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Point de presse de M. Jean-François Roberge, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'éducation, d'enseignement supérieur, de recherche et de science

Version finale

Monday, November 13, 2017, 11 h

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Onze heures huit minutes)

La Modératrice : Bonjour, tout le monde. Merci d'être là aujourd'hui. Donc, prendront la parole pour ce point de presse, M. Jean-François Roberge, député de Chambly, porte-parole de la CAQ en matière d'éducation; également, Mme Valérie Fournier, qui est la maman d'Anne-Marie Dussault, ici, à côté; nous allons également avoir Jonathan Côté, de l'autre côté, 23 ans, issu des Bois-Francs. Donc, ils vont prendre la parole, vous expliquer leur parcours avec la formation préparatoire au travail. Et, sans plus tarder, je vais laisser la parole à M. Roberge.

M. Roberge : Merci beaucoup. Je veux remercier donc tous les gens qui se sont déplacés aujourd'hui. On a aussi Henri Brosseau, 19 ans, et on a aussi Raphaël Brissette, 17 ans. On a des gens qui proviennent de la commission scolaire des Bois-Francs, commission scolaire des Maskoutains, commission scolaire des Navigateurs. Mais le problème qu'on va dénoncer aujourd'hui, c'est un problème généralisé à la grandeur du Québec, c'est un problème qui a même fait l'objet d'une consultation l'automne dernier, en 2016, alors que des jeunes qui participaient à une grande conférence de Coalition Interjeunes ont dénoncé ce problème des formations préparatoires au travail imposées aux jeunes.

Donc, je veux mentionner tous les regroupements et les associations qui dénoncent ce problème qui fait l'objet du point de presse aujourd'hui, donc

le Regroupement des maisons de jeunes du Québec; le Regroupement des auberges du coeur du Québec; le Regroupement des organismes communautaires autonomes jeunesse du Québec, le ROCAJQ; le Regroupement des organismes communautaires québécois de lutte au décrochage; le Regroupement des organismes communautaires québécois pour le travail de rue. On parle d'au-delà de 345 organismes qui sont fréquentés par plus de 370 000 jeunes qui dénoncent, depuis plus d'un an, et avec nous aujourd'hui, cette aberration.

Les jeunes de 15 ans, au Québec, qui ont un retard scolaire sont trop souvent forcés, forcés d'être inscrits l'année suivante dans ce qu'on appelle la formation préparatoire au travail. Grosso modo, on leur refuse ce droit de poursuivre une scolarisation de leur rêve, ce droit de poursuivre l'objectif d'obtenir un diplôme, et on les met sur ce qu'on pourrait qualifier d'une voie de garage. Bien sûr, il y en a qui vont faire le choix de cette formation-là, mais la grande majorité sont forcés. Les parents, les adolescents ne veulent pas y aller, mais c'est le seul choix qu'on leur laisse. J'ai Henri, tantôt, qui m'a dit : On ne m'a pas forcé, mais on ne m'a pas laissé le choix. C'est ça qui est arrivé.

Et, une fois rendu dans cette fameuse formation préparatoire au travail, il n'y a plus de bulletin digne de ce nom, hein? On en parlait tout à l'heure, il n'y a plus d'évaluation digne de ce nom, et ce n'est plus possible de réintégrer le parcours régulier. En réalité, on veut lutter contre le décrochage, on veut favoriser la persévérance scolaire, au Québec, mais, dans ce cas-ci, c'est le Québec qui décroche de ses jeunes, c'est le Québec qui essaie de leur vendre du rêve en disant qu'en entrant dans ce fameux parcours là ils vont vivre des réussites.

Mais ce que nous disent les jeunes, c'est que ce rêve-là tourne au cauchemar, ils ne peuvent pas se qualifier à décrocher un vrai emploi, et on leur dit, dans le fond : Fais du temps. Tu es en taule, tu es en prison, fais du temps. Tu as 15 ans, là, puis à 18 ans, quand tu auras perdu trois ans et plein d'acquis académiques, tu t'inscriras à la formation des adultes. Et c'est encore plus choquant de voir ça... c'est parce que les commissions scolaires, en faisant ça, ne respectent pas la loi, la loi qui dit que, pour s'inscrire, il faut que les jeunes en fassent le choix, il faut qu'ils choisissent un programme, et je cite le régime pédagogique, qui répond à ses intérêts et ses besoins. Ce n'est pas le cas en ce moment.

Et, en faisant ça, en plus, eh bien, on gonfle les statistiques de réussite, parce que, oui, les jeunes qui sont forcés d'aller dans ces formations préparatoires au travail comptent comme étant qualifiés, comptent comme étant diplômés et gonflent les statistiques de réussite du Québec, ce qui est une aberration.

Donc, je vais maintenant laisser la parole à, je pense, Mme Valérie Fournier, mère d'Anne-Marie, qui va venir nous témoigner de ce qu'elle a vécu.

Mme Fournier (Valérie) : Merci. Alors, bonjour. Moi, je suis la mère d'Anne-Marie Dussault, ici, à ma droite, une jeune fille de 15 ans qui souffre de troubles d'apprentissage sévères, donc plus de deux ans de retard dans son volet académique. Anne-Marie est au centre de formation aux entreprises, au CFER de la commission scolaire des Navigateurs cette année, et c'est un non-choix de notre part. Et là je m'explique. On a fait des démarches auprès de notre commission scolaire des Navigateurs, on est allés jusqu'à écrire au ministre de l'Éducation, lui demandant à ce qu'Anne-Marie puisse poursuivre ses études dans une classe langage avec tout le volet spécialisé. Notre ministre nous a référés à notre commission scolaire qui s'est empressée de nous rencontrer parce qu'on avait contacté les médias pour faire bouger les choses. Cependant, elle ne nous a laissé aucune autre alternative que celle qu'Anne-Marie poursuive ses études dans un centre de formation en entreprise.

Les centres de formation à l'entreprise ne sont pas adaptés à tous les enfants qui souffrent de troubles d'apprentissage sévères, du moins pas pour ceux qui veulent poursuivre leurs études. Ma fille, cette année, a 150 heures de matières académiques en moins, qui est dédié au volet d'entreprise, et l'an prochain, ça va être pire. Il faut comprendre que ces enfants-là font des efforts surhumains, sur une base quotidienne, année après année, afin d'assimiler et de maintenir des acquis, des notions académiques.

On se doit, en tant que parents, en tant que citoyens, de les encourager, de les soutenir, mais surtout de s'assurer qu'ils aient les services adéquats pour poursuivre leurs études, si tel est leur objectif. Le ministre, au lieu d'investir dans des projets d'école du futur, devrait plutôt investir dans le futur de nos enfants en troubles d'apprentissage, parce que présentement, on les incite à devenir des futurs décrocheurs.

Aujourd'hui, je parle pour ma fille et je parle pour les enfants qui souffrent de troubles d'apprentissage sévères, mais je m'adresse également aux parents qui ont de jeunes enfants en troubles d'apprentissage, parce que vous n'êtes peut-être pas au courant, mais lorsque votre enfant aura 15 ans, s'il a cumulé beaucoup de retard, plus de deux ans de retard, dans son volet académique, votre commission scolaire va le placer automatiquement dans un centre de formation en entreprise sans qu'il ait un mot à dire, et ça, c'est inacceptable.

On se doit d'obliger les commissions scolaires à donner les services adéquats à nos enfants. Il s'agit de l'avenir de nos enfants et présentement il est en péril.

La Modératrice : Merci beaucoup. On va passer la parole maintenant à M. Jonathan Roy.

M. Côté (Jonathan) : Bonjour. Mon nom est Jonathan Côté...

La Modératrice : Jonathan Côté, pardon.

M. Côté (Jonathan) : Malrgé ma grande détermination, le soutien de mes proches et de mes tentatives de raccrochages nombreuses... ont fait que mon parcours scolaire a été un échec. J'ai 23 ans, et on me classe en présecondaire. Le système d'éducation m'a échappé. Les options qui m'ont été offertes durant mon parcours n'étaient pas adaptées à mes besoins d'apprentissage.

Est-il normal de faire écouter des films à répétition au CFER au lieu de nous apprendre à lire, écrire et compter? Ma famille se voit dans l'obligation, par le ministère, de m'envoyer au CFER car mes lacunes étaient trop importantes selon eux. Pourtant, j'aurais voulu continuer mon cheminement afin de pouvoir obtenir mon diplôme d'études secondaires. Cela me donne l'impression, quand ils jugent que l'élève a besoin davantage d'encadrement, ils préfèrent s'en débarrasser plutôt d'offrir le soutien adéquat.

L'éducation est la base et les outils de chaque individu, et le ministère de l'Éducation n'a pas le droit de baisser les bras en se servant d'excuses sur le manque de ressources. Est-il plus rentable pour une société d'avoir un taux de diplomation plutôt que d'avoir du monde sur le bien-être social? Ne pas avoir un diplôme reconnu a eu de grandes répercussions sur ma vie. Il est très difficile pour moi d'avoir confiance en mes capacités, alors que le personnel d'école me disait très souvent que j'avais des capacités très limitées. Ma famille et mon entourage en souffrent grandement, car ils doivent me donner un soutien constant, car j'ai des graves lacunes.

Je veux que personne ne vive les mêmes choses que moi. C'est pour cela que je demande du changement et une aide qui répond à mes besoins. Afin de pouvoir être autonome dans ma vie, j'aimerais que le gouvernement me donne la vie qu'il m'a volée. Merci.

M. Roberge : Merci beaucoup pour ce témoignage. J'ai eu la chance, depuis ce matin, de discuter avec ces jeunes-là, avec leurs parents, puis ce sont des jeunes, vous les avez entendus, extrêmement articulés, brillants, qui ont des passions, qui ne veulent pas qu'on les laisse tomber. Au Québec, on veut pousser les jeunes à raccrocher, à aller au bout de leurs rêves, mais il faut laisser les jeunes apprendre à leur rythme. On a ce devoir, comme société, les amener, de leur donner des ressources.

Valérie, tout à l'heure, me disait que, l'an dernier, elle était dans une classe langage, puis en une année, elle avait rattrapé deux ans. C'était quelque chose qui était adapté à ses difficultés, mais aussi à son désir de progresser. Avec des ressources, avec un enseignant ou une enseignante qui était dédiée, ça fonctionnait. Puis, parce qu'elle a eu 15 ans, on lui a tiré ça puis on l'a envoyée de force vers un programme qui est inadapté.

Donc, j'interpelle aujourd'hui le ministre. Il doit faire appliquer le régime pédagogique, c'est-à-dire de laisser aux jeunes et aux parents un vrai choix. Il doit aider les jeunes à développer leur plein potentiel et garantir, pas par des statistiques, pas par des grandes annonces, garantir, dans les faits, par des gestes concrets, que les ressources professionnelles sont là pour aider chaque jeune à aller au bout de ses rêves.

C'est quelque chose qu'on veut faire dans la formation politique. Quand on parle de l'école jusqu'à 18 ans ou diplomation, c'est ça que ça veut dire. On ne laisse pas tomber un jeune parce qu'il a 15 ans, on ne laisse pas tomber un jeune parce qu'il a 16 ans et que l'école serait obligatoire jusqu'à 16 ans. On les accompagne au bout de leur rêve, même jusqu'à 18 ans, sans les laisser tomber pour une question de manque de ressources hypothétiques ou pour une question d'âge. C'est notre devoir comme société.

J'espère que le ministre Proulx a entendu ce message-là, qu'il va envoyer une directive claire à toutes les commissions scolaires de respecter le résultat pédagogique et de ne forcer personne à aller en formation préparatoire au travail sans leur donner un réel choix puis une vraie alternative.

La Modératrice : Merci beaucoup. On va passer à la période de questions. Pascal Poinlane, Radio-Canada.

M. Poinlane (Pascal) : Bonjour. M. Roberge, vous avez visiblement trouvé des familles, des cas où c'est une aberration, comme vous l'avez dit, mais est-ce que ce programme-là n'a pas certaines vertus pour des élèves qui ont beaucoup de difficulté en apprentissage et qui n'iraient nulle part, qui ne veulent pas aller à l'école? Il y a un volet pratique, ça peut les raccrocher. Donc, ce n'est peut-être pas le cas des élèves ici, mais est-ce que ça ne sert pas à quelque chose quand même pour beaucoup d'élèves en ce moment, cette formation-là?

M. Roberge : Je pense que le programme de formation préparatoire au travail a sa raison d'être. Je pense qu'il y a des jeunes, comme vous l'avez dit, qui peuvent le choisir en toute connaissance de cause, parce qu'ils ne veulent plus faire les apprentissages dans les matières académiques de base, parce qu'ils ne veulent pas passer encore de nombreuses années sur des bancs d'école pour décrocher un diplôme, soit le D.E.P., soit le D.E.S.. Je ne le nie pas. Je ne le nie pas, mais, pour avoir parlé à ces gens-là, je vois que j'ai ici quelques jeunes, mais qui sont représentatifs de milliers d'autres qui n'ont pas fait le choix dans la formation préparatoire au travail, puis il est là le drame.

M. Poinlane (Pascal) : Vous pensez que ce sont des milliers d'enfants, de jeunes concernés qui ne veulent pas y aller?

M. Roberge : Oui. Je pense que beaucoup, beaucoup, beaucoup, de jeunes ne veulent pas y aller. Pour parler à ces jeunes-là, on voyait que, dans leur classe, c'était assez généralisé. Et je pense que beaucoup de parents aussi se font placer devant un état de fait. On leur dit : l'an prochain, votre jeune sera en formation préparatoire au travail. On ne leur donne pas l'option en disant : Bien, l'an prochain, ils vont continuer dans une classe de difficulté d'apprentissage ou de langage avec des ressources pour l'amener... c'est peut-être en une année ou en deux années de plus jusqu'au diplôme, ou alors il peut s'inscrire en formation préparatoire au travail. Ce choix-là ne leur est pas donné, ni aux parents ni aux jeunes. On leur annonce comme un état de fait, et c'est une erreur très, très grave. C'est carrément nier le droit à l'éducation.

M. Poinlane (Pascal) : J'aimerais peut-être entendre Mme Fournier. Merci, M. Roberge, mais vous, Mme Fournier, justement, là-dessus... parce que vous avez opposé votre refus. Vous n'étiez pas d'accord. Alors, vous avez évoqué ça à la commission scolaire et vous êtes au courant des règles, visiblement. Alors, si c'est... le régime pédagogique prévoit que vous pouvez choisir. Quand vous leur dites ça, à la commission scolaire, ils n'auraient pas le choix que d'acquiescer à votre demande?

Mme Fournier (Valérie) : Effectivement. J'ai même rencontré le président de la commission scolaire à plusieurs reprises, qui m'a dit qu'il reviendrait pour voir s'il pouvait me donner plus d'aide pour aider Anne-Marie à ce qu'elle puisse poursuivre le volet académique. Mais je n'ai pas eu de nouvelles, je n'ai pas eu de suite à ça.

Donc, oui, on est au courant, oui, j'ai refusé qu'Anne-Marie se place dans un centre de formation en entreprise, sauf que je n'ai eu aucune autre alternative. C'était soit le centre de formation en entreprise ou soit je gardais Anne-Marie chez moi.

M. Poinlane (Pascal) : Carrément. O.K. Donc là, on en est où, vu que vous avez refusé, mais...

Mme Fournier (Valérie) : Bien, Anne-Marie est au centre de formation en entreprise, au CFER de la commission scolaire des Navigateurs cette année, comme je disais tantôt, et elle a un professeur qui vient à la maison gratuitement pour lui donner son aide lors des journées pédagogiques pour combler le 150 heures de matière académique qu'elle a en moins cette année, pour éviter qu'elle perde tous ses acquis.

M. Poinlane (Pascal) : Comme mère, ça ne doit pas être des moments faciles à vivre. Je sais que c'est une bataille que vous menez, mais ça vous prend des ressources personnelles énormes, là.

Mme Fournier (Valérie) : Oui, ça nous prend des ressources, puis l'an passé, lorsqu'Anne-Marie était en classe langage, elle les avait, ces ressources-là, et elle avait avancé d'au moins deux ans. Donc, c'est pour ça qu'on avait demandé à ce qu'elle puisse poursuivre ses études en classe langage avec tous les spécialistes et tous les outils qu'elle avait besoin. Sauf que là, cette année, bien, elle n'a plus rien de ça.

M. Poinlane (Pascal) : Merci beaucoup. Bon courage.

Mme Fournier (Valérie) : Merci.

La Modératrice : Merci à tout le monde, merci beaucoup. Ah! Peut-être que Jean-François...

M. Roberge : Moi, je peux ajouter quelque chose. Juste pour le redire une dernière fois, ces jeunes-là ont des rêves. Je pense à Valérie qui veut obtenir... excusez-moi, Anne-Marie, je mélange Valérie... à Anne-Marie qui veut décrocher son diplôme d'études secondaires. On a un jeune homme derrière moi qui veut être programmeur informatique, faire des jeux vidéos. On a ici un jeune qui a l'esprit d'entrepreneurship, ça lui coule dans les veines, et je pense qu'il peut faire de grandes choses. Et puis j'ai quelqu'un ici qui a de l'artiste dans l'âme, qui veut devenir luthier.

C'est tous des jeunes qui ont des talents incroyables, qui veulent continuer, que ce n'est pas des décrocheurs, ce n'est pas des jeunes qui sont tannés de l'école, c'est des jeunes qui demandent tout simplement à ce qu'on les aide.

La Modératrice : Merci beaucoup.

(Fin à 11 h 23)

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