(Onze heures cinq minutes)
La Modératrice
: Alors,
bonjour à tous et à toutes. Le député de Lac-Saint-Jean, Alexandre Cloutier,
est accompagné aujourd'hui de M. Simon Telles, président de l'Union
étudiante du Québec, de Mme Virginie Chantal-Bossut, qui est une étudiante en
enseignement du primaire à l'Université Laval, M. Antoine Côté, de la
Campagne de revendications et d'actions interuniversitaires pour les étudiants
et étudiantes d'éducation en stage. Alors, M. Telles, la parole est à vous.
M. Telles (Simon) : Merci
beaucoup. Bonjour, tout le monde. Donc, en tant qu'association étudiante
nationale, l'Union étudiante du Québec est très préoccupée par la question des
stagiaires étudiants. On tient à exprimer aujourd'hui notre solidarité à tous
ceux et celles qui se mobilisent pour obtenir une juste compensation financière
pour le travail qui est accompli en situation de stage.
Vendredi dernier, c'était la journée
mondiale des stagiaires, il y avait plus de 15 000 étudiantes et
étudiants qui étaient réunis à Montréal pour manifester, en fait, pour, en
fait, une juste compensation financière de leurs stages.
Aujourd'hui, on tient à exprimer notre soutien
directement à la CRAIES ainsi qu'aux étudiantes et aux étudiants en
enseignement pour l'obtention d'une compensation financière de leur stage
final. C'est un stage qui dure de trois à quatre mois, un stage pendant lequel
ils et elles assument une prise en charge complète, un stage pendant lequel les
étudiants doivent aussi planifier des cours, corriger des travaux, rencontrer
des parents, rencontrer toutes sortes de professionnels et assumer leurs tâches
universitaires.
Avec cette charge de travail, c'est tout
simplement impossible pour eux et elles de travailler pendant leurs études, et
ça compromet, en fait, leur santé physique, leur santé psychologique et leur
santé financière. Dans ce contexte, ce n'est pas étonnant de constater, en
fait, que près de la moitié des étudiants et des étudiantes en enseignement
vont décrocher avant la fin de leurs études et que 20 % d'entre eux et
d'entre elles vont décrocher à la suite, en fait, de leur graduation.
Alors, face à cette situation-là qui est
hautement préoccupante, on demande au gouvernement de régler ce problème-là, de
prendre la situation très au sérieux et de mettre en place des solutions concrètes.
Notre position, à l'UEQ, c'est clair, c'est obtenir une compensation financière
des stages, du stage final en enseignement en créant une allocation spéciale à
l'aide financière aux études pour, justement, soulager le fardeau financier de
nos futurs enseignants et enseignantes. Merci.
La Modératrice
: Merci.
Mme Virginie Chantal-Bossut.
Chantal-Bossut (Virginie) : Alors,
je suis étudiante en stage 4, en stage final, présentement, au préscolaire
puis je suis dans le baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire à
l'Université Laval. Et ce qui m'amène à vous parler aujourd'hui, en fait, c'est
que je le vis, et c'est quelque chose qui est très, très demandant, qui devient
épuisant pour moi et qui m'a apportée même à remettre en question ma carrière.
J'ai quitté mon emploi dernièrement, étant
donné que je voulais me consacrer pleinement à mon stage pour devenir une enseignante
douée et compétente, parce que c'est le moment, en stage, vraiment, de se
donner puis de développer nos compétences professionnelles. Donc, voilà.
Je crois aussi que la compensation
financière pourrait diminuer le stress qui va avec les études, finalement,
puisque… lorsqu'on n'a pas de revenu, mais la vie continue quand même, eh bien,
il faut quand même manger, et des fois on a affaire avec des prêts et bourses,
et c'est lié à tout un stress financier. Voilà.
La Modératrice
: Merci.
Maintenant, M. Cloutier.
M. Cloutier : Alors, ce
qu'il faut comprendre, c'est que le stage fait partie prenante de la formation
pour devenir un enseignant au Québec. Malheureusement, plusieurs jeunes se
retrouvent dans la situation où ils sont juste incapables de subvenir à leurs
besoins, considérant que, du jour au lendemain, on leur demande de prendre en
charge la totalité des responsabilités qu'on demande à un enseignant. C'est
donc dire que ces jeunes-là se retrouvent dans une situation où, s'ils veulent
continuer à payer pour leur logement, pour leur alimentation, bien, évidemment,
ils ne peuvent pas avoir un autre travail parce qu'ils en font déjà un autre à
temps plein, qui est celui du stage. Vous savez comme moi qu'il y a déjà
plusieurs stages qui, dans le cadre des formations, sont rémunérés. Maintenant,
les enseignants... Comme on le sait, nous ne valorisons pas suffisamment, comme
société, le travail qui est fait par nos professeurs. C'est un enseignant sur
cinq qui, dans les premières cinq années de sa vie professionnelle, va malheureusement
quitter le métier.
Évidemment, la proposition qui vous est
présentée aujourd'hui, qui est celle d'une juste compensation, fait partie de
ces solutions pour mieux soutenir nos enseignants. Mais nous aurons la chance,
comme formation politique, de vous présenter d'autres propositions qui visent
justement à valoriser le rôle des professeurs.
Mais je ne peux quand même passer sous
silence que le Parti libéral, en 2014, a adopté une résolution, une résolution
dans laquelle on demande clairement au gouvernement du Québec...
(Interruption)
M. Cloutier : ... — attaque
au trombone, excusez-moi — qui demande clairement au gouvernement du Québec
de reconnaître à sa juste valeur le travail qui est fait par les enseignants
dans le cadre d'un stage, proposition qui a été adoptée à l'unanimité en 2014,
mais qui, malheureusement... à laquelle le gouvernement n'a jamais donné suite.
Alors, vous aurez compris qu'on est en appui entier.
Je tiens aussi à rappeler que l'Assemblée nationale
a déposé une pétition il y a déjà de ça quelques mois, 7 000 pétitionnaires,
au printemps dernier. Et donc, pour nous, nous revenons à la charge à nouveau
avec cette proposition qui est aussi une proposition qui se retrouve dans notre
programme électoral pour la prochaine campagne en octobre l'année prochaine.
Voilà.
La Modératrice
: Merci.
Maintenant, M. Côté.
M. Côté (Antoine) :
Bonjour. Donc, d'abord, je tiens à dire, au nom de la CRAIES, un immense merci
à M. Cloutier pour son appui et pour l'appui du Parti québécois dans la
cause des stagiaires en enseignement. Je remercie aussi l'ensemble des partis
de l'opposition, même le Parti libéral, comme M. Cloutier l'a mentionné,
les jeunes libéraux, qui appuient notre proposition dans leur plateforme, donc,
pour la compensation financière des stages de prise en charge finaux en
enseignement. Je remercie aussi Simon Telles, président de l'Union étudiante du
Québec, qui réitère aujourd'hui l'appui du mouvement étudiant à notre cause, et
un merci très grand surtout à Virginie d'avoir accepté de partager son
expérience de stage.
Avec la Journée internationale des
stagiaires le 10 novembre dernier, il y a un constat qui s'est imposé dans
l'espace public : il y a présentement un problème d'équité dans les
conditions de stages. Certains stages ont de meilleures conditions que
d'autres, et certaines professions ne sont toujours pas valorisées à la hauteur
de l'importance qu'elles ont dans notre société. À la CRAIES, on est évidemment
solidaires de tous les mouvements qui visent à améliorer les conditions des
stagiaires en général et à renverser la situation.
Toutefois, ce qu'on veut mettre de l'avant
aujourd'hui, ce sont les conditions des étudiants, des étudiantes en éducation,
qui doivent faire leur stage de prise en charge final. Ce stage final, qui est obligatoire
pour quiconque veut obtenir un brevet en enseignement, est une partie
essentielle de notre formation. Cependant, dans sa forme actuelle, il est trop
exigeant pour qu'un étudiant ou une étudiante puisse à la fois bien le réussir
et maintenir une qualité de vie adéquate, donc, on en a eu une très bonne
démonstration avec le témoignage de Virginie. Devant ces pressions immenses,
les stagiaires en enseignement sont souvent obligés de quitter leur emploi,
voire même d'abandonner temporairement leurs études pour économiser des sous.
Ce que nous voulons, évidemment, c'est ouvrir un dialogue avec le gouvernement
pour trouver une solution à ce problème-là. On l'a répété à maintes reprises
dans les dernières années qu'il fallait valoriser la profession enseignante. Maintenant,
il est temps de passer du slogan politique aux actions concrètes. Pour nous,
ces actions-là commencent par la compensation financière des stages de prise en
charge. Merci.
La Modératrice
: Merci.
On va maintenant passer à la période de questions. Je vous demanderais, s'il
vous plaît, par respect pour nos invités, de rester sur le sujet du jour et de
poser une question, une sous-question. Micro de gauche, Mathieu Dion, Radio-Canada.
M. Dion (Mathieu) :
Est-ce qu'on a des moins bons enseignants pour cette raison-là, vu que les
stages ne sont pas rémunérés?
M. Côté (Antoine) :
Bien, je pense que Virginie en a fait un peu la démonstration. C'est que les
étudiants, malheureusement, n'ont pas la chance de se consacrer à temps plein à
leur stage, au développement de leurs capacités professionnelles, à la planification
de leurs cours parce qu'ils ont cette pression-là financière, parce qu'ils ont
ce stress-là qui couve toujours en arrière.
M. Dion (Mathieu) : Donc,
on se retrouve avec des enseignants qui sont moins bien formés qu'ils devraient
l'être, est-ce que c'est ça?
M. Côté (Antoine) : Je
ne dirais pas que les enseignants sont moins bien formés. Malheureusement, les
stagiaires n'ont juste pas la chance de consacrer tout le temps qu'il faudrait
à leur stage, à leurs études.
La Modératrice
: Merci.
Micro de droite, Hugo Pilon-Larose.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Mme Bossut, ma question est pour vous. Combien est-ce que vous auriez aimé
recevoir en compensation financière, idéalement, pour vous permettre de faire
votre stage et de vivre dignement, mettons?
Chantal-Bossut (Virginie) : Il
a été nommé, dans le journal, 330 $ par semaine, ça me semble un montant
qui serait très bien pour nous. C'est ce qui est calculé considérant un emploi
à temps partiel à raison d'environ 15 heures par semaine. Donc, je
trouverais ça tout à fait légitime d'avoir un tel montant, oui, pour subvenir
aux besoins de base pendant le stage. Je crois que ce serait légitime, déjà.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Sur cette même question-là, M. Cloutier, c'est un montant que vous
souscrivez, au Parti québécois, ce...
M. Cloutier : Bien, en
fait, on n'a pas... Ce qu'on sait, c'est que ça pourrait coûter environ une
dizaine de millions avec les montants qui vous sont présentés. Maintenant, on
n'a pas chiffré le montant final. Par contre, on est ouverts à ce que ça soit
une compensation, mais la compensation doit être raisonnable.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Le projet Lab-École, en ce moment, le ministre Proulx, donc, injecte
3 millions de dollars sur deux ans pour imaginer l'école parfaite. Vous
avez mentionné tantôt qu'il faut des mesures concrètes pour revaloriser la
profession d'enseignant. Est-ce que ça passe, entre autres, par une
augmentation de leurs salaires globaux? Est-ce qu'on parle de rémunération à ce
niveau-là?
M. Cloutier : Avec
respect, je pense que les enseignants, si on leur demande eux-mêmes la question
puis, si vous avez à hiérarchiser les demandes que vous faites pour valoriser
la profession, je pense qu'ils vont d'emblée dire qu'ils veulent être soutenus
et qu'on respecte le caractère professionnel de leur rôle, que ce soit dans les
évaluations qui sont faites auprès des étudiants, que ce soit sur les plans
d'intervention lorsqu'ils souhaitent être accompagnés par des ressources
parallèles et que ce n'est pas le cas. Le Parti québécois, par exemple, a
proposé que, dorénavant, nous ayons des ratios pour les orthopédagogues, pour
les psychoéducateurs, tout ça pour venir en soutien aux enseignants.
Bref, on va arriver avec une batterie de
mesures pour venir vraiment supporter nos enseignants puis aussi encourager les
meilleurs à choisir la profession parce que c'est l'avenir de nos jeunes. Ceci
étant dit, la question de la rémunération, à mon point de vue, après des
dizaines de rencontres, ce n'est jamais l'enjeu qui est nommé numéro un.
La Modératrice
: Merci.
Est-ce qu'on a d'autres questions en français, en anglais? C'est terminé.
Merci.
(Fin à 11 h 16)