(Treize heures sept minutes)
Mme Massé : Alors,
bonjour, tout le monde. Je suis vraiment supercontente d'être de retour. Un
mois et demi, c'est quand même plusieurs semaines. Pas que j'ai chômé durant ce
temps-là, mais, quand même, de ne pas vous voir, de ne pas pouvoir être en
échange avec vous m'a manqué un peu quand même, malgré tout.
Alors, bien, je pense que j'avais vraiment
envie de venir vous voir pour vous dire comment, lorsque j'ai vu les sondages
Léger hier et que j'ai vu que les Québécois et Québécoises voulaient, à la
hauteur de 76 %, un plan dentaire universel gratuit pour l'ensemble de la
population du Québec, je me suis dit : Peut-être que, dans les intentions
de vote, Québec solidaire, on ne pète pas des scores, mais, sur la connexion
avec les besoins de la population, ça, on n'est pas mal branché, par exemple.
Je regarde dans les quatre premiers
éléments qui ont été amenés comme étant désirés par la population du Québec. Bien,
je dirais, on score quatre sur quatre, mais principalement trois sur quatre où
c'est des mesures, hein... la gratuité scolaire, c'est Québec solidaire, au
niveau du transport collectif, la réduction à 50 %, c'est Québec
solidaire, et une assurance dentaire publique universelle, c'est Québec
solidaire. Et ça, c'est possible. Et ça se finance, dans la mesure où... les
choix politiques menés par un parti qui s'en va toujours dans le même sens
depuis 12 ans, qui est proche du monde, qui est proche des besoins du
monde, bien, ça se finance, et ça me faisait plaisir.
Aujourd'hui, j'ai questionné le premier
ministre parce que, dans les faits, il a eu quatre ans pour défaire le premier
nœud pour qu'il y ait une réelle prise en charge de la santé dentaire du peuple
québécois. Ce premier nœud-là, c'était de permettre aux hygiénistes d'exercer
en dehors de la surveillance d'un dentiste. Vous avez les infirmières qui
peuvent, elles, accueillir, évaluer les patients avant de les passer au
médecin; les hygiénistes, elles, doivent toujours être accompagnées par un
dentiste. Bien, il est temps que ça change. Le gouvernement libéral s'était
engagé à le faire, on est à deux jours de la fin de la session, et
malheureusement il n'a pas eu le courage politique, probablement à cause des
lobbys, des associations de dentistes ou d'assurances privées, il n'a pas eu le
courage d'aller jusque là, alors qu'on parle de la santé dentaire de l'ensemble
de la population du Québec.
Bref, je pense que maintenant c'est à la
population de continuer à se faire entendre. Québec solidaire est très fier
d'avoir été le parti qui a mis ça de l'avant. Maintenant, il faut pousser pour
s'assurer que tous les partis vont répondre à ce besoin-là. Et l'autre solution
simple, c'est de porter Québec solidaire au pouvoir le 2 octobre. Bonjour,
tout le monde.
Le Modérateur
: On va
prendre les questions. Alain. Question et sous-question, d'abord, s'il vous
plaît.
M. Laforest (Alain) :
Bonjour. Bien, bon retour.
Mme Massé : Merci.
M. Laforest (Alain) : Mme
Massé, qu'est-ce que vous pensez de la situation du président de la Coalition
avenir Québec, M. Le Bouyonnec, concernant son entreprise de prêteur sur gages?
Mme Massé : Oui, je pense que
c'est extrêmement désolant de voir que ce parti-là — et sa
présidence, — qui se veut proche du peuple, qui dit au monde :
Nous autres, on incarne le changement, que ces gens-là, dans le fond, jouent dans
le même vieux film que les vieux partis. Alors, de faire en sorte qu'on
dit : Bien, ici, au Québec on n'a pas le droit d'avoir autant de… En fait
c'est usurier. C'est fou. C'est complètement fou de penser qu'on peut charger à
du monde des taux d'intérêt aussi élevés. En fait, c'est vraiment triste. C'est
triste.
M. Laforest (Alain) : Est-ce
qu'il peut, selon vous, rester candidat avec une chose comme ça?
Mme Massé : Moi, je pense que
ça va avec la cohérence de la Coalition avenir Québec, c'est une vision de
l'économie. Eux autres, là, ils n'ont pas de trouble à faire de l'argent sur le
dos du monde. C'est une vision : la privatisation, le développement d'une
économie. Tu sais, M. Chassin, qui est leur grand économiste, est très, très,
très aligné vers une perspective qui va dans le sens de M. Le Bouyonnec.
Le Modérateur
:
Véronique.
Mme Prince (Véronique) :
Bonjour. Je voudrais savoir justement ce que vous pensez du fait qu'à deux
jours de la fin de la session parlementaire le gouvernement doit utiliser un
bâillon pour faire adopter le projet de loi sur LaPresse.
Mme Massé : Vous savez ce que
pense Québec solidaire du bâillon, là. C'est théoriquement une mesure
exceptionnelle, mais, avec ce gouvernement-là — ça fait quatre ans
que je suis là — systématiquement, c'est un outil qu'ils utilisent,
etc. Pourtant, nous sommes en faveur, on l'a dit, depuis le début : Dans
la mesure où les éléments qu'on avait mis de l'avant seraient rencontrés, on
est en faveur de l'adoption du projet de loi, c'est juste qu'on est désolés
qu'encore une fois ce soit par le bâillon qu'on soit obligés d'y arriver.
Mme Prince (Véronique) : Tout
le monde a l'air de vouloir faire porter l'odieux à l'autre. C'est la faute à
qui, là-dedans? Est-ce que c'est le gouvernement qui utilise le bâillon? Est-ce
que c'est Martine Ouellet qui ne donne pas son consentement? Qui porte l'odieux
de ça?
Mme Massé : Bien, moi, je
pense qu'il y a une assez grande unanimité entre les parlementaires pour
dire : Il faut adopter ce projet de loi là. C'est ce qu'on a entendu en
commission parlementaire, etc. Mais est-ce qu'on peut avouer que Power
Corporation sont arrivés tard dans le processus? Et c'est sûr qu'on peut bien
vouloir mettre la faute sur Mme Ouellet, puis c'est sûr qu'elle a une partie de
responsabilités — notre privilège de parlementaires indépendants,
notamment, de pouvoir poser des questions, etc. — mais est-ce qu'on
peut remettre aussi à Power Corp ce qui appartient à Power Corp? Il
est arrivé tard, dans le processus, et tout ça nous compresse. Puis les
libéraux, bien, utiliser le bâillon, ce n'est pas un problème. Au lieu de jouer
le rôle de rassembleur, bien, ils utilisent encore cet outil-là.
Le Modérateur
: Louis.
M. Lacroix (Louis) : Vous
connaissez Esteban Torres?
Mme Massé : Oui.
M. Lacroix (Louis) : Il a
placé, sur sa page Facebook, hier — qui a été enlevé assez
rapidement, d'ailleurs — un message qui disait : «J'ai lancé un
caillou sur le premier ministre Philippe Couillard. Je replaide coupable pour
voie de fait, pour entrave à la paix et pour parjure». Et ensuite, il
dit : «Manon Massé m'a donné le caillou en me disant de ne pas le lancer
sur le premier ministre. Je ne l'ai pas écoutée, ce n'était pas prévu, pour
moi, de faire ce geste. Quand je suis arrivé sur les lieux, tout ce que je
savais, c'est que quelque chose de mauvais allait se passer».
Est-ce que c'est vrai que vous avez donné
le caillou à M. Torres lorsque l'incident est survenu, il y a quelques années,
trois ans?
Mme Massé : Bien, effectivement,
j'ai été informée, dans les dernières heures, là, de ce post de ce jeune
homme-là, que j'ai lu. Et honnêtement, j'ai été ébranlée, hein, vous connaissez
mon passé d'intervenante, j'ai été ébranlée par la détresse que je lisais dans
ce post-là. J'ai envie de répondre à votre question, mais en même temps j'ai tellement
envie de protéger ce jeune homme-là. Je sens qu'il est en détresse. Je ne
voudrais pas jouer avec la vie de ce garçon-là. Alors… Et vous l'avez lu, le post
vous aussi, là. Tu sais, vous avez vu le malaise, le mal-être, je dirais. Et dans
ce sens-là j'aimerais mieux… J'aimerais mieux… Tu sais, à la limite, si vous
avez des questions, allez vers son avocate, allez…
M. Lacroix (Louis) : Bien
en fait, c'est une question factuelle, Mme Massé, que je vous demande, là.
Il dit que c'est vous qui lui avez donné le caillou. Est-ce que c'est vrai? Est-ce
que c'est vrai que vous lui avez dit de… Vous lui avez donné le caillou et dit
de ne pas le lancer sur le premier ministre. C'est juste ça que je… C'est oui
ou c'est non.
Mme Massé : Oui. Oui. Ce
que je ne trouve pas simple, et vous le savez comme moi, ça a été une cause… Tu
sais, je veux dire, ça a été juridique et, etc. Mais je vous réitère, tu sais,
moi je suis inquiète pour le jeune homme.
M. Lacroix (Louis) : Je
comprends.
Mme Massé : Et imaginez
si, demain, il vous lit, aujourd'hui, il vous lit — ça veut dire sur la
place publique — je suis inquiète, je suis vraiment inquiète. Ceci
étant dit, j'espère qu'on va prendre tous et toutes soin de cette dimension-là,
hein? Parce que c'est des vies. Puis il faut prendre soin du monde dans la vie.
C'est super important. De mon côté à moi, j'ai ça dans l'être, de prendre soin
des gens. Et j'ai effectivement des porte-bonheur, qui sont mes porte-bonheur à
moi, que lorsque je sens que les gens en ont besoin pour... peu importe, parce
qu'ils sont malheureux, parce que je sens que la vie est difficile, effectivement
je leur transmets des porte-bonheur. Je leur donne. Puis je l'ai fait avec ce
garçon-là, comme je le fais avec des collègues de travail, comme je le fais
avec des itinérants que je croise dans la rue. Puis c'est aussi ma façon de
prendre soin des gens, parce que, moi, c'est comme ça que je prends soin de
même. Je tiens mes porte-bonheur, solide dans ma main, puis je me dis que la
vie va aller mieux demain.
M. Lacroix (Louis) : Et
si je… J'essaie de décoder, là, ce que vous dites, là. Vous dites donc que vous
aviez un porte-bonheur avec vous, que vous lui avez donné. C'est ça?
Mme Massé : Oui, que je
lui ai remis.
M. Lacroix (Louis) :
Vous lui avez remis.
Mme Massé : À la suite…
Vous vous souvenez c'était quand, ce moment-là, hein?
M. Lacroix (Louis) :
Oui.
Mme Massé : Ce jeune
homme-là est une personne trans racisée, et on était à l'événement où... à
Orlando, il y avait eu une tuerie assez orientée vers les personnes racisées.
Alors, «back-stage», je sentais le jeune homme... c'est justement, tu sais?
M. Lacroix (Louis) : Fragile?
Mme Massé : Bien, touché. Puis
je peux comprendre, là. Moi, après Polytechnique, je vais vous avouer que
j'étais assez ébranlée moi aussi. D'ailleurs, c'est l'exemple que j'ai pris ce
soir-là. Mais ceci étant dit, c'est à ce moment-là de «back-stage», avant de
quitter — parce que, moi, j'ai quitté tôt, là, j'avais d'autres activités
à l'extérieur de Montréal — je lui ai remis un de mes porte-bonheur
en disant : Ground-toi.
M. Lacroix (Louis) :
Qu'est-ce que c'est, au juste, pouvez-vous nous décrire ce que c'est, au juste,
ce porte-bonheur-là? Qu'est-ce que c'est?
Mme Massé : Bien, c'est des
petits cailloux, des petites roches que j'ai, que je porte sur moi, dans ma
main quand j'en ai besoin — là, aujourd'hui, je n'en ressentais pas
le besoin — pour me grounder. C'est à ça que ça sert. Pour moi, il y
a quelque chose de spirituel là-dedans. Et c'est un peu ça que j'ai voulu
donner à ce jeune homme. C'est de dire : Ground-toi, mon «man». Oui.
M. Lacroix (Louis) : O.K. Et
c'est vrai que vous lui avez dit de ne pas les lancer ou le lancer à M.
Couillard?
Mme Massé : Ce que...
Vraiment, là, distribuer le bonheur, là, ce n'est pour faire de la marde.
Alors, je n'ai pas dit ça. Et pensez-y comme il faut, là. Remettez-vous dans
mes souliers, j'essaie de distribuer, d'aider les gens, ça fait que ça n'a rien
à voir avec de ne pas lancer ça sur M. Couillard, là. Mais je réitère, relisez
le texte, puis prenez soin de lui, s'il vous plaît. S'il vous plaît.
Le Modérateur
:
D'autres questions? Charles.
M. Lecavalier (Charles) :
Bonjour, Mme Massé. Juste une petite question pour revenir à M. Le Bouyonnec.
Bon, il a annoncé ce matin qu'il retirait ses billes de l'entreprise, qu'il ne
serait plus sur le conseil d'administration, mais, en même temps, il continue
de défendre l'entreprise, il dit que c'est une start-up, de nouvelles
technologies, des jeunes, etc., mais il dit que ce n'est pas, par exemple, des
taux usuraires, mais que c'est plutôt des frais d'administration. Donc, le fait
qu'il défende ce type de pratique là, d'entreprise, est-ce que ça... qu'est-ce
que ça dit sur les valeurs de M. Le Bouyonnec?
Mme Massé : Je réitère, M.
Le Bouyonnec, la CAQ, a une vision de l'économie qui permet ce genre
d'interprétation, que ce soit M. Chassin, allez relire, ce n'est pas seulement
M. Le Bouyonnec, c'est la façon de percevoir, de comprendre l'économie pour la
Coalition avenir Québec. Alors, qu'on le mette en frais d'administration ou en
taux usuraire, ça fait qu'il y a du monde qui se retrouve à payer des taux
exorbitants, puis ça n'a pas de bon sens.
M. Lecavalier (Charles) : Sur
le sondage d'avant-hier, bon, on voit que le... je sais que ce n'est pas les
résultats électoraux, mais on voit que le Parti québécois est en grande difficulté,
qu'il continue toujours de chuter, mais ce n'est pas Québec solidaire qui en
profite, c'est la Coalition avenir Québec. Donc, la question que je me pose,
c'est : Est-ce que ce n'est pas décevant, pour Québec solidaire qui a tout
le temps, bon, pensé aller chercher une partie de l'électorat du Parti
québécois, se rende compte que, les gens, ils font massivement le choix de
choisir François Legault et la CAQ, et pas Québec solidaire?
Mme Massé : Oui. Bien, écoutez,
je pense que Québec solidaire continue de faire le travail qu'il a toujours
fait. Et l'exemple est pétant dans ce sondage-là. C'est que les gens n'ont pas
encore associé la politique nationale d'assurance dentaire publique et
universelle à Québec solidaire. Ils n'ont pas encore associé gratuité scolaire
à Québec solidaire. Même chose pour le transport en commun. Même chose, même,
pour la diminution du temps d'attente dans les hôpitaux.
Alors, ce que ça veut dire, c'est que
nous, on a encore du travail à faire. C'est que nous, on a encore du travail à
faire, et je rectifierais un de vos propos : Québec solidaire n'a jamais
eu comme objectif de retirer des électeurs au Parti québécois. On est
indépendantistes, ils sont indépendantistes. Alors, c'est un élément, mais ce
qui se passe actuellement, ce que ça me confirme, à moi, c'est que, malheureusement,
tant et aussi longtemps que le mode de scrutin va rester tel qu'il est, il y a
des gens qui vont voter stratégique, et ça, bien, il y a toujours du monde qui
paient le prix. Québec solidaire en a payé le prix longtemps. Puis j'espère
qu'on ne le paiera pas encore pour trop longtemps.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup, tout le monde.
Mme Massé : Merci.
(Fin à 13 h 23)