(Quinze heures seize minutes)
M. Ouellet : Alors, bonjour.
Je suis ici présentement pour réagir au dépôt du projet de loi qui devait être,
à notre avis, une refonte d'Investissement Québec, mais, tel que le projet de
loi est intitulé, on parle plutôt d'une organisation gouvernementale en matière
d'économie et d'innovation.
Donc, ce qu'il faut comprendre très
sommairement, c'est que le ministre Fitzgibbon, le ministre de l'Économie,
devient le ministre omnipotent du gouvernement de Legault en matière d'économie,
en matière d'innovation. Et la seule chose qui manque à l'intérieur du projet
de loi, je vous dirais, c'est le numéro de cellulaire du ministre parce que
tout y est pour concentrer les pouvoirs à unique... à un seul et unique
endroit, pardon. Et donc, oui, effectivement, le gouvernement se donne les
moyens, mais, à notre avis, c'est beaucoup trop de moyens. On a hâte de voir
les résultats et les objectifs qui seront rattachés à tout cela.
Évidemment, il y a des mesures que le Parti
québécois salue. Lors de la dernière législature, j'ai fait partie du trio
Priorité PME. Trois entrepreneurs ont parcouru le Québec en entier pour
entendre les doléances et de quelle façon le gouvernement du Québec devait être
actif et proactif pour aider l'entrepreneuriat partout au Québec. Alors, assurément,
on salue les mesures qui vont nous permettre de mettre de l'avant des efforts
de commercialisation, des efforts de diversification, aussi, de simplifier un
peu l'appareil gouvernemental, dans certains cas, et la bureaucratie. Mais c'est
sûr qu'on reste pantois sur certaines dispositions du projet de loi en question.
On sait qu'avec les libéraux ça avait été
la mort des CLD en région, donc, la fin du développement économique local tel
qu'on le connaissait par des bénévoles et des acteurs clés sur le territoire.
Les municipalités du Québec s'étaient, dans certains cas, redonné des
organismes de développement économique, soit local, soit régional ou soit, dans
certains cas, suprarégional. Et là ce qu'on apprend, c'est qu'Investissement
Québec va ouvrir des bureaux dans les différentes régions du Québec et va
avaler, le mot est juste, les différentes corporations qui existent, et ça sera
donc les municipalités, les MRC ou toutes les entités qui financent ces
organisations-là qui devront financer l'établissement de services sur le territoire
par rapport au développement économique.
Alors, je suis convaincu que les gens de
l'UMQ, les gens des municipalités, les gens de la FQM, les gens des MRC, les
maires et mairesses partout au Québec vont assurément se désoler de voir cette
appropriation-là du développement économique, et d'être obligés de le financer,
et de ne pas être parties prenantes. Parce que, c'est important, il faut le
rappeler, la régionalisation, le succès de l'entrepreunariat au Québec, dans
toutes les régions, ça passe par, un, le pouvoir en région et la capacité de
décider.
Et ça nous laisse aussi sur notre faim parce
qu'il y aura un comité qui sera créé pour aider le financement ou, du moins,
recommander le financement à Investissement Québec, mais ce comité-là va
exclusivement donner ses recommandations, donc il n'y a pas de pouvoir
décisionnel, il n'y a pas de fonds locaux supplémentaires offerts dans les
différentes régions du Québec. Alors, ma prétention, c'est que ce sera encore une
fois du mur-à-mur dans les politiques gouvernementales, et on ne sera pas à
géométrie variable pour assurer un développement économique en fonction des
différentes dynamiques territoriales. Alors là, ça, effectivement, ça nous
laisse pantois.
Troisième chose aussi, c'est l'intégration
de certains employés du côté du ministère de l'Économie vers Investissement
Québec. L'article 51 est très clair là-dessus, on a jusqu'en 2020 pour
compléter cette intégration-là. Donc, de quelle façon ça va se faire? Évidemment,
les inquiétudes que nous avions soulevées il y a de ça deux semaines, lorsque
nous avons appris dans les médias qu'il pourrait y avoir une fusion des
ministères ensemble et qu'il y aurait effectivement des employés qui seraient
reliés maintenant du côté d'Investissement Québec, notre grande crainte : Est-ce
que le développement économique, présentement, au Québec, va se faire
exclusivement selon les doléances et la volonté des politiques
gouvernementales? On sait que M. Legault a certaines visées pour améliorer la
situation du Québec. Mais qu'est-ce qui va se passer lorsque viendra le temps à
des entreprises qui ne sont pas dans un secteur ciblé, mais qui ont des projets
de développement, des projets d'expansion et qui sont une force vive dans leurs
communautés? Est-ce qu'ils obtiendront le support adéquat du ministère ou
d'Investissement Québec? Je pense que poser la question, c'est effectivement
avoir des réponses sans mots.
L'autre chose, et celle-là est plus
fondamentale pour nous aussi, c'est la révision de la politique à rémunération
variable. On a appris que l'ami de M. le ministre, le nouveau P.D.G., a une
rémunération variable qui pourrait osciller autour de 1 million, selon les
objectifs. Et là on croit comprendre aussi que, dans le projet de loi en
question, qu'il y aura une deuxième strate de dirigeants d'Investissement
Québec qui se verront offrir aussi une rémunération variable. Alors, notre
véritable question là-dedans : De quelle façon cette rémunération variable
là va être en accord avec les objectifs?
Et, si on est exclusivement en mode de
rémunération sur, je vous dirais, la partie rendement, là, le capital investi
versus le pourcentage fait, est-ce qu'effectivement les dirigeants vont être
plutôt tentés de favoriser des placements qui sont à haut rendement mais qui ne
créent peu ou pas de grande richesse proprement dite en termes de nombre
d'emplois? Alors, ça, effectivement, ça peut poser des questions. On espère
que, lors de la commission parlementaire, ce sera plus clair sur ces nouveaux
programmes qui semblent intéresser le gouvernement, intéresser les nouveaux
talents.
Mais il faut bien comprendre, la
rémunération incitative, la rémunération variable, il faut que les objectifs
donnent des résultats concrets. Et, pour nous, le seul résultat concret, c'est
l'augmentation des emplois dans toutes les régions du Québec. Et on entend
souvent dire le premier ministre que c'est important de créer des emplois
payants, mais, dans d'autres régions du Québec, des emplois à 20 $,
25 $, qui ne sont peut-être pas, comparativement, très payants par rapport
aux grands centres, à Québec, à Montréal, bien, ils font toute une différence
dans une économie d'une région. Alors, assurément, pour nous, je pense qu'on
rate la cible si on focuse exclusivement sur les emplois extrêmement payants et
on laisse de côté un pan de l'économie qui, dans certains cas, est d'une
richesse, est d'une nécessité pour assurer la suite de nos régions du Québec.
En terminant, dernière question aussi,
bien, le transfert de plusieurs dispositions par rapport aux emplois supérieurs
à la recherche, à la science et à la technologie. Donc, ce qu'on croit
comprendre, c'est que tout ce qui était la recherche, maintenant, sera dorénavant
du côté du ministère de l'Économie.
Donc, est-ce que le ministre est en train
de se transférer des pouvoirs pour déterminer des priorités de recherche
fondamentale et appliquée à son propre ministère pour faire en sorte que ce
soient les intérêts économiques qui soient pris en considération dans l'établissement
des priorités? Bref, est-ce qu'on fera de la recherche exclusivement sur les
vecteurs de développement que le ministre et le gouvernement se seront donnés
ou on sera un peu plus large et on pourra donner effectivement d'autres
considérations à la recherche scientifique, notamment en prenant en compte des
facteurs sociétaux ou des facteurs sociodémographiques qui nous permettraient
effectivement d'aller de l'avant dans la recherche appliquée et fondamentale?
Donc, c'est notre réaction aujourd'hui, à
chaud. On a encore plusieurs questions, on a plusieurs interrogations. Je pense
que présentement le ministre ne se donne pas juste le gouvernail, se donne le
bateau, va choisir sur quelle mer il va naviguer. Mais, encore une fois, ce
qu'il est important de bien comprendre, si on veut avoir tous ces pouvoirs-là,
ça prend de la transparence, ça prend de la responsabilité, et malheureusement,
pour l'instant, on reste sans mots pour la suite.
Donc, on va suivre les discussions en
commission parlementaire, on aura plusieurs questions, mais on n'est pas en
train de réviser le travail d'Investissement Québec, on est en train de revoir
totalement la façon dont le gouvernement du Québec veut intervenir dans
l'économie, et assurément ça nous laisse avec encore beaucoup de questions.
Merci.
(Fin à 15 h 22)