(Neuf heures quatorze minutes)
M. Polo : Alors, bonjour à
tous. Écoutez, on termine cette semaine d'audiences sur une impression d'improvisation
du ministre à travers le dépôt du projet de loi n° 34 parce qu'il faut se
le dire, c'est un constat, c'est que ce projet de loi a créé l'unanimité d'à
peu près tous les groupes qui sont venus présenter et défendre leurs mémoires
contre des principes phares, des principes fondamentaux du projet de loi, que
ce soit, un, la simplification du processus, que ce soit également au niveau du
remboursement des trop-perçus.
Le ministre, plus la semaine avançait,
plus il se retrouvait à essayer de challenger les personnes qui arrivaient devant
lui pour leur exposer leurs arguments. Il n'y a pas un chat qui a supporté... à
part Hydro-Québec et une association qui était un peu même en conflit
d'intérêts, puisqu'Hydro-Québec était membre de leur conseil d'administration.
C'est la démonstration qu'on a pu faire.
Qu'est-ce que le gouvernement cherche à
faire avec ça, avec ce projet de loi? C'est qu'il l'a déposé le 12 juin
dernier. Il l'a déposé pour essayer de calmer le jeu, essayer de gagner du
temps pour faire croire ou, en fait, donner l'illusion à la population qu'à
travers le projet de loi le 1,5 milliard de dollars de trop-perçus, qu'il
a martelé pendant des années, allait être remboursé aux Québécois. Et plusieurs
groupes, dont des groupes de consommateurs, sont venus démontrer que, un, la
notion même du 1 milliard des trop-perçus, avec l'information qui est
soumise actuellement, ils sont incapables de confirmer si, effectivement,
ce milliard-là va être remboursé à la population.
Alors, ce projet de loi là a été rédigé
par qui et pour qui? Nous, ce que nous disons, c'est que ce projet de loi a été
rédigé par Hydro-Québec pour Hydro-Québec. Et le gouvernement joue le jeu
d'Hydro-Québec et oublie complètement la population, oublie complètement les
contribuables qui ont soutenu cette formation politique sur la base de ses
promesses, sur la base de ses engagements jusqu'au 1er octobre dernier. Et,
depuis le 1er octobre dernier, le premier ministre et son ministre font de
l'amnésie, font carrément de l'amnésie, essaient de faire croire aux Québécois
que finalement le remboursement des trop-perçus va se faire à travers un
réinvestissement en éducation, en santé... et notamment la question des taxes
scolaires.
Et, comme ils s'en sont rendu compte, que
la pression populaire ne baissait pas, le premier ministre François Legault
s'est retourné de bord, est allé voir Hydro-Québec puis il a dit : Bien,
comment pouvez-vous nous aider à essayer de nous dépêtrer, de nous sortir de ce
trou-là? Et Hydro-Québec leur a dit : Bien, aidez-nous à vous aider. On va
vous préparer un projet de loi qui va aussi nous aider, nous, à nous enlever la
Régie de l'énergie de nos pattes. Et c'est ce qu'on a pu constater. C'est ce
que les différents groupes sont venus dire en leurs mots cette semaine pour
démontrer que c'est un projet de loi qui a été patenté, qui a été bricolé sur
un coin de table pour faire l'affaire d'Hydro-Québec.
Mme Gamache (Valérie) :
Qu'est-ce qu'on fait à partir de maintenant? Il y a, par exemple, le Parti
québécois qui demande à ce que la régie soit pratiquement contrainte de venir
témoigner. Seriez-vous d'accord? Allez-vous unir votre voix au Parti québécois?
M. Polo : Bien, en fait, ce
qu'il faut dire, c'est que le Parti québécois a repris une demande que nous
avions faite lorsque nous avons négocié avec les différents leaders des
différents partis. Nous avons demandé par le passé que la Régie de l'énergie
participe aux audiences du projet de loi n° 34. Et là aujourd'hui je me
joins à mon collègue du Parti québécois pour également demander que la Régie de
l'énergie vienne jeter de la lumière sur le projet de loi n° 34, vienne
nous expliquer de quelle façon le projet de loi n° 34, en fait, n'amène
aucune simplification au processus, mais il est tellement simpliste qu'il est
même dangereux pour la population puisqu'il enlève des griffes, si on peut
dire, à la Régie de l'énergie afin qu'elle puisse faire correctement son
travail, au détriment des consommateurs. Il faut se rappeler qu'Hydro-Québec, c'est
un monopole, et la Régie de l'énergie est là pour contrôler un monopole. Et ce
que le projet de loi n° 34 vise à faire, c'est de déréglementer, de donner
toute la marge de manoeuvre à Hydro-Québec de pouvoir faire ce qu'elle veut au
détriment des consommateurs.
M. Bergeron (Patrice) : S'il
y a des parlementaires qui craignent que ça tourne au cirque, avec la régie,
tout partisan, est-ce que vous seriez prêts à accepter, comme l'a soumis ou
recommandé votre collègue tout à l'heure, M. Gaudreault, que l'audience de la
régie se fasse à huis clos pour éviter, là... pour essayer peut-être d'amadouer
ainsi la partie gouvernementale, parce que c'est quand même eux qui ont une
majorité, là?
M. Polo : En effet. Bien,
regardez, nous, là, ce qu'on est prêts à faire, c'est qu'on est prêts à faire
le nécessaire pour améliorer le projet de loi du mieux possible. Et, s'il faut justement
le faire à huis clos, on serait prêts à le faire à huis clos. Mais, avant tout,
là, il faut faire correctement notre travail. Et ce qu'on a entendu et ce que
les différents groupes sont venus nous présenter, c'est un projet de loi qui
joue sur l'improvisation et qui donne un chèque en blanc à Hydro-Québec de
pouvoir faire ce qu'elle veut avec l'argent des Québécois ou, en fait, avec le
fait qu'elle est un monopole et qu'il n'y a aucune restriction, à travers ce projet
de loi là, qui va leur empêcher de faire ce qu'ils vont faire dans le futur.
M. Cormier (François) : Mais
il reste qu'il y aura une supervision, entre guillemets, gouvernementale. Et éventuellement,
aux quatre ans, il y a des élections, là.
M. Polo : La supervision gouvernementale
de laquelle vous parlez, là, c'est la politisation d'Hydro-Québec. Et, à la
base même, la Régie de l'énergie a été mise en place afin d'enlever la
politisation d'Hydro-Québec. Donc, dans le projet de loi n° 34, lorsque
c'est énoncé qu'Hydro-Québec devra demander la permission au gouvernement,
c'est essentiellement ce qu'il est en train de dire, c'est que ça va amener de
la politisation sur Hydro-Québec.
M. Cormier (François) : Oui,
mais vous avez peur que ça nuise aux consommateurs. Vous avez peur que ça nuise
donc à l'augmentation des tarifs. Mais en même temps, de l'autre côté, aux
quatre ans, il y a un gouvernement qui va avoir à se faire élire, donc qui va
avoir peur de jouer dans les tarifs d'Hydro-Québec et de les augmenter. Alors,
est-ce qu'il n'y a pas là un «check and balance», là? C'est-à-dire que, oui, Hydro-Québec,
en tant que monopole, sera peut-être tentée d'augmenter, mais ultimement la
décision reviendra au gouvernement qui, lui, sera en élection aux quatre ans.
M. Polo : Regardez, le rôle de
la Régie de l'énergie, là, c'est de stopper l'appétit et la gourmandise d'Hydro-Québec.
L'appétit et la gourmandise d'Hydro-Québec, là, ont été démontrés au cours des
dernières années, où elle a demandé des hausses de 1,7 % et elle a obtenu
des hausses de 0,9 %. Ça veut dire la moitié moins également sur
l'inflation au cours des dernières années. C'est ça, le rôle de la Régie de
l'énergie. Peu importe ce qu'Hydro-Québec demande comme hausse, la Régie de
l'énergie, son rôle, c'est d'établir le juste prix — pas le prix de
l'inflation, le juste prix — en fonction des différents intrants qui
déterminent justement le juste prix.
Mme Gamache (Valérie) : Si ne
vous entendez pas Hydro-Québec, est-ce que vous pensez que vous serez
incapables de faire l'étude du projet de loi point par point lorsque sera venu
le moment vraiment de l'étudier?
M. Polo : Bien, nous, ce qu'on
invite le ministre à faire d'ici l'étude article par article, c'est de lui-même
réviser son propre projet de loi, c'est, lui-même, de prendre en considération
tout ce qui lui a été présenté cette semaine et lui-même être capable
d'améliorer son projet de loi avant qu'on revienne à l'étude article par
article.
Mme Gamache (Valérie) : J'ai
posé la même à question à M. Gaudreault. Entre le plan de remboursement et
le fait de dégriffer la régie, c'est-à-dire d'obliger Hydro-Québec de se
présenter seulement une fois aux cinq ans pour les hausses tarifaires, votre
principal cheval de bataille, si vous aviez à en choisir un, est-ce que ce sont
les trop-perçus ou ce cinq ans, cette obligation de se présenter aux cinq ans
plutôt que chaque année?
M. Polo : Bien, écoutez, tout
d'abord, pour les trop-perçus, là, indépendamment du projet de loi n° 34, le gouvernement a les leviers financiers, a les ressources
financières pour pouvoir être capable de rembourser les trop-perçus directement
auprès de la population et n'a pas beosin d'Hydro-Québec pour le faire.
Deuxièmement, ce qui est très inquiétant à
l'intérieur du projet de loi n° 34, là, c'est la
supposée simplification, qui est, en fait, un manque de transparence et qui
nous amène justement sur un délai de cinq ans. Aucun groupe, à part Hydro-Québec,
aucun groupe n'est venu justifier de retourner à la Régie de l'énergie à chaque
cinq ans. Il y a des groupes qui ont proposé peut-être de le ramener sur trois
ans. Il y a même des groupes qui l'ont proposé sur deux ans. Et il y a même des
groupes qui ont dit : Ce n'est pas moins de régie qu'on a de besoin, c'est
plus de régie qu'on a de besoin.
Mme Gamache (Valérie) : Donc,
pour vous, les deux éléments sont à rejeter, quand même?
M. Polo : Bien, écoutez, nous,
ce qu'on souhaite, c'est que la population reçoive le remboursement des
trop-perçus tel qu'elle le demande. Mais, deuxièmement, nous, ce qu'on souhaite
également, c'est que ce n'est pas une simplification tellement simpliste que c'est
même un danger pour la population, au contraire, mais ce qu'on demande, c'est
plus de régie, c'est de renforcer le rôle de la Régie de l'énergie. Est-ce
qu'il peut y avoir une amélioration sur les façons de faire de la Régie de
l'énergie? Certainement. Mais ce n'est pas moins de régie qui va arranger les
choses.
Des voix
: Merci.
M. Polo : Merci.
(Fin à 9 h 22)