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Conférence de presse de Mme Danielle McCann, ministre de la Santé et des Services sociaux, et Mme Sonia LeBel, ministre de la Justice

Annonce concernant la situation actuelle au Québec sur l’aide médicale à mourir

Version finale

Thursday, October 3, 2019, 14 h

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Treize heures cinquante-sept)

Mme McCann : Alors, bonjour, tout le monde. Alors, on vous a conviés aujourd'hui pour une annonce qu'on peut qualifier de rarissime dans notre histoire démocratique. On veut dire d'entrée de jeu qu'on dédie cette annonce à toutes les Québécoises et à tous les Québécois atteints de maladies graves et incurables et aux prises avec des souffrances persistantes et intolérables. Nous leur donnons le pouvoir et la liberté de décider, et on le fait dans le respect de leur volonté, de leurs valeurs et de leur dignité. Ça s'inscrit comme une priorité pour notre gouvernement.

On annonce donc aujourd'hui que le gouvernement du Québec a pris la décision de ne pas porter en appel le jugement concernant M. Truchon et Mme Gladu.

Ce jugement de la juge Beaudoin rend inopérant le critère de fin de vie prévu à la Loi concernant les soins de fin de vie. Alors, nous allons respecter ce jugement émis par la Cour supérieure du Québec. Toutefois, ce jugement va maintenir la validité du critère de fin de vie pendant six mois, avant de le rendre inopérant, pour laisser le temps au législateur de modifier la loi s'il le juge nécessaire.

Une réflexion va être entamée au sein des équipes du ministère de la Santé et des Services sociaux quant à savoir si la loi devra être modifiée ou non pour donner suite à la décision et, si oui, comment, toujours dans le respect du jugement.

Alors, je tiens à rappeler que l'aide médicale à mourir demeure une intervention exceptionnelle comprenant des conditions très restrictives et s'inscrivant dans un continuum de soins. Les demandes d'aide médicale à mourir demeurent, somme toute, rares, mais il est primordial que le recours à ce soin demeure strictement encadré et balisé par la loi.

Dans certains pays où cette possibilité existe et où les critères d'accès sont différents et moins restrictifs qu'au Québec, on estime que ces décès représentent environ 2 % de l'ensemble des décès.

Nos travaux se poursuivent donc afin de permettre au plus grand nombre possible de personnes de bénéficier des soins qu'elles souhaitent, dans la sérénité et entourées de leurs proches.

En tant que gouvernement, nous avons le devoir d'être à l'écoute, d'être proactifs et d'aller au-devant des enjeux qui se présentent en vue d'offrir aux personnes qui le souhaitent le meilleur accès possible à ces services. Je vais céder la parole à la ministre de la Justice.

Mme LeBel : Alors, merci. Bonjour, tout le monde. Naturellement, je suis ici à titre de Procureur général du Québec. Et ça me fait plaisir d'accompagner ma collègue dont c'est le dossier, toute la question de l'aide médicale à mourir, et de l'avoir également accompagnée non seulement pour cette annonce, mais dans la réflexion qui a mené jusqu'à cette décision.

Donc, peut-être juste pour compléter un peu certains éléments de contexte, vous savez que, dans ce dossier-là, bien qu'atteints de maladies graves et incurables qui causaient de grandes souffrances, qui sont des critères déjà prévus également à la loi, Mme Gladu et M. Truchon ne satisfaisaient pas tous les critères qui étaient prévus à la loi. Ils ont donc été amenés à contester cette fameuse loi, à déposer, donc, en 2017, une procédure judiciaire à la Cour supérieure, dont l'objectif était de faire déclarer inconstitutionnel le critère de fin de vie qui est prévu dans la loi québécoise ainsi que le critère de mort naturelle soit... que la mort naturelle soit devenue raisonnablement prévisible, qui est le critère prévu au Code criminel, donc, qui est dans la portion qui concerne le gouvernement fédéral.

Le 11 septembre dernier, comme vous le savez, la Cour supérieure a donné raison aux demandeurs et a invalidé le critère. Aujourd'hui, on a annoncé qu'on n'appellerait pas de la décision. Plusieurs facteurs sont entrés en compte dans cette décision, que je n'énumérerai pas tous, mais l'application des critères prévus actuellement entraîne des souffrances inutiles aux demandeurs, et c'est pourquoi que ma collègue annonce et entame cette réflexion au sein de son ministère.

La Cour supérieure, c'est important de le préciser, des gens vont se poser la question, a suspendu son jugement pour une durée de six mois. Donc, au moment où on se parle, à l'exception de M. Truchon et de Mme Gladu, le critère de fin de vie demeure, au moment où on se parle, pour les six prochains mois, ce qui va amener notre gouvernement à devoir agir dans des délais rapides. Mais ce délai va quand même nous permettre de réfléchir à ce vers quoi nous voulons aller comme société, et je pense que c'est une réflexion qui est importante à mener.

On aura donc à déterminer les modifications à apporter à la loi québécoise, mais surtout à évaluer l'opportunité d'ajouter de nouveaux paramètres ou non qui respecteront ceux établis par le tribunal pour le bien-être des personnes les plus vulnérables.

Naturellement, on est en campagne électorale, le gouvernement fédéral devra se positionner — ce sera mon seul commentaire — mais au moment opportun, nous devrons donc collaborer avec le prochain gouvernement afin d'harmoniser nos exigences des deux paliers de gouvernement, les critères étant reliés ou dépendants les uns des autres, effectivement, dans le futur. Ce qui ne nous empêche pas toutefois d'agir avec autonomie et de réfléchir dès à présent à ce vers quoi nous voulons aller comme société. Merci.

Le Modérateur : Nous allons maintenant enchaîner avec une période de questions. Je vous rappelle que vous pouvez toujours me faire signe si vous avez une question à poser. Et on commence avec Jocelyne Richer, LaPresse canadienne.

Mme Richer (Jocelyne) : Bonjour, mesdames. Donc, si je comprends bien, on doit tenir pour acquis, quand même, que la loi actuelle sur les soins de fin de vie sera élargie, forcément, à partir du jugement. Et j'aimerais savoir si on doit tenir pour acquis que vous avez un préjugé favorable envers le consentement préalable.

Mme McCann : Oui. Alors, comme on l'a dit, nous allons entamer des travaux au niveau, là, du ministère de la Santé et des Services sociaux, en lien, évidemment, avec le ministère de la Justice, et ces travaux vont devoir tenir compte, là, hein, du jugement dans le dossier de Mme Gladu et M. Truchon.

Quant à l'élargissement que vous mentionnez, on a un groupe d'experts, là, qui s'est penché sur la question, là, de l'élargissement dans une situation d'inaptitude, donc, des demandes anticipées. Alors, le rapport final, on devrait le recevoir sous peu. Et évidemment on va aussi vouloir faire des travaux dans ce dossier-là de façon transpartisane avec les collègues, aussi, de l'opposition.

Donc, c'est deux dossiers, hein, qui touchent à la loi sur les soins de fin de vie et que nous allons évidemment faire ensemble, là, dans ces deux dossiers-là, nous allons travailler là-dessus.

Mme LeBel : Est-ce que tu me permets de compléter?

Mme McCann : Oui.

Mme LeBel : Je pense qu'à ce stade-ci il ne faut rien tenir pour acquis. Ce qu'on doit tenir pour acquis, c'est qu'il va y avoir une réflexion sérieuse. Mais, ma collègue l'a bien dit, il y a deux aspects, présentement. Le dossier de Gladu-Truchon ne touche que les critères actuels de la loi. Il y a cinq critères, dont un des critères est celui de la fin de vie, et celui-là est validé avec un compte à rebours de six mois, naturellement, par la Cour supérieure. Pour ce qui est de l'élargissement, c'est une réflexion également à laquelle ma collègue vient de répondre mais qui ne touche pas le délai de six mois ou le critère.

Donc, il y a deux volets qui sont très importants à comprendre. Mais ce que ma collègue vous annonce, c'est que, comme gouvernement, on va faire la réflexion sur les deux volets, c'est-à-dire l'opportunité de redéfinir le critère de fin de vie ou non, et ça, c'est là-dedans que le délai de six mois est important, et la réflexion sur l'élargissement, que ma collègue vous a annoncée également.

Mme Richer (Jocelyne) : Mais votre position, à vous? Parce que ça fait longtemps que vous en parlez, à la CAQ, d'élargir l'idée de l'aide médicale à mourir. On se souvient de la sortie de votre collègue M. Bonnardel. Je répète un peu ma question : Est-ce qu'on doit tenir pour acquis que ça va être dans ce sens-là, que les demandes anticipées, le gouvernement s'en va vers ça?

Mme McCann : C'est sûr que, comme on l'a dit en campagne électorale, c'est un dossier qu'on va vouloir faire cheminer, hein, on va le dire comme ça. Le rapport du groupe d'experts va être très important pour nous aider justement à cheminer dans ce dossier.

Mme Richer (Jocelyne) : Et pourquoi vous ne l'avez pas encore rendu public, ce rapport-là?

Mme McCann : Ça va se faire sous peu. Et je pense qu'il fallait qu'ils prennent le temps, hein, de bien étudier la question, de faire des recommandations. C'est un dossier complexe qu'il faut faire avec soin. Et on va vouloir faire une consultation aussi à la population. On veut aussi que ce dossier-là soit transpartisan. Alors, c'est tout un travail qu'on va vouloir faire, mais effectivement on perçoit que la population a des attentes dans ce dossier-là et que la population est de plus en plus mûre par rapport au dossier de l'élargissement de l'aide médicale à mourir, par exemple, les demandes anticipées dans le cas d'inaptitude.

Alors, ce qu'on vous dit aujourd'hui, c'est que, oui, nous allons faire cheminer le dossier à la lumière des recommandations du groupe d'experts en consultation avec la population.

Le Modérateur : Tommy Chouinard, LaPresse.

M. Chouinard (Tommy) : Bonjour. J'ai besoin d'une précision parce que j'ai l'impression que vous n'avez pas tenu exactement le même discours sur ce qu'il adviendra de la loi. Mme McCann, vous avez dit : On va regarder si la loi sera modifiée ou non, et, si oui, comment. Puis d'un autre côté, Mme LeBel, vous avez dit : Bien, on va apporter des modifications à la loi puis regarder aussi l'opportunité d'apporter de nouveaux critères. Là, j'aimerais comprendre...

Mme LeBel : Non. Bien, je vais éclairer. Non, on n'a pas... on va réfléchir sur l'opportunité, sauf qu'on a six mois pour y réfléchir. Parce que le délai de six mois de la Cour supérieure fait en sorte que dans six mois le critère va tomber. Donc, il faut réfléchir quand même dans les délais pour pouvoir voir. Mais, non, on va... Merci de me permettre de le préciser. L'intention est toujours de réfléchir à l'opportunité de modifier ou non le critère ou de le maintenir ou non. On va réfléchir à toutes les options, je peux-tu le dire comme ça? Il n'y a rien de décidé.

M. Chouinard (Tommy) : O.K. Donc, doit-on comprendre que la loi pourrait très bien ne pas être rouverte d'ici six mois et qu'on laisse tout simplement aller cet article-là comme étant invalide selon les tribunaux? Est-ce que c'est ça que je comprends?

Mme LeBel : Je vais répondre de cette façon-là. La décision n'est pas prise, ça fait partie des options, mais, s'il y a décision de la part de ma collègue, après les consultations, après la réflexion, après le cheminement qu'elle entend faire, et ça lui appartient, elle va pouvoir en parler. Ce que ça fait, dans six mois, c'est que les cinq critères demeurent, sauf celui-là. Donc, dans six mois, si rien n'est fait, cinq critères demeurent, les principaux étant la maladie incurable et les souffrances. Mais le critère de fin de vie n'existera plus. Mais là c'est là qu'il faut que la société et le gouvernement se positionnent sur qu'est-ce qu'on veut faire avec ça.

M. Chouinard (Tommy) : O.K. Puis là, quand on parle de... C'est sûr que ça a dû... les gens qui ont pu écouter ont peut-être compris... Bien, peut-être qu'ils ont certaines inquiétudes. Parce que là vous dites... vous parlez de nouveaux critères, donc, d'ajouter des nouveaux critères, là. C'est bien ce que... «sur l'opportunité d'apporter de nouveaux critères», avez-vous dit, Mme LeBel. Donc là, est-ce que...

Mme LeBel : Bien, le sixième critère, l'opportunité de modifier ce sixième critère là ou non, là, je veux dire... Il faut travailler sur ce critère-là.

M. Chouinard (Tommy) : ...critères, pour vous?

Mme LeBel : Bien, le futur nous le dira. C'est ça qu'il faut...

Le Modérateur : Patrick Bellerose, Journal de Québec.

Mme LeBel : C'est à ça qu'il faut réfléchir.

M. Chouinard (Tommy) : ...vraiment, je pense à des... Parce que le débat ici est sur l'accès à l'aide médicale à mourir et les conditions, les critères qui sont fixés. Ces critères-là font en sorte que l'aide médicale à mourir est plus ou moins accessible selon le cas.

Mme LeBel : Oui.

M. Chouinard (Tommy) : O.K. Vous dites qu'en principe vous êtes... le gouvernement est plutôt d'accord avec l'idée d'élargir l'accès, mais vous dites aussi que vous pourriez apporter de nouveaux critères, donc, des critères qui feraient en sorte que ce ne soit pas tout à fait accessible, là. Est-ce qu'on joue sur les mots ou est-ce qu'on...

Mme LeBel : Bien, oui, je pense qu'on joue un peu sur les mots. Mais je veux être sûre qu'on précise la pensée. L'élargissement, présentement, auquel on faisait référence, est l'élargissement en matière des consentements anticipés, qui n'existent pas dans la loi actuelle. On s'entend? Au niveau de la loi actuelle, il n'y a pas de notion de consentement anticipé. Les six critères, les trois principaux étant la maladie incurable, les souffrances intolérables, je crois, et le critère de fin de vie, bon... Le critère de fin de vie, présentement, a été invalidé par la Cour supérieure. Je pense que c'est responsable, de la part du gouvernement, de réfléchir à qu'est-ce qu'on va faire avec ce critère-là ou non. C'est ça, quand je parle de la réflexion, O.K.? Ça ne veut pas dire qu'on va en rajouter un, ça ne veut pas dire qu'on va le modifier, ça ne veut pas dire... Tout est sur la table. Mais on doit réfléchir à quelles sont nos options, comme gouvernement et comme société, une fois qu'on a ça sur la table. Et on veut juste se donner cette opportunité-là de le faire. Il n'y a pas de décision de prise dans ce sens-là, je veux que ça soit très clair, là.

Le Modérateur : Patrick Bellerose, Journal de Québec.

M. Bellerose (Patrick) : Bonjour à toutes les deux. Donc, hier, M. Trudeau a annoncé qu'il ne porterait pas la cause en appel, tandis que M. Scheer, lui, a dit : Bien, écoutez, on va porter la cause en appel et on voudrait avoir une décision finale.

Mme LeBel, ce matin, vous avez souligné que la loi québécoise est un peu tributaire de la loi canadienne. Est-ce qu'il n'est pas un petit peu trop tôt aujourd'hui pour dire : On n'ira pas en appel ou on ne changera pas la loi, alors que la loi canadienne pourrait demeurer?

Mme LeBel : On n'a pas le choix de se positionner. Parce que les élections fédérales ne suspendent pas ni notre responsabilité de déposer appel ou non... Ça ne nous empêchera pas de faire cette réflexion-là, même si on saura dans le futur quel sera le barème à l'intérieur de laquelle il faut réfléchir. Parce que, naturellement, notre critère est tributaire du critère fédéral, s'il y a critère, je le précise, là. Mais, dans la réflexion, le critère éventuel ou non est tributaire de celui du fédéral parce qu'on ne peut pas avoir... on ne peut pas être plus large que le fédéral, vu qu'on parle d'une matière criminelle et du Code criminel.

Donc, ce que je dis, c'est qu'on verra. C'est plate comme question, mais c'est la réalité. On verra quelle sera la position du gouvernement fédéral, qu'on va connaître de façon certaine, quant à moi, après le 21 octobre — mais c'est mon opinion. Et par la suite, bien, on ajustera en conséquence, dépendamment des décisions que la réflexion que nous avons entamée, que nous

entamerons... vers quoi elle nous mènera. Mais, oui, ce sera quelque chose qu'il va falloir éventuellement considérer, dépendamment de leur décision.

M. Bellerose (Patrick) : ...date butoir et de porter en appel. Mais, pour ce qui est de décider de faire tomber ou non le critère, vous devez attendre que le fédéral se positionne?

Mme LeBel : Bien, on peut entamer notre réflexion. Puis par la suite on va être obligés de la concrétiser, de la finaliser en fonction de ce que le fédéral aura décidé, c'est sûr. Mais ça ne nous empêche pas d'entamer notre propre réflexion.

M. Bellerose (Patrick) : Dernière question, si vous permettez, sur la réflexion. Vous dites : On va avoir une grande réflexion de société, il va falloir réfléchir. Est-ce que ça va se faire à l'intérieur du gouvernement seulement ou si c'est un forum plus large pour réfléchir à ce qu'on fait avec l'ouverture, l'élargissement de l'aide médicale à mourir?

Mme McCann : Oh! ce sera un forum plus large parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, il faut que ce soit aussi transpartisan et il faut que la population soit consultée. Alors, on a un rapport d'experts, mais il faut que la population aussi... il y ait une forme de consultation avec la population.

M. Bellerose (Patrick) : D'ici six mois, il y aura consultation de la population?

Mme McCann : Non. Au niveau de l'élargissement, là, les demandes anticipées en cas d'inaptitude, le délai de six mois ne s'applique pas. Alors, ça peut être plus long.

Le Modérateur : Mylène Crête, Le Devoir.

Mme Crête (Mylène) : Bonjour. J'ai deux questions. Premièrement, Mme McCann, hier, dans le rapport annuel de la commission sur les soins de fin de vie, la commission recommandait d'inciter peut-être davantage de médecins spécialistes à offrir ce soin-là parce qu'elle s'inquiétait de l'accès, étant donné qu'il a seulement 17 %, là, si ma mémoire est bonne, de médecins spécialistes qui donnent l'aide médicale à mourir. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Est-ce que c'est quelque chose sur lequel vous allez plancher aussi?

Mme McCann : Oui. Je pense que ça va être important de le faire. Toutefois, il faut dire que le nombre de médecins... le rapport le dit, le nombre de médecins qui donnent l'aide médicale à mourir a augmenté, hein, quand même, là, d'une année à l'autre, là, ou pendant la durée, là, de ce que couvre le rapport. Alors, on voit qu'il y a eu une évolution quand même importante, mais on a encore du travail à faire, effectivement.

Et par rapport à la décision, là, qu'on prend aujourd'hui et ce fameux critère, là, de fin de vie, bien, il y a peut-être des médecins, oui, qui vont être moins à l'aise d'offrir l'aide médicale à mourir, mais il y en a peut-être d'autres qui vont être davantage à l'aise de l'offrir. Parce que le critère de soins de fin de vie était difficile à appliquer, on va le dire comme ça. Qu'est-ce que c'est, fin de vie? Dans quel horizon? On s'était donné des guides de pratique qui étaient aidants, mais ce n'était pas nécessairement facile pour les médecins de bien évaluer qu'est-ce que c'est, la fin de vie. Alors, dans ce sens-là, il pourrait y avoir des médecins qui seraient plus à l'aise de donner l'aide médicale à mourir.

Mais, comme on l'a dit, là, il y a vraiment du travail à faire. Et il y a des médecins qui font davantage, d'ailleurs, l'aide médicale à mourir et qui pourraient offrir un certain coaching, un certain mentorat à d'autres médecins. On a des stratégies, là, en tête, là-dessus.

Mme Crête (Mylène) : Et, pour Mme LeBel, peut-être Mme McCann aussi... mais vous parliez que, bon, la loi québécoise est tributaire de la loi fédérale...

Mme LeBel : ...critère.

Mme Crête (Mylène) : Oui, le critère de soins de fin de vie. Qu'en est-il de l'élargissement de la loi québécoise? Est-ce que, ça aussi, c'est tributaire de la loi fédérale?

Mme LeBel : C'est une excellente question. Effectivement, il va falloir se poser la question. Je serais portée à penser que oui, d'entrée de jeu, parce que, s'il y a un élargissement et qu'on ne peut pas être plus large ou plus permissif que ce que le critère fédéral nous donnera éventuellement, ça pourrait être un enjeu. Mais honnêtement c'est quelque chose qu'il va falloir examiner avec beaucoup d'attention. Mais il faut réfléchir à la question. Mais, encore une fois, on peut avoir cette réflexion-là, en tant que société, puis on pourra réfléchir aux voies de passage par la suite, mais ça pourrait faire partie de l'équation effectivement.

Mme Crête (Mylène) : Est-ce que vous savez si M. Lametti a demandé à réserver sa décision de porter ou non en appel...

Mme LeBel : Moi, je ne veux pas...

Mme Crête (Mylène) : ...campagne ou l'élection?

Mme LeBel : Moi, comme je vous l'ai dit, là, j'avais été informée que la décision logique était de réserver les droits d'appel pour que les gens puissent se positionner, mais je n'ai pas eu la confirmation finale. Et on le saura bien assez tôt. Je pense que c'est le 16 octobre ou le...

Une voix : ...

Mme LeBel : ...le 10 parce que la décision est du 11 septembre, donc. J'aurais pu faire le calcul moi-même, là, mais le 10, 30 jours à partir du 11 septembre, donc.

Mme Crête (Mylène) : ...que le cannabis, je pense.

Mme LeBel : Oui, c'est ça.

Le Modérateur : Mathieu Dion, Radio-Canada.

M. Dion (Mathieu) : Bonjour, Mme LeBel, question pour vous : Vous n'auriez pas avantage à demander — je ne sais pas si ça se fait — à la cour un délai quant à l'application du jugement, si vous décidez de modifier la loi, tu sais, de demander un délai de plus que six mois? Pouvez-vous faire ça?

Mme LeBel : Je peux vous dire que le délai de six mois est inhabituellement court. Habituellement, quand une cour supérieure ou une cour décide d'invalider quelque chose qui oblige les gouvernements à légiférer ou non, là, dépendamment de la décision qui sera prise, mais où on a un potentiel d'être obligés de légiférer, effectivement, habituellement, les délais sont d'un an. Mais on avisera en temps et lieu, comment se déroule la réflexion ou la décision qui sera prise, principalement menée par ma collègue dans ce domaine-là. Mais, si on parle simplement du plan juridique, effectivement, c'est un délai qui est inhabituellement court. Et on pourra voir en temps et lieu à demander une augmentation ou ce qu'on appelle un sursis, pour faire augmenter, mais ce sera en temps et lieu.

M. Dion (Mathieu) : O.K. Et, Mme McCann, par rapport à la réponse de Mylène, que vous avez donnée, donc, si je comprends bien, vous pensez que ce serait rassurant pour les médecins de modifier la loi puis d'avoir des critères plus clairs? Parce que présentement il y a beaucoup de médecins qui sont hésitants.

Mme McCann : Oui. Mais ça dépend. Pour certains médecins, ça peut être une remise en question, peut-être qu'ils vont être moins à l'aise, dans ce cadre-là, d'offrir l'aide médicale à mourir. Mais, pour d'autres, ça peut être aidant. Parce que ce critère-là, comme je le disais tout à l'heure, n'était pas facile à appliquer. Même si on s'était donné un guide de pratique, comme je disais, là, fin de vie, quelles sont les balises, la temporalité? Bon, alors, ça peut être, pour certains médecins, aidant qu'il n'y ait plus ce critère-là et que ces règles-là ont changé.

Le Modérateur : Phil Authier, The Gazette.

M. Authier (Philip) : Good afternoon. In English?

Le Modérateur : As you wish.

M. Authier (Philip) : Your immediate problem within the six months, if I understand this right, is to deal with what the court has struck down, the natural reasonably foreseeable death clause. Just to understand how you will proceed, you will deal with that immediate issue within the six months, but you also said in French that... Mme McCann, you said that the population has evolved and might be «mûre» for... ready for the enlargening of the criteria. So, would you proceed on the first element with an amendment to the bill, to the law that exists now? Is that how you would have to go, and the other process would be some sort of consultation arrangement?

Mme McCann : Well, that, of course, we will work out together. And we could, there are different possibilities. We could, if we get an extension, for instance But we have to start working now, by the way. But, if we get an extension, it might be possible to review the law on both aspects, you know? That could be the case too.

M. Authier (Philip) : But your immediate decision is to proceed with this, the problem of the sixth criteria?

Mme McCann : Because we have a time factor. At the same time, as I mentioned shortly, we are going to have the final report of the group of experts who have looked at this question of enlargement in situation when somebody becomes inapt, anticipated requests, and that is why we will also proceed in working on that aspect also.

Le Modérateur : Cathy Senay, CBC.

Mme Senay (Cathy) : I just would like to clarify a couple of things. Why did you have to make a press conference today, if you had more time to take your decision on the appeal, on the foreseeable criteria and the case of Mrs. Gladu and Mr. Truchon? Why did you have to come today to say : Well, we are not going to appeal the judgement? You still have time.

Mme McCann : Well, look, we had a few days, but we have been working on this since the judgement. We took the time, we had several meetings. In our teams, together, we discussed thoroughly, at the Government level, and we were ready to announce it. So why wait a few days more?

Mme Senay (Cathy) : It's just that, no matter what you're going to decide, the federal Government has the last word.

Mme McCann : Well, we work together. And it's true, what you're saying, that we have to be very conscious of what's happening at the federal level, but we think that we can work on our law. And, just the law «concernant les soins de fin de vie», what has been done in the past, Québec has been a leader, and I think Québec has influenced the federal Government too and the population in general. So I think we are in a good position to pursue right away working on these aspects of the law.

Mme Senay (Cathy) : You want to take the lead? Because we're in a federal election campaign, now, in the advent of the new Government.

Mme McCann : No, I don't think that's... You know, the judgement has to do with two «Québécois», Mr. Truchon and Mme Gladu. I think we have to be very conscious of that. And this is something that the population of Québec is following very much. We have a responsibility to respond. When we're ready, we respond. I think that's at the level that we took the decision.

Mme Senay (Cathy) : And, since you have already the report, the experts' report on the advance consent, you're studying it at this point. You have it already.

Mme McCann : Well, we still have to get the final report.

Mme Senay (Cathy) : Yes, but you have the preliminary one, you have lots of content already with the experts' report. It's been reported too. What I'm trying to get at is : How the reflection that you have on the foreseeable death may have an impact on how far you're going to go with the advance consent criteria? It's two different things in your mind?

Mme McCann : Two different things.

Mme Senay (Cathy) : Because I have the impression that that didn't move that much. The advance consent part is still : We're looking at the experts' report, we'll come out with the experts' report soon and then we'll probably launch consultations.

Mme McCann : The experts took a little bit more time, which was, I think, reasonable because it's a very complex question. There are not many countries in the world who are doing what we're doing right now. And I salute. I think we have to take the time. But the final report is going to be public soon...

Le Modérateur : Raquel Fletcher, Global... Pardon!

Mme McCann : ...and then we'll give you more information on how we're going to work with this aspect of the law.

Le Modérateur : Raquel Fletcher, Global.

Mme Fletcher (Raquel) : Yes. Good afternoon. Thank you. Putting the reflection and the consultation part aside for a minute, because, as you explained in French, it is possible to do nothing in that criteria, it would just be invalid, essentially, you might decide to make changes, or modifications, or whatever, but I'm just wondering if you just could explain what your decision today means for Quebeckers right now. What can Quebeckers expect if that criteria is just invalidated? Do you know what I'm getting at? I just want to know what it means for people at home.

Mme McCann : Yes, yes. Well, I think... and my colleague, I'm sure, will want to add something on this, but it means that there's an aspect of fairness, in terms of the judgment that was given.

If you have a severe handicap and you have a lot of suffering, it's a different situation, if, unfortunately, you have a cancer, for instance, and you're at the last steps of the illness. As a person who has a very severe handicap, I think Mrs. Gladu and Mr. Truchon explained that very well to the court, you might have severe suffering, and it's irreversible, obviously, but you don't have... you're not in a «trajectoire» of... trajectory of end of life, necessarily.

And the judgment, of course, elaborated on fairness, equality of everybody, on that possibility to have «l'aide médicale à mourir». So, it was putting people with severe handicap and sufferance in a different «catégorie». So, that's why it's going to change something for Quebeckers who have this kind of situation, that they will be able to ask, they will have the choice. As, I think, Mrs. Gladu said, that was very important for her to have a choice, to be able to ask for it or not.

Mme Fletcher (Raquel) : Mme LeBel, did you want to add anything?

Mme LeBel : No.

Mme Fletcher (Raquel) :O.K. Of course, the thing that isn't being addressed here, as Cathy has said, with advance consent, is Alzheimer's, right? That's the big question mark over this...

Mme McCann : It's Alzheimer, but it's also, you know, other situations of different kinds, but where you have a diagnosis of this kind of «maladies dégénératives» and you know that you will become eventually inapt and validated by a physician, and, of course, a team. So that is very different and, of course, that is another aspect of the law that we will work, in consultation with the population and with also the opposition. We wanted to be very transpartisan. But it's a very different aspect we're talking about, in the Gladu Truchon judgment, «les soins de... la fin de fin», and the other one we're talking about, if somebody has a diagnosis of an illness, that the person will become inapt, the anticipated request for «aide médicale à mourir». Very different.

Mme Fletcher (Raquel) : What is your concern, if Québec decides, after these consultations, to go in one direction? Because I know that there are a lot of people talking about... they want advanced consent. If Québec decides to go in that direction but the federal Government decides to go into... would you go in a different direction? Is there a concern that we will have two different bills in two different jurisdictions?

Mme LeBel : The only matter where we are really tied, I would say, or linked to what the federal will decide or not, eventually, is in the matter of the criteria for the admissibility, I mean, what is... Right now, like I said, «le critère de fin de vie» was challenged and invalidated by the Superior Court, and we have six months to make, like... deal with this fact or not. But this is the decision... Deciding not to do anything, it's also a decision, I want to precise that. So, this is part of the thinking process.

But the fact that somebody could give advance consent, that, we can decide. Because we are going give advance consent to what? I will consent... I know right now that I'm diagnosed, one day, I will be inapt, so I want to tell everybody, to the world, that, when I'm there, I won't be able to consent.

Parce que... one of the five... the six criteria right now is to consent, obviously. So, I'm giving... We have to think about the fact : Do we give people the opportunity to consent in advance, and then this criteria is done with? I could say it like that. But it doesn't mean that you don't have to meet the five or four other criteria later. And those criteria depend on what the federal will decide, not the fact to consent in advance or not. I don't know if I made myself clear, but...

Mme Fletcher (Raquel) : ...yes.

M. Cormier (François) : M. Chouinard, je vous accorde...

Mme LeBel : Oh! thank you.

M. Chouinard (Tommy) : C'est ça, une petite précision.

M. Cormier (François) : M. Chouinard, je vous accorde une précision, mais vous êtes sur mon temps. Vous avez 12 secondes.

M. Chouinard (Tommy) : Ce ne sera pas long. Et j'en ai deux petites, là. Mais, sur ce point-là, justement, le consentement aux soins, pour vous, donc, les directives médicales anticipées, c'est de compétence, de juridiction québécoise, là? Ça, il n'y a pas de problème?

Mme LeBel : Oui, oui, oui. Mais on consent en avance à recevoir l'aide médicale à mourir, mais il faut toujours...

M. Chouinard (Tommy) : Qui, lui, est dicté par...

Mme LeBel : ... quand même être éligible.

M. Chouinard (Tommy) : Oui, ça, je comprends. Maintenant, l'autre...

Mme LeBel : Et c'est les critères d'éligibilité qui... au moins un qui dépend du fédéral. Je veux juste être...

M. Chouinard (Tommy) : Oui. Je n'ai pas dépassé mon 12 secondes, je pense?

Des voix : ...

M. Chouinard (Tommy) : Je fais ça vite. Donc, je comprends que dans six mois, là, les malades, là, pourvu qu'ils répondent aux autres critères, même s'ils ne sont pas en fin de vie, ils vont pouvoir recevoir l'aide médicale à mourir au Québec? C'est ce que je comprends. Donc...

Mme LeBel : Si personne n'agit, dans les prochains six mois, c'est-à-dire si le gouvernement n'agit pas...

M. Chouinard (Tommy) : Si le gouvernement fédéral...

Mme LeBel : ...il y aura toujours cinq critères à remplir.

M. Chouinard (Tommy) : Bon, bien, c'est ça, mon point, c'est ça que je voulais faire ressortir. Parce que, là, vous dites que, donc, il pourrait y avoir un critère qui existe qui dit... pas fin de vie, mais qui dit : Bien, il faut que tu aies quelque chose, là, de plus.

Mme LeBel : Pour être très clair, il pourrait ne pas y en avoir, il pourrait y en avoir un, il pourrait y avoir n'importe quoi entre les deux. Et je veux juste être claire, le fait de décider de ne pas agir est une décision. Donc, nous avons six mois pour prendre une décision, mais ça ne préjuge pas de la décision. Ça fait juste dire qu'il faut qu'on agisse dans les six prochains mois.

M. Chouinard (Tommy) : Et là... Bien, en tout cas, oui, vas-y. Excuse-moi, François.

M. Cormier (François) : Non, non, ça va. As-tu besoin d'une autre précision?

M. Chouinard (Tommy) : Bien, c'est juste que je me dis : Est-ce que, donc, au-delà du cas de Mme Gladu puis de M. Truchon... Là, je me mets à la place d'un malade. Lui, il se dit : Bon, bien, là, je vais-tu pouvoir espérer ça ou pas? ou le gouvernement va arriver avec un nouveau critère, puis là on repart la cabale pour essayer de faire en sorte que je ne sois pas coupé, là, que je n'aie pas... que j'aie un autre obstacle? Tu sais? Est-ce que c'est possible, ça, qu'il y ait un obstacle supplémentaire?

Mme McCann : Bien, écoutez, moi, ce que... On en a discuté longuement, la ministre de la Justice et moi-même, puis il va falloir qu'on respecte le jugement, aussi, qui a été donné. Alors, voilà, je pense, la réponse, là, la plus claire qu'on peut vous donner. Je pense, en tout cas, moi, de mon point de vue, qu'il faut respecter le jugement. Alors, le jugement est assez clair.

M. Chouinard (Tommy) : On disait qu'on respectait Carter, puis tout ça, mais, en tout cas... Bon, bref...

M. Cormier (François) : Je vais vous référer aux attachés de presse...

Mme LeBel : Il faut respecter Carter.

Mme McCann : Oui.

M. Cormier (François) : Je vais vous référer aux attachés de presse des ministres pour davantage de questions. Merci beaucoup, mesdames, d'avoir été là.

Mme LeBel : Bien, merci à vous.

M. Cormier (François) : La Tribune de la presse vous remercie. Et on a une autre conférence de presse, comme vous le savez, ailleurs.

(Fin à 14 h 33)

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