(Quinze heures vingt-cinq minutes)
M. Arseneau : Bonjour. Alors,
au nom du Parti québécois, j'aimerais signifier que nous sommes très, très
déçus de voir que la motion qui a été présentée par Québec solidaire, que l'on
a appuyée dès le début, n'ait pas été adoptée par tous les parlementaires de l'Assemblée
nationale, une motion qui avait reçu l'assentiment du gouvernement du Québec,
donc de la Coalition avenir Québec.
Pour nous, c'est le geste à poser de
dénoncer l'intransigeance du gouvernement espagnol, l'intimidation institutionnelle,
comme l'a dit le premier ministre, de déplorer les lourdes peines
d'emprisonnement et d'appeler à une négociation pacifique et démocratique du
conflit actuellement en Catalogne. Ça doit aller de soi, et on a beaucoup de difficultés
à comprendre les résistances du Parti libéral à appuyer la démocratie et
l'exercice démocratique en Catalogne.
Donc, ce qu'on souhaite, c'est qu'on
puisse continuer à travailler de façon transpartisane pour signifier que l'Assemblée
nationale déplore ce qui se passe là-bas, et, contrairement à plusieurs pays, notamment...
dont l'Union européenne, que l'on puisse signifier que ce qui se passe là est important,
ne pas rester insensible à la situation qui se déploie actuellement, dont une
partie des actes sont répréhensibles, sur la négation du droit des Catalans à
l'autodétermination, et qu'on puisse trouver une voie de passage.
Nous, ce qu'on voudrait suggérer aujourd'hui,
c'est, si la motion a été refusée, que l'on puisse au moins travailler sur l'élaboration
d'une lettre qui pourrait être transmise aux autorités espagnoles pour
l'enjoindre de régler de façon pacifique la situation actuelle. On ne peut pas
demeurer insensibles à la situation. Alors, voilà l'essentiel du message pour aujourd'hui.
On ne comprend pas, d'ailleurs, que le Parti
libéral aille en deçà d'une première motion qui avait été adoptée en 2017 pour
souligner, là, encore une fois, là, les agissements du gouvernement espagnol
lors de la tenue du référendum sur l'indépendance de la Catalogne. Alors, on
souhaite des explications. On a beaucoup de difficultés à comprendre, mais on
souhaite encore la collaboration, surtout parce que le fait de ne pas adopter
une motion ensemble envoie un message très, très négatif de la part de parlementaires
qui doivent avoir comme premier objectif, là, le maintien de la démocratie dans
l'ensemble de la planète, et particulièrement dans les pays occidentaux, où on
souhaite donner... ou agir comme des modèles, à cet égard, comme
parlementaires. Voilà. Si... vous avez des questions?
Mme Gamache (Valérie) : Avez-vous
une petite idée de qu'est-ce qui a déplu aux libéraux dans cette motion-là?
M. Arseneau : Bien, en fait, il
y a eu certaines tractations, comme à l'habitude, pour adopter une motion. Dès
le départ, il y avait un libellé qui a été questionné par le gouvernement, on
est revenus... Et nous, on était d'accord avec le libellé initial, qui parlait
de déplorer les gestes qui étaient posés par les autorités espagnoles. Ensuite,
on a qualifié ces gestes-là en parlant d'intimidation institutionnelle et de
violence, qui avaient été essentiellement, là, les propos tenus par le premier
ministre. On était aussi d'accord avec cette précision apportée.
Pour ce qui est des libéraux, j'ai vu
passer une proposition de modification qui, plutôt que de prendre acte des
lourdes peines d'emprisonnement... au départ, on déplorait les lourdes peines,
on a ensuite proposé d'en prendre acte, une proposition de modification parlait
de reconnaître les lourdes peines. Évidemment, la signification est
complètement différente. Si on reconnaît les lourdes peines, on va donc les
accepter, et, pour nous, c'est absolument inacceptable, bien entendu, des peines
d'emprisonnement de neuf à 13 ans pour avoir tenu un référendum
démocratique en lien avec le mandat qu'ils avaient obtenu de la population.
Alors, vous comprendrez que, si c'était le fond de la réflexion du groupe
parlementaire libéral, évidemment, on ne pouvait pas accéder à une demande de
modification de cette nature. Alors, pourquoi, on a de la difficulté à le
comprendre.
Mme Crête (Mylène) :
...qu'est-ce que vous comprenez de ça?
M. Arseneau : Bien, en fait,
c'est à eux de s'expliquer là-dessus. Il faut quand même signifier que le
processus et la décision des tribunaux de l'Espagne, ces décisions-là sont
inacceptables, et il n'était pas question pour nous de reconnaître cette
décision-là comme étant démocratiquement valable en Espagne, et c'est la raison
pour laquelle, sans faire de l'ingérence dans le processus judiciaire espagnol,
on peut quand même convenir, la majorité des analystes le font aussi, que les
bases sur lesquelles on a, disons, étudié la preuve reposent, là, sur une
vision de la constitution qui est assez obtuse et qui ne prend pas en ligne de
compte, là, des principes plus larges, encore reconnus par les Nations unies, notamment,
là, sur le droit à l'autodétermination des peuples. Et d'inscrire dans la
constitution que l'on ne peut pas contester l'ordre établi, un ordre qui est
reconnu par la plupart des pays démocratiques, ce droit-là, donc, qui est
reconnu, que la constitution nie ces droits-là à la Catalogne, c'est, bien
entendu, inacceptable, d'où l'idée que la solution que l'on propose, c'est une
solution de négociation démocratique et par le dialogue, et non pas par la
violence qui a cours actuellement en Catalogne.
Mme Crête (Mylène) :
Qu'est-ce que vous avez pensé des propos de Mme Paule Robitaille la
semaine dernière, qui disait : Il faut laisser l'Espagne... il faut
laisser le processus judiciaire en Espagne, il faut le respecter, il suit son
cours, on comprend, mais on n'a pas à s'ingérer dans les affaires de l'Espagne?
M. Arseneau : Bien, en fait,
c'est une position, pour nous, qui est inacceptable, dans la mesure où on ne
peut pas cautionner ce qui se passe comme étant un peu un détournement de
démocratie par la voie judiciaire et la voie des tribunaux, et de plaider la
non-ingérence lorsque les grands principes auxquels j'ai fait référence tout à
l'heure sur le droit à l'autodétermination des peuples, ce grand principe là
est bafoué. Je pense que c'est irresponsable de la part de parlementaires qui
oeuvrent dans une assemblée nationale démocratique.
On a des exemples multiples d'endroits où
les droits humains ou les droits démocratiques sont bafoués. Et les démocraties
occidentales historiquement ne se sont pas gênées pour signifier leur
désapprobation. Et je pense qu'aujourd'hui on assiste à une autre de ces
démonstrations qui prouve que les droits démocratiques, souvent chèrement
obtenus, doivent être défendus lorsque, dans un pays, on s'aperçoit qu'il y a
un glissement vers l'autoritarisme et l'abus de pouvoir ou l'intimidation
institutionnelle, pour utiliser les mots du premier ministre. Lorsqu'on
constate une telle situation, je pense qu'on a le devoir d'intervenir, d'agir,
de se prononcer.
Mme Crête (Mylène) :
J'avais une autre question, c'était... Je vais essayer de m'en souvenir. Ah!
comment vous interprétez... Justement, vous dites : C'est aux libéraux de
s'expliquer. Est-ce que vous interprétez ça comme s'ils trouveraient ça
acceptable qu'un gouvernement canadien, par exemple, porte des accusations
criminelles contre un éventuel gouvernement qui ferait un référendum au Québec?
M. Arseneau : Ah! bien, j'ai...
je pense que... Y aller d'une hypothèse de cette nature, moi, ça me fait
frémir. Je n'ose pas penser que les libéraux sont rendus là dans leur
déconnexion du sentiment général qui a cours au Québec, qui est acquis, à
savoir qu'on a déjà mené deux exercices référendaires démocratiques. Et que,
s'il advenait qu'on ait l'opportunité de se prononcer encore une fois, le processus
même soit contesté, je n'ose pas imaginer que ce soit possible par un parti aujourd'hui
reconnu et avec une histoire telle que le Parti libéral. Donc, je ne peux pas
imaginer que ce soit ça, là, le fondement de la résistance du Parti libéral, à
l'heure actuelle, à se prononcer en faveur du respect du droit démocratique des
Catalans et de l'obligation pour l'Espagne de négocier et de dialoguer avec les
représentants de la Catalogne. Merci.
(Fin à 15 h 35)