(Douze heures trente-trois minutes)
M. Charette : Vous allez me
permettre, dans un premier temps, de remercier, pour leur présence, mais également
leur collaboration et leurs précieux conseils au cours des derniers mois, M.
Alain Branchaud, directeur général de la Société pour la nature et les parcs,
M. Hubert Pelletier, des relations intergouvernementales et partenariats au
niveau de Conservation de la nature Canada pour le Québec — merci — M.
Lafontaine Messier, directeur de la réserve mondiale de la biosphère
de l'UNESCO Uapishka — merci — et enfin M. Bélanger, professeur retraité à l'Université
Laval et membre de Nature Québec.
Effectivement, votre collaboration, au cours des dernières semaines, des derniers mois, a été excessivement appréciée et très, très,
très pertinente.
Donc, je suis très heureux
d'avoir déposé un petit peu plus tôt
ce matin le projet de loimodifiant la Loi sur la conservation du patrimoine naturel. Ce projet
de loi permettra au Québec de protéger une plus grande superficie de territoire
plus rapidement. Il nous permettra de protéger l'île d'Anticosti, un joyau de
notre patrimoine. Il faut dire que, malheureusement, en matière d'aires
protégées, on n'a pas de quoi être fiers actuellement. On accuse un certain
retard et on est très loin surtout des engagements pris au cours des dernières
années au niveau international.
Avec ce projet de loi, nous
proposons de moderniser le principal outil légal par lequel le Québec crée son
réseau d'aires protégées afin d'accélérer le rythme en matière de protection du
territoire. Pour ce faire, nous nous sommes alignés sur les meilleures
pratiques internationales en matière de conservation du patrimoine naturel.
Notre objectif est de créer plus d'aires protégées plus rapidement, ce qui
inclut notamment l'adoption d'un nouveau statut qui, comme je le disais, nous
permettrait de protéger l'intégralité de l'île d'Anticosti et d'assurer la
préservation de la diversité biologique sur l'ensemble de ce territoire. Il
démontre qu'en matière de protection de l'environnement le gouvernement est
sérieux.
Laissez-moi vous rappeler le
contexte dans lequel nous nous trouvons. La Loi sur la conservation du
patrimoine naturel a été adoptée il y a maintenant 17 ans et n'a pas fait
l'objet de modification majeure depuis cette adoption. On constate aujourd'hui
que les processus de création d'aires protégées actuels sont complexes et
qu'ils entraînent des délais importants en matière de protection du territoire.
La modernisation de la Loi sur la conservation du patrimoine naturel vise donc
à doter le Québec d'un outil légal plus performant et mieux adapté aux nouveaux
défis de conservation.
À l'international, de nouvelles cibles sur
les aires protégées seront bientôt fixées pour la période 2021‑2030. La
nouvelle loi que nous proposons aujourd'hui nous aiderait grandement à
atteindre les nouveaux objectifs internationaux après 2020, lesquels seront,
vraisemblablement, nettement plus ambitieux que les cibles actuelles.
Laissez-moi vous résumer la situation en ce
qui concerne les engagements auxquels nous sommes liés. En 2017, à Nagoya, au
Japon, des cibles de protection ont été adoptées par la communauté
internationale visant à protéger 17 % au niveau du territoire terrestre
d'ici 2020, 10 % d'aires protégées en milieu marin aussi d'ici 2020. Le gouvernement
du Québec a endossé ces cibles-là et s'est fixé comme cible de protéger
17 % de son territoire continental, qui comprend les milieux terrestres et
d'eau douce, ainsi que 10 % de son milieu marin, correspondant à
l'estuaire et au golfe du Saint-Laurent. Tous ces engagements viendront à
échéance dans un an, soit en décembre 2020.
Or, après des années d'inaction libérale,
le réseau d'aires protégées s'étend présentement sur seulement 10,03 % du
territoire québécois. Plus précisément, la protection des milieux terrestres et
d'eau douce couvre 10,68 % du territoire et celle du milieu marin
seulement 1,35 %. C'est d'autant plus désolant que le secrétariat de l'ONU
de la convention sur la biodiversité se trouve au Québec, soit à Montréal. Au
cours de la prochaine année, nous entendons mettre les bouchées doubles afin de
combler ce retard, atteindre les cibles de 2020 et respecter nos engagements
internationaux. Ce qu'on souhaite, c'est que le Québec fasse sa part et qu'on
soit fiers de notre plan en matière de protection du territoire et de la
biodiversité.
Le projet de loi permettrait au Québec de
se doter d'une loi sur la conservation du patrimoine naturel mieux adaptée aux
réalités d'aujourd'hui et aux besoins des communautés locales. Le gouvernement
du Québec s'inspire des meilleures pratiques internationales en proposant de
mettre en place deux nouveaux statuts d'aire protégée, plus compatibles avec
une utilisation durable des ressources. Ces statuts sont reconnus par les
autorités internationales et les groupes de conservation comme un outil
essentiel pour augmenter significativement la proportion du territoire faisant
l'objet de mesures de conservation.
Les deux nouveaux statuts, si le projet de
loi est adopté, se mettraient ainsi en place, un statut d'aire protégée
d'utilisation durable et le statut de réserve marine. L'ajout du statut d'aire
protégée d'utilisation durable permettrait notamment de protéger
l'entièreté — c'était important — de l'île d'Anticosti en
complétant les autres statuts d'aire protégée qui protègent actuellement l'île
à 22 %, et ainsi bonifier sa candidature au titre de site du patrimoine
mondial de l'UNESCO. Ce nouveau statut permettrait l'harmonisation entre
certaines activités économiques, de développement social et la protection de la
biodiversité. Sur l'île d'Anticosti, le statut d'aire protégée d'utilisation
durable pourrait, par exemple, permettre l'exploitation forestière durable et
la chasse, tout en protégeant les milieux naturels et leurs particularités,
comme les fossiles qui s'y trouvent.
Il existe, dans le monde, plusieurs
centaines de territoires qui possèdent un statut d'aire protégée comparable à
ce nouveau statut d'aire protégée d'utilisation durable, par exemple les sites
Black Creek Heritage Rangeland, en Alberta, ou encore Churn Creek Protected
Area, en Colombie-Britannique, Annapurna Conservation Area, au Népal, et Bladen
Lakes State Forest, aux États-Unis.
Quant au nouveau statut de réserve marine,
il répondrait mieux aux spécificités du milieu marin que le statut de réserve
aquatique, qui, lui, s'applique davantage au milieu terrestre et d'eau douce.
S'il est adopté, encore une fois, le
projet de loi viendrait aussi alléger et accélérer les processus menant à la
création des aires protégées. Par exemple, la notion de statut projeté, qui
était jusqu'à maintenant la première étape pour mener à la protection d'un
territoire de façon permanente, serait retirée. Un statut dit permanent serait,
lui, octroyé dès qu'une consultation aura établi qu'une aire protégée fait
consensus. Cet allégement, à l'image de ce qui est fait actuellement par le
gouvernement canadien, permettrait d'accélérer la comptabilisation des aires
protégées. Des corrections mineures pourraient également être faites par le
ministre aux limites d'une aire protégée sans qu'il soit requis de les
soumettre à l'approbation du Conseil des ministres.
Notre gouvernement est déterminé très
clairement à augmenter rapidement les superficies d'aires protégées sur le
territoire québécois. Nous visons toujours, c'est important de le rappeler,
l'atteinte des cibles internationales que nous nous sommes fixées pour 2020. Et,
avec ce projet de loi, nous voulons surtout être prêts pour l'après 2020. Nous
voulons aussi protéger l'ensemble de l'île d'Anticosti, un véritable joyau
naturel et historique du Québec et du monde entier.
Voilà pourquoi nous voulons moderniser la
Loi sur la conservation du patrimoine naturel. Merci.
Le Modérateur
: Merci,
M. le ministre. On va maintenant débuter la période des questions. Je vous
rappelle qu'après la période des questions il va y avoir une période
d'entrevues individuelles, pour laquelle nos collaborateurs seront eux aussi disponibles
pour des entrevues. Donc, sans plus tarder, je vais commencer avec
M. Bélair-Cirino.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui, bonjour, M. le ministre. Donc, est-ce que je comprends que vous allez
pouvoir court-circuiter le ministre des Forêts, notamment, ou le ministre de
l'Énergie, qui ont des préoccupations tout autres que les vôtres, là?
M. Charette : En fait, je ne
court-circuite personne étant donné qu'on travaille ensemble sur ce plan-là, et
ce, depuis le début. Pour l'île d'Anticosti, par exemple, on le sait, on a eu
l'occasion, là, d'échanger sur la question ces dernières semaines, et même en
Chambre, par rapport à quel type de statut on sera en mesure d'offrir. Donc,
c'est une belle avenue, en ce sens qu'on convient, et c'est une première, et
c'est entendu avec les instances internationales, d'une protection, un pourtour
d'un kilomètre avec une protection de catégorie très stricte. Les aires
protégées qui sont déjà de catégorie stricte sur l'île d'Anticosti vont être
maintenues. Et la loi, lorsqu'adoptée, permettrait d'englober l'entièreté de
l'île. Donc, c'est une avancée significative et ça nous aiderait grandement. En
fait, ça demeure une condition pour que l'île soit reconnue au patrimoine
naturel de l'UNESCO.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais vous vous donnez le droit de décréter des aires protégées sans avoir
l'autorisation du Conseil des ministres, donc de vos collègues des Forêts et de
l'Énergie?
M. Charette : En fait, on se
donne le droit, pour des petites modifications, de ne pas avoir à repasser par
tout ce processus-là. Mais, en même temps, soyons bien clairs, il y a une belle
collaboration de la part des différents collègues et ministres autant en
Ressources naturelles, autant au niveau Faune, Parcs et Forêts. Ce sont des
territoires qui sont convenus. D'ailleurs, le projet de loi va surtout nous
aider à atteindre les cibles pour 2021‑2030, parce que les cibles actuelles,
avec la catégorisation actuelle, on est confiants de pouvoir s'en approcher
d'ici la fin de l'année 2020.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Donc, actuellement, le pourcentage d'aires protégées, vous allez atteindre la
cible de 17 % à la fin de 2020?
M. Charette : En fait,
l'échéancier qui est convenu, c'est d'ici la fin de 2020. Cependant, le temps
presse. Si on regarde au cours des dernières années, avec les libéraux, le
pourcentage a très, très peu augmenté. Et le printemps dernier, par exemple,
j'ai confirmé des statuts permanents à certaines aires protégées qui avaient un
statut temporaire, et, dans certains cas, depuis le début des années 2000.
Donc, c'était un processus qui était excessivement long. Le but du projet de
loi est aussi de simplifier largement la démarche pour permettre la
reconnaissance officielle d'une aire protégée sans passer par de longues étapes
qui pouvaient prendre, dans certains cas, plusieurs années.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Et
quel est le pourcentage actuellement d'aires protégées au Québec?
M. Charette : Je vous l'ai
donné tout à l'heure. Je ne veux surtout pas vous induire en erreur, là. Je
vais juste vous le reprendre. Actuellement, on est à 10,03 % du territoire
québécois. Plus précisément, la protection des milieux terrestres et d'eau
douce couvre 10,68 %, et celle du milieu marin, 1,35 %.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
...oui, la cible, vous allez l'atteindre quand précisément?
M. Charette : Il faut
l'atteindre avant la fin de l'année 2020. Donc, ça nous laisse une année
pour l'atteindre.
M. Lecavalier (Charles) :
Bonjour, M. le ministre. J'aurais quand même juste une question sur, bon, les
frictions entre le ministère de l'Environnement, l'Énergie puis les Forêts. Il
y a quand même des cas concrets, là. Je pense à la réserve de la Magpie qui a
été carrément bloquée par le ministère de l'Énergie parce qu'ils considèrent qu'il
y a un potentiel hydroélectrique qu'un jour on pourrait développer. Donc, ils
ne veulent pas d'aire protégée. Est-ce que votre projet de loi va vous
permettre de passer par-dessus des blocages, par exemple, du ministère de
l'Énergie qui ne sont pas nécessairement politiques, là, qui sont d'ordre
administratif?
M. Charette : En fait, le
but, c'est de faciliter la collaboration aussi entre les ministères. Et le territoire
québécois est assez vaste pour pouvoir déjà atteindre ces objectifs-là. Mais ce
que le projet de loi introduit, c'est le concept d'utilisation durable du territoire
aussi. Et ça, c'est un concept qui, dans certains cas, pourrait rassurer des collègues
qui verraient une partie de leur territoire échapper. On comprend que, sur ce territoire-là
d'utilisation durable, on ne peut pas parler de grande industrie. C'est toutes
des utilisations qui devront être faites dans un concept d'utilisation durable
et de protection de la biodiversité qui est présente sur les territoires en question.
M. Lecavalier (Charles) :
Et, dans ce cas-ci, est-ce que ça permettrait de construire un barrage et de
noyer une partie du territoire?
M. Charette : En fait, on
n'est pas dans cette perspective-là du tout. Le concept d'utilisation durable,
c'est de maintenir la biodiversité qui est en place, effectivement.
M. Lecavalier (Charles) :
Dans le fond, il va pouvoir y avoir de la coupe forestière sur ces territoires-là.
J'aimerais savoir qu'est-ce qui va être différent de la coupe forestière qu'on
pratique actuellement sur les terres de la couronne, ce qu'on appelle les
terres de la couronne, et ce qui va se passer sur ces aires-là. Puis, en sous-question,
est-ce que c'est encore le MFFP qui va décider quand et où on coupe sur ces territoires-là
ou ça va être une entité distincte?
M. Charette : En fait, le
projet de loi introduit aussi un mécanisme de surveillance. Donc, on ne pourra
pas faire ce que l'on veut. Ça demeure une aire protégée. Pour répondre à votre
question, je vais prendre l'exemple d'Anticosti. À Anticosti, il y a déjà essentiellement
22 % du territoire de protégé de façon très stricte. On veut ajouter un
kilomètre au pourtour de l'île qui sera aussi protégé de façon très stricte.
Mais, pour ce qui est de la foresterie, elle pourra se faire, dans une certaine
mesure, dans un concept d'utilisation durable. Donc, on ne pourra pas faire de
foresterie intensive avec un reboisement intensif. C'est une utilisation
durable qui est visée et qui devra être approuvée au préalable.
M. Lecavalier (Charles) :
Et dernière petite question. Est-ce que vous avez déjà en ce moment une bonne
idée des endroits qui vont vous permettre d'atteindre la cible? Est-ce que vous
savez déjà à peu près les endroits où vous allez donner des statuts d'aire
réservée?
M. Charette : En fait, on
est déjà confiants de se rapprocher du 17 % avec les catégories actuelles.
Donc, ce que l'on modifie aujourd'hui, ce n'est pas dans une perspective d'alléger
le degré de protection, bien au contraire. Donc, le 17 %, on est confiants
de l'atteindre relativement dans les délais prescrits avec les catégories
actuelles. C'est un projet de loi qui va surtout nous être bénéfique pour
l'après 2020. Donc, les cibles à atteindre d'ici 2030, qui seront confirmées au
cours des prochaines années, sans doute assez rapidement, donc ça va nous
permettre d'avancer beaucoup plus rapidement pour l'atteinte de ces cibles-là.
Le Modérateur
: Merci.
J'ai M. Dutrisac.
M. Dutrisac (Robert) : Oui,
bonjour, M. Charrette. Donc, vous définissez vous-même, dans ce projet de loi
là, ce que vous entendez par cette aire protégée à développement durable?
M. Charette : En fait, on ne
le définit pas nous-mêmes parce que le coeur même du projet de loi, c'est de se
coller sur les plus hauts standards internationaux. Pour qu'un territoire soit
reconnu comme protégé, il y a des balises. Et je peux vous dire, largement,
qu'il y a certains pays, par exemple, qui décrètent avoir protégé 40 %,
50 % de leur territoire, mais avec des critères ou des balises plutôt
discutables. Donc, nous, ce n'est pas du tout dans cette perspective-là. On se
colle littéralement sur les plus hauts standards internationaux à travers
l'ONU. J'en parlais tout à l'heure. Mais il y a l'union internationale de
conservation de la nature aussi qui nous permet d'établir ces balises-là. Donc,
il n'y a personne qui va remettre en question la crédibilité, là, des
protections qu'on va assurer.
M. Dutrisac (Robert) : ...
M. Charette : ...qui est fondamental,
autrement la mesure n'a pas de valeur.
M. Dutrisac (Robert) : O.K., O.K.,
c'est ça. Et on sait que, bon, il est beaucoup plus facile d'avoir des aires
protégées dans le Nord-du-Québec, où il n'y a pas de population, etc. Est-ce
que ça va vous permettre, ce genre de statut là, justement à faire en sorte qu'il
y ait des aires protégées aussi dans le Sud du Québec?
M. Charette : Davantage. Et
vous avez des partenaires précieux qui sont avec nous, avec qui vous pourrez
échanger par la suite. Effectivement, il y a un défi au niveau du Sud. Nous, à
travers des aires protégées, on ne veut pas protéger du territoire pour
protéger du territoire. On veut favoriser le maintien de la biodiversité. La
biodiversité, dans le Sud, elle est, dans certains cas, encore menacée. Donc, c'est
la raison pour laquelle il faut aussi viser le Sud. Avec tout ce concept
défendu dans le projet de loi, on peut maintenant mieux parler ou incarner des
corridors de biodiversité, mieux incarner l'utilisation d'un territoire à des
fins durables. Donc, ça nous ouvre des portes fondamentales qui vont nous aider
dans le Nord, c'est bien certain, mais beaucoup plus au Sud également.
M. Dutrisac (Robert) : Finalement,
vous avez dit que, pour ce qui est des cibles, là, de 2020, vous n'avez essentiellement
pas besoin de ce nouveau statut là. Vous pouvez l'atteindre avec les
limitations, disons, plus grandes des catégories actuelles?
M. Charette : On travaille
dans ce sens-là, effectivement. Et, dans les prochains mois, je vais espérer pouvoir
confirmer des territoires à ce niveau-là. Mais, encore une fois, même si on n'a
pas besoin de nouvelles catégories pour l'atteindre, il y a des dispositions du
projet de loi qui nous seront très, très utiles.
(Interruption)
Généralement, il passe deux fois puis
après il ne revient plus.
Mais sinon le projet de loi nous sera tout
de même très utile parce qu'il vient accélérer le processus venant officialiser
une aire protégée. Actuellement, il y a des mécanismes qui peuvent être très
lourds, à travers le BAPE, à travers... Il y a des étapes bien campées. On
retire de ces étapes-là pour pouvoir procéder plus rapidement, et ça, c'est le
projet de loi qui le permet. Donc, même si on pense pouvoir atteindre le
17 % avec la catégorisation actuelle, le projet de loi va nous être
bénéfique pour aller encore plus rapidement dans le degré de protection.
Le Modérateur
: Mme
Gamache.
Mme Gamache (Valérie) : Je
voulais vous parler de réserve marine. Quand vous parlez d'aire protégée,
qu'est-ce que vous entendez par réserve marine? C'est vraiment les milieux
salés?
M. Charette : Oui, bien, en
fait, la loi, telle qu'elle existait, pouvait porter à confusion. Elle visait
davantage la réalité des territoires terrestres et davantage l'eau douce. Donc,
on vient éviter la confusion pour se concentrer réellement dans ce qui est
attendu par le marin. Le meilleur exemple au Québec, c'est la zone de
l'estuaire du Saint-Laurent. Donc, c'est une partie qu'on pourra mieux protéger
avec moins de confusion au niveau du choix des termes ou de la description attendue
de cette protection-là.
Mme Gamache (Valérie) : Je lis,
dans votre texte de projet de loi, qu'une des activités qui sera dorénavant
interdite dans les réserves marines, c'est une activité réalisée à des fins de
transport d'hydrocarbures. Est-ce que c'est-à-dire que ce projet-là va nuire,
peut-être, au projet de GNL Québec, au projet de gazoduc, parce
qu'éventuellement ces bateaux-là ne pourront pas passer dans ces réserves
marines?
M. Charette : En fait, un
territoire qui est visé par ce degré de protection là aura des contraintes,
effectivement, supplémentaires. Mais, comme je vous dis, la réserve marine,
versus l'appellation qui prévaut actuellement, engendrait trop de confusion, et
c'est ce qu'on veut préciser à travers le projet de loi et la distinction plus
claire dorénavant. Mais, oui, effectivement, un territoire protégé du côté
marin va imposer des contraintes supplémentaires à différents types d'utilisation
qu'on pourrait en faire.
Mme Gamache (Valérie) :
Notamment le transport, donc, de gaz naturel?
M. Charette : C'est-à-dire,
moi, je ne fais pas de lien avec GNL parce que ça dépend toujours du territoire
qui sera visé. Mais un territoire visé va imposer des contraintes
supplémentaires par rapport aux utilisations qu'on pourrait en faire.
Mme Gamache (Valérie) : On
comprend que, pour qu'une réserve ou une aire protégée soit, donc, déclarée,
c'est 12 mois, le processus, en tout et partout. Mais vous pouvez, à tout
moment, revenir et dire : Bien non, finalement, le ministre se garde ce
pouvoir-là?
M. Charette : En fait, si on
regarde les conditions actuelles, dans bien des cas, c'était beaucoup, beaucoup
plus que 12 mois. Je le disais tout à l'heure, le printemps dernier, j'ai
confirmé un statut permanent à une démarche qui était initiée depuis, certains
cas, 2004, 2005. Donc, ça peut être une procédure très longue. C'est ce qu'on
veut raccourcir, et le plus tôt possible. Quand un territoire fait consensus,
quand il y a eu une consultation, lorsqu'il y a eu une mobilisation de la
population, ce n'est pas pertinent d'attendre de nombreuses années pour pouvoir
bénéficier des bienfaits, là, de cette protection-là.
Le Modérateur
: M.
Croteau.
M. Croteau (Martin) :
Bonjour, M. le ministre. Pardonnez-moi si j'arrive en retard, là. Peut-être que
la question vous a déjà été posée, là, mais est-ce que vous pouvez confirmer
que cette annonce met fin une fois pour toutes aux projets pétroliers et
gaziers sur l'île d'Anticosti?
M. Charette : En fait, c'est
exactement ce que j'essayais de dire quand le chariot est passé. Donc, j'ai
déjà donné la réponse. Dans les faits, comme je viens tout juste de mentionner,
à partir du moment qu'il y a un degré de protection, peu importe lequel, en
fonction des catégories actuelles, en fonction de ce que l'on prévoit à travers
le projet de loi, c'est le type d'utilisation de ce territoire-là qui va être
impacté, c'est bien certain. Donc, si on parle de réserve marine, si on parle
de la protection en fonction de l'utilisation durable du territoire, ça limite
les usages. On ne pourra pas parler, sur ces territoires-là, d'usage industriel
intensif, que ce soit en foresterie ou dans tout autre type d'industrie.
M. Croteau (Martin) : Mais je
donne l'exemple, par exemple, d'un puits de pétrole de schiste ou de gaz de
schiste, ce n'est pas particulièrement invasif à la surface. Donc, est-ce que
cet usage que vous créez pourrait permettre ce type d'exploitation?
M. Charette : Le projet de loi
n'est pas conçu pour permettre ou faciliter ce type d'usage là. Nous, si on
dépose un projet de loi, c'est réellement pour assurer la protection de la
biodiversité sur un territoire donné. On veut permettre certaines utilisations.
Je pense, par exemple, à la chasse. C'est une utilisation du territoire qui, si
elle est bien faite, peut se faire de façon tout à fait durable. Mais
actuellement, avec certaines de nos catégories actuelles, même la chasse est
interdite. Mais ce n'est pas fait pour faciliter la tâche à quelque exploitation
industrielle, qu'elle soit forestière, ou pétrolière, ou minière. Ce n'est pas
du tout l'esprit du projet de loi.
M. Croteau (Martin) : Mais,
en tout respect, je pense que vous n'avez pas répondu à ma première question,
là, puis je vais essayer de vous y amener tranquillement. Je comprends un peu
où vous vouliez m'amener, mais, donc, la conclusion de ça, doit-on donc
conclure qu'il n'y aura plus jamais de projets pétroliers ou gaziers sur l'île
d'Anticosti?
M. Charette : Ah! bien, ça, on
l'a déjà mentionné. Dans le cas de l'île d'Anticosti, effectivement, pour le
gouvernement, c'est bien clair. Et, avec le projet de loi, c'est effectivement
l'entièreté de l'île qui pourrait être protégée. Pourquoi on arrive avec ce
degré de protection et de certitude en fonction des standards internationaux? C'est
qu'on vise toujours ultimement la reconnaissance de l'île, dans son entièreté,
par l'UNESCO comme patrimoine mondial, là, au niveau de la nature.
Donc, oui, pour répondre plus directement
à votre question, aucune exploitation de quelque nature, que ce soit au niveau
gazier, pétrolier ou quoi que ce soit, sur l'île d'Anticosti. Pour nous, c'est
une question qui est réglée, là, depuis un bon moment, mais question qui a
coûté très, très cher à régler aux Québécois, Québécoises, par contre. Avec le
Parti québécois, le Parti libéral, ce sont plusieurs dizaines de millions qui
ont été perdus dans cette aventure-là. Pour nous, la croix, elle est
définitive. Il n'y a aucune, aucune intention à ce niveau-là.
M. Croteau (Martin) : Si vous
me permettez juste... Parce que vous définissez finalement une nouvelle forme
d'aire protégée qui est un peu un hybride entre l'aire protégée à 100 % ou
l'aire pas protégée, finalement. Qu'est-ce qui va être permis de faire dans ces
îles-là... dans ces aires, pardon? Vous avez donné l'exemple de coupes
forestières, de chasse. Qu'est-ce qui pourra être fait comme activités dans ça?
M. Charette : En fait, en
tout respect, il y a une très, très grande différence entre une aire ou un
territoire qui n'est pas protégé versus la protection que l'on va assurer. Les
catégories qui prévalent actuellement sont toujours maintenues. Les aires
protégées, actuellement, qui sont protégées de façon stricte ne perdront pas de
statut. Donc, la protection stricte qui prévaut actuellement, elle sera maintenue
avec le projet de loi.
Ce que ça permet, par contre... parce
qu'effectivement la chasse sur certains territoires, la simple chasse ou la
simple foresterie avec utilisation durable, donc on ne parle pas d'une
foresterie intensive, empêchait de couvrir des territoires importants qui
méritent d'être protégés. Puis, avec cette nouvelle catégorisation, avec ce
nouveau statut d'utilisation durable, ça va aussi permettre d'avoir un concept
d'utilisation durable.
Donc, on ne pourra pas couper un arbre de
n'importe quelle façon. Il faudra que ça se fasse dans un concept d'utilisation
durable. Donc, ça change tout. Et encore une fois, c'est peut-être là où vous
n'y étiez pas tout à l'heure, on se fie sur les plus hauts standards
internationaux. D'aucune façon on ne diminue les standards exigés. Au
contraire, on aura encore les standards les plus élevés au niveau
international, mais ça permet de couvrir plus large.
Et on parlait du Sud tout à l'heure. Avec
un concept comme ça, quand on veut faciliter l'établissement de corridors de
biodiversité, ça ouvre des portes et des partenariats formidables. Juste ici,
on a différentes organisations qui travaillent et qui sont reconnues par leur
expertise pour développer ces partenariats-là, et on veut justement collaborer
plus facilement avec eux pour que et notre biodiversité soit mieux conservée et
que le territoire soit davantage protégé.
M. Croteau (Martin) : Quels
sont les usages qui seront permis? Quelles sont les activités économiques, là,
à part la foresterie et la chasse, qui seront autorisées dans ces aires
protégées?
M. Charette : Je pense, honnêtement,
c'est les meilleurs exemples. Et on en exclut beaucoup, d'exemples, par contre.
On exclut tout ce qui est intensif, tout ce qui est industriel, tout ce qui est
de nature proprement commerciale. Donc, on exclut passablement et on ajoute des
possibilités.
M. Croteau (Martin) :
Parfait.
Le Modérateur
: Merci à
tout le monde. On va maintenant passer à la période d'entrevues individuelles
si c'est souhaité. Merci.
M. Charette : Merci, tout le
monde.
(Fin à 13 h 1)