(Douze heures une minute)
M. Ouellet : Donc, bonjour.
Bonjour, tout le monde. Aujourd'hui, je suis accompagné de mon collègue Sylvain
Gaudreault, porte-parole du Parti québécois en matière d'environnement et aussi
député de Jonquière. On est ici pour réagir à la décision du Parlement suite à
une demande que j'avais faite pour outrage au Parlement dans le cas du dossier
qui nous occupe, c'est-à-dire Hydro-Québec.
Nous avons eu la décision ce matin, et le
président du Parlement, M. Paradis, blâme sérieusement Hydro-Québec. Et je
prends le temps un peu de reprendre ses paroles. Il nous a affirmé aujourd'hui
qu'il comprend très bien le sentiment d'indignation des parlementaires, qui ont
perçu un manque de considération et une dévalorisation du travail en regardant
le travail qui est accompli en commission parlementaire. Il a ajouté aussi
qu'il trouve tout à fait... il a rajouté aussi qu'il était tout à fait
inapproprié de dire que le projet de loi n° 34 fixe
quelque tarif que ce soit, et qu'Hydro-Québec démontre une méconnaissance
flagrante du rôle du Parlement. Et il conclut avec un sérieux avertissement à
Hydro-Québec. Il enjoint surtout la société d'État d'agir avec respect à
l'égard du Parlement et de ses membres et ne jamais sous-estimer le rôle
essentiel que nous jouons auprès de nos citoyens comme élus.
Donc, ce que le président est venu nous
dire... c'est-à-dire qu'Hydro-Québec a utilisé des propos malhabiles... mais
surtout, a exprimé une véritable, je vous dirais, méconnaissance d'Hydro-Québec
dans notre processus parlementaire. Donc, évidemment, on est satisfaits de la
décision du président, à savoir qu'il blâme sérieusement Hydro-Québec. Elle
devra se diriger, elle devra agir de façon à s'assurer que la démocratie, le
fait que des élus québécois siègent ici, à l'Assemblée nationale pour débattre
des lois, d'amender des lois, proposer des lois et, après ça, les sanctionner,
bien, c'est un travail que l'on fait avec respect. Et par souci de respect de
la démocratie, je pense qu'il est essentiel que le président remette à sa place
Hydro-Québec.
Mais ce message aussi s'adressait à toutes
les sociétés d'État. Il faut bien comprendre le système parlementaire et, dans
ce cas-là, nous sommes assurément satisfaits des motifs sérieux... et les
blâmes qui ont été donnés du côté d'Hydro-Québec. Alors, je vais laisser la
parole à mon collègue Sylvain Gaudreault.
M. Gaudreault : Oui. Alors, bonjour.
Deux éléments. D'abord, sur Hydro-Québec. Hydro-Québec a un genre de réflexe de
culture organisationnelle à être un État dans l'État. Je sais que certains
d'entre vous vont se souvenir, 2010, l'ordre de l'Assemblée nationale qu'on
avait été obligés d'adopter pour qu'Hydro-Québec nous donne accès à ses
contrats. Vous vous souvenez de la résistance d'Hydro-Québec, et, déjà là, on
sentait qu'Hydro-Québec avait cette espèce de regard condescendant sur les
petits parlementaires. Bien, on les avait remis à l'ordre. Mais là, la nature
revient au galop chez Hydro-Québec et, encore une fois, il faut faire une mise
au point importante avec Hydro-Québec, puis le président, à la toute fin de son
jugement, dit, de sa décision, bon : «...lorsqu'on représente une société
d'État d'une telle importance, cela vient avec des responsabilités.» Hein?
C'est le principe de Spider-Man, là, vous vous souvenez, vous savez, quand il
découvre son pouvoir : À grandes responsabilités... À grands pouvoirs,
grandes responsabilités. C'est son parrain qui lui dit ça. Alors, c'est la même
chose avec Hydro-Québec. «L'une de ces responsabilités est d'agir avec respect
à l'égard du Parlement et de ses membres et de ne jamais sous-estimer le rôle
essentiel qui leur est confié par les citoyens...» Alors, après l'ordre de l'Assemblée
nationale en 2010 pour obtenir les contrats, Hydro-Québec, encore une fois,
fait un manque de respect à l'égard des parlementaires.
Le deuxième élément, bien c'est à l'égard
du gouvernement. C'est un élément de plus qui s'ajoute dans une série, dans un
festival d'erreurs concernant le projet de loi n° 34, une unanimité contre
son désir de modifier unilatéralement — le gouvernement — son
désir de modifier unilatéralement la Régie de l'énergie. Alors, la seule chose
qu'il reste à faire au ministre de l'Énergie, c'est de remplir sa promesse puis
de rembourser les trop-perçus aux citoyens, puis tout ce qui est la modification
en profondeur de la régie, de repousser ça dans les calendes grecques.
Mme Plante (Caroline) : M. Ouellet,
est-ce que le président Paradis est en train de perdre le contrôle de la
Chambre?Avec ce qu'on a vu aujourd'hui, là...
M. Ouellet : Non, non, je ne
pense pas que M. Paradis va perdre le contrôle. Je pense qu'aujourd'hui,
les esprits étaient vifs et les gens... Il y avait des... Il y a eu des
échanges costauds, mais je vous dirais que la lumière aujourd'hui devrait être
mise du côté du gouvernement.
L'attitude du leader parlementaire, après
avoir connu une semaine désastreuse pour lui, on aurait pensé qu'il aurait fait
preuve d'humilité un peu plus longtemps. Le trémolo qu'il avait dans la voix en
s'excusant à tous les Québécois d'avoir déposé une réforme insensée, on pensait
que ça aurait duré. Mais aujourd'hui, là, le leader parlementaire se lève,
réplique aux arguments des oppositions et c'est lui qui contribue à ce climat
acrimonieux, présentement, qui existe. M. le Président doit arbitrer des
échanges. Ces... échanges-là, pardon, ils sont vigoureux, mais, évidemment,
pour nous, tout le travail qu'il a fait... Le président doit s'assurer d'un
arbitrage juste, et, aujourd'hui, je pense que la ligne était juste, oui.
Mme Plante (Caroline) : Mais
il a eu de la difficulté, quand même, à imposer son autorité aujourd'hui, en
période des questions.
M. Ouellet : Bien,
imposer son autorité... Je vous dirais que, par le jeu du leader parlementaire
et des répliques qui sont tout à fait non essentielles dans le débat, les
partis d'opposition soulèvent des points, et on dirait que
M. Jolin-Barrette veut toujours avoir le dernier mot avec des effets de
toge. C'est ça qui rend le ton acrimonieux. Il veut toujours avoir le dernier
mot, et malheureusement ça met le président dans une drôle de position, qu'il
doit toujours le faire rasseoir.
Alors, si M. Jolin-Barrette aurait
une chose à travailler pour améliorer le climat et la collaboration qu'il
demande des oppositions, c'est d'abord, un, changer de ton, et deux, s'assurer
qu'il n'ait pas toujours le dernier mot. Parce que M. Jolin-Barrette n'a
pas la vérité, et on l'a connu très bien la semaine passée.
Mme Plante (Caroline) :
Sur le terme antiparlementaire de «bloquer les travaux», on a vu M. Tanguay
se lever, M. Nadeau-Dubois se lever également. Vous, vous ne l'avez pas
fait. Pourquoi?
M. Ouellet : Oui. Bien, écoutez,
là, le temps, aux oppositions, il est compté, et, quand on voit le chrono
descendre, c'est des minutes qu'on n'a pas pour poser des questions. Et le leader
de l'opposition officielle en a fait mention tout à l'heure, on a juste eu sept
questions, quand habituellement on se rend jusqu'à neuf et parfois jusqu'à 10.
Donc, une fois que mes collègues de l'opposition officielle et de la deuxième opposition
ont un propos juste pour lequel je suis d'accord, d'en rajouter fait perdre des
secondes, un temps précieux à l'opposition. Donc, ce n'était pas nécessaire
pour moi, à ce moment-là.
Mais je tiens à dire que le président a quand
même l'opportunité d'arbitrer les débats, et, lorsqu'un propos est non parlementaire,
je m'aurais attendu — parce que M. Jolin-Barrette connaît le règlement — je
m'aurais attendu qu'il se lève beaucoup plus tôt pour dire : Écoutez, M.
le Président, c'est effectivement dans le guide, alors je me retire et je
retire les propos.
Mme Plante (Caroline) : Justement,
sur le nombre de questions qui sont posées lors de la période des questions, est-ce
que ça va toujours en diminuant? Qu'est-ce que vous pensez de ça?
M. Ouellet : Bien, évidemment,
on se pose des questions pour la suite parce que nous, écoute, on les trouve
importantes, les questions qu'on a à poser et on veut en avoir le plus
possible. Donc là, je n'ai pas fait un calcul, on le fait toujours en fin de
bilan pour savoir combien de questions on a eues puis combien on a perdu. Mais
nous, on essaie d'avoir la dixième question, mais quand il y a du rififi ou du
brouhaha, évidemment, on ne l'a pas. Mais là, aujourd'hui, quand même
particulier, on ne s'est pas rendus à huit ni à neuf, ce qui est effectivement,
je vous dirais, un grand manque à gagner pour tous les partis d'opposition
confondus. Des fois c'est nous...
Une voix
: Pour les
citoyens.
M. Ouellet : Pour les
citoyens. Puis des fois c'est nous qui n'a pas la question. Aujourd'hui, c'est
l'opposition officielle qui ne les a pas eues. Donc, tout le monde est perdant
aujourd'hui.
Mme Plante (Caroline) :
Comment est-ce que vous qualifiez le climat en Chambre?
M. Ouellet : Bien,
j'espère qu'il va descendre, le climat. Il nous reste trois semaines, dont deux
semaines de session intensive. Nous sommes très conscients que le gouvernement
veut adopter certains projets de loi à la vapeur. La motion d'aujourd'hui sur
Desjardins est un exemple flagrant du manque de collaboration qu'ils nous
offrent et de l'intention qu'ils ont de régler plusieurs choses avant les
fêtes.
Donc, si on veut s'assurer de se rendre
tout le monde avec un sourire et s'assurer que le Parlement fonctionne adéquatement,
la seule personne qui a le pouvoir là-dedans, c'est le leader du gouvernement.
Le fait que la collaboration doit s'installer, le fait que le climat doit
effectivement être serein, la seule personne qui doit faire ça, c'est le leader
du gouvernement, baisser la tension, accepter des fois par humilité de ne pas
avoir tout le temps raison, ne pas se lever à chaque fois pour avoir le dernier
mot et, surtout, entendre les propositions des oppositions officielles.
Mme Plante (Caroline) :
Donc, c'est lui le problème.
M. Ouellet : Bien, c'est
lui, le grand chef d'orchestre des travaux au salon bleu. C'est lui qui donne
le tempo. C'est lui qui donne la marche à suivre. C'est lui qui donne
l'intensité. Et souvenez-vous, hein, dans les médias est apparu le fait que
certains collègues caquistes étaient fatigués. Le rythme, là, ce n'est pas les oppositions
qui le coordonnent, c'est le gouvernement.
Donc, si les gens sont à brûle-pourpoint,
s'ils sont fatigués, ils ont une seule personne à regarder, c'est
M. Jolin-Barrette. Et il y a une seule personne qui peut, effectivement,
s'assurer que ce... climat-là, pardon, soit plus sain, que le rythme soit moins
effréné et qu'on ait du temps de débattre, c'est M. Jolin-Barrette. Donc,
c'est la seule personne.
Mme Plante (Caroline) : Est-ce
qu'il est en train de l'échapper, M. Jolin-Barrette?
M. Ouellet : Bien, je
m'aurais attendu... Comme je disais tout à l'heure, après l'exercice
d'humilité, le trémolo dans la voix, un acte de contrition devant la population
en disant : Je me suis trompé, c'est de ma faute, je m'aurais attendu au
moins que ça fasse toute la semaine. Mais, dès hier, encore, encore, on se lève
en Chambre, on essaie de prendre les oppositions en porte-à-faux, on fait des
effets de toge. Ce n'est pas nécessaire. Et ce que ça fait, je vous dis bien honnêtement,
c'est que ça augmente la frustration des oppositions. Et, au final, on fait
juste d'augmenter le nombre de décibels. Alors, ce genre de comportement là est
à proscrire. Mais celui qui met le feu présentement, c'est le leader du gouvernement.
Mme Richer (Jocelyne) :
...sur un autre sujet, là, pour M. Gaudreault. C'est au sujet de la COP25.
Vous irez à Madrid, mais on veut savoir dans quelle mesure c'était pour vous
évident qu'il fallait y aller ou si vous aviez un dilemme, étant donné que
l'Espagne... son comportement envers les leaders souverainistes, qui était
difficile pour vous, je pense, à accepter. Comment s'est passée la réflexion à
ce sujet-là?
M. Gaudreault : Tout à
fait, on aura l'occasion de vous en reparler. Mais le dilemme a été intense et
le dilemme est encore intense. Nous avons fait le choix d'y aller. Et j'ai eu
une conversation avec des représentants de la communauté catalane au Québec
avant de prendre la décision d'y aller, et de le communiquer, et d'en parler
avec mes collègues également au caucus. Et je vais profiter de cette occasion
pour porter fièrement, à la COP25, le ruban jaune de solidarité avec le peuple
catalan. Et je prévois également sur... profiter de l'occasion pour, sur mes
propres frais, aller, après Madrid, faire un tour à Barcelone pour rencontrer
des leaders indépendantistes catalans.
Alors, j'ai choisi... nous avons choisi ensemble
de ne pas appliquer la politique de la chaise vide, mais plutôt de profiter de
cette tribune d'une rencontre internationale sous la gouverne de l'ONU dans un
pays qui bafoue des droits de leaders politiques indépendantistes, de justement
manifester notre solidarité à l'égard du peuple catalan.
Mme Richer (Jocelyne) :
Vous ne craignez pas, de ce fait, que ça puisse être interprété comme une forme
de complicité envers un gouvernement qui est autoritaire envers les leaders
souverainistes?
M. Gaudreault : Non,
parce qu'on va... C'est une conférence de l'ONU. Maintenant, on va... on s'est
posé la question que vous nous posez, qui est tout à fait pertinente, et nous
allons profiter de cette tribune pour faire valoir la solidarité envers le
peuple catalan et, vous savez, profiter également d'un autre enjeu, qui est celui
du fait que la lutte contre les... Mais, en fait, les changements climatiques
et la crise climatique accentuent les inégalités sociales, les inégalités
politiques, le risque d'atteinte aux droits et libertés, et on l'a vu, par
exemple, au Chili. On le voit dans d'autres pays d'Amérique latine. On l'a vu
en France avec les gilets jaunes. C'est très tendu. Alors, il faut justement
profiter de ces tribunes-là pour faire valoir un discours qui est différent et
surtout profiter de cette tribune pour amener à l'intérieur de la COP25, là, de
l'endroit où se déroulent les discussions — parce qu'il faut
reconnaître ça, là, c'est assez particulier — le ruban jaune en
solidarité avec le peuple catalan, ce qui va permettre d'avoir une visibilité
et de ne jamais oublier ces prisonniers catalans.
Le Modérateur
: Merci.
M. Gaudreault : Merci.
(Fin à 12 h 13)