(Neuf heures quarante-neuf minutes)
M. Zanetti : Alors, bonjour.
Je voulais aujourd'hui, à l'occasion de l'étude des crédits puis du fait que
j'aurai du temps pour poser des questions au ministre Carmant, parler de la question
de la santé mentale parce que de nos jours au Québec, là, la santé mentale,
c'est un luxe, c'est un luxe que tout le monde ne peut pas se payer. Et
pourquoi? Bien, parce que notre système public n'offre pas assez de services, il
n'y a pas assez de ressources, il n'y a pas assez de psychologues dans le
public. Les délais d'attente peuvent aller de six mois à un an pour des gens
qui ont des problèmes, et on sait que beaucoup de gens qui consultent
attendent, au moment de consulter, d'avoir des problèmes qui sont presque à
l'état de crise. Alors, c'est quelque chose qui est impraticable.
Évidemment, quand on a de l'argent, des
bonnes assurances, on peut aller chez le psychologue à 100 $ la séance et
plus, mais c'est quelque chose que tout le monde ne peut pas se payer, et il y
a là une injustice importante.
On estime à peu près à 200 000 personnes
au Québec, là, 200 000 personnes de plus de 15 ans les gens qui
ont besoin de services et qui n'en ont pas dans le système public. Il y a 450 psychologues
qui ont quitté le réseau public depuis 2008, entre autres à cause des
conditions qui ne sont pas compétitives avec le milieu privé. Alors, il y a un
problème très important à régler. On sait que le ministre Carmant a maintenant
l'entière responsabilité des dossiers en santé mentale, donc je vais pouvoir
lui poser des questions là-dessus.
Et l'autre sujet aussi qui va retenir mon
attention aujourd'hui dans l'étude des crédits, c'est pour les relations
canadiennes. À 15 h 30, j'aurai l'occasion de discuter avec la
ministre LeBel et d'essayer un peu de voir où en sont les promesses
nationalistes de la CAQ. La CAQ s'est fait élire avec un plan en 2015, en 2018,
avec des promesses très audacieuses, en disant : On ne fera pas de pays,
là, on va rester une province et on va donner au Québec plus
d'autonomie et plus de pouvoirs. Il n'y a rien qui
a été fait à ce sujet-là. Ça n'a pas avancé. Ces promesses-là sont devenues
lettres mortes. Puis, moi, je veux faire un petit récapitulatif de qu'est-ce
qu'il se passe de ce côté-là pour qu'on voie un peu, là, mais où et comment
s'est dégonflé ce nationalisme-là de la CAQ.
Dans le temps, les fédéralistes
nationalistes, dans le temps de Meech, ils s'essayaient, hein? Ils essayaient
d'aller chercher des nouvelles affaires. Mais aujourd'hui, les nationalistes de
la CAQ, ils ne s'essaient même pas. Ils sont absents. Ils savent que ça ne
donne rien, ça fait qu'ils font des promesses, puis, après ça, ils les font
oublier. Alors, c'est un peu ça.
Puis je vais laisser la parole à ma collègue
pour continuer sur un sujet similaire, je pense, hein?
Mme Ghazal : Oui, exactement.
En fait, moi, ce que je vais faire aujourd'hui, je vais en profiter pendant
l'étude des crédits pour amener deux exemples de ce nationalisme-là. Si le gouvernement
était sérieux, bien, il aurait ces engagements-là.
Le premier, c'est au ministre Simon
Jolin-Barrette, donc, sur la protection de la langue française. Il y a un geste
très, très simple qu'il aurait pu faire et qui n'a pas été fait depuis par le gouvernement
de la CAQ, depuis deux ans. Bien, c'est tout simplement d'appliquer
l'article 1 de la loi n° 104, qui stipule que le gouvernement ne communiquerait
qu'en français, serait obligé de ne communiquer qu'en français avec les
personnes morales et les corporations établies au Québec. Donc, ce n'est toujours
pas fait. C'est un projet de loi qui a été adopté en 2002, et tous les partis
qui sont à l'Assemblée nationale sont pour ça. Donc, je vais poser la question
au ministre : Quand est-ce que vous allez le faire, après deux ans que
vous êtes au gouvernement?
L'autre sujet, je vais poser cette
question-là ce matin, tout de suite, aujourd'hui, au ministre de l'Énergie et
des Ressources naturelles, donc, Jonathan Julien, sur les subventions qu'on
donne aux industries extractives, c'est-à-dire les minières, les pétrolières et
les gazières. Moi, j'ai fait une demande d'accès à l'information sur des données
qui m'ont été rapportées par Revenu Québec, et c'est vraiment... les chiffres
qui sont là-dedans sont effarants. On donne des milliards de dollars. Je vous
invite à suivre l'étude des crédits où je vais présenter les données que j'ai.
Et je vais demander, en fait, au ministre s'il a l'intention de continuer à
subventionner ces compagnies-là. La grande majorité ont des sièges sociaux à
l'extérieur du Québec, beaucoup n'ont même pas d'employés au Québec et aucune
opération au Québec, et on leur donne, comme cadeaux fiscaux, tout cet
argent-là des contribuables, alors qu'on devrait...
Donc, au début, dans l'ancien temps, pour
parler de nationalisme, on disait : Maîtres chez nous. C'est ce
qu'on disait à la Révolution tranquille. Aujourd'hui, en 2020, sommes-nous
encore maîtres chez nous quand on donne l'argent des contribuables à des
compagnies étrangères pour qu'elles viennent extraire nos ressources naturelles,
avec tous les dégâts environnementaux qu'on connaît?
Donc, le ministre de l'Énergie et des
Ressources naturelles ce matin. Simon Jolin-Barrette, ça va être cet après-midi.
Merci.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. Est-ce qu'il y a des questions?
M. Bergeron (Patrice) : Oui.
Mme Ghazal, vous évoquez, donc, un chiffre qui va dans les milliards de
dollars. Là, on parle de crédits d'impôt, subventions directes…
Mme Ghazal : En fait, c'est
ça, crédits d'impôt aux corporations, déductions d'impôt pour les particuliers
qui achètent ce qu'on appelle des actions accréditives. Donc, ce sont des
riches actionnaires, beaucoup ont des 200 000 $ de revenus et plus.
Et moi, le montant que je fais, c'est sur une longue période de temps, c'est
sur les 20 dernières années. Ça va être des choses que je vous inviterais
à suivre. Je ne vais pas le révéler tout de suite, je vous invite à suivre
pendant la commission.
M. Bergeron (Patrice) : Vingt
ans, mais, dans la dernière année, ça représente combien, d'abord?
Mme Ghazal : Moi, les chiffres
que j'ai obtenus, je les ai eus de 2001 à 2018, je n'ai pas eu encore la
dernière année. Ça va être une question que je vais demander aussi au ministre,
s'il est au courant, premièrement, et si c'est possible d'avoir aussi cette
donnée-là.
M. Bergeron (Patrice) : Qu'est-ce
que vous recommanderiez, à ce moment-là, sur le plan du régime fiscal?
C'est-à-dire qu'on en donne moins ou qu'on n'en donne plus du tout?
Mme Ghazal : Bien, c'est parce
que le problème, c'est que les montants sont tellement effarants, sont
tellement importants. Qu'est-ce ça donne, au bout de la ligne? Souvent, quand
le gouvernement investit beaucoup d'argent dans des entreprises pour les attirer — puis
au Québec, on est parmi, si on veut, les gouvernements qui veulent le plus
attirer ces compagnies-là, je comprends qu'on les attire parce qu'on leur donne
des cadeaux — donc souvent, c'est parce que ça va créer de l'emploi,
ça va avoir des retombées économiques, etc. Qu'est-ce que ça donne comme
retombées économiques quand on donne à des compagnies
étrangères — moi, je l'ai ici — inopérantes au Québec?
Beaucoup n'ont aucune opération, pas d'employé, pas de siège social. Qu'est-ce
que ça donne, tout cet argent-là? Ça va être les questions que je vais poser.
Mme Gamache (Valérie) : M. Zanetti,
peut-être une question en prévision de la présentation, à 11 heures, du
plan pour la deuxième vague, le plan du gouvernement, donc : Est-ce que
vous avez des attentes particulières face à ce plan-là? Est-ce que vous croyez
que le gouvernement est prêt, cette fois-ci?
M. Zanetti : Bien, c'est ce
qu'on va voir, là. Nous, un plan pour la deuxième vague, on demandait ça depuis
longtemps. On a été parmi les premiers à le demander et on va évidemment
commenter, là, ce qui va être déposé. Par contre, on a certaines attentes, il y
a des choses qui sont des conditions plancher qui doivent être remplies, là, il
faut qu'il y ait un plan crédible pour éviter le mouvement de personnel d'un
CHSLD ou d'un établissement à l'autre. Il faut qu'il y ait un plan aussi pour
ne pas manquer de personnel. On sait qu'il y a des choses qui ont été mises en
branle, mais on veut voir les détails et comment ça va être attribué, et on
veut aussi qu'il y ait un plan pour éviter ce qui a été fait jusqu'ici, là,
jusqu'au jour d'aujourd'hui, les déplacements de pénurie. Augmenter les
conditions de travail d'une catégorie d'employés mais ne pas l'augmenter pour
tout le monde dans tous les établissements et dans tous les secteurs, qu'est-ce
que ça fait? Ça déplace la main-d'oeuvre, ça déplace la pénurie. Puis, en ce moment,
là, les gens du secteur du service à domicile, ils sont en train de vivre une
crise énorme, et c'est directement lié à l'incompétence de ce gouvernement-là à
prévoir les conséquences économiques de ses actions. Alors, nous, il faut un
plan pour ça, là, c'est le gros, gros minimum.
Mme Gamache (Valérie) : Est-ce
que vous pensez que l'opération qui a été faite, là, pour amener des préposés
dans le réseau, ça va combler les besoins ou qu'on reste quand même à un seuil
minimum?
M. Zanetti : Bien, c'est ce qu'on
va voir, là. De ce que j'ai compris, ils avaient... ils ont formé le nombre
qu'ils estimaient qu'il manquait. Alors, est-ce que leurs estimations vont être
bonnes? C'est ce qu'on va voir. Nous, cette idée de formation là, on trouve que
c'est une bonne idée. On avait, en début de crise, proposé une formation
similaire d'aide aux préposés aux bénéficiaires étant donné l'urgence. Donc,
ça, c'est une bonne chose.
Maintenant, il faut voir comment est-ce qu'on
va s'assurer que ces gens-là vont avoir aussi des bonnes conditions puis vont
se faire payer, là, parce que ça n'a même pas été évident dans les derniers
mois. Mais comment est-ce qu'on va s'assurer qu'ils ne changent pas
d'établissement et que tout ça se passe de façon sécuritaire? Puis aussi,
comment est-ce qu'on va s'assurer que beaucoup de gens qui sont allés faire
cette formation-là, bien, comment on va s'assurer que les postes qu'ils ont
laissés, parfois, ils vont être comblés?
Mme Gamache (Valérie) : On
disait lors de la dernière vague : On construit l'avion en plein vol, mais
quand on va... Pour la deuxième, il faudra être prêts. Avez-vous
l'impression... Est-ce que vous croyez — M. Legault a fait le
tour du Québec — qu'il a appris?
M. Zanetti : On va pouvoir le
voir aux résultats puis, aussi, on va le voir quand on va regarder son plan, mais,
moi, je ne suis pas, en ce moment, convaincu et rassuré. Juste le fait qu'on
ait déplacé des pénuries de personnel au lieu de les régler véritablement, et
puis qu'on n'ait pas réglé ce problème-là jusqu'ici, là, puis ça fait des
semaines et des mois qu'on en parle, pour moi, ça, c'est comme ou un signe
d'indifférence, ou d'incompétence, ou un manque de vision. Il y a quelque chose
là qui ne marche vraiment pas. Alors, on espère qu'ils ont un plan pour régler
ça très, très rapidement puis que ça va être annoncé aujourd'hui.
La Modératrice
: Et en
terminant en français.
Mme Gamache (Valérie) : On a
parlé beaucoup du fait que les P.D.G. ne sont peut-être pas... ne sont pas
imputables dans cette crise-là. La ministre a perdu son poste, le sous-ministre
aussi, mais pas les P.D.G. des CISSS, des CIUSSS. Est-ce que ça, ça devrait
faire partie du plan, de rendre ces gens-là imputables?
M. Zanetti : Bien, il y a un
problème structurel dans le réseau de la santé, là, il y a eu une immense
centralisation qui a été opérée par les libéraux et qui a causé beaucoup de
problèmes. Mais le premier ministre ne peut pas remettre la responsabilité de
ça sur les gens qui géraient des CHSLD ou qui géraient des établissements dans
le réseau, là. Il doit prendre la responsabilité, là. Les gens… Je ne comprends
pas pourquoi ces gens-là n'étaient pas imputables, là. Ces gens-là, ils sont
imputables et puis ils le seront. Puis, lui aussi, le premier ministre, il est
imputable. Alors, je comprends, là, l'idée, là, de stratégie, là, de faire
diversion, là, puis de mettre la faute sur les autres, mais ça, ça ne marchera
pas puis ça ne sera pas efficace pour la deuxième vague.
La Modératrice
: Merci.
On va passer en anglais.
Mme Senay (Cathy) : Good morning. M.Zanetti. The PQ… a few minutes ago about the importance of the
responsibility of ministers in the first and perhaps a second wave of COVID-19.
How important and how far should go this responsibility for ministers and… for its
actions or non actions? How far it should go?
M. Zanetti :
Well, ministers are responsible for what they do for their responsibilities and
they must… when they fail to do their duty, I mean, they should resign and let
somebody else take the place. That's valid for every minister, including the
Health Minister in Québec.
Mme Senay (Cathy) : What do you think about what happened during the first wave, the
appeals for help, the lack of protective equipment, the lack of clear
instructions, how to wear that protective equipment, the transfers of health
care workers from one place to another, the confusion with cold and hot zones?
What the Legault Government has to do to make sure that Quebeckers trust the
Government for the months to come?
M. Zanetti :
They have to fix the system. Everything happened because we tried to face a
pandemic with a broken health system, a system in which there was not enough
resources, not enough people, people tired, almost in burnout situations, and
there was a lack of resources in almost every way, and this is a thing that
they did not fix in the first part of their — do we say «mandat» or
mandate?
Une voix
:
Mandate.
M. Zanetti : — mandate,
and now they have to fix it because you cannot… even if you have good
directions, if you take good decisions, if the health system is not able to do
what it's asked because it lacks resources, we have a problem and it won't be
solved and it will not be efficient. So, they have to fix what has been broken
in the last fifteen years.
Mme Senay (Cathy) : And is it sufficient to say to the CIUSSS managers… that they have
to be accountable? Is that sufficient for the Premier to say so?
M. Zanetti :
Well, everybody is accountable, and the Premier is accountable, and the
ministers are accountable, and they certainly cannot take
their responsibility and put it on somebody else. I think he's trying to play
like the tough manager right now, but what we need is a Prime Minister that
takes his responsibilities and that fixes the problem, not distribute, like, the
responsibilities.
Une voix
: Merci beaucoup.
M. Zanetti : Thank you very much.
(Fin à 10 h 3)