(Neuf heures vingt minutes)
M. Zanetti : Alors, bonjour, tout
le monde. Aujourd'hui, je veux parler de l'enjeu de la santé mentale.
On sait, au Québec, on vit une crise de la
santé mentale, et ce n'était pas... ce n'est pas juste à cause de la pandémie.
C'est quelque chose qui était là avant. Les études faites par les associations
étudiantes l'ont montré, il y avait un problème qui était là, un problème qui a
été exacerbé, un problème qui est causé, entre autres, par des gouvernements
qui ont fait des politiques d'austérité qui ont grandement affaibli le système
public, et aujourd'hui, on en paie le prix.
Et, malgré les bonnes intentions qui sont
déclarées par la CAQ, là, on arrive à la fin du mandat, et la situation est
loin de s'améliorer, l'argent n'est pas au rendez-vous. Ce n'est pas un gouvernement
qui priorise la santé mentale, ce n'est pas un gouvernement qui priorise les
services publics. Ils sont loin, loin, loin d'avoir réparé le saccage des
gouvernements libéraux précédents avec leur austérité, et on se retrouve avec
un système dans lequel... qui a peine à redémarrer. Pourquoi? Parce qu'ils ne
mettent pas les moyens. En ce moment, ils ont mis 100 millions. Ils disent
qu'ils veulent réduire les listes. Ils n'atteignent pas leurs objectifs. Ils
essaient d'avoir recours au privé, ça ne fonctionne pas.
La solution fondamentale, là, c'est d'avoir
une bonne rétention puis une bonne attractivité dans le système public. Et ça,
ils ne le font pas parce que, pour faire ça, il faut mettre l'argent, et l'argent,
en ce moment, ils préfèrent la mettre dans des projets d'infrastructure complètement
insensés.
On a fait des propositions, à Québec
solidaire, tout au long de l'année pour pouvoir endiguer la crise en santé
mentale puis donner vraiment des services aux gens, et ces solutions-là ont été
boudées.
Nous, on propose de réembaucher
massivement du personnel en santé mentale, des psychologues, bien sûr, des
travailleurs sociaux, des psychoéducateurs, d'autres professionnels, d'autres intervenants.
Pour ça, il faut leur donner des conditions qui sont bonnes. Et, par
conditions, je ne parle pas uniquement des conditions salariales. Il faut
améliorer l'autonomie professionnelle, permettre aux gens de choisir l'approche
qu'ils veulent pratiquer, celle dans laquelle ils ont une spécialisation, celle
qu'ils jugent la plus appropriée à la personne qu'il y a devant eux, parce que
la diversité des approches, c'est important. Les mêmes approches ne sont pas
universellement bonnes pour toutes les personnes.
Il faut aussi qu'on ait... qu'on mette une
fin au nombre de séances limite que quelqu'un... à laquelle quelqu'un a droit
dans le système public. C'est au professionnel de décider quand un traitement
prend fin. C'est comme ça que ça fonctionne dans le système de santé en général.
On ne dit pas à quelqu'un qui fait de la chimiothérapie : Bien, vous avez
le droit à 15 séances et puis, après ça, c'est terminé. On le traite jusqu'à
ce qu'il soit guéri, et c'est comme ça qu'on devrait traiter l'enjeu de la
santé mentale également.
On devrait aussi, pour améliorer le
recrutement dans le système, favoriser le recrutement d'internes en
psychologie. En ce moment, les internes en psychologie, ils ont des conditions
déplorables, qui, à la limite, on dirait qu'elles sont conçues pour les pousser
vers le privé.
Alors, pour les internes, nous, ce qu'on a
proposé, c'est, d'une part, de leur donner des conditions qui ressemblent aux
résidents en médecine, c'est-à-dire un salaire équivalent, et aussi le statut
de salarié, et puis aussi qu'on leur permette d'appliquer sur des stages qui
sont transparents, des stages dans lesquels on leur dit : Voici le genre
de populations auprès desquelles vous allez travailler, voici dans quelle
région vous allez travailler. Est-ce que ça vous intéresse? Oui? Comme ça, on
aurait une meilleure attractivité puis on aurait des gens qui seraient
intéressés à aller pratiquer puis à joindre les rangs du public.
Alors, c'est des choses qui sont simples,
qui demandent de l'argent, et on ne peut pas se permettre de ne pas mettre cet argent-là.
En ce moment, là, on a beau être dans une situation de sortie de crise, où il y
a un déficit important, l'argent qu'on met en santé mentale sauve de l'argent ailleurs.
Les études démontrent que chaque dollar mis dans les soins de santé mentale économise
deux dollars au reste du système de la santé. On a, en ce moment, une
consultation sur trois, dans le réseau, qui concerne la santé mentale et on a
seulement 6 % du budget, environ, de la santé qui est attribué à la santé
mentale. Et c'est quelque chose qui nous coûte cher. On ne peut pas se
permettre d'économiser.
En ce moment, le ministre Carmant, là, son
gros plan, là, c'est de faire de la réorganisation de système. C'est de dire,
avec son programme québécois pour les troubles de la santé mentale, là, de dire
qu'ils vont... en organisant mieux les soins, bien, tout va mieux s'arranger.
Mais c'est essentiellement ce que les libéraux nous disaient. Ils nous disaient :
On coupe l'argent, mais on va mieux réorganiser. C'est la réingénierie de
l'État de Charest. C'est la même idée de dire : On va bouger les choses à
l'intérieur sans mettre plus de ressources, sans mettre plus de gaz, si vous me
permettez l'analogie, mais ces choses-là ne fonctionnent pas.
La Modératrice
: Merci.
On va prendre vos questions.
M. Laforest (Alain) : Est-ce
que le déconfinement va faire en sorte que la pression va baisser un peu, là,
sur les ressources en santé mentale et va aider les gens, peut-être, à retrouver
une certaine forme de normalité, quoique les dégâts sont quand même assez
profonds pour certaines personnes?
M. Zanetti : C'est sûr qu'on
le souhaite. On peut le penser. Il y a des choses en santé mentale qui ont
mieux été pendant la pandémie. Il y a des choses qui ont moins bien été. Il y a
évidemment des études qui ont à être faites par rapport à ça, mais je pense
que, pour certaines personnes, le stress financier a diminué à cause de la PCU,
entre autres, puis ça a amélioré la situation de certaines personnes. La
solitude a exacerbé la détresse d'autres personnes. Alors, il va falloir voir.
Moi, je souhaite que ça fasse ça.
Mais même si on revenait, en quelques
semaines ou quelques mois, à une situation qui était similaire à celle d'avant
la pandémie, il y avait un problème avant la pandémie. Il y avait aussi des
listes d'attente pas possible. Moi, j'ai travaillé comme préposé aux
bénéficiaires, ça fait longtemps, mais la situation s'est juste empirée depuis,
dans un hôpital psychiatrique, puis on voyait le phénomène de la porte
tournante, hein? Les gens qui viennent à l'hôpital, le temps d'une crise, puis
après ça, on les revoit aux six mois, on les revoit aux années parce qu'il n'y
a pas de traitement puis pas de suivi approprié après ça. Et c'est quelque
chose qui, non seulement a un coût humain terrible, ça détruit la vie des gens,
mais en plus, ce n'est pas comme si, de l'autre côté, on économisait en faisant
ça. C'est beaucoup plus cher.
M. Laforest (Alain) : Ma
question, c'est... ce soir, là, même s'il fait presque -1° dehors, les gens
vont pouvoir aller sur les terrasses... En fin de semaine, on va pouvoir avoir
des petits rassemblements et on retrouve un peu ce qu'on avait l'été prochain,
avec la possibilité d'avoir un peu plus.
Ça, est-ce que vous pensez que c'est
quelque chose qui va faire en sorte que ça donne une bouffée d'air suffisante
pour que ceux qui ont vraiment de gros problèmes de santé mentale, bien, la pression
baisse un peu ou le mal est tellement profond que ça ne va pas baisser, là?
M. Zanetti : Je pense que le
mal est tellement profond que ça ne va pas baisser. Par contre, est-ce que ça
va faire du bien au moral? Ça, c'est clair, ça va faire du bien au moral, mais
on est... La situation de la crise en santé mentale, qu'on avait même avant la
pandémie, elle dépasse largement une question de : le moral va-t-il ou ne
va-t-il pas? Il y avait vraiment et il y a encore un manque de ressources
profond dans le système public pour répondre aux besoins.
M. Bergeron (Patrice) : Mais
quand vous parlez, donc, d'un nombre illimité de séances... On en connaît, il y
a des gens, là, qui font des thérapies pendant des années, des années, des
années. Donc, aucun plafonnement, c'est bar ouvert, c'est ça?
M. Zanetti : Ce serait au
clinicien de déterminer la fin de la thérapie. La situation que vous décrivez,
c'est dans un système privé où c'est le patient qui décide quand il arrête puis
quand il termine. Évidemment, les patients peuvent refuser des soins n'importe
quand, puis c'est comme ça qu'il faut que ça se passe dans le public aussi,
mais je pense que ça devrait relever de l'évaluation du clinicien.
M. Laforest (Alain) : Ça
coûte combien, ça? L'avez-vous évalué?
M. Zanetti : Bien, c'est des
choses qu'on va détailler, évidemment, dans une plateforme électorale
ultérieurement, là, des choses qu'on a calculées aussi dans le passé, mais là
je n'ai pas ce chiffre-là de mémoire ce matin.
M. Laforest (Alain) : Mais
est-ce que le 100 millions disponible est suffisant?
M. Zanetti : Ah non! Non,
clairement pas, là. Il faudrait beaucoup plus. Puis même, dans le système de
santé en général, c'est des milliards qu'il faut mettre là-dedans.
M. Lavallée (Hugo) : En ce
qui concerne le déconfinement de façon plus générale, comment vous voyez ça?
Est-ce que vous avez des inquiétudes? Vous pensez que tout va bien aller? Que
les gens vont peut-être être trop pressés d'assouplir les mesures, même celles
qui ne le sont pas encore? Comment vous voyez ça?
M. Zanetti : Bien, moi, j'ai
confiance en la prudence des gens. Évidemment, on les incite à la prudence, là.
C'est sûr que c'est enthousiasmant, cette espèce d'élan de liberté là puis ces
nouvelles permissions là, et puis moi, je suis le premier à être content,
personnellement, que ça arrive. Je pense que, si on en est arrivés là, c'est
aussi parce que les gens ont été, de façon majoritaire, très, très responsables
puis que ça a fonctionné, les mesures sanitaires. Ça n'a pas été une réussite à
cause qu'il y a eu une répression armée incroyable, là. Les gens ont vraiment
respecté ça. Je pense qu'on peut s'attendre aux mêmes comportements.
M. Laforest (Alain) : Donc,
le merci du premier ministre dans les publicités ce matin, c'est une bonne
chose. Vous trouvez que c'est une bonne chose?
M. Zanetti : Bien, moi, je
pense qu'il faut reconnaître que cette pandémie-là, si on commence à en sortir,
c'est parce que les gens ont agi de manière responsable. On aurait eu beau
mettre toutes les mesures qu'on voulait, si les gens ne s'étaient pas sentis
impliqués et responsables, ça n'aurait peut-être pas fonctionné.
M. Lavallée (Hugo) : Est-ce
que ça justifie une publicité dans les journaux de la part du premier ministre
ce matin?
M. Zanetti : Bien, écoutez, je
ne sais pas. Je pense qu'avec les points de presse qu'il fait régulièrement il
peut passer ses messages comme ça. Moi, en tout cas, je n'ai pas vu la
publicité encore, là, mais...
M. Laforest (Alain) :
Concernant l'obligation d'avoir encore une quarantaine, là — c'est
remis en question, entre autres, par le fédéral — lorsque vous
arrivez par avion et non pas par terrestre, est-ce qu'on devrait lever ça
carrément, juste se fier aux 14 jours puis se fier à la bonne volonté des
gens chez eux, là, pour ceux qui arrivent de l'extérieur?
M. Zanetti : C'est une question
importante. Je vous référerais à notre porte-parole en matière de santé
publique, Gabriel Nadeau-Dubois, par rapport à ça, là. C'est des détails assez
précis.
Je vous remercie. Bonne journée.
(Fin à 9 h 30)