(Huit heures une minute)
La Modératrice
:
Bonjour. Bienvenue à ce point de presse du Parti québécois. Ce matin, M. Martin
Ouellet, notre porte-parole en matière d'affaires autochtones. Il sera suivi du
chef du Parti québécois, M. Paul St-Pierre Plamondon. La parole est à vous.
M. Ouellet : Bonjour à tous. Aujourd'hui,
c'est la Journée nationale sur la vérité et la réconciliation, et, vous savez,
on n'est pas des grands fans des décisions du gouvernement canadien, mais celle
de créer une journée fériée était une bonne décision. Et on ne comprend pas,
encore aujourd'hui, comment se fait-il que le gouvernement de la CAQ n'ait pas
voulu que cette journée soit fériée pour l'ensemble des Québécois et Québécoises,
pour qu'on ait ce temps d'arrêt et ce moment de réflexion sur ce qui s'est
passé auprès des Premières Nations et des Inuits.
On a entendu parler beaucoup des enjeux autochtones
cette semaine, et malheureusement c'est par la chicane, par de l'appropriation,
par des débats insolubles à l'Assemblée nationale, et je veux être certain que
ce qui s'est passé cette semaine ne soit pas ce qui va se passer dans les
semaines subséquentes. Il va falloir qu'on continue ensemble d'avoir cette
discussion sur les enjeux et les Premières Nations et les Inuits et de quelle
façon la nation québécoise, et les Premières Nations, et les Inuits, on est
capables de se réconcilier et d'avancer.
Aujourd'hui, c'est la journée pour les
peuples autochtones, et on veut quand même rappeler ce que le Parti québécois a
fait depuis les dernières dizaines, vingtaines d'années. On a créé une première
commission générale qui était organisée en 1983. Il y a eu la reconnaissance
des droits ancestraux des 11 nations en 1985, il y a eu la «Paix des Braves» en
2002, un premier autochtone élu à l'Assemblée nationale en 2007, et une entente
avec les Micmacs sur l'industrie éolienne, et, en 2020, une proposition sur la
sécurisation culturelle.
Aujourd'hui, on veut poser, encore une
fois, une action concrète pour amener à la réconciliation et surtout à la
discussion. On va déposer une motion qui va aller dans ce sens-là :
«Que l'Assemblée nationale reconnaisse la
désuétude de la Loi sur les Indiens;
«Qu'elle constate et déplore le caractère
colonial de cette loi;
«Qu'elle affirme sa préférence pour les
ententes négociées de nation à nation et d'égal à égal.»
Et surtout, et c'est ça, la nouveauté :
«Qu'en conséquence on réponde positivement à la demande des Premières Nations
de tenir un grand rendez-vous automnal sous la forme d'une commission
spéciale.»
Donc, ce qu'on veut faire, c'est de
rassembler, discuter, se réconcilier et avancer. Donc, sur cette commission
spéciale, je vais laisser la parole à mon chef, M. Paul St-Pierre
Plamondon.
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Bonjour, tout le monde. Merci, Martin. Vraiment, cette idée de tenir une commission
spéciale, un grand rendez-vous qui permettrait de se parler franchement et de
faire avancer la question autochtone, les enjeux relativement au racisme et à
la discrimination qui visent les autochtones, je pense que c'est une bonne
idée, une idée qui a été... En fait, là, en toute transparence, c'est une idée
de Ghislain Picard, qui a été publiée en juin dernier, qu'on reprend, parce que
Martin dit a juste titre : On a besoin de changer de ton, et c'est justement
la contribution du Parti québécois. En fait, la seule commission parlementaire
spéciale qui n'a jamais eu lieu sur les questions autochtones, c'est en 1983,
une initiative du Parti québécois.
Donc, pourquoi tenir une commission
spéciale? Bien, parce que la Loi sur les Indiens est toujours là, puis il faut
trouver une solution. C'est pour ça qu'aujourd'hui on présente une motion pour
dire que la Loi sur les Indiens se doit d'être abolie. Nous, on pense que c'est
l'évidence que ça passe par l'indépendance du Québec, mais, au moins, soyons
tous d'accord que cette loi-là est inacceptable.
Mais cette commission-là, également,
permettrait de discuter puis d'avancer sur, clairement, ce qu'on pourrait
qualifier de blocage idéologique en ce moment à l'Assemblée nationale. C'est
saisissant de voir que, sur les enjeux concrets, sur les gestes concrets qu'on
pourrait poser, il n'y a presque pas de temps consacré, il n'y a pas
d'attention parce qu'on s'entredéchire, on polarise le débat sur des questions
comme le racisme systémique, à savoir est-ce qu'il y en a ou est-ce qu'il n'y
en a pas.
Et là-dessus j'aimerais réitérer la
position du Parti québécois, qui pourrait servir de position de compromis, où,
depuis plus d'un an, le Parti québécois dit : Il y a du racisme, et il
peut y avoir du racisme qui dépasse le cadre individuel. Un racisme qui, donc,
a trait à une organisation, bien, appelons ça du racisme institutionnel. Mais
il y a une légitimité à la critique sur le racisme systémique, à savoir que,
quand chaque inégalité est interprétée comme une forme de racisme et qu'on en
vient à la conclusion que la loi 101 est raciste, la Loi sur la laïcité
est raciste, puis là je ne ferai pas toute la liste, là, des dérives, bien, il
y a peut-être un compromis possible.
Et nous, ce qu'on lance... parce qu'on est
demeurés constructifs au cours des derniers jours, on a laissé les autres
partis s'entredéchirer, et polariser, et instrumentaliser, même, je dirais, ce
débat-là, je trouve ça très, très décevant, mais on revient avec quelque chose
de constructif en disant : Pourquoi on n'écoute pas Ghislain Picard puis qu'on
ne fait pas une commission spéciale parlementaire, une commission qui va être
un lieu, justement, où est-ce qu'on va démêler toutes ces histoires de
vocabulaire, mais aussi parler, surtout, je l'espère, de comment on fait bouger
la situation, on améliore la situation? Il me semble que ça devrait être ça
dont on parle en ce moment, et non pas d'une autre manière d'imposer un
vocabulaire ou de polariser, à des fins politiques, un débat qui n'aurait jamais
dû être politisé comme il l'a été.
Le deuxième point, je veux juste rapidement
toucher la question assez étonnante d'un passeport vaccinal à l'Assemblée
nationale. Je vous en parle parce que tous les autres milieux de travail au Québec
ne requièrent pas le passeport vaccinal, parce que le passeport vaccinal, je
vous le rappelle, c'était une mesure pour des activités non essentielles. Là,
on comprend que le Bureau de l'Assemblée nationale imposerait à l'Assemblée
nationale uniquement, pas aux autres milieux travail à travers le Québec, juste
à l'Assemblée nationale, imposerait cette mesure-là. Et on apprend surtout que
l'avis de Santé publique, c'est qu'ils ne recommandent pas cette mesure-là.
Donc, on est... C'est décevant, là, parce qu'on s'apprête à prendre une
décision qui devrait être fondée sur la science, qui devrait être fondée sur la
santé publique, et finalement on la prend sur une base purement politique et on
ne comprend même pas pourquoi. Ça, c'est sans compter les risques juridiques,
parce que, si, évidemment, l'Assemblée nationale se dote d'un système de droit
du travail différent de l'ensemble des autres milieux de travail, bien, il peut
y avoir des questions juridiques.
Mais j'interviens parce que l'Assemblée
nationale, c'est la maison du peuple, c'est la démocratie, c'est le seul
endroit où il faut s'assurer à tout prix que tout le monde a une voix. Et je
suis très sensible aux dérives, à la perte de confiance, à la méfiance de plus
en plus grande dans une partie de la population vis-à-vis de notre gouvernement.
Je ne vois pas pourquoi on ferait ça, quand on sait que ça pourrait exacerber
l'impression qu'il y a des gens qui n'ont pas le droit de parole à l'Assemblée
nationale puis qu'on pose des règles juste pour l'Assemblée nationale.
Dans le contexte, là, de méfiance actuel,
si ce n'est pas soutenu par la science puis si vraiment l'avis de Santé
publique nous dit que ce n'est pas nécessaire, de ne pas faire ça, je demande
au Parti libéral du Québec et à la CAQ de cesser de politiser cet enjeu-là et
de suivre l'avis de Santé publique. Donc, là-dessus, je vais prendre vos questions.
La Modératrice
: Une question,
une sous-question, s'il vous plaît.
Mme Plante (Caroline) :
Souhaiteriez-vous que les Premières Nations soient mieux représentées à l'Assemblée
nationale?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Oui. Oui.
Mme Plante (Caroline) : Est-ce
que ça pourrait créer un meilleur dialogue?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Oui, parce que... Moi, j'en ai beaucoup parlé dans le cadre d'un Québec
indépendant, là, parce que, je me dis, ce serait tellement une belle occasion
de réorganiser notre Parlement puis ça serait l'occasion de briser la Loi sur
les Indiens. Parce que, moi, je n'y crois pas, là, que Justin Trudeau ou
les conservateurs cassent un jour cette loi-là. Ils vont faire beaucoup de
théâtre, mais j'ai l'impression que le cadre juridique colonial ne changera pas.
Donc, je mise beaucoup sur l'indépendance
du Québec, mais, dans l'intervalle, on met au jeu l'idée d'une commission
spéciale qui durera le temps qu'il faut puis où est-ce qu'il va y avoir un
dialogue. Puis on ne sera pas dans le déchirement, puis les coups d'éclat comme
on voit en ce moment. Ce n'est pas acceptable compte tenu de la prise de
conscience que tous les Québécois sont en train de faire puis du sérieux de la
situation. Donnons-nous un cadre constructif puis trouvons des voies de passage
dans ce qui, à mon avis, est une guerre idéologique qui n'a pas sa place compte
tenu de l'obligation qu'on a de livrer des résultats, d'agir.
Mme Plante (Caroline) :
Et la présence des Premières Nations à l'Assemblée nationale, comment on fait
pour les attirer...
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Bien, commençons par une commission parlementaire spéciale et posons-leur la question.
Ayons une discussion sur les différentes avenues de comment bâtir notre Assemblée
nationale pour que, justement, on ait cette pluralité de voix là puis que ça
favorise le dialogue et non pas les déchirements.
M. Lacroix (Louis) :
M. St-Pierre Plamondon, la Loi sur les Indiens, c'est écrit dans la
loi, c'est une loi d'assimilation pour...
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Clairement.
M. Lacroix (Louis) : Et,
à partir de cette loi-là, il y a eu tout un système de pensionnats autochtones
qui ont été ouverts à la grandeur du Canada, il y en a eu ici, au Québec, il y
en a eu beaucoup dans l'Ouest, bon, on a vu tout ce qui s'est passé, et ça,
avec l'assentiment de l'État, avec l'aide de l'État.
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Exact.
M. Lacroix (Louis) : Est-ce
que ce n'est pas un système, ça?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Non, c'est une institution puis c'est un...
M. Lacroix (Louis) :
...pas un système de dire : L'État soutient, finance, encourage, met sur
pied des pensionnats dont le but est d'assimiler des gens qui ont une culture
et des origines différentes? Ça, ce n'est pas un système?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Ce sont des institutions. On est capables de pointer que c'est le gouvernement
du Canada et on est capables, donc, d'identifier quelle institution.
À nouveau, ma position sur cette notion de
système, c'est que, quand on blâme un système, on blâme tout puis rien en même
temps. C'est très flou. Et les dérives de la notion de racisme systémique,
quand on en vient à la conclusion que la loi 101 est raciste, etc., c'est
parce que la notion de système est tellement floue que ça va toujours nous
amener à des conclusions simplistes sans nuances. Mais ça ne nous empêche pas
d'avancer sur la question autochtone...
M. Lacroix (Louis) : ...
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Je veux juste finir. Ça ne nous empêche pas d'avancer sur la question autochtone
parce qu'on peut utiliser un vocabulaire comme «institution», «institutionnel»,
«racisme d'État» puis, là, on cible exactement qui a fait quoi, quand, puis on
va déterminer, donc, quels sont les correctifs à apporter.
Puis c'est pour ça que je vous dis :
Il y a des voies de passage dans cette bataille idéologique. Et ce n'est pas
normal qu'on ne soit pas en train d'avancer concrètement dans des gestes sur le
terrain et qu'on soit pris...
M. Lacroix (Louis) : Pourquoi
un système, dans ce cas-là?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Justement. La question, vous la posez. Ça démontre que la notion est inutile. Parce
que, si vous, vous ne savez pas c'est quoi, un système, puis moi, je ne le sais
pas, on devrait ne pas utiliser...
M. Lacroix (Louis) : ...bien,
visiblement, ma définition, ce n'est pas la même que la vôtre.
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
C'est précisément le problème de cette notion-là. Chacun a sa définition du système,
personne n'est capable de le pointer.
Nous, on vous propose une voie de passage
pour qu'on arrête de se chicaner là-dessus, puis qu'on parle de solutions, puis
qu'on dise que c'est du racisme institutionnel, et donc qu'on sache de quelle institution
il est question, et quelles sont les solutions par rapport à ça.
Mme Gamache (Valérie) : Mais
vous reprochez aux libéraux, aux caquistes de casser du sucre,
d'instrumentaliser, à quelque part, le débat. Est-ce que vous ne faites pas la
même chose en refusant de reconnaître le racisme systémique puis en en ajoutant
dans le débat sémantique ce matin?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Au contraire, on offre une voie de passage devant un blocage qui non seulement
est évident, mais qui est contre-productif, là. Donc, on dit : Bien, si
vous voulez, nous, on a une position qui serait quand même un entre-deux. Est-ce
qu'on peut s'entendre sur quelque chose pour passer à la discussion sur les
gestes concrets?
Et je ne pense pas que vous pouvez dire
que tous ceux qui ne sont pas d'accord avec le racisme systémique comme notion
seraient ceux qui instrumentalisent, là. Il y a un désaccord. Le désaccord, il
est senti sur le plan idéologique.
Nous, ce qu'on répond, c'est : Ça pose
problème parce que, pendant ce temps-là, on n'avance pas. Est-ce qu'on pourrait
ouvrir la voie à des compromis ou, à tout le moins, que tout le monde consente
à notre proposition de commission parlementaire spéciale? Puis là, si on veut
parler de vocabulaire puis de concept, bon, on le fera, mais donnons-nous un
forum différent de ce qu'on voit depuis les derniers jours. Puis nous, ça
s'adonne qu'on a une position qu'on peut juger ou, tu sais, qui pourrait servir
de voie de passage dans le débat actuel.
Mme Gamache (Valérie) : Quand
on parle de commission, là, il y a quand même eu une commission royale d'enquête,
il y a eu Vérité et réconciliation, il y a Viens, il y a l'ENFFADA... Qu'est-ce
qu'elle a de spécial ou de différent, votre commission? Quels enjeux seraient
discutés qui ne l'ont pas été dans les 25 dernières années?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Premièrement, c'est que le dialogue doit être constant, hein? C'est vraiment
des questions qui évoluent notamment au fur et à mesure des découvertes et des
prises de conscience qu'on a. Puis, pour reprendre les termes de Ghislain
Picard en juin dernier, il nous dit : Le Québec et les Premières Nations
ont des choses importantes à se dire. Nous devons aborder des sujets essentiels
au développement harmonieux de nos relations.
Est-ce que, vraiment, cette mission-là,
elle est ponctuelle ou est-ce qu'elle n'est pas essentielle en tout temps?
Est-ce qu'on ne devrait pas réfléchir à des institutions qui nous permettent
constamment ce dialogue-là pour favoriser des relations entre nations qui sont
justement harmonieuses et qui avancent dans la bonne direction?
Moi, je pense qu'en instaurant une
commission spéciale on aurait probablement là le point de départ de nouveaux
mécanismes de dialogue beaucoup plus constants, parce que ce n'est pas normal
que la dernière fois qu'on s'est parlé dans ce cadre-là, c'est 1983, à
l'initiative du Parti québécois, là. Il y a peut-être un message à... un
constat à faire, à savoir qu'on devrait se doter de quelque chose de plus
récurrent.
Mme Lévesque (Fanny) :
...M. Paul St-Pierre Plamondon, là, que le rapport... en fait, le comité
de suivi sur la commission Viens qualifie les avancées de très timides depuis
deux ans, que finalement tous les éléments qui sont structurants et qui
impliquent des changements plus systémiques sont laissés de côté. Donc, premièrement,
quelles sont vos réactions par rapport à ce constat-là qui est fait par ce
comité indépendant? Le fait, entre autres, que le ministère de la Sécurité
publique, le ministère de la Santé n'ont pas participé, n'ont pas fourni de
demande d'accès, ça, je voudrais vos entendre là-dessus. Puis, ensuite de ça,
j'aimerais vous entendre sur d'autres choses.
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
O.K. Bien, sur le premier point, parce que c'est vrai que c'est costaud, puis
on ne peut pas traiter deux questions en même temps, là, sur le point des
résultats, nous, on insiste là-dessus constamment. On a parlé beaucoup de
sécurisation culturelle, de modifications dans la loi, de mise en place de
mécanismes qui permettent, si jamais il y a un manquement, de faire un suivi.
Toutes ces demandes-là, c'est vrai qu'on passe beaucoup de temps à débattre
puis à faire de la politique-spectacle, mais que les résultats, de l'avis de plusieurs,
là, se font attendre sur le terrain en termes de gestes concrets.
Donc, nous, ça a été notre message
constamment. On essaie de ne pas polariser davantage et d'axer sur ce que,
concrètement, on pourrait faire, notamment inscrire dans la loi un principe de
sécurisation culturelle qui fait que toute personne qui se rend à un hôpital a
droit à un environnement qui correspond à une forme de sécurité, là, pour que
ce qui s'est passé il y a un an ne survienne plus jamais.
Mme Lévesque (Fanny) : Mais c'est
justement, ce sont ce genre de mesures là qui nécessitent des changements aux
lois, aux institutions, au système en place qui ne sont pas… qui n'avancent pas
assez vite. Est-ce que, selon vous, le fait qu'on ne reconnaisse pas, justement,
qu'il y ait un système ou qu'on va plus largement dans la reconnaissance de la
discrimination, comme le juge Viens le disait, est-ce que ça ralentit la mise
en oeuvre du rapport Viens? Et sinon, comment on doit s'y attaquer pour que ça
aille plus rapidement puis que les changements structurants s'opèrent?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Bien, c'est que les débats idéologiques, l'imposition d'un vocabulaire par un
certain groupe et la résistance d'un autre groupe à ce vocabulaire-là, en
raison des conséquences qu'il aurait dans d'autres domaines, cette bataille-là
prend beaucoup plus de place, malheureusement, que le vrai enjeu, à savoir des
réformes institutionnelles, structurelles qui pourraient être mises en place ne
le sont toujours pas. C'est pour ça que, nous, on dit : Pourquoi on ne se
concentre pas sur les solutions? Puis pourquoi on ne se donne pas un forum? Si
jamais, vraiment, là, il y a une discussion qui perdure sur le vocabulaire, les
concepts, bien, pourquoi on ne se donne pas un forum de discussion là-dessus et
sur toute autre question qu'on peut faire avancer?
Mais malheureusement, là, le constat,
comme vous faites, c'est qu'il y a une polarisation d'un débat, et, pendant ce
temps-là, on n'avance pas vite parce que toutes les énergies sont mises à
essayer de faire des gains politiques ou de créer, là, un clivage politique
autour de questions qui sont réelles. Tu sais, c'est un vrai débat, là, mais ce
n'est pas une excuse pour ne pas agir.
Mme Lévesque (Fanny) :
...l'impression que le gouvernement agit justement au cas par cas ou en
réaction à des événements, plutôt que de s'attaquer à des structures et à des institutions?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Oui, parce que nous, ce qu'on demande, c'est le principe de sécurisation culturelle,
puis ça n'avance pas assez vite à notre goût. Puis on pense que, sur le plan institutionnel,
sur le plan structurel, ça aurait un impact vraiment structurant, et ça, ça n'a
toujours pas avancé à notre goût.
La Modératrice
:
Dernière question en français.
M. Gagnon (Marc-André) :
Concernant les médecins qui ne sont pas vaccinés, est-ce qu'on va trop loin en
leur interdisant de faire de la télémédecine, par exemple?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Moi, je pense qu'il faut regarder la situation dans son ensemble. C'est 600
médecins, mais c'est combien de pharmaciens, combien d'infirmières?
M. Gagnon (Marc-André) : ...moi,
je vous parle de médecins, là.
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Dans l'ensemble, je pense que l'approche du gouvernement devrait être de
garder, d'une manière ou d'une autre, actifs tous les travailleurs et de
continuer à miser sur l'éducation et la sensibilisation pour réduire le nombre
de personnes qui ne sont pas vaccinées. Mais, si on prend dans tous les secteurs
de travail l'approche, à savoir : On n'a pas plus besoin de vous, allez à
la maison, bonne chance, moi, j'entends, là, plusieurs milieux nous dire :
On s'en va devant des bris de service généralisés. Donc...
M. Gagnon (Marc-André) : Mais
actifs dans leurs milieux de travail ou actifs en télétravail?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Le télétravail, c'est un exemple. Il y a des manières sécuritaires de garder
active chaque catégorie de travailleurs. Mais il faut prendre la situation dans
son ensemble, pas que les médecins, et se poser la question : Si, en plus
de ces médecins-là, il y a des pharmaciens, des infirmières et des travailleurs
de la santé qui vont tous disparaître, du jour au lendemain, en congé sans
solde, qu'est-ce qui arrive le lendemain? Et ça, en commission parlementaire,
les syndicats sont tous venus nous dire : Faites attention, vous vous en
allez vers des conséquences très graves, des bris de service généralisés.
Nous, on a entendu. Est-ce que le
gouvernement, lui, va entendre? Moi, je pense que c'est l'intérêt public qui
doit primer, à savoir qu'il y a des gens qui attendent pour une chirurgie, qui
attendent pour des soins de santé puis qui vont être vraiment mal pris, le
lendemain du 15 octobre, si tous ces gens-là, en même temps, ont décidé de
quitter.
La Modératrice
:
Dernière en français.
Mme Côté (Claudie) : ...sur le
passeport vaccinal à l'Assemblée nationale, les partis qui sont pour disent que
c'est parce qu'il faut qu'on soit exemplaires ici. Puis visiblement la position
du Parti québécois ne va rien changer, là, ça va passer parce qu'au BAN la CAQ
est majoritaire. Alors, pour vous, c'est une dérive de l'imposer ici?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Bien, ce que je déplore, c'est qu'on prend une décision non pas fondée sur la
science, parce que l'avis scientifique nous dit : Ce n'est pas nécessaire,
ce n'est pas recommandé, on le prend sur une base politique, alors que c'est le
Bureau de l'Assemblée nationale qui est supposé de démontrer, donner l'exemple
en disant : C'est la science qui guide nos décisions, et non pas les
joutes politiques qui permettent à la CAQ et au PLQ de mettre de l'avant une politique
non recommandée et qui pose toutes sortes de questions aussi sur le plan
juridique, mais surtout, j'insiste, sur le plan de la symbolique. Il y a des
gens qui manifestent dehors, et qui conspuent, qui ont vraiment de la hargne
envers notre institution fondamentale qui est notre démocratie.
Est-ce qu'on va poser un geste pour
alimenter le cynisme ou la méfiance dans une certaine partie de la population
en leur disant : Bien, la démocratie est réservée seulement à ceux qui ont
obtenu le vaccin, alors qu'on avait été très clairs sur le fait que le
passeport vaccinal, c'est pour seulement des activités non essentielles? Est-ce
que, vraiment, on est dans un endroit non essentiel ici, en démocratie?
Mme Côté (Claudie) : ...est-ce
que c'est essentiel?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Bien, ce l'est probablement moins que tous ceux qui participent aux travaux,
là. Mais moi, je vous dis : Comment justifier que le seul milieu de
travail qui va exiger le passeport vaccinal au Québec, ce sera la maison de la
démocratie? Puis comment justifier ça s'il n'y a pas d'avis de Santé publique,
l'avis de Santé publique dit de ne pas le faire, mais qu'on est dans une phase
de notre histoire où il y a énormément de méfiance et d'agressivité dans une
certaine frange de la population qui ne croit plus et qui, même, embarque dans
des complots, là, par rapport à ce qui se passe...
La Modératrice
: On
passe aux questions en anglais, s'il vous plaît.
Des voix : ...
M. Robillard (Alexandre) :
...recours juridiques dans un cas comme ça contre l'Assemblée nationale?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Pardon?
M. Robillard (Alexandre) :
Vous avez parlé, là, que, juridiquement, ça soulève des questions...
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Bien, les questions que ça...
M. Robillard (Alexandre) : Il
n'y a pas des recours juridiques qui seraient possibles?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Je n'ai pas d'avis juridique pour vous ce matin. Tout ce que je vous dis, c'est
que le droit du travail en ce moment au Québec, c'est que, hormis certains
milieux qui posent un danger très, très précis, là, très, très aigu en termes
de santé, les autres milieux de travail n'ont pas à exiger le passeport
vaccinal. Puis ce n'était pas ça, le passeport vaccinal. Le passeport vaccinal,
c'était que des lieux jugés non essentiels soient réservés à ceux qui sont
vaccinés. Là, le gouvernement politise une mesure alors que l'avis de Santé
publique est très clair. Moi, je trouve que c'est dangereux.
La Modératrice
: On
passe aux questions en anglais.
M. Robillard (Alexandre) : Dans
un Québec indépendant, évidemment, la Loi des Indiens, ça n'existerait plus. Ce
serait quoi, les autres avantages, selon vous, que Premières Nations auraient à
appuyer le projet souverainiste?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Bien, moi, ce que je défends depuis plusieurs années, c'est que non seulement
la seule façon que je vois de briser la Loi sur les Indiens, c'est de sortir du
Canada, mais ça ouvre aussi la porte à des négociations de nation à nation.
C'est que le lendemain matin de l'indépendance du Québec, dans mon esprit, c'est
très clair : Si nous, comme nation québécoise, on a enfin pu se libérer du
colonialisme puis de l'héritage, là, antidémocratiques Britanniques, les
premiers à qui... on va vouloir qu'ils aient un traitement juste puis qu'ils soient
également reconnus comme nations, c'est les Premières Nations, dans quel cas on
va avoir l'occasion de négocier de nation à nation sur une façon de fonctionner
qui soit respectueuse, durable.
Donc, moi, je pense, ce serait un moment
historique d'une beauté incroyable, et c'est pour ça que je favorise beaucoup
le dialogue tout de suite en ayant la discussion. Qu'est-ce que, concrètement,
on pourrait faire pour se rendre là, pour se rendre dans un contexte, un jour,
où on sera des nations égales qui se respectent? Moi, c'est ça, mon objectif.
La Modératrice
: On
passe aux questions en anglais.
Mme Senay
(Cathy) : …your proposition for a committee on
vocabulary, like the fact that we are getting stuck with systemic racism, do
you have the impression that you're not opening a Pandora box? Meaning that
maybe there is systemic racism, like, more prevalent in the society than we
think and that we just justify it.
M. St-Pierre Plamondon
(Paul) : I oppose the concept. I think the
concept is counterproductive.
Mme Senay (Cathy) : …committee on the vocabulary and studying the systemic racism,
maybe you'll hear arguments that prove you that systemic racism is way more
present in the Québec society
than you think.
M. St-Pierre Plamondon
(Paul) : Sure. Let's have the conversation.
But, if we are paralyzed in the «salon bleu», debating that precise issue and,
meanwhile, we're not doing anything, I think we need to have conversations,
that may take time, in a forum that will allow not only a conversation about
vocabulary… that's not what I've said, I said a special commission on any
topics in our relations in between nations that might enhance move forward all
those issues.
So, it's not only about
vocabulary, but what I'm seeing right now is that we're stuck. There's a
disagreement on certain issues, but I think it is not an excuse to not be
moving forward certain… very concrete measures that we could put forward to
make sure that we are improving. And that's why I think a forum of discussion
would be very useful.
Mme Senay (Cathy) : And I don't understand your point of view about the vaccine passport at the National
Assembly. I mean, MNAs are here to set an example, and
everybody is vaccinated. So, what's the problem?
M. St-Pierre Plamondon
(Paul) : The problem is : it's not
justified by Public Health's opinion, so it's not based on science. It's a
political decision. And it sounds also like Dr. Massé said about the
compulsory vaccination of health workers. He started the commission by saying : Actually, we're
not suggesting this based on epidemiology. We want to set the example.
But the problem is :
we should be following science, we should be following the opinion given by the
Public Health, and that's our stance. If the Public Health tells us that it's
not necessary, we should follow the Public Health, especially in the context
where we know that a certain portion of the population is very skeptical. We
can also…
For a certain part of the
population, they are believing in all sorts of theories as to what's going on
here. And we think that that kind of decision, that is not based on science and
that would restrict some people to come to the National
Assembly, would fuel… could fuel the problems we have
with that portion of the population.
Mme Senay (Cathy) : And one last thing. Bill 59, it seems that the Labour Minister will
go ahead and go with the adoption of the bill today, and the opposition is voting against it. What the
population should get, should understand by the fact that the opposition, including the PQ, is voting
against it?
M. St-Pierre Plamondon
(Paul) : We care about the safety of our
workers, and many measures in that bill will weakened the protection in terms
of safety of our workers. And we will never let go. We will never let down
workers in terms of ensuring their safety. And that's the issue in that bill.
La Modératrice
:Merci beaucoup.
Bonne journée.
(Fin à 8 h 28)