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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, June 12, 1996 - Vol. 35 N° 36

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures cinq minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien, veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Aux affaires courantes, déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché

M. Landry (Verchères): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché intitulé «La distribution de produits financiers aux particuliers: relever résolument le défi du changement».

Le Président: Ce document est déposé.


Rapport de mission de la cinquième assemblée annuelle de l'Association parlementaire Ontario-Québec

Je dépose, de mon côté, le rapport de mission sur la cinquième assemblée annuelle de l'Association parlementaire Ontario-Québec qui s'est tenue à Toronto du 9 au 11 mai dernier. Cette mission était sous la responsabilité de M. François Beaulne, député de Marguerite-D'Youville, qui était accompagné de Mme Claire Vaive, députée de Chapleau, de M. Lévis Brien, député de Rousseau, de M. Russell Copeman, député de Notre-Dame-de-Grâce, et de M. Michel Côté, député de La Peltrie.


Dépôt de rapports de commissions

Dépôt de rapports de commissions. Mme la présidente de la commission de l'aménagement et des équipements et députée de Mégantic-Compton.


Étude détaillée du projet de loi n° 22

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 6, 7 et 10 juin 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 22, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. La commission a adopté le projet avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions.


Décision du président sur la recevabilité d'une question de privilège du leader de l'opposition officielle portant sur une publicité relative au nouveau régime d'assurance-médicaments

À l'étape des interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel, vous me permettrez de rendre la décision sur la question qui m'a été posée hier. Alors, avant la séance d'hier, j'ai reçu dans les délais requis un avis du leader de l'opposition et député de Brome-Missisquoi m'informant de son intention de soulever une violation de droit ou de privilège.

Selon le leader de l'opposition officielle, cette violation aurait pris la forme d'un outrage commis par le ministère de la Santé et des Services sociaux le 1er juin dernier, sous l'autorité du ministre, en faisant paraître dans plusieurs quotidiens du Québec une publicité sur le nouveau régime d'assurance-médicaments, et ce, sans que la publicité du ministère de la Santé et des Services sociaux ne mentionne que le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, est toujours à l'étude à l'Assemblée nationale.

Les faits à l'appui de l'intervention du leader de l'opposition officielle sont les mêmes que ceux qu'il a allégués la veille, soit le 10 juin, lorsqu'il a demandé à la présidence d'intervenir sur une violation de droit ou de privilège en invoquant le premier alinéa de l'article 69 de notre règlement. Le vice-président a alors rendu une décision dans laquelle il indiquait que la demande du leader de l'opposition officielle n'était pas conforme au premier alinéa de l'article 69 du règlement de l'Assemblée, puisque sa question de droit ou de privilège n'avait pas été soulevée immédiatement après le fait, les faits invoqués au soutien de sa demande s'étant produits le 1er juin 1996.

Ainsi, le leader de l'opposition officielle devait plutôt transmettre une demande écrite à la présidence, conformément au deuxième alinéa de l'article 69 de notre règlement. Mais le vice-président a également affirmé, et je cite: «Malgré que la procédure prévue au règlement n'ait pas été suivie pour introduire cette question de privilège, je peux d'ores et déjà affirmer, après avoir pris connaissance des documents déposés, que la question de privilège serait, à première vue, irrecevable.» Fin de la citation.

(10 h 10)

Au soutien de sa décision, le vice-président Pinard a également ajouté qu'«un ministre peut informer le public des décisions gouvernementales. Les autorités constituées ont pleinement le droit, dans notre système politique, de faire connaître leurs décisions et leurs choix touchant leur champ de compétence. Les décisions annoncées pourraient par la suite prendre la forme de dispositions législatives et les députés, le cas échéant, devraient décider s'ils appuient ou non cette initiative.» Fin de la citation.

En parfait accord avec le vice-président, je réitère, à ce moment-ci, que la publicité et les campagnes d'information initiées par les ministères ou les organismes publics afin d'informer la population quant aux décisions gouvernementales ne constituent pas, prima facie, un outrage au Parlement et, en conséquence, je ne puis donner suite à la demande d'intervention du leader de l'opposition officielle.

Cette position est conforme aux décisions rendues par l'un de mes prédécesseurs, le président Jean-Pierre Saintonge, à la fois en 1990 et en 1992. D'ailleurs, le 19 mai 1992, le président Saintonge s'exprimait ainsi, et je le cite: «En ce qui concerne les annonces publicitaires publiées dans les principaux quotidiens faisant état des modifications au régime d'assurance-maladie du Québec sans faire référence au projet de loi, je ne peux que déplorer qu'on n'ait pas donné suite au souhait de la présidence exprimé dans la décision du 14 décembre 1990, et je déclarais alors qu'il était souhaitable qu'une publicité d'une mesure législative non encore adoptée mentionne le rôle du Parlement et de ses membres. Bien que ce geste précis ne constitue pas prima facie un outrage formel au Parlement, je regrette – disait le président Saintonge – que le message que véhiculait ma décision de décembre 1990 n'ait pas eu l'effet souhaité. Je ne peux que réitérer et encourager toute manifestation ou attitude empreinte de respect et de déférence à l'endroit de l'institution parlementaire et de ses membres.» Fin de la citation.

Pour ma part, je m'engage à maintenir la politique des présidents antérieurs et à demander la collaboration du premier ministre et du Conseil des ministres afin qu'à l'avenir les publicités et communications à l'intention du public, initiées par un ministère ou un organisme public, fassent preuve de respect et de déférence à l'égard de l'Assemblée nationale et de ses membres. J'entends donc informer à la fois le ministre de la Santé et des Services sociaux, ainsi que tous les membres du Conseil des ministres, et, au besoin, les ministères et organismes qui pourraient être concernés, que les publicités comme l'ensemble des communications relatives à un projet de loi toujours à l'étude à l'Assemblée nationale devraient comporter une mention claire faisant référence au rôle à la fois spécifique et essentiel de l'Assemblée nationale dans l'examen et dans l'adoption de toute nouvelle mesure exigeant l'intervention du pouvoir législatif.

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, suite à votre décision, M. le Président, c'est la troisième fois qu'un président de l'Assemblée nationale – et vous êtes dans la continuité des autres présidents – constate un accroc majeur aux droits des parlementaires. À chaque fois, la décision présidentielle n'a pas été suivie de sanction, ce qui, dans la pratique – et tous les gouvernements sont visés, M. le Président – discrédite l'autorité de l'Assemblée nationale et de sa présidence. Je pourrais vous référer, M. le Président, à ce moment-ci, aux propos que vous teniez vous-même au moment de votre intronisation comme président de l'Assemblée nationale, et je vous cite: «Trop de parlementaires, de chaque côté de la Chambre, ont souvent l'impression que leur voix ne compte pas. Ici, je veux vous assurer, chers collègues, de ma profonde solidarité à votre endroit et vous aider à changer cette situation.»

J'ajouterai, M. le Président, que le vice-président s'est engagé à communiquer avec le ministère de la Santé et des Services sociaux. J'ajouterai également, M. le Président, qu'au moment où nous nous parlons l'Assemblée nationale ne recevra pas d'écho, à moins que le ministre de la Santé et des Services sociaux prenne acte de la situation et immédiatement mette fin au service téléphonique qui donne des renseignements sur un projet de loi non encore adopté par l'Assemblée nationale du Québec.

Est-ce qu'on peut au moins, à ce moment-ci, avoir cette assurance de la part du ministre qu'il n'y aura pas, au cours de la journée et des heures qui vont suivre, une récidive quant à l'insulte qui a été faite à l'Assemblée nationale du Québec, M. le Président?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, tout en prenant acte de votre décision à l'effet que ça ne constitue pas un outrage au Parlement et non plus un manquement à nos règles ou privilèges de l'Assemblée nationale, dès que la question a été soulevée par le leader de l'opposition, pour éviter toute controverse et pour, je pense aussi, qu'il y ait une façon de procéder qui soit tout à fait correcte et conforme à l'esprit aussi de notre règlement parlementaire, j'ai communiqué avec le ministère de la Santé et des Services sociaux et nous avons immédiatement demandé au ministère de la Santé et des Services sociaux de cesser toute publicité jusqu'à l'adoption éventuelle de ce projet de loi, s'il y a lieu. Et je peux vous dire qu'immédiatement le ministre de la Santé a voulu et était d'accord avec cette façon de procéder.

Cependant, je dois le dire, il y a une publicité qui nous a échappé, qui est dans le Journal de Québec ce matin, et je dois le dire. Mais c'est involontaire, et toute publicité va arrêter immédiatement, parce que nous sommes très respectueux des règles en cette Chambre, M. le Président, et nous respectons l'Assemblée législative.

Le Président: Je voudrais vous faire remarquer que la décision que j'ai rendue tantôt signalait qu'il s'agissait de la décision gouvernementale. Le problème que nous avons, c'est que, dans le public, quand on reçoit ce type de publicité, les gens font rarement la distinction entre gouvernement et, nécessairement, Parlement. Il faut que ce soit clair.

Et, quand j'ai étudié cette question, j'ai préparé la décision, je me suis, à un moment donné, demandé s'il n'y avait pas tout au moins outrage au président, dans la mesure où, trois fois, un président, depuis quelques années, est obligé de faire ce rappel à l'Assemblée nationale et aux membres du gouvernement. Même si l'équipe gouvernementale a changé, l'institution gouvernementale, l'Exécutif, continue de rester dans sa pérennité. Et, dans ce sens-là, c'est pour ça que j'ai indiqué tantôt que l'avis serait non seulement communiqué au ministre de la Santé et des Services sociaux, mais également au premier ministre et à l'ensemble des membres du Conseil des ministres.

De mon côté, je vous avise à ce moment-ci qu'après la période de questions et réponses orales M. le ministre de la Santé et des Services sociaux répondra à une question posée le 7 juin 1996 par M. le député de Viau, relativement à un cas de transplantation pulmonaire.

Je vous avise également que, après la période de questions et réponses orales, sera tenu le vote reporté sur la motion de M. le ministre de la Santé et des Services sociaux proposant que le principe du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, soit adopté.


Questions et réponses orales

Nous en arrivons maintenant à la période des questions et réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle, en principale.


Implantation du régime d'assurance-médicaments

M. Johnson: Depuis quelques jours, que ce soit à l'Assemblée, ou en commission parlementaire, ou par communiqué de presse, le premier ministre a dû voir comme nous que son ministre de la Santé et des Services sociaux amenait beaucoup de changements au projet de loi n° 33 qui touche ce qu'il est convenu d'appeler une assurance-médicaments. Le premier ministre aura remarqué, quand même, depuis quelques jours... Et on peut comprendre qu'il n'est pas obligé d'être ici tous les jours et de suivre les règlements et les commissions parlementaires à la trace. On a vu par les journaux qu'il avait de bonnes raisons de ne pas être ici quelquefois. Le premier ministre doit quand même être conscient que le débat qui touche les coûts de ce régime s'est engagé de façon assez unilatérale, on doit dire. Les seuils à partir desquels les Québécois et Québécoises devront verser des primes ont également été changés à la baisse, faisant en sorte que les coûts sont plus considérables pour les gens à bas revenus. On a imposé, par communiqué de presse, à toutes fins utiles, un régime d'État géré par la Régie de l'assurance-maladie à plus de 1 000 000 de Québécois sans leur laisser le choix de l'assureur. Et on a appris, finalement, à force de questionner le ministre, que c'est sur notre rapport d'impôts, au mois d'avril prochain, que ces primes-là vont être payées, c'est-à-dire que, finalement, c'est une mesure de perception d'impôts, contrairement à ce que le premier ministre avait toujours indiqué.

(10 h 20)

M. le Président, j'aimerais demander au premier ministre s'il ne trouve pas que son ministre de la Santé et des Services sociaux devrait se préoccuper davantage d'être un ministre soucieux de la santé des citoyens, plutôt que de la santé financière que lui dicte le ministre des Finances. Est-ce que le premier ministre ne trouve pas que, passer à peu près un mois pour discuter de l'opportunité, des détails, des agendas d'implantation, du fonctionnement d'un régime comme celui-là, ce n'est pas un peu court et que ce n'est pas parce que des fonctionnaires et des experts ont passé 25 semaines à discuter de quelque chose entre eux qu'en 25 jours les Québécois vont s'engager pour 25 ans dans un nouveau régime qui touche la santé publique? Est-ce que le premier ministre est disposé, comme on l'a demandé ici, à reporter ce projet de loi afin qu'il soit bien examiné et que tous les Québécois soient parfaitement conscients de ce que ça représente pour eux?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le ministre de la Santé et des Services sociaux accomplit un travail remarquable, puisque, actuellement, il prépare une mesure sociale qui s'est fait longtemps attendre au Québec, qui est complexe, c'est vrai, mais il y accorde tout son soin, et nous sommes en train, comme Assemblée nationale, de l'examiner avec sérieux.

N'oublions pas que tout cela a commencé par un rapport préparé par M. Castonguay et un groupe qui l'entourait, que, s'agissant, par exemple, de la modification qui a été apportée la semaine dernière quant au porteur privé ou public de la gestion du régime, M. Castonguay lui-même avait identifié deux modes de gestion possibles, soit avec les assureurs privés, soit avec la RAMQ, et le gouvernement a privilégié de faire affaire, d'abord, avec les assureurs privés. Et on aura noté que, pendant très longtemps, les travaux se sont très bien déroulés, qu'il y avait même une entente de facto avec eux quant au niveau des frais d'administration.

Il est apparu, à un moment donné, qu'à la faveur d'un changement de décision – ils ont le droit – les assureurs privés ont décidé d'augmenter leur participation en termes de frais d'administration, puis le gouvernement, à ce moment-là, a jugé qu'il était préférable, dans l'intérêt des bénéficiaires du régime, de plutôt confier la gestion à la RAMQ. Et, présentement, nous travaillons dans cette direction. La RAMQ est une institution qui a même plus d'expérience dans la gestion de ce genre de régime que les assureurs privés et qui nous donne une plus grande garantie de réussite de cette mesure qui est absolument nécessaire, je crois, et dont nous devons poursuivre l'étude, comme nous le faisons présentement, pour l'adopter le plus vite possible.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, en remarquant que le premier ministre vient d'indiquer que c'est le plus vite possible qu'une mesure comme celle-là doit être mise en vigueur, est-ce qu'il ne vient pas carrément d'avouer que, ce qui est le plus important pour lui, ce n'est pas une étude attentive des éléments de ce programme-là, que ce n'est pas une étude quant à ses répercussions sur la santé publique, que ce n'est pas l'étude sur la répartition des coûts, que ce n'est pas une étude sur l'équité qu'il y a à littéralement charger la même prime à quelqu'un qui fait 18 000 $, 180 000 $ et 1 800 000 $ de revenus? Est-ce que le premier ministre ne trouve pas, justement, qu'on doit prendre le temps nécessaire avant d'engager les Québécois dans un régime qui va être en vigueur, dès que l'Assemblée va l'adopter, pendant au moins une génération et que de discuter pendant un mois de quelque chose qui va affecter les Québécois pendant 25 ans, ce n'est pas carrément se ficher, finalement, de l'opinion des Québécois qui veulent savoir exactement dans quoi on veut les embarquer? Et est-ce que le premier ministre n'est pas, encore une fois, en train de nous dire que, dans le fond, ce n'est pas le débat de fond qui l'intéresse, ce sont les fonds publics que le ministre des Finances veut?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le souci d'équité qu'invoque, avec raison, le chef de l'opposition devrait l'amener à se préoccuper, d'abord et avant tout, de toute une série, d'un grand nombre de concitoyens et de concitoyennes qui, présentement, n'ont aucune protection, n'ont aucune couverture. Il y en a plus de 1 000 000, près de 1 200 000. Il devrait constater que, dans le régime, il y a le souci d'exclure le coût des médicaments administrés aux enfants du coût de système pour que, peu importe qu'on ait des enfants ou qu'on n'en ait pas, on soit obligé de participer en équité à la gestion du coût de système. Il me semble qu'il y a là des valeurs fondamentales, et, en plus, il y a eu un travail extrêmement sérieux qui a été accompli.

Je soumets en toute déférence M. le Président, que, même si on continue d'en discuter pendant plusieurs mois, même si on ajournait durant l'été, à ne rien faire en plus, on se retrouverait dans la même situation à l'automne pour devoir adopter ce projet de loi, et je ne pense pas qu'il évoluerait d'un iota, puisque toutes les études et l'attention vigilante que lui a apportée l'opposition officielle vont nous permettre de mettre en vigueur un plan qui sera bénéfique pour la population.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Comment le premier ministre peut-il dire que toute l'étude a été faite, que toutes les discussions sont intervenues, lorsque, tout d'un coup, par communiqué de presse, littéralement là, 1 200 000 Québécois se voient couvrir éventuellement, dit-on, par un régime public, par la Régie de l'assurance-maladie, sans même qu'on puisse discuter de l'opportunité d'avoir recours au système x privé-public, de voir comment le gouvernement peut imposer au secteur privé certains objectifs que le gouvernement pourrait contrôler? Comment le premier ministre peut-il nous dire, lui – non, pas le ministre de la Santé – qu'il a la certitude que le débat a eu lieu, alors qu'on apprend que des pans entiers du régime vont être imposés, par voie de communiqué de presse?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, le chef de l'opposition fait référence plus directement au 1 100 000 ou 1 200 000 personnes qui n'ont aucune couverture présentement. Les discussions, et on l'a très bien dit, on nous reprochait d'être revenus à un des modèles qui avaient déjà été discutés. Les possibilités en termes de gestion pour couvrir ces personnes-là sont très bien identifiées depuis longtemps, elles avaient été identifiées même avant les travaux du rapport Castonguay. Parce que M. Castonguay avec son comité ont dû travailler à partir des hypothèses qui avaient été développées dans l'année qui a précédé, et ces hypothèses prévoyaient soit une gestion des primes individuelles, des nouvelles primes pour les personnes dont on parle, 1 100 000 personnes, soit une gestion par les assureurs privés qui développeraient un nouveau marché qu'ils n'ont pas présentement parce qu'ils sont carrément dans le collectif, soit par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, soit par un partage entre les deux.

Tout ça a été discuté avec eux, étudié par le comité Castonguay, discuté avec eux pendant des mois. Et eux-mêmes sont venus nous dire en commission, M. le Président, qu'après avoir regardé toutes les hypothèses, après avoir pensé qu'ils pourraient le faire à aussi bon coût au moins que le gouvernement, ils sont arrivés à la conclusion qu'ils ne pouvaient pas.

Et les assureurs ont réagi. Ils ne sont pas en désaccord avec la décision qu'on a prise. Au contraire, ils ont très bien dit: On a pensé que c'était un marché qu'on pourrait prendre; on s'est aperçu que le gouvernement peut le faire mieux que nous parce que, avec son régime public, il a une meilleure expérience, il a un système qui est tout en place, il peut gérer ça avec un coût administratif marginal qui est inférieur. Ils ont reconnu ça. Ils n'ont pas affirmé ça, ils ont reconnu qu'on était en meilleure position pour le faire et ils sont d'accord.

Ils ont dit qu'on ne leur a rien enlevé, c'est un marché qu'ils n'avaient pas. C'est un marché qu'ils auraient pu prendre; ils ne peuvent pas le prendre au meilleur bénéfice des Québécois et des Québécoises, alors ils sont d'accord que ce soit d'abord la population qui en profite et non pas les assureurs. Ils sont d'accord pour que la population en profite plutôt qu'eux. Pourquoi on leur reprocherait ça, M. le Président?

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Étant conscient que ce n'est pas une question de savoir si c'est la RAMQ ou les assureurs qui en profitent mais qu'il y a des façons de faire profiter les citoyens, qu'il y a des moyens qui sont différents, selon l'approche qu'on prend, est-ce que le premier ministre, dans le fond, aujourd'hui, n'est pas en train de nous dire que, juste en quelques semaines, on a assez parlé de ça, puis que c'est très important que le ministre des Finances ait son 200 000 000 $, et qu'en conséquence on va couper court à la discussion, et que, dans quelques jours, on va voter sur une mesure? Le premier ministre. C'est lui le chef du gouvernement; je ne veux pas entendre parler le ministre de la Santé.

Des voix: Oh!

Le Président: Alors, M. le chef de l'opposition, en terminant votre question complémentaire.

M. Johnson: Oui, M. le Président. On a assez entendu le ministre de la Santé et le percepteur des revenus de l'État qu'il est devenu, là. Je n'ai absolument pas l'intention de poser de question, le premier ministre ne veut pas répondre.

Le Président: On est à la période des questions et des réponses orales. Il y a eu une intervention du chef de l'opposition officielle; il peut y avoir une réponse, une réplique du côté gouvernemental.

M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, les gouvernements changent et les styles de gouvernement changent. Je pense qu'on a une opposition qui n'a jamais su ce qu'était une équipe gouvernementale. Oui, les ministres ont des mandats, et les ministres les remplissent, et font rapport, et rendent compte à leur premier ministre. Alors, c'est tout à fait normal que, sur des questions techniques comme ça, ce soit le porteur du ballon qui le porte et qui le ramasse, le ballon.

(10 h 30)

Parlant de régime social ou de perception de revenus, est-ce que le chef de l'opposition, M. le Président, a réalisé que les 1 200 000 personnes qui vont être couvertes, dont on parle depuis tout à l'heure, que, parmi ces gens-là, il y a 300 000 enfants qui n'ont pas de couverture, qui vont avoir une couverture sans aucuns frais, ni prime ni franchise, aucuns frais? Que dans les 800 000, les 800 000...

Des voix: Bravo!

M. Rochon: ...M. le Président, que, dans les 800 000 adultes qui restent, il y en a 500 000 qui ont des revenus assez bas qu'ils vont être couverts sans payer aucune prime, et que ces gens-là attendent après cette protection, M. le Président?

Le Président: Mme la députée de Saint-François, en complémentaire.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, comment le premier ministre peut-il concilier le fait que, quand il s'agit de payer l'équité salariale pour les femmes, il doit reporter, faire une consultation beaucoup plus élargie, mais que, quand il s'agit d'aller chercher l'argent, 300 000 000 $, dans les poches des contribuables, il fait fi de toute recommandation des groupes concernés?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, nous avons pu constater à quel point le dossier de l'équité salariale soulève des questions profondes qui affectent de façon très substantielle le milieu du travail, les niveaux de rémunération. Et nous savons que, du côté de l'assurance-médicaments, il y a maintenant deux ans qu'on travaille sur le dossier. C'est un dossier qui est technique, il est vrai, mais dont on connaît maintenant les paramètres, qui a été évalué par les actuaires, par des programmes informatiques. On sait qui va l'appliquer. On sait maintenant que c'est le meilleur porteur de ballon qui va l'appliquer, c'est la RAMQ. Les assureurs privés se sont trouvés eux-mêmes à le reconnaître, ce faisant. Nous avons développé au Québec une expertise extraordinaire pour gérer ce genre de programme, grâce à la RAMQ, à l'assurance-maladie. Maintenant, nous allons en profiter. Un des fruits, ce sera d'avoir justement un régime qui sera bien géré, par une expertise qui est acquise, que nous connaissons, à un moindre coût.

Le Président: En principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Modalités du régime d'assurance-médicaments pour les personnes handicapées

M. Copeman: Merci, M. le Président. Les modifications annoncées à toute vapeur par le ministre de la Santé, lundi dernier, à son projet d'assurance-médicaments feront en sorte que les personnes atteintes d'un handicap survenu avant l'âge de 18 ans ne paieront pas leurs médicaments, mais celles dont le handicap est survenu après l'âge de 18 ans seront soumises à l'impôt-médicaments.

Le ministre peut-il nous expliquer la raison de cette discrimination?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Oui. Il ne s'agit pas de discrimination, M. le Président, il s'agit plutôt d'une amélioration pour couvrir des gens que la première version du projet ne couvrait pas. C'est une pratique établie que, quand on ajoute un groupe de personnes, qui sont des enfants de 18 ans à 25 ans, comme dans ce cas-ci, qui seront protégés tant qu'ils sont domiciliés chez leurs parents et qu'ils sont aux études, de leur assimiler les personnes handicapées qui ont contracté leur incapacité avant l'âge de 18 ans. C'est un groupe bien connu d'individus qui, dans beaucoup de programmes sociaux, sont assimilés ou sont rajoutés à une protection qui est donnée pour des enfants de 18 à 25 ans, et ce groupe-là a été ajouté.

Maintenant, les personnes handicapées qui le sont à cause d'un accident d'automobile présentement ont déjà une couverture par l'assurance automobile, et, ça, ça va continuer. Les personnes qui ont contracté un handicap à cause d'un accident au travail ont une couverture, une indemnité qui leur est donnée par la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

Alors, selon les analyses qu'on a faites, on couvre probablement à peu près tout le monde. Il reste des gens qui auraient pu avoir un accident à domicile ou ailleurs. Il y a peut-être encore un petit groupe de personnes qui, en dehors du milieu de travail, en dehors d'un accident d'automobile, en dehors d'une situation où elles auraient contracté une incapacité avant l'âge de 18 ans, ne seraient pas complètement couvertes.

Maintenant, M. le Président, on a apporté... on a répondu à peu près à tous les commentaires et suggestions, on s'en va en étude article par article. S'il y a des propositions comme ça à faire, si on peut le regarder en détail, si on peut en évaluer les coûts et qu'on peut le prendre, on peut la regarder, la question, mais on est rendu là, là. Quand il y a un processus législatif qui est prévu dans nos règles de jeu, pourquoi on ne le suit pas pour faire avancer les choses et améliorer un projet de loi au lieu de perdre notre temps à poser des questions en dehors de l'endroit où on devrait les poser, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Westmount– Saint-Louis, en principale.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je suis pris un peu dans un dilemme. Ma question s'adresse au député de Joliette: il entre et il sort, mais je ne peux pas vous dire qu'il est sorti. Alors, est-ce que je peux vous demander de lui demander de rentrer, s'il vous plaît?

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Le voilà!

Le Président: Alors, vos voeux sont exaucés, M. le député.


Plan de redressement budgétaire d'Hydro-Québec

M. Chagnon: Merci, M. le Président. M. le Président, nous faisons face à un gouvernement qui parle beaucoup, mais qui n'agit pas souvent dans le sens de son discours. On l'a vu dans le domaine de la santé, on l'a vu dans les domaines de l'éducation et de l'équité salariale. Bref, nous pouvons fournir des exemples à satiété.

L'exemple du jour serait sûrement dans le dossier des compressions à Hydro-Québec, où le double langage du ministre provoque des situations chaotiques, sinon ridicules, tellement ridicules, M. le Président, qu'au lendemain du dépôt de son plan de compressions le ministre et député de Joliette était à Rivière-du-Loup – probablement invité par son vieil ami, le député de Rivière-du-Loup – et déclarait le 6 juin dernier, M. le Président: «Mesdames, messieurs, moi, il y a des tâches très agréables en politique et très désagréables aussi. Ce matin, j'en ai une très agréable et j'en évite probablement une désagréable en étant ici au lieu d'être à l'Assemblée nationale. J'ai l'impression que je passerais au cash ce matin. Si j'étais là-bas, avec le plan d'action d'Hydro-Québec, le plan de redressement, je suis persuadé que l'opposition s'en donnerait à bras raccourcis. C'est probablement Bouchard qui va y goûter à ma place.»

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: M. le Président, je demande le consentement pour le dépôt de la pièce à conviction, qui est la cassette du discours du ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Des voix: Consentement.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Sur une question de directive, M. le Président. Il y a déjà eu des décisions de l'Assemblée nationale...

Une voix: Consentement.

M. Bélanger: ...relativement au dépôt de cassettes. Des dépôts de documents, on peut le faire, mais des documents vidéo, des documents audio, il me semble que ce n'est pas possible, selon les règles de notre Chambre.

Une voix: Je suis d'accord.

M. Bélanger: Mais il y aurait consentement, si c'est possible selon nos règlements.


Document déposé

Le Président: Écoutez. Le secrétaire général me signale qu'il pourrait peut-être y avoir des problèmes techniques. S'il y a consentement, sous réserve des possibilités d'utiliser les méthodes de reproduction... Alors, sous réserve de cette vérification, la pièce est déposée... pas la pièce à conviction, mais la cassette est déposée.

Maintenant, M. le député, je vous invite, puisque votre préambule est terminé, à poser votre question principale.

M. Chagnon: Évidemment, M. le Président, vous aurez compris que c'était pour le bénéfice du premier ministre.

M. le Président, est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi il a subitement changé d'idée en cautionnant les compressions de 70 000 000 $ dans les salaires et les bénéfices des employés d'Hydro? À moins que ce ne soit par honte qu'il se soit glissé, caché à Rivière-du-Loup, préférant que le premier ministre passe au cash à sa place.

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: D'abord, M. le Président, je n'ai pas l'habitude de reculer devant une avalanche de questions. Au contraire, j'aurais pensé que l'opposition aurait été assez vite pour les poser dès le dépôt du rapport qui a été soumis, ou le plan d'action, par Hydro-Québec. D'habitude, on ne se gêne pas pour le faire, même en l'absence du ministre responsable; on le fait au premier ministre, comme on a essayé de le faire durant son absence.

Donc, M. le Président, pourquoi avoir changé d'idée? dit-il. D'abord, je n'ai pas changé d'idée et je vais l'expliquer même pour le bénéfice de certains de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre. Oui, parce qu'on a laissé planer le doute que j'avais changé d'idée. Je n'ai pas changé d'idée.

Au moment où je me suis levé en cette Chambre suite à une question, j'ignore si c'est du député de Saint-Louis, on m'avait dit: Hydro-Québec avait annoncé une coupure de 71 000 000 $ à ce moment-là, sans rendre public son plan d'action qui coupait dans le gras à Hydro-Québec. J'ai dit que ce n'était pas une façon de faire, qu'on avait un comité sur pied qui devait à la fois sabrer dans le gras ou dans l'opulence et, au besoin, y aller sur la masse salariale, qui dépasse tout marché de comparaison. C'est ce que j'avais dit en Chambre à ce moment-là.

Le rapport est sorti, et il coupe 48 800 000 $, à la page 3 ou 4 du rapport, et je vous le déposerai en cette Chambre, s'il le faut... Je l'ai fait, même, vous devez en avoir pris connaissance. J'ai demandé, à ce moment-là, qu'on négocie de bonne foi à une table de négociation pour réaliser le plan de compressions, et j'ai même dit, de bonne foi toujours: Si vous avez des alternatives pour arriver à rencontrer la facture de compressions de 198 000 000 $, c'est ce qui nous intéresse pour que les bénéfices nets soient de 516 000 000 $. C'est ça, les objectifs fondamentaux du gouvernement. C'est ce à quoi j'ai répondu et je n'ai pas changé d'idée. Pour moi, l'important, c'est de rencontrer les deux objectifs fixés par le Conseil des ministres, 198 000 000 $ de compressions et 516 000 000 $ de bénéfices nets.

Le Président: M. le député.

(10 h 40)

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le ministre, qui, questionné il y a deux semaines effectivement, déclarait qu'Hydro doit faire d'abord un ménage dans l'accessoire, le gras, l'opulence, est conscient que son incohérence, finalement, par rapport au plan qui a été déposé fait de lui une espèce de pantin de la haute direction d'Hydro-Québec? Est-ce qu'il peut même répondre au président des ingénieurs d'Hydro-Québec, qui déclarait récemment, le 6 juin, qu'il serait bon d'avoir un ministre qui pourrait garder la même idée au moins pendant 24 heures de temps?

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, si on en est à demander des plans de compressions à Hydro-Québec aussi majeurs que celui qu'on a demandé, c'est précisément parce que, pendant neuf ans, il n'y a eu personne pour s'en occuper. Ça, c'est clair.

M. le Président, pendant neuf ans, neuf ans et demi même, on a vu des premiers ministres intervenir pour faire changer d'idée à Hydro-Québec; on a vu des premiers ministres qui ont exigé de faire partir des travaux alors que la demande n'était pas là; on a vu des premiers ministres obliger Hydro-Québec à signer des contrats secrets qui ont contribué à un manque à gagner de 1 200 000 000 $ par Hydro-Québec. M. le Président, c'est ça qu'ils avaient devant eux.

Quant au pantin, je «peux-tu» vous dire, M. le Président, que je n'ai pas de leçons à retirer du Parti libéral, parce que c'est la première fois qu'un gouvernement, en pleine commission parlementaire, ose exiger de la société d'État qu'elle sabre dans le gras et qu'elle livre des bénéfices nets acceptables pour une entreprise de cette taille?

Le Président: M. le député de Chomedey, en principale.


Procès opposant la Société d'habitation du Québec au conseil d'administration d'un HLM

M. Mulcair: Merci, M. le Président. M. le Président, le 15 mai dernier, les parlementaires en cette Chambre étaient saisis du projet de loi n° 30, qui reprend presque mot à mot les conclusions d'une procédure toujours pendante devant le Cour supérieure. En effet, depuis plus de deux ans, la Société d'habitation du Québec a entrepris des procédures judiciaires contre un organisme d'habitation à loyer modique. Pourtant, sans même attendre que la Cour dispose du litige, ce gouvernement propose un projet de loi lui permettant de décider lui-même du résultat de cette poursuite judiciaire avant que les tribunaux ne se soient prononcés.

Comment, M. le Président, est-ce que le ministre de la Justice, Procureur général et supposé gardien de la justice au Québec, peut cautionner une telle démarche qui a pour effet d'évacuer complètement le processus judiciaire et qui fait fi de l'opinion des tribunaux avant même que ceux-ci ne puissent se prononcer?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, je n'ai pas pris connaissance des faits que soulève le député de Chomedey. Je vais m'informer et je répondrai à cette question demain, dès que j'aurai les informations requises.

Le Président: M. le député de Laurier-Dorion, en principale.


Portée des pouvoirs donnés à la Société d'habitation du Québec par le projet de loi n° 30

M. Sirros: Oui, M. le Président. M. le Président, dans la requête dont il est question, de la SHQ, il s'agit d'une requête contre la corporation Waskahegen, une corporation autochtone, la seule qui gère des habitations à loyer modique pour les autochtones hors réserve. Cette cause, comme le disait si bien mon collègue, est actuellement devant les tribunaux. J'ai également copie du projet de loi dont l'ancien ministre des Affaires municipales – et l'actuel ministre responsable des Affaires autochtones – a probablement eu vent dans son temps, qui reprend presque textuellement la requête qui est devant les tribunaux pour la mettre dans la loi qui serait éventuellement adoptée par l'Assemblée nationale. Ce faisant, le gouvernement utilise l'Assemblée nationale, M. le Président, pour court-circuiter le processus judiciaire.

Une voix: Très grave.

M. Sirros: Comment le ministre responsable des Affaires autochtones peut-il accepter que son collègue utilise de cette façon l'Assemblée nationale pour priver un groupe d'autochtones de droits aussi fondamentaux que le droit à la justice impartiale, après avoir eu l'occasion de présenter une défense pleine et entière? Le ministre nie-t-il le principe fondamental qui veut que tous soient égaux devant la loi?

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, normalement, si mon collègue peut être de retour, c'est au ministre des Affaires municipales que je devrais donner la parole, puisqu'il est le parrain du projet de loi en question. J'ai discuté avec lui, effectivement, de cedit projet de loi, avec le ministre des Affaires municipales, et il est question de se donner une assise juridique pour contrer des aberrations. Que ce soit dans une communauté autochtone ou dans une municipalité, je m'excuse, mais l'État doit se donner une assise juridique d'intervention pour contrer des aberrations. Et je demanderais au ministre des Affaires municipales de compléter ma réponse.

Le Président: Rapidement, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: Bon. Effectivement, M. le Président, nous avons donc déposé le projet de loi n° 30 pour donner des assises juridiques, pour faire en sorte qu'au niveau du logement social le gouvernement ait les mécanismes, comme dans le domaine de la santé, comme dans le domaine de l'éducation, pour faire en sorte que les 250 000 000 $ que nous investissons avec des partenaires, que cela puisse se faire selon les objectifs signés dans les ententes avec les offices municipaux d'habitation ou les offices municipaux chargés d'une telle application.

Et je peux assurer le député qu'au moment où nous discuterons de ce projet de loi article par article nous allons tenir compte de ses remarques et nous allons nous assurer que les principes élémentaires de justice naturelle soient inclus dans le projet de loi.

Le Président: M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: M. le Président, un principe élémentaire de la justice naturelle, même pour quelqu'un qui n'est pas avocat, veut qu'on ne puisse pas présumer au départ de la culpabilité de quelqu'un.

M. le Président, au ministre des Affaires autochtones: Est-ce qu'il est au courant que les mêmes allégations à peu près ont été faites devant la cour criminelle et que cette requête a été renvoyée? Et le juge disait: Il me faudrait faire une gymnastique intellectuelle que la preuve ne permet pas de faire.

En agissant de la sorte, l'Assemblée nationale et le ministre des Affaires autochtones cautionnent une démarche qui va priver un groupe d'autochtones d'un élément de justice fondamental.

Le Président: M. le ministre responsable des Affaires autochtones.

M. Chevrette: M. le Président, les discussions que nous avons eues entre le ministre des Affaires municipales et moi-même portent exclusivement sur le droit fondamental, c'est-à-dire le droit, l'assise juridique à se donner pour intervenir dès que des aberrations ou des anomalies se produisent, comme on le fait dans l'ensemble des communautés, dans le réseau de la santé, etc., dans d'autres structures.

Je crois que, pour traiter du monde de façon égale, je suis d'accord avec ce principe-là, il faut donc que les possibilités d'intervention de l'État, ne serait-ce que sur le plan d'une enquête administrative, d'une tutelle administrative temporaire, je crois que ça doit exister pour la protection, précisément, d'abord, des droits les plus fondamentaux, et aussi pour faire en sorte que les argents injectés par l'ensemble des Québécois soient gérés de la façon la plus honnête possible.

Le Président: En principale, M. le député de Hull.


Poursuites en diffamation intentées par des dirigeants de la Société d'habitation du Québec

M. LeSage: Merci, M. le Président. En principale, mais dans le cadre de la même affaire, M. le Président. Nous apprenons que le président-directeur général de la Société d'habitation du Québec, M. Jean-Paul Beaulieu, et d'autres officiers de la SHQ ont intenté, en leur nom personnel, des actions en diffamation, dont le seul cas du président-directeur général qui s'élève à plus de 950 000 $. Nous apprenons également que, dans le cadre de ces actions, ce sont les avocats du gouvernement qui représentent les intérêts personnels du président-directeur général, M. Beaulieu, et des autres officiers de la SHQ.

M. le Président, ma question au ministre des Affaires municipales: Est-ce que le ministre des Affaires municipales est d'accord avec cette démarche et est-ce que le ministre trouve normal que le P.D.G. de la SHQ désire mettre 950 000 $ dans ses poches en bénéficiant des services des avocats du gouvernement, qui, eux, sont payés à même les poches des contribuables?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: D'abord, M. le Président, je vais me souvenir de la mise en garde que vous faites régulièrement, de la prudence, parce qu'il y a des éléments...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: ...qui sont donc pendants devant les tribunaux, et je ne voudrais qu'en aucun temps des déclarations puissent entacher le processus.

M. le Président, la Société d'habitation du Québec est une société du gouvernement avec une personnalité juridique distincte qui a pour responsabilité d'assurer le développement du logement social et d'assurer également un certain nombre d'aides à des organismes pour le développement de l'habitation au Québec et, dans ce cadre, obéit à des règles, à des règlements et à des lois qui ont été édictés par le Parlement. Et la société d'État, son conseil d'administration, doit s'assurer, avec les mécanismes normaux, que ces règles sont respectées et que, dans ce cas, les mécanismes de protection des administrateurs valent également comme on le fait pour les autres administrateurs publics. Et, dans ce cas, le processus suit son cours suivant les principes normaux généralement admis devant les tribunaux.

Une voix: L'aide juridique pour les millionnaires.

(10 h 50)

Le Président: En principale, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.


Incidences du projet de loi modifiant l'aide juridique sur les victimes de violence conjugale

Mme Loiselle: Oui, s'il vous plaît. M. le Président, le projet de loi n° 20 sur l'aide juridique élimine la couverture pour la plupart des infractions relatives à la violence conjugale – des voies de fait, si vous voulez – ce qui veut dire que l'agresseur pourra maintenant lui-même interroger sa victime en cour.

Lundi dernier, en commission parlementaire, deux amendements ont été déposés par l'opposition officielle afin de corriger cette situation inacceptable et indécente pour les femmes victimes de violence, M. le Président. C'est du revers de la main que le ministre de la Justice et la députée de Deux-Montagnes, une femme parlementaire, ont rejeté ces deux amendements de l'opposition officielle.

M. le Président, comment la ministre de la Condition féminine peut-elle accepter que son gouvernement soit présentement en train de forcer l'adoption d'une loi qui aura pour effet de permettre à l'agresseur de contre-interroger lui-même sa victime en cour?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, dans le projet de loi de l'aide juridique, qui, je le rappelle, va permettre à 650 000 Québécois de plus de pouvoir bénéficier de l'aide juridique, il est prévu les couvertures qui sont accordées à ceux qui peuvent bénéficier de l'aide juridique. Dans les actes qui sont couverts, entre autres, il y a les actes criminels, il y a les actes par poursuite sommaire, lorsqu'il y a une probabilité d'emprisonnement. Et, dans ce cadre-là, il y a certains types d'infraction qui rentrent dans ce groupe-là. La manière d'indiquer de quelle façon une personne pourra ou non être susceptible d'être condamnée à la prison: les procureurs de la couronne indiquent sur la procédure qu'ils n'entendent pas réclamer l'emprisonnement, de telle sorte que ceux et celles qui lisent la procédure, que ce soit la personne qui fasse l'admissibilité à l'aide juridique ou le juge, savent que le procureur de la couronne entend ou n'entend pas réclamer. Dans les circonstances, il est en mesure de savoir si, oui ou non, il doit y avoir accord de l'aide juridique. En matière que soulève la députée, il n'y aura pas d'indication à l'effet qu'on entend réclamer la prison, de telle sorte que l'aide juridique sera accordée dans ces cas-là.

Le Président: Mme la députée.

Mme Loiselle: M. le Président, le ministre et le premier ministre réalisent-ils qu'un grand nombre de femmes qui vivent la violence conjugale sont habitées et envahies par la peur et que, si elles apprennent que leurs agresseurs peuvent les contre-interroger en cour, M. le Président, aucune femme violentée ne va présenter de plainte?

Au premier ministre, au nom des femmes du Québec: Est-ce que le premier ministre peut s'engager ici, en cette Chambre, à demander au ministre de la Justice de rectifier le tir dès maintenant et qu'une telle aberration ne voie jamais le jour au Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Bégin: Je pense, M. le Président, qu'il faut reprendre l'explication, puisque, de toute évidence, la députée ne l'a pas comprise.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, le procureur de la couronne, au moment d'émettre une sommation, sait ce qu'il entend faire ou ne pas faire devant le tribunal. En indiquant qu'il n'a pas l'intention de réclamer l'emprisonnement, il est clair qu'il est dit que la sanction peut être moindre. Dans le cas où il ne marquera rien, la compréhension du directeur des services juridiques comme de la cour, c'est qu'il peut y avoir danger d'emprisonnement. À ce moment-là, il donnera un mandat d'aide juridique à la personne, de telle sorte que l'hypothèse soulevée n'existera pas. C'est ça, M. le Président, qui va exister dans la réalité, et il faut le comprendre, parce qu'on tente de faire des peurs.

Deuxièmement, et, ça, c'est une question de droit qu'il faut quand même mentionner – je ne défends pas la chose, je le dis à l'avance – il faut comprendre qu'il y a un droit pour une personne de refuser l'aide juridique. Une personne peut refuser l'aide d'un avocat, elle a droit de se représenter seule. Malheureusement, dans ces cas-là, ni vous, ni moi, ni personne ne pouvons faire quoi que ce soit, puisque c'est un droit fondamental. Donc, il peut arriver, malheureusement, que, dans certaines circonstances, une personne soit interrogée par son agresseur, mais nous n'y pouvons rien, même si nous accordons l'aide juridique, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, est-ce que le ministre de la Justice est capable de comprendre que la situation intolérable en question a déjà été dénoncée le printemps dernier et que même un âne ne se cogne pas la patte deux fois contre la même roche? Pourquoi est-ce que le ministre de la Justice ne change pas la loi pour éviter la situation déplorable que ma collègue, la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, vient de signaler tantôt?

Une voix: Han, han!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, je me rends compte que certaines personnes ne sont plus capables de parler, elles émettent des sons de l'âne. Alors, qu'elles portent le bonnet!

Je vois que la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne a compris, mais le député de Chomedey, comme à son habitude, n'a pas compris. Alors, je vais réexpliquer une troisième fois que l'hypothèse qu'il soulève ne se produira pas, parce qu'il y aura le signal que j'ai mentionné tantôt qui fera en sorte que la personne recevra l'aide juridique et que, en conséquence, son hypothèse n'existera pas.

Mais je comprends, M. le Président, un peu sa frustration, parce que, après avoir dit sur tous les toits que le projet de loi n'avait aucun sens, que le Barreau le dénonçait, il a eu, hier, la surprise de lire dans Le Journal du Barreau , qui a été publié et que j'ai reçu chez moi, daté du 16 juin 1996, et qui titre en première page: «Aide juridique: le Barreau salue la réforme proposée».

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Nelligan.


Communication de certains renseignements entre ministères et organismes publics

M. Williams: Merci, M. le Président. Au cours de la présente session, le gouvernement péquiste a déposé une série de projets de loi qui menacent la protection de la vie privée des Québécois du Québec. Le Protecteur du citoyen, la Commission d'accès à l'information et plusieurs autres intervenants ont, tour à tour, sévèrement critiqué les effets de ces projets de loi. Suite à ces critiques, nous avons appris que le ministre d'État aux Finances s'apprête à déposer des amendements à son projet de loi.

Puisque, par ailleurs, le projet de loi n° 32 a fait, lui aussi, l'objet de critiques tout aussi sévères de la part des mêmes intervenants et du Barreau du Québec, qui a même déclaré que le fisc réclame des pouvoirs plus étendus que ceux de la police – des pouvoirs plus étendus que ceux de la police – est-ce que le ministre délégué saura prendre l'exemple de son tuteur et prendra l'engagement de faire, lui aussi, des amendements à son projet de loi afin de protéger la vie privée des citoyens et leurs droits fondamentaux?

Le Président: M. le vice-premier ministre, ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le Président, l'opposition officielle, représentée surtout par le député de Laporte, le député de Nelligan et quelques autres, a effectivement contribué beaucoup à améliorer les projets dont a parlé le député de Nelligan. Et le gouvernement, évidemment, souscrit à tous les principes que l'opposition officielle a évoqués durant les travaux des commissions parlementaires et a fait son possible pour bonifier les projets, comme c'est le rôle de l'opposition officielle d'aider à le faire.

Et, dans un des deux cas – et mon collègue répondra pour l'autre – j'ai reçu une lettre du Protecteur du citoyen, qui est venu d'ailleurs de bonne grâce, malgré son horaire surchargé, devant notre commission, et des amendements proposés, voici ce qu'il dit: Cet amendement, ajouté à ceux que le ministre a déjà proposés, fera en sorte que les droits des personnes concernées seront valablement protégés et la transparence de l'État assurée dans la mesure prévue par la loi d'accès. Bon. Et il conclut en disant: Dans ce nouveau contexte, il nous semble que le projet de loi n° 36 respecterait les chartes québécoise et canadienne des droits et libertés au chapitre de la vie privée.

(11 heures)

Alors, je demanderais respectueusement au député de Nelligan, quand il parlera... Est-ce qu'on pourrait me laisser faire? Je demande respectueusement au député de Nelligan, quand il parle d'une série de projets de loi, qu'il soustraie immédiatement le projet de loi n° 36. Et mon collègue va lui dire pourquoi il faut qu'il soustraie l'autre aussi.

Le Président: À ce moment-ci, le temps imparti pour la partie gouvernementale pour la réponse est... À moins qu'il y ait consentement pour un complément de réponse. Alors, M. le député de Jacques-Cartier, en principale.


Protection des renseignements personnels dans le cadre du régime d'assurance-médicaments

M. Kelley: Oui. Merci, M. le Président. Le fait que le ministre de la Santé veuille procéder à l'implantation de son régime d'assurance-médicaments à toute vitesse a provoqué de graves inquiétudes quant à la protection des renseignements privés. Déjà, le président de la Commission d'accès à l'information a dit, et je le cite: «La mise en place du fichier pourrait s'avérer très lourde de conséquences pour chacun des citoyens du Québec. Il pourrait même institutionnaliser une intrusion permanente dans la vie privée des citoyens.»

Étant donné que son régime prévoit un partenariat entre le gouvernement et le secteur privé, notamment les compagnies d'assurances, les pharmaciens et une firme américaine qui sera responsable de la gestion informatique, quelles mesures est-ce que le ministre va mettre en place pour veiller à la protection des renseignements personnels entre ces partenaires?

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre délégué au Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, est-ce qu'il serait possible de répéter la question, s'il vous plaît?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Moi, c'était sur le projet de loi n° 33, et la question de...

Des voix: Ah!

M. Kelley: J'ai mentionné ça, le régime d'assurance-médicaments, M. le Président. Étant donné que le régime d'assurance-médicaments prévoit un partenariat entre le gouvernement et le secteur privé, notamment les compagnies d'assurances, les pharmaciens et une firme américaine qui sera responsable de la gestion informatique, la compagnie Fox Meyer, quelles mesures est-ce que le ministre va mettre en place pour veiller à la protection des renseignements personnels et de la vie privée des Québécois?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Je m'excuse, M. le Président. Deux choses. D'abord, le système qui est mis en place est une organisation à partir du système actuel de relation entre la Régie de l'assurance-maladie du Québec et les pharmaciens. Il y a déjà tout ce système. Et l'objectif du projet qui va être réalisé, c'est de rendre ce système interactif, de sorte que la gestion d'un programme éventuel d'assurance-médicaments puisse être faite en interaction directe. On a dit, par exemple, que la franchise va être payable, seulement 25 $, par période de trois mois, que le plafond va être applicable par période de trois mois pour rendre l'accès financier le plus facile possible. Alors, ça, ça prend une interaction directe pour voir, pour vérifier où on en est. Et c'est ça qui va être fait. Mais, par ailleurs, il n'y a rien de changé au système qu'ils ont, donc il n'est pas question d'avoir de dossiers personnalisés. Les personnes ne peuvent pas être identifiées dans leur dossier. C'est purement un dossier de gestion administrative. Ça, c'est le premier élément de la question.

La deuxième chose. Si, éventuellement, on voulait aller jusqu'à un dossier informatisé qui permettrait un meilleur service aux patients, parce que, par exemple, les pharmaciens pourraient avoir des logiciels qui existent actuellement qui pourraient les prévenir contre toute interaction médicamenteuse qui pourrait faire un tort aux patients, donc il y aurait un objectif de qualité de services encore meilleure avec un système personnalisé.

Maintenant, on a bien dit en commission parlementaire, et la Commission d'accès à l'information est venue en commission parlementaire, est au courant de tout développement éventuel dans ce sens-là... Et, si on s'en va là, on va prendre le temps de le faire correctement. La Commission d'accès à l'information va être impliquée là-dedans et on va faire exactement comme on a fait avec la carte à puce où on a pu développer un système avec toute la sécurité possible en prenant le temps qu'il faut pour le faire, M. le Président.

Le Président: C'est la fin de la période des questions et des réponses orales. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. M. le Président, à ce moment-ci, le règlement m'oblige à prendre la parole du leader du gouvernement compte tenu des réponses qu'il a apportées à cette Chambre suite à votre décision quant aux privilèges et immunité de l'Assemblée nationale du Québec. Des gens qui n'étaient pas dans la même obligation ont vérifié les informations fournies par le leader du gouvernement à cette Chambre quant à l'arrêt par le ministère de la Santé et des Services sociaux... l'exclusion que le leader du gouvernement avait faite quant à une publicité cette semaine. Et on me dit que, après la réponse du leader et en contradiction avec la réponse du leader du gouvernement, les services d'appel sont toujours maintenus – vous pouvez, encore une fois, signaler le numéro qui apparaît au bas – et que l'information qui a été transmise à l'Assemblée nationale est fausse, M. le Président.

Dans les circonstances, je vous demande de prendre les mesures appropriées pour qu'on ne ridiculise pas, encore une fois, l'institution.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, il faut, pour la population, que les choses soient très claires. Parce que, là, on est pris dans le dilemme. On nous dit... Et les principales critiques qu'on a encore contre ce projet, c'est que les gens ont besoin de plus d'information; ils ont besoin de savoir plus comment le système va être amélioré à la suite des commentaires qu'ils nous ont faits. Donc, il faut donner de l'information aux gens.

On est d'accord, on a arrêté toute information, toute publicité qui risquait de créer une confusion entre la nature du projet... Mais, M. le Président, les gens, de toute façon, continuent d'appeler. Les gens lisent les journaux, les gens parlent dans la rue, les gens continuent d'appeler à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, les gens continuent d'appeler au ministère, les gens appellent même dans leur CLSC. Alors, est-ce qu'on est après nous dire qu'il faudrait arrêter de prendre les appels et dire aux gens: Non, on ne vous donnera pas l'information que vous cherchez. Les gens ont le droit de demander de l'information, et c'est notre devoir de la donner quand ils appellent.

Le Président: Toujours sur cette question, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui, M. le Président, est-ce que vous pourriez demander au ministre de bien vouloir comprendre que ce qui est en cause, c'est que le ministère a mis sur pied un service de réponse? À partir des éléments qui existent aujourd'hui dans la législation, les fonctionnaires fournissent des réponses. Or, la loi n'est même pas adoptée. Est-ce que le ministre comprend que la loi n'est pas adoptée et qu'on ne peut pas répondre aux gens avant que la loi soit adoptée? C'est ça qui est en cause. Voyons donc!

Le Président: M. le leader du gouvernement. À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, si le chef de l'opposition avait bien écouté ce que je lui ai dit... Ce que j'ai dit, c'est que toute publicité a été arrêtée, sauf l'exception que j'ai mentionnée. Et ça a été effectivement fait. Est-ce que je dois comprendre du chef de l'opposition officielle et du leader de l'opposition officielle que, quand un citoyen va appeler au ministère de la Santé, on va raccrocher la ligne au nez, puis on va dire: Non, il ne se passe rien? Le droit d'un gouvernement d'informer les citoyens sur une législation proposée existe.

Le Président: Je voudrais rappeler à certains membres de cette Assemblée qu'il est vraiment inacceptable, même si on n'a pas le droit de parole, et surtout si on n'a pas le droit de parole, d'utiliser des propos qui sont non seulement antiparlementaires, mais qui, en plus, créent le désordre à l'Assemblée.

Alors, à ce moment-ci, je demanderais à ce que tout le monde respecte la règle fondamentale qu'il n'y a qu'une personne qui parle à la fois quand le président reconnaît ce député ou cette députée. Et, en l'occurrence, après le leader du gouvernement, qui vient d'avoir la parole, je cède la parole au chef de l'opposition officielle, toujours sur cette question.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le leader du gouvernement sait que le texte de l'annonce et ce qui persiste et la façon dont on attire l'attention des gens, c'est en leur demandant s'ils veulent plus d'information sur le nouveau régime d'assurance-médicaments? Il n'existe pas, le nouveau régime, on n'a pas encore voté pour.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, est-ce que le chef de l'opposition officielle réalise que la publicité qu'il vient de citer est arrêtée, sauf l'exception que j'ai mentionnée? Est-ce qu'il est courant aussi que les fonctionnaires qui répondent aux questions de la population – et la population en a, des questions – répondent, suite à des directives très précises, que le projet de loi n'a pas été adopté, que ce n'est qu'un projet de loi. Et on a le droit d'informer la population. Je pense que le chef de l'opposition ne voudrait pas qu'on l'informe, la population, M. le Président.

(11 h 10)

Le Président: À ce moment-ci, je voudrais peut-être rappeler ce que j'ai indiqué tantôt non seulement dans ma décision, mais, par la suite, dans des commentaires que j'ai faits après la réaction que cette décision a suscitée. Il faut faire la distinction entre de la publicité sur des décisions gouvernementales et de la publicité sur des décisions qui appellent une sanction de l'Assemblée nationale. Ce que j'ai indiqué, mes deux prédécesseurs l'avaient fait préalablement... en fait, mon prédécesseur l'avait fait, le député... en fait, le président Saintonge l'avait fait à deux reprises, et je l'ai fait tantôt, et le vice-président Pinard l'avait fait également, il faut faire cette distinction-là, fondamentale, entre les décisions gouvernementales et la sanction qui doit être donnée à une décision par le Parlement.

Par ailleurs, ce que j'ai indiqué, c'est que, malgré cette distinction-là – et je crois que c'était le sens des décisions précédentes – dans l'opinion publique, souvent, on ne fait pas la différence entre une décision gouvernementale et une décision qui vient de l'Assemblée nationale. En l'occurrence, c'est la raison pour laquelle le président Saintonge, avant moi, et moi aujourd'hui... Je réitère que l'approche que nous devons avoir, c'est de très clairement indiquer que, quand une décision gouvernementale appelle une sanction pour que cette décision soit en application du Parlement, ça doit être clair. Mais, une fois que cette mise en garde est faite, ni le président ni l'Assemblée, compte tenu de nos règles actuelles, ne peuvent empêcher le gouvernement de donner de l'information ou de publiciser des décisions qui lui appartiennent. Alors, faisons la distinction, mais faisons en sorte aussi que les citoyens comprennent qu'une décision gouvernementale qui appelle, pour qu'elle soit mise en exécution, un projet de loi, cette décision n'est effective qu'après la sanction du projet de loi. Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Très brièvement, M. le Président. Et puis-je faire appel, à ce moment-ci, à tous les collègues de l'Assemblée nationale? Et nous l'avons fait il y a quelques années, alors que le député de Joliette était leader de l'opposition et qu'il s'était offusqué, à raison, du fait que des organismes gouvernementaux ne respectaient pas l'Assemblée nationale en déposant hors délai des rapports qui étaient nécessaires pour les parlementaires. Je le rappelle aux membres de l'Assemblée en faisant un appel pour que l'autorité de l'Assemblée, ce ne soit pas quelque chose qui soit partisan, vu d'un côté ou de l'autre de la Chambre, mais que vous ayez le support, M. le Président, de tous les législateurs face à un exécutif qui, sous tous les gouvernements, a commis des lacunes.

À l'époque... Et je ne pensais jamais avoir à citer le député de Joliette dans des questions de procédure parlementaire, M. le Président, qui avaient trait...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis: ...mais je lui rappelle ses propos: Par rapport à l'indifférence des ministères, des organismes et de même des dirigeants, qui est fondamentalement à la source du mépris qui s'exprime de façon chronique envers les parlementaires... Je fais miens ces propos du député de Joliette, M. le Président, et sollicite l'appui de tous les membres de l'Assemblée pour supporter la décision et que le ministre de la Santé et des Services sociaux s'y conforme, M. le Président, il est aussi un parlementaire.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je suis tout à fait en accord avec ce qu'a dit le député de Joliette, M. le Président, et ce que vient de répéter le député de Brome-Missisquoi, et, d'ailleurs, c'est pour ça que nous avons fait cesser la publication, pour éviter toute controverse jusqu'à l'adoption éventuelle du projet de loi. Quant aux lignes, M. le Président, je le réitère, et vous l'avez confirmé, un gouvernement a le droit d'informer la population, il a le droit d'informer la population mais tout en faisant les mises en garde nécessaires à l'effet que c'est une réforme qui est proposée et qui est tout à fait dépendante de la volonté de cette Chambre, de cette Assemblée législative. Alors, nous avons le droit d'informer la population et c'est ce que nous allons continuer de faire. Mais, cependant, il n'y aura pas de publicité, M. le Président.

Une voix: ...

M. Bélanger: Non, la publicité a été arrêtée, M. le Président, suite, justement, au débat qu'il y a eu en cette Chambre et pour éviter tout débat et pour respecter ce qu'a dit le député de Joliette.


Réponses différées


Patient en attente d'une transplantation pulmonaire à l'hôpital Notre-Dame, à Montréal

Le Président: Alors, ces précisions ayant été données, nous en arrivons maintenant à l'étape des réponses différées.

M. le ministre de la Santé et des Services sociaux répondra maintenant à une question posée le 7 juin par M. le député de Viau relativement à un cas de transplantation pulmonaire. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Oui, M. le Président. Le député de Viau avait soulevé une question au sujet d'une personne qui n'a pu recevoir une transplantation pulmonaire alors qu'un poumon compatible avec le receveur avait été identifié. Vérification faite, je peux donner l'information suivante à cette Chambre et à la population. D'abord, parce qu'on avait aussi soulevé la possibilité d'un manque de ressources dans le secteur des transplantations qui pouvait expliquer cette situation... Or, vérification faite, je peux confirmer à cette Chambre que ce n'est pas un manque de ressources consacrées à la transplantation en général et à la transplantation pulmonaire en particulier qui a occasionné le fait qu'on n'ait pas procédé à une transplantation dans ce cas-là, M. le Président.

Deuxièmement, l'information qu'on a obtenue à partir des gens sur le terrain, dans les centres hospitaliers impliqués, est à l'effet que c'est pour des raisons techniques qu'il n'a pas été possible, dans le très court délai dans lequel on devait procéder, de procéder dans ce cas-là, M. le Président.

Par ailleurs – et c'est mon troisième point d'information – l'organisation et l'utilisation rationnelle de nos ressources dans les domaines de la surspécialité au Québec et, singulièrement dans ce cas-ci, dans le domaine de la transformation est un domaine...

Une voix: Transplantation.

M. Rochon: ...qui a besoin d'améliorations, M. le Président. Au cours des deux dernières années, on a pu commencer à stabiliser assez notre réseau en ce qui regarde la première ligne et la deuxième ligne de services spécialisés et on en est présentement à intensifier nos efforts pour les services de surspécialisation, qui demandent encore des améliorations, M. le Président. D'ailleurs, à cet effet, c'est très bien connu dans le domaine – d'ailleurs, le député d'Argenteuil, qui connaît aussi cette situation, m'avait posé une question à cet effet – effectivement, il y a besoin d'une meilleure rationalisation et, entre autres, d'un meilleur regroupement de la masse critique de nos effectifs et de nos ressources qu'on a dans ce domaine-là, et c'est quelque chose qui est en train de se faire présentement.

Et je peux m'engager, M. le Président, que, dans l'ensemble des soins spécialisés, surspécialisés, particulièrement dans un domaine comme celui-là, au cours des prochains mois et des prochaines semaines, on va accélérer nos efforts de ce côté-là, de sorte que nos ressources vont être utilisées de façon absolument efficace et que tous les services dont la population a besoin seront donnés au moment où on en a besoin, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui, M. le Président. Le ministre, qui n'a même pas voulu prendre la parole sur le projet de dons d'organes d'hier, est-ce que le ministre de la Santé peut arrêter de dire que tout va bien, que tout est attaché avec ses fonctionnaires, comme un parfait technocrate, quand, sur le terrain, son virage ambulatoire commence à faire des victimes, dont ce jeune patient? Et est-ce qu'il peut nous dire ce qu'il va faire pour ce jeune patient, pour réparer son erreur monumentale?

Le Président: Je m'excuse. Alors, le bon fonctionnement de l'Assemblée nécessite – encore une fois, je le redis, je pense que c'est la deuxième semaine que je le rappelle – qu'on s'endurcisse un peu la couenne. Si, chaque fois qu'il y a une intervention qui nous grafigne un peu, on se met à crier, on n'en finira plus, là. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: M. le Président, tout ce qu'on veut demander au ministre, c'est: Qu'est-ce qu'il va faire pour ce patient, maintenant qu'il a commis une erreur monumentale?

Le Président: M. le ministre.

Une voix: Il n'a commis aucune erreur.

M. Rochon: M. le Président, quand on veut améliorer une situation, je pense que la première chose à faire, c'est surtout de ne pas s'énerver. La situation actuelle, qui fait qu'on pourrait avoir une meilleure organisation, une meilleure rationalisation et utilisation de nos ressources dans des domaines de surspécialité pour des interventions qui coûtent très cher, qui demandent des équipes très spécialisées, qui sont très difficiles à monter et très fragiles à garder, les difficultés qu'on a présentement, ce n'est pas le résultat du virage ambulatoire, il faut bien le comprendre, c'est le résultat de ce qu'on a laissé traîner comme situation pour ne pas l'avoir organisé, ce secteur-là. Et, avec le virage ambulatoire, on en est rendu là. On a commencé à le réorganiser, M. le Président, et ça ne va aller qu'en s'améliorant, cette situation-là.

(11 h 20)

Le Président: À l'ordre! Vous aurez compris que la remarque pour un côté s'applique maintenant pour l'autre.


Votes reportés


Adoption du principe du projet de loi n° 33

Alors, aux votes reportés maintenant, tel qu'annoncé précédemment, nous allons procéder au vote sur la motion de M. le ministre de la Santé et des Services sociaux proposant que le principe du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, soit adopté.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie– Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Rivard (Limoilou), M. Baril (Arthabaska), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Paillé (Prévost), M. Létourneau (Ungava), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Charbonneau (Bourassa), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:61

Contre:38

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion est adoptée. Le principe du projet de loi n° 33 est donc adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Président: Cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Alors, la motion est adoptée.

Motion sans préavis.


Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux...

Le Président: Je m'excuse, M. le leader du gouvernement. J'inviterais les membres de l'Assemblée qui ont affaire à l'extérieur de le faire rapidement et en silence pour que nous puissions poursuivre les travaux ici, dans l'enceinte. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je disais donc que la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, et de 15 heures à 18 heures, et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 25, Loi modifiant le Code civil en matière d'obligation alimentaire, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission du budget et de l'administration procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 29, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives, après les affaires courantes et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission du budget et de l'administration procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 34, Loi sur le transfert des attributions de l'Office des ressources humaines, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 18, Loi sur le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration et modifiant d'autres dispositions législatives, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

J'avise également cette Assemblée, M. le Président, que la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude des projets de loi d'intérêt privé suivants: le projet de loi n° 216, Loi concernant la Régie d'assainissement des eaux usées de Piedmont, Saint-Sauveur et Saint-Sauveur-des-Monts; le projet de loi n° 223, Loi concernant la Ville de Sainte-Marie; le projet de loi n° 228, Loi concernant la Ville de Mont-Laurier; le projet de loi n° 231, Loi concernant le Canton d'Orford; le projet de loi n° 245, Loi concernant la Paroisse de Saint-Joseph-de-Lanoraie; le projet de loi n° 246, Loi concernant la Ville de Mirabel; le projet de loi n° 249, Loi modifiant la Charte de la Ville de Québec. L'étude de ces projets de loi d'intérêt privé se déroulera à la salle Louis-Joseph-Papineau, le mercredi 19 juin 1996, de 11 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures.

Le Président: Ça va pour les avis touchant les travaux des commissions?

Maintenant, renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Ça va?


Affaires du jour

Nous passons maintenant, dans ce cas-là, aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 39 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 21


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Président: À ce moment-ci, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 21, Loi modifiant la Loi sur la Société de récupération, d'exploitation et de développement forestiers du Québec.

Est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, nous avons convenu, le critique, M. le député de Montmagny-L'Islet, et moi-même, d'attendre pour nos interventions en troisième lecture.

Le Président: Alors, il n'y a pas d'intervention.


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 21, Loi modifiant la Loi sur la Société de récupération, d'exploitation et de développement forestiers du Québec, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 33 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 1


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et de l'amendement du ministre

Le Président: À l'article 33, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi n° 1, Loi sur le ministère de la Métropole, ainsi que l'amendement transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le ministre d'État à la Métropole. Cet amendement est déclaré recevable.

Alors, est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre d'État à la Métropole.


M. Serge Ménard

M. Ménard: M. le Président, il me fait plaisir de prendre la parole une deuxième fois devant cette Assemblée pour défendre le projet de loi n° 1, le projet de loi créant le ministère de la Métropole. Nous avons eu l'occasion de l'étudier en commission parlementaire. L'opposition a suggéré quelques amendements, nous en avons accepté un; pour les autres, je pense que je peux expliquer pourquoi, bien que d'accord avec les suggestions de l'opposition, il n'y avait pas lieu d'amender la loi.

(11 h 30)

Je voudrais d'abord rappeler un certain nombre de choses importantes. D'abord, le nom du ministère. J'ai choisi le nom de «Métropole» parce que je voulais que l'ensemble des citoyens qui habitent dans la région métropolitaine de Montréal – qui, je le sais bien, ont parfois leur susceptibilité – aient un nom qui puisse les rassembler tous et auquel ils s'identifieraient facilement. J'ai cru que ce nom ne devait pas mentionner Montréal, même si ses citoyens généralement, lorsqu'ils voyagent à l'étranger, s'empressent de préciser qu'ils habitent dans la région de Montréal, Montréal étant le nom le plus connu par lequel ce lieu est appelé.

Aussi, j'espérais avoir un nom qui soit un objectif. Parce que c'est un nom qu'on utilisait de moins en moins, celui de métropole, depuis qu'on sent qu'on a perdu le titre de métropole du Canada au profit de la région de Toronto. Mais cela signifie quand même un lieu d'excellence, un lieu où les échanges sont intenses, où les opportunités sont extrêmement grandes. Lorsqu'on élève des enfants, on sait que, quelle que soit la spécialisation qu'ils pourront choisir, ils peuvent atteindre les sommets dans une métropole. C'est aussi, par contre, un lieu qui a ses misères, qui a ses problèmes, où la solitude est encore plus difficile à supporter qu'ailleurs, où les problèmes sociaux se présentent en premier, qui demandent des actions nouvelles, innovatrices, pour faire face à ces problèmes nouveaux. Et je crois que ce nom pouvait justement avoir ce caractère rassembleur et ce caractère d'objectif.

La première chose aussi qu'il fallait définir, c'est le territoire. C'est difficile de définir le territoire d'une métropole, parce que les limites sont nécessairement imprécises, puisque ce qui détermine essentiellement la région métropolitaine, c'est l'intensité des rapports que ses habitants peuvent avoir entre eux, c'est ce qui détermine la compétition, la surspécialisation, les opportunités d'achats, d'échanges de toutes sortes. Chaque fois que l'on veut définir ce territoire et qu'on s'adresse aux élus qui représentent les diverses populations des diverses communautés de ces territoires, ils veulent tous en faire partie pour les avantages, mais lorsque vient le temps de distribuer la facture, alors, là, il y en a plusieurs qui voudraient s'en voir séparer.

L'expérience passée nous démontrait justement que, si nous passons notre temps à définir le territoire de la métropole et si nous demandons un consensus général entre élus, d'abord, il sera probablement impossible à atteindre, et puis, deuxièmement, si nous prenons une décision sur le territoire, il y aura nécessairement des frustrations qui vont être laissées.

Nous avons donc décidé de prendre un critère objectif, une définition reconnue internationalement, acceptée par tous les pays de l'OCDE et appliquée, donc, de façon uniforme en Amérique du Nord et qui a l'avantage de tenir compte, au fond, de la latitude des citoyens vis-à-vis la métropole, nous avons retenu le critère de la région métropolitaine de recensement.

Comment définit-on, sur le plan international, une région métropolitaine de recensement et, donc, comment cette définition s'applique-t-elle aussi à Montréal? D'abord, nous déterminons un noyau urbain, et là, on s'en doute, puisqu'il s'agit d'un noyau urbain, on le définit par la densité de sa population, c'est-à-dire lorsqu'il y a 400 habitants au km². Mais, comme il est rare d'avoir cette uniformité de densité, même dans une grande ville – par exemple, dans une cour de triage ou bien sur le mont Royal, il n'y a pas 400 habitants au km² – alors on dit que c'est lorsqu'il y a 400 habitants au km² à moins de 2 km de distance, cela détermine un noyau urbain. Une fois qu'on a déterminé le noyau urbain, on regarde les travailleurs qui vivent autour de ce noyau urbain, quel est leur comportement. Eh bien, on dit que lorsque, dans une communauté, plus de la moitié des travailleurs se rendent travailler à l'intérieur du noyau urbain, cette communauté fait donc partie de la région métropolitaine de recensement.

Donc, l'avantage que les citoyens ne voteront plus avec leurs pieds, ou plutôt, dans le cas de la région métropolitaine de Montréal, avec leurs chars. Et cela définit aussi, nécessairement, la proximité qui doit nécessairement exister entre les habitants d'une région métropolitaine, puisqu'elle détermine aussi la possibilité et l'intensité des échanges nombreux qui caractérisent ce qui existe dans une métropole. Cela, aussi, fait que nous n'avons pas à discuter entre élus des avantages, des désavantages ou des critères nouveaux par lesquels nous devons inclure ces gens dans la métropole. Mais cela, quand même, nous rend conscients qu'il y a certains problèmes qui sont vécus plus intensément à l'intérieur d'un territoire plus restreint de la métropole et qui demandent parfois d'être réglés par un moins grand nombre de ces unités. Mais cela, aussi, nous rend conscients que, dans d'autres domaines, les problèmes d'une métropole ou même ses avantages s'étendent au-delà de ses frontières. On pourra donner des exemples tout à l'heure, justement, d'attitudes qui font voir que ce territoire reste quand même imprécis et, donc, un peu élastique dans le mesures que nous devrons prendre.

C'est évident que la création de ce ministère ou l'annonce de la création de ce ministère a été saluée avec beaucoup d'enthousiasme dans la région métropolitaine de Montréal. Je pense qu'il y a une raison à cela. Dans tous les pays où la métropole n'est pas la capitale, les gens de la métropole se plaignent parfois de l'insensibilité des fonctionnaires, qui habitent la capitale, aux problèmes des métropoles, au fait qu'ils ne saisissent pas assez rapidement l'urgence de solutionner certains problèmes nouveaux, au fait, même, qu'ils prennent parfois des décisions contradictoires entre différents ministères sectoriels, les ministères sectoriels étant, comme on le sait, par exemple, l'Éducation, la Santé, la Sécurité publique, l'Industrie et Commerce et tous les autres ministères du gouvernement. Cette nécessité, donc, détermine la première mission du ministère de la Métropole, celle d'assurer la cohérence des actions gouvernementales quand elles ont un impact significatif sur la métropole.

J'ai parlé du territoire. Lorsque nous avons déterminé le territoire, on a réalisé tout de suite ce que ne doit pas être le ministère de la Métropole et comment il va déterminer ses fonctions, ses missions et sa nature. Parce que ce territoire regroupe 47 % de la population du Québec. En fait, ce sont les données du dernier recensement qui sont disponibles, celui qui a été fait en 1991. Comme on le sait, un autre est en cours actuellement, en 1996. Ces recensements se font chaque cinq ans.

Il regroupe donc 47 % de la population, 111 municipalités. Sur ce territoire, il y a une communauté urbaine. Nous regroupons entièrement ou partiellement 16 municipalités régionales de comté, nous avons 31 commissions scolaires. Nous avons donc 111 maires et près de 1 000 élus municipaux, et donc au-delà, en fait, de 1 000 personnes élues pour représenter d'une façon ou d'une autre, que ce soit dans les commissions scolaires ou dans les conseils municipaux, des habitants de la métropole. Alors, cela nous indique tout de suite la deuxième grande mission. La première étant la cohérence des actions gouvernementales, la deuxième mission étant donc la concertation de tous ces acteurs. Parce que, en plus de tous ceux qui sont élus, il y a tous les acteurs socioéconomiques qui ont une influence sur l'avenir de la métropole. La deuxième mission est donc d'assurer la concertation entre ces différents acteurs afin d'obtenir – et c'est la troisième mission – que leurs actions soient coordonnées. Donc, c'est drôle, c'est un hasard, en français, ça donne trois grandes missions: cohérence, concertation, coordination.

Les problèmes de la métropole, de Montréal, ont amené les gouvernements antérieurs à prendre des mesures pour qu'ils soient considérés de façon particulière. Le gouvernement antérieur avait cru bon de créer un secrétariat et un comité ministériel, si je me souviens bien, de huit ministres pour s'occuper particulièrement des problèmes de la métropole, qui avait un secrétariat qui relevait du Conseil exécutif. Je n'ai rien contre cette formule, c'était une formule qu'on avait essayée.

(11 h 40)

Ce qu'il y a de nouveau dans la création du ministère, c'est qu'on a maintenant un ministre à temps plein pour s'occuper de la métropole, et un ministère avec des gens qui travaillent à temps plein sur les problèmes de la métropole. Je crois que le fait qu'il y ait encore tant de problèmes à régler démontre que la formule du secrétariat avec un comité ministériel de ministres qui avaient d'autres responsabilités n'était pas suffisante par rapport à l'importance des problèmes de la métropole. Ce n'est pas un blâme sur ceux qui ont créé cette formule, c'est simplement de réaliser aujourd'hui qu'il fallait faire plus. Parce qu'on sait bien que chaque ministère peut occuper tout le temps qu'un ministre a de disponible. Mais, quand on confie des responsabilités sectorielles à un ministre dont il est le dernier responsable, le seul responsable, bien, c'est évident que la majorité de ses préoccupations va à exercer ces fonctions dont il est le seul responsable. Sur les sujets où sa responsabilité est partagée, il a nécessairement une tendance, puisqu'elle est partagée, à partager le fardeau avec d'autres; finalement, personne en particulier n'est responsable de la solution des problèmes qui leur sont confiés. Alors, les problèmes de la métropole étaient si importants qu'il fallait qu'il y ait une personne qui s'en sente responsable.

Si la création de ce ministère est un défi remarquable, c'est très nouveau comme formule. En fait, il ne s'est jamais créé de ministère qui avait pour fonction la relance économique d'un territoire précis. Et je disais que – c'est pour ça que j'ai parlé du territoire en début – dès que l'on parle du territoire, on réalise ce que ce ministère doit être et ce qu'il ne doit pas être. Si on y retrouve 47 % de la population, si, comme on me dit parfois, quoique ce sont des données qui sont difficiles à vérifier, l'État, paraît-il, y perçoit près de 80 % de ses revenus – et il est difficile de dire, en fait, combien l'État y dépense d'argent, mais on me dit que ça pourrait tourner autour de 40 % de ses revenus – donc il y aurait à peu près 40 % des fonctionnaires de l'État qui, sous une façon ou sous une autre, s'occuperaient de problèmes qui ont un impact significatif sur la métropole. Mais on voit tout de suite qu'à moins de révolutionner de façon... et puis, je pense, ça ne serait pas correct, la structure du gouvernement, il ne s'agit pas de confier à un seul ministre 40 % des fonctionnaires, 40 % des dépenses de l'État et d'avoir un superministère qui s'occuperait d'éducation, de santé, de sécurité publique, de finances, de revenu, et ainsi de suite, pour un territoire. Il fallait donc créer un ministère qui chercherait à utiliser les argents qui sont déjà dépensés par d'autres ministères à meilleur escient dans le territoire de la métropole.

C'est pourquoi, d'ailleurs, ce ministère est constitué d'une équipe légère; en fait, nous avons actuellement 70 employés, du sous-ministre jusqu'aux secrétaires et aux téléphonistes. Le but de ce ministère est justement d'utiliser, de sensibiliser et d'utiliser les autres ministères, de leur donner, dès que leurs mesures ont un impact significatif sur la métropole, une conscience qu'ils doivent attaquer ces problèmes d'une façon particulière, qu'ils doivent être sensibles aux problèmes de la métropole et dans la conception de leurs politiques ministérielles.

C'est pourquoi je dirais que le paragraphe le plus important de cette loi, qui est quand même assez courte, est le premier paragraphe de l'article 4, qui dit justement que le ministre de la Métropole «est associé à l'élaboration des mesures et des décisions ministérielles ayant un impact significatif sur la métropole». On comprendra immédiatement aussi que cette fonction ne peut donner des résultats immédiats puisque la majorité des politiques ministérielles qui sont appliquées présentement ont été élaborées à une époque où le ministère de la Métropole n'existait pas encore, où, en fait, même l'idée de la création d'un ministère de la Métropole n'avait pas encore été exprimée publiquement. Mais c'est là, donc, la première façon dont ce ministère va assurer la cohérence des actions gouvernementales sur le territoire de la métropole.

La deuxième façon, c'est, enfin, une fois que les politiques ont été élaborées, qu'elles ont pris la forme de mémoires qui seront soumis au Conseil des ministres pour approbation, elles ont à passer un certain nombre d'étapes. Et là, l'une de ces étapes, c'est le deuxième paragraphe de l'article 4. C'est que l'avis du ministre de la Métropole est requis sur toute mesure qui a un impact significatif sur la métropole avant qu'elle ne soit soumise pour décision du Conseil du trésor ou du gouvernement.

Pour réaliser cette mission, le ministère a besoin d'informations. On n'a pas voulu que ce ministère – justement parce que, dans la situation financière difficile de la province, nous pensons encore qu'il faut non pas dépenser plus, mais dépenser mieux – que les officiers de cette équipe légère soient toujours en train de courir après les informations dont elle a besoin. On a donc créé l'obligation, à la fin de l'article 4, à tous les ministères et organismes du gouvernement de communiquer au ministre les renseignements nécessaires à l'exercice de ses responsabilités.

Cet article est celui sur lequel on s'est finalement arrêté plutôt qu'une autre option qui nous avait été suggérée d'un droit de veto sur tout projet gouvernemental qui aurait un impact significatif sur la métropole. Cette attitude d'empêcher, d'abord, ce n'est pas l'attitude que je préfère. Je préfère plutôt l'attitude de pouvoir participer, d'innover, de lancer des projets, l'attitude d'initiative. Et je répondrai à ceux qui pensent que, sans droit de veto, je n'ai pas les pouvoirs suffisants pour exercer correctement les responsabilités qui m'incombent, que, à mon avis, en étant associé à l'élaboration des mesures qui ont un impact sur la métropole dès le début et en pouvant donner mon avis à la fin du processus, cela vaut bien des droits de veto. D'autant plus qu'un droit de veto est une attitude peut-être plus agressive, une attitude de confrontation avec les autres ministères, ce qui n'est pas l'attitude, je pense, qu'il faut avoir dans ce ministère. J'ai dit tout de suite à mes collaborateurs immédiats que, s'il y a bien un défaut que je ne veux pas voir dans ce ministère, c'est l'arrogance. Puisque, justement, nous devons travailler avec les autres machines gouvernementales, il faut que nous soyons toujours perçus comme des gens qui aident ces autres ministères à mieux exécuter leurs fonctions sectorielles.

Les autres fonctions de cohérence et de concertation sont reprises dans la loi et, comme elles ne posent pas de problème à personne, je pense qu'il est inutile de référer aux articles précis. Cependant, au cours des discussions qui ont eu lieu sur la création du ministère, un certain nombre de sujets ont été soulevés, auxquels je voudrais répondre. D'abord, on voulait que le siège social du ministère soit à Montréal, une attitude tout à fait naturelle si les ministères avaient un siège social. Mais, en fait, les ministères n'ont pas de siège social parce que les ministères n'ont pas de personnalité juridique distincte. Le siège du gouvernement est dans la capitale, comme dans tous les pays. Les ministres sont membres du gouvernement, et il n'y a aucun ministère qui ait un siège social. Donc, il n'y avait pas lieu de dire que le siège social serait à Montréal puisqu'il n'y a pas de siège social. Alors, on s'est repris sur l'expression «principale place d'affaires». D'abord, c'est là une expression qui est utilisée pour l'entreprise privée. Quant à moi, je vois une distinction entre les organismes publics – et surtout un ministère – et l'entreprise privée.

(11 h 50)

Mais qu'est-ce que cela veut dire, la principale place d'affaires? Eh bien, la principale place d'affaires, généralement, cela veut dire l'endroit où il y a le plus d'activités, donc l'endroit où il y a le plus d'employés. Eh bien, cette réalité, nous la livrons. Sur 70 employés au ministère de la Métropole, il y en a 10 qui sont à Québec; il y en a 60 qui sont à Montréal. Alors, je n'ai peut-être pas pu donner la satisfaction symbolique que certains demandaient, mais nous leur livrons plutôt la réalité. Je pense que les gens de Montréal préfèrent la réalité au symbole, de sorte que, dans les faits, notre principale place d'affaires est donc à Montréal.

Pourquoi y a-t-il des employés à Québec? Eh bien, on l'aura compris, c'est à cause de cette première mission de notre ministère qui est d'assurer la cohérence des actions gouvernementales. Le siège social, pas le siège social, mais, enfin, le siège du gouvernement du Québec est à Québec, sa capitale. C'est là que se prennent les décisions, c'est là, souvent, que sont élaborées, justement, les politiques auxquelles nous devons participer. Il faut donc que nous ayons là des experts qui suivent ces travaux dans les différents ministères et qui, donc, peuvent intervenir pour être impliqués dans l'élaboration de ces mesures, pour mieux les connaître, pour les façonner et, ensuite, rédiger les avis qui s'imposent. Il est donc important que nous ayons des employés là. Mais, pour les autres fonctions de concertation, de coordination, de réalisation de projets à l'avantage de la métropole, il est préférable que de ces employés soient à Montréal plutôt, et c'est là la majorité.

On a fait beaucoup de cas aussi du budget du ministère. J'ai peut-être donné moi-même une impression, que je voudrais corriger, convaincu que j'étais que, dans la situation des finances publiques actuelles, il faut cesser de penser que c'est en arrosant les problèmes d'argent qu'on va les solutionner. C'est cette attitude, je pense, qui a fait que, dans le passé, alors que l'économie augmentait beaucoup plus rapidement qu'aujourd'hui – et ça, au niveau mondial – la progression était beaucoup plus grande. On avait toujours l'impression qu'on mesurait la volonté politique de réaliser des choses aux millions ou aux milliards qu'on pouvait mettre sur les problèmes. Je pense qu'au contraire, maintenant, il faut chercher à faire mieux avec le même argent. Justement, c'est ce qui a amené la création d'un ministère de la Métropole, c'est cette pensée que le gouvernement dépense beaucoup d'argent dans la métropole, mais que, s'il y avait quelqu'un pour s'assurer que cela soit fait de façon cohérente, eh bien, il serait mieux dépensé et les problèmes de la métropole seraient mieux solutionnés. J'insiste encore que c'est là la façon idéale.

Mais il ne faut pas oublier qu'on a confié, justement, au ministre de la Métropole quatre organismes gouvernementaux qui sont particulièrement assignés à régler des problèmes métropolitains et qu'ils ont des budgets eux-mêmes: la Régie des installations olympiques, le Palais des congrès de Montréal, l'Agence métropolitaine de transport de Montréal, Innovatech du Grand Montréal. Eh bien, je veux dire, il est quand même bon de souligner que, si vous additionnez les budgets de ces divers organismes, vous arrivez à près de 240 000 000 $, plus le fonctionnement du ministère, qui serait prévu, de cette équipe légère dont j'ai parlé, autour de 5 000 000 $. Vous avez donc là un budget qui approche 250 000 000 $ en tout.

Cela répond, je pense, aussi, à certaines objections qui avaient été soulevées. On me disait, entre autres, que le ministre n'avait pas de pouvoirs en matière de transport. Mais dois-je rappeler que, justement, l'Agence métropolitaine de transport, qui vient d'être créée et dont le budget sera de 168 000 000 $, relève directement du ministère de la Métropole? Sans doute, cette Agence a une certaine indépendance, et elle doit avoir une indépendance, mais elle s'occupe de la partie la plus importante des problèmes de transport de la métropole, celle des transports collectifs. Mais il est impossible, lorsqu'on crée un ministère qui est totalement original, qui doit créer des structures, qui a aussi un pouvoir d'initiative – car cette loi donnera au ministère de la Métropole des pouvoirs d'initiative, d'initier des projets à l'avantage de la métropole – et il est impossible de prévoir avant un an de combien exactement ce ministère aura besoin.

Donc, la formule qui est utilisée habituellement, et c'est pour ça que je l'utilise, c'est que ce ministère, pendant sa première année d'existence, prend les argents dont il a besoin directement au Fonds de suppléance de la province. D'ailleurs, c'est aussi pour ça qu'il y a un fonds de suppléance. Quand on prévoit le budget chaque année, c'est pour les urgences qui peuvent arriver, les choses qui sont non prévues parce que non prévisibles, mais c'est aussi pour ces choses comme la création d'un nouveau ministère que ce Fonds de suppléance existe.

Donc, il va de soi qu'on ne peut mesurer avec la même précision qu'un ministère qui a de l'expérience de plusieurs années combien ce ministère dépensera dans le courant de son existence. Mais le fait qu'il peut justement utiliser le Fonds de suppléance démontre qu'il pourra avoir recours à tous les fonds dont il a besoin, ce qui ne m'empêchera pas de dépenser ces fonds avec un grand souci pour le respect des finances publiques, car je sais que le déficit qui nous cause tant de difficultés aujourd'hui... la solution du déficit est une tâche à laquelle tous les ministres responsables doivent s'attaquer, et ça, c'est à l'avantage de tous les citoyens, y compris les 47 % des citoyens qui habitent la région métropolitaine.

Aussi, certains se sont montrés inquiets de la création de ce ministère, comme les autres régions du Québec. D'abord, je rappellerai une chose. C'est qu'au fond la création du ministère de la Métropole est l'application et le corollaire d'une politique générale qui s'applique aux régions, c'est-à-dire la fin de la politique mur à mur, que les fonctionnaires, que les ministères soient sensibilisés au fait que les politiques qu'ils élaborent doivent être adaptées différemment selon les régions. Et ça n'est qu'à cause de l'importance de la région de la métropole, 47 % de la population, qu'on a cru bon de créer un ministère.

Mais la deuxième chose que je voudrais dire: S'il est vrai que la relance de l'économie du Québec passe par la relance économique de sa métropole, eh bien, la métropole a toujours avantage à ce que les régions aillent bien. Je vais vous donner un exemple convaincant dès le départ. Si l'aluminium va bien, c'est sûr que c'est excellent pour la région du Lac-Saint-Jean, et puis c'est très bon aussi pour une partie de l'économie de la Côte-Nord, où sont les alumineries. Mais c'est aussi très bon pour la métropole parce que, naturellement, une métropole aspire, pour ainsi dire, le tertiaire supérieur, et donc les services qu'elle rendra à cette industrie vont amener un avantage économique. Ce qui est vrai pour l'aluminium est vrai pour les forêts, c'est vrai pour les mines, c'est vrai pour les pêcheries, que nous voudrions voir aller mieux pour le bien de la Gaspésie. Donc, la métropole a tout avantage à la santé économique des régions.

Mêmes inquiétudes aussi, parfois, sur la couronne qui entoure le noyau urbain. Les gens autour ont peur d'être mobilisés, surtout fiscalement, pour régler les problèmes du centre. Eh bien, d'abord, ma conviction, c'est que, justement à cause de cette proximité, toute activité économique qui va s'installer sur une partie du territoire de la métropole est à l'avantage de l'ensemble de la métropole parce qu'elle crée des emplois, et ces emplois amènent les gens à dépenser dans le territoire de la métropole. Puisque la métropole est justement définie par ce lieu où au moins la moitié des travailleurs peuvent se rendre chaque jour pour leur emploi, ils s'y rendent donc pour faire leurs achats, et, donc, c'est nécessairement bon. Et c'est comme ça que j'entends mener ce ministère.

Mais je rappellerai toujours, cependant, qu'il faut éviter le phénomène qu'on a vu dans des grandes métropoles nord-américaines, où les gens fuient le centre, d'abord parce que c'est moins coûteux à l'extérieur. Et, comme c'est moins coûteux à l'extérieur, bien, ils laissent moins de gens payer les infrastructures du centre. Et puis, donc, ça devient plus coûteux par tête de population pour le centre. Donc, comme ça devient plus coûteux, les gens sont plus poussés à l'extérieur. Donc, ils y vont plus vite, et c'est un cercle vicieux.

(12 heures)

Il ne reste finalement au centre que les gens qui ne peuvent le quitter: les gens les plus pauvres, très souvent. Le chômage s'y installe, la misère progresse. Additionnez à cela les problèmes ethniques, comme on le voit trop souvent dans les grandes métropoles américaines, la délinquance entraîne comme un bouillon qui crée de la délinquance et les gens commencent à quitter le centre parce qu'ils ont peur. Or, le centre des métropoles contient généralement ce qui en fait la fierté: les grands équipements, les instituts de haut savoir, les grands équipements culturels, sportifs. Si les gens ne viennent plus au centre pour ces raisons, à ce moment-là, la métropole perd son efficacité. Il est donc dans l'intérêt de tous les gens de la métropole que nous trouvions une façon d'arrêter ce phénomène. Nous ne sommes pas rendus au point où étaient certaines grandes métropoles américaines, mais il faut arrêter ce phénomène.

En conclusion, M. le Président, je vous dirai que je pense que nous avons respecté et apprécié, d'ailleurs, la collaboration que l'opposition a apportée. Elle a montré un esprit d'ouverture à la commission parlementaire. Si nous n'avons pas accepté tous les amendements qu'ils nous ont proposés, c'est parce que je crois qu'ils ont obtenu la réalité de ce qu'ils demandaient. Entre autres, il y en a un que nous avons accepté, dans le préambule. C'est avec raison que le député de Jacques-Cartier nous avait signalé que nous avions une attitude colonialiste dans le préambule. Nous avons enlevé les mots qui laissaient voir cette attitude colonialiste. Mais je crois que, si nous voulons redonner à la métropole sa relance, nous devons faire comme dans toutes les autres métropoles, nous devons avoir un certain enthousiasme.

Et je voudrais, en conclusion, que ce ministère démontre la solidarité qui doit exister au-delà des différences politiques, puisque, justement, les députés de la métropole sont peut-être à peu près – je ne l'ai pas calculé, là – moitié-moitié de partis différents. Il est donc important, comme c'est fait ailleurs, si nous voulons véritablement la relance économique de Montréal, que nous montrions notre solidarité au-delà des lignes de partis. Et c'est pourquoi j'espère avoir l'appui intelligent, comme je l'ai eu dans la commission parlementaire, des gens de l'opposition pour l'adoption rapide de la loi créant le ministère de la Métropole. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Je reconnais maintenant Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, et je pense que, Mme la députée, vous allez intervenir au nom du chef de votre formation politique, ce qui vous donne droit à 30 minutes à vous également.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur une autre étape importante du processus de l'adoption du projet de loi n° 1, soit la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements concernant le projet de loi, la loi créant le ministère de la Métropole.

M. le Président, ce que nous allons faire, c'est que je vais toucher une partie, c'est-à-dire la partie des amendements, mais j'ai des collègues qui vont vouloir intervenir sur des points très spécifiques au niveau de la loi, points sur lesquels ils ont discuté et, pour certains, je dois dire qu'ils n'ont pas eu de réponses encore au moment où on se parle, lors de la prise en considération.

Cette étape nous permet aussi de revenir sur le travail qui a été effectué lors de la commission parlementaire. D'abord, M. le Président, mes premiers mots s'adresseront à mes collègues qui ont participé avec moi à cette commission et qui ont fourni ou qui ont essayé de fournir, par leur approche positive, des éléments pour bonifier le projet de loi. J'aimerais les remercier sincèrement pour le travail constructif qui a été fait pendant ces quelques jours. Je veux mentionner le travail constructif, parce que chaque intervention a été faite de façon très, très précise et sincère, soit celui de s'assurer, comme je le disais tantôt, que le ministre d'État à la Métropole comprenne bien la réalité montréalaise. De plus, nous voulions nous assurer aussi qu'il puisse avoir les outils nécessaires pour effectuer le travail qu'il imagine devoir faire.

Je dois vous dire que j'ai été aussi particulièrement heureuse de constater à quel point notre formation politique continue de croire, comme elle l'a fait, qu'elle soit dans l'opposition ou au gouvernement, au développement de la métropole. C'est avec beaucoup de satisfaction que j'ai eu l'appui des élus libéraux de l'ensemble des régions du Québec pour nous dire: Allez de l'avant, travaillons sérieusement et concrètement, car nous avons besoin de la grande région de Montréal pour assurer un dynamisme à l'ensemble du Québec. J'ai été aussi heureuse de constater à quel point les élus de la grande région de Montréal nous ont aussi fait savoir qu'il était primordial que, durant toute cette réflexion, tout ce travail, nous devions prendre en considération une réalité fondamentale, c'est que la grande région de Montréal ne peut vivre sans l'ensemble du Québec.

De même, je voudrais remercier aussi les membres du parti ministériel de la commission qui ont, à leur tour, apporté des propos constructifs qui, à mon avis, ont servi à enrichir le débat et certainement à faire réfléchir le ministre sur son rôle, ses mandats, sur les pouvoirs qu'il devait probablement avoir et sur l'ensemble de son projet de loi.

J'aimerais rappeler, M. le Président, que, depuis la nomination du ministre d'État à la Métropole, nous avons dit et redit qu'en aucun temps nous ne doutions de la bonne foi du ministre, en aucun temps. Cependant, nous devons constater qu'il se trouve, et je lui ai dit à plusieurs reprises en commission parlementaire, dans une situation très difficile, voire, à notre avis, impossible. Alors que tous applaudissaient la nomination d'un ministre responsable de la Métropole – et, quand je dis tous, M. le Président, je dis tous, globalement, unanimement – qui verrait à assurer à la métropole son développement social et économique, très peu ont applaudi au genre de projet de loi qui nous a été présenté et que nous sommes en train de discuter.

Bien sûr, nous avons adopté le principe du projet de loi et nous avons tenté d'y apporter certains correctifs, mais, malheureusement, après l'étude détaillée article par article – étude qui a pris 16 heures, M. le Président – je dois constater que nos inquiétudes s'avèrent fondées. Au-delà des beaux discours, de l'image et de l'impression donnée que le gouvernement du Québec accorderait beaucoup d'importance à la métropole, une importance spécifique à cause du statut d'urgence, nous réalisons, une fois de plus, aujourd'hui, que peu de pouvoirs tangibles ont été attribués au ministre d'État à la Métropole, peu de pouvoirs non pas envers les élus de la grande région de Montréal, mais peu de pouvoirs envers ses collègues.

Pour ceux qui ont eu l'occasion de siéger à la table du Conseil des ministres et aussi pour tous ceux qui, des deux côtés de cette Chambre, ont eu à travailler à travers les dédales gouvernementaux, je pense que nous pouvons dire qu'il est nécessaire d'avoir un certain ascendant, spécialement quand on fait face à une situation d'urgence – puisque c'est le cas, c'est pour ça qu'on crée, pour la première fois dans notre histoire, un ministère territorial – afin de pouvoir travailler activement, concrètement et efficacement dans les dossiers qui nous concernent.

Je l'ai déjà dit, je le répète, et je suis encore peinée de le dire, nous faisons face à un projet de loi qui, à mon avis, relève beaucoup plus du marketing que d'une volonté politique réelle, sinon tangible, en ligne avec les discours, certes, mais certainement pas en attribuant au ministre les moyens nécessaires pour réaliser des choses concrètes. Même le ministre nous l'a confirmé pendant la commission parlementaire alors qu'il nous disait, et je le cite: «Cette loi ne donne aucun nouveau pouvoir au gouvernement. La première fonction du nouveau ministre, c'est d'assurer la cohérence des actions gouvernementales sur la métropole.» Beau discours théorique, belle philosophie, belle pensée, mais avec une lacune principale: les pouvoirs réels nécessaires pour arriver à jouer efficacement ce rôle.

À aucun endroit dans le projet de loi, nous ne pouvons dénoter quelques outils qui permettraient d'agir de façon concrète auprès de ses collègues pour arriver à réaliser ce mandat important. Imaginez un seul instant ce rôle avec les pouvoirs inhérents, non pas que ces pouvoirs auraient pour fonction de réduire ou de ralentir ou de soutirer des pouvoirs aux autres ministres sectoriels, bien au contraire, mais certains pouvoirs prépondérants pour lui permettre d'agir efficacement sur des problèmes particuliers, voire ponctuels, pour une situation d'urgence particulière qui est celle que vit, dans plusieurs secteurs, la métropole aujourd'hui.

Il est tellement vrai que ce projet de loi n'apporte aucun nouveau pouvoir au ministre que même l'un de ses collègues, le député de Saint-Hyacinthe, disait, lors de l'étude du projet de loi, que notre impression était que le ministre avait un pouvoir moral. Très beau, j'en conviens, mais ce n'est certainement pas avec un pouvoir moral exclusif que nous allons arriver à relancer rapidement et efficacement l'économie, entre autres, de la grande région de Montréal, sans parler des autres problèmes sociaux, voire la pauvreté, voire la délinquance, voire aussi l'intégration de toutes les communautés culturelles sur le territoire de la métropole.

(12 h 10)

Cela dit, M. le Président, je dois dire que nous avons tenté de bonifier avec le ministre son projet de loi. Je dois malheureusement mentionner que peu des amendements proposés ont été reçus et, évidemment, cela nous déçoit parce que nous avions, à notre avis, des amendements qui, sans défaire le sens du projet de loi, avaient, comme je vous l'ai dit auparavant, un but ultime, c'est-à-dire de rendre le projet de loi plus efficace afin de permettre au ministère de la Métropole de jouer un rôle plus direct et, surtout, d'être plus efficace plus rapidement.

Nous avons tenté d'apporter des amendements constructifs, et ce, dans un but précis, soit de donner – encore une fois, je l'ai dit tantôt, ça revient, M. le Président, mais c'est la clé de ce projet de loi – plus de pouvoirs au ministre pour assurer l'efficacité de son ministère, et, je le répète, non pas par rapport aux élus locaux, mais surtout par rapport aux collègues. Ayant siégé moi-même quelques années au Conseil des ministres, je peux vous dire que le rôle dont le ministre vient d'hériter avec ce projet de loi n'est pas simple. De plus, il aura, de l'avis de notre formation politique, beaucoup de difficultés à concilier la réalité, l'ensemble de la dynamique qui se joue, M. le Président. Nous sommes en politique, que voulez-vous, c'est notre lot: d'un côté, il y a un côté positif; de l'autre côté, il faut vivre avec et aussi agir efficacement.

J'aimerais donc, à ce moment-ci, reprendre certains des amendements importants que nous avons apportés lors de la commission parlementaire. Tout d'abord, l'article 2, et, M. le Président, je me permets de vous le lire: «2. Le ministre a pour mission de susciter et de soutenir l'essor économique, culturel et social de la métropole et d'en favoriser le progrès, le dynamisme et le rayonnement.

«En concertation avec les ministres concernés, ses interventions portent, en particulier, sur la promotion économique et touristique de la métropole, l'aménagement de son territoire ainsi que l'organisation des transports et des voies de communication qui la desservent.»

Or, M. le Président, nous avons cru bon de demander au ministre, à cause de la situation particulière du Grand Montréal, à cause de sa géographie, à cause des entreprises et des industries qui s'y trouvent et de la volonté de certains élus municipaux aussi d'y accorder une importance capitale, d'ajouter, dans les priorités du gouvernement, l'environnement. Il s'agit d'un secteur prometteur pour la création d'emplois, secteur d'avenir, secteur aussi pour l'avenir non seulement de Montréal, mais pour notre société. La réponse du ministre à la Métropole a été: Je ne peux pas ajouter trop de choses, quand même, et, celle-là, je la refuse.

Par la suite, un autre amendement fut présenté; il a été discuté, modifié et accepté. Celui-ci détermine la priorité des priorités, surtout pour Montréal, c'est-à-dire parler d'emplois. Effectivement, nous avons demandé d'ajouter, et je cite: «Il doit notamment s'assurer que les politiques de son gouvernement favorisent la création d'emplois dans les secteurs défavorisés de la métropole.» Je m'explique, M. le Président. C'est qu'il y a certains secteurs de la métropole, par exemple, qui vont très bien; il y a d'autres secteurs qui sont peut-être un peu plus défavorisés, et, pour créer, par exemple, de l'activité économique dans certains secteurs défavorisés, si on se donne comme objectif de relancer ces secteurs, un peu comme l'a fait Boston, M. le Président, et d'autres villes américaines, il pourrait y avoir des succès et des succès assez rapides et convaincants.

Plusieurs le disent, on le constate, les chiffres le démontrent, l'emploi périclite à Montréal – quand je parle de Montréal, M. le Président, bien sûr, je parle beaucoup de Montréal, secteur Montréal île surtout – et les dirige vers les banlieues. Il faut freiner ce phénomène. On parle beaucoup du phénomène d'un vide à Montréal par rapport aux banlieues et il y a une façon de combler ce vide, comme, encore une fois, l'a fait Boston, c'est-à-dire d'avoir des politiques qui favorisent justement l'intégration à Montréal pour que les gens reviennent y travailler et que certaines catégories de personnes acceptent de réintégrer la vie à Montréal, c'est-à-dire de venir y vivre.

Donc, M. le Président, comme première réflexion à cet amendement, le ministre nous a dit deux choses: Il n'est pas nécessaire de l'inscrire dans la loi, que nous sommes pour la vertu et contre le vice – c'est sûr, tout le monde; et, deuxièmement, pour lui, c'est un slogan électoral plus qu'une chose que l'on doit mettre dans une loi. Ça, ça a été la première réaction. Eh bien, M. le Président, j'invite encore le ministre à répéter ces phrases devant les citoyens de la grande région de Montréal qui sont sans emploi, devant les industries qui ont de la difficulté parce qu'elles sont dans des secteurs plus fragiles. J'invite le ministre à répéter ceci et à dire aux gens qui ne travaillent pas, aux secteurs mous, que nos propositions pour relancer l'emploi de Montréal, pour créer ces emplois, ressemblent à des slogans électoraux.

Finalement, M. le Président, à force de conversations et de tergiversations, nous avons réussi, après une longue discussion, à faire accepter le principe de cet amendement. Et le ministre nous a suggéré une autre phrase qui rejoint, sinon en totalité – on a exclu les secteurs défavorisés – une partie de notre réflexion à ce sujet. L'ajout est maintenant ainsi: «Par ses interventions, il favorise, dans le cadre des orientations et des politiques du gouvernement, la création d'emplois dans la métropole.» C'est bien. Ça rejoint quand même la philosophie de prioriser l'emploi et d'avoir un souci constant, c'est-à-dire l'emploi. Qui dit emploi dit aussi vitalité économique. Donc, dorénavant, dans ses priorités, le ministre d'État à la Métropole devra – et nous applaudissons à cette modification – concentrer ses efforts, entre autres, sur la création d'emplois.

Un autre amendement, M. le Président, concernant l'article 4, article qui porte sur la coordination et la cohérence des actions gouvernementales sur le territoire de la métropole. Il précise plus spécifiquement le rôle de coordonnateur du ministre d'État pour toute activité gouvernementale concernant la métropole. Or, nous avons remarqué, à la lecture de cet article, que le ministre pouvait laisser passer certains éléments importants des politiques gouvernementales qui concernent la métropole. Afin de contrer cette lacune, nous avons proposé, plutôt que d'écrire que son avis était requis sur toute mesure ayant un impact significatif sur la métropole, d'inscrire: «Le gouvernement doit obtenir l'avis du ministre sur toute question relative à la métropole.» En réponse, le ministre nous dit: Qui trop embrasse mal étreint. Et il ajoute: Le mieux est parfois l'ennemi du pire.

M. le Président, je dois dire que le gouvernement nous a donné raison sur nos inquiétudes lorsque l'on discutait précisément de cet amendement, puisqu'au même moment on nous annonçait la création prochaine d'un ministère des régions dans un but particulier, nous en sommes convaincus, soit de faire contrepoids au ministère de la Métropole suite, probablement, à l'inquiétude des régions face à l'intérêt, et je dirais même face à la prépondérance des actions qui pourraient aller vers la métropole. Ça nous confirmait à nouveau que le ministre aurait peut-être une voix forte, mais certainement pas une voix prépondérante, comme le disait le député d'Abitibi-Ouest dans l'article qui annonçait aussi un ministère des régions.

Nous avons aussi fait remarquer au ministre, avec cet amendement, nos inquiétudes par rapport à la dynamique au Conseil des ministres où, là encore, on a compris, suite à l'annonce du futur ministère des régions, que sa voix serait égale aux autres. Vous savez, M. le Président, contrairement à ce que pense le ministre, une voix forte, ce n'est pas une voix qui va faire en sorte que celui-ci va pouvoir finalement remplir ses engagements malgré toute sa bonne volonté, tel que le décrivent les articles 4 et 5. Il aura une voix parmi toutes les autres voix, et, malheureusement, malgré les discours, malgré la nomination d'un ministre, malgré la création d'un ministère, on se retrouve avec une région de Montréal au Conseil des ministres qui a un poids égal à toutes les autres régions.

Malheureusement, M. le Président, le ministre, encore une fois, n'a pas compris que nos inquiétudes ne sont pas vis-a-vis des élus de la grande région de Montréal, mais vis-à-vis de ses collègues. On en a eu un exemple hier, à la période des questions, où le ministre d'État à la Métropole avait raison de dire, par exemple, que le CRDIM, c'est-à-dire le seul organisme de concertation de la région de Montréal, aurait besoin de plus de budget que les autres organismes. Pourquoi? Parce qu'il dessert une population de 38 % de l'ensemble du Québec, qu'il présente des projets sur un territoire aussi vaste et qu'il présente des projets, hein, mais qui sont multiples. En plus, le rôle de concertation du CRDIM est unique par rapport au rôle de concertation des autres CRD, M. le Président. Sans toutefois oublier que le CRD de la Montérégie bénéficie d'un budget supérieur aux autres CRD, en passant. Et le ministre d'État au Développement des régions, lui, qui est responsable de l'organisme de concertation pour la région de Montréal – une incongruité en soi – a dit carrément que, dans le fond, il ne fallait pas y aller par tête de pipe et que certaines régions, à cause de l'étendue de leur territoire, méritaient autant que la région de Montréal.

(12 h 20)

Alors, c'est pour dire, M. le Président, que, même si le ministre d'État à la Métropole avait raison hier, le ministre des régions, lui, a d'abord la responsabilité du CRD, puis c'est lui qui détermine si le budget est augmenté ou non. Un exemple.

Pour terminer, M. le Président, j'aimerais parler de deux autres amendements auxquels on tenait. C'est des amendements que je qualifierais de novateurs et que nous avons présentés lors de l'étude du projet de loi. Le premier concerne une clause crépusculaire et le deuxième a l'effet d'indiquer dans le projet de loi la principale place d'affaires ou siège social de ce nouveau ministère territorial. Le ministre en a parlé tantôt, mais, moi, j'aimerais y revenir.

Après quelques jours de discussion sur le ministère de la Métropole, nous avons cru bon de mettre une clause, comme je vous le disais un peu plus tôt, qui s'appelle «clause crépusculaire». Étant donné que c'est la première fois dans l'histoire du parlementarisme québécois que l'on crée un ministère territorial, nous avons proposé une clause. Puis c'est innovateur, M. le Président, ça ne se retrouve nulle part au niveau des ministères. Cependant, cette clause dit simplement que, dans trois ans, nous allons réévaluer le bien-fondé de la loi. C'est d'abord un avantage, c'est qu'en plus de mettre le bien-fondé de la loi, on met aussi en évidence les bons coups. Et, comme c'est un ministère territorial et que c'est la première fois, mettre en évidence les bons coups, en fait, ça peut convaincre aussi et continuer de convaincre les différents intervenants, si on veut, du bien-fondé de la loi.

S'il y a des problèmes avec l'application de la loi, si ça crée plus de tension qu'autre chose, bien, obligatoirement, trois ans plus tard, on a l'occasion d'y voir. Parce que, entre vous et moi, si on crée une structure inutile ou inefficace ou une structure qui met en évidence ou qui engendre malgré elle des conflits entre Montréal et les régions, on est aussi bien d'y voir immédiatement et obligatoirement avant que, justement, le cancer ne s'installe. Donc, on a beau dire: On y verra à l'usage, encore une fois, si la structure demeure inutile et génératrice de tension, bien, il s'agit d'y voir immédiatement. Donc, avec la clause crépusculaire, on peut se dire sincèrement et honnêtement, ensemble, qu'on a créé quelque chose de nouveau avec toute la bonne volonté, mais que, si ça ne fonctionne pas, on se donne les moyens obligatoires pour réviser, soit réviser la loi ou réviser le bien-fondé de cette nouvelle structure.

Bien sûr, il y a toujours la prérogative du premier ministre de retirer un ministère, c'est vrai, mais pourquoi ne pas se donner nous-mêmes, comme parlementaires qui travaillons à l'élaboration des lois avec le gouvernement, des polices d'assurance? Car je dois dire, M. le Président, que je plains le gouvernement, que ce soit de ce côté-ci ou de l'autre côté de la Chambre, qui décide, à un moment donné, d'abolir le ministère de la Métropole, une fois que le ministère va être mis en place et qu'il va fonctionner depuis quelques années, s'il n'y a pas une obligation de revoir de par la loi le bien-fondé du ministère. Tandis qu'en mettant automatiquement un examen de conscience au bout de trois ans, récurrent ensuite à tous les cinq ans, on s'assure d'abord que, collectivement, on se questionne – puis quand je dis collectivement, ça veut dire aussi les intervenants, les élus municipaux, etc. – que ça fait partie de la loi, que c'est inhérent dans la loi.

Alors, si, encore une fois, au niveau de cette police d'assurance, ça va bien, bravo! S'il y a aussi du renforcement à faire au niveau de certains articles de la loi, parfait! C'est le temps de les faire, trois ans plus tard et, ensuite, à tous les cinq ans. Mais, s'il y a des problèmes et si ça va mal, ce serait un moment privilégié de les analyser, de les réajuster ou d'annuler la structure en soi si cette structure-là va à l'encontre du développement de Montréal versus la métropole elle-même et aussi versus les régions.

M. le Président, malheureusement, nous avons été confrontés à un nouveau refus du ministre, mais je continue de croire qu'à partir d'aujourd'hui, quand la loi sera passée, il va être très difficile de mettre la clé dans la porte, si nécessaire. Bien sûr, si tout fonctionne bien, c'est tant mieux, on va applaudir, à ce moment-là. Mais, je le répète, M. le Président, malgré toutes les bonnes intentions que je peux prêter au ministre responsable et aux autres qui pourraient lui succéder, c'est un ministère qui n'est pas évident. Ce n'est pas évident surtout si on a un ministère des régions tout à côté. Et ce n'est pas évident que la dynamique va être simple et claire. Alors, encore une fois, d'insérer cette clause, c'était une police d'assurance, une protection supplémentaire face au système.

Je veux rappeler aussi, M. le Président, en parlant du système, vous savez, malgré toute la bonne volonté des ministres, et je dirais même du premier ministre, le système a une tendance à se multiplier, si on veut, et à se générer de l'ouvrage et se générer aussi des responsabilités, donc du monde. À preuve, lors de l'adoption des crédits, on parlait de 50 fonctionnaires. À l'étude du projet de loi, un mois et une semaine ou deux plus tard, ils étaient déjà 64. On parle d'une structure légère. Tantôt, on parlait de 70. Ça, c'est comme une semaine après, là. Alors, entre vous et moi, M. le Président... Je le sais, le ministre est convaincu qu'il veut une structure légère, mais d'une structure légère, le système lui-même, croyez-moi, M. le Président, après quelques années, va en faire une structure lourde. C'est partout pareil, et, malgré une attention vigilante et particulière, veux, veux pas, le ministère de la Métropole peut étendre ses actions de façon tellement large qu'il va toujours y avoir une bonne raison pour augmenter la structure et faire en sorte qu'en bout de ligne ça ne sera plus une structure simple mais une structure peut-être un peu plus complexe.

Dernier point sur les amendements, M. le Président, la place d'affaires ou siège social du ministère de la Métropole. On voulait avoir un amendement. Notre amendement se lisait comme suit: «Le ministère de la Métropole doit établir sa principale place d'affaires ou siège social sur le territoire de la métropole.» Encore une fois, il y a eu un refus. C'est difficile à comprendre parce que, malgré l'explication, tantôt, du ministre, qui disait, effectivement, que le ministère relève du Conseil exécutif et que, en bout de ligne, le Conseil exécutif, son siège social est à Québec et qu'il n'y a jamais eu de mention d'un siège social dans un ministère, il a raison, mais il n'y a jamais eu de ministère territorial non plus.

J'ai été très surprise, d'ailleurs, de voir que ça causait problème. Moi, personnellement, quand on a mis l'amendement, on pensait tout simplement qu'il y avait eu un oubli. Et, quand j'ai regardé, entre autres, la Commission de la capitale, on disait que le siège social devait être dans la capitale. Et c'est tout à fait normal. Bon, alors, comme on fait un ministère territorial, on se dit: Quand on parle de territoire, on parle de géographie, on parle de lieu donné, alors il serait normal aussi de spécifier que le siège social de la métropole est dans la métropole. Et je dois dire, M. le Président, que, quand on a pris le vote, il y a quelques députés de la formation ministérielle de la métropole qui ont voté par conscience de la solidarité ministérielle mais qui étaient un peu gênés de voter pour ça, ou de voter contre ça, je dirais.

Parce que, M. le Président, il faut quand même être cohérents dans notre pensée. C'est beau de dire, effectivement, que la plupart des fonctionnaires sont des fonctionnaires qui vont être établis à Montréal. Mais, encore une fois, M. le Président, on a apporté un bémol à ça en disant: Ce ministère-là, aussi, assure la cohérence. Mais la cohérence se fait à Québec. Déjà on commence. La cohérence se fait à Québec.

On sait aussi que l'ensemble des fonctionnaires qui vont travailler au ministère proviennent, j'en suis convaincue, de la mise en disponibilité ou de ceux qui sont mis en disponibilité par, entre autres, le Conseil du trésor. Ce qui fait qu'il faut aller chercher les gens avant d'embaucher à l'extérieur, à moins de prendre des gens qui doivent apporter, si on veut, une connaissance très pointue et très précise d'un dossier. Alors, ce n'est pas évident non plus, M. le Président, d'aller chercher des gens qui sont mis en disponibilité. La majeure partie des gens qui sont en disponibilité sont des gens de Québec. Ce n'est pas évident non plus d'arriver puis de convaincre tout le monde de déménager à Montréal. On s'entend.

Alors, ce qui arrive, c'est qu'en mettant, encore une fois, pas pour aujourd'hui mais surtout pour le futur, que le siège social de la métropole se situe dans la métropole, entre autres, c'est peut-être un symbole, mais par rapport au symbole, il me semble que c'est un facteur qui serait déterminant.

(12 h 30)

Alors, M. le Président, en bout de ligne et en terminant, parce qu'il y a eu un refus par rapport à cet amendement-là, on a eu une grande discussion, après ces heures de discussion, sur le ministère en soi, et, encore une fois, malgré, M. le Président, la bonne volonté du ministre. Encore une fois, on ne met pas en doute la bonne volonté du ministre. L'action étant telle, et la synergie dans un Conseil des ministres étant telle qu'on a posé la question, à savoir la pertinence même du ministère.

La question était celle-ci: Pourquoi pas... et pourquoi avoir aboli le principe d'un secrétariat à la Métropole? Secrétariat à la Métropole qu'on aurait pu renforcir en lui donnant, par le premier ministre même, des objectifs précis, avec une obligation de réaliser ces objectifs et un échéancier précis; secrétariat à la Métropole qui aurait été formé, d'abord, d'un président, comme on avait, un président qui, lui, aurait, évidemment, eu du premier ministre le mandat, l'obligation de réussir ainsi que l'échéancier, et formé de ministres qui, eux, ont des vrais pouvoirs, qui ont un vrai budget, qui ont, évidemment, de par leur fonction, une capacité d'agir dans leur secteur donné, de telle sorte qu'on puisse s'assurer, d'abord et avant tout, de l'efficacité de nos actions et non pas d'une structure qui paraît jusqu'à ce jour un peu contradictoire par rapport aux actions des autres ministères.

Exemple, dans un secrétariat à la Métropole, si le ministre des Transports y siège, entre autres, si le ministre du Conseil du trésor y siège, entre autres, si le ministre des Affaires municipales y siège, entre autres, avec un mandat précis donné à un ministre, encore une fois, par le premier ministre, M. le Président, ces ministres devront, par obligation, remplir une commande du premier ministre et devront agir dans leur secteur donné, chacun pour s'assurer de l'efficacité, si on veut, de l'objectif qu'on s'est donné et de la stratégie aussi à appliquer.

Encore une fois, quand on regarde l'ensemble du ministère, quand on regarde les réponses qui nous sont données par rapport à la volonté du ministre de la Métropole, M. le Président, le ministère de la Métropole, ce n'est pas évident.

Le Président suppléant (M. Chagnon): Mme la députée, je vais vous demander de conclure, s'il vous plaît. Votre temps est écoulé.

Mme Frulla: J'ai terminé, M. le Président, tout en disant que, encore une fois, on n'est pas tout à fait convaincu de l'efficacité du ministère de la Métropole.

Le Président suppléant (M. Chagnon): Je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, et j'inviterais maintenant, en réplique, le ministre responsable de la Métropole. Merci.

Mme Caron: Je m'excuse, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Chagnon): Oui, Mme la députée.

Mme Caron: Nous avons d'autres intervenants sur ce projet de loi.

Le Président suppléant (M. Chagnon): Oui, mais il a droit à son droit de réplique après chaque intervenant, Mme la députée, et le ministre m'avait indiqué qu'il avait l'intention de le prendre. Alors, je lui cède la parole. M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Je pense qu'au départ d'une aventure aussi nouvelle personne ne peut être absolument convaincu de son succès. Il faut avoir assez confiance dans le projet. Il faut surtout être profondément convaincu de la nécessité de faire quelque chose pour attaquer. Mais je pense que – et l'opposition en conviendra sûrement avec moi – la pire chose serait de ne rien faire.

Je voudrais répondre, très brièvement, encore à certaines critiques qui ont été apportées par l'opposition. C'est vrai que certaines inquiétudes ont pu être exprimées de part et d'autre sur le projet de loi, des inquiétudes souvent contradictoires, cela va de soi, parce que, justement, la plus grande difficulté dans la région de Montréal, c'est de réunir tout le monde ensemble sur des objectifs précis. C'est de le faire aussi en faisant comprendre que cela ne met pas en danger les autres régions. Les inquiétudes sont contradictoires: certains pensent qu'on n'a pas assez de pouvoirs, d'autres pensent qu'on en a trop. Je pense que ces expressions diverses démontrent que nous avons cherché le juste milieu, à avoir juste ce qu'il faut de pouvoirs pour atteindre l'objectif qui nous a été fixé par le premier ministre et auquel, je pense, tout le monde applaudit. Mais pas trop, justement pour ne pas créer un autre monstre, pas trop non plus pour ne pas créer un ministère qui serait un boulet pour les autres ministères, mais bien plutôt un agent catalyseur, comme le dit la loi, quelque chose qui accélère le processus, qui le bonifie.

D'ailleurs, je pense que l'article 5 du projet de loi démontre aussi que le ministre a des pouvoirs d'initiative. Vous voyez, il commence en disant: «Le ministre élabore et propose au gouvernement des orientations et des politiques favorables à l'épanouissement de la métropole et supervise leur réalisation.» Et puis, plus spécifiquement, on donne les exemples de son action dans ce sens-là.

Une autre critique, c'est sur l'environnement, sur la création d'emplois dans les milieux défavorisés, des amendements qui avaient été proposés par l'opposition. L'opposition voulait apporter ces amendements à l'article qui traite des grandes missions, des grandes priorités du ministère. Je pense qu'il était nécessaire de garder cet article assez court et d'indiquer de façon précise les grandes priorités, qui sont, et on le dit bien, en concertation avec les ministres concernés, donc: la promotion économique et touristique de la métropole, l'aménagement de son territoire ainsi que l'organisation des transports et des voies de communication qui la desservent. Donc, l'économie, le territoire, les communications. Mais tout cela est précédé de «en particulier».

Alors, il est évident qu'il y a un tas d'autres problèmes métropolitains qui sont extrêmement importants. L'éducation, entre autres; les commissions scolaires linguistiques dans la région métropolitaine doivent recevoir des solutions particulières. L'intégration des immigrants, comme le mentionnait la députée de Marguerite-Bourgeoys. Mais, justement, c'est là un exemple d'une action qui ne peut être entreprise par un seul ministère et dans laquelle nous devons en réunir plusieurs: le ministère des Relations avec les citoyens, la ministre de l'Éducation, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, à cause de son influence sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Parce que l'intégration commence par l'intégration dans les services aux citoyens, elle se continue par l'éducation des enfants de ces immigrants, elle se poursuit dans le travail que l'on doit trouver, et donc, on a besoin de plusieurs ministères.

L'autre chose, l'inquiétude vis-à-vis du ministère des régions. Bien, c'est là, je pense, que l'opposition pourra voir à quel point cette loi a été bien préparée, parce que, de deux choses l'une: ou un ministère des régions est créé et il a comme mission principale le sort économique des régions... Bien, c'est exactement la première mission du ministère de la Métropole. Donc, ce ministère des régions s'occupera de 53 % de la population, et le ministère de la Métropole de 47 %, et les budgets seront séparés en conséquence. Ou alors, ce sera un ministère sectoriel seulement et non pas uniquement pour les régions, mais alors, le premier paragraphe de l'alinéa 4 prend toute son importance. Il devra nécessairement associer à l'élaboration des mesures et des décisions qu'il prendra le ministère de la Métropole. Donc, ce sera une tâche commune.

Quant à la clause crépusculaire, dois-je le rappeler encore, ce n'est pas une position sur laquelle on peut être absolument sûr, d'un côté ou de l'autre, de son utilité ou de sa non-utilité. Je crois que c'est au premier ministre, au moment où il formera un autre cabinet, de voir si cela est encore utile. De toute façon, s'il y avait besoin d'amendements ou de revoir la nécessité du ministère, le processus de l'opposition, les questions qui sont posées jouent. C'est pourquoi nous avons décidé de ne pas faire un précédent, là, dans ces circonstances. C'est simplement parce que les arguments n'étaient pas assez convaincants que c'était nécessaire, une clause crépusculaire, étant donné toutes les autres dispositions qu'il y a pour remettre en cause la vie du ministère au fur et à mesure.

Un dernier exemple: La Commission de la capitale nationale. Si elle a un siège social, la Commission de la capitale nationale, c'est parce qu'elle est une commission, donc une personnalité différente, comme la RIO, qui a son siège social à Montréal, comme l'Agence métropolitaine de transport a son siège social à Montréal. Si on n'a pas dit que le siège social du ministère de la Métropole était à Montréal, c'est parce que les ministères n'ont pas de sièges sociaux. C'est ça, la raison. C'est simple. Mais sa principale place d'affaires, en pratique, est à Montréal.

(12 h 40)

Le Président: Alors, Mme la députée de Terrebonne et leader adjointe du gouvernement.


Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, nous en sommes à la prise en considération du rapport sur le projet de loi n° 1, Loi sur le ministère de la Métropole. Je pense que, du côté de l'opposition – et la porte-parole de l'opposition l'a bien dit au début de son intervention – il y avait un appui, un appui, je dirais, enthousiaste lors de la nomination d'un ministre d'État à la Métropole. Mais, une fois le ministre nommé, je pense qu'il est tout à fait normal que nous passions à l'étape suivante, c'est-à-dire la création du ministère de la Métropole. Lorsque nous avons fait l'adoption du principe, il y a eu appui, aussi, de la part de l'opposition sur ce projet de loi, au niveau du principe de la création d'un ministère de la Métropole. En fin d'intervention, la porte-parole de l'opposition nous parlait peut-être de la pertinence davantage d'un secrétariat à la Métropole, qu'elle aurait souhaité, mais je pense qu'on a quand même eu un appui à la création d'un ministère de la Métropole.

Je pense que ce qui crée le plus de confusion et de difficultés, c'est peut-être par rapport aux attentes, aux attentes tant du côté des parlementaires que du côté de la population, par rapport à ce ministère-là. Je pense que le mot «métropole» peut être... il est, je pense, dans les faits, présentement interprété de différentes façons, à partir de ces attentes, et je m'explique. Pour moi, le mot «métropole» est un mot – et je l'avais dit lors de mon intervention sur l'adoption du principe – beaucoup plus rassembleur et qui dit, finalement... C'est une ville mère. La métropole, la ville mère, dans un État qui rassemble un certain nombre de municipalités, et, cette métropole-là, elle regroupe tout près de la moitié de la population.

Lorsqu'on parle... Si on avait créé un ministère, par exemple, du Grand Montréal, déjà là, c'est de dire «Montréal et ce qui l'entoure», mais non plus dans un esprit de métropole qui doit s'assurer de l'ensemble des besoins de la métropole. Ça m'apparaissait beaucoup plus difficile. Mais, indépendamment du terme qui a été choisi, je pense que les attentes sont effectivement différentes. Que l'on vive à Montréal ou que l'on vive dans les municipalités qui entourent Montréal, c'est évident que les attentes peuvent être fort différentes sur cette métropole-là.

La porte-parole de l'opposition officielle nous a parlé du manque de pouvoirs, selon l'opposition, de pouvoirs tangibles, du manque de moyens pour accomplir ce rôle-là, rôle difficile, on en convient tous, je pense. Il est important de se rappeler... Et je vais prendre l'exemple qu'elle nous a donné par rapport aux CRD, au niveau des budgets, comme tels, des CRD. Là aussi, il y a un problème. Les CRD, actuellement, tels qu'ils sont constitués, on retrouve, finalement, sur le territoire de la métropole cinq CRD, puisque, sur le territoire de la métropole actuel, nous avons cinq régions administratives. Donc, le CRD actuel qui se trouve sur l'île de Montréal, finalement, consacre ses budgets et ne travaille présentement qu'en fonction des projets de Montréal. Donc, on ne peut pas dire actuellement que le CRD, tel qu'il est constitué, devrait avoir les mêmes budgets que la population de la métropole, puisque, présentement, la couronne de la métropole présente ses projets dans les CRD respectifs. Alors, c'est sûr qu'il y a peut-être certains ajustements à faire par rapport à ça, mais on ne peut pas dire que, actuellement, le budget du CRD de Montréal devrait normalement correspondre au territoire de la métropole, puisque cette population-là a déjà des budgets qui sont inclus dans les CRD des régions administratives qui entourent Montréal.

Je pense que le rôle majeur de ce nouveau ministère est d'assurer – le ministre l'a bien dit et la porte-parole de l'opposition officielle aussi – la cohérence. Et la cohérence, c'est de s'assurer, selon la définition même du dictionnaire Larousse, de l'harmonie logique entre les divers éléments d'un ensemble d'idées ou de faits. Donc, d'assurer l'harmonie. Et je pense que, si on avait donné des pouvoirs additionnels au ministre, nous aurions eu de la difficulté à assurer cette harmonie parce que, à ce moment-là, si le ministre d'État à la Métropole avait eu un pouvoir décisionnel par rapport à toutes les décisions des différents ministères, nous aurions pu vivre des confrontations constantes.

Et le fait, aussi, de demander au ministre d'État à la Métropole un avis – tel qu'il avait été proposé en amendement – sur toute question touchant la métropole... Bien, à ce moment-là, M. le Président, je me demande comment quelque ministre que ce soit pourrait arriver à donner – après avoir étudié, évidemment, parce que, pour donner un avis, il faut quand même bien connaître le sujet – un avis sur toutes les questions qui touchent la métropole, parce que, en fait, à peu près tous les sujets touchent la métropole. Donc, je pense qu'il y aurait eu une difficulté opérationnelle et je pense que le projet de loi doit nous permettre quand même d'être efficaces et que le ministre ne se retrouve pas, en ayant à donner des avis sur toutes les questions, à, finalement, ne pas se centrer sur les questions principales qui touchent la métropole. Là-dessus, je pense que c'est beaucoup plus prudent. Le ministre a, à ce moment-là, une discrétion sur les avis qu'il doit donner, et le tout va se faire d'une manière beaucoup plus harmonieuse, je pense. Et je pense que c'est l'objectif des deux côtés de cette Chambre.

Lorsque quelque chose est difficile à prendre comme décision... Je pensais à un dossier que j'ai eu dans l'opposition et qui demandait aussi une certaine délicatesse. Je pense, par exemple, aux lois professionnelles. J'ai été porte-parole, durant cinq ans, de ce dossier-là, et c'était un petit peu comme le dossier de la métropole, à une autre échelle. Chaque ordre professionnel avait des besoins différents, et la population, elle, avait ses propres besoins. Et lorsque chaque ordre professionnel, comme lorsque chaque député, lorsque chaque organisme, lorsque chaque municipalité, présente des choses, chacun regarde son besoin particulier. Et je pense que, à ce moment-là, pour être sûr d'être équitable et d'apporter un bon jugement, il faut d'abord entendre chacune des parties. Et lorsqu'il y avait certains projets de loi qui touchaient deux ordres professionnels, trois ordres professionnels, je pense que l'important, c'était d'entendre les trois d'abord. Et c'est, je pense, ce que le ministre va avoir à faire dans un premier temps, d'entendre chacune des parties sur les différents dossiers. Donc, la connaissance en premier.

Mais, pour prendre une décision ensuite et donner un avis, il s'agit, là, de se ramener à l'objectif ultime qui doit nous guider peu importe ce que l'on fait. Que ce soit un ordre professionnel, que ce soit une décision gouvernementale, c'est de se ramener aux besoins réels de la population, et, ça, ça doit être toujours le guide, le guide majeur pour prendre une décision.

Donc, une fois qu'on a entendu les différentes parties de la métropole sur un sujet, il faut se ramener aux besoins réels de la population par rapport à cette décision-là qu'on doit prendre, prendre une décision à ce moment-là et toujours se ramener aux besoins réels de la population. Et les besoins varient. Donc, dépendamment des différents sujets, le ministre d'État à la Métropole aura à toujours se guider sur le besoin réel de la population de la métropole. Et la population de la métropole, je le rappelle, c'est vraiment l'ensemble de la métropole.

La porte-parole de l'opposition officielle nous a parlé aussi au niveau de l'emploi, et c'est évident qu'au niveau de l'emploi il y a une volonté réelle. On sait que, lors du sommet socioéconomique, le premier ministre a mis en place trois chantiers: un chantier sur la création d'emplois, un chantier sur l'économie sociale, qui est aussi la création d'emplois sous une forme particulière, et aussi un chantier pour la métropole. Donc, je pense qu'à partir des différents comités qui vont travailler, c'est évident que la métropole va avoir un rôle majeur par rapport à cette création d'emplois.

Alors, M. le Président, oui, nous convenons que ce ne sera pas un ministère facile à diriger, mais je pense que les qualités que possède notre ministre, et qu'il a déjà développées dans d'autres ministères et dans sa carrière précédente, lui serviront beaucoup. Et je pense que, si on travaille, au niveau des deux groupes parlementaires, à toujours nous assurer de travailler en fonction des besoins de la population, le mandat pourra être rempli à la satisfaction de tous. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Jacques-Cartier, maintenant.

(12 h 50)


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. C'est un plaisir pour moi de me lever pour la prise en considération du rapport de la commission sur le projet de loi n° 1, Loi sur le ministère de la Métropole.

L'esprit qui a amené ma participation dans toutes nos discussions sur la création du ministère, c'est: on est devant un projet expérimental, un projet-pilote. Alors, nous avons posé une série de questions pratiques: Comment ça va fonctionner dans la vraie vie? C'est quoi, les choses que le ministre, dans sa capacité de rassembleur et catalyseur... Comment ça va fonctionner? On a posé une série de questions, et je dois avouer que je demeure toujours pas très satisfait des réponses que nous avons eues, parce que c'était toujours imprécis, les vrais pouvoirs, les vrais budgets, les vraies méthodes de fonctionnement que le ministre et son ministère vont utiliser pour s'impliquer dans les dossiers pour Montréal et sa région.

Par exemple, juste la question des budgets, au départ, c'était soulevé déjà, mais où est l'argent réel? Je ne veux pas être trop simpliste en disant uniquement que «money is power», mais, quand même, il faut avoir un certain accès à l'argent, il faut avoir une certaine capacité de faire fonctionner des projets, avoir une emprise sur la région de Montréal. Et le ministre a dit qu'il était très fier: il n'a pas d'argent. Il a l'argent pour faire fonctionner ses 70 fonctionnaires qui vont être impliqués, mais, à part ça, il est très fier du fait qu'il n'y a pas d'argent. Mais, à un certain moment, si on veut faire avancer les projets structurants pour Montréal, si on veut faire avancer les projets économiques, si on veut faire la promotion de certains projets dans le mandat, il faut avoir l'argent pour le faire, et ce n'est pas clair, au niveau du ministère, s'il aura accès à l'argent.

Oui à l'Agence métropolitaine de transport, mais, pour l'Agence métropolitaine de transport, nous avons créé un conseil d'administration pour gérer l'argent qui est le résultat de la taxe sur l'essence et des 30 $ pour les permis de conduire. Alors, ça, c'est à part. Dans le vrai fonctionnement du ministre et du ministère, ce n'est pas évident. C'est une question que nous avons soulevée et qui reste sans réponse.

Deuxièmement, on a regardé toute la question du territoire. La députée de Terrebonne a parlé tantôt de la cohérence, mais, dans la définition même de territoire, il n'y a aucune cohérence. Juste si on prend, par exemple... J'ai posé la question au ministre des Transports, à l'époque, et député de Crémazie et il m'a dit... avec toute la même méthode scientifique, il est arrivé avec un territoire de 96 municipalités. J'ai posé, quatre mois après, la même question au ministre d'État à la Métropole, il arrive avec 111. Alors, la même science, la même rigueur nous donnent deux résultats complètement différents. Alors, j'ai posé la question au ministre: Quand est-ce qu'on va faire un arrimage – parce qu'un des objectifs centraux de ce ministère, c'est de gérer le transport en commun, le transport interrégional? Et le ministre n'avait pas de réponse. Alors, on aura deux cartes. Ce n'est pas très cohérent, je trouve, M. le Président, d'avoir deux cartes: une carte pour l'Agence métropolitaine de transport et une autre carte pour le ministère de la Métropole, avec la même définition très scientifique, très rigoureuse, que les deux ministres, l'ancien ministre des Transports et le ministre d'État à la Métropole, ont défendue avec beaucoup de rigueur et beaucoup de vigueur.

Alors, il y a un problème avec le territoire. On parle d'un rôle de promotion touristique. Est-ce qu'ils vont faire la promotion des Laurentides au complet ou juste la partie des Laurentides qui se trouve à l'intérieur de la métropole? Est-ce qu'on va faire la promotion touristique de la Montérégie au complet ou juste les secteurs? Est-ce que le Festival des montgolfières de Saint-Jean va être couvert ou non? Il y a beaucoup de choses qui ne sont pas très cohérentes. Oui, c'est vrai, ça touche cinq régions administratives, mais pas complètement. Alors, il y a des parties de régions administratives à l'intérieur et à l'extérieur, comme la Montérégie, comme Lanaudière. Même dans le domaine des transports, ça ne couvre pas toutes les municipalités desservies par les commissions intermunicipales de transport. Alors, c'est possible d'avoir la moitié qui va être sous la gouverne de l'Agence métropolitaine de transport et l'autre moitié va être à l'extérieur.

Alors, si on cherche la cohérence dans la définition du territoire, ce n'est pas toujours évident. Nous avons posé les questions. On a vu... Comment le ministre va corriger la situation, ça, c'est les questions qui sont demeurées sans réponse. Si on regarde aussi juste au niveau du fonctionnement, qu'est-ce que le ministre va faire, surtout dans le domaine des transports? Moi, j'ai posé l'exemple de deux ou trois situations. Dans le domaine des transports, il y a des litiges, et, s'il est le rassembleur, comment est-ce qu'il va être capable de réunir les municipalités pour faire progresser un dossier qui a un effet très structurant pour le réseau routier à Montréal? Je prends l'exemple de l'estacade entre la Rive-Sud et Verdun, à Montréal. Il y a un grand litige entre la Rive-Sud et la ville de Verdun; ce n'est pas évident. Mais nous avons posé des questions, pas la solution proposée par le ministre, mais, moi, c'étaient des questions sur le fonctionnement: Qu'est-ce qu'il entend faire? Comment est-ce qu'il va jouer son rôle de rassembleur? Pas de réponse.

Dans mon secteur, dans l'Ouest de l'île de Montréal, il y a un litige qui implique six ou sept municipalités sur le corridor Jacques-Bizard et l'enclavement de la ville de L'Île-Bizard, un long litige qui date de 20 ans. Encore une fois, à cause du développement du secteur, on a besoin de ce projet. Mais, encore une fois le ministre, pas sa solution... Je ne cherche pas la solution... Je comprends qu'il entre dans ses fonctions, mais comment est-ce qu'il va procéder, comment est-ce qu'il va essayer de trouver les moyens de faire progresser ces genres de dossiers? Encore une fois, ça a été laissé sans réponse. Et ça, j'ai trouvé ça troublant.

Il y a d'autres exemples où on veut cerner c'est quoi les pouvoirs du ministre, en comparaison avec les ministres sectoriels. Sur le réseau routier, moi, j'ai l'intersection de Woodland et l'autoroute 20, dans mon comté, qui a causé beaucoup d'accidents, et je pense qu'il y a eu une série d'accidents mortels récemment. Est-ce que je dois informer mes commettants d'écrire au ministre des Transports ou au ministre de la Métropole? Qui est la personne qui est vraiment décideur? Qui peut faire progresser ce dossier auprès du gouvernement? On ne sait pas.

Alors, on a une série de questions comme ça où les pouvoirs réels, au lieu des pouvoirs virtuels, n'étaient pas vraiment identifiés, les façons de fonctionnement n'étaient pas clairement identifiées non plus. C'est pourquoi je veux appuyer la suggestion qui a été faite par ma collègue de Marguerite-Bourgeoys qu'il faut mettre dans cette loi une clause crépusculaire parce qu'on ne sait pas, c'est un projet expérimental. Alors je pense que, comme parlementaire, on a le devoir, chaque fois qu'on est en train de créer soit une nouvelle commission, société, agence, ministère, de dire, peut-être après trois ans ou cinq ans, qu'il faut, devant une commission parlementaire, regarder ça comme il faut. Parce qu'on sait tous que c'est beaucoup plus facile de créer quelque chose que de le démanteler. Comme élus, nous aimons beaucoup ouvrir les choses, commencer les choses; ça fait des bons communiqués de presse, ça. Mais mettre la clé dans quelque chose, c'est moins évident et, comme élus, on a tendance à éviter ça à tout prix.

Alors, moi, je dirais, comme règle générale, dans toutes nos lois où on veut créer un nouvel organisme, il faut mettre les parlementaires au devoir de regarder ça comme il faut, de dire que, après cinq ans, vraiment, malgré les efforts du ministre et malgré le talent des personnes dans son ministère – je ne mettrais jamais ça en doute – le modèle ne fonctionne pas. Les règles de fonctionnement, les choses qui sont proposées, malgré les belles intentions, ne fonctionnent pas. Alors, je pense qu'on a le devoir, comme parlementaires, de faire ça. Je pense qu'on a tout intérêt à mettre la clause crépusculaire dans le projet de loi. Et j'ai trouvé ça décevant.

Finalement, l'autre question, dans son ensemble, qu'on avait demandée, sans réponse, c'est: Est-ce que ça va alléger ou alourdir le processus? Parce qu'il y a beaucoup de projets à Montréal où c'est long. Ça prend du temps pour avoir accès au ministre. Ça prend du temps pour avoir accès au ministère. Ça prend du temps pour avoir les réponses, les décisions du gouvernement. Et, moi, je trouve, on n'a pas de réponse sur ça non plus, et ça risque, avec l'ajout des avis et les autres étapes, de devenir quelque chose qui va compliquer et non simplifier les dossiers qui touchent Montréal et sa région. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député. Puisqu'il est 13 heures, nous allons suspendre les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 6)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, nous reprenons le débat sur l'adoption du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi n° 1. Alors, y a-t-il des intervenants? M. le ministre d'État à la Métropole, je vous cède la parole.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Alors, une courte réplique au député de Jacques-Cartier, dont je dois dire que j'ai apprécié la collaboration au cours de la commission parlementaire, juste pour clarifier devant le public certaines des positions que nous avons prises respectivement et, effectivement, dans le respect d'opinions contraires.

C'est certain que, dans un ministère intersectoriel comme le mien, on peut chercher à trouver des contradictions sur des sujets entre des ministres sectoriels et le ministre d'État à la Métropole. Cependant, c'est justement le défi d'amener, de créer ce ministère qui voit à ce que les ministères sectoriels puissent, lorsqu'il s'agit de la métropole, avoir une attitude particulière qui correspond aux véritables enjeux, qui ont toujours une dimension très grande.

Alors, il a fait encore une fois allusion au manque d'argent et à la difficulté de mesurer les budgets du ministère de la Métropole. Je rappellerais certaines choses sur la façon dont nous entendons procéder. Dans une métropole, il y a parfois des décisions que l'on voudrait prendre, mais pour lesquelles il faut un consensus, parce que, si on les prend sans consensus, elles n'iront nulle part. Alors, des fois, on va atteindre des consensus qui ne sont pas la perfection, mais, puisque nous avons la chance d'atteindre ces consensus, il faut, à ce moment-là, passer à l'action.

Je vais donner un exemple, d'autant plus que cette initiative ne vient pas du ministère de la Métropole. Mais, à la création de la Société Montréal international – qui n'est pas encore faite, et on ne sait pas encore, d'ailleurs, quel est le véhicule juridique que nous utiliserons – c'est une idée qui a été reprise plusieurs fois, que la représentation à l'étranger des municipalités qui entourent Montréal causait beaucoup de confusion chez les investisseurs étrangers qui étaient intéressés à venir ici, sans compter la perte d'énergie. Alors, de concentrer dans les mains d'un même organisme cette représentation à l'extérieur, avec les économies de coûts et l'augmentation de l'efficacité qui pourra en résulter.

Cette idée a été reprise par le comité des sages qu'avait créé le maire Bourque. Il l'a lancée lui-même. Les maires de banlieue se sont retrouvés favorables. À un moment donné, j'ai senti qu'il y avait conflit, que le projet risquait de ne pas aboutir. Alors, là, le ministère de la Métropole est intervenu pour chercher à relancer le projet. Et puis nous avons réussi. Le gouvernement fédéral accepte d'embarquer, lui aussi, mais j'ai tenu à ce qu'au moins les deux plus grandes villes, autour de l'île de Montréal, qui ont des représentations importantes à l'étranger, puissent embarquer. Mais nous n'avons pas réuni encore – et il ne sera peut-être jamais nécessaire que nous les réunissions toutes – les 111 municipalités.

(15 h 10)

D'un autre côté, dans le tourisme, nous pourrions faire, encore là, une réalisation où, sans avoir toutes les municipalités de la métropole, peut-être que certaines autres qui sont à l'extérieur de la métropole mais dont l'industrie touristique dépend directement des touristes qui viennent dans la métropole voudraient se joindre à nous, comme par exemple Mont-Tremblant. Alors, voilà l'exemple d'attitude souple que nous devons avoir pour la métropole.

En plus, sur les budgets, j'ai parlé du budget important de l'Agence métropolitaine de transport. On me dit: Ce n'est pas le budget de la métropole. On a raison. Mais ce sera la même chose si nous créons un organisme régional sur le tourisme, qui aurait un budget indépendant.

Enfin, il faisait état aussi de la difficulté de... à quel ministre s'adresser pour poser les questions sur la métropole. D'abord, encore une fois, je m'aperçois que l'opposition n'a pas de difficulté à trouver le ministre à qui elle doit s'adresser, même qu'elle prend un malin plaisir parfois à chercher à nous mettre en contradiction. Et nous devons vivre... Je pense que la population l'accepte, qu'il est important que le gouvernement soit solidaire, mais la population sait très bien que, si c'est une équipe d'hommes et de femmes dynamiques, nécessairement ils doivent avoir des discussions entre eux. Nous en avons, c'est évident. Nous cherchons à les résoudre et nous sommes solidaires dans les décisions que nous prenons. Mais je pense que les gens pourront s'adresser à un endroit ou à l'autre, ils recevront une bonne réponse. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État à la Métropole. Mme la députée de Marie-Victorin, je vous cède la parole.


Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de pouvoir prendre la parole sur la motion de report du... Voyons, sur le rapport du projet de loi n° 1, en ce qui concerne la création du ministère de la Métropole... Non, ce n'est pas un ministère, c'est... Le ministère de la Métropole, effectivement.

Évidemment, M. le Président, pour moi, c'est important, ce projet de loi là. Il était même attendu, quelquefois, je pourrais vous dire, avec appréhension, puisque j'habite la rive sud de Montréal et je fais partie du Montréal métropolitain, de la grande métropole de Montréal, et, bien sûr, il y avait beaucoup d'interrogations en ce qui concerne les événements suite à l'approche de ce projet de loi n° 1.

Mais, avant de vous parler plus en détails de mes états d'âme en ce qui concerne le projet de loi, j'aimerais davantage commencer, en préambule, par ce qu'évoque pour moi le mot «métropole». On se souviendra qu'à un certain moment donné Montréal était reconnue comme la métropole du Québec et surtout la métropole canadienne-française. C'était la première ville en Amérique qui était métropole au niveau de la langue française. C'était la première ville, en fait, Montréal, qui était la métropole du Canada, en ce qui concerne la langue française. On se souviendra aussi des heures de gloire de Montréal, bien sûr, de la métropole, parce que, aux niveaux, en fait, culturel, artistique et sportif, Montréal était vraiment un lieu de rassemblement où tous les gens ne pouvaient pas faire autrement que débarquer, par le biais du fleuve Saint-Laurent, était le port le plus achalandé qu'on connaissait à ce moment-là.

Et, depuis l'avènement de la voie maritime du Saint-Laurent, bien sûr, ça a tout changé la vocation économique de Montréal et aussi ça a donné lieu, effectivement, à ce que certains sièges sociaux déménagent et, notamment, plus souvent qu'autrement, beaucoup de sièges sociaux ont déménagé à Toronto ou en Ontario. Ce qui fait en sorte que Montréal, petit à petit, s'est délestée de certains avantages économiques qu'elle connaissait à ce moment-là. Et, bien sûr, nous devons maintenant faire face à certaines nouvelles réalités de Montréal.

Et c'est sûr que Montréal, actuellement, doit repenser la vision de son propre développement, compte tenu des nouveaux impératifs et compte tenu aussi de ce qui se passe au niveau de la mouvance économique de nos sociétés modernes, M. le Président.

Bien sûr que, en ce qui nous concerne aussi, la rive sud de Montréal est considérée comme un peu la banlieue de Montréal, et nous avons beaucoup d'échanges avec la ville de Montréal là-dessus. Et je dois en profiter tout de suite pour signaler avec quelle diligence le ministre d'État à la Métropole a répondu aux interrogations des gens de la région. Et, plusieurs fois, il les a rencontrés pour pouvoir échanger avec eux et pour leur parler un petit peu des orientations qu'il entendait prendre via la création de ce ministère, de quelle façon il voulait vivre la concertation et de quelle façon il voulait maintenir un équilibre entre les différents acteurs qui devront participer à favoriser l'essor et le rayonnement de cette grande métropole montréalaise.

Bien sûr, M. le Président, le rôle qu'aura à jouer le ministre ne sera pas un rôle des plus faciles, mais c'est un rôle innovateur qui est intéressant en ce sens qu'il favorise la concertation et qu'il devra faire la conciliation des intérêts des uns et des autres et essayer d'arriver à un équilibre tout en tenant compte, comme on l'a dit à plusieurs reprises, de l'intérêt de la population, des gens qui sont concernés par les décisions qu'ils auront à prendre au niveau du développement de Montréal.

Et ça interpelle plus que le ministre, M. le Président. Ça interpelle plusieurs intervenants, et, en ce sens, je pense que le ministre aura à favoriser énormément des échanges, des rencontres. Et, moi, dans ce sens, ça me rassure en ce qui concerne le rôle que devra jouer le ministre d'État à la Métropole. Ça me rassure parce que, de toute façon, quand on connaît la dynamique qui se passe à l'intérieur des différentes régions qui ceinturent Montréal, bien sûr, on sait très bien que ces gens-là sont capables de faire valoir leur point de vue, sont capables aussi de travailler en concertation quand c'est le bien et l'intérêt de la population qui le commandent, mais aussi parce qu'on sait très bien que, quand Montréal va bien, quand la métropole va bien et fonctionne bien, en fait, c'est tout le monde qui s'en porte mieux aussi.

Et je vais vous donner comme exemple, bien sûr, en ce qui concerne le commerce extérieur et tout ce qui est la dynamique du commerce extérieur et du développement économique... Je sais que nous avons, nous, en Montérégie, favorisé, en fait, la vitrine des maisons du commerce qui est à Montréal, et c'est nous, au niveau de la SMD, qui avons financé une partie de cette vitrine pour montrer aux gens tout ce dont nous étions capables. Et on savait très bien qu'il fallait qu'on compte sur la collaboration de Montréal. Mais, bien sûr, plutôt que d'y aller d'une façon éparse, d'une façon éparpillée, sans qu'il y ait de concertation en ce qui concerne ce développement du commerce international, que chacun y aille de son cru et, vous savez bien, en représentant leur municipalité, leur ville, je pense que l'intérêt de la plupart des municipalités et des gens qui sont en périphérie de la métropole est qu'ils puissent compter sur un maître d'oeuvre, sur une personne qui est capable, justement, de catalyser toutes les actions prises et entreprises pour favoriser, dans le fond, un plus grand rayonnement en ce qui concerne leurs demandes au niveau international pour apporter des industries capables de se développer dans les municipalités respectives.

Mais, pour cela, M. le Président, bien sûr, je reviens à ce que je disais, il faut avoir un interlocuteur valable. Et Montréal est considérée comme la ville principale, mis à part Québec, bien sûr – je ne voudrais pas faire d'impair pour les gens qui demeurent à Québec. Mais, mis à part Québec, Montréal, c'est la ville qui est la plus reconnue, en fin de compte, au niveau du Québec. Et, quand on dit: Bien, écoutez, de quel endroit venez-vous? Quand vous allez dans les différents pays ou les différentes régions européennes, c'est évident que, si on vous dit: Je viens de Montréal, bien sûr, les gens disent: Ah! oui, je connais Montréal. Mais, si je leur dis: Je viens de Longueuil ou je viens de Brossard, ce n'est pas évident que les gens vont être capables de faire tout de suite le lien avec le Québec.

(15 h 20)

Alors, M. le Président, je considère qu'effectivement il est important, à ce moment-ci, dans cette mouvance du commerce extérieur que nous connaissons à l'heure actuelle, où on dit qu'on est à l'ère de l'internationalisation, de la mondialisation des marchés, c'est important que ces gens-là soient capables de travailler ensemble et soient capables de faire en sorte qu'ils puissent se concerter pour arriver à développer différents secteurs d'activité économique, selon, en fin de compte, leur région respective.

Bien sûr, ce n'est pas toujours facile d'asseoir les gens à une même table, et ça ne sera pas toujours facile, M. le Président, d'arriver à trouver le consensus pour l'ensemble de ces différents partenaires là. Mais il n'en demeure pas moins qu'il était grand temps qu'on suscite cette façon de faire les choses dans le meilleur intérêt autant des partenaires que de l'ensemble de la population. Et, quand on dit que le ministre va agir comme catalyseur et comme rassembleur pour l'intérêt et la promotion des intérêts de Montréal, c'est dans ce sens que le ministre devra intervenir. Et c'est pourquoi nous avons mis sur pied ce ministère.

J'écoutais le député de Jacques-Cartier qui tantôt mentionnait qu'il semblait qu'on allait trop vite encore une fois là-dedans, qu'il y avait trop de questions qui restaient sans réponse et qu'il aurait aimé et souhaité, avant de pouvoir aller de l'avant, avoir davantage de réponses. Je lui dirais que tout ça va reposer sur la qualité des partenaires et leur capacité aussi à réinventer et à se réinventer, en ce qui concerne les meilleures décisions qu'ils auront à prendre dans l'intérêt de l'ensemble de la métropole, mais aussi dans l'intérêt de l'ensemble de leurs contribuables respectifs.

Et, sur ce, M. le Président, j'espère, maintenant que le projet de loi a passé l'étape de l'étude article par article, qu'il est arrivé certains consensus avec l'opposition et le gouvernement, qu'au moment où ce projet de loi entrera en vigueur on aura aussi la possibilité de trouver ce même consensus pour en faire un franc succès pour l'intérêt de l'ensemble des Montréalais et des gens qui forment la métropole. Je vous remercie, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Marie-Victorin. Le prochain intervenant? Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Westmount–Saint-Louis. M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, mes premiers commentaires vont évidemment porter sur un sujet que j'ai déjà critiqué. J'ai déjà commenté et critiqué, dans le passé, à l'effet, d'une part, que, le projet de loi, ou bien il repose sur une fumisterie ou bien encore il est mal dénommé. La Loi sur le ministère de la Métropole n'est pas, en fait, une loi sur le ministère de la Métropole, mais bien plutôt une loi sur le Montréal métropolitain. La métropole, c'est Montréal. Le ministre n'est pas convaincu, le ministre ne croit pas cette formulation-là. Mais, dans mon esprit à moi, c'est clair, la métropole, c'est Montréal; l'île de Montréal si on veut, mais Montréal est le centre, c'est la ville-centre. Montréal est la ville-centre, est la métropole du Québec.

La grande région métropolitaine comprend les 111 municipalités qui font dire au ministre qu'il est le responsable de la métropole comprenant ces 111 municipalités là. Je pense que c'est une vision de l'esprit qui n'est pas juste et qui... Par contre, je ne ferai pas un débat de sémantique de 10 minutes sur le fait que le ministre est plutôt ministre responsable du Grand Montréal ou du Montréal métropolitain plutôt que d'être ministre de la Métropole. Il s'est exclu d'être le ministre de la Métropole en élargissant le bassin de la métropole aux 111 municipalités qui sont dans la liste des pages 9, 10 et 11 de son projet de loi.

Quand on retrouve, par exemple – juste pour vous citer un exemple, en fait – Saint-Anicet ou Maple Grove ou encore le canton de Gore comme faisant partie de la métropole, je pense que le ministre... Non, le ministre ne peut pas être le ministre de la Métropole et en même temps penser que le canton de Gore fait partie de la métropole. Il y a un problème quelque part. Le canton de Gore, c'est au nord de Lachute et... Évidemment, comme l'a souligné la députée de Marie-Victorin, si vous êtes à Paris, Londres, Rome ou Tokyo, puis que vous habitez le canton de Gore, vous dites: J'habite Montréal. Mais là le ministre ne fait pas des projets de loi pour les gens de Paris, Londres, Rome et Tokyo. Il fait des projets de loi pour les Québécoises et les Québécois. Alors, quand on est au Québec, la métropole, c'est Montréal.

Le Montréal métropolitain englobe une bonne partie des villes qui sont là. D'ailleurs, il pourrait en ajouter d'autres. Je remarque, entre autres, qu'il y a des MRC qui sont divisées, dont toutes les parties de la même MRC ne se trouvent pas dans son programme de Montréal métropolitain. Dans le comté de Verchères, par exemple, la ville de Verchères n'est pas dans le projet de loi du ministre, mais, pourtant, si vous allez au bout du quai à Verchères, M. le ministre, vous allez voir les tours du centre-ville de Montréal. Si vous reculez un peu, à Calixa-Lavallée, vous allez avoir la même perspective, mais vue d'un champ.

Quand la députée de Marie-Victorin faisait un drôle de retour historique sur la partie de l'ouverture de la voie maritime, je vous ferais remarquer que le port de Montréal est en croissance. Il est tellement en croissance au moment où on se parle que les projets d'expansion du port de Montréal sont à Contrecoeur, qui n'est pas dans la liste des villes citées par le ministre pour la Loi sur le ministère de la Métropole. Mais ça ne doit pas être si important que ça. Le ministre se préoccupe de transport, de tourisme et d'emploi, trois choses fort importantes, ma foi, par ailleurs.

Le ministre se dit: Moi, si on avait à résumer en trois qualités ma job de ministre responsable de Montréal, je dirais que je m'occupe de la cohérence, je m'occupe de la concertation et je m'occupe de la coordination. Bravo!

Premier exemple, Dorval et Mirabel. Où est le ministre? Disparu. Pouf! Baguette magique. Disparu. Au mois de février, il dit: Dorval, c'est une excellente idée que les aéroports de Montréal décident de transférer l'ensemble des activités de Mirabel à Dorval. Et, tout d'un coup, suite à un peu de brasse-camarades dans le coin de Mirabel, autre région toujours inscrite dans la Loi sur le ministère de la Métropole, là, le ministre disparaît. Surgit le ministre des Transports, qui dit: Mirabel doit demeurer ouvert, peu importe les activités qui se font à Dorval. En deux mots, on est assis sur un paradoxe. D'une part, on a pu vérifier, depuis 20 ans, que le fait que Mirabel a été construit n'a pas été une brillante idée de nos technocrates situés à Ottawa. Ça n'a pas marché. Le transport aérien s'est disloqué, allant en faveur d'un autre endroit où on pouvait faire du transport aérien et faire du transport entre plusieurs aéroports, comme c'est le cas à Toronto.

Évidemment que Dorval a payé pour, Montréal a payé pour. Aujourd'hui, on veut reconcentrer les activités aéroportuaires sur Dorval, et le ministre de Montréal, le ministre de la Métropole, est divisé sur la question. Il est divisé parce que la dynamique même de son projet de loi l'amène à être divisé. Il est divisé entre une partie politique, qui est celle de Montréal et d'une agglomération qui cherche à survivre en ayant un aéroport dans lequel seront concentrées les activités aéroportuaires, et celui de Mirabel, qui tire le diable par la queue en termes d'activités aéroportuaires, de plus en plus, une diminution de l'achalandage année après année, et puis il est... Parce qu'il est pris entre deux régions, dans la même constituante métropolitaine, il est placé pour ne pas être capable de donner son avis et pas être capable non plus de décerner ou d'attirer, par son autorité morale, un choix qui aurait pu être un choix consensuel. Donc, la cohérence dans le cas du transport, particulièrement du transport aéroportuaire, le ministre pourra repasser.

En ce qui concerne la concertation, la guerre est ouverte entre les gens qui appuient le document d'ADM concernant Dorval et ceux de Mirabel. Puis la coordination, bien, quand on n'est pas capable de faire la coordination entre deux aéroports puis qu'on en a deux, il y a un problème quelque part.

Ça, ça aurait été un bel exemple pour nous, de voir comment le ministre fonctionnait dans une situation concrète, réelle, pratique, touchant l'économie, le tourisme, l'emploi. Et la réaction qu'on en a eu, c'est une réaction de fuite, fuite en avant. Le ministre nous a dit, en commission parlementaire: Ça ne se serait pas passé de même si le choix du gouvernement fédéral avait été porté sur un aéroport qui aurait été dans le sud de Montréal plutôt que dans le nord. La question n'est pas là. La question, c'est que, quand on a décidé de sortir une partie du trafic aérien de Dorval, tranquillement pas vite, comme décision, on s'est mis à faire mal à Montréal, à sortir Montréal des destinations touristiques, des destinations de transport sur le continent nord-américain.

(15 h 30)

Mais voilà un exemple sur lequel le ministre n'a pas démontré une grande signification. Il n'a pas démontré qu'il avait en main une autorité morale responsable, comme on l'inscrit dans le projet de loi, qui fait de lui un rassembleur, un catalyseur – ce sont les mots mêmes, M. le Président, qu'on retrouve dans le projet de loi – qui nous amène à conclure que le projet de loi va être d'un grand secours puis d'une grande aide pour Montréal.

Le ministre nous dit: J'ai 250 000 000 $ par année. Il a fait la liste des budgets de l'école de tourisme et d'hôtellerie de Montréal, de la RIO, du Palais des congrès, d'Innovatech puis de l'Agence métropolitaine de transport. L'Agence métropolitaine de transport, M. le Président, on a adopté le projet de loi, c'était urgent, au mois de décembre l'an dernier, avec le bâillon. On a vu, le ministre a réussi à nommer, la semaine dernière, il y a deux semaines, la présidente de l'organisme. À la RIO, on attend une nomination, puis, au Palais des congrès, je ne sais pas s'il va y en avoir une. Je ne sais pas s'il y en a eu une dernièrement, une nomination de président.

Mais une chose est certaine, dans le cas d'Innovatech, les fonds qui sont destinés à Innovatech, ils sont destinés sur un espace de cinq ans, puis, le ministre, j'espère qu'il ne met pas son nez là-dedans. Ça marche tout seul, Innovatech, comme les cinq autres organismes qu'il a mentionnés, à l'exception de l'Agence de transport qui, elle, ne marche pas du tout.

Le ministre nous dit: Je suis un catalyseur, un rassembleur. Puis il nous dit en même temps, comme il vient de le faire tout à l'heure: Le gouvernement fédéral est un agent particulier, est un acteur principal dans le secteur du développement économique de Montréal. On lui pose la question: Bon, bien, si c'est un acteur principal, allez-vous inviter le gouvernement fédéral, les ministres Martin et Cauchon que vous avez rencontrés il y a deux semaines? Vous vous êtes bien entendu avec. Ça a été même mieux, je dirais, que la rencontre entre les deux premiers ministres ici, à Québec, où on a réussi simplement à faire le partage des coûts de la peinture pour le pont de Québec. Les trois ministres se sont rencontrés.

Eh bien, si on était sérieux, M. le Président, on demanderait, comme on l'a fait... On a demandé au ministre: Allez-vous inviter ce principal acteur, là, pour qu'il travaille avec vous au sommet cet automne à Montréal? On va savoir si le ministre est un véritable catalyseur, un rassembleur et s'il est sérieux lorsqu'il dit qu'il est innovateur. Il se prétendait même révolutionnaire au début de l'étude de ce projet de loi là. Ce n'est pas une grande révolution de demander à un acteur de plus de venir à la table comme un simple participant. Le ministre nous dit: Je ne le sais pas. Il a bégayé une réponse en nous disant: Je ne le sais pas. Mais une chose est certaine, nous, on pense qu'il y aurait intérêt à inviter tous les acteurs principaux, dont celui-là. Et, comme le ministre est le conseiller du gouvernement, nous l'invitons à le faire, et qu'il le fasse auprès de son gouvernement.

En terminant, M. le Président, je voudrais tout simplement signaler que, sur le dossier des fonds aux CRD, sa réponse, hier, ne concordait évidemment pas avec celle du député de Joliette. Et ça semblait non seulement se substituer, mais on aurait pensé qu'il était devenu adjoint parlementaire du député de Joliette. Et ça, nous le regrettons vivement, tous ceux qui veulent le bien, la réussite et l'épanouissement de Montréal. Merci beaucoup, M. le président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Alors, M. le ministre, pour votre réplique de cinq minutes.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Je pense que tout observateur aura reconnu une différence fondamentale d'attitude entre le député de Westmount–Saint-Georges et certains autres députés qui ont cru bon...

Une voix: Westmount–Saint-Louis.

M. Ménard: Westmount–Saint-Louis, pardon. C'est vrai. Ha, ha, ha! C'est parce que saint Georges est le patron... Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ménard: Westmount–Saint-Louis. Il y a une différence fondamentale d'attitude avec les autres personnes qui critiquent le projet de loi. Et il peut être d'autant plus éloquent dans ses diatribes qu'il nous cite mal pour ensuite critiquer avec beaucoup d'emphase les citations qu'il nous prête, alors que ce ne sont pas vraiment les paroles que nous avons prononcées.

Mais allons directement au point. Dorval: «Le ministre est disparu». Le ministre n'est pas disparu. Si c'est le ministre des Transports qui a livré la position gouvernementale, c'est parce que c'est celui qui était le plus impliqué au point de vue budget sur ce qui était exigé du gouvernement du Québec par la décision qui était prise. C'était donc normal que ce soit le ministre sectoriel dans une question de transport. Mais la décision qui a été prise est celle de ne pas s'objecter à la décision d'ADM. Ceux qui préfèrent la psychologie à la réalité s'attristeront peut-être que ce ne soit pas un appui enthousiaste, mais ceux qui aiment la réalité, comme le monde des affaires de Montréal et comme la majorité des gens de l'île de Montréal, je pense qu'ils sont heureux que la décision ait été acceptée. Et le ministre des Transports n'a pas dit que Mirabel, comme il dit, devait survivre coûte que coûte. Le ministre des Transports a reconnu, dans sa position publique, que la décision se justifiait sur le plan commercial. Mais là où il a exprimé des doutes, et je pense que n'importe quel observateur objectif l'aurait fait, c'est quant au plan de survie prévu par ADM pour l'aéroport de Mirabel. Je pense qu'il appartenait au gouvernement du Québec d'exprimer ces doutes, puisque personne d'autre ne les exprimait.

Je rappelle enfin qu'il s'agissait d'une question de juridiction fédérale où, normalement, puisque le gouvernement fédéral a reconnu ses erreurs, c'était à lui d'abord de s'assurer que ce plan de survie était réaliste. En plus, ayant reconnu leur erreur, nous leur avons rappelé que l'Agence métropolitaine de transport, une agence créée par le gouvernement fédéral, avait demandé, pour rentabiliser la décision qu'elle avait prise, de faire une bretelle au chemin de fer, pour que le chemin de fer puisse avoir une gare en dessous de l'aérogare de Dorval, ce qui permettrait aux gens d'Ottawa d'arriver plus rapidement à Dorval que par n'importe quel autre moyen de transport et, donc, apporterait une clientèle à Dorval, ce qui permettrait aussi – l'autre partie de la bretelle – d'avoir un transport rapide entre le centre-ville de Montréal et Dorval.

Ensuite, sur l'Agence métropolitaine de transport. Encore une fois, on fait état du bâillon. En voyant comment vont certains débats – pas sur cette loi-ci, mais sur d'autres – on comprendra qu'il y ait parfois des bâillons nécessaires en fin de session. Je rappellerais que, s'il était important de terminer l'étude de l'Agence métropolitaine de transport pour le 31 décembre, c'est qu'il y avait, à la fin du 31 décembre, fin des subventions au Conseil métropolitain de transport. Il fallait donc qu'un autre système fiscal soit installé, ce qui fut fait; et l'Agence métropolitaine de transport devait suivre par la suite. Je pense que, puisqu'il n'y a pas de critique sur les nominations qui ont été faites, l'on reconnaîtra que c'étaient d'excellentes nominations.

Enfin, pourquoi n'invitons-nous pas le gouvernement fédéral au sommet économique qui se tiendra à Montréal? Faut-il rappeler que le sommet économique qui se tiendra à Montréal n'est pas le sommet économique de Montréal, mais le sommet économique de tout le Québec qui se tiendra à Montréal; alors, c'est une activité du gouvernement du Québec. Voilà, en somme, des réponses simples à des diatribes un peu gratuites qui ont été faites par le député de Westmount–Saint-Louis.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État à la Métropole. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: M. le Président, je souhaitais participer à ce débat ou, en tout cas, adresser quelques mots parce que, pour moi, la situation économique de Montréal, c'est quelque chose d'excessivement important; c'est important à tous les égards. C'est sûr que mon comté n'est pas dans Montréal comme telle, bien qu'il soit à la périphérie de ce qu'on pourrait dire la grande métropole. Mais la situation économique, l'essor économique, le dynamisme économique de Montréal, c'est quelque chose qui intéresse tous les Québécois et toutes les Québécoises parce que, quand Montréal va bien au plan économique, normalement, c'est le Québec qui va bien. Et, quand les régions vont bien au plan économique, M. le Président, évidemment, ça se répercute sur la situation de la métropole.

C'est donc pour moi une question de solidarité avec la ville de Montréal, mais c'est aussi une question d'intérêt, je dirais, face à ma propre circonscription. C'est sûr que ce qui se passe à Saint-Hyacinthe... Il y a un tas de choses qui se passent à Saint-Hyacinthe qui sont liées d'une certaine façon aux liens économiques avec Montréal. Je pense en particulier à une entreprise qui est venue s'installer à Saint-Hyacinthe il y a une dizaine d'années. Il s'agit de deux entreprises, en fait, les Équipements Denis et Harricana Métal, qui étaient deux entreprises de l'Abitibi qui étaient très florissantes et qui fabriquaient de l'instrumentation dans l'abattage des arbres et dans l'ébranchage des arbres. Donc, c'étaient deux entreprises importantes. Pourquoi elles sont venues à Saint-Hyacinthe? Pour une raison très simple, M. le Président, parce qu'on est dans la grande couronne qui entoure Montréal. Autrement, elles ne seraient pas venues chez nous, elles seraient allées ailleurs. Donc, pour Saint-Hyacinthe, c'est important, le dynamisme économique de Montréal.

(15 h 40)

Ensuite de ça, d'un autre point de vue aussi, vous savez que ce qui fait la richesse des gens de mon comté, en grande partie, c'est l'économie agricole. La vaste plaine qui entoure Montréal vit en grande partie de l'agriculture. Eh bien, traditionnellement, depuis plus de 100 ans, depuis 200 ans, Montréal a été le marché où les producteurs agricoles de la grande région autour de Montréal sont allés déverser leurs produits, et c'est ce qui a amorcé le développement économique de toute cette grande région. Et, encore aujourd'hui, quand on parle de la Technopole agroalimentaire de Saint-Hyacinthe, avec toutes les institutions qui permettent de développer non seulement la production, mais encore davantage la recherche, le développement, la formation, tout cela serait bien difficile à développer si on n'avait pas la proximité de la métropole. Donc, d'un point de vue, je dirais, égoïste, en tant que député de Saint-Hyacinthe, évidemment, je suis intéressé à l'essor économique de Montréal.

Tous, on tombera d'accord facilement pour dire qu'être une grande métropole, c'est important. Ça comporte des avantages, mais ça comporte aussi des inconvénients. C'est sûr qu'une partie de la pauvreté qu'on a dans nos régions, bien, elle s'en va à Montréal, dans l'anonymat de la grande ville où elle peut un peu disparaître. Beaucoup de comportements violents se réfugient aussi à Montréal parce que, dans la grande métropole, tout est possible. Enfin, on est moins connu et tout est plus facile. Donc, un certain nombre de choses comme cela, la pauvreté, la violence, sont des choses qui sont peut-être plus aiguës à Montréal qu'ailleurs à cause du fait qu'un nombre considérable de personnes vivent dans un espace relativement restreint.

Il y a aussi d'autres problèmes qui résultent du fait d'être une métropole. Généralement, les terrains coûtent très cher, les services sont concentrés là, ce qui fait que ça amène un taux de taxation généralement supérieur et ça exerce une pression sur les résidents qui sont fortement tentés, souvent, de quitter la grande ville pour aller se réfugier, mais pas trop loin, dans la périphérie. Et là on assiste à l'étalement urbain et au fait que les grands travaux, les grandes infrastructures qui ont été payées, traditionnellement, et qui ont été installées par les métropolitains se trouvent avec un manque de payeurs de taxes, et ceux qui restent doivent payer davantage. Donc, un ensemble de problèmes qui sont liés au fait qu'on est une grande métropole.

Mais il y a aussi de grands avantages. Où est-ce qu'on trouve les plus grandes institutions, les centres de recherche les plus prestigieux? C'est dans la métropole, M. le Président. Où est-ce qu'on trouve les sièges sociaux? C'est dans la métropole, M. le Président. Donc, le fait d'être une métropole, ça comporte de grands avantages. Et c'est pour ça qu'il est important de bien soupeser tout cela et de faire en sorte qu'on puisse tirer le meilleur parti de tous ces avantages pour contrer les inconvénients et assurer l'essor économique de la ville de Montréal.

Qu'est-ce qu'on peut faire face à ça? De toutes les causes des problèmes qu'on vit à Montréal, entre autres, évidemment, le problème qui est au coeur de tous, qui est le manque d'emplois, il y a toutes sortes de causes à ça. Il n'y a pas une seule cause, il y en a plusieurs. Mais, M. le Président, il ne faudrait jamais oublier qu'il y en a une qui est peut-être très importante et qu'on passe sous silence parce qu'elle se situe un peu en arrière de nous au plan historique. Qu'est-ce qui s'est passé dans les années cinquante, alors que Montréal, l'est de Montréal était florissant? C'était une forêt de cheminées dans l'est de Montréal, où il y avait une industrie pétrochimique absolument florissante. Eh bien, qu'est-ce qui est arrivé? Le gouvernement fédéral a instauré la ligne Borden, le temps d'empêcher les industries de Montréal de vendre leur pétrole à l'Ouest, pour développer l'industrie pétrochimique en Ontario. Et le jour, M. le Président, où le pétrole de l'Ouest a commencé à être disponible et où on a construit le pipeline, alors, on a inversé le système de façon à approvisionner, à faire jouer sur le terrain de Montréal la compétition du pétrole qui venait de l'Ouest et de nuire à l'industrie pétrochimique de Montréal, ce qui fait qu'une très grande partie de l'industrie et de l'emploi de Montréal a été étouffée par une décision que je dirais arbitraire, une décision qui n'a pas été prise en concertation avec d'autres décisions et qui a fait que Montréal a souffert grandement.

On a mentionné antérieurement le phénomène de la canalisation du Saint-Laurent. Fallait-il la faire? Fallait-il ne pas la faire? Sans doute qu'il y avait là-dedans un élément positif pour le dynamisme économique de l'ensemble du Canada, je ne le nie pas. Mais qu'a-t-on fait à ce moment-là pour préserver ce qui était nécessaire pour assurer l'essor économique de Montréal? Pas grand-chose, M. le Président.

Alors, voyez-vous, M. le Président, il y a un tas de problèmes. Prenez par exemple la question des aéroports. Bien oui, on a construit Mirabel. On a détruit de beaux villages, de magnifiques villages de la région de Sainte-Scolastique, où l'armée canadienne se pratiquait à faire sauter des obus sur des vieilles maisons, des maisons centenaires, une richesse patrimoniale extraordinaire. On a détruit un territoire, on lui a enlevé son coeur, son dynamisme central qui était l'agriculture, pour bâtir un aéroport. Était-ce justifié, M. le Président? On voit les conséquences aujourd'hui: on a un éléphant blanc qui coûte cher à tout le monde. Et là, bien, on a décidé, les gens de Montréal ont décidé qu'il fallait rapatrier tout à Dorval et peut-être essayer de donner, je dirais, la respiration artificielle à Mirabel en espérant que Mirabel vivrait assez longtemps pour qu'on puisse la récupérer dans 20 ou 25 ou 30 ans.

Alors, c'est un ensemble de décisions éparses qui ont été prises sans concertation, M. le Président, et sans beaucoup de soin pour le dynamisme économique de Montréal, et c'est justement à cela que s'attaque le ministère de la Métropole, parce qu'il met en place un ministre et un ministère dont le rôle, ça va être justement d'assurer cette concertation.

Vous savez, M. le Président, quand un médecin commence ses cours de médecine, quel est le premier principe qu'on lui enseigne? On lui enseigne ce principe-ci: Surtout ne pas nuire. C'est le premier principe, c'est-à-dire: Quand quelqu'un est malade, il faut faire attention à ce qu'on fait, ne pas donner des médicaments qui empirent la situation et qui font qu'on se ramasse à l'hôpital, alors qu'un traitement léger aurait pu suffire. Alors, dans l'économie, c'est la même chose: Surtout ne pas nuire.

Et la concertation horizontale et verticale, ce sera la solution pour ne pas nuire: horizontale, parce que le ministre – et la réalité du terrain en a bien témoigné – sera à même de rassembler les forces vives – et il le fait déjà – de Montréal pour assurer la concertation dans les interventions et je dis aussi la concertation verticale parce que, par son poste de ministre, il est placé en situation de pouvoir assurer la concertation des interventions de chacun des ministères.

C'est là qu'est le vrai pouvoir, M. le Président, c'est là qu'est le véritable influx économique. Il ne suffit pas d'avoir des millions à jeter sur Montréal, il faut que chaque intervention soit pertinente et soit ajustée à une situation qui tient compte des autres facteurs de développement. C'est pour ça, M. le Président, que ce ministère est quelque chose de nouveau, quelque chose d'important et qui va assurer et qui va aider au développement économique de Montréal, développement économique qui va se répercuter sur l'ensemble du Québec, M. le Président. Aussi, c'est avec beaucoup de plaisir que j'appuie ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey. M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, il me fait plaisir de prendre parole sur cet important projet de loi, Loi sur le ministère de la Métropole. Je dois tout de suite tenter... Parce qu'en 10 minutes on pourrait seulement rectifier les 10 minutes du discours du député de Saint-Hyacinthe, qui, pourtant, nous a déjà dit qu'il avait des connaissances en matière d'histoire. Mais disons, juste pour résumer, M. le Président, que sa connaissance en matière de l'importance et du rôle de la ligne Borden fait sérieusement défaut. Par ailleurs, pour quelqu'un qui pleure la perte des terres de Mirabel, je tiens à lui rappeler que, lui, il était commissaire à la Commission de protection du territoire agricole en 1988, lorsque le terrain qui a servi pour la construction du château de 3 500 000 $ de la ministre de l'Éducation a été dézoné agricole sur l'Île-Bizard.

Pour ce qui est du projet de loi lui-même, M. le Président, je pense qu'il est important de le situer dans son contexte. Il faut savoir que le ministre lui-même, tout à l'heure, lorsqu'il parlait de son projet de loi – et puis, ça va paraître dans les transcriptions de ces débats aujourd'hui – a fait un lapsus très révélateur: le ministre a parlé de l'île. Il s'est tout de suite rattrapé en parlant de la métropole. Mais, pour un ministre qui représente une circonscription voisine de la mienne, M. le Président, sur l'île Laval, la ville de Laval, je pense qu'il vient de trahir, justement, ses réelles intentions, et on l'a vu à plusieurs reprises avec ce ministre au cours des derniers mois, notamment dans le dossier de l'aéroport de Mirabel.

(15 h 50)

Vous savez, M. le Président, les cinq députés de Laval – je suis le seul de notre formation politique; il y a quatre députés péquistes à Laval, dont le ministre de la Métropole – on a fait une réunion de notre comité régional de développement, et ça a été unanime à une voix près. Le ministre de la Métropole a voté contre l'idée d'utiliser certains fonds pour faire une évaluation d'impact du déménagement de l'aéroport Mirabel vers Dorval pour les vols internationaux, ce qui était intéressant parce que non seulement il était seul, mais ses trois autres collègues députés péquistes ont voté contre lui. C'est montrer à quel point le ministre, justement, confond son rôle de ministre de la Métropole avec un ministre de l'île de Montréal. Et, ça, je pense qu'il risque de le payer cher aux prochaines élections, parce qu'il représente une circonscription qui n'est même pas située sur l'île de Montréal, mais bel et bien dans la région métropolitaine de Montréal, dans la ville de Laval.

Mais, M. le Président, je pense aussi que le projet de loi n° 1, Loi sur le ministère de la Métropole, est aussi révélateur d'une attitude et d'une tendance au sein de ce gouvernement du Parti québécois. Il privilégie toujours des structures, il privilégie toujours des bureaucraties aux dépens des réelles actions, parce que, ce que ce projet de loi fait – et la démonstration en a été amplement faite, c'est une coquille vide – c'est qu'il tente de mettre une feuille de vigne sur l'incapacité du gouvernement du Parti québécois d'affronter le réel problème qu'affrontent la métropole et toute l'économie du Québec. C'est l'option séparatiste que le ministre de la Métropole et ses acolytes prônent au détriment de l'économie de tout le Québec.

Vous savez, le projet de loi qu'on a sur la table aujourd'hui, M. le Président, ça fait suite à une décision du premier ministre désigné de créer trois catégories de ministres. On avait déjà connu ça, deux catégories de ministres, mais, lui, il a décidé d'en créer une troisième. Il a décidé qu'il allait avoir des superministres. Alors, on a le vice-premier ministre qui s'occupe de tout ce qui est économique. On a la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui s'occupe de tout ce qui est concertation en matière de travail, ces questions-là. Et, évidemment, on connaît aussi les ministres délégués. Ça, c'est un autre niveau qui existait déjà. Mais, en créant cette autre catégorie de ministre, par défaut, ils ont créé une catégorie de ministres intermédiaires. Donc, des ministres qui, normalement, étaient des ministres de plein droit, comme le ministre des Affaires municipales, le ministre de la Justice, des ministères comme ça ont vu, par le fait même, diminuer leur statut au sein du Conseil des ministres.

Alors, le ministre de la Métropole, qui était auparavant ministre de la Sécurité publique, s'est fait offrir un choix. Il pouvait rester un ministre intermédiaire ou il pouvait accéder au rang exalté de superministre. Alors, la preuve est ici avec nous aujourd'hui, parce qu'il présente le projet de loi portant la création de son ministère, qu'il a acheté ce qu'on tentait de lui vendre. Il a acheté l'idée que, du jour au lendemain, il allait devenir superministre.

Il s'est fait avoir, M. le Président, parce que, aujourd'hui, à la mi-juin, il est encore en train d'essayer de nous convaincre de créer le ministère dont il est le superministre. Je pense que le titre dans le journal La Presse était beaucoup plus juste: «Un miniministère pour Montréal». Et c'est vraiment de ça qu'il s'agit. C'est de la poudre aux yeux, c'est une tentative de dire, comme le premier ministre désigné l'a dit à son sommet économique: Ceux qui disent qu'on a des probèmes économiques au Québec, ceux qui disent, dans le leadership des entreprises, qu'on a de réels problèmes à attirer des fonds et des investissements ici, bien, ils ont des problèmes psychologiques. C'est ce que le premier ministre désigné leur a dit, et je pense que, malheureusement, le ministre chargé du miniministère de Montréal a acheté cette argumentation-là.

M. le Président, ce n'est pas vrai que les gens qui disent que Montréal connaît des difficultés ou que c'est difficile d'attirer des investissements de ce temps-ci, avec l'incertitude économique causée par l'option séparatiste de son gouvernement, ont des problèmes psychologiques. Ils sont en train de dire la vérité. Et j'ose croire qu'un avocat chevronné, de très grande expérience, qui est le ministre de la Métropole, va se rendre compte un jour qu'il est en train d'essayer de défendre un client que 18 000 personnes ont vu et qui a été filmé en train de commettre le crime, et qu'un jour il va se réveiller et il va dire: Comment est-ce que je peux continuer à défendre cette thèse-là à l'effet que je veux être un ministre de la Métropole? On ne me donne pas de réelles ressources. Quand je me suis réveillé superministre, je n'avais même pas de bureau où aller; là, des mois plus tard, j'essaie toujours de passer un «bill» pour créer le ministère. Puis je pense qu'il est assez lucide et il est, ô combien, assez intelligent pour savoir que le réel problème... Parce qu'il doit commencer à rencontrer des hommes et des femmes d'affaires, et il va se rendre compte que le réel problème, c'est le fait que son gouvernement continue à prôner une option destructrice, une option qui ne fait que nuire à l'économie du Québec et, oui, par répercussion, par la bande, évidemment, son moteur économique, la grande région de Montréal, la région métropolitaine de Montréal.

Je manquerais à mon devoir, comme député en provenance de la ville de Laval, si je ne mentionnais pas à cette occasion le fait que, de la même manière que le gouvernement du Parti québécois aime bien des structures et des bureaucraties, il n'aime pas tellement produire des résultats; et on en a un exemple criant à Laval. À Laval, M. le Président, sur les quatre députés péquistes, on a le député de Mille-Îles qui est notre secrétaire régional, on a le député de Vimont qui est ministre de l'Environnement et qui est par ailleurs notre ministre régional – parce que rappelons que Laval, c'est une île, mais c'est aussi une ville, c'est une MRC, c'est une région; alors, on a le ministre de l'Environnement et député de Vimont qui est notre ministre régional – puis on a, en plus, le ministre de la Métropole qui est chez nous, à Laval, aussi.

Avec ces trois grands titres ronflants, M. le Président, à eux trois, ils ne sont pas capables d'apporter le moindre soutien à une des plus importantes infrastructures touristiques de la ville de Laval, le Cosmodôme, qui connaît des difficultés depuis plus d'un an, qui peut attirer énormément de gens et de touristes et de visites non seulement pour Laval, mais, évidemment, pour la grande région métropolitaine. Et le ministre de la Métropole n'a non seulement rien fait pour, mais à chaque occasion qui lui est donnée en commission régionale, il parle contre; il explique qu'il y a des pouvoirs en arrière de ça, que c'est une certaine catégorie d'hommes d'affaires qui veulent maintenant se faire aider par le gouvernement. Les sommes sont là, il le sait. Ça a été consenti que Québec et Ottawa donneraient leur tiers et Laval son tiers pour garder le Cosmodôme en vie. Qu'est-ce qu'on a appris? Si on veut de l'aide, à Laval, avec un secrétaire régional, un ministre régional puis un ministre de la Métropole, il faut aller en Abitibi, chez le ministre des Affaires municipales, si on veut avoir avoir de l'aide avec le Cosmodôme. Devinez quoi, M. le Président? On n'a pas encore eu d'aide pour le Cosmodôme.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, on espère que l'intelligence, la perspicacité et la clairvoyance du ministre de la Métropole vont lui permettre de réaliser qu'il s'est fait embarquer, qu'il s'est fait enfirouâper lorsqu'il s'est fait offrir ce miniministère de Montréal et que le réel problème, et il le sait, c'est l'option séparatiste prônée et poussée par son gouvernement, qui n'amène que des problèmes économiques pour la région métropolitaine et pour l'ensemble du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Alors, M. le ministre, votre droit de réplique.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun, le ministre, dans le cas de la prise en considération du rapport, peut répliquer après chaque intervention, pour un cinq minutes.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Je ne voudrais pas répondre au député de Chomedey sur le même ton qu'il m'a attaqué. Je crois que ça serait perpétuer une attitude qui serait destructrice pour la métropole à un moment où nous avons besoin de solidarité, quelles que soient les opinions politiques qui nous séparent occasionnellement, mais où on devrait se réunir pour atteindre les objectifs de la relance de la métropole pour une population... Et j'en sais quelque chose, justement, parce que je suis député de Laval-des-Rapides, qui, tout en n'étant pas sur l'île de Montréal, fait quand même partie du noyau urbain – ce dont je parlais, là, le noyau urbain – qui est défini comme étant le centre d'une métropole, auquel se rattache une couronne qui, elle, est définie par plus de la moitié des travailleurs qui viennent travailler au centre du noyau urbain, qui, d'ailleurs, a des problèmes tellement semblables aux comtés de l'est de Montréal. Et je sais que ces gens savent que, lorsque nous créons une activité économique quelque part sur le territoire de la métropole, tout le monde en bénéficie.

(16 heures)

Mais je voudrais répondre brièvement à certaines des attaques qui ont été faites et qui m'apparaissent injustifiées. La décision du CRD. C'est vrai que je croyais que dépenser 50 000 $ par un CRD local, ce n'était pas la meilleure utilisation qu'on pouvait faire des fonds limités qu'hélas les CRD ont que de payer une pareille enquête. D'ailleurs, bien que je n'y aie été pour aucune façon, il semble bien qu'après avoir voté ça, moi qui étais à l'assemblée générale du CRD, alors que le député de Chomedey n'y était pas, on m'a appris que ces fonds n'avaient pas été dépensés et qu'on avait changé d'idée. Probablement qu'on s'était aperçu que cette étude aurait ajouté peu de choses utiles au débat, puisqu'elle aurait été interprétée comme étant faite par une région qui avait peut-être un intérêt à défendre une option plutôt qu'une autre. C'était aussi mon opinion.

Je voudrais aussi corriger certaines choses. Je n'ai pas été attiré par le titre de ministre d'État au moment où j'ai eu, c'est vrai, à choisir entre demeurer où j'étais et accepter ce nouveau défi. Je ne savais pas que je serais ministre d'État et, donc, pas superministre. Je croyais bien simplement que je serais très simplement ministre de la Métropole. Ce que j'y voyais, ce n'était pas l'importance que l'on m'accordait mais plutôt un défi extraordinaire. À l'origine, je ne me croyais pas le mieux placé pour le relever. Le premier ministre m'a convaincu que j'étais, disons, le moins mal placé de toute la députation, et je croyais cependant, comme lui, que c'était une des choses les plus importantes à réaliser au Québec, et j'ai accepté cette lourde tâche plutôt que de rester dans un ministère où je me sentais plus confortable, et même plus populaire.

Et justement, puisqu'il me reste quelques instants, je sais que les gens savent généralement peu ce que nous faisons, et beaucoup de ce que nous faisons ne paraît pas. Mais, depuis que nous sommes là, nous avons quand même dû réaliser la mise en place du ministère, ce qui n'est pas rien, puisqu'on partait d'absolument rien, justement. J'ai dû assurer une présence à tous les comités ministériels pour assurer la promotion des intérêts métropolitains. Il y en a trois par semaine. J'ai des rencontres avec de nombreux investisseurs étrangers pour les amener à investir dans la région métropolitaine. J'ai siégé sur le comité de la Bibliothèque nationale du Québec.

J'ai eu une participation effective à différents comités interministériels que l'on distingue des comités ministériels parce que, eux, c'est dans l'élaboration des politiques, alors que les comités ministériels, c'est à la fin du processus, lorsque la politique est établie. J'ai eu une participation à la mise en place d'organismes régionaux, tels que la Société Montréal international, le réseau technologique de Montréal aussi, le rétablissement de l'axe Ottawa–Montréal–Québec, les rencontres et consultations auprès d'intervenants régionaux extrêmement nombreux, par exemple la Table des préfets et des maires, les CRD, les maires de banlieue, la mise en place de l'Agence métropolitaine de transport, le lancement du plan triennal de rénovation du Palais des congrès, la participation de la RIO à la venue d'une équipe de football professionnel, la confirmation de congrès majeurs comme Microsoft, INET, etc.

C'est donc un travail parfois un peu ingrat parce que j'y travaille plus qu'à mon autre ministère et ça paraît moins. Mais c'est parce que j'espère que ça va paraître à long terme, et même à moyen terme. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Comme beaucoup de gens, au moment de l'annonce d'un ministre sur Montréal, j'ai été satisfait. J'ai trouvé que c'était une bonne idée, ça pourrait être une bonne idée. Parce qu'on connaît les problèmes réels que vit, en termes de chômage et de pauvreté, la grande région de Montréal, je me suis dit: Ça prouve que ce gouvernement va peut-être tenter quelque chose sur Montréal après l'année et demie d'inactivité qu'on avait vue avec le précédent premier ministre de la même formation politique. Alors, je trouvais qu'il y avait quelque chose.

Je vais vous dire même, de plus, M. le Président, que, lorsqu'on a annoncé que le ministre responsable du ministère de Montréal était le député de Laval-des-Rapides, je dois dire que j'ai été satisfait. Il faut dire... Satisfait, oui. C'est ça. Le député de Laval-des-Rapides nous avait démontré, lorsqu'il était ministre responsable de la Sécurité publique, qu'il était à la fois un homme d'analyse et un homme de décision. Je répète: un homme d'analyse et un homme de décision. C'est-à-dire qu'il ne laissait pas traîner les dossiers, il était capable d'aller vite lorsqu'il avait à prendre une décision, qu'il était capable aussi de faire une analyse des questions qui, parfois, étaient très, très complexes. Je dois dire qu'il était une des étoiles montantes – c'est peut-être pour ça qu'il était devenu dangereux d'ailleurs – à l'intérieur de sa formation politique. Et il n'avait qu'à lire, à l'époque, les médias, les différents journaux pour voir à quel point il avait ce qu'on dit dans notre langage, une bonne presse.

Et, même dans les arcanes des gens qui étaient favorables à notre formation politique et qui donc n'ont pas tendance, n'ont pas l'habitude de valoriser les gens de la formation politique d'en face, ils faisaient un cas spécial, ils disaient: Oui, mais il y a le ministre – je ne peux pas nommer son nom parce que, ici, on ne peut pas nommer – non, non, mais il y a le ministre – et ils donnaient son nom, à l'époque – qui, lui, est un gars qui sait se tenir debout, qui sait faire quelque chose. Et on sait à quel point, dans des dossiers difficiles de la sécurité publique, il avait été en mesure de prendre des décisions souvent difficiles: je pense à la manière dont la crise amérindienne n'a pas éclaté; je pense aussi à des escouades où on a uni les différentes polices pour lutter contre les bandes de motards. Il avait une excellente réputation. Alors, vous voyez, M. le Président, à la fois un projet qui pourrait paraître intéressant et un ministre ayant une bonne réputation.

Alors, là, la réalité, lorsqu'on lit le projet de loi n° 1, c'est qu'on a – et vous m'excuserez cette image – castré complètement ce ministre, avec le projet de loi qu'on a devant nous. C'était ça, la réalité. On avait un homme qui était absolument une étoile montante...

Des voix: ...

M. Gautrin: Non, non, ça fait rire le monde, mais c'est la réalité. On avait une étoile montante dans la formation politique gouvernementale, et là on l'affuble d'une responsabilité qui pourrait être importante et on ne lui donne aucuns moyens. On ne lui donne aucuns moyens et, depuis qu'il assume cette fonction – et on peut le questionner sur beaucoup de questions – il a un rôle conseil, il a un rôle où il peut donner son avis. Mais lui qui était un homme de décision, lui qui avait l'habitude de pouvoir décider, de savoir ce qu'on faisait très rapidement, et il l'avait démontré lorsqu'il était en charge du dossier de la sécurité publique, lui qui savait sans tergiverser décider dans quelle direction on pouvait aller ou ne pas aller, il en est réduit à essayer de conseiller chacun de ses collègues sur ce qu'on pourrait faire ou ne pas faire pour la grande région de Montréal; et c'est ça, le malheur, M. le Président.

Il n'a, dans le projet de loi n° 1 qui crée son ministère, actuellement, aucun budget, il n'a qu'une structure extrêmement souple de fonctionnaires qui peuvent faire quelques études, le cas échéant, pour pouvoir soutenir les conseils qu'il va donner à droite et à gauche au gouvernement. Les ministres responsables, et je pense plus spécifiquement au ministre des Transports, je pense au ministre de la Santé et des Services sociaux – je vais revenir dans mon intervention, M. le Président, sur ces questions-là – je pense au ministre de l'Éducation, je pense au ministre de l'Industrie et du Commerce, peuvent entendre et obtenir l'avis du ministre responsable de Montréal, mais... D'abord, ils n'ont pas l'obligation de suivre cet avis, premièrement. Et, deuxièmement, ils sont tout à fait autonomes, à l'intérieur de leur propre machine, pour prendre les décisions qui touchent l'ensemble du Québec, y compris Montréal.

Alors, vous voyez la difficulté de cette structure qu'on a devant nous et l'absence réelle de pouvoirs que cet homme a, et on l'a vu dans les périodes de questions. Et, si on fait le bilan à l'heure actuelle, c'est clair que le ministre responsable de Montréal, en fonction de la loi, de sa loi constitutive qu'on est en train de voter, n'a pas vraiment de pouvoirs pour être en mesure de décider.

(16 h 10)

Je vais vous donner des exemples. On a eu, dans la grande région de Montréal, un problème et on a un problème de fermeture d'hôpitaux, de redéploiement, si je puis dire, des ressources en matière de santé, que ce soient les ressources de CLSC, que ce soient les ressources des hôpitaux. Je suis désolé de vous dire que ce n'est pas le ministre de Montréal qui a quelque influence là-dessus, c'est le ministre de la Santé et des Services sociaux. La régie régionale ou les régies régionales, parce qu'il y en a plusieurs, sont redevables devant le ministre de la Santé et des Services sociaux, tel qu'il est prévu par la loi. Celui-ci peut obtenir l'avis de beaucoup de gens, du maire de Montréal, des préfets, du maire de Laval, y compris du ministre responsable de Montréal, mais celui-ci n'a qu'un rôle d'aviseur.

Je pourrai revenir sur les projets qui sont dans le ministère de l'Éducation à l'heure actuelle, M. le Président, que ce soit au niveau de la carte, à l'heure actuelle, des immobilisations, c'est-à-dire des projets de construction d'écoles... Vous savez qu'il y a une situation, dans la grande région de Montréal, où, d'un côté, les populations se sont concentrées dans la couronne et, malheureusement, le besoin d'infrastructures s'en va dans la couronne et le centre a un surplus d'infrastructures. Le ministre peut donner des avis, mais il n'a pas un pouvoir de décision.

Alors, là, M. le Président, vous comprenez le problème que nous avons actuellement. Nous étions à la fois heureux qu'il y ait quelqu'un, dans ce gouvernement, qui soit conscient des problèmes que vit la grande région de Montréal sur le plan économique, sur le plan du chômage, sur le plan de la pauvreté, sur le plan du développement des infrastructures, sur le plan du réseau de transport – si j'avais un peu plus de temps, je pourrais aussi aborder toute la question du réseau de transport – et nous disions: Il peut y avoir une personne. Et je dois dire, de ce côté-ci de la Chambre, du moins, nous, les parlementaires libéraux, nous avions énormément d'estime pour le député de Laval-des-Rapides. Et, à ce moment-là, on se retrouve devant un projet de loi qui virtuellement ne donne aucun pouvoir réel à la personne qui est responsable du ministère de Montréal.

Alors, c'est vraiment un double langage. On crée un ministère de Montréal, on nomme une personne prestigieuse et compétente à la tête de ce ministère, mais, d'un autre côté, on ne lui donne ni ressources, ni moyens de fonctionner, rien, ni pouvoir d'agir. C'est ça, le double langage de ce gouvernement, c'est ça réellement que nous allons combattre dans tous les points et les secteurs d'activité du gouvernement, un double langage que nous ne pouvons pas accepter, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. M. le ministre, pour votre réplique de cinq minutes.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Ça va être moins que ça, cette fois-ci. J'ai tendance à dire que l'opposition m'envoie des roses. Certains députés se chargent des tiges, d'autres, de la fleur. J'espère que ce parfum n'est pas un poison. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ménard: Le député de Verdun soulève deux questions importantes, en fait, une question importante que sont les pouvoirs que ce ministère a.

Je vous signale que le défi qui consistait à bâtir ce ministère consistait aussi à déterminer les pouvoirs qu'il aurait. Il y a, au fond... L'opposition critique beaucoup l'absence de pouvoirs que ce ministère aurait, mais fait peu de suggestions pour dire quels pouvoirs il devrait avoir. De la nature des choses, j'ai déjà expliqué qu'il était impensable que l'on donne à un seul ministre 40 % du gouvernement dans tous les domaines: santé, éducation, sécurité publique, revenu, environnement, pour un seul territoire. Il fallait donc faire un autre choix qui était une équipe légère qui saurait stimuler et faire prendre par les autres ministères sectoriels les meilleures décisions pour la métropole, lorsque leurs décisions auraient un impact significatif sur la métropole. C'est le choix que nous avons fait.

L'autre choix qui aurait pu être fait, différent de celui que nous avons fait, c'est d'avoir un pouvoir de veto, c'est-à-dire de donner au ministre de la Métropole le pouvoir d'empêcher que les projets gouvernementaux sectoriels, par exemple en éducation ou en santé, viennent au Conseil des ministres sans avoir l'approbation du ministère de la Métropole; c'est ça, au fond, qu'aurait été un pouvoir de veto. C'est sûr que c'est une des options que nous avons envisagées. Mais, encore une fois, je préfère un pouvoir... D'abord, ça établirait une structure de confrontation qui, avant d'avoir ses effets, prendrait du temps, alors que je pense qu'il était plus important, puisque les problèmes sont si urgents dans la région métropolitaine, d'avoir un pouvoir de stimuler, d'initiative, d'accompagner les projets sectoriels en collaboration avec les ministres sectoriels et de les amener eux-mêmes à prendre les meilleures décisions pour la métropole.

Parce que je pense encore que ce n'est pas par méchanceté ou même par incompétence que les fonctionnaires de Québec prennent parfois des décisions contradictoires par rapport à la métropole ou qu'ils ne répondent pas aux besoins urgents; c'est plutôt par un manque de sensibilité, du fait qu'ils n'habitent pas cette ville, qu'ils ne ressentent pas les problèmes de façon aussi intense que les gens qui y sont, par un manque d'information. Et c'est justement ce à quoi visait le ministère de la Métropole.

C'est évident que cela m'amène à avoir une attitude, aussi, totalement différente de celle que j'avais au ministère de la Sécurité publique. Au ministère de la Sécurité publique, j'avais à diriger les policiers; ça s'étendait aussi aux prisons et aussi aux mesures prises lors de catastrophes naturelles, ce qu'on appelle la sécurité civile. J'avais, dans ces domaines-là, des gens qui aiment avoir des instructions claires et qui aiment obéir, enfin, réaliser des choses, exécuter avec compétence des ordres clairs qui leur sont donnés. Il est évident qu'il semble bien qu'ils avaient manqué, dans le passé, de ministres capables de prendre des décisions claires, qu'ils avaient notamment beaucoup souffert de ministres qui les laissaient s'engager à prendre eux-mêmes des décisions. Si c'était une réussite, le ministre cherchait à en tirer profit; s'il y avait un accident et si c'était un échec, alors il se dissimulait pour pouvoir les critiquer.

Moi, j'ai toujours voulu prendre une responsabilité, au ministère de la Sécurité publique, et assumer les décisions qui étaient prises, et c'est probablement l'attitude que l'on a appréciée. Mais l'attitude, je vous dirais d'élu est un peu comme celle des avocats, un peu différente, je dirais même tout à fait contraire. Il est préférable non pas de leur donner des ordres clairs, mais, quand on a bien réfléchi à un problème et qu'on pense avoir trouvé la solution, il faut les amener eux-mêmes à prendre cette décision en pensant qu'elle est la leur. C'est évidemment une attitude tout à fait différente, mais je pense que c'est la meilleure façon d'agir. Avec autant d'acteurs, il faut essayer des mesures de concertation, de coordination, d'encourager les initiatives que nous pensons les meilleures. Ce n'est plus l'attitude militaire, qui évidemment pouvait nous rendre plus populaires dans certains domaines, mais celle qui est plus adaptée à certains autres domaines. Alors, je pense que je dois plutôt avoir cette attitude, dans les nouvelles responsabilités qui m'ont été accordées, ce qui ne veut pas dire que je ne réfléchis pas beaucoup, justement, aux meilleures solutions qui doivent être prises et que je n'ai pas des idées sur ces solutions, même si j'agis moins publiquement. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État à la Métropole.


Mise aux voix de l'amendement du ministre

Alors, je vais maintenant mettre aux voix l'amendement qui a été proposé par M. le ministre d'État à la Métropole au rapport de la commission. Cet amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'aménagement et des équipements, portant sur le projet de loi n° 1, Loi sur le ministère de la Métropole, est-il adopté? Oui, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Le ministre nous signale qu'il y avait deux amendements.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le seul amendement qu'on m'a remis, c'est l'amendement du préambule.

(16 h 20)

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, écoutez, nous allons brièvement faire la recherche, là, parce que c'est important de régler ça tout de suite. Moi, on m'a indiqué un seul amendement et j'ai demandé le texte, c'est celui du préambule.

Alors, nous allons suspendre quelques minutes pour vérifier, puis nous reprendrons nos travaux bientôt, dans quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 21)

(Reprise à 16 h 22)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Nous avons élucidé la question. Le deuxième amendement auquel a fait référence le ministre avait déjà été adopté dans le cadre de la commission. Alors, cet amendement était déjà inclus dans le rapport qu'on nous a remis ici, et l'amendement que j'ai mis aux voix tantôt, c'est un amendement qui n'a pas été soumis dans le cadre de la commission. Alors, nous avons voté l'amendement tantôt et je vais maintenant mettre aux voix le rapport.


Mise aux voix du rapport amendé

Le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi n° 1, Loi sur le ministère de la Métropole, est-il adopté?

M. Gautrin: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 46 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 129


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 46, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce propose l'adoption du projet de loi n° 129, Loi modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement relativement aux navires de croisières internationales. Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce, je vous cède la parole.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais remercier tous mes collègues qui ont travaillé à ce projet de loi et qui ont participé à l'analyse du projet de loi en commission parlementaire. Nous avons, en effet, eu de bons échanges.

Le projet de loi que je vous demande d'adopter aujourd'hui a pour objectif de modifier la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement pour permettre l'exploitation des casinos sur les navires de croisières internationales. Ce projet de loi permet aussi au gouvernement d'assujettir, par la voie d'un règlement, cette activité à un régime de permis et à des règles d'exercice.

D'abord, il est important de rappeler à cette Chambre que ce projet de loi répond à des demandes maintes fois répétées par de nombreux intervenants de l'industrie touristique de permettre aux navires qui effectuent des croisières internationales au Québec de maintenir ouverts leurs casinos lorsqu'ils sont en eaux canadiennes. Ces intervenants, M. le Président, ce sont les compagnies maritimes, ce sont les grossistes en voyage, ce sont les ports de Québec et de Montréal, la Société de développement économique du Saint-Laurent et tous ceux qui ont à coeur le développement du Saint-Laurent. L'interdiction d'exploiter un casino dans les eaux canadiennes est véritablement perçue comme un irritant très important par l'industrie maritime et elle nuit considérablement au développement et à la compétitivité du Québec et de ses ports comme destination de croisière internationale.

C'est le Code criminel, donc une loi fédérale, qui interdit sur l'ensemble du territoire canadien toute forme de jeux ou de loteries publiques, à l'exception de ceux qui sont exploités ou autorisés, par licence, par les gouvernements des provinces. Il résulte de cette législation fédérale que les bateaux de croisières internationales ne peuvent pas exploiter leurs casinos lorsqu'ils sont en eaux canadiennes. Cela fait plus mal quand ils sont sur le Saint-Laurent, M. le Président, parce qu'ils passent un peu plus de temps, étant donné la longueur du Saint-Laurent et la profondeur de son cours d'eau à l'intérieur du Québec, cela fait plus mal à la rentabilité des propriétaires de navires de croisières.

Mais il n'y a pas que le Code criminel qui interdise l'exploitation des casinos à bord des navires de croisières internationales. En effet, à la suite des amendements qui ont été apportés en 1969 au Code criminel, décriminalisant l'exploitation de certains jeux et loteries, notre Assemblée nationale, ici, à Québec, a adopté la Loi sur les loteries et courses pour réglementer le commerce des jeux et des loteries et, à cette fin, prévoir l'émission de permis.

En 1992, cette loi a été amendée pour permettre et pour réserver à Loto-Québec l'exploitation des casinos d'État ainsi que des loteries vidéo. En conséquence, la législation actuelle empêche, même si la loi fédérale était modifiée, l'octroi de licences ou de permis pour l'exploitation de casinos sur les bateaux de croisières internationales, à moins d'une modification; et c'est ce que contient le projet de loi n° 129, tel que nous vous le soumettons aujourd'hui.

Je dois parler des retombées économiques importantes du projet de loi. L'industrie des croisières génère des retombées économiques très importantes non seulement pour les intervenants touristiques, mais aussi pour les nombreux secteurs de l'activité économique qui y sont reliés. Ainsi, lorsqu'ils sont à quai, les bateaux de croisières doivent payer des droits de port, des droits d'amarrage et de passagers. Ils font exécuter des réparations sur les navires et ils doivent, de plus, s'approvisionner en grande quantité en denrées alimentaires fraîches, en eau potable et en toutes sortes de produits de cette nature.

Quant aux croisiéristes, ils font des excursions dès qu'ils arrivent au port. Ils utilisent des taxis, ils participent à des visites guidées, ils se déplacent pour fréquenter les restaurants et les boutiques des villes où se trouvent les ports où accostent les navires de croisières. Sur un territoire grand comme celui du Québec, souvent, ils vont utiliser l'avion pour se rendre au port d'arrivée ou de départ ou pour faire des excursions un peu plus avancées. Ils vont coucher à l'hôtel avant d'entreprendre leur croisière, à l'occasion. Et toutes ces activités entraînent des déboursés importants.

Une étude a été réalisée par la SODES, qui est la Société de développement économique du Saint-Laurent et qui a établi les retombées économiques qui découlent de l'activité des croisières océaniques dans le Saint-Laurent. Elles s'établissent à 10 000 000 $ au chapitre des dépenses des passagers et à 6 000 000 $ au chapitre des dépenses des armateurs. Elle établit aussi les retombées économiques pour le gouvernement du Québec à 2 500 000 $ et à 1 200 000 $ pour le fédéral. En fait, les emplois créés par le rayonnement des retombées économiques reliées à l'augmentation du commerce des croisières internationales s'établiraient aux environs de 320 personnes-année, pour nous.

(16 h 30)

Les croisières internationales génèrent aussi des retombées qualitatives importantes pour l'industrie touristique du Québec. D'abord, elles permettent d'allonger la saison touristique, parce que les croisières se tiennent souvent au printemps ou à l'automne. Elles permettent de développer de nouveaux marchés touristiques. On sait que la clientèle de ces croisières internationales provient surtout de la Côte-Ouest et du Sud des États-Unis. Enfin, elles permettent le développement des secteurs portuaires, Montréal, Québec, mais peut-être aussi d'autres ports. Et elles nous permettent, dans l'ensemble, de mettre en valeur davantage la destination du Québec au rang des grandes destinations touristiques internationales.

Tous ces éléments démontrent l'intérêt qu'il faut avoir pour poursuivre le développement de l'industrie des croisières internationales pour le Québec. Cependant, la commercialisation du produit de croisière sur la voie nord-sud, vers la Nouvelle-Angleterre, est affectée très négativement par les restrictions de la législation canadienne sur l'exploitation des casinos. Pour solutionner ce problème, le ministre de la Justice du Québec a écrit, en février 1995, à son homologue du fédéral pour lui demander de modifier le Code criminel de façon à permettre à une province, notamment le Québec, d'émettre des permis d'exploitation des casinos sur les bateaux de croisières internationales lorsque ceux-ci sont en eaux canadiennes. Nous attendons toujours la réponse du ministre de la Justice fédéral.

Afin de supporter la démarche de mon collègue, j'ai aussi écrit, en février 1995, au ministre fédéral de l'Industrie et du Commerce, responsable du Tourisme, pour lui demander d'intervenir auprès de son collègue de la Justice afin d'accélérer les décisions dans ce dossier. La réponse de mon homologue indiquait qu'il avait l'intention d'appuyer cette modification, puisque nous ne sommes pas les seuls à nous plaindre de cette contrainte et que, dès que les résultats du processus de consultation qu'il avait mis en place seraient terminés, il croyait que le ministre de la Justice fédéral pourrait donner suite à notre demande.

Notre demande repose sur le fait que le secteur des croisières est un secteur en croissance dans l'industrie du tourisme. C'est un secteur dont le taux de croissance est de l'ordre de 10 % par année sur tout le marché nord-américain. Malheureusement, à cause de cette contrainte au niveau de l'exploitation des casinos, le taux de croissance, pour le Québec, est à peu près de la moitié. Donc, nous avons un manque à gagner à ce niveau-là. Or, on sait que, le Saint-Laurent, c'est un tronçon clé pour la zone de croisière du nord vers la Nouvelle-Angleterre.

Il est peut-être intéressant aussi de rappeler que, parmi les grandes destinations internationales de croisière, juste après les destinations tropicales vient la destination de l'Alaska, qui se trouve, en fait, au premier rang après les destinations tropicales. Actuellement, le Québec suit, plus loin, au douzième rang. Avec cette modification à la loi sur les loteries et au Code criminel, nous croyons que le Québec pourrait suivre assez rapidement le rang de l'Alaska. Nous entendons, bien sûr, poursuivre nos efforts auprès du gouvernement fédéral afin qu'il donne suite de manière positive à notre demande de modifier le Code criminel. Et, par ailleurs, le projet de loi que nous vous soumettons aujourd'hui pour adoption vise à faire reconnaître par cette Assemblée notre capacité à faire du Québec une destination de croisière internationale dès que le fédéral aura accepté de modifier le Code criminel. Et nous travaillons, en parallèle, à établir les nombreux avantages du Québec comme destination de croisière internationale en mettant en valeur les nombreux attraits du Saint-Laurent, du golfe Saint-Laurent, des ports du Québec. Et nous voulons, de cette façon, améliorer le rang du Québec comme site de destination internationale dans le domaine des croisières.

Alors, je termine, M. le Président, en vous demandant d'adopter ce projet de loi en prenant en compte les retombées économiques très importantes générées par l'industrie des croisières internationales, en prenant en compte la prolongation de la saison touristique que cela représente pour le Québec, ce qui est non négligeable – cela aidera à garder la destination québécoise comme une destination touristique quatre saisons – en prenant en compte aussi la clientèle aisée que le secteur des croisières internationales attire et, par conséquent, le prestige que ce produit touristique donne aux villes qui accueillent ces bateaux, en prenant en compte l'importance de maintenir la compétitivité du Québec dans ce secteur d'activité économique qui est particulièrement rentable pour les ports de Québec et de Montréal, et en prenant en compte la tolérance que plusieurs provinces canadiennes manifestent dans l'application du Code criminel, ce qui ne peut pas être le cas au Québec à cause de la longueur et de la profondeur de pénétration du fleuve Saint-Laurent. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, puisqu'il n'y a plus d'autres intervenants, le projet de loi n° 129, Loi modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement relativement aux navires de croisières internationales, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, j'aimerais obtenir le consentement de cette Assemblée pour revenir à l'étape des avis touchant les travaux des commissions.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement, M. le...

Une voix: ...


Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Merci, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission du budget et de l'administration poursuivra l'étude du projet de loi n° 34, Loi sur le transfert des attributions de l'Office des ressources humaines, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 27, Loi modifiant le Code du travail, après l'ajournement des travaux de l'Assemblée nationale jusqu'à 24 heures, à la salle 1.38.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la leader adjointe du gouvernement. Concernant les travaux de cette Chambre?

Mme Caron: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 36 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 13


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'article 36. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 13, Loi modifiant diverses dispositions en matière de boissons alcooliques, de loterie vidéo et d'appareils d'amusement. Y a-t-il des interventions sur ce projet de loi? M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Oui, merci, M. le Président. Quelques mots. Le 14 mai dernier, je présentais devant cette Assemblée le projet de loi n° 13. C'est une loi qui modifie, comme vous le mentionniez, diverses dispositions en matière de boissons alcooliques, de loterie vidéo et d'appareils d'amusement, et nous avons fait le débat dans le cadre de la commission des institutions. Nous avons fait l'étude détaillée de ce projet de loi, M. le Président. Je voudrais remercier mes collègues du travail. Je voudrais également saluer le travail constructif de l'opposition dans le cadre de l'étude de ce projet de loi.

Alors, le projet de loi fait trois choses. Il modifie la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques. Il modifie la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement et la Loi sur la Société des alcools. On le sait, M. le Président, depuis environ un an, le gouvernement a intensifié sa lutte à la contrebande, notamment en matière de boissons alcooliques. De même, suite à l'adoption de la Loi sur la Régie des alcools, des courses et des jeux, qui prévoyait, on se le rappelle, l'implantation des casinos d'État et du système de loterie vidéo, le gouvernement mettait en place des mesures pour contrer, cette fois-ci, le marché illégal d'appareils de loterie vidéo. Et on se rappellera que le récent discours sur le budget souligne que la coordination de l'action des intervenants gouvernementaux et des forces policières a permis de resserrer les contrôles sur la contrebande d'alcool et d'enrayer l'exploitation d'appareils de loterie vidéo illégaux, et tout ce travail a fourni, je pense bien, des résultats fort significatifs.

Toutefois, l'application de ces différentes lois engendre des coûts importants pour le gouvernement et pour les intervenants, dont la Société des alcools et la Régie des alcools, des courses et des jeux. En effet, depuis le début de la lutte à la contrebande de boissons alcooliques, par exemple, la Société des alcools du Québec a dû assumer des coûts représentant plusieurs centaines de milliers de dollars uniquement en frais d'analyse de boissons alcooliques, sans compter les frais d'entreposage de boissons saisies qu'elle doit également supporter. Et, de son côté, la Régie des alcools, des courses et des jeux supporte elle aussi des frais d'entreposage, par exemple, pour les appareils de loterie vidéo et d'amusement saisis, qui représentent, encore une fois, en termes de coûts d'entreposage, plusieurs centaines de milliers de dollars.

(16 h 40)

Or, cette expérience, M. le Président, que nous avons vécue nous a permis d'identifier certains facteurs qui pourraient alléger le fardeau du Procureur général, qui est responsable des poursuites qui sont engagées contre les auteurs d'infractions, et nous permettre, donc, ce faisant, de contribuer à l'assainissement des finances publiques et à poursuivre notre travail, mais au meilleur coût possible.

Quelques exemples, M. le Président. Par exemple, le projet de loi permettra la saisie immédiate de boissons alcooliques lors de l'immobilisation d'un véhicule par un agent de la paix qui a des motifs raisonnables de croire qu'un tel véhicule transporte illégalement des boissons alcooliques. Le projet permettra, par exemple, que le poursuivant puisse faire la preuve que le défendeur détient un permis d'alcool par le seul dépôt d'une déclaration du saisissant sur le constat ou sur le rapport d'infraction, ce qui va simplifier de beaucoup le travail. On s'est assuré, et j'ai eu l'occasion de l'expliquer à l'opposition dans l'étude détaillée du projet de loi, que le défendant pourrait toujours s'adresser au tribunal pour exiger du poursuivant le dépôt en preuve de l'attestation délivrée par la Régie.

D'autres exemples de simplification, de réduction de coûts: le projet de loi vise à réduire le nombre de situations où l'analyse des contenants de boissons alcooliques saisis est requise et le nombre de ces analyses. Par exemple, pour faciliter la preuve et réduire les coûts, le projet qui est devant nous propose qu'un certificat d'analyse soit exigé uniquement lorsque les contenants sont saisis ailleurs que dans un établissement pour lequel un permis d'alcool a été délivré, lorsqu'ils ne sont pas intacts ou lorsqu'ils ne portent pas d'identification de boissons alcooliques. Jusqu'à maintenant, M. le Président, on devait faire toutes les analyses à des coûts importants; maintenant, on va prendre la preuve à sa face même, donc prima facie, comme on dit dans le langage juridique.

Dans le cas des appareils de loterie vidéo, le projet de loi n° 13 propose également la confiscation automatique des appareils d'amusement, des appareils de loterie vidéo, de leurs accessoires, des sommes d'argent qu'ils contiennent ainsi que du matériel de jeu saisi lorsque des déclarations de culpabilité auront été enregistrées. Et, là aussi, M. le Président, j'ai eu l'occasion d'en discuter longuement avec les représentants de l'opposition. Il est très clair que lorsque nous parlons de déclaration de culpabilité, nous parlons, bien sûr, non pas de simples aveux, mais bel et bien de la reconnaissance de cette culpabilité.

Il y a d'autres dispositions pour permettre à la Régie des alcools, des courses et des jeux de disposer plus rapidement des appareils saisis: par destruction ou par vente publique, de même que, par exemple, la confiscation de plein droit des biens saisis à l'expiration d'un délai de 90 jours lorsque, par exemple, les propriétaires nous sont inconnus. Parce qu'une des difficultés qu'on rencontre dans la lutte à la contrebande, dans la lutte aux appareils illégaux, à la présence d'appareils illégaux, c'est que, souvent, évidemment, les propriétaires ne se présentent pas pour réclamer leurs biens lorsqu'ils savent qu'on les a pris en flagrant délit d'opérer ou de faire opérer par d'autres des appareils en situation d'illégalité.

J'ai eu l'occasion de présenter un amendement, je l'avais mentionné ici, M. le Président, en deuxième lecture, un amendement qui permet de transférer aux contrevenants, dans le cas de poursuites judiciaires, les coûts reliés aux expertises effectuées par des employés du ministère de la Sécurité publique sur les appareils saisis.

Alors, en conséquence, M. le Président, je pense qu'on a là un projet de loi qui permettra de poursuivre le travail en matière de lutte à la contrebande d'alcool, qui permettra également de poursuivre la lutte en matière d'appareils de loterie vidéo illégaux, de le faire au meilleur coût possible, avec des outils supplémentaires, tout en respectant – et l'opposition avait manifesté certaines réserves – à la fois la jurisprudence et les droits des défendants. Donc, pour toutes ces raisons, je pense que nous sommes prêts maintenant à passer à la prochaine étape, soit l'adoption du projet de loi n° 13. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Sécurité publique. Y a-t-il des interventions? Alors, M. le leader adjoint de l'opposition...

M. Lefebvre: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...et critique officiel en matière de sécurité publique.

M. Lefebvre: Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Frontenac.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le Président, nous sommes à l'étape de l'étude du rapport de la commission qui a siégé pour, comme M. le ministre l'a indiqué, évaluer article par article le projet de loi n° 13. Essentiellement, le ministre a résumé l'objectif du projet, qui est d'assainir les finances publiques. Ce que j'ai à plusieurs reprises mentionné au ministre et à son gouvernement, c'est qu'au nom de l'assainissement des finances publiques on ne peut pas remettre en question des principes de droit fondamentaux, que ce soit des principes de droit qui touchent le fond, ou la forme, c'est-à-dire la procédure. Et j'ai mis le ministre en garde à plusieurs reprises. Et dès le moment où le projet a été appelé – je ne parle pas du dépôt du projet – dès le moment où on a pu discuter, à la première occasion, de l'intention du gouvernement, c'est-à-dire au niveau du principe, j'ai indiqué au ministre que, au niveau du principe, oui, on allait donner notre appui, mais qu'on pouvait réévaluer la position de l'opposition officielle, la position sur le projet de loi comme tel dépendamment de la réaction du ministre à la commission parlementaire qui l'a évalué article par article.

Et j'indique tout de suite, M. le Président, que, sans être férocement contre – parce qu'on ne peut pas être férocement contre un projet de loi comme celui-là – il y a des réserves. Et il y a plus que des réserves, on est carrément contre sur un ou deux volets, c'est une question d'opinion; et on est pour plusieurs dispositions qui apparaissent dans le projet de loi n° 13. Alors, si on est contre une partie du projet de loi, on est nécessairement, compte tenu des règles qui nous gouvernent ici, à l'Assemblée nationale, si on est contre une partie, on est nécessairement obligé de voter contre. Mais je dis tout de suite au ministre que ça ne veut pas, évidemment, dire que, dans le projet de loi, il n'y a pas des choses intéressantes.

On est à l'étape du rapport. Mes commentaires seront plus résumés qu'ils ne le seront lors de l'adoption. Je veux rappeler au ministre, parce qu'il est encore temps de donner suite aux recommandations que je lui ai faites, aux suggestions que je lui ai faites, et, également, j'aurais peut-être dû commencer par dire: aux mises en garde que je lui ai faites, je voudrais rappeler essentiellement les inquiétudes que nous avons, du côté de l'opposition.

Le ministre introduit, par l'article 1 du projet de loi, la possibilité, à partir du moment où la loi entrera en vigueur, de saisir sans mandat les boissons alcooliques que l'on retrouvera à l'intérieur d'un véhicule automobile si on a des motifs raisonnables et probables de croire que ces boissons alcooliques sont illégales.

Ce que j'ai dit à M. le ministre, M. le Président, et j'ai insisté beaucoup là-dessus, j'ai eu un questionnement assez serré avec des conseillers et conseillères juridiques – qui, en passant, ont fait un excellent travail, je leur ai dit, d'ailleurs, en commission parlementaire, mais qui ne m'ont pas convaincu, et qui accompagnaient M. le ministre – je leur ai dit, et je m'adressais, évidemment, au ministre en espérant que je serais entendu par ceux et celles qui l'accompagnaient: Dans un premier temps, il y a l'article 8 de la Charte canadienne, qui se lit comme suit: «Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.» Il faut bien comprendre que ce qu'on veut introduire, c'est la saisie sans mandat en tout temps. On ne parle pas d'urgence, on ne parle pas de circonstances exceptionnelles. En tout temps, dès le moment où il y aura des motifs raisonnables et probables de croire que... les agents de la paix pourront procéder à la saisie sans mandat. Alors, je dis au ministre: Attention, vous avez, et je le répète, l'article 8 de la Charte. C'est un droit fondamental, lorsqu'on parle de la Charte canadienne ou de la Charte québécoise, on le sait, c'est ce qui protège de la façon la plus serrée et fondamentale les libertés individuelles des Québécois et des Canadiens. Alors, «chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives». Et, en commission, alors, j'ai dit au ministre: Faites attention, vous pouvez vous retrouver avec une attaque à ce pouvoir que vous vous donnez, une attaque sur la base de cet article 8 de la Charte canadienne.

(16 h 50)

J'ai aussi expliqué de la meilleure façon possible au ministre qu'il devait tenir compte des dispositions apparaissant dans le Code de procédure pénale, où la saisie sans mandat existe, mais en autant que certaines conditions existent, et, entre autres, l'urgence. L'article 96 du Code de procédure pénale dit ceci: «La perquisition est autorisée par mandat. Elle peut l'être par télémandat si les circonstances, notamment le temps requis ou la distance à franchir pour obtenir un mandat, risquent d'empêcher l'exécution de la perquisition. Elle ne peut être effectuée sans mandat ou télémandat que si le responsable des lieux consent à la perquisition ou que s'il y a urgence.»

Donc, M. le Président, en vertu du Code de procédure pénale, la saisie sans mandat est déjà permise à la condition... et c'est la poursuite qui aura le fardeau de la preuve devant la cour; la poursuite, le procureur de la couronne aura l'obligation de démontrer qu'il y avait urgence. S'il y a urgence et que la preuve est satisfaisante, la saisie sans mandat sera considérée comme étant correcte et admissible en preuve. Alors, j'ai dit au ministre: Attention, vous avez une disposition dans le Code de procédure pénale qui permet la saisie sans mandat en autant qu'il y a urgence, et la saisie sans mandat que l'on retrouve dans le Code de procédure pénale n'est pas restrictive, on peut saisir tout ce qui permet de faire la preuve de la commission d'un crime.

Et c'est là, M. le Président, la réserve majeure que nous avons de notre côté: l'introduction de la saisie sans mandat, immédiate, qui se restreint strictement aux boissons alcooliques risque de provoquer la situation suivante. Si, par hypothèse – ce n'est pas des hypothèses, ça va se produire comme ça dans les faits, M. le Président – les agents de la Sûreté du Québec ont des motifs probables, raisonnables de croire qu'ils ont intercepté un véhicule automobile, un camion dans lequel on retrouve des boissons alcooliques illégales, on pourra procéder sans mandat. J'ai dit au ministre: Attention. Est-ce que vous pouvez imaginer que les agents de la Sûreté du Québec, constatant au moment de la saisie qu'il y a d'autres éléments de preuve qui pourraient leur permettre de faire une preuve solide, des éléments de preuve nécessaires dans certaines circonstances pour faire la preuve de la contrebande – je pense, M. le Président, à des documents, à des livres de comptabilité, à des factures, je pense même aux caisses de carton ou de bois dans lesquelles on va retrouver les boissons alcooliques – étant donné que votre saisie immédiate sans mandat se limite aux boissons alcooliques, vos agents de la paix ne pourront saisir rien d'autre. Rien d'autre. Et, s'ils le faisaient, ils s'exposeraient à voir leur saisie, légale pour la boisson mais illégale pour le reste... ils s'exposeront – pas s'exposeraient, M. le Président – à voir toute la saisie comme telle non seulement attaquée, mais considérée comme étant illégale par le tribunal.

Alors, je n'ai pas convaincu le ministre, je n'ai pas convaincu ses conseillers et conseillères, quoiqu'ils m'ont semblé, jusqu'à un certain point, un peu ébranlés. Et voici que le ministre maintient sa position, n'a pas, M. le Président, réévalué sa décision, que l'on retrouve dans l'article 1.

Et, de notre côté, bien, évidemment, on maintient également notre position, parce que je suis convaincu que, la mise en garde que j'ai faite au ministre, elle est sérieuse et qu'il se retrouvera peut-être devant les tribunaux avec une réponse très claire, à savoir: M. le procureur de la couronne, vos policiers ont saisi des éléments, vous me soumettez des éléments de preuve qui ont été saisis de façon illégale, et toute votre saisie, par le fait même, est elle-même illégale.

Alors, M. le Président, moi, je ne peux pas faire plus que d'essayer de convaincre le ministre. Il restera une autre étape, l'adoption. Il sera encore temps. On peut à tout moment, jusqu'à l'adoption de la loi, accepter des suggestions ou, de soi-même, décider de modifier pour améliorer le projet de loi.

Quant au reste, M. le Président, il y a l'article 4, particulièrement. On modifie le processus – il n'y a pas un renversement du fardeau de la preuve – de la preuve devant la cour. Mais, ce qui me rassure – sinon, j'aurais eu des réserves – c'est que le défendeur, l'accusé pourra obliger la poursuite à procéder comme on doit le faire aujourd'hui, à savoir procéder en partant du principe que la preuve doit être faite de la meilleure façon possible. C'est la règle de la meilleure preuve. Alors, l'article 4, à son dernier paragraphe, va dans ce sens-là.

Il y a, évidemment, aussi des articles de concordance. J'avais aussi, M. le Président, des réserves sur l'article 7, quant à la signification précise des mots «une déclaration de culpabilité». Le ministre m'a donné des explications, de façon générale, satisfaisantes.

Alors, je m'arrête là-dessus, M. le Président. Je demande encore une fois au ministre, à ceux et celles qui le conseillent d'évaluer avec sérieux les mises en garde qu'on lui fait. Est-ce qu'une saisie sans mandat est vraiment nécessaire, compte tenu du fait que vous pouvez le faire en vertu du Code de procédure pénale? Et, si vous insistez pour maintenir cette intention, M. le Président, est-ce que le ministre ne devrait pas l'élargir, de sorte que la saisie de tout autre élément de preuve, de tout autre objet qui aurait été saisi en même temps que les boissons alcooliques soit considérée également comme légale, parce que le texte de loi sera plus clair?

Alors, je m'arrête là-dessus et je dis au ministre que, parce qu'on est contre une partie fondamentale, on sera contre, mais en admettant, cependant, qu'il y a des éléments qui bonifieront la loi actuelle et qui permettront effectivement, dans certains cas, d'alléger la procédure, de permettre au ministère d'éliminer certaines dépenses actuelles. Et, aussi, de façon générale, M. le Président, sauf quant à l'article 1, les droits fondamentaux, je pense, ne sont pas attaqués. Ça a été bien expliqué en commission parlementaire, et, de façon générale, je suis satisfait, sauf pour l'article 1. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac et leader adjoint du gouvernement. M. le ministre, vous avez un droit de réplique de cinq minutes.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Bien, je ne le prendrai pas, M. le Président. Juste un ou deux commentaires. Je suis heureux d'avoir réussi à convaincre le critique de l'opposition officielle sur l'essentiel du projet de loi. Je me rends compte que c'est dur de le convaincre sur tous les articles.

Par rapport à ce qu'il soulève, je veux simplement dire que nous avons tenté de bien expliquer que nous n'agissions pas à la légère, puisqu'il existe un arrêt de la Cour d'appel dans des situations analogues, qui est la contrebande de tabac, et pour lesquelles il a été mis très clair que les tribunaux ont reconnu la pertinence et la possibilité d'arrêter... de saisir des biens, dans le cas de véhicules, et de le faire sans mandat de perquisition. Puis il y a une raison bien simple, M. le Président, qui est assez évidente, c'est que des véhicules, par définition, ça roule, ça se déplace, ça bouge. Et, donc, s'il faut, à chaque fois, pour arrêter un véhicule, aller d'abord chercher le mandat, il y a là comme un problème. Alors, je suis heureux de savoir que l'opposition est d'accord avec nous qu'il faut faire la lutte à la contrebande, mais il ne faut pas juste être d'accord. Il faut se donner les moyens et il faut se donner des moyens légaux. J'entends le critique de l'opposition dire «légaux». C'est pour ça qu'on s'appuie sur un jugement.

Puis je termine en disant ceci. C'est un peu étonnant, l'attitude de l'opposition, parce que, d'un côté, elle nous dit: Vous allez trop loin en demandant un tel droit de saisir sans mandat. Et elle dit: Mais, si jamais vous faites ça, vous devriez le faire en allant jusqu'au bout, c'est-à-dire qu'on devrait pouvoir tout saisir sans exception.

M. le Président, on a l'impression que, la loi telle qu'elle est faite, elle est correcte. Elle s'appuie sur la jurisprudence, elle ne va pas au-delà de nos objectifs, elle fournira aux policiers des moyens importants dans la lutte contre la contrebande. Et, en même temps, on a eu la préoccupation de nous assurer, justement parce qu'on veut réussir, qu'elle ne soit pas trop facilement contestable devant les tribunaux, puisqu'elle respecte, à notre avis, les droits des défendants.

Alors, M. le Président, j'espère que, ces explications étant données, je finirai par convaincre le critique de l'opposition officielle; puis, à la limite, j'essaierai encore une dernière fois, au moment de l'adoption du projet de loi, M. le Président.

(17 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres interventions sur le projet de loi n° 13?


Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 13, Loi modifiant diverses dispositions en matière de boissons alcooliques, de loterie vidéo et d'appareils d'amusement, est-il adopté?

M. Lefebvre: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.

Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 37 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 17


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 37, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi n° 17, Loi abrogeant la Loi concernant les environs du parc du Mont Sainte-Anne. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi n° 17?


Mise aux voix du rapport

Alors, comme il n'y a pas d'interventions, le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi n° 17, Loi abrogeant la Loi concernant les environs du parc du Mont Sainte-Anne, est-il adopté?

M. Lefebvre: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 40 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 24


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Article 40. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi n° 24, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi n° 24?


Mise aux voix du rapport

Puisqu'il n'y a pas d'interventions, le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi n° 24, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

M. Lefebvre: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.

Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 41 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 26


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Article 41. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 26, Loi sur le ministère du Travail. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi n° 26?


Mise aux voix du rapport

Comme il n'y a pas d'interventions, le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 26, Loi sur le ministère du Travail, est-il adopté?

M. Lefebvre: Sur division, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.

Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 42 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 28


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Article 42. L'Assemblée prend en considération maintenant le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi n° 28, Loi sur la Société de télédiffusion du Québec et modifiant la Loi sur la programmation éducative et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi n° 28?


Mise aux voix du rapport

Aucune intervention. Donc, le rapport de la commission de la culture portant sur le projet de loi n° 28, Loi sur la Société de télédiffusion du Québec et modifiant la Loi sur la programmation éducative et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

M. Lefebvre: Un instant, M. le Président. Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté.

Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 44 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 51


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Article 44. M. le ministre des Relations internationales propose l'adoption du projet de loi n° 51, Loi concernant la mise en oeuvre des accords de commerce international. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi n° 51? Alors, M. le ministre des Relations internationales.


M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci, M. le Président. C'est avec énormément de fierté que je propose aujourd'hui l'adoption en troisième lecture du projet de loi n° 51, Loi concernant la mise en oeuvre des accords de commerce international. Ce projet, comme on le sait, va concrétiser de façon solennelle les engagements traditionnels du Québec en faveur d'un commerce ouvert et libre entre toutes les économies du monde ainsi que notre volonté de nous y conformer dans tous les champs de responsabilité qui nous appartiennent.

Ce projet législatif, M. le Président, comporte également un certain caractère historique puisqu'il compte parmi les mesures législatives ayant suscité le moins de controverse en cette Assemblée. En effet, ce n'est pas trop fréquent, il faut le souligner. Il est évident aux yeux de tous que la prospérité économique des Québécois a depuis toujours été liée au degré d'ouverture de nos frontières avec l'extérieur. Ce n'est pas par hasard que le Québec compte parmi les premières provinces canadiennes à vouloir prendre acte dans sa législation des principaux accords commerciaux internationaux qui affectent son économie. Les positions du Québec en faveur de règles équitables, claires et précises concernant les échanges commerciaux internationaux sont établies de longue date.

Sans vouloir rappeler tous les événements historiques qui confirment cette assertion, rappelons seulement qu'il y a huit ans c'est le vote massif de la population du Québec qui a permis l'élection du seul parti politique fédéral qui soutenait la conclusion d'un accord de libre-échange avec les États-Unis. Il n'est pas exagéré de dire que, sans cet appui massif, il n'y aurait pas eu d'accord bilatéral et, vraisemblablement, encore moins d'accord trilatéral. Comme on se plaît souvent à le répéter, la population québécoise est dotée d'un sens politique aigu. Il apparaît donc tout à fait logique que cette dernière ait été pleinement consciente de la nécessité d'établir et de consigner des règles qui allaient servir de cadre aux multiples relations commerciales qu'elle entretient depuis longtemps avec ses partenaires et concurrents économiques.

En s'engageant dans un tel processus, la communauté d'affaires québécoise était au fait que de tels accords comportaient à la fois des avantages et certains inconvénients. Une plus grande sécurité d'accès aux marchés visés et l'adoption de procédures claires en cas de mésentente constituent sans aucun doute les principaux avantages de l'Accord de libre-échange. Le solde des avantages et des inconvénients s'est vite révélé positif, comme en conviennent maintenant la plupart des intéressés, notamment les membres du gouvernement fédéral actuel, qui comptaient, ne l'oublions pas, parmi les plus féroces opposants à l'actuel traité.

Le gouvernement et le secteur privé québécois ayant déjà dû procéder aux multiples adaptations rendues nécessaires par le nouveau contexte commercial nord-américain, leur appui à l'inclusion du Mexique comme partenaire additionnel s'inscrivait dans une logique, pour ainsi dire, naturelle. La portée commerciale plus étendue de l'ALENA et la négociation d'accords parallèles sur l'environnement et le travail ont été accueillies et acceptées, sans véritable hésitation de la part de la communauté d'affaires québécoise, comme une sorte d'évolution logique naturelle.

C'est dans cette même optique que le Québec n'a pas hésité à donner son appui à un accord plus étendu, l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce. Comme l'adaptation des entreprises aux exigences du contexte économique mondial était déjà fortement engagée, il devenait de plus en plus naturel d'y voir d'abord une occasion d'accéder à de nouveaux marchés et d'étendre les mêmes règles de base à un plus grand nombre de partenaires.

(17 h 10)

Le rôle primordial qu'a joué le Québec sur le plan des relations commerciales est déjà reconnu dans l'ensemble du Canada et dans les milieux d'affaires des États-Unis et du Mexique. Il est important, cependant, de se rappeler que la signature de l'ALE, puis celle de l'ALENA et des accords de l'OMC ne mettent pas un terme au développement du cadre réglementaire international. Les négociations se poursuivent à l'OMC, notamment sur les questions touchant le commerce des services et d'autres secteurs dont plusieurs aspects relèvent des compétences des provinces. Par ailleurs, tout indique que les discussions à venir vont porter sur des questions de plus en plus complexes qui touchent inévitablement les compétences des provinces.

Depuis la conclusion de l'ALENA et des accords de l'OMC, d'autres initiatives commerciales font l'objet de discussions ou de négociations. L'amélioration des échanges entre l'Amérique du Nord et l'Europe, une éventuelle zone de libre-échange des Amériques ainsi que la coopération économique entre les pays du Pacifique sont à l'ordre du jour, sans oublier un accord bilatéral de libre-échange entre le Canada et le Chili, en attendant l'accession de ce dernier pays à l'ALENA, et un accord avec Israël qui pourrait entrer en vigueur en 1997. C'est dans ce cadre et donc dans le cadre de toutes ces perspectives que la loi n° 51 concerne la mise en oeuvre des accords de commerce international. C'est dans ce cadre qu'elle prend toute sa véritable dimension.

Sur le plan de nos échanges, selon les chiffres de 1995 – et ils sont beaucoup plus élevés pour l'année en cours – c'est plus de 45 % de la production intérieure brute du Québec qui trouve preneur à l'extérieur de nos frontières; 29 %, si on considère uniquement les exportations internationales. Un tel niveau d'ouverture vers les marchés externes est plutôt rare dans le monde. En effet, seuls quelques pays, comme Singapour, la Belgique et les Pays Bas, exportent une part plus importante de leur production. Pour illustrer encore davantage ce caractère commerçant de l'économie québécoise, rappelons simplement que la part moyenne des exportations par rapport au PIB, pour les pays de l'OCDE, les 25 plus grandes économies libérales, se situe aux alentours de 19 %; 9 % pour les États-Unis; 15 % pour le Japon. Bien sûr, nos échanges de marchandises se font encore principalement avec les États-Unis, qui demeurent, et de loin, notre principal partenaire commercial.

En 1995, les exportations de marchandises vers les États-Unis représentaient environ 81 % de nos exportations internationales, alors qu'en 1988, avant l'entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange Canada–États-Unis, cette part s'établissait à 75,3 %. Vous voyez tout de suite une augmentation considérable en très peu de temps. Entre 19... et 1995, nos exportations vers les États-Unis ont plus que doublé, passant de 19 900 000 000 $ à 48 200 000 000 $; et l'accroissement des liens commerciaux avec les États-Unis doit de toute évidence être imputé, en bonne partie, aux effets de l'Accord de libre-échange liant le Canada avec ce pays. Quand on sait jusqu'à quel point le bien-être économique des Québécois est lié aux performances de nos entreprises exportatrices, ce seul fait justifie pleinement que le gouvernement du Québec s'assure de pouvoir disposer de tous les outils possibles pour participer pleinement au développement et à la mise en oeuvre des accords de commerce international. C'est l'objectif fondamental qui soutient la présente initiative législative.

J'ai fait mention plus tôt de la forte poussée de nos ventes aux États-Unis au cours des dernières années et de l'importance grandissante de ce marché, alors que la part de nos importations provenant des États-Unis est restée sensiblement la même depuis une dizaine d'années environ, à 46 %. L'évolution comparative des importations et des exportations, par rapport aux États-Unis, illustre les progrès remarquables qui ont été accomplis dans la modernisation et l'adaptation de nos entreprises québécoises au cours des dernières décennies. En effet, le Québec compte de plus en plus d'entreprises spécialisées dans les produits à fortes composantes technologiques, et ce sont justement ces produits qui bénéficient dorénavant des tarifs douaniers les plus bas, alors que nos achats aux États-Unis se concentrent toujours à peu près dans les mêmes produits.

Ce mouvement de modernisation a d'ailleurs été beaucoup plus fort dans le cas du Québec qu'ailleurs au Canada. La diversification accélérée de la structure industrielle du Québec vers les produits à plus forte valeur ajoutée rend de plus en plus caduque la perception généralisée à l'effet que l'économie québécoise est basée exclusivement, ou presque exclusivement, sur la transformation de nos ressources naturelles. Bien que nos exportations de bois, de pâtes, de papiers et de métaux, comme l'aluminium ou le cuivre, sont encore d'une importance primordiale, notamment dans les différentes régions du Québec, il est important de noter que les produits hautement technologiques représentent maintenant près du tiers de nos exportations de marchandises, alors que cette production n'était que de 12 % en 1978. À l'inverse, les produits non manufacturés, non transformés, représentent maintenant à peine 5 % de nos exportations, contre 24,1 % en 1978. On voit tout de suite une évolution considérable. Il ne fait pas de doute que la conclusion des accords de commerce comme l'ALENA et les accords de l'OMC ont facilité grandement l'accélération de ce mouvement de diversification et de modernisation économiques en offrant des débouchés plus sécures, entre autres à nos appareils et équipements aéronautiques, nos équipements de télécommunications et nos instruments de mesure.

Le dynamisme des milieux d'affaires constitue, bien sûr, l'élément clé de l'adaptation de notre économie aux impératifs et normes des marchés mondiaux. La responsabilité des gouvernements à cet égard consiste à faciliter la création d'un environnement propice à ce mouvement. Or, les accords commerciaux internationaux définissent de plus en plus le cadre réglementaire à l'intérieur duquel les mesures et interventions gouvernementales sont acceptées par les partenaires économiques. Aucun gouvernement ayant à coeur le bien-être de ses citoyens ne peut donc se permettre d'être absent des discussions qui influencent le contenu et l'évolution de ces accords.

Par ailleurs, et l'ALENA en est un des exemples les plus frappants, les accords de commerce international ne se limitent plus au simple commerce de produits, mais leur portée s'étend dorénavant à l'investissement, aux services commerciaux et financiers, et ils prennent de plus en plus en compte des facteurs exogènes comme les impacts environnementaux et les normes de travail. Cet élargissement de la portée des accords, qui ne fera que s'accroître dans le futur, touche à des activités qui relèvent, en premier chef, des provinces.

Face à de telles responsabilités, il n'est donc pas surprenant que le projet de loi dont l'adoption est proposée aujourd'hui n'ait pas soulevé de grandes controverses, comme je le rappelais plus tôt. Le parti au pouvoir, tout comme le principal parti d'opposition, a toujours soutenu des politiques relativement semblables en matière de commerce et de développement. Souvenons-nous de la commission parlementaire sur l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, notamment les témoignages de MM. Landry et Parizeau qui, sur demande expresse du premier ministre d'alors – c'était M. Bourassa – étaient venus confirmer la concordance des doctrines économiques des deux principaux partis politiques québécois en matière de relations commerciales internationales.

Une mise en oeuvre législative des accords est nécessaire pour que leurs dispositions soient applicables en droit interne. Au Canada, la responsabilité de la mise en oeuvre des accords internationaux dépend du partage des compétences entre les divers ordres de gouvernement. Ainsi, en ce qui concerne les engagements internationaux du Canada, auxquels le Québec souscrit et qui touchent des domaines de compétence provinciale, seul le Québec a la responsabilité de s'assurer que sa législation interne soit conforme avec les dispositions des accords visés.

Or, l'Accord de libre-échange nord-américain – l'ALENA – l'Accord nord-américain de coopération dans le domaine de l'environnement et l'Accord nord-américain de coopération dans le domaine du travail ont des dispositions dont la mise en oeuvre relève des compétences constitutionnelles des provinces. Les accords parallèles influent directement sur des matières relevant de la compétence des provinces, tout comme l'ALENA, par exemple, dans ses dispositions régissant les services, le commerce des alcools et les investissements. Il en est de même pour les accords se rattachant à l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.

(17 h 20)

Comme le gouvernement du Québec entend maintenir ses politiques de développement fondées sur l'ouverture des marchés et respecter l'ensemble des dispositions des accords énumérés plus haut, il tient à être le véritable maître d'oeuvre de l'harmonisation de son droit interne avec ses obligations internationales. Puisque les accords parallèles à l'ALENA comportent des dispositions qui peuvent amener les tribunaux locaux à imposer des ordonnances découlant de ces accords, leur mise en oeuvre nécessite l'adoption d'une loi. Comme les autres accords ont une portée significative sur l'exercice du pouvoir législatif, il est apparu opportun de prévoir l'adoption d'une loi qui englobe l'ensemble des accords.

À ce jour, le seul geste posé par le gouvernement vis-à-vis de ces accords réside dans l'adoption du décret 985-94, par lequel il se déclarait favorable à l'ALENA. Certains ont pu mettre en doute le bien-fondé de la législation dont l'adoption est proposée aujourd'hui. L'adoption de décrets gouvernementaux peut techniquement rendre conformes aux obligations contractées dans le cadre des accords internationaux les réglementations et les pratiques québécoises visées. Légiférer élimine tous les doutes possibles et constitue une garantie plus formelle de l'application des obligations découlant des accords. Ainsi donc, lorsque le projet de loi n° 51, concernant la mise en oeuvre des accords de commerce international, aura été adopté, le gouvernement du Québec aura manifesté aux yeux de toute la communauté nationale et internationale son attachement aux politiques libre-échangistes et sa volonté claire et non équivoque d'assumer le plein exercice de ses pouvoirs constitutionnels pour ce qui touche la mise en oeuvre des accords internationaux auxquels il agrée et qui affectent des domaines de sa compétence. Par la même occasion, l'Assemblée nationale, notre Assemblée nationale, consentira à ce que le Québec s'engage à respecter les accords qui baliseront, à certains égards, la liberté du législateur.

Et, finalement, M. le Président, qu'il me soit permis de rappeler que le commerce international est d'une importance capitale pour le Québec, c'est un fait unanimement reconnu. La mondialisation des économies et des marchés et les efforts soutenus des entreprises québécoises visant l'amélioration de leur capacité concurrentielle les ont portées à rechercher de nouveaux débouchés pour leurs produits et leurs services ainsi qu'un environnement commercial plus stable et prévisible. Dans les faits, tout ce qui peut contribuer à l'amélioration de l'accès aux marchés étrangers et au renforcement des règles de droit en matière de commerce international, réduisant ainsi les possibilités d'action discriminatoire unilatérale, est bien évidemment souhaitable, car cela permet d'exploiter davantage la capacité d'action internationale des entreprises québécoises. C'est pour ces raisons que le Québec s'est toujours montré résolument favorable à l'abolition des obstacles au commerce et à la signature d'accords de libéralisation des échanges.

C'est également parce qu'il était conscient de l'importance capitale des négociations commerciales de l'Uruguay Round pour son économie que le gouvernement du Québec a suivi de très près toutes les phases de leur évolution. Même si le quart seulement de nos exportations internationales est présentement effectué outre-mer, des perspectives de croissance de nos exportations et de conquête de nouveaux marchés à l'extérieur des États-Unis sont loin d'être négligeables. L'Asie, l'Europe et l'Amérique latine recèlent de multiples occasions d'affaires et il appartiendra aux entreprises québécoises d'en tirer le meilleur profit. Ainsi, après huit ans, les conclusions des négociations multilatérales de l'Uruguay Round ont produit le plus grand ensemble d'accords commerciaux de l'histoire de l'humanité. Les règles qui ont été négociées ne sont évidemment pas parfaites, mais leur extension, leur renforcement et leur éventuelle acceptation permettront de continuer à les améliorer.

Dans l'ensemble, il s'agit d'un nouveau départ, aussi significatif que l'adoption du GATT lui-même, en 1947, un départ qui exigera une adaptation des stratégies commerciales des gouvernements et des entreprises pour la décennie à venir. Pour le Québec, l'acte final de l'Uruguay Round et l'ALENA représentent à la fois des atouts de plus ainsi que de nouveaux défis. Ces accords constituent un atout dans la mesure où ils facilitent l'accès à des marchés plus vastes pour les produits et services québécois, où ils réduisent les incertitudes inhérentes aux échanges et où ils contribuent à l'établissement d'une réglementation commerciale et administrative claire. Ils constituent également un défi pour le gouvernement et les entreprises, parce que, dans le contexte de la mondialisation des marchés, le Québec peut et doit devenir encore plus compétitif. Dans un climat d'intense concurrence mondiale, tous les pays, quel que soit leur niveau de développement, ne peuvent relâcher leurs efforts s'ils souhaitent se maintenir dans les rangs. La présente loi fait partie des efforts continus du gouvernement pour assurer la pleine participation du Québec à l'économie mondiale.

Même s'ils constituent des progrès importants, les accords de l'OMC et de l'ALENA constituent une étape dans le processus de libéralisation des échanges. Des obstacles tarifaires et non tarifaires subsistent toujours, obstacles qu'on doit tenter d'éliminer ou de mieux réglementer afin d'en diminuer l'incidence sur le commerce. En outre, des sujets comme l'environnement, les normes du travail, la politique de concurrence et l'investissement seront vraisemblablement au coeur des discussions lors des prochaines négociations. D'ailleurs, différents groupes examinent déjà ces questions dans différents forums internationaux et préparent ce qui servira manifestement de base à ces négociations.

Personne ne peut prévoir avec précision les implications des changements auxquels ont donné naissance les accords commerciaux internationaux, et ce n'est qu'à l'usage qu'on en mesurera réellement la portée. Il est clair, cependant, que les accords qui en découlent vont, nous l'espérons tous en tout cas, contribuer à l'amélioration de l'accès aux marchés étrangers, au renforcement de la règle de droit dans le commerce international, ce qui, à moyen et à long terme, ne peut être que bénéfique pour le Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Relations internationales. J'accorderai maintenant la parole...

Une voix: ...


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, puisqu'il n'y a plus d'intervenant, le projet de loi n° 51, Loi concernant la mise en oeuvre des accords de commerce international, est-il adopté?

M. Lefebvre: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 38 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 19


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'article 38. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière concernant les produits d'épargne du Québec.

Une voix: ...


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Pinard): Puisqu'il n'y a pas d'intervenant de part et d'autre, le rapport de la commission du budget et de l'administration portant sur le projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière concernant les produits d'épargne du Québec, est-il adopté?

M. Lefebvre: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

(17 h 30)

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 35 de notre feuilleton


Projet de loi n° 10


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'article 35. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec. Y a-t-il des interventions? Pas d'interventions.


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 43 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 7


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'article 43. M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 7, Loi modifiant le Code de procédure civile, la Loi sur la Régie du logement, la Loi sur les jurés et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi n° 7? Pas d'interventions.


Mise aux voix

Alors, le projet de loi n° 7, Loi modifiant le Code de procédure civile, la Loi sur la Régie du logement, la Loi sur les jurés et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté, monsieur...

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 4 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 14


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'article 4. M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 14, Loi modifiant la Loi sur le courtage immobilier. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi n° 14? Alors, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, c'est avec plaisir que je propose aux membres de l'Assemblée l'adoption du principe du projet de loi n° 14, Loi modifiant la Loi sur le courtage immobilier.

Rappelons d'abord que, en juin 1991, l'Assemblée adoptait la Loi sur le courtage immobilier, qui remplaçait l'ancienne loi. Parmi les dispositions importantes contenues à cette nouvelle loi, on peut noter la création de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, dont la principale mission est d'assurer la protection du public par l'application de règles de déontologie et l'inspection professionnelle de ses membres. À cet égard, la loi accorde des pouvoirs réglementaires à l'Association et prévoit la constitution au sein de celle-ci d'un comité d'inspection professionnelle et d'un comité de discipline ainsi que la nomination d'un syndic.

Cette loi contient par ailleurs des dispositions pénales assujetties à la procédure prévue au Code de procédure pénale. Entre autres, l'Inspecteur général des institutions financières, organisme public chargé de l'administration de cette loi, fait des enquêtes et prépare les dossiers de poursuites pénales pour traitement par le Procureur général. Les plaintes de nature pénale proviennent essentiellement de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec et sont, pour la majorité, relatives à l'exercice illégal de l'activité de courtier immobilier.

L'Association, qui contrôle et surveille l'exercice de l'activité de courtier immobilier, a manifesté le désir de prendre en charge toutes les poursuites pénales relatives à sa mission, dont celle concernant l'exercice illégal de l'activité de courtier immobilier, comme cela existe d'ailleurs dans le secteur des intermédiaires de marché et dans d'autres professions. Il s'avère opportun d'acquiescer à une telle demande, d'autant plus que cela dégagerait l'Inspecteur général des institutions financières de la nécessité de mobiliser les budgets et ressources nécessaires à l'accomplissement de ces tâches.

M. le Président, le présent projet de loi n° 14 a principalement pour objet, donc, de proposer des modifications à la Loi sur le courtage immobilier en vue, notamment: premièrement, d'attribuer expressément à l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec le pouvoir d'intenter, avec l'autorisation d'un juge, conformément à l'article 10 du Code de procédure pénale, des poursuites pénales en regard des infractions prévues à l'article 156 de la Loi sur le courtage immobilier, qui interdit à quiconque de prétendre être courtier ou agent immobilier, d'utiliser un titre pouvant laisser croire qu'il l'est, d'exercer l'activité de courtier ou d'agent immobilier ou de prétendre avoir le droit de le faire sans être titulaire du certificat requis par la loi, de même qu'à l'article 157 relatif à l'interdiction, pour un courtier ou un agent immobilier, de faire des représentations fausses, trompeuses ou incomplètes concernant sa compétence, ou un service, ou un bien et, finalement, des poursuites pénales contre les administrateurs d'une personne morale visée à l'article 160.

Deuxièmement, d'attribuer au conseil d'administration de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, dans le cadre du deuxième alinéa de l'article 75 de la loi, le pouvoir de déterminer par résolution soumise à l'approbation de l'Inspecteur général une augmentation des droits exigibles pour la délivrance ou le renouvellement d'un certificat lorsque cette augmentation est requise pour lui permettre d'assumer ses responsabilités en matière pénale. Par ailleurs, l'augmentation relative à l'inspection professionnelle, la discipline et en matière pénale ne s'appliquerait plus aux fins de la reprise d'effet d'un certificat.

Troisièmement, d'attribuer à l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec le droit de percevoir et de conserver les amendes imposées pour sanctionner ces infractions lorsque c'est elle qui a assumé la conduite de la poursuite. Donc, l'Association garde les amendes, mais l'Inspecteur général n'a plus à débourser.

Fixer un délai de prescription d'un an – quatrièmement – depuis la date d'ouverture du dossier d'enquête relatif à une infraction plutôt qu'un délai d'un an depuis la date de perpétration de l'infraction, tel que prévu à l'article 14 du Code de procédure pénale.

Et de conférer – cinquièmement – à l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, aux membres de son conseil d'administration, à une personne qu'elle autorise à agir en son nom, au comité d'inspection professionnelle et aux membres de ce comité une immunité visant à exclure les recours en justice en raison d'actes accomplis de bonne foi dans l'exercice de leurs fonctions.

D'attribuer au conseil d'administration – sixièmement – de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, à titre de mesure transitoire relative au transfert à cette Association d'une partie de la juridiction en matière pénale, le pouvoir de déterminer pour l'année en cours, lors de l'entrée en vigueur de la présente loi et les deux années suivantes, par résolution soumise à l'approbation de l'Inspecteur général, les droits exigibles durant cette période des titulaires de certificat de courtier et d'agent immobilier afin de lui permettre d'assumer ses nouvelles responsabilités en matière pénale.

Enfin, le projet ajoute à la liste des droits cités à l'annexe I de la loi sur l'Inspecteur général des institutions financières la Loi sur le courtage immobilier.

M. le Président, il est de la volonté de notre gouvernement de responsabiliser davantage les gens de l'industrie du courtage immobilier, et la prise en charge des poursuites pénales par l'organisme d'autoréglementation qui les regroupe va dans cette direction. Ce projet de loi répond à une attente de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec et lui permettra de jouer davantage son rôle de protection du public, comme c'est le cas pour les organismes ayant de semblables responsabilités.

En conséquence, je soumets à mes collègues de l'Assemblée ce projet de loi afin qu'ils puissent voter en faveur du principe de celui-ci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances. M. le député de Laporte.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Ce n'est pas sans un certain étonnement que je prends connaissance du désir du gouvernement d'aller plus avant dans le dossier de cette Loi modifiant la Loi sur le courtage immobilier, une loi qui vise à donner à l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec le pouvoir d'intenter des poursuites pénales en regard de certaines infractions prévues à la Loi sur le courtage immobilier, et qui lui permet de conserver les amendes lorsqu'elle a assumé la conduite de la poursuite, et qui accorde également une immunité à ses administrateurs à l'égard des actes qui sont accomplis de bonne foi dans l'exercice de leurs fonctions.

M. le Président, on sait que l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec est une association qui n'est pas sous le contrôle de l'Office des professions du Québec. C'est, en somme, l'équivalent d'une profession, mais qui n'a pas le statut de corporation professionnelle. Elle a sa propre loi, qui a été votée en 1991, et elle est sous la juridiction de l'Inspecteur général des institutions financières, mais elle n'est pas sous la responsabilité de l'Office des professions du Québec.

Et, justement, dans la loi de 1991, il était spécifié qu'au bout de cinq ans on devait procéder à une revue de cette loi-là et une analyse de cette loi-là et qu'on devait faire un rapport également au bout de cinq ans sur... Le ministre des Finances, d'ailleurs, doit faire un rapport au plus tard le 11 septembre 1996, un rapport au gouvernement sur la mise en oeuvre de cette loi et, par la suite, tous les cinq ans, sur l'opportunité de la maintenir en vigueur et, le cas échéant, de la modifier.

(17 h 40)

M. le Président, c'est assez étonnant qu'à peine trois mois avant l'échéance de cinq années où le ministre des Finances doit faire rapport sur le statut de la loi il nous arrive avec une modification comme ça, une modification assez peu importante, somme toute – on ne met pas en cause toute la loi – et qui arrive un petit peu en catastrophe à la fin de la session. Et pourquoi? On se pose la question: Pourquoi le ministre des Finances, plutôt que d'attendre cinq ans, enfin, attendre encore trois mois, de préparer son rapport et de le déposer, a-t-il choisi plutôt de faire un petit raccommodage à la pièce à la dernière minute?

Il y a lieu de se poser des questions, parce que, justement, nous avons appris que l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, qui n'est pas une corporation professionnelle au sens de la loi, voudrait l'être et qu'elle a demandé, semble-t-il – c'est ce qu'on nous communique dans une lettre ici – d'obtenir le statut, justement, d'ordre professionnel, et qu'un amendement à l'effet de procéder à une nouvelle étude ayant été adopté, cette Association-là doit soumettre à un vote postal une résolution amendée. Donc, il semble que l'Association en question ait demandé de devenir un ordre professionnel et, donc, d'être soumise à l'Office des professions et, donc, à toutes fins pratiques, de sortir du régime dans lequel elle est présentement.

D'ailleurs, nous avons ici une lettre du Protecteur du citoyen, datée de la semaine dernière, qui, justement, se pose des questions sur l'opportunité de déposer cette loi-ci alors qu'il semble que le groupe auquel on veut faire plaisir, en somme, ne le souhaiterait pas, enfin, semble-t-il, d'après ce qu'on peut voir, ne souhaiterait pas voir cette loi-là adoptée, mais souhaiterait plutôt faire en sorte que son statut soit modifié pour devenir une profession au sens de la loi, un ordre professionnel. Alors, il semble y avoir, en tous les cas, une certaine confusion qui s'installe dans ce dossier-là, où un organisme qui a un régime particulier voudrait devenir une profession comme les autres professions et être soumis à l'Office des professions.

Alors, moi, je ne vois pas, disons... Ce n'est pas un crime que de vouloir, à ce moment-ci, modifier cette loi-là, mais ça ne semble pas très logique de modifier une loi en fin de parcours alors que l'organisme, enfin, qui, nous dit-on, voudrait ces changements-là, semble-t-il, voudrait autre chose. Il voudrait autre chose de plus important.

Moi, M. le Président, je n'en ferai pas un plat, sauf qu'il me semble qu'avant de procéder à l'étude détaillée de ce projet de loi et à son adoption il faudrait quand même clarifier la situation pour savoir si l'organisme en question ne souhaiterait pas plutôt, comme on semble dire, devenir une profession, d'autant plus que l'ordre des professions du Québec, l'Office des professions du Québec, plutôt, avait manifesté dès l'année 1991 son inquiétude quant à l'adoption de la loi de 1991, la Loi sur le courtage immobilier, qui créait un organisme parallèle, justement, copié en tous points sur un système déjà en place, enfin, nous disait à ce moment-là le président de l'Office des professions. On faisait donc un régime particulier, mais il était copié sur le régime général, donc une loi particulière pour eux, pour les courtiers en immeubles, courtiers et agents immobiliers, alors qu'il y a déjà, comme on le sait, un organisme, l'Office des professions, qui chapeaute les ordres professionnels, les professions.

Et le président de l'Office des professions ajoutait: «Ce nouveau système nécessitera une nouvelle bureaucratie gouvernementale et un dédoublement des énergies et des expertises.» Or, dans la mesure où, semble-t-il, on veut sortir, et le client du ministre veut sortir de ce régime-là, bien, on se demande pourquoi on procéderait à une loi qui semble ne pas aller dans le sens de ce que souhaite l'Association des courtiers, non plus d'ailleurs que l'Office des professions et non plus que le Protecteur du citoyen. Alors, je ne pense pas que le Protecteur du citoyen en fasse un plat non plus, mais il souligne un peu, je n'oserais pas dire l'incohérence de la démarche, mais disons sa surprise devant une démarche qui arrive à ce moment-ci.

Alors, M. le Président, pour ces raisons-là, sans faire une objection importante, je pense bien qu'on va voter, pour l'instant, sur division, quitte éventuellement à se faire convaincre par le ministre que c'est dans le meilleur intérêt des courtiers et des agents immobiliers que de passer cette loi-là. Je vous remercie.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laporte. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du principe? Alors, le principe du projet de loi n° 14, Loi modifiant la Loi sur le courtage immobilier, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.


Renvoi à la commission du budget et de l'administration

Mme Caron: Oui. M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission du budget et de l'administration pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, compte tenu de l'heure, je vous demanderais de suspendre nos travaux.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, les travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 45)

(Reprise à 20 h 2)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 47 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 133


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 47, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 133, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne et d'autres dispositions législatives. M. le ministre de la Justice, je vous cède la parole.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, je remarque que, parmi l'assistance, se retrouvent des représentants des communautés gaie et lesbienne. J'en profite pour les saluer.

La Charte des droits et libertés de la personne constitue un instrument juridique unique pour assurer la protection des droits fondamentaux des Québécois et des Québécoises. Elle reconnaît le droit à l'égalité ainsi que les droits politiques, judiciaires, économiques et sociaux. L'originalité de cette loi fondamentale réside dans le fait que, d'une part, certains droits qui y sont reconnus n'ont pas de correspondance dans les législations analogues ailleurs au Canada et, d'autre part, que son domaine d'application touche non seulement les lois, mais également les relations privées, ce que ne fait pas la Charte canadienne. C'est ainsi que le secteur des contrats est régi par la Charte québécoise.

Depuis l'adoption de la Charte québécoise en 1975, l'application du principe du droit à l'égalité suscitait des difficultés d'application en matière d'avantages sociaux, de rentes et d'assurances parce que de nombreux régimes alors en vigueur comportaient des distinctions sur les motifs énumérés à l'article 10 de la Charte. Le ministre des Affaires sociales d'alors avait formé un comité de travail sur le sujet. À la lumière du rapport de ce comité, le législateur décida, en 1976, de modifier la Charte pour introduire ce qui est devenu l'actuel article 137 afin de laisser le temps à l'industrie de réajuster ses pratiques. Cet article 137 permet, encore aujourd'hui, dans les régimes de rentes, de retraite et d'assurance de personnes et dans tout autre régime d'avantages sociaux des distinctions fondées sur le sexe, l'état civil, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'âge et le handicap.

Vingt ans après l'adoption de cet article et après plusieurs tentatives pour trouver une solution adéquate à ce problème, je suis particulièrement heureux, M. le Président, de présenter à cette Assemblée le projet de loi n° 133 en vue de son adoption en troisième lecture. Ce projet propose d'abroger l'article 137 de la Charte ainsi que le premier paragraphe de l'article 97 qui prévoyait l'adoption d'un règlement.

D'une part, il propose d'interdire les pratiques discriminatoires fondées sur les motifs d'orientation sexuelle, de handicap et de grossesse dans le domaine des rentes, de l'assurance et des avantages sociaux. Notamment en ce qui a trait à l'orientation sexuelle, ce projet constitue sans conteste une indication claire que le législateur désire mettre fin à la discrimination fondée sur ce motif, comme le prévoit déjà l'article 10 de la Charte. Il permettra donc à toute personne qui se croira victime de discrimination dans ces domaines de contester les distinctions établies sur ce motif. Pour ce faire, elle pourra, le cas échéant, compter sur l'appui de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse pour vérifier la conformité à la Charte d'une pratique, comme elle le fait actuellement à l'égard des autres secteurs d'activité.

D'autre part, ce projet de loi introduit une disposition générale visant à limiter l'utilisation des motifs d'âge, de sexe et d'état civil dans des contrats de régime de retraite, d'assurance et d'avantages sociaux. En effet, pour être conforme à la Charte, une distinction, exclusion ou préférence fondée sur un de ces motifs devra être basée sur des données actuarielles et être légitime eu égard à l'objet et à la nature de ces contrats ou régimes.

De plus, la solution proposée par ce projet de loi semble répondre aux attentes des personnes concernées par le domaine des avantages sociaux, des rentes et de l'assurance. En effet, lors de la consultation publique menée les 19, 20 et 21 mars dernier, tous les groupes entendus à cette occasion se sont dits d'accord avec les objectifs poursuivis par ce projet et particulièrement avec l'élargissement de la protection accordée aux femmes enceintes, aux personnes handicapées et aux membres des communautés gaie et lesbienne.

Ainsi, si le projet de loi n° 133 est adopté, les entreprises oeuvrant dans ce secteur pourront utiliser les motifs d'âge, de sexe et d'état civil comme facteurs de détermination de risques dans les contrats ou régimes de rentes, d'assurance et d'avantages sociaux lorsque ces distinctions sont basées sur des données actuarielles et qu'elles sont légitimes. Cette norme de contrôle laisse tout de même aux assureurs et aux administrateurs de régimes une certaine marge de manoeuvre dans l'appréciation du risque dans les domaines des avantages sociaux, des rentes et de l'assurance.

Tel que mentionné précédemment, la Charte des droits et libertés de la personne garantit la protection des droits fondamentaux aux Québécois et aux Québécoises, mais il importe d'être vigilant pour s'assurer que les principes qui y sont énoncés soient respectés. Le projet de loi n° 133 permettra une meilleure application du droit à l'égalité en matière de rentes et d'assurance. Il constitue donc un pas en avant en vue d'un plus grand respect des droits fondamentaux.

M. le Président, je suis honoré d'avoir piloté ce projet de loi important. Je désire remercier mes collègues députés de leur appui, remercier également tous ceux et celles qui ont bien voulu commenter cette législation avec le souci de la bonifier, que ce soit l'industrie ou les clientèles visées. Ensemble, nous avons fait progresser la cause du droit à l'égalité de tous et de toutes dans notre société. Merci de votre attention, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de l'Acadie. M. le député.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir, M. le Président, d'intervenir aujourd'hui dans le cadre de l'adoption du projet de loi n° 133, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne et d'autres dispositions législatives. D'entrée de jeu, je tiens à souligner que notre formation politique souscrit aux objectifs et aux principes contenus dans le projet de loi n° 133 et que mous entendons appuyer son adoption en troisième lecture.

Dans un premier temps, M. le Président, j'aimerais rappeler le contexte dans lequel s'inscrit ce projet de loi. L'adoption, en 1975, de la Charte des droits et libertés de la personne par le Parti libéral du Québec a permis d'introduire le principe du droit à l'égalité pour tous, en interdisant toute discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, l'état civil, l'âge, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique, la condition sociale, le handicap, la grossesse ou l'orientation sexuelle.

(20 h 10)

Malgré ces grands principes du droit à l'égalité contenus dans l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne, l'article 137 de cette même Charte maintient, pour les régimes de rentes, de retraite, d'assurance et autres avantages sociaux, la possibilité de faire de la discrimination et des distinctions basées sur l'âge, l'état civil, le sexe, le handicap, la grossesse, de même que sur l'orientation sexuelle.

Nous constatons que le projet de loi n° 133 vise, comme premier objectif, à ne conserver, comme motif de distinction permis dans ces régimes de retraite, de rentes ou d'assurance, que le sexe, l'âge ou l'état civil en autant qu'il s'agisse d'un facteur de risque basé sur des données actuarielles qui soient légitimes pour assurer la mise en place d'un contrat d'assurance ou de rentes de même que pour un régime d'avantages sociaux, de retraite ou un régime universel de rentes ou d'assurance. On comprend donc, par l'abolition de l'article 137 de la Charte de même que par la modification du deuxième paragraphe de l'article 20 de cette même Charte, qu'on entend interdire toute discrimination fondée sur le handicap, la grossesse de même que sur l'orientation sexuelle.

Il s'agit donc sans conteste d'un projet de loi très important au principe duquel nous ne pouvons que souscrire. D'ailleurs, lors du congrès de notre formation politique en avril 1993, le Parti libéral adoptait la résolution suivante, et je cite: «Que le gouvernement élimine toutes les formes de discrimination en raison de l'orientation sexuelle, tant au niveau de la Charte des droits, des lois, des conditions et statuts légaux, des pratiques et règlements officieux et officiels de tous les ministères.»

Il m'apparaît important, M. le Président, de rappeler que le projet de loi n° 133 a fait l'objet d'une promesse et d'une annonce dans un contexte référendaire. En effet, c'est le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques qui en faisait l'annonce le 6 octobre 1995, soit à peine quelques jours avant le référendum. Il laissait alors entendre que son gouvernement avait l'intention de déposer un projet de loi abrogeant l'article 137 de la Charte des droits et libertés de la personne de façon à ce que le Québec reconnaisse officiellement les conjoints de même sexe et leur accorde le droit aux mêmes avantages sociaux que les couples hétérosexuels.

Cependant, il ressort, M. le Président, des auditions en commission parlementaire, en février dernier, que le projet de loi n° 133 apportait beaucoup moins que ce qu'on laisse entendre et que ce que le Parti québécois promettait durant la campagne référendaire. En effet, la très vaste majorité, pour ne pas dire la totalité des représentants des groupes de défense des droits de la personne ou des organismes communautaires oeuvrant dans les milieux gais du Québec sont venus expliquer en commission parlementaire que le projet de loi n° 133 était seulement – et je souligne «seulement», M. le Président – un pas dans la bonne direction et qu'ils attendaient fermement le reste.

Il en est ainsi, M. le Président, parce que le projet de loi n° 133 ne modifie que la Charte des droits et libertés de la personne en abrogeant l'article 137. Pour donner son plein effet à la reconnaissance des conjoints de même sexe et leur accorder les mêmes avantages sociaux que les couples hétérosexuels, il faudrait absolument que le gouvernement procède à la modification et à l'harmonisation de l'ensemble des définitions de «conjoint» contenues dans nos lois québécoises. Isolément, le projet de loi n° 133 n'a d'effet qu'à l'égard des assureurs privés. Mais, dans d'autres matières, dans d'autres secteurs, les définitions de «conjoint» font toujours référence à la notion d'homme et de femme, soit à la notion maritale, et continuent de porter discrimination et d'empêcher les couples homosexuels de bénéficier des mêmes droits que les couples hétérosexuels.

Pour bien me faire comprendre, M. le Président, j'illustrerai mon propos à l'aide d'un exemple. La Loi sur les normes du travail contient, au niveau de la définition de «conjoint», l'homme et la femme qui vivent maritalement. Ainsi, cette même loi accorde un congé au travailleur dont le conjoint décède. Cependant, à cause de cette définition restrictive qui ne fait référence qu'aux unions hétérosexuelles, il est impossible pour un conjoint homosexuel de se prévaloir de cet avantage social. On comprend donc que le projet de loi n° 133 est plus symbolique que réel.

Par ailleurs, M. le Président, je ne peux passer sous silence l'incohérence du gouvernement et du ministre de la Justice telle qu'elle nous a été démontrée pas plus tard que la semaine passée. En effet, au cours de la même session, soit la présente session, où le gouvernement avait déposé et étudié le projet de loi n° 133, le ministre de la Justice déposait, le 15 mai dernier, le projet de loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. Dans cette même loi, le ministre de la Justice, qui est celui qui a déposé le projet de loi n° 133, introduisait dans la Loi sur l'aide juridique une nouvelle définition de «conjoint» qui se lit comme suit:

«Sont des conjoints:

«1° les époux qui cohabitent;

«2° les personnes vivant maritalement qui sont les père et mère d'un même enfant;

«3° les personnes majeures qui vivent maritalement et qui, à un moment donné, ont cohabité pendant une période d'au moins un an.»

M. le Président, lors de l'étude en commission parlementaire de cet article du projet de loi n° 20, nous avons fait valoir au ministre de la Justice son incohérence, c'est-à-dire, d'une part, son intention et la volonté ferme de son gouvernement de modifier la Charte pour reconnaître les conjoints homosexuels et, d'autre part, quelques semaines plus tard, dans un projet de loi déposé par le même ministre, une définition de «conjoint» carrément contradictoire avec l'objectif poursuivi dans le projet de loi n° 133.

Après avoir fait valoir au ministre de la Justice son incohérence dans ses actions, l'opposition officielle a déposé deux amendements visant à modifier cette définition de «conjoint». Le premier de ces amendements visait à remplacer le mot «maritalement» par les mots «comme couple», de sorte que le paragraphe 3° de cet article se serait lu comme suit: les personnes majeures qui vivent comme couple et qui, à un moment donné, ont cohabité pendant une période d'au moins un an. M. le Président, quel ne fut pas notre étonnement de voir le ministre de la Justice et l'ensemble des députés ministériels voter contre l'amendement de l'opposition.

Par la suite, l'opposition a déposé un deuxième amendement, toujours dans le même objectif, afin de remplacer le mot «maritalement» par «publiquement reconnues comme couple», de sorte que l'article se serait lu comme suit: les personnes majeures qui vivent publiquement reconnues comme couple et qui y sont représentées comme conjoints. Il n'est pas inopportun de souligner, M. le Président, que ce concept était directement inspiré de plusieurs lois québécoises actuellement en vigueur, soit la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, la Loi visant à favoriser le civisme, la Loi sur l'indemnisation des victimes d'amiantose et de silicose dans les mines et carrières, des lois qui prévoient que sont reconnues comme couple les personnes publiquement représentées comme conjoints.

Encore une fois, après le débat suscité par cet amendement, le ministre de la Justice et son gouvernement prouvent leur incohérence. Cependant, cette fois, les arguments de l'opposition portèrent fruit, puisque le député de Marguerite-D'Youville s'est abstenu de voter sur cet amendement. Il a préféré cette solution à celle de voter contre l'amendement de l'opposition. Je suis persuadé, M. le Président, connaissant très bien la valeur et l'intégrité du député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, que, si ce dernier, qui était alors occupé à d'autres fonctions, avait été présent en commission parlementaire, il se serait, lui aussi, abstenu de voter contre l'amendement de l'opposition, sachant très bien que nous avions raison.

En conséquence, M. le Président, j'indiquerai encore une fois l'appui de notre formation politique au principe que poursuit le projet de loi n° 133, tout en soulignant à nouveau que, pour donner plein effet aux objectifs poursuivis par ce projet de loi, le gouvernement se doit, dans un très bref délai, de faire le ménage parmi les nombreuses définitions de «conjoint» que contient notre corpus législatif. C'est seulement de cette façon qu'il réussira à remplir pleinement la promesse qu'il a faite le 6 octobre dernier et qu'il saura faire preuve de cohérence. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de l'Acadie. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marguerite-D'Youville. M. le député.


M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. C'est à la fois avec émotion et fierté que j'interviens à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 133 modifiant la Charte québécoise des droits en vue d'élargir ses dispositions aux conjoints de fait, indépendamment de leur orientation sexuelle, ainsi qu'aux personnes handicapées et aux femmes enceintes. Émotion, d'une part, parce que ce projet de loi marque l'aboutissement de longues années d'efforts de groupes sociaux qui oeuvrent dans ce sens et parce qu'il vient reconnaître que de nombreux citoyens et citoyennes qui participent à l'essor de notre société méritent d'être acceptés pour ce qu'ils sont.

(20 h 20)

En plus de féliciter tous ceux et toutes celles qui, chacun et chacune à sa manière, ont participé à ce cheminement, je m'en voudrais de ne pas souligner le travail exceptionnel d'information et de sensibilisation de longue haleine de mon collègue et ami, le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, M. André Boulerice, qui, de session en session, patiemment mais inlassablement, nous rappelait à nous tous, les députés, le besoin d'apporter à la Charte des droits les correctifs que nous y introduisons ce soir. Ce projet de loi, nous le lui devons en grande partie. Nous le devons aussi à l'ouverture d'esprit, à la compréhension et au sens de la justice sociale de notre ministre de la Justice, le député de Louis-Hébert, qui s'en est fait le porte-parole et le porteur auprès du Conseil des ministres ainsi que de la Législature. Merci, M. le ministre, pour un travail bien fait et bien accompli.

Merci également aux collègues de l'opposition et, entre autres, au député de Chomedey et au député de l'Acadie – au député de Chomedey, porte-parole de l'opposition en cette matière – qui, tout au long des audiences publiques et pendant les travaux en commission parlementaire, ont su mettre leur sens de l'équité au-dessus de toute partisanerie politique. Même si nous devrons ajuster les autres lois aux dispositions de la Charte des droits et aux amendements que nous y introduisons ce soir, je répondrai à mon collègue, le député de l'Acadie, que nous avons eu au moins le courage, nous, comme gouvernement, de mettre en place des dispositions que la communauté exigeait depuis longtemps.

Il y a quelqu'un qui n'est, malheureusement, plus dans cette Assemblée, mais à qui nous devons de nous avoir laissé en héritage ce projet de loi. Vous aurez compris qu'il s'agit de notre ancien premier ministre, M. Jacques Parizeau, qui, au moment de quitter ses fonctions, a tenu à lancer le Québec sur la voie de la modernité, de l'équité et de la solidarité. En votant la loi n° 133, c'est également à lui que nous rendons hommage.

Fierté, enfin, M. le Président, de participer à cette adoption historique qui marquera une étape importante dans l'évolution des relations entre les personnes et l'État, parce qu'elle est finalement le reflet de notre Québec tolérant, progressiste et humaniste. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marguerite-D'Youville. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Taschereau. M. le député.


M. André Gaulin

M. Gaulin: M. le Président, juste un mot en tant que député de Taschereau, coeur de cette ville aimée de Québec et notre capitale nationale. J'aimerais dire que je suis particulièrement heureux et fier de voir adopter ce soir le projet de loi n° 133. Je voudrais en rendre hommage à mon collègue, le ministre de la Justice et député de Louis-Hébert. Cette loi n° 133 est importante pour beaucoup des citoyens et citoyennes de mon comté où se regroupe dynamiquement la communauté gaie et lesbienne. Le ministre a aussi remis sur pied un comité interministériel important qui fera rapport bientôt. Un suivi à cette loi essentielle sera assuré au fil des jours.

Je termine très simplement, M. le Président, en disant que la véritable démocratie s'exprime toujours par l'égalité de tous et de toutes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Taschereau. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Sainte-Marie– Saint-Jacques. M. le député.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, nous voici à la dernière étape parlementaire prévue pour l'adoption du projet de loi n° 133 qui vise à amender l'article 137 de notre Charte des droits et libertés de la personne. En ce moment, je ne peux qu'exprimer une joie intense, une fierté bien légitime et, plus modestement, la satisfaction d'un devoir accompli.

La joie, M. le Président, de voir qu'en ce coin d'Amérique et du monde occidental le terme «droits de la personne» a ici, comme nulle part ailleurs, une résonance particulière. N'est-ce pas ici, au Québec, dans cette même Assemblée, qu'en 1977 – et non pas 1975 – nous devenions, après les Pays-Bas, le deuxième État à inclure dans sa Charte fondamentale une clause interdisant la discrimination basée sur l'orientation sexuelle? Puis-je ajouter – la vérité a ses droits – qu'il s'agit aujourd'hui du même parti politique qu'en 1977, le Parti québécois, qui fait faire à notre société un pas de plus dans l'égalité entre les êtres?

Fierté, M. le Président, parce que celles et ceux qui sont intervenus en commission parlementaire et qui sont soit partenaires, connaissances, amis, et en qui je me reconnais, sont venus dignement, sans haine, sans rancune, parler de ce qu'ils ou elles avaient vécu comme brimades, négations, humiliations, blessures du corps et de l'âme, craintes et espoirs. Chacun et chacune de ces personnes doit savoir qu'elle a joué un rôle majeur dans cette législation puisque, dans l'anonymat du quotidien, elles ont lutté, maintenu et fait gagner des points à la communauté gaie et lesbienne. Chacun à sa manière, chacun à sa façon, comme le dit si bien Gilles Vigneault.

Pourquoi ne pas parler de cette mère et de ce père venus nous faire part de leur désarroi face à l'orientation sexuelle de leur fils et, ensuite, parler de lui avec cet amour et cette tendresse dont un adolescent a tellement besoin dans un moment aussi troublant de sa vie? Avec les mots de tous les jours et la simplicité de leur présentation, ils ont projeté l'image de parents modèles qui ne jugent pas, mais acceptent, conseillent et aiment.

Je dois remercier encore une fois tous ces gens qui ont fait le déplacement à l'Assemblée nationale pour nous offrir des témoignages individuels ou au nom d'un organisme, levant ainsi un voile qui masquait la réalité cruellement ressentie par des milliers de nos semblables. Ils se sont livrés entiers, mais avec pudeur, car l'illustration du vécu de chacun pouvait être, à l'occasion, pathétique. Ils voient ici, ce soir, que ce n'est pas en vain qu'ils l'ont fait.

Devoir accompli, M. le Président, car, au moment où je m'adresse à cette Assemblée, je ne peux oublier ma première campagne électorale où je demandais à rencontrer celles et ceux qui, à l'époque, étaient les acteurs importants de la communauté gaie et lesbienne. Certes, il n'y avait pas les structures et les organisations que l'on retrouve aujourd'hui, mais la question fondamentale que je posais était: Pour être député de tous, que devrais-je faire? Grâce à leur confiance, à leur complicité, à celle de mes collègues députés et à l'appui inconditionnel de mon parti politique, nous vivons ici un moment important qui correspond à la question posée alors.

Comme le disait fort opportunément un parlementaire, quand un groupe gagne, c'est l'ensemble de la collectivité qui gagne. Ainsi, le combat de la communauté gaie et lesbienne profite à toutes les femmes du Québec, car une lacune dans la Charte faisait en sorte que, lors d'une grossesse, elles pouvaient être discriminées. Il en va de même pour les femmes ou les hommes qui souffrent d'un handicap et qui pouvaient également être discriminés. Ils ont aussi gagné ce soir. J'ai déjà dit à la communauté gaie et lesbienne qu'elle avait fait oeuvre de salut public. Je suis heureux de le lui redire ce soir.

(20 h 30)

Avant de conclure, M. le Président, car un autre chantier m'attend, nous attend, je voudrais remercier quelqu'un dont un des derniers gestes politiques a été de donner vie à cet amendement de la Charte, quelqu'un qui a compris que la discrimination existait toujours envers les gais et lesbiennes du Québec. Je voudrais donc remercier notre ancien premier ministre, M. Jacques Parizeau. Des remerciements tout aussi sincères et émus s'adressent à mon collègue et ami, le ministre de la Justice, pour sa volonté et sa détermination à aller de l'avant et à défendre les droits des Québécoises et des Québécois, ainsi qu'à mes collègues de la commission des institutions et à l'ensemble de la députation qui se distingue aujourd'hui en adoptant cette loi qui rejette les exclusions.

Une autre étape viendra, M. le Président. Elle a été annoncée par le ministre de la Justice lui-même: il s'agit de la réception du rapport du comité interministériel sur les unions de fait. Ce chantier sera bien fait, il sera préréférendaire et la loi que nous déposerons de nouveau, M. le Président, bouclera la boucle, et tous les droits seront reconnus. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

Alors, le projet de loi n° 133, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au jeudi 13 juin 1996, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement? Alors, nous allons ajourner nos travaux à demain, jeudi 13 juin, à 10 heures. On peut attendre un petit instant.

(Fin de la séance à 20 h 33)


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