To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Assembly Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the National Assembly

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the National Assembly

Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Friday, December 3, 2004 - Vol. 38 N° 113

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures neuf minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je viens d'être informé du décès d'un de nos ex-collègues, M. Claude Filion, qui a été député du comté de Taillon de 1985 à 1989, ex-président de la Commission des droits de la personne et juge à la Cour du Québec. Je vous invite à avoir une pensée particulière pour sa famille et ses proches et je vous invite à prendre un moment de... un grand moment de recueillement.

n (10 h 10) n

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre de l'Éducation.

Rapport annuel de la Commission
consultative de l'enseignement privé

M. Reid: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le 35e rapport annuel 2003-2004 de la Commission consultative de l'enseignement privé.

Dépôt de rapports de commissions

Le Président: Ce document est déposé. Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la Commission de l'économie et du travail et député de Drummond. M. le député de Drummond.

Consultations particulières
sur le document intitulé Le secteur
énergétique au Québec 
?  Contexte,
enjeux et questionnements

M. Jutras: Alors, M. le Président, je dépose le rapport de la Commission de l'économie et du travail qui a siégé les 1er et 2 décembre 2004 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Des voix: ...

Le Président: Je vous demanderais votre collaboration.

Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. M. le député de Vachon.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Consentement.

Le Président: Il y a consentement. M. le député de Vachon.

Maintenir le service de transport
et d'accompagnement en soins de santé
fourni par Transport médical Montérégie

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale et signée par 1 335 pétitionnaires. Désignation: citoyennes et citoyens de Vachon.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement a arrêté de payer le Transport médical Montérégie pour ses assistés sociaux en oubliant ce qu'ils deviendront;

«Attendu que le coût du déplacement par taxi est le double et plus pour l'utilisateur et pour le gouvernement aussi;

«Attendu que les handicapés ainsi que les personnes à déplacements restreints, les malades, les personnes en dialyse, en soins psychiatriques, en chimio se retrouvent sans accompagnateur ni transport, ceci sans avertissement ou délai raisonnable, et ce, juste avant l'hiver, sachant que Transport médical faisait environ 900 transports par semaine et qu'il n'y a pas d'autre compagnie comme celle-là en Montérégie, Montréal, ainsi que sur la Rive-Nord;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons que le service de transport et d'accompagnement en soins de santé soit rétabli immédiatement en attendant que le conflit soit réglé ou qu'il y ait une entente.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Merci, M. le député. Cette pétition est déposée. Mme la députée de Nelligan.

Mme James: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Mme la députée de Nelligan.

Rétablir la gratuité des médicaments
pour les personnes âgées

Mme James: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 588 pétitionnaires. Désignation: seniors of the community.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«The health services plan:

«Whereas the formula used to determine the amount of the contribution is based on "Total Income (minus) Employment Income";

«Whereas this condition impacts directly on seniors whose income is primarily derived from pension income;

«The prescription drug insurance:

«Whereas the contribution to this plan has escalated drastically over the past 10 years: 1994, premium, $0; 2004, premium, $447;

«Whereas the prescription drug plan remains a defective and costly burden on seniors.»

Aucune demande d'intervention n'est réclamée, et je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Merci, Mme la députée. Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion du ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir proposant que le principe du projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations, soit maintenant adopté.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période des questions et réponses orales, et je reconnais M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

Règlement du conflit entourant l'établissement
d'un prix minimum pour la viande de boeuf

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Merci, M. le Président. L'entente de principe conclue, hier, entre l'UPA et l'Abattoir Colbex coûtera 16 millions de dollars aux contribuables. Le gouvernement, plutôt que de prendre ses responsabilités, de mettre ses culottes et de faire épargner 16 millions aux contribuables, a choisi de protéger des intérêts partisans. Ça, M. le Président, c'est sans compter l'aide que devra apporter le ministre des Finances aux producteurs pour se porter acquéreurs de l'abattoir.

En plus, la ministre de l'Agriculture a elle-même annoncé, à la place du fédéral, qu'il contribuera, à un programme, 60 % sur la compensation afin de permettre aux producteurs d'obtenir finalement 0,42 $ la livre. La ministre dit qu'elle a un accord avec le lieutenant politique de Paul Martin au Québec, M. Jean Lapierre. Le problème, M. le Président, c'est qu'il oublie souvent son chéquier à Ottawa.

Ma question sera simple, M. le Président: Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de pomper 16 millions de plus alors que les producteurs n'en veulent pas, alors qu'il avait les moyens de régler la situation sans verser une seule cent de plus en fixant un prix plancher par une loi sur mesure?

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, je veux juste rappeler que c'est une solution qui a été négociée avec les représentants des producteurs agricoles et l'entreprise Levinoff. C'est une solution qui était souhaitée par les producteurs agricoles, M. le Président. C'est une entente qui est intervenue. Les seuls intérêts partisans que nous avons protégés, c'est les intérêts de nos producteurs agricoles, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: M. le Président, comment expliquer ce choix du gouvernement de faire payer les contribuables au lieu de ramener à l'ordre une entreprise qui a abusé du contexte pour empocher des profits immoraux et pour gonfler le prix de vente de son entreprise?

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, moi, je ne comprends franchement pas, là, la réaction du député des Îles-de-la-Madeleine. Je pensais, ce matin, qu'il se levait pour me féliciter. C'est bien pour dire, hein?

Des voix: ...

Le Président: Si vous voulez...

Mme Gauthier: M. le Président, l'entente intervenue entre les représentants des producteurs agricoles et l'entreprise Levinoff, c'est une entente qui va permettre aux producteurs d'aller chercher des profits dans cette entreprise-là. Mais qu'est-ce qu'ils ont contre ça? Nos producteurs ont une solution gagnante, c'est une solution qui est choisie par les représentants des producteurs. Moi, j'ai toujours dit et mon gouvernement a toujours dit qu'on voulait une solution négociée, M. le Président. C'est ce que nous avons obtenu.

Le Président: En question complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Justement, M. le Président, est-ce que le gouvernement réalise que les agriculteurs placent beaucoup d'espoir dans cette entente de principe? Comme la menace d'une loi spéciale est essentielle, comme la date butoir a été fixée au 20 décembre, M. le Président...

Le Président: Votre question.

M. Arseneau: ...ce qui est très près des vacances, comme la ministre a dit, hier, que la loi était déjà écrite pour donner plus de chances à la négociation, pour rassurer davantage les agriculteurs, est-ce que la ministre accepte de déposer maintenant son projet de loi, qui est déjà écrit, à l'Assemblée nationale pour que nous puissions en prendre connaissance?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. M. le leader du gouvernement.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Je demande, je demande au député des Îles-de-la-Madeleine d'être un minimum réaliste, et d'oublier ses intérêts partisans, et d'être également un minimum cohérent. Il y a eu, hier, une entente de principe qui a été négociée. Le gouvernement a toujours dit, M. le Président, qu'il souhaitait une solution négociée plutôt que l'imposition, comme le réclamait l'opposition, d'un projet de loi. Pensez-vous trois secondes et quart que d'imposer un projet de loi, M. le Président, dans ce dossier-là n'aurait pas appelé une contestation immédiate et un non-règlement du problème? Ce n'est pas ça qu'on a cherché. On a cherché à régler par une solution négociée...

Le Président: En conclusion.

M. Dupuis: ...et bravo à la ministre de l'Éducation.

Des voix: Ha, ha, ha!

Des voix: ...

n(10 h 20)n

Le Président: En terminant, rapidement.

M. Dupuis: En terminant, premièrement, je n'ai aucune information privilégiée. Je n'ai aucune information privilégiée. Deuxièmement, bravo à la ministre qui fait l'éducation de l'opposition.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! En question principale?

Adoption d'un projet de loi fixant un prix
minimum pour la viande de boeuf

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Est-ce que vous pouvez reconnaître, M. le Président, que ce n'est pas étonnant si la nôtre a été faite...

Des voix: ...

Le Président: En question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: M. le Président, est-ce que le gouvernement peut reconnaître qu'il s'agit là d'une condition essentielle? Et la ministre, hier, elle a dit que la loi était écrite, qu'elle était là. C'est un élément de négociation d'ici le 20 décembre, engageant ce Parlement dans la voie de la loi spéciale pour mettre de la pression sur la négo, pour donner une chance aux producteurs, à moins que la ministre dénie ce qu'elle a dit hier devant les agriculteurs.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration.

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît. Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, je ne comprends franchement pas. Je comprends qu'il soit déçu... qu'il soit déçu... qu'il soit déçu parce qu'il y a une entente...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre.

Mme Gauthier: Juste vous rappeler qu'hier, quand le député des Îles-de-la-Madeleine s'est levé, il parlait du blocus qu'il y avait à Saint-Cyrille, qu'est-ce qu'on entendait. Moi, je lui disais que j'entendais et je souhaitais une solution négociée. C'est ce que nous avons ce matin. C'est ça qu'on voulait. C'est ça que les producteurs voulaient avoir, M. le Président. Il y a une entente de principe. Il reste à ficeler pour signer une entente définitive le 20 décembre.

Qu'est-ce qu'il recherche encore de plus? Nous avons obtenu pour les producteurs, M. le Président, une entente qu'ils souhaitaient avoir. On a fait en sorte que les parties s'assoient et négocient une entente, et je suis très fière, je suis très fière effectivement que ça se soit réglé de la façon dont ça s'est fait hier, en début d'après-midi. Et je suis certaine, M. le Président, que, le 20 décembre, on aura l'entente finale. L'entente-cadre, là où on avait de la difficulté, est maintenant réglée.

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Soutien à l'industrie aérospatiale

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, la situation devient pénible pour un des fleurons de l'économie québécoise, Bombardier. Dans le secteur transport, on annonce 350 nouvelles pertes d'emplois à La Pocatière alors qu'il y en avait déjà eu 400 au cours des deux dernières années. Côté aérospatiale, c'est plus tragique encore: chute dramatique des profits, décote par les agences d'évaluation du crédit. Bref, le coeur de l'industrie aérospatiale du Québec est menacé.

Pendant ce temps, le gouvernement de l'Ontario, dans un secteur beaucoup plus traditionnel et moins crucial, celui de l'automobile, qui généralement ne fait pas l'objet d'aide gouvernementale massive, met 500 millions de dollars pour aider les sociétés ontariennes, 100 % de l'automobile en Ontario. C'est leur affaire, me direz-vous. Mais le gouvernement du Canada, avec nos taxes et nos impôts, en fait autant pour aider l'industrie de l'automobile en Ontario.

Je pense que la question est évidente: Qu'attend le gouvernement du Québec pour émettre une politique de soutien à Bombardier et à l'aérospatiale du Québec? Et qu'attend-il pour demander vigoureusement au gouvernement du Canada de traiter avec la même attention notre aérospatiale qu'il le fait pour l'automobile en Ontario?

Le Président: M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Michel Audet

M. Audet: Je veux remercier le chef de l'opposition pour sa question parce que c'est vrai que l'industrie de l'aéronautique, et le groupe Bombardier, depuis quelques années, avec surtout les retombées du 11 septembre, a vécu une situation difficile. Ça reste cependant le fleuron, et je suis tout à fait d'accord avec le chef de l'opposition, de l'industrie québécoise, et nous le supporterons.

Ce qui m'étonne cependant, c'est que le député de Rousseau, lorsqu'on a annoncé, l'année dernière, qu'on allait ajouter un support pour le financement des appareils, se soit levé en Chambre, disons, outré et demandant des études de retombées économiques pour justifier que le gouvernement du Québec annonce, à ce moment-là, 600 millions pour aider au financement des appareils. Je comprends, aujourd'hui, que le chef de l'opposition nous dit que, si nous allons de l'avant pour un support additionnel, il nous féliciterait. Je l'en remercie.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Bernard Landry

M. Landry: Ça devrait être déjà fait depuis des mois. On sait ce qui arrive à Bombardier, ça traîne dans tous les journaux économiques et les journaux en général. Et tous les gouvernements du monde supportent leur industrie de l'aérospatiale. Il n'y a pas un Boeing qui décollerait sans l'aide de Washington puis il n'y aurait pas un Airbus qui aurait vu le jour sans l'aide de l'Angleterre, la France, l'Italie et l'Allemagne.

Le Président: Alors, votre question.

M. Landry: Ici, on a 10 000 emplois chez Bombardier seulement, et Bombardier est le troisième avionneur du monde.

Comment se fait-il que le gouvernement national du Québec revienne sur des questions posées il y a un an au lieu d'aller nécessairement et rapidement vers cette urgence cruciale pour notre économie, d'avoir une politique de soutien à Bombardier et d'aller à Ottawa chercher l'argent qui nous revient avant que le désastre ne se confirme?

Le Président: M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Michel Audet

M. Audet: Je pense que le chef de l'opposition devrait, je pense, avoir des propos modérés à l'égard de la situation de Bombardier. Elle n'est pas catastrophique, c'est une industrie, c'est une entreprise qui a un potentiel énorme, qui a, comme il sait, une technologie exceptionnelle. Il y a un personnel et il y a des employés qui sont extrêmement qualifiés, donc il y a une base solide pour maintenir cette industrie de l'aéronautique au Québec.

Je tiens cependant à mentionner qu'il y a deux aspects du dossier de Bombardier qu'il faut distinguer. Il y a le financement des appareils, des avions régionaux qui a donné lieu à un support l'année dernière et pour lequel nous aurons certainement des nouvelles prochainement à annoncer. Ottawa, on le sait, a fait un bout de chemin en finançant l'achat des avions par Air Canada, les avions Bombardier par Air Canada. Il y a l'autre dossier, dont il parle, à plus long terme qui est celui du développement de la nouvelle série, qui, lui aussi, fait l'objet de discussions et de négociations à la fois avec Bombardier et avec le gouvernement fédéral et pour lequel une décision sera prise d'ici le printemps prochain.

Le Président: En question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.

Règlement du dossier des disparités de traitement
dans les conventions collectives

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. M. le Président, je veux m'adresser au premier ministre à la fois comme premier ministre mais aussi comme responsable des dossiers de la jeunesse. Évidemment, la situation financière des jeunes n'est pas en train de s'améliorer. Il connaît bien la situation de l'endettement étudiant. Les jeunes qui, dans quelques années, vont sortir des études supérieures, qui auront eu besoin de prêts et bourses, vont sortir plus endettés.

Et de surcroît, bien, il faut regarder ce que le marché du travail offre. Les clauses dites orphelin, clauses de disparité dans les conventions collectives, pour lesquelles un projet de loi avait été adopté par l'ancien gouvernement, ont continué de se produire. Il y a cinq ans à peu près jour pour jour, on avait un débat, à l'Assemblée nationale, où je m'inquiétais qu'à peu près 90 % des conventions collectives où il y avait des clauses orphelin, ça allait continuer. D'ailleurs, je pense que le ministre du Travail a entre les mains une excellente étude qui a fait recensement de ce qui s'est passé depuis.

Le Président: Votre question.

M. Dumont: Il y a effectivement eu, comme prévu, 90 % des clauses orphelin qui ont continué. Mais ce qui est pire, c'est qu'il y a des clauses orphelin temporaires qui se sont multipliées, de telle sorte que, des conventions collectives sans clause orphelin, avant la loi il y en avait 86 %, maintenant il y en a 83 %.

Le Président: Votre question.

M. Dumont: On a plus de clauses orphelin qu'avant.

Le Président: Votre question, M. le député.

M. Dumont: Alors, ma question, elle est fort simple: Est-ce que les libéraux, qui étaient d'accord avec l'ADQ, dans l'opposition, pour dire que cette loi-là ne marchait pas... Qu'est-ce qu'ils vont faire, maintenant qu'ils sont au pouvoir?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis heureux qu'enfin le député de Rivière-du-Loup, après plus d'une centaine de questions... que j'ai déposé le rapport ici, à l'Assemblée nationale, se lève pour poser la question. Et j'aurais pensé qu'avant même qu'il nous interpelle, M. le Président, il félicite le gouvernement, parce que, depuis une semaine, en matière de travail sur l'équité salariale, nous avons adopté une loi pour faire avancer le dossier d'équité salariale, nous avons adopté, pour les travailleuses et les travailleurs du Québec, M. le Président, un règlement sur les comparateurs pour les entreprises qui n'ont pas d'emploi masculin dans leur entreprise, donc plus de 30 000 femmes qui pourront faire l'exercice d'équité salariale. Et je n'ai jamais vu les gens de l'Action démocratique participer au débat.

Le Président: À la question, M. le ministre.

n(10 h 30)n

M. Després: Ceci étant dit, M. le Président, effectivement, tel que la loi prévoyait, il y a un rapport qui a été déposé ici, à l'Assemblée nationale, le 2 novembre dernier. Ce rapport est remis à la Commission de l'économie et du travail, qui va en disposer, et, je crois, les membres se sont réunis. Et, la semaine prochaine, M. le Président, nous pourrons débattre effectivement du rapport et du plan d'action que j'entends déposer suite au rapport sur les disparités de traitement.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Bien, M. le Président, au moment où le débat sur les clauses orphelin est réouvert, ma question au premier ministre, elle est fort simple: Est-ce qu'il peut nous assurer... Il y a une commission qui va étudier des solutions, mais est-ce qu'il peut nous assurer que, pour son gouvernement, pour lui personnellement, le statu quo, l'inaction sont inacceptables?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Michel Després

M. Després: M. le Président, j'invite le député de Rivière-du-Loup à la commission parlementaire la semaine prochaine. Effectivement, la loi est jeune. La loi, M. le Président, il faut le reconnaître, est méconnue. Il faut le reconnaître aussi, les conventions collectives au Québec sont dans des cycles de trois à huit ans. Et ce que je veux dire au député de Rivière-du-Loup, c'est qu'on a un plan d'action. Je l'invite en commission parlementaire, puis il va voir ce qu'on va faire pour appliquer la loi, M. le Président.

Le Président: En dernière question complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. La même question: Est-ce que le premier ministre, dont le parti disait que cette loi ne marcherait pas, qui a maintenant une étude qui constate que cette loi ne marche pas, ne donne pas des résultats, peut donner une indication à une commission qui va se réunir la semaine prochaine pour dire que dans son esprit l'inaction, le statu quo sont inacceptables?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Michel Després

M. Després: M. le Président, ce que je peux donner comme assurance au député de Rivière-du-Loup, c'est qu'on va s'assurer que la loi soit connue, que la loi soit appliquée et que la loi soit respectée. Et je le réinvite à la commission parlementaire la semaine prochaine, M. le Président, pour en débattre avec lui.

Le Président: En question principale, M. le député de Rousseau.

Revenu disponible des familles

M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, le ministre de la Solidarité sociale fait beaucoup de publicité autour des chèques qu'il va envoyer aux familles au cours des prochaines semaines, mais, M. le Président, le ministre parle beaucoup moins des crédits d'impôt que le ministre des Finances a abolis pour les familles et pour les enfants. Il parle beaucoup moins aussi des allocations familiales qui ont été coupées. Il parle beaucoup moins des tarifs qui ont été augmentés, entre autres dans les services de garde et pour l'électricité. Or, M. le Président, ce qui est important pour les familles du Québec, c'est le montant net qui va entrer ou qui va sortir de leurs poches.

M. le Président, est-ce que le ministre des Finances, qui nous a habitués à dire les choses beaucoup plus clairement que les autres ministres et même que son premier ministre, est-ce que le ministre des Finances pourrait nous dire s'il est d'accord, par exemple, qu'une famille monoparentale avec deux enfants, un revenu de 35 000 $ ? ce n'est pas riche, M. le Président ? va avoir 224 $ de moins dans ses poches à la fin de l'année?

Le Président: M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. Je ne m'attendais pas à celle-là aujourd'hui; on avait répondu clairement hier, je croyais. Mais on va répondre encore. Vous dites... M. le Président, le député de Rousseau mentionne une famille monoparentale, deux enfants, avec un revenu de 35 000 $. Dans l'ancien régime, où on avait coupé les allocations familiales, on avait coupé l'aide aux familles pour mettre ça dans les services de garde à 5 $...

Des voix: ...

M. Béchard: Oui, dans l'ancien régime, oui, oui, l'ancien régime du Parti québécois.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Béchard: Bien, M. le Président, pour le cas précis dont nous parle le député de Rousseau, j'ai le plaisir d'annoncer à cette famille-là qu'elle aura, au net, à la fin de l'année, 1 091 $ de plus qu'actuellement. Si vous voulez avoir d'autres exemples, continuez.

Le Président: En question...

Une voix: ...

Le Président: M. le député de Beauharnois, s'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: De Huntingdon, je m'excuse. En question complémentaire, M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. M. le Président, est-ce que le premier ministre pourrait laisser répondre le ministre des Finances? Je comprends qu'il est en tutelle, là, mais ma question s'adresse au ministre des Finances.

M. le Président, est-ce que le ministre, et je prends un deuxième exemple, est-ce que le ministre des Finances peut nous confirmer qu'une famille biparentale avec un enfant, un revenu de 40 000 $, va avoir 277 $ de moins dans ses poches à la fin de l'année?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Bien, écoutez, M. le Président, on peut continuer comme ça jusqu'à la fin de la période de questions, je n'ai aucun problème. Parce que ce qu'on va démontrer hors de tout doute, c'est que maintenant il n'y a pas de famille perdante au Québec, comparativement à votre régime où vous laissiez exactement la moitié des enfants de côté, 30 % des familles de côté. Et, pour cette famille-là, grâce bien sûr à Soutien aux enfants, grâce aussi à Prime au travail, une autre mesure qui a été saluée non seulement par votre collègue le député de Vachon, mais aussi par le Conference Board, cette famille-là aura exactement, à la fin de l'année, au-delà de 500 $ de plus qu'actuellement dans le régime actuel, l'héritage de votre régime où on pénalisait la moitié des enfants et 30 % des parents s'ils n'avaient pas une place en services de garde.

Le Président: En dernière question complémentaire, M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: Ma question, encore au ministre des Finances: Est-ce que le ministre des Finances peut venir corriger le ministre de la Solidarité sociale, qui ne sait pas compter, de toute évidence? Au net, au net, M. le Président, au net ? je donne un troisième exemple: une famille biparentale avec deux enfants, un revenu de 40 000 $, va avoir 387 $ de moins dans ses poches à la fin de l'année. Est-ce que le premier ministre peut laisser le ministre des Finances se lever?

Le Président: M. le ministre...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, M. le député de Rousseau. S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: M. le député de Rousseau... M. le député de Rousseau, je vous demande votre collaboration.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je l'ai entendu également et je vous demanderais de retirer le mot que vous avez utilisé. M. le député de Rousseau.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande de retirer le mot que vous avez utilisé.

Une voix: ...

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: M. le Président, il faut pardonner au député de Rousseau; on est vendredi, et, le vendredi, il n'aime pas ça être à Québec.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: Question de règlement.

Mme Lemieux: ...rappeler l'article 79 au ministre de l'Emploi et de la Solidarité. Il a une fâcheuse tendance à s'amuser, et on aura tous compris qu'il s'amuse sur le dos des familles...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement, sur la question de règlement?

M. Dupuis: Sur la question de règlement, M. le Président. Tout ce que le député de... Tout ce que le ministre de l'Emploi a fait, c'est qu'il a répété une déclaration publique du député de Rousseau. Il n'y a rien qui est contre le règlement.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Alors, M. le ministre, vous connaissez très bien le règlement, là, à l'article 79. À la question, tout simplement. M. le ministre de l'Emploi.

M. Béchard: M. le Président, je me contenterai de dire que j'ai effectivement beaucoup de plaisir à faire partie d'un gouvernement qui aide autant les familles du Québec. J'invite le député de Rousseau à un peu d'humilité. Lui-même invitait, dans son petit guide Le courage de changer ? on ne sait qui ou on ne sait quoi ? invitait à reconnaître ses erreurs. Bien, pour le cas qu'il nous cite, dans le cas qu'il nous cite, cette famille-là aura au net, à la fin de l'année ? on ne peut pas être plus clair et précis que ça ? 710 $ que dans le régime actuel, dans lequel cette famille-là n'avait pas d'aide. Et...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Il n'y a rien qu'une personne qui a la parole. Je vous demanderais votre collaboration. Hier, c'était d'un côté, aujourd'hui, c'est de l'autre côté. Alors, je vous demanderais votre collaboration. Alors, si vous voulez conclure rapidement, M. le ministre.

M. Béchard: Oui, bien, je vais conclure rapidement. Écoutez, ça fait trois fois, là, qu'on lui prouve. Il y a trois prises. Normalement, au baseball, à trois prises, tu es retiré. Elle aura plus d'argent...

Des voix: ...

n(10 h 40)n

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! En question principale, M. le député de Dubuc.

Relance de l'usine d'Abitibi-Consolidated,
division Port-Alfred, à La Baie

M. Jacques Côté

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, en décembre dernier, le premier ministre s'engageait formellement à s'occuper personnellement du dossier de l'usine Port-Alfred d'Abitibi-Consol et à mettre toute son énergie pour justement permettre la réouverture de cette usine. Un an plus tard, M. le Président, les résultats sont plus que maigres, ils sont désastreux. Les 640 travailleurs de l'usine et travailleuses qui ont perdu leur emploi sont au bout du rouleau, tel qu'ils l'ont mentionné, et réclament des actions concrètes du gouvernement.

Ma question, M. le Président: Est-ce que le premier ministre, qui doit rencontrer le syndicat lundi qui vient, va répondre favorablement aux demandes du syndicat, les demandes qui sont, entre autres: mettre en place un programme d'aide spécial pour soutenir les travailleurs en attendant la réouverture de l'usine, donner des garanties à ce que le contrat d'approvisionnement et d'aménagement forestier qui appartient à Consol demeure attaché à l'usine Port-Alfred et établir également une position claire du gouvernement en ce qui concerne le bail d'utilisation par ACI des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw?

Le Président: Alors, M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, je veux dire au député de Dubuc que j'ai suivi le dossier de Port-Alfred de très, très près depuis l'annonce de la fermeture, et il le sait, on a eu l'occasion d'en discuter périodiquement. Et je vais rencontrer, lundi après-midi, Laval Perron et les représentants du syndicat pour faire le point sur le dossier. Et on a travaillé aussi avec la compagnie Abitibi-Consol pour explorer toutes les avenues possibles de solution, et on va continuer à travailler avec beaucoup, beaucoup d'effort pour qu'on puisse trouver une occasion, une ouverture qui nous permettrait de redonner vie à l'usine de Port-Alfred.

Mais je veux l'assurer qu'avec la députée de Jonquière, la ministre de l'Agriculture, on suit le dossier de très près puis on va persévérer, hein? Tant qu'on ne trouvera pas de solution, M. le Président, je veux vous assurer qu'on ne lâchera pas et que je vais effectivement continuer à m'y intéresser personnellement.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Dubuc.

M. Jacques Côté

M. Côté: Oui. Le premier ministre réalise-t-il qu'il est en train de me donner la même réponse qu'il m'a donnée le 10 décembre 2003 ici, en cette Chambre, M. le Président? Que fait-il des 640 travailleurs qui, à l'approche du temps des fêtes, sont complètement découragés? Il ne s'est rien passé depuis les 12 derniers mois. Quel geste concret entend-il poser pour donner espoir à ces travailleurs et travailleuses, M. le Président?

Le Président: M. le ministre délégué aux Forêts, à la Faune et aux Parcs.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: M. le Président, quand le député de Dubuc dit qu'il ne s'est rien passé au cours de la dernière année, j'aimerais tout simplement corriger la situation, à l'effet que non seulement le CAAF est resté rattaché à l'usine de façon intégrale, deuxièmement, quand on a donné le signal de relance de Produits forestiers Saguenay, on a fait en sorte que la disponibilité en copeaux soit dirigée vers un projet mettant en place la relance de Port-Alfred. Alors, je pense que ça, c'est des garanties d'approvisionnement stable pour 90 % des besoins de l'usine, et ça, c'est déjà attaché, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le député de Richelieu.

Prestation de services
en partenariat avec le secteur privé
dans les centres hospitaliers universitaires

M. Sylvain Simard

M. Simard: Oui, M. le Président. Avant-hier, la présidente du Conseil du trésor, lors d'une conférence de presse, a été très claire et elle a dit: «Moi, je souhaite vivement que les deux centres hospitaliers universitaires soient construits en formule PPP.» Pour ce qui est des services directs aux malades qui pourraient être confiés au secteur privé, la ministre nous disait: «On pourrait penser aux services auxiliaires, à tous les services qui ne sont pas reliés à des services cliniques.»

Maintenant qu'on connaît l'opinion de la présidente du Conseil du trésor, est-ce que le ministre de la Santé pourrait nous dire, ce matin, s'il est d'accord avec sa collègue et qu'il est prêt, lui aussi, à confier au secteur privé les services auxiliaires, les laboratoires, les préposés aux malades, les services alimentaires, les buanderies? Est-ce qu'il veut donner la gestion des prochains hôpitaux universitaires au secteur privé?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Alors, M. le Président, je pense que, probablement involontairement, le député déforme les propos de notre consoeur la secrétaire du Conseil... la présidente du Conseil du trésor, et elle aura l'occasion de les clarifier elle-même. Et d'ailleurs nous échangeons à de nombreuses reprises sur cette question, de même que l'ensemble du gouvernement, pour lequel le début de ces projets-là est une véritable priorité et une occasion stratégique de développer les soins de santé au Québec.

Lorsque nous serons au moment de débuter les projets ? et ça approche rapidement ? toutes les options seront considérées, de façon à ce que les projets soient de meilleure qualité possible, que ce soit aux meilleurs coûts possible pour le contribuable et qu'ils soient réalisés le plus rapidement. C'est dans cette optique que les remarques de la présidente du Conseil du trésor doivent être prises, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Maintenant que la seule chose qui semble claire maintenant, c'est que le ministre de la Santé semble assez mal à l'aise avec les propos cités...

Le Président: Votre question, M. le député. Votre question.

M. Simard: ...intégralement de sa présidente du Conseil du trésor...

Le Président: Votre question.

M. Simard: ...est-ce que... est-ce que le ministre... Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire s'il va trancher entre le ministre de la Santé et la présidente du Conseil du trésor et nous dire si, oui ou non, ceux et celles qui tournent actuellement autour des projets de CHU à Montréal sont là pour faire de l'argent avec la santé des malades?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, comment peut-on accepter un ton pareil, pour un parti politique qui n'a pas été capable pendant neuf ans de faire progresser ces dossiers?

La dernière fois qu'il a été question... la...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Borduas, vous n'aviez pas la parole. Alors, je vous demanderais votre collaboration. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: La dernière fois, à ma connaissance, qu'il a été question publiquement, de la part de l'ancien gouvernement, de ce projet, c'était pour faire un pavillon d'oncologie dans la cour de l'Hôpital Notre-Dame, et de toute évidence on avait complètement abandonné le projet du CHUM. Nous, nous allons de l'avant avec le projet, il sera réalisé le plus rapidement possible, ce sera un projet de la plus grande qualité et de la plus haute importance stratégique pour le Québec, M. le Président.

Le Président: En dernière question complémentaire, M. le député de Richelieu.

Nomination à la direction de l'Agence
des partenariats public-privé du Québec

M. Sylvain Simard

M. Simard: Toujours en point de presse ? en principale, M. le Président ? toujours dans ce même point de presse...

Le Président: Principale. Question principale.

M. Simard: ...la présidente du Conseil du trésor a causé toute une surprise en nous présentant la personne qui l'accompagnait comme étant le nouveau P.D.G. de son agence des PPP. Elle nous a même dit d'ailleurs qu'il était déjà depuis quelque temps à l'oeuvre, que c'était une nomination récente.

Comment la présidente du Conseil du trésor peut nommer quelqu'un à la tête d'une agence qui n'a pas été créée par la loi? Et comment peut-elle accepter qu'il soit déjà à l'oeuvre pour créer des PPP au Québec alors que cette Chambre ne s'est pas encore prononcée?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je pensais que mon collègue le député de Richelieu serait heureux de nous féliciter, puisque j'ai reçu des lettres, n'est-ce pas, du maire de Québec, le maire Olivier, de Longueuil, de même que l'Union des municipalités. Je pensais qu'il aurait été heureux, M. le Président, qu'on corrige le tir avec le Vérificateur général, qui aura complètement accès à l'Agence des partenariats public-privé. Plutôt, le député de Richelieu, M. le Président, s'interroge pour un employé qui est actuellement secrétaire associé au Conseil du trésor et qui s'occupe justement du bureau des partenariats public-privé, qui existait antérieurement.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! En question complémentaire, M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: M. le Président, c'est quand même extraordinaire que les seuls qui soient satisfaits soient ceux qui soient retirés de la loi.

Le Président: M. le député, à votre question. Vous êtes en question complémentaire.

M. Simard: M. le Président, si M. Lefebvre devait être nommé P.D.G. de l'agence, est-ce que la ministre exigerait qu'il se retire de toutes les instances décisionnelles lorsque la compagnie PricewaterhouseCoopers serait impliquée, puisqu'il était responsable des PPP dans cette entreprise jusqu'à tout récemment?

Le Président: Alors, Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je remercie encore une fois le député de Richelieu de sa question, puisque lui-même, alors qu'il était président du Conseil du trésor, a donné le contrat, n'est-ce pas, un contrat important pour faire la planification stratégique, n'est-ce pas, du Secrétariat du Conseil du trésor à Price Waterhouse. C'est donc dire, M. le Président, qu'il a une grande confiance dans cette compagnie. Et par conséquent, M. le Président, le député, il est de mauvais goût, dans le fond, d'avoir des réserves...

n(10 h 50)n

Des voix: ...

Mme Jérôme-Forget: Oui, de mauvais goût de mettre en doute l'intégrité du secrétaire associé actuel qui s'occupe des partenariats public-privé.

Le Président: Dernière question complémentaire, M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Alors, je rejoins M. Zampino...

Des voix: ...

M. Simard: Est-ce qu'il faut comprendre... Est-ce qu'il faut comprendre, M. le Président, que je rejoins M. Zampino dans les gens de mauvais goût cette semaine? Est-ce que la présidente du Conseil du trésor peut être sérieuse deux minutes et nous assurer que, dans toute décision où PricewaterhouseCoopers sera un acteur dans les partenariats public-privé, son président-directeur général, M. Lefebvre, ne sera pas partie des décisions et des études?

Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Je remercie, M. le Président, parce que, si je suivais... Il est clair, M. le Président, je l'ai dit: L'Agence des PPP ne fera aucun compromis au niveau de l'intégrité et de tous les volets qui sont rattachés à ce volet, M. le Président. Et par conséquent M. Lefebvre, qui est secrétaire associé actuellement à ce bureau, nous verrons à ce qu'il prenne les bonnes décisions en temps et lieu.

Le Président: En question principale, M. le député de Blainville.

Tarification de la consommation d'eau

M. Richard Legendre

M. Legendre: Oui. M. le Président, le ministre de l'Environnement a confirmé, cette semaine, qu'il imposera une nouvelle taxe sur l'eau et que tout bonnement il va refiler la facture aux municipalités. Les citoyens, qui paient déjà une taxe municipale pour l'eau, bien vont payer une deuxième fois pour le même service. Hier, la Fédération québécoise des municipalités, l'Union des municipalités du Québec et le maire de Gatineau, à raison d'ailleurs, ont très mal réagi à cette décision, décision qui a été prise sans consultation du monde municipal.

Alors, est-ce qu'il se pourrait, M. le Président, qu'en plus de ne pas consulter le monde municipal le ministre de l'Environnement, là, qui est de plus en plus horizontal, on le voit bien, le ministre de l'Environnement n'ait même pas consulté son collègue ministre des Affaires municipales? Comment le ministre des Affaires municipales peut-il tolérer que son collègue de l'Environnement envoie une facture aux villes alors que lui-même, le ministre des Affaires municipales, n'a même pas entamé les négociations sur le renouvellement du pacte fiscal?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Évidemment, M. le Président, vous aurez compris que nous n'avons pas beaucoup de leçons à recevoir de la part de l'opposition sur les consultations avec le monde municipal. On ne peut pas dire...

Des voix: ...

M. Fournier: À ce que je sache, le ministre de l'Environnement n'a pas annoncé une taxe pour le monde municipal, il a annoncé qu'il voulait appliquer la Politique de l'eau, pas juste en parler, pas juste faire des photos pour le Kodak, s'assurer qu'on était pour avoir une qualité de l'eau. Et, oui, ça interpelle aussi le monde municipal. Savez-vous pourquoi? Parce qu'il nous interpelle souvent, dans cette responsabilité de l'eau, pour nous assurer notamment qu'on ait des systèmes de filtration, des usines de traitement qui soient bonnes, qui soient fonctionnelles, qui ne soient pas trop chères, et pour ça il faut s'assurer de la qualité de l'eau qui rentre dedans. Alors, c'est une question qui est importante.

Vous savez, le député qui est juste derrière vous, le député de Berthier, nous a interpellés il n'y a pas longtemps: ils ont besoin de 35 millions juste pour l'eau à Berthier. Ce qui a été discuté ici, c'est 35 millions pour tout le Québec, pour vérifier la qualité de l'eau que nous devons boire et qui a un impact sur les réseaux. Donc, tout le monde municipal a besoin d'infrastructures, que nous faisons avec eux, avec le gouvernement fédéral, et qu'on veut continuer de faire pour la santé des Québécois, M. le Président. Je suis un peu étonné que le député se lève pour dire que, lui, la question de la qualité de l'eau, ça ne l'intéresse pas et que ça n'interpelle pas le monde municipal. J'en suis très étonné.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Blainville.

M. Richard Legendre

M. Legendre: Oui. Est-ce que le ministre réalise évidemment que ça interpelle le monde municipal? Le ministre de l'Environnement envoie une facture au monde municipal. Est-ce que c'est ça, le début de la décentralisation dont le gouvernement nous parlait? Est-ce que le ministre des Affaires municipales peut s'engager à ce que son gouvernement suspende cette décision jusqu'à temps qu'il ait l'occasion d'en discuter avec le monde municipal dans les négociations du pacte fiscal?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: On va avoir une discussion avec le monde municipal sur l'ensemble des sujets qui nous interpellent. Mais peut-être que notre collègue de Blainville ne l'a pas capté, mais, lorsque mon collègue de l'Environnement a discuté de la chose, il le disait pour lancer une consultation, il n'y a pas de décision de prise. Alors, c'est facile de suspendre, il n'y a pas de décision de prise. Alors, il y a une consultation qui est lancée par l'Environnement, et je vous annonce que, nous, on est en constante consultation avec le monde municipal. Mais je tiens à vous préciser cependant ceci: Dans le monde municipal, il y a les citoyens qui reçoivent des services. L'eau, c'est très important. Et, nous, on ne va pas juste faire des photo ops là-dessus, on va s'en occuper, on va s'en occuper à la captation, s'assurer c'est quoi, la condition de l'eau qui rentre, on va s'en assurer que, dans l'ensemble du réseau, la filtration dans l'aqueduc...

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Fournier: ...on puisse avoir des programmes qui font en sorte qu'on n'ait pas une croissance vers de l'eau embouteillée privée. Il s'en consomme de plus en plus à gros prix.

Le Président: Merci, M. le ministre. Donc, en question complémentaire...

Des voix: ...

Le Président: Je m'excuse, je suis ici, je préside et j'équilibre le temps de parole, et c'est mon rôle principal. En question principale, M. le député de Labelle.

Aide aux entreprises affectées
par l'interdiction de circuler en motoneige
dans le parc linéaire du P'tit Train du Nord

M. Sylvain Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. M. le Président, la décision rendue par la Cour supérieure du Québec, cette semaine, concernant l'utilisation de la motoneige sur le parc linéaire du P'tit Train du Nord est une véritable catastrophe, véritable catastrophe pour l'industrie touristique des Laurentides.

Selon les deux CLD, M. le Président, déjà: l'annulation de dizaines de forfaits, perte de revenus estimés à plus de 100 millions de dollars, de 400 à 600 emplois directs et indirects menacés, des dizaines de commerces, aubergistes, hôteliers, restaurateurs sont en péril, sans compter que, sur une soixantaine de pourvoiries dans les Hautes-Laurentides, certains ont déjà annoncé leur fermeture. C'est tout simplement le désespoir, M. le Président.

Devant cette catastrophe économique et humaine à la fois, quelles mesures d'urgence immédiates le gouvernement entend prendre afin de supporter les entreprises, les travailleurs, les travailleuses ainsi que l'ensemble de l'industrie des Laurentides?

Le Président: Alors, Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, merci, M. le Président. Alors, pour répondre au collègue de Labelle qui... on est au courant, on s'est parlé, même le collègue de Bertrand, on s'est parlé même de ce problème-là. Alors, ce que je veux dire, c'est qu'effectivement le jugement a été rendu dans le dossier du recours collectif, le 30 novembre dernier, c'est-à-dire mardi. On est après analyser le dossier, on est après l'étudier, et le plus rapidement possible, M. le Président, on avertira, on avisera des mesures qui seront prises, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Labelle.

M. Sylvain Pagé

M. Pagé: Oui. Bien sûr, M. le Président, j'apprécie la compassion, mais quand, quand clairement vous allez mettre sur pied un programme, un plan d'action concret qui va venir en aide à ces familles et à ces centaines d'entreprises dans les Hautes-Laurentides?

Le Président: Madame...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, comme je l'ai dit, on reconnaît, tout le monde reconnaît que ce jugement a des impacts majeurs à plusieurs niveaux. On va faire le plus rapidement possible, mais il faut tout de même étudier le dossier et l'analyser minutieusement, correctement, avec l'ensemble des collègues qui sont impliqués dans ce dossier-là, et on reviendra en temps et lieu.

Le Président: En question principale, M. le député de René-Lévesque.

Allégations de recours à des briseurs de grève
par la Société des alcools du Québec

M. Marjolain Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Alors, dans le dossier de la Société des alcools du Québec, la tension monte sur les lignes de piquetage, l'employeur utilise des injonctions pour éloigner les salariés. Récemment, la Société des alcools s'est fait accuser par le syndicat d'utilisation de briseurs de grève.

Pourquoi, M. le Président, ai-je entre les mains un rapport de deux enquêteurs, rapport que je dépose, M. le Président, si on a l'autorisation...

Document déposé

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt des documents? Consentement. Ces documents sont déposés.

M. Dufour: Alors, rapport qui a été remis au ministre du Travail le 16 novembre dernier et qui allègue, après un échantillonnage ? c'est important ? ponctuel seulement de 17 succursales, l'utilisation de briseurs de grève par la SAQ, qui, je le rappelle, est sous l'autorité ultime du ministre des Finances.

Pourquoi le gouvernement et le ministre du Travail en particulier tolèrent-ils l'utilisation de briseurs de grève par sa propre société d'État?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup. Je voudrais remercier le député de sa question, premièrement, pour lui dire qu'à tous les jours, M. le Président, dans ce conflit il y a conciliation, depuis le 21 novembre dernier. La conciliation continue, elle va continuer ? je peux lui annoncer ? toute la fin de semaine; que c'est un dossier où les choses évoluent bien, la négociation se passe bien. Entre autres, hier, il y a eu un communiqué d'émis par le syndicat, M. le Président, pour même rassurer ses employés, pour lui dire comment se dérouleraient les négociations et que les négociations se déroulaient très bien, M. le Président.

n(11 heures)n

En ce qui concerne les plaintes dont le député fait question, M. le Président, il y a eu effectivement... suite à des plaintes, le 3 décembre, il y a eu... les enquêteurs ont déposé effectivement leurs rapports dans les huit dossiers de plaintes, qui concluaient à l'absence d'infractions, M. le Président. Je vais prendre connaissance des rapports qu'il vient de déposer, mais je veux juste lui dire que, dans les deux demandes, il y a eu sept enquêteurs que le ministre du Travail a nommés pour justement s'assurer, M. le Président, que la loi soit respectée. Et je prendrai les dispositions, M. le Président, la loi sera respectée.

Le Président: Alors, ceci met fin à la période de questions et de réponses orales.

Votes reportés

Adoption du principe du projet de loi n° 75

Nous en sommes aux votes reportés. MM. les whips, ça va? Ça va. Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion du ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir proposant que le principe du projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations, soit maintenant adopté. Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Séguin (Outremont), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), Mme Courchesne (Fabre), M. Couillard (Mont-Royal), M. Reid (Orford), M. Audet (Laporte), Mme Gauthier (Jonquière), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Corbeil (Abitibi-Est), Mme Théberge (Lévis), Mme Normandeau (Bonaventure), M. Pelletier (Chapleau), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Ouimet (Marquette), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Fournier (Châteauguay), Mme Beauchamp (Bourassa-Sauvé), M. Mulcair (Chomedey), M. Vallières (Richmond), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Després (Jean-Lesage), Mme Boulet (Laviolette), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Lafrenière (Gatineau), M. Brodeur (Shefford), M. Gautrin (Verdun), M. Bordeleau (Acadie), M. MacMillan (Papineau), Mme Lamquin-Éthier (Crémazie), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Chenail (Huntingdon), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), Mme Thériault (Anjou), M. Auclair (Vimont), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda? Témiscamingue), M. Bernier (Montmorency), M. Blackburn (Roberval), Mme Charest (Matane), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gabias (Trois-Rivières), Mme Hamel (La Peltrie), M. Dubuc (La Prairie), M. Descoteaux (Groulx), M. Clermont (Mille-Îles), Mme Charlebois (Soulanges), Mme L'Écuyer (Pontiac), Mme Legault (Chambly), M. Lessard (Frontenac), M. Mercier (Charlesbourg), M. Moreau (Marguerite-D'Youville), M. Morin (Montmagny-L'Islet), M. Paquet (Laval-des-Rapides), M. Paquin (Saint-Jean), M. Tomassi (LaFontaine), M. Soucy (Portneuf), M. Rioux (Iberville), Mme Perreault (Chauveau), Mme Vien (Bellechasse), Mme James (Nelligan).

Le Président: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Landry (Verchères), Mme Lemieux (Bourget), Mme Marois (Taillon), M. Charbonneau (Borduas), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Legault (Rousseau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Bertrand (Charlevoix), M. Létourneau (Ungava), M. Boucher (Johnson), M. St-André (L'Assomption), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Jutras (Drummond), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Caron (Terrebonne), M. Pagé (Labelle), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Cousineau (Bertrand), M. Valois (Joliette), M. Bouchard (Vachon), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Bédard (Chicoutimi), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Richelieu), M. Legendre (Blainville), M. Deslières (Beauharnois), Mme Charest (Rimouski), Mme Richard (Duplessis), M. Dufour (René-Lévesque), M. Turp (Mercier), M. Côté (Dubuc), Mme Maltais (Taschereau), Mme Doyer (Matapédia), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Papineau (Prévost), M. Thériault (Masson), M. Tremblay (Lac-Saint-Jean), Mme Champagne (Champlain), M. Girard (Gouin), Mme Lefebvre (Laurier-Dorion).

M. Dumont (Rivière-du-Loup), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Grondin (Beauce-Nord), Mme Roy (Lotbinière), M. Légaré (Vanier).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune abstention. M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour: 69

Contre: 45

Abstentions: 0

Le Président: Bien, la motion est adoptée. Donc, le principe du projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations, est adopté.

M. le leader du gouvernement. M. le leader du gouvernement. Vous n'avez pas une motion à faire, là, vous?

M. Dupuis: J'avais compté la faire, M. le Président, après la première motion sans préavis, celle du ministre de la Santé. Mais je peux la faire tout de suite.

Alors, effectivement, M. le Président, conformément à l'article 21 de notre règlement, je fais motion pour que l'Assemblée se réunisse...

Le Président: Motion de référence, déférée.

Renvoi à la Commission
de l'aménagement du territoire

M. Dupuis: Ah! Excusez-moi. Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission de l'aménagement du territoire pour étude...

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Motions sans préavis

Nous sommes aux motions sans préavis. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Souligner la Journée internationale
des personnes handicapées

M. Couillard: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de l'Assemblée afin de débattre de la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale des personnes handicapées.»

La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement. Vous avez...

M. Dupuis: ...de consentement, un intervenant de part et d'autre sur la motion? Un intervenant de part et d'autre sur la motion.

La Vice-Présidente: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour un intervenant de chaque côté pour cette motion? M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Mme la Présidente, considérant l'importance de la motion, je pense qu'on doit permettre à tous les députés qui veulent prendre la parole de prendre la parole tout simplement.

La Vice-Présidente: Alors, je comprends que vous n'accordez pas le consentement qui a été demandé.

Mise aux voix

Alors, est-ce que cette motion est adoptée? Cette motion est adoptée? Alors, moi, je demande le consentement sur la proposition du leader. Alors, si le leader du gouvernement dit que tout le monde peut en débattre, moi, je n'ai pas de problème avec ça. Est-ce qu'il y a un consentement là-dessus? Il n'y a pas de consentement. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté, sans débat. La motion est adoptée. Alors, nous en sommes toujours aux motions sans préavis. Alors, je vais suspendre quelques instants, le temps que les députés qui doivent quitter le fassent et qu'on reprenne en silence.

(Suspension de la séance à 11 h 7)

 

(Reprise à 11 h 10)

La Vice-Présidente: Mesdames, messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous en sommes toujours aux motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

Proposer que l'Assemblée se réunisse
le lundi 6 décembre 2004, à compter de 10 heures

M. Dupuis: Alors, M. le... Mme la Présidente, pardonnez-moi, conformément à l'article 21 de notre règlement, je fais motion pour que l'Assemblée se réunisse lundi prochain, le 6 décembre 2004, à 10 heures le matin.

Mise aux voix

La Vice-Présidente: Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. Charbonneau: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Je veux juste avoir un renseignement du leader du gouvernement.

Une voix: ...

M. Charbonneau: Bien, c'est ça, parce que je veux savoir, là, si on va pouvoir y arriver, là.

Une voix: ...

M. Charbonneau: On va y arriver? Très bien.

Avis touchant les travaux des commissions

La Vice-Présidente: Alors, cette motion étant adoptée, nous allons maintenant passer à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, M. le Président, j'avise donc... Mme la Présidente! Excusez-moi, ce sont des réflexes que la fatigue n'aide pas à corriger.

J'avise cette Assemblée, Mme la Présidente, que la Commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec, la Loi sur les archives et d'autres dispositions législatives, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Que la Commission des finances publiques, d'autre part, entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 63, Loi sur Services Québec, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, et de 15 heures à 18 heures, et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif; et

Que finalement la Commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Environnement, la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau. Je vous remercie.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader. Alors, nous en sommes maintenant à la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Vous avez une question, M. le député de Borduas?

M. Charbonneau: Ça aurait pu être aussi juste à la rubrique précédente, mais finalement, dans un cas comme dans l'autre... C'est parce que, Mme la Présidente, j'ai reçu, ce matin, un avis du secrétaire de la Commission des institutions de l'Assemblée, et on a des auditions publiques, mardi prochain, sur le projet de loi n° 80, là, sur les questions policières, la problématique de la déontologie et aussi des promotions. Et nous nous étions entendus, de part et d'autre, pour inviter un certain nombre d'organismes à venir devant les membres de la commission pour finalement nous aider à évaluer la pertinence et la portée du projet de loi.

Alors, le secrétaire de la commission m'avise, ce matin, que deux organismes ont décidé de ne pas venir: la Sûreté du Québec, parce qu'ils considèrent que leurs commentaires ont été transmis directement au ministre; et la Protectrice du citoyen, qui considère que ça ne touche pas sa juridiction, et qu'elle a malgré tout regardé ça, puis elle dit que les citoyens, semble-t-il, ne seraient pas lésés.

Je pose le problème suivant. C'est qu'à partir du moment où une institution du Parlement ou même le Parlement lui-même, c'est-à-dire l'ensemble de l'Assemblée invite, convoque des gens à venir en commission parlementaire, on ne leur demande pas si eux pensent qu'on a besoin d'eux ou pas; on a jugé, comme élus, comme responsables, comme législateurs, qu'ils devaient venir en commission parlementaire apporter un éclairage adéquat aux députés et aux législateurs.

Alors, je demanderais soit au leader du gouvernement ou à la présidence, peut-être, d'intervenir pour que ces deux organismes-là viennent, mardi prochain, témoigner devant la Commission des institutions. D'autant plus que, de part et d'autre, et le ministre de la Sécurité publique et moi comme critique de l'opposition officielle dans ce dossier, nous nous étions entendus sur la pertinence d'entendre ces deux organismes, ces deux institutions.

La Vice-Présidente: Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Oui. Bien, évidemment, j'ai toujours plaisir à discuter de questions qui concernent le règlement avec le député de Borduas parce qu'évidemment c'est un des experts, en cette Chambre, du règlement.

Il sait très bien que, lorsqu'une commission parlementaire formule le voeu que des groupes soient entendus devant la commission, il s'agit d'une invitation. Par rapport à, par exemple, un subpoena, ce n'est pas un ordre de se présenter à la commission. On peut, l'Assemblée ou une commission, par exemple, la Commission de l'Assemblée nationale pourrait convoquer des gens, et là ça constitue un ordre. En commission parlementaire, dans l'étude d'un projet de loi suite à une motion préliminaire ou autrement, c'est une invitation à se présenter. Et, lorsqu'on invite des gens, vous aurez compris, Mme la Présidente, qu'il s'agit en toute occasion de groupes qui seraient intéressés à venir présenter leurs points de vue devant la commission parlementaire.

Dans le cas qui nous occupe, il y a eu effectivement une invitation qui a été transmise à la Protectrice du citoyen et à la Sûreté du Québec, puis ils ont estimé, ces deux organisations ont estimé qu'elles n'avaient pas un intérêt, mais pas un intérêt dans le sens de non-respect des parlementaires, mais qu'elles n'avaient pas à faire de représentation particulière à la commission parlementaire. Ça, c'est la première partie de ma réponse.

La deuxième, Mme la Présidente, est la suivante: C'est qu'évidemment les deux organismes, selon ce que je comprends ? je peux me tromper, mais selon ce que je comprends ? ont indiqué à la commission qu'ils ne souhaitaient pas être entendus et ont exprimé les motifs. Ça, ça peut faire partie, lors de la commission parlementaire, d'un débat, parce que le ministre peut être interrogé en commission parlementaire et il peut y avoir des échanges sur cette question-là.

Alors, je termine simplement en disant, Mme la Présidente, que c'est une invitation à ce que des groupes intéressés viennent se faire entendre, eux-mêmes jugent qu'ils n'ont pas à représenter de point de vue particulier devant cette commission parlementaire pour les sujets qui y sont convoqués, notamment le projet de loi n° 90, et que dans les circonstances on doit s'incliner.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader. Vous avez une question additionnelle, M. le député de Borduas?

M. Charbonneau: C'est parce que je voudrais un peu préciser parce que je crois que le leader du gouvernement n'a pas à dévaluer les propos que j'ai présentés précédemment de la bonne façon. C'est vrai que, dans le cas de la Protectrice du citoyen, elle indique qu'elle ne pense pas avoir une juridiction, mais par ailleurs elle dit: J'ai regardé malgré tout le projet de loi et je pense que les citoyens ne sont pas lésés. Nous, on peut avoir une opinion contraire. On veut être rassurés. Je crois que la commission aurait intérêt à l'entendre. Ça, c'est sur la question de la Protectrice du citoyen.

Mais, dans le cas de la Sûreté du Québec, écoutez, le projet de loi, il a deux éléments: un des deux éléments concerne toutes les promotions des officiers de la Sûreté du Québec. Et le directeur de la Sûreté du Québec, par l'entremise de son chef de cabinet, nous dit: Bien, écoutez, nous, on a remis nos commentaires au ministre, donc au gouvernement. Ce n'est pas le gouvernement qui légifère, c'est le Parlement, c'est la commission qui est chargée d'étudier.

Et, dans ce contexte-là, je veux bien comprendre que ce n'est pas un subpoena; on n'a pas donné un ordre et on aurait pu le faire, mais je ne pense pas qu'on devrait aller là pour faire comprendre, par exemple, à la direction de la Sûreté du Québec que le Parlement légifère. Ce n'est pas le gouvernement qui légifère, même si, dans la réalité des choses, on peut penser qu'on est juste là pour contrôler le processus législatif du gouvernement. Mais dans les faits, quand une direction de la police d'État, là... C'est la police de l'État, donc le directeur de la Sûreté du Québec est directement redevable au ministre de la Sécurité publique. On nous dit: Bien, écoutez, on n'a pas besoin d'y aller, on a donné nos commentaires au ministre. Là, il y a un problème fondamental de fonctionnement du parlementarisme et du sens de ce que c'est, la responsabilité du Parlement.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député.

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Oui, je vais vous reconnaître, M. le leader de l'opposition officielle.

Question de règlement concernant
le refus d'organismes publics de venir
en commission parlementaire tenant
des consultations particulières

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Merci, Mme la Présidente. Sur le dernier point, effectivement, et ce qu'il vous fait ressortir, c'est que... Je pense même que cette réponse va à l'encontre du principe de la séparation des pouvoirs. Faire appel à l'exécutif, dire qu'on a parlé, on s'est représenté devant l'exécutif et dire qu'on n'a pas à le faire devant le législateur, je pense même que c'est une entrave justement et ça va à l'encontre du principe de la séparation des pouvoirs, d'autant plus que cet organisme relève du gouvernement.

Alors, si chacun des organismes méprise à ce point ? et là je le dis entre guillemets, «méprise» ? le travail du législateur, du législatif, écoutez, on va se ramasser strictement avec un exécutif qui va décider de tout. Alors, moi, j'invite fortement, et je vous invite même à considérer cette question: Est-ce qu'un organisme relevant de l'État peut de sa propre initiative refuser, pour le motif qu'il a fait les représentations auprès de l'exécutif et qu'il n'a pas à le faire... D'abord, il s'en trouve libéré de le faire auprès du législatif, de la part d'un organisme étatique... Et là on le fait à brûle-pourpoint, Mme la Présidente, parce qu'on vient de recevoir l'avis de la commission et de la Sûreté du Québec. Mais je vous dis de regarder ça attentivement. Il me semble que cet avis irait peut-être même à l'encontre du principe de la séparation des pouvoirs si cher à notre démocratie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Alors, je vous remercie, M. le leader de l'opposition officielle. Vous avez une réponse là-dessus, M. le leader?

n(11 h 20)n

M. Dupuis: Ce que je veux dire, Mme la Présidente, c'est la chose suivante: D'abord, il est faux de prétendre... Je pense qu'il n'est pas exact ? pardonnez-moi ? il n'est pas exact de prétendre que les députés de l'opposition sont empêchés de poser des questions au sujet de la réaction de la Sûreté du Québec au projet de loi, puisque le ministre de la Sécurité publique, lui, est en commission parlementaire, est obligé de répondre, et il a la Sûreté du Québec sous son contrôle. Ça, c'est la première chose. Donc, il peut très bien être interrogé sur l'opinion que la Sûreté du Québec a au sujet du projet de loi et sur les discussions qu'il a eues avec la Sûreté du Québec. C'est le ministre de la Sécurité publique qui a sous sa juridiction la Sûreté du Québec. Ça, c'est la première chose. Donc, je veux que les gens qui nous écoutent sachent que les députés de l'opposition officielle ne sont pas empêchés ni de faire valoir leurs points de vue sur ces questions-là ni de poser des questions sur ces questions-là.

Moi, j'ai eu, comme critique de l'opposition en matière de Sécurité publique, à faire exactement le même genre de représentation lorsqu'avec notre ami Serge Ménard on a discuté d'amendements à la Loi de police. Il y avait, au sujet de l'Institut de police de Nicolet, des questions importantes qui devaient être discutées en commission parlementaire, et l'Institut de police n'a pas témoigné parce que le ministre a choisi de répondre lui-même aux questions qui concernaient les cours qui étaient donnés à l'Institut de police de Nicolet. Cependant, je dois dire ? mais, moi, je n'aurais pas d'objection à ce que ça, ça se fasse, parce que je ne veux pas qu'on contourne les règles ni le règlement de l'Assemblée nationale ? les gens de l'Institut de police étaient présents en commission parlementaire. Ils n'ont pas témoigné à la table comme témoins, mais ils étaient présents pour renseigner le ministre bien sûr sur certaines questions que je pourrais poser au sujet de l'Institut de police.

Facilement, avec le ministre de la Sécurité publique, on pourrait s'entendre pour que la Sûreté du Québec ou un membre de la Sûreté du Québec soit présent, accompagnant le ministre, pour être certain que, les questions que vous posez au ministre de la Sécurité publique ? au ministre de la Sécurité publique ? il aura la meilleure information pour vous donner des réponses. On peut faire ça. Mais...

On peut faire ça, sauf qu'il reste ? et je pense que c'est important, Mme la Présidente, que la présidence de l'Assemblée soit claire là-dessus ? qu'une invitation à se présenter en commission parlementaire, pour un groupe intéressé sur une question particulière sur un projet de loi, c'est une invitation, ce n'est pas un ordre. Et donc, évidemment, c'est chaque groupe qui est invité à présenter des points de vue qui a à décider s'il veut présenter des points de vue, s'il a un point de vue à présenter et si le projet de loi qui est sous étude revêt suffisamment un caractère intéressé pour qu'il s'y présente.

Décision de la présidence

La Vice-Présidente: Écoutez, je pense que j'ai une question qui m'a été adressée. D'abord, j'aimerais répondre au leader de l'opposition officielle, qui me disait... En ce qui concerne la présidence, vous aimeriez savoir ma position là-dessus. Et je peux vous dire qu'en ce qui me concerne, dans la loi, l'article 51 de notre règlement permet à la commission, à toutes les commissions parlementaires de contraindre qui que ce soit à venir en commission. Alors, si c'est le souhait de la commission de contraindre la Sûreté du Québec à venir se faire entendre en commission, elle aura toute la liberté et elle a tous les outils en main pour le faire. Alors, j'espère que ça répond à votre question. M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Bon. Mme la Présidente, s'il faudra aller jusque-là, pour le restant de ce que j'ai indiqué, je le ferai. Et j'avertis le ministre qu'on va malheureusement perdre beaucoup de temps, en commission parlementaire, pour débattre de l'opportunité que la Sûreté du Québec vienne. La question, ce n'est pas de savoir si on peut poser des questions au ministre de la Sécurité publique. Évidemment qu'on va pouvoir lui en poser. Puis à la limite, si les gens de la Sûreté du Québec étaient à côté de lui, ils vont pouvoir lui souffler toutes les bonnes réponses dans l'oreille, ce qui se fait régulièrement.

Et je vais vous dire: Si j'avais eu à décider, lorsque vous étiez dans l'opposition, ce que vous aviez demandé au ministre de la Sécurité publique, je crois qu'on aurait dû vous donner raison. Il ne peut pas y avoir, à un moment donné... Moi, je ne tiendrai pas deux discours parce que ça faisait notre affaire un temps puis que ça ne fait pas notre affaire maintenant. Et je crois que le principe fondamental dans ça, c'est qu'à un moment donné c'est le législateur qui fait la loi, c'est nous qui avons besoin des informations les plus pertinentes.

Écoutez, j'ai discuté avec le directeur de la Sûreté du Québec la semaine dernière, et le ministre était dans la même salle que moi, à la remise des prix policiers du Québec. Je le sais, je connais son opinion, sauf que je veux que les membres de la commission l'entende, parce que j'ai des collègues qui m'ont fait des représentations. Et je l'ai dit très franchement au ministre de la Sécurité publique: Je voudrais que le directeur de la Sûreté du Québec vienne nous donner l'éclairage qu'il m'a donné en privé parce que ça doit se faire publiquement. Et je pense que le directeur de la Sûreté du Québec n'a pas compris finalement, et ce n'est pas un blâme à son endroit, mais n'a pas compris la portée de la décision qu'il a prise puis du message qu'il nous a fait envoyer par son directeur de cabinet.

Écoutez, on est dans un processus législatif, et, dans notre système politique, même si la séparation des pouvoirs, comme en parlait mon collègue, n'est pas étanche, malheureusement en ce qui nous concerne, la réalité est que ce sont les législateurs qui font ultimement la loi. Bon. Et, dans ce contexte-là, on a besoin d'un éclairage, et en plus on s'était entendus. Je veux dire, en quelque part, là, il faut se rendre compte...

Et j'ajouterai une dernière chose pour que le ministre de la Justice, en fait le leader du gouvernement, convainque son collègue de la Sécurité publique de nous aider et que lui-même nous aide finalement à résoudre ce problème-là dans le respect de ce qu'est l'institution parlementaire. Il est non seulement ministre de la Justice, leader du gouvernement, il est ministre de la Réforme des institutions démocratiques.

À la limite, ça va même à l'encontre de la philosophie de la proposition qu'il nous a présentée quand il voulait faire en sorte que les commissions soient plus libres et que les ministres aient moins d'importance dans les commissions parlementaires que l'on a actuellement. Alors, je pense qu'à ce moment-ci on devrait être en mesure d'avoir, dès maintenant, l'assurance que, la police d'État, sa direction va être à la disposition des législateurs directement et pas par personnes interposées.

La Vice-Présidente: Alors, comme dernière intervention, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je veux d'abord dire et reconnaître que le député de Borduas, qu'il soit d'un côté de la Chambre ou de l'autre, a toujours la même opinion. Il a d'ailleurs réussi à l'exprimer très bien dans les journaux au sujet des fusions municipales et de l'attitude de la députée de Bourget lorsqu'elle était critique en matière... d'opposition. Donc, je lui reconnais cette droiture-là.

La deuxième chose que je veux dire, c'est justement parce qu'on a déposé un projet de réforme parlementaire, parce qu'on doit avoir le respect des règles qui nous gouvernent que j'insiste pour dire que le débat qui se fait actuellement ne se fait pas dans le bon forum. Si le député de Borduas, comme il l'a dit, a l'intention de convoquer un groupe qui a manifesté qu'il n'avait pas un intérêt ? mais pas un intérêt qui est préjudiciable à l'opposition ? à venir devant la commission parlementaire, si le député de Borduas estime qu'il ne peut pas accepter, qu'il procède en vertu du règlement et en vertu de la Loi sur l'Assemblée nationale. Je pense que ça, là, c'est la réponse la plus claire.

Ceci étant dit, c'est vrai, c'est vrai qu'il y a eu, entre le ministre de la Sécurité publique et le député de Borduas, des discussions au sujet de groupes qui pourraient être entendus en commission parlementaire. D'ailleurs, puis je ne pense pas que le député de Borduas va le contredire, j'ai l'information qu'effectivement il y a eu, entre les deux, des discussions. Ils se sont entendus sur un certain nombre de groupes qui allaient être... Toutes les demandes que le député de Borduas a données au ministre de la Sécurité publique ont été acceptées. Il y a un groupe, il y a un groupe... deux groupes, la Protectrice du citoyen et la Sûreté du Québec, qui ont indiqué qu'ils ne voyaient pas un intérêt à se présenter devant la commission pour y faire valoir leurs points de vue.

Mais il n'y a pas là-dedans, là... Il faut faire attention: il n'y a pas là-dedans, là, de cachette, il n'y a pas un désir de cacher. Il y a cependant ? et je suis certain, et je termine là-dessus, m'adressant à un ancien président de l'Assemblée nationale ? il y a le fait que nous avons un règlement, nous avons une loi. Il faut procéder en vertu du règlement et de la loi, tout simplement.

La Vice-Présidente: Alors, je vous remercie.

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Là, écoutez, ce n'est pas un débat, ici. Je pense que le bon forum pour discuter de cette question-là sera à la commission...

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Question de règlement.

M. Dupuis: Mme la Présidente, vous avez indiqué que vous aviez entendu les représentations, vous êtes prête à rendre une décision; c'est ce que je comprends. Et là bien ça ne peut pas... Ça, là, ça, là, c'est votre décision à vous et ça ne peut pas être contesté.

M. Charbonneau: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: Bon. Alors, je pense que tout le monde s'est fait entendre là-dessus. Il y a eu...

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Question de règlement. Si vous avez une question de règlement, en vertu de quel article, M. le député de Borduas?

M. Charbonneau: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: En vertu de quel article?

M. Charbonneau: Article 2.

La Vice-Présidente: Posez votre question.

M. Charbonneau: Pourquoi le leader du gouvernement, quand il pose une question de règlement, il a la possibilité de s'exprimer, quand un député de ce côté-ci se lève pour poser une question de règlement, il ne pourrait pas le faire? Vous m'avez autorisé, je le fais, là.

La Vice-Présidente: ...M. le député de Borduas. Alors là, écoutez! Là, on va se calmer, on va se calmer tout le monde, hein? Je vous ai reconnu, M. le député de Borduas, comme j'ai reconnu le leader aussitôt qu'il a mentionné que c'était une question de règlement. J'ai fait la même chose avec vous aussitôt que vous l'avez souligné. Alors, je pense que je suis équitable envers tout le monde.

n(11 h 30)n

Maintenant, moi, je suis d'avis que présentement la décision a été rendue. C'est à la commission à faire ses devoirs et à contraindre la Sûreté du Québec à se faire entendre, si elle le désire. Nous ne sommes plus dans le bon forum. Alors, la période des affaires courantes étant terminée...

M. Charbonneau: Mme la Présidente, question de règlement.

La Vice-Présidente: Allez-y.

M. Charbonneau: Alors...

Une voix: ...

M. Charbonneau: Je l'ai invoqué, l'article, et j'ai indiqué que c'était l'article 2. Mme la Présidente, ce que le leader du gouvernement vient d'indiquer n'est pas exact. Il a indiqué que les gens avaient manifesté qu'ils n'avaient pas...

M. Dupuis: ...

M. Charbonneau: Un instant. Je n'ai pas fini ma question de règlement!

M. Dupuis: ...

M. Charbonneau: Je vais en faire une autre!

La Vice-Présidente: Je ne vais entendre seulement qu'une question de règlement à la fois, M. le leader du gouvernement.

Des voix: ...

La Vice-Présidente: Je vais entendre une seule...

Des voix: ...

La Vice-Présidente: Je suis déjà à entendre une question de règlement, M. le leader. Je veux terminer d'entendre la question. Je vais vous reconnaître immédiatement après. M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Mme la Présidente, je viens de vous indiquer que le leader du gouvernement, responsable de la réforme parlementaire, vient de dire à la Chambre... vient de plaider sur une dimension qui n'est pas exacte. Il a indiqué que les gens avaient considéré que ce n'était pas... leur intérêt n'était pas en cause.

Je vais vous lire la lettre que j'ai reçue ce matin, signée par Pierre Henri, directeur de cabinet du directeur général de la Sûreté du Québec: «Auditions publiques sur le projet de loi n° 80. La présente a pour but de vous informer que nous n'avons pas l'intention de faire entendre nos représentations concernant le projet de loi n° 80, Loi modifiant la Loi sur la police...»

La Vice-Présidente: Non, je m'excuse, M. le député de Borduas, là, vous n'êtes plus dans une question de règlement à l'heure actuelle.

Des voix: ...

La Vice-Présidente: Vous êtes sur le fond de la question.

Des voix: ...

La Vice-Présidente: Vous êtes sur le fond de la question.

Des voix: ...

La Vice-Présidente: S'il vous plaît! Je vous demanderais de vous asseoir, tout le monde. Ma décision est déjà rendue, M. le leader de l'opposition officielle.

Des voix: ...

La Vice-Présidente: Alors, si vous voulez vous asseoir. Je vous demanderais de vous asseoir, s'il vous plaît.

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Je vais terminer ce que j'ai à dire et je vais vous reconnaître après. Si vous voulez vous asseoir. Merci.

Alors, comme je l'ai dit précédemment, j'ai entendu tous les députés qui devaient parler sur cette question-là et j'ai convenu que le débat devrait maintenant être acheminé ou dirigé vers la commission qui aura à étudier le projet de loi n° 80.

Je ne crois pas pertinent ni utile, à ce moment-ci, d'en faire un débat de fond. Ce n'est pas l'endroit. La commission a toute autorité en la matière pour contraindre qui que ce soit à venir témoigner devant elle. Là-dessus, je vais clore la période des affaires courantes et procéder aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, Mme la Présidente, j'apprécierais que vous nous référiez à l'article 3 du règlement.

Mme Lemieux: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Lemieux: Je prends acte de la décision que vous prenez. Ce que je soumets à votre attention est la chose suivante. Le député de Borduas a une lettre qui pourrait avoir une influence sur le cours des choses. J'apprécierais que vous acceptiez que vous en soyez saisie, que cette lettre soit déposée avant que la question soit statuée de manière finale. Je pense que c'est une information supplémentaire que le député de Borduas veut soumettre à votre attention.

La Vice-Présidente: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt de cette lettre? Il n'y a pas de problème? Alors, vous pouvez déposer votre lettre. Toutefois, je ne suis pas certaine que c'est à moi que devrait... qui devrais avoir à répondre à la lettre qui sera déposée. Ce sera peut-être à la commission. Je tiens tout simplement à vous le dire. Alors, déposez votre lettre, M. le député.

M. Charbonneau: Mme la Présidente, je voudrais, en utilisant mon droit de parlementaire de m'exprimer, je voudrais vous indiquer que je n'ai jamais demandé à ce que vous tranchiez la question. Ce que j'ai fait, et ça, c'était mon droit le plus strict, c'était d'invoquer mon droit comme parlementaire et comme...

Des voix: ...

La Vice-Présidente: S'il vous plaît!

M. Charbonneau: ...

La Vice-Présidente: Je regrette, M. le député de Borduas, la leader adjointe de l'opposition officielle m'avait demandé de me positionner sur cette question, c'est ce que j'ai fait. Alors, peut-être que, vous, vous ne l'aviez pas fait, mais votre collègue l'avait fait. Maintenant, le débat est clos. La lettre peut être déposée. Il y a consentement. Alors, je vous demanderais de la déposer sans aucun commentaire.

M. Charbonneau: Mme la Présidente, est-ce que je peux la lire, la lettre, puisqu'elle est publique maintenant?

La Vice-Présidente: C'est un dépôt. Alors, dans un dépôt, il n'est pas nécessaire de la lire. Alors, on la dépose tout simplement.

Des voix: ...

La Vice-Présidente: J'en prendrai connaissance après et je jugerai si j'aurai une décision à rendre ou si c'est la commission qui aura à se prononcer là-dessus. Alors, je demande tout simplement le dépôt pour la rendre publique. Et elle sera rendue publique à ce moment-là, mais il faut commencer par la déposer.

M. Bédard: ...Mme la Présidente. C'est que c'est vrai que le débat s'est animé, et je vous dirais qu'il y a eu plusieurs interventions, sauf qu'en matière... normalement, lorsqu'on invoque des arguments, quand de nouveaux arguments sont apportés par le leader, et on ne plaide pas sur... Parce qu'au départ on s'entendait sur, bon, quel était le problème, et là le leader du gouvernement a amené d'autres arguments qui n'avaient pas été invoqués par les autres intervenants. C'est ce qui a fait en sorte...

Une voix: ...

M. Bédard: ...question sur les renseignements sur les travaux, et je pense que ça fait partie des renseignements sur les travaux. Et, à partir du moment où je me lève et je demande des renseignements sur les travaux, je pense que j'ai droit de le faire, Mme la Présidente, en toute amitié pour vous. Parfait? Alors, à partir du moment où quelqu'un soulève une question qui n'a pas été soulevée, bien ça fait en sorte effectivement que l'autre personne... Vous devez effectivement restreindre les interventions aux nouveaux points qui ont été soulevés, mais empêcher mon collègue de plaider sur un des aspects qui a été soulevé et qui n'avait pas fait mention d'intervention de qui que ce soit, ça fait en sorte qu'un des parlementaires est privé de son droit d'intervenir et de vous faire des représentations quand vous avez à décider une question aussi importante que le respect du législatif versus l'exécutif.

Et, vous savez, mon collègue, ici, est, je pense, un des députés qui incarnent le plus cette valeur d'importance qu'il accorde à l'exécutif. Alors, je vous invite, à l'avenir, Mme la Présidente, à faire attention aux arguments qui sont soulevés pour nous permettre, dans les cas, qu'on le pense, qui sont pertinents et qui touchent le droit des parlementaires, de faire les représentations qui s'imposent. Et le temps n'est pas une limite aux arguments, Mme la Présidente. Les arguments invoqués ou la répétition peuvent l'être mais pas le temps.

La Vice-Présidente: ...leader de l'opposition officielle, je vous ai fait remarquer que ce n'est pas ici que le débat doit se faire, c'est en commission parlementaire. Le député de Borduas a demandé le consentement pour déposer une lettre parce qu'il croit que cette lettre-là pourrait convaincre les membres de la commission de contraindre peut-être la Sûreté du Québec à venir se faire entendre en commission parlementaire. Ce n'est pas à moi d'en décider, c'est la commission qui a tous ces outils-là.

Alors, lorsqu'on fait un dépôt de document à l'Assemblée, on ne le lit jamais, on le dépose simplement, et c'est sans commentaire. Alors, pour ma part, je peux vous dire qu'il n'y aura plus d'intervention sur le fond, comme vous avez fait. Je pense qu'on a un peu abusé, de part et d'autre, là, sur les articles du règlement. Tout le monde a eu l'occasion de se faire entendre. J'ai très bien saisi la question. J'ai rendu ma décision à l'effet que c'est la commission qui devrait maintenant se pencher là-dessus. Alors, je vous demande de déposer votre document afin qu'on puisse passer aux affaires du jour.

M. Charbonneau: Question de règlement, Mme la Présidente. D'abord, en tout respect pour votre fonction et votre personne également, je crois que vous ne pouvez pas prétendre que des collègues, de chaque côté, ont abusé de leur droit de parole.

La Vice-Présidente: Je n'ai pas dit qu'il y avait eu d'abus du droit de parole, j'ai dit que chacun avait eu en masse le temps de se prononcer là-dessus et qu'on avait peut-être abusé de questions de directive qui n'en étaient pas et de questions de règlement qui n'en étaient pas non plus. Alors, je pense que j'ai fait vraiment, là... j'ai été vraiment, là, correcte avec tout le monde. Maintenant, je vais vous demander votre collaboration, parce que ce n'est pas ici que le débat doit se faire mais bien à la commission. Mme la leader, est-ce que c'est une question de règlement?

Mme Lemieux: ...Mme la Présidente. Mme la Présidente, je soumets à votre attention la question suivante. Il y a eu un débat, depuis un certain nombre de minutes, au sujet de la présence de la Sûreté du Québec à cette commission parlementaire à l'occasion de l'adoption d'un projet de loi qui les concerne essentiellement. Il y a eu un certain nombre d'arguments des deux côtés de la Chambre: de la part du leader du gouvernement, de la part du député de Borduas, de la part du leader adjoint.

Or, dans cette foulée d'arguments, le leader du gouvernement a introduit un élément sur lequel vous n'avez pas été entièrement informée, puisque le député de Borduas, à partir de cette lettre, considère qu'il y a des informations qui mériteraient d'être arbitrées entre ce nouvel argument du leader du gouvernement et le député de Borduas. Alors, vous dites que ce n'est pas le bon forum, Mme la Présidente. Je considère qu'à ce moment-ci, si on n'est pas le bon forum pour décider du bon fonctionnement de la Chambre, je ne sais pas où ça va être.

n(11 h 40)n

Alors, la question que je vous pose: Que faites-vous du fait que le leader a invoqué un élément factuel au sujet duquel le député de Borduas dit: Écoutez, moi, j'ai une information supplémentaire, et je n'ai pas la même interprétation, et je crois même qu'on ne parle pas des mêmes faits? Alors, je crois que vous n'avez pas toute l'information pour pouvoir prendre les décisions et vous acquitter convenablement de vos responsabilités en vertu de l'article 2. C'est ça, le dilemme et la directive que je nous demande.

Si vous preniez connaissance, si on repérait l'argument nouveau que le leader du gouvernement a énoncé il y a de cela quelques minutes, et plus récemment dans le débat, si vous aviez à conjuguer avec cet élément de fait et cet élément de fait apporté par le député de Borduas, peut-être que votre décision serait différente. Je vous demande en tout respect de prendre correctement connaissance, et une manière de le faire, c'est que le député ? je sais très bien qu'un document, on le dépose... mais que le député fasse état de cet élément-là.

Alors, pour que nous puissions être au clair sur le bon fonctionnement, parce que visiblement nous n'avons pas le sentiment que cette question-là est correctement clarifiée, je vous demande d'être saisie formellement du contenu de cette lettre.

La Vice-Présidente: Alors, je vous remercie. Je vous rappelle que nous en sommes à la rubrique des renseignements sur les travaux des commissions, qu'on a pu poser les questions. Maintenant, si on veut en faire un débat, ce n'est pas le moment ici, à ce moment-ci. Le député de Borduas peut déposer sa lettre. Elle sera rendue publique. J'en prendrai connaissance et, s'il y a lieu, je pourrai revenir sur ma décision, seulement s'il y a lieu. Mais présentement je dois mettre un terme à cette façon de procéder, puisque ce n'est pas, ici, un débat. Nous en sommes aux renseignements sur les travaux des commissions. Alors, si vous voulez déposer votre lettre, M. le député, mais sans commentaire.

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Sans commentaire.

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Vous déposez votre lettre sans commentaire. Je vous remercie.

Une voix: Mme la Présidente, question de règlement.

La Vice-Présidente: En vertu de quel article, M. le député de Borduas?

Une voix: En vertu de l'article qui ferait en sorte que je vous demande une interprétation, une interprétation...

La Vice-Présidente: Non, je regrette...

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Non, je regrette, M. le député de Borduas, nous en sommes aux renseignements sur les travaux des commissions. Et vous savez très bien, vous savez même probablement mieux que moi, M. l'ex-président, puisque vous avez occupé ce fauteuil à ma place bien avant moi...

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Alors, vous savez qu'il y a un règlement, qu'il y a une procédure et que, dans notre procédure, nous avons des étapes à passer et que nous en sommes actuellement aux renseignements sur les travaux des commissions. Je pense que vous avez eu amplement le temps de poser toutes les questions que vous vouliez poser. Maintenant, si vous voulez en faire un débat de fond, je vous dis: Ce n'est pas le bon endroit. Vous devrez utiliser les outils que vous avez à votre disposition en commission parlementaire pour le faire.

Document déposé

Alors, votre lettre est déposée.

Affaires du jour

Maintenant, nous allons passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, Mme la Présidente, j'apprécierais que vous nous référiez à l'article 3 du feuilleton.

Projet de loi n° 64

Adoption du principe

La Vice-Présidente: Alors, à l'article 3, M. le ministre délégué à la Réforme des institutions démocratiques propose l'adoption du principe du projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi électorale. Alors, est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre de la Justice.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Mme la Présidente, je vous remercie de me donner la possibilité d'intervenir sur le projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi électorale.

Le projet de loi n° 64 a été présenté, Mme la Présidente, le 17 juin dernier. Il vise à modifier certaines dispositions de la Loi électorale en matière d'autorisation des partis politiques afin de respecter un arrêt de la Cour suprême du Canada. Rappelons les faits, si vous me le permettez.

La Cour suprême du Canada décidait, le 27 juin 2003, dans un jugement unanime, de déclarer inconstitutionnels certains articles de la Loi électorale fédérale. Ces articles avaient pour effet d'exiger qu'un parti politique présente au moins 50 candidats, lors des élections générales, afin de pouvoir être enregistré et de bénéficier des avantages accordés par la loi.

M. Michel Figueroa, en sa qualité de chef du Parti communiste du Canada, a soutenu avec succès devant la Cour suprême du Canada que ces dispositions limitaient ses droits en regard de l'article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés et que cette atteinte aux droits ne constituait pas une limite raisonnable que l'on peut justifier dans le cadre d'une société libre et démocratique, tel que le prescrit l'article 1 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Il n'est pas nécessaire de reprendre l'ensemble de la démonstration de la décision rédigée par le juge Iacobucci. Les courts passages qui suivent en illustrent clairement les effets. J'ouvre les guillemets, et évidemment c'est la Cour suprême qui parle: «En dernière analyse, j'estime que le critère des 50 candidatures est incompatible avec le droit de chaque citoyen de jouer un rôle significatif dans le processus électoral et que l'État n'a pas justifié la violation de ce droit. Essentiellement, donc ? et je cite toujours la Cour suprême ? il ressort des présents motifs qu'aucun seuil de [candidature] ? pardonnez-moi, "de candidature", c'est mon interprétation ? n'est acceptable.»

La Cour suprême a subséquemment donné un avis de un an au gouvernement fédéral pour apporter les correctifs requis, soit jusqu'au mois de juin 2004, époque où le gouvernement du Québec a présenté le présent projet de loi.

En quoi la Loi électorale du Québec est-elle touchée par cette décision, Mme la Présidente? Notre Loi électorale contient des dispositions comparables à la loi fédérale qui, à leur face même, seraient aussi déclarées contraires à l'article 3 de la charte si notre loi devait être contestée devant les tribunaux. En effet, l'article 47 de notre Loi électorale oblige un parti politique à présenter au moins 20 candidats, lors des élections générales, pour obtenir le statut de parti autorisé. De plus, la loi prévoit que la demande d'autorisation doit être accompagnée de la signature d'au moins 25 électeurs par circonscription, répartis dans au moins 20 circonscriptions, ce qui représente un minimum de 500 signatures.

Enfin, l'article 69 de notre loi prévoit que le Directeur général des élections doit retirer l'autorisation d'un parti si celui-ci ne présente pas au moins 20 candidats lors des élections générales. Sans cette autorisation, Mme la Présidente, un parti politique ne peut, entre autres, engager des dépenses électorales et notamment faire de la publicité électorale, voir son nom inscrit sur le bulletin de vote avec celui de ses candidats, recueillir des contributions et émettre des reçus pour fins d'impôt.

La décision de la Cour suprême du Canada est claire. L'autorisation d'un parti politique ne peut être liée au nombre de candidats qu'il peut présenter lors des élections générales. Les modifications que nous proposons respectent cette décision et viennent simplifier les exigences requises envers un parti politique aux fins d'obtenir une autorisation. Ainsi, la demande d'autorisation d'un parti politique n'exigera plus que le chef du parti s'engage à présenter au moins 20 candidats. Aucune exigence à cet égard ne sera formulée. De plus, si le nouvel article 47 est adopté bien sûr, et ça dépend en partie de la collaboration du député de Masson, qui est présent en cette Chambre, le nombre de signatures requises en appui à la demande sera fixé à 100 personnes ayant qualité d'électeurs et membres du parti sans égard à la provenance géographique des signataires. Enfin, en réduisant le nombre d'électeurs appuyant la demande, on peut faire disparaître la notion de sympathisant, difficile à vérifier, afin de limiter les signatures aux seules personnes ayant droit de vote et qui sont membres du parti qui en fait la demande.

Les nouvelles exigences formulées respectent ainsi la décision de la Cour suprême du Canada. Elles simplifient la demande pour les partis en réduisant le nombre de signatures requises. Elles facilitent aussi l'autorisation des partis dont les bases militantes sont concentrées dans un petit nombre de circonscriptions. De plus, le Directeur général des élections peut plus facilement vérifier la qualité des signataires qui appuient la demande d'autorisation d'un parti.

n(11 h 50)n

Notre approche, Mme la Présidente, diffère de celle retenue par le législateur fédéral, qui a adopté des modifications avant les élections de 2004 et qui ne sont valides que pour deux ans et doivent être revues. La loi fédérale donne la définition suivante de «parti politique». J'ouvre les guillemets: «Organisation dont l'un des objectifs essentiels consiste à participer aux affaires publiques en soutenant la candidature et en appuyant l'élection d'un ou de plusieurs de ses membres.»

On constate sans difficulté que notre opinion est à l'effet que cette définition pourrait souffrir d'équivoque. Plusieurs organisations pourraient prétendre répondre à cette définition, sans compter qu'on y retrouve encore une exigence quant au nombre de candidats à présenter, minimal certainement, mais qui ne semble pas appuyée par de nouveaux arguments. Cette approche oblige par ailleurs le Directeur général des élections à Ottawa à user d'une certaine discrétion dans l'enregistrement des partis politiques.

Les changements que nous proposons ne laissent place à aucune discrétion de la part du Directeur général des élections. Un parti politique ne sera pas autorisé pour ce qu'il prétend être, mais tout simplement parce que ses membres expriment leur intention d'agir au plan électoral et de respecter les règles définies démocratiquement à cette fin pour les partis autorisés. Le Directeur général des élections pourra toutefois retirer l'autorisation d'un parti politique qui ne respecte pas notamment les obligations de reddition de comptes qui lui sont faites, conformément aux pouvoirs dont il dispose en vertu de la Loi électorale, qui demeure inchangée à cet égard.

Les changements proposés ont pour conséquence, Mme la Présidente, qu'un parti politique autorisé pourrait à la rigueur ne pas présenter de candidat lors des élections générales ou lors d'une élection partielle. Ce pourrait être le cas d'un parti qui décide de remettre à des élections ultérieures sa participation électorale. Sans perdre pour autant son droit de s'exprimer, un tel parti perdrait tout droit de faire de la publicité. Afin de pallier à cette difficulté, le projet de loi prévoit qu'un parti autorisé qui ne présente pas de candidat lors d'une élection partielle ou des élections générales peut obtenir le statut d'intervenant particulier, qui lui permettra tout de même d'effectuer des dépenses de publicité. Le droit à la liberté d'expression est ainsi respecté de manière plus concrète.

En conclusion donc, Mme la Présidente, je vous dirais que le projet de loi n° 64, au moyen de quelques modifications minimales à la Loi électorale du Québec, permet de respecter les droits reconnus aux partis politiques à la suite de la décision de la Cour suprême, tout en respectant l'esprit de notre loi, une loi qui compte parmi les plus démocratiques qui existent dans les sociétés avancées. C'est pourquoi bien sûr, Mme la Présidente, j'invite les membres de l'Assemblée à se joindre à l'adoption de principe du projet de loi n° 64.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre. Alors, comme prochain intervenant, je vais reconnaître le député de Masson et porte-parole de l'opposition officielle en matière de réforme des institutions démocratiques.

M. Thériault: Merci, Mme la Présidente. Ce projet de loi, qui a été déposé à l'Assemblée nationale, le 17 juin dernier, modifie la Loi électorale afin de réviser les critères d'autorisation des partis politiques. Ainsi, il retire l'exigence en vertu de laquelle un parti politique doit présenter 20 candidats pour obtenir son autorisation et la maintenir. Le projet de loi accorde aussi au parti politique autorisé qui ne présente pas de candidat lors d'élections générales ou lors d'élections partielles et qui en fait la demande le statut d'intervenant particulier.

Ce projet de loi découle de la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Figueroa contre le Procureur général du Canada. Vous me permettrez de faire un bref historique, qui a mené à ce jugement.

Miguel Figueroa est le chef du Parti communiste du Canada, qui a été fondé en 1921 et qui était un parti enregistré en vertu de la Loi électorale du Canada depuis 1974, année où a débuté l'enregistrement des partis politiques. Lors des élections générales fédérales de 1993 toutefois, le Parti communiste a perdu son statut de parti enregistré et les avantages qui en découlaient parce qu'il n'a pas présenté au moins 50 candidats. À la suite de sa radiation, le parti a dû liquider ses biens, rembourser toutes ses dettes et remettre ce qui lui restait au Directeur général des élections. À l'époque, plusieurs autres partis ont aussi été radiés pour les mêmes raisons.

Au nom des membres du Parti communiste du Canada, M. Figueroa a intenté une action en justice contre le Procureur général afin de faire reconnaître que plusieurs dispositions de la Loi électorale du Canada étaient contraires à diverses dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés et qu'elles étaient par conséquent inopérantes.

Le premier jugement a été prononcé, le 10 mars 1999, par la juge Molloy de la Cour de justice de l'Ontario, division générale. Elle a statué que le critère, selon lequel un parti devait présenter au moins 50 candidats pour pouvoir être un parti politique enregistré au moment d'élections fédérales, était contraire à l'article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés et ne pouvait se justifier par l'article premier de celle-ci. Elle a ordonné que les dispositions pertinentes soient modifiées de manière à remplacer «50» par «2». Elle a également déclaré que l'interdiction d'indiquer sur le bulletin de vote l'appartenance politique des candidats qui ne reçoivent pas l'appui d'un parti enregistré contrevenait à l'article 3.

Le Procureur général a interjeté appel de ce jugement, et, en août 2000, la Cour d'appel de l'Ontario a rendu une décision unanime dont les motifs ont été rédigés par le juge Doherty. Celui-ci a jugé que le droit à l'éligibilité, garanti par l'article 3 de la charte, avait pour objet une représentation effective. Les partis politiques améliorent la représentation effective en structurant le choix des électeurs, en fournissant à la population un moyen de s'engager dans la politique et en donnant aux électeurs la possibilité de participer activement au choix du gouvernement de l'État. Le juge Doherty a fait remarquer que ces rôles exigent un degré élevé de participation au processus électoral. Par conséquent, un degré de participation significatif est à juste titre une condition préalable qu'un parti doit respecter pour pouvoir profiter des avantages consentis aux partis enregistrés, et le nombre de candidats présentés est une mesure légitime de degré de participation.

Bien que le nombre exact à retenir comme mesure ne fasse pas l'unanimité parmi des personnes raisonnables, le tribunal a conclu que l'obligation de présenter 50 candidats était raisonnable. Il a aussi rejeté les arguments invoqués par M. Figueroa pour soutenir que l'obligation de présenter 50 candidats contrevenait à l'article 15, c'est-à-dire le droit à l'égalité, et, à l'alinéa 2d, l'expression de la liberté d'association de la charte.

Toutefois, le juge Doherty a également statué que les articles de la Loi électorale du Canada prévoyant que seuls les partis enregistrés ont le droit d'indiquer l'appartenance politique de leurs candidats sur les bulletins de vote portent atteinte au droit de vote garanti à l'article 3 et que cette atteinte n'est pas justifiée en vertu de l'article premier de la charte.

Le droit de vote comporte un volet information, et l'indication de l'appartenance politique sur le bulletin de vote constitue une information importante pour les électeurs. Les dispositions de la loi visent à éviter d'embrouiller les électeurs ou de les induire en erreur, et le fait d'indiquer sur les bulletins de vote l'appartenance à un parti qui soutient 49 candidats ou moins n'est pas susceptible d'embrouiller les électeurs ou de les induire en erreur. D'ailleurs, cette information pourrait bien être le seul renseignement dont les électeurs disposent sur les candidats des petits partis.

Ces dispositions de la loi ont donc été invalidées. Mais l'effet de la déclaration d'invalidité a été suspendu pendant six mois pour donner au Parlement fédéral le temps de les modifier. Comme le Parlement fédéral a été dissous en vue de l'élection générale fédérale du 29 novembre 2000, il n'a pas siégé très longtemps pendant ces six mois.

n(12 heures)n

La décision a été portée en appel devant la Cour suprême du Canada. En juin 2003, celle-ci a statué que le critère fixant à 50 le nombre minimal de candidats était inconstitutionnel en vertu de l'article 3 de la charte. S'exprimant au nom de la majorité, le juge Iacobucci a expliqué que le seuil minimal de 50 candidats porte atteinte au droit de tout citoyen de jouer un rôle significatif dans le processus électoral du fait qu'il enlève aux partis politiques ayant moins de 50 candidats le droit de délivrer des reçus aux fins de l'impôt, de recevoir les fonds électoraux non dépensés et d'inscrire l'appartenance de leurs candidats sur les bulletins de vote. La cour a jugé que le fait de retirer le droit de délivrer des reçus aux fins de l'impôt et de conserver les fonds électoraux non dépensés aux candidats des partis qui ne représentaient pas au moins 50 candidats porte atteinte au droit des citoyens de jouer un rôle significatif dans le processus électoral.

La cour a expliqué que le critère relatif au nombre de candidats contrevient à l'article 3 en diminuant la capacité des membres et des partisans des partis défavorisés de présenter des idées et des opinions dans le débat public auquel donne lieu le processus électoral. Elle a également statué que le fait de retirer le droit d'inscrire l'appartenance politique sur les bulletins de vote est aussi contraire à l'article 3 parce qu'il porte atteinte au droit des citoyens de faire un choix éclairé. La Cour suprême a suspendu l'effet de sa décision pendant 12 mois, jusqu'au 27 juin 2004, afin de permettre au Parlement fédéral de modifier ces mesures législatives. La modification à la Loi électorale du Canada a été sanctionnée le 14 mai 2004.

Voici donc, Mme la Présidente, l'historique qui sous-tend l'intention du législateur québécois de modifier sa Loi électorale afin d'éviter qu'elle puisse faire l'objet de recours devant les tribunaux. Le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui devrait être appelé en commission parlementaire prochainement afin que l'on puisse procéder à l'étude article par article, et nous aurons amplement l'occasion de l'étudier de façon à nous assurer qu'elle répond aux exigences énoncées par le jugement Figueroa. Je vous remercie.

Mise aux voix

La Vice-Présidente: Alors, merci, M. le député de Masson. Est-ce qu'il y a d'autres interventions portant sur ce projet de loi? Alors, est-ce que le principe du projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi électorale, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la Commission des institutions

M. Dupuis: Alors, évidemment, Mme la Présidente, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission des institutions pour étude détaillée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Vous pourriez nous référer, Mme la Présidente, à l'article 7 du feuilleton?

Projet de loi n° 72

Adoption du principe

La Vice-Présidente: Oui. Alors, M. le ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 72, Loi modifiant la Loi sur les valeurs mobilières et d'autres dispositions législatives. Alors, je serais prête à reconnaître un premier intervenant. M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, Mme la Présidente. Alors, j'ai le plaisir, aujourd'hui, de déposer et d'expliquer brièvement les principales mesures contenues au projet de loi n° 72. J'ai relevé en particulier, au-delà d'un ensemble d'éléments plutôt techniques qui sont contenus dans le projet de loi afin de modifier la Loi des valeurs mobilières, au moins cinq points sur lesquels j'aimerais revenir rapidement, puisque ça constitue, je pense, les principaux éléments du projet de loi qui intéressent bien sûr l'intérêt public.

Une première mesure, Mme la Présidente, consiste à créer un nouveau recours. Les investisseurs, les petits investisseurs surtout, pourront dorénavant, dès la sanction de la loi, lorsqu'ils ont des dommages financiers subis à la suite d'un mauvais conseil ou de dommages subis par une faute commise par un courtier, pourront réclamer à l'Autorité des marchés financiers... Et je vais expliquer que l'Agence d'encadrement du secteur financier va changer de nom pour s'appeler dorénavant l'Autorité des marchés financiers. Donc, un investisseur pourra s'adresser à l'Autorité des marchés financiers et pouvoir réclamer les dommages jusqu'à 100 000 $, bien sûr s'il y a preuve de la faute commise et de la causalité entre le courtier, la faute et le dommage. C'est un recours accéléré, puisque le bureau de révision de l'Autorité des marchés financiers pourra, dans ce cas-là, permettre et ordonner le paiement des dommages jusqu'à 100 000 $.

C'est une première au Québec, et je tiens à le souligner, parce que ça rejoint cette préoccupation de permettre à des petits investisseurs, au grand public en général, qui, dans les transactions financières, ont pu dans le passé ? et c'est susceptible de se reproduire ? connaître des mauvais placements et être devant des transactions qui quelquefois sont mauvaises mais dues à une faute professionnelle commise par un courtier ou un autre agent autorisé, par ailleurs, par la loi, à émettre des produits financiers...

Donc, dans le domaine des produits financiers, il me semblait intéressant que nous allions de l'avant avec cette recommandation qui nous a été formulée, Mme la Présidente, par beaucoup d'associations de consommateurs, beaucoup d'associations qui ont déploré le fait que des investisseurs plutôt modestes ou des petits investisseurs n'ont souvent pas de recours, étant donné que les tribunaux actuels, qui existent bien sûr et qui permettent le recours en action de dommages et intérêts, dans le cas de faute, contre les auteurs de la faute, dans le domaine financier... sont souvent des recours très longs et malheureusement très onéreux.

Alors, dans le but de faciliter le recours des petits investisseurs, je suis très heureux de confirmer que, dans le projet de loi, nous élaborons, nous établissons un nouveau recours pour les investisseurs, qui peut atteindre la somme maximale de 100 000 $, que l'Autorité des marchés financiers, lorsqu'elle juge qu'il y a faute et juge que le dommage est constaté, et dans tous les cas où la preuve est démontrée, pourra ordonner le paiement d'un dommage jusqu'à 100 000 $.

Dans le même sens, une autre mesure importante, j'estime, Mme la Présidente, c'est les amendes et sanctions dans le cas où des agents ou des assujettis aux lois des valeurs mobilières commettent des fautes. On a beaucoup reproché, dans le public, et surtout depuis les dernières années, l'opinion publique est restée, je pense, perplexe devant des situations où on a pu constater des fautes graves commises par des sociétés ou par des assujettis aux lois des valeurs mobilières qui ont malheureusement quelquefois des pénalités jugées pas très élevées compte tenu des dommages financiers que leur faute a pu causer. Et, afin de s'assurer du respect des lois, il est bon quelquefois de s'assurer que les sanctions et pénalités soient à la hauteur de la faute commise. Dans le cas des valeurs mobilières, c'était un défaut, Mme la Présidente, où les pénalités et sanctions n'ont pas été revues depuis de nombreuses années. Et il est vrai qu'à la lumière des scandales dans le domaine financier, que ce soit ce qu'on a vu aux États-Unis dans le cas d'Enron ou Parmalat, en Italie, et autres, on s'est rendu compte que souvent la pénalité, si même elle était constatée et appliquée, représentait, au sens financier, une pénalité presque non importante, comparé aux dommages financiers que peut entraîner la faute commise par ces sociétés. Alors, on constatera au projet de loi que les amendes vont passer de 1 million à 5 millions. On se remet ici au même niveau qu'en Ontario qui récemment a réévalué l'ensemble des sanctions et pénalités dans le domaine financier, dans le domaine des valeurs mobilières.

Et je suis particulièrement content que nous ayons l'occasion de revoir ces sanctions, puisque, d'une part, c'est une façon de rassurer le public que les lois sont importantes dans le domaine financier. La Loi des valeurs mobilières impose des obligations, impose des sanctions au grand public investisseur mais aussi à ceux qui émettent des valeurs. Et je pense que nos lois sont bien suivies en général, mais malheureusement les pénalités et les sanctions devaient être relevées.

Il y a là aussi un message qui est transmis à l'Autorité des marchés financiers, qui, dans la loi, change de nom pour... l'Agence d'encadrement du secteur financier pour l'Autorité des marchés financiers, nom d'ailleurs sur lequel l'agence se fait connaître depuis plusieurs mois, et, par la loi, on va confirmer que le nom officiel est maintenant l'Autorité des marchés financiers. Donc, l'Autorité des marchés financiers verra aussi à revoir l'ensemble de la réglementation. Et, s'il y a lieu, je n'hésiterai pas, Mme la Présidente, probablement dans le courant de l'année ou même l'an prochain, à revenir et proposer à l'Assemblée nationale d'autres modifications aux lois des valeurs mobilières pour s'assurer que la réglementation, elle est vraiment plus sévère, plus rigoureuse et que, lorsque l'Autorité des marchés financiers va constater des fautes, eh bien, que les pénalités s'appliquent rigoureusement.

n(12 h 10)n

Je pense qu'il y a là, au-delà de ce que je viens de dire, un message qui peut rassurer le grand public investisseur, le public en général. Il y a là aussi un message pour l'ensemble de l'industrie et l'ensemble des assujettis aux règlements des valeurs mobilières que nous voulons moderniser nos lois pour les rendre plus souples, plus faciles, plus flexibles, mais en même temps, lorsqu'il y a faute, lorsqu'il y a dommages, il y a des sanctions. Et je pense que ça rejoint la défense de l'intérêt public d'abord et avant tout.

Un autre chapitre relativement important, Mme la Présidente, qu'on retrouve au projet de loi, c'est des modalités nouvelles, qu'on appelle passeport, pour permettre à des courtiers, à des émetteurs de valeurs mobilières de pouvoir avoir des enregistrements améliorés et facilités lorsqu'ils désirent faire affaire ailleurs qu'au Québec et dans d'autres provinces, comme lorsqu'à l'inverse ils sont enregistrés dans d'autres provinces et ils veulent établir leurs affaires au Québec.

C'est un reproche que l'industrie des valeurs mobilières a particulièrement soulevé depuis de nombreuses années, à l'effet que le Québec avait des réglementations et des formalités particulièrement complexes, comme dans d'autres provinces aussi. C'est ce qui a amené le gouvernement fédéral à proposer, il y a quelques années, l'abolition de l'ensemble des commissions des valeurs mobilières et de n'avoir qu'une seule Commission des valeurs mobilières canadienne. C'est en cela d'ailleurs, dans cette voie-là, que se dirige l'Ontario, qui, elle aussi, suggère, l'Ontario, d'abolir l'ensemble des commissions des valeurs mobilières pour n'avoir qu'une seule loi, qu'une seule commission, proposition, Mme la Présidente, et je tiens à vous rassurer là-dessus, qui n'est pas celle du Québec.

Le gouvernement du Québec a décidé de maintenir ses lois et règlements mais de participer... Et ça a été le sens des discussions avec l'ensemble des autres provinces, où la très grande majorité des provinces, sauf l'Ontario, sommes d'accord à travailler ensemble pour améliorer nos lois, les rendre, dans leur application, plus faciles pour ceux qui y sont assujettis mais sans renoncer à nos compétences, à nos devoirs comme législateurs, particulièrement chez nous, au Québec. Et d'un côté nous ne souscrirons jamais, jamais, jamais à un projet d'abolir nos lois et commissions des valeurs mobilières au Québec pour souscrire à cette idée très problématique d'une seule loi et d'une seule commission des valeurs mobilières au Canada. Et en parallèle nous allons faire des efforts avec les collègues des autres provinces pour rendre notre système plus compatible, plus harmonisé avec l'ensemble des autres commissions des valeurs mobilières.

Donc, j'aurai l'occasion d'expliquer plus en détail lorsque le projet de loi sera appelé en commission parlementaire. Mais c'était là l'essentiel du projet qu'on appelle passeport. C'est pour permettre à un émetteur de pouvoir s'enregistrer simultanément dans plusieurs provinces.

J'ai mentionné, Mme la Présidente ? et c'est là une partie du projet de loi ? plusieurs modalités qui touchent l'Agence d'encadrement du secteur financier qui change de nom. On précise certaines modalités d'organisation. Il faut dire que la loi qui a créé, constitué l'Agence d'encadrement existe depuis maintenant une année. J'aurai l'occasion de faire le bilan de cette première année, mais qui est très positif. Et ici, dans le projet de loi, on veut corriger et compléter certains éléments d'organisation de l'Agence d'encadrement.

Finalement, j'aimerais souligner la constitution, par la loi, d'un fonds de responsabilité professionnelle pour les courtiers en immeubles. C'est une demande qu'ils souhaitaient. Et nous allons permettre, par la loi, que cette corporation professionnelle mette sur pied un fonds d'indemnisation pour ses membres afin de suppléer, souvent... Et c'est un des problèmes qui touchent plusieurs corporations professionnelles, où souvent plusieurs assureurs se retirent des couvertures d'assurance qu'ils offraient antérieurement aux associations professionnelles.

Alors, voilà l'essentiel. Surtout, pour revenir sur le premier point, en quittant, ces propos, Mme la Présidente, pour souligner que je suis particulièrement heureux que le public puisse, avec l'adoption de cette loi, avoir un recours jusqu'à 100 000 $ en cas de dommages dans le domaine financier. Lorsqu'évidemment toute la démonstration est faite, l'Autorité des marchés financiers pourra permettre ce recours très accéléré aux petits investisseurs. Et, ne serait-ce que ce point, j'estime que le projet de loi mérite d'être adopté, ce que je souhaite à cette session, Mme la Présidente. Et j'espère que nous serons satisfaits, comme Parlement, d'offrir ainsi à la population en général un nouveau service, un nouveau recours qui va dans le sens de leur donner une meilleure protection. Merci.

La Vice-Présidente: Alors, merci, M. le ministre. Comme prochain intervenant, je vais reconnaître le député de Charlevoix et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'institutions financières. À vous la parole.

M. Rosaire Bertrand

M. Bertrand: Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je veux dire au ministre que nous accueillons favorablement le projet de loi, et j'aurai évidemment un peu de temps pour expliquer les principales raisons. Je veux d'abord et avant tout lui dire que la partie des passeports, qui est la partie d'entente qui permet à différents représentants d'ailleurs au Canada de venir et d'opérer selon des règles bien établies, est pour nous une excellente nouvelle.

La partie du respect de nos spécificités, le Québec, le ministre a dit assez haut et fort: Jamais on ne cédera. Pourquoi il a dit ça? C'est parce qu'on a des pressions d'ailleurs au Canada pour qu'on accepte une formule unique. Et je pense qu'il faut apprécier cette volonté à la fois du gouvernement et, je dirais, de tous les membres, députés en cette Chambre de maintenir nos spécificités mais par contre d'accepter de modifier certaines règles pour que les agents, les représentants, les institutions d'autres soit provinces ou territoires puissent venir faire des affaires ici, au Québec.

Le ministre a dit, en terminant: J'espère que ça va être accepté. Alors, je dis: Oui, on accueille favorablement. Il faut bien expliquer aux gens qui nous regardent que, quand on accepte un principe, à ce moment-ci, en Chambre, on accepte le principe de recevoir en commission parlementaire le projet de loi, de le débattre avec le ministre, et c'est l'occasion qu'on a, nous, de poser des questions au ministre sur les différents articles de son projet de loi. Alors, je lui dis tout de suite qu'il y a quelques articles où on aura beaucoup de questions à poser.

Parce que, oui, il est vrai que ce projet de loi là améliore la protection aux investisseurs du Québec, et l'améliore de beaucoup. Effectivement, on est très, très favorables, oui. Les associations de consommateurs l'ont demandé et depuis un bout de temps. Et, par rapport à ce qui se passe actuellement, les fameux scandales à gauche et à droite, surtout aux États-Unis, mais on n'est pas sans savoir que ça peut nous toucher ici, alors on se devait, comme législateurs, on se doit de protéger davantage le consommateur.

Mais, en même temps qu'on fait ça, il faut aussi savoir que, dans les articles du projet de loi, il faut qu'on s'assure que ceux qui seront touchés le seront correctement. Et là j'entends évidemment les représentants, j'entends les institutions financières qui sont concernées, j'entends aussi la nouvelle agence qui a été créée par le gouvernement, l'Autorité des marchés financiers. On va apporter certains amendements aux articles où, de nouveau... on va créer de nouvelles responsabilités.

Alors, nous, il est de notre devoir de s'assurer qu'on atteint, par ces amendements-là, la protection maximale pour les citoyens mais aussi que les gens qui le vantent, ce produit-là, qui recommandent ces produits-là, les institutions, etc., de s'assurer que tout est fait puis que tout est conforme. Et je m'explique. On va créer, exemple, des amendes beaucoup plus élevées et des montants quand même qui sont très élevés. Quand on passe de 1 million à 5 millions, c'est correct, c'est recommandable parce que ça en vaut la peine, mais il faut s'assurer que les gens qui auront à se payer des assurances, qui auront à avoir des protections requises, si on veut vraiment atteindre notre objectif, qu'ils puissent le faire.

Il faut s'assurer aussi que ça ne met pas en danger ? et, moi, j'ai eu deux téléphones d'information ? il faut s'assurer que ça ne met pas en danger nos petites et moyennes entreprises. Parce qu'on a, Mme la Présidente, des individus, qui ont des petites et moyennes entreprises, qui sont prêts à donner cette protection-là au public, mais il faut s'assurer qu'on ne les met pas en danger.

n(12 h 20)n

Alors, je pense que vous venez de comprendre, Mme la Présidente, qu'il y aura des articles où on aura évidemment beaucoup de réponses à recevoir de la part du ministre. On aura possiblement, j'imagine, des amendements, mais on verra ça en temps et lieu.

Deux éléments qui me chicotent un petit peu. Le ministre a semblé dire, à la fin de son intervention, qu'il voudrait bien que ça se fasse, que ça passe, que la loi soit en vigueur à la fin de cette session-ci, qui est plus ou moins, là, alentour du 20, 21 décembre. Je souligne au ministre que la Commission des finances publiques ? et même le ministre est dans notre commission pour plusieurs projets de loi ? la Commission des finances publiques a beaucoup, beaucoup de projets de loi à étudier d'ici cette date-là. Et je ne voudrais pas qu'on se sente pressés, en commission, je ne voudrais pas qu'on se sente, là: Il faut absolument que ça passe, quoi qu'il advienne. Je veux qu'on prenne vraiment le temps de bien l'analyser parce que... J'arrive à mon deuxième point, puis, mon deuxième point, moi, je pense que, compte tenu des conséquences de ce projet de loi, il faudrait avoir des consultations particulières.

Alors, en terminant, je demande au ministre de nous accorder des consultations particulières. On établira... quitte à ce qu'on établisse la liste en commission parlementaire. Mais il y a quelques groupes qu'il m'apparaîtrait important de recevoir en commission parlementaire, encore une fois, pour bien, bien, bien s'assurer qu'on a couvert, par ce projet de loi là, tous les angles. Alors, tout en disant que je suis d'accord pour le principe, je dis au ministre que je demande des consultations particulières et j'attends avec optimisme sa réponse.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député de Charlevoix. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervenant, je vais céder la parole au ministre des Finances pour son droit de réplique. À vous la parole.

M. Yves Séguin (réplique)

M. Séguin: Merci, Mme la Présidente. Alors, sur le dernier point soulevé par le député de Charlevoix, d'une part je peux l'assurer du fait qu'il y a beaucoup de consultations, depuis six mois, sur la préparation du projet de loi. J'ai reçu beaucoup de correspondance de groupes qui ont fait valoir des points. Ce que je proposerais plutôt, étant donné le peu de temps qu'il nous reste pour terminer nos travaux de la présente session, c'est que le député de Charlevoix fasse part par écrit des représentations qu'il aura. Et, au fur et à mesure que nous étudierons le projet de loi, je l'assure que nous en prendrons connaissance.

On pourrait même déposer à la commission cette correspondance et la regarder sur chacun des points de loi qui seraient débattus. Et j'en ai, moi aussi, quelques groupes qui auraient aimé faire valoir leurs points. Alors, on pourra les déposer, et la commission pourra juger à ce moment-là du genre de débat qu'on pourrait faire. Mais je suis convaincu que, dans l'étude article par article, chaque groupe aura l'assurance que son point de vue aura été déposé et débattu sur chacun des articles de loi qui intéressent chacun des groupes qui veulent s'exprimer. Alors, je pense que c'est un compromis qui me semble tout à fait, là, dans l'ordre des choses. Alors, je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le ministre des Finances. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervenant sur ce projet de loi... Je pourrais permettre une question en vertu de l'article 213 du règlement. M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Merci, Mme la Présidente. Je me demandais justement quel était le numéro de l'article que je pouvais invoquer. Je demanderais simplement au ministre, compte tenu qu'on a été... moi, j'ai été informé hier que je présentais ce matin. C'est de ma faute, jusqu'à un certain point, parce que, cette semaine, je n'ai pas pu être en Chambre. Mais, compte tenu, là, qu'on fait ça ce matin, j'aurais besoin de la compréhension du ministre pour qu'on permette d'informer les gens qui sont concernés et leur donner un délai raisonnable.

La Vice-Présidente: Alors, M. le ministre, est-ce que vous acceptez de répondre à la question, en vertu de l'article 213 du règlement? Alors, à vous la parole.

M. Séguin: Oui, Mme la Présidente. Je vais assurer mon collègue député de Charlevoix que les groupes dont il aimerait apporter, dans les travaux de la commission, des représentations vont avoir le temps, un temps raisonnable pour faire parvenir au député de Charlevoix leurs représentations. Et je le réassure sur le fait que je vais y accorder toute l'importance qu'elles méritent.

Mise aux voix

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le ministre. Alors, le principe du projet de loi n° 72, Loi modifiant la Loi sur les valeurs mobilières et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la Commission des finances publiques

Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. Alors, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission des finances publiques, et ce, pour étude détaillée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est également adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. Puis-je me permettre de vous référer à l'article 5 de notre ordre du jour?

Projet de loi n° 70

Adoption du principe

La Vice-Présidente: À l'article 5, M. le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 70, Loi donnant suite au discours sur le budget du 30 mars 2004 afin d'introduire des mesures de soutien aux familles ainsi qu'à certains autres énoncés budgétaires. Alors, comme premier intervenant, je vais reconnaître le ministre du Revenu. À vous la parole.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je soumets à cette Assemblée, pour qu'elle en adopte le principe, le projet de loi n° 70, intitulé Loi donnant suite au discours sur le budget du 30 mars 2004 afin d'introduire des mesures de soutien aux familles ainsi qu'à certains autres énoncés budgétaires.

Ce projet de loi, Mme la Présidente, a été présenté le 10 novembre 2004. Il modifie diverses lois afin d'introduire les mesures de soutien aux familles annoncées dans le discours sur le budget du 30 mars 2004 et de donner suite à certaines autres mesures annoncées dans les bulletins d'information publiés par le ministère des Finances en 2002, 2003 et 2004.

Ce projet de loi vise également à harmoniser certaines dispositions des lois fiscales, dont la Loi sur les impôts, à certaines dispositions de la législation fédérale. Mme la Présidente, de manière accessoire, il donne suite au discours sur le budget du 12 juin 2003. Ainsi, Mme la Présidente, il modifie 18 lois, dont la Loi sur les impôts et la Loi sur la taxe de vente du Québec.

Mme la Présidente, le budget du ministre des Finances du 30 mars 2004 a permis au gouvernement d'indiquer ses choix et de préciser ses priorités. Par le projet de loi n° 70, qui fait suite à ce budget du ministre des Finances du 30 mars 2004, le gouvernement franchit une étape importante dans la réduction d'impôts des particuliers. Nous le faisons de façon responsable et équitable. Nous avons décidé de donner la priorité à celles et ceux qui en ont le besoin, c'est-à-dire aux familles, aux travailleurs à faibles revenus.

Ainsi, Mme la Présidente, 547 millions de dollars retourneront dans les poches des familles en mettant en place le Soutien aux enfants, 243 millions de dollars iront aux travailleurs du Québec par la Prime au travail et enfin 219 millions de dollars iront à l'ensemble des contribuables québécois par la simplification du régime fiscal. Au total, Mme la Présidente, c'est plus de 1 milliard de dollars en réduction d'impôts pour les familles et les travailleurs. Le gouvernement libéral s'était engagé à réduire le fardeau fiscal des contribuables du Québec. C'est dorénavant chose faite.

Le gouvernement libéral veut bâtir un Québec où les familles peuvent s'épanouir et profiter pleinement de la vie. Il a donc mis en place, tel qu'il l'avait promis, une vraie politique familiale, par ce budget du 30 mars 2004. Le Soutien aux enfants est une mesure universelle qui s'adresse à toutes les familles qui ont des enfants de moins de 18 ans, et ce, peu importe le revenu. Cette mesure remplace et bonifie l'allocation familiale, le crédit d'impôt non remboursable pour enfants à charge et la réduction d'impôts à l'égard de la famille.

n(12 h 30)n

Ce nouveau Soutien aux enfants représente une aide substantielle pour les familles. Pour un couple, le montant pourrait atteindre 2 000 $ par année pour un enfant, 3 000 $ pour deux enfants, 4 000 $ pour trois enfants. Ce dernier montant augmentera de 1 500 $ pour chaque enfant additionnel. Mme la Présidente, pour une famille monoparentale, la somme de 700 $ s'ajouterait à celui accordé à un couple.

Mme la Présidente, le premier versement était prévu initialement pour le 1er janvier 2005. Pour le bénéfice des familles québécoises, mon collègue le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille a annoncé, le 1er décembre dernier, que le premier versement du Soutien aux enfants serait devancé au 15 décembre. À l'approche du temps des fêtes, ceci constitue une excellente nouvelle pour les familles, Mme la Présidente. En plus d'accorder une contribution financière plus généreuse aux familles, le gouvernement facilite également leur tâche. Dorénavant, Mme la Présidente, elles n'auront plus à demander l'allocation familiale, le crédit d'impôt non remboursable pour enfants à charge et la réduction d'impôts à l'égard de la famille. Ces mesures sont maintenant remplacées par une seule, soit le Soutien aux enfants, tel que décrit dans le budget du ministre des Finances du 30 mars 2004. Ce dernier sera calculé par la Régie des rentes du Québec et envoyé directement dans les foyers. Mme la Présidente, le projet de loi n° 70 inclut également une mesure qui donne un bon coup de pouce aux familles québécoises. Désormais, les parents n'ont plus à payer la taxe de vente du Québec sur les couches, les biberons et les autres articles d'allaitement. Voici une autre démonstration que le gouvernement actuel place la famille au coeur de ses priorités.

Mme la Présidente, de nombreux Québécois ne participent pas au marché du travail. Pour les encourager à le faire, le gouvernement a annoncé, dans le budget 2004-2005, l'instauration d'une prime au travail qui remplacera le Programme d'aide aux parents pour leurs revenus de travail nommé APPORT. En introduisant cette nouvelle prime, le gouvernement désire valoriser l'effort de travail et inciter les personnes à quitter l'aide sociale pour intégrer le marché du travail. Mme la Présidente, la nouvelle prime représente une réduction nette d'impôts de 243 millions de dollars pour les travailleurs à faibles et à moyens revenus. Ce nouveau programme s'adresse à environ 536 000 ménages.

Présentement, Mme la Présidente, un prestataire d'aide sociale qui souhaite intégrer le marché du travail n'y voit aucun avantage. En effet, dans bien des cas, il doit subir une réduction de sa prestation d'aide sociale égale à la hausse de son revenu de travail. Mme la Présidente, grâce à la Prime au travail, comme décrit dans le budget du ministre des Finances du 30 mars 2004, une famille recevant de l'aide sociale pourra profiter d'une majoration de son revenu de 25 % dans le cas d'un couple et de 30 % pour une famille monoparentale. Mme la Présidente, en majorant le taux horaire du travailleur, la valeur de la Prime au travail atteint son maximum dans la zone de revenus où le ménage n'est plus admissible à l'aide sociale. Pour un prestataire qui quitte l'aide sociale pour travailler à plein temps au salaire minimum, la Prime au travail équivaudra à une hausse de salaire de 1,40 $ l'heure pour une personne ayant un conjoint et des enfants, à 0,68 $ l'heure pour une personne seule avec des enfants.

Mme la Présidente, la nouvelle Prime au travail a pour but de redonner de l'argent dans les poches des contribuables à faibles et à moyens revenus. Elle favorise donc la sortie de l'aide sociale en majorant le salaire horaire du travailleur.

Mme la Présidente, le projet de loi n° 70 qui fait suite au budget du ministre des Finances du 30 mars 2004 introduit également un mécanisme de versement par anticipation du crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfants. Ce nouveau mécanisme versera le crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfants à raison de quatre fois par an, sous forme de chèques, et ce, dès le 1er janvier 2005. Actuellement, Mme la Présidente, les parents qui font garder leurs enfants dans le réseau privé ou à la maison ne reçoivent souvent leur aide fiscale qu'après la fin de l'année. Grâce à cette mesure, nous laissons une plus grande liberté aux parents et rétablissons l'équité entre ceux qui bénéficient d'une place à contribution réduite et ceux qui se tournent vers d'autres types de garde.

Mme la Présidente, ce crédit d'impôt peut atteindre jusqu'à 5 250 $ par enfant. À titre d'exemple, une famille avec un enfant et disposant d'un revenu de 25 000 $ pourrait recevoir plus de 1 300 $ par trimestre pour la garde de son enfant. Par ailleurs, Mme la Présidente, le projet de loi n° 70 qui fait suite au budget déposé par le ministre des Finances le 30 mars 2004 met en place un régime d'imposition unique qui remplace le régime d'impôt général et le régime d'impôt simplifié. Il s'agit là d'un exemple concret de la volonté de notre gouvernement de simplifier la vie des contribuables québécois dans l'observation de leurs obligations fiscales.

Le projet de loi instaure une bonification des montants admissibles en déduction du revenu, ce qui redonne 219 millions de dollars aux contribuables. Mme la Présidente, par ailleurs ce projet de loi modifie la Loi sur la taxe de vente du Québec afin d'y modifier et d'y introduire certaines mesures fiscales propres au Québec. Je vais m'abstenir d'énumérer les autres mesures contenues dans le projet de loi n° 70, puisque nous aurons l'occasion de l'examiner plus en détail en commission parlementaire.

Mme la Présidente, le projet de loi n° 70 constitue une étape fondamentale quant à l'allégement du fardeau fiscal des Québécois. Les mesures contenues dans ce projet de loi entraînent des gains financiers de plus de 1 milliard de dollars. Ces gains sont principalement concentrés au sein des familles et des travailleurs à faibles revenus. Au Québec, c'est plus de 1 million de familles qui bénéficieront d'un allégement fiscal en 2005. Elles recevront au total 775 millions de dollars. Mme la Présidente, je suis confiant que l'instauration de Soutien aux enfants, de la Prime au travailleurs, du régime unique d'imposition des particuliers contenues dans ce projet de loi sont des plus avantageuses pour toute la population québécoise. Le gouvernement du Québec est convaincu que ces allégements fiscaux sauront rendre notre régime plus moderne et plus compétitif en plus de répondre aux besoins et aux attentes des Québécois et Québécoises.

Mme la Présidente, j'invite donc les membres de cette Assemblée d'adopter le principe du projet de loi n° 70. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre.

Alors, comme prochain intervenant, je reconnaîtrai le député de Joliette. À vous la parole.

M. Valois: Merci, Mme la Présidente. Vous comprendrez que je... Oui? S'il vous plaît...

La Vice-Présidente: Pardon. Vous avez une question de règlement, Mme la leader adjointe du gouvernement?

n(12 h 40)n

Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. J'allais vous proposer de suspendre quelques minutes afin de permettre au porte-parole de l'opposition officielle de se faire entendre, le député de Gaspé.

La Vice-Présidente: Alors, si vous voulez bien, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 40)

 

(Reprise à 12 h 43)

La Vice-Présidente: Alors, merci, mesdames messieurs. Nous allons maintenant reprendre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 70, Loi donnant suite au discours sur le budget du 30 mars 2004 afin d'introduire des mesures de soutien aux familles ainsi qu'à certains autres énoncés budgétaires.

Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant, le député de Gaspé et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu. À vous la parole.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Oui, merci, Mme la Présidente. Permettez-moi également de saluer particulièrement le ministre du Revenu ainsi que tous mes collègues. Vous savez, Mme la Présidente, un budget, il faut que ça se concrétise dans un projet de loi. Ça prend des fois quelques semaines mais d'autres fois ça prend quelques mois, même plusieurs mois. Ce qui est intéressant dans ce délai, c'est que nous apprenons énormément d'informations, hein? L'information nous vient du gouvernement, particulièrement.

On se souviendra que le gouvernement a augmenté de 2 $ la tarification par jour dans les centres de la petite enfance, et le gouvernement a également augmenté les tarifs d'électricité de façon importante. Et il s'apprête encore à les augmenter. Le discours du budget naturellement prévoit des entrées de fonds qui proviennent des sociétés d'État, mais nous sommes encore une fois, Mme la Présidente, dans une situation où le gouvernement, tout en ayant un discours très positif, un discours très ouvert, qu'il travaille pour les familles du Québec, mais, ces familles, ils les aiment tellement, le gouvernement, et le chef du gouvernement, et le ministre des Finances, que, peu importe leur condition sociale, peu importent leurs revenus, on va les taxer. Pour un gouvernement, pour un gouvernement qui disait, à chaque occasion, que nous étions un gouvernement taxant lorsque le Parti québécois était au pouvoir, depuis que le nouveau gouvernement est en place, depuis avril 2003, suite à l'élection, Mme la Présidente, c'est des augmentations de tarifs continuelles.

On va le voir aussi avec la Société d'assurance automobile. Le gouvernement veut sortir du périmètre comptable la Société d'assurance automobile parce qu'elle a un déficit actuariel de 200 millions. Le gouvernement va faire quoi pour renflouer son déficit actuariel? Il va nécessairement aller voir ceux qui utilisent les services, donc les gens, les automobilistes au Québec, ceux qui ont des entreprises, ceux qui ont des camions, ceux qui ont des voitures, ceux qui ont des motocyclettes, tous ceux qui ont des véhicules routiers. Donc, les augmentations de tarifs soit sur les primes d'assurance, soit sur les immatriculations, soit sur les permis de conduire ou les trois à la fois.

Mme la Présidente, on a eu l'occasion aussi, récemment. Même on a terminé l'étude article par article, hier, d'un projet de loi présenté par le ministre des Finances concernant la mise en place d'un réceptacle pour le financement des infrastructures au Québec, que ce soit la voirie, que ce soit l'eau, que ce soient les égouts, ou encore d'autres services. Le gouvernement a décidé aussi de taxer les automobilistes. Il y aura une augmentation des frais d'immatriculation que le ministre des Finances va aller chercher dans les poches encore des automobilistes du Québec, et ça, ça va s'ajouter aux 200 millions, là, parce qu'il prévoit aller chercher un 40 millions au total par cette mesure de taxation. Donc, c'est de la taxation indirecte. Ce n'est pas dans un discours du budget, ce n'est pas dans une loi fiscale, c'est de la tarification.

Et éventuellement, lorsque la Société d'assurance automobile sera sortie du périmètre comptable, aura un conseil d'administration autonome qui, lui, pourra décider quand et comment augmenteront les primes et les tarifs, et le gouvernement n'aura plus d'emprise là-dessus. On se réfugie, on va se réfugier derrière le conseil d'administration de la Société d'assurance automobile qui, soit dit en passant, Mme la Présidente, le conseil d'administration a été entièrement renouvelé et dont les nominations ne sont pas moins partisanes, puisque les curriculum vitae des membres de ce conseil d'administration nous indiquent, entre autres, qu'un ancien directeur général du Parti libéral en est membre. Donc, ce n'est pas ? comment dirais-je donc? ? ce n'est pas une tare d'être membre du conseil d'administration...

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Non, je m'excuse...

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Un instant, s'il vous plaît, M. le député. M. le député, on m'a demandé une question de règlement. Mme la leader adjointe de l'opposition.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, Mme la Présidente, qu'il me soit permis de soumettre à votre attention l'article 239 de notre règlement et d'en faire lecture. «Le débat ? qui nous occupe évidemment sur l'adoption du principe, il est écrit ? [doit porter] ou porte ? pardonnez-moi ? exclusivement sur l'opportunité du projet de loi, sur sa valeur intrinsèque, ou sur tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins.»

J'aimerais vous dire que, oui, la jurisprudence reconnaît que le débat peut quand même, jusqu'à une certaine mesure, être assez large. Cependant, il doit rester lié à l'adoption du principe. Il doit donc s'intéresser exclusivement à l'opportunité du projet de loi et à sa valeur intrinsèque.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la leader adjointe. Alors, effectivement, la leader adjointe a soulevé l'article 239. Alors, je vous demanderais votre collaboration afin de rester sur le principe du projet de loi n° 70. À vous la parole.

n(12 h 50)n

M. Lelièvre: Mme la Présidente, ma collaboration vous est acquise. Mais je voudrais rappeler à la leader adjointe du gouvernement, hein, que, dans les notes explicatives, au point de départ, que nous avons, elles sont très importantes, ces notes-là, parce qu'elles nous indiquent, elles nous indiquent les orientations gouvernementales. Alors, on y parle, par exemple, de la modification de la Loi sur les impôts principalement afin d'introduire, de modifier ou d'abolir certaines mesures concernant notamment le remplacement des prestations familiales, des crédits d'impôt non remboursables pour enfants à charge, la réduction d'impôts à l'égard des familles et du Programme d'aide aux parents pour leurs revenus de travail. C'est dans les notes explicatives, Mme la Présidente.

Le programme APPORT...

Une voix: ...

M. Lelièvre: Le programme APPORT, vous me suivez, hein? Puis je pense que ça vous intéresse énormément parce que, vous aussi, vous allez comprendre, avec la démonstration qu'on va vous faire, que les familles du Québec en recevront moins par rapport à ce qu'ils recevaient avant. Pourquoi ils vont en recevoir moins? Parce que, dans l'ancien régime, une famille monoparentale, par exemple, avec un enfant, qui avait un revenu net, ils pouvaient économiser 1 733 $. Avec la nouvelle prestation, avec les modifications qui sont apportées dont le ministre de la Solidarité sociale et de la Famille a annoncé, hier, que ça allait être acheminé le 15 décembre, pour une famille monoparentale ? un enfant ? le chèque sera de 2 364 $. Mais, si on tient compte des hausses de tarifs, si on tient compte des hausses de tarifs, ils vont recevoir 164 $ de moins dans cette famille monoparentale avec un enfant.

Et, si on regarde pour une famille monoparentale de deux enfants, Mme la Présidente ? et je suis toujours pertinent, j'imagine, puisque vous m'écoutez attentivement ? on remplace les mesures. Et là on apprend qu'une famille monoparentale ? deux enfants, revenus de 40 000 $ ? avec l'ancien régime, elle pouvait aller chercher 2 323 $. Ce qu'on ne dit pas, c'est que le chèque qui va partir le 15 décembre, qui va être acheminé aux parents, il sera, Mme la Présidente, on prévoit 3 364 $. Par ailleurs...

Une voix: ...

M. Lelièvre: Oui, oui, par année. Par ailleurs, avec les augmentations de tarifs, il faut soustraire 1 949 $ par année. La famille perd 274 $ par rapport au montant qu'elle gagnait avant. C'est ça, la réalité. Et un couple avec un enfant, sous l'ancien régime, il avait droit à 1 762 $. Avec le nouveau chèque qui s'en vient, comme cadeau de Noël, on lui dit: Ah, ce sera 2 280 $ par année, Mme la Présidente. Et, le chèque, il faut le diminuer parce que l'augmentation des tarifs d'électricité, l'augmentation, Mme la Présidente, des frais de garderie et les autres tarifs, c'est 1 485 $ de moins, oui, qu'il faut soustraire. Donc, la famille perd 277 $ ? 277 $. Et, lorsqu'il y a deux enfants, Mme la Présidente, c'est moins 387 $.

Qu'est-ce qu'une famille fait avec ces sommes... qu'elle faisait antérieurement avec ces sommes? Elle achetait des vêtements, des articles scolaires. C'est ça, la réalité des familles qui ont des budgets serrés. Les tarifs d'électricité, ça fait mal, ça fait mal aux familles. Parce que les gens qui travaillent, qui ont des bons revenus, sont capables d'assumer, Mme la Présidente, les coûts inflationnistes, mais ceux qui n'ont pas les revenus appropriés puis qui ont des enfants? Puis qu'on dit au Québec: On a un problème démographique. C'est quoi, la politique familiale? C'est-u ça, de baisser, par une mécanique administrative, les tarifs... d'augmenter les tarifs pour récupérer les sommes qu'on leur donne d'une main et par la suite, dans le discours du budget, et qu'on concrétise ça dans un projet de loi? Nous allons souscrire à ces actions du gouvernement? Jamais, Mme la Présidente.

Nous allons devoir voter contre ce projet de loi parce que le projet de loi institue des mesures qui, à sa face même, hein, un projet de loi qui institue, à sa face même, une diminution des revenus des familles les moins aisées. Si le gouvernement, demain, nous annonce qu'il corrigera la situation, je serai enclin à y réfléchir pour l'appuyer parce que les mesures qui étaient en vigueur donnaient plus d'argent aux familles.

Mais c'est facile d'augmenter les tarifs. Et là je viens d'énumérer, tout à l'heure, la Société d'assurance automobile. Mais le ministre du Revenu est d'accord avec moi: si le gouvernement mettait les efforts pour aller chercher l'argent qui dort dans les paradis fiscaux que les grandes sociétés d'État, pas d'État, mais les grandes sociétés qui sont au Canada, hein ? les grandes sociétés qui sont au Canada ? Mme la Présidente, c'est des milliards et des milliards. Et vous l'avez vu récemment, dans les journaux: les banques, par exemple, les banques qui utilisent des paradis fiscaux pour mettre, à l'abri d'impôts, 13 milliards. Et, si on regarde les grandes entreprises, et particulièrement Canada Steamship Lines, qui est la propriété de la famille de M. Martin...

Une voix: ...

M. Lelièvre: M. Martin a vendu ses droits, M. Martin a vendu...

La Vice-Présidente: Un instant, M. le député. Mme la leader adjointe du gouvernement, vous avez une question de règlement?

Mme Lamquin-Éthier: Oui, absolument. Je soulève à nouveau l'article 239 pour les mêmes raisons: il y a une question de pertinence. Le débat qui nous occupe, à savoir au niveau de l'adoption du principe du projet de loi n° 70, doit porter «exclusivement sur l'opportunité du projet de loi, sur sa valeur intrinsèque, ou sur tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins».

Je dois vous dire, Mme la Présidente, et vous redire que notre collègue fait des digressions que je n'oserais qualifier, mais néanmoins il est clair qu'il n'est pas pertinent dans ses interventions. Et je pense qu'il aurait tout à fait raison de se limiter exclusivement au projet de loi et à son opportunité.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la députée. Alors, M. le député de Gaspé, je sais que, même si on peut considérer la pertinence d'une façon assez large, je vous demanderais quand même de vous en tenir le plus possible au principe même du projet de loi.

M. Lelièvre: Oui, Mme la Présidente. Et j'inviterais la leader adjointe du gouvernement de lire la page 3 du projet de loi n° 70 en son entier parce qu'on y parle des changements apportés à la législation fiscale fédérale découlant du processus de révision...

Mme Lamquin-Éthier: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: Pardon. Un instant. Attendez que je vous reconnaisse avant. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. Article 35 du règlement. Je trouve intéressant que mon collègue s'adresse directement à moi. Par ailleurs, l'article 35, alinéa 4, recommande de s'adresser à la présidente et non pas «directement à un autre député». Encore une fois, la pertinence. Au lieu de m'interpeller sur un débat qui est fondamental, hein, qu'il s'intéresse donc exclusivement au principe du projet de loi n° 70.

La Vice-Présidente: Alors, on peut toujours, M. le député de Gaspé, s'adresser à un député ou un ministre mais toujours le faire par le biais de la présidence.

M. Lelièvre: Par votre entremise, Mme la Présidente, je dirais que ? et si vous voulez le lui répéter par la suite ? je dirais que l'inaction du gouvernement à percevoir et à abolir les paradis fiscaux est une injustice pour les contribuables québécois et québécoises parce que les entreprises, les personnes du Québec ne sont pas d'accord avec ça, ne sont pas d'accord avec l'existence des paradis fiscaux. Et c'est des milliards que les grandes entreprises évitent en impôts.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

 

(Reprise à 15 h 4)

Le Vice-Président (M. Gendron): Chers collègues, veuillez vous asseoir.

Alors, l'Assemblée nationale va poursuivre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 70, Loi donnant suite au discours sur le budget du 30 mars 2004 afin d'introduire des mesures de soutien aux familles ainsi qu'à certains autres énoncés budgétaires. Et le collègue de Gaspé avait commencé son intervention et il lui reste du temps pour la faire. Alors, je cède à nouveau la parole au collègue de Gaspé pour la poursuite de son intervention. M. le député.

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. Alors, comme je l'ai mentionné ce matin, le gouvernement, en ce qui a trait aux mesures pour les familles, tente de nous faire croire que les familles sont avantagées avec les nouvelles mesures qui leur sont adressées, dont le ministre de la Famille et de la Solidarité sociale nous a fait part, ce matin, en cette Assemblée.

M. le Président, on sait qu'antérieurement, avant la venue du nouveau gouvernement, une famille monoparentale avec un enfant gagnant un revenu de 40 000 $ pouvait recevoir une aide de 1 733 $. Avec les mesures, avec les mesures prises par le gouvernement pour renflouer ses coffres, c'est-à-dire augmentation des frais de garde de 2 $, augmentation, M. le Président, des tarifs d'électricité, le gouvernement fait en sorte qu'une famille monoparentale, comme je le mentionnais, avec un enfant, va perdre 164 $; une famille monoparentale avec deux enfants, avec un revenu de 40 000 $, va perdre 274 $ annuellement; une famille dont les deux parents y sont, avec un enfant, avec un revenu toujours de 40 000 $, vont perdre 277 $; et une famille avec deux parents, deux enfants, revenu de 40 000 $, 387 $.

M. le Président, il faut que les familles du Québec le sachent: elles vont recevoir un chèque, bientôt, du gouvernement, un chèque qui va assurer la visibilité du gouvernement, une mesure qu'il présente comme étant bonifiante par rapport à ce qui existait auparavant, alors que ce n'est pas le cas. Nos calculs nous indiquent le contraire: ce n'est pas un gain, c'est une perte, et ces pertes, il faut que les familles du Québec le sachent.

M. le Président, j'ai eu le plaisir de dîner, ce midi, avec des jeunes qui sont à l'université. Le gouvernement, dans le cadre de son budget, n'avait pas indiqué qu'il allait convertir 103 millions de dollars qui étaient versés en bourses, qui dorénavant seront versés en prêts. Lorsque le budget a été présenté, le ministre des Finances ne nous a jamais dit qu'il y aurait une conversion d'un montant de 103 millions de dollars pour devenir des prêts et qui augmente le fardeau d'endettement des étudiants. Le ministre du Revenu est ici, avec nous, la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, un certain nombre de députés sont avec nous ici, aujourd'hui, M. le Président. J'apprécierais que ces ministres et ces députés se rangent du côté des étudiants, qu'ils appuient leurs démarches pour amener le ministre de l'Éducation à respecter ce qu'il y avait dans le budget. Comment se fait-il que ce sont les étudiants qui devront financer l'embauche des professeurs à l'université parce que le ministre décide de prendre cet argent, de convertir en prêts l'argent qui allait à l'aide aux études et d'augmenter leur fardeau?

n(15 h 10)n

On me disait aujourd'hui: Les tarifs d'électricité nous affectent. Les tarifs des garderies nous affectent. M. le Président, ce sont des mesures, ce sont des mesures que le gouvernement a prises et qui nuisent considérablement à l'avenir des jeunes. Ils sont au niveau du baccalauréat. Ceux et celles qui veulent fonder une famille, est-ce qu'ils vont fonder une famille, dans les circonstances, en ayant un fardeau d'endettement presque deux fois supérieur à ce qu'ils prévoyaient? L'aide aux études, sous forme de bourses... En fin de semaine dernière, au congrès du Parti libéral, le député de Brome-Missisquoi s'est déclaré contre la conversion du 103 millions en prêts. Est-ce qu'il y en a d'autres qui peuvent suivre son exemple, qui suivent sa pensée, puis de l'appuyer pour amener le gouvernement à changer d'idée? M. le Président, ce sont des mesures qui ne favorisent pas l'établissement de la famille.

Au niveau de la maîtrise, les jeunes me disaient: Bien, on y pense à deux fois avant de continuer nos études. Alors, comment on va faire pour arriver? On va sortir de l'université avec un fardeau d'endettement tellement élevé qu'on va être condamnés à devenir des locataires. Puis fonder une famille, bien ça prend de l'argent. Lorsqu'on a des enfants, ça prend de l'argent.

Alors, est-ce que les ministres et les députés sont conscients que ce fardeau fiscal, hein, qu'on transporte sur les épaules des étudiants, fera en sorte qu'éventuellement ces jeunes, plusieurs vont décrocher, plusieurs vont abandonner leurs études supérieures? Puis c'est déjà commencé. Et ceux qui vont persévérer vont le faire avec de l'endettement qu'ils ne prévoyaient pas au point de départ. Ce n'était pas prévu que le ministre de l'Éducation convertisse le 103 millions de bourses en prêts. Et, s'il y a un député, dans cette Assemblée, qui avait l'information, qu'il se lève et qu'il nous le dise.

Le ministre des Finances s'est engagé à baisser les impôts, et le gouvernement d'ailleurs, dans son ensemble, au premier chef le chef du gouvernement, le premier ministre du Québec a annoncé en campagne électorale qu'il devait baisser les impôts de 1 milliard par année. Après son arrivée au pouvoir, qu'est-ce qu'il a fait? Ah, bien, il dit: Ce n'est pas pour l'année... cette année, ce sera pour l'autre année. Alors, normalement, au 1er janvier 2005, on pourrait s'attendre que le gouvernement va réduire les impôts de 1 milliard. Mais l'autre milliard? Parce que là on va rentrer dans l'autre année: est-ce que le gouvernement va faire en sorte que les impôts des Québécois seront baissés? Est-ce que l'engagement sera respecté? Ou encore est-ce qu'ils cibleront uniquement une partie des contribuables du Québec, alors que les promesses électorales étaient des promesses universelles, que ça s'appliquait à tout le monde?

Aujourd'hui, M. le Président, je suis très déçu, très déçu du gouvernement. Parce que, ce matin, j'ai parlé des paradis fiscaux. Comment se fait-il par exemple, bien, qu'on parle, à la page 4, qui énumère les différentes règles... et là le ministre nous parle des règles sur les abris fiscaux afin d'en étendre l'application aux arrangements annoncés, etc. Pourquoi le gouvernement ne s'attaque-t-il pas aux paradis fiscaux? Pourquoi le gouvernement ne s'attaque-t-il pas aux grandes sociétés qui ne paient pas d'impôts?

Récemment, dans un article qui est publié dans Le Soleil et dans La Presse, on nous parle des paradis fiscaux. Le professeur à l'Université du Québec à Montréal, Léo-Paul Lauzon, nous dit que «les dizaines de milliards de dollars qu'envoient chaque année les entreprises canadiennes dans des paradis fiscaux permettraient de refinancer les programmes sociaux et de rembourser une partie de la dette nationale tout en abolissant la TPS, soutient le professeur Léo-Paul Lauzon».

M. le Président, on le sait que ça existe, on le sait que celui qui a négocié des ententes avec la Barbade, particulièrement, et là où il a installé son siège social, c'est le premier ministre du Canada pendant qu'il était propriétaire. Mais, aujourd'hui, il est premier ministre, mais à l'époque il était ministre des Finances, et c'est lui qui a négocié l'ensemble des ententes avec la Barbade pour faire en sorte que les entreprises canadiennes, québécoises ne paient pas d'impôts ici.

Et cet argent, et cet argent, le ministre des Finances... le ministre du Revenu est très conscient... Et ce n'est pas lui qu'il faut blâmer. Parce que le ministre du Revenu, il collecte, hein, le ministre du Revenu s'assure que les sommes qui sont dues au fisc, qui sont dues au ministère du Revenu, selon les règles qui sont en vigueur, soient perçues. C'est ça, là, la responsabilité du ministre. Et je crois que le ministre fait son travail. Il ne le fait pas comme il voudrait, mais il fait son travail. Il a de la difficulté, et ce n'est pas facile, j'en conviens, à percevoir tous ceux qui tentent d'échapper au fisc, puis ça prend des mesures particulières pour lutter contre l'évasion fiscale. Mais, moralement, moralement, je suis convaincu que le ministre du Revenu ne demande pas mieux que d'avoir la capacité d'agir pour justement aller percevoir les sommes qui s'en vont dans les paradis fiscaux. Et il n'y a pas juste les banques, là, il y a les entreprises. Dans le fond, ce sont toutes les entreprises les plus riches qui sont en mesure de bénéficier de ces mesures.

Le Québec doit regarder attentivement comment il peut intervenir. Parce que le Québec a une capacité d'intervenir. Est-ce qu'il manque d'outils? Est-ce que, par exemple, le ministre du Revenu a le personnel suffisant, les moyens financiers pour s'attaquer seul aux paradis fiscaux? Je ne le sais pas, M. le Président, c'est à lui à nous le dire, mais ce devrait être une priorité du ministère du Revenu, et que l'agence qui est sous sa responsabilité s'attaque à ce fléau. On pourrait financer les écoles, on pourrait financer les universités, on pourrait financer les hôpitaux, on pourrait financer l'éducation populaire, on pourrait financer tous les programmes de scolarisation des personnes qui n'ont pas réussi à l'école mais qui veulent revenir sur le marché du travail avec une formation, on pourrait construire nos routes, on pourrait former davantage de médecins, on pourrait ouvrir davantage nos portes aux universités. Ce sont des milliards qui dorment dans les coffres de ces entreprises, et ils le réinvestissent par la suite. Ah oui! Ça s'en va à la Barbade. M. Lauzon énumérait... Les cinq plus grandes banques canadiennes auraient épargné 10 milliards d'impôts en 13 ans grâce à leurs filiales dans les paradis fiscaux. C'est énorme.

Et on sait, M. le Président, que, depuis que ces ententes ont été négociées à la Barbade par l'ancien ministre des Finances, qui est aujourd'hui l'actuel premier ministre du Canada, il y a plus de 5 000 entreprises qui se sont installées à la Barbade, 5 000 entreprises qui se sont installées à la Barbade et qui ne paient pas d'impôts. Et tout ça parce qu'on envoie par télécopie des résolutions à un siège social. On a vu, à l'émission Enjeux... Et le ministre a certainement pu visionner cette émission. Je suis convaincu que le ministre du Revenu n'est pas en accord avec ça. Et, s'il a visionné cette émission, il va se lever puis il va dire: Oui, je l'ai vue. Oui, j'ai vu comment ils procédaient. Est-ce que les règles prévues aux ententes à l'effet qu'une entreprise doit générer des revenus d'exploitation dans le paradis fiscal sont respectées? Il y a lieu de faire des vérifications. Et on ne parle pas de générer des revenus de production dans le paradis fiscal juste par le jeu du travail ou de l'investissement de l'argent. Il faut qu'il y ait une activité de production dans le paradis fiscal. Est-ce que le ministre du Revenu a toutes les informations pour nous garantir à tout le moins, si je me trompe, pour nous dire si effectivement les paradis fiscaux ne sont pas uniquement une voie de transition, sans aucune opération de production qui génère des revenus et des profits. C'est ça, la situation.

n(15 h 20)n

Alors, quand je regarde, M. le Président, la situation des familles québécoises, hein, les gens à qui l'aide sociale est réduite ou encore qui vivent avec un montant de 533 $ par mois, que le ministre de la Solidarité sociale parle de mettre sur pied une fiducie dans laquelle les personnes les plus démunies déposeront une partie de leur chèque d'assistance sociale pour payer leur loyer, M. le Président, nous aurions peut-être une société qui est plus solidaire, une société qui pense à faire en sorte que les personnes les plus démunies, qui sont handicapées, qui ont des contraintes sévères à l'emploi, qui ne peuvent pas retourner sur le marché du travail, des personnes âgées, qu'on puisse améliorer leurs conditions et favoriser leur retour au travail par une formation appropriée des gens qui doivent recevoir l'assistance sociale. Et là le ministre, il catégorise, hein, le ministre de la Solidarité sociale nous dit que c'est normal que ça se passe comme ça, mais il va y avoir quatre catégories.

Alors, M. le Président, moi, je suis obligé de vous dire, je suis obligé de vous dire que, le projet de loi n° 70, nous allons devoir voter contre. Le gouvernement d'une part, non seulement pour l'année 2004 n'a pas respecté son engagement de baisser les impôts de 1 milliard, mais, en 2005, lorsqu'il mettra les mesures en place, si je ne me trompe pas, le gouvernement n'appliquera pas une mesure universelle. Donc, ils vont cibler des personnes qui ont des revenus, mais ce n'est pas la totalité des Québécois comme il s'était engagé. Et là ils vont me dire: Bien, écoutez, vous n'êtes pas solidaires parce qu'on veut donner plus d'argent à la famille moyenne. Mais ce n'est pas ça qu'il a dit aux Québécois pour se faire élire, il a dit aux Québécois et aux Québécoises: Je vais investir dans la santé, je vais investir dans l'éducation, je vais baisser les impôts; les garderies, on ne touchera pas à ça. C'est ça, la réalité: rendu au pouvoir, il augmente les tarifs partout.

Et, lorsqu'on regarde, on regarde le projet de loi qui fait suite au discours du budget, la Société d'assurance automobile, les tarifs vont augmenter: tarifs pour les permis de conduire, tarifs pour l'immatriculation, tarifs pour les assurances. Et en plus le ministre des Finances, lui, il veut aussi aller prélever une somme sur les grosses cylindrées. Donc, il va s'attaquer aux travailleurs forestiers qui ont besoin d'un camion pour aller en forêt, les pêcheurs, les agriculteurs, etc. C'est ça, la réalité, M. le Président. Alors, il faut que les Québécois et les Québécoises sachent qu'on est en présence d'un discours qui nous promet des choses et d'un agir qui fait le contraire ou qui fait à moitié les choses. C'est ça, la réalité.

Alors, il faut comprendre que le ministre du Revenu n'est pas à blâmer; lui, il est le percepteur. Au Moyen Âge, la perception des impôts se faisait chez un percepteur qui se rendait dans le village, et les impôts étaient payés avec de la marchandise, hein? Parfois, c'était du bétail, des poules. On voit aussi les peintures de cette époque qui illustrent la façon dont les percepteurs d'impôts agissaient. Alors, aujourd'hui, c'est une autre réalité. On reçoit les impôts par des versements électroniques. Le ministère du Revenu est un ministère qui est bien organisé, qui est bien structuré, qui a des moyens, etc., et c'est tout à l'honneur des personnes qui travaillent dans la fonction publique québécoise. Mais les décisions politiques ne viennent pas d'eux. Les décisions politiques viennent des élus et viennent de l'Exécutif. Et l'Exécutif, c'est le Conseil des ministres.

C'est le Conseil des ministres qui doit prendre les décisions pour rétablir les engagements qu'ils ont pris et agir en conséquence. S'ils promettent des baisses d'impôts universelles, bien, on est en droit de s'attendre à avoir une baisse d'impôts universelle. S'ils ont promis d'investir dans l'éducation, alors pourquoi ce gouvernement convertit-il des bourses pour endetter davantage les étudiants? Il faut absolument dénoncer cet état de fait. Et en plus on demande aux étudiants de financer l'embauche des professeurs à l'université avec cet argent. Et je vois le ministre de la Santé et des Services sociaux et je suis persuadé que le ministre de la Santé et des Services sociaux aimerait beaucoup avoir une marge de manoeuvre pour gérer le ministère de la Santé et des Services sociaux, pour le personnel, lutter contre les différents virus, les maladies, la formation, etc., l'embauche d'infirmières, formation des infirmières, de nouveaux médecins.

Quand M. Lauzon nous parle de 11 milliards de dollars qui échappent aux différents ministères du Revenu, c'est énorme. Puis là on ne parle juste, on ne parle juste... 10 milliards des grandes banques, des cinq plus grandes banques canadiennes. Imaginez-vous les pétrolières, imaginez-vous toutes les grandes sociétés, combien d'argent pourrait rentrer dans le Trésor du Québec, M. le Président?

Alors, je dois vous dire que le budget, lorsqu'il a été présenté, en mars 2004, on se souviendra que ça découle du cadre financier qui avait été présenté durant la campagne électorale. Et l'actuel ministre des Finances avait commenté, hein, fait des commentaires sur le cadre financier du Parti libéral à l'époque et il trouvait que ce n'était pas trop réaliste. Bien, le temps nous a démontré et les agirs du gouvernement nous ont démontré que le cadre financier que le gouvernement, le Parti libéral a proposé n'était pas réaliste. Et, rendus au pouvoir, ils font le contraire, ou à moitié, ou au quart, ou au trois quarts de ce qu'ils ont promis.

Mais les augmentations de tarifs, par exemple, qui affectent une famille qui a deux enfants ou trois enfants, puis que les enfants sont à la garderie, et que les revenus ne sont pas tellement élevés, je suis convaincu que le ministre de la Santé et des Services sociaux, il n'est pas d'accord avec ça. Mais au Conseil des ministres, lorsque le premier ministre dit: Ça va passer par là, bien là tout le monde est obligé de suivre la décision du premier ministre. On ne peut pas contester les engagements du premier ministre quand le premier ministre dit: Moi, j'ai décidé de baisser les impôts, 1 milliard par année. Mais je suis persuadé que dans le fond le ministre de la Santé et des Services sociaux est parfaitement au courant qu'ils ne sont pas capables de baisser les impôts.

Alors, qu'est-ce qu'ils ont fait? Ils ont rogné sur leur engagement. Ils l'ont réduit, leur engagement. C'est ça qu'ils ont fait. Et ils l'ont fait de telle sorte que c'est une partie seulement de la population qui va bénéficier des engagements du Parti libéral et du député de Sherbrooke alors qu'il était dans l'opposition et qu'il était chef du Parti libéral.

Alors, M. le Président, je vais m'arrêter ici, et, en ce qui me concerne, j'ai la volonté ferme de recommander à mes collègues de voter contre, de voter contre ce budget parce qu'il ne rencontre pas les engagements pris par la formation politique qui est maintenant au pouvoir, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Gaspé.

Juste au préalable, là, avant de donner la parole à d'autres intervenants ? parce que je voyais l'inquiétude de certains collègues: pour tout parlementaire, pour la suite, c'est 20 minutes, mais le critique ou le chef de l'opposition ou le représentant avait droit à une heure. Donc, il n'a pas usurpé ou dépassé le temps qui lui était imparti.

M. le député de Montmorency, est-ce que c'est pour une question en vertu de 213 ou autre chose?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Ça va? Ça va, c'est correct. Alors, M. le député de Montmorency, pour l'intervention sur le principe du projet de loi n° 70. M. le député de Montmorency, à vous la parole.

M. Raymond Bernier

M. Bernier: Merci, M. le Président, merci, chers collègues. Cher collègues, c'est toujours un honneur pour moi de prendre la parole dans cette Chambre, M. le Président. C'est toujours un plaisir, et, d'avoir la chance, cet après-midi, hein, de pouvoir être capable de faire mes commentaires en regard du projet de loi n° 70, je pense, c'est certainement quelque chose de fort intéressant.

n(15 h 30)n

Mais, avant, avant d'entamer le projet de loi n° 70 en tant que tel, j'aimerais mentionner que le député précédent, le critique en matière du ministère du Revenu, le député de Gaspé, est certainement un gros travailleur, certainement un gros travailleur.

Le député de Gaspé, présentement, on peut le voir... je travaille avec lui au niveau des commissions parlementaires sur le projet de loi n° 60, projet de loi n° 61, projet de loi n° 63, donc beaucoup de projets de loi, O.K., et c'est un gros travailleur, et ça, il faut le reconnaître, et je le reconnais, O.K.?

Par contre, au niveau du député de Gaspé, ce que ça a comme inconvénient, c'est qu'à un moment donné ça devient difficile de tout démêler, là, tu sais? On vient d'un projet de loi à l'autre, on considère des revenus pour des dépenses, des dépenses pour des revenus, du positif pour du négatif, de l'actif pour du passif, et c'était peut-être un peu ça, le problème. Donc, être capable de faire l'équilibre, là, ça devient difficile, puis, en ce qui concerne le ministère du Revenu, au moment où on doit, à partir d'un discours sur le budget, traduire ça sous forme d'un projet de loi comme le projet de loi n° 70, bien, ça devient fort complexe.

Ça fait que, là, si on rajoute tout ça ensemble, là, imaginez-vous, là, la difficulté qu'on a, là, à bien comprendre qu'est-ce qui se passe en réalité dans un projet de loi par rapport à un autre quand on parle de programme d'aide aux familles, parce que, dans le cadre du projet de loi n° 70, ce qu'on voit, c'est de concrétiser de l'aide aux familles. Parce que notre gouvernement, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, notre gouvernement s'est engagé à investir en santé, il s'est engagé à investir en éducation, hein, il s'est engagé à investir dans les familles, O.K., puis il s'est engagé à travailler pour baisser les impôts, hein, et sur ça d'alléger le fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises, c'est ce qu'on fait dans le cadre de ce projet-là.

Donc, M. le Président, il a également été fait mention, par notre collègue le député de Gaspé, de paradis fiscaux, de toutes sortes de choses comme ça, d'évasion fiscale; bon, je comprends, là. Mais, tu sais, à un moment donné, il ne faut pas crier alarme pour crier alarme, hein? Je pense que la société québécoise, on est rendus en l'an 2004, elle est bâtie, et tout. Il ne faut pas mettre en doute tout le monde comme ça, là. Il ne faut pas créer de scepticisme dans la population. Par rapport à une économie, il n'y a rien de pire que ça. Tu sais, il faut être positif. Et je peux vous garantir, M. le Président... Et ça, je peux en témoigner, moi, j'ai travaillé au ministère du Revenu. J'ai travaillé pendant de nombreuses années... et je peux vous dire que c'est un ministère qui est bien structuré, c'est un ministère qui travaille, où les gens sont compétents et un ministère qui a comme préoccupation justement de travailler à combattre l'évasion fiscale et à mettre en place les règles et les règlements qui permettent d'éviter l'évasion fiscale.

Et, sur ça, on a eu l'occasion, en commission parlementaire sur... la Commission de l'administration publique, de recevoir la sous-ministre du Revenu, qui est venue expliquer quelles étaient ses priorités en ce qui regarde son ministère. Et une de ses premières priorités, c'est d'assurer justement l'équité fiscale, hein? Et, dans une démocratie, il faut s'assurer que chacun et chacune paie sa juste part d'impôts, et c'est ce à quoi le ministère travaille depuis de nombreuses années. Et, lors de cette séance de travail et de cette rencontre publique avec la sous-ministre, le député de Gaspé a eu l'occasion d'interpeller la sous-ministre et d'entendre tout le travail qui se fait au niveau de la lutte à l'évasion fiscale, O.K.? On voit dans les journaux des résultats concrets de ce travail-là. Donc, c'est important de ne pas mettre en doute le travail du ministère en ce qui regarde la lutte à l'évasion fiscale, et ça, j'y tiens, de le mentionner, M. le Président.

M. le Président, de façon à aborder d'une façon plus concrète le projet de loi n° 70, je désirais avant toute chose féliciter le personnel du ministère qui travaille à rédiger un projet de loi comme celui-ci, parce que, à partir d'un discours du budget, de transformer ce discours-là au niveau d'une loi, d'un projet de loi en tant que tel, c'est beaucoup de travail à faire. Et, on sait, ces projets de loi là sont fort complexes. Et celui-ci est encore plus intéressant parce qu'il permet la concrétisation et la réalisation d'engagements politiques de notre gouvernement. Ces engagements, M. le Président, ils concernent les familles et ils concernent les contribuables.

Donc, les principales mesures concernant l'impôt sur le revenu qui sont comprises dans ce projet de loi sont au niveau des prestations familiales, des crédits d'impôt non remboursables pour enfant à charge, la réduction d'impôts à l'égard des familles et le programme APPORT, qui est remplacé. Donc, les crédits que ça va nécessiter pour le crédit d'impôt remboursable pour le Soutien aux enfants, bien je pense que... Tout à l'heure on venait mettre en doute le travail et les investissements de notre gouvernement en cette matière, mais je pense que c'est important de rétablir les faits, M. le Président, c'est important. C'est important de dire à la population qu'est-ce que notre gouvernement a fait. Bien, au niveau du crédit d'impôt remboursable pour le Soutien aux enfants, antérieurement c'était environ 1,5 milliard. Bien, cette année, c'est au-delà de 2 milliards. Ça veut dire, ça, c'est 547 millions de plus. Ça commence à être intéressant, M. le Président. 547 millions au niveau des crédits d'impôt remboursables pour le Soutien aux enfants.

En ce qui regarde le crédit d'impôt remboursable attribuant une prime au travail, l'ancien programme APPORT, c'était 26 millions. Le nouveau programme mis en place par notre gouvernement, c'est 269 millions. Donc, on parle d'une augmentation nette de 243 millions, M. le Président. On commence à parler de gros chiffres, là. De plus, il y aura une possibilité, au niveau du versement anticipé du crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfants, donc, au lieu d'attendre en fin d'année, on va pouvoir le recevoir avant; et également des mesures visant à simplifier le régime d'imposition applicable aux particuliers.

Pour chacune de ces mesures, M. le Président, j'aimerais apporter quelques commentaires. Au niveau du crédit d'impôt remboursable pour le Soutien aux enfants, hein, on a vu tout à l'heure que c'était un ajout de 547 millions. Donc, le nouveau programme de Soutien aux enfants remplacera l'allocation familiale, la réduction d'impôts à l'égard des familles et le crédit d'impôt pour enfant à charge. Donc, je pense qu'à ce moment-là on vient simplifier et ajouter 547 millions. L'aide est universelle, le soutien est offert à toutes les familles avec des enfants de moins de 18 ans, quel que soit leur revenu familial. Donc, c'est toutes les familles du Québec qui y ont droit, et ça, on va en donner un exemple.

Comme exemple, prenons un couple avec deux enfants, un revenu de 25 000 $. Ce couple-là va recevoir 3 000 $ par année pour le Soutien aux enfants, c'est-à-dire 2 224 $ de plus qu'actuellement. Et ça, c'est des chiffres, hein, c'est réel. L'autre exemple: une famille monoparentale avec deux enfants et un revenu de 25 000 $ recevra 3 700 $ par année, soit 1 600 $ de plus qu'avec le régime actuel. Et, élément important, on discute d'un projet de loi au niveau du ministère du Revenu... au niveau de l'agence du revenu, ces montants ne seront pas imposables. C'est de l'argent net dans les poches des Québécois et des Québécoises.

Donc, principaux avantages, le régime sera plus simple, puisque le Soutien aux enfants réduit de trois à un le nombre de programmes applicables, et les familles n'auront plus à demander des crédits d'impôt lors de la production de leurs déclarations de revenus. Plutôt que de réclamer des crédits d'impôt dans la déclaration du revenu, le Soutien aux enfants sera calculé par la Régie des rentes du Québec, et les familles le recevront automatiquement trimestriellement, hein? Donc, on n'a plus besoin de se casser la tête là-dessus, c'est la Régie des rentes... Et d'ailleurs les familles québécoises ont déjà reçu de l'information de la part de la Régie des rentes sur ce sujet. Bien sûr, tous les calculs ont été faits à partir des informations que le ministère du Revenu avait. Donc, ça facilite les choses. Au lieu d'en avoir trois, on en a un. C'est-u assez simple, M. le Président?

Puis, autre bonne nouvelle, le premier versement sera fait le 15 décembre au lieu de janvier. Et ça, c'est le ministre de l'Emploi, de la Famille et de la Solidarité sociale qui l'a annoncé. Donc, je pense qu'il s'agit d'une bonne nouvelle pour les familles du Québec, de pouvoir bénéficier d'un apport financier en cette période des fêtes, hein? Je pense que c'est important, ça, M. le Président. Puis, à partir d'avril, ils pourront même le recevoir mensuellement. Donc, tout le monde est gagnant avec cette mesure.

n(15 h 40)n

Deuxième, crédit d'impôt remboursable attribuant une prime au travail. On retrouve, dans le budget 2004-2005, l'instauration d'une prime au travail qui remplace le programme d'Aide aux parents pour leurs revenus de travail, c'est-à-dire le programme APPORT, O.K., ce que je vous ai mentionné tout à l'heure, le programme APPORT, 26 millions. Ce programme, ce nouveau programme, on parle d'un montant de 269 millions, hein, donc 243 millions de plus. À ce que je sache, c'est du plus. Et ce programme-là va être attribuable au niveau des travailleurs à faibles et moyens revenus, et cela, en 2005. La Prime au travail permettra d'inciter le travail, en favorisant la sortie de l'aide sociale. Je pense que c'est important, ça, de le dire: favoriser la sortie de l'aide sociale. Au lieu de pénaliser, on aide les gens qui vont travailler. C'est extraordinaire, ça, M. le Président, d'être capables de les aider, d'aider les gens. Et ceci va permettre également de majorer le gain net au niveau des horaires des travailleurs.

Donc, concrètement, ça veut dire quoi? Ça veut dire que, pour un prestataire qui quitte l'aide sociale pour travailler à temps plein au salaire minimum, la Prime au travail équivaudra à une hausse de salaire de 1,40 $ l'heure, pour une personne ayant un conjoint et des enfants, et à 0,68 $ l'heure pour une personne seule avec des enfants. Donc, comme exemple, un couple avec deux enfants, ayant un revenu annuel de 15 000 $, recevra, grâce à la Prime au travail, la somme de 2 780 $. Par sa simplicité, le nouveau programme Prime au travail s'adresse à 536 000 ménages à faibles et moyens revenus. Je pense que c'est une bonne mesure, ça, M. le Président, une mesure fort intéressante pour l'ensemble des familles du Québec.

Autre mesure comprise dans ce projet de loi: le versement anticipé du crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfant. On sait que chaque famille au Québec, quand on complète notre rapport d'impôts, hein, puis qu'on a des frais de garde, bien c'est à ce moment-là qu'on demande le remboursement. Mais, dans ce cas-ci, cette année, ce nouveau mécanisme permettra, sur demande, par anticipation, de recevoir ce crédit-là pour frais de garde d'enfant quatre fois par année, sous forme d'un chèque, à partir du 1er janvier 2005. Le gouvernement souhaite donner les moyens à tous les parents de recourir aux services de garde qui leur conviennent. Actuellement, les parents qui font garder leurs enfants dans le réseau privé ou à la maison ne reçoivent souvent leur aide fiscale qu'après la fin de l'année.

Donc, cette mesure-là, ce que ça permet, c'est, au moment où une famille a fait le choix de faire garder ses enfants d'une autre façon que dans un centre de la petite enfance, bien de recevoir immédiatement, quatre fois par année, ces montants-là, au lieu de l'avoir au moment où elle doit faire son rapport d'impôts, sa production de rapport d'impôts. Encore là, c'est une mesure qui est fort intéressante pour l'ensemble des familles, de bénéficier d'un cash-flow immédiatement dans vos poches. Ça vous permet de décider de faire autre chose avec votre argent. Donc, par cette mesure, nous laissons une plus grande liberté aux parents et rétablissons l'équité entre ceux qui bénéficient d'une place à contribution réduite et ceux qui se tournent vers d'autres types de garde.

Autre mesure dans ce projet de loi, M. le Président: la simplification du régime d'imposition applicable aux particuliers. Bon, on sait que depuis quelques années on se posait la question: Est-ce qu'on fait notre déclaration d'impôts sur un formulaire simplifié ou sur un formulaire détaillé? Est-ce qu'on est plus gagnants de le faire sur un formulaire simplifié ou bien sur un formulaire détaillé, tu sais? Les gens se posaient la question et, dans bien des cas, étaient obligés finalement de faire les deux calculs. Nous, notre gouvernement, lors du discours du budget, on a réglé la situation. Dans le discours du budget 2004-2005, il a été annoncé la fusion du régime général et du régime particulier à compter du 1er janvier 2005. Donc, seulement qu'un. On n'a plus besoin de se poser la question.

Le projet de loi n° 70 comprend également la bonification des montants admissibles en déduction du revenu, ce qui retourne 219 millions dans les poches de l'ensemble des contribuables. 219 millions, M. le Président, là. On ne le soustrait pas, on l'ajoute. On ajoute 219 millions.

Le régime unique d'imposition réduira l'impôt des particuliers en accordant à tous les contribuables un montant complémentaire de 2 925 $, soit l'équivalent du montant forfaitaire actuel, en permettant en plus ? et c'est là que c'est important ? à tous les contribuables de réclamer l'ensemble des déductions et crédits d'impôt non remboursables qui sont actuellement réservés au régime d'imposition général. Cette réduction d'impôts s'accompagne en plus d'une simplification du régime d'imposition. Donc, ça veut dire, ça, que, pour le contribuable qui, au moment où il avait le choix de faire son rapport d'impôts, formule détaillée ou formule longue, comme on peut dire, de façon plus simple, bien, à ce moment-là, il choisissait entre 2 925 $ ou un ensemble de déductions, dans le rapport détaillé au niveau du revenu. Là, ce qu'on lui dit, c'est: Vous allez avoir droit aux 2 925 $ et vous allez avoir droit également à l'ensemble des déductions de crédits d'impôt non remboursables en plus. Et c'est pour ça qu'on arrive avec un calcul de 219 millions additionnels investis dans les poches des particuliers. Donc, M. le Président, je pense que c'est une mesure fort importante. Hein, je pense que c'est une mesure dont les contribuables du Québec vont bénéficier, et cela, à court terme.

La mise en place du régime unique d'imposition met un terme à l'obligation de choisir entre les deux régimes, comme je vous le mentionnais, et le contribuable est gagnant, et cela pour 95 % des contribuables qui en sortent gagnants. Donc, ce n'est pas une mesure qui favorise un petit groupe par rapport à un autre, c'est 95 % des contribuables. C'est beau.

Je pense que le projet de loi n° 70, c'est un projet de loi gagnant, c'est un projet de loi qui permet aux familles, aux contribuables de recevoir des argents additionnels. Et ça, mes collègues, je pense que c'est fort important, et ça, enfin, enfin on a un gouvernement qui investit pour les contribuables, qui investit en santé, en éducation, pour les familles. Ça, je pense que c'est réellement tenir ses engagements et remplir le programme électoral.

M. le Président, tout à l'heure, le député de Gaspé est allé avec des chiffres, pour des familles, pour savoir qu'est-ce qu'ils vont recevoir, qu'est-ce qu'ils ne recevront pas exactement. O.K.? Donc, moi, je veux juste, en terminant, là, donner le message suivant aux familles, là. J'ai choisi... je vais essayer de choisir un élément cible, là, pour que les gens comprennent. Pour une famille monoparentale ayant deux enfants, revenu de travail de 20 000 $, dans le régime actuel, le régime présent, qui est présentement en vigueur, les réductions en regard de l'allocation de la famille, crédit d'impôt pour enfants et réduction d'impôts à l'égard des familles, c'était 2 053 $ que ça représentait. Dans le nouveau régime, à partir du 1er janvier 2005, on parle Soutien aux enfants, 3 700 $, Prime au travail, 1 160 $, total, 4 860 $, allégement fiscal, 2 807 $. Donc, ils sont gagnants de 2 807 $. Puis, si on voit un petit peu... Vous allez dire: Vous prenez un revenu un peu plus bas... On va aller à 40 000 $, juste pour montrer qu'on est quand même gagnant. À 40 000 $, la différence: le régime actuel, 2 323 $; le nouveau régime, 1 041 $ de plus du 2 323 $, donc 3 364 $. C'est drôle, mais, en ce qui me concerne, je pense qu'on est gagnant.

Juste en terminant. Couple ayant deux enfants, revenu de 25 000 $, qu'est-ce que ça va donner concrètement avec les mesures annoncées au niveau Prime au travail, de l'aide aux familles, Soutien aux enfants? Présentement, on parle, pour une famille dont le revenu est de 25 000 $, de 776 $ que ça lui donne. Ça donnait 776 $, actuellement. Le nouveau régime, 4 780 $, hein, donc c'est 4 000 $ de plus, là, 4 000 $ de plus que cette famille-là va recevoir, non imposable. Écoutez, là, si on fait des calculs, je pense que notre gouvernement prend ses responsabilités, et c'est réellement de l'aide fort positive.

M. le Président, donc j'ai été heureux de pouvoir souligner tous les avantages que nous apporte le projet de loi n° 70 et j'en souhaite son adoption le plus rapidement possible. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député de Montmorency. Pour la poursuite du débat, toujours sur le principe du projet de loi n° 70, je reconnais maintenant M. le député de Joliette. Alors, à vous pour votre intervention.

M. Jonathan Valois

M. Valois: Merci, M. le Président. J'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 70, la Loi donnant suite au discours sur le budget du 30 mars 2004 afin d'introduire des mesures de soutien aux familles ainsi qu'à certains autres énoncés budgétaires.

n(15 h 50)n

Évidemment, M. le Président, j'interviens notamment parce que c'est... dans le titre d'ailleurs, où est-ce qu'on nous dit que c'est des mesures de soutien aux familles. Et, vous vous rappelez certainement, dans une autre vie, j'étais porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille. Et justement, le 30 mars 2004, c'est à ce titre que j'étais intervenu sur le budget et c'est pour ça qu'aujourd'hui, alors qu'on a une loi qui donne suite à ce discours, je me permets encore une fois d'intervenir un peu, ce qui n'enlève absolument rien aux très grandes qualités du député de Vachon, qui est maintenant celui qui, en plus d'être porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi et de solidarité, se trouve à être porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille. Mais, quand même, comme j'étais là, j'étais à cette époque-là le porte-parole de l'opposition officielle, regardons ensemble ce qui s'est dit, regardons ensemble ce qui s'est fait depuis 2004.

Puis je vous dis «2004», M. le Président... J'ai entendu le ministre du Revenu, j'ai entendu le député de Montmorency nous dire que tout ce qui s'était fait là était finalement la suite d'engagements électoraux. Bien, les élections, ça, c'était en 2003. Qu'est-ce qui s'est passé en 2003? En 2003, M. le Président, il y a un parti politique qui est allé faire le tour des maisons, qui est allé voir les gens, qui a cogné à leur porte pour leur dire qu'il était pour maintenir les garderies à 5 $. Ça, c'est le Parti libéral qui disait ça, c'était dans leur cahier d'engagements électoraux: Si vous votez pour le Parti libéral, nous allons conserver pour tout le monde les garderies à 5 $. Certaines personnes ont fait confiance à ce parti-là sur la base de cet engagement-là. Mais qu'est-ce qui s'est passé le lendemain du 14 avril 2003? Dès le lendemain, le Parti libéral revenait sur cet engagement et les tarifs des garderies passaient de 5 $ à 7 $ par jour, une augmentation de 40 %. Ça, ça a été le premier cadeau qu'on a fait à ces familles-là, aux familles du Québec. Pour un gouvernement... pour un parti, je veux dire, qui s'était gargarisé pendant toute une campagne électorale, en 2003, d'être le parti de la famille, on voit très bien que la première intervention va vraiment dans l'autre sens que les engagements.

Alors, c'est ça, 2003, c'est la hausse de tarifs. Mais, si vous pensez, M. le Président, que cet engagement envers les familles qu'on voit ici, dans le projet de loi, là, puis qu'on nous dit qu'il est suite à des engagements, qu'il est suite au budget de 2004... si vous pensez que 2003, c'était simplement une augmentation de 5 $ à 7 $, c'est qu'il ne faut pas oublier non plus, M. le Président, qu'en plus de la hausse des tarifs il y a eu ? et on s'en rappelle très bien ? récupération des surplus des CPE. Les CPE, ce sont des organismes sans but lucratif gérés par des parents, et ces conseils d'administration là, qui sont justement composés de parents, par bonne gestion et souci d'investissements futurs ou de rénovation de leurs centres de la petite enfance, s'étaient accumulés quelques surplus pour être sûrs de ne justement pas demander des subventions spéciales au gouvernement. Qu'est-ce qu'on fait avec ces surplus-là? On va les rechercher. Deuxième cadeau de bienvenue du gouvernement du Parti libéral en 2003 aux familles du Québec: récupération des surplus des garderies. On en a pour entre 10 millions et 25 millions de dollars de surplus qu'on est allé chercher de ce côté-là.

Mais, si vous pensez qu'on s'arrête là, M. le Président, 2003, c'est loin d'être fini, là, il y a un troisième cadeau de bienvenue. Et le troisième cadeau de bienvenue qu'on fait aux familles du Québec, en plus de l'augmentation de tarifs, en plus des récupérations de surplus, c'est qu'on coupe de 4,5 % les subventions qu'on fait aux garderies. Alors, non seulement on hausse les tarifs, non seulement on va chercher les surplus, mais en plus on coupe les subventions aux familles, on coupe les subventions aux CPE qui servent vos familles.

Alors, en ce sens-là, on a trois beaux cadeaux d'un gouvernement qui se dit pour les familles. Puis, encore aujourd'hui puis encore cette semaine, on avait le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille qui se levait en disant: Notre gouvernement est pour la famille. Puis, une chance que le gouvernement est là pour les familles, le gouvernement du Parti libéral est là pour les familles. Rappelez-vous, en 2003, il y avait un manifestant qu'on n'avait jamais vu avant dans nos rues, le poupon. Ça a été des manifestations de poussettes. Des parents plein les rues, par milliers, et à Québec, et à Montréal, puis dans d'autres coins, sont venus dire à ce gouvernement-là: Pourquoi vous aviez dit que vous étiez pour la famille, alors qu'aujourd'hui ce qu'on voit, c'est que non seulement vous haussez les tarifs, non seulement vous venez chercher des surplus, mais en plus vous coupez dans les garderies? Alors ça, c'était 2003.

2003, c'était aussi la commande du ministre des Finances de 300 millions à son collègue ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, une pression budgétaire à ce ministère-là, le ministère de la Famille, de 300 millions. Alors là, on commence à voir un peu, là, l'état de situation de ce qui s'est passé en 2003 à l'égard des familles, par rapport au Parti libéral. Je vous rappelle, la campagne électorale, c'était aussi en 2003, ils se disaient aussi le parti de la famille, ils se sont fait élire sous cette représentation-là, puis, aujourd'hui, regardez où est-ce qu'on en est.

Alors, tout ça a amené le ministre à nous dire, en 2003: 2004 sera l'année de la famille. De un, on comprend qu'il admettait que 2003 ne l'avait vraiment pas été, et, de deux, vraiment on fondait beaucoup d'espoir, du côté du gouvernement, pour 2004. Et une des choses qui s'est passée en 2004, M. le Président, ça a été le discours du budget du 30 mars, 30 mars 2004, où est-ce qu'on disait que c'était un budget qui justement était un budget orienté, tourné vers les familles, dont on parle aujourd'hui des suites par rapport au Revenu. Bien, regardons 2004, l'année de la famille, mois après mois.

1er janvier 2004, c'est exactement ce jour-là que la hausse de 5 $ à 7 $ par jour des services de garde est tombée effective. Donc, cette année de la famille ? 2004 sera l'année de la famille ? première journée de l'année de la famille, augmentation de 40 % des tarifs. C'est comme ça qu'on commence l'année de la famille, selon le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille. Alors là, il faut vraiment bien le comprendre. Ça, ça a été la première journée de 2004, c'est comme ça qu'elle a commencé.

Par la suite, en février, on nous annonce que non seulement le réseau, il ne sera pas complété, le réseau des services de garde, en 2005, on repousse ça en 2006. Alors, on annonce 12 000 places, mais on dit en même temps: Attention! les 12 000 places qu'on annonce, ce ne sera pas des 12 000 places pour 2005, ça va être 2006. On étire l'échéancier de la mise en place du réseau des services de garde au Québec d'un an, un autre, encore là, là. On est dans l'année de la famille, puis ça, c'est le mois de février.

Le mois de mars, le ministre des Finances nous sert un budget ? c'est de ça qu'on parle aujourd'hui, des suites de ce budget-là ? qui dit qu'il n'arrivera rien pour les familles avant 2005, à part peut-être, à part peut-être le fait qu'on ne paiera plus de taxe sur les couches. Ça, ça va arriver en 2004, par contre. Alors là, il y a quelque chose qui est vraiment positif pour les familles, là. Il faut le noter, il faut le donner, pour les familles. Pour tout de suite, là, ce qui arrive, dans ma séquence de positif pour les familles en 2004, c'est qu'on ne paiera plus de taxe sur les couches. Ça, on va le donner au gouvernement, on va quand même, là-dessus, avoir cette reconnaissance-là. Mais, mars...

Avril suit mars, on se comprend?, on continue l'échéancier de 2004, l'année de la famille, hausse de tarifs d'hydroélectricité. C'est les familles qui sont touchées par ça.

Après ça, septembre 2004. Bien, c'est là qu'en septembre 2004 les familles voient que leurs services de garde en milieu scolaire, les tarifs vont passer de 5 $ à 7 $. L'année de la famille, là, on se comprend, tout le monde, on est toujours en 2004, l'année de la famille, là. Et là c'est les services de garde en milieu scolaire qui vont passer de 5 $ à 7 $.

En octobre 2004, on apprend que le ministre de l'Éducation veut finalement rajouter quelque chose comme une pression financière sur les étudiantes et les étudiants du Québec en leur disant que leur endettement augmentera de 100 millions de dollars. On est toujours dans l'année de la famille. Ça, ce qui nous amène à dire, M. le Président, que... et ce qui nous a amenés à dire à l'époque qu'essentiellement 2004, bien, c'était l'année des couches, parce que c'est ce qui a été positif par rapport à ce gouvernement-là. Parce que tout ce qui avait été annoncé puis tout ce qu'on nous parle depuis tantôt pour dire, là, que les familles, avec ce budget-là de 2004, là, du mois de mars 2004, il y aura donc des gros chèques, tout ça, puis on a donc donné 1 milliard, les parents du Québec n'ont pas vu un sou de ça encore. C'est le 1er janvier 2005. Tous les calculs qu'on nous fait, qu'on nous dit que ça a été décidé le 30 mars 2004, tout ça qui a été annoncé là, à part les couches, arrivera le 1er janvier 2005, et c'est comme ça qu'on doit comprendre aussi l'action de ce gouvernement-là.

n(16 heures)n

Tout arrivera tellement, M. le Président, en 2005, que le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, cette semaine, nous a dit: 2005 sera l'année de la famille. Attention, là! En 2003, il nous disait: 2004 sera l'année de la famille. Et là, en 2004, il se rend compte qu'il n'a toujours pas livré la marchandise là-dessus, il nous dit: Bien, attention, 2005 sera l'année de la famille. Combien d'années comme ça il va nous dire que c'est l'année prochaine, l'année de la famille? C'est ça qu'on doit se demander comme opposition, puis les parents du Québec, c'est ce qu'ils se demandent. Alors, des fois, on se questionne: Comment ça se fait qu'ils nous ôtent, hein... Là, on est au gouvernement, là. Il y a sûrement, là, des gens du gouvernement qui se disent: On fait tellement pour les familles, pourquoi 62 % de taux d'insatisfaction?

Bien, c'est parce que, dans le concret, M. le Président, la famille, là, ce qu'elle a vu arriver, ce qu'elle a vu arriver, c'est l'augmentation des tarifs. Ce qui s'est vu, c'est que vraiment on a laissé... puis on a diminué l'effort gouvernemental envers un réseau de services de garde. Ce qui est arrivé en 2004, c'est qu'il y a eu justement plus d'endettement étudiant. Ce qui est arrivé en 2004, c'est qu'il y a eu aussi des hausses de tarif pour les garderies en milieu scolaire. Les parents ont beau entendre les discours, ce qu'ils voient, là, dans le concret des choses, ils voient bien que leurs tarifs d'hydroélectricité ont augmenté, ils voient bien que les tarifs de transport en commun ont augmenté, ils voient ces choses-là aussi arriver.

Alors, on a beau leur dire, là, qu'ils ont eu 1 milliard, supposément, dans leurs poches... De un, ils ne l'ont pas vu arriver, puis je les comprends, parce qu'il n'arrivera pas avant janvier prochain, ou le 15 décembre, mais il n'arrivera pas avant janvier prochain, puis, pour le reste, ce qui est arrivé tout de suite, c'est les hausses de tarifs. Alors, présentement, M. le Président, lorsqu'on calcule les hausses de tarifs, lorsqu'on regarde la pression que le gouvernement a faite sur l'aide aux familles, le gouvernement est en dette envers la population du Québec, le gouvernement est en dette envers les familles du Québec, pour environ 1 milliard. Il nous dit: À partir du mois de janvier 2005, ils vont retourner le milliard. Wow! Pour tout de suite, là, on n'a toujours pas... on a juste... mon collègue de Vachon reviendra là-dessus, mais on a à peine remboursé la dette pour ce qui est de 2005, et, même lorsqu'on fait des calculs plus serrés par rapport à ce qui est demandé en termes de tarifs et ce qui est offert en termes de chèques, bien, encore là, il faut se questionner.

Ce qu'on comprend du projet de loi, M. le Président, c'est que c'est un projet de loi qui transforme l'aide aux familles pour en amener un autre type. C'est un projet de loi qui abroge. Comme ici, la loi abrogée, c'est la Loi sur les prestations familiales. On abroge des lois, on en transforme, on remplace une loi par une autre. C'est un peu ce qui est fait là. Ce qu'on fait, c'est que l'aide qui était donnée aux familles sous l'aide de crédits d'impôt parfois va maintenant arriver sous format de chèques. Alors, on mise beaucoup sur la visibilité du chèque. Et elle est importante, cette visibilité-là, parce qu'un gouvernement qui n'a toujours pas livré de politique familiale, un gouvernement qui... À ce que je sache, les consultations, le grand débat public là-dessus n'est toujours pas enclenché. Un gouvernement qui donc ne donne pas d'orientations en termes de vision de où on veut aller collectivement avec une politique familiale, avec l'aide collective aux familles, bien, à défaut d'avoir une vision, opte pour la visibilité, le chèque. Les parents du Québec verront un chèque et, en recevant ce chèque-là, vont se dire: Ah, que j'ai un bon gouvernement qui m'aide donc, en termes de famille. Mais les parents du Québec, en plus de recevoir le chèque, comme je vous dis, savent très bien qu'il y a une série de tarifications, savent très bien qu'il y a une série de factures qui vient avec.

Et, M. le Président, cette année de la famille là, 2004, avant de tomber sur 2005, il faut aussi se rappeler qu'il y a eu des projets de loi qui ont eu pour effet de fragiliser certains travailleurs, il y a eu des projets de loi qui ont eu pour effet d'empêcher certaines catégories de travailleurs, certaines catégories de citoyens de se syndiquer. Alors, il y a eu des interventions aussi qui n'étaient pas des interventions qu'on pourrait dire qu'elles profitent pour la famille, parce qu'une des choses qu'on regarde lorsqu'on veut fonder une famille, c'est: Est-ce que j'ai une stabilité économique? Et, lorsqu'on regarde d'autres projets de loi qui n'ont peut-être pas un lien direct avec le projet de loi n° 70 mais qui sont certainement en lien avec le discours qu'on nous sert depuis tout à l'heure sur le fait que ce gouvernement-là est tourné vers les familles, bien on doit comprendre que non seulement, pour ce qui est des tarifs et de l'effort auprès des familles, on avait une déficience de ce côté-là pour ce qui est de 2004, mais, en plus, les autres projets de loi qui auraient pu, par la bande, aider les familles en les stabilisant en emploi, en leur donnant des ressources pour justement aller de l'avant et fonder des familles, aller de l'avant et répondre aux demandes du rapport Bernier pour toutes les nouvelles familles qui... bien souvent, ce sont des jeunes, et les jeunes, on le sait, M. le Président, c'est bien souvent les personnes qui sont en emploi atypique, qui sont contractuelles, qui sont à temps partiel, tellement qu'on avait, nous, là, là où on était, à l'époque où on était au gouvernement, demandé un rapport, qui est arrivé au début de l'année 2003, un rapport qui s'appelle le rapport Bernier, qui justement nous dit à quel point il y a une aide et des conditions, des conditions sociales qu'on doit ajuster et adapter par rapport aux nouveaux travailleurs et aux nouvelles travailleuses.

Bien, toutes ces interventions-là, les suites du rapport Bernier pour les travailleurs et travailleuses atypiques, les interventions pour empêcher certains citoyens de se syndiquer, des interventions qui fragilisent les citoyens notamment en favorisant la sous-traitance, bien c'est un paquet d'interventions qu'on peut dire... Et on pourra calculer ? peut-être pas aujourd'hui mais certainement dans quelques années ? l'impact que ça aura sur la famille, l'impact que ça aura sur les générations et leur capacité de se faire le plus beau cadeau du monde, c'est-à-dire de se fonder une famille.

Ça, c'était pour 2004, l'année de la famille, mais là le ministre nous dit: Maintenant, écoutez... Peut-être qu'il ne nous le dit pas, mais, dans sa tête, il doit se dire: Bien, là, 2004, finalement, c'était l'année des couches, là. Alors, je veux dire que 2005 sera l'année de la famille. Et là on regarde 2005 arriver, et là on peut dire, là: Il y a une bonne nouvelle, là, mais vraiment, là, il y a une très bonne nouvelle pour les Québécoises et les Québécois, il n'y aura pas d'indexation du tarif de services de garde. Le service de garde restera à 7 $, et ça, on appelle ça une bonne nouvelle. C'est quoi, la bonne nouvelle? C'est: Le gouvernement, là, on vous a fait mal l'an passé en passant de 5 $ à 7 $; cette année, on ne vous fera pas mal. Avouez qu'on est fins! C'est un peu ça que le gouvernement est en train de dire: On vous donne une bonne nouvelle, là, on ne vous indexera pas. C'est-à-dire on ne vous fera pas mal cette année, remerciez-nous, s'il vous plaît.

Voyons donc! Les parents, ils se disent, là: Écoute, là, ce n'est pas vraiment comme ça que ça marche dans la vie, là. Je veux dire, moi, déjà que je suis passé de 5 $ à 7 $ par jour... Déjà, certains CPE, lorsque questionnés... Notamment, dans le coin de Sherbrooke, on avait une directrice de centre de la petite enfance qui nous disait: Bien, depuis l'arrivée du 5 $ à 7 $, ce que j'ai vu, c'est que j'ai vu fondre mes listes d'attente. Pourquoi? Bien, parce qu'il y a des parents qui se retirent de ces services-là. Il y a des parents que ce montant-là a fait qu'ils ne peuvent plus aller vers le service. Mais là, cette année, on rassure les parents, on va demeurer à 7 $, et ça, c'est supposé être une bonne nouvelle pour 2005, qui sera maintenant la nouvelle année de la famille. Alors, là-dessus, c'est comme ça qu'on... c'est ça qu'on nous dit. C'est ça qu'on nous dit, qu'on a devant nous un gouvernement qui est tourné vers les familles.

Maintenant, toute la semaine, j'ai entendu, dans nos débats qu'on a eus, des répliques du ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille nous dire qu'une chance que les familles ont le Parti libéral du Québec. Après la démonstration que je viens de faire par rapport à 2003, 2004 et ce qui arrive pour 2005, on peut bien comprendre, là, que ces propos-là, mis dans leur contexte, prennent une toute autre saveur. Lorsqu'on nous dit, de l'autre côté, que toutes les familles sortiront gagnantes, on doit comprendre, M. le Président, à la lueur aussi de l'historique que j'ai fait, qu'à un moment donné les familles espèrent être gagnantes de quelque chose à un moment donné. Et, lorsqu'on nous dit que l'année 2005 sera l'année de la famille, bien, moi, ce que je vous dis, c'est qu'on annonçait en 2003 que 2004 était pour être l'année de la famille, et finalement c'était l'année des couches. Et là qu'en 2004 on nous annonce, tarif après tarif, que l'année 2005 s'annonce pour être l'année de la famille, bien je vous dis: Tant l'année 2004 était l'année des couches, je pense que 2005 sera l'année des douches. Pourquoi les douches? Parce que, tarif après tarif, ce gouvernement-là s'est assuré de laver les citoyens. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je remercie M. le député de Joliette et je reconnais maintenant...

Une voix: ...

n(16 h 10)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je dois demander au député de Joliette: Est-ce que vous acceptez qu'on vous interrompe pour une question courte, avec une réponse courte, en vertu de l'article 213? C'est oui ou non. Alors, M. le député n'accepte pas. Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de Vachon. Alors, M. le député de Vachon, pour votre intervention.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Mes deux collègues de Gaspé et de Joliette, je pense, ont longuement analysé le projet de loi n° 70. Vous me permettrez de faire un peu plus court, je suis sûr, au grand soulagement de nos collègues d'en face. Mais laissez-moi quand même souligner quelques aspects du projet n° 70 qui soulèvent l'inquiétude. D'abord, 70, on vient avaliser dans le fond, hein, le budget avec 70, dans le sens où on permet au législateur de se donner le moyen d'appliquer un certain nombre de décisions qu'on aura prises dans le budget, et le ministre du Revenu est imputable donc de voir à ce que ça fonctionne bien.

M. le Président, je veux revenir un tout petit peu sur un aspect du budget que l'on a déjà longuement discuté cette semaine, mais je voudrais revenir un petit peu là-dessus parce que ça touche directement les personnes les plus démunies de notre société. Le budget n'a rien prévu, absolument rien en termes de couverture des besoins essentiels des personnes les plus démunies. Et je regarde le ministre du Revenu, là, qui doit maintenant appliquer dans 70 les prévisions budgétaires, il doit comprendre qu'en faisant ça il vient appuyer son collègue dans une omission extrêmement importante: nulle part dans ce budget n'a-t-on pensé à améliorer le sort des plus démunis, notamment en ce qui concerne la prestation des personnes qui sont sans contraintes à l'emploi, sinon que, dans le plan d'action du gouvernement en matière de lutte à la pauvreté, on a prévu une demi-indexation par rapport à l'augmentation du coût de la vie.

M. le Président, ce n'est pas un enrichissement, une demi-indexation, c'est un appauvrissement. Il faut bien comprendre que, lorsque le coût de la vie augmente de 1 $ et qu'on ajuste les prestations seulement à la moitié de cette augmentation-là, bien on vient de s'appauvrir par rapport à ce qui se passe dans le reste de la société. Lorsque le beurre augmente, il augmente pour tout le monde, puis c'est la même chose pour les bananes. Alors, dans ce sens-là, M. le Président, je ne peux pas faire autrement que de souligner à nouveau devant le ministre du Revenu, qui s'apprête à nous faire ses remarques finales vis-à-vis du budget qu'il doit défendre à travers 70, la loi n° 70, je ne peux faire autrement que de lui souligner combien importante cette omission est et combien lourd est le poids qu'il porte maintenant sur ses épaules dans son acceptation de ce que le ministre des Finances lui refile comme responsabilité.

Et pour bien dire, M. le Président, non simplement nous avons... non seulement nous avons une omission importante quant à l'augmentation des prestations en tant que telle, mais nous avons aussi un appauvrissement avec la demi-indexation. Et, lorsqu'on parle d'un appauvrissement avec la demi-indexation, on parle de personnes qui sont sans contraintes à l'emploi, qui dépassent facilement le 150 000, 160 000 en tout et partout, y compris les mères de famille monoparentale qui ont de jeunes enfants de moins de cinq ans et y compris les hommes et les femmes de 55 ans et plus qui sont considérés comme présentant une contrainte temporaire à l'emploi.

Plus que ça, le budget n'a pas prévu quelque part un respect, fondamental en démocratie, d'une promesse faite par des gens qui voulaient se faire élire au gouvernement, celui de la gratuité des médicaments pour les personnes inscrites à l'aide sociale ou encore les personnes âgées qui ont des revenus faibles. M. le Président, c'est une promesse qui avait été faite sur papier, sur lettre signée par le premier ministre, qui était à l'époque chef de l'opposition, en pleine campagne électorale, ce qui ne soustrait pas un candidat ou un chef de parti de ses responsabilités et de son imputabilité. Lorsqu'on signe une lettre comme celle-là et qu'on l'envoie à Mme Morval, qui était à l'époque présidente d'ATD Quart Monde, en lui certifiant que c'était une mesure urgente que celle de proposer la gratuité des médicaments aux personnes les plus démunies de notre société, qu'on s'y engage comme chef de parti et qu'on prétend éventuellement gagner le respect des citoyennes et des citoyens eu égard à un engagement politique, il me semble que la première chose qu'on fait, c'est qu'on respecte son engagement, ce qui n'a pas été fait dans ce budget. Et on a des indications comme quoi ? et le ministre de la Santé nous le disait ? ce sera possiblement dans le mandat. On verra bien. Mais ce qui était urgent est devenu désormais une possibilité qui va se présenter peut-être, oui ou non, selon les disponibilités financières ou budgétaires ou selon ce que conclura le ministre de la Santé en termes de politique du médicament.

Alors, vous voyez, M. le Président, on est loin des promesses, on est loin d'un soulagement de la misère et de la détresse économique et sociale avec ce budget. On n'a pas simplement fait ça, M. le Président, on a aussi coupé, dans ce budget. Et je le souligne au ministre du Revenu, qui n'a sans doute pas tous les détails du budget en mémoire, qu'on a coupé aussi, M. le ministre, 30 millions en matière de programmes de formation et d'insertion en emploi. Pourtant, voilà un gouvernement dont vous faites... dont le ministre fait partie, qui prétend inciter à l'effort et récompenser l'effort, comme si les gens, premièrement, n'avaient pas la motivation de travailler. Mais, au-delà de ça, il nous dit: Puisque je veux récompenser l'effort, je veux inciter les gens à travailler, je vais bien sûr leur offrir des possibilités de le faire et de s'insérer ou de se former de façon à pouvoir occuper un emploi. Ça, c'est le discours.

Mais, dans le budget, dans le budget, une coupure de 30 millions qui suit une coupure de 27 millions faite l'année précédente: 57 millions de coupures à Emploi-Québec en deux ans. Et ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire une baisse systématique dans l'offre de services pour les personnes qui sont les plus éloignées du marché du travail. Ça veut dire 14 % de moins d'offre de services pour ces personnes, alors que les gens disaient qu'il n'y en avait déjà pas assez. Alors, c'est ça, le budget, aussi, là. Il ne faut pas regarder seulement les aspects qui nous réconfortent en tant que parlementaires.

C'est sûr que la Prime au travail, il n'y a personne en tant que tel ici qui peut être contre ça. Qui peut être contre la vertu? C'est très bien, c'est tant mieux, c'est une bonne orientation, et nous l'avons même proposée au gouvernement dans les papiers qu'ils ont trouvés dans leurs bureaux en arrivant au ministère de la Famille, de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Ils ont même trouvé ça. Ils l'ont empruntée, l'idée, puis ils l'ont appliquée. Tant mieux. Mais il ne faut pas prendre d'une main ce qu'on a donné de l'autre, et c'est ce qui se passe dans ce budget. Et, lorsque j'écoutais le député de Montmorency s'enflammer tout à l'heure et citer des exemples, bien, hier, le ministre de la Famille, de l'Emploi et de la Solidarité sociale nous disait qu'il n'y avait pas de familles perdantes, dans le design, dans son nouveau scénario d'offre de Soutien aux enfants et de Prime au travail. Ce n'est pas exact. Ce n'est pas exact.

Et nous avons souligné, ce matin, durant la période de questions, que les familles monoparentales d'un enfant, de deux enfants, à 40 000 $, perdaient 164 $ et 274 $ respectivement une fois soustraite l'augmentation des tarifs de toute espèce. Nous l'avons souligné ce matin, à la période de questions, et le ministre de la Famille n'a pas été capable de répondre à cela correctement. Tout ce qu'il nous répétait, il nous relisait le budget. C'est beau, le budget, sauf que, si par ailleurs vous avez un autre arbre décisionnel à côté qui prend, qui vient prendre ce qu'un premier a donné, bien, au bout du compte, les familles, là, elles ne s'en trouvent pas mieux, M. le Président. Là, on cite, à 40 000 $, les familles monoparentales, les familles biparentales, c'est la même chose, à 40 000 $, un ou deux enfants, elles perdent. Elles perdent, si on regarde l'ensemble des politiques gouvernementales à l'égard des familles et des contribuables. Alors, disons que, d'une certaine façon, M. le Président, c'est assez accablant de se voir présenter qu'un seul côté de la médaille.

En ce qui concerne l'action communautaire, on n'en a pas parlé encore, je pense, mais, dans ce budget, pas un sou supplémentaire, pas un. Dans le Plan d'action gouvernemental en matière d'action communautaire, on nous annonce une augmentation zéro pour le prochain budget. Et on nous dit: Les gens iront éventuellement se chercher des subventions chez les philanthropes. Et ce qu'on va faire, c'est qu'on va leur demander de procéder à des évaluations systématiques et rigoureuses qui convaincront éventuellement les partenaires privés d'investir davantage dans l'action communautaire. Alors, on se dirige tranquillement vers un délestage du gouvernement vers le privé aussi dans ce domaine-là, M. le Président. Mais nous reviendrons là-dessus au cours de la session, c'est trop important.

n(16 h 20)n

Dernier item, M. le Président, parce que je vous avais indiqué que je ne serais pas long. Et j'essaie de ne pas être redondant avec mes collègues, mais je veux quand même revenir sur l'annonce du ministre de la Solidarité sociale en ce qui concerne les chèques qui vont être livrés dans nos familles le 15 décembre prochain. Alors, on a devancé le premier versement du programme Soutien aux enfants. Je me suis levé dans cette Chambre, M. le Président, pour indiquer que c'est un cadeau empoisonné. Donc, je cite, et je disais au ministre: «Est-ce qu'il ne voit pas que ces familles seront coincées entre les pressions à la consommation du temps des fêtes pour devoir ensuite attendre, jusqu'au 1er avril 2005, le chèque de Pâques?» Là, c'est le chèque de Noël, là, mais là ça va être le chèque de Pâques beaucoup plus tard. Et le ministre me disait: Ah! mais je pense que finalement le député de Vachon est jaloux, il aurait aimé ça faire ça à ma place.

Bien, ce matin, là, ça a l'air que je ne suis pas... aujourd'hui, ça a l'air que je ne suis pas le seul jaloux, hein? L'Association coopérative d'économie familiale de la Rive-Sud, suivant en cela l'Association coopérative d'économie familiale de Lanaudière, a émis un communiqué indiquant que c'était un cadeau empoisonné. Et je vais vous lire, M. le Président, si vous me permettez, un extrait d'un article qui porte sur cette déclaration des ACEF Rive-Sud, Un cadeau empoisonné ? Soutien aux enfants devancé, tout simplement pour mieux expliquer ce que ça veut dire pour ces familles.

Alors, j'ouvre les guillemets: «Là où le bât blesse, c'est que cet argent représente une part importante du budget mensuel des familles à faibles revenus. Or, elles recevront un "gros chèque" en décembre, à la veille de Noël, et puis plus rien avant avril.

«Il sera fort tentant pour les plus démunis de s'offrir un peu de confort supplémentaire à l'approche des Fêtes. "Quand tu es étouffé jusqu'au cou ? nous disent les représentants des associations coopératives d'économie familiale, qui donnent des services directement auprès des familles les plus démunies, Mme la députée de Jean-Talon, et qui les connaissent bien et qui savent bien dans quel dilemme elles seront placées ? quand tu es étouffé jusqu'au cou et qu'un peu d'air frais arrive, tu as le goût de respirer", plaide Thérèse Richer, conseillère à l'ACEF.

«"C'est beaucoup demander aux familles au niveau des émotions." Pour les familles les plus démunies, cet argent-là aide à payer le loyer, l'électricité, l'épicerie ? qui, en passant, l'épicerie qui a augmenté grâce au vote de nos amis d'en face ? bref, les dépenses incontournables. "On connaît les énormes besoins qui ne sont pas comblés quand on vit sous le seuil de la pauvreté."»

Alors, M. le Président, ce n'est pas une coquetterie que de dire que le père Noël, le père Noël a peut-être manqué son coup, là. Dans le sens que, s'il veut vraiment être généreux, il aurait pu annoncer en même temps que son chèque du 15 décembre un autre chèque supplémentaire le 15 janvier, et là ça aurait été un véritable cadeau pour les familles démunies. Là, ça aurait été un véritable cadeau, qu'ils ajoutent dans la cagnotte. Ils veulent faire ce qui apparaît comme un cadeau, bien il faut ajouter quand on donne un cadeau, M. le Président. Il ne faut pas prendre dans la poche de l'individu son truc puis lui donner d'une façon un peu plus précipitée qu'on l'avait prévu. Il faut ajouter quelque chose pour que ce soit un cadeau. Et, dans ce cas-là, il n'y en a pas, de cadeau. Au contraire, on a introduit dans la vie de ces familles-là peut-être, quelque part, un souci, ou une détresse, ou un stress supplémentaire.

M. le Président, je terminerai là-dessus, mais je demanderai aux collègues d'en face d'être prudents en ce qui concerne leurs affirmations lorsqu'ils parlent du soutien qu'ils offrent aux enfants et aux parents. Et je soulignerai un dernier item qui me paraît très important, que j'ai toujours eu à l'oeil depuis que je suis impliqué à la fois en recherche et en politique, c'est le développement des très jeunes enfants, M. le Président. Et mon collègue de Joliette faisait état tout à l'heure de l'augmentation des tarifs en services de garde. Il faisait état du fait que de nombreuses familles avaient décidé de retirer leurs enfants des services de garde étant donné l'augmentation des tarifs, qui avait été, soit dit en passant, qui avait été vue comme une impossibilité électorale, dans le temps, par le Parti libéral. Bien, M. le Président, j'ai bien peur que ces familles qui décident de ne plus envoyer leurs enfants en services de garde le font contre leur gré, tout simplement parce qu'ils savent très bien que ces environnements sont des environnements fantastiques pour leurs enfants, où ils rencontrent d'autres enfants, où il y a des programmes de stimulation pour les enfants, où on explore l'environnement dans un environnement sécuritaire, etc., et que c'est très, très, très important que leurs enfants puissent goûter à ce genre d'environnement et puissent en profiter avant qu'ils n'arrivent à l'école. Et ça, c'est une atteinte directe à un droit fondamental de tous les enfants de pouvoir éventuellement affronter la vie à partir d'une même position quant à leurs chances de réussir. Je terminerai là-dessus, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député de Vachon. Et je ne vois pas d'autre intervenant. Donc, je reconnais M. le ministre du Revenu pour son droit de réplique. Alors, M. le ministre du Revenu.

M. Lawrence S. Bergman (réplique)

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. le Président, j'aimerais tout d'abord remercier mes collègues sur le côté ministériel pour leur appui en ce vendredi après-midi, et en particulier mon adjoint parlementaire, le député de Montmorency, pour ses conseils sur l'analyse de ce projet de loi et pour ses remarques cet après-midi.

On vient d'écouter le député de Gaspé, qui nous a parlé d'évasion fiscale, le député de Joliette, qui manifestement s'ennuie de son poste comme critique pour la famille, et le député de Vachon. J'aimerais attirer à l'attention du député de Vachon les conclusions du Conference Board of Canada, qu'on a lues dans la Gazette, mardi le 9 novembre 2004, et l'analyse qui a été faite par Marie-Christine Bernard, où elle a indiqué, M. le Président, la croissance économique au Québec, l'amélioration positive par rapport à celle d'Ontario. Elle fait la comparaison en termes per capita et elle nous montre qu'il y une amélioration, au Québec, de 2,4 % par rapport à l'Ontario, où l'amélioration était seulement à 2,1 %, et, à travers le Canada, de 2,3 %. Elle attire notre attention, M. le Président ? le Conference Board of Canada et l'analyse qui a été faite par Marie-Christine Bernard ? aux revenus personnels des contribuables québécois, qui s'améliorent plus rapidement que ceux des résidents de l'Ontario et, pour l'année prochaine, plus rapidement, M. le Président, que la moyenne canadienne. Pourquoi? Une des raisons, et la raison principale qu'elle attire notre attention pour cette amélioration, c'est que c'est le budget du ministre des Finances du 30 mars 2004. Et je me demande pourquoi le député de Vachon n'a pas fait référence avec cette étude du Conference Board of Canada où Mme Bernard attire notre attention sur les bénéfices de ce budget, et en particulier les mesures pour le Soutien aux enfants et la Prime au travail.

En ce qui concerne les chèques qui seront remis le 15 décembre, M. le Président, oui, on a devancé les dates, et je me demande où est le sens de compréhension, où est le sens de compassion du député de Vachon, sachant les besoins des Québécois au temps des fêtes. Et, deuxièmement, M. le Président, j'ai confiance dans ceux qui vont recevoir ces chèques pour qu'ils gèrent leur budget personnel, et c'est une confiance qui semble... le député de Vachon manque, dans les personnes qui vont recevoir ces chèques.

Ainsi, M. le Président, 547 millions de dollars retourneront dans les poches des familles en mettant en place le Soutien aux enfants. 243 millions de dollars iront aux travailleurs du Québec par la Prime au travail. Et enfin 219 millions de dollars iront à l'ensemble des contribuables québécois par la simplification du régime fiscal. M. le Président, tel que je l'ai mentionné un peu plus tôt, les mesures du Soutien aux enfants et la Prime au travail auront des effets des plus bénéfiques pour la plupart des ménages québécois. Laissez-moi vous en convaincre par des exemples.

n(16 h 30)n

Une famille monoparentale comptant un enfant et un revenu de travail de 20 000 $ aura droit à 2 700 $ grâce au Soutien aux enfants, 1 160 $ par la Prime au travail, pour un total de 3 860 $. Cela constitue, M. le Président, un allégement fiscal en fin d'année de 2 432 $. Je suis convaincu, M. le Président, que les députés de l'opposition seront d'avis qu'un tel montant sera des plus appréciés par ces familles monoparentales, puisque, dans ces cas précis, M. le Président, cela équivaut à une hausse de salaire de 12 %. Un couple, M. le Président, ayant deux enfants et un revenu familial de 25 000 $, en 2005, aura le droit à la somme de 3 000 $ grâce au Soutien aux enfants; il recevra aussi, M. le Président, 1 780 $ par la Prime au travail, pour un total annuel de 4 780 $. Cela constitue, M. le Président, un allégement de 4 004 $. Vous conviendrez avec moi, M. le Président, qu'un tel montant permet aux familles à faibles revenus de mieux respirer.

Ainsi, M. le Président, je vous dis que les mesures principales incluses dans le projet de loi n° 70 apportent une aide généreuse aux familles et aux travailleurs du Québec. Comme je viens de vous démontrer, le Soutien aux enfants et la Prime au travail sont des mesures qui remettent de l'argent directement dans les poches des contribuables. Il s'agit donc de mesures qui posent des balises, affirment des valeurs et orientent notre action.

M. le Président, le député de Gaspé a parlé longtemps sur la question de récupération fiscale et l'évasion fiscale. J'aimerais lui démontrer que les chiffres de ce gouvernement, depuis que nous sommes en gouvernement, depuis avril 2003, se sont améliorés par rapport au gouvernement précédent. Dans le sens de la récupération fiscale, pour l'année 2002-2003, la dernière année de l'ancien gouvernement, le chiffre était 1 285 000 000 $. Pour l'année 2003-2004, notre première année d'arrivée en gouvernement, le chiffre était 1 362 000 000 $, une augmentation, M. le Président, une amélioration de 77 millions de dollars. Pour les premiers mois de cette année, du 1er avril 2004 au 30 septembre 2004, le chiffre est de 763 millions de dollars. Alors, on voit que c'était encore une amélioration par rapport aux résultats obtenus par l'ancien gouvernement.

Je peux assurer le député de Gaspé que la lutte contre l'évasion fiscale, dans la section des transactions financières, aura une amélioration aussi. Nous avons deux programmes, un en ce qui concerne les placements et investissements et un deuxième en ce qui concerne les indices boursiers. Et ces deux programmes, M. le Président, où... dans la section de placements et investissements, où il y a dans... beaucoup d'écart, un manque de déclarations des revenus provenant des placements en ce qui concerne les gains en capital, les revenus d'intérêts et de dividendes et les revenus payés aux détenteurs d'obligations et de bons de Trésor. Nous avons un programme spécial que l'ancien gouvernement n'avait pas, et la projection, pour l'année 2005-2006, est 36 millions de dollars pour le gouvernement.

En ce qui concerne l'indice boursier, M. le Président, il y a à peu près 3 000 contribuables qui font des transactions de plus de 1 million de dollars, à chaque année, en ce qui concerne les transactions en actions, obligations et bons du Trésor, et présentent des indices de richesse anormalement élevés par rapport aux revenus déclarés, et/ou ayant omis de produire des déclarations de revenus. Nous avons un programme spécial en l'aspect des indices boursiers, et la projection, pour l'année 2005-2006, est 25 millions de dollars. Alors, M. le Président, je peux assurer le député de Gaspé que nos chiffres, nos programmes montrent une amélioration incroyable sur les chiffres de la dernière année du gouvernement précédent, duquel M. le député de Gaspé était membre.

Alors, M. le Président, en conclusion, je suis confiant que l'instauration de Soutien aux enfants, de Prime au travail, du régime unique d'imposition des particuliers, contenus dans ce projet de loi, est des plus avantageuse pour toute la population québécoise. Le gouvernement du Québec est convaincu que ces allégements fiscaux sauront rendre notre régime plus moderne et répondront aux besoins et aux attentes des Québécois et Québécoises. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le ministre et député de D'Arcy-McGee. Alors, est-ce que... Le principe du projet de loi n° 70, Loi donnant suite au discours sur le budget du 30 mars 2004 afin d'introduire des mesures de soutien aux familles ainsi qu'à certains autres énoncés budgétaires, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la Commission des finances publiques

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission des finances publiques pour étude détaillée, s'il vous plaît.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Cusano): Est-ce que la motion du leader adjoint du gouvernement est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Est-ce que vous pourriez prendre en considération l'article 2 de notre feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 57

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'article 2, l'Assemblée reprend le débat ajourné par le leader adjoint du gouvernement, le 2 décembre 2004, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Alors, je suis prêt, à ce moment-ci, de reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Bertrand.

M. Claude Cousineau

M. Cousineau: Merci, M. le Président. M. le Président, moi aussi, je me fais un devoir, comme mes confrères de l'opposition officielle, de prendre la parole sur le projet de loi n° 57 dénoncé par un très grand nombre d'intervenants.

M. le Président, pourquoi s'opposer au projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles? Eh bien, M. le Président, pour des raisons fondamentales, des raisons de solidarité, des raisons de manque de concordance avec l'esprit de la loi n° 112, loi-cadre votée, en décembre 2001, unanimement par les trois partis politiques ici présents, à l'Assemblée nationale sans partisanerie, votée dans un esprit de respect et de solidarité envers les plus démunis de notre société.

M. le Président, le projet de loi n° 57, présenté par le ministre de la Solidarité sociale, ne répond pas à la volonté des parlementaires de faire du Québec une terre où toutes les actions posées par l'Assemblée nationale le sont en se préoccupant des effets qu'elles auront sur les plus démunis de notre société.

Je lisais dernièrement une lettre, signée le 7 avril 2003, par l'actuel premier ministre, alors chef de l'opposition officielle, qui tentait de s'accaparer les honneurs de la loi n° 112, même si cette loi a été déposée, rappelons-le, par le gouvernement du Parti québécois. Voici ce que disait le député de Sherbrooke dans sa lettre, et je cite: «...cette loi s'inspire largement des valeurs de justice sociale qui animent l'action politique du Parti libéral du Québec.» Il ajoutait dans sa lettre adressée à Mme Monique Morval, présidente du Mouvement ATD Quart Monde: «Nos engagements prévoient déjà l'adoption de certaines mesures urgentes, dont la gratuité des médicaments pour les personnes âgées avec des revenus les plus faibles et les personnes assistées sociales.» Promesses d'élection, M. le Président. Aucune de ces mesures n'ont été mises en place. Le projet de loi n° 57 est muet à cet égard.

De plus, M. le Président, le crédit d'avoir voté la loi n° 112 sur l'élimination de la pauvreté n'appartient pas à un parti politique en particulier, il appartient aux gens du Collectif pour un Québec sans pauvreté et à sa valeureuse présidente Vivian Labrie qui, avec de nombreux bénévoles, ont parrainé une pétition de 215 000 pétitionnaires déposée ici, à l'Assemblée nationale du Québec, réclamant cette loi. Par leur action, ils ont conscientisé les parlementaires à une réalité troublante, celle d'avoir à vivre avec des revenus maigres, insuffisants pour avoir accès aux services essentiels pour pouvoir vivre décemment.

Le projet de loi n° 57, M. le Président, malheureusement, même avec les amendements apportés par le ministre, ne répond que très partiellement aux objectifs de la loi n° 112, loi sur l'élimination de la pauvreté. Ce projet de loi crée un régime à quatre programmes. Il catégorise les démunis. Il stigmatise un groupe par rapport à l'autre. Il crée des programmes spécifiques présentant des difficultés particulières, lesquelles seront gérées d'une façon discrétionnaire par le ministre.

M. le Président, le premier programme du ministre, visant les personnes sans contraintes sévères à l'emploi, fait l'objet de nombreuses critiques, puisqu'il prévoit une indexation de 50 %. Cette décision aura pour effet, M. le Président, d'appauvrir davantage les prestataires les éloignera de plus en plus d'une éventuelle couverture des besoins essentiels.

n(16 h 40)n

M. le Président, le ministre a bien présenté des amendements sur ce sujet en début de semaine, mais l'amendement qu'il a présenté n'en était pas vraiment un. Il dit que 50 % d'indexation pourra... augmenter si et seulement si les conditions financières du gouvernement le permettent. Cela laisse entendre que ce n'est pas nécessairement une priorité pour l'instant. Si les finances sont trop serrées, ce type de pauvres n'est pas une priorité. Ces démunis aptes au travail devront attendre que le gouvernement se refasse une santé financière avant d'indexer leurs prestations.

M. le Président, le ministre dira sûrement que le Parti québécois, lorsqu'il était au pouvoir, il n'y avait pas d'indexation, mais je lui rappelle que c'est son gouvernement qui est au pouvoir depuis plus d'un an et demi, autour de 20 mois, et qu'il devrait prendre toutes les précautions législatives, immédiatement, dans son projet de loi n° 57, pour empêcher que lui-même ou ses successeurs ne viennent annuler complètement ou partiellement les indexations.

M. le Président, j'ai vécu comme parlementaire une expérience traumatisante, surtout gênante, dans le courant du mois de novembre ? vous vous souvenez, je crois que vous étiez présent ? dans le cadre d'un déjeuner-causerie, au début du mois de novembre, organisé ici, au Parlement, par les gens du Collectif pour un Québec sans pauvreté. Une vingtaine de députés des trois formations politiques y ont participé avec, comme animatrice, Mme Labrie et des personnes du Collectif. Nous avons vécu des mises en situation difficiles à vivre.

En ce qui me concerne, on m'a placé dans la peau d'un prestataire d'aide sociale sans contraintes à l'emploi avec en main un très beau chèque de 533 $ par mois. L'exercice, M. le Président, vous vous en souvenez, consistait à vivre le mois de novembre avec ce montant. Après trois jours, après avoir payé le loyer, 350 $ ? puis un loyer à 350 $, entre vous puis moi, bien, c'est vraiment le minimum ? Hydro-Québec pour le chauffage-électricité, 85 $, les assurances de toutes sortes, un 30 $, le téléphone, un 30 $, Bell Canada, pour un total de 505 $ en tout, il me restait, lors de cet exercice, un montant de 28 $ au 3 novembre, je vous le rappelle, M. le Président, pour le reste du mois, pour payer la nourriture, les vêtements, les médicaments nécessaires, parce qu'on sait que les personnes dans le besoin sont beaucoup plus susceptibles d'avoir des problèmes de santé à cause des nombreux tracas de tous genres qui causent nécessairement des problèmes d'anxiété, donc de santé, en plus de besoins ponctuels, des soins ponctuels comme les soins dentaires, les soins visuels, et j'en passe. Vous comprendrez, M. le Président, qu'après une semaine et demie, à partir du début du mois, soit vers le 8 et le 9 novembre, le prestataire que j'étais durant l'exercice n'avait plus un sou en poche pour vivre, zéro cenne, alors qu'il restait encore un trois semaines pour se rendre à la fin du mois de novembre.

J'ai vécu cette expérience avec émotion et honte de voir que, dans une société comme la nôtre, ici, au Québec, supposément riche, on se questionne toujours, à savoir si nous allons indexer, en partie à 50 %, à 60 %, à 70 %, les prestations de ces démunis, dépendant des ressources financières du gouvernement, comme le précise le ministre dans son supposé amendement à l'article 53 du projet de loi n° 57. Encore une fois, il faut faire notre mea-culpa. Notre parti politique n'a pas appliqué cette mesure d'indexation automatique. Mais le ministre, M. le Président, je vous le rappelle, est en poste depuis maintenant bientôt 20 mois. C'est lui qui est aux commandes. Il présente ce projet de loi n° 57 sans corriger cette situation gênante et honteuse, lui qui avait pourtant décrié, avec ses confrères, cette situation lorsqu'il était dans l'opposition officielle. On voit, M. le Président, qu'il est plus facile de critiquer que de prendre ses responsabilités. Il est plus facile de voir le cure-dent dans l'oeil du voisin que de voir pour le ministre la poutre dans son propre oeil.

L'amendement proposé par le ministre n'en est pas un, M. le Président, c'est de la poudre aux yeux, une sortie par la porte de côté. Il s'est esquivé. Quelle honte! Les autres amendements apportés par le ministre, cette semaine, sont le résultat de pressions exercées par de nombreux groupes s'opposant au projet de loi n° 57, qui demandent, comme nous, comme l'opposition officielle, le retrait pur et simple de ce projet de loi, ainsi que... Il faut souligner le travail inlassable de l'opposition officielle et de son critique chevronné, le député de Vachon, pour faire plier le ministre et lui faire prendre conscience qu'il s'éloigne de l'esprit de la loi n° 112, loi-cadre pour lutter contre la pauvreté.

M. le Président, une autre particularité très discutable du projet de loi n° 57 est la mise en place de programmes spécifiques pour les personnes et les familles présentant des difficultés particulières ainsi que des programmes Alternative jeunesse. Ces mesures ont fait l'objet de vives critiques en commission parlementaire, car elles reposent entièrement sur le pouvoir discrétionnaire du ministre. Il est spécifié, aux articles 67 et 72, que la ministre peut établir des programmes d'aide financière spécifiques et déterminer les balises, les paramètres, les normes d'application de ces programmes à sa guise, selon son bon vouloir.

M. le Président, on voit ici une situation curieuse, qui laisse perplexe, voire même très discutable: toutes les obligations appartiennent aux prestataires, et les pouvoirs discrétionnaires, disons-le sans gêne, sont dans la cour du ministre. Nous nous retrouvons dans un contexte où apparaîtront des programmes disparates, où le principe fondamental d'égalité pour tous prend le bord, car il sera à la discrétion du ministre de décider ce qui est bon pour les uns et satisfaisant pour les autres. Le ministre a déposé des amendements concernant ces programmes spécifiques. Ce n'est pas la publication, comme dans l'amendement, à la Gazette officielle qui va le freiner dans l'utilisation de son pouvoir discrétionnaire.

M. le Président, le ministre a fait une autre sortie, cette semaine, devant les médias pour annoncer l'envoi de chèques aux familles du Québec. Dès le 15 décembre, juste avant Noël, le ministre se transforme en père Noël. Mais il a oublié de dire, en conférence de presse, devant les journalistes, que ce cadeau est pour compenser, en partie seulement, pour les nombreuses hausses de tarifs que nous connaissons depuis l'arrivée en poste de son gouvernement. Ce serait intéressant, M. le Président, de prendre connaissance de l'éditorial de Mme Breton, ce matin, dans le journal Le Soleil, Lettre au père [Noël] ? pour ne pas nommer le nom du ministre. Alors, c'est très intéressant de lire cette lettre-là.

Hausse de tarifs d'électricité, hausse de tarifs des services de garde de 5 $ à 7 $, 40 % d'augmentation, hausse des tarifs du transport en commun, et en plus s'ajoutent des sommes arrachées à des gens extrêmement vulnérables, comme la coupure de 100 $ pour les prestataires vivant chez leurs parents, l'abolition de certaines déductions fiscales pour les familles, augmentation des primes d'assurance médicaments. On donne d'une main, on arrache de l'autre, voilà la façon de faire de ce ministre et de ce gouvernement, M. le Président.

M. le Président, ce gouvernement, avec son ministre, nous a présenté un plan d'action de 2,5 milliards sur cinq ans. Après analyse et vérification, on s'aperçoit que ce plan n'est que de la poudre aux yeux. C'est un leurre, un écran de fumée, puisque, lorsqu'on le met en parallèle avec les nombreuses hausses de tarifs mentionnées auparavant et les nombreuses modifications apportées au régime fiscal touchant les familles, cela démontre très bien que ce plan virtuel sera autofinancé à même les coupures et les hausses de tarifs faites par ce gouvernement depuis 19 mois. C'est tout simplement scandaleux. En d'autres mots, M. le Président, on assiste habilement au transfert de sommes non pas d'un ministère à l'autre, mais d'une poche à l'autre du contribuable, en appauvrissant les familles. Ce sont les familles du Québec qui autofinancent ce plan d'action, qui a toute l'apparence d'un mirage.

M. le Président, le ministre a déposé son projet de loi n° 57 sans le dépôt de règlement s'y rattachant, ce qui a fait dire à de nombreux intervenants en commission parlementaire qu'il y avait là un manque flagrant de transparence. L'absence du règlement ne permet pas de juger de la portée du projet de loi à l'étude. De nombreux groupes entendus ont déploré ce manquement qui, à sa face même, témoigne d'un manque de respect envers les groupes communautaires oeuvrant auprès des plus démunis.

n(16 h 50)n

Beaucoup de faiblesses et d'incertitudes apparaissent dans ce projet de loi n° 57. Comme par exemple, il n'y a aucune indexation sur l'exemption du calcul des pensions alimentaires dans le montant de la prestation. Ce projet de loi annonce l'abolition du supplément de 111 $ versé aux prestataires de 55 ans et plus. Il retire, comme je l'ai mentionné auparavant, un montant de 100 $ pour les prestataires habitant chez leurs parents, disposition discriminatoire, qui ne tient nullement compte des cas spéciaux, puis il y en a beaucoup, comme par exemple, un bénéficiaire qui habite avec sa mère âgée et qui en prend soin comme un aidant naturel. La coupure de 100 $ à ce prestataire touchera non seulement cet individu, mais aussi la personne âgée qui, elle, a besoin de son revenu entier pour joindre les deux bouts. Une coupure à son enfant la forcera sans doute à mettre la main dans ses poches pour l'aider, ce qui automatiquement la pénalisera, elle, cette personne âgée. C'est faux de dire que c'est une question d'équité, comme le dit le ministre, c'est plutôt un moyen pour lui de récupérer un montant d'une poche du citoyen pour la mettre dans l'autre poche, en fragilisant un groupe au détriment de l'autre groupe.

M. le Président, l'opposition officielle s'oppose au projet de loi n° 57 parce que c'est un projet de loi frileux, qui est loin des objectifs de la loi n° 112, parce qu'il met en place des mesures de transfert de sommes d'argent d'une poche de contribuable vers l'autre, parce qu'il crée des classes de démunis en pénalisant un groupe au détriment de l'autre, parce qu'il crée une indexation à la carte, totale pour certains mais partielle pour les autres, comme si l'augmentation du coût de la vie était différente d'un groupe à l'autre, parce qu'il permet au ministre de décider d'une façon discriminatoire de la mise en place de programmes d'aide selon le bon vouloir du ministre. Pour toutes ces raisons, M. le Président, nous voterons contre ce projet de loi.

M. le Président, le ministre de la Solidarité sociale a une mission sociale des plus importantes à jouer. Il doit se montrer à la hauteur de sa tâche. Il doit être perfectionniste dans la mise en place de mesures pour lutter contre les embûches qui privent les plus démunis de notre société de services auxquels ils ont droit, des services essentiels, nécessaires pour leur sécurité, pour leur permettre de vivre décemment, la tête haute, dans la dignité.

Malheureusement, M. le Président, le projet de loi n° 57 manque la cible. Le ministre n'a pas vraiment écouté. Il n'a pas su décoder les besoins des gens les plus vulnérables. Il suffit de lire certains grands titres de journaux très révélateurs. J'en ai quelques-uns ici, M. le Président: Mobilisation contre un projet de loi monarchique et illégal; Les pauvres ont trop d'appétit, selon le ministre; Le froid s'intensifie entre le ministre et les plus démunis; Les fonctionnaires dénoncent le projet de loi. Des articles de journaux, il y en a eu tout l'automne, M. le Président.

Alors, M. le Président, malheureusement, comme je disais, le projet de loi n° 57 manque la cible. Le ministre n'a pas vraiment écouté. Il n'a pas su décoder le besoin des gens. Il suffit de lire les articles de journaux, comme je viens de vous le dire, en particulier Le Devoir qui dit: Les assistés sociaux continueront de s'appauvrir. Il est fait mention, dans l'article que le gouvernement libéral a oublié sa promesse d'indexation. Il s'est pourtant engagé durant la dernière campagne électorale. Le ministre n'a pas su convaincre son premier ministre et ses collègues de l'importance de tenir leur parole. Le ministre aurait dû faire amende honorable et corriger cette lacune majeure par un amendement ? mais non, le courage lui a manqué ? ou, encore mieux, retirer carrément son projet de loi, comme le demande de nombreux intervenants et l'opposition officielle.

En terminant, M. le Président, je profite de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui ? parce qu'on s'adresse à beaucoup de personnes sur le projet de loi n° 57, c'est un projet de loi qui touche les plus démunis de notre société ? pour souhaiter d'heureuses fêtes et une bonne année 2005 aux citoyens de Bertrand, en particulier ceux et celles qui s'occupent des plus démunis, les bénévoles puis les aidants naturels. Je vous rappelle, pour ceux de ma circonscription qui m'écoutent et pour les nombreux Québécois et Québécoises, qu'il y aura un immense travail de récolte... M. le Président, s'il vous plaît, est-ce que je peux avoir le silence dans le coin là-bas?

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Bertrand, je pense que... Oui, oui, l'article...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): 32? Alors, l'article 32 est invoqué. Je demanderais aux députés qui ne sont pas à leur place de bien regagner leur siège.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant. Est-ce que vous demandez le quorum ou l'article 32, M. le député?

Une voix: Le quorum... c'est-à-dire l'article 32, le décorum.

Le Vice-Président (M. Cusano): Le décorum. Alors, je demanderais aux députés qui ne sont pas à leur siège, qui a été assigné par la présidence, de bien vouloir regagner leur siège. Mais en vous rappelant, M. le député, que votre temps achève.

M. Mulcair: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Mulcair: Il y a une jurisprudence constante qui a commencé, en 1986, avec le président Saintonge. Et il y a une série d'une trentaine de décisions qui sont répertoriées dans votre guide, que vous avez devant vous, qui précisent d'une manière constante que, lorsqu'il y a un problème, effectivement le président peut, spontanément ou en réponse à une demande, exiger que les gens occupent le fauteuil qui leur a été assigné. Mais vous savez comme moi que cette jurisprudence est très lourde et dit que, tant qu'il n'y a pas de dérangement... Puis sérieusement, là, comme un des collègues vient de dire, on pouvait entendre une mouche voler, il n'y avait aucun dérangement. Si le député a de la difficulté à retenir ses idées, ce n'est pas de notre faute. Mais, nous, on ne faisait rien pour le déranger, ça, je vous l'assure.

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le leader adjoint du gouvernement, c'est qu'effectivement, si la présidence s'aperçoit qu'il y a un dérangement, c'est la responsabilité de la présidence justement d'invoquer l'article 32. Mais je dois aussi vous dire que, si l'orateur, pour n'importe quelle raison, se sent que lui est dérangé par le fait qu'un député n'est pas à sa place, la présidence se doit d'invoquer l'article 32.

M. Mulcair: On cède à votre décision, M. le Président, puis on a une prochaine personne prête à intervenir.

Le Vice-Président (M. Cusano): Exactement. M. le député de Bertrand, vous savez fort bien que, lorsqu'on soulève une question de règlement, l'horloge continue à courir. Alors, le temps de votre intervention étant terminé, je suis prêt maintenant à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci beaucoup, M. le Président. Je tenais absolument à intervenir à l'adoption de principe du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Je vais tenter, M. le Président, de le faire dans l'esprit le plus non partisan possible, parce que je trouve, M. le Président, qu'il est important d'envoyer le message à ceux qui nous écoutent, à ceux qui sont touchés que, oui, les parlementaires peuvent s'élever au-dessus des questions partisanes quand on traite le dossier de lutte contre la pauvreté, de l'inclusion sociale, de l'aide sociale, M. le Président, et je vais tenter de le faire en évitant de tomber dans l'hyperbole. Je n'accuse pas le député de Bertrand de le faire. Il avait même, à un moment donné, reconnu que le projet de loi n° 57 répond partiellement à la loi n° 112. Alors, on voit là un certain progrès, selon le député de Bertrand, ce qui est très apprécié d'entendre du côté du gouvernement, M. le Président.

M. le Président, ça vaut la peine, je crois, de passer quelques instants à regarder un peu l'historique de l'aide sociale au Québec. Je pense que c'est intéressant pour tenter de situer où nous étions et par où on s'en va.

M. le Président, en 1961, le gouvernement libéral de Jean Lesage créait un comité d'étude sur l'assistance publique. Alors, ça ne date pas d'hier, M. le Président. C'était par contre le premier geste vers un régime d'assistance publique universel pour les Québécois. Ce comité d'étude a accouché, si je peux me permettre l'expression, M. le Président, du rapport Boucher, en 1963, et le rapport Boucher a suggéré, a indiqué au gouvernement qu'il devrait jeter la base... le rapport jetait la base d'un régime d'assistance publique pour le Québec. Malheureusement, ça a pris jusqu'en 1969, M. le Président, six ans après le rapport du comité Boucher, avant d'arriver avec une loi sur l'aide sociale qui établissait un droit, un régime de droit pour l'aide sociale, M. le Président. Après ça, vous voyez, depuis 1969, M. le Président, de multiples réformes qui ont été entreprises par des gouvernements de toutes les sortes, puis je vais vous en nommer quelques-unes, M. le Président.

n(17 heures)n

En 1984, notre collègue l'actuelle députée de Taillon a mené une importante réforme sur l'aide sociale, le projet de loi n° 65, qui a été vivement contesté dans le temps, hein? J'ai lu un article de presse d'alors, les syndicats étaient dans la rue, les évêques avaient dénoncé cette réforme en 1984, les groupes sociaux. Il y avait énormément de contestations parce que, en 1984, M. le Président, cette réforme, menée par notre collègue la députée de Taillon sous le gouvernement du Parti québécois évidemment, a amené une nouvelle notion d'employabilité dans le régime d'aide sociale, c'est-à-dire qu'il y avait un genre de participation et une contrepartie. La notion de contrepartie, dans notre régime d'aide sociale, émane de cette réforme, en 1984, par l'actuelle députée de Taillon.

En 1988, M. le Président, un autre gouvernement, cette fois-ci le gouvernement du Parti libéral du Québec, a amené des changements avec le projet de loi n° 37 piloté par notre ex-collègue André Bourbeau qui également a renforcé la notion d'employabilité, l'aptitude au travail. D'ailleurs, avec ces questions-là, on a créé des catégories d'«inaptitude» et «apte», «obligation de travailler», et ainsi de suite.

M. le Président, après ça, 1997 où il y avait une consultation générale menée par la députée, l'actuelle députée d'Hochelaga-Maisonneuve, quand elle était ministre de la Sécurité du revenu, un livre vert sur la réforme de la sécurité du revenu qui s'appelait Un parcours vers l'insertion, la formation et l'emploi. Certains collègues vont se souvenir de ce livre vert. Il y avait une vaste consultation publique là-dessus, et ce livre vert a donné naissance à un projet de loi n° 186 au printemps de 1998, M. le Président, qui s'appelle la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale.

J'étais, à ce moment-là, M. le Président, porte-parole de l'opposition officielle en matière de la sécurité du revenu. Alors, j'ai un vif souvenir des échanges qu'on a eus avec l'actuelle députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Le projet de loi n° 186, à ce moment-là, M. le Président, a amené un parcours individualisé mais obligatoire pour les prestataires qui n'avaient pas de contraintes sévères à l'emploi. Ça a amené, M. le Président... Ça, ça va vous intéresser, je suis sûr, et comme ça va intéresser nos collègues de l'opposition ici présents, en Chambre en grand nombre. La notion de «saisie partielle» du chèque de l'aide sociale pour le non-paiement de loyer était introduite dans la loi par l'actuelle députée d'Hochelaga-Maisonneuve, M. le Président. C'est assez intéressant à savoir, d'où vient cette mesure de saisie. Ça a été intégré dans la réforme de l'aide sociale menée par l'actuelle députée d'Hochelaga-Maisonneuve sous la gouverne du Parti québécois, évidemment. D'ailleurs, ce projet de loi n° 186, M. le Président, a été adopté par bâillon, hein? Je me souviens très bien, je crois que c'était autour de 3 heures ou 4 heures du matin que le précédent gouvernement nous avait imposé le bâillon sur le projet de loi n° 186, lui aussi vivement contesté par les groupes communautaires, par les syndicats, par beaucoup de groupes dans notre société.

Après ça, M. le Président, il y a une certaine rupture dans cette tradition avec le projet de loi n° 112, le projet de loi n° 112 que je qualifierais ? si vous me permettez l'expression, M. le Président, en anglais ? «a citizen-initiated bill». C'est rare, dans l'histoire du Québec, d'avoir un projet de loi qui, en fin de compte, est adopté ici, à l'Assemblée nationale, qui est issu de la communauté. Mais c'est vrai avec le projet de loi n° 112, M. le Président. Et on va y revenir, sur le projet de loi n° 112, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui a été adoptée à l'unanimité le 13 décembre 2003. Je dirais honnêtement, M. le Président, un très beau moment dans la vie parlementaire: une adoption à l'unanimité, trois partis ici présents, tout le monde a voté en faveur.

D'ailleurs, je souligne, M. le Président, la contribution absolument extraordinaire de notre ex-collègue Christos Sirros. Pendant tout ce débat, il a été un porte-parole absolument magnifique, très respecté par tous et chacun non seulement ici, en Chambre, mais à l'extérieur de la Chambre par les groupes communautaires, par le collectif. Et je tiens, M. le Président, à vraiment souligner l'importante contribution que M. Sirros a eue avec le projet de loi n° 112.

Fait assez intéressant, M. le Président, la loi n° 112, qui a fait l'unanimité, adoptée le 13 décembre, a été mise en vigueur quand? Est-ce qu'on se souvient? Moi, je me souviens, M. le Président, elle était mise en vigueur le 5 mars, c'est-à-dire à peu près deux mois et demi, trois mois plus tard, le 5 mars, à une semaine de la dissolution de la Chambre, M. le Président. Alors...

Une voix: ...

M. Copeman: Non, la Chambre a été dissoute le 12 mars. Oui, les brefs ont été émis le 12 mars. Alors, déclenchement de l'élection, la Chambre a été dissoute le 12 mars. Le projet de loi n° 112 a été mis en vigueur le 5. Alors, à une semaine de la générale, le projet de loi n° 112 a été mis en vigueur.

M. le Président, quels sont les éléments majeurs du projet de loi n° 112, parce que nos collègues de l'opposition y font référence souvent? Alors, à l'article 1, on indique qu'il faut poser des actes, des gestes et des politiques afin de «tendre vers un Québec sans pauvreté». Le mot «tendre» est intéressant, M. le Président.

À l'article 4, le projet de loi n° 112 annonce une stratégie nationale qui «vise à amener progressivement ? le mot est important, progressivement ? le Québec d'ici [...] ? et c'est 10 ans du moment de la sanction ? au nombre des nations industrialisées comptant le moins de personnes pauvres...» Alors, une stratégie nationale sur 10 ans, M. le Président, deuxième élément important dans le projet de loi n° 112.

Troisième élément, article 9: «Les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment viser à rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté, en tenant compte notamment de leur situation particulière et des ressources dont elles disposent pour couvrir leurs besoins essentiels.»

Et finalement, M. le Président, à l'article 15, elle introduit le principe d'une prestation minimale.

Ce sont les éléments majeurs. Il y en a d'autres, il y en a beaucoup d'autres, M. le Président, mais ce sont les éléments majeurs du projet de loi n° 112. Quelle était la réponse du gouvernement? Bien, dans un premier temps, la réponse du gouvernement a été un plan de lutte contre la pauvreté, un plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui a été déposé en mai, M. le Président... en avril, pardon, en avril de cette année. Ce plan de lutte, M. le Président, investit 2,5 milliards de dollars sur cinq ans pour combattre la pauvreté.

Quels sont les éléments majeurs? Bien, il y a 386 millions de dollars pour l'indexation des prestations. On va y revenir, M. le Président. Il y a 129 millions pour la prime à la participation, pour encourager les gens à participer à des mesures d'employabilité, à participer dans leur communauté, à retourner au travail, une prime à la participation que notre gouvernement veut bonifier. 510 millions sur cinq ans pour un nouveau programme, qui s'appelle Prime au travail, qui va beaucoup améliorer la situation des gens qui travaillent dans des emplois à bas revenus ? l'expression en anglais, «the working poor». Alors, 510 millions sur cinq ans, M. le Président, pour tenter de ramener les gens qui sont au travail à un niveau qui va les sortir de la pauvreté. 256 millions sur cinq ans, M. le Président, pour la construction de 16 000 nouveaux logements à loyer modique ou abordable qui vont bénéficier aux personnes les plus pauvres de notre société. Et finalement, M. le Président, 1 milliard de dollars, c'est beaucoup, 1 milliard de dollars sur cinq ans pour le programme Soutien aux enfants, qui va bénéficier largement aux personnes les plus pauvres avec enfants, au Québec, incluant les prestataires à l'aide sociale.

n(17 h 10)n

M. le Président, c'est le plan de lutte. Dans le débat qui nous occupe, c'est-à-dire le projet de loi n° 57, la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, je pense qu'il faut se concentrer un peu sur le projet de loi, M. le Président. Le projet de loi fait un certain nombre de choses, puis il y a ceux que j'appelle des enjeux parallèles. Je ne veux pas dire qu'ils sont moins importants, M. le Président. Mais pourquoi je les appelle des enjeux parallèles? Parce qu'ils ne sont pas traités dans la loi n° 57. Ces enjeux parallèles, l'indexation des prestations, puis la couverture des besoins essentiels, je vais en parler, M. le Président. C'est vrai qu'il n'est pas traité dans le projet de loi n° 57. D'ailleurs, la loi n° 112, à laquelle a fait référence le député de Bertrand, ne fait nullement mention d'une indexation automatique des prestations de l'aide sociale. Je présume que, si ça avait été le cas, une proposition en ce sens, le précédent gouvernement l'aurait refusée, parce que c'est leur projet de loi, ils ont accepté la paternité ? ou, dans le cas qui nous occupe, la maternité parce que c'était l'ex-députée de Lévis qui avait piloté le projet de loi ? et l'indexation automatique des prestations, telle que réclamée par l'opposition officielle, ne se trouve pas dans la loi n° 112, je regrette d'en informer nos savants collègues de l'opposition.

Alors, qu'est-ce que c'est, le projet de loi n° 57? Il remplace la loi actuelle. Et le nouveau titre est intéressant, M. le Président: on parle de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Il abandonne l'approche coercitive qui existe dans tous les régimes d'aide sociale depuis 1984. Il abandonne l'approche coercitive, M. le Président. Il élimine des pénalités. Il fait des incitatifs et non pas de la coercition, M. le Président. C'est un élément très important. Il maintient un régime d'aide sociale de base. Il reconnaît les besoins spéciaux des personnes qui ont des contraintes sévères à l'emploi.

M. le Président, effectivement, il y a beaucoup de critiques à l'égard du projet de loi n° 57, et d'ailleurs le gouvernement a déjà répondu à bon nombre de ces critiques-là. Le ministre a annoncé l'abandon de la saisie partielle du chèque de l'aide sociale pour non-paiement, l'abandon d'une mesure qui a été mise en place par le précédent gouvernement mais qui n'a jamais été mise en vigueur. Mais elle était là, M. le Président, elle était dans la loi. Et, de façon unanime, les groupes ont réclamé le retrait de cet article. Le ministre annonce qu'il sera retiré, chose qui est très positive, je crois, pour les gens qui sont prestataires d'aide sociale.

Il clarifie les recours, les modifications proposées par le ministre. Parce qu'il y avait beaucoup de critiques quant aux recours. Le ministre nous indique ? et en tant que président de la Commission des affaires sociales, M. le Président, je peux vous assurer que nous allons faire notre travail avec diligence ? qu'il va corriger cette notion d'absence de recours pour le programme Alternative jeunesse et les programmes spécifiques. Il maintiendra la référence, dans la loi, au Bureau des renseignements et plaintes. Une autre critique qui est venue en commission parlementaire: Vous avez éliminé les références au Bureau des renseignements et plaintes. Le ministre dit: Nous allons y faire référence dans les amendements pour corriger cette situation.

Il met en place, M. le Président, la plupart des éléments d'un barème plancher, tel qu'énoncé dans le projet de loi n° 112. M. le Président, il est exact que le projet de loi n° 57 reste muet sur la question des besoins essentiels et l'indexation. Et là, encore une fois, je rappelle à mes collègues que l'indexation automatique ne se retrouve pas dans les propositions, dans la loi n° 112. L'indexation, M. le Président, a toujours été... La mécanique de l'indexation a toujours été par décret, c'est-à-dire par décision du Conseil des ministres. Je comprends que ça ne réconforte pas nécessairement les gens qui n'auront pas la pleine indexation, mais il est important pour nous, comme législateurs, de comprendre que la mécanique d'indexation n'est pas dans 57, elle n'est pas dans 112, elle n'a jamais été, M. le Président.

M. le Président, 264 000 prestataires vont recevoir une demi-indexation. 264 000 prestataires vont recevoir une demi-indexation à partir du 1er janvier. Sur ce nombre, 75 000, plus ou moins, sont éligibles à la mesure Soutien aux enfants. Ils vont voir leur situation financière améliorée, M. le Président. 75 000 sur 264 000. En ce qui concerne les prestataires sans contraintes sévères... Parce qu'on se souvient, M. le Président, nous allons indexer... une pleine indexation pour tous les prestataires avec contraintes sévères à l'emploi.

En ce qui concerne les prestataires sans contraintes... Parce que ce n'est plus des personnes «aptes» et «inaptes», hein? Nous avons abandonné ces termes-là. Je n'en tiendrai pas rigueur le député de Bertrand, mais nous avons abandonné le libellé «prestataires aptes» et «inaptes» en 1998.

Mais, pour les prestataires qui n'ont pas de contraintes sévères à l'emploi, le ministre, cette semaine, a ouvert la porte à la possibilité de la pleine indexation pour ces prestataires selon la situation financière du gouvernement du Québec. Je sais, M. le Président, ça ne va pas satisfaire les groupes qui représentent les prestataires. Je présume que ça ne va pas satisfaire l'opposition officielle, malgré leur bilan qu'on connaît tous, quand ils étaient au pouvoir, mais au moins, M. le Président, la porte est ouverte à cette pleine indexation. Une situation que je souhaite, M. le Président... Je souhaite ardemment que notre gouvernement ait la possibilité de faire la pleine indexation dans un avenir très proche. Et beaucoup de collègues de ce côté de la Chambre vont travailler dans ce sens, M. le Président: pour assurer dans un avenir proche cette pleine indexation.

Je termine sur la notion des besoins essentiels, M. le Président. Il est vrai que le projet de loi n° 57 ne parle pas de la couverture des besoins essentiels. Je vous rappelle simplement...

Le Vice-Président (M. Cusano): Vous avez 20 secondes, M. le député.

M. Copeman: La couverture des besoins essentiels est visée dans le projet de loi n° 112 sur un horizon de 10 ans. Et là encore notre gouvernement va travailler pour améliorer la situation financière de tous les prestataires à l'intérieur de l'horizon du projet de loi n° 112 adopté à l'unanimité ici, à l'Assemblée nationale. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je suis prêt maintenant à reconnaître la prochaine intervenante, Mme la députée de Prévost.

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Oui, effectivement, ce soir, M. le Président, j'interviens sur le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.

M. le Président, le 11 juin dernier, le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille déposait le projet de loi n° 57 qui fut alors l'objet de nombreuses critiques de la part des groupes de défense des droits des personnes assistées sociales et des organismes-conseils du gouvernement comme la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, la Protectrice du citoyen et le Conseil de la famille.

J'ajouterais, M. le Président, que même les fonctionnaires ont dénoncé ce projet de loi. En commission parlementaire, Lucie Grandmont, vice-présidente... Qui est-ce qui rit comme ça?

Lucie Grandmont, vice-présidente du Syndicat de la fonction publique québécoise a déboulonné le projet de loi n° 57, lequel, disait-elle, fait reculer le Québec d'au moins 40 ans en matière d'aide aux démunis.

On parle, M. le Président, de 5 000... au-dessus de 5 000 employés à travers le Québec qui ont appliqué les directives incohérentes et les multiples contradictions entre le discours et la réalité. «Nous sommes à même de constater que les manoeuvres rejoignent le schéma de sabordage des acquis collectifs», de dire Mme Grandmont. C'est tellement vrai, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Cusano): Excusez, Mme la députée de Prévost. Je demanderais la collaboration de tous les membres de cette Assemblée. Il y a seulement qu'une personne qui a la parole, et on doit respecter justement que cette personne puisse se prononcer, prononcer des discours à sa façon. Alors, Mme la députée de Prévost, vous avez la parole.

Mme Papineau: Merci, M. le Président. C'est tellement vrai, M. le Président, que 55 % des 61 groupes entendus lors de la consultation générale ont demandé le retrait du projet de loi n° 57. La quasi-totalité des 71 mémoires qui ont été déposés en prévision de la commission parlementaire ont été franchement hostiles au projet de la réforme. Devant un tel tollé, le ministre de la Solidarité sociale devrait reconnaître son erreur et abandonner son projet de loi.

n(17 h 20)n

Et, comme le disait Réjean Parent, président de la CSQ, le 28 octobre dernier: «Le projet de loi ne comporte aucune mesure concrète visant à améliorer ou même stabiliser la situation des plus pauvres parmi les plus pauvres.» La CSN déplore également l'absence de mesures de protection visant les salariés à statut précaire dont le nombre est en augmentation constante et qui se retrouvent trop souvent, à cause de cette précarité, en situation de pauvreté.

De manière assez surprenante, le ministre s'est permis de faire du chantage aux groupes réclamant le retrait du projet de loi n° 57, alléguant que, sans ce projet de loi, il reviendrait...

M. Copeman: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Je ne suis pas aussi familier... non parlementaire, mais il me semble que, quand on fait référence même indirectement à un ministre qui fait du chantage auprès des groupes, ça doit manifestement être non parlementaire, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député, écoutez, ça fait assez longtemps que vous êtes ici, là, pour savoir que c'est vrai qu'on ne peut pas faire indirectement ce que le règlement ne permet pas. Alors, je demanderais la collaboration de tout le monde de se servir d'un langage qui est extrêmement respectueux. Alors, Mme la députée, on vous connaît, vous êtes extrêmement respectueuse de ce Parlement, alors je vous demande de continuer.

Mme Papineau: Merci, M. le Président. Il a même remis en question l'engagement de son gouvernement d'invertir 2,5 milliards en cinq ans dans la lutte à la pauvreté, et je le cite, M. le Président: «...juste d'être prudents ? très prudents ? parce que, tant qu'il n'y a pas une nouvelle loi qui est adoptée, la loi actuelle est là. Et, tant que la loi actuelle est là, c'est la philosophie des pénalités, c'est la philosophie du barème plancher qui n'est pas à 100 % qui s'applique. C'est pour ça qu'on veut la changer, la loi.» Et il ajoute, M. le Président: «Alors, quand vous nous demandez de retirer la loi, il faut faire attention, parce que, si on retire la loi, on n'applique pas les indications ou le barème plancher tel que prévu dans le plan de lutte à la pauvreté, et, moi, je ne voudrais surtout pas remettre en question un investissement de 2,5 milliards sur cinq ans. Alors, dit-il, je suis prêt à améliorer un certain nombre de choses, mais je veux juste qu'on soit [très] prudents. Ça peut être facile de dire: On va retirer la loi, mais je veux [tous qu'on soient] conscients des impacts que ça peut avoir aussi.» Fin de la citation.

Non seulement ces groupes ont-ils été très critiques à l'égard de ce projet de loi, M. le Président, mais plusieurs considèrent qu'il s'agit d'un recul vis-à-vis de la loi présente et vis-à-vis surtout de la loi n° 112, adoptée à l'Assemblée nationale, en décembre 2002, à l'unanimité. Lors de la commission parlementaire, le ministre a tenté d'amener des groupes à dire que, puisque la loi n° 112 ne faisait qu'invoquer l'instauration d'une prestation minimale sans référence à une couverture de besoins essentiels, son projet respectait la loi n° 112. Cependant, contrairement à ce qu'il affirme, l'article 9.1 de la loi fait explicitement référence à la nécessité de rehausser le revenu des personnes en situation de pauvreté en fonction d'une couverture des besoins essentiels.

Or, en maintenant sa décision de ne pas indexer les prestations des assistés sociaux aptes au travail pour qu'elles soient au même niveau que celles versées aux personnes qui ont des contraintes à l'emploi, le gouvernement libéral bafoue ce principe. Ainsi, les non-aptes ont droit à une hausse de 1,3 % en 2005, les autres devront se contenter de la moitié, comme si l'inflation était devenue sélective, comme le disait d'ailleurs Josée Boileau du Devoir du 1er décembre dernier. D'ailleurs, 67 % des groupes qui se sont présentés en commission parlementaire réclamaient qu'une réforme de l'aide sociale soit faite pour en faire un régime universel et non pas un régime fondé sur des catégories «aptes», «inaptes».

La Protectrice du citoyen s'exprimait ainsi sur la demi-indexation au coût de la vie: Est-il «indispensable de faire marche arrière et d'instaurer une inégalité de traitement pour des catégories de personnes qui, somme toute, connaissent les mêmes difficultés financières? En d'autres termes, l'indexation ne devrait-elle pas être accordée à tous les prestataires, sans égard à leurs statuts, puisque le marché, lui, ne crée pas de distinction?»

On croyait que, lorsque le ministre a présenté ses amendements, on y retrouverait une pleine indexation des prestations des personnes sans contraintes. Eh bien, non, malheureusement. Il a tout simplement dit: Lorsque les ressources financières du gouvernement le permettront, les prestations des personnes sans contraintes à l'emploi pourront être indexées à un taux supérieur que celui prévu dans le Plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Encore une fois, le ministre fait la démonstration qu'il ne comprend rien à la réalité des personnes sur l'aide sociale. Combien d'entre elles se seront appauvries avant que le ministre des Finances décide qu'elles seront indexées?

Ce projet de loi contribue à entretenir les préjugés à l'endroit des prestataires aptes au travail. On ouvre ainsi plus grande la porte à des différences de traitement selon les catégories de prestataires plutôt que de viser la couverture des besoins essentiels quelle que soit la condition des personnes, ce que devrait assurer l'aide de dernier recours. Il est clair, à la lecture du plan d'action et du projet de loi n° 57, que le ministre compte sur des mesures comme la prime au travail et la prime à la participation pour compenser l'indexation partielle de la prestation pour les personnes aptes au travail. Une telle indexation aura pour résultat de diminuer le pouvoir d'achat des prestataires, et le ministre remplira son objectif de valorisation des efforts en affamant davantage les prestataires de l'aide sociale.

72 % des groupes sont venus nous dire que la demi-indexation de la prestation aura des impacts sur le revenu et sur la motivation des gens. Vous savez, M. le Président, c'est Pierre Marois, président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui disait: «Non seulement les personnes bénéficiant de l'aide sociale sont les plus pauvres, mais leur situation fait peser sur leurs enfants tous les risques de marginalisation socioculturelle qui composent le cercle vicieux de la misère. Une société qui se réclame d'un idéal d'égalité ne peut accepter de tels constats pour réagir.» Il rajoutait: «La pauvreté s'accompagne de multiples entraves à l'exercice des droits, des entraves qui s'ajoutent, pour les personnes pauvres, aux contraintes sociales de chômage, de coût élevé de logements et de frais d'éducation et de santé, par exemple. Dans ces conditions, mettre l'accent principal, comme le fait le projet de loi, sur la responsabilité première des personnes pauvres dans la modification de leur situation, c'est méconnaître, voire nier la dynamique réelle de la pauvreté.»

Vous savez, M. le Président, le ministre a fait face à une salve de critiques, de la part du Collectif pour un Québec sans pauvreté et du Front commun des personnes assistées sociales, à l'occasion de l'étude, en commission parlementaire, du projet de loi n° 57. Et tout ce que le ministre a pu leur répondre, et je le cite: «Je comprends l'appétit des groupes sociaux.» M. le Président, il aurait peut-être mieux compris la situation des personnes assistées sociales s'il avait été présent lorsque le Collectif pour un Québec sans pauvreté est venu rencontrer les députés de l'Assemblée nationale. Il aurait vu comment c'est difficile pour une personne sur la sécurité du revenu de rejoindre les deux bouts. Une vingtaine de députés des trois formations politiques y ont participé, avec, comme animatrice, Vivian Labrie, et des personnes du Collectif.

Ce fut, M. le Président, de la part du Collectif, une belle initiative de sensibilisation. On nous a dit que la mesure du panier de consommation calculée par Statistique Canada, en 2003, établit à 11 221 $, soit 935 $ par mois, le montant nécessaire à un adulte seul habitant Montréal pour pourvoir à ses besoins de base, sans compter les médicaments prescrits et autres soins de santé. Au Québec, la prestation d'aide sociale de base est de 6 396 $ par année, donc 533 $ par mois. Elle est de 646 $ avec l'allocation pour contraintes temporaires à l'emploi et de 781 $ avec l'allocation pour contraintes sévères à l'emploi.

n(17 h 30)n

L'exercice consistait à vivre un mois avec un montant de 555 $ par mois, qui est le total du montant du chèque de l'assistance sociale plus 22 $ par mois pour le remboursement de la TVQ. Et j'assumais, M. le Président, le rôle d'une personne sur la sécurité du revenu sans contraintes sévères à l'emploi. M. le Président, après avoir payé le loyer, que l'on avait imaginé à 350 $ par mois pour l'exercice, ce qui à mon avis est irréaliste quand on regarde, aujourd'hui, le coût du logement; Hydro-Québec, 55 $; le téléphone, coût minimal, sans autres frais ni interurbain, au coût de 26 $; une petite assurance sur les biens au coût de 15 $; une passe d'autobus ou tout autre transport pour environ 63 $; et quelques petites dépenses pour 25 $; et n'oubliez pas, M. le Président, ces chiffres sont pour un mois, il ne me restait à la fin que 71 $. Oui, M. le Président, j'ai calculé que, vers le 7 du mois, donc après une semaine, il ne me restait que 71 $ pour le reste du mois. Vous remarquerez, M. le Président, que, dans les montants que je vous ai mentionnés, je ne vous ai pas parlé d'épicerie, je ne vous ai pas parlé de vêtements, et on est en hiver, on a besoin de manteaux chauds, on a besoin de bottes. Enfin, la prestataire que j'étais n'avait plus que 17,75 $ par semaine pour l'épicerie, les vêtements, les petits coups durs. Parfois, on doit aller à la pharmacie acheter des médicaments sans prescription parce que, voyez-vous, M. le Président, je pense que parfois j'aurais eu mal à la tête. Il me semble que j'aurais souffert d'anxiété. Je pense que j'aurais eu peur de manquer d'argent.

Je suis sortie de cette expérience troublée, gênée même de voir que, dans une société comme la nôtre, ici, au Québec, on se demande si on doit indexer en partie, 50 %, 60 %, les prestations de ces démunis, dépendant des ressources financières du gouvernement, comme le précise le ministre dans son supposé amendement de l'article 53 du projet de loi n° 57. Oui, M. le Président, peut-être, nous, du Parti québécois, devons faire amende honorable pour ne pas avoir appliqué l'indexation automatique, mais le ministre, il est là depuis 19 mois et il présente ce projet de loi n° 57 sans corriger cette situation qu'il avait pourtant décriée avec ses collègues lorsqu'il était dans l'opposition. On voit bien, M. le Président, que le ministre ajuste son discours dépendamment de quel côté de la Chambre il est.

M. le Président, le projet de loi n° 57 présenté par le ministre de la Solidarité sociale ne répond pas à la volonté des parlementaires de faire du Québec une terre où toutes les actions posées par l'Assemblée nationale le sont en se préoccupant des effets qu'elles auront sur les plus démunis de notre société, même avec les amendements apportés par le ministre, ne répond que très partiellement aux objectifs de la loi n° 112.

M. le Président, je prends l'occasion qui m'est donnée, ce soir, étant donné que ce projet de loi n° 57 touche les plus défavorisés de notre société, pour remercier les organismes et les citoyens et citoyennes de la circonscription de Prévost qui ont pour mission d'aider et d'apporter leur support aux plus démunis. Dans les prochains jours, j'accompagnerai, entre autres, le club Optimistes de Saint-Jérôme dans une activité très particulière où des citoyens et citoyennes sont mis à contribution pour s'assurer que, dans cette période des fêtes, les plus pauvres des pauvres puissent avoir, eux aussi, une petite période de réjouissances. Je me permets, M. le Président, de remercier mes bons amis ? et je vais les nommer ? Les Petits gars du vieux shack, des hommes d'affaires mais aussi des hommes de coeur qui, tout au long de l'année, ont une préoccupation constante, une préoccupation sans fin des personnes dans le besoin, et, à cette période-ci, à tous les ans, ils offrent le repas de Noël à des familles monoparentales avec des jouets pour les enfants et le père Noël en plus, M. le Président, mais le vrai père Noël. Permettez-moi de les remercier de leur immense générosité.

J'espère que le ministre est à l'écoute et qu'il acquiescera, lui aussi, à une plus grande générosité envers les plus démunis. M. le Président, l'opposition officielle continuera d'exiger le retrait du projet de loi n° 57 et son remplacement par un projet de loi plus simple, plus efficace dans sa capacité à couvrir les besoins essentiels, plus respectueux des personnes et moins discriminatoire, plus fondé sur le développement des personnes, plus appuyé sur une participation et une mobilisation large de la société et sur la contribution des premiers concernés. M. le Président, le ministre de la Solidarité sociale a une mission sociale des plus importantes à jouer. La balle est dans son camp. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Prévost. Alors, nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, et je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi n° 57 et puis en fait de venir vous parler de tout ce plan de lutte à la pauvreté que le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale a présenté d'abord au printemps puis maintenant avec ce projet de loi n° 57.

Alors, M. le Président, le problème principal avec le plan de lutte déposé par le ministre et avec le projet de loi n° 57, c'est d'abord un problème d'attitude de la part de l'individu qui est ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, qui, plutôt que de venir nous dire: La présidente du Conseil du trésor ne m'a pas donné un sou, m'a même demandé des coupures dans mon ministère, donc c'est impossible d'aller dans la direction de la loi n° 112 qui visait à lutter contre la pauvreté, plutôt que de nous dire la vérité, le ministre essaie, via un projet de loi très compliqué, avec toutes sortes de nouvelles mesures où on en ajoute d'un côté, on en retire de l'autre côté... Mais, M. le Président, ce qui est important, là, c'est compliqué, effectivement, à comprendre pour le pauvre monde au Québec, mais on se retrouve dans une situation où les familles du Québec sont perdantes au net. C'est ça qui est important, là.

Le ministre ne peut pas arriver puis dire: J'ai des chèques à donner le 15 décembre, à quelques jours de Noël, et bravo, voici les nouveaux chèques, pouvez-vous m'applaudir? Il faut regarder ce qui a été fait avant, ce qui sera fait avec les coupures de crédits d'impôt, avec les coupures d'allocations familiales, avec l'ensemble du portrait, M. le Président. Et c'est sûr que le ministre ne peut pas faire de miracles, on se retrouve dans une situation... Quand on regarde le budget de son ministère, bien le budget total pour l'Emploi et Solidarité sociale est 19 millions moins élevé que le budget de l'année passée. Donc, même pas capable d'indexer, même pas capable de faire un pas dans le sens de la loi n° 112. Or, M. le Président, il y a une chose qui est claire, c'est que les prestations qui sont données aux personnes sur l'aide sociale ne couvrent pas actuellement les besoins essentiels. À 533 $, entre autres, par mois, M. le Président, ce n'est pas suffisant, c'est évident.

Et je pense que les 125 personnes qui sont ici, dans cette salle, quand on est député, M. le Président, on a la chance, entre autres les lundis, d'être dans son comté puis de voir la réalité. Et je peux vous dire, M. le Président, qu'entre autres le comté de Rousseau, dans le comté de Rousseau, je pense que c'est peut-être un des comtés, au Québec, qui comptent le plus de démunis. Donc, on est dans une situation, M. le Président, où on peut le voir sur le terrain. Il y a des problèmes, et ces fameux chèques là que les gens vont commencer à recevoir à tous les trois mois causent des problèmes majeurs, majeurs, M. le Président.

Lundi ? je ne vous parle pas de n'importe quoi là ? lundi cette semaine, lundi dernier, j'ai trois groupes... Vous savez, à ce temps-ci, il y a beaucoup de députés, je pense, qui font ça. On distribue un peu d'aide aux groupes qui préparent les paniers de Noël pour le temps des fêtes. On les aide un petit peu, bien modestement, M. le Président. Il y a trois groupes, trois groupes, un groupe de Saint-Lin, un groupe de Rawdon et un groupe de Saint-Calixte qui m'ont dit tous les trois la même chose: On est inquiets.

Vous savez, lundi, là, on ne savait pas encore que le chèque serait devancé au 15 décembre. Donc, on savait qu'il y aurait un chèque au début janvier, puis ensuite le prochain chèque arriverait au début avril. Or, M. le Président, il y a un risque. Quand on est démuni, on reçoit le chèque. Il y a un réfrigérateur à remplacer, il y a des items à acheter qui étaient imprévus. C'est normal. Imaginez-vous que ces personnes fassent des déboursés qui ne sont peut-être pas répartis équitablement ou également entre les trois mois qui s'en viennent. Les groupes m'ont tous dit la même chose: On est inquiets qu'au mois de février, au mois de mars, lorsque viendra le temps de payer le loyer, de payer l'épicerie, ces familles n'auront plus les fonds, n'auront plus les fonds. Et ça, M. le Président, je comprends. Les gens peuvent dire: Ah! Les familles devraient répartir les montants elles-mêmes entre les trois mois. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne dans la vie.

n(17 h 40)n

Imaginez-vous, là, encore pire. Les chèques, au lieu d'être reçus au début janvier, vont être reçus avant Noël. Les familles vont être dans une situation où ils vont... Puis c'est normal. Mettez-vous à la place d'une mère ou d'un père de famille qui voit arriver Noël, va être tenté d'en mettre un peu plus sur les cadeaux, entre autres, aux enfants. Or, on va se retrouver dans une situation où, quand va arriver le mois de janvier, février, mars, la famille va être dans une situation où elle ne pourra pas payer ses besoins de base. C'est ça, la réalité, M. le Président.

Et le ministre ne semble pas comprendre. Il se dit: Bien, voyons donc! Ça va éviter de l'administration, d'envoyer les chèques à tous les trois mois. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne, M. le Président, et surtout quand on voit que la situation au net... Au net, les familles vont recevoir moins, et ça, c'est la réalité. Et ça, c'était la réalité que le ministre refuse de dire. Et pourtant, M. le Président, les chiffres sont têtus, les chiffres sont têtus. Quand on les regarde puis on additionne combien d'allocations familiales vont être coupées, combien de réductions d'impôts vont être coupées, combien de crédits vont être coupés, combien d'augmentations de tarifs ces personnes vont avoir à payer, au net, une fois qu'ils vont avoir reçu leur fameux chèque avec peut-être la photo du ministre, M. le Président, ils vont en avoir moins dans leurs poches qu'il y a un an. C'est ça, la réalité.

Puis on a fait des scénarios, là, on n'arrive pas en tirant ça n'importe où. J'en ai nommés quelques-uns ce matin, je veux les répéter, M. le Président: une famille monoparentale qui a des revenus de 35 000 $ ? ce n'est pas la richesse, ça, M. le Président, vous le savez ? avec un enfant, ces familles vont perdre 114 $; avec deux enfants, ces familles vont perdre 224 $. M. le Président, je continue: familles monoparentales, 40 000 $ de revenus, avec un enfant, ils vont perdre 164 $; avec deux enfants, ils vont perdre 274 $. Ça, c'est la réalité des chiffres, qui sont têtus, M. le Président. Je continue: une famille biparentale, donc deux parents, revenus 40 000 $, un enfant, ils vont perdre 277 $, M. le Président; deux enfants, 387 $ qu'ils vont perdre. Donc, M. le Président, c'est ça, la réalité. Les chèques nets, des retraits qui sont faits dans d'autres secteurs, les familles du Québec vont être perdantes, c'est ça, la vérité. Et, M. le Président, c'est ça qui est le plus choquant dans l'attitude du ministre qui essaie, là, de présenter ça de façon très positive, laisser croire aux gens qu'ils vont en avoir plus. C'est faux, M. le Président, ils vont en avoir moins dans leurs poches.

Et le ministre nous dit aussi: Il n'est pas écrit nulle part dans la loi n° 112 qu'il faut combler les besoins essentiels. M. le Président, à l'article 9 de la loi... vous vous en rappelez, la loi qui avait été adoptée ici, à l'unanimité, au moment où le Parti libéral était de ce coté-ci, donc il était très fier de l'appuyer. Dans cette loi, on dit: «Les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment viser à [...] rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté, en tenant compte notamment de leur situation particulière et des ressources dont elles disposent pour couvrir leurs besoins essentiels.» Pour couvrir leurs besoins essentiels. Comment le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale peut-il nous dire, et on peut même le citer, que... Il maintient: «La loi n° 112 ne garantit pas la couverture des besoins essentiels.» Comment il peut dire ça? Il était là, je l'ai vu. Moi, j'étais assis de ce côté-là, il était assis de ce côté-ci, il s'est levé, il a voté pour la loi n° 112, puis, aujourd'hui, il dit: Non, non, non, il n'a jamais été question de ça dans la loi n° 112.

M. le Président, il y a un témoignage, entre autres, qui m'a impressionné lors de la commission parlementaire, c'est la Protectrice du citoyen, Mme Champoux-Lesage, une femme qui a des valeurs, une femme avec qui j'ai eu le plaisir de travailler, c'est l'ancienne sous-ministre à l'Éducation. Je sais que le député, là, de LaSalle... en tout cas la connaît très bien, M. le Président...

Une voix: ...

M. Legault: Dans le coin de l'Ouest-de-l'Île, oui. M. le Président, la Protectrice du citoyen, Mme Champoux-Lesage, est venue dire: Une indexation des prestations pour... une indexation partielle... Parce que c'est ça qu'ils font. Ils disent: Pour ceux qui sont aptes au travail, qui sont sur l'aide sociale, on ne va pas indexer complètement, contrairement à ce qu'on a promis, mais en échange on va avoir des primes. Sauf que les primes, on le sait tous, tous ceux qui sont députés ici le savent, ils sont allés chez Emploi-Québec, il n'y en a pas pour tout le monde, des programmes de disponibles. Donc, ça veut dire qu'il y a des personnes qui veulent avoir cette prime qui ne peuvent pas l'avoir, donc n'ont pas une vraie indexation. Qu'est-ce qu'elle dit, Mme Champoux-Lesage? Je la cite: «...l'augmentation du coût de la vie touche tout le monde. [...]l'indexation ne devrait-elle pas être accordée à tous les prestataires, sans égard à leur statut, puisque le marché, lui, ne crée pas de distinction?»

Pourquoi le ministre s'acharne-t-il à dire: Il y a comme deux catégories: ceux qui auront droit à l'inflation, ceux qui n'auront pas droit a l'inflation? Puis, pas le droit à l'inflation, tout le monde le sait, ce que ça veut dire. Et c'est là que c'est... On l'a vu, M. le Président, dès que le Parti libéral a commencé à présenter ses budgets, il a dit: Les budgets vont être gelés. Sauf la santé et l'éducation, ils vont être gelés. On ne peut pas faire ça, geler le budget de l'aide sociale. Il y a de l'inflation. Tout le monde, là, qui gagne un salaire sait qu'il faut être capable d'avoir une augmentation au moins de 2 % pour être capable de couvrir l'augmentation des produits qu'on achète à l'épicerie. Or, là, on nous dit, du côté libéral: Bien, écoutez, là, on a changé d'idée, on ne touchera pas à ça pour certaines catégories de prestataires d'aide sociale.

Et, M. le Président, pour aller dans le sens de la couverture des besoins essentiels, toujours Mme Champoux-Lesage, qui dit: «Même si le gouvernement a aboli la pénalité pour refus ou abandon d'emploi, le barème de base de 533 $ par mois pour une personne seule sans contraintes sévères ne garantit pas ? selon elle ? la couverture des besoins essentiels.» Et la Protectrice met en doute le barème plancher que veut créer le Québec. M. le Président, c'est clair, là. Pourquoi le ministre refuse de le dire? Pourquoi il refuse de le dire, puis il se lève ici, puis il se fait applaudir, là, par son groupe, qui dit: Eh! Bravo pour les chèques? Dès qu'il prononce le mot, là, «chèques» qui vont être envoyés, ils commencent à applaudir, de l'autre côté. Regardez ça. C'est un manque de respect, M. le Président. C'est un manque de respect, parce qu'en bout de ligne ils savent très bien... En tout cas, je pense qu'il y en a quelques-uns au moins, de l'autre côté, qui savent compter, qui savent très bien qu'au net, quand on regarde ce qui sort de la poche, ce qui rentre dans l'autre poche, au net, les familles du Québec vont être perdantes. Donc, comment peuvent-ils applaudir à ces chèques qui seront envoyés à tous les trois mois, des chèques qui cherchent à faire de la politique, de la petite politique, M. le Président.

Et, M. le Président, on le voyait aussi avec les commentaires du Collectif pour un Québec sans pauvreté, qui disait, entre autres Mme Labrie, que c'était «back to the future». «Les assistés sociaux sans contraintes à l'emploi sortiront perdants de cette réforme», affirme le collectif. Et elle dit, Mme Labrie: «Ce projet de loi ramène le Québec aux années 1960 dans ce domaine.» C'est ça, l'action du Parti libéral du Québec, M. le Président. Et le professeur Alain Noël, que tout le monde connaît, disait aussi: «Si on veut inciter à retourner au travail, bien il faudrait prévoir des ressources supplémentaires.» On n'en prévoit pas, on coupe le budget. On coupe le budget total. Donc, quelle cohérence y a-t-il, de dire: On va mettre, à partir de maintenant, l'accent sur les primes au travail, mais on coupe le budget total?

Donc, comment le gouvernement libéral peut-il être capable de défendre ce projet de loi qui va dans le sens contraire des promesses qui ont été faites, entre autres, d'abord contraire au vote qu'ils ont fait lorsqu'ils ont adopté avec nous le projet de loi n° 112, contraire aussi aux promesses qui ont été faites pendant la campagne électorale.

n(17 h 50)n

Et, M. le Président, on se rappelle aussi que ce qui avait été convenu par tout le monde, entre autres dans ce projet de loi n° 112, c'est qu'il y aurait un observatoire sur la pauvreté, parce qu'il y a effectivement, je pense qu'il faut le dire, beaucoup de préjugés de ce côté-là, et c'est important de voir justement est-ce que les actions, les annonces qui sont faites par le gouvernement, est-ce qu'au net on améliore la situation ou si la situation se détériore. Or, le Parti libéral du Québec et le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale ont décidé qu'il n'y en aurait pas, d'observatoire sur la pauvreté. On s'était engagé à avoir un observatoire. On dit maintenant: Oubliez ça, on aime mieux les grandes déclarations spectaculaires du ministre qui nous annonce que les chèques vont être envoyés deux semaines à l'avance plutôt que d'avoir une analyse sérieuse, une analyse qui vient justement démontrer la situation, l'évolution de la situation des personnes plus démunies au Québec.

Et, M. le Président, je continue le commentaire de M. Alain Noël, il disait: «Le gouvernement s'en tient globalement à des réaménagements budgétaires qui lui permettent d'équilibrer ses comptes cette année. La philosophie innovatrice qui sous-tendait la loi, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, est littéralement balayée sous la langue de bois et les préjugés.» La langue de bois et les préjugés, c'est exactement ça, la situation puis l'attitude qui est prise par le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. le Président, je trouve ça malheureux, la situation qu'on vit actuellement avec ce projet de loi n° 57, avec cette supposée réforme, ce supposé plan de lutte à la pauvreté. M. le Président, je le répète, là, je voyais tantôt des députés libéraux, l'autre côté, qui disaient: Non, non, ce n'est pas compliqué. Bien non, ce n'est pas compliqué. On met un nouveau Programme de soutien aux enfants, on enlève des allocations familiales, on enlève des crédits d'impôt pour enfants, on enlève des crédits d'impôt pour la famille, on augmente les garderies de 5 $ à 7 $, on augmente trois fois les tarifs d'électricité. Au net, les familles sont perdantes. Au net, les familles sont perdantes. Mais, M. le Président, il faut être capable d'enligner les chiffres et de dire la vérité. Et, M. le Président, je pense que c'est important, c'est important de se dire: Qu'est-ce qu'on peut faire pour faire avancer la situation?

Et, M. le Président, le seul endroit où je peux comprendre un peu la situation du ministre, c'est que le ministre n'a pas reçu d'argent de la présidente du Conseil du trésor, donc n'a pas eu les moyens de mettre en place un plan. Il aurait dû le dire. Pourquoi n'a-t-il pas eu les moyens de mettre en place ce plan? Parce qu'on a un problème structurel avec les finances publiques du Québec. On a un problème structurel avec les finances publiques du Québec, M. le Président, et je l'ai vu de très près, là. Il s'agit d'avoir été à la santé pendant un certain temps pour savoir comment ça se passe et comment on se fait regarder même par ses collègues. Parce que, M. le Président, quand on regarde à chaque année l'augmentation des besoins en santé, c'est plus, juste l'augmentation, que toute l'augmentation des revenus du Québec. Donc, une fois que le ministère de la Santé est passé avec ses besoins, il ne reste plus un sou. Plus un sou pour l'éducation, plus un sou pour l'aide sociale, plus un sou pour aucun des ministères.

Or, M. le Président, pendant ce temps-là, il y a 2,5 milliards à Ottawa ? il y a 2,5 milliards à Ottawa. On a vu encore, en septembre et en octobre, l'échec du premier ministre fédéraliste libéral qui s'est fait dire, et on a vu, entre autres, le ministre des Finances, le seul qui nous a dit la vérité, que le Québec avait été saigné, que... Et vous avez vu la réponse, M. le Président, de l'autre côté. Le lieutenant politique de Paul Martin, M. Jean Lapierre, qui a dit: Le ministre des Finances du Québec ne viendra pas s'essuyer les pieds sur le tapis d'Ottawa. M. le Président, imaginez-vous les deux partis libéraux, là, le Parti libéral à Québec, le Parti libéral à Ottawa, sont en chicane, sont tous les deux fédéralistes. Mais une chose qui est sûre, là, c'est que l'argent, les marges de manoeuvre de milliards de dollars restent à Ottawa. Pendant ce temps-là, on est pris, au Québec, à essayer de gérer l'ingouvernable. C'est ça, M. le Président, la situation qu'on vit actuellement.

Et, M. le Président, je terminerais en disant que, au-delà de cette loi très compliquée, le résultat final, c'est que les pauvres du Québec vont rester pauvres et que le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale devrait cesser ? cesser ? de faire le fanfaron et de manquer de respect envers les pauvres du Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Cusano): Oui, je reconnais le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, en connaissant notre collègue, je suis sûr qu'il va accepter une question en vertu de l'article 213.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, en vertu de l'article 213, suite à une intervention, un député peut poser une question à la personne qui avait la parole. M. le député de Rousseau, est-ce que vous acceptez une...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Bon, O.K. Le député de Rousseau n'accepte pas cette question, alors je cède maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe.

Oui, M. le député de...

M. Ouimet: Marquette.

Le Vice-Président (M. Cusano): ...Marquette.

M. Ouimet: En vertu de l'article ? Marquette ? en vertu de l'article 213, est-ce que le député de Rousseau accepterait une autre...

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député, M. le député, vous savez, il n'y a seulement qu'une question qui est posée. J'ai reconnu le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. Il est 17 h 58, ça veut dire que, dans deux minutes, je devrais interrompre mon discours. Alors, je suis bien prêt quand même à commencer et à exposer.

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Saint-Hyacinthe, vous avez la parole, alors je demanderais la collaboration de tout le monde pour s'assurer que le député de Saint-Hyacinthe puisse bien s'exprimer.

M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. J'ai entendu plusieurs fois ici, dans cette Assemblée, et en dehors de l'Assemblée nos bons amis d'en face dire: Nous, notre priorité, c'est la santé; eux, leur priorité, c'est la souveraineté. Je les ai entendus dire ça plusieurs fois. En fait, c'est une mauvaise perception des choses. Pas que notre priorité soit la souveraineté, non. Ce qui est une mauvaise perception des choses, c'est d'opposer l'un à l'autre. Comme vient si bien de le démontrer mon collègue le député de Rousseau, c'est que la souveraineté a plusieurs qualités, mais une de ces qualités fondamentales, c'est que c'est un levier, c'est un levier dont on pourra se servir pour pouvoir faire ce que l'on veut avec le Québec, pour pouvoir avoir les fonds qu'il faut pour prendre soin des malades, pour s'occuper de nos aînés, pour pouvoir aider nos jeunes à aller étudier.

On ne sera pas obligé de couper dans les prêts-bourses, on pourra investir dans l'éducation, on pourra préparer l'avenir, on pourra investir dans la qualité professionnelle de tout le monde, y compris, M. le Président, les gens qui, aujourd'hui, sont un peu laissés pour compte parce qu'ils n'ont pas eu beaucoup de chance, parce qu'ils n'ont peut-être pas eu toute la formation dont ils auraient eu besoin. On pourra investir dans la formation de ces gens. Et on ne sera pas obligé toujours d'être coincé comme est coincé actuellement le ministère de la Solidarité sociale, qui voudrait bien faire... Il voudrait faire très bien, il voudrait que son projet de loi n° 57 puisse lui permettre vraiment d'atteindre l'objectif, qui est d'aider les plus démunis et faire en sorte qu'il n'y ait pas 1 %, 2 %, 3 %, 4 % des gens au Québec qui ne donnent pas tout ce qu'ils peuvent donner à la population parce qu'ils n'ont pas la formation qu'il faut.

C'est pour ça, M. le Président, quand on parle de souveraineté, c'est parce qu'on veut avoir le pouvoir de choisir ce qu'on veut pour la société québécoise comme société. C'est curieux, M. le Président, hein, quand une personne dit: Je veux être libre parce que je veux pouvoir choisir pour moi-même, on trouve ça merveilleux, on trouve que c'est normal, que ça fait partie d'un cheminement normal, et, quand c'est une collectivité qui veut ça, ce ne serait pas normal. C'est bizarre, hein, M. le Président.

Je vois que vous voulez m'interrompre, alors je...

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député, c'est à cause de l'horloge. Alors, compte tenu du fait qu'il est 18 heures, nos travaux sont suspendus à 20 heures, et vous pourrez à ce moment-là, M. le député de Saint-Hyacinthe, continuer avec votre intervention. Alors, les travaux sont suspendus à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 heures)

 

(Reprise à 20 h 7)

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, chers collègues, veuillez vous asseoir.

Alors, l'Assemblée va poursuivre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.

Et, au moment où on a suspendu les travaux, c'est M. le député de Saint-Hyacinthe qui avait la parole. Donc, je lui cède la parole pour qu'il puisse terminer son intervention. Alors, M. le député.

M. Dion: Merci, M. le Président. Nous parlons présentement de la loi n° 57, qui a été proposée comme plan pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale dans le sillage de la loi que nous avions fait adopter en 2002, quand nous étions au pouvoir, le Parti québécois, la loi sur la lutte à la pauvreté et à l'exclusion sociale. Donc, c'est dans ce contexte-là qu'il faut la lire et essayer de voir si vraiment, grâce à tout cela et grâce à la loi n° 57, bien les gens qui sont dans une situation de plus grande difficulté au plan économique, est-ce qu'ils vont faire un pas en avant ou un pas en arrière? C'est à cette aune-là qu'on va pouvoir juger de l'utilité et de la pertinence d'adopter cette loi.

Alors, M. le Président, je voudrais, pour expliquer un peu mon propos, je voudrais vous rappeler que toute ma vie, d'une façon ou de l'autre, j'ai eu affaire beaucoup avec le phénomène de la pauvreté. Vous savez que j'ai commencé ma vie d'adulte dans la coopération internationale en Amérique latine, au Pérou en particulier, en Colombie, et où j'ai constaté un certain nombre de choses. J'ai constaté, en voyant comment les gens vivaient et dans quel contexte, que la situation de pauvreté du plus grand nombre n'était pas le fait de la valeur individuelle de chacun. Ce n'était pas parce qu'ils étaient moins intelligents, qu'ils étaient moins travaillants ou quoi que ce soit de personnel à eux, mais c'était vraiment le fruit d'un système, un système politique et économique fait pour favoriser un tout petit nombre de personnes, environ 5 % de la population, alors que le 80 %, 90 % était dans une situation de pauvreté relative ou de grande pauvreté. Alors, évidemment j'ai compris que, même si ces gens-là, en droit, avaient tous les mêmes droits, ceux qui étaient les plus pauvres n'avaient pas le pouvoir d'exercer leurs droits, ils n'avaient pas la capacité. Même si la loi leur reconnaissait qu'ils avaient tous le droit à l'éducation, à la santé et à tout ça, en pratique, ils ne pouvaient pas exercer ce droit-là parce qu'ils n'avaient pas les moyens économiques, les moyens financiers.

n(20 h 10)n

C'est un peu comme si... Vous savez, ce n'est pas exclusif à ces pays-là. Prenez, par exemple, nous avons tous le droit, hein, nous avons tous le droit, c'est permis, la loi nous permet, nous avons tous le droit de faire le tour du monde en 747, en première classe, M. le Président, mais nous n'avons pas tous les moyens, nous n'avons pas tous le pouvoir d'exercer ce droit-là. Alors, c'est comme ça que ces gens-là, souvent les plus pauvres, n'ont pas le droit dans ces pays-là, et c'est la très large majorité de la population. Comme il n'y a presque pas de classe moyenne, eh bien, les gens qui ont beaucoup d'argent n'ont pas intérêt à créer des systèmes. C'est eux qui contrôlent le pouvoir politique, et ils n'ont pas d'intérêt à créer des systèmes pour partager la richesse, puisqu'ils sont un tout petit nombre à contrôler l'ensemble de la richesse. Alors, vous voyez, la situation, c'est un système d'appauvrissement. La pauvreté, elle est systémique, elle n'est pas personnelle, elle n'est pas seulement individuelle, elle est systémique.

Et, quand je suis revenu d'Amérique latine, je me suis mis à examiner la situation ici et à voir si ce n'était pas différent, puisqu'ici les gens qu'on considère les pauvres, c'est plutôt le 20 % ou le 15 % de la population qui a le moins de revenus, donc ce n'est pas une majorité. Il y a des gens extrêmement riches aussi, mais il y a une classe moyenne où la richesse est plus ou moins répartie, ce qui fait qu'en système démocratique, bien, on peut créer des mécanismes de redivision de la richesse, de répartition, de partage de la richesse. Par exemple, on peut créer un système d'éducation pour tout le monde dans lequel deux principes permettent de fonctionner: le premier, c'est qu'on paie selon sa richesse, l'impôt donc est plus ou moins élevé selon qu'on gagne davantage; et, par contre, le deuxième principe, on utilise les services selon nos besoins. Alors, qu'on soit riche ou qu'on soit pauvre, quand on est malade, on est malade. Alors, on utilise les services selon nos besoins. Donc, on paie selon notre richesse et on utilise selon nos besoins. C'est un mécanisme de partage de la richesse, et c'est ce qui permet, d'une certaine façon, d'amoindrir les problèmes de pauvreté.

Mais il y aura toujours et il y a toujours eu une partie de la population pour qui c'est plus difficile. Prenez un enfant, par exemple, qui naît dans une famille où, relativement, la scolarisation est peu élevée, une famille qui n'a pas eu trop de chance. Cet enfant-là souvent, s'il est élevé dans un milieu comme ça, peut-être que, rendu à la maternelle, il n'aura pas eu toute la stimulation et toutes les occasions de développement, de voyager, et tout ça, avec ses parents qu'ont eu les autres enfants. Ce qui fait qu'on a constaté, les études le démontrent, que les enfants dans ces cas-là ont beaucoup plus de difficultés à réussir à la maternelle, en première année, en deuxième année, et comme ils ont beaucoup... en général. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des enfants qui réussissent très bien quand même, il y a des petits génies dans toutes les classes de la société. Mais, pour l'ensemble des enfants qui sont dans ces situations-là, c'est plus difficile, et les chiffres nous montrent, les statistiques nous montrent qu'un très grand nombre de ces jeunes-là, la majorité, ne termineront pas leur secondaire.

Alors, vous voyez, il y a intérêt à faire en sorte d'avoir un programme pour permettre à ces enfants-là d'être à niveau quand ils arriveront à la maternelle, afin d'avoir des chances égales aux autres enfants pour pouvoir bénéficier des avantages dans la société, se développer et apporter à la société le maximum de ce qu'ils peuvent. C'est pour ça qu'on a mis en place un système de garderies, entre autres. Il y avait bien d'autres raisons, mais, entre autres, cette raison-là était très importante, pour permettre à tous les enfants une chance égale au système d'éducation. C'est très important, très important pour nos enfants. J'admets volontiers qu'il n'y a pas seulement que des vertus à ce système-là et j'admets qu'il y a moyen de l'améliorer, mais au moins reconnaissons ce qui existe.

Alors donc, je me suis rendu compte qu'au Québec il y avait des situations de pauvreté et que la pauvreté, d'une certaine façon, résulte d'un système économique qui fait en sorte que c'est difficile d'en sortir. Et, moi, je ne suis pas capable, après toutes ces expériences que j'ai vécues avec des gens qui sont dans des situations de difficultés économiques ici et à l'étranger, je ne suis plus capable d'admettre qu'on parte du présupposé que les pauvres sont pauvres par leur faute. Ça peut arriver, bien sûr, il y a des cas exceptionnels, bien sûr, dans toutes les classes de la société il y a des cas exceptionnels à tout point de vue, mais, généralement, on ne peut pas dire comme règle générale: S'ils sont pauvres, c'est de leur faute. Ce n'est pas correct, c'est de mal connaître notre système économique.

Et aussi c'est pour ça qu'il est important d'avoir des systèmes pour partager la richesse, pour permettre, à différentes étapes de la vie, de donner une chance égale à tout le monde de se développer, de profiter de la vie et puis de donner à la société le maximum de ce qu'ils peuvent donner. Dans ce contexte-là, moi, M. le Président, je vous dis que le système que l'on veut mettre en place par la loi n° 57 ne sera pas un pas en avant important pour les gens qui veulent sortir de la pauvreté parce que, d'un côté, on annonce qu'on va aider les gens, que c'est un programme pour sortir de la pauvreté, mais, d'un autre côté, quand on l'analyse en détail, on n'arrive pas à cette conclusion-là.

Oui, mais on dit: Vous oubliez une chose, vous oubliez qu'on va donner 2 000 $ par enfant dans chaque famille, quatre chèques par année de 500 $ pour un enfant. Oui, pour le premier, mais pour le deuxième, ce ne sera pas 2 000 $, ce sera 1 000 $ de plus, et le troisième, un autre 1 000 $ de plus. Donc, ça fera 4 000 $ pour trois enfants et 3 000 $ pour deux enfants. Mais, 1 000 $ par enfant, j'admets que c'est un plus théoriquement, et le fait de recevoir un chèque, à part ça, je vous dis que ça fait du bien, hein. Ça stimule et puis ça dit: Bon, on est bien aidé, là.

Mais regardons de plus près, regardons de plus près. J'ai analysé la situation parce qu'en faisant cela le ministre fait autre chose en même temps. Ce fameux chèque là de 2 000 $ par année ? c'est-à-dire quatre chèques de 500 $, ça fait 2 000 $ par année ? qu'est-ce que ça remplace? Est-ce que ça remplace d'autre chose? Oui. Ça remplace l'allocation familiale, 80 $ par année actuellement; ça remplace les crédits d'impôt, plus ou moins 1 500 $; ça remplace les réductions d'impôts aux familles, plus ou moins 750 $. Pourquoi je dis «plus ou moins»? Parce que c'est une moyenne, une moyenne. Ça peut être un peu plus, ça peut être un peu moins, selon notre situation dans notre société, selon qu'on gagne plus, selon qu'on gagne moins. Ça veut dire qu'est-ce qu'au total on remplace par 2 000 $? 1 335 $ de perte, qu'on enlève, et on remplace ça par 2 000 $. Alors, ça fait donc un gain net de 665 $ par année.

Bien, 665 $ par année divisé par 52 semaines, ça fait 12,79 $ par semaine, c'est quand même important. Pour une personne qui gagne 100 000 $ par année, 12,79 $ par semaine de plus ou de moins, ça ne fait pas une grosse différence, entendons-nous, mais, pour quelqu'un qui a très peu de revenus ou qui est à l'aide sociale, ça fait toute une différence. Alors, admettons que c'est un gain.

Mais, si on regarde ça avec un peu plus d'attention et qu'on considère, par exemple, les augmentations de tarifs, garderie, électricité, primes d'assurance médicaments, eh bien là, on a une perte de 602 $, 602 $. Et, si on diminue de la diminution de l'indexation des tables d'impôt, qui est une perte de 78 $, on arrive avec une perte de 680 $. Donc, d'un côté, on va donner 2 000 $, mais, de l'autre côté, ça va enlever 1 335 $ plus 680 $, donc un petit peu de 2 000 $. Donc, la famille, à la fin de l'année, va avoir reçu quatre chèques de 500 $ chacun. Elle va être très contente, mais, à la fin de l'année, son pouvoir d'achat va avoir diminué un petit peu. Vous voyez, le gouvernement annonce des choses mais il fait le contraire. C'est subtil, c'est habile, mais ça n'aide pas les gens à sortir de la pauvreté. Ça n'aide pas les gens à sortir de la pauvreté.

n(20 h 20)n

Alors, j'ai étudié ensuite qu'est-ce que ça pouvait faire, ça, pris à l'autre bout du système. Là, on regarde une famille en particulier avec un enfant, mais regardons, regardons la chose d'un point de vue macroéconomique. D'un point de vue macroéconomique, on se rend compte qu'on a aboli pour 203 millions dans le budget: allocations familiales, allocation pour enfant handicapé, crédit d'impôt pour enfant, réduction d'impôts à l'égard de la famille, ça fait 203 millions. Mais on a ajouté ? soutien aux enfants, crédit d'impôt pour enfant majeur, soutien pour enfant handicapé ? 509 millions, ce qui fait un gain net de 306 millions dans le budget. Alors, allons voir un peu plus loin. Si on compte maintenant les hausses de tarifs déjà imposées, on arrive à 855 millions. Donc, on avait un surplus dans le budget de 306 millions, mais là, si on regarde encore dans le budget, on voit que les familles ont perdu 855 millions, ce qui fait un total, une perte nette de 509 millions. Ce n'est pas bon pour les familles, ça. Alors, vous voyez, le gouvernement annonce une chose, fait le contraire.

Alors, ce n'est pas bon, ça, M. le Président, ce n'est pas bon du tout. Et c'est pour ça que, nous, on voudrait bien appuyer le ministre de la Solidarité et l'aider à pouvoir faire un pas en avant, mais ce n'est pas un pas en avant, c'est un pas en arrière, c'est un trompe-l'oeil. On envoie des chèques, ça va bien paraître. Tant mieux si ça paraît bien, tant mieux pour le gouvernement. Mais j'aimerais mieux que ça paraisse bien pour les gens, pour les petites familles, pour que le pas en avant soit vrai et qu'il ne soit pas compensé par un autre pas en arrière qui est un petit peu plus grand que le pas en avant. Ça, ce n'est pas bon.

Alors, M. le Président, d'un côté, le gouvernement annonce une chose, mais il fait une autre chose. Alors, à la limite, ça gruge la confiance dans le gouvernement, ça. Et puis les gens vont se rendre compte, à la fin de l'année, qu'ils ont eu quatre chèques, mais que leur situation n'est pas meilleure, ils vont s'en rendre compte. Il ne faut pas penser que les gens ne s'en rendent pas compte, les gens s'en rendent compte. Alors, je dis au ministre: Faites attention, corrigez donc la situation pendant qu'il est encore temps.

Vous savez, si on regarde, par exemple, j'ai ici une lettre très intéressante, une lettre d'un jeune homme. Dans le domaine des prêts et bourses, par exemple, regardez ce que dit le jeune homme: «Concrètement, plus de 130 000 jeunes étudiants et étudiantes du Québec voient leur endettement augmenter en moyenne de 65 %. Avant les compressions, un étudiant recevait en moyenne 2 400 $ en prêt et 2 600 $ en bourse. Depuis la décision du gouvernement, ce même étudiant reçoit maintenant 4 700 $ en prêt, 1 300 $ en bourse. Alors, pour un diplôme de trois ans, l'endettement moyen s'élève maintenant à 21 500 $.» Vous voyez, ce n'est pas bon, ça. On annonce qu'on va aider les jeunes, qu'on va mettre l'éducation en priorité. Bien oui, parce que l'éducation, c'est un investissement. La santé... Quand on va à l'hôpital, bien ça, c'est une dépense, hein. Quand on est obligé d'acheter des médicaments, c'est une dépense. Mais, quand on va à l'université ou qu'on va au collège, qu'on va au secondaire, ça, c'est un investissement. Alors, ce n'est pas la même chose. C'est pour ça qu'il faudrait insister plus là-dessus.

Ensuite, M. le Président, toute la question des aînés. Bon, vous savez la situation, hein. On sait que, dans le système antérieur qu'on avait mis en place, on avait donné aux aînés, aux gens de 55 ans et plus le statut de personnes avec contraintes temporaires. Pourquoi? Parce que, pour les gens à l'aide sociale, ceux qui avaient des contraintes temporaires créées par la santé, des problèmes de santé ou autrement pouvaient obtenir, grâce à cette clause-là, un 111 $ de plus par mois. Alors, c'est quand même important quand on n'a pas beaucoup de revenus. Alors là, le gouvernement a annoncé qu'il enlèverait cette clause-là. Alors, évidemment, les gens de 55 ans et plus qui perdent leur emploi, bien c'est un handicap, hein, parce que c'est très difficile pour eux d'en retrouver un autre et peut-être qu'ils ne retrouveront jamais d'emploi. Alors, au moins, ça, ça les aidait un peu.

J'ai demandé au ministre de corriger le tir et de rassurer les gens. Bien, il m'a répondu quelque chose d'un peu compliqué, là, mais ça se termine par ce qui suit: «Alors, je vous le dis, il n'y a pas lieu de paniquer. Qu'on arrête de tenter de semer l'inquiétude. Cette question-là va être dans le règlement.» Mais quoi dans le règlement? Qu'est-ce qu'il va y avoir, dans le règlement? Est-ce qu'on va tout simplement le restaurer ou si ça va être d'autre chose? C'est une réponse vague à souhait. Comme il est habitué de dire des choses et de faire le contraire, ma confiance est limitée. Alors, vous voyez, dans ce contexte-là, je ne peux pas, moi, voter pour cette loi-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Et, pour la poursuite du débat sur le principe de ce projet de loi là, je reconnais maintenant... S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Alors, l'intervention du député de Saint-Hyacinthe étant terminée, il faut passer à une autre intervention. Je reconnais maintenant M. le député de Gouin, toujours sur l'adoption du principe. Alors, M. le député de Gouin, pour votre intervention.

M. Nicolas Girard

M. Girard: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 57 de l'actuel gouvernement s'inscrit dans la lignée des actions posées par le Parti libéral depuis son arrivée au pouvoir en matière de lutte à la pauvreté, c'est-à-dire un recul pour les plus démunis.

Ce projet de loi n'est pas cohérent avec la loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Il ne permet pas d'améliorer la situation des plus pauvres de notre société. Ce projet de loi contribue plutôt à entretenir des préjugés à l'endroit des prestataires qui sont aptes au travail et introduit des modifications au régime qui nous ramènent 30 ans en arrière.

Comme l'indiquait d'ailleurs la CSN dans un communiqué de presse: «Avec le projet de loi n° 57, on ouvre ainsi toute grande la porte à des différences de traitement selon les catégories de prestataires plutôt que de viser la couverture des besoins essentiels, quelle que soit la condition des personnes, ce que devrait assurer l'aide de dernier recours.» Fin de la citation.

Par ailleurs, M. le Président, je crois qu'il est important de rappeler que ce projet de loi n° 57 s'ajoute aux nombreuses hausses de tarifs qu'a mises en place ce gouvernement depuis un an et demi. La question que nous devons nous poser comme parlementaires est la suivante: La situation des personnes les plus démunies de la société s'est-elle améliorée depuis le 14 avril 2003? Non, M. le Président.

Bien que le ministre ait rendu public son plan d'action en matière de lutte à la pauvreté et qu'il comprend un investissement de 2,5 milliards en cinq ans, force est de constater que ce plan s'est autofinancé par le biais de mesures fiscales et des augmentations de tarifs. Les gestes posés par ce gouvernement sont là pour le démontrer: une augmentation de 5 $ à 7 $ des frais de garde dans les centres de la petite enfance, l'abolition de certaines déductions fiscales pour les familles, l'augmentation des tarifs d'électricité, l'augmentation des primes d'assurance médicaments, l'indexation des tables d'impôt de 2 % plutôt qu'à l'IPC, l'indexation des prestations d'aide sociale à 2 % plutôt qu'à l'IPC, une hausse des tarifs de transport en commun et finalement l'instauration de la clause Tanguy.

Bref, depuis un an et demi, la cour est pleine pour les plus démunis de notre société. Il n'est donc pas surprenant que le projet de loi n° 57 ne réponde pas aux besoins des plus démunis de notre société. Ce n'est que la poursuite de l'oeuvre de ce gouvernement depuis un an et demi. Il est clair, M. le Président, que le projet de loi n° 57 ne passe pas le test auprès des organismes communautaires et organismes publics entendus en commission parlementaire. D'ailleurs, plus d'un groupe sur deux a demandé le retrait pur et simple du projet de loi. Le ministre a lamentablement échoué l'examen avec son projet de loi n° 57. C'est un «E» pour échec.

Échec sur le plan du respect des engagements électoraux du Parti libéral en matière de lutte à la pauvreté. Échec sur le plan du respect des principes de la loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Échec en termes d'absence de couverture des besoins essentiels. Échec pour le refus du ministre d'assurer l'indexation annuelle automatique et complète de toutes les prestations. Échec sur le plan de la transparence avec le refus du ministre de déposer son projet de règlement avant l'adoption de la loi. Bref, M. le Président, un échec sur toute la ligne.

M. le Président, reprenons un par un les principaux éléments contenus dans le projet de loi du ministre. Le projet de loi n° 57 transforme le régime de la sécurité du revenu en quatre programmes: l'aide sociale, la solidarité sociale, Alternative jeunesse et les programmes spécifiques. En commission parlementaire, plusieurs groupes ont émis des critiques importantes sur les programmes Alternative jeunesse et spécifiques parce qu'ils reposent entièrement sur le pouvoir discrétionnaire du ministre prévu aux articles 67 et 72. Le ministre a dévoilé des amendements à son projet de loi qui visent à assurer une certaine transparence dans le pouvoir du ministre de créer des programmes spécifiques. Nous surveillerons de près le ministre quant à sa soudaine volonté de transparence.

n(20 h 30)n

En commission parlementaire, plusieurs groupes ont indiqué au ministre que l'approche par programmes aboutit finalement à l'affaiblissement et, ultimement, l'élimination d'un programme de soutien financier égal pour tous.

M. le Président, un autre élément a fait l'objet de vives critiques en commission parlementaire. Le projet de loi n° 57 crée la prime à la participation. Le ministre ne dispose que d'un budget de 129 millions par année. Ce budget est nettement insuffisant pour offrir une prime intéressante pour tous. Cette prime se présente sous deux formes: allocation de travail et allocation de participation. Cette allocation de 130 à 150 $ par mois ne sera accessible qu'à 10 % des personnes admissibles. C'est clair qu'il n'y a pas suffisamment d'argent. Sur les 160 000 personnes qui sont admissibles à ces programmes, il ne peut les offrir qu'à 16 000. Concrètement, ça veut dire 90 % des personnes qu'on laisse tomber. On leur dit: Débrouillez-vous. Cette prime à la participation est vue comme un incitatif au travail et à l'insertion sociale, mais c'est surtout une façon de compenser une prestation nettement insuffisante pour couvrir les besoins essentiels. Mais on voit bien que l'approche du ministre ne tient pas la route, surtout quand le ministre nous présente la prime à la participation comme une façon de compenser des prestations insuffisantes. On donne des primes à ceux qui nous démontrent un effort, soit vers l'insertion en emploi ou sociale, mais on dit en même temps: Vous serez juste 16 000 sur 160 000 à pouvoir en profiter. Alors, on fait quoi avec les autres prestataires? On les laisse dans la misère?

M. le Président, j'aimerais maintenant aborder un autre aspect du projet de loi n° 57, la question de la couverture des besoins essentiels. La décision du ministre de n'indexer qu'à moitié les prestations des personnes n'ayant pas de contraintes sévères est mauvaise. On applique la règle du deux poids, deux mesures. C'est comme si on disait que le coût de la vie augmentait à des degrés divers selon le statut de prestataire. La pinte de lait, elle, elle augmente pour tout le monde, que l'on soit une personne sans contraintes à l'emploi, avec des contraintes temporaires ou des contraintes sévères. Vous voyez bien que la solution du ministre n'est pas viable.

Je pense donc, M. le Président, que cette décision va appauvrir davantage les prestataires et les éloignera de plus en plus d'une éventuelle couverture des besoins essentiels. On remplace les pénalités pour refus de participation à un parcours qui conduit tout droit à l'appauvrissement des prestataires de la sécurité du revenu. D'ailleurs, en commission parlementaire, 72 % des groupes sont venus dire que la demi-indexation de la prestation aura des impacts sur le revenu et la motivation des gens. La Protectrice du citoyen est à ce sujet fort éloquente. Elle soutient, et je cite: «...est-il indispensable de faire marche arrière et d'instaurer une inégalité de traitement pour des catégories de personnes qui, somme toute, connaissent les mêmes difficultés financières? En d'autres termes, l'indexation ne devrait-elle pas être accordée à tous les prestataires, sans égard à leur statut, puisque le marché, lui, ne crée pas de distinction?» Fin de la citation.

Combien d'autres prestataires le ministre laissera-t-il s'appauvrir avant de décider d'indexer les prestataires aptes au travail? Pouvons-nous, comme société, accepter que ces gens soient confinés dans leur situation d'exclusion et de pauvreté? Je ne le crois pas. Par ailleurs, M. le Président, ce projet de loi n'inclut pas de référence au principe de la couverture des besoins essentiels. Pour nous, la couverture des besoins essentiels est un élément majeur d'une réforme de l'aide sociale, et toute démarche qui ne l'inclut pas est insuffisante. D'ailleurs, M. le Président, 86 % des groupes qui se sont présentés en commission parlementaire recommandent que les barèmes d'aide sociale soient haussés de façon à couvrir les besoins essentiels qui sont reconnus par le ministère de la Sécurité du revenu en 1996.

Le projet de loi n° 57 est une réforme importante de l'aide sociale, et, malheureusement, il s'agit d'un pas en arrière pour les plus démunis. Le projet de loi ne prévoit pas de réel barème plancher. Il n'y a aucune provision qui protège les prestations contre certaines formes de coupures. La demi-indexation qui est prévue au plan d'action du ministre et la modification réglementaire du ministre, communément appelée la clause Tanguy, nous démontrent clairement qu'il n'existe pas de réel barème plancher avec le projet de loi n° 57. Cette pénalité pour partage de logement va d'ailleurs clairement à l'encontre de la Loi sur l'exclusion sociale et la pauvreté. D'ailleurs, à ce sujet, Jean Lalande, du Comité des droits sociaux du Sud-Ouest de Montréal, a indiqué, lors de la commission parlementaire, et je cite, qu'il y a des personnes qui, «à partir du mois de janvier», dont la prestation va être coupée de 100 $. «Il pourrait y avoir d'autres amendements au règlement qui pourraient réduire cette prestation-là.» Ça veut dire qu'il y a théoriquement une prestation universelle, mais, dans les faits, elle peut être augmentée puis réduite à loisir par le cabinet sans changer un mot à la loi.

M. le Président, il y a un autre aspect qui a soulevé de nombreux débats à la Commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 57. Il s'agit de l'article 53 concernant la saisie de chèques en cas de non-paiement de loyer. Le ministre nous a annoncé, cette semaine, qu'il retirait l'article, mais il nous propose autre chose: le recours à des fiducies sur une base volontaire. Rappelons, M. le Président, que ces fiducies gèrent, à la façon d'une curatelle, les chèques de la sécurité du revenu que des prestataires leur confient. Je ne crois pas, M. le Président, que cette nouvelle proposition du ministre soit une solution intéressante. D'ailleurs, plusieurs groupes nous l'ont indiqué en commission parlementaire. France Desroches, de l'Union des consommateurs, a indiqué, et je cite: «...nous sommes totalement en désaccord avec l'hypothèse de la création des fiducies. Il revient au gouvernement de rétablir l'équilibre en contrôlant l'augmentation du prix des loyers, en augmentant le nombre de logements sociaux, en augmentant le montant de la prestation de façon à permettre aux personnes dans le besoin de respecter leurs engagements vis-à-vis leurs propriétaires.» Fin de la citation. Quant au FRAPRU, ils nous ont indiqué que, pour eux, la mise en tutelle est peut-être pire, car, au lieu que ce soit 50 % du chèque qui échapperaient aux personnes assistées sociales, c'est 100 % du chèque qui échappera aux personnes assistées sociales.

Le danger avec l'approche des fiducies est que cela incite les propriétaires à exiger une mise en tutelle volontaire aux éventuels locataires de la sécurité du revenu, à défaut de quoi, on leur refusera leur location ou ils pourront perdre leur logement. En retirant l'article 53 du projet de loi, on évite de mettre en vigueur un article qui serait discriminatoire en vertu des chartes. Mais, si le gouvernement va de l'avant avec les fiducies, au fond il refile la discrimination en sous-traitance aux propriétaires, et on n'est pas plus avancé. Mais, M. le Président, pourquoi une fiducie volontaire pour les assistés sociaux, alors qu'il y a d'autres types de prestataires qui reçoivent des prestations de la part de l'État ? je pense à des prestataires de la Régie des rentes ou de la CSST ? et ceux-ci ne seraient pas obligés d'y participer? Je ne pense pas que la nouvelle idée du ministre va dans la bonne direction. D'ailleurs, en commission parlementaire, personne n'est arrivé à nous faire une démonstration convaincante que le non-paiement des loyers par les prestataires de la sécurité du revenu dépassait largement les autres catégories de locataires.

Je pense, M. le Président, qu'une augmentation des prestations de la sécurité du revenu et la construction de logements sociaux sont des pistes de solution beaucoup plus porteuses au problème de non-paiement des loyers. Sur le plan de l'augmentation des prestations ? on l'a indiqué un peu plus tôt ? le ministre a raté sa cible.

n(20 h 40)n

Quant à la construction de logements sociaux, c'est un problème criant. À Montréal, dans plusieurs régions du Québec, dans mon quartier, Rosemont et la Petite-Patrie, nous le vivons quotidiennement. On attend d'ailleurs avec impatience la nouvelle politique de l'habitation du ministre des Affaires municipales. Va-t-il dégager des sommes substantielles pour financer l'aide à la pierre, c'est-à-dire le financement nécessaire pour la construction de nouveaux logements sociaux? Nous l'espérons. Nous l'espérons pour des milliers de citoyens démunis ou prestataires de la sécurité du revenu en attente d'un logement convenable. C'est aussi cela, M. le Président, le partage de la richesse et la solidarité.

M. le Président, une autre vive critique de ce projet de loi repose sur la non-publication des règlements par le ministre. Le Collectif pour un Québec sans pauvreté et le Front commun des personnes assistées sociales ont réclamé la publication du règlement. Le refus du ministre de publier le règlement avant l'adoption de la loi rend difficile un véritable débat sur le projet de loi n° 57. D'ailleurs, Me Jean-Guy Ouellet, du Barreau du Québec, a le même point de vue. Il nous indiquait: «On vous dit que le débat démocratique est certainement difficile, puisqu'une grande partie de ce projet de loi [...] passe par voie réglementaire[...]. Donc, le débat est difficilement tenable.» Il ajoute: «...l'absence de règlement handicape certainement une analyse plus fouillée des données ou de la portée du projet de loi.» Fin de la citation. Malheureusement, le ministre ne s'est toujours pas rendu aux arguments du Barreau et des organismes communautaires et de défense des droits des personnes assistées sociales. À quand la publication des projets de règlement?

En terminant, je peux dire, M. le Président, que le projet de loi n° 57 est une autre promesse brisée du Parti libéral et ne respecte ni la loi n° 112 adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale ni l'engagement d'une indexation annuelle automatique et complète de toutes les prestations. D'ailleurs, Viviane Labrie, du Collectif pour un Québec sans pauvreté, déclarait dans Le Devoir du 6 octobre dernier, et je cite: «Nous considérons que ce projet trompe la population dans la mesure où il prétend appliquer la loi alors qu'il ne fait pas ça et [ça] représente plutôt un recul.» Fin de la citation. Cette promesse brisée du gouvernement libéral s'ajoute aux autres: sur les frais de garde dans les centres de la petite enfance, contournement du gel des droits de scolarité par la diminution des bourses aux étudiants et l'augmentation de l'endettement étudiant.

Bref, M. le Président, il y a tellement de promesses non remplies par ce gouvernement que ce n'est plus le Parti libéral du Québec que nous avons en face de nous, dans cette Assemblée, c'est plutôt le PPB, le parti des promesses brisées. Comme opposition officielle, nous ne pouvons donc cautionner le projet de loi n° 57, qui va à l'encontre des principes de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. La responsabilité de ce gouvernement est d'adopter des politiques qui vont faire en sorte d'amener le Québec parmi les pays dans le monde qui compteront le moins de personnes démunies. C'est ça, la vision. C'est ça, du leadership. Ce n'est pas avec ce projet de loi que nous allons y arriver. Le ministre et ce gouvernement devront refaire leurs devoirs.

En conséquence, c'est pour ces raisons que nous allons voter contre ce projet de loi. D'ailleurs, Michel Venne qualifiait ce projet de loi, dans le journal Le Devoir, dans l'édition du lundi le 4 octobre dernier, il titrait: Une fausse lutte contre la pauvreté. Je pense que ça résume bien notre pensée sur le projet de loi n° 57 du ministre. Et c'est pour cette raison que notre formation politique va voter contre l'adoption de principe de ce projet de loi et que nous demandons au ministre de le retirer. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Gouin. Et je suis prêt maintenant à entendre un prochain intervenant sur le principe du projet de loi. Et je reconnais maintenant, toujours sur le principe du projet de loi n° 57, M. le député de L'Assomption. Alors, à vous la parole, M. le député de L'Assomption.

M. Jean-Claude St-André

M. St-André: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à l'instar de mes collègues de l'opposition, j'interviens, ce soir, sur le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, qui a été présenté par le ministre de la Solidarité sociale, de l'Emploi et de la Famille le 11 juin dernier.

On ne peut pas parler du projet de loi n° 57, M. le Président, sans parler de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui a été adoptée à l'unanimité, adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale du Québec avant les élections d'avril 2003, plus précisément en décembre 2002. Ça a été manifestement un des moments forts de cette session d'hiver 2002 que l'adoption par l'Assemblée nationale du Québec ? l'adoption à l'unanimité ? de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

En présentant son projet de loi n° 57, le gouvernement, le ministre de la Solidarité sociale, de l'Emploi et de la Famille a fait rupture avec les principes, les objectifs contenus dans la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Ça, je pense, M. le Président, c'est important d'insister. Les gens d'en face, beaucoup de députés qui siégeaient à l'époque dans l'opposition, qui ont voté pour l'adoption de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, ont voté pour cette loi-là. Aujourd'hui, ils s'apprêtent à faire rupture en adoptant le projet de loi n° 57 sur l'aide aux personnes et aux familles. Plusieurs mouvements sociaux, je dirais, tous les mouvements sociaux ont dénoncé les principes et les objectifs contenus dans le projet de loi n° 57, mais ça n'empêche pas le gouvernement de continuer à aller de l'avant avec ce projet de loi.

M. le Président, je tiens à souligner le travail, la contribution exceptionnelle d'un groupe qui s'est distingué particulièrement dans l'adoption de ce qui a amené l'Assemblée nationale à adopter la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, c'est le Collectif pour un Québec sans pauvreté. À l'époque, il s'appelait le Collectif pour une loi pour un Québec sans pauvreté. Aujourd'hui, c'est le Collectif pour un Québec sans pauvreté. C'est un groupe qui est coordonné de façon brillante par Mme Viviane Labrie, qui oeuvre sur ces questions-là depuis des années. Et ce mouvement-là, au cours des dernières années, ils ont fait le tour du Québec, ils ont rencontré des citoyens qui vivent des situations de pauvreté, ils ont également rencontré les groupes communautaires, les groupes sociaux qui travaillent sur ces questions-là et ils en sont arrivé à une réflexion extrêmement intéressante. Et ça a aboutit, entre autres, par la présentation à l'Assemblée nationale d'une pétition, vous vous en souviendrez, M. le Président, d'une pétition qui réclamait l'adoption par l'Assemblée nationale d'une loi pour éliminer la pauvreté au Québec, une pétition de 200 000 citoyens. Plus de 200 000 citoyens et citoyennes, ce n'est pas rien. Et ça a amené l'Assemblée nationale du Québec donc à adopter la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, loi, je le répète encore une fois, qui a été adoptée à l'unanimité en décembre 2002.

Et, aujourd'hui, le gouvernement, les députés ministériels s'apprêtent, par leur vote, à bafouer en quelque sorte le vote qu'ils avaient pris en décembre 2002, en votant pour la loi n° 112, à l'époque.

n(20 h 50)n

M. le Président, le Collectif pour un Québec sans pauvreté est intervenu à plusieurs reprises, ces dernières semaines, ces derniers jours, pour dénoncer avec vigueur les objectifs qui sont contenus dans le projet de loi, le projet de loi n° 57. Le 10 novembre dernier, comme ils le font depuis quatre ans, ils ont organisé ici, à l'Assemblée nationale ? d'ailleurs, c'est le président de l'Assemblée nationale qui organise cette activité-là ? ils ont organisé un déjeuner où ils ont invité tous les députés à participer pour nous sensibiliser aux réalités des gens, des personnes, qui vivent dans la pauvreté. Peu de députés d'en face sont venus. Le ministre de la Solidarité sociale, lui, brillait par son absence, alors qu'il aurait dû être le premier présent à un tel déjeuner.

M. le Président, moi qui ai l'habitude de rencontrer le collectif et qui ai bien sûr assisté à ce déjeuner-là, encore une fois j'ai été renversé par ce que j'y ai découvert. M. le Président, comment, en 2004, peut-on penser vivre avec une prestation d'aide sociale de 540 $ par mois? Comment peut-on penser se loger, se nourrir et se vêtir avec 540 $ par mois? Il n'y a pas de réponse à une question comme celle-là, M. le Président, mais, puisque plusieurs députés d'en face étaient absents, je vais simplement me permettre, M. le Président, de lire une lettre que le collectif a adressée à tous les députés de l'Assemblée nationale, et qui parle d'elle-même, et qui illustre bien les lacunes de ce projet de loi, le recul important que ce projet de loi comporte, un recul d'au moins 40 ans, M. le Président.

Alors, je fais la lecture de la lettre en question, qui était adressée à tous les députés de l'Assemblée nationale, datée du 21 octobre dernier, lettre adressée aux députés par le Collectif pour un Québec sans pauvreté. Le titre de la lettre: «Back to the Future»: Reculs, poisons et tromperies à l'aide sociale. «Mesdames, messieurs [les députés], alors que votre rentrée parlementaire a lieu quelques jours après la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, nous voulons vous alerter aujourd'hui sur la façon dont le gouvernement est en train de se jouer des engagements de votre Assemblée à ce sujet. Nous employons des mots très forts dans le titre de notre lettre. Ils correspondent malheureusement à la réalité. Le 13 décembre 2002, votre Assemblée a adopté à l'unanimité la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Cette loi visait et vise toujours à engager les institutions politiques et la société québécoise à "tendre vers un Québec sans pauvreté". Deux ans plus tard, une réforme de l'aide sociale en trois morceaux s'avère une des pièces les plus empoisonnées de l'automne politique. Le gouvernement prétend appliquer la Loi sur la pauvreté. En réalité il l'enfreint grossièrement. Il y a ici un test pour [le] processus démocratique. Et un autre pour l'action citoyenne. Comme l'enchaînement des événements est complexe et confondant, voici les faits.»

M. le Président, je pense que la députée de Chauveau voudrait intervenir. Je serais prêt à lui céder la parole. J'ai l'impression qu'il y a des députés en face qui aimeraient intervenir sur le projet...

Le Vice-Président (M. Gendron): Bien, M. le député, je n'ai pas d'appel au règlement. Mais j'en profite; parfois, j'entends autant votre voix que celle d'autres, alors que ce n'est pas supposé. Moi, je suis supposé d'entendre votre voix, puisqu'il y a une personne qui a le droit de parole. Alors, si vous voulez poursuivre.

Mais, à tous les parlementaires, là, soyez attentifs aux propos de celui qui a la parole. Et il y a une seule personne qui a la parole. Et, si la députée de Chauveau veut intervenir, bien je sais qu'elle va demander. Elle va se lever puis elle va demander la parole. Et je n'ai pas eu connaissance qu'elle avait fait ce souhait. Alors, à vous, M. le député de L'Assomption.

M. St-André: Alors, bien dommage, on aurait aimé ça l'entendre, M. le Président.

Alors, je poursuis la lecture de la lettre du Collectif pour un Québec sans pauvreté adressée à tous les députés de l'Assemblée nationale. Alors: «Premier morceau empoisonné. Alors que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale impose d'améliorer dans un plan d'action les revenus et conditions de vie de l'ensemble des personnes en situation de pauvreté, le plan d'action publié le 2 avril 2004 par le gouvernement poursuit la dévaluation des prestations pour les deux tiers des personnes à l'aide sociale ? il poursuit la dévaluation des prestations pour les deux tiers des personnes à l'aide sociale: il programme de leur appliquer à partir de janvier 2005 un taux d'indexation réduit à moitié. Nous parlons ici de prestations mensuelles de 533 $, qui ne permettent à personne de couvrir ses besoins et qui ont perdu 30 % de leur valeur depuis 20 ans par défaut d'être indexées correctement. Second morceau empoisonné. Le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, déposé sans prévenir le 11 juin 2004 pour remplacer la loi actuelle sur l'aide sociale, enfreint en plusieurs points la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale qu'il devrait normalement appliquer. Il échoue même à opérer les changements spécifiques que celle-ci lui impose sur l'instauration d'une prestation minimale protégée de toute réduction, sur l'amélioration des biens et avoirs liquides permis et sur l'exclusion de la pension alimentaire du calcul de la prestation.

«À l'exception d'un article, à conserver, qui abolit les pénalités pour refus de mesure ou d'emploi, le projet de loi a pour effet soit de confirmer un statu quo inacceptable, soit d'empirer le régime d'aide sociale. Il ignore la nécessité, pourtant vitale, de couvrir les besoins essentiels des personnes et des familles. Piégé dans des préjugés graves et dans une doctrine fallacieuse de l'incitation au travail qui n'ont jamais réussi qu'à augmenter les inégalités et à réduire les conditions faites aux plus pauvres, le projet de loi consolide les discriminations entre personnes dites aptes ou inaptes au travail. Il diminue les garanties et protections spécifiées dans la loi.

«Ce report de loi ramènerait en fait le régime d'aide sociale à une gestion par régimes particuliers, dénoncée par le rapport Boucher de 1963. C'est cette situation que la première loi sur l'aide sociale est venue corriger en 1969 par la création d'un régime unique fondé sur des droits et sur la couverture des besoins, deux notions qui finiraient de disparaître dans le projet de loi n° 57. Le programme actuel d'assistance-emploi serait séparé en quatre programmes distincts: l'aide sociale, régime par défaut dévalué et désinvesti, la solidarité sociale, pour les personnes dites avec contraintes sévères à l'emploi, Alternative jeunesse pour les 18-25 ans et des "programmes spécifiques", pour diverses situations, ces deux dernières catégories étant sans droit de recours et normées à la discrétion du ministre. L'orientation "partenariats privé-public", bien perceptible [...] des besoins [spécieux] ou allocations de participation défrayés par un partenaire, groupe, entreprise, société, personne, pourraient être considérés comme payés au titre de la loi! Ajoutons pour la pleine mesure le retour du fantôme de la saisie des chèques pour non paiement de loyers, exhumé des débats de la réforme de 1998 et amplement repris par les médias démagogiques lors de la sortie du projet de loi en juin dernier ? reconnaissons tout de même que le ministre a décidé de reculer sur cette mesure-là.

«Troisième morceau empoisonné. Comme si cela ne suffisait pas, un projet de modification au règlement de la loi actuelle a ensuite été publiée le 22 septembre 2004, quelques jours après la date limite pour le dépôt des mémoires à la Commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 57. Ces modifications aggraveraient la situation en coupant 100 $ sur des prestations de 533 $ pour partage de logement familial ? ceci alors que la Loi sur la pauvreté abolit la coupure pour partage de logement ? en privant des milliers de ménages d'une allocation logement mensuelle allant jusqu'à 80 $ pendant l'année de leur inscription à l'aide sociale, en éliminant une allocation mensuelle pour frais d'emploi allant jusqu'à 25 $, en réduisant l'accès à l'aide pour des milliers de personnes. Ces modifications font au surplus craindre le pire pour le projet de règlement, non diffusé, qui devrait accompagner le projet de loi n° 57. Dans tous ces cas, le ministre fait fi des examens d'impact sur les revenus des personnes en situation de pauvreté qui lui sont imposés par l'article 20 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Il est ironique que le projet de modification au règlement atteste toutefois qu'un examen d'impact sur les entreprises et les PME a été fait!

n(21 heures)n

«Sortir de l'impasse. Comment sortir de l'impasse ainsi faite aux personnes en situation de pauvreté et de là, à toute la société? Les discussions en commission parlementaire sont pénibles, le ministre ajoutant de la confusion tant sur le contenu du projet de loi que sur le financement réel des mesures. Pourtant, il est possible d'agir positivement: la mesure Soutien aux enfants annoncée au printemps dernier en est un bon exemple.

«Dans notre mémoire à la commission, nous avons fait l'effort de circonstancier le problème pour montrer, citations à l'appui, le danger de tourner en rond dans l'histoire. La solution que nous vous proposons découle logiquement de cette analyse:

«1° retirer le projet de loi n° 57 et le projet de modification au règlement;

«2° amender la loi actuelle de l'aide sociale pour la conformer à la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale et pour assurer qu'elle couvre les besoins essentiels dans la dignité, sans distinction par rapport à l'attitude présumée au travail;

«3° ouvrir un débat public mettant à profit l'expertise citoyenne, dont celle des personnes en situation de pauvreté, en vue d'imaginer le régime de garantie du revenu qui devrait remplacer le régime actuel d'aide sociale pour faire un vrai saut qualitatif en direction d'un Québec sans pauvreté.

«Encore faut-il contrer les fabricants de l'impasse et des préjugés qui la construisent. Les gestes du présent gouvernement ressemblent fort à une correction du "marché" devant les avancées citoyennes des dernières années. La sortie récente de l'Institut économique de Montréal en appui à la diminution des prestations le rappelle assez bien.

«Vous aurez à décider cet automne des conditions faites aux plus pauvres de vos concitoyennes et concitoyens. Nous attendons de vous que vous imposiez le respect de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Faites primer le futur meilleur sur le futur à reculons. Allumez la lumière rouge. Marquez l'objection. Et agissez.» Et c'est signé le Collectif pour un Québec sans pauvreté.

M. le Président, c'est avec plaisir que je joins ma voix à celle du Collectif pour un Québec sans pauvreté. Je vais donc voter contre l'adoption de principe du projet de loi n° 57. Et je demande, comme mes collègues de l'opposition officielle, comme le Collectif pour un Québec sans pauvreté l'a demandé aussi, à ce que ce projet de loi, ce mauvais projet de loi soit retiré pour qu'on procède à une véritable réforme de l'aide sociale qui va permettre aux plus démunis de se sortir de la pauvreté. M. le Président, je pense que c'est important de faire la guerre à la pauvreté et non pas de faire la guerre aux pauvres, comme les gens d'en face le font. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors merci, M. le député de L'Assomption, pour votre intervention. Et, pour la poursuite du débat toujours sur le principe du projet de loi n° 57, je reconnais maintenant M. le député de Dubuc. Alors, à vous, M. le député de Dubuc.

M. Jacques Côté

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, le projet de loi qui nous est présenté et sur lequel nous étudions l'adoption de principe, le projet de loi n° 57, intitulé Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, est un leurre, M. le Président. Pourquoi, M. le Président? C'est ce que je vais tenter, dans les quelques minutes qui me sont allouées, de vous démontrer. Naturellement, je ne pourrai pas étudier ou parler de tous les aspects de ce projet de loi. Alors, je m'en tiendrai à deux aspects importants, soit l'indexation des prestations et également la réglementation concernant ce projet de loi.

Mais avant, M. le Président, de débuter mon intervention, je pense qu'il est important de lire le premier paragraphe des notes explicatives et je vous rappelle ces notes qui disent: «Dans le cadre des principes et orientations énoncées au plan d'action pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, ce projet de loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services afin de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles. Il vise également à inciter les personnes à exercer des activités permettant leur insertion sociale, leur intégration en emploi et leur participation sociale.»

Alors, M. le Président, c'est le grand principe qui est abordé par ce projet de loi. Malheureusement, je le disais tout à l'heure, c'est un leurre. Pourquoi, M. le Président, est-ce un leurre? D'abord, parce que ce projet prétend aider des personnes et des familles, alors qu'en réalité, M. le Président, ce gouvernement refuse d'indexer les prestations de l'ensemble des assistés sociaux. Pourtant, il s'y était engagé solennellement durant la campagne électorale. La preuve, M. le Président, le 7 avril 2003, c'est-à-dire une semaine avant l'élection du 14 avril 2003, M. Jean Charest, qui était alors chef de l'opposition officielle, adressait une lettre à Mme Monique Morval dans laquelle il lui disait: «Je peux vous assurer que la loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale sera respectée par le prochain gouvernement libéral.

«[Mes] engagements prévoient déjà...» Et là, M. le Président, déjà on voit le retrait ou l'abandon. «[Mes] engagements prévoient déjà l'adoption de certaines mesures urgentes dont la gratuité des médicaments pour les personnes âgées recevant le supplément du revenu et les personnes assistées sociales, l'indexation des prestations de dernier recours, l'établissement d'un seuil minimal de prestation...» Et on allait même jusqu'à dire qu'on consacrerait 850 millions de dollars, M. le Président, au chapitre de la valorisation du travail et du soutien au revenu.

M. le Président, en plus, le ministre a l'outrecuidance de venir nous dire, au sujet des indexations... Et je vous cite, là, les paroles qu'il a prononcées lors de son dernier point de presse, pas plus tard que, je pense, cette semaine. Au sujet des indexations des prestations, il disait ceci: «Lorsque les ressources financières du gouvernement le permettront, les prestations des personnes sans contraintes à l'emploi pourront être indexées à un taux supérieur que celui prévu dans le Plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.»

M. le Président, ceci est un leurre. Encore là, le ministre... Ça ne constitue absolument pas un amendement à la loi, c'est simplement une déclaration du ministre qu'il a faite comme ça, son point de presse devant les journalistes. Alors, on ne peut se fier à une telle déclaration. Et le ministre se demande après ça, M. le Président, pourquoi il y a des titres de journaux comme ceux du Devoir, par exemple, qui justement disait, le 1er décembre, alors c'est cette semaine, effectivement, disait: Les assistés sociaux continueront de s'appauvrir. Alors, M. le Président, on dit justement dans ce document... dans cet article du Devoir que «le gouvernement Charest refuse d'indexer pleinement les prestations de l'ensemble des...»

Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant, M. le député, un instant. C'est parce que... Non, ce n'est pas... C'est toujours la même règle. Ici, à l'Assemblée nationale, on ne peut pas, même dans une citation, pour un parlementaire, le nominer autrement que par son titre ou sa circonscription. Puis c'est une règle, alors j'aimerais ça que vous la suiviez, même dans une citation.

M. Côté: M. le Président, je vous remercie de me rappeler à l'ordre et je devrais dire: «Le gouvernement [libéral] refuse d'indexer pleinement les prestations de l'ensemble des assistés sociaux comme il s'y était pourtant engagé en campagne électorale. Selon son bon vouloir et l'état des finances publiques, il décidera année après année, de façon arbitraire, s'il accordera ou non une indexation complète aux assistés sociaux aptes au travail.

«Pour l'année 2005, la réponse est [...] ? vous le devinez, c'est non. "Il n'est pas prévu d'avoir une pleine indexation en 2005, sauf qu'on garde la porte ouverte pour les prochaines années."» Dixit le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille. «Le ministre a présenté cette "porte ouverte" à la pleine indexation comme l'une des modifications principales de son projet de loi», M. le Président. Est-ce que c'est une modification? Bien non, c'est évident. Il n'en est absolument pas question dans le projet de loi. C'est simplement une parole qu'il a lancée comme ça en l'air pour faire taire un petit peu, là, les opposants à son projet de loi.

Ce projet de loi également, M. le Président, prévoit une légère augmentation selon la hausse du coût de la vie seulement dans les cas des assistés sociaux ayant des contraintes sévères à l'emploi. Les prestataires qui sont aptes au travail ne recevront, quant à eux, qu'une demi-indexation annuelle. Et, en 2005, on disait que la prestation mensuelle de base, qui était de 533 $, va passer de 533 $ à 536 $, M. le Président, une augmentation de 3 $.

Alors, la vaste majorité des groupes sociaux, M. le Président, et même le Protecteur du citoyen ont réclamé, en commission parlementaire, l'instauration d'une pleine indexation pour l'ensemble des assistés sociaux et, je pense, pour une simple raison, c'est que l'augmentation du coût de la vie, ça affecte tous les prestataires, M. le Président, peu importe leur statut. Alors, je pense que c'est important que le ministre révise cette position. Et l'absence d'indexation complète, moi, ça m'apparaît, M. le Président, quelque chose qui est... je pourrais dire, employer le terme «odieux». Je pense que d'ailleurs Mme Labrie du Collectif sur la pauvreté, je pense qu'elle avait employé ce terme, là, pour parler de l'absence d'indexation sur les prestations.

n(21 h 10)n

Le Barreau du Québec, M. le Président, l'a dit au ministre en commission parlementaire. Le Barreau du Québec, dans une lettre qu'il avait adressée le 22 septembre 2004 au ministre, lui disait ceci: «Toutefois, il [nous] semble que le projet de loi n° 57, dans sa forme actuelle, ne répond pas [aux objectifs de lutte à la pauvreté et d'exclusion sociale].» À ce moment-là, M. le Président, le Barreau faisait référence également à l'article 45 de la Charte des droits et libertés de la personne. Donc, la charte prévoit que toute personne dans le besoin a droit pour elle et sa famille à des mesures d'assistance financière et à des mesures sociales prévues par la loi susceptibles de lui assurer un niveau de vie décent.

«L'absence d'une déclaration générale de garantie de prestation minimale susceptible d'assurer aux personnes dans le besoin et à leurs familles un niveau de vie décent constitue un sujet d'inquiétude important quant au respect des droits de la personne pour les personnes couvertes par le projet de loi.» Et cette phrase, M. le Président, du Barreau du Québec est sérieuse et je pense qu'on aurait dû s'y attarder beaucoup plus qu'on ne l'a fait avec le projet de loi n° 57.

Et le Barreau continue en disant que «cette inquiétude est d'autant plus grande que les niveaux d'aide et les mécanismes d'indexation différenciés de certains d'entre eux ? alors, on parle d'indexation à moitié, indexation plus ou moins complète ? ne se différencient pas substantiellement des niveaux d'aide actuels qui font l'objet d'analyses démontrant leur insuffisance à assurer un niveau de vie décent».

Et, M. le Président, le Barreau fait référence justement au rapport dont mon collègue tout à l'heure citait, c'était le rapport du Conseil national du bien-être social, Un revenu pour vivre?, qui avait été publié et dans lequel on disait que «l'État n'a pas à se préoccuper d'être charitable. Cependant, il a cependant le devoir d'être juste.» Et c'est ça, M. le Président, qui est excessivement important: la justice, la justice pour tous. C'est pourquoi il importe qu'il reconnaisse clairement le droit du citoyen à l'assistance lorsque celui-ci est dans le besoin, quelle que soit la cause immédiate ou éloignée de ce besoin. On ne lui fait pas la charité à cette personne qui est dans le besoin, M. le Président, on ne fait que lui donner des moyens de vivre décemment. Et c'est ça qui est important et c'est ça que le parti en face, que le gouvernement semble vouloir oublier.

Alors, M. le Président, également dans une lettre adressée... dans une lettre adressée... Je m'excuse, M. le Président, je viens d'en parler.

Mme Josée Boileau également, qui est éditorialiste au journal Le Devoir disait, dans un éditorial du 1er décembre dernier également: «Or, en maintenant sa décision de ne pas indexer les prestations des assistés sociaux aptes au travail pour qu'elles soient au même niveau que celles versées aux personnes qui ont des contraintes à l'emploi, le gouvernement libéral bafoue ce principe.» Alors, le principe, c'est le droit du citoyen à l'assistance lorsque celui-ci est dans le besoin. Je l'ai mentionné tout à l'heure. Et c'est ça qui est malsain, c'est ça qui est mauvais, c'est qu'on fait des distinctions. «Ainsi, si les "non-aptes" ont droit à une hausse de 1,3 % en 2005, les autres devront se contenter de la moitié. [Alors], comme si l'inflation était devenue sélective!» C'est Mme Josée Boileau, éditorialiste au Devoir qui fait cette constatation.

«Et les primes d'incitation au travail vont...» Le ministre disait, en réponse à cette déclaration de l'éditorialiste Mme Boileau, il a rétorqué tout simplement en point de presse que les primes d'incitation au travail vont compenser cette demi-indexation. Et cette demi-indexation, M. le Président, elle comporte plusieurs lacunes. D'une part, elle fait fi de l'écart important ? et ça va jusqu'à 250 $ par mois ? qui existe déjà entre les montants reçus selon que l'on est apte à l'emploi ou que l'on ne l'est pas. «D'autre part, le ministre confond le concept de couverture des besoins essentiels, ce qu'est l'aide sociale, et les incitatifs qui ajoutent au traitement de base. En amalgamant les deux ? alors, on mélange tout, M. le Président ? il procède de façon détournée à une diminution réelle de l'aide...» Et c'est ça, M. le Président, qu'il faut se rappeler. Alors, Mme Boileau terminait son article en disant: «Voilà un gouvernement qui fait financer ses nouvelles primes à l'emploi par les assistés sociaux eux-mêmes, grâce à sa demi-indexation et aux nouvelles restrictions imposées aux prestataires...»

Alors, M. le Président, c'est une affirmation qui est sérieuse, et je pense que le ministre ainsi que son gouvernement, le gouvernement d'en face, qui avait fait des belles promesses durant la campagne électorale, devraient considérer ces réactions, devraient prendre en compte l'opinion de ces gens qui ne sont pas tous des... Ce ne sont pas toutes des personnes qui ont tort, M. le Président. Ce sont des gens qui analysent froidement le projet de loi, qui l'analysent de façon objective, qui l'analysent de façon logique et qui émettent des opinions qui sont importantes. La société civile, M. le Président, c'est important de pouvoir tenir compte de son opinion. Et Mme Boileau, comme le Barreau du Québec, comme l'Ordre des travailleurs sociaux ne sont pas les seules personnes à faire de telles observations.

M. le Président, cette décision d'indexation partielle, elle aura pour effet d'appauvrir davantage les prestataires et je pense qu'elle va les éloigner de plus en plus d'une éventuelle couverture des besoins essentiels. On remplace des pénalités pour refus de participation à un parcours par l'appauvrissement progressif des personnes sans contraintes à l'emploi dans le dessein justement de les forcer à quitter une situation qui est de plus en plus aversive. Et mon collègue le député de Vachon en faisait également mention dans ses remarques, M. le Président. Et le ministre justifie sa décision ? je l'ai dit tout à l'heure ? en disant également que, lorsque nous étions au pouvoir, c'est que nous n'avions pas indexé les prestations durant une certaine période d'années et que nous avions affaibli le pouvoir d'achat des prestataires. À cela nous rétorquons qu'il devrait prendre toutes les précautions législatives possibles pour empêcher que lui-même ou ses successeurs ne viennent annuler complètement ou partiellement ces indexations.

M. le Président, pour conclure sur ce sujet de l'indexation, je crois qu'il est clair, à la lecture du plan d'action sur la pauvreté et du projet de loi n° 57 qui est devant nous pour adoption de principe, que le ministre compte sur des mesures comme la prime au travail et la prime à la participation pour compenser justement cette indexation partielle de la prestation pour les personnes aptes au travail. Une telle indexation aura pour résultat de diminuer le pouvoir d'achat des prestataires et le ministre ainsi remplira son objectif de valorisation des efforts en affamant davantage les prestataires de l'aide sociale. L'indexation ne devrait-elle pas être accordée à tous les prestataires sans égard à leur statut, puisque le marché, lui, ne crée pas de distinction? Alors, M. le Président, c'est la réponse à l'indexation, c'est que le marché ne crée pas de distinction entre les différents prestataires.

M. le Président, la reconnaissance du droit à un revenu qui couvre les besoins essentiels des ménages à faibles revenus constitue un des meilleurs moyens d'améliorer de façon permanente les conditions de vie. Et il faut faire un constat, M. le Président, c'est que les ménages les plus pauvres n'ont pas vu leurs revenus augmenter de façon significative au cours des dernières années. Et ceux qui sont déjà les plus pauvres ont vu justement leur situation continuer de s'aggraver de plus en plus. Autrement dit, M. le Président, les écarts augmentent à chaque année. Ceux qui étaient pauvres sont de plus en plus pauvres et ceux qui étaient les plus pauvres sont devenus de plus en plus pauvres. Alors, M. le Président, ce projet de loi, en ce sens-là, est inacceptable.

n(21 h 20)n

En effet, M. le Président, les revenus des ménages à l'aide sociale ne permettent pas de couvrir les dépenses de base. Ça, on le sait, et on est capable de le constater. C'est un scandale, M. le Président. Et les prestations des ménages à l'aide sociale qui ne sont pas indexées automatiquement et pleinement, ça aussi, c'est un autre scandale, M. le Président. L'aide sociale permet encore une division, une division entre les pauvres qui sont méritants et les mauvais pauvres, parce qu'on catégorise la pauvreté dans ce projet de loi, M. le Président, et ça, c'est inacceptable. Le projet de loi n° 57 qui est proposé par le gouvernement ne règle pas ces problèmes majeurs. Pire, il menace de coupures des personnes âgées de 55 ans et plus. Il propose de nouveaux programmes sans droit, sans recours, ébréchant encore à nouveau le droit à un revenu décent.

Et par ailleurs le projet de loi renvoie régulièrement au règlement ? et c'était mon deuxième point ? dont on ne connaît absolument pas la teneur et sur lequel il sera plus difficile de se prononcer à cause des délais et de la méthode de consultation des règlements. Il ajoute de nombreux pouvoirs au ministre qui ne sont absolument pas balisés ? et ça, M. le Président, c'est ça, une réglementation qui est non efficace, qui est non efficiente, parce qu'on ne sait pas exactement quelle sera cette réglementation ? les premiers étant, comme par hasard, ceux donnant au ministre plus de pouvoirs, laissant la population dans le noir sur les intentions réelles du ministre. Pardon, M. le Président, j'ai un peu la gorge enrouée, mais je voudrais... Il me reste une minute et demie, alors je voudrais simplement vous donner un exemple de cette réglementation.

Ainsi, lorsque le ministre affirme qu'on n'a plus besoin d'inscrire dans la nouvelle loi des garanties qu'à 55 ans les personnes assistées sociales recevront 113 $ de plus, alors le ministre préfère nous dire que les règlements stipuleront cette garantie. Elle est où, la garantie, M. le Président? Elle est où, cette garantie? Nous ne connaissons pas les règlements, nous ne les avons jamais vus, ces règlements. Le ministre croirait-il qu'à 55 ans les personnes pourront se trouver du travail facilement, alors que nous savons bien que c'est le marché de l'emploi qui est difficile, M. le Président, et que, pour eux, pour ces personnes, c'est très difficile de se trouver un nouveau emploi? Comment faire confiance à ce gouvernement qui ne respecte même pas une loi qui a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale?

Alors, M. le Président, je voudrais conclure sur ce. La question que nous devons nous poser, c'est la suivante: Est-ce que ce projet de loi n° 57 contribuera à amener le Québec au nombre des nations industrialisées comptant le moins de personnes pauvres? Non, M. le Président, et j'ai bien peur que cette réponse demeure encore non jusqu'à ce que le ministre refasse complètement ses devoirs, jusqu'à ce qu'il retire son projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député de Dubuc. Et, pour la poursuite du débat sur le principe du projet de loi n° 57, je reconnais maintenant M. le député de Sainte-Marie? Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, en vertu de l'alternance, si Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne veut intervenir, moi, je n'ai aucune objection à parler après.

Le Vice-Président (M. Gendron): Il n'y a pas d'alternance quand elle n'est pas souhaitée, la présidence doit appliquer l'alternance...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, si vous voulez parler, levez-vous. Si vous voulez parler...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant, un instant. Il n'y a pas personne qui a la parole, là, puis, quand on veut la prendre, il faut le demander. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervenant... Alors, Mme la députée de Matapédia.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Ah bien, là, ce n'est pas moi qui s'occupe de ça. Alors, qu'on lui apporte un lutrin dans les meilleurs délais.

M. Dupuis: Il y a consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le leader du gouvernement. Alors, s'il vous plaît, là, y a-t-il moyen de revenir au débat? Il me semble que c'est un débat sérieux. Alors, Mme la députée de Matapédia, pour votre intervention de 20 minutes, si vous en faites le choix, sur le principe du projet de loi n° 57. Mme la députée.

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, M. le Président. M. le Président, le 11 juin dernier, le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille déposait le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. D'entrée de jeu, M. le Président, je désire vous signifier que je demande le retrait de ce projet de loi, projet de loi n° 57. La raison qui motive ma demande est très simple. Ce projet a la prétention d'améliorer la qualité de vie des personnes défavorisées et démunies de notre société, mais dans les faits il les engouffre davantage dans leur pauvreté.

Je vous rappelle également, M. le Président, que, dès le début des consultations, nous avons demandé à maintes reprises au ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille le retrait du projet de loi, ce qui nous a été refusé. Mon collègue député de Vachon, porte-parole de ce dossier dans l'opposition officielle, l'a demandé aussi, comme plusieurs groupes l'ont fait.

Je vous cite un extrait du Courrier parlementaire d'hier, M. le Président, qui l'illustre bien. Dans le Courrier parlementaire, on parle de «morceaux manquants». Le journaliste du Courrier parlementaire dit: «Malgré toutes les fleurs que le ministre s'est lancées, il n'en demeure pas moins, selon le député Bouchard ? mais je n'ai pas le droit de le dire, je l'ai dit, mais le député de Vachon ? qu'il manque de gros morceaux à son approche. Le plus gros, c'est le refus d'indexer les prestations de tous les assistés sociaux. "C'est un gros morceau manquant aux amendements que le ministre nous a proposés hier, et il a raison de craindre que j'en parle, mais je vais en parler."» ? c'est le député de Vachon qui disait ça.

Maintenant, le journaliste du Courrier parlementaire, M. le Président, il dit: «La moitié des groupes qui se sont présentés à la consultation en commission parlementaire ont demandé le retrait pur et simple du texte, plus des trois quarts ont reproché l'absence d'un grand principe qui assurerait la couverture des besoins essentiels et 72 % ont revendiqué l'indexation annuelle automatique de toutes les prestations.» Il continue, il dit: «Les besoins essentiels, a reproché le député, sont les mêmes pour tout le monde, ce qui explique pourquoi l'approche spécialisée proposée par le ministre ne tient pas debout et déplaît.»

Je continue, M. le Président: «Donc, bien sûr, le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille a proposé des amendements au projet de loi n° 57 le 30 novembre dernier. Voilà déjà un signe que le ministre reconnaît que son projet de loi n'est pas tout à fait adapté aux besoins des personnes concernées. Ces amendements sont nettement insuffisants. Au nom des droits et de la dignité des personnes démunies de notre société et au nom des droits à une vie décente, je demande donc le retrait de ce projet de loi.»

Le 13 décembre, M. le Président, le 13 décembre 2002, le gouvernement du Parti québécois faisait adopter ici même, en Chambre, à l'unanimité, la loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. À peine deux années plus tard, on nous présente un projet de loi, celui-ci, qui constitue un net recul. Le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi, de solidarité sociale et de la famille, le député de Vachon, explique bien, dans le cadre de son intervention à l'Assemblée nationale sur ce projet de loi, ce que le Québec tout entier, dont les plus démunis, perd en ne respectant pas les principes de la loi n° 112, et je le cite: «Il doit se rappeler ? en parlant du ministre ? que son rôle n'est pas d'attaquer l'ancien gouvernement continuellement, mais de se concentrer à la mise en oeuvre de solutions qui vont nous amener vers ce que la loi n° 112 nous propose, c'est-à-dire amener le Québec parmi les pays qui, dans quelques années, compteront le moins de personnes démunies.»

On nous présente donc, M. le Président, un projet de loi bricolage ? bricolez, bricolons, bricolage, vous vous souvenez, quand on était jeunes, bricolez, bricolons, bricolage ? donc, un projet de loi bricolage où l'esprit de la loi n° 112 est trahi. En plus d'alimenter et de nourrir les préjugés, il ne respecte pas l'esprit de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Avec ce projet de loi, le droit à la sécurité du revenu disparaît de la Loi sur la sécurité du revenu. Quant aux préjugés, M. le Président, je vous lis ce qu'un représentant de la CSN nous communique au nom de son organisation. «Ce projet de loi, dit-il, contribue à entretenir les préjugés à l'endroit des prestataires aptes au travail. On ouvre ainsi plus grande la porte à des différences de traitement selon les catégories de prestataires plutôt que de viser la couverture des besoins essentiels quelle que soit la condition des personnes, ce que devrait assurer l'aide de dernier recours.» Pire, M. le Président, il faut voir dans ce projet de loi un manque de sensibilité et une méconnaissance des diverses réalités que vivent les plus démunis.

n(21 h 30)n

Ce qu'a à dire M. Pierre Marois, le président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse n'est pas à cet égard des plus reluisants pour le gouvernement libéral, et je le cite: «La pauvreté s'accompagne de multiples entraves à l'exercice des droits, des entraves qui s'ajoutent, pour les personnes pauvres, aux contraintes sociales du chômage, de coût élevé du logement et des frais d'éducation et de santé, par exemple. Dans ces conditions, mettre l'accent principal, comme le fait le projet de loi, sur la "responsabilité première" des personnes pauvres dans la modification de leur situation, c'est méconnaître, voire nier la dynamique réelle de la pauvreté.» M. le Président, j'éprouve donc d'importantes réserves concernant ce projet de loi.

Et je pourrais vous en citer encore plusieurs, M. le Président. Par exemple, des groupes de défense des droits des personnes assistées sociales, des organismes-conseils du gouvernement comme la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, la Protectrice du citoyen, le Conseil de la famille et de l'enfance, tous ont émis de sérieuses réserves sur ce projet de loi.

À l'évidence, M. le Président, ici comme ailleurs, une tendance lourde se dégage. Le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, comme son gouvernement d'ailleurs, éprouve de sérieuses difficultés à se mettre en mode écoute. Tout d'abord, M. le Président, le projet de loi n° 57 transforme le régime de sécurité du revenu en quatre programmes: le premier, l'aide sociale pour les personnes sans contraintes sévères à l'emploi; deux, la solidarité sociale pour les personnes ayant des contraintes sévères à l'emploi; le troisième, l'Alternative jeunesse pour les jeunes adultes de moins de 25 ans; et le quatrième, ce sont les programmes spécifiques pour les personnes et familles présentant des difficultés particulières. Avec ces quatre programmes, les grands perdants seront les plus démunis de notre société.

Des représentants de la Centrale des syndicats démocratiques se sont d'ailleurs prononcés et ont émis de sérieuses réserves sur la gestion de l'aide de dernier recours que l'on subdivise en plusieurs programmes. Le projet de loi n° 57 constitue donc un recul sur le plan des droits. S'il est adopté, le régime de dernier recours deviendra un véritable dédale administratif, divisé qu'il sera en quatre programmes, avec des taux de prestation différents et des taux d'indexation différents, eux aussi. Mais, surtout, certains de ces programmes deviendront des zones de non-droit et d'arbitraire, puisque plusieurs dispositions prévoient que le ministre peut offrir ceci ou cela à tel ou tel type de clientèle.

Je vous rappelle donc, M. le Président, que les programmes Alternative jeunesse et spécifiques du projet de loi n° 57 ont fait l'objet de nombreuses critiques en commission parlementaire. En effet, est-il concevable que pareils programmes reposent entièrement sur le pouvoir discrétionnaire du ministre? Voici ce que l'on retrouve dans le projet de loi: «Le ministre peut établir des programmes d'aide financière spécifiques et déterminer des normes d'application de ces programmes.» Ce sont les articles 67 et 72, M. le Président.

Est-il aussi concevable que, dans le projet de loi n° 57, toutes les obligations soient du côté du prestataire, que les pouvoirs discrétionnaires, ceux-là soient du côté du ministre? Est-il concevable aussi que, pour des questions aussi fondamentales que la lutte à la pauvreté et l'aide aux plus démunis de notre société, on préfère une approche par programmes par opposition à un programme de soutien financier égal pour tous? M. le Président, on sait que, dans ce projet de loi, les mesures et services offerts doivent favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles.

Ce projet de loi va alors créer la prime à la participation, dotée d'un budget de 129 millions par année. Dans le projet de loi, la prime à la participation se présente sous deux formes: l'allocation de travail, qui peut varier entre 130 $ et 150 $ par mois, et l'allocation de participation, qui permet de reconnaître la participation à des activités communautaires. Je désire préciser ici que l'allocation au travail ne sera accessible qu'à 10 % des personnes admissibles. J'ai donc de bonnes raisons de croire que ce budget est nettement insuffisant pour offrir une prime intéressante pour toutes et tous. Plus encore, est-ce une façon de couvrir des besoins essentiels? Est-ce que le ministre peut, M. le Président, compter sur ces mesures pour compenser l'indexation partielle pour les personnes aptes au travail?

Ce projet de loi fait référence à plusieurs reprises au fameux règlement qui doit préciser la loi. Faute de ce règlement, M. le Président, les groupes représentant la société entendus en commission parlementaire, les citoyennes et citoyens du Québec n'ont donc pas tous les éléments pour juger de la portée du projet de loi et l'étudier adéquatement. 38 % des groupes entendus en commission ont reproché au ministre un manque de transparence, vu l'absence de ce règlement. Que se cache-t-il derrière ces éléments essentiels auxquels nous n'avons pas eu accès?

Dans le plan d'action, M. le Président, déposé par le ministre en avril dernier, il est prévu que des personnes n'ayant pas de contraintes sévères à l'emploi seront indexées à 50 %, alors que des personnes avec contraintes sévères le seront à 100 %. Pareille décision n'aura d'autre effet que d'appauvrir les prestataires, diminuer leur pouvoir d'achat et les éloignera d'une éventuelle couverture des besoins essentiels.

Faut-il rappeler, M. le Président, que l'article 9.1 de la loi n° 112 fait référence à la nécessité de rehausser le revenu des personnes démunies en fonction de la couverture des besoins essentiels, que, dans ce projet de loi n° 57, le ministre fait fi de cet article et de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale que nous avons adoptée unanimement, en décembre 2002, dans cette Assemblée nationale?

Faut-il aussi rappeler que 72 % des groupes entendus en commission parlementaire ont fait valoir que la demi-indexation de la prestation aura très certainement des impacts sur le revenu et sur la motivation des personnes touchées par cette mesure? Et la Protectrice du citoyen, M. le Président, nous dit ceci sur ce sujet. Elle dit: «En terminant sur cette problématique de l'indexation, je pose la question suivante: Est-il indispensable de faire marche arrière et d'instaurer une inégalité de traitement pour des catégories de personnes qui, somme toute, connaissent les mêmes difficultés financières? En d'autres termes, l'indexation ne devrait-elle pas être accordée à tous les prestataires sans égard à leur statut, puisque le marché, lui, ne crée pas de distinction?»

M. le Président, le 22 septembre dernier, le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille est allé chercher, dans les poches des plus démunis de la société québécoise, les prestataires de l'aide sociale, 44 millions de dollars à l'aide de la clause Tanguy. Vous connaissez ça, M. le Président, la clause Tanguy? Vous avez vu le film? Tanguy qui colle chez les parents, qui ne veut plus laisser ses parents. Sauf que, dans le film, ils ont l'air pas mal à l'aise, ces parents-là, ce qui n'est pas le cas nécessairement de tous les jeunes du Québec, de tous ces gens qui restent avec leurs parents.

Donc, 44 millions de dollars, M. le Président, et cette clause oblige les personnes prestataires de l'aide sociale qui habitent chez leurs parents à rembourser 100 $ par mois au gouvernement. Et cette mesure dite de solidarité familiale, elle a fait écho dans ma circonscription. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle insécurise les familles et les personnes démunies.

Le gouvernement a soif, M. le Président. Il est avide de remplir ses coffres. Il s'attaque déjà aux travailleuses et travailleurs à temps partiel prestataires de la sécurité du revenu et aux plus démunis. Je vous cite le cas d'un citoyen de Lac-au-Saumon dans ma circonscription qui travaille comme brigadier scolaire. Déjà, le centre local d'emploi de sa région lui a fait parvenir une lettre l'informant qu'à partir du mois de janvier 2005 ses revenus seraient coupés de 100 $ parce qu'elle s'occupe de ses parents âgés. Ce n'est pas tout à fait les chèques dont on a parlé aujourd'hui, M. le Président, les chèques pour Noël, et cela, M. le Président, au moment même où, au Québec, plusieurs aînés sont laissés à eux-mêmes et vivent une grande solitude et une grande détresse. Est-ce là ce que l'on peut qualifier de solidarité familiale et d'aide aux plus démunis?

L'utilisation d'un amendement réglementaire pour couper dans la prestation sociale me fait craindre le pire par rapport à ce qui nous attend dans le règlement qui doit accompagner le projet de loi n° 57. L'absence de publication de cet important volet du projet de loi ne laisse rien présager de bon pour les prestataires de l'aide sociale. Il y a anguille sous roche. Est-ce que le diable, M. le Président, qui se cache derrière les détails du règlement accompagnant le projet de loi? Et je suis sûre que vous savez de quoi je parle.

Une loi, quand on ne peut pas regarder le règlement, quand on ne sait pas trop qu'est-ce qu'il y a dedans, c'est extrêmement important, un règlement d'une loi. Donc, pour le barème plancher, M. le Président, c'est la même chose. Je constate qu'il n'y a aucune provision qui protège les prestations contre certaines formes de coupures. La demi-indexation prévue au plan d'action et la modification réglementaire du ministre, ce qu'on appelle la clause Tanguy, n'est-elle pas la démonstration qu'il n'existe pas de barème plancher réel avec le projet de loi n° 57?

Là, je vous cite ce que l'Ordre des travailleurs sociaux du Québec, lorsqu'il s'est prononcé en commission parlementaire, a dit sur le fait que c'est une négation, cette modification, la philosophie qui sous-tend le projet de loi n° 57, ça en est une de négation de l'approche universelle qui est fondée sur les droits, une approche incitative, M. le Président, plutôt que coercitive: rendre le travail plus attractif que l'inaction.

n(21 h 40)n

Donc, l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec considère que ce projet de loi s'inscrit à contre-courant de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale et de l'article 45 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Ce projet de loi ne permettra pas au gouvernement du Québec de réaliser une réforme de l'aide sociale conforme aux requêtes que nous formulons depuis plusieurs années, lesquelles sont en lien direct avec les attentes et les besoins des personnes vulnérables sur le plan socioéconomique que les travailleurs sociaux côtoient au quotidien sur le terrain, M. le Président.

Savez-vous, M. le Président, que, depuis l'arrivée des libéraux au pouvoir, de nombreuses modifications ont été apportées au régime fiscal, accompagnées d'augmentations de tarifs dans différents secteurs. Or, M. le Président, ces hausses de tarifs heurtent de plein fouet les personnes les plus vulnérables au plan socioéconomique: hausse de tarifs que le ministre de la Solidarité sociale a lui-même acceptée en novembre dernier, une troisième hausse de tarifs consécutive à Hydro-Québec. Il ne s'est pas objecté à cette recommandation du ministre des Ressources naturelles, comme personne d'autre d'ailleurs au Conseil des ministres.

Quelles sont les valeurs si chères aux Québécoises et aux Québécois, M. le Président? Vous savez, ma collègue la députée de Rosemont, hier soir, lors de son intervention, m'a rejoint beaucoup dans son intervention. Elle disait ceci. Elle disait: «Je crois que le gouvernement qui a présenté ce projet de loi là nous présente quelque chose d'un peu décroché de la réalité, et c'est vrai pour Montréal comme pour les régions.» Elle dit plus loin: «Vous savez, on a, certains d'entre nous dans la société, on a la liberté de choisir où l'on veut vivre, et, quand on a décidé, après toutes sortes d'études, de vivre au Québec, on l'a souvent fait pour avoir observé ou vécu à l'extérieur et observé les conditions de vie hors Québec. Quand on revient chez nous, on se rend compte que, pour nous, nous préférons vivre ici malgré une structure fiscale que quelques-uns qualifient d'excessive, mais que, moi ? la députée de Rosemont toujours ? je ne qualifie pas d'excessive parce que c'est une structure fiscale qui repose sur un principe humanitaire, celui de reconnaître qu'il y a des gens dans la société qui sont plus forts, plus en santé, plus chanceux aussi, et que ces gens-là doivent assumer une responsabilité et aider ceux qui sont moins forts, moins en santé et moins chanceux, M. le Président.»

Et aussi mon collègue le député de Vachon affirmait ce qui suit dans le cadre de son intervention. Il disait: «Le ministre se targue d'investir, dans cette lutte à la pauvreté, autour de 2,5 milliards sur cinq ans. On pourrait peut-être lui rappeler qu'il finance largement et très largement cette lutte à la pauvreté par des taxes et des hausses de tarifs qui frappent directement les familles dont le revenu est précaire ou les familles à très bas revenus.» Voilà ce que disait mon collègue avec grande pertinence. Et ce qui est de plus grave encore, M. le Président, c'est que toutes ces modifications au régime fiscal, ces hausses de tarifs de toutes sortes servent à autofinancer le plan d'action pour lutter contre la pauvreté... pour lutter contre la pauvreté, excusez-moi, du gouvernement libéral.

Donc, on parle d'augmentation des services de garde, d'abolition de certaines déductions fiscales pour les familles, d'augmentation des tarifs d'hydroélectricité, d'augmentation des primes d'assurance médicaments, d'indexation des tables d'impôt de 2 % plutôt que de l'indice aux prix à la consommation, indexation des prestations d'aide sociale de 2 % plutôt que l'IPC, hausse des tarifs de transport en commun, clause Tanguy. Toutes ces coupures, M. le Président, ont servi à financer le plan d'action de lutte contre la pauvreté.

M. le Président, savez-vous ce qu'écrivait la journaliste Brigitte Breton hier, dans l'éditorial du journal Le Soleil? Je vous en fait part, écoutez bien, c'est très instructif. Et là, je n'ai pas le droit de le lire, je vais le montrer: Lettre au père [du nom du ministre], je ne le cite pas. Et qu'est-ce qu'elle disait? Elle disait: «Le Collectif pour un Québec sans pauvreté prétend que moins de 20 000 places pour ses programmes de formation seraient disponibles pour 160 000 prestataires. Cela fait beaucoup d'exclus et peu d'élus pour vos fameuses primes à la participation.» Et elle continue et elle décrit l'action du ministre actuel. Elle conclut en disant: «Il est difficile de faire confiance à un ministre qui ne résiste pas à la tentation de jouer au père Noël et qui pense qu'un cadeau en décembre compensera la disette des autres mois.» Voilà.

Et je termine, M. le Président, en vous disant que, bien entendu, il va de soi que je réclame, M. le Président, un véritable débat public afin d'améliorer le sort des personnes démunies, tel que le Québec s'y est engagé, avec l'adoption unanime en cette Chambre, de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Il en va du droit à la dignité et au respect des familles et des personnes démunies. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Matapédia, et je reconnais Mme la députée de Bellechasse pour la poursuite du principe du projet de loi. Mme la députée de Bellechasse.

Mme Dominique Vien

Mme Vien: Merci beaucoup, M. le Président. Ça me fait extrêmement plaisir de prendre la parole ici, ce soir. Si vous me permettez, afin d'être brève et touchante ? enfin, je l'espère ? et de pouvoir ramener les pendules à l'heure et de rafraîchir la mémoire à cette Assemblée, et particulièrement aux membres de l'opposition officielle qui se lèvent depuis quelque temps, et particulièrement ce soir... Je suis particulièrement attentive à ce que j'ai entendu et je peux vous dire que je me retiens pour ne pas tomber en bas de ma chaise. Vraiment! Et je les entends faire leurs gorges chaudes, M. le Président, à brandir des articles, à sortir des histoires épeurantes qui n'ont pas raison d'être. Et j'aimerais rappeler à l'opposition officielle, M. le Président, certains gestes ou certaines attitudes qu'a eus l'opposition officielle du temps qu'elle était au gouvernement.

On parle beaucoup d'indexation, on dit qu'on n'indexe pas assez, que c'est une fumisterie, qu'il faut refaire les choses, on demande même de jeter aux rebuts le projet de loi n° 57. Voyons donc, M. le Président! Comment peuvent-ils oublier, aujourd'hui, ce soir, qu'eux-mêmes, pendant quatre ans, n'ont même pas eu le coeur, la décence d'indexer les prestations des assistés sociaux au Québec? Comment peuvent-ils, ce soir, faire un reproche de cette nature-là, alors qu'eux-mêmes, les grands défenseurs, ce soir... On les entends, ils sont déchaînés, ils n'en reviennent pas, ils sont indignés. Comment peuvent-ils rappeler ces choses-là et ne pas eux-mêmes se rappeler de leurs comportements et de leurs décisions?

Alors, je tiens à le rappeler, à le redire ? vaut mieux se répéter quelquefois, M. le Président, pour bien se souvenir des gestes qu'on a posés ? qu'ils n'ont pas indexé les prestations des personnes sur l'assistance du revenu pendant quatre ans. Tandis que nous, ce que nous faisons, c'est que nous allons indexer à 100 %, à 100 % ? c'est important de le rappeler ? la prestation pour les gens qui ont des contraintes sévères. C'est quand même mieux que ce qu'ils ont fait.

D'autre part ? ce n'est pas rien non plus ? nous allons indexer, pour la moitié, les prestations pour les gens qui sont sans contraintes sévères. Je pense qu'effectivement le ministre de la Solidarité sociale mérite des bravos, mérite des félicitations. Et ce qu'a dit le ministre... Faut tout dire quand on parle, faut tout dire quand on raconte des histoires. Ce qu'a dit le ministre, c'est que, si les moyens financiers de l'État, qui nous a été laissé ? faut-il le rappeler ? dans un état lamentable ? c'est le cas de le dire ? plusieurs milliards de dollars... Donc, ces prestations, M. le Président, seront indexées. Le ministre l'a dit, le ministre a tenté de rassurer l'opposition officielle qui s'entête, s'entête à ne rien comprendre. Donc, quand les sous seront au rendez-vous, quand l'État québécois en aura les moyens, effectivement, le gouvernement, mon gouvernement sera enchanté de pouvoir indexer tout le monde sur la même base. Et je pense qu'on peut faire confiance effectivement, comme nous le suggérait le ministre de la Solidarité sociale.

Un autre rappel, qui n'est pas banal celui-là non plus: M. Christos Sirros. Un homme qui était respecté de tout le monde, un homme de coeur, un homme qui avait toujours une pensée envers les autres, il pensait toujours aux autres, un homme qui avait une sensibilité aussi pour les personnes qui vivent dans la pauvreté au Québec. Je pense qu'il n'y a personne ici qui peut dire le contraire. Même l'opposition officielle, je pense, reconnaît ce fait-là. Bien, figurez-vous donc, M. le Président ? vous étiez là, vous aussi, dans cette Chambre-là, vous devez vous en rappeler ? le Parti québécois, qui aujourd'hui se lève et ? encore une fois je le rappelle ? déchire sa chemise, a voté contre un amendement qui était amené par M. Sirros qui aurait finalement permis un barème plancher de 100 % de la prestation. Qu'est-ce qu'ils ont fait? Qu'est-ce qu'ils ont fait? Qu'est-ce qu'ils ont fait à la place de ça? Ils ont voté contre, M. le Président, contre, c-o-n-t-r-e, contre.

Et ça ose se lever aujourd'hui pour venir nous faire des reproches, alors que cette loi-là... La loi n° 112 a été adoptée quand? En décembre 2002, si ma mémoire est bonne. L'élection a eu lieu en avril 2003. Ils avaient quand même quelques mois pour commencer à travailler, pour commencer à imaginer des choses. On a balayé par en avant. C'est ça qu'on a fait: on a envoyé le problème par en avant. Bien, nous, dans l'espace d'un an et demi, même pas, on est arrivés avec un plan de la pauvreté et à l'exclusion sociale, on a mis 2,5 milliards là-dedans sur cinq ans; ce n'est pas rien, ça. Hein, ce n'est pas rien, ça, quand même.

n(21 h 50)n

Je reviens à l'amendement de mon ami ? le seul regret que j'ai d'ailleurs, c'est de l'avoir vu partir parce que c'est un parlementaire aguerri et qui aussi avait, comme je vous disais, une sensibilité vraiment exceptionnelle. Donc, ils ont voté contre cet amendement-là. Qu'est-ce que ça a eu comme conséquence? La prestation des personnes sur l'assistance sociale pouvait aller de 533 $ à 233 $. On ne parle plus de la même affaire. On n'est plus du tout, du tout dans la même situation d'aujourd'hui, là. Et ces gens-là aujourd'hui se lèvent, crient au meurtre, hein ? passez la bonne expression québécoise ? brandissent le projet de loi n° 57 avec indignation. Je ne comprends pas, M. le Président, moi, je m'excuse, mais je ne comprends pas. Rien n'est parfait sur cette terre, tout le monde le sait, il y a toujours place à l'amélioration. Nous, nous acceptons cela. Nous acceptons cela. Ce que nous disons, c'est que nous avons fait beaucoup en un an et demi, et nous ferons encore davantage quand les sous seront au rendez-vous. Les sous qui manquent d'ailleurs parce qu'on a eu avant nous une mauvaise administration.

L'assurance médicaments, c'est un autre beau petit dossier, ça, l'assurance médicaments. Il n'y aurait peut-être pas autant d'urgence d'agir puis on ne crierait pas autant après nous si effectivement, au moment où ils ont mis l'assurance-emploi... l'assurance médicaments, pardon, en place, s'ils avaient effectivement prévu la mesure, hein, de la gratuité des médicaments, êtes-vous d'accord avec moi? Non, mais vraiment, M. le Président.

Autre chose. Les allocations familiales. Moi, je suis une jeune mère de famille et j'ai connu ça, moi, les allocations familiales, qu'on nous a retirées d'une main pour aller financer des garderies. J'ai connu ça, moi. Et du temps que j'étais journaliste, animatrice, j'ai fait une table ronde à ce moment-là, à la radio. Et j'avais invité des femmes à venir nous parler justement de cette mesure-là en toute objectivité. Et c'était inouï, M. le Président, à quel point ces femmes-là ont vu leur univers basculer. Je vous le dis. Non, non. Non, non, que les députés ne s'indignent pas, là, moi, j'étais là, je ne parle pas pour rien dire, ce n'est pas mon genre. Et je pourrais vous citer ces femmes-là, vous pourriez les appeler puis je ne suis pas sûre que vous aimeriez ce qu'elles vous diraient. Elles pleuraient, M. le Président, parce que ces revenus-là, ce sont des femmes qui avaient fait le choix de rester à la maison, ce sont des femmes qui avaient ce petit revenu là pour rester à la maison avec leur petit. Qu'est-ce qu'on a fait, nous, au Québec, sous l'administration péquiste? On a dit: Tout le monde dans le même canal, tout le monde dans le même modèle, tout le monde s'en va à la garderie. C'est ça qu'on a fait. Bien, nous, ce n'est pas de même qu'on agit. Ce n'est pas cette philosophie-là qui nous guide. Ce n'est pas comme ça qu'on pense.

Alors, je vous dirais, M. le Président, que, nous, on a fait le choix des familles. Pas seulement les familles dont les enfants sont en garderie, toutes les familles. Et je pense qu'on le démontre éloquemment par ce projet de loi n° 57, par toutes les mesures qui sont mises en place, par ce plan de la pauvreté et à l'exclusion sociale, les sous, les milliards de dollars qu'on a mis dedans, cette philosophie aussi d'aider ces familles-là et d'avoir une philosophie de dire: Bien, finalement, là, la dignité, c'est aussi dans le travail.

Puis au bout du compte, on le sait tous finalement, on sait tous dans le fond, quand c'est possible, quand on est apte au travail, M. le Président, c'est toujours plus payant d'aller travailler. C'est ça, aussi, la dignité. Et c'est de permettre à ces gens-là d'aller le matin travailler et de leur donner une chance de s'en sortir. On ne peut dire, là, franchement, que ce sont des objectifs en fait, des objectifs qui ne sont pas nobles, là, quand même, là. Il n'y a personne qui va dire le contraire de ce que je suis en train de prétendre ce soir.

Alors, nous, M. le Président, la loi n° 112, on y croit et on met des moyens sur la table. Et je rappelle, je rappelle que l'opposition officielle qui occupait les banquettes du gouvernement à l'époque ont adopté, c'est vrai, avec des collègues de l'opposition officielle de l'époque, de façon tout à fait unanime, la loi n° 112, qui est une belle loi. Et je suis contente qu'on ait voté cette loi-là à l'Assemblée nationale, ça nous honore au Québec d'avoir adopté ça, et je salue en même temps la vision et la diligence des parlementaires, c'est bien évident. Il y a beaucoup de sous là-dedans, il y a beaucoup de moyens aussi, et, moi, je tiens à rendre hommage ? à rendre hommage ? à notre collègue, ministre de la Solidarité sociale, Famille, qui porte ce dossier-là de belle façon et qui a pris des engagements très, très, très sérieux, qui va les rendre ? qui va les rendre ? et qui aussi s'est donné du temps pour écouter les groupes qui sont venus le rencontrer, lui faire des suggestions, lui demander de revoir certaines choses. Il a fait de l'écoute active comparativement à ce qui se faisait avant, M. le Président, de l'écoute active, est arrivé avec un projet, je pense, assez léché, beau, bon et qui va donner des résultats au Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Bellechasse. Et pour la poursuite du débat...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît, à l'ordre.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): À l'ordre. Il y a moyen de le faire dans le silence, à moins qu'on suspende, mais, moi, je pense qu'il n'y a pas eu d'indication de suspendre les débats, là.

Alors, je reconnais le prochain intervenant, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, toujours sur l'adoption du principe du projet de loi n° 57. M. le député.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, j'aime bien la députée de Bellechasse. Elle est de fort agréable compagnie, notamment à la Commission de la culture, mais, pour ce qui est du dernier discours qu'elle vient de faire, comme dit aussi le vieil adage, vaut mieux être sourd qu'entendre une chose comme celle-là, M. le Président. M. le Président, la députée de Bellechasse nous dit: C'est épouvantable, vous n'avez pas donné la gratuité des médicaments. Nous, au parti libéral conservateur, on va faire beaucoup mieux. On va augmenter les primes d'assurance médicaments, 62 millions par année durant cinq ans, 310 millions; belle cohérence, M. le Président. Augmentation des tarifs des services de garde; j'aimerais bien qu'elle vienne tenir son discours sur les garderies dans la circonscription de Sainte-Marie?Saint-Jacques, je ne me porte garant des interventions qu'elle aurait. Mais l'augmentation des tarifs des services de garde, ça ne touche pas nos concitoyens qui sont sur l'assistance sociale, ça ne les touche pas, bien non, voyons donc. Abolition de certaines déductions fiscales pour les familles; ah, regarde donc ça, 203 millions par année sur cinq ans. Là on est rendu à 1 milliard et quelques, quelle belle cohérence, M. le Président. Augmentation des tarifs d'hydroélectricité; naturellement les assistés sociaux, ça ne les touche pas, ils ne se chauffent pas, eux autres, ils aiment ça geler, ils aiment ça geler, eux autres, M. le Président. Belle cohérence, et ça, c'est 623 millions par année durant cinq ans. Là on est rendu à 3,1 milliards de dollars, ça va vite avec eux autres. De toute façon, ils ont une bonne vieille habitude des gros chiffres: 6 milliards de déficit qu'ils nous avaient mis dans le trou, et vous vous rappelez, M. le Président, comment nous avons dû ramer pour nous en sortir. Indexation des tables d'impôts de 2 % plutôt que celui de l'indice des prix au consommateur; belle cohérence, chère collègue et néanmoins amie. Indexation des prestations d'aide sociale à 2 % plutôt que celle de l'indice des prix au consommateur.

Après ça, attendez, M. le Président, ce n'est pas fini, ce n'est pas fini, M. le Président. Hausse des tarifs de transport en commun; mais les transports en commun, je veux dire, nos compatriotes, nos concitoyens qui malheureusement vivent de prestations d'aide sociale, le transport en commun, eux autres, ça ne les concerne pas, hein, ils ont tous des voitures de fonction comme les ministres avec chauffeur et garde du corps. Donc, ce n'est pas important, donc ça, on peut augmenter ça, 56 millions par année durant cinq ans, ça fait 280 millions qu'on vient siphonner. Et il y a la clause Tanguy ? tout le monde a vu le film, j'espère, excellent film porteur ? 44 millions par année sur cinq ans, 220 millions de dollars.

Et là je ne vous parle pas de tout ce qui s'en vient. Là, le ministre de l'Environnement veut nous imposer une taxe sur l'eau, M. le Président, une autre. Naturellement, nos concitoyens qui malheureusement vivent des prestations d'assurance sociale... d'assistance sociale, bien, de l'eau, ils n'en ont pas besoin, ils ne boivent pas, ils n'ont pas besoin de se laver, ils n'ont pas besoin de faire la cuisine.

n(22 heures)n

Une voix: Ils ne mangent pas.

M. Boulerice: Ils ne mangent pas. Voyons, M. le Président! Je veux dire, belle logique, belle logique de la part de la députée de Bellechasse. Comme on dit, encore là en langage courant, elle s'est vraiment bien tirée dans le pied cette fois-là, mais là ça a été les deux pieds, M. le Président, avec sa démonstration.

M. le Président, ce qui m'a amené en politique, c'est de lutter contre l'injustice, lutter contre l'injustice. M. le Président, j'ai eu la chance d'être ce que Clémence Desrochers appelait, avec un brin de dérision, d'autodérision... je suis un marginal favorisé. J'ai eu la chance d'avoir de bons parents, relativement à l'aise; j'ai fréquenté de bonnes écoles; on n'a jamais manqué de quoi que ce soit. J'ai pu faire des études et je me suis rendu ici, qui est probablement l'honneur le plus grand qui peut être donné à un citoyen que de représenter ses compatriotes au sein de son Parlement.

Mais pourquoi? Pourquoi? Pourquoi il y a bien de mes petits compagnons, là, quand j'étais à l'école Baby, qui est maintenant l'hôtel de ville de Joliette ? et voilà, M. le Président, je sais, vous me connaissez bien, c'est pour ça que j'ai toujours une écoute tellement attentive de votre part, hein ? bien, pourquoi mes petits compagnons, eux, ils ne se sont pas rendus au cégep, ils ne sont pas allés au collège, ils ne sont pas allés à l'université? Bien, parce qu'il y a eu une injustice dans la vie, ils ne sont pas nés dans le même contexte que moi. Alors, moi, je l'ai eu, eux ne l'ont pas eu. Ah bien! c'est de leur faute puis il faudrait que je leur tape sur la tête? Non, je ne pense pas que c'est comme ça que ça doit fonctionner, M. le Président. Parce que, si la loi s'appelle aide aux familles et aux individus, ce n'est pas... elle s'appelle bien plus: Nous voulons votre bien et nous l'aurons, quand on regarde tout ce que l'on enlève à l'intérieur de ça.

Et ce que je ne peux pas supporter, M. le Président, c'est les préjugés qui sont véhiculés à l'intérieur des discours tenus et à l'intérieur de cette loi. Vous me permettrez de vous citer deux personnes connues, respectées, estimées, dont un, un ancien collègue ici, de cette Assemblée, qui est Me Pierre Marois, qui est le président à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui, dans un communiqué de presse émis le 26 octobre 2004, disait, je cite, M. le Président, in texto: «La pauvreté s'accompagne de multiples entraves à l'exercice des droits, des entraves qui s'ajoutent, pour les personnes pauvres, aux contraintes sociales de chômage, de coût élevé du logement et des frais d'éducation et de santé, par exemple. Dans ces conditions, mettre l'accent principal, comme le fait le projet de loi, sur la "responsabilité première" des personnes pauvres dans la modification de leur situation, c'est méconnaître, voire nier la dynamique réelle de la pauvreté.»

Et Me Jean-Guy Ouellet, du Barreau du Québec... Le Barreau du Québec, M. le Président, c'est également très respectable comme organisme ? oui, il y en a même qui attendent d'ailleurs des lettres d'excuses d'eux, qu'ils disent avoir reçues puis qu'ils n'ont jamais reçues, puis ça, c'est une autre histoire ? ils disent, et je vous en lis un extrait: «Toutes ces mesures ? et vous appartenez au Barreau, M. le Président, à moins que je ne me trompe, donc il exprime votre opinion également ? toutes ces mesures qui semblent indiquer que les personnes assistées sociales sont en partie responsables de leur propre situation véhiculent des préjugés, des stéréotypes.» Des préjugés, des stéréotypes.

M. le Président, nous sommes en décembre 2004, dans quelques semaines nous allons entamer 2005. 1985-2005, j'entreprends ma 20e année comme député de cette circonscription. M. le Président, je me préparais à intervenir et j'essayais, avec un fil, de regarder ces 20 ans, les lundis. Parce que, vous le savez comme moi, et on en parlait justement, de l'importance des lundis dans la vie d'un député, où nous sommes dans nos bureaux de circonscription, où nos compatriotes le savent, et ceux qui ont besoin de notre aide, d'un conseil viennent nous rencontrer... Et je sais, M. le Président, que, chez vous, c'était comme chez moi, c'était portes ouvertes. Pas besoin de rendez-vous, venez. Ça a toujours été votre marque de commerce, comme la mienne, M. le Président.

Eh bien, j'ai essayé de me rappeler s'il y en avait un ou une, une journée, qui était venu me voir à mon bureau puis qui aurait dit: M. le député, je suis venu vous voir, je veux vous demander un... Vous savez, j'ai voté pour vous, hein, puis j'ai un service à vous demander, M. le député: pourriez-vous vous arranger, que je sois sur l'assistance sociale toute ma vie? J'aimerais tellement ça. Vous ne pouvez pas m'arranger ça? On est bien. On est bien de vivre de l'assistance sociale, M. le député. M'as vous l'expliquer, comment est-ce qu'on est bien. C'est formidable de vivre sur l'assistance sociale. On vit dans un petit logement minable, vieux, probablement mal chauffé, avec des courants d'air, mais de toute façon ce n'est pas grave, parce que je n'ai pas les moyens de me chauffer, l'hydroélectricité augmente, hein? Et puis, après ça, bien, M. le député, écoutez, vous, vous aimez peut-être ça aller faire votre marché, vous aimez peut-être ça aller au marché Jean-Talon, vous savez, dans la petite Italie, qui est tellement beau, ou Atwater, ou le marché Saint-Jacques, dans ma circonscription, mais, moi, M. le député, j'aime bien mieux aller aux banques alimentaires. Ah, ça, c'est bien plus le fun d'aller aux banques alimentaires, hein? M. le député, vous avez une belle cravate, mais, moi, je vais au vestiaire du Comité social Centre-Sud, hein?

Comme si c'était un choix de vie, de vivre de prestations d'aide sociale. Pourquoi entretenir continuellement ce préjugé qui est complètement faux? Y a-t-il quelqu'un qui manquerait suffisamment de jugement pour se dire: Je suis-tu bien d'être misérable, je suis-tu bien d'être en difficulté! Que la vie est belle quand on n'a rien, que la vie est belle quand on est malade, que la vie est belle quand on a perdu son emploi! Je n'ai jamais, et vous non plus, M. le Président, n'avez jamais rencontré de vos concitoyens qui sont venus tenir de tels propos dans votre bureau de circonscription, où vous êtes éminemment et étonnamment présent tous les lundis depuis beaucoup plus longtemps que moi. Jamais vous n'avez entendu ça. Et je mets au défi quiconque ici, hein, de me dire s'ils ont déjà reçu un de leurs concitoyens leur présenter une telle requête et leur dire comment la vie était belle quand on vivait de prestations d'aide sociale.

Au contraire, au contraire, et vous l'avez vécu, vous aussi, M. le Président, combien sont venus à nos bureaux de circonscription, et le seul mot qu'ils avaient à la bouche, et vous allez reconnaître ces paroles, vous les avez entendues des centaines si ce n'est des milliers de fois, vous aussi: M. le député, vous n'auriez pas une petite job pour moi, n'importe quoi? N'importe quoi. Ces gens-là cherchaient, cherchent, continuent de chercher du travail. Pourquoi inculquer, dans une mentalité extrême-droitiste, l'idée que ce sont des paresseux, que ce sont des fainéants? Puis, bien bon pour eux autres s'ils sont comme ça. C'est faux, M. le Président. C'est faux.

n(22 h 10)n

Il y en a eu des centaines, voire des milliers, et si ce n'est pas dans le bureau, c'était dans la rue ou dans un centre communautaire, peu importe l'endroit, qui me disaient: M. Boulerice ? ou, chez moi, c'est beaucoup plus André ? André... Comme, M. le Président, je ne peux pas vous interpeller par votre prénom, mais je sais que, dans votre circonscription, c'est beaucoup plus par votre prénom qu'on vous interpelle, tellement les gens ont de l'affection pour vous. C'était: André, il n'y aurait pas une petite job pour moi? Tu ne connaîtrais pas quelqu'un qui aurait besoin de? Puis là l'éternelle question: Puis, qu'est-ce que tu sais faire? Bien, forcément: Oui, je sais tout faire. Parce qu'il en veut tellement une. Oui, je sais tout faire, m'as tout faire, m'as tout faire. Il ne m'a jamais dit: Mais j'en voudrais une... Attention, il faut absolument que ce soit telle chose, de 9 à 5 et, de préférence, qu'il y ait un bel... Non. Non, M. le Président, vous l'avez vue, vous aussi, cette quête, dans le sens le plus désolant du terme, cette quête de dignité que chacun et chacune de nos concitoyens et concitoyennes qui vivent ce triste état nous ont présentée: Aidez-nous, aidez-nous, aidez-nous. Et ce gouvernement, le gouvernement conservateur qui a été élu il y a un an et demi ici, au Québec, ce gouvernement dit: On va vous aider, on va vous aider, on va vous aider... parce que surtout, vous, vous n'avez rien fait.

Mais qui oublie le passé est condamné à le revivre. N'est-ce pas dans un mandat de l'actuel gouvernement, mais un mandat précédent, M. le Président, qu'on avait poussé l'odieux, l'odieux à instaurer ce qui s'est appelé ? et tout le monde en a la triste mémoire ? les «boubous macoutes»? Est-ce que le premier ministre souhaite d'être affublé du titre de Boubou two, c'est-à-dire le deuxième initiateur de boubous macoutes? Je ne le croirais pas. Donc, le premier ministre serait mieux avisé, M. le Président, d'écouter ceux qui sont venus intervenir en commission parlementaire que d'écouter son ministre, qui l'envoie dans l'erreur, qui ne lui donne pas les bonnes pistes. À moins qu'il n'ait pas les yeux et les oreilles de la ministre présidente du Conseil du trésor, qui dit: Non, non, il n'est pas question, on ne mettra pas ça là-dessus. Ce n'est pas bon chic bon genre; nous, ça ne nous intéresse pas. M. le Président, pourquoi?

Et le député de L'Assomption, notre collègue, le disait très bien, mais c'est la lutte à la pauvreté qu'il faut faire, ce n'est pas la lutte à celles et ceux qui malheureusement, dans notre société, sont pauvres. Et quel geste plus ignoble que d'aller dans cette direction alors que nous sommes... Et je ne sais si vous étiez arrivé dans l'enceinte, M. le Président, alors que je le disais, vous comme moi, comme l'ensemble d'entre nous, nous sommes ce que Clémence Desrochers appelait, avec un brin d'autodérision, des «marginaux favorisés». Nous avons, M. le Président, une responsabilité, et d'autant plus que nous avons la chance de vivre dans un pays où, quand même, nous avons des ressources, beaucoup plus de ressources que bien d'autres pays au monde. Le Québec est la 15e puissance économique dans l'échelle de cotation de l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économique.

Nous avons les moyens de rendre notre société plus juste, plus égalitaire, ce qui fait que ? à mon âge, on serait peut-être plus tenté de parler de petits-enfants que d'enfants ? que potentiellement notre petit-fils ou notre petite-fille ne vive pas ce que j'expliquais d'entrée, ce que j'ai vécu. Parce que, moi, j'ai eu la chance, un hasard, un accident, d'être dans une famille à l'aise, d'être enfant unique, d'avoir fréquenté de bonnes écoles, de n'avoir rien manqué, alors que ceux qui étaient mes copains puis mes copines puis qui habitaient la rue Fabre, la rue Saint-Viateur, la rue Saint-Louis ? vous connaissez bien ma ville natale, M. le Président, Joliette ? et qui, eux, n'étaient pas dans les mêmes conditions sociales et qui, eux, ont dû prendre d'autres trajectoires sont allés travailler très tôt et très jeunes dans des usines, à des petits salaires précaires. Et vous savez que Joliette a eu beaucoup d'usines textiles. Vous vous rappelez la Pinatel, M. le Président? Puis ces emplois-là ont disparu, hein? Et ça a fait quoi? Pourquoi, moi, je l'aurais eu et eux ne l'ont pas? Une injustice flagrante de la vie. Mais, M. le Président, la vie, on peut la changer. On peut la changer, la vie.

La députée de Bellechasse, que je salue de nouveau, disait: La dignité de l'emploi. Oui, la dignité de l'emploi. Ils en veulent tous, M. le Président, un emploi. Mais cela fait les manchettes du bulletin d'information à la télévision nationale, ce soir: le taux de chômage a augmenté, au Québec, de 0,3 %. Où est le gouvernement? Où est la création d'emplois? C'est beau de leur dire: Allez travailler! Mais, quand on ne crée pas d'emplois, M. le Président, comment peut-on donner des emplois après?

M. le Président, ce projet de loi est inacceptable parce que foncièrement injuste, et, à l'exemple de la quasi-totalité de celles et ceux qui sont intervenus en commission parlementaire lorsque ce projet de loi a été étudié, je vous dis que autant mes collègues que moi voterons contre un projet de loi qui au départ vise d'abord et avant tout à inculquer des préjugés et à mépriser celles et ceux d'entre nous, de notre peuple, qui vivent des difficultés. Faisons la guerre à la pauvreté mais non aux pauvres. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 57 et je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant, M. le porte-parole officiel de l'opposition en matière de transport, M. le député de Beauharnois. M. le député de Beauharnois, la parole est à vous.

M. Serge Deslières

M. Deslières: Merci, M. le Président. J'interviens ce soir sur le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Et je me suis posé une question. Et il faut se poser une question, je pense que ça résume tout: Est-ce que ce projet de loi ? je vous rappelle le titre, M. le Président, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles ? est-ce que ce projet de loi va faire en sorte qu'il va y avoir moins de pauvreté, qu'il va y avoir moins de pauvres au Québec après son application, de la loi et, un jour, de ses règlements qui doivent suivre?

M. le Président, de ce côté-ci, l'opposition, ma formation politique, après analyse, et j'écoutais mes collègues qui sont intervenus au cours de toute la journée, une partie de la journée, de façon très recherchée, de façon très pertinente, des propos très pertinents, ils ont disséqué ce projet de loi et ils l'ont taillé en pièces et ils ont répondu, chacun à leur façon... J'écoutais mon collègue de L'Assomption, ma collègue de Matapédia, mon collègue qui vient de me précéder, de Montréal, Sainte-Marie?Saint-Jean, Sainte-Marie, et qui a clairement démontré, clairement démontré que ce projet de loi faisait en sorte qu'il y aurait autant de pauvres, autant de pauvreté au Québec.

n(22 h 20)n

Parce que, M. le Président, pas seulement nous, mais l'ensemble de la société civile qui est venue, qui est venue déposer, qui est venue déposer des mémoires à la commission parlementaire, qui a été entendue par la commission, ils ont, de façon à peu près unanime, dénoncé ce projet de loi en disant que c'étaient des reculs, qu'on n'avançait pas, qu'on était revenu sur des promesses électorales, qu'on ne faisait pas en sorte de répondre aux besoins essentiels, qu'il n'y avait pas de barème plancher, qu'il n'y avait pas d'indexation. Et, M. le Président, la confiance est brisée. La confiance est brisée. Je vous dirais qu'une grande colère s'élève dans la société civile, une déception totale. Pour avoir rencontré des groupes, pour avoir lu les mémoires, pour avoir entendu des gens, c'est à peu près le pire scénario qui vient d'être déposé, M. le Président. Et, quand le ministre, quand le ministre, M. le Président, nous dit: Les pauvres ont trop d'appétit... Ce n'est pas nous, là, qui avons dit cela. Qu'est-ce que c'est que cette attitude-là: les pauvres ont trop d'appétit? Ils n'ont pas trop d'appétit, M. le Président, ils ont de la misère à manger! Et ce projet de loi ne viendra pas, M. le Président, corriger ces grandes lacunes, ce grand partage de la richesse, parce que c'est ça qui est en cause, là, c'est ça que l'État doit faire, M. le Président, partager la richesse. Non, ce projet de loi n'est pas au rendez-vous. Ce projet de loi, «aide aux personnes et aux familles», n'atteindra pas cet objectif, ce partage, cette répartition de la richesse qu'un gouvernement doit faire. Le gouvernement du Parti libéral, le ministre de la sécurité sociale, de l'Emploi, de la Famille a raté son coup, a raté la cible.

Et vous allez me permettre, M. le Président, de revenir un peu en arrière. J'écoutais notre collègue de Bellechasse faire son intervention. Elle nous disait que, lorsqu'on dit, lorsqu'on parle, il faut tout dire, tout parler. Mais bien sûr! La collègue, elle a raison, mais, elle-même, elle a commis ce qu'elle reproche aux députés de l'opposition.

Je vais juste lui rappeler quelques faits. Est-ce qu'elle se rappelle qu'en 2003 le ministre de la sécurité sociale avait dit: Je vais faire en sorte d'aider 25 000 personnes à sortir de l'aide sociale? Je vois les collègues d'en face, là, qui opinent du bonnet et qui disent: Oui, il l'a dit. Résultat net? Résultat net: c'est 8 000 que... le ministre, finissant l'année 2003, a été obligé de dire: Bien, j'ai raté la cible. De 25 000 à 8 000. Il n'a pas raté à peu près, M. le Président, de 300 %.

Pourquoi? Une des raisons: en même temps, M. le Président, lui qui est ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, en même temps qu'il faisait ce genre de déclaration, il acceptait une commande de sa collègue du Conseil du trésor, ministre responsable de l'Administration publique, acceptait une commande parce qu'on lui a dit: M. le ministre, ça nous prend 220 millions de dollars. 220 millions de dollars. Alors, le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille s'est exécuté et a coupé, dans l'ensemble de ses budgets et de ses programmes, 220 millions de dollars. Pas content de ça, M. le Président, le même ministre a récidivé: il a coupé 44 millions de dollars, 44 millions de dollars aux gens, aux personnes sur l'aide sociale qui... Une pénalité, parce qu'on ne devait plus, là... un engagement électoral: Non, on ne reviendra pas aux pénalités. On est revenu, malgré leurs affirmations, malgré leurs promesses, et ça a coûté 44 millions de dollars, parce que les gens... 100 $ par mois parce que les jeunes revenaient habiter chez leurs parents. Alors, je le rappelle à la mémoire de notre collègue.

Mais ce n'est pas terminé, M. le Président. Le même ministre fait en sorte, depuis qu'il occupe ses fonctions... depuis 20 mois, a coupé 57 millions de dollars à Emploi-Québec. Dans l'ensemble des programmes où on devait aider les gens à se réintroduire sur le marché du travail, on a coupé 57 millions de dollars. 740 emplois. On a dit aux gens: On n'a plus besoin de vous autres. Alors, vous me suivez, la logique? 220 millions de dollars en 2003, septembre, 44 millions de dollars de coupures, de coupures. Et on continue, à emploi, dans le côté emploi, Emploi-Québec, 57 millions. Puis on crée du chômage, en plus de ça. On renvoie chez eux les 740 personnes. Alors, M. le Président, M. le Président, comment faire en sorte de ne pas répondre, clairement et nettement, que non, M. le Président?

Il y aura... Puis, on espère se tromper, M. le Président, mais on voit les éléments; c'est des faits, là, c'est des faits. C'est des chiffres, c'est des faits, c'est des actions, c'est des annonces qui ont été annoncées. Comment croire qu'après, après cette adoption, ce projet de loi n° 57, il y aura moins de pauvres, moins de pauvreté au Québec? C'est un leurre, M. le Président. C'est un leurre. Quand on regarde les chiffres, quand on regarde les éléments qui sont en place, on arrive à cette conclusion tout à fait logique.

Mais, qu'à cela ne tienne, M. le Président, non seulement on ne s'est pas arrêté à ça, mais entre-temps le ministre de la Sécurité sociale, de la Famille et de l'Emploi a accepté que son gouvernement ? et mes collègues en parlaient, mais c'est bon de le rappeler, M. le Président ? a accepté d'appauvrir l'ensemble des citoyens du Québec, et pas à peu près, M. le Président, puis pas une fois, c'est plus 10 fois qu'une, et je vais le rappeler au bon souvenir de notre collègue.

Augmentation des tarifs des services de garde: pour un enfant, parce qu'on l'a augmenté de 5 $ à 7 $, ça coûte à une famille 500 $, 520 $; pour deux enfants, par année, c'est 1 000 $. L'abolition de certaines déductions fiscales pour les familles. Augmentation des tarifs d'hydroélectricité, pas une fois, c'est la troisième fois. Puis, ils sont au courant de ça, là. Là, ils ne peuvent pas dire qu'ils ne sont pas au courant, M. le Président, ils sont au courant. Augmentation des primes d'assurance médicaments. Indexation des tables d'impôt de 2 % plutôt que l'IPC. Indexation des prestations d'aide sociale à 2 % plutôt... malgré leurs promesses, parce qu'ils s'étaient engagés lors de la campagne électorale de les indexer totalement, à 100 %. Deux langages, M. le Président. Hausse des tarifs de transport en commun.

L'ensemble d'augmentations de tarifs, de primes, on est venu chercher, chercher, M. le Président... ce n'est pas des millions qu'au bout de cinq ans on sera venu chercher dans les poches des Québécois et des Québécoises. Tout ça combiné, sur cinq ans, c'est 6,6 milliards de dollars. Et le ministre est fier de nous annoncer un plan de lutte à la pauvreté de 2,5 milliards sur cinq ans. Il faut tout dire, il faut tout dire. Ma collègue de Bellechasse, je lui rappelle: augmentation des tarifs, toute l'énumération que je viens de faire, total, cinq ans: 6,6 milliards. On nous présente aujourd'hui... il nous a présenté il y a quelque temps un plan de lutte à la pauvreté de 2,5 milliards. Alors, autrement dit, ce sont les citoyens et les citoyennes qui vont financer leur propre plan, là, et bien sûr frappés de plein fouet. Quand on parle de transport en commun, quand on parle des tarifs de services de garde, ces gens-là sont touchés. L'électricité, M. le Président, ces gens-là sont touchés, ils sont frappés de plein fouet.

n(22 h 30)n

Alors, M. le Président, ça ne tient pas la route, ça ne tient pas la route. Et ce n'est pas seulement ma formation politique qui dénonce, l'ensemble de la société civile est venue dénoncer ce projet de loi parce qu'ils ont compris que ce que le ministre a présenté appauvrissait davantage, appauvrissait davantage ceux qui étaient sur l'aide sociale, ceux qui étaient en difficultés économiques.

Faisons un petit calcul, M. le Président, si vous me permettez, je pense qu'il me reste encore quelques minutes. Prenons un exemple, M. le Président: monoparentale, revenus 40 000 $, deux enfants. Ce qui existait avant: allocation familiale, réduction d'impôts à l'égard des familles et crédit d'impôt pour enfants, 2 323 $, ça donnait, ça, monoparentale, 40 000 $ de revenus, deux enfants. Nouveau programme du ministre, 3 364 $. Il y a là un gain net de 1 041 $, sauf, sauf qu'il faut soustraire, M. le Président, de ce gain ce que je viens d'expliquer, les augmentations de tarifs de toutes sortes: garderie, factures d'électricité, primes d'assurance médicaments, transport en commun, qui totalisent 1 315 $. Perte nette pour la personne, 274 $. Beau plan de lutte contre la pauvreté... à la pauvreté. C'est beau. La preuve, ces gens-là vont être plus pauvres, ils vont être plus pauvres, et ça, il faut que les collègues d'en face comprennent. J'espère qu'ils ont étudié comme il faut les conséquences de ce projet de loi, M. le Président.

M. le Président, comme je le disais tout à l'heure, ce n'est pas seulement la formation, notre formation politique qui le dit, la société civile s'est complètement mobilisée pour dénoncer, dénoncer ce projet de loi: Le projet de loi sur l'aide sociale est très contesté. Les fonctionnaires dénoncent le projet de loi. Le froid s'intensifie entre le ministre et les démunis. Mobilisation contre un projet de loi monarchique illégal. Un projet de loi inacceptable. Un recul de 40 ans avec la loi 57, Claude Leblond, président de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec.

Alors, M. le Président, il est clair, lorsqu'on étudie élément par élément de ce projet de loi, on constate qu'il n'y a pas de barème plancher, qu'on a un retour aux pénalités, qu'on a indexé partiellement les prestations, malgré une promesse qu'ils avaient faite lors de la dernière campagne, et que ça ne couvre même pas, M. le Président, ça ne couvre même pas, M. le Président, les besoins essentiels. Quand on parle de besoins essentiels, M. le Président, on parle de nourriture, on parle de logement, on parle de chauffage, on parle d'éclairage, on parle d'habillement, on parle d'ameublement, on parle de transport. Ça ne couvre même pas ça.

Or, le ministre et le gouvernement, gouvernement du Parti libéral, n'ont pas à se vanter de ce qu'ils viennent d'accoucher, M. le Président. Il est clair et net que, pour nous, notre position, en parallèle avec la société civile qui a fait la même lecture que nous, ce projet de loi est un recul parce que ? et encore une fois, M. le Président, ce n'est pas ce que nous voulons et c'est ce qui va arriver ? il va y avoir, à la fin de ce parcours-là, il va y avoir plus de pauvres et plus de pauvreté, M. le Président.

Et je veux conclure, M. le Président, puisqu'il me reste à peine deux minutes, je veux vous dire, M. le Président, que nous sommes excessivement déçus, déçus, déçus qu'après 20 mois eux qui se disaient prêts... Santé, on va tout régler; l'éducation, ça va être réglé. Deux priorités. La lutte à la pauvreté, on va vraiment proposer des choses nouvelles aux Québécois. On va créer de la richesse, on va la répartir, cette richesse, M. le Président. Tout à fait le contraire de ce qui se produit.

Ce projet de loi est un recul, et on tourne en rond. Et, comme le disait... Et je veux rendre hommage à notre collègue de Vachon parce qu'il nous a clairement démontré sa grande connaissance de toutes ces questions-là, et je veux tout simplement citer Michel Venne, du Devoir, le lundi 4 octobre 2004, il disait ceci: «[Le député de Vachon], avant d'être député, avait suggéré de remplacer l'assurance-emploi ? de compétence fédérale ? et l'aide sociale par une formule d'assurance [citoyenne] unique. Une politique visionnaire reconnaîtrait également l'importance de mobiliser les réseaux sociaux, les organisations communautaires, les entreprises, les écoles en vue de favoriser la responsabilisation des individus. Elle éviterait les pénalités et les sanctions et, au contraire, favoriserait l'accumulation d'actifs ? le contraire de ce que fait le ministre ? d'un patrimoine qui permette à un exclu de former des projets. On en est loin. En fait, on tourne en rond... et à reculons. Déprimant.» Voilà la conclusion, il faut rejeter ce projet de loi, M. le Président. Et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Beauharnois, pour votre intervention. Je suis prêt à reconnaître le prochain ou la prochaine intervenante. Je vois Mme la députée de Deux-Montagnes. Alors, pour la poursuite de l'adoption du principe du projet de loi n° 57, Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Hélène Robert

Mme Robert: Merci, M. le Président. À mon tour, à cette heure plutôt tardive de la journée, j'aimerais exprimer mon opinion vis-à-vis le projet de loi n° 57 qui est un plan de lutte à la pauvreté, un plan d'aide aux familles.

n(22 h 40)n

Dans notre société, qui est une société riche, une société d'abondance, surtout dans cette période de l'année où on se prépare fébrilement à fêter Noël en famille, avec les amis, les magasins débordent, et c'est spécial qu'on soit, en cette veille de Noël d'une certaine façon, à discuter sur cette loi, l'aide aux gens qui sont démunis, des gens qui, momentanément ou pour un long laps de temps, vivent des situations de pauvreté. Et la première idée qui me vient à l'esprit: Comment, dans une société aussi riche que la nôtre, nous ne pouvons pas arriver à établir un filet social minimum, au moins décent?

Je sais que ça prend plus que des sous pour régler ou arriver à diminuer en tout cas la pauvreté, mais il reste que je pense qu'un filet social décent, c'est-à-dire qui couvre le minimum, qui couvre les besoins essentiels, on ne l'a pas encore. On met une certaine somme qui très souvent ne tient pas compte de ce que ça coûte vraiment. Et, comme tout le filet d'entraide, toute l'organisation de la société est peu appuyée alentour de ces gens-là qui sont en situation de pauvreté, bien, à ce moment-là, c'est... comment je dirais, ces sous-là très souvent n'arrivent pas à aider véritablement. Ils enferment davantage ces gens-là dans des situations de maladie, on le sait, on a énormément de préjugés vis-à-vis ces personnes, on a développé énormément de préjugés, parce que ces gens-là ont été en situation d'avoir une aide tout à fait mitigée pour arriver à s'en sortir. On les a classés avec le temps. À mon avis, ce n'est pas une solution non plus. Mais il reste que ce projet de loi, au dire d'un nombre quand même énorme de gens qui sont passés en consultation, il ne répond pas à un véritable plan.

M. Claude Leblond, il en parlait tout à l'heure: On recule de 40 ans avec la loi n° 57. Il parle qu'«en 2002, la société québécoise célébrait l'adoption, par l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale, du [projet de loi n° 112 qui visait] à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Cette loi promulgue le principe selon lequel ? la loi n° 112, je rappelle ? "les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment viser à rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté, en tenant compte notamment de leur situation particulière et des ressources dont elles disposent pour couvrir leurs besoins essentiels".

«[Et], contrairement aux prétentions du ministre de l'Emploi ? et je cite toujours M. Leblond ? de la Solidarité sociale et de la Famille, [...] le projet de loi n° 57 va carrément à l'encontre de la loi n° 112 [parce qu'il fait] abstraction du principe de couverture des besoins essentiels.» Il ajoute: «De plus, ce projet de loi accorde au ministre un pouvoir discrétionnaire sans précédent et ravive les préjugés en remettant sur le dos des personnes vulnérables le fardeau de la preuve. Même la Charte québécoise des droits et libertés de la personne est écorchée par le projet de loi n° 57. L'article 45 de la charte stipule en effet que "toute personne dans le besoin a droit, pour elle et sa famille, à des mesures d'assistance financière et à des mesures sociales, prévues par la loi, susceptibles de lui assurer un niveau de vie décent".

«Pour toutes ces raisons, l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec est d'avis que le projet de loi n° 57 ouvre toute grande la porte à une remise en question de la justice sociale et de la reconnaissance du droit au bien-être. Lorsque la décence et la dignité humaine sont en cause, le gouvernement ne peut asseoir son action sociale simplement sur des principes d'efficacité économique, sans se désolidariser des personnes les plus vulnérables.»

Voilà en gros ce que M. Leblond nous a livré. M. Leblond est président de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec. Dieu sait que les travailleurs sociaux du Québec sont en contact journalier, continuel avec ces gens qui sont aux prises avec des problèmes de ne pouvoir arriver à vivre convenablement. Je ne suis pas assistée... je ne suis pas travailleuse sociale, mais je suis députée, et, comme députée et tous les autres députés ici, dans la Chambre, vous avez souvent l'occasion de recevoir dans vos bureaux ? moi, en tout cas j'en reçois beaucoup ? des gens qui sont aux prises avec toutes sortes de problèmes mais qui, désespérés, viennent nous voir, et c'est très souvent des gens qui vivent dans la pauvreté, pour toutes sortes de raisons. Ça vous est sûrement arrivé d'essayer de dénicher de la nourriture, de dénicher des vêtements. De ce temps-là, par chez nous, nous travaillons sans arrêt à dénicher des loyers, des logements. Il n'y en a pas, de logement, les logements sont trop élevés. Je pense que ceci existe dans plusieurs endroits au Québec. À l'heure actuelle, on a beaucoup de nos gens qui doivent vivre avec soit des amis ou des membres de la famille parce que tout simplement sinon ils sont dans la rue.

Alors, le problème de la pauvreté il n'est pas seulement à Montréal, il est partout, il est dans les banlieues. Et parfois et pourtant, on est une région, les Laurentides, reconnue pour un taux d'emploi très élevé, mais la pauvreté nous la sentons, nous la voyons tous les jours. Donc, la couverture des besoins essentiels est impérative, elle est tout à fait nécessaire, et on peut reprocher à ce projet de loi de refuser de l'aborder, d'une certaine façon.

Quand le projet de loi a été... quand le plan d'action a été rendu public, le gouvernement a annoncé un investissement de 2,5 millions pour la lutte à la pauvreté. Et on constate... Beaucoup de mes collègues l'ont répété, mais je pense qu'il est encore nécessaire de le répéter: On n'enlève pas d'une main ce qu'on vient de donner de l'autre ou ce qu'on propose de donner de l'autre. Et c'est un peu ce qu'on fait avec ces gens-là: 2,5 millions pour la lutte à la pauvreté, alors que... L'augmentation des tarifs des services de garde, soit 170 millions par année, ce qui fera, sur cinq ans, 850 millions. L'abolition de certaines déductions fiscales pour les familles, c'est 203 millions par année; sur cinq ans, ça fera 1 015 000 000 $. L'augmentation des tarifs d'hydroélectricité, 623 millions, ce qui est énorme quand on sait que souvent c'est une des problématiques que nous rencontrons souvent dans nos bureaux. Ces familles-là ont souvent des logements qui ne sont pas très étanches, donc où le chauffage coûte extrêmement cher. Donc, ces gens-là ont subi d'une façon encore plus forte cette hausse de tarifs. L'augmentation des primes d'assurance médicaments, 62 millions, ce qui fait, pour cinq ans, 310 millions. L'indexation des tables d'impôts de 2 % plutôt que l'IPC, 140 millions, ce qui fait 700 millions. L'indexation des prestations d'aide sociale à 2 % plutôt qu'à l'indice des prix à la consommation, 29,3 millions, ce qui va faire, sur cinq ans, 146,5 millions. La hausse des tarifs de transport en commun, ce qui est énorme aussi pour ces familles-là, 56 millions. La clause Tanguy, 44 millions; donc, sur cinq ans, 220 millions. Alors, c'est 6,6 milliards qui sont récupérés pour un investissement de 2,5 millions.

n(22 h 50)n

Alors, je pense que, comme société, on pourrait être davantage généreux parce que la lutte à la pauvreté, on le sait tous, la lutte à la pauvreté, c'est moins de soins de santé, c'est des gens formés qui vont être aptes à l'emploi, qui vont pouvoir facilement s'intégrer sur les marchés du travail. Alors, une réelle lutte à la pauvreté, c'est l'intégration de ces gens-là dans cette société-là. Donc, la lutte à la pauvreté, c'est aussi une société plus solidaire, et ces sociétés-là ce sont des sociétés qui vont coûter beaucoup moins cher en termes de soins de santé. Dans notre société, la consommation a pris une place tellement importante que la solidarité, d'une certaine façon, on n'arrive pas à la créer réellement au nom de laisser une grande place à une production effrénée, à une surconsommation effrénée, alors que cette solidarité-là, cette entraide-là réglerait énormément de nos problèmes que nous vivons à l'heure actuelle.

Réjean Parent, le président de la CSQ, disait: «Je plains un peu le ministre dans le fond, parce que j'ai toujours le sentiment qu'il a les mauvais projets de loi dans les mains. Il est le ministre de la Solidarité sociale, alors qu'on a un projet qui fait plus dans l'insécurité sociale.»

Et la CSN ajoutait dans la même veine: «...le projet de loi ne comporte aucune mesure concrète visant à améliorer ou même à stabiliser la situation des plus pauvres parmi les plus pauvres. La CSN déplore également l'absence de mesures de protection visant les salarié-es à statut précaire, dont le nombre est en augmentation constante et qui se retrouvent trop souvent à cause de cette précarité en situation de pauvreté.»

Alors, M. le Président, il y a 61 groupes qui ont été entendus en commission. Plus de la moitié ont réclamé le retrait du projet de loi; il y en a près de 86 % qui ont demandé à ce que cette réforme couvre les besoins essentiels; il y en a 72 % qui demandent, qui veulent l'indexation annuelle automatique de toutes les prestations; 60 % l'exemption totale de la pension alimentaire reçue pour un enfant; 50 % le maintien de l'aide additionnelle aux personnes de 55 ans et plus; 24 % la publication de l'étude d'impact; 67 % une réforme de l'aide sociale pour en faire un régime universel et non pas un régime fondé sur des catégories d'inaptes.

Il est certain que le ministre a déposé quelques amendements qui répondaient à des réclamations, en commission, d'amélioration du projet de loi. Mais il reste qu'il y a encore énormément de chemin à faire, il y a encore énormément de travail pour en arriver à un minimum.

Je vous ai dit, tout à l'heure, que le projet entretenait des préjugés. Il y a un communiqué de la CSN, le 28 octobre 2004, qui notait que ce projet de loi contribue à entretenir les préjugés à l'endroit des prestataires aptes au travail: «On ouvre ainsi plus grande la porte à des différences de traitement selon les catégories de prestataires plutôt que de viser la couverture des besoins essentiels quelle que soit la condition des personnes, ce que devrait assurer l'aide de dernier recours.»

Alors, eux comme plusieurs, les aptes, les inaptes, quand tu n'as rien... Pourquoi certains auraient un peu plus et d'autres un peu moins? De manquer de l'essentiel n'aide pas la personne à se stabiliser pour trouver un travail ou pour encore retourner aux études, ou quelque chose du genre, pour arriver à se réintégrer. Elle a besoin de ce minimum-là. Les inaptes, à l'heure actuelle, la question des besoins essentiels, c'est vraiment minimum, à l'heure actuelle, même si elle n'est pas très bien évaluée.

Alors, l'indexation, on dit que, durant tout le long de la commission, le ministre a tenté de justifier sa décision d'indexer à 50 % les prestations des personnes aptes en alléguant que le précédent gouvernement n'avait pas indexé pendant plusieurs années. Alors, cet argument, à quoi sert-il? Car, si c'était absurde de ne pas indexer, est-ce que c'est moins absurde de n'indexer que la moitié, d'une certaine façon? Alors, ce sont des arguments simplement... bon, qui disent... Il l'a dit à un moment donné, mais ça a pris du temps: On manque de sous, donc on choisit d'aller là. Mais ce qui fait qu'au niveau de notre société c'est de créer encore des choses à deux voies, à deux routes.

Alors, j'aimerais peut-être, pour terminer... Il y a l'indexation, il y a les besoins essentiels. Aujourd'hui, on nous a distribué, à travers tous les bureaux, tous les députés en ont reçu... c'est Joanne Chagnon, qui est une artiste de Montréal, et qui nous a laissé une belle grande... une grande chose rouge...

Le Vice-Président (M. Gendron): Je regrette...

Mme Robert: Alors, c'était: Ça suffit, les préjugés!

Le Vice-Président (M. Gendron): Mais je regrette, Mme la députée, votre temps est écoulé.

Mme Robert: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Ça me fait plaisir, Mme la députée de Deux-Montagnes. Alors, je vous remercie pour votre intervention. Et je suis prêt à entendre le prochain ou la prochaine intervenante, et je reconnais Mme la députée de Rimouski pour la poursuite de son intervention. Mme la députée de Rimouski.

Mme Solange Charest

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. La Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, ce projet de loi s'adresse aux personnes les plus vulnérables de notre société, soit les personnes qui, pour une raison ou pour une autre, ont besoin du support de l'État et qui reçoivent la sécurité du revenu. Ce projet de loi, de par sa philosophie et son approche coercitives, n'assure pas l'exercice des droits des personnes appauvries économiquement. Contrairement aux prétentions du ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, ce projet de loi n'améliorera en rien le bien-être des individus, et, lorsque nous écoutons le ministre discourir sur son projet de loi, il ne rassure personne, à commencer par les personnes à l'aide sociale ainsi que l'ensemble de la population.

Cette loi est pourtant un enjeu majeur de société, celui de la solidarité. Aucune assurance n'est fournie par ce projet de loi à l'effet de favoriser d'une manière ou d'une autre l'exercice des droits fondamentaux des personnes appauvries économiquement. L'analyse partagée à la fois par l'opposition officielle et l'ensemble des groupes entendus en commission parlementaire est à l'effet que ce projet de loi est un recul vis-à-vis la loi n° 112, la loi sur la lutte à la pauvreté, adoptée, en décembre 2002, à l'unanimité, M. le Président, par les trois partis politiques qui siègent à l'Assemblée nationale ? ai-je besoin de les nommer? il s'agit du Parti libéral du Québec, du Parti québécois et de l'Action démocratique ? la loi n° 112, reconnue comme un geste de solidarité sociale de la société québécoise envers les personnes les plus vulnérables.

n(23 heures)n

Pire que tout, M. le Président, ce projet de loi est une négation de l'esprit et de la lettre de la loi sur la lutte à la pauvreté. Ce projet de loi, et je le répète, est un net recul, un retour aux années quatre-vingt, c'est un projet de loi sournois, rétrograde et accablant pour les personnes assistées sociales, oui, je dis bien «accablant», parce qu'il met sur les épaules des personnes à l'aide sociale tout le fardeau de la preuve, alors que c'est au ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale de faire la preuve que son projet de loi est un plus pour les personnes économiquement faibles et un plus également pour la société québécoise tout entière. La loi n° 57 est un travail bâclé, mal fait. Le ministre devrait retirer son projet de loi et refaire ses devoirs.

M. le Président, ce projet de loi est mal reçu, non seulement de l'opposition officielle, mais également par les groupes qui représentent les intérêts ou les droits des personnes assistées sociales. Et là j'ose même lire dans les pensées de certains collègues. Vous allez me dire: Attention, ces personnes ou ces groupes ne sont pas objectifs. Peut-être que oui, peut-être que non, car c'est leur tâche de défendre les assistés sociaux. Cependant, laissez-moi vous rappeler que c'est aussi le sentiment qui se dégage de la lecture des mémoires de grandes institutions québécoises comme la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, comme l'Ordre professionnel des travailleuses et travailleurs sociaux, le Barreau, qui, eux, rencontrent et travaillent régulièrement avec les personnes assistées sociales.

C'est un projet de loi qui ne démontre aucune sensibilité vis-à-vis la clientèle qu'il dessert. Et à cet effet, M. le Président, permettez-moi de vous citer ce que dit Me Pierre Marois, président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, en date du 26 octobre 2004, dans un communiqué: «La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse abonde dans le même sens: non seulement les personnes bénéficiant de l'aide sociale sont les plus pauvres, mais leur situation fait peser sur leurs enfants tous les risques de marginalisation socioculturelle, qui composent le cercle vicieux de la misère. Une société qui se réclame d'un idéal d'égalité ne peut accepter de tels constats sans réagir.» Et c'est en date du 26 octobre. Toujours la même journée, Me Marois déclarait également: «Ce projet de loi contribue [...] à entretenir les préjugés à l'endroit des prestataires aptes au travail [...]. On ouvre ainsi plus grand la porte à des différences de traitement selon les catégories de prestataires plutôt que de viser la couverture des besoins essentiels quelle que soit la condition des personnes, ce que devrait assurer l'aide de dernier recours.» Je m'excuse, ce n'est pas Me Marois, c'est la CSN, en date du 28 octobre, qui faisait ce commentaire.

Et Me Marois, maintenant, je vais vous dire ce qu'il disait, lui, à son tour. C'est: «La pauvreté s'accompagne de multiples entraves à l'exercice des droits, des entraves qui s'ajoutent, pour les personnes pauvres, aux contraintes sociales de chômage, de coût élevé du logement et des frais d'éducation et de santé, par exemple. Dans ces conditions, mettre l'accent principal, comme le fait le projet de loi, sur la "responsabilité première" des personnes pauvres dans la modification de leur situation, c'est méconnaître, voire nier la dynamique réelle de la pauvreté.» Me Pierre Marois, président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, en date du 26 octobre 2004.

Alors, M. le Président, je pense que là-dessus nous ne sommes pas les seuls à avoir d'immenses craintes concernant ce projet de loi. Et je voudrais rappeler, dès le départ, qu'en début de discussion dans le cadre de la commission parlementaire sur ce projet de loi, l'opposition officielle a demandé plusieurs amendements, soit: l'indexation annuelle automatique à 100 % pour tous les prestataires; l'introduction du principe de couverture des besoins essentiels, parce qu'on sait très bien, M. le Président, ce n'est pas avec 500 quelques dollars par mois que l'on peut répondre aux besoins essentiels, parce que le beurre, le pain coûtent le même prix pour tout le monde, peu importent les revenus. Alors, on a demandé également d'inclure un véritable barème plancher, de développer une vision relativement à la prime à la participation, de retirer les modifications réglementaires du 22 septembre dernier ? vous savez, cette fameuse clause Tanguy ? parce que la clause Tanguy, ça pénalise des personnes qui cohabitent ensemble et, parce qu'il y a cohabitation, on pénalise la personne qui reçoit de la sécurité du revenu, et peu importe leur âge.

On faisait image avec la clause Tanguy, en pensant qu'il n'y avait que des jeunes qui retournaient chez leurs parents, mais on sait tous très bien que parfois des individus dans la quarantaine, dans la cinquantaine vivent avec leurs parents âgés, les parents âgés qui souvent n'ont que leur pension pour vivre. Et celui qui revient chez sa mère ou chez son père et qui a 52 ans et qui reçoit de l'aide sociale va être pénalisé parce que l'autre, qui est son parent âgé, reçoit également une pension. Alors, je pense que là-dessus, M. le Président, cette clause Tanguy ne favorise en rien les liens familiaux, ne favorise en rien la solidarité, et il faut retirer cette modification, cette réglementation qui a été incluse le 22 septembre dernier.

Nous avons également demandé, comme opposition officielle, d'exempter les pensions alimentaires du calcul de la prestation d'aide sociale. Nous avons précisé, nous avons demandé que les intentions relativement au rehaussement des actifs, dans le calcul de la prestation, soient précisées. Nous voulons assurer la disponibilité des mesures d'insertion en emploi. Il faut que ce soit fait, parce que c'est bien beau de dire aux gens: Faites la preuve que vous êtes vaillants, puis que vous voulez travailler, puis que vous ne serez pas pénalisés parce que vous êtes aptes au travail et que vous faites des recherches d'emploi, mais il faut assurer une disponibilité au niveau des mesures qui vont favoriser cette insertion en emploi.

Alors, on a réclamé également de faire un réel débat public avec les principaux intéressés sur un document qui assurera une réelle couverture des besoins essentiels et qui fera la preuve d'une véritable volonté d'améliorer le sort des personnes démunies, tel que le Québec s'est engagé, avec l'adoption à l'unanimité de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Alors, en place et lieu des amendements réclamés par l'opposition officielle et un grand nombre de groupes entendus en commission parlementaire, c'est à une véritable opération de maquillage improvisée à laquelle le ministre s'est prêtée.

Les amendements du ministre sont nettement insuffisants. Pour en savoir plus long, on peut regarder de plus près ce qu'il nous a proposé. Et j'ai ici, M. le Président, la série de modifications qui vient du cabinet du ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille: principales modifications au projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Et, les mesures qui sont proposées, ça concerne, entre autres, l'article 53; vous savez, le non-paiement des loyers. Cet article est présent dans la loi actuelle mais n'a jamais été mis en vigueur depuis 1998, et la motivation vise donc à retirer, selon le ministre, l'article du projet de loi. Ainsi, le ministère entend explorer des solutions en mettant sur pied des projets pilotes, notamment l'établissement d'une fiducie volontaire pour les mauvais payeurs.

M. le Président, inutile de vous dire que la fiducie volontaire, ça ne prendra pas grand temps que ça va devenir une fiducie obligatoire quand on connaît très bien le milieu de la location des logements. Et j'y reviendrai un peu plus tard parce que j'ai beaucoup de choses à dire là-dessus, et il y a des témoignages que je voudrais vous faire partager. Et l'objectif présentement, c'est de vous faire connaître les accommodements ou les modifications que le ministre entend apporter à son projet de loi.

Il est question également des indexations des prestations. Ça ne constitue pas en soi un amendement à la loi, mais, ce que le ministre dit, c'est que, lorsque les ressources financières du gouvernement le permettront ? il faut le relire, hein, pour le croire ? lorsque les ressources financières du gouvernement le permettront, les prestations des personnes sans contraintes à l'emploi pourront être indexées à un taux supérieur que celui prévu dans le plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

M. le Président, ça, là, c'est une phrase qui est une phrase passe-partout quand on ne veut rien faire. Et je pense que là-dessus, en regard de l'indexation des prestations, il faut se rappeler aussi que le ministre a dit, en cours de discussion, que les groupes ne seront jamais satisfaits par rapport à l'indexation des prestations. Alors, je pense que ça reflète son esprit, et c'est pour ça qu'il a dit «lorsque les ressources financières du gouvernement le permettront». Alors, on peut attendre longtemps.

n(23 h 10)n

Contrainte temporaire pour les parents d'enfants handicapés. C'est une autre chose sur laquelle il veut revoir. Alors, le projet de loi prévoit que la contrainte temporaire est accessible aux parents d'un enfant handicapé à condition que l'enfant ne fréquente pas l'école à plein temps. Et la modification vise à étendre l'application de la contrainte temporaire aux parents dont les enfants handicapés fréquentent l'école à plein temps.

Mais, ça, ce n'est pas connaître la problématique des personnes handicapées et surtout des enfants handicapés. Et je vous assure que là-dessus il a fallu que l'opposition travaille très fort avec les groupes en commission parlementaire pour amener un éclairage nouveau pour permettre au ministre de comprendre ce que ça voulait dire que d'avoir un enfant handicapé ou un jeune ou une personne handicapée et qu'elle ait droit à du secours. Parce qu'il faut le dire, l'aide sociale, c'est une aide de dernier recours. Alors, je pense que là-dessus la modification sera bienvenue en autant qu'elle vise les bons objectifs et qu'elle permette aux personnes handicapées d'avoir accès à la prestation à laquelle ils ont droit.

Maintenant, il y avait l'article 33 et 34 du projet de loi qui seront modifiés parce que, vous savez, le Bureau des renseignements et des plaintes était prévu comme étant aboli. Alors, ça veut dire que n'importe qui qui voulait se plaindre par rapport...

Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant, Mme la députée. Oui, Mme la leader...

Une voix: ...vérifier le quorum, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Gendron): Effectivement, je constate qu'il n'y a pas quorum. Alors, que l'on appelle les députés. Suspension pendant quelques minutes.

n(23 h 11 ? 23 h 12)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, nous avons maintenant quorum. Nous allons poursuivre. Et je cède à nouveau la parole à la députée de Rimouski pour la poursuite de son intervention. Mme la députée.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Alors, je reprends. Certains groupes ont soulevé quand même beaucoup d'inquiétudes concernant le principe de prestation minimale qui ne serait pas applicable au programme Alternative jeunesse. Alors, le projet de loi sera modifié parce que, de l'aveu même du ministre, ça permettra de dissiper la confusion sur ce sujet. Alors, je pense que là-dessus nous n'étions pas les seuls à voir que ça ne fonctionnait pas et qu'il fallait faire quelque chose. Et le projet de loi va être également modifié pour reconnaître davantage le rôle des centres de travail adapté et les contrats d'intégration au travail, deux mesures absolument importantes pour les personnes handicapées. Et ça va permettre de préciser leur accès, comme de quoi elles ne seront pas limitées aux prestataires avec contraintes sévères. Et je pense que là-dessus... Et cet article qui concerne les centres de travail adapté et les contrats d'intégration au travail sont très importants parce que, dans le cadre du projet de loi n° 56, il y a eu transfert de l'Office des personnes handicapées aux centres d'emploi. Il faut s'assurer, M. le Président, que les services aux personnes handicapées se poursuivent.

Et naturellement l'article 96 portait à confusion, et on a réussi à convaincre le ministre de le modifier. Alors, il a dit qu'il le fera. Et ça va permettre de préciser que le projet de loi n° 57 prévoit des recours accrus par rapport à la loi actuelle quant aux programmes spécifiques et au programme Alternative jeunesse.

En regard des programmes spécifiques, il faut assurer une certaine transparence dans le pouvoir du ministre de créer des programmes spécifiques. Le ministère prendra des mesures telles que la publication des programmes disponibles dans la Gazette officielle, la diffusion des normes des programmes et l'inclusion, dans le rapport annuel de gestion, des résultats relatifs à ces programmes. M. le Président, ça ne dit pas grand-chose, sinon que ça va être publié dans la Gazette. Une fois les faits faits, ça va venir confirmer ce que le ministre aura fait sans consultation, sans dialogue et sans partage des informations, avant de mettre ces programmes-là sur pied.

Alors, je ne pense pas que c'est ça qui va révolutionner le milieu par rapport à ce qui va être apporté. En résumé, M. le Président, la crédibilité du ministre en a pris pour son rhume avec ce projet de loi n° 57. Il n'a pas répondu aux principales demandes ni des groupes ni de l'opposition, notamment celle d'introduire dans la loi un principe d'indexation automatique. Il n'a pas non plus introduit dans la loi un principe extrêmement important, celui de la couverture des besoins essentiels, qui aurait pu amener le projet de loi n° 57, à tout le moins les législateurs comme tels, à considérer les besoins essentiels dans leurs décisions.

De plus, le retrait de l'article 53, vous savez, le fameux article concernant le non-paiement de loyer, était attendu, étant donné que la quasi-unanimité contre l'article 53 était bel et bien présente. La proposition du ministre maintient cependant l'article 53 en partie, et il prévoit éventuellement une réglementation qui adoucit en quelque sorte les angles dans le sens de créer une alternative un peu plus acceptable pour certaines personnes dans la société.

Parmi les solutions avancées, le ministre prévoit qu'une fiducie sera implantée. Alors, malgré le fait de s'être fait dire et fait mettre en garde par de nombreux groupes avec cette approche, parce que même si la fiducie n'est pas obligatoire, elle pourrait devenir vite une obligation pour les propriétaires d'immeubles à logements lorsqu'une personne assistée sociale voudrait louer un logement.

Même si le ministre insiste pour dire que la fiducie ne sera pas obligatoire, les propriétaires pourront toujours utiliser cette question devant les locataires et leur demander: Est-ce que votre chèque de bien-être social est en fiducie, monsieur? Est-ce que votre chèque de bien-être social est en fiducie, madame? Non? Ah, bien, je suis désolé, vous savez, le logement n'est pas disponible, le logement n'est pas adéquat, etc. Alors, M. le Président, c'est le genre de situation que nous ne voulons pas voir s'installer dans le système de l'aide sociale.

C'est certain que tous les propriétaires de logements ne réagiraient pas nécessairement de cette façon. Cependant, il y en aura trop, beaucoup trop, et je pense qu'il y a un risque de discrimination en introduisant une telle mesure, une mesure improvisée de toute façon.

Maintenant, M. le Président, nous allons voir ce qu'en pensent les partenaires sociaux par rapport à l'article 53. Les groupes de défense des droits des personnes assistées sociales sont opposés, je l'ai dit tout à l'heure et je le redis, à ce projet de fiducie, notamment parce que, selon eux, la solution au non-paiement de loyer passe par le rehaussement de la prestation d'aide sociale: «Les difficultés qu'éprouvent certaines personnes à rencontrer cette dépense tiennent au déséquilibre entre les coûts de loyer et le calcul des besoins que devrait couvrir le montant des prestations. Nous tenons à spécifier au gouvernement que nous sommes totalement en désaccord avec l'hypothèse de la création de fiducie.»

Le Vice-Président (M. Gendron): Il vous reste une minute.

Mme Charest (Rimouski):«Il revient au gouvernement de rétablir l'équilibre en contrôlant l'augmentation du prix des loyers, en augmentant le nombre de logements sociaux, en augmentant le montant de la prestation de façon à permettre aux personnes dans le besoin de respecter leur engagement vis-à-vis leur propriétaire. Nous sommes d'avis qu'il ne revient pas au gouvernement, dans une loi qui devrait viser à assurer un niveau de vie décent aux personnes dans le besoin, de veiller à favoriser quelque créancier que ce soit. La prestation doit demeurer intégralement incessible et insaisissable.» Et ça vient de l'Union des consommateurs, Mme France Desrochers, en date du 23 novembre 2003.

M. le Président, j'aurais beaucoup d'autres choses à vous dire, sinon que ce projet de loi ne rencontre vraiment pas l'assentiment d'une très forte...

Le Vice-Président (M. Gendron): Votre temps est terminé. Alors, je vous remercie, Mme la députée de Matane, je vous remercie pour votre intervention. Et pour la poursuite du principe de ce projet de loi n° 57, je reconnais maintenant M. le député du Lac-Saint-Jean. M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Stéphan Tremblay

M. Tremblay: Merci, M. le Président. Alors, je tiens à rappeler à nos auditeurs, s'il y en a encore, qu'il est 11 h 20 et que nous sommes en direct. Je pense que c'est bien important de le mentionner, puisque bien des gens qui actuellement regardent, en ce vendredi soir, le canal parlementaire pensent trop souvent que nous sommes en reprise. Or, c'est faux. Il y a devant moi peut-être une dizaine de ministres que je salue, et je suis bien heureux qu'en ce vendredi soir, alors que bien des gens savourent un souper ou prennent une bouteille de vin, ont du plaisir, mais que d'autres personnes n'ont pas nécessairement cette chance.

n(23 h 20)n

Et c'est d'ailleurs ce qui m'anime ici, ce soir, puisque, si j'avais eu à parler des partenariats public-privé ou des fusions municipales, ça m'aurait beaucoup plus ennuyé. Sauf qu'ici, ce soir, j'ai une certaine motivation à venir me présenter devant cette Assemblée, à cette heure-ci, et de parler d'un sujet qui traite d'une question fondamentale de l'action politique, c'est-à-dire la lutte à la pauvreté.

En fait, à mon sens, si nous faisons de la politique, c'est parce que nous avons décidé de nous organiser collectivement. Et de nous organiser collectivement, qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire fondamentalement de répartir en quelque sorte la richesse que nous allons produire. Et malheureusement, en l'an 2004, nous sommes encore obligés de discuter de façons de lutter contre la pauvreté. N'est-ce pas Nelson Mandela qui disait: «La sécurité pour quelques-uns, c'est l'insécurité pour tous.» Et il est fort probable et souhaitable ? et je tends à penser qu'il en est ainsi pour l'ensemble des collègues dans cette Chambre ? que notre souhait le plus profond serait de vivre dans une nation sans pauvreté.

Or, avec la tendance néolibéraliste actuelle, on tend trop souvent à l'oublier, voire même à le banaliser. Je n'ai qu'à citer l'exemple de l'Alberta, qui est probablement l'une des provinces les plus riches du Canada, qui est en train d'éliminer, qui a éliminé récemment, je pense, sa dette et qui, pourtant, depuis les 10 dernières années, a vu accroître sa pauvreté extrême. Il y a 10 ans, lorsque nous marchions dans les rues de Calgary, il était très rare de voir des pauvres dans la rue. Or, aujourd'hui, c'est une chose absolument fréquente. Est-ce qu'on peut se réjouir de ce genre de chose? Parce qu'effectivement on est tous un peu jaloux de voir le fait que l'Alberta est parvenue à éliminer sa dette, mais est-ce correct de parvenir à ses fins mais tout en acceptant le fait qu'il y ait des gens dans la rue, dans la rue ou même n'importe où? Parce qu'on pense souvent que la pauvreté, c'est ce que l'on voit, mais ce qui est encore bien pire, c'est la pauvreté qu'on ne voit pas, celle qui ne fait pas mal, celle qui est cachée dans les maisons, dans les appartements. Et je crois que c'est à ça qu'il faut réfléchir, et qu'il faut se rappeler, comme parlementaires, au-delà de toute loi, au-delà de tout projet de loi, de tout règlement, réforme ou quoi que ce soit, il faut se poser la question si, notre objectif, comme parlementaires, comme députés, n'est-il pas celui de parvenir à une société plus équitable qui tentera de faire en sorte que chacun dans la société ait une dignité.

Bien entendu, plusieurs personnes diront: Ah, de la pauvreté, il y en a toujours eu, il y en aura toujours, mais, à un moment de l'humanité où nous n'avons jamais été aussi riches, nous n'avons jamais eu autant accès aux connaissances, accès aux richesses, est-il encore normal que nous ayons à tolérer cette pauvreté? Je sais que plusieurs pourront dire: Ah, éliminer la pauvreté, c'est utopique. Mais je dois vous dire que, lorsque je suis entré en politique, je me disais: Ah, écoutez, les générations antérieures ont trop dépensé, et puis là il faut maintenant se serrer la ceinture. Mais j'ai rapidement réalisé, ça m'a pris quelques années, peut-être deux ans, à réaliser que finalement il était anormal de voir que nous devions nous serrer la ceinture et que, pour cette raison, certains devaient crever de faim ou peut-être manger du Kraft Dinner plutôt que de manger un repas équilibré.

Et à cet égard je crois qu'il faut réfléchir. Je crois que plusieurs personnes parmi les politiciens, parmi les parlementaires ont des bonnes volontés. Et je l'ai vu à la Chambre des communes, lorsque j'y étais, lorsque nous avons voté à l'unanimité une motion qui disait que, d'ici l'an 2000, il fallait éliminer la pauvreté infantile. Bien entendu, éliminer la pauvreté infantile, ça veut tout d'abord dire éliminer la pauvreté tout court parce que les enfants ne naissent pas pauvres, c'est les parents qui sont pauvres et qui mettent au monde des enfants pauvres. Donc, de banaliser un projet de loi comme celui dont nous traitons ce soir est, selon moi, banaliser l'action politique que nous faisons.

La société dans laquelle nous vivons actuellement, comme je l'ai dit tout à l'heure, n'a jamais été aussi riche; jamais nous n'avons eu accès autant à la richesse. Et on dit même, si on le prend sur un aspect plus global, que la planète est en mesure de nourrir environ 9 milliards d'humains sur terre. Or, nous en sommes à peu près 6, presque 7 et bientôt, en tout cas de mon vivant je l'espère, nous atteindrons les 9 milliards. Et la question que nous nous posons ce soir, par ce projet de loi qui est très technique, hein, qui émet les paramètres comment nous allons définir les sommes d'argent minimales que nous allons octroyer aux personnes les plus démunies, et bien c'est l'ensemble de la planète qui doit se les poser. Et je crois que c'est fondamental de bien réfléchir à ces aspects-là.

Je me souviens toujours d'une personne dans mon comté ? je pense que tous les députés ici, ce soir ont des gens parce que, veux, veux pas, les députés sont des gens qui ont des bureaux dans leurs comtés et qui, je l'espère, rencontrent des gens, des gens qui viennent chez eux ou bien qui vont dans les activités et discutent avec les gens ? et je me souviendrai toujours de cette personne, en ce qui me concerne, et je le dis très personnellement, soeur Étiennette Dallaire, qui est aujourd'hui décédée, qui un jour est venue à mon bureau et m'a dit: Stéphane, ça n'a plus de bon sens, ça ne peut plus continuer comme ça; il y a des gens qui crèvent de faim. Alors que je ne les voyait pas, ces gens-là.

Et alors je pense qu'il serait important de se rappeler que justement ces gens qui sont dans la misère, ces gens qui prennent une grande partie de leurs revenus disponibles à seulement se loger. Et on parle d'un fort pourcentage de personnes au Québec, au Canada, en Amérique, c'est encore pire, et dans le monde qui passent plus de 50 % de leurs revenus seulement pour payer leur loyer, et par la suite il reste à payer la nourriture, et par la suite il ne reste plus grand chose.

Et ça, c'est clair que, lorsque ça fait quelques années qu'on gagne un bon salaire... Parce que j'en suis, hein, ça fait maintenant six ans, sept ans que je gagne un bon salaire. Parce que j'ai déjà fait de l'assurance chômage, M. le Président, je n'ai jamais souffert de pauvreté, mais je me souviens que j'étais plus sensible à ce que c'était que d'avoir de la misère à boucler ses fins de mois que ce que je le suis actuellement, et c'est pour ça, je pense, qu'il est important, nous, parlementaires, d'être capables de se projeter justement dans la réalité de ces individus.

Bien entendu, parler de pauvreté ou parler d'aide sociale et bourrés de préjugés, et j'en ai pour preuve certains animateurs radiophoniques, que ce soit à Québec, dans ma région ou partout au Québec... que c'est facile de casser du sucre sur le dos des pauvres, disant que ce sont des gens paresseux, qui n'en n'ont rien à foutre de travailler et tout ce qu'ils veulent c'est de recevoir leur chèque de BS. Il est vrai que c'est la réalité pour certaines personnes, mais c'est peut-être un pourcentage condamnable et où il faut trouver des moyens de pénaliser ou enfin de faire en sorte que ça ne se reproduise pas. Mais bien entendu il y aura toujours des «craques» dans le plancher, si vous me permettez l'expression.

Mais pour d'autres, pour d'autres... Et je parle pour ces gens, pour ces gens que j'ai rencontrés, des gens que j'ai rencontrés il y a trois semaines de cela, dans mes premières activités suite à ma convalescence, et qui me disaient: Stéphan, qu'est-ce qu'on peut faire? Tu es notre député, tu dois nous représenter, tu dois être notre voix puisque nous ne pourrons jamais entrer dans ce salon ou presque pas et tu dois être notre voix pour dire que nous sommes contre ce projet de loi, puisque ce projet de loi fait en sorte que nous considérons que la solidarité québécoise n'est pas, que ce n'est pas assez.

n(23 h 30)n

Et j'insiste sur le fait qu'il y a plein de préjugés. Je me souviens lorsque nous avons voté à l'unanimité, il y a de cela quelques années maintenant, mais presque deux ans, la loi pour éliminer la pauvreté, la loi sur l'élimination de la pauvreté. Je me souviens de certains commentaires radiophoniques, mais aussi dans la population ? puisque j'étais en élections partielles à ce moment-là, je tentais d'entrer dans ce salon bleu ? et je me souviens de travailleurs qui triment dur, qui ont de la misère à arriver mais qui travaillent 40 heures et plus par semaine et même font des heures supplémentaires, ils ont de la misère à joindre les deux bouts, et ils me disaient: Voyons donc, Stéphan, ça n'a pas de bon sens, c'est encore nous autres qui va payer pour eux autres; puis ils ont rien qu'à travailler, puis ils ont rien qu'à se débrouiller. Puis ça, je suis persuadé que nous l'avons tous entendu, ou en tout cas pour ceux qui se promènent dans la population, nous l'avons tous entendu. Et c'est un préjugé qui persiste.

Mais en tout cas je veux me faire, ce soir, la voix de ceux qui condamnent le pourcentage de la population qui peut-être abuse de la solidarité québécoise, qui abuse de l'aide sociale, qui abuse et qui n'en aurait pas nécessairement besoin, qui travaille au noir à gauche et à droite, et tout ça.

Mais je sais pertinemment, je sais pertinemment qu'il y a des gens qui en arrachent. Je sais qu'il y en a des gens, des familles, des femmes monoparentales notamment ? et c'est souvent le cas malheureusement ? qui regardent leur enfant et qui n'arrivent même pas à leur offrir un déjeuner le matin. Et, aujourd'hui, justement c'est ce qu'on s'aperçoit dans plusieurs écoles. On est tout contents d'ouvrir des clubs des petits-déjeuners. Je lève mon chapeau à ces gens qui justement font ce genre d'action, d'ouvrir des clubs de petits-déjeuners. Mais je me dis que, comme société, à chaque fois qu'il y en a un qui ouvre, c'est une forme d'échec, c'est une forme d'échec.

Bien entendu, peut-être que certains parents ne remplissent pas leur rôle convenablement, et ça, il y en a un pourcentage aussi. Mais c'est ça, la difficulté de traiter de ce genre de question comme nous le faisons ce soir, c'est qu'il y en a qui abusent puis il y en a qui en ont vraiment de besoin. Et je tente, ce soir, d'amener ma voix et de parler en leur nom pour tenter que nous nous plongions justement dans leur réalité de difficultés, de misère, de détresse, de suicide parfois, même de ça, et de perte de dignité. Et je pense que ça, c'est important de se le rappeler. Donc, je me fais le porte-étendard des gens qui m'ont appelé à leur bureau... bien, pas à leur bureau, mais les groupes collectifs du comté de Lac-Saint-Jean qui m'ont dit: Cher Stéphan, tu es notre député qui doit porter notre voix à l'Assemblée nationale pour dire que nous souhaitons le retrait du projet de loi n° 57.

Mais, au-delà de ça je pense que nous devons être conscients de cette réalité. Bien entendu, nous devons mettre les efforts pour faire en sorte de sortir du cercle de la misère ces personnes, puisque bien souvent ces gens sont pris dans ces difficultés de plusieurs générations. Donc, je ne dis pas, ce soir, que j'ai la réponse à cette problématique, loin de là, mais, je crois, peut-être que, dans l'histoire, même de ça, là, dans 50 ans d'ici, lorsqu'on regardera... et je l'espère que ce sera le cas, qu'on regardera les années 2000 comme une période où des gens ont souhaité l'élimination de la pauvreté et des gens ici, ce soir, en ce vendredi soir, ont discuté des façons d'y arriver.

Je sais aussi que, dans certains États dans le monde, notamment le Danemark ou les pays scandinaves, on se fait une fierté d'avoir comme objectif de société d'avoir une pauvreté zéro. Et je pense que trop souvent nous tergiversons, nous nous éloignons de cet objectif de société. C'est clair que c'est beaucoup plus palpitant de discuter de façons d'arriver à rendre plus efficaces nos moyens de consommation énergétique, de production énergétique ou de faire rouler notre économie pour créer de l'emploi, c'est clair. Et ça, c'est vrai que c'est plus intéressant, c'est plus palpitant, hein, aider des entreprises à démarrer, produire de la richesse, produire de l'emploi, ce qui donnera une dignité aux individus et qui par la suite répartira la richesse. Et ça, c'est clair que la façon numéro un de répartir la richesse, c'est la création d'emplois. C'est de cette façon que nous parviendrons comme société à éliminer la pauvreté. Mais il y aura probablement toujours un pourcentage d'individus qui ne parviendront pas à s'insérer dans la société, que ce soit dans une école...

Je me souviens très bien de certains de mes amis qui ne parvenaient pas à réussir à l'école, ils avaient certaines difficultés, ou qui ne sont pas nés dans des conditions familiales comme j'ai pu les avoir, par exemple, et qui ont fait en sorte qu'ils n'ont pas eu accès aux mêmes chances que j'ai eues. Et c'est à ça que je crois qu'il faut réfléchir ici, ce soir, au-delà de toutes les technicalités du projet de loi qu'on nous soumet. Et voilà, je crois que la base de la social-démocratie, c'est de penser que nous ne naissons pas tous égaux. Nous naissons, certains individus naissent dans des conditions plus favorables ou peut-être intellectuellement plus défavorisés peut-être mais dans une famille où on parviendra à stimuler les enfants qui arriveront à trouver leur place dans la société. Parce que la pauvreté et la détresse sociale est une résultante de plusieurs conséquences, plusieurs effets, et c'est peut-être aussi à ça qu'il faut réfléchir.

Aujourd'hui, mon chef, le député de Verchères, a parlé d'une stratégie basée sur les connaissances, basée sur le savoir, qui sera certainement une façon de faire accroître la richesse, et à cet égard j'en suis à 100 %. Mais, dans le même sens, il faut continuer de réfléchir à ces gens qui ont de la difficulté à s'insérer dans ce système, à ces enfants qui naissent dans des familles parfois en difficulté, des familles qui n'ont pas eu accès à la chance que d'autres ont. Et à cet égard il faut se poser la question: Bon, bien, ces gens en difficulté, qu'est-ce qu'on doit faire avec? Ces gens qui prennent plus de 50 % de leurs revenus pour simplement se loger et se nourrir et par la suite plus de qualité de vie ou presque pas, puisque leur vie consiste à survivre.

Et après ça bien de ces gens en perte de dignité souvent ? pas toujours mais souvent ? puisque sans emploi, se sentent exclus de la société, se sentent frustrés de cette société et ont souvent le sentiment et la difficulté de réintégrer, puisque, après quelques années de réception de la solidarité sociale, ces gens ont parfois beaucoup de difficultés à se réinsérer dans la société, de frapper aux portes et de dire: Moi aussi, je veux travailler. Et ça, c'est un aspect, je pense, qu'il faut réfléchir.

Bien entendu, quand on parle, par exemple, pour une personne dans l'aide sociale sans contraintes, on parle de 533 $ par mois. Des groupes de chez nous on fait une expérience intéressante de demander à certains élus, notamment des préfets, de faire l'expérience de vivre avec ce montant d'argent pendant un mois, et je dois vous assurer qu'il n'y a pas grand monde qui ont réussi à le faire. Et donc en tout cas je pense que c'est important que nous réfléchissions à tous ces aspects-là. C'est important que nous réfléchissions à des façons de réintégrer ces gens, de leur tendre la main et de s'assurer que les enfants de ces milieux-là puissent trouver moyen de se sortir de ce cercle vicieux, ce cercle misérable qui est la détresse sociale et la perte de dignité.

Donc, c'était l'essentiel de mon propos, même si je n'ai pas été dans les technicalités. Je pense qu'en ce vendredi soir, 23 h 40, où peut-être que la cote d'écoute est très basse, je me suis permis de peut-être plus philosopher, hein. Il y a peut-être le chum de notre leader qui écoute. Ma conjointe aussi écoute, elle m'attend dans mon bureau, alors...

Le Vice-Président (M. Gendron): Mais là vous devez conclure, vous devez conclure, M. le député.

M. Tremblay: Je conclus en disant que j'espère que ce petit discours a permis de sensibiliser l'ensemble de mes collègues à cette difficile réalité.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député du Lac-Saint-Jean. Et, pour la poursuite du débat... Oui.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Il appartient à votre collègue de décider. Est-ce que, M. le député du Lac-Saint-Jean, vous acceptez de répondre à une question posée? Alors, il faut se rappeler que la question doit être brève, également la réponse. Alors, M. le député de Beauharnois.

M. Deslières: Merci, M. le Président. Je sais que mon collègue est au fait de toute la question, de toutes les questions entourant le développement durable. Est-ce qu'il croit que le projet de loi n° 57 va dans le sens des objectifs du plan de développement durable rendu public par le gouvernement dernièrement?

n(23 h 40)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, M. le député du Lac-Saint-Jean, pour une courte réponse.

M. Tremblay: Bien, c'est clair que le développement durable, comme je l'ai dit et comme... le gouvernement aussi a déposé son plan en indiquant clairement que le développement durable, c'était de considérer les aspects environnementaux, économiques et sociaux. Donc, à cet égard, si l'on considère que les montants d'argent ou le régime que nous proposons aujourd'hui, que le gouvernement propose aujourd'hui, ne sortira pas les gens de la pauvreté, bien on pourrait dire facilement que ce n'est pas du développement durable. Sauf qu'il faudrait faire un débat et il faudrait faire attention de ne pas tout mettre...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non. Mais là on ne peut pas reprendre le débat, là. Il faut que la réponse soit courte.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Bien, alors, allez pour conclure.

M. Tremblay: Je voulais juste dire que... Mais il ne faut pas tomber dans le piège de tout mettre dans le développement durable, et ça, ça je tiens à le dire. Il y a quand même certains paramètres. Mais globalement, effectivement, peut-être que nous pourrions questionner à l'effet de savoir si la mesure de ce soir n'est peut-être pas tant que ça du développement durable. Si vous pourriez me permettre de parler encore plus, je pourrais explorer. Mais, bon, bien, voilà.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Et, pour la poursuite du débat, je reconnais la prochaine intervenante, Mme la leader de l'opposition officielle, pour son intervention sur le principe du projet de loi n° 57. Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Et députée de Bourget également. Alors, nous sommes vendredi le 3 décembre, il est 23 h 40. Alors, s'il y a des gens qui nous écoutent, nous sommes en direct. Et peut-être que certains se demandent qu'est-ce qu'on peut bien faire au salon bleu de l'Assemblée nationale, un vendredi soir, à 23 h 40.

Alors, nous sommes à une étape importante de l'adoption d'un projet de loi. Il y a toutes sortes d'étapes que je ne réexpliquerai pas, mais tout de même, dans ce cas-ci, nous sommes donc à discuter du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Et plusieurs de mes collègues de l'opposition officielle sont intervenus, au cours des dernières heures, ils l'ont fait également dans les jours... depuis quelques jours, peut-être qu'il y aura d'autres interventions aussi au cours des prochains jours parce que nous voulons signifier nos remarques, nos commentaires et aussi nos inconforts profonds face à l'adoption de ce projet de loi. Alors, voici pourquoi j'interviens et j'ajoute ma voix et mes propos à ce qui a été dit jusqu'à maintenant sur ce projet de loi n° 57.

Je voudrais... J'essayais tout à l'heure... Parce que, bon, on se prépare pour ce genre d'intervention, j'ai entendu plusieurs de mes collègues intervenir, puis on se dit: Comment on peut à notre manière expliquer notre point de vue sur un projet de loi? Et je partirai d'un événement tout simple. Il y a quelques semaines, au moment où ce projet de loi a été déposé, des gens dans mon comté, qui sont dans l'est de Montréal, ont pris connaissance de ce projet de loi, du communiqué du ministre, ont pris connaissance des propos du porte-parole de l'opposition officielle, le député de Vachon, et ont commencé à se poser passablement de questions sur ce projet de loi. Et, c'est assez rare que cela arrive, ils ont appelé à mon bureau et ils ont dit: On veut être capables de comprendre ce projet de loi, on a entendu le député de Vachon ? qu'ils ont bien sûr appelé par son nom, ce qu'on ne peut pas faire ici ? est-ce qu'on peut avoir un échange avec lui parce que, là, on ne s'y retrouve plus et surtout on a l'impression qu'il y a une dérive par rapport à ce qui a été adopté au Québec ces dernières années, notamment la loi 112, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale?

Alors, c'est assez rare tout de même que des groupes vraiment volontairement se tournent vers des députés pour avoir des ressources pour comprendre de manière aussi volontaire une loi. Et ça m'a vraiment étonnée, ça m'a ravie qu'ils nous voient, qu'ils voient leur députée comme une ressource. Évidemment, c'est mon travail. Et j'ai donc organisé une session d'échange toute simple mais très fructueuse avec le député de Vachon et des représentants d'organismes, notamment d'organismes communautaires et d'organismes qui travaillent avec des personnes qui vivent toutes sortes de difficultés liées à la pauvreté, une session qui a été donc extrêmement fructueuse. Et j'ai d'ailleurs constaté...

J'ai vu récemment des documents notamment qui ont été produits par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté, des documents qui étaient... qui démontraient à quel point... c'est dommage, je ne les ai pas repérés juste avant d'arriver, mais qui illustraient à quel point ce projet de loi venait de nous embarquer dans une histoire bien compliquée, alors que le point de départ était simple et limpide. Il était bien sûr un défi, mais il était simple et limpide, et c'est cette loi que nous avons adoptée à l'Assemblée nationale, à l'unanimité, en 2003, qui visait justement à lutter contre la pauvreté.

Évidemment, une loi n'est pas en soi un instrument de lutte, mais une loi donne des outils. Et cette loi-là a été un défi pour l'Assemblée nationale et pour les forces vives du Québec. Le député de Vachon, pour le paraphraser, a souvent dit que ça a été, au moment de cette loi n° 112, une espèce d'électrochoc social. Puis effectivement, on travaillait, comme on dit, dans du neuf, puisque ce type de mesure là n'existait pas, enfin on n'a pas trouvé de références dans des pays qui sont équivalents à notre situation.

Donc, collectivement, il n'y a pas si longtemps, on s'était donné des objectifs que nous voulions atteindre pour faire en sorte que les humains de ce Québec puissent vivre dans les meilleures conditions possibles, que les programmes gouvernementaux puissent faciliter la vie des gens et faire en sorte qu'on n'enlise pas les gens dans la pauvreté, que nos enfants aient à leur disposition des ressources matérielles et financières pour pouvoir s'épanouir. Donc, ce cadre-là, cette loi n° 112 a été un défi. Nous l'avons réalisée, nous l'adoptée à l'Assemblée nationale unanimement. Alors, c'est ça, le point de départ.

Arrive un autre événement qui est normal dans notre vie démocratique: des élections. Il faut qu'il y ait des élections à certains moments. Et, dans le cadre évidemment d'élections, les partis politiques veulent bien sûr ? et c'est tout à fait normal ? saisir l'attention des gens de qui ils demandent la confiance. Et, à ce moment-là, au moment donc de la dernière campagne électorale, le chef du Parti libéral, qui est l'actuel premier ministre du Québec, a écrit, le 7 avril 2003... Et je tiens à être précise sur les dates, M. le Président, parce que j'ai entendu plusieurs interventions de la part des députés ministériels du Parti libéral qui se sont offusqués et ils en ont mis plus que le client en demandait sur le fait que le gouvernement précédent n'avait pas fait ceci et n'avait pas fait cela. Ils nous l'ont dit abondamment.

M. le Président, le chef du gouvernement actuel, qui était chef de l'opposition, le 7 avril 2003, a écrit et il a dit: Un, je peux vous assurer que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale sera respectée. C'est la moindre des choses, il avait voté pour, on avait voté à l'unanimité. Ça, je pense que c'était élémentaire. Et il conclut: «Nos engagements prévoient déjà l'adoption de certaines mesures urgentes dont la gratuité des médicaments pour les personnes âgées recevant le supplément du revenu et les personnes assistées sociales ? on l'attend toujours ? l'indexation des prestations de dernier recours, l'établissement d'un seuil minimal de prestation», ce qu'on appelle le barème plancher. Et voilà, ils promettent un investissement de 850 millions sur cinq ans.

Pour plusieurs de ces mesures, M. le Président, on attend encore. Et on sent... on ne fait pas juste sentir, M. le Président, le ministre l'a dit lui-même, l'indexation, ça va attendre, quand on va pouvoir, quand on va vouloir, on ne sait pas quand, ça va attendre. Et c'est ça qui est profondément dérangeant dans ce dossier-là, M. le Président. L'Assemblée nationale a été interpellée, d'ailleurs ce n'est pas arrivé d'un coup de baguette magique, elle a été interpellée parce qu'il y a eu un mouvement de fond ? et d'ailleurs il y a des gens qui suivent ces travaux dans les tribunes, c'est assez rare que des gens soient avec nous à cette heure-ci, c'est la preuve de la profondeur de ce mouvement ? il y a eu une démarche de fond, pendant deux ou trois ans, sur cette question de la présence de la pauvreté au Québec considérant les ressources que nous avons au Québec. Ils ont voulu provoquer, choquer, faire en sorte qu'il y ait des changements, et, quand je dis «choquer», ce n'est absolument pas péjoratif, mais bousculer, oui, bousculer pour faire en sorte qu'il y ait des changements. Ils ont fait en sorte que les élus ont été saisis de ça.

n(23 h 50)n

Et j'entendais, ce soir, la députée de Papineau raconter l'expérience qu'elle a vécue, il y a quelques jours, à l'Assemblée nationale, où les députés étaient amenés à faire un exercice très concret: Qu'est-ce que vous faites avec un budget de tant de centaines de dollars par mois? Et évidemment il y a bien des députés qui ont été mal pris, à faire cet exercice-là, parce que ça témoigne de la difficulté de vivre avec si peu de sous.

Alors, je disais donc que le Québec s'est fait brasser la cage, a été profondément interpellé. Il s'est dit, par l'entremise de ses élus: Ça va faire, on est capables de faire quelque chose, a adopté unanimement... Ça arrive qu'il y ait des lois adoptées unanimement à l'Assemblée nationale, mais ça n'arrive pas si souvent, et il faut le souligner lorsque ça arrive, c'est parce qu'il y a une espèce de consensus profond qui est installé. Alors, unanimement, nous adoptons la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Changement de gouvernement ? ça, c'est notre vie démocratique: engagements, engagements in extremis du chef du Parti libéral et qui est maintenant chef du gouvernement. Et là maintenant on a ce projet de loi n° 57. Non seulement on a ce projet de loi n° 57, qui crée une dérive par rapport à cette loi contre l'exclusion et la pauvreté que nous avons adoptée ensemble, non seulement cette loi est une dérive, mais en plus on assiste à un discours où les députés et les ministres du Parti libéral nous reprochent de ne pas avoir fait ceci ou cela. Et le député de Vachon l'a bien illustré, ces derniers jours. Écoutez, là, si les députés et les ministres du Parti libéral n'étaient pas d'accord avec ce qu'on a fait, et ils nous l'ont signifié à certains moments, pourquoi ne font-ils pas mieux, s'ils croient que nous sommes autant fautifs? Alors, ça, là, ça crée une distorsion dans le débat.

Et j'ajouterais en plus que l'autre problème qui se pose, c'est la manière dont le ministre responsable de ce projet de loi se comporte également. Nous avons un ministre qui badine énormément avec ces questions, et ça devient presque choquant. Et, je peux vous dire, moi, j'ai assisté, pas toujours physiquement, aux consultations, et elles ont été nombreuses, sur le projet de loi ? vous savez qu'on a accès à toute l'information ? et j'ai été étonnée du comportement du ministre, qui se prétend être un grand défenseur de certaines valeurs et qui dans les faits a transformé des questions difficiles à résoudre en des enjeux partisans. Et je ne qualifierai pas la hauteur de cette partisanerie. Et ça, ça ajoute également à ce malaise autour de ce projet de loi. Alors, ça, je tenais aussi à le dire. Et je crois que ça explique en partie les réactions extrêmement négatives autour de ce projet de loi.

Alors, toujours est-il, où en sommes-nous aujourd'hui? Nous avions un cadre adopté unanimement. Nous nous étions lancé le défi de faire quelque chose de mieux pour lutter contre la pauvreté. Le Québec est un coin du monde qui a des richesses extraordinaires, et c'est tout à fait vrai. Et, moi, je le vois, comme bien de mes collègues, dans l'est de Montréal, où il y a le plus grand nombre de personnes qui vivent seules, sur le territoire de Montréal, c'est dans l'est de Montréal, dans mon comté entre autres, des gens qui vivent seuls, à faibles revenus, des familles à bas revenus, pas beaucoup scolarisées, donc de moins bonne chances d'avoir des emplois qui soient plus payants. Alors, je suis heureuse, comme parlementaire, que nous nous soyons donné cet outil, cette vision de l'avenir quant à la lutte à la pauvreté, que nous nous soyons donné des moyens, qu'on n'ait pas baissé les bras puis qu'on se soit dit: Comme élus, ça vaut la peine de s'y attaquer, ça vaut la peine d'examiner comment un gouvernement travaille, comment ses programmes sont déployés, comment on mesure les choses.

Alors, nous avions ça, et un des premiers gestes qui a été posé, M. le Président, par le gouvernement, c'est d'enlever certains de ces outils qui avaient été prévus. Et j'ai entendu des gens aujourd'hui rappeler qu'une des premières décisions du gouvernement libéral, ça a été d'abolir cette idée de l'Observatoire sur la pauvreté. Ça a l'air bien technique. C'est quoi, l'idée de faire un observatoire sur la pauvreté quand on veut lutter contre la pauvreté? Bien, les gens, ce qu'ils nous ont dit, là, lorsqu'est arrivé ce grand mouvement de fond, hein, où ils ont interpellé la société québécoise et les élus, ils nous ont dit: Il nous faut des instruments de mesure, il faut savoir de quoi on parle, il faut être capables de comparer les choses, il faut être capables aussi de mesurer les succès, ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas. Il faut être capables de challenger également les chiffres habituels qu'on peut voir sortir des différents ministères. Mais une des premières décisions, c'est de ne pas mettre en vigueur cet Observatoire sur la pauvreté. C'est un très mauvais signal, M. le Président.

Alors, là, le gouvernement s'est mis en place, le ministre a posé certains gestes et, parmi ces gestes bien, des coupures, des coupures. Ça fait partie des premiers gestes qui ont été faits par le ministre responsable et par le gouvernement, des coupures importantes dans certains types de prestations, des coupures importantes également dans les budgets d'Emploi-Québec. Et là je me permets d'en parler quelques instants parce que j'ai été ministre responsable d'Emploi-Québec, une organisation qui a dû prendre des moyens très costauds pour pouvoir bien répondre aux besoins des gens qui sont en recherche d'emploi.

Bien, parmi les premiers gestes de la part du ministre, qui m'avait à l'époque souvent questionnée ? toujours avec son petit ton et son badinage en plus ? souvent questionnée sur qu'est-ce qui se passait avec Emploi-Québec, eh bien, parmi les premiers gestes qu'il pose, c'est de couper dans ces services à l'emploi, ces services à l'emploi qui sont destinés en général à des gens qui ont de la misère à se trouver de l'emploi. Les gens qui n'ont pas de misère à se trouver de l'emploi, c'est des chasseurs de tête qui les aident à se trouver de l'emploi. Mais les gens, là, qui ont moins de scolarité, qui étaient dans des jobs précaires, qui étaient dans des jobs où les conditions étaient plus vulnérables, c'est ces gens-là qui ont besoin d'un peu plus d'aide pour se trouver un emploi. Bien, une des premières décisions que le ministre a prises à ce moment-là, ça a été de couper dans ces services à l'emploi. Très, très, très mauvais signal.

Et l'autre signal également que ce gouvernement donne et qui crée ce sentiment de profond malaise autour de ce projet de loi... Et je ne veux pas utiliser de mot antiparlementaire, mais il y a un contraste tellement, tellement fort entre cette lettre que j'ai ici du chef de l'opposition...

M. Dupuis: M. le Président...

Mme Lemieux: Quel est le problème?

M. Dupuis: L'article 32 du règlement, M. le Président, pourriez-vous le faire respecter?

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui. Bien, l'article 32 du règlement, à ce moment-ci, indique que les collègues parlementaires doivent être à leurs sièges. Et ça s'adresse à tous les collègues de cette Assemblée. Ils doivent occuper leurs sièges, y compris le vôtre.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant. Alors, dès que tous les collègues sont à leurs sièges, nous allons poursuivre pour...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! S'il vous plaît, pour une minute, il nous reste une minute de séance et il vous reste quatre minutes pour votre intervention. Alors, pour la minute de séance.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je n'ai aucune idée de ce que vous venez de dire, là, mais ça devrait aller.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je viens de dire qu'il ne reste maintenant plus qu'une minute avant d'ajourner nos travaux à lundi. C'est juste ça que je viens de dire.

Mme Lemieux: D'accord. Alors, M. le Président, bien je termine en disant... Je viens de comprendre qu'il fallait que je termine, là.

Le Vice-Président (M. Gendron): Vous, si vous voulez, vous avez du temps, je l'ai dit tantôt.

Mme Lemieux: Ah oui, d'accord.

Le Vice-Président (M. Gendron): Gardez votre temps. Il vous reste trois minutes. Mais il ne reste que 40 secondes avant de terminer.

Mme Lemieux: On va arrêter de s'expliquer là-dessus et je vais les utiliser. Alors, M. le Président, je termine sur cette question de contraste. Nous avons unanimement adopté une loi qui vise à lutter contre la pauvreté. Nous avons un chef de gouvernement... un chef d'opposition qui maintenant est chef de gouvernement, qui a pris des engagements. Les premiers gestes posés par ce gouvernement, c'est des coupures, c'est des hausses de tarifs, c'est des coupures à Emploi-Québec. C'est du badinage de la part d'un ministre qui devrait prendre ses responsabilités de manière beaucoup plus sérieuse qu'il ne le fait actuellement. Alors, il est difficile, dans ce contexte de...

Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant! Alors, moi... Un instant, là! Je voulais juste indiquer ? après ça, on verra les décisions ? que, compte tenu de l'heure, moi, je me vois dans l'obligation d'ajourner.

n(minuit)n

À votre temps de parole, il restait deux minutes. Alors, s'il y a consentement de part et d'autre pour le poursuivre, moi, je vais le solliciter. Mais ce n'est pas moi qui décide, c'est à vous à décider. Alors, est-ce que vous voulez terminer ou si on ajourne les travaux? Parce que je ne peux pas... On ajourne les travaux.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, mais elle vient de m'indiquer que le choix de la leader, c'est d'ajourner les travaux. Et, moi, compte tenu de l'heure, je ne peux pas faire autrement. Alors, compte tenu de l'heure et de la motion adoptée ce matin en vertu du deuxième alinéa...

Des voix: ...

Ajournement

Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Les travaux de cette Assemblée sont ajournés à lundi, 6 décembre, 10 heures.

(Fin de la séance à 0 h 1)