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Version finale

38th Legislature, 1st Session
(May 8, 2007 au November 5, 2008)

Wednesday, May 28, 2008 - Vol. 40 N° 89

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures cinq minutes)

Le Président: Alors, bonne journée, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Alors, mes chers collègues, en votre nom, je voudrais souhaiter un bon anniversaire, aujourd'hui, à M. le député de Rimouski.

Affaires courantes

Aux affaires courantes, aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre de la Justice et ministre de la Sécurité publique.

Entente concernant la continuation des
contributions pour la prestation de services
policiers sur certains territoires autochtones

M. Dupuis: Alors, M. le Président, permettez-moi de déposer une entente concernant la continuation des contributions pour la prestation de services policiers par les premières nations cries entre le Grand Conseil des Cris, l'Administration régionale crie, le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le ministre des Ressources naturelles et de la Faune.

Rapport annuel de la Société de
développement de la Baie-James

M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 2007 de la Société de développement de la Baie-James.

Le Président: Ce document est déposé.

Dépôt de rapports de commissions

Dépôt de rapports de commissions. Mme la présidente de la Commission des institutions et députée d'Anjou.

Élection du vice-président de la
Commission des institutions

Mme Thériault: Merci, M. le Président. M. le Président, je dépose le rapport de la Commission des institutions qui a siégé le 27 mai 2008 afin de procéder à l'élection de la vice-présidence de la commission.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé. M. le président de la Commission des affaires sociales et député de Jacques-Cartier.

Examen des orientations, des activités et de la
gestion de la Corporation d'urgences-santé

M. Kelley: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la Commission des affaires sociales qui a siégé le 21 mai 2008 afin de procéder à l'examen des orientations, des activités et de la gestion de la Corporation d'urgences-santé dans le cadre d'un mandat de surveillance d'organisme, conformément à l'article 294 du règlement de l'Assemblée.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le vice-président de la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et député de Beauce-Nord.

Étude détaillée du projet de loi n° 72

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, je dépose le rapport de la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui a siégé les 20 et 27 mai 2008 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 72, Loi sur la protection sanitaire des cultures. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Il n'y a pas de dépôt de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle en question principale.

Proposition de modification constitutionnelle
en matière de multiculturalisme

M. Mario Dumont

M. Dumont: M. le Président, ce qu'on appelle généralement les demandes traditionnelles du Québec, c'est-à-dire la somme des revendications des Québécois, des gouvernements du Québec qui se sont succédé, au-delà du parti, c'est ce qui s'est construit au fil des événements, au fil du vécu de notre société, des grands moments. Et il m'apparaît qu'au lendemain de la commission Bouchard-Taylor mais de toutes les réflexions de la société québécoise autour de ça et de la reconnaissance aussi du Québec comme nation par le Parlement fédéral il y a un contexte pour bien inscrire que le multiculturalisme canadien, pour le Québec, ce n'est pas la bonne politique, ce n'est pas la bonne approche. Hier, j'ai questionné le premier ministre parce que je l'avais écouté à l'entrevue avec Bernard Derome. Je vais vous dire, après la période des questions, là, j'étais un peu inquiet et déstabilisé, à tel point que je suis allé réécouter l'entrevue pour être bien sûr que ce n'était pas mon ouïe qui faisait défaut. Et, oui, la semaine passée, jeudi soir passé, à Bernard Derome, le premier ministre avait été très clair, il avait dit: «Le multiculturalisme, ce n'est pas applicable au Québec.» Je ne m'étais pas trompé hier.

Je lui repose donc la même question. Nous, on s'était présentés ici, l'opposition officielle, pour lui donner notre appui, pour en faire une demande et une position formelle du Québec et de l'Assemblée nationale. Pourquoi ne répète-t-il pas, à l'Assemblée nationale, cette position et pourquoi on n'en fait pas ici, à l'Assemblée, une demande formelle du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, je prends acte, comme vous le faites, M. le Président, de l'obsession constitutionnelle du chef de l'opposition officielle. À chaque fois qu'il se présente un problème, il veut faire de la constitution. À chaque fois qu'il y a un enjeu, que ce soit TQS ou le CRTC... Et là-dessus, bien, l'opposition, ils sont unis, ils sont... À chaque fois qu'il se présente une question, que ce soit de l'immigration... il faudrait faire de la constitution, alors que les Québécois sont à la recherche de...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, M. le député de Vanier! M. le premier ministre.

M. Charest: Alors, l'ADQ, ils sont toujours à la recherche ou obsédés par cette question-là. D'ailleurs, il faut prendre acte du fait que, depuis 2003 et suite à la politique qu'on avait énoncée en 2001, on a fait des gains très importants pour le Québec, que ce soit dans le dossier du déséquilibre fiscal, la reconnaissance du Québec comme nation, l'entente du Québec pour la participation à la délégation canadienne de l'UNESCO, que le chef de l'opposition a lui-même applaudie, a même reconnu que c'était un gain important, et la reconnaissance du rôle du Québec à l'international, le fédéralisme asymétrique, le rapatriement du régime d'assurance parentale, qui a eu un effet concret dans la vie des familles québécoises. Ça, c'est des gestes qu'on a posés, nous, qui ont un effet concret.

Mais ce n'est pas vrai qu'à chaque fois qu'il se présente un problème il faut faire de la constitution. Mais là-dessus je constate que l'ADQ est exactement sur la même longueur d'onde que le PQ et même le Bloc. Aujourd'hui, les médias nous apprenaient que l'ADQ et le Bloc voient les choses du même oeil, M. le Président. On peut donc en conclure que la fusion des oppositions est maintenant complète.

n (10 h 10) n

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Mario Dumont

M. Dumont: M. le Président, on est obligés d'être amusés par la situation parce que, nous, l'opposition officielle, on s'est présentés ici pour être d'accord avec le premier ministre, avec ses déclarations. C'est juste qu'en cours de semaine on s'est rendu compte que, hein, la plante fléchissait puis qu'on aurait peut-être besoin de la renchausser, hein, de le renchausser et de le renforcer un peu dans ses positions.

Mais ma question: Est-ce que, le M. le premier ministre, son changement d'idée durant la fin de semaine ne vient pas du fait qu'il a repensé à ça, entre samedi puis dimanche, que lui avait voté pour la Loi sur le multiculturalisme en 1988?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, dans sa première question, le chef de l'opposition disait qu'il était allé vérifier si son ouïe l'avait trompé. Le oui, ça, il connaît ça. En 1995, il était tout oui justement avec on sait qui, là, avec le Bloc puis avec le PQ. Et, là-dessus d'ailleurs, il n'a pas beaucoup de leçons à donner à quiconque. Rappelons-nous le discours qu'il est allé livrer, en 2003, à Toronto, M. le Président, le discours du tapis, le discours où il est allé dire au reste du Canada officiellement que, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: Question de règlement, M. le...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Question de règlement, M. le leader?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, à l'ordre!

M. Proulx: Oui, M. le Président. Toujours en fonction de l'article 79 et à la lumière de la déclaration que vous avez faite hier, vous avez demandé aux parlementaires de s'en tenir aux questions qui étaient posées. Vous avez demandé une interprétation stricte du règlement. Alors, je vous demande de la tenir aujourd'hui. Ce qu'a fait le premier ministre du Québec, c'est de s'éloigner volontairement de la question qui portait sur le multiculturalisme, c'est de porter des intentions et c'est surtout noyer un débat dans lequel c'est lui qui a de l'air fou.

Le Président: Sur la question de règlement.

M. Fournier: Et, sur la décision que vous avez rendue, vous avez demandé aux parlementaires, notamment au leader de l'opposition, de cesser de se lever à chaque fois pour faire perdre du temps de la période de questions qui est enlevé à l'opposition et de laisser les parlementaires assumer leurs réponses. Nous allons compléter la réponse, et le leader en sera très satisfait.

Le Président: Alors, M. le premier ministre, si vous voulez vous rappeler de la question et toucher la question...

M. Charest: Je ne changerai pas... Je ne changerai pas un iota, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande, M. le premier ministre, de vous rapporter à la question qui a été posée.

M. Charest: Et je dis...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! C'est ma décision, M. le leader. Je demande au premier ministre...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre! Non, je m'excuse.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, je vous demande de vous rattacher à la question qui a été posée tout simplement.

M. Fournier: Et nous comprenons bien. Comme, en tout temps, c'est ce que nous faisons, nous allons poursuivre comme vous le faites, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Alors, je vous demande de poursuivre en vous rattachant à la question. C'est ça.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charest: Et, M. le Président, je ne changerai pas un mot, un iota de la réponse que je viens de lui donner, malgré le fait que le leader de l'opposition se sente obligé de venir à la rescousse de son chef, M. le Président. Parce qu'en 2003... en 2003...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Dernière question complémentaire. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. On comprend tous que le premier ministre, dès qu'on parle de questions qui impliquent le courage de toucher les choses fondamentales, notamment les choses constitutionnelles, il vient sur la défensive, parce que la seule fois qu'il a touché à ça, hein, le rapport, au début des années quatre-vingt-dix, qui portait son nom, ça a été un fiasco. Nous, ce qu'on lui offre, là, c'est l'occasion de réparer ça, de toucher à quelque chose qui va être fondamental pour l'avenir du Québec et d'inscrire, par la voix de l'Assemblée nationale, une demande importante pour le Québec, que le Québec soit reconnu comme société d'accueil en dehors du...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: En 2003, M. le Président, tous les Québécois se rappelleront que le chef de l'ADQ est le seul chef d'un parti politique québécois, dans l'histoire ? on m'en nommera un autre ? le seul de l'histoire du Québec qui est allé à Toronto dire au reste du Canada: On ne demande rien, on ne vous dérangera pas, qui est allé faire de l'aplaventrisme devant le reste du Canada, M. le Président. Et, aujourd'hui, à chaque fois qu'il se présente un problème, il faut que les Québécois le sachent, là, clairement, ce que le chef de l'ADQ demande, c'est de repartir la machine constitutionnelle avec tout ce que ça implique, incluant un référendum, incluant tous les débats, alors que, nous, on va mettre en place des solutions concrètes aux problèmes qui se posent dans la société québécoise.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Charlesbourg.

Ligne téléphonique d'information
sur les pratiques d'accommodement
reliées aux différences culturelles

Mme Catherine Morissette

Mme Morissette: Merci, M. le Président. La semaine dernière, j'ai posé des questions au gouvernement sur les suites qu'il entendait donner au rapport Bouchard-Taylor. C'est la ministre de l'Immigration qui s'est levée, mais elle n'a pas répondu à mes questions. Je n'ai pas eu plus de réponse, hier, de la part du ministre de la Justice lorsque j'ai questionné le gouvernement à propos de la création de la ligne 1 800. J'ai pourtant soumis deux cas simples et précis des situations qui pourraient se poser à tous les jours. Il y a une chose par contre que le ministre de la Justice a dite, c'est que ce n'était pas compliqué.

Alors, puisque ce n'est pas compliqué, est-ce qu'il y a un des deux ministres, peu importe lequel, qui peut nous dire, aujourd'hui, qu'est-ce qu'un parent va avoir comme réponse s'il utilise la ligne 1 800 afin de questionner à propos de l'enseignante de son enfant qui porte le hidjab?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Bien, j'avoue qu'aujourd'hui, M. le Président, le sujet semble être le même. Elle ne nous a pas parlé cependant des zoroastriens. Il va falloir qu'elle nous explique ce qu'elle entend par «zoroastriens». Ce que nous disons...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. M. le ministre de la Justice.

M. Dupuis: M. le Président, je pense que, dans ce débat-là, là, plutôt que de chercher, comme je l'ai dit hier et comme un caricaturiste l'a indiqué en fin de semaine, à chercher des allumettes, de ce côté-là de la Chambre, pour rallumer un incendie qui est éteint, il faut se poser les questions fondamentales et sérieuses. La première, la première des choses qui est importante à dire: Les Québécois souhaitent, veulent et exigent que leurs valeurs fondamentales soient respectées par tous les gens qui se joignent à notre société.

Quand on parle de l'immigration, M. le Président, ça veut dire quoi? Ça veut dire que les immigrants ont le devoir de s'intégrer. Ça veut dire que la responsabilité de la société québécoise, c'est de leur donner les moyens de s'intégrer. On le fait comment? On le fait, M. le Président, par le biais de la langue française, c'est clair, et on le fait aussi...

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Charlesbourg.

Mme Catherine Morissette

Mme Morissette: Oui. Merci, M. le Président. Écoutez, c'est le ministre de la Justice lui-même qui disait, hier, que ce n'était pas compliqué. Si on n'est pas capables d'avoir une réponse à un cas d'espèce précis aujourd'hui, moi, je suis très inquiète parce que cette ligne 1 800 là va être en fonction d'ici la fin du mois. Peut-être que ce cas-ci était trop compliqué, je peux essayer de lui en poser un autre.

Qu'est-ce qu'un employeur va se faire répondre lorsqu'il va appeler pour prendre des informations sur un congé religieux qu'il se fait demander par un de ses travailleurs... Puis, je m'excuse, on prend la question très au sérieux, j'aimerais...

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Toutes les personnes...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! À l'ordre! Vous m'avez vu? J'ai regardé de ce côté-là, M. le leader. M. le ministre de la Justice.

M. Dupuis: Toutes les...

Le Président: Vous avez des bons yeux. Je vous connais, vous avez des bons yeux. M. le ministre de la Justice.

M. Dupuis: Toutes les personnes...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre de la Justice.

n (10 h 20) n

M. Dupuis: Toutes les personnes qui sont bien intentionnées dans ce dossier-là, comme c'est le cas de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, comprendront que ces questions-là sont beaucoup plus sérieuses que ce que l'ADQ veut en faire aujourd'hui, en Chambre. Je ne tomberai pas...

Une voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le député de Terrebonne, premier rappel. M. le ministre de la Justice.

M. Dupuis: On ne tombera pas dans le piège qui nous est tendu par les députés de l'ADQ, M. le Président, sur ces questions-là. Je complète la réponse précédente en disant que, oui, il faut intégrer, il faut que nous... Nous, on a, comme société québécoise, la responsabilité de fournir les moyens pour que ces gens-là, les immigrants, puissent s'intégrer à la société québécoise: premièrement bien sûr la langue française; deuxièmement, le travail. Et il est injuste à l'égard...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! En question principale, Mme la chef du deuxième groupe d'opposition.

Affirmation des valeurs
fondamentales du Québec

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Hier et il y a quelques minutes encore, le ministre de la Justice, gardien de la Charte des droits et libertés, a indiqué que, par la ligne 1 800 accommodements, on donnerait des conseils en matière d'accommodements raisonnables, en fonction de la charte, ça va de soi, mais également, et là, je cite le ministre, il dit ceci, «en fonction [...] des valeurs fondamentales que la société québécoise veut voir [respecter] par tout le monde». Fin de la citation.

Le problème, M. le Président, c'est que les valeurs dont parle le ministre de la Justice de même que celles que le premier ministre a mis dans les journaux en fin de semaine, elles ne se retrouvent pas dans la Charte des droits et libertés. Par le projet de loi n° 63 d'ailleurs, nous allons inclure dans cette charte l'égalité hommes-femmes, et il va de soi que nous appuyons cette idée, M. le Président. Mais...

Des voix: ...

Le Président: Mme la chef du deuxième groupe d'opposition.

Mme Marois: Alors, je voudrais recevoir les mêmes applaudissements, M. le Président, en demandant au ministre de la Justice: Pourquoi refuser d'inclure aussi deux autres valeurs dont parle le premier ministre, soit la prédominance du français et la laïcité de l'État, M. le Président? Pourquoi enchâsser une des deux valeurs, une et pas les deux autres, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, d'abord, il faut accueillir comme étant une très bonne nouvelle, M. le Président, le fait que la deuxième chef de l'opposition annonce aujourd'hui... la deuxième chef de l'opposition. C'est une seule opposition, elle est fusionnée.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre! M. le premier ministre.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Question de règlement, M. le leader de l'opposition.

M. Gendron: Le premier ministre, ce matin, s'amuse, là, mais, à ce que je sache, le décorum de l'Assemblée nationale n'a pas changé, là. Il y a un bout, là. Ça fait deux fois que délibérément il dit: Moi, vous ferez ce que vous voudrez, M. le Président, je m'en fous, c'est moi qui mène. Ça fait deux fois qu'il vous dit ça, là. Ça fait deux fois qu'il vous indique que, lui, les règles de l'Assemblée nationale, il ne veut rien savoir. Alors, il y a un bout, là, il faut se faire respecter un peu. Alors, je demanderais au premier ministre d'être plus...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Un instant! Un instant! La parole est au leader, puis je voudrais l'écouter, s'il vous plaît.

M. Gendron: C'est exactement ce qui est arrivé. Il vient d'affirmer quelque chose qui est viscéralement contraire au règlement, contraire à la responsabilité de celle qui a posé correctement une question. Il me semble que ça mériterait un peu de décorum, dans cette Assemblée, de la part du premier ministre.

Le Président: Sur la question de règlement.

M. Fournier: Premièrement, le leader de l'opposition met des mots dans la bouche du premier ministre qu'il n'a pas prononcés. Premièrement...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous ne devez pas entreprendre un débat sur une question de règlement. Monsieur, sur la question de règlement.

M. Fournier: Premièrement. Deuxièmement, lorsqu'on regarde l'ensemble de l'évolution de ce qui se passe dans ce Parlement, que nous voulions un Parlement de cohabitation, force est d'admettre que les oppositions font de l'obstruction, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demanderais... Je vous ai rappelé, hier, au décorum. Je vous demanderais un grand décorum dans cette Assemblée. C'est l'institution que nous représentons, et je vous demande votre collaboration à vous tous. M. le premier ministre.

M. Charest: Je constate, M. le Président, que l'opposition dit la même chose. Non seulement ici, à l'Assemblée, mais il y a même la Sainte-Trinité du Bloc québécois, l'ADQ puis le PQ qui disent exactement la même chose. Alors, s'ils disent exactement la même chose, c'est donc qu'ils sont exactement du même côté. Alors, on le constate, ils défendent les mêmes idées, font le même combat, alors que, sur cette question d'abord de l'égalité des femmes et des hommes, c'est un moment important. Je prends acte et je me réjouis du fait que justement la députée de l'opposition qui parle au nom du Parti québécois dit, aujourd'hui, qu'elle va appuyer le projet de loi. Il y a là-dessus un consensus puis une longue démarche qui a été faite. On a fait une commission parlementaire, on a entendu plusieurs personnes qui sont venues témoigner justement de ce qu'on a proposé. Il y a unanimité là-dessus, et, quand, dans un Parlement, il y a unanimité sur une mesure, on procède. D'autant plus que nous le faisons pour les femmes du Québec et pour affirmer une valeur incontournable de la société québécoise.

Le Président: En question complémentaire, Mme la chef du deuxième groupe d'opposition.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, le premier ministre n'a pas répondu à ma question, et vous le savez très bien. Au contraire, il a pris mon affirmation. Et j'imagine que jamais je ne puisse penser qu'il a eu un doute sur le fait qu'on n'appuierait pas cette loi et que je ne l'appuierais pas.

La question, elle est simple: Il y a deux autres valeurs auxquelles on fait référence, il s'agit de la prédominance de la langue française et de la laïcité de l'État, pourquoi ne veut-il pas les inclure dans la Charte des droits et libertés de la personne? M. le Président, c'est ça...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: La question qu'on se pose est la suivante: Est-ce que la députée de l'opposition, comme toutes les oppositions, est en train de négocier le droit des femmes? Est-ce qu'elle fait le...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre, vous savez très bien qu'il faut appeler chaque député par leur titre. Alors, c'est Mme la chef du deuxième groupe d'opposition. C'est sa fonction.

M. Charest: Est-ce qu'aujourd'hui elle est en train, M. le Président, de négocier le droit des femmes contre autre chose? C'est ça, la question qu'on lui pose. Est-ce que, oui ou non, elle dit que son appui envers les femmes du Québec est...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le premier ministre, si vous voulez poursuivre.

M. Charest: Alors, j'étais pour finir ma question: Est-ce qu'elle est en train de nous dire qu'elle négocie justement...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Charest: Alors, il faut clarifier ça: Est-ce qu'elle est en train de nous dire qu'elle négocie les droits des femmes contre autre chose? Si la réponse, c'est oui, qu'elle nous le dise. Si la réponse, c'est non, qu'elle le dise à l'Assemblée pour que les femmes du Québec sachent à quoi s'en tenir.

Le Président: En question principale, Mme la chef du deuxième groupe d'opposition.

Pertinence d'inscrire certaines
valeurs fondamentales dans la Charte
des droits et libertés de la personne

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, ce serait bien mal me connaître que de penser que je puisse négocier l'égalité entre les hommes et les femmes et négocier quoi que ce soit sur ce principe. Il me semble que mon passé à cet égard est exemplaire.

Cependant, je veux savoir si le premier ministre est sincère dans la publicité qu'il a fait paraître dernièrement, pleine page, dans tous les journaux: Voilà quelles sont les valeurs québécoises sur lesquelles nous nous appuierons pour interpréter les accommodements raisonnables. Il y en a deux que nous voulons inclure dans la loi, c'est la prédominance du français, la laïcité de l'État. Est-ce qu'il peut me dire s'il est sincère lorsqu'il appuie ces valeurs, lorsqu'il nous fait un grand discours ici, à l'Assemblée nationale? Si c'est le cas, qu'il les inclue, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, on doit tenir compte de ce que le Parti québécois a proposé, M. le Président. Et ce qui a été proposé à l'Assemblée, c'est un projet de loi qui a été rejeté par un très grand nombre de Québécois qui voient là-dedans une source de division inacceptable et de catégorisation...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! La question a été posée correctement dans l'ordre. Je voudrais le même ordre pour la réponse. S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Charest: Et une source de division très profonde de la société québécoise, une division de la citoyenneté que nous n'acceptons pas. D'ailleurs, on n'est pas les seuls. Au moment où elle a présenté son projet de loi là-dessus, Bernard Landry, son prédécesseur, un de ses prédécesseurs disait: «Il y a [...] un problème, [affirme] Bernard Landry, dans une entrevue accordée [au journal] La Presse [...] au sujet du projet de loi...» Alors, qu'elle ne s'étonne pas que sa proposition soit aussi mal reçue.

n(10 h 30)n

Le Président: En question complémentaire, Mme la chef du deuxième groupe d'opposition.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, vous aurez constaté, vous comme moi, hein, qu'il n'a pas répondu à la question, absolument pas. Et, M. le Président, la question, elle est tellement simple, elle ne divise personne, à moins qu'il me dise que les valeurs qu'il souhaite que nous adoptions divisent les gens. Or, deux valeurs que nous souhaiterions inclure dans la Charte des droits et libertés de la personne: la prédominance du français, M. le Président, et la reconnaissance de la laïcité de l'État. Il me semble que c'est d'une simplicité enfantine, M. le Président. Et je mets en doute...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Il faut que les gens sachent de quoi il s'agit. On a déposé un projet de loi, on a fait des consultations, on a fait des consultations détaillées. Tous les parlementaires ont eu l'occasion de participer aux consultations. On est rendus à l'étape où on est capables de livrer un projet de loi qui va affirmer l'égalité entre les femmes et les hommes. Et ce que vous proposez...

Une voix: ...

Le Président: Question de règlement. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Gendron: La chose qui vient d'être dite a, quoi, quelque rapport que ce soit avec la question...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le leader, si vous voulez vous asseoir.

S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Quelle est votre question de règlement, M. le leader?

M. Gendron: Ma question de règlement, M. le Président, elle est...

Le Président: ...

M. Gendron: ...elle est très claire. Nous rappeler qu'il y a eu une commission sur ce qui va être débattu, on le sait, on était ici, on est membres du même Parlement. La question...

Le Président: S'il vous plaît. Écoutez, écoutez, M. le leader du deuxième groupe d'opposition, le premier ministre a commencé à répondre, j'attends qu'il continue. Il a 45 secondes, il reste 24 secondes. M. le premier ministre, à la question.

M. Charest: Alors, merci. Alors, j'étais en train de dire, au bénéfice de tous les Québécois qui nous écoutent aujourd'hui, qu'on a déposé un projet de loi, on a fait des consultations, tous les parlementaires ont participé aux consultations sur le principe de l'égalité entre les femmes et les hommes. C'est de ça dont il s'agit et c'est ce projet de loi là que j'invite l'Assemblée nationale du Québec à adopter, parce que c'est à portée de main, on peut le faire dès maintenant...

Le Président: En question principale, M. le leader de l'opposition officielle.

Lutte contre le décrochage scolaire

M. Sébastien Proulx

M. Proulx: Oui, M. le Président. Hier, j'avais l'occasion d'interpeller la ministre de l'Éducation sur son inaction et celle de ses prédécesseurs. J'ai fait référence à quatre ministres de l'Éducation libéraux dans les 15 dernières années. Et la ministre de l'Éducation actuelle, sur le décrochage scolaire, M. le Président, elle est dans la grande tradition libérale: beaucoup de préoccupations mais peu d'actions concrètes qui vont amener des changements significatifs. Ça, c'est de tradition chez les libéraux, M. le Président, et c'est présent.

Le palmarès qui a été mis de l'avant puis que les gens, aujourd'hui, ont l'occasion de consulter, c'est dans le fond le bulletin de la ministre, c'est le bulletin du ministère et du gouvernement. Et ça, pas besoin de faire une grande discussion sur les compétences, là, c'est échec, M. le Président.

Et ce qu'on veut savoir aujourd'hui de la ministre: À la lumière de son bulletin, il y a des parents, qui ont des enfants de sixième année aujourd'hui, qui savent que, l'année prochaine, c'est l'école Pierre-Dupuy qui est la destination de leurs enfants, avec 84,3 % de décrochage. Qu'est-ce qu'elle leur dit, à ces parents-là?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, je répète en cette Chambre que la question du décrochage scolaire au Québec est effectivement une question très sérieuse, sauf que le député, M. le Président, fait erreur quand il laisse sous-entendre que cette... Particulièrement lorsqu'il parle de l'école Pierre-Dupuy ? je pense qu'il prend l'exemple à escient ? si on parle de l'école Pierre-Dupuy, il faut bien comprendre et accepter qu'il s'agit là d'un phénomène, d'une situation qui déborde largement le cadre de l'école.

M. le Président, c'est évident qu'en collaboration avec la commission scolaire de Montréal... je peux nommer Pierre-Dupuy, je peux nommer Lucien-Pagé, je peux nommer Jeanne-Mance, l'école Jeanne-Mance, pour lesquelles actuellement il y a beaucoup de travaux qui se font pour travailler avec l'ensemble des intervenants sociaux, les parents bien sûr au premier chef, mais il faut comprendre que, dans ce milieu, il est parfois très difficile même de rejoindre les parents. Et c'est un phénomène qui est sérieux, qui est grave, qui demande la mobilisation de tous: l'école, les services sociaux, la famille, les intervenants, M. le Président. Et je peux vous assurer, tant à la commission scolaire de Montréal qu'au ministère de l'Éducation...

Le Président: En question complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx: Oui, M. le Président. Force est de constater que la ministre se plaît dans la complexité. Elle se plaît à en ajouter, de la complexité. Quatre ministres, 15 ans, quatre fois des préoccupations, M. le Président: aucune mesure concrète. Il n'y a pas longtemps, le premier ministre du Québec se promenait avec un tee-shirt marqué Briller parmi les meilleurs; à ce moment-là, c'était briller parmi les pas bons, c'est ça qui aurait dû être écrit sur le chandail, parce qu'aujourd'hui c'est honteux de voir ce qu'on fait à l'école, ce qu'on fait à nos enfants, quand 250 000 d'entre eux sur 1 million...

Le Président: S'il vous plaît. Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, j'invite le nouveau critique de l'éducation à l'opposition officielle de faire davantage de devoirs et de leçons. Parce que c'est bien facile de dire qu'il ne se passe rien au Québec, mais il y a des mesures concrètes: 1 800 embauches de personnel spécialisé, d'enseignants-ressources pour justement s'attaquer à ces problèmes-là, M. le Président.

Pourquoi ne parle-t-il pas des exemples du Saguenay?Lac-Saint-Jean? Pourquoi ne parle-t-il pas des exemples du Bas-Saint-Laurent, du Témiscouata? Pourquoi ne parle-t-il pas des histoires à succès? Pourquoi il ne dit pas que 39 % raccrochent, y compris des jeunes de l'école Pierre-Dupuy, raccrochent dans la vingtaine? Et ça, c'est le meilleur pourcentage au Canada, M. le Président. Comme mesures concrètes...

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Plan d'action en matière
de décrochage scolaire

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, M. le Président. Sur cette question du décrochage, j'étais, il y a quelques semaines, à Saint-Hyacinthe, tout de suite après que le journal local ait informé la population du taux de décrochage, en fait informer la population qu'à Saint-Hyacinthe il y a plus d'un garçon sur deux qui décroche, qui ne finira pas son secondaire V, que le taux de décrochage scolaire dans la région est de 41 %. Je prends cet exemple-là, il y a d'autres régions, il y a d'autres communautés du Québec où les gens vivent ça comme une tragédie.

La ministre nous disait hier: Il y a un plan d'action. Écoutez un instant, là, le député de Westmount?Saint-Louis, la députée de Charlevoix, le député de Rousseau, le député de Richelieu, le député d'Orford, le député de Châteauguay, cette cassette-là, il y a toujours un plan d'action, là, qui est soit en action ou en préparation. Je pense que le premier briefing qu'on donne à un nouveau ministre de l'Éducation, c'est: Si on te parle de décrochage, dis qu'il y a un plan d'action.

Est-ce que le premier ministre prend au sérieux cette question et appelle sa ministre à faire ses devoirs?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, je peux vous dire que notre gouvernement et le premier ministre en tête préfèrent davantage de continuer à travailler sur des solutions concrètes et des actions concrètes plutôt que de jouer dans les structures des commissions scolaires puis d'avoir comme seul item à leur programme l'abolition des commissions scolaires, M. le Président. Ça, c'est négatif puis ça démolit. Nous, M. le Président, face à une...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Montmorency, je vous demande votre collaboration. S'il vous plaît! Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Courchesne: Nous, M. le Président, face à une situation complexe qui fait appel à des intervenants de l'ensemble de notre société... Vous me parlez... M. le Président, il nous parle de Saint-Hyacinthe. Bien, bien sûr que les gens de la Montérégie et particulièrement de Saint-Hyacinthe doivent se mobiliser pour ensemble... que nous travaillions ensemble à lutter contre ce phénomène.

Et la pensée magique, la baguette magique, M. le Président, elle n'existe pas. Pourquoi? Parce qu'il y a des problèmes de pauvreté, il y a des problèmes de toxicomanie, il y a des problèmes familiaux sévères, il y a des problèmes de société qui évoluent, malheureusement. Est-ce que c'est acceptable? Non. Quelle est la solution, M. le Président? Certainement pas d'abolir les commissions scolaires. La solution, c'est de se mettre autour des mêmes tables, déployer les actions et les ressources pour qu'on travaille de la bonne façon.

Le Président: En terminant.

Mme Courchesne: Et ça, ça évolue par de la recherche et de l'expertise. Et, M. le Président...

n(10 h 40)n

Le Président: S'il vous plaît. En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Mario Dumont

M. Dumont: La ministre sait très bien comment son gouvernement s'est traîné les pieds, ça a pris cinq ans avant que... non, cinq ans avant qu'on commence à avoir les premiers balbutiements, là, de réparer les pots cassés de la réforme de la députée de Charlevoix, ça a pris cinq ans avant qu'ils s'y attaquent un tant soit peu. Le gouvernement ? c'est de tables de pilotage, en comités, en études ? s'est traîné les pieds. Pour ce qui est de la solution, la solution au problème du décrochage, ce n'est sûrement pas d'ajouter une couche bureaucratique de plus. Partout où les sociétés ont réussi là-dedans, c'est avec des écoles plus autonomes.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, j'invite le chef de l'opposition, en fin de semaine, à faire quelques kilomètres, tout près de chez lui, Squatec. Squatec est un très bel exemple, très bel exemple où les parents, la commission scolaire, le milieu est mobilisé. Regardez le même tableau que le leader, regardez avec la commission scolaire, le taux de décrochage est à zéro. M. le Président, regardons aussi le fait que le taux de diplômation au Québec, il augmente. M. le Président, le problème avec les gens d'en face, c'est qu'on a toujours un seul côté de la médaille. On peut-u regarder le deuxième côté de la médaille? Ça, ils ne le disent pas, par exemple, que, grâce à nos réinvestissements, grâce à notre acharnement, grâce à notre ténacité, on travaille pour la réussite de nos enfants, et le taux de diplômation augmente.

Le Président: En question principale, M. le député de Richelieu.

Contrat attribué à l'Agence
d'investigation et de sécurité DRP inc.

M. Sylvain Simard

M. Simard: M. le Président, dans la foulée de l'histoire entourant la démission de Maxime Bernier, nous avons découvert que le ministère de la Sécurité publique a octroyé, au début 2007, un contrat de 167 000 $ à l'Agence d'investigation et de sécurité DRP, l'entreprise de l'ex-conjoint de Julie Couillard, déjà accusé de recel en 2004 et dont les liens avec le crime organisé sont bien connus. Un contrat, tenez-vous bien, pour la surveillance des détenus hors prison. Alors que M. Pépin avait déjà plaidé coupable à des accusations de recel, était déjà sous enquête par l'Autorité des marchés financiers, alors que La Presse avait révélé ses liens avec le crime organisé...

Des voix: ...

Le Président: Un instant! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre! S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. S'il vous plaît! M. le député de Richelieu.

M. Simard: Alors que M. Pépin avait déjà plaidé à des accusations de recel, comment le ministre de la Sécurité publique peut-il nous expliquer que son ministère ait confié à cette entreprise un contrat pour escorter des détenus à l'extérieur des prisons sans aucune vérification de sécurité?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: J'invite, j'invite le député de Richelieu à se calmer, M. le Président. Je pense qu'on peut poser ces questions-là calmement. Je ne connais pas Mme Couillard, je ne l'ai jamais rencontrée.

Une voix: ...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Montmorency, s'il vous plaît. M. le ministre, s'il vous plaît, à la question. S'il vous plaît.

M. Dupuis: Je veux simplement ajouter, M. le Président, parce que les gens n'ont pas eu le bénéfice d'entendre le ministre de la Santé dire la même chose que ce que j'ai dit: Il ne la connaît pas non plus.

On va vérifier l'information qui m'est donnée par le député de Richelieu, M. le Président. Maintenant, c'est certain que le ministère de la Sécurité publique donne des contrats à l'occasion à des organismes communautaires, comme ça se fait depuis plusieurs années, pour évidemment faire la surveillance des détenus alors qu'ils sont libérés. On va vérifier l'information du député de Richelieu, M. le Président, tout simplement.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: M. le Président, le ministère de la Sécurité publique a octroyé un contrat à une firme dont un représentant a été accusé de recel en 2004, qui a plaidé coupable. Un individu qui était déjà sous enquête par l'Autorité des marchés financiers et dont les liens avec le crime organisé étaient connus.

Comment le ministre peut-il expliquer que des vérifications minimales n'ont pas eu lieu avant d'accorder un tel contrat, qu'on a trouvé dans les crédits du ministère?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Alors, on va faire la recherche, on va faire la recherche qui s'impose, là, un contrat qui est donné en 2004. Maintenant, M. le Président, c'est évident, c'est évident qu'il faut faire des recherches, particulièrement au ministère de la Sécurité publique, lorsqu'on donne des contrats à des gens, pour ne pas donner des contrats à des gens qui ont des dossiers judiciaires. C'est évident. Ça m'apparaît comme étant tout à fait évident. Alors, on va le vérifier, M. le député de Richelieu. On va le vérifier, M. le député de Richelieu, comme vous auriez dû vous-même vérifier les gens à qui vous vous adressiez quand vous étiez vous-même un ministre du gouvernement et que les gens d'Oxygène 9 sont allés vous voir.

Le Président: En question principale, Mme la leader adjointe de l'opposition officielle et députée de Lotbinière.

Négociations avec les leaders
mohawks concernant le
prolongement de l'autoroute 30

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: M. le Président, dans le dossier de l'autoroute 30, autoroute promise depuis plus de 30 ans, on apprend qu'une réunion secrète, convoquée par le ministre de la Sécurité publique, qui a été tenue pour parler des menaces mohawks, qui savait que le ministre du Revenu et député de Châteauguay n'exerçait aucun leadership dans ce dossier, que le ministre des Affaires autochtones est totalement absent... C'est maintenant le ministre de la Sécurité publique qui prend les choses en main, fait des stratégies policières et qui envoie le député de Jacques-Cartier, émissaire du gouvernement, pour négocier avec les Mohawks.

Est-ce que le ministre de la Sécurité publique peut nous dire quel mandat a le député et quels seront les pourparlers avec les chefs mohawks?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, à l'ordre! Mme la ministre des Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, vous savez combien le projet de l'autoroute 30 tient à coeur à notre gouvernement et tout particulièrement au député de Châteauguay. Alors, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. M. le député, M. le whip, je vous demande votre collaboration, ainsi qu'à vos collègues. Mme la ministre des Transports.

Mme Boulet: Alors, M. le Président, c'est un dossier, un projet, au niveau économique, qui va avoir des effets extraordinaires pour l'ensemble de la région de la grande métropole, de doter cette région-là d'une véritable voie de contournement. Donc, pour nous, c'est une priorité. On s'est engagés à y investir des montants importants, c'est ce qu'on fait.

Maintenant, M. le Président, les échéanciers sont toujours maintenus. Donc, pour le tronçon est, on parle de 2010; pour le tronçon ouest, on parle de 2012; et il y a des...

Le Président: Excusez! Je vous demanderais de vous rattacher à la question, Mme la ministre.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande de vous rattacher à la question qui a été posée.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Mme Boulet: M. le Président, le dossier, il est complexe et il comporte plusieurs éléments, et j'arrivais à l'élément. Il y a des discussions actuellement avec les communautés autochtones de Kahnawake. Alors, les discussions se poursuivent, et le dossier et le projet vont se réaliser, comme le gouvernement l'a promis à la population de la Montérégie.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Lotbinière.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Je comprends qu'au gouvernement on dit que tout va bien, il n'y a rien comme problématique, mais par contre on parle d'envoyer l'armée. On se demande combien il y a de AK-47 sur la réserve. Écoutez, M. le Président, est-ce qu'il y a un des deux ministres, là, qui ma m'expliquer où, pour faire une sortie d'autoroute, on a besoin de l'armée au Québec?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre! M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, permettez-moi, par votre entremise, d'informer les membres de cette Assemblée qu'effectivement il s'agit d'un projet autoroutier important ? et là je touche à la question dont on parle, c'est de cette autoroute-là dont on parle. C'est un projet important. Je me pose parfois les questions, comment l'ADQ et le PQ peut vouloir compromettre ce projet-là, alors que la façon dont nous abordons la question, en équipe avec l'ensemble des membres de cette formation politique, c'est de nous assurer qu'on puisse faire... compléter ces travaux ? nous sommes dans les échéanciers ? en le faisant sans troubler la paix sociale, en ayant des discussions correctes, de bonne foi avec l'ensemble des intervenants du Québec. Ça inclut bien sûr des autochtones au Québec ? il y en a ? et il y a moyen d'être de bonne foi avec eux, et, d'eux, d'être de bonne foi avec nous, plutôt que d'allumer des allumettes tout le temps. Ça, c'est votre choix qui bloquait le développement du...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Merci, M. le... En question principale, M. le député de Beauharnois.

Coût de l'expropriation de la
cimenterie de Lafarge Canada inc.
pour le prolongement de l'autoroute 30

M. Serge Deslières

M. Deslières: Merci, M. le Président. Toujours dans le dossier de l'autoroute 30, les questions que j'ai posées la semaine dernière sur l'autoroute 30 sont restées sans réponse. Le dossier continue de se complexifier, on vient de le voir: non seulement les négociations avec les Mohawks ne semblent pas vouloir aboutir, mais nous ne connaissons toujours pas les coûts d'expropriation des entreprises Lafarge et Goodfellow. M. le Président, on croirait revivre la saga du Mont-Orford pour une deuxième fois. On nous dit depuis le début des négociations que l'expropriation de la cimenterie Lafarge se fera en deçà de la barre des 400 millions, M. le Président. Pourtant, en 2004, on parlait de quelques dizaines de millions tout au plus.

Ma question est fort simple, M. le Président: Combien a coûté l'expropriation de la cimenterie Lafarge aux contribuables québécois pour faire passer l'autoroute 30 sur le tracé sud, choix politique du gouvernement?

Le Président: Mme la ministre des Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, c'est étonnant d'entendre le député puis de parler sans connaître le dossier plus que ça. Il parle...

n(10 h 50)n

Des voix: ...

Mme Boulet: ...M. le Président, il parle de 400 millions pour une expropriation... Bien, alors, écoutez! Alors, il parle de 400 millions pour une expropriation, alors que le budget d'expropriation pour tout le tronçon est est de 33 millions, incluant ciments Lafarge. Alors, je pense qu'en quelque part il devrait refaire ses devoirs, puis poser des questions, puis aller chercher les bons chiffres, parce que c'est 33 millions, incluant Lafarge. Alors, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député... M. le député de Beauharnois, vous avez posé votre question. Alors, Mme la ministre, si vous voulez poursuivre.

Mme Boulet: Alors, M. le Président, les expropriations vont être terminées d'ici la fin de l'année 2008, et, je le répète, c'est 33 millions pour tous les dossiers et non 400 millions pour un seul, comme le prétend le député de Beauharnois. L'autre élément, M. le Président. Ça fait longtemps qu'on parle de la 30, ça fait 30 ans. C'est la 30, mais ça fait au moins 30 ans que les gens discutent et essaient de trouver le bon choix du tracé. Et le PQ et le PLQ ont décidé de se référer au BAPE, M. le Président, pour avoir une opinion objective, et le BAPE a décidé et a dit que c'était par le sud qui était le choix privilégié. Alors, nous, M. le Président... M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader, vous n'avez pas la parole. S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement, je vous demande votre collaboration. Mme la ministre des Transports.

Mme Boulet: Alors...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre, si vous voulez conclure rapidement.

Mme Boulet: Alors, M. le Président, on est allés devant les audiences publiques...

Le Président: ...complémentaire, M. le député de Beauharnois.

M. Serge Deslières

M. Deslières: M. le Président, je répète: Il y a eu trois avis contraires de la CPTAQ concernant ce tracé sud. La ministre nous a dit, la semaine dernière, que le dossier de la cimenterie Lafarge était complété. Au nom de la transparence, les citoyens contribuables payeurs de taxes ont le droit de savoir: Combien ont coûté les expropriations seulement de la compagnie Lafarge? La question est simple.

Le Président: Mme la ministre des Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, je tiens à répéter que l'ensemble des dossiers d'expropriation du tronçon est, l'ensemble des expropriations vont coûter 33 millions de dollars, incluant le dossier de Lafarge. Alors, je pense qu'on est bien, bien loin du 400 millions pour un seul dossier, comme le prétend le député.

M. le Président, on est allés, et je le dis parce qu'on réfère... Je pense que mon collègue connaît bien l'histoire du dossier de la 30. Le PQ et le PLQ ont décidé de se référer au BAPE, qui, lui, a recommandé le sud. Mais, M. le Président, ce n'est pas juste le BAPE qui a demandé également qu'on passe au sud, le bureau de l'environnement de Kahnawake, ce qu'il nous dit ici, M. le Président: L'option nord nous semble être celle des deux qui serait...

Le Président: Alors, c'est terminé. Ceci met fin à la période de questions et réponses orales.

Motions sans préavis

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer aux motions sans préavis. Mme la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport.

Souligner la Semaine des
services de garde du Québec

Mme Courchesne: Alors, M. le Président, je présenterai une motion conjointement avec la députée de Groulx et le député de Verchères. Elle se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine des services de garde du Québec 2008 qui se tient du 25 au 31 mai sous le thème Un jardin aux mille trésors;

«Qu'elle réitère son engagement à placer les familles au coeur de son action et à travailler à la bonification du réseau des services de garde; enfin

«Qu'elle rende hommage aux artisans du réseau qui contribuent à l'épanouissement des enfants et qui assurent le développement de l'excellence des services de garde éducatifs.»

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Gautrin: Il y a consentement, sans débat.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Picard): Consentement, sans débat. Cette motion est adoptée? Adopté. On va prendre quelques instants pour permettre aux députés de quitter en silence.

Maintenant, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Souligner la Journée internationale
de l'action pour la santé des femmes

M. Couillard: Oui, M. le Président, c'est une motion conjointement présentée avec mon collègue député de La Peltrie et mon collègue député de Marie-Victorin:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale [action santé] des femmes.»

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Gautrin: Il y a consentement, sans débat, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Picard): Cette motion est-elle adoptée sans débat?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Picard): Adopté. Maintenant, M. le député de Mirabel.

Reconnaître l'expertise des producteurs
et accroître la qualité des produits
alcooliques québécois artisanaux, leur
mise en valeur et leur rayonnement

M. Desrochers: Oui, M. le Président. La motion est présentée conjointement avec notre collègue au ministère des Finances ainsi que le porte-parole en agriculture:

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'expertise développée au cours de la dernière décennie par les producteurs [de l'association et] membres de l'Association des vignerons du Québec, celle des Cidriculteurs artisans du Québec, et des autres producteurs artisanaux;

«Qu'une véritable synergie s'établisse entre les divers ministères, la Société des alcools du Québec, la Régie des alcools, des courses et des jeux et l'industrie afin de continuer d'accroître la qualité des produits québécois, leur mise en valeur et leur rayonnement.»

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Gautrin: Il y a consentement, sans débat.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Picard): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Picard): Adopté. Mme la présidente du Conseil du trésor.

Exiger le dépôt du rapport du Comité
de travail sur l'évaluation du coût de
l'indexation des régimes de retraite des
secteurs public et parapublic et
inviter ses membres en Commission
des finances publiques

Mme Jérôme-Forget: Oui, M. le Président. Conjointement avec le député de Montmorency et le député de Richelieu, je lis la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale exige des co-présidents qu'il fasse rapport des travaux du Comité de travail sur l'indexation des régimes de retraite des secteurs publics et parapublic en déposant leur rapport et ce le plus rapidement possible auprès de l'Assemblée, pour que les parlementaires aient accès à l'information qui leur revient de plein droit et qui est nécessaire pour faire cheminer le dossier;

«[...]une fois le rapport déposé, [que] tous les membres du comité soient invités à faire part de leurs travaux devant la Commission des finances publiques d'ici le 21 octobre 2008.»

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a consentement pour permettre de déroger à l'article 84 du règlement selon lequel chaque député ne peut présenter qu'une seule motion au cours d'une même séance? Consentement?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Picard): Consentement. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Gautrin: Il y a consentement, limité à un intervenant par groupe parlementaire, de trois minutes.

Le Vice-Président (M. Picard): Trois minutes, M. le leader?

M. Gautrin: Trois minutes.

Le Vice-Président (M. Picard): O.K. Donc, il y a consentement pour un débat de trois minutes. Mme la ministre.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Alors, merci, M. le Président. Alors, aujourd'hui, M. le Président, j'ai fait appel aux deux autres formations politiques pour que ce rapport soit rendu public d'une part pour des raisons, M. le Président, qui sont un peu malheureuses. Le rapport ou une version du rapport antérieure a été rendue publique via un média, et par conséquent, M. le Président, je pense qu'il y a lieu qu'il y ait un débat ouvert, franc et que le rapport final soit rendu public.

M. le Président, le dossier dont on parle, c'est un dossier qui relève de plusieurs années. Le député de Richelieu, je suis sûre qu'alors qu'il était président du Conseil du trésor a certainement été impliqué dans ce dossier. C'est un dossier dont on parle depuis plusieurs, plusieurs années.

M. le Président, tout le monde a beaucoup de sympathie à l'endroit des retraités dont le régime de retraite est finalement non indexé de 1982 à 2000. Par ailleurs, M. le Président, ce dont on demande, on demande de faire payer par les travailleurs d'aujourd'hui une indexation totale ou même une demi-indexation qui s'élèverait entre 2 et 7 milliards de dollars. Qui plus est, M. le Président, en 1990, il y avait sept travailleurs par retraité. Très prochainement, il y aura deux travailleurs par retraité. Vous comprendrez, M. le Président, qu'à raison de se retrouver deux travailleurs par retraité, si le fardeau sur ces travailleurs-là est trop élevé, vite ces gens vont décider de faire fi d'un fonds de retraite et vont dire au gouvernement: Nous, vous comprendrez, on travaille, on a des familles, on a des maisons, on a des obligations, vous nous demandez de supporter presque un retraité à notre charge puis, en plus de ça, économiser pour notre propre retraite. Vous comprendrez, M. le Président, quels sont les risques qui peuvent s'accompagner face à une telle situation.

Alors, M. le Président, moi, je suis très contente parce que le rapport va être rendu public. Il va y avoir débat en commission parlementaire. Les gens finalement vont avoir les chiffres. Parce qu'on a toujours fait passer les gouvernements comme étant des gens de mauvaise foi. M. le Président, s'il y a une chose que j'aimerais faire, c'est me transformer en mère Noël, hein, et être capable finalement d'aller dire oui aux gens qui font des revendications de ce style-là. M. le Président, moi, je dois penser à l'avenir des Québécois, à l'avenir des payeurs de taxes, à l'avenir de nos employés, et vous comprendrez qu'à cause de ça... c'est la raison pour laquelle nous nous sommes entendus pour mettre un groupe de travail finalement en place. Le drame, M. le Président, c'est que les deux retraités ont refusé de signer le rapport.

n(11 heures)n

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Montmorency.

M. Hubert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Ce n'est pas d'hier que les retraités savent qu'ils peuvent compter sur l'appui de l'Action démocratique et sur ma collaboration. Alors, par le passé et à plusieurs occasions, nous avons été sensibles à leurs revendications. Dans toute la démarche entreprise par l'Assemblée nationale depuis octobre 2007, il y a maintenant plus de sept mois, nous avons fait confiance au gouvernement. Nous avons collaboré de bonne foi à une initiative qui devait permettre de fixer certains repères pour enfin aborder la question de l'indexation des régimes de retraite entre 1982 et 2000. Alors, nous avons pris nos responsabilités, nous avons fait un suivi, nous avons posé des questions pour s'assurer que cette démarche porte fruit. Malheureusement, nous constatons que, depuis plusieurs mois, le Comité de travail sur l'évaluation des coûts d'indexation de retraite est dans une impasse, une impasse à laquelle le gouvernement libéral ne semble pas étranger. Je rappelle aussi à cette Assemblée que le Parti libéral s'était engagé, en 2002, à régler ce problème. Dans le Conseil général de février 2002, c'est marqué noir sur blanc dans une résolution.

Nous souhaitons que la ministre des Finances tienne parole et mette de l'avant des mesures afin de corriger l'indexation des pensions, et ce, dans le respect de la capacité financière du gouvernement. Je voudrais vous lire un passage d'une lettre écrite par M. Roger Bellavance, représentant du GTAR, le Groupe de travail des associations des retraités des secteurs public et parapublic, qui explique pourquoi il a délaissé le comité. Alors, voilà: «Durant le déroulement des travaux, les représentants désignés du GTAR et les coprésidents du comité se sont entendus sur le principe de la production d'un rapport qui devait être neutre et suffisamment clair pour être compris malgré son contenu très technique. Cependant, malgré plusieurs mois de travail et de discussion intense, le comité n'est toujours pas parvenu à produire un document qui répond totalement à ces exigences.

«À titre d'exemple, le comité a refusé de produire un outil aussi simple et essentiel qu'un glossaire. Par ailleurs, le document produit par certains membres du GTAR soumet la résolution du problème de la désindexation au bon vouloir du gouvernement et de la partie syndicale au lieu de favoriser la participation des associations de retraités comme partie négociante à part entière.»

Alors, c'est avec beaucoup de regret que nous devons, aujourd'hui, appuyer une motion qui oblige le dépôt du rapport sans qu'il ait reçu au préalable l'aval des retraités.

Et j'écoutais la ministre tout à l'heure qui nous parlait du choc intergénérationnel. On le comprend très bien. Elle nous citait que les travailleurs d'aujourd'hui... Alors, de 1982 à 1999-2000, elle dit qu'il y avait sept travailleurs pour un retraité et que présentement il y a deux travailleurs pour un retraité. On le comprend très bien, mais il faut être clair à ce niveau-là. C'est évident qu'il ne faut pas hypothéquer les travailleurs actuels, mais par contre les gens, les fonctionnaires du public, du parapublic ont payé leurs cotisations, et le gouvernement a-t-il payé la sienne...

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Oui, M. le Président. C'est avec plaisir que nous nous joignons à cette motion et que nous l'adoptons aujourd'hui. Je rappelle pour ceux qui ne seraient pas au courant que c'est à notre initiative que cette motion a été déposée et appuyée par nos collègues de l'opposition officielle et par le gouvernement afin de créer une commission spéciale dont le mandat était de rechercher les faits, c'est-à-dire non pas de prendre parti, mais d'analyser les différentes options sur la table, d'en évaluer les coûts et les méthodes pour rencontrer, pour être capable de mettre en oeuvre ces différentes options selon les méthodes communément admises.

Alors, le comité a fait son travail. Les membres ont été approuvés par les différents partis ici, en Chambre. Malheureusement, la date du 29 février est arrivée sans qu'il y ait entente entre les parties, les représentants des associations de retraités n'étant pas d'accord avec certains aspects de la présentation du rapport.

Alors, nous allons enfin connaître la version définitive de ce rapport. Nous nous en réjouissons. Nous allons pouvoir également recevoir en commission parlementaire les membres de ce comité de façon à connaître exactement le contenu du rapport et leur point de vue sur les différentes options qui sont sur la table. Il n'en demeure pas moins, M. le Président, que c'est un dossier très sérieux où des gens, avec raison, se sentent abandonnés, où il faut faire tous les efforts d'imagination imaginables pour tenter de trouver des solutions. La ministre semble éliminer du revers de la main toute solution possible. Nous pensons que nous devons continuer à travailler afin de trouver une solution à ce problème. Méfions-nous cependant des gens qui font des promesses en terminant leurs promesses en disant: Dans le cadre des ressources financières publiques de l'État. C'est exactement dire que nous pouvons promettre la lune dans le cadre des ressources financières de l'État, ce qui évidemment est un attrape vous savez quoi.

M. le Président, nous serons très heureux de recevoir en Commission des finances publiques les membres de ce comité. Nous leur poserons toutes les questions nécessaires. Nous ferons en sorte de mettre en évidence les différentes options, les coûts réels, la situation exacte actuelle du régime de retraite des employés du secteur public, que ce soit le RREGOP, le RRE, le RPE, de faire en sorte que nous ayons un portrait global, que chacun ensuite, à la lumière de ces faits, pourra prendre position, s'engager, et c'est ça, un vrai débat démocratique sur la base d'une réalité. Alors, je suis très heureux de voir enfin les résultats de ces travaux rendus publics. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Picard): Adopté. Aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Gautrin: M. le Président, c'est avec plaisir que j'avise cette Assemblée que la Commission de l'éducation poursuivra les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur les élections scolaires, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, et ce soir, de 20 heures à 22 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la Commission de l'aménagement du territoire entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière municipale, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Que la Commission des finances publiques entreprendra l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi n° 77, Loi sur les instruments dérivés, et le projet de loi n° 80, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, immédiatement après l'élection du vice-président, et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le leader. Pour ma part, je vous avise que la Commission des finances publiques se réunira aujourd'hui, à 15 heures, à la salle du Conseil législatif, afin de procéder à l'élection du vice-président de la commission;

La Commission des institutions se réunira en séance de travail demain, jeudi 28 mai 2008, de 7 h 30 à 9 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement, afin d'entendre la Protectrice du citoyen concernant son rapport annuel.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Maintenant, nous sommes rendus à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Avis de sanction de projets de loi

Je vous avise qu'il y aura sanction de plusieurs projets de loi aujourd'hui, à 14 heures, au cabinet de Son Honneur le lieutenant-gouverneur.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Gautrin: M. le Président, auriez-vous l'amabilité d'appeler l'article 36?

Projet de loi n° 60

Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Picard): À l'article 36, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des institutions sur le projet de loi n° 60, Loi modifiant la Loi sur la police. Est-ce qu'il y a des interventions? Mme la députée de Lotbinière.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: La prise en considération du rapport de la commission où on a fait l'étude détaillée a été un travail assez précis, assez serein et assez dynamique. Il faut comprendre que ce projet de loi là, le projet de loi n° 60, modifie la Loi sur la police. Pour comprendre où on va dans ce dossier-là, il faut savoir d'où on vient.

Il y a eu, il y a plusieurs années, la commission Poitras concernant... C'est Lawrence Poitras qui avait dirigé cette commission-là pour voir la façon dont la desserte policière se faisait sur le territoire du Québec. À l'époque, il y avait beaucoup plus de corps de police municipaux et la Sûreté du Québec. On voyait qu'en général les policiers municipaux étaient engagés par la municipalité et desservaient des municipalités plus petites, plus grosses, il y avait des différences, comme la police de La Tuque qui était une municipalité de 12 000 habitants, mais il y avait aussi des policiers pour desservir de plus grandes populations, comme la population de Montréal, population de Québec. On a tout remanié, tout remanié la façon dont on dessert les services policiers au Québec.

n(11 h 10)n

À partir de ce rapport est arrivée la Loi sur la police. La Loi sur la police prévoyait beaucoup de choses, notamment quels cours doivent prendre les policiers, le mandat de l'École nationale de police, le mandat des corps policiers. Puis, ce qu'on a décidé de faire, c'est de classer les corps de police par numéros: corps de police 1, de niveau 1, par niveaux 1, 2, 3, 4, 5 et 6. Pour vous donner un exemple, les corps de police de niveau 1 ont certains actes criminels sur lesquels ils peuvent enquêter, et, si malheureusement arrive un acte criminel qui ne fait pas partie de leur juridiction, de leurs compétences, ils doivent recourir à un autre corps de police de niveau 5 ou 6.

Généralement, lorsqu'arrive un de ces événements-là, bon, dans une municipalité, par exemple, on fait appel à la Sûreté du Québec, et puis la Sûreté du Québec vient en renfort avec son unité des crimes majeurs, ou peu importe, là, comme le crime qui est prévu, et puis là vient aider le corps de police municipal, et ils font de concert le travail ou ils font le travail. Vous ne vous posez peut-être pas la question, mais on le voit surtout lorsqu'il y a des scènes de crime. Pour avoir des spécialistes en scènes de crime, en balistique, avec les chiens, bon, c'est la Sûreté du Québec qui pourvoit chacun des corps de police pour éviter que chacun ait... On sait très bien que chaque corps de police municipal n'a pas les moyens de se payer un expert en scènes de crime, un expert en polygraphie, un expert en tout ce que la science, les techniques policières peuvent requérir. Donc, c'est la façon dont on gère les crimes puis la police sur notre territoire.

Bien sûr, il y a des fois que ça cause des problèmes d'avoir deux juridictions comme ça parce que, si... Je vais vous donner, par exemple, un crime fait sur la cybercriminalité, je ne sais pas, un leurre d'enfant, c'est-à-dire un criminel qui demande à un enfant de venir poser des gestes de nature sexuelle. Le criminel peut se retrouver à Trois-Rivières, avoir une jeune qui est à Québec et lui donner rendez-vous à mi-chemin entre les deux. Là, là, qui sont les corps de police? À Trois-Rivières, il y a un corps de police municipal, à Québec, il y en a un autre, entre les deux, c'est la Sûreté du Québec. Donc, cette loi-là mérite des aménagements.

On a fait des aménagements mais pas pour régler les problèmes de juridiction. On a fait certains aménagements dans la Loi sur la police pour enlever quelques irritants qui, au fil des années, sont apparus. Ce ne sont pas des... ce n'est pas un... c'est un rafraîchissement, je dirais, de la Loi sur la police, ce n'est pas vraiment... Dans ses fondements, la Loi sur la police demeure la même. Mais c'est des choses comme clarifier le mandat de l'École nationale de police, c'est...

On a aussi également clarifié ce qui était compatible ou incompatible avec le métier de policier. Auparavant, les policiers ne pouvaient pas détenir ? ou leurs conjoints ? un permis d'alcool. Maintenant, c'est modifié. Il y a aussi des... bien des modifications ou des facilitateurs pour les mises en commun de certains services entre les corps policiers, donc des biens, des services, puis la Sûreté du Québec peut mettre en commun certains biens et services avec les autres corps policiers.

Il y a par contre un point majeur que les policiers demandaient, qui n'est pas au rapport. Le sujet que j'aborde, c'est la destitution automatique. Lorsqu'un policier comment une infraction, il est automatiquement destitué, contrairement au procureur de la couronne. Puis l'argument, puis je l'entends, là, du ministre de la Justice là-dessus et de la Sécurité publique, c'est que les policiers doivent être au-dessus de tout soupçon, doivent laver plus blanc que blanc et doivent, puisqu'ils ont une position d'autorité sur les personnes... on doit ne tolérer aucune erreur.

Bien entendu que je partage le fait qu'il faut être extrêmement sévère en matière d'actes criminels posés par les policiers. Je suis tout à fait d'accord avec ça et je n'entends pas que ces crimes-là doivent rester impunis ou qu'automatiquement on permette à un policier de continuer sa carrière, même s'il a commis un acte répréhensible. Ce n'est pas là mon propos. Par contre, ce que je soutiens, c'est qu'ils doivent être entendus, ils doivent au moins avoir la chance d'être entendus auprès de leurs employeurs puis auprès de la déontologie.

Il y a, lors de l'avant-dernière campagne électorale, eu une phrase qui est devenue plus célèbre parce qu'elle a été dans la bouche d'un ancien premier ministre, Bernard Landry, la règle audi alteram partem. Cette règle-là, en latin, ça veut dire: Entends l'autre partie. C'est une base... Moi, je suis avocate, c'est la base de la justice naturelle. La justice naturelle sous-tend la justice positive qui a cours dans cet État de droit qu'est le Québec. La base de ça, c'est qu'on ne peut pas rendre une décision sans qu'on ait eu la chance d'être entendu. C'est un principe fondateur du droit, et je me demande pourquoi on retirerait aux policier ce droit-là qu'on reconnaît à tous les citoyens du Québec. Tous les policiers du Québec ne peuvent être entendus s'ils ont commis un acte répréhensible. Par contre, au Canada, ils le peuvent.

L'argument d'autorité ne tient pas la route selon moi parce qu'on permet aux juges, eux, d'être entendus. Ce n'est pas plus normal qu'un juge commette un acte criminel qu'un policier. Est-ce qu'un juge a de l'autorité morale? Je pense que oui. Il peut décider du sort d'une vie. Il doit être vraiment au-dessus de tout soupçon. Mais à lui on lui permet d'être entendu.

Le procureur de la couronne, qui travaille avec le policier à faire condamner des criminels, peut, lui aussi, être entendu. Il n'est pas destitué de façon automatique. Je me demande pourquoi on en fait une catégorie aussi à part. Je pense que, quand j'ai entendu le ministre de la Justice venir dire que permettre aux policiers d'être entendus, c'est du nivellement par le bas, je me demande ce qu'en pense le ministre des Affaires intergouvernementales, qui s'occupe de la charte. Quand on dit qu'enlever le droit à quelqu'un d'être entendu, c'est du nivellement par le bas, je pense que c'est le contraire. Le respect des droits de tous les individus dans notre société, c'est de leur permettre d'être entendus lorsqu'ils sont sujets à une sanction.

Je vais vous rappeler ce que les policiers ont dit là-dessus, puis il faut comprendre que ça ne touche pas beaucoup de policiers, que, depuis l'application de la Loi sur la police, c'est peut-être 22 policiers qui sont en cause. Je pense que ça aurait peut-être fait changement dans un cas, à ma connaissance, un policier qui a passé devant le juge, qui a 27 ans de superservice, qui a gagné deux fois la médaille des services policiers, une fois la médaille du lieutenant-gouverneur, qui n'a commis aucune faute déontologique. Il est arrivé des événements malheureux dans sa vie, un divorce, et puis il a perdu le contrôle et a porté des voies de fait sur son ex-conjointe. Il a été reconnu coupable ? c'est un acte criminel ? dans un contexte bien particulier. Il a été reconnu coupable, a subi sa sentence. Sa sentence, c'est une libération conditionnelle. C'est donc dire que le juge considérait que cet individu-là a eu un moment d'égarement et qu'il n'est pas dangereux pour la population, parce que, dans ce temps-là, on a des sentences dissuasives, ou exemplaires, ou punitives. Mais, dans ce cas-ci, non. S'il envoyait le message que...

Libération conditionnelle, c'est une sentence très basse pour une voie de fait. Ce policier-là ne pouvait même pas être entendu, il est destitué automatiquement. Il en a appelé de cette cause-là, mais, écoutez, on ne peut pas interpréter la loi autrement qu'elle est. Il a été destitué, la cour a confirmé qu'il a été destitué. Eh bien, ce policier-là aurait peut-être été l'objet d'une sanction, aurait peut-être été destitué, mais on n'a même pas eu la chance de se faire entendre.

Je vais rappeler les propos des présidents de syndicat de chacun des policiers qui sont venus nous faire valoir leur arguments sur ce sujet. Denis Côté, c'est le président de la Fédération des policiers du Québec. Il tient ces propos, puis je le cite pour ne pas trahir sa pensée: «Appliqué dans toute sa rigueur, l'article 260 rendrait le travail policier impossible. S'il ne l'est pas, il envoie quand même un très mauvais message aux policiers, leur signifiant qu'ils sont épiés les uns par rapport aux autres et que toute action qu'ils posent est "susceptible" de donner lieu à une enquête disciplinaire, déontologique ou criminelle. Alors, ils sont sur leurs gardes, pas dans le sens positif d'être prudents dans leurs interventions mais dans le sens négatif qu'ils préfèrent souvent ne pas intervenir ou fermer les yeux. On instaure la méfiance et on décourage l'ardeur et l'initiative. Celui qui en fait moins s'expose moins. Voilà l'effet pervers de ces dispositions pleines de bonnes intentions mais nettement abusives. Cela incite malencontreusement à une retenue extrême.»

n(11 h 20)n

Ce qu'a dit Jean Beaudoin, président du Syndicat des policiers de Québec: l'article 260, obligation de dénoncer... Ça, c'est l'article... Ce que je vous parlais, c'était l'obligation de dénoncer un collègue. Mais, par amendement, on a fait du travail, et puis on l'a modifié, et on l'a bonifié grâce aux propos que nous ont tenus les présidents du syndicat. Et Jean Beaudoin nous disait que cette obligation de dénoncer à son supérieur immédiat une faute disciplinaire ou déontologique, c'était peut-être un peu trop, parce qu'il faut avoir connaissance directement de qu'est-ce qui a été commis. Si j'entends un ragot d'un ragot d'un ragot, du triple ouï-dire, comme on dit, l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours, je suis obligée de dénoncer sur la foi de «j'ai entendu dire qu'un tel a fait telle chose, a ? admettons ? insulté une personne qui l'arrêtait». Bien, c'était peut-être un peu trop loin comme obligation de dénoncer. Et puis, par chance, nos travaux nous ont permis de corriger cette disposition-là.

Cependant, au niveau de la destitution automatique, on n'a pas été capables. J'ai présenté un amendement visant à corriger la situation sur la destitution automatique et je n'ai pas eu l'appui du Parti québécois et ni du gouvernement. J'ose espérer rester optimiste sur ce dossier, puisque la cause est actuellement pendante devant la Cour suprême, et j'espère qu'après le débat pourra se faire encore, qu'on va pouvoir continuer à faire évoluer ce dossier et continuer à réfléchir sur cet aspect de la loi. Par contre, une attitude fermée, je crois, démotiverait les policiers.

Ce qu'ils sont venus nous dire, c'est qu'ils ne se sentent pas épaulés, qu'ils ne se sentent pas respectés dans leur travail parce qu'on ne les entend pas là-dessus. Ce qu'ils nous disent, c'est que... Je vais vous donner un exemple. Il y a des mises en accusation par acte criminel puis il y a des mises en accusation par poursuite sommaire, puis, quand c'est une mise en accusation par acte criminel, ils ne peuvent pas être entendus; poursuite sommaire, ils peuvent. Ça, M. le Président, pour quelqu'un qui ne connaît pas le droit, là, on a l'impression que les mises en accusation par acte criminel sont plus graves, sont des crimes plus graves que les mises en accusation par poursuite sommaire, parce que la procédure n'est pas la même. La poursuite sommaire, ça se fait plus rapidement, il y a moins d'étapes. L'accusation criminelle, c'est une procédure un petit peu plus lourde. Sauf qu'on n'a pas juridiction pour déterminer quelles infractions sont poursuivables par acte criminel et quelles infractions sont poursuivables par poursuite sommaire. Souvent, c'est le procureur de la couronne qui a le choix. Il a deux choix: il peut... soit par acte criminel soit par poursuite sommaire. Vous comprendrez qu'un meurtre, c'est par acte criminel. Mais, une agression sexuelle, on a deux choix: c'est soit par acte criminel soit par poursuite sommaire. C'est un crime hautement répréhensible, l'agression sexuelle, tandis que la conduite causant une blessure, conduite criminelle causant une lésion, ça, c'est poursuivable seulement par acte criminel.

Bon, une conduite dangereuse causant une lésion, là, j'ai déjà vu, devant les tribunaux, quelqu'un qui avait coupé une courbe, qui a frappé une mobylette, était accusé de conduite criminelle, conduite dangereuse causant des lésions. Ce n'est pas une conduite en état d'ébriété, là, c'est une conduite qui est dangereuse. Ça veut dire qu'il ne respecte pas le Code de la route ou qu'il est hors la norme habituelle de conduite de tout le monde. Vous voyez, il y a un critère un peu subjectif là-dedans. Et puis malheureusement les policiers qui sont toujours en patrouille, qui doivent faire des poursuites, sont beaucoup plus exposés à faire de ce genre de manoeuvre.

Il y a eu un dossier, M. le Président, où des policiers, dans une ruelle, patrouillaient la nuit. Mais vous comprendrez que les ruelles sont à sens unique et que les techniques policières, c'est de patrouiller à l'envers, parce qu'on patrouille à l'envers pour ne pas que les personnes qu'on veut surprendre nous voient venir, les lumières fermées. Donc, deux jeunes policiers... Puis malheureusement on a beaucoup de jeunes policiers parce qu'on a tout engagé nos policiers à la même époque, et puis ils ont tous pris leur retraite à la même époque. Donc, le corps policier, à l'heure actuelle, est très jeune. Et donc ce sont deux jeunes policiers qui patrouillent à l'envers. Ils voient un individu se sauver, s'enfuir. Premier réflexe policier: ils poursuivent l'individu, arrivent à l'intersection, ils n'ont pas d'arrêt parce qu'ils sont à l'envers dans le sens unique ? mais c'est une infraction, être à l'envers dans le sens unique ? continuent puis heurtent une voiture. La femme qui était dans la voiture s'est fait casser un doigt lors de l'accident. Elle n'a aucune séquelle de cet accident. Il y a eu une plainte pour conduite dangereuse causant lésions. Ça se poursuit seulement par acte criminel.

Voyez-vous que, quand on sait que ça peut arriver à un collègue... Puis là, pendant ce temps-là, là, le policier ne travaille pas, il n'a rien pour nourrir sa famille et puis il est complètement démoralisé. Il faut qu'il subisse son procès, il n'a pas le choix. S'il plaide coupable, sa carrière est terminée. Il doit faire son procès. Un procès, on sait que ça prend un an, deux ans avant d'avoir notre date de procès avec assignation. Donc, c'est extrêmement lourd à porter comme conséquence d'un geste qu'il a commis à l'intérieur de ses fonctions, et sans aucune mauvaise foi, et sans aucune mauvaise intention. Et il est arrivé malheureusement des cas comme ça.

Et puis là, après ça, les autres policiers, qui sont solidaires de ce policier-là, ou policière, quand arrive une poursuite, qu'est-ce qu'ils se disent? Oh! je pense à mon ami, là, ou à mon collègue qui a arrêté de travailler, qui s'est mis dans une situation extrêmement difficile. Est-ce que je m'engage, avec les risques que ça comporte, dans une poursuite? Je pense que c'est un frein, c'est un frein à l'intervention, puis les policiers nous l'on dit. Le ministre n'achète pas cet argument-là, mais tous les policiers qui... tous les présidents de syndicat qui sont venus nous voir ont été unanimes.

Je n'arrive pas à comprendre comment on peut écarter cet argument-là. Parce que, s'il y a des milliers de policiers sur le terrain qui se déploient et qui ont cette réserve-là, il y a peu de policiers de toute façon, qui auraient commis un acte criminel, qui auraient pu ne pas être destitués. Je pense que la balance des inconvénients ? admettons qu'on met en doute leur position ? la balance des inconvénients plaide en leur faveur. Des milliers de policiers qui se sont déployés puis qui ont un frein à l'action ou un policier sur peut-être 22 qui n'aurait pas une destitution mais une sanction sévère après avoir eu une audition et après avoir tenu compte de ses fonctions, et de tous ses gestes, et de ses états de service, je pense que ça plaide en la faveur des policiers, et c'est la raison pour laquelle j'ai voulu qu'on procède à cet amendement. Cependant, ça n'a pas été possible.

Par contre, au niveau de l'article 117, on a fait des progrès. L'article 117, ça permettait des aménagements pour que la fonction de policier ne soit pas incompatible avec une activité de restauration qui exige un permis à la Régie des alcools. M. Francoeur disait que le fait qu'on modifie ça, M. Francoeur qui est le président de la Fédération des policiers de Montréal... «La fraternité reconnaît que cet amendement constitue un pas dans la bonne direction et qu'il répond aux attentes de certains de nos membres dans une société capitaliste. En ajoutant "à l'exclusion du permis de restaurant pour vendre et du permis de restaurant pour servir[...]", l'amendement proposé a pour effet de prévenir [et] de corriger des aberrations, des irritants ou des situations d'injustice. Cette modification est intéressante, car il ne saurait faire doute que l'intention du législateur au moment de l'adoption de la loi était d'éviter qu'un policier ait un intérêt direct ou indirect dans un bar [et non dans un restaurant, dans une cabane à sucre ou dans une auberge].» Donc, il y a quand même des progrès.

Jean Beaudoin, président du syndicat des policiers de Québec, le rappelle aussi: «Je tiens [...] à vous féliciter pour les modifications qui sont proposées à l'article 117. Il y a environ deux ans, le Service de police de la ville de Québec, en collaboration avec la Fraternité des policiers et [des] policières et de Me DeBlois, avons donné une journée de formation à nos 800 policiers concernant la Loi sur la police. Et, lors de cette journée-là, on parlait, entre autres, de la discipline, de la déontologie, des allégations criminelles ainsi que des enquêtes ministérielles, et je vous dirais qu'à plusieurs reprises il y a plusieurs de nos membres qui nous ont mentionné: Pourquoi que le gouvernement ne permet pas à un policier, par exemple, d'avoir une cabane à sucre? En quoi [cela est-il] incompatible avec le travail de policier?» Donc, on voit qu'il y a eu des aménagements sur des irritants, mais je pense que l'essentiel de la destitution est encore un travail qu'il reste à faire.

n(11 h 30)n

Il y a encore beaucoup d'autre travail à faire. On entend les municipalités se plaindre régulièrement du fait qu'il n'y a pas de desserte... il n'y a pas de policiers visibles, les effectifs policiers ne sont pas visibles, et on sait que le fait de ne pas avoir de policiers visibles entraîne la recrudescence de délits. Écoutez, dans le comté, mon seul comté, avec le nombre de kilométrage qu'on a, là, j'engage n'importe qui et je mets au défi n'importe qui d'aller voir, là, dans mon comté; entre Sainte-Agathe et Saint-Gilles, la petite route qui est là, là, tout le monde roule à 100 dans les rangs. La limite est de 90. La limite est de 90 km entre ces deux municipalités là, tout le monde roule à 50 km. Savez-vous pourquoi, M. le Président? Parce qu'on rencontre toujours des chevreuils sur ce tronçon sur cette autoroute-là, sur ce tronçon routier là. Le monde ont plus peur de frapper un chevreuil que de rencontrer un policier dans mon comté, c'est ce qui fait qu'on diminue de vitesse chez nous. Je peux vous dire aussi qu'entre Villeroy et Sainte-Françoise, là, ça ne roule pas vite parce qu'il y a deux troupeaux de chevreuils qui sont là. Mais j'ai vu beaucoup plus souvent des policiers. Moi qui fais beaucoup de kilométrage, là, j'ai vu beaucoup plus souvent des chevreuils que des policiers sur ce tronçon de route là, donc.

Une voix: ...

Mme Roy: Oui, ça coûte moins cher, comme dit mon collègue. Donc, je pense qu'il y a beaucoup d'endroits au Québec que c'est comme ça aussi. Et les maires s'en plaignent parce que malheureusement les chevreuils ne font pas appliquer les règlements municipaux.

Donc, M. le Président, c'est vrai, parce qu'on voit beaucoup de policiers sur l'autoroute, mais le problème, c'est que, pour les municipalités, bien il y a le service autoroutier. Ça, c'est à part. Pour les municipalités, les MRC, il y a la sécurité du Québec par chacune des MRC en milieu rural, et, quand ils font appliquer les lois sur les routes principales, les amendes vont au Trésor. Quand ils font appliquer les lois sur les routes des municipalités, les amendes vont à la municipalité. Mais c'est dans toutes les routes secondaires que se commettent la plupart des infractions, parce que, tout le monde le sait, dans les rangs on peut rouler vite, on ne rencontre pas de policier. Donc, c'est encore des choses qu'il va falloir travailler, parce que de toute façon il n'y en a pas assez, il n'y en a pas assez pour couvrir des territoires qui sont immenses. D'un bout à l'autre d'une MRC, les policiers ne peuvent pas intervenir rapidement. C'est la même chose pour les ambulanciers, mais c'est un autre dossier. On a eu une promesse du gouvernement conservateur de fournir des policiers. Ça équivalait à peu près à 250 policiers ici, au Québec. Et puis le ministre de la Sécurité publique a décidé de prendre ces sous-là mais pour faire autre chose et pour faire la lutte à la gang de rue.

Il faut comprendre que, lors des dernières élections, il en avait fait sa priorité, la lutte aux gangs de rue. Il avait fait une promesse, là, sans avoir les fonds attachés, à la dernière campagne, puis il l'a refaite, refaite et refaite, cette promesse-là, là. Les sommes ne sont pas encore déployées, mais, grâce au gouvernement Harper, il va pouvoir exécuter la promesse qu'il a eue. Ça fait que, moi, je vais vous dire, M. le Président, ce n'est pas une promesse libérale remplie, c'est une promesse conservatrice remplie. Et c'est bien de valeur à dire, mais ça nous prend quand même plus de policiers. La cybercriminalité, là, en Ontario, ils ont 100 policiers, une escouade dédiée à la cybercriminalité sexuelle, c'est-à-dire la pornographie juvénile, les leurres d'enfants. 100 policiers qui sont dédiés à ça. Chez nous, au Québec, là, je comprends qu'on est un peu moins nombreux, mais on en a huit. Le nombre n'explique pas la différence. Puis après ça, là-bas, ils ont une escouade de procureurs de la couronne qui connaissent la cybercriminalité. Parce que je veux être respectueuse avec mes collègues, mes collègues avocats, mais certains ne maîtrisent pas nécessairement les ordinateurs.

Quand on fait une preuve de cybercriminalité, il faut prouver plein de choses par rapport à l'ordinateur. Ça fait que le policier qui a fait une arrestation en Ontario va rencontrer un procureur de la couronne qui connaît ça, puis il va aller directement à l'essentiel puis il va porter des accusations. Un policier qui fait de la cybercriminalité au Québec va rencontrer un procureur de la couronne qui peut-être sait seulement où est le piton «on» de son ordinateur ? peut-être, parce que c'est une époque qui n'est certainement pas révolue chez les avocats, ils travaillent beaucoup avec le dictaphone ? peut-être n'ouvre jamais un ordinateur. Mais là il faut qu'il lui explique tout ça avant de le convaincre de prendre la plainte puis après, imaginez-vous, parce que ce procureur de la couronne là est le procureur du district concerné, après ça il faut qu'il fasse un procès. Ça fait que vous imaginez toute l'énergie que ce policier-là met à faire faire une condamnation. C'est du temps qu'il n'a pas pour être sur le terrain puis pour arrêter d'autres criminels.

Ça, c'est un problème. Puis aussi il y a le problème de juridiction. Je vous en ai parlé au début, les corps de police ont chacun une juridiction, mais, dans la cybercriminalité, on a souvent des problèmes de juridiction. La seule façon de régler ça, c'est une escouade mixte, c'est-à-dire des policiers de chacun des niveaux. Donc, ils vont toujours avoir la juridiction, il y a toujours un de ces policiers-là qui a la juridiction au Québec pour ça. Puis, quand on a une escouade mixte, bien on peut intervenir n'importe où. On l'a fait pour le crime organisé. Je pense qu'on est rendu à le faire pour la cybercriminalité, parce que vous savez que l'Internet, ça modifie la donne de la criminalité au Québec, autant au niveau de la contrebande qu'au niveau des crimes de nature sexuelle. Vous pouvez trouver de tout. Les policiers me disent, là: On fait «armes illégales» puis on est capables d'hameçonner quelqu'un tout de suite, aussi facilement que ça. Ce n'est pas le fait de les trouver, notre problème, c'est le fait d'avoir le temps de procéder à leurs arrestations et de faire les procès.

Ce qui m'amène à vous dire qu'un document émanant du ministère de la Sécurité publique nous disait: On n'est pas pour avoir plus de policiers parce que, si on a plus de policiers, on va avoir plus de monde devant les tribunaux; si on a plus de monde devant les tribunaux, on manque de ressources, on va engorger les tribunaux; puis, si on engorge les tribunaux, aussi on va engorger le système carcéral. Écoutez, on ne veut pas de criminel arrêté parce que ça va engorger le système de la justice. C'est épouvantable, là. C'est épouvantable. C'est comme vendre son cheval pour lui acheter du foin. C'est à peu près ça, là. Écoutez, ça n'a pas d'allure, là. Puis ça, ça ne vient pas, là, d'un hurluberlu, là, qui sur une montagne s'est levé un jour puis a pensé à ça, c'est les fonctionnaires du ministère de la Sécurité publique qui ont pondu un document de 30 pages, puis c'était leur argumentaire pour dire non à M. Harper, on ne veut pas d'argent pour plus de policiers. Écoutez, quand on en arrive là, là on a un sérieux problème, on a un sérieux problème de mission fondamentale de l'État qui est d'assumer la sécurité publique de sa population puis de mission fondamentale du ministère de la Sécurité publique qui est d'assumer la sécurité des personnes sur le territoire du Québec.

Donc, on peut bien faire des petites modifications à la Loi sur la police puis permettre à ce que les policiers aient des cabanes à sucre, mais je pense qu'on a des enjeux fondamentaux, des choses beaucoup plus grandes à discuter ici, sur où on s'en va au Québec, au niveau de la sécurité publique. Donc, je convie le ministre ? bien oui, on peut faire des pas comme ça, on peut mâcher de la gomme et marcher; je convie le ministre ? à revoir en profondeur la façon dont on dessert nos services policiers sur le territoire pour avancer puis, je pense, donner satisfaction aux Québécois en la matière.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le député de Dubuc, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de sécurité publique.

M. Jacques Côté

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, je serai très bref, je vais m'en tenir au sujet qui fait l'objet des présentes, c'est-à-dire le projet de loi n° 60, Loi sur la police.

Après avoir entendu les différents groupes qui se sont présentés devant nous, en commission parlementaire, tels les associations, fraternités de policiers de même que les associations, les unions, les fédérations des municipalités ainsi que les agents de conservation de la faune, nous avons procédé, article par article, à l'étude du projet de loi n° 60, Loi sur la police. Nous avons proposé certains amendements, et d'autres amendements ont été apportés à ce projet de loi. Je voudrais, entre autres, parler des municipalités où il est maintenant permis, entre différentes municipalités, d'avoir des ententes entre elles pour du transport, pour de l'équipement, pour des transports de détenus. Alors, ce sont des nouvelles dispositions qui favorisent et qui permettent davantage aux municipalités d'être beaucoup plus souples dans le cas de ces ententes entre elles. Les municipalités auraient voulu avoir également des ententes avec d'autres corps policiers en ce qui concerne les enquêtes. Le ministre n'est pas allé jusqu'à leur accorder cette disposition, mais ce n'est que partie remise, puisque nous allons continuer, comme je l'ai toujours dit, de travailler sur le dossier justement de la police.

En ce qui concerne des amendements importants, il y a eu la question de la double sanction où l'article 230 de la Loi sur la police a été modifié, c'est-à-dire que, lorsqu'un policier était destitué suite à un acte criminel du premier alinéa de l'article 119, automatiquement c'est qu'on transférait, on communiquait le jugement au Commissaire à la déontologie, ce qui faisait que le Comité de déontologie pouvait établir une double sanction, ce qui ne sera plus le cas maintenant parce que, le policier étant destitué, ce n'est plus nécessaire de communiquer ce fait. Aussi, c'est que les policiers maintenant qui serviront comme témoins dans une cause pourront être assistés d'un avocat. C'est nouveau et c'était demandé par différents corps de police, associations, et ça a fait l'objet d'un amendement. De même, l'article 260 sur l'obligation de dénonciation. Avant, dans la Loi sur la police, le policier devait dénoncer toute faute au point de vue disciplinaire et déontologique. Le ministre a consenti à enlever le mot «disciplinaire», c'est-à-dire que maintenant l'obligation de dénonciation demeure en ce qui concerne la déontologie, mais, au point de vue disciplinaire, c'est enlevé.

n(11 h 40)n

Et, au point de vue déontologique maintenant, également, c'est que le directeur devra aviser le ministre, le Directeur des poursuites pénales pour éviter, là, les poursuites frivoles, et on devra faire un examen pour éviter ces poursuites frivoles. L'autre chose, c'est que maintenant, Mme la députée de Lotbinière en a parlé, c'est que la fonction de policier demeure incompatible avec toute fonction relative à la justice. Mais, en ce qui concerne la vente d'un permis de restauration, permis d'alcool pour la restauration, un policier pourra avoir la permission de détenir ce permis.

Les agents de conservation de la faune qui travaillent en forêt et qui travaillent à travers tout le Québec seront dorénavant, par ce projet de loi, soumis au Code de déontologie des policiers, ce qui est une bonne chose. Toutefois, les agents de conservation de la faune sont venus nous dire en commission parlementaire qu'ils désiraient, avant que cet article soit adopté, soit mis en vigueur, recevoir la formation nécessaire avant que cet article soit mis en vigueur.

Enfin, dans le projet de loi ? je résume, parce que, lors de l'adoption finale, je serai beaucoup plus précis, là, en ce qui concerne les sujets dont je vous entretiens ? mais enfin le projet de loi officialise le conseil des services policiers qui existait dans les faits mais qui légalement est dans un texte de loi, maintenant. Alors, c'est un organisme qui comprend toutes les associations de policiers, les municipalités, même les nations autochtones et qui va permettre à ces gens-là de se réunir et de donner des avis au ministre afin que les services policiers soient beaucoup plus efficaces, afin que l'intérêt du public soit davantage pris en compte.

Alors, naturellement, toutes les demandes qui nous ont été faites n'ont pas été accordées dans le projet de loi, notamment l'article 119, on en a discuté, ou la destitution automatique, où les policiers voulaient cette destitution automatique. Nous continuons de travailler. Nous continuerons également de travailler dans l'avenir sur ce projet, sur cette Loi de la police, même si toutes les demandes n'ont pas été accordées. Compte tenu qu'il y a encore des demandes pendantes devant les tribunaux, compte tenu également que d'autres événements pourraient se produire, nous allons continuer de travailler toujours dans l'intérêt public.

Et, en terminant, M. le Président, je pense que, dans un projet comme ce projet de loi, de Loi sur la police, le premier objectif, c'est toujours la sécurité du public, c'est l'intérêt du public en premier lieu. Je pense que l'opposition, la deuxième opposition, le Parti québécois, nous avons fait notre travail de façon respectueuse, de façon aussi consciencieuse, afin justement que cet intérêt public soit toujours le premier objectif, sans jamais oublier cet objectif premier que nous avons toujours en tête. Nous avons discuté avec les associations de policiers, nous avons regardé les demandes qu'ils faisaient, nous nous sommes entendus sur certaines choses et nous leur avons assuré de notre entière collaboration tant pour le présent que pour l'avenir également, et ça, je tiens à le répéter. Nous allons continuer de travailler, car une loi est évolutive, elle n'est jamais terminée. Elle n'est jamais fixe, elle évolue avec le temps, elle évolue également avec le droit.

Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de Chambly.

M. Richard Merlini

M. Merlini: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, il me fait plaisir d'intervenir sur la prise en considération du rapport de la Commission des institutions concernant le projet de loi n° 60, Loi modifiant la Loi sur la police.

Il s'agit, M. le Président, d'un projet de loi qui était très attendu par le monde policier et à l'étape presque finale et il y a de quoi se réjouir pour le monde policier qui demandait des ajustements nécessaires et pertinents à la Loi sur la police. Je prends, par exemple, dans mon comté, où il y a des régies de police et j'en prends une en particulier, la Régie de police de Richelieu?Saint-Laurent qui couvre un immense territoire. Et la députée de Lotbinière a fait allusion tantôt à l'aspect du service et de la présence policière. Bien, la Régie de Richelieu?Saint-Laurent couvre 17 municipalités. Alors, les voitures se promènent d'un bout à l'autre de ce territoire-là qui est très vaste et qui regroupe plusieurs comtés représentés par différents partis politiques ici, à l'Assemblée nationale. Dans le cas de Saint-Bruno, étant donné qu'ils ont été fusionnés dans la ville de Longueuil, ils sont pris avec le Service de police de Longueuil. Et eux aussi se plaignent du manque d'effectif présent sur le terrain, d'une hausse de petits crimes qui se déroulent présentement dans leur municipalité, qui ne se passaient pas avant parce que Saint-Bruno avait son propre service de police et en était d'ailleurs très satisfait.

Le projet de loi permet un certain nombre de choses et touche à plusieurs points importants qui sont des améliorations pour lesquelles l'opposition officielle se réjouit. Le projet de loi consacre également la constitution du Conseil sur les services policiers du Québec, composé des représentants du monde policier, du monde municipal et du gouvernement, et ce conseil pourra dans l'avenir donner avis au ministre sur toute question relative aux services policiers rendus au Québec. Alors, on sait que ce conseil opère déjà et qu'ils se rencontrent à l'occasion pour discuter. Ce que nous souhaitons et ce que nous espérons, à l'opposition officielle, c'est que les résultats seront intéressants et que le gouvernement aura les oreilles ouvertes, et écoutera, et prendra vraiment acte de ces recommandations qui en découleront afin d'améliorer vraiment les services policiers et de ne pas laisser croire qu'on a créé un autre comité, une autre structure qui va faire d'autres rapports qui vont finir sur la tablette ou qui vont finir dans la déchiqueteuse.

Mais l'enjeu majeur du projet de loi, qui a fait l'objet de demandes insistantes de la part des associations policières, ne se retrouve pas toutefois dans ce projet de loi. Il s'agit de modifications demandées à l'article 119 de la loi concernant la destitution automatique. Les policiers demandaient à ce qu'on enlève le principe d'automatisme dans la destitution, pas la destitution elle-même. Les gens veulent garder des gens honorables dans cette profession, et ceux qui ne sont pas à la hauteur de cette profession se doivent d'être destitués. Cependant, l'automatisme doit être remis en question, comme l'a si bien illustré ma collègue de Lotbinière. Mais le ministre, lui, nous a répondu, en commission parlementaire, et je le cite pour ne pas trahir sa pensée:

«Essentiellement, essentiellement la base du raisonnement est la suivante: pour 20 cas ou 25 cas ou des cas extrêmement rares, j'en conviens, une minorité de cas où des policiers sont accusés d'un acte criminel qui, je le répète pour les gens qui souhaiteraient nous écouter ce matin, constituent les infractions les plus importantes, les plus graves du Code criminel, moi, j'estime que la population [n'acceptera] pas qu'un policier qui est condamné pour un acte criminel puisse continuer à exercer son métier. D'autant plus que l'argument de l'opposition se veut être un argument de justice à l'égard du policier qui est destitué et il a eu sa mesure de justice, le policier qui est destitué, puisqu'il a été accusé devant un tribunal de droit commun de l'acte criminel auquel il doit répondre. Il a bénéficié de la [peine de] présomption d'innocence lorsque la direction du corps de police concerné n'estime pas qu'il s'agit d'une faute lourde. Il a même eu un avocat qui a été payé par les autorités publiques pour le défendre lorsque la direction du service de police estime qu'il s'agit d'une faute lourde, et souvent dans ces cas-là, ils estiment qu'il s'agit d'une faute lourde. [...]J'ai dit, en commission parlementaire, et je [le] répète ? c'est toujours le ministre qui parle, là: Ce n'est pas tout d'avoir l'autorité légale pour exercer une fonction dans la société, encore faut-il avoir une autorité morale. Et, entre vous et moi, que la population réalise qu'un policier qui est condamné pour un acte criminel, encore une fois je le répète, les actes les plus graves du Code criminel, puisse continuer d'exercer la fonction de policier, j'estime que ça ne passe pas la rampe et j'estime que ce serait ne pas rendre service aux policiers que d'accepter l'amendement que dépose l'opposition officielle.» Fin de la citation.

Et il est très difficile de concevoir que ce ne serait pas de rendre service aux policiers que de se rendre à leur demande. Si le ministre n'a pas voulu aller sur ce terrain, c'est parce qu'il en a fait le choix, c'est parce qu'il a bien voulu ne pas y aller. Ça, ça en dit très long, M. le Président, sur l'esprit qui anime ce gouvernement. Il croit que la perception populaire serait très négative si on modifiait l'article 119 qui est une disposition unique au Canada pour les policiers. Est-ce qu'il s'est questionné à savoir comment que ça fonctionnait ailleurs? Est-ce qu'il s'est demandé un instant si la perception populaire était plus négative ailleurs qu'au Québec parce qu'il n'y avait pas une telle disposition dans la loi? Est-ce qu'il s'est dit que, s'il n'y avait pas de disposition pareille ailleurs que dans la Loi sur la police du Québec, c'est parce qu'il n'y en avait pas une absolue nécessité? Nous, à l'Action démocratique, à l'opposition officielle, nous croyons, puisque nous sommes plus progressistes, plus ouverts, plus conscients de créer une telle disposition dans la loi, qu'il fallait y aller avec une modification à l'article 119 et faire preuve de respect envers nos policiers. Nous croyons que dans la population les mentalités ont évolué et que nous en sommes rendus à un point où il serait compris que les policiers aussi ont droit de se faire entendre quand ils doivent être relevés de leurs fonctions.

n(11 h 50)n

Et qu'en disaient justement les policiers en commission parlementaire, M. le Président? Là aussi, je vais les citer parce que je ne veux pas trahir leur pensée. Je pense à Yves Francoeur, le président de la Fraternité des policières et des policiers de Montréal. Voici ce qu'il dit à l'égard de l'article 119: «Résoudre le problème maintenant vous garantit de ne pas avoir à le résoudre plus tard. Nous vous demandons instamment et expressément de ne pas vous laisser divertir par des débats qui sont étrangers à l'enjeu principal de cette révision statutaire de la Loi sur la police après huit ans d'existence de cette fameuse loi. S'il faut ouvrir le débat sur la carte policière sur un mode majeur, faisons-le, mais faisons-le dans l'ordre, après avoir singulièrement amélioré les dispositions qui posent problème dans la Loi sur la police actuelle, à commencer par la destitution.»

«Revenons à l'article 119 de la Loi sur la police. La fraternité déplore encore une fois le fait que le projet de loi ne propose aucun amendement. Le libellé de l'article 119, tel qu'il existe présentement, est totalement inacceptable pour nos policiers et nos policières. Il va sans dire que la fraternité ne désire pas maintenir dans leurs rangs des policiers qui déshonorent la profession et qui se comportent de façon contraire à l'éthique professionnelle. D'ailleurs, dans ces cas-là, nous avons toujours refusé de les défendre. Nous sommes parfaitement d'accord avec l'application de mécanismes ou de processus de contrôle disciplinaire pour les policiers qui ont commis des erreurs, mais nous avons beaucoup de problèmes avec le moyen qui a été choisi par le législateur pour examiner et sanctionner la conduite adoptée par les policiers.»

«En conclusion, nous l'avons déjà dit, pour nous, l'essentiel du travail à faire pour améliorer le projet de loi n° 60 est lié à l'article 119. Le reste n'est pas sans importance, mais autant être francs tout de suite, si nous ne profitons pas de cette révision statutaire de la Loi sur la police pour remplacer la destitution automatique par un mécanisme qui redonnera sa dignité à la profession policière, nous considérerons que l'exercice a été en vain. La proposition que nous vous soumettons pour modifier l'article 119 est à notre avis tout à fait raisonnable. Il appartient aux membres de cette commission et aux dirigeants des trois partis de travailler avec nous pour lever l'automatisme de la destitution afin de régler ce problème dès maintenant.»

C'est une citation qui est quand même assez importante. Ce sont des gens qui veillent à la sécurité de nos enfants, la sécurité sur nos rues, la sécurité dans nos entreprises, la sécurité même des parlementaires. Et, bien que nous soyons déçus que le gouvernement et le Parti québécois aient rejeté l'amendement proposé en commission parlementaire, ce projet de loi contient des avancées importantes. Mais ce que nous espérons, à l'opposition officielle, c'est que dans l'avenir nous pourrons faire encore mieux, et ce jour viendra lorsque le député de Rivière-du-Loup sera premier ministre du Québec et qu'il sera à la tête d'un gouvernement adéquiste. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Simon-Pierre Diamond

M. Diamond: Oui. Merci, M. le Président. Écoutez, je me lève aujourd'hui pour parler du projet de loi n° 60, un projet de loi qui, comme la députée de Lotbinière l'a mentionné, a sa pertinence, puisque c'est un projet de loi qui amène plusieurs modifications, plusieurs ajustements qui étaient nécessaires, souhaités. Mais, avant d'entrer dans le vif du sujet, avant de parler de l'article 119 qui est un enjeu excessivement important qui a fait l'objet de plusieurs débats en commission parlementaire, je me dois, en tant que député de Marguerite-D'Youville, de parler des conséquences qu'a eues la Loi sur la police chez nous, dans mon comté, à Boucherville, qui a fait l'objet évidemment d'une fusion municipale dont on a largement traité, largement débattu, qui a amené l'ADQ à prendre une position sur l'abolition du conseil d'agglomération, une structure qui nous apparaît complètement inadéquate.

La Loi sur la police, elle fusionnait les services de police, à Longueuil notamment, et, aujourd'hui, on vit encore avec ces conséquences, des conséquences qui sont navrantes pour les citoyens de Boucherville. Il fut une époque où on avait notre poste de police, notre chef de police, les services étaient très près des citoyens, accessibles. Les gens appréciaient grandement cette desserte de services là qui correspondait, à bien des égards, à tous nos besoins. La fusion a amené un niveau de police supérieur, nécessaire et requis, puisque la population de Boucherville est largement inférieure à celle de Longueuil fusionnée, un niveau de police qui nous amène à avoir des chiens policiers, des escouades antiémeute, qui nous amène à avoir une panoplie de services que la ville de Boucherville, une ville de banlieue relativement tranquille, n'avait pas nécessairement de besoin, qu'il n'a jamais eu, dans son histoire, besoin non plus et qui amène son lot évidemment de coûts, qui amène des coûts très importants.

Alors, on se retrouve, aujourd'hui, avec des frais pour le service de police excessivement importants. En grande proportion, là, de la quote-part envoyée à la ville de Longueuil, c'est pratiquement 50 % de cette quote-part là qui va au service policier, c'est excessivement important comme dépense, et pourtant les services, eux ne sont pas nécessairement meilleurs. Parce que maintenant, étant fusionnés, vous savez comment ça fonctionne, au même titre que moi, M. le Président. Les appels faits dans le corps policier correspondent à des échelles de mesure, des échelles de grandeur sur la gravité de la situation. Un code très important va avoir préséance pour aller à l'appel, et ce qui fait que les codes moins importants vont prendre plus de temps à être traités. C'est notamment ce qui arrive à Boucherville, une ville, comme je vous ai dit, très paisible. Longueuil, qui vit une réalité très différente, et ça, c'est très malheureux, on en convient, mais qui a son lot de criminalité supérieure à celle de la ville de Boucherville, qui est en périphérie, ce qui fait que, la plupart du temps, les patrouilleurs sont appelés à faire des actions policières à la ville de Longueuil, pour toutes sortes de cas qui, il faut le dire, demandent l'intervention policière mais qui privent la ville de Boucherville de patrouilleurs...

Donc, du jour au lendemain, un corps policier qui nous coûte excessivement cher, qui nous amène des services de corps policier, d'escouade antiémeute puis d'escouade tactique, des choses qui somme toute, comparativement à la base même d'un service policier, d'avoir des patrouilleurs dans nos villes, dans nos routes, qui vont dans nos parcs... ça se trouve à être la base même qui en est négligée pour des services qu'on pourrait se passer. Et d'autant plus que les patrouilleurs se retrouvent à la ville de Longueuil.

L'autre élément qu'il faut mentionner, M. le Président, c'est qu'on avait un poste de police, mais cette restructuration-là s'est vue faite également dans les postes de police, et, aujourd'hui, un simple accident banal qui mérite de faire un rapport à un poste de police, bien les citoyens se rendent dans le défunt poste de police de la ville de Boucherville, frappent à une porte qui est fermée, découvrent avec une certaine part de frustration que, même si notre service de police nous coûte beaucoup plus cher qu'avant, maintenant pour remplir le formulaire puis aviser les autorités policières qu'il y a eu un accident au coin de telle rue et telle rue, bien il faut se rendre à un poste de police à Longueuil, dont la plupart des gens ne savent pas il se situe à quel endroit. C'est un peu dépouiller la ville de Boucherville de son poste de police, de ses services, une chose qui était à mon sens, aujourd'hui, un incontournable d'avoir dans chacune des villes, une ville aussi populeuse que celle de Boucherville, d'avoir un service adéquat de police. C'est la moindre des choses.

Alors, la Loi sur la police, aujourd'hui, a eu son lot de complications, et on vit encore ces conséquences-là, un sujet qui est loin d'être terminé parce qu'il préoccupe les gens. Et, à chaque jour que des personnes se rendent, que des citoyens se rendent au poste de police défunt, ils constatent qu'il n'y a plus de service offert là, ils constatent des cas de criminalité mineurs qu'on était capable de gérer avec une surveillance adéquate des policiers. Bien, aujourd'hui, par exemple, des graffitis à des endroits où il n'y en avait pas, parce qu'il y a moins de patrouilleurs qui circulent, bien ça, ça choque les gens et ça amène une réflexion sur: Est-ce que ça a été fait dans le meilleur des intérêts des citoyens, cette Loi sur la police là? Et certainement le débat a cours. Et, moi, je suis le député, je représente les citoyens de Boucherville et Sainte-Julie. Évidemment, cette conséquence-là se vit uniquement pour les citoyens de Boucherville, mais je suis excessivement préoccupé par toute cette situation-là. Et je tiens, aujourd'hui, à dire aux citoyens de la ville de Boucherville que le combat n'est pas terminé dans cette escalade des inconvénients, suite à la fusion, à la défusion puis à toute la confusion qui s'en est rattachée.

Maintenant, j'aimerais, pour les minutes qu'il me reste, M. le Président, aborder le dossier qui a été traité par la députée de Lotbinière et par le député de Chambly, celui de l'article 119, qui nous apparaissait un problème majeur dans toute la gouvernance de notre sécurité publique, qui a été l'objet de revendications très claires de la part des policiers, depuis excessivement longtemps, une revendication qui a été appuyée par la députée de Lotbinière, qui a amené, en commission parlementaire, cette revendication-là, qui a tout fait ce qui était possible pour régler ce problème-là. Malheureusement, on n'a pas eu le support, le concours de la deuxième opposition et celle du gouvernement dans ce dossier-là.

n(12 heures)n

Et je vais me permettre de citer Denis Côté, président de la Fédération des policiers municipaux, qui disait, en commission parlementaire, sur l'article 119, que, «même si certaines améliorations ont été apportées, des problèmes majeurs ? ça, c'est traitant de la loi n° 60, du projet de loi n° 60 ? demeurent et nécessitent une correction, notamment en ce qui concerne la destitution automatique, [donc] l'article 119, ainsi que l'obligation prévue à l'article 260, que le projet de loi corrige trop timidement [et ne s'y rattache pas] que l'aspect de la discipline.»

Sur l'article 119, il disait également: «...la destitution. Le projet de loi ne traite pas de cette disposition. Il s'agit pourtant d'une revendication majeure du milieu policier, l'un des aspects les plus irritants de la législation de 2000.» Donc, il faut bien voir qu'il n'y a pas eu simplement des irritants à la ville de Boucherville, mais bien dans le corps policier au grand complet. «L'article 119 prévoit la destitution automatique d'un policier reconnu coupable d'un acte criminel pur. Elle privilégie également la destitution dans le cas d'un acte mixte, sous réserve des circonstances particulières.»

On a tous entendu avec émotion le témoignage de la députée de Lotbinière, tout à l'heure, sur ce policier qui faisait une intervention, avec la plus grande responsabilité, dans l'intérêt des citoyens, de suivre un individu qui fuit un policier, et puis qui finalement se retrouve à devoir quitter son emploi parce que justement l'article 119 amène un lot de problèmes et d'inconvénients. Il me semble que c'est le devoir de tout État de modifier une disposition aussi problématique. Il me semble qu'on aurait dû, en commission parlementaire, traiter, M. le Président, de cette disposition-là.

Denis Côté continue en disant: «Ce n'est pas vrai que le principe de destitution doit être privilégié dans tous les cas, lorsque l'infraction reprochée ne met pas en cause la probité du policier.» Je pense qu'effectivement dans certains cas, on peut mettre en doute la compétence du policier, mais, dans bien d'autres cas, c'est une aberration, ce que l'on vit, de mettre tous les oeufs dans le même paquet, de penser que le policier est automatiquement destitué dès qu'il y a une infraction. Il se doit d'avoir une réflexion, une réflexion qui a été amenée par le Syndicat des policiers, une réflexion qui a été supportée par bien des intervenants dans la population, une revendication qui a été appuyée par l'ADQ. Et je pense qu'on se doit d'y mettre un terme immédiatement, à cette aberration-là.

Les policiers, aujourd'hui, agissent dans des circonstances excessivement difficiles, M. le Président, la moindre des choses que l'on peut leur accorder ? et puis là je comprends que le temps est écoulé, mais je termine là-dessus ? la moindre des choses qu'on peut accorder à un policier, c'est le respect de ses fonctions, le respect de son environnement de travail, qui est excessivement difficile. Et, à l'ADQ, on a entendu le message. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député d'Arthabaska.

M. Jean-François Roux

M. Roux: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir, ce matin, d'intervenir dans le débat sur le projet de loi n° 60. Je tiendrais tout d'abord à souligner le travail exceptionnel qui a été fait par la députée de Lotbinière lors de l'étude de ce projet de loi là et, comme mes deux collègues l'ont fait, je vais le faire beaucoup plus brièvement, mais souligner l'importance de l'amendement qu'elle a apporté dans ce dossier-là, de prouver une fois de plus qu'elle était une parlementaire responsable, une parlementaire redoutable également et très, très au fait du dossier.

Je voudrais élargir un peu le débat. Je comprends que le projet de loi n° 60 était attendu depuis bien longtemps dans le milieu policier. Je comprends également que la loi avait été, à toutes fins pratiques, inchangée depuis l'an 2000 et que le milieu policier accueille à bras ouverts les nouvelles dispositions.

Ceci étant dit, pour avoir travaillé un dossier qui est parallèle à celui-là mais qui s'y rattache ? vous verrez où je veux en venir ? et pour avoir discuté avec certains policiers, une autre chose que les policiers attendent depuis longtemps, c'est le support du gouvernement dans le dossier de la contrebande de cigarettes. C'est un problème qui est en constante évolution, qui croît à toutes les années, j'irais même jusqu'à dire qu'il s'accroît à tous les mois. C'est un problème... un phénomène qui prend de l'ampleur constamment, à tel point qu'en 2008 la GRC a déposé une stratégie de lutte contre le tabac de contrebande, M. le Président, où on cite, à l'intérieur, l'urgence d'agir de façon énergique et de façon soutenue dans ce dossier-là.

Et, sur divers débats qu'on a eus, le ministre Fournier citait la collaboration entre le gouvernement du Québec, la Sûreté du Québec, avec la GRC, la Gendarmerie royale canadienne, et d'autres corps policiers qui sont également touchés par le phénomène. Ce qu'on peut constater maintenant, c'est que la GRC a fait ses devoirs. D'autres corps policiers ont fait leurs devoirs également et mis sur pied un plan d'intervention, une stratégie de lutte. Par contre, lorsqu'on demande au ministre de la Justice, lorsqu'on demande au ministre du Revenu, qui est touché directement parce que les pertes de revenus pour le gouvernement québécois sont énormes dans ce problème-là, si on a, nous aussi, une stratégie, est-ce qu'on a un plan d'intervention, est-ce qu'on a seulement l'intention d'agir pour diminuer le phénomène, bien le ministre du Revenu, qui prend souvent la parole, nous fait une liste de litanies qu'on connaît tous par coeur, rendu aujourd'hui, mais qui ne convainc plus absolument personne. Donc, ce qu'on constate, c'est que, pour eux, dans la tête du gouvernement, tout est sous contrôle, tout va bien, on fait ce qu'on peut, on n'en fait pas trop, on ne dérange pas personne, puis tout va se régler par magie.

Vous savez, on juge un arbre par ses fruits, on juge de l'ampleur d'un problème par sa progression. Bien que le gouvernement ait fait état d'arrestations et de condamnations plus élevées que dans le passé, le phénomène continue d'augmenter à une vitesse fulgurante. On parle d'une diminution des ventes de tabac légal, depuis 2001, de 50 %. C'est la moitié des ventes qui sont... Il y a eu une certaine baisse du tabagisme, on doit le reconnaître, mais qui est loin d'être de 50 %. On peut donc en conclure que le reste des 50 % s'en va directement dans l'achat de tabac illégal au Québec. Et les pressions que ça crée, non seulement la pression financière sur le gouvernement, mais plus directement sur tous les détaillants du Québec... Les détaillants, les dépanneurs, les épiceries, tous les points de vente de tabac, au Québec, subissent une pression indue présentement, une pression financière, une baisse de revenus importante, qui va de 25 % à 50 % dans certains cas.

Il ne faut pas oublier que les gens, là, qui subissent les contrecoups de l'inaction gouvernementale, ce sont des contribuables, des gens responsables, souvent des créateurs d'emplois, des entrepreneurs, des gens dynamiques, des gens impliqués dans leur milieu, qui, pour eux, respectent toute la réglementation, aussi sévère soit-elle ? et avec raison, on comprend que la réglementation sur la vente des produits du tabac soit sévère ? ils la respectent à la lettre. Ils respectent les règlements, entre autres sur l'âge légal de vendre du tabac. On sait que les détaillants sont sensibilisés à cette problématique-là, ce que les trafiquants ne sont pas.

Maintenant, ils doivent s'adapter à la nouvelle réglementation sur l'affichage et l'entreposage des produits du tabac hors de la vue des clients, et ça, à grands frais. Pour la plupart des établissements, bien c'est un changement de matériel, c'est un changement d'affichage qui est très important et qui amène des coûts importants. Et, bien entendu, ces gens-là subissent également la visite d'inspecteurs pour vérifier que tout est fait, donc se conforment parfaitement à la loi. Et c'est aussi des gens qui perçoivent des taxes pour le gouvernement du Québec.

Ce qu'eux demandent, comme ce que l'ADQ demande, c'est une application uniforme des lois. Ces gens-là sont heureux de se conformer aux lois, pas toujours de débourser ce que ça coûte, mais on comprendra que parfois c'est des coûts importants, mais ils s'y prêtent de bonne foi parce qu'ils veulent être des citoyens responsables. Maintenant, ils s'attendent à ce que le gouvernement exige la même chose de tout le monde partout au Québec.

Le tabac de contrebande a des conséquences importantes également sur la santé. Une étude récente montrait que, dans du tabac de contrebande, il y avait cinq fois plus de sélénium, 20 fois plus de plomb, deux fois plus de mercure, sept fois plus d'arsenic, trois fois plus de cadmium. C'est un produit excessivement toxique, beaucoup plus que la cigarette régulière peut l'être. Et on sait déjà les conséquences désastreuses du tabagisme, même en tabac légal, ce que ça peut avoir sur la santé. Vous savez, ce que je vous ai récité, là, comme liste d'ingrédients, là, ce n'est pas le contenu d'une batterie, là, c'est le contenu d'une cigarette de contrebande.

Autre phénomène qui est relié à la contrebande de tabac, c'est l'augmentation du tabagisme chez les jeunes. Vous savez, lorsqu'on établit des lois, au gouvernement, pour dire: Bien, on ne vend pas de tabac aux gens de moins de 18 ans, bien je pense que c'est la moindre des choses, je pense que c'est tout à fait logique, je pense que, si on veut combattre le tabagisme, on doit restreindre l'accès au tabac aux mineurs, et c'est tout à fait louable. Par contre, lorsqu'on laisse aller la contrebande, les contrebandiers, eux, ne cartent jamais un client, ne vont jamais demander à un client s'il a 18 ans, ne vont jamais demander à un client s'il a la permission de ses parents.

Vous savez, la contrebande est par définition une activité criminelle et menée par le crime organisé, des gens qui n'ont aucun souci pour les mineurs. C'est des gens qui se servent des revenus de cette activité-là tout à fait illégale pour financer le reste de leurs activités illégales. Que ce soit la vente de stupéfiants, que ce soit le trafic d'armes, que ce soit toute autre activité qui est contrôlée par le crime organisé, c'est financé en grande partie parce que le phénomène, là, est devenu tellement gros que c'est rendu une véritable vache à lait, la contrebande de tabac, c'est là qu'ils retirent une grande partie de leurs revenus, et on finance d'autres activités par ça.

n(12 h 10)n

Et c'est là où je veux en venir, et c'est là que je me rapporte aux forces policières. On demande aux forces policières de combattre tous ces fléaux-là, ceux que j'ai mentionnés et d'autres, mais le gouvernement refuse de s'engager dans une voie qui énergiquement combattrait un problème qui est, à la base, le financement premier des organisations criminelles. Je suis sûr que les policiers apprécient le projet de loi, j'en suis convaincu pour en avoir discuté avec plusieurs d'eux. Peut-être aussi apprécieraient-ils un support du gouvernement dans leur travail de lutte au crime organisé. Et on sait que la façon de frapper où ça fait mal, dans le crime organisé, c'est d'aller au financement, c'est d'aller là où le crime organisé tire ses revenus. Ils sont en affaires, ces gens-là, pour faire de l'argent, et là une grande partie de leurs revenus est tout simplement... par inaction est laissée au libre cours.

Et, vous savez, on décrit depuis longtemps, l'ADQ, cette situation-là, mais on n'est pas les seuls. Dans un article publié le 8 mai dernier dans Le Devoir, la journaliste Isabelle Rodrigue, qui parlait du plan d'intervention de la GRC pour décrire l'action gouvernementale, titrait: Québec s'écrase?. C'est très révélateur, M. le Président. On n'est pas les seuls à avoir cette opinion-là que le gouvernement du Québec ne pose pas les gestes nécessaires pour en venir à bout. Le ministre, dans cet article-là, lui-même, et je le cite textuellement, disait: «Nous devons [...] nous assurer qu'il y ait une application [de la loi] qui évite des effets collatéraux.» M. le Président, ce que ça veut dire en clair, c'est qu'on est bien d'accord d'appliquer la loi, mais, s'il y a des gens à qui ça ne fait pas vraiment leur affaire, bien là il faut y repenser. On n'est pas sûrs qu'on veut déranger.

C'est sûr que le ministre du Revenu, qui semble être un porte-parole important dans le dossier et qui compte une pléthore, une quantité étonnante de points de vente dans son propre comté, est peut-être un petit peu réticent à agir énergiquement. J'espère cependant que l'attitude du gouvernement changera et qu'il appuiera les forces policières de façon plus importante, de façon plus décisive dans ce dossier.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Le rapport de la Commission des institutions portant sur le projet de loi n° 60, Loi modifiant la Loi sur la police, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Picard): Adopté. M. le leader.

M. Gautrin: M. le Président, auriez-vous l'amabilité d'appeler l'article 1, s'il vous plaît?

Débats sur les rapports de commissions

Prise en considération du rapport
de la commission qui a procédé
à l'examen des orientations,
des activités et de la gestion de
certains organismes publics

Le Vice-Président (M. Picard): Avec plaisir, M. le leader. À l'article 1, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de la culture qui, le 18 mars, 8 et 9 avril 2008, a entendu le Conseil supérieur de la langue française, l'Office québécois de la langue française et la Commission de la toponymie du Québec dans le cadre d'un mandat de surveillance d'organisme. Ce rapport, qui a été déposé le 20 mai 2008, contient huit recommandations.

Je vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, la prise en considération du rapport donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable.

À la suite d'une réunion avec les leaders, je vous informe que le temps de parole pour la durée de ce débat sera réparti selon le critère objectif de la proportionnalité. Chaque groupe parlementaire se verra donc attribuer une enveloppe de temps proportionnelle au nombre de sièges qu'il détient dans cette Assemblée. En conséquence, le groupe parlementaire formant le gouvernement disposera de 46 min 5 s, l'opposition officielle, de 39 min 21 s, et le deuxième groupe d'opposition disposera de 34 min 34 s. Le temps non utilisé par un groupe sera transféré aux deux autres groupes selon la proportion des sièges qu'ils détiennent, et les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Enfin, je vous rappelle qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 95 ce débat n'entraîne aucune décision de l'Assemblée.

Je suis maintenant prêt à céder la parole à un premier intervenant. Je reconnais M. le député de Viau et adjoint parlementaire au ministre de la Solidarité sociale et de l'Emploi.

M. Emmanuel Dubourg

M. Dubourg: Merci, M. le Président. M. le Président, je suis très heureux de prendre la parole, aujourd'hui, concernant ce rapport qui a été déposé, d'abord à titre aussi de vice-président de la Commission de la culture.

Je voudrais tout d'abord, M. le Président, saluer et remercier les sociétés d'État que nous avons reçues en commission, en particulier Mme Boucher, qui est la présidente de l'Office québécois de la langue française et présidente par intérim de la Commission de la toponymie. Nous avons aussi rencontré M. Ouellon, qui est président du Conseil supérieur de la langue française.

M. le Président, l'objet de ces rencontres de la Commission de la culture était de procéder à l'examen de la mission, des activités et de la gestion de ces trois organismes que j'ai nommés précédemment, et il faut dire que ce mandat a été réalisé en vertu de l'article 294 du règlement de l'Assemblée nationale du Québec. Nous avons discuté, entre autres, du rapport sur l'évolution de la situation linguistique au Québec, ce sur quoi, M. le Président, je voudrais vous entretenir.

Il est vrai que les médias en ont longuement parlé, du rapport de l'Office québécois de la langue française, parce que la langue française, comme on le sait, c'est un dossier important et il faut aussi en parler. En deux mots, ce qu'on peut y lire, c'est que les actions posées par le gouvernement libéral, M. le Président, ont porté fruit. Que dit le rapport de l'Office québécois de la langue française dans ce contexte? C'est qu'au chapitre tout d'abord de la connaissance du français, on nous dit que la connaissance de la langue française est en hausse au Québec. De 1991 à 2006, elle s'est accrue de manière appréciable tant chez les personnes de langue maternelle anglaise que chez celles de langue tierce. Ensuite, on nous dit aussi: «Entre 2001 et 2006, la connaissance du français a progressé, au Québec, pour passer de 50,5 % à 53,2 % chez les personnes de langue maternelle anglaise et de 72,2 % à 74,5 % chez celles de langues maternelles tierces.» C'est ce qu'on peut lire dans ce rapport-là, à la page 59.

Une autre variable, M. le Président, dont il faut tenir compte est celle des transferts linguistiques, c'est-à-dire les gens qui choisissent le français comme langue d'usage. L'évolution des substitutions linguistiques révèle, d'après ce rapport, que, pour l'ensemble du Québec, il y a un attrait croissant du français. Sa force d'attraction est passée de 35 % à 45,7 %. Le recensement de 2006 semble indiquer pour la première fois que la proportion de transferts en faveur du français serait plus élevée que celle en faveur de l'anglais, M. le Président.

Un autre facteur qu'on doit tenir compte quand on prend en considération ce rapport, M. le Président, c'est la situation du français chez les immigrants. Nous savons que le Québec est une terre d'accueil, vous le savez aussi, M. le Président, que, nous du Parti libéral, nous avons décidé d'augmenter les seuils d'immigration et, pour ce, nous avons aussi mis de l'avant un certain nombre de mesures pour faciliter l'intégration et la francisation aussi des immigrants.

Dans ce rapport, ce qu'on nous dit, c'est que le français chez les immigrants... «Entre 2001 et 2006, la population immigrée a augmenté de manière significative. En 2006, un peu plus d'un Québécois sur 10 était né à l'étranger.» Dans ce rapport, à la page 73, on nous dit que «ces nouveaux arrivants proviennent de tous les continents et parlent une multitude de langues. Toutefois, le français est de loin la langue maternelle la plus souvent signalée par les personnes immigrées, suivi de l'arabe, de l'espagnol, de l'anglais et de l'italien», ou même du créole, peut-on dire. Permettez-moi...

Donc, pour continuer, M. le Président, oui, je parlais de substitutions, donc il y a plusieurs substitutions en faveur du français qui sont réalisées ou amorcées avant même l'arrivée de l'immigrant ici, au Québec, et cela est dû par l'image francophone qui est projetée par le Québec à l'étranger. «Un certain nombre d'entre elles ? je parle de ces substitutions ? découlent vraiment de l'application de la politique d'immigration du Québec, et particulièrement de ses critères de sélection. Par ailleurs, le pouvoir d'attraction ? on peut lire dans ce rapport ? du français au Québec est aussi renforcé par différentes dispositions de la Charte de la langue française, notamment celles sur la langue de l'enseignement et sur la langue du travail.»

n(12 h 20)n

Permettez-moi M. le Président, de vous faire part de quelques conclusions que nous pouvons tirer de ce rapport de l'Office québécois de la langue française. D'abord, le bilan est un portrait du Québec dans toute sa modernité. Toutes les conditions sont réunies pour consolider le visage français du Québec.

Un autre élément, on nous dit que par ailleurs il y a, dans ce rapport, certaines données qui démontrent que nos actions contribuent à améliorer la situation du français au Québec: qu'on parle de francisation des grandes entreprises, qui progresse, on parle de 80 %; du fait que les immigrants optent de plus en plus pour le français; et qu'enfin les produits culturels québécois attirent de plus en plus d'anglophones et d'allophones.

Par contre, M. le Président, nous ne pouvons nier que la situation du poids démographique est préoccupante. Par ailleurs, nous avons agi. Nous avons mis en place une excellente politique familiale. Nous constatons qu'en 2006 le Québec a enregistré la plus forte augmentation en pourcentage des naissances ? on parle de 8 % ? depuis 60 ans. On n'est pas sans savoir aussi que nous avons un programme d'assurance parentale qui est très populaire et que ce programme-là permet aussi bien aux mères de famille qu'aux pères de rester à la maison pour prendre soin de leur nouveau-né. Il y a aussi le programme d'allocation familiale qui est très généreux. Ce n'est pas étonnant, M. le Président, que La Presse titre que le Québec, c'est le paradis des familles. Et ça, c'est grâce à nos mesures, nos plans d'action que nous avons mis en place.

M. le Président, pour réaliser ces auditions-là que nous avons tenues en commission parlementaire, nous avons pu compter, et je veux le souligner, sur la précieuse collaboration de l'équipe de recherche et du personnel de la Commission de la culture. Je tiens à les remercier pour leur excellent travail, ce qui nous a permis d'aborder différents thèmes, en commission parlementaire, avec la présidente, Mme Boucher, et aussi M. Ouellon.

Il est vrai que, dans les médias... et même aussi l'opposition disait que, dans ce rapport soumis par l'Office québécois de la langue française, ce sont des... ils nous ont présenté des situations et qu'il n'y avait pas de conclusion. M. le Président, Mme Boucher, en commission parlementaire, voilà qu'est-ce qu'elle avait à nous dire par rapport à ces éléments-là. Elle disait, et je cite: «[Les membres de l'Office québécois de la langue française] ont privilégié des conclusions sur chacun des six chapitres du rapport plutôt que de formuler une opinion générale qui n'aurait pas rendu justice à la complexité des questions examinées.»

En parlant des plaintes, dans ce rapport-là, on nous dit aussi que le nombre de plaintes est en baisse concernant la langue française. Concernant aussi l'admission aux ordres professionnels des immigrants, bien, vous le savez, l'Office québécois de la langue française leur fait passer des examens de français et, à ce titre, on peut lire qu'environ 51 % de ces personnes-là réussissent dès leur première tentative, puis ce taux-là passe à 86 % après deux essais, tentatives d'examen. Les efforts déployés par l'Office québécois de la langue française ont permis de maintenir une période d'attente minimale de un mois pour subir cet examen.

Donc, je le disais, nous avons rencontré ces personnes-là, en commission parlementaire, durant trois jours d'audience, le 18 mars, les 8 et 9 avril dernier. La Commission de la culture en a fait quelques recommandations à ces trois organismes-là, visant, entre autres, M. le Président, à l'amélioration de la reddition de comptes. Mais essentiellement notre rapport mentionne ce qui suit, et encore une fois je cite: «Les députés tiennent à souligner l'ampleur et la qualité du travail accompli au sein de chacun des organismes. Les résultats en regard des objectifs stratégiques en témoignent. De manière particulière, [les députés] saluent la qualité des outils terminologiques et toponymiques et celle des publications du Conseil supérieur de la langue française.»

M. le Président, les actions du gouvernement libéral ne s'arrêtent pas là. Plans d'action gouvernementaux, nous en avons eu plusieurs, et ma collègue, tout à l'heure, va pouvoir vous dévoiler encore plus longuement en quoi consiste ces plans d'action là. Mais permettez-moi de souligner qu'il y a eu plusieurs nouvelles mesures qui touchent la langue française, qui visent l'Office québécois de la langue française. Il y a eu ajout de 20 ressources, 20 nouvelles ressources sur le terrain, à l'Office québécois de la langue française, et ça, on parle de 2 millions de dollars, M. le Président. Il y a aussi des programmes de francisation des technologies dans les entreprises. La ministre de la Culture, de la Communication et de la Condition féminine en a fait l'annonce, et à ce titre on parle de 2 millions de dollars qui ont été investis. On parle aussi de rendez-vous des gens d'affaires auxquels nous sommes conviés, et ça, c'est pour 1 million de dollars. Et aussi on parle d'élaboration de plans de suivi sur l'affichage dans la région de Montréal. Notre gouvernement entend aussi valoriser l'usage d'un français de qualité. La ministre de l'Éducation a déjà établi des mesures pour assurer que nos enfants réussissent en français à l'école. Au total, c'est près de 39 millions de dollars qui sont consacrés à la réussite scolaire en français.

Donc, toutes ces mesures-là, M. le Président, ça, c'est pour valoriser et pour encore une fois donner plus de possibilités à la langue française, aller encore plus loin dans ce qu'on fait comme actions pour promouvoir cette langue-là.

De plus, la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, elle aussi, elle a fait des annonces pour présenter des mesures pour permettre d'accueillir et faciliter l'intégration et la francisation aussi des immigrants, donc de faire en sorte que ces gens-là, les immigrants qui choisissent le Québec, qu'ils épousent en même temps la culture française du Québec moderne. Je vous rappelle d'ailleurs que les études publiées, M. le Président, par l'Office québécois de la langue française nous apprenaient que de plus en plus d'allophones consomment, comme je l'ai dit tantôt, des produits culturels francophones.

Au total, près de 23 millions sont consacrés à la francisation des immigrants. Ce sont au total 80 millions de dollars de nouvelles sommes en francisation, en concertation avec ces trois ministères, ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, ministère de la Culture et de la Condition féminine, qui est responsable de la charte, et aussi la ministre de l'Éducation. Donc, 80 millions de dollars. Donc, vous voyez, M. le Président, c'est un travail de concert, donc ce n'est pas qu'un seul ministère qui prend des mesures pour la langue française. Donc, nous voulons valoriser et aussi voir à la qualité de la langue française. Donc, en un mot, c'est que nos mesures sont concrètes et s'attaquent à la réalité: la qualité du français, l'intégration en français des immigrants, la valorisation, la promotion et la protection de la langue française.

Pour la première fois en 20 ans, notre gouvernement est le premier à réinvestir aussi massivement dans les outils de protection de la langue française. Par contre, M. le Président, nous sommes déçus que le Parti québécois ait voté contre le budget. Vous avez vu, lors du discours du budget, combien d'argent qu'on a consacré pour la langue française; malheureusement, ils ont voté contre ce budget. Et nos collègues aussi d'en face, de l'opposition, bien on se demande encore c'est quoi, leur stratégie. On attend encore leurs propositions pour améliorer la situation de la langue française.

Du côté du Parti québécois, M. le Président, qu'est-ce qu'on nous propose? On nous dit: Écoutez, il faut modifier la Charte de la langue française. Bien, c'est ça, leur proposition, en gros. Et d'ailleurs la chef du Parti québécois a annoncé dernièrement que, si son parti était porté au pouvoir, elle créerait une nouvelle loi 101. M. Ouellon, en commission parlementaire, à ce propos, du Conseil supérieur de la langue française, a clairement indiqué que la loi actuelle offre la marge de manoeuvre pour proposer des moyens pour améliorer la situation du français. Oui, il y a place à amélioration. Mais est-ce qu'il faut une nouvelle loi 101? Vous voyez que, même dans les médias, on en parle, on a dit: Non, ce n'est pas nécessaire.

n(12 h 30)n

Elle souhaite aussi... bien, enfin, le Parti québécois souhaite obliger tout employeur dont les conditions d'embauche pour un emploi demandent la connaissance d'une autre langue que le français de démontrer la nécessité de cette connaissance pour occuper l'emploi.

Le Parti québécois aussi propose de franciser aussi toutes les entreprises, même celles de 50 employés et moins. À ce titre, je cite: «Nous n'hésiterons pas à imposer des amendes si les choses ne changent pas.» C'est ce qu'a indiqué le Parti québécois. Or, M. le Président, il y a 6 000 entreprises environ de 50 employés et plus, et là, présentement, nous sommes rendus à 80 % du processus de francisation. Il y a 60 conseillers à l'Office québécois de la langue française pour accompagner, pour aider ces entreprises-là dans le processus de francisation. Donc, si maintenant on disait: Oui, bon, on va accepter de franciser toutes les entreprises de 50 employés et moins, là, on est rendus, il faudrait franciser plus de 200 000 entreprises. Est-ce nécessaire? Donc, pour franciser 200 000 entreprises, en tout et partout, ça prendrait, quoi, 6 000 conseillers pour accompagner ces 2 000 entreprises là à un processus de francisation. Est-ce nécessaire? Cela veut tout simplement dire qu'on exigerait, par exemple, à une station de service qui se trouve au Saguenay?Lac-Saint-Jean, on exigerait un certificat de francisation. Est-ce qu'on demanderait au dépanneur du coin, qui a peut-être un seul employé, que cette entreprise-là, que ce dépanneur-là ait un certificat de francisation? Parce qu'on cherche à franciser toutes les entreprises de moins de 50 employés, donc...

D'ailleurs, il y a Mme Diane Lemieux, le 23 mai 2002, une ancienne députée du Parti québécois, voilà qu'est-ce qu'elle disait à propos... en commission parlementaire, à ce sujet, elle disait: «Alors, je veux préciser que le nombre de travailleurs est à peu près de 1,3 million au total, qu'on est à peu près 900 000 personnes dans les entreprises de 50 employés et plus, et 50 employés et moins, 450 000. C'est une corvée, tout de même.» C'est ce qu'elle a eu à dire pour dire que ce n'était pas nécessaire de franciser les entreprises de moins de 50 employés.

Le journaliste André Pratte disait, dans La Presse, que le Parti québécois propose des mesures légales tous azimuts, coûteuses, inutiles et controversées.

Vous avez vu, dans la foulée des accommodements raisonnables... Bon, d'ailleurs, les commissaires, MM. Bouchard et Taylor, bon, c'est deux intellectuels dont on connaît bien. Bon, ils ont soumis leur rapport, malgré le fait que ce n'était pas l'essentiel de leur mandat, mais ils ont eu quand même à en parler. Et qu'ont-ils dit dans ce rapport? Ils disent que, pour eux, la langue française n'est ni en état de crise ni en péril au Québec. Il n'y a pas de changement brusque, profond qu'on puisse assimiler à une crise et qui appellerait à des mesures radicales. Ils ne partagent pas l'idée alarmante du Parti québécois que le progrès réalisé du bilinguisme au Québec mette la langue française en péril. Ils disent qu'il est hautement souhaitable que le plus grand nombre possible de Québécois apprennent l'anglais en plus du français, sinon c'est une génération de francophones qui risque d'être injustement pénalisée. C'est leurs propos, leurs citations, M. le Président.

Donc, oui, le Parti québécois, bon, on a parlé aussi de ce projet de loi aussi n° 195, encore une fois projet de loi qui cherche à diviser parce que, dans ce projet-là, on parle de nous versus eux. À ce moment-là, est-ce qu'ils vont aussi créer deux sortes d'impôt: un impôt pour les «nous» et un impôt pour les «eux»? Enfin, bref, M. le Président... Et le Parti québécois n'est pas en reste, là, parce que, même du côté du parti de l'Action démocratique aussi, on attend encore des propositions de leur part. Mais, dans les médias, ce qu'on y voit aussi, c'est que, concernant l'enseignement du français, bon, l'une des propositions, c'était qu'on enseigne ? du Parti québécois ? la géographie et l'histoire nationale du Québec en anglais. La citation dans les journaux, ce qu'on pouvait lire, c'est que, si on met plus de temps dans les premières années sur certaines matières, on peut prendre plus de temps ensuite en anglais, estime la chef, on peut prendre certains cours d'histoire et les donner en anglais. Ça peut être la géographie, ça peut être un autre cours de formation générale. Bien, écoutez, c'est... En plus, on qualifie le plan d'action du gouvernement, ce plan d'action concerté, de ridicule et d'insignifiant, et ensuite on reprend la plupart des modifications ou bien de ce qu'on propose pour les mettre dans un projet de loi. Écoutez, je crois que nos actions portent déjà fruit, et il faut continuer en ce sens.

Un autre élément aussi, là, pour parler de situations un peu cocasses, c'est que j'ai mon collègue le député de Borduas qui disait que, «quand on fréquente un CPE, comme dans les écoles, la même logique s'applique». Il parlait de la langue française. «Je pense qu'on serait en droit d'exiger ça dans la mesure où on sera capable d'offrir le nombre de places suffisantes», disait le député de Borduas. Bien, malheureusement et tout de suite, son chef l'a rappelé pour lui dire: Non, il ne faut pas parler de ces choses-là.

Enfin, M. le Président, encore une fois je veux vous rappeler que c'est 80 millions qui ont été investis. C'est des actions concertées avec trois ministères de façon à assurer la valorisation, la promotion de la langue française, M. le Président.

Donc, oui, j'ai vu mon collègue aussi du parti de l'Action démocratique. Bon, encore une fois, concernant le français, ce qu'on a vu dernièrement, c'est dans les médias, pendant les dernières élections, les élections partielles, le parallèle qu'on faisait: recul du français et, tout de suite après, l'immigration. Or, M. le Président, la situation, on parle plutôt de question démographique. C'est essentiellement cet élément-là qu'il faut tenir compte.

En conclusion, M. le Président, ce que je voudrais dire, c'est que le rapport qui a été déposé par l'Office québécois de la langue française... Bon, nous avons reçu la présidente et le président du Conseil supérieur de la langue française en commission parlementaire. Ils ont répondu à nos questions, il y a eu clarification sur tous les sujets. Et ce que je peux dire, c'est que nous avons fait un certain nombre de recommandations, et le rapport leur est soumis de façon à ce que, que ce soit au niveau de reddition de comptes ou de tout autre élément, qu'il y ait des suivis par rapport à ces éléments-là. Encore une fois, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de Berthier, porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture, communications et langue. M. le député.

M. François Benjamin

M. Benjamin: Merci, M. le Président. Alors, tout d'abord, je tiens à saluer mes collègues de la Commission de la culture, avec qui j'ai entendu, au cours des derniers mois et des dernières semaines, les organismes rattachés à la Charte de la langue française.

Avant de commencer mon discours, je tiens à rappeler, cette commission, l'ambiance qu'il y avait dans cette salle lors des auditions de ces trois groupes. En effet, je peux dire sans me tromper que tous les députés ici présents sont arrivés à des auditions avec maintes et maintes questions. Chacun a occupé le pourcentage de temps qui lui était attribué, et il y avait tellement de questions qu'on se perdait dans nos papiers parce que, là, à force de... Chacune des questions qui était reprise par d'autres partis, il y avait tellement de questions que ça aurait pris trois commissions comme ça. Plusieurs interrogations, des doutes, du scepticisme face à ces organismes. On nous avait donné un mandat de surveillance, puis je pense bien que nous avons réussi à le faire.

Je ne surprendrai pas personne ici en affirmant que l'organisme qui a été attendu avec le plus d'impatience était l'Office québécois de la langue française. La controverse entourant le dépôt du rapport et la publication de l'étude du démographe Marc Termote a occupé le devant de la scène médiatique du Québec pendant quelques semaines au retour des vacances, vous vous en souvenez sûrement. Je pense que tout le monde s'en souvient, avant même qu'on commence à écouter et qu'on ait un mandat d'initiative pour écouter à cette commission l'Office québécois de la langue française, c'était dans tous les journaux déjà, on attendait avec impatience cette commission.

n(12 h 40)n

Les circonstances dans lesquelles le rapport quinquennal a été rendu public, associées à un bilan mitigé, selon qu'on se trouve d'un côté ou de l'autre de la Chambre ? j'ai bien entendu mon collègue tout à l'heure, je pense qu'on n'a pas la même interprétation de la façon et de la même commission ? on a entendu ça avec... on a eu l'impression qu'elle soufflait un peu sur le brasier de la question de la langue française au Québec, parce que ça demandait juste une petite brise puis ça s'est allumé. Cela a probablement provoqué une certaine tension lors de l'audition de Mme Boucher, mais je pense, au terme du processus, que nous avons repris sur nous et sur nos émotions les interprétations de la situation pour laisser place à la présidence et à ses réponses.

Je dois admettre que j'aurais espéré que les intervenants, principalement ceux de l'Office québécois de la langue française, nous élaborent de façon plus concise et plus substantielle un état de la situation du français au Québec. En effet, je continue de penser que les rapports et études ont été noyés les uns dans les autres lors de la publication de milliers de pages d'information et de données sur le sujet. Je pense que c'est la meilleure façon de comprendre exactement ce qui se passe, c'est: avec l'ensemble et la multitude... et toutes les études, les rapports, tellement de papier que, là, quand tu arrives en commission, on appelle ça un peu noyer le poisson. Puis j'ai eu l'occasion de le dire en commission, j'en ai perdu moi-même mon français.

Je déplore, M. le Président, alors que la ministre de la Culture et des Communications et responsable de la langue française semblait elle-même impliquée dans ce chaos... Je rappelle à mes collègues de l'Assemblée nationale que, lors de sa première question à mon collègue sur la langue française, la réponse de la ministre était: Tolérance zéro. Ça été, je pense, les premiers mots qu'elle a dits à l'Assemblée nationale au niveau de la langue: Tolérance zéro. Elle ne nous avait pas parlé du chaos, par contre.

Remettons-nous quelque peu dans le contexte, parce que, les gens qui nous écoutent, il faut comprendre dans quel contexte on était dans ce temps-là. Le 18 janvier, les études sur la situation linguistique devaient être présentées. À cette occasion, l'Office québécois de la langue française avait demandé au chercheur Marc Termote de préparer une présentation sur son étude. Jusque-là, tout va bien. Toutefois, la séance d'information prévue, woups! il y a quelque chose qui se passe, là, subitement annulée, on ne sait pas pourquoi.

Les résultats de son étude précisaient que, vers 2021, ceux qui parlent le français à la maison seront devenus minoritaires sur l'île de Montréal. La situation, selon le chercheur, finirait par se propager partout au Québec ? ça, c'est dans le rapport ? et ne pourrait que s'aggraver avec la venue de plus d'immigrants. Ça, ce n'est pas moi qui le dis, c'est Marc Termote, Marc Termote qui a eu un mandat. Ce n'est pas moi, là, tout le monde... Bien, on a l'impression que c'est moi, là, qui est cité ici, mais non, c'est Marc Termote. Ce n'est pas le chef de l'opposition officielle. Marc Termote dit: Et ne pourrait que s'aggraver avec la venue de plus d'immigrants. Ah, surprise! Un discours complètement à l'opposé de celui de la ministre de la Culture et des Communications et du premier ministre qui affirmaient que le français ne s'était jamais mieux porté au Québec. Je le répète, là, ce n'est pas le député de Berthier qui dit ça, c'est Marc Termote. Je ne pense pas que la réputation de M. Termote est en jeu ici.

Pour justifier cette position, la ministre parlait alors d'une étude terrain qui tenait sur deux petites pages. Pendant plusieurs semaines, donc, le débat a fait rage. Difficile de savoir qui avait tort, qui avait raison tant la situation était confuse pour tout le monde. Là, je vous rappelle, plusieurs études ont été déposées, plusieurs études, plusieurs rapports, puis finalement un rapport de la ministre sur deux petites pages. Il faut comprendre un peu que, des milliers de pages puis deux pages, il y a une marge entre les deux.

Ce qu'on a compris aussi, que les communications ne semblaient pas être très, très efficaces entre la ministre et l'Office québécois de la langue française. Dans ce temps-là, les deux, on posait des questions aux deux, ils se renvoyaient la balle. Les médias posaient des questions aux deux, ça se renvoyait la balle. Qui avait en main l'étude de M. Termote? Chacun rejetait le blâme sur l'autre, c'était comme... C'est sûr qu'on est en culture ici, c'était comme un feuilleton, un téléroman, on a vu ça, là. Puis il y avait plusieurs acteurs, puis, des fois, les acteurs changeaient de personnage. C'était comme un peu déroutant.

L'étude est finalement sortie le 6 mars ? là, on revient, là, tu sais, dans la chronologie, j'espère que je n'ai pas perdu personne, M. le Président ? l'étude est finalement sortie le 6 mars. On y apprend alors que ce n'est pas tout à fait tout rose, mais ce n'est pas tout à fait si pire, tout dépendant sur quel bord qu'on se place. Finalement, si on oublie les zones d'ombre et les prévisions alarmistes, tu sais, si on oublie tout ce qui est négatif, finalement ce n'est pas si pire. C'est ce qu'on apprend dans le rapport.

Toutefois, on se rend rapidement compte qu'il n'existe pas de conclusion au rapport. Et je rappelle ce que mon collègue a dit: Bien que la présidente de l'office nous ait expliqué en long et en large, en commission parlementaire, que chacune des sections comprenait une conclusion. Moi, ce n'est pas ça que j'ai appris à l'école. Quand on faisait un rapport, un document, il y avait une introduction puis il y avait une conclusion. Parce que, si j'avais déposé des rapports à l'époque avec six conclusions, je pense que je me serais fait rabrouer en disant: Écoute, ce n'est pas comme ça qu'on présente un rapport, ce n'est pas comme ça qu'on présente...

Finalement, pour comprendre la confusion, c'est qu'il y avait une nouvelle méthode au niveau de la langue française. On venait d'inventer que, dans un rapport, maintenant, il y a six conclusions. Puis là ça, c'est clair comme de l'eau de roche, six conclusions, un rapport. Là, mon collègue le député de Viau, tout à l'heure, disait: Ah! c'était tellement important qu'on a décidé de mettre... que la présidente a décidé de mettre six conclusions. Franchement! Je lis particulièrement beaucoup, puis, tu sais, si, à la fin d'un livre, quand tu arrives à la conclusion, tu as six conclusions... C'est six conclusions si tu as six livres. Bref, encore une fois, ce n'est pas moi qui le dis, là. Quand on dit à plusieurs chercheurs, plusieurs... Tu as six conclusions, c'est une autre façon de noyer le poisson.

Il a été quand même assez difficile de savoir, en bout de ligne, dans toutes ces conclusions puis tous ces rapports, le français, au Québec, il est-u en péril, oui ou non, parce que, là, on lit les six conclusions, l'ensemble des rapports, puis là, après ces auditions, l'étude des crédits sur le budget, je ne sais toujours pas à quel point le français, en Amérique, est en danger. M. le Président, vous avez compris tout le nombre de rencontres qu'on a eues sur ce sujet-là, les auditions, les commissions. Tu sais, on a l'impression d'être redondants. On a parlé de la langue française, on en a parlé dans tous les journaux, puis, aujourd'hui, avec tout ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale, tout ce qui s'est passé en Commission de la culture, personnellement je ne suis pas capable de dire la situation, au Québec, du français, est-ce qu'elle est en danger.

Ce que je sais cependant, c'est que l'étude Termote est vraie. Les parlementaires ici présents ont voté à l'automne... Écoutez-moi bien, c'est important, M. le Président, c'est sérieux, je reviens à ce qu'on a dit tout à l'heure, ce que Marc Termote a dit, les parlementaires ici présents ont voté à l'automne une hausse des seuils d'immigration en méconnaissance de cause. On n'avait pas le rapport de Marc Termote puis on a voté ça. Bien, nous, on a voté contre nécessairement parce qu'on n'a pas les données.

n(12 h 50)n

Le Parti québécois ont voté pour ça. Ils déchirent leurs chemises sur la place publique pour la langue française, puis là Marc Termote, il dit: C'est... Je vous l'ai dit tout à l'heure, au niveau de l'immigration, il y a un danger au niveau de la francisation. Le Parti québécois déchire sa chemise sur la place publique: Le français, c'est important, puis on veut avoir une loi, on veut avoir ci, on veut avoir ça. Puis là, quand il arrive au niveau du seuil d'immigration, on vote pour, on augmente l'immigration, même s'il y a un problème au niveau de la francisation. Tu sais, on parle de cohérence, là. J'ai de la difficulté à perdre ça... à comprendre toutes ces choses-là. Comment on peut sciemment faire ces choses-là? Bien là, bref, ce que j'ai compris, c'est qu'ils s'étaient trop avancés pour reculer, pour perdre la face. Ça fait que, là, ils ont dit: Bon, bien, on va aller dans ce sens-là.

En plus, la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles avait rencontré M. Termote. Parce qu'elle elle a eu le privilège et le droit de le rencontrer puis avoir les statistiques avant de se dépêcher pour voter ça. Avant de demander une hausse des seuils d'immigration, il y avait de quoi se questionner, et je pense qu'il y a toujours de quoi se questionner sur ce sujet-là. Parce que, même si on a l'impression que tout est réglé... À l'époque, je n'avais pas beaucoup d'expérience. Maintenant, j'en ai plus puis j'ai compris que, là, il y a des gens qui ont voté des choses puis qu'ils ne savaient pas pourquoi qu'ils votaient, là, de toute évidence, parce que les deux discours, ce n'est pas cohérent, ça ne va pas ensemble.

On aurait pu croire qu'après le dépôt du plan quinquennal on aurait des mesures intéressantes pour répondre aux problématiques soulevées dans ce plan. Eh bien, non, pas vraiment. Le plan d'action proposé par la ministre, c'est... Écoutez, là, il n'y a pas de cibles là-dedans puis il n'y a pas d'objectifs. Tout ce que j'ai appris en sciences humaines dans la façon de déposer des rapports, dans la façon de présenter des documents... Là, j'arrive à l'Assemblée nationale, puis là on dépose des documents, six conclusions, puis un autre document qui n'a pas de cibles puis pas d'objectifs. C'est quand même incroyable.

Heureusement, lors de la comparution de la Commission de la culture, Mme Boucher nous a confirmé que l'Office québécois de la langue française avait le mandat de donner des cibles et des objectifs à ce plan d'action. Ça me rassure, M. le Président, même si je croyais qu'habituellement il était préférable de définir des objectifs avant de soumettre un plan. Je le répète encore, c'est assez important quand même, définir des objectifs avant de soumettre un plan. Là, on parle toujours de la langue française. Des fois, j'écris un texte, je me relis puis j'ai de la difficulté. Je dis: Ça ne se peut pas que le monde... tu sais, qu'on ne comprenne pas exactement tout ce qui s'est passé dans ce dossier-là.

Nous avons particulièrement questionné la présidente de l'office sur ce qu'elle entendait faire dans les régions de Montréal et de l'Outaouais. J'ai été soulagé d'entendre que Mme Boucher... d'admettre, lors de son audition, que ces deux régions vivaient une situation linguistique particulière et feront donc l'objet d'actions prioritaires, notamment en matière de francisation des immigrants, et de la langue française, et de la langue du travail.

Là, je continue de citer le rapport: «Il a aussi été dit que [le plan] d'action de francisation des immigrants, de promotion de la langue française et d'amélioration de l'apprentissage du français doivent s'imbriquer pour maximiser leur efficacité.» Ça, c'est assez important ? vous allez le comprendre un petit peu plus tard ? que toutes parlent le même langage, c'est excessivement important. J'espère sincèrement que ça ne restera pas juste des belles paroles parce que maintenant je vais veiller au grain, je vais regarder attentivement à ce qu'il n'y ait pas des actions en silo au niveau des trois organismes de la langue française.

La présidente de l'Office québécois de la langue française a également profité de son audition devant la Commission de la culture pour nous mentionner que les ressources consacrées aux mesures pour promouvoir la langue française allaient être bonifiées. Mon collègue a parlé d'emblée de 20 postes tout de suite. Mais ce n'est pas ça que j'ai compris puis ce n'est pas ça qui est dans le plan. On a parlé ici de 10 postes permanents qui devraient être ajoutés à l'office en 2008-2009, oui, on parle de 10 postes permanents qui devraient être ajoutés en 2008-2009, et 10 autres en 2009-2010. Ce n'est pas 20, ça, là, c'est 10 plus 10, ce n'est pas pareil. 10 plus 10, effectivement ça fait 20. Mais, si tu les répartis sur deux ans, ce n'est pas la même chose. On ne gagne pas du terrain, on s'en va en gagner. Ce n'est pas pareil, ça, là. C'est toujours des façons de dire les choses de façon... essayer de rapatrier des succès qu'on n'a pas eus encore. Ce que j'ai compris, ce qui est dans le rapport, c'est 10 plus 10. Mon collègue a parlé tout de suite de 20, on ne sait même pas s'ils vont être là. Ces employés devront présenter «un profil de compétences en francisation ou en technologies de l'information». Ça va sûrement intéresser mon collègue de La Peltrie.

Quant à l'aide attribuée aux centrales syndicales pour l'appui aux membres des comités de francisation, Mme Boucher nous a annoncé que «le doublement des subventions viendra appuyer le rôle important que la loi confie aux travailleurs et à leurs syndicats». Main dans la main. Il est certain qu'il va falloir faire un suivi, dans l'avenir, de ces mesures annoncées par la présidente-directrice générale de l'office.

M. le Président, après un examen minutieux de tous les faits portés à notre connaissance au cours des derniers mois, j'adhère complètement aux recommandations de la Commission de la culture qui estime que l'Office québécois de la langue française doit clarifier, améliorer le partage de ses responsabilités et la politique de publication applicable à la réalisation du mandat de surveillance de l'évolution de la situation linguistique. On partage ça ensemble. Je me réjouis d'autant plus que c'est à la même conclusion qu'arrive Mme Boucher lors de son audition. Après avoir admis que le cadre de publication n'avait peut-être pas été approprié, elle a affirmé que l'office se donnerait une nouvelle politique de publication. Bien là, après le chaos, la présidente nous dit qu'il va y avoir une nouvelle politique de publication. Alors, j'espère bien que cette demande de la commission, et la volonté de Mme Boucher, sera entendue et respectée, M. le Président.

Je me réjouis, car, pour moi, c'est inconcevable que les prochains rapports de la situation linguistique soient transmis dans un tel cafouillage, dans un contexte de relations dégradées entre l'Office québécois de la langue française et ses dirigeants ? je ne me mettrai pas à lire tous les articles de journaux, tout le monde le sait, c'était le chaos total ? et le Comité de suivi de la situation linguistique. Comment ça a pu arriver, toutes ces choses-là? Je regarde ça, on dirait, encore une fois, c'est une façon de noyer le poisson. Ce qu'on a mis de l'avant, c'est des relations qui étaient houleuses, au lieu de parler de la situation linguistique. Déjà, avec une situation, six conclusions.

Je répète par le fait même que l'office doit ajuster son partage de responsabilités entre les membres qui travaillaient à l'élaboration de la situation linguistique. La politique de publication doit être plus claire, plus transparente si on veut établir un portrait juste de la situation au Québec et, par le fait même, mettre en place des mesures adaptées et surtout efficaces...

Le Vice-Président (M. Picard): M. le député...

M. Benjamin: Oui. C'est l'heure du dîner.

Le Vice-Président (M. Picard): ...compte tenu de l'heure, nous devons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures. Vous allez pouvoir poursuivre votre allocution. Donc, bon appétit à tous. Et, à 3 heures, nous reprenons les travaux.

(Suspension de la séance à 13 heures)

 

(Reprise à 15 h 3)

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Alors, nous allons poursuivre le débat sur la prise en considération du rapport de la Commission de la culture qui, les 18 mars, 8 et 9 avril 2008, a entendu le Conseil supérieur de la langue française, l'Office québécois de la langue française et la Commission de toponymie du Québec, dans le cadre d'un mandat de surveillance d'organismes.

Je vous rappelle qu'il reste 23 minutes au groupe formant le gouvernement, 17 minutes au groupe formant l'opposition officielle et 34 minutes au deuxième groupe d'opposition. Je suis prête à reconnaître M. le député de Berthier.

M. Benjamin: Merci, Mme la Présidente. Alors, ce que je disais avant que ça lève pour le dîner, c'est que Mme Boucher, lors de son audition, après avoir admis que le cadre de publication n'avait peut-être pas été approprié, elle a affirmé que l'office se donnait une nouvelle politique de publication. Alors, j'espère bien que cette demande de la commission et la volonté de Mme Boucher seront entendues et respectées.

Alors, je me réjouis, car il est pour moi inconcevable que les prochains rapports de la situation linguistique soient transmis dans un tel cafouillage ou dans un contexte de relations dégradées entre l'Office québécois de la langue française et ses dirigeants et le Comité de suivi de la situation linguistique. Je répète par le fait même que l'office doit ajuster son partage de responsabilités entre les membres qui travaillent à l'élaboration de la situation linguistique.

La politique de publication doit être plus claire, plus transparente, si on veut établir un portrait juste de la situation au Québec et, par le fait même, mettre en place des mesures adaptées et surtout efficaces, car c'est bien là dont il est question. Il faut avoir des informations limpides comme de l'eau de roche. Pour ajouter à la limpidité, il me semble que nous devrions être mieux informés quant aux plaintes, leur nature et leur traitement. Personne n'aime entendre parler de chiffres, mais j'aimerais quand même vous présenter quelques données quant à la gestion des plaintes à l'Office québécois de la langue française, de l'année 2000 à l'année 2004. Les délais de traitement de plaintes à l'intérieur de six mois tournaient autour de 58 %. Entre six et 12 mois, les dossiers traités étaient de l'ordre de 20 % en moyenne, et encore une fois une moyenne. C'est 22 % des dossiers qui ont pris plus de 12 mois à être réglés. 12 mois, Mme la Présidente, c'est quand même assez considérable. En 2006-2007, quelque 44 % des dossiers qui ont été bouclés étaient en traitement depuis plus de 12 mois.

Ces pourcentages qui démontrent des délais variables dans les traitements de plaintes révèlent d'autres problématiques, et c'est pourquoi il faut que les délais des plaintes et de leur traitement soient dorénavant mieux explicités dans le portrait sur la situation de la langue. Par exemple, en 2006-2007, des 25 754 plaintes transmises à l'office, 22 512 provenaient d'associations qui voulaient dénoncer la problématique du français dans les jeux vidéo, dans les sites Web ou les électroménagers. Cela a permis à l'office de constater une problématique, ce qui par la suite aide les représentants de l'office à faire valoir leurs points devant l'industrie. De quoi satisfaire tout le monde. C'est sûr qu'à partir du moment qu'on traite les problèmes puis qu'on prend conscience de la problématique, bien là, à ce moment-là, on est plus apte à aller rencontrer les industries pour leur expliquer qu'il y a un certain problème à ce niveau-là. Ce sont les plaintes qui permettent à l'office d'être interpellé et d'agir. Elles sont un indicateur d'une situation par rapport à la langue. Il faudrait que l'Office québécois de la langue française en tienne compte à l'avenir dans son rapport annuel.

En ce qui a trait à la nomination des dirigeants et des membres, particulièrement à l'Office québécois de la langue française, la commission a soulevé un point intéressant. Il serait important, eu égard aux événements de l'hiver dernier, que j'ai abordés tout à l'heure, qu'une réflexion plus approfondie ait lieu. Nous pouvons lire dans le rapport sur les nominations des dirigeants que, et je cite: «Différents modes sont possibles, par exemple la désignation par l'Assemblée nationale ou, comme dans le cas de certaines sociétés d'État, la nomination par le gouvernement après consultation.» Alors, je pense que, si on s'entendrait sur... les trois partis présents à l'Assemblée nationale, pour la nomination d'une présidente, bien, quand la présidente se présenterait en commission, on aurait moins le sentiment de partisanerie qui existe, parce qu'à partir du moment que la présidente débarque en commission on a l'impression, et dans son attitude et dans son ton, on a senti une certaine partisanerie. Alors, quand le rapport est déposé, bien on a tendance à penser à une petite teinte de partisanerie. Alors, si la présidente serait nommée par l'Assemblée nationale, bien là il y aurait probablement unanimité. Ce serait une différente façon d'accepter ces rapports-là. De cette façon, nous éviterions de nous questionner sur l'impartialité de ceux et celles qui sont à la tête d'organismes aussi importants que l'Office de la langue française, compte tenu du rôle primordial qu'ils occupent dans la protection de notre langue, qui ne serait jamais à l'abri de toute menace. Ainsi que le mentionne le rapport: «La commission n'a fait [...] que soulever cette question», mais c'est certainement quelque chose qui est à suivre.

n(15 h 10)n

Nous avons aussi passé en revue les agissements du Conseil supérieur de la langue française. Globalement, je suis assez satisfait du travail du Conseil supérieur, mais, comme la commission, je pense qu'il devrait y avoir une plus étroite collaboration entre le conseil et les organismes de la langue en ayant la possibilité d'émettre des avis et de se prononcer sur des moyens pour améliorer la situation linguistique au Québec. Le conseil se doit d'interagir encore plus étroitement avec l'Office québécois de la langue française, surtout dans la réalisation du mandat de surveillance de la situation linguistique. Les recherches, les études de l'Office québécois de la langue française se verraient assurément bonifiées avec les propositions du conseil. On a posé des questions au président, puis je pense que le président serait d'accord avec cette position-là de, au lieu que ça se fasse chacun, les trois organismes, en silo, bien que ça... toutes les instances seraient mises à contribution.

Il me semble toutefois illogique que les idées du conseil sortent plusieurs mois après le rapport et non pas en complémentarité. Plutôt que de travailler en silo, je pense que les organismes de la langue doivent travailler en étroite collaboration. Il faut que tous soient aptes à comprendre et à mettre en oeuvre les mesures annoncées récemment. Encore faut-il que les mesures soient chiffrées, ciblées, mais, semble-t-il, c'est ce que s'appliquera à faire l'Office québécois de la langue française prochainement, et je l'espère, Mme la Présidente.

Le président du conseil, Conrad Ouellon, a d'ailleurs admis cette complémentarité lors de son audition en affirmant que le mandat de l'office en était un d'étude de la situation linguistique au Québec. Là où le conseil vient en renfort, c'est lors de la partie réflexion sur l'avenir, les ajustements et les modifications à apporter. Cela étant dit, je trouve particulier que le conseil et l'office n'aient pas fait front commun ensemble lors de la présentation de la situation linguistique. Un plan quinquennal et un plan pour l'avenir auraient certainement été plus appréciés qu'un plan quinquennal et des milliers d'autres pages de fascicules divers. Comme je le disais tout à l'heure, avec le nombre de pages qui a été déposé et plusieurs fascicules, on a eu l'impression qu'on noyait le poisson.

Enfin, nous avons aussi entendu les représentants de la Commission de la toponymie. Je dois admettre que j'ai appris beaucoup sur le mandat et ce que fait au quotidien la commission. J'en ai appris, entre autres, à quel point la commission véhicule, à sa manière, de toutes façons... de façon tout à fait particulière, le patrimoine culturel québécois. S'assurer que l'histoire du Québec, ses origines et ses particularités demeurent partie intégrante de notre toponymie, c'est un geste concret assez simple en soi mais quand même très important pour l'imaginaire collectif.

J'ai également pris connaissance du fait que la commission était à l'origine d'un recueil magnifique qu'est le livre Noms et lieux du Québec. À partir du moment que j'ai appris que c'étaient eux qui avaient fait ça... mais j'avais ce livre-là en ma possession, puis, à chaque fois que je vais visiter un des nombreux villages au Québec, je me permets d'aller visiter et de lire ce qui est marqué, dans ce livre-là, comme introduction. C'est un livre qui est extrêmement bien fait. Puis, en plus de fournir des images tout à fait magnifiques, ce livre-là représente la toponymie sociale, municipale du Québec.

La présidente par intérim nous a mentionné les défis auxquels la Commission de toponymie fait face actuellement. On retrouve l'existence d'un bassin important de lieux à nommer, particulièrement dans le Québec septentrional, la jonction de la toponymie avec les systèmes d'information géographique, et la poursuite du développement des outils en ligne, et la réponse aux attentes des populations autochtones.

En ce qui concerne le dernier point, la commission s'assure ainsi de poursuivre le traitement de la toponymie autochtone. Et, pour cela, je dois admettre que j'ai été impressionné qu'elle fasse de tels rapprochements afin d'assurer la transmission du patrimoine toponymique traditionnel inuit. Les jeunes autochtones vivent, eux aussi, la mondialisation, il est essentiel qu'ils puissent avoir un ancrage avec leurs racines. La diffusion en ligne des noms de leurs lieux traditionnels en langue autochtone est un bon exemple de transmission et de partage de cultures. C'est d'autant plus important que d'autres types de partenariats, pour la production de fascicules entre autres, sont établis entre les différentes communautés culturelles.

J'ai aussi été heureux de constater la collaboration qui semble exister entre la commission et les différentes structures. En effet, on nous disait que, sur les 108 000 voies de communication en place dans les municipalités, 105 avaient été officialisées par la commission, une belle et une grande collaboration entre les organismes d'État et les autres structures. Il me semble important que nous le soulignions.

La seule chose qui m'a dérangé lorsque nous avons entendu Mme Boucher, et ça a touché aussi mes collègues, c'est que la Commission de toponymie semble se délester de ses obligations en termes de membre... de dépôt de documents à l'Assemblée nationale. En effet, leur audition nous a permis de constater que, depuis maintes années, la présidente, qui est aussi celle de l'Office québécois de la langue française, a un poste par intérim et que plusieurs postes d'administrateurs sont vacants depuis fort longtemps. À ce sujet, c'est donc la ministre qui est interpellée afin qu'elle mette fin à cette présidence intérimaire ou qu'elle nous la justifie. Elle doit de plus combler, tel que précise son mandat, les postes vacants à la Commission de la toponymie. Quant au dépôt de documents devant les parlementaires, je pense que la Commission de toponymie se doit de déposer son rapport annuel de gestion 2006-2007 et non pas fournir une copie intégrée dans le rapport annuel de gestion de l'Office québécois de la langue française. La commission est soumise à la Loi sur l'administration publique et ne peut s'en décharger.

En conclusion, à l'instar de mes collègues membres de la Commission de la culture, je reste préoccupé par la dégradation des relations entre l'Office québécois de la langue française, représenté en premier lieu par la présidente-directrice générale, Mme Boucher, et le Comité de suivi sur la situation linguistique. Je crois aussi que l'existence d'un climat de travail serein et d'un lieu de confiance fort essentiel pour la réalisation du mandat de surveillance de l'évolution de la situation linguistique au Québec... Il ne faut jamais oublier que nous ne sommes somme toute qu'une poignée de francophones sur ce continent, et c'est notre devoir à tous de ne jamais baisser la garde. C'est la survie du français qui en dépend.

Enfin, pour terminer, je ferai les mêmes recommandations que celles de la Commission de la culture pour le Secrétariat à la politique linguistique et les trois organismes rattachés à la Charte de la langue française. En effet, il m'apparaît essentiel que la ministre ou les organismes chiffrent, ciblent et précisent les nombreuses mesures annoncées dernièrement pour la promotion et la valorisation de la langue française. Il m'apparaît un peu ridicule que la ministre ait mis en place des mesures sans cibles et sans objectifs. Ces mesures, en plus d'être intégrées au plan stratégique en matière linguistique, doivent être précisées pour être utilisées et utiles à la sauvegarde du fait français.

Ainsi, je réitère mon appui aux recommandations de la Commission de la culture et précise que je resterai sur mes gardes afin de m'assurer que les recommandations seront entendues et appliquées par les organismes chargés de la langue française. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le député de Berthier. Vous avez complété votre intervention, M. le député? Très bien. Alors, je reconnais le prochain intervenant, M. le député de Borduas, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de culture, de communications et de langue. M. le député, je vous rappelle que vous avez un temps de parole de 34 min et 34 s.

M. Pierre Curzi

M. Curzi: Merci, Mme la Présidente. Saluer mes collègues qui sont présents dans cette Assemblée. Je vais essayer, Mme la Présidente, de faire... de parler de la langue, d'avoir un discours qui s'articule autour de trois grands axes: le premier étant la responsabilité de l'État à l'égard de la langue, la partisanerie et la réalité, qui à mon sens constituent peut-être le premier temps de cette réflexion-là; le deuxième temps étant une analyse des recommandations qui émanent du rapport et de la mission que nous avons exercée sur le Conseil supérieur de la langue française, l'Office québécois et la Commission de toponymie; et le troisième moment de cette intervention-là étant quelques considérations sur l'avenir de la langue française tel que nous devrions le vivre.

n(15 h 20)n

Alors, prenons ça dans l'ordre. D'abord, la responsabilité de l'État. Il est clair que nous fêtons actuellement, cette année, le 400e anniversaire de la ville de Québec. Mais, à cette occasion-là, il est clair aussi que nous fêtons surtout l'arrivée, il y a 400 ans, des francophones en terre d'Amérique. Nous fêtons non seulement leur arrivée, mais nous fêtons surtout leur persistance, leur résilience, le fait qu'au cours de ces 400 ans d'existence les francophones ont réussi, et souvent dans des combats qui ont été lourds, à préserver non seulement la langue, mais la culture, qui est, disons, la langue... coeur de la culture francophone.

Donc, ces 400 ans là que nous fêtons actuellement, cette année, sont d'abord et avant tout ou en bonne partie l'anniversaire majeur de la présence française et francophone. Il est clair qu'après 400 ans de résistance, de combat, qu'une communauté ait réussi à préserver à la fois sa langue et sa culture cela implique de la part de tous les gouvernements qui l'ont accompagnée et de l'ensemble des institutions qui l'ont promue, cela implique de la part de tous donc un souci extrême de la préservation, non seulement de la préservation, mais de l'épanouissement de cette langue en terre d'Amérique.

Évidemment, tous partis confondus, tous les gouvernements qui sont au Québec ont eu à coeur de défendre la langue. Et ce n'est pas la moindre des choses que d'exiger que tous les gouvernements, quelle que soit leur couleur, à quelque moment de l'histoire qu'ils arrivent, aient comme mission première, essentielle, fondamentale, de défendre, de préserver la langue. La raison en est claire, la raison, elle est répandue, on le sait, que la langue est au coeur de l'identité. Elle est au coeur de l'identité parce que c'est cette langue-là qui nous permet de fonder notre identité, c'est cette langue-là qui nous aura permis de nommer le territoire, cette langue-là qui nous aura permis d'occuper le territoire, qui nous aura permis de nous donner des institutions, qui aura permis que des familles aient un nom et que ce nom-là soit transmis, cette langue-là nous aura permis aussi de nous donner une histoire à la fois intellectuelle, une histoire émotive et une histoire dans tous ses aspects et dans toute sa richesse. Donc, de chaque gouvernement, on doit s'attendre à ce qu'il préserve farouchement non seulement l'existence, mais la floraison de la langue française.

Il est bien clair qu'un gouvernement est toujours confronté au fait que ce gouvernement-là change ? et espérons qu'il change assez rapidement! Mais, quoi qu'il en soit, chaque gouvernement est donc confronté à ce qu'on appelle la partisanerie. Et la partisanerie est un phénomène en soi extrêmement démocratique. L'existence de différents partis permet à certaines opinions de s'incarner dans un nombre d'élus qui représentent une partie du pouvoir. Cependant, à l'égard de la langue, il y a toujours une certaine gêne à considérer que la partisanerie pourrait outrepasser le devoir fondamental d'un gouvernement à défendre l'objet même de son existence, ce qui fonde ultimement son pouvoir, c'est-à-dire une majorité d'expression francophone. Et donc, à cet égard, la partisanerie devrait toujours céder le pas à un accord plus fondamental, plus essentiel.

Malheureusement, ce n'est pas toujours évident que cette partisanerie-là cède aux intérêts supérieurs d'une nation francophone. Ce qu'on peut dire, au cours de l'histoire, c'est qu'il y a eu, à tout le moins, un moment extrêmement fondateur au niveau de la langue, et ce moment-là, ça a été l'existence de la loi 101. À partir du moment où la loi 101 est née, on sait qu'on a marqué l'histoire entière de la francophonie d'un de ces temps forts qui fait que ce gouvernement-là, à ce moment-là, et c'était le Parti québécois, s'est acquitté noblement de sa tâche essentielle qui était non seulement la préservation, mais assurer l'avenir de la langue française.

C'est un contexte dans lequel il faut toujours resituer toutes les questions sur lesquelles, quand on parle de... il faut toujours resituer toutes les questions que l'on analyse. On le sait, que la loi 101 a permis et a donné naissance à un certain nombre d'organismes, le plus important étant sans nul doute le Conseil supérieur de la langue française, l'Office québécois de la langue française ? et c'est bien «québécois», «office» étant un nom masculin, l'Office québécois de la langue française ? et, après, le secrétariat et la Commission de la toponymie. Donc, il y a eu, à l'occasion de la loi 101, la naissance d'organismes qui ont eu pour tâches et qui ont encore pour tâches non seulement de préserver la qualité, et l'application, et l'existence du français, mais d'en assurer la pérennité, l'avenir et, comme je le disais, la floraison. Bien.

Maintenant, dans le troisième temps de ce préambule, il y a ce qu'on appelle la réalité, et actuellement, au niveau de la réalité, nous voyons qu'il y a, entre la noblesse d'une politique gouvernementale qui devrait outrepasser la partisanerie et la réalité, il y a actuellement ce prisme qui déforme jusqu'à un certain point la réalité. En fait, j'affirme que ce prisme actuellement déforme, parce que, quand j'entends mon collègue de Viau, ce matin, faire certains énoncés, je me dis qu'il y a là un prisme déformant.

Pourquoi c'est un prisme déformant? Et quelle est la réalité? Parce qu'ultimement on peut dire que chaque partie aura tendance à déformer la réalité pour en tirer certains avantages partisans. Mais il n'empêche que, dans cette question-là, la partisanerie doit toujours céder le pas, et ça a toujours été connu, reconnu, affirmé et réaffirmé. Est-ce qu'il en est ainsi actuellement? Je ne crois pas, Mme la Présidente. Je ne crois pas. Il est important de réaffirmer que le but véritable de cette Assemblée, le but véritable de ces institutions, le but véritable de cette loi 101, le but véritable de nos actions en tout ce qui touche, en tout ce qui a trait à la langue et à la culture doit être d'avoir un portrait précis de la réalité, parce que c'est la réalité qui dictera les moyens d'action, et les moyens d'action seront à la mesure de notre souci de cette réalité et des objectifs qu'on y applique, et c'est là que le bât blesse ou commence à blesser.

Et c'est pourquoi l'exercice que nous avons mené au cours des mois qui précèdent cette journée a été un exercice récurrent, compliqué, un exercice qui nous a amenés à prendre la parole à cette Assemblée, à prendre la parole dans une commission, mais aussi à ce que la parole soit prise partout dans la société civile, largement dans les journaux, et qu'il y aura toujours un aspect hautement émotif lié à la façon dont on décrit, dont on perçoit la réalité. Parce que cette réalité-là, elle est tellement fondamentale, tellement au coeur de l'identité qu'il faut en avoir un portrait extrêmement précis pour pouvoir avoir les exigences extrêmement fortes à l'égard de ceux qui ont la mission, une mission, je le redis, extrêmement noble et totalement majeure, de s'assurer non seulement de l'épanouissement de la langue, mais de sa pérennité.

Et c'est là où nous entrons en conflit, parce qu'il faut bien le dire, toute l'histoire de cette évolution de la langue depuis les 30 dernières années nous aura permis d'assurer la présence du français dans une bonne partie du Québec et d'une façon qui est effectivement relativement correcte. Disons que généralement on peut aller à peu près partout au Québec et on va pouvoir vivre en français. Les seules inquiétudes que nous avons sont liées à deux endroits majeurs: l'Outaouais, et j'avoue connaître moins bien cette situation-là, mais surtout Montréal, l'île de Montréal et tout ce qui entoure l'île. Ce n'est pas banal, parce qu'on sait qu'à la fois Montréal, c'est quasiment la moitié de la population du Québec ou une grande partie de la population du Québec, et c'est aussi là que le visage français s'exprime aux yeux du monde, mais c'est aussi le lieu qui accueille la majorité et où réside la majorité des gens qui viennent chez nous et que l'on souhaite voir venir chez nous. Nos inquiétudes sont donc concentrées dans un lieu qui est majeur. Il est majeur pour la pérennité du français, il est majeur pour le visage français du Québec, il est majeur parce que c'est le lieu d'une économie forte, c'est le lieu où se développent ou se développeront des habitudes, des consensus, des pratiques qui influencent l'ensemble de la société et l'ensemble du territoire québécois.

Et nos inquiétudes sont donc dans la description de la réalité, et c'est à cela qu'on s'est acharnés avec le plus de bonne foi possible au cours des derniers mois, c'est à tenter d'obtenir un portrait réel sur lequel, tous partis confondus, nous arriverions à avoir une même perception. La raison, vous vous en doutez bien, c'est que, si on ne perçoit pas les choses de la même façon, comment peut-on exiger que les mêmes remèdes soient apportés? On parle ici d'un diagnostic, et tout le monde qui est ici cherche, lorsqu'il a des inquiétudes sur sa santé, à avoir le diagnostic le plus précis, le plus exact, le plus irrévocable possible pour savoir et exiger d'avoir le remède approprié, le remède juste pour rester en santé le plus longtemps possible.

Nous parlons ici d'une santé et de la santé de la nation. Quand on regarde les recommandations du rapport actuellement, on peut s'interroger, mais on peut surtout en définir la situation qui a amené cette recommandation, et je voudrais me livrer avec vous à cet exercice parce qu'il me semble riche d'enseignement.

n(15 h 30)n

Les recommandations à l'article 5 de ce rapport disent: «Au terme de l'examen des trois organismes du programme de la Charte de la langue française, les membres de la Commission de la culture formulent les recommandations suivantes.» On peut donc en conclure que l'ensemble des trois partis représentés par les membres qui font partie de la Commission de la culture ont finalement convenu d'un consensus et que ce consensus-là a donné naissance à un certain nombre de recommandations. Est-ce qu'il est possible, à travers ces recommandations, d'en déduire l'état de la situation? Livrons-nous à l'exercice.

La première recommandation dit: «Que le Secrétariat à la politique linguistique et les trois organismes du programme de la Charte de la langue française: intègrent dans le prochain plan stratégique en matière de politique linguistique les mesures récentes annoncées par le gouvernement.»

Le gouvernement a annoncé un bon nombre de mesures dans différents plans d'action. Il l'a fait sous l'égide du ministère de la Culture, il l'a fait sous le chapeau du ministère de l'Immigration et il l'a fait sous le chapeau du ministère de... de l'Éducation et de l'Immigration. Ces trois ministères ont annoncé des plans d'action. Chacun de ces plans d'action là, quand il nous a été présenté, est arrivé d'une façon assez rapide. Il a suivi des discussions, assez âpres souvent, ou des nouvelles qui ont été sorties dans les journaux. Bref, on a eu le sentiment, plus que le sentiment, il a été évident que les plans d'action étaient mis sur la place publique pour essayer de contrer des inquiétudes ou des nouvelles légitimes que nous avions découvertes. Mais, quand on lit cette recommandation-là, on voit bien qu'il y a là une notion d'intégration, d'intégration de politique linguistique, et ce n'est pas banal.

L'utilisation du mot «intégration» signifie très précisément que ces plans d'action manquent d'intégration, et ça a été la critique fondamentale. C'est une chose que de mettre en place, d'annoncer un plan d'action, d'annoncer même des millions qui accompagnent un plan d'action comme on l'a fait ce matin, mais de savoir que ces différents plans d'action ne sont pas liés entre eux, qu'ils ne sont pas le fait d'une réflexion approfondie et qu'ils servent surtout d'une sorte de camouflage, alors que les problèmes, eux, sont bien réels... Encore faut-il qu'un million soit dépensé correctement pour qu'il justifie qu'on le dépense. Et la présomption que le Parti québécois a et que nous avons eue tout au long de ces audiences, c'est de questionner ces plans d'action là en disant qu'ils manquaient justement d'intégration. Et vous allez voir que, dans les autres recommandations, plusieurs des recommandations arrivent au même constat. Il y a là une inadéquation entre ce qui est annoncé et ce qui va se produire parce que ce qui est annoncé est gonflé, est arrivé rapidement, alors que ce qui va se produire manque de précision, manque d'objectifs, manque de cibles, manque de mesures pour l'évaluer.

Voyons donc le deuxième membre de cette première recommandation: Que le Secrétariat à la politique linguistique «associe à tous les axes d'intervention des objectifs, des indicateurs et des cibles bien conçus». Donc, d'un commun accord, la Commission de la culture en est arrivée à la conclusion que, quand elle examine des plans d'action, et en particulier le plan d'action du ministère de la Culture et des Communications, l'absence de cibles, l'absence d'objectifs, l'absence d'indicateurs dévaluent terriblement, sinon totalement, ce plan d'action. Et c'est grave parce qu'il y a là un message où il s'agit de jeter de la poudre aux yeux et de jeter des millions sans apporter de solution réelle, de solution avec des objectifs clairs, avec des cibles précises, avec des indicateurs qui nous permettent de savoir que ce plan d'action là a un effet.

Cette imprécision dans le plan d'action... Et mon collègue de Berthier en a bien parlé, puisque, tout d'un coup, on apprend que ces objectifs, ces cibles, ces indicateurs-là feront partie, feront partie de la politique après que le plan d'action ait été émis, ce qui est complètement invraisemblable. Alors, on nous dit: Nous atteindrons des objectifs après avoir mis en place des mesures. Est-ce qu'il y a une logique là-dedans? Non. La logique est inversée. La logique est inversée parce que la nécessité d'agir pour apporter une réponse précède la réflexion qui devrait ordonner des actions efficaces. C'est la première remarque, la première recommandation.

La deuxième recommandation ? et je pourrai donner tantôt des exemples pour illustrer mon propos plus clairement; la deuxième recommandation ? c'est que l'Office québécois de la langue française «clarifie et améliore le partage des responsabilités et la politique de publication applicables à la réalisation du mandat de surveillance de l'évolution de la situation linguistique au Québec». Au diable, Mme la Présidente, au diable, hein? Oui, c'est un petit peu théâtral, mais il faut bien. Imaginez-vous que cette phrase-là décrit très exactement l'immense cafouillis, le chaos total qui a présidé à la publication des différents rapports.

Mon collègue de Berthier a parlé du rapport Termote. Mais parlons-en encore un peu, du rapport Termote. Le rapport Termote, qui était au mois d'août... qui nous a été caché littéralement depuis le mois d'août, disait des choses extrêmement troublantes, extrêmement troublantes. Le rapport Termote, dans ses meilleurs scénarios, décrivait une éventuelle anglicisation de Montréal et, dans ses pires scénarios, il la prévoit très rapidement. Mais, dans ses meilleurs scénarios, ce qu'il nous dit, c'est qu'actuellement, à cause de raisons démographiques, à cause de réalités de l'immigration, le poids réel des francophones sur l'île de Montréal, qui a glissé sous la barre des 50 %, va continuer à glisser, et à glisser, et à glisser, parce que les francophones quittent Montréal pour aller s'établir dans la couronne nord, dans la couronne sud, phénomène démographique important, puisque ce sont de jeunes familles, ce sont des enfants, d'une part.

D'autre part, il y a le phénomène d'anglicisation qui se continue. Et on le verra dans la langue de travail. On l'a vu dans la langue de l'Administration. On le voit dans plusieurs... dans la langue de certains services, même gouvernementaux. Et en plus il y a une sorte d'échec au niveau de la francisation d'une bonne partie des immigrants. On sait qu'une bonne partie des immigrants sont heureusement choisis dans les pays du Maghreb qui ont le français comme langue d'usage, et c'est ce qui explique qu'il y a une francisation des gens, quoiqu'on sache par ailleurs, et de plus en plus, que ces gens qui viennent du Maghreb ont un taux d'emploi terriblement inférieur à notre taux d'emploi. Il y a donc des problèmes au niveau du travail, il y a des problèmes sociaux, il y a des problèmes économiques et il y a des problèmes aussi au niveau de la localisation des gens.

Si on additionne cette démographie en baisse, le fait que les francophones quittent l'île de Montréal, l'arrivée des immigrants qui ne s'intègrent pas aux groupes francophones mais qui au contraire s'intègrent aux groupes anglophones, et c'est important... Là, on parle de quoi? On parle... Les chiffres sont extrêmement troublants. Quand on dit que, sur 12 000 personnes qui ne parlent ni français ni anglais, qui arrivent au Québec, il y en a 8 600 qui ne se joindront pas à la communauté francophone, si on multiplie ce 8 600 par 10 ans, on arrive à 85 000. C'est énorme. Ça vient gonfler d'une façon démesurée.

Il faut donc agir et agir d'une manière intelligente, parce que le but, c'est de les accueillir, ce n'est pas de réduire le nombre d'immigrants. Ce n'est pas de ne pas accueillir correctement, mais c'est de réussir à tout prix non seulement la francisation, mais l'intégration. Et pour cela il faut avoir des objectifs clairs, il faut avoir des cibles précises, il faut avoir des indicateurs réels. Il faut peut-être remettre en place certains des organismes qui ont réussi à l'époque. On pense aux COFI, on pense à différents organismes qui ont réussi l'intégration. Et actuellement on s'interroge sur ce qui n'est pas réussi.

Ce n'est pas annoncer une crise, ce n'est pas être alarmiste que de dire: Est-ce qu'on peut s'entendre sur une description réelle de la situation réelle du français dans ce lieu particulier qu'est la ville de Montréal? C'est de ça dont nous parlons. Et alors la théorie du verre à moitié plein, qui nous camoufle quand même que le verre devrait être complètement plein, fait que, de partisanerie en partisanerie, on nous accuse de voir les choses comme si le verre était à moitié vide, et nous disons: Il est à moitié plein. Ils disent: Il est à moitié plein, réjouissons-nous. Nous disons: Il est à moitié vide, inquiétons-nous. Mais le but fondamental de l'ensemble de ces deux parties devrait être de dire: Ce verre se remplit d'heure en heure, d'année en année, et bientôt il sera presque complètement rempli. Non pas que nous ayons quoi que ce soit contre quelque langue que ce soit, au contraire, nous serons, dans la mesure où nous serons certains et nous aurons l'estime de nous-mêmes et la confiance que nous avons déjà, mais qui peut encore grandir... Dans la mesure où nous réussirons cette francisation, où nous réussirons l'intégration, il est bien clair que, dans cette mesure-là, notre ouverture à toutes les autres langues en sera augmentée.

n(15 h 40)n

Je continue sur la deuxième recommandation qui dit que l'Office québécois de la langue française ajoute... Alors, je n'ai pas été loin, j'ai parlé du rapport Termote. Évidemment que j'ai passé sous silence l'invraisemblable cafouillis qu'il y a eu et les interventions douteuses. Si le rapport Termote n'a pas été publié, c'est qu'à la dernière minute on a empêché une conférence de presse. On sait très bien que la ministre était d'accord avec la publication du rapport Termote, donc on sait que l'ordre est venu d'ailleurs, probablement du bureau du Conseil exécutif ou du bureau du premier ministre. On sait aussi que, tout d'un coup, on a publié les 16 rapports d'un coup en refusant systématiquement de tirer des conclusions, de nous faire un portrait clair de la situation du français, laissant à tout le monde le soin de se taper des milliers de pages de lecture, laissant à tout le monde le soin d'interpréter les recommandations, les six ou sept recommandations qui accompagnaient chacun de ces... l'ensemble de la publication de ces documents-là, alors que le Conseil supérieur de la langue française n'a pas été informé de ces rapports-là, n'a pas participé à la rédaction, qu'il aurait été logique qu'il donne un avis sur les conclusions à tirer de ces nombreuses études, et c'est ce qu'il va faire au mois de juin, paraît-il. Il va le faire au mois de juin, alors que les rapports ont été publiés, alors qu'il y a eu un plan d'action.

Il y a une incohérence qui est scandaleuse dans toute cette question-là, une incohérence qui témoigne très clairement de l'absence de relations fortes entre l'Office québécois de la langue, le Conseil supérieur, et là on a vu tout à coup émaner les conflits qu'il y a entre la directrice générale et le comité de suivi à l'intérieur de l'Office québécois. On a vu, tout d'un coup, l'absence de relations entre le Conseil supérieur et l'Office québécois. On s'interroge sur le rôle que devrait jouer le secrétariat de la langue française, qui visiblement n'arrive pas à coordonner tout ça.

Le seul aspect positif, nous y reviendrons tantôt parce que quand même il y en a, donc c'est peut-être la Commission de la toponymie. Mais il n'empêche que, là, on constate soudain qu'après 30 ans d'exercice ce milieu-là ne travaille pas d'une façon cohérente, que les gens sont en chicane littéralement et qu'une directrice générale, dont le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elle n'a pas prouvé qu'elle était très efficace, est protégée par sa ministre et par son gouvernement, comme si elle n'était responsable de rien, alors qu'elle est au coeur de tout. Et sa présence et sa venue en commission parlementaire ont très bien illustré à quel point cette personne-là pouvait créer, amenait la controverse et n'avait certainement pas réussi à tout le moins à ce que l'ensemble des propositions soient cohérentes, planifiées et efficaces.

Donc, je dis: «Que l'Office [...] de la langue française ajoute à son rapport annuel de gestion une information plus complète sur le traitement des plaintes et des données sur la répartition des ressources en fonction des orientations stratégiques.» Est-ce que ça vaut vraiment la peine de parler de cet aspect? Oui, ça en vaut la peine, c'est une recommandation. C'est clair aussi que le nombre de plaintes a augmenté; le nombre de personnes sur le terrain n'avait pas augmenté. Là, on vient d'annoncer, pour cette année, 10 personnes supplémentaires, mais on prend soin de spécifier que ces personnes-là vont surtout se consacrer au travail sur les logiciels et sur l'informatique. On ne sait pas au juste quelle va être leur action. Ce qu'on croit comprendre, c'est qu'elles ne seront pas très présentes sur le terrain, mais on n'en est pas certains. Il y a là, comme dans bien d'autres endroits, du flou, un flou très artistique qui semble tout à fait consacré à camoufler certaines choses. Et on le comprend, si on regarde les choses d'un point de vue partisan, on n'a pas nécessairement intérêt à donner un portrait réel parce que le portrait réel a des arêtes, le portrait réel peut nous amener à ce qu'on constate qu'il y a des blessures, qu'il y a certaines blessures dans le tissu, dans le tissu linguistique. Et je peux comprendre ça, mais je ne l'admets pas, Mme la Présidente. Je n'admets pas que, pour cette raison-là, on camoufle, on maintienne des flous artistiques au sujet du nombre de personnes qui vont être engagées, donc sur les dépenses qui sont liées à cet engagement-là, et qu'on continue dans l'imprécision.

Donc, quand on parle du nombre de plaintes, on sait qu'elles ont augmenté considérablement. On sait qu'il y avait... Bon, peu importe, elles ont augmenté, et je pourrais vous apporter au moins ça d'épais. Et, de jour en jour, le nombre de plaintes qui me sont adressées à moi est incroyable. Comment se fait-il que les gens m'envoient et dénoncent des situations en lien avec la langue française? Que je sache, je ne suis pas l'Office québécois de la langue; il y a donc là un problème majeur. Quand on s'adresse aux gens de l'opposition pour dénoncer des situations où le français est maltraité, ces plaintes-là devraient s'adresser à l'Office québécois. Si elles ne le sont pas, adressées à l'Office québécois de la langue française, c'est que cet office-là n'arrive pas en tout cas, à tout le moins, à recevoir toutes les plaintes. Et on sait, et c'est clair dans les différents papiers qu'on a vus, que le nombre de plaintes qui est en retard, ça peut prendre jusqu'à un an avant qu'on traite certaines plaintes. Il y a donc un problème sérieux.

Et ce n'est pas une critique à l'endroit des gens qui y travaillent. Pour les avoir côtoyés, les avoir vus en commission parlementaire, la majorité des gens qui sont à l'emploi de ces différents organismes qui s'occupent de la langue sont des gens qui ont à coeur la langue. Le problème apparaît bien plutôt de l'ordre que je décris ou que je tente de décrire, c'est-à-dire à la fois, dans le cas de l'Office québécois, à la direction et aussi dans cette opacité qu'on cherche à vouloir... ou enfin cette demi-lumière qu'on laisse régner sur la réalité de la situation linguistique, alors que la clarté est mère de la vertu. Vous le savez, Mme la Présidente, sans nul doute. Bien.

La troisième recommandation, c'est: «Que le Conseil supérieur de la langue française et l'Office québécois de la langue française développent une collaboration plus étroite, en particulier dans la réalisation du mandat de surveillance de l'évolution de la situation linguistique.» Là, c'est un petit peu redondant, parce que ce que je m'efforce de faire depuis déjà un certain nombre de minutes, c'est de décrire à quel point cette collaboration-là est peu fructueuse et n'arrive pas à décrire avec exactitude la situation linguistique. Et je maintiens qu'en dehors d'une vue claire de la situation linguistique, en dehors d'une identification précise des causes de cette dégradation dans un milieu particulier ? surtout à Montréal ? de la situation de la langue, on n'arrivera pas à apporter des remèdes réels, et tous les plans d'action du monde n'y feront rien s'ils ne sont pas accompagnés d'objectifs, de cibles et d'indicateurs extrêmement précis et s'ils ne sont pas mis en cohésion les uns avec les autres.

La dernière... une, deux, trois ? la quatrième recommandation, c'est: «Que la Commission de toponymie dépose à l'Assemblée nationale son rapport annuel de gestion 2006-2007.» Écoutez, qu'y a-t-il à dire? Je pense qu'on s'est plaint qu'il n'y ait pas un rapport de gestion, on souhaite qu'ils le fassent, et je pense qu'ils vont se conformer.

Finalement, le rapport dit, souhaite «que le gouvernement procède, le plus rapidement possible, et en respectant les critères proposés par la Commission de toponymie, à des nominations pour combler les postes de membre de la Commission de toponymie qui sont actuellement vacants». Évidemment, c'est logique, c'est cohérent qu'on les nomme parce que ça fait vraiment très, très, très longtemps qu'il y a des absences. J'en profite pour dire qu'il y a aussi des fois des absences au comité de suivi et qu'à mon sens la question se pose et devrait se poser, c'est: Doit-on ou pas élire la P.D.G. ou le P.D.G de l'Office québécois par un vote de l'Assemblée nationale ou est-ce que ça devrait demeurer la prérogative du gouvernement? La question est légitime, elle se pose, il faudrait que ce débat ait lieu. Tôt ou tard, il va falloir parce qu'actuellement on sent bien que le fait d'être inféodée à un gouvernement partisan n'aide pas et n'améliore pas la qualité de la direction générale de l'Office québécois de la langue française.

Enfin, «que le gouvernement mène une réflexion sur le mode de nomination des dirigeants des organismes du programme de la Charte de la langue française». C'est ce que nous venons de dire.

Ça complète un petit peu une analyse extrêmement sommaire de ces conclusions et surtout une vision un petit peu... qui oublie bien des détails de ce qui s'est passé. Mais je veux juste dire que, ce matin, j'ai entendu le député de Viau faire des affirmations qui étaient un petit peu fâchantes. Évidemment, il n'y a personne d'assez stupide ou malhonnête... Et je connais bien le député de Viau, je sais que ce n'est pas le cas, que c'est un homme intelligent et que c'est un homme honnête, mais je crois qu'il a souffert profondément de partisanerie lorsqu'il affirme que nous devrions franciser 200 000 entreprises. C'est clair que personne de raisonnable ne pense qu'il y a 200 000 entreprises de moins de 50 employés à franciser. C'est évident qu'au Québec la majorité des entreprises qui ont moins de 50 employés sont déjà francophones, que nous n'aurions pas à les franciser, mais il est clair aussi que le lieu de travail de bien des gens qui viennent chez nous, ce sont de petites entreprises et qu'un lieu de francisation et d'intégration, c'est le lieu où de petites entreprises emploient des gens.

n(15 h 50)n

Il faudrait donc qu'une politique, et c'est ce à quoi nous travaillons, une politique qui veut franciser des petites entreprises le fasse sur un calendrier échelonné dans le temps, par secteurs et dans des lieux qui voient une fréquentation importante des gens qui viennent travailler. Nous avons là un outil fondamental pour réussir non seulement la francisation, mais l'intégration des gens, et c'est majeur que nous nous consacrions à cela.

Je parle un peu déjà de l'avenir, je vais passer sur certaines autres remarques qui étaient un peu insultantes pour la compréhension de l'ensemble des gens ici. Finalement, juste en quelques mots parler de l'avenir. Ce à quoi nous travaillons et ce que nous proposons, ça a plusieurs aspects: le premier aspect, on l'a vu ce matin, un refus par le gouvernement d'intégrer cette notion de la prédominance de la langue française comme étant une des valeurs fondamentales qui devrait se retrouver dans la Charte de la langue française; deuxièmement, nous croyons qu'il faut, oui, revoir la loi 101 principalement pour s'assurer que la francisation des entreprises de 100 employés...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député, un moment, s'il vous plaît. M. le leader du gouvernement.

M. Pelletier (Chapleau): Est-ce que je dois comprendre que le député disposerait de plus que 30 minutes pour son exposé?

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, M. le leader du gouvernement, il a 34 min 34 s. Continuez, M. le député.

M. Curzi: J'ai perdu quelques secondes par l'intervention de...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Continuez.

M. Curzi: Je suis certain qu'il me permettra d'allonger mes 34 secondes d'autant de secondes.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est normal.

M. Curzi: Donc, je dis donc que nous voulons avoir une nouvelle loi sur laquelle nous travaillons, qui saura donc apporter des mesures intelligentes, très intelligentes sur la manière d'utiliser les petites entreprises comme lieux de francisation plutôt que d'imaginer que c'est aberrant. Ensuite de ça, cette loi devra aussi renforcer l'enseignement du français à l'intérieur du système scolaire. Et cette loi-là devra aussi toucher certains aspects de l'immigration, et on pense en particulier à la francisation des immigrants avant leur venue, à des programmes de francisation qui toucheraient aussi les gens qui sont déjà venus, que nous avons déjà accueillis. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le député de Borduas. Alors, je suis prête maintenant à céder la parole au prochain intervenant. Ce sera une intervenante, Mme la députée de Pontiac et adjointe au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Et je vous rappelle, Mme la députée, qu'il reste 23 min 31 s à votre groupe parlementaire. Mme la députée.

Mme Charlotte L'Écuyer

Mme L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. D'entrée en matière, je veux reprendre quelques expressions utilisées par le député de Borduas, qui a qualifié certaines remarques insultantes de la part de notre collègue de Viau. Je pense que le discours que je viens d'entendre pour la fin est quand même assez insultant pour les travailleurs du Conseil supérieur de la langue française, de l'Office québécois de la langue française et de la Commission de la toponymie. Les gens qui écoutaient ce discours en disant que les relations de travail à l'Office québécois étaient pourries, que la présidente de la commission de travail... Pour avoir été gestionnaire pendant des années, je pense qu'on n'aurait pas eu le rendement, Mme la Présidente, que nous avons eu de ces trois... de l'office, et du conseil, et de la commission, que nous avons connu. Normalement, quand les relations de travail ne vont pas bien, les résultats ne sont pas bons.

Ceci étant dit, je suis heureuse de prendre la parole, aujourd'hui, à la suite du rapport de la Commission de la culture intitulé Rapport et recommandations à la suite de l'examen de la mission, des activités et de la gestion du Conseil supérieur de la langue française, de l'Office québécois de la langue française et de la Commission de la toponymie. Je désire remercier Mme Boucher, M. Ouellon et les permanents de ces trois organismes, qui sont venus en commission pour nous parler de la situation de la langue française au Québec. Et je tiens tout particulièrement à souligner le travail qu'ils accomplissent chaque jour.

30 ans après l'adoption de la Charte de la langue française, le Québec d'aujourd'hui est plus français qu'il ne l'a jamais été. Malgré une économie ouverte sur le monde, nous réussissons bien en français. En effet, les nouveaux arrivants s'intègrent mieux et optent de plus en plus pour notre langue. Malgré plusieurs bons résultats, certaines inquiétudes demeurent quant à l'avenir du français. C'est dans cette optique que notre gouvernement a mis en place dernièrement une série de mesures contenues à l'intérieur de trois plans d'action, et ce, dans le but de toujours mieux réussir en français au Québec.

Premièrement, je vous rappelle, Mme la Présidente, qu'en mars dernier ma collègue la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine et ministre responsable de la Charte de la langue française a annoncé un plan d'action pour promouvoir la langue française au Québec. Les mesures qu'elle a annoncées visent à donner un nouvel élan à la francisation des entreprises de toutes tailles, à promouvoir l'utilisation du français dans les commerces et enfin à valoriser l'utilisation de notre langue.

D'abord, notre gouvernement consacrera des efforts additionnels pour renforcer l'information destinée aux consommateurs et aux commerçants afin de nous assurer que tous les concitoyens puissent acheter, vendre et se faire servir en français partout au Québec.

Au chapitre de la protection de notre langue, l'Office québécois de la langue française disposera de moyens additionnels pour mieux assumer sa mission, qui est notamment de soutenir la francisation dans les milieux de travail et les commerces. Nous allons donc augmenter, au cours des deux prochaines années, le budget de l'office de près de 25 %.

Pour la première fois en 20 ans, notre gouvernement est le premier à réinvestir aussi massivement dans les outils de protection de la langue française. Au total, c'est 20 nouvelles ressources qui se joindront, dans les deux prochaines années, à l'équipe de l'office pour assurer le respect de la Charte de la langue française et accompagner les entreprises de moins de 50 employés qui souhaitent entreprendre une démarche de francisation. C'est donc, Mme la Présidente, un soutien de plus en plus pour assurer un succès de francisation dans la démarche de francisation de nos entreprises de moins de 50 employés.

L'autre aspect fondamental sur lequel il faut agir, c'est celui de la langue de travail. Le rapport quinquennal de l'Office québécois de la langue française et le dernier rapport de Statistique Canada, rendu public dernièrement, affirmaient que la situation du français au travail, même si elle s'améliore légèrement, demeure une source de préoccupation. Nous apporterons donc toute l'aide nécessaire aux employeurs pour qu'ils puissent offrir rapidement à leurs employés un environnement de travail en français. Dans une réalité où l'économie est ouverte sur le monde, nous mettrons toute l'énergie qu'il faut pour nous assurer que les Québécois travaillent davantage en français. Pour y arriver, nous convoquerons une rencontre qui mettra à contribution les associations et les regroupements d'entreprises de divers secteurs afin de favoriser la mise en place d'actions de francisation qui porteront spécifiquement sur la langue du commerce et des affaires. Les budgets alloués pour encourager les entreprises à réussir en français seront aussi augmentés. La ministre de la Culture a aussi annoncé la mise sur pied d'un nouveau programme pour favoriser la francisation des technologies de l'information dans les entreprises. 2 millions de dollars par année seront consacrés au remplacement des logiciels, des claviers et autres interfaces linguistiques.

n(16 heures)n

En outre, notre gouvernement a décidé d'agir en offrant aux entreprises des incitatifs afin de leur permettre de faire de la francisation un succès de tous les jours. Pour y arriver, nous compterons sur l'adhésion et la participation des employeurs mais aussi sur celles des syndicats, ces partenaires incontournables de la francisation des entreprises. Nous accorderons 250 000 $ additionnels aux centrales syndicales pour faciliter la mise sur pied d'initiatives de francisation dans des entreprises oeuvrant dans des secteurs peu francisés.

Contrairement au PQ qui désire retourner dans une nouvelle querelle linguistique en apportant des changements majeurs à la loi 101, notre gouvernement passe à l'action, d'autant plus que ? et je cite André Pratte, de La Presse du 29 avril dernier ? «le père de ladite loi, Camille Laurin, en a conclu que la voie des changements législatifs n'était plus fructueuse. "En raison des très importants progrès effectués, nous partons du principe qu'il ne faut légiférer que lorsque c'est vraiment nécessaire", disait M. Laurin en 1996. Or, depuis ce temps ? et je cite toujours M. Pratte ? bien que le PQ et l'ADQ ne cessent de parler du "recul du français", la plupart des indicateurs du suivi linguistique [relèvent] une évolution positive.»

De plus, je voudrais citer un autre article, celui d'Alain Dubuc, de La Presse du 30 avril dernier: «...en choisissant ce terrain ? modifier la loi 101 ? elle ? la chef du deuxième groupe d'opposition ? ne sert pas la création de [la] richesse dont elle a fait une priorité. Difficile de créer de la richesse quand on veut gonfler une bureaucratie pour renforcer la loi 101, qu'on veut étouffer les PME, qu'on brasse une insécurité linguistique qui encourage le repli. Ce qui risque alors de reculer, ce n'est pas le français, c'est le Québec.»

Mme la Présidente, les mesures annoncées pour promouvoir la langue française au Québec montrent toute l'importance que notre gouvernement accorde à cette question. Cela démontre aussi toute sa détermination pour assurer le rayonnement et la pérennité du français au Québec. Mais ce n'est pas tout, Mme la Présidente. Deuxièmement, dans le secteur de l'éducation, notre gouvernement entend valoriser l'usage d'un français de qualité. Ma collègue la ministre de l'Éducation, du Sport et du Loisir a déjà établi des mesures pour assurer que nos enfants réussissent mieux en français à l'école. Le plan présenté le 6 février dernier, intitulé Le français, une priorité à l'école, un devoir de société, comprend 22 nouvelles mesures pour améliorer la maîtrise du français chez les jeunes. Nous valorisons donc la place du français à l'école, notamment par des dictées et des textes écrits, afin que la connaissance puisse être vérifiée. De plus, le contenu des programmes de français sera révisé afin de préciser ce que les élèves doivent savoir à la fin de chaque trimestre.

La ministre, notre collègue de l'Éducation, a également annoncé que le niveau de préparation du personnel enseignant serait accru et les exigences, considérablement resserrées. Par ailleurs, chaque enseignant du réseau scolaire primaire et secondaire devra se doter d'un plan de formation continue en français. Au total, près de 39 millions sont consacrés à la réussite scolaire en français. D'ailleurs, Mme la Présidente, la chef de la deuxième opposition n'a pas de leçons à donner étant donné la mauvaise gestion du renouveau pédagogique qu'elle a elle-même lancé en 1996. Avec ce plan, nous venons encore une fois contrer les coupures exercées par le PQ au niveau des conseillers pédagogiques, de différents types de professionnels, des orthopédagogues et des psychoéducateurs. Ainsi, cet autre plan de notre gouvernement vient renforcer notre volonté d'améliorer la qualité du français dans nos écoles primaires et secondaires afin que nos enfants et petits-enfants maîtrisent cette langue qui nous est si chère.

Troisièmement, notre gouvernement a compris depuis longtemps que la francisation est un passage obligatoire pour une intégration réussie. À cet effet, ma collègue de l'Immigration et des Communautés culturelles a annoncé dernièrement une série de mesures pour nous permettre de réussir l'accueil et l'intégration de ceux et celles qui choisissent d'épouser la culture française du Québec moderne. Je vous rappelle d'ailleurs que les études publiées par l'Office de la langue française nous apprenaient que de plus en plus d'allophones consomment des produits culturels francophones. Au total, près de 23 millions supplémentaires seront consacrés à la francisation des immigrants d'ici l'année financière 2010-2011. Ces mesures additionnelles en francisation sont liées à la hausse du niveau d'immigration pour la période 2008-2010. Elles visent trois objectifs: franciser le plus tôt, c'est-à-dire avant l'arrivée des nouveaux immigrants, franciser plus en rejoignant de nouvelles clientèles notamment au sein des entreprises et franciser mieux, en adaptant des cours selon les besoins professionnels.

À ce jour, plus de 60 % des immigrants connaissent le français à leur arrivée. C'est 10 % de plus qu'en 2003. Contrairement à l'ADQ qui veut geler le seuil d'immigration et qui associe à tort le recul du français à la hausse des seuils d'immigrants, mon gouvernement met en oeuvre des mesures pour franciser les nouveaux arrivants afin qu'ils puissent contribuer au développement culturel et économique du Québec. Encore une fois, l'ADQ se comporte d'une façon irresponsable sur la question de l'immigration. Les pancartes électorales, lors de la dernière partielle dans les deux comtés montréalais, en étaient un bon exemple.

Mme la Présidente, avec l'ensemble des mesures mises de l'avant par notre gouvernement, je crois que toutes les conditions sont maintenant réunies pour renforcer le français au Québec. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée de Pontiac. Je suis prête à céder la parole au prochain intervenant. Alors, il n'y a pas d'autres interventions? Alors, cela met fin au débat restreint de deux heures sur le rapport de la Commission de la culture concernant l'audition du Conseil supérieur de la langue française, de l'Office québécois de la langue française et de la Commission de toponymie du Québec. M. le leader du gouvernement.

M. Pelletier (Chapleau): Alors, Mme la Présidente, je vous prierais d'appeler l'article 2 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 23

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): À l'article 2 du feuilleton, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 23, Loi sur les activités cliniques et de recherche en matière de procréation assistée. Y a-t-il des interventions? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Merci, Mme la Présidente. C'est avec grand plaisir, dans la foulée de la Semaine canadienne de l'infertilité qui se déroulait la semaine dernière, que nous abordons, aujourd'hui, le projet de loi n° 23 intitulé, comme vous l'avez très bien dit, Loi sur les activités cliniques et de recherche en matière de procréation assistée et modifiant d'autres dispositions législatives.

Au cours de cette dernière semaine, il nous a été rappelé que l'infertilité touche près de 10 % de nos concitoyennes et concitoyens et les atteint directement au coeur de leur projet de couple et de désir d'enfant. Sur ce point et d'autres points connexes au projet de loi, j'aimerais établir les souhaits ou les principes suivants. D'abord, c'est que la solidarité que nous ressentons tous par rapport aux familles qui ont des difficultés à concevoir, des difficultés à avoir des enfants, cette solidarité dépasse les barrières partisanes et s'étend à tous les parlementaires présents dans cette Assemblée.

Deuxièmement, c'est que nous souhaitons, le gouvernement souhaite, je souhaite et j'espère que mes collègues souhaitent également que ce projet de loi soit adopté à l'unanimité. Pourquoi? Parce que d'abord le sujet dont il traite est un sujet qui est un enjeu éthique important dans une société et qui encore une fois doit être traité au-dessus et à travers les lignes politiques partisanes. Deuxièmement, il y a la question constitutionnelle de juridiction qui vient s'interjeter ici, dans nos débats. Comme on le sait, le gouvernement fédéral a déposé un projet de loi ou a adopté même un projet de loi qui n'est pas encore accompagné d'une base réglementaire, mais il est de l'opinion du gouvernement du Québec que ce projet de loi empiète sur la juridiction de notre gouvernement, et il y a donc eu introduction d'un recours devant les tribunaux qui est actuellement devant la cour, ce qui nous amène à rappeler à nos collègues qu'il faudrait faire preuve de beaucoup de prudence dans les opinions que nous exprimerions en ce qui a trait au texte de législation fédérale par rapport à celui-ci ou toute autre remarque qui pourrait être considérée comme étant sub judice, si vous me permettez l'expression consacrée.

n(16 h 10)n

Le troisième élément, et je sais que pour mon collègue de La Peltrie et son parti politique c'est un élément qui est important, il ne faut pas avoir, au cours de l'adoption de ce projet de loi, des débats sur les sujets qui n'appartiennent pas au projet de loi. Je sais, par exemple, que sur la question de l'inclusion, au panier de services de l'assurance maladie du Québec, des procédures il y a peut-être des différences d'opinions ? elles seront probablement, on le verra, moins grandes que ce qu'on pense; peut-être des différences d'opinions ? entre le gouvernement et l'opposition officielle, parce qu'il faut rappeler que le gouvernement du Québec est, de tous les gouvernements canadiens, celui qui consacre le plus de fonds publics et est de loin le plus généreux envers les couples qui ont à subir ces procédures, mais la définition d'un panier de services, de ce qu'ils considèrent les services assurés par la Régie de l'assurance maladie du Québec, ne peut être introduite dans un projet de loi. Elle appartient à la Loi de l'assurance maladie du Québec et au règlement découlant de cette loi, qui permet de faire la liste des services assurés.

Et ce n'est donc pas au cours de l'adoption de ce projet de loi que ce débat peut se tenir ou devrait se tenir, ce qui ne veut pas dire qu'il n'est pas légitime. Mais il appartient à d'autres forums de débat politique, comme la période de questions, les conférences de presse et les communications avec la population. On pourra bien sûr en discuter, mais ce débat n'avancera pas, de façon significative et concrète, avec l'adoption de ce projet de loi qui traite d'autres sujets et auquel on ne peut greffer un changement réglementaire sur une autre loi totalement dissociée de celle que nous discutons.

Donc, alimenté par les découvertes scientifiques, le domaine de la procréation assistée est en évolution rapide, une évolution que bien souvent et la société et le législateur peinent à suivre. Un sujet aussi délicat que la procréation assistée confronte nos valeurs sociales. Un débat autour de ce thème ne peut en faire abstraction, pas plus qu'il ne peut faire l'impasse sur les questions éthiques. Ces questionnements sont au coeur de nos valeurs sociales, et il est sain qu'elles trouvent une expression démocratique. Au Québec, on estime que près de 600 naissances résultent de cette technique chaque année, soit moins de 1 % des naissances. Ces chiffres peuvent paraître peu élevés, mais les enjeux sous-tendant la procréation assistée se trouvent ailleurs, notamment dans le développement accéléré de la science et les valeurs qu'elle interpelle.

Il faut aussi prendre en compte le fait qu'au Québec comme ailleurs nous assistons à une augmentation de la demande pour les interventions de procréation assistée. Ajoutons à cela, comme je l'expliquais plus tôt, l'adoption, fin 2004, par le gouvernement fédéral de la Loi concernant la procréation assistée et la recherche connexe, loi qui empiète selon nous dans un champ de compétence provinciale et qu'encore une fois notre gouvernement a décidé de contester devant les tribunaux compétents. Je l'ai déjà dit lors des précédentes consultations, parce qu'il faut rappeler que ce projet de loi avait déjà été présenté devant l'Assemblée, lors de la précédente législature, le projet de loi n° 23 va bien plus loin qu'une réponse législative à un problème constitutionnel, c'est, d'abord et avant tout, une réponse concrète et humaine qui place, au coeur de ses préoccupations, les femmes, les couples et les enfants.

Ces enjeux démontrent l'importance d'encadrer la pratique clinique et la recherche sur la procréation assistée par un projet de loi qui prend son assise à même nos pratiques, nos besoins et nos valeurs. Par ce projet de loi, le Québec affirme ou affirmera sa position en matière d'encadrement des nouvelles techniques biomédicales, dont fait partie le domaine de la procréation assistée. Le projet de loi n° 23 vise à protéger la santé des personnes qui ont recours à des activités de procréation assistée et celle des enfants qui en sont issus. Il a pour objet l'encadrement des activités de procréation assistée de manière à assurer une pratique de qualité, sécuritaire et éthique des activités cliniques et de recherche et de favoriser l'amélioration continue de ces services.

Permettez-moi, Mme la Présidente, de circonscrire brièvement le domaine de la procréation assistée tel que défini par ce projet de loi. Par procréation assistée, on entend, et je cite, «tout soutien apporté à la reproduction humaine par des techniques médicales ou pharmaceutiques ou par des manipulations de laboratoire, que ce soit dans le domaine clinique en visant la création d'un embryon humain ou dans le domaine de la recherche en permettant d'améliorer les procédés cliniques ou d'acquérir de nouvelles connaissances». Fin de la citation.

Plusieurs activités sont visées par le projet de loi qui couvre notamment la stimulation ovarienne. Cette technique de stimulation ovarienne n'est habituellement pas incluse dans les activités de procréation assistée. Même si elle se révèle moins complexe que la fécondation in vitro, elle n'en comporte pas moins un taux accru de grossesses à risque, comme l'ont indiqué plusieurs intervenants, dont le Collège des médecins. Cette inclusion de la stimulation ovarienne dans les activités visées par la définition de la procréation assistée fait du projet de loi n° 23 un projet très novateur et consacre un précédent législatif sur le plan canadien, voire même sur le plan international. On sait que ce projet n'a pas connu de suite en raison de la dissolution de la dernière législature. Toutefois, le projet de loi n° 23 prend en compte les commentaires recueillis lors de ces consultations. Nous reprenons donc là où nous avions laissé le travail, enrichis des échanges qui ont eu cours en 2006.

Qu'avons-nous appris lors des consultations menées par le ministère au cours des dernières années? Deux choses essentielles. D'abord, que le domaine de la procréation assistée est marqué par le professionnalisme des intervenants mais aussi qu'il y a nécessité d'un encadrement de ces activités. Premièrement, nous avons pu mieux connaître la pratique de la procréation assistée au Québec. C'est une pratique empreinte de professionnalisme encore une fois et de respect des personnes et de la vie. En revanche, c'est une pratique qui n'est pas exempte d'embûches. Nous connaissons, de mieux en mieux, les difficultés associées à ces techniques, et c'est important de les mentionner: taux d'anomalies congénitales plus élevé chez les enfants conçus en fécondation in vitro par rapport aux enfants conçus naturellement, naissances prématurées, naissances de faible poids et taux élevé de naissances multiples, conduisant à des problèmes importants de santé chez les nouveaux-nés, problèmes qui dans certains cas les suivront tout au cours de leur vie.

Deuxièmement, la pratique clinique et la recherche dans ce domaine doivent être encadrées. La très grande majorité des intervenants consultés y est favorable, car, même si le domaine est marqué par le professionnalisme des intervenants, nous ne sommes pas à l'abri d'erreurs qui peuvent se trouver amplifiées par le fait que c'est un champ scientifique complexe dont l'évolution pousse à l'extrême les interventions cliniques. Il nous faut donc avancer en terrain sûr et baliser la recherche et les pratiques cliniques. Les intervenants n'ont pas manqué de faire ressortir les besoins à ce chapitre qui sont de deux ordres: d'abord, nous avons besoin des mécanismes souples et évolutifs pour nous adapter aux découvertes scientifiques avant de les mettre en application et de les offrir; ensuite, l'encadrement prodigué doit déboucher sur des mécanismes de suivi et de reddition de comptes adéquats et transparents.

À ce chapitre, la préparation du projet de loi a mis en évidence des lacunes importantes. Le manque de données nous empêche de dresser un portrait précis de l'ensemble des activités qui gravitent autour de la procréation assistée au Québec. Le projet de loi prévoit corriger cela. La collecte d'information n'a pas pour but d'exercer un contrôle inutile. Bien au contraire, l'encadrement proposé vise à prendre des décisions fondées sur des données scientifiques et des faits éprouvés afin, entre autres, de repérer les pratiques risquées et de réglementer, le cas échéant, ces champs d'intervention. De cette manière, nous sommes assurés de garantir à nos concitoyennes et nos concitoyens une sécurité accrue et des services de la plus haute qualité. Nous sommes d'autant plus confortés dans cette voie que les intervenants sont d'avis que la loi fédérale repose sur une approche qui ne répond pas selon nous à nos besoins parce qu'inutilement contraignante. Elle utilise le droit criminel pour interdire des pratiques et a débouché sur la création d'une agence de contrôle qui n'a d'ailleurs pas été mise sur pied. Ces mécanismes d'application manquent de souplesse quand ils ne sont pas limitatifs.

Le projet de loi comporte différents mécanismes permettant d'atteindre les objectifs. Je voudrais les énumérer: d'abord, l'instauration d'un permis d'exercice pour les centres de procréation assistée en fonction des services offerts, soit le domaine clinique, le domaine de la recherche ou les deux; l'obligation d'obtenir un agrément des activités auprès d'un organisme reconnu par le ministre; la mise sur pied d'une procédure d'inspection et de surveillance et d'un mécanisme de reddition de comptes de la part des centre auprès du ministère de la Santé et Services sociaux pour assurer le suivi des activités; l'encadrement des pratiques professionnelles par les pairs ? par exemple, le ministre peut demander au bureau de l'ordre professionnel des médecins du Québec un avis sur la qualité, la sécurité et l'éthique des activités exercées dans un centre et sur la compétence professionnelle des médecins; l'évaluation des projets de recherche par des comités d'éthique de la recherche reconnus; l'évaluation des questions éthiques et sociales sur des enjeux fondamentaux par un organisme compétent; la création d'un système de collecte de données permettant de suivre l'évolution du domaine et des éventuelles pratiques risquées.

En somme, c'est un projet de loi qui nous permettra d'exercer nos compétences dans le domaine de la procréation assistée et par conséquent d'agir dans le respect de nos valeurs.

Nous avons choisi la voie d'un projet de loi assorti d'une réglementation, et c'est bien et correct de faire de cette façon. Nous avons choisi de favoriser un encadrement formel applicable à l'ensemble des activités plutôt que de détailler des dispositions précises pour chaque activité. Je voudrais répéter que, lors de l'étude article par article, nous déposerons alors des orientations en matière réglementaire. Je voudrais répéter que le recours à une réglementation large n'est pas un artifice ou n'est pas une solution choisie superficiellement, elle correspond à deux réalités: d'abord, l'évolution extrêmement rapide de la technologie qui n'est pas conforme autant qu'il est nécessaire pour changer des textes législatifs et, deuxièmement, le fait que ces pratiques sont essentiellement des pratiques d'ordre professionnel que l'État doit réglementer, s'il le fait, de concert avec les associations professionnelles comme et notamment avec le Collège des médecins.

Le recours à la réglementation va donc nous permettre d'agir avec souplesse et de nous adapter rapidement, ce qu'une modification à la loi ne permet pas d'accomplir facilement. Parfois, il vaut mieux baliser rapidement un domaine par la voie réglementaire, surtout lorsque la science va vite, si on veut éviter des conséquences malheureuses, plutôt que de s'en remettre au long processus d'ouverture et de réouverture de la loi. Certains pourraient émettre des réserves et des inquiétudes à l'endroit de la souplesse que confère l'adoption de règlements. Tout en comprenant ces propos, j'insiste sur le fait que cette souplesse et cette façon d'encadrer sont comprises et souhaitées par la vaste majorité des intervenants concernés par la procréation assistée, comme nous l'avons constaté lors des consultations.

Depuis les dernières consultations, nous ne sommes pas restés inactifs dans ce domaine. Nous avons donné suite aux préoccupations concernant l'accessibilité financière à ces techniques. En effet, à compter de l'année d'imposition 2008, nous avons annoncé une hausse de 30 % à 50 % du taux du crédit d'impôt remboursable pour le traitement de l'infertilité, dont la fécondation in vitro et les frais reliés à l'insémination artificielle. En 2008, nous estimons que la bonification profitera à quelque 2 500 familles. Il faut rappeler que cette bonification a été également étendue au domaine de l'adoption pour qu'il y ait une équité pour les couples qui désirent, pour plusieurs raisons, soit par échec des procédures de procréation, dont on sait malheureusement que la majorité échoue, soit lorsqu'ils décident d'emblée d'avoir recours à l'adoption...

n(16 h 20)n

Je répète encore une fois, Mme la Présidente, que de loin le Québec est la province canadienne qui est la plus ouverte et celle qui assume la plus large part de financement, à même les fonds publics, de ces activités. Au Canada, il n'y a que l'Ontario qui a un programme de remboursement très partiel pour certaines conditions spécifiques qui ne sont pas la totalité des cas, loin de là. Donc, encore une fois, le Québec, comme c'est le cas, par exemple, en assurance médicaments, a un régime de soutien et d'investissement publics qui se démarque au contexte de canadien de loin par sa générosité et les montants qui y sont consacrés.

On a également commencé à élaborer ? et cette politique ne pourra se faire que de concert avec le Collège des médecins et les associations professionnelles ? une politique limitant le nombre d'embryons transférés, pour donner suite aux recommandations des intervenants en commission parlementaire. Il faut rappeler qu'on nous a répété à plusieurs reprises, et j'en ai fait état au début de mon allocution, que plus de 30 % des grossesses attribuables aux techniques de fécondation in vitro résulteraient en grossesses multiples. Et, pour expliquer aux citoyens qui nous écoutent, une grossesse multiple de jumeaux, c'est maintenant rarement un problème, mais, lorsqu'on parle de triplés, de quadruplés et même parfois plus, on a une incidence élevée de prématurité extrême, d'anomalies et de problèmes de santé à long terme, raison pour laquelle ce que les pays dans le monde font actuellement, et le Québec et le Canada ne font pas exception, c'est de diminuer le nombre d'embryons transférés pour réduire, réduire donc le risque de grossesse multiple, qui accompagne souvent ces techniques.

Lors de nos consultations sur ce sujet en 2007, auprès de la communauté médicale, un consensus s'est dégagé à l'effet qu'il faut au Québec favoriser les naissances tout en minimisant les risques. Cette politique, une fois adoptée, nous permettrait donc de baliser la délicate question du nombre d'embryons. C'est une question qui est absolument essentielle parce qu'il semble acquis sur le plan scientifique et sur le plan des risques qu'il faut aller vers une réglementation semblable. Cependant, nous comprenons tous qu'en réduisant le nombre d'embryons transférés il est possible que nous ayons ainsi posé un geste ou que nous poserions un geste qui augmente le nombre de procédures ou de tentatives qu'une famille doit subir avant d'avoir peut-être un succès dans le pourcentage de cas que ces succès maintenant représentent, qui n'est pas la majorité des tentatives, malheureusement. Donc, c'est pour cette raison et d'autres également qu'il a fallu, en même temps que nous présentions ce projet de loi là et que nous prévoyions aller de l'avant avec la politique sur l'implantation du nombre d'embryons transférés, bonifier le soutien financier aux familles qui encore une fois demeure et est encore de loin au Canada le plus généreux.

Mme la Présidente, j'ai la conviction que ce projet de loi et les grands principes qui le fondent sont bien accueillis à la fois par les intervenants du réseau de la santé et des services sociaux, les groupes d'intérêts publics mais aussi et surtout par les personnes qui doivent recourir à la procréation assistée. Certains points de cette délicate question peuvent soulever davantage de questions qu'ils n'en résolvent, mais nous ne pouvons nous permettre de ne pas aller de l'avant avec l'encadrement dans ce domaine. Nous devons en même temps accepter que nos pratiques évoluent et s'adaptent au fur et à mesure que nous obtenons des réponses de la part de la société et de la science.

Avant de terminer, Mme la Présidente, permettez-moi de rappeler aux membres de cette Assemblée que nous devons agir dans le meilleur intérêt des Québécoises et des Québécois et de nos enfants à venir, ce que propose le projet de loi n° 23, et encore une fois nous formulons le souhait, en sachant que d'autres débats sont en périphérie de ce projet de loi, nous formulons le souhait que ce projet de loi soit adopté à l'unanimité par notre Assemblée nationale pour les raisons que j'ai mentionnées au début de mon allocution. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le leader du gouvernement.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, madame. Merci. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, suite à une entente entre les groupes parlementaires, je fais motion afin d'ajourner le débat, conformément à l'article 100 du règlement, pour permettre aux députés de l'opposition officielle ou de la deuxième opposition d'intervenir ultérieurement sur le sujet.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pelletier (Chapleau): Alors, Mme la Présidente, je fais motion pour que nous suspendions nos travaux jusqu'à 17 heures.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, les travaux sont suspendus jusqu'à 17 heures.

(Suspension de la séance à 16 h 24)

 

(Reprise à 17 h 2)

Le Vice-Président (M. Chagnon): Nous allons reprendre nos travaux, sans précipitation, et je vais demander au leader s'il a quelque chose pour nous au menu.

M. Pelletier (Chapleau): Bien, oui, M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 6 du feuilleton.

Projet de loi n° 63

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Chagnon): Alors, à l'article 6, Mme la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine propose l'adoption du principe du projet de loi n° 63, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne. Est-ce qu'il y a des interventions? Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Christine St-Pierre

Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai le plaisir de soumettre pour adoption de principe le projet de loi n° 63 visant à modifier la Charte des droits et libertés de la personne. Par cet acte législatif, le gouvernement entend rendre manifeste l'importance qu'accorde notre société à la valeur fondamentale que représente l'égalité entre les femmes et les hommes. Cette valeur fait l'objet, est-il besoin de le préciser, d'un réel consensus dans la population. En conséquence, la nécessité de la faire figurer dans un texte fondamental de notre législation remporte l'adhésion de la grande majorité des Québécois et des Québécoises.

En réitérant le droit à l'égalité entre les femmes et les hommes au rang de droits fondamentaux, le gouvernement assume ses responsabilités et donne un signal clair à propos de sa volonté de concourir à l'édification d'une société foncièrement et totalement démocratique. En outre, il se conforme aux engagements internationaux auxquels le Québec a adhéré relativement aux droits et aux conditions de vie des femmes. Je rappelle pour le bénéfice de l'Assemblée que le Québec s'est déclaré lié au Programme d'action de Beijing ainsi qu'à la Convention des Nations unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Ces deux documents très importants encouragent les gouvernements non seulement à protéger les femmes contre les discriminations, mais aussi à s'employer à promouvoir activement leurs droits, entre autres en adoptant des mesures législatives.

C'est donc un moment historique que nous vivons aujourd'hui, car on se souviendra de l'année 2008 comme celle où notre nation a fait l'affirmation solennelle que l'égalité entre les femmes et les hommes est un pilier de notre société, une valeur partagée par l'ensemble des concitoyens et concitoyennes ainsi qu'un principe incontournable dans la vie démocratique du Québec. Afin de situer les enjeux dans une juste perspective, permettez-moi, M. le Président, d'exposer le contexte social et juridique entourant la présentation de ce projet de loi.

Le Québec est une société pluraliste et tolérante au sein de laquelle l'égalité entre les femmes et les hommes a pris forme d'évidence dans l'esprit de la très grande majorité de la population. Tout autant que la diversité culturelle et les droits individuels, l'égalité entre les femmes et les hommes est perçue comme une marque de progrès, une richesse. Afin que cette valeur s'incarne véritablement et que certains vestiges issus d'une autre époque puissent être enfin laissés derrière, nous avons fait de l'égalité une priorité. C'est cette valeur qui nous a donné le premier Conseil des ministres de l'histoire du Québec comptant un nombre égal de femmes et d'hommes. Elle a de plus mené à l'adoption d'une loi pour l'atteinte de la parité sur les conseils d'administration des sociétés d'État ainsi qu'à la mise en place de mesures comme le programme À égalité pour décider, qui encourage la participation des femmes aux instances locales et régionales. Elle prend la forme de gestes importants comme l'adoption d'une politique gouvernementale d'égalité engageant l'ensemble des ministères et organismes de l'administration publique. Intitulée Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait, cette politique a été rendue publique en décembre 2006, accompagnée d'un plan d'action gouvernemental qui comprend plusieurs mesures favorisant l'égalité entre les sexes. Elle affirme notre volonté, comme gouvernement et comme société, de faire en sorte que les principes d'égalité entre les femmes et les hommes s'incarnent sur le terrain.

Je voudrais rappeler que, le 27 septembre dernier, le Conseil du statut de la femme nous enjoignait de faire un pas de plus dans cette direction, un pas déterminant. Intitulé Droit à l'égalité entre les femmes et les hommes et liberté religieuse, cet avis proposait, entre autres, un amendement à la Charte des droits et libertés de la personne pour affirmer solennellement que le principe de l'égalité doit être respecté en toutes circonstances. Cet avis du Conseil du statut de la femme m'a interpellée en tant que ministre responsable de la Condition féminine, mais il a aussi eu l'écoute de mes collègues ministres, consoeurs et confrères qui donnent au quotidien un solide coup de pouce aux femmes en s'employant activement à promouvoir l'égalité dans leurs prestations de services ou la mise en oeuvre de leurs programmes. Je les en remercie chaleureusement et je remercie le premier ministre qui, en ardent défenseur de l'égalité, a d'emblée soutenu et promu le projet et d'en faire un principe inscrit dans la charte.

Comme résultat de nos efforts, j'ai eu l'honneur de présenter à cette Assemblée, le 12 décembre dernier, le projet de loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne. Pourquoi précisément une loi modifiant la charte? Parce que, M. le Président, la Charte des droits et libertés de la personne est une législation fondamentale qui se situe au sommet de la hiérarchie des textes juridiques au Québec et qu'elle est, avec le Code civil, une de celles autour desquelles s'articulent toutes les autres normes juridiques. Les dispositions qu'elle contient disposent donc d'une visibilité et d'une reconnaissance particulières. En effet, le contenu de la charte québécoise a une influence sur l'ensemble du droit, et ses répercussions se font sentir tant sur le plan des comportements que dans l'attitude qu'adoptent les tribunaux.

Les amendements proposés pourront donc guider les juges mais aussi les citoyens, les employeurs, les administrateurs et tous ceux qui ont intérêt à prendre acte du fait que notre société refuse désormais que la valeur de l'égalité entre les femmes et les hommes soit occultée. C'est pourquoi je considère ce projet de loi comme un jalon très important dans cette longue marche vers l'égalité, un résultat qui récompense 40 années de combat mené pacifiquement mais avec pugnacité par les éléments progressistes de notre société.

n(17 h 10)n

Peu après la présentation de ce projet de loi, une consultation générale s'est amorcée, à partir du 12 février dernier, à la Commission des affaires sociales. Dans le cadre de ces audiences publiques, 30 mémoires ont été déposés par des organismes importants et crédibles oeuvrant notamment dans le domaine juridique. Il est apparu que la grande majorité d'entre eux soulignaient l'intérêt de cette initiative gouvernementale d'inscrire le principe de l'égalité entre les femmes et les hommes dans la charte québécoise. Entre autres organisations ayant pris position, on compte la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, qui s'est montrée très favorable à l'idée. Les modifications proposées à la charte ont été appuyées par le Conseil du statut de la femme avec le soutien du constitutionnaliste M. Henri Brun. Elles ont été reçues favorablement par le Forum des femmes juristes de l'Association du Barreau canadien, division Québec; par Mme Louise Langevin, titulaire de la Chaire d'étude Claire-Bonenfant sur la condition des femmes, de l'Université Laval. Même le Barreau du Québec, qui craignait une hiérarchie contradictoire des droits fondamentaux, soutient désormais que ses craintes se sont apaisées à la suite d'une consultation particulière auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Toutes ces personnes, M. le Président, ont vu dans notre projet de loi le ferment d'un véritable progrès sur plusieurs plans. Entre autres, il fait connaître et reconnaître le principe fondamental de l'égalité; il protège et renforce cette valeur; il harmonise les chartes québécoises et canadiennes; il outille et guide les tribunaux; et il consolide les acquis des femmes.

J'aimerais citer ici Me Julie Latour, du Forum des femmes juristes de l'Association du Barreau canadien: «C'est une omission historique que l'on répare. On arrime notre charte avec la charte canadienne, et c'est une modification qui bénéficiera à toutes les femmes, quelles que soient leurs origines.» Fin de la citation.

Je prends un moment pour aborder très brièvement la question des droits économiques et sociaux, parce qu'au cours de la consultation plusieurs groupes ont demandé de rendre justiciables ces droits. Or, bien que ceux-ci soient d'une importance et d'un intérêt certains, ils devront être traités dans un autre contexte car ils couvrent un champ beaucoup plus vaste que celui de l'égalité entre les sexes. Une réforme dans ce périmètre légal toucherait une grande variété de droits dans divers secteurs et interpellerait plus largement le gouvernement et le secteur privé. Ces enjeux ne peuvent donc être appréhendés sans que l'on mène une réflexion en profondeur à propos de toutes les éventuelles implications. Ils doivent en outre être discutés et analysés dans des forums appropriés. En l'occurrence, la Commission des affaires sociales a un mandat trop restreint pour une mission semblable.

M. le Président, le projet de loi n° 63 s'inscrit comme une des réponses aux travaux de la Commission de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles ou, si vous préférez, la commission Bouchard-Taylor. Le gouvernement du Québec souhaitait dès le départ apporter un signal clair de la réception favorable à certaines préoccupations de la population qui sont ressorties au cours des audiences de la commission Bouchard-Taylor. Un important consensus s'est dégagé dans le rapport de la commission, déposé le 22 mai dernier, en ce qui concerne l'égalité entre les femmes et les hommes.

À propos de l'opinion de la commission sur la pertinence de ce projet de loi, je me contente de citer la recommandation B6 du rapport: «Nous approuvons l'initiative en cours à l'Assemblée nationale pour insérer dans la charte québécoise une clause interprétative établissant l'égalité hommes-femmes comme une valeur fondamentale de notre société.» Fin de la citation.

Nous donnons suite aux propos tenus par certains, dont le Parti québécois, qui souhaitaient déplacer l'article 49.2 pour renforcer son caractère interprétatif. Nous envisageons maintenant d'insérer cette clause interprétative à l'article 50.1.

En conclusion, M. le Président, j'aimerais mettre en évidence le fait que le projet de loi propose des modifications à la charte qui sont respectueuses des valeurs fondamentales, non négociables, de la société québécoise et qu'il transmet un message gouvernemental très fort sur l'importance de cette valeur. Elle permet au gouvernement de souligner l'importance du droit à l'égalité entre les hommes et les femmes, en cohérence et en continuité avec les gestes décisifs qu'il a posés en ce sens ces derniers mois. En adoptant cette loi, nous répondons tout à fait à l'engagement du gouvernement du Québec à l'effet de réaffirmer l'égalité entre les femmes et les hommes au rang de valeurs fondamentales, non négociables, de la société québécoise. Je demeure convaincue, M. le Président, que le Québec doit s'assurer de promouvoir auprès des nouveaux arrivants et des personnes issues des communautés culturelles, tout comme auprès de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, les valeurs qui soutiennent la cohésion au sein de notre belle société.

J'invite donc l'Assemblée nationale et les deux partis de l'opposition, qui ont maintes fois indiqué leur intention de nous appuyer, à accorder toute leur considération à ce projet de loi pour qu'il entre en vigueur très prochainement et que le principe de l'égalité entre les femmes et les hommes soit enfin réaffirmé de façon positive dans un texte fondamental du corpus juridique québécois. Merci de votre attention, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Merci beaucoup, Mme la ministre. J'inviterais maintenant Mme la députée de Deux-Montagnes à prendre la parole.

Mme Lucie Leblanc

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Aujourd'hui, nous allons adopter le principe du projet de loi n° 63. La valeur de l'égalité entre les femmes et les hommes est au coeur de mes préoccupations et de mes actions quotidiennes. Toutefois, je voudrais, d'entrée de jeu, exprimer ma déception face au contexte entourant l'adoption du projet de loi n° 63. Pour nous, la haute importance que représentent la Charte des droits et libertés et particulièrement la notion d'égalité entre les femmes et les hommes ne devrait aucunement devenir un hochet politique, comme le gouvernement libéral semble les utiliser. Je m'explique.

Il y a cinq années, la commission des droits de la personne et de la jeunesse déposait un rapport sur les 25 ans de la Charte québécoise des droits et libertés et formulait une série de recommandations visant à renforcer notre charte et surtout à rehausser la notion d'égalité des femmes. Au même moment ou presque, le gouvernement libéral était élu. On serait tenté de croire que, si ce gouvernement avait été réellement intéressé à s'occuper de l'égalité des femmes et des hommes, il avait là une occasion en or. Pourtant, aucun geste en ce sens n'est venu du gouvernement libéral. Aucun. Il aura fallu, quelques années plus tard, la crise sur les accommodements raisonnables pour qu'enfin le gouvernement sorte de sa torpeur et pose un geste, le projet de loi n° 63.

Toutefois, vous l'aurez compris, M. le Président, je me questionne sérieusement sur la sincérité de ce gouvernement dans cette opération. À plus forte raison que les modifications suggérées par ce gouvernement ne sont, au dire de plusieurs, que cosmétiques, pour bien paraître, pour montrer qu'on fait quelque chose. D'ailleurs, le premier ministre n'a pas tardé, depuis maintenant deux journées, en cette Chambre, à récupérer le projet de loi n° 63 pour démontrer qu'il était proactif dans les suites à donner à la commission Bouchard-Taylor. Si le premier ministre était sincère dans la présentation du projet de loi n° 63 en ce qui a trait à une réelle volonté d'agir sur la notion d'égalité des femmes, il aurait passé la commande claire à la ministre de la Condition féminine de préparer un projet beaucoup plus ambitieux et surtout complet. Nous aurions peut-être alors assisté à l'adoption d'un véritable plan d'égalité des femmes et des hommes.

Malheureusement, comme je l'ai mentionné précédemment, le premier ministre a préféré utiliser cette pseudovolonté d'agir sur l'égalité des femmes comme un simple hochet pour tenter de nous distraire de son immobilisme et de son incapacité d'agir en regard de ce fameux dossier des accommodements raisonnables. Je ne doute pas de la sincérité de la ministre de la Condition féminine en regard de ce projet de loi, mais je l'invite à se questionner sérieusement sur le rôle que le premier ministre lui a fait jouer dans cette mise en scène imaginée par ses faiseurs d'image.

Malheureusement, c'est ce que je crois, le projet de loi n° 63, quoique valable au niveau de son principe intrinsèque, ne s'appuie pas sur une réelle volonté de faire progresser la cause des femmes au Québec mais prend davantage ses origines dans une tactique purement politique d'endormir la galerie. Néanmoins, je l'ai souligné, le projet de loi n° 63 a tout de même une valeur symbolique. Si on se détourne un moment des motivations qui ont conduit à sa présentation, on peut certainement y trouver des avantages possibles ? je dis bien «possibles» ? pour l'avancement des femmes du Québec.

Je le répète, mon seul doute, et il est majeur, réside dans la récupération évidente de ce dossier par le gouvernement pour parer son immobilisme dans le dossier des accommodements raisonnables. Une fois cette poussière retombée, assisterons-nous à un désengagement rapide du gouvernement libéral dans le dossier de la cause des femmes? C'est ma crainte, et elle est partagée par plusieurs groupes qui sont venus se faire entendre lors des consultations publiques sur le projet de loi n° 63. Ce gouvernement est passé maître dans l'art d'escamoter les problèmes par de grandes déclarations vides d'action, et je le déplore vivement, surtout dans un dossier aussi important que celui de la condition féminine.

Le sous-financement des centres de femmes, des maisons d'hébergement pour femmes et enfants victimes de violence, des centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle et toute organisation visant à faire valoir les droits et recours des femmes démontre dramatiquement l'importance d'agir concrètement sur le terrain, au-delà des voeux pieux. Le gouvernement ne pourra pas trop longtemps se soustraire de ses réelles responsabilités à l'égard de la condition féminine et des conditions sociales et économiques des femmes. En ce sens, soyez assuré, M. le Président, que j'agirai avec vigilance.

n(17 h 20)n

Notre formation politique adhère totalement au principe de l'égalité des sexes. Il s'agit d'un principe qui est non négociable et qui est fondamentalement ancré dans la société québécoise. Pourtant, récemment encore, ce principe de l'égalité des sexes était remis en question dans le cadre de discussions sur les femmes et la religion en marge de la commission Bouchard-Taylor. Nous devons tout mettre en oeuvre pour que les femmes, qui représentent plus de 50 % de la population du Québec, participent pleinement à l'édification d'une société empreinte d'ouverture et de tolérance. Nous devons tous travailler avec rigueur ? et spécialement moi, en tant que parlementaire responsable de la condition féminine ? à lever ces obstacles et ces non-dits qui entourent encore les questions de genre. Il est de notre devoir en tant que société de veiller à ce que les hommes comme les femmes développent leur potentiel pleinement et également.

Il faut tout de même rappeler que, depuis son émergence au Québec, la condition féminine a toujours joui d'une approche progressiste. Grâce à l'initiative des femmes avant-gardistes et engagées, notre société a su se doter d'une structure solide qui assure la promotion et l'avancement de la condition féminine. Cette fondation solide est essentielle au maintien des acquis, c'est pourquoi nous croyons qu'il est indispensable de continuer à soutenir et à encourager les efforts des organismes dont la mission principale s'attarde directement à l'enjeu fondamental de la condition féminine, soit l'atteinte de l'égalité entre les femmes et les hommes. Nous pouvons certainement dire que cette valeur d'égalité entre les femmes et les hommes fait l'unanimité chez les parlementaires. Nous pourrons très certainement nous appuyer sur cette alliance afin de bonifier le projet de loi n° 63.

Toutefois, et nous l'avons déjà évoqué, il est malheureux de ne s'en tenir qu'à un seul aspect de la modernisation de notre Charte des droits et libertés. Même s'il s'agit d'un élément fort important, nous croyons que cette modification législative aurait dû s'inscrire dans une révision globale de notre charte. À cet égard, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse présentait, en 2003, une série de recommandations visant justement à moderniser la charte. Malheureusement, le gouvernement libéral, à son habitude, s'est enferré dans un immobilisme dommageable et a laissé le soin aux tribunaux de baliser le droit, ignorant ainsi son devoir de leadership. Petit à petit, des institutions publiques ont adopté des accommodements dits raisonnables qui de toute évidence heurtaient les valeurs profondes des Québécoises et des Québécois. Dans un contexte de rectitude politique, nos dirigeants ont laissé aller des situations portant à conséquence sur les droits de la majorité.

Lors des audiences de la Commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 63, l'opposition officielle a tenté d'être constructive dans ses questions et souhaitait connaître les motivations de plusieurs organisations à vouloir ratisser plus large quant à une modification à la Charte des droits et libertés de la personne. À l'occasion, ces questions ont fait frémir la ministre, qui tient mordicus à l'intégrité de son projet de loi. En banalisant les recommandations des groupes comme elle l'a fait durant ces cinq jours d'audiences, la ministre se retrouvait alors isolée. On s'attendait à ce qu'elle puisse regarder les deux côtés de la médaille, à ce qu'elle fasse preuve de curiosité intellectuelle. Hélas! nous sommes profondément déçus de l'entêtement de la ministre. Vous savez, mettre les mots dans la bouche des intervenants, ce n'est pas ça, être constructif. Cela aura démontré à quel point le présent gouvernement souhaite vouloir procéder à la pièce quand il s'agit d'un document aussi important que la Charte des droits et libertés de la personne.

Je rappellerai à la ministre responsable de la Condition féminine que son parti voulait s'en tenir à des consultations particulières sur le projet de loi n° 63. Si les gens ont eu l'occasion de s'exprimer au cours des cinq jours de consultation, c'est grâce à ma formation politique, et je pense très sincèrement qu'avoir pu entendre différents intervenants au sujet de la hiérarchisation des droits et la question des droits socioéconomiques justifie amplement le processus ardu que nous avons mené depuis quelque temps.

Les résultats de cette consultation, le rapport de la commission Bouchard-Taylor et les nombreux commentaires entendus depuis de nombreuses semaines nous indiquent toutefois que le Québec est très certainement mûr pour un geste fondamental tel l'adoption d'une constitution propre à notre nation spécifique. Ce geste courageux et rassembleur donnerait encore plus de poids sur la nécessaire reconnaissance de l'égalité entre les femmes et les hommes. Malgré notre position de main tendue en ce sens au gouvernement libéral, ce dernier fait la sourde oreille à cet appel du peuple du Québec. Un Québec réellement autonome au sein de la fédération canadienne doit s'affirmer par sa propre constitution, à l'intérieur de laquelle on pourrait affirmer et réaffirmer haut et fort les valeurs qui nous unissent comme société libre, distincte et démocratique, mais également comme société d'accueil pour un grand nombre de citoyens du monde.

La publication du rapport de la commission Bouchard-Taylor vient créer ce momentum pour adopter une constitution québécoise, mais le gouvernement Charest ne semble pas reconnaître cette nouvelle fenêtre historique qui se présente devant lui et qui, d'une certaine façon, viendrait corriger l'affront aux Québécois et aux Québécoises qu'a constitué le rapatriement de la Constitution canadienne en 1982. Encore une fois, je le répète, le gouvernement ne semble intéressé qu'à brandir un projet de loi somme toute assez mince, mince dans son libellé mais également mince dans ses effets réels. Plusieurs juristes entendus lors des audiences étaient d'avis que la modification du préambule n'aurait pas d'effet direct sur l'interprétation de la charte. N'est-ce pas là le plus bel exemple que cette opération n'en est finalement qu'une d'opportunité et de stratégie politique?

Comme je le mentionnais au début de mon intervention, cette affirmation des juristes vient renforcer mon sentiment que le premier ministre est très peu sincère dans ses motivations en regard de l'égalité entre les femmes et les hommes. Par exemple, le projet de loi n° 63 ne viendra en rien régler toute la question des symboles religieux affirmant l'infériorité de la femme, pour certaines religions. En ce sens, il est inquiétant de lire que les commissaires Bouchard et Taylor aient recommandé que le port du hidjab soit toléré pour les employés oeuvrant dans nos institutions publiques, tels la fonction publique et le réseau d'enseignement du Québec. Tout au long des consultations générales sur ce projet de loi, mon objectif a été l'avancement des femmes au sein de notre société. Je demeure convaincue néanmoins qu'une série de petits gestes vaut mieux qu'un grand coup d'éclat. Je suis fière, M. le Président, de contribuer avec ma formation politique à l'édification d'une société pluraliste, ouverte, tolérante et où chaque individu peut gravir les échelons et affirmer son plein potentiel.

Au mois de février dernier, la Commission des affaires sociales a été interpellée pour effectuer une consultation sur le projet de loi n° 63 visant à amender le préambule de la Charte des droits et libertés de la personne pour y inclure formellement l'égalité des sexes. Après cinq séances où nous avons eu la chance d'entendre près de 30 groupes sur la question, nous pouvons affirmer sans se tromper que les parlementaires qui étaient présents lors de cette consultation générale ont une bonne idée maintenant des forces et des faiblesses du projet de loi n° 63.

Tout comme de nombreux groupes, je dois exprimer une certaine réserve quant au moment choisi par le gouvernement pour aller de l'avant avec un tel projet de loi. Quelle urgence y avait-il? Ne pouvait-il pas attendre quelques semaines, soit après le dépôt du rapport de la commission Bouchard-Taylor? De notre côté, nous jugeons qu'il aurait été plus responsable et moins électoraliste d'attendre le rapport de la commission Bouchard-Taylor. La prise de connaissance de ce rapport aurait possiblement pu guider davantage les intervenants s'exprimant sur le projet de loi n° 63, et surtout le gouvernement.

Je vais vous faire une mise en contexte, M. le Président, qui découle de ce projet de loi. Avec courage, notre formation politique a dénoncé, à l'automne 2006, les accommodements déraisonnables, ce qui a surtout eu pour effet de forcer la main au gouvernement et de mettre en place la commission Bouchard-Taylor. Dans la foulée de la crise sur les accommodements raisonnables, le Conseil du statut de la femme a déposé un avis au gouvernement et à la commission Bouchard-Taylor recommandant d'amender la charte afin d'y inclure la notion d'égalité femmes-hommes. Telle une bouée de sauvetage, le gouvernement libéral a sauté sur cette opportunité afin de démontrer qu'il prenait la chose au sérieux et présentait précipitamment le projet de loi n° 63.

Pourtant, et tel que dénoncé par plusieurs groupes, n'aurait-il pas été mieux avisé d'attendre le rapport de la commission Bouchard-Taylor afin d'avoir une vue d'ensemble et de présenter un projet de loi plus consistant et congruent? Surtout que ce rapport a coûté 5 millions de dollars aux contribuables. C'est tout de même loufoque: le gouvernement libéral a fait preuve d'inertie, d'immobilisme suite au dépôt du rapport, en 2003, de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse sur les 25 ans de la charte; il a fait maintenant preuve de précipitation et d'improvisation, avant même le dépôt du rapport de la commission Bouchard-Taylor, dans le projet de loi n° 63.

n(17 h 30)n

Souvenez-vous de ce qui s'est passé à l'automne dernier, lors de l'étude en commission parlementaire sur les seuils d'immigration. Après les audiences, nous apprenions qu'il existait des études de l'Office de la langue française qui déploraient le niveau de francisation des immigrants. Si ces informations avaient été rendues publiques aux parlementaires, le débat aurait fort probablement pris une autre tournure. Avec le dépôt précipité du projet de loi n° 63 avant même la présentation du rapport Bouchard-Taylor, le gouvernement n'est-il pas en train de répéter la même erreur? Je crois que oui et je le dénonce avec amertume.

Tout comme nous, plusieurs groupes se sont questionnés. J'ai donc trouvé important de vous faire part des commentaires de certains groupes venus présenter leur mémoire. Je vais vous souligner quelques passages. Naturellement, ces groupes sont, tout comme nous, favorables au projet de loi n° 63 mais ont également des interrogations. L'AFEAS, qui représente 13 000 Québécoises, stipule que, «bien qu'appuyant la démarche du gouvernement dans le projet de loi n° 63, [elle] se questionne à savoir si les modifications telles que proposées sont suffisantes pour atteindre l'objectif visé. La brève note explicative du projet de loi ne nous éclaire pas en ce sens.»

Une autre citation, le Barreau du Québec, qui compte 22 000 membres, dont 46 % sont des femmes, «réitère l'importance d'actualiser la Charte québécoise avec une vision d'ensemble des droits qui y sont compris et notamment les droits économiques et sociaux». Le comité de travail a eu peine à trouver le problème ou à identifier l'enjeu précis qui justifiait, à ce moment-ci, le dépôt du projet de loi n° 63.

Ensuite, M. le Président, l'Intersyndicale des femmes ? c'est 160 000 travailleuses provenant d'organisations syndicales ? qui nous dit: «Certains y voient une manoeuvre politique qui permettait au gouvernement d'éviter de prendre position et de gagner du temps. L'arrivée du projet de loi en décembre dernier, avant même que la commission Bouchard-Taylor ait remis ses recommandations, pouvait aussi nous faire penser à un calcul politique. [...]L'Intersyndicale des femmes reconnaît que le dépôt du projet de loi répond à des considérations politiques et qu'il serait pertinent qu'une réflexion plus poussée soit menée sur les modifications susceptibles d'être apportées à la charte. Malgré cela, nous avons choisi d'appuyer les modifications proposées par le projet de loi. Nous voulons aussi insister sur le fait que, même précisée dans la charte, l'égalité entre les femmes et les hommes ne peut être atteinte par une seule mesure législative. Le droit à l'égalité pour les femmes implique aussi la mise en oeuvre effective des autres droits, économiques et sociaux...»

Ensuite, Mme Carbonneau, de la CSN, qui représente 300 000 travailleuses et travailleurs, dont 53 % sont des femmes, se questionne. «Qu'est-ce qu'on veut réparer avec ce projet de loi n° 63? Quant à nous, l'égalité entre les femmes et les hommes est garantie adéquatement par les dispositions de la charte québécoise, notamment à son article 10. [...]Je rappelle que le libellé de l'article 10, il va parler du sexe, il va parler de la couleur, de la race, enfin une série de situations pour lesquelles on ne peut pas exercer de discrimination, et tout ça est traité correctement, sur un pied d'égalité. L'objectif de la loi n° 63, dans ces circonstances-là, nous laisse en quelque sorte un peu perplexes.»

Voilà ce que ces groupes avaient, entre autres, M. le Président, à nous dire. Ça laisse quelque peu songeur, n'est-ce pas? Ces organismes ou associations que je viens de vous présenter sont venus nous déposer un mémoire, et tous ces organismes et associations représentent à eux seuls un demi-million de Québécois, dont 335 000 femmes.

Bien que le projet de loi n° 63 réponde à des objectifs nobles, le gouvernement libéral n'a pas envisagé toutes les options qu'il avait devant lui avant de le présenter, et ce manque de planification pourrait coûter cher à la société québécoise. Il ne faut pas jouer à quitte ou double avec les valeurs fondamentales du Québec. Elles auraient dû commander plus de rigueur et de sérieux de la part du gouvernement libéral.

L'opposition officielle souhaite donc faire un travail beaucoup plus sérieux afin d'atteindre le vrai objectif, soit l'atteinte d'une équité des droits sociaux et économiques des femmes, et en ce sens nous rejoignons plusieurs groupes, dont l'Intersyndicale des femmes qui, dans sa présentation, disait qu'elle ajoutait «sa voix à celle de la Fédération des femmes du Québec et à celle de la Ligue des droits et libertés qui demandent que le gouvernement du Québec renforce les droits économiques et sociaux en mettant en place des mesures et des programmes qui sont concrètement susceptibles d'améliorer la condition sociale et économique des femmes et ainsi de poursuivre la réalisation progressive de l'égalité réelle de toutes les femmes».

Après avoir pris également en considération les préoccupations qu'a exprimées ma formation politique à l'égard de ce projet de loi là, je puis dès maintenant offrir ma collaboration à la ministre responsable de la Condition féminine pour faire progresser celui-ci. Le droit des femmes est un enjeu qui préoccupe sérieusement les élus de l'Action démocratique du Québec, et il nous fera plaisir de bonifier le projet de loi n° 63 dans la mesure du possible, en questionnant la ministre sur les répercussions éventuelles de ce projet de loi.

En terminant, M. le Président, malgré notre déception face aux échéanciers imposés par le gouvernement libéral et malgré les réels motifs sous-jacents à la présentation de ce projet de loi, l'opposition accueille favorablement le projet de loi n° 63, et nous agirons de manière constructive lors de l'étude article par article. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Merci, Mme la députée de Deux-Montagnes. J'inviterais maintenant Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve à prendre la parole.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. C'est évident, M. le Président, que le mot qui a été utilisé par ma collègue, le mot de «déception», est celui qui s'applique cet après-midi à l'examen du projet de loi n° 63 puisque c'est la démonstration que le gouvernement a décidé de renoncer à inscrire dans le préambule de la Charte des droits et libertés du Québec deux des trois valeurs fondamentales dont il fait pourtant la promotion à pleines pages des journaux.

On le sait, M. le Président, le premier ministre a fait connaître ces valeurs fondamentales qui sont celles que la très large majorité ? peut-être pouvons-nous penser et espérer l'unanimité ? des Québécoises et des Québécois appuient, auxquelles ils souscrivent. Et ces valeurs fondamentales, répétons-les, puisque, comme le disait si bien Talleyrand ? on nous l'a rappelé en commission parlementaire d'ailleurs: Cela va sans dire, mais cela va encore mieux en le disant. Ces valeurs fondamentales sont l'égalité entre les hommes et les femmes, la primauté du français et la séparation entre l'État et la religion. Ce sont là donc trois valeurs fondamentales, trois piliers de notre culture publique commune, trois principes incontournables, et le signal clair cet après-midi, c'est qu'une seule de ces valeurs fondamentales fait l'objet d'une législation. Et cela, M. le Président, devra être corrigé lors de l'examen en commission parlementaire que nous ferons, l'étude article par article de ce projet de loi, puisque ce serait absolument inconcevable, à ce moment-ci, qu'on prétende endosser un seul pilier, un seul principe incontournable, une seule valeur fondamentale, que l'on dit avec raison, n'est-ce pas, être celle que l'on a en partage.

Et le premier ministre ajoutait, dans ces publicités qu'il a fait paraître dans tous les médias, dans tous les quotidiens, que ces valeurs fondamentales «sont à prendre avec le Québec». Il ajoutait: «Nous n'avons pas tous la même origine, [pourtant] nous avons la même destinée, car nous sommes tous Québécois.» Alors, c'est certain, M. le Président, que nous aurons l'occasion lors de l'étude article par article du projet de loi en commission parlementaire, nous aurons l'occasion de faire valoir la nécessité d'introduire dans le préambule de la charte, à ce moment-ci, ces trois valeurs fondamentales, et non pas une seule d'entre elles, aussi importante soit-elle. Et, vous savez, l'immense, disons, participation que j'ai pu avoir, je le dis très modestement, M. le Président, avec combien d'autres milliers de Québécoises, à l'avènement de ce que l'on considère maintenant comme allant de soi en matière d'égalité, de principe d'égalité, de principe du droit à l'égalité entre les hommes et les femmes.

n(17 h 40)n

Alors, c'est donc dire que le projet de loi... qui contient deux articles, hein, le projet de loi n° 63 qui est devant nous, l'un introduisant cette question d'égalité entre les femmes et les hommes dans le préambule de la Charte des droits et libertés de la personne et l'autre énonçant que les droits et libertés qui sont prévus dans la présente charte sont garantis également aux hommes et aux femmes, cela peut être intéressant.

Et nous ne sommes pas la seule société qui introduit ce type de disposition dans les préambules. J'en veux à preuve le mandat que le président de la République française, M. Sarkozy, a donné récemment à Mme Simone Veil, bien connue, comme on le sait, pour sa participation à la cause des femmes, lui a donc donné ce mandat d'examiner un projet de modification du préambule de la Constitution française pour mieux assurer également l'égalité entre hommes et femmes. Alors, c'est le président Sarkozy qui l'a chargée de cela, et je crois qu'on a intérêt ici même, au Québec, à suivre les travaux qui se font, en France comme ailleurs, sur ces questions.

D'autant, M. le Président, que le projet de loi qui est devant nous a une valeur symbolique certaine, nous l'avons dit, nous le répétons, a une valeur beaucoup plus symbolique ? mais ça a de l'importance dans une société ? que juridique. Et je voudrais simplement à cet égard citer le mémoire de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, donc laquelle commission dans le fond a un mandat de veiller à l'application de la Charte des droits et libertés, et la commission, en conclusion de son mémoire, disait ceci: «Accueillir avec intérêt la proposition de modification à la charte.» Et elle ajoutait: «Ces modifications devraient mieux faire connaître le principe fondamental de l'égalité entre les femmes et les hommes. La commission estime que ces modifications n'ont pas pour effet de modifier l'état actuel du droit en matière de droit à l'égalité et ? ajoutait-elle ? elle est en accord avec cette approche.»

En fait, ce que la commission est venue nous signifier lors de nos travaux, c'est donc que depuis 1975 le principe de l'égalité des droits entre les femmes et les hommes est inscrit dans la charte québécoise. Cependant, évidemment, ce projet de loi vient sursouligner ce principe de droit à l'égalité, qui existait déjà, de telle manière que, s'il s'avérait qu'un juge qui a à interpréter la charte soit un peu, disons... ait un peu de difficulté à lire les textes, ce sursoulignement lui rappellerait, n'est-ce pas, combien c'est important et... puisque c'est considéré comme un principe. Et je pense que c'est largement partagé. Je ne sache pas qu'en commission parlementaire il y ait eu plus que quelques groupes, qu'on ne compte même pas sur les doigts d'une seule main, qui se soient opposés à l'adoption de ces deux articles dans ce projet de loi n° 63.

Cependant, M. le Président, il faut bien comprendre qu'en n'adoptant qu'un seul de ces principes on se trouve à discréditer la primauté du français et à discréditer du même coup la séparation de l'État et de la religion, puisque ces principes que l'on prétend pourtant, au gouvernement, comme faisant partie des valeurs fondamentales ne sont pas retenus comme devant, eux également, faire partie du préambule de la Charte des droits et libertés.

Alors, à cet effet, je voudrais souligner que le Conseil du statut de la femme, dans un avis publié en novembre dernier, rappelait à bon escient le droit à l'égalité entre les femmes et les hommes et la liberté religieuse. Et à cet égard, dans cet avis du Conseil du statut de la femme, on faisait valoir la nécessité d'une séparation entre l'État et la religion et on disait: «Il existe au Québec une laïcité de fait», mais on rappelait qu'il n'y avait pas de législation claire à cet effet. «Ponctuellement ? rappelle-t-on ? le gouvernement réaffirme cette laïcité, comme il l'a fait en décembre 2006, lors de l'adoption de la politique gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes, [intitulée] Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait.»

Alors, M. le Président, j'ai donc relu cette politique gouvernementale du gouvernement libéral qui s'intitule Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait, et il est vrai que, dans ce document qui sert de politique triennale ? alors, nous en sommes donc à la deuxième année d'application de cette politique gouvernementale ? on retrouve ceci ? permettez ? alors on retrouve cette affirmation: Il faut donc «soutenir l'égalité entre les femmes et les hommes dans un contexte de diversité croissante sur les plans culturel et religieux». On sait que cette politique gouvernementale, c'est un plan d'action en fait, hein, que le gouvernement adopte en matière de condition féminine. Alors, dans ce plan d'action, on nous dit ceci: «Dans le contexte de la diversité croissante sur les plans culturel et religieux et d'un certain regain de la ferveur religieuse, on assiste à la multiplication des manifestations de valeurs ou de pratiques religieuses dans l'espace public, dont quelques-unes peuvent être sources de frictions avec l'exercice des droits des femmes.» Et on dit: «Par conséquent, de façon particulière, les valeurs et les principes suivants doivent être réaffirmés: l'État est laïc et la séparation des sphères politique et religieuse est une valeur fondamentale de la société québécoise.»

Cela, M. le Président, fait partie du plan d'action ou en fait de ce qu'on appelle l'équivalent d'un plan d'action de la politique gouvernementale du gouvernement libéral pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Donc, je répète, donc: «...doivent être réaffirmés [que] l'État est laïc et [que] la séparation des sphères politique et religieuse est une valeur fondamentale de la société québécoise.» Ça se trouve, tout cela, dans un plan d'action en matière de condition féminine.

Alors, je ne sache pas, M. le Président, qu'il pourrait s'avérer que la ministre responsable du dossier de la condition féminine, ou ses collègues de son gouvernement, refuse, lors de l'étude article par article en commission parlementaire, d'appliquer une des dispositions qui est préconisée dans le Plan d'action gouvernemental en matière de condition féminine et qui consiste à reconnaître cette valeur fondamentale de la séparation de l'État et de la religion, telle que promue, n'est-ce pas, dans cette publicité du premier ministre, et donc de faire en sorte que cela ne soit pas... n'ait pas que la valeur du papier sur lequel il est écrit, mais que ça devienne inscrit dans une charte, de telle manière que, dans l'espace public commun, dans cet espace culturel qui est celui des Québécoises et Québécois de toutes origines, il soit su que l'égalité des hommes et des femmes, la séparation de l'Église et de la religion de même que la primauté du français sont le socle sur lequel, les fondements sur lequel la société québécoise ? «notre nation», comme disait si bien la députée de Deux-Montagnes ? poursuit ses destinées avec ceux et celles des Québécois qui sont nés ici comme ceux et celles qui sont issus de l'immigration et qui sont des Québécois à part entière.

Et comme le disait si bien mon collègue, maintenant décédé, Gérald Godin, qui fut très longtemps député dans cette Assemblée, il y a 101 façons d'être Québécoise et Québécois. Et nos destinées sont communes, mais bien évidemment dans le contexte de ces valeurs fondamentales qui sont promues présentement.

Alors, je rappelais donc l'avis du Conseil du statut de la femme qui porte sur les femmes et les hommes et la liberté religieuse et qui, à cet égard, disait ceci: «Cette laïcité nouvellement affirmée comme valeur commune du peuple québécois prend tout son sens à la lumière de notre histoire. La neutralité de l'État ? la séparation des pouvoirs civil et religieux ? est la meilleure garantie du respect de la liberté de religion, qui inclut aussi le droit de ne pas être forcé d'adhérer à une croyance.»

n(17 h 50)n

Alors, tout cela se retrouve dans un avis du Conseil du statut de la femme, ce qui est bien la démonstration, M. le Président, que les droits doivent s'interpréter les uns par rapport aux autres. Alors, le droit, par exemple, à l'égalité des hommes et des femmes doit s'interpréter aussi en regard des autres droits que l'on retrouve dans la Charte québécoise, et donc, à cet égard, la nécessité, dans le préambule, d'y inclure ce qu'on considère comme des fondements, qui sont sursoulignés: il y a l'égalité des hommes et des femmes, sursoulignée, la primauté du français, et il y a la séparation de l'État et des religions.

J'ai trouvé ça assez intéressant que, dans cet avis du Conseil du statut, qui est récent, là, novembre dernier, on aborde également la question de la primauté du français. Et on le rappelle comme étant justement, avec raison, une des valeurs fondamentales et qui fait partie en fait au même titre que l'égalité entre les hommes et les femmes et la séparation de l'État et des religions. Pourquoi, M. le Président? C'est évident qu'il y a eu assez récemment des jugements de cour qui ont semé un certain désarroi, un certain émoi, mais en tout cas une certaine inquiétude. Je pense en particulier à ce jugement de la Cour supérieure, en 2005, à l'effet qu'une épouse de religion presbytérienne pouvait renoncer aux prescriptions du Code civil en matière de nom, de nom, si vous voulez, de l'époux, de l'épouse. En fait, il s'agissait en l'occurrence d'adopter le nom exclusif du mari, à l'exclusion de son nom propre, pour, disait-on, suivre les prescriptions de sa religion, et la Cour supérieure a donné raison, alors donc a permis de renoncer aux prescriptions du Code civil, et cela a donné lieu à des inquiétudes. Par exemple, est-ce qu'une femme pourrait renoncer aux prescriptions du Code civil en matière de partage du patrimoine familial s'il advenait qu'elle invoque que les prescriptions de sa religion ne lui permettent pas d'être à égalité avec son conjoint, ou à égalité avec son mari, ou à égalité? Alors, il y a, comme ça, bien évidemment des questions nécessairement qui amènent la nécessité d'une interprétation des droits les uns par rapport aux autres, et d'où, je pense, M. le Président, à l'évidence la nécessité d'affirmer clairement que ces droits qui doivent s'interpréter les uns par rapport aux autres doivent l'être en fonction de valeurs fondamentales qui sont celles que je n'ai pas besoin de répéter à nouveau, je pense, puisqu'elles sont maintenant bien connues.

Alors, également, je voudrais attirer votre attention sur le fait que, lors des travaux de notre commission parlementaire, la commission des droits et libertés de la personne sont venus d'abord donner leur point de vue sur l'application de ces dispositions du projet de loi n° 63, et je vous disais tantôt leur conclusion à l'effet que ce projet de loi était accueilli avec beaucoup d'intérêt mais qu'il ne modifiait pas l'état actuel du droit en la matière. Et la commission ajoutait: «La charte reconnaît des droits et libertés à tous. Les tribunaux ont développé des moyens qui permettent de respecter les droits de chacun même dans [des] situations où [des] conflits entre les droits des uns et ceux des autres prennent leur source. [...]Ces moyens prennent en considération les circonstances propres [...] afin d'apporter une solution respectueuse des droits de chacun et des valeurs de la charte. [Et] la commission estime [en fait] que [le projet de loi n° 63], tel que formulé, ne devrait pas avoir pour effet de modifier cette situation.»

En fait, le projet de loi vient simplement réaffirmer. Mais, je le répète encore, j'aime beaucoup cette phrase de Talleyrand: «Cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant.» Je dirais encore mieux: Cela va mieux en légiférant, et cela va mieux en le légiférant mais en étant clair sur ces valeurs fondamentales et en en n'oubliant aucune des trois.

D'ailleurs, je me plais à répéter Montesquieu, que j'aime beaucoup, qui répétait qu'«entre le fort et le faible c'est la liberté qui opprime et le droit qui affranchit». Et il est bien évident que les chartes ont justement pour effet de s'assurer d'une part de l'exercice des droits et libertés des personnes mais également de s'assurer que cela se fasse dans le respect des droits des autres et aussi que cela se fasse dans le respect de l'intérêt collectif.

Alors, les chartes posent des limites à l'action du gouvernement, mais en même temps les chartes invoquent aussi l'intérêt collectif pour évaluer, lorsqu'il y a conflit de droits... Et c'est vraiment important, je pense, M. le Président, puisque la société québécoise, au fil des ans, s'est dotée d'un ensemble de normes et d'orientations qui constituent le fondement de sa culture, de ce qu'on peut appeler cette culture commune. Et il s'agit donc en fait de réintroduire de manière significative... On l'a fait pour l'égalité des droits entre les femmes et les hommes, de le faire également pour la séparation de l'État et de la religion et également de la primauté du français, de l'introduire dans la charte québécoise. À ce moment-ci, cela m'apparaît tout à fait souhaitable et tout à fait indiqué.

Alors, j'aimerais également rappeler que de très nombreux mémoires ? Mme la députée de Deux-Montagnes y a fait référence ? nous ont rappelé que des droits peuvent rester sur papier s'ils ne sont pas effectivement... s'ils ne peuvent pas effectivement se réaliser ou s'appliquer, et je parle en particulier des droits économiques et sociaux. Je voudrais à cet égard citer la commission des droits et libertés de la personne, qui rappelait avoir transmis au gouvernement, à l'automne 2003, plus précisément en novembre 2003, un bilan des 25 premières années d'application de la charte québécoise, adoptée en 1975, et donc, avec un peu de retard, là, la commission des droits et libertés soumettait, transmettait au gouvernement un bilan des 25 premières années de la charte et formulait plusieurs recommandations pour mieux garantir les droits reconnus par la charte.

Et une de ces recommandations primordiales, selon la commission, là, je les cite, c'est «le renforcement des droits économiques et sociaux». Et à cet égard ce que la commission disait en commission parlementaire, quand on étudiait le projet de loi n° 63, et je les cite: «S'il est vrai que la reconnaissance [des droits économiques et sociaux] ne vise pas spécifiquement les femmes, il importe de rappeler que les femmes sont particulièrement touchées par l'objet des droits économiques et sociaux.»Alors, la commission ajoute: «Dans une des études du bilan des 25 ans de la charte[...], le chapitre consacré à la lutte des femmes se conclut par le paragraphe suivant: "Depuis le début des années [quatre-vingt-dix], l'émergence de la pauvreté comme thème d'intervention d'une grande diversité d'acteurs sociaux et la grande capacité de mobilisation [...] ? dont témoignent les grands rassemblements orchestrés par la Fédération des femmes du Québec en 1995 et en 2000 ? pointent dans une même direction: la pauvreté est de loin la situation la plus corrosive pour l'exercice des droits, et particulièrement, celui du droit à l'égalité."» Alors, c'est ce que soulignait la commission dans une déclaration qu'elle a faite et qu'elle a reprise en commission parlementaire, en février dernier, à l'effet que, pour lutter contre la pauvreté... lutter contre la pauvreté, c'est permettre de corriger à la racine les sources d'inégalité et les sources de discrimination. Et je le répète, je pense que c'est important: «La pauvreté est de loin la situation la plus corrosive pour l'exercice des droits, et particulièrement celui du droit à l'égalité.»

C'est donc dire qu'à l'instar de la très grande majorité, je pense, des mémoires que nous avons reçus en commission parlementaire, autant la commission des droits et libertés de la personne que le Barreau... C'est quand même étonnant, mais le Barreau a même tenu à transmettre une correspondance, le 25 mars, à tous les membres de la commission parlementaire pour rappeler qu'il estimait, à l'instar de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qu'une égalité plus effective entre les femmes et les hommes passe par une reconnaissance plus complète des droits économiques et sociaux. Et à cet égard le Barreau recommandait de donner suite à ces nombreuses recommandations qui nous ont été transmises par la commission des droits et libertés de la personne.

Alors, je vais demander votre consentement, M. le Président, pour pouvoir poursuivre à notre retour, à 20 heures. Est-ce que nous avons complété?

n(18 heures)n

Le Vice-Président (M. Chagnon): J'aurais été obligé de m'excuser de vous interrompre, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, parce que dans quelques secondes évidemment nous serions rendus à notre période de suspension jusqu'à 20 heures. Mais, si éventuellement il y a consentement, il me fera plaisir de vous laisser continuer et terminer. Je ne sais pas si vous en avez pour longtemps? En principe, vous pourriez en avoir encore pour plusieurs minutes, mais...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Chagnon): Alors, pour une demi-heure.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Chagnon): Alors, je crois comprendre, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, que vos collègues préféreraient vous entendre à 20 heures. Alors, je vais donc évidemment m'en tenir au choix et au voeu de vos collègues et faire en sorte de suspendre cette Chambre jusqu'à 20 heures. Alors, il y a suspension.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

(Reprise à 20 h 2)

Le Vice-Président (M. Picard): Bonne soirée, Mmes et MM. les députés. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 63, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne. La parole est à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Contrairement, j'imagine, à l'attente générale où j'avais mentionné que cela pourrait durer au-delà de 30 minutes, je vais, M. le Président, me contenter de conclure cette intervention que je faisais, compte tenu des ententes intervenues entre nos leaders, de manière à ce que mes collègues qui ont participé très activement à la commission parlementaire puissent également concourir au débat sur ce projet de loi n° 63.

Je voudrais rappeler, M. le Président, que ce projet de loi a été déposé en novembre dernier. Alors, cela fait déjà plusieurs mois, presque six mois que le projet de loi n° 63 sur l'égalité de droit entre les hommes et les femmes, qui contient deux articles, a été déposé, et les auditions en commission parlementaire se sont tenues en février dernier. On aurait pu croire que le gouvernement a attendu depuis des mois maintenant, 12 semaines et plus, avant de rappeler ce projet de loi pour en faire l'adoption de principe à laquelle on procède ce soir parce qu'il avait l'intention de donner suite aux recommandations de la commission Bouchard-Taylor mais aussi parce qu'il avait l'intention d'introduire dans ce projet de loi ce que le premier ministre, dans sa déclaration ministérielle, nous a dit être son engagement à l'égard des valeurs fondamentales de notre société, ce qu'il a d'ailleurs publié dans tous les grands quotidiens du Québec en nous rappelant que ces valeurs fondamentales ? c'est le terme même, l'expression même utilisée ? sont, en plus de l'égalité entre les femmes et les hommes, la primauté du français et la séparation entre l'État et la religion et que ces trois valeurs font partie des fondements mêmes de notre société, d'où notre déception de comprendre qu'il n'y a pas eu d'annonce de la ministre de la Condition féminine ou de quiconque du gouvernement pour pérenniser dans la Charte des droits et libertés ces trois valeurs-phares, ce socle sur lequel notre culture commune est édifiée.

Et je rappellerai, M. le Président, que le gouvernement a eu tout le temps, n'est-ce pas, d'accepter de rendre, dans une législation, ce qu'il a jusqu'à maintenant simplement publié sous forme de publicité dans les quotidiens.

Il serait, et je le dis avec conviction, M. le Président, il serait inimaginable que le message qu'on lance, c'est celui qu'une seule de ces valeurs est fondamentale, finalement. Elle est importante, elle le fut toujours, à mes yeux, elle l'est toujours autant, mais ce n'est pas vrai qu'il n'y en a une seule qui est plus importante que les autres. Il n'y a pas une hiérarchisation par rapport aux valeurs. Celle de la primauté du français, de la séparation de l'Église et... la séparation de l'État et de la religion, comme le disent les publicités, et celle de l'égalité des droits des hommes et des femmes, il n'y a pas de hiérarchie entre ces valeurs fondamentales, elles sont intégrées, elles sont inextricablement imbriquées les unes dans les autres.

Alors, pour toutes ces raisons, nous pensons que l'étude en commission parlementaire va nous permettre d'examiner, lors de l'étude article par article, évidemment, ce respect, cette pérennité, ce respect de l'intérêt collectif qui est celui d'introduire dans la charte, comme cela nous est possible grâce à cet outil qui est à notre disposition, qui est le projet de loi n° 63, ces valeurs que l'on considère comme fondamentales, ces principes qui sont ceux sur lesquels nous faisons l'unanimité dans cette Assemblée et sur lesquels nous souhaitons que notre société fasse l'unanimité et lance à tous le message clair que ce sont là des valeurs qui ne sont pas négociables.

Alors, M. le Président, pour toutes ces raisons, je vous rappelle que nous avons déjà fait savoir que nous endossons le principe du projet de loi mais que nous le trouvons incomplet et qu'à ce moment-ci les Québécoises et les Québécois ont besoin de savoir que cette Assemblée nationale, qui est le lieu du bien commun général, que cette Assemblée nationale va avoir le courage et la conviction d'affirmer dans sa Charte des droits et libertés, d'affirmer clairement ses principes. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Mercier, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de Francophonie et de relations internationales et responsable aussi de la réforme des institutions démocratiques, M. le député, la parole est à vous.

M. Daniel Turp

M. Turp: Alors, merci, M. le Président. J'ai le plaisir de prendre la parole après ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et notre porte-parole en matière de condition féminine pour rappeler d'abord le plaisir que nous avons eu de travailler à la Commission des affaires sociales, d'entendre près de 30 groupes qui sont venus s'exprimer sur le projet de loi n° 63, cette loi qui modifie la Charte des droits et libertés de la personne sur des questions relatives à l'égalité hommes-femmes.

Nous avions reçu 30 mémoires. Nous avions, du côté de notre formation politique, pris grand soin à examiner le contenu de ces mémoires, en résumer le contenu, les propositions et, pendant ces cinq jours d'audition, nous avons été en mesure de prendre connaissance des vues de ces groupes, et en particulier d'un nombre important de groupes de femmes, de poser, de formuler un certain nombre de questions, d'obtenir des précisions, d'obtenir des réponses à nos questions. Nous avons eu le droit aussi à la participation de quelques juristes, de constitutionnalistes qui sont venus nous parler de la portée des propositions qui étaient formulées par le gouvernement dans son projet de loi, et je crois que nous avons été éclairés sur ce que devrait contenir cette loi, les modifications qui pourraient être apportées pour la bonifier et l'améliorer.

n(20 h 10)n

Nous avons entendu des représentations dans le contexte aussi d'auditions et d'études de la commission Bouchard-Taylor, et il est vrai qu'à l'époque où nous avons examiné et entendu des représentations sur le contenu du projet de loi n° 63 nous n'étions pas saisis des recommandations, ces recommandations étaient en cours d'élaboration. Nous avons, aujourd'hui, la possibilité d'examiner et de repenser le projet de loi n° 63 en regard des recommandations formulées par les commissaires Bouchard et Taylor puisque la question de l'égalité des hommes et des femmes, de cette valeur fondamentale, et la question de la place, au sein du Québec, d'autres valeurs fondamentales, a été abordée par les commissaires dans le rapport que nous avons obtenu la semaine dernière.

Je rappelle, et je reprends les remarques finales que j'avais formulées lors des travaux de la commission, qu'il y avait certains groupes qui s'objectaient à l'adoption du projet de loi n° 63 parce qu'ils étaient d'avis qu'une réforme de la Charte des droits et libertés devait être faite de façon globale et d'ailleurs qu'il était important et qu'on avait encore trop tardé à adopter une réforme beaucoup plus globale et majeure de cette Charte des droits et libertés, qui est en quelque sorte notre quasi-constitution, qui comporte des dispositions de nature quasi constitutionnelle. Certains ont rappelé, et on aura l'occasion de le faire, que la Commission des droits de la personne, en 2003, avait présenté un bilan des 25 années d'application de la charte et avait formulé un certain nombre de recommandations qui n'avaient pas été mises en oeuvre, qui n'avaient pas eu de suite et qui n'ont pas encore eu de suite, et pour cette raison certains groupes, et je pense notamment à la Ligue des droits et libertés, avaient exprimé leur désaccord avec l'idée de la présentation d'un projet de loi qui visait à modifier de façon partielle, et non pas globale, la Charte des droits et libertés de la personne.

Il y a d'autres groupes qui ont affirmé, puisque ce projet de loi ne cherchait pas à mieux enchâsser les droits économiques et sociaux, à leur donner une primauté, qu'il fallait revoir le contenu de la charte, qu'il fallait refaire ses devoirs parce que l'égalité des hommes et des femmes était si intimement liée à l'effectivité de l'égalité qu'elle ne pourrait passer que par une meilleure reconnaissance des droits économiques et sociaux, qu'il ne valait donc pas la peine d'adopter un projet de loi si partiel et qui ne répondait pas aux besoins fondamentaux des femmes.

En revanche, et je crois qu'on a pu le dire, plusieurs groupes se sont présentés devant la commission pour affirmer que ce projet de loi, ses dispositions, la disposition qui visait à modifier le préambule pour y faire référence à l'égalité des hommes et des femmes, l'article, la clause de garantie ou de sûreté que l'on voulait ajouter dans la charte étaient des pas qui méritaient d'être pris par notre Assemblée parce qu'ils bonifiaient, dans une certaine mesure, le principe de l'égalité des hommes et des femmes. Dans ce contexte, plusieurs ont proposé par ailleurs des modifications à adopter notamment à la clause de sûreté, de garantie, et j'y reviendrai.

D'ailleurs, quand on examine attentivement et on lit attentivement les mémoires, quand on examine les travaux et les mémoires, on constate qu'il y a des modifications de quatre natures qu'on a proposées, qu'on nous a proposées d'adopter ici, à l'Assemblée nationale.

La première proposition qui a été formulée par un certain nombre de groupes veut que l'on modifie l'article 49.2, le nouvel article 49.2 qu'on veut inclure, pour en faire une véritable clause d'interprétation et que l'on modifie donc la façon dont cet article est rédigé, qui est rédigé de telle sorte qu'il semble ne vouloir que réaffirmer des droits existants, alors que l'on pourrait le reformuler de telle sorte qu'il puisse donner lieu à des interprétations, parce que les tribunaux seraient invités à utiliser une clause d'interprétation pour assurer le respect du principe d'égalité entre les hommes et les femmes. Certains groupes, certaines personnes, certains juristes ont aussi proposé de le relocaliser, et j'ai cru comprendre que la ministre semble avoir l'intention de resituer ce projet d'article, la clause, ailleurs dans la Charte des droits et libertés, et on pourra prendre connaissance de ce projet puis évaluer ce que proposera le gouvernement en termes de relocalisation.

Il y a eu aussi, dans certaines représentations qui nous ont été faites dans des mémoires, l'idée de bonifier une clause d'interprétation par la référence à d'autres valeurs fondamentales. Ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve a rappelé que, si l'égalité entre hommes et femmes est une valeur fondamentale, il y a d'autres valeurs fondamentales qui mériteraient d'être enchâssées dans une clause d'interprétation et dans la Charte des droits et libertés, et je partage cette vue, et je partage l'idée que l'on devrait, comme le premier ministre l'a indiqué dans sa déclaration ministérielle, qu'il y aurait place, dans le cadre de ce débat et à l'intérieur de ce projet de loi, de référer à deux autres valeurs fondamentales sur lesquelles il y a un vaste consensus au Québec, celui de la séparation de l'État de la religion, de la laïcité des institutions publiques et de la primauté ou de la prédominance de la langue française, et je crois que cela mérite un débat.

On aura sans doute ce débat en commission parlementaire puisque je crois que nous avons l'occasion, nous devrions saisir l'occasion d'une modification à la Charte des droits et libertés pour y référer, référer, dans cette loi fondamentale, quasi constitutionnelle, à des valeurs fondamentales, d'ailleurs à défaut de le faire dans l'instrument où les valeurs fondamentales devraient être enchâssées, et c'est dans une constitution, le meilleur lieu, le meilleur instrument pour enchâsser des valeurs fondamentales et le texte d'une constitution. Et d'ailleurs, dans le projet de constitution québécoise que j'ai déposé dans cette Assemblée, le 18 octobre 2007, le chapitre premier énumère un certain nombre de valeurs fondamentales, y compris celles dont il est question aujourd'hui, l'égalité hommes-femmes, mais aussi la question de la laïcité des institutions publiques et de la primauté, de la prédominance de la langue française. Et je suis toujours d'avis, notre parti est toujours d'avis, et je crois avoir entendu de la part de la représentante de l'opposition officielle, tout à l'heure, que l'idée de doter le Québec d'une constitution, c'est une idée qui devrait être retenue.

Le premier ministre semble avoir fermé la porte, lors des échanges, la semaine dernière, sur cette question, mais je crois que le temps va faire son oeuvre, que le Québec aura, un jour, sa constitution, une constitution québécoise qui sera le lieu le plus approprié pour y décrire les valeurs fondamentales. Et, à défaut de pouvoir ensemble élaborer une constitution, je crois que la Charte des droits et libertés est un lieu, est un instrument dans lequel on peut aussi enchâsser des valeurs qui ont une portée limitée parce qu'elles n'auront de rapport et de référence qu'avec des droits individuels enchâssés dans une charte des droits et libertés qui n'enchâsse que des droits individuels, alors qu'une nation québécoise en est une qui se reconnaît à elle-même des droits collectifs, comme elle peut reconnaître à certains groupes, par exemple aux nations autochtones, à la communauté anglophone, des droits collectifs dont l'application se mesure et doit être parfois mesurée à la lumière des valeurs fondamentales de la nation dans son ensemble.

n(20 h 20)n

Alors, je crois qu'il devrait y avoir un débat entre les parlementaires, à la commission, sur l'idée d'inclure des valeurs fondamentales autres que l'égalité des hommes et des femmes dans ce projet de loi n° 63 et j'espère qu'il y aura une ouverture, de la part de la ministre, à ce que l'on puisse débattre d'une telle inclusion d'autres valeurs dans la charte.

Je crois que les travaux de la Commission des affaires sociales ont aussi révélé un très, très large consensus, et notamment au sein des groupes de femmes, pour qu'on bonifie la garantie des droits économiques et sociaux pour assurer une effectivité réelle au principe de l'égalité entre les hommes et les femmes. De très nombreux mémoires, de très nombreux témoignages sont venus exiger de nous que la Charte des droits et libertés, qui contient un chapitre sur les droits économiques et sociaux... Le chapitre IV de la Charte des droits et libertés de la personne, qui était un chapitre très original, très innovateur lorsqu'il a été adopté en 1975, a une portée limitée puisque les droits de ce chapitre n'ont pas primauté sur les autre lois, et ces droits ne sont pas sanctionnables, «justiciable», dirait-on en anglais, et la très grande majorité des groupes de femmes, plusieurs juristes ? il y a des exceptions ? sont venus indiquer aux membres de la commission, aux parlementaires, que nous devions profiter de ce projet de loi pour mieux protéger, mieux garantir les droits économiques et sociaux.

Et je crois qu'il y a un lien fondamental entre l'égalité des hommes et des femmes et la garantie des droits économiques et sociaux et que l'égalité ne sera servie que si ces droits économiques et sociaux sont mieux garantis, qu'ils ont primauté sur les lois québécoises, comme les autres droits de la charte ont primauté sur les lois québécoises. Alors, je crois que sur cette question nous devrions donner suite aux revendications de ces groupes qui sont venus en très grand nombre demander aux parlementaires de modifier la charte pour renforcer les droits économiques et sociaux.

Et, cela nous a surpris, pour certains d'entre nous, l'un des promoteurs des groupes, qui est promoteur, aujourd'hui, du renforcement des droits économiques et sociaux, est le Barreau du Québec. Le Barreau du Québec s'est présenté devant notre commission avec un mémoire, d'ailleurs très bien fait, très bien documenté, en nous invitant à renforcer les droits économiques et sociaux. Et d'ailleurs, dans une correspondance ultérieure, le Barreau du Québec nous a à nouveau invités à renforcer le dispositif des droits économiques et sociaux, et je crois que nous devrions donner suite à cette demande du Barreau, qui est une demande qui est aussi celle d'un très grand nombre de groupes de femmes qui se sont présentés devant nous.

Et il y a une demande qui ne devrait pas passer inaperçue, qui est celle de référer, dans le préambule de la Charte des droits et libertés de la personne, aux instruments internationaux et notamment à la Convention internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Plusieurs groupes, et en particulier des groupes de femmes, nous ont demandé d'inclure dans le préambule de la charte une référence aux conventions internationales. J'étais heureux d'entendre la ministre dans son discours de présentation à ce stade de l'adoption du principe, de l'entendre rappeler l'importance des engagements internationaux du Québec en matière d'égalité hommes-femmes. Elle a rappelé que le gouvernement du Québec s'était déclaré lié par plusieurs engagements internationaux, les pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques, et cette convention importante qui est ratifiée par à peu près tous les États de la communauté internationale, cette Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Et je crois que nous devrions examiner avec toute l'attention qu'elles méritent les propositions d'inclusion d'un autre alinéa dans le préambule qui ferait référence aux instruments internationaux, et notamment à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, qui serait une clause qui permettrait d'ailleurs aux interprètes de cette charte, qui permettrait en particulier aux juges de tenir compte de cette convention lorsqu'ils interpréteraient la portée du droit à l'égalité, lorsqu'ils voudraient appliquer même la clause de garantie de sûreté ou d'interprétation, et ces interprètes pourraient d'ailleurs faire appel à une certaine jurisprudence internationale, puisqu'il y a des affaires traitées au niveau international sur l'égalité hommes-femmes, et donc je pense qu'on devrait également manifester une ouverture lorsqu'il s'agit de proposer d'inclure dans le préambule une référence aux instruments internationaux auxquels le Québec... ou à l'égard desquels le Québec s'est déclaré lié.

Je crois que ce serait assez intéressant de poser un geste comme celui-là parce que, vous savez, le Québec doit rendre compte du respect de ses engagements internationaux devant des comités internationaux d'experts, et notamment devant le comité qui a la responsabilité de surveiller l'application de la Convention sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, et, lorsque les représentants du Québec se présenteraient devant ce comité et annonceraient que le Québec a modifié sa charte pour y référer à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, l'on ne pourrait qu'applaudir ce geste qui vise à assurer que le Québec remplisse ses engagements internationaux et veuille exécuter de bonne foi ses obligations internationales en matière d'égalité entre les hommes et les femmes.

M. le Président, on a rappelé que la commission Bouchard-Taylor avait invité cette Assemblée à adopter le projet de loi n° 63. Nous l'avons noté dans la recommandation B6. Mais je vous rappelle que la commission Bouchard-Taylor a aussi adopté une recommandation, la recommandation E3, qui nous invite, invite notre Assemblée à donner suite à une recommandation de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse qui vise à renforcer les droits économiques et sociaux reconnus aux articles 39 et 48 de la charte québécoise. Si nous voulons donc donner effet aux recommandations de la commission Bouchard-Taylor sur la question des droits économiques et sociaux, nous avons l'occasion de le faire. Nous avons l'occasion d'inclure dans le projet de loi n° 63 les dispositions qui renforceraient les droits économiques et sociaux.

M. le Président, j'anticipe le plaisir de travailler...

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant Mme la députée de Charlesbourg, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'immigration et de communautés culturelles.

Mme Catherine Morissette

Mme Morissette: Merci, M. le Président. C'est avec un grand plaisir que je me trouve devant vous, ce soir, pour débattre de l'adoption du principe du projet de loi n° 63, qui s'intitule Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne.

Je me permettrai de porter plusieurs chapeaux à la fois au cours de cette présente allocution. En tant que critique de l'opposition officielle en matière d'immigration et de communautés culturelles, comme vous l'avez mentionné, je me sens interpellée sur les origines de ce projet de loi, c'est-à-dire le débat entourant les accommodements raisonnables, mais c'est aussi à titre de femme et de future mère que je m'adresse à vous aujourd'hui pour témoigner de l'importance de l'égalité entre les hommes et les femmes dans le Québec du XXIe siècle.

Les femmes du Québec ont à leur actif de nombreux combats pour la reconnaissance de leurs droits. Les acquis sont encore récents et fragiles. Le débat sur les accommodements raisonnables nous aura rappelé l'important pilier que constitue l'égalité des sexes dans la fondation du Québec moderne. Certaines valeurs fondamentales ne doivent en aucun moment être transgressées.

Une voix: ...

Mme Morissette: Oui, 18 semaines. Ha, ha, ha! J'entendais...

Des voix: ...

Mme Morissette: Merci. 26 octobre.

Des voix: Félicitations!

Mme Morissette: Merci beaucoup. Bon! Merci beaucoup.

Une voix: ...

Mme Morissette: Ah oui! Vous me permettrez de...

Une voix: ...

n(20 h 30)n

Le Vice-Président (M. Picard): S'il vous plaît, M. le ministre.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Picard): Allez-y.

Mme Morissette: Oui, j'ai d'excellents collègues qui font très attention à moi.

Donc, le débat sur les accommodements raisonnables nous rappelle également l'importance de faire preuve de leadership politique dans le dossier de l'identité québécoise. Malheureusement, le gouvernement libéral n'a pas su être proactif, et le présent projet de loi découle d'un avis du Conseil du statut de la femme dans le cadre des travaux de la commission Bouchard-Taylor. Je vais y revenir dans quelques instants. Si nos valeurs fondamentales ont pu, à quelque moment que ce soit, être remises en cause, la mollesse du gouvernement libéral mérite d'être mise au banc des accusés. Le manque de repères et de balises aura laissé la société civile dans le doute. Il s'agit du constat auquel il faut arriver aujourd'hui.

J'aimerais revenir quelques instants, M. le Président, sur la commission Bouchard-Taylor et le rapport qui en a découlé. Alors que les travaux avaient cours et que la population s'exprimait dans les différentes villes du Québec, le Conseil du statut de la femme a émis elle-même... lui-même, en fait, une opinion, et, avant même le dépôt du rapport et de l'ensemble des conclusions que les commissaires allaient arriver, le gouvernement est allé de l'avant avec le projet de loi n° 63. Bien que l'opposition officielle soit en parfait accord avec ce projet de loi ? ma collègue de Deux-Montagnes a offert sa totale collaboration dans les premières étapes du dossier et l'offrira d'ailleurs pour les prochaines étapes ? on peut quand même se questionner sur la façon que le gouvernement gère ce dossier entourant la commission Bouchard-Taylor, les accommodements raisonnables et tout le débat qu'il y a eu autour de ça.

Depuis la semaine dernière, où nous avons eu le rapport, nous avons eu l'occasion, l'opposition officielle, de poser plusieurs questions au gouvernement pour connaître ses intentions par rapport à différentes recommandations des commissaires Bouchard et Taylor. Malheureusement, nous n'avons pas eu, à ce jour, d'autres indices sur les objectifs que chercherait à atteindre le gouvernement ni si certaines des recommandations allaient tenir en place, ne serait-ce que la motion qui a été adoptée concernant le crucifix. Nous avons su par le biais des médias qu'il y aurait mise en place d'une ligne 1 800 qui serait faite, mais, encore là, lorsqu'on pose des questions dans le concret, dans les cas qui vont vraiment dans le quotidien des gens, il y a un vide, nous n'avons pas de réponse, nous n'avons pas d'indice. C'est très difficile de pouvoir s'orienter, c'est très difficile d'être capable de répondre aux questions des citoyens qui nous interpellent, puisque ce rapport, bien qu'il y a eu certaines recommandations très pertinentes, entre autres en ce qui concerne l'intégration des nouveaux arrivants, nous avons reconnu là certaines de nos phrases et de nos idées que nous avons amenées à plusieurs reprises dans les différents débats, mais ce rapport m'a quand même laissé plusieurs questions en suspens. Et la tribune qui nous est offerte durant la période des questions nous permet d'essayer d'en savoir plus, malheureusement c'est très difficile et c'est très rare que l'on peut obtenir davantage de réponses à ce sujet.

Entre autres, ce que nous cherchons à savoir par rapport à la ligne 1 800, c'est quelles seront les balises sur lesquelles les fonctionnaires pourront s'appuyer afin de pouvoir répondre aux questions des citoyens. J'ai posé deux cas assez précis, des cas terre à terre de questions qu'en fait j'ai puisées dans les courriels que j'ai pu recevoir depuis le dépôt du rapport et je n'ai pas eu de réponse. Je n'ai pas eu de réponse, donc je ne sais toujours pas quoi répondre aux citoyens qui m'ont envoyé ces courriels-là.

Mais, au-delà de la période de questions et de l'absence de réponses, dont on a maintenant l'habitude, il y a plusieurs responsabilités qui incombent désormais à la gent politique, et nous avons offert, à l'opposition officielle, des solutions concrètes pour encadrer, pour aller de l'avant vers une société civile qui pourrait être agréable et qui pourrait être plus... pas plus, ce n'est pas vraiment le terme que je cherche à utiliser. Mais je veux en venir à répéter les propositions et la main tendue toujours de l'opposition officielle envers le gouvernement, qui est de mettre en place les trois solutions, une des trois, idéalement les trois, mais on peut quand même être discutables, j'imagine, à ce sujet-là.

Le chef de l'opposition officielle a proposé trois choses: la mise en place d'une constitution québécoise de manière non partisane afin que les trois partis présents à l'Assemblée nationale puissent travailler ensemble à l'élaboration d'un document qui pourrait prendre place d'une carte de visite pour les nouveaux arrivants, mais également pour ceux qui sont déjà ici, ceux qui sont nés ici, afin que ce texte-là soit rassembleur pour l'ensemble des citoyens.

Évidemment, cette constitution québécoise, c'est un débat qui pourra prendre place... qui devra, en fait, prendre place à l'intérieur des trois partis de l'Assemblée nationale. Et, bien que le premier ministre semble effrayé par la possibilité d'avoir à travailler et à bûcher pour le bien-être du Québec et des Québécois, je peux vous assurer, M. le Président, que, du côté de l'opposition officielle, c'est tout le contraire, nous sommes prêts à travailler pour les Québécois et nous sommes prêts à mettre les efforts et les énergies qu'il faut pour parvenir à ce but ultime que nous croyons essentiel pour l'avenir du Québec.

Ensuite, modification à la charte canadienne. Je n'aurai pas besoin d'élaborer plus longtemps là-dessus, on en a amplement parlé également. Et, troisième étape, en fait, un leadership politique clair, la mise en place de balises claires.

Donc, nous revenons à la question... aux questions, en fait, que j'ai posées à plusieurs reprises concernant ces mêmes balises qui devraient être mises à la disposition des fonctionnaires, en fait, qui auront la charge de mettre en place cette ligne 1 800. Nous sommes impatients et nous sommes curieux d'en savoir plus. Et j'espère que, dans cette tribune ou dans une autre, nous pourrons avoir... Quand je parle de cette tribune, je parle de l'Assemblée nationale, le salon bleu, période de questions, tous les débats qui peuvent y prendre place. Mais, si ça peut être dans une autre tribune, si le gouvernement libéral, qui aime bien faire des grandes annonces, a envie de le faire en présence des médias, pour nous annoncer, nous allons prendre l'information quand même et nous allons être prêts à travailler avec elle. À un moment donné, je pense qu'on prend le peu que le gouvernement a bien le goût de nous donner, et nous prenons l'information afin de pouvoir travailler pour le bien-être du Québec et de la population.

Je voudrais, dans le cadre du rapport de la commission Bouchard-Taylor, vous parler d'une situation qui m'inquiétait déjà, mais, de le relire noir sur blanc, nous ramène encore à cette réalité-là, c'est-à-dire la situation des femmes immigrantes. Statistiquement, nous connaissons leur situation malheureuse, pour la plupart. Je dis «pour la plupart» parce qu'évidemment il y a des histoires à succès, on ne peut que les applaudir. Par contre, comme je l'ai déjà dit, le rôle du gouvernement est aussi de s'inspirer de ces histoires à succès là pour faire en sorte que toutes les histoires soient à succès.

Donc, il y a 50,9 % de la population immigrante, au Québec, qui sont des femmes, et ces femmes-là vivent souvent... Moi, je vais parler de celles qui vivent des situations un peu plus difficiles, bien, comme je l'ai mentionné, qu'il y en a qui vivent des histoires à succès très, très, très remarquables. Donc, ces femmes, dont la moitié appartiennent à des groupes qu'on appelle... en fait, les commissaires utilisent, comme terme, «racisés», sont davantage frappées par le sous-emploi, peu importe leur degré de scolarité, je tiens à le mentionner, et par la pauvreté.

Souvent, elles arrivent au Québec, oui, par leurs propres moyens, mais souvent dans le cadre du regroupement familial. Donc, à ce moment-là, c'est davantage le dossier de l'homme, de l'époux qui est pris en considération, et la femme vient en renfort à l'évaluation du dossier. Donc, on les retrouve, la plupart, dans cette catégorie-là des regroupements familiaux ou des immigrants parrainés. Donc, le conjoint arrivera d'avance, par exemple, et la femme viendra le rejoindre ensuite avec les enfants, s'il y en a, ou par elle-même, s'il n'y a pas d'enfant dans leur famille, ce qui fait en sorte que ces femmes arrivent au Québec dans une situation parfois de grande dépendance envers leur conjoint. Parfois, elles ne parleront pas la langue, parfois elles seront dans un milieu qui les oblige, malgré elles ou du fait de leur éducation, à être recluses, à vivre dans une communauté qui est plus fermée donc qui leur permet moins de venir à la rencontre des autres Québécois et d'apprendre à vivre ce qu'est le Québec.

Pour celles qui ont une scolarité donc qui leur permettrait normalement, en théorie, d'occuper des emplois gratifiants, qualifiés et avec une rémunération intéressante, ces femmes vivent, comme les hommes évidemment, une déqualification professionnelle très importante. Et pourtant le taux de diplomation universitaire pour les femmes immigrantes ? données de 2006 ? est de 24,4 %, contrairement à 16,5 % pour la moyenne québécoise. C'est quand même remarquable. Mais malgré tout ces femmes se retrouvent à occuper des emplois qui sont bien au-dessous de leurs qualifications et avec un salaire évidemment très au-dessous de ce qu'elles pourraient mériter, dans celles qui peuvent... ou même celles qui ont de la diplomation non élevée, parfois dans un environnement de violence familiale ou conjugale.

n(20 h 40)n

Ça résume un peu rapidement malheureusement la situation que les femmes immigrantes vivent, situation qui peut être très malheureuse parfois. Mais, moi, ce que je me questionne, c'est: De quelle façon le fait d'avoir introduit dans la Charte québécoise l'égalité entre les hommes et les femmes va venir aider ces femmes-là immigrantes qui sont soit parfois recluses de par leur situation familiale, de par leur éducation, de par leur scolarité? Ces femmes-là, le besoin, il est beaucoup plus primaire, je dirais, c'est-à-dire il faut qu'on puisse aller les rejoindre d'une façon ou d'une autre, entrer en contact avec elles afin de leur faire découvrir d'abord ce qu'est le Québec. Oui, évidemment, elles vont apprendre que l'égalité hommes-femmes existe au Québec, est un état de fait, quoique fragile, mais il est là. par contre, le fait de le légiférer dans un texte, je ne pense pas que, du jour au lendemain, ces femmes-là vont se retrouver avec un emploi qui correspond à leur diplomation et avec un salaire qui correspond à leurs qualifications. Donc, je m'attends quand même, dans les prochaines semaines, prochains mois, idéalement prochaines semaines, à ce qu'il y ait des gestes beaucoup plus concrets, terre à terre, en lien avec le milieu de vie de ces femmes, qui soient posés par le gouvernement.

Il y a plusieurs catégories de nouveaux arrivants qui souffrent présentement, que ce soit la communauté maghrébine, qui a un haut taux de chômage, que ce soient les femmes immigrantes, qui ont de la difficulté parce que l'intégration dont elles ont besoin est très spécifique à leur situation, et je ne retrouve pas cette volonté-là du gouvernement de faire les efforts pour ces catégories-là précises de personnes. Et, aujourd'hui, on parle de l'égalité hommes-femmes, et je trouvais ça extrêmement important d'amener ici, à l'Assemblée nationale... de ramener de nouveau, en fait, je devrais dire, la situation des femmes immigrantes, qui méritent et qui mériteraient qu'on leur accorde davantage d'attention, ne serait-ce que pour être cohérents avec le projet de loi sur lequel nous travaillons aujourd'hui.

Donc, j'espère que mon message est entendu et que j'aurai l'occasion de me prononcer sur d'autres initiatives du gouvernement. Mais, si je me fie au style de réponses que j'ai obtenues dans les dernières journées concernant les interrogations que nous avions sur le rapport de MM. Bouchard et Taylor, je ne peux pas vous dire, M. le Président, que j'ai un énorme espoir de ce côté-là. Le Parti libéral a su décevoir les attentes de beaucoup de gens, et je peux vous dire qu'ils ont su décevoir les miennes plus d'une fois.

Pour revenir précisément au projet de loi, on peut dire que ce projet de loi, tel que formulé, a un impact avant tout très symbolique, mais il fournira une bonne indication aux nouveaux arrivants quant aux valeurs fondamentales du Québec. Le Québec, en tant que société d'accueil depuis 400 ans maintenant, a la responsabilité d'assurer la pleine intégration des immigrants et des immigrantes. Comme chaque être humain a des droits mais aussi des devoirs, le nouvel arrivant doit en contrepartie adhérer et se renseigner sur les moeurs, les valeurs fondamentales et la culture de la société d'accueil. Nous ne pouvons pas faire de concession sur l'égalité des sexes, et je pense que le projet de loi n° 63 offre une intention en ce sens. Il faudra cependant adopter des mesures plus concrètes dans l'avenir pour concrétiser une politique d'immigration qui soit globale et cohérente. Nous voulons 45 000 succès en immigration, et ça inclut le 50 % de femmes qui arrivent à chaque année.

Le projet de loi n° 63 marque donc le pas à une avancée dans la cause des femmes. Nous devons perpétuer les acquis des femmes aux générations futures, même si les fondements de ces droits sont encore bien fragiles. Dans ce contexte, le présent projet de loi vise à colmater les brèches mises à l'avant-plan dans la médiatisation des différents cas d'accommodement au Québec.

Ma formation politique a eu dès le départ un regard favorable face à ce projet de loi. Nul ne peut être contre la vertu, mais je ne prétend pas que le projet de loi n° 63 sera la solution à tous les maux. Il enverra cependant un message clair aux nouveaux arrivants que l'égalité des sexes est une valeur partagée par tous les Québécoises et tous les Québécois. J'invite donc les parlementaires de cette Assemblée à bien réfléchir sur les impacts symboliques d'une telle législation.

D'ici peu, le projet de loi n° 63 sera mis au feuilleton ? en fait, si j'ai bien compris, ça va même être demain ? pour son étude détaillée. L'occasion sera belle pour les parlementaires d'unir leurs voix autour d'un principe qui forme le ciment de notre cohésion sociale. J'invite mes collègues de toutes les formations politiques à débattre rigoureusement du sujet, et surtout je pense que ça va être la tribune idéale et essentielle de laisser la partisanerie de côté et de se concentrer sur ce sujet unique, qui est l'égalité entre les hommes et les femmes, dont nous parlons dans le projet de loi n° 63. Je le mentionnais un peu plus tôt, ce projet de loi-là est à nos yeux très symbolique, un symbole par contre important, mais il va falloir faire plus, il va falloir faire mieux, et je m'attends très honnêtement à beaucoup plus du gouvernement et je peux vous assurer, M. le Président, que je suis loin d'être la seule.

Alors, moi, c'est tout pour mon allocution de ce soir. Alors, merci de votre attention et bonne soirée.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Rosemont.

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, je vais ajouter ma voix à cette étude du projet de loi n° 63 pour fins d'adoption du principe de ce projet de loi. Je voudrais, pour le bénéfice de ceux qui sont moins familiers que d'autres en matière juridique, dont je fais partie évidemment...

Ce projet de loi-là, il a trois articles, M. le Président. Pas beaucoup, hein? Et pourtant il survient à un moment où les Québécois se posent beaucoup de questions. Et, quand je le compare pour évidemment l'étudier, on a dû regarder... j'ai dû regarder la Charte des droits et libertés de la personne, cette charte du Québec que j'ai entre les mains, qui fait quand même... qui est assez volumineuse, M. le Président. Cette charte, elle compte 139 articles, ce n'est quand même rien. On va donc, avec ce petit projet de loi, modifier un article et un préambule. Et puis j'ai aussi regardé ? parce que je voulais comprendre l'impact de cette modification qu'on nous proposait ? la Charte canadienne des droits et libertés. Elle est beaucoup plus mince, mais, quand on compare les deux, elle a un certain nombre de contenus que la charte du Québec n'a pas.

Alors, j'écoutais la ministre, un peu plus tôt cet après-midi, et elle a indiqué, et je la cite, que «le gouvernement entend rendre manifeste l'égalité entre les hommes et les femmes par ce projet de loi», ce à quoi bien sûr on souscrit, et je crois qu'au Québec vous ne trouverez pas beaucoup de gens qui ne souscrivent pas à cela. Elle a rappelé que nous avions eu droit à des présentations de 30 mémoires; dans les faits, il y en a eu 31. Elle a aussi indiqué que, depuis le moment où elle a déposé son projet de loi, il y avait eu le dépôt du rapport Bouchard-Taylor et qu'elle retenait la recommandation B6, mais elle n'a pas dit un mot ? j'ai la liste des recommandations, ici, là, du rapport Bouchard-Taylor ? elle n'a pas mentionné rien sur les recommandations E3, ni sur G1 ou G3, qui auraient peut-être pu aussi être d'intérêt.

Pour sa part, la députée de Deux-Montagnes a parlé de sa déception, que nous partageons, face à ce projet de loi là, et surtout de ne pas voir, dans ce projet de loi, un certain nombre d'améliorations découlant des recommandations de la commission Bouchard-Taylor. Et la députée de Deux-Montagnes a rappelé avec justesse que cette commission Bouchard-Taylor avait coûté 5 millions et qu'on craignait effectivement qu'il n'y ait pas beaucoup d'impacts au niveau de ce projet de loi. En tout cas, ça n'a pas apporté une grosse valeur ajoutée, disons, à ce projet de loi, pour utiliser des expressions avec lesquelles je suis plus familière.

n(20 h 50)n

La députée d'Hochelaga-Maisonneuve a rappelé, tout à l'heure, les valeurs fondamentales de notre société et elle a, avec justesse encore une fois, parlé de cette publicité que le gouvernement du Québec, mettant en vedette son premier ministre, avait adressée à tous les Québécois à la suite du dépôt de ce rapport Bouchard-Taylor. Et cette publicité dit: «Quand on choisit le Québec, on choisit aussi les Québécois et leurs valeurs.»

Elle a mentionné aussi, ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, l'intérêt qu'elle aurait et que notre formation politique aurait eu à voir une suite au rapport Bouchard-Taylor dans ce projet de loi. Et nous allons sûrement en reparler beaucoup, dans les prochains jours, au fur et à mesure où on va étudier ce projet de loi, dans l'objectif bien sûr de l'améliorer.

Mon collègue le député de Mercier, lui, a souligné ? et, moi, je suis toujours bien impressionnée par ces grands juristes ? qu'une charte des droits et libertés, c'est une quasi-constitution. Et j'essaie ici de me représenter ce que les citoyens et les citoyennes de Rosemont comprennent à ce langage que nous utilisons aujourd'hui. Et je vais essayer d'expliquer mon point de vue sur ce qui pourrait être amélioré dans ce projet de loi, bien que sur le fond je suis tout à fait favorable à ce premier énoncé d'égalité entre les hommes et les femmes, mais il doit y avoir plus que ça dans notre Charte des droits, M. le Président.

Il a mentionné, mon collègue de Mercier, que certains groupes s'étaient opposés à modifier la charte de façon partielle. Et j'ai retracé, en l'écoutant, une petite phrase du document du Barreau du Québec, et je vais vous la lire: «Cependant, le Barreau du Québec estime qu'une modification législative à la charte québécoise, aussi louable que puisse en être l'objet, ne saurait être apportée sans considérer l'impact qu'une modification parcellaire serait susceptible de créer.» Et pourquoi je cite ça, M. le Président? Parce que, pour moi, le coeur de notre discussion, à la suite du rapport Bouchard-Taylor, pour faire le lien avec une charte des droits avec laquelle on veut vivre pour établir nos valeurs fondamentales, ce socle dont parlait la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, il faut qu'il soit quand même assez solide.

Et la députée de Charlesbourg mentionnait aussi, elle, le manque de repaires que la société a. Bien, justement, j'ai l'impression que, quand le premier ministre du Québec a fait sa publicité, en fin de semaine ? dont je ne connais pas le coût, là ? c'était pour établir un certain nombre de principes, c'était pour donner un cadre de référence, en fait peut-être les principes mêmes de ce socle qu'on essaie de bâtir. Et il dit, dans sa publicité: «Le Québec est une nation par son histoire, sa langue, sa culture, son territoire et ses institutions. La nation du Québec a des valeurs.» Et là il continue en les énonçant, ces valeurs: «L'égalité entre les femmes et les hommes, la primauté du français et la séparation entre l'État et la religion font partie de ces valeurs fondamentales. Elles sont à prendre avec le Québec. Nous n'avons pas tous la même origine, pourtant nous avons la même destinée, car nous sommes tous Québécois.»

Bien, dans la publicité, M. le Président, cette publicité-là, elle est ponctuelle. Ce que notre formation politique aurait souhaité et souhaite, c'est que, dans notre charte, nous ayons ces valeurs fondamentales, qu'elles soient inscrites pour justement donner un message clair...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Picard): C'est Mme la députée qui a la parole. Je vous demanderais votre collaboration, s'il vous plaît. J'ai de la difficulté à l'entendre.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, merci, M. le Président. Donc, je reviens. Nous souhaiterions que, dans cette Charte des droits, nos valeurs fondamentales, qui sont bien écrites dans la publicité du premier ministre, soient assises dans notre Charte des droits et qu'elles puissent passer le test du temps, de sorte que, quand des citoyens souhaitent devenir citoyens du Québec, ils aient au moins des éléments de référence de base.

Et c'est pour ça, M. le Président, que, quand j'ai regardé la Charte canadienne, je me suis demandée si un certain nombre de valeurs se trouvaient là-dedans, et, nous, on... Égalité entre les hommes et les femmes, ça va. Dans notre charte, on ne parle pas de langue, mais, dans la Charte canadienne, on parle des langues officielles du Canada, on les a, on les nomme comme étant... «Le français et l'anglais sont les langues officielles du Canada; ils ont un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du Parlement et du gouvernement du Canada.»

Pourquoi est-ce que nous n'aurions pas la même sagesse et inclure dans notre Charte des droits, dans la charte québécoise des droits, parmi ses 140 articles ou presque, cette primauté de la langue française, cette séparation entre l'État et la religion, de sorte que les citoyens qui immigrent au Québec arrivent chez nous et comprennent qu'ici il y a égalité entre les hommes et les femmes, tel que le stipule le projet de loi que la ministre veut nous proposer, celui que l'on étudie aujourd'hui, le projet de loi n° 63, mais qu'aussi, au Québec, la primauté du français, comme le premier ministre s'en vante, et la séparation entre l'État et la religion sont aussi dans notre charte, M. le Président? Et là les citoyens qui souhaiteraient adopter le Québec auraient un message clair. Parce que, qu'on le veuille ou non, et le rapport Bouchard-Taylor nous confond un peu dans cette réalité, mais qu'on le veuille ou non, au Québec, nous sommes une minorité au sein du pays. Le pays, c'est toujours le Canada. Donc, quand les immigrants arrivent chez nous et veulent adopter une langue, bien là il y a deux langues officielles dans ce pays, c'est dans leur charte du Canada, mais, dans la nôtre, on ne dit pas un mot. Alors, c'est ça qu'on demande, c'est ça qu'on voudrait voir. Tant qu'à changer la charte, pourquoi ne pas établir ces valeurs fondamentales dont on fait... sur lesquelles le premier ministre lui-même fait de la publicité, pourquoi ne pas les inclure dans notre charte? Pourquoi ne pas mettre les choses clairement devant ces citoyens que nous voulons accueillir, de façon à ce qu'ils n'aient pas à se poser: Dans quel pays je vis? Dans quel pays j'ai choisi de vivre? Dans quelles conditions? Alors, clarifions les choses, c'est toujours plus facile.

Si la publicité qui a été faite dans les journaux de fin de semaine, c'est autre chose qu'une opération de marketing, si ça se veut un code de vie, il me semble qu'il faudrait lui donner des assises qui rejoignent les composantes d'une Charte des droits et libertés du Québec. Si on veut vivre en harmonie, comme le rapport Bouchard-Taylor nous le suggère, nous le propose, nous le recommande même, il faut que nous ayons une connaissance commune des principes de base et des valeurs de base de notre société d'accueil. Et ces valeurs-là, on va les trouver quelque part. Le seul endroit que nous avons pour les retrouver, c'est la Charte des droits, à tel point que même si...

Et la majorité des intervenants qui sont venus étudier le projet de loi n° 63 nous l'ont dit, dans la Charte des droits du Québec, l'égalité entre les hommes et les femmes, elle est là. Alors, pourquoi le gouvernement sent le besoin d'ajouter trois petits articles pour l'affirmer dans un projet de loi n° 63, mais ne sent pas le besoin, pour les deux autres valeurs, c'est-à-dire la séparation entre l'État et la religion et la primauté du français... Ah bien, ça, ce n'est pas important, on ne le mettra pas dans la charte! Et pourtant c'est assez important pour que le premier ministre dise: Les règles du jeu, chez nous, là, c'est ça, les bases de notre harmonie, de notre société, c'est ça. J'espère que ça ne durera pas seulement le temps du printemps. J'espère que ces valeurs-là, dans lesquelles on a beaucoup investi pour mettre en valeur le chef du gouvernement du Québec, j'espère que ces valeurs-là vont passer le test du temps. Et il y a seulement une façon de s'en assurer, M. le Président, c'est de le mettre dans une loi et dans notre Charte des droits.

n(21 heures)n

Si je reprends les recommandations du rapport Bouchard-Taylor... D'ailleurs, au fait, en passant, je voulais vous faire une demande, M. le Président: Est-ce que ce serait possible que tous les députés reçoivent une copie du rapport Bouchard-Taylor? Parce qu'on a dû, tous et chacun, ceux qui voulaient le lire, le télécharger et on ne peut pas le télécharger en... Savez-vous combien il y a de pages dans ce rapport-là, M. le Président?

Une voix: ...

Mme Dionne-Marsolais: Merci. 310 pages. Avez-vous idée de ce que ça fait, ça, dans un bureau de député, quand on veut l'imprimer? C'est quand même énorme et ça gaspille beaucoup de papier. Comme de toute façon ces rapports-là sont généralement disponibles au gouvernement, ce serait utile que nous en ayons des copies. J'aurais cru d'ailleurs que chaque député... Il me semble que c'est la décence, là, à 5 millions, il me semble qu'on aurait mérité une copie chacun, là, tu sais, parce que, dans nos comtés, quand les gens viennent nous voir, ils comptent sur nous pour leur expliquer c'est quoi, ce rapport-là, qu'est-ce qu'il y a là-dedans. Alors, il faut le lire, il faut l'étudier, et nous ne sommes pas tous des grands juristes comme mes collègues. Il y a du commun des mortels comme moi qui sommes des gens de chiffres mais pas nécessairement de lettres, et puis c'est plus difficile, alors il faut le lire une fois, deux fois pour comprendre le sens de chaque mot.

Dans les recommandations de Bouchard-Taylor ? j'en donne une, là, par exemple, parce qu'elle m'a frappée ? la recommandation B1 ? on sait que la ministre a retenu la B6 ? mais la B1, elle dit: «Que l'État s'emploie davantage à promouvoir le cadre civique commun ou ce que nous avons appelé les valeurs publiques communes au sein [des] diverses institutions et dans le public en général». Bien, c'est ça, c'est ça, inclure nos valeurs fondamentales dans la Charte des droits, c'est ça qu'on demande. Quand ce projet de loi n° 63 a été déposé, le rapport Bouchard-Taylor n'existait pas. Maintenant, il existe. On ne peut pas tourner la page puis dire: Bon, bien là, poubelle. 5 millions plus tard, là, vous l'étudierez plus tard, nous autres, on ne veut pas en parler, de ça. Et c'est pourquoi, M. le Président, pour moi c'est important, si on veut avoir un langage commun, des valeurs communes, c'est important qu'on les écrive. Et, ce cadre civique commun, qui est la première recommandation du chapitre des pratiques d'harmonisation, ça m'apparaît crucial, M. le Président, qu'on y donne suite, et c'est pour ça que je crois que, si cette publicité-là veut dire quelque chose, je serais tentée de dire: Si elle n'est pas trompeuse, elle ne l'est pas, mais, si elle veut dire quelque chose pour le gouvernement et notamment pour le premier ministre qui en est la vedette, il me semble qu'il faudrait qu'il inclure, dans la charte et donc dans le projet de loi n° 63, les deux autres valeurs fondamentales du Québec dont il a lui-même fait l'éloge: la séparation entre l'État et la religion et la primauté du français.

Et, si le premier ministre croit en ce qu'il a vanté dans sa publicité, il faut qu'il l'inscrive dans la charte du Québec, dans ce projet, dans ce document, cette Charte des droits qui est supposée édicter les règles du vivre-ensemble.

Alors, c'est mon point, M. le Président. Et je souhaite que nous en discutions en détail et j'aurai peut-être des suggestions constructives pour que nous puissions nous assurer que l'avenir nous permettra de vivre ensemble, en harmonie, comme on le veut tous, mais avec les mêmes valeurs communes dans un cadre civique commun. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard): Je cède maintenant la parole à M. le député de Mirabel, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes.

M. François Desrochers

M. Desrochers: Merci, M. le Président. C'est donc avec joie que je m'adresse à vous aujourd'hui, dans le cadre de l'adoption de principe du projet de loi n° 63, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne.

Ma nouvelle nomination à titre de critique de l'opposition officielle en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes justifie mon intervention, et je m'explique. On m'a confié aussi le mandat des responsabilités des dossiers institutionnels et des relations avec le gouvernement fédéral, et, comme la charte, évidemment la Charte des droits et libertés de la personne, est un rouage important de nos symboles institutionnels, évidemment c'est très pertinent que je prenne la parole à ce moment-ci et que je commente, d'un point de vue constitutionnel, le projet de loi n° 63. Après tout, M. le Président, chaque modification qu'on pouvait faire avec la Charte des droits et libertés n'est pas une simple modification, et ça, c'est clair, et plusieurs parlementaires ici l'ont déjà soulevé.

Le législateur ne parle jamais pour ne rien dire, et il n'est pas fréquent de dépoussiérer un tel document, c'est évident, pour le moderniser ou l'ajuster. Ce qu'on voit et ce qu'on souhaite présentement, aussi, à travers ce projet-là, évidemment il y a des choses qui sont vraiment intéressantes, et on voit que l'égalité des sexes évidemment est une valeur fondamentale partagée par l'ensemble des parlementaires. Et peut-être qu'ici on va observer que le parti au pouvoir, le Parti libéral, présentement manque une grande occasion compte tenu des enjeux fondamentaux qui sont représentés par le projet de loi n° 63, dont le processus qui est visé, bien sûr c'est d'avoir une grande signification pour nous, les parlementaires, mais pour toute la société québécoise. Et, avant d'élaborer un petit peu plus loin sur le projet de loi n° 63, M. le Président, j'aimerais juste ? une perspective, contexte un peu historique ? rappeler évidemment, tout le monde le sait, que pour nous, Québécois et Québécoises, la valeur de l'égalité hommes-femmes est au coeur de nos préoccupations, et c'est maintenant une valeur fondamentale et sacrée. Mais j'aimerais simplement rappeler à cette Chambre que l'occasion s'est déjà présentée par le passé.

Et j'aimerais mettre en perspective les relations et les réactions qu'a eues, à ce moment-là, le parti au pouvoir, qui était déjà là, le Parti libéral, il y a cinq ans. L'occasion s'était présentée. Et on se rappelle, à ce moment-là, que c'est la Commission des droits de la personne qui était arrivée avec des recommandations et pour renforcer la charte à ce moment-là. Et l'occasion s'était présentée une première fois. Et on demandait, à ce moment-là, au parti au pouvoir de commencer à élaborer des pistes de solution ou du moins d'articuler une pensée, une pensée peut-être en vue d'un changement institutionnel. Évidemment, ça n'a pas été fait. Et, le projet de loi n° 63, évidemment ce qu'on remarque aussi, c'est qu'on ne voit pas, à travers tout ça, un gouvernement qui est en action. On semble plutôt voir un gouvernement qui est en réaction, et dû évidemment à la crise précipitée des accommodements raisonnables. Et on a senti à travers tout ça qu'à travers le gouvernement, à travers les dernières années qui ont précédé le dépôt du rapport et la question du projet de loi, de l'adoption de principe qu'on vit aujourd'hui... une certaine torpeur au cours des dernières années.

Donc, c'était bon quand même de le mettre en perspective une fois, donc. Et, la question qui va se poser, on se l'est posée pour le passé et on va se la poser pour l'avenir. Évidemment, présentement, tout le monde en parle, avec raison, et tout le monde constate que le projet de loi n° 63 présentement a des pistes intéressantes mais qu'il a des lacunes, évidemment. Et c'est dommage de manquer de saisir une telle occasion. Et on pourrait se poser la question peut-être dans un futur rapproché: Mais que va-t-il arriver? Est-ce que le gouvernement va se remettre en mode somnolence aussi dans les dossiers de la cause des femmes, présentement? Et c'est un peu une crainte qui est partagée par plusieurs groupes qui l'ont déjà mise en perspective et que, nous, on est en droit évidemment, comme parlementaires, de se questionner. Et certains exemples assez concrets, des questions déjà présentes. Présentement, M. le Président, il y a des questions de sous-financement au niveau des centres des femmes. Dans les réalités quotidiennes, on voit que présentement l'État québécois en fait mais n'en fait pas assez. Et on sait que les situations présentement sont très difficiles, très difficiles pour une mère et un enfant aussi qui ont à fréquenter malheureusement des maisons d'hébergement, qui sont victimes évidemment de violence. Et c'est des cas fréquents, à travers le Québec, qu'on entend, et malheureusement qu'on entend trop fréquemment.

Est-ce que ces situations-là vont tomber dans l'oubli ou dans une certaine torpeur, après, présentement, l'ébullition qu'on entend autour du projet de loi n° 63 mais aussi en lien avec le dépôt du rapport Bouchard-Taylor de la commission? Plusieurs craintes ont été formées. Donc, on est en droit de s'interroger à tout ça.

Et notre formation à nous, on adhère totalement au principe de l'égalité des sexes. C'est un principe qui est non négociable au Québec et qui est ancré dans notre société québécoise. Et on a vu l'évolution rapide. Et je tiendrais à le souligner, M. le Président, qu'au Québec on sait au niveau constitutionnel et au niveau canadien que le droit de vote des femmes, si on compare le Québec aux autres provinces, nous avons été au provincial les derniers. Et on voit, en l'espace de quelques décennies, les progrès phénoménaux qui ont été faits et qu'aujourd'hui nous sommes à la conjonction de nouveaux courants. Et, je crois ? et je l'ai déjà souligné tantôt dans mon intervention ? on craint de manquer un rendez-vous historique présentement avec le parti au pouvoir. Les deux oppositions ont chacune des visions par rapport à tout ça, et j'aurai l'occasion d'élaborer un peu plus sur la vision de notre parti, mais il faut penser, d'abord et avant tout, que les femmes sont libres de leurs choix dans notre société, présentement. Et ce que l'on souhaite et ce que tout le monde souhaite, c'est d'avoir une société qui est empreinte d'ouverture et de tolérance, et que, nous, ce qu'on veut surtout, à notre parti, à l'Action démocratique, M. le Président, c'est de maintenir nos acquis, soutenir et encourager les efforts de nos organismes qui travaillent directement à l'atteinte de l'égalité hommes-femmes, et qui sont présents partout à travers le Québec, et qui déploient des énergies, et que nous, parlementaires, avons l'occasion, dans notre travail comme députés, de les rencontrer souvent.

Et la charge de travail est énorme, et les besoins sont énormes aussi. Donc, ce serait vraiment important, à travers la foulée de l'adoption du projet de loi n° 63, présentement que ces actions-là soient vraiment concertées et qu'on arrive à développer et à améliorer la situation des femmes au Québec.

n(21 h 10)n

Chez nous, les parlementaires évidemment, aussi certains ont souligné qu'il était malheureux, à travers le projet de loi n° 63, de ne s'en tenir qu'à un seul aspect de la modernisation de notre Charte des droits et libertés, et même s'il s'agit d'un élément fort important. L'égalité des sexes, des hommes et des femmes, c'est vraiment important, mais on aurait pu saisir l'occasion d'aller plus loin. Une modification législative aurait dû s'inscrire dans une vision globale, dans une révision globale. Et on voit que ce projet de loi là est très symbolique et on doit en faire plus. Et je pense que l'occasion est belle et je pense que l'occasion pour le gouvernement est belle aussi de saisir la balle au bond.

Et ma collègue de Deux-Montagnes en a parlé un peu tout à l'heure, m'indiquait que beaucoup de groupes qui ont participé aux consultations ont fait des pressions au niveau des représentations publiques. Puis, nous aussi, comme formation politique, nous souhaitions que ce projet de loi là soit adopté après la publication du rapport Bouchard-Taylor. C'était une position que notre formation politique avait trouvé écho au sein de plusieurs groupes qui avaient fait des représentations dans leurs consultations, et nous jugions, à ce moment-là, qu'il était vraiment important de ne pas précipiter la réflexion, nos réflexions à nous sur l'enchâssement de l'égalité des sexes dans un document aussi fondamental qu'est la Charte des droits et libertés de la personne. Et je suis content de voir que sur cet aspect-là, sur l'égalité des sexes, que le gouvernement libéral s'est ravisé et s'est rallié à la position adéquiste. Donc, ce n'est pas peu dire. On sait que, parfois et même souvent, que les idées de l'ADQ sont reprises par le gouvernement et évidemment, dans ce cas-ci, on ne peut que le constater une fois de plus.

J'aimerais rappeler, M. le Président, dans la même foulée que le projet de loi constitue en quelque sorte une bride à la problématique des accommodements raisonnables présentement, vise, et je crois que les buts sont nobles, à formaliser l'égalité des rapports des hommes et des femmes comme un pilier fondamental de la promotion de la justice et de la paix au Québec. Et la société québécoise est rendue... Elle n'est pas parfaite, mais, si on la compare à différentes sociétés à travers le monde, on peut être fiers du travail qui a été fait et des distances que nous avons parcourues à rattraper cet écart-là qu'on avait à travers les années. Et, à ce stade-ci, on devrait, M. le Président, réitérer la position de notre formation politique. Nous jugeons que le pas que nous franchirons avec le projet de loi n° 63 constituera une avancée, une avancée symbolique certes significative pour les femmes au Québec. Il s'agit d'un pas de plus pour la cause des femmes. Néanmoins, et plusieurs en ont parlé tantôt, ma formation politique estime avec raison que le Québec a besoin des balises fixes, notamment dans la gestion, et on en a parlé beaucoup, pour les dirigeants, pour nos gens de la fonction publique, nos fonctionnaires qui ont à gérer, au jour le jour, des cas d'accommodement raisonnable. Présentement, on n'a pas de balise claire, et c'est ce qu'on déplore beaucoup, parce que la société en a besoin. Et ce n'est pas évident pour des gestionnaires, pour des enseignants, pour des directeurs d'école, pour des gens qui travaillent dans la fonction publique, autant au niveau des hôpitaux.

Présentement, il y a un vide et, à travers ce projet de loi là, malheureusement il n'y a pas de balises qui sont claires. Et c'est dommage parce qu'évidemment, à travers tout ça, on va probablement créer d'autres irritants qui reviendront. Et l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui, qui nous est présentée pourrait aller plus loin dans ce sens-là et apporter des changements majeurs, et malheureusement on n'en voit pas ici. La question de la modification de la Charte canadienne est vraiment soulevée par notre formation, et c'est la politique de la main tendue, et je crois qu'à partir du moment où des partis politiques sont prêts à négocier, à travailler ensemble je crois que le gouvernement aurait avantage à écouter beaucoup et à tendre la main de plus en plus. Et la question aussi de la Constitution, qui est évincée de plus en plus par le Parti libéral qui ne semble pas avoir le goût de l'effort et de faire quoi que ce soit. On nous évoque des processus qui sont longs, qui sont difficiles, des processus constitutionnels.

Évidemment, M. le Président, ce genre de changements là ne se fait pas en criant ciseau, c'est évident. Ce qui est encore plus regrettable par contre, c'est qu'à partir du moment où on a l'occasion de redresser un tort qui est fait à une société ou d'en améliorer simplement ses tenants et ses aboutissants on ne peut pas se défiler devant l'effort qui est à faire. Et encore une fois, de la part du parti, et le premier ministre en parlé depuis quelques jours, ici, en Chambre, il ne semble avoir aucun intérêt à le faire. Évidemment, ça prend du courage, ça prend de la volonté, de la détermination, mais ce qui est clair, le message qui nous est envoyé par le premier ministre présentement: Oubliez-moi, je n'en ai pas. Et ça, c'est regrettable parce que je crois que le timing, si je peux prendre l'anglicisme, est vraiment très bon à ce niveau-là. Au-delà des balises que nous devons donner, M. le Président, pour notre société québécoise ? puis certaines évidemment nous en donnent à travers le projet de loi n° 63 ? il faudrait arriver à radier complètement la question: Est-ce que le projet de loi n° 63... Et la question qu'on peut se poser arriverait, là, vraiment à radier la question des accommodements déraisonnables. Je comprends que ce n'est pas l'objectif qui est visé par le projet de loi n° 63, et en ce sens ce que je viens de dire aussi, c'est que projet de loi d'une constitution pour le Québec permettrait à des nouveaux arrivants...

Et ce n'est pas rien. Pour éviter des tensions, pour maximiser, favoriser une intégration réussie, nos nouveaux arrivants ont besoin de saisir les valeurs fondamentales de la société québécoise et des règles, que nous avons ici, du vivre-ensemble. Et ça, c'est à nous, comme société, et c'est à nous, comme parlementaires, de les définir. Et, à travers le projet de loi n° 63, on n'en fait qu'une partie, la partie symbolique de l'égalité des sexes, on ne va pas assez loin et, à ce niveau-là, depuis qu'on en parle, évidemment on ose espérer. Il est encore tôt. Je sais que l'adoption va se faire rapidement, mais quand même j'ose espérer que, d'ici ce temps-là, on pourra donner des balises claires. Et c'est important pour une société qu'elle se définisse elle-même, parce que sinon qui va le faire à ce niveau-là? Et on risque de créer ce qu'on craint le plus.

Et c'est possible d'arriver à une entente avec les différentes formations politiques. Évidemment, il s'agit de discuter franchement des possibilités, mais évidemment c'est possible. Et, pour un gouvernement qui se targue ? et ça, on l'entend souvent, M. le Président, et permettez-moi d'en douter un petit peu ? d'être à la tête d'un gouvernement de cohabitation depuis plus de un an... alors je crois qu'un gouvernement de cohabitation doit, d'abord et avant tout, se parler, doit discuter, négocier et doit avoir un échange d'idées aussi. Et on ne peut, à coups de renforts de publicité dans les journaux ? et une collègue en a parlé tout à l'heure; de la deuxième opposition ? aussi mettre un paquet d'argent pour faire un montage marketing et dire que la situation est réglée et que ça s'en va dans le bon sens. Est-ce que ces sommes-là s'en vont à la bonne place, des sommes évidemment payées par les contribuables québécois? La réponse, c'est non. Et, compte tenu des investissements qu'on fait aussi au rapport Bouchard-Taylor, plusieurs millions de dollars que nous a coûté cette commission-là qui donne des balises, si on ne va pas de l'avant et si on n'approfondit pas la situation du Québec et d'essayer de comprendre les difficultés qu'on aura, l'avenir...

Parce qu'au cours des prochains mois, des prochaines années, M. le Président, on aura toujours des questions à faire, on aura toujours des conflits à résoudre et, avec la qualité des outils qu'on va se donner ici, des outils constitutionnels, des projets de loi, des balises claires, avec cette qualité d'outils là, on pourrait éviter d'avoir à régler une quantité probablement, qui devrait aller en augmentant, enfin une quantité de problèmes qui devraient surgir. Et l'occasion doit être saisie maintenant par les parlementaires de l'Assemblée, et c'est vraiment important. Le rapport Bouchard-Taylor, évidemment que le rapport final de la commission a été muet sur l'affirmation de notre identité collective et de nos valeurs fondamentales. Et là encore une fois je vais reprendre, M. le Président, l'expression du «bât qui blesse». Une société avec des nouveaux immigrants... Et nous souhaitons tous... Et le Québec a toujours été une société ouverte à l'immigration, et elle le sera toujours et elle a besoin de cette immigration-là, des immigrations réussies, où, évidemment pour assurer sa croissance et son développement futur, c'est fondamental. Et, à travers tout ça, à travers ce projet de loi là, on ne voit pas l'affirmation ? et le dépôt de la commission Bouchard-Taylor aussi, je rappelle, plusieurs millions de dollars; on ne voit pas l'affirmation ? de notre identité collective et de nos valeurs fondamentales.

Donc, c'est important pour bien intégrer nos immigrants pour arriver à une société moderne, une société pluraliste ouverte sur le monde. Le Québec n'a pas fait, au cours des dernières années, ce genre de changements là, ce genre de démarche là, et c'est impératif que ça se fasse maintenant. J'ai parfois l'impression de me répéter aussi, mais tout s'enligne dans ce sens, dans ces axes-là. L'égalité hommes-femmes encore une fois, que l'on retrouve dans le n° 63, est fondamentale, est importante. Il faut aller plus loin, et présentement, malheureusement, on sent une certaine gêne là-dessus. On croit en effet que le projet de loi n° 63, M. le Président, a des objectifs qui sont nobles. Il est important de lancer un message clair à la société et au monde entier, parce qu'on sait que présentement, dans un contexte international de mondialisation où les échanges se font de plus en plus, où les frontières reculent de plus en plus, c'est d'autant plus important. Et j'ai un petit moment aussi une pensée pour toutes ces femmes évidemment qui vivent à l'extérieur des sociétés occidentales, à travers le monde, qui ont parfois, dans certains cas, la chance d'avoir des sociétés ouvertes, par contre, dans certains cas, qui n'ont pas exactement le genre de liberté que nos femmes ont ici, d'égalité surtout et de justice.

C'est important pour nous d'envoyer un message clair comme société moderne ouverte sur le monde, et cette société-là n'est pas simplement l'apanage des sociétés occidentales. Et c'est important d'aller plus loin. Et je suis fier de voir qu'au Québec on a fait un grand bout de chemin et on est capables de montrer, à la face du monde, les progrès qu'on a ici, et je crois qu'on peut en être fiers. Mais pourquoi ne pas saisir l'occasion pour aller encore plus loin et, comme société, nous faire connaître? C'est un peu ça, les principes autonomistes du Québec. Le fait d'avoir une constitution, le fait d'avoir nos propres balises, c'est ce qu'on doit. On doit s'affirmer et on doit le dire haut et fort. Et on doit décrier qu'au Québec on a des choses importantes et intéressantes à montrer à toutes les sociétés du monde. Encore une fois, est-ce qu'on va saisir l'occasion ici? La balle est dans le camp du Parti libéral. Je n'en suis pas tellement convaincu.

n(21 h 20)n

Pour mettre un terme à la crise des accommodements raisonnables, M. le Président, il nous faudrait plus de concret qui permettrait aux femmes du Québec de se mettre encore plus en valeur et de construire le Québec de demain. Les besoins sont forts, et le Québec est capable de répondre à ces objectifs-là, à ce défi-là, et c'est vraiment quelque chose d'important pour les prochaines années. Le Québec est mûr pour un changement et mûr pour des réformes. Nous croyons sincèrement, à l'Action démocratique, à l'opposition officielle, qu'une réforme institutionnelle servirait de complément au projet de loi n° 63. On doit un peu oser, M. le Président. Et, si nous regardons à travers ce Parlement, si nous regardons à travers les différents projets de loi qui ont émané de ce Parlement-là à travers les années, on est capables de sentir des années charnières, on est capables de voir qu'à certains moments de l'histoire du Québec différentes formations politiques, différents individus ont réussi à cohabiter ensemble, et à travailler ensemble, et à se donner des nouvelles balises.

Et c'est la politique de la main tendue, c'est la politique de l'écoute, c'est la politique, entre guillemets, de la cohabitation, de l'intégration des idées et du vouloir aller plus loin ensemble. Force est de constater, M. le Président, un peu avec regret... Je constate qu'on n'en est pas là. On voit des bribes, on voit certaines étincelles, mais on voit que le feu n'est pas près de prendre. Et ça, j'apprécierais et j'espère qu'on ne manquera pas ce rendez-vous-là avec l'histoire, parce qu'aujourd'hui on fait un petit pas et on a l'occasion de faire un pas de géant présentement, et c'est au-delà des changements cosmétiques qui nous sont proposés qu'on pourrait le faire.

Et, en terminant, M. le Président, différents points ont émané de la plupart de nos parlementaires qui ont eu la chance d'élaborer sur la question du projet de loi n° 63, différents arguments aussi ont été proposés par chacun. Chacun y va de sa vision, mais encore une fois l'écoute et la collaboration doivent être de mise. Et, aux gens qui nous écoutent ce soir, par le biais des caméras et de la télévision, je crois que ces gens-là doivent réaliser l'ampleur du débat. Et on parlait tantôt de l'importance de la documentation qui a été émise, du rapport, les 300 pages. Nous avons un devoir d'éducation aussi à faire auprès de cette population-là qui est très importante, et qui nous le demande, et qui vont chercher des sources un peu partout. Et c'est à travers le travail que nous allons faire ici et c'est à travers les discussions qu'on fait et des propositions qu'on fait qu'émane le développement critique d'une personne et c'est à nous qu'incombe ce travail-là d'être un porteur d'idées, un porteur aussi d'une société, d'être un porteur de rêves, en ayant des rêves, M. le Président, en étant capables de voir à long terme. C'est ce qui fait défaut au Québec, c'est d'avoir une vision claire pour les prochaines années. Et, si on recule en arrière, l'espace de quelques années, on n'a pas vu, depuis cinq ans, cette vision à moyen terme, cette vision à long terme qui est fondamentale pour une société.

À travers le projet de loi n° 63, je suis content de voir qu'on reconnaît l'égalité hommes-femmes. On pourrait aller plus loin. J'espère qu'on n'y manquera pas. Je puis assurer, M. le Président, en terminant, en conclusion, à la ministre de la bonne collaboration de ma formation politique pour acheminer, là, dans les meilleurs délais, ce projet de loi là. Je pense qu'il est important, mais j'aimerais aussi que le gouvernement prenne note de mes inquiétudes et de mes craintes de manquer un rendez-vous important, de manquer le moment de changer les choses. Et ça, j'espère que l'écoute sera bonne au niveau du parti ministériel. Je vous remercie, M. le Président, et je vous souhaite à tous une bonne fin de soirée.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'affaires gouvernementales canadiennes.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier: M. le Président, d'abord je vais adresser des remerciements aux groupes, aux différents groupes qui sont venus nous rencontrer durant la Commission sur les affaires sociales. Ça a été des rencontres extrêmement productives, et puis on a eu des magnifiques discussions principalement sur les droits économiques et sociaux.

Bien évidemment, il est apparu assez évident pour tous qu'il se dégageait un consensus dès le départ sur l'égalité entre les hommes et les femmes, et, puisqu'un consensus s'est établi, vous me permettrez, M. le Président, de faire mes remarques pour bonifier ce qui a été déposé par le gouvernement. Je ne peux quand même pas passer sous silence les remarques de l'opposition officielle qui nous invite à une grande réforme des institutions, qui nous invite à faire des pas de géant. Je me questionne sur où ils étaient au moment... au dépôt du projet de constitution ? mais je n'entrerai pas trop sur ce terrain-là ? qu'on a déposé bien évidemment à l'automne dernier. Ceci dit, M. le Président, je vais utiliser le temps qui m'est alloué pour me concentrer sur les autres modifications à la charte qui auraient pu être abordées beaucoup plus en détail. Ce qui a attiré mon attention lors de nos discussions, c'est la recherche, par les groupes de défense des femmes, de l'égalité réelle, c'est-à-dire l'égalité dans les faits et non pas seulement l'égalité de droit. Cette égalité dans les faits passe, selon plusieurs intervenants qui sont venus nous rencontrer, par un renforcement des droits économiques et sociaux.

Plus d'un quart de siècle s'est écoulé depuis l'adoption de la charte québécoise, et aucune révision en profondeur n'a été faite depuis. Avec le projet de loi n° 63, une belle occasion d'aborder en profondeur la question des droits économiques et sociaux s'est présentée, comme nous l'ont suggéré multiples groupes qui sont venus nous rencontrer.

Permettez-moi, M. le Président, de faire référence à ces groupes qui sont venus présenter leur mémoire, par exemple Mme Louise Langevin, titulaire de la Chaire d'étude Claire-Bonenfant sur la condition des femmes à la Faculté de droit de l'Université Laval. Elle nous a indiqué qu'on aurait pu, et je cite, «modifier l'article 52 de la charte afin d'y inclure les droits [économiques] et [sociaux]. Ainsi, les droits sociaux et économiques auraient eu préséance sur toutes les lois, comme les droits énumérés dans les articles 1 à 38. Une telle modification aurait permis aux femmes d'atteindre l'égalité réelle puisqu'elles sont les plus pauvres, particulièrement si elles sont âgées ou immigrantes, et qu'elles recourent aux programmes sociaux en plus grand nombre que les hommes.»

Je vais faire référence maintenant au mémoire de la centrale syndicale nationale: «À l'heure actuelle, les droits économiques et sociaux ne sont que des voeux pieux; ils n'ont aucune préséance; ils ne peuvent donner lieu à une déclaration d'invalidité ni à une action en dommages-intérêts. Pourtant, ce sont [des] droits qui, maintenant, sont à même de permettre la réalisation de l'égalité des femmes et des hommes.» De plus, M. le Président, on peut lire dans le mémoire de la Fédération des femmes du Québec qu'«en examinant le libellé de l'article 49.2 proposé dans le projet de loi n° 63, il est difficile de comprendre comment ce nouvel article pourrait concrètement promouvoir l'égalité réelle des femmes. Nous sommes d'avis que cet énoncé, à lui seul, n'est pas suffisant pour inciter la mise en oeuvre de politiques et de programmes susceptibles d'améliorer les conditions sociales et économiques des femmes. [...]l'absence de prépondérance des droits économiques et sociaux dans la Charte des droits et libertés du Québec sur toute autre législation, contrairement aux droits civils et politiques, constitue un handicap important à la réalisation d'une égalité réelle pour les femmes.»

Je vais terminer ces citations, M. le Président, en faisant référence au Barreau du Québec qui, je crois, résume bien la pensée générale qui a été exprimée durant la commission. Le Barreau du Québec nous a rappelé durant la commission que, pour atteindre l'égalité réelle, et je cite, «ça passe beaucoup par les droits économiques et sociaux. Si on veut parler de moyens concrets, il faut parler de droits économiques et sociaux. Donc, un amendement comme celui proposé [par le] projet de loi n° 63 est peut-être un moyen pour cette égalité réelle, mais peut-être pas le meilleur moyen.»

M. le Président, ce sont 17 groupes sur 30, 17 groupes sur 30 qui se sont dit en faveur de revoir la question de la justiciabilité des droits économiques et sociaux, et vous me permettrez d'utiliser le temps qui m'est alloué pour aborder plus en profondeur cette question. Le texte a une saveur un peu plus juridique, mais j'ai cru important d'exprimer ces arguments ici, à l'Assemblée nationale. Le Québec a aujourd'hui, évidemment, beaucoup changé au cours des 30 dernières années, et c'est dans cet esprit que la Commission des droits de la personne a déposé, en 2003, son bilan des 25 ans de la Charte des droits et libertés du Québec. Malgré quelques modifications du législateur au fil du temps, la charte québécoise n'a pas été revue en profondeur depuis son adoption. La Commission des droits de la personne a proposé 25 recommandations, dans son rapport de 2003, au texte de la charte qu'elle juge nécessaires ou souhaitables. Ce n'est sans doute pas par hasard que les premières pages du rapport de la commission ? le paragraphe un ? sont consacrées à la question de la justiciabilité des droits économiques et sociaux. Le titre du chapitre 1.1. est sans équivoque un préalable: Renforcer les droits économiques et sociaux.

Selon la Commission des droits de la personne, un des consensus les plus forts à se dégager de la consultation qu'ils ont organisée est que la garantie juridique des droits économiques et sociaux énoncés à la charte de 1975 doit aujourd'hui être considérablement renforcée. Il s'agit, selon la commission, et je la cite, de l'un «des enjeux de droits majeurs de notre époque». M. le Président, les droits économiques et sociaux sont considérés par nos tribunaux comme étant les parents pauvres de la charte, une sorte de sous-article n'ayant pas la même force de droit que les autres dispositions de la charte québécoise. Même si le ministre de la Justice de l'époque affirmait en 1975 que les droits sont plus que l'expression d'une simple bonne volonté, force est de constater que dans les faits ils n'ont pas eu l'écho souhaité devant les tribunaux. Cette réalité s'explique principalement par le fait que la majorité de ces droits n'ont pas de primauté sur le reste des dispositions législatives. La plupart des dispositions de la charte qui traitent des droits économiques et sociaux se réfèrent aux normes prévues par la loi. Cette façon de faire donne en réalité carte blanche au législateur.

n(21 h 30)n

Je vais vous citer quelques articles, M. le M. le Président, pour que les gens comprennent bien. Par exemple, l'article 40, qui est un exemple des droits économiques et sociaux: «Toute personne a droit, dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi, à l'instruction publique gratuite.» C'est donc dire que l'Assemblée nationale peut légiférer en toute liberté sur la question de l'instruction publique gratuite, puisque la loi lui permet d'agir dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi, donc en toute liberté.

L'article 46: «Toute personne qui travaille a droit, conformément à la loi ? à nouveau ? à des conditions de travail justes et raisonnables et qui respectent sa santé, sa sécurité et son intégrité physique.» Encore une fois, on donne carte blanche à l'Assemblée nationale.

46.1: «Toute personne a droit, dans [les mesures] et suivant les normes prévues par la loi, de vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité.»

Enfin, l'article 45, qui, je crois, a une importance particulière: «Toute personne dans le besoin a droit, pour elle et sa famille, à des mesures d'assistance financière et à des mesures sociales, prévues par la loi, susceptibles de lui assurer un niveau de vie décent.»

Alors, difficile, M. le Président, de s'adresser aux tribunaux, de plaider l'article 45 de la Charte québécoise des droits et libertés, puisqu'on a laissé au législateur une entière discrétion sur qu'est-ce qu'étaient finalement les mesures qui, elles, étaient prévues par la loi. Alors, c'est donc dire que les cours de justice n'ont pas de droit de regard sur les mesures prévues par la loi, comme je viens de le dire. L'Assemblée nationale peut donc agir sans crainte d'être réprimandée.

Or, comme l'affirmait Michel Virally, dans un livre intitulé La pensée juridique...

Une voix: ...

M. Cloutier: ...le directeur de thèse de mon collègue: «Une obligation dont nul ne peut réclamer l'exécution ou sanctionner la violation n'est qu'un impératif de la conscience et ne dépasse pas le for interne.» Bref, M. le Président, ça ne dépasse pas dans le fond les remords de conscience.

M. le Président, les tribunaux canadiens ont traditionnellement été réticents à imposer à l'État des obligations financières sur la base des droits économiques et sociaux proprement dits ou des droits qui pourraient comporter une dimension positive comme, par exemple, les articles 7 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés qui reconnaissent respectivement à toute personne les droits à la sécurité et à l'égalité.

Les droits positifs, M. le Président, ce sont des droits qui imposent des obligations, des obligations d'agir ou de faire quelque chose. Cette hésitation des instances judiciaires devant des droits positifs repose essentiellement sur deux motifs, que la ministre nous a d'ailleurs rappelés lors de la commission: les affaires économiques de l'État appartiendraient uniquement au législateur; et, deuxièmement, la mise en oeuvre et la sanction de ces droits seraient d'une telle complexité que les cours de justice devraient se restreindre d'intervenir. Le Pr Robitaille, dans un article publié dans le McGill Law Journal de l'hiver 2008, donc un article très récent, s'attaque à ces objections.

Sans reproduire exactement tout ce qui se fait à l'étranger, M. le Président, il est au moins intéressant de s'y référer. Certaines constitutions d'autres pays reconnaissent, en plus des droits et libertés traditionnels, donc la liberté d'expression, la liberté de religion, le droit à l'égalité, reconnaissent certains droits économiques et sociaux, notamment le droit au logement, à des soins de santé, à la sécurité sociale et à l'éducation. La Constitution italienne, par exemple, contient un catalogue détaillé des droits économiques. Le droit à la santé, le droit à la sécurité sociale et le droit au logement ont été qualifiés de droits inviolables par les cours de justice. Au Japon, la Constitution garantit le droit à un niveau de vie minimum, avec une surveillance particulière pour les cours de justice.

La Constitution sud-africaine prévoit en outre que l'État, sous réserve des contraintes excessives liées à une insuffisance de ressources financières ? donc, on laisse une marge de manoeuvre à l'Assemblée législative ? doit prendre des mesures afin de donner effet aux droits économiques et sociaux dans un délai raisonnable, compte tenu des circonstances. Alors, les droits économiques et sociaux, dans ce pays, au même titre que les droits civils et politiques, bénéficient d'un statut constitutionnel et prioritaire par rapport aux autres droits. Plutôt que de simplement refuser la justiciabilité des droits économiques et sociaux, comme c'est le cas ici, au Québec, la jurisprudence de la Cour constitutionnelle sud-africaine démontre que la violation de ces droits peut faire l'objet d'une intervention mesurée. Les cours de justice ont établi le critère du caractère raisonnable des mesures attaquées. C'est donc dire que la cour de justice s'intéresse à savoir si les politiques sociales mises en place respectent ce caractère raisonnable. Alors, on procède par une analyse pragmatique et contextuelle, et c'est ainsi que les tribunaux en arrivent à déterminer le caractère raisonnable ou non des mesures mises en place par l'État.

M. le Président, c'est important de mentionner que les tribunaux font la distinction entre l'élaboration, la gestion et l'administration des programmes, qui appartient bien évidemment à l'État, et l'évaluation de leur caractère raisonnable. Alors, c'est donc dire que l'intervention des tribunaux se fait uniquement en fonction de l'analyse de ce que les Parlements ont décidé de mettre en place. Ce ne sont pas les cours de justice qui disent précisément quels sont les programmes, mais les cours de justice évaluent le caractère raisonnable des programmes mis en place en fonction des différentes dispositions législatives adoptées.

Plusieurs pays ont donc installé un dialogue entre les tribunaux et les parlementaires sur la question des droits économiques. Cette complicité dans les rapports devrait nous inspirer dans notre réflexion collective sur la place que devraient jouer les droits économiques et sociaux dans notre nation. Les parlementaires devraient également prendre acte que nous ne sommes peut-être pas si loin du jour où les tribunaux canadiens s'immisceront sur le terrain des droits économiques et sociaux, par l'intermédiaire de la Charte canadienne des droits et libertés, en imposant des obligations positives.

Il faut prendre acte d'un jugement récent de la Cour suprême du Canada, un jugement de 2007, six juges de la Cour suprême, à Ottawa, qui affirment... qui ont affirmé en fait que l'arrêt Chaoulli, où le droit à la sécurité prévu à l'article 7 est invoqué, pose à l'État... Et je cite les juges de la Cour suprême, alors on pose à l'État «l'obligation constitutionnelle de fournir des soins de santé publics de qualité raisonnable dans un délai raisonnable, [...]dans certaines circonstances». Sans me prononcer sur la justesse du jugement Chaoulli bien évidemment, je ne peux que constater que nous sommes peut-être rendus au seuil d'une reconnaissance, par la Cour suprême du Canada, d'une obligation positive qui aurait comme origine l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.

M. le Président, en guise de conclusion, je suis évidemment pour l'égalité entre les hommes et les femmes, comme sans doute tous mes collègues à l'Assemblée nationale. Toutefois, considérant l'importance des discussions que nous avons eues sur la question des droits économiques et sociaux, il aurait été intéressant pour le moins de pousser la réflexion un peu plus loin sur cette question, d'autant plus, M. le Président, que la commission Bouchard-Taylor, comme l'ont déjà souligné mes collègues, nous invite à agir en ce sens. En effet, dans le rapport Bouchard-Taylor, il y a des suggestions, des propositions qui sont priorisées. 11 des 37 recommandations sont considérées par les coprésidents comme absolument prioritaires, l'une d'entre elles, la recommandation E3, concerne les droits économiques et sociaux.

Les commissaires ont aussi pris acte des propos qui ont été tenus par la majorité des groupes qui ont comparu en commission parlementaire. En fait, les commissaires citent notre commission parlementaire, et je vais citer le rapport Bouchard-Taylor: La majorité des groupes qui ont comparu en commission parlementaire ont «soutenu que la meilleure façon de contribuer à l'avancement du droit des femmes était de renforcer les droits économiques, sociaux et culturels déjà reconnus dans la charte». Il y a là, il me semble, M. le Président, pour le moins matière à réflexion. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Lotbinière et leader adjointe de l'opposition officielle.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Merci, M. le Président. Il me fait également plaisir d'intervenir sur ce projet de loi, le projet de loi n° 63. C'est le projet de loi qui se nomme Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne. Il faut comprendre que les chartes sont des documents législatifs différents de la législation habituelle parce que les chartes ont un... ce sont comme un genre de parapluie qui englobent toutes les autres lois et qui dirigent... qui nous font comprendre la lecture qu'on doit avoir de tous les autres textes législatifs. Au Québec, cette charte a un caractère quasi constitutionnel, c'est donc un texte fort... le texte des chartes, c'est donc un texte fort en symboles, en valeurs, mais c'est aussi un texte qui doit produire des effets.

n(21 h 40)n

Je vais vous lire la note explicative: «Ce projet de loi modifie la Charte des droits et libertés de la personne afin d'affirmer expressément que les droits et libertés énoncés dans la charte sont garantis également aux femmes et aux hommes.»

Deux articles. Le Parlement du Québec décrète ce qui suit: Le préambule de la Charte des droits et libertés des personnes est modifié par le remplacement du troisième alinéa par le suivant.

On ajoute donc au préambule: «Considérant que le respect [et] la dignité de l'être humain, l'égalité entre les femmes et les hommes et la reconnaissance des droits et libertés dont ils sont titulaires constituent le fondement de la justice, de la liberté et de la paix...»

Et on rajoute un article à la charte, l'article 49.2. Je peux me permettre de le faire, là, c'est tellement court: «Les droits et libertés énoncés dans la présente charte sont garantis également aux femmes et aux hommes.»

Il faut comprendre qu'il y a également une charte canadienne qui interdit la discrimination basée sur le sexe et qui est un texte constitutionnel et non un texte quasi constitutionnel comme celui-ci. Donc, l'état du droit au Québec est régi autant par la législation provinciale que la législation fédérale, mais, dans ce cas-ci, la charte aussi. Bon. Donc, la situation au Québec, c'est interdit de faire de la discrimination en se basant sur le sexe. En rajoutant une clause comme celle-ci à la charte du Québec, qu'est-ce qu'on change vraiment dans les faits? Qu'est-ce qui va avancer vraiment dans la cause des femmes? Ce n'est que de symboliquement venir affirmer tous ensemble que nous sommes d'accord sur l'égalité entre les hommes et les femmes. Ici, à l'Assemblée nationale, je vous dis, on fait des motions. On a déjà fait des motions plus courageuses que celle-là parce que ça fait l'unanimité, l'unanimité dans les parlementaires et l'unanimité dans la population, l'unanimité aussi dans nos institutions. Les femmes et les hommes sont égaux, c'est une vérité de La Palice au Québec. Affirmez le contraire, et je vous garantis que vous allez subir des remontrances très rapides. C'est un fait acquis.

Par contre, l'égalité en droit ne veut pas dire l'égalité en fait, et c'est ce que les femmes revendiquent. M. le Président, à l'heure actuelle, les femmes âgées de 65 ans et qui vivent seules sont, pour la plupart, pauvres. Les femmes sont, pour la plupart, les aidantes naturelles qui arrêtent de travailler pour aider leurs conjoints. Même l'AFEAS dit qu'on ne peut pas dire que ce soit naturel, ce sont des aidantes, point, parce que c'est comme... Ce n'est pas si naturel que ça que de tout abandonner pour soigner un conjoint malade ou un enfant malade, mais ce sont, la majorité du temps, des femmes qui le font, qui renoncent à un salaire, qui renoncent à une retraite plus tard, qui renoncent à des économies, qui renoncent à un niveau de vie pour se mettre au service de leurs proches. Dans les faits, les femmes ont des moins bons salaires que les hommes. Dans les faits, ici, à l'Assemblée nationale, il y a moins de femmes que d'hommes, et jamais nous n'avons acquis la parité en tant que députés à cette Assemblée nationale.

Donc, quelle est la raison pour laquelle on fait cette modification-là à la Charte des droits et libertés, si courte soit-elle, là? C'est un projet de loi qui a... On ne peut même pas tourner deux pages, là, c'est une feuille, le projet de loi, pour un texte important. Bien ça, on fait ça quand on veut marquer le pas, faire un vrai symbole. Mais, pour faire un vrai symbole, il faut des déclarations fortes.

Depuis que je siège ici, M. le Président, il y a quelque chose que je n'ai pas encore réussi à comprendre, parce que nous sommes, pour une bonne partie du temps, ici, au salon bleu, dans ce salon, comme on dit, de la race, et puis on fait des projets de loi, on discute entre nous, mais, quand on arrive sur le terrain puis qu'ils nous demandent: Mais qu'est-ce que vous avez fait?, puis, moi, je vais dire à mon club, les cercles de fermières de mon... qui sont majoritairement des femmes: Nous avons voté une loi qui dit que les femmes et les hommes sont égaux, je pense que très sérieusement, M. le Président... je vois, là, le genre de réunion que j'ai, ils vont me dire: Vous n'avez pas fait ça à l'Assemblée nationale pendant des heures de temps? Ce n'est pas acquis au Québec? Pourquoi vous avez fait ça? Puis qu'est-ce que ça va changer pour moi dans ma vie?

Donc, je pense que c'est bien mince, qu'est-ce qu'on fait. Je pense qu'on aurait dû y aller pour quelque chose de beaucoup plus ambitieux. Mais je pense également que, lorsqu'on parle des enjeux de cette nature-là, il faut tous laisser tomber notre côté, notre parti, nos allégeances politiques pour travailler ensemble parce que ce sont des valeurs qui doivent nous unir et non nous diviser. Et la modification d'une charte, ça doit se faire dans un consensus. Ce n'est pas un texte de loi qui est... je ne dirais pas banal parce que, tous les textes de loi, aucuns ne sont banals, mais c'est un texte de loi qui a un caractère différent, un peu au-dessus des autres. On a fait des choses qui...

On a déjà fait ici, à l'Assemblée nationale, unanimement des déclarations, et je pense, entre autres, à notre motion de façon conjointe avec Mme la députée de La Pinière et vice-présidente maintenant de cette Assemblée. Et la députée d'Hochelaga-Maisonneuve ainsi que moi avions fait une motion condamnant ou... déclarant que la charia ne devrait pas avoir son cours ici, à l'Assemblée nationale. C'est un texte que nous avons adopté à l'unanimité, mais jamais l'Assemblée nationale ne s'était prononcée sur ce sujet. Les trois partis ont pris la parole, et unanimement nous avons déclaré que, non, il n'y aura pas de charia ici, au Québec. Parce qu'on se rappelle, à l'époque, il y avait un débat sur cette matière en Ontario, la Procureur général, je crois, de l'époque voulait envisager d'avoir des tribunaux islamiques. Ici, au Québec, on a dit non. Mais il me semble que ce symbole-là est important.

Par contre, ici, je nous trouve redondants. C'est encore quelque chose que j'ai remarqué depuis que je suis ici, à l'Assemblée nationale, on pense qu'en votant un projet de loi ça va changer le monde autour. Mais, tant qu'on ne marque pas un symbole important puis qu'on ne fait pas les dossiers en profondeur, nous faisons ce qui coûte le moins cher. Nous maquillons, nous donnons une réponse politique, nous nous achetons une bonne conscience, mais nous faisons ce qui coûte le moins cher. Parce que ce qu'il faudrait, si on avait vraiment le goût que les femmes et les hommes soient égaux en fait, c'est de combler le retard qu'elles ont accumulé au cours des années.

Bien sûr, il y a eu des pas de géant qui ont été faits. La lutte à la violence conjugale. Je suis avocate et je pratique depuis 20 ans, permettez-moi de vous dire, M. le Président, que, lorsque j'ai commencé ma pratique, la violence conjugale était considérée comme des troubles domestiques et qu'on intervenait de façon très légère. Maintenant, par le travail que nous avons fait, par le travail que les procureurs de la couronne ont fait ? je vois mon ami le ministre de la Justice, il a certainement participé ? par le travail que les Québécoises ont fait auprès aussi de leur gouvernement, la lutte à la violence conjugale est devenue une priorité. Et, dans le temps, on pensait que c'étaient des... on traitait ça comme des chicanes domestiques. Maintenant, avec les publicités, tout le monde sait que la violence conjugale, c'est criminel. Donc, il y a eu des avancées, mais il en reste encore à faire.

Et, moi, je pense beaucoup à nos aînés qui ont participé à cette société puis qui sont rendus au moment de cueillir les fruits de leurs efforts et qui... Malheureusement, il reste très peu pour eux. Il me semble que ça aurait été un bon moment pour revoir ensemble les valeurs québécoises qui nous animent. Il y a des moments charnières, là, comme la crise que le Québec a vécue sur les accommodements raisonnables. Pendant de longs mois, l'espace médiatique a été occupé par la commission Bouchard-Taylor. Certains symboles religieux sont venus heurter notre attachement à l'égalité entre les hommes et les femmes, et c'était probablement le temps de parler, je pense, sérieusement, de façon mature, des volontés qui nous animent.

n(21 h 50)n

Nous, à l'ADQ, nous proposions une charte. Bien sûr, M. le Président, cette charte est inscrite dans notre programme politique depuis plusieurs années, sauf qu'il nous semblait que la fenêtre s'ouvre... pour employer une expression chère à certains, que la fenêtre s'ouvrait pour donner place à ce débat, pour transformer un débat qu'on a entendu pendant 10 mois être assez négatif, souvent hargneux, quelquefois presque raciste en un débat inclusif qui nous unit et qui est positif, en se disant: Nous, les Québécois, ce qui nous unit, qui sommes-nous, où allons-nous, que voulons-nous comme société, et en l'incluant dans une charte québécoise. Pour les Québécois, passer d'un débat qui était «il y a les Québécois et les autres»... Mais passer à un débat de «qui sommes-nous, où allons-nous», ça aurait été beaucoup plus positif. Il me semble qu'on aurait évolué par rapport à la crise des accommodements raisonnables. On a passé à la crise, à l'étude et à la solution et non à la crise, à l'étude et à la tablette. Donc, pour une chose, je pense que ça aurait abouti à quelque chose de positif que d'avoir une charte.

La deuxième des choses également, le deuxième des résultats d'avoir une charte, c'est que tout le monde serait capable d'expliquer clairement, quand vous venez au Québec, quel produit vous achetez, dans quel genre de monde vous allez vivre. Attendez-vous à respecter ce qui est inclus dans la charte. Donc, ça aurait simplifié également pour tout... Parce que, nous, ici, on en discute, mais tout le monde peut se rattacher après ça à ce texte-là pour expliquer à son ami qu'il rencontre, qui décide d'immigrer ici: Regarde, au Québec, c'est ça. Puis je pense que ça aurait été, pour tout le monde qui sommes ici, un texte rassembleur qui nous aurait permis de mieux expliquer aussi le Québec.

Donc, je suis un peu déçue que, pour éviter de faire ce travail en profondeur, pour éviter de vraiment discuter d'enjeux qui sont viscéraux... Parce que les questions d'identité, c'est viscéral, ça imprime chacune de nos cellules, chacune des cellules de notre société. Bien, pour éviter de discuter de... on accouche d'une petite, petite réponse, et puis là on pense qu'avec ça on va pouvoir fermer le dossier, considérer que c'est terminé, éviter de se dire que tout a été complètement sur la tablette et puis essayer de passer à autre chose. Je pense que ça aurait pris du courage. Nous avions la main tendue pour faire ce travail, on aurait pu le faire au-delà de la partisanerie, on aurait pu le faire dans le meilleur intérêt des Québécois, et malheureusement le Parti libéral n'était pas au rendez-vous. C'est très dommage parce que c'est eux qui ont demandé la commission Bouchard-Taylor. Et maintenant il faut continuer, il faut continuer, il faut aller plus loin, et cette charte aurait été cette occasion, M. le Président.

Je termine en vous disant qu'on est rendus au 25e anniversaire de la charte. À défaut d'avoir eu une constitution, comme on le désirait, cette charte aurait pu jouir d'un meilleur rafraîchissement, d'un travail en plus de profondeur. Mon problème est qu'en faisant un si petit amendement on se dise: Bon, c'est fini, on va se revoir dans 25 ans et puis on ne travaille pas plus sur ce document. Donc, je suis certainement d'accord avec ce qu'on propose, mais j'aurais bien aimé qu'on aille au-delà de deux articles seulement, une page seulement pour un projet aussi important. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Picard): M. le député de Trois-Rivières et leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx: Merci, M. le Président. J'avais été un peu distrait par le leader du gouvernement. Mais, comme on a toujours des discussions sérieuses à avoir, j'ai pris la peine de la compléter avant de revenir vous voir.

Je suis heureux de prendre la parole dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi n° 63. Vous savez, dans ce cadre-là... D'abord, c'est toujours intéressant de parler dans des projets comme celui-là parce que tous les parlementaires s'y ont senti intéressés. La réalité, M. le Président, c'est qu'on en a fait un enjeu parce que, c'est vrai, c'est important, puis il faut, je pense, consacrer ce principe-là.

Ce qui est intéressant, par exemple, là-dedans, c'est que ça s'est fait dans un contexte qui est bien particulier. On revient en arrière. Premièrement, un malaise identitaire avec les accommodements raisonnables, ce qui nous amène à la commission Bouchard-Taylor. Je l'ai dit à ce moment-là, je vais le redire aujourd'hui puis je vais le redire encore demain, à ce moment-là, le gouvernement a choisi de prendre ce malaise-là et de l'envoyer en commission avec des commissaires. Parce qu'il avait deux choix: acceptait ses responsabilités, faisait preuve de leadership, mettait en place des balises, faisait des changements législatifs, comme ils le font, ou bien reportait ça aux calendes, envoyait ça en avant. Puis c'est le choix qu'ils ont fait à ce moment-là.

Dans l'intervalle de ça, bien il y a eu des mémoires qui ont été déposés, il y a des groupes citoyens qui sont venus. Le Conseil du statut de la femme est venu et a déposé... a proposé ou déposé cette modification à la Charte des droits et libertés qui a pour objet de consacrer, dans notre législation, l'égalité femmes-hommes ou hommes-femmes, selon ce que vous souhaitez.

Ce qui est particulier, M. le Président, c'est que, tu sais, pour nous... Parler pour ma génération peut-être parce que, dans notre cas, à nous, c'est de l'acquis, mais la réalité, c'est ce que... Moi, ce que je comprends, c'est que c'est déjà clairement établi dans notre société. Tu sais, moi, dans mon entourage, à moi, c'est quelque chose qui est clair, qui est vécu, qui est normal. On a le respect de ça, puis ça fait partie des balises avec lesquelles on construit, puis ça fait aussi partie des balises qu'on veut donner à nos enfants. Mais il n'y a personne à l'opposition officielle, M. le Président, qui est contre l'idée de le consacrer dans la Charte des droits et libertés. Ça lui donne de l'effet, ça consacre un principe important et surtout ça donne des balises à ceux qui vont, plus tard, interpréter les violations de ce principe-là, de le faire via le texte législatif.

Ce qui est intéressant ? puis je reviens à ce que je disais au départ ? c'est qu'il y a tout un débat de perception dans tout ça. Il y a le premier ministre du Québec qui nous a fait bien rire parce que... Puis je veux être clair, là, il ne nous a pas fait rire quand il nous a dit qu'il fallait amender la charte. Ça, là-dessus, on est d'accord avec lui, il faut poser un geste. Où il nous a fait rire, c'est quand il s'est présenté comme le gardien de ça, celui qui, contre une armée de gens qui étaient contre lui, voulait faire en sorte que ça passe contre vents et marées. On avait l'impression, M. le Président, que les gens regardaient un film, qu'il ne voyait pas que la porte est ouverte puis que, lui, il se battait pour être capable de l'enfoncer puis de l'ouvrir. C'est ça, la réalité de ça. Il n'y a aucun parlementaire ici, à l'Assemblée nationale, M. le Président, qui... Mme la Présidente, pardon. Je n'avais pas vu ce changement si significatif. Alors, compte tenu du débat que je tiens, je vais faire en sorte que ça ne se reproduise plus. Alors, Mme la Présidente, on avait l'impression que le premier ministre avait envie de feindre un peu la réalité là-dedans. Puis c'est clair, la façon dont il a traité ça était purement partisane.

Bon, ce sera ma critique constructive de la soirée, la prochaine fois, lorsqu'il y aura un enjeu aussi important pour notre société, on aimerait ça qu'on ne fasse pas trop de partisanerie là-dessus puis qu'on fasse le débat sérieusement. Les parlementaires de cette Assemblée étaient d'accord avec ça, les parlementaires de cette Assemblée souhaitaient qu'on y aille au fond au moment où ça a été annoncé, et c'est ce qui a été fait.

Ce qui est surprenant... Puis il ne faut jamais oublier qu'un contexte comme celui-là, on est dans le cadre de l'adoption du principe d'une modification à la charte. Or, premièrement, ce n'est pas commun. On ne fait pas ça tous les jours, amender la Charte québécoise des droits et libertés. On ne le fait pas tous les jours pour des sujets aussi importants que celui-là. Mais, cette fois-ci, ça se passe dans un contexte particulier, ça se passe dans le contexte où on a eu un débat au Québec, un débat de société qui s'est fait à l'intérieur d'une commission puis d'un malaise qui a existé sur les accommodements. Et, au sortir de cette commission-là, on se retrouve avec un rapport qui, lui, n'est pas mis en oeuvre aujourd'hui. Parce que, soyons francs, ce qu'a fait le gouvernement jusqu'à maintenant, c'est de proposer un amendement à la charte que tout le monde était d'accord. Alors ça, c'est la position courageuse jusqu'à maintenant.

L'autre, c'est d'annoncer, par exemple, la ligne 1 800, cette ligne téléphonique qui va venir, à un moment donné, répondre à des besoins. C'est ce qu'on nous dit, hein? Les gens vont pouvoir téléphoner. Ça va être intéressant, par exemple, dans le cadre du projet de loi n° 63, une fois que notre charte sera amendée, une fois que cette valeur-là se retrouvera au centre des textes législatifs qui sont les nôtres, de voir de quelle façon on va proposer aux Québécois et aux Québécoises de le mettre en application parce que ça, c'est concret, là. Jusqu'à maintenant, le gouvernement du Québec n'a pas voulu donner de balises. Pourquoi? On ne le sait pas. Ça fait un an, Mme la Présidente, qu'on est dans la situation de ce malaise identitaire. Ça fait un an, Mme la Présidente, que le gouvernement du Québec est au courant de cette situation et qu'il attend des recommandations de la part des commissaires.

n(22 heures)n

Durant cette période-là, Mme la Présidente, il y avait deux choses qu'on peut faire. On peut s'asseoir puis attendre, puis faire d'autre chose. C'est ce qu'ils ont fait. On aurait pu travailler directement à des balises. Il n'y a personne, Mme la Présidente, il n'y a personne qui va me faire croire et nous faire croire, à l'opposition officielle, qu'on n'arriverait pas avec une conclusion claire qu'il va falloir des balises, tout le monde le dit. Il ne faut pas être commissaire pour dire ça, Mme la Présidente. La réalité, c'est que tout le monde le dit.

Et ce qui est bien important, c'est qui le dit. Bien, les gens qui le disent, c'est ceux qui, tous les jours, ont arbitré ces situations-là, les gens qui se retrouvent dans la situation où ils ont à prendre des décisions, parce que le malaise, là, à la base, il est là. Les gens qui ont à prendre ces décisions-là, c'est eux qui vivent avec ça, c'est eux qui se mettent dans une situation où ils sont mal à l'aise parce qu'ils disent: Est-ce que je vais trop loin? Est-ce que je vais assez loin? Est-ce que je suis respectueux, mais en même temps je fais un déni par rapport aux droits et libertés des autres? Les questions se posent et elles ont le droit d'être posées. Mais, nous, notre travail, c'est de leur donner ces balises-là. Et là ce qu'on a fait, c'est consacrer quelque chose qu'on connaissait. Ce qu'on fait dans la charte, c'est consacrer un principe important. Mais ni avec ce principe-là ni avec les autres valeurs on n'est capable, aujourd'hui, de nous donner les balises, et ça, ça m'apparaît assez inquiétant.

Au-delà du projet de loi n° 63, il y a une réponse à donner, comme Assemblée nationale, à cette question-là. Il y a une réponse à donner au rapport Bouchard-Taylor. Il y a plusieurs choix qui s'offrent au gouvernement. Il y a le choix de la partisanerie, puis je suis le gardien de toutes ces valeurs-là, mais jamais, au grand jamais, expliquer comment on entend les défendre. Il y a la façon de faire qui à mon sens serait la plus profitable pour tous les Québécois, qui est de travailler tout de suite à les mettre en place, ces balises-là. On est dans une situation, Mme la Présidente, où les gens ont le droit de le savoir, et jusqu'à maintenant on ne leur a rien donné par rapport à ça.

Je veux revenir à notre proposition parce qu'au-delà du projet de loi n° 63, qui se veut, et comme le premier ministre l'a dit, un projet de loi qui répond en partie à Bouchard-Taylor, je suis obligé, moi, d'aller plus loin que ça puis de voir ça dans son cadre plus grand. Vous vous souviendrez, Mme la Présidente, qu'ici, dans cette Assemblée, le chef de l'opposition officielle, ce qu'il a fait, c'est des appels au premier ministre. Ça a été fait, là, le plus respectueusement possible. Ça a été fait sans aucune partisanerie parce que c'était pour impliquer les trois chefs des formations politiques. Ça n'a pas été fait en disant: Vous n'avez pas fait votre travail. À ce moment-là, ça a été fait en disant: Nous, on est prêts à collaborer, il faut qu'on le fasse ensemble, le travail.

Le premier ministre du Québec, lui, il a viré ça comme un trente-sous. On s'est retrouvés dans une situation où il n'a pas donné les balises. On s'est retrouvés dans une situation où le premier ministre du Québec a décidé d'ignorer cette situation de cohabitation qu'il aurait pu mettre à profit. Là, pour une fois... Puis, moi, personnellement, Mme la Présidente, de par la fonction que j'occupe, là, je suis à même de constater que, si on veut qu'elle fonctionne, cette cohabitation-là, on peut le faire dans des moments précis. Ce n'est pas vrai dans tout, les intérêts de chacun des groupes... parce que nos perceptions, nos convictions font en sorte qu'on ne peut pas aller sur le même terrain des autres. Ça, ça arrive dans toutes les situations ici. Mais il y a des moments où on peut aller au-dessus de ça, et c'est ça qu'a proposé le chef de l'opposition officielle.

Dans le cadre du n° 63, le premier ministre du Québec, il ne peut pas dire qu'on veut marchander tout ça, le droit entre l'égalité des hommes puis des femmes, qu'on veut en faire un enjeu partisan puis qu'on veut se limiter à ça. Nous, comme Assemblée nationale, on ne veut pas prendre les gens pour ce qu'ils ne sont pas. On les sait intelligents, on sait que les gens ont des attentes puis on veut leur livrer le message qu'il faut leur livrer, c'est-à-dire qu'on va respecter la culture normative, on va la promouvoir et la renforcer pour être capables de bien faire l'intégration dans le respect puis dans l'ouverture des gens qui viennent chez nous, et ça, là-dessus, Mme la Présidente, il y a plusieurs façons de le faire.

J'ai parlé assez longuement des balises, je peux en parler encore si vous voulez, mais je veux vous amener sur la constitution québécoise parce qu'une des propositions qu'a faites le chef de l'opposition officielle ? et j'ai entendu de l'écho de la part du député de Mercier ? c'est d'aller de l'avant avec un projet où on mettrait en place une constitution québécoise. Mais d'abord je tiens à dire ce que j'ai dit au député de Mercier dans différentes...

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): À l'ordre, s'il vous plaît! Seul le député de Trois-Rivières a la parole. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député.

M. Proulx: Je vous remercie de les avoir rappelés à l'ordre, vous êtes aimable, je ne m'entendais plus.

Ce que j'étais en train de dire sur la constitution québécoise, Mme la Présidente, c'est la chose suivante: je l'ai dit cette fin de semaine, j'ai eu des débats à trois avec le ministre des Affaires intergouvernementales, je l'ai eu également avec la charmante et sympathique ministre de l'Immigration, je l'ai eu également avec le député de Mercier, et, à toutes les fois, lorsqu'on a parlé... à toutes les fois, lorsqu'on a parlé...

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): S'il vous plaît!

M. Proulx: ...à toutes les fois, lorsqu'on a parlé de la constitution québécoise, j'ai répété la chose suivante: Si le Parti québécois veut qu'on aille de l'avant avec un projet non partisan, il n'a qu'une chose à faire, retirer son projet de loi, parce qu'à la base ça vient...

Une voix: ...

M. Proulx: Je le savais, qu'à un moment donné on ne s'entendrait pas. Mais il faut le dire, on est là pour ça, Mme la Présidente. Dans ce cas précis où on veut faire une constitution québécoise pour y intégrer nos textes des valeurs fondamentales, qu'on veut y intégrer cette cohérence qu'on a besoin pour bien enligner tout ce débat-là sur les accommodements raisonnables, sur la façon dont on veut travailler à construire le Québec puis renforcer cette identité, bien il faut sortir, je pense, de cette Assemblée, et je le dis respectueusement. Je pense que cette démarche-là doit se faire dans le cadre de la rencontre qu'on peut avoir avec les chefs des trois formations politiques. Et là-dessus c'est triste, mais il n'y en a pas eu, de réponse positive.

D'ailleurs, je sais que le député de Mercier tient à la constitution québécoise. Ce serait de mentir que de dire qu'il n'y tient pas, il en parle régulièrement. J'aurais aimé, par exemple, que la chef du deuxième groupe d'opposition, elle, dise...

Des voix: ...

M. Proulx: Oui. Je m'excuse. Je ne voulais pas me mêler, alors je m'en suis tenu aux mots les plus simples, c'est-à-dire ceux qui sont inscrits en bas de sa carte d'affaires. Et ce que je voulais mettre clairement dans le débat, Mme la Présidente, c'est qu'on aurait aimé, elle, l'entendre nous dire qu'elle accepte une invitation à trois, une invitation faite pour une discussion à trois, et ça, ça aurait été un geste important dans le cadre de cette cohabitation.

Le leader du gouvernement est ici, il le sait, lui, il le souhaite, il le dit régulièrement: La cohabitation, elle peut exister. C'est dommage qu'à l'occasion qu'on a eue de la mettre en application dans l'action ? mots populaires du côté du gouvernement cette semaine ? bien, manifestement, on l'a oublié.

Des voix: ...

M. Proulx: C'est intéressant de vous entendre vous applaudir à 10 h 10, parce qu'en période des questions, quand vous êtes dans l'action, c'est toujours un peu plus compliqué. Parce que la réalité, Mme la Présidente, c'est que c'est la pluie d'intentions, mais c'est le désert dans l'action. C'est comme ça que ce gouvernement-là doit être qualifié, notamment dans cette question-là.

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, monsieur.

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Un instant, s'il vous plaît. Un instant. Du calme, s'il vous plaît. Une personne à la fois. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: ...Mme la Présidente, de rappeler le leader de l'opposition à la pertinence. Je crois que, dans le débat que nous avons sur l'égalité hommes-femmes, nous devrions nous consacrer à cet important débat, mais je m'attends à ce que la pertinence revienne au galop dans son allocution.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, merci pour votre commentaire, M. le leader du gouvernement. Je sollicite votre collaboration, s'il vous plaît, c'est un sujet important. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx: Mme la Présidente, ça va me faire plaisir de revenir au projet de loi n° 63 parce que, je l'ai dit d'entrée de jeu, ce qu'a fait le premier ministre là-dedans, c'est de feindre la réalité. Lorsqu'il s'est levé ici et qu'il a dit à plusieurs reprises: Suivez-moi contre vents et marées, je veux mettre en application cette modification, bien il prêchait à un paquet de convertis. La réalité, c'est que tout le monde ici ? je n'en ai pas entendu qui étaient contre ? tout le monde ici était d'accord avec ça. Alors, ce n'est pas rendre justice au débat qui s'est passé ici, ce n'est pas rendre justice à ce qui s'est passé en commission parlementaire, il n'y a personne ici, notamment du côté de l'opposition officielle... Et je dois féliciter notre collègue la députée de Deux-Montagnes, qui a fait un travail assez extraordinaire là-dedans. Bien, dans ce cas-là, ils sont allés travailler.

Puis ça, moi, je pense que le jupon, il dépasse, Mme la Présidente, quand le premier ministre agit comme ça, parce qu'il a eu une possibilité de venir travailler en commun avec les autres, il ne l'a pas fait. Il a eu une invitation à parler de la constitution québécoise, il est allé dire toutes sortes de faussetés.

Une voix: ...

M. Proulx: Bien, c'est la réalité, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le leader du gouvernement, je vous invite à la prudence.

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le leader du gouvernement, je vous invite à la prudence et je vous invite à vous adresser à la présidence, s'il vous plaît.

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Leader de l'opposition.

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Alors, M. le leader, vous m'avez bien comprise, M. le leader. Je m'adresse à vous, M. le député de Trois-Rivières.

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Vous avez la parole, M. le leader de l'opposition officielle.

n(22 h 10)n

M. Proulx: Tout ce que je voulais dire, Mme la Présidente, c'est que la réalité d'une démarche constructive, positive pour mettre en place une constitution québécoise, ça se fait à l'intérieur du Québec, ça se fait par les Québécois, ça ne se fait pas avec un régime constitutionnel canadien, ça ne se fait pas en opposition avec ce qui se fait ailleurs et surtout ça ne nécessite pas tous les mécanismes qu'a souhaité discuter le premier ministre sur la place publique. On peut faire ça de façon constructive, on peut mettre en place cette réforme-là.

Et je dois dire là-dessus que le ministre des Relations internationales avait un débat qui était assez contradictoire là-dedans... pas des Relations internationales, pardon, des Affaires intergouvernementales canadiennes avait un débat assez... avait un discours qui était assez contradictoire là-dedans, Mme la Présidente, parce que d'un côté il disait: Il faut prendre le temps d'étudier le rapport, puis ça, ça peut prendre du temps, mais ça, pour ça, il faut prendre du temps, mais il n'était pas prêt à faire une démarche constructive de constitution québécoise parce que, de ce côté-là, ça, c'était pour prendre du temps. Mme la Présidente, pour faire avancer le Québec, pour faire en sorte que notre société soit plus unie, plus solidaire, plus ouverte mais aussi renforcée dans son identité, je pense qu'on peut en prendre, du temps, puis demander aux Québécois de se joindre à nous dans cette démarche-là, qui n'est pas seulement partisane mais qui implique les trois partis représentés à l'Assemblée nationale de façon sine qua non. C'est une condition sine qua non du processus pour ne pas qu'il soit vicié à sa base même. Je pense que c'est normal de prendre du temps, dans cette optique-là.

Alors, je vais conclure, Mme la Présidente, en vous disant que le projet de loi n° 63 a l'accord, l'appui et va se rendre au bout parce que je pense que tous les députés de l'Assemblée nationale seront heureux et fiers de l'amener à terme. Je veux seulement rappeler, Mme la Présidente, que personne ici ne va accepter que ce soit le seul geste courageux que posera le gouvernement, parce que, dans les faits, il n'y a pas de courage quand il n'y a pas de difficulté. Ils ont proposé ça suite à la demande de Mme Pelchat, et ça, de notre côté... Et la députée de Deux-Montagnes pourra le dire, les discussions qu'on a eues avec elle sont claires là-dessus. On est d'accord avec ça, on veut aller de l'avant là-dedans, mais on s'attend de notre gouvernement, du gouvernement du Québec qu'il pose des gestes, qu'il nous donne des balises pour que le malaise cesse. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le leader de l'opposition officielle. Y a-t-il d'autres interventions? Y a-t-il d'autres interventions? Mme la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, pour votre droit de réplique, madame.

Mme Christine St-Pierre (réplique)

Mme St-Pierre: Merci, Mme la Présidente. Ça a été fort intéressant d'entendre les parlementaires se prononcer sur le projet de loi n° 63, projet de loi qui vise à modifier la Charte des droits et libertés pour inclure l'égalité entre les femmes et les hommes. Je pense que c'est un projet de loi majeur, c'est un projet de loi qui est important, et je n'ai fait que sursauter tout à l'heure lorsque le leader de l'opposition a dit: Pas de courage quand il n'y a pas de difficulté. J'aimerais ça qu'il aille dire ça, moi, à Marie Gérin-Lajoie, à Claire Kirkland, à Thérèse Casgrain, à Claire Bonenfant. J'aimerais ça qu'il aille dire ça, qu'elles n'ont pas eu de difficulté, qu'il n'y a pas eu de difficulté sur la question de l'égalité entre les hommes et les femmes.

Ce que je retiens, Mme la Présidente, de ce que j'ai entendu, ce soir, de l'opposition officielle, c'est très intéressant parce qu'on a parlé d'avancées dans la cause des femmes, que ce projet de loi... que cette loi enverra un message clair aux nouveaux arrivants, qu'on envoie le message qu'on ne peut pas faire de compromis sur l'égalité entre les hommes et les femmes. L'objectif est noble, le message est clair que nous sommes une société ouverte sur le monde. Donc, c'étaient des réflexions fort intéressantes que j'ai entendues sur ce projet de loi n° 63.

Cependant, lorsqu'on a dit, du côté de l'opposition officielle, que c'est grâce à l'opposition officielle si nous avons attendu le dépôt du rapport Bouchard-Taylor pour procéder à l'adoption du projet de loi, il y a une erreur grossière parce que c'est faux. Dès le départ, nous avons dit, au moment du dépôt du projet de loi, que, pour l'adoption du projet de loi, nous attendrions le rapport Bouchard-Taylor. D'ailleurs, dans le rapport Bouchard-Taylor, on salue cette initiative du gouvernement de faire en sorte d'inclure l'égalité entre les femmes et les hommes dans le préambule de la charte.

Du côté de la deuxième opposition, ce que je retiens, c'est qu'on parle évidemment de l'égalité entre les hommes et les femmes. On a parlé de langue, de laïcité, puis on ajoute la question des droits économiques et sociaux. La chef de la deuxième opposition parle de langue, et de laïcité, et d'égalité entre les hommes et les femmes depuis quelques jours, mais là il semble que des gens de sa formation politique ajoutent la question des droits économiques et sociaux.

Mme la Présidente, j'aimerais revenir sur certaines citations que nous avons entendues en commission parlementaire, lorsque les groupes sont venus parler de ce projet de loi. Il y a eu des interventions fort pertinentes, des interventions importantes. Tout d'abord, j'aimerais parler de l'intervention du Barreau du Québec qui, à la suite de la consultation, a fait parvenir une lettre le 25 mars dernier pour dire ce qui suit. Alors, je cite le Barreau: «Le Barreau trouve bien inspirée cette initiative du gouvernement du Québec de rappeler l'importance qu'il accorde à l'égalité des femmes et des hommes dans notre société. Le Barreau du Québec a toujours été d'opinion que l'égalité entre les femmes et les hommes est un principe fondamental de la société québécoise.»

Pendant la commission, nous avons entendu plusieurs témoignages, et j'aimerais citer ces témoignages sur l'importance de ce projet de loi et l'importance de cette démarche que nous avons entreprise.

Me Julie Latour, coprésidente du Forum des femmes juristes de l'Association du Barreau canadien ? je cite: «C'est une omission historique que l'on répare. On arrime notre charte avec la charte canadienne, et c'est une modification qui bénéficie à toutes les femmes du Québec, quelles que soient leurs origines, et, sans donc entrer dans d'autres dédales ou réflexions, pour une fois, je le répète, que les femmes passent en avant, se mettent en avant.»

Michèle Asselin, présidente de la Fédération des femmes du Québec: «La Fédération des femmes du Québec appuie la reconnaissance formelle du droit des femmes à l'égalité dans la charte québécoise. Le mot "femme" n'apparaît pas encore dans la charte. Il nous semble qu'une telle reconnaissance est non seulement appropriée, mais qu'elle est aussi conséquente avec le développement du droit international depuis 1975.»

Louise Langevin, titulaire de la Chaire d'étude Claire-Bonenfant: «On se trouve à corriger une erreur historique. La reconnaissance du droit à l'égalité entre les hommes et les femmes aurait dû avoir été placée là lorsqu'on a adopté la charte en 1975. Bon, ça n'a pas été fait. On la corrige maintenant, cette erreur-là.» Fin de la citation.

Gaétan Cousineau, président de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse: «C'est un message juridique parce qu'on change une loi importante, qui est la charte, le préambule. N'importe quel juriste ne pourrait pas, ne pourrait plus passer à côté.»

Donc, ça a été des remarques. Il y en a eu beaucoup d'autres. J'ai ici Ginette Bergevin, présidente du Regroupement des groupes de femmes du Québec: «Et, qu'on renforce le principe de l'égalité entre les femmes et les hommes, je pense que c'est quelque chose de positif qui va nous permettre d'appuyer aussi, parce qu'un des éléments qui est très important, c'est notre politique gouvernementale pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait. Ça vient appuyer le travail qui est fait à travers cette politique et pour les prochaines années.»

Mme Nicole de Sève, l'Intersyndicale des femmes: «Juste de nommer les femmes dans la charte, c'est déjà un grand élément. Juste de le mettre en matière interprétative, ça vous pose à vous, comme députés, comme ministres, une obligation supplémentaire politique de pouvoir regarder si votre travail de parlementaires, si votre travail de législateurs contribue à l'égalité ou est en train d'augmenter les discriminations.»

Donc, ce sont des témoignages pendant cette commission parlementaire qui ont été entendus, témoignages importants. Il y avait eu auparavant, lors du dépôt du projet de loi, Mme la Présidente, le commentaire de Claire L'Heureux-Dubé, ex-juge de la Cour suprême du Canada: «J'appuie sans réserve l'ajout de l'article 42 à la charte québécoise. C'est une affirmation de principe sans ambiguïté de cette valeur fondamentale qu'est l'égalité des sexes dans la société québécoise, comme elle l'est dans la société canadienne.»

Donc, je pense, Mme la Présidente, que cette démarche qui a été entreprise, c'est une démarche importante, c'est une démarche qui s'inscrit bien sûr dans la foulée du rapport Bouchard-Taylor, mais ce ne sera pas la seule démarche qui se fera dans la foulée du rapport Bouchard-Taylor. Je pense que l'égalité entre les hommes et les femmes, c'est une valeur fondamentale et que c'est un devoir pour nous de l'inscrire noir sur blanc dans la charte québécoise des droits et libertés. Ça va également dans le sens des démarches qui ont été entreprises par le gouvernement du Québec depuis plusieurs années. Plusieurs lois ont été adoptées pour faire la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes, et ça s'inscrit dans une démarche, dans une logique, c'est une pierre que l'on ajoute à la société québécoise et à cette égalité entre les hommes et les femmes.

Alors, Mme la Présidente, je suis heureuse de piloter ce projet de loi et je suis heureuse de voir que, du côté de l'opposition, on nous dit que ce projet de loi sera adopté, et ça me fera plaisir d'en débattre en commission parlementaire lors des discussions article par article. Merci, Mme la Présidente.

n(22 h 20)n

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, le principe du projet de loi n° 63, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne, est-il adopté?

M. Fournier: Mme la Présidente je vous demanderais d'appeler un vote nominal que nous tiendrions demain, après la période de questions, sur ce sujet.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Donc, vous demandez un vote nominal et vous le reportez en même temps.

M. Fournier: Du coup, Mme la Présidente.

Vote reporté

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Du coup. Tout d'un coup. Alors donc, le vote est reporté à demain. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: Et maintenant je ferais un autre coup, Mme la Présidente, et j'appellerais l'article 13 pour compléter nos travaux, enfin une partie de nos travaux.

Projet de loi n° 89

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Poursuivre les travaux. Alors, à l'article 13, M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale propose l'adoption du principe du projet de loi n° 89, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.

M. Sam Hamad

M. Hamad: Merci, Mme la Présidente. Je suis honoré de m'adresser, aujourd'hui...

Une voix: ...

M. Hamad: ...je suis honoré de m'adresser, aujourd'hui, aux membres de cette Assemblée en vue de l'adoption de principe du projet de loi sur les modifications à la Loi sur le régime de rentes du Québec concernant la gouvernance. Ce projet de loi propose les diverses modifications requises pour adapter la gouvernance de la Régie des rentes du Québec aux nouvelles règles édictées par le gouvernement dans le cadre de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État.

On se rappellera, au printemps 2006, le ministre des Finances du Québec déposait à l'Assemblée nationale un énoncé de politique pour une révision en profondeur des règles de gouvernance des sociétés d'État et des organismes gouvernementaux. La Régie des rentes du Québec compte parmi les organismes visés par cette nouvelle politique. Pour donner suite à l'engagement gouvernemental, une révision des règles applicables spécifiquement à la Régie des rentes du Québec devenait donc nécessaire.

Le moment est maintenant venu, pour la Régie des rentes du Québec, de se conformer formellement aux nouvelles règles de gouvernance. Il faut toutefois savoir que, depuis plusieurs années, la régie est sensibilisée à l'application des pratiques des principes modernes de gouvernance des organismes gouvernementaux. En effet, la régie possède déjà des comités opérationnels, comme ceux prévus par la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État: le comité de gouvernance et d'éthique, le comité de vérification et de performance, le comité des ressources humaines et des technologies de l'information. De plus, la régie a mis en place deux autres comités fonctionnels qui tiennent compte de l'importance de ses devoirs et ses responsabilités en regard de la caisse du Régime de rentes du Québec et de la valeur qu'elle accorde aux services aux citoyens: ce sont le comité de la politique de placement et le comité des services aux citoyens.

Le mode de fonctionnement de la régie lui a d'ailleurs valu, au fil des années, divers prix et mentions, dont le Grand Prix québécois de la qualité. De plus, en 2006, lors d'une évaluation, en termes de coût et de service à la clientèle, de 56 gestionnaires publics et privés de fonds de retraite de plusieurs pays et États par la firme CEM, Cost Effectiveness Measurement, la régie s'est classée dans les cinq premiers pour tous les aspects évalués, soit le coût d'administration du régime, la qualité des services et la gestion des projets et des technologies de l'information. Dans le contexte d'une constante augmentation du nombre de personnes visées par les programmes qu'elle administre, la régie a toujours fait en sorte de disposer des moyens lui permettant de maintenir un mode de fonctionnement efficace et adapté.

Les nouvelles règles de gouvernance appliquées à la Régie des rentes du Québec viennent améliorer, préciser et clarifier les balises qui lui permettent de s'acquitter de sa mission d'assistance financière et de service à la clientèle ainsi que de son rôle de fiduciaire et de surveillance.

La régie a pour mission de contribuer à la sécurité financière à la retraite des Québécois et des Québécoises. Elle sensibilise la population à l'importance de la planification financière en vue de la retraite. Elle surveille aussi le régime de retraite pour préserver les droits des participants et bénéficiaires. La régie aide financièrement les familles qui ont des enfants de moins de 18 ans. La régie s'adresse à une vaste clientèle: c'est 3 724 000 cotisants, c'est 1 450 000 bénéficiaires, c'est 1 242 000 participants et bénéficiaires des régimes complémentaires de retraite, c'est 871 familles qui reçoivent le soutien aux enfants.

Passons maintenant aux mesures proposées dans le projet de loi concernant la composition du conseil d'administration. Le conseil d'administration de la régie serait composé de 15 membres, dont le président du conseil et le président-directeur général, au lieu de 12 comme présentement. Vu l'assujettissement à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, les deux tiers des membres, dont le président du conseil, devraient être indépendants. La fonction de président du conseil d'administration serait distincte de celle du président-directeur général, tout comme le prévoit la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État. Le président du conseil d'administration serait nommé par le gouvernement. Le président-directeur général serait nommé aussi par le gouvernement mais sur recommandation du conseil d'administration en tenant compte du profil de compétence et d'expérience approuvé par le conseil d'administration. Les membres du conseil d'administration autres que le président du conseil d'administration et le président-directeur général seraient nommés par le gouvernement en tenant compte des profils de compétence et d'expérience établis par le conseil d'administration.

Le gouvernement devrait veiller à ce que la composition du conseil d'administration assure, dans la mesure du possible, une juste représentation de la société et tienne compte des différentes missions de la régie. Ainsi, les salariés, les travailleurs autonomes, les employeurs et les prestataires des régimes gérés et administrés par la régie seront représentés au conseil d'administration. Le mandat du président du conseil d'administration et du président-directeur général serait d'au plus cinq ans et, celui des autres membres d'au plus quatre ans. Ces mandats seraient renouvelables.

En ce qui concerne les comités du conseil d'administration, les comités sur la politique de placement et le service à la clientèle seront inscrits formellement dans la Loi sur le régime de rentes, en plus de ceux prévus par la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État. Comme on l'a vu, cette mesure ne fait qu'enchâsser dans la loi ce qui existe déjà. Il est aussi proposé que le nombre de vice-présidents ne soit pas limité à trois comme actuellement et que ceux-ci soient nommés par le gouvernement.

Comme on l'a vu, les règles de gouvernance ont toujours été bien inscrites dans le mode de fonctionnement de la régie. C'est donc dans un esprit d'une démarche certes d'adaptation mais aussi de continuité que la régie a entrepris cette révision des règles de gouvernance qui lui sont applicables. En donnant suite à l'engagement gouvernemental en matière de politique sur la gouvernance, la régie se joint aux autres sociétés d'État et organismes gouvernementaux qui étaient visés et elle s'assure aussi d'appliquer pleinement les principes modernes de gestion, de transparence et de reddition de comptes qui leur sont communs.

J'invite les membres de cette Assemblée à donner leur accord de principe pour la poursuite de l'étude de ce projet de loi, qui devrait faire rapidement consensus. Je vous remercie de votre attention.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Montmorency et porte-parole de l'opposition officielle en matière de régime des rentes et de régime d'assurance maladie du Québec. M. le député.

M. Hubert Benoit

M. Benoit: Merci, Mme la Présidente. Alors, effectivement, les questions de saine gestion et de gouvernance sont au coeur des préoccupations actuellement au niveau gouvernemental, et nous sommes heureux de voir que cette question interpelle le gouvernement. La transparence est un devoir face aux Québécoises et aux Québécois, donc un devoir d'honnêteté.

Les sociétés d'État ont été mises sur pied graduellement sur quatre décennies sans qu'une vision d'ensemble ne guide l'élaboration de leurs règles de fonctionnement. Alors, le projet de loi n° 89 s'harmonise avec la loi n° 53 qui a été mise en force en décembre 2006. Alors, elle viendra s'harmoniser avec les façons de procéder dans l'ensemble des sociétés d'État.

n(22 h 30)n

Et, pour faire un parallèle directement avec le projet de loi n° 63 dont on débattait tout à l'heure, il y aura plus de femmes sur les conseils d'administration, semble-t-il. Alors, en vue de la nouvelle loi, le gouvernement s'assurera que, d'ici cinq ans, les conseils d'administration des sociétés d'État seront constitués à parts égales d'hommes et de femmes ? alors, pour aller dans le même sens que tout à l'heure. Cette mesure a fait l'unanimité chez les personnes et les organismes consultés au cours des derniers mois. Alors, il existe, au Québec, un bassin de femmes qualifiées et prêtes à faire partie des conseils d'administration des grandes sociétés d'État, d'autant plus que, depuis quelques années, la majorité des nouveaux diplômés universitaires sont des femmes. Alors, on espère que, sur les 15 membres du... dont au moins 15 membres du conseil d'administration, lorsqu'on fait un bon calcul, il devrait y avoir sept à huit femmes sur le conseil d'administration. Et on dit que deux tiers, c'est-à-dire 66 %, devront être des administrateurs indépendants, alors j'espère que l'indépendance sera vraiment un facteur de transparence plus élevé et de saine de gestion au niveau de la Régie des rentes, que les administrateurs seront vraiment indépendants.

Le ministre a dit tout à l'heure que les administrateurs seront plus représentatifs de la société: alors, on a parlé de travailleurs autonomes, on a parlé de retraités, de travailleurs salariés. Alors, j'espère que ce sera effectivement représentatif, parce que la Régie des rentes, n'est-ce pas, est là pour donner le service aux citoyens. Alors, c'est un de ses mandats, et, d'après ce que le ministre disait, tant mieux si le travail est bien fait et que la Régie des rentes donne un bon service à nos concitoyens, car tout le monde paie. À toutes les semaines, à tous les mois, on paie des cotisations, et on a droit à s'attendre à un bon service.

Maintenant, lorsqu'on regarde le projet de loi, le ministre parlait tout à l'heure qu'il y a des comités. Alors, il y a le comité de service aux citoyens, dont je viens de parler, et le comité au niveau de la politique de placement de la caisse du régime. Alors, le comité chargé de la politique de placement a notamment pour fonction, alors comme je disais, d'élaborer et de soumettre au conseil d'administration la politique de placement de la caisse du régime, de faire des recommandations au conseil d'administration concernant la politique de placement et de faire rapport au conseil d'administration sur l'application de la politique de placement par la Caisse de dépôt et placement du Québec, alors le rendement de la caisse du régime, et toute autre question concernant la politique de placement.

Alors, on parlait tout à l'heure d'administrateurs indépendants, et, au niveau de la politique de placement, j'espère qu'on arrivera à maintenir le rendement, les rendements qui ont été soit... en passant, qui ont été corrects pour maintenir la réserve, mais on se rappellera malheureusement, quand on regarde les différents aboutissants de la crise des PCAA et des PCAC... on sait que la Régie des rentes a été touchée, hein? Alors, j'ai ici la Régie des rentes du Québec dans l'aventure des PCAA et des PCAC. Alors, lorsqu'on a auditionné M. Rousseau, président de la Caisse de dépôt ? c'était à la dernière session parlementaire ? on a pu constater dans son rapport que la Régie des rentes du Québec avait perdu 2,8 milliards au niveau de la crise des PCAA et des PCAC. Puis là je vais en faire un aparté: Aussi, le RREGOP, on a parlé de 4 milliards, et le FARR, de 2,7 milliards. Ça n'a pas de lien direct avec la Régie des rentes, mais c'est des chiffres qui ont été nommés par M. Rousseau.

Alors, au niveau du projet de loi, eh bien, comme le disait le ministre, la Régie des rentes a un devoir de planification financière envers la société, envers les gens qui y contribuent, un devoir de sécurité financière, hein? Moi-même, étant un conseiller en sécurité financière dans mon ancienne vie, si je peux m'exprimer ainsi, je suis très touché par les besoins de sécurité financière de nos concitoyens. J'ai moi-même travaillé longtemps à encourager les gens à faire de l'épargne parce que, comme on dit en Europe... Les Suisses disent: Premier palier, deuxième palier, troisième palier. Alors, le premier palier est la Régie des rentes, le deuxième doit se faire soit par des régimes de retraite complémentaires, et le troisième palier par de l'épargne que l'on fait nous-mêmes.

Alors, oui, la Régie des rentes a un mandat de sécurité financière. Et, comme j'ai souvent l'occasion, quand je suis sur des projets de loi avec le ministre, de lui demander... de le questionner sur la consultation qui est dans la loi, hein, qui devra se faire, si ma mémoire est bonne, soit à l'automne ou au début 2009, consultation publique où est-ce qu'on écoutera la population, on rencontrera les différents groupes d'intérêts, comme on l'a fait dernièrement sur le projet de loi n° 68 qui touche aussi les régimes de retraite complémentaires, la Protectrice du citoyen, les différentes unions, les différents représentants de nos concitoyens. Alors, lors de la consultation publique, nous verrons ce que la population attend de la Régie des rentes au niveau des améliorations qu'il y aura à faire.

Alors, j'ai déjà discuté, questionné le ministre là-dessus et aussi M. le président de la Régie des rentes: Est-ce qu'il y aura des modifications qui se feront au niveau du taux de cotisation? Est-ce qu'il y aura... J'ai entendu parler, dans ma pratique privée, que peut-être, pour le calcul de la rente, on enlèverait les cinq années de cotisation les plus basses. On l'enlève présentement pour ne pas désavantager le rentier, est-ce qu'on les laissera? Est-ce que la rente de conjoint survivant sera diminuée d'une rente viagère à une rente à durée fixe? On verra, on verra ce que la population nous donnera comme pouls à ce niveau-là.

Alors, au niveau du projet de loi en tant que tel, il est certain que ça touche aussi les services aux citoyens, comme le disait le ministre. Alors, il y a beaucoup d'articles de concordance avec la loi n° 53. Ma question, je me posais une question versus le mandat du Vérificateur général au niveau de la Régie des rentes du Québec. Alors, on sait que la loi n° 63, qui a été adoptée en décembre 2006, donnait au Vérificateur général le loisir de vérifier les sociétés d'État telles qu'Hydro-Québec, la Société générale de financement. Alors, est-ce que le Vérificateur général pourra aussi vérifier les comptes de la Régie des rentes? Est-ce que c'est prévu dans la loi déjà? Ce sera à vérifier.

Maintenant, l'idée d'instaurer des mesures plus transparentes aux sociétés d'État est une démarche que nous réclamons depuis longtemps au sein de notre formation politique. En bout de ligne, la gestion de la Régie des rentes ne peut qu'en être améliorée et modernisée aux réalités d'aujourd'hui. Alors, le projet de loi va être étudié article par article, et nous verrons à ce que ça améliore effectivement la gestion, que ce soit plus transparent.

Alors, la révision de la gouvernance s'imposait d'autant plus qu'au cours des dernières années des difficultés importantes ont démontré les lacunes existant dans la gouvernance de certaines de ces entreprises et la nécessité d'y remédier. Alors, les gouvernances de l'État, de toutes les sociétés d'État, c'est fait avec le projet de loi n° 63, comme je disais, mais, avec le projet de loi n° 89, eh bien on va tout simplement harmoniser avec le 63.

Alors, malgré l'assujettissement de la Régie des rentes sur la loi des gouvernances, nous resterons vigilants afin de s'assurer que le gouvernement ne profite pas des modifications apportées à la loi pour ouvrir la porte du conseil d'administration aux nominations partisanes. Je le disais tout à l'heure, il faut que les administrateurs soient indépendants. L'indépendance et la transparence ne doivent pas être associées à la partisanerie. Les gens qui siègent au C.A., mis à part le président-directeur général, sont choisis par le gouvernement; il faut prêter grande attention que ceux-ci soient choisis en fonction de leurs compétences et non de leurs bons contacts. La ligne est mince et la tentation est là. Il ne faudrait pas qu'il y ait de faiblesse au niveau des nominations, le ministre l'a dit tout à l'heure, des représentants des différentes couches de la société.

Alors, cela vaut pour les sociétés d'État assujetties à la Loi sur la gouvernance, mais il faut aussi rester vigilant sur la gestion en général des entreprises et organismes publics, comme je le mentionnais un peu avant mon allocution... dans mon allocution. Il faut aussi veiller à ne pas alourdir inutilement la tâche de la Régie des rentes. L'introduction de nouvelles règles en matière de divulgation et de publication de renseignements doit être surveillée de près afin de s'assurer d'un maximum de sécurité sans toutefois nuire à l'efficacité.

La Régie des rentes se définit comme une entreprise qui a des clients, alors, tu sais, même si c'est une société d'État, elle se définit comme étant une entreprise de service à la clientèle qui a pour mission de contribuer, comme je le disais tout à l'heure, à la sécurité de revenu des Québécois et des Québécoises à plusieurs étapes de leur vie, alors que ce soit lorsqu'on tombe... malheureusement on perd un conjoint, lorsqu'on a un conjoint qui décède et qu'il laisse des enfants dans le deuil, alors autant à ce niveau-là. Au niveau de l'invalidité aussi, on sait que la rente d'invalidité qui est versée par la Régie des rentes est importante pour bien des familles. Et nous félicitons cet esprit et nous encourageons d'autres à emprunter cette voie vers l'excellence au niveau des sociétés de gestion.

Alors, je vais tout simplement laisser la parole à mon collègue de Terrebonne pour la suite des allocutions. Merci.

n(22 h 40)n

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député de Montmorency. Je suis prête à reconnaître Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, porte-parole du deuxième groupe de l'opposition en matière de services sociaux, condition des aînés en perte d'autonomie, condition des femmes. Mme la députée.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Alors, la première question qui se pose légitimement à l'examen de ce projet de loi qui a été déposé par le ministre et son gouvernement, c'est très simplement le suivant: Pourquoi un examen à la pièce des ajustements qui doivent être apportés à la loi sur la Régie des rentes?

Je dis «un examen à la pièce» parce que, devant cette Assemblée, Mme la Présidente, il y a maintenant deux projets de loi qui traitent de la Régie des rentes, le présent projet de loi, qui est plus un projet de concordance avec la loi sur l'assujettissement... c'est à dire la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, mais il y a aussi un deuxième projet de loi, qui porte plutôt sur les régimes complémentaires de retraite, en fait qui fait une majeure sur les régimes complémentaires de retraite mais qui a des dispositions, cette fois, sur la Régie des rentes, modifiant la Régie des rentes, au moment même où le ministre a annoncé que, d'ici la fin de la présente session, il y aurait un document de consultation qui serait rendu public, lequel document de consultation portant sur le rapport de l'actuaire M. Coulombe, rendu public il y a quelques semaines maintenant, devrait donner lieu à une commission parlementaire l'automne prochain.

Alors, vous voyez que c'est comme égrené finalement, il n'y a pas comme une vision d'ensemble de ce qu'il faut faire, sans doute nécessaire, pour adapter, ajuster la loi de la Régie des rentes, et notamment pour attendre l'automne prochain, au moment où on va examiner le rapport actuariel, où on va également prendre connaissance, là, dans les jours qui viennent, normalement du rapport de consultation. Le ministre a dit en commission parlementaire, et je le cite, lors de l'étude des crédits, je pense... non, lors de l'étude article par article de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, alors: «D'ici la fin de la session parlementaire, le document sera disponible.»

Alors, Mme la Présidente, c'est un projet de concordance en fait avec cette Loi, là, sur la gouvernance des sociétés d'État. Cependant, j'ai été très surprise de ne pas entendre le ministre parler des intentions qu'il a ? j'espère, du moins ? en tant que ministre responsable, à l'égard d'une juste représentation, équitable, des femmes au sein de la direction de la Régie des rentes et de son conseil d'administration. D'autant, Mme la Présidente, qu'un examen récent, là, de ce document qui a été rendu public par le Conseil du trésor à l'occasion de l'étude des crédits, je pense, du Conseil du trésor nous amène à constater que, contrairement à ce qu'on pouvait imaginer, avec toutes les déclarations nombreuses de membres de ce gouvernement qui se réjouissent de l'égalité au sein de leur Conseil des ministres... On s'en est réjouis, je crois que cela aussi a fait l'unanimité ici même, à cette Assemblée. Comme le disait le député de Trois-Rivières tantôt à l'égard de ce que parfois le gouvernement se crée comme faux adversaires, alors que finalement la porte est ouverte à cette réjouissance commune, finalement, à l'égard de ces progrès qui sont faits.

Je voudrais simplement rappeler cependant, en ce domaine, que, bien avant la composition paritaire de l'actuel Conseil des ministres, il y a eu une composition paritaire du Comité de priorités, qui était déterminant puisque toute législation ou projet de loi qui était présenté au Conseil des ministres devait préalablement, d'abord, être autorisé par ce Comité de priorités. C'était au moment où Jacques Parizeau était premier ministre du Québec, et ce Comité de priorités était déjà paritaire et composé de trois femmes et de trois hommes.

Alors, ce sont là des progrès importants, qu'il faut poursuivre, Mme la Présidente. Je pense que vous êtes personnellement très sensible à cette question et notamment à celle du recul que notre Parlement a connu depuis la dernière élection où, de 40 députées, femmes parlementaires, nous avons, pour la première fois dans l'histoire de ce Parlement, reculé à 33 seulement, alors que les progrès constants au fil des dernières décennies nous avaient permis de penser que tout cela suivrait son cours et qu'il s'agissait quasi de droits acquis.

Alors, quand on regarde de près les nominations qui ont été faites à la prérogative du gouvernement ? en fait ce sont des nominations soit de présidentes ou vice-présidentes d'organismes gouvernementaux ? alors on se rend compte, en date du 31 mars, cette année ? ce sont les chiffres fournis par le Conseil du trésor, intitulés Indicateurs de l'égalité ? bien on se rend compte qu'en cette matière, entre 2002 et 2006 ? ce sont les dernières statistiques qu'on nous a données ? on a reculé en matière de présence des femmes nommées par le Conseil des ministres comme présidentes, vice-présidentes d'organismes gouvernementaux. Des 39 femmes occupant ces fonctions de présidentes et vice-présidentes d'organismes gouvernementaux en 2002, il n'y en a plus que 32. Alors, on voit, là, un recul qui de prime abord est inquiétant, Mme la Présidente, ce qui signifie que c'est presque, ma foi, c'est presque... c'est plus même que 15 % de diminution du pourcentage des femmes parmi les titulaires d'emplois supérieurs à temps plein qui sont nommées par le Conseil des ministres pour occuper ces fonctions de présidentes et vice-présidentes d'organismes gouvernementaux.

Il en va ainsi également pour ce qui concerne les emplois supérieurs à temps plein. Alors, cette fois, ça n'a pas bougé. En fait, des 37 que comptait la haute fonction publique en 2002, en emplois supérieurs à temps plein, il en reste 37. En fait, ça ne s'est pas amélioré. Malgré toutes les déclarations du gouvernement, on comprend que non seulement ça ne s'est pas amélioré, mais, à l'égard des organismes gouvernementaux, ça s'est détérioré, la situation s'est aggravée.

Alors, je pense que le ministre responsable de la Régie des rentes va certainement avoir à répondre à nos questions en commission parlementaire, lors de l'étude article par article, sur ses intentions à l'égard de cette plus juste représentation des femmes au sein de la direction ou encore au sein du conseil d'administration.

Alors, nous disions qu'il s'agit d'un projet de concordance. Quelle explication peut-on donner au fait de présenter un projet de loi qui aurait très bien pu se retrouver à l'occasion de la consultation déjà annoncée, l'automne prochain, portant sur la Régie des rentes? Je tente, Mme la Présidente, une explication. S'il y en a d'autres, le ministre pourra nous la donner, mais c'est sans doute que son gouvernement est en manque de législation, et certainement cette concordance va pouvoir s'ajouter à d'autres législations en donnant l'impression d'augmenter le volume. Mais il demeure que la consultation de l'automne prochain est vraiment celle qui reste la plus névralgique, la plus importante. Je rappelle que, suite au rapport actuariel, il y aura un document.

n(22 h 50)n

Lors de l'examen fait en commission parlementaire du projet de loi sur les régimes complémentaires de retraite, à une question que je lui posais sur la rente de conjoint survivant, le ministre répondait, et je le cite, «n'avoir rien écarté, en matière d'avenir différent, de ce qui existe depuis 40 ans», un peu plus, 42 ans que la Régie des rentes est créée au Québec. Et vous savez, Mme la Présidente, que déjà, dans un document antérieur qui date d'il y a quatre ans, l'actuel gouvernement avait pensé réduire la rente de conjoint survivant à trois ans seulement. Il y a eu un tollé de protestations, vous le savez, et finalement le gouvernement a reculé à ce moment-là. Et quand je lui ai posé la question, on le verra, là, dans ce document qui sera rendu disponible d'ici la fin de la session, le ministre répondait: «Je n'ai rien écarté. On va amener ça à la consultation. On va mettre [cela en] consultation. Et nous allons tous discuter [...] ici, comme parlementaires...» Alors, plutôt que de rassurer les membres de la commission, en l'occurrence les députés et ceux et celles qui suivent nos travaux, en disant clairement qu'on n'allait pas reprendre les discussions au point où on les avait laissées lors de la controverse sur cette question-là, il y a quatre ans, loin d'écarter cette hypothèse, en fait ce scénario, le ministre a comme laissé entendre qu'il allait à nouveau être discuté. Alors, je crois qu'il est utile d'en informer nos concitoyennes et nos concitoyens pour qu'ils puissent rester vigilants sur ces questions qu'on va reprendre au moment de la consultation, l'automne prochain.

Alors, pour toutes ces raisons, Mme la Présidente, vous avez compris que nous allons souscrire à l'adoption du principe de ce projet de loi de concordance, tout en espérant qu'il y ait une vue d'ensemble qui puisse se dégager, l'automne prochain, sur, appelons ça, la modernisation de la Régie des rentes du Québec. Je vous remercie.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Je reconnais maintenant M. le député de Terrebonne, porte-parole de l'opposition officielle en matière de Conseil du trésor et d'administration gouvernementale. M. le député.

M. Jean-François Therrien

M. Therrien: Merci, Mme la Présidente. C'est un honneur pour moi de pouvoir parler sur le projet de loi n° 89 ce soir. Donc, ce projet de loi a pour objet d'assujettir la Régie des rentes du Québec à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État et d'introduire dans la loi constitutive de l'organisme de nouvelles règles de gouvernance qui visent la composition et le fonctionnement de son conseil d'administration.

L'assujettissement à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État rend aussi applicables à la régie des règles sur la divulgation et la publication de renseignements. Et elles modifient spécifiquement la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État. Les questions de saine gestion et de gouvernance sont au coeur des préoccupations actuellement, et nous sommes heureux de voir que cette question interpelle le gouvernement. C'est quelque peu surprenant.

Mais aussi, la transparence est un devoir face aux Québécois, et on l'a vu cette semaine, que le gouvernement a un petit peu de difficultés avec le concept de transparence. Juste à penser, quand on lui pose la question au niveau de la publicité qu'il a publiée suite au rapport Bouchard-Taylor. Et, pour un gouvernement qui se dit que la transparence est un souci, il n'est pas capable de nous dire exactement le coût précis qu'une telle publicité a pu coûter aux contribuables québécois. Et il était important de rappeler que justement cette publicité sortait directement des poches des Québécois.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député de Terrebonne, je vous invite, s'il vous plaît, à la pertinence. Alors, je vous demanderais, s'il vous plaît, de rester dans le cadre du projet de loi qui est actuellement à l'étude. Je vous en prie.

M. Therrien: Il n'y a pas de problème, Mme la Présidente. Mais qu'est-ce qui est encore plus dramatique de ça, c'est que justement... c'est que le député de Châteauguay approuvait mes dires il y a quelques secondes.

Donc, nous sommes contents, Mme la Présidente, de voir que la Régie des rentes est sur une bonne voie, sur l'avenue de la transparence qui doit inévitablement caractériser les sociétés d'État, favoriser une gestion qui répond à des critères exigeants d'intégrité et de responsabilité, bonifier à coup sûr la performance des entreprises du secteur public. À ce sujet, nous comptons collaborer étroitement avec la ministre pour mener à terme ce projet de loi.

Nous avons quelques retenues par contre sur ce projet de loi. Nous nous engageons à être attentifs face aux nominations du gouvernement, tout comme nous resterons vigilants et attentifs sur la gestion en général des entreprises publiques. À ce sujet, et malgré l'assujettissement de la Régie des rentes du Québec à la Loi sur la gouvernance, nous resterons vigilants afin de s'assurer que le gouvernement ne profite pas des modifications apportées à la loi pour ouvrir la porte du conseil d'administration aux nominations partisanes.

Et, sur ce sujet précisément, Mme la Présidente, j'aimerais vous rappeler et rappeler à cette Chambre et tous les gens qui nous écoutent que mon confrère de Chutes-de-la-Chaudière, à l'époque, en 2006, avait déposé un projet de loi justement sur les nominations partisanes, et j'aimerais vous rappeler ce projet de loi donc qui était très pertinent à l'époque et que le gouvernement n'a pas jugé bon d'appeler. Et aujourd'hui on nous parle de pertinence et on nous parle d'intégrité, et on voit encore que les idées de notre parti refont surface.

Donc, le projet de loi n° 190, dans les notes explicatives, disait ceci: «Ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur l'Assemblée nationale pour prévoir que les personnes nommées par l'Assemblée nationale soient préalablement choisies suivant la procédure de sélection établie par la Commission de l'Assemblée nationale. De plus, le projet de loi prévoit que la liste des noms des personnes déclarées aptes est transmise au premier ministre; celui-ci doit alors proposer à l'Assemblée nationale la candidature de la personne qu'il a choisie pour la fonction à combler après avoir consulté le chef parlementaire du parti de l'opposition officielle et le chef parlementaire de tout autre parti représenté à l'Assemblée nationale. Le projet de loi prévoit en annexe la procédure de sélection des personnes nommées par l'Assemblée nationale. Enfin, le projet de loi...»

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Un moment, M. le député, s'il vous plaît. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: Mme la Présidente, simplement pour rappeler à notre collègue peut-être de... Je ne veux pas empêcher qu'il ait le droit de parole, là, je vais... on peut arrêter le temps pour lui, il n'y a pas de difficulté. Mais, si ses propos pouvaient porter sur le projet de loi qui est en débat plutôt que sur un projet qu'il voudrait qu'il soit débattu. La règle de pertinence, là, qu'on est rendus à quelques fois, ce soir, de rappeler, il serait peut-être bon qu'elle soit appliquée.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député... M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx: Oui, Mme la Présidente. Les traditions ici sont qu'à l'adoption du principe cette interprétation doit être davantage plus large. Ce qui est clair là-dedans, c'est que les nominations dont parle mon collègue sont directement au coeur du projet de loi. Je suis en train de le lire, là, pour préparer mon allocution; très intéressant, il y a des choses qui touchent directement les nominations. Alors, ce que je comprends, que ce que fait mon collègue de Terrebonne, c'est de donner des guides au ministre.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. MM. les leaders, je vous ai entendus; je voudrais entendre M. le député de Terrebonne. Je l'appelle à la pertinence. M. le député de Terrebonne, je vous invite à rester dans le sujet du projet de loi, s'il vous plaît.

M. Therrien: Donc, pour revenir, Mme la Présidente, au sujet justement qui nous préoccupe, on se demande, de notre côté, aussi les gens qui vont siéger au conseil d'administration, mis à part le président-directeur général, qui sont choisis par le gouvernement, il faut prêter une grande attention pour que ceux-ci soient choisis en fonction de leur compétence. Donc, je crois pertinemment que le projet de loi n° 190 qui avait été déposé par mon confrère à l'époque se rattache directement à ces principes de compétence, et de responsabilisation, et d'imputabilité, au niveau des choix qui devront être faits sur le conseil d'administration. Donc, j'aimerais simplement rappeler au monde qui nous écoute ce soir que c'était un excellent projet de loi qui avait été présenté par mon confrère et que j'aimerais rappeler aux gens qu'est-ce que ce projet de loi disait, pour peut-être rafraîchir et donner des idées au gouvernement, pour qu'il puisse peut-être rappeler ce projet de loi là et l'adopter un jour. Donc, l'article 1: La Loi sur l'Assemblée nationale est modifiée par l'insertion, après l'article 28, de ce qui suit...

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, M. le leader. Je vous ai entendu, M. le leader. M. le leader de l'opposition officielle, j'appelle le député à la pertinence. Je vous appelle à la pertinence. Nous sommes sur le projet de loi sur le Régime des rentes du Québec, alors je vous prie d'intervenir sur le projet de loi qui est devant vous, s'il vous plaît.

n(23 heures)n

M. Therrien: Avec tout le respect que je vous dois, Mme la Présidente, le projet de loi qui est devant moi, c'est le projet de loi n° 190 présentement, et je crois pertinemment qu'il y a un lien avec les nominations au niveau du conseil d'administration, et on parle de gouvernance. Donc, c'était un projet qui était directement en lien avec la gouvernance, donc j'aimerais que les citoyens du Québec soient au courant de ce projet de loi là.

Donc, l'article 28.1...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député, nous sommes sur le projet de loi n° 89 en lien avec le régime des rentes. J'aimerais vous entendre, vous avez toute la latitude pour intervenir sur ce projet de loi, et je vous rappelle le principe de la pertinence, s'il vous plaît. Merci. Allez-y.

M. Therrien: Donc, cela va pour les sociétés d'État assujetties à la Loi sur la gouvernance, donc on revient à la Loi sur la gouvernance, Mme la Présidente, ici. On fait un lien, et il y a même... le projet de loi n° 89 modifie le projet de loi sur la gouvernance des sociétés d'État. Et qu'est-ce qui avait été présenté par mon confrère au niveau de la loi n° 190, c'était directement aussi en lien avec la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État.

Bon. Donc, l'article 28.1 de ce projet de loi qui intéresse sûrement les gens qui nous écoutent ce soir. Donc:

«Les personnes nommées par l'Assemblée sont préalablement choisies suivant la procédure de sélection établie par la Commission de l'Assemblée nationale.» C'est ce qu'on souhaiterait pour le projet de loi n° 89.

Donc: «Ces personnes sont:

«1° les membres de la Commission d'accès à l'information;

«2° les membres de la Commission des droits de la personne et [...] de la jeunesse;

«3° [la direction générale] des élections et [la commission] de la Commission de la représentation;

«4° les membres de la Commission de la fonction publique et les commissaires suppléants de cette commission;

«5° [la] Commissaire à la santé et au bien-être;

«6° le Commissaire au lobbyisme;

«7° le Protecteur du citoyen;

«8° le Vérificateur général;

«9° le secrétaire général et les secrétaires généraux adjoints de l'Assemblée;

«10° le jurisconsulte de l'Assemblée.

«28.2. En outre de prévoir[ toutes ces mesures], la procédure de sélection doit déterminer:

«1° la manière de procéder à l'appel de candidatures.»

28.2, je crois que c'est un article très pertinent pour justement choisir au niveau...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député. M. le député de Terrebonne, je voudrais vous rappeler l'article 239. Asseyez-vous, M. le député. Merci.

Objet du débat. «Le débat porte exclusivement sur l'opportunité du projet de loi, sur sa valeur intrinsèque, ou sur tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins.»

Alors, je vous invite, s'il vous plaît, à rester sur le projet de loi n° 89, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives. C'est l'objet du débat en cours.

M. Therrien: Merci, Mme la Présidente. Et justement j'y arrivais, au lien qu'il y a avec ce projet de loi là, justement la pertinence que vous me dites et les... tout autre moyen. Donc, quand on prévoit la procédure de sélection, donc dans le projet de loi n° 89, on parle de nommer un conseil d'administration, je crois que, pour justement arriver à une procédure de sélection qui soit impartiale, avec intégrité et transparence, ce projet de loi là est très pertinent, et j'y arrivais justement à 28.2:

«...la manière de procéder à l'appel de candidatures; la manière dont une personne peut se porter candidate et les renseignements qui peuvent être requis; les règles de formation du comité de sélection; les règles du fonctionnement du comité et les critères de sélection dont il tient compte.»

Donc, je crois que c'est très pertinent à la formation d'un conseil d'administration qui est assujetti pour le projet de loi n° 89.

Donc, 28.3 aussi porte sur la procédure de sélection qui «doit être adoptée par la Commission de l'Assemblée nationale à la majorité des membres de chaque groupe parlementaire». Donc, très pertinent.

«28.4. La liste des personnes que le comité de sélection estime aptes à remplir la fonction à combler est transmise au premier ministre par le président de l'Assemblée.»

Donc, 89 nous dit qu'il doit y avoir des nominations par le gouvernement, donc, nous, on lui fait une suggestion que ce soit transmis au premier ministre.

Ensuite: «Dans les 30 jours de la réception de cette liste, le premier ministre consulte le chef parlementaire du parti de l'opposition officielle et [du] chef parlementaire de tout autre parti représenté à l'Assemblée ? ce soir, on est seulement deux partis ? quant à la candidature qu'il souhaite proposer à l'Assemblée.

«28.5. Le premier ministre doit faire connaître sans délai à l'Assemblée le nom du candidat qu'il propose pour occuper la fonction à combler.»

La Loi sur le Commissaire de la santé et au bien-être est modifiée par le remplacement de l'article... Là, on tombe dans d'autres articles qui, je rejoins votre objection, sont moins pertinents.

Au chapitre I de la loi n° 190 par contre, on va dans... qui est nommé le chapitre sur l'avis de recrutement. Donc là, pour l'avis de recrutement, je pense que, pour former un conseil d'administration, il faut qu'il y ait des personnes qui se présentent, il faut qu'elles soumettent leurs candidatures. Donc, je pense que 89 demande un conseil d'administration. Donc, il faut qu'il y ait des candidatures, et donc on va aller en avis de recrutement. Donc, l'article 1 du chapitre sur l'avis de recrutement dit que:

«Au plus tard six mois avant l'expiration du mandat d'une personne occupant une fonction visée par l'article 28.1 de la Loi [de] l'Assemblée nationale, le président de l'Assemblée nationale fait publier dans deux quotidiens circulant au Québec un avis invitant les personnes intéressées à soumettre leur candidature à la procédure de sélection et informant toute personne qu'elle peut proposer la candidature d'une personne qu'elle estime apte à remplir la fonction.

«Lorsqu'il s'agit d'une fonction vacante...» D'autres dispositions. Ce n'est pas le cas ici du projet de loi n° 89.

2. L'article 2 du chapitre de l'avis de recrutement:

«L'avis doit indiquer:

«1° une description sommaire de la fonction à combler pour laquelle une candidature peut être proposée;

«2° l'indication du lieu où la personne peut être appelée à exercer principalement ses fonctions;

«3° les conditions et critères de sélection prévus par la loi et la présente procédure et, le cas échéant, les exigences professionnelles et les expériences particulières recherchées.»

Ici, c'est très important, Mme la Présidente, là, on parle de compétences donc pour pouvoir appliquer sur un poste qui est ouvert sur un conseil d'administration, tel que le prévoit la loi n° 89.

«4° le régime de confidentialité applicable dans le cadre de la procédure de sélection et une indication de la possibilité pour le comité de sélection de faire des consultations; et

«5° la date avec laquelle une candidature doit être soumise et l'adresse où elle doit être transmise.»

Le chapitre II de la loi n° 190 est aussi très pertinent. On parle ici de la candidature des gens qui veulent soumettre leurs compétences, et, je précise, leurs compétences au gouvernement du Québec. Donc, l'article 3:

«La personne qui désire soumettre sa candidature transmet au président de l'Assemblée nationale son curriculum vitae ? on n'a pas vu ça souvent ici, Mme la Présidente, on aurait aimé ça voir plus de C.V., mais ce n'est pas la norme encore ? contenant les renseignements suivants ? donc:

«1° [le] nom ainsi que l'adresse et le numéro de téléphone de sa résidence et, le cas échéant, de son lieu de travail;

«2° sa date de naissance;

«3° les diplômes de niveau collégial et universitaire qu'elle détient;

«4° si elle est membre d'un ordre professionnel, l'année de son admission dans cet ordre, la preuve qu'elle [...] est membre ainsi que le nombre d'années de pratique qu'elle a complétées avec la mention des principaux secteurs d'activité dans lesquelles elle a oeuvré;

«5° la nature des activités qu'elle a exercées et qui lui ont permis d'acquérir une expérience pertinente dans le domaine de la fonction à combler;

«6° le cas échéant, le fait d'avoir fait l'objet d'une sanction par le comité de discipline de l'ordre professionnel dont elle est ou a été membre et par le Tribunal des professions ainsi que l'objet et les motifs de cette sanction;

«7° le cas échéant, le nom de ses employeurs ou de ses associés au cours des dix dernières années;

«8° un exposé résumant les motifs de son intérêt...»

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Un instant, M. le député, s'il vous plaît. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: Je donnais le temps au collègue pour essayer de voir si j'étais capable de suivre l'étude du projet n° 89. Depuis tantôt qu'il lit les articles et, de toute évidence, ce n'est pas ce projet de loi. Je pense que, pour aider, je suis prêt à déposer le projet n° 89, sur lequel nous discutons présentement, pour qu'il en prenne connaissance et qu'il puisse parler du sujet qui est en ce moment appelé par la Chambre.

Alors, je demande la permission de déposer le projet de loi pour qu'il puisse en prendre connaissance, non seulement pour nous, ici, mais ceux qui nous écoutent, ce serait très utile, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, j'imagine que j'ai le consentement pour le dépôt du projet de loi qui fait l'objet de l'étude actuellement? M. le leader de l'opposition.

M. Proulx: Oui. Mme la Présidente, deux choses. La première, vous avez consentement pour le dépôt. Ça va me faire plaisir de le relire une deuxième fois.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est gentil.

M. Proulx: Par contre, ce qui doit être clair, c'est que ce que fait mon collègue, c'est se rattacher au projet de loi n° 89, c'est ce qu'il fait depuis tout à l'heure. Moi, je l'écoute: très clair à mon esprit ce qu'il dit. Il parle notamment des nominations. Il veut que le ministre soit bien au fait des écueils qui pourraient se retrouver devant lui. Alors, est-ce qu'il a pris son temps pour le faire? Je pense qu'il voulait le faire correctement, c'est pour ça que c'était un peu plus long que d'habitude, c'est tout.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous rappelle, M. le leader du gouvernement, que le projet de loi est déjà déposé. Donc... faire ça pour la forme, il est déjà public.

Et je rappelle le député de Terrebonne à la pertinence. M. le député, je vous rappelle à la pertinence. Nous sommes sur le projet de loi n° 89, Loi modifiant la Loi sur le régime des rentes du Québec et d'autres dispositions législatives. Alors, je suis prête à vous entendre sur ce projet de loi.

n(23 h 10)n

M. Therrien: Merci, Mme la Présidente. Je vais, pour justement écourter le débat et satisfaire au leader du gouvernement, je vais écourter. Je vais tout simplement vous citer les chapitres du projet de loi n° 190 qui étaient très pertinents, qu'il aurait été intéressant pour la population du Québec qu'on puisse les décrire plus spécifiquement, mais, bon, le gouvernement n'aime pas qu'on les rappelle à l'ordre.

Donc, le chapitre III énonçait la formation d'un comité de sélection pour arriver à un choix des membres du conseil d'administration; le chapitre IV, le fonctionnement de ce comité de sélection; le chapitre V, les critères de sélection. Ensuite, au chapitre VI, on demandait qu'il y ait un rapport du comité de sélection. Donc, je crois, Mme la Présidente, que ce projet de loi était à l'époque très pertinent, et d'autant plus aujourd'hui, étant donné que le gouvernement prend conscience aujourd'hui de l'importance de la transparence et de l'intégrité dans ses nominations. Par contre, nous devons garder toujours la rigueur et la surveillance au niveau de ces institutions.

Donc, pour revenir sur 89, il faut aussi veiller à ne pas alourdir inutilement la tâche de la Régie des rentes du Québec. L'introduction de nouvelles règles en matière de divulgation et de publication de renseignements doit être surveillée de près afin de s'assurer d'un maximum de sécurité sans toutefois nuire à l'efficacité. Certes, les façons de faire ont changé, et il convient de s'adapter et de développer des pratiques sécuritaires en matière de gestion de l'information.

La Régie des rentes du Québec se définit comme une entreprise qui a des clients, qui a pour mission de contribuer à la sécurité du revenu des Québécois et Québécoises à plusieurs étapes de leur vie. Nous félicitons cet esprit. Nous encourageons d'autres à emprunter cette voie vers l'excellence. Je vous remercie, Mme la Présidente. Je vous souhaite une bonne fin de soirée.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, M. le député de Terrebonne. Et je cède la parole à M. le député de Nicolet-Yamaska. M. le député.

M. Éric Dorion

M. Dorion: Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, Mme la Présidente, j'aimerais quand même vous souligner, par souci du leader du gouvernement et pour ceux et celles qui nous écoutent ce soir... de faire un peu le résumé du projet de loi n° 89.

Dans les notes explicatives:

«Le projet de loi a pour objectif d'assujettir la Régie des rentes du Québec à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État et d'introduire, dans la loi constitutive de l'organisme, de nouvelles règles de gouvernance qui visent notamment la composition et le fonctionnement de son conseil d'administration.

«Ainsi, ce projet de loi prévoit que le conseil d'administration est formé de 15 membres, dont au moins les deux tiers devront se qualifier comme administrateurs indépendants. Il distingue les fonctions de président du conseil d'administration et celles de président-directeur général et prescrit les règles relatives à la nomination des membres du conseil d'administration. Le projet de loi prévoit ainsi la création, [entre autres,] des comités visés à l'article 19 de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, d'un comité chargé de la politique de placement et d'un comité chargé des services aux citoyens.

«L'assujettissement à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État rend ainsi applicables à la régie des règles sur la divulgation et la publication de renseignements.

«Enfin, ce projet de loi comporte des dispositions transitoires.»

Projet de loi n° 89, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives.

La Loi sur la Régie des rentes du Québec est modifiée par le remplacement des articles 14 à 23.4 par les suivants:

«14. La régie est administrée par un conseil d'administration formé de 15 membres, dont le président du conseil et le président-directeur général.

«15. Le gouvernement nomme les membres du conseil d'administration, autres que le président du conseil et le président-directeur général, en tenant compte des profils [des compétences] et d'expérience approuvés par le conseil d'administration de la régie. Ces membres sont nommés pour un mandat d'au plus quatre ans.

«Il veille [entre autres] à ce que le conseil d'administration se compose notamment de salariés, de travailleurs autonomes, d'employeurs et de prestataires de régimes gérés ou administrés par la régie.

«16. Le gouvernement nomme le président du conseil d'administration pour un mandat d'au plus cinq ans.

«17. Le gouvernement nomme le président-directeur général sur la recommandation du conseil d'administration, en tenant compte du profil de compétence et d'expérience approuvé par le conseil d'administration.

«Si le conseil d'administration ne recommande pas la nomination d'une personne au poste de président-directeur général dans un délai raisonnable, le gouvernement peut nommer celui-ci après en avoir avisé les membres du conseil.

«Le mandat du président-directeur général est d'au plus cinq ans.

«18. À la fin de leur mandat, les membres du conseil d'administration demeurent en fonction jusqu'à ce qu'ils soient remplacés ou nommés de nouveau.

«19. Toute vacance parmi les membres du conseil d'administration est comblée suivant les règles de nomination prévues à leur égard.

«Constitue notamment une vacance, l'absence à un nombre de réunions du conseil déterminé par le règlement intérieur de la régie, dans [le] cas et les circonstances qui y sont indiquées.

«20. En cas d'absence ou d'empêchement du président-directeur général, le conseil d'administration peut désigner un vice-président pour en exercer les fonctions.

«21. Les membres du conseil d'administration, autres que le président-directeur général, ne sont pas rémunérés sauf dans les [cas ou] conditions et dans la mesure que peut déterminer le gouvernement.

«22. Le conseil d'administration constitue notamment, [entre autres,] du comité de gouvernance et d'éthique, du comité de vérification et du comité des ressources humaines, qui sont prévus à l'article 19 de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État (chapitre G-1.02), un comité chargé de la politique de placement et un comité chargé des services aux citoyens.

«23. Le comité chargé de la politique de placement a notamment pour fonction:

«1° d'élaborer et de soumettre au conseil d'administration la politique de placement de la caisse du régime;

«2° de faire des recommandations au conseil d'administration concernant la politique de placement;

«3° de faire rapport au conseil d'administration sur l'application de la politique de placement par la Caisse de dépôt et placement du Québec, le rendement de la caisse du régime et toute autre question concernant la politique de placement.

«23.1. Le comité chargé des services aux citoyens a notamment pour fonctions d'élaborer des orientations concernant les services aux citoyens, de les soumettre au conseil d'administration et d'en assurer le suivi.

«23.2. Les règles relatives au quorum des réunions du conseil d'administration et de ses comités sont déterminées par le règlement intérieur de la régie.

«23.3. Le président-directeur général est assisté par un ou plusieurs vice-présidents nommés par le gouvernement.

«Le mandat des vice-présidents est d'au plus cinq ans.

«À la fin de leur mandat, les vice-présidents demeurent en fonction jusqu'à ce qu'ils soient remplacés ou nommés de nouveau.

«23.4. Le gouvernement fixe la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail du président-directeur général et des vice-présidents.

«23.4.1. Le président-directeur général et les vice-présidents sont les dirigeants de la régie. Ils exercent leurs fonctions à temps plein.

n(23 h 20)n

«23.4.2. En cas d'absence ou d'empêchement d'un vice-président, le président-directeur général désigne un membre du personnel pour en exercer les fonctions.

«23.4.3. Tout règlement intérieur de la régie entre en vigueur à la date de sa publication sur le site Internet de la régie ou [...] toute date ultérieure qu'il indique.»

2. L'article 23.6 de cette loi est modifié:

1° par le remplacement, dans le premier alinéa, des mots «par son président» par les mots «par le président du conseil d'administration ou le président-directeur général»;

2° par le remplacement, dans le premier alinéa, des mots «règlements de régie interne» par les mots «règlements intérieurs».

3. L'article 31 de cette loi est modifié par le remplacement, dans le deuxième alinéa, des mots «par le président» par les mots «par le président-directeur général».

4. L'article 33 de cette loi est modifié par le remplacement des mots «Les indemnités et allocations prévues à l'article 19, le traitement du président» par les mots «La rémunération prévue à l'article 21, le cas échéant, la rémunération du président-directeur général».

5. L'article 37 de cette loi est modifié par l'insertion, dans le premier alinéa et après les mots «Ce rapport doit aussi contenir», de ce qui suit : «, outre les éléments prévus aux articles 36, 38 et 39 de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État,».

6. L'annexe I de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État est modifiée par l'insertion, suivant l'ordre alphabétique, de ce qui suit: «Régie des rentes du Québec».

7. L'article 251 de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite est modifié:

1° par le remplacement des mots «par son président» par les mots «par le président de son conseil d'administration, par son président-directeur général»;

2° par le remplacement des mots «règlements de régie interne» par les mots «règlements intérieurs».

Dispositions transitoires et finales.

8. Les exigences relatives au nombre de membres indépendants du conseil d'administration de la Régie des rentes du Québec et celles relatives à l'indépendance du président du conseil d'administration, prévues à l'article 4 de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, ainsi que l'exigence prévue au deuxième alinéa de l'article 19 dont cette loi s'appliquent à compter de la date fixée par le gouvernement. Cette date doit être fixée dans les meilleurs délais et cet article... s'appliqueront au plus tard le 14 décembre 2011.

Il en est de même de l'exigence relative à la présence d'un membre au sein du comité de vérification devant être membre d'un ordre professionnel de comptables, prévue au deuxième alinéa de l'article 23 de cette loi.

9. Le gouvernement peut, conformément à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, déterminer qu'un membre du conseil d'administration de la Régie des rentes du Québec, en poste le (indiquer ici la date qui précède celle de l'entrée en vigueur de la présente loi) a le statut d'administrateur indépendant.

10. Les membres du conseil d'administration de la Régie en poste le (indiquer ici la date qui précède celle de l'entrée en vigueur de la présente loi) demeurent en fonction, pour la durée non écoulée de leur mandat et aux mêmes conditions, jusqu'à ce qu'ils soient remplacés ou nommés de nouveau.

Malgré l'article 19 de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, un membre du conseil d'administration, en poste à cette date, qui n'a pas obtenu le statut d'administrateur indépendant peut être membre de comités visés à cet article jusqu'à ce que le nombre des administrateurs indépendants au sein du conseil d'administration de la régie ait atteint les deux tiers.

11. Le président et directeur général de la régie demeure en fonction à titre de président-directeur général, aux mêmes conditions, pour la durée non écoulée de son mandat.

Il assume la fonction de président du conseil d'administration jusqu'à ce que ce poste soit comblé conformément à l'article 16 de la Loi sur le Régime de rentes du Québec, édicté par l'article 1 de la présente loi.

12. Les vice-présidents de la régie en poste le (indiquer ici la date qui précède celle de l'entrée en vigueur de la présente loi) demeurent en fonction, aux mêmes conditions, pour la durée non écoulée de leur mandat.

13. Les dispositions des articles 36, 38 et 39 de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État s'appliquent à la Régie des rentes du Québec à compter de l'exercice financier débutant le 1er avril 2008.

14. La présente loi entre en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi).

Mme la Présidente, adoption. Les questions de saine gestion et de gouvernance sont au coeur des préoccupations actuellement, et nous sommes heureux de voir que cette question interpelle le gouvernement. La transparence est un devoir face aux Québécois et aux Québécoises, un devoir d'honnêteté. L'idée d'instaurer des méthodes plus transparentes aux sociétés d'État est une démarche que nous réclamons depuis longtemps au sein de ma formation politique. En bout de ligne, la gestion de la Régie des rentes ne peut qu'en être améliorée et modernisée aux réalités d'aujourd'hui, Mme la Présidente. Nous sommes contents de voir que la Régie des rentes est sur la bonne voie, sur l'avenue de la transparence qui doit inévitablement caractériser les sociétés d'État. Favoriser une gestion qui répond à des critères exigeants d'intégrité et de responsabilité bonifie à coup sûr la performance des entreprises du secteur public.

À ce sujet, nous comptons collaborer étroitement avec le ministre pour mener à terme ce projet de loi. Seule réserve, Mme la Présidente: par contre, nous nous engageons à d'être attentifs face aux nominations du gouvernement tout comme nous resterons vigilants et attentifs sur la gestion en général des entreprises publiques. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: Mme la Présidente, en vertu de l'article 213, je voudrais demander la permission de poser une question à notre collègue pour une meilleure compréhension de son intervention. Puisqu'il vient de nous lire, pendant 15 minutes, la loi intégralement, quel était le but visé par l'allocution qu'il vient de prononcer, puisque mot à mot, lettre après lettre, il vient de lire notes explicatives, titres, jusqu'à même la parenthèse «indiquer ici la date de la sanction de la présente loi»? Je n'ai pas compris quel était l'objet de son allocution, si ce n'est que de lire intégralement le projet. Alors, question bien simple: Que voulait-il nous dire en relisant la loi que nous avions tous?

n(23 h 30)n

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. le député de Nicolet-Yamaska, accepteriez-vous de répondre à une question du leader du gouvernement? Alors, je n'ai pas de consentement pour avoir votre réponse. Je suis prête à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de L'Assomption et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, de recherche, de développement et d'innovation, et j'ai besoin d'avoir le silence, s'il vous plaît. Merci. M. le député.

M. Éric Laporte

M. Laporte: Oui. Merci, Mme la Présidente. Donc, ça me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui concernant le projet de loi n° 89, la Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives. À moins que le leader le demande, je ne lirai pas le projet de loi en entier, mais je vais vous faire quand même un court résumé pour être sûr qu'on parle du bon projet de loi.

Ce projet de loi a pour objectif d'assujettir la Régie des rentes du Québec à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État et d'introduire, dans la loi constitutive de l'organisme, de nouvelles règles de gouvernance qui visent la composition et le fonctionnement de son conseil d'administration. L'assujettissement à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État rend aussi applicables à la régie les règles sur la divulgation et la publication des renseignements.

On est, aujourd'hui, en adoption de principe, donc on va parler de principes. On va commencer à parler du principe de transparence. Vous savez, Mme la Présidente, ça fait un petit peu plus d'un an qu'on est ici en mandat, que, moi, je suis ici, à l'Assemblée nationale, puis du manque de transparence, on a eu l'occasion d'en voir plus souvent qu'autrement.

Dernièrement, en étude de crédits, avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, j'ai, à plusieurs occasions, eu à rappeler au ministre que, s'il faisait preuve de plus de transparence, ce serait beaucoup plus facile pour nous, dans un gouvernement de cohabitation, comme se plaît à dire le premier ministre, de travailler pour faire avancer les choses, pour s'assurer d'une saine gestion, autant dans nos organismes publics qu'au gouvernement, que dans les différents ministères. Donc, la règle de transparence, on est heureux de voir que le ministre... que les ministres commencent à comprendre que c'est essentiel pour les principes de saine gestion, on est heureux de voir que le gouvernement commence enfin à réaliser tout ce que les Québécois demandent depuis longtemps.

On espère que le ministre ne va pas s'arrêter là, que les autres ministres, que ses collègues vont en faire autant, aller de l'avant avec plus de transparence. On a juste à penser, supposons, à l'affaire Bruno Fortier dernièrement, où est-ce qu'on a eu un manque flagrant de transparence, où est-ce qu'on aurait pu régler des problèmes beaucoup plus facilement si les différents ministres avaient fait preuve de plus de transparence. Dans les dossiers des hippodromes, par exemple, on a juste à penser à ça également. Donc, on encourage le gouvernement à continuer dans ce sens-là. On va lui pousser dans le dos pour qu'il fasse preuve de plus de transparence à chacune des occasions possibles.

Vous savez, on parle, aujourd'hui, de la Régie des rentes du Québec, comment c'est important pour les Québécois, cette Régie des rentes là, combien c'est important pour la retraite de nos Québécois. Vous savez, c'est quand même un souci important. Les Québécois ont beaucoup d'inquiétudes par rapport à l'environnement, par rapport au travail, par rapport à la santé, mais on oublie souvent de parler de la préoccupation des Québécois pour leur retraite. Ça touche tout le monde, personne n'est épargné par cette préoccupation-là, d'où l'importance de gérer la Régie des rentes avec beaucoup de vigilance, avec une saine gestion. Donc, la transparence vient assurément aider à la gestion de la Régie des rentes, vient aider à rassurer les Québécois quant à leur retraite.

Parce que, vous savez, on a eu beaucoup de scandales financiers dernièrement. On a eu des scandales financiers qui étaient quand même dus à une mauvaise gestion, dus à un manque de transparence. Donc, on s'attend à ce que la Régie des rentes fasse preuve de transparence pour rassurer les Québécois. Les Québécois ont besoin d'être rassurés, ils veulent savoir comment est investi leur argent, comment sont investis les fonds qui vont faire en sorte qu'ils vont avoir ou non une belle retraite.

Moi, dans mon entourage, il y a plusieurs personnes qui me demandent: Est-ce que, moi, à mes vieux jours, je vais avoir encore une Régie des rentes? Est-ce que la Régie des rentes va avoir épuisé ses fonds? Il y a beaucoup de préoccupations. Pourquoi? C'est peut-être parce que justement on ne fait pas assez preuve de transparence, on n'en parle pas assez.

Je parlais de saine gestion tantôt. Effectivement, c'est important que chaque sou qui est investi dans la Régie des rentes soit bien investi. Il faut porter une attention particulière à la gestion de nos fonds, à la gestion des fonds publics. Puis, pour ce faire, on doit avoir des gestionnaires de grande qualité, on doit avoir des dirigeants de grande qualité également, avec une expérience, avec un savoir-faire qui vont permettre de faire en sorte que les Québécois vont pouvoir dormir sur leurs deux oreilles puis vont pouvoir se dire: Bien, notre régime de retraite est bien géré, est bien surveillé et bien contrôlé.

Pour ce faire, il faut être certain qu'on choisisse les gens qui vont gérer la Régie des rentes, qui vont être le chien de garde, si on veut, qui vont s'assurer de donner une bonne retraite à nos Québécois, il faut s'assurer que ces gens-là aient les compétences qu'il faut et non pas les bonnes relations. Autrement dit, vous voyez où est-ce que je veux en venir, il ne faut pas que ce soient les amis du premier ministre ou les amis des différents ministres qui soient en poste pour gérer quelque chose d'aussi important que la Régie des rentes, il faut que ce soit vraiment les personnes les plus compétentes. Il faut attirer les personnes qui vont savoir comment rassurer les Québécois, comment garantir aux Québécois qu'ils vont avoir une bonne retraite.

Donc, à ce niveau-là on veut s'assurer que le gouvernement établisse un processus de sélection, qu'il fasse une sélection très serrée, très rigoureuse. Puis on veut savoir comment qu'il va faire cette sélection-là. On ne veut pas que ce soit seulement entre les mains du gouvernement, qu'il va pouvoir sélectionner à sa façon, de la façon qu'il va bien l'entendre les membres qui vont avoir autant de responsabilités.

Je fais un court rappel, je serai bref, mais je pense que c'est important. Avec ce que je vous dis, en vous parlant de saine gestion, en vous parlant de l'importance de sélectionner les bons dirigeants, je ne peux pas ne pas faire un lien avec le projet de loi n° 190 qui avait été déposé par mon collègue. Vous comprenez le lien, c'est extrêmement pertinent parce qu'ici, dans le projet de loi n° 190, on déterminait justement... on donnait des guides, on donnait des exemples des façons de faire pour s'assurer que les préoccupations dont je viens de vous faire part, bien, qu'on n'ait pas à s'en soucier, que ce soit fait selon les règles. Donc, je vous résume rapidement quelques aspects qui pourraient aider le ministre, qui pourraient aider les différents ministres dans leur décision pour choisir les bonnes personnes qui ont des rôles aussi importants dans la société québécoise.

Donc, premièrement, lorsqu'on reçoit une candidature, «la personne qui désire soumettre sa candidature transmet au président de l'Assemblée nationale son curriculum vitae contenant les renseignements suivants: 1° son nom ainsi que l'adresse et le numéro de téléphone de sa résidence et, le cas échéant, de son lieu de travail; 2° sa date de naissance; 3° ? très important ? les diplômes de niveau collégial et universitaire qu'elle détient».

Tantôt, je vous parlais que c'était important de choisir les bonnes personnes, les personnes qualifiées. Supposons, pour la Régie des rentes, le ministre devra faire une sélection, comment est-ce qu'il va faire cette sélection-là? Quels diplômes va-t-il demander au postulant pour pouvoir avoir le poste? Je pense que c'est intéressant, c'est même primordial de pouvoir savoir, la personne qu'on va embaucher, la personne qui va avoir cette responsabilité énorme, c'est quoi, ses compétences, c'est quoi, sa... quels diplômes elle possède. Donc, je crois que c'est un point important à souligner.

«Si elle est membre d'un ordre professionnel, l'année de son admission à cet ordre, la preuve qu'elle en est membre ainsi que le nombre d'années de pratique qu'elle a complétées avec la mention des principaux secteurs d'activité dans lesquels elle a oeuvré.»

Autrement dit, Mme la Présidente, c'est sûr que les gens qui font partie d'un ordre professionnel sont assujettis à un cadre quand même rigoureux, sont assujettis à certaines réglementations, à certaines responsabilités. Donc, c'est important que, lorsque le ministre va faire sa sélection, lorsqu'on va choisir les personnes responsables de gérer ces actifs, ce soient des personnes que, si elles ont fait partie d'un ordre professionnel, bien qu'on puisse aller chercher des références de cet ordre pour savoir si cette personne-là a les antécédents dignes de combler un poste aussi important.

Un autre point très important, Mme la Présidente, qui est toujours en lien avec le processus de sélection, avec l'importance de sélectionner les bonnes personnes et non pas de sélectionner les personnes qui ont les bonnes relations, le point n° 5: «La nature des activités qu'elle a exercées et qui lui ont permis d'acquérir une expérience pertinente dans le domaine de la fonction à combler.»

Extrêmement important également, ce point-là, Mme la Présidente, parce que, vous le savez, l'expérience dans des postes aussi importants, bien ça ne s'achète pas. L'importance d'avoir déjà géré, d'avoir déjà occupé des postes de grande envergure, c'est quelque chose qui va être extrêmement important à considérer dans tout le processus de sélection. Donc, je pense important de rappeler au ministre certains critères comme ça, certains points qui avaient été déposés par mon collègue dans le projet de loi n° 190, qui pourraient lui être fort utiles. Puis je lui recommande fortement, même si je vais lui en faire la lecture, même si je vais lui résumer les principaux points, de jeter un oeil sur ce projet de loi là, puis peut-être que ça va pouvoir l'inspirer, puis je recommande également aux autres ministres d'en faire autant.

n(23 h 40)n

Donc, je poursuis avec le point n° 6, Mme la Présidente: «Le cas échéant, le fait d'avoir fait l'objet d'une sanction par le comité de discipline de l'ordre professionnel dont elle est ou a été membre ou par le Tribunal des professions ainsi que l'objet et les motifs de cette sanction.»

Combien important, Mme la Présidente. Je crois que c'est un des principaux points du projet de loi n° 190, à mon avis. On l'a vu dernièrement, avec le ministre de la Justice qui a octroyé des contrats, c'est important de savoir avec qui on fait affaire, c'est important de savoir, les personnes à qui on va donner une telle responsabilité, c'est quoi leurs antécédents, est-ce qu'elles ont commis des fautes professionnelles dans le passé. Je pense que le ministre a tout intérêt à considérer le point n° 6 du projet de loi n° 190, c'est tout à son avantage. Puis, lorsqu'on parlait de transparence plus tôt, ça, c'est un point justement, un point de transparence vis-à-vis les candidats qu'on va recruter, vis-à-vis les candidats, les postulants pour le futur poste à combler. On ne peut pas être plus transparent lorsqu'on demande toutes ces informations-là avant d'accepter une candidature, avant de considérer une personne pour le poste.

Un autre point très important, Mme la Présidente: «Le cas échéant, le nom de ses employeurs ou de ses associés au cours des dix dernières années.» Le huitième point également: «Un exposé résumant les motifs de son intérêt à exercer la fonction à combler.» Intéressant, qualitatif certes, ce n'est pas quelque chose qui peut se mesurer, ce n'est pas quelque chose qu'on peut quantifier, mais par contre le motif pour lequel la personne va postuler, je crois que ça en dit long sur le sérieux avec lequel elle va remplir ses futures fonctions.

Souvent, lorsqu'on parle de nominations partisanes, c'est des personnes qui vont avoir plus en tête un but, un objectif personnel, et non pas... il ne sera peut-être pas là pour les bonnes raisons nécessairement. Donc, ce point-là, d'avoir des personnes qu'on sait qu'elles sont vraiment intéressées par le poste, qui sont motivées, qui sont motivées par l'atteinte d'objectifs, l'atteinte de transparence, de saine gestion, je pense que c'est un point important à examiner avant d'accepter une candidature.

Vous savez, Mme la Présidente, les Québécois l'ont vu plus souvent qu'à leur tour, ont vu trop souvent même des nominations partisanes, des personnes se voir attribuer un poste sans avoir les qualifications pour ce poste, sans avoir l'expérience pour ce poste et sans avoir les bonnes raisons, les bons motifs pour vouloir occuper ce poste, puis ça, je pense que les gens sont tannés de ça. Les gens, ce qu'ils veulent, c'est des gens compétents, au bon endroit, à la bonne place, pour le bon poste. Donc, si le ministre pouvait prendre en considération les points que je viens d'énumérer, je pense qu'on serait gagnant-gagnant, de notre côté, on aurait plus de transparence, on aurait des gens plus compétents aux postes exigeants, puis le ministre, le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, pourrait, de son côté, faire plaisir aux Québécois, qui demandent des gens compétents à des postes aussi importants que celui-là.

J'aimerais apporter un autre point aussi qui est important, si on veut continuer dans l'esprit du projet de loi n° 190 dont je viens de vous résumer rapidement quelques points, un autre aspect important, qui était le chapitre III, c'est la formation d'un comité de sélection, parce que ça, dans tout le processus, le comité de sélection va avoir un rôle important à jouer.

Donc, le point 5 du chapitre III ? puis j'invite le ministre à être très attentif: «À la suite de la publication de l'avis de recrutement, la Commission de l'Assemblée nationale forme un comité de sélection de neuf membres dont un président, en y nommant les membres du comité directeur de la commission parlementaire compétente et six autres députés, désignés par leur chef parlementaire, selon la répartition suivante: trois du parti gouvernemental et trois du parti de l'opposition officielle ou, s'il y a plusieurs partis d'opposition, deux du parti de l'opposition officielle et un de celui des autres partis d'opposition qui a obtenu le plus grand nombre de sièges ou, au cas d'égalité de sièges, de celui qui a obtenu le plus grand nombre de votes valides.»

Donc, si le ministre veut être cohérent avec les propos du premier ministre, du leader, depuis plusieurs semaines, depuis plusieurs mois qu'on est dans un gouvernement de cohabitation, bien je l'invite à écouter ce qu'on a écrit dans le projet de loi n° 190 que mon collègue avait déposé à l'Assemblée nationale.

Donc, sur ce, je pense, j'ai fait quand même un bon résumé du projet de loi n° 190, qui peut éclairer, qui peut donner des pistes au ministre pour avoir une meilleure gestion, pour pouvoir rassurer les Québécois que les gens qui vont occuper un poste aussi important... Comme je vous le disais, la Régie des rentes, là, c'est une question très importante pour tous les Québécois parce que, tous les Québécois, un jour ou l'autre, on va avoir à prendre notre retraite. Donc, si le ministre veut être cohérent avec un élément si important de la population québécoise, il doit prendre ça au sérieux. Il doit faire preuve, un, de saine gestion, deux, de transparence.

Donc, j'invite le ministre à prendre en considération tout ce qu'on a eu l'occasion de lui dire aujourd'hui, puis on va avoir beaucoup d'intérêt à travailler avec lui sur ce projet de loi là. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député de L'Assomption. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Groulx et porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille et d'aînés.

Mme Linda Lapointe

Mme Lapointe (Groulx): Merci, Mme la Présidente. Même à cette heure tardive, j'ose espérer que je saurai vous garder éveillés.

Des voix: ...

Mme Lapointe (Groulx): Non, il est encore de bonne heure. Ça me fait vraiment plaisir de représenter encore les gens de Groulx et pouvoir participer à cette discussion. Bien que je sois maintenant chargée de la famille, critique, et des aînés, j'ai quand même passé la dernière année comme vice-présidente de la Commission des finances publiques et je dois dire que j'ai vu souvent, l'automne passé, des projets de loi qui étaient sur la gouvernance, qui étaient très intéressants, on en a eu plusieurs, et le projet de loi que le ministre de l'Emploi nous suggère fait aussi rapport à la gouvernance.

La plupart des projets de loi de la gouvernance qu'on a eus l'année passée, à l'automne passé, qui étaient par la ministre des Finances, on parlait toujours... souvent de nominations partisanes. On a eu plusieurs réserves à ce niveau-là. Il y a un endroit que je ne retrouve pas et, si vous voulez, je pourrais le lire mais je ne lirai pas tous les articles un après l'autre... Si on va à l'article 17...

Une voix: Ça a déjà été fait.

Mme Lapointe (Groulx): Oui, je sais, ça a déjà été fait. Mais il y a une chose qu'on ne retrouve pas et que je trouve assez étonnant si je compare avec tous les autres projets de loi que j'ai vus, l'automne dernier, sur les projets de loi de la gouvernance, c'est la nomination, sur le conseil d'administration, du nombre de femmes. On avait une nomination autant de femmes... Et je suis assez surprise, considérant que le premier ministre a fait quand même un conseil des ministres à parité femmes et hommes. Et ce qui est encore assez surprenant, c'est que, ce soir, on parlait du projet de loi n° 63, qui était l'égalité des femmes et des hommes, et que, dans ce projet de loi, on ne fait aucune mention des femmes. Et moi-même étant une femme, je suis sensible à ça et je trouve ça assez étonnant. Je ne comprends pas que, dans ce projet de loi, on n'en parle pas. Alors, j'aurais bien aimé pouvoir entendre le ministre.

Alors, comme mes précédents collègues, j'aimerais parler d'où est-ce que j'ai des réserves sur le projet de loi n° 89. C'est certain qu'on va l'appuyer, mais, comme je disais, il y a certains endroits que j'aurais aimé qu'on aille un petit peu plus loin.

Alors, le Régime des rentes du Québec, ça touche tous les Québécois, ça touche tous les gens que nous représentons ici, à l'Assemblée nationale, comme parlementaires, ça touche tous les gens. Il faut être sensible à ça. Il faut s'assurer que l'argent des Québécois est bien géré. Je me dois, tout comme mes collègues, de demeurer vigilante, et c'est ce que je veux, durant mon allocution, éveiller que c'est le but, la saine gestion. Quand je suis arrivée en politique, mon but était de faire un changement au niveau de la saine gestion des fonds publics. Et je pense que le Régime des rentes du Québec, ça touche tout le monde et il faut rester vigilant.

Meilleure gestion des fonds publics, transparence, le gouvernement se targue, à tous les jours, de transparence, et malgré tout, si on regarde ici l'article 17, l'article nous dit qu'on nomme le président-directeur général sur des recommandations du conseil d'administration mais que, dans le échéant qu'on ne trouve pas, on va en nommer un. Je continue d'avoir des réserves, on ne m'a pas convaincue qu'il n'y aurait pas de nominations partisanes. Je n'en ai pas, je n'ai pas été convaincue par ces articles-là. Et puis, comme mon collègue de L'Assomption parlait tantôt, je partage ses craintes, à savoir qu'il n'y a pas de comité pour établir les règles de qui on va engager, qui on trouverait advenant... Son discours qu'il avait tantôt, je le partage complètement. Le comité de mise en candidature, quel est le C.V., on ne parle d'aucune règle.

n(23 h 50)n

Et, quand on regarde l'article 17 et on va un petit peu plus loin, ça me trouble encore plus parce que, dans le 23.4, on dit: «Le gouvernement fixe la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail du président-directeur général et des vice-présidents.» À nulle part, dans ce projet de loi là, on ne va m'expliquer clairement qu'il n'y aura pas de nomination partisane. Le fil est mince, c'est difficile. Alors, je demeure sceptique.

Si on revient encore au niveau, là, de la saine gestion, dans l'article 23, «le comité chargé de la politique de placement a notamment pour fonctions», on parle notamment de l'argent des Québécois, c'est quoi, les règles pour gérer l'argent des Québécois: élaborer et soumettre au conseil d'administration la politique de placement du régime. On parle des règles qui vont aller encadrer les lignes de qu'est-ce qu'on veut avoir comme rendement, qu'est-ce qu'on veut quand les gestionnaires vont gérer l'argent des Québécois, qu'est-ce qu'on leur donne comme règles.

Encore là, je vais élaborer mes craintes. Vous savez, dans la dernière année, avec les... je reviens encore à la Commission des finances publiques, tous les PCAA, on en a parlé grandement. On a même eu la chance d'avoir Henri-Paul Rousseau qui est venu nous expliquer toutes les réserves, et tout, sur l'argent des Québécois encore. Est-ce qu'à quelque part, au régime des rentes, il y a quelqu'un qui va pouvoir formuler, dire: Il n'y aura pas de folie de rendement, on va s'assurer que l'argent des Québécois va être faite sainement? Quand, moi, je vais prendre ma retraite, un jour, j'ose espérer que, la caisse, il va y avoir de l'argent dedans, que le but, ce ne sera pas d'avoir des folies de rendement, ça va être de s'assurer que tous les Québécois qui ont contribué vont avoir une retraite paisible. Il faut savoir que ces règles soient bien faites. Et je dois dire que, dans la dernière année, le but visé, en tout cas celui de mes collègues, c'est de s'assurer d'une saine gestion des fonds publics, je n'ai pas nécessairement toujours été rassurée. C'est l'argent des Québécois, Mme la Présidente, il faut demeurer vigilant, très vigilant. Il faut justement définir les règles, s'assurer que l'argent est bien fait.

Quand je faisais référence tantôt, j'ai parlé d'Henri-Paul Rousseau, mais il y a la société La Financière agricole. Dernièrement, ça a été difficile. À nulle part... je suis encore... je demeure sceptique. Je veux m'assurer que les gens qui sont ici, ce soir, même s'il est 11 h 55, vont être éveillés à toutes mes craintes ou mes réserves, je veux être certaine qu'ils vont les prendre en note quand ils vont voir des projets de loi. Je me souviens, quand j'étais la vis-à-vis du ministre du Développement économique, il y avait eu justement un projet de loi qui était sur... Mon Dieu, comment, le Parc olympique, là, notre Stage olympique... ah, la Régie des parcs olympiques, et la même chose que c'était pour les centres des congrès, on avait parlé de la gouvernance. Et, dans ces projets de loi là, on parlait d'avoir, au conseil d'administration, des femmes, et là on n'en a pas. Je ne comprends pas. Et puis, la saine gestion, la transparence, on ne m'a pas convaincue.

Le Régime des rentes se définit comme une entreprise qui a des clients. Nous sommes les clients, c'est notre argent. Je demeure... si je peux m'assurer que les gens de l'autre côté vont avoir compris mon message: vigilance, transparence et s'assurer que l'argent des Québécois du Régime des rentes du Québec soit bien géré. Parce que, tous ici, un jour, prendrons notre retraite, tous, un jour. Et j'ose espérer que les gens qui me regardent, du comté de Groulx, que je prends leur part, m'assurer qu'eux aussi auront une retraite paisible et que l'argent sera bien géré. C'est mon but: assurer que les gens... les fonds publics sont bien gérés.

Je peux continuer. Je reviens encore... Non, je regarde mes notes pour être certaine que je n'oublie rien du tout, que les gens auront tous compris mes petites réserves et mes grandes réserves. Donc, pour résumer tout ce que mes collègues ont dit, c'est sûr qu'on appuie ce projet de loi là qui est en adoption de principe. Je ne l'ai pas répété, mais je pense que les gens ont dû savoir qu'on parlait du projet de loi, lequel. Notre groupe parlementaire favorise l'adoption, mais en même temps la saine gestion des fonds publics. Nous allons donc rester les yeux ouverts, aguerris et vigilants. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée de Groulx. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx: Je voulais juste dire qu'on pourrait reconnaître un autre intervenant.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Excusez-moi?

M. Proulx: ...reconnaître un autre intervenant...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, oui, il reste quelques minutes, cinq minutes... moins de cinq minutes, M. le leader de l'opposition officielle. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Je vous écoute, M. le leader de l'opposition.

M. Proulx: ...parce qu'il y avait une demande du ministre du Développement économique qui n'a pas encore été transmise au leader du gouvernement. Alors, j'étais dans le processus, j'attendais de voir si...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Non, M. le leader de l'opposition officielle, les députés, quand ils ont envie de s'exprimer, ils se lèvent et ils demandent la parole. Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Fournier: ...simplement pour nous assurer que la population et la Chambre puissent avoir toutes les informations, séance tenante, des sujets qui sont soulevés, et des questionnements, et des craintes qui sont soulevés. Donc, ce n'est pas tellement une intervention comme une réponse à la députée qui a pris parole juste avant nous.

Dans le projet de loi, que son collègue a lu intégralement tantôt, il s'est arrêté sur l'article 6, qui précise que la Régie des rentes sera donc insérée à la Loi sur la gouvernance, laquelle prévoit ? dans la Loi sur la gouvernance ? à son article 43, qu'il y aura égalité entre les hommes et les femmes. Donc, je comprends que cette crainte-là maintenant, elle ne l'a plus, et probablement que ça nous permet d'avoir, en cette Chambre, un consensus pour...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Bon, M. le leader du gouvernement, la précision étant apportée, y a-t-il d'autres interventions? Il reste trois minutes. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx: Oui, Mme la Présidente, je peux peut-être faire une proposition, c'est celle du ministre du Développement économique. Si le leader du gouvernement veut statuer par la fiction qui est le consentement qu'il est minuit, je vais me rasseoir. S'il souhaite ne pas le faire, je vais utiliser les trois minutes qui sont à ma disposition.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi?

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): D'accord. Alors, dans ce cas-là, il vous reste deux minutes à peine.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx: Merci, Mme la Présidente. D'abord, c'est intéressant de prendre la parole sur le projet de loi n° 89 parce que vous savez qu'en matière de gouvernance on oublie souvent qu'il n'y a pas seulement les grandes sociétés, les agences, les offices gouvernementaux qui ont à faire de la gouvernance un enjeu. Vous savez, moi, je suis fils d'une famille d'entrepreneurs, mon père avait un hôpital vétérinaire, puis on n'avait pas besoin d'une loi, on n'avait pas besoin de dispositions législatives...

Une voix: ...

M. Proulx: Oui, c'est vrai que mon père a un hôpital vétérinaire. Je ne sais pas si vous...

Une voix: ...

M. Proulx: Je vous remercie, M. le ministre. Ce que je disais, Mme la Présidente, c'est que, dans des cas comme celui-là, on est tous concernés par la gouvernance. Et c'est intéressant de voir que le gouvernement, depuis un an, a décidé ? puis là le leader du gouvernement sera d'accord avec moi ? depuis un an, d'aller de l'avant avec beaucoup de projets qui touchent la gouvernance. J'imagine qu'il y avait un peu de rattrapage à faire. C'est important de le faire, c'est de toute façon dans l'air du temps, hein, c'est essentiel de parler de ces questions-là. «Rigueur», «transparence», «imputabilité», c'est les mots qui ont été portés à la connaissance de tous, et c'est pour ça que l'opposition officielle a pris la parole là-dessus.

Je profite de la minute que vous semblez vouloir m'accorder, et je vous en remercie, pour saluer le travail de mon collègue Hubert Benoit, qui... J'aurais dû le nommer par «le député de Montmorency», je m'en excuse. Alors, le député de Montmorency, Mme la Présidente, exerce du leadership en matière de régimes de retraite. Il le fait dans ce projet-là, il le fait dans d'autres. Et les retraités qui nous écoutent ? et je suis convaincu qu'il y en a ? savent qu'ils peuvent compter sur l'opposition officielle, Mme la Présidente, pour aller de l'avant pour la défense de leurs intérêts.

Alors, je comprends que vous voulez que je mette fin à ma...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le leader de l'opposition, c'est le temps, c'est l'horloge qui met fin à nos travaux. Par contre, M. le leader de l'opposition officielle, souhaiteriez-vous continuer votre intervention à...

M. Proulx: ...à la prochaine.

Ajournement

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): À la prochaine. Alors, dans ce cas-là, compte tenu de l'heure...

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés à demain, 29 mai, à 10 heures. Alors, je vous souhaite une bonne nuit, elle va vous apporter la sagesse aussi.

(Fin de la séance à minuit)