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Version finale

40th Legislature, 1st Session
(October 30, 2012 au March 5, 2014)

Wednesday, December 4, 2013 - Vol. 43 N° 101

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Rendre hommage à M. Jean-Marie Huard à l'occasion
de sa retraite du domaine de la boxe

M. Sylvain Roy

Rendre hommage aux bénévoles de la circonscription de La Pinière
pour leur engagement pendant la période des fêtes

Mme Fatima Houda-Pepin

Féliciter l'entreprise Pur Vodka inc., lauréate de
plusieurs prix lors du Vodka Masters

Mme Marie Bouillé

Rendre hommage à l'Association Messinese de Montréal inc.

M. Robert Poëti

Souligner la tenue de guignolées dans Beauce-Nord et au Québec

M. André Spénard

Féliciter les personnes honorées lors de la soirée reconnaissance
organisée par le Comité régional en économie sociale de Laval

Mme Suzanne Proulx

Féliciter l'Association régionale de soccer de Laval, nommée
Association régionale de soccer de l'année

M. Jean Rousselle

Féliciter la Maison des naissances Colette-Julien, lauréate du prix
Approche multidisciplinaire en prévention des risques obstétricaux

M. Pascal Bérubé

Féliciter M. Hugues Fafard et Mme Isabelle Fontaine
pour leur ascension du Kilimandjaro

M. André Villeneuve

Souligner le 40e anniversaire de la FADOQ, région Estrie

Mme Karine Vallières

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 68 Loi sur l'Agence des infrastructures
de transport du Québec

M. Sylvain Gaudreault

Mise aux voix

Projet de loi n° 66 Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel

M. Maka Kotto

Mise aux voix

Projet de loi n° 499  Loi modifiant la Loi sur les normes du travail afin d'interdire
les clauses de disparité de traitement en fonction de la date
d'embauche relatives aux régimes complémentaires
de retraite et aux régimes d'assurance collective

M. Amir Khadir

Mise aux voix

Projet de loi n° 498  Loi modernisant les dispositions relatives aux briseurs
de grève et modifiant le Code du travail

Mme Françoise David

Mise aux voix

Dépôt de documents

Réponses à des pétitions

Lettre de la députée de Gouin, Mme Françoise David, informant
de son souhait d'être membre de la Commission des institutions

Lettre du leader de l'opposition officielle sur la recevabilité
de la demande de la députée de Gouin


Dépôt de rapports de commissions

Étude trimestrielle de la politique budgétaire du gouvernement
et de l'évolution des finances publiques

Audition du ministre de la Justice concernant les commentaires de la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse
sur le projet de charte des valeurs québécoises

Consultations particulières sur le projet de loi n° 65   Loi concernant le
remplacement et la reconstitution des actes notariés en minute détruits lors
du sinistre ferroviaire du 6 juillet 2013 dans la Ville de Lac-Mégantic

Étude détaillée du projet de loi n° 65   Loi concernant le remplacement
et la reconstitution des actes notariés en minute détruits lors du sinistre
ferroviaire du 6 juillet 2013 dans la Ville de Lac-Mégantic


Dépôt de pétitions

Bonifier le programme d'aide de la Société d'habitation
aux propriétaires de maisons lézardées

Corriger la situation d'iniquité salariale des physiothérapeutes

Demander à la commission scolaire de la Capitale de soumettre
aux citoyens de Val-Bélair une offre de service scolaire
cohérente avec le développement du secteur

Intervenir auprès d'Hydro-Québec concernant le projet de ligne à
120 kV du Grand-Brûlé
Dérivation Saint-Sauveur


Questions et réponses orales

Atteinte des objectifs en matière d'équilibre budgétaire

M. Jean-Marc Fournier

Mme Pauline Marois

M. Jean-Marc Fournier

Mme Pauline Marois

M. Jean-Marc Fournier

Mme Pauline Marois

M. Jean-Marc Fournier

Mme Pauline Marois

Situation économique et financière du Québec

M. Pierre Paradis

M. Nicolas Marceau

M. Pierre Paradis

M. Nicolas Marceau

M. Pierre Paradis

M. Nicolas Marceau

Situation financière du réseau des centres de la petite enfance

Mme Danielle St-Amand

Mme Nicole Léger

Mme Danielle St-Amand

Mme Nicole Léger

Mme Danielle St-Amand

Mme Nicole Léger

Gestion du Centre hospitalier de l'Université de Montréal

M. François Legault

Mme Pauline Marois

M. François Legault

M. Réjean Hébert

M. François Legault

M. Réjean Hébert

Réglementation du prix des livres neufs imprimés et numériques

Mme Nathalie Roy

M. Maka Kotto

Mme Nathalie Roy

M. Maka Kotto

Mme Nathalie Roy

M. Maka Kotto

Demande d'accès à des documents d'Hydro-Québec

Mme Julie Boulet

Mme Martine Ouellet

Mme Julie Boulet

Mme Martine Ouellet

Mme Julie Boulet

Mme Martine Ouellet

Rapport d'enquête sur l'abattoir Levinoff-Colbex inc.

M. Donald Martel

M. François Gendron

M. Donald Martel

M. François Gendron

M. Donald Martel

M. François Gendron

Aide à la relève agricole

M. Stéphane Billette

M. François Gendron

M. Alexandre Iracà

M. François Gendron

Motions sans préavis

Réitérer l'opposition de l'Assemblée au projet du gouvernement
fédéral de commission canadienne des valeurs mobilières

Mise aux voix

Souligner la Journée internationale des personnes handicapées

Mme Stéphanie Vallée

Mme Sylvie Roy

Mme Véronique Hivon

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 45   Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche,
de la Science et de la Technologie

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

M. Pierre Duchesne

M. Pierre Arcand

M. Stéphane Le Bouyonnec

Mme Dominique Vien

Mme Christine St-Pierre

M. Marc Tanguay

Mise aux voix du rapport

Projet de loi n° 35   Loi modifiant le Code civil en matière d'état civil,
de successions et de publicité des droits

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

M. Bertrand St-Arnaud

M. Gilles Ouimet

Mme Michelyne C. St-Laurent

Mme Rita de Santis

M. Daniel Ratthé

Mise aux voix du rapport

Projet de loi n° 61   Loi visant principalement le recouvrement de sommes payées
injustement par des organismes publics relativement à
certains contrats dans l'industrie de la construction

Adoption du principe

M. Bertrand St-Arnaud

M. Gilles Ouimet

M. Jacques Duchesneau

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante-six minutes)

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Bon matin. Vous pouvez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Alors, nous en sommes à la rubrique Déclarations de députés. Je reconnais M. le député de Bonaventure.

Rendre hommage à M. Jean-Marie Huard
à l'occasion de sa retraite
du domaine de la boxe

M. Sylvain Roy

M. Roy : Bon matin, Mme la Présidente. Chers collègues, je souhaite aujourd'hui souligner la carrière exceptionnelle de Jean-Marie Huard.Après plus d'un demi-siècle consacré à la boxe… entame une retraite bien méritée. M. Huard a commencé à faire de la boxe à l'âge de 12 ans, est entré dans le domaine professionnel en 1960 et par la suite est devenu un entraîneur en 1971. Il a fondé plusieurs clubs de boxe dans notre région et a levé de nombreux boxeurs gaspésiens aux niveaux régional, provincial et même international. Sa participation aux Jeux olympiques de 1976 en tant qu'entraîneur avec son frère Camille comme boxeur est d'ailleurs le point culminant de sa carrière.

Dans une région comme la Gaspésie, il est primordial que des personnes-ressources, tel M. Huard, partagent leur passion avec des jeunes. Cela a permis à certains d'entre eux de développer de nouvelles activités sportives permettant l'épanouissement et parfois même la distinction.

M. Huard, merci pour votre dévouement et votre inspiration. En espérant que votre art perdure, je vous souhaite une bonne retraite. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Mme la députée de La Pinière.

Rendre hommage aux bénévoles de la circonscription de
La Pinière pour leur engagement pendant la période des fêtes

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin : Mme la Présidente, la période des fêtes est l'occasion pour des milliers de bénévoles de se mobiliser pour venir en aide aux familles démunies et aux personnes âgées ou seules. C'est à ces gestes d'entraide et de solidarité que je voudrais aujourd'hui rendre hommage, et le comté de La Pinière n'y fait pas exception. Plusieurs organismes communautaires, tant francophones qu'anglophones, y sont déjà à l'oeuvre. Certains préparent des paniers de Noël et d'autres mijotent de bons petits plats à livrer aux personnes seules. Les comités de loisirs dans les centres d'hébergement de soins de longue durée sont déjà à planifier des repas savoureux et à acheter des cadeaux que le père Noël amènera, dans son traîneau, aux personnes malades.

J'invite mes collègues de cette Assemblée à se joindre à moi pour rendre hommage à ces bénévoles qui, dans un élan de générosité, consacrent leur temps et leur énergie à rendre les autres heureux. Merci à ces organismes d'entraide et à ces personnes de coeur et d'action qui ne laissent personne de côté. Joyeux Noël!

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Mme la députée d'Iberville.

Féliciter l'entreprise Pur Vodka inc., lauréate
de plusieurs prix lors du Vodka Masters

Mme Marie Bouillé

Mme Bouillé : Mme la Présidente, chaque année, le magazine anglais The Spirits Business organise un des plus prestigieux concours consacrés à la vodka, le Vodka Masters. Pur Vodka, distillée dans la circonscription d'Iberville, a remporté l'argent dans la catégorie Super Premium et la plus haute mention master dans la catégorie Micro Distillery. Ce dernier prix fait la fierté de ses producteurs, car il est remis lorsque tous les juges ont attribué à l'aveugle une note supérieure à 90 points.

Je suis très fière de souligner que des entrepreneurs de chez nous, qui sont dans nos tribunes en ce matin, Nicolas Duvernois et sa conjointe Karolyne Auger, produisent la meilleure vodka au monde avec du maïs et de l'eau de source du Québec. Pur Vodka est exportée et reconnue partout dans le monde comme un produit de la plus haute qualité. Je tiens à les féliciter et à les remercier d'avoir fait rayonner le Québec dans un concours mondial aussi prestigieux. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Rendre hommage à l'Association Messinese de Montréal inc.

M. Robert Poëti

M. Poëti : Merci, Mme la Présidente. l'Association Messinese de Montréal fut créée en 1981. Son but premier était la préservation de la culture sicilienne et d'aider l'intégration de ses membres au mode de vie québécois. Depuis les 30 dernières années, l'association a pris de l'expansion en aidant différents organismes. À ce jour, ils ont amassé 90 000 $ pour la Fondation de la recherche sur les maladies infantiles. 18 tournois de golf ont été organisés pour amasser des dons pour L'Hôpital de Montréal pour enfants. En tout, 290 000 $ ont été remis.

L'Association Messinese de Montréal est aussi très active dans sa propre communauté en organisant des campagnes de financement pour la Fondation de l'hôpital LaSalle. Grâce à leurs efforts depuis plusieurs années, de belles causes ont pu profiter de cet engagement. En terminant, Mme la Présidente, j'aimerais féliciter la présidente, Mme Maria Donato, dans nos estrades, ici, aujourd'hui, et toute son équipe pour leur dévouement à cette organisation. (S'exprime en italien).

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le député de Beauce-Nord.

Souligner la tenue de guignolées dans Beauce-Nord et au Québec

M. André Spénard

M. Spénard : Merci, Mme la Présidente. Dimanche dernier, comme bien des Québécois, j'ai parcouru quelques rues de mon comté dans le cadre de la guignolée. Accompagné du maire Gaétan Vachon, ce sont quelque 40 000 $ qui ont été récoltés à Sainte-Marie, au profit du service d'entraide de l'endroit. De nombreuses autres municipalités de Beauce-Nord tenaient des guignolées ce jour même, notamment à Saint-Isidore et Scott. Demain, les Beaucerons, tout comme bien des Québécois, seront conviés à participer à la Grande Guignolée des médias. Je salue l'initiative des médias radios, imprimés et Web de Beauce-Nord qui s'unissent au profit de Moisson Beauce.

D'autres guignolées se sont tenues ou se tiendront dans mon comté prochainement ainsi qu'aux quatre coins du Québec. J'invite les Beaucerons et les Québécois à participer généreusement à cet élan de générosité à l'approche des fêtes. Que ce soit en offrant de l'argent, des denrées, des produits de toutes sortes, vos contributions sont les bienvenues. Et que dire de ces milliers de bénévoles qui prépareront des activités ou paniers de Noël pour les plus démunis de notre société? Je vous lève mon chapeau et vous remercie de votre implication dans votre communauté. À vous tous et toutes je souhaite de joyeuses fêtes.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Mme la députée de Sainte-Rose.

Féliciter les personnes honorées lors
de la soirée reconnaissance organisée par le
Comité régional en économie sociale de Laval

Mme Suzanne Proulx

Mme Proulx : Merci, Mme la Présidente. Laval compte plusieurs entreprises d'économie sociale dont les acteurs partagent des valeurs communes de gouvernance égalitaire et démocratique, de rentabilité sociale et de recherche du bien commun. Ces entreprises collectives tentent aussi à développer des emplois durables qui tiennent compte du respect des personnes tout autant que de la réussite financière de leurs organisations.

Récemment, 13 personnes se sont distinguées lors d'une soirée reconnaissance organisée par le Comité régional en économie sociale de Laval, dont notamment Anne-Marie Vézeau du Café Le Signet, Koceila Syphax Sedoud de l'atelier de tri des matières plastiques recyclées du Québec, Denise Filiatrault d'Éco-Nature et Brigitte L'Ecuyer de Mieux-Naître à Laval. L'importance de leur contribution à la collectivité est à l'image de la force et du dynamisme de l'économie sociale à Laval.

Je veux les féliciter et les encourager à poursuivre dans cette voie. Elles contribuent ainsi à diversifier le portrait économique de Laval tout en améliorant la qualité de vie de nos concitoyens. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci beaucoup. M. le député de Vimont.

Féliciter l'Association régionale de soccer de Laval,
nommée Association régionale de soccer de l'année

M. Jean Rousselle

M. Rousselle : Merci, Mme la Présidente. C'est avec un immense plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour féliciter l'Association régionale de soccer de Laval.

Le 2 décembre dernier avait lieu le Gala de la mi-temps, organisé par la Fédération de soccer du Québec. À cette occasion, l'Association régionale de soccer de Laval a été nommée l'Association régionale de soccer de l'année.

Dynamique et présente au sein de la communauté, l'association regroupe les six clubs de Laval. Je tiens à féliciter et à remercier pour leur excellent travail le président régional de l'association régionale, M. Bernard David, les membres du comité exécutif, les représentants des clubs de Laval, les bénévoles et surtout les joueurs.

Je fais le souhait que 2014 soit une année gagnante pour l'Association régionale de soccer de Laval et que ses joueurs connaissent encore le succès et les honneurs qui ont fait la fierté des Lavallois et des Lavalloises. Merci, madame.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député. M. le député de Matane-Matapédia.

Féliciter la Maison des naissances Colette-Julien,
lauréate du prix Approche multidisciplinaire
en prévention des risques obstétricaux

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Mme la présidente, en novembre dernier, la Maison des naissances Colette-Julien de Mont-Joli s'est vue décerner le prix Approche multidisciplinaire en prévention des risques obstétricaux, AMPRO. Ce prix est remis aux organisations qui font preuve de pratiques hautement sécuritaires.

C'est le deuxième établissement à recevoir cette distinction au Québec, qui exige à l'ensemble du personnel une formation accrue et la réussite d'examens de compétences supplémentaires. Ainsi, l'ensemble des intervenants participent à des ateliers cliniques afin d'harmoniser leurs pratiques en obstétrique. Cette façon de faire favorise grandement la communication avec les différents corps professionnels, et ce, pour un meilleur encadrement des femmes enceintes de notre région.

La Maison des naissances Colette-Julien est un modèle de réussite au Québec. Je tiens à féliciter sa directrice, Mme Chantal Lavallée, son équipe ainsi que l'ensemble de leurs partenaires qui, chaque jour, contribuent au mieux-être des femmes et de leurs nouveau-nés. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le député Berthier.

Féliciter M. Hugues Fafard et Mme Isabelle Fontaine
pour leur ascension du Kilimandjaro

M. André Villeneuve

M. Villeneuve : Bonjour, Mme la Présidente et chers collègues, bien sûr. Entre le 12 et 17 octobre dernier, deux Berthelais ont réussi l'ascension du Kilimandjaro, cette montagne mythique de près de 6 000 mètres située en Tanzanie. Il s'agit d'Isabelle Fontaine, chef d'équipe des services d'emploi à Emploi-Québec, et d'Hugues Fafard, employé de la compagnie Bridgestone et pompier à la Régie intermunicipale de Berthier.

Il aura fallu plus de deux ans et demi de préparation méticuleuse à nos deux héros avant de réaliser leur projet. L'exploit, en tant que tel, mérite d'être salué, bien sûr, mais c'est avant tout son objectif qu'il convient de souligner. En effet, ces deux Berthelais ont vécu cette aventure dans le cadre du programme d'expédition et de collecte de fonds intitulé Challenge SRC, qui soutient la recherche sur le cancer. Ils ont ainsi pu remettre la somme de 11 000 $ chacun à ladite société. Voilà une belle façon de contribuer à combattre une terrible maladie, tout en réalisant un vieux rêve et un exploit sportif.

J'adresse donc toutes mes félicitations à Isabelle Fontaine et à Hugues Fafard et les remercie d'avoir fait preuve de tant de courage et de générosité. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour permettre à la députée de Richmond de faire sa déclaration ce matin? Il y a consentement?

Une voix :

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, excellent. Alors, Mme la députée de Richmond.

Souligner le 40e anniversaire de la FADOQ, région Estrie

Mme Karine Vallières

Mme Vallières : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais, particulièrement aujourd'hui, souligner le 40e anniversaire de la FADOQ, région Estrie. Avec ses 18 000 membres répartis dans 50 clubs où oeuvrent plus de 400 bénévoles, la FADOQ Estrie constitue un maillon essentiel pour la défense du droit des aînés mais également pour les inciter à demeurer actifs. Que ce soit par la mise sur pied d'activités ou de programmes répondant aux besoins spécifiques des aînés, la FADOQ travaille tous les jours à maintenir et à favoriser l'inclusion sociale des personnes de 50 ans et plus à la vie des communautés.

Aujourd'hui, j'invite tous mes collègues à l'Assemblée nationale à saluer le travail des administrateurs, des travailleurs et des bénévoles qui, par leur dévouement, font du troisième âge une étape de vie sous le signe de la santé et de l'épanouissement. Un bon anniversaire à la FADOQ Estrie.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Ceci met fin à la rubrique Déclarations de députés.

Alors, je suspends nos travaux pour un court moment.

(Suspension de la séance à 9 h 58)

(Reprise à 10 h 13)

Le Président : Alors, mesdames messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Bédard : Bonjour, M. le Président.En cette semaine importante, j'aimerais que vous appeliez l'article b de notre feuilleton.

Projet de loi n° 68

Le Président : Alors, à l'article b du feuilleton, M. le ministre des Transports présente le projet de loi n° 68, Loi sur l'Agence des infrastructures de transport du Québec. M. le ministre.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui, merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi propose d'instituer l'Agence des infrastructures de transport du Québec.

Le projet de loi prévoit que l'agence aura pour mission de gérer et d'exploiter les infrastructures routières dont la responsabilité relève du ministre des Transports de même que tout autre bien qu'il détermine. Elle privilégiera le développement d'une expertise en matière d'études, de planification, de conception et de réalisation de projets d'infrastructure routière. Elle protégera l'intégrité des investissements routiers par une gestion rigoureuse et transparente et par une optimisation de ses façons de faire.

Aussi, le projet de loi prévoit que l'agence sera appelée à réaliser les projets d'infrastructure publique de transport majeurs ou à accompagner les organismes publics dans la réalisation de tels projets. Le projet de loi spécifie que l'agence collaborera étroitement avec le ministre des Transports dans l'établissement d'une vision intégrée de la mobilité au Québec.

Le projet de loi confère à l'agence des pouvoirs et des responsabilités en matière immobilière lui permettant notamment d'acquérir des immeubles pour les organismes publics et d'en disposer.

Le projet de loi prévoit que l'agence sera sous la responsabilité du ministre des Transports. Elle sera dotée d'un conseil d'administration qui en supervisera l'administration et d'un président-directeur général qui en aura la direction et la gestion. Le projet prévoit aussi que la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État s'applique à l'agence. Elle possédera tous les pouvoirs propres à l'accomplissement de sa mission.

Le projet de loi prévoit aussi que les employés de l'agence seront nommés selon un plan d'effectifs qu'elle établira. L'agence déterminera les normes et barèmes de rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail de ses employés, conformément aux règles définies par le gouvernement.

Le projet de loi prévoit également les dispositions financières qui encadrent les activités de l'agence.

Enfin, le projet de loi comporte des dispositions modificatives diverses et transitoires nécessaires à la création de l'agence et concernant notamment le transfert à l'agence d'une partie des employés du ministère des Transports. En outre, il accorde aux fonctionnaires certains droits leur permettant un retour dans la fonction publique. Merci, M. le Président.

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.

M. Moreau :Alors, M. le Président, on aura sans doute l'occasion de donner toute l'impression que nous avons de l'idée de créer une agence semblable. Mais, avant de ce faire, nous souhaitons avoir des consultations particulières avant que le principe ne soit appelé. Et, notamment, dans ces consultations particulières, M. le Président, nous souhaiterions entendre le Syndicat de la fonction publique du Québec, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, et notamment l'Ordre des ingénieurs, et nous aurons sans doute une liste plus complète. J'aimerais savoir si le leader du gouvernement est prêt à tenir des consultations avant le principe du projet de loi.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Bédard : M. le Président, si ça peut aider le Parti libéral à prendre position enfin, nous le ferons avec grand plaisir.

Des voix :

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix :

Le Président : Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bédard : On ne pourra pas me dire que je ne suis pas collaborateur, M. le Président, je suis partie même à leur réflexion de groupe.

Alors, j'aimerais aussi appeler l'article c, M. le Président, de notre feuilleton.

Projet de loi n° 66

Le Président : Alors, à l'article c du feuilleton, M. le ministre de la Culture et des Communications présente le projet de loi n° 66, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel. M. le ministre.

M. Maka Kotto

M. Kotto : M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'habiliter le ministre de la Culture et des Communications à prendre des règlements, pour l'ensemble ou une partie d'un site patrimonial déclaré ou classé, afin de moduler l'exercice des pouvoirs que lui confère la Loi sur le patrimoine culturel. Il permet au ministre d'édicter certaines prohibitions.

Il prévoit également des dispositions de concordance, notamment en lien avec les dispositions de cette loi relatives au transfert de responsabilité, aux pouvoirs d'autorisation du ministre, aux recours et aux sanctions.

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.

M. Moreau : Là aussi, M. le Président, nous désirons avoir des consultations particulières sur ce projet de loi. Et j'espère que, sans arrogance cette fois, mon collègue le leader du gouvernement, qui est dans une forme splendide, et qui applaudit, et qui trouve drôle ses propres interventions — c'est bon, ça, déjà, ça fait une personne — acceptera de tenir les consultations que nous demandons.

Le Président : Bon! Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bédard : Je pense que le leader mélange bonne humeur et arrogance, mais, si ça peut faire son affaire que je sois et de bonne humeur et arrogant, bien, tant mieux, mais je l'apprécie par ailleurs tout autant, puis leur dire que je comprends… Il intervient souvent de ces temps-ci. Je me demande si ce n'est pas la venue de son nouveau chef... Il profite de chacune des occasions pour parler parce que peut-être il a peur de perdre…

Des voix :

Le Président : M. le leader, sur le…

Des voix :

Le Président : S'il vous plaît. M. le leader, sur le point qui a été mentionné.

M. Bédard : Ceci dit, M. le Président, je serai toujours un allié du leader de l'opposition, peu importe ce qui lui arrive.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Bédard : Et nous allons collaborer, effectivement, à avoir des consultations.

Le Président : Si ça peut continuer de même encore pendant trois jours, ça va être correct. M. le leader de l'opposition.

M. Moreau : Non, non, non, je veux que le leader du gouvernement sache que, malgré toute son attitude, il conserve mon estime et qu'il y a des matins que c'est beaucoup plus difficile que d'autres.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Alors, adopté. M. le député de Mercier.

• (10 h 20) •

M. Khadir : Merci… Président. M. le Président, pour permettre un intermède dans les échanges entre le leader du gouvernement et le leader de l'opposition officielle, veuillez, s'il vous plaît, appeler l'article f du feuilleton.

Projet de loi n° 499

Le Président : Alors, à l'article f du feuilleton, M. le député de Mercier présente le projet de loi n° 499, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail afin d'interdire les clauses de disparité de traitement en fonction de la date d'embauche relatives aux régimes complémentaires de retraite et aux régimes d'assurance collective. M. le député de Mercier.

M. Amir Khadir

M. Khadir : Merci, M. le Président. Ce projet de loi a pour objet d'interdire les clauses de disparité de traitement relatives aux régimes complémentaires de retraite et aux régimes d'assurance collective. Il vient renforcer la Loi sur les normes du travail en précisant que les disparités de traitement sont interdites pour tous les avantages sociaux accordés aux salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : Adopté.

Le Président : Adopté. Mme la députée de Gouin.

Mme David : M. le Président, veuillez, s'il vous plaît, appeler l'article g du feuilleton.

Projet de loi n° 498

Le Président : Alors, à l'article g du feuilleton, Mme la députée de Gouin présente le projet de loi n° 498, Loi modernisant les dispositions relatives aux briseurs de grève et modifiant le Code du travail. Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David : Merci, M. le Président. Ce projet de loi modifie le Code du travail afin d'interdire le recours à des briseurs de grève dans des cas qui ne sont pas actuellement couverts par ce code. Le projet de loi prévoit qu'il est interdit pour un employeur d'utiliser, à l'extérieur de l'établissement où une grève ou un lock-out a été déclaré, les services ou le produit du travail d'un salarié, d'un entrepreneur, d'une personne morale ou d'une personne employée par un autre employeur pour remplir les fonctions d'un salarié faisant partie de l'unité de négociation en grève ou en lock-out.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : Adopté.

Dépôt de documents

Le Président : Adopté. Alors, à la rubrique Dépôt de documents, M. le leader du gouvernement.

Réponses à des pétitions

M. Bédard : Alors, M. le Président, permettez-moi de déposer la réponse du ministre des Transports, des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire aux pétitions déposées les 23 et 30 octobre 2013 par les députés de Portneuf et de LaFontaine.

Le Président : Alors, ces documents sont déposés.

Lettre de la députée de Gouin, Mme Françoise David,
informant de son souhait d'être membre
de la Commission des institutions

Pour ma part, je dépose la lettre que m'a adressée Mme la députée de Gouin, dans laquelle elle m'a fait part de son souhait de changer de commission afin de devenir membre de la Commission des institutions.

Lettre du leader de l'opposition officielle sur la
recevabilité de la demande de la députée de Gouin

Et je dépose également la lettre que j'ai reçue de M. le leader de l'opposition officielle en réponse à la demande formulée par Mme la députée de Gouin.

Évidemment, je tiens à souligner qu'à la lecture des dispositions de notre règlement relativement à la composition des commissions et, au surplus, constatant que l'unanimité nécessaire aux décisions prises par la commission de l'Assemblée en semblable matière n'existe pas, vous comprendrez donc que je ne peux donner suite à cette demande.

Dépôt de rapports de commissions

Alors, nous sommes rendus maintenant au dépôt de rapports de commissions. M. le président de la Commission des finances publiques et député de Rimouski.

Étude trimestrielle de la politique budgétaire du
gouvernement et de l'évolution des finances publiques

M. Pelletier (Rimouski) : M. le Président, je dépose le rapport de la Commission des finances publiques qui a siégé le 20 novembre 2013 afin de procéder à l'étude trimestrielle de la politique budgétaire du gouvernement et de l'évolution des finances publiques.

La commission s'est également réunie en séance de travail concernant ce mandat les 1er, 29, 30 octobre et le 3 décembre 2013, et ce rapport contient deux recommandations.

Le Président : Alors, ce rapport est déposé. M. le président de la Commission des institutions et député d'Ungava.

Audition du ministre de la Justice concernant
les commentaires de la Commission des droits
de la personne et des droits de la jeunesse sur
le projet de charte des valeurs québécoises

M. Ferland : M. le Président, je dépose le rapport de la Commission des institutions, qui, le 28 novembre 2013, a procédé à l'audition du ministre de la Justice concernant les commentaires de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, rendus publics le 17 octobre 2013, sur les orientations gouvernementales au sujet du projet de charte des valeurs québécoises ainsi que sur le caractère inconstitutionnel du projet gouvernemental.

La commission s'est également réunie en séance de travail le 3 décembre 2013 relativement à ce mandat. Ce rapport contient deux recommandations.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 65

Et je dépose également le rapport de mandat des consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 65, Loi concernant le remplacement et la reconstitution des actes notariés en minute détruits lors du sinistre ferroviaire le 6 juillet 2013 dans la Ville de Lac-Mégantic.

Étude détaillée du projet de loi n° 65

Finalement, je dépose le rapport de mandat de l'étude détaillée du projet de loi n° 65, Loi concernant le remplacement et la reconstitution des actes notariés en minute détruits lors du sinistre ferroviaire du 6 juillet 2013 dans la Ville de Lac-Mégantic. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Le Président : Alors, ces documents sont déposés.

Dépôt de pétitions

Nous en sommes maintenant rendus à la rubrique Dépôt des pétitions. J'inviterais Mme la députée de La Pinière, s'il vous plaît.

Bonifier le programme d'aide de la Société
d'habitation aux propriétaires de maisons lézardées

Mme Houda-Pepin : M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 115 pétitionnaires. Désignation : citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant l'ampleur du sinistre qui a touché 23 municipalités du Québec en 2012 suite à la sécheresse causant des affaissements de sol et des maisons lézardées pour plusieurs centaines de résidents;

«Considérant que le gouvernement du Québec soit sensible aux difficultés vécues par les propriétaires des résidences lézardées et ait accepté déjà de rétablir un programme de subvention par le biais de la Société d'habitation du Québec;

«Considérant que les 4,5 millions de dollars annoncés par ce programme s'avèrent insuffisants pour répondre aux besoins des sinistrés du Québec, dont la ville de Brossard particulièrement touchée;

«Considérant que le programme précédent de 2003 fixait à 20 000 $ l'aide financière maximale par projet, pour l'agglomération de Longueuil, alors qu'en 2013 l'offre budgétaire s'avère de beaucoup inférieure;

«Considérant qu'un certain nombre de sinistrés ont réalisé en urgence les travaux en empruntant des sommes énormes, de 50 000 $ à 70 000 $, plus les intérêts;

«Considérant que bon nombre d'autres sinistrés se trouvent dans l'incapacité de trouver les fonds nécessaires pour réparer et préserver leur immeuble de conséquences de ce sinistre;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, réclamons que le gouvernement du Québec bonifie le programme de la Société d'habitation du Québec lié aux maisons lézardées afin de permettre aux victimes en cause d'effectuer les réparations nécessaires et obligatoires au maintien de leur immeuble, et ce, à un montant équivalent des subventions offertes aux sinistrés de 2003, en toute équité.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. M. le député de Mercier.

Corriger la situation d'iniquité
salariale des physiothérapeutes

M. Khadir : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 4 914 pétitionnaires, et j'en profite pour souligner que l'initiatrice de la pétition ainsi qu'une de ses collègues, Mme Paradis et Mme Dubé, sont parmi nous dans les tribunes. Alors, désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que les ergothérapeutes et physiothérapeutes ont toujours fait partie du même groupe quant aux échelles de salaires — niveaux équivalents de scolarité et responsabilité professionnelle;

«Considérant que les curriculums des deux professions ont été rehaussés au niveau de la maîtrise dans toutes les universités du Québec à la même date et que l'Ordre professionnel de la physiothérapie a présenté sa demande de modification réglementaire à l'Office des professions le 2 décembre 2008;

«Considérant que la demande de modification réglementaire pour les physiothérapeutes a été soumise en février 2010 à une nouvelle directive du ministère du Conseil exécutif qui a entraîné un délai, au-delà du 20 décembre 2010, retardant ainsi l'adoption de la modification réglementaire au 12 mai 2011;

«Considérant que les ergothérapeutes bénéficient d'une hausse salariale de 5,9 % depuis décembre 2010, contre seulement 0,9 % pour les physiothérapeutes; qu'en mars 2013 le Conseil du trésor a admis l'injustice en consentant une hausse additionnelle rétroactive au 18 janvier 2013 plutôt qu'au 20 décembre 2010;

«Considérant que plus de 1 000 physiothérapeutes ont porté plainte à la Commission de l'équité salariale en mai 2011 et sont toujours en attente d'un règlement;

«L'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, citoyennes et citoyens du Québec, exigeons que le gouvernement du Québec corrige la situation d'iniquité salariale des physiothérapeutes, incluant la rétroactivité au 20 décembre 2010.»

M. le Président, je certifie que l'extrait que je viens de lire est conforme au règlement et à l'original de la pétition

• (10 h 30) •

Le Président : Merci. Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

J'ai reçu de la part de M. le député de La Peltrie une demande de dépôt de pétition qui est non conforme. Est-ce que j'ai un consentement? Consentement. M. le député de La Peltrie, c'est à vous, la parole.

Demander à la commission scolaire de la Capitale
de soumettre aux citoyens de Val-Bélair une offre de
service scolaire cohérente avec le développement du secteur

M. Caire : Merci, M. le Président. Vous me permettrez de saluer la présence, dans nos tribunes, des représentants du collectif pour un parcours scolaire complet à Val-Bélair. Je les salue.

M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 2 186 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que nous, adultes concernés par le bien-être des enfants du secteur Val-Bélair, désirons porter à l'attention de la commission scolaire de la Capitale le fait que nous considérons le projet de transfert des cinquième et sixième années du primaire vers l'école secondaire l'Odyssée inacceptable dans les conditions présentes;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons à la commission scolaire de la Capitale de soumettre aux citoyens de Val-Bélair un projet conforme au mandat qui lui est confié, c'est-à-dire un projet où le bien-être des enfants prime et une offre de service scolaire cohérente avec le développement du secteur.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

J'ai reçu de la part de M. le député d'Argenteuil une demande de dépôt d'une pétition non conforme. Est-ce que j'ai un consentement? Consentement. M. le député d'Argenteuil.

Intervenir auprès d'Hydro-Québec
concernant le projet de ligne à 120 kV du
Grand-Brûlé
—Dérivation Saint-Sauveur

M. Richer : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 202 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes de la circonscription d'Argenteuil.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant qu'Hydro-Québec projette de construire, au coeur des Laurentides, une ligne de transport 120 kV, comprenant des pylônes d'une hauteur de [20] mètres, soit la hauteur d'un immeuble de vingt étages;

«Considérant que le tracé de la variante nord A proposé par Hydro-Québec viendra augmenter de 15 mètres le déboisement de l'emprise actuelle et par le fait même augmentera la pollution visuelle qui affectera considérablement la beauté des paysages naturels de Sainte-Adèle;

«Considérant qu'Hydro-Québec projette de déboiser l'emprise actuelle, ceci éliminerait par le fait même l'écran naturel qui nous protège de la vision de la servitude. Elle affectera la qualité de vie, la quiétude d'un paysage et le bien-être des gens;

«Considérant qu'Hydro-Québec veut construire une nouvelle ligne 120 kV, ceci aura un impact économique qui sera désastreux sur la valeur des propriétés limitrophes de Sainte-Adèle;

«Considérant que le conseil municipal de Sainte-Adèle, par une résolution, appuie les citoyens et adressera une demande à Hydro-Québec afin de maintenir les pylônes existants ou de les remplacer par des pylônes d'une même hauteur afin de conserver les emprises actuelles;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, citoyens de Sainte-Adèle, des Pays-d'en-Haut, demandons à l'Assemblée nationale :

«De s'assurer qu'Hydro-Québec respecte la Loi sur le développement durable et la Charte des paysages naturels et [du] patrimoine bâtis des Laurentides;

«Une intervention de votre part avant que l'irréparable ne soit accompli par la société d'État du Québec sur le projet Grand-Brûlé—Saint-Sauveur s'ils vont de l'avant avec ce qu'ils nous ont présenté le 20 mars 2013.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales. Je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Atteinte des objectifs en
matière d'équilibre budgétaire

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Dans son discours du budget, le ministre des Finances déclarait, et je cite : «J'annonce que le budget sera équilibré en 2013‑2014 et les années suivantes.» Il l'a réaffirmé à New York en avril, il l'a répété encore en septembre. La vérité, c'est que le déficit zéro, c'est un trou de 2,5 milliards de dollars. Le PQ a raté la cible des revenus, la cible des dépenses, la cible du déficit.

Dimanche, le ministre des Finances a déclaré : On n'a pas été bons. On s'est trompé beaucoup.

La première ministre est au courant depuis le mois d'avril qu'elle s'est trompée au budget, mais, comme elle voulait aller en élection avant la mise à jour, elle refusait de l'admettre. Maintenant, la même tactique recommence : une nouvelle échéance électorale l'amène à prétendre que toutes ses promesses non budgétées pour l'an prochain seront respectées. Mais ça ne marche pas, M. le Président.

Dans le budget, le PQ prévoit une hausse des dépenses de 1,5 milliard en santé pour 2014‑2015. Dans sa mise à jour, il prévoit une hausse du budget pour tout le gouvernement, tous les ministères, de 1,3 milliard. Il n'y a pas assez d'argent pour les engagements budgétés, il n'y en aura pas pour les promesses non budgétées. Pourquoi nier la réalité de vos chiffres?

Le Président : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, merci, M. le Président. La réalité des chiffres que nous avons déposés, c'est que nous avons décidé… nous avons décidé de continuer à être responsables, de contrôler la croissance de nos dépenses. Nous l'avons fait cette année, nous avons même atteint une cible plus basse que celle qui avait été prévue, M. le Président, contrairement à tout ce qui s'est passé sous l'ancien gouvernement, qui, à chaque fois, systématiquement, a raté sa cible de contrôle des dépenses, d'ailleurs tellement que ça a été difficile pour nous d'atteindre cet objectif-là parce qu'il y avait une habitude de prise dans l'ensemble du gouvernement, qui faisait que, bon an, mal an, on augmentait les dépenses parce qu'en contrepartie on augmentait les tarifs, les impôts, les taxes. Ça, c'était la recette du gouvernement libéral.

D'ailleurs, le chef du Parti libéral du Québec a, lui, proposé qu'on atteigne l'équilibre budgétaire seulement en 2017‑2018, M. le Président. Or, le gouvernement, plus responsable que ne l'est le nouveau chef du Parti libéral du Québec, Philippe Couillard, a décidé que la cible 2015 était raisonnable et était atteignable.

Nous allons agir sur tous les fronts, comme nous l'avons toujours fait. Nous avons fixé une cible quant à la croissance de nos dépenses, nous avons établi des priorités sur les dépenses que nous voulons faire pour aider les gens. Je pense, entre autres, à la question de l'assurance autonomie, aux politiques de solidarité sociale, aux politiques en matière de garde, aux politiques en matière d'investissement pour rehausser l'emploi, pour soutenir nos entrepreneurs, pour augmenter et améliorer notre productivité, soutenir nos agriculteurs. Ce sont des choix, des priorités qu'on a établis...

Le Président : En terminant.

Mme Marois : …et c'est en fonction de cela que nous allons agir, M. le e Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Dans le budget de l'an passé, le ministre des Finances prévoit, à la page A.50, des dépenses en santé de 1,5 milliard en 2014‑2015. Dans sa mise à jour d'il y a une dizaine de jours, à la page A.62, il dit que, pour tout le gouvernement, la hausse des dépenses va être de 1,3 milliard. Il n'y a pas suffisamment d'argent en 2014‑2015 pour les engagements du budget. Elle veut nous faire croire que les promesses, depuis ce temps-là, qui ne sont pas budgétées, elle va les réaliser. Je lui demande de dire la vérité.

Le Président : Mme la première ministre.

Des voix :

Le Président : M. le chef de l'opposition, je vous recommande de faire attention dans vos propos. Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, M. le Président, le budget, quand nous avons préparé le budget, nous l'avons établi sur la base des prévisions du ministère des Finances et sur la base des prévisions des économistes de l'ensemble des institutions financières du Québec et même des institutions financières pancanadiennes, M. le Président. Alors, ces prévisions-là nous amenaient à pouvoir atteindre, de fait, l'équilibre budgétaire, compte tenu de la hausse prévisible des revenus. Il s'est avéréque la conjoncture n'a pas été celle qui avait été prévue, et les taux de progression des revenus ont été plus bas que prévu.

Il y a un autre phénomène qui a joué, M. le Président, et j'en rends en partie responsable le gouvernement libéral qui nous a précédés. Nous avons eu un… Je vais revenir, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Malheureusement, elle ne répond pas à la question. Il n'y a pas d'argent pour les engagements budgétés, puis elle ne veut pas avouer qu'il n'y en aura évidemment pas pour les promesses qui ne sont pas budgétées. Les 200 millions des universités, c'est du vent. Le 80 millions du plan de solidarité, 200 millions de la forêt, 165 millions de la politique industrielle, c'est du vent. C'est un paravent électoraliste, M. le Président. On ne peut pas mettre un gallon dans une pinte. On ne peut pas la croire.

Le Président : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, M. le Président, je sais que le Parti libéral a une grande expérience dans l'annonce de projets d'investissements jamais budgétés; ce n'est pas notre cas, M. le Président. Alors…

Des voix :

Mme Marois : Je m'excuse, là, ce n'est pas notre cas. Alors, je vais terminer la réponse de tout à l'heure. Il y a eu un manque à gagner, du côté des rendements de la taxe de vente, de 1 milliard de dollars parce que le Parti libéral du Québec, alors qu'il formait le gouvernement, avait poussé le bouchon trop loin et avait augmenté la taxe de vente de telle sorte que maintenant on ait un rendement décroissant, décroissant. C'est ça que ça veut dire, M. le Président. Alors, on repassera pour les leçons quant à la bonne gestion de la chose…

Le Président : En terminant.

Mme Marois : …publique, M. le Président. Alors, ce que je veux signifier à l'opposition officielle, c'est que…

Le Président : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : La première ministre refuse de voir la vérité de ses propres documents. Son budget prétend qu'à la santé seulement il va y avoir 1,5 milliard de plus en 2014‑2015. Elle vient de nous dire que, non, pour tout le gouvernement, ça va être 1,3 milliard. Puis elle veut nous faire croire qu'il va y en avoir plein d'autres pour toutes les autres promesses? Elle nous a trompés depuis un an. C'est assez, M. le Président!

• (10 h 40) •

Le Président : M. le chef de l'opposition, vous savez fort bien que ces propos-là ne peuvent pas être dits en Chambre. Je vous demande de les retirer. Il les retire. Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, M. le Président, je crois que l'opposition officielle devrait être un peu prudente à cet égard. Je regardais des données tirées du budget de 2009, M. le Président, alors que le gouvernement libéral… alors que le gouvernement libéral était au pouvoir. Un mois à peine avant de déposer le budget, la ministre annonçait qu'on allait maintenir l'équilibre budgétaire, alors que c'est 4 milliards de dollars qu'on a annoncés comme déficit, M. le Président. Après ne pas avoir dit tout ce qu'ils auraient dû dire sur Gentilly et sur sa fermeture, M. le Président, je crois que nous n'avons aucune leçon à recevoir. Lorsque nous présenterons le budget des crédits, c'est-à-dire les dépenses dugouvernement, il pourra constater que nous allons respecter les engagements que nous avons pris à l'égard de la population québécoise.

Le Président : Principale, M. le député de Brome-Missisquoi.

Situation économique et financière du Québec

M. Pierre Paradis

M. Paradis : M. le Président, la première ministre répète à qui veut bien l'entendre que l'économie du Québec se porte bien, du moins, du moins aussi bien que celle du reste du Canada ou des États-Unis. Le ministre des Finances, quant à lui, est passé aux aveux en fin de semaine, et vous me permettrez de le citer : Je n'étais pas en mesure de porter un jugement intelligent. C'est vrai qu'on s'est trompé beaucoup. C'est vrai qu'on n'a pas été bons.

Qui dit la vérité, celle qui se prétend bonne ou celui qui admet qu'il n'a été pas bon?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : M. le Président, on va revenir sur la situation économique. La question de ce matin est équivalente à celle d'hier et possiblement à celle de demain. Une dose de répétitions chez l'adversaire.

M. le Président, la situation économique du Québec est une situation de croissance économique modérée, je l'ai dit à plusieurs reprises. Nous avons par ailleurs des indicateurs très, très positifs du marché du travail, je vous rappelle la création d'emplois de 53 000, 53 000 emplois quand on prend les 10 premiers mois de l'année 2013 et qu'on les compare aux 10 premiers mois de l'année 2012, dont 57 000 du secteur privé, un taux de chômage qui est en baisse, un taux d'activité qui est en hausse. M. le Président, le marché du travail québécois se porte bien.

Par ailleurs, d'autres indicateurs sont également des indicateurs qui sont bons, j'en prends pour preuve celui des exportations. Je vous rappelle que les exportations québécoises ont augmenté, janvier à septembre 2013 sur janvier à septembre 2012, de 4,5 %, ce qui est pas mal, pas mal, pas mal meilleur que ce qui s'est passé dans le reste du Canada, où c'est 1,2 %. Alors, M. le Président, d'autres indicateurs montrent la même tendance.

Alors, évidemment, j'aimerais que ce soit plus…

Le Président : En terminant.

M. Marceau : …j'aimerais qu'on ait plus de croissance économique. C'est pour ça qu'on a mis en place notre politique économique, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Pierre Paradis

M. Paradis : M. le Président, à la page A.7 de sa mise à jour économique de la semaine dernière, le ministre des Finances écrit que la croissance économique du Québec, pour 2013, est inférieure de 50 % à celle du reste du Canada et des États-Unis. 50 % de moins, ce n'est pas bon.

Le ministre des Finances peut-il risquer un jugement intelligent et nous dire pourquoi il n'a pas été bon?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : M. le Président, je vais revenir à la question de l'équité budgétaire, c'est important. Le Parti libéral, à ce jour, n'a pas de position claire. D'ailleurs, j'aimerais bien que le député de Brome-Missisquoi, le caucus libéral, le Parti libéral et que Philippe Couillard arrivent un jour à une position qui est claire, compréhensible pour les Québécois.

M. le Président, une chose est certaine, de notre côté, on n'ira pas dans le sens de ce qu'on a pu observer du Parti libéral ces dernières années, c'est-à-dire des hausses de taxe de 6 milliards pour les Québécois, des dépenses qui n'ont jamais été contrôlées, hein? On parle de neuf ans, 10 ans de cibles dépassées. M. le Président, de notre côté, la gestion va être serrée sur les dépenses, on n'augmentera pas les taxes, on n'augmentera pas les impôts…

Le Président : En terminant.

M. Marceau : …et on va continuer de stimuler l'économie québécoise, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Pierre Paradis

M. Paradis : Mais, M. le Président, le titre de ministre des Finances comporte une responsabilité ministérielle à valeur ajoutée, une respectabilité ministérielle à valeur ajoutée.

Comment le ministre des Finances a-t-il pu, en si peu de temps, décrédibiliser sa fonction au point de se faire affubler par les médias du titre de «sinistre des finances»?

Le Président : M. le ministre des Finances, en rappelant à nos collègues ici qu'on doit appeler les gens ici par leur titre.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : M. le Président, M. le Président, je vais passer sur ce genre de remarque du député de Brome-Missisquoi, qui ne l'honore pas, et je vais revenir simplement sur son chef, parce qu'il y a un chef en principe dans ce parti-là, dans le libéral. Je rappelle que le chef a parlé de 2017-2018. Est-ce qu'il va y avoir un nouveau Philippe-flop, M. le Président? La question se pose. Parce qu'effectivement 2017-2018, ça n'est pas responsable. Ce qui ne serait pas plus responsable, ça serait d'augmenter les taxes et les impôts à la manière de l'ancien gouvernement, M. le Président. Et ce qui ne serait pas responsable non plus, ça serait d'augmenter les dépenses à des rythmes de 4 % aux dépenses de programmes et de 5 % aux dépenses consolidées. Ça, c'était…

Le Président : En terminant.

M. Marceau : …irresponsable! Nous sommes responsables, nous allons stimuler l'économie québécoise, nous allons contrôler les dépenses, M. le Président.

Le Président : Principale, Mme la députée de Trois-Rivières.

Situation financière du réseau
des centres de la petite enfance

Mme Danielle St-Amand

Mme St-Amand : M. le Président, en plus des coupures de 56 millions imposées au réseau des services de garde au printemps dernier, on apprend, ce matin, que la ministre de la Famille pourrait imposer de nouvelles coupures de 40 millions aux CPE.

De plus, depuis la mise à jour économique, on sait que le gouvernement péquiste n'a pas l'argent pour remplir ses engagements, notamment celui de développer de nouvelles places, et qu'il sera incapable, encore une fois, de tenir sa promesse.

M. le Président, la ministre peut-elle avouer aux jeunes parents du Québec que, lorsqu'elle a fait son annonce, elle n'en avait pas, d'argent, elle le savait, et elle n'en a pas plus aujourd'hui?

Le Président : Mme la ministre de la Famille.


Mme Nicole Léger

Mme Léger : Alors, M. le Président, je veux dire clairement qu'il n'y a pas de coupure dans les CPE. Je le dis, je le confirme et je le répète.

Maintenant, j'en profite pour dire que j'ai tenu ma promesse avec les associations de CPE du Québec de tenir un chantier de travail, dans le fond. Pour ce chantier de travail là, qui est fait avec eux, la question qui est sur la table, c'est de voir, en fin de compte, avec la même subvention, comment se fait-il qu'il y a des CPE qui sont en déficit et d'autres pas, que certains ont des surplus et d'autres pas. C'est ça, la question sur le chantier de travail, donc comment on peut mieux optimiser et s'assurer de la pérennité de notre réseau, dont nous sommes très fiers, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme Danielle St-Amand

Mme St-Amand : M. le Président, c'est ça, le problème. Des fois, c'est des comités, des fois, c'est des chantiers, mais ils n'en ont pas, d'argent, l'argent n'est jamais au rendez-vous. Elle a beau dire qu'il n'y a pas de coupure — c'est ce qu'elle vient de nous dire — une note interne de son propre ministère indique qu'à court terme on doit combler un manque à gagner récurrent de l'ordre de 40 millions.

La ministre peut-elle admettre qu'elle fera payer l'incompétence de son gouvernement aux familles du Québec et que, là aussi, comme le disait le ministre des Finances, ils n'ont franchement pas été bons?

Le Président : …de la Famille.

Mme Nicole Léger

Mme Léger : Si la députée, M. le Président, voit bien, dans le dernier budget que nous avons mis sur la table, ce budget-là a été clair, il y a une augmentation de 3,2 % du ministère de la Famille expressément pour créer des nouvelles places en service de garde.

Nous avons annoncé 28 000 nouvelles places en service de garde. Et, je tiens à le dire, hier, nous avons commencé le déploiement de toutes les 15 000 places additionnelles. Alors, je pense qu'on est heureux, tous les députés ici, de l'Assemblée nationale, de ce déploiement, dans chacune des circonscriptions, des 15 000 places. Hier, j'ai annoncé celles de la Côte-Nord et du Nord-du-Québec, c'est 363 places à tous les enfants et parents de Nord-du-Québec et de la Côte-Nord.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme Danielle St-Amand

Mme St-Amand : C'est bien beau, des annonces, M. le Président, il n'y en a pas, d'argent. De l'aveu même de son collègue des Finances, il n'y a pas d'argent nécessaire pour le développement des nouvelles places, les familles du Québec le savent maintenant, M. le Président.

Aujourd'hui, la ministre peut-elle avoir la décence d'avouer que son gouvernement s'est aussi trompé à ce sujet, que maintenant, au lieu d'avoir un enfant, une place, c'est pas d'argent, pas de place?

Le Président : Mme la ministre de la Famille.

Mme Nicole Léger

Mme Léger : Je comprends, M. le Président, qu'on est encore dans le même parfum chez les libéraux, M. le Président, où, les libéraux, c'était un don et un permis. Alors, les libéraux ont retardé le développement des places. Il y a beaucoup de pression pour développer les places. Nous, c'est un enfant, une place. On n'est pas au Parti libéral ici, on n'a pas à politiser les places, M. le Président. Je ne m'appelle pas Tony Tomassi, je m'appelle Nicole Léger.

Le Président : Je ne sais pas si notre règlement permet de s'autonommer en Chambre.

Des voix :

• (10 h 50) •

Le Président : Principale, madame… M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Gestion du Centre hospitalier de l'Université de Montréal

M. François Legault

M. Legault : Oui. M. le Président, le gouvernement a complètement perdu le contrôle des dépenses. Je ne sais pas si la première ministre a lu la mise à jour économique. Si elle ne l'a pas fait, elle pourrait l'emprunter au ministre et lire seulement une page, la page C-24.

À la page C-24, M. le Président, on le voit clairement, les dépenses, cette année, augmentent de 3,3 % si on exclut le service de la dette, de 4,1 % si on inclut le service de la dette. Et, M. le Président, le ministre des Finances nous dit : Il n'y a pas d'inflation au Québec. Une chance! Ça serait quoi, l'augmentation des dépenses s'il y avait de l'inflation, M. le Président?

M. le Président, un bon exemple de perte de contrôle des dépenses, c'est la gestion du CHUM, le plus gros hôpital au Québec. Selon les derniers chiffres disponibles, au CHUM, il y a 3 687 employés non soignants, dont 344 gestionnaires. Juste dans un hôpital, M. le Président. Ça n'a pas empêché le gouvernement, le 22 août dernier, de renouveller le contrat du D.G. Le ministre de la Santé a même dit, je le cite : C'est une sage décision, je fais complètement confiance au conseil d'administration du CHUM. Évidemment, on n'a pas entendu le Parti libéral, parce que c'est tout leur beau monde qu'ils avaient nommé là.

Mais, M. le Président, ce que je veux savoir ce matin, c'est : Est-ce que la première ministre trouve que le CHUM est bien géré? Est-ce qu'elle trouve que c'est raisonnable, 3 600 non…

Le Président : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, M. le Président, je crois que le chef de la deuxième opposition aurait besoin de l'aide du Vérificateur général du Québec — d''ailleurs, j'ai l'intention de présenter une motion, on va regarder ça avec le leader du gouvernement — parce qu'à chaque fois que le chef du deuxième groupe d'opposition présente des chiffres et que nous les revisons on se rend compte que c'est truffé d'erreurs. Et la meilleure preuve de cela, c'est le document qu'il a déposé la semaine dernière, affirmant qu'on avait pris des engagements pour 10 milliards de dollars, laissant croire que ce 10 milliards s'appliquait dans les mois qui viennent, dans l'année qui vient, alors qu'il a comptabilisé des immobilisations avec des dépenses de programme, alors qu'il a comptabilisé deux fois les mêmes dépenses, M. le Président, alors qu'il a mis dans ce document un investissement qui s'étale sur 10 ans, la Politique nationale de la ruralité. Son document est un véritable torchon, M. le Président. Et…

Des voix :

Mme Marois : Absolument! Alors, quand il m'amène des chiffres ce matin…

Des voix :

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Marois : …peut-être sont-ils justes, peut-être ne le sont-ils pas. Mais la première fois, l'année… il y a quelques mois, il s'était trompé de 3 000 % dans les projets d'investissement. On repassera…

Des voix :

Le Président : S'il vous plaît! Mme la première ministre, j'espère… On va essayer tous ici, là, d'éviter le langage qui est blessant. M. le chef du deuxième groupe d'opposition, en complémentaire.

M. François Legault

M. Legault : …document, page C.24, les dépenses augmentent de 3,3 %. Mais, M. le Président, la première ministre n'a pas répondu à ma question. En juin dernier, la députée de Groulx a fait venir le D.G. du CHUM ici. Le D.G. du CHUM a avoué qu'il avait engagé des cadres sans autorisation, qu'il avait donné des contrats sans appel d'offres.

Comment la première ministre a-t-elle pu garder en poste le D.G. et même être d'accord pour renouveler son contrat?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Réjean Hébert

M. Hébert : M. le Président, la situation du CHUM est sérieuse. Le Vérificateur général a complété son évaluation. On souligne des problèmes de gestion, au CHUM, qui sont sérieux, avec des nominations et une rémunération des cadres qui ne respecte pas les règles, des contrats qui ont été attribués de gré à gré, alors qu'ils auraient dû faire preuve… faire face à des appels d'offres, des dépenses de déplacement qui ne respectent pas les normes également et une absence de transparence envers le conseil d'administration. Nous avons attendu le rapport du VG pour avoir faits et causes dans ce fait plutôt que de lancer…

Le Président : En terminant.

M. Hébert : …des accusations à tort et à travers, comme le député de Saint-Jérôme a fait, M. le Président. Nous avons…

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, tout le monde est au courant des problèmes depuis le mois de juin. Personne n'est responsable. Le ministre n'est pas responsable, le conseil d'administration, pas responsable, le D.G., pas responsable. C'est ça, le problème au Québec, c'est qu'il n'y a jamais personne de responsable.

Est-ce que la première ministre peut prendre ses responsabilités? Qu'est-ce qu'elle va faire pour faire le ménage dans le CHUM, M. le Président? C'est le plus gros hôpital du Québec.

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Réjean Hébert

M. Hébert : M. le Président, nous prenons nos responsabilités. Nous ne lançons pas des accusations à tort et à travers, comme le député de Saint-Jérôme puis le chef du deuxième groupe d'opposition, M. le Président, nous attendons d'avoir des faits. Nous avons attendu que ce soit documenté par le Vérificateur général. Nous avons attendu que les accompagnateurs qui ont été mis en place au CHUM pour faire l'observation de ce qui se passait au niveau de la gestion et de la gouvernance puissent nous faire des recommandations préliminaires. Et, dans les prochaines heures, M. le Président, nous prendrons les décisions qui s'imposent.

Le Président : Principale, Mme la députée de Montarville.

Réglementation du prix des livres
neufs imprimés et numériques

Mme Nathalie Roy

Mme Roy (Montarville) : Bonjour, M. le Président! On va changer de ton, si vous le voulez bien. Le ministre de la Culture veut…

Des voix :

Le Président : C'est à vous, la parole, Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Le ministre de la Culture veut limiter à 10 % les rabais sur le prix des nouveaux livres, alors qu'actuellement certains détaillants offrent des rabais de 20 % à 40 %. Nous, c'est clair, nous sommes contre ce projet. Le PQ est pour, c'est clair également. Mais là on cherche la position du Parti libéral. On sait que la députée de l'Acadie est favorable, mais qu'en pense le chef du Parti libéral? Est-ce que ce sera le prochain Philippe-flop du PLQ?

En tous les cas, M. le Président, je vais vous démontrer comment les consommateurs seront pénalisés. Ce livre, qui a été acheté dans une grande surface il y a quelques jours à 24 $... a été payé 24 $ plutôt que 35 $ en librairie. C'est une économie de 11 $ pour le consommateur. Si le PQ et le PLQ s'associent, eh bien, ce même livre sera vendu 31,50 $, une…

Le Président : J'imagine que la question va au ministre de la Culture. Alors, M. le ministre de la Culture.

Des voix :

M. Maka Kotto

M. Kotto : M. le Président, ma collègue n'a pas eu le temps de terminer sa question, elle avait probablement une interrogation à la fin de son laïus.

Je dirais tout simplement que je connais la position de la CAQ depuis le jour un de la commission parlementaire qui s'est tenue autour de cet enjeu touchant un prix plancher sur les livres neufs… sur le prix des livres neufs imprimés et numériques. Ils ont été clairs. Ce qui m'inquiète par contre, c'est la position du Parti libéral, exprimée par la voix de la porte-parole, la députée d'Acadie, à l'effet qu'il fallait aller de l'avant, y aller très vite, nous reprochant même de traîner des pieds. Elle avait mis cinq ans avant de s'intéresser au dossier de façon tangible.

Et je m'interroge également de savoir où loge exactement M. Couillard dans ce dossier et aussi quelle est la position de l'ensemble du caucus relativement à ce dossier. Ça, personne ne le sait, c'est un grand mystère.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Montarville.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy (Montarville) : M. le Président, comment le fait d'augmenter les prix du livre va augmenter les ventes? Le prix unique du livre va priver aussi les auteurs de revenus en raison de la diminution des ventes.

Par ailleurs, Blaise Renaud, le président de Renaud-Bray, a demandé : Comment le gouvernement pourra empêcher les gros joueurs de l'extérieur, comme Amazon, d'offrir des livres à rabais? Cette loi ajoutera encore un nouveau fardeau aux Québécois qui sont déjà les plus taxés en Amérique du Nord.

Alors, M. le Président, pourquoi priver les lecteurs de grosses économies sur les nouveaux livres?

Le Président : M. le ministre de la Culture.

M. Maka Kotto

M. Kotto : M. le Président, la CAQ nous a habitués à défendre les PME, et je veux informer ma collègue à l'effet que notre réseau de librairies indépendantes est constitué de PME, c'est 12 000 emplois, c'est 800 millions de ventes de livres neufs par année.

Alors, ma question est de savoir : Demain, quand ce réseau va s'effondrer, que direz-vous aux familles des gens qui y travaillent? Que répondrez-vous à ces gens qui vont se retrouver au chômage? Partout où il n'y a pas eu réglementation, on l'a constaté, il y a eu oligopole en puissance et effondrement de la lecture…

Le Président : En terminant.

M. Kotto : …et augmentation de prix des livres. Ce qui va, demain, disons, se limiter à 10 % va...

• (11 heures) •

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Montarville.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy (Montarville) : Bon, M. le Président, ce n'est pas fini, on n'a eu aucune preuve de ce qui a été dit là, là.

À la veille de Noël, il y a une nouvelle taxe qui pourrait frapper les citoyens. Le rapport sur l'avenir du cinéma québécois propose au gouvernement la création d'une nouvelle taxe sur les produits électroniques comme les téléviseurs, les portables, les téléphones intelligents et les tablettes comme celle-ci, par exemple. Alors, avec la TPS, et la TVQ, et aussi l'écotaxe, ces produits sont déjà taxés trois fois.

Le ministre peut-il fermer la porte à cette quatrième taxe sur les...

Le Président : M. le ministre de la Culture.

M. Maka Kotto

M. Kotto : M. le Président, les taxes, ce n'est pas nous, ce sont les libéraux.

Des voix :

Le Président : M. le député de Jean-Lesage, je vous ai entendu encore. Ça me surprend, je vous ai entendu encore.

Des voix :

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre, veuillez compléter.

M. Kotto : M. le Président, ma collègue met en relief des scénarios catastrophe relativement à ce qui va arriver. Il n'y a aucune étude qui peut soutenir ce qu'elle avance ici comme assertion. J'ai proposé avant-hier l'élaboration d'un projet de loi qui s'étendrait sur trois années. Attendons de voir. Nous, nous sommes convaincus que la mesure va être constructive et va profiter aux consommateurs québécois parce qu'on va maintenir la diversité de l'offre de titres de livres nouveaux au Québec, contrairement à ce qui arriverait...

Le Président : En terminant.

M. Kotto : ...en défendant votre position.

Le Président : Principale, Mme la députée de Laviolette.

Demande d'accès à des documents d'Hydro-Québec

Mme Julie Boulet

Mme Boulet : M. le Président, le 10 octobre dernier, je faisais une demande d'accès à l'information à Hydro-Québec pour obtenir la liste des projets hydroélectriques en cours et la liste des tous les contrats où il y avait des dépassements de coûts, et incluant le nom des entrepreneurs, les échéanciers et les coûts estimés.

Hydro-Québec a refusé de nous transmettre les documents. Pourtant...

Des voix :

Mme Boulet : Pourtant, M. le Président...

Des voix :

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Il n'y a qu'une personne qui a le droit de parole ici, c'est Mme la députée de Laviolette.

Mme Boulet : Pourtant, M. le Président, on sait qu'au ministère des Transports on rend publique l'information lors d'attribution de contrats, notamment la description des travaux, le montant des soumissions, les soumissionnaires, l'entreprise qui obtient le contrat et les dépassements de coûts s'il y a lieu. Alors, ce que je comprends, c'est deux poids, deux mesures : des règles pour le ministère des Transports et des règles... Ce n'est pas même des règles, c'est des passe-droits pour Hydro-Québec.

Alors, comment la ministre peut expliquer ce manque flagrant de transparence de la part de la société d'État? Et peut-elle s'engager ici aujourd'hui à déposer dans les plus brefs délais les documents demandés?

Le Président : Mme la ministre des Ressources naturelles.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : M. le Président, c'est assez particulier, la question de la députée de Laviolette, la députée même de la région de la centrale Gentilly. Alors qu'en ayant les informations pour s'assurer de faire semblant de ne pas le savoir ils ne demandaient pas de rapport à Hydro-Québec tellement qu'ils ne voulaient pas le savoir… Mais ils savaient, mais ils faisaient semblant de ne pas le savoir, M. le Président. Ça fait que de l'entendre aujourd'hui faire ces remarques-là, alors qu'à l'époque où nous étions à l'opposition nous avons été obligés de demander et de redemander l'information, jusqu'à un outrage au Parlement pour avoir les informations, je trouve ça assez particulier ce matin, M. le Président.

Le Président : Juste pour le…

Des voix :

Le Président : Juste pour le bon fonctionnement de notre séance, nous allons éviter d'imputer des motifs à l'un et à l'autre et…

Des voix :

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Ça va. Mme la députée de Laviolette, en complémentaire.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet : Alors, je vais vous lire quelques citations : «…pourquoi la ministre n'exige-t-elle pas d'Hydro-Québec [qu'ils communiquent] immédiatement les documents demandés?» «…qu'est-ce qu'elle attend, la ministre, pour mettre son poing sur la table puis dire à Thierry Vandal de donner les documents tout de suite?» «…pourquoi ce traitement de faveur d'Hydro-Québec?» Alors, M. le Président, ça, ces paroles-là viennent du député de Jonquière alors qu'il était assis juste ici. Mais j'avoue qu'il était plus jasant, qu'il avait plus de convictions à l'époque.

Alors, qu'est-ce que la ministre… C'est elle qui est au gouvernement, qu'est-ce qu'elle répond à son collègue?

Le Président : Mme la ministre des Ressources naturelles.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Oui. Merci, M. le Président. Toujours aussi surprise des déclarations de la députée de Laviolette, de, tout d'un coup, s'intéresser à ce que fait Hydro-Québec, alors que, lorsqu'elle était au sein du gouvernement, au sein du Conseil des ministres, elle ne s'y intéressait pas du tout concernant Gentilly. Il faut se rappeler, M. le Président. Donc, un petit peu surprise de voir ça aujourd'hui.

Et, par rapport à sa question, la députée ne m'a jamais contactée pour me demander qu'est-ce qu'il en était concernant ces demandes d'information là. Hydro-Québec ne réfère pas à la ministre pour chacune des demandes d'information, M. le Président, donc je suis un peu surprise de sa demande ce matin.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Laviolette.

Des voix :

Le Président : Un instant. Un peu trop…

Mme Julie Boulet

Mme Boulet : La ministre a refusé de nous transmettre les rapports d'Hydro-Québec sur les feux de forêt, elle est incapable de défendre les travailleurs pylôniers, il n'y a toujours pas de règlement sur les tarifs d'électricité avec les alumineries, et, aujourd'hui, elle cautionne Hydro-Québec dans son mépris envers les citoyens du Québec.

Alors, M. le Président, pour Hydro-Québec, la ministre n'existe même pas. Alors, il faudrait peut-être transférer le dossier d'Hydro-Québec au député de Jonquière, peut-être qu'il pourrait répondre à ses propres questions. Mais ce qui est clair, c'est qu'elle, elle n'existe pas. Peut-être qu'elle a juste existé quand elle était leur employée, tout simplement.

Le Président : Mme la ministre des Ressources naturelles.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Merci, M. le Président. Quand les propos d'une députée sont rendus à des insultes, c'est parce que la députée n'a plus grand-chose à dire, M. le Président. Je suis très déçue de…

Des voix :

Mme Ouellet : Je vais vous dire ce que le gouvernement a fait depuis qu'on est au pouvoir : réparer le gâchis libéral dans le dossier de la centrale nucléaire Gentilly, alors que le Parti libéral n'a rien fait. Ça fait que c'est assez désolant de l'entendre ce matin, M. le Président.

Le Président : En terminant.

Mme Ouellet : Nous avons fait l'éolien. Nous avons géré les minicentrales parce qu'elles étaient en période de surplus. La planification…

Le Président : Principale, M. le député de Nicolet-Bécancour.

Rapport d'enquête sur l'abattoir Levinoff-Colbex inc.

M. Donald Martel

M. Martel : M. le Président, le gouvernement a ordonné en février 2013 une enquête sur la vente de l'abattoir Levinoff-Colbex. En 2006, la Régie des marchés agricoles a autorisé cette transaction malgré un avis contraire des fonctionnaires du MAPAQ. En 2011, on a appris que l'ex-ministre libérale de l'Agriculture Françoise Gauthier aurait avantagé la famille Cola. Rappelons que la famille Cola a contribué pour 192 000 $ au Parti libéral. La transaction de 62,5 millions implique une part de 19 millions d'Investissement Québec, en plus d'une marge de crédit de 10 millions garantie par le gouvernement. Résultat : ce sont les contribuables qui ont payé pour ce fiasco.

Il y a neuf mois que nous attendons les résultats de cette enquête, aucun suivi n'a été fait par le ministre. Par respect pour les contribuables et les producteurs bovins, le ministre doit publier le rapport d'enquête sur l'abattoir Colbex.

Quand va-t-il le faire? Quand saurons-nous la vérité dans ce dossier?

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. François Gendron

M. Gendron : Oui. Je remercie énormément le collègue du deuxième groupe parlementaire parce que, ce qu'il a énoncé, il y a beaucoup de choses qui, effectivement, ont été entendues dans l'opinion publique, il y a beaucoup de choses qui sont douteuses. Ce n'est pas pour rien qu'on a pris nos responsabilités et qu'on a voulu faire toute la lumière sur ce dossier-là, parce qu'il y avait besoin de pas mal de clarté, et ce n'est pas le cas qu'on a eu avec les gens d'en face.

Alors, on a nommé un juriscomptable qui poursuit actuellement… et je reconnais que j'ai hâte — vous connaissez mon expression — en étoile de mettre la main sur le rapport parce qu'effectivement je voudrais informer l'ensemble de la population de passablement d'éléments douteux — pour l'instant, je n'emploierai pas d'autre expression — immensément douteux, toutes sortes d'allégations. Mais ce n'est pas la première fois, on a vécu ça pendant neuf ans, là. Il y en a eu pas mal, toutes sortes de choses douteuses. Et, dans ce cas-là, bien c'est comme le reste, et c'est pour ça que nous, dès qu'on a été au pouvoir, on a ordonné à un juriscomptable, qui a des pouvoirs plus particuliers, de fouiller cette question-là, parce qu'elle mérite d'être fouillée. C'est loin d'être un exemple…

Le Président : En terminant.

M. Gendron : …de bon usage de fonds publics.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Donald Martel

M. Martel : M. le Président, ça fait quand même neuf mois. L'histoire récente de l'Abattoir Colbex, c'est un fiasco financier pour les contribuables du Québec. L'abattoir devrait réouvrir ses portes le 15 janvier prochain grâce à la mise sur pied de la Coopérative d'abattage du Québec.

À la veille de sa réouverture, le ministre peut-il nous garantir que le rapport d'enquête sera rendu public?

• (11 h 10) •

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. François Gendron

M. Gendron : Bien, le collègue a la gentillesse d'appeler ça un fiasco financier, mais c'est également un fiasco libéral. Et ça, c'est clair. On n'a pas besoin de jurisconsulte pour confirmer ça, que c'est clair parce que, par les noms qui circulent là-dedans, les collecteurs de fonds des gens qui, effectivement, ont obtenu des permis de garderie, bien, c'est les mêmes noms, puis ils étaient propriétaires de l'abattoir Levinoff, là. Il faut que vous soyez conscients de ça, là, c'est des gens qui ont obtenu des permis de garderie. Il faut le faire! Donc, c'est clair que ça méritait de faire tout un nettoyage. Ça méritait de faire tout un nettoyage, et je répète devant les membres de cette Assemblée, j'affirme que le ministre concerné…

Le Président : En terminant.

M. Gendron : …pour les aspects que j'ai traités, je n'ai pas pu encore mettre la main sur le rapport.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Donald Martel

M. Martel : M. le Président, quand ça va être déposé? Et est-ce que ça va être public? Je tiens à rappeler que la Fédération des producteurs bovins doit toujours 9 millions à Investissement Québec. Par respect pour les producteurs bovins, qui paient toujours pour rembourser cette transaction qui crée toujours énormément de tension dans le milieu agricole, le ministre doit rendre le rapport d'enquête public.

Est-ce que le ministre a discuté des conclusions du dossier d'enquête avec les représentants de l'UPA?

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. François Gendron

M. Gendron : Bien, une chose qui est sûre, lorsqu'il y a mauvais usage de fonds publics, ce n'est pas inadéquat d'être très transparent, et on va l'être.

Le Président : M. le…

Des voix :

Le Président : S'il vous plaît! M. le leader de l'opposition.

M. Moreau : Le ministre de l'Agriculture rappelle avec éloquence que, pendant neuf ans, on a fait de la culpabilité par association. Ici, il répond à une question… d'une question qui est sous enquête, ce qui va à l'encontre de l'article 35.3° de notre règlement. Il a lui-même dit qu'on était sous enquête. Et une question sous enquête, c'est visé par l'article 35, paragraphe 3°. Il devrait se garder une petite gêne et, surtout, ne pas faire de la culpabilité par association.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Bédard : À moins que le leader ait des informations qu'on ne sait pas, actuellement on est en enquête du juriscomptable. S'il sait qu'il y a des enquêtes de police, qu'il nous le dise. Quant aux garderies, je tiens, effectivement, à affirmer à cette Chambre qu'il y a enquête de police, qu'il y a des accusations, que l'UPAC a même passé au ministère de la Famille. C'est ça, le résultat de l'ère libérale, M. le Président, et nous ferons attention dans nos réponses.

Le Président : En terminant, M. le leader de l'opposition.

M. Moreau : Moi, là, les informations que j'ai, elles viennent de la bouche de la personne qui répond, et il a lui-même dit que c'était sous enquête. Le député qui a la parole ne peut parler — paragraphe 3° — d'une chose qui fait l'objet d'une enquête…

Des voix :

Le Président : Alors, j'aimerais préciser ici, là, lorsqu'on parle d'une enquête, on parle d'une enquête de police. Je ne sais pas si c'est à ça que faisait référence le ministre, là. M. le leader.

M. Bédard : On a dit, effectivement, que c'était une enquête du juriscomptable. S'il y a d'autres enquêtes, on n'est pas au courant. Mais je tiens à vous dire qu'il n'est nullement question pour nous de se taire sur ce fiasco libéral, M. le Président.

Le Président : M. le ministre, veuillez conclure. M. le ministre, concluez-vous?

M. Gendron : Bien, je répète ce que j'ai dit sans aucun problème, j'ai toujours parlé d'un juriscomptable.

Des voix :

M. Gendron : Non. Un juriscomptable, il a un travail à faire.

Des voix :

Le Président : Juste une seconde, là, on va… Une des choses les plus importantes ici, c'est d'éviter de s'interpeller. Alors, M. le ministre, d'abord, adressez-vous à la présidence, premièrement. Puis, deuxièmement…

M. Gendron : M. le Président, je répète ce que j'ai dit. J'ai toujours parlé de juriscomptable parce qu'il y a un paquet d'affaires louches qui confirment les affirmations qui ont été mentionnées par le collègue. On en a entendu parler longtemps, il y avait lieu de faire la lumière. C'est ce qu'on est en train de faire, et on sera transparents pour les suites des choses.

Le Président : Principale, M. le député de Huntingdon.

Aide à la relève agricole

M. Stéphane Billette

M. Billette : Merci, M. le Président. «Des jeunes en agriculture, il y en a. Il ne manque pas de relève, il manque des moyens pour prendre la relève. C'est pourquoi le non-renouvellement de la politique jeunesse agricole agace la Fédération de la relève agricole, et, dans la politique de souveraineté du ministère, elle n'y était pas.» Fin de la citation.

Ces propos, M. le Président, ce sont ceux de la Fédération de la relève agricole du Québec. Depuis la fin de la politique jeunesse, il y a maintenant huit mois, aucun signe de vie du gouvernement, plus de plans pour nos jeunes et, du même coup, perte nette de 10 millions pour ces derniers. Pourtant, il y a huit mois, le ministre s'époumonait à dire : La politique jeunesse sera incluse dans la Politique de souveraineté alimentaire. Six mois plus tard, rien. Rien du tout, M. le Président.

Est-ce que le ministre, dans quelques minutes, va aller confirmer au congrès de l'UPA qu'il a complètement largué la relève agricole et qu'il s'est, lui aussi, beaucoup trompé? Son bilan en relève, zéro. Zéro puis une barre, M. le Président. Merci.

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. François Gendron

M. Gendron : Oui, M. le Président. Je remercie le collègue de sa question. J'ai très hâte d'aller de l'autre bord, effectivement, parce que je sais que l'accueil va être chaleureux, parce qu'on a eu une année extraordinaire dans le domaine de l'agroalimentaire, y incluant la relève. Je donne un exemple. Dès la publication de la Politique de souveraineté alimentaire, premier geste de bonification de l'aide à la relève de 150 %. Les jeunes me l'ont rappelé. Je les ai rencontrés à trois, quatre reprises, je suis allé les voir la semaine dernière.

Quand il me parle de la politique jeunesse, on a dit : Nous, on va l'intégrer dans la politique jeunesse nationale du Québec. Et on a un adjoint parlementaire à la première ministre qui est responsable là-dessus, il a rencontré les jeunes de la relève, et, dans la réflexion que le gouvernement conduit pour une politique jeunesse du Québec, il y aura également un volet pour la relève agricole. J'aurai l'occasion d'en parler tantôt au congrès de l'UPA et je suis à peu près certain que les jeunes vont être agréablement surpris du rapport que je vais faire de l'ensemble des mesures d'accompagnement. Lorsque je fais une politique de souveraineté alimentaire, c'est aussi pour la relève. Lorsque je fais une politique…

Le Président : En terminant.

M. Gendron : …pour contrer l'achat des terres à l'étranger, c'est pour la relève agricole.

Le Président : Complémentaire, M. le député de Papineau.

M. Alexandre Iracà

M. Iracà : En additionnelle, M. le Président. Je rappelle qu'en campagne électorale la première ministre avait pris l'engagement de bonifier les programmes de relève agricole en investissant 20 millions de plus par année pour donner le coup de pouce nécessaire à nos jeunes agriculteurs. Près d'un an et demi plus tard, toujours rien, et rien non plus dans sa mise à jour panique où tout le monde a constaté qu'il n'y avait rien pour les jeunes.

Est-ce que la première ministre, responsable des dossiers jeunesse, va nous confirmer, elle aussi, qu'elle abandonne cet engagement envers nos jeunes de la relève agricole?

Le Président : M. le ministre de l'Agriculture.

M. François Gendron

M. Gendron : Bien, la première ministre aura l'occasion de s'exprimer dans d'autres occasions là-dessus, mais je suis sûr qu'elle dirait exactement la même chose que je viens de vous dire. Elle était présente avec moi lorsqu'on a rendu publique la première Politique de souveraineté alimentaire du Québec et elle était à côté de moi où j'ai annoncé, le même jour, deux mesures de correction de tout ce que vous n'avez pas fait puis de vos négligences, que je ne qualifierai pas pour le moment, dans le domaine de l'agroalimentaire.

Alors, je n'ai pas de trouble avec la relève. Je pense que c'est une responsabilité collective. Il faut être responsable, il faut tous être responsables pour améliorer…

Des voix :

Le Président : S'il vous plaît! Alors, ceci met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, nous en sommes à la rubrique des motions sans préavis. Alors, je reconnaîtrais maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Chauveau.

M. Deltell : Merci beaucoup, Mme la Présidente.

Des voix :

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : S'il vous plaît! J'aimerais entendre le député de Chauveau, s'il vous plaît. Merci.

M. Deltell : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement avec la députée de Laporte et la députée de Gouin :

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement qu'il rende public immédiatement le rapport du comité sur les conditions d'emploi des titulaires en provenance de l'extérieur de la fonction publique.»

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Traversy : Mme la Présidente, il n'y a pas de consentement pour cette motion.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Il n'y a pas de consentement. Alors, je reconnaîtrais maintenant le ministre des Finances et de l'Économie.

Réitérer l'opposition de l'Assemblée au projet
du gouvernement fédéral de commission
canadienne des valeurs mobilières

M. Marceau : Oui. Mme la Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de Brome-Missisquoi, le député de La Prairie, le député de Mercier et le député de Blainville, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale salue les initiatives de la communauté d'affaires du Québec afin de s'opposer au projet du gouvernement fédéral de créer une commission canadienne des valeurs mobilières;

«Qu'elle réitère son opposition à ce projet qui aurait pour conséquences d'affaiblir l'économie du Québec, en particulier le secteur de la finance;

«Qu'elle réitère son appui au système de passeport en valeurs mobilières dont l'efficacité est reconnue mondialement;

«Que le gouvernement du Québec consacre des efforts pour créer des alliances avec les autres provinces canadiennes, afin de contrer le projet fédéral de créer une commission nationale des valeurs mobilières.» Voilà.

• (11 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint.

M. Traversy : Mme la Présidente, il y a consentement sans débat pour la motion.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Je reconnaîtrais maintenant la députée de Gatineau.

Souligner la Journée internationale
des personnes handicapées

Mme Vallée : Alors, Mme la Présidente, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la ministre déléguée aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse, la députée d'Arthabaska, le député de Blainville et la députée de Gouin :

«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale des personnes handicapées qui s'est tenue le 3 décembre et qui cette année se déroulait sous le thème Ensemble, réduisons les obstacles et ouvrons la porte à une société plus inclusive!;

«Qu'elle réitère toute l'importance qui doit être accordée à l'intégration des personnes handicapées sur le marché du travail, et dans tous les volets de notre société;

«Qu'elle réaffirme son engagement à travailler pour éliminer les obstacles à la participation sociale des personnes [en situation de handicap].»

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Traversy : Merci, Mme la Présidente. Alors, je prendrai la parole pour vous dire qu'il y a consentement pour débattre de cette motion pour un temps de parole d'approximativement une minute par intervenant, en commençant, bien sûr, par la députée de Gatineau, suivie par la députée d'Arthabaska et en terminant, bien sûr, par la ministre responsable et déléguée aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Alors, Mme la députée de Gatineau.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Alors, Mme la Présidente, il me fait extrêmement plaisir de souligner aujourd'hui devant cette Assemblée nationale la Journée internationale des personnes handicapées et, en fait, les personnes en situation de handicap parce que, comme l'a si bien souligné ma collègue de Saint-Henri—Sainte-Anne ce matin, les personnes sont en situation de handicap. Il suffit, pour notre société, d'adapter notre environnement afin de réduire cette situation et de rendre notre société plus inclusive.

Il me fait aussi extrêmement plaisir de souligner l'implication de tous ceux et celles qui, au quotidien, travaillent d'arrache-pied, justement… ils s'investissent, justement, pour rendre cette société plus inclusive. Alors, un peu partout à travers le Québec, il y a des gens qui, à travers leur quotidien, travaillent auprès des personnes en situation de handicap. Ou elles-mêmes sont des personnes en situation de handicap qui, par leur action, par leur implication, par leurs interventions, deviennent des modèles et font de sorte que nous sommes une société qui, au quotidien, est plus inclusive. Alors, Mme la Présidente, il me fait plaisir de souligner ici cette journée très spéciale et de rendre hommage à tous ces intervenants et à ceux et celles qui, au quotidien, vivent avec des situations de handicap. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, Mme la députée de Gatineau. Je cède maintenant la parole à la députée d'Arthabaska.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy (Arthabaska) : Mme la Présidente, on parle ici de la Journée internationale des personnes handicapées. On en parle une fois par année, mais ces gens-là vivent, 365 jours par année, cette condition-là. Donc, je félicite leur courage, je félicite l'implication de ceux qui les aident. Et je me permets de nous sensibiliser. Avec la population qui vieillit, il y aura certainement de plus en plus de personnes dont l'autonomie sera restreinte. Il va falloir être d'autant plus vigilants, dans les années et les mois qui vont suivre, pour faciliter la vie de nos concitoyens. Parce que les enjeux liés, je dirais, à la longévité — parce que je ne veux pas appeler ça le vieillissement de la population, on vieillit tous chaque 24 heures, une journée — donc, les enjeux liés à la longévité sont un grand défi que nous aurons à vivre tous ensemble, et je pense que c'est bien au-delà des partis politiques. Je convie donc mes collègues à travailler sur ce sujet. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole à la ministre déléguée aux Services sociaux.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis heureuse, à mon tour, d'avoir l'occasion de souligner cette très importante journée qu'est la Journée internationale des personnes handicapées parce que c'est une occasion de faire de la sensibilisation sur l'importance d'avoir une société qui adapte toujours plus sa réalité aux personnes qui ont un handicap, une incapacité et qui doivent, à tous les jours, Mme la Présidente, vivre avec ce défi, ce défi souvent plus grand que nature d'évoluer dans un monde qui n'est pas parfaitement adapté pour eux, loin de là, et aussi avec le défi plus général de la différence.

Donc, hier, à l'occasion de la journée des personnes handicapées, j'ai eu la chance de reconnaître une de ces personnes, Martin Deschamps, le chanteur célèbre au Québec, qui, bien sûr, a ce handicap, mais surtout fait de ce handicap une force en allant auprès des jeunes dans les écoles pour passer ce message très important d'inclusion, d'acceptation de la différence, et je peux vous dire que c'est une valeur qui nous est chère, au gouvernement, et nous travaillons à chaque jour pour toujours plus d'inclusion. Merci, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. La motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Alors, je demanderais le consentement pour déroger à l'article 84.1 pour permettre au député de Bonaventure de présenter une motion. Alors, Mme la leader de l'opposition?

Mme Thériault : Il n'y a pas de consentement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Il n'y a pas de consentement.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader adjoint.

M. Traversy : ...juste bien m'assurer, pour que la députée d'Anjou soit consciente, on parle vraiment de la motion qui traite, là, du décès de M. Bertrand Berger, c'est bien ça.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la leader adjointe de l'opposition.

Mme Thériault : Oui. Mme la Présidente, vous savez très bien qu'à ce moment-ci ça prend un consentement, et il n'y a pas de consentement. On a donné notre consentement pour que le député puisse faire une déclaration de député, et ils n'ont pas accepté. Donc, je n'ai pas donné de consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, nous passons à la rubrique suivante, aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Traversy : Bertrand, je vais lire celle-là. Bonjour, Mme la Présidente. Alors, pour les avis touchant les commissions, j'avise cette Assemblée que la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra aujourd'hui les consultations particulières et les auditions publiques en vue d'étudier l'acceptabilité,pour le Québec, du projet proposé par Enbridge Pipelines Inc. sur le renversement vers l'est du flux de l'oléoduc 9B situé entre North Westover et Montréal, décrit notamment dans le document que vous connaissez bien, Inversion du flux de l'oléoduc 9B d'Enbridge, aujourd'hui, après les affaires courantes pour une durée d'une heure et demie ainsi que de 15 heures à 17 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Prenez note, Mme la Présidente, que la Commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 211, Loi concernant la Ville de Sherbrooke, suivi d'un projet de loi privé, n° 207, intitulé Loi concernant la Ville de Windsor, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 52, Loi concernant les soins de fin de vie, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif, ainsi que de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Et finalement, Mme la Présidente, la Commission des institutions ne procédera pas, aujourd'hui, à l'audition des intéressés à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 210, Loi modifiant la Loi fusionnant le Centre de réadaptation Mackay et L'Association montréalaise pour les aveugles sous le nom de Centre de réadaptation MAB-Mackay / MAB-Mackay Rehabilitation Centre, tel qu'il avait été initialement prévu dans l'avis donné à ce sujet le 26 novembre dernier.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader de l'opposition.

M. Moreau : Oui, Mme la Présidente. Vous me permettrez, sur cet avis de révocation, très brièvement, de rappeler que l'avis fait suite à des échanges qui ont eu lieu entre la ministre de l'Éducation, du Sport et du Loisir et la députée de Notre-Dame-de-Grâce, qui est la marraine de ce projet de loi privé, et que nos discussions se poursuivent, Mme la Présidente, quant au rappel possible de ce projet de loi en commission parlementaire.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, j'en suis maintenant à la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Moreau : Oui, Mme la présidente. Hier, j'ai eu l'occasion de poser, à tout le moins, une question concernant cet item, le projet de loi n° 55, Loi modifiant la Loi sur les impôts miniers, qui a été présenté le 12 novembre 2013 et pour lequel nous avons envoyé des propositions de consultations particulières le 13 novembre 2013. Mon collègue le leader adjoint du gouvernement a répondu ou a laissé entendre dans sa réponse qu'il y avait des négociations entre les cabinets de leaders. Je souhaite mentionner au leader adjoint du gouvernement que nous n'avons aucun retour du gouvernementdepuis le 13 novembre et je réitère donc ma question : À quel moment procéderons-nous aux consultations sur ce projet de loi, compte tenu qu'il n'y a pas de discussions entre les cabinets de leader à ce sujet?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Traversy : Mme la Présidente, les informations que je détiens sont à l'effet qu'on est en train d'analyser la liste qui nous a été fournie. Nous allons revenir le plus rapidement possible au leader de l'opposition pour répondre à sa question.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le leader de la deuxième opposition.

• (11 h 30) •

M. Deltell : Merci, Mme la Présidente. Alors, selon l'horaire de notre règlement, il nous reste encore deux jours parlementaires, soit, donc, jeudi et vendredi, et pourtant il y a des questions qui sont inscrites au feuilleton, des questions écrites, donc, qui dorment actuellement, et on voulait s'enquérir auprès du gouvernement de quoi il en retournait.

Par exemple, à l'article 23 de la partie 5 de notre feuilleton, la question posée le 7 novembre dernier par le député de Lévis au ministre des Finances, qui demande de fournir le portrait de la croissance des dépenses de programmes et des dépenses consolidées. Également, le 12 novembre, le député de Granby a posé une question au ministre des Affaires municipales concernant la réglementation qui touche les piscines. Également, toujours le député de Granby, le 19 novembre, a posé une question à la ministre de l'Emploi et de la Solidarité concernant les saisies qui peuvent être faites lorsqu'un jugement est rendu. Et finalement j'ai posé moi-même une question écrite, le 27 novembre dernier, au ministre des Transports concernant le manque à gagner du financement pour la MRC de La Jacques-Cartier en ce qui concerne le transport collectif, ce qui, à notre point de vue, est en complète contradiction avec les propos du ministre et la réalité qui se vit sur le terrain.

Donc, Mme la Présidente, nous avons quatre questions écrites en suspens. La session achève, il nous reste encore deux jours devant nous. On aimerait savoir de la part du gouvernement : Quand aurons-nous les réponses à ces quatre questions?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Traversy : Merci, Mme la Présidente. Il devrait y avoir des réponses sous peu aux questions du député de Chauveau.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Je vous remercie. Alors, je vous informe qu'il y aura sanction du projet de loi n° 39, Loi sur les régimes volontaires d'épargne-retraite, aujourd'hui, à 15 h 30, au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Traversy : Merci, Mme la Présidente. Nous nous approchons d'une adoption finale. Alors, sans plus tarder, je voudrais donc que vous puissiez appeler, pour poursuivre nos travaux, l'article 25 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 45

Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de la culture et de l'éducation sur le projet de loi n° 45, Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie.

Alors, je vous cède la parole, M. le ministre de l'Enseignement supérieur, des Sciences, de la Recherche et de la Technologie.

M. Pierre Duchesne

M. Duchesne : Merci, Mme la Présidente. Alors, effectivement, nous voilà maintenant à une étape… une autre étape, en fait, du cheminement du projet de loi n° 45, soit celle de la prise en considération du rapport de la commission. Alors, après avoir passé l'étude du projet de loi article par article, nous en sommes maintenant à une étape charnière.

Le projet de loi n° 45, il faut le rappeler, revêt un caractère très important pour le développement du Québec. Essentiellement, ce projet de loi va créer le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Il faut expliquer aux citoyens qu'il existe déjà par décret mais qu'il doit y avoir un projet de loi et qu'il doit être consacré par l'existence d'une loi.

Ce projet de loi n° 45 va, entre autres… détermine, entre autres, la mission du ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Il établit aussi les pouvoirs et fonctions de ce ministre. Il précise également les modalités d'organisation interne, qui sont similaires, il faut le dire, à l'ensemble des ministères.

Pendant cette étude détaillée, plusieurs amendements ont été apportés afin de répondre aux préoccupations des députés de l'opposition, et, parmi eux, certains concernent les missions et les fonctions du ministre. Notamment, un amendement a été proposé par le parti ministériel et retenu par la commission pour l'une des fonctions du ministre, et ça se lit comme suit : «Favoriser la probité, la valorisation et la qualité des activités de recherche.» C'est une amélioration qui précise, Mme la Présidente, davantage le rôle du ministre en matière de recherche.

Deux amendements ont aussi été apportés avec la collaboration des partis d'opposition afin d'accroître la parité entre les hommes et les femmes au sein du conseil d'administration de l'Institut national des mines et de l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec. Certains amendements ont introduit dans la législation aussi des consultations interministérielles qui vont rendre plus formels les liens entre les différents ministères.

C'est un projet de loi, Mme la Présidente, qui vient clarifier les rôles et responsabilités de chacun des ministères. Il va permettre la signature d'ententes visant au partage des ressources et de services qui faciliteront le travail au quotidien de mon ministère. Et, avec l'adoption du projet de loi, le cadre juridique va être clarifié et simplifié.

L'institution du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie va faciliter la réflexion sur l'avenir de l'enseignement supérieur, sur les perspectives qui s'offrent au Québec en matière de recherche, de science, d'innovation et de technologie. C'est aussi un moyen privilégié d'intensifier la synergie entre les différents acteurs de l'enseignement supérieur, et de la recherche, et de l'innovation. Et, en créant ce ministère, nous voulons valoriser plus que jamais le savoir, lui donner la place qui lui revient au sein de notre société.

Alors, c'est une étape importante. Et il faut rappeler que, pour ce gouvernement, l'éducation est une... je dirais, d'une importance stratégique, parce qu'il y aura… et, en fait, depuis la venue du nouveau gouvernement, il y a donc deux ministres qui ont pour responsabilité, au Conseil des ministres, de parler de l'éducation : la ministre, bien sûr, qui est assise normalement à côté de moi, la ministre de l'Éducation, et moi-même. Alors, ces deux ministres sont présents au Conseil des ministres, sont présents au sein de leurs ministères.

Et, en ce qui me concerne, l'apparition de ce nouveau ministère donne aussi toute la place aux collèges, à nos cégeps, une belle invention québécoise, Mme la Présidente. D'ailleurs, on célèbre cette année le 50e anniversaire du dépôt du rapport Parent, qui a initié, dans les années suivantes, la création des cégeps, les cégeps, qui sont présents sur toute notre région… tout notre grand territoire plutôt. Les cégeps et l'innovation, là — puisque c'est un ministère aussi qui doit parler d'innovation — l'innovation des cégeps, c'est qu'à l'intérieur de la même boîte, qui est ce collège, il y a, en parallèle, une formation préuniversitaire qui nous amène à l'université et une formation technique qui est valorisée, et tout ça avec une formation générale. Il y a un noyau de formation générale qu'on garde et qu'on préserve.

La création, et l'apparition, et le développement de cégeps font que le nombre de diplômés postsecondaires au Québec est supérieur à celui du Canada et supérieur à celui qu'il y a aux États-Unis. Donc, pour nous, la pertinence des cégeps et la création de ce ministère confirment la pertinence et la valorisation que nous accordons à cet ordre d'enseignement. C'est aussi un endroit où il se fait de la recherche appliquée, les CCTT, les centres collégiaux de transfert de technologie, qui sont des succès et qui suscitent même l'envie du reste du Canada.

Ce ministère, bien sûr, aussi, aura et a comme responsabilité de suivre, d'encourager le développement des universités, de notre système universitaire, 18 universités, Mme la Présidente, des universités qui sont situées dans des grands centres, des universités aussi dans les régions du Québec — parce que nous avons un grand territoire — et qui favorisent, de par leur présence sur l'ensemble du territoire, des diplômés de première génération. Et ça, les diplômés de première génération, Mme la première ministre… Mme la Présidente, pardon, nous allons tout faire pour continuer à valoriser cette situation. Un diplômé de première génération, c'est ce jeune homme ou cette jeune fille qui revient à la maison avec son diplôme et c'est le premier de sa famille à avoir un diplôme, ses parents n'en avaient pas; ça inspire, ça donne de la fierté à la famille, c'est bon pour l'estime de soi de l'individu. Il peut se développer, il va s'enrichir, bien sûr, en ayant un emploi avec un bon salaire, mais en ayant beaucoup plus de place à jouer dans la société, en étant présent dans les débats sociaux, en étant un citoyen, une citoyenne très active.

Alors, les universités ont maintenant un ministère qui leur est consacré. Nous allons rappeler que ce sont des institutions publiques qui visent au développement du bien commun, et nous avons déjà installé un rapport de dialogue avec eux. On l'a vu, il y a eu un sommet sur l'enseignement supérieur où il y avait de grands défis, et nous sommes arrivés à un succès suite à ce sommet. Donc, nous allons tout faire pour, bien sûr, valoriser les institutions universitaires, parce que — on pourrait même dire l'université au singulier — l'université est une institution essentielle dans une démocratie. C'est même, à la limite, à l'occasion, un contre-pouvoir. Ça permet d'amener un équilibre. C'est une des sentinelles qui permet à un système de demeurer une démocratie. Et il faut préserver, pour ça, bien sûr, l'autonomie universitaire, la libre pensée, la capacité de faire de la recherche, mais aussi de transmettre le savoir, d'avoir des professeurs qui sont, je dirais, des maîtres, hein — c'est le nom, d'ailleurs, qui leur est donné — des maîtres pour former une nouvelle génération qui est toujours plus… qui a un sens critique toujours plus développé.

L'autre responsabilité de ce futur ministère, Mme la Présidente, c'est la recherche et l'innovation. Donc, j'ai déposé d'ailleurs une politique nationale de la recherche et de l'innovation, et le but, ici, parce que la recherche et l'innovation est maintenant sous l'autorité de ce ministère de l'Enseignement supérieur, c'est donc de favoriser l'harmonie. Pas d'opposition au Québec entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Ces gens-là travaillent ensemble. Nos PME ont besoin de nos laboratoires, de nos centres de recherche dans nos universités, de nos CCTT. Il faut favoriser la collaboration. Ce ministère va viser à donner beaucoup, je dirais, d'élan à cet objectif-là. Collaboration aussi entre les universités et entre les cégeps. Il faut cesser de se concurrencer, là. La concurrence, elle est à l'international. Mais ensemble il faut définir des mandats communs, collaborer ensemble.

Et cette Politique nationale de la recherche et de l'innovation, Mme la Présidente, elle est ancrée dans des valeurs, je viens de vous en parler, collaboration, bien commun, mais aussi des valeurs importantes : le développement durable. On le sait, la planète est menacée. Il faut que nos chercheurs des universités, il faut que nos entrepreneurs pensent au développement de technologies et de moyens d'action qui nous permettent de préserver et de donner de la pérennité, bien sûr, à notre planète.

• (11 h 40) •

L'autre axe à favoriser, c'est toute la question de comment traverser ce… affronter ce défi des changements démographiques. Le Québec est une des sociétés qui vieillit le plus rapidement au monde, à l'exception du Japon. Il faut donc favoriser... trouver des solutions face à une société vieillissante et aussi… et ça, c'est des défis liés à la santé, bien sûr, toute la technologie, tout le domaine de la santé, mais aussi donner de la place à nos jeunes. Quand vous avez une part qui est moins grande donnée aux jeunes, parce qu'il y a moins de jeunes dans notre société, il faut leur donner de l'oxygène, Mme la Présidente, il faut leur permettre d'avoir un avenir malgré une société vieillissante, d'établir des liens intergénérationnels. Il ne faut pas opposer une génération à l'autre, il faut surtout éviter ce genre de choses. Ça veut dire, par exemple, des politiques familiales pour les plus jeunes, Mme la Présidente.

Et, bon, enfin, les PME. Les PME, j'en ai parlé un peu tout à l'heure, mais, notre structure économique, là, le filet de notre structure économique est basé, est structuré à partir de PME, les petites et moyennes entreprises, qui créent beaucoup d'emplois. Et nous avons au Québec une tradition : beaucoup d'inventeurs, mais souvent la commercialisation, la capacité d'en faire une petite entreprise, c'est difficile. Alors, notre ministère va assister, va aider, va appuyer ces jeunes entrepreneurs ou ces entrepreneurs d'une certaine génération qui ont travaillé des années pour développer un produit ou un service, parce qu'il y a l'innovation technologique et il y a l'innovation sociale, Mme la Présidente.

Alors, la pérennité. Nous avons déposé une politique nationale de recherche sur cinq ans; pas sur trois ans, sur cinq ans. Pour les milieux économiques, on demandait de la stabilité. Cinq ans, c'est aussi un engagement important. Et, vous le savez, ce ministère, à la suite du sommet, a annoncé un réinvestissement dans l'enseignement supérieur sur une période de sept ans, jusqu'en 2019, 1,8 milliard, Mme la Présidente, et c'est un engagement ferme de notre gouvernement, et c'est appuyé en plus sur l'existence d'un nouveau ministère.

En terminant, Mme la Présidente, je vous dirais que, dans les prochains mois, il y aura beaucoup de travail, parce que, suite à ce Sommet sur l'enseignement supérieur, ce ministère va devoir donner des suites aux différents chantiers qui ont été mis en place. Celui sur l'aide financière est terminé. Résultat : pour la première fois depuis des années, le régime d'aide financière donne plus de bourses que de prêts. C'est important. C'est une réforme structurante, Mme la Présidente. On ne veut pas endetter les étudiants inutilement. Il y a donc un signal, là, un choix qui est de dire : Quand on le peut, quand les dossiers sont évalués et que les besoins sont là, d'aider — et d'aider, là, pas les fils de riches, pas les filles de riches, ils ont les moyens — d'aider la classe moyenne, d'aider même ceux qui sont peut-être moins choyés en termes de revenus pour… lorsqu'ils ont la capacité et la volonté, de monter aux plus hauts échelons, et d'être même des étudiants, et même des finissants, et, qui sait, des maîtres ou des docteurs dans le domaine universitaire, pour ceux qui le veulent.

L'autre chantier, c'est la création du Conseil national des universités qui va superviser le développement des universités. On doit développer... On va déposer un projet de loi dès le début de l'année prochaine là-dessus.

Troisième chantier, une loi-cadre sur les universités. Qu'est-ce que c'est, les universités? Étonnamment, dans nos lois, on n'en parle pas, on ne parle que de la façon dont on finance les universités. Et il faudra aussi amener un nouveau regard sur la gouvernance. On le sait, il y a beaucoup de questions, dans les derniers jours, on le voit, la façon dont les conseils d'administration des différentes organisations sont composés. Nous avons de bons conseils d'administration dans les universités, mais la population demande encore plus de transparence, d'en faire des piliers d'intégrité. Nous allons travailler là-dessus.

Autre chantier, sur l'offre de formation collégiale, comment mieux protéger nos cégeps en région. Parce que, face à… j'en parlais tout à l'heure, les changements démographiques, il y a des régions qui… où il y a des défis face à un peu moins d'étudiants, je dirais, dans les cégeps. Il faut voir comment on peut préserver ces institutions, entre autres. Mais il y a d'autres domaines, il y a d'autres défis, bien sûr, à l'intérieur de ce chantier.

Le cinquième chantier, le plus important, la formule de financement. Ça fait au moins 12 ans qu'on n'a pas révisé cette formule de financement. Il y a, semble-t-il, des effets contestés, contestables de cette formule de financement qui amènerait les universités, devant tout, à une course à la clientèle, aux cohortes étudiantes, parce que cette formule de financement est basée essentiellement sur le nombre d'étudiants. Une université a plus d'étudiants, on finance par tête de pipe, elle a plus d'argent. On est en train de voir s'il n'y a pas moyen de bonifier, de diversifier, d'enrichir la formule de financement. C'est fondamental, Mme la Présidente. La façon dont on donne l'argent, bien sûr, assure un développement à l'université. Donc, c'est un chantier important, et il y aura un rapport qui sera déposé au printemps prochain.

Alors, vous voyez, ce ministère a du pain sur la planche mais dans un domaine d'avenir, qui est celui de notre jeunesse, qui est celui du savoir, qui est celui de la recherche, dans une société qui bouge vite, Mme la Présidente, bombardée d'information, où le divertissement occupe beaucoup de place, où la démocratie demeure fragile. C'est toujours un combat constant. Il faut qu'il y ait une place pour la réflexion, il faut qu'il y ait une place pour le savoir. Il faut qu'il y ait des professeurs qui prennent le temps de dire à des jeunes comment réfléchir, comment… et eux, ils doivent transmettre leur savoir, c'est essentiel. Nos universités, nos cégeps sont plus que des bâtiments, c'est une institution du Québec qu'il faut protéger et en assurer le développement. La même chose pour tout le domaine de la recherche, ça assure un dynamisme, ça donne à notre société, au Québec, une place sur la scène internationale, ça en fait une société qui est concurrentielle.

La libre pensée — je termine là-dessus — l'indépendance d'esprit, c'est fondamental. Il faut… Et ça, c'est lié… c'est une valeur stratégique : quand on veut une démocratie, il faut qu'on ait, de génération en génération, des gens qui se questionnent, qui sont capables d'argumenter et d'engager des débats, pas se lancer dans la calomnie, Mme la Présidente, des débats argumentaires, et nos maisons d'enseignement, tous les ordres d'enseignement confondus, ont un rôle fondamental là-dessus.

Alors, je suis heureux, donc, de voir que nous traversons… nous passons une étape importante en vue d'adopter ce projet de loi qui, donc, pourrait confirmer, donc, le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Ça a été fait, donc, à la suite d'une commission où il y a eu des discussions enrichissantes, et je suis très satisfait et très encouragé pour la suite, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Mont-Royal.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Vous savez, aujourd'hui, nous consacrons, en fait, en cette prise de considération, la loi qui crée évidemment le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation.

J'aimerais peut-être profiter de l'occasion pour rappeler un peu les étapes de la création de ce ministère. Ce ministère avait été créé en septembre 2012. Le gouvernement avait décidé, le 15 mai 2013, donc de déposer, huit mois après, le projet de loi du ministère. Nous avons adopté le principe le 4 juin 2013 et donc nous en sommes aujourd'hui, en ce 4 décembre, pour la prise en considération et l'adoption finale.

Il y avait évidemment, pour nous… Nous avions accepté le principe, nous avions accepté le principe malgré un malaise évident non pas sur la question de principe de la création du ministère, mais compte tenu que, dès le début du mandat, le gouvernement avait fait des coupures extrêmement importantes au niveau des universités, au niveau de plusieurs maisons d'enseignement; ça avait été vraiment très mal reçu au départ.

Et, aujourd'hui, on ne sait pas dans quelle direction on s'en va, parce que — ceux qui ont pu écouter avec nous la période de questions, Mme la Présidente — on est toujours actuellement dans une atmosphère de déni. Au niveau, par exemple, des CPE, par exemple, on a posé des questions aujourd'hui, c'étaient les en-têtes des journaux, partout qu'il y avait des coupures, et le ministre nous dit : Non, ça n'existe pas. Ça a été la même chose au niveau des CHSLD. Et, au niveau des universités, ça fait déjà une semaine où j'ai un nombre important d'universités, Mme la Présidente, qui sont venues nous parler de leurs inquiétudes, du fait que, leur budget, pour l'année en cours, on ne sait pas dans quelle direction on s'en va.

Et d'ailleurs une des choses qui m'a fait rire un peu lors de cette séance avec les universités, c'est que, là, le gouvernement était un peu mal à l'aise, les députés du gouvernement étaient un peu mal à l'aise parce qu'ils entendaient évidemment les universités faire part de leurs préoccupations, préoccupations majeures à ce niveau-là, et il y avait le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques… et je reprends un peu, vous savez, la chanson de Mme Bolduc, là, lorsqu'il arrivait et qu'il disait : «Bien, ça va venir, ça va venir, découragez-vous pas.» Je ne sais pas si vous vous rappelez de cette chanson-là, mais c'est un peu ce que le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques disait aux universités : Ça va venir, découragez-vous pas, ça s'en vient.

• (11 h 50) •

Alors, c'est donc dans ce contexte-là et de cette atmosphère un peu particulière qu'on a discuté, Mme la Présidente, du projet de loi n° 45 article par article. Et donc nous avons, bien sûr, adopté le principe de ce projet de loi, et nous nous sommes assurés de bien faire le travail, parce que c'est ce que la population attend des élus, entre autres, et des parlementaires. Et nous, comme nous avons déjà été au gouvernement, peu importent les structures, nous pensons que c'est tout à fait le droit du gouvernement d'organiser son Conseil exécutif comme bon lui semble, et je pense que ça, à notre avis, c'est quelque chose qu'il faut respecter. Et la création de ce ministère, pour nous, était un principe qui se défendait à ce moment-là. Cependant, comme on le dit toujours, le diable est dans les détails, et, tout au cours de ces discussions, évidemment nous avons fait un travail rigoureux, un travail constructif pour avoir, bien sûr, le meilleur projet de loi.

Je dois dire que ce projet de loi, Mme la Présidente, ce n'était pas simple.On parlait de quoi? On parlait de 208 articles, Mme la Présidente, et ces 208 articles modifiaient 51 lois et 36 règlements. Ce n'est donc pas une tâche qui était simple, évidemment. Et, à partir du moment où les travaux ont commencé — les travaux ont véritablement commencé plus tôt, à l'automne, puisque le principe avait été adopté le 4 juin, donc on a commencé à l'automne — il y a eu, pendant un certain temps, une certaine impatience de la part du cabinet du ministre — je ne dis pas du ministre, nécessairement, lui-même, mais certainement de son cabinet — qui, évidemment, avait multiplié les tactiques pour faire adopter encore plus rapidement ce projet de loi.À un point tel d'ailleurs que nous sommes allés nous plaindre à vous, Mme la Présidente, et vous avez confirmé ce que tout le monde pense, c'est que l'opposition doit prendre le temps nécessaire qu'il faut pour adopter les projets de loi et faire de ces projets de loi des projets de loi responsables. Évidemment, il y avait des syndicats, il y avait, entre autres, récemment, une organisation qui s'appelle l'ACFAS, et, à notre très grande surprise, c'était l'ancienne chef de cabinet du ministre actuel qui menait la campagne pour faire adopter ce projet de loi là.

Alors, évidemment, je dois vous dire qu'il y a eu, à certains moments, je dirais, une atmosphère un peu difficile dans l'élaboration de ce projet de loi et les discussions qui ont suivi, parce que, d'une part, on est, nous, convaincus qu'il y a beaucoup de difficultés au niveau financier, actuellement, dans ce gouvernement — la mise à jour l'a montré la semaine dernière — et, malgré les bonnes intentions du ministre, il est clair que le gouvernement n'a pas l'argent suffisant pour parler véritablement, avec respectabilité, du sous-financement des universités, parce qu'actuellement les choses ne vont pas dans cette direction-là.

Qu'est-ce que nous avions, sur le plan du principe, comme problèmes avec ce projet de loi? Qu'est-ce que nous avions comme arguments pour dire que ce projet de loi là méritait d'être bonifié? Mme la Présidente, le premierpoint, je pense… et là-dessus je dirais que la deuxième opposition était d'accord avec nous sur cette question-là. Vous savez, ce ministère-là a changé de vocation à plusieurs reprises. À un moment donné, on a créé un ministère de la Recherche et du Développement, auparavant il y avait un seul ministère de l'Éducation. Je pense qu'on a changé à peu près 10 fois, au cours des 15 ou 20 dernières années, on a changé à peu près 10 fois tout ce qui touchait la recherche. À un moment donné, même, en 2003, à l'époque où l'actuelle première ministre était ministre des Finances, la recherche, l'innovation, c'était sous la responsabilité du ministère des Finances. Sous notre gouvernement, la recherche et l'innovation a été la responsabilité du ministère du Développement économique. Le gouvernement a décidé d'abolir le ministère du Développement économique, de confier tout l'aspect de la recherche et de l'innovation au ministre.

Et donc on avait quand même certaines questions. Parce que, comme vous le savez, c'est toujours, lorsqu'on parle de recherche et d'innovation, un peu la même chose : il y a des gens qui font de la recherche pure, il y a des gens qui font de la recherche appliquée, et, ceux qui font de la recherche pure, je dois vous dire qu'évidemment… Si je prends, par exemple, la génomique, ça a été extrêmement bénéfique de faire de la recherche pure, parce qu'on a développé, au fil des années, dans ce domaine-là, une expertise très importante. Mais la recherche appliquée, celle avec laquelle on travaille avec des entreprises sur des projets particuliers, des façons de faire particulières, je dois vous dire que là-dessus il y a aussi un besoin. Et j'étais un peu inquiet, moi-même, sur ces questions-là, non pas de la part du ministre, mais, encore une fois, lorsque j'entendais le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques qui n'arrêtait pas de parler des abus, des abus des compagnies, qu'il ne fallait pas fonctionner de cette façon-là. Et donc il m'apparaissait qu'il était particulièrement contre la recherche appliquée, dans une certaine mesure. Alors, pour nous, il était très important, Mme la Présidente, dans ce projet de loi, de vraiment avoir des notions à caractère économique pour ne pas que ce soit uniquement un projet de loi dans lequel, évidemment, les seuls gagnants sont les cégeps et les universités, que c'est seulement la recherche pure. Il fallait aussi qu'il y ait un équilibre, un équilibre qui, à mon avis, était nécessaire.

Et d'ailleurs je dois vous dire qu'on a eu de très longues discussions. Le député de Laurier-Dorion et également le député de La Prairie ont fait ensemble, au départ, beaucoup de pression sur le ministre, qui a décidé, à la fin, bien sûr d'adopter certains aspects du projet de loi dans lesquels il y avait des considérations économiques. Nous tenions donc à apporter, Mme la Présidente, ces amendements constructifs, car, à première vue, dans la lecture de ce projet de loi, le Parti québécois semblait avoir évacué, en fait, tout rapport entre le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, et nous avons donc tenu à ce que les termes économiques… que la relation qui doit exister entre le ministre de l'Économie et des Finances et le ministre de l'Enseignement supérieur soit présente, et, même, pas seulement le ministre de l'Économie et des Finances, mais les autres ministères, que ce soit inscrit comme tel dans la mission du ministère et dans le rôle du ministre.

Vous savez, Mme la Présidente, la situation des universités, au moment où on se parle... Je vous donnerai simplement quelques citations que j'ai entendues depuis une semaine. Lorsque je parle, par exemple, de l'UQAM, l'UQAM dit : Je ne vous dirai pas qu'on est riches, je ne vous dirai pas qu'on nage dans l'argent et on réussit à faire nos frais. On respecte notre plan budgétaire, mais c'est très difficile.

Quant à l'INRS, qui est venu témoigner devant nous, ce qu'ils nous ont dit, c'est que... L'Institut national de la recherche scientifique mentionne que, si elle n'a pas de signal clair d'un gouvernement d'ici février prochain, elle aurait beaucoup de difficultés à mettre des chiffres dans son budget au cours de l'année. Donc, son budget est en péril.

Dans le cas du HEC, des Hautes Études commerciales, ils ont dit : Bien, au sujet du plan de réinvestissement des universités de la part du ministre, les messages sont un peu ambigus. On ne sait pas trop, véritablement. On entend la première ministre qui dit qu'il va y avoir des réinvestissements, mais on n'a pas de nouvelle, on ne sait pas. On veut y croire, mais ce qu'on veut, c'est des actions probantes. On veut voir vraiment.

Et, aujourd'hui, le chef de l'opposition a vraiment fait une démonstration, je pense, lors de la période de questions, particulièrement éloquente lorsqu'il a démontré que, dans le premier budget du ministre des Finances, on parlait évidemment d'investissement au niveau du ministère de la Santé et des Services sociaux, on parlait d'un investissement de 1,3 milliard dans le budget, et là on était rendus à 1,2 pour tout le gouvernement.

Alors, dans les circonstances, comment le gouvernement va-t-il pouvoir investir dans les universités, comme il semble le promettre, après avoir coupé? Et, après ça, il dit qu'il va investir? On a beaucoup de doute, surtout qu'il n'y a pas actuellement de cadre budgétaire.

• (12 heures) •

Puis je peux continuer comme ça. Concordia a dit, en parlant du réinvestissement : On l'attend. On travaille seulement avec le réel. Nous sommes à la limite financière, on ne peut pas couper indéfiniment. Hier, c'était l'Université McGill. L'Université McGill est une université, disaient-ils... disaient-ils... Mme la rectrice, Mme Fortier, disait : C'est une université fragilisée. L'élastique est étiré à son extrême limite. Les murs de McGill craquent. Il faut redonner de l'oxygène aux universités. Et, quant à l'Université de Montréal hier, c'est une université qui déclare : Bien sûr, nous n'avons plus de marge de manoeuvre. Chaque dollar coupé, c'est autant de revenus aux étudiants qui sont coupés.

Alors, Mme la Présidente, lorsqu'on regarde cette situation-là, il n'y a rien de très, très réjouissant, c'est le moins que l'on puisse dire. Et une des choses également que toutes les universités montréalaises, parce que celles qui ont comparu devant nous, à la Commission de la culture et de l'éducation, ce sont des universités de Montréal… Et là les universités de Montréal nous ont dit : En plus de tout ça, on est inquiets des orientations du ministre. Le ministre dit : Il y a trois choses. Il y a trois choses qu'il veut privilégier, entre autres, c'est bien sûr le développement des universités en région. Je pense que c'est une des choses qu'il veut privilégier. Que certains groupes de la société comme, par exemple, des autochtones puissent avoir un meilleur accès aux universités… Et une autre des choses qu'il veut aussi privilégier, c'est l'accessibilité financière. Trois principes sur lesquels, évidemment, on ne peut pas être en désaccord avec ça, mais il est clair, Mme la Présidente, que, dans ce domaine-là, ça me semble être un peu... pas être très positif, ces priorités-là, pour des universités montréalaises, qui recherchent, entre autres, l'excellence, qui ont à se battre dans un marché mondial, dans un marché dans lequel les universités, à l'échelle mondiale, sont présentes. Et donc il y a, au sein de ces universités montréalaises là, énormément d'inquiétudes, d'inquiétudes qui, je pense, sont pleinement justifiées par les récentes actions du gouvernement.

Et, encore une fois, on a parlé beaucoup de la recherche et de l'innovation, bien sûr, une politique sur laquelle, lorsqu'on regarde ce qui est écrit, évidemment, on peut difficilement être contre, sauf qu'il est clair qu'encore une fois le gouvernement n'a pas de cadre financier, Mme la Présidente, pour véritablement dire, à ce stade-ci, que nous allons réinvestir et que nos universités, au cours des prochaines semaines et des prochains mois, vont être en santé.

Donc, pas de cadre financier, pas de prévisibilité de façon très claire. On remarquera, dans la politique de recherche et d'innovation, on va jusqu'en 2019, Mme la Présidente, on balaie, si on veut, vers l'avant, parce que nous n'avons pas, encore une fois...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : ...de Mont-Royal. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Traversy : Mme la Présidente, l'article 211. Écoutez, nous parlons, présentement ici, du projet de loi n° 45. Je sais que, dans l'optique de la pertinence, on peut laisser une grande marge de manoeuvre à ceux qui prennent la parole en cette Chambre. On aimerait quand même pouvoir y revenir très prochainement.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Mont-Royal, je vous invite à poursuivre votre propos, s'il vous plaît.

M. Arcand : Écoutez, Mme la Présidente, on parle d'universités. Je ne vois pas vraiment quelle est laproblématique. Évidemment, le gouvernement n'aime pas entendre, lorsqu'on parle des coupures qu'ils ont faites, des coupures draconiennes au niveau des universités dès le départ. Et le gouvernement, évidemment, est toujours dans le déni et n'arrête pas de dire qu'il va vouloir, n'est-ce pas, continuer à investir dans les universités. Mais il est clair qu'ils ont fait des coupures, et on parle de 250 millions de dollars, Mme la Présidente, et ça, c'est sans compter, évidemment, un déficit des universités qui est près de 100 millions de dollars actuellement pour les universités.

Alors, il est très clair, Mme la Présidente, que, même si la première ministre, lors du sommet, avait dit qu'en 2014‑2015 il y aurait une augmentation de 8,5 % et une augmentation de 1,7 milliard sur huit ans, ce ne sont pas encore des chiffres qui sont dans le cadre budgétaire du ministre des Finances.

Alors, Mme la Présidente, dans tout ça, la question qui se pose… Et, avec la création de ce ministère, on espère qu'il y ait de l'espoir.On espère qu'il va y avoir, avec ce ministère, n'est-ce pas, une amélioration, une amélioration importante des universités, du financement qui est fait et qui sera poursuivi dans la lignée de ce que nous avons fait, Mme la Présidente. Nous avions présenté, lors du discours du budget en 2011 et 2012, un plan quinquennal pour les universités. Nous avions prévu, Mme la Présidente, une hausse des droits de scolarité et l'engagement, également, du gouvernement de réinvestir 1 milliard en enseignement supérieur, une croissance des revenus autonomes des universités et une participation plus importante du secteur privé, Mme la Présidente, au financement.

Il y avait aussi, parallèlement à cela, parce qu'on croit, nous aussi, à l'accessibilité, mais il y avait aussi une hausse importante, un budget de 568 millions de dollars, Mme la Présidente, qui était consacré au Programme de prêts et bourses, au programme, je dirais, complémentaire, et je vous dirais qu'on avait même modifié le Programme de prêts et bourses afin que les premiers 1 200 $ de revenus de pension alimentaire ne soient pas pris en considération dans le calcul de la contribution de l'étudiant. Et cette exemption, donc, des revenus de pension alimentaire est de 1 200 $ par année par enfant, plutôt que 1 200 $ par année sans égard au nombre d'enfants, Mme la Présidente.

Alors, je pense que, lorsqu'on regarde l'ensemble du travail qui a été fait par le précédent gouvernement, les universités... Je regardais hier simplement le budget et les subventions du ministère en 2007‑2008 : le ministère de l'Éducation, en 2007, à l'Université de Montréal seulement, on parlait de 397 ou 395 millions, à peu près, en 2007‑2008, que le ministère consacrait aux universités. Lorsque je regarde où on est rendus, au niveau de 2012, eh bien, on était rendus à près de 500 millions, donc de 395, disons, à peu près, à presque 500 millions. On voit que le gouvernement précédent avait fait le travail, Mme la Présidente, pour favoriser les universités, et je note cet exemple-là dans le cas de l'Université de Montréal.

Il y a une autre chose qu'on a apprise lors de, je dirais, la discussion que nous avons eue, pendant plusieurs heures, avec le ministre, c'est que les liens entre le gouvernement du Québec et, évidemment, le gouvernement fédéral sont parfois difficiles. Le ministre nous a avoué, évidemment, qu'il n'avait pas vraiment eu de rencontre avec les gens du gouvernement fédéral. Et, vous savez, lorsque nous étions là, il y avait un programme d'infrastructure du savoir de la part du gouvernement fédéral.Il y avait, n'est-ce pas, une enveloppe de 458 millions de dollars, Mme la Présidente, qui avait été affectée au Québec. À cela, donc, il y avait eu une espèce de programme commun, 597 millions qui venaient du Québec et 458 millions du fédéral qui étaient donc ajoutés et qui faisaient donc un investissement qui allait au-delà du milliard pour tous les établissements d'enseignement supérieur. Alors, jusqu'à entre 2009 et 2011, Mme la Présidente, ça a été un total de 235 projets, Mme la Présidente, dans les cégeps, dans les universités, dans les collèges privés agréés aux fins de subventions, qui auront été réalisés, Mme la Présidente, par le ministère, par l'entremise de ce programme. Et je pense qu'actuellement — le ministre nous l'a dit en commission parlementaire — il n'y a pas de lien qui existe actuellement avec le gouvernement fédéral, et je dois dire, Mme la Présidente, que c'est particulièrement important.

• (12 h 10) •

Maintenant, si je reviens sur la question de l'autre débat que nous avons eu au sujet du projet de loi n° 45, Mme la Présidente, il y avait un enjeu qui nous apparaissait très important, et cet enjeu, c'était évidemment, je dirais, la composition du conseil d'administration, le conseil d'administration, par exemple, de l'institut des mines, où on a débattu de l'importance de cet institut pour la région du Nord, parce qu'évidemment, le Plan Nord n'existant plus, il était très clair, pour nous, qu'il fallait qu'il y ait, à l'intérieur de cet institut, une amélioration, évidemment, de la vocation, de la coordination qui existe dans la région de l'Abitibi, et qu'il y ait véritablement des possibilités de relance, et cette relance peut se faire par une meilleure éducation. Et donc nous avons discuté de la composition du conseil d'administration, n'est-ce pas, de l'institut des mines et nous avons... Finalement, nous en sommes arrivés à une entente pour qu'il y ait vraiment une meilleure table de concertation au sein de l'institut des mines.

Même chose pour l'institut d'hôtellerie, Mme la Présidente, où, au niveau de l'institut de l'hôtellerie, dans lequel il y a des responsabilités ministérielles, il y avait à l'intérieur de cet institut à la fois un hôtel, à la fois un restaurant et en plus, bien sûr, une école ou, enfin, un institut qui enseigne, bien sûr. Ce que nous avions demandé, nous, c'était simplement de dire : Écoutez, sur la composition du conseil d'administration, il faudrait qu'il y ait au moins, à tout le moins une personne qui ait une expertise dans le domaine du marketing, dans le... parce que vous avez un restaurant qui doit fonctionner. Et donc c'était important, parce qu'il y a quand même une certaine rentabilité à aller chercher. On ne peut pas opérer ce restaurant-là à l'intérieur de l'institut de l'hôtellerie et penser, Mme la Présidente, qu'on ne va pas quand même s'assurer, là, qu'on est capables de faire nos frais.

D'ailleurs, j'avais expliqué au ministre l'importance de cela, parce que parfois… le restaurant n'était pas toujours plein, jusqu'au moment où quelqu'un a eu, à l'institut, la brillante idée… Lorsque Kate et William sont venus à l'institut, quelqu'un a eu la brillante idée d'offrir à tous les consommateurs du Québec la possibilité d'aller à cet institut, aller au restaurant, et d'avoir exactement le même repas que les deux monarques britanniques avaient eu à ce moment-là, lors de leur visite à Montréal. Bien, vous savez, ce restaurant-là, Mme la Présidente, il a été plein pendant six mois de temps. Alors, s'il n'y a pas quelqu'un au sein de l'institut qui n'a pas une expertise marketing... Le ministre nous a répondu : Il y en a plus qu'un, donc je n'ai pas besoin de mettre ça dans le projet de loi. Il y a plus qu'une personne qui a une expertise de marketing à ce niveau-là.

Alors, c'étaient, à quelque part, Mme la Présidente, différents enjeux à l'intérieur de ce projet de loi. Et je ferai grâce au ministre… Parce qu'on allait même, à un moment donné, toucher l'école d'agriculture à La Pocatière. Il y avait même le député de Côte-du-Sud qui nous a parlé de l'insémination des bovins. J'étais très surpris de voir que le ministre avait à l'intérieur de son projet de loi un règlement sur l'insémination des bovins; je ne pensais pas que le ministre de l'Enseignement supérieur aurait, à ce moment-là, à jouer un rôle. Alors, on en apprend tous les jours, Mme la Présidente.

Alors, pour toutes ces raisons-là, je dois vous dire, Mme la Présidente, que nous en sommes finalement arrivés à un accord, un accord qui a été long. Mais je tiens à rappeler cependant, Mme la Présidente… Pour ceux qui nous auraient reproché d'avoir pris trop de temps, bien, je peux simplement vous dire, Mme la Présidente, que le gouvernement n'a pas à rappeler à toutes les semaines, comme il peut très bien le faire, ce projet de loi n° 45. Et donc nous avons travaillé sur les 208 articles dans le but de mieux le faire fonctionner.

Et je reprendrai certains propos du ministre lorsqu'il a fait, entre autres, sa déclaration de base, sa première déclaration, lorsque nous avons accepté le principe de ce projet de loi. Et je reprends essentiellement les propos du ministre, et il dit, entre autres, évidemment, que c'est «un moyen privilégié pour intensifier la synergie entre l'enseignement supérieur et la recherche». Ça, là-dessus, on est tout à fait d'accord. Et on pense, nous, que, ce ministère, s'il est bien financé… ce dont nous avons des doutes, mais, s'il est bien financé, je pense que ce ministère peut, bien sûr, améliorer les choses.

Cependant, il dit une chose qui m'apparaît particulièrement spéciale, c'est qu'il dit, entre autres, qu'en créant ce ministère, eh bien, un ministère consacré entièrement à l'enseignement supérieur et à la recherche, il a dit : Nous allons valoriser le savoir. Là-dessus, évidemment, valoriser le savoir, Mme la Présidente, c'est une très bonne intention, mais le problème, c'est qu'encore faut-il donner les ressources à la hauteur de nos ambitions. Et ça, je pense que c'est ce qui nous préoccupe le plus pour l'avenir, maintenant que le ministère est en place, maintenant que ce ministère a été fait dans des délais raisonnables.

Je rappelle qu'on a appris d'ailleurs, en commission parlementaire, que même le ministère de l'Économie et des Finances n'est même pas officiellement créé. Alors, là, on vient de franchir une étape. Je pense qu'il n'y a même pas de projet de loi qui a été déposé pour créer officiellement le ministère de l'Économie et des Finances.

Là, cette fois-ci, nous avons collaboré dans le but, Mme la Présidente, de créer justement le ministère de l'Enseignement supérieur. Le ministre a maintenant tous les outils pour faire le travail auquel on s'attend, un travail de motivation. Et il doit… Et je l'incite, encore une fois, d'une part à s'attaquer au problème entre autres des cégeps en région au cours des prochains mois et des prochaines années, je pense que c'est un enjeu majeur. Il doit également… Et je l'inviterais beaucoup… Parce que je suis un député de Montréal, alors vous comprendrez qu'en tant que député de Montréal — je pense que vous comprenez ça, vous aussi, Mme la Présidente — je pense qu'il est très important que nos grandes universités, celles du haut savoir, celles qui vont finalement faire qu'on a un Québec où il va y avoir del'excellence, que ces universités-là vont être pleinement financées. Et, Mme la Présidente, je souhaite donc au ministre, malgré toutes mes inquiétudes, la meilleure des chances, et j'espère qu'il va faire le travail nécessaire pour qu'on puisse avoir un système d'éducation, au Québec, dans lequel on sera fiers, Mme la Présidente. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Alors, je reconnaîtrais maintenant M. le député de La Prairie.

M. Stéphane Le Bouyonnec

M. Le Bouyonnec : Merci, Mme la Présidente. Donc, à mon tour, je tenais à remercier les collègues de la banquette ministérielle et de l'opposition officielle pour le travail en commission parlementaire. Mais, d'entrée de jeu, malgré le fait qu'on ait pu nous entendre, j'aimerais quand même revenir sur, un petit peu, la genèse de la création de ce ministère, en rappelant… Et c'est évidemment le choix du gouvernement, et le gouvernement a le droit de faire ce choix-là, dans l'attribution et la répartition des responsabilités ministérielles, de recomposer finalement les portefeuilles des différents ministres.

À la base de la création du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science, Technologie, on aura tous compris que c'est en partie le ministère de l'Éducation. Et à ça il faut évidemment souligner le fait que la communauté de l'enseignement supérieur a bien accueilli le fait d'avoir un ministre à temps plein versus le fait d'avoir peut-être un demi-ministre. Donc, ça a eu un impact positif dans les communautés, puis on peut le comprendre.

Cependant, l'autre élément de modification touchait le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation. Pour des raisons certainement réfléchies, d'autres gouvernements avaient décidé de regrouper certaines fonctions économiques extrêmement importantes, et nous voyons aujourd'hui à quel point l'économie est importante. La faible croissance économique, ça pose même des maux de tête à notre ministre des Finances, et on peut comprendre pourquoi. Le fait de disloquer, d'un côté, le ministère du Développement économique, de l'Innovation et des Exportations en les répartissant dans différents ministères, ça a été pour nous, dès le départ, une source d'inquiétude. Et, je vous dirais, ça a tellement été une source d'inquiétude que notre chef, d'ailleurs, a voulu, d'une certaine manière, démontrer son mécontentement face à ça en faisant en sorte que, pour la deuxième opposition, c'est le même critique qui porte les dossiers de développement économique, de commerce extérieur et d'enseignement supérieur.

• (12 h 20) •

Maintenant, le nouveau design gouvernemental, quels sont les effets? Nous constatons, par exemple, que le terme «innovation», qui est si important, là, de nos jours, pour le développement de nos sociétés, a complètement disparu de l'un ou l'autre des titres ministériels. Nous comprenons que certaines fonctions, par contre, ont été récupérées à l'intérieur du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Mais, à l'instar de mon collègue de l'opposition officielle, le député de Mont-Royal, je ferais remarquer que nous avons quand même, au moment des travaux, remarqué très rapidement que le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et Technologie, eu égard à la mission du ministère, eu égard aux fonctions du ministre, semblait faire une part congrue aux fonctions de développement économique. Ce ministère-là avait davantage un design de ministère à vocation sociale qu'un ministère à vocation de développement économique. Donc, nous avons porté la plupart de nos interventions à ce niveau pour faire en sorte qu'effectivement ces missions, qui étaient auparavant au ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, continuent à être portées par le ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie.

Et il faut comprendre que c'est quand même quelque chose de très concret parce qu'évidemment, lorsque nous regardons la nouvelle politique de l'emploi, priorité… politique économique Priorité emploi, il y a quand même des volets extrêmement importants qui visent justement à stimuler l'innovation en faisant en sorte que la recherche, appliquée ou fondamentale, se rapproche des préoccupations des entreprises et que des ponts de convergence puissent être établis afin de créer du développement réel.

Maintenant, sur la question des autres interventions que nous avons pu faire. Nous avons attiré l'attention du ministre à plusieurs moments sur la question de la gouvernance. Les journaux sont remplis d'exemples, en ce moment, d'organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux qui semblent avoir des lacunes de gouvernance. Nous avons vu Tourisme Montréal, nous avons vu le CHUM et nous avons vu, dans le passé, à l'intérieur du réseau des universités aussi, un certain nombre de problèmes. Pensons, par exemple, aux primes de séparation à Concordia. Pensons à la dérive de l'îlot Voyageur.

En 2007, un rapport important, créé par un comité, là, dirigé par l'ancien recteur des HEC, Toulouse, avait donné quand même des directives et des indications claires en ce qui a trait à une saine gouvernance pour nos universités. Six ans plus tard, on se rend compte que certaines universités ont suivi un certain nombre de recommandations, pas toutes. Le gouvernement, dans le dépôt de son projet de loi, semblait avoir oublié… On avait un exemple. Vous allez me dire : Ce n'est pas si important, parce que ce n'était que l'institut d'hôtellerie… mais avait directement des modifications à la gouvernance, et donc à la composition du conseil d'administration, qui allaient à l'encontre, finalement, des recommandationsdu rapport Toulouse qui ont été suivies par certaines universités. Je prends ça en exemple, et je ne veux pas faire de cet exemple-là une généralisation, ça serait abusif, mais je crois que le ministre, dans le futur, avec son nouveau ministère, aura un rôle à jouer pour faire en sorte que la gouvernance des universités sera revue, de telle sorte que ces principes-là puissent être appliqués.

Évidemment, ça touche, cette question-là, d'autres chantiers qui ont été lancés. On comprend que, dorénavant, le ministre ayant son outil de travail, il pourra être à la hauteur, je dirais, des expectatives qui ont été créées suite au sommet sur l'éducation… l'enseignement supérieur. Rappelons qu'évidemment il y a eu la crise, il y a eu le sommet. Le règlement quant aux frais de scolarité, évidemment, pour notre part, nous avons été déçus parce que ça ne règle pas le problème de sous-financement chronique des universités. Et un certain nombre de chantiers ont été établis justement pour faire travailler la communauté, revenir au ministre avec des recommandations qui pourraient éventuellement améliorer le sort de tout un chacun à l'intérieur de ce réseau.

Rappelons que, sur les chantiers, nous avons évidemment la loi-cadre sur les universités. À l'intérieur de cette loi-cadre-là, on peut imaginer que la question de la gouvernance va être traitée, de la place, aussi, des universités, éventuellement, l'objet du deuxième chantier, c'est-à-dire le Conseil national des universités, qui ferait partie peut-être aussi de cette loi-cadre.

Sur ce deuxième point, le Conseil national des universités, je vous rappellerais que notre formation s'est montrée en défaveur puisqu'il s'agissait de la création, à nouveau, d'un autre organisme, alors… Et je veux faire tout à l'heure un petit peu la liste de tous les organismes que se propose de créer le ministre, et nous trouvons ça un peu trop, dans un contexte de contraintes budgétaires comme nous le vivons, de créer autant de nouveaux organismes, même si, de manière objective, dans l'absolu, il peut y avoir des fonctions intéressantes et de l'intérêt pour la création de ces organismes. Mais le contexte ne s'y prête pas.

Sur le Conseil national des universités, je rappellerais que nous avions déjà le Conseil supérieur de l'éducation, avec peut-être l'avantage d'avoir un oeil à la fois sur le début du réseau, le primaire, le secondaire, le collégial et universitaire. Aujourd'hui, nous aurons le Conseil supérieur de l'éducation pour le primaire et le secondaire, nous aurons le Conseil national des universités. Mais les cégeps tombent un peu, si vous me permettez l'expression, dans la craque. Ils n'ont pas leur conseil. Puis là on assiste un peu à une dislocation du continuum et puis des éléments d'intégration entre les divers conseils.

Pour ça, si jamais nous devons participer à la création du Conseil national des universités, à l'instar de l'Université de Montréal, Mme la Présidente, je vous dirais que nous souhaiterions que ça soit plutôt le conseil national de l'enseignementsupérieur plutôt que simplement des universités. Nous savons à quel point les cégeps ont de l'importance, et l'interface entre les cégeps et les universités, quelque part, ça doit être considéré comme un tout. Et j'invite le ministre à réfléchir à cette question.

D'autres chantiers étaient aussi mis de l'avant : la formation collégiale, le financement des universités et l'aide financière aux études. Tout ça pour dire que, maintenant que le ministère est créé, les attentes sont énormes. On a pu réaliser, comme l'a souligné le député de Mont-Royal, qu'il y a un malaise, en ce moment, au niveau universitaire, dans la mesure où… et j'espère que ce n'est pas la création du ministère qui a fait en sorte que certains travaux de planification budgétaire, de discussions permanentes avec les différentes institutions ont été retardés de telle sorte qu'aujourd'hui, alors qu'il ne reste que quelques mois avant le début de la nouvelle année de ces organisations-là, les gens sont, aujourd'hui encore, dans le flou artistique et un peu dans le noir.

D'ailleurs, le recteur le l'Université Laval, aujourd'hui, disait, à la limite, que Québec ne tenait pas ses promesses. D'autres recteurs étaient moins, si vous voulez, virulents, mais indiquaient qu'ils n'avaient pas eu de coup de téléphone. Et effectivement le député de Laurier… Sainte-Marie, annonçant une bonne nouvelle, a promis à ces recteurs-là que, dans quelques semaines, ils auraient un coup de téléphone du ministre, entre autres pour élaborer les projets de partenariat, qui, rappelons-nous, sont la source principale du nouveau réinvestissement. Donc, c'est un peu un cas le cas, contrat de performance. On n'est pas contre cette approche, parce que ça permet éventuellement au ministre d'avoir un meilleur contrôle; encore faudrait-il que le ministère se mette au travail.

Alors, la question qu'on pourrait se poser : Est-ce que tous les délais de la création du ministère et les énergies qui ont été consenties à créer ce ministère ont fait en sorte que les urgences et les priorités d'offrir un cadre financier stable et prévisible aux universités n'ont pas été rencontrées et que nous nous retrouvons à nouveau un peu comme dans une crise, comme ce qu'ils ont vécu lorsque le gouvernement, prenant le pouvoir, a évidemment aboli la hausse des frais de scolarité du précédent gouvernement, qui générait une première coupe dans les budgets universitaires et aussi pour donner une coupe de 250 millions, qui ajoutait vraiment à un stade déjà critique? Finalement, le gouvernement, pour jouer en fait sur les fins d'année financière du gouvernement puis du réseau universitaire, le petit mois de différence, par un tour de passe-passe comptable, permettait de basculer et de pelleter en avant une partie des déficits.

Alors, la question du financement des universités, évidemment, aujourd'hui, à la lumière de ce que nous avons vu dans la dernière mise à jour économique du gouvernement avec le déficit de 2,5 milliards, peu importent les raisons qui ont mené à cet état de fait, je ne reviendrai pas là-dessus, ça a été moultement commenté, nous devons réaliser que ce 2,5 milliards, c'est quelque chose d'important. Et, dans les années futures, nous voyons très bien que nous sommes encore en déficit. Nous voyons très bien que, pour la première année, suite aux 2,5 milliards, le ministre des Finances devra trouver peut-être un 500 millions de coupures additionnelles; l'année suivante, un autre milliard. Alors, où le trouvera-t-il?

Lorsque la politique a été annoncée économique, Priorité emploi, sur le 2 milliards d'annonce, le ministre des Finances le disait lui-même, en fait, il y avait 700, 800 millions qui étaient déjà à l'intérieur du cadre budgétaire et 1,3 milliard, qui étaient finalement des sommes qui devaient être des dépenses supplémentaires à l'extérieur du cadre budgétaire. Ce qui signifie, à la lecture de tout ça, qu'on peut raisonnablement penser que la politique de recherche et d'innovation, pour laquelle on dit que c'est un investissement de 3,7 milliards de dollars sur cinq ans — rappelons-nous qu'on a un cadre financier sur trois ans, j'oublie les deux dernières années, mais il y a quand même un 2,1 milliards, là, pour les trois prochaines années — on peut raisonnablement penser que, si le gouvernement devait appliquer des coupes additionnelles, si les revenus n'étaient pas au rendez-vous à nouveau ou l'inflation ou peu importe, on pourrait penser raisonnablement que les universités et le milieu de la recherche universitaire et la recherche en général pourraient écoper.

Alors, lorsqu'on est face à des faits qui sont aussi troublants, j'invite donc le ministre, maintenant, avec son nouveau ministère, peut-être à donner l'heure juste aux organisations qui sont sous sa responsabilité, particulièrement les universités, d'éviter les fausses promesses, d'éviter de faire en sorte que la planification budgétaire…

Une voix : Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Oui, M. le leader du gouvernement.

• (12 h 30) •

M. Traversy : Mme la Présidente, dans le cadre du débat actuel sur le projet de loi n° 45, le ton est excellent. Nous demanderions simplement aux parlementaires, en cette Chambre, de faire attention à leurs propos qui pourraient imputer des motifs à des collègues, ou encore utiliser des propos non parlementaires qui sont proscrits à notre lexique. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, M. le député de La Prairie, M. le député de La Prairie, je vais vous inviter à la prudence dans vos propos, tout simplement.

M. Le Bouyonnec : Alors, j'accepte le commentaire du leader adjoint, alors je vais reformuler : De faire... En fait, de faire des promesses que le gouvernement pourra s'assurer de tenir.

Plusieurs députés du gouvernement, à l'intérieur de la commission parlementaire, ont indiqué à plusieurs reprises que le gouvernement disait ce qu'il fait et faisait ce qu'il dit.D'accord, mais, dans le cas des universités, je pense qu'on doit tous reconnaître que la situation est grave et critique. Le recteur Breton, par exemple, a réaffirmé en commission parlementaire ce qu'il avait dit directement à la première ministre lors du sommet, c'est qu'il craignait, au niveau des organismes d'agrément — entre autres pour la médecine et d'autres — que le sous-financement chronique des universités fasse en sorte que nous puissions assister à des désaccréditations pour des domaines aussi importants, par exemple, que la médecine. Écoutez, j'ai reposé la question au recteur Breton en disant : Est-ce que vous avez prononcé ces phrases,dans le cadre du sommet, sur le coup de l'émotion? Quelques mois après, est-ce que vous vous répétez? Il a répété ces phrases-là. Nous avons vu d'autres universités aussi, McGill, par exemple, avec presque 1 milliard de déficitaccumulé quant à l'entretien reporté.

Lorsqu'on regarde le tout, ça s'additionne. On est dans une situation où il est raisonnable que les gens puissent avoir des doutes sur les capacités du gouvernement de pouvoir livrer aux universités ce qui a été indiqué. Alors, la solution, je crois, si on devait se rendre compte que le gouvernement n'est pas en mesure de donner suite à l'un ou l'autre de tous ces chantiers, et finalement des attentes qui ont été créées : il y a peut-être lieu — le nouveau ministère pourrait se pencher là-dessus, avec ou sans l'aide du conseil national des universités — de voir à ce qu'on puisse donner davantage de flexibilité financière à nos grandes universités. Et, parmi ces flexibilités financières additionnelles, moult exemples ont été présentés, entre autres les frais de scolarité pour les étudiants étrangers, etc., et j'en passe — je ne veux pas aller trop loin dans le détail — ou même de permettre de financer, par exemple, pour des universités comme l'Université de Montréal, des cours de francisation — ça pourrait peut-être être un clin d'oeil pour la ministre de l'Immigration — pour permettre de faire immigrer des étudiants de langue... qui ne parlent pas le français, de telle sorte qu'ils se francisent à l'intérieur du cursus et que les sommes, finalement, des frais de scolarité augmentées puissent servir au budget de l'université. C'était un autre exemple.

Alors, Mme la Présidente, tout ça pour vous dire que je crois que le ministre a beaucoup de pain sur la planche. C'est un travailleur infatigable, on lui souhaite bonne chance, on lui offre notre collaboration et on souhaite que les éléments prioritaires soient : évidemment, la question du financement des universités dans le cadre de ses prochains travaux, que nos universités soient rassurées, aient une prévisibilité; la question de la reddition de comptes, d'alléger la reddition de comptes pour laquelle nous savons que des sommes importantes sont engagées de manière inutile; de favoriser une plus grande autonomie de nos universités; et de faire en sorte que le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie soit véritablement connecté et aussi en collaboration avec l'économie réelle, avec le monde des affaires, avec nos grandes industries. Et c'est sur ce, Mme la Présidente, que je vais terminer mon intervention.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, je vous remercie, M. le député de La Prairie. Je reconnais maintenant Mme la députée... Excusez, j'ai un...

Mme Dominique Vien

Mme Vien : …de Bellechasse, bien oui.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : ...de Bellechasse, effectivement.

Mme Vien : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bon matin, bonjour à chacun et à chacune. Alors, ça me fait plaisir, effectivement, à titre de parlementaire, de prendre la parole ce matin sur un important projet de loi, un projet de loi qui a commandé beaucoup d'heures de travail, Mme la Présidente, tout le monde le sait, un projet de loi important, aussi, parce qu'il vient confirmer la création du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, donc une situation qui vient un peu chambarder, bouger aussi, ce qui était, sous une autre administration, sous la coupe, donc, du ministère de l'Éducation. Il faut savoir qu'ici, avec la création de ce ministère, Mme la Présidente, là, c'est le ministère, aussi, du Développement économique qui n'existe plus. Alors, effectivement, c'est un projet de loi qui est important. Et, tout comme les collègues l'ont dit un peu avant moi, soit le député de Mont-Royal ou de La Prairie, il s'agit effectivement d'un choix légitime, d'un choix qui appartient à l'Exécutif, d'organiser, évidemment, le cabinet, le Conseil des ministres comme l'entend la partie ministérielle et comme l'entend la première ministre.

Toujours important de se rappeler d'où on vient. M. le député de La Prairie parlait de la genèse, il a raison de le souligner. Un ministère, donc, qui verra le jour officiellement dans les prochaines heures, peut-être, ou dans les prochains jours. Mais il faut spécifier que le ministre en question a pu vaquer à ses occupations que lui a confiées la première ministre le 19 septembre 2012, au moment de la constitution, de l'installation du nouveau Conseil des ministres, parce qu'évidemment l'Exécutif a adopté un décret à ce moment-là. Ce n'est que huit mois plus tard, faut-il le rappeler, que la partie gouvernementale a déposé un projet de loi voyant justement à la création de ce ministère. Et, à juste titre, le député de Mont-Royal soulignait tout à l'heure que, dans l'étude article par article de ce projet de loi n° 45, on se sentait quelquefois un peu bousculés d'aller rapidement parce que c'était important d'avoir ce projet de loi là, effectivement, pour fonctionner, alors que le ministre fonctionne déjà depuis plus d'un an avec le décret qu'il a reçu, et on se questionne, on se questionne pourquoi, Mme la Présidente. Si c'est si important pour le ministre actuel de l'Enseignement supérieur, pourquoi ça ne l'est pas pour le ministre… concernant les finances et l'économie? Mais ça, c'est un autre débat. On attend toujours un dépôt de projet de loi à ce niveau-là.

Donc, le 15 mai, c'est le dépôt du projet de loi en question, 45. Et, le 4 juin, nous avons, bien entendu, adopté le principe de ce projet de loi et, depuis l'automne, nous sommes à la tâche d'étudier article par article ce projet de loi.

C'est un projet de loi, je l'ai dit, je le rappelle, qui est très, très, très important, et je tiens à souligner que nous avons pris à peu près une soixantaine d'heures pour étudier la création d'un nouvel organisme de ce ministère. Je n'ai pas l'impression, Mme la Présidente, que nous avons utilisé des mesures dilatoires, bien au contraire. Je pense que nous avons fait oeuvre utile de prendre notre temps, parce que nous avons pu convaincre la partie ministérielle d'apporter certains aménagements, certains amendements, certains changements au projet de loi, et ces changements, ces amendementsserviront beaucoup mieux, je pense, toute la communauté des universités, des cégeps, tout ce qui concerne l'enseignement supérieur au Québec, la recherche, l'innovation. Je pense que nous avons eu raison aujourd'hui de prendre notre temps et d'apporter certains amendements dont… J'en parlerai dans quelques instants.

Vous vous rappelez, Mme la Présidente, hein? Des fois, on oublie ça, au Québec, à quel point on est bien munis en termes d'établissements d'enseignement supérieur : 19 universités au Québec, 48 cégeps, 47 collèges privés. Évidemment, ce sont tous des établissements, par la richesse de leur corps professoral, par la richesse également des projets qu'ils mettentsur la table, notamment en recherche, qui sont devenus, qui deviennent et qui deviendront, je l'espère, encore davantage des vecteurs du savoir. Cette recherche qui est, pour certains, fondamentale, pour d'autres, en recherche appliquée, dans nos collèges par exemple, est fondamentale. Elle est importante notamment au niveau du développement régional. On le sait tous, on en connaît dans nos régions, des cégeps, par exemple, qui sont carrément collés sur les besoins des communautés que le cégep dessert, collés sur les priorités des petites et moyennes entreprises de nos régions. Alors, c'est vous dire à quel point c'est carrément, là, indispensable, ce qui se déroule dans nos établissements d'enseignement supérieur.

• (12 h 40) •

Alors, nous avons, je le répète, travaillé avec beaucoup de rigueur, beaucoup de constance, beaucoup de sérieux pour en arriver, je crois, au meilleur projet de loi possible. Nous avons eu des collègues qui ont travaillé sans relâche, que ce soit du parti ministériel, ou du côté de l'opposition officielle, ou de la deuxième opposition. Je lève mon chapeau à chacun et à chacune, Mme la Présidente, parce que c'étaient plusieurs heures. Il y a des fois où ça n'a pas été comique à tous les jours, on va se le dire, mais je pense aujourd'hui que nous sommes devant une pièce législative qui satisfait quand même les parlementaires ici aujourd'hui.

Un des amendements qui a été apporté, Mme la Présidente, qui est très important, c'est d'avoir convaincu le ministre d'apporter un changement majeur au niveau de la mission du nouveau ministère qui va voir le jour, mais aussi d'avoir apporté un changement dans ce qu'est le rôle du ministre de l'Enseignement supérieur, c'est-à-dire d'avoir réussi à apporter toute cette notion importante de l'économie, du volet économique. Le député de Mont-Royal, tantôt, je pense, que… je ne reprendrai pas tout son exemple, mais il en a fait une démonstration éloquente, notamment avec l'institut d'hôtellerie et du tourisme. Quand on parle d'économie, quand on parle de marketing, ce sont tous des vases communicants et qui sont importants de considérer quand on est dans un univers d'enseignement supérieur, dans des établissements d'enseignement. Il faut être collé sur la réalité de nos entreprises, il faut être collé sur la réalité du monde qui nous entoure. Alors, ces gens-là ne sont pas désincarnés de la société québécoise et, je dirais même, ne sont pas désincarnés de l'ensemble du monde. Alors, il était important de pouvoir convaincre le ministre et d'y aller, donc, avec l'ajout de cette notion d'économie.

Bien sûr, Mme la Présidente, nous avons aussi insisté souvent — souvent — pour clarifier les rôles entre la ministre de l'Éducation maintenant et le nouveau ministre de l'Enseignement supérieur. Très honnêtement, ce n'était pas toujours évident de tracer la ligne entre les deux, et nous avons souvent insisté pour clarifier les choses à ce niveau-là.

On connaît aussi l'insistance, et on l'appuie là-dedans à 100 %, de notre collègue d'Acadie en ce qui a trait à la parité hommes-femmes sur nos établissements, nos conseils d'administration. Alors, bien entendu, nous avons fait front commun auprès de notre collègue pour convaincre d'insister, notamment avec l'institut des mines et l'Institut d'hôtellerie, pour qu'il y ait, sur leurs conseils d'administration, la parité hommes-femmes. Je pense qu'il est de notre devoir comme parlementaires, à chaque fois qu'il se présente une occasion justement de rappeler cet aspect fondamental des choses, qu'il y ait l'égalité entre les hommes et les femmes et qu'il y ait parité sur le conseil d'administration. Vous le savez, vous-même, vous me dites — je pense que j'ai raison de le souligner — qu'il faut… que nous soyons un homme ou une femme, un parlementaire, nous devons insister sur cette question.

Bien sûr, Mme la Présidente, donc ce sont des événements, des changements, des amendements qui ont demandé du temps. Et nous ne sommes pas gênés aujourd'hui devant cette pièce législative quand même qui porte aussi le sceau de l'opposition officielle, du Parti libéral qui a insisté, à plusieurs reprises, pour intégrer des changements qui sont fondamentaux mais dont on se réjouit aujourd'hui.

Mme la Présidente, vous dire, au passage, également — je vais juste vérifier le temps qu'il me reste — que je demeure inquiète quand même sur la suite des choses. Nous avons, à la Commission de la culture et de l'éducation, entrepris des auditions sur la gestion des universités. Quelles qu'elles soient jusqu'à maintenant, elles sont toutes inquiètes sur la suite des choses au niveau budgétaire. Elles se sont fait promettre, Mme la Présidente, pour 2014‑2015… l'année 2014‑2015, des augmentations de 8,5 %, un chiffre aux alentours de 1,7 milliard de dollars d'argent neuf dans leurs établissements. Or, ce qu'on nous dit, ce qu'on apprend aujourd'hui, que ce soit de l'Université de Montréal, que ce soit de Concordia, que ce soit des HEC, que ce soit n'importe quelle université montréalaise, parce que ce sont les universités montréalaises que nous avons auditionnées jusqu'à maintenant, elles sont toutes inquiètes pour la suite des choses. Pourquoi? Parce qu'elles n'ont pas de signal, Mme la Présidente.

Non seulement il y a 2,5 milliards de dollars qui manquent actuellement pour l'année en cours, c'est la conséquence directe de cette mauvaise gestion de ce gouvernement, mais on se rappellera aussi que le gouvernement a déjà demandé des coupures inimaginables aux universités. Alors, elles se retrouvent aujourd'hui avec une impasse budgétaire, et elles savent bien qu'elles ne sont pas, elles aussi, désincarnées de ce qui se passe au reste du Québec et qu'elles pourraient effectivement payer une facture. Payer une facture, pour elles, ça veut dire probablement entacher ou revoir un certain nombre de services qui ne pourraient pas être justement délivrés auprès de leurs étudiants.

Alors, vous me voyez très inquiète, Mme la Présidente, ce matin : une situation budgétaire, au Québec, qui est préoccupante, des universités qui se sont fait promettre mer et monde et elles se rendent compte aujourd'hui qu'il se peut qu'elles n'aient pas les argents auquel elles s'attendent pour faire un budget équilibré dans leur établissement.

Alors, Mme la Présidente, je vais terminer là-dessus, en rappelant, donc, au ministre ses engagements budgétaires auprès de ces établissements, pour lui rappeler également — parce que ce sont d'autres de ses collègues qui assistaient aux auditions des universités — que ces universités attendent son coup de fil. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Mme la députée de l'Acadie.

Mme Christine St-Pierre

Mme St-Pierre : Merci, Mme la Présidente. Alors, il me fait grand plaisir de prendre la parole dans le cadre du projet de loi n° 45, un projet de loi qui crée le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. C'est un ministère qui sera important dans l'appareil gouvernemental, bien sûr, et c'est un ministère qui est créé avec ce projet de loi qui comporte plusieurs articles : il y a des articles de concordance, bien évidemment, mais plusieurs articles qui créent le ministère — on parle de 208 articles. Alors, l'opposition officielle a adopté le principe du projet de loi et s'est assurée de bien faire le travail que la population attend des élus lors des travaux parlementaires.

Il y a eu certaines critiques, vraiment, qui ont été... qui étaient injustes, puisqu'on sous-entendait — ou enfin on le disait même carrément — que les députés de l'opposition officielle faisaient en sorte qu'on étirait le débat. Mais sachez, Mme la Présidente, qu'aujourd'hui on se retrouve avec un projet de loi qui est nettement meilleur que ce qui a été déposé au début de la commission parlementaire. C'est un projet de loi qui est bonifié, c'est un projet de loi qui est clair, c'est un projet de loi, aussi, qui éclaircit certains éléments.

Vous savez, comme ancienne responsable du ministère de la Condition féminine, j'étais très sensible — et je le suis toujours — aux questions de parité ou de zones de parité dans les conseils d'administration. Nous avions adopté une loi, sous notre gouvernement, sur... une loi sur la gouvernance, qui faisait en sorte que les sociétés d'État devaient faire en sorte que leur conseil d'administration atteigne une parité. Lorsque, pendant l'étude du projet de loi, des articles de concordance allaient dans des organismes où il y avait des conseils d'administration, je me suis assurée de vérifier s'il y avait soit la zone... en fait, la zone de parité, parce que je pense que ça, c'est pas mal reconnu dans les milieux, plutôt que la parité pure et dure. La zone de parité, ça peut être 40-60 ou 60-40, ce qui donne encore plus de marge de manoeuvre,parce qu'on peut aller même jusque... les femmes pourraient représenter 60 % des conseils d'administration plutôt que de se limiter à 50 %.

Alors, ça a été assez long. La première fois que j'ai parlé de cette question-là, c'était lorsque nous étions au chapitre qui traitait de l'institut des mines. Ça a été long, le ministre a dû prendre un certain moment de réflexion. Et la nuit lui a porté conseil puisque, le lendemain, il est revenu en acceptant la proposition de faire en sorte que le conseil d'administration soit dans la zone de parité, et ça a été la même chose également pour l'institut de l'hôtellerie.

Donc, simplement sur ces deux aspects-là, qui peuvent paraître, lorsqu'on rédige un projet de loi, pas nécessaires, mais, lorsqu'on allait dans certaines lois... Puisque nous étions à... puisque nous allions ouvrir certaines lois, bien, on en a profité aussi pour regarder un peu plus en profondeur les éléments de ces lois.

C'est, je le disais, un ministère qui est important, puisqu'il représente l'enseignement supérieur, donc on parle de nombreux collèges, universités également. Et, pour moi qui suis députée de la circonscription de l'Acadie, évidemment, c'est un projet de loi qui m'intéresse au plus haut point, puisque, dans ma circonscription, on compte trois cégeps et… dont un cégep anglophone, deux cégeps francophones, alors c'est nettement important. On parle de plusieurs milliers d'étudiants qui fréquentent ces institutions qui sont situées dans ma circonscription d'Acadie. Alors, pour moi, c'est évidemment un projet de loi qui m'intéressait au plus haut point.

• (12 h 50) •

La question du développement économique était complètement évacuée — pourtant, le lien est naturel — et nous avons insisté, évidemment, pour que cette notion de développement économique soit vraiment prise en compte et qu'on comprenne qu'évidemment la recherche, le développement doit aller de pair avec le développement économique.

Le projet de loi, nous a dit le ministre, était très bien accueilli. On en convient, ce projet de loi était bien accueilli, mais il fallait, bien sûr, faire le travail qui était nécessaire comme parlementaires. Et je pense que ceux qui sont intervenus en dehors de la commission parlementaire, les organismes, entre autres les syndicats qui sont intervenus, comprennent mal le rôle des députés, et ce rôle de député doit être réitéré, doit être rappelé. Et, pour avoir piloté des projets de loi… Et je me souviens que vous étiez, Mme la Présidente, en face de moi à ce moment-là. Entre autres le projet de loi sur le patrimoine culturel, il y a certains moments où je sourcillais. Vous me rappeliez à l'ordre — et vous le faisiez très bien — en me disant qu'il y avait un travail qui devait se faire, un travail, évidemment, en profondeur pour que le projet de loi soit le meilleur possible, et c'est ce qui est arrivé, alors je vous en remercie. Et j'espère que le ministre, qui est à ses débuts... C'était son premier projet de loi. Et je comprenais très, très bien à quel point il pouvait être fier, et excité, et tout ça, mais, même quand il le rappelait, ça ne nous impressionnait pas beaucoup, puisque nous savions que nous avions un travail très, très sérieux à faire.

Nous avons abordé certaines questions. Entre autres, il y a eu la question de la langue, puisqu'on avait un article de référence, de concordance qui allait dans la loi de la Charte de la langue française, et j'en ai profité pour rappeler au ministre que, dans la Charte de la langue française, il y a un article qui dit aux collèges et aux universités qu'ils se doivent d'adopter — cette loi a été adoptée en 2002 — des politiques linguistiques. Alors, j'ai posé des questions au ministre sur cette question-là. Il a dit que… Il a fait savoir que c'était important et que ça devait être révisé, il l'a dit rapidement. Après ça, il s'est un petit peu rétracté. Ça va mériter des éclaircissements éventuellement pour savoir quel est le message exactement qu'il a envoyé, parce que, lorsqu'on a rencontré… On rencontre présentement les universités en commission parlementaire. J'ai posé carrément la question aux HEC : Est-ce que vous avez entendu parler de quelque chose? Est-ce que le ministre vous a demandé quelque chose? Est-ce que le ministre vous a passé une commande à ce sujet-là? Puis ça a été non. Alors, je pense qu'il va falloir qu'on comprenne quel est le message exactement qu'il leur a envoyé, puisque c'est très important. C'est dans la loi, et, à la demande du ministre, il doit y avoir des comptes qui sont rendus.

Il a aussi… Lorsque je lui ai posé la question s'il était toujours d'accord pour que la loi 101 soit appliquée au niveau collégial, il a répondu qu'il était favorable à cette question-là, question qui m'intéresse encore, puisque je suis députée d'Acadie, et, dans mon comté, il y a trois cégeps, dont un cégep qui est anglophone. Et, si la loi 101 ou des… était appliquée à ce cégep — il y a beaucoup de francophones qui le fréquentent parce qu'ils veulent, ces étudiants-là, avoir une formation en anglais — ça voudrait dire que ça viderait le collège d'environ, je me dis… peut-être 2 000 étudiants. Alors, ce serait quand même assez…

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Excusez, Mme la députée de l'Acadie, excusez-moi. M. le ministre.

M. Duchesne : …parce qu'on ne peut pas mettre dans ma bouche des mots qui ne sont pas le cas.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Vous invoquez quel article?

M. Duchesne : J'invoque l'article sur imputer des motifs. Alors, sur la question du cégep en français, je n'ai pas donné de détails là-dessus. Alors, elle peut interpréter, mais il faut juste que ce soit présenté ainsi.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : D'accord. Alors, veuillez poursuivre, Mme la ministre… Mme la députée.

Mme St-Pierre : Merci, Mme la Présidente. On pourra sortir les transcripts. On pourra les envoyer au ministre avec plaisir. C'est exactement ce qu'il a dit.

Alors, Mme la Présidente, nous avons aussi, pendant les audiences que nous tenons sur les maisons… collèges, en fait les cégeps, présentement, il y a une énorme préoccupation sur les questions budgétaires. Des promesses, des engagements ont été pris d'augmentation très importante des budgets. Avec la mise à jour économique du ministre, qui a admis cette semaine qu'il s'était trompé beaucoup, les universités sont très, très, très inquiètes et elles sont venues nous le dire en commission parlementaire cette semaine, commission parlementaire qui se tient… Vous savez, à tous les trois ans, les universités viennent rendre des comptes, faire rapport de leur administration, et, sur cette question-là, vraiment c'était l'inquiétude. Ça nous a permis — et je termine là-dessus — d'apprendre que… On savait que les HEC avaient un M.B.A. en anglais seulement. Alors, théoriquement, le HEC de Montréal pourrait diplômer un étudiant d'une université… un collège francophone… en fait, une maison d'enseignement francophone, qui ne parle pas un mot de français. Alors, ça a été assez… C'était déjà sorti dans les médias il y a deux ans, et le HEC nous a appris que c'est la première ministre elle-même, lorsqu'elle était ministre de l'Éducation, qui avait autorisé ce programme aux hautes études collégiales en anglais seulement, le M.B.A. en anglais seulement. Donc, parfois, ça fait du bien d'entendre que certaines décisions ont été prises par des personnes qui croyaient à une formation en anglais et à une possibilité de faire un programme où on peut obtenir un diplôme dans une autre langue.

Alors, je termine là-dessus, Mme la Présidente?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Non, c'est terminé, vous aviez 10 minutes. Alors, c'est terminé, je vous remercie.

Mme St-Pierre :

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Ça a été une erreur de ma part, tout simplement. J'essaie de ne pas les faire deux fois. Alors, M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je suis heureux, Mme la Présidente, de prendre la parole dans le contexte de la prise en considération et, le cas échéant, de l'adoption du projet de loi n° 45. Donc, dans ce contexte, Mme la Présidente, je crois qu'il est important de rappeler évidemment la chronologie des événements.

En septembre 2012, par décret, le 20 septembre 2012, le gouvernement du Parti québécois a décidé de fusionner certains éléments, tantôt du ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, d'une part, et, d'autre part, du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Alors, par décret, parce qu'il était possible au gouvernement de le faire de cette façon-là en vertu de l'article 9 de la Loi sur l'exécutif, a été constitué, je dirais, administrativement mais non législativement, le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie.

Évidemment, cette décision fut prise, on vient de le souligner, par décret le 20 septembre 2012. Il est important, dans la chronologie des événements, Mme la Présidente, de constater que, huit mois après, soit le 15 mai 2013, il y a eu dépôt d'un projet de loi qui visait à, législativement, faire, de un, le constat, mais évidemment bonifier et entériner cette décision qui était tantôt de prendre une partie du ministère de l'Éducation et de la fusionner ou de la récupérer au sein du ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, ce qui nous donnerait évidemment, avec l'Enseignement supérieur… qui nous donne le projet qui est devant nous, le projet de loi n° 45.

Nous avons eu l'occasion, Mme la Présidente... Et j'ai eu l'occasion de siéger comme représentant de l'opposition officielle dans le cadre de l'étude article par article. Rappelons-nous, et j'y vais de mémoire : un projet de loi qui a 208 articles, qui vient modifier 51 lois, vient modifier 36 règlements, un projet de loi qui nécessitait évidemment un minimum, de un, de compréhension, de donner un minimum, également, de temps au ministre et à la banquette ministérielle pour expliquer et justifier ce qui était proposé et faire en sorte que la mission… Parce que nous avons eu, dès les premiers articles, Mme la Présidente, à statuer sur la mission de ce ministère qui reprenait… et nous avions avec nous l'opportunité d'avoir un organigramme de ce qui avait été le nouveau ministère au lendemain de la prise de décret. Donc, le 20 septembre 2012, par décret, le ministère a été constitué. Nous avons pu voir, administrativement, qu'il y avait toute une section intitulée «Recherche, innovation, infrastructures et collaborations internationales» qui avait été ajoutée à l'Enseignement supérieur, ainsi que la troisième grande boîte, si je peux m'exprimer ainsi, l'«Aide financière aux études et gouvernance interne des ressources».

Alors, il y avait là évidemment, au niveau de la philosophie d'action, au niveau de la justification, une importance de tenir un débat sur, je vous dirais, premier élément, les premiers articles, sur la mission de ce ministère, sur les fonctions que le ministre voulait s'octroyer et évidemment comment il aurait pu les mettre en application : Comment il peut ou non les mettre en application? A-t-il les outils nécessaires? Et aussi on a pu voir, Mme la Présidente, qu'il y avait un chevauchement…

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, étant donné l'heure, je vais vous demander si vous souhaitez poursuivre votre présentation au retour de la pause?

M. Tanguay : Tout à fait, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, je vais suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15  h 1)

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Veuillez vous asseoir. Bon après-midi à tous et à toutes.

Alors, l'Assemblée poursuit la prise en considération du rapport de la Commission de la culture et de l'éducation sur le projet de loi n° 45, Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Nous en étions avec M. le député de LaFontaine. Je vous laisse aller, M. le député de LaFontaine, vous pouvez poursuivre votre intervention.

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, effectivement, M. le Président, nous en étions à la prise en considération qui nous amènerait vers l'adoption finale du projet de loi n° 45, projet de loi, il est important de le rappeler, qui a pour but la création du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Alors, avant la pause du midi, M. le Président, j'avais eu l'occasion, en quelques minutes, de préciser évidemment l'importance du débat qui a eu lieu sur les assises, sur les justifications ou non d'y aller de certaines modifications à plusieurs autres lois, d'autres lois, M. le Président, qui sont au nombre de 51, 51 lois qui sont amendées par ce projet de loi, et 36 règlements. Donc, il s'agissait bien évidemment, comme opposition responsable, de faire en sorte que l'on puisse se prononcer sur des articles qui soient clairs, dont l'on connaît évidemment les impacts tangibles, et également de se prononcer et de pouvoir bonifier le projet de loi, et c'est ce que nous avons fait durant les heures qui nous ont occupés en commission parlementaire.

Deux lois importantes, M. le Président, parce qu'il y a deux ministères touchés, essentiellement : le ministère de la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport et évidemment l'actuel ministre, ministre de l'Enseignement supérieur, qui fait en sorte d'aller chercher, permettez-moi l'expression, un morceau des responsabilités qui sont déjà dans la Loi sur le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport et également un morceau non négligeable, Loi sur le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'exportation.

Ce qui, d'entrée de jeu, était très important pour nous, M. le Président, c'est de faire en sorte qu'en mettant ce pan innovation et exportation, en mettant ce pan surtout innovation sous l'égide du ministre de l'Enseignement supérieur, bien, qu'on ne perde pas évidemment le nécessaire maillage, la nécessaire collaboration et prise en considération tantôt des recherches que l'on fait dans nos universités, dans nos cégeps... On parle ici de recherches, d'une part, fondamentales, mais, d'autre part, de recherches appliquées, faire en sorte que, oui, on se pose des questions tout en conservant… Et j'ai particulièrement aimé, M. le Président, ce matin, entendre le ministre du Développement... pas du Développement économique, mais le ministre de l'Enseignement supérieur souligner à grands traits l'importance pour les universités de demeurer des centres de savoir, mais également de conserver leur pleine autonomie institutionnelle. On aura l'occasion, dans le contexte de la charte des valeurs, de parler de cette autonomie institutionnelle là, mais je referme la parenthèse, M. le Président, parce que vous pourriez me faire un rappel au règlement auquel je n'aurais aucune objection, et, en ce sens-là, il est important de revenir sur l'importance, l'importance de s'assurer que le développement économique puisse aussi — et ce n'est pas une tare, ce n'est pas un avatar, ce n'est pas un défaut — bénéficier de la recherche fondamentale, mais qu'elle puisse être appliquée. La recherche appliquée également doit pouvoir avoir cours dans ce contexte-là.

Principales statistiques de l'éducation, je pense que c'est important de s'y attarder, M. le Président. On parle des cégeps, on parle de l'enseignement supérieur, cégeps et universités. Pour les personnes qui nous écoutent à la maison, de quoi parle-t-on? 48 cégeps au Québec, c'est ce que nous avons, dont cinq anglophones. Il y avait, pour le trimestre d'automne 2011, tout près de 200 000, 195 499, tout près de 200 000 étudiantes et étudiants dans nos 48 cégeps dont cinq anglophones. Il est important de reconnaître également qu'il y a, là aussi, beaucoup d'implication au niveau des universités. Il y a 19 entités universitaires, 18 universités et un siège social, et — mêmesstatistiques de la session 2011, l'année 2011 — tout près de 300 000, 281 948 étudiants et étudiantes à l'université pour nos 19 entités, dont 18 universités.

Quels sont les indicateurs de performance? Lorsque l'on dit, évidemment : Apprendre un métier, évidemment il faut s'assurer que l'enseignement technique, également, au niveau du secondaire, après le secondaire III, on puisse y avoir un enseignement technique. Parce que des emplois, au Québec, il y en a, nous devons nous assurer que la main-d'oeuvre soit là et que les gens, sur une base individuelle… C'est ça, le Parti libéral du Québec, la liberté individuelle de choisir son métier, également la capacité et l'opportunité de pouvoir étudier dans le domaine qui nous passionne et de pouvoir performer. Au Parti libéral du Québec, c'est la réalisation de l'individu qui permet socialement d'en récolter les bénéfices. On ne pourra jamais, M. le Président, partager ce que l'on n'aura pas préalablement créé. On veut financer nos systèmes de santé, notre système d'éducation, ça prend des femmes, des hommes qui vont venir étudier et qui vont se passionner pour un métier, et ce n'est pas uniquement au niveau universitaire et collégial — c'est en bonne partie à ce niveau-là — mais également au niveau secondaire par de la formation technique. Les emplois sont là, nous devons former notre main-d'oeuvre, et, en ce sens-là, M. le Président, il est important de s'assurer que le financement des universités, des cégeps, des études supérieures puisse être là.

Nous avons toujours été de l'école de s'assurer du plein financement de nos universités, de nos cégeps, ça a toujours été notre position.Dans les dernières années également, on a eu l'occasion de le reconfirmer. Il est important de constater qu'il y a un énorme défi pour nos universités, on les entend en commission parlementaire quant à leur niveau de financement.

Et, en terminant, M. le Président, vous me permettrez de souligner que, durant cette commission parlementaire, il y a des paroles malheureuses qui ont été prononcées par le ministre de l'Enseignement supérieur, qui faisait en sorte de remettre en question le travail de l'opposition. Mais on se félicite aujourd'hui, M. le Président, d'avoir entendu le ministre dire qu'effectivement — alors je vois qu'il a un recul salué et salutaire — il y avait eu, en cette commission, des bonifications, des amendements qui font en sorte qu'aujourd'hui on a un meilleur projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) :Merci. Merci, M. le député de LaFontaine. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mise aux voix du rapport

Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, le rapport de la Commission de la culture et de l'éducation portant sur le projet de loi n° 45, Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, est-il adopté?

Des voix :Adopté.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. St-Arnaud : Oui, M. le Président. Alors, cela étant, si j'ai bien compris, nous avons adopté, M. le Président, la prise en considération du projet de loi n° 45.

Alors, je vais vous demander maintenant… je vais en profiter pour appeler un de mes dossiers, M. le Président, peut-être l'article 24, qu'est-ce que vous en pensez?

Projet de loi n° 35

  Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Cousineau) :Est-ce que vous avez le choix? Merci.

Donc, l'article 24 du feuilleton : l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des institutions sur le projet de loi n° 35, Loi modifiant le Code civil en matière d'état civil, de successions et de publicité des droits. Y a-t-il des interventions? M. le ministre de la Justice.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, il me fait plaisir de prendre part aujourd'hui à cette nouvelle étape relative au projet de loi n° 35, cette étape de la prise en considération du rapport de la Commission des institutions, qui a procédé, les 22 et 23 mai dernier, les 4, 10, 11 et 12 juin, ainsi que le 26 novembre dernier, à l'étude détaillée du projet de loi n° 35, Loi modifiant le Code civil en matière d'état civil, de successions et de publicité des droits. Ce projet de loi, je vous le rappelle, M. le Président, avait été présenté à l'Assemblée le 17 avril 2013, et son principe y avait été adopté le 28 mai 2013.

• (15 h 10) •

Alors, on me permettra d'abord, M. le Président, de remercier les collègues de cette Assemblée qui ont participé à l'étude détaillée de ce projet de loi, notamment le député de Fabre, qui est le porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice; la députée de Montmorency, porte-parole également en matière de justice, cette fois, pour le deuxième groupe d'opposition; et tous les députés, M. le Président… je me contenterai de nommer les deux porte-parole, mais tous les députés qui ont participé à ces séances fructueuses qui nous amènent aujourd'hui à débattre du rapport de la commission avant son adoption finale, je le souhaite bien, M. le Président, d'ici la fin de la semaine, parce que les travaux, vous l'aurez compris, M. le Président, se sont faits sur la base d'un respect réciproque, et je pense que nous avons réussi à travailler d'une manière particulièrement constructive.

M. le Président, je ne serai pas très long à cette étape, quelques minutes seulement peut-être pour vous rappeler que ce projet de loi n° 35 comporte, comme son titre l'indique, des mesures en matière d'état civil, de successions et de publicité des droits.

Sans entrer dans tous les détails du projet de loi, M. le Président, j'aimerais rappeler qu'il propose d'abord, en matière d'état civil, des mesures visant à pallier à certaines difficultés vécues par les personnes transgenres et transsexuelles concernant notamment la publicité du changement de nom et de la mention du sexe ainsi que les conditions pour obtenir le changement de la mention du sexe. Et, à cet égard, M. le Président, je suis particulièrement fier de l'ajout d'un élément qui n'était pas prévu dans la version initiale du projet de loi n° 35, d'un amendement que j'ai présenté durant les travaux de la Commission des institutions et qui, M. le Président, retire du Code civil, retire de l'article 71 du Code civil la condition consistant à avoir subi avec succès une chirurgie de réassignation sexuelle pour obtenir la modification de la mention du sexe à son acte de naissance.

Cette disposition, M. le Président, qui a fait l'objet d'un consensus, que j'ai présentée et qui a fait l'objet d'un consensus à la Commission des institutions sera donc dans le projet de loi et devrait entrer en vigueur en 2014, en même temps que le règlement qui encadrera les nouvelles formalités à remplir pour obtenir le changement de sexe à son acte de naissance. Il s'agit là, M. le Président, vous l'aurez compris, d'un changement majeur dans notre droit. Certains, et je les comprends, M. le Président, auraient souhaité que l'Assemblée nationale aille encore plus loin, et un jour, j'espère pas si lointain, nous irons plus loin, mais, à ce moment-ci, je crois que nous devons être très fiers d'avoir franchi une étape que nous n'envisagions même pas de franchir il y a à peine quelques mois.

Toujours, M. le Président, en matière d'état civil, et plus particulièrement concernant les actes de décès, des dispositions confèrent dorénavant au Directeur de l'état civil le pouvoir de dresser l'acte de décès d'une personne disparue chaque fois qu'un tribunal a déjà déclaré une autre personne coupable d'avoir causé soit le décès de la personne disparue soit la disparition de son corps.

Enfin, le projet de loi apporte des mesures visant à moderniser certaines façons de faire afin de permettre la transmission par voie électronique des déclarations relatives aux événements de l'état civil comme les naissances et les décès. Alors, ça, M. le Président, c'est donc en quelques mots le premier volet, eu égard à l'état civil.

Le deuxième volet porte sur les successions, parce qu'effectivement, M. le Président, le projet de loi n° 35, en matière de successions, et plus particulièrement concernant les testaments, propose des mesures permettant aux personnes sourdes qui ne savent ni parler, ni lire, ni écrire de recourir aux services d'un interprète pour faire un testament notarié ou un testament devant témoins et ainsi disposer de leurs biens à leur décès comme elles l'entendent.

Troisième volet, M. le Président, du projet de loi : la publicité des droits. En cette matière, le projet de loi propose de nouvelles mesures concernant la présentation des réquisitions d'inscription au registre foncier et des mesures visant à régler certaines difficultés en matière de publicité foncière.

Alors, voilà, M. le Président, en quelques mots ce que contient ce projet de loi. Il a été, comme je vous l'ai dit, travaillé en commission parlementaire depuis déjà quelques mois, amendé, notamment sur cette question des conditions pour modifier la mention du sexe à son acte de naissance, une modification... un amendement important. Et je vous soumets donc ce rapport en souhaitant qu'il soit adopté aujourd'hui, et que nous puissions franchir cette étape, et éventuellement, M. le Président, si la Chambre y souscrit, que nous puissions procéder à l'adoption finale avant la fin de la semaine. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le ministre. Merci, M. le ministre de la Justice. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Fabre, à vous la parole pour 10 minutes.

M. Ouimet (Fabre) : Merci. 10 minutes?

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Non, c'est vrai, vous avez droit à 30 minutes, excusez-moi.

M. Gilles Ouimet

M. Ouimet (Fabre) : Je vais essayer d'être bref, M. le Président, mais j'ai l'habitude de dire que 10 minutes, c'est le temps que ça me prend pour placer ma voix, faire mon introduction, préparer mes collègues. Mais je vais être bref, je vais être bref.

Mais tout de même je pense que ça vaut la peine, c'est... Le ministre vient de faire des commentaires sur le rapport de la commission suite à l'étude détaillée, et je suis d'accord avec les commentaires qu'il a faits. J'ajouterai cependant quelques observations sur ce processus que nous venons de vivre parce que, bien que le travail a été fait de façon, comment dire… à l'enseigne de la collaboration, comme c'est la marque de commerce de la Commission des institutions depuis le début de la 40e législature, présidée de main de maître par le député d'Ungava, il y a tout de même, même à la Commission des institutions, des moments où il peut y avoir des petites tensions parce que nous vivons dans cet environnement où, malgré notre désir collectif de servir le bien public, de travailler dans l'intérêt collectif, de temps à autre, M. le Président, nos intérêts politiques immédiats peuvent nous amener à, disons, diverger d'opinion, et je ferai quelques commentaires par rapport à ça.

Ceci dit, dans un premier temps, moi aussi, je tiens à remercier tous les collègues qui ont participé aux travaux de la commission, qui y ont consacré plusieurs heures, je pense, une vingtaine d'heures. Et d'ailleurs, M. le Président, je suis encore un bébé député, un jeune député, je me suis donné la peine… puisque nous étions à l'étape de la prise en considération du rapport, j'ai fait une chose étrange, j'ai lu le rapport de la commission. Même si j'avais participé à tous les travaux, je me suis dit : Ce ne serait pas une mauvaise idée de lire le rapport puisqu'on va le prendre en considération, et je tiens, M. le Président, à souligner la qualité du rapport. Nous bénéficions, à l'Assemblée nationale, d'équipes de soutien, des gens, les secrétaires, tous ceux qui participent à nos travaux, qui travaillent dans l'ombre pour appuyer les députés, et je tiens à les remercier parce que, particulièrement en lisant le rapport de la Commission des institutions dont nous discutons, qui fait l'objet de notre discussion en ce moment, il est de grande qualité et donne un très bon aperçu du travail que nous avons fait.

Ce qu'on y apprend, c'est que le projet de loi n° 35, qui était, et je le rappelle, une reprise du projet de loi qui avait été déposé par le député de Saint-Laurent, alors ministre de la Justice, à la précédente législature, qui était le projet de loi n° 70, le ministre de la Justice actuel a eu la bonne idée de s'en inspirer pour déposer le projet de loi n° 35 qu'il a, il faut le reconnaître, bonifié à quelques endroits…

Ceci dit, donc, nous avons procédé à l'étude de ce projet de loi et nous y avons consacré une vingtaine d'heures, à peu près, réparties en cinq séances, le 4 juin, 10, 11, 12 juin et le 26 novembre. Il y a un délai de quelque cinq mois entre la quatrième et la cinquième séance, cinquième et finale, dernière séance, et c'est à propos de ça que j'aimerais faire des commentaires, M. le Président.

• (15 h 20) •

Ceci dit, avant d'aborder le vif du sujet, je tiens à souligner, parce que c'est pertinent, ça fait partie du rapport de la commission, que le projet de loi, qui comptait 43 articles, suite au travail très sérieux, très rigoureux des députés, on a procédé à l'adoption de 25 amendements. Sur un projet de loi qui compte 43 articles, c'est quand même un bon rendement. Et je suis heureux de souligner que nous avons bonifié le projet de loi.

Ce projet de loi qui a, le ministre y a fait référence, entre autres, porté sur un changement qui peut sembler, comment dire… ne soulèvera pas les passions, l'ensemble de la population, mais on a corrigé, par ce projet de loi, des injustices, des traitements qui étaient, à notre point de vue, inéquitables pour certaines personnes, certaines catégories de personnes, notamment pour les personnes sourdes qui, jusqu'à ce que nous adoptions, puisque j'ai bon espoir que nous allons adopter ce projet de loi… les personnes sourdes ne pouvaient pas faire un contrat notarié. C'était interdit puisque la personne sourde ne peut pas communiquer avec le notaire qui a pour fonction de s'assurer des volontés du testateur, puisque la personne sourde, qui ne peut pas parler, ne peut pas communiquer directement avec le notaire qui doit… Je n'entrerai pas dans le débat. On m'invite à préciser la notion de «sourde et muette», M. le Président, et je voudrais répondre aux collègues, mais c'est un peu technique, mais l'idée étant que la loi ne permet pas à la personne sourde, qui ne peut pas communiquer directement ses volontés au notaire… le notaire ne pouvait pas, à ce moment-là, prendre le testament et l'enregistrer comme un acte notarié. Et donc nous avons, M. le Président, fait ce changement, et, en cette Chambre, certains de mes collègues ont déjà souligné… disons critiqué la réponse de la Chambre des notaires, parce que, M. le Président, la Chambre des notaires s'est opposée à ce changement en insistant sur le caractère essentiel de la communication entre le notaire et le testateur, et ce qui rendait, selon la Chambre des notaires, ce changement incompatible avec la fonction notaire. Mais, tout de même,nous avons fait ce changement, et je pense que c'est une amélioration.

Ceci dit, M. le Président, malgré tout, je demeure désolé que nous ayons rejeté un amendement que nous avions proposé, qui visait à simplifier la rédaction d'un des articles. Et malheureusement le ministre a insisté pour conserver la version longue, alambiquée de l'article 40. Je le déplore encore, mais ça ne nous empêchera pas d'appuyer et l'adoption du rapport et, éventuellement, l'adoption du projet de loi, au final.

Ceci dit, M. le Président, j'aborde l'aspect le plus délicat, en fait, de ce débat. Je dis «délicat»parce que je trouve malheureux, alors que nous avons, dans le cadre des travaux de la Commission des institutions, fait la démonstration que nous travaillons de façon, en fait c'est presque toujours le cas, nous travaillons en collaboration… Nous avons connu un épisode un peu — ah! je cherche le terme — «déplorable» est un peu fort, mais disons…

Une voix :

M. Ouimet (Fabre) : …désagréable, merci, désagréable, c'était en lien avec le changement que le ministre a évoqué, c'est-à-dire permettre à une personne de changer le sexe au niveau de l'État civil sans que nous ayons recours à la chirurgie. Parce que, jusqu'à maintenant, M. le Président, le Code civil exige, pour une personne majeure domiciliée au Québec qui désire obtenir un changement de la désignation de son sexe à l'État civil, que cette personne ait subi des traitements médicaux ou chirurgicaux. C'était l'objet du débat.

Malheureusement, M. le Président, ce changement, que nous venons d'adopter lors de la dernière séance de la commission, ne faisait pas partie du projet de loi dès le départ. Et c'est, en ce qui me concerne, le point regrettable. C'est que ce changement qui exigeait, de la part de notre société, une évolution, c'est un changement qui bouleverse les gens qui ne sont malheureusement pas familiers avec cette réalité. Moi-même, M. le Président, avant que nous n'entreprenions les consultations particulières, j'avoue ne pas avoir été très familier avec cette réalité de ces personnes qui se désignent les trans, c'est-à-dire transgenre et transsexuel. Je n'étais pas très familier avec leur réalité, leur triste réalité. Parce que, lors des consultations particulières, nous avons eu le privilège d'entendre ces drames que ces personnes-là vivent au quotidien, et c'est ce qui a motivé, au bout du compte, l'ensemble des parlementaires à adhérer à ce changement.

Le problème, M. le Président, c'est que — et c'est le but de mon propos en ce moment — je pense que le ministre de la Justice aurait dû, dès le départ, dès le dépôt du projet de loi n° 35, annoncer le changement qu'il souhaitait faire, de sorte que nous aurions pu… et c'est le but du processus législatif de donner avis à la population des changements que nous proposons d'adopter. Nous tenons des consultations sur le changement proposé, nous discutons, nous débattons des changements proposés et, ultimement, nous les adoptons si ces changements sont ceux souhaités par la société. Malheureusement, M. le Président, le ministre n'a pas jugé opportun d'insérer ce changement dès le départ du projet de loi, alors qu'il a lui-même — peut-être qu'il l'a reconnu en commission parlementaire — été sensibilisé dès son entrée en fonction. Donc, dès l'automne 2012, il avait été sensibilisé à cette problématique et il avait, à ce moment-là, pris connaissance des arguments qui étaient très convaincants pour justifier ce changement, c'est-à-dire qu'un changement identique a été adopté en Ontario.

La Commission des droits de la personne… le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario avait, si je ne m'abuse, en avril 2012, rendu une décision qui ordonnait au gouvernement de la province d'adopter ce changement, ce que l'Ontario a fait au mois d'octobre 2012. Le ministre de la Justice nous a dit candidement, lors des travaux de la commission parlementaire, avoir été au courant de cette situation-là, et, malgré tout, le dépôt du projet de loi n° 35, qui a eu lieu, je crois, au mois d'avril dernier, ne portait pas sur cette question, de sorte qu'on s'est retrouvés, M. le Président, lors de la dernière séance du mois de juin, notre quatrième séance alors que le projet de loi avait presque franchi toutes les étapes, nous avions à ce moment-là adopté presque tous les articles, ce n'est qu'à la quatrième séance de travail, l'étude article par article, que le ministre nous a annoncé qu'il déposait cet amendement.

L'opposition officielle a tenté de convaincre le ministre que ce n'était pas une façon régulière de procéder, et malheureusement, et c'est le seul moment de nos travaux en commission, M. le Président, où on a senti qu'il y avait une certaine tension, et, comble de malheur pour moi, c'était le jour de mon anniversaire, mais j'ai défendu mes convictions et j'ai tenu mon bout, M. le Président. Malheureusement, je l'avoue, ça a été une journée triste pour moi, souligner mon anniversaire jusqu'à… je pense que nous avons terminé nos travaux vers 10 heures, 10 h 30, sur cette note d'affrontement. Il y avait un débat assez intense avec le gouvernement sur cette question. Alors, ça, c'est ce qui s'est passé en commission parlementaire.

Ce qu'il est important de souligner, M. le Président, et je l'ai répété sur à peu près toutes les tribunes depuis ce temps-là, l'opposition officielle n'était pas contre le changement, le changement qui était proposé. L'opposition officielle reprochait au gouvernement la façon avec laquelle elle proposait ce changement, parce que, pour l'opposition officielle, il était nécessaire qu'il y ait des consultations spécifiques sur ce point avant qu'il soit adopté. Et le ministre avait lui-même reconnu la nécessité de faire des consultations ministérielles, à l'interne, pour voir si le changement nécessitait des modifications de politiques ou d'autres modifications législatives. Or, le ministre lui-même reconnaissait qu'il y avait du travail à faire, mais que, malgré tout, il avait choisi de procéder de cette façon.

Alors donc, depuis le mois de juin, M. le Président, j'ai répété, j'ai réitéré… et j'ai même écrit au ministre, dès le mois de septembre, pour lui faire part de la volonté de l'opposition officielle de procéder à l'adoption de ce changement si nous procédions de façon régulière, et ça a quand même pris deux autres mois, au mois de novembre, pour que le ministre accepte cette façon de procéder pour que nous tenions des consultations, et la même journée, le 26 novembre, toute la question était réglée, et nous avons, tel que nous l'avions annoncé, adopté le changement qui était proposé, qui est, le ministre l'a dit tantôt, un pas. Ce n'est qu'un pas, il y aura d'autres pas à franchir, mais, à tout le moins, nous avons, comme société… du moins, c'est ce que la Commission des institutions propose au terme de son étude article par article du projet de loi n° 35, de faire ce changement pour permettre aux personnes trans d'obtenir une reconnaissance de leur situation auprès de l'État civil sans subir ce que la Commission des droits de la personne, ce que les spécialistes reconnaissent, au plan juridique, comme étant un traitement cruel, d'exiger de la personne qu'elle subisse une intervention chirurgicale très douloureuse. C'était, de l'avis de ces personnes, un traitement cruel, et il fallait corriger cette situation. C'est ce que la Commission des droits de la personne du Québec recommandait, et nous faisons, aujourd'hui… nous recommandons ce changement, et je suis satisfait et je suis convaincu que c'est un changement positif pour la société québécoise.

Ceci dit, en conclusion, M. le Président, sur cet épisode, j'espère que nous éviterons de nous placer dans ces situations, et la meilleure façon de le faire, M. le Président, c'est de respecter notre processus législatif. Que legouvernement qui dépose un projet de loi annonce ses intentions, c'est le but de la présentation du projet de loi, c'est le but du débat qui s'enclenche à partir de ce moment-là, de laisser savoir à l'ensemble de la société québécoise des changements que nous envisageons, et particulièrement quand on parle de ces questions d'état civil liées à la personne, ce sont des questions très délicates, très sensibles.

Alors, je suis convaincu que le ministre de la Justice a pris de bonnes notes de mes propos et que nous pourrons, et je le fais, j'envisage... j'anticipe avec beaucoup de plaisir que nous reprenions nos travaux à la Commission des institutions, travaux très intenses depuis le début de l'automne… Le président opine, il est d'accord, il est très, très occupé. Alors, nous allons poursuivre nos travaux, M. le Président.

Je conclus mes remarques. Je suis heureux de proposer à cette Chambre que nous adoptions le rapport de la commission sur le projet de loi n° 35. Merci, M. le Président.

• (15 h 30) •

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de Fabre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur ce projet de loi? Oui? Mme la députée de Montmorency?

Mme Michelyne C. St-Laurent

Mme St-Laurent : Oui. Merci, monsieur…

Le Vice-Président (M. Cousineau) : À vous la parole pour... Vous êtes la représentante. Alors, allez-y pour 30 minutes.

Mme St-Laurent : Merci, M. le Président. C'est avec un enthousiasme non caché que je viens, aujourd'hui, appuyer ce projet de loi au nom de mon parti. Et, M. le Président, nous avons salué à quelques reprises l'initiative du ministre de la Justice d'améliorer l'accessibilité à la justice pour tous. Je tiens, aujourd'hui, à remercier encore une fois le ministre de la Justice, mais pas seulement le ministre de la Justice, je voudrais remercier aussi le député de Fabre, le député de D'Arcy-McGee qui n'est pas là, mais qui ont contribué… Je me souviens de la fameuse virgule, entre autres, où on a passé une heure et demie sur une virgule. La députée de Bourassa-Sauvé, les députés du gouvernement qui étaient là, et le président aussi, le député d'Ungava.

Au fil des ans, M. le Président, je dois vous dire que ça a été toute une saga et, vous savez, après un travail d'autant de mois, qu'on en vient à cette conclusion aujourd'hui, c'est un soulagement pour nous, c'est un soulagement pour la population aussi. Au fil des ans, de nombreuses difficultés dans l'application du Code civil du Québec ont été constatées. Effectivement, il semble que certaines injustices soient apparues et il est bien temps d'y remédier. Entre autres, mon collègue de Fabre en a parlé, pour les sourds-muets entre autres, pour le fait de faire un testament authentique.

Écoutez, je n'ai pas remercié... les personnes que je veux remercier aussi, ce sont tous ceux qui ont contribué à cette commission, qui nous ont apporté des éclaircissements. Entre autres, je ne peux pas tous les nommer, mais, entre autres, je veux parler du Barreau, de la Chambre des notaires. Même si je n'ai pas toujours été tendre avec la Chambre des notaires, je les remercie pour leur participation. Évidemment, nous avons reçu, M. le Président, de nombreuses personnes qui représentaient les transgenres, et plusieurs transgenres également qui nous ont montré la réalité, bien que je la connaissais un peu. Je vous en parlerai tout à l'heure.

Avec les années, notre société a évolué; j'en suis heureuse. Les lois qui l'encadrent doivent en faire tout autant, et c'est ce qu'on fait aujourd'hui. Aussi, lors des consultations particulières, les groupes invités nous ont fait part de plusieurs recommandations et ont mis la lumière sur diverses bonifications possibles que nous avons étudiées. Je les remercie encore pour tout le temps qu'ils ont consacré à ce projet de loi. Mais je tiens à remercier aussi ceux qui nous ont envoyé des mémoires et qui ne se sont pas présentés à la commission. On a tenu compte d'ailleurs de tous ces mémoires. Tout le travail a été fait. Leur participation... Et, en passant, quand je dis : Tout le travail a été fait et bien fait, je veux dire qu'il n'y avait aucune partisanerie dans le travail que nous avons fait sur la réforme du Code civil, et nous faisons pareil sur le Code de procédure civile. C'est un travail intense, sérieux et sans partisanerie. Leur participation, à tous ces gens-là, est nécessaire à la bonne santé de notre démocratie. Leurs propositions et recommandations ont élevé le débat et nous ont certainement guidés.

Lors de l'étude détaillée de ce projet de loi, nous avons discuté de divers points que je ne répéterai pas, mes collègues l'ont fait, avec toujours à l'esprit d'en arriver à une loi qui réponde adéquatement aux objectifs d'une justice équitable et accessible. Nos débats, entre autres ceux ayant porté sur la question des transgenres, ont apporté un éclairage nouveau sur un sujet délicat qui soulève bien des passions. Je suis heureuse de pouvoir affirmer aujourd'hui que nous sommes finalement parvenus à une entente.

Il y a plusieurs années déjà, j'ai fait une des premières causes de jurisprudence de changement de nom d'une personne qui n'était pas transformée. À l'époque, c'était quelque chose, ça fait déjà il y a plus de 20 ans, je ne compte plus les dizaines d'années, M. le Président, et... pour vous dire comme c'était un sujet chaud depuis longtemps, et, personnellement, je savais tout ce que ça impliquait. Et j'excuse, justement, les députés de l'opposition officielle qui ne connaissaient pas tous les problèmes qu'ils rencontraient. D'ailleurs, ça a retardé le dossier parce qu'il fallait qu'ils prennent connaissance. Je les excuse et je me... Écoutez, je me faisais beaucoup de mauvais sang pour ces personnes-là parce que je disais : Le projet de loi, ça n'avance plus, ça bloque. Et je me suis rendu compte que je ne pouvais pas trop pousser parce que moi, je m'y connaissais et des collègues du côté de l'opposition n'avaient pas vécu cette expérience-là.

Ces personnes vivent des situations qui engendrent un lot important de difficultés. Et cette opération, je tiens à vous le dire, je la connais et je tiens… Je ne vous la décrirai pas. Il y a un député qui est sorti de mon caucus quand j'ai commencé à décrire l'opération parce que… Disons qu'il y en a que ça leur fait mal, là. Je tiens à vous dire que j'appelais ça une opération barbare, surtout pour des gens qui étaient réticents. Pour les autres, c'est extrêmement difficile. Ce n'est pas une simple opération, et c'est une opération, je vais vous dire, terrible, et ça dure longtemps, les effets, c'est quelque chose.

C'est notre rôle... Et maintenant c'est notre rôle, comme représentants de la population et comme législateur, de les soulager d'une partie de ce fardeau. Ils n'auront plus besoin, maintenant, de cette transformation. Et on retrouvait des cas... Une personne pouvait s'appeler Micheline, et c'était marqué, sur le registre d'état civil «masculin». Un autre pouvait s'appeler Jacques, et c'était marqué «féminin». Vous imaginez ces gens-là lorsqu'ils allaient pour un emploi? L'employeur trouvait qu'ils avaient les compétences et voyait, à un moment donné, Micheline devant lui, et, oh, devant elle, et... ou devant lui, et là, ah, mon Dieu! Sexe masculin. Je vais vous dire qu'il y a beaucoup de gens qui se sont sentis rejetés des emplois suite à ça.

Et sans compter qu'il y a des pays où ces gens-là, qui partent avec un nom féminin ou un nom masculin avec un sexe contraire dans leur passeport, ces gens-là sont en danger de mort dans certains pays dans le monde. Ça va jusque-là, M. le Président. Et je voudrais que les gens soient conscients que, si nous avons modifié cette loi, c'était pour éviter toute discrimination, que ce soit en matière d'emploi, que ce soit... en matière de passeport et en d'autres matières. Je vais vous dire que c'étaient des gens qui subissaient des pressions énormes de toutes parts, tous côtés. Ils se ramassaient dans les hôpitaux, carte d'assurance maladie, nom féminin et sexe masculin. C'était partout.

C'est donc avec enthousiasme et avec le sentiment du devoir accompli que j'aborde la prochaine et dernière étape de ce projet de loi. Lors de l'étude détaillée de ce projet de loi, nous avons discuté de divers points avec toujours à l'esprit d'en arriver à une loi qui réponde adéquatement aux objectifs d'une justice équitable et accessible. Nos débats, entre autres, ont porté sur les sujets énumérés.

Je suis heureuse de pouvoir affirmer aujourd'hui que nous sommes finalement, avec la bonne volonté, sans partisanerie, parvenus à une entente. Enfin, le devoir est accompli. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme la députée de Montmorency. Est-ce que... Bien, principe d'alternance, ce serait supposé d'être à vous, M. le député de Blainville. Non? Mme la députée de Bourassa-Sauvé, allez-y pour 10 minutes.

Mme Rita de Santis

Mme de Santis : Merci beaucoup. Pour combien?

Le Vice-Président (M. Cousineau) : 10 minutes.

• (15 h 40) •

Mme de Santis : Merci beaucoup. M. le Président, ce projet de loi, comme son titre l'indique, propose de modifier le Code civil en matière d'état civil, de successions et de publicité des droits. Ce projet de loi, bien qu'en apparence ne soit pas spectaculaire, vise à apporter des changements qui ont un impact réel dans la vie des Québécois et Québécoises.

Ma participation a été limitée à deux jours de consultation publique, au printemps dernier, et aux consultations de cet automne, et l'étude de quelques articles du projet de loi touchant particulièrement les transsexuels et les transgenres. Même si je voudrais parler du projet de loi dans son ensemble, je vais plutôt m'en tenir aux audiences et études auxquelles j'ai participé.

Tout d'abord, je voudrais remercier le ministre de la Justice, le député de Chambly, le porte-parole de l'opposition officielle en justice, le député de Fabre, la députée de Montmorency et le député de Blainville, ainsi que tous mes collègues députés qui ont participé aux délibérations de la Commission des institutions sur le projet de loi n° 35, ainsi que le président, député d'Ungava, les membres du ministère, le personnel de la commission et les pages.

Modifier le Code civil, c'est modifier une loi fondamentale du Québec. D'une certaine manière, c'est comme toucher la Bible. Porter des modifications touchant l'état civil de la personne, c'est encore plus fondamental. En commission, ce que tous et toutes, nous avons recherché, c'est de faire de notre mieux, d'être à la recherche du bien de tous et toutes les Québécois et Québécoises, et sans partisanerie. Merci, M. le ministre. Merci, le député de Fabre. Merci, Mme la députée de Montmorency. Merci, M. le député de Blainville.

Rappelons-nous le préambule du Code civil du Québec : «Le Code civil du Québec régit, en harmonie avec la Charte des droits et libertés de la personne et les principes généraux du droit, les personnes, les rapports entre les personnes, ainsi que les biens.

«Le code est constitué d'un ensemble de règles qui, en toutes [manières] auxquelles se rapportent la lettre, l'esprit ou l'objet de ses dispositions, établit, en termes exprès ou de façon implicite, le droit commun. En ces matières, il constitue le fondement des autres lois qui peuvent elles-mêmes ajouter au code ou y déroger.»

Ce sont les groupes et leurs représentants qui sont venus nous faire part de leurs commentaires qui ont fait toute la différence. Les consultations particulières ont été une étape importante dans le processus d'étude du projet de loi. Ils ont enrichi nos réflexions concernant les multiples sujets traités par le projet de loi n° 35 et en particulier la situation des transsexuels et transgenres. C'est une situation que moi, je ne connaissais pas du tout. Mes propres réactions m'ont surprise. À la fin, j'ai réalisé comment les membres de notre société connaissent très peu les difficultés vécues par les personnes transgenres et transsexuelles, et je suis une de ces personnes.

D'après la loi actuelle, avant la proposition du projet de loi n° 35, les transsexuels et transgenres sont obligés de publier dans un journal et à la Gazette officielle le fait qu'elles demandent au Directeur de l'état civil le changement de leur prénom. Cette obligation de publication les force donc à révéler publiquement leur situation, ce qui pourrait avoir des répercussions négatives pour ces personnes.

Le projet de loi n° 35, dans sa forme initiale, proposait de dispenser le Directeur de l'état civil de s'assurer que des avis ont été publiés dans un journal et dans la Gazette officielle, dès lors qu'il était manifeste, à la vue du changement du nom demandé, que la demande de modification de prénom concernait une modification de l'identité sexuelle de la personne. De même, la décision du Directeur de l'état civil d'autoriser le changement de prénom dans ce cas n'aurait plus à être publiée. Toujours pour les mêmes raisons, le Directeur de l'état civil n'aurait plus à s'assurer de la publication d'un avis dans un journal et dans la Gazette officielle lorsqu'une personne présentait une demande de changement de la mention de sexe à son acte de naissance.

Mais, lors des consultations, au printemps dernier, ce sont les groupes qui sont venus nous faire part de leurs commentaires qui ont souligné que les personnes transsexuelles peuvent changer leur mention de sexe sur l'ensemble de leurs documents d'identité uniquement si elles subissent des chirurgies de réassignation sexuelle. Pour une femme trans, cette chirurgie implique habituellement l'ablation du pénis et des testicules, ainsi qu'une vaginoplastie et une augmentation mammaire. Pour l'homme trans, la chirurgie consiste en l'ablation des ovaires, de l'utérus et du vagin, voire des seins, ainsi qu'à façonner un pénis. Vous pouvez comprendre la crainte des complications, des pertes de sensation, des problèmes de santé. Ces personnes sont donc contraintes à une stérilisation forcée pour pouvoir changer la mention de leur sexe.

Les personnes transsexuelles qui n'effectuent pas ces chirurgies sont contraintes de dévoiler leur mention de sexe à chaque fois qu'elles présentent leurs pièces d'identité : permis de conduire, RAMQ, passeport, etc. Ces circonstances les placent dans des situations de dévoilement forcé de leur vie privée et intime, de discrimination, de refus de service, de curiosité malsaine, de danger lors de voyage à l'étranger. La plupart des personnes transsexuelles qui n'ont pas une mention de sexe qui correspond à leur identité de genre se sentent régulièrement angoissées et humiliées, dû à des propos négatifs à caractère transphobe, et finissent par s'isoler. Par exemple, certaines de ces personnes transsexuelles attendent à la dernière minute pour aller dans une clinique ou un hôpital pour recevoir des soins de santé ou elles n'y vont pas du tout par peur d'être rejetées. Presque 50 % font des tentatives de suicide.

Le printemps dernier, suite aux consultations, le ministre a déposé une modification au projet de loi n° 35, qui n'était pas prévue dans le projet de loi initial, que des modifications aux actes de naissance ne peuvent en aucun cas être subordonnées à l'existence que la personne ait subi quelque traitement médical ou intervention chirurgicale que ce soit. Une modification de telle importance ne se fait pas soudainement, sans transparence et sans discussion. Si le ministre l'avait prévue dans le projet de loi initial, cela aurait été autre chose. Nous avons conclu qu'il fallait que des consultations publiques soient tenues sur les modifications suggérées. Cet automne, plusieurs groupes ont été invités à venir nous présenter des mémoires. C'est vrai que très peu ont répondu à l'invitation, mais, en tant que législateur, il faut toujours agir dans la transparence.

Je suis heureuse que nous présentions aujourd'hui un projet de loi modifié pour permettre des modifications aux actes de naissance dans le cas de transgenres et transsexuels sans traitement médical ou intervention chirurgicale. Mais je suis aussi convaincue qu'il faut faire plus. Je me souviens le début des années 90. Il y avait des gangs de skinheads qui attaquaient des gays et lesbiennes. En tant que société, nous avons évolué. C'est nécessaire qu'on fasse la même chose quant à la discrimination basée sur l'identité sexuelle et l'expression de l'identité sexuelle. Les Québécois, tous les Québécois doivent être mieux informés. En plus, et je tiens cela à coeur, on doit mieux comprendre la situation, les problèmes des jeunes qui vivent cette crise d'identité de genre. Les modifications au Code civil, quant à la mention du sexe figurant à l'acte de naissance, s'appliquent uniquement à des majeurs domiciliés au Québec depuis au mois un an et ayant la citoyenneté canadienne. Il y a des enfants qui souffrent. On est obligé, à un moment donné, de faire face à cette situation.

Je veux aussi vous assurer que je crois que le principe de stabilité des éléments identifiant les personnes est important. D'après le projet de loi que nous allons adopter, les premiers règlements qui prescrivent les conditions nécessaires pour obtenir un changement à la mention de sexe et les documents qui doivent être fournis doivent faire l'objet d'une étude par la Commission des institutions avant l'adoption par le gouvernement. C'est important qu'on retienne les préoccupations de la SPVM. Personne ne veut que le projet de loi n° 35 soit utilisé au profit des personnes malhonnêtes qui essaieront de se forger de nouvelles identités.

Nous reconnaissons aussi que le retrait de l'exigence de chirurgie implique des défis significatifs, le premier étant celui du maintien de la stabilité du genre fondamental à l'identité d'une personne et le deuxième étant propre aux pratiques et lieux ségrégués sur la base du sexe, tels les prisons, les foyers pour personnes itinérantes, les centres de désintoxication, certains lieux d'entraînement, les vestiaires, etc.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : En conclusion.

Mme de Santis : Nous allons travailler ensemble pour y parvenir. Nous allons travailler ensemble pour réussir. Merci, M. le Président.

• (15 h 50) •

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Alors, je reconnais maintenant le député de Blainville. M. le député, vous avez 10 minutes.

M. Daniel Ratthé

M. Ratthé : Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, d'entrée de jeu, M. le Président, j'aimerais souligner le fait que j'ai joint la Commission des institutions il y a à peine deux semaines à titre de membre officiel, et je dois reconnaître que j'ai eu droit à un accueil chaleureux et que j'ai eu également… pu constater de mes yeux que c'est une commission qui travaille habituellement en bonne collaboration. Moi, je pense que le choc des idées ne veut pas dire qu'on ne travaille pas en collaboration. Toute discussion peut se faire dans le respect des autres. Et j'ai été à même de constater, pour avoir participé à d'autres commissions parlementaires où il y avait des fois plus d'effervescence, où moi-même, j'ai eu à jouer des rôles parfois où on devait confronter le gouvernement… J'ai été toutefois à même de constater que c'est une commission parlementaire, d'une part, qui travaille beaucoup, fort intéressante et dans laquelle on apprend beaucoup, et, d'une part… d'autre part, également une commission qui, je pense, a un souci… dont tous les membres ont un souci, M. le Président, de faire en sorte que les projets de loi qui sont adoptés le sont de manière à ce qu'on puisse, en fait, permettre à la population d'avoir les meilleurs outils, dans un projet de loi, pour pouvoir effectivement soit légiférer soit fonctionner.

Et je dois dire, M. le Président, que, dans le cadre du projet de loi n° 35, je suis arrivé dans le dernier droit, si je peux dire, mais un droit, un bout, une audition qui m'a, comme, je pense, la plupart des collègues de la commission… en tout cas nous a sûrement forcés à nous poser des questions, M. le Président. Nous avons eu à nous remettre en question, à remettre nos pensées, nos façons de voir en question puis à se demander — et c'est peut-être là, en tout cas, un des aspects les plus intéressants de notre travail de législateur — comment nous pouvions, par un projet de loi, faire évoluer notre société, faire en sorte que nos lois reflètent les changements importants qui arrivent dans notre société. En écoutant les gens qui sont venus, les groupes qui sont venus nous parler des problématiques que rencontraient les transgenres, je me disais qu'il y a eu des étapes dans notre société, entre autres, où probablement que nos mères ont dû faire des combats très difficiles, lorsqu'il a été le temps de parler de contraception — c'était un changement de moeurs important — lorsque publiquement, quelques années plus tard, quelques décennies plus tard, je devrais dire, les personnes homosexuelles, gaies ont dû s'affirmer, sortir dans la rue pour faire avancer leurs droits, et j'avais l'impression, en tout cas, lors de l'audition des représentants des groupes transgenres, que nous avions à faire un pas, que nous avions à montrer le chemin pour qu'éventuellement on soit encore plus capables de faire accepter aux gens de la société cette évolution et surtout, surtout, M. le Président, les difficultés que vivent ces personnes au quotidien.

Ce qui m'a beaucoup frappé, c'est que ces difficultés-là ne sont pas seulement rencontrées par des adultes, ce sont des difficultés qui parfois sont rencontrées par des jeunes de huit, neuf, 11 ans, 12 ans et qui sont très au fait de leur différence en termes de genre, qui vivent, selon leurs dires, dans des corps qui ne sont pas en réalité ce qu'ils ressentent intérieurement et qui rencontrent des difficultés d'intimidation, qui rencontrent des difficultés au secondaire surtout, M. le Président, et qui doivent, tout ce temps-là, se faire accepter. Parfois, c'est très difficile. Parfois, ils n'y arrivent pas : taux de suicide important. Et ça, ça m'a touché, M. le Président, d'entendre ça. Je pense qu'on a tous été sensibilisés.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : M. le député de Blainville, je vous arrête quelques secondes pour demander… S'il vous plaît, ceux qui veulent parler, vous avez des salles adjacentes au salon bleu, vous pouvez vous déplacer dans ces salles, mais on aimerait avoir le silence, s'il vous plaît. Poursuivez, M. le député de Blainville.

M. Ratthé : Merci, M. le Président. D'autant plus que je pense que c'est un sujet très important.

Alors, écoutez, on a eu un… Ce n'est pas un débat. Je pense qu'on a eu des discussions, j'allais dire, même, à la limite, émotives, qui venaient tous nous chercher sur justement à quel âge, d'une part, on allait faire en sorte que la décision de pouvoir changer sur un permis de conduire, ou sur un acte de naissance, ou sur une pièce d'identité… donc de pouvoir faire changer le genre d'une personne sans que celle-ci — et ça, c'était le grand pas — n'ait à subir aucune opération, aucune intervention chirurgicale. Et je dois vous dire qu'on s'est beaucoup questionnés même à savoir est-ce qu'on allait permettre, par exemple, avec l'autorisation d'un parent, d'un tuteur, d'un adulte, à ce qu'un mineur puisse effectuer ce changement-là, et nous avons convenu après moult discussions que, pour l'instant, je pense, il fallait faire un premier pas, un pas important, et pouvoir accorder à une personne majeure cette possibilité-là de pouvoir changer de genre et de pouvoir, en fait, pour cette personne-là, dans beaucoup de cas, franchir le pas final qui allait lui permettre de vivre en société comme elle se sent, comme elle désire vivre. Et je pense que, dans cet esprit-là, M. le Président, nous avons accompli quelque chose de très important.

Je n'étais pas là au moment où le ministre a déposé l'amendement. J'entendais tout à l'heure le député de Fabre, qui m'a dit que… qui disait, en tout cas, que ça avait eu… En fait, il avait un certain regret, à savoir que ça ne s'était peut-être pas passé aussi harmonieusement qu'il l'aurait souhaité. Mais parfois, quand on fait des changements, ça ne peut pas toujours être harmonieux. Comme je disais tantôt, à condition que ce soit dans le respect, je pense que les résultats sont importants. Et je vous dirais, moi, qu'au contraire je pense que le ministre de la Justice, ce faisant, a fait preuve de beaucoup de souplesse. Et je pense que, dans notre… Quand on fait des lois, quand on les amende, quand on les corrige, on doit faire preuve de souplesse. Il arrive parfois qu'on dépose un projet de loi et que, n'ayant pas perçu... ou du moins s'être rendu compte qu'il y a des lacunes,ou du moins qu'il y a des modifications importantes auxquelles on n'a pas changé... devraient être apportées, je pense qu'au contraire, même si parfois ça apporte de vives discussions, il est important de pouvoir faire preuve de souplesse. Et j'ai pu constater qu'à la fin tous les partis étaient prêts à faire preuve d'une grande souplesse et surtout de paver la voie pour un changement important dans notre société.

Et ce que je pense que je retiens également de ce projet de loi, mais surtout de cette partie de projet de loi, M. le Président, c'est le fait qu'il y a eu un voeu également de tous les membres de la commission à ce que ça ne s'arrête pas là,que notre réflexion, à savoir… On vient de faire un pas important : on vient d'accorder à des personnes majeures le droit de changer de genre sans intervention chirurgicale. On s'est tous dit qu'on devait, dans un avenir quand même relativement rapproché, M. le Président, poursuivre notre réflexion, à savoir :Est-ce que la société est prête à aller plus loin? Est-ce que, nous, comme parlementaires, comme législateurs, nous devons mettre en place les outils pour aller encore un peu plus loin et permettre aux personnes mineures, évidemment avec consentement de parents, et des études psychologiques, et tout ce que ça devrait engendrer... Est-ce qu'on devra, dans un avenir rapproché, faire évoluer encore un peu plus notre loi pour que toutes les personnes concernées, visées par cette problématique, puissent enfin pouvoir vivre leur vie de façon beaucoup plus… j'allais dire positive, de façon beaucoup plus, en tout cas, à leur ressemblance?

M. le Président, en terminant, bien, je voudrais remercier, évidemment, tous les gens qui sont venus nous rencontrer. Je pense que ça prend beaucoup de courage pour venir parler sur un sujet comme celui-là. On a eu une mère de famille qui est venue nous parler. On a eu des gens qui sont venus nous parler. Ça prenait quand même une bonne dose de courage, une bonne dose de conviction, et ils ont réussi à nous convaincre, en tout cas, jusqu'à un certain point.

Remercier également les collègues, autant le ministre que l'équipe ministérielle, l'équipe de… les gens de l'opposition officielle, deuxième groupe d'opposition, la présidence et tous les gens qui nous entourent, pour le travail qui a été effectué. Et je suis convaincu, parce que... pour y avoir participé maintenant depuis deux semaines, que je vais me plaire dans cette commission. Les sujets y sont passionnants, parfois un peu arides, je vous dirais, M. le Président, mais, bon, ça me permet d'apprendre et d'accumuler différents bagages au niveau de mon expérience personnelle. Et ça me fera plaisir, évidemment, de participer à cette prise en considération et de voter de façon positive pour ce projet de loi, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de Blainville. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cette prise en considération? Non.

Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la Commission des institutions portant sur le projet de loi n° 35, Loi modifiant le Code civil en matière d'état civil, de successions et de publicité des droits, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. St-Arnaud : Bien, M. le Président, je vais en profiter, puisque je suis toujours leader adjoint, pour appeler un autre de mes dossiers, le dossier n° 15, M. le Président.

Projet de loi n° 61

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cousineau) : D'accord. Alors, on voit que vous avez mis la table pour vous cet après-midi. Alors, article 15 du feuilleton. M. le ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 61, Loi visant principalement le recouvrement de sommes payées injustement par des organismes publics relativement à certains contrats dans l'industrie de la construction.

• (16 heures) •

Y a-t-il des interventions? M. le ministre de la Justice.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud :Merci, M. le Président. Alors, effectivement, M. le Président, il me fait plaisir de prendre la parole à l'occasion de ce débat sur l'adoption du principe de l'important projet de loi n° 61, Loi visant principalement le recouvrement de sommes payées injustement par des organismes publics relativement à certains contrats dans l'industrie de la construction.

Alors, M. le Président, ce projet de loi, que j'ai déposé à l'Assemblée nationale le 13 novembre dernier, est une suite logique du premier geste posé par notre gouvernement au début de son mandat, soit la présentation d'une loi pour enrayer la corruption et la collusion dans le processus d'octroi des contrats publics, la Loi sur l'intégrité en matière de contrats publics, la loi n° 1, M. le Président. Nous poussons maintenant plus loin notre démarche en présentant ce projet de loi, le projet de loi n° 61, qui vise, lui, à récupérer les sommes dues aux organismes publics en raison d'opérations malhonnêtes telles que de la fraude ou des manoeuvres dolosives.

Alors, M. le Président, sommairement — et on m'apporte le projet de loi, M. le Président, une copie supplémentaire du projet de loi — ce projet de loi n° 61 comporte deux volets. Le premier volet, que l'on retrouve aux articles 12 et suivants, vise à inciter les entreprises à rembourser les organismes publics avant que des recours juridiques ne soient entrepris. Ce premier volet, c'est le programme de remboursement. Le second volet du projet de loi n° 61 vise, pour sa part, à faciliter les recours civils au nom des organismes publics. C'est ce volet que l'on retrouve aux articles 3 et suivants. Donc, M. le Président, deux volets : premier volet, Programme de remboursement; deuxième volet, Règles particulières applicables aux recours judiciaires.

Si je reprends rapidement, M. le Président, les deux volets, d'abord le premier volet, le programme de remboursement, prévoit que le ministre de la Justice pourra créer un programme de remboursement afin qu'une entreprise puisse remettre les sommes qui pourraient avoir été obtenues à la suite de manoeuvres dolosives ou frauduleuses. Ce programme permettra notamment aux entreprises ayant posé des gestes répréhensibles de démontrer une volonté de changer leur culture organisationnelle, en plus de démontrer qu'elles sont de bonnes citoyennes corporatives. Toujours dans le but d'optimiser l'utilisation des ressources mises à notre disposition et de réduire ainsi le fardeau des Québécois, une telle mesure permettra aux entreprises concernées d'éviter une judiciarisation inutile des litiges, avec les désagréments et les coûts qui s'y rattacheraient. Il est entendu que la quittance que pourrait obtenir une entreprise suite au remboursement sera limitée aux seules divulgations faites par elle. Le projet de loi établit également une présomption à l'effet que le préjudice causé par une faute correspond à un certain pourcentage, déterminé par décret du gouvernement, du montant payé par l'organisme public concerné pour un contrat visé. Il appartiendra, le cas échéant, à une entreprise de démontrer au tribunal que le préjudice causé était moindre.

D'autres règles sont également prévues afin que soient recouvrées les sommes injustement payées lorsque sont intentés des recours judiciaires, tel d'allonger le délai de prescription à cinq ans, de permettre la prise de recours pour des actes fautifs commis dans les 15 ans précédant l'adoption du projet de loi et de transiger au nom d'un organisme public. Ces diverses mesures permettront une utilisation efficace des ressources des ministères et des organismes publics telles les municipalités si des procédures judiciaires devaient être intentées pour récupérer les sommes payées injustement.

Alors, en quelques mots, M. le Président, voilà donc le volet 1 de ce projet de loi — articles 12 et suivants — qui crée, donc, le cadre législatif encadrant le programme de remboursement.

Le deuxième volet, M. le Président, du projet de loi a pour objet, quant à lui, comme je le disais il y a quelques instants, d'établir des règles particulières applicables aux recours judiciaires. Le projet de loi permet ainsi au ministre de la Justice d'intenter pour le compte d'un organisme public un recours contre une entreprise qui a commis une faute, par exemple une manoeuvre dolosive, dans le cadre de l'adjudication, de l'attribution ou de la gestion de contrats publics dans l'industrie de la construction. Voilà, M. le Président, le résultat. Donc, comme je le disais tantôt, il y aura donc une présomption à l'effet que le préjudice causé par une faute correspond à un certain pourcentage — déterminé par décret du gouvernement — du montant payé par l'organisme public concerné pour un contrat visé.

Alors donc, M. le Président, deux volets essentiellement. Un premier volet qui est un programme de remboursement qui permettra, M. le Président, donc, de… qui permettra à une personne neutre et impartiale désignée de tenter d'amener les parties à s'entendre — on peut penser, par exemple, à un juge à la retraite — les sommes étant perçues étant redistribuées aux ministères et organismes publics en fonction du préjudice subi par chacun, déduction faite, dit le projet de loi n° 61, d'un montant de 20 % des sommes recouvrées pour payer les frais liés à la mise en application de la loi. Alors donc, M. le Président, programme de remboursement, c'est le premier volet. Deuxième volet, règles particulières permettant aux entreprises... permettant de faciliter les recours judiciaires.

M. le Président, donc, sur chacun de ces deux volets, les consultations particulières tenues depuis jeudi dernier nous ont permis d'entendre de la part de divers intervenants concernés qui se sont présentés à la commission plusieurs suggestions visant à bonifier le projet de loi n° 61. J'ai demandé, M. le Président, aux experts du ministère de la Justice qui travaillent sur ce dossier en étroite collaboration avec les experts du Conseil du trésor… j'ai demandé à nos experts de regarder avec attention les suggestions qui ont été faites et qui pourraient éventuellement faire l'objet d'amendements lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 61.

Eu égard, M. le Président, aux articles 27 et suivants, on retrouve certaines modifications à la Loi sur les contrats des organismes publics, donc à la loi n° 1, le chapitre C-65.1 de nos lois. Et, eu égard à ces articles, M. le Président, nous avons reçu quelques suggestions lors de la consultation particulière, des suggestions de modification de la part du Directeur général des élections, suggestions très pertinentes qui mériteront, j'en suis convaincu, une attention toute particulière des membres de la Commission des institutions lors de l'étude article par article du projet de loi.

Alors, M. le Président, donc, je vais me contenter de ces quelques mots en vous résumant, donc, ce projet de loi, projet de loi important. Je pense que le titre même du projet de loi le dit, il s'agit d'un projet de loi qui vise le recouvrement de sommes payées injustement par des organismes publics relativement à certains contrats dans l'industrie de la construction. Comment on fait pour recouvrer ces sommes, M. le Président? On crée d'abord un cadre législatif qui encadre un programme de remboursement. Donc, possibilité pour des entreprises de faire un remboursement en allant rencontrer un tiers désigné, qui pourrait être un juge à la retraite, et éventuellement, M. le Président, il peut y avoir entente sur un remboursement de certaines sommes. Alors, ça, c'est le premier volet.

Le deuxième volet, M. le Président, ce sont des règles particulières, des présomptions particulières qui permettront... en fait, des moyens plus costauds qui permettront, si le premier volet n'a pas fonctionné, qui permettront à l'État, qui permettront au ministre de la Justice, au Procureur général d'intenter des recours judiciaires pour aller récupérer ces sommes, et là l'État se donne un certain nombre de moyens particuliers, de moyens plus costauds pour aller récupérer ces sommes.

Alors, voilà, M. le Président. C'est, en quelques mots, ce que contient ce projet de loi. Nous avons, comme je l'ai dit, tenu des consultations particulières. Nous avons reçu plusieurs suggestions, nous sommes à les analyser en vue de bonifier ce projet de loi, et je souhaite qu'on adopte, dans un premier temps, le principe du projet de loi cette semaine, et, éventuellement, s'ensuivra l'étude détaillée avec certains amendements pour le bonifier. Tout ça dans un but que nous avons tous, M. le Président, d'aller recouvrer ces sommes qui ont été payées injustement par des organismes publics, notamment par le gouvernement du Québec. Je vous remercie. M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le ministre de la Justice. Alors, je cède maintenant la parole au député de Fabre.

M. Gilles Ouimet

M. Ouimet (Fabre) : Merci. Merci, M. le Président. Je crois, je dispose de...

Le Vice-Président (M. Cousineau) : De 60 minutes.

M. Ouimet (Fabre) : 60 minutes de plaisir. Puisque j'ai eu l'occasion, M. le Président, de placer ma voix, mon intervention tantôt, je vais pouvoir plonger plus rapidement dans le vif du sujet au plus grand plaisir de tous mes collègues ici présents cet après-midi. C'est vraiment le… tu sais — comment dire? — c'est l'après-midi de la Commission des institutions, c'est… On rend hommage au travail de la Commission des institutions, dont il y a plusieurs membres ici.

Une voix : ...

M. Ouimet (Fabre) : Pardon?

Une voix : ...

• (16 h 10) •

M. Ouimet (Fabre) : Oui, je m'excuse, M. le Président, j'ai été... Les collègues... En fait, je me réjouis parce que je sens qu'il y a beaucoup d'attention pour les... On a écouté avec beaucoup d'intérêt les propos du ministre et… bien là je vais profiter de cet intérêt des collègues pour essayer de maintenir leur intérêt pour les prochaines minutes dans ce débat.

J'ai l'habitude, M. le Président… Je me préoccupe de ceux qui nous regardent, même si — et je m'en excuse encore une fois — on m'a déjà fait la remarque, je bouge, je m'exprime avec les mains. Probablement que, si on m'attachait les mains, je deviendrais muet. Mais on a nos qualités et nos défauts, j'ai les miens. Mais on m'a aussi mentionné que j'avais tendance à bouger. J'ai développé cette mauvaise habitude alors que je fréquentais les mêmes endroits que le ministre de la Justice, c'est-à-dire les cours de justice de la province en matière criminelle.

Des voix :

M. Ouimet (Fabre) : Oui, fiou! Je sais que j'en ai inquiété plusieurs, mais, non, non, ne craignez...

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : J'apprécie votre collégialité, mais, si c'était possible de poursuivre en vous adressant au président. Poursuivez.

M. Ouimet (Fabre) : Oui, M. le Président, je m'excuse. Je vais essayer d'être plus... m'en tenir à mon texte pour éviter les situations embêtantes.

Ceci dit, donc, j'ai tendance à bouger et je vais faire l'effort, M. le Président, de vous fixer et de m'adresser à vous, quoique, j'ai déjà eu l'occasion, en parlant ici, de le rappeler, je crois beaucoup au parlementarisme qui est cet acte de prendre la parole entre nous, et on s'écoute, et c'est dans le choc de ces idées… Quelquefois, on ne partage pas le même point de vue au départ, mais, lorsqu'on prend la parole ici, on écoute les collègues, et c'est dans cet exercice que notre pensée évolue. Et c'est ça, la force du parlementarisme, un système auquel je crois beaucoup, qui a de grandes vertus. Et moi, je souhaiterais qu'on exploite davantage ce système, mais, pour faire ça, c'est que nous devons nous livrer à l'exercice, nous devons collectivement, les 125 députés, accepter d'être présents pas seulement physiquement, comme nous le sommes en ce moment, mais également présents d'esprit, ouverts au débat, ouverts à la discussion, et c'est dans cet exercice, M. le Président, que nous allons adopter de meilleures lois.

Je disais tantôt, je soulignais... J'ai pris l'habitude de rappeler pour les gens qui nous écoutent que nous en sommes au débat sur le principe. C'est-à-dire, dans notre procédure parlementaire, selon notre règlement, c'est la deuxième étape qui apparaît après la présentation du projet de loi, avant l'étude détaillée, avant la prise en considération du rapport et, si, évidemment, tout se passe bien, l'adoption du projet de loi. Donc, nous en sommes au débat sur le principe, débat qui porte, comme le rappelle le règlement, sur l'objet de la loi, sur ses valeurs intrinsèques, et c'est de cela dont il est question aujourd'hui.

Le ministre a présenté brièvement le projet de loi, a rappelé l'objet de cette loi-là, son titre, et je vous dirai d'emblée, M. le Président, que nous sommes favorables, l'opposition officielle est favorable au principe, donc à l'adoption du principe. Et je pense que je sens la tension, du côté ministériel, qui vient de baisser d'un cran en entendant mes propos, mais j'aurai tout de même— et peut-être que ça, ça va faire monter la tension du côté du ministre — quelques remarques, disons, moins encourageantes quant à l'état du projet de loi tel qu'il est en ce moment, des points qui sont, à mon point de vue, importants et qui vont au-delà de l'aspect technique de ce projet de loi, des aspects qui touchent les fondements mêmes d'une société de droit.

Quand on parle de modifier les règles de droit, les règles fondamentales, la responsabilité contractuelle fait partie de nos règles de droit, de notre Code civil, nos règles fondamentales. Et le projet de loi proposé par le ministre, le projet de loi dont nous discutons cet après-midi propose de modifier ces règles-là, et c'est un exercice, M. le Président… Si nous sommes d'accord de discuter de ces moyens, je pense qu'avant de conclure à la nécessité d'adopter ces moyens, de poser ce geste, qui est de modifier les règles fondamentales, les règles du jeu qui s'appliquent en matière de responsabilité contractuelle... C'est un geste grave, c'est un geste qu'en tant que parlementaires nous devons poser de façon... avec extrêmement de prudence et de retenue, et j'aurai l'occasion de citer, entre autres, le Barreau du Québec, qui rappelle l'importance de cette prudence. Donc, ça fera partie de mes commentaires.

D'entrée de jeu, M. le Président, et tel que c'est notre habitude, même si ça ne figure pas dans le règlement tel quel, le débat d'aujourd'hui sur le principe fait suite à la procédure habituelle que nous adoptons, c'est-à-dire après les consultations particulières. Je vous vois réagir. Vous savez l'affection, l'intérêt que je porte aux consultations particulières, et je prendrai quand même quelques minutes pour faire des observations parce que je fais souvent ces remarques en commission parlementaire sur notre façon de procéder. Non seulement il est absolument essentiel — et certains projets de loi plus que d'autres, évidemment — de tenir ces consultations particulières, mais, depuis que je suis député à l'Assemblée nationale, j'ai été à même de constater l'importance de ces consultations dans l'exercice de l'examen des projets de loi et dans la poursuite de l'objectif de la bonification de nos projets de loi. J'avais connu cette expérience de l'autre bout de la table, puisque, comme représentant du Barreau, j'avais eu, à plusieurs reprises, l'occasion de... le privilège de comparaître en commission parlementaire, à l'Assemblée nationale, pour faire des représentations sur des projets de loi. Mais, depuis que je suis député, je vois la richesse de l'exercice et je ne cesserai jamais d'insister sur cette étape essentielle.

C'est une étape essentielle, M. le Président, mais je suis obligé de nous critiquer dans la façon dont nous gérons cette étape essentielle. Et le projet de loi n° 61 offre, malheureusement, un bel exemple de comment notre façon de procéder, de façon tout à fait involontaire, de façon... dans la plus pure bonne foi, malheureusement, nous prive de cet outil, on ne peut pas l'exploiter comme il se doit. Et surtout — et c'est sans doute l'aspect qui est le plus troublant, à mon point de vue — de la façon que nous procédons, nous manquons de respect à l'égard des personnes que nous convoquons en commission parlementaire.

Je m'explique, M. le Président. En fait, pour les collègues de la Commission des institutions, qui ont l'habitude de m'entendre le dire à peu près à chaque occasion... Et même le député de Blainville, qui célèbre ses premières semaines comme membre de la Commission des institutions, réagit déjà, il m'a déjà entendu à quelques reprises faire ces commentaires. Alors, je m'excuse pour les membres de la commission, qui m'entendent régulièrement faire ce commentaire, mais je ferai ces commentaires — M. le Président, j'en prends l'engagement solennel — je ferai ces commentaires jusqu'au jour où nous modifierons nos façons de procéder afin que nous ne répétions plus cette façon de procéder, que j'estime inacceptable. Et je m'explique.

Comme je l'ai mentionné, le projet de loi n° 61 nous offre un bel exemple de cette situation-là, puisqu'il a... Le projet de loi a été déposé, et j'ai... Le ministre a mentionné la date, là, c'est à la fin du mois de novembre. Un projet de loi qui vise à offrir des solutions pour un problème sur lequel nous nous entendons tous, un fléau, une situationdéplorable, les sommes qui ont été volées, les sommes qui ont été fraudées de l'ensemble des contribuables, que ce soit... Peu importent les villes, peu importent les organismes publics qui ont été touchés, le Québec, les citoyens ont été volés de sommes d'argent, et le projet de loi n° 61 propose des moyens d'action pour tenter, dans la mesure du possible, de corriger cette situation inacceptable. Sur ce point-là, M. le Président, tous les parlementaires, sans exception, sont unanimes. Cet objectif est important, et nous devons prendre tous les moyens légitimes, tous les moyens légaux, tous les moyens nécessaires pour corriger cette situation. Sur ce point, il n'y a pas de problème.

• (16 h 20) •

Donc, le ministre de la Justice, après 14 mois dans ses fonctions, a proposé, à la fin du mois de novembre, le projet de loi n° 61. Le problème, M. le Président, c'est que, puisque nous étions en fin de session et que le gouvernement tenait à ce que nous entreprenions le débat sur ce projet de loi, nous avons décidé de tenir des consultations particulières à quelques jours d'avis. J'oublie les détails, là, mais nous sommes à, je pense, moins de sept jours d'avis entre le moment de la convocation de la commission… de la liste des personnes convoquées et la date de cette convocation.

Je vous laisse deviner, M. le Président, le résultat. Lorsqu'on s'adresse à des organisations importantes à qui on demande de faire un travail sérieux, de commenter un projet de loi… Est-il réaliste, est-il raisonnable de demander à une organisation comme le Barreau, comme l'Ordre des ingénieurs, comme la ville de Montréal, de leur demander de produire des commentaires, de produire un mémoire… Parce qu'évidemment, comme parlementaires, on souhaite avoir un document qui nous permet de connaître le point de vue des témoins. Est-il raisonnable, M. le Président, d'exiger, de la part de ces personnes, à quelques jours d'avis, de se livrer à ce travail quand on le veut sérieux? Et c'est ce que nous voulons tous.

Alors, M. le Président, je pense que nous devrions… À moins de nous placer dans une situation d'urgence, qui peut exister, je crois, M. le Président, que nous devrions modifier nos façons de procéder, de sorte que nous nous imposions une limite, à mon point de vue, d'au moins 14 jours avant de convoquer une organisation pour demander une critique constructive des projets de loi que nous voulons étudier, avant que nous convoquions ces organisations ou ces personnes en commission parlementaire. Et je le dis, évidemment, sous réserve d'une situation exceptionnelle, donc du pouvoir de convoquer à brève échéance. Mais je pense, M. le Président… Et j'espère qu'un jour je vais arrêter de prêcher dans le désert, sur mon île déserte, sur cette question. Je sais que tous les députés partagent le point de vue. Le problème, c'est qu'au-delà du fait qu'on le mentionne en présence des témoins qui viennent malgré les courts délais, malgré qu'on les place dans des situations impossibles… Alors, tous mes collègues, on est tous d'accord. Le problème, c'est qu'on ne corrige pas la situation, et, la fois d'après, ça recommence. Donc, je souhaite qu'un jour… Et là je vois tous mes collègues qui écoutent mes propos avec beaucoup d'intérêt, et je suis convaincu que, dans un avenir très rapproché, nous aurons procédé aux modifications nécessaires, de sorte que cette situation déplorable ne se reproduise plus.

Ce qui m'amène, M. le Président, à… D'ailleurs, nous avons reçu ce matin les commentaires du Barreau du Québec sur le projet de loi n° 61, et vous me permettrez… En fait, je pense qu'il serait utile que je fasse lecture de l'ensemble des commentaires du Barreau. Si j'ai le temps, je le ferai tantôt, mais vous me permettrez, M. le Président, de citer le premier paragraphe de la lettre signée par la bâtonnière du Québec, Me Johanne Brodeur, en date du 4 décembre 2013, lettre adressée au ministre de la Justice. Donc, je cite la lettre : «M. le ministre, le Barreau du Québec a pris connaissance avec intérêt du projet de loi n° 61 intitulé Loi visant principalement le recouvrement de sommes payées injustement par des organismes publics relativement à certains contrats dans l'industrie de la construction. Le Barreau désire vous faire part de ses commentaires au sujet de ce projet de loi d'exception. Le Barreau aurait souhaité comparaître en commission parlementaire, mais les trop courts délais de convocation l'en ont empêché.»

M. le Président, je suis convaincu que, parmi mes collègues, compte tenu de mes antécédents, certains pourraient être tentés de penser que j'ai influencé la rédaction de ce paragraphe. Ce n'est pas le cas, M. le Président. Donc, quand j'ai lu cette lettre ce matin, j'ai dit : Quel merveilleux adon, comme on dit. Alors, je ne pouvais pas m'empêcher de citer la bâtonnière du Québec, qui me rejoint. Et, je l'ai dit en commission parlementaire, particulièrement sur le projet de loi n° 61, compte tenu de la nature exceptionnelle des mesures, il est, à mon point de vue, totalement inconcevable qu'on propose d'aller plus loin dans l'adoption de ce projet de loi sans que nous nous donnions la peine de compléter l'exercice des consultations particulières. Avec le Barreau, à tout le moins.

Je sais également que… Je pense que c'est la STM qui nous a transmis et qui veut transmettre des commentaires. Donc, M. le Président — et je reviens à mon point de départ — je pense qu'on peut très bien procéder à l'adoption du principe et refaire des consultations. Nous l'avons fait dans… Nous venons de compléter la prise en considération du rapport sur le projet de loi n° 35, et c'était un exemple où, malgré le fait que nous avions franchi l'étape de l'adoption du principe, malgré le fait que nous avions presque complété l'étude de tous les articles du projet de loi, nous avons, d'un commun accord, après avoir discuté d'une façon de procéder, nous avons convenu de suspendre l'étude article par article et nous avons procédé à des consultations particulières.

Alors, je pense… et j'invite le ministre de la Justice à se rappeler cette procédure que nous venons d'adopter, et je l'invite à ce que nous procédions au même exercice et que nous entendions le Barreau du Québec sur le projet de loi n° 61 parce qu'ils ont… J'y ferai sans doute référence de façon plus détaillée tantôt si j'ai le temps, mais ce que le Barreau mentionne, il y a des remarques absolument essentielles, des problèmes avec le projet de loi tel qu'il est rédigé, et je pense que nous ne… Le travail de législateur serait, malheureusement, incomplet si nous ne bénéficiions pas des commentaires du Barreau du Québec en commission parlementaire lors de commissions additionnelles. Et, de la même façon, je ne peux pas présumer de ce que la STM, la Société de transport de Montréal, veut nous dire, mais, comme organisme public qui peut être visé par cette loi, je pense qu'on ne peut pas justifier par l'urgence d'agir par rapport au projet de loi n° 61 de refuser d'entendre ce groupe-là. Je pense que ça, ce serait inacceptable, et on ne doit pas le faire.

Ceci dit, sur la question d'urgence, je pense qu'il est important de souligner une chose, M. le Président. À première vue, je sais que quelques collègues ont déjà soulevé cette question depuis fort longtemps, et peut-être serions-nous tentés d'agir rapidement à cause que cette situation remonte à plusieurs années et à cause qu'on l'a dénoncée depuis plusieurs mois déjà. Et, donc, la tentation d'agir rapidement pourrait peut-être nous venir naturellement, mais je nous invite à la retenue pour une chose. D'abord, quand on lit le projet de loi, un des moyens exceptionnels, un des moyens costauds, pour reprendre l'expression utilisée par le ministre de la Justice lorsqu'il décrivait certaines dispositions du projet de loi, c'est qu'on permet d'entreprendre des recours pour des gestes posés il y a jusqu'à 15 ans.

Ça, M. le Président, en termes simples, là, ce qu'il faut savoir, c'est qu'en temps normal vous disposez d'un délai de trois ans pour poursuivre lorsqu'un geste a été posé. Je ne suis pas spécialiste en procédure civile ni en droit civil, quoiqu'avec les heures qu'on a faites sur le projet de loi n° 28 je commence à me débrouiller, mais la règle normale, dans notre système de droit, ce n'est pas 15 ans. Là, on propose d'étendre la période pour laquelle on peut entreprendre des recours jusqu'à 15 ans. Je pense qu'on peut se permettre, dans ce contexte-là, de se donner quelques mois de plus pour s'assurer que le projet de loi va être bien rédigé et va correspondre à nos besoins.

Et donc je reviens à mon point, c'est-à-dire je pense qu'on n'est pas à quelques jours, à quelques semaines près pour dire : Non, non, on n'a pas… on va se passer des commentaires du Barreau, on va se passer des commentaires des spécialistes, des gens dont c'est la mission, dans la société québécoise, de protéger le Québec sous l'angle juridique, on va se priver de leur regard spécialisé dans l'examen d'un projet et on va changer nos règles fondamentales du droit, on va changer les règles du jeu sans… en se privant de leurs observations. On peut bien dire qu'on a eu un mémoire et que l'essentiel est là, mais je suis convaincu que tous les collègues qui participent à des auditions en commission parlementaire…

Vous avez mal saisi, M. le Président? Je peux répéter un bout, là, si ce n'était pas clair.

• (16 h 30) •

Une voix :

M. Ouimet (Fabre) : Ah! Vous êtes d'accord? Bon, bien, c'est bon, ça, c'est… On progresse.

Une voix :

M. Ouimet (Fabre) : Oui, je m'excuse, M. le Président. C'est mon manque d'expérience. Vous savez, j'ai cette habitude de vouloir… Quand on veut convaincre les gens, la première façon de convaincre les gens, c'est de les regarder, c'est de s'adresser à eux. Là, je dois faire le choix difficile entre convaincre la présidence et convaincre mes 124… 123 autres collègues, alors j'essaie de partager l'effet en regardant de temps à autre la présidence et les autres collègues. Mais je vais faire un effort supplémentaire, M. le Président.

Donc là, j'ai perdu le fil de ma pensée, mais tant mieux si le ministre a compris. C'est déjà… c'est déjà…

Une voix :

M. Ouimet (Fabre) : Non, c'est plus tard, ça. J'ai quelques… Je suis encore dans le réchauffement, M. le Président, là. Ça s'en vient, ça s'en vient. Oh! Déjà 24 minutes! Le temps file quand on s'amuse.

Donc, on va aller dans quelque chose d'un peu plus léger, on va parler de la primauté du droit. Non, mais, vous savez, j'aime bien faire des blagues et je pense qu'il faut être capable de faire des blagues même quand on fait un travail sérieux.

D'ailleurs, et vous me… Est-ce que vous permettez une petite anecdote, M. le Président, mon premier procès devant jury? Je fais un procès devant jury et, à ce moment-là, je travaille… je suis au ministère fédéral de la Justice, poursuite en évasion fiscale. D'ailleurs… En fait, c'est en lien direct avec le projet de loi. C'était en 1996, et déjà à cette époque-là, comme poursuivant, on s'attaquait à… Les factures d'accommodation, les fameuses factures d'accommodation dans l'industrie de la construction, là, moi, je faisais des poursuites dans les années 90 par rapport à ça, mais évidemment personne ne s'intéressait à ça. On faisait ça caché au palais de justice, là, mais les médias ne s'intéressaient pas à ça. Mais ce fléau-là, ce système de fraude était largement répandu, et donc c'était tout à fait connu.

Ceci dit, je reviens à mon anecdote, procès devant jury. Et, au terme de l'exercice, le jury rend son verdict, justice a été rendue, mais… J'étais à la poursuite. À ce moment-là, un membre du jury, quelques semaines plus tard, croise un de mes collègues et avait fait le commentaire qu'il trouvait que le procureur de la couronne était cabotin. Ce qui veut dire que… Écoutez, je suis qui je suis. Je pense qu'on peut faire un travail sérieux, même si on fait des blagues. Donc, je ferme mon anecdote, je ferme ma parenthèse et je reviens à mon propos pour vous dire que je vais vous parler de la primauté du droit, sujet on ne peut plus sérieux.

Qu'est-ce que c'est, la primauté du droit, M. le Président? Bon, la raison pour laquelle je vous parle de la primauté du droit, c'est que le projet de loi n° 61, d'une certaine façon, remet en question certaines règles fondamentales. Et, lorsqu'on fait ça, on peut... on s'approche de remettre en question les règles qui relèvent de la primauté du droit, et c'est la raison pour laquelle je pense qu'il faut le faire avec prudence, et c'est la raison pour laquelle, M. le Président, pour le bénéfice des collègues, et je sais qu'ils connaissent déjà bien le sujet, mais pour ceux qui nous écoutent, je pense qu'il est important de rappeler certaines règles.

Qu'est-ce que c'est que la primauté du droit? Nous vivons dans une société de droit, une société qui est basée sur la règle de droit, sur la primauté du droit. Qu'est-ce que ça veut dire? Selon la Cour suprême… J'aurais pu citer beaucoup d'autres autorités, mais je m'inspire d'une décision de 2005 de la Cour suprême, qui se penchait sur la constitutionnalité d'une loi adoptée par la Colombie-Britannique et qui visait à récupérer des sommes liées au tabagisme, au fléau ou… en fait, les coûts du système de santé liés à la vente du tabac, l'usage du tabac au fil des années. Et, dans les années... fin des années 90, début des années 2000, plusieurs provinces, dont le Québec, ont adopté des lois d'exception, des lois particulières qui visaient à permettre de récupérer, de la part des compagnies du tabac, des sommes qu'on a dû consacrer, comme société, au système de santé pour combattre les effets du tabagisme, le problème étant, M. le Président, qu'il y avait des défis insurmontables à mener ces poursuites pour obtenir le dédommagement de la part des compagnies de tabac si nous nous en tenions aux règles usuelles du droit en matière de responsabilité civile. Et donc les provinces, les différentes juridictions, ont proposé de changer les règles du jeu pour faciliter l'exercice de ces recours. Et la Cour suprême, en 2005, a eu à se prononcer sur la validité constitutionnelle de ce geste, et je pense que le projet de loi que nous examinons s'inspire de ces législations, et c'est la raison pour laquelle je pense qu'il est intéressant de retourner aux enseignements de la Cour suprême en 2005.

Donc, la Cour suprême nous dit ceci : «La primauté du droit constitue "un des postulats fondamentaux de notre structure constitutionnelle".»

«La Cour [suprême] a décrit la primauté du droit comme embrassant trois principes. Le premier reconnaît que "le droit est au-dessus des autorités gouvernementales aussi bien que du simple citoyen et exclut, par conséquent, l'influence de l'arbitraire".» Le deuxième, deuxième principe, reconnaît… Pardon. «Le deuxième "exige la création et le maintien d'un ordre réel de droit positif qui préserve et incorpore le principe plus général de l'ordre normatif".» J'avoue que celui-là est un petit peu plus aride, c'est pour initiés. «Selon le troisième, "les rapports entre l'État et les individus doivent être régis par le droit".»

Toujours dans le jugement, la cour dit ceci, rappelant les propos de la juge en chef McLachlin dans l'arrêt Babcock : «…les "principes constitutionnels non écrits", incluant la primauté du droit, "[peuvent] limiter les actes du gouvernement".»

• (16 h 40) •

Alors, dans cette affaire, M. le Président, les compagnies de tabac, en invoquant la primauté du droit comme principe constitutionnel non écrit, prétendaient qu'on ne pouvait changer les règles du jeu pour modifier de façon… après coup, changer les règles du jeu pour permettre de justifier, de fonder des recours juridiques contre les compagnies de tabac, ce qu'on appelle les faits rétroactifs. Et également les compagnies de tabac soutenaient qu'on ne pouvait pas changer les règles du droit civil applicables de façon rétroactive pour, d'une certaine façon, j'allais dire, loader la main du gouvernement et donc avantager le gouvernement de façon injuste. C'étaient essentiellement les deux arguments qui étaient invoqués pour attaquer la constitutionnalité de la loi ou des différentes lois. Et la Cour suprême, au bout du compte, a rejeté cette attaque constitutionnelle, non pas en statuant que la loi était nécessairement juste, parce que, et vous le verrez, la cour ne se prononçait pas sur la justesse ou sur l'opportunité de ces lois, mais ne se prononçait que sur le caractère constitutionnel. Est-ce que le gouvernement, qu'il soit provincial ou fédéral, a l'autorité constitutionnelle nécessaire pour adopter ces changements au droit usuel? Est-ce qu'il est permis de le faire du point de vue constitutionnel et non pas est-ce qu'il est souhaitable, est-ce qu'il est juste, est-ce qu'il est opportun de le faire? Cette question relève de la sphère politique. C'est la question, M. le Président, à laquelle nous devons répondre, mais la cour a tout de même pris la peine de souligner que, du point de vue constitutionnel, il n'y avait pas de problème.

Vous me permettrez une citation, toujours du jugement de 2005. La cour dit ceci : «Il n'existe aucune exigence générale que la législation ait une portée uniquement prospective, même si une loi rétrospective et rétroactive peut renverser des expectatives bien établies et être parfois perçue comme étant injuste. Ceux qui partagent cette perception seront peut-être rassurés par les règles d'interprétation législative qui imposent au législateur d'indiquer clairement les effets rétroactifs ou rétrospectifs souhaités. Ces règles garantissent que le législateur a réfléchi aux effets souhaités et "a conclu que les avantages de la rétroactivité [ou du caractère rétrospectif] l'emportent sur les possibilités de perturbation ou d'iniquité".»

Ce qui m'amène, M. le Président, à un point important à l'égard du projet de loi n° 61, et j'ai déjà fait ce point lors des consultations particulières et j'espère que le ministre de la Justice prend bonne note. Parce que, pour moi, un des problèmes avec le projet de loi n° 61, c'est que nous... avant de changer les règles du jeu, avant de modifier les règles de la responsabilité contractuelle, les règles qui nous gouvernent tous, qui, comme je le rappelais tantôt, puisque personne n'est au-dessus de la loi, ces règles s'appliquent à tous, même au gouvernement… Et on ne peut, à la légère, modifier ces règles sans paraître qu'on agit de façon injuste.

Et donc l'importance, M. le Président, et c'est le message tiré de la Cour suprême, c'est que nous devons faire la démonstration de la nécessité de poser ce geste grave de modifier les règles du jeu pour que la démonstration soit faite que cette mesure n'est pas injuste.

En 2009, et c'est intéressant, parce qu'encore une fois le Barreau du Québec avait fait ce commentaire lorsqu'il était question du projet de loi québécois en matière de tabac, l'équivalent de la loi de Colombie-Britannique, donc le Barreau du Québec avait dit ceci en juin 2009 : «Le Barreau du Québec ne s'oppose pas au principe du projet de loi compte tenu de la situation exceptionnelle créée par l'utilisation des produits du tabac qui justifie une intervention de cette nature. Cependant, le Barreau est d'avis que des efforts additionnels doivent être faits par le législateur pour concilier les objectifs légitimes poursuivis avec les principes de saine législation dans une société démocratique comme la nôtre. En principe, le législateur devrait explicitement protéger les causes pendantes sans rouvrir les jugements déjà rendus ayant acquis l'autorité de la chose jugée. En outre, la loi devrait explicitement faire état de son caractère exceptionnel afin de réduire les risques qu'elle puisse servir de précédent.»

Il y a, M. le Président, dans ce passage de la lettre du Barreau, écrite en 2009 pour une loi relativement à la récupération des coûts du service de santé pour le tabagisme, des paroles sages, qui devraient nous inspirer aujourd'hui, alors que le ministre de la Justice nous propose de modifier les règles du jeu. Le ministre de la Justice n'a pas, à mon point de vue, démontré… en tout cas, il n'a pas écrit, dans son projet de loi, ce qui justifie de modifier les règles du jeu.

Lors des consultations particulières, la ville de Montréal est venue malgré les courts délais. Et ce qui est intéressant, M. le Président, c'est que, malgré les difficultés qu'on peut imaginer dans le fait de préparer une poursuite et d'entreprendre une poursuite judiciaire pour recouvrer des sommes, la ville de Montréal nous a dit qu'ils avaient entrepris deux de ces recours. Alors, à première vue, et sans évidemment… Je n'ai pas l'intention de m'aventurer sur le terrain de… est-ce que ces recours sont bien fondés ou non, mais, à tout le moins et à première vue, il faut reconnaître qu'il est possible de le faire. Alors, si la ville de Montréal avait entrepris ces recours-là, il semble qu'eux autres, ils ont été capables de le faire. On peut se poser la question : Pourquoi le gouvernement ne l'aurait pas fait avant? Je sais qu'en disant ça je fais plaisir au député de Saint-Jérôme, qui l'a, à maintes reprises, soulevée, cette question, mais je pense que, dans le contexte du projet de loi n° 61, alors que le ministre de la Justice nous dit : Là, il faut qu'on change les règles du jeu, et voici ce qu'on va faire, je pense que le ministre de la Justice doit expliquer pourquoi il est impossible de suivre les règles usuelles et entreprendre des recours pour atteindre l'objectif que nous souhaitons tous, c'est-à-dire de récupérer ces sommes qui ont été volées. Alors, sur ça, je pense que, même si je suis… nous sommes d'accord avec l'objectif, le ministre de la Justice a encore un travail pour exposer à la population en quoi ces mesures sont nécessaires, en quoi il est aujourd'hui nécessaire de déroger aux règles du jeu qui sont établies depuis des siècles, pourquoi est-il nécessaire aujourd'hui de modifier ces règles pour permettre que justice soit rendue et que les sommes soient restituées. C'est un point important.

Un autre point, M. le Président, en lien avec tout ça, et ça, ça ressort du projet de loi même, c'est toute cette idée du programme de remboursement. C'est les articles, je pense, 12 et suivants, chapitre III. Il n'y a personne, M. le Président, qui peut être contre ça, là. Tout le monde est d'accord à ce qu'il puisse y avoir des remboursements. Et, quand on lit les dispositions de la loi, qu'est-ce qu'on voit? C'est qu'on vise à encadrer, à proposer un cadre pour encourager la négociation. Maintenant, M. le Président, j'ai tout le temps pensé, moi, que, la négociation, au Québec, il s'en fait depuis toujours. On a même d'excellents négociateurs, on a des médiateurs, on a des conciliateurs. Nous avons développé, particulièrement dans les 20 dernières années, tout le pan, en matière de justice… On parle de la justice alternative, la justice participative, ça a différents noms, mais nous encourageons de plus en plus les avocats, les juristes à explorer ces façons de régler des problèmes plutôt que de s'adresser aux tribunaux. Donc, tout ça, là, ça fait 20 ans, M. le Président, que c'est à la mode, qu'on le développe, et ça fait du chemin, au point où — on est en train d'examiner le projet de loi n° 28, un nouveau code de procédure civile — on a décidé qu'il fallait qu'on mette ça dès le début du livre, dès le début du code, pour envoyer ce message aux avocats que, avant de se précipiter au palais de justice pour entreprendre des poursuites, ce qu'ils devraient faire, c'est d'envisager la possibilité de négocier. C'est le message qu'on veut envoyer.

• (16 h 50) •

Maintenant, là, c'est bien qu'on décide : On va se donner un programme de remboursement, mais ces règles-là existent déjà, on a déjà les outils. Alors, je reviens à la question. Sûrement que le député de Saint-Jérôme va la reposer cet après-midi, comme il l'a fait à de nombreuses reprises depuis plusieurs mois. Qu'est-ce qu'on fait? Pourquoi est-ce qu'on ne négocie pas déjà? Alors, ça, on n'a pas besoin du projet de loi n° 61 pour négocier. Peut-être qu'il y a des questions qui restent en suspens, à savoir : Est-ce qu'il y aurait lieu de donner une quittance complète? Est-ce que cette négociation doit avoir un impact sur l'accréditation ou l'autorisation que la compagnie cherche à obtenir de l'Autorité des marchés financiers? Et ça, c'est en lien avec la loi n° 1. Ça, c'est une question intéressante à laquelle il faut se... sur laquelle on peut se pencher. Mais sincèrement, M. le Président, en lien avec mes commentaires sur la nécessité du projet de loi, la nécessité d'adopter les mesures costaudes telles que décrites par le ministre de la Justice, je m'interroge à savoir si cette démonstration-là a été faite, et j'invite le ministre de la Justice à faire cette démonstration-là et à l'inscrire dans la loi.

Et je vous annonce, M. le Président, que je vais inviter... Évidemment, je ne veux pas présumer du résultat du débat d'aujourd'hui sur l'adoption du principe. J'ai tendance à penser qu'il y a de bonnes chances que le principe soit adopté, donc que nous nous retrouverons à l'étude article par... Bien là, je ne peux pas dire quand, là, je sais qu'il me reste juste 18 minutes, mais ça devrait… Il y a de l'espoir, M. le ministre. Ça va... Un jour, on va l'adopter, le principe, je suis confiant.

Ceci dit, et trêve de plaisanteries, parce que je pense que c'est un sujet très sérieux, j'invite le ministre à emboîter le pas à ce que nous amendions le projet de loi pour que nous inscrivions dans le préambule ou dans les premières dispositions de la loi pour quelle raison il est nécessaire de modifier les règles usuelles de notre droit, de notre responsabilité contractuelle, pour que ces mesures soient justifiées et qu'elles paraissent, M. le Président, justes à l'égard de la société. Parce qu'il y a une chose que nous ne devons jamais faire. Dans notre société fondée sur la règle de droit, il y a un principe fondamental qui n'est pas uniquement un principe de droit criminel. La présomption d'innocence, M. le Président, c'est une règle fondamentale de la société et en matière criminelle et en matière civile. Le pendant en matière civile, ça s'appelle la présomption de bonne foi. Ça fait partie de notre Code civil depuis très longtemps; on présume de la bonne foi d'une personne, et, avant de conclure à sa responsabilité, on doit en faire la preuve. Et ça, c'est une règle fondamentale, et on doit toujours garder à l'esprit de ne pas tirer des conclusions sans motif valable.

Et un des problèmes qui a été soulevé par de nombreuses personnes qui sont venues en consultation, lors des consultations particulières, c'est la portée de l'article 3, où le ministre de la Justice propose, dans le projet de loi, que les personnes... Et je vais le lire, le deuxième alinéa de l'article 3 dit ceci : «Dans un tel cas — parlant de la preuve qu'une entreprise a fraudé dans le processus d'attribution ou d'adjudication d'un contrat public, alors dans un tel cas — la responsabilité de ses dirigeants ou de ses représentants, agissant à quelque titre que ce soit au moment de la fraude ou de la manoeuvre dolosive, est engagée à moins qu'ils démontrent avoir agi avec le soin, la diligence et la compétence dont ferait preuve, en pareilles circonstances, une personne prudente.»

Ça va très loin, M. le Président. On n'exige même pas que la personne ait participé activement à la fraude, qu'elle ait eu une connaissance, et on lui impose le fardeau de démontrer son innocence, sa non-responsabilité, toujours en gardant à l'esprit, M. le Président, que la loi propose que nous puissions entreprendre des recours jusqu'à 15 ans en arrière, ce qui n'est pas rien. Quand on pense... Me demander à moi de me défendre sur quelque chose que j'ai fait il y a 15 ans, alors qu'on n'a pas nécessairement gardé les documents... D'autant plus que la loi permet de réouvrir des dossiers où il y aurait eu un jugement qui conclut que le recours est prescrit. La loi dit : Ce n'est pas grave, on peut quand même poursuivre. Alors, la personne qui aurait gagné un dossier en disant : C'était prescrit, le dossier est fini, on peut jeter les boîtes, là, avec la loi, on dit : Non, on peut réouvrir, puis on recommence, puis là la personne va devoir se défendre, sans qu'on lui accorde nécessairement les moyens de le faire. Ça va loin, là.

Encore une fois, M. le Président, on est tous d'accord, là. Les bandits, ceux qui nous ont volés, là, je pense qu'ils doivent payer. Ça, là, il n'y a personne qui va débattre de ça, on ne perd pas notre temps sur ça. La question, c'est : Comment est-ce qu'on doit procéder? Et moi, je pense, M. le Président, qu'on a déjà beaucoup d'outils, mais il faut les utiliser. Je suis convaincu qu'en disant ça je fais plaisir au député de Saint-Jérôme qui dit ça et qui répète ça depuis plusieurs mois. Et je ne suis pas dans les souliers du ministre de la Justice puis je ne sais pas tout ce qu'il sait puis je ne sais pas ce que les juristes de l'État savent, mais je regarde la ville de Montréal puis eux autres, ils ont agi au moins dans deux dossiers…

Une voix :

M. Ouimet (Fabre) : Bon, bien, huit… On me dit huit dossiers. J'avais compris deux lors des consultations. Donc, il y a des moyens d'agir. Tout ça pour dire, M. le Président, qu'on devrait, à tout le moins, prendre le temps de bien analyser le projet de loi pour s'assurer que ce qui est là-dedans correspond aux mesures qu'on veut. D'ailleurs, j'ai trouvé ça cute, je l'ai noté : le 2 décembre, les représentants de l'Association de la construction du Québec sont venus en commission et ils ont dit exactement ça. Ils ont dit : Prenez le temps de faire une loi juste. Je trouvais que ce n'était pas fou de se dire : On peut-u s'assurer… Évidemment, ils parlaient, à ce moment-là, du pourcentage de dommages, et ça, c'est un point qui est soulevé.

Malheureusement, je vois que je n'aurai pas le temps, M. le Président. Je vais être obligé de limiter mon plaisir. Il y a plusieurs points que j'aurais aimé aborder en détail avec vous cet après-midi, mais je vais laisser mes collègues… je sais que plusieurs autres collègues vont en parler. Mais, sur cette question-là du pourcentage des dommages, comme d'autres aspects, le ministre a recours à cette… ce que j'appelle ou ce que je décrivais, lorsque j'étais bâtonnier du Québec, cette fâcheuse habitude de la législation par délégation. C'est-à-dire qu'on adopte une loi et on dit : Ah! C'est le gouvernement qui va adopter par règlement ce qui va dans la loi, qui va fixer les paramètres. Du point de vue de la stabilité et de la prévisibilité de la loi, M. le Président, qui sont des qualités fondamentales de la primauté du droit dans une société fondée sur la règle de droit, il est important que les règles du jeu soient débattues, connues, élaborées dans le cadre du processus législatif et pas de déléguer ça au gouvernement.

Or, ça, c'est un point, et il y a plusieurs aspects de la loi… du projet de loi proposé par le ministre, le projet de loi n° 61, où on a recours à cette technique, où on nous dit, notamment quant au montant des dommages : C'est le gouvernement qui va déterminer c'est quoi, le pourcentage du dommage applicable. Sur ça, M. le Président, je pense qu'il est absolument essentiel : si on ne l'écrit pas dans la loi, donc, si ça ne fait pas partie du processus législatif, si on ne règle pas ces questions dès la loi, il faut, minimalement, que le gouvernement s'engage à tenir des consultations sur le règlement. Parce que, comme on vient de le… on l'a fait dans le projet de loi n° 35 cette semaine, c'est un aspect essentiel du projet de loi qui est à l'étude présentement, et on ne peut pas tout simplement dire : Bien, le gouvernement répondra à ces questions plus tard. Il y a des aspects importants de la loi qui sont délégués au gouvernement, qui devra fixer les règles du jeu. Et ça, je pense que c'est inacceptable dans l'état actuel du projet de loi.

• (17 heures) •

Un point... Il y a plusieurs points importants. Il y a plusieurs points importants, M. le Président, que je souhaiterais aborder, mais je vais revenir sur... Je sais que mon collègue de Chomedey va en parler. Il avait participé activement à l'adoption du projet de loi n° 1 l'an dernier. Il a vécu de près ce qui était... je n'ai pas pu m'empêcher de sourire lorsque nous avons entendu le Directeur général des élections qui est venu, lors des consultations particulières, et qui a porté à notre attention le fait que nous proposons de modifier la loi n° 1, qui a été adoptée il y a à peine un an; il faut la changer. Je ne ferais pas de commentaire, là, sur l'opportunité de ce changement-là, sauf noter que ça fait déjà... ça fait un an, mais déjà il faut faire des changements à cette loi-là. Le DGE, M. le Président, nous a dit… est venu nous dire que… Vous savez, vous allez faire des changements à la loi n° 1, la loi n° 1, qui permet de… qui, à l'heure actuelle, empêche d'obtenir une autorisation, de la part de l'Autorité des marchés, une compagnie qui a fait l'objet d'une condamnation… Et le DGE est venu nous dire : Vous savez, le changement qui a été adopté en 2010 par le gouvernement libéral à la loi sur le… des élections, la Loi électorale, est une disposition plus sévère que ce que vous avez adopté en 2012 parce que, en vertu de la Loi électorale, une déclaration de culpabilité à l'égard d'une infraction en matière de financement électoral, quel que soit le montant impliqué, quel que soit le contrat public que la compagnie souhaiterait obtenir par la suite, cette compagnie est automatiquement barrée. Alors, je n'ai pas pu m'empêcher de sourire lorsque j'ai entendu ce commentaire du DGE qui, dans le fond, venait nous dire : Vous savez, la loi de 2010 qui a été proposée par le gouvernement libéral, là, était plus sévère encore. Quand même… c'est quand même particulier.

Ceci dit, M. le Président, nous en sommes, avec le projet de loi n° 1, à la possibilité de faire une modification à la loi n° 1, celle qui a été… que nous avons adoptée, à mon point de vue, avec un peu d'empressement l'an dernier. Et donc je profite de cette expérience que nous avons connue pour dire que, comme le reconnaît le ministre de la Justice lors de nos séances de travail en commission parlementaire, le processus législatif ne doit pas se conjuguer à la vitesse grand V.

Il y a une sagesse dans notre règlement, M. le Président. Ces étapes et ces délais que nous devons respecter ont pour but d'assurer que nous allons adopter des lois qui correspondent aux besoins de la société, que nous avons travaillé de façon rigoureuse, on a soupesé, considéré les impacts de ces lois-là. Et, dans tous les cas, ça s'applique au projet de loi n° 61 comme à toutes les lois que nous adoptons. C'est un exercice, il faut que nous ayons cette retenue. Il faut l'avoir encore plus lorsqu'on propose, comme c'est le cas avec le projet de loi n° 61, de modifier les règles du jeu, les règles fondamentales de la responsabilité contractuelle. Et, pour cette raison-là, M. le Président, j'espère que le ministre aura la sagesse de ne pas précipiter les choses pour que nous fassions bien notre travail de législateurs, pour qu'au bout du compte nous proposions à la société québécoise la loi dont nous avons besoin pour nous aider à corriger cette situation où des personnes nous ont volé, où ils ont volé des contribuables et donc où les personnes responsables paient leur dû à la société, tout en gardant à l'esprit, M. le Président, parce que c'est un point important…

Et je conclurai là-dessus. Il faut garder à l'esprit que nous devons permettre à l'économie québécoise de progresser. Nous ne devons pas nous pénaliser doublement en nous privant de l'expertise québécoise, en matière de génie notamment, et donc d'avoir à l'esprit cette idée de réhabilitation, permettre aux personnes responsables de payer leur dû, mais de contribuer positivement à la société en se réhabilitant et en faisant bénéficier l'ensemble de la société de leur expertise. Et, sur ce, M. le Président, je réitère mon approbation avec le principe malgré les difficultés que j'ai avec le projet de loi tel que rédigé. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Fabre. Vous aviez encore un gros cinq minutes. M. le député de Saint-Jérôme, vous avez 60 minutes.

M. Jacques Duchesneau

M. Duchesneau : Est-ce que je peux en prendre 65, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Ah non, ça, vous ne le pouvez pas. Allez-y, M. le député.

M. Duchesneau : Je dois vous dire que j'ai écouté avec beaucoup d'attention et beaucoup de plaisir les propos de mon collègue de Fabre. Quoiqu'on soit dans un système partisan, je dois vous dire que ses propos ont raisonné comme de la musique à mes oreilles, et je vous dis ça même si je ne suis pas du tout virtuose de quelque façon que ce soit. Mais vraiment ses propos pavent la voie aux commentaires que je vais vous faire. Et je suis aussi ravi de voir qu'il y a fusion des esprits ici, là, quant à l'appréciation du projet de loi n° 61.

Mon collègue de Fabre en a fait écho tantôt, on a reçu, ce matin, le mémoire du Barreau du Québec, et j'ai à peine eu le temps de le lire, mais une chose qu'on pouvait voir en première page, c'est que le Barreau exprimait clairement que le projet de loi n° 61 est une loi d'exception. D'autres témoins qui sont venus devant notre commission nous ont aussi parlé que… ou nous ont fait prendre conscience que le projet de loi n° 61 n'est pas un projet de loi temporaire, mais un projet de loi qui est là pour toujours, du moins jusqu'au moment où on va le changer.

Personnellement, je pense que cette idée de rembourser les argents qui nous ont été volés en ayant fraudé l'État est une loi-phare dans la lutte à la corruption que nous voulons entreprendre. Encore faut-il que cette loi soit justement bien encadrée et que cette loi vienne vraiment appuyer ce qui a déjà été amorcé au cours des dernières années pour s'attaquer à cette plaie qu'est la corruption dans notre société. Alors, il était important pour moi de d'abord mettre en contexte et peut-être faire un bref historique, en commençant bien évidemment par les propos que nous avons tenus en cette Chambre, que la Coalition avenir Québec a tenus en cette Chambre principalement lors de la dernière session parlementaire, où on a demandé à plusieurs reprises au gouvernement d'entamer et aussi de coordonner des poursuites civiles envers les entreprises qui nous ont volés.

Malheureusement, on a souvent été rabroués lorsqu'on a apporté des suggestions comme celle-là, on a même raillé la coalition, et on l'a fait avec tant de vigueur qu'il me semble pertinent aujourd'hui de vous faire part de quelques exemples pour comprendre le contexte qui nous amène à être un peu, non pas sceptiques parce qu'on est bien d'accord avec le principe, on l'a d'ailleurs suggéré il y a longtemps, je le répète… mais l'importance de bien faire notre travail cette fois-ci et non pas de le faire rapidement.

Un de ces exemples, c'est qu'à une question posée par le député de L'Assomption et chef de la coalition, le ministre président du Conseil du trésor nous traitait d'amateurs. Puis, comme ses collègues — j'ai été surpris parce que je l'apprécie particulièrement — le ministre de la Justice ne s'est même pas gêné pour nous traiter, lui aussi, d'amateurs et de simplistes quand venait le temps de qualifier la proposition, à laquelle heureusement il adhère aujourd'hui. On nous disait, à ce moment-là, que c'était un concept qui était pseudo juridique et qui manquait de rigueur. Je ne veux pas en dire autant aujourd'hui du projet qu'il nous a présenté, mais, bien évidemment, tout n'est pas encore ficelé comme on voudrait qu'il le soit.

Donc, afin de mettre un peu de pression sur le gouvernement pour qu'il prenne des actions concrètes, on est même allés plus loin, en demandant… ou en présentant une pétition qui s'appelait Remboursez-nous. Il y a près de 27 000 personnes qui ont signé en neuf jours une pétition. Donc, c'est vraiment un souhait populaire de faire en sorte que ceux qui nous ont volés nous remboursent; aussi simple que ça. Encore là, malgré la pétition, malgré le fait que près de 27 000 personnes avaient appuyé cette demande, notre proposition a encore une fois été rejetée.

Et ça a pris un avis juridique indépendant présenté au gouvernement pour qu'on comprenne l'importance de l'action que nous proposions. Et cet avis juridique stipulait six choses, il est important, je pense, de le préciser. D'abord, il stipulait qu'il était possible pour une administration publique d'instituer des recours même si toutes les informations pertinentes, incluant le montant qui nous a été volé, même si tout ça n'est peut-être pas encore connu. Le deuxième point que nos avocats nous disaient, c'est qu'une partie a intérêt à instituer rapidement un recours civil aussitôt qu'elle a en main suffisamment d'éléments pour établir les fondements de la réclamation. Troisième point, on nous disait que rien n'empêche d'utiliser un témoignage rendu devant la commission Charbonneau comme guide dans la rédaction d'une requête introductive d'instance. Quatrième point, un tribunal pourrait déterminer que certains témoins entendus devant la commission Charbonneau étaient aussi les mandataires autorisés de leurs employeurs, et, à ce moment-là, on pouvait admettre en preuve la transcription de leur témoignage à titre d'aveu, et tout ça pour faire valoir contre l'entreprise des éléments de preuve pour montrer justement qu'il y avait eu malversation.

• (17 h 10) •

On parlait d'immunité que les témoins avaient devant la commission Charbonneau, mais on disait aussi qu'il était toujours possible, dans le cadre d'éventuelles poursuites civiles, d'interroger les mêmes individus qui ont témoigné devant cette commission sur l'ensemble des sujets abordés lors de leur témoignage. Et finalement on concluait avec l'affirmation suivante, qu'il n'existe a priori aucun obstacle juridique au dépôt de recours civil à l'encontre des entreprises nommées dans le cadre des audiences de la commission Charbonneau.

Alors, il faut constater, M. le Président, aujourd'hui, que non seulement c'était possible, mais, pour une raison que j'ignore et qui demeure toujours obscure, quand même reconnaître que le gouvernement a très certainement procrastiné trop longtemps sur ce sujet. Donc, il est évident qu'aujourd'hui, avec le projet de loi n° 61, nous répondons à une demande de la population, ceux qui nous élisent ici, en cette Chambre.

La question que nous devons nous poser est maintenant celle-ci : Ce projet de loi est-il maintenant le véhicule adéquat pour mener à bien le principe qui est sous-jacent à cette demande de nous rembourser, ou offrons-nous, dans la hâte clairement évoquée par mon collègue de Fabre… est-ce qu'on offre un projet de loi qui est mal ficelé et qui va laisser filer nos objectifs que nous voulons avoir avec ce projet de loi?

Avant de débuter, M. le Président, je pense qu'il nous semble inacceptable que certains groupes, des groupes très importants comme le Barreau du Québec par exemple, n'aient pas pu venir témoigner lors de la Commission des institutions. Chaque fois que les témoins qui se sont présentés devant nous ont exposé leur point de vue, on a eu l'impression qu'on était dans une position pour bonifier le projet tel qu'il était présenté.

Je répète, là, les organisations telles que le Barreau ont une expertise qui est particulière. Ils jettent un regard sur un projet de loi important, mais avec une lentille très différente. Et, pour l'avoir expérimenté dans le passé, chaque fois que le Barreau est venu témoigner devant la Commission des institutions, on a entendu des choses fort intéressantes, et ils nous ont toujours apporté un angle très particulier, et ils l'ont fait avec une précision, je dirais, chirurgicale, justement, pour caractériser les recommandations qu'ils nous faisaient. Donc, ces propos nous ont manqué dans le processus que nous vivons actuellement. Et, comme mon collègue de Fabre, je réitère ma déception face à cette précipitation à conclure rapidement le projet de loi n° 61.

Je pourrais dire la même chose de l'AMF, l'AMF, qui devait venir témoigner devant nous, qui, à la dernière minute, s'est désistée. Or, l'AMF est vraiment le maître d'oeuvre de l'application de la loi n° 1 et leur expérience de la dernière année aurait pu certainement nous aider, encore là, à venir accepter ce projet de loi n° 61, qui était, en fait, quand on regarde ça bien comme il faut… c'est plutôt un projet de loi n° 1a, là où on n'avait pas pu pousser notre réflexion lors des travaux entourant le projet de loi n° 1. Il est bien évident qu'à l'époque on aurait pu inclure quelque chose qui visait le remboursement, et on n'a pas pu le faire. Et je trouve inadmissible que l'AMF ne se soit pas présentée devant nous. Même si tous les partis présents à la commission ont demandé à ce que ces gens-là viennent nous rencontrer, ils ne l'ont pas fait.

On vit dans une société démocratique, et, je devrais dire, nous avons la chance de vivre dans une société démocratique où la population et ces groupes ont l'occasion de se faire entendre dans le débat qui les concerne. En agissant avec urgence comme on le fait actuellement, pour des raisons qui ne sont pas encore tellement claires à mon esprit, bien je pense qu'on manque une occasion de faire justement triompher cette démocratie. Mais, en tant que représentant de la population, parmi les membres de cette auguste Chambre, je ne peux pas me faire complice de ce type d'agissement et ne pas dénoncer avec véhémence cet accroc important à ce processus démocratique, je le répète.

Je vais faire quelques critiques, encore là en préambule, qui concernent le projet de loi n° 1, mais qui visent essentiellement à bonifier le projet de loi n° 61. La principale critique : je le répète, le projet de loi n° 1 s'est fait à va-vite. Un an… moins d'un an depuis son adoption, on est en train justement d'y apporter des corrections. Malgré le fait que le principe était excellent et l'est encore, je pense qu'on est en train de faire une mauvaise application. Et on a besoin justement de poursuivre notre réflexion sur le sujet parce que, sinon, on a des relents amers de ce qui s'est fait en cette Chambre il y a un an, où, à cause de mon manque d'expérience concernant la procédure parlementaire, on a été dans l'impossibilité d'apporter des corrections à la dernière minute. C'est pour ça que l'adoption du principe n'est pas juste une étape automatique, il y a toute une philosophie derrière ça. Et on veut profiter justement pour claironner notre opinion et expliquer à la population des principes fondamentaux qui doivent entourer le projet de loi n° 61.

Lors de l'adoption du projet de loi n° 1, les étapes adoptées avec urgence, sans apprécier les effets pervers que pouvait apporter ce projet de loi… Et pourtant on a martelé, l'opposition officielle et nous, la deuxième opposition, on a martelé des situations qui pouvaient devenir problèmes importants et, un an plus tard, on est obligés d'admettre que peut-être qu'on avait vu juste. Si seulement on nous avait entendus, on ne serait pas, aujourd'hui, en train de peut-être recoller les pièces qui sont brisées actuellement. Nos avions, je le répète, soulevé de nombreuses objections. Et, si je me rappelle bien, sur 90 articles, je pense qu'on a fait 94 ou 95 amendements, là, je... mais dans cet ordre-là. Je ne me rappelle pas des chiffres de façon exacte, là. Donc, je pense qu'on a amélioré, mais, encore là, vu qu'on était pressés par le temps, on n'a pas pu aller au bout de cette réflexion. Permettez-moi juste de vous en énumérer quelques-uns de ces amendements que nous voulions faire.

D'abord, nous avions dénoncé l'absence d'un plan global pour s'attaquer à la corruption. On avait dit, et je le répète encore aujourd'hui : Un problème aussi important et aussi vaste et complexe que celui de la corruption ne peut pas être résolu uniquement par une certification, comme on a eu avec le projet de loi n° 1. Et, je ne sais pas si vous vous rappelez, M. le Président, mais je crois qu'on était le 6 décembre, l'an passé, donc à la veille d'ajourner les travaux, on avait... J'avais même demandé au nom de ma formation de changer le nom du projet de loi n° 1, qui était la loi sur l'intégrité, alors que c'était une infime partie d'une lutte globale à cette criminalité-là. Et, parce qu'on n'avait pas, justement, exprimé notre désaccord lors de l'adoption du principe, bien on a trouvé une décision qui nous empêchait d'aller plus loin. Et c'est pour ça aujourd'hui que je me sens justement appuyé par mes collègues de l'opposition et de mon équipe pour faire valoir ces points avec lesquels on était en désaccord et comme on le fait ici avec le projet de loi n° 61.

On avait soutenu, à l'époque, qu'il fallait changer nos façons de faire. Le président du Conseil du trésor nous avait parlé qu'il fallait adopter le projet de loi n° 1 parce que, de toute façon, le volet 2 et le volet 3 allaient suivre. Ça fait plus d'un an, et on attend toujours les tomes 1 et 2 de cette lutte à la corruption. On avait notamment parlé des contrats publics, et on ne s'était pas tellement attardés à cet aspect-là. Pourtant, s'il y a quelque chose qui fait problème actuellement, s'il y a une porte d'entrée à la corruption, c'est d'abord lors de l'entente que le gouvernement peut avoir avec un de ses fournisseurs, donc lors de la signature du contrat.

Et je vais vous donner un exemple et citer ce que le président du Conseil du trésor nous disait le 13 novembre 2012, alors que nous étions à l'étape de de l'adoption du principe, et je le cite : «Ça fait partie de la trilogie qu'on veut développer autour des contrats publics. Et vous allez voir, là, on s'intéresse beaucoup à la probité des entreprises, mais il y aura d'autres aspects au niveau de ceux et celles qui donnent les contrats dans un avenir très rapproché et, par la suite, d'harmonisation et uniformisation des pratiques contractuelles sur l'ensemble des ministères et organismes dépendant de l'État, et incluant les sociétés d'État.» Et je ferme la parenthèse.

• (17 h 20) •

Puis le lendemain, le 14 novembre, le même président du Conseil du trésor nous expliquait un peu plus sa vision : «Nous en sommes à réfléchir sur comment les détecter — en parlant des activités frauduleuses, comment les détecter — comment se donner des processus pour être capables de ne pas attendre l'inévitable. Ça fait plusieurs fois que je me répète, il y a eu plusieurs groupes, mais c'est vraiment notre volonté.»

Or, il nous disait que, «dans une première étape — là, il parlait toujours de sa trilogie, "une belle trilogie", disait-il — au départ, [c'est] ceux qui contractent…» C'était le but du projet de loi n° 1. «On a une situation urgente, nous disait-il, il faut ramener la confiance, [la] probité, alors on commence.» On commençait avec le projet de loi n° 1. «Puis, de toute façon, c'est un processus qui va s'étendre.» C'est ce qu'on voit avec le projet de loi n° 61. «Autrement dit, à partir du moment où on commence, on ne peut pas certifier tout le monde.» On parlait du projet de loi n° 1. «Donc, il y aura un crescendo, il y aura une mise en application qui va permettre à terme, effectivement, d'avoir un processus qui va être tout à fait rodé.»

Deuxième point, disait-il, «ça va être d'agir au niveau, effectivement, de ceux et celles qui prennent les décisions.» Et ça, c'est un point sur lequel je vais revenir, M. le Président. «Et nous en sommes [donc là]. Dans certains cas, malheureusement, même face à — comment je pourrais dire sans cibler personne, [nous disait le président du Conseil du trésor, là il dit] c'est assez difficile — face à des situations d'illégalité plus que présumées, disons, quasi avouées, il y a des gens qui ne comprennent pas. Donc, on devra agir sur tous les plans. Ça, je suis entièrement d'accord.» Je ferme la parenthèse.

Plus loin, il nous disait : «Et ultimement, après ça, sur aussi la révision de l'ensemble de la façon qu'on donne les contrats publics, quand on voit les mauvaises pratiques, comment on peut uniformiser. On est là, c'est pour ça. D'ailleurs, une des dispositions du projet de loi ramène à rapatrier — [et là] je vois que vous êtes en accord avec ça — au Conseil du trésor, qui a déjà des bonnes compétences, pour assurer une plus grande harmonisation, pour faire en sorte que vous qui soumissionnez ne soyez pas pris dans des règles […] un peu disparates qui font en sorte que ça peut donner l'impression parfois — sans parler de collusion, ou corruption, ou quoi que ce soit — que les appels d'offres ne suivent pas des règles qui devraient normalement être suivies pour assurer une saine concurrence.» Fin de cette longue citation, mais qui vraiment pave la voie à ces commentaires que je vous ferai sur le projet de loi n° 61.

On parlait à l'époque des notions subjectives au niveau de l'intégrité et de la probité, on l'avait mis à l'ordre du jour, on disait : Le projet de loi, tel qu'il est fait, donne trop dans l'arbitraire et permet à des gens qui ont des visions différentes de rendre des décisions différentes, alors qu'on devrait avoir des moyens très objectifs d'évaluer ce qui est une fraude, ce qui est de la collusion ou ce qui est de la corruption.

Alors, en terminant sur le projet de loi n° 1, je vous dirais aussi qu'on a dénoncé l'absence de mesures de prévention et de détection. Parce qu'avec le projet de loi n° 1 on était toujours en réaction à une situation, alors que ce nous proposions, c'était justement de trouver des moyens de détecter, donc ne pas attendre de se faire voler et après ça tenter de réagir, mais empêcher justement que des crimes soient commis. Un an plus tard, on n'a toujours pas plus de moyens pour trouver et questionner les personnes suspectes. Nous n'avons pas de rempart supplémentaire pour nous assurer, par exemple, que, lors de l'exécution d'un contrat, justement, ce contrat-là va être fait selon les règles de l'art, selon les règles du jeu, justement, clairement étayées dans les contrats. Parlant de contrats, on avait répété ad nauseam, M. le Président, que rien dans le projet de loi n° 1 — et je ne constate rien dans le projet de loi n° 61, quoi que ce n'est pas son objectif — ne touche les contrats, je répète, contrats qui sont les portes d'entrée vers la collusion et la corruption.

On avait aussi clairement indiqué — et j'ai martelé ce point-là plus d'une fois, autant en commission parlementaire, l'an passé, que cette année et aussi plusieurs fois en cette Chambre — que rien n'est fait pour protéger les dénonciateurs, les lanceurs d'alerte. On a souvent aussi été rabroués là-dessus. Et on a refusé des amendements qu'on avait proposés en disant que ça ferait partie de la trilogie; un an plus tard, on attend toujours. Pourtant, de nombreux dénonciateurs, de nombreux lanceurs d'alerte subissent toujours les conséquences de leurs actions non seulement sur le plan professionnel, mais également sur le plan personnel. M. le Président, la collusion et la corruption, c'est un mal collectif. Mais, quand on est un lanceur d'alerte, les blessures sont au niveau personnel ou au niveau familial. Et, encore aujourd'hui, un an plus tard, les gens qui ont dénoncé subissent les contrecoups de ça.

Et, à cet effet, cette Assemblée a d'ailleurs adopté une motion enjoignant la Chambre à adopter dans les meilleurs délais des mesures législatives visant à protéger les lanceurs d'alerte, et on est toujours laissés pour compte à ce niveau-là, on est sur l'attente, et l'attente qui ne finit pas. Et on devrait faire en sorte justement de pousser plus loin tout ce qui touche la protection des dénonciateurs et des lanceurs d'alerte parce que ces gens-là se mettent souvent dans des positions de vulnérabilité, s'exposent à des représailles. On l'a vu, que cette loi, au fédéral, qui a été amenée en 2007, a emmené son lot de victimes, malheureusement toujours des victimes du côté de ceux qui lancent des alertes. Alors, on peut faire des lois, mais, si cette loi n'a pas de mordant, on fait faux bond et ça pose des problèmes et amène des risques qui sont considérables.

Parlons maintenant du projet de loi n° 61, M. le Président. Il est clair que nous devons envoyer un message clair à ceux qui nous ont volés : Remboursez-nous. Et le message est aussi simple que ça : Remboursez-nous l'argent que vous nous avez volé et, à ce moment-là, vous pourrez avoir des contrats de l'État. Si vous ne payez pas ce que vous nous devez, bien, c'est simple, vous n'aurez pas de contrats de l'État. Le message est aussi simple que ça. Le reste devient de la mécanique purement juridique. Et, je le disais et je le répète, tout ce qui est légal n'est pas nécessairement juste. Alors, il faut faire en sorte que le projet de loi n° 61 puisse justement donner espoir à ceux qui se sont fait avoir.

Et, quand je dis «pas d'entente de remboursement, pas de contrat», bien on le vit tous, hein? C'est comme si vous allez chez votre garagiste pour faire faire une réparation, que, quand vous avez payé, vous retournez chez vous, vous vous apercevez que votre auto n'a pas été réparée comme vous l'aviez demandé, bien évidemment, avant de retourner chez votre garagiste, vous allez demander d'être remboursé ou à tout le moins qu'il, justement, fasse la réparation qui s'impose. Et c'est un peu ce qu'on demande avec le projet de loi n° 61.

Par contre, ce principe d'être remboursé doit respecter trois règles, trois principes fondamentaux : l'équité, la justice et aussi le discernement. Alors, quand je dis «équité» : équité pour les travailleurs honnêtes des firmes fautives. Quand on a une entreprise de 5 000, 6 000 personnes et qu'il y a seulement quelques personnes à la tête de l'organisation qui ont, justement, fait des tractations de coulisse pour obtenir illégalement des contrats, ces gens-là qui sont des pères de famille, des mères de famille qui travaillent de bonne foi pour ces entreprises-là, qui n'ont jamais été partie prenante à ces manoeuvres dolosives et frauduleuses… «Dolosives», M. le Président, j'ai appris, cette semaine, par un témoin ce que ça voulait dire. Mais c'est dans le projet de loi n° 61. Voyez-vous, comment on éclaircit plusieurs choses quand on fait nos travaux de la bonne façon en commission parlementaire.

• (17 h 30) •

Donc, équité pour ces gens-là, qui sont des gens honnêtes, mais qui, aujourd'hui, parce que leurs compagnies n'ont plus de contrats parce qu'ils ont, justement, commis des fraudes, ces gens-là peuvent perdre leur emploi. Et c'est… Souvent, les premiers à subir les contrecoups ont été justement ceux qui ont lancé des alertes ou qui ont été des dénonciateurs.

Le deuxième point, c'est la justice, la justice pour les citoyens et les entrepreneurs honnêtes qui, eux, se sont fait éjecter du processus d'appel d'offres parce qu'ils respectaient les règles, parce qu'ils n'étaient pas les plus forts, parce qu'ils n'étaient pas les plus gros et qu'ils devaient faire face à une compétition tout à fait... ou une concurrence tout à fait déloyale de la part de certaines compagnies.

Et le troisième point, c'est le discernement pour justement jeter les bases de nouvelles façons de faire afin de mettre un frein, un frein réel à la corruption, et considérer justement, en même temps, l'importance des firmes de génie et des entrepreneurs. On ne peut pas jeter le bébé avec l'eau du bain, M. le Président, donc on doit appliquer nos règles, mais les appliquer avec discernement. Il faut être guidés par ce qu'on appelle au quotidien, si vous voulez, le gros bon sens. On ne peut pas laisser la place à la rancoeur et à la vengeance. On s'est fait voler, oui, mais est-ce qu'on est capables de bâtir un monde meilleur? C'est ce qu'on souhaite. Mais on peut le faire uniquement avec des procédures qui vont venir régler des choses, pas nécessairement avec des procédures qui sont complexes. Et on doit le faire dans un laps de temps qui va être acceptable, acceptable et raisonnable. En fait, le remède que nous proposons avec le projet de loi n° 61 ne peut pas être plus dommageable que le mal auquel nous tentons justement de remédier.

Il va aussi falloir, M. le Président, penser à une forme de réhabilitation et de réconciliation. Ça s'est fait dans d'autres pays, dans des pays où on a justement commis des crimes innommables, mais on s'est aperçu, après un certain temps… Je pense à l'Afrique du Sud, on a trouvé des moyens de trouver justice et réconciliation, et peut-être qu'on en est rendus là ici, au Québec, dans cette lutte à la corruption. Il faut regarder devant nous et tenter d'entrevoir un avenir plus brillant que celui qu'on a connu au cours des 10, 15 dernières années. Sinon, à quoi bon apporter de nouvelles solutions si notre objectif n'est justement pas de créer un monde meilleur?

Parlons d'équité encore une fois. C'est le premier objectif que nous visons avec le projet de loi n° 61. Puis un exemple qui me vient en tête, que tout le monde va comprendre, là, alors qu'on est dans la fièvre du hockey, c'est : quand vous mettez deux équipes sur la patinoire, il faut que chaque équipe ait cinq joueurs d'avant et un gardien de but. Si une équipe décide de jouer avec 10 joueurs ou avec deux rondelles, bien, on vient briser la façon de faire. C'est la même chose quand on fait des contrats avec le gouvernement. Il faut que tout le monde soit capable de respecter ces règles et amener des moyens qui vont éviter l'injustice dont plusieurs entreprises et firmes ont été victimes, et donc il faut être capables de trouver des moyens de le faire.

On a eu des témoignages variés au cours de la commission parlementaire. En fait, avec un si court laps de temps, je suis, moi aussi, comme l'a été... comme l'a exprimé tantôt mon collègue de Fabre, mais qui reflétait un peu l'opinion de tout le monde de la commission, nous avons été impressionnés par la qualité des mémoires qui nous ont été présentés, et avec un court laps de temps, là, entre l'invitation et le moment où ces gens-là devaient témoigner. Et je pourrais vous dire que chacun de ces témoignages ou chacun de ces mémoires ont été une fleur qui nous a été apportée. À nous maintenant, à la commission, de faire un bouquet de ces fleurs qui nous ont été déposées et de présenter un projet de loi qui va respecter vraiment ce que cherche la population et nous aussi, les parlementaires, c'est-à-dire la justice.

Et, dans cette optique, on doit évaluer les propositions qui nous ont été faites, et, à titre d'exemple, il faut élargir au-delà du monde de la construction une saine application des règles d'octroi de contrat public à l'ensemble des contrats publics, justement, pas seulement au monde de la construction. Et là je pense à tout ce qui touche l'informatique, ce qui touche l'approvisionnement. Le gouvernement dépense des centaines de millions de dollars chaque année, est-ce qu'on en a pour notre argent? Alors, il serait erroné ou mal avisé que de prendre le projet de loi n° 61 et de l'utiliser uniquement au monde de la construction, ça serait, d'une certaine façon, M. le Président, faire un peu de l'aveuglement volontaire.

Plusieurs des groupes qui ont été entendus nous l'ont d'ailleurs souligné. Et je pense à l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, c'est à la page 9 de son mémoire, et je cite : «…le mandat accordé en 2011 à l'Unité permanente anticorruption — l'UPAC — en vertu de la Loi concernant la lutte contre la corruption ne s'arrête pas à l'industrie de la construction, il concerne tout le secteur public.» On dit aussi que «le présent projet de loi devrait [...] également viser tout le secteur public». Il faut «étendre l'application du projet de loi à tous les contrats du secteur public [afin de permettre] d'éviter les écueils du choix d'une définition, tout en rendant l'application de la loi encore plus large et efficace — et je ferme les guillemets.»

La Corporation des entrepreneurs généraux du Québec, que tout le monde a salué… tout le monde de la commission a salué l'excellence du mémoire qui nous a été présenté, d'entrée de jeu, à la page 3 de son mémoire, et je cite, on nous dit : «Nous sommes d'avis que ce projet de loi devrait viser l'ensemble des marchés publics et non seulement les contrats reliés à la construction. Les autres secteurs d'approvisionnement sont également à risque de connaître des situations similaires et sont par ailleurs également soumis aux accréditations de l'AMF — l'agence des marchés financiers. Au surplus, nous sommes déçus — disaient-ils — de constater que ce projet de loi vise uniquement les entreprises de construction qui ont conclu un contrat directement avec un organisme public. Ce qui exclut les sous-entrepreneurs, les fournisseurs, etc.» Alors, on pose une question, on dit : «Pourquoi ne pas saisir l'opportunité de légiférer pour tous les secteurs? — et je pense que c'est une merveilleuse suggestion et je ferme les guillemets.»

Dans le même sens, l'Ordre des ingénieurs du Québec, à la page 8 de son mémoire, nous disait, et je cite : «Nous partageons, par ailleurs, l'opinion de la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec à l'effet que le projet de loi devrait viser l'ensemble des marchés publics et non seulement les contrats liés à la construction.»

Alors, vous voyez, M. le Président, tout le monde a à peu près la même opinion. Même chose pour l'Association de la construction du Québec, pages 7 et 8 de son mémoire, dans une longue citation que je vais tenter de résumer, on nous disait — j'ouvre les guillemets : «Les arguments qui militent en faveur d'un champ d'application élargi de la loi sont de deux ordres. Débutons par le souci d'uniformité législative. La Loi sur les contrats des organismes publics, adoptée en 2006 puis entrée en vigueur en 2008, encadre l'ensemble des processus d'approvisionnement de l'État.» Il vise trois points, que je vous résume rapidement : «Tout contrat d'approvisionnement, de services ou de travaux de construction comportant une dépense égale ou supérieure au seuil [minimum] prévu dans tout accord intergouvernemental applicable pour chacun de ces contrats et organismes publics — vise aussi — tout contrat de partenariat public-privé — et finalement, le troisième point — tout autre contrat déterminé par règlement du gouvernement. Seules les municipalités sont partiellement exclues de l'application de la loi, une situation — disaient-ils — qui n'a pas sa raison d'être.» Et je ne citerai pas l'ensemble de… ce que j'avais extrait de ce mémoire, mais je pense que le message, vous voyez, il est très clair.

Alors, il ne faut pas penser que, puisque nous avons débusqué des cas de corruption dans le monde de laconstruction, il n'y en a pas dans d'autres secteurs. Je pense qu'il faut aller au-delà de ces seuls contrats dans le domaine de la construction, sinon, bien honnêtement, je pense que nous allons faillir à notre tâche, parce que les citoyens nous demandent justement de non seulement réagir, mais d'être beaucoup plus proactifs. Et on a vu dans les journaux récemment que les contrats en informatique ont fait la manchette plus d'une fois. Alors, c'est un des aspects que nous pourrions regarder. Parce que, vous savez, M. le Président, les criminels ne se limitent pas à un champ d'activité, puis les barrières pour les retenir ne sont pas là, et, tant qu'il y aura des failles dans notre façon de faire, soyez assurés que des gens avec de mauvaises intentions vont être très créatifs et surtout très proactifs.

• (17 h 40) •

Au même titre, les personnes qui ont commis des actes répréhensibles ne sont pas uniquement dans le secteur privé. Il y en a aussi dans la fonction publique. On l'a entendu à la commission Charbonneau. Pour faire de la collusion et de la corruption, c'est-à-dire collusion, c'est au niveau des idées, mais corruption, c'est qu'on passe à l'acte, ça prend des gens dans l'appareil gouvernemental qui vont faciliter justement, à ceux qui sont prêts à payer le gros prix, qui vont faciliter leurs façons de faire à l'interne. Et malheureusement le projet de loi n° 61 ne vise qu'un des acteurs, ne vise pas des gens qui, à partir de leur fonction dans l'appareil gouvernemental, ont facilité la tâche à ces gens-là.

La ville de Montréal a d'ailleurs souligné cet aspect et en a même fait une recommandation. Et ce que la ville de Montréal nous disait, je vais le citer parce que je pense qu'ils ont mis le doigt sur le problème, je cite : «Les audiences de la commission Charbonneau ont démontré que des employés et des élus ont tiré des avantages indus, notamment d'ordre financier, dans le cadre de l'adjudication, de l'attribution ou [...] la gestion de contrats publics. Or, dans sa forme actuelle, les fonctionnaires et les élus qui ont participé à ce genre de stratagèmes ne sont pas inclus dans le projet de loi [n° 61]. La ville de Montréal a déjà intenté un certain nombre de recours à l'égard d'ex-employés. Ces recours impliquent les mêmes défis que les recours visés par le projet de loi n° 61, notamment au chapitre de la preuve des dommages et de la prescription. La ville de Montréal souhaite donc que le projet de loi soit modifié pour permettre de faciliter également les recours à l'égard des employés, fonctionnaires et élus en faisant les adaptations nécessaires. Si cette proposition devait être acceptée — nous disait la ville de Montréal — il faudrait ainsi notamment s'assurer que les recours visés par le projet de loi ne se limitent pas à ceux initiés devant les tribunaux civils, mais visent également les tribunaux d'arbitrage où certains litiges entre la ville de Montréal et ses employés syndiqués sont tranchés.» Je poursuis en citant : «La ville de Montréal recommande que le projet de loi soit modifié pour permettre de faciliter également les recours à l'égard des employés, fonctionnaires et élus en faisant les adaptations nécessaires.» Et ils ont terminé leur mémoire sur ces propos qui, selon moi, sont tout à fait pertinents, M. le Président.

Le troisième point, c'est la capacité juridique exclusive présentée dans le projet de loi n° 61, une capacité juridique exclusive que se donne le ministre de la Justice pour intenter des recours et qui soulève un tas de questionnements de la part de plusieurs témoins. Certains organismes ont pourtant des moyens d'intenter des recours, et l'ont déjà fait, la ville de Montréal en étant un exemple. Cependant, avec le projet de loi n° 61, un organisme public, une municipalité, par exemple, devra toujours obtenir l'autorisation du ministre pour intenter un recours. Alors, s'il estime que l'intérêt public le justifie, le ministre peut, bien sûr, autoriser le recours devant le tribunal du district judiciaire de son choix. Et ce dernier, à ce moment-là, doit être mis en cause. Pourtant, hier, le maire de Montréal a revendiqué le droit pour la ville d'intenter ses propres recours sans devoir demander la permission à Québec. Et je pense que ça, c'est un aspect qu'on va devoir fouiller beaucoup plus avant d'adopter ce projet de loi, M. le Président.

Donc, ce qu'on doit viser pour être efficaces, c'est une meilleure collaboration entre les organismes, tous voués aux meilleurs intérêts de la population, et des organismes qui veulent empêcher qu'on continue à se faire frauder, voler et spolier comme on le fait actuellement.

L'Union des municipalités du Québec est même, aussi, allée dans le même sens, et je cite leur mémoire, on dit : «Considérant que les municipalités sont des partenaires privilégiés dans la mise en oeuvre de ce projet de loi, permettez-moi de vous proposer quelques amendements pour bonifier les mécanismes d'application du projet de loi en impliquant les municipalités et en respectant leur autonomie». Donc, c'est un message qui nous vient de toutes parts et qui est clair, net, précis. Et les municipalités nous disent aussi qu'ils veulent avoir ce choix d'intenter eux-mêmes lerecouvrement. Vous savez, quand, dans le projet de loi, le gouvernement se donne la possibilité de retenir 20 % des sommes recouvrées, bien, il y a peut-être des municipalités qui vont se dire : On va développer l'expertise puis peut-être qu'on sera en mesure de faire le travail pour beaucoup moins cher.

L'Association des ingénieurs-conseils du Québec, qui nous sont aussi arrivés avec des idées fort originales et pertinentes, cite, notamment en page 6 de son mémoire — et j'ouvre les guillemets : «À l'heure actuelle, le projet de loi du gouvernement et l'institution de certains recours collectifs de droit civil font double emploi, ce qui aura pour effet de nuire à l'efficacité [des] processus engagés par le gouvernement. La possibilité que des entrepreneurs et sous-traitants désirent éventuellement entreprendre des poursuites sur la base de faits visés par le projet de loi risque également d'en perturber l'application.» On dit que «le projet de loi n° 61, tel que rédigé, contient par ailleurs peu d'incitatifs à la participation des entreprises au programme de remboursement».

Alors, ça, c'est un point qui est important. Est-ce qu'on va viser uniquement les entreprises qui ont été convoquées à la commission Charbonneau, qui ont avoué leur crime ou est-ce qu'on doit regarder l'ensemble des entreprises ou des firmes qui ont pu participer à un tel problème? On serait surpris, mais l'Association des ingénieurs-conseils du Québec, qui comptait à peu près 170 membres il y a plusieurs années, n'a maintenant que 34 membres. Alors, ce serait simple, si on trouvait un moyen d'avoir une négociation avec un organisme comme l'association, de réunir ces 34 firmes là et de nous dire : Écoutez, on peut embarquer dans un long processus judiciaire pour tenter de vous faire admettre certains faits ou admettez que maintenant vous êtes coincés. On va se réunir ensemble puis on va revenir au gouvernement avec une proposition.

Le ministre de la Justice parlait, lors de l'annonce du projet de loi n° 61, que les autorités gouvernementales au Québec se sont fait voler plusieurs centaines de millions. Bien, peut-être qu'on pourrait s'entendre rapidement, éviter des longs processus judiciaires et faire en sorte qu'on puisse récupérer notre argent le plus rapidement possible. Et ça, je peux vous dire que c'est une proposition avec laquelle je suis entièrement d'accord, quand l'Association des ingénieurs-conseils du Québec nous disait : Au lieu d'y aller, là, contrat par contrat et tenter de trouver une méthode quelconque pour déterminer quelle a été notre perte, on pourrait s'entendre sur l'ensemble des pertes qu'une compagnie a pu nous faire subir. La compagnie X qui a eu 150, 200 millions de contrats pourrait déterminer avec le gouvernement et dire : Bon, bien, parfait, on vous doit, là, tant de millions de dollars, est-ce qu'on peut s'entendre là-dessus? Mais il n'y a pas personne qui ose venir le faire parce que, dans sa forme actuelle, le projet de loi n° 61 n'offre aucun incitatif pour que des gens viennent faire la bonne chose. Alors, ça, c'est une des choses sur laquelle on va mettre aussi beaucoup d'emphase.

• (17 h 50) •

Deuxième idée que je veux traiter, en plus de l'équité, M. le Président, c'est la justice. C'est sûr que les citoyens du Québec vivent une injustice depuis trop longtemps en matière de collusion et de corruption. La population a été flouée, et je pense qu'on doit rendre justice aux citoyens mais également aux firmes honnêtes. Combien de firmes ont déclaré faillite, M. le Président, parce qu'elles n'avaient pas accès à certains marchés, parce qu'elles n'avaient pas accès à certains fonctionnaires, parce qu'elles n'avaient pas accès à certains élus, et que ces firmes-là, parce qu'elles ont voulu respecter les règles du jeu, bien, ont perdu leurs rêves, ont perdu leurs compagnies? Plusieurs ont fait faillite. Qu'est-ce qu'on dit aux gens honnêtes, M. le Président? La loi n° 61 vise essentiellement à venir, justement, parer ou répondre à cette injustice flagrante. Et personnellement, dans le cadre des travaux que j'ai effectués à l'Unité anticollusion, j'ai rencontré de ces ingénieurs qui étaient devenus ingénieurs pour la bonne cause et qui ont tout simplement décidé de quitter ce secteur-là parce que justement ils n'avaient jamais droit au chapitre et ils n'étaient jamais capables d'obtenir les contrats que le gouvernement devrait accorder de façon équitable à l'ensemble de ces citoyens, à l'ensemble de ces entreprises.

Donc, visons un remboursement rapide selon les règles de l'art. On ne fera pas de raccourci, on ne fera pas de choses qui ne sont pas transparentes, mais faisons en sorte justement de régler ça autrement que par des dédales juridiques compliqués. Un témoin est venu nous dire que le projet de loi n° 61, tel qu'il est, est un fouillis juridique… un casse-tête juridique, pas fouillis, trop négatif, mais un casse-tête juridique. Et là-dessus le ministre a pris acte, et, oui, on va regarder ces aspects-là. Mais il est important de s'assurer qu'on aura les reins solides pour naviguer durant de longues années dans de telles procédures, M. le Président. L'Assemblée nationale étudie actuellement un projet de loi qui vise à rendre la justice accessible et compréhensible. Bien, voici un bel exemple. Pour commencer, commençons avec le projet de loi n° 61, allons dans ce sens, et arrêtons de faire compliqué, et trouvons un moyen d'agir avec simplicité, efficacité et aussi rapidité.

Faire payer, bien, c'est ce que vise essentiellement le projet de loi n° 61, recouvrer les sommes volées et aussi penser à une certaine forme de suramende. Ce n'est pas vrai que quelqu'un qui a pris toutes sortes de moyens frauduleux pour nous voler 100 millions pourrait s'en tirer en nous remettant 100 millions. À ce que je sache, comme citoyen, si je tente de frauder le fisc, on va d'abord me faire payer ce que j'aurais dû payer, puis en plus de ça on me donne une amende. Bien, peut-être que c'est cette amende-là qui deviendrait justement un moyen de ramener les gens dans le droit chemin. Sans ça, il n'y a pas de danger de se faire prendre, on est aussi bien de continuer à frauder, puis on s'arrangera avec le gouvernement pour pouvoir négocier une pénalité qui va être beaucoup moindre. Et là-dessus l'association des entrepreneurs généraux du Québec a d'ailleurs proposé cette idée d'introduire, et je le cite : d'«introduire pour ces entreprises une pénalité équivalente à 5 % des montants des contrats conclus avec des organismes publics pour les trois années qui vont suivre [l']accréditation [de] l'AMF». Donc, penser à une suramende, je pense que c'est une voie intéressante.

La ville de Montréal a d'ailleurs repris cette idée, et la ville qui disait : Bien, on va être obligés d'aller chercher des avocats, des juriscomptables pour faire la preuve; qu'ils viennent s'asseoir avec nous, qu'ils nous remboursent, qu'ils paient cette amende, puis, à ce moment-là, on ne sera pas quittes, mais, à tout le moins, on aura trouvé une solution rapide plutôt que de traîner des dossiers comme ceux-là en justice pendant de longues périodes de temps.

Plusieurs, M. le Président, ont posé des questions sur les frais forfaitaires du ministre, 20 %; on veut donner au ministère ou au gouvernement 20 % des sommes qui auront été recouvrées. Alors, si on s'est fait… on a eu une entente pour se faire rembourser 100 millions, bien, il y a seulement 80 millions qui vont retourner aux victimes, d'une certaine façon, et 20 % serviront de frais administratifs. C'est énorme. Si je ne me trompe pas, dans mon vieux métier, 30 % était un taux usuraire, et on pouvait accuser quelqu'un au criminel. Alors, 10 % de plus, là... on va peut-être y arriver. Je pense qu'on peut trouver un terrain d'entente pour réduire les frais pour ces sommes recouvrées. Et je dis bien les sommes... pas les sommes qui nous ont été volées, les sommes qu'on va recouvrer. C'est beaucoup. Et la ville de Montréal a aussi appuyé cette motion en nous disant qu'eux autres, ils veulent récupérer 100 % des sommes qui leur ont été volées, idéalement, mais, à tout le moins, 100 % des sommes que le gouvernement aura réussi à récupérer, M. le Président.

Donc, ce qu'on constate, c'est qu'il y a une importance d'avoir une bonne coordination avec toutes les instances de poursuite, autant le gouvernement que les municipalités ou que d'autres partenaires importants, et de s'assurer que le gouvernement, s'il entame des poursuites, fasse défrayer les frais par les entreprises fautives plutôt que de refaire payer encore une fois les citoyens qui vont réclamer leur dû, M. le Président.

Alors, ça me porte aussi à me questionner au sujet des moyens que va utiliser le gouvernement pour déterminer les pourcentages à rembourser, les surcharges... On parle qu'on s'est fait voler, depuis plusieurs années… On parle, à la ville de Montréal, de 30 %, d'autres parlent de 15 %. Comment on va faire pour déterminer ce pourcentage-là? C'est un... on dirait en criminologie le chiffre gris pour déterminer c'est quoi, la vraie criminalité. Seulement celle qui nous est rapportée ou celle qui a vraiment eu lieu? Là, c'est la même chose, comment on est en mesure de dire exactement combien telentrepreneur a pu prendre en surcharge lorsqu'il nous a soumis son contrat? Ça, c'est une chose. Ça, c'est... on regarde uniquement le montant. On pourrait aussi regarder la qualité du travail; combien d'argent il nous a chargé une chose, mais, si, en plus de ça, la route qu'il nous a construite doit être refaite dans deux ans, c'est un coût supplémentaire que l'État va être encore obligé de regarder. Donc, si on a regardé le tort fait à une municipalité ou au gouvernement, bien, il faut regarder l'ensemble des choses. Et, pour plusieurs, les surcharges entraînées par, justement, cette collusion, qui varient entre 13 % et 35 %, on ne peut pas y aller de manière arbitraire pour déterminer exactement combien qu'on va charger à ces entreprises-là, parce que ça ouvre la porte, encore là, à des débats judiciaires qui vont être longs et difficiles.

Le troisième point, M. le Président, en terminant, c'est discernement et pragmatisme. Soyons terre à terre, est-ce qu'on va récupérer 100 % des sommes qui nous ont été volées? La réponse, c'est non, n'ayons pas peur de l'affirmer aujourd'hui. Mais on peut se laisser guider par des moyens qui vont être autre chose que la vengeance, et je pense que c'est un aspect important du projet de loi, et ça doit répondre à des objectifs qui sont, justement, objectifs mais qui vont préserver aussi l'économie du Québec.

Est-ce qu'on va faire en sorte qu'on va faire couler toutes les entreprises qui ont pu participer à certains stratagèmes et de faire venir des gens de l'extérieur dont on ne sait pas grand-chose? On pourrait, là aussi, avoir des surprises. Parce que, s'il y a une chose qu'on doit se dire ici, au Québec, c'est : À tout le moins, on a eu le courage de faire le ménage dans cette industrie-là. Moi, j'ai donné des conférences à travers le pays, puis les gens disaient au début que c'était un problème qui était purement québécois. Et je leur disais : Mais commencez donc à regarder dans votre propre cour. Et, c'est drôle, depuis qu'ils ont commencé à faire ça, ils se sont aperçus que le problème de collusion puis de corruption, ça existe ailleurs.

Alors, au moins, donnons-nous un bon certificat… ou un certificat de bon gouvernement, de vouloir justement faire les bonnes choses et de prendre des moyens pour s'attaquer à un problème qui va au-delà, comme je le disais tantôt, de l'aspect monétaire. On ne peut pas se voiler les yeux, on ne peut pas faire de l'aveuglement volontaire : il y a beaucoup d'argent qui nous a été volé. Et on va faire une chose, et la chose la plus digne, mon collègue de Fabre l'a dit tantôt, il faut négocier. On regarde, là, les conflits qu'on a en Afghanistan et au Pakistan, même les forces de ces pays-là, lesgouvernements de ces pays-là sont en train de contempler l'idée qu'il faut peut-être négocier avec les talibans, ceux qui étaient leurs ennemis il n'y a pas si longtemps. Peut-être qu'on est rendus là, au Québec, et il faut trouver un moyen de négocier et faire en sorte qu'on va trouver une solution qui va être équitable pour tout le monde.

Et, à ce propos, l'Association des ingénieurs-conseils du Québec nous disait, je les cite : «Le programme de remboursement prévu par le projet de loi n° 61 devrait offrir la possibilité de négocier non seulement sur la base de chacun des contrats visés, mais bien pour l'ensemble des contrats visés d'une même firme. L'AICQ observe un grand désir chez ses membres de prendre part activement au virage amorcé dans l'industrie du génie-conseil, et ce, de manière efficace. Les membres craignent qu'en procédant par contrat la période nécessaire à établir les remboursements soit inutilement prolongée. Il est crucial que le programme de remboursement créé par le gouvernement soit facilitateur et incitatif afin d‘atteindre rapidement l'objectif [visé].» Voyez-vous, c'est ce qu'ils disent : Arrêtons de poursuivre notre malheur, trouvons un moyen de régler et faisons ça d'une façon logique, en négociant.

Et ce qu'ils nous ont dit, les gens, les représentants de l'association des ingénieurs, c'est que les firmes sont prêtes à venir voir le gouvernement. Mais, s'ils sont pour le faire à leur détriment, c'est-à-dire que… le faire et amener leurs entreprises à la faillite, bien évidemment ils vont rester sur la touche et vont attendre que le gouvernement intervienne. Donc, ça nous prend des incitatifs au programme. Et il faut améliorer, dans le projet de loi n° 61, ces incitatifs, M. le Président, et on doit le faire avec ces organisations.

En conclusion, M. le Président, on vit actuellement une conjoncture extraordinaire qui nous donne l'occasion de changer les cultures, c'est ça qu'on doit changer. Le projet de loi n° 61 n'est pas uniquement une question de dollars, c'est une question de culture. Il faut saisir cette occasion. Et je vois que vous vous levez, donc vous voulez que je résume. M. le Président…

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Il est 18 heures, M. le… Bien, s'il y a consentement pour qu'on poursuive une petite minute ou deux de plus pour faire votre conclusion.

Des voix :

• (18 heures) •

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Consentement pour deux minutes? Est-ce que vous êtes capable de nous… M. le député de Saint-Jérôme, alors concluez.

M. Duchesneau : …ça fait partie du bouquet dont je vous parlais tantôt, donc vous pouvez avoir une conclusion de deux minutes ou de 15 minutes si… Mais je vais vous faire ça en deux minutes, M. le Président; je ne veux pas étirer indûment.

On l'a entendu lors des audiences, on a actuellement une intention ferme de vouloir changer les choses. Profitons-en. Et les propos critiques que j'ai apportés tantôt ne visent pas le ministre de la Justice lui-même, je connais ses intentions nobles à vouloir changer les choses, mais m'obligent comme parlementaire à vous apporter ces corrections, ces changements. Puis je suis sûr qu'on va trouver un terrain d'entente, on l'a fait dans le passé, mais je ne peux pas être tout simplement silencieux. On a le leadership, ça nous prend un leadership qui est porteur pour amener justement le navire à bon port. Et on va faire en sorte qu'on va trouver une solution.

Ce qu'il faut retenir, et la Commission de réforme du droit nous l'a dit — je termine là-dessus, M. le Président, j'ai 12 pages mais je vais terminer — la Commission de réforme du droit, en 1973, nous avait dit que le vrai facteur de dissuasion quand des crimes sont commis, ce n'est pas la sévérité de la peine, c'est la certitude d'être pris quand tu as commis un crime. Alors, il faut que le projet de loi n° 61 soit cette certitude d'être pris si tu commets une infraction à la réglementation. Merci d'avoir été indulgent, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jérôme.

Ajournement

Alors, s'il vous plaît, compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés au jeudi 5 décembre 2013, 9 h 45. Bonne soirée à tous et à toutes et bonne nuit.

(Fin de la séance à 18 h 2)