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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Wednesday, November 26, 2014 - Vol. 44 N° 47

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Souligner la participation de M. Philippe Lécuyer au tournoi mondial de handball

M. Stéphane Billette

Rendre hommage à M. Sylvain McKenzie, instigateur du Défi cycliste pour les grands brûlés

M. André Villeneuve

Souligner le 40e anniversaire de l'Association féminine d'éducation et d'action sociale
de Saint-Denis-de-Brompton

Mme Karine Vallières

Souligner le 40e anniversaire de l'Ensemble folklorique Mackinaw inc.

M. Sébastien Schneeberger

Féliciter les organismes communautaires de Laval-des-Rapides et inviter les citoyens à
participer aux guignolées

M. Saul Polo

Rendre hommage à M. Samuel Côté, historien

M. Pascal Bérubé

Souligner le 40e anniversaire de La Société historique du Cap-Rouge

M. Sam Hamad

Souligner l'inauguration d'un monument à la mémoire de Mme Julie Surprenant,
disparue en 1996

M. Mathieu Lemay

Souligner les 30 ans de M. Edward Janiszewski en tant que maire de Dollard-des-Ormeaux

M. Carlos J Leitão

Féliciter l'entreprise Soucy industriel, lauréate du prix Desjardins Entrepreneurs

M. Jean D'Amour

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 28 Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions
du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l'équilibre
budgétaire en 2015-2016

M. Carlos J Leitão

Mise aux voix

Projet de loi n° 27 Loi sur l'optimisation des services de garde éducatifs à l'enfance
subventionnés

Mme Francine Charbonneau

Mise aux voix

Dépôt de documents

Réponse à une pétition

Dépôt de rapports de commissions

Consultations particulières sur le projet de loi n° 21 Loi concernant principalement la
mise en oeuvre d'ententes en matière de travail entre le gouvernement du Québec et le
Conseil Mohawk de Kahnawake


Dépôt de pétitions

Prendre position en faveur d'un système léger sur rail comme mode de transport collectif
sur le pont de remplacement du pont Champlain


Questions et réponses orales

Tarification des services de garde et création de nouvelles places

M. Stéphane Bédard

M. Philippe Couillard

M. Stéphane Bédard

M. Philippe Couillard

M. Stéphane Bédard

M. Philippe Couillard

M. Stéphane Bédard

M. Philippe Couillard

Services informatiques du gouvernement

Mme Diane Lamarre

M. Gaétan Barrette

Mme Diane Lamarre

Document déposé

M. Gaétan Barrette

M. Sylvain Roy

M. Sam Hamad

Modulation des tarifs de services de garde selon les revenus

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

Bonis versés aux employés des sociétés d'État

M. François Bonnardel

M. Martin Coiteux

M. François Bonnardel

M. Martin Coiteux

M. François Bonnardel

M. Martin Coiteux

Processus d'attribution d'un contrat en informatique à la Commission de la santé et de
la sécurité du travail

M. Claude Surprenant

M. Sam Hamad

M. Claude Surprenant

M. Sam Hamad

M. Claude Surprenant

M. Sam Hamad

Conditions imposées à TransCanada concernant le projet d'oléoduc Énergie Est

M. Sylvain Gaudreault

M. David Heurtel

M. Sylvain Gaudreault

M. David Heurtel

M. Bernard Drainville

M. Jean-Marc Fournier

Révision de la gouvernance, du rôle et de l'organisation des commissions scolaires

Mme Nicole Léger

M. Yves Bolduc

Mme Nicole Léger

M. Yves Bolduc

Fusions de commissions scolaires

M. Jean-François Roberge

M. Yves Bolduc

M. Jean-François Roberge

M. Yves Bolduc

M. Jean-François Roberge

M. Yves Bolduc

Compressions budgétaires à ICI Radio-Canada

Mme Véronique Hivon

Mme Hélène David

Motions sans préavis

Rappeler aux Québécois l'importance de transmettre les informations qu'ils possèdent aux
autorités et de collaborer aux enquêtes de l'UPAC

Mise aux voix

Presser le gouvernement fédéral d'appuyer ICI Radio-Canada dans la réalisation de son
mandat et de lui fournir les moyens nécessaires pour respecter ses obligations en vertu
des lois fédérales

Mme Manon Massé

Mme Véronique Hivon

Mme Claire Samson

Mme Hélène David

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Affaires du jour

Projet de loi n° 23   Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal relativement à la
composition du comité exécutif

Adoption du principe

M. Pierre Moreau

M. Jean-François Lisée

M. Mario Laframboise

Mise aux voix

Renvoi à la Commission de l'aménagement du territoire

Mise aux voix

Projet de loi n° 10   Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des
services sociaux notamment par l'abolition des agences régionales

Adoption du principe

Reprise du débat sur la motion de report

Mme Diane Lamarre (suite)

Mme Françoise David

M. Alexandre Iracà

M. Nicolas Marceau

M. Harold LeBel

Mme Lorraine Richard

Mise aux voix

Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. Stéphane Bédard

M. Marc Picard

M. Jean-François Lisée

Mme Françoise David

M. Jean-François Roberge

M. Nicolas Marceau

M. Sébastien Schneeberger

M. Alexandre Cloutier

M. André Villeneuve

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante-cinq minutes)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon mercredi à tous et toutes. Vous pouvez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Et nous allons débuter avec la rubrique des déclarations de députés. Et, sans plus tarder, je vais céder la parole à M. le député de Huntingdon.

Souligner la participation de M. Philippe Lécuyer
au tournoi mondial de handball

M. Stéphane Billette

M. Billette : Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'aimerais profiter de cette tribune pour souligner les talents sportifs d'un jeune homme de mon comté. Philippe Lécuyer est un jeune homme de 16 ans qui s'est démarqué, en juin dernier, en participant au tournoi mondial de handball la Partille Cup en Suède. Ce tournoi est une occasion unique pour les joueurs de handball d'affronter les équipes de plusieurs pays en plus de créer des souvenirs mémorables et créer des amitiés à travers la planète.

Son équipe, l'équipe du Québec, a récolté des honneurs en gagnant la médaille d'argent. Ils sont arrivés en deuxième position parmi 37 équipes. J'aimerais féliciter Philippe pour sa détermination et pour son esprit d'équipe qui ont été des atouts essentiels pour son équipe lors de ce tournoi d'envergure. J'aimerais également féliciter tous les membres de son équipe.

Le sport est un élément essentiel à un mode de vie sain, et c'est très beau de voir des jeunes y mettre autant d'énergie et y avoir autant de plaisir. Encore une fois, félicitations à Philippe et son équipe.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de Huntingdon. Et maintenant je vous cède la parole, M. le député de Berthier.

Rendre hommage à M. Sylvain McKenzie,
instigateur du Défi cycliste pour les grands brûlés

M. André Villeneuve

M. Villeneuve : Mme la Présidente, en 2006, M. Sylvain McKenzie, un pompier de la MRC de D'Autray, originaire de Lanoraie, est profondément touché et attristé lorsque son collègue et ami est gravement brûlé lors d'une intervention. Son état nécessite des soins au Centre des grands brûlés. Sylvain décide alors d'agir et d'amasser des fonds pour la Fondation des pompiers du Québec pour les grands brûlés. M. McKenzie entreprend de parcourir à vélo le trajet Montréal-Papineauville en échange d'une commandite de 1 000 $ qu'il remet aux organisateurs de la compétition provinciale des pompiers. Son action débouche alors sur la création du Défi cycliste pour les grands brûlés, un événement annuel dont il est l'organisateur. Cet événement consiste, pour environ 40 cyclistes, à parcourir 1 000 kilomètres à vélo en cinq jours.

Depuis sa création, presque toutes les régions du Québec ont été visitées, incluant Havre-Saint-Pierre, en 2014. À ce jour, c'est plus de 460 000 $ qui ont été remis à la Fondation des grands brûlés. Ce n'est pas fini puisque M. McKenzie planifie, pour le défi 2016, un trajet Vancouver-Montréal. Il y a donc lieu de souligner son engagement social exceptionnel, sa ténacité et son sens de l'organisation et de lui rendre, Mme la Présidente, un hommage bien mérité. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de Berthier. Maintenant, je me tourne vers la députée de Richmond pour sa déclaration du jour.

Souligner le 40e anniversaire de l'Association
féminine d'éducation et d'action sociale
de
Saint-Denis-de-Brompton

Mme Karine Vallières

Mme Vallières : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Aujourd'hui, j'invite mes collègues de l'Assemblée nationale à souligner avec moi le 40e anniversaire de l'AFEAS de la municipalité de Saint-Denis-de-Brompton. J'en profite aussi pour porter à votre attention que cet organisme, fondé en 1969, s'est vu honorer récemment, lors du congrès provincial, comme l'AFEAS ayant recruté le plus de membres. Autre réussite : en créant la friperie La Fouillerie, dans l'ancienne école depuis 1988, l'AFEAS de Saint-Denis-de-Brompton réussit à assurer son financement et même à distribuer ses surplus à des causes humanitaires.

En terminant, permettez-moi d'adresser une salutation spéciale aux quatre membres fondatrices, toujours aussi actives, Mmes Huguette Mailhot, Thérèse Randlett ainsi que Cécile et Irène Anctil. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée. Et, pour la prochaine déclaration, je reconnais M. le député de Drummond—Bois-Francs.

Souligner le 40e anniversaire de l'Ensemble
folklorique Mackinaw inc.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est avec plaisir que je souligne le 40e anniversaire de l'Ensemble folklorique Mackinaw. Cette compagnie culturelle a été fondée en 1974 par la fusion de deux groupes de danse folklorique, soit l'Alunelul de Drummondville, et le Tovarich d'Acton Vale. Fondateur du Festival mondial de folklore en 1982, devenu le Mondial des cultures en 1998, Mackinaw demeure le partenaire artistique de premier plan. Démontrant qu'on atteint l'universel en étant soi-même, il contribue au rayonnement du Québec au-delà des frontières. Perpétuant les traditions d'ici et d'ailleurs par la danse et la musique, Mackinaw a amené Drummondville à faire partie du réseau sélect des capitales folkloriques.

À l'occasion de son 40e anniversaire, Mackinaw s'est démarqué par une importante implication du milieu culturel québécois. Permettez-moi de saluer la présidente de l'ensemble, Suzette Joyal, et son directeur artistique, Mihai Muntean. Grand bravo et merci à Mackinaw, qui est la fierté de notre patrimoine folklorique!

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député. Et, toujours à la rubrique de déclarations de députés, je reconnais M. le député de Laval-des-Rapides.

Féliciter les organismes communautaires de
Laval-des-Rapides et inviter les citoyens
à participer aux guignolées

M. Saul Polo

M. Polo : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je tenais à adresser mon soutien et mes félicitations aux différents organismes qui se mobilisent à Laval-des-Rapides en cette période des fêtes afin d'apporter un peu de réconfort et de soutien aux personnes démunies et dans le besoin.

Mon équipe et moi-même, accompagnés de bénévoles de notre comté, avons participé, dimanche dernier, à la guignolée de la Saint-Vincent-de-Paul, église Saint-Louis. Nous avons apporté des denrées non périssables ainsi que des jouets que nous avons recueillis auprès de généreux citoyens. Nous participerons également, les prochaines semaines, à plusieurs activités dans le comté afin de contribuer à redonner un peu le sourire à ceux qui, dans cette période des fêtes, en ont grand besoin. À cet effet, j'invite tous les citoyens de Laval-des-Rapides à prendre part aux différentes activités et guignolées. Que ce soit en faisant du bénévolat ou par des petites contributions, ces petits gestes ont des grands impacts et redonnent le sourire à ceux qui l'ont perdu. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. M. le député de Matane-Matapédia, c'est à vous la parole.

Rendre hommage à M. Samuel Côté, historien

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente. Je désire souligner le travail exceptionnel d'un jeune historien originaire de Price, dans La Mitis, M. Samuel Côté. Ce passionné de recherche et de trésors sous-marins présente aux Québécois la nouvelle série télévisée Chasseurs d'épaves, diffusée sur la chaîne Historia. Entouré d'une équipe de plongeurs chevronnés, Samuel dirige l'ensemble des opérations de recherche des épaves enfouies dans les profondeurs du fleuve Saint-Laurent.

Dans cette série hors du commun, Samuel met en lumière les différents aspects de son métier, que très peu de gens pratiquent. Il redonne également à notre majestueux fleuve Saint-Laurent son histoire et ses lettres de noblesse. Auteur du livre Les naufrages du Québec au XXe siècle, Samuel Côté a déjà plusieurs découvertes à son actif. Il est rapidement devenu une référence en matière d'histoire maritime au Québec. Sachant qu'il a toujours plusieurs projets sur sa table à dessin, je lui souhaite beaucoup de succès dans ses aventures à venir, et je me ferai un plaisir de suivre son journal de bord avec attention. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député. Et, M. le député de Louis-Hébert, à vous la parole.

Souligner le 40e anniversaire de La
Société historique du Cap-Rouge

M. Sam Hamad

M. Hamad : Mme la Présidente, La Société historique de Cap-Rouge célèbre cette année son 40e anniversaire d'existence. Voué à la sauvegarde et à la mise en valeur du patrimoine de Cap-Rouge, cet organisme travaille depuis quatre décennies déjà à faire découvrir son histoire et à protéger son patrimoine. Est-il besoin de rappeler que c'est près de l'embouchure de la rivière de Cap-Rouge que Jacques Cartier a fait la première tentative d'implantation française au Québec en 1541? Que ce soit par son engagement et sa contribution dans plusieurs projets ou encore par la publication de nombreux ouvrages, La Société historique de Cap-Rouge révèle à la population ce merveilleux petit coin du pays.

Je profite donc de l'occasion, Mme la Présidente, pour souligner le travail et l'apport des dirigeants de La Société historique de Cap-Rouge et de saluer ses 400 membres actuels. Et ils sont présents avec nous aujourd'hui, Mme la Présidente. Je tiens particulièrement à mentionner le travail de Mme Louise Slater, qui a été présidente de la société pendant plus de 17 ans, de M. Yvon Lirette, membre actif depuis le début, et celui de la présidente actuelle, Mme Linda Even, qui assure la continuité. Longue vie à La Société historique de Cap-Rouge!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député. Alors, messieurs et mesdames, bienvenue à l'Assemblée nationale. Et, pour poursuivre les déclarations de députés, je vais maintenant reconnaître M. le député de Masson.

Souligner l'inauguration d'un monument à la
mémoire de Mme Julie Surprenant
,
disparue en 1996

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : Mme la Présidente, le 16 novembre dernier marquait les 15 ans de la disparition de Julie Surprenant. Pour souligner ce triste anniversaire, la communauté moulinoise s'est montrée solidaire et s'est recueillie à l'occasion de la cérémonie d'inauguration du monument érigé en sa mémoire, une initiative de sa soeur, Andréanne Surprenant. Le monument est éclairé en permanence par un lampadaire afin de symboliser l'espoir de retrouver la jeune femme disparue en novembre 1996.

Face à une telle épreuve qui, pour la grande majorité d'entre nous, semble insurmontable, je tiens à souligner et saluer le courage incommensurable de la famille de Julie, soit sa soeur Andréanne, son père Michel Surprenant et sa mère Francine Desautels. Nous sommes tous très touchés par l'épreuve que vous surmontez depuis maintenant 15 ans, et soyez assurés que nous partagerons à jamais l'espoir de retrouver Julie. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Maintenant, M. le député de Robert-Baldwin, je vous cède la parole.

Souligner les 30 ans de M. Edward Janiszewski
en tant que maire de Dollard-des-Ormeaux

M. Carlos J Leitão

M. Leitão : Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est avec grand plaisir que je tiens aujourd'hui à saluer et à féliciter M. Edward Janiszewski, qui souligne cette année 30 ans de service à la communauté à titre de maire de la ville de Dollard-des-Ormeaux.

Sa carrière politique a connu un succès retentissant. Élu tout d'abord comme conseiller municipal à la ville de Dollard-des-Ormeaux en 1978, réélu aux élections municipales successives jusqu'en 1984, année où il devient maire jusqu'à ce jour, il est aujourd'hui le maire qui a servi pendant le plus grand nombre d'années à Dollard-des-Ormeaux ainsi que dans toute la grande région de Montréal. C'est un accomplissement extraordinaire.

Mr. Janiszewski, Ed, I'd like to thank you for all the hard work you've done over the past 30 years for your community. Et je souhaite travailler encore longtemps avec vous. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de Robert-Baldwin. Et je cède maintenant la parole à M. le député de Rivière-du-Loup—Témiscouata.

Féliciter l'entreprise Soucy industriel, lauréate
du prix Desjardins Entrepreneurs

M. Jean D'Amour

M. D'Amour : Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Une entreprise de Rivière-du-Loup dans ma circonscription, au Bas-Saint-Laurent, s'est vu récemment remettre le prix entrepreneurs Desjardins dans la catégorie Innovation et productivité, petite entreprise.

Spécialisée en usinage, soudure, mécanique de chantier et tuyauterie pour l'industrie lourde du Nord-du-Québec, l'entreprise Soucy industriel se distingue entre autres par la mobilité de ses services. Comptant aujourd'hui plus de 80 années d'existence, Soucy industriel a débuté ses opérations en 1931, où l'on fabriquait alors des sertisseuses à manivelle pour sceller les couvercles des boîtes de conserve domestiques. Par la suite, l'entreprise louperivoise a fait sa renommée en devenant fabricant de planeurs. Ceux-ci seront vendus à travers le pays et, fait à noter, certains planeurs Soucy sont toujours en fonction, en opération à ce jour.

M. Frédérick Soucy, au nom de la population que je représente et de cette Assemblée, je vous offre mes plus sincères félicitations! Je vous souhaite le meilleur des succès pour vos projets en cours et à venir, et une longue vie à l'entreprise Soucy industriel. Alors, je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député.

Ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés, et je vais suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9  h 57)

(Reprise à 10 h 18)

Le Président : Bon mercredi matin, chers collègues. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir.

Nous poursuivons les affaires courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement... Mme la leader du gouvernement.

Mme Vallée : Je vous demanderais, M. le Président, d'appeler l'article a, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 28

Le Président : Alors, à l'article a du feuilleton, M. le ministre des Finances présente le projet de loi n° 28, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. M. le ministre.

M. Carlos J Leitão

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi n° 28 concerne principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016.

Alors, ce projet de loi modifie ou édicte plusieurs dispositions législatives afin principalement de mettre en oeuvre certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et d'assurer la mise en place de mesures visant le redressement des finances de l'État.

• (10 h 20) •

Ainsi, le projet de loi modifie la Loi sur l'équilibre budgétaire afin de prévoir le retour à l'équilibre budgétaire pour l'année financière 2015‑2016 et de fixer le montant en deçà duquel doit se trouver le déficit budgétaire pour l'année financière 2014‑2015. Il modifie la Loi sur la réduction de la dette et en instituant le Fonds des générations afin que le montant de la taxe spécifique sur les boissons alcooliques, porté annuellement au crédit du fonds, soit, à compter au 1er avril 2016, augmenté à 500 millions de dollars.

Le projet de loi reconduit pour un an le gel de la rémunération additionnelle fondée sur le rendement du personnel de direction et du personnel d'encadrement des ministères et de certains organismes de même qu'à celui des cabinets ministériels. Il prévoit que la rémunération additionnelle fondée sur le rendement versée au personnel de direction et au personnel d'encadrement de certaines sociétés d'État est conditionnelle à l'atteinte de cibles de résultat net.

Le projet de loi confie au ministre des Finances la préparation et la publication d'un rapport préélectoral sur la situation financière du gouvernement et confie au Vérificateur général la préparation d'un rapport portant sur la plausibilité des prévisions et hypothèses présentées dans le rapport préélectoral.

En ce qui concerne l'énergie, le projet de loi modifie la Loi sur la Régie de l'énergie afin de suspendre la mise en place de tout mécanisme de partage des écarts de rendement par la Régie de l'énergie jusqu'à ce que l'équilibre budgétaire soit atteint et de prévoir qu'Hydro-Québec conservera tout écart de rendement. La même loi est également modifiée afin de réserver la fourniture d'électricité à la satisfaction des marchés québécois.

En matière de ressources naturelles, le projet de loi modifie la Loi sur Investissement Québec afin d'instituer Capital Mines Hydrocarbures, un fonds spécial permettant principalement la prise de participation dans les entreprises qui exploitent des substances minérales du domaine de l'État et, à certaines conditions, dans des entreprises qui les transforment. Il prévoit, par ailleurs, le transfert à l'Agence du revenu du Québec des responsabilités relatives à l'application de la Loi sur l'impôt minier.

En matière de lutte contre l'évasion fiscale et le travail non déclaré, le projet de loi modifie la Loi sur les impôts afin de prévoir l'obligation pour un fournisseur de services d'obtenir, sous certaines conditions, une attestation de Revenu Québec dans le cadre de la conclusion d'un contrat de travaux de construction ou d'un contrat de services de placement ou de location de personnel. Ce projet de loi modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec afin de prévoir l'implantation de modules d'enregistrement des ventes dans le secteur des bars et des restobars.

Le projet de loi modifie la Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance afin de revoir les règles déterminant la contribution exigée d'un parent dont l'enfant bénéficie de services de garde fournis par un prestataire de service de garde subventionné.

En matière de santé, le projet de loi prévoit que, lorsqu'un service fourni par un professionnel de la santé cesse d'être un service assuré, les sommes prévues pour le financement de sa rémunération soient maintenues au fonds consolidé du revenu et soumises au pouvoir d'allocation du Parlement.

Deuxièmement, le projet de loi permet au ministre de la Santé et des Services sociaux, avant l'inscription d'un médicament à la liste des médicaments dont le coût est garanti par le régime général d'assurance médicaments, de conclure une entente d'inscription avec le fabricant de ces médicaments, autorise le gouvernement à étendre les garanties du régime général d'assurance médicaments aux services pharmaceutiques déterminés par règlement et confère au ministre, pour une période limitée et en certaines circonstances, le pouvoir de prévoir ou de modifier les modalités de rémunération applicables aux pharmaciens.

Le projet de loi apporte diverses modifications concernant la gouvernance municipale en matière de développement local et régional.

Le projet de loi propose des modifications touchant les fonds spéciaux suivants :

1° le Fonds Avenir Mécénat Culture, qu'il institue au ministère de la Culture et des Communications, affecté aux mesures prises en vue d'encourager certains organismes à développer des méthodes de diversification de leurs sources de financement et à capitaliser une part de leurs revenus provenant des collectes de fonds;

2° le Fonds du développement nordique, notamment pour lui redonner le nom du Fonds du Plan Nord et de remplacer dans sa loi constitutive l'expression «territoire du développement nordique» par celle de «territoire du Plan Nord»;

3° le Fonds pour le développement du sport et de l'activité physique afin d'augmenter la partie du produit de l'impôt sur le tabac portée annuellement à son crédit;

4° le Fonds de financement des établissements de santé et de services sociaux afin notamment de porter à son crédit, pour les années financières 2014‑2015 à 2016‑2017, la partie qui est précisée du Transfert canadien en matière de santé.

Le projet de loi modifie les règles de gouvernance applicables à Fondaction, le Fonds de développement de la Confédération des syndicats nationaux pour la coopération et l'emploi, ainsi qu'au Fonds de solidarité des travailleurs du Québec — FTQ. Il revoit également la composition du conseil d'administration de Financement-Québec afin qu'elle puisse être modifiée sans intervention législative lorsque les fonctions des différents ministres responsables des organismes qui en reçoivent les services sont modifiées ou lorsque les organismes bénéficiant de ses services changent.

Le projet de loi modifie certaines autres dispositions législatives afin notamment :

1° d'intégrer dans la Loi sur les matériaux de rembourrage et les articles rembourrés les droits exigibles pour la délivrance des permis actuellement prévus par règlement;

2° d'augmenter la contribution pénale prévue par le Code de procédure pénale;

3° de donner au ministre responsable de la Loi sur l'immigration au Québec le pouvoir de déterminer les modalités d'un dépôt de garantie par les entrepreneurs immigrants qui assurent les sommes nécessaires au développement d'un projet d'affaires au Québec, pour prévoir l'habilitation nécessaire afin de permettre au gouvernement de déterminer un mécanisme de répartition des dossiers d'immigrants investisseurs entre les intermédiaires financiers et, enfin, pour faire passer de 10 000 $ à 15 000 $ les droits exigibles pour l'examen d'une demande de certificat de sélection d'un ressortissant étranger de la catégorie de l'immigration économique présentée à titre d'investisseur;

4° de permettreau ministre des Finances de grever d'une hypothèque certaines créances pécuniaires, de lui permettre de verser et de recevoir des sommes à titre de garantie accessoirement à certaines transactions financières ainsi que de permettre, dans ce contexte, la compensation contre l'État;

5° d'introduire dans le Code civil des modifications en matière d'hypothèque, principalement en ce qui a trait aux hypothèques constituées en faveur d'un fonds de pouvoir et aux hypothèques mobilières avec dépossession sur certaines créances pécuniaires;

6° de prévoir qu'une société de gestion de portefeuille contrôlée par une coopérative de services financiers peut, à certaines conditions, être assujettie à la surveillance de l'Autorité des marchés financiers comme si elle était une institution financière.

Finalement, M. le Président, ce projet de loi apporte des modifications de concordance à plusieurs lois et comporte des dispositions de nature transitoire.

Le Président : Évidemment, ma question, c'est : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Mme la leader de l'opposition.

Mme Maltais : Bien sûr, M. le Président. Mais évidemment on est habitués à un projet de loi de mise en oeuvre de certaines dispositions du discours du budget, mais ça semble être un projet de loi fourre-tout, alors il y aura sûrement des consultations particulières.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Avant de parler des consultations particulières, j'aurais peut-être une autre façon de désigner la chose que ma collègue. Il s'agit d'une loi sur le retour à l'équilibre budgétaire, loi qui fait suite à une motion qui a été adoptée ici, à l'Assemblée, retour pour 2015‑2016. Alors, 2015‑2016, c'est bientôt, M. le Président, 2015 arrive très rapidement. Alors, oui, on va discuter avec les oppositions pour qu'il y ait des consultations, d'ailleurs qu'on prévoit, là, assez tôt en janvier.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que je comprends que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : ...

Le Président : Alors, c'est adopté. M. le leader du gouvernement.

• (10 h 30) •

M. Fournier : Je vous demanderais d'appeler l'article b, M. le Président.

Projet de loi n° 27

Le Président : Je ne sais pas si je peux l'adopter, mais je peux l'apporter. Alors, à l'article b du feuilleton, Mme la ministre de la Famille présente le projet de loi n° 27, Loi sur l'optimisation des services de garde éducatifs à l'enfance subventionnés. Mme la ministre.

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. J'ai le privilège de déposer en cette Chambre la loi n° 27, Loi sur l'optimisation des services de garde éducatifs à l'enfance subventionnés.

Ce projet de loi modifie la Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance afin d'obliger tout prestataire de services de garde à conclure avec un parent qui utilise ces services de garde subventionnés une entente de services de garde éducatifs subventionnés dont la forme et le contenu sont déterminés par le ministre responsable de cette loi. Il interdit de plus à toute personne d'inciter un parent à inscrire des renseignements faux ou trompeurs dans cette entente.

Dans le cas où cette entente de services de garde éducatifs subventionnés n'est pas utilisée, qu'elle n'est pas remplie entièrement ou que des renseignements faux ou trompeurs y sont inscrits, le projet de loi prévoit des sanctions applicables au parent ou au prestataire de services de garde. Des sanctions pourront également être applicables en cas d'inscription de renseignements faux ou trompeurs sur tout autre document requis en vertu de la loi ou d'un règlement pris pour son application.

Plus particulièrement, il accorde au ministre le pouvoir de retirer au parent, pour une période de trois mois, la possibilité de bénéficier d'une place dont les services de garde sont subventionnés à l'égard de son enfant. De plus, il prévoit des sanctions pénales pour le prestataire de services de garde fautif et permet au ministre d'annuler et de diminuer la subvention consentie à ce prestataire de services de garde ou de suspendre son versement.

Le Président : Et voilà.

Mme Charbonneau : Et voilà.

Le Président : Merci. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Mme la leader du gouvernement... de l'opposition.

Mme Maltais : Nous allons avoir, bien sûr, des consultations particulières sur ce sujet?

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Il va de soi, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : ...

Le Président : Alors, c'est adopté.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le leader du gouvernement.

Réponse à une pétition

M. Fournier : Oui. Permettez-moi de déposer la réponse du gouvernement à la pétition déposée par le député de Rimouski le 23 octobre 2014.

Le Président : Alors, ce document est déposé.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission des institutions et député de Fabre.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 21

M. Ouimet (Fabre) : M. le Président, je dépose le rapport de la Commission des institutions qui a procédé à des consultations particulières et tenu des auditions publiques le 25 novembre 2014, hier, sur le projet de loi n° 21, Loi concernant principalement la mise en oeuvre d'ententes en matière de travail entre le gouvernement du Québec et le Conseil Mohawk de Kahnawake, conformément au mandat de l'Assemblée.

Le Président : Alors, le rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, j'ai une pétition de la part de M. le député Rosemont.

Prendre position en faveur d'un système léger sur rail
comme mode de transport collectif sur le pont
de remplacement du pont Champlain

M. Lisée : M. le Président, il me fait plaisir de vous déposer l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 2 252 pétitionnaires.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que l'analyse coût-bénéfice contenue dans le rapport de la firme AECOM, commandée par l'AMT, conclut que le système léger sur rail — SLR — serait le choix le plus judicieux en termes d'efficacité et de coût à long terme;

«Considérant que les 1 200 passages d'autobus actuels qui traversent Griffintown et Ville-Marie en provenance de la Rive-Sud démontrent que ce mode de transport en milieu urbain dense a atteint ses limites et crée des nuisances à la qualité de vie de milliers de résidents tout en hypothéquant le redéveloppement du centre-ville, du havre et des futures zones d'emploi;

«Considérant que le SLR permettra de relier la Rive-Sud en plus de nouveaux secteurs montréalais, dont L'Île-des-Soeurs et Griffintown, à l'ensemble du réseau de transport collectif existant, selon les principes [du] "Transit-Oriented Development" promus dans le Plan métropolitain d'aménagement et de développement de la Communauté métropolitaine de Montréal;

«Considérant qu'il y a non seulement unanimité chez les maires et mairesses de la région de Montréal depuis 20 ans autour du SLR, mais que cette même unanimité règne chez tous les partis à l'Assemblée nationale comme en fait foi la résolution adoptée le 27 novembre 2013;

«Considérant que l'implantation du SLR contribuera à l'électrification des transports, une action incontournable pour contrer le réchauffement climatique, diminuant ainsi notre dépendance aux hydrocarbures;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec de prendre position en faveur d'un SLR comme mode de transport collectif sur le pont de remplacement du pont Champlain.»

Je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales. Et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Tarification des services de garde et
création de nouvelles places

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Demain, M. le Président, nous présenterons une motion de censure pour que les masques tombent. Tous les Québécois ont en mémoire la promesse du premier ministre, qui s'est fait élire en s'engageant, souvenez-vous, à annuler la hausse du tarif de garde de 2 $ qui avait été annoncée avant les élections. Je voudrais juste rappeler au premier ministre qu'il a fait cette promesse tout en répétant pendant toute la campagne électorale qu'il estimait le déficit à 3 milliards, ce qui est effectivement autour du résultat, que l'année financière... et ça, même sept jours avant l'élection.

D'ailleurs, lors du lancement de son cadre financier, à trois semaines du vote, il avait dit : «On va atteindre nos objectifs, on va remplir nos engagements.» «S'il faut faire encore plus d'efforts de rationalisation, on le fera. On n'ira pas demander aux contribuables de mettre la main dans leurs poches davantage.» C'est incroyable, M. le Président, hein? Je le lis puis, même moi, je n'en reviens pas. Le premier ministre aura sa photo sûrement dans le dictionnaire juste à côté du mot «cynisme» s'il ne reconsidère pas sa décision, M. le Président.

La ministre et le premier ministre nous ont dit que la proposition sur les tarifs de garde, c'était, à ce que j'ai compris, une proposition. Ce qu'on lui demande aujourd'hui pour mettre fin au chaos, pour mettre fin au recul : Est-ce qu'il peut renoncer à sa proposition et revenir à un tarif égal pour tous les Québécois et toutes les familles québécoises, M. le Président?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, je ne veux pas reprendre tout le contenu de la question de notre collègue, mais j'ai cru entendre «les masques tombent». Effectivement, il aurait fallu qu'ils tombassent avant, ces masques, puisqu'on aurait alors su qu'il y avait 5,8 milliards de déficit pour l'année en cours, 7,2 milliards pour l'année suivante.

Des voix : ...

M. Couillard : Et malheureusement je les entends nier l'évidence, mais je leur demande de relire le rapport du Vérificateur général. S'ils ne veulent pas relire celui de M. Godbout et de M. Montmarquette, qu'ils prennent au moins la peine de relire celui du Vérificateur général. Voilà donc la situation dans laquelle nous nous trouvons.

Nous avons également, à plusieurs reprises, indiqué le fait que nous voulions protéger les personnes les plus vulnérables de la société, notamment les familles à bas revenus. Et c'est là que le discours de l'opposition est en totale contradiction avec les principes qu'ils disent représenter. C'est rendu qu'il faut faire le travail de la gauche, M. le Président, ici. Parce que, quand on fait... quand on met en place une contribution uniforme pour toutes les familles, à 9 $, qui touche...

Une voix : ...

M. Couillard : J'entends «l'égalité des chances». Égalité des chances à 50 000 $ par année, une famille? De passer de 7 $ à 9 $, c'est l'égalité des chances, ça? Non. Non. Non.

Des voix : ...

M. Couillard : Alors, ce que je voudrais dire, en concluant, M. le Président, c'est que ce n'est pas de gaieté de coeur qu'on pose ces gestes. Il faut les poser pour être responsables devant le défi des finances publiques. Mais il y a une chose que je vais dire, je veux le répéter, ce que j'ai dit hier : C'est la dernière fois qu'un gouvernement n'a pas révélé l'état des finances publiques avant d'aller en élection. On va y voir très bientôt.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : On sait que la parole du candidat ne valait pas grand-chose. Je veux savoir si la parole du premier ministre, elle, elle a une valeur.

Le premier ministre a la mémoire courte. Dans son discours d'assermentation au Conseil des ministres, le 23 avril, alors qu'il était déjà au pouvoir, qu'il connaissait l'état des finances publiques, il a demandé à la ministre de la Famille — et là je vais le citer encore au mot : «Vous verrez à poursuivre le développement des places en garderie et évitererez un choc tarifaire aux familles de la classe moyenne, en optant pour une indexation des tarifs.»

Comment le premier ministre peut manquer deux fois à sa parole, M. le Président?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, M. le Président, contrairement à ceux qui nous ont précédés, qui ont laissé miroiter pour les familles du Québec l'espoir de nouvelles places non budgétées — parce qu'il n'y avait plus d'argent dans la caisse, on le sait maintenant — il y aura, cette année, je suis heureux de le rappeler, le développement de 6 300 postes à contribution réduite... 6 300 places payées avec du vrai argent, pas de l'argent imaginaire comme ce qu'on a eu dans le dernier exercice du gouvernement.

Maintenant, je vais répéter, puis je suis content qu'on ait rappelé cette préoccupation pour les familles de la classe moyenne et les familles à bas revenus. Je ne peux pas... comment on peut vraiment se prétendre de gauche...

Des voix : ...

M. Couillard : ...mais la gauche, au PQ, c'est dans l'opposition, pas au gouvernement.

Le Président : La question a été très bien posée. J'aimerais entendre la réponse. Et c'est bruyant quand le premier ministre répond. Je n'endurerais pas que ce soit...

Des voix : ...

Le Président : Je n'endurerais pas que ce soit bruyant quand c'est le chef de l'opposition qui pose sa question. Je n'endure pas plus que ce soit bruyant quand c'est le premier ministre qui répond.

M. Couillard : ...à l'ordre, M. le Président. Alors, la véritable justice sociale, le véritable progressiste, c'est celui qui se donne les moyens de l'être et de protéger les gens à bas revenus.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : ...c'est : Qui va le rappeler à l'ordre, M. le Président, lui? Le coq chante trois fois, M. le Président. Troisième recul. Comble du cynisme, dans une petite ligne de son communiqué de presse du 20 novembre, le premier ministre annonce un arrêt du développement des places en services de garde à contribution réduite, sauf celles qui sont en construction ou un contrat signé. C'est écrit noir sur blanc. Ça veut dire que les 15 000 places sont arrêtées, mais, plus encore, les trois quarts des 13 000 places de 2011 sont aussi arrêtées.

Comment un premier ministre peut manquer trois fois à sa parole, M. le Président?

• (10 h 40) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, je n'en reviens pas non plus. Comment peut-on avoir le front de parler de promesse de places pour lesquelles il n'y avait pas d'argent public de réservé? Si c'était le cas...

Je vais leur lancer un petit défi, d'expliquer à la population et aux parlementaires ici aujourd'hui : Si effectivement il y avait de l'argent, pourquoi n'ont-ils pas publié de cahiers de crédits dans lesquels on aurait trouvé le financement de ces 15 000 places de façon claire? La question, c'est la réponse, M. le Président.

Le Président : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Pas de parole! M. le Président, les conseillers du ministère de la Famille sont en train d'appeler aujourd'hui, là, depuis hier, les responsables de projets en services de garde pour leur dire que leur projet ne se fera pas, hier puis aujourd'hui. Le premier ministre ne l'a pas dit, évidemment, là. À Montréal, 2 692 places ont été octroyées; on arrête les projets. À Laval, c'est tous les projets qui sont bloqués.

Pourquoi le premier ministre manque-t-il trois fois à sa parole, M. le Président?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, je comprends qu'on a les questions écrites devant soi puis qu'on n'écoute pas les réponses, là, mais je vais répéter encore une fois que les espoirs donnés aux familles par le gouvernement précédent sur les places, c'était du vent, M. le Président, de la poudre aux yeux. Il n'y avait pas d'argent dans les caisses de l'État identifié pour ça.

Nous, on a dit clairement aux familles du Québec : Cette année, il y a 6 300 — la vérité fait mal, M. le Président — ...

Des voix : ...

M. Couillard : ...il y a 6 300 places véritablement budgétées qui vont être créées. Et je dirais que l'aveuglement, l'aveuglement du Parti québécois sur ce dossier-là mettait en danger la pérennité de ce régime, que nous avons sauvé, M. le Président.

Le Président : Principale, Mme la députée de Taillon.

Services informatiques du gouvernement

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Les dissensions au Parti libéral émergent de toutes parts. Le ministre de la Santé a qualifié l'informatisation du réseau — et je le cite — vendredi dernier, d'«échec retentissant dont il sera difficile de se sortir», ajoutant même que «le projet devrait être abandonné et restructuré». Il décrit le bilan de son premier ministre qui, en 2006, avait lancé le Dossier santé Québec et promis sa livraison pour 2010 à un coût de 547 millions de dollars. On parle maintenant de coût de 1,6 milliard de dollars et de délais jusqu'en 2021. Pourtant, son premier ministre, en 2007, martelait que l'informatisation du dossier médical des Québécois n'entraînerait pas de dépassement descoûts. En 2009, son collègue maintenant ministre de l'Éducation répétait : Le projet suit son cours et nous sommes dans nos balises budgétaires. Le lien de confiance est brisé.

Comment le ministre va-t-il corriger la mauvaise gestion de son premier ministre et de son collègue ministre de l'Éducation?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

Des voix : ...

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : ...avez-vous fini, là?

Des voix : ...

Le Président : Est-ce que ça vous intéresse d'entendre une réponse? Le temps passe.

Une voix : ...

Le Président : M. le député de Sanguinet, je ne vous apprends rien en vous disant que le temps passe. Peut-être... La question a été posée correctement, j'aimerais pouvoir entendre la réponse.

M. Barrette : M. le Président, la députée de Taillon nous pose une question assez large. Elle me pose la question de savoir comment qu'on va corriger la situation, elle étend même sa question au ministre de l'Éducation. Alors, je vais répondre d'une façon aussi large, M. le Président.

Alors, c'est vrai qu'il y a des choses à corriger, comme, évidemment, le déficit budgétaire que le Parti québécois nous a laissé. Et ça me fait rire beaucoup, M. le Président, parce que, cette semaine, c'est ma première question, et j'ai entendu beaucoup de questions, et on a fait plusieurs réponses, et on entend toujours l'opposition officielle s'époumoner lorsqu'on fait référence au déficit budgétaire. Moi, M. le Président, là, à tous les soirs je me demande... Et j'aimerais être dans le passé, dans le bureau et du chef de l'opposition officielle et du député de Rousseau lorsqu'il était ministre des Finances, alors qu'ils savaient très bien qu'ils créaient un déficit budgétaire parce qu'ils avaient des contrats, des ententes qui...

Des voix : ...

M. Barrette : M. le Président...

Des voix : ...

Le Président : Mme la leader de l'opposition.

Mme Maltais : M. le Président, la députée de Taillon a posé une question sur le fiasco libéral. On attend toujours un début de réponse sur les problèmes...

Le Président : M. le ministre de la...

Une voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : L'utilisation du recours à un appel au règlement pour essayer de placer une ligne, M. le Président, pour essayer de passer un message n'est pas utile. Il y a une question qui a été posée... Et je le souligne, M. le Président, permettez-moi de le faire parce que ce n'est pas la première occasion. Et je le fais, ma foi, pour les oppositions qui ont le droit de poser des questions et qui ont le droit à des réponses. Il serait préférable qu'on laisse le ministre répondre à la question posée, plutôt que d'inventer de nouveaux sobriquets. Ici, une question est posée, qu'on y réponde. C'est ça, la démocratie, monsieur...

Le Président : M. le ministre, veuillez terminer votre réponse, s'il vous plaît.

Des voix : ...

Le Président : J'attends que le ministre réponde. C'est ça que j'ai demandé.

M. Barrette : Alors...

Une voix : ...

M. Barrette : Non, non, juste il y a 18 mois. Ce n'est pas en 1638, c'est il y a 18 mois, M. le Président, alors qu'ils créaient... Les deux, là, qui sont ici, M. le Président, créaient des arrérages et, donc, un déficit qui nous a amenés là.

Pour ce qui est de l'informatisation, compte tenu que...

Des voix : ...

M. Barrette : On m'a fait perdre le...

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : M. le Président, calendrier de réalisation du DSQ 2007‑2010, où il devait être terminé, 2010, je le dépose. Il déclarait d'ailleurs, en 2010, le ministre, que les ratés du fameux dossier santé électronique étaient un autre exemple des problèmes de leadership du gouvernement libéral. En 2012, il est allé jusqu'à dire que le Québec était la risée du reste du Canada en matière d'informatisation. C'est sérieux! Quand un Québécois arrive inconscient à l'urgence, le DSQ, ça peut sauver une vie.

Qu'est-ce que le ministre compte faire pour rattraper le retard informatique du Québec maintenant que le président du Conseil du trésor...

Document déposé

Le Président : D'abord, est-ce qu'il y a consentement sur le dépôt? Consentement sur le dépôt. Alors, le dépôt est fait. Sur la question, M. le ministre.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, je compte ne pas faire ce que mon prédécesseur a fait lorsque le Parti québécois était au pouvoir. Et une des choses que je ne ferai pas, M. le Président, c'est annoncer des choses qui ne se réaliseront pas telles qu'elles ont été annoncées. Je rappellerai que le Parti québécois, M. le Président, lorsqu'il était au pouvoir, en ce qui a trait au DSQ, avait annoncé que le DSQ allait être fonctionnel et de façon imminente, M. le Président, et évidemment, sous le gouvernement du Parti québécois, ça ne s'est pas réalisé.

Nous avons l'intention, M. le Président, d'apporter...

Des voix : ...

Le Président : Je pense qu'on a plusieurs places en garderie ici aujourd'hui, là. M. le ministre, veuillez terminer, s'il vous plaît, sur la question.

M. Barrette : Et j'ose espérer, M. le Président, que la collaboration du Parti québécois sera meilleure dans ce dossier-là que dans le projet de loi n° 10.

Le Président : Complémentaire, M. le député de Bonaventure.

M. Sylvain Roy

M. Roy : M. le Président, dans la même thématique, on nous apprend, dans LeJournal de Québec de ce matin, qu'à la CSST il y a eu un appel d'offres informatique de 5,5 millions où, selon certaines sources, nous pouvions déjà prédire le gagnant. L'appel d'offres était fait pour qu'une seule compagnie soumissionne; elle l'a fait et devrait l'emporter si la soumission est conforme. La concurrence est inexistante, les contribuables sont perdants, car les prix explosent.

Est-ce que le ministre du Travail peut expliquer pourquoi de tels appels d'offres se produisent encore dans un organisme sous sa responsabilité?

Le Président : M. le ministre du Travail.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Merci, M. le Président. Moi aussi, à la lecture du même article, je partageais ces inquiétudes. Alors, nous avons communiqué avec la CSST pour comprendre exactement le processus qui a été mis en place. Premièrement, c'est un appel d'offres pour répondre à 1,3 million d'appels, 5 600 postes. Alors, qu'est-ce que la CSST a fait pour répondre aux normes et les critères les plus importants?

Premièrement, il y a eu des commentaires des fournisseurs avant de préparer l'appel d'offres. Deuxièmement, il y a eu un expert indépendant pour préparer les clauses contractuelles. Troisièmement, il y a eu un expert indépendant pour parler des clauses techniques de l'appel d'offres. Quatrièmement, il y a un comité juridique qui a vérifié l'ensemble des aspects juridiques de l'appel d'offres...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : Cinquièmement, M. le Président, le comité de direction a approuvé l'appel d'offres.

• (10 h 50) •

Le Président : Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Modulation des tarifs de services de garde selon les revenus

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le chef du Parti libéral, durant la campagne électorale, a écrit, dans son programme, et je le cite : «[Les familles] éviteront [...] le choc tarifaire — donc, c'est le mot qu'il a utilisé — découlant de la décision du Parti québécois de porter à [...] 9 $ les tarifs de garde.» C'est ce qu'il disait, c'était un «choc tarifaire».

Or, M. le Président, lors du discours d'ouverture le 21 mai dernier, donc un mois et demi après avoir été élu, à un moment solonel où il a sûrement, avant de prendre des engagements, pris connaissance des finances publiques du Québec, il a dit, et je le cite : «Nous poursuivrons le développement des services de garde en mettant les familles de [la] classe moyenne ou à bas revenus à l'abri d'un choc tarifaire.»

M. le Président, ça, c'était le 21 mai dernier. Qu'est-ce qui est arrivé entre le 21 mai et aujourd'hui? Quel est le vrai visage du premier ministre? Est-ce qu'il peut au moins avouer qu'il a renié sa parole puis s'excuser?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, je note que notre collègue est un peu plus réservé dans ses propos aujourd'hui, puis je l'en félicite. Ça n'aidait pas, hier, la façon dont il menait ce débat-là. Mais je vais...

Des voix : ...

M. Couillard : Il s'améliore. C'est ça, effectivement. Mais je vais répondre à sa question. Effectivement, on a réussi à épargner les gens à revenus moyens et bas, au Québec, du choc tarifaire, et c'est ce qu'on voulait faire, et c'est ce que nous avons fait.

Je vais lui rappeler certains faits importants. 30 % des familles du Québec restent à 7,30 $. À 50 000 $, 55 000 $ par année pour une famille, passer de 7 $ à 9 $, c'est très difficile. 60 % des familles du Québec restent en dessous de 9 $ que leur annonçait le gouvernement précédent. Le revenu moyen des familles est de 70 000 $. On a vraiment mis en place une politique, M. le Président, non seulement pour avoir la pérennité, que le système de garde dure au Québec, qu'on puisse en développer non seulement pour les enfants d'aujourd'hui, mais ceux de demain, mais je suis fier de dire qu'on a épargné le choc tarifaire pour les gens à revenus moyens et bas, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le 21 mai dernier, au moment où il connaissait les finances publiques, la situation, il a pris l'engagement de ne pas créer de choc tarifaire pour la classe moyenne. Une classe moyenne, là, qui gagne 50 000 $ par parent va payer 2 000 $ de plus, c'est un choc tarifaire.

Est-ce qu'il peut au moins avouer aux familles du Québec de la classe moyenne, là, qu'il a renié sa parole?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, je vais répéter qu'on a effectivement protégé les gens particulièrement à bas revenus et la partie à bas revenus de la classe moyenne du choc tarifaire que leur réservaient nos prédécesseurs.

Maintenant, ce que j'ai dit encore une fois, c'est que ces décisions, M. le Président, ne sont pas faciles à prendre. Je note, dans le ton des interventions de notre collègue, l'évidence que je crois qu'il n'aurait pas eu le courage de procéder aux changements nécessaires pour atteindre l'équilibre budgétaire; ça m'apparaît très clair. Le courage s'est interrompu le jour de la chicane avec la mascotte.

Maintenant, ce que je veux également répéter, ce que je veux répéter, c'est que c'est la dernière fois — puis je pense qu'il devrait m'appuyer là-dessus — c'est la dernière fois qu'un gouvernement est allé en élection sans donner le parfait portrait des finances publiques.

Le Président : En terminant.

M. Legault : On va y voir très bientôt. J'espère qu'il va m'appuyer.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le 21 mai dernier, il connaissait les finances publiques du Québec, il connaissait la situation. Il a promis aux familles de la classe moyenne qu'il n'y aurait pas de choc tarifaire. Les Québécois ne sont pas dupes, M. le Président. Maintenant, ils voient le vrai visage du premier ministre. Maintenant, ils voient que la parole du premier ministre n'a plus de valeur.

Pourrait-il au moins s'excuser auprès des Québécois de ne pas leur avoir dit la vérité au discours inaugural?

Le Président : M. le premier ministre. En vous demandant de faire attention, M. le chef...

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, M. le Président, notre collègue se rapproche encore une fois de l'exagération, qui traduit la vacuité des propos. Malheureusement, je suis obligé de répéter ce que j'ai dit hier.

Alors, je vais lui répéter parce qu'il ne semble pas avoir compris la réponse. Effectivement, on a réussi, on a réussi, M. le Président — et je vais remercier tous mes collègues du caucus qui ont participé, je suis très fier que chacun des députés ait eu l'occasion de participer à ce débat-là — on a réussi, tous ensemble, à épargner les gens à bas revenus et la partie de la classe moyenne à plus bas revenus de tout choc tarifaire. À 55 000 $ par année pour une famille, 7 $ à 9 $, c'était trop.

Le Président : Principale, M. le député de Granby.

Bonis versés aux employés des sociétés d'État

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : M. le Président, pendant que les contribuables sont fortement touchés par des hausses de taxes et tarifs et malgré les deux visages du Parti libéral en campagne électorale et aujourd'hui, l'État continue de verser des bonis à ses employés.

À la Société des alcools du Québec, c'est 3,5 millions en bonis en 2013 et 38 millions depuis les cinq dernières années. Chez Loto-Québec, c'est 51 millions de dollars lors des cinq dernières années. Chez Hydro-Québec, la société d'État ne verse plus, depuis 2013, les primes moyennes de 90 millions de dollars qui étaient auparavant versées à ses employés, puisqu'elles ont été converties en salaires, maintenant des primes déguisées.

Le président du Conseil du trésor a dit hier : Alors que tout le monde doit faire sa part, pourquoi nous verserions des bonis aux cadres et aux gestionnaires? Toutefois, il ne semble pas être en mesure de s'attaquer aux bonis dans les sociétés d'État puisqu'il a aussi dit, et je le cite : «Concernant les sociétés d'État, elles devront identifier des mesures dont les effets sont au moins comparables à ce qui est exigé [...] des ministères, des organismes [...] et des cabinets ministériels.» Il y en a qui doivent être pas mal «shakés» dans les sociétés d'État.

Dans un contexte où le gouvernement n'hésite pas à piger dans les poches des contribuables, comment le président du...

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Je pense que mon collègue de la deuxième opposition n'a pas tout écouté ce qu'on a annoncé hier. Ce qu'on a annoncé hier aux Québécois, c'est que la pensée magique... Parce que la deuxième opposition dit qu'elle est en faveur du retour à l'équilibre budgétaire, mais, chaque fois qu'on fait des propositions : Ah non! Non, nous, on ne joue pas dans ce film-là. On veut l'équilibre budgétaire par magie.

Alors, qu'est ce que j'ai dit hier, M. le Président? J'ai dit que la pensée magique ne suffira pas. Ça ne fonctionnait pas avec le gouvernement précédent et ça ne fonctionne pas aussi avec la façon de voir de la CAQ. J'ai dit hier que l'appareil de tout l'État allait se serrer la ceinture. J'ai dit qu'on allait rénover la maison, qu'on allait réduire les effectifs dans l'ensemble du secteur public.

Et, en ce qui concerne les bonis, eh bien, on les a resserrés complètement, 2014‑2015 et 2015‑2016, et ça inclut les sociétés d'État, en fonction de leur réalité qui est propre. Alors, s'il vous plaît, si vous êtes en faveur de l'équilibre budgétaire, bien vous devriez nous appuyer.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Granby.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : M. le Président, si le président du Conseil du trésor manque de pouvoir pour mettre au pas les sociétés d'État, on peut l'aider. Je le répète, c'est 51 millions de dollars chez Loto-Québec. Il y a eu des pertes de 100 millions chez JoaGroupe. On a investi des millions de dollars dans les casinos; c'est un échec. On a aussi donné énormément d'argent à la Société des alcools du Québec.

Est-ce qu'il entend mettre fin aux bonis dans les sociétés d'État qui gèrent des monopoles?

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Écoutez, ce qu'il demande, là, ici sur les bonis, c'est exactement ce qu'on a annoncé qu'on faisait, c'est ça. Alors, il faut écouter l'ensemble de l'annonce. C'est intéressant de parler de retour à l'équilibre budgétaire, c'est intéressant d'y penser, c'est même intéressant, semble-t-il, d'y rêver. Parce que ce que nous dit la deuxième opposition ici, c'est qu'ils en rêvent, mais qu'ils sont contre toute mesure pour y arriver.

Alors, nous, c'est du sérieux. Chaque jour, chaque jour, M. le Président, on se lève en pensant...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Coiteux : Chaque jour...

Des voix : ...

Le Président : M. le député de La Peltrie, je vous entends bien. Vous avez une belle voix. Je vous entends bien.

Une voix : ...

Le Président : Oui, oui, vous avez une belle voix. M. le ministre.

M. Coiteux : Chaque jour, M. le Président, quand on se lève pour travailler au service de l'ensemble des Québécois, on pense à ces 7 milliards, le 7 milliards de dollars qui se serait ajouté à la dette du Québec...

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : ...avec le plan du gouvernement précédent, qui était un non-plan, par ailleurs, il n'y avait même pas de crédits.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Granby.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : La vérité, M. le Président, c'est que le ministre n'a pas de pouvoir pour mettre au pas les sociétés d'État. Chez Hydro-Québec, ça a été, en moyenne, 90 millions de dollars depuis 10 ans. Là, ce qu'on a fait? Bien, on a pris des primes déguisées, on a augmenté le salaire de 4,2 %. C'est ça qui est arrivé.

Alors, je répète ma question fort simple : Est-ce qu'il entend mettre fin aux bonis des sociétés d'État qui gèrent des monopoles?

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Alors, on parle de pouvoir ici, et je pense que la...

Des voix : ...

M. Coiteux : Écoutez un peu les réponses, s'il vous plaît! Un peu d'éducation! Un peu de sens civique parlementaire! Les Québécois nous regardent, M. le Président, les Québécois veulent qu'on travaille ensemble pour retourner à l'équilibre budgétaire.

Et il y a un projet de loi, qui s'appelle le projet de loi n° 15, dont on est en train de discuter actuellement en commission parlementaire et, avec la collaboration de tout le monde, on pourrait l'adopter rapidement. Ça vise à faire quoi justement? Ça vise à étendre les pouvoirs du Conseil du trésor à l'ensemble des réseaux pour connaître, suivre et contrôler les effectifs.

• (11 heures) •

Le Président : Principale, M. le député de Groulx.

Processus d'attribution d'un contrat en
informatique à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail

M. Claude Surprenant

M. Surprenant : M. le Président, les histoires se suivent et se ressemblent dans le dossier informatique au gouvernement. On apprend effectivement, ce matin, qu'en septembre dernier la CSST a fait un appel d'offres de 5,5 millions dont les conditions avantageaient clairement Telus. Comme dans beaucoup d'autres contrats informatiques, ces conditions étaient tellement spécifiques qu'on pouvait déterminer le gagnant bien à l'avance. Cette façon de faire ne favorise ni la libre concurrence ni les économies d'argent. Ce matin, plusieurs acteurs de l'industrie se disent découragés et voient comme une perte de temps de soumissionner sur ce genre de contrat.

Alors, est-ce que le président du Conseil du trésor va demander des comptes à la CSST pour cet appel d'offres dont les dés semblent piqués et va-t-il demander à l'organisme de refaire ses devoirs et de retourner en appel d'offres, M. le Président?

Le Président : M. le ministre du Travail.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Alors, M. le Président, c'est à peu près la même réponse, mais j'ai plus de temps de lui répondre. Quand j'ai lu l'article, M. le Président, je partageais la même inquiétude que le deuxième député ici, M. le Président. Nous avons demandé à la CSST de nous donner exactement les démarches suivies pour aller en appel d'offres. Les démarches sont les suivantes selon la CSST. Premièrement, ils ont consulté tous les fournisseurs potentiels pour préparer l'appel d'offres. Deuxièmement, ils ont nommé un expert indépendant pour la partie contractuelle. Troisièmement, ils ont nommé un expert indépendant pour la partie technologique. Quatrièmement, il y a eu un comité... le service juridique, ils ont vérifié la partie juridique de l'appel d'offres. Et, à la fin, M. le Président, il y a un comité du conseil paritaire de la CSST, les syndicats et les patronats, et il y a un comité technologie qui ont approuvé l'appel d'offres.

Maintenant, M. le Président, en plus je peux ajouter aussi que les résultats de l'appel d'offres actuellement, c'est à peu près 12 % à 15 % de moins que les coûts estimés des travaux à faire. Actuellement, la CSST est en train de valider la conformité de l'appel d'offres, et, selon l'information que j'ai obtenue de la CSST, ils ont suivi les démarches.

Le Président : En terminant.

M. Hamad : Maintenant, M. le Président, on ne pouvait pas obliger le monde de soumissionner. Ce que nous avons actuellement, nous sommes en train de vérifier...

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Groulx.

M. Claude Surprenant

M. Surprenant : M. le Président, dès le lancement de l'appel d'offres, il était possible de prévoir que Telus le remporterait. Les conditions demandées par la CSST favorisaient clairement cette entreprise. Alors, le président du Conseil du trésor doit condamner vivement ce genre de pratique et demander à la CSST de retourner en appel d'offres.

Enfin, le président du Conseil du trésor, M. le Président, peut-il nous assurer qu'il n'y a pas de copinage avec quelque fournisseur technologique de l'État qui soit?

Le Président : M. le ministre du Travail.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Je pense que ça prend un moindre effort d'écouter la réponse. Je vais la répéter. M. le Président, il y a eu un expert dans la partie contractuelle... indépendant qui a évalué la partie contractuelle, un autre expert dans la partie technologique. Après ça, les services juridiques, ils ont validé les aspects légaux de l'appel d'offres. Le comité du conseil d'administration, qui est composé des partie patronale et partie syndicale, ils ont approuvé l'appel d'offres. Il y a eu des discussions avec les fournisseurs. La durée de l'appel d'offres a pris 88 jours, avec 16 addendas pour répondre à des questions des soumissionnaires, et, finalement, ils ont eu une soumission...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...qui correspond à peu près à 15 % de moins que les valeurs estimées.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Groulx.

M. Claude Surprenant

M. Surprenant : M. le Président, ça va prendre un comité pour revoir tous ces comités-là. En fait, il y a deux ans, le Vérificateur général avait fait rapport sur les contrats informatiques en dénonçant le manque flagrant de concurrence. Il recommandait — et je cite — de «s'assurer que la sollicitation favorise le libre jeu de la concurrence». Alors, force est de constater que peu de choses ont changé depuis, l'histoire se répète, le problème est généralisé.

Alors, combien de temps encore ce gouvernement va-t-il résister avant de déclencher une commission d'enquête, M. le Président?

Le Président : M. le ministre du Travail.

M. Sam Hamad

M. Hamad : M. le Président, ce n'est pas parce que la question est écrite par une recherchiste qu'il faut la répéter. M. le Président, il faut comprendre la réponse. La réponse est simple : Il y a un expert dans les technologies qui a donné son opinion. Il y a un expert dans l'aspect contractuel, il a travaillé dans l'appel d'offres. Le service juridique, il a validé le côté légal. À la fin, M. le Président, il y a un comité du conseil paritaire, les syndicats et les patronats, il y a un comité qui a regardé puis approuvé l'appel d'offres. Ils sont allés en appel d'offres, ça a pris 88 jours. Ils ont invité tout le monde, ils ont fait 16 addendas pour répondre aux questions des soumissionnaires. Il y a eu un soumissionnaire. Cependant, le prix du soumissionnaire...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...c'est 15 % de moins que l'estimait la CSST.

Le Président : Principale, M. le député de Jonquière.

Conditions imposées à TransCanada concernant
le projet d'oléoduc Énergie Est

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. La semaine passée, le ministre de l'Environnement a fixé sept conditions sur le projet d'Énergie Est. Une de ces conditions, c'est d'avoir un BAPE sur l'ensemble du projet et de faire une évaluation de la contribution globale aux émissions de GES, mais le gouvernement fédéral a dit très clairement que lui ne se sentirait pas lié par le BAPE fait au Québec. Donc, sans surprise, encore une fois, le gouvernement fédéral fait très peu de cas de la situation ou de la position du Québec. Mais il reste un flou, M. le Président, c'est la volonté réelle de ce gouvernement de défendre le Québec dans le dossier. Il faut que le gouvernement mette ses divisions de côté pour que, finalement, le Québec ait le dernier mot.

Quand le ministre dit qu'il veut assumer ses compétences en environnement, ça veut dire quoi au juste? Est-ce que ça signifie le pouvoir de dire non? Qui, en bout de ligne, M. le Président, aura le dernier mot? Est-ce que c'est le gouvernement fédéral ou le gouvernement du Québec?

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : Merci, M. le Président. En effet, nous avons, le 18 novembre dernier, envoyé une lettre au président et chef de la direction de TransCanada pour lui présenter nos sept conditions qui guideront les choix du gouvernement sur le projet TransCanada, mais, depuis ce temps-là, ce qu'il faut comprendre aussi, c'est qu'il s'est passé quand même quelques événements majeurs, depuis que le Québec a indiqué clairement son leadership dans ce dossier. Depuis, il y a eu une entente historique entre l'Ontario et le Québec qui a été annoncée vendredi dernier à Toronto, où ces conditions-là ont été reprises comme principes communs pour l'ensemble du Canada central. Donc, l'Ontario et le Québec, 60 % de la population canadienne, 54 % de l'économie du Canada, partagent les mêmes principes en matière d'oléoduc. Ensuite de ça, l'Alberta, le Nouveau-Brunswick ont également dit, affirmé clairement qu'ils ne voyaient aucun problème avec le fait que nous imposions les conditions que nous avons imposées.

Donc, M. le Président, il faut lire de façon très sérieuse l'ensemble des conditions que nous avons imposées. Et, de plus, il faut lire l'ensemble de la lettre que j'ai envoyée le 18 novembre...

Le Président : En terminant.

M. Heurtel : ...où on dit clairement que le BAPE va affirmer clairement les compétences du Québec en matière...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : M. le Président, peut-être que le ministre ne s'en est pas aperçu, là, mais c'est au Québec qu'on est, là, ce n'est pas en Ontario, ce n'est pas en Saskatchewan, ce n'est pas au Nouveau-Brunswick. Il y a un sondage, le 21 novembre dernier, qui démontre... un sondage SOM qui démontre que 87 %, 87 % des Québécois croient que c'est au Québec, c'est au Québec de décider sur le projet d'Énergie Est. Assumer ses compétences, M. le Président, ce n'est pas s'en tenir strictement au BAPE.

Alors, en bout de ligne, qui aura le dernier mot? Est-ce que c'est le fédéral ou le Québec?

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : M. le Président, je vais rappeler au député de Jonquière... et je vais citer un extrait de la lettre que j'ai déposée la semaine dernière à cette Assemblée : «Quant à la portion québécoise de l'oléoduc, elle est assujettie à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement en vertu de l'article 2, paragraphe j, du Règlement sur l'évaluation et l'examen des impacts sur l'environnement. Il est dans votre intérêt de respecter la volonté des Québécoises et Québécois de faire la lumière sur l'ensemble de la portion québécoise du projet en déposant sans délai, au [ministère], l'étude d'impact sur l'environnement...»

Qu'est-ce que le député de Jonquière ne comprend pas, M. le Président? Le Québec va affirmer clairement ses compétences en matière environnementale sur l'ensemble de la portion québécoise du projet.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Marie-Victorin.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : M. le Président, le premier ministre déclarait hier : «Le Québec, comme d'autres provinces, est bénéficiaire de la richesse générée dans l'ouest du pays, notamment avec l'exploitation du pétrole. [...]ce pétrole va devoir se déplacer d'une façon ou d'une autre...» Et, dans une autre réponse, le premier ministre a ajouté : «Le projet de pipeline va se réaliser», M. le Président. Le gouvernement libéral, c'est clair, est pour le pipeline de TransCanada, mais les Québécois n'en veulent pas.

Péréquation ou pas, office canadien de l'énergie ou pas, est-ce que le gouvernement libéral reconnaît que le territoire québécois...

• (11 h 10) •

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : On pourrait commencer par s'étonner que le Parti québécois, maintenant, semble avoir une position bien différente de celle qu'il avait lorsqu'il était question de Kildair ou bien d'Anticosti. Ils sont vraiment dans une autre zone.

Mais, ceci étant, les changements climatiques, ce n'est pas juste au Québec, ce n'est pas juste au Canada, c'est dans le monde. On a la capacité d'intervenir plus largement. Lorsque mon collègue parle de l'entente avec l'Ontario, lorsqu'il cite le fait que le Nouveau-Brunswick et l'Alberta appuient ces principes, lorsqu'on sait que la Colombie-Britannique — dont vous parliez, mais vous ne parlez plus — avait déjà commencé à appliquer ces principes, ce qu'on est en train de voir, c'est que près de 88 % de la population canadienne représentée par ces gouvernements ont la même idée que nous. Alors, si on fait front commun, on va être à l'avantage pour les changements climatiques.

Le Président : Principale, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Révision de la gouvernance, du rôle et de
l'organisation des commissions scolaires

Mme Nicole Léger

Mme Léger : L'annonce des fusions des commissions scolaires s'est faite, comme le reste des dossiers abordés par ce gouvernement cet automne, dans le flou, la confusion et la dissension. De la dissension, il y en a notamment dans le Conseil des ministres. Hier, le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs a affirmé qu'il s'opposait au regroupement des commissions scolaires dans sa région. Dans une vidéo de Courrier Frontenac, le journal de sa région, datant de la campagne électorale, on entend le ministre dire mot pour mot : «...je tiens à vous mentionner immédiatement que je vais m'opposer farouchement et férocement à toute fusion forcée [de la commission scolaire]...»

Maintenant que son gouvernement veut faire exactement ce à quoi s'oppose le ministre, qu'est-ce qu'il va faire? Va-t-il faire le bon garçon libéral, se taire et renier son engagement solennel auprès de ses électeurs de Lotbinière-Frontenac?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, avant de penser à du découpage géographique, il faut penser au bien de l'élève, à la réussite scolaire, puis j'aurais apprécié peut-être une question sur la réussite scolaire — pour nous, c'est la priorité — peut-être aussi une question sur la valorisation des enseignants, qui est aussi une priorité, et également l'organisation au niveau de la classe, de l'école où c'est à cet endroit que ça se passe par rapport à la réussite scolaire. M. le Président, notre priorité va être la réussite scolaire.

J'ai une question à poser à la députée de Pointe-aux-Trembles.

Des voix : ...

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, j'ai une question à poser à la députée de Pointe-aux-Trembles. Ils ont voulu faire la fusion des commissions scolaires, ils se sont positionnés pour les fusions des commissions scolaires. Aujourd'hui, est-ce qu'elle est d'accord pour qu'on fasse des fusions scolaires qui vont, justement, répondre aux besoins de réussite de nos jeunes?

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Nicole Léger

Mme Léger : Je veux bien croire, M. le Président, que le ministre veut faire de la diversion — le ministre de l'Éducation — mais ma question est au ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs.

Va-t-il accorder plus d'importance aux électeurs de sa circonscription ou à sa famille libérale? Va-t-il se tenir debout ou va-t-il se taire en bredouillant des excuses? Qu'est-ce qui est le plus important pour le ministre des Forêts? Est-ce que c'est ses citoyens ou le Parti libéral?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc (Jean-Talon) : Premièrement, M. le Président, dans notre parti, on peut discuter. On a déposé un document de travail, chacun peut donner son opinion. J'ai d'ailleurs rencontré mon collègue, et on a fait des discussions. Ce que l'on veut, lui et moi, et tout le caucus libéral, c'est la réussite scolaire, et on veut également diminuer la bureaucratie. Et tous sont conscients, en faisant des fusions logiques et intelligentes, on peut diminuer la bureaucratie. D'ailleurs, on est en consultations, c'est un document de travail. J'invite les gens à donner leur opinion, mais je dois vous avouer que, jusqu'à date, 90 %, 95 % des propositions, d'après moi, sont très acceptables.

Le Président : Principale, M. le député de Chambly.

Fusions de commissions scolaires

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, la semaine dernière, nous avons demandé au ministre de l'Éducation comment il pensait donner plus d'autonomie aux écoles en fusionnant les commissions scolaires. Nous n'avons pas eu de réponse compréhensible à cette question. Nous lui avons aussi demandé combien d'argent les fusions de commissions scolaires permettraient d'économiser. Là encore, ce n'est pas clair. Je vous rappelle, les dernières fusions de commissions scolaires ont engendré des coûts, pas des économies. Même son collègue le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs s'oppose clairement aux fusions de commissions scolaires, et je vais le citer à nouveau : «...je vais m'opposer farouchement et férocement à toute fusion forcée des commissions scolaires...» Voilà ce qu'il a dit. Dans La Presse ce matin, la journaliste Mme Pascale Breton qualifie les fusions de coûteuses et inutiles.

Comment le ministre de l'Éducation pense-t-il rassurer et rallier les Québécois à sa réforme de fusions forcées et improvisées si, à l'intérieur même de son caucus, les ministres contestent sa démarche?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, je répéterais le message de mon collègue : La CAQ, ils ont des idées, mais, quand arrive le temps d'agir, ils ne sont pas là. On veut réformer nos commissions scolaires, on veut travailler, on veut décentraliser. Je vais vous donner un exemple, M. le Président. J'étais au Saguenay—Lac-Saint-Jean cette semaine puis j'ai eu l'occasion de rencontrer des commissions scolaires du Lac-Saint-Jean, celle de Saint-Félicien puis également celle d'Alma, et ils m'ont dit qu'eux, ils pratiquent le fonctionnement au niveau de la classe, de l'école, et ça fonctionne. D'ailleurs, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, la couverture pour les regroupements des commissions scolaires est très positive. Pourquoi? Parce qu'ils ne s'attaquent pas à la grosseur de la commission scolaire, ils ont mis leur intérêt directement au niveau de l'enseignant, au niveau de la classe et au niveau de l'école. C'est ça, le modèle qu'on veut. Et, en même temps, on va économiser au niveau de la bureaucratie. La CAQ, ils ont des idées, mais, quand arrive le temps d'agir, ils ne sont jamais là.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, je pense que, quand le premier ministre parle de la vacuité des propos, il devrait regarder dans sa cour, tout près de lui. Le ministre de la Forêt, de la Faune et des Parcs a même dit qu'il était prêt à se battre pour défendre ce qu'il appelle l'identité scolaire. Il en a rajouté hier en disant : «Je suis pour le maintien de l'intégralité des territoires.» C'est très clair.

Quelle crédibilité le ministre de l'Éducation peut-il avoir dans la population quand, au sein même de son caucus, on refuse ces fusions forcées et improvisées?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, lorsqu'on dépose un document de travail, c'est normal qu'on reçoive des suggestions, c'est normal qu'on en fasse une discussion. On sait qu'il y a d'autres partis que c'est beaucoup plus l'imposition dans les idées, tandis que nous, du Parti libéral, on est capables de discuter et on est capables de s'entendre.

Il y a une chose, par contre, M. le Président, au niveau du Parti libéral, par contre, il y a une position qu'on prend. Une fois qu'on s'est entendus puis qu'on a fait le consensus, la totalité du caucus est en arrière de la décision.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, le ministre parle de document de travail, mais la vérité, là, c'est un scénario broche à foin qu'on a devant nous. Dans mon comté, les élèves de secondaire 4 et 5, je ne sais pas à quoi on s'attend, s'ils vont décrocher, là, mais, avec le redécoupage, ils ne peuvent même pas poursuivre leur éducation. Le secondaire 1, 2, 3, c'est dans une commission scolaire, 4 et 5, c'est dans une autre commission scolaire. La commission scolaire dit : Il va falloir bâtir une nouvelle école avec ce que propose le ministre. Clairement, le ministre n'est pas l'homme de la situation.

Quand le premier ministre va-t-il prendre la décision qui s'impose?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, M. le Président, je comprends que le député, sa seule phrase, c'est toujours de dire : Bien, pourquoi est-ce qu'on ne le remplace pas? Pourquoi est-ce qu'on ne le remplace pas? Mais je vais lui répondre...

Des voix : ...

M. Bolduc (Jean-Talon) : ...je vais lui répondre, M. le Président...

Des voix : ...

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président...

Le Président : M. le ministre.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Je vais lui répondre : Qu'il prenne le temps de regarder les suggestions. Comme je lui ai dit, l'ensemble de l'oeuvre va probablement être accepté, mais nous acceptons qu'il y ait des discussions. Mais j'aimerais que le député revienne à la base. C'est quoi, les critères pour la réussite, au niveau de l'élève? Comment peut-on avoir une école qui fonctionne mieux? Comment peut-on mieux organiser les services? Et également comment peut-on diminuer les coûts en diminuant non pas les services à l'élève, mais la bureaucratie?

Le Président : Principale, Mme la députée de Joliette.

Compressions budgétaires à ICI Radio-Canada

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Merci, M. le Président. Nous allons, dans quelques minutes, débattre d'une motion sur l'avenir de Radio-Canada en demandant au gouvernement fédéral de cesser les compressions dramatiques imposées au diffuseur public qui mettent en péril autant la production culturelle que, bien sûr, l'accès à de l'information de qualité localement, nationalement, internationalement, en français, partout au Québec, dans toutes les régions du Québec, sans oublier, bien sûr, tous les emplois qui sont en jeu. Nous espérons que nous saurons tous parler d'une voix forte et unie pour que l'Assemblée nationale, pour que le Québec envoie un message clair au gouvernement fédéral quant au caractère inadmissible de ces compressions.

Maintenant que la ministre de la Culture et des Communications, par sa présence au point de presse de ce matin, s'est associée au mouvement — et on la remercie — peut-elle nous dire quels gestes concrets elle a posés à ce jour, quelle démarche concrète elle a faite auprès de son homologue fédérale pour obtenir des résultats tangibles et répondre aux milliers de voix qui se sont exprimées au Québec?

Le Président : Mme la ministre de la Culture.

Mme Hélène David

Mme David (Outremont) : Alors, écoutez, M. le Président, je suis vraiment enchantée de la question de la collègue députée de Joliette parce que, justement, nous étions ensemble ce matin. Non seulement nous étions ensemble ce matin, mais nous sommes, avec mon collègue le ministre au Secrétariat aux Affaires intergouvernementales, nous sommes au travail depuis plusieurs mois pour sensibiliser, justement, le gouvernement fédéral à l'importance de cette institution extraordinaire que représente Radio-Canada, que ça soit pour la francophonie au Québec, que pour la francophonie dans l'ensemble du Canada. Nous étions en réunion à Toronto, et mon collègue a eu l'occasion, justement, de faire vraiment une prestation extraordinaire pour la protection de la langue française partout au Canada et au Québec aussi.

Donc, je remercie la collègue de me poser la question parce que Radio-Canada est vraiment un vecteur de culture, de création, d'innovation extrêmement important, d'information, et partout dans les régions du Québec. Alors, merci beaucoup, M. le Président.

• (11 h 20) •

Le Président : Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, puisqu'il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je suis prête à reconnaître un membre du groupe formant l'opposition officielle, et je cède la parole à M. le député de Verchères.

M. Bergeron : Mme la Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Montarville et le député de Mercier, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale rappelle au premier ministre et chef du Parti libéral du Québec son mot d'ordre adressé à l'ensemble des anciens et actuels ministres, députés, dirigeants et employés du Parti libéral du Québec selon lequel ils doivent collaborer aux enquêtes de l'UPAC.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député. Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Il y a une autre motion qui s'en vient sur le même sujet. Pas de consentement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement. Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Maltais : Mme la Présidente, l'autre motion est différente, elle s'adresse à tous les Québécois, alors que ce sont les libéraux qui sont filés actuellement et qui sont...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Alors, il n'y a pas de consentement. Et nous allons passer à la prochaine motion sans préavis, et je suis prête à reconnaître un membre du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Groulx, la parole est à vous.

M. Surprenant : Mme la Présidente, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement avec la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte des nombreuses dérives financières dans les projets de développement et de gestion informatique, de technologie, et de communication des ministères et organismes du gouvernement;

«Qu'elle reconnaisse qu'il s'agit d'un problème grave et persistant dont l'ampleur exige de prendre des mesures fortes afin d'en identifier les sources et de trouver les solutions appropriées;

«Qu'elle demande au gouvernement de déclencher dans les plus brefs délais une commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie des technologies de l'information et des communications.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Groulx. Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Pas de consentement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement. Nous allons passer à la prochaine motion sans préavis. Je suis prête à reconnaître un membre formant le gouvernement. Mme la ministre de la Sécurité publique.

Rappeler aux Québécois l'importance de transmettre
les informations qu'ils possèdent aux autorités
et de collaborer aux enquêtes de l'UPAC

Mme Thériault : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Verchères et la députée de Montarville :

«Que l'Assemblée nationale rappelle aux Québécois et Québécoises l'importance de transmettre les informations qu'ils possèdent aux autorités et de collaborer aux enquêtes de l'UPAC.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Nous proposons l'adoption sans débat, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup. Cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Maintenant, pour la prochaine motion sans préavis, je vais reconnaître Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Presser le gouvernement fédéral d'appuyer ICI Radio-Canada
dans la réalisation de son mandat et de lui fournir
les moyens nécessaires pour respecter ses
obligations en vertu des lois fédérales

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec la ministre de la Culture et des Communications, la députée de Joliette et la députée d'Iberville. Et j'aimerais, bien sûr, souligner la présence de Mme Isabelle Montpetit, présidente de... Syndicat des communications Radio-Canada, Jacques Létourneau, président de la CSN, et M. et Mme Pierre Roger et Pascale St-Onge, de la Fédération nationale des communications qui sont là-bas.

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse le rôle essentiel de la Société Radio-Canada en matière d'information, de contenu culturel et de divertissement destinés aux francophones du Québec et aux 2,6 millions de francophones et francophiles hors Québec;

«Que l'Assemblée nationale affirme que les compressions effectuées dans les services en français de la Société Radio-Canada suscitent une grande inquiétude au Québec et à travers le Canada;

«Que l'Assemblée nationale réitère la pertinence d'un diffuseur public francophone fort et l'importance de l'information régionale;

«Que l'Assemblée nationale presse le gouvernement fédéral d'appuyer la Société Radio-Canada dans la réalisation de son mandat et de lui fournir les moyens nécessaires afin qu'elle puisse respecter ses obligations en vertu des lois fédérales.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la députée. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Oui, madame...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Monsieur le...

M. Sklavounos : Oui, Mme la Présidente, il y a un consentement pour le débat. Deux minutes par intervenant, à commencer par la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, la députée de Joliette, suivie de la députée d'Iberville et, finalement, notre ministre de la Culture et des Communications.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le leader adjoint. Je vais maintenant vous céder la parole, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. Alors, je me réjouis vraiment de l'appui de mes collègues à cette motion parce qu'ensemble on envoie clairement un signal au premier ministre et au P.D.G. de Radio-Canada, M. Hubert Lacroix, à l'effet que, les coupes annoncées, on n'en veut pas parce qu'elles accélèrent le démantèlement de notre télévision publique, de notre radio publique, et que ce démantèlement-là transforme lentement cette télé publique vers une télé d'État qui se met parfois de plus en plus au service du pouvoir à Ottawa, et ça, ça nous rappelle d'anciens régimes passés date et inacceptables en démocratie du XXIe siècle.

Ce nouvel appui de Québec à Radio-Canada, CBC, arrive à un moment crucial où la population se mobilise de plus en plus pour défendre ici notre production, notre diffusion publique. À l'instar des 25 000 qui ont manifesté à Montréal et plusieurs milliers d'autres ici même, à Québec, et à travers le Québec le 16 novembre dernier, j'invite donc Ottawa à répondre favorablement à notre demande, des parlementaires, et à celle de la CSN et de Radio-Canada de surseoir aux mises à pied. Il faut des journalistes pour faire du journalisme, des présentateurs et présentatrices pour informer, vulgariser. Il faut des réalisatrices, des monteurs, des artistes de son, des animateurs, des comédiens et comédiennes pour nous offrir des émissions bien de chez nous qui expriment notre culture en français. Le gouvernement prétend réaliser des économies en coupant les budgets de Radio-Canada. C'est une culture qu'il déstructure. Dans les faits, des économies, à elle seule, l'émission Enquête a permis d'en économiser plusieurs dizaines de milliers uniquement en dévoilant les stratagèmes de corruption.

J'invite donc la population et mes collègues de l'Assemblée à faire un geste de plus et à signer la pétition pour un moratoire sur les compressions et une commission parlementaire sur l'avenir du diffuseur public. Et je remercie encore sincèrement, au nom de nos amis et alliés, mes collègues de l'Assemblée nationale.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Et je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour, je suis très heureuse d'appuyer, au nom de l'opposition officielle, cette motion, cette motion qui est très importante parce qu'aujourd'hui nous parlons d'une seule voix, une voix unie, une voix forte, celle de l'Assemblée nationale, mais à travers nous, bien sûr, celle du Québec qui veut se tenir debout face à ces compressions dramatiques pour l'avenir du diffuseur public. Dramatiques pourquoi? Parce que, d'une part, c'est la production culturelle qui est mise en péril, c'est le travail de nos artistes et de nos artisans, mais c'est aussi, comme on l'a déjà mentionné, mettre en péril la qualité de l'accès à une information diversifiée, une information publique de qualité en français. Qu'elle soit locale, régionale, nationale ou internationale, on sait tous à quel point l'accès à cette information-là est fondamental en démocratie, à quel point c'est un pilier de pouvoir avoir des citoyens informés pour être capable de débattre correctement. Et il y a, par les temps qui courent, de nombreux débats, donc nous avons besoin de cette information de qualité partout au Québec, partout, dans toutes les régions du Québec.

Déjà, ces compressions dramatiques sans précédent se font sentir : des pertes d'emploi, des pertes d'accès à de l'information en région notamment. On a même vu jusqu'au costumier qui est mis de côté par le diffuseur public, alors que c'est un symbole d'énormément d'années de patrimoine, de culture au Québec. Alors, c'est rendu très loin, et aujourd'hui c'est important qu'on se fasse ici, à l'Assemblée nationale, le relais de ces milliers de voix qui se sont fait entendre il y a une dizaine de jours à Montréal, mais partout au Québec en soutien aux gens de Radio-Canada, aux gens dont les emplois sont directement touchés, mais surtout en soutien à ce diffuseur public, à ce pilier, donc, pour le rayonnement du Québec, des francophones du Québec. Et donc je suis heureuse qu'on puisse se faire le relais de ces milliers de voix et envoyer un message clair au gouvernement fédéral, que j'invite ma collègue de la Culture et des Communications à porter haut et fort et à demander clairement au gouvernement fédéral de faire marche arrière, et de réduire, et d'annuler ces compressions qui, déjà, ont des impacts majeurs. Merci beaucoup.

• (11 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la députée de Joliette. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée d'Iberville.

Mme Claire Samson

Mme Samson : Merci, Mme la Présidente. Mes collègues et les différentes formations politiques reconnaissent que Radio-Canada, c'est un joyau. C'est notre diffuseur public et qui est un agent d'expression culturelle du Québec et des francophones ailleurs au Canada. C'est un diffuseur qui produit un contenu d'une très haute qualité, reconnu mondialement, et nous pouvons en être fiers. Il est indéniable que Radio-Canada, au fil des ans et des décennies, a énormément contribué au dynamisme de notre culture, de son expression et à son succès. C'est une situation qui est unique au Canada.

C'est également la société qui joue un rôle clé au niveau de l'information internationale, en assurant la majeure partie de la couverture étrangère à laquelle nous avons accès.

C'est aussi une institution importante et fondamentale en matière d'information régionale, secteur déjà fragilisé par le désistement ou la fermeture en région de d'autres diffuseurs privés. Les ressources doivent être conservées afin que Radio-Canada puisse continuer à diffuser une information locale de qualité. C'est vital pour le développement et l'épanouissement des régions.

Il est vraiment dommage que Radio-Canada soit si dépendante et vulnérable aux revenus d'une seule propriété sportive. La perte de la diffusion du hockey, entre autres, à la CBC, a créé un manque à gagner excessivement important dont on voit les conséquences aujourd'hui.

Nous croyons qu'il serait sage que le gouvernement fédéral demeure attentif aux besoins de Radio-Canada et lui alloue les ressources nécessaires pour assurer sa pérennité. Mais le gouvernement doit également lui allouer les ressources pour assurer son développement, son épanouissement et lui permettre d'assumer ses mandats en termes de couverture régionale et internationale ainsi que le rayonnement de la culture francophone. Nous croyons également très fermement, comme le demande le mouvement Tous amis de Radio-Canada, qu'il est grand temps que le gouvernement fédéral tienne une commission parlementaire publique sur l'avenir de notre radiodiffuseur pour se pencher sur son financement, sa gouvernance et sa mission. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la députée d'Iberville. Et, toujours sur cette motion, je cède maintenant la parole à Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Hélène David

Mme David (Outremont) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je suis extrêmement heureuse de m'associer à mes collègues pour parler de Radio-Canada, pour parler de l'importance de Radio-Canada dans notre société.

Radio-Canada nous a, tous et toutes, passablement bâtis à travers les années, ce que nous sommes, la francophonie que nous portons fièrement ici, au Québec et à travers le Canada. La langue et la culture francophone, c'est ça, Radio-Canada. Radio-Canada, c'est un moteur central historique, national de la culture francophone, c'est un vecteur de création, c'est un vecteur d'innovation en langue française. Radio-Canada, c'est une présence absolument fondamentale pour la présence et la consolidation du fait français d'un océan à l'autre. C'est une présence partout en région, on l'a souligné, l'importance de Radio-Canada en région, on ne le dira jamais assez. C'est aussi, évidemment, la qualité de l'information en français, une information qui provient, est-il nécessaire de le souligner, de partout au monde, et ce n'est pas nécessairement le cas de tous les diffuseurs d'information.

Je pense que la mobilisation de la population québécoise démontre l'importance du télédiffuseur et du radiodiffuseur pour les Québécois de tous les horizons. Qu'il suffise de rappeler, comme exemple extrêmement récent, la mise en nomination, aux Emmy Awards — je le dis en anglais puisque c'est un événement américain — de deux séries diffusées sur les ondes de Radio-Canada, soit la série 30 vies ainsi que Unité 9, et particulièrement un acteur que nous aimons tous énormément, Claude Legault, ce qui est vraiment tout à l'honneur de la production et des artisans québécois. Ces deux séries figuraient au centre de productions parmi les plus prestigieuses au monde. Et, même s'ils n'ont pas obtenu le grand honneur, nous sommes extrêmement fiers qu'ils aient été mis en nomination.

On doit dire, c'est ça aussi, Radio-Canada. Et Radio-Canada, c'est aussi... évidemment, ce sont les émissions scientifiques, les documentaires, RDI, et j'en passe. Il est vraiment nécessaire et important de sensibiliser le gouvernement fédéral quant à son mandat essentiel de protection de l'information, de protection de la langue, de la culture et de la création francophones, et ce, tant au Québec que partout au Canada. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mise aux voix

Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Alors, nous allons maintenant passer...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

M. Bergeron : Mme la Présidente, simplement pour nous assurer que cette motion sera bel et bien acheminée à la Chambre des communes et au Sénat du Canada.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le leader adjoint. Ce sera fait.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous en sommes maintenant à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement. Et ceux qui doivent quitter la salle, s'il vous plaît, faites-le dans le silence et le calme.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. J'avise cette Assemblée que la Commission des transports et de l'environnement entreprendra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur les véhicules hors route et d'autres dispositions, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif, ainsi que de 15 heures à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle des Premiers-Ministres, 1.38, de l'édifice Pamphile-Le May;

La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra, elle, l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi sur la Société du Plan Nord, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 3, Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission des finances publiques, quant à elle, poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 15, Loi sur la gestion et le contrôle des effectifs des ministères, des organismes et des réseaux du secteur public ainsi que des sociétés d'État, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle du Conseil législatif;

La Commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué : le projet de loi n° 200, Loi concernant la Municipalité de Lac-Simon; le projet de loi n° 201, Loi concernant la Ville de Westmount; le projet de loi n° 202, Loi concernant la Régie intermunicipale de valorisation des matières organiques de Beauharnois-Salaberry et de Roussillon, mercredi le 3 décembre 2014, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 15 heures à 16 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et finalement

La Commission de la culture et de l'éducation entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 203, Loi concernant la vente d'un immeuble situé dans le site patrimonial de La Grave, mercredi le 3 décembre 2014, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le leader adjoint du gouvernement.

Et nous sommes maintenant à la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Affaires du jour

Et, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

• (11 h 40) •

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Auriez-vous l'amabilité d'appeler l'article 4 de notre feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 23

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Article 4. Merci beaucoup. Alors, à l'article 4 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire propose l'adoption du principe du projet de loi n° 23, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal relativement à la composition du comité exécutif. Et, sans plus tarder, je cède la parole à M. le ministre des Affaires municipales.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Merci, Mme la Présidente. C'est très agréable de retrouver les travaux du salon bleu, étant concentré depuis plusieurs semaines maintenant aux travaux des commissions parlementaires, particulièrement sur l'étude en commission parlementaire du projet de loi n° 3, que nous avons bon espoir, suivant une entente intervenue avec l'opposition officielle, de faire adopter la semaine prochaine.

Mme la Présidente, ce matin, nous sommes à l'étude pour l'adoption du principe du projet de loi n° 23, qui est un petit projet de loi mais qui est supporté par un grand principe, celui de l'autonomie des municipalités. C'est un petit projet de loi puisqu'il ne contient que deux articles, Mme la Présidente, et c'est un projet de loi qui est intitulé Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal relativement à la composition du comité exécutif.

C'est une demande que nous avons eue de la ville de Montréal. La charte actuelle de la ville de Montréal, et la raison pour laquelle nous la modifions par un projet de loi public... La Charte de la Ville de Montréal est une loi publique. Et historiquement tous les gouvernements du Québec ont fait une modification... lorsqu'ils ont fait des modifications à la Charte de la Ville de Montréal, ça a été fait par projet de loi public. Et je le précise parce que, dans bien des cas, les villes au Québec ont des projets de loi d'intérêt privé pour se voir attribuer des pouvoirs additionnels à ce que leur charte, pour celles qui en ont, prévoit et à ce que la Loi sur les cités et villes ou le Code municipal prévoient pour les autres municipalités au Québec.

La ville de Montréal a déjà, donc, ce statut particulier d'avoir une charte publique, et, dans sa charte, on prévoit la composition du comité exécutif. La disposition actuelle qui s'applique prévoit que le comité exécutif est composé d'au moins sept personnes et d'au plus 11 personnes désignées par le maire et que le comité exécutif est composé d'un président et de deux vice-présidents. Ce que le projet de loi n° 23 vient faire, c'est de répondre à une demande de la ville de Montréal pour éliminer le nombre minimum et maximum de membres qui composent le comité exécutif. Et déjà, Mme la Présidente, en vous ayant dit tout ça, mon discours est plus long que le projet de loi lui-même. Essentiellement, ce qu'on vient faire, c'est qu'on dit au maire de la ville de Montréal, pour qui le comité exécutif est l'équivalent de la composition du Conseil des ministres pour le gouvernement du Québec ou pour le gouvernement fédéral : Vous n'avez pas à vous faire dicter par une loi adoptée par Assemblée nationale la composition minimale et maximale de ceux que vous estimez nécessaires à l'accession au comité exécutif pour la bonne marche des affaires de la ville de Montréal.

Vous savez, Mme la Présidente, nous avons entrepris une démarche beaucoup plus large en ce qui a trait Montréal, Québec et l'ensemble des municipalités du Québec. Et j'insiste sur «l'ensemble des municipalités du Québec», parce qu'on a entendu : Ah! vous êtes très occupé avec Montréal et Québec. C'est une démarche que nous allons faire avec toutes les municipalités du Québec, parce que c'est le mandat que m'a confié le premier ministre du Québec, de redéfinir la relation entre le gouvernement du Québec et les municipalités en leur conférant une plus grande autonomie. Le projet de loi n° 23 va dans ce sens-là.

Pour quelle raison intervenons-nous maintenant? Parce que la ville nous en a fait la demande et parce que nous estimons que cette demande est tout à fait légitime. Il ne nous viendrait pas à l'esprit qu'un autre Parlement dicte à l'Assemblée nationale du Québec ou au premier ministre du Québec quelle devrait être la composition de son Conseil des ministres.

Si on est d'accord avec le principe de l'autonomie des municipalités, si on est d'accord de reconnaître le palier municipal comme étant un palier de gouvernance de proximité, bien, il faut redonner aussi à ce palier de gouvernance la capacité, les moyens et l'autonomie qui caractérisent l'autonomie gouvernementale. Ça ne veut pas dire que Québec tourne le dos aux municipalités, ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas un examen ou une collaboration avec les élus municipaux de ce qui doit être fait, mais ça veut dire qu'on doit aller vers un mouvement qui reconnaît plus d'autonomie au fonctionnement des municipalités. Ça veut dire, pour la ville de Montréal, puisque c'est d'elle dont on parle ce matin avec le projet de loi n° 23, de reconnaître aussi, plus tard dans une loi, son statut extrêmement particulier et unique de métropole du Québec.

Et le statut de métropole confère à Montréal des obligations qui dépassent largement les obligations des autres municipalités au Québec. Et on ne dit pas ça pour dire que Montréal est meilleure que les autres, on dit ça pour reconnaître une situation de fait que personne ne conteste et qui fait que Montréal a des obligations inhérentes à son rôle de métropole, inhérentes à la composition de son territoire, inhérentes au fait qu'elle est, on le dit, un moteur économique pour l'ensemble du Québec.

Je repassais les chiffres récemment. Strictement en matière d'immigration, il y a, bon an, mal an, à peu près 50 000 personnes qui choisissent de quitter leur terre d'origine, partout dans le monde, pour venir s'établir au Québec. 85 % d'entre elles choisissent de s'établir à Montréal. Donc, la ville de Montréal, de facto, joue un rôle important dans l'accueil et l'intégration des immigrants.

Le gouvernement du Québec a des compétences en ce domaine-là. Est-ce que certaines des compétences exercées par le gouvernement du Québec ne devraient pas être transférées directement à la ville de Montréal, avec la capacité économique qui, à l'heure actuelle, est mise à la disposition du gouvernement pour le faire, mais qui pourrait être transférée à la ville de Montréal si, dorénavant, c'était elle qui devait occuper ce palier ou ce champ de compétence ou une partie de ce champ de compétence?

La réflexion dans laquelle nous nous sommes engagés avec le maire de Montréal, avec le maire de Québec, avec le président de la Fédération québécoise des municipalités, avec la présidente de l'Union des municipalités du Québec, c'est une réflexion qui veut nous amener à nous assurer que le service est rendu au meilleur endroit possible, au bénéfice des citoyens, avec la capacité... en tenant compte de la capacité de payer de ce citoyen, qu'il soit un contribuable municipal ou qu'il soit un contribuable qui paie ses impôts au gouvernement du Québec.

La réalité de la chose, Mme la Présidente, c'est que par ce petit principe nous venons de poser une autre pierre dans un édifice qui est beaucoup plus grand que nous tous, celui de la démocratie municipale au Québec, celui qui va faire en sorte que nous pourrons, et j'en suis convaincu, avant la fin du présent mandat, livrer clés en main à la ville de Montréal, à la ville de Québec et à l'ensemble des municipalités du Québec des dispositions législatives qui reconnaîtront enfin le palier municipal comme étant un véritable palier de gouvernance locale.

Le projet de loi n° 23 libérera donc le maire de Montréal des contraintes liées à la composition du comité exécutif, qui sera composé minimalement de trois personnes, puisque les dispositions relatives à la présence d'un président et de deux vice-présidents demeurent, mais qui ne sera pas limité dans le nombre de personnes non plus que dans l'utilité et, je dirais, dans l'exercice des compétences qu'il estime devoir faire jouer au comité exécutif. Alors, nous sommes heureux, par ce projet de loi, de répondre à la demande faite, formulée en ce sens par la ville de Montréal. Et j'invite mes collègues porte-parole de l'opposition officielle, porte-parole du deuxième groupe d'opposition de même que tous les collègues de l'Assemblée nationale à s'unir au gouvernement pour assurer non seulement l'adoption du principe, ce matin, de ce projet de loi, mais assurer son cheminement rapide dans nos instances en vue de son adoption. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le ministre des Affaires municipales. Et je vais maintenant céder la parole à M. le député de Rosemont.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Mme la Présidente, je n'arriverai pas à parler aussi longtemps que le ministre, qui, sur un projet de loi d'un article, a quand même fait une douzaine de minutes. Évidemment, ça dépend de l'article. Il y a des articles qui modifient des choses fondamentales, et d'autres, non. Mais le législateur ne parle jamais pour ne rien dire, et, lorsqu'il décide de retirer des balises, il faut s'attacher à la raison pour laquelle c'est fait, dans quel contexte c'est apporté, quel objectif on essaie d'atteindre et est-ce qu'il a raison de le faire.

Alors, dans ce cas-ci, on est effectivement, comme le ministre l'a indiqué, dans un processus plus large où nous voulons revoir l'autonomie des municipalités et arrêter de les considérer, comme ça a été fait dans le passé, comme des créatures du gouvernement du Québec, où le gouvernement du Québec ou l'Assemblée nationale devaient dicter jusque dans le menu détail le fonctionnement. Et on disait souvent qu'à chaque année, deux fois par année, un bill omnibus est présenté ici par le ministre des Municipalités pour modifier, faire un peu de microgestion sur les chartes des municipalités, des réglementations, des lois qui sont très complexes, qui couvrent l'ensemble de l'activité municipale au Québec, et que... donc, oui, le gouvernement du Parti québécois était tout à fait d'accord. Mon ancien collègue ministre responsable des Municipalités avait d'ailleurs accueilli favorablement le rapport, le livre blanc de l'Union des municipalités qui demandait un nouvel arrangement, un nouveau respect, du respect pour les gouvernements municipaux, du respect pour leur autonomie et du respect pour le droit qu'ils doivent avoir de prendre des décisions qui n'auraient pas été celles de l'Assemblée nationale. Et, comme le ministre l'a dit, bien, parfois il y a des gens qui pensent que l'Assemblée nationale ne prend pas les décisions qu'ils auraient prises. Alors, s'il y a du respect mutuel, il faut aussi avoir l'ouverture d'esprit de dire : Bon, bien, si on donne de l'autonomie, on s'attend bien à ce que les choses ne soient pas faites exactement comme on aurait voulu qu'elles se fassent.

• (11 h 50) •

Alors, dans cas-ci, ce qui est particulier avec ce projet de loi, c'est qu'il nous arrive à la pièce, qu'il modifie seulement un aspect de la charte de Montréal, alors qu'on sait que le gouvernement est engagé, comme le gouvernement du Parti québécois voulait le faire aussi, dans un exercice beaucoup plus large de revue du statut de la métropole, du statut de la capitale et des responsabilités des municipalités. Alors, il faut bien dire le vrai, Mme la Présidente : C'est parce que le maire de Montréal voulait modifier la composition de son comité exécutif pour ajouter une personne, et le maire avait décidé qu'il ne pouvait pas faire une substitution à l'intérieur des balises de sept à 11 qui lui étaient données par la loi actuelle. C'est un peu particulier. Moi, j'admets que c'est un peu particulier que, pour des raisons de régie interne, et en attendant une réforme plus large dans laquelle cette disposition aurait pu être modifiée pour donner de la latitude au maire d'avoir plus ou moins de membres du comité exécutif, le maire se tourne vers l'Assemblée nationale et disant : Bon, pouvez-vous régler mon problème? On est dans une disposition de bonne volonté et puis on veut bien régler des problèmes à mesure qu'ils se présentent, et j'indique à mon collègue le ministre des Municipalités que nous allons voter pour le principe, mais nous devons quand même souligner que c'est particulier, c'est particulier. Nous pensons que le maire de Montréal aurait pu trouver une autre façon de régler son problème, qui était de vouloir intégrer au comité exécutif quelqu'un qui, jusque-là, était membre de l'opposition. C'est très bien. C'est à lui de le décider. Nous n'avons pas à poser de jugement là-dessus, mais il aurait pu procéder autrement et dire : Bon, bien, on attendra la réforme du statut de Montréal pour ajouter une personne de plus, ou deux, ou trois. Bon.

Alors, parce que nous sommes bons joueurs, parce que nous voulons le succès de la métropole, parce que nous ne voulons pas mettre de bâtons dans les roues, nous allons accepter ce principe. Mais nous allons ajouter aussi que nous aurions préféré que la législation soit adoptée avant qu'une annonce ne soit faite à Montréal sur la façon dont cette disposition allait être utilisée, si tant est que nous allions l'adopter. Parce que, tant que l'Assemblée ne s'est pas prononcée, le droit n'a pas changé.

Une voix : ...

M. Lisée : Et puis il y a un précédent. D'ailleurs, j'entends le ministre chuchoter qu'il y avait même un précédent. Alors, ça, il faut quand même dire que le respect, ce n'est pas à sens unique, ça va dans les deux sens, et on aime bien que les formes soient respectées, et nous voulons exprimer cela.

Maintenant, le gouvernement aurait pu procéder autrement aussi. Il aurait pu dire : Bon, les balises, en ce moment, c'est de sept à 11. On a un cas particulier, on pourra décider que ça va être de six à 12 ou de cinq à 13, parce que le débat sur le comité exécutif n'est pas fait dans l'ensemble de la législation sur les statuts des villes, et la question se pose. Nous savons que, dans l'ensemble des discussions sur la bonne gouvernance, il y a des masses critiques : en bas d'un certain nombre, ça ne suffit pas; en haut d'un certain nombre, il y en a trop. Et nous aurions pu discuter entre nous : Est-ce que, dans cette volonté de donner plus d'autonomie aux villes, il faut quand même donner une balise qui ressemble à ce que sont les masses critiques pour des comités exécutifs? Puisque nous sommes des législateurs et que... Si nous voulons donner plus de flexibilité, faut-il donner la totale flexibilité? Ce qui est le cas maintenant, nous enlevons ces balises. Et tout ce qu'on peut dire, c'est ce que le ministre a dit : Bien, trois, c'est minimum, parce que ça prend un président et deux vice-présidents. Et là il n'y a plus de maximum. Donc, théoriquement, il pourrait y avoir 100 personnes au comité exécutif, ce qui serait vraiment très mauvais pour la gouvernance, puisque l'imputabilité serait trop diluée. Bon. Nous acceptons le fait que rien n'empêcherait le premier ministre, ici, de nommer tous les membres de son caucus au Conseil des ministres, il n'y a rien qui l'interdit. Il pourrait même nommer l'ensemble des parlementaires, rien ne l'interdit dans la constitution. Mais on pense bien... et je vois que le goût pour cette hypothèse, de mon collègue de Beauce, n'est pas très grand, mais enfin c'est un peu la question qu'on se pose.

Alors, nous voulons, dans ce cas-ci, accepter la proposition que fait le gouvernement, mais nous pensons qu'il aurait pu agir autrement et nous aimerions aussi savoir ce qu'en pensent les autres membres du conseil municipal de Montréal qui sont intéressés par cette question. Alors, nous allons probablement le proposer, lors de l'ouverture de la commission... qu'en pensent les organisations politiques qui sont membres du conseil municipal de Montréal, pour qu'ils nous éclairent sur cette question. Mais nous ne sommes pas opposés au principe, et je tiens à assurer le ministre de notre collaboration. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Rosemont et porte-parole de l'opposition officielle pour la métropole. Et je vais maintenant céder la parole à M. le député de Blainville, qui est aussi porte-parole du deuxième groupe d'opposition pour les affaires municipales.

M. Mario Laframboise

M. Laframboise : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bon, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi n° 23, évidemment, un projet de loi qui a très peu de volume, deux articles.

Je pense qu'on a bien saisi le principe, c'est-à-dire que, présentement, la Charte de la Ville de Montréal encadre le comité exécutif, un minimum de sept membres, un maximum de 11. Ce que nous demande la ville de Montréal, c'est tout simplement d'abolir ce paragraphe-là qui fixe un nombre. Donc, la liberté serait entière au maire de la ville de Montréal.

Je vous dis ça, évidemment on sera... J'ai entendu le ministre nous faire une petite analyse par rapport à l'autonomie municipale. Vous avez compris que, s'il y a un parti politique, dans cette Chambre, qui est pour l'autonomie municipale, c'est bien la Coalition avenir Québec. On avait déjà déposé un projet de loi, dans l'ancienne législature, pour adopter la charte des municipalités. On a déjà été le premier parti à déposer un projet de loi pour régler les déficits des fonds de pension. Donc, je pense que de donner de l'autonomie à la ville de Montréal, là... je pense que ça va de soi pour nous, donc on sera en faveur du projet de loi.

Par contre, il faut quand même, aussi... J'espère qu'on aura la possibilité de questionner le maire, parce qu'il y a aussi des contraintes budgétaires, je veux dire, on passe... Il n'y a pas personne qui... En tout cas, ceux qui ont suivi le dossier, je pense que la seule raison pourquoi le maire nous le demande, c'est pour ajouter un siège qui était pour M. Richard Bergeron, je pense que c'était clair. Évidemment, quand on rajoute un siège, bien, on rajoute une prime, parce qu'il y a une prime quand on s'en va au comité exécutif, donc il y aura des dépenses supplémentaires à la ville de Montréal. Donc, c'est ces choses-là qui sont plus agaçantes.

Et, pour moi, ce qui est encore plus agaçant, c'est que M. Bergeron a déjà commencé à siéger, puis théoriquement, selon la loi, il n'a pas le droit, là. On a vu qu'il avait voté sur... au comité exécutif, il était membre, puis qu'il a voté. En tout cas, c'est toutes ces petites choses là, dans le cadre d'une journée de grand dérangement... Pour lesquelles la Coalition avenir Québec est contre toute manifestation, là, syndicale qui aurait pour effet d'empêcher les travailleurs, en tout cas, d'aller au travail ou des contribuables d'avoir accès, là, à leurs résidences ou aux lieux de travail. Moi, je pense que tout ce qui se fait doit se faire dans le respect des contribuables, parce que c'est pour eux, ces hommes et ces femmes-là qui travaillent fort le matin, qu'on est ici, pour essayer de défendre leurs droits. Mais, quand on discute dans une journée comme aujourd'hui d'une situation où le maire de la ville demande de grossir son exécutif, bon, augmenter les dépenses, quand on veut contraindre les employés, donc, je pense que... Il n'y a pas de mauvais moment, on dira, pour faire de la politique, mais il y a d'autres moments, des fois, où est-ce que c'est plus difficile, puis aujourd'hui c'en est un.

Parce que, pour la ville de Montréal, ce n'est pas la première fois, là, et je veux le dire au ministre, parce que, quand on a adopté le projet de loi sur l'inspecteur général de la ville de Montréal, la ville avait déjà engagé M. Denis Gallant, là, tu sais. Ce n'est pas la première fois que la ville de Montréal fait des dépenses avant que la loi ne l'autorise. Et là c'est sûr que, comme je vous dis, là, quand on demande aux employés municipaux de respecter la loi, il faut surtout donner l'exemple. Donc, si j'ai un message à livrer au maire de Montréal puis au parti du maire, c'est de dire : Avant d'effectuer des dépenses, en tout cas, assurez-vous que la loi vous permet de le faire. Puis c'est un peu le message que je livre aujourd'hui, évidemment, à la ville de Montréal, tout en leur disant que, oui, pour nous, l'autonomie, elle est là puis elle était là.

Dans le projet de loi n° 3, le ministre le soulignait tantôt, le projet de loi n° 3 sur les fonds de pension... D'abord, nous, on l'a toujours dit, on veut la pérennité des régimes de fonds de pension puis on veut assurer, évidemment, qu'ils soient renfloués pour que justement les employés municipaux aient des pensions, pas juste pour ceux qui sont pensionnés présentement, mais tous les travailleurs du monde municipal puissent avoir accès au même régime. Donc, c'est important. Mais ce qui est d'autant plus important par rapport à l'autonomie, c'est que nous avions proposé un amendement au projet de loi n° 3, qu'à la fin, plutôt que ce soit un arbitre qui tranche, ce soit la ville qui tranche. Donc, ça a toujours été dans un souci d'autonomie municipale. Comme au gouvernement avec les employés, bien, quand les employés du gouvernement ne s'entendent pas, le gouvernement passe un projet de loi, puis c'est lui qui décide. Donc, nous, l'autonomie municipale, on était prêts à la donner au projet de loi n° 3.

Évidemment, notre amendement n'a pas été jugé recevable quant à la forme, parce qu'on demandait l'abolition de tout un pan du projet de loi. Donc, vous avez compris : quand on n'est pas au gouvernement, on ne peut pas faire ce qu'on veut. Donc, ça arrivera dans la prochaine... après les prochaines élections, on sera au gouvernement et on pourra être capables de donner l'autonomie nécessaire aux villes. Mais présentement, là, on est obligés de vivre avec les projets de loi que le gouvernement dépose.

Donc, encore une fois, au point de vue de l'autonomie municipale, je pense que vous avez... j'espère que... Les citoyens, les contribuables qui nous écoutent et puis les représentants de toutes les villes du Québec, je veux que vous sachiez que la Coalition avenir Québec, quant à l'autonomie municipale, nous serons toujours là pour leur donner l'autonomie qu'elles ont besoin, qu'elles demandent, à charge de rendre des comptes. Et c'est ce que je dis aux élus de la ville de Montréal aujourd'hui : Assurez-vous que, quand vous adoptez les mesures, bien, légalement vous soyez capables d'enclencher, donc que M. Bergeron qui siège à l'exécutif en tout cas ne vote pas, parce que présentement il y a... bon, qu'il siège à titre d'observateur, parce qu'il n'a pas le droit de voter, tout simplement. Ça fait que, s'il vote... Il n'a pas le droit tant que ce projet de loi là... Parce qu'évidemment il y en a juste 11, ils sont connus. Puis il aura sa place quand le projet de loi sera déposé. Donc, c'est le message qu'on veut livrer, dans le respect de la législation.

Quand on demande aux employés de respecter les lois... Puis c'est ce que la Coalition avenir Québec demande aux employés : Respectez les lois qui vous gouvernent, et on demande aussi aux élus municipaux de faire la même chose. Et, dans ce souci-là, bien on va leur donner l'autonomie qu'ils demandent et on sera en faveur du projet de loi n° 23. Merci, Mme la Présidente.

• (12 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Blainville.

Mise aux voix

Alors, je vois qu'il n'y a pas d'autre intervention. Alors, je suis prête à vous proposer que... Le principe du projet de loi n° 23, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal relativement à la composition du comité exécutif, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la Commission de l'aménagement du territoire

M. Sklavounos : Oui, Mme la Présidente. Conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que ce projet de loi soit déféré à la Commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Alors, pour la poursuite des choses, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Oui. Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article 1, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 10

Adoption du principe

Reprise du débat sur la motion de report

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 25 novembre 2014, sur la motion de report présentée par M. le député de Labelle dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi n° 10, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l'abolition des agences régionales.

Lors de l'ajournement, Mme la députée de Taillon n'avait pas terminé son intervention. Et, avant de lui céder la parole, je vous indique qu'il reste 36 min 53 s au groupe parlementaire formant le gouvernement, 25 min 51 s au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et six minutes aux députés indépendants. Et, sans plus tarder, je cède la parole à Mme la députée de Taillon.

Mme Diane Lamarre (suite)

Mme Lamarre : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, faire un bref rappel sur ce qui justifie cette motion de report.

D'abord, 64 organismes ou individus sont venus présenter à cette commission parlementaire du projet de loi n° 10 qui dépasse largement le titre qui est évoqué dans son appellation pour vraiment venir modifier en profondeur chacun des liens qui unissent les organismes qui travaillent dans le domaine de la santé et des services sociaux pour le Québec. Donc, 60 présentations. Sur ces 64 présentations, seulement trois ont indiqué clairement qu'elles étaient en faveur du projet de loi n° 10, 13 ont émis des commentaires ambigus, mais 48, 48 sur 64, ont dit être contre. Alors, ça m'apparaît être quelque chose qui mérite, du côté du ministre, un moment de réflexion, une opportunité de pouvoir revenir à sa planche à dessin et à réécrire certains éléments de ce projet de loi. En plus des 64 organismes qui se sont présentés, 64 autres ont voulu rédiger un mémoire, ce qui fait qu'on a reçu en tout 128 mémoires pour ce projet de loi. Or, j'indique que, dans les gens qui ont écrit ces projets de loi, ce sont des gens qui n'ont pas eu le privilège d'être entendus mais qui se sentent quand même tellement concernés ou préoccupés par le projet de loi qu'ils ont pris le temps d'écrire, de rédiger des mises en garde, des avertissements, des améliorations potentielles sur ce projet de loi.

Au cours de notre commission parlementaire, le ministre a plusieurs fois fait référence au fait qu'il serait ouvert aux amendements, mais, quand on regarde, et j'ai assisté à toutes les minutes de cette commission parlementaire, cette ouverture se manifeste principalement lorsqu'on fait référence à des aménagements au niveau territorial, au niveau géographique. Alors, on va rechanger un petit peu, on ne mettra pas cet établissement-là dans ce grand centre intégré là, on va le mettre à côté. On va donc avoir des aménagements qui vont permettre de nouveaux centres suprarégionaux. Alors, ce sont des organisations qui sont... des amendements qui semblent beaucoup sur une organisation mécanique. Mais ce que les gens sont venus nous dire, c'est que plusieurs d'entre eux ont vraiment... d'abord, nous ont tous dit qu'ils n'avaient pas été consultés, donc, c'est un projet de loi qui a été rédigé par le ministre lui-même et seulement par lui. Et ils ont également dit qu'ils avaient... ces groupes n'avaient pas le sentiment d'avoir été écoutés ou entendus par le ministre.

Donc, si on prend la parole du ministre à ce moment-ci, plusieurs amendements sont attendus. Depuis une semaine, nous demandons d'avoir accès à ces amendements pour pouvoir mieux préparer notre période d'étude article par article qui doit débuter jeudi soir. Nous sommes mercredi. Depuis jeudi dernier, nous demandons d'avoir accès à ces amendements. La bonne collaboration, l'ouverture à laquelle le ministre a fait référence dans son allocution hier soir, elle se manifeste réciproquement. Et, quand on a non pas une opposition, mais simplement 48 organismes sur 64 qui représentent la population du Québec, qui représentent les citoyens, les usagers, les patients, les organisateurs, les gestionnaires, les citoyens du Québec, qui disent qu'ils sont contre, je pense que c'est de bonne foi, de la part du ministre, de faire preuve, lui, de collaboration et de présenter ses amendements un petit peu à l'avance. Sinon, la motion de report nous donnait l'opportunité de lui offrir cette opportunité de revoir ces éléments dont il a été témoin et qu'on espère qu'il a bien entendus et qu'il a bien reçus. Donc, jusqu'à maintenant, un refus d'obtenir ou de nous transmettre les amendements alors qu'on sait qu'ils seront nombreux. Nous devrons donc les étudier sur place au fur et à mesure qu'ils nous seront déposés, ce qui m'apparaît, après avoir eu un processus de consultation qui est complètement nul, être un autre signal que le ministre nous envoie à l'effet qu'il n'a pas la volonté de collaborer, n'a pas la volonté d'écouter ceux qui ne pensent pas exactement comme lui dans ce projet de loi là, et c'est très préoccupant. Et c'est ça que les groupes communautaires, les groupes en déficience intellectuelle, les groupes des spécialistes en compréhension de système de santé viennent dire et sont venus témoigner : Attention! La vérité ne peut pas être, dans une réforme d'un système de santé qui touche presque 50 % du budget du Québec, dans une seule et même personne.

Et actuellement le ministre nous donne, mettons, beaucoup d'arguments qui nous laissent croire qu'il a la conviction que tout est dans sa tête. Et non seulement ça, mais on a un projet qu'il a lui-même dit comme n'étant qu'une petite portion de l'ensemble de tout son remaniement du système de santé, et, là encore, il ne nous permet pas d'avoir accès à l'ensemble de cette évaluation-là ou de ce remaniement. Peut-être que ça nous rassurerait. Peut-être qu'on verrait davantage de lieux où on peut être d'accord avec lui, mais pour l'instant il s'oppose à nous partager cette vision-là, et ça, c'est très préoccupant.

En ce qui concerne la Coalition avenir Québec, elle est un peu coincée dans sa position. Depuis déjà 2012, ils ont annoncé qu'ils demandaient l'abolition des agences. Or, le titre du projet de loi précise qu'il y aura, entre autres, l'abolition des agences régionales. Alors, avant même d'avoir pris le temps de lire au complet le projet de loi, la CAQ applaudissait déjà ce projet. Or, à la lecture et lors des commissions parlementaires, on a bien senti du côté de la CAQ certaines interrogations, et je pense qu'on a réussi à prendre la mesure de l'ampleur des changements qui dépassent largement l'abolition des agences, et qui d'ailleurs n'abolissent pas les agences, ça a été dit souvent. On fait tout simplement remplacer les agences par une autre mégastructure encore plus grosse que les agences. Et ce qu'on supprime, c'est la centaine de centres de santé et de services sociaux qui étaient à proximité des citoyens, avec lesquels les gens avaient réussi à tisser des liens et à se frayer un chemin. Parce qu'un réseau de la santé, là, le mot «réseau», ça le dit, il faut trouver les portes d'entrée correctement, et les gens nous disent qu'on commençait à y arriver.

• (12 h 10) •

Donc, actuellement, l'appui de la CAQ nous apparaît être lié à son ancienne demande d'abolir les agences, et ils sont un petit peu coincés avec ça, mais, dans les faits, il y a probablement une certaine méconnaissance de la réalité quotidienne des patients et des usagers du système de santé et des services sociaux.

Alors, je pense qu'où on se rejoint, où on rejoint la CAQ au niveau de... nous, de l'opposition officielle, c'est au niveau de l'importance et de la priorité — et, quand je dis «priorité», c'est «priorité prioritaire» — d'avoir un système d'information performant. D'ailleurs, un des groupes qui a été très, très opposé au projet de loi, c'est la Fédération des médecins résidents, et ils ont dit : Pire que de répondre à l'attente du projet de loi tel qu'il est annoncé, d'améliorer l'accès, le projet de loi passe à côté des vraies priorités : un système d'information efficace pour mieux connaître les patients, mieux colliger les données sur sa performance ou sa non-performance et en faire l'analyse dans des délais raisonnables. C'est ça qu'on veut, on veut des résultats dans notre système de santé. On veut avoir des instruments pour mesurer des résultats, pour vraiment faire mieux. Le projet de loi n° 10, malheureusement, concentre le pouvoir au ministre mais ne travaille pas sur ces projets, et sur cette centralisation, et sur cette meilleure diffusion de l'information.

Le projet de loi n'est pas mûr, c'est un projet impulsif. Le mot «impulsif», ça veut dire «un comportement direct, adopté par un individu, sans que celui-ci ne pense aux conséquences de ses actes». Et c'est un peu ça que les citoyens sont venus en grand nombre dire : Attention! Il y a énormément de conséquences que vous n'avez pas vues, que vous n'avez pas évaluées, M. le ministre. Ce n'est pas vrai que vous connaissez l'ensemble du système de santé et des services sociaux, il y a des morceaux, des grands pans que vous ne maîtrisez pas, et votre réforme vient saboter ces grands éléments qui constituent... et qui contribuent à un équilibre en santé et en services sociaux. Tout n'est pas parfait dans notre système, mais le premier auquel on devrait s'attaquer, c'est l'amélioration des systèmes d'information qui vont nous rendre une première ligne plus efficace, qui vont faire qu'on va améliorer également le soutien à domicile parce qu'on va mieux suivre le parcours du citoyen et des patients.

Donc, pourquoi un report? Parce qu'on n'a pas le plan global du projet du ministre. Parce que les coûts de la transition n'ont pas été estimés et ne nous ont jamais été présentés. On a présumé d'économies qui ont été décriées et qui ont été tout de suite reconnues comme étant très peu probables, alors que toute l'augmentation de la bureaucratie, tous les changements administratifs, organisationnels, les protocoles qui vont devoir être mis en commun par les différents hôpitaux qui vont être reliés ensemble maintenant, tous ces éléments-là n'ont pas été évalués et ils représentent des coûts énormes. Donc, à travers cette dissimulation de ces coûts ou cette négation de nous en faire part ou même de les avoir réalisés, moi, je pense que le ministre doit remettre et doit faire un plan de ces coûts de transition, des coûts d'opportunité qui n'ont pas été évalués et un plan de transition, plan de transition qui a été exigé par la Protectrice du citoyen, quelqu'un qui veut vraiment que les choses avancent mais qui constate que l'ampleur de la réforme exige un plan de transition. Alors, le dépôt de report... la motion de report pourrait permettre au ministre de nous remettre ce plan de transition qui est essentiel. Donc, pas de plan global, pas de coût de cette réorganisation, pas de plan de transition. Ça justifie certainement quelques semaines, quelques mois pour compléter le plan, le projet de loi n° 10.

Il y a d'autres pistes qui sont importantes. Dans les éléments qui sont reprochés au projet de loi, écoutez, il y a dans ça différents éléments qui méritent d'être relatés à nouveau parce qu'ils sont préoccupants.

Alors, on a d'abord la majorité des... il y a des fusions d'établissement qui vont être faites. On n'a pas de preuve qu'il va y avoir une corrélation entre les fusions administratives et l'amélioration des soins. Ça semble être une équation automatique. Ce n'est pas le cas. Les experts nous disent : Attention! Les fusions administratives, ce n'est pas ça qui va garantir que les gens vont avoir un meilleur accès à la première ligne, ce n'est pas ça qui va donner des soins à domicile. Les gens vont être occupés à gérer une réforme administrative et ils vont avoir moins de temps, moins d'énergie pour s'occuper des vraies préoccupations citoyennes. Une centralisation très poussée de pouvoirs décisionnels ne permet donc pas forcément une amélioration de la performance. Et un élément déterminant, je vous dirais, qui est frappant dans l'opposition des groupes, c'est que le succès d'un projet de fusion auquel les acteurs sur le terrain ne croient pas est sérieusement compromis. Actuellement, le ministre doit prendre du temps pour expliquer son projet, pour convaincre, pour faire partager sa vision parce qu'actuellement les groupes de toute nature, de citoyens, de patients, d'usagers, de gestionnaires, d'universitaires, de syndicats, ne comprennent pas où il s'en va avec cette réforme. Alors, dans un contexte où on travaille sur un système de santé qui est géré par des humains, pour des humains, on comprend que, si on n'a pas un consentement, si on n'a pas une compréhension de l'ensemble de la direction vers laquelle on veut aller, eh bien, c'est vraiment se préparer de très mauvais jours, et ralentir, et nuire à notre système qui a, au contraire, besoin d'un solide coup de pouce mais pas dans l'orientation que le ministre lui donne. Et en plus cette réorganisation va prendre plusieurs années. Les gens le confirment. Il y a déjà eu des fusions beaucoup plus modestes entre deux établissements, qui ont pris plus de deux ans et demi à se structurer.

Donc, le ministre a besoin d'établir un lien de confiance avec tous les gens du réseau, avec tous les citoyens du Québec parce que son projet implique des désorganisations importantes, à tout le moins, transitoires et peut-être pour de nombreuses années, et possiblement que même les économies qu'il nous fait miroiter ne sont justement qu'un mirage et pour lesquelles on n'a pas du tout de confirmation que tous les coûts indirects qui vont être reliés à ces réaménagements-là ne dépasseront pas les quelques économies qui sont prévues.

Ce projet de loi, c'est difficile de le présenter, parce que pour le public, pour les citoyens qui sont à domicile, quand on dit «couper des cadres, couper des fonctionnaires», ça semble être des mots un peu magiques. Mais, quand on essaie de dire : Vous savez, ça va politiser, ça va centraliser tout au ministre, c'est difficile d'expliquer ça en une ligne dans un journal. Je vais prendre quelques exemples de ce que... à partir de maintenant, d'éléments qui vont être seulement sur autorisation du ministre. Alors, sur autorisation du ministre, les sommes dédiées à un programme-service pourront être permutées. C'est ce que l'article 55 dit. Ça, ça veut dire... Tous les gens des organisations, des services sociaux, de la prévention, de la santé publique, des déficiences sont venus dire : Ça, nous, M. le ministre, ce qu'on comprend de ça, c'est que les budgets vont pouvoir être transférés, sous votre décision, vers les hôpitaux. Hier, le collègue de Maskinongé demandait à un de mes collègues qu'est-ce qui faisait dire que ça centraliserait à l'hôpital. Bien, en voilà un exemple : l'article 55. L'article 59, quatrième alinéa : le ministre va pouvoir attribuer les subventions aux organismes communautaires. On le voit, dans le contexte d'austérité, on est capable de retenir tout ce qu'on veut, du côté du gouvernement libéral. Alors, c'est loin d'être rassurant pour les organismes communautaires. Le même article 59, l'alinéa 12 dit que le ministre va pouvoir signer des ententes de service pour les centrales syndicales. C'est un chèque en blanc pour pouvoir transférer des pouvoirs au privé.

• (12 h 20) •

Le projet prévoit aussi qu'il va y avoir... le ministre va pouvoir fusionner deux ou plusieurs établissements, qu'il peut changer le président-directeur général, le président-directeur général adjoint pour assurer des pouvoirs si le ministre juge que le conseil d'administration pose des gestes incompatibles avec les règles de saine gestion. Moi, je vais avoir besoin d'avoir des références parce que, des règles de saine gestion, il peut y en avoir autant que des experts en gestion. Alors, le ministre se donne le pouvoir de suspendre un président-directeur général d'un des CISSS et de nommer quelqu'un d'autre ou de s'arroger le pouvoir pour une période de 180 jours renouvelable une autre fois, donc pour un an.

Et surtout le dernier, c'est que, dans les éléments à l'article 161 sur 165, donc la preuve qu'on va devoir les regarder un après l'autre avec beaucoup d'attention, eh bien, le ministre demande, dans son projet de loi, de soustraire les règlements du projet de loi n° 10 de l'obligation de publication. Ce que ça veut dire, c'est qu'une fois que les règlements vont avoir été retravaillés au niveau des amendements, eh bien, il va falloir... il pourrait ne pas faire en sorte qu'ils soient republiés pour que l'ensemble des intervenants, au moins les 48 qui soient contre, puissent dire s'ils sont d'accord ou non sur ces amendements et si les amendements donnent bien l'esprit de ce qu'ils attendaient que ça donne au niveau du projet de loi.

Donc, beaucoup d'éléments qui sont préoccupants et qui demandent qu'on puisse faire vraiment un report pour que le ministre donne une vision qui va être plus rassurante, à laquelle ça va être plus facile d'adhérer, une vision plus complète. Et je pense qu'il doit faire cet effort-là. Donc, un plan global de la stratégie qui est nécessaire.

Je terminerais en citant un organisme qui nous a envoyé un rapport, un mémoire. C'est le Comité régional des associations pour la déficience intellectuelle. Et ce sont des organisations qui nous parlent beaucoup parce qu'elles ont des besoins particuliers à... qu'elles n'ont pas considéré qu'elles avaient été entendues, et elles veulent donner une dernière chance au ministre de bien l'entendre. Alors, je termine : «Par ailleurs, nous doutons que la fusion de plusieurs établissements ayant tous une liste d'attente se traduise par la disparition ou la résorption de [ces listes d'attente là]. [...]Les nouvelles fusions, qui se traduiront par [une] diminution du nombre de guichets d'accès, risquent de compliquer plus encore l'accès aux soins et aux services.»

C'est dans ce contexte que je pense que notre motion de report est tout à fait justifiée et que, le ministre, je l'invite à regarder de façon beaucoup plus complète... à nous présenter, de façon beaucoup plus complète et transparente, l'ensemble de sa vision sur une réforme d'une telle envergure pour le réseau de la santé et des services sociaux.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la députée de Taillon. Alors, je vois qu'il y a deux députés qui sont debout et j'aurais besoin peut-être du consentement de tous pour permettre à Mme la députée de Gouin d'intervenir immédiatement, et on passera ensuite au prochain intervenant.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Vous êtes tous d'accord. Alors, Mme la députée de Gouin, la parole est à vous, et je vous rappelle que vous disposez d'un temps de parole de six minutes.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Merci, Mme la Présidente. Merci, chers collègues. Je veux indiquer, au nom de ma formation politique, que nous allons appuyer la demande de report de l'opposition officielle.

Ce qui est devant nous comme réforme fondamentale, structurelle du réseau de la santé et des services sociaux est beaucoup trop important, beaucoup trop lourd en conséquences pour qu'on procède à la va-vite.

Effectivement, le ministre de la Santé et des Services sociaux nous a annoncé un certain nombre d'amendements que nous n'avons pas encore vus, que nous souhaitons voir, mais ça prend du temps. Deuxièmement, beaucoup d'organismes et d'individus sont venus en commission parlementaire nous rappeler un certain nombre de choses assez élémentaires. La première, c'est qu'un bilan réel, factuel, exhaustif des 10 ou 15 dernières années de réforme de la santé n'a absolument pas été fait. Alors, on dit : Il faut réformer entièrement un système, système qu'on n'a pas évalué et dont le bilan est forcément extrêmement incomplet.

Nous aimerions rappeler, nous, qu'au moment de la dernière réforme, celle de 2003, le premier ministre qui était alors ministre de la Santé nous avait quand même bien dit que le patient, la personne serait au coeur du système, qu'on réglerait enfin les problèmes de listes d'attente et d'attente pour avoir un médecin de famille. Eh bien, en 2014, rien de tout ça n'est arrivé. Bien au contraire, il y a eu des conséquences difficiles à vivre, pour les gens, de cette réforme qui n'a pas apporté que du négatif, je tiens à le dire, mais qui a eu quand même des conséquences difficiles pendant plusieurs années. Et de tout ça le bilan n'a pas été fait. Par exemple, on a vu augmenter le pouvoir des médecins, particulièrement les médecins spécialistes, au détriment de la première ligne. Et pourtant tous les intervenants qui viennent en commission ces temps-ci nous disent : La première ligne, c'est ça qui est le plus important. Mais ça ne s'est pas avéré avec la dernière réforme.

On a perdu des services de proximité. Les CLSC, comme installations, existent encore, mais ils n'ont plus ce rapport intime avec les citoyens et les citoyennes de leurs communautés qui ne sont plus présents sur leurs conseils d'administration. Peu d'intégration et de continuité dans les services. Pourtant, c'était censé être la bonne recette. On a vécu aussi des coupures, bien entendu, et des réductions de services.

Détérioration des services sociaux. Tout le monde est venu nous le dire, les services sociaux, la prévention, tout ce qui est en dehors de ce qu'on pourrait appeler le système médical est vraiment le parent pauvre dans notre réseau de services sociaux et de santé, et, ça, non plus, la dernière réforme n'a pas permis de le régler. Les structures déjà sont grosses, elles ont pris du temps à se mettre en place. Certains nous disent : Après 10 ans, on commence à trouver que c'est gérable, qu'on est capables de se comprendre entre les gens qui travaillaient avant en CLSC et d'autres en hôpitaux, là on commence à créer une synergie. Ça serait entièrement à recommencer et ça prendrait peut-être encore cinq à 10 ans avant qu'on arrive à un système fluide? Mais quel gaspillage d'énergies et, je dirais même, de ressources financières! Donc, c'est peut-être important de faire des bilans avant de travailler. Les personnels, les employés ont trouvé que c'était une période difficile, compliquée. Le taux d'épuisement professionnel n'a cessé d'augmenter; je pense, entre autres, aux infirmières. Ça, ce sont des vrais problèmes, des vrais problèmes que nous devons absolument régler et que, malheureusement, la réforme proposée n'aborde même pas, alors je ne vois pas comment elle pourrait les régler. Et, à l'instar de mes collègues, je demande au ministre : Mais pourquoi un empressement aussi subit que démesuré à vouloir que dès le 1er avril prochain, ce qui m'apparaît de plus en plus illusoire, on ait complètement changé les règles juridiques, les règles de fonctionnement d'un mégasystème, parce que le système de santé et de services sociaux, c'est énorme au Québec, tout ça en quelques mois, comme si ça allait aller tout seul sur des roulettes? Qu'est-ce qui peut justifier ça? Les fameux 220 millions d'économies? Franchement, c'est un peu risible, là, sur l'ensemble du système.

Alors, si ce n'est pas ça, faut-il croire le ministre qui nous dit : Moi, je veux sincèrement améliorer le système? Il a changé un tout petit peu son vocabulaire sur nos recommandations, il ne parle plus seulement de «patients» mais de «personnes», c'est une bonne idée. Donc, la personne doit recevoir de bons services, ça doit être fluide de la première à la deuxième ligne, il faut régler le problème de l'accès à un médecin de famille, mais il n'y a absolument rien dans la réforme proposée qui ne répond aux objectifs fixés par le ministre lui-même au début de son projet de loi.

Alors, nous pensons qu'une pause est requise pour que les parlementaires puissent tranquillement discuter, pour que les parlementaires continuent de se faire influencer, y compris le ministre, par les échos qui nous viennent du terrain et principalement des personnes qui déjà travaillent dans le réseau de la santé et des services sociaux et qui sont, au fond, nos meilleures expertes. Alors, nous appuyons ce report. Nous pensons qu'il faut faire les choses calmement, sereinement. Nous ne nous opposons pas à ce qu'il y ait des réformes dans le système de santé et de services sociaux, mais elles doivent répondre aux véritables besoins des gens. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée de Gouin. Et je vais maintenant céder la parole... Je crois que M. le député de Papineau...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vais céder la parole à M. le député de Papineau pour son intervention. Merci.

M. Alexandre Iracà

M. Iracà : Alors, merci, Mme la Présidente. Alors, je me lève en cette Chambre pour m'opposer farouchement à la demande de report de la députée de Taillon. Nous ne sommes pas un parti de statu quo et d'immobilisme, alors c'est important d'agir. Les gens, les Québécois, nous ont élus pour agir, on est là pour ça.

Et, je vous dirais, Mme la Présidente, ce qui a attiré mon attention, c'est lorsque la députée de Taillon a affirmé que le processus de consultation est nul. Alors, je reprends ses propres mots. Alors, c'est, je pense, Mme la Présidente, de discréditer le processus parlementaire et le travail que les parlementaires font en cette Chambre et font en commission. C'est de discréditer également les 72 groupes qui sont venus nous visiter, se sont présentés ici, à Québec, à l'Assemblée nationale, se sont préparés...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

• (12 h 30) •

M. Pagé : Notre collègue nous prête des intentions, et on est bien loin de cela. La demande de report, elle est tout à fait légitime. Alors, s'il est contre, mais qu'il argumente à partir d'arguments sérieux, pas à partir de nous prêter des intentions qui ne sont vraiment pas justifiées.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup. Je vais vous... M. le député de Papineau, je vais vous inviter à la prudence et de ne pas...

M. Iracà : Alors, Mme la Présidente, ce que j'ai à dire, c'est que les 72 groupes qui sont venus nous voir, qui sont venus pour exprimer leurs points de vue, ils ne l'ont pas fait pour rien. Ils se sont préparés, ces gens-là, ils sont venus ici, à l'Assemblée nationale, pour nous exprimer leurs points de vue en lien avec le projet de loi n° 10, et ce que le ministre a mentionné, c'est que, suite à ces consultations-là qu'il y a eu, il était pour y avoir des amendements. Donc, ces gens-là, Mme la Présidente ne sont pas venus pour rien, et le processus qui a eu lieu ici, c'est un bon processus, un processus parlementaire où on consulte les gens. C'est important de le faire. Et, après avoir consulté, il faut suivre les règles parlementaires, bien, il faut adopter le principe du projet de loi et après procéder article par article avec les amendements qui y seront proposés par le ministre pour faire en sorte qu'on puisse adopter le meilleur projet de loi possible pour les patients, pour les personnes du Québec, le citoyen. C'est ce qui est le plus important, Mme la Présidente.

Alors, je m'objecte farouchement à une demande de report concernant le projet de loi n° 10. Nous sommes un parti où l'action est importante, on ne pellettera pas par en avant, on va agir maintenant. On veut le faire avec les gens en consultant, en déposant, éventuellement, des amendements au projet de loi qui est proposé par le ministre, je me répète, pour adopter le meilleur projet de loi possible pour les citoyens du Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Papineau. Je vais maintenant...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il reste encore du temps, oui, maintenant... On y va par alternance. On va vous laisser faire votre intervention...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : On va vous laisser faire votre intervention, il vous reste 5 min 36 s, et, lorsque ce temps sera écoulé, nous vérifierons avec le gouvernement, voir s'il va utiliser le temps qui lui a été imparti. Alors, je vous cède la parole, vous disposez d'un temps... en tout cas, d'abord d'un temps de 5 min 36 s.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : On va commencer par 5 min 36 s, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Voilà.

M. Marceau : O.K. Je comprends ça. Parfait. Merci, Mme la Présidente. Alors, écoutez, évidemment, je salue ici la sagesse de ma collègue la députée de Taillon, qui, devant un projet de loi qui, de toute évidence, ne fait pas le travail qui est nécessaire, demande à ce que le ministre retourne à sa table à dessin et fasse ses devoirs.

Clairement, clairement, c'est un projet de loi qui est complètement déconnecté des véritables enjeux auxquels le système de santé du Québec est confronté. Alors, c'est un projet de loi qui revoit les structures, mais qui d'aucune façon n'apporte des solutions aux véritables problèmes auxquels sont confrontés les Québécois, et je pense, entre autres, par exemple, à la question de l'accès, sur laquelle on pourrait dire bien des choses. Donc, un projet de loi qui, au départ, là, est déconnecté.

Par ailleurs, le projet de loi ne fait pas l'objet d'une approbation qu'on pourrait dire minimale de la part des intervenants qui sont concernés par le projet de loi. On a vu, en commission parlementaire, on a entendu, en commission parlementaire, un nombre impressionnant d'intervenants qui ont des réserves majeures par rapport à ce projet de loi.

Et faut-il rappeler, Mme la Présidente, que les personnes qui sont appelées à le mettre en oeuvre, les personnes qui sont appelées à oeuvrer dans le projet de loi sont... il faut que leur adhésion soit complète pour qu'une telle réforme soit remplie de succès? Or, cette condition minimale n'est pas satisfaite. Cette condition minimale n'est pas satisfaite.

On se rappellera, Mme la Présidente, qu'une réforme du système de santé avait été mise en place par notre actuel premier ministre et que cette réforme a fait l'objet d'une transition qui a été longue et pénible pour l'ensemble du système de santé du Québec. Pour avoir parlé personnellement avec de nombreux gestionnaires, avec de nombreux intervenants, avec de nombreux professionnels de notre système de la santé de cette réforme du premier ministre, on me disait encore récemment qu'on n'avait pas complété, qu'on n'avait pas complété le travail nécessaire pour la mise en place de la réforme qui avait été suggérée par le premier ministre à l'époque. Et là, donc, alors qu'on sort tout juste d'une réforme qui de toute évidence n'a pas été remplie de succès, puisque le nouveau ministre de la Santé veut déjà défaire ce que le premier ministre avait fait à l'époque, donc, on s'apprête à mettre en place une autre réforme des structures qui ne contient aucun ingrédient qui laisse croire qu'elle pourrait satisfaire, satisfaire les besoins des intervenants dans le système de santé, les besoins des patients, puis qui pourrait mener à des améliorations.

Alors, je le répète, le projet de loi, tel qu'il est présentement rédigé, ne reçoit pas l'adhésion minimale. Je ne vous demande pas une grande adhésion, là, Mme la Présidente, je parle d'une adhésion minimale, qui est une condition nécessaire pour qu'une réforme soit un succès. Alors, devant un tel état de fait, hein, devant le fait que le projet de loi ne reçoit pas l'adhésion des intervenants du milieu de la santé, il faut de toute évidence que le ministre refasse ses devoirs, et c'est dans ce contexte que nous lui demandons de prendre le temps de refaire les choses correctement. Parce que de toute évidence le premier jet de ce projet de loi là n'avait pas été rédigé en connaissance de cause et puis en ayant pris le temps de consulter les intervenants du milieu, cet exercice-là n'avait pas été fait. Maintenant, nous reconnaissons qu'il y a eu un grand nombre de personnes qui sont venues intervenir en commission parlementaire. Maintenant que le ministre a entendu les intervenants, il a maintenant la matière qui est requise pour bien faire ses devoirs, et nous lui demandons donc de retourner à la table à dessin. Et le moment venu, lorsqu'il aura pris le temps de bien faire les choses, de déposer des amendements ou même, ou même, Mme la Présidente, de déposer carrément une nouvelle version du projet de loi... Parce que, quant à moi, ce ne sont pas de petits amendements qui vont pouvoir venir corriger un projet de loi qui est rempli de déficiences majeures, de problèmes qui, on le sait, on en découvre à chaque fois qu'on lit ce projet de loi là... À chaque article qu'on lit, on se rend compte qu'il y a des problèmes majeurs, donc ce ne sont pas de petits amendements ou une petite série d'amendements qui vont venir corriger les lacunes majeures de ce projet de loi là. Alors, Mme la Présidente, c'est très simple, le ministre doit refaire ses devoirs. La sagesse voudrait que le gouvernement, que le ministre de la Santé réponde positivement, favorablement à la demande de la députée de Taillon, qui est une demande tout à fait normale et légitime.

Alors, Mme la Présidente, je me rends compte, là, qu'il me reste 34 secondes. J'en profite pour vous redemander s'il reste du temps de la partie gouvernementale que je pourrais utiliser pour poursuivre mon intervention.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Rousseau. Alors, je me tourne vers le leader adjoint du gouvernement pour... J'aimerais savoir si vous allez utiliser le temps qui vous a été imparti, le temps qu'il vous reste. Il s'agit de 33 min 47 s.

M. Sklavounos : Mme la Présidente, avant de permettre au collègue de terminer son intervention, c'est à la base de ce qu'il va dire qu'on va prendre la décision si nous aurons un autre intervenant.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le leader adjoint. Alors, M. le député de Rousseau, la parole est à vous.

M. Marceau : Mme la Présidente, il me reste 20 secondes. Alors, je vais en profiter, en 15 secondes, pour redemander au ministre d'aller refaire ses devoirs, retrouver la table à dessin, répondre aux demandes qui ont été exprimées par les intervenants du milieu de la santé. Ces demandes sont légitimes, il y a un travail colossal à faire pour remener ce projet de loi dans un état qui est satisfaisant.

Je redemande ma question, je repose ma question, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup. Alors, M. le leader adjoint.

M. Sklavounos : Alors, Mme la Présidente, à ce stade-ci, il n'y aura pas d'autre intervenant pour le gouvernement. Nous avons hâte de pouvoir procéder, terminer cette étape et nous rendre en commission parlementaire avec les amendements qui seront déposés dès que le principe est adopté pour continuer le débat sur cet important projet de loi, Mme la Présidente. Merci.

• (12 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, c'est assez particulier comme décision, mais nous allons poursuivre les travaux. Je crois que nous avons un autre intervenant du côté de l'opposition officielle et je cède maintenant la parole à M. le député de Rimouski.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Merci, Mme la Présidente. J'ai participé aux auditions, aux consultations sur le projet de loi n° 10. Beaucoup de monde sont venus nous parler de leur expérience, de leur façon de travailler dans le réseau et de la façon qu'ils accueillaient ce projet de loi comme un genre de refus de leurs compétences, de refus, de négation de leurs compétences, de négation de l'expérience qu'ils ont faite dans le réseau depuis plein d'années. Et ils présentaient au ministre plein de dangers sur la façon qu'il voulait faire le ménage, comme il dit, dans le réseau par-dessus souvent les compétences des gens, par-dessus les réalités de groupe, par-dessus les expériences, les initiatives qui étaient faites au niveau local dans toutes les régions du Québec, mais aussi par-dessus des initiatives nouvelles, des engagements de gens impliqués dans les services aux citoyens dans le réseau.

Et le ministre écoutait — je le dis entre guillemets, écoutait — et on lui proposait, d'une façon constructive, à nous déposer... parce qu'il nous démontrait certaines ouvertures, qu'on aimerait voir ces ouvertures, qu'il dépose ses amendements, qu'il nous démontre qu'il a écouté les gens qui sont venus devant lui. Et je pense, entre autres, aux aînés, à la FADOQ, aux gens impliqués dans les centres d'action bénévole, dans les réseaux, qui proposaient des amendements, qui proposaient des façons de s'impliquer dans cette réforme et essayer de corriger certaines choses. Les gens venaient d'une façon assez positive, étaient déçus, c'est certain, mais démontraient de l'ouverture à discuter. Pour ça, il faudrait que le ministre nous dépose ses amendements. Il faudrait qu'il nous le montre, qu'il a vraiment écouté ces gens-là, qu'il a fait travailler son monde, qu'il a essayé de trouver des façons de répondre à ce que les gens nous amenaient en consultation. Parce que les gens qui sont venus en consultation, ils l'ont fait de bonne foi. Puis, encore là, je vous dis, là, ils l'ont fait de bonne foi puis souvent après avoir été un peu agressés. Je pense aux gestionnaires du réseau qui se disaient : Le ministre vient de nous dire à tout le monde, dans une claque, en nous disant : Vous êtes une gang d'incompétents, mais qui sont quand même venus puis ont quand même démontré certaines ouvertures. Ils s'attendent à ce que le ministre leur démontre qu'il a vraiment écouté.

Vous savez, dans ces commissions-là — moi, c'est une des premières que je fais — c'est assez intéressant de voir le non verbal, puis c'est... Je me suis amusé de regarder le non verbal du ministre pendant ces présentations-là et je pouvais avoir certains doutes sur l'écoute du ministre. Mais, en même temps, quand il répondait aux questions, il disait... Quand il questionnait les gens, bien, il... Quand même, il nous démontrait qu'il voulait peut-être écouter, qu'il y avait des éléments qu'il trouvait intéressants. Ça fait que je me dis : Il doit avoir fait travailler son monde. Il doit avoir des amendements de prévus. Il doit avoir des choses de prêtes, de nous montrer qu'il a vraiment entendu. Nous, on est prêts à l'écouter. C'est là-dessus qu'on veut travailler. On a, nous de notre côté, écouté ces gens-là. On les a rencontrés. On a pris le temps de voir les mémoires, d'essayer de voir, dans chacun de ces mémoires-là, comment on pourrait... parce qu'il y aura le projet de loi, le ministre est entêté... mais comment on pourrait améliorer son intervention, ses choix.

Puis je pense que c'est un peu par respect de tous ces gens-là, qui sont venus nous rencontrer, qu'on doit faire ça, qu'on doit le faire comme il faut. Ce n'est quand même pas rien, c'est un réseau partout, dans tout le Québec, qui donne des services, qui est près dans nos communautés, qui travaille avec des groupes bénévoles, des groupes communautaires, des clientèles qui sont en difficulté, qui sont vulnérables. Ce n'est pas rien, ce qu'il est en train de faire là. C'est la moitié du budget du Québec. C'est immense, ce qu'il fait. Et il agit, depuis le début, un peu comme ce qu'il y a dans le projet de loi, où on voit que le ministre est omnipotent dans tous les services, dans toutes les décisions, c'est lui qui prend les décisions sur tout. Il prend les décisions, il nomme les gens, il nomme les comités qui vont étudier sur des problématiques. Il s'assure même de définir lui-même les problématiques.

Bien, s'il est si puissant puis s'il y a autant de pouvoirs qu'il veut se donner, bien, il me semble qu'il devrait commencer par avoir le pouvoir de nous déposer ses amendements puis de nous expliquer sa vision des choses. C'est ça qu'on s'attend de lui. Ce n'est pas du blocage, c'est de l'ouverture à travailler et c'est surtout, surtout... Vous savez, quand les gens viennent déposer des mémoires puis ils viennent nous rencontrer, ce n'est pas rien de venir ici, à l'Assemblée nationale. C'est du travail. Ils ont préparé leur mémoire, ils ont consulté leurs gens, leur base. C'est des groupes souvent... Je pense aux groupes communautaires que je connais plus, c'est des groupes très démocratiques qui prennent le temps de consulter, qui... C'est du travail. Et ils viennent ici de bonne foi proposer certains éléments de solution. Ils essaient de sauver les meubles souvent, garder un peu de présence dans ce réseau-là qui s'en vient un réseau ministériel très, très puissant.

Ça fait que ces gens-là sont venus nous déposer des choses, certaines idées nouvelles. On s'attend à ce que le ministre... après tout ça, tout ce temps-là, le ministre puisse nous déposer ses amendements. Ça serait la moindre des choses. Et, comme parlementaire... Je vois le député, mon collègue de la région qui fait signe que oui. Je pense que c'est vers ça... Moi, ce que je m'attends, comme nouveau député, comme... Je me dis : On est prêts à travailler, d'ouverture, on est prêts à essayer de corriger des choses, mais faut-il que le ministre ne s'entête pas et nous dépose ses documents. Il faut au moins que ça commence par ça.

Et actuellement, de façon très... puis je ne veux pas prendre à partie le ministre, là, puis je le dis très, très ouvertement : Je ne sens pas cette ouverture-là puis je sens un braquage. Je pense qu'il aimerait autant passer cette loi-là sur bâillon le plus rapidement possible. Je ne sens pas qu'il veut ouvrir. Et là le fait de ne pas déposer ses amendements, ça vient comme confirmer mes craintes. J'espère que je me trompe, puis j'espère que les collègues du ministre, autour, qui connaissent les réalités dans chacune de leurs régions, vont lui parler. Je pense qu'on est capables de travailler ensemble, moindrement, on est capables de trouver des façons.

Comme je l'explique, c'est un réseau que je connais un petit peu par l'action communautaire, mais c'est un réseau très important partout dans nos communautés, partout au niveau de la santé et services sociaux. Dans nos communautés, c'est hyperimportant, ça prend... Il me semble qu'on devrait être capables d'échanger, être capables de travailler. On est des collègues, on devrait être bons pour essayer de voir. Mais, encore là, je l'explique, je le répète, ça prend un peu d'ouverture de son côté, ça prend... qu'il dépose ses amendements, qu'il ne se braque pas d'avance puis qu'il essaie de travailler en collaboration. Il travaille probablement avec son caucus, j'espère qu'il travaille un peu avec son caucus, qu'il consulte son caucus, je peux peut-être même en douter, mais j'espère qu'il le fait et... j'espère qu'il le fait, mais il me semble qu'on devrait être capables de travailler ensemble.

Par respect de la... de mes collègues, par respect du travail qui est fait dans les oppositions, dans les deux oppositions, par respect des gens qui sont venus déposer leurs mémoires, par respect aussi des gens en région, des gens sur le terrain et des gens qui vivent ce changement-là, qui vivent ça difficilement, là... je pense aux intervenants, qui sont là, qui doivent donner des services, qu'à chaque jour, eux autres, ils rencontrent des gens, souvent des gens vulnérables, ils doivent être concentrés sur la personne qu'ils rencontrent, puis qui savent, puis qui ont derrière la tête un changement possible, puis qui se demandent comment ça va arriver. Ils continuent à offrir un bon service, partout en région. Je les connais, ces gens-là, ils rencontrent des jeunes en difficulté, ils rencontrent des personnes âgées, ils continuent à donner un bon service, ils continuent à les écouter puis ils continuent à... mais avec une pression sur les épaules, énorme, parce qu'ils ne savent pas comment va virer le réseau, ils ne savent pas comment les prochains jours seront faits. Par respect pour ces gens-là, on devrait voir les amendements, on devrait voir de l'ouverture du ministre à collaborer avec nous autres.

Même chose pour les citoyens. On le sait, dans le Bas-Saint-Laurent, je le vois, il y a les CSSS, bien connus dans chacune des communautés, qui sont très impliqués, avec leurs fondations. On le sait, ces centres hospitaliers, ils sont très impliqués dans leur milieu, et c'est très représentatif de leur milieu, le milieu est très jaloux de leur CSSS. Et là on vient leur dire : Là, ça se défait, vous n'avez plus de C.A., on va tout centraliser ça, on va... dans une grosse machine nommée par le ministre, enlignée par le ministre, décidée par le ministre, autorisée par le ministre, Dieu le Père qui est à Québec, qui va tout décider sur comment ça va se comporter dans le Bas-Saint-Laurent. Ces gens-là, ces communautés-là... puis là je pense autant aux communautés d'affaires, des groupes communautaires, des citoyens en général, ils voient tout ça faire, ils se posent des questions. En ce sens-là, on a un rôle un peu de pédagogie à faire dans notre travail de législateur avec le ministre.

Et, s'il ne les dépose pas, ses amendements, s'il ne démontre pas cette ouverture-là, comment on peut faire pour répondre à nos citoyens? Quelqu'un vient me voir, est-ce que je peux lui dire : Bien, je pense qu'il y a de l'ouverture du ministre, je pense qu'on est capables... Je ne peux pas lui dire ça, on n'en voit pas, d'ouverture, on ne voit rien, c'est fermé, c'est complètement fermé. Tout ce qu'il veut faire, c'est décider, décider, décider, avoir le pouvoir, toujours le pouvoir sur... lui-même, comme ministre. On lui propose de déposer ses amendements pour essayer de comprendre un peu mieux où est-ce qu'il s'en va puis voir est-ce qu'il a vraiment écouté les gens qui sont venus lui parler, est-ce qu'il a vraiment écouté les travaux qu'on a faits d'une façon sereine en commission parlementaire. On a posé des questions comme il faut, on a préparé nos dossiers, il me semble que le ministre devrait être capable de prendre en considération tout ça et déposer ses amendements. Ça nous ferait, nous, de notre côté, une façon de mieux travailler puis de mieux essayer de l'aider... bien oui, essayer de l'aider à améliorer son projet de loi, essayer de l'aider à répondre, comme il a semblé vouloir faire, à répondre aux groupes qui sont venus lui proposer des solutions. On peut faire ça ensemble, si on voit un peu d'ouverture, si on voit un peu de capacité d'écoute du ministre, si on voit un peu de capacité du ministre à laisser un peu son pouvoir de côté pour nous permettre de l'influencer, si on est capables de voir ça du ministre, mais, pour l'instant, je vous le dis, je ne le vois pas. Mais peut-être que je me trompe, peut-être que le ministre va nous arriver, du jour au lendemain, puis avec une façon de travailler plus ouverte, plus collégiale. On ne sait pas, peut-être que ça peut lui arriver. Il peut arriver toutes sortes de choses dans la vie; peut-être que ça peut arriver, là, il faut y croire, mais, pour l'instant, on ne le voit pas, il ne dépose pas ses amendements et ça nous inquiète.

Comme je vous dis, c'est une question de respect : respect de l'Assemblée, respect des législateurs, respect des gens qui sont venus nous rencontrer, respect des citoyens et respect de tout ce monde-là qui travaille dans un immense réseau. Ils ont besoin, eux autres, de sentir qu'ils n'ont pas tout perdu, qu'ils sont capables encore d'influencer les choses, et ces gens-là comptent sur les législateurs, comptent sur le ministre pour qu'ils puissent voir qu'on est en train d'améliorer les choses, puis qu'on les a écoutés, puis qu'on les a entendus, puis qu'on est capables de parler pour eux autres. Ça fait que je redemande au ministre de déposer ses amendements pour qu'on puisse travailler puis qu'on puisse respecter les gens. Merci.

• (12 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Rimouski. Alors, pour la suite de ce débat restreint, je vais céder la parole à Mme la députée de Duplessis, et je vous rappelle que vous disposez d'un temps de parole de 21 min 9 s. Merci.

Mme Lorraine Richard

Mme Richard : Merci. Merci, Mme la Présidente. Vous savez, le projet de loi n° 10, on en a abondamment parlé et, dans la population, comment a été perçu le projet de loi n° 10 du ministre de la Santé, c'était simplement, au début, l'abolition des agences de santé. Mais, plus on en parle, plus les gens commencent à comprendre le but ultime du ministre de la Santé : c'est des fusions des différents CSSS. Et, en bout de piste, c'est de faire quoi, Mme la Présidente? De créer des mégastructures au niveau des régions entre autres.

On lui demande, ce matin, de déposer les amendements, d'être plus transparent. Parce qu'à écouter les gens qui sont venus en commission parlementaire, Mme la Présidente, le ministre peut bien l'interpréter à sa façon, mais, majoritairement, les gens sont contre le projet de loi n° 10. Il sème énormément d'inquiétude, il déstabilise le réseau, les employés sont démobilisés plus que jamais, les directions des CSSS n'osent pas trop dénoncer ce projet de loi qui n'a aucun sens, et le ministre ne semble pas être à l'écoute de notre proposition. Un projet qui va avoir autant d'impact dans un réseau aussi important que la santé, il me semble que, comme nouveau ministre de la Santé, il aurait dû être à l'écoute, pas juste des partis d'opposition, de la population en général et des gens qui travaillent dans le réseau, et se dire : Après que j'ai entendu les gens en commission parlementaire, j'ai des choses à corriger. Je vais être transparent, je vais déposer mes amendements, je vais donner du temps. Puis peut-être que, s'il avait été encore un petit peu plus responsable, il aurait peut-être dit : Je vais réécrire mon projet de loi — parce qu'il n'a pas de foutu bon sens, son projet de loi, Mme la Présidente.

Moi, quand j'en ai pris connaissance, je me suis dit : Mais on est rendus où? Le ministre actuel de l'Éducation, Mme la Présidente, a été auparavant ministre de la Santé. Dans le comté de Duplessis entre autres, sur la Côte-Nord, il avait voulu imposer les fusions. On l'a rencontré, on lui a fait part de nos craintes, lui dire que ça n'avait aucun foutu bon sens, sur 1 280 kilomètres de côte, de Tadoussac à Blanc-Sablon, vouloir faire un mégacentre régional. Sept CSSS sur la Côte-Nord, un territoire de 270 000 kilomètres carrés. C'est 20 % de la superficie du Québec. C'est ça, ma réalité.

Pensez-vous sincèrement que le ministre, qui, dans sa vie antérieure, était habitué à négocier avec des médecins spécialistes, le petit roi, a de l'inquiétude face au désastre de son projet de loi? Je vais peser mes mots, là, mais je pense, là, sincèrement, Mme la Présidente, que ça ne le préoccupe pas d'aucune façon. Il est arrivé ici : Je suis maître, je réponds à vos questions comme ça me chante. Je peux être arrogant, je peux blaguer puis je peux rire.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Mme la Présidente, les qualificatifs que notre collègue utilise, elle le sait très bien, ne sont pas acceptables. En même temps, je ne sais pas combien de fois le ministre peut réitérer le fait que c'est à la suite des consultations qu'il a préparé des amendements. Alors, on l'accuse d'être arrogant, de ne pas écouter alors qu'il a préparé des amendements suite à ces consultations.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la députée de Duplessis, vous allez me laisser faire mon travail. Alors, je vais vous inviter à un peu plus de prudence, et à ne pas imputer de motifs, et non plus ne pas utiliser de propos blessants lors de votre intervention. Et je vous invite à poursuivre. Merci.

Mme Richard : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit, mais il ne faut vraiment pas avoir une idée de ce qui se passe concrètement dans les différentes régions du Québec pour vouloir aller de l'avant avec un tel projet de loi, il faut vraiment avoir resté dans sa tour d'ivoire pendant des années. Et c'est ce qu'il a fait durant les dernières années, et maintenant il arrive comme ministre ici, à l'Assemblée nationale, il propose un projet de loi qui n'a aucun sens. Et tout ce qu'on lui demande, tout ce qu'on lui demande... Ce que fait ma collègue de Taillon en commission parlementaire, c'est un excellent travail. Elle est d'une écoute, d'une collaboration! Ce qu'on lui demande aujourd'hui, Mme la Présidente, c'est : M. le ministre, là, avant de tout détruire sur votre passage, M. le ministre, avant... Un système de santé, là, on ne le remettra pas sur les rails dans un an puis deux ans. Puis, dans quatre ans, vous ne serez peut-être plus au pouvoir, mais il va être détruit, on va avoir démobilisé les gens.

Mme la Présidente, je vais parler aussi de mon coin de pays. En commission parlementaire, ils ont reçu la conférence régionale des élus, disons qu'ils n'avaient un petit peu pas le choix. On a demandé, Mme la Présidente, à entendre les gens du CSSS de Sept-Îles. Savez-vous quoi, Mme la Présidente? J'ai demandé si on avait entendu des gens des CSSS, des gens des régions. La réponse, savez-vous quoi? C'est non. Puis, quand on a demandé que le CSSS de Sept-Îles soit entendu, on a demandé à la Coalition avenir Québec, elle a donné son accord. Savez-vous qui a refusé, Mme la Présidente? Le Parti libéral. Pourquoi? Parce que ça aurait été la seule fois qu'ils auraient entendu des gens des régions peut-être leur dire comment ça se passait dans la région, Mme la Présidente...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Je pourrais me lever et faire la liste de tous les groupes qui ont été refusés par le leader du PQ. Je pense, les consultations ont eu lieu. Là, elle répète que les régions n'ont pas été entendues...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader adjoint, ce n'est pas une question de règlement. Et je vais demander à Mme la députée de Duplessis à ce point-ci : Est-ce que vous avez terminé votre intervention?

Mme Richard : Non, absolument pas, Mme la Présidente. On va reprendre.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vais vous inviter à poursuivre plus tard.

Et, compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux à 13... à 15 heures, pardon, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise à 15 h 4)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, veuillez vous asseoir, chers collègues.

L'Assemblée, pour ceux qui nous écoutent et vous-mêmes, va poursuivre le débat sur la motion de report présentée par M. le député de Labelle dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi n° 10, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l'abolition des agences régionales.

C'était commencé, ça fait qu'on parle de poursuite. Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Duplessis en lui rappelant qu'il lui reste 14 min 30 s, à l'opposition officielle, pour discourir sur la motion de report. Oui, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Maltais : M. le Président, pourrions-nous constater le quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Gendron) : On va vérifier, effectivement, si nous avons quorum. Et je constate que nous ne l'avons pas. Que l'on appelle les députés.

• (15 h 5    15 h 8) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, s'il vous plaît! Nous allons poursuivre là où nous en étions, puisque l'Assemblée a quorum, et je cède à nouveau... bien, à nouveau... pour commencer, la parole à la députée de Duplessis, en lui indiquant qu'il reste 14 min 30 s à l'opposition officielle sur la motion de report. À vous, Mme la députée.

Mme Richard : Merci, M. le Président. On va continuer où nous en étions avant l'ajournement des travaux. Donc, qu'est-ce qu'on avait demandé? On avait demandé une motion de report au ministre de la Santé pour prendre le temps d'analyser en profondeur le projet de loi n° 10. Malheureusement, comme bien des dossiers d'ailleurs, M. le Président, nous n'avons pas reçu une écoute du côté du gouvernement libéral.

• (15 h 10) •

Je l'ai dit ce matin, je le redis cet après-midi, le projet de loi n° 10 va avoir des conséquences extrêmement importantes sur le réseau de la santé. Vous savez, dans le projet de loi, même quand on parle du titre, et c'est ce qui a fait en sorte que beaucoup de gens ne croyaient pas, jusqu'à tout récemment, ce qui pouvait les attendre avec le projet de loi n° 10, le projet de loi n° 10 n'est pas que seulement que l'abolition des agences de santé. Dans le projet de loi n° 10, M. le Président, le ministre se donne tous les pouvoirs, le pouvoir de décider qui va siéger sur les conseils d'administration, et j'en passe. C'est un pouvoir exceptionnel. Je comprends, M. le Président, que le ministre actuel est habitué de gérer, est habitué de négocier, est habitué d'être le roi de son petit monde, mais le milieu de la santé, M. le Président, c'est des hommes et des femmes qui travaillent chaque jour au mieux-être des gens pour lesquels ils prodiguent des soins. C'est des médecins, des infirmières, des préposés. Et les gens sur le terrain, M. le Président, ils disent au ministre d'aller refaire ses devoirs, que son projet de loi, ça ne tient pas la route.

Le ministre n'a pas jugé bon de consulter, avant d'élaborer son projet de loi, les gens qui travaillent au jour le jour sur le terrain. Nos gens à nous sur le terrain, nos acteurs locaux, on leur a dit, savez-vous quoi, M. le Président? Taisez-vous, on n'a pas besoin de vous entendre. C'est à peu près ce que le ministre leur dit : Moi, là, je sais ce qui est bon pour vous et je vais appliquer cette médecine, c'est-à-dire une mégacentralisation. Entre autres, moi, dans ma région, M. le Président, un immense territoire, un pôle, qu'on présume, devra être situé à Baie-Comeau. Vous savez, M. le Président, sur la Côte-Nord, on gère des motoneiges, on gère au quotidien avec des dispensaires, avec des distances énormes à parcourir, un immense territoire qui n'est même pas relié au reste du monde par le réseau routier.

Ce qu'on m'a dit, c'est que, pour les Îles-de-la-Madeleine, il y avait une décision politique, peut-être pour la Gaspésie aussi, où il allait maintenir le statu quo. J'aurais bien aimé, moi, que le ministre puisse entendre les gens du CSSS de Sept-Îles, de la région. Malheureusement, il n'a pas voulu les entendre. On a dit, ce matin, qu'il avait refusé d'autres groupes. J'ai essayé de vérifier avec d'autres personnes. On n'écoute pas les gens des régions, comme on n'écoute pas la population, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Un instant! Un instant! Oui, qu'est-ce qu'il y a?

M. Sklavounos : Je veux juste dire : La liste pour les groupes qui ont été consultés a été sur entente entre les leaders. Or, simplement, le fait que la députée sous-tend que le ministre ne voulait pas entendre certains groupes... Je rappelle simplement qu'il y a eu une entente entre les leaders, les groupes ont été fixés. Je pense qu'il faut être prudent avec ses propos.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, mais ce n'est sûrement pas une question de règlement. Il faut être prudent, mais toutes ces choses-là ont été réglées antérieurement, et, dans son propos, c'est toujours la même histoire : il faut toujours penser qu'un parlementaire doit vivre avec ses propos. Si ses propos ne sont pas antiparlementaires, on doit les entendre puis on compose avec ça. Alors, moi, je suis obligé de dire... C'est pour ça que nos débats, là, sont télévisés, pour que des gens se fassent un jugement sur ce qui est dit. Alors, en conséquence, ce n'était pas une question de règlement et je redonne la parole à la députée de Duplessis.

Mme Richard : Merci, M. le Président. Écoutez, le leader adjoint m'a interrompue plusieurs fois ce matin, peut-être que mes propos ne font pas leur affaire. Bien, écoutez, vous me connaissez, puis je ne changerai pas d'idée, je dis ce que je pense, en toute transparence. Moi, là, je suis ici pour représenter les gens du comté de Duplessis et je peux vous dire que, dans la région chez nous, comme beaucoup de régions au Québec, le projet de loi n° 10 du ministre de la Santé, il ne fait pas l'affaire. Bon, ça fait que vous ne me ferez pas dire autre chose aujourd'hui. Et on avait demandé que ces gens-là soient entendus, Bon, ils ont refusé, c'est à eux d'en porter, écoutez, l'odieux, ce n'est pas à moi. Parce que je voulais que ces gens-là, qui travaillent au quotidien, viennent essayer de sensibiliser le ministre. Il n'est pas sensible à grand-chose, le ministre.

Puis, M. le Président, au-delà des gens de la région, là, il y a de nombreux chercheurs qui avaient mis le ministre en garde parce que la stratégie de la grande réforme administrative, elle a été essayée ailleurs, entre autres en Angleterre, en Suède, même dans la province de l'Alberta, et vous savez quoi? Non seulement ça n'a pas donné les résultats escomptés, la situation s'est empirée. Et, quand on touche à une telle structure que la santé, M. le Président, il va y avoir des dommages. Tout ce qu'on demande au ministre, après avoir entendu les groupes : Prenez le temps, M. le ministre, prenez le temps de lire, de relire ce que les gens vous ont dit en commission parlementaire, et dites... ce qu'il devrait dire, M. le Président. Quand vous êtes élu, même si vous êtes élu au Parti libéral, quand vous êtes ministre, vous êtes ministre de tous les Québécois, vous devez écouter le monde. Qu'est-ce qu'ils ont dit, les gens, c'est : Écoutez-moi, M. le ministre, n'allez pas là, ça n'a pas de foutu bon sens. Qu'il prenne juste le temps de relire les mémoires, à tête reposée, chez lui. Il va dire : Oui, c'est vrai, peut-être que ça, je n'avais pas pensé à ça, ça va peut-être donner cet impact-là.

Il ne veut même pas faire ça, M. le Président. C'est entêté pas à peu près, là. C'est tout ce qu'on lui demande, là. On n'a même pas commencé à étudier le projet de loi en commission parlementaire. Vous savez, nous, on vit un peu dans la... on appelle ça notre bulle, ici, à l'Assemblée nationale. On est à l'aise avec : adoption de principe, adoption du projet de loi, commission parlementaire, etc. La plupart des gens qui nous écoutent, M. le Président, là, des fois, ils ont de la difficulté à nous suivre. Ce que je veux que les gens comprennent : Il y a eu les consultations où on aurait aimé que les gens... le ministre puisse entendre le plus de gens possible. Ça n'a pas été fait. Et là ce qu'on lui dit, avant de commencer l'étude du projet de loi étudié article par article, tous les impacts, on lui dit : Prenez le temps puis, s'il faut, refaites donc votre projet de loi parce qu'il n'a pas de foutu bon sens. Si vous ne voulez pas le refaire au complet, bien, déposez vos amendements, dites ce que vous voulez corriger.

Non, non. Je ne sais même pas, il y a peut-être une possibilité qu'il va aller en bâillon avec le projet de loi. Il va être tellement allé rapidement, il travaille sur plusieurs fronts. On l'a vu, là, M. le Président, ce n'est pas juste dans la santé. Ça, c'est pour faire oublier, là, comment, comment, comme Québécois, Québécoises, on s'était dotés d'outils au cours des décennies précédentes, ils vont tout saccager. Bien, la Santé, M. le Président, c'est comme l'Éducation, on ne touche pas à ça n'importe comment, même si, dans notre vie antérieure, M. le Président, on a été proche de la Santé.

On a eu le premier ministre, le ministre de l'Éducation comme ministres de la Santé. Ils ont-u changé le monde? Ils ont été neuf ans au pouvoir, pas 18 mois, neuf ans, M. le Président. Et là on a un nouveau ministre de la Santé qui arrive avec un tempérament des fois assez bouillant. On n'est pas sûrs, des fois... Je vais faire attention à mes mots parce que le collègue va encore se lever. Je n'ai pas de propos antiparlementaires, M. le Président, mais je dois admettre que j'observe, de ce côté-ci, à la période de questions. Il se lève avec un petit ton, là, anodin puis un petit sourire en coin. Ce n'est jamais grave puis c'est toujours la faute du gouvernement péquiste quand on était au pouvoir. C'est un petit peu ça. Il prend les choses, M. le Président, extrêmement à la légère pour être un ministre de la Santé, extrêmement à la légère. Son projet de loi n° 10, il n'en mesure pas tous les impacts.

S'il y a des collègues de l'autre côté... Il va toujours bien y en avoir qui avaient des problèmes avec ça. Parce que, puisque... Et ça, c'est très habile, M. le Président, dire : C'est l'abolition des agences de santé. On sait que l'abolition de certaines structures, ça pouvait peut-être passer plus facilement, soit dit en passant. Ça ne veut pas dire qu'on fait un bon coup en abolissant les agences de santé, mais c'était très habile. Tout le monde, moi, que j'entendais les fins de semaine... Aïe! je disais : Réveillez-vous, là, mes amis. Ils sont très habiles, nos amis au gouvernement libéral. Vous allez voir, mes amis, que, dans les faits, ce n'est pas l'abolition de l'agence de santé, il va aller beaucoup plus loin. C'est exactement ce qui se passe. Puis, quand on va tous se... le monde va se réveiller... parce qu'on essaie un peu de le leur dire, là. Ça commence un petit peu : Ah! on a perdu ça, on a perdu ça. Puis, lui, de sa tour d'ivoire, dit : Moi, je sais tout, je connais tout et je vais vous imposer ce projet de loi, et vous allez devoir faire avec.

J'aurais souhaité, M. le Président, que les collègues d'en face aient de bonnes discussions avec le ministre de la Santé. Il faut croire que ça n'a pas été le cas parce qu'il n'a pas l'intention de reculer. Comme ils sont majoritaires, M. le Président, on va devoir vivre avec un projet de loi dans lequel on va avoir tout saccagé les structures, où déjà, M. le Président, on a des pénuries au niveau des médecins à certains endroits, au niveau des infirmières. La profession, ce n'est plus ce qu'elle était; on fait affaire avec des agences privées. On est toujours en restructuration. On en demande de plus en plus au réseau quotidiennement. Ces gens-là ne vont plus travailler avec le même esprit qu'il y a plusieurs années. Et là on va encore brasser ça.

Et, dans tout ça, M. le Président, il est où, le patient? Il est où? On voit plus souvent le mot «ministre» qu'on voit le mot «patient», «service» qui est à l'écoute de ces gens-là. Quand vous dites qu'il y a un projet de loi qui va donner tous les pouvoirs à une seule et même personne pour changer un réseau déjà fragilisé, il faut le faire, M. le Président! Il faut le faire!

Je vous ai dit, hein, l'exception pour les Îles-de-la-Madeleine, peut-être pour la Gaspésie, je ne suis pas contre. Bravo à la Gaspésie s'ils ont été capables de rencontrer le ministre de la Santé puis de lui faire comprendre que ça n'avait pas de foutu bon sens. Bien, moi, j'aurais aimé, M. le Président, que le ministre de la Santé ait la même écoute pour les gens de la Côte-Nord. Mais non.

• (15 h 20) •

Vous savez, le premier ministre, il aime ça, les défis; il aime ça, les défis. Bien, moi, je vais lancer un défi au ministre de la Santé. Je vais lancer un défi au ministre de la Santé, je vais même l'accompagner : Venez visiter mes dispensaires. Je vais juste, par exemple, lui dire ce que ça lui prend pour venir m'accompagner : parce qu'il n'y a pas de route, souvent; parce que, souvent, on gère, au niveau de la santé, des motoneiges. Je vais l'inviter. Je vais lui dire qu'il s'habille chaudement. Ça va lui prendre un casque de motoneige pour être sécuritaire, puis on va faire tous les dispensaires sur la Basse-Côte, puis après, bien, on prendra la 389, si elle est ouverte, parce qu'elle n'est pas toujours ouverte puis il y a des conditions difficiles, puis on va monter jusqu'à Fermont, à Caniapiscau, hein? S'il n'a pas compris l'étendue de mon territoire, bien, je pense qu'on va lui faire faire un cours de géographie, pas un cours en santé pour devenir médecin spécialiste, en géographie puis au niveau des distances, M. le Président. Et pourquoi pas?

Savez-vous quoi, M. le Président? La semaine dernière, j'étais à Sept-Îles, l'inauguration du pavillon Alouette. Alouette a donné 10 millions à la communauté pour un pavillon au cégep, puis on va avoir une bonne complicité entre le cégep de Sept-Îles et l'Université du Québec à Chicoutimi. Et le ministre de l'Éducation, c'est le ministre responsable de la Côte-Nord, c'est le ministre avec lequel je me suis battue auparavant et... pour lui dire — parce que, des fois, je l'appelle par son prénom, je ne le nommerai pas ici — quand il voulait nous imposer des fusions : Tu le sais, que ça n'a pas de bon sens d'imposer ça ici. Savez-vous quoi, M. le Président? À cette époque-là, vous qui connaissez ma région, qui êtes déjà venu, on prenait la Basse-Côte-Nord, la Minganie, Fermont puis Port-Cartier puis on ramenait ça à Sept-Îles. On lui a dit : Ça n'a pas de bon sens! C'est l'autonomie de nos CSSS, puis ce n'est pas la même chose à Blanc-Sablon qu'en Minganie, qu'à Fermont, qu'à Port-Cartier, qu'à Sept-Îles. Là, je trouve que, des fois, si je serais critique, c'est sûr que j'aurais beaucoup de questions pour le ministre de l'Éducation actuel, même si je l'apprécie au niveau personnel, mais il avait eu un bon jugement à cette époque, M. le Président. Il a dit : Sais-tu, Lorraine, puis tu as raison, on ne peut pas. Bien, savez-vous quoi? Je l'ai vu, lundi passé, puis il a dit : Lorraine, ça n'a pas de bon sens, ce qu'il s'apprête à faire. J'ai dit : Est-ce que tu ne penses pas que deux pôles tout au moins, ça serait un moindre mal? Il a dit oui. Bien, j'ai dit : Comme, moi, ton ministre de la Santé, il n'a pas bien, bien d'égard pour la députée de Duplessis, il m'a à peine croisée dans le corridor, il ne va pas m'accorder une rencontre pour que je plaide pour ma région, mais peut-être que, toi, mon cher ministre responsable de la Côte-Nord, tu pourrais peut-être lui parler puis lui dire de ne pas appliquer ça chez nous puis d'être un petit peu plus à l'écoute. Puis j'ai dit : Tu sais-tu qu'il est en train de scraper tout notre système de santé? Parlez-vous, chers amis, avant d'aller trop loin, M. le Président, parce que ça n'a pas de foutu bon sens.

Puis on a beau à dire comment je suis — on m'appelle la tigresse — je m'assume. Puis, quand je dis quelque chose, c'est parce que je le pense, ce n'est pas pour faire de la frime. Puis ça n'a pas de foutu bon sens, ce que le ministre s'apprête à faire. Puis, si le premier ministre n'est pas capable de lui faire entendre raison, bien, réveillez-vous, chers collègues. Ne riez pas, parce que la santé, là, si vous vous en foutez, vous avez un sérieux problème de comportement.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, Mme la députée de Duplessis, de votre intervention.

Mais son intervention met fin au débat restreint de deux heures sur la motion de report présentée par M. le député de Labelle.

Je mets maintenant aux voix la motion qui se lit comme suit :

 «Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, [les mots] "dans deux mois".»

Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Mme Maltais : M. le Président, nous demandons un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, le vote par appel nominal est demandé. Alors, que l'on appelle les députés.

• (15 h 24 — 15 h 36) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on prend place, on prend place, on prend place.

Mise aux voix

Alors, je mets maintenant aux voix la motion de report présentée par le député de Labelle, qui se lit comme suit :

«Que la motion de discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, [les mots] "dans deux mois".»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Bédard (Chicoutimi), Mme Maltais (Taschereau), M. Marceau (Rousseau), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M. LeBel (Rimouski), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaudreault (Jonquière), M. Therrien (Sanguinet), M. Bergeron (Verchères), M. Dufour (René-Lévesque), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Traversy (Terrebonne), M. Cousineau (Bertrand), M. Leclair (Beauharnois), M. Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Péladeau (Saint-Jérôme), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Pagé (Labelle), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).

Mme David (Gouin), M. Khadir (Mercier), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques).

Le Vice-Président (M. Gendron) : Que les...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! On voudrait poursuivre le vote, mais un peu plus dans le silence.

Que celles et ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Couillard (Roberval), M. Fournier (Saint-Laurent), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), M. Moreau (Châteauguay), Mme David (Outremont), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vien (Bellechasse), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Daoust (Verdun), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vallée (Gatineau), M. Billette (Huntingdon), M. Bolduc (Jean-Talon), M. Blais (Charlesbourg), M. Reid (Orford), Mme Boulet (Laviolette), M. Morin (Côte-du-Sud), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Girard (Trois-Rivières), M. Bernier (Montmorency), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf), M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Fortin (Pontiac), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Boucher (Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain), M. Rousselle (Vimont), M. Ouimet (Fabre), M. Fortin (Sherbrooke), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil).

M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Deltell (Chauveau), M. Caire (La Peltrie), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M. Laframboise (Blainville), Mme Lavallée (Repentigny), M. Lamontagne (Johnson), M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M. Paradis (Lévis), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Lemay (Masson).

Le Vice-Président (M. Gendron) : Y a-t-il des abstentions? Alors, Mme la secrétaire générale.

La Secrétaire : Pour : 29

                     Contre :           84

                     Abstentions :     0

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, la motion est rejetée.

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Et, lorsque la motion de report est rejetée, l'Assemblée poursuit donc le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 10, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, nous allons suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 40)

(Reprise à 15 h 42)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, nous allons poursuivre le débat, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle pour la poursuite du débat sur le principe du projet de loi n° 10. Alors, M. le chef de l'opposition officielle, à vous la parole.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Merci, M. le Président. Tout d'abord... évidemment, ce ne sera pas la première fois, mais plutôt déçu du résultat du vote. Évidemment, une motion de report, s'il y a un moment où elle a sa pertinence, c'est bien dans le moment où on se trouve actuellement, où, suite à des consultations, un nombre nettement majoritaire, sinon la quasi-totalité des groupes sont venus dire au ministre, au gouvernement, que le projet de loi n'était pas le bon, qu'on ne rencontrait pas les objectifs qu'on s'était fixés. Dans les faits, on avait mal fait notre travail puis on pouvait recommencer. Alors, il faut donner du temps aux gens pour refaire ce travail-là, et le ministre aurait dû profiter de l'occasion pour nous présenter un projet de loi plus costaud, plus sérieux, moins nombriliste et qui permette finalement d'avoir le patient au coeur de ses préoccupations. Je pense que ce deux mois aurait été suffisant pour lui permettre de faire ce travail.

Malheureusement, il en va tout autrement. Tout autrement, parce que le ministre a décidé de faire l'exercice qu'on connaît, de recevoir un accueil — que je vais parler un peu plus tard — qui est, disons, presque unanime à l'encontre de son projet de loi. Le problème qu'il a, par contre, c'est de ne pas voir cette réalité. M. le Président, vous êtes là, dans ce Parlement, depuis plus longtemps que moi, presque... pas presque, le double et un peu plus, et il faut écouter les gens, je pense que c'est votre marque de commerce. C'est un principe de base qu'on a ici, c'est d'écouter ceux qui viennent en commission, les gens dans la rue, un peu partout, qui nous font leurs commentaires et, après ça, en tirer des conclusions.

Le ministre de la Santé ne semble pas avoir fait cet apprentissage. Et de conclure que tout le monde était d'accord sur son projet de loi va à l'encontre, oui, de la réalité en commission parlementaire, mais va à l'encontre du principe même de l'écoute, M. le Président. Quand les gens prennent la peine de se déplacer pour venir dire au ministre : Refaites votre devoir, quand le ministre en tire la conclusion que tout le monde l'appuie, c'est sûr que ce n'est pas de nature à valoriser nos institutions puis ce n'est pas de nature à faire en sorte que les gens vont croire aux exercices qu'on a de consultation.

Donc, le ministre s'enferme dans sa réalité, et ça, c'est, je vous dirais, plutôt inquiétant pour la suite des choses. Quand on s'isole comme ça, en général, on prend des mauvaises décisions. Donc, je l'invite à la réflexion. On va lui donner du temps. Parce que l'opposition, ce qu'elle a comme possibilité, c'est faire réfléchir les gens. Des fois, ça donne des bons résultats, parfois, ça n'en donne pas, mais il faut utiliser ce temps pour permettre au ministre, lui, de bien comprendre qu'il a fait le mauvais choix. Comment?

Bien, d'abord, on va commencer par un petit élément mais qui est quand même... qu'on retrouve dans son projet de loi, mais qu'on retrouve dans plusieurs depuis le début. Je vous dirais, c'est comme une maladie qui semble s'installer chez nos amis d'en face, ainsi que nos amis de la CAQ, désormais appelée la PLAQ — je trouvais l'expression plutôt bonne, M. le Président — c'est celle, M. le Président, de vouloir congédier des bénévoles. Je ne sais pas ce qu'ils ont pris... je ne sais pas où ils ont pris cette maladie-là qu'au Québec, des bénévoles, ce n'est pas bon, donc il faut les congédier. On l'a vu dans les CLD, c'est quoi, 3 000, un réseau de bénévoles, 4 000 personnes? Non, non, il y a trop de bénévoles ici, là. Il faut les congédier, ce monde-là, ça n'a pas de bon sens. Beaucoup trop de papier. On a même dit : Ça coûte cher de papier. Bien, ça... il faut faire des ordres du jour, il faut rendre des comptes à du monde. C'est incroyable, hein? Du monde dans leur milieu, donc... ou bien on leur rend compte ou bien on les tasse. Bien, le gouvernement, lui, il a fait un choix plutôt étonnant, il a dit : Moi, je les tasse, je les congédie. Pour les CLD, il l'a fait. Alors, les gens des communautés, non, non, non, on va prendre d'autre monde. Vous autres, vous aviez donné du temps depuis 15 ans, vous étiez des gens d'affaires de tous les milieux, des gens du domaine communautaire, on vous tasse.

Même maladie, même maladie qui a frappé le gouvernement, avec l'appui de la CAQ, dans ce projet de loi, le projet de loi n° 10. Conseils d'établissement... plutôt les conseils d'administration, tant au niveau des agences qu'au niveau de l'ensemble des établissements dans toutes les régions du Québec, mais aussi les bénévoles qui se retrouvent dans le réseau, que ce soit au niveau des centres jeunesses — c'est des conseils d'administration différents — bien, ces gens-là... CRDI, on a plusieurs exemples. Alors, ces gens-là donnent du temps.

J'ai mon voisin d'en face, moi, M. le Président, il est membre des centres jeunesse, préoccupé par ça. Sa femme est enseignante à la commission scolaire. Il a une préoccupation. Il dit : Moi, la jeunesse, ça m'intéresse. Les gens sont allés le voir, ils ont dit : Est-ce que ça te tente de t'intéresser à la jeunesse avec nous pour la région? C'est un homme d'affaires très intéressé. Il aurait pu décider, lui, de faire d'autres choses, parce que, dans les faits, vous comprendrez qu'être bénévole, ce n'est pas très payant. Il a décidé : Non, moi, la jeunesse, ça m'intéresse. J'ai une expérience qui est de terrain, je viens d'un milieu rural, j'ai réussi en affaires, ça va bien, et maintenant je décide de consacrer du temps à mon centre jeunesse pour les guider à travers les choix qu'ils font, mais aussi pour leur donner cette expérience que j'ai. Il est comptable de profession, une belle réussite, je vous dirais, d'affaires. Il a appris, M. le Président, qu'il était congédié, imaginez-vous. Congédié, pas utile. Pas utile d'avoir des gens avec une expérience comme ça, intéressante, de terrain, différente des intervenants, qui vient enrichir ce milieu pour s'assurer, oui, d'une reddition de comptes intéressante, mais, en même temps, d'apporter des conseils, d'apporter du soutien, de mobiliser la communauté autour d'institutions qui sont fondamentales.

Vous savez, on est très près de nos institutions en santé. Pourquoi? Parce que c'est notre première priorité dans la vie : la jeunesse, notre santé, la santé de nos jeunes, de nos personnes âgées, de nos enfants. C'est ça qui nous préoccupe. Alors, tant au niveau scolaire, dans les conseils d'établissement qu'au niveau des hôpitaux, il y a une présence réelle de la population. Pas seulement des groupes syndiqués, là, pas seulement des travailleurs. La population est intéressée par ça parce que ça les concerne dans leur réalité concrète. Ils sentent qu'ils ont un mot à dire. Alors, normalement, tout gouvernement, toute personne normalement constituée serait contente de ça, de voir des gens qui s'intéressent bénévolement, M. le Président. Non, non, non, on n'a pas besoin de ces gens-là. Pas besoin de ces gens-là.

Vous savez, moi, j'aime bien... j'essaie de me donner l'exemple de l'appartenance qu'on a par rapport à nos institutions dans le domaine de la santé, que ce soient les hôpitaux... je regarde dans ma région : Roberval, Alma, Chicoutimi, Jonquière, Dolbeau-Mistassini, nous avons des institutions de très grande qualité, à La Baie aussi, La Baie qui a un très bel hôpital. Il y a des gens qui sont impliqués. Alors, on veut... on a un sentiment d'appartenance très développé pour ces institutions-là.

• (15 h 50) •

Vous savez, on ne retrouve pas de la même façon, dans les services gouvernementaux... Il y a des services qu'on donne, par exemple, au ministère du Revenu. Vous savez, c'est assez présent, le ministère du Revenu, hein? On en a partout. Moi, j'ai des fonctionnaires, chez nous, qui donnent ces services-là. C'est sûr que la population, elle se sent un petit peu moins dans le coup. Dans le ministère du Revenu, ils vont avoir tendance à moins s'impliquer dans les... je vous dirais, dans les instances ou à créer, par exemple, des fondations pour le ministère du Revenu. C'est moins clair, hein? On se dit : Pourtant, c'est important, les impôts, là, c'est important que tout le monde paie ses impôts, mais je n'ai pas encore vu beaucoup de gens dire : Je vais partir une fondation, je vais consacrer mon temps à récolter des sous ou à m'impliquer dans les choix qui ont été faits. Pourquoi? Bien, c'est simple, parce que la santé, tout gouvernement s'est dit : C'est au coeur des préoccupations des gens, il faut les impliquer. Oui, il faut impliquer les médecins, les infirmières, les gens qui sont dans les services, l'ensemble des services, incluant le service alimentaire dans les hôpitaux, dans les centres jeunesse, CRDI, mais ça prend l'implication de la population, le vrai monde, qu'on dit, là, ceux et celles qui ont une autre réalité, que ce soit au niveau éthique... ou qui ont une expérience pertinente, puis ils souhaitent donner du temps. Je pense que c'est normal de vouloir les impliquer dans leurs localités, là.

C'est sûr qu'on pourrait faire un grand conseil d'administration à Québec. Je pense que c'est le rêve, d'ailleurs, du ministre de la Santé, autour de lui, là, un grand conseil d'administration qui le conseillerait, lui, personnellement. La réalité, c'est que les services, ils ne se donnent pas au ministère. Les services, ils se donnent dans nos hôpitaux, ils se donnent dans le centre jeunesse, auprès de la clientèle. Alors, c'est sûr qu'il faut rapprocher les services de la population, les prises de décision mais aussi l'implication citoyenne.

Donc, le choix du gouvernement de congédier autant de bénévoles m'étonne, m'étonne puis va à l'encontre du principe même de la participation citoyenne dans ces institutions, aussi fondamentale qu'elle puisse l'être. J'ai parlé tantôt des CLD, mais la santé, c'est la première des priorités de tous les Québécois. Donc, cette maladie, j'espère qu'elle va trouver une fin quelque part, parce que je pense qu'à force de congédier des bénévoles comme ça ça va finir par coûter très cher au gouvernement. Et moi, j'invite le ministre, dans le temps qu'il a pour réfléchir, de revenir en arrière là-dessus, là. On ne peut pas faire ce choix de vouloir congédier autant de gens qui étaient dans les conseils au niveau de tous les centres hospitaliers et tous les autres organismes qui travaillent dans le domaine de la santé, les organisations qui travaillent dans le domaine de la santé dans tout le Québec et dans toutes les régions.

Donc, premier travers que j'ai vu dès le départ. Ça ne fonctionne pas, éloigner la communauté de ce qui est le plus important pour elle. Comment donner des services à sa population? Comment assurer la prévention? Comment travailler avec la santé publique? Comment s'assurer que nos services jeunesse ont des services qui sont cohérents avec les besoins de notre population? Premier biais.

Deuxième biais, et justement les deux sont porteurs, c'est la centralisation. Au-delà du ministre qui pense qu'il a raison sur à peu près tous les éléments puis lui, il a des solutions pour tout le monde, dans chaque hôpital au Québec, il devient... c'est lui qui a la bonne façon de faire, la centralisation de ces institutions aussi importantes en une seule main — dans les faits, ce n'est pas seulement ses mains à lui, c'est les mains du ministère en tant que tel — c'est un choix qui va à l'encontre des organisations qu'on rencontre actuellement. Dans le secteur privé, il n'y a personne qui fait ça, M. le Président. Vous irez voir chez Power Corporation : pas beaucoup de monde au siège social, M. le Président. Dans les composantes, par contre, dans le domaine de l'assurance, là il y a du monde, les services se donnent. On ne remplit pas le siège social. Pourtant, ils en gèrent, des actifs, là. Bien non. On s'assure que, dans les filiales, dans le monde qui travaille auprès de la clientèle, il y a du monde, les services se donnent là. Le ministre, il ne pense pas ça, lui, non. Le ministre, il dit au contraire : Moi, les décisions, les bonnes, là, c'est moi qui vais les prendre à partir de Québec. Et ça, il fait fausse route, ça, je n'en ai aucun doute, aucun doute, parce que... Ce n'est pas simplement parce que je suis un régionaliste, parce que je crois au développement régional. C'est parce que, comme tendance administrative, c'est un mauvais choix. Même des entreprises, on peut en citer plusieurs. Rio Tinto, qui est quand même un citoyen corporatif qu'on connaît bien, dont le siège social est à Londres, reste qu'ils ne géreront pas les usines à partir de Londres, M. le Président. C'est sûr qu'ils vont, dans chaque usine, avoir des directions pour s'assurer que, quand il y a des conflits, quand il y a des problèmes, c'est les personnes sur le terrain qui vont agir. Ils n'attendront pas le téléphone de la personne qui a supposément la réponse pour venir la donner aux gens sur le terrain à Jonquière ou en Australie, ça serait un bien mauvais choix. Donc, on va à l'encontre d'une grande tendance qui est celle de rapprocher du citoyen les décisions importantes, de l'impliquer dans les prises de décision.

Et, pire encore, le système de santé, il vise toujours à être amélioré. D'ailleurs, moi, je vous dirais, comme président du Conseil du trésor, l'année et demie où j'ai été là, je peux vous le dire, les meilleurs gestionnaires que j'ai vus dans tout le réseau, tous ministères confondus, c'est dans la santé qu'on a les meilleurs gestionnaires. Je n'ai aucune réserve à vous dire ça, M. le Président. C'est des gens qui sont à la fine pointe de l'optimisation, de toutes les méthodes d'amélioration continue de la performance. C'est des gens, pourtant, qui sont pris avec... des personnes qui sont prises avec souvent des litiges ou des problèmes lourds, mais ils ont développé des aptitudes phénoménales, il y a de la formation qui se donne. Je vous dirais, c'est ce qui se rapproche le plus, là, des meilleurs gestionnaires qu'on peut retrouver dans tous les domaines, public ou privé. Et moi, j'avais la fierté de voir, dans chacun des établissements dans ma région, des gestionnaires compétents, et chacun dans leur domaine, que ce soit au niveau, comme je vous dis, des centres jeunesse qu'au niveau des centres hospitaliers, des gens préoccupés par l'idée de performance, mais, en même temps, bien connectés sur leur réalité concrète.

Et la réalité concrète, c'est quoi? C'est le patient, la personne qui rentre. Ce n'est pas le médecin qui est au coeur, là, c'est le patient. Et, moi, s'il y a quelque chose que j'ai reproché parfois à notre système de santé, c'est qu'il s'est développé, pendant des années, autour du médecin, pas assez autour du patient. Les besoins ont été comblés à partir, justement, des attentes médicales. Or, le domaine de la santé, ce n'est pas seulement le domaine médical. C'est beaucoup plus vaste. Et je pense que ce virage qui a été opéré depuis plusieurs années est bon pour les patients.

Or, le ministre, il est en train de reproduire exactement ce qu'il ne faut pas faire et, quand je le vois remettre tout le système autour de lui, il reproduit une erreur qui s'est faite dans le temps, d'ailleurs qui n'était pas de mauvaise foi à l'époque, parce que, souvenez-vous, souvent, les villages et même plus globalement, quand s'est développée la médecine, tout tournait autour du bon médecin qui allait voir les gens dans leur maison ou à l'hôpital, et le corps professionnel était autour pour soutenir ce professionnel. Maintenant, c'est très diversifié, des infirmières spécialisées, les pharmaciens qui jouent un rôle important. Il y a plusieurs... Que ce soit les travailleurs sociaux, c'est maintenant très vaste. Donc, ce pouvoir-là, il s'est réparti normalement, ce qui fait en sorte que le ministre opère sur lui un des problèmes qu'avait eu le réseau pendant des années.

Donc, moi, je l'invite là-dessus, encore une fois, à réfléchir. Il n'est pas normal, M. le Président, dans le contexte où on doit améliorer toujours les soins, puis c'est toujours un défi, que le patient ne soit pas au coeur des préoccupations du ministre dans le contexte actuellement puis qu'il soit obnubilé par l'idée que c'est lui qui doit, à partir de Québec, avoir la direction sur les établissements. Pourquoi? Ce qu'il veut faire, on a vu les pouvoirs qu'il veut se donner, M. le Président, c'est comme... nommer le P.D.G., P.D.G. adjoint, s'assurer d'un contrôle horizontal et vertical... J'avais la liste dans le projet de loi, c'était... C'est étonnant comment le ministre et ses fonctionnaires se donnent un pouvoir décisionnel sur les gens qui sont sur le terrain. C'est malsain.

Puis qu'est-ce que ça va entraîner, M. le Président? C'est simple, le ministre ne sera pas capable de faire ça, là. Alors, c'est quoi? Bien, il va créer un immeuble ici, à Québec, là, un beau gros, très gros immeuble, là, où il va être en plein milieu, fonctionnaires à tous les étages, parce que, là, quand on fait ça, il faut contrôler. Là, il faut tout contrôler, amener la paperasserie, la... Là, ce n'est pas de la reddition de comptes, ça, c'est le contrôle. C'est différent de la reddition de comptes. Vous avez une décision à prendre? Oh! Venez nous voir, parce que moi, j'ai le droit de vous congédier, j'ai le droit de vous suspendre maintenant si ça ne va pas dans le sens de mes préoccupations.

Alors, qu'est-ce qu'on va créer? C'est sûr qu'en termes d'efficience il n'y a personne qui va y gagner. On va faire beaucoup de paperasserie puis on va augmenter, ici, le nombre de fonctionnaires au ministère de la Santé, alors que... Qui donne les soins? C'est les gens sur le terrain, partout au Québec, ici, à Québec aussi évidemment. Mais moi, j'aime mieux pas mal plus de gens qui en donnent dans... ici, au CHUQ, à Québec, à l'Hôtel-Dieu qu'au ministère de la Santé. Entre vous et moi, là, il ne semble que c'est beaucoup plus normal, sain et à l'avantage des patients d'avoir plus de monde près des services que du monde dans un ministère qui font des piles de papier pour dire : Est-ce que? Est-ce que?

Donc, l'orientation gouvernementale là-dessus, je pense, n'est pas la bonne, à l'évidence. Elle origine d'une volonté du ministre d'imposer des choix, puis on ne sait pas encore lesquels, d'ailleurs. C'est ça, le problème. Si on avait commencé par le bon sens et de dire : Voici ce que je veux faire, voici ce qui ne marche pas... Le ministre, il ne dit pas ça. Il dit : Là, je m'assure du contrôle. Après, je vais vous dire comment ça va marcher. Voyons! Voyons! Qu'il nous dise c'est quoi qui ne marche pas, selon lui, là. À part le fait, là, qu'il n'a pas un pouvoir, là, absolu sur chacune des personnes dans le réseau, là, c'est quoi qui ne fonctionne pas, qu'il veut améliorer pour le patient? On ne le sait pas encore. Mais il dit : Attendez. Donnez-moi le pouvoir. Vous allez voir, ça s'en vient. Voyons! Il n'y a personne qui est dupe de ça, M. le Président.

Et, je reviens, fusionner les missions... Moi, je regarde santé mentale... Tant les intervenants au niveau de la santé publique, la prévention, protection de la jeunesse, quelle mauvaise idée de mettre tout ça dans le même paquet. Ça va se faire au détriment, c'est évident, des missions qui sont différentes et de l'évolution de la santé. La prévention, pour nous... vous le savez, Réjean Hébert était sûrement le plus grand porteur de ce virage, c'était la prévention, M. le Président. Bien, c'est sûr que la prévention, elle va prendre le bord parce que, quand va venir le temps des choix budgétaires, entre des ultraspécialistes et la prévention, malheureusement, il risque parfois que ça soit la prévention qui y goûte. On en a des exemples d'ailleurs très concrets.

M. le Président, ce qu'on ne sait pas non plus, évidemment, c'est les coûts de la réforme. On ne le sait pas, mais on sait par contre que pendant cinq ans, là, on va être dans le trouble. Ça, là, une réforme de cette ampleur-là, on en a pour cinq ans, M. le Président, à seulement absorber le fait qu'on fusionne tout le monde ensemble, parce que les agences vont rester là, elles vont seulement se déplacer un petit peu, dans les faits, même elles vont rester au même endroit, mais que les établissements partout dans les différentes régions vont être administrés à partir d'un seul endroit, qui, lui, va rendre des comptes, évidemment, au ministre lui-même. Donc, on n'a pas les coûts.

Puis là il nous dit : C'est transitoire. Mais transitoire à quoi, M. le Président? Là, le ministre, moi, je l'invite à refaire sa réflexion, nous dire où est-ce qu'il s'en va pour les patients, puis après ça on regardera le projet de loi avec intérêt puis on verra : Est-ce que ça vaut la peine de faire autant de contrôle puis autant de centralisation pour le résultat qu'il souhaite? Est-ce que ça vaut la peine de paralyser le système pendant cinq ans pour une obsession ministérielle, M. le Président?

Donc, il est évident que, dans le contexte actuel, où je ne vois aucun lien entre la loi et l'amélioration des soins, nous ne serons pas en faveur de ce projet de loi là, contrairement à la CAQ et au Parti libéral. Alors, M. le Président, à ce moment-ci j'annonce, évidemment, comme l'a fait notre porte-parole, que nous serons contre, mais j'invite nos collègues d'en face à aider le ministre à réfléchir, à entendre la population. Si ce n'est pas nous, au moins qu'il entende la population, les intervenants, les 48 mémoires qui sont venus dire au ministre qu'il faisait fausse route, fausse route, M. le Président. Merci.

• (16 heures) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le chef de l'opposition officielle, de votre intervention sur le principe du projet de loi n° 10. Et je cède la parole pour son intervention à M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, à vous.

M. Marc Picard

M. Picard : Merci, M. le Président. M. le Président, le projet de loi n° 10 suscite de vives réactions dans tout le réseau de la santé et des services sociaux. Il est évident que les dispositions de cette importante réforme n'est pas sans provoquer de nombreuses interrogations, voire même un certain vent de panique non seulement chez les usagers, mais surtout, surtout auprès des principaux acteurs du réseau de la santé.

À cet égard, il y aurait lieu de s'interroger sur la faiblesse du plan marketing du ministre de la Santé, qui n'a pas réussi à vendre le bien-fondé de son projet de loi, car il a déposé avec empressement un projet de loi dont les suites sont inconnues et sans avoir su faire la démonstration des bénéfices d'une telle réforme sur les patients. Aussi, devant autant d'inquiétudes, autant à l'intérieur du réseau lui-même qu'auprès de la population, il semble bien que le ministre de la Santé ait négligé de se faire rassurant.

Toutefois, M. le Président, face à la lourdeur du système actuel et de la piètre performance du réseau de la santé quant à l'accessibilité des soins et du temps d'attente, nous sommes d'avis que des changements s'imposent, et c'est ainsi que la Coalition avenir Québec appuie le gouvernement dans sa volonté de modifier l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux.

Il faut bien se rappeler, M. le Président, bien... qu'il s'agit d'un deuxième essai pour le gouvernement libéral, car il faut se rappeler que la première réforme avait été pilotée en 2003 par le premier ministre actuel. Force est de constater aujourd'hui que cette première tentative n'a pas donné les résultats escomptés en ce qui concerne l'amélioration de l'accessibilité des soins de santé. Par conséquent, M. le Président, l'appui de la Coalition avenir Québec à l'adoption finale de ce projet de loi sera conditionnelle à l'acceptation par le ministre de la Santé des amendements et autres demandes proposés par notre formation par la voix de notre député de La Peltrie, notamment pour éviter des nominations partisanes et de rebureaucratiser les CISSS — les CISSS, pour la population, là, c'est des centres intégrés de santé et de services sociaux.

M. le Président, le projet de loi n° 10 contient de bons principes généraux en proposant, entre autres, l'abolition des agences de santé ainsi que l'allègement des structures et de la bureaucratie.

M. le Président, j'ai participé aux consultations publiques durant quelques jours alors que différents groupes représentant plus d'une soixantaine d'organisations sont venus présenter des critiques pertinentes et constructives. Une constante se dégage des propos tenus, entre autres, par l'Association des centres de réadaptation en dépendance du Québec et l'Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec, soit la crainte que leurs missions soient englouties dans la grande mission des CISSS.

À ce propos, l'Office des personnes handicapées du Québec, par l'entremise de son bulletin d'information Express-O, relève des préoccupations majeures, notamment en ce qui concerne la pérennité des services spécialisés et surspécialisés et de la représentation des usagers auprès des établissements du réseau.

M. le Président, je me permets de prendre un moment pour vous faire part de quelques passages qui démontrent les inquiétudes de plusieurs associations quant aux répercussions directes sur les services aux usagers. C'est des extraits du bulletin de l'Office des personnes handicapées. Vous excuserez le nombre d'acronymes, mais je vais les expliquer au début. Je reprends le texte du bulletin Express-O : «Plusieurs ont fait des recommandations qui touchent les personnes handicapées, dont les regroupements d'associations de personnes handicapées que sont la COPHAN — Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec — l'AQRIPH — l'association québécoise des regroupements de personnes handicapées — et l'AQIS — association québécoise pour l'intégration sociale — ainsi que [...] deux associations québécoises de centres de réadaptation, [...]l'AERDPQ — Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec — et la FQCRDITED — Fédération québécoise des centres de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement.

«[M. le Président,] les deux associations du domaine de la réadaptation se sont dites [d']accord avec l'objectif du ministre de la Santé et des Services sociaux [...] d'améliorer l'accès aux services et l'efficience du réseau. Par contre, elles ont toutes deux exprimé des craintes quant à la pérennité des services spécialisés et surspécialisés, craintes partagées par la COPHAN, l'AQRIPH et l'AQIS.»

Toujours dans le bulletin, M. le Président : «En bref, les associations demandent que les personnes handicapées aient la garantie qu'elles pourront continuer à recevoir des services spécialisés et surspécialisés de pointe.

«De leur côté, les regroupements de personnes handicapées se sont montrés déçus du projet de loi dans son ensemble. Outre la pérennité des services spécialisés et surspécialisés, leurs préoccupations rejoignaient en plusieurs points celles de l'AERDPQ et de la FQCRDITED.

«L'une de ces craintes partagées est de voir les services aux personnes handicapées faire les frais d'une priorisation des budgets en faveur du volet médical. [...]Dans le même sens, la FQCRDITED recommande une reddition de comptes des budgets alloués pour chaque programme-service.

«Une autre préoccupation majeure — M. le Président — est la représentation des usagers auprès des établissements [...] du réseau.»

Pour terminer la lecture du bulletin, on dit : «La COPHAN, par exemple, recommande entre autres de revoir le mandat, le financement et le fonctionnement du comité des usagers des CISSS. De son côté, l'AERDPQ souhaite que soient maintenus, au sein des établissements régionaux et suprarégionaux, les comités des usagers par mission. Outre ces comités, la composition des conseils d'administration préoccupe également [ces] différentes associations. Que ce soit par l'ajout d'un administrateur issu d'un organisme de personnes handicapées ou d'un administrateur qui [aura] un profil de compétences en réadaptation, ou encore par la nomination d'une personne à la présidence-direction générale ayant des compétences équilibrées entre [le domaine] médical et social, les associations souhaitent que des moyens soient pris pour assurer une représentation équitable des personnes handicapées dans le réseau.»

M. le Président, j'ai terminé la lecture du bulletin Express-O de l'Office des personnes handicapées. Et je vous dirais, M. le Président, qu'il est évident que le projet de loi n° 10, dans sa forme actuelle, entraîne beaucoup de questionnements. Ces inquiétudes sont légitimes. C'est pourquoi la Coalition avenir Québec demande au ministre de la Santé des amendements sur le projet de loi n° 10 et des engagements directs en ce qui concerne l'implantation de cette réforme.

À cet effet, M. le Président, je souhaite faire un bref retour sur quelques demandes de notre formation. Nous pensons, entre autres, que le pouvoir décisionnel que s'est attribué le ministre de la Santé en regard de la nomination des P.D.G. risque de politiser le réseau de la santé. Aussi, pour éviter de telles nominations partisanes, nous demandons de retirer ce pouvoir au ministre et de laisser aux conseils d'administration le soin de choisir le P.D.G. de chaque établissement.

Nous croyons également qu'il faut éviter des dérapages lors de l'implantation de la réforme et assurer une transition harmonieuse pour que la qualité et l'accessibilité des services ne soient pas affectées. Pour ce faire, nous proposons de mandater le Protecteur du citoyen et/ou le Vérificateur général du Québec pour veiller à ce que cette période transitoire ne pénalise aucunement les usagers.

Par ailleurs, il faudra réduire la taille des CISSS pour assurer une gestion optimale des ressources. Sur ce point, le Protecteur du citoyen croit qu'il faut un maximum de 500 000 citoyens par CISSS. Cependant, le ministre de la Santé doit faire preuve de souplesse sur cette question et tenir compte des réalités régionales.

Aussi, M. le Président, dans un contexte de restructuration, s'il est important de régionaliser les questions administratives, il faut toutefois préserver l'autonomie du corps médical et assurer une représentation locale des usagers.

En terminant, M. le Président, nous sommes tous conscients du défi que représente la réorganisation du système de santé et nous souhaitons que cette réforme ait un impact positif sur l'accessibilité des soins de santé à court terme. Dans cet état des choses, cette réorganisation est essentielle lorsque l'objectif ultime est d'améliorer l'efficience et l'accessibilité, et ce, pour le mieux-être de tous les citoyens et citoyennes du Québec. Merci, M. le Président.

• (16 h 10) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, de votre intervention. Et je suis prêt à entendre le prochain ou la prochaine intervenante sur le principe du projet de loi n° 10. Je reconnais M. le député de Rosemont pour son intervention. M. le député de Rosemont, à vous la parole.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Merci, M. le Président. Alors, nous sommes sur le fond. Nous avons essayé de convaincre l'Assemblée de donner un peu plus de temps au ministre pour qu'il revoie sa copie. Le ministre semblait ne pas avoir compris que, sur les 64 groupes qui sont venus témoigner en commission parlementaire, 48 lui avaient dit que le projet de loi était contre-productif, n'allait pas dans le sens de la réparation de ce qui est brisé.

On est tous d'accord qu'il y a des choses à améliorer dans le système de santé québécois. Et la première chose à améliorer, c'est les listes d'attente pour les gens qui attendent un premier diagnostic, que ce soit pour des enfants handicapés ou que ce soit le trouble de l'autisme. On sait qu'il y a un problème des les urgences, on sait qu'il y a un problème de liste d'attente dans les CHSLD, on sait qu'il y a un problème de liste d'attente ou de manque de ressources dans les ressources intermédiaires, c'est-à-dire ces résidences qui permettent à des enfants ou à des adultes qui ont des problèmes graves d'être accompagnés dans leur réinsertion. On sait qu'il y a des manques et on sait aussi qu'il y a, dans ce qu'on appelle le continuum de soins, des ruptures.

Aujourd'hui, lorsque vous allez faire une intervention dans un hôpital et que vous avez besoin d'une autre intervention, on vous donne la liste des médecins que vous pouvez appeler ou des cliniques où vous devez aller. Là, vous dites : Mais comment ça se fait que ce n'est pas à l'intérieur de l'hôpital, du continuum de soins? Pourquoi est-ce qu'il y a cette rupture-là, que tout à coup le patient n'est pas accompagné? On le sait qu'il y a des tas de choses à régler.

Et le ministre, dans une intervention récente, disait : Mais je ne comprends pas pourquoi les gens sont contre, ils sont tous venus me dire qu'ils étaient d'accord avec la finalité du projet de loi. Bien, la finalité du projet de loi... On est tous d'accord que le continuum de soins doit être amélioré. Mais tout le monde lui a dit ou presque : Ce que tu proposes ne règle pas ce problème-là, ce que tu proposes va même empirer, parce que les ressources, l'énergie, le temps qui va être absorbé à appliquer cette réforme gargantuesque ne sera pas utilisé pour résoudre les vrais problèmes.

Alors, on le sait, la dernière réforme, celle de l'actuel premier ministre, lorsqu'il était ministre de la Santé, en 2003, c'était de fusionner, à l'intérieur des CSSS, des centres de santé et de services sociaux, un certain nombre d'établissements de santé pour leur donner un continuum. C'était en 2003. On est 11 ans plus tard. Les gens sont venus nous dire : Vous savez, on est à peine au moment où la réforme porte ses fruits. On est en train de digérer, on n'a pas fini de digérer cette réforme-là, et là vous allez nous faire passer à une autre vitesse. Ça n'a pas de sens.

Alors, je vais faire une petite digression pour vous dire, M. le Président, qu'une des raisons de la précipitation du ministre et de la précipitation du gouvernement, c'est qu'ils pensent qu'ils vont économiser de l'argent. Ils pensent qu'ils vont économiser au moins 200 millions, et l'autre aile du gouvernement du PL-CAQ, la CAQ, eux, pensent qu'ils vont économiser jusqu'à 600 millions. Ils sont tellement pour le projet de loi du Parti libéral qu'eux, ils pensent que le Parti libéral sous-estime les économies, ils disent : Ça va être trois fois plus. Alors donc, le gouvernement libéral se trompe, et la CAQ se trompe trois fois plus. Parce que nous avons eu des scientifiques — je sais que le ministre n'aime pas les scientifiques — qui sont venus nous dire : Vous savez, ce n'est pas la première fois qu'il y a des fusions qui sont faites comme celle-là. Il y a des fusions qui ont été faites comme celle-là en Alberta et ailleurs, et on a des études un peu partout dans le monde, et qui démontrent qu'à cette ampleur de fusion il n'y a aucune économie possible. Et d'ailleurs les scientifiques, dirigés par Contandriopoulos et une dizaine d'autres, nous ont dit : Vous savez, on est même frappés de la robustesse de cette conclusion scientifique. Ça, ça veut dire que ce n'est pas dans 51 % des cas, ça ne donne rien, c'est que la preuve, elle est insurmontable, qu'à ce niveau de fusion c'est contre-productif. Bon, bien, il pense aller chercher 200 millions, le Parti libéral; le club-école, la CAQ, pense aller chercher 600 millions, puis ils sont pressés d'aller le chercher. Ils veulent faire ça avant le 1er avril.

Et qu'est-ce qu'ils disent à chaque fois qu'ils sont pressés de démanteler un aspect du modèle québécois? Bien, ils disent : C'est bien épouvantable, parce que, quand on est arrivés, on a découvert, par une surprise énorme, qu'il y avait un trou budgétaire laissé par le Parti québécois. On a découvert ça, là. On est tombés des nues. C'était incroyable. Jamais on n'aurait pu penser qu'il y avait un trou de cette ampleur. Bien, moi, M. le Président, vous savez, j'aime retourner en arrière. Je ne suis pas un historien, mais je m'intéresse à l'actualité puis je suis retourné en arrière. J'ai dit : D'où ça vient, ça, ce chiffre-là, cette surprise de 3,7 milliards qu'ils auraient trouvée puis qu'il faut combler de toute urgence en faisant toutes sortes de réformes improvisées? Bien, Gérald Fillion, vous le connaissez, c'est le chroniqueur économique de Radio-Canada, dont la crédibilité n'est pas en cause. Et il a écrit cela dès que le gouvernement libéral a trouvé cette surprise, a écrit ça sur son blogue de Radio-Canada. Il dit : «L'effort budgétaire de 3,7 milliards de dollars émane du rapport Godbout-Montmarquette et repose sur une croissance hypothétique des dépenses de [6 %] en 2014‑2015. Cette croissance des dépenses n'aura pas lieu — c'est M. Fillion qui parle — c'est Luc Godbout lui-même qui l'a dit à notre antenne.» Donc, M. Fillion a demandé à M. Godbout qui avait trouvé ce chiffre. Est-ce que ce 3,7 milliards là, est-ce qu'il allait arriver ou non? Puis Godbout a dit : Bien non, il n'allait pas arriver. «Comme [l'ancien président du Conseil du trésor] auparavant, le [présent] président du Conseil du trésor [...] doit trier les demandes des ministères afin de respecter une cible de croissance des dépenses. L'effort budgétaire est, en fait, l'exercice normal des activités du Trésor.

«[L'actuel président du Conseil du trésor] a évoqué la possibilité que le déficit dépasse les 5 milliards de dollars si rien n'est fait.» Je continue à citer M. Fillion. Et ça, ces chiffres-là, on les entend presque tous les jours ici, à l'Assemblée. Le premier ministre dit : Je mets qui que ce soit au défi de me dire que c'est faux. Bien, Gérald Fillion, Gérald Fillion dit que c'est faux, puis quelle est la source de Gérald Fillion? Luc Godbout, le gars qui a donné le chiffre au premier ministre. Lui-même, il dit que c'est faux. Il dit que c'est juste la totalité des demandes des ministères qui arrivent chaque année sur le bureau du président du Conseil du trésor, puis le président du Conseil du trésor fait sa job, il dit : Non, ça n'arrivera pas.

• (16 h 20) •

Je reprends ma lecture de Gérald Fillion : «Il est peu probable qu'une telle chose survienne — c'est-à-dire les 5 milliards dont parle le président actuel du Conseil du trésor. L'ex-ministre des Finances [du Parti québécois] visait une croissance des dépenses de programmes de 2 %[...]. [L'actuel ministre des Finances] aura une cible [...] semblable[...]. Malgré [ça] — et je cite toujours M. Fillion — toute la communication du gouvernement repose sur ce total — 3,7 milliards.» Alors, ça, c'est M. Fillion, qui dit : Toute la rhétorique gouvernementale repose sur un chiffre qui est faux et dont l'auteur du chiffre a dit : Oui, oui, c'est faux, c'est une hypothèse qui ne se serait pas avérée. Ça, c'est le premier étage, premier étage.

Deuxième étage, c'est que, lorsqu'il était chef de l'opposition, avant l'élection d'avril, l'actuel premier ministre n'arrêtait pas, dans cette Chambre, de mettre en doute le fait que le gouvernement du Parti québécois allait atteindre ses cibles, hein? Maintenant, il dit : C'est une grosse surprise qu'il n'ait pas atteint ses cibles, mais tous les jours ici il posait la question en disant : Vous n'arriverez pas aux cibles, vous n'arriverez pas, vous dépensez trop.

En fait, M. le Président, le jour du déclenchement de la campagne électorale qui s'est terminée le 7 avril dernier, l'actuel premier ministre disait ceci : «Ce que j'entends partout au Québec, c'est : Ça va faire! Ça va faire, le fiasco économique; ça va faire, cacher la vérité; ça va faire, prendre la fuite pour ne pas rendre des comptes. [...]C'est l'échec dans les finances publiques, la gestion de nos taxes et nos impôts. On avait promis l'équilibre budgétaire, on est dans le trou de 3 milliards.»

Donc, le premier ministre, qui s'est dit surpris après l'élection de trouver un trou de 3 milliards, avait prévu, le jour du déclenchement de l'élection, un trou de 3 milliards. Alors, comment est-ce que quelqu'un peut être surpris de ce qu'il a prévu? Je vous le demande, M. le Président.

Et ce n'est pas fini. Après avoir dit qu'il s'attendait à un trou de 3 milliards, il a écrit son cadre financier et il a dit : Ne vous inquiétez pas, les familles du Québec. Ne vous inquiétez pas, les jeunes couples. Ne vous inquiétez pas, ceux qui veulent avoir un deuxième ou un troisième enfant. Nous allons vous charger moins cher que si vous réélisez le Parti québécois. Il a écrit ça, il a dit ça en ayant prévu un trou de 3 milliards.

Et là c'est pire. Ça, c'est le deuxième étage. Donc, premier étage, le chiffre de 3 milliards, il est faux, et ils le savent. Deuxième étage, ils avaient... La ministre de la Famille n'a pas suivi, le chiffre de 5 milliards est aussi faux, elle relira le transcript. Luc Godbout dit que c'est faux, c'est une hypothèse, et Gérald Fillion dit que c'est faux. Alors, non seulement c'est faux, ce n'est pas possible qu'ils se soient surpris parce qu'ils ont fait cette prédiction.

Et, troisièmement, pendant la campagne électorale, il y a eu une journée funeste où le premier ministre actuel a déposé le cadre financier du Parti libéral, qui est en ce moment le document le plus amusant ou le plus triste de l'histoire politique récente du Québec parce que presque à chaque ligne ce sont des promesses brisées, presque à chaque ligne. Mais en fait le premier ministre actuel, qui était candidat à l'époque, s'est fait poser la question, parce que les journalistes, ils suivent, ils suivent. Les journalistes, ils ont dit : Oui, mais, M. le chef du Parti libéral, vous n'avez pas arrêté de dire qu'il y aurait un trou en arrivant. Alors, qu'est-ce qui va se passer s'il y a un trou en arrivant, si vous êtes élus? Voici ce qu'il a dit, M. le Président, et je le cite : «On va faire en sorte que [le cadre financier] se réalise même après l'examen [que nous allons demander au Vérificateur général des finances publiques].» Le cadre financier sera «révisé en tenant compte des trouvailles du Vérificateur général, s'il y en a». Fin de citation. Les promesses du Parti libéral — je cite encore l'actuel premier ministre — «vont se réaliser. S'il faut faire encore plus d'efforts de rationalisation, on le fera. On n'ira pas demander aux contribuables de mettre la main dans leurs poches davantage.» Fin de citation.

Donc là, on a trois fois. On a la première fois en sachant que le 3,7 et le 5 milliards, ce sont des chiffres hypothétiques dont même les auteurs... Luc Godbout dit que c'est un chiffre hypothétique qui ne se serait jamais réalisé. Donc, ça ne peut pas être une surprise. Cette surprise, elle n'existe pas. Deuxièmement, dans leur rhétorique politique, M. le chef du gouvernement actuel, lorsqu'il était candidat, disait : Vous allez voir, il va y avoir un trou de 3 milliards. Donc, lorsqu'il a fait des promesses, soit il ne croyait pas à ce qu'il disait quand il disait qu'il y avait un trou, soit il y croyait puis il ne croyait pas à ce qu'il disait quand il disait qu'il faisait des promesses. Et, troisièmement, quand on lui a demandé : Oui, mais, M. le chef du PLQ, s'il y avait un trou?, il a dit : S'il y avait un trou — et je le cite encore parce que c'est trop beau — «on n'ira pas demander aux contribuables de mettre la main dans leurs poches davantage».

Alors, M. le Président, franchement, quand on sait la fragilité du lien de confiance entre la population québécoise et ses élus, quand on sait combien, pendant neuf ans de gouvernement Charest, ce lien de confiance a été effiloché, mis à mal, éreinté, ratatiné et, finalement, cassé, et que là, maintenant, ils reviennent au pouvoir, et la première chose qu'ils font, c'est de le recasser, ça va mal, M. le Président. Ça va très mal.

Et là on nous dit : Nous, on connaît ça. Ça, je cite le ministre de la Santé qui nous a dit, en commission parlementaire, parlant des... tous les groupes qui lui avaient dit le contraire, parlant de l'opposition, qui était, et je le cite : d'une ignorance abyssale. Ce sont les termes du ministre de la Santé : ignorance abyssale. On attend encore que le premier ministre le rabroue là-dessus, mais peut-être qu'il est tanné de rabrouer constamment son ministre de la Santé. Mais, en tout cas, c'est les termes qu'il a utilisés pour contester les arguments de l'opposition officielle, qui ne fait que relayer les opinions de 48 groupes différents qui ont dit, avec un maximum de... j'ai trouvé, d'à propos mais aussi de civilité, que ce que faisait le ministre n'était pas la solution pour régler les vrais problèmes du système de santé.

Alors, je voudrais dire une chose qui m'a particulièrement frappé pendant ces audiences. C'est le fait que... Lorsqu'on fait une réforme, le ministre donne les orientations, l'Assemblée nationale vote, mais ensuite ce sont des hommes et des femmes qui appliquent la réforme. Et tout bon gestionnaire sait, et tout bon cadre sait, et tout bon salarié sait que, si on veut qu'une réforme soit couronnée de succès, bien, il faut, au mieux, la participation active de ceux qui vont l'appliquer; au pire, au moins, pas une opposition active. Or, ce dont on s'est rendu compte, c'est que la façon utilisée par le ministre pour introduire sa réforme n'invite pas à la collaboration des gens qui vont l'appliquer sur le terrain.

Alors, je vais vous citer ce mémoire de l'Association des cadres supérieurs de la santé et des services sociaux. Ça, c'est les gens qui vont avoir à mettre en oeuvre la réforme, c'est les premiers intervenants. Ils disent ceci :

«Dans la transformation proposée par le ministre de la Santé [...] la dimension humaine est le principal enjeu. [...]Les cadres supérieurs sont insultés, outrés, démotivés par les propos du ministre [...] à leur égard sur la place publique. Loin de vivre dans la paperasse ou d'être une tour de Babel, les cadres supérieurs consacrent en moyenne une trentaine d'années de leur carrière à servir la population du Québec. Ils constituent les principaux agents de changement organisationnel de premier ordre. Ils sont les porteurs et les responsables du rythme du changement incontournable[...]. Ce sont les animateurs de la culture du changement.»

Or, ils se sentent insultés, outrés, démotivés. Et d'ailleurs leur première recommandation au ministre, recommandation numéro un : «Que le ministre de la Santé [...] adopte et tienne un discours respectueux sur la place publique à l'égard des cadres supérieurs du réseau de la santé et des services sociaux.» Ça commence bien. Alors, quelle a été sa réponse? Bien, c'est qu'ils sont d'une ignorance abyssale. Bien là, ça a été la réponse : d'une ignorance abyssale.

• (16 h 30) •

Bon, on sait qu'une des grandes craintes qui a été évoquée au sujet de ce projet de loi — dans les minutes qui me restent, M. le Président — ça a été : Est-ce que ça ouvre la porte à plus de santé? À plus de santé, non, mais à plus de privé dans la santé. Et on connaît l'intérêt que certains membres du Parti libéral ont pour avoir plus de privé dans la santé. On connaît l'intérêt que le premier ministre, lui-même médecin, a eu pour le privé dans la santé. On sait que c'est un de ses legs, d'ailleurs, comme ministre de la Santé, d'avoir ouvert l'assurance privée en santé et d'avoir ouvert plus de centres médicaux associés en santé. On sait aussi que la CAQ, qui est l'autre aile du gouvernement, a beaucoup dit qu'elle aimait l'idée du privé dans la santé, mais le ministre, à sa décharge, je dois dire que, constamment, lorsque la question a été posée, a dit : Bon, moi, il n'en est pas question, moi, je veux le système public. On veut bien le croire, mais il y aura un test, parce qu'il y a un article, dans la loi, qui fait en sorte que... La mécanique, je vais vous l'expliquer bien simplement. En ce moment, une agence régionale de la santé, celles qui vont être abolies, peut constater qu'il y a un manque dans le continuum de soins et peut recommander au ministre que, bien, peut-être qu'une clinique médicale associée, qui peut être privée, pourrait combler ce soin, hein? Et, à la régie régionale, à l'agence régionale, il y a un conseil d'administration qui pourrait bloquer ça. Le ministre a décidé... Il n'y a personne qui l'a obligé à faire ça, là, le ministre a décidé de modifier la procédure pour que ce soit quelqu'un dans les futurs centres intégrés de santé, quelqu'un qui n'est pas désigné, qui recommande au ministre d'accepter qu'une clinique médicale privée pourrait combler un manque. Il n'y a personne d'autre dans le processus. Ça revient à la table du ministre, qui nous a par ailleurs annoncé 50 supercliniques, dont on peut penser qu'elles seront privées. Alors, ça, c'est la première difficulté qu'on y voit.

La deuxième difficulté, c'est qu'en détruisant les conseils d'administration locaux puis en renommant un certain nombre de conseils d'administration, il s'est dit favorable à un profil entrepreneurial. Et d'ailleurs la chambre de commerce a dit : Nous sommes très favorables au projet de loi parce qu'il y aura un profil entrepreneurial maintenant au conseil d'administration et que ça pourrait créer un climat plus sain pour l'augmentation des liens avec le privé.

Mais moi, j'ai été surpris ce matin, et je terminerai par ça, d'entendre — hier, c'est-à-dire — le ministre dire que... ce livre Le privé dans la santé, qui est la somme de ce que les chercheurs québécois connaissent sur la question et qui conclut à l'inefficacité et la non-rentabilité du privé dans la santé, le ministre ne l'a pas lu. Alors, j'en suggère la lecture au ministre, aux collègues de la CAQ, aux collègues du parti ministériel et même à certains collègues au Parti québécois. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : M. le député de Rosemont, on vous remercie de votre intervention. Et... juste une seconde, là. Madame...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, ça va. En vertu de 213?

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bon, avant 213, je suis obligé de valider si M. le député de Rosemont accepte la question qui sera posée. Et vous connaissez le règlement : question assez brève et évidemment même chose pour la réponse.

M. le député... M. le ministre, pardon, du Travail, allez.

M. Hamad : M. le Président, ça me fait plaisir. Merci, M. le Président. Compte tenu que le député est connu pour sa franchise, le député de Saint-Jérôme en est témoin, alors ma question est simple : Est-ce que le député a lu le rapport du Vérificateur général, qui montrait le manque à gagner de 5 milliards? La réponse est simple : Oui ou non. Si oui, quelle page, c'est écrit «5 milliards»?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, M. le député de Rosemont, à vous la réponse.

M. Lisée : Oui, bien, j'ai pris connaissance du rapport. J'ai pris connaissance du rapport Godbout-Montmarquette qui disait que c'était une hypothèse — et je connais aussi le fonctionnement des gouvernements — et que, lorsque ces hypothèses sont avancées, le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor disent : Non. Ce qui fait que ce 5 milliards n'aurait jamais vu le jour et que vous savez, comme moi, que ce chiffre est une hypothèse, et on ne peut pas fonder une action gouvernementale sur de la désinformation.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, voilà. Question posée, réponse posée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Gouin...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ... — juste une seconde — qui veut intervenir sur le projet de loi... sur le principe du projet de loi n° 10. Et je cède la parole à Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Merci beaucoup, M. le Président. Pour une durée de?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, à ma connaissance, vous avez le même droit que les parlementaires, 20 minutes, parce que c'est sur le principe puis vous êtes de plein droit à l'Assemblée nationale sur le principe d'un projet de loi. À vous de décider le temps que vous prendrez, mais le maximum du temps imparti, c'est 20 minutes.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Alors, j'ai eu l'occasion, un peu plus tôt, d'exprimer pourquoi j'aurais cru, au nom de ma formation politique, qu'il aurait été intéressant de prendre davantage de temps avant d'en arriver à l'adoption du principe. L'Assemblée a statué, mais je rappelle simplement que le bilan des dernières réformes du système de services sociaux et de santé n'a pas donné les résultats escomptés, qu'on s'apprête à entreprendre une réforme absolument majeure, très, très bousculante, très dérangeante pour l'ensemble du réseau, que l'on soit usager, cadre ou travailleur, travailleuse syndiqué. Et donc il faudrait vraiment réfléchir à ce qu'on va faire, c'est ce que sont venus d'ailleurs nous dire de multiples intervenants et intervenantes lors de la commission parlementaire.

En fait, cette réforme proposée par le ministre de la Santé et des Services sociaux est tellement loin de faire consensus que, sans risquer de trop me tromper, je dirais facilement que plus de 90 % des mémoires qui nous ont été présentés indiquaient ou bien une opposition marquée à cette réforme, à ce projet de loi, ou alors les mots qui étaient le plus souvent utilisés étaient «scepticisme», «très grandes inquiétudes», «craintes». Alors, on ne peut vraiment pas parler d'un réseau, tous niveaux confondus, qui adhère avec enthousiasme à une réforme qui, pourtant, les concerne au premier chef.

Je rappelle que, récemment, une trentaine d'organisations représentant une diversité d'acteurs et d'actrices de la société civile ont signé une déclaration commune qui presse le ministre de retirer son projet de loi. Les gens déplorent l'absence d'une véritable consultation avant même d'avoir élaboré ce projet de loi. Ils dénoncent la concentration tout à fait inédite des pouvoirs entre les mains du ministre, en fait on assiste ici à une supercentralisation des pouvoirs, et ils craignent énormément les grandes limitations à l'autonomie des établissements, tout comme ils déplorent la perte totale et absolue de la participation citoyenne.

Près de 80 professeurs et chercheurs ont aussi indiqué que cette réforme serait un échec de la démocratie. Et je suis complètement d'accord avec cette position. Ça revient à dire : On ne fait pas confiance aux gens, on ne fait pas confiance aux citoyens. D'ailleurs, je rappelle que les gens de l'Institut de la gouvernance ont traité les conseils d'administration de bric-à-brac, ce qui n'était pas très gentil à l'égard des milliers de bénévoles qui, chaque année, se consacrent courageusement à la gestion des établissements de santé et services sociaux.

Les trois fédérations de médecins — spécialistes, omnipraticiens, résidents — sont venues exprimer des réserves majeures. Les spécialistes disant : «Nous croyons qu'une réorganisation d'une telle envergure pourrait engendrer des bouleversements importants et des effets davantage négatifs que positifs.» Les omnipraticiens : «Pour beaucoup de médecins, l'inquiétude à l'égard du projet de loi n° 10 provient [...] de l'appréhension de voir les services hors établissement et ceux offerts en CLSC devenir des laissés-pour-compte pour, éventuellement, s'amenuiser sous l'influence qu'exerceront les grands hôpitaux d'une région sur la gestion du CISSS et [...] son gigantesque budget.» Et les résidents : «Signer un chèque en blanc au ministre de la Santé et des Services sociaux sans savoir ce que nous recevrons en échange ne fait politiquement et démocratiquement pas de sens...»

L'association des centres communautaires pour aînés nous a dit qu'elle n'est pas favorable à l'adoption du projet de loi n° 10 : «Son application précipitée, combinée au contexte actuel de restrictions budgétaires, mettrait le réseau de la santé et des services sociaux dans un inconfort généralisé alors qu'il tarde à se relever de la dernière réforme.» Et même l'association des cadres supérieurs des établissements de santé et des services sociaux pose des questions. Ils disent : «Qu'adviendra-t-il de cette proximité des décideurs avec les partenaires du milieu pour exercer la responsabilité populationnelle, particulièrement si on pense à un territoire géographiquement étendu sur, [parfois], 10 000 kilomètres carrés? Comment les comités de direction pourront-ils prendre des décisions éclairées centrées sur la clientèle — donc la population — pour d'aussi grandes régions? Les réalités régionales ne risquent-elles pas d'être évacuées?»

Et la communauté anglophone, pourtant généralement acquise au gouvernement du Québec, au gouvernement libéral, s'est opposée au projet de loi n° 10 et elle dit : «...avec la création des mégastructures et la dévalorisation du rôle communautaire dans la gouvernance que propose le projet de loi, le progrès des communautés d'expression anglaise, en tant que partie prenante dans le système, se voit compromis : il s'agit d'une véritable perte pour ces communautés et pour les établissements voués à mieux les servir dans leur langue. [...]En d'autres mots, la participation dans la gouvernance des établissements est importante, non seulement à l'égard du contrôle et de la gestion, mais aussi pour le bien-être qu'elle procure au sein des communautés. Ce que le projet de loi n° 10 propose constitue une vraie perte pour ces communautés», parlant bien sûr des communautés anglophones.

• (16 h 40) •

La liste pourrait être très longue des nombreux intervenants, des nombreuses intervenantes qui sont venus manifester des préoccupations majeures face au projet de loi. Des travailleuses et travailleurs du réseau jusqu'aux gestionnaires, en passant par les groupes communautaires, les associations de la société civile, les spécialistes, les organismes gouvernementaux ou des acteurs respectés comme l'avocat défenseur des usagers, Jean-Pierre Ménard, ou l'ex-ministre libéral Claude Castonguay, qu'on ne peut pas soupçonner d'être si près que ça en général des positions de Québec solidaire, tous ces gens-là, tout ce monde-là s'accorde pour demander au ministre de surseoir à son projet et de vraiment bien réfléchir avant d'opérer des bouleversements majeurs. Il serait vraiment plus sage de prendre une pause pour avoir un vrai débat de société, faire un bon bilan du passé et mieux envisager l'avenir.

Le projet de loi n° 10, à notre avis, comporte de trop nombreux problèmes. Premièrement, il concentre beaucoup trop de pouvoirs entre les mains d'une seule personne, c'est-à-dire le ministre de la Santé et des Services sociaux. C'est le ministre qui nomme les directeurs et directeurs adjoints des CISSS, ce que beaucoup ont dénoncé. Il nomme les représentantes et représentants des conseils d'administration de ces établissements. Comment ne pas penser que ces personnes nommées par un ministre seront forcément, et peut-être parfois malgré elles, inféodées à tout ce que le ministre va vouloir dire ou faire? D'ailleurs, il nous a dit clairement en commission parlementaire : Si les gens ne livrent pas la marchandise comme je veux, bien, on va en nommer d'autres.

Que le ministre veuille donner des orientations à un système de services sociaux et de santé, c'est tout à fait normal. Qu'il y ait un débat de société sur ces grandes orientations, qu'ensuite le ministre et même le gouvernement donnent des orientations, normal. Mais après ça ça prend quand même un peu d'autonomie régionale et même sous-régionale pour appliquer les grandes orientations en tenant compte des particularités du milieu. Et, au fond, ce que le ministre nous dit, c'est : Non, non, non, ça ne fonctionnera pas comme ça. Même les plans stratégiques de développement en santé et services sociaux dans les régions pourraient être conçus au ministère ici, à Québec, par des fonctionnaires certainement bien intentionnés mais qui, enfin, ne peuvent pas connaître intimement les réalités de l'ensemble des régions du Québec. Donc, cette centralisation nous apparaît démesurée, totalement dysfonctionnelle, improductive et contraire à ce que le Québec essaie de faire depuis des décennies maintenant, c'est-à-dire associer les communautés aux réflexions et aux décisions, que ça soit en santé et services sociaux ou dans d'autres domaines.

Justement, le projet de loi n° 10 fait reculer la démocratie et la participation citoyenne. Alors, on sait maintenant qu'il n'y aura plus de travailleurs et de travailleuses sur les conseils d'administration d'établissement, une seule personne représentant le conseil des usagers. Et là le ministre a pris soin, dans le projet de loi, de nous énumérer la nomenclature des gens qu'il veut voir sur les conseils d'administration, dont la majorité, au fond, ont une qualité principale, c'est d'être des gestionnaires, d'être des gens qui ont une pensée entreprise privée. D'ailleurs, le ministre nous le dit, hein? Le réseau des services sociaux et de santé, là, il y a eu une fois en commission, il nous a dit clairement : C'est comme une entreprise.

Eh bien, non. Non. Je souligne respectueusement au ministre qu'un réseau public, un réseau immense comme celui-là, complexe, multifonctionnel, qui doit répondre aux besoins de toutes sortes de gens différents dans la population, ça ne se gère pas comme dans une entreprise multinationale qui a son siège social quelque part et des milliers de franchisés qui font tous exactement la même chose. Non, ça n'est pas comme ça que ça fonctionne. Et tous les travaux des chercheurs, ce qui se passe dans les pays les plus avancés à l'extérieur du Québec, nous le disent, il faut vraiment qu'il y ait une association du local, du régional et du national pour que ça fonctionne. Les citoyens doivent se sentir partie prenante de l'organisation d'un système.

On centralise aussi beaucoup les services à la population. Et là il y a toutes sortes d'inquiétudes qui surgissent. En éloignant le pouvoir décisionnel des gens, des communautés, des sous-territoires, comment est-ce qu'on va faire pour prendre en compte des particularités même locales? Par exemple, l'un des intervenants est venu nous dire : Est-ce que, de Rimouski, on va être capable de vraiment bien prendre en compte les besoins en maintien à domicile dans les villages des terres de l'arrière-pays du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie? Est-ce que, de Rouyn-Noranda, on va vraiment bien savoir ce que veut le Témiscamingue? Et je fais exprès pour prendre ces exemples-là, ayant de nombreux amis dans ces régions, pour savoir que les réalités ne sont pas toujours exactement les mêmes et que les gens sont assez jaloux de leur autonomie et de leur capacité à décider pour eux-mêmes. Alors, de n'avoir qu'un seul CISSS par région nous paraît vraiment être une aberration.

Beaucoup ont soulevé le cas de la Montérégie. Le ministre a annoncé des amendements là-dessus, j'ai hâte de les voir. Mais il n'y a pas que la Montérégie, il y a les Laurentides, il y a Lanaudière, il y a l'Estrie, il y a la Côte-Nord et les autres régions que j'ai nommées. Je ne pense pas qu'on puisse décemment croire qu'un seul établissement régional, soit dans des régions extrêmement densément peuplées comme la Montérégie ou dans des régions beaucoup moins densément peuplées mais très, très grandes géographiquement... je ne peux pas croire qu'on s'imagine que ça va être vraiment bien géré, qu'on va vraiment bien répondre aux besoins des gens à la base.

Je voudrais aussi faire une mise en garde sur l'organisation de ce qui s'appelle les programmes-services. Il est évident que c'est intéressant de penser que ça va être plus fluide si on réfléchit au passage de la première ligne à la deuxième, à la troisième. Tout le monde veut cette fluidité. Tout le monde veut qu'une personne qui a besoin de services de santé ou de services sociaux puisse d'abord avoir ou bien un médecin de famille, ou bien une travailleuse sociale, ou bien tout autre professionnel qui va s'occuper de cette personne et qu'ensuite, si on a besoin de services davantage spécialisés, ça puisse se faire.

Il y a deux problèmes. Il y a celui de la fluidité, c'est réel, ça existe, et il faut le regarder. Et il y en a un autre, c'est qu'on aura beau rendre plus fluide le passage de la première à la deuxième ligne, si on manque de spécialistes dans une région, ce n'est pas ça qui va faire que les gens auront des services spécialisés plus rapidement pour leurs enfants ou pour eux-mêmes. Donc là, on essaie de nous faire croire que la fluidité va forcément rendre les services accessibles. Rien n'est moins vrai. Tout dépend de l'organisation des services, où se concentrent les spécialistes. Ce dont il faut s'assurer, c'est que les gens, oui, aient réellement accès à des spécialistes lorsqu'ils en ont besoin. La fluidité, oui. Cela ne justifie pas que l'on crée un seul établissement par région. Ça peut se faire autrement, y compris sur la base des CSSS actuels, qui pourraient intégrer — je pense à Montréal, entre autres — des hôpitaux qui, pour le moment, ne sont pas intégrés dans les CSSS et qui pourraient l'être. Et donc ça rendrait effectivement les passages plus fluides.

Une autre crainte très souvent exprimée, c'est le renforcement de la vision hospitalocentriste de la santé. Il est certain que, si on a un seul établissement régional avec un conseil d'administration nommé par le ministre, rempli de gestionnaires, de gens qui comptent les sous... Et là on a les hôpitaux qui en prennent beaucoup, de sous, beaucoup, beaucoup, beaucoup, les hôpitaux, toute la technologie, tout le secteur des médicaments, tout le secteur médical. Qu'est-ce qu'il va rester exactement pour les services sociaux? Oui, le ministre nous dit — parfois la ministre déléguée aussi : Il y a une protection des budgets pour les services sociaux, à cause de l'article 55 de la loi. Mais moi, je pose une question : Oui, il y a cet article 55, mais il y a aussi une loi qui interdit aux hôpitaux de faire des déficits. Laquelle aura préséance? En tout cas, si le passé est garant de l'avenir, jusqu'à présent, chaque fois qu'un hôpital se dirige vers une situation de déficit appréhendé, il pige dans les budgets du social. Est-ce qu'on est vraiment certains que ça va être réglé avec le projet de loi n° 10?

• (16 h 50) •

Nous craignons aussi, à cause de l'article 38 et de l'article 59 du projet de loi n° 10, une ouverture encore plus grande du système de services sociaux et de santé à la privatisation des services. Je rappelle qu'au Québec, quoi qu'on en dise, là, déjà il y a beaucoup, beaucoup de privé dans les services sociaux et de santé. Combien de nos concitoyens, découragés par les délais d'attente, et je parle de gens qui n'ont pas toujours forcément beaucoup d'argent, finissent par aller dans le privé parce que c'est la seule façon d'être rapidement rassurés sur leur état, de passer rapidement des tests, d'avoir rapidement un traitement? Cela n'est pas normal.

Le projet de loi ouvre toute grande la porte à de la sous-traitance, à des ententes de service avec des organismes privés. Je pense qu'il va falloir être très attentifs à cela, parce que, d'une part, les personnes ayant des revenus très élevés vont donc pouvoir très facilement avoir accès, beaucoup plus rapidement que les autres, à des services. Mais, d'autre part, les gens de la classe moyenne, si on ne résout pas les problèmes de délai d'attente dans le public, vont se trouver à payer une majeure partie de leurs impôts pour le système de santé, puis ils vont payer une deuxième fois pour avoir des services privés, parce que le réseau public n'y arrive pas. Ça nous apparaît tout à fait inconcevable.

Le projet de loi, enfin, accentue les craintes du mouvement communautaire, et beaucoup d'organismes sont venus exprimer ces craintes. En travaillant avec un système de programmes-services, donc très compartimenté et par problématiques, on se trouve à aller à l'encontre de ce que font beaucoup d'organismes communautaires, qui ont des missions globales, qui essaient de traiter les personnes, les familles, que ce soient des jeunes ou des moins jeunes, dans leur globalité. Et donc les organismes communautaires se demandent comment ils vont être traités par ce réseau qui va fonctionner en programmes-services. On n'est vraiment pas certains de l'interdisciplinarité entre les différents programmes-services dans le réseau, mais, à l'extérieur du réseau, parce que les organismes communautaires ne veulent pas être intégrés au réseau, on se dit : Ça va fonctionner comment, là, des ententes de service avec le communautaire? Comment le communautaire va-t-il être financé? Est-ce qu'un programme comme le PSOC, bien connu du communautaire, va continuer de s'appliquer? Et qui va vraiment travailler au financement des organismes communautaires, et dans quelle optique? Donc, beaucoup, beaucoup de craintes des organismes communautaires.

En conclusion, je dirais que ce projet de loi a très sérieusement besoin d'être revu. Il a sérieusement besoin d'être revu parce que, premièrement, il ne répond en rien au problème d'accès aux services, et d'accès aux services de première ligne particulièrement. Il ne répond en rien à ce qui est le principal problème, au Québec en ce moment, dans le système des services sociaux et de santé. Il est très clair que ce projet de loi, je dirais, ne passe pas le test de l'acceptabilité sociale ni à l'intérieur du réseau — qui est quand même un gros réseau, qui est quand même important — ni à l'extérieur. En fait, beaucoup de gens ont l'impression qu'une sorte de bulldozer est en train de passer, sabrant dans des acquis construits patiemment depuis les 20 ou 30 dernières années. Tout va trop vite, tout est trop gros, trop énorme. Ça n'est pas possible de fonctionner comme ça.

Nous pensons que le ministre doit surseoir à son projet pour faire un bilan sérieux et consulter vraiment les gens du réseau, les acteurs et les actrices du réseau, de même que les conseils d'usagers pour leur demander : Comment voudriez-vous que ça fonctionne? Parce que, oui, il faut améliorer le fonctionnement des services sociaux et de santé. Nous aurons des propositions d'amendement à soumettre à la commission parlementaire. Nous allons le faire de façon constructive. Mais, d'ici là, nous nous voyons obligés de voter contre le principe d'un projet de loi qui ne répond pas, à notre avis, aux besoins des Québécoises et des Québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, Mme la députée de Gouin, de votre intervention sur le principe du projet de loi n° 10. Et je reconnais maintenant M. le député de Chambly pour son intervention, toujours sur le principe du même projet de loi. M. le député, à vous la parole.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci, M. le Président. D'abord, puisqu'il est question de santé, je veux tout d'abord saluer le travail du personnel soignant au Québec. Parce que, quand on parle du réseau de la santé, on s'adresse souvent aux administrateurs, mais, il faut le dire, la qualité des soins offerts, le professionnalisme du personnel soignant et des intervenants sociaux au Québec n'est rarement, pour ainsi dire jamais remis en compte. Puis il ne faudrait pas que ces gens-là se sentent visés par les débats qu'on fait ici puis par les interventions que mon groupe parlementaire fait, ce n'est pas du tout le cas. Quand on a un problème, au Québec, avec le réseau de la santé, c'est d'abord et avant tout un problème de coûts d'administration qui sont énormes, c'est un monstre bureaucratique et administratif, et c'est aussi un problème d'accès à ces soins de santé, qui sont de qualité quand on y a accès. Parce que la carte-soleil nous permet de rentrer physiquement dans l'hôpital, mais, avant de voir le médecin, des fois le cas a le temps de s'aggraver gravement.

Et, pour accepter, là, de résoudre ces problèmes-là, bien, il ne faut pas nier les problèmes. Malheureusement, d'après ce que j'en sais, dans les travaux qui ont été menés pour travailler sur ce projet de loi là, les gens de l'opposition officielle ont trop souvent joué le rôle d'obstructeurs, de bloqueurs, d'empêcheurs d'avancer, et ça, ça ne nous aide pas du tout à résoudre les problèmes, hein? Quand une voiture ne fonctionne pas, là, ce n'est pas en lui fixant un sabot de Denver qu'on règle le problème. Il faut s'attaquer au problème pour vrai, il faut accepter d'en débattre, il faut accepter de proposer des modifications qui vont améliorer ce projet de loi là.

C'est ce que nous avons tenté de faire, à la Coalition avenir Québec. Est-ce qu'à chaque fois ça a été accepté? Non. Est-ce qu'à la fin on pourra adopter ce projet de loi là? Ça va être à voir, ça va dépendre du niveau d'ouverture et ça va dépendre de cette capacité à améliorer réellement l'accès aux soins et à diminuer cette administration extrêmement lourde. Parce que, l'administration très lourde, qu'est-ce qu'elle fait? Elle vient gruger nos ressources financières, et ce manque de ressources financières nous éloigne de l'objectif, qui est, encore une fois, l'accès aux soins.

Donc, il faut accepter de travailler et ne pas obstruer et bloquer le travail parlementaire. Je lance un appel, ici, là, à tous les parlementaires de toutes les formations politiques.

Parlant de modifications, une des modifications importantes qu'on soumet, et je le répète, bien, c'est de ramener les CISSS, les centres intégrés de santé et services sociaux, à une taille humaine. Beaucoup, beaucoup d'experts en administration publique — je n'en suis pas un, mais je suis capable de les consulter — nous disent qu'un maximum de 500 000 personnes doivent être visées par une structure administrative. Donc, c'est quelque chose à ne pas dépasser. Or, le ministre nous propose quelque chose qui, dans bien des cas, nous amène à des regroupements beaucoup plus grands que 500 000 personnes. Je parle de la Montérégie, là où habitent mes concitoyens du comté de Chambly, où on a 1,5 million de personnes. Alors, 1,5 million de personnes, c'est une zone beaucoup trop grande pour faire un CISSS, ou même deux, il en faudrait trois. Le ministre a fait une petite ouverture, moi, je l'invite à continuer de cheminer et à nous donner, en Montérégie, trois CISSS, de façon à avoir une gestion optimale.

Laurentides est une autre région où il faudrait créer, encore une fois, deux CISSS. C'est la même chose dans Lanaudière et c'est la même chose pour Mauricie—Centre-du-Québec. Et ce n'est pas parce qu'on essaie de sauver chacun sa petite organisation administrative, c'est tout simplement pour atteindre un niveau d'organisation à taille humaine et gérable. Parce qu'il ne faut pas mettre de côté nos principes, qui sont d'arriver à quelque chose d'optimal, hein? On vise une administration publique qui va être au service des citoyens et pas le contraire. Ce n'est pas aux citoyens à essayer de faire leur chemin quelque part dans une espèce de monstre bureaucratique.

L'objectif auquel on souscrit, de notre côté, eh bien, c'est une décentralisation. Et on entend beaucoup de critiques du projet de loi, où on dit que le ministre ramène tous les pouvoirs à lui. Dans certains cas, c'est vrai, puis, dans certains cas, il faut faire attention. Il faut décentraliser la prise de décision à ces organismes régionaux. Ça, ça veut dire : Donner de grandes enveloppes budgétaires pour permettre à ces organismes-là, qui sont plus près, à taille humaine, je le répète, maximum 500 000 personnes, qui sont plus près des citoyens, qui sont à même de rendre les services... Donc, ces gens-là seraient imputables et auraient une reddition de comptes en fonction d'objectifs. On appelle ça des indicateurs de performance. Plutôt que d'avoir 50 ou 60 enveloppes dédiées, donnons-leur des missions, des objectifs précis, et évaluons cette performance-là avec des indicateurs de performance dans des organismes de taille... d'un maximum de 500 000 personnes, et puis, bon sang! on va y arriver. Ce n'est pas si compliqué, au fond. Il faut faire preuve de bonne foi, tout simplement.

Donc, je répète, nos objectifs... en espérant que les parlementaires de toutes formations politiques mettront les idéologies de côté pour réellement mettre le réseau au service des citoyens... puis d'aider le personnel soignant et les intervenants sociaux, qui se dévouent corps et âme à chaque jour, de les aider à rendre ces services-là, un accès facile, des coûts administratifs moindres et une décentralisation efficace. Merci, M. le Président.

• (17 heures) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de Chambly, pour votre intervention sur le projet de loi n° 10. On m'avait indiqué que le député de Rousseau voulait intervenir. Le voici. Alors, je cède la parole à M. le député de Rousseau pour son intervention, toujours sur le principe du projet de loi n° 10. M. le député, à vous la parole.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Oui. Merci, M. le Président. Alors, je m'excuse, je croyais qu'il y avait un 20 minutes qui était en chemin et j'ai été surpris par la relative brièveté de l'intervention. Mais c'est sans reproche, j'ai simplement été pris par surprise.

Alors, M. le Président, j'interviens sur le projet de loi lui-même après être intervenu un peu plus tôt aujourd'hui sur la motion de report, mais je vais quand même... vous allez me permettre d'utiliser certains des arguments que j'ai utilisés un peu plus tôt. La première chose que je vous disais puis que j'aimerais redire, c'est que le projet de loi que nous sommes à étudier et sur lequel nous devons nous prononcer est un projet de loi qui malheureusement est complètement déconnecté des difficultés auxquelles on fait face, au Québec, dans notre système de santé, complètement déconnecté parce que d'aucune manière ce projet de loi ne s'attaque aux véritables problèmes de notre système de santé et puis d'aucune manière ce projet de loi ne propose de véritables solutions à ces véritables problèmes.

Puis-je vous rappeler les problèmes auxquels nous faisons face? Ils sont bien connus. Le problème numéro un, je pense, et auquel de nombreux Québécois sont malheureusement confrontés, c'est celui de l'accès à notre système de santé. Je ne prétends pas puis je ne prétendrai jamais qu'il existe des solutions magiques à ce problème, je ne prétendrai pas cela, mais on ne me fera pas non plus accroire que le projet de loi sur lequel on me demande de me prononcer passe même un petit peu proche de résoudre ce problème d'accès. Jamais on ne va me faire accroire ça. Il existe des solutions alternatives, mais certainement pas, certainement pas un brassage de structures tel qu'on nous le propose dans le projet de loi n° 10.

Le deuxième problème, qui est documenté, qui commence enfin à être documenté, c'est un problème important, c'est le problème du surdiagnostic. C'est le fait qu'un certain nombre de tests médicaux, un certain nombre de tests diagnostiques et un certain nombre d'interventions chirurgicales aussi sont réalisés au Québec, qui ne sont pas nécessaires, des actes médicaux qui sont des actes posés pour les mauvaises raisons et qui résultent essentiellement d'une mauvaise pratique médicale. Évidemment, ça n'est pas la majorité des actes médicaux qui sont des actes médicaux inutiles, mais le problème du surdiagnostic est un problème bien présent, qui existe aux États-Unis, qui est bien documenté aux États-Unis, et on a toutes les raisons de croire qu'il existe aussi au Québec et que ça représente des milliards de dollars. En fait, c'est l'Association médicale du Québec qui le dit, ce n'est pas le député de Rousseau, là. Et il y a même des travaux qui ont été entrepris pour tenter de lutter contre le surdiagnostic. J'y reviendrai un peu plus tard, M. le Président. En attendant, encore une fois, le projet de loi d'aucune façon ne passe près de s'attaquer à ce problème. On est dans le brassage de structures, dans le changement dans des conseils d'administration. Et vous conviendrez facilement avec moi que le problème d'accès ou le problème de surdiagnostic, ce sont des problèmes qui sont complètement évacués.

Dernier problème peut-être, et puis, pour avoir été ministre des Finances et de l'Économie, je sais que c'est un problème réel, c'est de s'assurer que les services à la population sont offerts à des coûts qui n'augmentent pas trop rapidement, alors, bien sûr, c'est cette difficulté de contrôler les coûts. Et, là encore, le projet de loi ne passe même pas près de nous offrir une solution à ce problème du contrôle des coûts dans le système de santé, d'aucune manière.

Et les solutions aux problèmes auxquels nous faisons face, sans dire qu'elles sont miraculeuses, il y en a un certain nombre qui ont été mises sur la table, et puis je crois que je vais me faire le devoir de vous les rappeler pour que vous puissiez constater par la suite à quel point on est sur une planète éloignée dans le projet de loi n° 10, éloignée des véritables solutions aux problèmes auxquels nous sommes confrontés.

Première solution de base, évidemment c'est de renforcer la première ligne. Je n'invente rien, je sais que tous les députés ici connaissent cette phrase, connaissent ces mots. Et pourtant le projet de loi change les conseils d'administration, fusionne des établissements, mais ne dit pas grand-chose sur le renforcement de la première ligne. Et je reviendrai aussi sur les dangers qui guettent la première ligne de par la fusion des établissements dans des centres intégrés.

Deuxième élément de solution aux problèmes auxquels nous faisons face, évidemment le développement des soins à domicile. On le sait, le Québec est très en retard dans la fourniture de soins à domicile. Il y a des pays dans lesquels les soins aux personnes en perte d'autonomie sont majoritairement, très, très majoritairement des soins offerts à domicile, alors qu'au Québec, je crois, de mémoire, la proportion est en deçà de 20 %, alors que, de mémoire, au Danemark, je crois, on était tout près de 80 %. Et évidemment il va de soi que d'offrir des soins à domicile, ça coûte moins cher que d'offrir des soins en établissement. Puis il va aussi de soi que d'offrir des soins à domicile, c'est plus agréable pour les personnes soignées que d'être soigné en établissement. Solution très connue sur laquelle le gouvernement du Parti québécois auquel j'ai appartenu avait l'intention de s'attaquer, avait entrepris de s'attaquer, mais, disons-le, rien, encore une fois, dans le projet de loi n° 10, qui passe même près de cette solution.

Je le disais tout à l'heure, le problème du surdiagnostic est un problème important, et il faut trouver le moyen d'encourager des pratiques médicales de premier ordre, les meilleures pratiques médicales de façon à éviter le surdiagnostic. Rien, rien, rien dans le projet de loi, évidemment, qui nous est proposé. Et présentement, disons-le, il n'y a pas grand-chose non plus qui a été mis en place par le gouvernement du Québec pour lutter contre cette grande difficulté qui nous coûtent probablement des milliards de dollars.

Autre élément qui favoriserait... qui rendrait notre système de santé plus performant et meilleur pour les patients, évidemment c'est l'informatisation de notre système de santé. Mais là doit-on rappeler — et je vais le faire, M. le Président — doit-on rappeler le fiasco du DSQ, Dossier de santé du Québec, qui est le petit bébé de notre premier ministre actuel, bébé qu'il avait entrepris de mettre au monde alors qu'il était ministre de la Santé?

On nous disait à l'époque que le DSQ, ça coûterait quelque chose... enfin, ou, disons, autour de 600 millions de dollars, et aujourd'hui on parle d'un projet qui va bien au-delà du milliard. Je pense qu'on est au-delà de 1,5 milliard maintenant. Ça ne fonctionne toujours pas bien. Et on a pu voir, ce matin, à la période de questions, que le ministre de la Santé ne sait pas répondre à la question de : Qu'est-ce que vous allez faire? Il ne sait pas répondre. De toute évidence, il y a un très, très grand malaise au gouvernement libéral quand on parle du DSQ. C'est un fiasco parmi tant d'autres. Et évidemment le projet de loi n° 10 qui est devant nous, c'est une préoccupation de gens qui sont complètement déconnectés des véritables moyens qui permettraient d'améliorer notre système de santé.

Il y a d'autres solutions. Évidemment, il y a le financement à l'activité, financement à l'activité qui consiste, donc, à financer les établissements de santé sur la base non pas de l'histoire, mais sur la base des volumes de soins fournis ou sur la qualité des soins fournis. Là, il y a un travail à faire. Je crois que le gouvernement actuel est déterminé à aller dans cette direction-là, direction que nous avions entrepris de prendre, nous, de notre côté. Maintenant, encore une fois, le projet de loi n° 10 ne raconte rien à ce sujet-là.

Alors, M. le Président, donc, il s'agit d'un projet de loi qui est complètement déconnecté à la fois des vrais problèmes auxquels nous sommes confrontés et des vraies solutions à ces problèmes, complètement déconnecté. Maintenant, ce que je viens de dire, là, ce que je viens de dire, là, ça a été dit, redit, re-re-redit et répété à de nombreuses reprises tout au long des consultations qui ont été tenues. Et la vaste majorité des intervenants, la vaste majorité des intervenants sont en désaccord avec le projet de loi, sont contre, ils sont contre le projet de loi. Et, le ministre de la Santé, je ne sais pas ce qu'il ne comprend pas quand quelqu'un lui dit qu'il est contre le projet de loi n° 10, là, mais lui, il pense que tout le monde est pour. Alors, je crois qu'il va falloir faire la relecture tranquille de chacun des mémoires qui ont été déposés.

• (17 h 10) •

Mais, regardez, nous, on a fait le décompte, on a fait le décompte et puis, regardez, on reconnaît qu'il y a des gens qui sont pour le projet de loi, cela existe. Cela existe, des gens qui sont pour. Mais, regardez, la vaste majorité des gens sont contre, la vaste majorité des gens. Nous, on en a trouvé 48, là, dont ont peut dire qu'ils ne sont pas à l'aise avec le projet de loi, et un grand nombre, un grand nombre qui ont demandé au ministre d'aller refaire ses devoirs. Alors, lui, il les met dans la catégorie des gens qui sont pour, M. le Président. Lui, là, le ministre de la Santé, il pense que quelqu'un qui lui demande d'aller refaire ses devoirs, c'est quelqu'un qui est pour son projet de loi. Alors, regardez, quand on est là-dedans, là, c'est difficile, c'est clair, la conversation n'est pas simple.

Le ministre, de toute évidence, est complètement déconnecté. Le projet de loi est déconnecté et le ministre de la Santé est déconnecté, lui aussi. Alors, on a un gros problème, M. le Président, on a un gros problème. Le ministre doit prendre un temps d'arrêt, il doit aller refaire ses devoirs. Et je l'invite à réfléchir au fait que ce ne sont pas des amendements mineurs qui vont pouvoir corriger un projet de loi qui est fondamentalement incorrect et mauvais. Ce n'est pas vrai que des petits amendements vont modifier quelque chose qui est fondamentalement mauvais. Il y a, dans le projet de loi, écoutez, un nombre incroyable de problèmes. Je vais vous en nommer quelques-uns pour le guider dans la réécriture de son projet de loi parce que je pense que ça va être nécessaire.

Premièrement, il y a la centralisation incroyable qui est exécutée par ce projet de loi là. Ce projet de loi là centralise dans les mains du ministre des pouvoirs, des pouvoirs décisionnels qui n'ont pas à être transférés au ministre de la Santé — ça n'a aucun sens, cela n'a pas de sens — des pouvoirs qui sont exorbitants. Et cela va à l'encontre de tout ce qu'on a observé de progrès, dans le monde, dans les systèmes de santé. Les systèmes de santé qui ont progressé de par le monde sont des systèmes de santé dans lesquels on a décentralisé, et toute la littérature scientifique le démontre abondamment. Alors, on a un projet de loi qui va dans la direction opposée à celle dans laquelle on devrait aller. Ce n'est pas compliqué, ça, M. le Président.

Par ailleurs, on sait... Parce que, là, le ministre nous dit : On va économiser de l'argent, on va couper dans la bureaucratie. M. le Président, on sait très bien que, dans les systèmes centralisés, la reddition de comptes puis la paperasse, c'est la norme. On sait très bien qu'il va y avoir plus de normes, plus d'étages qui vont rendre des comptes à l'étage supérieur parce qu'ultimement il faut que le ministre comprenne quelque chose et puis qu'il y a beaucoup, beaucoup d'étages avant qu'on arrive au ministre. Alors, ça, là, c'est au coeur même du projet de loi. Et on prétend qu'on va couper dans la bureaucratie, M. le Président? On est en train d'en créer, avec ce projet de loi là, on est en train d'en créer.

Autre élément, la politisation, la politisation. En faisant en sorte que le ministre nomme tout le monde puis décide de tout dans le système de santé qu'il caresse voir se matérialiser, bien, M. le Président, que va-t-il arriver? Bien, il va arriver que les gestionnaires vont avoir peur, ils vont être effrayés de critiquer puis de formuler des réserves à l'égard des décisions prises par le ministre, ce qui fait que les décisions, plutôt que d'être prises par des gestionnaires responsables dans chacune des communautés, ce qu'on va avoir dans notre système de santé, ce sont des gestionnaires qui vont craindre le ministre de la Santé et puis qui n'oseront pas lui dire les réserves qu'ils ont quant aux décisions qui sont prises.

M. le Président, autre problème, et ça, je pense que c'est au coeur même de ce projet de loi là, c'est un projet de loi, donc, qui regroupe différents établissements dans un même centre intégré, et le fait de regrouper des établissements qui font... Bon, évidemment, il y a des hôpitaux là-dedans, mais il y a des centres locaux de services communautaires, il y a des centres jeunesse, il y a des centres de réadaptation, il y a de la santé publique. Alors, le fait de regrouper toutes ces organisations-là ensemble, qu'est-ce que ça va faire? Bien, ça va faire en sorte que l'une des organisations regroupées va prendre le dessus sur les autres. C'est la nature humaine, M. le Président, c'est la nature humaine.

Et qui va mener, qui va mener dans ce système-là, dans ce nouveau système là? On s'en doute bien, ce sont les hôpitaux. Les hôpitaux vont dominer. Et ce phénomène par lequel les hôpitaux finissent par dominer toutes les autres missions de notre système de santé et de services sociaux, on appelle ça comment? Bien, vous le savez, on appelle ça l'hospitalocentrisme. Et on sait que le ministre de la Santé est un fervent partisan de l'hospitalocentrisme. Ça se voit simplement qu'à lire, simplement qu'à constater la manière dont a été rédigé ce projet de loi.

Alors, l'hospitalocentrisme, ça veut dire quoi? Bien, ça veut dire que le renforcement de la première ligne, M. le Président, oubliez ça. Ça veut dire que la santé publique indépendante, qui est capable de bien assurer ses missions de prévention, oubliez ça, M. le Président. La réadaptation, qui est une partie importante de notre système de santé, va être dominée par l'hôpital. Le financement de nos organismes communautaires, ça va être dominé par les décisions des hôpitaux. La protection de la jeunesse. Toutes ces missions fondamentales vont désormais passer numéro deux, numéro trois, numéro quatre, numéro cinq, derrière le numéro un, qui va être l'hôpital. Ça va être ça. Ça va être ça. Et évidemment, de toute évidence, ça correspond à la vision du ministre de la Santé.

M. le Président, le projet de loi, je le disais, est rejeté par énormément d'intervenants qu'on a vus, et c'est très grave de vouloir procéder avec un projet de loi qui est rejeté par la majorité des intervenants parce qu'évidemment les changements que le ministre souhaite apporter ne pourront... Bien, prenons le cas, M. le Président, où ces changements seraient souhaitables. Je ne le crois pas, vous l'aurez bien compris. Mais, même s'ils étaient souhaitables, à partir du moment où les gens qui sont sur le terrain sont en désaccord, bien on a un problème, on a un problème parce que, pour que les changements soient un succès, il faut qu'il y ait adhésion des partenaires, des gens qui sont sur le terrain.

Alors là, on a deux problèmes. D'une part, les changements qui sont souhaités par le ministre ne sont pas souhaitables, hein, ils ne sont pas souhaitables, ils ne sont pas à l'avantage de notre système de santé. Puis, en plus de ça, les gens qui sont au coeur de notre système de santé ne sont pas d'accord. Alors, qu'est-ce qu'on va avoir? C'est la recette pour avoir de très graves problèmes, je dirais une catastrophe dans notre système de santé, M. le Président. Alors, tant et aussi longtemps que le ministre n'aura pas refait ses devoirs et obtenu l'adhésion des principaux partenaires du système de santé, il ne devrait pas procéder, il ne devrait pas procéder, c'est ma conviction profonde, M. le Président.

Je veux parler un peu des économies. Je veux parler un petit peu des économies que le ministre prévoit faire. Vous savez, M. le Président, que le ministre nous a dit qu'il allait économiser 220 millions de dollars, 220 millions de dollars. Qu'on mette ça en relation quand même, s'il vous plaît, avec le coût de notre système de santé qui est proche de 35 milliards de dollars. 35 milliards de dollars. Ça fait environ 0,6 %, 0,6 %. Il n'y a pas de petites économies, M. le Président, bien sûr, bien sûr, mais c'est quand même surprenant qu'un ministre de la Santé fasse de son premier combat une attaque contre les structures, un brassage des conseils d'administration, une fusion des établissements, alors qu'il y a tellement, tellement de choses à faire pour travailler sur l'accès, pour travailler sur le surdiagnostic, pour travailler à l'informatisation. Il y a tellement de choses qui auraient pu être faites, qui sont significatives puis qui sont à même de nous permettre de sauver des sommes importantes.

Alors, quoi qu'il en soit, 220 millions, maintenant il faut voir d'où ça vient tout cela. Ça vient évidemment des agences, qui, elles, vont disparaître, et puis ça représente un budget de 98 millions de dollars. Maintenant, il y a, à côté de cela, des centres intégrés qui vont être créés. Et les coûts supplémentaires qui vont découler de la création des centres intégrés, ça, on n'a rien là-dessus, pas d'information, aucune. Et j'ajouterais, M. le Président, que le projet du ministre implique, implique un regroupement de ressources informationnelles qui aujourd'hui ne se parlent pas, ne se sont jamais parlé, en tout cas, à ce jour, hein? Des systèmes informatiques qui, même dans un même établissement de santé, ne se parlent pas, qui ne sont pas capables de communiquer ensemble. Et là le ministre dit : On va mettre tout ça ensemble, puis ça ne va rien coûter. Regardez, M. le Président, j'ai le goût de rire quand je dis ça. Alors, M. le Président, il y a un problème évident de ce côté-là.

J'ajouterais... Écoutez, j'ai tellement de choses à dire, j'en ai des pages et des pages. Je vais simplement résumer ce que j'ai à dire sur ce projet de loi là. Alors, écoutez, résumons.

Tous ceux qui vont avoir à implanter ce nouveau modèle n'y adhèrent pas, sont inquiets des conséquences, et c'est clair que, dans ce contexte-là, c'est la recette assurée pour l'échec. Le ministre doit retourner à sa table à dessin, il doit s'assurer d'obtenir l'adhésion des gens, il doit s'assurer aussi de corriger les nombreux problèmes que j'ai évoqués. Il n'y a aucun lien, aucun lien entre ce projet de loi là et les vrais problèmes auxquels on est confrontés puis les vraies solutions que tout le monde connaît.

Le ministre nous dit que le nouveau système met le patient au centre de notre système de santé. Regardez, tout ce que ça fait, ce projet de loi là, c'est mettre le ministre au centre du système de santé, puisque son nom apparaît... le nom du ministre apparaît 104 fois, 104 fois, M. le Président, et le mot «patient» ne s'y trouve qu'une seule fois. 104 à 1, M. le Président. Ça, c'est les priorités du ministre, hein : le ministre, 104 fois; les patients, une fois.

Alors, écoutez, M. le Président, on va voter contre, je pense que vous aurez compris. Mais ce projet de loi a besoin d'être réécrit au complet.

• (17 h 20) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député de Rousseau, de votre intervention sur le projet de loi. Et j'attends le prochain intervenant, qui se manifeste. Et je reconnais M. le député de Drummond—Bois-Francs sur le principe du projet de loi n° 10. M. le député de Drummond—Bois-Francs, à vous la parole.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Alors, merci, M. le Président. À mon tour d'émettre quelques commentaires sur le projet de loi n° 10. Tout d'abord, je voudrais réitérer l'appui pour le principe, et je parle bien ici du principe du projet de loi, parce que nous, nous pensons, du côté de notre formation, que le statu quo actuel n'est pas un exemple à suivre.

Depuis de trop nombreuses années, nous avons des problématiques au niveau du système de la santé, bien que plusieurs ici veulent nous faire croire que nous avons toujours le meilleur système au monde. Il n'est pas ici question de dire quoi que ce soit sur le système de financement public de la santé qui, je pense, est encore le meilleur. Par contre, c'est au niveau du système lui-même, au niveau de la gestion de tous les services donnés sur le territoire et, pour ça, souvent, les problématiques au niveau des temps d'attente, O.K. C'est toujours...

C'est une guerre à n'en plus finir, les temps d'attente qui s'allongent, où, à chaque jour, nous pouvons voir dans le système de la santé des histoires qui finissent souvent très mal, malgré qu'il faut toujours dire que la majorité quand même finissent bien. Mais, pour ceux qui finissent mal, bien ce n'est pas plaisant pour les familles qui en subissent les conséquences. Et puis, là-dessus, je pense que cet aspect du temps d'attente n'est plus une possibilité encore qu'on... chaque Québécois, on s'est un peu assis... Et moi, je dis souvent comme un peu en farce, mais une farce très jaune, c'est que le système est beaucoup plus malade que le patient. Et souvent le mot «patient», je me dis encore, au lieu d'être malade... le mot «patient», c'est parce qu'on attend : il vaut mieux être patient, avant de recevoir des soins.

Alors, pour ça, nous, nous pensons que l'approche du ministre de la Santé est une approche qui est sans doute ambitieuse, mais que néanmoins nous devons avoir une oreille attentive et un regard sur les possibilités d'amélioration, même si par contre nous avons de grands points d'interrogation sur certains points, certaines lignes de ce projet de loi là.

Tout d'abord, je voudrais réitérer que notre programme, nous, à la CAQ, était justement l'abolition des agences de santé et, par contre, à la base, on gardait tous les CSSS. Et alors le projet de loi actuel va plus loin que ça, O.K.? Il supprime les agences, mais il fusionne aussi les CSSS par région. Et ça, ça nous amène à des grands questionnements au niveau de la grandeur... la grosseur de certains CSSS, notamment au niveau de la Montérégie, Lanaudière, au niveau des... le Québec même aussi, et certains aussi CSSS qui fusionnent à l'intérieur ici, au niveau universitaire de Québec, alors qu'à Montréal on a des identités distinctes.

Concernant la grandeur des CISSS actuellement que le ministre nous propose, j'ai un très grand malaise. Étant député du Centre-du-Québec, j'ai un très grand malaise au niveau de la... Bien, actuellement, c'est déjà comme ça, mais nous, on le revendique depuis des années au niveau du Centre-du-Québec et la Mauricie. Plusieurs qui sont venus nous voir en commission, qui étaient en général assez favorables au projet de loi, nous ont quand même dit que les CISSS de plus de 500 000 personnes poseraient des problèmes et que ça ne serait tout simplement pas gérable. Alors, à ce niveau-là, nous dépassons le 500 000, et, M. le Président, c'est beaucoup plus loin que ça.

Actuellement, le Centre-du-Québec est la seule région administrative qui n'a pas de reconnaissance sociosanitaire. Et ça, ça vient à l'époque où est-ce que le Centre-du-Québec a été divisé par l'ancien gouvernement, qui était M. Lucien Bouchard. Et malheureusement M. Bouchard, là-dessus, n'avait pas terminé son approche, et c'est pour ça que le Centre-du-Québec est toujours resté une région qui a été attachée, au niveau des centres administratifs, avec la Mauricie. Et cela, naturellement, a causé des problèmes, c'est-à-dire que l'argent est là, sauf qu'il n'est pas distribué toujours adéquatement. Pour cause, j'en tiens au nombre de médecins. Il y a plus de médecins par habitant en Mauricie qu'il y en a au Centre-du-Québec, alors que le Centre-du-Québec est une région qui grandit très vite. Si le rythme actuel ne change pas, nous allons dépasser la Mauricie dans plusieurs années, là, quelques années. Mais c'est à un rythme qui s'en va comme ça. Alors, je ne vois pas pourquoi que le sort du Québec serait encore à la merci de la Mauricie. Je n'ai absolument rien contre la Mauricie, mais, par principe, si nous sommes une région qui est reconnue, la région 17, alors elle se doit d'avoir son propre CISSS.

Et ce qui est encore plus insultant, c'est que, dans le projet de loi du ministre, il est écrit que toutes les régions administratives auront leur propre CISSS, alors que Centre-du-Québec n'y figure pas. Et de plus il est noté que le CISSS Mauricie—Centre-du-Québec, région 04... le mot «17»... la lettre «17», excusez, n'y figure même pas. Et ça, je trouve, pour les gens du Centre-du-Québec, c'est encore beaucoup plus aberrant parce qu'on est une région à part entière et, si...

J'ai posé la question au ministre là-dessus, il m'a dit : C'est une question de la grandeur au niveau de la population. Eh bien, j'ai une nouvelle pour lui, nous sommes la 12e région la plus populeuse sur les 17, alors que... Nous sommes plus populeux que la Gaspésie, que le Bas-du-Fleuve, que la Côte-Nord, l'Abitibi-Témiscamingue, et nous nous comparons avantageusement au Lac-Saint-Jean, à la Mauricie et l'Estrie, qui est un peu plus grand, mais, au niveau territoire, qui est assez similaire. Alors, je ne vois pas pourquoi nous, au Centre-du-Québec, on ne pourrait pas avoir notre propre CISSS.

Et, là-dessus, depuis des années, pour les soins tertiaires, beaucoup de la population à Drummondville et la région de Victoriaville se font soigner à Sherbrooke. Ça, il n'y a pas de problème. Le ministre nous dit... Il veut développer l'hôpital de Trois-Rivières pour offrir plus de services. Je veux dire, aucune personne ici ne va s'opposer contre une amélioration des services. Et je pense que, pour un citoyen de Drummondville ou de Victoriaville, il n'y a aucun problème à aller recevoir des services à Trois-Rivières si le besoin est au niveau des services tertiaires. Alors, là n'est pas le débat. Le débat est que nous, Centre-du-Québec, nous avons une région à part entière et nous devons avoir nos propres CISSS.

Concernant les autres régions, c'est bien entendu que des régions comme la Montérégie, où il figure plus de 1,5 million d'habitants, c'est sûr que l'administratif d'un si gros CISSS nous semble un peu loufoque parce qu'imaginez un citoyen de Granby qui est sur le même CISSS que quelqu'un qui est à Huntingdon, à l'autre bout de la Montérégie, et le nombre de citoyens que cela comprend. Alors, pour ça, nous, nous demandons justement qu'il y ait des... que le territoire soit divisé en trois ou, en tout cas, une approche similaire pour, justement, avoir une meilleure gestion, selon, justement, des experts qui étaient pour le projet de loi mais, justement, avec certaines recommandations. Alors, il y en a plusieurs qui étaient contre le projet de loi, certains avec raison et certains par crainte, justement, d'autres organismes qui oeuvrent dans le système de santé, qui sont un peu... des fois, que leur porte-voix est moins élevé, alors ils craignent d'être mis de côté, et cela, j'en conviens fortement, il faut que le ministre le prenne en compte.

Un autre point qui nous fait un peu questionner sur l'avancement... le projet de loi lui-même au niveau... Le ministre nous dit qu'on pourrait peut-être supprimer au-delà de 172 rapports annuels. Imaginez que, dans le système actuel de santé, il y a plus de 240 rapports qui sont remis au ministère de la Santé. S'il y a vraiment un problème, c'est vraiment au niveau de la paperasse. Ça, justement, il faut faire le ménage. Par contre, dans le projet de loi, il n'y a aucune ligne ou aucun texte de loi qui dit fortement, avec des cibles pointues, qu'on va diminuer le nombre de rapports. Alors, ça, je pense que c'est une grande lacune parce que, si le ministre ne se fixe pas de cibles, de buts chiffrés, il pourra toujours dire que sa réforme est bonne, mais elle est bonne avec quels chiffres, elle est bonne avec quels barèmes, quels critères? Je pense que, là-dessus, c'est une grande lacune, et il faudra justement mettre des articles spécifiques dans le projet de loi.

Le ministre nous dit aussi qu'il va faire des économies substantielles de 220 millions. O.K. Tant mieux. Tant mieux si l'on fait des économies au niveau des structures. Parce que nous, comme on l'a dit, nous, ici, on ne soutient pas les structures, nous, on soutient les services qui sont donnés aux citoyens. C'est ça, notre cheval de bataille depuis des années, on soutient le contribuable, que le contribuable en ait le plus pour son argent et qu'il ait des soins adéquats. Moi, je pose la question au ministre. Étant donné ce qu'il nous dit, là, l'impasse budgétaire, 220 millions dans un système de santé qui est presque la moitié du budget du Québec, ce n'est pas énorme, compte tenu de l'impasse de plusieurs milliards de dollars, alors j'aimerais ça qu'il nous dise aussi si d'autres coupes sont à venir à ce niveau-là. Et puis ça, c'est loin d'être certain.

• (17 h 30) •

Vous savez, M. le Président, beaucoup de personnes protègent un peu le système actuel. C'est toujours un peu le statu quo. On nous fait croire que le système est bon, que c'est le meilleur au monde, et autre. Mais moi, j'appelle ça un peu... j'appellerais ça un syndrome de Gérald Tremblay : Tout va bien, tout va bien, tu sais, au Québec, tout va bien, mais, pour régler les problèmes, il faut d'abord, premièrement, les reconnaître. Et je pense que c'est sage de vouloir reconnaître les problèmes et d'y faire face. Et, quand on regarde le système de santé, je pense que nous avons, à la santé... nous avons la chance d'avoir des personnes qui, à tous les jours, travaillent fort, d'excellente qualité, mais ils ont entre les mains un système qui fait grandement défaut. Et j'utiliserais un peu l'image — étant passionné de course — de Jacques Villeneuve. Jacques Villeneuve, ses deux premières années de course automobile, bonne voiture, il gagne le championnat du monde. Après ça, il a eu, comme on dit, une minoune, et il n'a jamais rien fait. Pourtant, le pilote était le même, il était encore bon. Bien, c'est un peu ce qui se passe dans le système de la santé, on a d'excellents personnels soignants. D'ailleurs, étant même, vous savez, d'origine suisse, malheureusement, plusieurs infirmières s'en vont travailler là-bas, puis on les perd. On ne peut pas se payer le luxe de perdre ces infirmières-là d'excellente qualité.

Alors, pourquoi? Parce que, justement, on a un système qui ne suit plus, on a un système qui fait de l'embonpoint, et puis, alors qu'il faudrait régler les problèmes, bien, on nous fait toujours croire... certains partis politiques nous font accroire que c'est encore le meilleur système. Alors, c'est la pire chose qui peut arriver parce qu'actuellement, justement, ce qui est arrivé, c'est qu'on a un système de santé qui est avec un financement public, et, malheureusement, il y a plein de petites unités privées qui ont poussé un peu partout et où, justement, les citoyens sont amenés à payer deux fois, une fois par leurs impôts et une fois directement la facture avec des cliniques privées. Et alors, si on ne veut pas reconnaître ça, bien, il faudrait, tout au moins, être réaliste et être honnête avec les citoyens et y faire face une fois pour toutes si on veut avoir un système de santé qui est au point.

Alors, M. le Président, aussi d'autres commentaires que je voudrais amener au niveau de la gestion elle-même. Le ministre se donne beaucoup de pouvoirs au niveau de la structure pour la mise en place de cette réforme. Il y a des risques importants que le projet de loi politise le réseau. Notamment, nous, ce qu'on demande dans les points où est-ce qu'on demande de modifier, c'est de retirer le pouvoir du ministre de nommer les P.D.G. des établissements, laisser au conseil d'administration choisir le P.D.G. des établissements sous approbation du ministre. Nous demandons à ce que cette formule de nomination s'applique au maximum de deux années après l'entrée en vigueur de cette loi, laisser au P.D.G. le choix de désigner son propre P.D.G.

Je comprends l'approche, M. le Président, du ministre, qui dit : Moi, si je veux amener ma réforme au point, je dois avoir des personnes qui vont être à côté de moi pour être sur la même longueur d'onde. Oui. Par contre, il faudrait aussi noter qu'une fois que l'application est mise en marche il faudrait qu'on ait sur les... quelques lignes dans la réforme qui expliquent... la fin de ça. Et nous, on demande, justement, l'arrêt au niveau de la loi pour que ces lignes soient mises claires et précises au niveau du projet de loi. Sinon, nous ne pourrons pas continuer à appuyer ce projet parce qu'il nous paraît un peu trop... Il manque de détails, mais surtout... Le ministre, je veux bien croire qu'il a de bonnes qualités, mais il se présente un peu comme un sage et il nous dit : Croyez-moi, c'est comme ça que ça va se faire. Alors, on veut le croire, mais qu'il le mette précis dans les règles.

Alors, nous, c'est comme je vous disais tantôt, nous allons appuyer le principe. Par contre, si les recommandations que nous demandons ne se retrouvent pas, nous aurons de la grande difficulté à appuyer ce projet de loi. Merci, M. le ministre.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député, de votre intervention, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Et je suis prêt à entendre le prochain intervenant, et je reconnais M. le député du Lac-Saint-Jean pour son intervention sur le principe du projet de loi n° 10. À vous, M. le député.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : Je vous remercie, M. le Président. À mon tour de prendre la parole sur ce projet de loi, qui remet en cause l'organisation de notre système de santé et qui vient, encore une fois, chambouler toute l'organisation de notre système, qui, inévitablement, sera remis en question sur plusieurs mois, voire même sur plusieurs années.

Mais, M. le Président, j'ai envie de prendre la problématique à un autre niveau puis avoir une vision un peu plus d'ensemble sur ce qui est en train de se passer au Québec sur l'ensemble du territoire. Vous savez, moi, M. le Président, je crois profondément que le Québec doit être fort non seulement dans ses grands centres, dans sa métropole, ici, à Québec, son centre administratif, mais aussi sur l'ensemble du territoire, et particulièrement dans les régions. Là, ce qu'on constate, M. le Président, c'est que toute l'organisation locale et l'organisation régionale est en train d'être remise en question. Que ce soit sur le plan économique, que ce soit sur le plan de la concertation régionale, que ça soit pour l'organisation de notre système de santé, on est en train, dans le fond, de remettre en cause tout le pouvoir d'une administration de proximité.

Alors, moi, M. le Président, si j'ai un message que je veux exprimer au gouvernement actuel, c'est certainement cette nécessité de se retourner davantage vers les citoyens, vers les gens qui habitent le milieu parce que je suis profondément convaincu qu'en bout de course c'est pas mal plus efficace de pouvoir parler à quelqu'un, un gestionnaire qui habite le territoire, qui comprend bien les réalités locales lorsque vient le temps de prendre des décisions. Alors, je m'opposerai toujours contre ces vagues de centralisation, contre un système qui souhaite rapatrier les pouvoirs des régions vers les grands centres.

Alors, je le disais tout à l'heure, le gouvernement actuel s'en prend à la concertation, au seul lieu de concertation dans nos régions que sont les CRE, on s'en prend à l'aide à nos entrepreneurs sur le territoire avec les CLD, on s'en prend même aux carrefours jeunesse-emploi. J'en dis un mot, M. le Président, parce qu'il faut comprendre que ceux qui administrent ces carrefours jeunesse-emploi sont des gens qui habitent le territoire, qui ont la responsabilité de partager avec les centres d'emploi toute la formation de notre jeunesse et d'accompagner nos jeunes à se trouver de l'emploi. Alors, tout ça est remis en question, tout ça est rejeté du revers de la main.

Le problème, M. le Président, c'est que, durant la dernière campagne électorale, il y avait un candidat, le premier ministre actuel, qui s'est présenté devant les Québécois et il leur a dit : J'habite une région, j'habite Roberval maintenant depuis quelques années et je comprends la réalité des régions. Malheureusement, M. le Président, force est de constater que la population, en réalité, a été induite en erreur. Le premier ministre actuel s'est présenté comme quelqu'un qui comprenait la réalité des gens qui habitent le territoire québécois, qui habitent en région. Or, malheureusement, moi, ce que je constate plutôt sur le terrain, c'est des centaines, des milliers de personnes qui me disent qu'ils n'ont pas voté pour ça, que jamais on ne leur a parlé du fait qu'on allait dépouiller les régions de leurs pouvoirs, le pouvoir de concertation, le pouvoir de venir en aide à nos entrepreneurs.

• (17 h 40) •

Je vois, du côté ministériel, ça fait réagir, mais c'est la triste vérité. M. le Président, comment voulez-vous qu'on puisse appuyer un projet de loi... Dans une région comme la mienne, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, il n'y aura qu'un seul centre intégré, un seul centre intégré pour l'ensemble de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Vous savez quoi, M. le Président? Quand les gens avaient des préoccupations sur la gestion de la santé, ils avaient des représentants locaux, des gens qui habitent sur le territoire, qui sont à proximité des soins qui sont donnés, qui pouvaient côtoyer ces gens du conseil d'administration de nos CSSS actuels, qui leur permettaient, justement, d'échanger avec les gens. Chez nous, par exemple, au Lac-Saint-Jean, le conseil d'administration organise des levées de fonds, prend soin de son hôpital, prend soin des services qui sont offerts sur son territoire. Or, qu'est-ce que le ministre veut faire? Bien, c'est abolir, abolir cette gestion plus locale pour centraliser ça dans un seul point de services ou une administration régionale, ce qui, pour notre grande région, va faire en sorte que des citoyens se retrouveront à plus de 200 kilomètres de l'administration régionale, une nouvelle centralisation de pouvoirs, une nouvelle façon pour le ministre de se réapproprier des pouvoirs vers Québec, vers les grands centres pour avoir, j'imagine, une vision plus uniforme.

Or, comme mon collègue le député de Rousseau y faisait référence tout à l'heure, ça va directement à l'encontre des modèles suédois, entre autres, des modèles nordiques, qui sont des exemples, des modèles où des établissements sont mis en compétition un contre l'autre, une compétition saine. Mais une compétition d'établissements de l'État, bien sûr — pas du privé, de l'État — dans laquelle on peut comparer, par des administrations qui sont locales, avec un système qui a à partager des objectifs, et, comme ça, on est capable de bien cibler qui, dans le fond, a le meilleur système de gestion. Bref, on est en complète contradiction avec une tendance internationale où, au contraire de centraliser, on souhaite davantage donner les pouvoirs aux milieux et aux gestionnaires des établissements.

Ce qui m'agace profondément, c'est qu'on fait exactement l'inverse de cette tendance. Et sous quel objectif? L'objectif de réorganiser les soins, le système de santé. Mais est-ce qu'à quelque part il y a une seule mesure qui vise la réelle priorité des Québécois, la réelle priorité des Québécois qui est l'amélioration des soins et l'accès aux soins de santé au Québec? À quel endroit, M. le Président, dans le projet de loi, on nous parle que les Québécois vont avoir un meilleur système, vont avoir des meilleurs soins? À quel endroit on nous dit que les Québécois vont attendre moins, qu'on s'attaque réellement aux listes d'attente? Nulle part, M. le Président. C'est un projet de loi qui est de structure, qui revoit l'organisation des choses, mais qui, malheureusement, n'aborde pas les réels enjeux en santé au Québec que sont l'accès aux médecins, les soins à domicile, le paiement des factures, parce qu'encore, malheureusement, il y a trop de gens qui doivent débourser des frais importants pour les médicaments. Ensuite, on n'a absolument rien sur l'informatisation du système de santé.

Alors, essentiellement, ce qu'on retrouve, M. le Président, dans ce projet de loi, ce n'est rien d'autre que du rebrassage de documents qui va alourdir l'administration publique, qui va centraliser vers les grands centres, qui va éloigner les citoyens des gestionnaires, qui va créer une distance entre le patient, ceux qui reçoivent les services, de l'administration, des administrateurs, de ceux qui ont la responsabilité de mettre en oeuvre les politiques. Et cet objectif-là du gouvernement vise essentiellement à faire des économies. On nous dit qu'on va sauver de l'argent. Bien, M. le Président, permettez-moi de remettre en question cette pensée magique parce que, lorsqu'on réorganise, par définition on crée une zone d'incertitude, on doit passer énormément de temps à réorganiser l'ensemble du système, et Dieu sait, M. le Président, que les exemples sont multiples où on n'a pas atteint les objectifs qui étaient visés.

Alors, le pouvoir de centralisation revient essentiellement entre les mains du ministre, où on lui donne toute la latitude de nommer à peu près qui il veut, hein? C'est lui qui, dorénavant, va nommer à la fois le P.D.G., le P.D.G. adjoint, de même que tous les membres du conseil d'administration. Inévitablement, M. le Président, ça crée un problème de proximité. On va se demander si ces gens-là, qui, éventuellement, auront à venir témoigner ici, en commission parlementaire, ont toutes et tous l'indépendance nécessaire pour pouvoir commenter positivement et négativement les éventuels projets de loi qui seront déposés par le ministre de la Santé. On sera en droit de se questionner sur leur indépendance réelle. Pourquoi? Parce que ces gens-là seront directement nommés par le ministre de la Santé. Alors, toute la question de l'indépendance du processus de nomination doit être revue en entier parce qu'on enlève, dans le fond, la capacité du milieu aussi à choisir une représentation qui est plus citoyenne.

Il faut comprendre aussi que, dans l'organisation actuelle des choses, il y a également de nombreux bénévoles qui, par générosité, par solidarité, appuient leur CSSS, appuient les administrateurs. Et là ce qu'on comprend, c'est qu'avec le projet de loi actuel on va venir, dans le fond, rejeter ou abandonner, dans le fond, les 3 000 bénévoles actuels qui sont présents dans l'administration des CSSS.

Ce qu'on comprend également, M. le Président, c'est le rôle des comités d'usagers, les représentants des patients, ceux et celles qui bénéficient des soins. Ce sont ces gens qui, jusqu'à maintenant, étaient représentés dans les conseils d'administration. Ce qu'on comprend, c'est que le nombre d'usagers au conseil d'administration sera essentiellement réduit de moitié. Alors, la réduction de moitié dans la représentation des usagers va clairement affaiblir l'influence — déjà très modeste, pourtant — des usagers dans l'administration de notre système de santé.

L'autre problématique, c'est toute la prise en compte des réalités bien locales. Comment le ministre va-t-il faire, dans cette structure centralisée, de tenir compte de toutes les particularités qu'il y a sur l'ensemble du territoire québécois? M. le Président, vous savez qu'au Lac-Saint-Jean nous avons nos propres réalités dans la grande région du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Et, si on prend juste le Lac-Saint-Jean lui-même, il y a déjà deux CSSS qui sont différents, sans compter ceux qui sont à Saguenay. Alors, tout ça pour dire que l'organisation, qu'elle sera maintenant imposée, il n'y aura qu'un seul centre qui aura à gérer, et, inévitablement, ça fera en sorte que beaucoup de patients, beaucoup de personnes se retrouveront très éloignées de là où il y aura une prise de décision qui est importante.

L'autre chose qui est, pour le moins, surprenante, c'est de voir la rapidité avec laquelle le ministre de la Santé a souhaité procéder dans ce dossier-là. Malheureusement, ce que tout le milieu est venu nous dire, c'est qu'on aurait procédé rapidement, sans tenir les consultations nécessaires préalables, sans que le milieu de la santé et les ordres professionnels soient mis à contribution. Ça fait que, finalement, tout le monde était un peu pris par surprise parce que, justement, on ne les avait pas intégrés directement dans le processus, dans la démarche. Alors, non seulement ils n'ont pas fait partie prenante de la réflexion, mais, en plus, on leur a laissé très peu de temps pour se retourner de bord pour rédiger leurs mémoires, participer aux travaux de la commission. C'est donc un peu sans surprise, M. le Président, qu'autant de groupes sont venus en commission parlementaire témoigner leur opposition au projet de loi tel qu'il a été déposé par le ministre de la Santé.

• (17 h 50) •

Alors, ce que nous avons répertorié, c'est que, sur les 64 groupes entendus en commission parlementaire, 48 avaient déposé des mémoires où ils étaient contre le projet de loi qui a été déposé par le gouvernement. Alors, vous aurez compris, M. le Président, que, lorsqu'on fait une réforme aussi importante, lorsque le ministre décide de revoir des structures comme il le fait à l'heure actuelle, lorsqu'une telle réorganisation va nécessiter l'appui, le soutien du milieu pour que les gens qui font vivre ce système de la santé se sentent partie prenante, se sentent encouragés, aient le goût de poursuivre leurs activités, bien, encore faut-il qu'ils croient en la réforme qu'ils ont la responsabilité de mettre en oeuvre. Le problème, ce qu'on a entendu en commission, c'est que ces différents groupes représentés durant les travaux parlementaires sont venus nous dire essentiellement qu'ils ne croyaient pas dans les projets ou dans les orientations qui venaient d'être déposées par le ministre de la Santé.

Une autre problématique qui a été soulevée, c'est toute la transition des données informatiques qui sont déjà existantes. M. le Président, on sait tous à quel point le dossier de l'informatisation de notre système de santé est plus qu'un échec, M. le Président, est un véritable scandale : une absence totale de contrôle, une explosion des coûts. Ce que je trouve malheureux parfois, c'est qu'on perd même la hauteur des chiffres. C'est un projet qui a triplé, passant de 500 millions à 1,5 milliard, qui a complètement explosé, hors de contrôle, puis qui est venu presque à 10 fois le budget du ministère de l'Environnement annuellement. C'est injustifiable, incalculable comme erreur. Mais là, en plus, on impose à un système qui est déjà fragmentaire, incomplet une transition importante qui va s'échelonner sur plusieurs années. Je trouve ça, M. le Président, extrêmement inquiétant, et j'ai peur qu'on ait de la difficulté, eu égard à tous les problèmes qu'on a eus jusqu'à maintenant avec l'informatisation du système, à vivre d'autres problèmes importants dans cette espèce de transition qui va s'échelonner sur plusieurs années.

L'autre chose, M. le Président, c'est le Protecteur du citoyen qui est venu nous dire que cette transition pourrait prendre plusieurs années avant de voir finalement s'opérer un véritable virage, une véritable mise en oeuvre des nouvelles orientations du projet de loi tel qu'il a été déposé.

Ce que je trouve aussi préoccupant, M. le Président, c'est de voir l'importance que s'est donnée le ministre dans la gestion du système de santé au Québec. En gros, essentiellement, ce que le ministre a fait, c'est qu'il s'est mis lui-même au centre de tout le système. C'est lui qui va nommer à peu près tout le monde. Il s'est donné vraiment une mainmise sur tout. Mais ça, M. le Président, ce n'est rien d'autre qu'une centralisation poussée à l'extrême où il se garde, dans le fond, tous les pouvoirs pour intervenir dans le système de santé comme il le souhaite, alors qu'on aurait pu faire un choix inverse qui est celui de donner davantage de pouvoirs aux établissements, s'assurer d'une saine compétition entre les établissements publics financés par l'État pour s'assurer de l'efficacité de notre système.

Ce que je trouve particulièrement déplorable... Puis, quand on fait une campagne électorale, M. le Président, ce que les gens nous demandent, c'est : Est-ce que je vais moins attendre quand je vais aller à l'urgence? Est-ce qu'enfin j'aurai droit à un médecin de famille comme tous les Québécois? Est-ce que je vais voir ma facture de médicaments réduite? Est-ce que j'aurai droit à davantage de médecins sur mon territoire? C'est ça que les gens nous demandent. Moi, M. le Président, durant dans la dernière campagne, je n'ai personne qui m'a dit : Alexandre, notre problème, c'est notre gestion locale. Notre problème, c'est le CSSS. Le problème, c'est que c'est géré à trop petite échelle puis que le ministre devrait avoir plus de pouvoirs. D'ailleurs, y a-t-il quelqu'un du côté gouvernemental qui avait dit à ses électeurs qu'il laisserait tomber l'administration de proximité, qu'il mettrait de côté les administrateurs qui habitent le territoire, qu'il rejetterait du revers de la main la régionalisation de notre système de santé? Bien sûr que non, M. le Président. Ça, ça fait partie des surprises, des hasards, du mauvais réveil du gouvernement actuel, des mauvaises surprises qu'il réservait aux Québécois.

Le problème de tout ça, c'est que ça encourage le cynisme. C'est un peu comme donner carte blanche, hein? On apprend ça, qu'ils révisent de A à Z, et qu'ils mettent un peu de côté cette vision que nous, on a, d'assurer des soins de santé bien gérés, accessibles, gratuits et publics.

Alors, M. le Président, j'aurais souhaité un projet de loi qui cible davantage les vraies priorités des Québécois, qui nous donne des exemples concrets, de, je ne sais pas, moi, nouveaux groupes de médecins familiaux qui s'établissent sur un territoire, qu'on nous dise que les gens vont moins attendre quand ils vont aller dans les urgences. Malheureusement, on a plutôt choisi une voie purement de structure. On revoit des structures. Il y aura une longue période de transition. En plus, le milieu directement concerné est très majoritairement en défaveur. Ils ne se sentent pas partie prenante, ils se sentent démobilisés, abandonnés, voire peu écoutés par le ministre actuel. Alors, vous aurez compris que, comme député de Lac-Saint-Jean et comme député de région, je me sens particulièrement interpellé. Ça s'ajoute à une longue liste de mauvaises décisions. On s'en est pris à la jeunesse, on s'en est pris à la concertation, on s'en est pris au développement régional, on s'en est pris aux carrefours jeunesse-emploi, on s'en est pris à la création de nouvelles places en garderie, et voilà maintenant que c'est le système de santé qui sera, lui aussi, centralisé vers les grands centres. Alors, ça m'apparaît être contraire à l'intérêt public, ça m'apparaît être contraire aux intérêts des Québécois et ça m'apparaît être contraire aux priorités des Québécois, qui veulent quoi en bout de course? Des meilleurs soins, plus accessibles, universels, gratuits et publics, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de Lac-Saint-Jean, de votre intervention sur le principe du projet de loi n° 10. Et, pour la poursuite du débat, je cède maintenant la parole à M. le député de Berthier en lui rappelant qu'il va avoir deux minutes et quelques secondes.

M. André Villeneuve

M. Villeneuve : Merci, M. le Président. Bonne fin d'après-midi. Bonjour à tout le monde. Très heureux d'être ici. M. le Président, mes premiers mots vont aller aux gens, aux personnes, aux humains qui travaillent dans nos services de santé au Québec. Je pense tout particulièrement aux infirmières, aux infirmiers, aux auxiliaires, aux préposés aux patients, aux médecins, tous les professionnels de la santé, M. le Président, qui, jour après jour, tiennent le système de santé à bout de bras.

Ils le font, M. le Président, malgré le fait que... Parce que, voyez-vous, M. le Président, ils sont aussi au courant de ce qui se passe ici, à l'Assemblée nationale. Pour plusieurs, ils connaissent un peu les objectifs et le but visé par le projet de loi n° 10, et, déjà qu'ils n'ont pas terminé une réforme qui a été lancée en 2007... Et allez les voir sur le terrain, M. le Président — puis je sais que vous êtes quelqu'un de terrain — ils vous le diront, ils sont épuisés, ils aimeraient que le gouvernement... ils aimeraient que d'abord, M. le Président, que cette reconnaissance que je veux leur offrir aujourd'hui, qu'elle vienne de l'ensemble des parlementaires ici. Et j'ose croire que c'est le cas, M. le Président, mais ils aimeraient passer, peut-être, à autre chose qu'à une guerre de structures. Ils aimeraient peut-être passer à autre chose, comme pouvoir avoir le temps de s'occuper des patients, parce que, vous savez, ces gens-là, M. le Président, qui oeuvrent au sein de nos services de santé au Québec sont des gens, d'abord et avant tout, de coeur et de passion. Et je pense qu'il faut leur dire, et il faut leur rendre tout le mérite qu'ils méritent, M. le Président. Alors, ce sont mes premiers mots que je voulais leur adresser.

Et aussi, bien sûr, je ne veux pas oublier tous les bénévoles parce que, dans les hôpitaux... allez dans les hôpitaux, allez dans les centres de santé, M. le Président, vous avez toujours, en quelque part, des bénévoles, des proches aidants, comme mon collègue me signale, des proches aidants... J'en oublie, M. le Président, mais il faut leur rendre cela, M. le Président, ils font un travail extraordinaire, et, sans eux, on n'en doute point, sans eux, le système serait un chaos total.

Je veux aussi, M. le Président, souligner le travail extraordinaire des organismes communautaires. Les organismes communautaires, et là j'ajoute «autonomes» parce que, vous le savez, les organismes communautaires, ils aiment garder leur autonomie, ils veulent conserver leur autonomie, et je pense qu'il faut respecter ce voeu-là. Ils sont aux premières lignes, monsieur... Mais je continuerai demain, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, je m'en doutais. Alors, on vient d'avoir l'indication. Alors, oui, il vous restera votre temps de parole.

Ajournement

Alors, compte tenu de l'heure, les travaux sont ajournés à demain, jeudi le 27 novembre, à 9 h 45.

(Fin de la séance à 18 heures)