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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Thursday, October 8, 2020 - Vol. 45 N° 132

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Féliciter les médecins de l'Hôpital de Thetford Mines pour la création d'une capsule vidéo
éducative sur le respect des mesures sanitaires

Mme Isabelle Lecours

Souligner le 25e anniversaire de l'organisme Les Productions Multisens inc.

M. Enrico Ciccone

Remercier Mme Valérie Gagnon pour sa décision de répondre à l'appel face à la pénurie
d'enseignants

Mme Claire IsaBelle

Rendre hommage à Mme Mary Ann Davis, ex-commissaire scolaire

Mme Isabelle Melançon

Féliciter Mme Sylvianne Paré, fondatrice de l'entreprise Les Savons Kimi

M. Denis Tardif

Rendre hommage à Mme Denise Desjarlais pour son engagement social et communautaire

M. Simon Allaire

Saluer l'initiative Dans ma rue, on joue! de la municipalité de Frontenac

M. François Jacques

Demander la prolongation du Programme de soutien aux organismes communautaires

Mme Manon Massé

Rendre hommage au Journal Mobiles, lauréat de cinq prix de l'Association des médias écrits communautaires du Québec

Mme Chantal Soucy

Saluer le partenariat entre les policiers et les professionnels en santé mentale dans la ville
de Saint-Jérôme

M. Youri Chassin

Dépôt de documents

Rapports annuels du Tribunal administratif des marchés financiers, des CIUSSS de l'Est-de-
l'Île-de-Montréal, du Saguenay—Lac-Saint-Jean, du CISSS de l'Abitibi-Témiscamingue,
rapport sur l'application de la procédure d'examen des plaintes du CISSS de Chaudière-
Appalaches, rapport sur la mise en oeuvre de la Loi regroupant la Commission de l'équité
salariale, la Commission des normes du travail et la Commission de la santé et de la
sécurité du travail et instituant le Tribunal administratif du travail et bilan de la mise
en oeuvre du programme Objectif emploi

Réponse à une pétition

Rapport annuel du Vérificateur général

Rapport annuel du Comité de surveillance des activités de l'Unité permanente anticorruption

Questions et réponses orales

Accès aux services en santé mentale

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Accès à l'information sur l'évolution de la pandémie de COVID-19

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Ressources allouées pour le dépistage du coronavirus

Mme Marie Montpetit

M. Christian Dubé

Mme Marie Montpetit

M. Christian Dubé

Mme Marie Montpetit

M. Christian Dubé

Projet d'agrandissement du collège Dawson

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

Gestion de la pandémie de COVID-19

Mme Manon Massé

M. François Legault

Mme Manon Massé

M. François Legault

Mme Manon Massé

M. François Legault

Mise en oeuvre des recommandations de la Commission d'enquête sur les relations entre les
autochtones et certains services publics

M. Gregory Kelley

Mme Sylvie D'Amours

M. Gregory Kelley

Mme Sylvie D'Amours

M. Gregory Kelley

Mme Sylvie D'Amours

Engorgement du service des urgences dans les hôpitaux

Mme Catherine Fournier

M. Christian Dubé

Mme Catherine Fournier

M. Christian Dubé

Mme Catherine Fournier

M. Christian Dubé

Impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale

M. David Birnbaum

M. Christian Dubé

Mme Monique Sauvé

M. Christian Dubé

M. Frantz Benjamin

M. Jean-François Roberge

Impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des femmes

Mme Isabelle Melançon

M. Christian Dubé

Motions sans préavis

Souligner la Semaine pour l'école publique

Mise aux voix

Prendre acte de la hausse rapide des cas de COVID-19 chez les aînés et demander au gouvernement
de prendre les mesures nécessaires pour protéger ceux qui vivent en résidence privée pour aînés

Mise aux voix

Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 65— Loi modifiant principalement
la Loi sur la qualité de l'environnement en matière de consigne et de collecte sélective

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Avis de sanction de projets de loi

Affaires du jour

Projet de loi n° 39 — Loi établissant un nouveau mode de scrutin

Adoption du principe

Mme Sonia LeBel

M. Marc Tanguay

M. Gaétan Barrette

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Harold LeBel

Mme Isabelle Melançon

Document déposé

Mme Christine Labrie

M. Pierre Arcand

M. David Birnbaum

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Marwah Rizqy

Mise aux voix

Renvoi à la Commission des institutions

Mise aux voix

Projet de loi n° 44 —  Loi visant principalement la gouvernance efficace de la lutte contre les
changements climatiques et à favoriser l'électrification

Reprise du débat sur l'adoption

M. Marc Tanguay

Débats de fin de séance

Impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale

M. David Birnbaum

M. Éric Caire

M. David Birnbaum (réplique)

Impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des jeunes

M. Frantz Benjamin

Documents déposés

M. Éric Caire

M. Frantz Benjamin (réplique)

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon jeudi à tous et toutes. Vous pouvez prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Et nous allons débuter notre séance avec la rubrique des déclarations de députés. Et la première déclaration sera celle de Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.

Féliciter les médecins de l'Hôpital de Thetford Mines pour la création d'une
capsule vidéo éducative sur le respect des mesures sanitaires

Mme Isabelle Lecours

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Merci, Mme la Présidente. Je tiens à adresser mes plus sincères félicitations et mes remerciements au groupe de médecins de l'Hôpital de Thetford Mines dans mon comté qui ont mis en ligne une vidéo pour sensibiliser la population au respect des mesures sanitaires. Je les nomme : Dr Arata, Dre Lepire, Dr Gaudreau, Dr Piuze, Dre Laliberté, Dr Fréchette, Dre Godbout et son fils Antoine, Dre Pruneau, Dr Breton, Dre Faucher, Dre Andrews-Côté, Dr Veilleux, Dre Boutet, Dre Laliberté, Dre Lessard et M. Cloutier, caméraman-monteur. Merci pour votre mobilisation et pour ce message visant à préserver notre système de santé et à sauver des vies.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Lotbinière-Frontenac. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Marquette.

Souligner le 25e anniversaire de l'organisme
Les Productions Multisens inc.

M. Enrico Ciccone

M. Ciccone : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais rendre un bel hommage aux Productions Multisens, un OBNL culturel d'économie sociale situé à Lachine.

Depuis 1995, cet organisme est très ancré dans la vie culturelle de la circonscription de Marquette, avec de nombreuses réalisations à l'appui, 16 ans de théâtre et 10 ans de spectacles avec la Troupe de danse Expression, plus de 100 spectacles et des dizaines de journées d'animation théâtrale. Leur mission : favoriser le rapprochement entre les différentes générations par la création et la diffusion de projets culturels multidisciplinaires auprès de notre collectivité.

L'organisme permet, entre autres, aux jeunes d'exprimer leur côté artistique tout en profitant du support d'une équipe talentueuse et passionnée. Les Productions Multisens offrent des cours et des activités pour enfants, ados, adultes et aînés, où tous trouvent chaussure à leur pied.

Un gros bravo et merci aux fondatrices France Lafontaine et Sylvie Blanchet pour votre excellente contribution. Vous êtes, comme vous le dites si bien, non seulement des gouttes d'art qui rassemblent, mais surtout des gouttes d'or précieuses pour notre communauté. Félicitations pour votre 25e anniversaire et bonne continuation! Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Marquette. Et maintenant je reconnais Mme la députée de Huntingdon.

Remercier Mme Valérie Gagnon pour sa décision de répondre
à l'appel face à la pénurie d'enseignants

Mme Claire IsaBelle

Mme IsaBelle : Mme la Présidente, depuis huit ans, Valérie Gagnon, de Sainte-Martine, pratique le métier de journaliste pour un journal de la région lorsqu'en mars la crise sanitaire l'oblige à changer d'orientation. Elle réalise qu'elle peut faire une différence en mettant ses compétences au service des jeunes. Bachelière, elle décide donc de sortir de sa zone de confort et de répondre présente à l'appel du gouvernement.

Pour Mme Gagnon, les enfants de la COVID vivent une période d'insécurité. Ces derniers ont donc besoin d'être réconfortés et de recevoir un enseignement de qualité afin qu'ils puissent atteindre leur plein potentiel. Son plus grand désir, c'est aussi d'enseigner aux jeunes les principes de l'analyse critique afin qu'ils puissent prendre des décisions éclairées tout au long de leur vie. Depuis quelques semaines, Mme Gagnon enseigne les sciences et l'univers social à l'école primaire Louis-Lafortune, à Delson.

Merci à Mme Gagnon et à toutes les personnes qui ont accepté et accepteront de répondre présentes à l'appel, car le milieu de l'éducation est très stimulant et gratifiant.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Huntingdon. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Verdun.

Rendre hommage à Mme Mary Ann Davis, ex-commissaire scolaire

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Merci, Mme la Présidente. Alors, aujourd'hui, j'aimerais souligner le travail d'une femme remarquable, qui a su laisser sa marque au sein du milieu scolaire anglophone de Verdun.

Le 27 septembre dernier, Mary Ann Davis a quitté ses fonctions de commissaire à la commission scolaire Lester-B.-Pearson. Mary Ann a été une voix forte pour les écoles verdunoises du secteur anglophone pendant six ans. Portée par ses convictions et dévouée aux jeunes de Verdun, on ne compte plus ses accomplissements.

Il y a quelques années, alors que l'école Riverview Elementary annonçait sa fermeture, elle s'est battue sans relâche et avec succès pour la garder ouverte, tout comme elle l'a fait pour l'école secondaire Beurling Academy en novembre dernier. Elle est aussi la cofondatrice du mouvement LGBTQ Rainbow Umbrella, qui offre des services aux élèves de cette école.

Mary Ann, thank you for everything.

Nous garderons à jamais le souvenir d'une femme passionnée, dont le coeur est à la bonne place. Merci, chère amie. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Verdun. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup—Témiscouata.

Féliciter Mme Sylvianne Paré, fondatrice de l'entreprise Les Savons Kimi

M. Denis Tardif

M. Tardif : Merci, Mme la Présidente. En cette Semaine de sensibilisation aux maladies mentales, j'aimerais souligner l'engagement de Mme Sylvianne Paré pour offrir un travail à sa fille Kim, qui est atteinte d'une déficience intellectuelle lourde.

En 2016, elle a fondé Les Savons de Kimi, une entreprise de confection de savons artisanaux, qui a maintenant pignon sur rue au centre-ville de Rivière-du-Loup. Au fil des ans, la petite savonnerie s'est développée, et aujourd'hui ce qui ne devait être qu'un milieu de travail pour Kim est devenu une véritable entreprise, offrant une dizaine de produits cosmétiques différents.

Mme Paré, vous êtes une référence pour ce que vous faites chaque jour depuis plus de 21 ans et pour améliorer la qualité de votre fille Kim. Vous lui avez offert beaucoup plus qu'un emploi, vous lui avez donné l'envie d'entreprendre et de construire.

Continuez, les filles, et merci beaucoup d'être là avec nous. Bonne fin de journée.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Maskinongé.

Rendre hommage à Mme Denise Desjarlais pour son
engagement social et communautaire

M. Simon Allaire

M. Allaire : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, je souhaite souligner personnellement le grand dévouement d'une citoyenne de Louiseville, pour qui aider son prochain est une valeur fondamentale, Mme Denise Desjarlais.

Mme Desjarlais compte maintenant 35 années d'implication au service des résidents souffrant de pression artérielle dans les habitations à loyer modique de sa municipalité. Infirmière retraitée, elle a mis ses connaissances et ses compétences au service des personnes vulnérables, ce qui lui permet d'assurer la prise en charge des dossiers par le personnel soignant et de leur bon suivi, et ce, avec énormément de respect et d'empathie.

Mme Desjarlais a été aussi une des premières personnes à apporter son aide lors de l'évacuation du Centre communautaire de Louiseville. Et, je m'en souviens très bien, Mme la Présidente, on était en campagne électorale. Et, si vous vous souvenez aussi, j'étais un des premiers à avoir une CAQ mobile. Donc, ma CAQ mobile s'est rapidement transformée en camion de déménagement. Mais Mme Desjarlais était la première sur les lieux pour aider et soutenir les organismes communautaires.

Alors, pour toutes ces raisons, vous méritez pleinement de vous faire honorer aujourd'hui. Je suis heureux de vous dire personnellement merci, Mme Desjarlais. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Maskinongé. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Mégantic.

Saluer l'initiative Dans ma rue, on joue! de la municipalité de Frontenac

M. François Jacques

M. Jacques : Merci, Mme la Présidente. Je tiens, aujourd'hui, à saluer l'initiative de la municipalité de Frontenac, l'une des 36 municipalités de ma circonscription de Mégantic, qui a lancé dernièrement le projet Dans ma rue, on joue!

Ce projet, déjà en place dans quelques autres municipalités au Québec, est une première en Estrie. Il vise à inciter les enfants et les plus grands à jouer librement et de façon sécuritaire dans les rues de quartiers où vivent de nombreuses familles.

Aujourd'hui, je suis fier de savoir que le jeu est encouragé et encadré, parce qu'autant les participants que les automobilistes doivent respecter un code de conduite. Il m'importe également de souligner que c'est la mobilisation citoyenne qui a mené à la mise en place de cette initiative, ce qui démontre que les autorités municipales sont proches de leur population.

J'encourage les citoyens de toutes les municipalités à lancer des projets semblables afin que tous puissent jouer en toute sécurité. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Mégantic. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Demander la prolongation du Programme de
soutien aux organismes communautaires

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. Comme l'ensemble du Québec, le milieu communautaire est sévèrement touché par la crise. Ça fait plus de six mois que les travailleurs et travailleuses sont au rendez-vous pour veiller sur les gens. Je les salue, je salue leur bienveillance et surtout leur résilience.

Les demandes ne cessent d'augmenter. Le virus impose de s'adapter alors que les organismes subissent encore les contrecoups de l'austérité libérale. La prolongation du PSOC d'urgence est essentielle pour leurs services.

Voici quelques exemples de mon comté : information alimentaire Centre-Sud devra diminuer le nombre paniers offerts aux personnes à mobilité réduite, le PAS de la rue devra limiter le nombre de places et de repas distribués pour itinérants, le Carrefour Saint-Eusèbe ne pourra plus assurer les services offerts pour les aînés sans un financement supplémentaire.

Prolonger le PSOC d'urgence, c'est la façon de prévenir la détresse dans le réseau. Ne pas le faire maintenant, c'est de la négligence, et c'est perdant pour tous les groupes, mais surtout pour l'ensemble de la population. Merci, Mme la Présidente.

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Saint-Hyacinthe.

Rendre hommage au Journal Mobiles, lauréat de cinq prix de
l'Association des médias écrits communautaires du Québec

Mme Chantal Soucy

Mme Soucy : Mme la Présidente, ce matin, je vais vous parler d'un important média de la grande région de Saint-Hyacinthe, le Journal Mobiles.

Le Journal Mobiles s'est vu décerner cinq prix lors du gala virtuel de l'Association des médias écrits communautaires du Québec. Depuis maintenant 16 ans, tant par leur talent que par leur engagement, ces journalistes s'assurent de fournir une information de qualité à tous les Maskoutains.

Le Journal Mobiles est un média qui ne cesse d'innover et il se réinvente continuellement dans une période particulièrement difficile pour les médias traditionnels.

Je tiens donc à féliciter M. Alexandre D'Astous, Mme Catherine Courchesne, M. Martin Rinfret et M. Guillaume Mousseau pour leurs prix dans diverses catégories et, enfin, féliciter toute l'équipe pour leur deuxième place au classement général des journaux communautaires pour l'année 2020. Je suis vraiment fière de votre équipe. Et merci de faire rayonner la grande région de Saint-Hyacinthe. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Saint-Hyacinthe. Et maintenant, pour la dernière des déclarations, je cède la parole à M. le député de Saint-Jérôme.

Saluer le partenariat entre les policiers et les professionnels en
santé mentale dans la ville de Saint-Jérôme

M. Youri Chassin

M. Chassin : Merci, Mme la Présidente. Alors, samedi, c'est la Journée mondiale en santé mentale. Alors, j'aimerais souligner un nouveau partenariat entre le CISSS des Laurentides et le Service de police de la ville de Saint-Jérôme qui vise à ce que les policiers et les professionnels en santé mentale travaillent de concert lors des interventions policières auprès des personnes en crise.

Les problèmes de santé mentale sont bien présents à Saint-Jérôme, et les policiers sont bien souvent les premiers répondants auprès d'une personne agitée. Il était donc souhaitable qu'ils soient soutenus dans ces interventions délicates. Concrètement, des intervenants psychosociaux vont désormais travailler en tandem avec les patrouilleurs du service de police et jouer auprès d'eux un rôle conseil lors d'interventions. Le service de police les accueillera même dans leurs propres locaux.

Pour cette initiative, je félicite donc Mme Rosemonde Landry, P.D.G., et toute son équipe en santé mentale au CISSS des Laurentides et M. Danny Paterson, directeur du Service de police de la ville de Saint-Jérôme, et toute son équipe. Je les félicite pour leur volonté de travailler ensemble et je les félicite de prendre à coeur le bien-être de ceux qui souffrent et qui ont besoin d'aide. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Saint-Jérôme. Alors, ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés.

Et je suspends nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 52)

(Reprise à 10 h 4)

Le Président : Mmes et MM. les députés, bon jeudi à toutes et à tous. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. Vous me permettrez quelques mots, pour commencer, pour remercier, M. le Président, M. le député de René-Lévesque, qui... Ça fait deux ans qu'il est leader parlementaire, qu'il travaille en collaboration avec nous. Et vous savez, M. le Président, que le Parti québécois tiendra sa course... terminera sa course à la chefferie aujourd'hui. Alors, je tenais à remercier le député de René-Lévesque, à titre de leader du troisième groupe d'opposition, pour son travail au cours des deux dernières années. C'est un parlementaire qui travaille fort, c'est un gentilhomme aussi. On a parfois des accrochages, mais on réussit toujours à s'entendre, au salon bleu. Alors, je le salue et je le remercie pour son travail au cours des deux dernières années.

Rapports annuels du Tribunal administratif des marchés financiers, des CIUSSS de l'Est-de-
l'Île-de-Montréal, du Saguenay—Lac-Saint-Jean, du CISSS de l'Abitibi-Témiscamingue,
rapport sur l'application de la procédure d'examen des plaintes du CISSS de Chaudière-
Appalaches, rapport sur la mise en oeuvre de la Loi regroupant la Commission de
l'équité salariale, la Commission des normes du travail et la Commission de la santé
et de la sécurité du travail et instituant le Tribunal administratif du travail et
bilan de la mise en oeuvre du programme Objectif emploi

Alors, M. le Président, pour les dépôts de documents, permettez-moi de déposer, au nom de mes collègues, les documents suivants : le rapport annuel 2019-2020 du Tribunal administratif des marchés financiers, le rapport annuel 2019-2020 sur l'application de la procédure d'examen des plaintes et de l'amélioration de la qualité des services du CISSS de Chaudière-Appalaches, les rapports annuels de gestion 2019-2020 des CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal, du Saguenay—Lac-Saint-Jean et du CISSS de l'Abitibi-Témiscamingue, le rapport sur la mise en oeuvre de la Loi regroupant la Commission de l'équité salariale, la Commission des normes du travail et la Commission de la santé et de la sécurité au travail et instituant le Tribunal administratif du travail, ainsi que le bilan de la mise en oeuvre du programme Objectif emploi. Et ça complète, M. le Président. Merci.

Le Président : Ces documents sont donc déposés. À nouveau la parole à vous, M. le leader du gouvernement.

Réponse à une pétition

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je dépose la réponse du gouvernement à la pétition présentée en Chambre le 15 septembre par le député de D'Arcy-McGee. Merci, M. le Président.

Le Président : Ces documents sont donc déposés.

Rapport annuel du Vérificateur général

Pour ma part, je dépose le rapport du Vérificateur général du Québec à l'Assemblée nationale pour l'année 2020-2021, tome d'octobre 2020.

Rapport annuel du Comité de surveillance des activités
de l'Unité permanente anticorruption

Je dépose également le rapport d'activité 2019-2020 du Comité de surveillance des activités de l'Unité permanente anticorruption du Québec.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni dépôt de pétitions.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à la cheffe de l'opposition officielle.

Accès aux services en santé mentale

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, alors que la pandémie de la COVID vient bouleverser plusieurs habitudes de vie et entraîne des effets psychologiques chez les Québécois, il est plus important que jamais que tous nous soyons réunis pour nous assurer d'un accès des soins de santé mentale.

Les conséquences de la COVID se font sentir partout : nos enfants, nos jeunes au primaire, ceux qui voient leurs parents anxieux, inquiets, développent eux-mêmes de l'anxiété; nos adolescents dans les écoles secondaires, nos jeunes qui sont au cégep puis à l'université, qui ont besoin de voir leurs amis pour bien se sentir mais qui ne peuvent pas le faire, qui sont dans les cours à distance; les femmes, en première ligne, au boulot à la maison, avec une charge mentale supplémentaire; les hommes, souvent plus réticents à dire qu'ils ont besoin d'aide, même s'ils en ont réellement besoin; nos aînés, qui ont dû quitter leurs amis, nos aînés qui parfois ont eu un conjoint qui est décédé, une conjointe qui est décédée ou plusieurs personnes auxquelles ils n'ont pas pu dire au revoir.

Après avoir soumis 16 propositions au gouvernement, en voici une 17e. Nous proposons aujourd'hui au gouvernement de mettre en place une couverture publique universelle de la psychothérapie qui couvrirait les jeunes et les moins jeunes. Nous souhaitons un vrai programme de soins en santé mentale, accessible à tous. Pour nous, il s'agit d'un choix de société.

Est-ce que le premier ministre acceptera de mettre en oeuvre cette proposition?

• (10 h 10) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, effectivement, la situation de la santé mentale est préoccupante. Avec la pandémie, beaucoup de gens se sont retrouvés plus seuls que jamais, plus stressés. Et, alors qu'on avait, avant la pandémie, 2 % des Québécois qui avaient des problèmes de santé mentale, il y en a maintenant 15 %. Donc, c'est beaucoup.

M. le Président, on a ajouté du financement. On a ajouté des ressources, 300 personnes qu'on est en train d'embaucher. Jusqu'à présent, on en a 254 de trouvées. Donc, on a aussi rehaussé, M. le Président, les services, là, qui sont donnés par les organismes communautaires. Évidemment, on y va selon nos moyens.

Moi, j'aurais peut-être une petite addition à demander comme proposition à la cheffe de l'opposition officielle : Combien ça coûte, sa proposition?

Le Président : ...complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Merci, M. le Président. Alors, dans le point de presse qu'on a annoncé ce matin, cette proposition-là coûte 300 millions de dollars, elle est estimée à 300 millions de dollars. Et il est temps que l'on puisse offrir des soins de santé mentale à notre population. Il est temps de considérer qu'une jambe cassée, c'est aussi important qu'avoir un problème d'anxiété, et que tout le monde puisse avoir accès à ces soins.

Est-ce que le premier ministre accepte la proposition que nous lui faisons aujourd'hui?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, on n'est pas fermés à la proposition. Maintenant, il faut être prudents. Quand on parle d'une couverture universelle, il faut donner les services appropriés à chacune des personnes. Actuellement, j'entends, entre autres, l'Association des psychologues qui souhaiterait qu'on utilise davantage leurs services. Oui, on est ouverts à ça. Mais en même temps, il faut le dire, il y a certaines personnes qui n'ont pas besoin de services de psychologue, donc il y a d'autres employés qui peuvent faire le même travail à un coût moins élevé. Donc, on a une responsabilité aussi de bien gérer les fonds publics.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Hier, M. le Président, nous avions une motion, qui n'a pas reçu le consentement du gouvernement, une motion sur la santé mentale. Alors, j'entends l'ouverture du premier ministre, mais, de manière très concrète, il est urgent d'agir. Il est urgent de poser des gestes concrets aujourd'hui, pas dans six mois, parce que c'est maintenant que les gens ont besoin de ça.

Alors, 300 millions, M. le Président, c'est de l'argent drôlement bien investi lorsqu'on regarde la situation dans laquelle on se trouve. Est-ce que, oui ou non, le gouvernement est prêt à regarder une couverture universelle?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je l'ai dit, on est ouverts. Notre évaluation est pas mal plus élevée que 300 millions de dollars.

Mais, M. le Président, ce qu'il est important de dire, c'est qu'au mois de mars on avait 20 639 personnes qui étaient en attente de services pour la santé mentale, on est rendus maintenant à 16 000. Donc, il y a eu une diminution, malgré l'augmentation du nombre de cas, il y a eu une diminution sur la liste d'attente en santé mentale.

Donc, M. le Président, on fait des efforts, on investit des montants importants. On y va selon les moyens qu'on a.

Le Président : Troisième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Nous n'avons surtout pas les moyens d'échapper nos jeunes, nos moins jeunes, nos aînés, nous n'avons surtout pas les moyens de le faire. Et sérieusement, M. le Président, nous pensons que nous devrions aller de l'avant maintenant.

Alors, ce qu'on demande au premier ministre, c'est : Après 17 propositions que nous lui faisons, après 17 propositions, est-ce que réellement il va regarder cette proposition de manière attentive, nous revenir là-dessus, nous partons en semaine de circonscription, et nous revenir et nous dire si on est capables d'assurer ces soins universels pour toute la population du Québec?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je suis prudent, quand j'entends la cheffe de l'opposition nous dire qu'elle a fait 17 propositions, parce qu'hier elle nous a dit qu'elle avait fait huit propositions, puis toutes les propositions sont déjà faites ou en voie de l'être. Donc, M. le Président, j'aimerais avoir une copie des 17 propositions.

Le Président : Question principale, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Accès à l'information sur l'évolution de la pandémie de COVID-19

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, nous avons la conviction qu'il existe des avis écrits de la Santé publique auxquels a accès le premier ministre du Québec pour prendre ses décisions. Dans un souci de transparence, le premier ministre pourrait-il rendre ces avis disponibles à la population pour que nous en soyons informés, pour que l'on fasse réellement preuve de transparence, pour que l'on puisse savoir de quelle manière les décisions se prennent?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, ce n'est pas comme ça que ça se passe. La majorité des recommandations du Dr Arruda sont amenées oralement à des rencontres qu'on a à chaque jour, sont débattues, sont, comme je l'ai déjà dit, acceptées à 100 %.

Donc, M. le Président, je ne peux pas déposer... Oui, il y a eu certains chiffres qui ont été déposés, puis qu'on rend publics, d'ailleurs, à chaque matin, pour prendre ces décisions sur les mesures qu'on annonce, mais, M. le Président, la majorité des recommandations du Dr Arruda sont faites oralement.

Le Président : Première complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : La majorité, pas toutes, la majorité.

M. le Président, la commissaire Castonguay enquête sur la gestion de crise du directeur de la santé publique. Est-ce que, pour le premier ministre, le Dr Arruda sera le prochain responsable de cette crise? Et qui enquêtera sur les décisions des ministres du gouvernement?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, j'ai déjà dit que la Commissaire à la santé, Joanne Castonguay, est totalement indépendante. Elle va pouvoir enquêter sur ce qui a été fait par tout le monde, que ce soit dans les ministères, que ce soit à la Santé publique. Je pense que c'est ce qu'on souhaite tous ici, à l'Assemblée nationale. Puis elle va être capable de faire ça dans un délai qui est raisonnable pour qu'on puisse ensuite agir, corriger, si c'est nécessaire.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, les Québécois ont le droit de savoir. On a le droit de savoir ce qui se passe et comment les décisions sont prises. Ils ont surtout le droit de savoir comment on est en arrivés là aujourd'hui, dans la situation où nous sommes, la pire des juridictions, présentement, au pays. Ils ont le droit de savoir.

Est-ce que le premier ministre peut mettre en place une commission d'enquête publique indépendante?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, j'invite encore la cheffe de l'opposition officielle à la prudence. Quand on regarde les États de l'Est de l'Amérique du Nord, que ce soit l'Illinois, le Michigan, le Massachusetts, New York, New Jersey, Connecticut, Rhode Island, tous ces États ont un bilan qui est soit équivalent soit pire que celui du Québec. Donc, j'invite la cheffe de l'opposition officielle à ouvrir un petit peu ses recherches.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Maurice-Richard.

Ressources allouées pour le dépistage du coronavirus

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Les problèmes de dépistage et de retraçage durent depuis des semaines. Les cliniques de dépistage sont toujours débordées, les équipes de santé publique aussi. Les délais pour avoir des résultats de test continuent de dépasser des délais sécuritaires. Et, pendant ce temps-là, le nombre de cas continue d'augmenter chaque jour.

Et qu'est-ce qu'on apprend ce matin? Que le gouvernement du Québec boude l'aide du gouvernement fédéral pour faire du retraçage. Depuis le mois de juillet, ce sont 1 700 téléphonistes du fédéral qui prêtent main-forte aux provinces, qui font 14 000 appels par jour, 13 000 en Ontario et en Alberta. Et, des 14 000, combien au Québec? Seulement 1 000, parce que le gouvernement du Québec n'en a pas demandé davantage.

Le premier ministre, hier, pourtant, disait : On est à la recherche de solutions. Le gouvernement fédéral nous offre de faire des milliers d'appels par jour pour aider à retracer puis à limiter la propagation, et ils disent : Non, on n'en a pas besoin.

Donc, est-ce que le ministre a vraiment jugé qu'ils n'en avaient pas besoin ou il va encore embarquer avec deux trains de retard?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, M. le Président, oui, ça fait effectivement plusieurs semaines que je parle de toutes les améliorations que nous avons faites à notre système de dépistage. Et je me rappelle, en Chambre, ici, il y a quelques semaines, que j'ai expliqué comment il était important, M. le Président, de travailler sur le bloc, par exemple, à l'entrée. Rappelez-vous, on avait des files d'attentes très, très importantes. Et, à ce moment-là, ce qu'on a fait, c'est qu'on a demandé de faire la gestion de la file.

Pour la question centrale des laboratoires, on a augmenté notre capacité, qui était seulement, il y a quelques mois, de 14 000, 15 000 tests par jour, on l'a montée à 25 000. On a été même capables de faire 35 000 tests par mois, M. le Président. Quant aux contacts avec les gens, on s'est beaucoup améliorés.

Je suis conscient qu'il nous reste encore des éléments d'amélioration, et ça, c'est pour la partie dépistage. Lorsqu'on a rencontré nos équipes, on a dit : Maintenant, qu'est-ce qui se passe au niveau du traçage? Et, dans le traçage, on sait qu'il y a encore des améliorations importantes, autant de notre côté que du service à la clientèle, parce que les gens répondent moins, et il faut trouver une façon d'avoir un meilleur contact pour tracer plus rapidement possible. C'est ce que nous faisons, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Moi, M. le Président, là, je suis quelqu'un de bien patient, dans la vie, là, mais le ministre, il commence à arriver au bout de ma patience. Aucune réponse. Des centaines de nouveaux cas par jour, qui ont été en contact avec des milliers de personnes. S'il veut freiner la propagation, s'il veut casser la deuxième vague, le retraçage, c'est un des éléments clés.

Pourquoi il n'a pas demandé au gouvernement fédéral un coup de main? Puis pourquoi il n'accepte pas d'avoir ces appels-là du gouvernement fédéral?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : M. le Président, dans une crise comme on vit présentement, je pense qu'il faut garder notre calme. Il faut agir. Nous avons agi énormément, depuis plusieurs mois, à se préparer pour être capables de contrer cette deuxième vague là. J'ai expliqué, et ce n'est pas une surprise, que nous avions des éléments d'amélioration à faire autant au niveau du dépistage, M. le Président, qu'au niveau du traçage.

Je vous donne un exemple. Nous avons dit clairement, depuis quelques semaines, qu'il nous manquait du personnel. Est-ce que la solution qui vient du fédéral, où l'entente vient d'être signée avec eux dans les dernières semaines, fait partie de la solution? La réponse, M. le Président, c'est oui...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...et nous allons continuer de faire nos améliorations sur ce point-là aussi.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Allo? Anticipation, anticipation.

• (10 h 20) •

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Montpetit : La deuxième vague, on est au courant depuis le printemps qu'il allait y en avoir une. On n'arrête pas de leur dire qu'ils ne sont pas capables d'anticiper. Ce n'est pas dans deux mois qu'il va falloir appeler le fédéral puis leur demander de faire des appels, c'est depuis le mois de juillet que ça aurait dû être fait.

Moi, ce que je veux savoir, c'est combien de fois le ministre a parlé à la ministre fédérale de la Santé depuis le mois de juillet sur ce dossier-là.

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. On s'adresse toujours à la présidence.

M. Christian Dubé

M. Dubé : M. le Président, encore une fois, on va rester très calmes, parce que ce que les Québécois s'attendent de nous, c'est qu'on travaille ensemble au niveau de cette pandémie-là. Et je pense que le ton que la députée de Maurice-Richard peut utiliser, c'est son choix. Moi, je travaille avec les gens en Ontario, je travaille avec le fédéral. Nous allons prendre, comme nous l'avons fait lors de la première vague, toute l'aide qui est disponible, M. le Président. Et nous sommes en train de faire des réorganisations à l'intérieur de notre santé publique pour être capables d'être le plus efficaces possible, mais, je le répète, M. le Président, le Parti libéral avait coupé, en santé publique, plus de 40 millions de dollars dans les dernières années. Nous sommes à remettre...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...la santé publique en bon état. Merci.

Le Président : Question principale...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le chef du troisième groupe d'opposition.

Projet d'agrandissement du collège Dawson

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, on ne peut pas, d'un côté, dire que le français, au Québec, c'est important pour nous et, de l'autre côté, appuyer énergiquement et vouloir accélérer l'agrandissement de deux établissements d'enseignement supérieur anglophones à Montréal. On ne peut pas s'identifier comme nationaliste quand on s'apprête à inviter des milliers d'étudiants francophones et allophones à se joindre à McGill et à Dawson, qui, soit dit en passant, dépasse le devis d'inscription. Ces deux choix, ils ont été faits par le Parti libéral du Québec. Ça me surprend que la CAQ adopte exactement la même position. Sur 50 collèges publics au Québec, le seul qui trouve grâce aux yeux de la CAQ, c'est le collège Dawson, le plus controversé, le plus populeux, le plus riche.

Je demande au premier ministre pourquoi, à travers son projet de loi n° 66, il accélère le financement de ce projet, il accélère l'anglicisation de Montréal, il accélère notre propre assimilation à travers un projet de loi qu'il a choisi lui-même.

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. M. le Président, je vais prendre deux, trois secondes quand même pour souligner que c'est la dernière période de questions du chef intérimaire du Parti québécois. Donc, je veux le remercier pour sa collaboration, le féliciter pour son travail. Je sais que c'est quelqu'un qui a été bien formé, M. le Président. Et, M. le Président, même il y en a plusieurs dans son parti qui auraient voulu qu'il se présente à la chefferie. Bon, il a choisi de ne pas le faire.

Maintenant, M. le Président, concernant la loi 101 au cégep, j'ai été au Parti québécois, j'ai participé plusieurs fois à ce débat, à savoir, actuellement, les francophones puis les allophones n'ont pas le droit d'aller à l'école en anglais mais ont le droit d'aller au cégep puis à l'université en anglais. Ça a toujours été très divisé au Parti québécois.

Donc, évidemment, on va attendre le nouveau chef, ce soir, pour savoir quelle est la position du Parti québécois, mais, M. le Président, je voudrais juste que le chef du Parti québécois... Je ne sais pas s'il peut nous le dire, là, avant de savoir c'est qui, le nouveau chef. Est-ce qu'il suggère que la loi 101 s'applique maintenant aux cégeps?

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Je remercie le premier ministre pour ses bons mots. Je vais dire que son équipe était très contente que je ne me présente pas. Ça, je le sais assurément.

M. le Président, ce n'est pas de ça qu'il est question. Le gouvernement de la CAQ pratique un nationalisme homéopathique, il n'en met pas trop. Et là ce n'est pas l'accès aux collèges anglophones, c'est le financement. Alors, lui, il a choisi, comme les libéraux : Dawson, on vous donne tout ce que vous voulez pour accueillir des francophones, des allophones. Puis, le Royal Vic, même affaire avec McGill. Moi, je suis convaincu que c'est une mauvaise nouvelle, qui va venir à l'encontre des mesures que son...

Le Président : M. le premier ministre, à vous la parole.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je suis d'accord que le chef du Parti québécois aurait peut-être été meilleur que les candidats qui sont là. C'est lui qui le dit, mais je suis un peu d'accord avec lui.

M. le Président, quand le chef du Parti québécois nous dit qu'on mélange financement et accès, j'avoue que je ne le suis pas, là, parce que, si on veut continuer de donner accès aux francophones puis aux allophones aux cégeps anglophones, bien, des fois, ça veut dire qu'il faut les agrandir.

Donc, est-ce qu'il nous dit, oui ou non, qu'il refuse, à partir de maintenant, l'accès aux cégeps anglophones pour les francophones et les allophones au Québec? Est-ce que c'est ça, sa proposition?

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, ce que je refuse, c'est qu'on adopte des mesures comme il le fait, qui vont accélérer l'assimilation et l'anglicisation à Montréal. Il a bien choisi son collège pour le faire, le cégep Dawson. Ça va à l'encontre de tous les efforts que son ministre va faire. Puis vous savez quoi? Je suis convaincu qu'il est contre ce que vous annoncez, votre ministre responsable de la langue. Sinon, laissez-lui se lever pour dire qu'il est d'accord avec vous.

Le Président : M. le premier ministre. On s'adresse toujours à la présidence, s'il vous plaît.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le chef intérimaire du Parti québécois vient de nous dire que les francophones puis les allophones qui veulent aller au cégep Dawson, avec le Parti québécois, ils ne pourront plus le faire. C'est son choix. Je prends bonne note. Puis on va attendre de voir quelle est la position du nouveau chef.

Le Président : Question principale, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition. La parole est à vous et uniquement à vous.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! La parole appartient maintenant... Et vous comprenez le système, hein, je n'invente rien. Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition, à vous la parole pour votre question, s'il vous plaît.

Gestion de la pandémie de COVID-19

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, M. le Président. Lors de son assermentation, il y a deux ans, le premier ministre a demandé à ses ministres de faire preuve d'humilité. Je cite : «C'est vrai pour moi, c'est vrai pour vous. Les Québécois ne s'attendent pas à ce qu'on soit parfaits, ils s'attendent à ce qu'on les écoute...» Fin de citation.

Aujourd'hui, on a les deux pieds dans la deuxième vague. On s'enfonce, même, M. le Président. J'écoute le monde sur le terrain. Ce qu'ils nous disent depuis des semaines, c'est que la stratégie du gouvernement, bien, elle ne marche pas. Le premier ministre, lui, il a arrêté d'écouter. Il s'enferme dans sa cellule de crise avec une poignée de conseillers, toujours les mêmes, d'ailleurs, il refuse de dévoiler les avis de la Santé publique, il balaie du revers de la main chacune des propositions des oppositions, il blâme la discipline des Québécois et Québécoises. Dans mon livre à moi, ce n'est pas ça, de l'humilité, M. le Président, c'est de l'arrogance.

Pourtant, des gens lui parlent, les gens lui disent. Québec solidaire a des solutions. Les travailleuses de la santé ont des solutions. Les professeurs, les enseignantes ont des solutions. Les éducatrices ont des solutions.

Bref, est-ce que le premier ministre est vraiment en train de nous écouter?

Le Président : Juste avant de donner la parole, je vous rappelle qu'il y a un mot qui a été utilisé qui fait partie des propos qui sont non parlementaires. Je vous demanderais votre attention, si vous avez envie d'y revenir, parce que je ne l'accepterai pas. M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je trouve ça assez particulier que la cheffe de Québec solidaire pose une question sur la pandémie. Actuellement, le plus grand défi qu'on a, c'est de réduire la propagation du virus. Pour ça, ce qu'il faut faire, c'est de s'assurer le plus rapidement possible que, quand une personne a la COVID, les personnes qui ont eu des contacts avec elle dans les deux semaines précédentes, on puisse leur demander de se faire tester puis, au besoin, de s'isoler. M. le Président, je le dis, là, je trouve ça totalement irresponsable, la position de Québec solidaire...

Le Président : M. le leader du deuxième groupe de l'opposition.

M. Nadeau-Dubois : L'article 35.6° de notre règlement nous interdit d'imputer des motifs indignes à un député. En qualifiant les propos de ma collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques d'irresponsables, c'est ce qu'il fait. Il n'y a pas un député ici qui ne veut pas lutter contre la COVID-19 puis sauver des vies, mais nous avons le droit de débattre, en démocratie, des moyens pour le faire. C'est ce que nous faisons en cette Chambre. Je demande au premier ministre de respecter ça.

Le Président : M. le leader du gouvernement, rapidement, et je compléterai. Vous pouvez continuer.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le premier ministre... M. le Président. Vous constaterez que ça ne remplit pas les critères de l'article 35.5°. Le premier ministre répond à la question et indique clairement que la position défendue par Québec solidaire est irresponsable. Il n'attaque pas la conduite du député et n'impute pas de motifs indignes.

Le Président : Alors, les opinions sont émises. Je vous demande quand même d'être prudents dans les échanges que nous avons aujourd'hui. Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition, à vous la parole.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Alors, je lui parle de son manque d'écoute, puis il m'attaque. Très révélateur. Ça fait une semaine qu'on alerte le gouvernement que le monde a...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Ça, c'est prêter des intentions au premier ministre. Ce que la cheffe du deuxième groupe d'opposition vient de faire, c'est totalement ce qu'il ne faut pas faire. Et c'est complètement faux.

Le Président : Je vais vous demander, s'il vous plaît... M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : La cheffe parlementaire de ma formation politique a le droit de dire en cette Chambre qu'elle entend les propos du premier ministre et qu'elle les considère comme une attaque. Ça s'appelle argumenter.

Une voix : ...

Le Président : Non, je vous remercie. Je pense qu'on va arrêter. M. le leader du gouvernement, j'ai bien entendu. M. le leader du deuxième groupe, j'ai bien entendu. On va poursuivre, maintenant, la période de questions. On arrête ces échanges. Je pense que c'est clair pour tout le monde. Madame, je vous demande de continuer.

• (10 h 30) •

Mme Massé : Ça fait une semaine qu'on alerte le gouvernement que le monde a recours au privé pour le dépistage. C'est rendu tellement long, à recevoir des résultats, que les écoles ont recours à des entreprises privées pour recevoir des résultats plus vite.

Le premier ministre veut des propositions? On ne fait rien que ça. Réquisitionner les laboratoires privés, ce n'est pas compliqué, ça donne des réponses rapides. Puis pourquoi le premier ministre, là-dessus, ne veut pas nous écouter?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, Québec fait, en date d'hier, deux fois plus de tests, toutes proportions gardées, que dans le reste du Canada.

Je reviens sur l'application COVID. C'est simple, on s'inscrit. Quand on a la COVID, on le dit, et, comme ça, ça informe toutes les personnes qui ont été à moins... proches des personnes qui ont la COVID. On a fait toutes les vérifications, il n'y a aucun risque pour les données personnelles. Et Québec solidaire ose faire peur aux Québécois, en disant...

Des voix : ...

Le Président : On ne peut pas... Non, mais je comprends... M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, d'abord, j'ai le droit de signaler une infraction au règlement. L'expression «faire peur aux Québécois» est nommément dans le lexique des propos interdits en cette Chambre. La seule option pour vous, c'est de demander au premier ministre de les retirer.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, on est sur une question importante de sensibilisation de la population pour lutter contre la COVID-19, M. le Président. L'approche qui est présentée par Québec solidaire n'est pas responsable, M. le Président, pour permettre aux Québécois...

Des voix : ...

Le Président : Bon, écoutez, non, deux secondes. Je vais... On ne va pas commencer à qualifier tous les propos tout au long de la séance. On a une séance, je veux qu'elle se tienne de bonne façon. Ça a bien démarré, ça doit bien se continuer.

M. le premier ministre, sur ces propos, effectivement, ils ne sont pas permis au lexique. Je vais vous demander de les retirer.

M. Legault : Je les retire, M. le Président. Québec solidaire refuse d'inciter les Québécois à s'inscrire à une application. C'est une question de vie ou de mort. Quand Québec solidaire et le Parti québécois vont-ils prendre leurs responsabilités?

Des voix : ...

Le Président : Monsieur... Je pense, c'est... M. le leader du deuxième groupe d'opposition. Vous savez, là, on peut, là...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le leader, rapidement.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, en disant des choses comme «c'est une question de vie ou de mort», le premier ministre prend un sous-entendu qui est grave. Je pense que ça n'a pas sa place en cette Chambre.

Des voix : ...

Le Président : Non, c'est correct. Je pense que c'est clair, et on comprendra. Je pense qu'on va continuer la séquence. On est en deuxième complémentaire, également. Je vous demande maintenant d'aller en deuxième complémentaire. Et je vous demande à tous votre grande collaboration pour continuer de bonne façon cette période de questions, en évitant ce que vous savez être plus sensible.

Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition, deuxième complémentaire.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Je vais le répéter, il ne l'a pas entendu : Si la Santé publique nous transmet l'information à l'effet que cette application ne congestionnera pas les tests de dépistage, et donc les réponses à nos concitoyens concernant les résultats du dépistage, on l'a dit, qu'on serait prêts à le faire. Mais on ne veut pas nous donner accès à ça. Je n'ai pas entendu la Santé publique dire : Il n'y a pas de danger pour les dépistages, donc la longueur des résultats. Ça aussi, c'est problématique.

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je vais prendre au mot la cheffe de Québec solidaire. Si le directeur de la santé publique lui confirme qu'il n'y a aucun impact sur le traçage, d'inciter les Québécois à s'inscrire, elle va le suggérer? C'est ça qu'elle vient de nous dire? J'espère qu'elle va respecter sa parole.

Le Président : Question...

Une voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement... Non, écoutez, on ne va pas... M. le leader du gouvernement. Et rapidement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, le premier ministre a exprimé un souhait.

L'autre élément qui est fondamental, c'est que, lorsque la Santé publique et que le gouvernement du Québec dit à la population : Pour prévenir la contamination, on invite les gens à se faire tester, on invite les gens à télécharger l'application de traçage...

Le Président : M. le leader du gouvernement, je pense, c'est clair, là. Je veux dire, on n'est pas en réponse directement. Là, je vais vous demander...

Des voix : ...

Le Président : Je vous demande une attitude... À ce moment-ci, je pense que tout a été dit, tous ont bien compris. Je vous demande une attitude de collaboration, une attitude plus cordiale pour qu'on puisse poursuivre cette période de questions comme elle a été entamée, dans un contexte où tant les questions que les réponses, sur chacun des sujets, est extrêmement important. Alors, faites attention à vos propos, soyez collaboratifs et travaillons de façon cordiale.

Question principale, M. le député de Jacques-Cartier.

Mise en oeuvre des recommandations de la Commission d'enquête sur
les relations entre les autochtones et certains services publics

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Merci, M. le Président. C'est plus comme un débat entre Trump et Biden, ici, qu'une vraie période de questions.

Dans le rapport Viens, il y a 142 appels à l'action. C'est la feuille de route pour notre société afin de commencer une vraie réconciliation entre les peuples autochtones et l'État québécois. Il y a des appels à l'action qui touchent la vie des peuples autochtones : justice, éducation, santé, protection de la jeunesse.

Un an après le dépôt du rapport, les peuples autochtones et les Québécois sont déçus avec l'absence de réels progrès de ce gouvernement. Les ex-membres de la commission Viens ont exprimé leur déception hier dans une lettre adressée au gouvernement. Ils ont demandé plus de transparence afin de bien suivre le progrès ou l'absence de progrès.

Alors, ma question est simple : Êtes-vous prêts à être plus transparents dans le processus de suivi des 142 appels à l'action?

Le Président : Mme la ministre responsable des Affaires autochtones.

Mme Sylvie D'Amours

Mme D'Amours : Merci, M. le Président. Je remercie mon collègue de poser cette question, ça va pouvoir me permettre de relater les faits.

Effectivement, ça fait un an que le rapport a été déposé, mais, tout comme d'autres dossiers, ça fait sept mois qu'on est en pandémie. Vous savez, il y a eu le rapport de la commission royale, le rapport vérité de la réconciliation, l'Enquête nationale des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées et, le dernier, Viens. Le dernier rapport, M. le Président, c'est le miroir des 15 dernières années, et force est de constater qu'il n'y a rien qui avait été fait, rien qui n'avait été fait de la façon... pour et par les autochtones. J'ai voulu, par ce travail des deux rencontres, dont son collègue, de D'Arcy-McGee, était présent... j'ai voulu travailler d'une façon différente, qui prend peut-être un peu plus de temps, mais qui va être faite par et pour les Autochtones.

C'est fini, la façon colonialisme de le faire. Il faut le faire avec eux et pour eux. Et c'est un dossier qui est complexe, ça prend du temps. Il faut s'assurer que tout le monde soit en place.

Maintenant, il y a eu des retards un peu...

Le Président : En terminant.

Mme D'Amours : ...sur le travail de l'APNQL, mais il y a d'autres groupes avec qui je travaille.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : C'est vrai, il n'y a pas juste le rapport Viens qui explique la réalité des peuples autochtones mais aussi le rapport sur les femmes et les filles disparues ou assassinées. Les femmes et les filles autochtones sont 12 fois plus susceptibles d'être assassinées ou portées disparues. 12 fois. 12 fois. Il y a 21 appels à l'action dans le rapport sur les femmes disparues et assassinées qui ciblent le gouvernement du Québec. Je veux savoir de la ministre des Affaires autochtones combien ont été mis en oeuvre depuis un an.

Le Président : Mme la ministre responsable des Affaires autochtones.

Mme Sylvie D'Amours

Mme D'Amours : M. le Président, je vais continuer. J'ai travaillé avec l'Assemblée des premières nations du Québec, qui sont en réflexion, mais probablement qu'ils ont énormément de travail pendant la pandémie, et je ne juge pas ça.

Par contre, j'ai travaillé avec le Regroupement des centres d'amitié autochtones, qui existe depuis 40 ans. Nous avons continué nos travaux. Nous allons avoir quelques annonces à faire d'ici quelques semaines. Il y a aussi Femmes autochtones du Québec avec qui je travaille et le conseil des femmes autochtones élues, avec lesquelles je vais avoir des rencontres éventuellement la semaine prochaine.

Donc, il y a des appels à l'action, 21 appels à la justice, l'ENFFADA, et 142 appels à l'action...

Le Président : En terminant.

Mme D'Amours : ...de rapport Viens, et nous sommes en train de travailler de façon...

Le Président : Deuxième complémentaire. Je vous demande d'être attentifs, s'il vous plaît, j'entends des bruits qui sont un peu dérangeants. S'il vous plaît, M. le député, à vous la parole.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Mardi, c'étaient les funérailles de Joyce Echaquan. La communauté de Manawan a le coeur brisé. Ils demandent la justice pour Joyce. Mais la famille est claire, le chef Ottawa est clair, la nation attikamek est claire, c'est impossible d'avoir justice pour Joyce si le premier ministre et le gouvernement refusent de reconnaître que le racisme systémique existe envers ces peuples autochtones.

Alors, une question pour le premier ministre : Est-ce qu'il est prêt pour accepter et reconnaître que le racisme systémique existe envers les peuples autochtones du Québec?

Le Président : Mme la ministre responsable des Affaires autochtones, à vous la parole.

Mme Sylvie D'Amours

Mme D'Amours : M. le Président, le racisme existe, au Québec, on en a la preuve à l'hôpital de Joliette. Le racisme, au Québec, ne doit pas être toléré. On doit le dénoncer, on doit le... sévir et on doit aussi dire aux gens que c'est tolérance zéro. On ne pourra pas accepter ça encore une fois.

On est déjà à l'oeuvre. On a convenu, avec les chefs attikameks, de se rencontrer la semaine prochaine, avec le ministre de la Santé, d'ailleurs, puis on a déjà eu une rencontre avec eux. On va régler le problème de l'hôpital de Joliette et on va le prendre comme exemple pour régler tous les hôpitaux qui desservent les autochtones au Québec.

Le Président : En terminant.

Mme D'Amours : C'est tolérance zéro, au Québec, pour le racisme.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Marie-Victorin.

Engorgement du service des urgences dans les hôpitaux

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : M. le Président, à l'heure où on se parle, présentement, à l'Hôpital Pierre-Boucher, à Longueuil, il y a une dame âgée de 96 ans qui attend maintenant depuis plus de 95 heures sur une civière à l'urgence sans qu'aucun proche aidant ne soit admis à ses côtés parce que c'est le chaos dans les directives. Je suis certaine que le ministre sera d'accord avec moi pour dire que cette situation n'a aucun sens.

Je vois au moins deux options pour empêcher que de telles histoires crève-coeurs ne se reproduisent. La première : mieux circonscrire la directive concernant les proches aidants en zone rouge en les permettant, même en cas de débordement, pour les patients âgés et vulnérables. La seconde : réserver des chambres à ces patients pour qu'ils y soient dirigés rapidement.

Est-ce que le ministre peut s'engager à appliquer l'une ou l'autre de ces propositions?

• (10 h 40) •

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, M. le Président, j'apprécie beaucoup la question de la députée de Marie-Victorin parce que je souscris totalement à son point, que la situation qui a été vécue à Pierre-Boucher, notamment par cette personne âgée là, est totalement inacceptable. Il faut voir comment on peut mieux organiser nos urgences. Ce n'est vraiment pas le genre de patient qui aurait dû passer par les urgences, mais qui aurait dû être admis en chambre plus rapidement. On en a fait un point dans notre discussion quotidienne sur la situation. Donc, je souscris totalement à son commentaire, cette situation n'est pas acceptable.

Maintenant, plus largement, plus largement, comment on va faire pour améliorer? Moi, mon plus grand défi que j'ai, en ce moment, c'est de travailler sur la crise, en ce moment, mais faire avancer des dossiers qui ont traîné depuis des années, comme les urgences.

Alors, en ce moment, ce que l'on fait, c'est qu'on a fait énormément, dans les dernières années, au niveau des soins à domicile. On a mis, par exemple... on est en discussion avec la Montérégie pour voir comment des infrastructures temporaires pourraient permettre, comme on l'a fait dans d'autres hôpitaux...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...d'améliorer la capacité. Alors, je pourrai continuer, mais on a plusieurs mesures partout.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : M. le Président, j'ai cité le cas de cette dame, mais ce n'est pas la seule. Le téléphone ne dérougit pas, on a plusieurs situations de patients qui sont dans la même situation, en fait. Puis le taux d'occupation à l'urgence, hier, à Pierre-Boucher, était de 203 %.

Il me semble que c'est urgent de faire quelque chose pour le protocole de triage des urgences pour tenir compte du niveau de vulnérabilité des patients, dans le contexte actuel, puis s'assurer de limiter le temps de séjour des patients dans ce contexte de milieu hospitalier.

Alors, quel est le plan précis du gouvernement?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je voulais juste... Je n'ai peut-être pas eu le temps de terminer, M. le Président, la première question, mais, sur la question des proches aidants, moi, j'ai un appel tout à l'heure, comme je vous ai dit souvent, on a un appel avec les P.D.G. à chaque semaine, et, la question des proches aidants, je veux être certain que la directive qui a été émise, que les gens pouvaient avoir accès, les proches aidants pouvaient aller soit à l'hôpital... Ce qui n'est pas toujours facile, parce que, lorsqu'on est à l'urgence, dans le cas de la dame dont la députée parlait, c'était un cas qui était difficile. Mais, la directive que nous avons mise pour être sûrs que les proches aidants puissent avoir accès à leurs personnes, on va la faire respecter. J'en ai un point de discussion à l'heure du midi avec les P.D.G.

Le Président : Rapidement.

M. Dubé : Donc, je suis très sensible à cet élément-là.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée.

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : M. le Président, je remercie le ministre pour cette réponse claire. On sait que la situation dans les urgences, elle ne peut que s'aggraver avec la deuxième vague, l'hiver qui s'en vient.

On sait aussi que l'idée de louer des salles de réception puis des chambres d'hôtel avait été retenue ce printemps. Est-ce que vous allez faire la même chose pour cet automne? Et, si oui, quand?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : On a la chance, Mme la députée... M. le Président, pardon, on a la chance, en ce moment, d'avoir mis, depuis quelques mois, une équipe en place avec tout le groupe, je dirais, de plusieurs sous-ministres associés qui travaillent sur un plan pour améliorer nos urgences. Je l'ai dit, notre défi, c'est de travailler sur la COVID mais en même temps sur un projet important comme ça. Ce groupe-là est mené par la Dre Berger, qui est un médecin de l'Hôtel-Dieu de Lévis qui fait un travail incroyable, en ce moment, pour nous arriver avec des recommandations. Nous avons identifié 25 urgences dans 15 établissements sur lesquels nous allons améliorer et...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...suivre l'amélioration des urgences au cours des prochains mois. Merci, M. le Président.

Le Président : Question principale, M. le député de D'Arcy-McGee.

Impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : M. le Président, l'anxiété, dépression, isolement, cyberintimidation, violence conjugale, voilà la bombe à retardement qui confronte les Québécois avec chaque jour qui passe de cette terrible pandémie. Depuis le mois de mars, les signaux d'une crise de santé mentale se multiplient.

43 groupes d'experts et d'usagers nous ont écrit pour sonner l'alarme sur la crise émergente de santé mentale; l'Ordre des psychologues du Québec, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, pour n'en nommer que deux. Chaque jour, ce gouvernement nous parle de la crise sanitaire. Mais un plan d'action, un diagnostic expert sur l'étendue du problème grave de la santé mentale, de nouvelles ressources pour combattre le problème? Radio silence. Déjà ce matin, de toute évidence, un refus du premier ministre de notre main tendue, de notre proposition concrète et structurante sur l'accès public et universel à la psychothérapie.

Donc, le ministre de la Santé a-t-il une proposition sérieuse pour protéger la...

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bon, je ne suis pas certain d'avoir tout compris quelle était la question, mais, sur la question de la santé mentale, j'aimerais faire une mise en contexte qui est importante. C'est toujours intéressant de voir que les questions sur la santé mentale viennent lorsque mon collègue n'est pas là. Alors donc, je pense que je vais essayer de répondre, parce que c'est important pour moi, M. le Président, c'est important pour moi, M. le Président, d'expliquer comment, pour nous, la santé mentale est importante, très importante.

Mon collègue le député de Taillon et ministre délégué à la Santé a fait des efforts incroyables depuis plusieurs mois. Le premier ministre a cité des exemples très clairs, où on a baissé de plus de 40 % la liste des personnes qui étaient en attente. On a une collaboration, en ce moment, plus qu'exemplaire, je dirais, avec l'opposition pour s'assurer que les organismes communautaires vont pouvoir participer à une consultation, cet automne, pour s'assurer que le plan, le plan qui va être mis, maintenant, à jour entre 2020 et 2025, va se faire en collaboration avec ces organismes communautaires.

Alors, je pense qu'on est vraiment sur le dossier de façon active, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire. Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, le printemps dernier, nos aînés ont été confinés pendant des semaines, seuls, isolés, sans famille, sans proche aidant. Deuxième vague, le même film recommence : nos aînés seuls, isolés. Ils ne voient plus leurs amis, ils ne serrent plus dans leurs bras leurs enfants et petits-enfants. C'est la solitude qui pèse, la tristesse et la détresse qui s'installent.

Avec le COVID, la santé mentale de nos aînés est plus fragile que jamais. Le gouvernement doit agir avant qu'il ne soit trop tard.

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, je pense que les Québécois qui nous écoutent ce matin doivent voir comment, pour nous, non seulement la santé mentale est importante, dans un contexte de crise, comme l'a très bien expliqué le premier ministre tout à l'heure, mais comment, pour nous, le traitement de nos aînés est important, et de ce qu'on a appris de la première vague.

J'aimerais rappeler aux Québécois, lorsqu'on était dans la première vague, la plupart des décès ont été constatés dans les CHSLD. Ce n'est vraiment pas la situation en ce moment, ce n'est vraiment pas cette situation-là.

Par contre, ce qu'on doit s'assurer, puis c'est pour ça qu'on doit avoir la collaboration de l'opposition...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...c'est que les Québécois comprennent les mesures sanitaires qu'on doit appliquer pour que ça n'arrive pas.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Viau.

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : Démotivée, démoralisée, désabusée, découragée, notre jeunesse a le vent de la pandémie en plein visage. Écoles fermées, cours à distance, arrêt des sports interscolaires, premiers à être expulsés du marché du travail. On parle d'une génération qui est au moment de sa vie où les risques de suicide sont les plus élevés. Avec la COVID, la santé mentale des jeunes est plus fragile que jamais. Le gouvernement doit agir avant qu'il ne soit trop tard.

M. le premier ministre, vous êtes le responsable des dossiers jeunesse. Quelles sont les mesures spécifiques que vous allez mettre en place pour protéger la santé mentale des jeunes du Québec?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci bien, M. le Président. Les mesures pour protéger le bien-être, la santé mentale de nos jeunes, de nos adolescents, on en a pris plusieurs. On a ajouté plus de 350 professionnels, qui oeuvrent dans notre réseau scolaire dès cette année, 350 de plus qui s'ajoutent aux 700 de l'an passé. Dans ces personnels-là, il y a des gens qui s'occupent d'élèves, évidemment, plus vulnérables, il y a des psychologues, il y a des psychoéducateurs.

On a aussi une entente particulière avec notre Santé publique pour ajouter 30 millions d'argent neuf en partenariat avec des organismes communautaires et de l'embauche de professionnels qui vont venir soutenir nos jeunes dans nos écoles secondaires dès cette année. On est très actifs.

On est conscients que les temps sont difficiles. C'est pour ça qu'on en fait plus.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Verdun.

Impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des femmes

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : M. le Président, les premières études sur l'impact de la COVID chez les femmes sont inquiétantes : pertes d'emploi, responsabilités familiales accentuées, donc charge mentale supplémentaire pour les femmes, notamment lors de la fermeture des écoles et des garderies, augmentation du taux de divorce, augmentation de la précarité financière, augmentation de la violence conjugale. Et ça, c'est sans compter que les anges gardiens de la COVID, qui sont ceux qui ont mis leur propre santé à risque pendant la crise, sont majoritairement des femmes. On pense aux infirmières, aux préposées aux bénéficiaires, aux enseignantes, aux éducatrices en service de garde.

Hier, on parlait des victimes d'agression sexuelle laissées sans soutien, faute de personnel dans les hôpitaux. Tout ça ensemble, c'est un cocktail explosif pour la santé mentale des femmes.

Avec la COVID, la santé mentale des femmes est plus fragile que jamais. Le gouvernement doit agir avant qu'il ne soit trop tard.

• (10 h 50) •

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, M. le Président, j'apprécie la question de la députée de Verdun. Puis je pense que les gens doivent être rassurés que, pour nous, je le répète encore une fois, la santé mentale, particulièrement dans une période difficile comme nous vivons, est importante pour nous.

Je vais donner un exemple de ce qu'on a fait au cours des derniers mois. On a demandé à nos organismes de participer à un appel collectif. Nous avons contacté, M. le Président, au cours des quatre derniers mois, plus de 300 000 personnes qui sont des bénéficiaires du ministère de la Santé, particulièrement les gens avec qui on travaille tous les jours, que ce soit dans les soins à domicile, que ce soit dans les différentes interventions que l'on fait. Je pense que ça, M. le Président, ça ne s'était jamais fait, de demander à nos équipes de contacter directement nos bénéficiaires pour s'assurer qu'ils sont corrects.

Le Président : ...

M. Fortin : M. le Président, question de règlement. Le règlement est clair, le député répondre à la question... le ministre doit répondre à la question de la députée. La députée a posé une question qui porte sur les femmes. Ça fait 51 secondes qu'il répond, zéro fois il a utilisé mot «femmes».

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, le leader de l'opposition officielle sait très bien que vous n'êtes pas là pour juger de la qualité de la réponse ou de la teneur de la réponse qui est offerte par le gouvernement. Le ministre a parlé de la santé mentale, qui inclut également la santé mentale des femmes, qui sont particulièrement éprouvées. Et le ministre de la Santé indique également très clairement qu'il y a des ressources et que le gouvernement du Québec s'en occupe parce qu'on considère ça très important, la santé mentale.

Surtout dans la situation de pandémie actuelle, M. le Président, je pense que c'est prioritaire de dire à tout le monde qui souffre d'aller chercher de l'aide. Il y a des lignes, il y a des services qui sont disponibles, M. le Président. Il faut rappeler ça à la population de chaque côté.

Le Président : On demande au ministre de poursuivre sa réponse, s'il vous plaît, à ce moment-ci. M. le ministre.

M. Dubé : Alors, merci, M. le Président. Puis j'apprécie mon leader pour ces précisions, parce que, dans le fond, lorsque j'ai répondu, tout à l'heure, M. le Président, j'ai dit qu'il y a eu un effort concerté de rejoindre plus de 325 000 personnes. Moi, je pourrais penser qu'il y a au moins... plus que 50 % des femmes qui ont été contactées lorsqu'on a fait cet effort-là pour s'assurer qu'on comprenait très bien notre clientèle, M. le Président. Merci.

Le Président : Ceci met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

Nous passons maintenant à la rubrique Motions sans préavis. En fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je reconnais M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Bérubé : M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'importance de protéger, de valoriser, de promouvoir et de pérenniser la langue française au Québec;

«Que l'Assemblée nationale réitère sa profonde préoccupation quant à l'effritement du français au Québec, particulièrement en région métropolitaine;

«Qu'elle demande au gouvernement de renoncer aux projets d'agrandissement du collège Dawson et de l'Université McGill, contenus dans le projet de loi n° 66;

«Qu'elle demande également au gouvernement de renoncer à donner, sans contrepartie, une section de l'ancien Hôpital Royal Victoria à l'Université McGill, et de procéder plutôt à location du site pour maintenir publique la propriété de cet édifice patrimonial.» Merci, M. le Président.

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement. Je reconnais maintenant M. le ministre de l'Éducation.

Souligner la Semaine pour l'école publique

M. Roberge : M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée Saint-Laurent, la députée de Sherbrooke, la députée de Joliette, le député de Chomedey et la députée Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale souligne la 11e Semaine pour l'école publique, organisée par la Fédération autonome de l'enseignement, qui a pour thème Notre école publique, on l'aime... encore plus!;

«Qu'elle réitère l'importance capitale de la triple mission de l'école publique, soit instruire, socialiser et qualifier;

«Qu'elle se joigne au porte-parole de la Semaine pour l'école publique, Philippe Laprise, pour reconnaître le travail colossal des personnels de l'école publique, mais aussi la persévérance de tous les élèves, jeunes et adultes;

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse le rôle essentiel que doit jouer l'école publique comme vecteur d'égalité des chances et de justice sociale au Québec, en offrant une éducation gratuite, accessible et universelle;

«Qu'elle reconnaisse la contribution exceptionnelle de l'école publique au développement de la société québécoise.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Consentement, sans débat. Je vous demande de m'indiquer le vote de vos groupes respectifs. D'abord, M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Cette motion est donc adoptée. Et je reconnais maintenant M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Birnbaum : M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Jean-Lesage, le député des Îles-de-la-Madeleine, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que la pandémie de COVID-19 et tous les bouleversements qu'elle a créés, ont augmenté les seuils d'anxiété et de dépression dans toutes les couches de la population et ont eu des effets néfastes chez un grand nombre de Québécois et Québécoises;

«Qu'elle rappelle que les problématiques de santé mentale, si elles ne sont pas prises en charge rapidement, peuvent avoir de nombreuses conséquences tant sur le plan personnel que professionnel et sociétal;

«Qu'enfin, elle exige du gouvernement caquiste de mettre en place une couverture publique universelle des soins de santé mentale dès maintenant.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement. À ce moment-ci, je reconnais M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

Prendre acte de la hausse rapide des cas de COVID-19 chez les aînés et demander
au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour protéger
ceux qui vivent en résidence privée pour aînés

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, la députée de Fabre, le député de Rimouski, la députée de Marie-Victorin et le député de Chomedey :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte des chiffres dévoilés hier par la Dre Mylène Drouin, qui font état d'une hausse rapide des cas de COVID chez les aînés;

«Qu'elle prenne acte du nombre de cas confirmés chez les 65 ans et plus qui est passé en deux semaines d'un peu moins de 40 par jour à une centaine;

«Qu'elle rappelle qu'au Québec, des dizaines de milliers d'aînés vivent dans des résidences privées pour aînés (RPA);

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les aînés vivant en RPA, notamment en limitant au maximum le déplacement de personnel entre ces résidences tout en s'assurant d'éviter les bris de services.» Merci.

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Consentement, sans débat.

Mise aux voix

Le Président : Consentement, sans débat. Vos votes pour vos groupes parlementaires respectifs. D'abord, par le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Cette motion est donc adoptée. Une motion sans préavis ayant été déjà présentée par le groupe parlementaire formant le gouvernement, je demande s'il y a le consentement pour permettre la lecture d'une autre motion sans préavis. Consentement? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Avant de consentir, on aimerait simplement être informés du sujet de la motion en question.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : C'est la motion pour les consultations particulières sur le projet de loi n° 65.

Le Président : Donc, consentement? Je reconnais M. le leader du gouvernement.

Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 65

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je fais motion, conformément à l'article 146 du règlement de l'Assemblée nationale, afin :

«Que la Commission des transports et de l'environnement, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 65, Loi modifiant principalement la Loi sur la qualité de l'environnement en matière de consigne et de collecte sélective, procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques le mardi 20 octobre 2020 de 10 heures à 11 h 50, après les affaires courantes jusqu'à 17 h 55 et de 19 h 30 à 21 h 05, le mercredi 21 octobre 2020 après les affaires courantes jusqu'à 13 h 05 et de 15 heures à 17 h 25 et le jeudi 22 octobre 2020 après les affaires courantes jusqu'à 13 h 05 et de 15 heures à 17 h 25 et le mardi 27 octobre 2020 de 10 heures à 11 h 35;

«Qu'à cette fin, la commission entende les personnes et organismes suivants : RECYC-QUÉBEC, la SAQ, L'Association des brasseurs du Québec, le Conseil canadien du commerce de détail, l'Association canadienne des boissons, Éco-Entreprise Québec, le Conseil des entreprises en technologies environnementales du Québec, l'Union des municipalités du Québec, la Fédération québécoise des municipalités, la Fondation David-Suzuki, le Front commun québécois pour gestion écologique des déchets, Boissons gazeuses Environnement, Les bouteilles recyclées du Québec, Coop Les Valoristes, le Réseau [de l'environnement], Conseil de la transformation alimentaire du Québec, Association des marchands [de] dépanneurs et épiciers du Québec, Équiterre, l'Association des détaillants en alimentation du Québec;

«Qu'une période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la manière suivante : 6 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 4 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 1 minute au deuxième groupe d'opposition et 1 minute au troisième groupe d'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 35 minutes partagées ainsi : 17 minutes 30 secondes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 11 minutes 40 secondes pour l'opposition officielle, 2 minutes 55 secondes pour le deuxième groupe d'opposition et 2 minutes 55 secondes pour le troisième groupe d'opposition;

«Que les témoins auditionnés puissent l'être par visioconférence;

«Qu'une suspension de 5 minutes soit prévue entre les échanges avec chaque personne et organisme;

«Que le ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

• (11 heures) •

Le Président : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Une voix : ...

Mise aux voix

Le Président : Je vous demande donc vos votes respectifs en fonction de vos groupes parlementaires. M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader de deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Cette motion est donc adoptée.

Avis touchant les travaux des commissions

À la rubrique Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'avise cette Assemblée que la Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 53, Loi sur les agents d'évaluation du crédit, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;

La Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 45, Loi concernant principalement la nomination et le mandat des coroners et du coroner en chef, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Pauline-Marois;

La Commission des relations avec les citoyens poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 56, Loi visant à reconnaître et à soutenir les personnes proches aidantes et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Marie-Claire-Kirkland;

La Commission des finances publiques entreprendra les consultations particulières sur le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure, le mardi 20 octobre 2020, de 10 heures à 11 h 50, à la salle Pauline-Marois;

La Commission des transports et de l'environnement entreprendra les consultations particulières sur le projet de loi n° 65, Loi modifiant principalement la Loi sur la qualité de l'environnement en matière de consigne et de collecte sélective, le mardi 20 octobre 2020, de 10 heures à 11 h 50, à la salle Marie-Claire-Kirkland.

Le Président : Et, pour ma part, je vous avise que la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs se réunira en séance de travail virtuelle le vendredi 9 octobre 2020, de 10 heures à midi, afin d'organiser les travaux de la commission.

Je vous avise également que la Commission des finances publiques se réunira en auditions publiques le lundi 19 octobre 2020, à 14 heures, pour une durée de 90 minutes, à la salle Pauline-Marois, afin d'entendre le ministre des Finances dans le cadre de l'étude de la politique budgétaire du gouvernement et de l'évolution des finances publiques.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Avis de sanction de projets de loi

À la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous informe qu'aujourd'hui, à 15 h 30, au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur, il y aura sanction du projet de loi n° 35, Loi visant à moderniser certaines règles relatives à la publicité foncière et à favoriser la diffusion de l'information géospatiale, ainsi que du projet de loi n° 50, Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw.

Je vous avise de plus que l'interpellation prévue pour le vendredi 23 octobre 2020 portera sur le sujet suivant : Propositions concrètes visant à redresser la situation dans la gestion de la crise de la COVID-19 dans le réseau de l'éducation par le gouvernement caquiste. Mme la députée de Saint-Laurent s'adressera alors à M. le ministre de l'Éducation.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour.

Et je suspends les travaux pour quelques instants. Merci à toutes et à tous.

(Suspension de la séance à 11 h 3)

(Reprise à 11 h 12)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous reprenons nos travaux. Et je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Caire : Merci, Mme la Présidente. Pourriez-vous appeler l'article 2 du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 39

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 2 du feuilleton, Mme la ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Réforme électorale propose l'adoption du principe du projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin. Alors, Mme la ministre, je vous cède la parole.

Mme Sonia LeBel

Mme LeBel : Oui. Bien, alors, merci, Mme la Présidente. C'est vraiment un beau moment pour moi de m'adresser à vous, là, à l'occasion de l'adoption de principe du projet de loi n° 39, la loi, effectivement, qui établit un nouveau mode de scrutin. Comme vous le savez, Mme la Présidente, le 25 septembre 2019, j'ai eu l'honneur et, je dirais, le bonheur de présenter ce projet de loi, auquel je crois très profondément. Nous avions pris l'engagement de le faire dans la première année de mon mandat, nous avons tenu parole.

Donc, le projet de loi n° 39 est le premier projet de loi qui propose de réformer le mode de scrutin à avoir été présenté à l'Assemblée nationale dans l'histoire du Québec. Aucun gouvernement n'est allé aussi loin, je pense que c'est bon de le souligner à ce stade-ci. Avec le mode de scrutin proposé, nous avons trouvé, je pense, un juste équilibre. D'une part, il constitue une avancée significative vers un système plus proportionnel et, d'autre part, il maintient la possibilité d'élire des gouvernements stables.

Il faut le dire, on traverse maintenant une crise sanitaire. Je pense qu'on n'a plus besoin de le mentionner, malgré que je pense qu'il est toujours important de répéter qu'on est toujours dans cette période de pandémie. Peut-être que parce que ça fait plusieurs mois, on commence à penser que c'est une nouvelle réalité, on s'y habitue. Mais il ne faut pas s'y habituer, c'est quelque chose qu'il faut combattre à tous les jours et pour lequel il faut continuer à être vigilants. Mais cette crise, elle est partout dans le monde, elle n'est pas simplement au Québec, Mme la Présidente. Le Québec, par contre, n'y échappe pas. Puis, malgré la pandémie qui a chamboulé notre calendrier, ma volonté et celle du gouvernement d'aller de l'avant dans cette réforme du mode de scrutin demeure la même.

Étant donné la pause forcée qu'on a vécue, Mme la Présidente, laissez-moi rapidement vous rappeler les grandes lignes et principes du mode de scrutin que nous proposons. Je pense que c'est important de ramener sur l'avant‑plan quelles sont les motivations derrière ce projet de loi et quels sont les intérêts et bénéfices que les Québécois pourront en tirer au niveau démocratique pour notre société.

Plusieurs principes adoptés à l'unanimité à l'Assemblée nationale nous guident depuis le début de l'élaboration de ce projet de loi, soit une meilleure représentation du vote populaire, ce qu'on appelle la proportionnalité, l'importance du lien entre la population et les élus — on en a beaucoup discuté en consultations, ce lien important là qu'on voit maintenant, pendant la pandémie, de plus en plus chaque jour, ce lien important qu'on a entre le député et ses citoyens sur le terrain pour faire le pont avec le gouvernement — le respect du poids politique des régions — avec mon collègue du Parti québécois, c'est un point qui a été beaucoup mis de l'avant pendant les consultations et c'est quelque chose qu'on partage, c'est des choix qu'il faut faire, mais je pense que le fait de maintenir, dans le projet de loi, 17 régions administratives, c'est un des compromis qu'on peut faire pour, effectivement, maintenir le poids politique de nos régions — la stabilité du gouvernement, un système accessible, un système où chaque citoyen verra son vote compter plus, pourra trouver que son vote est de plus en plus pertinent.

Et je pense que, dans une crise comme celle que nous traversons maintenant, la confiance des citoyens envers leur gouvernement, la confiance envers les élus de l'Assemblée nationale est totalement importante. Donc, une réforme du mode de scrutin comme ça, qui pourrait paraître secondaire en ces temps de pandémie, devient de plus en plus cruciale, justement, pour rétablir ce lien de confiance là entre le citoyen et ses élus, ainsi qu'une plus grande représentation des femmes, des jeunes et des communautés ethnoculturelles, ce sont des notions qu'on a également introduites dans le projet de loi, Mme la Présidente.

Donc, on propose, de façon beaucoup plus technique, là, un mode de scrutin mixte avec compensation régionale, qui va compter 80 députés de circonscription, 45 députés de région pour un total de 125 députés, comme c'est le cas aujourd'hui. Donc, la stabilité aussi de notre Parlement est tenue compte dans notre réflexion et dans le projet de loi que nous avons déposé. Les électeurs disposeront de deux votes : un vote pour un député dans une circonscription et un vote pour les députés qui les représenteront au niveau régional. C'est important de souligner que la liste n'est pas une liste nationale, c'est-à-dire que ce n'est pas une liste de candidats qui se veut être à la grandeur du Québec, mais chaque candidat qui se verra mettre sur une liste pour être un député, ce qu'on appelle un député de liste, pour compenser sera un candidat qui sera choisi sur une liste dans une région. Le lien d'attachement à la région doit demeurer, et on en a tenu compte dans notre proposition.

Mme la Présidente, le mode de scrutin est fondé sur les 17 régions administratives du Québec, je l'ai mentionné, avec les Îles-de-la-Madeleine et Ungava comme circonscriptions d'exception. C'est important également de le préserver. Je vois mon collègue qui me fait... qui fait signe. Donc, on a les Îles-de-la-Madeleine à coeur, malgré ce qui peut se passer dans l'actualité récemment, je pense qu'il faut le noter. On travaille très fort — et je fais un aparté — pour maintenir ce lien terrestre et on va continuer de le faire.

Le Québec est formé de régions caractéristiques distinctes et aux identités fortes qui doivent être représentées à l'Assemblée nationale. Donc, c'est, encore une fois, un des critères qui a guidé notre réflexion et la proposition que nous avons déposée dans le projet de loi n° 39. On souhaite également contribuer à une meilleure représentation des femmes, des jeunes et des personnes issues de la diversité, un sujet qui est encore plus criant aux heures sombres que nous vivons présentement. Ce principe est énoncé clairement dans le projet de loi. Et, en ce qui concerne la parité, les partis politiques devront se doter, donc, d'objectifs clairs et en rendre compte durant la période électorale. Ainsi, ce sont les électeurs qui auront le dernier mot, et c'est eux qui pourront se prononcer en toute connaissance de cause.

Enfin, il est prévu que le nouveau mode de scrutin soit soumis au référendum et n'entre en vigueur que s'il obtient l'aval d'une majorité des électeurs. De cette manière, ce sont les Québécoises et les Québécois, Mme la Présidente, qui auront le dernier mot quant à cette réforme sans précédent dans l'histoire du Québec. Bien que nous avons toujours considéré avoir la légitimité nécessaire, la légitimité parlementaire nécessaire pour mettre de l'avant cette réforme, je pense qu'elle est trop importante pour les Québécois, elle a trop d'impacts sur leur démocratie, sur leur vie citoyenne pour qu'on ne leur pose pas la question avec un projet de loi qui est clairement identifié.

Au cours de l'hiver dernier, des consultations particulières se sont tenues. On dirait que c'est il y a un siècle, je dois vous l'avouer, mais c'est l'hiver dernier. Je pense qu'on peut retenir de ces consultations que la grande majorité des intervenants qui ont été entendus sont en faveur d'une réforme du mode de scrutin.

Naturellement, plusieurs points plus particuliers ont été abordés, pendant cette consultation, qui sont beaucoup plus techniques : ce qui est de, bon, la double candidature, le mode de calcul de la distribution des candidats pour la proportionnalité. Je n'entrerai pas dans tous les détails, mais, si on parle de l'objectif général du projet de loi, qui est de réformer notre mode de scrutin actuel, notre système parlementaire actuel pour en faire un système plus proportionnel, donc injecter plus de proportionnalité dans le système actuel, cette idée, cet objectif remporte l'adhésion de la très grande majorité des gens que nous avons entendus.

• (11 h 20) •

Ils souhaitent donc un mode de scrutin qui assure une meilleure représentation des électeurs dans un modèle mixte avec compensation régionale. C'est le compromis à faire entre une proportionnalité pure et de garder, comme je vous le disais, ce lien d'attachement qu'on a avec nos députés, d'être capables de garder jusqu'à 80 députés de circonscription et d'être capables d'avoir encore ce lien si important, si étroit, je le disais tantôt, qu'on voit, qu'on ressent avec beaucoup plus d'urgence et de pertinence pendant cette crise que nous vivons tous. Pour les 125 députés de l'Assemblée nationale, on a eu l'occasion d'en discuter à plusieurs reprises, le lien avec les citoyens est extrêmement important, et par le maintien de circonscriptions de type traditionnel, si on peut dire, et le fait que la liste des députés de liste soit bien ancrée dans une région donnée, on s'assure de maintenir cette préoccupation-là de nos citoyens d'avoir un lien avec leurs élus qui est beaucoup plus étroit.

Les différents intervenants entendus nous ont fait, donc, des propositions, je le mentionnais, notamment en vue d'augmenter la proportionnalité du mode de scrutin proposé. Plusieurs nous ont parlé du seuil de votes requis ou encore de la méthode de calcul utilisée. Le nombre de régions a aussi été évoqué à plusieurs reprises. La parité est aussi un sujet abondamment abordé par de nombreux intervenants. Je tiens à le redire à mes collègues ici présents, Mme la Présidente, tous les projets de loi sont perfectibles. On a eu de belles discussions pendant les consultations. Et je suis contente qu'on passe à l'adoption de principe aujourd'hui parce qu'on pourra aller de l'avant, en commission parlementaire, à l'étude article par article, et je suis convaincue qu'on pourra avoir des discussions constructives.

Quand je parlais du point d'équilibre, tantôt, qu'on a su trouver, c'est ce point d'équilibre là entre injecter une proportionnalité plus grande qui est crédible, donc, qui fait en sorte que la... Parce que, de passer d'un mode de scrutin x à un autre, si on n'a pas d'effet sur l'aiguille de la proportionnalité, c'est changer, pour moi, quatre trente-sous pour une piastre. Donc, il fallait trouver la façon d'être capable de passer à un mode de scrutin beaucoup plus proportionnel, qui a un effet probant sur cette proportionnalité-là, qui donne effectivement à nos citoyens beaucoup plus de pouvoir pour leur vote individuel, tout en respectant les autres caractéristiques que je vous disais. Et ce sont tous des vases communicants. Si on ajoute plus de proportionnalité, nécessairement on doit peut-être diminuer le nombre de régions, peut-être on doit augmenter le nombre de députés de liste, on doit diminuer le nombre de circonscriptions.

Alors, ce sont tous des intérêts qui sont importants pour le gouvernement : le nombre de régions, le poids des régions, la proportionnalité, le lien avec le député, la stabilité du gouvernement, être capable d'assurer que, malgré ce changement-là, on réussit quand même à avoir des gouvernements qui sont stables. Ce sont tous des facteurs qui s'influencent entre eux. Et ce que j'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises pendant les consultations, trouver ce que j'appelais ce point de friction, ce point d'équilibre entre tous ces facteurs-là, je pense qu'on a réussi à l'atteindre, mais ce point-là demeure perfectible et je pense qu'on a encore une certaine marge de manoeuvre pour respecter tous ces critères-là, tout en ajustant encore notre projet de loi.

Donc, je suis ouverte à le bonifier. Je ne sais pas si ça transparaissait de mes propos, mais je vais le dire de façon très claire : Je suis ouverte, naturellement, à bonifier et améliorer le projet de loi n° 39, des améliorations qui pourraient permettre d'atteindre, donc, notre objectif, comme je le disais, de proportionnalité, mais d'offrir aussi des institutions plus représentatives, plus démocratiques et plus accessibles.

Toutefois, je le disais, il faut maintenir ce point d'équilibre là et c'est un des objectifs de ce projet de loi. Il y a plusieurs, je le disais, plusieurs facteurs dans notre entente, plusieurs facteurs qui sont interreliés, mais qui aussi... pas interfèrent, mais ont un effet les uns sur les autres. Donc, si on augmente d'un côté, on diminue de l'autre, c'est nécessairement vrai. Si on augmente le nombre de circonscriptions, on diminue l'effet de la proportionnalité. Alors, c'est un jeu d'équilibre pour trouver une réforme du mode de scrutin qui nous permettra quand même d'atteindre l'objectif principal : injecter beaucoup plus de proportionnalité dans notre système actuel. Et cet équilibre-là est nécessaire, il est même essentiel pour conserver le large consensus que je pense avoir su atteindre dans cette proposition de réforme. Il est névralgique, ce point de friction là, pour moi, et je le vois comme la voie de passage pour réussir à faire cette réforme qui est tant attendue et, je le pense et je le crois sincèrement, qui sera et qui est au bénéfice de nos citoyens.

Donc, lorsqu'on regarde le projet de loi n° 39, avec la compensation régionale, les 17 régions, le seuil national, je considère qu'on doit aujourd'hui se réjouir. Il constitue une avancée pour la représentation des intérêts des différentes régions du Québec à l'Assemblée nationale. Il garantit un nombre de sièges minimal à chacune des régions, c'était important pour nous. Il permettra également la fin des chevauchements des frontières de circonscriptions sur plus d'une région administrative, ce qui est une demande de plusieurs MRC dans tout le Québec. Ce sont tous des avantages qui me font dire que le projet de loi n° 39 va nous permettre de mieux représenter nos citoyens, je ne peux pas le répéter assez souvent, quelle que soit la région dont ils proviennent. Ça démontre la recherche, là, de ce fragile équilibre.

Mme la Présidente, d'autres modifications sont possibles, par contre, pour bonifier le projet de loi n° 39, des modifications qui n'ont pas nécessairement d'impact sur la proportionnalité, ou la représentation des régions, ou encore la stabilité du gouvernement, qui sont les trois principaux objectifs et critères qui guident notre action dans ce dossier. La double candidature en est un bon exemple. C'est une mesure qui a été largement demandée lors des consultations particulières et qui serait, donc, de nature à favoriser un large consensus. La question de la parité, également, est un autre exemple. Lors des consultations particulières, cette question a occupé une place plus que prépondérante, et je considère que c'est un enjeu très important dont on devra débattre, là, dans les études article par article à venir.

Donc, on propose de consolider les efforts des dernières élections, et il énonce, d'ailleurs, l'importance de favoriser les candidatures féminines. Il fixe la zone paritaire pour atteindre... pour les partis politiques et mentionne que tout parti politique devra transmettre à Élections Québec un énoncé au sujet des objectifs qu'il souhaite se fixer concernant la parité. Un parti qui se fixe, donc, des objectifs qui sont trop bas ou qui ne réussit pas à les atteindre aura à s'expliquer à la population et à répondre aux questions des médias. Une forte pression politique, je pense que c'est la meilleure pression pour faire bouger les partis politiques en matière de parité et d'équité, c'est la pression populaire. On l'a vu aux dernières élections, hein, tous les partis confondus ici, à cette Assemblée nationale, ont présenté plus de candidatures féminines que jamais. On a maintenant une Assemblée nationale qui est paritaire, je dois le dire, un Conseil des ministres qui est paritaire. Donc, je pense qu'il ne faut pas nécessairement ne tabler que sur ces bons résultats, il faut se donner les moyens de les conserver et continuer à aller de l'avant, mais je pense que la meilleure motivation pour un parti politique, c'est l'opinion publique, et c'est ce qu'on propose de mettre de l'avant.

Le changement du mode de scrutin actuel à un mode de scrutin proportionnel avec compensation régionale a le potentiel d'avoir un impact significatif sur nos institutions démocratiques et sur la culture politique québécoise. Il y aura très certainement une période d'adaptation, une période de changement, mais je pense qu'au bout du compte c'est bénéfique pour tous les citoyens. Donc, on croit toujours qu'il est essentiel que les citoyens puissent se prononcer directement, donc, sur la réforme du mode de scrutin à l'occasion d'un référendum. Je l'ai dit tantôt, c'est une question pour laquelle le gouvernement est convaincu d'avoir la légitimité politique nécessaire, compte tenu de l'adhésion aussi de deux autres des partis politiques représentés dans cette Chambre, d'aller de l'avant, mais ce n'est pas notre objectif. Notre objectif est de faire en sorte que les Québécois s'approprient ce nouveau mode de scrutin, le comprennent, l'aiment parce qu'il est fait pour eux, et je suis profondément convaincue qu'ils sauront l'apprécier. Et le fait d'avoir mis une proposition qui est détaillée sur la table et de ne pas demander aux citoyens dans l'abstrait, dans l'absolu : Êtes-vous pour la réforme du mode de scrutin?, je pense que c'est un atout considérable.

On en débat présentement, on débat des technicalités à la commission parlementaire, mais ces technicalités-là ont, derrière elles, les objectifs que je vous ai énoncés : plus de représentativité, un poids plus important du vote individuel de nos citoyens, un équilibre entre le poids des régions, le lien avec le député, les régions administratives, la bonne représentativité à l'Assemblée nationale, la diversité. Et ça, c'est quelque chose qui est demandé par les citoyens depuis longtemps, et c'est ce qu'on est en train de faire avec la réforme de mode de scrutin. Donc, le fait de demander un référendum, pour moi, n'est qu'une évidence, demander aux citoyens de se prononcer. C'est leur mode de scrutin, ils devront vivre avec pendant plusieurs années, et je pense que c'est la chose à faire, donc elle doit leur revenir ultimement.

Donc, Mme la Présidente, en terminant, j'ai bien hâte d'entrer dans les consultations particulières... article par article, pardon. C'est toujours un moment qui est très intéressant pour moi, où j'ai eu l'occasion d'avoir, avec mon collègue d'en face, sur d'autres projets de loi, des débats éclairants, des débats qui sont respectueux, je dois le dire, et des débats qui sont pertinents. Donc, très bonne nouvelle pour moi de pouvoir faire l'adoption de principe et de pouvoir enfin passer, le plus rapidement possible, je le souhaite, à la prochaine étape. Merci, Mme la Présidente.

• (11 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la ministre. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je tiens à rassurer la ministre, et ça, c'est un message important... Vous allez voir que, sur le projet de loi n° 39, nous ne partageons pas du tout, du tout la même philosophie. Durant l'heure qui m'est dévolue, Mme la Présidente, je vais tenter d'expliquer le plus clairement possible tous les écueils, tous les risques que représente le projet de loi n° 39. Et je tiens à assurer la ministre, et ça, c'est important, d'entrée de jeu, de le dire, elle a raison, on a déjà travaillé sur des projets de loi, je pense qu'il y a une belle relation de respect entre nous, entre collègues, particulièrement avec la ministre qui est chargée, ici, de ce dossier du p.l n° 39, réforme du mode de scrutin. Nous allons faire, de l'opposition officielle, le débat. Nous avons fait nos devoirs, vous allez le constater durant l'heure qui m'est dévolue. Nous serons toujours respectueux des opinions contraires et nous avancerons, c'est notre prétention, des arguments réfléchis, étayés, documentés qui démontrent, par a plus b, que plusieurs éléments du projet de loi n° 39 ne tiennent pas la route et que, dans ses principes mêmes, j'aurai l'occasion de revenir, Mme la Présidente, sur une motion qui avait été adoptée à l'Assemblée nationale, qui est reprise dans l'entente de mai 2018 qui avait été signée par le chef de la CAQ à l'époque, l'actuel premier ministre. Les six principes, Mme la présidente, dans le projet de loi n° 39, ne sont pas respectés.

Alors, j'ai 60 minutes. Quand j'étais à l'école du Barreau, à l'université, quand on avait des examens qui duraient trois heures, je m'étais donné un code, Mme la Présidente, en disant : Si c'est trois heures, on a 180 minutes. Si c'est une question à 10 points, je vais y consacrer 18 minutes. Si c'est une question à 20 points, je vais y consacrer 36 minutes. Il y a tellement d'éléments à aborder que j'ai fait le même exercice ici, dans l'heure, pour m'assurer de toucher à chacun des aspects le plus possible. Puis, honnêtement, des fois vous dites : Ah! le député de LaFontaine va parler pendant une heure... Je n'en aurai pas de trop, Mme la Présidente.

Vous allez d'abord me permettre... Puis on peut subdiviser, mais ce n'est pas égal un tiers, un tiers, un tiers. Mon intervention, d'abord, on va faire un bref rappel historique, 2002 à aujourd'hui. Dans un deuxième temps, Mme la Présidente, on va parler de l'entente de mai 2018, signée à l'époque par le chef de la CAQ, actuel premier ministre, qui faisait en sorte qu'ils se ralliaient à déposer un projet de loi sur le mode de scrutin, selon certaines conditions. Donc, premier point : retour historique. Deuxième point : l'entente de mai 2018. Et troisième point : le projet de loi n° 39, notre analyse, ce qu'on a entendu et ce que l'on doit décoder aussi derrière tout ça.

Alors, Mme la Présidente, dans un premier temps, bref rappel historique. D'où venons-nous dans l'histoire récente du Québec? D'abord, il est important de souligner d'où vient le Parti libéral du Québec. À l'intérieur du mémoire présenté par le Parti libéral du Québec à la Commission des institutions en 2002, on pouvait y lire ce qui suit : «Un gouvernement libéral procédera, dans les deux ans suivant l'élection et après consultation, à une réforme du mode de scrutin afin d'introduire des modalités [d'ordre] proportionnel.» Alors, il est important de souligner deux aspects — fin de la citation : après consultation et modalités d'ordre proportionnel. Ça, c'était dans le programme de 2002 du Parti libéral du Québec. Qu'en a fait le Parti libéral? Et la pertinence de ce point-là, c'est de voir que l'on ne vient pas de nulle part. Il y a une réflexion, il y a un processus qui a été fait, notamment lors du mandat de 2003 du Parti libéral du Québec.

Suite aux élections générales de mars 2003, le gouvernement a confié à M. Louis Massicotte le mandat d'examiner les modalités possibles d'un mode de scrutin mixte compensatoire adapté au Québec. Il y a eu le fameux rapport Massicotte qui a été rendu public en décembre 2004. En même temps, le gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale un avant-projet de loi remplaçant la Loi électorale. Ça, c'était un avant-projet de loi, Mme la Présidente, qui devait évidemment... et qui proposait un mode de scrutin mixte compensatoire, qui allait faire l'objet de quoi? Ce que je vous ai dit du programme du Parti libéral en 2002, d'une consultation, avant-projet de loi destiné à la consultation.

En juin 2005, le ministre Benoît Pelletier a présenté une motion à l'Assemblée nationale. Créant quoi? Une commission spéciale chargée d'étudier l'avant-projet de loi. La commission spéciale était constituée de neuf députés de tous les partis politiques, et je tiens à souligner qu'elle était présidée par François Ouimet, notre collègue de Marquette à l'époque, et je tiens à saluer le travail qu'il a fait là-dessus. Puis il m'en a parlé, François, puis il m'a dit de l'intérieur comment ça s'était passé. Ils avaient, vous allez voir, travaillé extrêmement fort. C'était la phase nécessaire de consultation, avant-projet de loi, consultations. Donc, neuf députés, huit citoyens ont participé à ces consultations-là. Alors, vous voyez qu'on ne vient pas de nulle part.

Alors, qu'a fait la commission? Puis vous allez me permettre de prendre le temps. Un dépliant, excusez du peu, invitant les citoyens à participer aux travaux de la commission a été distribué par la poste dans 3 340 000 foyers québécois. La commission a rencontré 1 170 citoyens qui avaient choisi de s'exprimer. Elle a fait une tournée du Québec. Elle a reçu 371 mémoires et elle en a entendu, ultimement, 379. Imaginez-vous, Mme la Présidente, imaginez-vous la consultation. 379 groupes ont été entendus lors de cette consultation-là. Et, je vous l'ai dit, ils avaient fait une tournée du Québec, 17 villes avaient été rencontrées.

Donc, d'où vient le Parti libéral? Engagement clair : Oui, on va l'étudier de façon... la proportionnelle mixte, très sérieusement. C'est ce qu'on veut faire. Parole honorée. Dépôt d'un avant-projet de loi, consultations. Je viens d'étayer ce qui avait été effectué sur le terrain.

Alors, Mme la Présidente, en avril et mai 2006, la commission a rendu publics plusieurs rapports. Il y avait d'abord un premier rapport qui était relatif aux modalités d'exercice du droit de vote, 25 avril 2006.

Par la suite, deuxième rapport sur, notamment, le mode de scrutin et des mesures incitatives pour le vote. Mode de scrutin, rapport du 31 mai 2006, les conclusions de ce rapport-là, Mme la Présidente, ne pouvaient pas être mieux exprimées que par Benoît Pelletier lorsqu'il a fait une déclaration ministérielle le 13 décembre 2006, et je vais le citer. Quelles étaient les conclusions de cette consultation-là? Je le cite, il parlait de la Commission spéciale sur la Loi électorale qui avait terminé ses travaux fin mai dernier : «...malgré ses appuis de principe, la commission n'a pas été en mesure de dégager un consensus au regard des modalités précises d'un éventuel système proportionnel mixte.» Et ça, c'est important, c'est un niveau de distinction important.

Sur le principe d'une proportionnelle, quand vous dites juste ça, Mme la Présidente, ça peut être vendeur, ça peut être accrocheur. Êtes-vous pour ça, la proportionnelle? Êtes-vous pour ça, pour que l'Assemblée nationale soit plus représentative? Si vous arrêtez là, c'est bien sûr que les gens vont dire : Bien, pourquoi pas? À prime abord, oui. Sur les modalités, je viens de vous faire montre, dans les faits, de l'énorme consultation qui avait eu lieu. Le ministre Pelletier faisait le rapport, et Francois Ouimet, qui présidait cette commission-là, m'en avait parlé, tournée du Québec, et ainsi de suite. «...malgré ces appuis de principe, la commission n'a pas été en mesure de dégager un consensus au regard des modalités précises d'un éventuel système proportionnel mixte.» Et il précisait : Les avis sont partagés au sujet suivant : beaucoup d'intervenants voulaient une compensation au niveau du Québec et, a contrario, un nombre important voulaient une compensation régionale.

Le projet de loi, Mme la Présidente, prévoit une compensation régionale. À l'époque, il n'y avait pas de consensus et il n'y avait pas de consensus, Mme la Présidente, en se disant : Oui, sur le principe, ça peut paraître une bonne idée, mais les modalités ne sont pas des détails. S'il n'y a pas consensus sur une répartition nationale ou régionale, ça, c'est un écueil.

Puis je vais vous citer des extraits du rapport de la Fédération québécoise des municipalités qui disent que la compensation régionale du projet de loi n° 39 est un écueil majeur. Également, ils soulevaient que l'agrandissement des circonscriptions fait craindre pour la disponibilité des élus. On va y revenir. C'est un autre écueil qui vient dans le projet de loi n° 39. Et évidemment, les gens avaient souligné qu'ils craignaient la stabilité gouvernementale et préféraient la simplicité que confère un seul vote pour l'électeur. C'était un autre écueil.

Donc, sur le principe, on peut tous dire : Oui, ça a de l'allure, une meilleure représentation, proportionnalité. Mais, après tout ce travail herculéen qui a été fait, les constats sont, sur les modalités, qui ne sont pas des détails et qui sont déterminants : Il n'y avait pas accord, il n'y avait pas entente.

• (11 h 40) •

Alors, ça, c'est le premier point que je voulais faire, Mme la Présidente, d'où on vient. Et, par la suite, il est important de souligner que ce n'était pas resté là. Face à ça, Benoît Pelletier avait mandaté le DGEQ pour qu'il donne son avis. Le Directeur général des élections, il avait rendu public son rapport en décembre 2007, dans lequel il ne prenait pas position dans le dossier, mais faisait l'inventaire des avantages et inconvénients des modalités du mode de scrutin mixte compensatoire. Lors des élections générales du 8 décembre 2008, au Québec, Mme la Présidente, aucun parti politique, exception faite de Québec solidaire, n'avait inclus la réforme du mode de scrutin sur sa plateforme électorale. Fin de cette histoire-là, Mme la Présidente. On vient de là.

Donc, sous un gouvernement libéral, 2003 à 2007, Mme la Présidente, il y a eu cette réflexion, ces avancées au niveau collectif, qui ont eu lieu pour faire avancer la réflexion.

Alors, je vais poursuivre, Mme la Présidente, et je vais enchaîner sur l'entente de mai 2018. L'entente de mai 2018, je me rappelle, j'étais dans mon bureau, quand je voyais défiler la conférence de presse, entente de mai 2018 qui a été signée par, à l'époque, le chef de la Coalition avenir Québec, l'actuel premier ministre, le chef du Parti québécois, Québec solidaire et le Parti vert. Il y avait trois engagements fondamentaux. Mai 2018, c'est avant la dernière élection d'octobre 2018. Les trois engagements fondamentaux, je cite : «Attendu que nous sommes arrivés à la conclusion que les député-e-s de l'Assemblée nationale du Québec devaient être élu-e-s, à partir de la 43e législature, selon un mode de scrutin [proportionnel]...» Premier engagement, Mme la Présidente. Bref, la 43e législature, soit en 2022, devrait être élue selon un mode proportionnel. C'était le premier engagement fondamental. Le deuxième engagement de l'entente de mai 2018 : «Nous nous engageons à déposer un projet de loi[...] — c'était ça, l'engagement, Mme la Présidente, puis je vais revenir sur une modalité — au plus tard le 1er octobre 2019.» Retenez cette date. On s'engageait à déposer un projet de loi au plus tard le 1er octobre 2019, mais la réforme qui devait faire en sorte que le mode de scrutin allait être en place en 2022 devait se faire. Donc, premier engagement, c'était la dernière élection sur le mode actuel en 2018; 2022, ce serait le nouveau mode de scrutin. Deuxième engagement, ça se ferait par une loi. C'est une loi votée à l'Assemblée nationale qui déciderait et qui mettrait ça en oeuvre. Et le troisième aspect, Mme la Présidente : Ce projet de loi là devrait rencontrer les six principes auxquels la ministre a fait référence un peu plus tôt. Les six principes, elle les a nommés, je vais y revenir en conclusion. Et vous verrez qu'à la conclusion, à la fin de mon intervention, aucun, aucun des six principes de l'entente de mai 2018 ne sont rencontrés, ne sont accomplis par le projet de loi n° 39. Puis je vais vous en faire la démonstration par A plus B.

Alors, face à cela, évidemment, les trois engagements, on les connaît, ont été réitérés, notamment le 26 février 2019. La réforme du mode de scrutin ne fera pas l'objet d'un référendum, réitère la ministre. Ça, c'est l'engagement 2 de l'entente. On va le faire par loi, puis 2022, ça va être le nouveau mode de scrutin puis on va respecter les six principes. Le 26 février 2019, Mme la Présidente, la ministre en charge avait spécifié qu'il n'y aurait pas de référendum pour avaliser ce changement-là. Et la logique était exprimée. «Lors des élections de 2018, ces partis ont récolté un peu plus de 72 %[...] — ces partis, c'est la CAQ, QS et PQ, qui, sur cet enjeu, marchent main dans la main — ont fait élire [ensemble les trois] 95 députés. Ce résultat offre — et je cite la ministre — "le consensus nécessaire pour aller de l'avant et [légitimer] notre démarche".» Fin de la citation.

Bref, il n'allait pas y avoir de référendum, elle le réitère le 26 février 2019. Et un acteur important, c'est Jean-Pierre Charbonneau, qui est président du Mouvement Démocratie nouvelle, parce que le même jour, évidemment, la ministre annonçait une subvention de 225 000 $ au Mouvement Démocratie nouvelle. Lui, Jean-Pierre Charbonneau, portait un jugement très dur sur ceux qui auraient voulu un référendum, et je le cite : «Au Québec, les gens qui, actuellement, demandent un référendum sont ceux qui sont pour le statu quo.» Fin de la citation. Il avait déjà étiqueté que ceux qui voulaient un référendum, c'était le statu quo. Puis la ministre, le 26 février, elle dit : Non, non, non, il n'y aura pas de référendum, ce sera au niveau d'une loi que l'on va procéder.

Il y a eu, Mme la Présidente, bien évidemment, dépôt du projet de loi. Le projet de loi n° 39 a été déposé à minuit moins cinq. Je vous ai dit que, dans l'entente de mai 2018... disait que vous allez déposer un projet de loi, au plus tard, le 1er octobre 2019. Bien, le projet de loi, Mme la Présidente, a été déposé quelques jours avant, le 25 septembre 2019. Puis pourquoi expliquer ça, Mme la Présidente? Le 25 septembre 2019, le premier ministre disait ce qui suit, je le cite : «C'est plus complexe que ce que je pensais. On avait souhaité une mise en oeuvre plus tôt, mais on a sous-estimé l'ampleur de la tâche.» Fin de la citation. 25 septembre 2019, minuit moins cinq, dépôt d'un projet de loi de 227 articles.

Les deux derniers articles, juste pour vous montrer, Mme la Présidente, puis vous me permettrez... En tout respect, ça fait un peu brouillon. Les deux derniers articles, Mme la Présidente, excusez du peu, balayaient du revers de la main une grande loi québécoise, celle de 1978, la Loi sur les consultations populaires. L'article 226 puis 227 disaient : Ça va se faire par référendum, puis, la Loi sur la consultation populaire, on met ça de côté, elle ne s'applique pas, puis voici la question. Je vais vous lire peut-être tantôt, si j'ai le temps, la question de 35 mots qui va être posée, puis c'est oui ou non, il y aura un référendum.

Alors, premier recul. Exit, mai 2012, l'engagement du premier ministre de faire en sorte que ça se fasse par loi, réitéré le 26 février par la ministre. Quelques mois après, ils disent : Non, non, non, ça va se faire par référendum. Première déception chez Jean-Pierre Charbonneau, qui a dit : Ceux qui veulent un référendum, c'est les tenants du statu quo. Premier recul, premier reniement. Il y a eu un reniement, il a renié sa parole sur cet aspect-là.

Poursuivons. Donc, le dépôt du projet de loi, Mme la Présidente, 227 articles, le 25 septembre 2019. On voyait que le premier ministre, de son aveu même, disait : C'est plus complexe que ce que je pensais, on a sous-estimé l'ampleur de la tâche. Ça, Mme la Présidente, prenez l'analogie des Dents de la mer. Ça, c'était Jaws 1, Les dents de la mer 1. Jaws 2, «the return», le retour, a eu lieu, Mme la Présidente, quelques mois après, deux mois après, le 5 décembre 2019.

Le 5 décembre 2019, les deux articles qui balayaient du revers de la main la Loi sur les consultations populaires sont devenus 163 nouveaux articles, partie deux de Jaws 2 qui vient faire en sorte de gérer le référendum. 163 articles ont été déposés, parce qu'ils ont voulu... vous l'avez compris, ils ont voulu presser puis respecter l'engagement du 1er octobre, ils ont déposé ça le 25 septembre, 227 articles. Les deux derniers : exit, la loi sur le référendum. La question, ce sera ça.

Mais la loi sur les référendums, Mme la Présidente, qui est une grande loi québécoise, stipule un principe extrêmement important à son article 15. Depuis 1978, vous ne pouvez pas, au Québec, et c'est fondamental dans notre démocratie, faire un référendum en même temps qu'une élection, parce qu'il y a mélange des genres. Une élection générale, c'est des enjeux. Qui je veux comme député? Est-ce que je vais voter pour elle? Est-ce que je vais voter pour lui? Est-ce que je vote pour tel parti, tel autre parti? C'est les idées, c'est les débats, c'est les enjeux nationaux, régionaux, locaux. Vous le savez mieux que moi, tout le monde ici ont fait une campagne électorale, puis on n'a pas trop de 35 jours pour débattre puis essayer de faire valoir notre point puis, le jour du vote, d'essayer de sortir le vote, puis faire en sorte qu'on puisse gagner, puis de faire en sorte de représenter notre population. Puis là il y a des débats à travers ça, des débats locaux, régionaux, nationaux. On en a tous fait, et c'est important, c'est un enjeu.

Ajoutez à ça un débat sur une modification d'un mode de scrutin ou, à l'époque, ça aurait pu être un débat sur la souveraineté du Québec, vous venez de mélanger deux sauces qui ne se mélangent pas. Je vous donne juste un exemple, puis je l'ai dit en consultation, mes chers amis de Québec solidaire, durant la campagne électorale, si d'aventure, on faisait ça en même temps que l'élection, vont dire : Bien, votez pour Québec solidaire à cause de ça, ça, ça qu'on propose, puis à cause que nous, on va vouloir, évidemment, que le mode de scrutin soit modifié, puis on vous encourage à voter oui sur le référendum. Bien, au niveau de la dépense électorale, vous allez faire quoi sur cette publicité-là? Votez pour QS à cause d'un, deux, trois arguments puis, de quatre, votez oui au référendum.

Il y est prévu, et c'est la... fondamental de la loi de 1978, que vous ne pouvez pas avoir deux campagnes en même temps, parce que vous devez avoir deux administrations en même temps, vous devez avoir un débat clair. Et les gens sont venus nous le dire, même les gens de Démocratie nouvelle... Ça, c'était quasi-unanimité. 98 % de ceux qui sont venus nous voir, Mme la Présidente, ont dit : Non, non, un référendum... Bien, première des choses, Jean-Pierre Charbonneau, il n'en veut pas, de référendum. Pas besoin de référendum, vous avez la majorité. Ne consultez pas la population, pas de référendum. Les gens sont venus dire : Ne faites pas ça, ne faites pas ça. Ceux qui n'en veulent pas, ceux qui en veulent, ils ont dit : Ne faites pas ça en même temps que l'élection, ça ne permettrait pas d'avoir un sain débat démocratique.

Donc, en ce sens-là, Mme la Présidente, on l'a vu, dépôt de 227 articles le 25 septembre 2019 et, quelques mois après, octobre, novembre, décembre, deux mois et demi après, 5 décembre 2019, 163 nouveaux articles, ce qui fait en sorte qu'à l'heure actuelle nous avons tout près de 400 articles sur la table. Retenez bien ça parce qu'on va vous parler des délais d'exécution par la suite. Parce que le DGEQ, s'il veut organiser un référendum en 2022, il faut qu'il ait le temps. Il faut qu'il ait le temps d'organiser les camps du Oui, les camps du Non. Il faut qu'il ait le temps de tout structurer ça et il est venu nous le dire. Je vais vous donner le punch un peu plus tard, si vous restez à l'écoute, Mme la Présidente, du délai imposé par le DGEQ. Si le DGEQ n'a pas la loi adoptée et sanctionnée avant telle date, il n'y aura pas de référendum parce qu'il n'aura pas le temps de le dire. Puis celles et ceux qui sont rapides, à la maison, allez voir dans son mémoire à la page 67, vous allez avoir une avance sur les autres. On va le dire tantôt, c'est quoi, ce délai-là pour que tout ça, là, les 227 articles, les 163 articles, près de 400 articles, soient adoptés et sanctionnés.

Mais, Mme la Présidente, vous allez me dire : Jaws, c'est un peu comme Rocky, il n'y en avait pas juste deux, films, il y en avait un troisième, film. La ministre l'a dit... Durant les auditions, là, ceux qui sont pour, ceux qui sont contre ont soulevé : Ça, ça ne marche pas, ça, ça ne marche pas. Ça, ça ne tient pas la route. Puis, dans les 40 minutes qu'il me reste, j'aurai l'occasion d'aborder certains de ces amendements-là qui sont fondamentaux, qui sont majeurs. Je vois mon collègue de La Pinière, il va en parler, entre autres, d'un amendement qui est majeur, sur le 10 %. Je vais l'aborder brièvement, mais mon collègue de La Pinière va nous servir ça à sa sauce, puis vous allez voir qu'on va comprendre ce qu'il veut dire très clairement.

• (11 h 50) •

Jaws 3, là, il y a énormément... Ah! je peux monter les attentes, mon collègue de La Pinière, il va les rencontrer, Mme la Présidente. Je me serais attendu à ce qu'il applaudisse lui-même, rendu là, mais c'est correct. Il a une certaine retenue parce qu'indirectement... Alors, Mme la Présidente, Jaws 3, c'est quoi? Je vous annonce, la ministre l'a déjà laissé entendre, il va y avoir des dizaines, et des dizaines, et des dizaines d'amendements, très clairement. Donc, d'un projet de loi qui est passé de 227 plus 63, près de 400, on va être près d'un projet de loi de près de 500 articles. Et ça, ça démontre un peu le patchage, si vous me permettez, en tout respect, l'expression, l'aspect un peu brouillon de cette approche-là pour rencontrer, pour ne pas directement renier un engagement électoral de mai 2018 : il n'y aurait pas de référendum, ça ferait par loi. Il va y avoir un référendum.

Le deuxième élément, autre élément important, Mme la Présidente, le premier ministre y croit tellement au projet de loi qu'il a mis, à travers les amendements, la batch, si vous me permettez l'expression en tout respect, du 5 décembre, il a mis un article 225.8. Il faut aller le chercher, là. 225.8, qu'est-ce qu'il dit, cet article-là qui traite du référendum puis des camps? «Une personne morale ne peut être désignée comme camp référendaire si l'une des personnes suivantes est un administrateur, un dirigeant ou le représentant financier...» Qui? Un membre de l'Assemblée nationale ou un chef d'un parti autorisé représenté à l'Assemblée nationale. Ça, c'est le premier ministre du Québec. Ça, c'est le chef de la CAQ. Ça, c'est l'article 225.8 qui fait en sorte que, lui, il ne présidera pas le camp du Oui à l'élection référendaire. Il ne veut pas présider le camp du Oui. Il ne pourra même pas être dirigeant, Mme la Présidente, du camp du Oui. Ça démontre, Mme la Présidente, tout, je dirais, le sérieux... en tout respect, le manque de sérieux qui est accordé à ce dossier-là. Et ça, vous savez où on loge.

Je vais y aller, avec le temps qui m'est dévolu, sur les éléments qui ne fonctionnent pas. Puis je vais citer, entre autres, la fédération des municipalités du Québec et d'autres, il y a des écueils majeurs. C'est un bouleversement de notre démocratie. On va voter contre le principe, de l'opposition officielle, parce que c'est un vote responsable et raisonnable. Et surtout, les six principes étayés dans l'entente de mai qui ont été repris dans une motion à l'Assemblée nationale, voté à l'unanimité, on a voté pour ça, nous, vous allez voir que les six principes non seulement ne sont pas épanouis par le projet de loi, mais sont contredits, sont empêchés par le projet de loi.

Alors, le premier ministre ne sera pas président du camp du Oui, oubliez ça, Mme la Présidente. Et, en ce sens-là, c'est important de le souligner.

Alors, vous allez me permettre maintenant, on va y aller, on va aborder le projet de loi un peu plus d'avant. Là, c'est assez instructif. Il y a tellement de matière, là, j'essaie de m'organiser, Mme la Présidente, pour être digestible, mais surtout compréhensible. Regardons les comparatifs. On se compare avec quoi? Beaucoup de gens sont venus nous dire : On va se comparer à l'Écosse. Ils sont venus nous dire... Puis là l'argument qu'ils disent : Aïe! nous autres, les Québécois, là, on n'est pas plus fous que les Écossais. Les Écossais, ils ont un système de même. Pourquoi qu'on n'en aurait pas un, nous autres? C'est encore une fois le principe de base. Une fois qu'on a dit ça, c'est clair. Moi, le premier, je dirais : Bien oui, c'est vrai, on n'est pas plus fous que les Écossais, nous autres, là, pourquoi on ne pourrait pas en avoir un de même? Mais, quand on va voir dans les... 2002, les modalités ne sont pas des détails. Les modalités sont des écueils majeurs, des bouleversements de notre démocratie.

Alors, on se compare à qui? On se compare à l'Écosse, Mme la Présidente. Parfait. L'Écosse entre 20 fois dans le Québec, le territoire. Le Québec, c'est un vaste territoire. L'Écosse entre 20 fois, on peut mettre 20 fois l'Écosse dans le Québec. L'Écosse a 5,4 millions d'habitants. Au Québec, on en a 3 millions de plus, c'est 8,4 millions d'habitants, j'arrondis. Nous avons 125 députés, les Écossais en ont 129. Alors, quand vous avez dit ça, Mme la Présidente... Puis c'est Napoléon qui disait : Il faut avoir la politique de sa géographie. Quand vous dites que l'Écosse, qui est 1/20 du Québec... l'ensemble du Québec, l'Écosse, c'est 1/20, une toute petite partie. Ils sont 3 millions de moins puis ils ont quatre députés de plus. Ils n'en ont pas 125, ils en ont 129. Là, vous pouvez vous amuser à faire une proportionnelle, parce que votre territoire n'est pas immense puis parce que votre population est concentrée sur ce territoire-là. Et, quand vous divisez le total de la population, 5,4 par 129, ça vous donne une proportion nettement moins élevée de commettants, de citoyens à représenter que si vous prenez le Québec, immense territoire, et que vous ne divisez pas par 129, par 125, 8,4 millions d'habitants.

Alors, au Québec, on a l'écueil, on a l'avantage, mais qui n'est pas traduit et qui... Cet avantage au Québec, Mme la Présidente, devient, dans le projet de loi n° 39, des désavantages. C'est pour ça que ce n'est pas bon, c'est pour ça qu'on va voter contre ça. Quand vous avez un territoire immense, que vous représentez une population immense, vous ne pouvez pas utiliser ça.

Je vais vous donner un seul exemple, Mme la Présidente. L'Abitibi, à l'heure actuelle, il y a trois comtés dans l'Abitibi. Ce qui est proposé par le projet de loi, c'est de faire en sorte qu'il y ait toujours trois députés, mais deux circonscriptions, plus trois circonscriptions. L'Abitibi serait divisée en deux, il y aurait un député pour chacun des comtés, donc, un, deux, puis le troisième député serait représentant ou représentante de tout l'Abitibi, Mme la Présidente. Bien, l'Abitibi, là, c'est 82 % de l'Écosse. L'Abitibi, vous voyez comment les gens... puis ça, c'est la proximité qui est importante, la proximité de son député, de son élu.

Les gens veulent avoir accès à son député. Puis je suis certain que c'est la même chose pour les 124 collègues, Mme la Présidente, moi, je m'enorgueillis d'une chose. Je m'enorgueillis d'une chose, d'être député, je dis à mon monde : Je ne veux jamais entendre parler, je ne veux jamais me faire dire, comme député : Vous, là, M. le député de LaFontaine, j'ai essayé de vous voir, j'ai essayé de vous parler, je n'ai pas été capable, je n'ai pas été capable de vous voir, je n'ai pas été capable de vous parler. Ça, vous le savez, puis les collègues le savent, si quelqu'un laisse entendre ça, là, je deviens bleu. Puis ce n'est pas arrivé à date, Mme la Présidente. Puis à toutes les fois qu'on me dit : Ah! M. le député de LaFontaine — ils m'appellent par mon nom, les collègues — un tel veut te parler, oui, je vais lui parler, cédule-moi ça, oui, je vais le rencontrer. Avec la pandémie, on fait du Teams puis on leur parle par téléphone.

Vous créez trois victimes, avec le projet de loi n° 39, dans le cas de l'Abitibi. L'Abitibi, à l'heure actuelle, c'est divisé en trois, ils ont un tiers de la population puis un tiers du territoire. Là, avec le projet de loi n° 39, vous allez faire que l'Abitibi va être divisée en deux. Alors, il y aura deux députés qui vont avoir encore une plus grande partie, qui va être assimilable à celle de l'Écosse divisée en deux, puis vous allez en avoir un troisième, la grande chanceuse, le grand chanceux, qui devra être en proximité avec ses citoyens puis disponible, comme on prétend tous l'être, pour toute l'Abitibi, un immense territoire. Juste à dire ça, Mme la Présidente, on voit que ça ne tient pas la route. Alors, quand on se compare à l'Écosse, attention. Après ça, on va se comparer à un des 16 länder allemands, dont la capitale est Munich. Qui suis-je? La Bavière. Alors, la Bavière, Mme la Présidente, excusez du peu, elle rentre, elle, 22 fois. Pas 20 fois comme l'Écosse, 22 fois dans le Québec. La Bavière a plus de population, 12,9, et la Bavière a, tenez-vous bien, pas 125, pas 129, 205 députés. Alors, la Bavière, ce n'est pas le Québec, c'est un 1/22, une partie. Divisez le Québec en 22, mettez, sur ce territoire-là, 12,9 millions d'habitants puis dites : Vous allez être représentés pas par 125, par 205 députés.

Ça, c'est une logique. La politique de sa géographie, ça tient la route, ça marche. Quand on nous fait du copier-coller, Mme la Présidente, je vous le dis, c'est un bouleversement de la démocratie et ça bafoue l'un des six principes : la proximité.

Et, quand vous faites l'autre principe... le premier principe, Mme la Présidente, le premier principe, c'est de s'assurer d'une proportionnalité. Quand vous essayez, on ne l'atteint pas, ce principe-là. Quand vous essayez de faire une proportionnalité en Abitibi avec un comté, pour représenter mieux le fait qu'il y a eu un parti qui a eu, au niveau régional, 35 %, l'autre en a eu 28 %, l'autre en a eu 26 % puis l'autre en a eu 12 %, quand vous faites une proportionnalité avec un député, oubliez ça. Il y a un parti qui va l'avoir, et, les autres, qu'ils soient un quart-un quart-un quart-un quart ou un tiers-un tiers-un tiers, il y en a deux autres pour le tiers qui n'en auront pas, puis, pour le quart, il y en a trois autres qui n'en auront pas. On ne peut pas faire, ça ne tient pas la route, de proportionnalité avec un député. Puis on n'a pas encore, Mme la Présidente, la capacité de saucissonner un député puis de le couper en deux, trois. Le député va appartenir à une formation politique. Ça ne tient pas la route.

Même chose, Mme la Présidente, avec la Nouvelle-Zélande. On nous compare souvent à la Nouvelle-Zélande. Là, la Nouvelle-Zélande rentre six fois dans le Québec. La Nouvelle-Zélande, ce n'est pas 8,4, mais c'est 4,9 millions de citoyens, donc 3,6 millions de citoyens de moins, et la Nouvelle-Zélande a 120 députés, mais avec 4,9 millions de citoyens, 3,6 millions de moins que le Québec, et ont cinq députés de moins seulement, et le territoire est énorme... est un sixième, rentre six fois dans le Québec. Ça, ça peut peut-être tenir la route, mais ça ne tient pas la route.

• (12 heures) •

Également, on cite l'Écosse, un autre principe, la stabilité du gouvernement. Mme la Présidente, on va aborder le sujet de la répartition régionale tantôt. Première des choses, allô la complexité! Puis, je veux dire, il n'y a pas personne qui a dit que c'est facile à comprendre. Pas personne. C'est unanime, personne n'a dit que c'est facile à comprendre. C'est complexe, c'est complexe. Puis je vais tenter... Puis probablement que je ne serai pas capable de l'expliquer, je ne serai pas capable de le verbaliser pour que les gens... pour que je puisse, moi, me faire comprendre, parce que c'est excessivement complexe. Il faut réellement avoir pris un bon café serré le matin même puis se concentrer sur comment va se faire cette répartition régionale là. J'y reviendrai tantôt.

Donc, un des principes, c'est la stabilité des gouvernements. Bien, allons y voir. Dans les cinq dernières élections, en Écosse, il y a eu quatre gouvernements minoritaires. Quatre gouvernements... La manière dont le projet de loi n° 39 est écrit et la manière d'imposer ça au Québec, c'est de faire en sorte d'avoir une fabrique de gouvernements minoritaires.

Et j'y reviendrai tantôt, sur la façon dont on répartit... je vais vous donner un avant-goût. Là, j'ai créé plusieurs attentes. La plus facile à rencontrer, ça va être le fait que mon collègue de La Pinière va être extraordinaire tantôt. Ça, vous pouvez prendre pour acquis que ça va être un fait.

La deuxième attente, je vais vous revenir avec la date butoir du DGEQ pour que tout ça, là, quasi 500 articles, là, ce soit la vraie vie en 2022. Je vais vous revenir. Page 67, mémoire du DGEQ. Allez voir, celles et ceux qui l'ont. Sinon, inquiétez-vous pas, on va vous donner la réponse à la fin.

Pour que tout ça tienne la route, on vient dire, entre autres, Mme la Présidente, stabilité des gouvernements. On vient de démontrer qu'il n'y en avait pas, de stabilité.

Autre élément, on dit : On veut améliorer notre démocratie. On se compare à l'Écosse. J'ai les chiffres de l'Écosse, Mme la Présidente. Je ne le sais pas ce qui se passe, je ne le sais pas, ça doit être dans l'eau du Québec, Mme la Présidente, mais on n'est pas si pire. On est même bons, pour ne pas dire très bons, au niveau du taux de participation. Parce que ce qui est sous-entendu, c'est : Ah! il va y avoir les licornes, ça va être parfait. Avec un vote proportionnel, les gens vont sortir voter. Mon vote, il vaut quelque chose. Parce que, là, vous voteriez pour votre député. Vous auriez deux votes. Vous voteriez pour votre député puis vous voteriez pour votre représentant, un parti politique régional. Après ça, je vais vous expliquer comment que les partis politiques vont se diviser ça entre eux autres. Ce serait fantastique. Ça va augmenter la démocratie, le débat, puis on le fait avec...

Allons voir l'étalon de mesure. En Écosse, là, j'ai les taux... — je ne vais pas vous assommer avec les taux — j'ai les taux des cinq dernières années parce que, l'Écosse, ça fait depuis 1999 qu'ils ont ce système-là. J'ai cinq taux de participation pour l'Écosse puis j'ai les cinq taux de participation du Québec des cinq dernières élections. Roulement de tambour, Mme la Présidente. Au Québec, le taux de participation moyen des cinq dernières élections, c'est 68,23 %, on est près de 70 %. C'est 68,23 %. Il y a même eu une élection à 74 %, puis deux à 71 %. Alors, au Québec, les cinq dernières élections, taux de participation : 68,23 %. Qu'en est-il de l'Écosse? C'est merveilleux, ça va aider notre démocratie : moins 15 %, 68 %, Québec, 53 % à l'Écosse. Ça, c'est l'étalon de mesure du grand bond démocratique qu'on ferait avec le mode de scrutin. Ça, si on se compare à l'Écosse, il faut prendre les chiffres, il faut les analyser.

Ça, Mme la Présidente, c'est un autre élément qui démontre que l'appartenance... Vous voyez la face. On se dit toujours : Avoir le courage de mettre sa face sur le poteau. Vous savez pour qui vous votez. Lui, là, je l'aime ou elle, je l'aime, puis elle, là, je ne veux pas qu'elle soit élue pour le parti politique, pour sa personne, pour quoi que ce soit, elle ne m'a jamais retourné mon appel. Ah! bien, je ne voterai pas pour elle, elle n'a jamais retourné mon appel. Je ne voterai pas pour lui, il a cancellé un rendez-vous. Il n'est pas là. Il n'est pas là pour moi, je vais voter... Vous savez pour qui vous votez.

Quand vous faites une proportionnelle, vous votez pour votre député, qui va avoir un immense territoire, que vous allez moins voir, et vous votez les yeux fermés pour un parti politique, sur une liste de candidats et de candidates qui, comme par magie, vont être désignés gagnants par rapport aux votes totaux que le parti aurait eus dans la région. Une fois que vous avez dit ça, peut-être que ça explique des taux de participation à 53 %, puis qu'au Québec, on est 15 % meilleurs. Alors, pour le mode de scrutin, qu'on ne vienne jamais dire, Mme la Présidente, qu'on va améliorer le taux de participation. Comme on dit, la preuve est dans le pouding.

Alors, autre élément, puis je vois le temps qui file, autre élément, puis là je vais prendre le temps de faire des citations, Mme la Présidente. Vous avez été témoin, j'ai été témoin, puis je ne veux pas imputer de mauvais motifs, je ne veux pas badiner avec ça, c'était une question fondamentale. La collègue de Québec solidaire, la cheffe, la cocheffe de Québec solidaire, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, quand elle a su, Mme la Présidente, que son comté allait être fusionné à l'intérieur notamment de Westmount—Saint-Louis, qu'elle perdait son comté, c'est arrivé le 7 février 2017, coup de tonnerre! Et là je me suis amusé... «amusé» est un grand mot, j'ai eu la rigueur, je pense, sans trop de... sans fausse modestie, d'aller rechercher tout ce qui s'était dit à l'époque. Et, il faut le dire, ce que la collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques voulait, c'est que, dans un premier temps, sa population soit consultée. Parce que la Commission de représentation électorale avait déposé un premier, on s'en rappelle tous, avait déposé un premier rapport qui ne touchait pas à son comté. Montréal à l'époque avait 28 comtés. La Commission de représentation électorale, elle a dit : Il faut en enlever un à Montréal pour en donner dans une autre région. Il fallait passer de 28 à 27. Il faut enlever un comté. La Commission de représentation électorale avait dit, dans son premier rapport : Bien, on va aller chercher une partie d'Outremont, partie de Westmount, puis avait joué là-dedans. Dans le deuxième qu'elle avait déposé, ce n'était pas ça. Dans le deuxième rapport, c'était... Sainte-Marie—Saint-Jacques disparaissait, et il y avait un amalgame qui était fait avec les comtés de Sainte-Marie—Saint-Jacques, Westmount—Saint-Louis et Saint-Henri—Sainte-Anne. On enlevait ce comté-là, la collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques perdait son comté.

Son premier point, il faut le mentionner, sa population n'avait pas été consultée, elle voulait que la population soit consultée puis elle se battait pour ça. Mais aussi, du même souffle, elle se battait parce que son comté représentait une communauté naturelle qui n'était pas du tout celle de Westmount—Saint-Louis. Écoutez, j'ai des citations, mais je vois le temps qui file, je n'aurai pas le temps de toutes les citer. Mais, Mme la Présidente, c'était un déni de démocratie. Je reviens là-dessus, il faut être honnête intellectuellement. Son premier point, c'était de dire : On veut être consultés. Ce n'était pas dans le premier rapport, c'est dans le deuxième rapport, puis là ça va passer à l'Assemblée nationale, et la Commission de représentation électorale a tous les pouvoirs de déterminer, la circonscription, c'est ça, c'est ça, c'est ça. Si elle ne bouge pas, c'est déposé à l'Assemblée nationale, il y a un débat de cinq heures, c'est publié à la Gazette officielle, puis c'est ça, les comtés. Fin du débat. On ne peut pas amender ça par motion, vous êtes présidente depuis plusieurs années, vice-présidente, et vous connaissez le règlement, on ne peut pas amender ça.

La collègue avait parlé de déni de démocratie, Québec solidaire. Carole Poirier du Parti québécois, Hochelaga-Maisonneuve à l'époque, avait donné son appui. Les deux, main dans la main, avaient été participer à une manifestation qui avait eu lieu dans son comté. Elle aussi avait dit que c'était un deni de démocratie, Cri du coeur pour Sainte-MarieSaint-Jacques : «Quelques quelques centaines de personnes ont bravé le froid — dimanche le 12 février — lors d'un rassemblement citoyen dans le quartier...» Et là on disait toutes les bonnes raisons pourquoi Sainte-Marie—Saint-Jacques, ce n'est pas Westmount—Saint-Louis, ne mélangez pas ça, ça ne se mélange pas. C'est du bon monde dans les deux, mais ce n'est pas la même réalité économique, ce n'est pas la même réalité, également, sociologique, sur le terrain. Puis elle a débattu, elle a débattu, elle a débattu. Elle a même déposé un projet de loi, n° 790, projet de loi qui disait : On suspend le processus de la Commission de représentation électorale. Il faut mettre un stop à ça, on veut être entendus pour exprimer... Ce n'est pas pantoute la même chose.

Il y a même eu, et là je passe, il y a même eu un recours en injonction, Mme la Présidente, il y a eu un recours en injonction qui avait été pris par deux citoyens de son comté, deux citoyens qui étaient liés à Québec solidaire. Ça, elle ne s'en cache pas, elle l'a dit, et avec un avocat également qui participait avec Québec solidaire. Ils ont déposé un recours en Cour supérieure pour une injonction pour faire arrêter ça. La Cour supérieure a rejeté le recours en date du 21 février 2017, et il disait, le tribunal : «Les demandeurs sont deux électeurs de la circonscription de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Invoquant l'urgence, ils demandent au tribunal de prononcer une ordonnance de sauvegarde pour suspendre le processus de délimitation des circonscriptions.» Je termine, paragraphe 6° : «Le tribunal, après analyse, est d'avis que les demandeurs ne justifient pas un droit apparent à obtenir la suspension du processus de délimitation[...]. Ils échouent dans leur tentative de démontrer que le processus suivi par la CRE est entaché d'irrégularités, cette dernière ayant suivi toutes les étapes [de la] Loi électorale du Québec.»

• (12 h 10) •

Autre point de presse. Il y en a eu six, points de presse, minimum. Un amendement... Il y aurait un article... «En fait, je vais vous le dire, là, simplement, on donne deux mois au DGE pour consulter l'île de Montréal en reconnaissant que l'île de Montréal doit perdre une circonscription. [...]Les gens se sont exprimés, la population, les chroniqueurs, même la Chambre de commerce de l'est de Montréal appuie l'idée du milieu naturel [de] Sainte-Marie—Saint-Jacques, qu'est le Centre-Sud de Montréal.». Et ainsi de suite.

Qu'est-ce qui est arrivé, Mme la Présidente? Acte final de cette saga, le rapport final de juin 2017, qui allait être le rouleau compresseur puis qui faisait en sorte... Savez-vous quoi? 97 des 125 comtés ne changeaient plus, et, je vous le donne en mille, Sainte-Marie—Saint-Jacques continue à exister. Sainte-Marie—Saint-Jacques faisait partie des 80 %... 78 % des comtés qui n'avaient aucune modification à leurs limites. Là, c'était l'euphorie, Mme la Présidente. Évidemment, il y en a d'autres, plus loin, qui ont perdu leur comté, je ne ferai pas ce débat-là, mais Montréal est quand même passée de 28 à 27 comtés. Et ça avait été l'euphorie. Imaginez-vous, Sainte-Marie—Saint-Jacques, je le vois, là, j'ai marqué «alléluia», pas de changement, il est parmi les 97 comtés sur les 125.

Ça, là, je ne veux pas badiner. Ce débat-là de la collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques, elle l'a fait avec son coeur. Elle connaît son monde, elle sait ce que c'est, Sainte-Marie—Saint-Jacques, et ça, je la salue, je la félicite d'avoir... de s'être battue pour ça.

Le projet de loi n° 39, Mme la Présidente, ne vient pas modifier ce processus de détermination des comtés. Je vous ai dit que 28 des 125 comtés avaient changé; 97 n'avaient pas changé. Là, la collègue a eu gain de cause, puis c'était fondamental, tu ne pouvais pas faire ça, mais savez-vous que la nouvelle carte électorale, qui devrait être mise en place, ferait passer le Québec de 125 à 80 comtés? Savez-vous que Montréal ne devrait pas seulement perdre un comté; Montréal, Mme la Présidente, perdrait 11 comtés.

Aujourd'hui, je suis surpris de voir la collègue de Québec solidaire applaudir à ça puis dire : Oui, on va voter pour ça. Sainte-Marie—Saint-Jacques va être noyé, veux veux pas, dans un autre comté, Mme la Présidente. Aussi fondamental... Et ce qu'elle exprimait, là, c'était le lien très étroit qu'elle a avec sa population, la communauté naturelle, et faire en sorte de défendre ça.

Le projet de loi fait en sorte que, oui, on serait toujours 125 députés, mais il y en aurait 45 qui seraient élus au niveau régional. Ça veut dire que, pour Montréal, il y en a huit qui représenteraient toute l'île de Montréal. Ça, c'est plus de 1,3 million d'électeurs. Moi, Mme la Présidente, là, représenter l'île de Montréal, plus de 1,3 million d'électeurs... Vous ne pouvez pas être disponible pour 1,3 million d'électeurs, c'est impossible, oubliez ça. Vous ne pouvez pas avoir la même nature de travail, le même lien. Vous ne pouvez pas donner à votre population la disponibilité que vous vous enorgueuillez de leur donner. Moi, je ne pourrais pas faire sur l'île de Montréal, si d'aventure j'étais élu député régional, je ne pourrais pas être le même député que j'ai dans rivière, Rivière-des-Prairies, qui est LaFontaine. Je dis à mon monde : À toutes les fois que quelqu'un veut me parler, veut me rencontrer, je veux que ça se fasse. Vous les rencontrez avant pour préparer le dossier. C'est quoi l'objet. Vous allez me briefer, si vous me permettez l'expression. Après ça, je vais m'asseoir puis on va parler. Je n'en ai pas échappé un, Mme la Présidente. Je n'en ai pas échappé un ou une depuis le début. Mais si je suis député de Montréal, je vais représenter 1,3 million d'électeurs, même plus. C'est les chiffres du dernier... des derniers chiffres applicables. Ça ne tient pas la route.

Donc, Montréal va passer de 27 à 24 comtés. Retirez les huit qui vont représenter toute l'île de Montréal, vous allez avoir 16 comtés. On va devoir fusionner de 27 à 16 tous les comtés de Montréal. Le non-sens que faisait la fusion de Sainte-Marie—Saint-Jacques avec Westmount—Saint-Louis, ce sera copier-coller dans la carte électorale. Ce ne sera pas juste Montréal, ça va être partout au Québec. Les communautés naturelles, oubliez ça.

Ce qui fait en sorte que la Fédération québécoise des municipalités est venue le dire dans son mémoire, est venue le verbaliser. Il y aura une perte de proximité qui sera constatée. Je cite leur mémoire : «La proximité entre l'élu municipal et son député doit être garantie. Dans les modèles de scrutin mixte compensatoire avec ou sans liste régionale, il y a une perte de proximité avec le député puisque le territoire retenu pour la compensation sera nécessairement plus grand, plus près de l'échelle des régions administratives.» Plus loin, la fédération des municipalités du Québec, Mme la Présidente, eux représentent 1000 municipalités locales, des MRC membres. Ils représentent plus de 7000 élus, des mairesses, des maires, des conseillères, des conseillers, du monde très, très, très «groundés», on en connaît tous. Ils disent, sur cet aspect, page 11 de leur mémoire : «Certaines circonscriptions couvrent déjà des territoires aussi vastes que des États.» On en a parlé. «Certaines circonscriptions couvrent déjà des territoires aussi vastes que des états. Alors, comment un député pourra remplir convenablement son mandat et répondre aux besoins de ses citoyens si son territoire est encore une fois agrandi?» Là, ils soulignent ce que je vais vous lire, ils le soulignent : «Pour le citoyen qui est loin de la Capitale nationale et de la métropole, le député est souvent son seul lien avec le gouvernement et l'État. Il en va de même pour l'élu municipal et sa relation avec son député. Il apparaît clair pour la FQM que la proximité entre le citoyen et son député, telle que proposée dans le projet de réforme du mode de scrutin, en sera grandement affectée.» Alors, Mme la Présidente, «proximité» sera grandement affectée par ce mode de scrutin.

Autre élément, également, dont je veux vous parler, Mme la Présidente. J'ai parlé et je viens de citer la FQM, Fédération québécoise des municipalités, au niveau de l'immense territoire, nombre très élevé de citoyens. Je vous ai parlé de 1,3 million que représenteraient huit députés pour toute l'île de Montréal et du fait que l'on perdrait, au départ, trois comtés, de 27 à 24, 8 régionaux, 16 de comté. Ça veut dire que, moi, si je me représentais dans un tel système, ça ne serait plus juste Rivière-des-Prairies, puis Rivière-des-Prairies a besoin de toute mon attention, puis je le fais au meilleur de mes capacités, mais là, ce serait quoi? Ce serait la pointe est de l'île. On fusionnerait Rivière-des-Prairies avec Pointe-aux-Trembles puis on irait peut-être chercher d'Anjou—Louis-Riel également. Ça ferait un immense comté. Vous devez passer de 27 à 16. Là, on pousserait les mêmes hauts cris, puis ça, ce serait tout le monde, Mme la Présidente, que vous soyez caquiste, péquiste, Québec solidaire, ou Parti libéral, Mme la Présidente, toutes les candidates et les candidats diraient — puis les députés sortants : Ma population, là, elle a un sentiment d'appartenance, c'est une communauté naturelle, puis il ne faut pas toucher à ça. Bien, le projet de loi viendrait anéantir ça, et ce n'est pas trop fort que de le dire de cette façon-là.

Autre élément, Mme la Présidente, le poids des régions, baisse du poids politique des régions. La Fédération québécoise des municipalités, je vais prendre le temps de la citer, le dit dans les mots suivants : «Dans son dernier bilan sur les perspectives démographiques des régions du Québec, paru en juillet 2019, l'ISQ — l'Institut de la statistique du Québec — prévoit une croissance démographique des régions près de Montréal de 14 %. À l'inverse, les régions plus éloignées comme le Bas-Saint-Laurent, [...]Gaspésie et [...] Îles-de-la-Madeleine, Saguenay—Lac-Saint-Jean, l'Abitibi-Témiscamingue, la Côte-Nord, verront le poids de leurs populations passer de 10,3 %, en 2016, à 8,6 % de la population totale du Québec en 2041. Malheureusement, force est d'admettre que malgré les efforts énormes des régions pour lutter contre cette tendance, l'adoption de ce projet de loi provoquera à moyen terme une baisse réelle du poids politique des régions malgré les précautions prises par le gouvernement. [...]Compte tenu de ce qui précède, le principe du maintien politique du poids des régions n'est donc pas rencontré par le projet de loi n° 39. [...]Le projet n'est donc pas acceptable sur cette question et devrait être revu.» Ça, ça ventile, ça démontre l'impact négatif sur le poids des régions.

La répartition des députés, Mme la Présidente, comment ça se ferait au niveau régional? La répartition des députés au niveau régional, premier élément, puis mon collègue de La Pinière va en parler, au niveau de la règle du 10 %, on dit : Ça, c'est fait pour que des petits partis puissent émerger puis assister... être élus ici, à l'Assemblée nationale. Bien, dans le projet de loi, puis mon collègue pourra parler plus en détail de la règle du 10 %, dans le projet de loi, il est dit que, pour la redistribution des sièges au niveau régional, vous devez être l'un des partis qui, au niveau national, a 10 % ou plus des votes.

Ce qui veut dire, si j'applique ça à la dernière élection, que les quatre, Mme la Présidente, les quatre qui auraient droit au chapitre, de se distribuer, entre eux autres, des députés au niveau régional, bien, c'est la CAQ, c'est le Parti libéral, Parti québécois et Québec solidaire. Les quatre seuls, selon cette logique-là, dans la dernière élection, qui avaient 10 % ou plus, c'étaient eux autres. Le cinquième, parce qu'on fait tout ça pour que les petits partis émergent, le cinquième, il n'est pas à 10 %, le cinquième est à 1,68 %, c'est le Parti vert; le sixième, 1,46 %, Parti conservateur du Québec; et le septième, c'est le Nouveau Parti démocratique du Québec, à 0,57 %. Les trois sont venus en commission nous dire que ça ne tient pas la route, ça n'a pas d'allure, vous passez à côté de la cible avec votre 10 %.

Une fois qu'on a dit ça, comment ça fonctionnerait, Mme la Présidente, au niveau régional? Au niveau régional, je vais le dire de même, je vais essayer de l'expliquer, là, mais c'est complexe. Au niveau régional, vous êtes dans Montréal, qui est une région, on peut prendre la région de Québec, n'importe quelle région, vous avez deux bulletins de vote, vous votez pour votre député dans l'immense circonscription. Alors, Montréal, on n'en a plus 27, on en aurait 16. Alors, mettons, moi, je suis candidat dans toute la pointe est de l'île, alors je représente, par exemple, Rivière-des-Prairies, Pointe-aux-Trembles, Anjou—Louis-Riel. Je suis candidat, vous votez pour cette immense circonscription là pour le député. Vous y voyez le visage, vous dites : Elle, oui, lui, non, lui, oui, elle, non. Et vous avez un deuxième vote au niveau régional pour Montréal. Alors, dans le cas d'espèce où j'ai gagné la confiance d'un électeur, il vote pour — j'allais dire mon nom — dans le supergros comté, l'est de Montréal, et il vote pour le Parti libéral au niveau régional.

• (12 h 20) •

Si, sur les 16 comtés, vous avez, à titre d'exemple, 10 députés d'élus au niveau des 16 circonscriptions, après, on va faire la répartition de qui va avoir huit députés au niveau régional. Bien, vous allez être pénalisé, comme parti politique parce qu'on va diviser votre total de votes, au niveau régional, par le nombre de députés que vous avez élus au niveau des comtés. Ce qui fait en sorte que, si vous avez 1 million de voteurs au niveau régional, puis vous avez 10 députés, on va prendre 1 million de votes, au niveau régional, divisés par 10, ça va donner 100 000. Si un autre parti n'a aucun député, mais qu'au niveau régional il a 200 000 votes on va prendre 200 000 divisés par zéro, plus un, divisés par un, ça va donner 200 000. Le Parti libéral, dans ce contexte-là, avait 100 000. L'autre parti a 200 000. Qui qui a le député, Mme la Présidente, au niveau régional? Ce n'est pas le Parti libéral, c'est le parti qui a eu 200 000 votes, pas le parti qui a eu 1 million de votes. C'est le parti qui a 200 000 votes au niveau régional. C'est une fabrique à gouvernements minoritaires. Et ça crée, là, Mme la Présidente, de façon très inquiétante, une taxe, une peine pour les partis qui sont plus «groundés», qui ont fait élire de plus grand nombre de députés parce qu'on diminue d'autant, on divise d'autant leur total de votes.

Qu'est-ce que ça donne? Ça donne qu'en Écosse, Mme la Présidente... Je vais vous donner ce seul exemple-là. J'ai des exemples, là, pour tous les comparatifs, de Nouvelle-Zélande puis de la Bavière. En Nouvelle-Écosse, à la dernière élection de 2016, vous allez tout comprendre, le parti SNP a eu, au niveau des circonscriptions, 46 % des voix. Il a eu 59 sièges. Au niveau, toujours, des circonscriptions, le Parti conservateur a eu 22 %, 7 sièges. Alors, je reviens. Le SNP, au niveau national a eu 46 %, ça lui a donné 59 députés de comté. Conservateur a eu 22 %, ça lui a donné sept députés.

Avec cette proportionnelle-là, vous allez revirer ça de bord au niveau régional. Au niveau régional, le SNP a eu 41 % des votes. Il a eu quatre députés. Puis le Parti conservateur a eu 23 % des votes. Il a eu 24 députés. Si vous additionnez 59 plus quatre, ça fait 63. Sept plus 24, ça fait 31. Bingo! Vous avez un gouvernement minoritaire, parce qu'ils sont 129; pour être majoritaire, ça prend 65, ils sont 63. Une fois que vous avez dit ça, on vient de démonter par a plus b que c'est une fabrique à gouvernements minoritaires.

Et il y a des gens, Mme la Présidente, qui sont venus très clairement nous exprimer le fait que ça, c'était un danger. Ghislain Dufour nous a dit qu'au Québec... puis je pense que je peux remettre la main sur son mémoire à ce stade-ci, est venu nous dire qu'à Québec ça ne tenait pas la route. Ghislain Dufour, qui a écrit un livre, puis qui en a envoyé une copie à tous les députés. Il a écrit un livre : Le pouvoir québécois menacé — Non à la proportionnelle! . Je le cite. Pourquoi au Québec ce n'est pas une bonne idée d'avoir minoritaire après minoritaire, après minoritaire? On en a la preuve : «Tout le monde admet [...] que l'adoption d'un mode de scrutin proportionnel rendra plus fréquent, sinon systématique, pour le seul Québec au sein du Canada, la formation de gouvernements minoritaires de coalition, avec les négociations, les compromis, les marchandages et les délais que cela nécessitera.

«Il en résultera forcément des gouvernements moins forts que les gouvernements majoritaires auxquels les Québécois sont habitués. La réalité est qu'il n'y a rien de plus fort qu'un gouvernement majoritaire dans un système parlementaire comme le nôtre.» Fin de la citation, Ghislain Dufour.

Gouvernement fragile, la Fédération québécoise des municipalités est venue l'exprimer de façon très claire dans son dernier bilan sur les perspectives démographiques des régions du Québec. Excusez-moi, la bonne citation, elle est ici. Excusez-moi. J'en suis : «Par ailleurs, les membres de la FQM craignent qu'un tel mode de scrutin favorise l'élection de gouvernements minoritaires, et ainsi, une instabilité dans la gouvernance de l'État québécois. Aurions-nous pu nationaliser l'électricité, adopter la Loi 101ou mettre en place le réseau des CPE dans un tel contexte? Un gouvernement pourrait-il réaliser ses engagements phares, sans compter le risque de vivre des élections à répétition qui sera bien réel? Quel en sera l'impact pour les régions du Québec?» La FQM faisait écho des propos de Ghislain Dufour quant à l'instabilité et à amenuiser l'État québécois.

Donc, Mme la Présidente, c'est une fabrique à gouvernements, une fabrique à gouvernements. Et même, les amis... Parce que, là, il faut ajouter un niveau de complication. Jean-Pierre Charbonneau a dit que la CAQ a caché une prime au vainqueur dans son projet de loi parce que la CAQ ne prend pas l'entièreté, dans le projet de loi, des 10 députés de mon exemple tantôt. Il divise ça puis il en fait juste cinq. Ça va être une fabrique, pareil, à gouvernements minoritaires, mais, même là... Ils ont été capables d'éconduire Jean-Pierre Charbonneau, qui dit que ça n'a pas de bon sens puis que c'est une prime au vainqueur. Mais, même là, ça demeure une fabrique de gouvernements minoritaires.

Alors, Mme la Présidente, au niveau de l'importante parité hommes-femmes, qui est un des six principes énoncés, la parité dans le projet de loi, là, on n'y est pas du tout, du tout. Ce qui est demandé dans le projet de loi, c'est aucune contrainte. Ce qui est demandé au projet de loi, c'est l'article 73 qui impose ce qui suit : «[Les partis doivent faire] un énoncé relatif aux objectifs que se fixe [le] parti en ce qui concerne la parité entre les femmes et les hommes.» Et ça va être envoyé au DGEQ, un énoncé, puis ça va être mis sur le site Web du DGEQ. Bien, ça, Mme la présidente, ce n'est pas une véritable politique contraignante de parité.

Et il y en a d'autres qui sont venus nous dire... Le Conseil du statut de la femme est venu nous dire que c'est des mesures qui étaient trop timides, la CSN également. Et ultimement on a dit, Groupe de Femmes, Politique et Démocratie, qu'on ne devait pas lier la parité, l'importance de faire avancer le Québec dès 2022, pas après un référendum, juste en 2026, mais travailler sur la parité femme-homme pour que l'Assemblée nationale soit plus représentative de cette parité femme-homme, qu'on doit travailler maintenant, sortir ça du projet de loi n° 39, l'adopter puis faire en sorte que ce soit des mesures contraignantes, pas juste un document mis sur le site Internet du DGEQ, faire en sorte qu'il y ait plus de femmes et d'hommes au Québec qui soient élus.

Alors, Mme la Présidente, vous voyez, j'achève mon tour de piste. Je vais répondre à mes points. Vous avez vu que, sur les six points, puis je vais faire une remise en contexte, on ne rencontre pas les six principes de l'entente de mai 2018, et on ne rencontre pas les six principes de la motion que vous avez adoptée. La réponse, à la page 67, du DGEQ, il faut, Mme la Présidente, que je vous le cite la réponse à la page 67 du mémoire du DGEQ, Délai requis pour la tenue d'un référendum. Pour le Directeur général des élections — je cite son mémoire : «Pour que le Directeur général des élections soit en mesure de tenir le référendum selon les dispositions prévues lors de la prochaine élection générale, le 3 octobre 2022, le projet de loi n° 39 devra avoir été adopté et sanctionné au plus tard le 1er février 2021.» Le 1er février prochain, fin de la citation, le projet de loi, les quelque 500 articles, Jaws 1, Jaws 2, Jaws 3, devront avoir été débattus, adoptés, sanctionnés pour le 1er février 2021, sinon tout ça, ce beau château de cartes là, va tomber, puis il n'y en aura pas de référendum. C'est le DGEQ qui est venu le dire.

Mme la Présidente, en date du 8 octobre 2020, il reste 105 jours pour faire tout ce travail-là, puis là-dessus j'inclus Noël puis le jour de l'An. Alors, Mme la Présidente, puis il y a même des éléments qui... La réforme du mode de scrutin divise la CAQ, il y a même des collègues de la CAQ, je n'ai pas le temps de les citer, qui disent, finalement, que ce n'est pas une priorité, loin de là.

Alors, quand on regarde ça, Mme la Présidente, c'est important de souligner que le projet de loi, le premier ministre du Québec qui a signé l'entente à l'époque, ne rencontre pas les critères qui avaient été mis à l'intérieur de l'entente de mai 2018. Ce qu'il est important de noter, Mme la Présidente, c'est qu'il y aura un poids réduit des régions du Québec. Le retour sur les six principes fait en sorte que l'on ne peut pas atteindre cet objectif-là. Sur ces principes même, on ne respecte pas les objectifs donnés. C'est pour ça qu'on va voter contre le principe. Nous aurons une opposition intelligente, on ne va pas, évidemment, faire en sorte de bloquer, Mme la Présidente, mais on fera le débat, puis on est prêts à faire avancer le Québec pour la parité hommes-femmes.

• (12 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de LaFontaine.

Et, avant de céder la parole au prochain intervenant, je vous informe que deux débats de fin de séance se tiendront aujourd'hui. Le premier débat portera sur une question adressée par M. le député de D'Arcy-McGee au ministre de la Santé et des Services sociaux concernant l'impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des Québécois. Le deuxième débat portera sur une question adressée par M. le député de Viau au premier ministre et responsable des dossiers jeunesse concernant l'impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des jeunes.

Et maintenant je suis prête à reconnaître le prochain intervenant, et ce sera M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Au risque de décevoir mon collègue, évidemment, de Rivière-des-Prairies, je vais faire mon intervention, qui ne sera pas si flamboyante que ça, là, mais, ceci étant dit, je pense qu'il y a lieu de faire une intervention à cette étape-ci sur ce qui doit être un projet de loi qui est important, je vais le dire comme ça.

Je vais commencer par souligner le fait que l'ex-ministre de la Justice, qui a été à l'origine du projet de loi, soit venue défendre ledit projet de loi. Je pense que c'est très honorable de sa part d'être venue ici aujourd'hui le faire. Ce n'est pas ça qu'on a vu régulièrement dans les derniers mois et dans les derniers projets de loi. Alors, il y en a qui sont venus, il y en a qui sont moins venus, on va dire ça comme ça, parce qu'on ne peut pas souligner les absences. Mais, ceci dit, je souligne quand même le fait que l'ex-ministre de la Justice, qui est maintenant présidente du Conseil du trésor, soit venue défendre son projet de loi.

Je ne reprendrai évidemment pas tous les éléments, les excellents éléments que contenait la présentation de mon collègue, qui vient de la faire avec beaucoup d'éloquence, beaucoup d'énergie, beaucoup de précision, dans la dernière heure. Je soutiens tous les arguments qu'il a mis de l'avant. Je vais prendre peut-être un ou deux autres angles qui sont un petit peu différents, mais pas complètement.

J'ai été surpris de l'approche de l'actuelle présidente du Conseil du trésor, Mme la députée de Champlain, hein, c'est comme ça... je ne m'abuse, c'est ça, hein? Et il y a des éléments avec lesquels je ne suis pas d'accord, et on va mettre les choses dans le contexte. Le contexte est intéressant, Mme la Présidente, parce que, dans les derniers jours, dans la dernière semaine, on a une ex-première ministre du Québec qui a publié ses mémoires, et je m'étais demandé s'il y avait un passage sur la réforme du scrutin, et il y en a un. Et le passage est tout à fait en défaveur de la réforme du scrutin. Le passage n'est pas en défaveur du projet de loi actuel, le passage est en défaveur d'une réforme du scrutin. Et, sans citer mot à mot ce que l'ex-première ministre, Mme Marois, a dit, elle dit que le système actuellement sert bien la population québécoise. On reconnaît là la réserve de l'ex-première ministre. Elle n'a pas parlé... elle n'a pas dit qu'elle servait bien le Parti québécois, ni le Parti libéral, ni la CAQ. Elle a essentiellement dit que la population québécoise était bien servie par le mode de scrutin actuel, ce qui nous amène à conclure qu'une réforme, implicitement, pourrait les desservir. Et ça, je pense que mon collègue a vraiment, vraiment, vraiment fait la démonstration, pendant une heure, qu'il y a des travers à ce projet de loi.

Et là, Mme la Présidente, je ne vais certainement pas, certainement pas critiquer le fait qu'on veuille améliorer les choses. Mais on est tous ici, tous et toutes ici pour améliorer les choses, incluant le processus démocratique qui est celui d'une élection.

Bon, là où j'ai un problème, Mme la Présidente, c'est quand l'ex-ministre de la Justice commence par nous dire que le gouvernement de la CAQ a tenu parole. O.K. Mon collègue, il y a quelques instants, a fait référence à l'entente solennelle, historique de mai 2018. Elle était surprenante parce que, bien honnêtement, Mme la Présidente, je ne m'attendais pas à ce que l'actuel premier ministre, qui, à l'époque, était évidemment à l'opposition, signe cette entente-là. Je ne m'attendais pas à ça. Bien, je n'ai pas de problème à ce qu'il l'ait fait, mais vraiment pas. Il l'a fait, puis c'est correct. On n'était pas partie prenante, pour toutes sortes de raisons qui ont été évoquées dans la dernière heure. Mais le côté solennel... C'était solennel, là, ils étaient tous ensemble, les trois partis, bon, les députés indépendants, puis tout ça, à la caméra, là. Et ce que la population a compris, là, à moins que je sois déconnecté de la population, puis je peux vous dire que je me considère connecté, la population a compris que l'élection de 2022 serait de facto sous un nouveau mode de scrutin. C'est ça que la population a compris.

On a joué dans le même film, et c'est rare que j'utilise cette expression-là, parce qu'elle est tellement utilisée, utilisée, utilisée, là, que ça devient comme de dire qu'il fait soleil dehors, là, mais là je pense que ça s'applique parce qu'on vient de le vivre au fédéral. Ce sera la dernière élection selon le mode de scrutin traditionnel, blablabla. La seule chose qu'il reste, évidemment, c'est blablabla. C'est ça, là, qui a été dit, là. Le bon peuple, là, a compris, là, en 2018, que, s'ils étaient élus, là... n'importe quel des trois, là, bon, il y en a deux que c'était impossible, là, mais que c'est ça qu'il allait arriver. C'est-u ça qu'il arrive, Mme la Présidente? Non. Alors, quand l'ex-ministre de la Justice nous dit aujourd'hui que la CAQ a tenu parole, bien non, la CAQ n'a pas tenu parole. C'est plate, mais c'est — vous connaissez mon expression — de même.

Mais il y a plus là-dedans, Mme la Présidente. L'ex-ministre de la Justice nous a même évoqué la pandémie. Bien, voyons donc! Le projet de loi, il a été déposé avant que le virus apparaisse, n'est-ce pas, et nous avons pu continuer nos travaux. La pandémie, écoutez, ce n'est pas un facteur là-dedans, là. Mais c'est comme un péché véniel, là. Je ne lui reproche pas, là, ce n'est pas un péché mortel. Un péché mortel, là, c'est qu'il n'y aura pas d'élection selon le nouveau mode de scrutin en 2022, là, ça n'arrivera pas, Mme la Présidente. Là, l'ex-ministre de la Justice nous dit qu'il y a une légitimité, je l'ai noté, là, parce que, des fois, on écoute des gens pour être sûr qu'on puisse le reprendre, on le note pour bien citer la personne que l'on veut critiquer amicalement... Parce que nous, les parlementaires, nous sommes amicaux les uns envers les autres, n'est-ce pas? Alors, elle nous a dit que c'était légitime de le faire. O.K. Parlons donc de la légitimité. Est-ce que le gouvernement en place a la légitimité de faire un référendum? La réponse, c'est oui. Est-ce que le gouvernement en place considère qu'un référendum est un acte démocratique consultatif légitime? La réponse, c'est oui. O.K.?

Maintenant, évidemment, là, je viens de parler essentiellement de la définition du dictionnaire, mais, comme tous les mots ont une valeur, les mots ont aussi une valeur par le contexte dans lesquels on l'applique. Alors, un référendum ne peut pas, à mon sens, être un acte complètement légitime s'il est mis dans un contexte qui ne l'est pas à la base sur le plan politique, sur le plan du geste, sur le plan de sa finalité.

Alors, c'est quoi, un référendum, Mme la Présidente? C'est une consultation populaire ciblée à un moment donné, en dehors, autant faire se peut, d'influence externe. Quand je dis «influence externe», ça veut dire qu'au moment du référendum c'est le sujet pas noyé dans d'autres sujets, pas, je dirais, influencé par d'autres sujets, c'est le sujet. Et qui dit référendum dit débat préalable. Et les conditions pour un référendum qui aurait une légitimité pleine et entière valent pour le jour du vote, comme pour le chemin préparatoire au vote et ce qui s'appelle une campagne. «Référendum», Mme la Présidente, ça veut dire une question et deux réponses possibles : oui ou non. Le citoyen accepte ou refuse la proposition qui aura été débattue suffisamment, correctement dans les semaines ou, peu importe, les mois, peu importe, précédents. C'est ça, un référendum. Si j'avais à demander à mon collègue du Parti québécois, que je vois du coin de l'oeil, s'il est d'accord avec ce que je viens de dire, il me répondrait même des dates de référendums qui sont l'illustration de ce que je viens de dire.

• (12 h 40) •

Alors, la question de la légitimité d'un référendum dans le sens du Larousse, bien oui. Pris hors contexte, bien non, puis, dans le contexte qui est proposé, certainement pas. Je ne suis pas content de me lever, moi, là, aujourd'hui, là. Je ne suis pas content parce que je considère que le travail qui a été fait a été fait en vue de faire... je dirais, prendre une décision sur un projet de loi et que ce projet de loi là, de la manière qu'il est présenté à la population, devient ipso facto un projet mort-né.

On se satisfait d'avoir déposé un projet de loi pour lequel il va y avoir un référendum, qu'on situe, dans le temps, le jour de l'élection de 2022, une élection. Et là on dit que c'est légitime. Puis, en le faisant, bien, c'est sûr qu'on ne peut qu'argumenter que de dire : Bien oui, il y a un référendum. Regardez, je vous avais promis ça. Bien non, tu avais promis des élections, ça n'arrivera pas. Un référendum, c'est correct. Ce n'était pas dans la résolution solennelle, mais c'est correct. Moi, je suis en faveur de ça, pas de problème avec ça. Mais on le met le jour de l'élection. Comment est-il possible... Et là j'aimerais bien entendre n'importe qui, incluant l'ex-ministre de la Justice, surtout elle, venir m'expliquer, là, et expliquer à la population générale que le citoyen moyen, moi, vous, ceux qui nous écoutent, va réussir, là, mais réussir à se détacher du discours électoral ambiant. Quelles sont les probabilités que M. Tout-le-monde, pendant six semaines, ou 10, ou 12, si on ajoute un débat référendaire, se fasse une tête d'une façon rigoureuse et qu'il arrive à l'élection, là, et qu'il n'y aura aucune influence dans sa décision du cheminement que le citoyen aura fait pour l'élection, avec le référendum? Qu'est-ce qui est le plus probable, là, qu'un va influencer l'autre ou que l'un n'influencera pas l'autre? Rien que de poser la question, c'est y répondre. Une autre lapalissade, mais celle-là, elle s'applique en titi!

Le citoyen, là, hein, le citoyen qui va aller voter, quel va être son réflexe le plus naturel? Je m'inclus là-dedans. Même si je me dis, là : Moi, là, je vais être capable de faire la part des choses, bien non... en fait, c'est bien oui, je peux la faire, mais, bien non, il va y avoir une influence. Le citoyen moyen, là, mettons, là, Mme la Présidente, que les sondages sont serrés entre trois partis. Tiens, on va prendre le scénario le plus spectaculaire. Et là ils regardent ça, là, puis ils se disent : Bon, si je vote pour ce parti-là, O.K., là, j'ai des chances de gagner, ça va être serré. Mais là, le référendum, de la manière que c'est dessiné, là, bien, la fois d'après, si je me retrouve dans la même situation, ça défait tout, là, c'est sûr, sûr, sûr. Je peux même prendre le scénario inverse, à l'autre extrême. Bien, voyons donc! Là, mon parti gagne aujourd'hui, là, je suis content, moi, là, là, je ne vais pas... Je vais-tu voter pour une affaire de même, qui risque, la prochaine fois, dans les mêmes circonstances, de me faire perdre? C'est inévitable que n'importe quel citoyen va se présenter, Mme la Présidente, à l'élection en considérant son vote référendaire avec son vote électoral de l'élection provinciale de ce moment-là en 2022. L'un va influencer l'autre. Et la bonne phrase, c'est : l'un va contaminer l'autre.

Or, c'est un choix qui a été fait, Mme la Présidente. Mon collègue le dit, le gouvernement avait le pouvoir, par sa majorité, de faire la loi et de l'appliquer, élection au nouveau mode de scrutin nonobstant qu'on soit d'accord ou non. Il avait ce pouvoir-là. Non. Il a décidé, lui, unilatéralement, de faire un référendum et, tout aussi unilatéralement, de déterminer la date du référendum le jour de l'élection. Ça, si ce n'est pas fait pour le perdre, là, le référendum, je ne sais pas ce que c'est. Mais il y a une chose qui est certaine. Mettons, Mme la Présidente, que ça n'a pas été fait pour que ce soit battu, bien, ça n'a certainement pas été fait pour que ce soit indépendant, là, certainement pas, c'est clair.

Quand on regarde les paramètres de ce qui est leur nouveau mode de scrutin... Je suis sûr qu'il n'y en a pas, de parfait, hein, il n'y a pas... Changer les modes scrutin, il n'y a rien de parfait. Mon collègue, dans la dernière heure, a pris plusieurs exemples. Il a pris les bons exemples. Le problème, c'est que ça va arriver. Et je vous dirais qu'aujourd'hui, là, si on avait à voter là-dessus, là, il y a à peu près 99 % de la population qui ne comprennent absolument rien de ce qui va se passer. Mais les cas de figure qui ont été déterminés... pas déterminés, mais relevés par mon collègue sont bien réels et ils vont bien arriver.

Je vais faire une petite remarque, Mme la Présidente, un petit fantasme que j'exprime ici, là. Pour ce qui est de la représentativité territoriale, pour être noyé, là, on peut être une goutte dans l'océan, oui, et l'océan, ça peut être un océan de kilomètres carrés ou ça peut être un océan de gens. Alors, un de mes fantasmes, là, ce serait de pouvoir avoir cinq minutes, juste cinq minutes, là, un débat de... une motion, là, avec débat où, trois minutes chacun, les députés d'Ungava des trois derniers gouvernements viennent nous expliquer c'est quoi, la vie d'être une goutte noyée dans des kilomètres carrés, là. Et c'est là, là, que vous transposez ça, là, aux députés de régions, là, puis «have fun». Et la transposition, elle est 100 % identique quand on est un député à Montréal ou dans la Capitale-Nationale.

Ce n'est même pas un reproche que je fais, Mme la Présidente. Je dis que ce qui est là, on va en débattre dans l'étude détaillée. Il y a des travers. Ce travers-là en est un. Mon collègue faisait référence au seuil de 10 %. Bon. Le seuil de 10 %, Mme la Présidente, par définition, par définition, ça exclut du monde. Et là on se promène ici en disant : On va faire une réforme de scrutin, là, du mode de scrutin pour être sûrs d'inclure tout le monde et on met un seuil qui, par définition, va exclure du monde. Bon. O.K. Est-ce que ça, c'est légitime dans la... Bon, ça sort d'où, cette affaire-là?

Alors, c'est sûr que, là, on va me répondre que, pour avoir tout le monde, bien, il faudrait la proportionnelle complète. Et ça, ça nous amène à des gouvernements de coalition permanents. Je ne suis pas convaincu, moi, là, là, dans la présentation actuelle, mais pas du tout, qu'on assure la stabilité, tel que ça a été évoqué par l'ex... la ministre de la Justice. Mais ça, on aura la chance d'en débattre au fil de l'étude détaillée.

Pas sûr non plus... Vous avez remarqué qu'on n'est pas allé jusqu'à obliger d'avoir une parité hommes-femmes, et ainsi de suite, là. On ne l'a pas obligé, on propose des tendances, des engagements, et ainsi de suite.

Alors, je vois, moi aussi, le temps qui file. Je vois qu'il me reste moins d'une minute, Mme la Présidente. Alors, aujourd'hui, là, je vais conclure là-dessus. Vraiment, là, pour moi, comme parlementaire, c'est un mauvais moment, parce qu'on nous a présenté de la vertu alors qu'au départ ça a été conçu pour que ça ne vive pas. Ça ne vivra pas. Et on va prendre beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps pour essayer d'améliorer quelque chose qui a beaucoup plus de chance d'être battu circonstanciellement, comme je l'ai dit, que de quoi que ce soit d'autre. Si ça, ce n'est pas un écran de fumée, Mme la Présidente, là, je ne sais pas ce que c'est. Je suis déçu, très, très déçu de l'exercice. Et ça, c'est la responsabilité du gouvernement en place. Je le répète, ce sont des choix qu'ils ont faits. On aurait pu faire d'autres choix. Et le choix qui a été fait, il mène là où je pense que ça nous mène. Et j'exprime aujourd'hui ma déception, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de La Pinière. M. le député de LaFontaine, vous voulez intervenir?

M. Tanguay : Oui, Mme la Présidente. J'aimerais que vous vérifiiez, en vertu de l'article 213, l'intérêt pour mon collègue de recevoir une question de ma part.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bien, attendez, je vais voir s'il y a une légitimité pour poser une question, puisque c'est une situation un peu particulière. 213. Il n'y a pas de problème. Alors, j'imagine que c'est une question courte et une réponse courte.

• (12 h 50) •

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bien, c'est ça, là. Et c'est pour ça que je spécifie, là. Alors, vous pouvez... Il faut que vous acceptiez de dire... Est-ce que vous acceptez?

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, oui, oui. Alors, voilà. La question sera posée rapidement, et une réponse courte.

M. Tanguay : Alors, Mme la Présidente, brièvement, le secrétariat a fait une simulation du projet de loi n° 39 appliquée à la dernière élection, ce qui ferait en sorte que la CAQ aurait 14 députés de moins, ils seraient 60, il y aurait un gouvernement minoritaire. Question à mon collègue de La Pinière : À la lumière de la façon de gouverner du premier ministre, comment juge-t-il l'enthousiasme réel du premier ministre à gouverner un gouvernement minoritaire?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Mme la Présidente, je ne répondrai que par une prescription de Gravol. Je pense que le premier ministre, actuellement, n'a aucun intérêt et aucun sentiment positif pour aller dans cette direction-là. Et, si ça arrivait, je serais prêt à lui prescrire le bon médicament.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie de cette courte réponse. Et maintenant je suis prête à reconnaître le prochain intervenant, qui sera M. le leader du deuxième groupe d'opposition et député de Gouin.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, Mme la Présidente. Pour ma part, je n'ai pas de question spécifique pour le député de La Pinière. Je vais plutôt profiter du temps qui m'est imparti aujourd'hui, en tout cas d'une partie de ce temps-là, pour vous exposer les raisons qui motivent ma formation politique à appuyer le principe du projet de loi n° 39.

Je vous mentirais si je dirais que c'est un enthousiasme débordant qui nous habite. Je dirais que c'est un enthousiasme prudent, prudent parce que ce projet de loi là, bien qu'on en appuie l'intention première, est un projet de loi sur lequel nous avons l'intention de travailler avec beaucoup d'énergie en étude détaillée parce qu'il comporte des lacunes importantes. Il y a des trous, il y a des gros problèmes dans le projet de loi, même si je ne surprendrai personne en disant que la réforme du mode de scrutin est un combat, une bataille que nous menons, à Québec solidaire, depuis longtemps.

Et, par déformation professionnelle, Mme la Présidente, j'ai envie de faire un retour dans le temps. Je ne sais pas si les gens qui m'écoutent ici aujourd'hui savent c'est quoi, le premier moment au Québec dans notre histoire politique que cette idée de réformer le mode de scrutin pour ajouter, disons, une composante de proportionnalité a été évoquée. On me fait signe : Ça fait longtemps. Mais ça fait vraiment, vraiment longtemps. En fait, la première trace écrite de cette idée dans notre histoire politique, on la retrouve en 1902 dans le journal Le Pionnier, un certain Amédée Denault, qui évoquait, à l'époque, cette idée de réformer le mode de scrutin pour une représentation proportionnelle. C'est le premier moment dans notre histoire politique où cette idée est évoquée, et c'est le début d'une longue conversation démocratique qui commence, donc, en 1902, et qui, plus d'un siècle plus tard, nous occupe et nous mobilise encore aujourd'hui ici, à l'Assemblée nationale du Québec.

Je ne ferai pas le résumé de tous les jalons de cette longue conversation démocratique, je n'aurais pas assez de l'heure qui m'est impartie, mais, disons, dans l'histoire politique récente, contemporaine du Québec, c'est une idée qui a été, souvent, débattue. Puis je vais commencer réellement mon historique en 1965, alors que le Rassemblement pour l'indépendance nationale, le RIN, l'ancêtre du parti qui forme aujourd'hui la troisième opposition, est la première formation politique à inscrire dans son programme un projet de réforme électorale qui prévoit une part de proportionnalité.

À partir du moment où le RIN inscrit ça dans son programme, beaucoup de gens se disent : Ah! c'est une bonne idée, mais il faudrait consulter pour être sûrs que les gens comprennent et que les gens soient d'accord. Parce qu'un des arguments qui a été invoqué par le député de La Pinière à l'instant, c'est que c'est un enjeu qui est complexe, c'est vrai, et que, donc, il y a un défi que les gens, vraiment, comprennent de manière pleine et entière quels sont les enjeux en question. Et donc on s'est dit dès le milieu des années 60, au Québec : Il faut faire des consultations, pour être sûrs que tout le monde comprenne bien.

Alors, voici les consultations que nous avons faites depuis 1965. Donc, en 1970, d'abord, Commission de l'Assemblée nationale, qui étudie la réforme du mode de scrutin. 1979, livre vert sur la réforme du mode de scrutin. 1981 à 1983, le gouvernement de l'époque réalise une consultation sur le mode de scrutin. 2001, la Commission des institutions de l'Assemblée nationale se donne un mandat d'initiative concernant la réforme du mode de scrutin. 2002 à 2003, se tiennent les états généraux sur la réforme des institutions démocratiques. 2004, le Parti libéral du Québec dépose un avant-projet de loi. 2005‑2006, il y a une commission spéciale sur la Loi électorale. En 2007, le Directeur général des élections du Québec dépose un rapport. 2017, grande consultation pilotée par le MDN, intitulée Chaque voix compte, des milliers de citoyens, citoyennes contribuent à cette consultation. Et cette longue cascade de consultations populaires culmine le 9 mai 2018 sur une signature d'une entente, où quatre des cinq principales formations politiques au Québec s'entendent sur un principe élémentaire, fondamental, c'est-à-dire il faut réformer le mode de scrutin pour y introduire des composantes de proportionnalité, et il faut le faire dès la prochaine législature, dès le prochain mandat, le mandat qui est celui, actuellement, de la Coalition avenir Québec.

Vous comprendrez, Mme la Présidente, qu'après cette longue, que dis-je, cette très longue cascade de consultations, on a été plutôt surpris de voir la Coalition avenir Québec, son gouvernement, faire marche arrière sur une partie de la promesse électorale pour dire : Ah! finalement, on n'est pas sûrs qu'on a assez consulté. On a consulté, quoi, une quinzaine de fois, là, je n'ai pas compté, en tout cas, plusieurs fois depuis les années 70. Ce n'est pas suffisant, il faut reconsulter à nouveau et il faut faire un référendum.

C'était d'autant plus surprenant que le premier ministre lui-même avait réitéré à plusieurs reprises qu'un référendum n'était pas nécessaire. En septembre 2018, l'actuel premier ministre disait, et je cite : «Je pense qu'une campagne électorale, c'est suffisant pour avoir la légitimité de changer le mode de scrutin. [Les électeurs, ils] vont se prononcer le 1er octobre.» Quelques jours plus tard, toujours en septembre 2018, je cite à nouveau le premier ministre actuel du Québec : L'élection qui s'en vient sera... En fait, non, je cite d'abord la question du journaliste, parce que c'est important pour comprendre. Le journaliste demande : «L'élection qui vient sera donc la dernière du mode de scrutin actuel, sûr de sûr?» Sûr de sûr? Et l'actuel premier ministre de répondre : «Effectivement[...]. Sauf si les libéraux sont élus. Mais [nous autres] on ne fera pas comme Justin Trudeau.» Vous comprendrez qu'après une telle séquence consultative, après des déclarations aussi fermes de l'actuel premier ministre, à peu près tout le monde qui a travaillé sur la question de la réforme du mode de scrutin dans l'histoire du Québec est tombé des nues de voir que, tout d'un coup, changement de cap, une réforme du mode de scrutin était inimaginable sans référendum. C'est un changement de position radical.

Est-ce la prise du pouvoir qui a assoupli les convictions du premier ministre en matière de réforme du mode de scrutin? C'est la question qui se pose, puis beaucoup de gens pensent que oui. Puis, à partir du moment où on bénéficie d'un mandat majoritaire qui nous est donné par un certain système électoral, ça nous rend naturellement réticents à transformer ce système électoral. Et ça, ce n'est pas seulement la responsabilité du premier ministre, Mme la Présidente, c'est la responsabilité de l'ensemble des députés de la Coalition avenir Québec, qui ont tous été élus sous la même bannière, bannière sur laquelle il était écrit : Nous réformerons le mode de scrutin si nous sommes élus. Et la Coalition avenir Québec étant un parti unifié derrière son chef...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, justement... Alors, vous n'avez pas terminé votre intervention, M. le député. Je dois vous inviter à poursuivre lors de la reprise de ce débat.

Et, d'ici là, je suspends nos travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 heures)

Le Vice-Président (M. Picard) : Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. L'Assemblée poursuit les débats sur l'adoption du principe du projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin. Lorsque nous avons cessé nos travaux pour aller dîner, c'était M. le député de Gouin. Il avait 7 min 47 s. Vous pouvez poursuivre.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Lorsque j'ai été interrompu par l'horloge, je parlais de la décision du gouvernement d'inclure dans son projet de loi sur la réforme du mode de scrutin un référendum, une décision qui a surpris beaucoup de gens, notamment les gens qui depuis des années suivent le dossier du mode de scrutin et qui militent en faveur de la réforme du mode de scrutin.

Ce qui est surprenant dans cette stratégie, c'est que le peuple québécois a été, au fil des ans, consulté à de nombreuses reprises sur cette question-là, et les partis politiques qui avaient signé l'entente de 2018 sur la réforme du mode de scrutin pensaient vraiment que, cette fois-ci, on y était et que le scrutin de 2018 serait le dernier à se dérouler sous l'actuel mode de scrutin. Ça a été vécu comme une énorme déception par les gens qui militent en faveur de la réforme du mode de scrutin au Québec, que cette décision de promulguer un référendum, parce qu'historiquement cette idée de référendum, généralement, a été utilisée par les adversaires de la réforme du mode de scrutin.

Et c'est questionnant d'autant plus que nous avons fait, au Québec, nous avons posé beaucoup de gestes qui nous définissent aujourd'hui comme peuple... posé de nombreux gestes, donc, sans procéder à des référendums, des décisions politiques qui n'avaient rien de banal, qui étaient déterminantes pour la société québécoise, puis qu'on a mises de l'avant sans passer par ce détour du référendum, par exemple la nationalisation de l'eau... de l'hydroélectricité, pas une petite décision, l'adoption de la Charte de la langue française, qui venait quand même... qui a créé, c'est un euphémisme, de nombreux débats, des débats constitutionnels. Ce n'était pas une petite décision, ce n'était pas un petit projet de loi. Il y avait de l'opposition, à l'époque à l'Assemblée nationale, à l'adoption de cette Charte de la langue française, et on est allé de l'avant sans référendum.

La déconfessionnalisation des écoles, l'aide médicale à mourir, il y a plein de décisions qu'on pourrait nommer au fil des ans, des décisions déterminantes pour ce qui est le Québec d'aujourd'hui puis qu'on a mises de l'avant, des choix qu'on a faits collectivement, que les gouvernements ont fait sans prendre le détour du référendum parce qu'il y avait un consensus social et politique assez fort pour aller de l'avant. Et, s'il y a bien un consensus social sur un enjeu au Québec, c'est bien celui de la réforme du mode de scrutin. Il y a une seule formation politique qui s'y oppose depuis un moment. Cette formation politique, c'est celle qui constitue aujourd'hui l'opposition officielle, c'est le Parti libéral du Québec. C'est l'exception, M. le Président, à une coalition gargantuesque de partis politiques et de forces de la société civile qui disent tous la même chose : Il faut sortir de ce mode de scrutin problématique, ce mode de scrutin que René Lévesque décrivait comme démocratiquement infect, que d'autres politologues décrivent comme étant un miroir déformant de la volonté populaire qu'expriment les Québécois et les Québécoises quand ils vont voter lors des élections.

Dommage, donc, qu'on s'impose ce détour et ce délai qui n'est pas nécessaire. Dommage qu'on suspende au-dessus de la réforme du mode de scrutin cette épée de Damoclès qui n'a pas lieu d'être. On aurait pu, on aurait dû aller de l'avant. Et c'est dommage, à la lueur du débat politique et social qui a lieu au Québec depuis des décennies sur le mode de scrutin, qu'on ouvre cette possibilité qu'on n'y arrive pas une nouvelle fois et qu'on revienne à cette triste tradition où on en parle pendant les élections, on en parle avant les élections, puis qu'une fois ici au salon bleu, bien, on ne soit pas capable de livrer la marchandise pour une réforme qui est demandée par une majorité nette, claire et maintes fois confirmée de Québécois puis de Québécoises.

Ceci étant dit, le gouvernement a néanmoins pris la décision d'aller de l'avant avec le référendum. Qu'est-ce qu'on fait maintenant avec le reste du projet de loi? Un des éléments qui est inclus dans cette réforme du mode de scrutin, c'est des dispositions en matière de parité hommes-femmes en matière de représentation des femmes à l'Assemblée nationale. On nous avait annoncé des mesures de parité. Finalement, ce qu'on a, c'est grosso modo des souhaits de parité, puisque, dans le projet de loi, il n'y a qu'une obligation pour les formations politiques de se donner des objectifs de parité. On demande aux formations politiques que ces objectifs-là soient rendus publics. C'est bien, mais c'est très, très, très peu.

Dans la plupart des pays dans le monde où il y a des modes de scrutin proportionnel, on met en place des mesures de représentation des femmes beaucoup plus importantes, qui vont beaucoup plus loin, par exemple en obligeant les formations politiques à avoir la parité sur leur liste de candidats et de candidates. Dans d'autres pays, on module le financement électoral selon la capacité des partis à atteindre des cibles de parité. Il y a toute une série de mesures structurelles de parité qui sont appliquées dans les pays où il y a des modes de scrutin à composante proportionnelle, et, en fait, le choix qu'à fait le gouvernement, c'est de prendre, dans tout cet éventail de possibilités là, l'option la moins contraignante, l'option qui va faire progresser le plus lentement la cause de la présence des femmes en politique, alors qu'ils avaient à leur disposition une panoplie d'options beaucoup plus ambitieuses, et c'est dommage.

Pour vous donner une idée, M. le Président, il y a 103 pays, 103 pays à travers le monde, qui appliquent des mesures structurelles dans leur mode de scrutin pour améliorer la représentation des femmes et des minorités nationales. Et, dans ces 103 pays, en moyenne, devinez quoi, bien, il y a plus de femmes élues que dans les autres. Alors, ce n'est pas une proposition radicale, ce n'est pas une proposition marginale, ce n'est pas une proposition saugrenue ou originale que de demander des mesures structurelles de parité dans un projet de loi comme celui-là. C'est en fait la norme dans une centaine de démocraties à travers le monde. Le gouvernement de la Coalition avenir Québec a fait le choix de l'exception et de se contenter de mesures très timides en matière de représentation des femmes.

Un autre des enjeux qui devra être amélioré dans ce projet de loi là, c'est la question du seuil d'admissibilité. Une décision très difficile à comprendre du gouvernement de fixer le seuil d'admissibilité, pour participer à l'attribution des sièges en région, à 10 %. M. le Président, après de nombreuses recherches, il y a un seul pays dans le monde où un tel seuil est appliqué, c'est la Turquie, pas exactement une démocratie à laquelle on aime se comparer. Et, quand on regarde quelles sont les réelles pratiques dans les pays où il y a des modes de scrutin à dimension proportionnelle, on parle de seuils qui sont généralement autour de 5 % ou inférieurs à 5 %. Il y a des pays où il n'y a pas seuil. Nous, on juge que ce serait une erreur que d'aller dans un système électoral où il n'y a pas de seuil de représentation. Ça génère trop d'instabilité. Donc, mon argument n'est pas celui-là, mais on aurait pu puis on aurait dû opter pour un seuil beaucoup plus raisonnable puis beaucoup plus conforme à ce que font les autres pays dans le monde où il y a des modes de scrutin à dimension proportionnelle.

Et ça, également, ma formation politique va déposer des amendements, lors de l'étude détaillée, pour qu'on ramène un seuil de représentation... un seuil d'admissibilité beaucoup plus raisonnable, beaucoup plus démocratique. 10 %, M. le Président, ça aurait été très long avant que ma formation politique fasse élire des députés, s'il y avait eu un seuil de 10 %. C'est un seuil beaucoup trop fort, ça ne peut se justifier par aucune pratique dans aucune des démocraties à travers le monde. Il va absolument falloir que, sur cette question-là spécifique, le gouvernement fasse un compromis, et, pour nous, c'est absolument essentiel.

Autre élément spécifique avant de me permettre un argument plus général, il y a eu, dans ce projet de loi, l'introduction d'une petite, j'essaie de trouver un terme pour le décrire, d'une petite particularité, d'une petite twist, d'un petit détail qui n'a l'air de rien et qui est particulièrement technique, mais qui vient bouleverser tout l'équilibre interne du projet de loi puis du mode de scrutin qui est proposé par le projet de loi. C'est ce que certains experts ont appelé la prime au vainqueur, qui a été incluse dans le calcul de distribution des sièges, puis c'est une disposition qui vient tirer vers le bas le caractère représentatif, le caractère proportionnel du mode de scrutin qui est proposé dans le projet de loi n° 39.

• (15 h 10) •

C'est dur de ne pas y voir une mesure de compromis, à l'interne de la Coalition avenir Québec, pour peut-être ménager certaines sensibilités ou, en tout cas, rassurer certains députés qui craignent qu'un changement du mode de scrutin ait une influence sur les résultats de la prochaine élection.

C'est cette prime, donc, au vainqueur qui fait en sorte qu'on ne comptabilise que la moitié des sièges de circonscription remportés dans une région. C'est une petite entourloupe assez ingénieuse, mathématiquement, mais qui vient vraiment tirer vers le bas le caractère représentatif du mode de scrutin qui est proposé là. Et ça a l'air d'une technicalité, c'en est une, en fait, mais elle a des conséquences déterminantes sur les résultats des prochaines élections qui seront tenues sous le mode de scrutin proposé par le projet de loi n° 39.

Je veux, avant de passer à un argument plus général, vous parler de la question des régions, parce que c'est l'argument qui est utilisé par beaucoup des adversaires à la réforme du mode de scrutin pour décrédibiliser ce projet. Et c'est un argument qui fonctionne parce qu'il rejoint des craintes légitimes des citoyens et des citoyennes du Québec qui habitent en dehors des grands centres de voir leur poids politique diminuer.

Il s'est créé, à travers les années, une association mentale entre réforme du mode de scrutin... Ça, cette affaire-là, ce n'est pas bon pour les régions. Puis c'est une perception qui s'est enracinée dans beaucoup de régions du Québec et c'est dommage parce que c'est faux. C'est profondément faux et ça repose sur une conception de ce que c'est, le pouvoir politique des régions, qui m'apparaît problématique, mais même nuisible pour le dynamisme des régions du Québec.

Je vais prendre l'exemple des Laurentides, une région administrative qu'on connaît tous bien et qui, en ce moment, est représentée à 100 % par des députés de la Coalition avenir Québec. Pourquoi? Parce qu'à l'intérieur de chacune des circonscriptions des Laurentides, le candidat ou la candidate qui a eu le plus de votes, c'est un candidat de la CAQ. Est-ce que ça veut dire que, dans les Laurentides, 100 % des gens ont voté pour la CAQ? Bien sûr que non, tout comme, à l'intérieur de chacune de ces circonscriptions-là, ce n'est pas 100 % des gens qui ont voté pour la CAQ. Pourtant, politiquement, la région administrative des Laurentides ne parle que d'une voix à l'Assemblée nationale, celle d'un seul parti, la Coalition avenir Québec.

Puis là je prends la CAQ parce qu'ils ont eu de tels résultats aux dernières élections que c'est l'exemple qui revient le plus souvent, mais ce serait le même problème si c'étaient des régions entières qui auraient voté pour ma formation politique, pour le Parti libéral du Québec ou pour le Parti québécois. On a un mode de scrutin qui, en ce moment, nuit à l'expression du pluralisme politique à l'intérieur des régions. Le mode de scrutin actuel peint les régions d'une seule couleur, et ça a des conséquences, ça, sur la capacité de ces régions-là de s'exprimer politiquement puis d'avoir des débats à l'intérieur d'elles-mêmes, parce que ça, c'est aussi un enjeu, là. Déjà, les régions, ça n'existe pas. Il y a des régions qui sont toutes différentes les unes des autres, puis, à l'intérieur de ces régions-là, il y a des débats politiques, il y a des familles politiques, il y a des conflits idéologiques. Ce n'est pas des entités monolithiques, d'un point de vue politique, tout comme une métropole, comme Montréal ou une ville comme la capitale nationale.

Et notre mode de scrutin actuel, uninominal majoritaire à un tour, il enferme les régions du Québec dans une monoreprésentation structurelle qui fait qu'il y a plein d'électeurs des régions qui n'ont pas de voix au niveau politique, qui n'ont pas de voix au niveau politique parce que le mode uninominal majoritaire à un tour donne tous les... souvent, et c'est une constante quand on regarde les résultats électoraux depuis des décennies, donne systématiquement des résultats monolithiques, quand on les prend région par région, à un seul parti.

Donc, loin d'affaiblir la représentation politique des régions, une réforme bien réfléchie du mode de scrutin, ça permet d'améliorer la représentativité des régions puis d'améliorer, de permettre l'expression du pluralisme politique à l'intérieur des régions. Pas juste à l'échelle du Québec, mais à l'intérieur de chaque région, il faut qu'on ait un mode de scrutin qui permet au pluralisme politique de s'exprimer, puis notre mode de scrutin, en ce moment, il ne le permet pas, parce qu'il y a beaucoup de gens qui ont voté pour la Coalition avenir Québec dans les Laurentides, puis ces gens-là ont le droit d'être représentés à l'Assemblée nationale, mais la majorité des gens, pour reprendre mon exemple dans les Laurentides, qui n'ont pas voté pour cette formation politique là ont droit aussi d'avoir des gens ici, au salon bleu, qui parlent pour eux et pour elles. S'il y en a qui ont voté pour le Parti québécois, tant mieux, mais pourquoi c'est un député de l'Est du Québec qui parle en leur nom? S'il y en a qui ont voté pour les libéraux, pourquoi c'est un député de Montréal qui parle en leur nom? Puis, s'ils ont voté pour Québec solidaire, pourquoi c'est un député d'une autre des régions qui parle en leur nom?

Les électeurs de toutes les formations politiques à l'intérieur de chaque région ont droit d'avoir une voix en politique québécoise, et une réforme du mode de scrutin, c'est ce que ça permet. Et ce projet de loi, malgré ses écueils, il y en a, permet cette expression du pluralisme politique des régions. Et il le fait sans diminuer le poids politique global des régions. Parce que ça aussi, c'est quelque chose qu'on entend : Le poids des régions va être diminué au sein de l'Assemblée nationale avec un tel projet de loi. C'est faux. En fait, en s'assurant que les régions du Québec se voient attribuer un nombre fixe de sièges régionaux, de sièges de compensation, ça vient au contraire verrouiller le poids politique de certaines régions qui, par ailleurs, sont en déclin démographique et pourraient perdre des sièges à l'intérieur du mode de scrutin actuel quand on révise la carte électorale, parce qu'il y a des régions en ce moment, là, quand on révise la carte électorale, qui sont en voie des perdre des circonscriptions. À partir du moment où on met des sièges de région, des sièges de compensation régionale et qu'on les verrouille dans le mode de scrutin, ça crée un seuil en bas duquel on ne peut pas descendre et ça garantit un poids politique à bien des régions qui, dans le mode de scrutin actuel, voient leur poids politique diminuer. Donc, loin d'être une menace au poids politique des régions au Québec, cette réforme du mode de scrutin représente une garantie que certaines régions ne perdront par davantage de poids.

D'ailleurs, d'un point de vue strictement mathématique, la région qui, en vertu de ce mode de scrutin, perd en proportion ici, à l'Assemblée nationale, des représentants, il y en a une qui en perd le plus, c'est laquelle? C'est la région de Montréal, qui voit en toute proportion son nombre de députés diminuer. On pourrait... Je viens d'une formation politique dont les premières racines, plus maintenant, mais les premières racines sont à Montréal. On pourrait se dire : Oh! ce n'est pas bon pour nous autres, ça. Ce n'est pas bon pour nous autres, ça. Non, au contraire, M. le Président, c'est une bonne chose. Je ne m'inquiète pas pour le poids politique de la métropole. Je pense qu'elle est bien représentée. Je pense que c'est correct. Et, si elle souffre de la perte d'un ou de deux députés, c'est correct comme ça si c'est le prix à payer pour une démocratie, au Québec, plus représentative de tous les Québécois puis toutes les Québécoises.

Et ça, il faut le dire, ce projet de loi là, ce n'est pas une attaque aux régions, ça défend en grande partie le poids politique de plusieurs régions au Québec. Je vous cite Louis Massicotte, qui est généralement considéré comme un des grands, sinon le grand spécialiste de la question de la réforme du mode de scrutin au Québec, qui disait : «Un premier constat s'impose d'emblée : le projet de loi ne préserve pas le poids politique actuel des régions. Il fait plus que maintenir la surreprésentation de certaines régions rurales éloignées, il l'accentue.» Alors, ce que le spécialiste vient dire, c'est : Ça ne préserve pas le poids politique, ça l'améliore puis ça améliore des phénomènes, en ce moment, de surreprésentation d'un point de vue démographique. Donc, c'est un projet de loi qui est bon pour l'expression politique des régions.

Maintenant, M. le Président... J'ai voulu couvrir les aspects plus techniques d'abord, les éléments qui nous apparaissent devoir être ajustés ou améliorés dans le projet de loi. Je me permets de terminer en répondant à un argument que j'ai entendu beaucoup dans le cadre des débats qui ont eu lieu lorsqu'on a discuté de ce projet de loi, ça nous apparaît appartenir à un autre univers, hein, ça ne fait que quelques mois seulement, et c'est cette idée qui convainc, je pense, certaines personnes, mais qui m'apparaît pernicieuse, cette idée que la réforme du mode de scrutin constitue une attaque à ce que certains ont appelé le pouvoir francophone.

• (15 h 20) •

On a entendu de certains nationalistes, parfois indépendantistes, parfois fédéralistes, mais des nationalistes, nous dire : La réforme du mode de scrutin, ça va affaiblir la majorité historique francophone, au Québec, dans sa capacité de s'exprimer politiquement dans des majorités parlementaires. Il y a des gens par ailleurs bien intelligents qui ont fait cet argument-là en disant : Ça va brider la capacité de la majorité historique francophone à s'exprimer politiquement puis à réaliser des choses pour ses intérêts. Bon, je pourrais ouvrir une énorme parenthèse puis dire : C'est qui, ça, la majorité historique francophone? Qui qui est dedans? Qui qui n'est pas dedans? En tout cas, c'est une notion qu'on pourrait remettre en question ou contester, mais mettons qu'on la prend comme ça, qu'on l'accepte. Cette thèse-là, qui présente la réforme du mode de scrutin comme une menace à l'égard du pouvoir francophone, est problématique à plusieurs niveaux. La première, ça ne repose sur aucune démonstration factuelle rigoureuse. Il n'y a aucune donnée nulle part dans le monde, dans les pays où il y a des modes de scrutin à composante proportionnelle, qui appuie cette thèse-là.

Puis je me permets de m'adresser à des gens qui sont, comme moi, indépendantistes et qui s'opposent à cette réforme du mode de scrutin là en disant que le pays qui est passé le plus près d'accéder à son indépendance dans les dernières années, c'est l'Écosse, qui a un mode de scrutin proportionnel... à dimension proportionnelle qui ressemble à plusieurs égards à celui qui est proposé dans ce projet de loi là. Donc, de faire de la réforme du mode de scrutin une espèce de menace à l'expression de la majorité historique francophone et, pour certains, à l'accession à l'indépendance pour le Québec, c'est factuellement non démontré. Il y a même, un peu partout à travers le monde, des contre-exemples clairs à cette idée.

Ce qu'on croit comprendre dans cette thèse de la dilution du pouvoir francophone, c'est qu'une réforme du mode de scrutin, ça produirait, c'est ce que les gens qui défendent cette idée-là soutiennent, une fragmentation du pouvoir politique, et que, donc, ça va générer ce qu'eux appellent des gouvernements faibles, et que ça va rendre difficile l'accomplissement de gestes collectifs décisifs et importants, ça va rendre le Parlement incapable de prendre des décisions et ça va... et on a donné l'exemple, par exemple, en disant : S'il y avait eu une réforme du mode de scrutin, il n'y aurait jamais eu de loi sur la laïcité.

D'abord, c'est très intéressant, cet argument-là, parce que ça révèle la conception que ces gens-là ont de la démocratie. Qu'est-ce que c'est, la démocratie? Et là je parle de la démocratie représentative. Est-ce que c'est un système politique qui doit avoir comme objectif de représenter le plus fidèlement possible les choix politiques des citoyens et des citoyennes ou est-ce que la démocratie représentative, c'est un système qui doit avoir comme objectif de constituer, de mettre sur pied une majorité claire qui gouverne? Si on pense que le critère qui définit une bonne démocratie représentative, c'est sa capacité à générer des majorités fortes, qui sont décisives et qui prennent des décisions, bien, il n'y a pas de raison d'être en faveur de la réforme du mode de scrutin. Par contre, si on pense que la vertu principale d'une démocratie représentative, c'est de représenter les choix politiques des citoyens et des citoyennes, bien, en vertu de cette définition-là, notre mode de scrutin actuel, il est hautement problématique, et il faut le transformer.

Ça parle aussi de la conception de la nation qu'ont ces nationalistes-là. Ces gens-là nous disent : La nation, elle est une, elle est homogène, et l'expression du débat politique, l'expression du pluralisme politique, ça menace l'unité de la nation. C'est ça, l'argument qui est sous-jacent à la thèse de la dilution du pouvoir francophone par la réforme du mode de scrutin. C'est l'idée selon laquelle le pluralisme politique menace l'unité de la nation. Mais alors la question, c'est : Mais de quelle unité s'agit-il? Si le fait de donner une représentation fidèle des idées des citoyens et citoyennes, c'est une menace à cette nation-là, de quelle unité parle-t-on? Certainement pas d'une unité réelle, puisque, si ce qui tient la nation québécois ensemble, c'est un mode de scrutin qui trahit la volonté populaire, on a des petits problèmes, là. Si la condition de notre capacité à faire des gestes collectifs décisifs, c'est de surtout s'assurer de ne jamais représenter la volonté des électeurs, bien, on a un problème.

Si ces gens-là nous disent : Pour accomplir de grandes choses, il faut tordre la volonté populaire jusqu'au point, par exemple, de mettre au pouvoir, en 1998, un parti qui a reçu moins de voix, dans l'absolu, qu'un autre, mais là ça veut dire qu'on est en train de dire que la capacité des gouvernements de prendre des décisions est moins importante que la légitimité démocratique de ces gouvernements-là puis que ce qui prime, ce n'est pas l'expression de la volonté populaire, c'est la capacité de prendre des décisions, la capacité de gouverner. Ça, M. le Président, pour moi, c'est une inversion fondamentale de la logique démocratique. Personne n'est contre la capacité de gouverner, bien sûr, ce n'est pas ça. Mais cette capacité-là, elle doit s'appuyer sur une légitimité démocratique. Et que, dans notre échelle de valeurs, on mette au-dessus de la légitimité démocratique puis de l'expression fidèle de la volonté populaire une simple capacité de gouvernance efficace, pour moi, c'est une distorsion majeure de ce qu'est l'idéal démocratique.

D'ailleurs, quand on regarde ce qui se passe à travers le monde, on se rend compte que les pays qui ont des modes de scrutin où il y a une composante de proportionnalité ont en moyenne moins d'élections, ils ont des élections moins fréquentes que les pays avec des systèmes, avec des modes de scrutin uninominaux majoritaires à un tour comme le nôtre. Donc, même sur une base factuelle, c'est un argument qui est contredit par les faits. Ça ne produit pas des gouvernements instables. Ce que ça produit, c'est des gouvernements de collaboration, de coalition. Et ça, il y en a, je peux comprendre, qui ne veulent pas ça, mais ce n'est pas la même chose que de l'instabilité.

M. le Président, je vais m'arrêter bientôt, mais j'invite, en terminant, le gouvernement de la Coalition avenir Québec à ne pas rater le moment historique qui est le nôtre. J'ai commencé mon intervention plus tôt, aujourd'hui, en vous parlant de la longue séquence de consultations, de mémoires, de commissions, de tournées, de sondages, d'assemblées citoyennes qui ont été faites sur la question de la réforme du mode de scrutin. Je pense qu'on est arrivé au bout de ce chemin et qu'il faut maintenant passer à l'action.

M. le Président, dans les 41 élections, O.K., nous sommes dans la 42e législature, dans les 41 élections québécoises, il n'y en a pas une seule, pas une, qui a donné naissance à une Assemblée nationale qui était conforme aux voix exprimées par le peuple du Québec. Puis, à cinq reprises, les élections au Québec, cinq reprises, les élections au Québec ont mis au pouvoir un gouvernement qui avait obtenu moins de votes que l'opposition officielle. Cette statistique-là à elle seule devrait trancher le débat, parce qu'on ne peut pas défendre un système qui met au pouvoir le deuxième. Je ne sais pas comment on peut défendre un système démocratique qui met au pouvoir le deuxième. Ça m'apparaît juste injustifiable.

• (15 h 30) •

On est arrivés, je l'espère, je le souhaite, dans les derniers milles de ce système. Changeons-le. Réformons le mode de scrutin pour avoir une meilleure représentation des femmes en politique, une meilleure représentation des régions, une expression plus saine, plus complète et fidèle du pluralisme politique puis, en terminant, pour s'assurer que, quand un Québécois ou une Québécoise à Rimouski, à Blainville, à Westmount, en Abitibi-Témiscamingue, quand ces gens-là votent, là, partout au Québec, là, chaque personne qui met son vote dans l'urne ait le même poids dans la composition de l'Assemblée nationale. Ça, ce principe fondamental que chaque voix de chaque individu doit avoir le même poids, c'est un idéal auquel il ne faut pas renoncer. Aucun système politique ne permet de l'atteindre parfaitement, cet idéal, soyons en paix avec ce fait, mais il y a des systèmes qui contredisent ce principe-là de manière radicale. Notre mode de scrutin actuel trahit ce principe-là complètement. Le mode de scrutin proposé par le projet de loi n° 39, bien que largement imparfait, nous permet de faire un pas vers cet idéal-là, et c'est pour cette raison-là que ma formation politique va voter en faveur du principe du projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Gouin. D'autres interventions? M. le député de Rimouski.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Merci, M. le Président. En 1984, j'étais membre de l'exécutif national du Parti québécois, et on m'avait... — ça fait longtemps, hein, déjà? — et on m'avait donné le mandat, là, je devais représenter l'exécutif au caucus du parti. Puis je me souviendrai toujours, il y avait eu un caucus à Granby avec M. Lévesque, Marc‑André Bédard, Jacques Parizeau que j'arrive, ti-cul, je m'assois à la table, et là premier dossier à l'ordre du jour : la réforme du mode de scrutin. Ça fait que... Et je voyais M. Lévesque essayer de défendre ça avec M. Bédard, mais là les élections s'en venaient, M. Lévesque partait un an après, bon, tout ça, en fin de compte, ça n'a jamais abouti. Mais je me souviendrai toujours de ce moment-là. Puis je me disais : Aïe! c'est 1984, puis là on est en 2020. Il me semble qu'il y a un rendez-vous, à un moment donné, il faut qu'il soit là puis il faut que ça arrive. Et c'est ce que j'espère par ce projet de loi là. J'espère que ce rendez-vous-là va finir par aboutir.

Tantôt, je parlais ici, puis il y a un député qui m'accroche, il dit : Harold, tu es-tu certain que tu es pour ça, toi, tu es-tu certain que tu es pour ça? Oui, je suis certain que je suis pour ça, je sais qu'il y a des enjeux. Je sais qu'il y a des enjeux par rapport aux régions. Je le sais, la grandeur des circonscriptions, je sais tout ça, je peux comprendre ça. Mais au plus profond de moi-même je crois que les Québécois sont capables de changer leur culture politique. Ils sont capables, peut-être, de voir ça autrement.

Ce n'est pas vrai qu'on est enfargés dans ce système britannique pour toujours comme ça, tu sais. Il me semble que... Tu sais, dans les années 60, tu avais des rouges puis les bleus. Puis, si tu étais rouge, puis le bleu prenait le pouvoir, tu perdais ta job. Puis, tu sais, c'était comme ça, dans ces temps-là. Quand les bleus perdaient le pouvoir, bien, les rouges allaient brûler des tires devant les maisons des organisateurs, puis c'était ça, la politique du temps. Puis là on appelait les teindus, là, tu étais... On n'est plus là aujourd'hui. Ça a changé beaucoup. On n'est plus comme ça. Les gens regardent ça un peu autrement. Puis les gens aiment aussi quand, aussi, on travaille ensemble. Quand on réussit à faire des affaires transpartisanes, là, les gens adorent ça, parce qu'on réussit à faire avancer des choses puis à faire avancer des projets qui viennent les chercher. Ça fait que je crois à ça, que la politique, la culture politique peut changer, peut être différente.

C'est sûr que moi, un nouveau mode démocratique, je le voyais beaucoup dans un Québec indépendant. C'est sûr que je pense qu'on est... Un Québec indépendant, on pourrait se donner quelque chose qui colle plus à nos façons de faire. Je vois une chambre des régions, plus représentative des régions, une deuxième chambre, je vois des choses du genre. On a déjà discuté ça longtemps, au parti. Il me semble qu'il y a des choses qui pourraient être faites là-dessus.

Mais là on a devant nous, quand même, quatre partis... plus que quatre, cinq partis, la Coalition avenir Québec, le Parti québécois, Québec solidaire, le Parti vert du Québec, le Nouveau Parti démocratique du Québec, qui ont signé une entente ensemble pour dire : La prochaine élection, essayons donc de faire ça sur un autre mode de scrutin qui va être plus démocratique que celui actuel. Puis l'engagement était clair : déposer un projet de loi au plus tard le 1er octobre 2019. Donc, nous sommes engagés, la majorité des partis, parce que... la grande majorité des partis, à ce que l'élection du 1er octobre 2018 soit la dernière dans le mode de scrutin actuel. Bon, là, avec le projet de loi, il semble déjà acquis que le gouvernement a décidé que la prochaine élection se tiendra sur le mode de scrutin... celui-là actuel, aujourd'hui. L'entente 2018 nous semblait pourtant claire.

Le projet de loi a bien été déposé avant le 1er octobre 2019, et nous sommes un an plus tard, mais c'est seulement du 22 janvier au 6 février que se tiendront les consultations, environ quatre mois après le dépôt du projet. Et c'est huit mois après les consultations que le débat sur le principe du projet de loi débute. C'est comme si on s'était dit : On se presse lentement, pas trop vite. C'est sûr qu'il y a eu la pandémie, ça n'a pas aidé, tout ça. Mais, sur certains projets de loi, le gouvernement a réussi des façons de faire avancer ses projets de loi. Celui-là, j'ai l'impression qu'on s'est dit : N'allons pas trop vite. Soyons sincères, nous avons connu un leader parlementaire du gouvernement beaucoup plus pressé de faire avancer d'autres projets de loi malgré la pandémie de COVID-19. Beaucoup de temps a été perdu, et nous demeurons convaincus qu'il était possible de travailler à ce que la prochaine élection soit sous le nouveau mode de scrutin.

C'est sans compter sur la décision du gouvernement de tenir un référendum en même temps que les prochaines élections. Ça, j'aimerais bien ça être convaincu qu'un référendum en même temps que des élections, ça peut marcher. Moi, s'il y avait un référendum, il faut le faire avant, pas en même temps qu'une campagne électorale. Moi, ça, quand on a parlé... Quand les gens sont venus en consultations, c'était aussi clair pour eux autres. Comment on peut commencer en plein été... Parce que c'est un peu ça, l'idée, là. Au mois de juin, on part un référendum. Quand tout le monde retourne sur le bord des plages puis est dans les barbecues, on fait un référendum pendant l'été. Woups! Au mois de septembre, on arrête le référendum puis on vire tout ça en élection générale. Je ne suis pas certain que c'est la bonne façon pour informer les gens, pour qu'ils comprennent bien ce qu'on est en train de faire là. Puis je me dis... Comme je disais au début, si on parle de faire un changement culturel, bien, il faut prendre le temps aussi de bien l'expliquer. Le référendum, ce n'est peut-être pas une mauvaise idée, au contraire, mais faisons-le dans une façon optimale, là, pas en plein été, autour de la plage puis avec les barbecues. Je ne pense pas que ce soit la bonne façon, et pourtant c'est ce qu'on a devant nous.

Idéalement, le gouvernement se serait senti assez solide pour ne pas tenir ce référendum. Mais, maintenant qu'il a décidé, nous pensons qu'un tel référendum devrait se tenir avant les prochaines élections, pour une plus grande clarté du débat. Et c'est sûr que plus on retarde dans l'adoption du projet de loi, moins on se donne cette marge de manoeuvre là, et, à un moment donné, il y aura des décisions à prendre. Là, il est clair, pour nous, que la volonté du gouvernement a toujours été d'éviter que les prochaines élections se tiennent sous un nouveau mode de scrutin, en repoussant toujours ces éléments-là. Nous déplorons ces délais, mais le maître de l'agenda, c'est toujours le gouvernement.

Sur la proportionnalité puis la représentativité, le système actuel favorise une grande distorsion entre les votes obtenus par une formation politique et les sièges qui lui sont octroyés en cette Chambre. Plusieurs exemples existent, mais prenons les dernières élections générales : la CAQ avec 37,5 % des votes, 60 % des sièges; le Parti libéral avec 24,8 % des votes, 24 % des sièges; le Parti québécois avec 17 % des votes, 8 % des sièges; Québec solidaire avec 16 % des votes, 8 % des sièges. Quand je vous parlais de M. Lévesque puis de Marc-André Bédard, eux autres, ce qu'ils avaient aussi en mémoire, c'est les années 70, là, où le Parti québécois ramassait 20 %, 25 % des voix et se ramassait ici avec sept députés ou six députés, là. En 1970-1973, c'était ça, la situation.

Cette grande disproportion peut expliquer un certain cynisme de la population et une perte de confiance envers la représentativité de cette Assemblée aux yeux des citoyens. Réduire cette distorsion entre les suffrages exprimés et le nombre de sièges pourra recontribuer à améliorer la confiance des citoyens et leur sentiment d'être représentés à l'Assemblée et se traduire par un meilleur taux de participation aux élections.

Un élément que j'ai beaucoup insisté pendant les consultations, c'est l'accès à son député. La proportionnalité et la représentativité sont des principes importants, mais nous ne devons surtout pas oublier le droit du citoyen à avoir accès à son député, de pouvoir créer un lien avec son député. C'est un droit tout aussi essentiel pour une vie démocratique saine que représentativité proportionnelle. À quoi bon avoir une plus grande représentativité de la diversité politique si je ne suis pas en mesure d'approcher mon député pour lui faire part de mes problèmes à régler et mes besoins d'avoir de l'aide?

• (15 h 40) •

Si je regarde du coin de l'oeil le député de Rivière-du-Loup—Témiscouata, lui, il a un immense comté, de Trois-Pistoles à aller virer dans le Témiscouata, retourner à Rivière-du-Loup, faire... c'est immense. La job qu'il doit faire pour être présent dans son comté, c'est immense. Avoir des circonscriptions encore plus grandes que ça, je ne sais pas. Et c'est sûr que les citoyens ne peuvent pas avoir accès.

Ça fait qu'il faudra, dans notre exercice de proportionnelle, de trouver une proportionnelle, avoir ce... faire l'exercice d'équilibriste, aller chercher la proportionnelle mais s'assurer que les circonscriptions seront de grandeur adéquate pour que les citoyens aient accès à leurs députés. Dans le projet de loi, on parle de 80 circonscriptions. On prend les 125 actuelles, on les redivise en 80. Vous imaginez la grandeur des territoires? Et il y en aurait 45 de liste. Ce qui ferait, entre autres, sur la Côte-Nord, deux députés, mais deux députés pour le même comté. Le comté serait toute la Côte-Nord. Duplessis, René-Lévesque, actuellement, là, les deux seraient ensemble, ce serait une seule circonscription avec un député de circonscription puis un député de liste. Ça fait que c'est sûr que la Côte-Nord ne perd pas de député, mais on a deux députés sur le même territoire. Comment on va gérer ça?

C'est là, il y a un changement de culture à avoir, mais il y a quand même un questionnement. Est-ce qu'on ne pourrait pas, pour s'assurer que les citoyens aient accès à leurs députés, puis en gardant notre volonté d'avoir une proportionnelle, rajouter un député? Moi, je pense que c'est faisable. Avec quatre ou cinq nouveaux députés, on pourrait réussir à trouver cet équilibre. Parce qu'on l'a vu... — on n'a pas d'eau — parce qu'on l'a vu pendant la pandémie, pendant la... et c'est encore là, mais, pendant le pic, au printemps passé, comment les députés ont été utiles pour leurs citoyens puis comment qu'il fallait être là puis être capables de répondre. Ça fait qu'imaginez des circonscriptions immenses, ça aurait été encore plus compliqué

Nous avons, avec nos équipes en circonscription, tous étaient appelés à répondre directement aux questionnements, puis impliqués dans l'inquiétude des citoyens, à expliquer en détail les différentes mesures qui ont été mises en place pendant cette période-là. Ça fait que j'imagine avec 80 circonscriptions beaucoup plus grandes, il faudra s'assurer que les députés aient ce qu'il faut pour travailler, le personnel qu'il faut. Ça fait qu'il y a tout cet élément-là de la capacité du député d'être proche de ses citoyens qu'il faudra discuter dans le cadre du projet de loi.

L'égalité... non, sur... Il y a tout l'élément du seuil national minimal. Un seuil élevé réduit la proportionnalité des résultats et représente une barrière supplémentaire pour une représentativité. Au printemps 2019, les discussions portaient sur 5 %. Le projet de loi n° 39 surprend avec 10 %. Le Mouvement Démocratie nouvelle propose 3 %. La ministre se dit ouverte à bouger. Est-ce que ce sera 2 %, 3 %, 5 %? La seule certitude, c'est qu'un seuil de 10 % est beaucoup trop élevé.

Les méthodes traditionnelles d'attribution des sièges compensatoires prennent généralement compte de 100 % des sièges gagnés dans le diviseur pour répartir les sièges de l'Est. La méthode CAQ est unique et ne tient compte que de 50 % des sièges remportés lors de l'attribution des sièges de l'Est. Cette modification permettrait au parti gagnant d'obtenir des sièges de compensation même s'il a remporté plus de sièges dans une région, au détriment des petits partis. C'est ce qu'on appelle la prime au vainqueur. Cette proposition a été fortement décriée par plusieurs groupes lors des consultations, en commençant par le Mouvement Démocratie nouvelle et le Pr Louis Massicotte, spécialiste reconnu des divers modes de scrutin. Nous comprenons mal l'idée d'avoir un système proportionnel si c'est pour en faire le système le moins proportionnel du monde.

L'égalité entre les femmes et les hommes est une valeur fondamentale au Parti québécois. C'est sous notre bannière qu'une grande dame comme Pauline Marois a pu diriger autant de ministères plus importants les uns que les autres, ne pensons qu'à l'Éducation, les Finances, pour ne nommer que ceux-là. Mme Marois aura aussi réussi l'exploit d'être la première femme à occuper la fonction de première ministre du Québec, ce qui demeurera à jamais une très grande fierté pour les gens de mon parti.

Malgré tout, nous admettons que beaucoup de chemin reste à faire pour l'égalité hommes-femmes en politique. C'est pourquoi nos statuts, les statuts du Parti québécois, prévoient l'obligation de respecter la parité dans nos candidatures lors de la prochaine élection générale. C'est aussi pourquoi ma collègue la députée de Joliette a fait adopter à l'unanimité une résolution pour accélérer la mise en place de congés parentaux pour les élus. Il faut savoir aussi que les partis politiques ne fonctionnent pas tous de la même façon. Certains, comme ma formation politique, font confiance à leur base militante pour choisir les candidats lors d'investitures, alors qu'ailleurs c'est le chef de parti qui décide, qui décide de tout : ça va être toi, mon candidat, ça va être toi, ma candidate. Nous, ça passe par des investitures. Est-ce vraiment avisé de punir une formation politique en raison d'un tel mode de fonctionnement qui laisse une plus grande place à la démocratie, au risque du moins grand contrôle sur le résultat des investitures et donc des candidats?

Le projet de loi n° 39 prévoit un engagement non contraignant. Les partis devront communiquer au DGEQ leurs objectifs en matière de parité et leur plan pour les atteindre. Ils vivront alors avec les conséquences électorales de ne pas atteindre leurs objectifs. Encore une fois, l'engagement du Parti québécois en la matière est clair. Nos statuts nous imposent le respect de la parité dans notre liste de candidatures. Laissons la population juger de nos efforts pour y arriver. Cela dit, le nouveau mode de scrutin proposé permettra de faciliter l'atteinte de la parité entre les femmes et les hommes grâce au recours de listes de candidatures pour les sièges régionaux, ce que nous saluons.

Le nombre de régions, le projet de loi propose 17 régions électorales, ce qui semble élevé, à première vue, mais nous sommes d'accord avec les 17 régions. Rappelons qu'un nombre élevé de régions implique généralement une baisse de proportionnalité, mais il fallait faire ce choix des 17 régions. Plusieurs groupes entendus en consultations demandent de réduire le nombre de régions pour augmenter la proportionnalité, en garantissant moins de deux députés... au moins deux députés par liste, par région. Il ne s'agit par contre que d'une seule variable dans l'atteinte de la proportionnalité. Des régions plus petites et plus nombreuses nous semblent un gage plus grand de proximité entre les députés et leurs citoyens, tout en respectant la réalité géographique du Québec, six fois plus grand que la France. Je vous parlais de la Côte-Nord tantôt, c'est un exemple patent, ou dans le Bas-Saint-Laurent. Tout le Bas-Saint-Laurent serait divisé en deux, il y aurait deux comtés, dans tout le Bas-du-Fleuve, la partie est, la partie ouest, puis il y aurait un troisième député qui aurait tout le Bas-Saint-Laurent. Ça fait des circonscriptions immenses, et on pense que ça pourrait être corrigé par l'ajout d'un seul député. Il y en aurait quatre de plus au Québec, puis il me semble que c'est faisable.

Des alternatives existent, et j'invite le gouvernement à y réfléchir, comme hausser légèrement le nombre de députés, en particulier dans les régions étendues, pour maintenir justement cette proximité, en favorisant une plus grande proportionnalité. On parle peut-être de seulement quatre députés de plus pour arriver. Ne soyons pas surpris, alors, que des groupes avec une forte sensibilité régionale comme L'Union des producteurs agricoles ou la Fédération étudiante collégiale du Québec sont favorables au maintien des 17 régions ou avec une légère hausse de la députation, parce qu'elles connaissent bien la réalité vécue par les gens de nos régions et leur attachement à un lien étroit avec leurs députés.

En conclusion, en tant que signataires de l'entente du 9 mai 2018, nous sommes évidemment favorables au principe du projet de loi pour une réforme du mode de scrutin, un projet de loi qui représente une avancée vers une plus grande proportionnalité, mais qui semble être en conflit avec lui-même parce qu'il comprend certaines mesures qui remettent un peu en question son objectif, soit l'atteinte d'une plus grande proportionnalité des résultats électoraux et la volonté exprimée par les électeurs.

C'est pourquoi nous avons hâte de procéder à l'étude détaillée pour pouvoir le bonifier et clarifier. On a des enjeux — proximité des députés avec leurs citoyens, protection du poids politique des régions — mais on pense qu'on est capables ici ensemble de protéger ça mais prendre ce rendez-vous avec un mode de scrutin qui va être beaucoup plus respectueux des idées politiques des Québécois. Et on pense qu'on peut y arriver. Et travaillons ensemble pour y arriver. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Rimouski. D'autres interventions? Mme la députée de Verdun.

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Merci, M. le Président. Vous êtes lumineux, aujourd'hui.

Écoutez, je vais débuter, je vais débuter sur une note un peu plus sérieuse, parce que je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour pouvoir parler du principe du projet de loi n° 39, qui est la Loi établissant un nouveau mode de scrutin. C'est un projet de loi qui touche le coeur de notre démocratie, donc je pense qu'on doit prendre le temps d'en discuter, prendre le temps d'échanger et d'entendre les positions des uns et des autres, c'est pour ça qu'on est là.

Et j'entendais tout à l'heure le député de Gouin parler : Les autres qui pensent ça, puis moi, je pense qu'on doit le faire de façon très respectueuse, et c'est ce que j'entends en ce moment, parce que rien n'est totalement gris, hein, ce n'est ni... c'est-à-dire que tout est gris, rien n'est noir, rien n'est blanc, on est dans une zone... Puis je sais que c'est la même chose du côté du gouvernement, parce que je comprends que c'est un projet de loi qui émane du gouvernement, mais je sais qu'il y a aussi beaucoup de tiraillements à l'intérieur du gouvernement de la CAQ sur ce projet de loi, et avec raison, parce que ce n'est pas simple.

• (15 h 50) •

Et, avant d'aller plus loin, je veux déjà vous donner mes couleurs, là, de mon côté. Je vais parler de ce qui s'appelle condition féminine, au moment où on se parle, parce qu'il y a un article très important dans le projet de loi, qui est l'article 73, et je vais y revenir un peu plus tard, qui, moi, me déçoit, me déçoit, et je vais vous expliquer pourquoi.

D'abord, la parité, c'est un concept qui n'est pas simple non plus. Et je regarde d'où on est parti à là où on est aujourd'hui, puis je vois des collègues féminines qui sont là aujourd'hui, je pense qu'on peut se dire : Fierté. Il n'y a pas si longtemps, ce salon bleu était uniquement dédié aux hommes, il n'y a pas si longtemps, et, la dernière élection, bien, voici ce que ça a donné : maintenant, au salon bleu, il y a 54 femmes sur 125 élus. Ce que ça donne en répartition pour les différentes formations politiques, c'est ceci, M. le Président : donc, pour la Coalition avenir Québec, il y a 29 femmes sur 76 députés, donc 38 % des élus sont des femmes; au Parti libéral du Québec, il y a 16 femmes, pour 57 % des femmes qui sont élues; au parti... oui, à Québec solidaire, pardonnez-moi, c'est 10 députés dont c'est cinq femmes élues, 50 %; au Parti québécois, il y a neuf députés, il y a trois femmes élues, qui donne 33 %; et puis il y a une députée indépendante.

Là, vous allez me dire : Bien, pourquoi est-ce qu'elle parle de ça? Puis il y a la représentation, bien sûr, aussi de l'Assemblée nationale, là, où on doit se dire : C'est 54 %, 43 % et des poussières. Donc, on est dans la zone de parité. Là, vous allez me dire : Pourquoi? Pourquoi est-ce qu'elle nous parle de ça? Bien, c'est qu'il y a eu beaucoup de chemin qui a été fait, mais cet équilibre-là est fragile, actuellement. Non seulement c'est fragile, mais on ne peut pas se fier à une seule élection pour dire que c'est dans la poche, c'est fait, c'est gagné, on passe à un prochain appel. Mais non, c'est un combat de tous les jours, d'assurer qu'on puisse être suffisamment nombreuses à l'Assemblée nationale pour représenter 50 % de la population, hein, les hommes, les femmes, on est même un peu plus nombreuses, messieurs, dans la... Bien oui. Il y a des hommes qui semblent... que ça a l'air de déranger, mais on est un petit peu... on est même un peu plus nombreuses dans la population, du côté des femmes.

Alors, je veux vous parler d'un mémoire qui a été déposé par le Comité des femmes du Cercle des ex-parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec. Et les femmes qui ont signé ce mémoire sont Marie Malavoy, Hélène Daneault, Louise Harel, Lucienne Robillard et Carole Théberge, que je salue au passage. Ce qu'elles mentionnaient à l'intérieur de leur mémoire, c'est la chose suivante : «Si l'avancée des femmes lors des élections de 2018 au Québec est manifeste — et on le salue — celle-ci n'est pas exempte de reculs possibles comme celui que nous avons vécu entre 2012 et 2014 — ce n'est pas il y a si longtemps — perdant d'un coup 5,6 % d'élues. [...]Le déséquilibre de représentation entre les hommes et les femmes dans les parlements est d'ordre systémique — je sais que vous n'aimez pas ce mot, du côté du gouvernement, mais quand même. L'apprentissage des rôles sociaux, la tradition de gouvernance au masculin, l'absence de modèles féminins, les règles du jeu qui constituent la culture du pouvoir, la perception des responsabilités familiales sont parmi [les] obstacles à l'entrée des femmes en politique.» C'est intéressant. Et ça m'a fait sourire, lorsque j'ai lu ce mémoire, parce que, bien, on parle de modèles. J'ai eu la chance d'avoir un modèle, à la maison, bien sûr, parce que ma mère est quand même une femme... disons qu'elle avait ses idées puis elle les faisait entendre, mais j'ai aussi eu le bonheur de rencontrer, toute jeune, Liza Frulla. Alors, Liza est pour moi un modèle, et ce n'est pas donné... Il ne faut pas sous-estimer, mesdames, lorsqu'on va dans les écoles primaires, secondaires, lorsqu'on va à la rencontre des jeunes filles, le poids que ça peut leur donner, la volonté aussi que ça peut dégager, à ces jeunes femmes, de devenir, sait-on jamais, à leur tour aussi, un jour, députées à l'Assemblée nationale.

Je vais vous lire un autre passage et je vais revenir sur l'idée d'avoir, de notre côté, là, des modèles féminins. Il y a le Conseil du statut de la femme qui a aussi écrit sur le sujet, en disant ceci, dans leur mémoire — permettez-moi, M. le Président, je vais mettre mes verres, parce que, là, c'est écrit un peu petit pour moi — alors : «Ces résultats rendent compte d'avancées qui demeurent fragiles, notamment parce qu'ils ne [se concentrent que sur une] élection — voilà ce qu'on disait tout à l'heure — se présentent à la suite d'une longue période, en 2000 [...] 2014, pendant laquelle les proportions de femmes candidates et élues à l'Assemblée nationale [a] stagné autour de 30 %.» Donc, tout à l'heure, là, on voyait, sur le tableau, on était rendus autour de 44 %, 43 et des poussières, pour cent. Alors, on a gagné 13 %, mais en une seule élection. Donc, on se rappelle de la fragilité. Moi, c'est le mot que j'ai envie de vous dire, là, qu'il est important de retenir à ce moment-ci. «...s'inscrivent dans une histoire récente marquée par [le recul ponctuel], particulièrement lorsque la proportion des femmes élues a décru de 32,8 % à 27,2 % entre 2012 et 2014 et lorsque les candidatures féminines ont chuté de 31,2 % à 28,5 % entre 2007 et 2012.»

J'entendais tout à l'heure mon très estimé collègue de Rimouski nous faire mention de la problématique de la grandeur des comtés, puis là, bien, il citait... il donnait en exemple le député de Rivière-du-Loup, qui est avec nous, qui a un immense comté. Je dois vous dire que j'ai été candidate en 2002 dans le comté de René-Lévesque, c'est grand longtemps. Je veux juste vous dire que, si on pense que c'est une bonne idée d'agrandir les comtés, je peux vous dire que ça va décourager certains hommes mais aussi certaines femmes à plonger dans l'arène politique. Je veux juste... Ça m'a fait penser à ça, tout à l'heure, lorsque j'entendais le député de Rimouski parler de ça, parce que les femmes, souvent, aiment beaucoup la proximité, justement, avec leur monde, hein, quand on parle de notre monde. Je vois des collègues, en face, dire : Oui, c'est important, on est là pour aider notre monde. Vous aussi, M. le député de La Peltrie, vous êtes là pour aider votre monde. C'est votre petit côté féminin qui parle, là. Mais, cela étant dit...

Une voix : ...

• (16 heures) •

Le Vice-Président (M. Picard) : ...

Mme Melançon : Bien sûr, M. le Président. Mais, oui, c'est un immense compliment.

Alors, ce que je voulais... où je voulais en venir, c'est qu'il faut attirer plus de femmes en politique, puis c'est important de le faire. Ça prend des tremplins pour ça.

Et là je vais faire un petit éditorial de quelques secondes, mais le projet de loi n° 40, où on a aboli des commissions scolaires, qui était principalement... où c'étaient des femmes qui étaient élues, n'aide pas à l'entrée de femmes en politique, d'autant plus que, ces commissions scolaires là, quand on parle d'aider notre monde, il y a des femmes, là, qui voulaient venir, justement, à l'école pour aider leurs petits, là, les enfants, puis voir comment ça roulait, c'était ça. Donc, je fais cette parenthèse-là.

Et je me permets une autre parenthèse du même coup. Tout à l'heure, j'entendais le député de Rimouski nous parler de la première première ministre, donc de Mme Marois, et de la citer. Je voudrais quand même rappeler, avec beaucoup de gentillesse, que Mme Marois est contre le changement de mode de scrutin. Elle le dit dans son livre, dans son dernier ouvrage. Je pourrais vous en faire lecture, mais je vois le temps qui file et j'ai peur, vraiment, de manquer de temps. Mais je voulais simplement le rappeler au député de Rimouski, parce que c'est une bonne chose, de pouvoir citer des grandes dames, et je reconnais le travail qu'a fait Mme Marois pour le Québec, mais, quand même, à l'intérieur de son livre, là, lorsque... elle dit : «Doit-on changer le mode de scrutin dont les vertus ont été démontrées pour le remplacer par un autre qui ne correspond pas à l'histoire de notre démocratie, de notre culture démocratique? Je crois plutôt qu'il serait préférable d'améliorer notre système actuel.» Alors, je le dépose ici, M. le Président.

Vous savez, M. le Président, c'est un projet de loi qui est costaud, sur lequel il y a 227, je crois, articles. Il y en a eu 163 nouveaux qui ont été ajoutés, et dans tout ce qui a été ajouté comme amendement, bien, il n'y a rien eu qui pouvait modifier les articles sur la parité, il n'y a que l'article 73, dont je vous parlais un peu plus tôt. Et, moi, mon grand malaise, c'est de voir qu'on met, à l'intérieur d'un projet de loi comme celui-là, la parité en jeu. Là, vous allez dire : Pourquoi c'est en jeu? Ça ne devrait pas être dans un projet de loi comme ça. Ça devrait être traité autrement, sur le côté, parce qu'on n'est même pas sûrs, dans le contenu, là, d'être d'accord avec ça. Puis on va s'en aller, puis ça va être soumis à un référendum, puis peut-être qu'en référendum, là, ça va être rejeté. Ça veut-u dire que les Québécois puis les Québécoises qui vont voter vont rejeter la parité? Moi, je ne pense pas. Ça devient un tout. Moi, je pense que la parité, ça doit être traité à l'extérieur d'un projet de loi comme celui-là, c'est trop important. Ce n'est pas vrai qu'on aurait accepté de traiter de, par exemple, la Charte des droits et libertés dans un référendum. Mais, pour moi, la parité, c'est aussi important et ça ne doit pas être traité dans un projet de loi comme celui qui nous est proposé.

Puis je trouve ça tellement faible, les articles qui sont amenés, en plus, dans le projet de loi. C'est des objectifs généraux. O.K. Puis elles sont où, les poignées? C'est comme si je vous disais, M. le Président : Moi, j'ai envie de perdre du poids, là, puis je me donne un objectif, mais je vais continuer à manger de la poutine, puis je vais continuer à être en arrière de mon bureau à l'Assemblée jusqu'à tard le soir, puis je n'irai pas marcher. C'est bien beau d'avoir des objectifs, là, mais, si on ne fait rien pour les atteindre, bien, ça ne donne rien du tout.

Alors, cela étant dit, je me pose une question, là. J'espère que la ministre de la Condition féminine a lu le projet de loi parce que devant la faiblesse de ce qui est proposé, je pense qu'il devrait y avoir une conversation avec la présidente du Conseil du trésor et la ministre de la Condition féminine. Je ne suis pas la seule à le mentionner, il y en a plusieurs qui en ont parlé. Je vais vous donner des exemples, parce que plusieurs ont parlé d'un manque d'audace, d'un manque de poigne à l'intérieur de ce qui est proposé, actuellement. Il y en a qui ont parlé d'un bonus financier. Là, actuellement, là, ce qui est proposé dans le projet de loi, là, c'est de déposer quelque chose auprès du DGEQ à la 12e journée, puis après ça, bien, de venir revoir. O.K., puis, si vous ne les atteignez pas, ça fait quoi? Rien.

Alors, quand on veut parler de parité avec un peu de sérieux, bien, il faut aussi donner un peu de poigne puis il faut se donner aussi le goût d'atteindre les objectifs, et ce n'est pas ce que nous avons, actuellement. On parle de mesures timides dans bien des cas. Si j'avais un titre à donner au projet de loi pour la parité, je pense vraiment qu'on a manqué l'objectif. On est passés à côté complètement, et je ne suis pas la seule à le dire. J'ai traversé les différents mémoires qui nous ont été déposés, et je sais à quel point le député de LaFontaine a travaillé avec les groupes qui sont venus se faire entendre, il a questionné les groupes de femmes qui sont venus se faire entendre, puis elles ont toutes dit la même chose : Ça prend plus d'audace, il faut arrêter d'y aller avec des voeux pieux.

Et donc, en ce sens-là, je vais me permettre de prendre, là, un petit peu, parce que le temps file vraiment... Je vais prendre, par exemple, le mémoire de la FTQ, donc, de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, en page 13. Voici ce qui est dit, M. le Président : «Dans cet exercice de réforme du mode de scrutin, la FTQ s'attendait à ce que le gouvernement présente des mesures contraignantes pour obliger les partis [...] à atteindre la parité [hommes-femmes] parmi leurs candidatures. Or, ce n'est pas le cas avec le projet de loi n° 39. Les seules exigences consistent à obliger chaque formation politique à "transmettre au Directeur général des élections — ce que je vous racontais il y a quelques instants — un énoncé relatif aux objectifs que se fixe son parti en ce qui concerne la parité entre les femmes et les hommes ". On ne peut pas qualifier cet article de très contraignant...» Honnêtement, soyons sérieux, si on veut vraiment faire bouger l'aiguille, il va falloir qu'on se donne vraiment des mesures plus costaudes.

Et, parlant de mesures costaudes, moi, je me rappelle... là, je ne suivrai plus du tout mes feuilles, parce que je viens de toutes les mêler, mais je me rappelle très bien qu'en 2006 on voulait changer la donne dans les conseils d'administration de l'État. Jean Charest, premier ministre du Québec, se faisait tout le temps dire la même chose : Ah! il n'y a pas beaucoup de femmes qui appliquent, vous devez vivre avec ça, là, on va continuer à aller avec ces chiffres-là. Un jour, là, le gouvernement, il a dit : Non, non, non, on va y aller avec des vraies mesures. Ils sont allés avec des mesures, ils l'ont enchâssé dans la loi. Savez-vous ce que ça a donné comme résultat? Je vais y aller court : «L'objectif de 50 % de femmes au sein des conseils d'administration pour l'ensemble de sociétés d'État devait être atteint le 14 décembre dernier — donc là, on parle de 2011 — ce qui fut fait; le pourcentage de femmes aux conseils d'administration est donc passé de 27,5 % en 2006 à la moitié en 2011.» Ça aura pris cinq ans, mais on y est arrivé. C'est formidable, mais encore faut-il se donner des mesures structurantes. Il faut être audacieux.

Et moi, M. le Président, là, j'espère un jour que ma fille voudra venir au salon bleu. J'espère un jour qu'elle voudra représenter des gens. Je lui souhaite, c'est le plus beau des métiers du monde. Mais savez-vous quoi? Pour pouvoir lui donner cette chance-là, on a la chance, aujourd'hui, de changer les choses. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée de Verdun. Mme la députée de Verdun, vous voulez bien déposer tout à l'heure ce que vous avez cité, le texte de Mme Marois? Vous avez dit : Je dépose. Est-ce que c'était bien ça?

Mme Melançon : Oui, je peux le déposer, bien sûr, bien sûr.

Le Vice-Président (M. Picard) : C'est un dépôt électronique. Consentement?

Une voix : ...

Document déposé

Le Vice-Président (M. Picard) : Consentement. Le dépôt est fait. Je cède la parole à Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Je suis contente de venir m'exprimer sur le projet de loi n° 39, aujourd'hui, de la réforme du mode de scrutin. On avait hâte que ce projet-là revienne à l'ordre du jour. Il a été déposé il y a très longtemps, on voudrait qu'il progresse plus rapidement que ça. Donc, je me réjouis de voir qu'on passe à l'adoption de principe en ce moment.

Il y a beaucoup de gens qui ont eu des préoccupations par rapport à ce projet de loi là, notamment sur la question du poids des régions. Puis évidemment je suis moi-même une élue des régions et je représente des citoyens des régions, donc c'est quelque chose qui me préoccupe énormément. Il s'est dit toute de sortes de choses, notamment que le projet de loi allait peut-être diminuer le poids des régions. Et pourtant c'est assez particulier, parce que, bon, d'abord, les régions ont déjà plus d'élus par nombre d'électeurs que les circonscriptions des grandes villes, et en plus le mode de scrutin qui est proposé va accentuer la surreprésentation des régions rurales et des régions qui sont éloignées. Donc, c'est une préoccupation, qui est légitime, des gens, mais manifestement elle ne s'applique pas, là, au projet de loi qui est sur la table en ce moment. Dans le projet de loi n° 39, Montréal perd trois députés et trois régions en gagnent un, soit le Centre-du-Québec, la Mauricie et l'Outaouais. Donc, définitivement, c'est difficile d'argumenter pour dire que ce projet de loi là va nuire à la représentation des régions.

• (16 h 10) •

Et puis d'ailleurs nous, on est tout à fait à l'aise avec ça, le fait que les régions soient un peu plus avantagées par le système parce que c'est important que leurs voix soient bien prises en compte à l'Assemblée nationale, en raison de la grandeur du territoire qu'elles occupent, notamment. Donc, c'est assez clair, là, qu'avec ce projet de loi là la préoccupation de certaines personnes sur la représentation des régions, elle a été prise en compte, et il n'y a lieu de s'inquiéter avec le projet de loi.

Et d'ailleurs la façon dont le projet de loi va modifier notre mode de scrutin propose de le faire risque d'empêcher la mainmise d'un parti sur une région, et je pense que ça va être favorable aux électeurs des régions parce qu'en ce moment il y a plusieurs régions qui sont représentées par un seul parti. On peut penser à la région Gaspésie—Bas-Saint-Laurent, qui est représentée par un seul parti, la région des Laurentides aussi, où, par exemple, la CAQ occupe 100 % des sièges même s'il y a quand même 55 % des gens de cette région-là qui ont voté pour d'autres partis. Donc, eux, ils sont représentés seulement par des députés d'une même formation politique, et ça, c'est assez problématique parce que, dans ce temps-là, les citoyens ne peuvent pas toujours s'adresser à un élu qui représente ou partage ses valeurs. Et ça, moi, je le vis beaucoup parce que je suis dans une région où il y a deux partis qui sont représentés, et on reçoit énormément de demandes de gens qui ne sont pas de ma circonscription, mais qui sont dans la région, et qui parfois, après s'être adressés après un autre bureau de circonscription, ou même sans l'avoir fait, simplement parce qu'ils estiment avoir plus d'affinités avec moi, s'adressent à mon bureau de circonscription. Puis je suis certaine qu'il se passe la même chose dans les autres bureaux de circonscription de mes collègues de la région de l'Estrie.

Mais ça a quand même un impact sur la façon dont on travaille parce que, nous, à chaque année, là, depuis le début de mon mandat, c'est environ 300 demandes d'ouverture de dossier de citoyens qu'on a, de gens qui ne sont pas de ma circonscription, qui sont généralement de l'Estrie, mais même parfois de plus loin au Québec. Et ça, ça ne tient pas compte du tout des demandes d'information, là, on parle de gens qui nous parlent d'un problème et qui mériteraient qu'on ouvre un dossier pour eux, mais on ne le fait pas, là, parce qu'on n'a pas la capacité, les ressources humaines dans nos bureaux de circonscriptions pour gérer des centaines de demandes, comme ça, qui ne viennent pas de nos citoyens, on les réfère. Mais ce que ça nous permet de constater, c'est que les gens ont tendance à s'adresser en premier à un élu qui correspond peut-être un peu plus à leurs valeurs, et c'est important que, dans chaque région, les citoyens aient accès à ça, aient la possibilité de faire ça. En ce moment, bien, nous, on ne peut pas répondre à cette demande-là des citoyens, puis il y en a qui sont déçus. Il y en a qui nous disent : Bien, j'aurais aimé mieux que ce soit vous qui passiez mon dossier, ou : J'ai essayé de le faire avec mon élu à moi, puis, bon, ça n'a pas marché, pour toutes sortes de raisons.

Donc, moi, je pense qu'il y a un avantage pour les citoyens d'avoir accès à plusieurs députés dans la même région, notamment parce qu'il y a cette question-là des affinités sur le plan des valeurs, mais il y a aussi la question que les députés ne travaillent pas de la même manière s'ils sont dans l'opposition ou s'ils sont au le gouvernement, ils n'ont pas accès aux mêmes moyens, nécessairement. Donc, ça vient offrir un éventail de moyens qui va être plus complet pour les citoyens d'avoir accès à des députés qui représentent plusieurs formations politiques.

Donc, moi, je pense que ça vient vraiment faire en sorte que les citoyens vont être mieux servis d'avoir accès dans chaque région à une plus grande variété de partis politiques. Puis même je trouve que deux, ce n'est pas beaucoup. C'est moins pire que dans d'autres régions, mais moi, j'aimerais voir que les citoyens ont accès à des partis qui représentent la réalité de ce qu'ils ont exprimé lors des élections. Donc, c'est clair que, pour moi, ça, c'est un des avantages de la réforme. D'avoir des députés de liste, là, qui viendraient ajuster un peu le résultat de ce qui est exprimé lors des élections, c'est un avantage. Ça encourage aussi le travail transpartisan parce que, nous, quand on a des collègues qui sont d'une autre formation politique dans la région, c'est clair qu'on va avoir des dossiers locaux, régionaux, municipaux, dans mon cas, qui vont toucher plusieurs circonscriptions, et donc on va travailler ensemble. C'est sûr qu'on va travailler ensemble, on le fait, je ne sais pas... Ma collègue de Saint-François, ça arrive à l'occasion qu'on travaille ensemble sur des dossiers, peu importe notre formation politique, parce qu'on a un intérêt commun qui est de représenter nos citoyens, peu importe notre formation politique. Et là il y a des régions où les élus n'ont jamais l'occasion de travailler avec des élus d'autres formations politiques que la leur. Moi, je pense que ça entretient la partisanerie. Puis, quand on a l'occasion de travailler sur des dossiers locaux avec des députés de plusieurs formations politiques, bien, ça nous permet de tisser des liens, de briser un peu cette partisanerie-là, puis je pense que c'est au bénéfice des citoyens de pouvoir faire ça.

Puis d'ailleurs il y en a qui pensent que les députés de liste auraient un statut particulier puis ils n'auraient pas nécessairement à faire de travail sur le terrain autant que les autres. Mais la réalité, c'est que, si ce député-là se traîne les pieds puis n'est pas efficace auprès de ses citoyens, bien, il va y avoir... il va quand même être en concurrence avec les autres députés de la région parce que les citoyens vont pouvoir aller en voir d'autres, députés, puis ils vont pouvoir lui faire savoir qu'ils ne sont pas satisfaits de ses services. Donc, sur la légitimité de ces élus-là de liste, là, finalement, ceux qui obtiendraient un poste sans avoir nécessairement été inscrits sur un bulletin de vote, il y en a qui se posent la question sur leur légitimité, à ces élus-là, mais en fait ce qu'on constate ailleurs dans le monde, parce qu'il y a d'autres pays qui ont des mesures comme on le propose avec le projet de loi n° 39, c'est que ces députés-là ont exactement les mêmes pouvoirs, les mêmes responsabilités quand ça vient le temps d'exercer leur rôle dans l'Assemblée nationale de leurs États respectifs. Les deux types de députés participent autant aux débats, aux votes au sein de l'Assemblée, ils sont des députés à part entière. Puis tous les spécialistes qui ont étudié les systèmes... les modes de scrutin comme on le propose à l'étranger ont tous mentionné que ce n'était pas un enjeu dans ces pays-là, par exemple en Écosse, en Allemagne, qui ont un système assez similaire à ce qui est proposé ici. Puis d'ailleurs la plupart des pays industrialisés en ont une, composante de proportionnelle, en fait, c'est 85 % des pays industrialisés. On est plutôt une anomalie, nous, ici, en ce moment, de ne pas avoir de composante de proportionnelle. En Europe, d'ailleurs, il y a seulement la France et le Royaume-Uni qui n'en ont pas. Donc, je pense que c'est le temps qu'on aille rejoindre cette longue liste là de pays qui ont soit une longue tradition ou qui ont soit modernisé leurs institutions pour s'assurer d'une meilleure représentation de leurs citoyens.

Puis, avant de conclure, j'aimerais ça dire quelques mots sur la parité, parce que, même si j'apprécie beaucoup le projet de loi et que j'ai hâte qu'il avance et qu'il se traduise dans la réalité, c'est quand même une déception pour moi qu'il n'y ait pas de mesures plus solides que ça sur la parité, dans le projet de loi, parce que c'est une occasion qu'on a, là, de réfléchir à notre mode de scrutin, puis tout ce qu'il y a dans le projet de loi n° 39, en ce moment, sur la parité, c'est l'obligation pour les partis de soumettre au Directeur général des élections ses objectifs de parité, et puis ils vont être rendus publics sur le site Web du DGEQ. Donc, ce n'est pas exactement une mesure qui favorise l'atteinte de la parité ici, à l'Assemblée nationale, dans le sens où il n'y a pas... on leur demande de transmettre leur objectif, mais on ne leur donne pas de contraintes pour cet objectif-là. Cet objectif-là pourrait aussi bien être de 10 %, ce qui est bien en dessous de ce que la plupart des partis font déjà. Donc, ce n'est pas, pour moi, un gage qu'on va atteindre une amélioration au niveau de la parité.

Donc, nous, à Québec solidaire, ce qu'on propose, d'ailleurs, avec d'autres mouvements sociaux, notamment le Mouvement Démocratie nouvelle, qui fait la même proposition, c'est d'obliger les partis à présenter des listes régionales paritaires, donc, qu'ils alternent les candidatures entre les hommes et les femmes sur leurs listes et qu'au moins la moitié des listes régionales devraient commencer par des candidatures féminines. On sait qu'on n'a pas le pouvoir sur le choix des électeurs, mais au moins, si on y va avec les députés de liste, en imposant la parité sur ces listes-là et l'alternance, on va s'assurer de favoriser un accès à la politique pour les femmes plus rapidement.

Puis d'ailleurs, sur le plan des candidatures dans les circonscriptions, on propose aussi de rehausser le financement public des partis qui respectent une cible de 45 % de candidatures féminines et que les partis qui ne s'y conforment pas, à cette cible-là, voient leur financement public amputé aussi. Et on propose ça parce que ça semble, en fait, assez normal, que les fonds publics — parce que c'est ça, hein, le financement des partis politiques, c'est les fonds publics — ce soit utilisé pour faire arriver les changements qu'on veut voir arriver dans la société. On le fait dans toutes sortes de programmes. Pourquoi on ne le ferait pas dans le financement des partis politiques, donc, d'utiliser ça comme un levier, à la fois la carotte et le bâton, pour que les partis politiques soient, disons, encouragés, aient des incitatifs forts à s'assurer d'avoir des candidatures paritaires? Parce que je suis certaine que tout le monde ici aspire à ce qu'on ait une Assemblée paritaire. Ça, pour moi, ce n'est même pas une question que j'ai. Tout le monde est fier ici, en ce moment, qu'on ait une représentation qui atteint pour la première fois la zone paritaire, hein? C'est quand même la première fois, en 2018, qu'on l'atteignait. Jusqu'en 2018, il y avait moins de 30 % des sièges qui étaient occupés par des femmes, donc c'est très peu. Et, pour moi, ce gain-là, il est très précaire, dans le sens où c'est arrivé une fois, mais il n'y a rien qui nous dit que ça va se reproduire. Puis d'ailleurs on l'a vu dans d'autres pays qui avaient même parfois des longues traditions de parité, on a vu que parfois, bien, il y a des reculs là-dedans, quand ce n'est pas prévu puis encadré par des lois pour s'assurer... ou le financement des partis politiques, par exemple, quand il n'y a pas de mesures structurantes, bien, on sait que c'est fragile, et puis donc ça va dépendre à chaque fois de la conjoncture.

• (16 h 20) •

Et, pour moi, c'est important qu'il y ait ici, à l'Assemblée nationale, une parité dans la représentation, comme c'est important pour moi aussi qu'il y ait une diversité au niveau de l'appartenance culturelle parce que, quand on a la parité ici, ça nous permet d'aborder plus souvent des enjeux qui touchent les femmes, puis je pense entre autres à la violence conjugale, à la violence sexuelle. C'est quelque chose qui n'est pas un phénomène nouveau, loin de là, en fait, et pourtant c'est tout récent qu'on en parle ici, à l'Assemblée nationale. Et, pour moi, il y a un lien direct avec le fait qu'il y a de plus en plus de femmes qui sont représentées ici. Et, pour nous, c'est des sujets qui sont quotidiens, qui habitent nos vies. Donc, c'est certain que c'est normal, quand on a des élues ici qui vivent ces enjeux-là au quotidien, que ce soit plus rapide qu'on les traite politiquement puis on... parce qu'on ne peut pas s'attendre à ce que des gens qui ne connaissent pas ces réalités-là pensent nécessairement à les aborder. Donc, pour moi, c'est clair que, si on veut faire les changements qu'on veut dans la société, il faut commencer par atteindre la parité ici. Et, pour ça, bien, il faut rejoindre les plus d'une centaine de pays qui appliquent déjà des mesures structurelles pour s'assurer de représenter adéquatement les femmes et parfois même les minorités nationales au sein de leurs Assemblées. Donc, je pense que c'est le temps qu'on prenne aussi les moyens d'atteindre nos objectifs par rapport à ça. Et puis changer le système électoral comme on se propose de le faire en ce moment sans agir en même temps pour atteindre la parité, ce serait plutôt ironique, dans le sens où on propose une grande transformation, une transformation majeure, c'est l'occasion ou jamais, tant qu'à jouer dans ces lois-là d'aller jusqu'au bout puis de s'assurer que l'Assemblée va ressembler à ce à quoi on veut qu'elle ressemble.

Et puis d'ailleurs, par rapport à ça, je pense que les modifications sur la parité auraient dû être faites, d'ailleurs, depuis longtemps et puis elles ne devraient pas être traitées de la même manière que la réforme du mode de scrutin, au sens où elles doivent être indépendantes du référendum, à mon sens, elles doivent être en vigueur dès la prochaine élection. Et ce n'est pas quelque chose qui fait partie de la réforme du mode de scrutin en elle-même, donc, à mon sens, ça doit entrer en vigueur, là, sans tarder, sans nécessairement être lié à un référendum comme le reste des mesures de réforme du mode de scrutin. Donc, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée de Sherbrooke. D'autres interventions? M. le député de Mont-Royal—Outremont.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Merci beaucoup, M. le Président. Très heureux de pouvoir parler aujourd'hui du projet de loi n° 39.

Je pense qu'on a eu déjà plusieurs interventions à ce niveau-là depuis le début. J'ai écouté plusieurs des commentaires qui ont été faits, entre autres par la députée de Champlain et la ministre responsable, par le député de Mercier, par notre collègue, également, de LaFontaine. Notre collègue de LaFontaine est quelqu'un de profondément convaincu, profondément convaincu qu'il faut qu'on poursuive la discussion et profondément convaincu également que ce projet de loi là ne tient pas la route d'aucune façon. Et moi, je voudrais, au départ, M. le Président, vous dire que ce que j'ai entendu de la part de la ministre, au départ, c'était de dire : Bien, écoutez, nous voulons ce projet de loi qui va vers une meilleure proportionnelle. Ce n'était pas : C'est un projet de loi en fonction d'une proportionnelle, mais qui va vers une meilleure proportionnelle. Le député de Mercier, quand il a parlé, lui, il a dit : Écoutez, j'ai un enthousiasme prudent, ce qui veut dire, donc, que ce projet de loi ne fait pas son affaire à bien des égards également.

Et je voudrais donc, au départ, régler, premièrement, un des aspects, je pense, qui est particulièrement important, c'est la question de la parité. Je pense que notre formation politique, que je représente, on a été les pionniers dans ce domaine. À l'époque, le gouvernement de M. Charest a été le premier à parler d'une parité à l'intérieur d'un Conseil des ministres. Le gouvernement de M. Couillard, par la suite, a mis énormément d'efforts pour d'assurer qu'il y ait véritablement, dans nos sociétés d'État, un peu partout, la parité la plus grande. Donc, je pense que, de ce côté-là, je ne crois pas que ce soit l'enjeu principal de ce projet de loi. Je pense que tout le monde ici, à l'Assemblée nationale, est capable de s'entendre sur ces éléments-là.

Maintenant, lorsque je regarde ce projet de loi, j'aimerais peut-être qu'on puisse, au départ, regarder de quelle façon ça s'est produit parce que la proportionnelle, ça dure depuis nombre d'années. Je pense que ça s'est particulièrement accentué en 1973, lorsque le premier ministre M. Bourassa, avait été réélu et qu'il avait eu environ 50 quelques pour cent des votes. Le Parti québécois avait eu 30 % des votes, et là le Parti québécois, je crois, avait eu six députés et M. Bourassa, à l'époque, avait eu 102 députés. Évidemment, à partir de ce moment-là, tout le monde a dit : Il faut une proportionnelle, ça n'a pas de bon sens, etc., pour s'apercevoir, trois ans plus tard, que le Parti québécois, avec 42 %, si ma mémoire est bonne, avait eu 60 % des députés.

Alors, oui, parfois, le système que nous avons a pu, dans certains cas, pénaliser certains partis, mais, dans d'autres cas, ces mêmes partis qui avaient été pénalisés à l'époque, trois ans auparavant, se sont retrouvés avec un gouvernement majoritaire également, puis personne, je crois, à l'époque, ne doutait que c'était le voeu d'une grande partie de la population.

Avant de parler des détails de ce projet de loi, l'autre élément qui m'apparaît important de dire, c'est qu'un des arguments, entre autres, du député de Mercier, c'était de dire : Écoutez, ce projet de loi là, l'aspect «proportionnelle» est partagé par la vaste majorité de la population. Moi, écoutez, si demain matin vous faites un sondage auprès des gens puis vous dites : Écoutez, voulez-vous avoir un régime dans lequel, bien, le nombre de gens qui... le parti politique qui obtient un tel pourcentage de votes, bien, il va avoir un tel pourcentage de représentation? Probablement que c'est vrai, tout le monde va dire : Bien oui, ça fait du sens. Mais, quand on pousse la réflexion plus loin, quand on commence à entrer dans le détail de la mécanique, de ce que ça peut impliquer... Si on dit, par exemple, à un électeur caquiste qui a voté : Bien là, tu vas te retrouver dans un Parlement où tu risques d'avoir Québec solidaire qui va avoir la balance du pouvoir ou qui va avoir un potentiel de bloquer, d'une certaine façon, le Parlement, je pense que l'électeur ne va pas être sûr que c'est la meilleure formule. Je ne suis pas sûr qu'il va trouver qu'il n'y a pas là des éléments importants.

Puis je voudrais lire simplement ce qu'il y avait dans le livre de, entre autres, Christian Dufour, qui avait écrit et qui a dit la chose suivante : Plusieurs personnes réclament la mise à mort du système en vigueur, accusé d'être peu représentatif du choix des électeurs. En fait, il s'agissait, selon lui, ce qui est proposé, entre autres, d'un projet dangereux pour le pouvoir du seul gouvernement qui est présent. Il déclare : La proportionnelle est devenue une véritable obsession pour certains. Et, en fait, il veut démontrer qu'elle n'est pas toujours démocratique, qu'elle est démocratique sur papier, en plus de comporter de multiples effets pervers, trop souvent passés sous silence. «Les résultats de l'élection de 2018, dit-il, ont illustré que le mode de scrutin[...], loin d'être une aberration, tient la route. Il favorise l'accouchement de gouvernements à la fois forts, mais des gouvernements [qui sont] congédiables, tout en permettant l'émergence de forces politiques nouvelles comme [ce fut le cas pour] la Coalition avenir Québec et [comme ce fut le cas pour] Québec solidaire.»

• (16 h 30) •

En plus, ce qu'il dit, puis je pense que les députés, de l'autre côté, devraient entendre ce que je vais dire, il dit : En fait, la proportionnelle serait... le premier parti qui aurait vraiment avoir un avantage d'une proportionnelle pure, c'est le Parti libéral du Québec. Une des raisons pourquoi la proportionnelle risquerait de verrouiller pour longtemps le pouvoir au bénéfice des libéraux, bien, c'est le fait que le parti politique que nous avons, Parti libéral du Québec, même si actuellement il n'est pas, au niveau des sièges, dans une position aussi importante qu'il l'a déjà été dans le passé... Je pense qu'il ne faut pas oublier que cette formation politique n'est en rien menacée de disparition et qu'elle a tout avantage à adopter, très souvent, la proportionnelle.

Ce n'est pas, d'ailleurs, pour rien que... En fait, dans ce cas-ci, en tout cas, ce qui est arrivé, c'est que, la proportionnelle, comme tel, lorsque la députée de Champlain et la ministre responsable a commencé à en parler, bien, elle a dit : Il va quand même devoir y avoir ce que j'appelle une prime au vainqueur. Je pense que c'était très important pour elle parce qu'elle s'est rendu compte que la proportionnelle appliquée à l'état pur risquait justement, comme l'a mentionné d'ailleurs le député de LaFontaine au cours de sa discussion aujourd'hui, au cours de son intervention... Il a parlé de gouvernements minoritaires à répétition. Je pense que c'était une expression qui était tout à fait valable et qui a vraiment démontré jusqu'à quel point il y a quand même des éléments qui sont importants.

Moi, l'élément, également, que je retiens, encore une fois, parce que je sais jusqu'à quel point, souvent, c'est délicat, moi, ce que je retiens beaucoup, pour l'électeur, c'est la confusion dans la tête de l'électeur entre ce qu'on appelle le député de liste et le député qui est élu sur les 80. Moi, je me mets dans la peau de l'électeur. Premièrement, pour aller voter, là, ça va être un peu plus compliqué, il va devoir y avoir des explications importantes qui vont devoir être données. Puis, en plus de ça, ça va être quoi, le rôle des deux? On risque de se retrouver dans une situation où est-ce qu'il va y avoir... souvent, même, dans certaines régions, il peut y avoir un petit peu de compétition entre des députés, surtout, évidemment, s'ils ne sont pas de la même formation politique. Mais là imaginez-vous avoir des territoires qui sont partagés à la fois par des députés élus puis des députés de liste, là. Je pense que ça va causer des problèmes particulièrement importants de ce côté-là.

Alors, tout ça pour vous dire qu'on dit toujours que le diable est dans le détail, on dit toujours qu'on ne fait pas de changement à moins que ce changement-là ne soit vraiment clairement supérieur. Nous, on pense qu'il y a matière à discussion, mais on pense aussi que, compte tenu de ce qui s'est passé au cours des derniers temps, surtout, en plus on est en pleine pandémie... je ne crois pas, actuellement, que la population a nécessairement vraiment à coeur de vouloir discuter ces éléments-là. Et, compte tenu de cet échéancier également que nous a donné aussi le Directeur général des élections, qui nous dit : Écoutez, il faut que le projet de loi soit adopté le 1er février, je pense que le temps commence très sérieusement, à ce stade-ci, à nous manquer.

Nous allons cependant certainement participer aux commissions parlementaires qui vont suivre, mais il n'en demeure pas moins que le nombre de questions qui sont posées sont très importantes, que ce soit, par exemple, le seuil national d'accès à la représentation parlementaire, qui, à 10 %, a été jugé trop élevé, les primes aux vainqueurs régionaux et le calcul de la compensation dans chaque région, qui devrait se faire en tenant compte de toutes les circonscriptions locales remportées et non seulement la moitié; le mécanisme de motion de censure constructive, la délimitation et le nombre de régions, les précisions sur les rôles des députés. Je pense que tout ça démontre jusqu'à point il va y avoir des discussions extrêmement importantes.

Et, quand on regarde, entre autres, le nombre d'articles... Ce matin, quand j'écoutais le député de LaFontaine, qui disait : Écoutez, on est rendu à quasiment 500, là, au-delà de 500, même, avec les amendements et tous les articles qui ont été faits, je doute très sérieusement qu'on ait le temps de véritablement discuter de ce projet de loi, parce que ce projet de loi, essentiellement, est mal ficelé. Même les représentants qui étaient vraiment en faveur de la proportionnelle, aucun groupe n'est venu pour affirmer qu'il était pleinement satisfait de la réforme annoncée.

Et, comme on le rappelait très bien, ce n'est pas la première discussion qu'il y a à cet effet-là. Il y avait eu des discussions en 2006, entre autres, et la conclusion, entre autres, d'un travail très sérieux qui avait été fait, à partir de ce moment-là, c'était de dire : Écoutez, pour l'instant, il n'y a pas consensus sur la façon d'appliquer les principes d'élection proportionnelle. Alors, nous avons toujours été, nous, comme formation politique, en faveur de mesures pour améliorer notre démocratie, mais, encore une fois, il faut vraiment en discuter, il faut vraiment analyser les modalités choisies par, entre autres, le ministre.

Maintenant, les principaux écueils, encore une fois, c'est le fait de passer de 125 à 80 circonscriptions. C'est un processus de délimitation qui va être extrêmement complexe et qui va occasionner des débats extrêmement déchirants. Je vous rappelle que, quand le Directeur général des élections du Québec a essayé, à un moment donné, de simplement... parce que j'ai été, évidemment, impliqué dans ça. J'avais le comté de Mont-Royal, ma collègue à Outremont avait également le comté d'Outremont, et que, là, à deux reprises le Directeur général des élections a changé d'idée en disant : Bon, bien, on va mettre Sainte-Marie—Saint-Jacques avec Westmount. Là, il y a eu un autre drame qui est arrivé. Par la suite, il est revenu en disant : Bien, on va finalement fusionner cela, Mont-Royal—Outremont. Bon, il y a des éléments qui sont extrêmement déchirants, alors imaginez-vous dans quelle situation on va se retrouver.

Le rôle des députés, pour moi, il est fondamental. Il va y avoir deux types de députés. Des types de députés, certains auront un immense territoire à représenter. Les cas de comté, les gens vont se demander : Est-ce que je vais voir le député de liste ou je vais voir le député qui a été élu? Ça va être pas simple comme situation pour l'électeur. Et je pense que notre rôle fondamental, c'est justement de faciliter le travail auprès des gens qui vont nous élire.

Déjà, on a un système qui est compliqué. Quand il y a des dossiers, par exemple, en matière d'immigration, puis que les gens m'appellent, puis que je vois que le dossier, ça relève plus du fédéral, bien, tu sais, je ne commence pas à expliquer aux gens : Bien, allez voir le député fédéral. J'appelle le député fédéral, son bureau, j'appelle à Ottawa puis je donne la réponse, parce que la situation, elle est déjà suffisamment complexe comme ça pour l'électeur moyen. Et donc je pense qu'à partir du moment où ils vont se retrouver avec un député de liste, un député de région... je pense qu'ils vont vraiment se poser la question, encore une fois : Bien, qui, véritablement, va me représenter? Je pense que le fait, d'ailleurs, que, dans ce projet de loi, le rôle du député de région ne soit pas clarifié démontre, encore une fois, qu'il y a une grande partie d'improvisation dans ce projet de loi.

Deuxièmement, notre formation politique considère que... la tenue d'un référendum en même temps qu'une élection comme celle qu'il va y avoir en 2022 nous apparaît, en tout cas, un chamboulement de la démocratie, c'est-à-dire que je pense que c'est très grave... Quand on décide, par exemple, de changer un système électoral, c'est très sérieux. De le faire en le mêlant en même temps qu'une élection, je trouve ça... Vous savez, quand on décide de faire un référendum pour des choses qui sont relativement simples, exemple... je ne sais pas, moi, sur la question, par exemple, de la marijuana, si je donne ça comme exemple, ce n'est pas... êtes-vous pour, contre, il y a des choses qui peuvent se faire de façon simple, mais, un enjeu comme ça, je ne vois pas comment on peut faire ça en même temps, entre autres, qu'une campagne électorale, en même temps que le fait de choisir, justement, un député, de choisir un futur gouvernement au sein du gouvernement du Québec.

• (16 h 40) •

Mon collègue de LaFontaine a parlé de l'instabilité, également, des gouvernements minoritaires. Vous savez, j'ai fait partie d'un gouvernement minoritaire, j'ai fait partie d'un gouvernement majoritaire. Vous savez, il y a différentes personnes qui disent : Aïe! c'est bien mieux, un gouvernement minoritaire, parce qu'il est plus à l'écoute des citoyens, il doit composer avec les oppositions, etc. Moi, je dois vous dire qu'un gouvernement majoritaire, qui peut être congédié à tous les quatre ans, si jamais les gens trouvent qu'il ne fait pas le travail, là, je pense que c'est plus efficace. Je pense qu'on peut accomplir certainement beaucoup plus à ce moment-là. Moi, pour avoir participé, justement, quand il y avait un gouvernement minoritaire, ce qu'un gouvernement minoritaire fait, très souvent, c'est d'arriver avec des projets de loi les plus consensuels possible la première année, et là, bien, ils essaient de fonctionner pour ne pas être défaits. C'est ce qu'on vit actuellement à Ottawa, au moment où on se parle, et c'est ce qu'on a vécu en 2012 au Québec, c'est ce qu'on a vécu en 2007 au Québec. Et, à un moment donné, un gouvernement minoritaire, ça ne peut pas durer très longtemps. On le sait très bien, on le sait, de la façon dont ça fonctionne. Et ce projet de loi là, à toutes fins pratiques... Il ne faut jamais oublier qu'on n'est plus dans l'époque, là, du Parti québécois avec le Parti libéral, on est dans l'époque dans laquelle il y a quatre formations politiques bien ancrées, bien installées, au Québec. Et donc le risque de se retrouver... Même en gardant, d'ailleurs, le même système que celui qu'on a actuellement, on risque déjà de se retrouver, au cours des prochaines années, avec plus que moins de gouvernements minoritaires. Mais, avec l'adoption du projet de loi tel que proposé, il est absolument très clair que ça, ça veut dire des gouvernements, je dirais, minoritaires qui vont, à toutes fins pratiques, être à répétition.

L'autre élément, encore une fois, c'est que la population doit absolument comprendre de quelle façon les choses vont fonctionner. Et le mode de scrutin proportionnel mixte compensatoire, tel qu'il est proposé, certainement, risque de créer un désengagement du processus électoral à cause de sa très grande complexité.

Alors, Mme la Présidente, on est là pour, encore une fois, en discuter, on est là pour faire ce travail, mais moi, j'invite sérieusement le gouvernement à ne pas bousculer l'adoption de ce projet de loi, parce que je pense qu'à partir du moment où ce projet de loi serait adopté on risque de vivre avec ça pour très longtemps. Et moi, je pense que la discussion est encore de rigueur, parce que c'est un projet de loi extrêmement complexe. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Et maintenant nous allons poursuivre ce débat avec M. le député de D'Arcy-McGee.

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. À mon tour d'intervenir sur le projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin, à son étape d'adoption de principe.

Je le fais avec une certaine ambivalence, vous allez comprendre. On parle d'un sujet qui nous est très cher, fondamental, la démocratie, dans son instance la plus sérieuse, c'est-à-dire le choix solennel de nos concitoyens chaque quatre ans et comment le faire. Suite à ça, il y a des conséquences sur la gouvernance qui en découlent, de chaque élection. Et vous allez me permettre, Mme la Présidente, d'être un petit peu ambivalent parce que, pour un sujet si solennel, il me semble qu'il nous faut des assises assez solides. Est-ce que l'échéancier de nos délibérations est compris et réaliste? Est-ce que les enjeux sont vulgarisés et compris de façon claire et transparente? Est-ce que les conséquences sont connues?

Quand on parle de la démocratie et l'accès à la démocratie, on parle, dans un premier temps, de rendre l'individu habile et en mesure d'exercer son droit tellement solennel, alors, qu'on a l'obligation dès le début de se donner le seuil, d'être compris dans nos délibérations et nos gestes ultimes par l'électeur. Trop souvent, je trouve, dans notre bulle, on se permet de dire : Mais, voyons donc, vous n'avez rien compris. C'est le privilège et le droit du citoyen, de vouloir regarder son bulletin de vote, de regarder des nouvelles ou même pas, même pas. C'est son privilège, de prendre une bière à la taverne et dire : Bon, je vais me donner 10 minutes pour décider comment je vote le 1er octobre. C'est son privilège. Nous avons une responsabilité civile pour faire tout pour inciter l'intérêt et l'implication de nos concitoyens, mais c'est leur droit d'en embarquer de leur façon. Donc, c'est leur droit d'avoir devant eux un régime électoral qu'ils comprennent, qui fait leur affaire, qui leur permet d'avoir accès aux services gouvernementaux après, qui leur permet de comprendre comment s'insérer de la façon qui leur convient et quand ils ont un problème durant les quatre ans de mandat de quelque gouvernement que ce soit.

Ils ont aussi le droit de comprendre nos délibérations qui risquent de nous mener à une éventuelle loi. Et je peux me permettre d'imaginer que mon monsieur, madame cible devraient être assez confus à l'instant. Nous sommes en train de parler, à juste titre, et on fait notre contribution, notre «due diligence» à un processus qui, de toute évidence, va s'arrêter soudainement, sans issue, sans conclusion. Est-ce qu'il y a quelqu'un dans cette Chambre qui peut même oser suggérer que nous serons au rendez-vous prévu, en toute objectivité, par un officier, nommé de façon unanime par le Parlement, le Directeur général des élections?

Moi, pour avoir travaillé comme directeur général de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, bon, un système d'élection un petit peu plus modeste et très difficile, je vous en conviens, les élections scolaires, le processus a besoin d'être entamé, quoi, deux ans, trois ans avant une élection où ils vont être implantés. C'est compliqué, les listes électorales, les consultations prévues en bonne et due forme par les lois pour décider sur les démarcations, les frontières des circonscriptions, c'est un processus énorme. Et, bon, on est en temps de pandémie, maintenant, ce qui nous invite et nous interpelle de temps en temps, de façon responsable... peut-être le projet de loi n° 66 et pas le projet de loi n° 61, avec respect, de façon responsable, des fois, à regarder nos échéanciers. On est en crise, alors peut-être des processus en bonne et due forme, qui sont en place, doivent être abrogés, en quelque part, mais pas le processus devant nous.

Alors, quand je parle du fait que c'est très, très compliqué, la confection des frontières, les avis à l'électeur, la mise en candidature, l'explication de la chose, la réservation des bureaux de scrutin, le tout, les délais prescrits sont là pour une bonne raison, et ces délais font en sorte que l'échéancier qu'a suggéré le Directeur général des élections est réaliste, et il faut le respecter, et on parle d'un échéancier qui terminerait nos délibérations d'ici sept, huit, neuf semaines. Alors, comme je dis, mon ambivalence, on met toutes nos énergies dans notre analyse et notre participation à un projet de loi sur un sujet d'une importance capitale. En même temps, on est conscients un petit peu qu'on fait un petit peu de surplace, bon.

The leader called the bill, so here we are, and we're doing our work in all due diligence. And we'll look at each article in «étude détaillée» with an eye on each elector and their equitable right and ability to participate in this process.

Mais, il me semble qu'«ambivalence», c'est un mot approprié quand on parle d'un projet de loi qui a, comme a été dit, quelque 400 et plus amendements de déjà déposés, qui est d'une complexité énorme. C'est un petit peu surréel, en quelque part, surtout en temps de pandémie, où le temps de nos délibérations est assez précieux. Il y a d'autres choix qui auraient pu être faits. Bon. Mais là, ici, c'est là où nous sommes. Il faut dire qu'on est ici aussi suite à un engagement solennel du gouvernement devant nous de poursuivre ces délibérations-là. Donc, on va essayer de le faire, mais, comme je dis, avec un oeil sur le sérieux de ce projet-là. La faisabilité dans les échéanciers identifiés d'ici 2022, bon, voilà une chose dont on va être toujours conscients.

• (16 h 50) •

En même temps, nous parlons de l'intégrité du système. Nous parlons de la place équitable et essentielle de nos régions au Québec, la place des députés en région qui ont déjà des territoires énormes à couvrir. On parle de la place équitable de notre grande métropole de Montréal qui est en quelque part peut-être compromise par les propositions que nous avons devant nous.

On parle aussi, en quelque part, de crédibilité, solidité du mandat qui serait confié aux éventuels gouvernements sous le régime proposé dans ce projet de loi. Et je ne parle pas juste de l'aspect probable d'un plus grand nombre de gouvernements minoritaires. Un gouvernement élu de façon minoritaire est quand même dûment élu. Mais le mandat, la solidité du mandat des éventuels gouvernements élus sur un système qui risque d'être très mal compris par le public, qui risque de faire en sorte qu'un problème prédominant dans les démocraties occidentales et aggravé ici, au Québec, il faut le dire, c'est-à-dire le taux de participation aux élections. Moi, je crois qu'il y aurait un consensus auprès des experts en tout ce qui a trait à la réforme électorale qu'une formule telle que proposée par ce projet de loi risque fortement de faire en sorte qu'on se trouverait devant un taux de participation dramatiquement réduit, ce qui est une mesure essentielle de la santé même de notre démocratie.

Donc, Mme la Présidente, on a ces grandes ambivalences. Si on tombe un petit peu dans les spécifiques de l'affaire, on peut aussi avoir nos grandes questions. Y a-t-il de la transparence dans ce qu'on propose de faire? Y a-t-il, comme je dis, des outils qui vont faire en sorte que l'électeur vote en mesure de participer pleinement?

Bon, première chose, on va avoir, si le projet de loi est adopté tel que proposé, 80 circonscriptions au lieu de 125. Je nous offre l'exemple banal, et je suis sûr que je ne suis pas le seul, ça arrive tellement souvent dans ma circonscription : Ah! salut, M. Birnbaum, dis bonjour à Justin. Bien, voyons donc! Et moi, comme nous tous, on travaille, on est très fiers de tout ce qu'on fait et on espère que ça ait écho, j'espère que ce n'est pas juste moi, mais que ça ait écho et que nos concitoyens nous suivent dans nos délibérations tellement importantes en leur nom, comme députés de l'Assemblée nationale du Québec. Alors, déjà, nous avons à sauvegarder et, à chaque jour, faire connaître le rôle solennel qu'on joue ici, pas de façon partisane, dans les délibérations de l'État.

Donc, je me permets de donner l'exemple banal, parce qu'où va être le niveau de compréhension de nos citoyens quand, dans une période assez courte, ils ou elles seraient obligés de comprendre que, bon, maintenant, j'ai un député... le territoire a changé, est-ce qu'il ou elle est sur une liste comme député choisi de façon proportionnelle? Comment ça se fait que je vois que les gens d'une communauté qui est assez éloignée de moi fait partie maintenant de la même circonscription? Alors, l'exercice de la gouvernance ainsi que la démocratie risquent d'être compromis par un tel genre de formule.

En région, qui est... Comme je dis, des fois, j'empathise, surtout les jeudis, pour quelques-uns de mes collègues qui ont devant eux soit un vol interminable ou six heures, sept heures à faire, de route, pour arriver à la circonscription, j'espère, pour se reposer un petit peu, mais pour se réveiller le lendemain, le samedi, pour aller à un évènement qui est à 1 h 30 min de chez eux. Ce n'est pas facile, ce n'est pas facile. Une des choses, bon, qui ne rend pas ça nécessairement plus facile mais plus faisable, je crois, c'est la crédibilité de ce député-là, sa notoriété au sein de sa communauté qui est connue, quantifiable, identifiable en termes de frontières, c'est une chose claire. La démocratie s'exprime de la meilleure façon quand les balises sont claires. Alors, voilà juste un exemple de la répartition des circonscriptions qui sème la confusion.

Je regarde mon collègue et notre expert sur l'affaire, je ne vous cache pas qu'il y avait beaucoup de grattage de tête lors de ces briefings assez, assez efficaces devant notre caucus. Nous sommes des parlementaires qui ont la responsabilité de creuser un petit peu plus et de se doter d'une certaine expertise dans les choses électorales, dans les règles du jeu de la démocratie, et ce n'était pas facile. Moi, je serais mal à l'aise à vous donner un topo de deux minutes sur le projet de loi devant nous. Donc, je le dis parce que c'est notre obligation de nous assurer, quand on embarque... et nécessairement, dans la réforme électorale, on se donne la tâche solennelle, difficile et sérieuse de le faire de façon claire, imputable et explicable.

Bon, une autre ambiguïté, compte tenu du fait qu'on va convenir qu'on est dans une complexité énorme : on va l'assujettir à un processus référendaire. Bon, si on est pris avec une réforme de cette ampleur-là, ce serait inacceptable de faire autrement. Et voilà la tâche de taille qu'on va avoir devant nous. Le citoyen aurait l'opportunité, au moins, de trancher sur cette grande question.

Bon, il y a des livres, et des livres, et des livres, évidemment, de rédigés sur la campagne référendaire de 1995 et probablement quelques livres, et livres, et livres sur le libellé. Là, on parle des enjeux... peu importe où on se situe sur le spectrum là-dessus, mais on parle d'un choix qui a été évident. On vivait ces réalités en continu, de d'autres façons, maintenant, de vivre ces réalités à chaque jour. Alors, malgré le fait que cette question référendaire était d'une complexité épouvantable, on avait la possibilité de se dire... M., Mme Tout-le-monde, ils avaient l'opportunité de comprendre les enjeux. Là, déjà, ça va être très difficile de faire le même constat. Et comment est-ce qu'on peut même, de bonne foi... Parce que, pour moi, s'il y a un... bon, de bonne foi, je vais le laisser comme ça, comment on peut imaginer qu'un référendum coïncidant avec une campagne d'élection peut être une chose fidèle, crédible à défendre?

• (17 heures) •

Ce serait, en quelque part, de dire : Tout ce qu'on fait... Et la plupart des gens que je vois autour de moi ont déjà participé dans plus qu'une élection, mais, même si vous auriez participé à une seule, ce serait de dire : Bon, ce n'est pas si compliqué que ça, nos 30 jours, quelques jours de campagne, je vais mettre ma plateforme dans votre boîte à malle, là, et, bon, faire une publicité ici et là, et ça devrait être facile, votre choix. J'espère qu'on s'est donné, chacun — et j'en suis sûr — une job beaucoup plus étoffée que ça dans les campagnes qui nous auraient menés ici, de comprendre, dans chacun de ces 30 jours, que ce n'était pas juste un enjeu pour nous faire élire, ça a été une des opportunités très chères et rares de savoir que notre population a été à l'écoute, est à l'écoute, donc une opportunité, sans être arrogant, de les sensibiliser à chaque aspect de notre gouvernance au Québec, de les sensibiliser aux questions sur l'environnement, sur l'économie, sur la santé, sur l'éducation. C'est ça, une campagne électorale. Est-ce qu'on trouve ça normal d'ajouter à cette tâche-là un référendum sur une réforme fondamentale de notre système électoral?

Je nous inviterais à faire pas un référendum, mais un sondage, une fois qu'on aura complété nos discussions, d'ici, même, qu'on est en phase finale, de faire un sondage informel ou de se donner la tâche de se promener dans notre circonscription pour demander à 10 personnes de nous dire une phrase sur la réforme électorale qui serait devant eux. On parle de nos électeurs, on parle de nos gardiens de la démocratie, on parle du système qui choisit nos gouvernements. Ces 10 personnes, de ma lecture, vont être unanimes en disant : Je ne comprends pas.

Ça, ce n'est pas une petite affaire. Ils peuvent ne pas comprendre un de nos projets de loi ou une de nos discussions sur un autre sujet. Et nous avons le devoir solennel de les suivre, ils ont besoin de comprendre comment ça marche, notre système électoral.

Alors, on va travailler, Mme la Présidente, en étude détaillée, mais on a un projet, devant nous, qui a tous ces risques pour notre démocratie. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député. Maintenant, nous allons poursuivre le débat avec Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci. Merci, Mme la Présidente. Alors, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 39.

Je ne le cacherai pas, d'emblée c'est un projet de loi qui est quand même assez complexe, disons-le. Mon collègue, précédemment, disait qu'on a eu plusieurs présentations au caucus, en effet, puis c'est très technique, c'est très... je dirais même que c'est difficile à suivre. On a un excellent porte-parole. Donc, je remercie le député de LaFontaine, qui, je suis certaine, nous voit... On le regarde, des fois, puis on se dit : Je ne suis pas sûre que j'aie suivi, là, mais, comme je vous dis, c'est hypercomplexe.

Je me suis permis de regarder le projet de loi, avec le collègue de LaFontaine, avec des lunettes qui viennent du monde municipal, donc, et je me suis permis aussi d'écouter, là, les interventions de la FQM, de lire le mémoire de la FQM. Je me suis permis aussi d'en parler à différents élus dans le monde municipal, autant des maires... Vous savez la MRC Vaudreuil-Soulanges, c'est 23 maires. J'ai d'anciens collègues aussi qui sont encore en poste, soit à la mairie ou soit des conseillers municipaux, puis j'ai jasé avec eux à savoir l'importance qu'ils accordaient... Un, permettez-moi de revenir sur la compréhension. Je ne suis pas certaine, puis pourtant, là... Les gens dans le monde municipal, là, pour eux, ça fait partie de leur mode électoral, quand on parle d'élections, là, mais, quand on rentre dans les détails comme ça, pour eux aussi, c'était quand même assez complexe. Mais j'ai quand même jasé avec eux, puis, ce qui revenait souvent, à la fin de la conversation, bien, les élus me disaient : Bien, Marie-Claude, finalement, c'est un projet de loi majeur, puis ce que je comprends, ce que tu m'expliques, bien, ça chamboule pas mal le coeur de notre démocratie. Alors, bien, j'ai été obligée de leur répondre : Oui, en effet, tu sais, ça vient vraiment changer... ça change le coeur de la démocratie. Mais est-ce que c'est dans le sens où on veut aller?

Bien, j'ai fait des statistiques, là, auprès des gens qui... lesquels j'ai abordés, puis je vous dirais que 98 % des élus à qui j'ai parlé se disaient : Pourquoi on fait ça? Pourquoi on s'en va là? Dans le fond, l'objectif, ce que vous devez faire, c'est... vous devez faire une meilleure communication auprès des citoyens, vous devez l'expliquer mieux aux citoyens, vos citoyens n'embarqueront pas dans ce projet de loi là si vous l'expliquez comme vous me l'expliquez. Donc, c'est que ce les élus nous demandent de faire. Donc, c'est ce qu'on fait aujourd'hui, on prend la parole à tour de rôle puis on essaie d'expliquer un peu où est-ce qu'on s'en... en fait, ce que représente ce projet de loi là.

Je voudrais peut-être, d'emblée, expliquer que le Québec, c'est probablement une des plus anciennes démocraties parlementaires au monde, que notre système parlementaire date de 1792. Oui, il a des défauts, on a un système parlementaire qui a des défauts, mais c'est un système parlementaire qui fonctionne bien aussi. Un idéal démocratique, je pense que ça n'existe pas. Peut-être, tu sais, qu'on est dus pour des améliorations, puis je pense que c'est ce qu'on essaie de faire, mais je pense qu'ici, en Amérique du Nord, le Québec représente certainement une stabilité. Je pense que le Québec, on est une stabilité par notre mode de fonctionnement, entre autres.

Je pense qu'on est une communauté qui est devenue, au fil du temps, une société bien distincte, je dois le dire, puis qu'on jouit d'une situation des plus enviables. Bon, peut-être qu'en temps de pandémie c'est un peu moins partagé, cette situation enviable là. Mais, si on se compare, on peut dire qu'ici on a un système parlementaire où chacun on peut prendre la parole, chacun on a le droit de s'exprimer dans le respect, puis ce n'est pas comme ça partout à travers le monde.

Donc, comme je disais, bien, je suis convaincue qu'il n'en existe pas, de système électoral idéal, que tous les modes de scrutin sont perfectibles, que les propositions doivent évidemment être analysées. Cependant, c'est vrai, c'est vrai que note société veut améliorer le caractère démocratique de ses institutions, mais je pense que ça ne doit pas se faire sans une réflexion approfondie des conséquences sur le Québec d'aujourd'hui mais surtout le Québec de demain, le Québec de nos enfants.

Le Québec, c'est une nation complexe. C'est une nation complexe, c'est un territoire immense avec une faible population. Pour la grandeur du territoire, on a une faible population. On a une minorité anglophone importante parmi une majorité francophone, qui est elle-même minoritaire en Amérique. Donc, vous comprenez déjà là un peu la complexité de tout ça. Mais il reste que l'attractivité de quelques grandes villes et la diminution du poids démographique des régions ajoutent aussi cette complexité-là. Les tendances migratoires se poursuivent, puis notre système d'immigration, entre autres, n'arrive toujours pas à attirer des nouveaux citoyens en région. Le Québec risque de perdre une partie de son identité liée à son territoire et à la façon dont il habite son territoire. C'est pourquoi toute proposition de réforme du mode de scrutin ne peut pas s'appuyer uniquement sur le principe de la représentation du vote proportionnel, parce que cela ne fera qu'accentuer la perte d'influence des régions, et les régions, c'est tellement important — j'imagine que c'est important aussi pour le gouvernement, puisque, la représentativité du gouvernement, vous êtes majoritairement des régions — et le sentiment, évidemment, déjà largement répandu à l'extérieur de Montréal et de Québec de ne pas être entendu par nos gouvernements.

Donc, le poids politique des régions est, selon moi, l'argument le plus important et l'élément incontournable de la présente réforme. Et c'est ce qu'est venu dire, entre autres, le président de la FQM, M. Demers. C'est ce qu'ils ont aussi exprimé dans leur mémoire, un mémoire bien étoffé, bien élaboré, avec six recommandations, six recommandations quand même assez simples mais tout de même précises. Et ce que j'apprécie du travail de la FQM, qui représente, disons-le, plus de 1 000 municipalités, là, au Québec, donc c'est une belle représentativité, mais, quand ils nous font un travail, ou quand ils déposent un mémoire, ou quand ils viennent faire des représentations, bien, ils ont consulté leurs gens. Donc, le travail, le mémoire qui a été fait, les arguments qui ont été présentés, bien, soyez assurés que ça ne vient pas juste d'une personne, mais que ça vient bel et bien d'un comité et c'est réfléchi.

• (17 h 10) •

Donc, je vais me permettre de vous présenter, entre autres, les six recommandations de la FQM, parce que je pense que ça résume quand même bien ce qui se passe dans nos régions ou, en fait, là où on veut s'en aller. Donc, je vais présenter les recommandations. Puis il y a peut-être des recommandations sur lesquelles je porterai une attention un peu plus particulière, mais la première représentation est que «le projet de loi assure la pérennité du poids politique des régions». Donc, j'en ai déjà parlé beaucoup, dans mon introduction, de cette importance-là. Et je faisais une petite recherche, je regardais, entre autres, sur l'Institut de la statistique du Québec, je regardais l'évolution de la démographie au Québec, et définitivement ça montre une baisse lente mais continuelle de la population dans les régions plus éloignées des grands centres. Je pense que ce n'est pas une surprise pour personne, mais c'est quand même étonnant quand on va voir sur le site de l'ISQ.

Entre autres, dans le dernier bilan sur les perspectives démographiques des régions du Québec, qui a été publié en 2019, l'institut prévoit une croissance démographique des régions près de Montréal de 14 %. Donc, tout qu'est-ce qui est aux alentours de Montréal, qu'on appelle les régions, on voit qu'il y aura une augmentation de 14 %. À l'inverse, les régions plus éloignées, comme le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, le Saguenay—Lac-Saint-Jean, l'Abitibi-Témiscamingue et la Côte-Nord, eux, verront le poids de leurs populations passer de 10,3 % à 8,6 % en 2041. Je le sais, que c'est loin, mais c'est quand même des statistiques qui sont disponibles, puis je pense qu'il faut en tenir compte quand on embarque dans des changements ou quand on veut étudier des projets de loi aussi importants. Donc, malheureusement, force est d'admettre que, malgré les efforts énormes des régions pour lutter contre cette tendance à la baisse, l'adoption de ce projet de loi provoquera, à moyen terme, une baisse réelle du poids politique des régions malgré les précautions prises par le gouvernement. Donc, voilà toute l'importance... et ce pourquoi cette recommandation, de s'assurer que la pérennité du poids politique des régions soit bien représentée.

La deuxième recommandation, c'est qu'on «demande que le rôle du député issu de la liste régionale, ou [...] appelé "député de région", soit clarifié». Je pense que mes collègues, précédemment, en ont largement parlé, à l'effet que, dans le projet de loi, ce n'est pas clair, les rôles ne sont pas clairement définis. Et d'ailleurs ça fait... si on le lit rapidement, on voit que ce n'est pas nécessairement défini, puis, dans le fond, ce qu'on tire comme conclusion, bien, c'est qu'il existerait désormais deux classes de députés. Bon. C'est clair. On se demande : Mais qu'est-ce que ça apporte de plus, ce projet de loi là? Bien, ça apporte deux classes de députés, deux classes de députés, qui apporte probablement ou très certainement beaucoup de confusion auprès de nos citoyens, beaucoup de confusion auprès de notre population. Déjà que, quand on explique, au Québec, comment ça fonctionne, la politique, souvent on leur dit : Bien, vous savez, il y a le niveau municipal, après il y a la MRC. La MRC, c'est le regroupement de vos municipalités, qui sont des municipalités régionales de comté. Après, vous avez le provincial, puis après vous avez le fédéral. Ça fait que, là, ils nous disent : O.K., ça fait que, là, tu commences au municipal, après tu es élu à la MRC, après tu es élu au provincial, puis là tu as le top suprême au fédéral. Mais, non, ce n'est pas comme ça que ça fonctionne, c'est tous des champs de compétence qu'on se partage.

Bien, nous, la politique provinciale, c'est notre quotidien, donc on baigne là-dedans à tous les jours, on comprend comment ça fonctionne, mais, pour un citoyen, pour une mère de famille qui va mener ses enfants à l'école, qui est débordée au travail, l'école, les devoirs, les dodos, les bains, bien, elle ne porte peut-être pas tant d'attention que ça au système, à savoir comment ça fonctionne, qui me représente. Donc, elle, quand elle a un problème — je dis elle... ou ce citoyen ou cette citoyenne — quand elle a un problème, puis que ça se passe... Bon, on va se le dire, quand c'est un nid-de-poule, on le sait, on appelle au municipal. Mais, quand c'est un peu plus que ça, qu'est-ce qu'on fait? Bien, on prend le téléphone puis on appelle au bureau de notre député. Puis souvent, comme disait mon collègue précédemment, on appelle au bureau de la députée ou du député, puis : J'ai un problème en immigration ou j'ai un problème en... Puis là on leur dit : Oui, mais c'est peut-être plus fédéral. Bien, eux ils ne comprennent pas, là, nécessairement, là, le partage des compétences, qu'il y a des compétences fédérales, qu'il y a des compétences provinciales. Déjà là, c'est mêlant pour nos citoyens, de savoir est-ce que c'est provincial ou est-ce que c'est fédéral. Le municipal, comme je vous disais, c'est un petit peu plus facile, mais même quand on leur dit... bien, même au municipal, là, quand on leur dit : Non, non, non, ton changement de zonage, là, ça doit passer par le PMAD, le Plan métropolitain d'aménagement, puis ça doit passer par la MRC, puis la MRC doit avoir une autorisation de la CMM... Ah! Bien là, embarquez-moi pas sur la CMM, là. Mais, quand on dit qu'il faut que ça passe en plus par la CMM, bien là ça devient encore plus complexe.

Donc, moi, je suis d'avis qu'il faut garder ce lien de proximité là avec notre député. Je pense que, justement, il y a un sentiment, il y a quelque chose qui se développe avec nos citoyens, avec nos députés. Ils nous voient, on est présents pour eux, puis quand ils ont des questions ou une problématique, bien, ils viennent nous voir, c'est important. C'est important pour eux, c'est important pour nous aussi, là, de pouvoir les aider. Même nous, advenant qu'il y a deux classes de députés, comment... Même nous, je pense qu'on va être mêlés, à savoir, bien, c'est toi, c'est moi, c'est en haut, c'est à qui.

Donc, je pense qu'il y a beaucoup de... je pense que ce n'est pas nécessairement une bonne avenue à choisir. Puis ça allait aussi dans le même sens que la recommandation n° 3, quand on dit que... «garantir la proximité du député et des citoyens». Donc, c'est dans ce sens-là, les recommandations n° 2 et n° 3 de la FQM, lesquelles j'appuie, évidemment.

La quatrième recommandation, c'est qu'on «demande à nouveau que toutes nouvelles délimitations [des] territoires de circonscriptions respectent les limites des territoires [des] MRC». Donc, je pense que la délimitation des territoires, ça a toujours été un sujet très, très, très délicat. Écoutez, je pourrais vous donner des exemples, particulièrement présentement, là, en temps de pandémie. La délimitation des territoires, ce n'est pas évident. C'est souvent un casse-tête, particulièrement pour le gouvernement qui doit prendre des décisions difficiles à savoir : Qu'est-ce qui tombe en zone rouge? On le définit par MRC, on le définit par CMM, on le définit comment? Chez nous, ça a été une grande problématique parce que c'est la MRC Vaudreuil-Soulanges, donc on a des institutions en commun, comme la commission scolaire Vaudreuil-Soulanges, la MRC Vaudreuil-Soulanges, mais, le territoire de la CMM, ce n'est pas Vaudreuil-Soulanges qui fait partie du territoire de la CMM. Donc, quand on dit que la commission scolaire passe... quand on dit que Vaudreuil-Soulanges passe en zone rouge, que la CMM passe en zone rouge, bien, ce n'est pas tout Soulanges qui passe en zone rouge, c'est partiel. Donc, pour nous, c'est hypercomplexe, d'utiliser la délimitation CMM. C'est beaucoup plus facile d'utiliser un territoire MRC, un peu partout comme le reste du Québec. C'était déjà bien défini, puis, déjà là, c'est compliqué pour nos citoyens, à savoir : Bien, moi, je fais-tu partie de la délimitation Vaudreuil ou de la délimitation Soulanges? C'est déjà compliqué. On a des gens qui appellent au bureau puis qui disent, je donne un exemple, là : Moi, j'habite à Saint-Lazare, je suis dans le comté de Vaudreuil. Non, vous êtes dans le comté de Soulanges, mais c'est la MRC Vaudreuil-Soulanges. Non, mais vous le savez, là. Je fais un exposé sur la chose, là, mais vous le savez, à quel point c'est déjà difficile, pour les citoyens, de s'identifier à une région. Si en plus il fallait agrandir ces régions-là et les délimiter autrement, avec un nouveau nom, avec... C'est hypercomplexe, puis je ne pense pas que ce soit nécessaire. Puis même au niveau de la collaboration entre élus, parce que je me permets de dire aussi que le nombre puis l'importance des dossiers qu'on travaille en collaboration avec les élus municipaux, ça augmente, là. D'année en année, on travaille encore plus en collaboration avec nos élus municipaux. On leur a d'ailleurs donné un titre, un titre de gouvernement de proximité, on a reconnu les municipalités et les MRC comme des gouvernements de proximité, donc on doit également refléter dans ce projet de loi là cette proximité-là avec nos élus des différents paliers. Donc, vous comprendrez, encore là, toute l'importance de la délimitation des territoires.

Je passe vite sur une des recommandations qui a été faite par la FQM, qui demandait, entre autres, que «toute réforme inclue l'obligation de déposer des listes paritaires pour les candidatures régionales». Ils sont venus faire des représentations aussi à cet effet-là, auxquelles j'adhère.

• (17 h 20) •

Et la dernière recommandation de la FQM, qui demandait que «le gouvernement s'assure que toute l'information, notamment des simulations quant aux effets réels du vote, soit disponible et accessible afin que les citoyens et les citoyennes puissent exercer leur droit de vote en toute connaissance de cause», donc, j'ai tout simplement envie de vous rappeler que ça prend une grande campagne, une grande campagne d'information. Il faut prévoir ça pour expliquer clairement comment ça fonctionne ou comment pourrait fonctionner un mode de scrutin tel que proposé. Ce n'est pas évident, comme je disais, de transmettre cette information-là, ou de détricoter tout ça, ou de le présenter aux citoyens, à la population, que ce soit aussi accessible, de prévoir des périodes d'échange, de questions, questions-réponses. C'est loin d'être évident. C'est complexe.

Alors, je le dis en tant que représentante d'une région, parce que je pense que Vaudreuil est une région, Vaudreuil est une partie... Oui, on a un petit centre peut-être un peu plus urbain, mais on a quand même 70 % de notre territoire qui est agricole. Et je me considère comme une députée de région, et je crois sincèrement que les régions, bien, nous serons pénalisées par un tel projet de loi, par une telle réforme. Et j'irais même un peu plus loin, je dirais que je trouve que c'est un manque de considération pour les citoyens qui habitent en région. Je ne vois pas comment ça peut bonifier le travail, bonifier l'accès à leurs députés. Je ne vois pas comment ils pourraient tirer profit de tout ça. Ça fait que, selon moi, c'est un grand manque de considération pour nos citoyens. Le contact avec le député serait encore plus dur à couvrir parce que le territoire serait encore plus grand.

Et je terminerai en vous disant que le poids politique des régions doit être protégé. C'est la seule phrase que je demande qu'on puisse retenir dans ce projet de loi.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Ah! J'aurais pensé que peut-être... — j'ai pris un peu de temps — peut-être que quelqu'un voudrait parler, de l'autre côté, étant donné que c'est tellement un projet de loi important, mais, bon, contente de vous retrouver. C'est jeudi, je vais essayer de m'assurer que tout le monde reste réveillé jusqu'à 18 heures.

Alors, Mme la Présidente, quand j'étais plus jeune, à l'école primaire, quand je me présentais, je disais mon prénom, puis là les gens disaient : Hein, comme Pauline Marois? Et moi de dire : Bien oui. Quand j'étais au primaire, elle était ministre de l'Éducation. Et je me rappelle de cette grande dame qui, à la télévision, expliquait, vulgarisait et s'assurait que les gens comprennent où est-ce qu'elle s'en va avec ses skis.

Alors, quand elle a récemment publié son livre, je me suis dit : Ah! je ne peux m'empêcher que de trouver inspiration que dans le livre de notre première femme première ministre du Québec. Et c'est rare que Mme Marois revienne pour donner des conseils. Elle a vraiment très, très bien respecté, je dirais, son devoir de réserve.

Alors, Pauline Marois — Au-delà du pouvoir, je vous invite à aller acheter son livre, évidemment, mais, de façon plus précise, à la page 362 de son livre... J'ai fait des petites copies, inquiétez-vous pas, le livre est à la maison. Peut-être que j'aurai la chance, quand le coronavirus sera terminé, d'avoir une dédicace. Et vous savez que même Infoman a fait une petite photo de Mme Marois et moi-même, si jamais elle et moi avions un enfant, à quoi ressemblerait l'enfant? Je vous le dis tout de suite, ce n'est pas une bonne idée. Alors, il est question, dans son livre, un bref passage sur la réforme électorale...

Une voix : ...

Mme Rizqy : Ah! Non, mais je sais que le ministre à la Transformation numérique se dit... Là, j'ai piqué votre curiosité, hein? Je vais vous envoyer la photo. Puis je suis convaincue que vous allez dire : Là-dessus, c'est unanime, on est d'accord, pas d'enfant entre les deux.

Alors, il est question, dans le livre... Il y a un court passage mais quand même très précis sur la réforme électorale. Elle commence d'abord en rappelant que c'est un débat qui date depuis maintenant plusieurs décennies. Et elle dit ainsi : «Bernard Drainville...» Tout le monde connaît Bernard Drainville. D'ailleurs, plusieurs d'entre vous lui parlez très tôt le matin, avant qu'il rentre en ondes au 98,5, à Cogeco. Alors : «Bernard Drainville déposait donc le projet de loi n° 13, qui contribuerait à accroître l'engagement démocratique des jeunes Québécois en permettant aux étudiants des cégeps, des universités et des centres de formation professionnelle de voter directement sur leurs campus.» Je fais une parenthèse. C'est vrai, et on devrait lui dire merci. Alors, j'en profite, M. Drainville, merci, parce que c'était un changement qui était important et nécessaire.

«On estimait à ce moment-là qu'un demi-million d'étudiants pourraient se prévaloir de cette possibilité lors de la prochaine élection générale. Le projet de loi de M. Drainville a été adopté à l'unanimité le 23 avril 2013.» Je vous invite à retenir «unanimité».

«Depuis le milieu des années 70, la réforme du mode de scrutin est un sujet qui revient périodiquement dans l'actualité. Même si nous avions souhaité aborder les problèmes qui y sont liés durant notre mandat, il aurait été maladroit de le faire dans le contexte où nous étions. Comme tous les acteurs politiques, je suis préoccupée par la représentativité des élus. Il est évident qu'un mode de scrutin plus proportionnel faciliterait l'expression d'un spectre plus large des opinions. En même temps, il faut bien réaliser que pour fonctionner la société doit être gouvernée en tout temps, sinon, c'est le blocage des institutions. Et, si une crise économique ou sociale survient, on risque fort de se retrouver dans l'incapacité de décider et d'agir...» Et Mme Marois ajoute trois petits points, trois petits points de suspension.

«Par ailleurs, je suis bien placée pour parler des difficultés de gouverner lorsqu'on est minoritaire à l'Assemblée. Notre système électoral, malgré ses défauts, a permis l'alternance des gouvernements — alternance des gouvernements — et l'apparition de nouveaux partis — ah! ça, la CAQ, vous devriez être sensibles à cela — qui ont pu accéder à la direction de l'État. C'est déjà beaucoup lorsqu'on regarde comment les choses se passent dans d'autres sociétés. Doit-on changer un mode de scrutin dont les vertus ont été démontrées pour le remplacer par un autre qui ne correspond pas à l'histoire de notre culture démocratique?» Mme Marois pose la question.

«Je crois plutôt qu'il serait préférable d'améliorer notre système actuel. On pourrait, par exemple, adopter un mode de scrutin majoritaire à deux tours, où les électeurs auraient à choisir entre les deux candidats ayant obtenu le plus de voix au premier tour. Si on proposait une telle option aux Québécois, je crois qu'un large consensus permettrait d'entreprendre rapidement une réforme. Il serait alors possible pour chacun de voter avec son coeur au premier tour, et au second de choisir celui des deux candidats qui représente le mieux ses valeurs et ses opinions.»

«En 2012‑2013, en modifiant ces lois pour les adapter à la réalité de l'époque, nous avons agi dans le cadre de ce qui était possible. Dans ce contexte, la priorité de rétablir un sain climat de confiance entre les citoyens et les dirigeants du Québec et l'adoption de ces nouvelles lois représentaient assurément un pas remarquable dans la bonne direction.» Fin de citation.

Il y a plusieurs passages pertinents dans son livre, évidemment, mais le court extrait que je me suis permis de vous lire, Mme la Présidente, j'aimerais m'attarder à quelques éléments : «Notre système électoral, malgré ses défauts, a permis l'alternance des gouvernements et l'apparition de nouveaux partis qui ont pu accéder à la direction de l'État.» En ce moment, le projet de loi n'aurait pas pu permettre, par exemple, à l'arrivée de l'ADQ, et nous n'aurions pas eu le plaisir et le bonheur d'avoir le ministre délégué à la Transformation numérique faire ses premiers pas dans un nouveau parti qui correspond à ses couleurs et motivations politiques. Et imaginez ma peine d'être aujourd'hui au salon bleu et ne pas avoir le privilège d'être assise face à face avec lui. Imaginez le salon bleu sans le shérif de la CAQ. Ce serait impossible... Ce serait comment?

Une voix : ...

• (17 h 30) •

Mme Rizqy : Non, mais c'est bon. Mais, vous voyez, c'est ça, je vous parle, cette interaction, cette alternance, mais aussi l'arrivée de nouveaux partis. Et ça, il me semble que, juste ça, là, juste ce petit élément-là, moi, je ferais en sorte qu'effectivement je m'assurerais que c'est toujours possible à tout Québécois de dire que moi, j'ai envie de créer un nouveau parti, et c'est possible au Québec; qu'au Québec, lorsqu'on a de l'ambition puis qu'on veut avoir son propre parti, on est capable de le faire.

Imaginez, le premier ministre du Québec actuel qui ne se reconnaissait plus dans le Parti québécois, avec ce projet de loi, qu'est-ce qu'il aurait fait? Est-ce qu'il aurait été pris avec le Parti québécois? Je ne sais pas comment ça se serait passé entre lui puis Pascal Bérubé parce que, de toute évidence, dernièrement, ça a été un peu plus tendu. Mais je me dis que c'est quand même important de laisser place aux nouveaux. Imaginez l'histoire du Québec sans l'apparition du Parti québécois. Non, mais c'est important. Et Mme Marois, toujours remplie de sagesse, parle de pouvoir gouverner. Lorsqu'on regarde ailleurs dans le monde, c'est très difficile, lorsqu'ils ont modifié leur mode de scrutin, d'avoir un gouvernement majoritaire. C'est très souvent des gouvernements minoritaires. Imaginez lorsqu'on est dans l'incapacité, et je cite, d'agir. En pleine turbulence économique et sociale, c'est important d'avoir les coudées franches ou, pour reprendre une expression tellement célèbre, les deux mains sur le volant!

Je peux toujours compter sur le ministre délégué à la Transformation numérique pour être mon meilleur public en cette Chambre. Alors, merci. Mais c'est... Ah! Merci pour le petit coeur. C'est dommage qu'on ne peut pas voir tout ça, mais il y a quand même ici une belle camaraderie, j'aimerais le souligner, Mme la Présidente.

Mais, de façon très sérieuse, c'est important d'être... aussi avoir les coudées franches. Ici, je trouve qu'il y a quelque chose qui est en train de nous échapper. Moi, je comprends parfaitement l'objectif, avoir une plus grande participation citoyenne. C'est vrai que lorsqu'on regarde dans les dernières années, le taux de participation... bon, à part 2014, ça a été vraiment plus élevé, mais 2018, ça a été ma première campagne électorale au Québec, provinciale, et le taux de participation était 68 %, si ma mémoire est bonne? Je regarde la ministre. Oui. Plus ou moins. Donc, c'est quand même un Québécois sur trois, presque, environ, si vous me permettez d'arrondir, qui est resté à la maison. Ça, ça me préoccupe.

Mais, vous voyez, Bernard Drainville, sage homme avec un excellent flair politique, lui, il s'est attaqué directement à un enjeu. Il dit : Les jeunes votent moins. Qu'est-ce que je peux faire concrètement pour dire aux jeunes que c'est important d'aller voter? Puis, si vous n'allez pas au bureau de vote, bien, on va faire comme avec la montagne : si vous n'êtes pas capable de vous rendre à la montagne, bien, la montagne va se rendre à vous sur les campus. Ça, c'est vraiment une mesure spécifique qui a permis... Et je reprends les chiffres, là, un demi-million, là. Ça visait un demi-million de citoyens, jeunes, en plus, que malheureusement, des fois, leur taux de participation est moins élevé que la population générale. Et ça, on devait le corriger. Alors, ça, c'est une... je trouve que c'est très, très spécifique comme action.

D'autre part, je me demande pourquoi qu'on n'a pas examiné d'autres avenues. Est-ce que c'est par manque de temps? Bien, je comprends qu'on veut des fois aller vite. Et je me pose sincèrement la question : Une fois qu'on s'est arrêté sur une solution, pourquoi qu'on ne va pas réellement à un référendum? Et, pour faire un référendum, il faut encore respecter la loi sur le référendum. On ne peut pas tenir un référendum en même temps qu'une élection générale.

Imaginez, quand j'ai demandé au ministre de l'Éducation la possibilité de tenir des élections municipales avec les élections scolaires, c'était un : Non, non, non, on n'est pas capables de faire deux affaires en même temps, on va carrément, même, les abolir. Et, même pour les élections anglophones, quand j'ai demandé que ce soit — parce que, vous savez, pour les élections anglophones, c'est maintenu — en même temps, municipal et élections scolaires anglophones, la réponse était encore : Non, non, non, on n'est pas capables de faire deux affaires en même temps.

Alors, imaginez une question aussi importante, en pleine campagne électorale, où on ne peut même pas nous-mêmes, les députés, en débattre. Pour moi, il m'appert ici que ce n'est pas une véritable consultation. Il faudrait que cette consultation se fasse à un moment autre que la campagne électorale. Et là on aurait le vrai pouls.

Et c'est aussi important de faire ce que Mme Marois faisait : beaucoup de pédagogie, expliquer et vulgariser afin que, lorsque les gens se rendent aux urnes pour voter, ce soit fait en toute connaissance de cause. Parce qu'un consentement doit être vraiment libre et éclairé. Et, pour l'obtenir, encore faut-il comprendre toutes les nuances.

Alors, parlons-en, des nuances. Je suis une députée de Montréal, le magnifique comté de Saint-Laurent. Vous savez, ville Saint-Laurent, c'est deux comtés. Il y a ma chère collègue, estimée collègue, la députée d'Acadie, qui représente environ l'autre moitié de ville Saint-Laurent. Bon, je ne vous dirai pas qui est la meilleure des deux, hein, quand même. On est ex aequo. Mais vous savez quoi? Les gens à Saint-Laurent, ils savent que la députée de l'Acadie, c'est leur députée. Mais ils savent aussi que moi, là, je représente mon territoire, l'autre partie de ville Saint-Laurent. Donc, vous prenez la 15, d'un côté, à l'est, c'est Acadie, à l'ouest, avec le technoparc, c'est moi. Donc, un député, Mme la Présidente, est rattaché à sa population mais aussi à son territoire.

J'ai aussi le magnifique bonheur d'avoir d'autres collègues sur l'île de Montréal. Nous sommes 27, avec deux caquistes. Il ne faut jamais l'oublier. Des fois, même eux l'oublient, mais nous, on est là pour leur rappeler. Alors, imaginez, nous sommes 27 pour représenter 1,3 million de citoyens. Et, avec la réforme, lorsque je regarde les projections... Qui ne viennent pas de moi, hein? Vous savez, le Secrétariat à l'accès à l'information et à la réforme des institutions démocratiques du Québec a préparé un tableau, un estimé. Quelles sont les projections si jamais, d'aventure, le projet de loi était sanctionné et rentrait en vigueur? Eh bien, nous passerons, Mme la Présidente, de 27 députés à 16 sièges de circonscription. Donc, vous savez comment c'est découpé, donc, moi, Saint-Laurent, qui qu'on choisit? Moi ou Christine? Le choix va être difficile, hein? Je vous vois sourire, qu'est-ce que vous préféreriez? La blonde ou la brune? Hum! La brune? Merci. Bien, vous savez, ce ne sera pas comme ça que ça va se décider. Je vois la députée de Vaudreuil, elle préférerait qu'on garde les blondes, mais moi, dans mon caucus libéral, je suis en minorité, et c'est vraiment un caucus avec beaucoup, beaucoup de blondes. Alors, j'espère que je serais celle qui serait conservée, advenant le cas qu'on devra fusionner la magnifique ville de Saint-Laurent, les deux comtés en un. J'espère qu'on va me garder pour la dernière brune. Alors, ça, ce n'est quand même pas la dernière des Mohicans, mais la dernière brune, quand même, c'est important.

Alors, Mme la Présidente, imaginez, on passe de 27 à 16, de comtés, donc, de circonscription, mais on aurait ce qu'on appelle les députés de liste. Est-ce qu'un député de liste, c'est comme, au fond, des célébrités? Parce que, quand même... C'est comme la ligue des stars, ceux qui ne sont pas attachés à un comté, sont attachés, au fond, au chef. Donc, plus que le chef vous aime, plus il va vous mettre sur la liste, j'imagine? J'espère que je vais être attachée à un comté, là, parce que c'est important. Mais un député de liste, pour l'île de Montréal, il y en aurait huit, et les huit au même pied d'égalité pour représenter l'entièreté de l'île de Montréal. Ça inclut l'île des Soeurs, là. Ça en fait, du monde. Mais moi, je me pose la question. Si jamais moi, je suis la députée de Saint-Laurent, qui pensez-vous que le citoyen va appeler? Le député de liste qui va toujours à la télévision ou la députée de Saint-Laurent qui est toujours prise à son bureau? Ouais. Est-ce que le député de liste aura le temps de s'occuper de 1,3 million de personnes à l'île de Montréal ou il va être trop occupé parce que c'est un député de liste, un député prestigieux? Est-ce que le député de liste aura les mêmes obligations que le député d'un comté? En fait, son bureau va être où? Est-ce qu'il va être au centre-ville de Montréal? Je comprends que les tours commencent à avoir besoin d'amour. J'espère que vous aurez l'occasion d'ailleurs de pouvoir remédier à la situation névralgique au centre-ville de Montréal, parce que, sinon, il va falloir vraiment qu'on occupe plusieurs tours avec les députés de liste, là. On pourra les mettre là, je vois que le député de La Peltrie est d'accord.

Mais, imaginez, là, moi, je parle de Montréal, allons faire un tour en Abitibi, Mme la Présidente. Bon, moi, je suis allée une fois en Abitibi, c'était pour un match de basketball, ça m'a pris sept heures à m'y rendre avec toute l'équipe. Puis, pire que ça, c'est qu'on a perdu par un point, mais c'est à cause du coach qui m'a fait «bencher» à la dernière minute. C'est de sa faute. Donc, le chemin du retour, il a été long longtemps, là, je peux vous le dire. Par contre, je sais une chose, nous, on est arrivés... Puis on n'a pas fait toute l'Abitibi, là, c'est grand. En ce moment, il y a trois comtés. Selon ce qui est proposé, on tomberait avec deux comtés. Donc, on n'est plus trois députés rattachés à un comté, trois députés rattachés à leur propre population, on a deux députés pour un immense territoire et une grande population. Et évidemment le superdéputé de liste que, lui, on ne sait pas ce qu'il va faire, mais il va être responsable de cette région-là. Je me demande comment le citoyen là-dedans est gagnant.

• (17 h 40) •

En ce moment, là, dans les députés qui sont plus en région, les règles de fonctionnement leur permettent d'avoir deux bureaux, donc un bureau principal puis le bureau satellite. Ça, c'est pour démontrer, là, à quel point que l'Assemblée nationale reconnaît l'étendue du territoire, mais reconnaît aussi qu'un député doit être en mesure de se présenter physiquement dans un bureau, rencontrer ses citoyens, son monde. Puis, son monde, là, eux, c'est leur député, puis ils sont fiers de dire : Moi, mon député, je lui ai parlé de mon problème. Puis savez-vous quoi? Il s'est levé en Chambre. Comme cette semaine, le député des Îles qui nous a raconté une histoire vraiment tragique par rapport à un couple qui a eu un accident d'auto, puis qui n'a pas eu le soutien nécessaire, puis qui s'est fait traiter comme des parias du Québec. Alors, ça, c'est important d'être des députés qui représentent leur population. Parce qu'un député de liste, moi, je fais le pari suivant, Mme la Présidente, il sera peut-être rattaché à une liste, mais il ne sera pas rattaché à une population puis à un territoire. Il n'aura peut-être pas le même souci qu'un député de comté. Et je dis «peut-être».

Je vois mon collègue, estimé collègue, il le sait. Des fois, il faut reconnaître que, oui, c'est important de changer les choses, mais, si on veut faire quelque chose d'aussi important, la consultation est de mise. Une consultation et un référendum dans ce que c'est, je crois que c'est plus que souhaité, c'est primordial, une vraie consultation.

Et je vais laisser la question en suspens, je nous invite à réfléchir : Est-ce que c'est un type de projet de loi qui nécessite que nous votions à l'unanimité? Peut-être pas, peut-être que c'est souhaitable. Et je crois sincèrement que, si Bernard Drainville a réussi à avoir l'unanimité, c'est parce que tout le monde savait que c'était utile. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Comme il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder au vote.

Et je constate qu'il manque des formations politiques, donc nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 43)

(Reprise à 17 h 47)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, nous allons reprendre. Nous étions rendus pour voter. M. le député... M. le leader du gouvernement, ça va? Tout est correct, tout va bien?

M. Caire : Ah! Oui, oui. «Top shape», Mme la Présidente. Je suis prêt, je suis prêt.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : O.K. Merci. Alors, en application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur l'adoption du principe du projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin. M. le leader du gouvernement?

M. Caire : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Tanguay : Contre.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader du gouvernement, vous avez à nous donner le vote du député de Chomedey?

M. Caire : Oui, Mme la Présidente. M. le député de Chomedey nous a indiqué qu'il votait contre.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Et Mme la députée de Marie-Victorin?

M. Caire : Mme la députée de Marie-Victorin nous a indiqué qu'elle votait pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, je vous remercie. En conséquence, le principe du projet de loi n° 39 est adopté.

M. le leader du gouvernement, pour les indications pour la suite.

Renvoi à la Commission des institutions

M. Caire : Oui, merci, Mme la Présidente. Donc, conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin, soit déféré à la Commission des institutions pour son étude détaillée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. En application de l'ordre spécial, nous allons faire le même exercice. J'invite les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur la motion. M. le leader du gouvernement?

M. Caire : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Tanguay : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Labrie : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie. En conséquence, la motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Caire : Pourriez-vous appeler l'article 18, Mme la Présidente, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 44

Reprise du débat sur l'adoption

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bien sûr. Donc, à l'article 18 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 7 octobre 2020 sur l'adoption du principe... sur l'adoption du projet de loi n° 44, Loi visant principalement la gouvernance efficace de la lutte contre les changements climatiques et à favoriser l'électrification. Y a-t-il des interventions sur ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle, la parole est à vous.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Le député de LaFontaine. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mon rôle a changé.

Alors, sur le projet de loi n° 44, nous en sommes donc, et je suis très heureux de m'inscrire dans le débat, quant à l'adoption finale du projet de loi n° 44. Évidemment, c'est un projet de loi qui a pour titre Loi visant principalement la gouvernance efficace de la lutte contre les changements climatiques et à favoriser l'électrification.

• (17 h 50) •

Mme la Présidente, vous ne serez probablement pas surprise de voir que, suite aux débats, aux nombreux débats... Puis j'ai même la liste ici, là, des débats qui ont eu lieu lors de l'article par article, une liste assez longue des amendements qui ont été proposés par tous les partis d'opposition, notamment le Parti libéral du Québec, l'opposition officielle, qui visaient à renforcer le projet de loi, qui visaient à assurer que le mot «lutte», dans le titre du projet de loi, veuille dire quelque chose. Bien, il y a eu énormément d'amendements. Certains ont été adoptés, mais beaucoup trop d'amendements ont été rejetés, des amendements qui venaient faire en sorte que le projet de loi aurait été bonifié. Alors, vous ne serez pas surprise qu'à la fin, au final, nous n'allons pas voter en faveur du projet de loi n° 44. Et je vous dirais que ça participe, entre autres, de la nature même du gouvernement qui propose le projet de loi.

Alors, quand on parle d'environnement, vous allez me permettre, avant d'aborder deux aspects, si le temps le permet, deux aspects du projet de loi, j'aimerais ça que l'on regarde ensemble un peu d'où vient la Coalition avenir Québec.

La CAQ a mis, en environnement, la barre très haute. On sait que ça n'a pas été un enjeu durant l'élection pour la CAQ... pas que ça a été un enjeu, je vais rephraser ce que je viens de dire, ça n'a pas été un chapitre assez volumineux de la plateforme électorale de la CAQ que la lutte aux changements climatiques. Je vais dire ça comme ça. Je pense que c'est plus exact. Ça a été, par contre, un enjeu électoral. Mais force est de constater que, suite à l'élection, suite.. surtout la dernière semaine de la campagne, tout le monde... si certains avaient des doutes, dont la CAQ, que l'environnement, c'était un enjeu central, plus personne ne l'avait au lendemain de l'élection, plus personne ne l'avait.

Alors, évidemment, la barre a été mise, entre autres, et traduite dans un article du Devoir d'Alexandre Shields, du 20 avril 2019, où le premier ministre, on peut lire l'article, insiste sur l'importance de «relever un grand défi». Et là il citait le premier ministre : «La survie de notre planète est en jeu, et je ne peux pas ignorer ce défi de l'urgence climatique et continuer de regarder mes deux fils dans les yeux. L'audace dans ce domaine consiste à regarder la réalité en face, à nous retrousser les manches malgré l'ampleur colossale du défi qu'on a devant nous.» Fin de la citation. Ça, c'était le premier ministre dans Le Devoir, l'article du 20 avril 2019.

Le ministre de l'Environnement a évidemment ajouté à cette affirmation-là, et je le cite : «Comme nous nous y sommes engagés dans le budget, nous présenterons, dans les prochains mois, un plan détaillé de lutte contre les changements climatiques qui démontrera l'importance que nous accordons à la question et comment nous envisageons de prioriser ainsi que d'orienter nos actions dans les prochaines années.» Fin de la citation. Ça, c'est l'affirmation. Ça, c'est la barre que la CAQ met très haute en matière d'environnement. On ne peut pas avoir affirmation, parole plus claire que ça.

Il y en a même un, évidemment, qui est tombé, je vous dirais, pas dans le piège, parce que je pourrais peut-être être dérogatoire, mais qui est tombé... qui a cru, évidemment, de bonne foi ce qui avait été dit, c'est Dominic Champage. Dominic Champagne faisait même partie... Et là j'ai un article du Devoir toujours, cette fois-ci sous la plume de Marco Bélair-Cirino, Dominic Champagne, article du 23 mai 2019, où... sûrement que mes collègues, en face, de la Coalition avenir Québec, ils ont dû le croiser sur le plancher de leurs délibérations du week-end à ce moment-là, en mai 2019, où il faisait partie des militants, imaginez-vous donc, Mme la Présidence : «...dont certains portent la signature de nouveaux membres écolos de la formation politique», comme Dominic Champagne avait pris sa carte de membre de la Coalition avenir Québec, croyait à ce qu'avait dit le premier ministre, croyait à ce qu'avait dit le ministre de l'Environnement et faisait... Je continue à citer l'article : «Le metteur en scène Dominic Champagne et le directeur général pour le Québec et l'Atlantique de la Fondation David-Suzuki, Karel Mayrand, s'adresseront tour à tour aux militants caquistes avant l'amorce du débat en plénière dans un hôtel du centre-ville de Montréal samedi. Ils tenteront de les "convaincre de l'urgence d'agir" — ça, c'est entre guillemets — pour une transition écologique.» Barre très haute. Dominic Champagne, les gens de la fondation Suzuki ont dit : Aïe! on embarque, c'est trop important.

Désenchantement, Mme la Présidente. Je ne sais pas si «climatosceptique» va un jour devenir un terme interdit, mais, pour l'instant, il ne l'est pas. On disait dans le titre de cet article-là, qui traduit le désenchantement de ces écologistes, de ces militants... pour que l'on puisse réellement donner suite à l'affirmation de principe du premier ministre puis du ministre de l'Environnement. Eux y ont cru, mais eux ont été désenchantés, comme disait la chanson. En septembre 2019, le 21 : «...Dominic Champagne doute maintenant que le premier ministre croit réellement aux changements climatiques.» Et, en ce sens-là, il parlait même que... «Le premier ministre agit comme un climatosceptique, croit Dominic Champagne.» Je ne suis pas en train de vous dire que je porte foi à ce qu'il dit là, mais, quand il se questionne, et c'est surtout comme ça que je le prends, quand il se questionne, au-delà... Et mon propos n'est pas de prêter de mauvaises intentions, c'est... Quand il se questionne, ce questionnement-là découle des gestes, des actions au-delà des bonnes paroles.

Et les gestes, les actions au-delà des bonnes paroles, allons voir l'étalon de mesure, qui est le projet de loi n° 44. Le projet de loi n° 44, Mme la Présidente, premier écueil de deux, j'aurai juste le temps de vous en soulever deux, on vient éliminer Transition énergétique Québec. Transition énergétique Québec, Mme la Présidente, est un organisme qui avait fait ses preuves, un organisme, et ce fut soulevé par plusieurs groupes entendus en commission parlementaire... Transition énergétique Québec, c'est le TEQ, T-E-Q. TEQ représente tout près de 65 % des réductions des gaz à effet de serre au Québec, et ce, avec seulement 18 % du budget du Fonds vert.

Ça faisait même dire à l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques, l'IGOPP, ça leur faisait dire, Mme la Présidente, et je cite un article, une lettre d'opinion signée par Yvan Allaire et Michel Nadeau, 30 janvier 2020, ce qui suit : Ce projet de loi — ils parlent du projet de loi n° 44 — la mesure... «...ce projet de loi comporte la mesure discutable, voire douteuse, d'intégrer au ministère une pléthore de programmes et de mesures spécifiques visant l'atteinte de cibles énergétiques, un rôle actuellement assumé par la société d'État Transition énergétique Québec. Or, cet organisme gère depuis près de trois ans avec souplesse, transparence et imputabilité des dizaines d'initiatives; l'organisme assume la coordination sous une même administration des services et des programmes reliés à différents volets de la transition énergétique...»

Et, Mme la Présidente, il poursuivait : «Comme le montre l'étude récente de l'IGOPP — ça, c'est l'institut — sur la gouvernance des sociétés d'État, TEQ se classe dans le peloton de tête — huitième rang — des sociétés d'État et organismes québécois en matière de gouvernance. TEQ est à réaliser son plan directeur 2018-2023, lequel fut préparé en concertation avec toutes les parties prenantes, ce qui est précisément le rôle et l'avantage d'une société d'État. Le rôle du ministre et du ministère consiste à établir des objectifs précis, des priorités des cibles, les grandes orientations et de mesurer les résultats obtenus.»

Et là la prochaine partie, elle est en gras : «Pour bien faire son travail de planification des efforts du Québec, le ministre doit se concentrer sur l'essentiel : déterminer et gérer les priorités du Québec dans la lutte contre les changements climatiques, mais laisser la gestion quotidienne à un organisme comme [le] TEQ.»

Donc, le fait de ramener le TEQ de façon unilatérale au sein du ministère de l'Environnement et avec le Fonds vert du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, on vient mettre de côté, Mme la Présidente, un organisme, Transition énergétique Québec, qui avait fait ses preuves, et pas les moindres. Je n'ai cité que l'IGOPP, l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques, mais d'autres sont venus le dire également, reconnaître de façon très tangible sur le terrain... Je vous ai dit : 65 % des résultats ont été atteints par l'action du TEQ avec 18 % du budget du Fonds vert. Et, lorsque l'on regarde ça, Mme la Présidente, force est de constater que l'on ne peut pas applaudir le ministre quand il dit : Bien, moi, le TEQ, je vais faire en sorte de ramener ça sous le ministère de l'Environnement et ainsi détruire ce qui fonctionne bien, anéantir les efforts qui fonctionnent bien.

Et j'aurai l'occasion, Mme la Présidente, si je n'ai pas l'occasion de terminer maintenant, parce qu'on va bientôt arriver à 18 heures, de soulever également qu'ici... Nouveau plan vert du Québec : «complètement insuffisant». Même le plan qui a été déposé... Il y a deux aspects qui ont été déposés, le plan pour une économie verte et un plan de mise en oeuvre. Même là les experts ont des doutes très sérieux, et, selon leur propre analyse, on va manquer la cible. Autre élément... Donc, mauvaise idée de faire en sorte que Transition énergétique Québec soit complètement anéantie et mise sous le ministère de l'Environnement.

Deuxième élément du projet de loi dont je veux vous parler, c'est la perte de pouvoir de la Régie de l'énergie. La Régie de l'énergie, Mme la Présidente, on retire la révision de l'efficacité des mesures en matière énergétique, on vient limiter le chien de garde indépendant.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, merci, M. le député de LaFontaine. Compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux quelques instants pour permettre la désinfection des places, pour ensuite prendre les débats de fin de séance.

Alors, je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 18 h 5)

Débats de fin de séance

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, nous allons procéder aux débats de fin de séance. Tel qu'annoncé précédemment, le premier débat portera sur une question adressée par M. le député de D'Arcy-McGee au ministre délégué à la Transformation numérique, en remplacement du ministre de la Santé et des Services sociaux, concernant l'impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des Québécois.

Je vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et ensuite le député aura droit à une réplique de deux minutes.

M. le député de D'Arcy-McGee, je vous laisse la parole pour une durée de cinq minutes.

Impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Chaque matin, on se lève avec d'autres indications d'un écho de cette pandémie terrible qui nous confirment l'étendue d'une crise émergente de santé mentale, une crise qui touche nos jeunes, qui touche nos aînés, qui touche nos familles. Il y a des études déjà qui démontrent une croissance de 20 % dans les demandes des ordonnances pour les antidépresseurs. Il y a une étude toute récente qui suggère qu'un adulte sur cinq souffre de l'anxiété et/ou dépression. Nous sommes, comme formation de l'opposition officielle, à la recherche d'une réponse cohérente, réfléchie et sérieuse du gouvernement de la CAQ qui est à la taille de cette crise. Le premier ministre lui-même a commencé cette semaine, suite à plusieurs interventions, ah oui! à constater qu'il y a un problème d'une certaine ampleur en ce qui a trait à notre santé mentale collective. Ce n'est pas rien, ce n'est pas rien, et ça nous touche, et ça exige des réponses sérieuses, comme je dis, réfléchies, conséquentes et chiffrées.

Nous avons... Moi, j'ai en main 43 lettres de l'Ordre des psychologues du Québec, l'Ordre des travailleurs sociaux, l'ordre des pédiatres, les experts qui nous ont écrit avec leurs préoccupations en ce qui a trait à la santé mentale. La plupart des lettres appuyaient notre demande, de toute évidence, qui tombait dans les oreilles sourdes du gouvernement, d'inviter la Commission de la santé et des services sociaux à se saisir d'un mandat d'initiative, une enquête sur la santé mentale pour qu'on puisse entendre les experts. Ces 43 lettres avaient des exemples déchirants et documentés qui parlaient de l'étendue de la crise devant nous et qui offraient des solutions.

Bon, Mme la Présidente, comme tout au long de cette pandémie, nous prenons très au sérieux, en opposition officielle, nos responsabilités d'être impliqués, rigoureux et actifs dans nos propositions. Donc, on a donné suite à cette obligation, comme on fait chaque semaine et chaque jour, ce matin, en faisant une proposition claire, et structurante, et implémentable dans un court délai, c'est-à-dire une proposition d'une couverture publique de la psychothérapie au Québec. On parle de rendre une seule vitesse de disponible pour l'aide aux gens qui souffrent actuellement, c'est-à-dire qui souffrent des problèmes d'anxiété, dépression. Actuellement, il y a des délais qui sont triplés depuis le début de la pandémie et il y a deux vitesses. Il y a des gens avec certains moyens qui peuvent avoir recours à un psychothérapeute certifié en privé ou qui sont assez chanceux pour être assurés pour le faire. Les autres Québécoises et Québécois n'ont pas cet accès-là. Nous, on propose de mettre fin à ce problème-là, et dans un court délai, et en pérennité. La CAQ, lors d'une motion, aujourd'hui, là-dessus, a donné le revers de la main à cette solution-là.

On veut être clairs. On veut être clairs, on parle d'une solution structurante, et en pérennité, et, oui, qui coûte cher, ça va coûter 300 millions de dollars. Est-ce que ça va s'adresser de façon efficace, compatissante et sérieuse aux gens qui souffrent dans chaque région du Québec? Oui. Est-ce que le gouvernement, s'il a été disposé, peut agir vite? Oui. C'est basé sur des programmes très probants en Angleterre, en Nouvelle-Zélande, et ça a été bâti sur un programme que notre gouvernement a mis en place, que ce gouvernement a décidé de mettre sur la tablette.

Alors là, on a une proposition devant nous, de toute évidence à fin de non-recevoir, mais voilà une autre chance de changer la donne, qui va donner de l'aide aux Québécois et Québécoises, ils le méritent, et qu'on agisse maintenant pour le faire.

• (18 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Maintenant, je cède la parole à M. le ministre de la Transformation numérique, en remplacement au ministre de la Santé et des Services... délégué Santé et Services sociaux. Allez-y, la parole est à vous.

M. Éric Caire

M. Caire : Oui. Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je pense que je ne surprendrai personne en disant qu'on est présentement dans une lutte à la pandémie, qui amène une réalité qui est complètement différente de celle que l'on connaît, très certainement, et potentiellement que l'on ne connaîtra jamais.

J'ai écouté attentivement mon collègue de D'Arcy-McGee. D'ailleurs, je trouve ça intéressant de voir que, maintenant qu'on est dans l'opposition, on foisonne de bonnes idées. J'ai surtout écouté la proposition et j'ai écouté le montant : 300 millions de dollars. D'abord, Mme la Présidente, permettez-moi de mettre en doute les calculs qui ont été faits par l'opposition officielle. Je pense que le montant de la proposition que les collègues font est substantiellement beaucoup plus élevé que les 300 millions de dollars annoncés. Donc, ça, première remarque, ce serait très intéressant d'avoir une discussion sur ce fameux 300 millions, parce qu'il m'apparaît être nettement sous-évalué.

Ceci étant dit, Mme la Présidente, le gouvernement n'est pas resté les bras croisés, là. À écouter mes collègues de l'opposition, on croirait que le gouvernement n'est pas conscient que la pandémie amène une réalité, une réalité qui est difficile, une réalité qui peut amener, effectivement, des difficultés, des problèmes de santé mentale et qui peut exacerber ces problèmes-là chez les gens qui étaient déjà en situation de problèmes de santé mentale.

C'est la raison pour laquelle on a déposé un plan. Puis ça, je sais que les collègues de l'opposition n'aiment pas le dire et/ou en parler, mais, oui, le gouvernement du Québec a déposé un plan pour lutter contre les problèmes de santé mentale, y faire face, un plan qui a été accompagné d'un budget de 31 millions, soit dit en passant, ce qui amène 250 ressources supplémentaires. Le gouvernement du Québec a mis en place aussi des outils pour aider les gens, notamment sur le site Québec.ca. Le gouvernement du Québec a renforcé le service de la ligne 8-1-1, avec des temps de réponse qui sont significativement réduits et qui permettent, et qui permettent de rejoindre les Québécois qui auraient besoin de ce soutien-là. Le gouvernement du Québec a aussi fait un suivi chez les gens qui avaient déjà, comme je l'ai manifesté et comme je l'ai dit précédemment, qui avaient déjà été identifiés comme étant à risque au niveau de la santé mentale. On a quand même rejoint 325 000 personnes pour faire le suivi.

Alors, Mme la Présidente, moi, quand j'entends mon collègue nous parler de l'improvisation, nous parler du fait que le gouvernement reste les bras croisés, ça, je veux dire, j'ai beaucoup, beaucoup, beaucoup de difficulté. Mme la Présidente, le Québec lutte contre une pandémie, la planète lutte contre une pandémie. Et moi, je veux bien, là, je veux bien qu'on est dans un forum politique et je veux bien qu'on a des échanges qui se veulent politiques, mais, à un moment donné, on a une responsabilité aussi comme élus, là. On a une responsabilité comme élus, qu'on soit au gouvernement, qu'on soit à l'opposition, on a une responsabilité de regarder l'objectif commun, qui est de lutter contre cette pandémie et d'y travailler ensemble.

Et, quand je vois mes collègues, je vais faire attention à mes propos, Mme la Présidente, mais, quand je vois les collègues dépeindre des situations qui sont peut-être beaucoup plus noires que ce qu'elles sont véritablement, avec des objectifs très personnels, personnels à leur formation politique, personnels à l'avancement de leurs idées, bien là je me pose des questions. Être un élu, c'est avoir une responsabilité.

Et j'en veux pour preuve, Mme la Présidente, puis ça, le collègue ne l'a pas mentionné, des usagers en attente de soins : diminution de 21 % pendant la pandémie. 21 % de diminution des temps d'attente. Je n'ai pas entendu le collègue parler de ça. Je n'ai pas entendu le collègue parler de l'argent qui a été investi. Je n'ai pas entendu le collègue parler des différents moyens qui ont été mis en place.

J'entends mon collègue, qui, maintenant qu'il est dans l'opposition, trouve que d'avoir un service public universel, ça devient la panacée, mais, alors qu'il était au gouvernement, moi, je n'ai pas entendu l'ombre du début du commencement de ça. Puis je pourrais lui en parler longtemps. Puis j'aurai certainement l'occasion de le faire avec le collègue de Viau, qui va nous parler des problèmes de santé mentale chez les jeunes, si j'ai bien compris. Puis je vais avoir beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses à lui dire sur le legs politique...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, M. le ministre, vous allez continuer tantôt, parce que votre temps de parole est écoulé. M. le député, votre droit de réplique.

M. David Birnbaum (réplique)

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Bon, dans un premier temps, ça me déçoit de ne pas être en mesure d'avoir des réponses du ministre responsable. Tant mieux.

Je veux parler de notre proposition. Le premier ministre nous invite de mettre des choses concrètes de l'avant, on n'avait pas besoin de sa permission pour le faire, c'est pleinement dans notre façon de faire. Nous sommes à la recherche, Mme la Présidente, depuis la première vague, de gestes structurants et clairs. En voilà une, une proposition qui va assurer que les gens en détresse, peu importent leurs revenus, leurs circonstances, vont avoir de l'aide. Ils n'auraient pas à avoir à attendre pour un médecin, pour une référence, des psychothérapeutes et d'autres qui ont les qualifications vont répondre immédiatement. Oui, ça va coûter 300 millions de dollars. C'est basé sur des exemples probants dans deux pays : Angleterre puis Nouvelle-Zélande.

Le député de La Peltrie a ses doutes. «Get to work! Get to work, do some homework! We've been waiting for months.» Nous attendons des études probantes, l'opportunité pour les experts de s'intervenir, une transparence. Un système, un plan d'action, en voilà un. En voilà un qui va mettre à l'oeuvre une offre universelle publique aux gens en grande détresse. Le gouvernement a une responsabilité d'en agir. Pas avec un numéro 1-800, des coups de téléphone qui sont répondus par quelqu'un, qui vont faire du triage. Il faut un programme désigné, ambitieux, audacieux, et en voilà un.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Donc, nous allons maintenant procéder au deuxième débat, qui portera sur une question adressée par M. le député de Viau au ministre délégué à la Transformation numérique, en remplacement du premier ministre et responsable des dossiers jeunesse, concernant l'impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des jeunes. M. le député de Viau, la parole est à vous.

Impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des jeunes

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : Merci. Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, dans un premier temps, j'aimerais peut-être rappeler au ministre de la Stratégie numérique qu'il n'est ici question du député de Viau ni non plus du Parti libéral du Québec, il est question des jeunes du Québec. C'est de cela dont il s'agit. Et je dois commencer par déplorer, Mme la Présidente, que le ministre de la Santé et Services sociaux ne soit pas là pour répondre à...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, tout à fait, je...

M. Benjamin : Merci pour le rappel...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon, merci. Vous comprenez le règlement. Merci.

M. Benjamin : Mme la Présidente, démotivés, démoralisés, désabusés, c'est comme ça, c'est par ces mots que j'ai commencé, ce matin, ma question au premier ministre, qui est en même temps... bien sûr, c'est notre premier ministre à nous toutes et à nous tous, mais c'est aussi le responsable des dossiers jeunesse. Et, à ce que je sache, il n'a pas démissionné de ses responsabilités comme responsable des dossiers jeunesse. Alors, je veux bien qu'on me serve la soupe pour me dire : Écoutez, concentrons-nous sur la pandémie, mais on peut aussi se concentrer sur les jeunes Québécoises et les jeunes Québécois dont il est question, de leur santé mentale.

Et, Mme la Présidente, il n'y a pas une semaine, il n'y a pas une semaine, depuis les derniers mois, sans qu'on ait vu un article de journal qui nous rappelle, soit les experts, les organismes qui travaillent auprès de ces jeunes, l'enjeu de la santé mentale des jeunes et des jeunes Québécoises. L'angle mort, nous disent les revues de presse. Et aujourd'hui, Mme la Présidente, ce que nous avons comme débat... Parce que je n'ai pas eu... on n'a pas eu d'engagement ferme, parce que, il va de soi, on parle de la jeunesse québécoise, nous sommes obligés de revenir pour poser des questions.

• (18 h 20) •

Lorsque, par exemple, Mme la Présidente, je vous donne comme exemple le ROCAJQ, le regroupement des organismes communautaires jeunesse, un organisme qui regroupe 66 membres et qui rejoignent 300 000 jeunes du Québec, qui a écrit au premier ministre du Québec, et, dans cette lettre envoyée au premier ministre du Québec, qui est le responsable des dossiers jeunesse, le ROCAJQ lui rappelle ceci : «...notre constat depuis le début de cette crise est à quel point les jeunes — de 12 à 29 ans — sont exclus, jusqu'à maintenant, des mesures de soutien[...]. [Nous tenons à] vous sensibiliser à leur réalité, à leur besoin [en matière de santé mentale]. [...]Les jeunes qui étaient déjà fragilisés le sont encore [davantage]. En cette période stressante, incertaine et anxiogène, nous sommes inquiets de la santé mentale des jeunes.» Et je veux déposer, Mme la Présidente, si vous permettez, cette lettre qui a été envoyée par le ROCAJQ au premier ministre du Québec.

Mme la Présidente, lors des crédits budgétaires, j'ai moi-même questionné le premier ministre pour lui demander c'était quoi, son engagement pour la santé mentale des jeunes. On n'a pas eu de réponse. Je suis revenu à la charge aussi par une question au feuilleton. Et, Mme la Présidente, j'écoutais le ministre de la Stratégie numérique, c'était véritablement... je ne sais pas si le mot «cassette» est parlementaire ou est antiparlementaire, mais c'est une véritable cassette parce que la réponse que j'ai eue au feuilleton, Mme la Présidente, c'est exactement ce que le ministre nous disait. Aucun engagement, aucun engagement, donc, pour soutenir les enjeux de santé mentale des jeunes Québécoises et des jeunes Québécois.

Mme la Présidente, il n'y a pas si longtemps, le 30 juin dernier, une vingtaine d'organismes jeunesse, et pas des moindres, Force Jeunesse, le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec, venaient rappeler au gouvernement du Québec... Et je pourrais faire la liste, Mme la Présidente, ils sont une vingtaine d'organismes jeunesse qui sont venus rappeler au gouvernement du Québec que les jeunes de 18 à 35 ans sont peut-être moins à risque d'être victime de la COVID, et j'aimerais bien que le ministre nous entende, m'écoute, mais force est de constater qu'ils sont aussi directement concernés par des conséquences collatérales de la pandémie. J'aimerais déposer aussi cet article, cette coupure de presse, Mme la Présidente, au sujet de l'avenir des jeunes Québécois tel que nous l'a dit les organismes jeunesse du Québec.

Et, pour terminer, Mme la Présidente, il y a aussi cette demande, cette demande qui a été formulée par Force Jeunesse du Québec. Force Jeunesse qui vient rappeler que, dans cette pandémie, que, dans cette pandémie, bien sûr, les premiers à être expulsés du marché du travail, ce sont les jeunes. Et Force Jeunesse est arrivée avec des propositions concrètes, notamment au niveau de la Loi sur les normes du travail, pour soutenir en matière de santé et de sécurité du travail par rapport à la santé et aux enjeux de santé mentale des jeunes. Là encore, lettre morte.

Voilà, nous avons fait une proposition concrète, Mme la Présidente. Et je salue, je remercie le député de D'Arcy-McGee d'avoir fait cette proposition qui va soutenir les besoins des jeunes...

Documents déposés

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a consentement pour que le député de Viau dépose les deux documents? Il y a consentement. M. le député de Viau, vous allez devoir les envoyer électroniquement.

Alors, M. le ministre, je vous cède la parole pour une durée de cinq minutes.

M. Éric Caire

M. Caire : Merci, Mme la Présidente. Bien, je ne sais pas si le terme «cassette» est parlementaire, mais j'invite le député de Viau à être très attentif, parce que, dans le message que je vais lui passer, il n'y en aura pas, de cassette.

Le député de Viau a commencé son interpellation... pardon, son débat de fin de séance en disant : Il ne s'agit pas du député de Viau, il ne s'agit pas du Parti libéral. C'est vrai qu'il ne s'agit pas du député de Viau, mais, oui, il s'agit du Parti libéral. Et moi, je vais lui raconter l'histoire d'un jeune, d'un jeune qui avait besoin de services il y a 14 ans de ça, alors qu'on disait : Cet enfant-là, il a un problème, il a besoin de services, puis qu'on nous disait : Non, non, non, ça va se corriger, tout va bien aller, tout va bien aller, pour lequel les parents ont répété, année après année, jusqu'à la troisième année, où, enfin, la psychologue de l'école l'a vu, enfin, après trois ans, trois ans d'efforts. Pour dire quoi? Oui, cet enfant-là a besoin de services et, non, il ne les aura pas à l'école. Allez au privé. C'est ça qu'il s'est fait dire, cet enfant-là il y a 14 ans. Ce n'était pas le gouvernement de la CAQ qui était au pouvoir à ce moment-là, Mme la Présidente, c'était le Parti libéral, c'était le gouvernement libéral qui était là puis qui nous font des leçons aujourd'hui sur le traitement des jeunes.

Mais je vais poursuivre parce que ce jeune-là a été en CLSC, hein? Besoin de soins? On va essayer au CLSC, guichet de santé mentale. Aïe! Le guichet de santé mentale. La psychologue du CLSC, qu'est-ce qu'elle lui répond, à ce jeune-là? Malheureusement, je suis limitée à 16 séances avec votre enfant. 16 séances. Mais je peux vous référer au privé. Ça, Mme la Présidente, c'était il y a 11 ans.

Le même enfant, l'orthophoniste, qui lui dit : Oui, il a besoin de soins en orthophonie. Malheureusement, je suis une demi-journée par semaine à votre école. Je ne peux pas faire de suivi. Allez au privé. C'est ça qu'il s'est fait répondre, cet enfant-là il y a 11 ans. Qui était au gouvernement, Mme la Présidente? Les gens qui, aujourd'hui, veulent nous faire des leçons sur comment traiter les jeunes.

Et là je pourrais continuer comme ça, mais je vais m'arrêter là parce que des histoires d'horreur, ce jeune-là et des milliers de jeunes en ont vécues fois après fois, appel après appel, parce que le gouvernement libéral ne s'est jamais vraiment préoccupé des jeunes avant aujourd'hui. Le gouvernement libéral, qui nous arrive avec une pseudo-proposition de 300 millions, dont, dans les faits, on pourrait plutôt calculer qu'elle est dans les milliards, n'avait pas la bonne idée, au moment où il était au gouvernement, de mettre de l'avant cette proposition-là. C'est le fun, être dans l'opposition, hein, Mme la Présidente? Parce que, finalement, on a toutes les solutions, on a toutes les bonnes idées.

Mais qu'est-ce que le gouvernement de la CAQ a fait avec mon collègue le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux? D'abord, le portrait de la DPJ. Je veux juste rappeler à mon collègue que ce qu'on a entendu sur la DPJ, ce n'était pas le fun, puis ça aussi, c'est un legs libéral. La commission Laurent est sur pied justement pour être capable de corriger ces problèmes-là qui s'adressent directement aux jeunes. Mon collègue ministre délégué à la Santé a mis en place le programme Agir tôt. Pourquoi? Parce que tout le monde s'entend que ce petit bonhomme là, il y a 15 ans, qui était en troisième année, aurait dû les avoir, ces services, et même bien avant, parce qu'agir tôt c'est fondamental. Nous, on l'a fait, on l'a mis en place, le programme. On a financé le programme. Les sommes sont là pour aider les jeunes, pour être capable de détecter les problèmes à la base parce que c'est à cette période-là qu'il faut intervenir.

Alors, Mme la Présidente, de voir le député de Viau, dans un contexte de pandémie, hein... parce que, comprenons-nous bien, là, en plus de ramasser des pots cassés, en plus d'hériter d'une situation dramatique et pathétique, le gouvernement actuel a aussi à faire face à une pandémie. Ça non plus, le gouvernement libéral, Mme la Présidente, la seule pandémie à laquelle ils ont fait face, c'était plus les questions éthiques puis de corruption qu'il était question, puis la source de la pandémie, on la connaissait, de cette pandémie-là, on la connaissait.

Alors, Mme la Présidente, aujourd'hui, de se faire donner des leçons par mon collègue de Viau, mon collègue de D'Arcy-McGee, qui nous arrivent avec des solutions en disant : Ça coûtera ce que ça coûtera, alors que le gouvernement est en action, je ne vous dirai pas ce que j'en pense, Mme la Présidente, mais ce n'est pas très parlementaire.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole pour votre droit de réplique de deux minutes.

M. Frantz Benjamin (réplique)

M. Benjamin : Merci, Mme la Présidente. Et, comme il est question des jeunes, c'est cela dont il est question pour moi, Mme la Présidente, je vais céder la parole à Danaé Langlois, 15 ans, à travers son cri du coeur en mai dernier : «Qui pense à nous, à tous les étudiants qui ont passé leurs années du secondaire dans la peur, le stress, l'anxiété, l'angoisse, à tous les étudiants qui se forçaient chaque jour pour aller à l'école car ils n'étaient pas bons et ne voyaient plus le bout? Qui pense à eux? Qui pense à nous, nous qui sommes laissés à nous-mêmes avec de longs travaux à faire seuls sans encadrement, sans enseignant pour nous rassurer sur notre avenir scolaire?

«Je sais, je sais que la population mondiale qui est touchée n'est pas juste moi, mais, pendant que le gouvernement et tous les médecins pensent à notre santé et à la COVID, qui pense à notre bien-être mental? Qui pense à notre bien-être mental? À tous les sportifs qui sombrent, chaque jour, dans un monde sans stimulation, sans équipe, sans adrénaline, sans peut-être la seule chose qui les rendait bien, souriants, et tout ce qui nous tenait en vie?»

• (18 h 30) •

Alors, je tiens à dire à Danaé Langlois, aujourd'hui : Le gouvernement a refusé de vous entendre, mais nous, du côté de l'opposition officielle, nous vous avons entendus. Et c'est pour cette raison que nous allons continuer. Nous allons encore continuer. Danaé, en votre nom et au nom des nombreux jeunes Québécoises et Québécois qui ont besoin plus que jamais du soutien nécessaire, pourtant, pour leur santé mentale, nous allons revenir à la charge. Nous allons parler en votre nom, car cette parole, elle est importante. Nous croyons qu'il faut continuer effectivement à parler des enjeux de la COVID, mais à parler aussi des angles morts. Et, parmi ces angles morts, il y a vous, Danaé, il y a d'autres jeunes dans toutes nos circonscriptions au Québec, dans les 125 circonscriptions, dans toutes les régions du Québec. Et, pour ces jeunes-là, au nom de ces jeunes-là, nous allons continuer à parler, à rappeler au gouvernement l'importance, la nécessité qu'il investisse dans les enjeux de santé mentale pour la population québécoise. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député.

Ajournement

Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés jusqu'au mardi 20 octobre 2020, à 13 h 40.

(Fin de la séance à 18 h 31)