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Version finale

39th Legislature, 2nd Session
(February 23, 2011 au August 1, 2012)

Monday, August 22, 2011 - Vol. 42 N° 16

Examen des orientations, des activités et de la gestion administrative de La Financière agricole du Québec


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Table des matières

Journal des débats

(Dix heures deux minutes)

Le Président (M. Paradis): Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires ou autres types d'appareils du même acabit.

La commission est réunie afin de procéder à des auditions publiques dans le cadre de son mandat de surveillance de La Financière agricole du Québec.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gaudreault (Jonquière) est remplacé par M. Marceau (Rousseau); M. Trottier (Roberval) est remplacé par M. Simard (Kamouraska-Témiscouata).

Le Président (M. Paradis): J'en profite pour souligner à ce moment-ci que la présidence a été informée du remplacement de Mme la députée d'Iberville à titre de porte-parole en matière agricole -- elle s'en va comme porte-parole en matière de la famille -- par M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Bienvenue parmi nous à titre de porte-parole en agriculture.

Les députés sont tous présents, M. le vice-président est là. C'est un peu extraordinaire de siéger le lundi, parce que, dans nos comtés de région, habituellement le lundi, c'est le bureau de comté. Il y a des gens qui sont partis, là, d'aussi loin que de la Gaspésie, ou de l'Outaouais, ou des Cantons-de-l'Est, du Bas-du-Fleuve, Iberville, Kam-Témis, Rousseau pour consacrer leur journée à accomplir un mandat de l'Assemblée nationale du Québec.

La journée risque d'être longue. Nous entendrons, dans l'ordre, les personnes suivantes: à 10 heures, ce matin, Mme Lorraine Cormier; à 11 heures, l'organisme Au Coeur des familles agricoles; à midi, l'Union des producteurs agricoles. Il y aura suspension des travaux pour une durée de une heure. Par la suite, à 14 heures, Mme Marie-Christiane Lecours, administratrice à La Financière agricole; suivie de Mme Solange Morneau; suivie de Mme Renée Saint-Hilaire; de Mme Gisèle Grandbois. Suspension des travaux à 18 heures, reprise des travaux à 19 heures. M. Claude Lambert, administrateur de La Financière; M. Gilles Lavoie et M. Denis Pageau. Et, si tout se déroule conformément à notre réglementation, nous ajournerons nos travaux à 22 heures, ce soir.

Auditions

À ce moment-ci, j'inviterais la première personne qui est appelée à rendre témoignage devant la commission, Mme Cormier, à bien vouloir prendre place. Au centre, Mme Cormier, s'il vous plaît. Vous avez, Mme Cormier, tel que convenu, 15 minutes pour effectuer votre présentation, et par la suite, pour une durée de 45 minutes, les députés de chaque côté de la table, là, vont intervenir pour vous interroger, pour vous poser des questions. Votre témoignage doit être libre et sans contraintes. Le règlement prévoit que vous pouvez témoigner assermentée ou sans être assermentée. La différence substantielle -- vous devez, dans tous les cas, nous dire la vérité -- si vous êtes assermentée, vous jouissez de la même immunité que les députés de l'Assemblée nationale du Québec. C'est un choix qui est personnel.

Mme Lorraine Cormier et M. Éric Martin

Mme Cormier (Lorraine): Oui. Effectivement, peut-être que, par l'énervement, il y a peut-être des gens qui vont être écorchés sans que je m'en rende compte nécessairement. Oui, je demanderais d'être assermentée.

Le Président (M. Paradis): Mme la secrétaire, veuillez procéder à l'assermentation.

Mme Cormier (Lorraine): Par le fait même, aussi, derrière toute entreprise agricole, il y a des femmes et il y a des hommes. Vous m'avez demandé à témoigner, je vais témoigner, mais j'aimerais que mon conjoint soit ici, à côté de moi. Est-ce que vous acceptez?

Le Président (M. Paradis): Est-ce qu'il y a des objections? À ce moment-là, est-ce que...

Mme Cormier (Lorraine): Je vais faire la présentation. Quand il y aura la période de questions, si vous voulez, on pourrait répondre à deux, les deux...

Le Président (M. Paradis): Bien, si vous comparez ça à deux... si vous répondez à deux, je vais être obligé de lui demander également s'il souhaite être assermenté, pour que vous soyez sur un pied d'égalité, là. Ça va?

Assermentation

Mme Cormier (Lorraine): Oui. Je, Lorraine Cormier, déclare sous serment que je dirai toute la vérité et rien que la vérité.

M. Martin (Éric): Je, Éric Martin, déclare sous serment que je dirai toute la vérité et rien que la vérité.

Le Président (M. Paradis): Merci beaucoup. Vous pouvez débuter votre témoignage, Mme Cormier.

Mme Cormier (Lorraine): M. le Président, membres du comité de la commission, MM., Mmes les députés, merci de m'avoir invitée. Pour pouvoir dire comment se vit des mesures de resserrement, ça prend un peu une explication: qui nous sommes. Alors, je suis... Les deux, on est du milieu agricole. On ne faisait pas partie des plans de relève de nos familles respectives. Et, nous, on s'est connus en milieu de travail. J'ai un bac en agronomie. J'ai exercé, pendant sept ans, aussi de la mise en marché des grains pour tout le Québec au complet. Mon conjoint était représentant laitier, végétal. Donc, on est des gens qui connaît l'agriculture passablement bien.

Et, nous, notre souhait quand on s'est connus, c'était d'avoir une entreprise agricole. Alors, on a été formés aussi pour être capables de non seulement conseiller les gens, mais aussi d'être capables de relever des défis en agriculture. Alors, ce qu'on a fait, on s'est servi d'un premier levier... Nous, on s'est construit une maison et on s'est servi, comme premier levier, avec l'aide à la relève agricole. On s'est assis avec La Financière et on a demandé... On voulait une entreprise, et, quand on a acheté notre première ferme, on nous a dit: Bien, va à contrat, prends-toi un contrat à l'intégration, puis, à ce moment-là, on va vous prêter. Alors, c'est ce qu'on a fait. On a démarré notre première ferme en 1996 à contrat.

Quatre ans plus tard, en 2000, on a dit: Nous, on est des leaders, on est des gens qui aiment prendre des décisions, on veut acheter le troupeau, on veut être à notre compte. Et, à ce moment-là, bien ce qui s'est passé... Bon, il y a eu quelques... ça a fait en sorte qu'on n'a pas pu acheter le troupeau. Alors, nous, on a mis cette ferme-là en vente. Et on avait entendu parler d'une autre entreprise qui voulait vendre la partie naisseur-finisseur, une porcherie naisseur-finisseur. Alors, on a acheté cette entreprise-là. On s'est servi d'un deuxième levier, la vente de la première ferme, pour acheter notre entreprise.

Maintenant, on a une ferme porcine naisseur-finisseur spécialisée. En fait, c'est qu'on n'a pas de culture qui est avec cette entreprise-là, on produit... On a 250 truies naisseur-finisseur, on produit un 5 000 porcs annuellement. On est exactement... En fait, le modèle de l'assurance stabilisation, de l'ASRA, c'est 228 truies naisseur-finisseur, 4 000 quelque chose... 4 200 porcs, je crois. Alors, on est exactement dans le modèle type que La Financière agricole a fait, a évalué.

**(10 h 10)**

Alors, nous, on utilise... On aime le travail d'équipe, donc on utilise, chacun, les forces de chacun. Moi, j'avais l'achat des... J'ai toujours fait l'achat et la vente d'intrants, donc tous les achats passaient par moi. Lui, au niveau nutrition, bien il gérait ça. On fabrique nos moulées à la ferme. Donc, on était capables d'aller acheter les bases et pouvoir aussi aller chercher les meilleurs coûts possible pour les moulées.

En 2008, il a commencé à y avoir des entrées... En fait, il n'a pas commencé, il y en avait, mais il y en a eu beaucoup parce qu'il y a eu... Les crises ont commencé, en production porcine, avec les hausses de dollar, les fermetures de frontières. Il y a eu beaucoup de porcs, de porcelets qu'ils ont rentrés en provenance d'ailleurs et qui étaient stabilisés, et ces prix de porc, de porcelet là arrivaient à des prix de dumping. Donc, les naisseurs stricts, spécialisés naisseurs, eux, ils vendaient leurs porcelets à rabais.

Alors, on s'est associés avec le cousin à Éric et sa conjointe, on s'est associés les quatre ensemble. Eux autres, ils avaient une maternité. Alors, nous, ce qu'on a fait, on a dit: On va s'associer ensemble, on va acheter une ferme pour la transformer, pour pouvoir finir tous les porcelets issus de cette maternité-là. Puis en même temps on avait un objectif, les quatre associés, on connaissait toutes les fermes et on s'est dit: On va pouvoir avoir des vacances. Ça, c'est quelque chose qui est important, dans... Sur une ferme, on travaille sept jours sur sept. Alors, l'objectif était d'avoir des vacances et aussi de pouvoir...

On n'avait plus, naisseurs-finisseurs... 200 truies, 250 truies naisseur-finisseur, on a de moins en moins d'intérêt, pour les abattoirs, on est moins intéressants. On est moins intéressants pour les transporteurs parce qu'on est une demi-van, on livre 100 cochons par semaine, on n'en livre pas 200, 210 comme une van complète. Ça fait qu'on se disait: L'objectif, c'est d'être capables de prendre de l'expansion, mais... Donc, on a acheté une ferme qui était une reprise de finance de La Financière. En 2008, on a fait une soumission, on l'a eue, les quatre associés ensemble. Donc, on a acheté cette ferme-là. On a monté les budgets, on a travaillé avec La Financière. Nous, c'est La Financière qui nous a prêté depuis qu'on a démarré en agriculture. Donc, c'est le «set-up». À quatre, à quatre jeunes comme nous -- je suis la plus vieille des quatre -- on a un 750 truies naisseur-finisseur. Je vous dis «on a», je m'excuse, «on avait».

En 2009, le temps de passer les contrats... Tout s'est fait en février 2009. Là, dans la vraie vie, qu'est-ce qui se passe? À quoi ça ressemble, des mesures de resserrement? Depuis 2009, La Financière a appliqué des mesures de resserrement. Bref, ce n'est pas le rôle de l'ASRA, des assurances de payer sans arrêt pour les bas prix du porc, c'est vraiment fait... C'est une assurance, là, c'est pour pallier à des choses ponctuelles. On vit une crise, c'est une cinquième année de crise, c'est sûr et certain qu'on ne peut faire... on ne peut tout le temps vivre de ça. Mais, parce qu'on a distribué «at large», on n'a pas mis... on n'a pas pris... comment que je peux dire ca? On n'a pas su mettre notre pied à terre, en tant que Financière agricole, puis dire: Bien, il y a des gens qui n'ont pas besoin ou qui ont moins besoin. Si on aurait séparé les classes de producteurs, peut-être qu'aujourd'hui on ne serait pas là, ici, en train de discuter de ça.

Quelques mois après qu'on a eu acheté de La Financière cette entreprise-là, qu'on a commencé à faire les transformations, La Financière a coupé dans le coût de production, ce qui a fait que cette entreprise-là, quelques mois plus tard... quelques mois auparavant, était rentable, elle a passé non rentable, non viable, tout de suite, quelques mois après, quand elle a appliqué ces mesures de resserrement là. Pour nous autres, là, quelqu'un qui vend des porcs, ça nous représentait, en 2009, 11 $ par porc. Cette ferme-là, qui avait pour objectif de produire un 9 000, 10 000 porcs, bien, fois 11 $... c'est ça. Donc, elle a passé négatif. Et, même chose pour notre ferme à nous, qu'on avait, c'est très difficile, au jour un, de penser qu'il faut récupérer, là, beaucoup de dollars pour être capable de passer au travers.

Alors, on s'est assis avec La Financière, on disait: Est-ce que vous nous auriez prêté avec le nouveau modèle? Et la réponse était claire, c'était toujours: Non, on ne vous aurait pas prêté. Alors, on disait: Les clés sont là, reprenez-les. Et on disait: Non, ça va se replacer, ça va se replacer, ça va se replacer. Et donc ce qui arriva arriva. Après plusieurs rencontres avec La Financière où on leur disait: Reprenez, là, on va frapper le mur, ça ne fonctionne pas...

Ça ne fonctionne pas. Les mesures de resserrement, on coupe, on coupe, on coupe. Le coût de production, là... Un coût de production, avec des coupures, ça ne peut pas fonctionner. Ça ne représente pas un coût de production pour un porc. Et en plus on vit l'expansion du... une augmentation. C'est énorme, le prix des grains. Puis 80 % de notre coût de production, c'est l'alimentation pour la ferme porcine. Donc, c'est difficile, là, avec l'augmentation.

Et, en novembre, en novembre 2010... novembre 2010, La Financière a repris les clés de cette entreprise-là parce que...

Une voix: ...

Mme Cormier (Lorraine): Elle nous avait... C'est ça, La Financière, qui nous avait prêté un montant d'argent et qui croyait en nous, elle dit: Bon, on reprend les clés puis on la vend. Voulez-vous savoir, cette vente-là, à quel prix elle s'est vendue? On vient de passer chez le notaire, la semaine passée, tout a été fait. On nous dit en pleine face... J'ai téléphoné à tous les intégrateurs pour qu'ils viennent soumissionner. Cette ferme-là, elle a été vendue 154 000. Une ferme, une maison -- il y avait cinq personnes avant qui vivaient là -- une piscine creusée, un 10 acres de terre pour l'emplacement des porcheries, porcheries, deux garages doubles, tout le kit, ça s'est vendu pour 154 000. En connaissez-vous, des endroits où il y a des maisons qui se vendent moins cher que ça?

Alors donc, actuellement il y a des gens qui sont mieux nantis, on parle de gens qui ont de la... qui transforment leurs produits, eux, ils sont capables d'acheter des entreprises à rabais. S'il y a des entreprises à rabais qui s'achètent par ces gens-là, est-ce qu'elle a vraiment besoin d'ASRA pour passer au travers? Je ne suis pas sûre. Alors, comme tel, quand on n'est pas capable de mettre notre pied à terre puis on applique des mesures de resserrement irréfléchies... Parce que c'est vraiment irréfléchi, là. On a coupé «at large», à tout le monde, puis il y a des gens là-dedans qui en bénéficient, mais malheureusement pas la ferme familiale. Et, aujourd'hui...

Une voix: ...

Mme Cormier (Lorraine): Oui, c'est irréfléchi puis c'est aussi improvisé. On aurait dû prendre le temps... En 2002, là, quand on ne voyait plus clair avec la production porcine, là, on a mis un moratoire. Pourquoi on n'a pas pris un temps d'arrêt, là, pour réfléchir: Wo! qu'est-ce qui se passe? Qui qui en a besoin? Qui c'est qui n'en a pas besoin?

Aujourd'hui, on avait trois entreprises, on en a une... On avait trois entreprises à quatre associés, maintenant on en a une. On essaie de sauvegarder la nôtre à Pike-River. On essaie, avec toutes les coupures qui ont eu lieu. Et, cette année, ce qui nous fait encore plus de dommage, le prix des... une van de maïs: 340 $ la tonne livrée. Ça coûte 10 000, 11 000 $ à chaque semaine, j'ai besoin d'une van par semaine pour la moulée. La moyenne des 10 dernières années, c'était autour de 150, 200 $ la tonne. Ça, c'est très difficile à absorber.

Puis en plus on me dit, dans le nouveau modèle: Bien, toutes les fermes ont toutes 57 hectares de grains. Je regrette, si elle regarderait ses papiers, La Financière, elle aurait vu que, quand elle nous a prêté, elle ne nous a pas prêté pour des terres. Donc, les productions sans sol, là, actuellement qui ont opté pour se spécialiser, eux, là, c'est eux autres le plus dans la marde, mais j'en connais -- excusez -- qui sont le plus dans le trouble. Je m'excuse, j'ai...

Des voix: ...

**(10 h 20)**

Mme Cormier (Lorraine): On va mettre ça sur le dos du stress. Désolée pour l'auditoire.

C'est comme ça qu'on vit, on nous maintient dans l'incertitude. Par l'incertitude, nos banques n'ont plus confiance en nous autres. Alors, actuellement, à l'heure où nos banques... Parce que le prix des grains est plus cher, on devrait avoir une marge de crédit plus chère pour être capables de payer nos intrants. Bien, eux autres, tout ce qu'ils ont comme intention, c'est de couper la marge de crédit. Et, si on n'aurait pas tout... En plus, cette année, là, on nous met des... des... les 25 % les moins efficaces. Ça aussi, ça rentre en ligne de compte. C'est des coupures, c'est des coupures, c'est des coupures. Dans la vraie vie, là, je n'en ai pas, de coupure parce que mon dollar a monté à 1,04 $. C'est drôle, hein, on importe tous nos produits pharmaceutiques, et tout, je n'ai jamais eu de coupure, moi, de 30 %, là, pour mes intrants, là.

Et ça fait longtemps qu'on demande un message clair. Là, au lieu de nous donner un message clair: On n'en veut plus, de fermes sans sols, on n'en veut plus, de fermes familiales, on veut de l'intégration... Bien, si c'est ça, le message clair, là, au lieu de nous laisser crever, si La Financière est conséquente... En fait, je lis des choses, hein: Il n'y en a pas, de crise, parce qu'il n'y a pas de diminution de porcs, il n'y a pas diminution de la production. La Financière, elle dit ça, ça sort de la bouche de La Financière, de nos présidents, ça sort de notre ministre. J'ai quand même beaucoup de respect pour ces gens-là parce qu'ils font une job... Ils sont très efficaces dans leurs rôles, là, dans ce qu'ils appliquent, mais il reste que, dans la vraie vie, ça ne marche pas, ça, là.

Un vrai coût de production, ça prend... c'est ça, élever un porc, il y a un prix. C'est une crise majeure. Ça prend un programme à côté. Mais là, actuellement on nous fait un programme à côté des programmes d'adaptation, où, la semaine passée, on commence à avoir des réponses chez nous. Mais là la réponse, c'est... Là, on s'ostine sur les chiffres que notre conseiller a faits. Là, actuellement, là, on est à cette étape-là, là. Quand est-ce qu'on va répondre, là?

Le Président (M. Paradis): Mme Cormier, je m'excuse de vous interrompre, mais à ce moment-ci, là, votre 15 minutes est expiré. Ce que je peux demander, c'est qu'on consente pour un 5 minutes additionnel. Je diviserai le temps de façon équitable entre les différentes formations politiques. Est-ce que ça va?

Des voix: ...

Le Président (M. Paradis): Vous pouvez continuer, Mme Cormier.

Mme Cormier (Lorraine): Merci. Je vais le redire, là: Il n'y en a plus, de liquidités, hein, parce qu'on a décidé de couper tout le monde au lieu de regarder qui qui avait les besoins puis de continuer comme ça. Je pense qu'ils avaient une orientation qui était assez claire, et maintenant je suis... je suis... Je n'ai pas apporté mes clés, parce que c'est quelqu'un qui travaillait aujourd'hui pendant que je suis ici, là, mais peut-être qu'il y aurait eu quelqu'un qui aurait repris mes clés, là. Je ne le sais pas, où est-ce que je m'en vais, là, c'est de l'incertitude totale.

Et, si l'orientation était claire... Et, si on dit qu'il n'y en a pas, de problème, parce que la production, elle continue toujours d'être au même nombre de porcs abattus, et même en augmentant, c'est parce qu'on prend la ferme de nos producteurs indépendants puis on la refile à des gens qui ont de la transformation, qui ont des valeurs ajoutées à leurs carcasses de porcs. Alors, comme tel, s'il est conséquent dans ses gestes, il va fournir une aide pour que les gens se retirent, il va laisser les bâtisses vides. Parce que c'est ça, il dit, là: Il n'y en a pas, de diminution de production, là. Bien, s'il n'y en a pas, redonnez-la pas à des gens qui la remplissent, la bâtisse, là. Je ne le sais pas, là, mais il y a quelque chose... Ça ne diminuera jamais, jamais, jamais, là, si on continue à faire ça.

Alors, c'est ou bien... En fait, on fait un vrai coût de production, on arrête de couper, on enlève... on sépare par les classes de producteurs, là, qui qui en a le plus besoin. Ceux qui en ont moins de besoin, mettons-les de côté pour régler. Prenons une pause, là, pour voir, là. Consolidons les fermes qui sont en place actuellement au lieu de les faire crever, là. Il y a plein de solutions, il y en a plein, de solutions. Un gel des cotisations. Ça coûte de plus en plus cher. Pourquoi qu'on n'en fait pas, là, des gels de cotisation? Il faut pallier au manque de liquidités, parce qu'on l'a pris. Ça prend aussi des orientations qui sont claires, d'arrêter de nous mener en bateau. Si c'est ça, le message, là, que tout le monde est intégré, là, arrêtons de... ça ne donne rien d'être assis icitte, là, puis essayer de négocier, là, il n'y a rien à faire.

Parce qu'on fait ça, il y a eu des changements de cap qu'on ne pouvait prévoir, parce que, moi, tout le long... Puis, en fait, 50 % des productions... des producteurs, ils sont financés à La Financière agricole. Bien, personne n'était capable de prévoir un changement de cap aussi drastique. Dans ce sens-là, on est comme pris en otages.

M. Martin (Éric): Même La Financière n'était pas capable de le prévoir. Parce qu'on est l'exemple, l'exemple type, on a été prêté, puis, six mois après, les mêmes conseillers qui nous ont prêté n'expliquaient pas pourquoi ils nous avaient prêté, parce que le coût de production avait diminué de 11 $ du cochon. Tu sais, je m'achète une maison, la banque me finance, puis... C'est un peu comme une crise immobilière, on voit ça comme ça, là, tu sais, on s'achète une maison qui vaut 200 000 $, puis, du jour au lendemain, elle en vaut 100 000 $, puis celui qui me donnait mon revenu pour me la payer, c'est celui qui m'a prêté, ça fait que, lui, il la reprend. Tu sais, j'essaie d'être clair un peu là-dedans.

Malgré notre compétence, malgré le fait qu'on est des gens formés, agronomes, techniciens, on avait zéro chance de prévoir ce qui s'en venait. Ça n'a pas été annoncé. Il n'y a eu aucun temps d'adaptation. S'ils auraient annoncé ces mesures de redressement là et cette diminution du coût de production là...

Une voix: ...

M. Martin (Éric): ...avec un temps, cinq ans -- exemple, dans cinq ans, le coût de production va baisser -- bien on aurait été capables, chez nous -- en tout cas, moi, je parle pour nous autres -- de restructurer nos dettes, de baisser nos prêts, notre endettement. Là, ça a été du jour au lendemain. Même, ça a été rétroactif, parce qu'on était rendu au mois de janvier, ils ont annoncé qu'il y avait des coupures rétroactives du mois de novembre. Assez difficile à prévoir, ça, comme gestionnaire, là.

Le Président (M. Paradis): Merci, M. Martin. À ce moment-ci, je céderais la parole à un député du côté ministériel. M. le député de Gaspé, après ce long voyage.

M. Mamelonet: Ce n'est pas si long que ça, c'est juste la moitié du Québec. M. Martin, Mme Cormier, merci beaucoup d'être ici ce matin. Bienvenue à tous les membres de la commission qui se sont, eux aussi, déplacés de façon à pouvoir écouter ces témoignages.

On se rappellera de la... en fin de compte, du mandat de la commission, qui est un mandat de surveillance de La Financière agricole où on essaie de décoder un petit peu comment est-ce que La Financière agit en fonction de... c'est-à-dire de l'évolution du monde agricole.

Et je prends bonne note de votre témoignage, qui est un témoignage qui est excessivement poignant, excessivement troublant aussi, dans la mesure où de jeunes entrepreneurs se retrouvent face à une situation où ils sont obligés de laisser tomber une partie de leur entreprise. Et là vous êtes maintenant, si j'ai bien compris, en train d'essayer de sauver une dernière portion de votre capital, votre capital entrepreneurial.

Donc, dans tout ce que vous nous disiez... Je ne suis pas un spécialiste de l'agriculture, loin de là. En Gaspésie, vous savez qu'on a très peu de fermes, quelques fermes ovines, bovines et un petit peu de foin, mais on n'a pas grand-chose, on est plutôt dans les pêches. Mais, dans votre témoignage... Bon, j'essaie de décoder un petit peu tout ce que vous nous avez amené, là. Mais, selon ma compréhension et selon ma connaissance, les mesures de resserrement de La Financière ont été mises en place uniquement cette année. Or, vous avez commencé à rencontrer des difficultés à partir de 2009, si j'ai bien compris. C'est ça?

Mme Cormier (Lorraine): Oui.

M. Martin (Éric): Absolument.

Mme Cormier (Lorraine): En 2009, on a changé le coût de production, on a changé les méthodes de calcul de coût de production.

**(10 h 30)**

M. Martin (Éric): On n'a pas besoin d'avoir le 25 %, tu sais, la coupure du 25 % -- nous autres, on l'appelle comme ça -- pour être en difficulté, parce que n'importe qui qui... Le prix du cochon, il coûte environ, mettons, 230 $ à produire, 220 $. Le coût de production est ajusté à 211. On voit tout de suite qu'il en manque 20 $. Ça fait que, même si vous le mettez, le 25 %, ou vous ne le mettez pas, il en manque déjà 20 $.

Tu sais, on ne rentrera pas dans les guerres de chiffres, parce que ce n'est pas vraiment notre rôle, là, mais, nous autres, ce qu'on veut... ce qu'on dit, c'est que le coût de production de base a été ajusté en 2009 en fonction de diminuer la dette de La Financière -- nous autres, c'est la seule façon qu'on le voit -- au détriment des producteurs. À partir de ce moment-là, La Financière -- Lorraine, elle l'a sorti, là, c'était dans un texte de l'Assemblée nationale, là -- le mandat de La Financière, c'est de garantir un revenu net positif aux producteurs agricoles. Ce n'est pas moi, ce n'est pas nous autres, là, qui a inventé ça, là, c'est écrit, là, dans le texte, dans le mandat de La Financière. Ce n'est pas le cas depuis 2008-2009, il manque de l'argent.

Puis, les études du coût de production qui sont faites par La Financière démontrent qu'il en manque, de l'argent. Nous autres, on est deux jeunes formés, donc on participe à tout ce qui se fait en termes de coûts de production, les études, on a participé aux coûts de production de La Financière agricole puis, la même année, on a participé aux coûts de la Fédération des producteurs de porcs. C'est deux études qui avaient le même but: déterminer comment ça coûte, un porc. Puis, dans les deux cas... Dans un cas, on était positifs, qui était avec La Financière agricole, puis, dans l'autre, on était négatifs de 11 $.

Mais c'est probablement... C'est des agronomes puis des gens qui calculent des budgets, tu sais; il n'y en a pas un qui est moins compétent que l'autre, là. C'est parce qu'il y a eu des choses erronées à quelque part. Il y a des chiffres que La Financière ne tiennent pas compte puis que, dans la vraie vie, ils nous coûtent quelque chose, là, tu sais.

Mme Cormier (Lorraine): Regardez, c'est mon programme, mon diagnostic, mon plan d'affaires qui a été remis au MAPAQ pour les programmes d'adaptation -- vous viendrez le voir, si vous voulez, là: les quatre dernières années, là, j'ai battu le modèle. On n'a pas de sols, on est efficaces, on est dans un endroit où c'est isolé, on n'a pas de maladie, on travaille fort dans nos bâtisses pour... Chaque cenne est calculée. On a battu le modèle et on n'arrive pas. Ça ne fonctionne pas.

M. Martin (Éric): Donc, il y a des coupures cachées, tu sais. Quand La Financière nous annonce qu'on va recevoir une aide d'ASRA... Comme, demain, on va en recevoir une, là. C'était-u prévu en même temps que la commission? Tu sais, on se pose des questions, là.

Mme Cormier (Lorraine): Bien, une chance, on va recevoir 1,98 $, puis 22 $ et quelque chose dans la truie, puis 1,98 $ dans le porc. Et, juste avant qu'on nous dise qu'on va recevoir ça, là -- demain, là, l'argent va être déposé dans le compte, là -- bien, ça, on nous a dit qu'on avait une diminution de notre cotisation de 1,04 $ puis de 20 $ et quelque chose. Une maudite chance qu'on a eu une diminution de la cotisation, parce qu'on aurait reçu 0,98 $ puis 2 $ quelque chose, là.

M. Martin (Éric): Ça fait que le 25 % qui sont annoncés cette année, ça va juste rajouter sur le tas, c'est ça que ça veut dire.

Mme Cormier (Lorraine): Puis, une image, façon claire, là, un voyage de maïs, c'est 32 tonnes, à 340 $ la tonne. Ce que je vais recevoir, là, une ferme familiale, là, faites-le, le calcul, là, 228 truies puis 4 168, je pense, le modèle, là, fois 1,98 $ puis fois 22 et quelque chose, bien ça représente... on va recevoir autour de 15 000, là. Un voyage en coûte 10 000, 11 000. Ça fait que ça, là...

M. Martin (Éric): Ça fait qu'on a la liquidité pour 10 jours.

Mme Cormier (Lorraine): Bien, 10 jours, mais pour un seul voyage de maïs, là. Ça, ça veut dire que je n'achèterai rien d'autre, là. Il faut que je n'achète rien d'autre puis il ne faut pas qu'il y ait rien qui brise dans la bâtisse. Les liquidités, ils sont grugés. Tout est là.

Et, par l'incertitude, par tout ça... Il y a quelque chose que j'ai oublié aussi, là: nos fermes n'ont plus de valeur. Une ferme... À matin, je vous l'ai dit, là, la vente par soumissions qui a eu lieu, là, 154 000, ce n'est même pas le prix de la maison. Alors, à matin, là, ma ferme, elle vaut zéro puis une barre, ma maison est à valeur dépréciée.

Si j'étais le ministre de l'Agriculture, je me dépêcherais d'appeler mon confrère au municipal... aux Affaires municipales, parce qu'il va avoir des problèmes au niveau de la taxation, là, parce qu'on n'est plus capables de payer ce montant-là, là, nos taxes, là, qu'on va recevoir. Il va falloir qu'il y ait des discussions, là. Parce que, moi, ce n'est pas vrai, là, je... Ma maison est à valeur dépréciée puis ma ferme, elle ne vaut rien, ça fait que je ne peux pas payer plein montant.

M. Martin (Éric): On ne peut surtout pas la réhypothéquer. C'est ça qu'il faut comprendre là-dedans, il ne faut surtout pas réhypothéquer notre ferme. On ne peut pas...

Mme Cormier (Lorraine): Bien, on ne peut pas parce qu'on n'a plus...

M. Martin (Éric): ...il faut se donner la liquidité.

Mme Cormier (Lorraine): ...on n'a pas de liquidités, ça ne vaut rien.

M. Martin (Éric): Les banques, comme elle vous a dit, ont gelé la marge de crédit. Dans notre cas, ils l'ont descendue un peu parce que là ils sont plus nerveux. Puis en même temps nos fournisseurs n'acceptent plus de nous faire crédit sur rien. Il faut les payer cash sur livraison. Ça fait que c'est le problème qu'on vit à tous les jours.

Le Président (M. Paradis): Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Cormier, M. Martin. J'apprécie votre témoignage, c'est un témoignage terrain. On essaie de comprendre. Le mandat de surveillance de La Financière, c'est, d'une part, savoir ce qui se passe et où ils s'en vont. Et j'espère que ces témoignages-là vont nous aider à faire des recommandations au niveau de La Financière.

Dans votre témoignage, Mme Cormier, le premier message que j'ai retenu, c'est: Est-ce qu'on peut avoir des messages clairs et transparents? Vous n'êtes pas la première qui le dites, je l'ai aussi redit à La Financière au mois de juin, en disant: Nos producteurs, il faut qu'ils sachent à quoi s'en tenir. Est-ce que c'est possible de leur faire connaître vos intentions, vos orientations, non pas la journée que vous l'appliquez, mais qu'ils puissent savoir où ils s'en vont?

L'autre chose que je trouve importante, que vous avez dite, c'est le choix du financement de La Financière. C'est sûr que, quand on parle que La Financière va donner de l'assurance stabilisation -- je ne suis pas productrice, hein, ça fait que ça se peut que je me mêle un peu dans les termes, là -- mais va financer tout le monde parce que le prix du porc a baissé. Et peut-être qu'il y a des gens, comme vous dites, qui est capable d'aller acheter une ferme à 150 000 $ -- puis je trouve ça très malheureux -- elle n'a peut-être pas besoin, elle, de cet argent-là. Puis on va parler... on va dire les mots comme ils sont: les intégrateurs, les intégrateurs, qui sont probablement plus en moyens parce qu'ils vendent plus, sont gros, ce n'est pas des fermes familiales. Quand on parle de choix de financement, on parle d'orientations. Vous savez que La Financière avait comme... bon, donnait de l'argent, dans le fond, à tout le monde, probablement le même montant, puis pas nécessairement selon le besoin. Peut-être, une ferme familiale devrait être considérée d'une autre façon qu'un intégrateur.

J'aimerais ça que vous me parliez un peu de quelle serait la réaction des producteurs de porc si on avait une recommandation à l'effet que La Financière revoie sa façon de distribuer les subventions aux différentes productions. On a le porc, on a d'autres productions, mais on va en rester sur le porc. J'aimerais ça que vous me parliez un peu: comment réagiraient, entre autres, les intégrateurs, en disant: Vos besoins sont beaucoup moins grands, vous êtes moins en danger de fermer qu'une ferme familiale? La ferme familiale n'a que ça, et on doit s'assurer... Bien, tu sais, on parle beaucoup de l'occupation de notre territoire, hein, notre territoire rural, vous faites partie de ça, j'aimerais ça que vous me parliez de ça.

Mme Cormier (Lorraine): Bien, on va répondre à deux, là, en fait.

Mme L'Écuyer: Oui, allez-y.

M. Martin (Éric): On fait une distinction... Il faut faire une distinction entre intégrateurs et intégrateurs-transformateurs. Parce qu'on en connaît, des gros producteurs, à matin, qui sont seulement intégrateurs, ils vivent les mêmes difficultés que nous autres, là, ils ont un coût de production trop élevé. Ou ce que... Ceux qui ont le plus de facilité à acheter les fermes ce matin, c'est ceux qui sont transformateurs: ils ont une valeur ajoutée à leurs produits.

Puis, pour ma part, c'est ce qu'on souhaite depuis longtemps, qu'il y ait une révision de la façon de distribuer les subventions. Ça ne peut pas être tout le monde de la même façon, à cause justement du modèle d'entreprise de chacun. Nous autres, on est une ferme familiale. J'aimerais ça, moi, en faire, de la transformation; je n'ai pas les moyens financiers de le faire. Je ne les aurai jamais, pas, en tout cas, de la façon que c'est parti. Les modèles d'entreprises plus grosses, il faut leur lever notre chapeau. Ce n'est pas... Je ne les traite pas de bandits, ces gens-là qui ont fait de la transformation, loin de là, c'est des gens d'affaires qui sont en affaires. Ils sont en affaires parce qu'ils se sont développés de cette façon-là. Mais, à matin, est-ce qu'ils ont besoin du même soutien dans une crise comme on vit? C'est sûr que non.

**(10 h 40)**

Mme Cormier (Lorraine): Quand on va chercher... C'est sûr que ça ne plaît pas, là, quand on commence à faire des ségrégations comme ça, là: bien, toi, tu en as moins besoin, tu sais. Bon, c'est sûr que ça ne plaît pas, là. Mais par contre, quand on est capable de... On assure tout le monde, on assure même des porcs qui viennent d'ailleurs, là. En 2008, ce qui a fait, là, des dépenses énormes puis des déficits énormes au niveau de l'ASRA, c'est qu'on a payé tout le monde, même des porcs qui venaient d'ailleurs. On aurait pu peut-être, à ce moment-là, porter une attention particulière aux porcs Québec, là, aux porcs du Québec, là. C'est un programme qui était pour les producteurs québécois. Alors, comme tel, peut-être qu'on aurait pu prendre un temps, là, pour dire: Woups! Qu'est-ce qu'on fait, là? On paie-tu tout le monde? Bien, si on paie tout le monde, bien... Regardez, là, il y a eu des déficits en conséquence. Mais, pour pallier à ça, on coupe tout le monde aussi.

Mais c'est sûr et certain qu'il y a des catégories qui ne peuvent pas passer au travers. Puis ça, je n'en veux pas... Tu sais, vous avez parlé intégrateurs. On a démarré, nous autres, là, grâce à un intégrateur. C'est comme ça qu'il fallait démarrer en production porcine. On n'en veut pas du tout, on est même contents d'avoir démarré, on est fiers. On a un seul défaut, là, on aime ce qu'on fait, c'est pour ça qu'on s'accroche tant à notre entreprise. Parce qu'on pourrait dire...

Puis, la problématique, aussi, on s'accroche à notre entreprise, là, bien, si je remets mes clés, là, moi puis lui, on n'a plus de job. On n'a pas de compensation, on part avec notre petite valise, on n'a plus de maison.

M. Martin (Éric): Pas de chômage.

Mme Cormier (Lorraine): Un entrepreneur qui a son entreprise, peut-être qu'il ne vit pas... il ne rouvre pas la porte de sa maison puis qu'il est dans son entreprise, là. Nous autres, il faut laisser la maison, il faut déstabiliser, déraciner nos enfants -- ma fille est avec nous autres, un de mes enfants. On a trois enfants, il y en a une qui est avec nous autres, la plus vieille, elle suit. On parle ouvertement de ce qui se passe, ça fait qu'elle est très au fait des réalités qu'on vit actuellement.

Mais, c'est ça, là, il faut arrêter les dommages, là. Puis peut-être que ça n'aurait pas plu... Puis, quand on parle de coupures, on a coupé... Pour essayer, là, de couper, on visait une catégorie qu'il fallait arrêter, là. Regarde, c'était clair, là, on disait tout le temps... On a entendu souvent: Il y a 2 % des producteurs qui reçoivent 80 % de l'ASRA; ça, on l'a entendue souvent, celle-là. Mais, si c'était vraiment le 2 % qu'on ciblait, là, il fallait peut-être réagir là au lieu de le dire... et de ne pas bouger. C'était là, probablement, qu'il fallait poser des gestes. Oui, effectivement, on a appliqué pour les fermes, là, trois fois le modèle: on coupe, on met des plafonnements. Aussitôt qu'il y a un plafonnement, là, ce n'est pas la personne, là, qui intègre des gens, là, qui est coupée, elle se revire de bord puis elle coupe le contrat. Donc, c'est toujours la base qui est coupée.

M. Martin (Éric): C'est encore la ferme familiale...

Mme Cormier (Lorraine): Qui écope.

M. Martin (Éric): Le propriétaire de la bâtisse qui a un contrat, bien c'est lui qui est coupé. On en connaît, là, tu sais, on a déjà été aussi à contrat. Quand ça ne va pas bien, c'est les gens à contrat qui sont coupés, ce n'est pas nécessairement... Bien, dans une mesure, ils vont perdre un peu d'argent, mais ça reste qu'ils refilent, la plupart du temps, à la base, là. On n'a peut-être pas bien répondu à votre question, là, mais on essaie de...

Le Président (M. Paradis): Oui, Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: Je vais poser une sous-question. On sait que l'ASRA, c'est un programme universel, qui s'adresse à tout le monde. Moi, quand je vous écoute... Et vous n'êtes pas les premiers à nous faire part des difficultés que vit les fermes familiales. Là, on parle du porc, mais, dans d'autres domaines aussi, les fermes familiales ont plus de difficultés que les intégrateurs et... Est-ce que ça veut dire qu'il faudrait n'avoir un programme d'assurance récolte ou... -- je ne sais pas c'est quoi, l'ASRA, assurance récolte... c'est ça, stabilisation -- du revenu agricole, que pour les fermes familiales, qui ferait qu'on pourrait protéger nos fermes familiales un peu partout dans nos territoires? Avec un plafond, est-ce qu'on pourrait penser à aller vers ça?

M. Martin (Éric): Moi, je pense que, le futur modèle de l'ASRA, on peut dire que, oui, ça serait ça, puis ça s'adresserait aussi aux gens qui sont intégrés. C'est eux autres qui possèdent les fermes, c'est eux autres qui y vivent. Nous autres, on est indépendants mais probablement futurs intégrés, là, parce qu'on n'a plus les moyens, c'est ça, la réalité, là, c'est une question de jours. En fait, on a failli abandonner voilà deux semaines, puis, vu qu'on avait été convoqués ici, on a dit: On va au moins continuer. Mais c'est ça, notre réalité, c'est qu'on n'a plus les moyens de continuer. Ça se peut qu'on se ramasse intégrés puis ça se peut qu'on fasse couper nos contrats d'intégration aussi parce qu'il y a moins d'ASRA.

Ça fait qu'à un moment donné tu ne vis plus de ta ferme. Moi, j'appelle ça pris en otage, là. Parce que le choix qu'on a, c'est ça, c'est: tu remets tes clés, tu perds ta maison, tu perds tes deux emplois, tu n'as pas de chômage, tu t'en vas de là, on prend ta ferme puis on la vend à rabais. Puis ce n'est pas une invention, ça nous est arrivé, là, puis ça a arrivé à nos associés. Nous autres, on a deux fermes comme ça qui ont été remises à l'intégration. Puis c'est ça que je vous dis, ce n'est pas que les gens intégration, ils sont mauvais, c'est qu'ils ont une opportunité d'affaires, ils l'ont prise, là. Puis je serais à leur place, j'aurais peut-être fait pareil. Ça ne vient pas de leur faute à eux autres, ça, mais ça reste que c'est arrivé, ça, puis ça va arriver encore.

Le Président (M. Paradis): Mme la députée de Mégantic-Compton?

Mme Gonthier: Non, ça va aller, je vais laisser la parole à mon collègue.

Le Président (M. Paradis): Ça va? M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: Merci, M. le Président. Alors, je veux à mon tour vous souhaiter la bienvenue à l'Assemblée nationale. C'est très important, ce qu'on fait aujourd'hui. Puis je vous écoute avec une attention particulière, en ce sens que j'ai le bonheur de vivre sur une ferme, dans le Bas-Saint-Laurent, où j'ai le bonheur aussi d'avoir de la relève, c'est mon fils de 22 ans qui s'occupe de la ferme. Alors, j'ai une grande sensibilité à travers ce que vous traversez, ce que vous vivez, d'une part.

D'autre part, sur les fameuses mesures d'adaptation qui ont été mises en place, je vous demanderais: À votre avis, parce que les mesures d'adaptation sont tout de même récentes, si on se transpose dans une année ou dans deux ans, est-ce que les mesures d'adaptation qui ont été mises en place, est-ce que... En termes clairs, là, est-ce que ça fait le travail? Est-ce que ça fait la job? Si, les mesures d'adaptation, vous aviez pu en bénéficier il y a une couple d'années, est-ce que vous seriez là ce matin avec un discours qui est le vôtre, ou si ça aurait été différent? Est-ce que ça fait le travail à ce moment-ci?

M. Martin (Éric): Moi, je vous dirais que...

M. D'Amour: C'est votre avis, hein, parce que vous ne l'avez pas vraiment vécu. C'est votre avis que...

M. Martin (Éric): Oui, c'est ça. Moi, je vous dirais que ces mesures d'adaptation là, ils auraient été mis cinq années, justement, avant... S'ils auraient annoncé les coupures en début 2011, comme ils l'ont fait, puis qu'ils auraient dit: On vous donne cinq ans pour vous adapter, on n'aurait pas eu besoin d'un 100 millions du MAPAQ. Je pense que la plupart des gestionnaires que nous sommes, on aurait réagi sans que ça coûte beaucoup d'argent au gouvernement. Ça, je pense, je ne me trompe pas là-dessus.

Ça fait que, là, à matin, chez nous, dans notre diagnostic de ferme, les mesures, ils ne font pas le travail. Je vous le dis, là, ils ne font pas le travail, chez nous, les mesures d'adaptation. Parce que ce qu'ils font, c'est qu'ils nous disent: Va te moderniser, va emprunter, nous autres, on va te payer 40 %. C'est un peu ça, là: va emprunter 100 000 $, puis, nous autres, on va te donner 40 % de subventions, qui est 40 000 $, pour te moderniser. Ça reste que le 60 000 $ que, moi, je vais avoir en fardeau, ça reste une dette, ça. Puis je ne suis pas capable de la payer à matin. Il n'y a personne qui veut me la prêter, il n'y a pas de liquidités pour la financer, cette dette-là.

Puis, la modernité, dans notre cas, on l'a déjà faite. J'invite n'importe qui de chez vous à venir visiter notre ferme. On est vraiment une ferme familiale puis on est à l'affût des nouvelles technologies. On a un biocomposteur, à la ferme, qui fait en sorte qu'on a augmenté notre biosécurité, mais ça a un coût. Ça fait déjà quatre ans qu'on a commencé ça. On a un système d'alimentation automatisé au niveau des truies qui fait en sorte qu'on a plus de performance avec nos porcelets. Mais on n'a pas attendu que le MAPAQ nous dise: Achète ça. Tu sais, ceux qui attendent à matin, là, puis qui se font dire d'acheter ça, je pense qu'il est déjà trop tard, moi, ou ils ont d'autres revenus.

À matin, ceux qui vont bénéficier des mesures d'adaptation, à mon avis, c'est des fermes qui sont plus diversifiées que spécialisées. Ils ont soit la grande culture soit du lait qui pallie. Tu sais, ces gens-là acceptent de manger de l'argent dans le lait pour pallier le porc en attendant que ça se replace, ou dans la grande culture. Ça, c'est leur choix, c'est leurs entreprises, je n'ai rien à dire là-dessus. Mais une ferme spécialisée comme nous, sans sols, il est trop tard. Je vous le dis, là, je ne pense pas qu'on passe au travers, nous autres, s'il n'y a pas un programme ou il n'y a pas de la liquidité de ramenée sur les fermes immédiatement. Et ce n'est pas des menaces que je vous fais, là. Venez voir nos chiffres puis venez rencontrer mon banquier, il va vous le dire.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Rivière-du-Loup, à ce moment-ci, à moins que j'aie un consentement, j'irais à l'opposition officielle et au député de Beauce-Nord par la suite. Et, s'il reste des choses à vider, je demanderais un consentement. Est-ce que ça va?

M. D'Amour: Oui.

Le Président (M. Paradis): Du côté de l'opposition officielle, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Alors, bonjour, Mme Cormier, M. Martin. Ce n'est pas la formation, ce n'est pas l'éducation, ce n'est pas les connaissances qui vous manquent, vous en témoignez ici. Vous avez fait une présentation qui vient vraiment faire la démonstration, je pense, qu'on a un problème, un problème de crise, de survie d'entreprises.

Vous avez un esprit entrepreneur, puisque vous avez fait... Vous avez expliqué le cheminement que vous avez poursuivi du moment où vous avez commencé jusqu'au temps où vous vous êtes associés pour, au fond, répondre au message qu'il faut grossir pour pouvoir survivre. Ce que je trouve troublant, puis je voudrais vous entendre à... vous réentendre un peu à cet égard, c'est que, d'une part, vous suivez un cheminement, vous êtes conseillés dans votre démarche de vous associer et de risquer de réinvestir, mais en pensant que... Et vous êtes sûrement solvables puisqu'on vous prête, et tout ça, et ce que j'entendais et ce que je trouve troublant, par peut-être les mêmes personnes, vous vous faites dire... vous apprenez, quelques mois plus tard, au fond, que la donne a changé.

Avez-vous le sentiment d'avoir été floués, au fond? Ou avez-vous le sentiment qu'il y a une part de responsabilité qui appartient à un système, à un système qui a un traitement qu'on pourrait qualifier d'inhumain dans votre cas? Je voudrais vous entendre à cet égard.

**(10 h 50)**

Mme Cormier (Lorraine): Depuis novembre l'an passé, on a chacun notre psychologue qui travaille avec nous autres pour passer à travers la crise, là. Nous, on n'en voit plus clair, hein? Quand on a le nez sur l'écorce, on ne voit pas la forêt, là. Ça fait qu'on est... On ne devient plus efficaces dans nos positions d'affaires, dans notre gestion. Ça fait qu'on s'est mis à dire qu'on était des pas bons. Ça fait que, quand on se dit qu'on est des pas bons, bien, écoute, là, à un moment donné, il n'y a plus rien qui va, là, puis on dit: Ça doit être nous autres, là, les sans-dessein, là, qui n'est pas capable de comprendre. Tout le monde coupe, tout le monde arrive, là. Bien, ça doit être nous autres, là.

Ça fait que, depuis novembre passé, on a un psychologue. On en a chacun un qui travaille avec nous autres puis qui écoute notre cheminement, qui nous fait cheminer à travers ça. On apprend à accepter. Il n'y a aucune larme qui sort. Parce que, moi, je suis quand même quelqu'un de vrai, authentique puis sensible, là, mais il n'y a aucune larme qui somme... sortent... qui sort de ma face, parce que j'ai comme accepté, là, de me faire avoir, là, tu sais, finalement, là. Je pense que c'est ça qui se passe, là.

Oui, on se sent trahis. Puis on se fait dire par nos psychologues actuellement: C'est que... je pense que... d'habitude, là, quand c'est vous autres qui prenez les décisions, là, tu sais, c'est vous autres qui êtes coupables, là. Mais il dit, là, il dit: Il y a quelqu'un d'autre qui prend des décisions à votre place, là. Puis il dit... Tu sais... En tout cas, moi, je me sens un peu comme marionnette, là: je ne te dis rien, là, puis, regarde, là, tu bouges, là, puis tu vas exécuter ce qui passe, là. C'est comme ça qu'on se sent. Oui, on se sent trahis, parce que ces gens-là, ils nous croient, là, ils nous financent, là, puis ils croient en nous autres, là. Puis ils nous ont appelés pour nous féliciter, là: Vous faites des bonnes affaires, ça va bien, c'est avec vous autres qu'on veut travailler. Mais on arrive en médiation, c'est le recouvrement qui est là.

On est allés en médiation en janvier, là. On a eu deux jours intenses, là. Nous, pour protéger la Ferme Cormier-Martin, là, à Pike-River, là, on s'est mis en médiation, sur le B, qu'on appelle, pour justement trouver des solutions pour passer au travers. Mais, les deux autres fermes, c'était le recouvrement qui était là. Puis, quand on est arrivé, le lendemain, à nous autres, c'était le fun, c'étaient nos gens à La Financière qui étaient là puis qui ont dit: Non, nous autres, on veut continuer à travailler avec vous autres. Mais on veut continuer à travailler avec nous autres, mais on n'a aucun moyen, on n'a plus de liquidités. Ça fait qu'on ne peut pas s'adapter, c'est difficile de s'adapter.

M. Martin (Éric): Mais c'est de l'improvisation qui a été faite, là. Moi, c'est de même que je le vois. La Financière agricole nous ont prêté sur de l'improvisation, tu sais. Ils ont improvisé une coupure quelques semaines après nous avoir prêté. Mais ça, ça n'avait pas été décidé... Je suis convaincu que, quand ils nous ont prêté, ils le savaient déjà qu'ils étaient pour couper. Tu sais, je ne peux pas croire qu'ils ont décidé ça en trois mois, là. Habituellement, ça prend des mois, et des semaines, et des années avant de pondre un programme. Puis là, en trois mois, ils nous prêtent puis, trois mois après, ils nous coupent. Écoute, c'était déjà pensé, là.

Puis, nous autres, ils nous ont mis dans la merde -- moi, je vais le dire, le mot, là, sans m'excuser, là -- parce qu'ils nous ont prêté personnellement l'argent, ils ont venu hypothéquer la nôtre, qu'on a encore, pour injecter dans notre nouvelle ferme. Ça fait que, nous autres, on y croyait, là, on a accepté d'être hypothéqués, là. Puis, trois mois après, ils nous enlèvent notre ferme, mais ils ne veulent pas nous enlever le prêt qu'ils nous ont donné. Ça fait que finalement ils nous ont condamnés, nous autres aussi, chez nous. C'est une question de temps. Moi, s'il n'y a pas des levées de conditions ou... Tu sais, c'est sûr que, nous autres, on ne passe pas au travers si je suis obligé de rembourser le prêt de l'autre ferme qu'ils m'ont enlevée.

Ça fait que, pour moi, c'est de la trahison. J'ai beaucoup de rage, moi, par les temps qui courent. Puis j'ai l'impression qu'on a été vendus en monnaie d'échange à quelque chose, là. Tu sais, c'est comme: les producteurs indépendants, on n'en veut plus. En échange, on va, je ne sais pas, moi, avoir un modèle d'agriculture plus stable, à l'intégration ou... «whatever», tu sais, ce n'est pas moi à répondre à ça. Mais j'ai l'impression d'avoir été sacrifié en tant que producteur indépendant. C'est ça, mon sentiment.

Le Président (M. Paradis): Juste une précision, si vous me permettez, là. Dans la perception générale et populaire, on a entendu parler de la coupure de 25 % comme telle, et les gens pensent que ce sont les 25 % des producteurs les moins efficaces qui tombent au front. C'est-u vrai, ça?

M. Martin (Éric): Absolument pas. Parce que, premièrement, ça fait juste commencer à être appliqué. Puis, regardez, Lorraine, elle avait dressé une liste de -- ça rentrait à peine sur une feuille de cartable, là -- tous ceux qu'on connaît personnellement qui ont levé les pattes, là, on va dire ça comme ça, là, qui n'ont plus déjà leurs fermes. Ils ont remis leurs clés, là.

Mme Cormier (Lorraine): Juste autour de nous, là.

M. Martin (Éric): C'est tous des gens qu'on connaissait, qui étaient dans notre secteur, qu'on aurait pu prendre une bière avec puis discuter de nos enfants. C'est des gens qu'on connaît personnellement. Il reste à peu près juste nous autres, là, puis quelques autres Gaulois, on va les appeler comme ça, là. Il n'en reste plus. Ils ont tous levé les pattes. Puis ça, le 25 % n'a même pas commencé à être appliqué. Donc, c'est vraiment des coupures du coût de production qui nous fait mal. Tu sais, ça a été comme, je ne sais pas, moi, oublié ou en tout cas...

Mme Cormier (Lorraine): On dirait... On a reçu un PPA, là, un programme de paiement anticipé, en production porcine, là...

M. Martin (Éric): Qui venait du fédéral.

Mme Cormier (Lorraine): ...qui venait du fédéral. On a reçu un PPA qui nous a donné une liquidité, puis ça, on dirait, là, parce qu'on avait une liquidité, là, La Financière, elle a dit, je ne sais pas, moi: On n'accepte pas ça, là. Regarde, c'est des perceptions, là. Bien, elle est allée chercher le montant que, moi, là, j'ai été chercher en paiement anticipé, là. Mais je l'ai tout redonné à La Financière, là. Il est tout parti à La Financière. Ça fait qu'à matin, ce PPA là, je ne peux plus le rembourser parce qu'il a tout fondu. Jusqu'à l'été 2010, jusqu'à l'été passé, là, on était capables de le rembourser. Là, on n'est plus capables. Jusqu'à cet été, on était capables.

M. Martin (Éric): Puis c'est une dette personnelle qu'on a contractée, nous autres. Ça fait qu'en plus de perdre notre entreprise, de diminuer nos liquidités, on a la menace de se faire poursuivre personnellement, là, tu sais...

Mme Cormier (Lorraine): La possibilité, là, c'est de faire faillite, là.

M. Martin (Éric): C'est ça.

Mme Cormier (Lorraine): C'est ça qu'on a à matin. Dans le cas des Élevages PILE -- ça, c'est la ferme qu'on avait en commun, nos quatre associés, PILE, P-I-L-E pour Pierre, Isabelle, Lorraine et Éric, c'était ça, notre entreprise -- on avait demandé un 100 000 $ de PPA. On a remis nos clés. On nous dit: Collaborez, là, puis on ne vous mettra pas en faillite, là, mais collaborez. C'est ce qu'on fait, on collabore. Mais là on n'est pas en faillite, les institutions financières nous disent: O.K., on va collaborer, nous autres avec, nous autres aussi, s'il en manque sur la marge de crédit, on va être «fair» avec vous autres, là. Mais Agriculture Canada nous dit: Tu as un 100 000 $, là, que vous avez cautionné personnellement, là. Ça fait que, ça, là, à matin, on a ce 100 000 $ là des Élevages PILE, là. Parce que là ils savent qu'on n'est pas capables de rembourser, on a fermé nos portes.

La maternité avec le... Le couple avec qui on s'est associés, eux autres, ils ont retombé à la case départ, là, comme, nous, on est retombés à la case départ, là. On a perdu notre possibilité d'avoir nos vacances, on a perdu toutes sortes d'avantages, on n'est plus intéressants aussi pour les abattoirs: on est revenus à la case départ avec un 5 000 cochons par année, une demi-van, comme je vous disais, de cochons à vendre à l'abattoir. Ça fait que, là, on n'est plus intéressants, on se fait dire: Bien là, on mange de l'argent, avec vous autres, sur le transport. Mais là on cause des problèmes à tout le monde, là. Parce que c'est ça, la réalité.

Puis là, quand, nous, on a passé en médiation pour protéger notre ferme à nous autres, la dame à Agriculture Canada, elle a dit: Là, n'oubliez pas, là, elle dit, vous avez le 100 000 $ des Élevages PILE, là, Cormier-Martin, là. Ça fait que, là, moi, j'avais demandé un paiement anticipé, plus le paiement anticipé de l'autre ferme, là. Ça fait que, moi, j'ai ça sur le dos aussi, là, à matin. Bien, on a ça sur le dos à matin, là. Puis c'est ça, là. Mais on dit... on vous dit: Non, non... À La Financière, on vous dit: On ne vous fera pas faire faillite. Bien, on n'a pas le choix, là. Regarde, nos associés, là, c'est ça, là, eux autres, là, la ferme, la maternité, elle a été vendue. Elle a été vendue pour le prix des terres; nonobstant la ferme porcine et la maison, elle a été vendue pour le prix de la terre. Là, ils se sont entendus pour rester dans cette maison-là le temps qu'ils se trouvent une job puis qu'ils placent leurs... que l'école recommence puis que, là, ils déménagent, là, parce qu'ils partent avec leur petit train-train, plus rien, là.

Bien, c'est ça, nos réalités, c'est ça qu'on vit. Puis il y en a beaucoup, de nos amis, qui sont comme ça. Puis ceux... Ça n'a pas pris deux minutes, là, j'avais une liste, là, complète de producteurs, d'amis qui ont fermé leurs portes ou bien qui sont rendus intégrés parce qu'ils n'étaient plus capables. Parce que c'est ça, nos possibilités. C'est: Tu remets tes clés ou bien tu t'en vas intégré. C'est ça, les possibilités qu'on a, pour des entreprises qui sont spécialisées...

**(11 heures)**

M. Martin (Éric): Puis, dans les deux cas, là, faites-vous pas d'illusions, dans les deux cas, on s'en va intégrés. Ça se peut qu'on peuve garder notre maison puis que les paiements vont se faire, mais on ne vivra pas de ça. Il va falloir travailler tous les deux à l'extérieur pour amener un revenu à la famille. Si on remet nos clés... Bien là, on ne peut pas nécessairement le faire, parce que, là, c'est la menace de la faillite personnelle qui s'ensuit, puis, regardez, ce n'est pas trop, trop intéressant de faire faillite. Moi, personnellement, là, ça ne m'intéresse pas, mais je pense qu'on n'aura peut-être pas le choix. Ça fait que c'est ça, notre avenue. Ça fait que, quand le ministre, il nous dit qu'on a le choix en business, on a tout un choix, là!

Le Président (M. Paradis): M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président, merci. Vous avez utilisé le terme... on vous demande de collaborer. Qu'est-ce que ça sous-entend quand vous dites ça?

Mme Cormier (Lorraine): Bien, on nous a demandé... quand on a remis les clés, en... bien, oui, c'est en décembre, en début décembre, on nous a dit: Collaborez. C'est que les bâtisses étaient pleines. On a dit: Pour aller chercher le maximum d'argent par porc, pour rembourser la marge de crédit, faites-le, puis vous nous donnez un compte rendu, à tous les mois, des inventaires. Parce qu'il ne faut pas fourrer personne, là. Nous autres, on a le droit de se faire fourrer, mais pas eux, là. Excusez. Ça a sorti.

M. Martin (Éric): Mais la collaboration, c'est ça.

Mme Cormier (Lorraine): C'est ça, la collaboration. C'est qu'on a travaillé sans salaire pour rendre notre porc au... le plus... dans le meilleur indice possible, pour renflouer la marge de crédit, pour aider à notre institution bancaire. Dans le fond, c'est ça.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): ...continuer avec la motivation, avec tout le travail, mais comme si de rien n'était?

Mme Cormier (Lorraine): Bien, motivation...

M. Martin (Éric): Bien, c'est ça, c'est...

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Non, non, mais c'est que... la collaboration, c'est ça, là.

M. Martin (Éric): Oui, c'est ça.

Mme Cormier (Lorraine): C'est ça, la collaboration.

M. Martin (Éric): Puis, point de vue financier, c'est la même chose: Ne soyez pas inquiets, on ne vous mettra pas en faillite personnelle. Mais collaborez avec la caisse pop pour renflouer la marge, collaborez avec nous. Obstinez-vous pas quand on va faire des visites. Tu sais, ça, c'est la collaboration. Puis, dans notre cas, ça a été sans salaire, là. Ils ont payé du gaz pendant deux mois, c'est ça qu'ils ont fait, là, tu sais, pour aller faire le train, là. Puis ça a été ça. Puis, la majorité des gens qu'on connaît, c'est la même chose. Ça fait que, là, tu annonces la fermeture de ton entreprise puis tu es six mois à vivre dedans à tous les jours, là. Tu sais, c'est ça que ça veut dire, là. Ce n'est pas trop humain, ça.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci.

Le Président (M. Paradis): D'autres intervenants? Oui, M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Alors, merci, M. le Président. Et merci à vous. Je vais aller direct au sujet parce que, moi, normalement ils ne donnent pas beaucoup de temps.

Je suis un... Remarquez que j'en suis un, producteur, moi. Pas de porc, mais je suis dans... j'ai été élevé dans l'agriculture et je saisis très bien qu'est-ce que vous dites, qu'est-ce que vous vivez. Puis, moi, je me pose de sérieuses questions ces temps-ci. Quelle vision qu'on a pour l'agriculture au Québec, pour les décennies à venir? Est-ce qu'on a une vision dans tous les domaines, là? Que ce soit dans le porc, dans le boeuf, est-ce que c'est juste la grosse, grosse machine? Est-ce qu'on a une vision de dire: Nos petits producteurs, on peut tous les faire crever? On va importer de l'Argentine, du Chili, puis ça va coûter moins cher. Est-ce que c'est ça, la vision qu'on a?

Les gens ne peuvent pas s'imaginer, demain matin, si toutes nos fermes familiales font comme le témoignage que vous faites là, quel prix que ça va avoir et quelles conséquences ça va avoir sur le Québec dans les décennies à venir. Vous l'avez dit vous-mêmes tout à l'heure, votre maison, avec votre entreprise, s'est vendue 150 000 $. Les taxes municipales, qui va les payer? Pour la ville, là, qui va payer les infrastructures? Qui va payer pour les écoles? Il n'y aura plus d'enfants dans les écoles. Alors...

Puis je ne sais pas si quelqu'un a vu le documentaire, là, dernièrement, au Canal D, sur les productions de masse, toutes les maladies qu'on va importer. Parce qu'ici, au Québec, il faut calculer qu'on a des mesures très sévères au niveau de médicaments, et de tout, d'environnement. On se revire de bord, on fait crever notre monde, puis on va importer le stock d'ailleurs, qui n'a aucune mesure... Alors...

M. Martin (Éric): Ça, je suis content que vous en parliez, parce qu'on l'avait dans notre discours puis on a manqué de temps pour le dire, là. Parce que présentement au Québec on se fait imposer des lois environnementales et de salubrité, au niveau de nos viandes, à peu près les plus sévères au monde. Ça, on le sait, là. Avec notre UPA, on a fait le tour de la planète, là. C'est icitte qu'on a les meilleures normes. Puis on laisse les épiceries importer du porc qu'on ne sait pas où... qui a été traité avec on ne sait pas quel antibiotique puis qui ont été élevés dans quelles conditions, on ne le sait pas. Ça fait que ce que vous mangez quand vous achetez un filet de porc ou une côtelette à l'épicerie... vous ne le savez pas, d'où est-ce qu'elle vient.

Puis icitte on est obligés d'avoir des traçabilités puis des normes environnementales hypersévères, puis on nous demande de concurrencer ces pays-là? Regarde, décidez... Il faut qu'il y ait un débat de société là-dessus, à savoir qu'est-ce que vous voulez. Puis je rejoins exactement... Moi, ma vision à matin, c'est: tout le monde intégré, trois ou quatre grosses entreprises qui vont contrôler la majeure partie de l'agriculture. Puis ça va peut-être coûter moins cher pour quelques années à la population, là, mais, à un moment donné, ça va se revirer de bord. Regardez ce qui se passe dans le pétrole, là. C'est la même chose, là. Moi, je le vois comme ça.

M. Grondin: Écoutez, en agriculture, présentement, si on prend juste le remboursement des taxes municipales, on a mis un minimum de production, mais on n'a jamais mis le maximum. Je me demande pourquoi que, dans l'ASRA, on ne pourrait pas mettre un maximum. À un moment donné, rendu à un tel montant, c'est bien de valeur, si tu veux grossir, grossis. Tant mieux si ça va bien, mais, nous, on va essayer de protéger la ferme familiale et les, je pense, les plus petits, qui vont faire en sorte qu'ils vont garder notre territoire en santé, ils vont garder nos municipalités en santé. Là, présentement, moi, je me dis, on manque énormément de vision, on va passer à côté, là, de l'objectif, là. On s'en va dans une... je ne sais pas où, mais je pense que tout le monde va avoir à se poser une question sérieuse: Où on s'en va dans les prochaines années?

M. Martin (Éric): C'est pour ça que j'ai amené le mot «improvisation», hein? Parce qu'à matin... Toute entreprise qui se respecte fait un plan d'affaires quelques années en avant pour savoir où est-ce qu'elle s'en va. Puis, dans le cas de La Financière agricole -- je considère ça comme une entreprise majeure, qui sont là pour protéger d'autres entreprises -- ils n'ont aucun livre, il n'y a rien qui dit: Dans 10 ans, on va être à tel endroit. Je trouve ça...

Le Président (M. Paradis): Oui, M. le député...

M. Grondin: ...moi... À moins que je me trompe, M. le Président.

Le Président (M. Paradis): Brièvement. Si vous vous trompez, trompez-vous brièvement.

M. Grondin: Trouvez-moi une industrie ou une compagnie qui a emprunté de l'argent pour partir avec un modèle, puis, en chemin, au bout de trois, quatre ans, on lui dit: Bon, bien, là, nous, on a changé de modèle. Tu as signé des papiers, tu t'en vas dans un contrat puis tu as... la banque vient, au bout de trois, quatre ans, te dire: Bien là, on change de modèle. Au lieu de te coûter 100 $ de remèdes, ça va t'en coûter 1 000 $. Trouvez-moi dans le monde présentement quelqu'un qui peut se permettre ça.

Mme Cormier (Lorraine): C'est comme n'importe qui ici qui a sa maison qui est assurée. Vous avez un sinistre, puis là, quand vous appelez pour vos assurances, on vous dit: Bien là, je m'excuse, là, mais, moi, j'assure seulement tes portes puis tes fenêtres. Arrange-toi avec ça. Ça fait que c'est comme ça que... C'est une belle image, là, mais c'est à peu près à ça que ça ressemble. Mais tu la paies, ton assurance, là.

Le Président (M. Paradis): Oui. Mme la députée de Mégantic-Compton, brièvement.

Mme Gonthier: Brièvement, moi, je vais... D'une part, j'ai écouté votre discours, et ça rejoint un peu le discours que j'entends sur le terrain chez nous aussi. Mais je voulais que vous me rameniez au... Vous parlez que des mesures de resserrement ont été mises en place à partir de 2009. On parle de quoi? Parce que, là, récemment on parlait plus du 25 %, là, au niveau du modèle, là, et puis tout ça. Ramenez-moi à ça un peu. Dites-moi ça incluait quoi, ces mesures de resserrement là, dans votre livre à vous. Vous avez parlé entre autres... Bien, vous avez parlé qu'au niveau du coût de production vous avez perdu 11 $, là...

**(11 h 10)**

M. Martin (Éric): ...ça. Bien, en fait, le coût de production, ils ne calculaient pas ça toutes les années, ils calculaient ça... Là, je peux me tromper, par contre, là, mais ils calculaient ça à toutes les trois ou cinq années. Puis là ils ont décidé de refaire une enquête. Ils appellent ça une enquête sur le coût de production. Ils l'ont faite puis ils sont arrivés à la conclusion que le cochon coûtait 11 $ de moins à produire que cinq ans auparavant. Ça fait que, du jour au lendemain, ils ont appliqué ce 11 $ là de réduction sur le coût de production.

Nous, on en produit 5 000 par année. Donc, en partant, c'étaient 55 000 $ de moins d'assurances, mais avec la même cotisation, là. Puis même que la cotisation, elle a augmenté. Donc, du jour au lendemain, il fallait trouver à être plus efficaces de 11 $ du cochon. Puis, n'importe qui qui est dans l'industrie du porc ou qui est producteur, quand on fait un gain de 0,50 $, on se tape les mains, nous autres, là, là. Parce que c'est... Tu ne peux pas sauver 11 $ du cochon en changeant de couleur de mur, là. Tu sais, tu as énormément de travail à faire au niveau génétique, au niveau alimentation, au niveau santé animale. Ça ne se fait pas du jour au lendemain. Puis, la coupure, pour nous autres dans le porc, notre sort a déjà été décidé avec le nouveau coût de production. Le 25 % supérieur, c'est juste comme la cerise sur le sundae, là.

Le Président (M. Paradis): Oui, M. le député de Gaspé, très, très brièvement.

M. Mamelonet: Bien, très brièvement, moi, en fin de compte, c'est pour conclure, M. le Président, parce qu'effectivement le temps court. Vous remercier. Vous remercier de me conforter, comme député de Gaspé, comme député à l'Assemblée nationale, comme membre de la commission, de faire preuve de vision dans ce qu'on est en train de préparer, c'est-à-dire la politique bioalimentaire puis l'analyse du livre vert de l'agriculture. Effectivement, votre cas est un cas très spécifique mais qui se répercute un petit peu partout, dans beaucoup de productions. Et je dirais que dans l'agriculture, oui, mais aussi dans d'autres secteurs économiques, dans d'autres entreprises, je pense qu'on rencontre malheureusement assez fréquemment le même genre de problème. Dans votre cas particulier, évidemment il y a des choses qui sont urgentes, il y a des choses qu'il faut regarder de façon assez rapide. Et votre témoignage va nous permettre effectivement, à toute la commission, de donner des recommandations à La Financière, qui sera un... je dirais, simplement un petit pas dans une atteinte ou une recherche de solution pour l'ensemble du monde agricole québécois.

Mais, dans vos exemples et dans votre témoignage, vous nous avez amené vraiment de très belles images sur l'agriculture québécoise, sur la volonté que des jeunes comme vous, des jeunes agriculteurs, des agriculteurs au Québec -- puis on en a beaucoup avec nous aujourd'hui -- la volonté que vous avez de conserver vos productions et comment est-ce qu'on va être capables, à travers nos politiques agricoles, de pouvoir adapter tous ces modèles-là, adapter un grand Québec, qui est excessivement diversifié sur son territoire, à des règles financières qui sont malheureusement trop souvent très rigides. Et ça, c'est un gros défi, mais j'espère que vous serez avec nous pour les années qui viennent, mais j'espère aussi que vous serez avec nous pour ces discussions autour de cette politique agricole, de ce livre vert. Merci beaucoup, Mme Lorraine et M. Éric. Merci beaucoup.

Le Président (M. Paradis): Mme Cormier, peut-être, en terminant... Moi, je me souviens d'avoir vu des articles à votre sujet dans les médias. Question de nous rappeler, là, avant de nous quitter, des meilleurs jours, vous avez déjà reçu des mérites, je ne me rappelle pas... Je ne veux pas faire d'erreur, là, puis je ne veux pas vous placer dans une mauvaise situation, mais rappelez-le à la commission, parce que vous avez eu des bons moments en agriculture, également.

Mme Cormier (Lorraine): Bien, oui. Merci. Merci de nous avoir dit qu'on est des gens spécifiques, là. Ça... Peut-être qu'on est spécifiques, mais c'est pas mal généralisé, ce qui nous arrive, pour les fermes familiales. Mais, oui, effectivement, en 2007, j'ai été nommée l'agricultrice de l'année pour la région de Saint-Hyacinthe. Et à ce moment-là on commençait à vivre des crises. Puis, à quelque part, aussi, j'étais... après avoir gagné ce titre, j'étais déçue, parce que je me disais: Ça me donne quoi de gagner ce titre si je ne suis pas capable de vivre de mon agriculture? Puis après ça je me suis dit: Ah! regarde, là, c'est une poignée dans le dos, là... une tape... Bien, pas une poignée, là, mais c'est une tape dans le dos. Prends-la, Lorraine. Ça fait que c'est comme ça que je l'ai pris. Oui, j'ai gagné le titre de l'agricultrice de l'année en 2007. Donc, c'est ça, j'ai...

On est des passionnés. On aime ça. On souhaiterait continuer. Mais dites-vous que vous avez probablement deux professionnels en avant de vous qui est en recherche d'emploi actuellement. Ça fait que, si vous avez des gens qui cherchent des professionnels, bien on sera probablement là.

M. Martin (Éric): On peut peut-être aller travailler à La Financière pour leur montrer c'est quoi, la...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paradis): On vous remercie.

Des voix: ...

Le Président (M. Paradis): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je demanderais aux gens dans la salle de ne pas intervenir, d'approuver simplement en clignant des yeux.

Je tiens à vous remercier, M. Martin. Je tiens à vous remercier de votre témoignage et du courage dont vous avez fait preuve. Merci des informations que vous avez véhiculées, au nom des autres producteurs agricoles également, à la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Merci.

Je suspends deux minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 15)

 

(Reprise à 11 h 17)

Le Président (M. Paradis): La commission reprend ses travaux et accueille à ce moment-ci l'organisme Au Coeur des familles agricoles, représenté par Maria Labrecque-Duchesneau. Si vous voulez, Mme Maria, nous présenter les gens qui vous accompagnent. Et vous étiez présents, je crois, lorsque nous avons offert aux gens qui vous ont précédés d'être assermentés. Vous avez la même possibilité. Si vous voulez témoigner sans être assermentés, vous êtes quand même tenus de nous dire la vérité. Bienvenue.

Au Coeur des familles agricoles (ACFA)

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Merci, M. le Président. MM. les députés, Mmes les députées, je vous présente M. Jean-Claude Poissant, président de l'organisme Au Coeur des familles agricoles.

M. Poissant (Jean-Claude): Bonjour.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Mme Christine Létourneau-Alix, vice-présidente, et Mme Micheline Bruneau-Beaudry, administratrice. Les deux personnes ici sont productrices porcines, et monsieur, dans une bonne production laitière.

M. Poissant (Jean-Claude): Pour le moment.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Et, oui, je vais prendre l'assermentation, s'il vous plaît.

Assermentation de M. Jean-Claude Poissant

M. Poissant (Jean-Claude): Je prête serment... Je, Jean-Claude Poissant, déclare sous serment que je dirai toute la vérité et rien que la vérité.

Assermentation de Mme Maria Labrecque-Duchesneau

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Je, Maria Labrecque-Duchesneau, déclare sous serment que je dirai toute la vérité et rien que la vérité.

Assermentation de Mme Christine Létourneau-Alix

Mme Létourneau-Alix (Christine): Je, Christine Létourneau, déclare sous serment que je dirai toute la vérité et rien que la vérité.

Assermentation de Mme Micheline Beaudry-Bruneau

Mme Beaudry-Bruneau (Micheline): Je, Micheline Beaudry-Bruneau, déclare sous serment que je dirai toute la vérité et rien que la vérité.

Le Président (M. Paradis): Merci beaucoup. Mme Duchesneau, si vous voulez procéder.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Alors, je suis intervenante psychosociale avec un organisme qui s'appelle Au Coeur des familles agricoles. Mon travail est essentiellement d'écouter les familles agricoles pleurer. Donc, effectivement, depuis plusieurs années... ça fait déjà 11 ans que j'écoute les producteurs. Et les clients premiers, ce sont le porc. Le deuxième, même s'il va bien dans la structure, c'est le lait. Et j'en ai très peu dans la volaille, sauf s'ils divorcent. Donc, j'aimerais vous parler d'abord...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Oui, ça coûte cher, divorcer, quand on est dans la volaille. Alors, j'aimerais d'abord vous parler...

Une voix: ...

**(11 h 20)**

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Ils ont beaucoup de problèmes, effectivement. Ce que je pourrais apporter, dans ce que j'entends le plus souvent... Ce que j'entends le plus souvent, c'est: Ils vont s'adapter. On me le dit de tous bords tous côtés: ils vont s'adapter. Que ce soient les personnes qui sont dans le milieu universitaire, que ce soient des personnes au niveau d'institutions financières, que ce soit dans le milieu de La Financière tout court, ils vont s'adapter. C'est rendu que je dis tout haut et fort qu'Yvon ne s'est pas adapté, Suzanne non plus, Marcel non plus. Je pourrais tous les nommer. Non, s'adapter de façon trop vive, trop vite, c'est difficile.

L'agriculture, ce n'est pas si facile que ça, selon les gens qui pleurent chez nous. C'est des familles, c'est transmis de génération en génération des fois, et souvent Noël, c'est pénible. Pourquoi? Parce qu'ils ne se parlent plus, parce que papa a transmis la ferme à son fils et que son fils n'a pas honoré ce transfert. Et ça pleure. Ça pleure beaucoup. On me parle souvent de maladie: influenza mystérieuse, etc. Et si on parlait de la maladie des humains qui sont derrière ces productions-là? Eh bien, on a fait monter, j'en suis certaine, les antidépresseurs au niveau des producteurs et des productrices agricoles. Effexor, si vous voulez faire des placements, c'est le bon placement.

Donc, la pauvreté que je vois, ce qui m'attriste le plus, c'est les enfants. Quand on est pauvre, comment qu'on doit être? Quand on est pauvre, qu'est-ce qu'on peut faire? Ça m'attriste énormément, parce qu'en agriculture on n'a pas fait qu'un enfant, on en a fait trois, quatre, cinq et très souvent six. Donc, ça me touche particulièrement.

La ferme, étant donné que c'est transmis de génération en génération, comme je vous le disais tantôt, il y a la honte de faire faillite. Qu'est-ce que diraient les autres? On a une vie sociale dans le rang, on a une vie sociale dans notre milieu, un petit village, parce qu'on... Peut-être que je demeure en Montérégie, mais... On est proche de Saint-Hubert, on est proche de Montréal, mais il y a bien des petits villages qui sont éloignés, et, socialement parlant, c'est difficile de dire: Regarde, je ne suis plus capable de continuer.

Il y a aussi beaucoup qu'on me parle de dévalorisation de leurs biens. Je paie mes dus à l'institution financière, mais je paie beaucoup trop cher pour qu'est-ce que je suis capable d'avoir si je voulais vendre. Combien de fois j'ai demandé à des producteurs: Si tu avais le prix, vendrais-tu? Et d'instinct, tout de suite: Oui, je vendrais.

J'ai demandé aussi: Est-ce que vous seriez prêt à aller travailler pour quelqu'un d'autre en faisant... Avec vos connaissances, allez-vous travailler encore dans le porc? Croyez-vous sincèrement que l'on veut continuer dans le porc lorsque l'on a fait faillite? Donc, c'est une demande que j'ai faite au niveau du MAPAQ, de pouvoir trouver de façon... «agréable», ce n'est peut-être pas le bon mot, mais, de façon humble, de trouver... Comme les entreprises quand ils ferment leurs portes, on donne une possibilité d'avoir une formation, on donne une possibilité d'avoir des argents pour se reclasser, mais, en agriculture, quand on est propriétaire, on ne peut même pas faire ça. Donc, j'ai demandé au ministère du MAPAQ de parler avec le ministère de l'Emploi, vos collègues, si c'est possible qu'ils puissent au moins, les producteurs, apprendre un autre métier honorablement. C'est des personnes humaines.

Ce que je vois, c'est du harcèlement aussi: écraser, écraser, écraser une personne parce qu'il ne paie pas. Devoir dire au système: Écoutez, ce n'est pas votre salaire qu'on parle, on parle d'un humain. J'aimerais ça qu'on puisse parler avec les employés de La Financière, parce qu'il y a beaucoup... beaucoup, sur le terrain, ont énormément de peine de tout ce qui se passe. Il y a des décisions qui se prennent à Québec, mais, sur le terrain, il s'en passe aussi, des choses. Les gens sont proches de leur monde, en affaires.

Je vois des banques, des systèmes... -- je n'aime pas dire «banques», je vais dire «institutions financières» -- qui du jour au lendemain décident qu'ils n'auront plus de prêt. Le prêt, on l'enlève. Et de dire: Bien, voyons, si j'emprunte pour un char -- excusez pour le mot «char» -- si j'emprunte pour un char, est-ce que vous allez me demander comment je vais le chauffer, si vous me donnez des argents pour le chauffer, ce char-là? Non. Mais comment qu'on fait pour retirer des prêts agricoles en disant que le système financier disent: On a déjà trop donné, de toute façon? Oui, ça se fait pour une marge de crédit. Je vois des fermes qui ont quand même un bon roulement mais qu'on leur dit merci beaucoup pour un 30 000 $, parce que le 30 000 $... les marges de crédit ne sont pas assurables à La Financière. Donc, les banques sont très... institutions financières sont très féroces.

Quand on me parle des moins performantes, je dis souvent: Bien, les moins performantes, ça fait belle lurette qu'elles ne sont plus là. Aujourd'hui, je vois des gens qui ont gagné des beaux trophées, effectivement, puis qui perdent leurs fermes. On parle de trophées, de remises par leurs pairs, là. On parle du porc, on parle des gens... Il n'y a pas juste le porc, là, qu'il y a un problème avec La Financière. Il y a le veau aussi. Voilà deux ans... Je sais les problèmes, moi, quand on m'appelle de façon démesurée. Mais, voilà deux ans, c'étaient les intégrés qui m'appelaient. Je ne connais aucun intégrateur qui n'a pas baissé, qui... Comment je vais le dire? Attends un peu. Tous les contrats à l'intégrateur ont été baissés entre 25 % et... un, entre autres, 40 %, parce qu'ils voyaient La Financière arriver avec leur façon de calculer. C'est ma vision à moi. Je ne suis pas agronome-conseil, je suis juste Maria.

Donc, ce que, moi, je veux amener, c'est que... comment on peut, du jour au lendemain, agir de cette façon? Je suis toujours... C'est toujours le producteur qui a les dettes sur le dos, c'est toujours le producteur qui a la... qui doit rénover. Je me suis longtemps posé la question: Voulez-vous m'expliquer quel pouvoir qu'ils ont? Quand on baisse dans les... quand on baisse les... Dans la détresse, quand on baisse les contrats de 25 % à 40 %, bien c'est ton salaire qui y passe, c'est l'employé que tu as en moins, c'est beaucoup de facteurs qui sont en moins.

Donc, la personne arrive chez moi épuisée, écoeurée, tannée, mais elle toffe. Le mot «toffe» n'est pas... C'est très français pour moi, parce que, quand c'est toffe, c'est toffe. Alors, ces personnes-là me disent: Je suis tanné. Et là je leur demande tout le temps: Tu as-tu le goût de vivre encore? Parce que ça va être important qu'on le sache, là. Et ma deuxième question, c'est: Quel est le moyen que tu vas prendre? Puis la troisième question, c'est: As-tu décidé de la date? Quand j'ai trois réponses, on s'en va à l'hôpital. Mais ce n'est pas vrai qu'ils veulent tous mourir, là. Il ne faudrait pas penser ça. C'est difficile. C'est des gens solides quand même.

Oui, ça pleure dans le rang. Ça coûte cher. Qui les motive? Donc, beaucoup, c'est un jour à la fois. Puis, pour vous dire que c'est très vrai que ça ne va pas bien, même si on essaie de me dire que ça va bien, et je l'ai lu aussi, bien on avait un congrès du porc, voilà pas si longtemps, qui durait trois jours. J'allais là, j'embrassais tout le monde, c'étaient beaucoup de personnes, c'était fort agréable. Aujourd'hui, il n'existe plus. Si vous vous êtes déplacé au congrès du porc cette année, ça et un salon funéraire auraient été bien équitables pour les comparer ensemble.

Donc, c'est aussi un autre côté qui m'inquiète. J'ai vu un producteur vendre ses terres à la demande de La Financière agricole, pour son dossier, et c'est une compagnie de transport qui a acheté les terres. Mais je me suis posé la question: où est-ce qu'elle était rendue, notre agriculture? Parce que, dans la confidentialité, je reçois pas mal de petites affaires, ce qui me fait dire: Holà! On peut-u être honnête puis se dire les vraies affaires? Effectivement, je ne peux pas tout vous dire aujourd'hui, vous m'enverriez la Sûreté du Québec sur le dos. Mais je me dis...

Une voix: ...

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Oui, c'est vrai. Alors, le harcèlement, ça suffit. Quand quelqu'un est déjà à terre, on peut-u le respecter? On peut-u faire en sorte qu'on le prenne comme un humain et non pas comme un rendement qui n'est plus là? On peut-u juste le considérer comme un être humain?

Bref, que vous dire de plus? Est-ce que j'ai tout dit, M. le président?

**(11 h 30)**

M. Poissant (Jean-Claude): Peut-être qu'il y en a d'autres qui vont te revenir.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Peut-être. Mais effectivement 30 % d'augmentation dans mon chiffre d'affaires, et j'ai adopté le modèle agricole sept jours sur sept, 80 heures semaine, puis je peux-tu vous dire qu'il est temps qu'on arrête ça, cette hémorragie-là? Parce que c'est des bonnes personnes. Je dis tout le temps ça. Même quand je parle de vous autres, je dis que vous êtes des bonnes personnes, mais... Tout le monde, c'est des bonnes personnes, mais tout le monde a droit à sa part du gâteau, tout le monde a droit à être respecté. Je pense que j'ai tout dit.

Le Président (M. Paradis): Ça va? À ce moment-ci, si vous avez terminé votre témoignage, je reconnaîtrais quelqu'un du côté ministériel pour une question. Mme la députée de Pontiac? Ça va? Ça va, ça va. Du côté de l'opposition, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Mme Labecque-Duchesneau et les gens qui vous accompagnent, bonjour. Alors, c'est sûr qu'on vous connaît, Mme Maria, sous le nom de Maria, avec votre franc-parler mais qui illustre aussi le drame qui se passe en agriculture, dans bien des secteurs d'activité.

J'aimerais vous réentendre, Mme Labrecque-Duchesneau, sur votre demande que vous avez adressée pour... Vous parliez de formation en termes soit de relève ou de continuité. Savoir... Que vous reparliez un peu, là, sur votre idée, puis aussi quelle réponse vous avez eue jusqu'à présent.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Je sais que le MAPAQ présentement travaille avec le ministère de l'Emploi pour trouver une formule. Comment je l'ai vu? C'est que les producteurs agricoles, si on regarde maintenant ce qu'on fait avec le... Comment t'appelles ça quand... pour le secondaire V?

Une voix: ...

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): L'équivalence. Mais, quand tu as été sur une ferme toute ta vie puis que tu as un secondaire IV, mais un producteur agricole, une productrice agricole -- on va y aller avec le sexe masculin, s'il vous plaît, ça va être plus facile -- ça sait souder, ça sait faire de la mécanique, ça sait conduire des camions. Ils ont des compétences multiples. Donc, est-ce qu'Emploi-Québec peut faire en sorte d'avoir une mise à niveau facile, intéressante, selon ses compétences et de le réintroduire dans le milieu du travail de façon honorable? C'est ma demande. Sauf que ce sont des sans-chèque parce qu'ils sont propriétaires. Et, quand on fait faillite, bien, du jour au lendemain, il n'y a pas de chèque qui rentre. Mais on mange encore trois repas par jour.

Et, comme je vous ai dit, je m'inquiète aussi pour les enfants et je trouve ça triste de voir qu'on va à la miette, on essaie de trouver la meilleure méthode, on essaie de trouver la meilleure façon de s'en sortir. Mais honorablement est-ce qu'on peut faire quelque chose pour que ces personnes-là se disent: J'ai fait un autre métier, je suis contente de mes acquis, et on les a reconnus? C'est ma demande que j'ai faite.

L'autre demande que j'ai faite pour sortir honorablement, si vous me permettez: Pourquoi ne pas leur donner, quand ils arrivent à un certain âge... Parce que, même si vous avez des diplômes puis vous avez 60 ans, bien vous avez de la misère. À moins de se présenter comme député à la prochaine élection! On ne le sait pas. Toutefois, toutefois...

Des voix: ...

Une voix: ...

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Est-ce que vous avez lu dans ma pensée, cher homme? Je pense qu'en quelque part... Où c'est que j'en étais?

Une voix: ...

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): On est... Ils sont des sans-chèque, donc il faut manger trois repas par jour encore. Ça fait que, si on pouvait faire en sorte, de façon honorable... leur dire: Bien, voilà, vous pouvez quitter et vous... et on vous amène... Ce n'était pas ça. Je recommence. C'est-u permis de se tromper? Parfait.

Le Président (M. Paradis): Vous pouvez recommencer.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Quand tu es rendu à 60 ans, peu importe le diplôme que tu as, tu as de la misère à te placer. Vous le savez, ça fait partie des statistiques. On peut-u leur donner une pension? Ça serait-u trop demander, ça, une pension pour se retirer, quelque chose qui va faire en sorte qu'ils vont être honorablement capables de sortir? En Europe, apparemment ça existe. Il y a un montant qui est équivalent... Bien, dans le temps, quand je l'ai su, il y a une dizaine d'années, là, 10 000 euros. Puis, la personne, si elle transférait à son enfant en totalité, recevait une pension, peu importe l'âge qu'il avait, là. Moi, je vous demande juste que... Retourner sur le marché du travail à 60 ans, c'est déjà difficile avec des diplômes, imaginez sans diplôme.

Le Président (M. Paradis): Mme la députée de Pontiac. Et je reviendrai.

Mme L'Écuyer: Merci, M. le Président. Bonjour, madame... Oups! je n'ai pas une bonne mémoire des noms. Mme Duchesneau? Maria? On ne discrimine pas avec l'âge, en politique, nous autres. Par contre, il y a deux... Bon, votre demande, je suis très intéressée par ça, puis on va s'assurer que... on va en parler au niveau du MAPAQ, là, parce qu'on s'aperçoit que, dans les milieux ruraux, souvent on est en manque de gens de métier, que ce soit plombier, électricien. Bon, c'est sûr que ce n'est pas la solution, que nos producteurs deviennent des plombiers puis des électriciens, mais il y en a peut-être qui veulent, à un moment donné, quitter, et je pense qu'il faut en profiter. Ça, ça m'apparaît comme étant... Ça va de soi que l'utilisation des compétences de ces personnes-là soit utilisée au maximum et qu'on puisse leur faciliter de pouvoir se recycler dans différents domaines, selon leurs goûts.

J'aimerais ça... Quand je vous écoutais, tantôt, bon, vous disiez comment ce n'est pas facile et que ça pleurait beaucoup dans nos rangs, que les gens pleuraient beaucoup, et vous avez posé une question: Où s'en va notre agriculture? Et je pense que beaucoup de gens qui sont ici se préoccupent de ça aujourd'hui. J'aimerais ça savoir, sans divulguer de secret professionnel, si dans vos rencontres avec nos producteurs, nos producteurs qui ont des fermes familiales... est-ce qu'il y en a qui ont fait part de ces commentaires-là ou bien est-ce qu'il y en a qui vous ont fait part un peu d'une vision, vers quoi on s'en allait dans nos milieux avec nos productions familiales?

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Ce que je peux vous dire, c'est que j'écoute pleurer les gens à travers la province. J'ai une bonne vision de qu'est-ce qui se passe au niveau de la province. Je sais que les gens se posent énormément de questions dans le travail qu'ils font, dans l'avenir de leurs productions. Souvent, on m'amène... C'est sûr que, quand on est rendu avec une business qui est très grosse, puis qu'on est rendu à 64 ans, puis qu'on n'a pas transféré, bien plus les cheveux gris grisonnent... nos cheveux grisonnent, plus notre corps nous dit qu'on prend de l'âge, alors, oui, c'est difficile de transmettre ou de dire que je ne continue pas parce que je n'ai pas de relève.

Alors, moi, je vois des troubles un peu partout, plus dans le porc, je vous l'ai dit. Dans le lait, c'est une autre histoire. Dans le veau, c'est une autre histoire encore. Dans le mouton, c'en est une autre. Dans la chèvre laitière, il y a tellement de monde qui se promène avec des chèvres. Ça commence, ça finit, ça recommence. C'est assez étonnant.

Mais, oui, l'agriculture, des fois je me dis: En fin de compte, dans le stress que vivent les agriculteurs, c'est l'incertitude qui tue. L'incertitude, c'est de ne pas savoir où est-ce qu'on s'en va. L'incertitude, c'est: Je vas-tu faire assez d'argent pour faire mes paiements? L'incertitude: Est-ce que je vais être députée à la prochaine élection? Est-ce que c'est une incertitude pour vous? Bien, dans la vraie vie, l'incertitude dérange. Quand on a des paiements à faire puis qu'on a une incertitude qui dérange, bien le stress commence. Et le stress ne diminue pas. Quand on change les données de l'ASRA, comme l'ASRA, ce que j'ai vu le plus, c'est toute l'inquiétude qui s'englobait là-dedans et que, là, les producteurs agricoles, les familles agricoles se questionnaient énormément à savoir: Bien, on va-tu arriver? Ça va-tu marcher? Oui, je m'inquiète pour l'agriculture, madame.

Mme L'Écuyer: ...question très courte.

Le Président (M. Paradis): Oui, allez-y. Puis j'avais une additionnelle.

Mme L'Écuyer: Oui, très, très courte. Vous venez de dire que vous avez des contacts avec à peu près les agriculteurs d'un peu partout au Québec. Dans vos rencontres avec ces gens-là d'un peu partout, qu'est-ce qui, pour vous, ressort comme vision de ce que va être notre agriculture, ou nos productions, d'ici quelques années? La vôtre, votre vision.

**(11 h 40)**

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): La mienne? Ma vision à moi? Bien, moi, j'aime dire, surtout à mes clients, que le bonheur, c'est ce qui prime dans la vie. Donc, l'agriculture future, moi, comme opinion, c'est qu'ils soient heureux, le monde qui sont en agriculture, qu'ils puissent faire leurs paiements, qu'ils puissent bien en vivre. Parce qu'en quelque part souvent j'ai l'impression que l'agriculteur n'a pas le droit de faire de l'argent. Juste le monde du poulet, là. C'est quelque chose, hein? Tout le monde a le droit de faire de l'argent. Pas juste... Parce qu'il est agriculteur, il faut qu'il ait deux poulets, un cochon, une vache, comme certaines personnes disent parfois à la télé. L'agriculture, il faut l'aimer, il faut l'apprécier, il faut le dire, que c'est beau.

C'est de valeur, parce que les médias sont souvent contre l'agriculture. Ils sont souvent contre, au niveau environnemental, au niveau ci, au niveau ça. Puis je me dis: C'est difficile, faire de l'agriculture. M. le député, qui en a fait longtemps, le sait que c'est difficile. Vous levez-vous encore à 5 heures le matin? Peut-être pas. Mais il y en a d'autres qui se lèvent à 5 heures le matin.

Une voix: ...

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Oui, hein? Vous vous souvenez des 5 heures du matin? 9 heures le soir? Est-ce que c'est facile, faire de l'agriculture, monsieur? C'est passionnant, mais c'est... Il faut la garder, cette passion. Parce que souvent on me dit: Je gagne 5 $ de l'heure, moi, quand j'en gagne. 5 $!

Le Président (M. Paradis): Oui? Est-ce qu'il y a un complément de réponse?

M. Poissant (Jean-Claude): Oui, s'il vous plaît.

Le Président (M. Paradis): En vous identifiant.

M. Poissant (Jean-Claude): Jean-Claude Poissant. Je suis le président, Au Coeur des familles agricoles. Premièrement, je tiens à vous remercier de prendre le temps de faire une commission parlementaire sur l'agriculture. On voit l'importance que vous y apportez.

Et puis, pour répondre un peu dans le sens de la question que madame a dite, j'ai un peu une définition. En 1961, on était 95 000 fermes au Québec. Présentement, il en reste 30 000. L'année dernière, sur mon entreprise, j'ai eu la visite d'investisseurs étrangers qui sont venus voir mon entreprise. Et puis, il y a environ deux semaines, j'ai eu un appel. C'étaient des investisseurs étrangers qui cherchaient des grosses fermes laitières. On me demandait de trouver une ferme de 500 vaches et plus.

Notre agriculture, au Québec, il faut la garder, il faut la protéger. C'est un patrimoine qui nous appartient, qu'il ne faut pas laisser aller dans d'autres mains. C'est ce qu'on me... on essaie de transférer à notre relève de plus en plus. Mais notre relève vit aussi des moments difficiles: le financement, la valorisation du métier. C'en est une, part de ce que vit notre relève.

Moi, ce que j'aimerais lancer comme message aujourd'hui, c'est ensemble, vous, les députés, peu importe le parti que vous êtes, de faire un consensus pour protéger notre agriculture du Québec, parce que c'est notre façon de nous nourrir et puis de nous garantir un avenir d'alimentation. On produit environ 30 % de notre alimentation. C'est très minime, je trouve.

Et on voit de très beaux projets de développement. Je suis de Saint-Philippe-de-La Prairie. On a toutes sortes de beaux projets. Je suis conseiller municipal. On nous amène des très gros projets sur le territoire agricole. Je n'ai pas le droit d'en parler, mais, quand même, je sens... notre agriculture est très grandement menacée. C'était pour ajouter...

Le Président (M. Paradis): Moi, j'aurais peut-être une petite question. Vous avez parlé d'une augmentation de votre chiffre d'affaires, là, pour utiliser votre expression, de 30 %. J'aimerais savoir sur une période de combien de temps puis comment vous pouvez expliquer ça, alors que le gouvernement a doublé sa contribution dans le cadre de La Financière agricole dans les dernières années. À un moment donné, on double l'apport gouvernemental puis on a malgré ça une augmentation du chiffre d'affaires des personnes en difficulté.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Vous dire... Ça pleure. Vous dire que c'est que des problèmes financiers, quand ça arrive chez moi, si madame a fait sa valise parce qu'ils mangeaient du porc soir et matin -- puis ça, c'est vrai que ça existe, là -- de là à appeler le bovin puis leur dire: Avez-vous du steak? Je vais vous échanger ça contre des côtelettes de lard, ce n'est pas rare, ça, monsieur.

Donc, vous dire: Mon chiffre d'affaires a augmenté... C'est peut-être parce que l'agriculture, c'est prenant, l'agriculture... il y a toutes sortes de problèmes dans la vie. Des fois, c'est un accident. Vendredi, cette semaine, c'est un parent que j'ai rencontré, sa fille est décédée. Quand tu n'as pas de moral, bien c'est difficile de travailler. Tout est là. Les problèmes que je vis, qui me sont expliqués, se vivent dans la société, peu importe où qu'on vit. L'idée, c'est que vous rajoutez une ferme. La ferme est prenante. Souvent, je dis à la madame -- puis ce n'est pas des blagues, ce je dis là, là, je le sais que ça va avoir l'air en blague: Il ne peut pas avoir de maîtresse, il en a déjà une, madame, votre mari, c'est son entreprise. Elle est coûteuse, elle est exigeante, elle est demandante. Pas besoin d'aller chercher quelqu'un d'autre ailleurs, il a tout ce qu'il lui faut.

Comprenez-vous que l'agriculture, c'est soir et matin? Puis surtout quand on est dans les animaux. Et, si vous rajoutez les maladies... Mon Dieu! on me parle de tension parasitaire, on me parle... Ultramar, Hydro-Québec, éoliennes. Mettons qu'il y a une grosse part là-dedans présentement. Que voulez-vous que je fasse? Que les écouter. Que les écouter. Les éoliennes ne seront pas dans ma cour à moi, elles sont dans la cour d'eux autres.

Le Président (M. Paradis): Oui, en vous identifiant.

Mme Létourneau-Alix (Christine): Merci. Christine Létourneau, production porcine à L'Ange-Gardien. J'aimerais donner un peu une réponse à la dame qui demandait la vision de l'agriculture. Nous, mon mari et moi, nous sommes diplômés à l'ITA de Saint-Hyacinthe, en gestion d'entreprise agricole, 1982-1984, et mon fils, qui est associé avec nous en 2004... On a une ferme porcine naisseur, puis, en 2009, on a décidé de... vu qu'on avait de la relève, puis la relève était très intéressée, on a décidé de faire de la place puis on a dit: O.K., on fonce. Ça fait que, là, pour la viabilité de la ferme, c'était bien de finir tous nos porcs. Ça fait que, là, on a eu un projet, celui d'acheter la ferme qui était comme en face de chez nous pour engraisser tous nos porcs. On étudie le projet à l'interne, entre nous, les associés. On trouve que le projet a bien de l'allure. On va voir les institutions bancaires, notre institution bancaire, avec un conseiller professionnellement formé, diplômé là-dedans, qui est bon pour faire des calculs. Lui aussi, il trouve que le projet a bien de l'allure. On continue, on va à La Financière, où il y a des professionnels qui travaillent, qui étudient notre dossier avec nous: Ça a de l'allure, votre affaire. On continue. On montre le projet au régional, au niveau de La Financière, ils étudient le dossier: Ça a de l'allure, votre affaire. On continue. Le dossier arrive à Québec, ils regardent le dossier: Ça a de l'allure, votre affaire, on accepte. Vous pouvez aller au devant puis acheter l'entreprise en question.

Là, le temps de tout ça... On a commencé les démarches en avril 2008. Le temps de tout ça, l'acceptation a été donnée en début août 2008, pour la possession de l'entreprise en janvier 2009. On prend possession des clés. La même journée, on nous annonce que les données ne sont plus les mêmes. On nous coupe ce que, nous, on avait prévu aller chercher en économies, étant donné qu'on changeait une... Au niveau des alimentations, on ne faisait plus la moulée de la même façon. On avait une économie d'échelle, à ce moment-là, grâce à ça. Puis il y a le même, même montant de coupure à l'ASRA qui se fait.

Six mois après, notre conseiller au niveau de La Financière agricole, il appelle, un peu les baguettes dans les airs, il dit: Qu'est-ce que c'est, ça? Vous nous aviez fait un budget dans lequel ça devait donner ça, ça, ça, puis ce n'est même pas ça qui arrive. Ça fait que, là, on dit: Bien, attends un petit peu, checke bien ça. Nous autres, on a dit que ça faisait ça, ça, ça parce que, toi, tu nous avais dit que ça faisait ça, ça, ça aussi. Ça fait qu'ensemble on avait calculé qu'un plus un donnait deux. Mais aujourd'hui c'est un plus un égale moins deux. Ça fait que...

Mais, nous, on a des paiements à faire, on a des paiements à rencontrer. Puis on a une relève intéressée. On a voulu, en tant que parents... Quand on a une relève, bien on a des sacrifices à faire, tout comme la relève aussi a des sacrifices à faire. Mais on a décidé... Regarde, notre relève, elle veut. On va se mettre la tête sur la bûche puis on va continuer parce qu'on a beaucoup à aller chercher. Nous, on est la cinquième génération sur la ferme, mon fils, la sixième, puis mes petits-enfants... À 46 ans, je suis grand-mère trois fois. Mes petits-enfants sont la septième génération à vivre sur la même entreprise.

Puis là, au mois de juin, on s'est assis, mon fils, mon mari et moi, on a fait des calculs. Parce que finalement ça a l'air qu'il y en a qui ne sont pas mieux que nous autres pour calculer. Ça fait qu'on s'est assis, on a calculé, puis on ne fait pas une cenne. On n'a pas d'argent pour payer l'épicerie. Ça fait que là on a dit: On fait quoi? On a une infrastructure qui est grosse, dans laquelle on est trop passionnés pour laisser tomber. C'est une manière de vie. Ça coule dans nos veines. C'est dur à expliquer. Mais parlez à un médecin que c'est sa raison d'être, sa raison de vivre, puis demandez-lui d'être plombier demain matin, vous venez de le tuer. Je pense que c'est la même affaire en agriculture. Les vocations ne sont plus dans les églises, elles sont dans les porcheries, elles sont dans les étables. Elles sont, je pense, aussi à l'Assemblée nationale, quand on décide d'être député, parce que je pense que, ça aussi, il faut être des passionnés pour faire ce métier-là.

Là, on s'assoit, puis on ne fait pas une cenne. Mon fils est un jeune homme très intelligent -- il retient de sa mère -- ça fait que...

**(11 h 50)**

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Létourneau-Alix (Christine): Non, mais il est diplômé, très intelligent. Il dit: Regarde, s'ils ne veulent pas de nous autres, je vais être capable de faire d'autre chose. Mon fils a vécu quelque chose de très gros. Il a eu une bactérie au coeur. Opéré à coeur ouvert à 23 ans. Ça remet les pendules à l'heure. J'ai eu un cancer du sein en même temps. Ça aussi, ça met les pendules à l'heure.

Une voix: ...

Mme Létourneau-Alix (Christine): C'est ça: «Tu vas t'adapter.» Ça fait qu'à un moment donné tu dis... On s'est regardés, moi puis mon mari, on dit: Où elle est, notre passion? Où elle est, la passion de Jonathan, qui avait les yeux si brillants puis qui disait: Papa, c'est ça que je veux faire, je ne veux pas faire d'autre chose? Agriculteur un jour, agriculteur toujours. Où elle est, notre passion? Je ne le sais plus. Mon gars est en train de penser à aller chauffer des dix-roues.

Ça fait que, si on va tous à salaire, qui va payer nos salaires? À un moment donné, ça en prend, des entrepreneurs. En agriculture, la raison pourquoi qu'on accepte de travailler sept jours par semaine, pourquoi que ça ne nous dérange pas d'avoir les deux mains dans la merde parce que la pompe a pété un matin, puis il faut la réparer, c'est parce que c'est à nous. C'est notre fierté, ça, notre entreprise. C'est tout ce qu'on a. Puis, quand les gens viennent, là... Venez, venez faire un tour avec nous autres. Ils sont tellement heureux de voir ça: Vous êtes tellement chanceux d'avoir une porcherie, d'avoir des petits cochons. On se le demande, oui, si on est chanceux. Mais comment ça se fait que, voilà quelques années, on ne se le demandait pas? Je ne sais pas. Merci de m'avoir écoutée.

Le Président (M. Paradis): Je vous remercie de votre témoignage. Oui.

Des voix: ...

Le Président (M. Paradis): S'il vous plaît! Je sais ce que vous en pensez, là, mais gardez-le intérieurement. Prochain intervenant, en vous identifiant.

Mme Beaudry-Bruneau (Micheline): ...Bruneau. Je suis en production porcine avec mon mari et mon fils. Je devais dire: J'étais en production porcine avec mon fils, parce que la ferme sur laquelle... qu'on exploitait, mon fils et moi, elle est vide présentement. On a dû fermer les portes. Il a 32 ans. Il s'en va travailler à salaire. Et je pourrais vous dire, à quelque part, que c'est presque une délivrance pour lui, parce que ça faisait 11 ans qu'il était dans le porcin, et puis il n'avait pas une cenne. Il a dit: Maman, finalement j'ai des sous dans mes poches. Ça faisait 11 ans qu'il se privait. Il en a eu, des beaux certificats comme quoi qu'il était le meilleur producteur dans sa région, il en a eu en masse. Mais il dit: Maman, je n'avais jamais un sou dans mes poches. Il dit: Aujourd'hui, j'ai des sous dans mes poches.

Ça, ça fait 11 ans qu'on l'avait établi. Mon mari et moi, ça fait 29 ans qu'on est en production porcine. À cause qu'on n'est plus associés avec notre fils, parce que, nous, on a une maternité de 250 truies, il n'y a plus personne qui veut nos porcelets. Ça veut dire qu'on est en train de fermer, chez nous aussi. Avec des dettes, naturellement, parce qu'on s'est mis à date en 2005, on a rénové en ... Ça nous a coûté beaucoup de sous. À ce moment-là, on était clairs de dettes, mais, pour se mettre à la page, qu'on pourrait dire, on a investi. Et parce que notre fils, aussi, s'en venait avec nous, notre cadet, qui aujourd'hui n'est plus là aussi. Ça veut dire que nos deux relèves ne sont plus là. Ils sont partis.

Nous, on ne sait pas si on va avoir une maison demain matin, parce qu'on a des fournisseurs qui sont tenaces, qui ne veulent pas laisser tomber. On a 56 et 57 ans. Heureusement, moi, j'ai un salaire. Je gagne à peu près 250 $ par semaine, un gros salaire pour faire l'épicerie.

Ce n'est pas facile aujourd'hui, parce que je me mets à nu devant des confrères qui sont ici. C'est la première fois. Ce n'est pas facile, parce qu'on pensait qu'on avait une retraite. On n'en a plus. Ce n'est pas facile, parce qu'il y a le jugement des autres. Qu'est-ce qu'ils vont dire? Micheline et Richard, c'est des gens fiers, c'est des gens qui se sont battus pour leur entreprise, ce sont des gens qui se sont battus pour leur famille. On se bat pour quoi aujourd'hui? Pour essayer d'avoir une retraite décente, si c'est possible.

Ça fait que les coupures de l'ASRA, on les a vécues, mais elles ont été difficiles. Les 55 000 $ que Lorraine et Éric parlaient tantôt, ils sont là. 55 000 $, quand vous prenez à peu près 10 000 $, 15 000 $ pour vivre dans une année, on se demande où est-ce qu'on va prendre le reste. Mais c'est les fournisseurs qui fournissent le reste, parce que finalement on ne paie plus nos comptes. Mais ces mêmes fournisseurs là veulent leur argent. Ils sont tenaces.

Et tantôt on va avoir le PPA, sur lequel on a signé personnellement. Parce qu'on n'avait pas le choix. C'était le remboursement ou il faut signer personnellement. Lorsqu'on est allés en médiation, ce qu'on a appris, c'est que les intérêts, même si le montant est dû seulement qu'en 2013, les intérêts commencent aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui vous êtes en médiation. Pourquoi? On n'est pas encore en faillite. On n'a pas remis nos clés encore. Mais les intérêts commencent aujourd'hui.

La situation n'est pas facile, et je le sais qu'elle ne l'est pas pour beaucoup autour de moi. Mon mari est allé rencontrer des producteurs: ça pleure. Puis ils nous demandent de faire des rencontres de producteurs parce qu'ils sont désespérés: les femmes pleurent, la relève s'en va. C'est le constat qu'on peut faire en production porcine aujourd'hui. Merci.

Le Président (M. Paradis): Merci de votre témoignage. Est-ce que j'ai d'autres demandes d'intervention? Oui. M. le député de Kamouraska-Témiscouata, suivi de M. le député de Beauce-Nord.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Non, je vais laisser la parole...

Le Président (M. Paradis): M. le député de Beauce-Nord, immédiatement.

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): Oh! excusez, à Mme la députée d'Iberville. Je sautais...

Mme Bouillé: Non, mais je ne veux pas... Merci, M. le Président. Merci pour votre franchise. Ce n'est pas évident de livrer des témoignages comme vous le faites aujourd'hui. Puis je veux souligner le courage qui vous anime, aussi. Et ça me fend vraiment le coeur, là. J'en ai entendu, des témoignages, depuis plusieurs mois, de la part des productrices et producteurs, et ça me fend vraiment le coeur. Ça me touche. Ça me fend le coeur d'entendre des histoires comme ça.

Et j'aimerais que vous expliquiez un peu plus, Mme Labrecque-Duchesneau... Puis, Mme Beaudry-Bruneau, vous avez aussi abordé un peu la question du harcèlement. J'aimerais ça vous entendre un peu plus, quand vous soulevez ça, là. C'est quoi, le harcèlement, là, que vous vivez?

Le Président (M. Paradis): Mme Maria.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Quand vous allez en médiation, vous n'êtes pas tellement, tellement pesant dans vos bottines. Vous allez vous livrer, les livres ouverts, et tu vas chercher dans ta vie privée beaucoup. Mais les gens sont... ceux qui sont alentour de la table tirent chacun sur leur couverture. Et il y a certains... Quand j'ai su qu'il y avait certains réseaux qui cognaient sur la personne plus, j'ai décidé d'aller aux médiations. Ça, ils se sont fait une petite gêne, rendu là. Mais c'est comme si on traitait les producteurs comme des moins que rien, en bon français, des trous du cul, comme si c'étaient des gens qui avaient profité... des gens qui les avaient volés, des gens qui... Tu fais: Bien, voyons, d'où ça sort? Pourquoi toute cette hargne-là? Mais c'est ça qu'ils vivent, les producteurs.

Quand on arrive en médiation, ce n'est pas simple, et surtout quand le... Il y a une personne, entre autres, qui me frappe beaucoup, puis je ne peux pas dire c'est quelle organisation. Elle, elle est au téléphone. Elle ne se déplace plus. Et elle a un ton tellement arrogant que j'ai fait: Qu'est que c'est que ça? C'est facile d'être arrogant au téléphone. Mais elle ne se déplace pas. Elle est toujours au téléphone, et je trouve ça ordinaire.

Donc, effectivement, quand tu arrives en médiation, c'est que tu arrives avec juste ce que tu peux sur ton dos, et on te déshabille. C'est à la fois humiliant et honteux pour eux. C'est très difficile.

Le Président (M. Paradis): Mme la députée d'Iberville.

Mme Bouillé: ...je me permets d'insister un peu, étant donné qu'on est en mandat de surveillance de La Financière. Est-ce que vous en avez de la part de La Financière agricole?

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Bien non, effectivement. C'est plus le système financier.

**(12 heures)**

Mme Bouillé: Si vous me permettez, M. le Président... Comment vous expliquez que le MAPAQ et La Financière agricole continuent à nier qu'il y a une crise actuellement dans le secteur? J'aimerais ça vous entendre sur ça.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Si j'avais une réponse! Je suis toujours très étonnée. Peut-être que M. Lacasse, après moi, va pouvoir vous répondre. Toutefois, je suis étonnée de voir des gens intelligents, comme Micheline, comme des personnes ici, dans la salle, que je connais beaucoup, qui savent compter, je me dis, écoutez, là... Pourquoi ça arrive à des dates toutes pareilles? Parce que, quand on change les règles du jeu puis qu'on me dit: ils vont s'adapter, bien, ils vont s'adapter, c'est comme... bien oui, mais on s'adapte comment, en fin de compte? Même à un enfant qui apprend à marcher, il faut qu'il s'adapte à ne pas attraper les coins de la table du salon et... Ils vont s'adapter, ça dure comment longtemps, ça? Est-ce qu'on peut avoir une période pour l'adaptation? Moi, je pense que oui.

Puis, à toutes... souvent, quand j'ai parlé avec les producteurs, ils me disent: Tu sais, si c'était... si on pouvait arriver de notre propre travail avec les prix qui conviennent, on n'en voudrait pas, de l'ASRA, c'est trop compliqué. Beaucoup de producteurs me disent ça. Alors, je me dis, moi, qualité égale, rentrez tout le stock d'ailleurs, qualité égale. Mais ce n'est pas ça qui se passe. Tantôt, on en a fait allusion. On a le côté environnemental très développé au Québec. C'est correct, mais qu'est-ce qui vient d'ailleurs, c'est quoi? Qu'est-ce qu'on mange? Quand on est même pas capable d'avoir, ceux qui sont bio, là, les carnets de charges, les cahiers de charges? Bien, ça a l'air qu'ici c'est une chose, en Ontario aussi. Donc, qu'est-ce qu'on mange à Vancouver, ça semble être pareil... ça semble être fort différent de nous, mais on porte toujours le même mot: «bio».

Mme Létourneau-Alix (Christine): Moi, je sais c'est quoi que je mange: je mange mon cochon. Puis, moi, je mange du cochon matin, midi, soir.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Donc, ils vont... Moi, je vous le redis: s'adapter demande un certain temps. C'est important, le temps, en agriculture. Voilà. Est-ce qu'on a tout dit?

Le Président (M. Paradis): Merci. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Écoutez, je comprends très bien parce que, comme j'ai dit tout à l'heure, moi, je proviens du monde agricole, et j'ai des amis qui viennent me voir, puis je pense que tous les députés doivent avoir le même... Tu sais, quand la détresse est rendue... elle vient cogner à nos portes, aussi, de députés pour nous expliquer qu'est-ce qui se passe puis comment est-ce qu'on peut régler les problèmes, comment est-ce qu'on peut les aider à régler les problèmes.

Mais on regarde La Financière agricole présentement, on m'a dit qu'il y a assez d'argent dans le système. Mais, moi, je crois et je demeure convaincu que l'aide est mal ciblée. Parce que, que ce soit... me semble que, là, on dit: peut-être 10 % des fermes vont chercher à peu près 80 % de l'argent qui est disponible à La Financière agricole. Ça veut dire qu'il y a 90 % des fermes familiales qui n'ont pas grand-chose pour vivre.

Puis, si j'en reviens à ce que je disais tout à l'heure, moi: c'est quelle vision qu'on a pour les décennies à venir pour notre agriculture? De quelle façon on va nourrir nos enfants? De quelle façon? Est-ce qu'on va se fier à toutes les importations d'autres pays qui ne suivent aucune norme? Tout ce qu'on va penser économiser, on va tout le remettre dans le système de santé pour se faire soigner. Puis on va penser faire une économie, mais ce n'est pas une économie facile, là. La détresse que vous nous dites aujourd'hui, je suis certain, ici, que tous les députés le savent, parce qu'ils en ont, des gens, ceux-là qui sont dans le monde agricole, on la vit, la détresse, dans nos bureaux de comté.

Alors, moi, je pense que... je dirais... Moi, je proviens du monde agricole puis je pourrais dire aux agriculteurs, vous l'avez mentionné tout à l'heure, c'est des gens qui savent tous les métiers du monde puis c'est des gens qui n'ont pas peur de travailler, là. Parce que des sept jours par semaine puis des 3 heures du matin pour aller voir dans l'étable, voir si la vache va vêler puis si elle va avoir de la misère, puis c'est le vétérinaire... souvent ils jouent le rôle de vétérinaire. Alors, ces gens-là sont d'une compétence énorme puis ils n'ont pas peur de travailler. Mais, quand ils arrivent dans le domaine du travail pour faire un autre métier, bien là, on dit: Bien, écoute, là, il va falloir que tu ailles te chercher une formation, tu ne passeras pas... la CCQ, elle ne te donnera pas... Là, il faut qu'ils rembarquent dans tout ce système-là, c'est encore une montagne, que des gens disent: Moi, j'ai 50 ans, j'ai vécu puis je n'ai pas le goût de retourner me chercher un papier. Alors, qu'est-ce qui se passe, vous pensez? Ça travaille au noir, ça travaille comme ça peut, ça travaille pour essayer d'emmener de quoi à manger chez eux. Alors, moi, je pense qu'on a une grosse réflexion à faire, puis ça presse pour la faire. Oui, à vous écouter, puis avec ce qu'on vit, il va falloir se dépêcher à faire cette réflexion-là.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): J'ai compris que vous étiez...

Le Président (M. Paradis): Mme Maria.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Excusez, M. le Président.

Le Président (M. Paradis): Là, allez-y.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): J'ai compris que vous étiez député de la Beauce. J'ai deux...

Le Président (M. Paradis): Beauce-Nord.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Beauce-Nord. Bien là, géographiquement... Excusez-moi, monsieur, on va rester en Beauce. C'est-u correct?

Le Président (M. Paradis): Mais il faut... C'est M. Dutil, Beauce-Sud.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Bon. En Beauce -- on ne se chicanera pas -- bien j'ai deux suicides dans le porc, monsieur, dans votre région, j'en ai un dans Montérégie-Est. Ils ne veulent pas tous mourir comme ça. L'idée, c'est: honorablement, peut-on faire quelque chose pour qu'ils partent par la porte d'en avant, s'ils ont à partir? C'est ça que je demande. Et honorablement ils vont vous saluer puis ils vont vous remercier.

Les producteurs agricoles, là... Je ne sais pas, ici, qui deviendra producteur agricole demain matin. Peut-être que monsieur va être capable de reprendre l'ensemble de ses activités agricoles un jour, je l'ignore. Mais on ne devient pas producteur agricole comme ça parce qu'on décide demain matin. Je reçois toutes sortes de téléphones, vous savez. À un moment donné, j'avais dit: Pourquoi ne pas aider un producteur agricole? J'ai reçu un téléphone d'un monsieur de Montréal. Bien, j'ai dit: On a justement des roches à ramasser. Non, non, non, je ne veux pas ramasser de roches. Bien, je dis: Monsieur, ça puis du Nautilus, je ne vois pas le rapport, c'est pareil. Au lieu d'être des poids, c'est des roches puis... Non, je veux tirer les vaches. Là, j'essaie de lui expliquer que de tirer des vaches, ça demande une certaine dextérité, une certaine connaissance. Il était fâché après moi. Écoutez, je me dis: S'ils veulent être agriculteurs, ça prend aussi de la formation, ça prend aussi une passion, parce que, pas de passion, je ne pense pas qu'on fasse de l'agriculture, parce que les heures de travail, s'il faut les rémunérer, ça n'arriverait pas. Alors, je vous souhaite beaucoup de passion, monsieur.

Le Président (M. Paradis): Oui. J'ai une demande d'intervention de Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: Merci, M. le Président. Merci, mesdames, surtout Mme Létourneau, Mme Bruneau, Beaudry-Bruneau. Vous avez le don de nous ramener sur terre de façon assez brutale, mais je comprends ce que vous vivez. Notre mandat, c'est un mandat de surveillance. Moi, je peux vous assurer que nous allons, avec La Financière agricole et avec le MAPAQ, regarder de très près le maintien... pour qu'on maintienne nos fermes en milieu rural. Pour moi, c'est quelque chose qui est important, ça fait partie de qui on est. Et aussi on va regarder au niveau de la sensibilité, pour les gens qui vivent des problèmes. Il n'y a pas juste les fermes de porcs, il y en a d'autres, producteurs, ou d'autres productions aussi qui ont des problèmes. Je sais que chez vous la crise est plus grande. Mais avoir la même sensibilité envers nos producteurs que nous avons eue quand nous avons fermé nos entreprises forestières, que les gens ont quitté, que les gens ont dû vendre, et... Les messages vont passer. Je peux vous assurer que les messages vont passer. Et aussi qu'on puisse maintenir notre relève agricole. Ce n'est pas juste de s'assurer que les gens qui sont là depuis 30, 40 ans puissent avoir et faire, dans le fond, pourquoi ils ont été là-dedans toute leur vie, mais je peux vous assurer, Mmes et MM. les producteurs qui sont en arrière, que les messages vont passer.

La Financière agricole est un groupe d'administrateurs. Il y a aussi des gens qui vous représentent qui sont là, il y a cinq personnes au niveau de l'UPA, et je pense qu'eux aussi vont devoir se faire parler, en termes de défense, de qui on est et de qui sont nos fermes dans les milieux ruraux. Ça fait que vous pouvez vous assurer que votre message a bien passé. Je vous remercie.

Le Président (M. Paradis): Mme Maria, en terminant. Ça va?

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): Est-ce que je peux ajouter quelque chose...

Le Président (M. Paradis): Oui, brièvement.

Mme Labrecque-Duchesneau (Maria): M. Mamelonet, je suis allée aux Îles-de-la-Madeleine l'année passée et j'ai parlé aux pêcheurs, parce que c'est là-bas que ça se passe. C'est sensiblement pareil, effectivement. Donc, la détresse est là aussi. Voilà.

Le Président (M. Paradis): Juste pour les fins de l'identification, il est député de Gaspé. On est encore dans... en train de départager quel est le meilleur homard, celui de Gaspé ou celui des Îles, pour vous. M. le député de Gaspé.

M. Mamelonet: Nous l'avons départagé, M. le Président, c'est le homard du Québec qui est le meilleur!

Le Président (M. Paradis): C'est bien. Merci beaucoup de votre témoignage. Merci aux gens qui vous accompagnent également. Ce n'est pas des moments qui sont faciles, mais c'est des moments qui sont enrichissants pour la société québécoise. Merci de votre participation.

Je suspends pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 12 h 10)

 

(Reprise à 12 h 23)

Le Président (M. Paradis): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): M. le député de Beauce-Nord, premier rappel à l'ordre.

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): Non, non. On ne bousculera pas les affaires. À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez prendre place.

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): Ils vont vouloir, je pense que oui.

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): M. le député de Montmagny-L'Islet, on connaît votre verve. Merci beaucoup.

Union des producteurs agricoles du Québec (UPA)

À ce moment-ci, j'inviterais les gens de l'Union des producteurs agricoles à prendre place: M. Lacasse, président. Je veux juste vérifier, parce que j'ai discuté avec certains représentants de chacune des formations politiques. Compte tenu de l'heure, à ce moment-ci, on procéderait au témoignage du président l'Union des producteurs agricoles. Il va déborder légèrement son 15 minutes. J'ai été prévenu et je vous demande le consentement pour qu'il en soit ainsi. Dès qu'il aura fini son témoignage, je suspendrais les travaux jusqu'à 14 heures, où nous pourrions procéder, là, sans avoir à minuter précisément l'ensemble des questions des groupes parlementaires. Est-ce que ça vous va?

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): O.K. À ce moment-ci, M. Lacasse, je vais vous faire la même offre que la commission a faite aux autres personnes qui ont comparu devant nous ce matin: Est-ce que vous désirez procéder en étant assermenté ou sans être assermenté?

M. Lacasse (Christian): Je souhaiterais être assermenté.

Le Président (M. Paradis): Très bien. Mme la secrétaire.

M. Lacasse (Christian): J'ai bénéficié de l'immunité, vous comprenez aussi que, moi, j'ai été convoqué à titre de président de l'Union des producteurs agricoles, mais je souhaite aussi m'exprimer à titre d'administrateur à La Financière agricole.

Le Président (M. Paradis): Nous vous en sommes gré, parce que j'ai la conviction que les députés vont vouloir vous interroger avec vos deux chapeaux.

Assermentation de M. Christian Lacasse

M. Lacasse (Christian): Alors, je, Christian Lacasse, déclare sous serment que je dirai toute la vérité et rien que la vérité.

Le Président (M. Paradis): Merci, M. le président. Veuillez procéder. Vous avez 15 minutes, mais, comme entendu, si vous débordez, la présidence ne vous interrompra pas. Maintenant, ne débordez pas 13 heures. Merci.

M. Lacasse (Christian): O.K. Eh bien, M. le Président, Mmes et MM. les députés, commissaires à la CAPERN, alors je vous remercie beaucoup de l'invitation à venir témoigner et faire le propos, là, à la fois au nom de l'Union des producteurs agricoles mais aussi en tant qu'administrateur à La Financière.

Mon propos ce matin va porter... je vais revenir sur la situation en agriculture, situation financière extrêmement difficile dans certains secteurs de production. On a parlé... beaucoup de témoignages ce matin sur la production porcine, mais il y a également d'autres secteurs de production qui sont en difficultés financières très importantes. Alors, ça va me permettre d'établir un portrait un peu plus exhaustif, là, de cette situation-là. Je vais également faire beaucoup de propos, beaucoup de commentaires à l'égard de La Financière agricole, tenant compte, là, de mon rôle d'administrateur, et je vais terminer avec des propositions. Parce qu'à l'Union des producteurs agricoles, devant de telles situations, notre responsabilité, c'est aussi de trouver des solutions, de les mettre sur la table et de les défendre.

D'entrée de jeu, moi, je voudrais revenir et bien clarifier un fait. Je vous mentionnais tantôt que je vais avoir des commentaires à l'égard de l'attitude et des décisions qui se prennent à La Financière agricole. Je ne voudrais pas que ce soit interprété au-delà du fait qu'il y a certains problèmes, puis je vais les relater, mais d'aucune façon il faut que ce soit interprété à l'effet que l'Union des producteurs agricoles remet en cause la mission et le rôle fondamental qu'un organisme comme La Financière agricole doit jouer, doit continuer de jouer pour le développement de l'agriculture.

Je tiens à le mentionner parce que -- vous savez très bien d'ailleurs -- ...à l'origine de La Financière, l'UPA a été très impliquée dans ces discussions-là, dans ces négociations-là. Parce que, nous, on croyait énormément aux avantages de développer un partenariat, un vrai partenariat entre les producteurs agricoles et le gouvernement à l'égard de programmes, qu'on parle d'assurance récolte, qu'on parle d'assurance stabilisation ou de financement agricole, mais particulièrement au niveau des programmes d'assurance. Les producteurs sont contributaires de ces programmes-là, ils assument entre 33 %, 40 %, même 50 % des primes. Alors, nous, en considérant ça, on trouvait fondamental, très important qu'on soit assis à la table pour assurer la bonne gestion, faire en sorte que ces programmes répondent toujours adéquatement aux attentes des producteurs et productrices agricoles du Québec. C'est toujours dans cet esprit-là que l'UPA a aussi siégé au conseil d'administration de La Financière.

**(12 h 30)**

Malheureusement, puis je vais y aller plus en détail tout à l'heure, mais malheureusement ce climat de partenariat n'existe plus. En fait, pour La Financière agricole, l'UPA n'est plus un partenaire. Et je vous fais grâce, là... puis je vais... encore une fois, je vais y revenir tout à l'heure, le manque de respect à l'égard des représentants des producteurs agricoles, qui sont en fait les clients de La Financière, est flagrant. Et c'est clair que, dans un contexte comme celui-là, dans un climat où l'attitude de La Financière est inexcusable, bien la relation de confiance et de recherche de solutions est handicapée.

Une preuve comme à l'effet que, pour l'UPA, la mission de La Financière et l'avenir des programmes est fondamental pour le développement de l'agriculture, c'est qu'en 2008, au moment où le gouvernement devait renouveler l'enveloppe budgétaire ou le cadre financier à La Financière agricole, l'UPA a été très active pour demander au gouvernement de mettre en place un comité bipartite, un comité qui permettrait dans les mois suivants, et là on se reporte en 2008, 2009, d'asseoir les principaux représentants du gouvernement, mais aussi les représentants des producteurs, productrices agricoles. On a réclamé ce comité-là parce qu'on ne savait pas à ce moment-là quel était l'avenir des programmes et quelle serait l'enveloppe budgétaire à La Financière. On a obtenu ce comité-là, qui a siégé pendant un certain nombre de mois.

Je vous dis ça parce que ça fait partie du contexte aussi. Parce qu'à ce moment-là, avec le ministère des Finances, le Conseil du trésor, le ministère de l'Agriculture et La Financière, qui était aussi observateur à ce comité-là, et l'UPA, bien sûr, on avait clairement identifié quels seraient les besoins de La Financière pour les cinq prochaines années, c'est-à-dire à partir du moment où l'annonce serait faite... ou l'engagement budgétaire du gouvernement.

Les besoins avaient été évalués à 650 millions. Vous connaissez finalement l'annonce qui a été faite: 630 millions à La Financière, plus un 20 millions au ministère de l'Agriculture, pour cinq ans. Et ça nous semblait correspondre, je dirais, à peu de chose près, aux besoins qui avaient été identifiés.

La surprise, en fait, c'est... parce que, nous, à travers ces discussions-là, l'UPA avait consenti aussi à certaines mesures de resserrement. On croyait que, pour l'avenir des programmes d'assurance stabilisation, il y avait certains ajustements: l'annualisation, une modulation selon la taille des entreprises. C'est des éléments qu'on avait mis sur la table comme Union des producteurs agricoles pour s'assurer de la pérennité des programmes d'assurance stabilisation.

Mais notre grande surprise... parce que, lorsque les besoins financiers avaient été évalués à 650 millions, il n'y avait pas la fameuse coupure du 25 % dans le décor. Alors, assez surprenant qu'au moment où on nous annonce 630 millions à La Financière en même temps on nous annonce qu'il y aurait une mesure... une coupure supplémentaire, le fameux 25 %, qui correspond à 75 millions par année, de coupure.

Et c'est dès ce moment-là que l'UPA, sur plusieurs tribunes, a dénoncé le fait que... L'enveloppe budgétaire est là, on salue le gouvernement. L'effort du gouvernement, c'est honorable. On salue aussi que les programmes d'assurance stabilisation vont être maintenus, mais on ne comprend pas pourquoi il y a une mesure, une coupure supplémentaire qui correspond à 75 millions. Parce qu'elle n'est pas nécessaire, d'abord, pour respecter le budget, et en plus elle va être extrêmement déstructurante et elle va amener des entreprises carrément en faillite. C'est ça, le constat que l'UPA a fait en novembre 2009.

Puis, juste pour vous faire une petite règle de calcul simple, La Financière avait accumulé un déficit de 1,1 milliard au cours des cinq dernières années. Le gouvernement a accordé en fait 300 millions de plus pour les cinq prochaines années à La Financière, passé de 305 millions à 630 millions. Faites le calcul, là, 300 millions par année fois cinq, ça fait 1,5 milliard. Alors, ça ne se peut pas que La Financière n'arrive pas au bout de cinq ans. Et, quand on considère l'application de la fameuse coupure du 25 %, c'est clair que La Financière ferait d'énormes surplus. Le calcul, il est simple à faire. Un déficit de 1,1 milliard des cinq années d'avant, puis là 300 millions sur cinq ans, de plus, pour les cinq prochaines années, ça fait 1,5 milliard. Ça ne peut pas faire autrement que d'arriver, sans appliquer la fameuse coupure de 25 %. Mais là je vous fais grâce de tous les dédales de calculs puis de... administratifs qu'on a pu avoir avec La Financière. Quand on veut noyer le poisson, il y a toujours moyen de manipuler les chiffres.

Maintenant, sur la situation financière des producteurs et productrices agricoles, je vous ai dit... On a eu des témoignages ce matin, particulièrement au niveau de la production porcine. Ces témoignages-là valent... moi, je vais vous donner quelques statistiques, mais je pense que les témoignages valent beaucoup plus que ça. Et les statistiques sont là. Parce que, je vous dirais, c'est probablement ce qui est le plus incroyable depuis les derniers mois, c'est qu'il y a des gens, particulièrement encore à La Financière, et j'entendais justement la dernière commission ici, au début de juin, les gens de La Financière qui sont venus encore une fois répéter qu'il n'y en a pas, de problème, il n'y en a pas, de crise. Bien, je m'excuse, mais il y en a une.

Il ne faut pas généraliser. Ce n'est pas dans tous les secteurs de production puis ce n'est pas pour toute l'agriculture au Québec, mais, dans certains secteurs de production, il y a vraiment une crise: en production porcine, en production bovine, dans l'agneau, dans les petites céréales. Pour les producteurs qui sont dans ces productions-là, ils sont en crise, pour plusieurs. Plusieurs, parce que, dans ces productions-là, le porc, le boeuf, c'est 20 % depuis les trois dernières années qui ont perdu leurs entreprises. Ils sont disparus. Puis on ne les reverra pas, hein? C'est sûr qu'on ne les reverra pas, malheureusement. Dans l'agneau, on parle de 10 % à 15 % des entreprises qui sont parties. Puis, dans les petites céréales, les petites céréales, bien je vous dirais que c'est particulièrement inquiétant, parce que, si vous faites la somme des trois derniers secteurs de production, bovine, agneau et petites céréales, là, il faut être conscients que c'est particulièrement des productions présentes dans nos régions périphériques, les régions éloignées des grands centres. Il faut considérer aussi que, dans ces régions-là, il n'y a pas beaucoup d'alternatives.

Moi, quand j'entends les gens, là, à La Financière puis au ministère, dire: Bien, ces producteurs-là, si ça ne fait pas dans telle production, ils peuvent envisager d'autres productions. D'abord, quand un producteur a immobilisé en fonction d'un secteur de production, ce n'est pas vrai qu'il peut se revirer de bord puis dire: Bien, maintenant, je vais changer de production. Vous savez très bien que ça ne fonctionne pas comme ça. Puis, d'autre part, dans nos régions moins centrales, bien la diversité des alternatives de production, pour ces producteurs-là, est extrêmement limitée. En fait, l'histoire a fait son oeuvre. Les productions que je vous mentionne, le boeuf, les petites céréales puis l'agneau, se sont orientées dans des régions appropriées. Mais j'espère que ces régions-là vont rester encore appropriées pour ces producteurs-là, parce qu'il n'y en a pas beaucoup, d'alternatives, il n'y en a vraiment pas beaucoup. Et, moi, j'ose espérer qu'on va être capables de les garder en agriculture, dans le choix de production qu'ils ont fait, parce que c'est là qu'ils ont leur passion, ces producteurs-là.

**(12 h 40)**

En production porcine, la Fédération des producteurs de porcs suit de très près l'évolution de la situation financière. Sur 122 entreprises agricoles qui... entreprises porcines qui survivent, bien ils réalisent, avec chiffres à l'appui, que même les entreprises en tête sont en difficultés financières et ont un solde résiduel négatif.

Or, le discours qu'on nous sert, là, que certaines entreprises ne sont pas efficaces, puis que finalement, bien, c'est eux que ça concerne, là, puis qu'elles devraient s'adapter, c'est un faux débat. Parce que ce n'est pas ça, la réalité. Au point où on en est rendus, avec les coupures dans l'assurance stabilisation, dans une situation ou dans un contexte où ces producteurs-là, dans ces productions-là, ont vécu cinq, six années de prix anormalement bas, ces producteurs-là, là, même s'ils sont plus efficaces puis ils battent les modèles, ce n'est pas suffisant. Ils ne passeront pas à travers. Ça, vous avez eu aussi des témoignages qui viennent renchérir ça, là. Dans le secteur du bovin, selon les informations qu'on obtient de la Fédération des producteurs de bovins, un producteur sur trois ne sera pas en mesure de rembourser ses PPA, programme de paiements anticipés. Oui, les producteurs se sont engagés, mais ils se sont engagés dans un contexte qui a changé, qui a évolué et qui fait en sorte qu'aujourd'hui ils ne seront pas en mesure d'honorer cet engagement-là.

Or, en plus des 20 % des entreprises qu'on a perdues dans les dernières années, présentement, dans ces secteurs-là, il y a un 20 % à 30 %... même 33 % des entreprises qui sont encore à risque. Or, faites le calcul, là, ça veut dire que, dans un an ou deux, on pourrait avoir perdu, là, près de la moitié des entreprises agricoles dans ces secteurs-là. Je ne sais pas qu'est-ce que ça prend de plus, là, honnêtement, là. Parce que l'information que je vous donne ce matin, ça fait longtemps, là, qu'elle est véhiculée, mais elle est continuellement contredite et elle est déniée par principalement La Financière agricole.

Pourtant, La Financière avait une responsabilité. Au moment des annonces du gouvernement sur les mesures de resserrement, le ministre de l'Agriculture, à cette époque-là, le défunt M. Béchard, avait demandé à La Financière, avant d'appliquer l'ensemble des mesures, de faire une étude d'impact sur ces mesures-là. Au moment où on se parle, elle n'a jamais été faite. Tout ce que La Financière a trouvé à faire, elle a dit: La mesure du 25 %, ça correspond à 3 %... une baisse de 3 % du revenu brut des entreprises. Ça, là, c'est la meilleure façon de noyer le poisson. D'abord, tu généralises, là, hein, tu fais une moyenne. Puis en plus du t'appuies sur le revenu brut. Mais, en agriculture, là, le revenu brut, malheureusement, ça ne veut pas dire grand-chose. C'est ce qui reste en bout de piste, là. Ça fait que le 3 % du revenu brut, de baisse, ça peut correspondre à cinq fois le revenu net de l'entreprise. Ça fait que, s'il était déjà serré, ce qui est le cas, bien là, on s'entend, là, que, là, il se creuse, puis il se creuse, puis il se creuse, là, pas à peu près, là.

Mais ça, là, La Financière devait fournir, là, une véritable étude d'impact pour orienter le gouvernement, pour orienter le ministère de l'Agriculture dans ses décisions. Ça n'a pas été fait.

En production porcine, au moment où on se parle, c'est de 25 % à 30 % des entreprises qui sont en arrérages de paiement. Ça, c'est cinq fois le taux normal d'arrérages en agriculture, cinq fois. Et là, ces gens-là disent qu'il n'y en a pas, de problème, il n'y a pas de crise. Ça n'a pas de bons sens. Ça n'a carrément pas de bon sens.

Alors là, comment voulez-vous qu'on travaille en partenariat avec un organisme qui dénie continuellement la situation réelle vécue par la agriculteurs?

J'arrive maintenant au rôle que joue La Financière agricole. Et là j'ai des documents que je vais vous déposer au fur et à mesure et auxquels je vais faire référence. Alors, la fameuse attitude de déni, qu'il n'y en n'a pas, de problème, la situation est normale, ce n'est pas facile, mais c'est normal, et que l'impact des mesures de resserrement, ce n'est pas si pire que ça... Je vous dépose des documents. La Financière doit faire rapport au ministre de l'Agriculture régulièrement, à tous les trois, quatre mois, de l'application et de l'impact de l'application des mesures de resserrement. Alors, en date du 28 janvier, La Financière, M. Brind'Amour, transmettait à M. Lessard, le ministre de l'époque, un bilan suivant la mise en oeuvre des orientations gouvernementales en matière de gestion des risques agricoles. C'est un rapport trimestriel. Et c'est assez incroyable, là. Là, vous avez un tableau 81/2 X 14 et là je vais vous donner juste un exemple, parce qu'on ne passera pas à travers tout ça, là. Oui, en haut de la page 3. Alors, vous savez que tous les frais de promotion et de recherche, à l'entreprise agricole, ont été retirés du coût de production... de façon arbitraire, on s'entend, parce que ces coûts-là, ils sont dans nos bilans, ils sont dans nos états financiers. Alors, l'impact pour La Financière, dans son budget, c'est que ça va être moins 4 millions. Alors, La Financière, avec cette mesure-là, va sauver 4 millions. Et là vous avez, deux lignes plus loin, «impacts pour les entreprises agricoles», là, La Financière, elle écrit qu'il n'y a aucun impact pour les producteurs.

Le Président (M. Paradis): Là, à ce moment-ci, il faudrait être certains que tous les députés, là, sont à la bonne page. Est-ce que vous suivez?

M. Lacasse (Christian): Page 3 du document 81/2 X 14.

Document déposé

Le Président (M. Paradis): O.K. Et pour accueillir le dépôt du document également... ça va? Vous pouvez continuer.

M. Lacasse (Christian): Alors, puis là, écoutez, je vous fais grâce des discussions qu'on a eues au conseil d'administration, parce que, quand c'est arrivé, ça a été déposé au conseil d'administration, ça avait déjà été transmis au ministre. C'était déjà transmis. Ça fait que, le document, bien on l'a commenté, mais il était trop tard, il était déjà transmis. Mais là j'ai posé des questions, puis d'autres aussi, les administrateurs, on a dit: Comment une mesure peut avoir une économie de 4 millions pour La Financière puis aucun impact pour les producteurs agricoles? Il faut le faire, là, puis écrire ça dans un document, là!

Alors, il y en a quelques-uns, exemples, là, assez spécial, on s'entendra. Alors, moi, j'ai cru bon d'informer le ministre. En faisant référence à ce document-là, j'ai écrit au ministre le 7 avril pour le sensibiliser, que, là, il venait de recevoir un rapport trimestriel de La Financière qui était erroné. Il y a de la fausse information. Le ministre est mal informé de l'application des mesures de resserrement. Moi, je considère que c'est extrêmement grave, là. Le ministre, il voulait avoir un suivi. Il veut savoir, là, l'application des mesures, c'est quoi, les effets que ça a. D'abord, est-ce que La Financière les applique correctement? Ça, j'en conviens. Mais c'est quoi, les impacts? Le ministre est mal informé. Moi, je considère que c'est extrêmement grave, puis ce n'est pas à moi, là, comme président de l'UPA, à repasser par en arrière de La Financière pour dire au ministre, là, la bonne information.

**(12 h 50)**

Et, comme si ce n'était pas encore assez, bien là, La Financière, le 6 juin, elle revient encore avec un autre rapport trimestriel. Elle reprend encore les mêmes informations erronées sur le tableau 81/2 X 14. Pourtant, après en avoir discuté, avoir fait des commentaires au conseil d'administration... Et je vous dirais que... pas juste de la part d'administrateurs représentant l'Union des producteurs agricoles, de d'autres administrateurs aussi qui ont fait des remarques à cet égard-là. Mais on a fait fi de ça à La Financière puis on a retourné un autre rapport, le 6 juin. Je n'ai pas retourné de lettre au ministre suite au 6 juin, parce que, là, je me dis... Peut-être que j'aurais dû le faire encore, mais ce n'est pas mon rôle de repasser par en arrière de La Financière. Mais, moi, je considère que c'est très grave.

Concernant la relation avec la clientèle, et particulièrement les représentants de la clientèle, là, je pourrais vous en conter, là, depuis les deux dernières années, là; on a vécu toutes sortes de situations. Je vous dirais qu'au moment où certains de nos présidents de fédérations régionales ont reçu des mises en demeure de la part de La Financière... Ce n'est pas anodin, ça, là, là; ce n'est pas anodin. Est-ce que c'était une intention vraiment de poursuivre de La Financière? J'en doute. De toute façon, je ne crois pas qu'il y avait motif. Mais c'est tout ce qu'il y a en arrière de ça. C'est une bonne vieille technique d'intimidation pour faire en sorte qu'on ferme la boîte aux représentants de l'UPA. Je pense que c'est ça, le premier motif.

Ces mises en demeure là, elles n'ont jamais été au conseil d'administration. Ça a été une initiative, là, de la direction. Ce n'est pas venu au conseil. Je présume que, si vraiment il y avait eu une intention de poursuivre, ça aurait dû venir au conseil, au conseil d'administration. Ce n'est pas venu. Alors, il y a un problème, là, ou bien, si c'était juste une tactique pour bâillonner les représentants de la clientèle, bien, moi, je considère que c'est, encore une fois, inacceptable de la part des gens de La Financière, totalement inacceptable. Je pense qu'on est dans un monde de démocratie, puis on doit être capables de s'exprimer librement, on doit être capables de pouvoir donner de l'information, nous, comme organisation qui est à la défense des producteurs, des productrices agricoles. Le jour, là, où, au Québec, on ne sera plus capables de faire ça, on va avoir d'autres problèmes. Alors, moi, je pense que c'est un comportement, une attitude totalement inacceptables.

Je vous dépose des lettres qui ont été acheminées au ministre, particulièrement au ministre. D'abord, celle de l'Union des producteurs agricoles, que j'ai signée au nom de tous les membres du conseil général, c'est-à-dire nos 16 présidents et présidentes de fédérations régionales et nos 25 présidents et présidentes de groupes spécialisés, d'une voix unanime, le 8 avril, suite à un conseil général... ont envoyé une missive au ministre, et qui dénonce largement tous les points que je viens de vous faire part. Alors, ça, ça a été envoyé au ministre le 8 avril parce qu'on jugeait que la situation était devenue intolérable, inacceptable, et que cette situation-là va à l'encontre du partenariat qui est recherché, qui est recherché par les représentants, les producteurs, l'UPA et ses groupes affiliés, recherche d'un partenariat qui n'existe plus. Ah! je ne vais pas dans les détails, parce que je les reprends, je les reprends d'autre part.

Je veux quand même vous mentionner que certains groupes aussi ont écrit au ministre. Vous avez la lettre, là, de la Fédération des producteurs de pommes de terre, et, dans le milieu du deuxième paragraphe, à la première page: «Cependant, à toutes les fois que nous nous sommes adressés à La Financière agricole [...] pour évaluer avec leurs représentants les mesures qui pourraient aider à retirer plus de revenus du marché -- donc diminuer ceux en provenance des subventions -- ce fut une quasi fin de non recevoir. De plus, cette fermeture à l'égard de nos initiatives s'accompagne de plus en plus par un "unilatéralisme" à répétition de [La Financière] dans la prise de décisions, que ce soit au niveau des programmes [...] sécurité du revenu, de leur application, [de la révision des modèles] de coûts de production...»

Et ça, là, c'est un fait. Depuis les deux dernières années, que ce soit à travers la révision des modèles de coûts de production, où il doit y avoir, là, une analyse, des discussions, des échanges avec chacune des productions, hein, que ce soit nos fédérations concernées, la pomme de terre, l'agneau, le porc, le boeuf, bien, je dirais, au moment où on se parle, là, le CECPA, son... faire son travail, il donne les données; quand ça arrive à la fédération, c'est transmis la veille du C.A. de La Financière, qui doit prendre une décision. Vous comprenez que la fédération concernée, là, elle a à peu près, là, une nuit puis une demi-journée pour analyser ça puis nous transmettre, là, son appréciation en fonction de la décision du conseil. CECPA puis La Financière, là, ils ont pris des mois pour regarder ça. Ce n'est pas vrai qu'une fédération peut analyser tout ça puis avoir des réponses à ses questions dans une journée et demie.

Alors, il y a un problème, là, il y a un sérieux problème, là, de relations puis d'échange d'information avec nos groupes concernés. Puis ce n'est pas surprenant que, la veille d'un C.A. ou le matin d'un C.A., la fédération me dit: Regarde, je n'ai pas eu le temps, là, je n'ai pas eu le temps d'analyser ça. Ça fait que, nous, on se retrouve devant... au conseil d'administration, qu'est-ce qu'on fait, là? Ces échanges-là sont absolument indispensables si on veut prendre des décisions éclairées au conseil d'administration.

La même chose au niveau des cultures commerciales, en début de page: «L'attitude de La Financière [...] contribue aussi énormément au dépérissement de la relation de confiance entre le monde agricole et le gouvernement. Cette priorité donnée à minimiser l'intervention du programme ASRA au détriment de la rigueur n'est plus simplement une perception de producteurs bien loin de la réalité des programmes, mais un constat que je fais moi-même et une réalité qui se démontre jour après jour depuis quelques mois.» Et c'est le président de la fédération qui signait.

Alors, ceux qui entretiennent puis qui... ils se plaisent à véhiculer que, là, il y a un différend entre le président de l'UPA puis le P.D.G. de La Financière, là, ce n'en est rien, là. Ce n'est rien de personnel, là, pas du tout. Moi, j'ai écrit à La Financière au nom de tous les représentants des producteurs à travers le Québec. Puis il y a aussi les présidents de fédérations qui ont écrit au ministre pour dénoncer cette situation-là. Ça fait que je pense que c'est assez clair, là, que le problème, là, il est à La Financière, là.

Une dernière, Fédération du Bas-Saint-Laurent, parce que nos fédérations régionales aussi sont confrontées à ça...

Le Président (M. Paradis): Je m'excuse de vous interrompre, M. Lacasse. À ce moment-ci, là, il n'est pas tout à fait 13 heures, mais vous en avez pour combien de temps encore?

M. Lacasse (Christian): 10 minutes.

Le Président (M. Paradis): Est-ce que vous voulez que l'on procède aux 10 minutes pour dépasser 13 heures? J'ai un consentement? Ça va, consentement pour 10 minutes.

**(13 heures)**

M. Lacasse (Christian): Alors, dans celle du Bas-Saint-Laurent, bien, à la page 2: «L'attitude des hauts dirigeants de La Financière s'avère la première cause de tout ce qui se passe dans les productions sous ASRA. Ceux-ci agissent en toute autocratie. La collaboration des partenaires n'est plus un facteur déterminant à la mise en place de changements ou à l'adoption de nouvelles règles. La transparence dans les dossiers, laquelle aide à la compréhension de ceux-ci, n'est plus un critère de partenariat et de développement du secteur agricole.» Je pourrais continuer, il y a trois paragraphes. Vous lirez les trois paragraphes, là, ça vaut... Ça appuie largement les constats que je vous fais ce matin.

Concernant les primes, vous avez la lettre que j'avais adressée à M. Brind'Amour le 28 janvier concernant les taux de cotisation à l'assurance stabilisation. En fait, il faut... On va repartir du mois de janvier 2010, où là vous avez -- des documents 81/2 X 14 -- à la fois la décision du conseil d'adopter... En fait, c'est le compte rendu du 29 janvier 2010, la séance du conseil d'administration de La Financière. Dans ce compte rendu là, à la page 200... avant la page 295 -- là, c'est une pagination qui n'est pas facile, là, alors, c'est dans le bas de la page, la deuxième page, en fait, là: Méthodologie de tarification en assurance stabilisation des revenus agricoles. Alors:

«Pour donner suite à une recommandation du comité de vérification, il est résolu, [...]et sur opposition de [...] Christian Lacasse et de [...] Charles-Félix Ross:

«1° que soit approuvée l'implantation, à compter de l'exercice financier 2010-2011, [...]pour le secteur animal et l'année récolte 2009-2010 pour le secteur végétal, de la méthodologie de tarification en assurance stabilisation des revenus agricoles présentée [en] séances [au] conseil d'administration [des] 2 juin et [...] 17 décembre 2009; [et]

«2° que soit approuvée le traitement des soldes des comptes cumulés antérieurement à l'implantation de cette méthodologie de façon distincte, tel que proposé à l'analyse actuarielle, par la prise en compte d'une surcharge spécifique, basée sur une période d'amortissement de 15 ans.»

Alors, la décision du conseil d'amortir sur 15 ans, elle est là, et de traiter les déficits passés et à venir de façon distincte, elle est là, la décision.

Charles-Félix et moi, comme administrateurs, on s'est opposés, pas par rapport à ces décisions-là, on s'est opposés parce qu'avec cette nouvelle méthodologie là, nous, on était convaincus que ça occasionnerait une surtarification. La raison fondamentale, c'est que la tarification, la méthode qui a été mise en place, elle a été analysée, elle a été produite en fonction d'un contexte... du contexte des cinq dernières années, où, on sait, ça a été catastrophique dans certains secteurs de production. Nous, ce qu'on a dit à La Financière, c'est que la situation passée ne pourra jamais se reproduire dans le futur. La raison, c'est que, depuis janvier 2010, La Financière a établi un plafond de compensations, alors que, dans les cinq dernières années, les compensations pour répondre à ces situations catastrophiques, c'est allé jusqu'à 850 millions de compensations, La Financière. Là, il y a un plafond, dans la dernière année, de 759 millions qui a été... qui devait s'appliquer. Mais la situation, elle est moins pire que dans les cinq dernières années, ce n'est pas appliqué. Mais, même si on avait connu la même situation catastrophique, situation sur laquelle... qui a guidé l'actuaire à mettre la nouvelle méthodologie de tarification, elle ne peut pas se reproduire, parce que maintenant il y a un plafond de compensation. Et le plafond de compensation n'est pas pris en compte dans la méthode... la nouvelle méthode de tarification.

Dans le fond, le risque, là, il est diminué par le fait de ce plafond-là, pas le risque à l'entreprise, mais le risque financier pour La Financière, il est diminué d'autant parce qu'il y a un plafond qui s'applique. Mais il n'y a personne qui en a tenu compte dans la tarification. Alors, c'est pour ça que, nous, on s'est opposés, parce que la méthode... parce qu'elle ne tient pas compte du plafond, maintenant, qui s'applique, elle surtarife, parce qu'elle fausse le risque réel de La Financière agricole.

Deuxième document. Là, mon commentaire, c'est à l'égard d'un critère de cette nouvelle méthode là, la fameuse marge d'anticipation. Nous, on a appris... C'est seulement en fin d'année qu'on a appris qu'il y aurait une marge d'anticipation qui s'appliquerait en production porcine, c'est-à-dire en novembre 2010. Pourtant, au moment de l'adoption -- la décision, là -- de la nouvelle méthode... Et là je fais référence au document qui a servi aux administrateurs pour prendre la décision, décision de la nouvelle méthode, et là je vous amène à l'impact financier, la deuxième page, alors: «Sur la base de [la] simulations réalisées pour l'année d'assurance 2009 dans le secteur animal et [à] l'année récolte 2009-2010 [pour] le secteur végétal, l'application de la méthodologie proposée -- et qui a été adoptée par le conseil d'administration -- en considérant une période d'amortissement de 10 ans [dans] les déficits du passé...» Bon, la décision finale, ça a été 15 ans au lieu de 10. Mais ça, c'est un document préalable à la décision, on s'entend bien, là? C'est ce qui éclairait supposément les administrateurs à prendre une bonne décision. Alors, l'application de cette méthode-là «ne génère pas d'augmentation significative compte tenu que la marge d'anticipation est calculée en fonction d'un fonds remis à zéro vu que les déficits existants ont été isolés et traités séparément».

En fait, nous, c'est le point qu'on fait depuis plus d'un an, c'est que, c'est clair à la lecture de ce paragraphe-là, il ne peut en avoir, de marge d'anticipation, parce que la méthode, là, elle fait qu'on isole les anciens déficits, puis, la marge d'anticipation, bien, comme on repart les cadrans à zéro...

Puis, exemple, dans la production porcine, l'an passé, là, en 2010-2011, c'est un solde très positif dans le régime porc, là. On parle d'aux alentours de 200 millions, le solde, plus 200 millions dans l'année. Alors, pour moi, c'est évident, là, que ça ne respecte... L'application d'une marge d'anticipation dans le porc, là, elle ne respecte pas la méthode qui a été adoptée. Elle n'a pas été respectée en 2010-2011, il n'y aurait jamais dû avoir application de ce critère-là, avec l'impact qu'on connaît. C'est que, là, ça surtarife et une charge supplémentaire aux producteurs, productrices agricoles et aussi de la part du gouvernement, le deux tiers.

Et là j'en profite déjà pour faire le point là-dessus. Parce que, nous, la crainte qu'on a, c'est que l'engagement du ministre, le 17 décembre dernier, à l'effet de compenser pour la mesure du 25 % à partir des surplus réalisés par La Financière est sérieusement compromis par ça. En surtarifant, La Financière, à la fois les producteurs mais aussi la contribution du gouvernement, elle diminue d'autant ses chances de réaliser un surplus en fin d'année, donc de ne pas avoir la capacité de compenser pour l'impact du 25 %. Alors, nous, quand on met ça bout à bout, là, on finit par se convaincre qu'il n'y a aucune volonté de la part des gens de La Financière de donner suite à l'engagement du ministre, qui a été pris.

Puis vous savez dans quel contexte il a été... On est arrivés à s'entendre avec le ministre, là. Ça a été un cheminement long et pénible. Mais, moi, j'étais content qu'on arrive à s'entendre, le 17 décembre, avec le ministère de l'Agriculture, puis aussi le gouvernement par conséquent. Enfin, on arrivait à dénouer une impasse importante. Mais, depuis ce temps-là, la balle est dans le camp de La Financière, et, à voir... Avec ces agissements-là, bien l'entente, elle est sérieusement compromise. Alors, il y a deux conséquences à ça: celle d'enlever des liquidités aux producteurs puis le fait que les producteurs ne seront jamais compensés pour la mesure du 25 %, tel que le ministre s'est engagé l'automne dernier. Moi, je considère, là, que c'est très grave.

**(13 h 10)**

Je vous fais juste... Parce qu'on dit qu'on fait référence à la grille à l'annexe 5, tableau 81/2 X 14, le dernier tableau en fait, alors Comparaison des méthodologies de tarification. Entre parenthèses, à côté de Nouvelle méthode, c'est pourtant bien écrit aussi «marge d'anticipation exclue pour les produits porcs et porcelets». Alors, ça, ça a été déposé au conseil d'administration, où on a pris la décision de la nouvelle méthode. C'est écrit clairement: «marge d'anticipation exclue pour les produits porcs et porcelets». Puis, en novembre, c'est-à-dire quasiment un an après, on finit par apprendre que là La Financière applique une marge d'anticipation dans le porc. Là, en fait, tu sais, moi, je vais vous dire, question de transparence, là, on repassera, hein?

Et là, justement -- puis je termine avec ça -- le point sur l'accès à l'information, refus d'accès à l'information par La Financière agricole et un manque de transparence flagrant. Vous avez toute une série d'échanges de lettres à partir du 19 avril. Il faut savoir qu'au moment du budget adopté par La Financière, auquel les représentants de l'UPA se sont opposés le 31 mars dernier... On s'est opposés parce que, nous, on considère qu'on n'avait pas toute l'information, le conseil d'administration n'avait pas toute l'information pour prendre une décision éclairée sur le budget, malgré la demande expresse, là, d'avoir cette information-là à ce conseil d'administration là au mois de mars dernier, et qui n'a pas été transmise aux administrateurs de La Financière à ce moment-là. Nous, par la suite, bien on s'est opposés au budget, mais le budget, il a passé majoritairement.

Par la suite, le 19 avril, on a transmis une lettre à Mme Saint-Hilaire, qui est secrétaire du conseil, pour lui faire la demande d'informations supplémentaires. Et là vous avez toute la liste d'informations que, nous, on considère absolument essentielles si on veut savoir finalement, dans les besoins, pour La Financière, là, au niveau de l'assurance stabilisation pour la prochaine année, ça se ventile comment, ça. Est-ce qu'il y a une marge d'anticipation qui s'applique dans le porc? Est-ce qu'il y a une marge d'anticipation qui s'applique dans les céréales? On ne l'a pas eue, cette information-là. On ne l'avait pas. On n'avait pas la ventilation, dans le fond le détail. Comment La Financière est arrivée à dire: Ça prend 380 millions pour administrer les fonds de la... les fonds d'assurance pour la prochaine année? On n'avait pas le détail. On l'a demandé, 19 avril.

On nous a répondu. Puis on nous a répondu que l'info... ça, c'était dans le mandat du comité de vérification. On n'est pas sur le comité de vérification. Les règles de gouvernance à La Financière excluent les représentants de l'UPA au comité de vérification. Je vous dis ça en passant, là. Moi, je ne comprends pas pourquoi, là. Ça ne fait pas de sens, hein? On a... Il me semble qu'on devrait avoir au moins un poste, mais on n'est pas là. Mais, de toute façon, ce n'est pas le comité de vérification qui adopte le budget, c'est le conseil d'administration. Ça fait que, moi, qu'on me réponde que là le comité de vérification a fait son travail, oui, mais, moi, je peux-tu, comme administrateur, être capable de vérifier, avoir des repères? Non, on nous refuse l'information.

Puis on me répond comme président de l'UPA. Bien là, moi, j'ai réécrit, le 10 mai, une lettre à M. Forcier, président du conseil, une autre lettre à M. Brind'Amour pour lui dire... leur dire: Moi, ce n'est pas comme président de l'UPA que je veux l'information, c'est comme administrateur de La Financière qui a une responsabilité très importante à l'égard des décisions du conseil d'administration de La Financière, et, pour cette information... pour ces décisions-là, j'ai besoin de toute l'information. Alors, c'est à titre d'administrateur, et on a signé, tous les représentants de l'UPA à La Financière, mais en tant qu'administrateurs à La Financière. Si on veut prendre des décisions éclairées, il faut avoir de l'information, puis toute l'information.

Et on a envoyé aussi ces deux lettres-là à tous les autres membres du conseil d'administration de La Financière pour qu'ils soient au courant que, nous, là, on considère que le budget a été adopté avec insuffisance d'information. Et là on nous a répondu à nouveau que... Et c'est... oui, c'est justement à ce moment-là qu'on nous a offert une séance, là, tu sais, on nous a dit... pas une séance, mais... c'est-à-dire: Vous pourrez avoir l'information. Puis là on nous mettrait en contact avec Alain Pouliot. Alain Pouliot, là, on le connaît, là. Je veux dire, moi, là, si je veux lui parler, je peux lui parler au téléphone, là. Mais ce n'est pas ça. La Financière a adopté un budget, moi, je considère et d'autres administrateurs considèrent qu'on n'avait pas toute l'information. Alors, encore une fois, ce n'est pas à titre de président de l'UPA que je veux l'information, je la veux en tant qu'administrateur à La Financière.

Alors, on a réécrit à nouveau le 8 juin, et là on a été encore beaucoup plus spécifiques, où là on a fait vraiment la démonstration qu'à l'égard de la méthode de tarification il y a un problème majeur. D'abord, on n'a pas l'information, alors manque de transparence. Et là on a demandé expressément que, le 15 juin, il y aurait... le point soit à l'ordre du jour et que ce soit un point décisionnel. Je dirais, ce conseil d'administration là était pratiquement au lendemain de la séance, ici, où les hauts dirigeants de La Financière sont venus témoigner. Et, à la suite de La Financière, vous aviez demandé, comme commission, que La Financière mette sur la table des solutions concrètes, des solutions rapides aussi. Moi, comme administrateur à La Financière, j'ai aussi renchéri sur la nécessité pour La Financière de mettre des propositions sur la table, et rapidement. Vous êtes en mesure de faire le constat comme moi, là: Est-ce que ça a évolué? Est-ce que ça a avancé depuis ce temps-là?

Mais je veux juste vous dire, en passant, que l'information qui a été demandée le 19 avril dernier, au moment où on se parle, je ne l'ai pas encore. Je ne l'ai pas encore, on ne nous l'a jamais transmise. Je ne sais pas comment il faudrait s'y prendre pour l'avoir. Là aussi, je considère que c'est... Un refus d'accès à l'information comme ça à des administrateurs qui doivent prendre des décisions éclairées, je pense que c'est assez grave. Puis, au moment où on se parle, on ne l'a pas encore. On va finir par décortiquer, tu sais... Parce que là La Financière nous dit qu'elle n'appliquerait pas de marge d'anticipation cette année, mais, moi, je n'ai rien vu d'officiel à ce niveau-là. Puis je n'ai pas non plus le détail de tous les autres critères d'application de la nouvelle méthode de tarification pour 2011-2012, je ne l'ai toujours pas malgré plusieurs demandes pressantes qu'on a faites.

Rapidement, pour conclure, des solutions, il y en a. Des solutions, il y en a, je vous les mets juste sur la table, vous aurez le loisir de me questionner là-dessus. Premièrement, baisse de prime ou ajustement de la prime selon une tarification qui va tenir la route. Et là la tarification actuelle, elle va faire en sorte qu'il y ait un remboursement accéléré des fonds ASRA... des déficits ASRA sur le dos des producteurs, productrices agricoles, et qui remet en doute... remet en question l'application d'ententes intervenues entre l'UPA et le ministère de l'Agriculture le 17 décembre dernier. C'est ça, les conséquences. Alors, ça, c'est la première avenue de solution rapide. La Financière peut faire ça, là, comme ça.

**(13 h 20)**

Deuxième élément de solution. Nous, on demande un congé de capital. Ce qu'on propose, c'est un congé de capital. Nous, on pense que la situation est telle dans certains secteurs de production, avec les témoignages qu'on a reçus, ces producteurs-là auraient besoin d'un temps d'arrêt, pas de six mois, comme La Financière administre présentement. Elle dit: Oui, on va t'accorder un... arrérages pour quelques mois. Ce n'est pas de même que ça marche. Si on veut vraiment faire en sorte que ces producteurs-là vont s'en sortir, qu'ils vont voir un peu de lumière, ça prend un congé capital pour trois ans. Trois ans, là, on donne un espace à ces producteurs-là de s'en sortir. Ça, ça ne coûte rien au gouvernement, là. Ça ne coûte rien au gouvernement. On ne demande pas au gouvernement de rembourser le capital à la place du producteur, on dit, là: Donnons un espace. Puis ça, là, demain matin, c'est des liquidités sur les fermes que ça va donner. Ça a tout un impact. Ils ont dit, le programme d'adaptation, qu'on le... Servez-vous du programme d'adaptation, le 20 millions, servez-vous d'une partie de ça pour rembourser les intérêts, absorber les intérêts jusqu'à un maximum de 300 000 $. Là, on commence à être en affaires, là. Là, je pense que concrètement, là, on donnerait de l'espace aux producteurs. Là, on aurait une réelle volonté de sauver ces entreprises-là.

Troisième élément, bien c'est que l'entente du 17 décembre, c'est-à-dire la compensation pour l'application du 25 %, elle s'applique. Bon, pas maintenant. Nous, on ne remet pas en cause l'entente, on dit: À la fin de chaque année, pour les secteurs visés, il y aura une compensation jusqu'à concurrence des budgets, des surplus. Mais là, premièrement, il faut que La Financière arrête de surtarifer, pour ne pas qu'il y ait de surplus à la fin de l'année. Ça, c'est la première étape. Ça, il faut qu'elle le fasse tout de suite. Puis après ça on verra, en janvier, février, mars de l'année prochaine, en 2012, comment La Financière est en mesure de compenser pour le 25 %.

Alors, ça, là, si on avait ça, là, si on était capables de s'entendre là-dessus, là, là on serait en affaires. Je ne comprends pas que depuis les derniers mois, là, il y en a, toutes sortes de solutions, mais on passe toujours à côté de ceux-là. Pouvez-vous comprendre ça, vous autres? Toutes les solutions sont bonnes, sauf ceux-là. C'est donc curieux! Parce que, nous, on pense que c'est ceux-là qui auraient vraiment le plus d'impact et qui agiraient le plus rapidement possible pour donner des liquidités à la ferme puis permettre à ces entreprises-là de se remettre dans la bonne voie.

Ça fait que l'UPA, là, on ne s'est pas assis sur notre steak, là, puis à revendiquer, puis à dire: Bon, ça va mal, ça va mal. Non. On a fait nos devoirs, on a analysé ça puis on fait des propositions bien concrètes. Là, on attend. On attend puis on attend, puis, pendant ce temps-là, bien les producteurs sont dans le trouble, puis on est en train de déstructurer l'agriculture dans nos régions. C'est ça qui va arriver. Puis là, bien, il y a un manque de vision, là. Il y a un manque de vision flagrant. On nous parle du livre vert, là, de la future politique agricole. C'est qui qui va rester, là, comme producteurs mais qu'on y arrive? On nous dit: Dans deux, trois ans, il va y avoir une nouvelle politique. Puis on risque de reperdre encore 25 %, 30 % de nos fermes. On peut-u, là, regarder, là, maintenant, là, qu'est-ce qu'on peut faire, là? Ça ne nous empêche pas de réfléchir sur l'avenir, mais qu'est-ce qu'on peut faire maintenant pour sauver ces fermes-là? Merci.

Documents déposés

Le Président (M. Paradis): Merci, M. Lacasse. Je constate qu'il est 1 h 25. Sur le plan procédural comme tel, le dépôt des documents auxquels a fait référence M. Lacasse est considéré comme ayant été fait devant la commission, et je pense que tous les membres en ont eu des copies.

Des voix: ...

Le Président (M. Paradis): Non?

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): Vous vérifierez avec le secrétariat. Le secrétariat m'a dit que tout a été distribué. Maintenant, s'il y avait une erreur, on la corrigera. Ça va?

Maintenant, j'ai besoin d'un consentement unanime pour que nous reprenions nos travaux non pas à 14 heures, mais à 14 h 30. Ça va? Et je demanderais au secrétariat de prendre les dispositions pour que nos prochains témoins, qui sont convoqués pour 14 heures et 15 heures, soit Mmes Marie-Christiane Lecours et Solange Morneau, puissent être accueillis quand même par les services de sécurité lorsqu'elles vont se présenter pour venir témoigner. Ça va? Merci.

...les documents, la salle va être sécurisée.

(Suspension de la séance à 13 h 25)

 

(Reprise à 14 h 37)

Le Président (M. Paradis): S'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. S'il vous plaît, dans la salle. Au moment... au moment...

Des voix: ...

Le Président (M. Paradis): S'il vous plaît, à l'ordre! Au moment où la commission a suspendu ses travaux, le président de l'Union des producteurs agricoles venait de terminer son exposé. À ce moment-ci, je reconnaîtrais un premier intervenant du côté ministériel, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: Merci, M. le Président. Alors, bon retour. Alors, l'intérêt est aussi grand cet après-midi qu'il l'était ce matin. Alors, M. Lacasse, bienvenue à la commission. D'entrée de jeu, ce matin, vous avez mentionné que l'UPA n'est plus un partenaire... selon vous, n'est plus un partenaire à La Financière agricole du Québec. Question rapide: Vous êtes combien de représentants de l'UPA au sein de La Financière présentement?

Une voix: Cinq.

M. D'Amour: Cinq représentants. Moi, dans le fond, je vais aborder la question des surplus. Pour vous, c'est clair dans votre esprit, il n'y aura pas de surplus à La Financière agricole du Québec. Selon vous, aujourd'hui, là, si vous regardez la tendance actuelle, il n'y aura pas de surplus à La Financière.

M. Lacasse (Christian): Bien, c'est-à-dire que, si La Financière continue de surtarifer comme elle l'a fait depuis les deux dernières années, nous, effectivement on croit, là, que ça pourrait compromettre les surplus à La Financière.

M. D'Amour: Dans les solutions: baisse de prime ou un... enfin un ajustement de la prime, congé de capital pendant trois ans et la fameuse compensation, là, 25 %. Vous abordez ces éléments-là comme si c'était d'une simplicité déconcertante. Je ne doute pas du tout de vos propos, là, mais, si c'est si simple et si les solutions étaient si efficaces, pourquoi ça n'a jamais été abordé à La Financière, selon vous? Parce que vous disiez ce matin qu'il n'y a comme pas eu d'analyse.

M. Lacasse (Christian): Juste distinguer: il n'y a pas eu d'analyse d'impact sur les coupures de... les mesures de resserrement.

Le Président (M. Paradis): M. Lacasse, quand vous référez aux analyses d'impact, c'étaient des analyses d'impact dont vous aviez discuté avec l'ancien ministre, M. Béchard?

M. Lacasse (Christian): Tout à fait. C'est ça.

Le Président (M. Paradis): O.K. Ça va. Merci.

M. D'Amour: ...les analyses d'impact discutées au moment de M. Béchard, à l'époque où M. Béchard était ministre de l'Agriculture, n'ont pas été réalisées.

**(14 h 40)**

M. Lacasse (Christian): Non. Puis en fait, à ma mémoire, à ma mémoire, là, le ministre Béchard avait accordé... avait dit à La Financière: Je vous donne trois mois. Puis là on se reporte, là, en début d'année 2010, le ministre Béchard avait dit... comme ministre, là, avait dit: Je donne trois mois à La Financière pour réaliser ces études d'impact là, ces analyses d'impact là. Parce que, nous, on avait soulevé tout le questionnement de la fameuse mesure du 25 % en disant: Ça va avoir de lourdes conséquences sur les entreprises agricoles. Le ministre Béchard avait bien entendu ça, il a dit: Regarde, c'est une mesure qui est à venir. Oui, elle est dans les orientations gouvernementales, mais elle n'est pas en application immédiatement.

Alors, je demande à La Financière de faire une analyse d'impact de ces mesures-là, ce qui n'a jamais été fait. Regardez, tout ce qui a été fait, c'est ce que je vous ai dit, ils nous sont... La Financière est arrivée à dire: Ça représente 3 % du revenu brut. Ce n'est pas ça, une analyse d'impact, là, ça, on s'entend, là.

M. D'Amour: ...représentants de l'UPA, chez vous, il y a unanimité et il n'y a pas eu possibilité pour vous de convaincre, puis ce n'est pas un jugement, là, c'est une réalité. Parce que, quand on vous écoute, quand on a eu l'occasion de vous écouter, ce matin, vous avez fait des déclarations à l'effet que le ministre est mal informé des impacts des mesures de resserrement; vous parlez de manque de vision. En fait, moi, je constate qu'il y a comme une crise de confiance, quand même, qui est très sérieuse, là. Et, dans le fond, vous souhaitez des études d'impact à brève échéance, le plus vite possible, pour savoir. Parce qu'on ne peut pas... C'est parce que, si vous n'avez pas d'étude d'impact, vous ne pouvez pas dire que c'est les solutions, là.

M. Lacasse (Christian): Bien, regardez, on demandait des analyses d'impact, puis le ministre avait... est allé dans le même sens, mais là on se reporte en janvier 2010. Là, on est en août 2011. Moi, je crois, là, qu'on n'est plus à l'heure de faire des analyses d'impact. Les impacts sont déjà en... ils s'appliquent déjà, là, les statistiques que je vous ai données, là, sur la diminution du nombre de fermes, le fait que nos fédérations suivent de près l'évolution, là, sur certaines entreprises puis que ces entreprises-là, même des entreprises très efficaces, considérées dans le groupe de tête, affichent un solde résiduel négatif. C'est que, là, un an et demi après, la situation que, nous, on anticipait puis que le ministre se posait de sérieuses questions, elle est en train de se produire, là.

Et là, moi, dites-moi pas qu'on va faire des analyses d'impact, puis qui va prendre encore six mois, puis... C'est des solutions concrètes, là, on est rendus à cette étape-là. Moi, ce que je déplore, c'est que les analyses d'impact n'ont pas été faites quand c'était le temps. Ils n'ont pas été en mesure de permettre de prendre des meilleures décisions. Puis, aujourd'hui, si on avait pris des meilleures décisions, bien on aurait déjà des solutions qui s'appliquent. Là, on est encore en train de discuter c'est quoi, les solutions, mais assez curieusement on passe toujours à côté des vraies solutions.

M. D'Amour: Les vôtres, en fait, celles que vous proposez.

Le Président (M. Paradis): ...M. le député de Rivière-du-Loup, je m'excuse, je veux juste vérifier, sur une de vos questions que vous avez posées, vous avez parlé de la possibilité d'influencer les autres membres du conseil d'administration par un groupe d'administrateurs important. Moi, je n'ai pas eu de réponse là-dessus.

M. Lacasse (Christian): Écoutez, avec la nouvelle gouvernance, là, on est cinq sur 15, on est cinq administrateurs sur 15. Nous, là, on connaît la situation sur les fermes, hein? Des témoignages comme vous avez entendus ce matin, moi, j'en entends, là, j'en ai entendu, depuis les deux dernières années, là, continuellement, parce que je suis continuellement dans des assemblées. Les producteurs m'appellent, m'écrivent. Ça fait que les représentants de l'UPA à La Financière, ils sont très au fait de la situation que vivent les producteurs. Moi, je crois, là... En tout cas, dans une gouvernance, je pense, là, normale, là, les représentants de la clientèle à La Financière sont d'un apport considérable au conseil d'administration par l'éclairage qu'ils peuvent amener, par l'expérience, les connaissances qu'on a, l'expertise qu'on a. Malheureusement...

Le Président (M. Paradis): Excusez...

M. Lacasse (Christian): Malheureusement, ça...

Le Président (M. Paradis): Excusez, M. Lacasse. Là, vous parlez des administrateurs de l'UPA comme tels. Vous avez quand même un pouvoir d'influence auprès des autres administrateurs. Vous vous êtes plaint ce matin que La Financière ne vous communiquait pas, comme administrateur, des documents qui étaient essentiels à des prises de décision saines et éclairées. Est-ce qu'à votre connaissance les autres administrateurs ont eu accès à ces documents?

M. Lacasse (Christian): Pas à ma connaissance. Pas à ma connaissance. Puis, écoutez, je comprendrais encore plus mal pourquoi des administrateurs auraient eu accès à de l'information que, nous, on n'a pas parce qu'on serait représentants de l'UPA. Ça serait tout aussi inacceptable. Mais ce que je voulais dire, c'est que notre apport, il est considérable, nous, au conseil d'administration, dans la mesure où on travaille en partenaire, dans la mesure où on entend puis on écoute ce que les représentants de l'UPA ont à dire sur chacun des dossiers. Mais malheureusement, depuis deux ans, bien ce n'est pas la réalité. Ce n'est pas la réalité, les... malgré que... Je dirais, ça fait en sorte que, nous, à plusieurs occasions depuis les deux dernières années, bien on a inscrit notre dissidence... où les décisions se retrouvent plus majoritaires... plus majoritaires qu'autrement, là.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: M. le Président. Vous mentionnez que vous enregistrez votre dissidence, est-ce comme ça dans chacune des décisions, ou à peu près... disons, dans la majorité des décisions que La Financière prend?

M. Lacasse (Christian): Non. On inscrit notre dissidence, je dirais, sur des points très précis, je vous dirais, là. L'application... l'application de la mesure du 25 %, on...

M. D'Amour: Bien, c'est-u la moitié des décisions, la majorité des décisions?

M. Lacasse (Christian): Ah, ce n'est pas la majorité des décisions. Ce n'est pas la majorité des décisions. Je dirais, on s'est opposés lorsque, dans notre... on avait la ferme conviction que c'est des décisions qui allaient à l'encontre de l'intérêt des producteurs et qui, selon nous, ne correspondaient pas, là, à... je dirais, soit par manque d'information qu'on pouvait avoir... Je vous ai donné l'exemple de l'information que, moi, je considère essentielle. Quand on adopte un budget, là, puis qu'on détermine... dans ce budget-là, il est déterminé le besoin financier, là, ce que ça prend pour faire virer les programmes d'assurance stabilisation, on veut... moi, je veux... On ne peut pas prendre juste le chiffre au global. Il faut être capable d'avoir l'information toute ventilée. Et, cette information-là, quand on n'est pas capable de l'avoir, moi, je pense que c'est normal qu'on inscrive notre inconfort puis qu'on inscrive même notre dissidence à adopter un budget en n'ayant pas toute l'information.

M. D'Amour: ...vous comprendrez que, pour la suite des événements, des rencontres que, nous, on aura, comme commission, elle est importante, elle est pointue. Les solutions que vous proposez, que vous nous amenez ici, au salon rouge aujourd'hui, à l'Assemblée nationale, est-ce que ces solutions-là ont été débattues au conseil d'administration?

M. Lacasse (Christian): Je dirais, la question de la... le point sur la prime, la prime... baisse de prime, ça, ça a été largement débattu au conseil d'administration, ainsi que la mesure du... c'est-à-dire la compensation, là, pour le 25 %, suite à l'engagement du ministre le 17 décembre dernier. En ce qui concerne le congé de capital, on a rencontré les hauts dirigeants de La Financière -- quand je dis «on», c'est ma directrice générale et moi ainsi que M. Forcier et M. Brind'Amour -- lundi dernier. On est revenus avec les deux premières mesures, baisse de prime puis compensation pour le 25 %, et la troisième mesure, le congé de capital.

M. D'Amour: Est-ce qu'on doit comprendre que ça va... je m'excuse, M. le Président, hein? Est-ce qu'on peut comprendre que les points, les trois points pourraient être inscrits à un prochain ordre du jour d'un conseil d'administration de La Financière?

M. Lacasse (Christian): Regardez, c'est ce qu'on a fait le 15 juin dernier, et, le 15 juin dernier, on était au lendemain de la commission parlementaire que vous aviez tenue avec les hauts dirigeants de La Financière et auxquels vous aviez demandé des solutions concrètes, nous, on avait inscrit à l'ordre du jour expressément la tarification des deux dernières années, et ça n'a rien donné.

M. D'Amour: Question technique: Comment ça se passe si, vous, comme membre du conseil d'administration de La Financière, vous souhaitez qu'un ou des points soient débattus lors d'un prochain conseil d'administration? Quelle est la procédure?

M. Lacasse (Christian): Bien, je peux vous donner l'exemple, là, de celui du 15 juin. On avait demandé à ce que soit inscrit...

M. D'Amour: La procédure habituelle, la connaissez-vous?

M. Lacasse (Christian): ...bien, la procédure, nous, on s'adresse soit au président du conseil ou au président-directeur général.

M. D'Amour: Et on comprend que ça n'a pas suivi. Est-ce qu'on vous a donné des raisons pour ça?

**(14 h 50)**

M. Lacasse (Christian): Bien, il y a eu un point de discussion au conseil d'administration, mais... Écoutez, il n'y avait pas de nouvelle solution à l'égard des points qu'on avait soulevés: baisse de prime, suite de l'engagement du 17 décembre. Il n'y a pas eu d'avancées de solutions concrètes à ces deux points-là qui ont été apportées par les gens de La Financière le 15 juin dernier.

M. D'Amour: Là, on...

Le Président (M. Paradis): Excusez-moi. M. Lacasse, comme la réunion du conseil d'administration se tenait dans les 48 heures de la tenue d'une commission parlementaire où il y avait eu des demandes expresses des députés de façon unanime, tous partis politiques confondus à l'Assemblée nationale du Québec, est-ce que vous voulez dire qu'on a décidé de ne pas donner suite à cette demande de la commission parlementaire?

M. Lacasse (Christian): Moi, ce que je vous dis, là, c'est que, moi aussi, j'ai fait le point en disant: Regardez, la situation perdure, il faut aller sur des solutions pour les producteurs, les producteurs sont en train d'abandonner leurs productions. Et j'ai fait référence moi-même aussi à la commission parlementaire qui venait de se tenir, et je pense que c'était évident, cette journée-là, que la commission souhaitait... Parce que ça avait été manifesté par plusieurs d'entre vous à la fin de la session en disant: On a des attentes pour des solutions, et des solutions rapides. Moi, j'ai bien entendu ça quand je suis venu ici, à ce moment-là, et c'est des choses que j'ai répétées au conseil d'administration. Puis là vous êtes en mesure de constater, ça n'a pas évolué.

M. D'Amour: Ce matin, on a eu l'occasion d'entendre M. Martin, Mme Cormier, Mme Labrecque, vous par la suite, il est clair qu'il y a des problèmes, on ne se le cachera pas, il y a des problèmes, des problèmes sérieux. Et ce qu'on entend... On est heureux, tout le monde ensemble, là, des deux côtés de cette salle, aujourd'hui, on est très heureux de vous recevoir. Cependant, évidemment, votre présence fait référence à un problème particulier.

Si vous me permettez, M. le Président, j'irais d'une suggestion, c'est que, l'ensemble des solutions que vous proposez, là, formellement vous demandiez à La Financière de les entendre, d'une part, de les entendre au conseil d'administration de La Financière agricole du Québec dans les meilleurs délais. Il me semble que c'est légitime. Si ça n'a pas été fait, là... Vous amenez ici des solutions. Je n'ai pas à juger des solutions. Mais, si les solutions permettent effectivement d'améliorer la vie de l'agriculture en région et des agriculteurs en particulier, je pense que tout le monde ici, là, on va applaudir puis on va être bien contents.

Sauf qu'il faut les analyser, ces solutions-là. Et, moi, ce que j'ose vous suggérer, M. le Président, c'est: les trois éléments, compensation 25 %; le congé de capital trois ans et la baisse de prime -- je les prends dans l'ordre inverse que vous les avez soumis ce matin -- bien il faut qu'il y ait un débat là-dessus le plus vite possible. Si ce sont les bonnes solutions, bien mettons-les de l'avant le plus rapidement possible. Mais il faut une analyse à quelque part, il faut que ça se fasse. Alors, moi, je pense que ce bout-là doit se faire. Et, en toute humilité, là, j'ose faire la suggestion, et qu'on se tienne au courant là-dessus, pas à la fin de nos travaux, bien au contraire.

Mais je ne sais pas comment vous allez réagir à ce que je viens de vous dire, mais je le fais avec ouverture, en me disant qu'il y a un coup de barre à donner, puis il faut qu'il se donne, là. C'est la vie de nos régions dont on parle puis la vie de nos agriculteurs et agricultrices.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Rivière-du-Loup, avant que M. le président réponde, la prochaine réunion du conseil d'administration de la Financière agricole est prévue pour quelle date?

M. Lacasse (Christian): Je ne sais pas la date par coeur. Il y a un C.A. au mois de septembre, mais je n'ai pas la date précise. On va vérifier.

M. D'Amour: L'assurance qu'on a, c'est qu'il y en aura une prochaine.

M. Lacasse (Christian): Pour répondre à la question, là, je vous répète qu'on a soumis de façon très officielle, là, lundi dernier aux dirigeants de La Financière. J'entends bien votre suggestion de faire inscrire ça au prochain conseil d'administration. Ça va être fait. Mais, moi, ce que j'ai perçu, là, de réception lundi dernier, je pense qu'on a encore du travail à faire pour arriver à des solutions, là, à ce type de solution là. Puis, moi, j'ai... Il y a un caractère d'urgence aussi, là. On peut encore tout entreprendre le processus, là, mais c'est des solutions, là... Regardez, dans ces trois solutions-là, il y en a deux, là, ça fait presque un an qu'on en parle, là, puis il n'y a toujours pas de suite concrète à ces deux demandes-là.

Le Président (M. Paradis): ...M. le député de Rivière-du-Loup, si vous permettez, à ce moment-ci, suite à l'échange de correspondance que la commission a eu avec La Financière agricole, depuis notre commission parlementaire comme telle, il ressort, là, quand on sait lire entre les lignes, dans un premier temps: il n'y a pas de problème. Dans un deuxième temps, si problème il y avait, les mesures mises de l'avant, autant par la Financière agricole que par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, répondent à l'ensemble des problèmes. Donc, dossier clos.

Comment on fait pour rouvrir ce dossier-là? Et la suggestion du député de Rivière-du-Loup va dans ce sens-là. Allez-y, là.

M. Lacasse (Christian): Ces propositions-là, ils ont été soumis aussi au ministre de l'Agriculture, là. Ils ont aussi été soumis au ministre de l'Agriculture, alors...

Le Président (M. Paradis): ...M. Lacasse, je tiendrais à vous indiquer, puis l'indiquer pour les gens qui nous écoutent également, que le ministre, à l'occasion d'une correspondance de vendredi ou jeudi dernier -- là, je ne veux pas me tromper de date -- s'est montré disponible à venir faire ses représentations devant la commission parlementaire. Donc, on jouit, là, de cette ouverture-là, et, si nécessaire -- ce n'est jamais agréable, là, de demander au ministre, mais, quand il l'offre, on peut prendre l'offre au bond, là -- de prévoir la présence du ministre à l'occasion d'une de nos prochaines séances.

M. D'Amour: Une chose qui est claire dans tout ça puis... on a une responsabilité, qu'on soit un député, qu'on soit à l'Union des producteurs agricoles, qu'on soit sur le conseil de La Financière agricole du Québec, on a la responsabilité de savoir, hein? S'il n'y a pas eu d'analyse, on ne peut pas dire qu'on sait que ça va donner des éléments positifs ou négatifs. Et vos suggestions ont au moins le mérite d'être des suggestions qui méritent, à mon sens, d'être discutées autour d'une table, là où ça compte: à La Financière agricole du Québec. Moi, je suis de cet avis-là.

Maintenant, s'il y a une prochaine rencontre d'ici le mois de septembre, ça vous donne du temps pour parler à votre monde -- votre monde, c'est vos 10 autres collègues -- pour essayer d'ouvrir le chemin. Puis, entre-temps, nous, on continue notre travail. Je ne vous dis pas qu'elles sont bonnes, je ne vous dis pas qu'elles sont mauvaises, mais elles ont au moins le mérite d'être des solutions proposées. Puis, dans les circonstances actuelles, là, tout ce qui peut aider puis soutenir, je pense qu'il faut regarder ça de façon très, très, très sérieuse et de façon très poussée.

C'était l'ensemble de mon questionnement et mon propos cet après-midi. Peut-être que je reviendrai tantôt, mais je vais laisser le soin à d'autres d'interroger M. Lacasse.

Le Président (M. Paradis): Merci beaucoup. Moi, je vais rechercher, là, cet après-midi des solutions à la problématique. On pensait en avoir dans le passé puis on s'est fait fermer la porte au nez. Je ne veux plus que ça se reproduise. Je vous le dis, là, comme je le pense comme président de la commission. Et, dans ce sens-là, la suggestion du député de Rivière-du-Loup revêt des aspects intéressants.

Maintenant, les recommandations de la commission sont d'autant plus écoutées et suivies, ou méritent de l'être, si ce sont des recommandations qui connaissent l'unanimité des parlementaires. À date, dans ce débat-là, il n'y a pas eu de partisanerie politique, et je félicite tous les membres. Je souhaite que ça n'en arrive jamais là. Maintenant, je ne veux pas vous empêcher de faire votre travail comme vous entendez le faire. Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: ...très brièvement, et c'est pour compléter ce que mon collègue disait. Vous avez proposé des solutions. Vous êtes cinq membres au niveau du conseil d'administration. C'est quoi, l'influence des cinq membres de l'UPA au conseil d'administration de La Financière? Quand je pense... je parle de pouvoir... un pouvoir de faire des alliances avec les autres membres, vous êtes quand même 15. Est-ce qu'il n'y a pas moyen, quand vous allez déposer ou faire la demande que ça, ça apparaisse à un ordre du jour bientôt, d'avoir des alliances avec les autres membres du conseil pour qu'il n'ait pas le choix?

**(15 heures)**

M. Lacasse (Christian): Moi, je vais reprendre... Elle est correcte, votre question, là, mais je vais... Resituons-nous dans le contexte de La Financière. Je vous ai fait part ce matin, là... Nos présidents, là, ils ont reçu des mises en demeure de La Financière. Ils ont eu des courriels, ils ont eu des téléphones pour leur indiquer assez clairement: Tu vas-tu te fermer, là? Tu sais, tu vas-tu te fermer, là? On n'aime pas ça, ce que tu dis. Mais nos présidents, là, ils ont fait juste leur travail, là, ils ont fait juste leur travail. Ils représentent les producteurs, ils ont des connaissances, ils ont de l'expertise, puis, jusqu'à preuve du contraire, là, c'est ceux qui parlent au nom des producteurs et des productrices agricoles, et ça, là, c'est... Pour moi, là, c'est fondamental qu'on laisse ces gens-là parler. Mais ça, là, ça fait partie du contexte, là. Alors, des mises en demeure.

Après ça, on demande de l'information à La Financière, on ne nous la transmet pas. Ça fait des mois qu'on attend après ça, on ne nous la transmet pas. La Financière transmet de l'information erronée au ministre. Ça, là, ça, là, ça ne fait pas un climat favorable pour des échanges, je dirais, là, respectueux et à la recherche de solutions. Ça crée un climat de tension, de contradiction. C'est ça que La Financière a établi depuis deux ans. Puis, moi, là, j'en ai pas mal enduré par rapport à ça. Pas mal! Puis là, là, on a mis les éléments sur la table. Ce contexte-là, ce n'est pas un contexte qui nous permet d'arriver avec des solutions et auquel l'expertise puis les connaissances, la nôtre, là, comme producteurs, comme représentants des producteurs, est vraiment mise à contribution. Or, quand notre expertise n'est pas mise à contribution, bien on ne travaille pas sur les vraies solutions, malheureusement.

Le Président (M. Paradis): Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: Si je comprends bien, là, vous nous dites... vous allez déposer les propositions de solutions que vous nous avez faites ce matin, mais vous n'êtes pas optimiste que ça va être traité, que ça va être regardé ou discuté. Parce que vous nous dites: On le met sur la table, c'est difficile d'aller chercher d'autres membres pour appuyer cette proposition-là, et, dans le fond, ça va être là, mais ça va rester là. Il n'y a pas moyen, compte tenu que les présidents ont reçu des téléphones et ces choses-là. C'est comme si vous étiez membres du conseil, mais en même temps ils vous ont, les cinq, isolés. Est-ce que j'interprète bien?

M. Lacasse (Christian): Sur des décisions, là, et à travers des discussions au conseil d'administration, oui, effectivement on s'est retrouvés carrément isolés, puis des décisions qui touchaient au plus haut point les producteurs, les productrices agricoles au Québec.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: J'aimerais revenir rapidement sur un élément qui a été soulevé par vous aussi ce matin, le fameux 3 % de moyenne au niveau des mesures de resserrement. L'impact, selon La Financière, c'est 3 %. On a tenu compte de l'ensemble de l'industrie. Est-ce qu'on a tenu compte, par exemple, du secteur de la volaille, le lait ou si on s'en est tenu au secteur... secteur par secteur sur l'ensemble?

M. Lacasse (Christian): C'était sur les secteurs touchés par les mesures de resserrement; or, ça excluait les productions sous contingentement, là.

M. D'Amour: Pour que je comprenne mieux, là, vous l'avez expliqué ce matin, mais il y a des bouts qui m'ont échappé, j'aimerais que vous reveniez sur cet élément-là du 3 %. Parce qu'il semblait y avoir aussi une divergence d'opinions entre votre organisation et La Financière.

M. Lacasse (Christian): En fait, ce que je mentionnais, c'est que de répondre à une demande d'analyse d'impact, O.K., en disant que l'application de la mesure du 25 % se traduit par une baisse de 3 % du revenu brut, ce n'est pas une analyse d'impact, ça, c'est une très mauvaise référence pour déterminer le réel impact d'une mesure comme celle-là. Très, très mauvaise référence.

Les raisons, je vous l'ai dit, se baser sur le revenu brut en agriculture. Au départ, tout le monde va reconnaître, ce n'est pas une bonne référence, c'est très mauvais. Alors, pourquoi ils utilisent cette référence-là? Vous pouvez vous poser la question comme moi, là. Mais on sait très bien que ce n'est pas une bonne mesure de référence. Alors... Puis 3 % dans le revenu brut, par rapport au revenu net, là, je l'ai dit, ça peut être 10 fois le revenu net, là. Ça veut dire que... Puis, une analyse d'impact doit tenir compte du contexte de la situation financière que les producteurs... qui est en cours. C'était quoi, la situation en 2009, au moment où la demande a été faite à La Financière? Déjà, là, dans le porc, ils étaient rendus à leur cinquième année de bas prix. Dans le boeuf, les marges sont très minces depuis le début des années 2000.

Or, il faut que tu situes ce contexte-là au départ, les entreprises sont fragilisées dans le porc, dans le boeuf, dans l'agneau, sont fragilisées par le contexte de bas prix depuis cinq ans. Là, on arrive avec des mesures, des coupures dans l'ASRA qui peuvent représenter 25 000 $, 30 000 $, 50 000 $. Ça, c'est des vrais chiffres, là, ça, c'est des vrais chiffres, à des entreprises, parce qu'elles sont fragilisées, qu'elles sont déjà dans un solde résiduel négatif. Puis là tu viens remettre une coupure supplémentaire de 40 000 $, 50 000 $. Ça, c'est une analyse d'impact avec des chiffres réels, parce que ça, les chiffres, La Financière les a. Mais ça, là, non, c'est 3 % du revenu brut, ce n'est pas significatif.

Le Président (M. Paradis): Si vous le permettez, je passerais la parole du côté de l'opposition officielle. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Bonjour, M. Lacasse. Merci pour votre présentation éclairante, là, juste avant le dîner. M. Lacasse, vous êtes au conseil d'administration de La Financière depuis quand?

M. Lacasse (Christian): Depuis... attendez un petit peu, là...

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Je ne veux pas vous mettre en boîte, là. Simplement pour...

M. Lacasse (Christian): J'ai été élu en décembre 2007 et... c'est début 2008. Mais j'ai peut-être assisté à un conseil d'administration, là, à titre d'observateur, le temps que les changements se... en début 2008.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Et, vous me corrigerez, mais vous êtes nommé par décret par le Conseil des ministres, c'est bien ça?

M. Lacasse (Christian): Oui.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Comme tous les autres membres du conseil d'administration, voilà. Pourriez-vous situer, M. Lacasse, en fait, de la façon que vous l'estimez, là... Vous nous avez parlé de la crise ou de la situation financière, dans certains secteurs, qui est difficile, là. Vous parlez de deux ans, on parle de cinq ans, mais, selon vous, là, ça va mal depuis à peu près combien de temps?

M. Lacasse (Christian): Bien, c'est variable, je dirais, à la fois dans les différents secteurs de production puis en plus, bien, c'est variable d'une ferme à l'autre. Mais globalement, là, tu sais, ce qu'on peut dire, c'est que... tantôt je mentionnais, là, dans le porc, là, ça n'arrive pas comme ça, hein? Vous savez, c'est que la situation... parce que les prix ne sont pas là... Donc, il y a beaucoup de facteurs. Tu sais, la parité sur le dollar puis... tu sais, c'est d'autres facteurs qui sont rentrés en ligne de compte: la hausse des intrants... C'est souvent une combinaison de facteurs qui fait qu'à un moment donné la situation se resserre.

Mais ce qu'on sait, là, je dirais, dans le secteur du porc, là, puis du boeuf, là, depuis les trois, quatre dernières années, là, ça s'est détérioré beaucoup, tu sais? Puis là on est rendus au point où, là, on voit que les producteurs... Je dirais, moi, j'ai bien senti, là, en début d'année 2011, là, les tournées que j'ai faites, là -- on fait deux tournées par année, là, de toutes nos régions -- là, là, j'ai vraiment senti que là c'est... Avant ça, on parlait de situation précaire, mais, depuis 2011, janvier 2011, là, ce qui se parle, c'est des producteurs qui abandonnent, c'est des producteurs qui font faillite. La gradation, là, elle est évidente, là, et, en 2011, ça bascule.

Puis là les statistiques qu'on a, c'est qu'elles sont accaparantes, parce qu'il y en a déjà qui ont abandonné puis il y a encore un 20 %, 25 %, dans le porc, qui sont en arrérage, là. Puis, dans le boeuf, là, on doit être aux alentours de... on est au-dessus de 10 %, peut-être entre 10 % et 15 %. Bien, ça, ces producteurs-là, s'il n'y a pas de solution rapide, ils vont s'en aller, ils vont partir, là.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Kamouraska-Témiscouata et par la suite M. le député de Rousseau.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Alors, M. Lacasse, vous avez aussi parlé ce matin d'un point précis sur les relations et les attitudes de La Financière. Dans le même sens que je viens de vous poser pour la situation financière des fermes, est-ce que, du côté des relations, vous êtes arrivé en 2008, est-ce qu'en 2008 ça existait, ou ça s'est développé, ou ça s'est accentué? Est-ce que c'est en janvier 2011 aussi qu'on retrouve ce que vous avez donné en exemple ce matin, là?

M. Lacasse (Christian): Au niveau de la relation, des...

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Relations et attitude de La Financière.

M. Lacasse (Christian): Non, moi, ça, je vous dirais, c'est depuis deux ans, là, tu sais, pas tout à fait, là, mais proche, là. Je dirais, à partir, là, des... J'ai fait référence au comité bipartite. Alors là il y a eu des discussions. C'est sûr que ça a corsé un peu dans ces discussions-là, mais c'est normal. Je veux dire, le gouvernement renouvelle son engagement budgétaire, on demandait de doubler l'enveloppe. Moi, je comprends bien, là, ça corse un peu.

La contribution de La Financière à ce moment-là, c'est de mettre les bonnes estimations sur la table. Au moment des annonces, là, il y a la fameuse mesure du 25 %, là, on est en novembre 2009. En fait, le seul point, nous, qu'on a relevé en novembre 2009, dans toutes ces annonces-là, le seul point, parce que tout le restant, là, soit qu'on était d'accord ou bien qu'on a salué les décisions qui ont été prises, le seul point, c'est la mesure du 25 %. Et, parce qu'il n'y a pas eu d'analyses d'impact par La Financière, rapides, qui ont été faites, parce qu'il y a eu, je dirais, un refus de La Financière aussi, là, de reporter l'application, là, de dire: Bien, on va analyser ça comme il faut, reporter l'application de ça... Devant ces refus-là, c'est clair que, là, la situation, elle s'est détériorée.

Et, en parallèle à ça et indépendamment du dossier de l'ASRA puis des mesures de resserrement, moi, je dois noter, puis je l'affirme, là, la relation, depuis les deux dernières années, entre La Financière puis les groupes spécialisés qui, de toute évidence, doivent discuter, échanger avec La Financière pour le renouvellement des modèles de coûts de production -- c'est un processus qui se fait régulièrement, ça -- cette relation-là, là, elle s'est vraiment détériorée depuis les... Puis là j'ai déposé des documents à l'appui de ça.

Puis ça ne prend pas grand-chose. Le simple fait que La Financière ne transmet pas les informations à nos groupes spécialisés quand c'est le temps puis qu'elle les dépose à la dernière minute, puis que, là, la fédération m'appelle, me dit: Bien là, c'est inscrit à l'ordre du jour du conseil, puis on vient juste d'avoir l'information, nous autres, on n'a pas eu le temps de regarder ça, on aurait des questions, tout ça. Ça, c'est manquer de respect, ça, là, là, hein? Puis là il y a tout le temps... les raisons sont tout le temps bonnes, que l'information a pris plus de temps. Sauf que ce n'est pas de même qu'on travaille.

Ça fait que, ça, ça dénote que, je dirais, la relation de partenariat, qui est absolument essentielle pour se... pour une bonne administration, une bonne gestion de ces programmes-là, elle n'existe plus, là.

**(15 h 10)**

Le Président (M. Paradis): Une dernière intervention, puis je vais reconnaître le député de Rousseau immédiatement après, puis Beauce-Nord.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Oui. Merci, M. le Président. Je reviens pour la demande que M. Béchard avait faite en décembre 2009 à l'effet qu'il y ait un délai de trois mois pour que et La Financière et l'UPA regardent... par des mesures d'impact, des mesures d'impact. Qu'est-ce qui fait que ça ne s'est pas fait, d'une part? D'autre part, dans les mois qui ont suivi les trois mois, est-ce que l'UPA et vous, comme élu président, avez vu, avez porté à l'attention du ministre cette situation qui est quand même déplorable?

M. Lacasse (Christian): Regardez, pourquoi ça n'a pas été fait? Vous savez... En fait, ils n'ont pas dit qu'ils ne l'avaient pas fait, ils nous ont déposé ce qu'eux considéraient comme une étude de... une analyse d'impact: le fameux 3 %, puis avec des tableaux par secteur de production. Alors là, nous, on a répondu très clairement: Ce n'est pas ça, une analyse d'impact. Les critères que vous utilisez, là, vous ne les resituez pas dans le contexte difficile des entreprises. Ça ne peut pas donner un résultat, là, qui va nous éclairer, pas du tout. Ça fait que... Alors, ça, ça a été dénoncé très clairement.

Là, au niveau du ministre, bien il faut comprendre que, là, le ministre, en janvier, il subissait une opération. Puis, par la suite, là, les contacts avec le ministère de l'Agriculture étaient plus difficiles. Parce que, moi, dans mon rôle, il faut que je sois en mesure de rencontrer, discuter avec le ministre régulièrement. Bon, cette période-là, on en convient, là, je ne pouvais pas le faire. Puis je ne critique pas, là, je fais juste... c'est un constat.

Alors, ça a été une période qui était difficile pour tout le monde, là, on se comprend, le ministre, c'était difficile pour lui, mais je pense que ça a été une période où ça été bien difficile de faire avancer les dossiers.

Mais, quand même, bon, il y a un sous-ministre en titre, là. Je veux dire, on avait encore des contacts avec le ministère de l'Agriculture. Mais celui qui avait callé cette analyse d'impact là, il n'était plus en mesure, là, je dirais, de faire le suivi nécessaire. Mais, nous, on s'est occupés... en tout cas, je pense qu'on a fait le maximum pour qu'on ait les bons chiffres. Mais ça n'a jamais été réalisé.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): ...même un ministre responsable de l'agriculture?

M. Lacasse (Christian): Oui, M. Dutil, là, qui a assumé l'intérim. Bon, moi, je ne veux pas, je dirais, remettre sur la table toutes les rencontres, toutes les discussions qu'on a pu avoir, là. Il y en a eu beaucoup, de discussions. Puis de là a découlé la pétition, fameuse pétition, là, de 22 000 signatures de producteurs agricoles, là, qui souhaitaient avoir des, je dirais... une écoute puis des solutions à l'égard, là, de la fameuse mesure du 25 % qui a été déposée au gouvernement aussi, là, en mai... en avril-mai 2010.

Le Président (M. Paradis): Le nouveau sous-ministre à l'Agriculture, qui est là depuis le début de l'année, provient de La Financière agricole, là...

M. Lacasse (Christian): Oui, c'était le vice-président à La Financière.

Le Président (M. Paradis): C'était un vice-président... Allez-y. M. le député de Rousseau.

M. Marceau: Ah! c'est à moi? Excusez-moi. Je n'avais rien entendu. Bonjour, M. Lacasse.

Une voix: ...

M. Marceau: Pardon?

Le Président (M. Paradis): La nuit a été courte.

M. Marceau: Oui. Effectivement. Bonjour, M. Lacasse. Je vais commencer par une question un peu naïve, là. Vous nous dites que la crise, elle était moins intense, mais elle était quand même présente il y a trois, quatre ans, qu'elle s'est intensifiée au cours du temps, que, dans la dernière année, là, c'est une crise, maintenant, qu'on peut qualifier de très majeure, avec des faillites, 20 % de fermes qui ont fermé dans certains secteurs. Vous nous dites aussi: les relations avec La Financière sont difficiles depuis deux ans. La Financière nie l'existence d'une crise et évidemment, puisqu'elle nie cette crise, elle n'apporte pas de solutions aux problèmes.

Donc, ma question très naïve: Comment expliquez-vous que La Financière s'entête comme ça et puis qu'on tolère qu'elle s'entête, aussi? Il y a deux choses là-dedans. Donc, comment vous expliquez ça? Comment c'est possible, là, alors que tout le monde décrit cette situation...

Le Président (M. Paradis): M. le député de Rousseau, le mot «s'entête» peut prêter des intentions comme telles, vous pourriez le remplacer: Comment expliquez-vous le comportement? Ce serait plus neutre.

M. Marceau: Ou qu'on continue dans la même voie, quoi? Ça va, ça?

M. Lacasse (Christian): C'est une question que je me pose souvent: D'où vient... Là, je ne sais pas, je peux-tu utiliser «acharnement»?

Le Président (M. Paradis): Oui, oui, oui. Le témoin a plus de liberté.

**(15 h 20)**

M. Lacasse (Christian): Alors, pourquoi un tel acharnement? Parce que, pour moi puis pour plusieurs autres, là, la démonstration a été faite, là. Et, vous savez, c'est facile de tomber dans le discours, là, un peu comme il a été mentionné par plusieurs témoins ce matin, tomber dans le discours, là, de: Tu sais, aujourd'hui, il faut être efficace puis il faut s'adapter. Puis, moi, je crois que c'est un discours, là, qui est très présent maintenant, aujourd'hui, là, à La Financière agricole aussi.

Je crois que, pour certaines de ces personnes-là, c'est devenu un fait qu'il faut que des entreprises disparaissent. Puis on se dit... probablement que certains se disent aussi: De toute façon, l'agriculture, il va continuer de s'en faire. Ces fermes-là vont être rachetées par d'autres, particulièrement par les intégrateurs. On le sait, là, dans certains secteurs de production, c'est un fait. Et là on rentre, là, dans le débat de la vision. Parce qu'effectivement c'est une question de vision, là. C'est quel genre d'agriculture qu'on veut pour l'avenir au Québec?

Puis, moi, je vais vous dire aussi que de l'agriculture, il va continuer de s'en faire, là. Tu sais, on pourrait perdre encore 25 %, 30 % des fermes, puis on va probablement continuer de faire à peu près le même volume de production. Mais qui va faire cette agriculture-là, puis avec quelle structure de ferme ça va être fait? Puis ça, à l'Union des producteurs agricoles, là, ça fait des années qu'on fait ce débat-là. Puis on a fait nos choix, nous autres, là. On les a faits comme organisation.

Nous autres, on prône pour la ferme familiale avec des producteurs qui sont propriétaires, autonomes, gestionnaires, qui sont en possession de leurs actifs. C'est ça qu'on prône. C'est ça qu'on veut. C'est ça qu'on veut pour l'avenir du Québec. Parce que c'est ce type de ferme là qui a caractérisé le Québec agricole puis qui se démarque avantageusement par rapport à d'autres modèles d'agriculture qui nous entourent en Amérique du Nord. Puis, quand je dis «avantageusement», là, c'est qu'on a encore un modèle d'entreprise agricole très familial, avec des tailles d'entreprises qui sont humaines. Puis, si on a encore ce type d'entreprise agricole là au Québec, c'est parce qu'on a fait des choix: des choix collectifs, des outils collectifs, mais aussi des programmes de sécurité du revenu qui permettent à des entreprises de taille moyenne de vivre de l'agriculture, dans toutes les régions du Québec. Mais, moi, je vous dis: avec les mesures de resserrement qui ont été annoncées, avec certaines décisions de La Financière depuis les deux dernières années, on va s'éloigner de ce modèle agricole là.

Ce n'est pas parce que les autres modèles sont à combattre, là. Moi, je pense que ça prend toutes sortes de modèles agricoles, toutes sortes de structures de fermes. Mais, quand on met en péril notre modèle dominant, le modèle qui fait l'envie, là, des modèles agricoles, la ferme familiale, là, on a un problème de vision. Et ce problème de vision là, il est rendu à La Financière.

Le Président (M. Paradis): Oui, M. le député de Rousseau.

M. Marceau: C'est une complémentaire. Donc, moi, je constate comme vous que la vision sous-jacente aux actions de La Financière, c'est celle d'une agriculture industrielle, d'une disparition de l'agriculture traditionnelle familiale qu'on avait au Québec, hein? Donc, on ne sait pas... on constate que La Financière nie le problème, et les gestes qu'elle pose laissent croire que ce qu'elle veut, dans le fond, c'est que des fermes disparaissent et que ça soit remplacé par de l'agriculture industrielle. Je pense que c'est ce que vous venez de dire, là, puis, moi, je constate la même chose que vous.

La question que je me pose, c'est: D'où elle vient, cette vision? Est-ce que La Financière peut tout simplement, parce que le hasard a fait qu'une personne ou une autre ait atterri à sa direction, est-ce qu'elle peut se déclarer... décider de sa vision ou est-ce qu'elle ne doit pas décider de la vision que les Québécois se donnent? Est-ce qu'elle ne doit pas, La Financière, être l'exécutante des choix que nous faisons comme collectivité? Alors, la question que je me pose, c'est: Est-ce que vous avez... que je vous pose, c'est: Est-ce que vous avez l'impression qu'il y a eu un détournement de mission de la part de La Financière? Est-ce que La Financière avait une mission de faire la promotion de l'agriculture telle que nous la connaissons, telle que vous voulez la favoriser, et puis que... donc, il y a quelqu'un, là dedans, qui a détourné la mission, ou bien est-ce que -- et là je ne l'ai pas vu passer, moi, mais peut-être, vous, vous l'aurez vu passer -- quelqu'un a donné l'ordre à La Financière de faire ce qu'elle fait aujourd'hui? Alors, ma question, c'est: D'où ça vient, cette vision-là, là, qu'on voit, qui est sous-jacente dans tous les gestes de La Financière?

Le Président (M. Paradis): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Vous savez, d'abord, cette vision-là, là, que je vous décris puis que, moi, je perçois des gens de La Financière, ça n'a pas fait l'objet de déclarations, ça, là, là, hein? C'est une perception que j'ai, maintenant qui est appuyée par le fait que... Tu sais, nous, tout le débat qu'on a fait sur le maintien des programmes d'assurance stabilisation basés sur le coût de production, ce n'est pas juste pour dire: On veut garder l'ASRA, là. C'est parce que, nous, on est convaincus que le meilleur programme pour assurer la pérennité de nos fermes familiales, c'est l'assurance stabilisation basée sur le coût de production.

Moi, j'étais heureux que le gouvernement maintienne l'assurance stabilisation. Où le bât blesse, c'est que le revenu stabilisé calculé par La Financière ou le CECPA pour... puis avec les coupures selon les orientations gouvernementales, fait en sorte que le revenu stabilisé par le Programme d'assurance stabilisation, par rapport aux véritables coûts de production, l'écart est rendu trop grand. Puis le principal facteur de ça, là, la principale cause, c'est la mesure du 25 %.

Or, moi, j'ai la même question que vous, vous savez, c'est: Qui a décidé, là, au Québec, là, que là on mettrait la ferme familiale en péril, tout en se faisant accroire qu'on maintient l'assurance stabilisation? Mais de façon très sournoise on joue sur le coût de production, le revenu stabilisé, puis finalement le résultat, il va être le même en bout de piste, là, on va avoir maintenu l'assurance stabilisation, mais, dans le fonctionnement du programme, on le dénature tellement qu'il ne jouera plus son rôle, c'est-à-dire de protéger la ferme familiale au Québec. Mais pourtant, là, il n'y a personne qui va avoir décidé ça, là.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Écoutez, où, moi, je me pose la question, là: Qu'est-ce qu'on fait ici aujourd'hui, là? Parce que, si je regarde la mission de La Financière agricole, c'est bien écrit dans leur mission qu'elle a comme mission de soutenir, de promouvoir, dans une perspective de développement durable, l'expansion du secteur agricole et agroalimentaire. «Elle met à la disposition des entreprises des produits et des services en matière de protection du revenu, [de l'assurance] et [du] financement agricole adaptés [au] secteur...»

Alors, si ces gens-là qui sont sur le conseil d'administration étaient là pour faire la mission dont ils ont été mandatés, on n'aurait pas d'affaire à être ici aujourd'hui. Mais pourquoi qu'on est obligés de leur pousser, si on... Normalement, c'est écrit, c'est ça, leur mission. On est ici à... J'imagine que ce n'est pas des imbéciles, ces gens-là, là. On voit les crises qu'il y a présentement dans le domaine agricole, ils doivent les voir comme nous.

Mais, moi, je me rappelle, quand on les a eus ici, devant moi, là, je leur ai posé la question, moi: Est-ce que vous voulez... si votre mandat n'est pas correct, est-ce qu'on... On est tous des élus ici puis on est tous d'accord: on peut le changer, votre mandat, on peut l'améliorer, on peut l'ajuster. Ils nous ont dit: Non, le mandat, il est correct. Nous, on ne voit pas de problème en agriculture. Puis, entre les lignes, ils nous ont presque dit carrément qu'il faut qu'il disparaisse encore 25 % des fermes pour que ça aille bien au Québec. Moi, j'ai trouvé ça un petit peu spécial comme réponse, mais... En tout cas, je n'étais pas seul, il y en a plusieurs qui l'ont entendu.

On parle beaucoup d'où viennent les problèmes, mais, moi, ce que j'aimerais savoir, c'est ce qu'on vit présentement, la disparition des fermes familiales, on voit que ça disparaît, mais ça profite à qui? Qui profite de ça? Parce que l'agriculture ne baissera pas. C'est les intégrateurs, les grosses compagnies qui vont toutes faire en sorte que demain matin on va manger des produits, on ne sait pas d'où ils vont venir, mais ça va être la grande entreprise qui va en profiter? Est-ce que c'est ça, la vision qu'on veut se donner? Je ne sais pas si vous...

M. Lacasse (Christian): Moi, je crois que, dans une évolution normale de l'agriculture, là, il y a une dynamique qui fait qu'il y a toujours de la consolidation. Nous, on souhaiterait que le nombre de fermes soit maintenu, tu sais, que, dans le fond, il arrive autant de nouveaux agriculteurs qu'il y en a qui doivent abandonner, pour toutes sortes de raisons.

Moi, je crois quand même que ça, c'est dans une situation, une normalité des choses, puis ça fait en sorte qu'il il y a quand même une diminution du nombre de fermes qui peut être considérée comme normale. Mais là, on n'est pas dans cette situation-là. Là, c'est une diminution anormale du nombre de fermes. Et sur la question: Qui en profite? Bien, c'est évident qu'il y en a qui profitent de cette situation-là. Ça, c'est clair et net.

Maintenant, je dirais, nous, à l'UPA, là, je crois qu'on fait l'arbitrage nécessaire entre les différents types de structures d'entreprise agricole. Et je disais tantôt: Je ne crois pas qu'on peut... Nous, comme organisation, on peut privilégier, prôner en faveur d'un modèle d'entreprise agricole qui est la ferme familiale, puis on l'a fait, mais ce modèle-là ne peut pas être exclusif, là. Il faut vivre dans une réalité où il y a d'autres types, d'autres structures d'entreprises agricoles. Mais ce qui est important, c'est que, dans l'évolution de l'agriculture, bien on s'assure qu'à travers cette diversité d'entreprises agricoles là, bien on a quand même un modèle dominant. Puis on est la seule province, selon moi, là, en Amérique du Nord où le modèle d'entreprise familiale est encore dominant. Et j'espère qu'on va être assez fins pour le conserver.

**(15 h 30)**

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): Oui. À ce moment-ci, je m'excuse... peut-être parce que c'est sa première journée à titre de porte-parole de l'opposition officielle, parce que le temps est expiré, M. le vice-président m'a demandé une question. Je reconnaîtrais à ce moment-ci M. le député de Kamouraska-Témiscouata pour une brève question.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Lacasse, est-ce que vous... On parlait... vous avez des solutions à proposer. Je pense que, depuis quelques mois d'ailleurs, ça circule. Avez-vous eu l'occasion d'en parler avec le ministre? Et, si oui, qu'est-ce qu'il en pense?

M. Lacasse (Christian): Oui. Les propositions que je vous ai présentées ont été soumises au ministre à la fin juin, dans un package, si on veut, là. Parce que, comme je vous disais, baisse de prime...

Puis, l'engagement du ministre du 17 décembre, là, vous comprenez très bien que c'est un engagement qui est signé, là. Pour moi, c'est un engagement du gouvernement, là. Ce n'est pas rien, là. Cet engagement-là... Écoutez, il n'y a pas un ministre, là, qui ne souhaite pas que cet engagement-là soit réellement appliqué par La Financière. Alors, ça, là, on a... Moi, j'ai avisé le ministre Lessard au lendemain de l'entente du 17 décembre, dans les premiers jours de janvier. J'étais préoccupé à l'effet que: est-ce que La Financière va vraiment traduire l'application de cet engagement-là? Je l'ai refait avec le ministre.

Le Président (M. Paradis): Simplement une précision, là. Simplement... Vous aviez une entente, on est à la mi-décembre, juste avant Noël, jour de l'An, congé des fêtes, puis, dès le début de l'année, vous étiez préoccupé que l'entente que vous aviez avec un ministre de la couronne, ministre de l'Agriculture, ne soit pas respectée par La Financière agricole, dont vous faites partie du conseil d'administration?

M. Lacasse (Christian): Bien, regardez, moi, je ne vous cache pas, là, que, pour arriver à cet engagement-là, là, il y a eu des discussions très serrées, et l'engagement repose sur les surplus à La Financière. En janvier 2011, je venais d'apprendre que La Financière imposait une marge d'anticipation dans le calcul de la tarification dans le porc. Je l'ai appris en novembre, je vous l'ai dit ce matin, novembre, décembre 2010. Là, on s'entend avec le ministre, compensation selon les surplus de La Financière, puis là j'apprends en même temps que La Financière impose une surprime dans le porc. Puis là, je vous l'ai tout bien expliqué, là, surprime, surtarification, ça, ça veut dire que La Financière diminue grandement ses chances de faire des surplus. Alors, c'est pour ça que tant... très rapidement, en janvier 2011, j'ai communiqué avec le ministre Lessard, puis ensuite j'ai repris ça avec le ministre Corbeil, j'ai dit: Là, là, La Financière surtarife. Et, s'il n'y a pas de surplus, il n'y aura pas de suite de l'engagement du 17 décembre.

Le Président (M. Paradis): ...l'entente entre vous-même et le ministre Lessard, La Financière agricole était présente et consentante à l'entente?

M. Lacasse (Christian): C'est des discussions qu'on a faites, nous...

Le Président (M. Paradis): ...partie à l'acte, là?

M. Lacasse (Christian): À mon niveau, là, à mon niveau, là. Puis, moi, j'ai... Ça ne peut pas être à un autre niveau que ça, parce qu'on était... Je dirais que c'est des discussions, là, qui se sont passées entre le ministre et moi, et La Financière, là, n'était pas autour de la table. Sauf que j'imagine qu'il y avait aussi des discussions ou en tout cas de l'information, de l'échange d'information avec La Financière, mais, moi, je n'ai jamais été témoin de ces discussions-là.

Le Président (M. Paradis): Ça va. Dernière question. M. le vice-président.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci beaucoup, M. le Président. Rapidement, là, en terminant, selon vous, M. Lacasse, est-ce que La Financière agit conformément aux orientations du gouvernement dans ce dossier-là?

M. Lacasse (Christian): Bien, pour moi, c'est clair qu'à l'égard de l'engagement du 17 décembre, pour moi, là, non. La réponse, là, c'est non. À l'égard des orientations gouvernementales, il y avait une demande d'analyse d'impact clairement signifiée à La Financière qui, pour moi, n'a pas été réalisée. Et le problème, il part de là. Le problème, je dirais, qui s'est enchaîné... tout le problème qui s'est enchaîné par la suite, il part de là. Alors, pour moi, c'est deux éléments qui sont quand même déterminants pour la suite des choses.

Le Président (M. Paradis): M. le vice-président, à vous la parole.

M. Pinard: Merci, M. le Président. Vous avez déposé auprès du ministre Corbeil vos solutions. Il y aura discussion avec le ministre, j'imagine. Vous avez fait ça à la fin du mois de juin, suite à la tenue de la commission parlementaire en début de juin, pour être précis, le 6. C'est bien ça?

Une voix: ...

M. Pinard: Vous avez rencontré lundi passé le président et le directeur général de La Financière pour mettre de l'avant de nouveau vos solutions. C'est exact?

M. Lacasse (Christian): Oui.

M. Pinard: Vous nous avez mentionné avec énormément... pas d'aplomb, parce que vous en avez toujours, M. Lacasse, mais vous nous avez mentionné avec beaucoup d'à-propos le nombre de citoyens qui ont quitté l'agriculture soit volontairement soit parce qu'ils ont fait faillite ou pour multiples raisons. C'est assez effarant, les chiffres que vous nous avez mentionnés. Et vous nous avez bien dit, à la commission, que le tout datait depuis 2009, d'une façon très, très, très sensible, de sorte que l'UPA ne pouvait pas passer à côté de cette problématique-là qu'elle vivait, que ses membres vivaient.

Est-ce que, depuis... entre 2009 et le moment où la commission parlementaire a tenu ses auditions, en juin 2011, est-ce que vous avez eu des rencontres formelles avec les dirigeants de La Financière pour étudier ce problème-là et pour mettre de l'avant des pistes de solution?

M. Lacasse (Christian): Oui.

M. Pinard: Vous l'avez fait avec le côté politique, côté ministériel?

M. Lacasse (Christian): Oui.

M. Pinard: Vous avez rencontré le ministre Béchard, le ministre Lessard...

Une voix: Le ministre Dutil.

M. Pinard: Le ministre Dutil, le ministre Corbeil. Ça en fait quatre, là. Bon.

Maintenant, il semble y avoir un cheval sauvage à côté qui s'appelle La Financière. Est-ce que vous avez été capable de le monter? Après ça, je vous demanderai si vous êtes capable de rester dessus.

M. Lacasse (Christian): Oui, c'est une bonne image.

Le Président (M. Paradis): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Oui, on l'a fait, puis on l'a toujours fait dans une approche, là, de partenariat. Parce que, moi, je pense, des solutions comme celles-là, il faut être capable d'avoir l'ouverture... Puis, moi, je considère que l'UPA a démontré beaucoup d'ouverture depuis les deux dernières années.

Quand je vous disais qu'à travers toutes les mesures de resserrement qui ont été avancées à la fois par le ministère mais ensuite par La Financière, toutes les coupures, il y a une seule qu'on a dénoncée, il y a une seule mesure qu'on a dénoncée, là, véritablement, là. Les autres, là, je ne vous dis pas que c'est facile à accepter, là, parce qu'on sait très bien que c'est un défi majeur pour nos producteurs, nos productrices. Alors, ça, c'est un premier élément d'ouverture, là. Nous, on a fait des propositions, là, dans ces discussions-là pour arriver à assurer la pérennité de l'assurance stabilisation.

Le plafond, là, dans les compensations à l'assurance stabilisation, là, n'allez pas penser, là, que c'était aussi une mesure qui faisait notre affaire, là. Bien, on ne l'a pas dénoncée. On ne l'a pas dénoncée, savez-vous pourquoi? Parce que, nous, là, quand le gouvernement, il a annoncé 630 millions à La Financière, moi, je ne me suis pas servi de ça pour dire: Bien, là, il en manque 50 millions. Non, j'ai dit: Regarde, le gouvernement a fait un effort majeur, on le reconnaît.

Puis c'est sûr qu'un plafond sur les compensations, moi, je prends un risque comme représentant des producteurs, mais on a une parole aussi. Quand on salue l'effort du gouvernement puis ont dit, là: On ne demande pas d'argent supplémentaire, bien il me semble qu'on a été bons joueurs encore une fois, là, très bons joueurs.

Ça fait que, voyez-vous, là, au fil de ces deux années-là, nous autres, là, tu sais, on en a mis sur la table dans l'espoir qu'on ait un petit retour d'ascenseur, qu'on nous dise: Regarde, la mesure du 25 %, là, regarde, on peut-u la mettre de côté, là, pour quelque temps, là? Bon, finalement le ministre a dit: Oui, regarde, jusqu'en 2013, là, ils vont avoir une compensation.

Là, les primes, on dit: On peut-u avoir un petit lousse, là, permettre aux producteurs de respirer un peu? Non, non. Non seulement la tarification change, puis là on impose une surprime en plus, par là-dessus. Regarde, moi, là, de l'ouverture, là, je peux en faire, on peut en faire, là, mais, à un moment donné, là, il faut être capables de mettre nos limites. Puis là, là, elles sont redues, les limites, là. La limite, là, c'est les producteurs qui ferment, qui abandonnent, là. Puis il me semble que, sur ce point de vue là, ce critère-là, on devrait être capables de tous s'entendre là-dessus. Ce n'est pas vrai qu'on va continuer à laisser partir nos fermes comme ça, là. On peut-u arrêter ça? Puis là on peut-u avoir un package, là, avec des solutions concrètes? Là, on propose ça puis là on donne de l'air aux producteurs pour trois ans. Ça fait que, oui, depuis les deux dernières années, là, on en a fait, des compromis. Mais là, là, à un moment donné, là, assez, c'est assez.

Puis, moi, je vais juste, si vous me permettez, M. le Président...

**(15 h 40)**

Le Président (M. Paradis): Oui. J'aurais... puis les autres membres auraient une série de questions. À un moment donné, il y a quand même une horloge qui dicte mes travaux. Je vais vous permettre une dernière intervention, je vais ravaler les questions additionnelles que j'avais, comme les autres membres vont le faire. S'il y a lieu de se revoir, on se reverra. Maintenant, pour le mot de la fin.

M. Lacasse (Christian): Oui. Dernier élément: moi, ce que j'ai entendu ce matin, là, puis ce que j'entends aussi de d'autres producteurs, là, qui sont vraiment au pied du mur, là... Puis là, là, c'est juste une décision qui va faire, là, qu'ils vont se faire clairer, là, hein, ils vont se faire déposséder, là. Est-ce que, là, en plus de ce qu'on a, nous, on a mis sur la table ce matin, les trois propositions, là, est-ce que rapidement, là, on pourrait convenir puis faire en sorte que les entreprises qui sont au pied du mur, là, on ait un petit répit qui permettrait de mettre en place les solutions qu'on propose, pour ne pas que dans deux mois, quand ces solutions-là vont arriver, je l'espère, on n'aura pas encore perdu, là, des dizaines d'entreprises agricoles? On est-u capables de faire ça?

Moi, en tout cas, là, je le soumets parce que, moi, je vois l'urgence, là, pour certains producteurs. Ils sont dans le processus de médiation, puis là il va arriver une décision à un moment donné, un matin, là. Là, il y en a qui vont rappeler leurs prêts, là. Moi, je pense qu'il faut... ça prend quelque chose.

Une voix: Merci beaucoup.

Le Président (M. Paradis): Je vais peut-être permettre une intervention porte-parole du côté de l'opposition, porte-parole du côté ministériel, puis un petit 30 secondes à mon bon ami de Beauce-Nord, en commençant par mon bon ami de Beauce-Nord. 30 secondes.

M. Grondin: Bien, écoutez, moi, je voulais vous poser comme question... Mais je trouve que vos solutions que vous apportez, là, pour régler le problème, je les trouve excellentes, parce que, moi, j'ai dit: On l'a fait dans d'autres domaines. Quand on a passé la crise économique, on en a mis, des choses à la disposition des gens pour être capables de passer. On l'a fait dans le domaine forestier, on l'a fait dans le domaine de l'avion, des trains, plus que... on l'a fait partout. Pourquoi qu'on n'est pas capables de le faire dans le domaine de l'agriculture? C'était ça que je voulais apporter.

Le Président (M. Paradis): Merci, M. le député de Beauce-Nord. En étant presque aussi bref, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président, je vais laisser la parole à ma collègue d'Iberville, qui souhaitait poser une question, brève sans doute.

Le Président (M. Paradis): Très bien. Mme la députée d'Iberville...

Mme Bouillé: Merci.

Le Président (M. Paradis): ...votre testament à la commission comme porte-parole officielle.

Mme Bouillé: Je ne suis plus la porte-parole officielle. Merci, M. le Président. Écoutez, c'est juste pour revenir sur la question de la méthodologie de tarification et pour rassurer peut-être le président de l'UPA, qui dit que les documents puis les informations ne sont pas transmis aux représentants de l'UPA qui sont au conseil d'administration. Mais ils ne sont pas plus transmis aux parlementaires quand on les demande. Donc, c'est pour le rassurer.

Je vous remercie d'avoir déposé le procès-verbal.

Une voix: ...

Mme Bouillé: Je vous remercie...

Le Président (M. Paradis): ...compris que vous ne deviez pas... vous ne deviez pas le prendre personnel.

Mme Bouillé: Ce n'est pas sur mon temps, ça, hein? Déposé par M. Lacasse le procès-verbal de la 112e séance du conseil d'administration de La Financière agricole, le 29 janvier 2010, où vous aviez expliqué, avant la suspension pour l'heure du lunch, que vous étiez opposés, vous et M. Charles-Félix Ross, de l'UPA, à une résolution qui approuvait «l'implantation, à compter de l'exercice financier [...] soit l'année d'assurance 2010 pour le secteur animal et l'année récolte 2009-2010 pour le secteur végétal, [...]la méthodologie de tarification en assurance stabilisation». Puis, le deuxième volet:

«Que soit approuvé le traitement des soldes des comptes cumulés antérieurement à l'implantation de cette méthodologie de façon distincte, tel que proposé à l'analyse -- excusez-moi -- actuarielle, par la prise en compte d'une surcharge spécifique, basée sur une période d'amortissement de 15 ans.»

Mais on avait demandé, nous, d'avoir la fiche qui avait servi à votre décision, mais vous nous l'avez fournie. Et ce que je m'aperçois, elle vient du... fiche exécutive au conseil d'administration, et, en bas, c'est marqué «Jacques Brind'Amour» -- ce n'est pas signé cependant -- mais il y a juste le nom, Jacques Brind'Amour, et ce qu'on voit, c'est qu'il dit: «Sur la base des simulations réalisées pour l'année d'assurance 2009 dans le secteur animal et l'année récolte 2009-2010 dans le secteur végétal, l'application de la méthodologie proposée -- en considérant une période d'amortissement de 10 ans...» Puis pourquoi je le souligne? Parce qu'il y a tout un débat, là, sur 15 ans, cinq ans. Mais là: «... -- [sur] une période d'amortissement de 10 ans pour les déficits du passé -- ne génère pas d'augmentation significative compte tenu que la marge d'anticipation est calculée en fonction d'un fonds remis à zéro vu que les déficits existants ont été isolés et traités séparément.»

Et la recommandation de M. Brind'Amour était de «traiter séparément les déficits cumulés sous la méthode actuelle, tel que proposé par l'actuaire, par l'addition au taux de prime d'une surcharge spécifique, basée sur une période d'amortissement de 15 ans». Et là, écoutez, je suis surprise, là, parce que la recommandation, donc, sur laquelle la décision a été prise par le C.A... Mais, à la sessions de juin, là, on nous disait que ce n'était plus 15 ans dans certains cas puis que les fonds n'étaient pas séparés. On n'a pas fait fi des... c'est-à-dire qu'on a tenu compte des déficits antérieurs, alors que tout ce que je vois là, c'est que les fonds étaient séparés, les déficits existants ont été isolés et traités séparément. Mais ce n'est pas ça qui se passe là et ce n'est pas ça qu'on nous a dit. Donc, je veux souligner à la commission, là, parce que ça va à l'encontre du conseil d'administration...

Le Président (M. Paradis): Bref...

Mme Bouillé: ...carrément à l'encontre de la décision du conseil d'administration.

Le Président (M. Paradis): Bref commentaire, M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Bien, c'est ça. Pour nous, c'est bien, bien clair, là, qu'avec les documents d'appui à la décision du conseil les fonds... les déficits antérieurs, là, devaient être traités de façon séparée, hein, et amortis sur 15 ans. Parce que ça, c'est la décision du conseil. Ce n'est pas ça que La Financière fait. Elle ne les traite pas séparément, ce qui fait que, là, en les traitant dans un tout, là, elle impose une marge d'anticipation, ce que, moi, j'appelle une surprime, et la surprime va faire en sorte que le remboursement des fonds... des déficits ASRA, au lieu finalement d'être amorti sur une période de 15 ans, ils vont l'être, là, selon le rythme qu'on voit là, là, après un an, un an et demi, là. Ils vont être sur un rythme, là, de quatre, cinq ans.

Mme Bouillé: Donc, vous avez souligné comme quoi La Financière ne respecte pas les décisions du conseil d'administration de La Financière. C'est ma remarque de clôture.

Le Président (M. Paradis): Ça va. M. le député de Gaspé, à ce moment-ci.

M. Mamelonet: Écoutez, M. Lacasse, merci beaucoup pour cet exposé, qui a été plus long que prévu mais qui était tout aussi intéressant que les exposés précédents, pour nous faire une belle image de la situation.

Pour revenir aux trois propositions que vous faites, tout en réfléchissant tout à l'heure et en consultant quelques documents, je me suis aperçu que, dans la stratégie d'adaptation, le congé de capital était déjà inclus. Donc, c'est une portion de vos demandes. Dans les stratégies d'adaptation qui ont été mises de l'avant justement pour porter assistance, en fin de compte, aux entreprises qui étaient plus en difficulté que les autres, le congé de capital est déjà inclus dans les stratégies d'adaptation. C'est l'information que j'ai. Ça fait que je vous demanderais peut-être d'en tenir compte, de vérifier. Et, au niveau des baisses de...

Une voix: ...

M. Mamelonet: Pardon?

M. Lacasse (Christian): Congé de remboursement d'intérêts, oui.

**(15 h 50)**

M. Mamelonet: Congé en capital, me dit-on. Ça fait qu'il y a peut-être quelque chose à vérifier. Parce que je pense que la stratégie d'adaptation est peut-être un excellent moyen justement pour passer ces trois éléments dont vous parlez qui pourraient être donc exclus des mesures générales, que ça pourrait peut-être passer plus facilement au niveau de La Financière agricole, du conseil d'administration, dans la mesure où on a déjà des budgets qui sont là pour ça. Et ce que vous regardez, ce que vous proposez est vraiment destiné au nombre d'entreprises, à un certain nombre d'entreprises qui sont vraiment en difficulté. Ça fait que je pense que cette orientation-là pourrait être très intéressante dans les discussions futures, et je vous remercie infiniment de l'avoir amenée à la commission. Écoutez, on va continuer... je pense que la commission va continuer à se pencher sur le dossier de façon très sérieuse. On a un rapport à remettre, un rapport de recommandations justement sur la façon de fonctionner de La Financière, voir comment est-ce qu'on est capables de l'orienter de la bonne façon pour l'avenir de notre secteur agricole.

Le Président (M. Paradis): Oui, M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Vous permettez? La notion de trois ans est très importante, parce que vous allez entendre, de la part de La Financière ou peut-être du ministère, dire: Bien, La Financière accorde déjà du consentement pour certains arrérages, mais elle le fait sur une base ponctuelle et de courte période. Moi, je pense... Puis, à la lumière des témoignages que vous avez reçus ce matin, il faut vraiment créer un contexte, un espace, là, de confiance à la fois pour les producteurs, qui ont parfois à restructurer un peu leur entreprise à partir des diagnostics... Puis ça, on s'entend que ce n'est pas quelque chose qu'ils peuvent faire dans six mois, même pas un an. Faire ces changements-là, là, ça peut demander deux, trois ans. Il vient de là, le trois ans, de façon a ce que le producteur puisse se restructurer, avoir l'espace, mais surtout la confiance puis l'espérance que La Financière, dans six mois, ne reviendra pas en disant: Bien là, regarde, ça ne marche pas, là. Tu sais, là, on... Non. Tu sais, au moins pour trois ans, là... Il y a un suivi qui peut être fait, là, quand même sur chacun de ces dossiers-là. Mais, pour trois ans, on lui donne un cadre financier, là, qui va lui permettre de se redresser puis passer à travers. Il est très important, le trois ans.

Le Président (M. Paradis): Ça va? Je veux remercier, là, tous les parlementaires des divers consentements qui ont été octroyés, remercier le président de l'UPA de son témoignage. Ce n'est pas parce que le sujet est épuisé, c'est que le temps imparti a largement été dépassé.

Je vais suspendre les travaux pour une période de cinq minutes, au terme duquel Mme Marie-Christiane Lecours, qui est administratrice à La Financière agricole, sera appelée à témoigner. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 53)

 

(Reprise à 15 h 59)

Le Président (M. Paradis): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Prenez place. La commission reprend ses travaux avec un certain retard. À ce moment-ci, nous nous en excusons auprès des gens que nous avons convoqués.

Mme Marie-Christiane Lecours, s'il vous plaît, veuillez prendre place. Est-ce que Mme Lecours... Est-ce que vous pouvez vérifier avec la sécurité si Mme Lecours est entrée au parlement? Il faut signer pour entrer au parlement, donc obligatoirement on va le savoir. Parce qu'il y a possibilité que Mme Lecours, là... On a recommencé nos travaux à 14 h 30, mais, si elle s'est présentée au parlement, il faut signer pour rentrer au parlement, donc on va le savoir.

Dans l'intervalle, de façon à ne pas retarder nos travaux, nous avions convoqué pour 15 heures Mme Solange Morneau. Est-ce que Mme Morneau veut s'approcher, s'il vous plaît?

Même chose, est-ce que vous pouvez vérifier avec la sécurité si Mme Morneau s'est présentée à l'Assemblée nationale?

Et, pour 16 heures -- je constate qu'il est 16 heures -- il s'agit de la secrétaire du conseil d'administration de La Financière agricole, Mme Renée Saint-Hilaire. Est-ce que Mme Saint-Hilaire veut bien s'approcher, s'il vous plaît? Est-ce que vous pouvez faire les mêmes vérifications à ce... Parce que nous avions demandé à ce qu'ils se présentent une demi-heure à l'avant.

Là, j'ai une vérification à faire auprès du secrétariat. Est-ce que ces personnes ont été convoquées conformément à nos règles de procédure habituelles?

**(16 heures)**

La Secrétaire: Oui.

Le Président (M. Paradis): Est-ce que ces personnes ont reçu l'avis de convocation personnellement? Parce que j'ai été informé que La Financière agricole avait refusé de communiquer à la commission les adresses de certains administrateurs. M. le secrétaire, s'il vous plaît. Ou Mme la secrétaire... Parce que...

La Secrétaire: On a reçu la confirmation, au Secrétariat des commissions, que les convocations avaient été remises.

Le Président (M. Paradis): Personnellement?

La Secrétaire: Personnellement aux administrateurs.

Le Président (M. Paradis): À ces trois administrateurs?

La Secrétaire: Oui.

Organisation des travaux

Le Président (M. Paradis): Très bien. Il s'agissait d'une convocation à l'unanimité des membres de la commission. C'est un précédent. Habituellement, les gens, surtout qui font partie des organismes publics ou parapublics, s'empressent de venir témoigner devant la commission parlementaire. Dans les circonstances, nous avons deux choix qui s'offrent à nous: oublier de les convoquer de façon plus formelle, c'est-à-dire par l'émission de brefs de subpoena, ce qui peut constituer un précédent. Les personnes qui seront désormais convoquées devant les commissions parlementaires de l'Assemblée nationale décideront si elles souhaitent venir ou ne pas venir.

C'est d'autant plus sérieux qu'il s'agit d'un organisme d'État, de nominations du Conseil des ministres de la province de Québec, qu'il s'agit de gens qui ont reçu des avis dans les délais requis. Je ne peux pas présumer de la présence ou de l'absence des autres administrateurs. Je veux que nous prenions les mesures pour les accueillir jusqu'à 21 heures ce soir, tel que notre programme le prévoyait. Quant aux...

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): On vient de me confirmer que les trois ne se sont pas présentés à l'Assemblée nationale du Québec. Dans les circonstances, la commission a une décision à prendre. M. le vice-président.

M. Pinard: Est-ce que ces gens ont reçu seulement qu'une convocation ou s'il y a eu un renouvellement de convocation?

Une voix: ...

M. Pinard: Je ne vous ai pas entendu, M. le secrétaire adjoint.

Le Secrétaire: Une convocation et deux rappels.

M. Pinard: Une convocation et deux rappels. Les deux rappels ont été faits à quelle date?

Le Secrétaire: Les 17 et 19 août.

M. Pinard: Les 17 et 19 août. Très bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Paradis): Et la convocation initiale?

Le Secrétaire: Le 8.

Le Président (M. Paradis): Le 8?

M. Pinard: Convocation le 8, rappels le 17 et le 18 août. Parfait.

Le Président (M. Paradis): Mme la députée d'Iberville.

Mme Bouillé: Merci, M. le Président. Sur Internet, la Primeur agricole annonçait, vers 14 h 30, qu'il y avait de grands absents à nos travaux et que, selon la porte-parole de La Financière, Mélanie Fiset, les membres du conseil d'administration de l'organisme ont reçu des lettres et que... C'est un long... Je peux vous le lire parce que ça nous touche particulièrement, là: «...ont reçu des lettres de la commission il y a plus d'une semaine, mais ont convenu de ne pas se rendre à Québec.» Donc, la commission souhaitait en outre entendre les deux grands patrons de l'organisme. Encore là, le P.D.G., Jacques Brind'Amour, et le président du conseil d'administration, André Forcier, ont brillé par leur absence. À 14 h 30, cet après-midi. Et là...

Une voix: ...

Mme Bouillé: Non, mais... M. le Président, c'est la porte-parole de La Financière agricole qui parle, là.

Le Président (M. Paradis): Mais, moi, je ne l'ai pas entendue en commission. Je ne peux pas prendre de décision basée sur...

Mme Bouillé: M. le Président, je vous l'annonce, là, qu'à 14 h 30 la porte-parole de La Financière agricole avertissait...

Le Président (M. Paradis): Mme la députée... Mme la députée d'Iberville, je vous remercie beaucoup, là. J'en tiendrai compte comme un élément extrinsèque à nos discussions. Je considère que nous avons assez d'éléments au dossier qui sont factuels, qui sont rapportés dans la documentation, l'échange de correspondance, etc. Je ne dis pas que l'article est faux, là, je ne dis rien de ça. C'est qu'on est capables de prendre une décision en fonction des éléments que le dossier contient présentement. M. le député de Gaspé.

M. Mamelonet: ...préciser, suite aux informations que la députée d'Iberville annonce, c'est que, dans les convocations, on n'a jamais eu les convocations pour le président ou le... président-directeur général ou le président du conseil.

Le Président (M. Paradis): Pas pour aujourd'hui.

M. Mamelonet: Pas pour aujourd'hui. C'est ça. O.K.

Le Président (M. Paradis): Pas pour aujourd'hui.

M. Pinard: Ce sera en même temps que le ministre. Bien, c'est...

Le Président (M. Paradis): La commission prendra ses décisions.

M. Pinard: ...le comité directeur qui va déterminer...

Le Président (M. Paradis): Là, moi, j'ai besoin, comme président...

M. Mamelonet: Ils n'ont jamais été convoqués.

Le Président (M. Paradis): J'ai besoin, comme président, d'un éclairage. Quel est le souhait des membres de la commission? Est-ce qu'on permet aux gens qui ont été convoqués de ne pas se présenter ou est-ce qu'on va à l'étape suivante qui est prévue dans notre règlement, l'émission d'un bref d'assignation?

Des voix: ...

Le Président (M. Paradis): Excusez! M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: En séance de travail, on pourra ensemble décider. Puis, la séance de travail peut se tenir dans les prochaines minutes.

Des voix: ...

M. Pinard: M. le Président...

Le Président (M. Paradis): Oui, M. le vice-président.

M. Pinard: Pour obtenir un huis clos, ça prend, je pense, la majorité des deux groupes parlementaires.

Le Président (M. Paradis): Pour un huis clos en séance publique? Oui, je pense, de mémoire.

M. Pinard: Donc, à ce stade-ci, je ne crois pas que mon groupe parlementaire va accepter un huis clos.

Des voix: ...

Le Président (M. Paradis): Oui, Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: ...propose qu'on mette fin à la séance publique et qu'on fixe une date pour une séance de travail où on pourra discuter des mesures à prendre et des décisions...

Une voix: ...

Mme L'Écuyer: C'est une question de règlement, de mettre fin à la séance et...

Le Président (M. Paradis): Oui. Je m'excuse, là, ce n'est pas une question de règlement, c'est une proposition qui est faite. Je vais recevoir toutes les propositions et tenter d'en disposer dans l'ordre. Ça va?

Pour le huis clos, j'ai vérifié. Pour le huis clos, c'est à double majorité, comme tel. Pour une proposition de se transformer, c'est à majorité simple. Ça va? D'autres propositions? M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président, écoutez, il y a 70 personnes, là, du monde agricole aujourd'hui. Il y a des gens qui nous ont écoutés de l'extérieur. Il y a eu deux convocations en bonne et due forme...

Des voix: ...

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Trois, même, vous voyez? Écoutez, on a demandé des documents expressément en juin. Nous ne les avons pas reçus, en tout cas, à tout le moins, de manière satisfaisante, c'est manifeste, là. Je ne vois pas pourquoi on n'irait pas de l'avant pour faire en sorte que ces personnes-là qui refusent de venir aujourd'hui... Ce sont des administrateurs, des administratrices, vous le dites. Ils sont nommés formellement par le Conseil des ministres par voie de décret. La société d'État, ce sont des fonctionnaires qui y travaillent, bien sûr. Mais, écoutez, la situation est telle que ce que nous avons entendu ce matin, il n'y a pas de... Je pense qu'on doit aller de l'avant, M. le Président. Puis c'est toute la crédibilité, aussi, de la commission par rapport à son mandat. C'est un mandat de surveillance. Alors, c'est un refus...

Le Président (M. Paradis): ...permettre un bref débat. La question qui se pose à nous: Devons-nous procéder en séance de travail ou devons-nous procéder en commission publique? Et c'est là-dessus que je vais vous entendre. Je veux...

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): Exact. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: M. le Président, écoutez, moi, je n'ai aucune objection à parler publiquement, là. Ce qu'on dit... Normalement, quand on dit la vérité, que ça soit public ou caché, c'est la vérité. Moi, je n'ai pas de problème avec ça.

Le Président (M. Paradis): J'avais... Je m'excuse, M. le député de Beauce-Nord, je ne peux pas accepter le terme que vous avez utilisé.

M. Grondin: Mais, moi, je... La chose que je me demande comme élu et comme responsabilité... Nous, on est les élus du peuple, ici, aujourd'hui, là. C'est quoi, la... Je ne connais pas toute la légalité de l'Assemblée nationale, mais c'est quoi qu'on fait dans des circonstances semblables? Moi, je n'ai jamais vu ça, là. Ça fait neuf ans que je suis ici, là, je n'ai jamais vu ça.

Des voix: ...

M. Grondin: Mais c'est quoi, les règles du jeu légal?

Le Président (M. Paradis): Excusez-moi, est-ce que vous voulez...

M. Pinard: ...les règles du jeu, Janvier.

M. Grondin: Je me demandais c'était quoi, les règles du jeu légal. Parce que, moi, ça fait neuf ans que je suis ici, je n'ai jamais vu ça, quelqu'un qui refuse de se présenter ici. On les...

Le Président (M. Paradis): Oui, moi, je l'ai déjà vu. La Loi de l'Assemblée nationale prévoit la possibilité pour une commission ou pour l'Assemblée d'émettre des subpoenas. Ça veut dire que la personne n'a plus le choix, elle doit comparaître. Ça s'est fait de... la dernière fois, je pense, dans le dossier du mont Orford, si ma mémoire est fidèle.

Des voix: ...

**(16 h 10)**

Le Président (M. Paradis): Bon! Et, à ce moment-là, ça devient... C'est l'article 51, si ma mémoire est fidèle, de la Loi de l'Assemblée nationale. Donc, le pouvoir existe. Maintenant, comment on l'exerce, comme tel? Est-ce qu'on le décide en séance publique ou en séance de travail? Moi, j'ai une proposition de Mme la députée de Pontiac, qui me dit qu'elle souhaite le décider en séance de travail. Je permets un court débat, je vais passer au vote, puis on procédera. Oui, M. le député de Rousseau.

M. Marceau: Oui, bien, deux choses à dire sur ce débat-là. La première, c'est que, comme le député de Beauce-Nord, je ne vois pas ce qu'il y a de secret ou de difficile à discuter dans ce dossier-là. La décision que nous prendrons sera, de toute manière, publique dès lors que nous avons décidé d'aller dans un sens ou dans l'autre. Alors, le fait de le faire publiquement puis de faire valoir devant tous nos arguments, ça ne devrait pas poser vraiment de problème.

Et puis, la deuxième chose, je vous signale que notre ordre du jour n'est pas épuisé, loin de là. On en avait jusqu'à 22 heures, en principe. En principe, on doit, à l'intérieur d'une même séance de travail, prendre toutes les décisions qui concernent le boulot qui nous avait été imparti par l'Assemblée nationale, et tel n'est pas encore le cas. Si nous levions, hein, si nous levions en ce moment, il y aurait des éléments qui n'ont pas... il y aurait du boulot qui n'aurait pas été abattu. Il faut abattre tout le travail qui nous a été donné par l'Assemblée, et ce n'est pas le cas. Donc, moi, je pense qu'il faut conclure, à l'intérieur même de cette séance, sur ce sujet-là.

Le Président (M. Paradis): Bon, je vais tenter, là, de préciser. La commission est convoquée pour des travaux jusqu'à 22 heures, ce soir. Mais les travaux doivent porter sur des auditions publiques. À ce moment-ci, il semble que les auditions publiques comme telles soient pour le moins, en tout cas pour ce qui était prévu jusqu'à 17 heures, compromises vu l'absence des témoins. Je ne peux pas empêcher un membre de cette commission de nous garder assis ici jusqu'à 17 heures, 18 heures, 19 heures, 20 heures, 21 heures, 22 heures. Vous avez le droit, comme députés, d'exiger l'application comme telle de l'ordre du jour qui a été décidé.

Compte tenu des circonstances, là, je tente de rallier les positions. Je pense qu'on a une décision qui est quand même assez grave à prendre. Il s'agit de l'émission de brefs de subpoena envers des administrateurs d'une société d'État. Est-ce que nous prenons cette décision en séance publique présentement ou, tel que l'a proposé Mme la députée de Pontiac, en réunion de travail, qui n'est pas et qui n'est jamais publique, les réunions de travail de la commission?

Mme la députée de Pontiac, faites votre proposition.

Mme L'Écuyer: Je veux juste expliquer pourquoi en séance de travail. Pour avoir vécu la commission Orford, quand on prend une décision d'un subpoena... Et c'était très différent, la commission Orford, de celle-là. La commission Orford touchait un individu avec des données très sensibles. Aujourd'hui, il faut décider et discuter... Et, moi, j'ai besoin de beaucoup plus d'informations que juste arriver et dire: On envoie un subpoena. On s'adresse à des membres d'un conseil d'administration, qui normalement, dans... pour avoir connu pendant des années un conseil d'administration... Il y a une question d'éthique. Est-ce qu'on peut, comme Assemblée nationale... Je sais qu'on peut faire tout et rien, hein, on peut tout faire, mais, moi, je veux m'informer avant. Est-ce qu'on peut, avec un subpoena, faire venir l'ensemble des membres d'un conseil d'administration? Comment fonctionne un conseil d'administration d'une organisation parapublique? Et, moi, j'ai besoin de ces informations-là avant d'arriver puis de dire: On envoie des subpoenas pour que tout le monde vienne. Ce n'est pas le mandat d'initiative dont on traite... de surveillance dont on travaille dessus aujourd'hui.

Le Président (M. Paradis): Là-dessus, Mme la députée, le comité directeur de la commission, avant la réunion de travail des membres de la commission de cet été, a procédé à ces vérifications auprès du Secrétariat de l'Assemblée nationale du Québec, et je peux vous affirmer que la réponse est oui.

Mme L'Écuyer: Mais on n'avait pas ces informations-là.

Le Président (M. Paradis): Mais je vous la donne, là. La réponse est oui. Et la décision de les convoquer avait été prise à l'unanimité des membres de la commission en séance de travail. Je pourrais retrouver la date exactement.

M. Pinard: Le 13 juillet.

Le Président (M. Paradis): Le 13 juillet. À partir de ce moment-là, le geste a été posé de les convoquer. La question qui se pose aujourd'hui, ce n'est pas si on peut les convoquer ou pas. La question se pose: Est-ce qu'on pose le geste additionnel, parce que ces gens-là ont choisi de ne pas se présenter, d'émettre des brefs d'assignation qui les obligent à se présenter? C'est la petite nuance. Ça va? Oui, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: M. le Président, entendons-nous bien, là. Je veux dire, on a assisté aujourd'hui aux mêmes présentations, tout le monde, hein? On est, tout le monde, très sensibles quant à la question qui touche notre agriculture au Québec. Moi, là, c'est strictement sur une question de procédure. Comme parlementaire, je veux m'assurer qu'on fasse bien les choses, qu'on aille au fond des détails au niveau de la procédure. Puis il n'est pas écrit nulle part qu'on reporte ça aux calendes grecques, là, qu'on se revoit en 2017. On peut faire ça -- et corrigez-moi si je me trompe -- on pourrait faire ça pratiquement là, là. Je veux dire, après la réunion publique, on peut procéder. Ce qui compte, c'est le résultat. Ce qui compte, ce qu'on veut, là, c'est un résultat. C'est une question de procédure. Il n'est pas question de cacher quoi que ce soit. M. le député de Beauce-Nord tantôt faisait référence à la vérité. On partage ça, là. On veut juste... Moi, personnellement, comme député, c'est sérieux, ce qu'on fait, puis on ne parle pas nécessairement d'un précédent, mais ce n'est pas arrivé souvent dans le passé. Moi, je veux m'assurer qu'on fasse bien les choses puis...

Mme Gonthier: Qu'on prenne le temps de réfléchir.

M. D'Amour: ...comme ma collègue de Mégantic-Compton, qu'on prenne le temps de réfléchir, qu'on discute entre nous. On ne reporte pas ça à la semaine prochaine ni à demain, là, on est là, là. Alors, c'est ainsi que je vois la chose.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Rousseau.

M. Marceau: Oui. Très simplement, les débats de procédure, l'examen des circonstances, l'opportunité de faire... d'émettre des subpoenas ou pas, ça peut se faire publiquement, ça peut se faire dans une séance de travail. Je n'ai pas entendu un seul argument qui me convainque d'aller en séance privée. Je crois que tout ça, ça peut se faire à la face même du public.

Le Président (M. Paradis): Est-ce que je peux...

M. Marceau: Je n'ai aucun... J'ai déjà eu des débats de procédure, et pourtant je ne suis pas expérimenté comme vous ni comme le vice-président, mais je suis certain que, vous deux, vous avez eu l'occasion d'avoir de longs débats de procédure en public et je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas possible de le faire aujourd'hui. Alors, moi, je nous invite à procéder à une discussion sur le sujet plutôt que de réfléchir à l'opportunité d'aller le faire en privé.

Le Président (M. Paradis): Est-ce que je peux tenter une proposition? Une des forces de cette commission, jusqu'à ce moment-ci, dans ce mandat-ci de surveillance, a été l'unanimité de ses décisions. Je n'ai jamais été obligé d'appeler un vote. À ce moment-ci, je sens que je vais être obligé de l'être. Je vais vous faire la suggestion suivante. Si tout le monde se rallie à un comité de travail immédiatement, c'est-à-dire que l'on suspend, et on s'en va en séance de travail immédiatement, et qu'on prend une décision dans le temps imparti, là... Ça va aller à 18 heures, 19 heures, je ne le sais pas, là, mais la décision va être prise aujourd'hui, et elle va être annoncée aujourd'hui, et on garde l'unanimité de cette commission. On s'entend pour ne pas... qu'il n'y ait pas un seul député qui nous dise: Moi, je veux siéger jusqu'à 10 heures, là. On va mettre du personnel du secrétariat à la disposition des autres personnes qui ont été convoquées, au cas où elles se présentent, parce que la personne qui se présente ne mérite peut-être pas la même procédure que la personne qui ne s'est pas présentée. Et à ce moment-là on pourrait lever la séance. Maintenant, personne n'est obligé d'accepter ça. Vous pouvez vous en tenir au règlement. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Écoutez, M. le Président, moi, je suis nouveau à la commission. Je suis arrivé pour siéger en juin. J'étais invité de façon particulière. Ce n'est pas ma commission habituelle. Maintenant, ça va l'être. Mais c'est quand même un mandat de surveillance que la commission s'est donné; c'est du sérieux, c'est quelque chose qui n'est pas courant mais qui n'est pas irrégulier. Et je n'étais pas là le 13 juillet, mais j'ai suivi tout de même les correspondances. Le 13, la commission a pris le soin de regarder, de convoquer, de donner un autre délai, au 1er août. Il y a eu deux correspondances du président du conseil d'administration, qui finalement a dit: Les administrateurs ne se présenteront pas. J'ai comme l'impression qu'on se fait servir à peu près le même genre d'attitude que nous avons eue comme témoignage ce matin. Je ne vois vraiment pas, M. le Président, qu'est-ce qui empêche d'agir en toute transparence, publiquement, à l'étape où on est rendus. Il n'y a absolument rien qui est à cacher, il n'y a absolument rien qui est compromettant, je pense.

Le Président (M. Paradis): Non, on ne veut prêter d'intention à personne, là. Je ne veux pas de... Il y a une question de chimie lorsqu'on travaille publiquement et... ou qu'on travaille à huis clos. Moi, comme président de la commission, je recherche le même objectif que vous autres. On s'est donné un mandat de surveillance d'une société d'État. Il y a une problématique. Et, on l'a tous vécu, là, quand on prend nos décisions, on se rappelle des témoignages qu'on a entendus cet avant-midi et cet après-midi, donc on ne la prend pas dans l'intérêt des parlementaires, on la prend dans l'intérêt des gens qui sont venus témoigner puis qui vivent à chaque jour. Moi, je veux prendre la meilleure décision dans ce sens-là. Maintenant, ce n'est pas moi qui la prends, la décision, c'est la commission qui prend la décision. Moi, je l'applique. M. le député de Beauce-Nord.

**(16 h 20)**

M. Grondin: M. le Président, moi, je pense que, pour respecter les gens qui sont venus ici aujourd'hui, qui ont venu nous parler à coeur ouvert, à peu près livrer leur vie ici, sur la table, publiquement, on se doit à une réponse publiquement immédiatement, juste par respect pour ces personnes-là.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: M. le Président, moi, j'ai l'impression qu'on perd un temps précieux, là. Il y a pas mal plus important que ça aujourd'hui, qu'un débat de procédure, comment on va faire les choses. On veut décider, là. Quant à la forme, il y a eu une proposition qui a été faite par la députée de Pontiac, il y avait votre compromis. Prononçons-nous puis procédons, là. On ne peut pas tataouiner de même jusqu'en 2017, là. «Tataouiner», ce n'est pas très parlementaire.

Le Président (M. Paradis): Mme la députée d'Iberville.

Mme Bouillé: M. le Président, ce qu'on veut justement, c'est, ici, régler ça, puis tout de suite. Donc, il n'est pas question d'aller en séance de travail. Si vous avez des arguments contre le subpoena ou d'autres...

Une voix: ...

Mme Bouillé: Laissez-moi donc parler, Mme la députée.

Le Président (M. Paradis): S'il vous... S'il vous plaît!

Mme Bouillé: M. le Président, s'il vous plaît, si...

Le Président (M. Paradis): S'il vous plaît! Les gens qui sont venus nous...

Mme Bouillé: ...s'il y a des arguments, ils peuvent être tenus publiquement aussi bien qu'en séance privée, et donc je plaide pour qu'on continue et justement qu'on ne continue pas à essayer, là, de mettre en dessous du tapis les questions... les décisions qu'on a à prendre actuellement.

Le Président (M. Paradis): Je vais, compte tenu des circonstances, suspendre nos travaux pour une période de 10 minutes. Nous reprendrons dans 10 minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 21)

 

(Reprise à 16 h 33)

Le Président (M. Paradis): Je tiens à remercier les députés de leur disponibilité pendant la suspension de nos travaux.

Motion proposant que la commission assigne à comparaître des
membres du conseil d'administration de La Financière agricole
et qu'elle exige la production de certains documents par
Mme Renée Saint-Hilaire, secrétaire générale de cet organisme

Des discussions ont eu lieu entre les parlementaires, et à ce moment-ci je me risque à proposer la motion suivante... pas à la proposer, mais à vous la lire, et j'aurais besoin d'un proposeur et d'un secondeur:

Assignation à comparaître:

«Qu'en vertu de l'article 51 de la Loi sur l'Assemblée nationale la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles assigne à comparaître les membres suivants du conseil d'administration de La Financière agricole: M. André Forcier, M. Marcel Ostiguy, M. Norman Johnston, M. Charles-Félix Ross, Mme Marie-Christiane Lecours, M. Christian Overbeek, Mme Jacynthe Gagnon, M. Claude Lacoste, M. Denis Pageau, M. Gilles Lavoie, M. Claude Lambert, Mme Gisèle Grandbois, Mme Renée Saint-Hilaire, Mme Solange Morneau;

«Que, à l'occasion de sa comparution devant la commission, Mme Renée Saint-Hilaire, secrétaire générale de La Financière agricole, produise les documents suivants:

«Les procès-verbaux des séances du conseil d'administration de La Financière agricole qui ont eu lieu depuis le 1er avril 2009;

«Les adresses et numéros de téléphone et de télécopieur du lieu de travail et du domicile de chacun des membres du conseil d'administration de La Financière agricole ainsi que leur adresse électronique;

«Que le comité directeur détermine le moment où les personnes assignées devront comparaître devant la commission;

«Que les frais d'assignation soient payés à même le budget de la commission.»

Est-ce que ça vous va?

M. Pinard: Je seconde, M. le Président.

Le Président (M. Paradis): Ah non! je n'ai pas proposé. J'ai fait lecture de... M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président, j'aurais une proposition à faire, d'amendement. Au point 1, on parle des procès-verbaux des séances du conseil d'administration, mais il y a aussi les documents afférents, les fiches exécutives ayant servi à la prise de décision. C'est ce qu'on avait demandé le 9 juin.

Le Président (M. Paradis): Mme la secrétaire, est-ce que c'est conforme à ce qui avait été demandé au mois de juin? C'est ce que je veux vérifier.

La Secrétaire: C'est plus large. Il faudrait que je fasse la vérification.

Le Président (M. Paradis): Écoutez, moi, si vous nous donnez la permission, là, il y aura une vérification de faite. Il y a des engagements qui avaient été pris, au moment des auditions du mois de juin dernier, à fournir de la documentation. Une certaine partie de cette documentation nous a été acheminée, mais il en manque. On peut se fier au secrétariat et à sa vigilance pour dresser la liste des documents qui manquent, et ils seront ajoutés aux subpeonas duces tecum. Ça va? D'autres interventions? M. le député de Gaspé.

M. Mamelonet: Je proposerais cette convocation, M. le Président. Mais j'ai l'impression que M. Norman Johnston n'est plus sur le conseil d'administration de La Financière.

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): Automatiquement, en vertu de la loi.

M. Mamelonet: O.K. Parce qu'il était vice-président...

Le Président (M. Paradis): Oui. Ça va? Est-ce que j'ai un proposeur? M. le...

M. Pinard: Je propose.

Mise aux voix

Le Président (M. Paradis): M. le député de Gaspé propose. Je m'excuse, M. le vice-président. Vous secondez?

M. Pinard: Oui.

Le Président (M. Paradis): Ça va? C'est adopté à l'unanimité. Maintenant, il n'y a pas de date précise pour le moment. Les indications que j'ai sont des indications préliminaires. Nous travaillons pour le lundi, encore une fois, parce que c'est la journée où on n'est pas dans les jambes des autres commissions, puis ça facilite le travail, comme tel. Le lundi... le 12 septembre, c'est la date tentative. Maintenant, je dois faire des vérifications pour s'assurer de la salle, les bureaux de leader, etc., là. C'est tentatif. Ça va? Ça donne le temps à tous ceux et celles qui nous écoutent de régler la situation avant qu'on se réunisse. Merci.

Une voix: ...

Le Président (M. Paradis): Oui.

Mme L'Écuyer: M. Lacasse est venu aujourd'hui, mais il est venu en tant que représentant de l'UPA. M. Lacasse, est-ce que c'est...

Une voix: ...

Mme L'Écuyer: Les deux? Ah! O.K. Parce que son nom n'est pas là. Je ne voudrais juste pas que ça annule...

Le Président (M. Paradis): ...et, si jamais on avait besoin du témoignage de M. Lacasse encore une fois...

Mme L'Écuyer: On le rajouterait?

Le Président (M. Paradis): ...j'ai vérifié, on me donne l'assurance qu'il va se rendre disponible.

Mme L'Écuyer: O.K. Parfait. Je veux juste... que ça n'annule pas...

Le Président (M. Paradis): Ça va? Merci beaucoup. Sur ce, je demande au personnel quand même, au cas où d'autres personnes qui ont été convoquées se présentent, au niveau du secrétariat et de la sécurité de l'Assemblée nationale, de prendre des dispositions, et je communiquerai avec ces personnes si elles se présentent. Merci beaucoup. Merci de votre... Oui, M. le député de Gaspé.

M. Mamelonet: ...de La Financière agricole nous indiquant que...

Le Président (M. Paradis): Je ne veux pas tomber là-dedans, parce que ça pourrait devenir compliqué sur le plan du droit parlementaire.

À ce moment-ci, on ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 16 h 38)

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