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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Tuesday, May 19, 2015 - Vol. 44 N° 37

Examination of the policy directions, orientations, activities and administrative management of the Commission de protection du territoire agricole du Québec


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Table des matières

Auditions (suite)

MM. Guy Lebeau et Jean-Guy Provencher

Union des producteurs agricoles du Québec (UPA)

Mme Suzanne Cloutier et M. Jacques Cartier

MM. Yves Baril et Réjean St-Pierre

Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ)

M. Louis-V. Sylvestre

Autres intervenants

Mme Nicole Léger, présidente

M. Norbert Morin, vice-président

M. Robert Dutil

M. Ghislain Bolduc

M. André Villeneuve

Mme Sylvie D'Amours

M. Serge Simard

M. Sébastien Schneeberger

M. Guy Bourgeois

*          M. Marcel Groleau, UPA

*          Mme Guylaine Gosselin, idem

*          M. Stéphane Forest, idem

*          Mme Marie-Josée Gouin, CPTAQ

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures)

La Présidente (Mme Léger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles ouverte. Je demande donc à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires et, les gens qui accompagnent les députés ou les équipes, de bien s'assurer de l'angle de la caméra également.

La commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques dans le cadre de l'examen des orientations, des activités et de la gestion administrative de la Commission de protection du territoire agricole du Québec.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Giguère (Saint-Maurice) est remplacé par M. Bolduc (Mégantic) et M. Hardy (Saint-François) est remplacé par M. Fortin (Pontiac).

La Présidente (Mme Léger) : Merci bien. Alors, nous avons une belle journée aujourd'hui. Bonjour, Mmes et MM. les députés.

Auditions (suite)

L'ordre du jour. Nous allons entendre, ce matin, M. Guy Lebeau aussi conjointement avec M. Jean-Guy Provencher; ainsi que l'Union des producteurs agricoles, que nous allons recevoir ce matin. Et, cet après-midi, nous aurons aussi d'anciens commissaires de la CPTAQ, Mme Cloutier et M. Cartier; et nous aurons aussi M. Baril et M. St-Pierre; et nous aurons évidemment la Commission de la protection du territoire agricole; et M. Louis Sylvestre, avocat, sur des questions agricoles.

Alors, pour commencer, alors, bonjour, M. Lebeau, bonjour, M. Provencher. Alors, nous avons une période de 30 minutes chacun, dont 10 minutes, une présentation... Je pense que c'est avec M. Lebeau qu'on commence? M. Lebeau est à droite ou à gauche?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Léger) : À gauche, O.K. Bonjour. Alors, nous commençons avec vous, une dizaine de minutes puis, après, un échange de 20 minutes avec les députés. Et la même chose qu'on fera, sans pause, on continuera avec vous, M. Provencher, par la suite. Alors, bien à vous, M. Lebeau, et vous avez 10 minutes.

MM. Guy Lebeau et Jean-Guy Provencher

M. Lebeau (Guy) : Alors, bonjour, Mme la Présidente. Bonjour, Mme la députée. Bonjour, MM. les députés. Tout d'abord, je vous dresse un portrait de mon expérience dans le zonage agricole. J'ai été conseiller en aménagement du territoire à l'Union des producteurs agricoles de la région de Québec durant quatre ans, au début de ma carrière. À 28 ans, j'ai été nommé commissaire à la CPTAQ. J'y ai été commissaire 23 ans. Mon premier travail, ça a été de participer à la révision des zones agricoles, donc de parcourir le Québec pour redélimiter les périmètres urbains partout à travers le Québec. J'ai, par la suite, été assigné à la tâche normale d'un commissaire, là, c'est-à-dire d'entendre des causes et de rendre des décisions, mais il y a eu une interruption pendant une année et demie où j'ai été directeur des services techniques par intérim pour la région de Québec.

Alors, j'ai aussi été assigné à la négociation des décisions en vertu de l'article 59 de la loi. J'ai participé à pratiquement toutes les décisions qui ont été rendues sur ces demandes, là, au cours des 10 dernières années. Toutes les demandes auxquelles j'ai participé se sont soldées par des ententes entre la commission, la MRC, municipalités et l'UPA.

Depuis deux ans, je suis consultant en zonage agricole.

En 2016, ça fera donc 30 ans que, dans mon travail de tous les jours, je suis en lien avec la protection du territoire et des activités agricoles. On peut dire que j'ai vu la protection du territoire agricole de tous les angles.

Tout d'abord, pour moi, la mission de la commission demeure une nécessité pour la collectivité québécoise : garantir pour les générations futures un territoire propice au maintien et au développement de l'agriculture et des activités agricoles. Ensuite, je suis convaincu de la nécessité de maintenir un organisme de niveau provincial qui se porte garant de l'accomplissement de cette mission à long terme.

Si la mission de la commission est toujours aussi importante en 2015 et qu'il en est de même pour le besoin de maintenir un organisme provincial pour s'assurer du respect de la mission, je veux toutefois attirer votre attention sur certains problèmes qui minent la crédibilité de la commission et qui mériteraient une modification législative pour faire évoluer la loi.

Le premier point sur lequel je veux attirer votre attention, c'est la cohérence des décisions. À mon avis, le niveau d'incohérence actuel des décisions de la CPTAQ est assez élevé. Cela se compare à l'incohérence qui était observée à la fin des années 80 et qui a conduit aux modifications législatives de 1989. À ce moment, les critères de décision ont été modifiés et précisés substantiellement, mais, néanmoins, les situations d'incohérence refont surface. Il ne faut pas jeter le blâme sur les employés de la commission ni sur les commissaires devant ce constat. Comme vous l'a mentionné M. Bernard Ouimet dans sa présentation, l'incohérence fait partie du système et découle du traitement des demandes une par une. Cela fait en sorte que la commission est très imprévisible. J'ai plusieurs exemples de situations et de cas que je pourrai vous présenter, dans la période de questions, pour illustrer mon propos si vous le souhaitez.

Le deuxième problème sur lequel je souhaite attirer votre attention est le délai de traitement d'une demande à la CPTAQ. Nul besoin de vous dire que les délais de traitement de demandes d'autorisation ont augmenté considérablement au cours des dernières années. En fait, les délais de traitement des dossiers sont deux fois plus longs qu'il y a 10 ans, même si le nombre de demandes étudiées par la commission a diminué du tiers. Le pire, c'est que la pression à la hausse sur les délais de traitement va demeurer tant et aussi longtemps que la commission continuera à étudier des demandes une par une pour un volume aussi grand. Il ne faut donc pas croire que ce sont les commissaires ou les employés de la commission qui se traînent les pieds. L'accumulation de dossiers étudiés un par un alourdit les recherches avant la décision, alourdit aussi la prise de décision et la motivation, qui doit prendre en compte plus de précédents d'une année à l'autre.

Les problèmes sur les délais mettent encore plus de pression sur les incohérences possibles, parce que la commission souhaite prendre ses décisions un peu plus rapidement. On a vu, au cours des trois ou quatre dernières années, que des commissaires siègent seuls pour entendre les causes en rencontres publiques. Cette mesure avait pour principal objectif de pallier aux problèmes de délais qui augmentaient. Or, le fait de siéger seul augmente les risques d'incohérence entre les commissaires.

L'article 59 de la loi. Pour être plus cohérente, la CPTAQ doit traiter un moins grand volume de dossiers. Le moyen le plus approprié pour réduire le volume de dossiers traités pour pallier à l'incohérence et à l'augmentation des délais est d'amender l'article 59 de la loi pour l'élargir aux cas de morcellements de terres agricoles et à tous les autres objets pour lesquels une autorisation de la CPTAQ est nécessaire.

Actuellement, la manière de décider des demandes de la CPTAQ n'a pas de perspective à long terme et de vue d'ensemble. L'article 59 permet d'inscrire la manière de décider dans une approche de zonage. Les plans de zonage existent pour donner des lignes de conduite aux promoteurs et aux résidents et pour garantir l'équité entre les citoyens d'une même zone.

L'article 59 a permis de rendre le processus décisionnel transparent et équitable, d'impliquer les acteurs du milieu et de tenir compte des particularités régionales. Cela a permis de diminuer de moitié le nombre de demandes que reçoit la commission pour le résidentiel depuis 10 ans. Puisque j'ai moi-même participé à la très grande majorité des décisions qui ont été rendues en vertu de l'article 59 de la loi, je pourrai certainement élaborer davantage sur ce point pendant la période de questions si vous le souhaitez.

Les modifications suggérées dans l'attente de la négociation de l'article 59 de la loi. Une modification à l'article 59 de la loi pourrait réduire le nombre de demandes reçues à la commission sur une période de cinq à 10 ans, et cela devrait permettre de dégager du temps pour ses professionnels, notamment pour travailler sur divers éléments d'intérêt pour la protection du territoire agricole sur lesquels je reviendrai plus tard.

Mais, dans l'intervalle, je vous suggère des petits ajustements à la loi qui permettraient de régler certains irritants. Le premier : établir à deux le nombre de commissaires pour entendre une cause. Cela permettrait de réduire le niveau d'incohérence, mais sans toutefois l'enrayer tant que la commission traite un aussi grand volume de demandes. Fixer par la loi le délai maximal pour le traitement d'un dossier à la commission, comme l'a suggéré M. Gilles Thibault dans sa présentation lors de la première journée des auditions. Et puis préciser l'article 40 de la loi, comme l'ont suggéré Me Éthier et comme va le suggérer Me Provencher dans sa présentation. Le privilège prévu à l'article 40 de la loi devrait permettre à la commission de faciliter le développement de petites entreprises, ce qui n'est pas le cas actuellement. Aussi, cet article prête à interprétation et crée de l'injustice actuellement dans son application.

Vous remarquerez que je ne suggère aucune modification aux critères décisionnels puisque, de toute façon, ce n'est pas le libellé des critères qui ramènerait la cohérence à la commission à long terme ni, selon moi, de meilleurs résultats pour la protection du territoire et des activités agricoles.

• (10 h 10) •

J'ai compris par les questions posées par les membres de votre commission qu'une avenue étudiée est à l'effet que les MRC puissent inclure certaines parties de terrains en zone agricole en contrepartie d'exclusions de certaines autres, mieux situées par rapport aux enjeux de développement urbain.

Même si la CPTAQ mentionne souvent qu'elle ne souhaite pas faire d'échange inclusion, exclusion dans ses décisions lorsque de tels échanges lui sont proposés, souvent elle accepte de le faire, même si les terrains inclus à la zone agricole, en contrepartie de l'exclusion, ne sont d'aucun intérêt pour l'agriculture à long terme. J'ai quelques exemples de cette nature que... Je pourrai vous en donner, si vous souhaitez, par la suite.

En rapport avec cette problématique, je réponds que la mission de la CPTAQ n'est pas de maintenir la zone agricole à 6,3 millions d'hectares. Les décisions qui incluent les superficies équivalentes des exclusions donnent cette impression lorsqu'il est question de terrains sans valeur pour l'agriculture. Cette impression est renforcée par le rapport annuel de la commission qui ne livre que cette information par rapport au contenu de la zone agricole.

Selon moi, il faudrait donc que la CPTAQ soit tenue par la loi de développer des indicateurs sur l'état de la zone agricole et d'en faire rapport : Quelle quantité de sols cultivables retrouve-t-on en zone agricole? Quelle quantité de sols ont été sacrifiés pour des fins autres que l'agriculture à chaque année? Qu'est-ce qui nous reste pour les générations futures? Les érablières occupent quelle superficie? Et j'en passe parce que je vois que mon temps raccourcit.

Un dernier point sur lequel je veux m'exprimer, c'est l'échange de l'utilisation autre qu'agricole d'une parcelle de terre cultivée contre la remise en culture de superficie équivalente. J'ai vu ces propositions-là qui ont été discutées dans ce que vous avez posé comme questions. Ce que j'ai à dire sur cet aspect-là, c'est : Tant qu'il y aura des terres de qualité à remettre en culture, cette avenue peut être intéressante. Mais, un jour, il n'y aura plus de sols de qualité pour compenser la perte d'une autre parcelle.

L'idée de compenser les parcelles perdues par la mise en valeur de certaines autres parcelles devrait donc s'inscrire dans un plus vaste objectif de conserver un seuil de superficies cultivables pour les générations futures. Quelle quantité de sols cultivables souhaitons-nous conserver pour les générations futures? Voilà une question essentielle à laquelle nous devrions nous attaquer comme société.

J'imagine que c'est le chiffre que vous allez me montrer maintenant? Alors, je suis disponible pour vos questions.

La Présidente (Mme Léger) : Alors, nous avons un temps de 10 minutes pour les députés ministériels; six minutes, l'opposition officielle; deuxième groupe d'opposition, quatre minutes. Donc, évidemment, ça va vous demander des réponses le plus précises et concises possible pour faire un échange. Et vous me l'indiquez, les députés, si vous voulez reprendre la parole, à chaque fois, pour m'assurer que je fasse bien le lien. Alors, M. le député de Beauce-Sud, à vous la parole.

M. Dutil : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à la commission. Je pense que l'étude qu'on fait est très importante. Il y a un aspect, dans votre argumentation, que vous avez compris, tout à l'heure, sur les échanges, que vous n'avez pas évoqué, c'est les zones qui sont en diminution de population. On a à peu près, là... C'est un chiffre qui est peu connu, ça, mais on a à peu près 600 municipalités qui perdent de la population et où la pression sur le monde agricole est vraiment en diminution. Et c'est là que je pense que les échanges seraient le moins dommageables puisque les terres se perdent en friche, on augmente la friche et on augmente le reboisement. Et c'est là que ce serait plus important pour les petites municipalités de ne pas attendre deux ans pour agrandir leur petite industrie dans leur local parce que c'est leur seule source de création d'emplois actuellement, là, qui est vraiment valable.

Alors, vous n'avez pas fait cette distinction-là. Est-ce que vous êtes au courant de cette difficulté particulière des régions qui sont en dépopulation? Je les appelle comme ça. Est-ce que vous pensez que ce serait une bonne idée de faire une règle un peu différente dans leur cas?

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau.

M. Lebeau (Guy) : Oui. Je serais d'accord, très certainement, pour qu'il y ait des règles différentes qui puissent s'appliquer dans les régions périphériques par rapport aux régions centrales parce que... ou périurbaines, je dirais, plutôt que périphériques, là. Dans le périurbain, il se perd de grandes superficies de terre à toutes les années, alors que, dans les régions périphériques...

Je vais vous donner un petit exemple bien simple. Dans le cadre du PMAD, Plan métropolitain d'aménagement et développement, de la région de Montréal, il se gruge environ 1 000 hectares de terre pour du résidentiel à toutes les années. C'est 22 000 logements, quelque chose de même, qui se construit dans la région... dans la CMM à toutes les années, c'est 1 000 hectares de terre qui se perd à cet endroit-là. Si on fait le bilan de tout ce qui se perd dans le périurbain partout à travers le Québec, si on prend les régions métropolitaines de recensement, les agglomérations métropolitaines de recensement, donc, Québec, Sherbrooke, toutes les grandes villes et les villes d'un petit peu moins de grande envergure, comme Saint-Georges, qui est dans votre coin, si je ne me trompe pas, il se perd environ 2 000 hectares de terre qui est convertie à des fins urbaines. Actuellement, ces espaces-là sont majoritairement situés à l'extérieur de la zone agricole, mais c'est la commission qui l'a donné.

Par exemple, si on revient sur le territoire de la CMM, il reste des espaces pour 15 ans... 10 à 15 ans, en zone blanche. La question, c'est : Dans 15 ans, qu'est-ce qu'on va faire? Est-ce qu'on met la clé dans la porte du développement de la région de Montréal? Les espaces qui se perdent dans les régions centrales, dans ces régions périurbaines là, à toutes les années, pourraient permettre aux... environ 800 autres municipalités à travers le Québec. Il y a à peu près 150 municipalités qui sont concernées par les grands espaces, développement urbain. Les 2 000 hectares qui se perdent à toutes les années dans ces grandes villes là pourraient permettre à tous les petits villages, partout à travers le Québec, de satisfaire leurs besoins pour une vingtaine d'années, sans problème.

C'est sûr que je vous explique ça comme ça, ici, ça paraît simple. Lorsque vous êtes décideur à la commission, vous avez à décider un bon matin une demande. La première demande que vous étudiez est au Lac-Saint-Jean, la deuxième est en Abitibi, les trois suivantes sont dans la région de Beauce-Appalaches, parce qu'il y en a beaucoup, de demandes, dans ce secteur-là, comme sur la Rive-Sud. C'est difficile de faire le lien : Où est-ce que je suis rendu là-dedans? Comment est-ce qu'on devrait l'appliquer dans ce cas-là précis? Ce qui fait que de le faire par des demandes individuelles, une à une, le risque d'incohérence est très, très grand. De le faire dans une approche comme on a par l'article 59 de la loi permet une cohérence, on l'a vu par le 59...

La Présidente (Mme Léger) : Conclusion.

M. Lebeau (Guy) : ...regardez, on sait où ça commence, on sait où ça finit.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député.

M. Dutil : Vous avez soulevé un point bien important. Est-ce que la croissance de la population au Québec peut être infinie? Hein, si on veut protéger le territoire agricole, la réponse est évidemment non. Tu sais, quand on parle de développement, on parle d'augmenter la population. Quand on parle de protéger le territoire agricole, on parle d'avoir une certaine quantité d'hectares per capita. Plus la population augmente actuellement, plus... Même si on ne perd pas un hectare de terre agricole, on perd dans la moyenne, puisque la population augmente, on est d'accord? Donc, il y a une limite, dans les pays nordiques, à accroître la population, premièrement.

Deuxièmement, comment on fait pour envoyer des gens qui veulent aller vivre en ville, les immigrants en particulier, en campagne, alors qu'il y a des espaces libres, qu'il y a de l'ouvrage? Actuellement, là, on pourrait avoir 500 emplois, dans Chaudière-Appalaches puis dans la Beauce, disponibles, tout de suite, demain matin. On n'est pas capables de trouver preneur, on ne trouve pas preneur, avec un taux de chômage de 7,9 % au Québec, c'est assez incroyable. Avez-vous une idée pour les envoyer en région?

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau.

M. Lebeau (Guy) : Non, mais j'aime bien votre question, parce que ça démontre que la problématique protection du territoire agricole déborde largement la simple protection de la qualité du sol. Sauf que, si — c'est la suggestion que je vous fais — dans notre perspective, on dit : Nous, là, il y a une quantité de sols... Actuellement, il y a 6,3 millions d'hectares en zone agricole. S'il y a une quantité de sols, est-ce que c'est... il y a 6,3 millions d'hectares en zone agricole, il y en a 52 %, de la zone agricole, qui est cultivée, mais ce n'est pas 100 % de la zone agricole qui est composée de terres cultivables. Mais ce qui veut dire, sur le 6,3 millions d'hectares, est-ce que c'est 4 millions d'hectares que l'on devrait conserver pour les générations futures? Si on arrive à situer un chiffre, une perspective, bien là, tout le développement va s'organiser d'une manière différente, ce qui fait que, quand quelqu'un va prendre le train à Montréal pour se rendre en banlieue, il va prendre le train pour se rendre en banlieue sur une terre qui n'a pas de perspective agricole. Ça, là, c'est de changer complètement notre manière de voir le zonage agricole à très long terme.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, Mme la Présidente. C'est intéressant, ce que vous dites, M. Lebeau. J'aimerais vous entendre un peu plus, parce que les particularités régionales, comme vous avez mentionné, en Abitibi puis tout près de la frontière américaine en Estrie, le potentiel agricole n'est pas très bon. Je vous donne l'exemple dans mon comté; en 30 ans, on a perdu 24 %.

Mais ce que j'aimerais vous entendre, c'est la protection de la vallée du Saint-Laurent, en comparaison de protéger les terres agricoles, potentiellement, de l'Abitibi ou de certains secteurs où la qualité des terres n'est pas très bonne. Est-ce que vous avez un avis là-dessus, puisque vous parlez de protéger un volume minimal? Mais, dans la vallée puis dans les autres régions, comment vous voyez ça?

M. Lebeau (Guy) : C'est sûr que, dans certaines régions, les sols de qualité sont plus rares. Mais ce n'est pas parce qu'ils sont plus rares qu'ils ont moins d'importance dans le bilan. Je prends un exemple, par exemple, une municipalité comme celle de Lambton, que vous devez connaître, j'imagine, assez bien.

M. Bolduc : Bien oui.

• (10 h 20) •

M. Lebeau (Guy) : O.K., il y a des portions du territoire qui sont composées de très, très, très bons sols cultivables puis, dans le fond, tu sais, qui sont aussi bons que ce qu'on va retrouver dans la plaine du Saint-Laurent. Ce n'est pas à cet endroit-là que devrait se faire... Dans le fond, ce que vous m'exprimez là, ce n'est pas à cet endroit-là que vous souhaitez que ça soit dézoné, c'est bien certain. Ce qui fait qu'à toutes les fois qu'on parle de telle protection du territoire agricole il faut vraiment nuancer parce qu'il y a des portions de territoire qu'il faut préserver avec la même intensité que si on se retrouvait dans la plaine du Saint-Laurent, mais il y a d'autres portions de territoire où il faut montrer beaucoup plus d'ouverture. Puis c'est ce qu'on a fait dans le traitement de l'article 59 de la loi.

On a autorisé, à travers le Québec, 32 000 résidences en zone agricole avec l'accord de l'UPA, l'accord des municipalités, l'accord des MRC, dans une approche d'ensemble. On savait où ça finissait... On savait où ça commençait, on savait où ça finissait. On a tenu peut-être 200 réunions avec les élus municipaux, des gens autour de la table, une cinquantaine de personnes. Il y a des MRC, c'était une cinquantaine de personnes autour de la table, puis elles ont convenu ensemble où est-ce qu'il était logique d'implanter des résidences et où il n'était pas logique de le faire.

Pourquoi ne pas étendre ça aux usages commerciaux? Pourquoi ne pas étendre ça aux usages institutionnels? Pourquoi ne pas utiliser ce qui a bien fonctionné pour aller de l'avant? Puis ça... Oui?

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Ce qui a moins... Êtes-vous en train de nous dire qu'il faudrait faire une différence entre les zones vertes et les zones agricoles? Parce que, dans les zones vertes, il y a beaucoup de forêts puis il y a beaucoup de territoire, comme vous dites, qui est impropre à l'agriculture, point final. Mais la CPTAQ, en tout cas, mon impression, c'est qu'ils ne font pas de différence entre les deux.

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau.

M. Lebeau (Guy) : Je ne serais pas capable de soutenir une affirmation aussi profonde que celle que vous venez de faire : que la CPTAQ ne le fait jamais. Moi, j'ai l'impression que, dans mes décisions, je le faisais. Je connaissais très bien le territoire. Je l'ai visité, je l'ai arpenté, j'ai eu la chance de le visiter deux fois dans deux opérations. Donc, quand je rendais une décision du côté est du village de Lambton, je savais très bien que ce n'était pas la même chose que quand on se dirigeait du côté sud ou du côté est, bien, c'est parce que je l'avais visité puis je savais qu'est-ce qu'il en était. Mais, sur les bancs, à la commission, les commissaires sont tous différents, donc la personne, est-ce qu'elle connaît très bien votre territoire pour savoir comment le faire? Regardez, je peux vous garantir que non. C'est pour ça qu'avec une approche d'ensemble, par l'article 59, on arrivait à vraiment coller au terrain, coller à la réalité du milieu.

M. Bolduc : O.K.

La Présidente (Mme Léger) : Merci. C'est tout le temps que nous avons du côté ministériel, je regrette. Alors, nous passons au niveau de l'opposition officielle, pour un temps de six minutes. Alors, c'est assez rapide, ça.

M. Villeneuve : O.K. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Léger) : Vous me l'indiquez, si vous voulez reprendre la parole, pour que...

M. Villeneuve : Oui. Bonjour. Question rapide : Est-ce que vous considérez que les connaissances de la zone agricole au Québec sont, à l'heure où on se parle, suffisantes?

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau.

M. Lebeau (Guy) : Je croirais que les connaissances sont suffisantes, mais elles ne sont pas regroupées au même endroit. Souvent, c'est les MRC qui les ont, qui ont une partie, une bonne partie des connaissances. Et puis elles ne sont pas regroupées au même endroit. Et puis on aurait avantage à tenir... à mieux documenter la zone agricole à partir des connaissances qui existent. Notamment, les plans de développement de la zone agricole qui ont été faits récemment ont permis de bien documenter, de caractériser la zone agricole. Ça avait été fait... loi sur l'aménagement... Dans les orientations du gouvernement en matière d'aménagement, on a exigé, par les deuxièmes schémas d'aménagement, qu'il y ait une meilleure caractérisation de la zone agricole. Quand on a fait les articles 59 de la loi, on a encore mieux caractérisé la zone agricole.

Mais il y a encore du travail à faire, parce que, dans plusieurs MRC, ce qu'on retrouve dans la zone agricole, c'est une affectation agricole dynamique et une autre, agroforestière. Mais, moi, pour la connaître, la zone agricole, on sait qu'il y a plus que deux caractéristiques dans ce territoire-là. Il y a de l'agroforestier qui va être dynamique, il y a de l'agroforestier qui va être moins dynamique. Vraiment, on aurait avantage à centraliser les informations et à mieux les utiliser.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier, porte-parole.

M. Villeneuve : Oui. Pensez-vous que le modèle maison-cabanon-piscine-clôture doit être revu au Québec pour justement s'assurer de se développer, de densifier davantage, que ce soit au niveau énergétique, au niveau du transport, que ce soit aussi au niveau de la zone agricole?

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau.

M. Lebeau (Guy) : Ah! c'est sûr que, lorsque vous êtes protecteur du territoire agricole puis lorsque vous tenez à la zone agricole, la densification, c'est très important, mais ça a ses limites. Lorsque je disais tout à l'heure, dans la CMM, en se basant sur le plan métropolitain d'aménagement, qui vient tout juste d'être adopté, là... Ça fait deux ans qu'il a été adopté. Dans 15 ans, il n'y en aura plus, d'espace. Puis pourtant les densités ont été augmentées beaucoup, puis il y a des gens qui criaient... Il y a des maires, des élus et puis les gens du domaine de l'aménagement qui disaient : C'est trop dense, ce que vous nous demandez. Si on densifie deux fois plus, on va atteindre la limite, on va devoir empiéter sur la zone agricole dans 20 ans plutôt que dans 10 ans, là. Mais ce qui fait que l'idéal, ce serait de se donner une perspective, puis la perspective, c'est par la quantité. Qu'est-ce qu'on veut conserver pour les générations futures? C'est la question à poser, je vais vous dire. C'est incontournable pour la protection du territoire agricole si on veut lui donner une perspective.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Donc, ce que je comprends de ce que vous me dites, c'est, dans le fond, faisons un contour, faisons un contour de ce qu'on a besoin de préserver pour l'avenir en termes de terres agricoles. Ce qu'on peut laisser aller, identifions-le, voyons voir comment on procède, mais ne jamais perdre aussi en tête... ne jamais perdre de vue le fait que, je le disais l'autre jour, il se perd 30 millions, sur la planète, d'hectares de terres par année, soit par érosion ou appauvrissement des sols et la population mondiale croît et augmente. Le Québec est un endroit qui est privilégié, d'une certaine façon, parce qu'on a beaucoup d'eau, d'eau de qualité et on a des belles terres, alors, le jour où on réussit à définir le nombre d'hectares et qu'on réussit à faire le dessin, il va falloir, à ce moment-là, devenir totalement intransigeants pour la suite des choses. C'est ce que je comprends?

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau.

M. Lebeau (Guy) : Des espaces incultes où pourrait se réaliser le développement, il y en a. Il y en a. Ici, par exemple, dans la région de Québec, lorsqu'on se pousse vers le nord, là... En fait, lorsqu'on va vers le sud, l'est et l'ouest, on retrouve de belles terres agricoles. Lorsqu'on va vers le nord, il y en a beaucoup moins, ce qui fait que, par exemple, pour la région de Québec, c'est un problème qui est facilement contournable. Pour la région de Montréal, c'est plus difficile. C'est sûr que, là, tout le tour du périmètre urbain, ce sont de belles terres. Est-ce qu'on veut se réorganiser comme société dans 15, 20 ans?

Et, regardez, c'est simple, actuellement, les gens... On développe les trains de banlieue, là, pour aller du côté de Mascouche notamment, là. On a vu réaliser, là, un train de banlieue. Si c'est pour aller sur des belles terres à Mascouche, ce n'est pas une bonne idée, là. Il faut regarder plus loin que ça. Est-ce qu'on serait mieux de se diriger vers le nord à Montréal aussi ou vers des endroits... Il y a des portions de territoire qui sont moins utilisables pour des fins agricoles.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : J'ai le droit à une dernière question. Sur l'article 59 de la loi qui présentement comprend une zone... le résidentiel, les maisons en zone agricole, vous dites : On devrait y ajouter l'aspect institutionnel, commercial. Est-ce que vous mettriez un certain mécanisme? Parce que là on sait que, pour le 59, il faut adopter le deuxième schéma d'aménagement, je pense, et après ça pouvoir se prévaloir du 59. Est-ce que vous mettriez, et quel serait-il si jamais c'est le cas, un mécanisme aussi pour s'assurer que finalement les MRC... on parle de connaissances tantôt, là, mais qu'elles puissent faire leurs devoirs, comme on dit, et bien les faire? Quel mécanisme vous mettriez en place si jamais ça allait de l'avant à ce niveau-là, 59 avec institutionnel et commercial?

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau.

M. Lebeau (Guy) : Je ne suis pas dans la mécanique proprement dite, là, mais il y aurait certainement des étapes... Il devrait y avoir des étapes. Moi, je pense que, lorsque ça a été introduit à la loi en 1997 et puis que ça a été ajusté en 2001, le résidentiel seulement était ciblé. Dans le fond, c'était comme une première marche à monter parce que c'est comme la base, puis en plus, c'était dans le domaine où la commission était la plus incohérente. Il devrait y avoir d'autres marches à monter, effectivement, avant de pouvoir soumettre la demande en vertu de l'article 59. Par contre, le processus, à mon avis, devrait être plus souple qu'il ne l'est actuellement. Actuellement, c'est très lourd, on rend une décision en vertu de l'article 59, ça peut prendre deux ans avant que ça prenne effet. C'est pour ça que les premières décisions qui ont été rendues de l'article 59, ça fait déjà 10 ans, mais, dans le fond, l'effet positif sur le nombre de demandes est apparu dans les cinq dernières années, puis ça a pris comme cinq ans, c'est très long.

La Présidente (Mme Léger) : Et c'est tout le temps que nous avons.

M. Lebeau (Guy) : Oui.

La Présidente (Mme Léger) : Ça passe vite, hein?

M. Villeneuve : Oui, oui, oui.

La Présidente (Mme Léger) : Donc, je vais au deuxième groupe d'opposition, à Mme la députée de Mirabel, la porte-parole.

Mme D'Amours : Merci beaucoup. Bonjour, monsieur. Vous avez parlé tout à l'heure que l'incohérence des décisions était assez élevée. Vous avez aussi mentionné qu'il ne fallait pas voir à ce que... bon, que le blâme soit sur les commissaires ou, en tout cas, sur la CPTAQ. Mais qui est imputable de ça s'il ne faut pas regarder de ce côté-là?

M. Lebeau (Guy) : C'est la manière de décider et le volume. Je m'excuse, je n'ai pas attendu mon droit de parole...

La Présidente (Mme Léger) : C'est beau, allez-y.

• (10 h 30) •

M. Lebeau (Guy) : La manière de décider et le volume. Dans ma carrière, moi, j'ai décidé d'environ 8 000 demandes à la CPTAQ, mais un commissaire, à tous les jours, lui, par année, il va rendre lui-même 200 décisions, il va participer à 200 autres, ce qui fait qu'à la fin de l'année, s'il veut être cohérent avec lui-même seulement, il doit se souvenir de 400 décisions qu'il a rendues. S'il reste là 10 ans, il doit se souvenir de la première autant que de la 3 999e lorsqu'il rend sa décision. Il y a un système qui est mis en place pour l'aider, mais d'être cohérent avec soi-même, c'est difficile. Là, d'être cohérent avec mon collègue, regardez, ce n'est comme pas évident. Et puis, sur chacun des postes de commissaire... Moi, sur le poste sur lequel j'ai été, il y a eu trois commissaires. Regardez, je suis convaincu qu'entre la première personne qui était sur le poste et moi la cohérence n'était pas parfaite et, entre la personne qui a été nommée sur mon poste et moi, la cohérence n'est pas parfaite, parce que j'en lis, des décisions de la personne qui m'a remplacé puis, dans certains cas, moi, je n'aurais pas rendu la même, ce qui fait que ça fait partie tout simplement du système. Le cas par cas n'a pas de perspective à long terme et conduit à l'incohérence, c'est évident.

La Présidente (Mme Léger) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Merci. On a eu quelqu'un qui nous a mentionné... bien, si vous l'avez suivi, qui nous parlait qu'au tout début il y avait cinq commissaires, puis maintenant on sait le nombre qu'on a. Il y avait plus de demandes à l'époque; là, il y en a moins. C'est plus long, comme délais. Alors, vous, depuis 30 ans en 2016, là, donc 28 ans, est-ce que vous avez une réponse à ça, le pourquoi de ça?

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau.

M. Lebeau (Guy) : Au début, la commission traitait 8 000 demandes par année, ce qui fait que, lorsque tu en rends une, tu n'as pas à vérifier 7 999 en arrière. Actuellement, la commission a rendu comme 150 000 décisions. Lorsqu'elle rend une décision, là, elle doit s'assurer d'être cohérente par rapport à toutes celles qui se trouvent derrière. C'est plus long de faire de la recherche, c'est plus long à étudier comme il faut, c'est plus long de préparer la décision et de bien la motiver.

La Présidente (Mme Léger) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Merci. Alors, j'essaie de comprendre, là. Tantôt, vous parliez de la mission puis de la vision, est-ce que vous pensez que, depuis que la loi existe... La CPTAQ, elle a été vue deux fois depuis son existence. Je trouve, à mon avis, que ce n'est pas assez. Est-ce qu'en 2015 il n'y ait pas lieu d'actualiser tout ce qu'on est en train de parler? Parce que vous parlez de mission puis de vision, mais on n'avait peut-être pas les mêmes problématiques à l'époque que la CPTAQ est arrivée, quand elle a été fondée, à maintenant, aujourd'hui.

La Présidente (Mme Léger) : M. Lebeau, 30 secondes.

M. Lebeau (Guy) : La problématique était bien différente, parce qu'à ce moment-là il y avait peu de règlements de zonage qui étaient applicables sur le territoire, puis là ça a évolué beaucoup, assez que, par l'article 59 de la loi, là, puis tous les schémas d'aménagement qui ont été adoptés, la deuxième génération de schémas... En fait, la commission n'est plus seule à protéger le territoire agricole, contrairement à ce que c'était en 1978. C'est pour ça qu'il faut qu'elle compte justement... L'élargissement de l'article 59 permettrait à la commission de compter sur les apports du milieu pour l'aider à protéger le territoire agricole sans jamais remettre en cause son imputabilité au niveau du territoire. C'est pour ça... Moi, ce que je souhaiterais, c'est que la commission diminue. Cinq membres, c'est une bonne idée, ça, je n'ai rien contre ça, moi, mais d'agir, de travailler différemment, de composer avec les gens du milieu, d'être plus présents sur le territoire, de mieux percevoir les particularités régionales parce que tu composes avec les gens, de tenir compte des plans de développement de la zone agricole qui sont adoptés. Vraiment, l'idée d'une mise à jour de la loi...

La Présidente (Mme Léger) : Merci beaucoup. Merci, M. Lebeau. C'est tout le temps que nous avions. Vous avez un document, ça serait peut-être intéressant que vous puissiez le déposer au secrétariat. Est-ce que c'est possible?

M. Lebeau (Guy) : La présentation que j'ai faite ce matin va être déposée avant 6 heures ce soir.

La Présidente (Mme Léger) : Bon, merci beaucoup, M. Lebeau. Alors, nous passons maintenant à M. Provencher. Alors, vous avez 10 minutes, M. Provencher, vous aussi, et un échange comme vous avez vu un peu précédemment, ça va être dans la même procédure. À vous la parole.

M. Provencher (Jean-Guy) : Alors, je vous remercie, Mme la Présidente. Mme la députée, MM. les députés.

Alors, moi, je ne voudrais pas revenir sur qui saisissent... par rapport à M. Gilles Thibault, Gervais Simard... c'est-à-dire... Gervais Simard, oui, puis mon collègue Guy Lebeau. Disons que je vais y aller avec des points très précis.

Tout d'abord, pour me présenter, j'ai pratiqué le droit comme avocat dans la région des Bois-Francs, à Victoriaville, Plessisville, pendant 17 ans, de 1972 à 1989. En 1989, j'ai été nommé à la Commission de protection du territoire agricole et, en 1995, j'ai été transféré au Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole qui est devenu, en 1998, le Tribunal administratif du Québec, et alors j'ai siégé pendant quelques mois, jusqu'à la fin de l'année, alors que mon mandat n'a pas été renouvelé.

Depuis 1999, je pratique pratiquement exclusivement dans le domaine du zonage agricole devant la Commission de protection du territoire agricole. Et, comme je suis avocat, évidemment, je vais régulièrement devant le Tribunal administratif du Québec. Et c'est la raison pour laquelle j'en ai fait l'objet de mon premier sujet. Parce que je vois que, devant le Tribunal administratif du Québec actuellement, on a un sérieux problème. Le problème résulte surtout du fait qu'à la suite de la décision de la Cour d'appel qui a été rendue le 14 décembre 2009, c'est qu'on a consacré, si vous voulez, la primauté, l'exclusivité en matière de protection du territoire agricole à la CPTAQ. On a pratiquement enlevé tous les pouvoirs du Tribunal administratif du Québec pour réviser les décisions de la commission, parce qu'il faut démontrer une erreur de droit et une erreur de fait déterminante sur la décision qui a été rendue. Contrairement à ce que c'était avant, lorsqu'on se présentait devant le Tribunal administratif, c'est qu'on pouvait faire une preuve nouvelle, si on veut. On faisait entendre nos clients puis, même, on faisait appel à des experts pour compléter la preuve. Alors là, évidemment, la Cour d'appel a dit : Écoutez, le tribunal, il ne faut pas que ça soit un deuxième essai, il faut partir avec qu'est-ce qui s'est dit devant la Commission de protection du territoire agricole.

Alors, évidemment, lorsqu'on est mandataire avec de l'expérience, c'est évident que, quand on va devant la commission, lors d'une rencontre publique, à ce moment-là, on est capable de bonifier notre demande, si on a besoin d'un agronome, si on a besoin d'un expert, à ce moment-là, on le fait, mais ce n'est pas toujours le cas pour des gens qui vont... Parce qu'il y a tout de même beaucoup de personnes qui présentent elles-mêmes leur demande devant la commission. Ils pensent évidemment pour... Ils ne les rencontrent... Pour rencontrer des gens régulièrement, on se rend compte que ces gens-là, ils pensent que, pour aller devant la commission, il s'agit de remplir un formulaire, puis on dépose ça, puis ça va être facile. Mais on sait que ce n'est pas toujours le cas quand on est devant la commission.

Alors, à tout le moins devant le Tribunal administratif, il faudrait à tout le moins que les gens puissent au moins présenter... Au moins, le demandeur devrait à tout le moins être capable de présenter sa demande avec peut-être certains ajouts, là. On ne parle pas de recommencer à neuf, mais je pense que les personnes, les demandeurs devraient être capables, là, de bonifier quelque peu, sans aller dans l'extrême, leur demande pour permettre au Tribunal administratif d'avoir tous les éléments pour déterminer s'il y a une erreur de droit ou une erreur de fait déterminante, alors qu'actuellement le tribunal est tellement coincé avec la décision de la Cour d'appel du 14 décembre 2009, ce qu'elle... Alors, plus souvent, quand on arrive à la conclusion, bien c'est une question d'opinion. Alors, il n'y a pas d'erreur... bon, on confirme la demande de la commission.

• (10 h 40) •

Alors, je pense qu'au niveau du Tribunal administratif je comprends que ça regarde plus la modification de la Loi sur la justice administrative, mais il reste qu'il y aurait, je pense... On devrait avoir plus de souplesse devant le tribunal sans nécessairement faire une preuve de novo. Parce qu'actuellement le Tribunal administratif, à mon point de vue, on le considère pratiquement comme une Cour d'appel, alors qu'on y va sur dossier, alors qu'on ne peut compléter absolument rien. Même les tribunaux judiciaires sont plus souples, actuellement, que le Tribunal administratif. Il ne faut pas blâmer le tribunal, parce que le tribunal est coincé, comme que je dis, avec les normes qui ont été établies par la Cour d'appel de 2009. Et je pense que ce sont des modifications qui devraient être faites pour permettre au tribunal d'avoir plus de latitude pour rendre une décision.

Actuellement, le gros problème, comme je le dis dans le texte, c'est que, lorsqu'on va devant le tribunal, le Tribunal administratif, plus souvent qu'autrement, compte tenu que la Cour d'appel a convenu que c'était la commission qui avait toute la juridiction, toute la compétence, toute l'expertise pour rendre sa décision, alors, lorsqu'on constate une erreur de droit puis une erreur de fait déterminante, là le Tribunal administratif retourne le dossier à la commission. Alors, en retournant, très souvent, on a vu que le Tribunal administratif retourne le dossier en disant qu'on demande une préséance pour qu'on recommence à neuf, parce que, quand c'est retourné devant le Tribunal administratif, c'est qu'il y a une nouvelle orientation préliminaire qui doit être rendue par la commission, parce que, bien souvent, le tribunal va dire : Bien, écoutez, c'est parce que ce n'est pas assez motivé, vous êtes allés au-delà de ce qui était demandé ou bien vous n'avez pas précisé certaines choses. Alors là, on demande à la commission de bien vouloir reprendre, bonifier, si on veut, sa décision.

Alors, on arrive au résultat, très souvent, que, là, la Commission de protection du territoire agricole rend une nouvelle orientation préliminaire bien souvent après six mois, huit mois. J'ai déjà vu pratiquement un an. Même si le tribunal dit : On accorde une préséance, la commission se penche sur le dossier six mois ou huit mois après. Alors, c'est pour ça que moi, je vous dis que les délais sont... une nouvelle orientation préliminaire puis, si c'est refusé, bien là il y a une rencontre publique, puis, si c'est encore refusé, on retourne devant le TAQ, et là on se ramasse avec des délais de deux, trois ans avant d'avoir une décision. C'est complètement, à notre point de vue, inconcevable. Il devrait y avoir certainement...

Alors, rapidement, l'article 59, mon collègue en a parlé, je pense qu'il y aurait des ajustements à faire, parce qu'actuellement, lorsqu'on a établi les articles 59, les îlots déstructurés, on les a établis en fonction des îlots qui étaient à l'intérieur, si vous voulez, d'usages autres qu'agricoles et on n'a pas élargi, je pense, à mon point de vue, suffisamment l'îlot, parce que, bien souvent, on voit qu'il y a quelqu'un qui est dans un îlot, puis le voisin à côté, parce que lui, il déborde un peu, bien, lui, on lui a dit non. Alors, ça fait des conflits, si on veut, puis ce n'est pas tellement intéressant pour les gens qui ont à subir ça.

L'article 40, mon collègue Guy Lebeau en a parlé brièvement, moi, je pense que l'article 40, actuellement, ça s'applique uniquement aux gens qui ont la profession d'agriculteur, c'est-à-dire que la principale occupation, c'est l'agriculture. Je pense qu'on devrait... Moi, à mon point de vue, il y a tout de même des gens d'affaires, des professionnels, peu importent les professions, qui sont... Ils veulent faire de l'agriculture, mais ils ont des revenus à l'extérieur. Mais, tous ces gens-là, bien souvent, ils vont investir dans l'agriculture plus que bien des agriculteurs, mais on ne leur permet pas de construire une résidence en fonction de leur investissement, en fonction de l'agriculture qu'ils font. On ne parle pas de faire une agriculture très artisanale, mais, pour faire une agriculture importante, je pense que l'article 40 devrait permettre à ces gens-là de se classifier pour obtenir la construction d'une résidence.

L'article 31...

La Présidente (Mme Léger) : C'est tout le temps que nous avons, M. Provencher. Si vous avez peut-être d'autres éléments, d'essayer de les passer dans les questions que vous aurez peut-être.

M. Provencher (Jean-Guy) : D'accord.

La Présidente (Mme Léger) : Alors, je donne la parole au député de Dubuc.

M. Simard : Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, Mme la Présidente, je dois indiquer, par rapport à mes questions, qu'étant donné que M. Lebeau et M. Provencher ont déjà été commissaires ça se pourrait arriver que mes questions soient plus par rapport à la présentation de M. Lebeau. Mais j'imagine que M. Provencher doit avoir les réponses aussi, O.K.? Ça fait que je veux quand même vous dire qu'est-ce que je vais faire immédiatement.

D'abord, M. Provencher, dans l'allocution de M. Lebeau, parlait d'inventaire des terres chaque année. Est-ce qu'il y a des terres en friche? Est-ce que, bon, le nombre de terres cultivées est important, etc.? Comment, au moment où on se parle, peut-on juger d'une protection de terres qu'on ne connaît pas? J'aimerais vous entendre là-dessus.

La Présidente (Mme Léger) : Alors, M. Provencher.

M. Provencher (Jean-Guy) : Bien, c'est-à-dire que les terres qu'on ne connaît pas, c'est qu'évidemment, avec l'inventaire des terres, je pense qu'on est capables tout de même de savoir d'une façon possiblement précise c'est quoi, la qualité des sols, etc.

Mais, à titre d'exemple, on dit par contre que, lorsqu'on fait une demande, la commission dit : Oui, mais il y a de l'espace ailleurs. L'article 61.1 dit qu'il faut démontrer qu'il y a de l'espace disponible dans la zone urbaine avant d'aller ailleurs. Vous en avez... Bien, on a vu régulièrement des... on voit régulièrement des cas dans des municipalités où est-ce qu'on a sorti des grands périmètres supposément en dehors de la zone agricole, mais ce n'est pas constructible, c'est dans des endroits inaccessibles, puis là les gens : Oui, mais vous en avez de l'espace. Vous avez de l'espace, mais c'est de l'espace qui n'est pas accessible.

La Présidente (Mme Léger) : Alors, M. le député de Dubuc.

M. Simard : Merci, Mme la Présidente. Pour faire du chemin un petit peu sur ce que vient de dire M. Provencher, pour protéger un territoire, il faut s'assurer qu'il soit utilisé, parce que, s'il n'est pas utilisé jamais, ça donne quoi de le protéger? Ne croyez-vous pas que la CPTAQ pourrait nécessairement avoir un mandant nouveau qui pourrait peut-être proposer des solutions pour l'utilisation des terres agricoles, par rapport à vos connaissances, si on fait des inventaires? Parce que, moi, ce que je sais, là, au moment où on se parle, on a déjà posé cette question-là ici, en commission, là : Est-ce que vous connaissez les terres qui sont en friche? La CPTAQ, ils ne connaissent pas les terres qui sont en friche et puis... Mais sauf que, pour protéger des terres dans un village, dans une région, on les protège, mais on ne sait pas les terres qui sont en friche.

Donc, c'est la raison pour laquelle je vous dis dans ma deuxième question : Est-ce que la CPTAQ ne devrait pas faire des suggestions, étant donné qu'elle connaît bien ce dossier-là, de faire des suggestions soit par amendement de la loi, soit par assouplir les règlements, soit pour... Je ne le sais pas, là, mais est-ce que la CPTAQ devrait avoir le pouvoir tout au moins de faire des suggestions pour l'utilisation des terres agricoles? Si on veut les protéger, il faut quand même avoir une solution pour être en mesure de les utiliser.

J'aimerais d'abord que vous m'entreteniez là-dessus et, par la suite, j'ai une troisième question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Léger) : M. Provencher.

M. Provencher (Jean-Guy) : Écoutez, évidemment, c'est sûr que ce n'est peut-être pas une mauvaise suggestion d'avoir un inventaire des terres en friche. Est-ce que ça... Est-ce qu'effectivement la commission a le personnel pour faire ce travail-là? Est-ce qu'on devrait confier ça à un organisme quelconque?

Mais il reste qu'au niveau pratique c'est que, dans les décisions, la commission considère les terres en friche en disant : Bien, écoutez, on est là pour protéger les générations futures, et ce n'est pas parce qu'une terre est en friche que, nécessairement, elle a perdu son potentiel. On voit ça souvent, qu'il y a des promoteurs, bien souvent, dans les régions périphériques, et ils vont laisser aller leurs terres à l'abandon en disant : Bien, écoutez, ce n'est pas cultivé, c'est rendu en friche, en boisé; maintenant, on pourrait peut-être avoir une demande pour agrandir le périmètre urbain, là.

C'est une bonne idée de... Mais est-ce que ça va résoudre tous les problèmes, la question des terres en friche? Moi, je suis d'accord que ce n'est pas juste les terres en friche, mais, comme M. Lebeau l'a dit, il y a beaucoup de secteurs où est-ce que la commission pense... veut protéger, alors qu'en réalité il n'y a rien à protéger.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Dubuc.

M. Simard : Merci, Mme la Présidente. Ma dernière question, parce que, là, je vais laisser la parole à mes collègues, là : Est-ce que la CPTAQ... Parce que j'entendais parler tout à l'heure M. Lebeau, également vous, M. Provencher, vous parlez beaucoup de protection, mais ça sous-entend très souvent le grenier du Québec, là. C'est très clair qu'il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de pression sur la zone centrale du Québec, Montréal, ses environs, beaucoup de pression.

Maintenant, est-ce que la CPTAQ devrait avoir deux façons de protéger le territoire agricole? Une façon pour les régions, disons, périphériques et une autre façon pour ce qui est du grenier du Québec, le Centre-du-Québec, etc., là, qui, là, eux, ont beaucoup de pression sur les terres agricoles. Parce qu'en réalité quand vous dites : Protéger les générations futures, je vais vous dire une affaire, si vous venez dans nos villages puis dans les villages périphériques, là, vous ne protégez plus grand-chose, puis, si vous faites ça pour les générations futures, il n'y aura plus de génération, pas du tout, là. Ça fait que j'aimerais vous entendre là-dessus.

La Présidente (Mme Léger) : M. Provencher.

• (10 h 50) •

M. Provencher (Jean-Guy) : Alors, je suis d'accord avec vous. C'est qu'actuellement on parle... À l'article 12 de la loi, on dit qu'il faut tenir compte des disparités régionales, mais, dans les faits, on n'en tient pas compte. Qu'est-ce qui arrive, c'est qu'on voit très souvent, comme vous dites, dans des milieux... En fin de compte, la population baisse, il n'y a plus d'école, il n'y a plus de caisse populaire, il n'y a plus de service, il n'y a plus rien. Et ces gens-là demandent bien souvent deux, trois hectares pour s'agrandir, et la commission les traitent comme s'ils étaient dans la grande plaine de Montréal. Ils veulent avoir deux, trois hectares pour permettre de se construire... Au lieu que tous les retraités, les agriculteurs... On dit : Bien, allez au village, mais l'agriculteur, lui, là, là, il veut rester dans son milieu. Puis il faudrait regarder ça aussi : Est-ce que l'agriculteur qui prend sa retraite ne pourrait pas rester dans son milieu où c'est qu'il a pratiqué toute son agriculture? Alors là, c'est tout un débat aussi, là, avec les... Mais seulement que je pense que les petites municipalités sont réellement délaissées, et la commission les traite comme si c'était...

Pour parler, par exemple, des parcs industriels, c'est bien beau, actuellement, de vouloir dire : Bien là, vous avez un parc industriel dans la ville la plus importante de la MRC, mais la petite communauté, eux autres, ils en veulent un aussi, un petit parc industriel, ils veulent avoir des emplois. La commission dit : Non, non, allez voir ailleurs, là, dans l'autre municipalité, parce qu'eux autres, ils en ont, de l'espace. Alors, les petites municipalités, je pense qu'on devrait en tenir compte beaucoup plus.

M. Simard : ...Mme la Présidente, je laisse la place aux autres maintenant.

La Présidente (Mme Léger) : Alors, je ne sais pas qui prend la parole. M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, M. Provencher, je suis entièrement d'accord avec vous. Ça m'est arrivé dans mon patelin où ils m'ont dit : Il y a des zones blanches dans le village voisin, allez-y donc. C'est un fait, mais ce n'est pas toujours fonctionnel, je vais vous dire ça comme ça.

Mais moi, j'aimerais bien vous entendre sur un autre élément ici, puis je vais vous le préciser un peu avant, c'est le fait que l'article 59, M. Lebeau nous a mentionné qu'il y avait eu 32 000 lots qui avaient été ouverts au développement. Ce qu'on s'est rendu compte dans les dernières années, c'est qu'on a un autre problème avec ces 32 000 lots là, parce que, finalement, quand on a fait le débat dans les MRC, dans les municipalités, pour le développement de ces terres-là, on n'a jamais regardé la disponibilité des services. Ce qu'on se rend compte aujourd'hui, c'est que, même si ce lot-là est disponible puis qu'Hydro-Québec est à cinq kilomètres, il n'y a personne qui va se bâtir là, il n'y a pas d'Internet, il n'y a pas de service, il y a rien qui est disponible. Ça fait que, dans les 32 000 lots, là, on pourrait en ôter une très large majorité qui ne sont pas réellement disponibles pour des raisons pratiques. Et j'arrête ça là, là.

La Présidente (Mme Léger) : Une minute, M. le député.

M. Bolduc : Comment vous voyez, finalement, l'article 59? Puis, dans la pratique des faits, est-ce qu'il y a des choses qu'on pourrait faire pour l'améliorer?

La Présidente (Mme Léger) : Alors, M. Provencher.

M. Provencher (Jean-Guy) : Écoutez, l'article 59, je comprends que mon collègue Guy Lebeau a participé aux négociations. Alors, on ne veut pas remettre la pertinence de l'article 59, je pense que ça a été une très bonne initiative, mais, comme on en a parlé, c'est que l'article 59, actuellement, c'est un processus qui est très lourd. Moi, j'ai beaucoup de plaintes de municipalités qui aimeraient peut-être renégocier ou faire des ajustements pour l'article 59. Et là on dit : Mais, écoutez, ça va être un processus qui va durer encore cinq ans.

Bien souvent, c'est tout simplement pour permettre à certaines communautés d'être capables de s'agrandir à l'extérieur des îlots déstructurés, où est-ce qu'on ne retrouve aucun impact sur l'agriculture. Et là, actuellement, l'article 59 est très fermé. Tout ce que vous avez le droit, avec l'article 59, c'est que vous pouvez vous construire avec une résidence au moins de 100 hectares avec des droits acquis, mais vous ne pouvez pas aller ailleurs parce que c'est fermé. Je pense, comme je le disais dans mon texte, c'est que, bien souvent, il pourrait y avoir... Actuellement, les rangs se vident, et même l'article 59 pourrait toujours prévoir, peut-être, dans certaines municipalités, dans des secteurs, dans des rangs où est-ce qu'il ne se passe plus rien... On pourrait peut-être, malgré l'article 59, permettre la construction résidentielle.

La Présidente (Mme Léger) : Merci. C'est tout le temps que nous avons, M. Provencher...

M. Provencher (Jean-Guy) : ...et là évidemment aussi on a parlé aussi qu'on... L'article 59...

La Présidente (Mme Léger) : Merci, M. Provencher. Vous êtes parti. Merci bien. Vous aurez peut-être l'occasion de continuer. Je laisse la parole au député de Berthier, porte-parole de l'opposition officielle pour un temps de six minutes.

M. Villeneuve : Oui, bonjour, M. Provencher. Content de vous voir aujourd'hui ici, en commission parlementaire. Tantôt, vous disiez que le Tribunal administratif du Québec ne peut juger une cause qui lui est soumise par un individu, ou peu importe, que sur les erreurs de droit et de fait, et ça, c'est un tribunal qui l'a statué, un tribunal plus haut qui l'a statué. Il y a quelqu'un qui nous a proposé, ici, en disant : Bien, écoutez, lorsqu'on soumet le dossier d'une demande à la Commission de la protection du territoire agricole, le dossier est regardé, il n'y a pas d'intervention, si ce n'est que par téléphone avec les analystes pour monter le dossier. Après ça, on envoie le dossier. Le commissaire ou les commissaires se penchent sur le dossier, vont émettre un avis, une orientation préliminaire négative ou positive. C'est sûr, quand elle est négative, on n'est pas très heureux parce qu'on aimerait que ça soit positif. Et ce que la personne nous disait, c'est qu'il faudrait, là, qu'il y ait un... il pourrait y avoir un palier juste avant, un palier de rencontre formelle avec les commissaires.

Je vous pose la question parce que, tantôt, c'était un peu... Bien, je me disais : Peut-être que ça serait une bonne idée, d'une certaine façon, parce que, là, il y aurait vraiment audience immédiatement avec le ou les commissaires pour s'assurer qu'on étaie correctement notre projet. Vous, vous semblez plutôt dire : Bien, il faudrait que le TAQ puisse refaire, finalement, le travail de la commission, une deuxième chance, si je peux dire ça comme ça, pour le TAQ. Mais ce que la personne nous proposait, c'est vraiment un palier, là, juste avant, là, avant que les commissaires émettent une orientation préliminaire, qu'il y ait une rencontre formelle avec les tenants de la demande et les commissaires. Qu'est-ce que vous pensez de cette idée-là?

La Présidente (Mme Léger) : M. Provencher.

M. Provencher (Jean-Guy) : Écoutez, avoir un palier... Actuellement, le processus est déjà passablement lourd avec la commission, alors, si, dans chaque dossier, la commission fait une étape préliminaire, ça équivaut pratiquement à une nouvelle rencontre, après ça, une deuxième rencontre, moi, je pense que ça serait alourdir le processus. Je ne pense pas que ça soit tellement une bonne idée, là.

Mais je pense qu'au niveau de la rencontre publique, tout de même, peut-être que les commissaires devraient peut-être y aller un peu plus, peut-être, avec des suggestions, peut-être, pour aider la clientèle, peut-être, à bonifier le dossier. Mais je ne demande pas, au niveau du tribunal, de tout reprendre à neuf, là. Il serait peut-être intéressant, au moins que le demandeur puisse au moins aller devant le tribunal puis s'expliquer sur des points, peut-être, qu'il n'a pas eu l'occasion de préciser devant la commission. Parce qu'actuellement, évidemment, qu'est-ce qu'on fait lorsqu'on va devant le tribunal? Bien, on fait le relevé des notes sténographiques pour savoir exactement tout ce qui s'est dit lors de la rencontre publique, et là on dépose ça devant le TAQ, le tribunal, qui, là, a tous les éléments pour rendre sa décision. Mais le problème, c'est le carcan, là, qui fait que les erreurs de droit puis les erreurs de fait déterminantes ne sont pas évidentes, là, avec la décision de la Cour d'appel.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Personnellement, j'ai vécu les deux situations. Je me suis retrouvé devant le TAQ, O.K., erreur de droit, erreur de fait, et j'ai vécu l'autre situation où j'ai eu une orientation préliminaire négative. Et, dans les deux cas, c'est lourd. Qu'on rajoute un élément... qu'on change le statut ou le regard du TAQ, on alourdit le processus. Qu'on rajoute un palier avant l'orientation préliminaire, encore là, on alourdit le processus. On en avait d'ailleurs discuté avec l'intervenant en question. Effectivement, il y a un alourdissement. Par ailleurs, par ailleurs, moi, je trouvais l'idée intéressante de mettre une rencontre formelle, parce qu'on dit que les gens ont le droit d'être entendus.

Alors, avant qu'il y ait une... Parce que renverser, là... Il faut ramer en tabarnouche pour renverser une orientation préliminaire négative. Il faut ramer, puis pas à peu près. Alors, s'il y a ce processus-là, formel, qui est établi, où, là, on a le droit d'être entendu, comme demandeur, avant cette orientation-là, moi, je voyais ça comme étant quelque chose... un gage en tout cas de me faire entendre correctement par rapport... et d'avoir droit aux questions et aux éléments qui titillent parfois les commissaires, de pouvoir répondre avec les différents intervenants qui m'accompagneraient, effectivement, pour cette demande-là. Je voyais ça intéressant, mais je comprends...

M. Provencher (Jean-Guy) : Écoutez, je prends note de votre... Peut-être que... Une suggestion, c'est peut-être qu'on pourrait rencontrer, peut-être, le professionnel, là, du dossier, qui, lui, va conseiller les commissaires. Le professionnel étudie le dossier et, après ça, il soumet le dossier aux commissaires. Est-ce qu'on ne pourrait pas rencontrer les professionnels? Ça serait peut-être une étape. Mais est-ce que ça serait une solution? Écoutez, je n'ai pas de réponse affirmative à cet effet-là, là.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier, pour une minute environ.

• (11 heures) •

M. Villeneuve : Oui. Merci, Mme la Présidente. Ça va être rapide. Vous proposez qu'au lieu de 100 hectares on diminue ça à 75 hectares au niveau de l'article 31.1 de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles. Selon vous, ce serait vraiment très accommodant de descendre de 100 à 75 hectares? Ça représenterait combien de demandes?

La Présidente (Mme Léger) : M. Provencher.

M. Provencher (Jean-Guy) : J'ai mis un chiffre comme ça, mais ça pourrait... Actuellement, là, c'est que, comme on parlait, là, c'est que le 100 hectares ne fait pas de distinction entre un milieu dynamique puis un milieu agroforestier, si vous voulez, qui n'est pas dynamique. Et je pense que là, bien souvent, on a vu des cas, là... on fait une demande, alors que des propriétaires fonciers ont des superficies de 90 hectares, et la commission dit non.

Alors, je pense qu'il devrait y avoir peut-être... La commission devrait peut-être être capable... Quand on est rendus à 50 hectares dans un milieu, un exemple, qui n'est pas trop propice à l'agriculture, je pense, ça devrait pratiquement être automatique qu'on puisse accorder la construction d'une résidence pour permettre au moins le développement dans certains secteurs d'une municipalité qui n'est pas tellement active.

La Présidente (Mme Léger) : Merci. C'est tout le temps que nous avons. Mme la députée de Mirabel, la porte-parole du deuxième groupe d'opposition.

Mme D'Amours : Merci. Bonjour, M. Provencher. Tantôt, vous avez touché un point, là, à l'effet que les agriculteurs veulent rester dans leur milieu puis qu'effectivement, avec ce qu'ils vivent aujourd'hui, qu'ils achètent des terres et des terres et qu'ils veulent se construire une maison parce qu'ils vendent à la relève le prix moindre que l'évaluation, ça leur permet de ne pas acheter un terrain au village, de se construire une nouvelle maison, puis ils veulent rester dans leur milieu, puis il y a une problématique là-dessus, et il y a plusieurs cas. Ça fait que je trouvais que vous aviez touché un bon point là-dessus et je voulais vous le mentionner.

Je voudrais revenir sur ce que vous avez déposé. Vous nous avez déposé... Vous dites, là, à la page 5 de votre document, qu'«à la suite d'une demande et principalement à la réception de l'orientation préliminaire de la commission, la fédération de l'UPA envoie son avis, qui, généralement, se montre favorable aux conclusions de la commission dans le cas d'un refus qui apparaît à l'orientation préliminaire». Et vous mentionnez : «À notre grande surprise, ce n'est que lors de la rencontre publique que les commissaires nous informent d'un tel avis.» J'aimerais que vous élaboriez là-dessus, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Léger) : M. Provencher.

M. Provencher (Jean-Guy) : C'est-à-dire que moi, écoutez, ça fait 15, 20 ans, là, que je... Encore la semaine dernière, j'ai profité de l'occasion encore pour informer les commissaires. Ils sont arrivés encore le matin même avec : Est-ce que vous avez pris connaissance de l'opinion de la fédération de l'UPA? Non. Voici, on est prêts à vous remettre le texte. C'est surtout avec la fédération de l'UPA, puis très souvent, lorsqu'ils reçoivent l'avis, l'orientation préliminaire négative, la commission annonce son refus, et là l'UPA envoie un texte en disant : On est d'accord que ça va briser l'homogénéité puis que ça va nuire à l'agriculture. Bon. Alors, moi, je pense, ça serait tellement simple...

J'en parle, j'en parle puis je ne sais pas c'est quoi, la difficulté. Devant le Tribunal administratif, lorsqu'un nouveau document va rentrer, on le reçoit. À la commission, pourquoi qu'il n'y a pas une directive qui fait que, lorsque vous recevez un document dans le dossier, pourquoi vous ne l'envoyez pas au mandataire ou bien au demandeur pour l'aviser qu'ils ont reçu un texte? Que ce soit l'UPA ou que ça soit de n'importe qui.

Alors, c'est des petits détails tellement simples à corriger, mais on dirait qu'on n'est pas capable, au niveau administratif... Alors, voyez-vous, on n'est pas capable de corriger ça, ça fait que là ça va être tout un défi de corriger les délais pour rendre la décision, comme mon collègue en a parlé tout à l'heure.

La Présidente (Mme Léger) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Mon collègue aurait une question à poser...

La Présidente (Mme Léger) : Oui, M. le député de Drummond—Bois-Francs.

M. Schneeberger : Oui, bonjour. Je vais aller droit au but, là. J'ai scruté pas mal quelques dossiers, là, des jugements qui ont été faits au Tribunal administratif, dont un particulièrement que je ne nommerai pas, mais j'ai encore l'exemple. Et, à l'intérieur, comme motif pour exprimer le refus, premièrement, ce qu'on m'a dit souvent, c'est qu'au niveau Tribunal administratif, majoritairement du temps, on ne renverse pas une décision. Ça veut dire que c'est comme un peu une loi non écrite. Et, pour poursuivre dans la même direction, on trouve souvent des aspects qui sont... que je dirais douteux, c'est-à-dire où... un cas précis où on remettait en doute le rapport d'un urbaniste qui avait été fait. Alors là, c'est rendu qu'on met en doute des personnes pour pouvoir exprimer la première décision qui avait été rendue. Est-ce que vous êtes en mesure de nous confirmer ça, qu'il y a des fois des problématiques à ce niveau-là?

La Présidente (Mme Léger) : Malheureusement, vous n'avez plus de temps pour répondre. Ou bien vous dites oui puis non. M. Provencher.

M. Provencher (Jean-Guy) : Non, non. Écoutez, tu sais, je n'ai pas... Si vous me permettez...

La Présidente (Mme Léger) : 30 secondes.

M. Provencher (Jean-Guy) : C'est terminé?

La Présidente (Mme Léger) : Vous avez 10 secondes, allez-y. Est-ce que vous êtes...

Une voix : Oui, tu peux parler 10 secondes.

La Présidente (Mme Léger) : Vous avez 10 secondes.

M. Provencher (Jean-Guy) : 10 secondes. Écoutez, je n'ai pas eu de cas particulier, là, que... En général, le tribunal... Bien, c'est arrivé que, dans certains cas, on met en doute, là, l'expertise d'un professionnel, mais, en général, ce n'est pas un problème qui se pose.

La Présidente (Mme Léger) : Merci beaucoup. Alors, je remercie beaucoup M. Guy Lebeau et M. Jean-Guy Provencher.

Nous allons suspendre quelques instants pour permettre à l'Union des producteurs agricoles de venir s'asseoir.

(Suspension de la séance à 11 h 6)

(Reprise à 11 h 8)

La Présidente (Mme Léger) : Alors, nous reprenons. Nous recevons l'Union des producteurs agricoles. Alors, je laisse la parole à M. Groleau, Marcel Groleau, le président général. Vous avez un exposé de 10 minutes, et après on aura un échange d'une cinquantaine de minutes. Donc, on est une heure avec vous, M. Groleau. Alors, bienvenue à la commission, et vous... nous dire qui vous accompagne.

Union des producteurs agricoles du Québec (UPA)

M. Groleau (Marcel) : D'accord. Alors, merci de l'invitation. Je suis accompagné de Mme Guylaine Gosselin, directrice générale de l'Union des producteurs agricoles, et de M. Stéphane Forest, qui, au niveau du service du contentieux de l'UPA, s'occupe spécifiquement des dossiers de zonage agricole et de la loi de protection des terres agricoles.

Alors, rapidement, étalement urbain, multiplication et complexité accrue des demandes de dézonage et d'implantation d'usages non agricoles en zone verte, règlements municipaux contraignants, diminution des ressources professionnelles à la CAPERN... pardon — je ne sais pas si c'est vrai également ici — à la CPTAQ, le territoire et les activités agricoles sont plus que jamais sous pression. Or, la question qui se pose est la suivante : Tous les 10 ans, l'équivalent de la superficie de l'île de Montréal disparaît. Est-il raisonnable de demander plus de flexibilité? L'Union des producteurs agricoles, l'union, à l'instar d'un grand nombre d'organisations, ayant à coeur le développement durable et la pérennité du territoire et des activités agricoles, considère que non.

La zone agricole occupée par les entreprises agricoles ne constitue que 2 % du territoire québécois. Elle représente une richesse collective non renouvelable, qui nécessite des mesures extraordinaires de protection. Le régime québécois de protection du territoire et des activités agricoles est plus que jamais pertinent, compte tenu des pressions exercées sur les terres et les projections démographiques mondiales. Je comparerais la protection du territoire agricole à la protection de l'environnement; c'est une responsabilité collective. Les critiques à son endroit sont d'autant plus discutables qu'elles sont fondées sur un certain nombre de mythes.

• (11 h 10) •

Les superficies disponibles, on en parlait un peu plus tôt... Je vous entendais en parler un peu plus tôt. Il est trop souvent soutenu que la superficie couverte par la zone agricole est d'environ 6 millions d'hectares, donc 4 % de la superficie totale du Québec, ne serait exploitée qu'à 54 %. Or, lorsqu'on regarde... si on décortique ce 6 307 000 hectares là, en fait, il y en a 3 390 000 hectares qui est occupé par les entreprises agricoles, donc c'est 54 % de la zone agricole, dont 33 % sont en culture et 21 % en boisés de ferme. Environ 2 %, soit 280 000 hectares, sont constitués de terres en friche. Le territoire restant comporte des milieux humides naturels, lacs, cours d'eau, des boisés privés ainsi que des zones résidentielles, commerciales et industrielles ou réservées à des utilités publiques. Donc, la zone agricole est très utilisée et exploitée.

Un autre mythe, c'est les taux d'autorisation acceptés ou les demandes d'autorisation présentées à la CPTAQ. Plusieurs prétendent que la CPTAQ refuse trop souvent des demandes qui lui sont adressées et que la loi bloque le développement des collectivités. Dans les faits, au cours des dix dernières années, la commission a autorisé 76 % des projets industriels et commerciaux, 96 % des projets institutionnels d'utilité publique, 53 % des projets résidentiels qui lui ont été soumis. Enfin, 77 % des demandes d'autorisation pour l'exclusion de territoires de la zone agricole ont été acceptés. Alors, on a peine à croire que vous puissiez trouver que ces taux d'autorisation sont trop faibles.

La possibilité d'accroître la zone résidentielle. Bien, en fait, suite à l'utilisation de l'article 59, c'est 1,2 million d'hectares qui ont été rendus disponibles en milieu rural pour les développements à portée collective, et c'est la possibilité d'établir 32 000 résidences. Je suis sûr qu'il y aura des questions qui viendront là-dessus, j'en ai entendu tout à l'heure. Nous croyons que ce processus de demandes à portée collective réduit substantiellement le nombre de dossiers traités annuellement par la commission, une fois que l'ensemble des MRC auront complété cette démarche et publicisé les emplacements résidentiels disponibles.

Au regard des irritants observés pour la mise en oeuvre des décisions de la commission, en vertu de 59, ils ne sont pas nécessairement liés à la loi ou à la commission, mais plutôt à la conformité nécessaire entre les différentes échelles de planification et la concordance des réglementations. Alors, ça prend l'approbation du MAMROT pour rendre... pour que ces choses-là soient acceptées et définitives. Souvent, ces délais-là sont longs, et le MAMROT, lui, demande des modifications.

Les morcellements en lots plus petits. D'autres intervenants font valoir que la loi empêche le morcellement en petits lots. Après vérification auprès de la commission, on peut constater que la proportion d'autorisations pour les demandes de morcellement est d'environ 70 %. Il faut aussi considérer que près de 50 % des unités d'évaluation foncière et 20 % des fermes québécoises ont moins de 25 hectares, donc 10 hectares en moyenne, ce qui est très petit pour des lots agricoles.

Le traitement des dossiers. Dans les faits, c'est vrai, bon, on peut reprocher à la commission que les demandes de traitement soient longues ou se prolongent, mais, dans les faits, les dépenses réelles de l'organisme n'ont pas évolué substantiellement depuis 10 ans, passant de 8,7 à 9,1 millions de dollars, soit une hausse de 4,6 %. Pendant la même période, les ressources au service de la commission ont été réduites de 14 %, passant de 107 à 92. Donc, c'est sûr que, compte tenu du rôle essentiel de la commission, et de l'application de la loi, et des coûts engendrés par les délais, cet organisme ne devrait pas subir une réduction systématique de son personnel. Une telle pratique génère plus de coûts qu'elle n'entraîne d'économies.

La prise en compte des particularités régionales. En vertu de l'article 12, la commission doit tenir compte des particularités régionales. Dans sa prise de décision, elle pondère adéquatement les critères — article 62 de la loi — notamment celui sur le développement économique de la région et celui sur les conditions socioéconomiques nécessaires à la viabilité d'une collectivité, mettant ainsi en évidence les particularités régionales.

En ce moment, pour les producteurs et productrices agricoles, la seule façon de protéger les activités agricoles demeure l'application des dispositions de la loi. L'intolérance à l'endroit des activités agricoles et la pression des citoyens sur les élus municipaux génèrent de plus en plus de règlements brimant la pratique des activités agricoles en zone verte. Les producteurs, en situation minoritaire, n'ont pas le poids démographique nécessaire pour résister à ces règlements abusifs. Et j'ai une liste ici de règlements que, si vous souhaitez les connaître, je pourrais vous énumérer. Si certains proposent de céder une partie des pouvoirs de la commission aux municipalités, l'union montera rapidement aux barricades. Transférer l'application d'une loi d'un tribunal administratif à un tribunal politique serait une grave erreur. Par définition, la loi fera toujours des insatisfaits.

Le rôle de la CAPERN. Il nous apparaît clairement que les débats des dernières années, voire les revendications de certains pour un assouplissement aux lois, sont à l'origine de l'actuel mandat de la commission de l'agriculture. Or, nous croyons que l'examen des orientations, des activités et de la gestion administrative de la commission ne peut être un prétexte pour remettre en question la pertinence des lois, mais plutôt une analyse visant à s'assurer que la commission dispose des moyens nécessaires pour accomplir sa mission et garantir la protection du territoire et des activités agricoles.

À travers cet exercice, c'est à vous, membres de la CAPERN, qu'incombe maintenant la responsabilité d'assurer que tout soit mis en oeuvre pour protéger le territoire agricole pour les générations futures.

En terminant, les producteurs agricoles désirent mettre en garde les décideurs contre une tentative de réduire les moyens dévolus à la commission, prétextant des questions budgétaires ou d'allègements administratifs. La protection des terres agricoles et des activités agricoles est cruciale pour les Québécois. Il en va de la pérennité de l'agriculture et du pouvoir de se nourrir. Alors, merci beaucoup.

La Présidente (Mme Léger) : Merci, M. Groleau. Alors, je cède la parole au député ministériel, qui est le député de Beauce-Sud.

M. Dutil : Mme la Présidente, merci. Merci, M. Groleau, de votre présentation. Je pense qu'on est d'accord sur deux aspects ici, sans trop de problèmes : il faut protéger les activités agricoles, vous l'avez mentionné, il faut éviter qu'il y ait des frictions inutiles et surtout dommageables à l'agriculture, puis on comprend que les agriculteurs sont minoritaires.

Toutefois, notre impression ici, c'est que votre perception de... Ce qu'on appelle la dévitalisation — on devrait appeler ça la dépopulation — est un des problèmes majeurs de plusieurs municipalités. Il y a vraiment deux Québec, puis, moi je n'ai pas l'impression que vous reconnaissez cet aspect-là, là. J'ai fait un petit inventaire personnel, je vais le colliger correctement, mais il semble qu'il y aurait à peu près 600 municipalités des 1 200 qui sont soit en perte de population soit qui sont en dévitalisation absolue, donc qui n'ont pas de pression sur le zonage agricole.

Je pense qu'on va comprendre puis on va être d'accord que, si tu perds de la population, à long terme, tu finis par ne plus avoir de pression sur la zone agricole parce qu'il n'y a plus personne qui l'habite, et je ne vois pas de virages demain matin qui vont changer ça. La seule chose qui semble pouvoir changer ça, c'est un changement de culture au niveau de la natalité. L'autre chose qui peut changer ça, c'est que l'immigration finisse par s'en aller en région, ce qui est un combat, je vous dis, extrêmement difficile et pénible.

Donc, nous, ce qu'on plaide, c'est que... Puis tout à l'heure vous avez mentionné : Est-ce qu'on va envoyer ça aux MRC ou aux municipalités? La réponse, c'est non. On a renoncé à cette idée-là. On l'a soumise, on pensait que ça pouvait être une bonne idée. Vous avez soulevé puis beaucoup de gens ont soulevé que ce n'était pas une bonne idée, puis on a dit : Bon, ce n'est pas une bonne idée, ça fait qu'on oublie ça, là. Inutile de nous en parler encore; on n'en parle plus, nous autres. On a compris cet aspect-là, on a compris l'aspect de la difficulté que ça présentait.

Alors, ma question, c'est : Il n'y aurait pas lieu de trouver un modus vivendi qui ferait que, oui, on protège les activités agricoles partout, oui, on protège les territoires agricoles d'une façon beaucoup plus sévère là où la pression est, puis oui, par contre, on trouve des solutions viables qui n'amènent pas des délais de deux ans? Entre autres choses, la particularité, c'est des délais de deux ans. Vous dites que c'est à cause des ressources; nous, on prétend que c'est peut-être à cause de l'organisation comme telle de la loi pour les zones qui sont en... que j'appelle dépopulation, là, parce que je ne veux pas utiliser le mot «dévitalisation». La dévitalisation, le seul critère, ce n'est pas les pertes de population, mais c'est le critère important.

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Tout d'abord, moi, je ne crois pas qu'on peut imputer à la loi sur la protection des terres agricoles la dévitalisation de nos régions. Il y a certainement beaucoup d'autres régions... beaucoup d'autres raisons pour... Moi, je demeure à Thetford Mines, puis on a plusieurs villages et régions autour dont la population est soit vieillissante ou à la baisse, et ce n'est pas à cause de la protection du territoire agricole. Il y a beaucoup d'autres raisons à ça.

Les régions comme les nôtres, les jeunes sont moins intéressés à y demeurer. Les emplois offerts sont peut-être moins intéressants ou il y a moins d'emplois qui sont offerts, et, en ce sens-là, si on veut adresser ces questions-là, je pense qu'on avait des outils comme... qui ont été modifiés pour stimuler le développement économique de nos régions. Les municipalités travaillent fort.

Mais nous, on... à travers l'article 59 élargi, il y a peut-être des choses qu'on pourrait faire. On aurait des propositions à vous faire en ce sens-là, mais moi, je crois que, si on observe... si on fait cette analyse-là strictement sur la base du territoire agricole, je crois qu'on va échapper une bonne partie des enjeux du dossier de la dépopulation de nos régions.

• (11 h 20) •

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Beauce-Sud.

M. Dutil : Mme la Présidente, je ne dis pas que l'agriculture est responsable de la dépopulation. Je ne dis pas ça. Je dis qu'on a de la dépopulation. Et comment on pourrait faciliter un redressement qu'on ne réussira peut-être pas? Moi, je pense que les premières raisons, c'est la natalité, puis la deuxième raison, c'est l'immigration. Ça, on est d'accord, ce n'est pas l'agriculture, ce n'est pas l'environnement, ce n'est pas les autres choses. Sauf qu'il y a peut-être lieu de faire un travail là-dessus. Alors, on est une personne qui est en train de se noyer, là, puis on se dit : Peut-être qu'on va se noyer pareil, mais on va essayer de ne pas se noyer. Puis est-ce qu'il y a moyen de trouver des façons pour éviter que la noyade, si elle arrive un jour, arrive le moins vite possible? Et c'est ça, notre point de vue, là. Ce n'est pas d'accuser l'agriculture d'être la cause de cette problématique-là.

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Non, mais ce n'est pas ça que je disais non plus, là. J'ai été mal interprété. Je n'ai pas dit que la...

La Présidente (Mme Léger) : ...

M. Groleau (Marcel) : Moi, je dis que les restrictions qu'impose la Loi sur la protection du territoire agricole ne sont pas responsables, à elles seules, à tout le moins, de la dépopulation des régions qui souffrent de ce phénomène-là. Et ça, on a plusieurs exemples pour le démontrer, là. Quand même qu'on permettrait, sur ces territoires-là, la construction de résidences sans restriction, je ne crois pas que ça amènerait une augmentation de la population de façon significative.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Côte-du-Sud.

M. Morin : Oui, merci, Mme la Présidente. M. le président, j'essaie de... J'ai lu ça rapidement, je vous ai écouté, puis, selon votre opinion, la Loi de protection du territoire agricole est bonne telle qu'elle est là, on ne peut pas l'améliorer. La pression agricole est la même partout. Chez nous, à Saint-François, c'est des gros cultivateurs, des producteurs, la pression est forte, mais, dans le sud de la MRC de Montmagny, MRC de L'Islet, ce n'est pas l'épandage qui va déranger — juste un exemple — la population. Il n'y en a plus, de terres agricoles viables, à part qu'un peu d'agneaux puis un peu de bovins, mais c'est... Je suis vraiment déçu. Je pensais qu'il y avait une ouverture pour essayer de voir si on n'a pas à améliorer cette loi de 30 quelques années.

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Bien, la loi, elle a été améliorée depuis 30 ans. Il y a eu des modifications à la loi, puis on a... Lorsqu'on dit que... Moi, je suis... S'il y a une dévitalisation dans certains secteurs, bien, je pense qu'on doit aussi regarder les raisons qui font qu'on a perdu 30 % des fermes bovines et ovines de 2010 à 2012. Ça, c'est une raison de la dévitalisation également, là, que ça a touché principalement les régions où ces productions-là étaient plus vulnérables, parce qu'il n'y avait pas l'opportunité, dans ces régions-là, de produire du maïs ou du soya, là. Donc, encore une fois, de faire porter à la Loi sur la protection du territoire agricole les problèmes vécus en région, je pense que c'est un raccourci qui est un peu dangereux parce qu'il y a beaucoup d'autres raisons à ça. Il y a beaucoup d'autres raisons à ça.

Pour ce qui est des terres qui ne sont pas cultivées aujourd'hui, moi, je donne l'exemple suivant : on est le troisième producteur de canneberges, maintenant, dans le monde, après le Wisconsin et la Colombie-Britannique, si je ne me trompe pas. Les terres où se produit la canneberge aujourd'hui, il y a 30 ans, étaient des terres qu'on qualifiait ou qu'on considérait presque incultes parce qu'il n'y avait pas de forêt sur ces terres-là, c'étaient des milieux semi-humides. Aujourd'hui, c'est une des richesses du Québec, ces terres-là. Il y a d'autres plantes qu'on produit pour de la fibre maintenant qu'on ne cultivait pas il y a seulement trois ou quatre ans.

Donc, il faut toujours avoir à l'esprit que les terres agricoles ne sont pas renouvelables, et de croire qu'en ouvrant l'accessibilité au territoire pour le résidentiel on va redynamiser nos régions, moi, je crois que ce n'est pas la solution. On ne ramènera pas l'industrie non plus. Les emplois qui sont... les employés disponibles en région, c'est déjà un problème. Nous, sur les fermes, on a de la misère à trouver de la main-d'oeuvre aussi. Alors, moi, je pense qu'il y a une réflexion beaucoup plus large à faire sur les problèmes qu'on vit en région que de ramener ça à la Loi sur la protection du territoire agricole.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Côte-du-Sud.

M. Morin : Oui. Simplement, pour terminer, il y a de la cohérence, incohérence. L'utilisation non agricole, on a vraiment des problématiques majeures qui font en sorte que la protection du territoire agricole n'est pas vraiment là pour vraiment aider à l'agriculture. Pourtant, moi, je vis dans un milieu fort agricole, puis il y a de l'incohérence. L'utilisation non agricole, j'ai des cas qui font que ça ne dérange en aucune façon l'agriculture, et je le sais très bien, j'ai été pendant 28 ans membre d'un conseil municipal. On a toujours su que l'agriculture, même s'il n'y a pas une maison d'un agriculteur, il se fait de l'agriculture.

Mais l'utilisation non agricole parfois ne dérange en rien l'agriculture. Se construire une maison où est-ce qu'il n'y a pas de maison, où est-ce qu'il y a de l'agriculture, ça peut amener des problèmes à l'agriculture. Ça, on en convient, ça a été... pendant toutes ces années-là, on a compris qu'est-ce qu'était la Commission de la protection du territoire agricole. Mais maintenant l'utilisation non agricole et l'incohérence des décisions... il faut trouver des solutions pour faire en sorte que l'agriculture soit plus appréciée dans nos milieux.

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Bien, j'aimerais... C'est sûr que, là, on parle... Moi, j'aimerais avoir des exemples, là, concrets sur lesquels on pourrait réagir lorsqu'on parle de l'incohérence et de ces choses-là, là. On est tous d'accord pour le développement, puis la commission aussi, là, je crois. D'ailleurs, les taux d'acceptation des projets industriels ou non agricoles sont de 76 %, là. Donc, elle accepte trois projets sur quatre qui lui sont présentés dans ce cadre-là, là. Donc, ce n'est pas vrai qu'il y a une... Il n'y a donc pas une fermeture totale à cet effet-là. Donc, de quel cas on parle? Est-ce qu'à partir de ce cas-là on peut généraliser? Je ne sais pas, moi, mais j'aimerais avoir... C'est dur pour moi, là, de répliquer directement à ça.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Côte-du-Sud.

M. Morin : Mme la Présidente, je sais très bien que c'est peut-être des cas particuliers, mais, quand une demande est faite et que c'est deux ans plus tard, on a un problème. On a un gros problème.

M. Groleau (Marcel) : Là, les délais, on l'a mentionné, si ce n'est pas... Les délais trop longs coûtent cher à tout le monde, et il faut trouver une façon de réduire les délais.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Dubuc.

M. Simard : Je vous remercie, Mme la Présidente. Moi, j'ai juste une question. D'abord, dans un premier temps, pour garder du temps pour mes copains, vous savez, il y a des villages... Je suis convaincu qu'au Centre-du-Québec puis dans le grenier du Québec — j'appelle toujours ça comme ça, là, — bon, il y a des belles terres, puis ça, c'est clair, dans ma tête à moi, il faut protéger ça, parce que moi, je suis très favorable à l'agriculture.

Mais là où j'ai un problème, dans des villages où il y a une diminution de la population, où il y a une perte de services de toutes sortes, caisse populaire, le supermarché qui ferme, bon, etc., la population, étant donné qu'il n'y a plus de services, s'en va. On se court après la queue dans ces secteurs-là. On veut dézoner, nécessairement, pour une entreprise qui, elle, a été construite entourée par les terres agricoles, et puis les terres sont pratiquement non opérantes. Il n'y a personne qui les utilisent, et on protège ces terres-là qui, tantôt, vont être des terres qui vont être en friche, là. Bien, il ne faut pas se compter des peurs là-dessus, puis il n'y a rien... il n'y a pas moyen de rien faire. On nous dit : Allez ailleurs.

Moi, j'ai de la misère avec ça parce que, je l'expliquais tout à l'heure aux intervenants qui étaient là avant vous, écoutez, on veut protéger quoi? On veut protéger quelque chose qui doit durer. Les générations futures... S'il n'y a plus de génération là, de père en fils, on s'en va rester ailleurs... La terre... Si on fait ça pour les générations futures, là, bien, on va faire ça pour le propriétaire de forêt qui, nécessairement, va s'en servir plus tard, mais on ne s'en servira pas pour faire de la culture, de l'agriculture.

J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce qu'il y a deux façons de développer ce... de voir la protection du territoire agricole pour le... pas pour le périurbain, mais pour les villages qui sont en perte de croissance et ailleurs, où il y a vraiment de la pression? J'aimerais vous entendre là-dessus.

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Bon, dans un cas comme ça, il y a fort à parier... Parce que, là, on parle d'un cas potentiel, là, de...

M. Simard : ...

• (11 h 30) •

M. Groleau (Marcel) : Non, non, mais, je veux dire, vous dites... Il y en a, là, mais, dans ces cas-là, les trois quarts des projets sont acceptés, là. Donc, ils sont refusés... Il y a 10 critères. Si vous allez à la page 11 de notre mémoire, on vous rappelle les 10 critères sur lesquels la commission doit analyser un projet. Et, lorsqu'elle passe à travers cette grille-là, le projet est accepté. Alors, ce n'est pas vrai que c'est une fermeture complète, là, de la commission sur ces projets-là. Est-ce que c'est trop long avant que la commission donne son avis? Bon, peut-être. Ça, là-dessus, on l'a dit, il faut réduire les... Il y a des coûts à ça. Mais moi, je pense que les réductions de personnel, avec la complexité des cas qu'a à analyser la commission, sont en partie responsables des délais qu'on vit, là. Mais à votre question, M. Bolduc... C'est ça, M. Bolduc?

Une voix : ...

M. Groleau (Marcel) : Pardon. Simard. M. Bolduc est... C'est ça. Un seul homme, M. Bolduc.

La Présidente (Mme Léger) : Vous vous adressez à la présidence, de toute façon.

M. Groleau (Marcel) : Oui, de toute façon. Oui. Voilà. C'est plus simple comme ça. Oui, Guylaine.

Mme Gosselin (Guylaine) : En fait, ce sont plus précisément...

La Présidente (Mme Léger) : Mme Gosselin.

Mme Gosselin (Guylaine) : ... — oui, merci — les critères 9 et 10, là, ce que vous soulevez, là, les conditions socioéconomiques nécessaires à la viabilité d'une collectivité, l'effet sur le développement économique de la région sur preuve soumise par une municipalité, une communauté, un organisme public ou un organisme fournissant des services d'utilité publique. Alors, les critères sont là, là. Donc, peut-être, le cas que vous mentionnez, des fois... Bon, est-ce que ça a été trop long? Est-ce que ça a été bien présenté? Est-ce que tous les arguments étaient là? Parce que la commission, elle a la latitude pour tenir compte de ce dont vous parlez, justement, puis...

M. Simard : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Léger) : Six minutes environ.

M. Bolduc : Six minutes. Bonjour, M. Groleau, Mme Gosselin, M. Forest. Ça me fait plaisir de vous rencontrer ici aujourd'hui. Mon premier commentaire, M. Groleau, est que, depuis les années 80, finalement, 35 ans, on s'est ramassé, surtout dans les régions rurales — je vous reviendrai avec la vallée du Saint-Laurent — avec des municipalités qui ont de grands périmètres zonés blancs, d'autres qui n'en ont aucun, et l'encadrement dans lequel ces zonages-là s'étaient faits était beaucoup plus, comment je dirais, dans le principe de précaution qu'elles se sont... prévaut à ce moment-là. Il y en a qui n'en ont pas fait. Et aujourd'hui on se retrouve avec des anomalies, je dirais, qui devraient être rééquilibrées. Puis vous connaissez ma région presque autant que moi, donc je ne vous ferai pas de surprise. Il y a des municipalités qui ont des centaines d'hectares zonés blancs puis il y en a d'autres qui n'en ont pas pantoute puis qui sont prises avec des contraintes difficiles à gérer. Puis il y aurait à un moment donné peut-être une façon de rééquilibrer ça pour donner une chance autant à l'agriculture... puis que le développement de certaines municipalités... comme mon collègue de Beauce en a parlé précédemment.

Donc, comment vous voyez cette espèce de déséquilibre là? Puis est-ce qu'on pourrait faire quelque chose à ce sujet-là?

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Lorsqu'une municipalité n'a plus de zone blanche ou de périmètre urbain, elle peut s'adresser à la commission pour obtenir un agrandissement de son périmètre. Et, habituellement, si elle en fait la démonstration, c'est autorisé. Il y a des délais encore, mais, habituellement, c'est autorisé.

Puis j'aimerais faire un point ici sur un des éléments, nous, qui est extrêmement important, c'est la protection des activités agricoles. Puis j'aimerais que vous compreniez qu'à ce moment-ci la seule loi qui, vraiment, protège les activités agricoles, c'est la loi de protection du territoire agricole et des activités agricoles. Il n'y a aucune autre loi... On a une loi sur, entre guillemets, le droit de produire au Québec, là, mais cette loi-là, sur le droit de produire ou la protection du droit de produire, a permis d'instaurer des distances séparatrices dans les règlements pour les élevages, et tout, mais les municipalités ont entièrement... en utilisant la Loi sur les compétences municipales, utilisent les règlements sur les nuisances, et on réglemente les activités agricoles. Ce sont toujours les agriculteurs qui se font repousser soit dans leur droit de produire, ou dans leur droit de s'établir, ou dans leur droit de cultiver, ou dans leur droit de pratiquer leur métier pour satisfaire l'intolérance grandissante des citoyens. Puis là, à chaque fois qu'on nous demande, à nous, pour élargir la... ou assouplir la portée de la loi, bien, on se ramasse... Puis là je pourrais vous en... Le MAPAQ a fait une demande, là, récemment pour avoir l'énumération des différents règlements qui existent juste en production porcine. Bien, il y a plus de 200 municipalités qui ont adopté des règlements au Québec pour limiter la production porcine ou la production de volaille. Souvent, c'est le veau de lait aussi. On voit des municipalités, maintenant, qui adoptent des réglementations pour limiter l'usage des pesticides. On voit des municipalités qui adoptent des réglementations pour limiter à quelle heure tu peux débuter les travaux le matin; donc, avant 7 heures, tu ne peux pas travailler avec ton tracteur.

Je veux dire, il va falloir que vous fassiez quelque chose pour ça, puis nous, on est là. Si vous voulez parler d'assouplissements à la loi, il y a des choses qu'on peut regarder, mais il va falloir assurer que les producteurs agricoles puissent pratiquer leur métier en zone agricole. Puis, actuellement, ce n'est pas le cas.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je suis entièrement d'accord avec M. Groleau, c'est une voie, c'est un débat qui doit se faire dans les deux directions. Je suis entièrement d'accord avec votre argument, les cultivateurs devraient avoir le droit de travailler sur leurs terres quand ils ont besoin de travailler sur leurs terres dans les conditions qu'ils peuvent le faire. Je n'ai pas de débat là-dessus. En fait, dans mon point de vue, comme je vous dis, c'est une route à deux voies, c'est-à-dire que l'agriculture doit y trouver son compte.

Puis je vous donne un exemple. C'est que, si une municipalité a besoin de terres pour un développement x, que l'agriculture soit compensée en équivalence d'une superficie agricole au moins équivalente. Et je vous donne des exemples, là. Pourquoi un cultivateur ou un agriculteur d'une certaine superficie ne pourrait pas avoir une certaine souplesse pour ajuster sa superficie agricole, l'agrandir? Parce qu'on parle toujours de rapetisser, mais on ne parle jamais d'agrandir. Pourquoi on ne pourrait pas faire ce genre de débat là si l'Union des producteurs agricoles a besoin de ce genre d'activité là?

La Présidente (Mme Léger) : Une trentaine de secondes pour terminer.

M. Groleau (Marcel) : Nous, on le... On fait cette demande-là, récurrente, à chaque année, à chaque nouveau gouvernement, à chaque nouveau ministre de l'Agriculture, à chaque nouveau ministre de l'Environnement. La zone agricole, au Québec, ne fait que rapetisser pour toutes les raisons que j'ai mentionnées.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député, oui.

M. Bolduc : Puis, comme vous le savez, M. Groleau, aussi, le ministre de l'Environnement a accepté qu'on va rouvrir la LQE. Donc, il y a beaucoup d'opportunités pour vous dans un futur prochain.

La Présidente (Mme Léger) : Alors, merci. C'est tout le temps que nous avons. Nous passons à l'opposition officielle avec le député de Berthier, le porte-parole.

M. Villeneuve : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, madame, bonjour, messieurs. Content de vous voir ce matin.

Écoutez, c'est une commission qui, effectivement, est fort éclairante, fort éclairante, en tout cas pour ma part. Je remarque qu'il y a un élément — et ça, comme ancien maire, préfet, c'est un élément qui est incontournable — ce sont les délais, ce sont les délais de la commission. Ça, c'est un irritant terrible. Vous soulignez dans votre document que la Commission de protection du territoire agricole, depuis les 10 dernières années, il y a eu une baisse d'au moins 14 % du personnel relié, justement, entre autres, au traitement des demandes, j'imagine pour d'autres choses aussi, là, mais au niveau du traitement des demandes. Alors là, les délais, si on arrivait à résoudre ce problème-là — et on rencontre la commission cet après-midi — si on arrivait à régler puis à se donner un délai raisonnable de réponse... évidemment, nul n'est tenu devant l'impossible, là, mais au moins un délai raisonnable de réponse, je pense qu'on réglerait une grande, grande partie de frustration. Et c'est avec raison que les gens sont frustrés, que ce soit au niveau des demandeurs, que ce soit au niveau des gens qui sont actifs dans les milieux, que ce soient les élus municipaux ou encore les gens dans d'autres domaines. Il faut régler ce problème-là, c'est majeur, à mon avis.

Incohérence. Incohérence. Et là, monsieur... Tantôt, c'était monsieur... Attendez un petit peu. Je crois que c'est M. Lebeau qui parlait que le cas par cas amène à l'incohérence. 150 000 réponses de la commission depuis sa création, à un moment donné, tu ne peux pas non plus... Il proposait — je pense que c'est M. Lebeau aussi — de dire : Bien, il devrait y avoir deux commissaires pour entendre les causes, peut-être que ça améliorerait la cohérence. Mais là il y a de l'incohérence cas par cas.

• (11 h 40) •

L'article 59 est venu, d'une certaine façon, corriger cette incohérence-là. Effectivement, pour les gens qui nous écoutent, c'est important de le savoir. C'est que les MRC, les municipalités ont pu dégager sur leur territoire ce qu'on appelle les îlots déstructurés. Pour qu'on se comprenne, aussi, c'est quoi, un îlot déstructuré, c'est que, dans un rayon d'un kilomètre, il y a cinq propriétés, cinq maisons, et, à l'intérieur de ce périmètre-là, il y a, entre chaque maison, des espaces possibles constructibles. Donc, en général, il y a de l'électricité, puis Vidéotron ou Bell, etc., sont là. En général, ça fonctionne à ce niveau-là.

Je voudrais vous entendre, parce que vous avez débuté tantôt avec l'article 59, vous en avez parlé et vous avez dit : Peut-être qu'on aurait quelques pistes, mais vous vous êtes arrêté là. Alors, au niveau de l'incohérence, au niveau des délais, je veux vous entendre. Au niveau de l'incohérence, j'aimerais vous entendre aussi. Puis, au niveau de l'article 59, est-ce que ça ne viendrait pas, d'une certaine façon, si jamais on l'élargissait, hein, permettre un élargissement? Donc, au lieu d'aller seulement sur le résidentiel, permettre d'y aller sur l'institutionnel, permettre d'y aller sur le commercial, l'industriel, ça permettrait peut-être aux municipalités de pouvoir planifier sur le plus long terme.

Et ce que M. Ouimet nous disait la semaine passée, c'est que ce léger ajustement à la loi permettrait de donner une perspective d'avenir tout à fait extraordinaire pour les 15, 20 prochaines années. Vous vérifierez les galées, si c'est ça qu'il a dit, mais, en gros, je pense que... moi, c'est ce que j'en ai compris. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Délai, incohérence : deux réalités. Et l'article 59 là-dedans, comment vous le voyez?

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Bon, pour la question des délais, bon, je l'ai mentionné, nous, on croit que la commission est insuffisamment dotée actuellement, compte tenu de la complexité des projets qui lui sont présentés. Par exemple, quand la commission doit analyser un projet comme le pipeline d'Ultramar, qui concerne plusieurs lots, et tout, ça prend du temps. Là on a d'autres projets de pipelines qui se discutent. C'est sûr que ça demande énormément d'énergie et de ressources à la commission, ces projets-là. Donc, il faut voir : Est-ce qu'elle est suffisamment dotée par rapport à la complexité des demandes qu'elle a à traiter aujourd'hui? Puis ça, c'est votre rôle, de s'assurer de ça.

Sur le 59, nous, si on avait vraiment une loi qui protège les activités agricoles, donc qu'on avait l'assurance que les producteurs pourront pratiquer leur métier, ce qu'on suggérerait, qui va dans le sens un peu de ce que le monsieur... c'est que les endroits... Là, on a traité surtout dans les endroits agroforestiers, mais on a exclu la zone agricole dynamique. Mais, si on peut identifier les endroits impropres à l'agriculture, entre guillemets, là, situés en zone agricole dynamique, bien, une fois que ça, c'est fait, bien, les municipalités ont ces terrains-là à leur disponibilité pour offrir des sites pour des résidences.

Sur les questions industrielles et commerciales, on préfère continuer au cas par cas, parce que chaque cas, par exemple, au niveau industriel, peut avoir des particularités. Selon l'eau que ça prend, par exemple, pour un certain type d'industrie en fonction de l'eau disponible dans ce territoire-là, ça peut devenir, pour le territoire agricole, un problème d'implantation de cette usine-là. Donc, moi, je pense que, sur l'industriel, pour le nombre de cas qu'il y a à traiter concernant l'industriel, je pense qu'on doit continuer au cas par cas.

L'autre élément, c'est au niveau du morcellement pour des projets agricoles, par exemple. Est-ce qu'à travers un article 59 on pourrait analyser les coins de la MRC ou du territoire que... Si on veut morceler pour des plus petites unités agricoles, serricoles, par exemple, ou autres, où on sait que deux, ou trois, ou quatre hectares pourraient être suffisants, bien, c'est des choses sur lesquelles on serait ouverts, encore une fois si on avait l'assurance de la protection des activités agricoles. Parce que, lorsqu'on arrive... Ça, c'est des projets agricoles, là, mais avec construction de résidences, naturellement, là.

Sur le morcellement, bon, on en parle beaucoup. Là, actuellement, c'est 200 hectares. À moins de 200 hectares, on ne peut pas morceler sans une autorisation de la commission, parce que ça fait deux lots... il y a un des lots qui aura moins de 100 hectares. Nous, on serait prêts à réduire ça à 100 hectares. Donc, si les deux lots constituent au moins 50 hectares chacun, bien, ça pourrait se faire sans l'autorisation de la commission. Donc, c'est moins de demandes à traiter, encore une fois. Mais on est dans l'agricole.

Pour ce qui est de l'industriel, ou du commercial, ou de l'institutionnel, ça, il faut... ou les autres usages, je pense que le cas par cas est nécessaire, parce que chaque cas peut être un cas d'espèce.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : En fait, c'est ce que je comprends. L'argument principal — en tout cas, vous me corrigerez — c'est au niveau de la ressource eau, entre autres, au niveau de l'article 59, s'il était élargi au niveau commercial, industriel, institutionnel...

M. Groleau (Marcel) : Mais ce n'est pas juste l'eau, là...

M. Villeneuve : Pas juste l'eau, ce sont aussi les...

M. Groleau (Marcel) : C'est aussi la cohabitation, là. Je veux dire, mettons que tu es dans un territoire où il y a de l'élevage puis que l'industrie ou le commercial en question attire des gens qui doivent se déplacer pour aller là, ça devient un espace, entre guillemets, de commerce également ou touristique, bien, c'est sûr que ce n'est pas compatible. Alors là, on ne peut pas installer, dans un endroit où qu'il y a de l'élevage, un usage qui ne serait pas compatible avec ce qui existe déjà sur le territoire. C'est à ça que la commission s'assure lorsqu'elle rend un jugement, la compatibilité des usages pour des types d'entreprises qui ne sont pas nécessairement agricoles, là, mais en territoire agricole.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Oui. Vous dites, toujours dans... Au niveau de l'article 59, là, vous dites : «L'union pourrait être [ouverte] à un ajustement — vous venez de nous en faire part, là — de la [demande] à portée collective dans la mesure où la protection des activités agricoles serait renforcée...» J'ai eu une réponse, mais ça a été très, très court parce qu'on a manqué de temps avec M. Ouimet la semaine passée, et puis il m'a répondu rapidement : C'est déjà prévu dans la loi. Mais vous, vous considérez que ça doit être renforcé. De quelle façon vous verriez un renforcement de la loi à ce niveau-là?

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Bien, je vais y aller avec une courte réponse puis je vais demander à M. Forest de compléter. Mais, nous, c'est sûr qu'il faut encadrer le pouvoir des municipalités d'utiliser la Loi sur les compétences municipales et la gestion des nuisances, c'est clair. Ça, je pense que toute activité agricole légitime devrait être... On ne devrait pas pouvoir la réglementer. Elle est légitime en zone verte, alors c'est ce qu'on croit. Donc, c'est sûr que ça prend un encadrement des compétences municipales.

La Présidente (Mme Léger) : M. Forest.

M. Forest (Stéphane) : Alors, brièvement, M. Villeneuve, ce qu'on peut vous dire, à la page 25 de notre mémoire, on a déployé tout un compte rendu des mesures de protection qui nous ont été proposées, qui ont été légiférées en 1996 par la loi agricole. Ces mesures-là aujourd'hui, dans certaines situations, sont insuffisantes. M. Groleau vous parle du problème des nuisances et du fait que les municipalités décrètent tout et rien comme étant une nuisance, y compris d'utiliser des séchoirs, de faire de la ventilation dans les étables, de faire du labour ou des semis. On a une série de cas qu'on pourra vous remettre. La jurisprudence se déploie dans ce domaine-là et empêche ou cause des problématiques. Quand un producteur agricole doit payer systématiquement, à tous les automnes, un constat d'infraction pour le bruit parce que son séchoir fonctionne quand il fait sécher son grain, il y a un problème de protection des activités agricoles.

L'autre chose qu'il faut comprendre également, c'est qu'on a une immunité contre les poursuites civiles seulement, alors les poursuites pénales, telles que les nuisances, ne sont pas protégées. La loi ne va pas aussi loin. Encore, M. Ouimet dit que la loi protège les activités agricoles. C'est dans un corpus très précis qui aujourd'hui, après 20 ans, s'avère, compte tenu du développement de la jurisprudence, insatisfaisant dans le quotidien. Ça, c'est sans parler, comme M. Groleau a dit, de toute la panoplie de réglementations municipales qui viennent d'être adoptées ces deux dernières décennies. Mais, encore récemment dans la MRC du Témiscamingue, trois municipalités ont interdit à peu près totalement les élevages porcins sur leurs territoires, alors qu'il n'y a pas de porcheries dans ces régions-là, que ces régions-là sont en manque de fertilisants, que les terres seraient beaucoup plus productives si on avait cet apport d'engrais naturel dans des territoires immenses où, non, les municipalités ont décidé qu'il n'y aurait pas de développement d'agriculture, ont décidé de refuser des investissements considérables. Vous avez lu, si vous regardez La Terre de chez nous, on parlait de 50 millions d'investissements de la part d'Olymel. Alors, c'est de l'activité économique qu'on décide de mettre de côté parce qu'on interdit désormais l'implantation de porcheries. Et une des trois municipalités dans cette MRC là, là, il y a quatre lots, quatre cadastres, où on a le droit de faire une porcherie désormais. Alors, si, ça, c'est une... On considère que c'est une diminution de la protection des activités agricoles, et ça, ça devient un préalable à toute discussion sur des assouplissements.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Je ne veux pas rentrer dans le détail, mais je vais y rentrer pareil, parce qu'on sait que les règlements doivent être approuvés. Il y a des orientations du gouvernement à suivre, puis les règlements doivent être approuvés aussi par le ministère dans...

M. Forest (Stéphane) : Plus maintenant.

M. Villeneuve : Plus maintenant?

• (11 h 50) •

M. Forest (Stéphane) : C'est-à-dire, quand que le schéma d'aménagement est révisé, conforme aux orientations gouvernementales de 2001, l'exercice de la conformité réglementaire en ce genre de règlement là ne monte plus au cabinet du ministre, ça reste au conseil des maires de la MRC, et là on a des situations qui deviennent complexes, voire abusives dans certains cas, où des règlements... Les trois règlements que je vous parle, des trois villages, là, ils ont été jugés conformes. Or, ils vont à l'encontre totale des orientations gouvernementales.

La Présidente (Mme Léger) : M. le député de Berthier, je vais vous...

M. Villeneuve : Autre sujet...

La Présidente (Mme Léger) : Laissez-moi le temps de vous donner la parole pour...

M. Villeneuve : Autre sujet. Je veux juste savoir... Vous parlez des terres en friche. Vous dites qu'il y a 280 000 hectares de terres en friche au Québec. Donc, on a le chiffre, là, ce matin, là. Parce que, souvent, on en parle, mais on ne sait pas de quelle quantité de terre dont on parle.

Mme Gosselin (Guylaine) : Mais il y a peut-être...

La Présidente (Mme Léger) : Un instant, s'il vous plaît!

Mme Gosselin (Guylaine) : Oups! Pardon.

La Présidente (Mme Léger) : Est-ce que vous avez terminé, M. le député de Berthier? Je vais laisser...

M. Villeneuve : Oui, allez-y. Allez-y, Mme Gosselin.

La Présidente (Mme Léger) : Mme Gosselin.

Mme Gosselin (Guylaine) : Bien, je dirais que... Bon, les évaluations, là, on pense que c'est entre 140 000 puis 300 000, là. Tu sais, vous êtes à peu près là, là. Le montant, le chiffre que vous avez là, il provient du ministère de l'Agriculture, bon, lorsqu'il a fait la politique, là, la... Bon. Et puis l'autre chiffre, là, je vous dis, l'autre balise, c'est une évaluation qu'on a faite à partir d'un décompte dans différentes municipalités. Ça fait que vous êtes autour de ça, là, 2 %, 3 % de la zone agricole qui est en friche.

La Présidente (Mme Léger) : Merci. C'est tout le temps que nous avons. Nous passons maintenant à Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Merci. Bonjour, madame, bonjour, messieurs. Je vous écoute parler depuis tantôt, M. Groleau, puis je reviens toujours au dernier paragraphe, là, quand vous avez dit... que vous nous avez lu : «En terminant, les producteurs agricoles désirent mettre en garde les décideurs contre une tentative de réduire les moyens dévolus à la CPTAQ, prétextant des questions budgétaires ou d'allégements administratifs.»

Le mandat — moi, j'aimerais ça qu'on remette les choses, là, à ce qu'elles sont — c'est un mandat d'initiative pour surveiller la CPTAQ, l'organisme, et à voir aussi à ce qu'on puisse l'actualiser, voir si sa mission et sa vision étaient toujours... D'accord? Si je lis votre paragraphe, c'est comme si vous étiez pour le statu quo, mais, à vous écouter répondre à des questions, je vois qu'il y a une ouverture. Est-ce que vous êtes d'accord à ce qu'on actualise avec une vision puis une mission 2015, toujours dans l'optique de l'agriculture? Parce qu'il faut toujours... on regarde toujours le négatif, mais il y aurait du positif aussi, pour les producteurs, à ce qu'on revise la protection du territoire agricole. Vous venez de le mentionner — moi, je l'avais marqué, là — les zones agricoles, la pression, c'est toujours les producteurs qui l'ont, c'est toujours eux qui ont une zone tampon à fournir, c'est toujours eux autres qui doivent regarder pour les cours d'eau, c'est toujours eux autres qui doivent... Il y a toujours, toujours... Les odeurs, c'est toujours le producteur agricole. Donc, aux réponses que vous me dites, je veux m'assurer : Vous êtes ouverts à ce qu'on regarde pour une vision puis une mission de la CPTAQ plus 2015 à 2030, exemple?

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Bien, la vision et la mission de la commission, c'est la loi qui les détermine, et nous, sur la loi, on vous a dit clairement que, si on voulait l'actualiser dans le sens de mieux protéger les terres agricoles, naturellement qu'on va être d'accord. Si l'actualiser, c'est donner plus de souplesse aux municipalités pour gérer le territoire agricole, ça, on vous a dit qu'on n'était pas d'accord, mais on a été rassurés à cet effet-là. Donc, on va être d'accord lorsqu'on va connaître qu'est-ce que vous voulez dire par «actualiser», là.

La Présidente (Mme Léger) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Bien, en fait, on prend l'exemple, là, des odeurs, tu sais. Est-ce qu'on va par une loi, ou par un amendement dans la loi, ou rafraîchir la loi... Peu importe, là. Ça sera à nous, législateurs, de décider comment le faire, mais est-ce qu'il n'y aura pas lieu... On parle des odeurs. Bien, est-ce qu'un producteur agricole pourra faire décemment son métier sans avoir des embûches au niveau municipal? Est-ce qu'il y a quelque chose à regarder sur ça? Parce qu'effectivement peut-être qu'il y a 20 ans on n'avait pas cette problématique-là mais qu'aujourd'hui on l'a. Donc, c'est plus de cet ordre-là.

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : En fait, la loi sur la protection des activités agricoles n'est pas l'outil législatif pour protéger les activités agricoles, elle est l'outil législatif pour protéger les terres agricoles et, conséquemment, les activités agricoles. Mais, si on veut protéger les activités comme on a discuté depuis que je suis ici, c'est la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme ou la Loi sur les compétences municipales, je crois, qu'il faudra ajuster.

La Présidente (Mme Léger) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Tout à l'heure, Me Lebeau a mentionné qu'il faudrait se pencher sur le seuil acceptable des terres cultivables pour l'avenir du Québec. Est-ce que vous, vous avez une réponse à ça? Combien de superficie agricole on devrait protéger corps et âme pour nourrir le Québec?

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : Actuellement, on cultive, au Québec, 1,9 million d'hectares, et, de la zone agricole à chaque année, est retranché autour de 4 000 hectares. Alors, c'est sûr... Et, comme on a un règlement sur les entreprises agricoles qui empêche l'agrandissement des superficies en culture dans plus de 600 municipalités, alors, nécessairement, notre zone agricole se rétrécit. Et nous, si on se donnait comme objectif collectif de maintenir la superficie actuelle agricole, nonobstant les autres projets qui peuvent se développer en zone agricole, on adhérerait rapidement à ça. Donc, ça serait une contrainte, qu'on se donne ensemble, de dire : Quand on fait un projet, comme ça a été dit un peu plus tôt, il faut trouver les terres disponibles ailleurs, parce qu'on utilise 200 hectares, bien, il faut développer 200 hectares ailleurs. C'est sûr que, si on avait une approche comme celle-là, dans bien des cas, pour bien des MRC, ça rendrait la... ça serait plus facile de rallier la collectivité pour un projet de développement quelconque.

La Présidente (Mme Léger) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Si je comprends bien, c'est que la superficie qu'on a maintenant, on ne devrait plus y toucher du tout pour l'avenir du garde-manger québécois?

M. Groleau (Marcel) : L'avenir du garde-manger mondial, parce qu'avec l'assèchement de certaines régions, avec l'accroissement des températures... C'est sûr que, même s'il y a un accroissement des températures, là, les terres au nord vont devenir un peu plus productives, mais ça va prendre encore plusieurs générations avant qu'on cultive dans le pergélisol, là. Alors, c'est sûr que les terres disponibles à l'agriculture sont probablement dans nos régions, ici. Là, je parle de l'Abitibi, naturellement, et du Lac-Saint-Jean, là, mais on n'a pas un grand territoire cultivable au Québec. Alors, c'est sûr que... C'est pour ça que je faisais référence à l'environnement. On devrait ensemble considérer le territoire agricole un peu comme l'environnement et assurer sa protection.

La Présidente (Mme Léger) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Dans les zones déstructurées... Moi, j'ai participé, dans mon autre vie où j'étais conseillère municipale, à des zones déstructurées, et le ministre de l'Agriculture nous a fait part, aux crédits, que les zones déstructurées avaient comme donné plus de latitude pour des constructions de maisons dans les zones déstructurées. Et nous, dans notre secteur, c'était différent, les zones déstructurées. C'est un peu comme M. Provencher a dit : il y avait des maisons qui étaient construites, c'était un peu en dents de scie. Ils sont dans la zone déstructurée, le terrain qui n'est pas construit ne l'est pas, on continue avec les zones déstructurées. Donc, ce travail-là a été fait, mais pas de la même façon puis pour la même vision dans l'ensemble du Québec.

Est-ce que vous pensez qu'il y aurait lieu qu'on regarde ça encore? Parce que ce n'est pas encore accepté, là, les zones déstructurées, il reste encore un chemin à faire. Mais est-ce que vous pensez qu'étant donné qu'il y a des zones qui sont disparates envers d'autres zones du Québec... Qu'est-ce que vous en pensez?

La Présidente (Mme Léger) : M. Groleau.

M. Groleau (Marcel) : À ma connaissance, c'est fait selon les mêmes critères, là, parce que l'article 59 s'applique quand même partout, est le même pour tous. Mais maintenant est-ce que la notion de zone déstructurée peut varier d'une MRC à l'autre? Je ne sais pas, Stéphane, si...

M. Forest (Stéphane) : Bien, il faut comprendre que premièrement...

La Présidente (Mme Léger) : Alors, M. Stéphane Forest.

M. Forest (Stéphane) : Excusez, Mme la Présidente. Les articles 59, les portées collectives, là, il y en a 57 ou 60 de réalisées, là, donc on est plus proches de la fin que du début.

Dans un deuxième temps, quand on identifie un îlot déstructuré dans le volet 1, chaque partenaire autour de la table, que ce soit la commission, l'association accréditée ou la municipalité concernée, va identifier ces îlots déstructurés. Dans des villages, il va y avoir deux îlots déstructurés, dans d'autres, il va y en avoir six; ça dépend du type d'aménagement du territoire qu'il y a eu depuis 40 ans. Alors, dans certains cas, on va abandonner cet îlot déstructuré là au profit de deux, trois autres, et le résultat de ça va faire l'objet d'un consensus qui va se répertorier dans une décision.

Alors, si on est dans votre région, c'est ça, le résultat; si on s'en va dans une autre région administrative du Québec, avec d'autres acteurs, d'autres personnes autour de la table, un autre territoire, un autre aménagement du territoire, on va donc avoir un résultat sur un nombre d'îlots déstructurés qui va être différent. C'est pour ça que ça varie un peu d'une région à l'autre, c'est pour prendre en compte les particularités régionales.

La Présidente (Mme Léger) : Alors, c'est tout le temps que nous avions. Merci.

Je remercie M. Marcel Groleau, Mme Guylaine Gosselin, M. Stéphane Forest et je vais suspendre les travaux jusqu'aux affaires courantes, vers 15 heures, cet après-midi. Merci à tous.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 15 h 16)

Le Président (M. Morin) : Bon début d'après-midi. Nous reprenons nos travaux.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques dans le cadre de l'examen des orientations, des activités et de la gestion administrative de la Commission de protection du territoire agricole du Québec.

Cet après-midi, nous recevons M. Jacques Cartier, conjointement avec Mme Suzanne Cloutier; MM. Yves Baril et Réjean St-Pierre, de la Commission de protection du territoire agricole du Québec; et, pour finir, Me Louis Sylvestre.

Nous débutons avec M. Jacques Cartier et Mme Suzanne Cloutier, anciens commissaires de la CPTAQ. Et, comme c'est convenu, on a chacun une demi-heure, 10 minutes d'intervention. On va commencer par Mme Suzanne Cloutier. Vous avez 10 minutes. On a une demi-heure avec vous. Ensuite, on passe à votre collègue. Allez-y, chère madame.

Mme Suzanne Cloutier et M. Jacques Cartier

Mme Cloutier (Suzanne) : Bonjour. Alors, avant de débuter, il serait opportun de vous présenter mon parcours professionnel. Alors, géographe de formation et détentrice d'une maîtrise en sciences de l'environnement, mon parcours professionnel s'est déroulé globalement en trois temps. Après une expérience de 11 ans comme géographe à la société des travaux du Complexe La Grande, j'ai oeuvré, au sein de l'Union des producteurs agricoles pendant autant d'années, d'abord à titre de conseillère en aménagement du territoire et de la protection du territoire agricole auprès des fédérations régionales et des dirigeants de l'UPA, puis à titre de directrice adjointe de la direction Recherches et politiques agricoles. Enfin, pendant 11 ans, soit de 2000 à 2011, j'ai assumé les fonctions de commissaire et de vice-présidente à la commission et rendu, à cet effet, divers décisions et avis qui traduisent le processus décisionnel.

Après mon départ de CPTAQ, j'ai eu l'occasion d'élaborer une trousse d'information relative à l'élaboration des plans de développement de la zone agricole, sous l'égide de l'UPA, et au bénéfice de l'ensemble des intervenants impliqués dans cette démarche. Cette trousse est d'ailleurs disponible sur le Web.

Les présentations étant faites, je souhaite remercier la commission de me donner l'occasion de soumettre certaines observations dans le cadre de ses travaux relatifs à l'examen des orientations, des activités et de la gestion administrative de la Commission de protection du territoire agricole.

Mon intervention sera brève et ciblée. Elle portera essentiellement sur la fréquente méconnaissance et par conséquent sur l'incompréhension de la Loi sur la protection du territoire et de son application dans la commission. À cet égard, j'aborderai plus spécifiquement la question du morcellement du territoire agricole.

La Loi sur la protection... des activités... et des activités agricoles : l'incomprise ou la mal-aimée. Lorsqu'à l'occasion d'un sondage on demande si la protection du territoire agricole est toujours nécessaire ou même primordiale, la vaste majorité des personnes répondent par l'affirmative. Cette adhésion de principe semble toutefois rapidement s'évanouir chez ceux à qui l'on refuse le droit de faire ce qu'ils veulent, surtout sur un terrain qui leur appartient.

Il en va de même de la majorité des instances municipales qui, toutes, conviennent de la pertinence et du bien-fondé de la loi sur la protection des activités agricoles, mais qui, du même souffle, proposent de l'assouplir en réclamant une gestion décentralisée de certains usages non agricoles, voire davantage.

Comme ils ne peuvent savoir quelle réglementation municipale viendra freiner leurs possibilités d'expansion ou encore quel usage non agricole s'implantera en zone verte près de leur ferme, les producteurs agricoles estiment, quant à eux, ne plus pouvoir exercer et planifier leurs activités de manière appropriée.

• (15 h 20) •

Les décisions de la commission et le citoyen. L'incompréhension du citoyen qui se voit refuser une demande vient en partie du fait que l'usage non agricole qu'il veut implanter est permis et même appuyé par sa municipalité. De plus, dans bien des cas, il a eu vent que d'autres personnes ayant déposé une demande semblable ont eu gain de cause. En outre, souvent, la simple lecture de la décision rendue ne lui permet pas de comprendre les motifs d'un refus. Enfin, il estime que la commission va trop loin, arguant qu'elle lui refuse le droit de construire sur — permettez-moi l'image — un piton rocheux peu propice à l'agriculture.

Examinons chacune des perceptions de ce citoyen fictif. «La municipalité est d'accord avec le type de projet que je propose.» Malgré l'adhésion de principe à la LPTAA et l'existence d'orientations gouvernementales claires en matière de protection du territoire et des activités agricoles, la véritable reconnaissance de la priorité des activités agricoles en milieu agricole est rarement exprimée explicitement à travers les outils d'aménagement et de contrôle des municipalités. La situation s'est certes améliorée, bon nombre de MRC ont caractérisé leur zone agricole et ont éliminé les possibilités de résidences en zone agricole jugée dynamique, notamment celles ayant révisé leur schéma d'aménagement et ayant conclu la négociation de demandes à portée collective. Mais il reste une longue route à parcourir. Le territoire agricole est encore trop souvent perçu comme une réserve de terres que l'on peut gruger à l'occasion, sans trop de répercussions.

Deuxième assertion : La commission a déjà dit oui à un projet similaire. Ce type d'affirmation — aux effets délétères sur la crédibilité de l'application de la loi et donc de la loi elle-même — soulève la question de la nécessaire cohérence des décisions et donc celle de leur caractère non arbitraire. Il est tout à fait légitime de penser que les mêmes faits se déroulant dans un environnement similaire devraient conduire à des décisions semblables. En pratique, en matière de protection du territoire et des activités agricoles, les choses ne sont hélas pas aussi simples. Parfois, quelques éléments déterminants viennent différencier radicalement les demandes en apparence similaires.

Pour rendre une décision, la commission doit se baser sur 10 critères obligatoires et deux facultatifs. C'est la pondération de chacun de ces 10 critères qui pavera la voie à un refus ou à une autorisation. Cependant, bon nombre de personnes comprennent difficilement que la commission refuse encore une demande d'autorisation lorsque le sol est peu propice à l'agriculture. En somme, dans le sens commun, seul le premier critère de l'article 62 de la loi semble avoir été intégré. Ainsi, parmi les motifs souvent allégués lors d'un refus, il y a la préservation de l'homogénéité et de l'exploitation agricoles, le critère 6.

Qu'en est-il de ce critère? Prenons l'exemple d'une zone agricole activement exploitée à des fins agricoles, mais comportant à plusieurs endroits dispersés des aires de faible superficie peu propices à l'agriculture. Il apparaît évident, et l'expérience le corrobore, que l'érection d'une résidence puis d'une deuxième, puis d'une troisième, et ainsi de suite, sur chacun des pitons rocheux ouvrirait la voie à des problèmes de cohabitation, compromettrait la pratique de l'agriculture à long terme et briserait l'essentielle homogénéité de cette communauté. Par ailleurs, il est possible qu'en raison de sa localisation spécifique une autorisation soit autorisée pour les deux premières, mais refusée pour la troisième.

Il s'agit là d'un exemple simple, mais, dans l'exercice de ses fonctions, la commission doit juger de plusieurs cas de figure, parfois en tenant compte de l'ensemble des critères, parfois en fonction de quelques critères seulement. En somme, selon la nature de la demande et, n'oublions pas, selon son insertion dans le milieu immédiat et selon la région en cause, le processus décisionnel peut se révéler relativement complexe ou plutôt succinct. Cependant, peu importe la complexité de la décision, il est primordial qu'au bout du compte la personne ou l'organisme ayant reçu cette décision en comprenne les... peut comprendre les motifs, ce qui exige de la part des décideurs de la clarté et du doigté dans la rédaction de la décision, le tout, évidemment, dans un délai raisonnable. Aussi, il appartient à la commission d'assurer la cohérence de ses décisions. Compte tenu du nombre de demandes individuelles, cette tâche s'avère délicate mais néanmoins nécessaire dans un souci d'équité et de justice.

La commission et les instances municipales. En adoptant, en 1978, la Loi sur la protection du territoire agricole, le législateur reconnaissait la rareté de cette ressource et la nécessité de la protéger. Il instituait la commission et lui confiait la responsabilité de veiller à la protection de ce patrimoine collectif au bénéfice des générations futures. Doit-on aujourd'hui revoir ce choix politique?

La protection des sols à des fins agricoles apparaît toujours aussi nécessaire qu'elle l'était en 1978. Des pressions sur la zone agricole à des fins de développement résidentiel, commercial, industriel sont toujours présentes, et le réflexe de construire hors la zone agricole n'est pas encore véritablement assimilé par les instances municipales.

Certes, depuis cette époque, les instances municipales se sont dotées d'outils d'aménagement permettant une meilleure planification de leur territoire. Elles ont également, pour certaines, caractérisé leurs zones agricoles. De même, la loi a été modifiée à quelques reprises pour favoriser une implication accrue des instances municipales et une plus grande concordance entre la protection du territoire agricole, d'une part, et l'aménagement du territoire, d'autre part. La conclusion de nombreuses demandes à portée collective illustre bien cette plus grande concordance. Ces ententes sont toutefois sujettes à l'approbation et à l'appréciation de la commission.

La zone agricole forme l'assise territoriale garantissant aux générations actuelles et à venir l'exercice d'activités agricoles et leur développement. Devant le chassé-croisé des intérêts visant l'occupation du territoire, il demeure impératif que la responsabilité première de l'application de la loi relève de la commission si la protection du patrimoine collectif que constituent les sols propices à l'agriculture demeure l'objectif recherché.

Cela n'empêche pas, dans l'avenir, de trouver des formules similaires à celle élaborée dans le cadre de l'article 59 pour d'autres éléments qui aujourd'hui nécessitent le dépôt d'une demande individuelle, ni également de réglementer certaines utilisations non agricoles. Dans ce dernier cas, cela éliminerait plusieurs demandes qui, pour l'essentiel, sont autorisées à plus de 90 %.

Et le producteur agricole dans tout ça? Quand un producteur agricole est confronté au jugement de la commission, c'est souvent lors du dépôt d'une demande de morcellement. Bien que, bon an, mal an, le taux d'autorisation de telles demandes avoisine le 66 %, la réception d'un refus soulève souvent l'incompréhension.

Le Président (M. Morin) : On vous invite à conclure.

Mme Cloutier (Suzanne) : Je ne parlerai pas du morcellement, à ce moment-là. Écoutez...

Le Président (M. Morin) : Il vous reste 23 secondes, vous pouvez y aller.

Mme Cloutier (Suzanne) : Bien, je vais directement aller à la conclusion, à ce moment-là. Alors, en guise de conclusion, les sols propices à l'agriculture constituent une richesse, et le Québec doit lui accorder une protection sans faille en dotant notamment la commission des ressources nécessaires à la réalisation de ses missions et en réaffirmant l'importance de cet outil législatif pour la société. Cette richesse est d'autant précieuse qu'elle est rare et non renouvelable. Par ailleurs, les conditions économiques et climatiques évoluant rapidement, des terres autrefois marginales en raison des conditions climatiques pourraient devenir des terreaux pour de nouvelles cultures. Il importe donc de veiller à la protection de cette ressource en adoptant une vision à long terme et une vue d'ensemble.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Je vous remercie.

Le Président (M. Morin) : Merci beaucoup. C'est que les collègues de la commission ont bien hâte d'échanger avec vous. Donc, on va débuter avec le député de Dubuc.

M. Simard : Merci, M. le Président. Mme Cloutier, vous parliez, tout à l'heure, de... On en a parlé un petit peu ce matin, mais j'aimerais vous entendre, parce que vous dites que vous avez travaillé auparavant, là, comme commissaire, mais vous étiez plus encline à travailler au niveau du développement de la zone agricole. Vous avez dit ça tout à l'heure.

Mme Cloutier (Suzanne) : Non.

M. Simard : Vous avez travaillé au niveau... Vous aviez... En tout cas, je ne sais pas si c'est une pensée que vous aviez, là, de travailler sur le développement de la zone agricole, mais est-ce que j'ai rêvé en vous entendant là-dessus tout à l'heure?

Le Président (M. Morin) : Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Non, bien, peut-être une précision. C'est que j'ai... Bon, j'ai lu rapidement ma présentation, là. Alors, non, quand je travaillais à la commission, mon jugement était basé sur la loi, les critères de la loi, évidemment.

Au niveau du développement, c'est sûr que, quand on prend des décisions, c'est en fonction d'un développement également futur, là, c'est-à-dire de respecter les conditions d'exercice de l'agriculture, là, maximum.

Il y a peut-être la question de la trousse au niveau des plans de développement de la zone agricole?

M. Simard : Oui, peut-être, là, ou, en tout cas...

Mme Cloutier (Suzanne) : Ah! ça, j'ai fait ça par la suite, après mon départ de la commission.

M. Simard : Mais vous avez quand même une expérience. C'est quoi, votre idée là-dessus? Est-ce que vous pouvez nous en donner... nous en faire part? Parce qu'on parle de la protection, mais on ne parle pas, jamais, de développement.. Mais, si vous avez quelque chose à nous proposer, moi, je serais prêt à vous écouter.

• (15 h 30) •

Mme Cloutier (Suzanne) : Bien, je pense... Bien, écoutez, là, c'est peut-être parce que j'ai travaillé là-dessus au niveau d'un guide, là, pour l'élaboration des plans de développement de la zone agricole, qui est excellent, d'ailleurs. Vous le trouverez sur le Web. Je vous invite à le lire. Je pense, c'est une occasion, à ce moment-là, d'établir une certaine solidarité entre les producteurs agricoles et les instances municipales. Ça permet un échange avec les producteurs. Les instances reconnaissent, à ce moment-là, les problèmes que les producteurs peuvent vivre, et par ailleurs les producteurs agricoles comprennent mieux aussi les contraintes, des fois, en termes d'urbanisme, auxquelles sont vouées les municipalités. Alors, à ce moment-là, c'est l'occasion, lors de ces plans de développement là de la zone agricole, d'établir les priorités de développement : dans quel secteur, en caractérisant la zone, quelle sorte de projet serait favorable pour revitaliser une région donnée, ou des choses comme ça.

M. Simard : ...

Le Président (M. Morin) : M. le député de Dubuc.

Mme Cloutier (Suzanne) : Je pense, à l'intérieur de ça, des plans de développement de la zone agricole, c'est quand même intéressant de faire ça, là.

M. Simard : O.K. Mme Cloutier, ce matin, avec M. Lebeau, on a parlé énormément de cohérence, et ça m'a amené à la question suivante : Vous avez dit d'emblée tout à l'heure qu'il y avait à peu près 90 % des gens qui étaient refusés, mais il y en avait quand même 10 % qui étaient... c'est-à-dire 90 % des gens qui étaient acceptés, 10 % qui étaient refusés, dans les demandes qui étaient soumises.

Mme Cloutier (Suzanne) : Ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit. C'est : il y a certaines demandes d'utilisation non agricole... Je ne sais pas si ça s'appelle comme ça encore, mais, quand j'étais là, à la commission, on appelait ça les groupes 1. C'est des petits dossiers, les agrandissements résidentiels, des choses comme ça, qui sont souvent autorisés, ou des bornes d'incendie ou des choses comme ça, là, qui étaient autorisées à 90 %.

M. Simard : ...

Mme Cloutier (Suzanne) : Mais ça n'incluait pas les exclusions, là-dedans, là, ou les morcellements, là, pas du tout.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Dubuc.

M. Simard : O.K. M. le Président, lorsqu'on parle de cohérence... Et aussi vous avez parlé d'arbitraire... Parce que, vous savez, il faut comprendre que les gens qui font des demandes... Effectivement, vous l'avez bien dit tout à l'heure, il y a des gens qui font des demandes qui ressemblent nécessairement à une autre demande et puis elle est refusée, alors que l'autre a été acceptée. Vous avez dit que ce n'étaient pas nécessairement les... un dossier peut se ressembler, et pas nécessairement le même. Mais c'est de là que l'ensemble des contribuables... des Québécois se posent la question : Est-ce que c'est parce que je n'ai pas pris le bon commissaire que je n'ai pas été reçu, je n'ai pas été accepté ou... Parce que je connais quelqu'un que, lui, ça a été accepté. Et est-ce que c'est ça dont vous voulez parler lorsqu'on parle de cohérence ou encore d'arbitraire? Parce que, ce matin, il y avait une recommandation à l'effet que c'était mieux de travailler avec deux commissaires pour étudier un dossier que de seulement travailler avec un commissaire. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Morin) : Oui, Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Ah! sur la question des deux commissaires?

M. Simard : Oui.

Mme Cloutier (Suzanne) : Bien, c'est sûr que c'est préférable de travailler... Maintenant, il y a une question de délai, là. Je ne veux pas m'immiscer dans l'administration, là, de la commission. C'est sûr qu'en prenant toujours deux commissaires, bien, à ce moment-là, ça risque d'allonger un peu le processus, mais par contre, en termes de cohésion, de cohérence, effectivement, ça favorise. Parce que, quand...

L'orientation préliminaire est toujours à deux commissaires. C'est suite à la rencontre publique... La rencontre publique est parfois juste un commissaire, et puis, bon, là, ce que décide le commissaire, là... Tandis que, quand tu es continuellement deux, c'est une façon de procéder, là, c'est...

M. Simard : M. le Président, le temps file, je vais laisser mes collègues...

Mme Cloutier (Suzanne) : Ça ne peut pas nuire, si c'est ça que vous voulez savoir. En termes de cohérence, ça ne peut pas nuire.

M. Simard : O.K. D'accord.

Le Président (M. Morin) : Merci, M. le député de Dubuc. M. le député de Beauce-Sud.

M. Dutil : Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, madame. Une des discussions qu'on a actuellement, c'est la situation démographique au Québec qui est très différente d'un endroit à l'autre. Et, plus particulièrement, je viens d'une région où j'ai fait l'estimé de la déperdition de population : j'ai 17 de mes 24 municipalités qui perdent de la population. Nous estimons que la gestion n'est pas la même pour la pression sur le zonage agricole qu'elle le serait ailleurs. Entre autres, un des sujets qui était élaboré souvent, c'est que, dans les petits villages, souvent la seule source d'emploi, ce n'est pas... il y en a en agriculture, bien sûr, mais c'est l'industrie. Curieusement, l'industrie, qui perd des plumes partout, en regagne dans nos petits milieux pour une raison bien simple : il n'y a pas d'alternative, hein? Comme je dis souvent, M. Dolan ne vient pas avec ses caméramans à Saint-Éphrem-de-Beauce, et on n'a pas beaucoup d'emplois de services, là, pour illustrer mon propos. Est-ce qu'il y aurait lieu d'envisager des modalités différentes en fonction de cette situation sur le plan démographique qui est très différente d'un endroit à l'autre?

Le Président (M. Morin) : Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Voyez-vous, il existe déjà des critères dans la loi qui permettent, au niveau de soit la viabilité des collectivités rurales... de prendre en compte cette réalité-là.

M. Dutil : ...ma question, M. le Président, si vous permettez.

Mme Cloutier (Suzanne) : Oui.

Le Président (M. Morin) : Oui. Allez, M. le député de Beauce-Sud.

M. Dutil : Oui, c'est vrai, vous avez tout à fait raison. Le problème, c'est la rapidité. C'est qu'il y a des municipalités, où, deux ans, c'est trop long, l'industrie est partie. Elle est partie, elle a dit : Je voulais m'agrandir, je n'ai pas pu m'agrandir, je m'en vais parce que j'ai d'autres problèmes à régler.

Mme Cloutier (Suzanne) : Bien là, c'est une question de délai, là.

M. Dutil : Oui, oui.

Mme Cloutier (Suzanne) : Vous êtes...

M. Dutil : C'est ce que je dis, là. Je dis : Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de trouver une façon... À tout le moins, il y a des sujets beaucoup plus complexes, je le comprends, il y en a qui sont moins complexes, il y en a où il n'y a pas de pression, vraiment, sur le zonage agricole. Il faut essayer de trouver... de sauver la région.

Mme Cloutier (Suzanne) : Oui.

M. Dutil : Ce matin, le président de l'UPA nous disait ce n'est pas de leur faute s'il y a de la dépopulation dans les régions, et j'en suis.

Mme Cloutier (Suzanne) : Non.

M. Dutil : Ce n'est pas de la faute de la loi, ça, on est d'accord. Mais, à tout le moins, est-ce qu'il y aurait une façon d'envisager que ces délais-là soient — pour ces régions-là où il n'y a pas vraiment de pression sur la zone agricole — vraiment diminués?

Le Président (M. Morin) : Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Écoutez, j'aurais de la difficulté à vous répondre, là, mais sûrement que... C'est sûr que, si on enlève, au niveau de la tâche de la commission, là... Si on lui donne un... si on la recentre sur son travail, là, sur les choses plus essentielles, probablement que ça va raccourcir les délais. Mais, dans le «day-to-day», là, je serais en... j'ai de la difficulté à vous répondre, là, là-dessus, là, d'avoir une réponse claire.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Beauce-Sud, une minute...

M. Dutil : Ça va.

Le Président (M. Morin) : Ça va? M. le député de Mégantic, 1 min 14 s.

M. Bolduc : Eh, mon Dieu Seigneur! J'aimerais vous...

Le Président (M. Morin) : ...votre question.

M. Bolduc : Merci. J'aimerais vous entendre, si c'est possible, sur le fait que... Vous parlez que le territoire agricole est encore perçu, jusqu'à un certain point, comme divisible. On nous a parlé qu'il y avait presque 4 000 hectares de terres qui étaient utilisés à d'autres fins qu'agricoles par année, une grande partie de ça dans la vallée du Saint-Laurent. Qu'est-ce que vous pensez de ça vs le développement dans des terres, comment je dirais, de valeur ajoutée moins élevée?

Le Président (M. Morin) : Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Bien, je pense qu'il devrait y avoir une protection accrue, effectivement, là, au niveau des sols propices à l'agriculture. Mais, cela dit, vous savez, quand je regarde ce qui est zoné réellement, en Gaspésie, c'est 8 %, hein, du territoire de l'ensemble de la région, hein, qui est zoné agricole. Il y en a d'autres... C'est 4 %, en Estrie. Je vais vous dire, là, à un moment donné, là, c'est quoi, là, on... Mais c'est sûr que la protection... les enjeux, là, les véritables enjeux, là, c'est au niveau des agglomérations urbaines et dans leur pourtour.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme Cloutier. Merci, M. le député de Mégantic. On se dirige vers M. le député de Berthier, pour six minutes.

M. Villeneuve : Merci, M. le Président. Bonjour, madame. On n'y échappe pas, et on aura l'occasion de discuter avec la commission tantôt, je reviens sur les délais. C'est l'irritant le plus évident, là. Vous avez été commissaire pendant 10... 11 ans?

Mme Cloutier (Suzanne) : 11 ans.

M. Villeneuve : 11 ans, et vous avez sûrement dû... Parce que moi, je me rappelle, à l'époque, on nous parlait de l'article 59, on nous disait : Ça va permettre d'avoir moins de demandes à la commission, parce qu'à ce moment-là tout ce qui est résidentiel ne pourra pas s'y retrouver de façon... Et là on a 60 MRC ou à peu près, là, qui ont utilisé l'article 59 de la loi, mais ça ne semble pas avoir eu d'effet... En tout cas, ce que je constate, c'est que les délais sont toujours aussi longs.

Vous avez été commissaire pendant 11 ans. Est-ce que vous, vous avez senti cet irritant-là au niveau des délais? Et, si oui, est-ce que vous auriez des pistes de solution à nous proposer? Et, sinon, comment cela ce fait-il qu'on nous en parle constamment, des délais trop longs qui font en sorte que les gens... Vous savez, les entrepreneurs... Et là-dessus le député de Beauce-Sud a tout à fait raison, un entrepreneur, là, si tu lui dis : Tu vas avoir la réponse dans deux ans, il est parti déjà, là, tu ne le retiendras pas. Et ça semble être... Et ce n'est pas juste l'entrepreneur, c'est... Puis, quand je dis «entrepreneur», ça peut être aussi un agriculteur, bien sûr, et... Bien, j'aimerais vous entendre là-dessus, par rapport aux délais.

Mme Cloutier (Suzanne) : Bien, écoutez, je...

Le Président (M. Morin) : Oui, Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Merci. Je réponds trop vite, hein?

Le Président (M. Morin) : Ça va aller. Ça va bien.

Mme Cloutier (Suzanne) : Écoutez, je serais mal placée. Ça fait déjà trois ans et demi, presque quatre ans, là, que j'ai quitté la commission, là...

M. Villeneuve : ...du temps que vous étiez là?

Mme Cloutier (Suzanne) : Du temps que j'étais là, ça allait relativement bien. Je ne sais pas, là. Bien, c'était rare, là, des... La majorité des décisions, des petits... ça sortait, là, aisément, là, deux mois, trois mois, là. C'est sûr que des grandes exclusions ou encore des dossiers... Je pense, dans Lanoraie, la prise d'eau, bon, j'étais sur le dossier. J'en parle spécifiquement parce que j'étais avec Me Pierre Turcotte à l'époque...

M. Villeneuve : ...

• (15 h 40) •

Mme Cloutier (Suzanne) : C'est un peu plus long, hein, et puis... Bon. Puis il y en a certains... Ça dépend quand la rencontre publique est cédulée, aussi. Alors, le processus, lui, il y a possibilité, là, c'est... Puis ça prend aussi des commissaires aguerris, hein? C'est délicat comme... Mais ça prend des bons commissaires.

Le Président (M. Morin) : Allez, M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Oui. Parce que, tantôt, on faisait remarquer que, depuis une dizaine d'années, c'est 14 % de ressources en moins à la commission, et il y a des dossiers qui, par ailleurs, sont de plus en plus complexes. Je pense, entre autres, au pipeline Énergie Est qui va demander une somme de travail considérable, et pourtant la commission, à ce que je sache, a un nombre de ressources limité. Mais enfin, bref, de ce que vous vous rappelez, les problèmes de délais n'étaient pas nécessairement présents à ce moment-là... des délais indus, là, n'étaient pas nécessairement présents.

Le Président (M. Morin) : Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Il y en avait quelques-uns, mais je ne sais pas dans quelle mesure. J'ai de la difficulté à comparer est-ce que c'est pire aujourd'hui, là, parce que je serais... étant donné que je ne le sais pas, là, je n'ai pas... Ça fait quand même, comme je vous dis, trois ans et demi, là, que j'ai quitté la commission, là.

M. Villeneuve : Je vais poser une question, et ne la prenez pas mal. Parce que, tantôt, on disait que, s'il y avait deux commissaires, ce serait plus cohérent que s'il y avait juste un commissaire. Et on dit aussi que, si on avait l'article 59 plus élargi, on pourrait avoir une plus grande cohérence. Évidemment, je ne crois pas que personne ici est contre le fait d'avoir une plus grande cohérence. Comment on explique — parce que la loi est la même dans l'interprétation — qu'un commissaire versus deux, on n'obtient pas la même cohérence au niveau des décisions rendues par la commission?

Mme Cloutier (Suzanne) : Je vous dis, ce n'est pas la...

Le Président (M. Morin) : Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Suzanne) : Merci. Écoutez, c'est parce que ça permet de discuter plus au niveau de... Quand on est deux, on ne perçoit pas nécessairement la même chose, puis ça permet un dialogue entre les commissaires également sur un point qu'a amené le demandeur. Il y a une discussion qui peut se faire, alors que, quand on est tout seul, bien, on est tout seul avec sa propre logique, hein? Alors, ça peut amener à parfois... Mais je ne vous dis pas que c'est, comment dirais-je, la solution, là, à une meilleure cohérence, ça peut être un outil, là, parmi d'autres.

Quant à l'article 59, évidemment, quand tu as une vue d'ensemble d'un territoire puis que tu décrètes dans un lieu donné, bien, que, dans ces conditions-là, bien, telle chose peut se faire, bien là, tout le monde est au courant, là. Alors là, la cohérence, elle est là, là. De toute façon, une fois que 59 est fait, bien, ils ne viennent plus à la commission. Sauf, là, ce qui se passe présentement, c'est qu'il y a beaucoup de municipalités... Il y a un 59, mais les municipalités, elles n'ont pas mis leur réglementation en vigueur. Ça fait que les demandes continuent à rentrer à la commission.

M. Villeneuve : Oui, c'est ça, les 30 ou 30 quelques MRC qui n'ont pas adopté leur deuxième schéma d'aménagement ne peuvent pas se prévaloir du 59, donc à eux de faire leurs devoirs pour s'en prévaloir et pouvoir utiliser la portée de l'article 59.

Écoutez, bien, en passant, il reste quelque 30 secondes, juste vous dire qu'effectivement... Puis je me rappelle de vous dans le dossier Lanoraie. Juste une petite histoire ici, là, petite note d'histoire, là, où Lanoraie avait fait une demande pour des puits en zone agricole et on avait effectivement eu une orientation préliminaire défavorable et, malgré tout ça, avec une rencontre qu'on avait eue avec la commission, on avait pu renverser la décision... pas la décision, mais l'orientation préliminaire défavorable.

Il y a quelqu'un qui nous a proposé ici de peut-être prévoir une étape supplémentaire dans les rencontres avec les analystes de la commission. Donc, une municipalité ou un individu qui dépose une demande pourrait rencontrer les analystes directement dans une rencontre formelle pour pouvoir étayer davantage son dossier. Vous en dites quoi, de cette proposition-là?

Le Président (M. Morin) : Merci, M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Ah! vous...

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Mirabel...

Une voix : ...

Le Président (M. Morin) : Ah! oui, M. le député de?

M. Schneeberger : Drummond—Bois-Francs.

Le Président (M. Morin) : Drummond.

M. Schneeberger : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Madame, moi, je voudrais... C'est sûr qu'on parle souvent de délais dans un... Il y a un délai au niveau de certaines régions, mais, moi, surtout, je regarde, il y a vraiment deux Québec : celui des grands centres et celui un peu plus en région éloignée, mais, des fois, il ne faut pas aller tellement plus loin. Et, souvent, les grandes villes comme Montréal ou les grandes agglomérations ont un certain pouvoir d'attraction, c'est-à-dire qu'ils ont aussi les moyens financiers de développer des zones industrielles et autres, O.K., ce que n'ont pas les petites municipalités parce qu'eux c'est trop d'argent et ils y vont un peu à la pièce. Ça fait en sorte que, souvent, des grands centres, ils se prennent d'avance et, même si c'est refusé, avec le temps, ils reviennent à la charge et oh! finalement ça vient accepté ou... en tout cas, peu importe. Et ce que je regarde actuellement, la carte, c'est que les plus belles terres... Parce qu'anciennement, si on revient à l'histoire, c'est que toutes les grandes villes ont été bâties dans des régions souvent qui étaient le plus propices à l'agriculture. C'est un fait, même. Et on voit, justement à Montréal, la Rive-Sud, Rive-Nord, qui sont les plus belles terres du Québec, et c'est là qu'il y a le plus grand nombre d'hectares justement qui partent, mais c'est les meilleures terres.

Et on a beau dire qu'on veut protéger les terres, mais protéger une terre qui est impropre à l'agriculture, tu ne protèges pas grand-chose. Actuellement, le but, ça serait de protéger vraiment les terres qui sont propres à l'agriculture, qui sont les meilleures. Et, dans ce cas-ci, on voit, là, depuis une dizaine d'années, là, tous les développements qui se sont faits, là, le long du Richelieu, région de Saint-Hyacinthe, la Rive-Sud surtout, et on s'est dit : Pour quelle raison, à ce moment-là, eux peuvent développer autant que ça, même que ce soit qu'ils ont des blocages? Et surtout trouvez-vous qu'on devrait plus y aller à la pièce? C'est-à-dire qu'on sait qu'il y a une zone qui est très, très bonne à la culture. Par contre, dans cette zone-là, il y a peut-être des coins qui sont moins propices par rapport à la dénivellation, la structure. Des fois, on voit des approches d'autoroute, des choses comme ça, et pourtant c'est des zones des fois qu'il ne se passe rien parce que, bon, on sait que les contracteurs, eux aussi, c'est plus facile d'aller se bâtir dans une zone plus planche où il n'y a pas de dynamitage à faire parce qu'il n'y a pas de roches et autres. Mais est-ce que justement on ne devrait pas prendre des considérations de miser là-dessus et vraiment sauvegarder les belles parcelles de terrain?

Le Président (M. Morin) : Mme Cloutier.

M. Schneeberger : Vous, vous voyez...

Mme Cloutier (Suzanne) : Je ne sais pas, votre question, c'est...

M. Schneeberger : Bon. Je me répète. C'est qu'actuellement on y va par lots. On dézone des grands territoires. Et souvent à quelques kilomètres à côté, parce que ce n'est peut-être pas tout à fait dans le centre ou proche de la ville, mais il y aurait peut-être des zones pour la construction résidentielle qui seraient peut-être plus propices tout en ne pas bloquant le développement, mais en protégeant les terres. Et actuellement, moi, à mes yeux, ce n'est pas ça que je vois, là. C'est que, souvent, les plus belles parcelles de terrain, elles partent, elles finissent par partir avec les... Je prends en même temps la vallée du Richelieu. Je regarde, mettons, sur le bord de la 20, là, de chaque côté. Avant ça, c'étaient des champs; aujourd'hui, bien, il y a un cinéma. Tu sais, on est en... Et moi, je ne vois pas... Le développement durable là-dedans, là, je ne le vois pas, là.

Mme Cloutier (Suzanne) : Bien, il faut faire attention...

Le Président (M. Morin) : Mme Cloutier, en 30 secondes.

Mme Cloutier (Suzanne) : Il faut faire attention, parce que, lors de la révision de la zone agricole, là, il y a eu beaucoup de terrains de bonne qualité aussi, dans ces zones-là, qui ont été sortis de la zone agricole et qui commencent à se développer, hein, notamment sur le bord de la 20, là.

Par ailleurs, quand je dis, au niveau des agglomérations urbaines, les enjeux sont là, mais il y a des très belles terres à Côte-du-Sud puis dans le Bas-Saint-Laurent aussi, là. Il faut faire attention, là, tu sais, ce n'est pas...

M. Schneeberger : Mais la pression est beaucoup moindre.

Mme Cloutier (Suzanne) : Bien, c'est une question de démographie.

M. Schneeberger : Bien oui, c'est ça.

Mme Cloutier (Suzanne) : C'est sûr que c'est une question économique.

Le Président (M. Morin) : Je me dois de vous arrêter. Notre temps est écoulé, madame.

Mme Cloutier (Suzanne) : Ah!

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme Cloutier.

M. Schneeberger : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Morin) : Merci au député de Drummond—Bois-Francs. M. Cartier, vous avez vu de quelle façon on procède, je vous donne la parole.

• (15 h 50) •

M. Cartier (Jacques) : Alors, merci, M. le Président. Alors, M. le Président de la commission, Mme et MM. les députés, merci de votre invitation à participer à cette audition publique sur l'examen des orientations, des activités et de la gestion administrative de la Commission de protection du territoire agricole du Québec.

Alors, pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis producteur céréalier et producteur de légumes à Saint-Aimé, près de Sorel, et aussi ancien producteur laitier. Je suis surtout un passionné de l'agriculture. Et, pour moi, chaque acre de terre propice à la culture doit être cultivée comme un jardin et surtout doit être protégée.

De 2006 à 2012, j'ai également occupé le poste de commissaire à la Commission de protection du territoire agricole du Québec. J'ai quitté ce poste à la fin de mon mandat, sans amertume et sans le désir de renouveler l'expérience. Je n'ai pas non plus travaillé comme consultant par la suite. D'entrée de jeu, il m'apparaît fondamental de souligner la grande importance de la Loi de protection du territoire et des activités agricoles et le rôle majeur joué par la commission pour préserver notre territoire agricole et y permettre le maintien et le développement des activités agricoles.

Aujourd'hui plus que jamais, les municipalités font preuve d'un appétit féroce envers le territoire agricole pour l'agrandissement de leur périmètre urbain et l'implantation de projets soit résidentiels, commerciaux et industriels. Beaucoup de ces pressions se font sur le territoire de la vallée du Saint-Laurent, à partir de la frontière de l'Ontario jusqu'à l'est de la ville de Québec principalement, là où les terres sont les plus propices à l'agriculture et où l'on retrouve les conditions climatiques les plus favorables. Chaque parcelle agricole soustraite est une perte nette et irréversible pour l'agriculture.

Malgré ça, toutes les municipalités souhaitent avoir leur propre projet de développement chez elles, que ce soit un parc industriel, quartier résidentiel, et tous ces projets sont justifiés et justifiables à leurs yeux, parfois même lorsque les maires sont aussi agriculteurs. Pourtant, ces projets sont bien souvent localisés sur les meilleures terres, sur les terres au meilleur potentiel agricole de leur territoire.

Pour cette raison, il est essentiel que le gouvernement réaffirme l'importance de protéger le territoire agricole québécois et s'engage à maintenir les pleins pouvoirs décisionnels à la commission. Malgré les prétentions du milieu municipal, la commission est certainement la seule instance possédant la vision d'ensemble pour appliquer de façon cohérente les critères que le Québec s'est donnés dans la loi afin de préserver le peu de son territoire propice à l'agriculture. La commission est également moins sujette aux jeux de pressions locales et régionales entourant les demandes.

Cela ne veut pas dire, cependant, qu'il faille considérer la zone agricole comme un sanctuaire immuable. Par exemple, l'application de l'article 59 — les demandes à portée collective — est présentement réservée à l'usage résidentiel. Certaines zones identifiées comme moins propices à l'agriculture pourraient également être destinées à d'autres usages non agricoles outre le résidentiel, que ce soit du commercial, industriel, par exemple.

La commission pourrait donc démontrer davantage d'ouverture pour des projets localisés dans les zones agricoles de moins bonne qualité et, par le fait même, éviter de se réfugier derrière son critère de préservation de l'homogénéité du territoire pour refuser certaines demandes.

La commission devrait également tenir compte des unités thermiques et des conditions climatiques les plus propices à l'agriculture dans l'évaluation des demandes. Ces réalités influencent grandement le potentiel de culture des terres agricoles et la possibilité d'en retirer une rentabilité pour l'agriculteur.

Pour encourager le développement de l'agriculture en zone agricole, la commission devrait par ailleurs traiter plus promptement et avec plus d'ouverture les demandes de morcellement des terres en plus petites superficies à des fins agricoles. Il s'agit d'une façon de favoriser l'implantation des jeunes, de la relève non apparentée et de d'autres passionnés de l'agriculture.

Il s'agit également d'un moyen de réduire les coûts d'acquisition d'une terre pour une entreprise agricole lorsqu'elle n'a pas réellement besoin d'une si grande superficie. En production maraîchère par exemple, une ferme peut obtenir une très bonne rentabilité sur quelques hectares cultivés. C'est d'autant plus vrai en production serricole. Il ne faut pas oublier non plus les productions animales spécialisées comme le porc, le lait et la volaille, qui peuvent être implantées sur de petites superficies en laissant le reste des terres agricoles à des producteurs spécialisés en culture des sols. Bien entendu, quelques projets autorisés ne pourraient jamais voir le jour ou disparaître après quelques années, mais ce n'est pas une raison suffisante pour ne pas démontrer plus d'ouverture.

Récemment, la CAPERN s'est intéressée au présumé phénomène d'accaparement des terres agricoles. Alors, j'ai constaté, en marge de cette commission, que, s'il existe un consensus à l'extérieur du monopole syndical de l'UPA et de son réseau d'influence, c'est que le Québec n'a pas besoin d'un registre de transactions des terres agricoles confié à la commission ni une nouvelle société d'État nommée SADAQ. Déjà, plusieurs producteurs sont insatisfaits des longs délais de traitement de leur demande à la commission. Qu'en sera-t-il pour un tel registre chargé de suivre toutes les transactions ou d'une SADAQ qui veut contrôler ces mêmes transactions?

Quant aux enjeux de gouvernance de la commission, trois éléments méritent d'être soulignés. En premier lieu, discutons du processus de nomination des commissaires, tout en soulignant que mon propos ne vise en aucun cas à juger de la compétence des commissaires actuels. À mon avis, le mécanisme de choix des commissaires et des critères de sélection devrait être revu pour assurer le maintien d'une diversité des compétences utiles à la commission dans le cadre de ses décisions. Alors, j'ai marqué entre parenthèses : «Notaire, avocat, géographe, agronome, agriculteur, etc.»

Les commissaires devraient également se sentir plus indépendants du pouvoir politique ou des appuis les ayant menés à se faire nommer commissaire. En contrepartie, on pourrait envisager de réduire la durée du premier mandat d'un nouveau commissaire, par exemple à deux ans ou à un maximum de trois ans, à l'image d'une probation avec démonstration des compétences associées au rôle de commissaire. Le renouvellement du mandat pourrait alors être effectué après évaluation et bonne conduite, en vue de mener à une permanence.

Les commissaires devraient finalement être préservés des pressions politiques dans le cadre des demandes analysées. Ceux qui critiquent la commission sont évidemment ceux qui se sont fait dire non.

Le second élément concerne le recours au Tribunal administratif du Québec pour contester les décisions de la commission. La Loi prévoit que le recours au TAQ est uniquement possible dans le cas d'une erreur de droit ou de fait déterminant. Dans certains dossiers durant l'histoire, le TAQ a eu tendance à accepter de reprendre l'analyse complète de certains dossiers et de refaire le travail de la commission.

Le dernier enjeu de gouvernance concerne la reconnaissance accordée à l'organisme syndical accrédité. L'article 13.1 de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricolesstipule en effet que l'association accréditée est reconnue comme ayant l'intérêt requis pour intervenir sur une demande; l'article 58.4, quant à lui, que la commission doit demander à une association accréditée de lui transmettre une recommandation sur les demandes dans les 45 jours.

Comment peut-on justifier qu'une loi accorde à un syndicat un droit de regard et d'influence sur des transactions privées auprès d'une commission censée être indépendante et neutre? Cette disposition a pour conséquence d'amener certains demandeurs à négocier avec l'UPA a prioridu dépôt des demandes à la commission. Il s'agit clairement d'une position plus que discutable accordée à l'organisme syndical accrédité, notamment dans le cadre de l'article 59. Dans un tel régime, qu'en est-il des demandes de producteurs agricoles administrateurs des différentes instances de l'UPA qui occupent une position avantageuse? En revanche, qu'advient-il des demandes des producteurs qui n'ont pas ces relations privilégiées?

En terminant, je désire porter à l'attention de la CAPERN deux enjeux fondamentaux pour la pérennité du territoire agricole et du développement de l'agriculture en marge de la protection du territoire agricole. D'abord, bien que la loi protège les terres agricoles, il est désolant de constater que beaucoup de bonnes terres agricoles retournent en friche. Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec devrait examiner de nouveaux moyens pour stimuler la pratique de l'agriculture sur les terres agricoles et favoriser leur remise en culture. On ne peut s'engager à protéger le territoire agricole pour la pratique de l'agriculture d'un côté et, de l'autre, accepter la perte de potentiel agricole sur ces mêmes terres par la reprise des friches herbacées et arbustives.

Ensuite, les normes environnementales empêchent actuellement les agriculteurs de prendre de l'expansion par l'interdiction de mettre en culture de nouvelles superficies de terres agricoles. Non seulement cette règle constitue un frein pour le développement des fermes existantes, mais elle oblige en plus les agriculteurs à se tourner vers des terres déjà en culture et appartenant à d'autres producteurs agricoles, ce qui crée une surenchère. Évidemment, ces restrictions proviennent d'enjeux environnementaux soulevés au début des années 2000, suite à l'adoption du Règlement sur les exploitations agricoles. Cependant, plus de 10 ans plus tard, force est de constater que les connaissances ont grandement évolué, tout comme les pratiques de production qui permettent de minimiser les risques d'impacts négatifs sur l'environnement.

Le Président (M. Morin) : Je vous invite à conclure, M. Cartier.

M. Cartier (Jacques) : Oui. Pour conclure, je désire rappeler une recommandation du rapport Ouimet, de 2009, qui me semble pertinente : la création d'un indicateur de mesure du potentiel des terres agricoles cultivables. Cet indicateur pourrait être créé à même les outils de géomatique existants, permettant d'avoir un portrait plus exact de la quantité et surtout de la qualité des terres par région qui sont disponibles et propices à l'agriculture à long terme. Il s'agirait d'une information supplémentaire aux statistiques actuelles tenues par la commission, permettant d'avoir une réelle appréciation du potentiel de la zone agricole disponible.

Le Président (M. Morin) : Merci, M. Cartier.

M. Cartier (Jacques) : Merci.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Beauce-Sud, vous voulez débuter l'échange?

• (16 heures) •

M. Dutil : Oui. Merci, M. le Président. M. Cartier, bienvenue. Deux points que je veux soulever : les normes environnementales et le morcellement. Les normes environnementales, là, ce que je comprends, on en discute depuis assez longtemps, c'est qu'elles ont été imposées en 2000 pour des raisons valables, puis, aujourd'hui, on ne sait pas si ces raisons-là sont encore valables, mais c'est encore imposé. Alors, les agriculteurs se plaignent énormément, de dire : Regarde, j'aurais acheté cette terre-là, mais elle est en friche et je n'ai pas le droit de la remettre en culture. C'est le premier point, que je pense clair. Je veux juste voir si je comprends bien ce que vous nous dites.

Mais le deuxième point, je vous le demande tout de suite : Comment on pourrait en arriver à avoir une procédure de morcellement simple et correcte pour les fins agricoles? Je vous soulève le point que nous constatons. Vous l'avez mentionné tantôt, il y a des terres qui peuvent être beaucoup plus petites pour certaines productions qui pourraient être acceptées, mais les gens ne vont même pas à la commission pour demander le morcellement, pas parce qu'elles seraient refusées, parce que les coûts pour demander le morcellement dépassent l'entendement pour eux. C'est trop long, c'est tannant, ça prend trop de temps, puis ils ne sont plus là, alors que, oui, ce serait probablement une façon d'activer l'agriculture dans des milieux comme les nôtres.

Le Président (M. Morin) : M. Cartier.

M. Cartier (Jacques) : Oui, M. le Président. Il y a une chose qui est claire pour moi, c'est que l'agriculture... Je vous l'ai mentionné tantôt, je suis un passionné d'agriculture, puis l'agriculture, c'est une spécialité. On ne devient pas producteur agricole par défaut, on le devient par choix. Et le problème, souvent, c'est que, dans les productions spécialisées, même dans les productions animales... Il y a une différence fondamentale entre être un producteur spécialisé, comme exemple en production porcine... Puis, si on exige de ce même producteur là de conserver des superficies énormes, soit pour les épandages ou faire de la production végétale, écoutez, on perd la possibilité... Cette personne-là ne peut pas être un expert aux deux endroits et va laisser soit ses terres à l'abandon ou les laisser à d'autres producteurs parce qu'eux autres n'auront pas le temps de s'en occuper et/ou vont négliger leur production principale.

Alors, c'est pour ça que, spécialement en production maraîchère, en production sous serre ou dans d'autres types de production, on pourrait facilement accepter le morcellement des terres. Et, faites-vous-en pas, ces terres-là vont rester en agriculture, vont être retransférées aux agriculteurs. Regardez la surenchère sur les terres à l'heure actuelle, c'est parce que tous les producteurs qui sont actifs, dynamiques en veulent, des terres disponibles. Alors, qu'il y ait une parcelle de cinq ou 10 hectares, elle sera toujours possédée par un producteur qui souhaitera l'exploiter.

M. Dutil : Ma question précise est la suivante : Si on permet le morcellement, est-ce que ça doit passer par la CPTA, qui prend deux ans pour prendre une décision — c'est ça, la question — ou bien donc si on peut éviter de passer par la CPTA en ce qui concerne le morcellement, justement, parce qu'il y a d'autres façons de faire, puis on estime que les agriculteurs vont être assez fins pour prendre intérêt pour eux-mêmes, alors qu'il n'est pas question de remettre en question le zonage lui-même, c'est juste l'utilisation agricole qui en est faite?

M. Cartier (Jacques) : Il est clair pour moi que ça doit rester dans les mains de la commission. Par contre, au niveau du délai, le processus pourrait être différent justement parce qu'on traite un cas spécifique de morcellement et non pas d'utilisation non agricole. Alors, à l'intérieur de la loi et à l'intérieur du mandat de la commission, cette façon de faire là pourrait être traitée de façon différente. Et, quand on parle de morcellement, dans 90 % des cas, on parle d'agriculteurs ou d'agriculteurs potentiels. Alors, on ne parle pas de gentlemen farmers ou de citadins, on parle d'agriculteurs, alors il y aurait moyen de traiter ces dossiers-là avec plus de célérité.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Beauce-Sud, ça va? M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Cartier, bonjour, madame. Ça me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur cet enjeu très important de l'agriculture. Moi, ce que je voudrais savoir, c'est qu'actuellement, puis dans la poursuite du... de mon collègue de Beauce-Sud, il y a plusieurs types de morcellement : on peut faire du morcellement pour faire une pépinière, on peut faire du morcellement pour faire de la culture maraîchère. Puis ça, ça a un hectare, quatre hectares, puis là, après ça, on ne peut pas diviser les terres de moins de 100 hectares... ou de 200 hectares pour en avoir au moins deux pièces de 100 hectares. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Juste pour être clair, est-ce qu'on n'a pas un peu d'inconsistance?

M. Cartier (Jacques) : Bon, je vais vous citer un cas qui a été mon cas. En 2004, j'ai voulu acquérir une terre, et c'était 24 hectares, puis, dans la région de Saint-Hyacinthe, 24 hectares, c'est quand même un élément important. Le producteur qui me vendait, c'était un producteur qui était... qui s'acheminait vers la retraite, et lui, il voulait conserver environ 80 hectares, et cette demande-là à la commission a été refusée parce que la propriété du cédant était contiguë aux propriétés que lui gardait. Et ça a pris un délai qui a été quand même assez important, et on est allés en révision parce que la commission nous avait refusé le dossier, et c'est ça qui m'a incité à me présenter comme commissaire.

Alors, c'est pour ça que de dire... Pour moi, ce n'est pas une question de superficie de 40, 80 ou 100 hectares, mais c'est une question d'utilisation du sol. Lorsqu'on veut acquérir une terre comme agriculteur, on veut le faire pour cultiver, on ne veut pas le faire pour autre chose que ça, et loin de nous l'intérêt de faire du développement résidentiel ou quoi que ce soit. Et c'est pour ça que, dans mon propos, ce que j'ai mentionné, dans les régions, on a des secteurs qui sont beaucoup moins propices, et l'élément de morcellement s'applique, pour moi, pour des usages agricoles, des utilisations agricoles et non pas pour des utilisations autres que l'agriculture.

M. Bolduc : Moi, j'ai une autre question ici. Vous nous mentionnez à votre page 3 : «Récemment, la CAPERN s'est intéressée au [...] phénomène d'accaparement des terres agricoles...» Et : «J'ai constaté en marge [qu'il] existe un consensus à l'extérieur du monopole syndical de l'UPA et de son réseau d'influence, c'est que le Québec n'a pas besoin d'un registre [de] transactions des terres agricoles confié à la CPTAQ...» J'aimerais vous entendre un peu plus là-dessus, sur quoi vous basez ce commentaire-là, parce que je le considère très intéressant.

Le Président (M. Morin) : M. Cartier.

M. Cartier (Jacques) : Bon, écoutez, ce qu'on a entendu de la CAPERN il y a un mois et demi environ ici, on nous a cité le cas de Pangea, et ça a été repris dans d'autres audiences publiques et des autres intervenants dans le dossier. Ce qu'on a mentionné, dans le cas de Pangea, on parlait de sept producteurs agricoles établis. Il y a 29 000 fermes au Québec. Est-ce qu'on va faire subir aux 29 000 propriétaires d'entreprises agricoles des contrôles, des restrictions pour une dizaine de terres établies ou une dizaine de transactions — mettez-en une quinzaine?

Quand j'ai commencé en 1975, ces mêmes joueurs là, ils avaient des noms différents, mais on avait les commerçants de terres, on avait exactement le même phénomène qui se produisait. Dans le temps, on n'en entendait pas parler. Là, on a sorti un modèle en exemple, on a dit : C'est dangereux pour l'agriculture au Québec. Ces mêmes phénomènes là existaient il y a 30 ans dans la région de Saint-Hyacinthe. Ils sont disparus parce que la valeur des terres a trop augmenté. Et on essaie d'en faire un cas social puis on mélange le Québec avec l'Afrique, avec le Brésil, avec tout ce qu'on veut, et ça, ça devient dangereux pour nous autres, agriculteurs.

Le Président (M. Morin) : M. le député de...

M. Bolduc : M. le Président, une dernière question, pour moi, qui est bien importante, c'est : Est-ce qu'on devrait, selon votre opinion, là, protéger de façon différente, si on veut, les plus belles terres de l'Amérique du Nord, les terres de la vallée du Saint-Laurent, puis nos terres de roche dans nos régions où est-ce que les arbres se déracinent au vent parce qu'il n'y a pas de terre végétale? Qu'est-ce que vous pensez de ce commentaire-là?

M. Cartier (Jacques) : Moi, je vais vous dire que, curieusement, même dans votre région, dans Mégantic ou ailleurs, une terre qui est propice à l'agriculture, où qu'elle soit au Québec, mérite d'être protégée. Par contre, c'est ce que j'ai mentionné tantôt, ce qu'on ne tient pas compte aujourd'hui, puis qu'on devrait tenir compte de plus en plus, comme ça existe au niveau de La Financière agricole, du potentiel agricole. Un sol de classe 7, quand vous avez 1 900 unités thermiques, oubliez ça, vous ne pourrez pas produire grand-chose si le sol n'est pas propice à l'agriculture. Mais, quand vous avez du sol de classe 1, classe 2 ou classe 3 dans Mégantic, pour moi, il a autant de valeur qu'un classe 2 à Saint-Hyacinthe. Ça, pour moi, c'est important de le conserver. C'est votre avenir, c'est l'avenir de l'occupation de votre territoire.

M. Bolduc : Donc, ce que vous nous dites, c'est qu'on devrait, finalement, procéder plus en un classement puis à une valorisation de notre territoire agricole au lieu, comment je dirais ça, de le défendre sans égard. Oui? Non?

M. Cartier (Jacques) : Bien oui, puis c'est pour ça que je vous ai mentionné tantôt, quand j'ai repris, dans ma conclusion, la proposition qui avait été faite par M. Ouimet, de le détailler en qualité puis en quantité, qu'est-ce qui est disponible dans chacune des régions, tout comme on aurait aussi une évaluation des sols qui sont peu propices à l'agriculture qu'on tient mordicus à garder en activité agricole.

M. Bolduc : O.K. Donc, une autre chose, c'est, là où est-ce qu'on a beaucoup de proximité d'usages autres qu'agricoles, des producteurs — puis M. Groleau nous en a fait mention aujourd'hui — qu'il y a de plus en plus de gens qui se plaignent des odeurs, des bruits, des ci et des ça. Est-ce que vous avez une opinion à ce sujet-là? Parce que les agriculteurs se sentent un peu frustrés par la proximité des non-agriculteurs, ce qui fait qu'on a une espèce de conflit de fond, là.

Le Président (M. Morin) : M. Cartier, moins de 30 secondes.

M. Cartier (Jacques) : Oui, le conflit a été beaucoup plus important il y a plusieurs années. Je vous dirai, la relation entre les agriculteurs et des non-agriculteurs s'est beaucoup améliorée au cours des années. On a beaucoup moins cette pression-là. Écoutez, j'ai des terres dans quatre municipalités, dont collées sur des périmètres urbains, et on sent beaucoup moins cette pression-là qu'on l'a sentie il y a plusieurs années. On n'a plus cet effet-là de pression. Regardez, des années où des... à propos des constructions de porcheries, c'étaient des débats interminables. On a moins cette pression-là aujourd'hui.

Le Président (M. Morin) : Merci. Merci, M. Cartier. Merci, M. le député de Mégantic. Le député de Berthier, s'il vous plaît.

M. Villeneuve : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Cartier. J'écoutais, avec l'échange que vous aviez... J'ai déjà eu l'idée de m'acheter un bout de terrain, qui était une terre, dans le fond, et je voulais savoir de quoi elle était composée. Je suis allé sur le site... de mémoire — ça fait quand même un certain temps — c'était, je crois, Agriculture Canada, et là on a exactement le classement de la terre, on a les indices thermiques. Tout est là, tout est disponible ou presque, là. Je ne sais pas si c'est à la grandeur du Québec, mais, dans le secteur où j'étais, c'était déjà disponible. Et j'imagine que vous, comme commissaire, à l'époque, vous aviez, pour rendre une décision, à vous fier à ces critères-là qui sont existants et vous deviez les utiliser inévitablement pour rendre des décisions?

• (16 h 10) •

M. Cartier (Jacques) : Ce qui était utilisé, à la commission, surtout, dans le temps, c'était la classification des sols, quand on parlait des classes des sols de 1 à 7. Ça, c'était un élément qui était utilisé. La question des unités thermiques, c'était facultatif, puis ce n'était pas... Dans un des critères, ce n'était pas un des éléments d'évaluation qui était nécessairement reconnu. Par contre, ça a une influence majeure. Je prends l'exemple dans votre comté : quand on est proche du Saint-Laurent versus quand on va à Saint-Jean-de-Matha, on ne parle pas de la même chose, puis on parle pourtant du même comté, et vous pouvez avoir un sol de classe 2 à Saint-Jean-de-Matha versus un classe 2 à Lanoraie, et on ne parlera pas de l'agriculture de la même façon du tout. Alors, ce critère-là devrait aussi rentrer en ligne de compte.

M. Villeneuve : Est-ce que je me trompe ou souvent on entend dire : Bien, il faudrait développer, mais on oublie de dire que l'agriculture, c'est du développement, c'est du développement économique, c'est de l'occupation du territoire? Parce que, des fois, les gens, ils disent : Ah! ce secteur-là de telle municipalité, à l'est, on devrait développer ça. Mais c'est déjà des champs en culture, c'est déjà du développement. Est-ce que je me trompe ou les gens, on a tendance à penser que l'agriculture, dans le fond, ça n'a peut-être pas la même valeur — on parlait de catégorie 1, 2, 3, 4 — dans la tête de certaines personnes?

M. Cartier (Jacques) : Bien, effectivement, écoutez, dans la région de Sorel, comme exemple, l'agriculture, c'est le deuxième secteur économique après Rio Tinto, Fer et Titane, avec des ventes ou chiffre d'affaires au-delà de 100 millions par année, sauf que ce sont 375 entités isolées. Alors, vous ne pouvez pas...

Le chiffre d'affaires d'une entreprise comme la mienne, ça peut jouer entre 1,5 million, 2 millions par année. On emploie quatre à six employés saisonniers, dépendamment des périodes. Ça n'a aucun impact au niveau régional. Les gens ne cumulent pas l'ensemble des producteurs agricoles.

Je vais vous donner l'exemple de la MRC voisine, Maskoutains. Chaque maire, ou à peu près, de chaque municipalité a son projet de développement résidentiel et, je vous dirai, 60 % des maires sont des agriculteurs. Je ne sais pas s'ils veulent avoir une médaille à l'entrée de leur village, s'ils veulent avoir une plaque dans leur parc, mais c'est malheureux que ça soit dans... Dans notre MRC et dans tout le pourtour de la région de Montréal — parce que je le connais plus — c'est aberrant de voir les demandes. Bien, à chaque fois... On a même, dans certaines régions, donné des terrains pour faire du développement résidentiel, puis après ça on va voir la commission, demander une nouvelle exclusion pour avoir d'autres résidences. Puis là on donne comme exemple : Bien, ça nous prend... Ah! il faut maintenir les services de l'école, il faut faire ci, il faut faire ça. Mais l'agriculture, on est les principaux pourvoyeurs d'emplois dans les régions, parce qu'il n'y a pas seulement que les emplois directs sur ma ferme. Demain matin, moi, j'ai besoin d'un mécanicien pour réparer de l'équipement agricole, j'ai besoin des services techniques d'agronomes, de support technique pour mes productions de pois, de haricots, de maïs sucré...

Le Président (M. Morin) : Oui. M. Cartier...

M. Cartier (Jacques) : On embauche une multitude de personnes, puis ce n'est pas reconnu.

Le Président (M. Morin) : On reconnaît votre passion, mais le député de Berthier veut vous poser quelques questions.

M. Villeneuve : M. le Président, il était sur une envolée, et j'ai... Je m'excuse de vous avoir coupé, mais je comprends, là, puis je suis tout à fait d'accord avec vous. Je pense que les membres de la commission le sont aussi. C'est une activité économique assez extraordinaire, c'est un moteur économique.

Peut-être au niveau des morcellements, parce que... puis on aura l'occasion de poser la question à la commission tantôt, et peut-être pourront-ils préparer la réponse, peut-être que vous, vous l'avez, mais c'est quoi, la moyenne? Quand les gens font... Bon, je vous donne un exemple — je n'ai aucune idée, là — mettons qu'il y a 100 demandes de morcellement par année — je ne sais pas, je n'ai aucune idée — c'est quoi, la moyenne? C'est-u trois mois, six mois, deux ans? Ça prend combien de temps avant que la commission... Parce que ça me semble assez simple. Quoiqu'il faut toujours se méfier des questions qui nous semblent simples, des fois la réponse peut être complexe. Vous en pensez quoi?

M. Cartier (Jacques) : Je ne répondrai pas sur les délais de la commission. Un peu comme Mme Cloutier, ça fait quand même depuis mai 2012 que j'ai quitté, je ne veux pas intervenir de cette façon-là. Sauf que, pour moi, c'est ce que j'ai mentionné tantôt, je cultive des parcelles de quatre, cinq hectares, puis j'en cultive de 90 hectares, quand on veut avoir une propriété, si on est obligé de morceler, comme exemple, la différence d'une terre en culture avec un boisé, comme exemple, une érablière où je n'ai aucune aptitude, on pourrait avoir plus de latitude dans ces éléments-là, qu'on ne retrouve pas nécessairement. Et je ne veux pas répondre au niveau de la commission.

Peut-être un point... Tantôt, vous avez parlé que je suis passionné. Mes deux confrères, mes anciens confrères d'en arrière, ont été aussi producteurs agricoles, la seule différence, c'est que moi, je le vis encore aujourd'hui puis peut-être avec plus de passion que je le vivais il y a 30 ans ou 35 ans. Ça s'améliore avec les années.

Le Président (M. Morin) : Oui, merci, M. Cartier. M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Oui. Tantôt, M. Cartier, vous avez abordé la question de la nomination des commissaires. Vous disiez... Vous sembliez... En tout cas, je ne veux pas mettre des paroles... de fausses paroles, mais vous sembliez dire que ça prendrait une plus grande diversité, une meilleure sélection, et vous avez parlé de pressions politiques. On sait que la Commission de protection du territoire agricole, à tout le moins au niveau du politique, elle devrait en être exempte, des pressions politiques, parce que c'est une commission. Est-ce que vous avez subi des pressions politiques ou vous avez vu des gens autour de vous en subir? Pourquoi vous apportez cette affirmation-là aujourd'hui?

Le Président (M. Morin) : 40 secondes, M. Cartier.

M. Cartier (Jacques) : Oui, j'apporte cette précision-là... Je n'en ai pas subi, puis je n'ai pas mentionné des interventions quelles qu'elles soient. Sauf que ce que je mentionne, c'est que les commissaires, c'est pour ça que je vous le réitère... Ce que j'ai dit, c'est que les commissaires devraient être nommés pour une période de probation. En entreprise privée, quand on engage quelqu'un, on veut être certain des compétences puis... que les compétences soient reconnues, on maintient une permanence. Aujourd'hui, on n'est pas sûrs. Quand un commissaire est nommé, il ne sait pas, à la fin de son mandat, s'il va être renouvelé ou pas. Alors, s'il a à travailler certains dossiers qui ont une incidence politique, bien, il est toujours... Même s'il n'a pas de pression, la pression vient de lui-même, en disant : Écoute, si je refuse telle décision, je ne serai pas renommé. Et vous avez des exemples ce matin, M. Legault, qui a été sorti de la commission, une personne de 52, 53 ans, avec 25 ans d'expérience.

Le Président (M. Morin) : Merci. Merci, M. Cartier. Madame... Oui, Mme la députée de Mirabel. Un peu plus, je vous oubliais, là.

Mme D'Amours : Merci, M. le Président. M. Cartier, bonjour. Vous parliez tantôt, là, des zones dynamiques. Mais, dans les zones dynamiques, là... qui est recensée par Statistique Canada, dans les zones dynamiques. Ce matin, après la commission, j'ai parlé avec M. Groleau, puis il me donnait raison en disant qu'il y a des zones où c'est dynamique et c'est des terres qui sont cultivables, mais il y a certains endroits où ce n'est pas cultivable, mais c'est vraiment dans la zone dynamique. Est-ce que, d'après votre expérience et selon votre expérience comme producteur agricole — vous avez plusieurs terres — il y a lieu de regarder cette facette-là en disant : Oui, c'est une zone dynamique, mais qu'à l'intérieur de la zone dynamique il pourrait y avoir une ouverture à certains endroits qui auraient été déterminés par l'UPA régionale, la MRC, qui soit en accord avec le schéma d'aménagement?

M. Cartier (Jacques) : Il faut faire quand même une nuance. C'est que vous entendez certains producteurs qui vont vous dire qu'ils ont chacun des petites parcelles qui ne sont pas propices à l'agriculture. Il ne faut pas que ça devienne ces secteurs-là. Dans l'ensemble d'une MRC ou d'une région donnée, il y a des secteurs dynamiques, il y a des secteurs agroforestiers puis il y a des secteurs qui sont moins dynamiques pour l'agriculture. Ces secteurs-là pourraient justement profiter de plus d'ouverture. Mais il ne faut pas que ça devienne des cas locaux, ou municipaux, ou régionaux, dans le sens que chacun va avoir besoin de son petit secteur qui est moins dynamique que d'autres pour faire des activités autres que l'agriculture.

Le Président (M. Morin) : Mme la députée.

Mme D'Amours : M. le Président, j'entends, moi, des producteurs agricoles me dire : Bien, écoute, si ma zone est déclarée dynamique puis que je ne peux pas cultiver tant d'hectares parce qu'il y a de la roche, il y a, bon... nommez toutes les raisons, pourtant il y a des taxes là-dessus, hein? Vous comprendrez qu'eux autres, pour eux autres, si ce n'est pas dynamique, ils aimeraient ça s'en départir parce qu'il y a... Pourquoi que je paierais des taxes, que j'en resterais propriétaire si je ne suis pas capable de rien faire avec? Parce qu'aujourd'hui, en tant que producteurs agricoles, ces gens-là, c'est des gens qui... c'est des entrepreneurs, et chaque sou compte. Alors, qu'est-ce qu'on répond à ces gens-là?

M. Cartier (Jacques) : Bien, ce qu'on répond à ces gens-là... Il existe... Tantôt, ça a été mentionné, que ce soit Agriculture Canada, que ce soit GéoSol, au Québec, vous avez l'évaluation de tous les sols, leur potentiel, les unités thermiques, vous avez même la topographie du sol à l'intérieur d'une même propriété. Tous ces éléments-là existent, mais ça ne doit pas non plus devenir des choix individuels, c'est ce que j'ai mentionné tantôt. Il faut que ce soit une décision collective d'une région de dire qu'on a des secteurs moins dynamiques ou non dynamiques pour l'agriculture, ce n'est pas un producteur avec deux acres de roches qui va avoir 80 ou 100 acres à détruire pour deux acres de roches. Alors, ça fait partie d'un ensemble aussi, là, et on ne peut pas commencer à faire des parcelles ou des morcellements dans des entités comme celles-là.

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Mirabel, allez-y.

Mme D'Amours : Vous avez mentionné tout à l'heure les ressources non renouvelables, là. Puis une terre agricole, c'est une ressource non renouvelable, et je pense qu'on est tous d'accord avec ça. Ce matin, il y avait un morcellement des terres qui avait été discuté, et M. Groleau nous a apporté... Il nous a dit qu'il accepterait — parce que, là, c'est à 100, le secteur — à 50. Est-ce que vous, vous pensez que c'est raisonnable, le chiffre 50, ou s'il n'y a pas des morcellements qui pourraient être un petit peu plus petits, tout dépendant de l'activité agricole qui s'effectuerait dessus?

M. Cartier (Jacques) : Moi, je ne vous mettrais pas de superficie de morcellement, mais je trouve malheureux... Regardez, on parle des superficies moyennes des terres au Québec, on parle de 110, 115 hectares. Dans ma région, moi, j'en cultive 700. J'ai des amis qui en cultivent 2 000. De dire que la grandeur pour un permis pour un morcellement devrait être 50 au lieu de 100, je pense que ça, c'est ce que j'appelle... c'est de la mathématique, ce n'est pas ça qu'est le principe. Le principe c'est quelqu'un qui a besoin pour produire en production maraîchère, s'il a besoin de 10 hectares, comment qu'on le mettrait à 50, on n'a rien réglé, on fait juste changer la contrainte.

Le Président (M. Morin) : Merci, M. Cartier. Mme Cloutier, M. Cartier, merci de votre présentation.

Et je suspends temporairement pour recevoir les deux prochains invités.

(Suspension de la séance à 16 h 19)

(Reprise à 16 h 21)

Le Président (M. Morin) : Nous reprenons nos travaux. M. Baril et M. St-Pierre, je vous laisse la parole... à qui veut commencer et nous expliquer votre... Je sais que votre façon, là, qu'on va procéder... Vous allez prendre 10 minutes, et après ça on discute avec vous. C'est bien ça?

MM. Yves Baril et Réjean St-Pierre

M. Baril (Yves) : Merci, M. le Président. Merci pour l'invitation. Bonjour, MM., Mmes les députés. Tout d'abord, je vais me présenter : Yves Baril, je suis commissaire à la commission et vice-président depuis cinq ans, pratiquement cinq ans, comme vice-président, et le reste de mon mandat a été comme membre de la commission. Tout d'abord, je proviens du monde agricole. Je suis producteur agricole encore aujourd'hui. Je suis en processus de transfert de ma ferme à mon fils. J'ai été dans les grandes cultures, que j'ai quittées il y a à peu près trois ou quatre ans, où j'ai vendu mes parts à mon frère, et je suis présentement dans le domaine de la volaille. J'ai été à l'UPA pendant une dizaine d'années, au syndicat régional des producteurs de volaille, par la suite membre du conseil d'administration de la fédération des Éleveurs de volailles du Québec, membre de l'exécutif, et, par la suite, j'ai été président de la fédération pendant une période d'environ sept ans, et, par la suite, j'ai été nommé à la commission. Et voilà mon parcours en agriculture qui fait en sorte que je siège présentement à la commission.

Le Président (M. Morin) : M. St-Pierre.

M. St-Pierre (Réjean) : Alors, c'est bien, vous comprendrez qu'on ne prendra pas le 10 minutes complet à titre de mise en situation. Alors, moi, je me présente, je suis Réjean St-Pierre. Je suis commissaire depuis bientôt 20 ans, depuis septembre 1995. Je suis celui qui a le plus d'années d'expérience actuellement, mais sans nécessairement en être le doyen. Alors, je suis agronome de formation et puis j'ai été agriculteur aussi. J'ai pris la relève de la ferme familiale en 1977 et j'ai été impliqué dans le syndicalisme agricole entre 1980 et 1995, dans la fédération de l'UPA de Nicolet à l'époque, maintenant qui s'appelle le Centre-du-Québec.

Alors, je vais faire un court propos d'introduction qui est un petit peu basé sur ce qu'on entend beaucoup depuis le début de vos audiences, celui de la remarque qui est souvent... qui est soulevée à l'effet que les délais de décision sont longs, puis je vais associer ça un petit peu avec l'évolution du travail des commissaires depuis une vingtaine d'années.

Alors, quand j'ai commencé, en 1995, on faisait à peu près 4 000 dossiers, on était 14 commissaires; aujourd'hui, on en fait à peu près 2 300 à 12 commissaires. Comment ça se fait que, bon, il y a des... Puis même, comment ça se fait qu'il y a des délais? En principe, si on fait une formule mathématique, on ne devrait jamais être en retard. Alors, je vais vous dire qu'au cours de ces 20 dernières années là, quand on a débuté, on était impliqués au niveau de la décision quand arrivait le temps de rendre la décision, on entendait parler du dossier quand le dossier se présentait sur notre table, on analysait... on voyait ce qu'il y avait dans le dossier, puis on rendait une décision. Plus tard est arrivée, en 1998, la réforme des tribunaux... la réforme de la justice administrative, qui a fait en sorte que les commissaires ont été impliqués beaucoup plus tôt au niveau du processus décisionnel. On a eu l'orientation préliminaire à rendre, par la suite on avait la décision puis, de temps à autre, on a un avis de modification d'orientation préliminaire. Ça fait tout le temps au moins deux ou trois documents à rédiger. Alors, tout ça, s'est additionné à la charge.

Par la suite, en 2006, après avoir remarqué aussi au niveau de beaucoup d'intervenants du milieu que la commission rendait des décisions mur à mur, que c'était la même décision, qu'on la rende à Saint-Hyacinthe ou encore qu'on la rende dans le comté de monsieur, on disait tout le temps que, bon, la décision était rendue pareille. À partir de ce moment-là, on s'est dit : Écoutez, il faut regarder un petit peu plus toute la question des particularités régionales. On a fait un travail au niveau de la commission, on s'est dit : Oui, c'est vrai, il faut que les gens se reconnaissent dans nos décisions. Alors, on est arrivés... on a travaillé à établir qu'est-ce qu'il fallait dans chaque décision. À ce moment-là, on a décrit mieux la localisation géographique, on a décrit mieux le territoire agricole dans lequel on était, et puis, à ce moment-là, les gens se sont reconnus puis se reconnaissent mieux dans nos décisions, et puis, en même temps, on arrivait à rendre des décisions toujours avec les mêmes critères de décision, mais avec des particularités régionales mieux ciblées.

Puis, en même temps que tout ça, les décisions des tribunaux supérieurs, autant le Tribunal administratif que la Cour du Québec ou encore la Cour d'appel, nous arrivaient avec des décisions qui nous disaient qu'il fallait mieux motiver nos décisions, basées sur les critères de la loi, bien entendu, puis même expliquer de temps en temps sur quoi on se basait au niveau des critères de la loi. Ça, ce que je viens de dire, là, j'appelle ça des facteurs qui ont influencé la longueur des décisions, j'appelle ça des facteurs internes.

Maintenant, il y a eu des facteurs externes aussi. C'est sûr que, depuis une vingtaine d'années, les mandataires, les personnes qui assistent les demandeurs au niveau des membres, eux autres, ils se sont raffinés, eux autres aussi. Alors, c'est bien entendu que... Vous en avez vu une couple ce matin qui, eux, ont quand même de l'expérience puis, quand ils nous arrivent avec des demandes, elles sont très documentées. Alors, cette documentation-là, la commission, autant les analystes que les commissaires doivent en prendre connaissance et puis en disposer aussi au niveau de la décision. Alors, tout ça, ça rallonge une décision.

Je vais rajouter un autre facteur externe aussi, qui est toute la question de la jurisprudence de la commission. On a 150 000 décisions, à peu près, de rendues depuis le début, alors chaque décision peut être citée à titre d'exemple. Alors, quand on rend une décision, il faut traiter ça parce que, si on oublie de la traiter, on peut être taxé de faire une erreur de fait ou encore une erreur de droit. Alors, c'est tout ça puis, quand on rend une décision, c'est tout ça qui rentre en ligne de compte.

Alors, le rôle des commissaires, c'est d'être le bras du gouvernement, finalement, dans l'application de la loi. Et on est là aussi pour faire la surveillance du territoire, surveiller ce qui peut se passer au niveau des infractions, des choses qui ne sont pas... qui vont à l'encontre de la loi. On a aussi toute la question de l'indépendance décisionnelle, la cohérence des décisions. Sûrement que vous allez nous poser quelques questions là-dessus, on essaiera d'y répondre de notre mieux. Alors, je vous remercie de votre écoute. J'espère que je n'ai pas pris trop de temps.

Le Président (M. Morin) : Vous êtes dans les temps, mon cher monsieur.

M. St-Pierre (Réjean) : C'est bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Morin) : On va se diriger vers Beauce-Sud.

M. Dutil : Merci, M. le Président. Je pense qu'on touche le point central de la difficulté en parlant des délais. On tourne... On en parle, là, ça fait quand même quelques séances qu'on a faites à la CAPERN ensemble, puis on a nos audiences ici, et là vous nous expliquez pourquoi ça prend plus de temps. Mais nous autres, ce qu'on veut savoir, c'est comment il faut faire pour que ça prenne moins de temps, puis ça ne peut pas être juste une augmentation de budget. Alors, c'est ça, la question. Regarde, je ne peux pas croire qu'il faut engranger la jurisprudence de 150 000 décisions puis, au fur et à mesure où les années passent, il faut tenir compte encore de plus de décisions, puis on va finir par avoir des délais de quatre ans au lieu de deux ans. C'est ça qui va arriver si on continue.

Le Président (M. Morin) : M. Baril. M. St-Pierre.

• (16 h 30) •

M. Baril (Yves) : Je vais tenter une réponse. Écoutez, bien entendu, c'est difficile pour moi de commenter nos décisions et les décisions de mon collègue. Je vais me garder une petite réserve par rapport à ça. Par contre, on a suivi les audiences de la CAPERN, tout de même. En fin de semaine, j'ai regardé les audiences qu'il y avait eu, j'ai entendu les commentaires qui se sont faits. Je comprends aussi, les gens qui font des demandes auprès de la commission, qu'il y a des plaintes qui se fassent. Ce n'est pas le souhait de la commission non plus de retarder les délais indûment. On a soulevé quelques points, et, bien entendu, il y a des choses, à la commission, qui sont des automatismes, qu'on dirait. Je pense que, pour ce volet-là, dans certaines situations, au lieu de passer par les critères de la loi, ça pourrait être par voie réglementaire. Certains de mes anciens collègues l'ont mentionné. Ça a été mentionné aussi par d'autres intervenants. On parle de bornes sèches, on parle de choses qu'on autorise généralement à un haut taux, ça pourrait se faire différemment.

Par contre, le législateur nous a donné les outils qu'on a présentement, qui est la Loi de protection du territoire et des activités agricoles, et nous, notre mandat, comme commissaires, c'est d'appliquer la loi comme elle est aujourd'hui. On a beau dire — on a employé le mot «gros bon sens» à quelques reprises — oui, on peut bien appliquer le gros bon sens, mais on a des critères de la loi à suivre, c'est le législateur qui les a mis. S'il y a des modifications à apporter par rapport à ça, comme commissaire et vice-président à la commission, je suis un peu mal placé pour arriver à donner des solutions aux législateurs pour améliorer l'efficacité de la commission. Mais nous sommes préoccupés par cette efficacité, oui, bien entendu.

M. Dutil : Au contraire, M. le Président, au contraire, vous êtes bien placé pour nous faire des suggestions. Vous les connaissez, les problèmes. Le seul point où vous êtes mal placé, évidemment, c'est que c'est votre travail, puis, si vous êtes trop efficace, vous n'aurez plus de travail, là, mais c'est le seul point que je vous... Je vous fais des blagues, là, mais je pense que le législateur que nous sommes ici se rend compte qu'il y a une augmentation de délai, et vous avez un argumentaire très bien fondé pour nous expliquer l'augmentation de délai. On comprend très bien. Ceci dit, moi, si je détricote, là, si je détricote, là, je vais prendre chacun de vos arguments, puis on va rechanger les choses, mais peut-être ne le ferons-nous pas très bien si on n'a pas votre expertise. C'est vous autres qui êtes à même de nous dire : Cette étape-là, vous l'avez rajoutée, vous auriez bien pu vous passer d'ajouter cette étape-là. Par contre, celle-là nous apparaît importante, elle génère un certain délai, donc, oui, on va vivre avec. Donc, globalement, à la fin, on aurait de meilleures décisions si vous nous donniez vos opinions sur la façon d'améliorer l'efficacité.

Le Président (M. Morin) : Oui, monsieur.

M. St-Pierre (Réjean) : Je vous ai parlé des 150 000 décisions tout à l'heure, là, je reviens là-dessus, là. Je ne veux pas dire qu'on regarde les 150 000 décisions. Vous comprenez que le choix du mandataire ou encore du demandeur est plus vaste. Et puis je peux vous dire aussi qu'on a développé des outils, on est peut-être un petit peu victimes de certaines de nos avancées technologiques aussi. Au niveau de notre site Internet, toutes les décisions sont là, quelqu'un peut piger là-dedans. On a des outils géomatiques aussi où on peut localiser à peu près tout.

De là à parler... Je vous dis que je vous ai apporté quelques éléments qui font peut-être que les délais sont longs, mais il n'y a pas seulement que ceux-là, là. Moi, je me suis borné à la longueur, peut-être, des décisions, parce que c'est notre travail de rédiger. C'est sûr que le reste... Il y a peut-être une foule de facteurs aussi qui ont fait en sorte qu'au cours des dernières années on a pris du retard. Il y a deux commissaires qui n'ont pas été renommés, par exemple. Ça, je le prends sur moi de le dire, mais c'est le travail plutôt de la présidente, tout à l'heure, qui va être plus en mesure de vous faire une vue d'ensemble de tout ça. Alors, il ne faut quand même pas non plus lui soustraire son droit de parole ici.

D'un autre côté, c'est sûr que, si la loi nous donnait la permission, si vous voulez, de sauter quelques étapes à certains endroits, on ne demanderait pas mieux. Mais ça arrive, de temps à autre, aussi, que plutôt que, quand on fait une décision... J'ai entendu parler dernièrement... pas dernièrement, mais un des présentateurs qui disait que, bon, pour un renouvellement, il me semble que ça pourrait être plus rapide. C'est arrivé de temps à autre qu'on... Quand il n'y a pas rien de nouveau à rajouter, ça arrive de temps à autre qu'on passe vite dans la machine et puis on est capables de conclure toujours en fonction des critères de la loi. Ça va arriver de temps à autre qu'on va prendre sur nous-mêmes de faire pas nécessairement ce qui s'appelle un «fast track», mais une décision écourtée, qui est capable de faire le tour de la question, puis, en même temps, être capable aussi de rendre la décision juste, la décision éclairée puis la décision qui, dans notre jargon, n'est pas appelable. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Dubuc.

M. Simard : Rapidement, M. le Président, une question pour M. St-Pierre. La semaine dernière, vous m'avez dit que... Vous avez dit d'entrée de jeu tout à l'heure que vous aviez écouté la commission par rapport à tous ceux qui sont venus nous rencontrer. Vous avez sûrement entendu M. Thibault, qui nous a dit : Il y a trop de chefs, pas assez d'Indiens. Il a dit qu'il y a plusieurs années — ça fait 20 ans que vous êtes là, donc on peut en parler — il y avait moins de commissaires, plus de techniciens, plus de gens qui faisaient le travail, qui mâchaient les dossiers, qui faisaient, après ça, des recommandations. Et puis la décision était plus rapide, il y avait moins de délais. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Morin) : M. St-Pierre.

M. St-Pierre (Réjean) : Merci, M. le Président. Il faut que je vous dise que ça, c'est encore plus vieux que moi. Écoutez, on a entendu... Bien, c'est sûr qu'avec les discussions qu'on a eues avec nos collègues dans le temps, quand on est arrivés, on se faisait dire ça aussi. Bon, regarde, quand ça a commencé, le modus operandi était différent. Les rédacteurs étaient des avocats, les commissaires étaient plus entourés. Ils disaient qu'il y en avait 8 000... ils rendaient 8 000 décisions à cinq commissaires. Oui, c'est possible au cours des deux ou trois dernières années, mais, la quatrième ou cinquième année, on était descendu déjà à 5 000 décisions. Bon, ça a remonté à 6 000 avec le temps, autour des années 1985, 1988, 1990, puis, après ça, ça s'est tenu aux alentours de 4 000 ou 5 000 et puis... De toute façon, là, je suis en train d'usurper le discours de ma présidente, là, qu'elle va vous faire tout à l'heure...

Le Président (M. Morin) : Elle va vous le pardonner.

M. St-Pierre (Réjean) : J'espère qu'elle ne me mettra pas en punition. Alors, tout ça pour dire que, oui, c'était différent. Mais vous avez parlé tout à l'heure de la réforme de la justice administrative qui a fait en sorte qu'à un moment donné le législateur... la Loi sur la justice administrative est venue amener des contraintes aussi à la Loi sur la protection du territoire agricole. Alors, tout ça a fait en sorte que le commissaire... puis ça a été le voeu aussi des instances décisionnelles, des instances de la commission puis probablement des instances gouvernementales aussi de dire : Ce sont les commissaires qui sont là pour prendre une décision, bien, à eux autres de rédiger la décision aussi.

Ça, ça a commencé aux alentours des années 1985‑1986. Alors, quand les commissaires ont été amenés à rédiger leurs décisions, bien, c'est là que ça a commencé. Certains dictaient, d'autres écrivaient à la main. Puis, moi, quand je suis arrivé, on commençait à faire du traitement de texte. C'est là que je me suis mis au clavier, puis je suis rendu pas mal.

Une voix : Félicitations! Je ne suis pas rendu là encore.

Le Président (M. Morin) : Oui, ça va? Monsieur...

M. Simard : Mais, M. le Président...

Le Président (M. Morin) : M. le député de Dubuc, oui.

M. Simard : C'est parce que moi, j'ai bien aimé la réponse de M. St-Pierre, mais j'aimerais savoir : Est-ce que c'est une avenue possible, la proposition qui a été faite la semaine passée?

M. St-Pierre (Réjean) : Bien, personnellement, je vais vous dire que je serais gêné de signer des décisions que je n'ai pas écrites.

M. Simard : C'est une réponse. Merci, M. le Président. Merci, M. St-Pierre.

Le Président (M. Morin) : Merci. M. le député d'Abitibi-Est, vous voulez intervenir?

M. Bourgeois : Oui, M. le Président, s'il vous plaît.

Le Président (M. Morin) : Allez-y.

M. Bourgeois : Rapidement.

Le Président (M. Morin) : Rapidement, oui, parce que Mégantic est là, là.

• (16 h 40) •

M. Bourgeois : Je pense qu'on a beaucoup fait état des enjeux en lien avec la vallée du Saint-Laurent et les régions qui sont un peu plus en... Moi, je suis en périphérie plus nordique un peu, là, et, chez nous, ce qu'on vit beaucoup, c'est la question avec les autres types d'utilisation, que ce soit dans le domaine minier, que ce soit dans le domaine forestier, et aussi les industries qui se développent autour de ce secteur-là, qui ont, en même temps, été un pont pour la transition, parce que l'Abitibi-Témiscamingue s'est développée, dans le temps, entre autres, avec le plan Vautrin. Donc, on rentrait dans un rang, il y avait huit, neuf cultivateurs, des exploitations; maintenant, on rentre dans les mêmes rangs, il en reste un. Des fois, il n'en reste pas, puis ils viennent de l'autre rang d'à côté pour exploiter, mais, en même temps, on a des mines qui se sont développées en périmètre, on a des exploitants au niveau sylvicole, et d'avoir des critères qui tiendraient compte de ces réalités-là... Parce que, nous, ce que ça fait chez nous, il y a une dévitalisation et il y a des enjeux importants. Et vous avez, à ce que j'en comprends, à gérer ça sur un genre de mur à mur. D'avoir des paramètres qui tiendraient compte de cette situation-là, est-ce que ça pourrait être quelque chose qui pourrait faciliter votre travail puis aussi peut-être permettre d'accélérer? Je peux vous dire que les gens du monde minier ou du monde forestier n'ont pas nécessairement la même patience aussi. Parce qu'eux l'exploitation qu'ils veulent faire, c'est pour un autre type, et c'est souvent dans des secteurs qui ne sont pas reconnus pour être très productifs au niveau agricole, sauf qu'ils sont en périphérie.

Le Président (M. Morin) : Je pense que, M. Baril, vous voulez répondre? Allez-y.

M. Baril (Yves) : Oui, je vais... M. le Président, merci. Écoutez, pour être du secteur ouest de la commission, pour siéger à Longueuil, le territoire de l'Abitibi-Témiscamingue fait partie de notre territoire. Pour avoir été visiter votre belle région à plusieurs reprises dans le cadre d'audiences, ce que je peux dire, en tout cas, comme commissaire, et comme vice-président, puis comme personne qui applique les critères de la loi, pour ma part, quand on est en Abitibi-Témiscamingue, le traitement n'est pas le même que lorsqu'on est dans la vallée du Saint-Laurent. On a des critères dans la loi, les critères 9, les critères 10, les critères 12... Euh, je veux dire, l'article 62, les paragraphes 9° et 10°, et le critère... l'article 12 de la loi. Le traitement des demandes d'autorisation tienne en compte toujours le lieu dans lequel se situe la demande puis la région.

Peut-être que la perception n'est pas comme ça, mais la réalité l'est. On en tient compte. On sait qu'est-ce qui se passe dans les municipalités. On a des statistiques de dévitalisation, de dépeuplement, comme le disait M. Dutil plus tôt, aujourd'hui. Par rapport à ça, la commission, elle est conscientisée. On tient des réunions, des communautés de pratique entre nous, on discute de dossiers, on essaie de se tenir le plus à la page de l'évolution de ce qui se passe au niveau de nos décisions pour obtenir une cohérence. Somme toute, on ne peut pas l'avoir à 100 %. Puis souvent, lorsqu'on entend les différences entre les dossiers... Lorsqu'on fait une analyse approfondie de chacun des dossiers, il y en a, des différences. Pour en avoir... On nous soumet tout le temps : Bon, regardez ce que la commission a fait dans tel cas, puis là je ne prendrai pas de cas précis. On nous soumet : Bien, vous avez dit oui pour ça. Puis, à la lecture de chacune de ces décisions, des fois, c'est dans une région où le secteur était différent, où il y avait une dépopulation, où l'activité socioéconomique était prise en compte, tandis que, dans un autre secteur, ce facteur-là va être moindre.

Alors donc, les critères de la loi sont là présentement pour tenir compte de ce que vous soulevez, M. le député. Je pense que ma réponse va s'en tenir là. Est-ce que vous trouvez que l'application est faite de manière correcte? Puis là ça reste à déterminer.

Le Président (M. Morin) : M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : L'autre aspect, ce qu'on a vu aussi, c'est au niveau des petites productions. Tout à l'heure, on parlait, là, bon, des producteurs bio, des producteurs maraîchers, des petites exploitations qui, bon, ont de plus en plus d'attrait pour des gens en région, parce que la facilité aussi de rentrer dans la production, la capacité financière étant limitée. Et donc, encore là, quand on parle de faire de l'acquisition, bon, avec les paramètres actuels, les gens nous disent que c'est très difficile. En termes d'échéancier, ils trouvent ça très long parce qu'avant d'être capables financièrement de rejoindre vraiment les paramètres de base, pour certains, c'est ce qui fait qu'à un moment donné ils abandonnent en cours de route, même s'ils ont de l'aide de producteurs. Parce que chez nous aussi, c'est cette transition-là. Il n'y a pas toujours une relève ou la qualité des terres ne permet pas nécessairement l'exploitation qui aurait été souhaitée, mais il y aurait d'autres types de cultures, d'autres types de productions qui seraient intéressantes.

Encore là, de ce côté-là, moi, au niveau du... On parlait tout à l'heure de la question de morcellement. Est-ce que vous avez des pistes là-dessus qui pourraient être intéressantes pour... L'objectif, c'est toujours de faciliter votre travail tout en nous permettant, nous, d'amener des législations qui vont correspondre à une situation qui reflète le Québec de 2015, là.

Le Président (M. Morin) : M. Baril.

M. Baril (Yves) : Je vais tenter une réponse. Peut-être que mon collègue pourra poursuivre s'il y a d'autres éléments. Écoutez, les productions en émergence, ce ne sont pas des dossiers faciles à la commission, je dois l'admettre, parce que, souvent, on a des cas où on va demander un morcellement pour partir une production bio, exemple, pour ces choses-là. Là-dedans, il y a beaucoup de gens qui se lancent, oui, qui font des demandes, il y en a qui réussissent, il y en a d'autres qui ne réussissent pas. Il faut prendre ça en considération lorsqu'il y a une demande de morcellement : la viabilité, la superficie suffisante pour pratiquer l'agriculture puis, je dirais, la précaution de la commission : Est-ce que ça va être viable à long terme? Parce que souvent, lorsqu'une production est demandée pour x, il y a une maison qui va être raccrochée avec la superficie en question. La maison, un coup qu'elle est construite, elle est là puis elle demeure un point de repère.

Tout ça est lié indirectement. Lorsqu'on fait un morcellement pour une production en émergence avec des petites superficies, souvent, on veut greffer une résidence avec ça. Et là, bon, écoutez, on vient de régler une résidence, exemple, 150 000 $ sur une terre qui en vaut à peu près... On vient de doubler la valeur de cette terre-là en même temps, là. C'est tout ça qui vient rentrer en ligne de compte. Ce ne sont pas des dossiers faciles. Souvent, les gens vont tenter des expériences puis ils peuvent manquer leur coup. La commission en a vécu souvent, des choses où la résidence est restée en place, et la production s'est éteinte pour ça, mais la commission... On en rend, des décisions favorables à des morcellements, ce ne sont pas toutes des fins de non-recevoir.

Le Président (M. Morin) : Vous voulez mettre votre grain de sel, M. St-Pierre?

M. St-Pierre (Réjean) : Oui, un grain de sel, appelons ça comme vous voulez, mais il y a des actions au niveau morcellement qui ont été faites aussi au niveau de la commission, il y a un règlement qui a été passé à l'effet que, quand il y a un morcellement qui est à être réalisé entre deux producteurs agricoles... Par exemple, moi, je suis agriculteur propriétaire d'une terre, puis mes voisins, qui sont aussi agriculteurs, veulent se partager ma terre. Alors, si moi, je leur offre d'en prendre chacun la moitié, ils n'ont pas besoin de faire de demande de morcellement à la commission. Ça, ça se fait en autant qu'il n'y ait pas de superficie résiduelle. Alors, ça, c'est une espèce d'avancée qui existe depuis... je ne sais pas combien d'années, Mme la présidente, peut-être sept ou huit, peut-être même 10 ans. C'est quand même une réalité, ça, c'est des transactions, ça, qui ne nous passent pas dans les mains, ce sont des morcellements qui se font automatiquement.

Le Président (M. Morin) : Merci, M. le député d'Abitibi-Est. Oui, le député de Mégantic est prêt.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Écoutez, moi, je veux vous entendre un peu plus sur ce dossier-là des producteurs en émergence, parce qu'on assiste à toutes sortes de choses très différentes, et plus ça va, plus on va en voir, je suis convaincu, surtout avec l'arrivée des changements climatiques. On parle de dossiers, par exemple, de fermes de lapin, on parle de dossiers de fermes de canard, on parle de dossiers d'une nouvelle agriculture qui n'existe pas en Amérique du Nord. Il se passe beaucoup de choses. Juste pour vous donner un exemple très évident, celui de la culture vignoble, des vignobles au Québec, qui s'étend de plus en plus vers les régions nordiques.

Ma question à vous est : Est-ce qu'il y a un besoin, selon vous, d'adapter, si on veut, notre législation à ce type de développement là qui va, pour nous, constituer un développement économique et un développement de diversification qui est très bon pour notre économie et très bon pour notre agriculture ou si vous croyez que notre législation actuelle est très adéquate pour cette diversification-là, autant bio, tout ce que vous voyez de nos jours?

Le Président (M. Morin) : M. St-Pierre.

• (16 h 50) •

M. St-Pierre (Réjean) : Oui. Peut-être que mon collègue pourra aussi... Bon, écoutez, oui, ces cultures en émergence là dont vous parlez, c'est presque l'avenir en termes de développement de l'agriculture. Il y a 40 ans, 50 ans, les productions agricoles dont on parlait au Québec, c'était le lait, le porc, le poulet, les oeufs; on faisait beaucoup de foin et un petit peu d'avoine pour soigner les chevaux. Bon, ces productions-là sont restées là pour combler les besoins qu'on a, mais on voit l'émergence de plusieurs types de production, on parle de l'arbousier, on parle de la camerise. Puis toutes ces choses-là, ça se fait... Il y en a beaucoup, au Lac-Saint-Jean, de la camerise, les bleuets qui se développent. Puis je vais vous parler d'une autre production parce que je la connais un petit peu parce qu'elle s'est développée dans mon coin d'origine, sur des terres presque incultes, de classe 7, on appelle ça des sols mouilleux, dans notre coin, on appelle ça des sols pisseux. On a développé des productions de canneberges sur des sols qui n'avaient pratiquement aucune autre possibilité de développer, il poussait des... on appelait ça des talles d'aulnes, c'est juste ça qui poussait dans ce coin-là. Puis là maintenant c'est rendu de la production que c'est merveilleux de voir aller ça, de voir travailler ça. Ça fait qu'en ce moment le prix du fruit n'est peut-être pas très bon, mais, quand même, il y a une industrie de la canneberge qui s'est développée sur des sols de piètre qualité.

Ça, c'est un exemple de diversification de la production. Quand on parle des vignobles, quand on parle aussi de la production de lapins ou de n'importe quelle autre production qui est émergente, en ce moment, on parle du cassis, j'ai parlé tantôt de la camerise, le bleuet qui s'est développé beaucoup, beaucoup au Lac-Saint-Jean. On a même inclus des territoires en zone agricole pour que les producteurs puissent profiter de tous les avantages d'être en zone agricole, alors on donne un coup de main à l'agriculture aussi à ce moment-là. Puis c'est sûr qu'on ne les met pas de côté, ces cultures émergentes là.

Et puis, regardez, je vais vous donner un exemple. Il y a quelques années, j'ai accordé une autorisation pour un morcellement, même si je devrais... En tout cas, de toute façon, ça fait déjà une dizaine d'années. On avait autorisé un morcellement pour une dame qui s'était lancée dans la culture de fleurs et de plantes aromatiques, toutes consommables. Alors, on lui avait annoncé un refus à l'orientation préliminaire. Elle est venue défendre son dossier. Elle nous a expliqué tous les revenus qu'elle pouvait retirer de ça puis les avantages pour sa région — elle était dans le Témiscouata — puis, bon, après avoir discuté un peu avec elle, elle nous a dit : Écoutez, je vais prendre toute la superficie qui est cultivable de la propriété, elle a modifié un petit peu sa demande, et puis on l'a autorisée. C'est une des seules autorisations que j'ai accordées où j'ai eu une lettre de remerciement. Mais c'est comme ça que...

Ah! puis je vais juste rajouter aussi, quand vous parlez d'agriculture biologique, souvent, l'agriculture biologique génère des rendements un petit peu plus faibles qu'en production conventionnelle, mais on s'est déjà fait dire aussi que ça prenait des terres plus grandes quand on est en agriculture biologique. Alors, quand on parle de morcellement et d'agriculture biologique, il faut quand même spécifier dans quelle production on s'en va.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Mégantic.

M. St-Pierre (Réjean) : Je vais laisser la parole à...

Le Président (M. Morin) : Oui?

M. St-Pierre (Réjean) : J'ai l'impression que je prends beaucoup de temps, alors je vais laisser la parole à mon collègue. Il voulait...

M. Bolduc : Allez-y, allez-y.

Le Président (M. Morin) : Oui, allez-y, M. Baril.

M. Baril (Yves) : Ça va être très rapide. Juste pour renchérir un peu sur mon collègue, lorsqu'on arrive avec des productions en émergence, là, comme les vignobles, vous avez mentionné... La commission, elle se base aussi sur des données économiques, là, qui proviennent du CRAAQ. On va regarder aussi, selon la superficie, les hectares qui vont être plantés pour x productions, soit des vignes ou autres, on va voir les données économiques que ça représente. Est-ce que, sur cette superficie-là, une superficie suffisante, le critère 8 de l'article 62... Si on voit que, sur un hectare, il est impossible d'avoir une survivance, de pouvoir en vivre, bon, la commission va se questionner, là.

Le Président (M. Morin) : Merci, M. Baril. Le temps est terminé, M. le député de Mégantic. Et voilà. On s'en va du côté de Berthier.

M. Villeneuve : La route est belle, M. le Président, à Berthier.

Le Président (M. Morin) : Oui, on en a une, route de Berthier, nous autres aussi.

M. Villeneuve : Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. C'est vrai qu'effectivement la commission se penche beaucoup sur les problèmes qui nous sont soumis, et évidemment ça vous touche. Je comprends que vous avez reçu une lettre de remerciement pour votre travail une fois dans votre vie, là, depuis 20 ans, mais effectivement ce qu'on soulève ici, ce qui nous est soulevé dans nos comtés, ce sont souvent les problèmes que les gens vivent. Et les gens attendent des réponses à ces problèmes-là. Et, bon, on parle... ce qui nous est soumis, puis je vous le dis puis je pense que tout le monde est d'accord avec ça, il y a les délais, les délais et les délais. Ça, c'est clair, c'est l'élément, là, je pense, le plus frappant qui nous est... Mais là on a compris, remarquez, on a compris, vous avez donné de bonnes explications tantôt, pourquoi on en est arrivés là. Il y a eu des propositions... Vous avez suivi la commission, il y a eu des propositions de plusieurs personnes ici qui nous ont dit : Pour les délais, il y aurait des façons de faire. Et, dans le fond, je me dis : Le statu quo n'étant pas, à mon avis, acceptable — et là je rejoins M. le député de Beauce-Sud — en termes de délai, j'imagine que la commission... en tout cas, je pense que la commission devrait se pencher sur comment elle fonctionne présentement pour, peut-être, proposer des choses, peut-être. Puis vous êtes les mieux placés pour le faire. Tu sais, là-dessus aussi, je rejoins mon collègue. Vous êtes les mieux placés pour le faire, et je pense que vous devriez le faire, parce qu'il va falloir, effectivement, que des corrections soient apportées. Vous avez des pistes, hein, qui nous ont été soumises par des gens qui sont venus nous rencontrer. Ça, c'est pour les délais.

L'incohérence. L'incohérence, en tout cas, perception ou... vrai ou pas vrai, mais il y a une perception qui est là, celle de l'incohérence par rapport aux décisions. Puis c'est sûr que, quand les gens se font dire non, bien, ils disent : Mon dossier était pareil que comme celui d'avant puis de l'autre bord. Moi, là, à Berthier, les gens, ils me disent : À Maskinongé, à côté, là, ils ont tout ce qu'ils veulent. Comment ça se fait qu'à Berthier ça ne fonctionne pas? Quand je vais à Maskinongé, ils me disent : Comment ça se fait qu'à Berthier ils ont tout ce qu'ils veulent, puis moi... Bon, c'est sûr qu'il y a une perception qui est là, qui existe au niveau de l'incohérence. Puis certaines personnes, même, sont venues nous dire que le cas par cas amène cette incohérence. M. Ouimet, d'ailleurs, nous a dit ça : Le cas par cas amène probablement une partie de l'incohérence. Le fait qu'il n'y ait rien qu'un commissaire... Idéalement, ça serait peut-être d'avoir deux commissaires. Hein, on est tous des humains, à un moment donné, on peut peut-être en oublier, en échapper, alors que, si on est deux commissaires pour prendre une décision, peut-être qu'il y aurait moins de cette incohérence-là qui est perçue à tort à raison.

Moi, je veux vous entendre là-dessus, délais et incohérence. Vous avez 20 ans derrière la cravate. On a le vice-président; tantôt, on va avoir la présidente. Alors, moi, je suis convaincu d'une chose, c'est que, si ces audiences-là doivent amener quelque chose, ça va être une façon de faire différente, parce que, comme Einstein le disait, je ne le répéterai pas, hein? Si on veut obtenir des résultats différents, il faut faire les choses différemment. Alors, je veux vous entendre, monsieur... un ou l'autre, là, sur ces deux points-là.

Le Président (M. Morin) : M. Baril.

M. Baril (Yves) : Merci, M. le Président. Tout d'abord, sur les délais, tantôt, j'ai soulevé quelques points avec M. Dutil. Je pense qu'au niveau des délais il y avait probablement, oui, certains volets de certaines demandes qui pourraient être passées différemment, par voie réglementaire. Je vais vous donner un exemple, là, les bornes sèches. Les services d'incendie ont fait des demandes, puis, écoutez, je ne pense pas... J'en ai traité quelques-unes. Lorsque les schémas d'aménagement veulent avoir une couverture d'incendie, chaque municipalité doit avoir des réserves d'eau. Or donc, soit qu'on puise dans des lacs existants ou qu'on mette des bornes... Ça devrait être réglementaire, ça devrait être un automatisme, avec certains critères, un peu comme les enseignes sur le bord des routes. Ça, c'est une chose.

Puis il y aurait probablement d'autres secteurs à cibler, là, d'autorisation pratiquement automatique. Ça, ce n'est pas... je pense que cette discussion-là doit avoir lieu avec le législateur et les administrateurs de la commission comme telle, parce qu'il y a certains éléments que je suis sûr où est-ce que la commission est capable de pointer sur ça.

Pour ce qui est de la cohérence de nos décisions, écoutez, moi, je vais vous raconter une expérience personnelle. Quand on était en audience — je ne parlerai pas, je ne détaillerai pas de quelle audience ça va être en général — on nous dépose la jurisprudence puis on disait : Bien, regardez ce que vous avez fait, je l'ai mentionné tantôt. Bien, à la lecture de chacune des décisions, puis là il faut que je les traite, là, parce qu'on les a déposées devant moi, c'est une pièce qui est devant moi, à la lecture, généralement, là, à 99,9 %, chacune des décisions qu'ils nous ont mis devant nous, il y a quelque chose qui n'est pas pareil : on n'est pas dans le même secteur, on a des choses bien différentes...

On pourrait donner un exemple. Exemple, il y a un îlot déstructuré, il y a de la place pour trois résidences qui ne génèrent aucune contrainte à l'agriculture. On autorise une maison une fois. Puis il y a de la place pour trois, on autorise la deuxième. La troisième, on la refuse. Pourquoi? Parce que la troisième résidence, elle vient bloquer l'accès à la terre, voilà pourquoi on va... Ça, c'est un exemple que je donne, là. Je ne dis pas que c'est un cas réel. Mais la motivation dans ce dossier-là, ça va être qu'on va enclaver une terre agricole où le producteur agricole n'aura plus d'accès. Et les voisins à côté puis celui qui a été refusé, ils se parlent, là. Ça fait que, je veux dire, ces gens-là : Ah! moi, je l'ai eu, toi, tu l'as eu. Comment ça, moi, je ne l'ai pas eu? Je pense qu'il faut lire la décision comme il faut, aller prendre la lecture de chaque point. Puis c'est notre obligation de motiver nos décisions en fonction des critères de la loi. Chacune de nos décisions doit l'être en fonction de ces critères.

Le Président (M. Morin) : Oui, M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : La situation de certaines personnes de dire : Deux commissaires devraient toujours être présents, vous voyez ça comment, vous?

• (17 heures) •

M. Baril (Yves) : Moi, je sais une chose par rapport à siéger seul. Tout d'abord, les orientations préliminaires, ce sont toujours deux commissaires qui sont là. Pour une question d'efficacité, on a tombé à siéger seuls simplement parce qu'on avait des délais, puis la décision qui a été prise, c'était pour raccourcir ces délais-là. Je ne crois pas que ça amène une... Écoutez, on a des comités de pratiques entre nous, on discute de dossiers ensemble, on a des réunions des membres de la commission justement pour essayer d'obtenir une cohérence. Je préside un comité agronomique à l'intérieur de la commission, puis on s'évertue, depuis trois ans, à créer une grille de critères lorsque les... Pour les carrières-sablières, il y a des demandes qui s'en viennent. J'ai présidé ce comité-là, puis le comité était là pour créer un genre de cohérence, que les demandeurs aient toutes les mêmes choses à remplir, puis ça, cet exercice-là, il est en fonction, puis c'est en train de se mettre en branle présentement.

M. Villeneuve : ...

Le Président (M. Morin) : Allez, allez, allez.

M. Villeneuve : Les demandes à portée collective, à l'époque, on nous disait : Vous allez voir, ça va générer moins de demandes à la commission. J'imagine, ça a été le cas. Il y en a 60, ou à peu près, 60 MRC qui ont été de l'avant avec ça. Vous, vous le sentez sur le terrain, que ces demandes à portée collective là, elles ont un effet sur la masse de travail qui vous est...

Le Président (M. Morin) : M. St-Pierre.

M. St-Pierre (Réjean) : Merci, M. le Président. Au niveau des demandes de résidences, ça a baissé un petit peu, mais les demandes de résidences ont été remplacées par d'autres types de demandes. Qui a parlé de ça, toute la question des...

M. Villeneuve : Pipelines.

M. St-Pierre (Réjean) : Des pipelines, les... Puis vous comprendrez aussi qu'une décision dans ce qu'on appelle nous, un champ d'éoliennes, ça demande quand même beaucoup de travail, puis on a eu plusieurs parcs éoliens, en commençant par la Gaspésie, le dernier au Lac-Saint-Jean. Il y en a eu beaucoup au Centre-du-Québec, qui font encore couler beaucoup d'encre dans les journaux en ce moment. Alors, c'est quand même des dossiers qui prennent de l'importance. On a eu Gaz Métro, toute la question aussi du puisage des gaz de schiste, puis tout ça, là. Il y a eu quand même de l'exploration qui a été faite. C'est la commission qui s'est penchée là-dessus. Ça, c'est des nouveaux dossiers. Il y a aussi toute la question du stockage des matières résiduelles fertilisantes.

Alors, maintenant, on a à se prononcer là-dessus. Tantôt, c'est un usage commercial; tantôt, ça ressemble plus à un usage agricole, alors on a toutes ces choses-là à traiter. Alors, les demandes à portée collective, oui, elles ont fait leur effet, sauf que, des fois, c'est remplacé par d'autres types de ...

Le Président (M. Morin) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Par chance, parce qu'on comprend que la réalité de la dernière décennie et ce qui s'en vient aussi va demander à la commission beaucoup de ses ressources, et il ne faut pas faire les choses à moitié. Donc, dans ce que le député, tantôt, de Beauce-Sud, disait : Faites-nous des recommandations ou, à tout le moins... Parce qu'on ne peut pas... Je pense que je ne pense pas trop me tromper en disant que le statu quo n'est pas acceptable. Il faut trouver des façons de faire. Est-ce que c'est en regardant comment, à l'interne, vous travaillez? Bon, est-ce que c'est en disant : Bien, écoutez, voici la part des projets qui s'en viennent, la part des projets majeurs, là, qui sont présents, ceux qui s'en viennent, ça va prendre x pourcentage de nos ressources? Inévitablement, ça va avoir un effet collatéral sur les autres demandes. Il y aura nécessairement... Et là, si on allonge les délais encore plus, je peux vous dire que ça risque de nous revenir encore plus dans nos comtés... de circonscriptions, et puis on aimerait ça pouvoir tabler sur des solutions qui vont permettre d'arriver à juguler ce problème-là et évidemment peut-être diminuer les délais avec les mois et les années qui viennent.

Tantôt, je disais, au niveau du morcellement, que — je lançais un chiffre — c'est 100 demandes, mais c'est 325 en 2013‑2014 au niveau du morcellement, et je vois qu'on a le résultat dans les délais, mais on n'a pas la suite. Exemple, s'il y en a 48 % qui sont accordés dans les délais requis, bien, les 52 autres pour cent, on ne sait pas si ça a pris 18 mois ou deux ans. Est-ce que vous avez le chiffre? Est-ce que vous pouvez nous dire si, au niveau du morcellement... ou bien tantôt on pourra voir avec la commission. Ils ont le chiffre. Vous ne voulez pas scooper votre présidente, c'est correct. Alors, je poserai la question tantôt.

Mais, au niveau du morcellement, donc, il y a 325 demandes puis, je regardais la liste, dans les catégories, là, il y a quand même une liste assez longue, le nombre de demandes, et la commission comme telle est sollicitée beaucoup, hein? J'aimerais vous entendre peut-être là-dessus parce que... Vous êtes combien de commissaires, déjà? 14? 16?

M. St-Pierre (Réjean) : Nous sommes 12 maintenant.

M. Villeneuve : 12 commissaires. 97 O.K.

M. St-Pierre (Réjean) : Au niveau que vous parlez, de morcellement comme tel, je ne peux pas vous dire exactement les délais, et tout ça, mais les suites... Ça arrive de temps à autre qu'on a autorisé un morcellement puis qu'on reçoive une autre demande. C'est un morcellement qui va viser à peu près la même propriété ou autre chose. C'est que le morcellement qui a été autorisé n'a pas été réalisé. Ça, ça arrive de temps à autre aussi qu'on... Ce n'est pas des fausses balles de notre part, sauf qu'on a donné une autorisation qui ne s'est pas réalisée pour toutes sortes de bonnes raisons. Ça arrive de temps à autre, bon, qu'il y a des transactions qui se préparent entre deux agriculteurs puis qui ne se réalisent pas. Ça, c'est tout à fait normal.

La cohérence, maintenant, au niveau des morcellements, bon, bien, c'est bien entendu que, quand on dit qu'on est seuls à rendre une décision ou quand on prend notre décision, c'est bien entendu que, bon, on a tous notre façon de voir les choses, mais globalement on arrive à des résultats qui sont pas mal cohérents, je pense.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Vous êtes revenu sur la cohérence, alors je prends la balle au bond. Selon vous, cette cohérence-là, d'abord, elle est essentielle, elle est nécessaire, elle est vitale. Cette cohérence-là passe au niveau du morcellement entre autres, peut-être dans d'autres éléments aussi, mais au niveau du morcellement. Est-ce que, selon vous, cette cohérence-là passe d'abord et avant tout par des décisions venant de la commission ou autrement?

Le Président (M. Morin) : M. St-Pierre.

M. St-Pierre (Réjean) : Je vais aller plus loin que ça encore. Il faudra la définir, la cohérence, aussi, parce qu'on nous a reproché déjà de rendre des décisions pareilles à Saint-Hyacinthe qu'en Abitibi. Alors, on a dit : O.K., on va se rattacher plus à la particularité régionale. Alors, c'est ce qu'on a fait. Puis vous avez parlé tout à l'heure vous-même de Berthier puis de Maskinongé. Berthier jalouse Maskinongé, puis Maskinongé jalouse Berthier, mais c'est justement parce qu'on a fait la distinction entre les deux milieux.

Puis cette distinction-là, elle se fait beaucoup aussi quand on travaille à l'article 59. Quand on travaille à l'article 59, on le fait avec les gens du milieu, on les fait avec les représentants des agriculteurs puis on les fait avec les municipalités. Puis là on s'entend à dire : Bon, bien, ça, c'est un milieu qui est plus dynamique; ça, c'est un milieu qui est moins dynamique. À ce moment-là, on caractérise le milieu, puis le milieu de Berthier puis le milieu de Maskinongé sont différents, ce qui peut amener des décisions différentes aussi, autant au niveau de 59 qu'au niveau d'un morcellement ou encore du travail qu'on a à faire au niveau de tout le type de décisions qu'on a à rendre.

M. Villeneuve : Corrigez-moi si je me trompe, mais tantôt vous parliez que, quand vous regardez un morcellement, c'est sûr que, s'il y a : agriculteur, agriculteur, puis celui du centre, il veut morceller, puis la commission n'a pas... Il n'y a pas de résiduel...

M. St-Pierre (Réjean) : Oui, mais à condition qu'il ramende, par exemple, à condition qu'il ramende.

M. Villeneuve : Oui, oui, d'accord, d'accord. Mais le morcellement... parce que vous regardez la viabilité aussi du projet. Est-ce que l'on doit associer aussi le morcellement à la construction d'une demeure, d'une résidence? Parce que c'est un peu ça, les gens, ils veulent bien acheter un lopin de terre, mais ils veulent aussi s'y établir.

Le Président (M. Morin) : M. Baril, une minute.

M. Baril (Yves) : Merci. Merci, M. le Président. On ne peut pas nécessairement l'associer directement avec la construction d'une résidence. Je ne voulais pas en venir là tantôt, mais souvent, lorsqu'on autorise le morcellement, il faut se dire que probablement que le producteur agricole en question, qui va travailler sur sa terre, va vouloir un jour s'y établir. C'est ça.

C'est pour ça que, lorsqu'on regarde un morcellement en fonction des critères de la loi, c'est important de les appliquer, parce que, si on accepte le morcellement en fonction d'une activité agricole qui est non pérenne, qui est appelée à disparaître, bien, la résidence, elle va rester là puis elle va créer une contrainte à l'agriculture. C'est pour ça qu'on fait toujours... Il y a un lien à faire, indirect, mais ce n'est pas nécessairement toujours la résidence qui va être demandée avec le morcellement.

Si je peux me permettre, M. le Président, juste pour revenir par rapport aux délais, il ne faut pas oublier aussi que les mandataires, lorsqu'on arrive en rencontre publique, là, souvent, souvent, je dirais à 80 % des cas, on apporte un amendement à la demande. On nous dépose des pièces additionnelles, puis ça, ce n'est pas mentionné par les mandataires qui viennent ici casser du sucre sur le dos de la commission. Ça, je voudrais vous rappeler ça.

Le Président (M. Morin) : C'est terminé, M. le député de Berthier. On va laisser Mme la députée de Mirabel continuer sur cette lancée, si elle veut bien, là, à son choix.

• (17 h 10) •

Mme D'Amours : Merci, M. le Président. M. Baril, M. St-Pierre, bonjour. On a parlé des processus de sélection des commissaires. Moi, j'ai sorti les C.V., là. On est chanceux aujourd'hui, on a un agronome puis on a un producteur agricole, mais, sur les 15, vous êtes quatre qui viennent du milieu. Puis là je ne veux pas nécessairement, là, dénigrer les autres personnes parce qu'elles ont quand même des C.V. quand même exceptionnels. On ne peut pas... Puis on est tous des bons pères puis des bonnes mères de famille, là n'est pas le cas. Mais, pour avoir une cohérence, quand vous dites, là, il faudrait la... Quand on dit «une cohérence et une transparence», quand on connaît le milieu, ne pensez-vous pas que ça pourrait être un critère pour faire la sélection des commissaires?

Le Président (M. Morin) : M. St-Pierre.

M. St-Pierre (Réjean) : Quand vous parlez de connaître le milieu, on associe souvent à toute la question : Bon, c'est des agriculteurs, ils connaissent le milieu. Il y a des personnes aussi du monde municipal qui connaissent bien le milieu. On a une personne qui était à la Commission municipale avant de s'en venir chez nous. On a déjà eu des... on va peut-être en rire, mais un comptable. On avait un comptable, puis je vais vous dire que sa participation aux activités de la commission, puis aux activités de réflexion, puis tout ça, c'était pratiquement... c'était un éclairage différent. Quand on étudie un projet, c'est bien sûr qu'il y a tout le temps un montage financier alentour de ça, puis c'était notre aide à ce moment-là. Qu'il y ait des gens de tous les domaines : géographes... On a une personne qui est spécialiste en aménagement du territoire aussi. C'est des personnes qui connaissent le territoire, pas nécessairement avec la vision exclusivement agricole, parce que, si on avait la vision exclusivement agricole, on pourrait se faire taxer d'avoir juste... de regarder l'affaire juste d'un côté de la lorgnette. J'aime ça avoir quelqu'un aussi qui peut être spécialisé dans le... Excusez-moi.

Le Président (M. Morin) : Oui, juste pour raccourcir, parce qu'elle n'a pas grand temps.

M. St-Pierre (Réjean) : Excusez, excusez, excusez.

Le Président (M. Morin) : Donnez-lui une chance.

Mme D'Amours : Je comprends votre point de vue, mais, quand quelqu'un a un dossier d'un producteur puis qu'il vient d'être nommé, qu'il ne connaît pas le milieu, j'imagine que le processus n'est pas de vous parler tous ensemble, les 15, pour parler d'un dossier, hein? Ils ont un dossier, puis, si c'est complexe, quelqu'un... un autre commissaire peut travailler avec lui. Alors, la problématique du temps... Parce que, là, regardez mon document . Si vous le voyez bien, là, tous les petits onglets que j'ai en bleu ici, c'est les commissions qui ont eu lieu en 1996 et en 1997, et tous les petits onglets, c'est tout ce qu'on est en train de se parler aujourd'hui et hier... lundi... attendez, jeudi dernier. C'est la même, même chose. Je pourrais vous sortir, là, des choses, là, vraiment cocasses que... je ne mettrais pas de date dessus, vous pensez qu'on en a parlé jeudi dernier et aujourd'hui.

Alors, ma question est simple. Est-ce que vous pensez que quelqu'un qui vient du milieu... Si on regardait les nominations des commissaires, pour des délais plus respectables, est-ce que, pour vous, ça serait préférable qu'un commissaire vienne d'une région précise, qu'il soit du domaine de l'agriculture, et là le comptable... moi, mon comptable connaît très bien l'agriculture, qu'il y aurait des gens agronomes, des producteurs agricoles... Dans ce dossier-là... On parlait des MRC, on louangeait la MRC puis on louangeait les CCA, qu'ils allaient être tellement efficaces que ça allait enlever du travail à tout le moins à la commission, que ça allait soulager. Aujourd'hui, on n'a plus de CLD, puis les CCA, bien, ça émane des MRC, qui sont consultatifs, hein, c'est le comité consultatif agricole.

Alors, ma question est simple. Est-ce que les commissaires devraient, s'ils ont à travailler seuls sur un dossier, venir du milieu? Je connais bien la sphère de... la dynamique d'un groupe, là, à savoir toutes les sphères d'activité, c'est très intéressant, mais, quand on parle d'un producteur agricole qui dépose une demande, à tout le moins, il se sentirait peut-être plus sécure, il se sentirait peut-être plus favorable à dire : Bien, j'ai confiance que mon dossier va bien se travailler, et pas parce que les gens, comme je vous dis, là... les commissaires ne sont pas aptes à le faire, mais ça prend plus de temps, quelquefois, quand on ne connaît pas le milieu.

Le Président (M. Morin) : M. Baril.

M. Baril (Yves) : Je vais tenter une réponse là-dessus. Écoutez, est-ce que le commissaire doit avoir un certain lien avec l'agriculture? Je ne crois pas que ça soit nécessaire, parce qu'une diversité, comme mon collègue le mentionnait, d'expertise autour de la table, ça a du bon. Puis, de un, que je sois... Moi, je vais vous raconter mon expérience. Je suis producteur, je suis «grindé» sur le terrain, là, bien comme il faut, et, lorsque je suis arrivé à la commission, on a un accompagnement qui est fait par nos collègues, puis tous les commissaires ont cet accompagnement-là. Il y a une formation qui est faite, un petit peu plus... Par la suite, on est accompagné. Qu'on soit notaire, avocat, producteur agricole ou agronome, l'apprentissage de la loi... il faut la connaître, il faut connaître la jurisprudence, parce que ce qui est écrit, le libellé de la loi, et l'application en vertu des jurisprudences, c'est bien différent. Ça, cet apprentissage-là, qu'on provienne de n'importe quel domaine, il faut se l'accaparer en partant, que je sois producteur agricole ou non, ou agronome ou non, ou comptable, ou juriste. Et l'expertise des collègues qui sont en place fait en sorte que ce savoir-là va se transmettre d'un commissaire à l'autre.

Mme D'Amours : On a tenté d'avoir l'information à savoir combien d'heures fait un commissaire par semaine. Vu que vous êtes en poste, est-ce que vous pouvez me dire combien d'heures que fait un commissaire à la commission?

M. Baril (Yves) : Bien, écoutez, moi, je peux vous dire que je fais mes 40 heures facilement...

Le Président (M. Morin) : M. Baril.

M. Baril (Yves) : Excusez-moi, M. le Président, j'ai répondu un petit peu trop vite. Moi, je peux vous dire que, des heures, on en fait en masse. Puis assurez-vous d'une chose, moi, là, j'ai été élevé sur une terre à ramasser de la roche puis après avoir semé, puis je me couchais le soir, l'ouvrage était fait. Pensez-vous que les commissaires autour de la table de la commission sont heureux des délais qu'il y a là présentement? Je ne pense pas qu'il y en ait un seul. On veut tous donner des réponses le plus rapidement possible, puis je peux vous dire une chose, qu'on fait de notre mieux avec les outils qu'on a présentement. Puis moi, je suis un gars qui aime ça finir ma journée quand l'ouvrage est fait, puis là je n'arrive pas à le faire, puis je suis bien déçu de ça.

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Quand je vous entends dire ça, est-ce que vous avez des solutions pour alléger votre travail, pour faire en sorte que les délais soient moins longs? Est-ce qu'il y a une autre étape qu'on pourrait rajouter ou enlever? Est-ce qu'il y a des choses auxquelles, vous, vous avez des propositions? Parce que M. Ouimet nous a dit, bon : améliorer et moderniser le processus de sélection des membres de la commission, libérer la commission de certains types de demandes adoptées de manière quasi systématique, proposer... trois mesures qu'il avait dites. La troisième, c'était : Modifier les dispositions de l'article 59.

Alors, vous, en tant que commissaires, est-ce que vous avez des propositions semblables? Est-ce que vous adhérez à ces propositions-là?

Le Président (M. Morin) : M. St-Pierre.

M. St-Pierre (Réjean) : C'est sûr que c'est toutes des choses qui sont à considérer, mais, en matière de commissaires instrumentants en ce moment, c'est difficile pour nous de dire : Bon, bien, telle affaire, ça ne fonctionne pas ou telle autre affaire, ça va aller mieux, parce qu'en même temps on ouvre le jeu du décideur qui a un devoir de réserve là-dessus.

Puis je veux répondre, en même temps, à M. Dutil tantôt, qui n'a probablement pas eu la réponse qu'il s'attendait en disant : Vous qui êtes là, est-ce que vous ne seriez pas les meilleures personnes pour nous suggérer des choses? Je suis d'accord avec son affaire, puis, nous, personnellement, c'est bien difficile de le faire. On peut le faire, par exemple, par la voix de notre présidente, de notre présidence. On peut travailler tous ensemble, dire, bon... C'est bien sûr qu'on veut améliorer le sort de la commission, mais de là à aller individuellement dire : Bien, moi, je pense qu'on devrait faire, je ne sais pas, plus d'heures par semaine, on devrait donner un coup pour... ça, c'est des... ou encore modifier tel critère de la loi pour ne plus avoir à s'en occuper, je ne suis pas sûr qu'individuellement, moi, comme décideur, je suis prêt à faire cette suggestion-là, qui pourra ne pas être retenue, bien entendu.

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Mirabel.

M. St-Pierre (Réjean) : Alors, ça peut dire... Écoutez, St-Pierre, là, mettons qu'il dit d'enlever le critère d'homogénéité... Ah! St-Pierre, il ne statue pas en fonction de l'homogénéité. Vous comprenez ce que je veux dire, là?

Le Président (M. Morin) : Ce n'est pas saint Pierre du ciel, là? Ce n'est pas saint Pierre du ciel, non?

M. St-Pierre (Réjean) : Ah non! Ce n'est pas...

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Merci, M. le Président. Oui, bien, en fait, je ne sais pas comment l'invitation vous est parvenue, puis je pense qu'elle est parvenue... L'invitation était claire, c'est qu'on voulait voir deux commissaires qui étaient les porte-parole des commissaires. On ne pouvait pas les voir les 15. Alors, quand vous parlez, je n'entends pas M. St-Pierre ou M. Baril, j'entends les commissaires. Vous nous apportez la façon dont les commissaires travaillent. Alors, les suggestions, je ne les aurais pas prises que c'était juste M. St-Pierre, je les aurais prises en général. Donc, tu sais, quand mon collègue vous a dit que, justement, c'est vous qui êtes en place, qui auriez pu nous donner des suggestions, on entendait les 15 commissaires, on n'entendait pas ceux qui représentaient les 15 commissaires.

Le Président (M. Morin) : ...Mme la députée de Mirabel. Là-dessus, on vous dit merci, MM. St-Pierre et Baril, ça a été fort intéressant. Donc, bonne continuité. Merci.

Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 20)

(Reprise à 17 h 22)

Le Président (M. Morin) : Nous reprenons nos travaux et nous avons devant nous les gens de la Commission de protection du territoire agricole. Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Donc, je vous laisse vous présenter, et vous avez 10 minutes.

Commission de protection du territoire
agricole du Québec
(CPTAQ)

Mme Gouin (Marie-Josée) : Excellent. Merci beaucoup. Mon nom est Marie-Josée Gouin. Je suis la présidente de la Commission de protection du territoire agricole.

Madame, M. le Président, MM. les députés, merci de nous donner l'opportunité d'être parmi vous aujourd'hui afin de vous informer des actions de la commission au cours des 35 dernières années. Il est essentiel de vous rappeler les grands événements et changements des environnements externes et internes intervenus depuis l'entrée en vigueur de nos deux lois. Ce bref rappel vous permettra de bien comprendre les résultats actuels des délais de traitement et l'évolution de la fonction de commissaire.

De 1978 à 1983, en marge de ses activités, la commission a complété, avec chacune des municipalités locales visées, le processus de négociation conduisant à l'adoption de décrets établissant les zones agricoles. En 1987, la commission amorçait le processus des révisions des limites des zones agricoles ayant pour but d'assurer une plus grande harmonisation entre la zone agricole et la première génération des schémas d'aménagement. Cette négociation a été complétée en 1992. Pendant cette période, la commission pouvait compter sur près de 200 employés.

Sans historique de jurisprudence et ayant peu d'outils de localisation et de photographie aérienne, le traitement des demandes d'autorisation était simple. À l'époque, les juristes préparaient les documents pour les commissaires qui, eux, décidaient de l'issue de la demande. À ce stade, la révision ou la révocation d'une décision de la commission pouvait être demandée, et c'est la commission elle-même qui statuait.

En 1985, la loi a été modifiée pour introduire un appel à la Cour du Québec. En 1989, la Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole a institué pour la première fois un recours en appel contre les décisions et ordonnances rendues par la commission. À cet effet, la loi créait le Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole, le TAPTA. Le TAPTA a exercé ses fonctions de 1989 jusqu'à l'entrée en vigueur de la Loi sur la justice administrative, en 1998. Depuis cette date, c'est le Tribunal administratif du Québec, section du territoire et de l'environnement, qui entend les recours dirigés contre les décisions ou ordonnances de la commission.

La réforme de la justice administrative a eu pour effet de modifier le processus décisionnel au sein de la commission. Par cette réforme, le législateur avait cherché à déjudiciariser le processus décisionnel des organismes de l'administration publique. La tâche des commissaires fut donc modifiée et enrichie notamment par le remplacement du rapport d'analyse, qui était produit par un professionnel de la commission, par un compte rendu du dossier comprenant l'orientation préliminaire et par la récupération par la commission du pouvoir de réviser et rectifier ses propres décisions.

Ainsi, en 1998, malgré une diminution des dossiers traités comparativement au nombre traité en 1980, venait s'ajouter l'émission d'un document supplémentaire à l'intention des demandeurs pour l'ensemble des demandes d'autorisation.

Au rapport annuel de l'exercice financier 1997‑1998, il est indiqué que le nombre d'effectifs avait diminué de moitié, pour se situer à 107. Autre changement important : en décembre 2009, la Cour d'appel, dans l'arrêt Saint-Pie, confirme le rôle d'organisme expert en protection du territoire de la commission et ainsi son obligation de recueillir la totalité de la preuve pertinente puisque le Tribunal administratif du Québec ne peut entendre de nouvelles preuves. Ce jugement a généré des impacts considérables sur le traitement des dossiers. Afin de permettre aux parties d'effectuer l'ensemble de leurs représentations et d'obtenir la précision nécessaire sur les faits relatés, la durée des rencontres publiques a augmenté, et les rencontres sont désormais enregistrées.

Le processus décisionnel s'est complexifié puisqu'il est clairement indiqué par les tribunaux supérieurs que l'appréciation d'une demande doit se baser sur des faits. Les contextes agricole, géographique et réglementaire doivent être amplement documentés. La jurisprudence relative à la LPTAA s'est également étoffée par ses 35 ans d'application.

Enfin, les modifications à la loi sur les non-résidents entrées en vigueur en 2013 ont introduit de nouveaux critères d'analyse pour contrer l'accaparement des terres par des non-résidents, augmentant alors la complexité de l'évaluation des demandes d'autorisation faites en vertu de cette loi. À son prochain rapport annuel de gestion, 2014‑2015, c'est 96 ETC qui seront indiqués, et la cible à atteindre pour l'exercice financier 2015‑2016 est identifiée à 85 ETC.

Maintenant, à l'interne, la mise en place d'outils technologiques sophistiqués de plus en plus performants génère un nombre croissant d'informations utiles lors de l'analyse et l'appréciation des dossiers. Elles participent à la connaissance pointue des particularités régionales. Les commissaires comme les analystes se doivent de maîtriser ces outils, de maintenir à jour leurs connaissances en ce domaine. L'importance de la formation continue s'est accentuée. En plus des activités de formation plus traditionnelles, une communauté de pratique rassemble maintenant les commissaires pour faciliter, en collégialité, l'atteinte d'objectifs d'apprentissage et de cohérence.

En outre, afin d'améliorer constamment nos façons de faire et réagir au contexte en mouvance, des comités de travail se penchent sur différentes thématiques. Récemment, en septembre 2014, est issu du comité agronomique un guide des bonnes pratiques agronomiques pour la préparation de dossiers visant l'exploitation de sablières, gravières, carrières, remblais et sols arables. Ce guide spécifie les attentes de la commission et propose aux demandeurs et mandataires les éléments de contenu à inclure lors de la préparation des demandes d'autorisation. Notons également des décisions de principe qui permettent de faire connaître les grandes orientations de la commission en différentes matières, notamment sur les andains de défrichement, sur des demandes visant les maisons bigénérationnelles, sur les travaux de remblai, sur la coupe d'entretien normal d'une érablière et sur la disposition des matières résiduelles fertilisantes.

Ce type de réflexion se poursuit constamment par la commission dans une optique d'amélioration continue. Par ailleurs, dans le processus décisionnel relatif aux décisions rendues en fonction de l'article 59, le commissaire agit dans un contexte de négociation avec les instances régionales et locales. Pour la municipalité et la MRC, c'est une gestion plus simple, plus cohérente et plus efficace. Chaque MRC est différente, ce qui explique des décisions différentes qui tiennent compte du contexte des particularités régionales.

Aussi, afin d'accélérer le traitement des dossiers, depuis plus de cinq ans maintenant, un triage est effectué dès la réception d'un dossier afin d'identifier le niveau de complexité. Sur les 2 500 demandes traitées annuellement, près de 300 sont identifiées peu complexes et prennent une voie différente dans le processus d'analyse. Aussi, c'est dans un souci d'efficience que la majorité des rencontres publiques sont tenues par un seul commissaire. Grâce à son système de mission Sphinx, des indicateurs de gestion ont été développés afin de suivre en temps réel le traitement des dossiers.

• (17 h 30) •

En terminant, en termes de reddition de comptes, la commission est assujettie à un cadre de gestion gouvernemental découlant notamment de la Loi sur l'administration publique. En vertu de cette loi, la commission doit entre autres rendre publique une déclaration de services aux citoyens, établir un plan stratégique et préparer un rapport annuel de gestion. Rappelons que, dans le rapport concernant l'application de la Loi sur l'administration publique, déposé à l'Assemblée nationale le 1er octobre 2014, l'indice global de la commission est de 77,5 %, comparativement à 73,3 % pour l'ensemble de l'administration publique.

En tant qu'organisme gouvernemental la commission doit également contribuer à l'atteinte de la stratégie gouvernementale de développement durable. Elle est également assujettie à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et à la protection des renseignements personnels. Elle est assujettie à la Loi sur la gouvernance et à la gestion des ressources informationnelles des organismes publics et des entreprises du gouvernement. La commission doit réaliser toutes les activités en lien avec le cycle budgétaire gouvernemental, dont la préparation des documents pour l'étude des crédits. Elle doit élaborer un plan d'action annuel assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. Enfin, la commission se doit d'appliquer la politique gouvernementale relative à l'emploi et à la qualité de la langue française.

En conclusion, la commission espère avoir l'appui des instances gouvernementales pour disposer des moyens lui permettant de remplir ses obligations afin de continuer à exercer son rôle d'organisme expert à caractère unique pour la préservation d'une ressource rare et non renouvelable qu'est notre territoire agricole. Merci.

Le Président (M. Morin) : Mme Julien, merci beaucoup. M. le député de Beauce-Sud, vous partez le bal.

M. Dutil : Merci, M. le Président. Juste une remarque, une remarque qui ne s'adresse pas à la commission particulièrement, mais qui s'adresse à l'ensemble de la société. Actuellement — nous, on le constate comme députés — on est en train de crouler sous l'augmentation des contrôles. Moi, j'ai 24 municipalités dans mon comté, là, puis, à la prochaine élection de 2017, là, si j'ai de l'opposition dans 10 municipalités, ça va être tout, puis, dans les municipalités où il n'y aura pas d'opposition, si j'ai un candidat qui se présente à la mairie puis j'ai six candidats qui se présentent au conseil municipal, je vais être très fier de ça. Ils ne veulent plus rien savoir, c'est aussi simple que ça. C'est trop compliqué partout tout le temps. Bon, ça, c'est mon petit éditorial.

Pour en arriver à ceci : je comprends ce que vous nous dites. Ce que vous nous dites, c'est que les contraintes ont augmenté, tout simplement. On contrôle de plus en plus, puis il y a des raisons juridiques qui nous amènent à le faire, mais il faudra trouver des solutions imaginatives pour rentrer dans des délais. Moi, je vais vous dire comment j'aborderais ça actuellement, en fonction des discussions qu'on a ici, là. Je mettrais le délai puis, après ça, je dirais : Comment vous faites pour rentrer là-dedans? C'est ça que je ferais. Qu'est-ce que ça prend comme ressources supplémentaires? Est-ce qu'il y a lieu d'envisager de la tarification dans certains dossiers plus complexes et plus dispendieux? Je pense, par exemple, à un pipeline. Vous autres, vous ne tarifez personne? Je pense que la commission ne tarife personne pour...

Mme Gouin (Marie-Josée) : Pour la tarification... Oui, chaque municipalité dans ces cas-là, oui.

M. Dutil : Oui, je veux dire, les municipalités paient pour avoir une décision de la commission?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Oui.

M. Dutil : Oui. O.K. Est-ce que ça correspond aux coûts? Probablement pas, j'imagine. Bon, en tout cas, j'essaie de voir les diverses avenues et j'en vois trois. La première, c'est de changer les façons de fonctionner. La deuxième, c'est d'avoir les ressources suffisantes. Puis la troisième, c'est de tarifer ceux qui nous demandent des choses et qui ont les moyens de les payer, parce qu'on ne peut plus aller charger aux citoyens davantage de taxes. Est-ce que vous en voyez d'autres? Est-ce que vous pensez que ce serait raisonnable d'envisager de dire : On met des délais, on s'entend sur les délais pour tel, tel, tel genre de décision?

Et j'ajoute un élément. Tantôt, vous avez dit : On fait un triage en fonction des peu complexes, pas complexes. Moi, je pense que le triage devrait se faire en fonction de : crucial pour le développement économique; moins crucial pour le développement économique. Moi, je pense que, si vous nous dites : Les industries, dans ces régions-là, sont cruciales, là — j'utilise cet élément-là parce que c'est celui que je connais le mieux, là — les industries sont tellement cruciales que, pour une décision pour un agrandissement d'usine, là, c'est 30 jours, elles passent en premier. On le trie, parce qu'à la fin de la journée on peut perdre l'entreprise pour une région qui est en dépopulation, là, pour utiliser le terme que...

Alors donc, ma question, c'est : Voyez-vous d'autres points qui nous permettraient d'arriver dans des délais que... Augmentation des ressources, changement des façons de faire, tarification quand ce serait nécessaire, ou autres?

Le Président (M. Morin) : Mme Julien.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Merci, M. le Président. Écoutez, il y a peut-être... Oui?

Le Président (M. Morin) : Je vous ai appelée Julien, puis c'est Gouin. Ça fait que mille pardons.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Gouin. Mais je viens de Saint-Julien. C'est pour ça.

Le Président (M. Morin) : Ah bon! Voilà. Vous me mêlez, vous, M. le député de Mégantic.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Je viens de Saint-Julien.

Le Président (M. Morin) : Excusez-moi, allez-y.

M. Bolduc : Je n'ai rien dit.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Écoutez, comme mes collègues, on en a parlé, puis je vous écoute aussi, j'ai écouté les revendications, puis les délais de traitement depuis que je suis présidente, en 2010, et même avant, on en avait, et on a travaillé fort, à chaque comité de direction... On a un comité de direction à chaque mois, et puis c'est un sujet statutaire, les délais de traitement. On regarde les décisions rendues, on regarde aussi les décisions à venir, le nombre de décisions qu'on a dans la boîte. Aussi, on regarde aussi nos nombres d'effectifs pour en arriver à sortir le plus rapidement possible... et de la meilleure façon aussi, parce que trop vite, non plus, ce n'est pas nécessairement la bonne décision, qu'elle soit autorisée ou refusée. Donc, il faut garder une bonne rigueur et une discipline à ce niveau-là.

Pour les délais de traitement, pour vous dire, là, j'ai les chiffres, moi, des six dernières années sous les yeux, les délais de traitement qui sont soumis à la déclaration de services aux citoyens, donc le gros module, et la pire de notre année, ça a été en 2011‑2012 à ce niveau-là, lorsqu'on parle de l'acheminement de l'orientation préliminaire. L'orientation préliminaire, c'est le premier document qu'on envoie aux demandeurs à la suite d'une demande. Dans notre déclaration aux citoyens, on identifie à 40 jours ouvrables pour rendre cette décision-là. À l'exercice financier 2011‑2012, on était à 35 %; c'est épouvantable! On l'a monté, 34 %, 42 %, et puis là, au prochain rapport annuel — on a essayé, pendant l'année, on avait monté en haut de 48 % — on va être à 45 %. On a travaillé fort à ce niveau-là, et c'est pour ça qu'on a mis en place le tri et c'est pour ça qu'on regarde aussi les dossiers complexes. On demande à nos analystes à chaque semaine, lorsqu'ils reçoivent de nouveaux dossiers, de regarder la complexité et de voir s'ils ont besoin de demander des nouveaux éléments aux demandeurs. Ça, c'est au niveau des délais de traitement.

2011‑2012, la venue de quatre nouveaux commissaires. Mme la députée, tantôt, parlait de la connaissance des commissaires. Je pense que vous aviez deux commissaires ici, M. Baril et M. St-Pierre, qui connaissent bien le milieu agricole. Mais il y a de l'apprentissage, et puis ça peut prendre un bon deux ans, deux ans et demi à vraiment avoir fait le tour, d'avoir fait des dossiers de demande d'autorisation de morcellement, d'agrandissement résidentiel, des demandes d'exclusion, des demandes de morcellement. On surveille aussi l'application. Il y a souvent des dossiers d'enquête que les commissaires doivent traiter pour rendre une décision. Les nouveaux commissaires ne sont pas laissés seuls; ils ont du mentorat. Alors, s'ils ont du mentorat, ils ne siègent pas seuls non plus dans les premières années. Ça prend du temps avant que les commissaires siègent seuls, là. Alors, le mentorat, qu'est-ce que ça fait? Bien, ça enlève peut-être un commissaire plus expert du traitement du dossier quotidien. Donc, ça, on a connu une baisse — je voulais juste vous donner le contexte — à ce niveau-là et, bon, bien, aussi les départs à la retraite.

Pour les façons de... changer les façons de faire, on a une limite, nous, à agir à l'intérieur de notre loi, ne serait-ce que l'envoi de l'avis de modification après une rencontre publique. Je vous explique. On rend l'orientation préliminaire défavorable. Il y a une rencontre publique. On entend. Les commissaires décident de changer d'avis. On envoie un avis de changement, on explique le résumé, on envoie. Après ça, on a encore 10 jours supplémentaires qui est donné au demandeur ou à des représentants de faire des observations additionnelles. On gagne toujours ces délais-là. Il y a toujours un petit peu de délai qui est donné. Peut-être, je n'ai pas la solution exacte ici aujourd'hui, mais, administrativement, il y a peut-être des petites choses à faire, ne serait-ce que l'orientation préliminaire, qu'on a annoncé une autorisation. C'est beaucoup, parce qu'on autorise quasiment à 70 %. Donc, malgré qu'il y a les délais, on autorise à 70 %. Est-ce que le document d'orientation préliminaire pourrait être collé, pourrait ressembler le plus possible au document de décision finale? De ne pas avoir à... On reprend les décisions, on les met sur un autre style pour qu'elles ressemblent avec le dispositif. Il y a des choses comme ça, au niveau de certaines modifications, qu'on pourrait peut-être accélérer le processus des 70 % d'autorisations qu'on amène. Ça, c'est au niveau des façons de travailler. Puis il y a des petites choses qu'on pourrait améliorer, ça, c'est sûr.

• (17 h 40) •

Vous aviez parlé du triage vraiment dans des dossiers économiques, des dossiers d'exclusion. Présentement, ces dossiers-là ne sont pas inclus dans notre déclaration de services aux citoyens. Pourquoi? Parce que ce sont des dossiers qui nécessitaient beaucoup plus de travail à la base. Les analystes travaillent déjà beaucoup au niveau de la demande pour une exclusion. Je prends un exemple d'exclusion. On reçoit des informations. Il y a des obligations, hein, de connaître les espaces appropriés disponibles en zone blanche. Donc il y a des allées et venues avec les mandataires ou la municipalité de connaître des documents. Avant même que ça arrive prêt sur le bureau des commissaires, il y a déjà eu beaucoup de travail qui s'est fait.

Qu'est-ce qu'on a fait pour éviter ce va-et-vient-là? Bien, on appelle ça, dans notre jargon, des prébans. J'ai des analystes, bon, qui regardent des demandes d'exclusion. Ils disent : Ah! là, il faudrait que je parle à... J'aurais besoin du ban des commissaires déjà désignés, parfait, au niveau de la mise au rôle. On désigne déjà le commissaire préalablement pour être sûrs de bien orienter l'analyste, pour ne pas que l'analyste travaille pour rien sur des choses qui ne seraient peut-être pas nécessaires dans ces dossiers-là. Donc, ça, ce sont des choses qu'on fait depuis les dernières années. On sélectionne des prébans pour améliorer, eh oui, ça améliore, parce que, là, l'analyste retourne aux mandataires ou à la municipalité en disant : J'ai besoin de ça, ça, et ça.

Donc, ce sont des petits gestes qu'on a faits au fur et à mesure, parce que la pression est là au niveau des délais de traitement, là. Les commissaires ne sont pas plus contents... les analystes, les agents d'information qui reçoivent les téléphones en disant : Écoutez, quand est-ce que vous sortez la décision? Mais ça, c'est pour une partie des dossiers, mais une partie qui sort assez rapidement aussi.

Les décisions, après — juste pour vous donner, quand même, on a des bons résultats, là — orientations préliminaires favorables, il y a un 30 jours obligatoire, hein, pour recevoir des observations additionnelles. Ça, c'est prévu par la loi. Puis après ça il y a un 30 jours qui est dédié à la commission pour rendre sa décision, elle la rend dans les 93 % dans les délais.

Les dossiers qui ont une rencontre publique... Je vous disais que la pire des années, hein, c'était avril de l'année financière 2011‑2012 pour rendre une décision dans les délais de 45 jours après l'audience publique. Bien, on était à 32 % dans nos délais. Et qu'est-ce qu'on a fait? On a dit : Qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer ces délais-là? Pas pour les nouveaux commissaires, les nouveaux commissaires, on les fait siéger à deux. Mais les commissaires expérimentés sur des dossiers... non pas pour des dossiers d'exclusion puis des dossiers plus complexes qui siègent à deux, mais une bonne partie des dossiers que nous, communément, on appelle les groupes 2, qui ne sont pas les dossiers de municipalités et non pas les dossiers... je veux dire les 300 dossiers qu'on examine, qui sont peu complexes... Bien, ces groupes 2 là, bien, on a réussi à atteindre 63 %, à notre prochain rapport annuel, de rendre une décision dans les délais de 45 jours. On a travaillé fort pour ça. On a passé d'année en année... 32 %, 52 % et, cette année, 63 % dans nos délais parce que les commissaires ont siégé seuls. Et ce n'est pas parce qu'ils siègent seuls qu'ils perdent leurs compétences. Ils sont très compétents, ils ont entendu l'orientation préliminaire, les rencontres publiques sont enregistrées, et, s'ils ont besoin de parler à un juriste, à un analyste ou à un collègue pour être sûr de se faire une tête... C'est le commissaire qui signe la décision. C'est important. C'est leur signature en bout de piste, et ce sont eux qui sont responsables de leur décision. Puis ils ne sont pas contents non plus, les commissaires, quand arrive une décision, exemple : Regarde, tu as fait ça dans ce milieu-là, moi... Il y a beaucoup... Ce n'est pas une tâche simple. Il y a beaucoup d'échanges, et les outils aussi, de géomatique, nous donnent de l'information énorme, là, sur le milieu puis les décisions, là, rendues déjà.

Tarification, maintenant. Ça vous va? Tarification. Écoutez, voilà à peu près trois ans, on a travaillé sur une tarification. À la suite de la visite du Vérificateur général, on avait comme mandat de travailler une tarification. On l'a soumise à différents ministres, la tarification. Alors, nous, notre travail est fait. Peut-être, il faudrait l'actualiser au niveau de certaines augmentations de coûts, mais elle avait été modulée pour certaines demandes de municipalités. Les articles 59, sablières, gravières, dossier d'un citoyen... Donc, c'était modulé à cette époque-là, mais notre travail de tarification a été effectué.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Beauce-Sud. Ça va. M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. J'ai une série de petites questions. Bonjour, Mme Gouin, bonjour, M. Legault, premièrement. Moi, je serais curieux de savoir combien, approximativement, si vous avez l'information, de dossiers qui sont visités par les commissaires — je parle du terrain lui-même, là — ou si les informations électroniques que vous avez maintenant ou les informations de tout type vous suffisent généralement.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Écoutez, pour prendre votre deuxième portion de votre question, au niveau des outils géomatiques, c'est très performant, là, localisation, localisation des décisions. On a les photographies aériennes de 1979, de toutes les années possibles qui sont disponibles. On a accès aussi à Street View. On a accès aux cultures assurées. On a accès aux cartes de visite terrain depuis le début du processus qu'on a fait au niveau des articles 59. On a commencé vraiment... 2005. Les notes terrain sont géoréférencées. Avant de dire à quelqu'un... On sait, là, pour avoir participé comme... J'ai été commissaire un certain temps et puis, pour avoir donné de l'information, on a notre géomatique, les plans sont affichés au niveau d'un écran, et puis on est capables vraiment de voir, ne serait-ce que la délimitation des droits acquis en 1979, on est capables de faire le tour avec les gens. Les gens : Ah bien! Oui, c'est chez nous, ça. C'est comme ça qu'ils nous arrivent puis c'est... C'est ça. Donc, ça, la partie technique, là, informatique, on est reconnus à ce niveau-là.

L'autre partie, par rapport aux visites terrain, bien, les visites terrain, on les fait dans des cas, un peu comme le député de Berthier... Vous parliez avec Mme Cloutier des sujets de dossiers plus... municipal, puisage d'eau. On s'est déplacés pour des étangs aérés. Des gros dossiers, on se déplace en région aussi. Aller visiter au cas par cas dans chaque dossier, ça serait un petit peu plus difficile. Un, il y a la contrainte aussi des budgets, il y a le fait aussi qu'on a un budget fixe aussi pour pouvoir sortir. Donc, quand les commissaires, on les envoie en région, ils vont siéger en région, et, habituellement, les gens sont très contents de les avoir. Donc, on appelle ça, nous, dans notre jargon à nous, encore pour prendre ce mot-là, des «préorientations». On s'en va en région, on va rencontrer les municipalités, et ce sont deux commissaires à cet effet-là qui se déplacent pour aller discuter d'un projet. Et après on annonce notre orientation préliminaire, qu'elle soit autorisée ou refusée, là. Et après ça le processus continue.

M. Bolduc : Merci. Moi, j'ai une autre question par rapport à l'ensemble du processus décisionnel. Donc, techniquement, vous avez des bons outils. Les visites, c'est seulement au cas ou si vous avez définitivement besoin. Comment vous intégrez dans la jurisprudence les 150 000 décisions que vous avez rendues depuis 35 ans? Parce qu'on a entendu parler à quelques reprises de ça. Puis est-ce que ça, en soi, ça ne devient pas une espèce de fardeau très pénible ou si vous êtes capables de vivre sans ça?

Mme Gouin (Marie-Josée) : M. le Président...

Le Président (M. Morin) : Allez, allez, madame.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Fardeau très pénible, je ne le crois pas, parce que ça nous permet... ça nous donne une image du milieu aussi, la jurisprudence, là. Je veux dire, lorsqu'on regarde nos... On a nos photographies, parce qu'on travaille beaucoup avec notre géomatique, hein, la géolocalisation, et puis on est capables de voir d'un seul coup d'oeil les demandes. Par exemple, on parlait de morcellement, on est capables de voir les demandes de morcellement dans une région concernée, dans une MRC, ça nous permet de voir ce qu'on a fait dans la région au cours des dernières années. Les analystes travaillent sur ça aussi préalablement, ils vont nous travailler des... Ils vont nous faire une analyse à ce niveau-là. Et le commissaire, avec cette jurisprudence-là, va l'incorporer dans sa réflexion en vertu de nos critères de l'article 62. Donc, ce n'est pas nécessairement un fardeau. C'est sûr que c'est plus lourd, ça nous prend... ce n'est pas nécessairement le fardeau comme dire : Il faut en prendre compte, il faut prendre le temps de le traiter, de lire les décisions et de comprendre pourquoi on a dit oui, pourquoi on a dit non, et de regarder notre cas et d'apprécier vraiment globalement à ce niveau-là.

M. Bolduc : Merci. Vous avez parlé tout à l'heure de comités de travail où vous faites toutes sortes de travaux, par exemple, un guide pratique agronomique, des demandes bigénérationnelles, les coupes d'entretien sur les érablières, etc., là, vous en avez nommé plusieurs. Ce comité de travail là, est-ce que ça mange beaucoup de temps ou ces comités de travail là? Parce que vous semblez faire de plus en plus d'études qui sont, je qualifierais, périphériques au processus décisionnel de la CPTAQ. Combien de temps tout ça, ça demande? Puis qu'est-ce que vous faites avec ça?

• (17 h 50) •

Mme Gouin (Marie-Josée) : Les cas que je vous ai soumis dans mon allocution de départ, ce sont des décisions de principe. Des décisions de principe, c'est dans des cas, mettons, des... je vous ai parlé des matières résiduelles fertilisantes. Dans les trois dernières années, on a eu beaucoup de demandes d'utilisation de fosses déjà existantes sur des fermes pour entreposage de matières résiduelles fertilisantes. Qu'est-ce qu'on a fait à cet effet-là? C'est qu'il y a un dossier, à un moment donné, qui s'est présenté en disant : Ça sera un bon dossier à faire une décision de principe, en prenant cette décision-là, à dire dans quel cas et dans quel cas, autre cas, on dirait oui, on dirait non. Alors, la décision de principe va expliquer : Bon, c'est dans un dossier X, on explique et on dit : Parfait, on va autoriser à telle condition, et, à cette décision de principe là, souvent, on va inclure un tableau en disant : Si votre demande est sous tel, tel format, vous voulez faire telle, telle chose d'usage non agricole en zone agricole et vous rentrez dans ces conditions-là, vous n'avez pas d'affaire à venir faire d'autorisation.

Donc, c'est peut-être plus long à l'écrire, cette décision-là, mais, pour les autres après, on gagne du temps. Et même pour la cohérence de nos décisions, bien, les commissaires... Oui, il y a des comités, oui, ça prend du temps. C'est qu'à un moment donné il faut se reculer un peu, prendre le temps d'écrire ces décisions-là pour, après, bien... Écoutez, une décision de principe, autant au niveau de l'information qu'au niveau des analystes disent : Parfait! Le cas qu'on a présentement peut ressembler à cette décision de principe là.

Le Président (M. Morin) : ...

M. Bolduc : Merci. En anglais, on appelle ça du «time banking», c'est-à-dire que vous investissez du temps, que vous mettez en banque, qui vous économise du temps pour tous les travaux qui seront exécutés après. C'est ça, l'objectif, hein?

Mme Gouin (Marie-Josée) : C'est l'objectif, oui.

M. Bolduc : O.K. Donc, merci. Ce que vous dites aussi, c'est que vous avez 300 demandes qui sont moins complexes, qui passent par un autre processus. Qu'est-ce que ça veut dire, en termes d'économie de temps, pour ces 300 demandes là, entre autres?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Je vais vous donner l'exemple... Avant qu'on ait notre système de mission Sphynx ou qu'il soit performant au niveau des outils de gestion, on avait mis en place cette façon de faire là, on les appelle nos groupes 1, les dossiers accélérés, et puis on se rendait compte que la décision, l'orientation préliminaire était prête à partir puis que le chèque n'avait pas été encaissé encore, là. Ça allait assez vite, de sorte qu'on allait peut-être trop vite pour ces décisions-là. Lorsqu'on a eu nos outils de gestion pour pouvoir vraiment identifier notre 45 jours, puis tout ça, on a été capables de rentrer ces 300 demandes-là à la main pour rentrer dans notre 45 jours pour émettre l'orientation préliminaire, mais c'est de cette façon-là.

Donc, ces 300 dossiers là, dès l'ouverture des dossiers, il y a une grille encore là. C'est très structuré, là, on ne peut pas aller d'une façon aléatoire, là, c'est très structuré. Les personnes, à l'ouverture du dossier... Est-ce que la demande qui est déposée répond à tel, tel, tel critères? Si c'est oui, ça s'en va dans le canal plus rapide, ça va à l'analyste, puis tout ça.

M. Bolduc : On a entendu aujourd'hui, Mme Gouin, des commentaires, aussi une recommandation, où des jeunes parlaient que peut-être que la CPTAQ devrait avoir un tableau de bord. Puis, dans ce cas-là, on parlait, par exemple, de quantités de terres agricoles dézonées... puis je ne parle pas de zone «vert», là, je parle de terres agricoles. Parce que vous avez des bons outils géomatiques. Combien de terres, de superficies de terres en friche, la qualité de ces terres-là, les régions affectées, etc. Je voudrais vous entendre sur ça. Est-ce que ça serait quelque chose que vous voyez comme quelque chose d'intéressant?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Écoutez, c'est très intéressant, ce n'est peut-être pas ce que certaines personnes peuvent... quand on parle de tableau de bord, mais c'est certain qu'au niveau des régions nos analystes régionaux ont un portrait régional de leur MRC déjà. Est-ce qu'on en est rendus à être en mesure d'identifier les terres en friche, l'évolution? Ça, c'est des choses très intéressantes qui pourraient... On sait que c'est en mouvance aussi. La terre ne devient pas en friche du jour au lendemain, là. Donc, il faut être en mesure de répertorier au fur et à mesure. Donc, ce sont des outils qu'il faut mettre en place. Cet outil-là n'existe pas. Là, ce qu'on fait, nous, plutôt, c'est de travailler régionalement avec nos analystes. Est-ce que c'est une possibilité? Est-ce que ça aiderait? C'est certain, mais, présentement, ce sont plus des portraits régionaux qu'on a, mais, lorsqu'on a des demandes d'envergure, ces extractions de données là, on peut les trouver ponctuellement.

M. Bolduc : Donc, vous seriez en faveur d'un tableau de bord, là, on ne définira pas les détails, là, mais d'un tableau de bord qui pourrait nous aider à mesurer notre performance de la protection de l'agriculture dans son sens large.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Il y a déjà beaucoup d'outils, hein, qui existent, hein, pour... de savoir le nombre de terres en friche, savoir la constitution des propriétés. Il y a beaucoup d'achats et ventes aussi. Selon les années, au niveau agricole, il y a des activités qui vont mieux, des activités, disons, qui vont moins bien, donc, que ça soit... On l'a connu au niveau porcin, on l'a connu au niveau du bovin de boucherie aussi. Mais, si je reviens à votre tableau de bord au niveau des terres en friche, des choses comme ça, oui, c'est un outil qui pourrait permettre, mais encore faut-il être en mesure de le garder constamment à jour, parce que ça ne prend pas de temps que, lorsqu'on bouge avec... qu'il y a des éléments qui changent au niveau agricole, qu'il faut le maintenir à jour, là.

M. Bolduc : Alors, merci. Mais, malheureusement, on manque de temps, mais une question très rapide. Vous nous avez dit que, pour 2015‑2016, vous seriez identifiés avec un budget de 85 ETC, ce qui est une autre réduction. Avec toute votre lourdeur administrative et votre processus d'amélioration continue, est-ce que vous allez être capables de maintenir ou de raccourcir les délais ou si on va se ramasser avec un problème qui empire?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Écoutez, à 85 ETC, là, c'est 11 % de réduction qu'on nous demande pour l'année. Juste pour vous dire, là, on a fait un exercice pendant plusieurs mois avec les directeurs dans les derniers mois pour essayer de trouver puis de mettre les bonnes ressources, parce qu'on a une planification de la main-d'oeuvre, et puis il y a plein d'impondérables aussi : les aménagements de temps de travail, les congés de maternité, de maladie, des gens qui partent à la retraite. Donc, il y a tout ce niveau de remplacement là. On va arriver à 85, mais ce n'est pas sorcier de savoir qu'on va... Tu sais, là, je suis fière de vous parler du délai après rencontre publique, là, mais j'ai 12 commissaires, là, on n'est pas 15, là. Moi, je suis la 13e, là. Je n'en fais pas, de décision, là, j'en fais peu ou pas, là. Cette année, je n'en ai pas fait, là, mais je ne peux pas contribuer comme membre. Mais ils sont 12 commissaires. Donc, ça, c'est pour les commissaires. Que ça soit les analystes, il m'en manque. À 85, là, on ne pourra pas faire de miracles, là.

Le Président (M. Morin) : Ne croyez pas que j'avais un petit penchant, là. C'est parce que le député de Berthier m'a donné la permission de prendre ça sur son temps. C'est parce que...

M. Bolduc : Merci, M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Vous êtes passé, vous m'en devrez une.

Le Président (M. Morin) : Oui, c'est ça. M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Non, c'était — oui, merci, M. le Président — aussi ma question, parce que, là... Tantôt, vous avez énuméré toutes les obligations que vous avez, que ce soit au niveau du développement durable, et la liste est très longue. J'ai essayé de la suivre, mais...

Mme Gouin (Marie-Josée) : ...

M. Villeneuve : Oui, on aura le document, mais tout ça pour comprendre que vous avez beaucoup, beaucoup d'obligations, et ce sont des lois qui sont votées ici, vous n'avez pas le choix d'être conformes à ces lois-là. Et là on vous entend nous dire que vous allez avoir une baisse d'effectifs de 11 %, et ce qu'on a entendu, et peut-être me le confirmer, mais, depuis les 10 dernières années, c'est aussi une baisse de moins 14 %, ça fait que, là, on est rendu à moins 25 % en termes d'effectifs, et ça ne règle pas notre problème de délais, loin de là. C'est loin de le régler, là, parce qu'on va se retrouver avec des délais qui... Parce que c'est vraiment les gens qui vont devoir attendre encore davantage. Et c'est sans parler de tous les dossiers. On parlait des éoliennes tantôt, et là on va avoir TransCanada Pipelines. Vous avez dû avoir un soupir de soulagement quand vous avez vu que c'était reporté de deux ans, ça va vous donner un peu plus de temps pour... Mais c'est un gros dossier, c'est immense, là. On parle de 700 kilomètres, dont beaucoup de terres en zone agricole, et vous devrez vous pencher sur l'ensemble du trajet éventuellement pour en mesurer les conséquences sur l'agriculture.

Donc, on lance le message à la partie gouvernementale, les députés du gouvernement, comme quoi que... Et là on parle de... pour 2015‑2016, c'est ça? Donc, 2016, c'est l'an prochain. Et vous devez atteindre 85 à partir de quand exactement, la date fixe? 31 mars 2016?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Écoutez, déjà, là, il faut...

Le Président (M. Morin) : Mme Gouin.

Mme Gouin (Marie-Josée) : ... — oui, M. le Président — il faut faire une reddition de comptes et il faut avoir atteint... Moi, je dois... on doit démontrer 85, on est dans l'exercice financier, là. On ne peut pas jouer sur le 85, sinon on nous impose un gel d'embauche, là.

M. Villeneuve : D'accord. O.K. Tantôt, je parlais du morcellement. Vous avez les chiffres, je présume bien, là, à savoir : il y a 325 demandes, 2013‑2014, il y en a tout près de 70 % qui ont été acceptées, je pense. En tout cas, peu importe le pourcentage. Mais c'est quoi, les délais, en termes de... que la commission prend pour rendre des décisions au niveau du morcellement?

• (18 heures) •

Mme Gouin (Marie-Josée) : Écoutez, ce que je vais vous répondre par rapport aux délais au niveau du morcellement, ce sont des dossiers qui sont classés dans nos groupes 2, donc dans notre déclaration de services aux citoyens.

Au niveau de l'orientation préliminaire, on atteint 45 %, donc ça doit être dans ces chiffres-là. Mais ce que je vous propose, c'est que je pourrais vous le donner exactement là. On pourrait interroger notre système, là, et puis on pourrait vous envoyer vraiment la... Mais je pourrais vous dire que ça va osciller aux alentours de 45 % parce qu'ils font partie du groupe central, là; ils ne sont pas exclus. Parce que les dossiers de morcellement, il faut comprendre aussi que, de plus en plus, avec les structures de ferme qu'on connaît, c'est plus compliqué, là. Ce n'est plus juste Paul qui vend à Jean, là. Souvent, c'est une société qui divise les actions, puis on vend à untel, puis c'est beaucoup plus complexe. Donc, pour les délais de traitement, si vous me permettez, je vais vous les faire... je vais vous les transmettre au niveau du morcellement de ferme, les 325 demandes.

M. Villeneuve : Pourquoi c'est classé 2? Parce qu'il y a beaucoup... Vous dites que ce n'est pas... Classé 2, c'est répondre aux citoyens. Mais c'est souvent des entreprises qui vont...

Mme Gouin (Marie-Josée) : Mais ils sont... Oui?

M. Villeneuve : Oui, juste comprendre pourquoi vous le classez 2. Parce que, tantôt, le député de Beauce-Sud... Et, pour avoir été en affaires pendant 20 ans, effectivement, le développement économique, c'est aussi de mettre du beurre et du pain sur la table, c'est assez vital, je dirais, et là c'est des classés 2. Je ne comprends pas pourquoi.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Écoutez, au niveau de la déclaration de services aux citoyens, toutes les demandes à caractère public présentées par les municipalités, MRC, les ministères, les organismes publics, les organismes qui fournissent des services d'utilité publique, et les non-résidents, ça, c'est à l'extérieur, là, c'est nos classe 3, mais le restant, là, c'est un propriétaire... Toutes les demandes commerciales, les demandes d'agrandissement résidentiel sont classées... Il y a trois classes. On a fait trois classes, au fil des années, parce qu'on a retiré les 300 dossiers avec un plus faible impact, moins complexes. Mais notre déclaration de services aux citoyens, telle qu'elle est, c'est deux groupes : c'est le groupe d'utilité publique et les autres, là. Donc, nous, au fil des années, en raison des délais, on a essayé de travailler... Même nos groupes 1, comme je peux vous expliquer, sont inclus dans l'ensemble des groupes 2, là. C'est pour ça, lorsque je vous dis que les résultats au niveau du morcellement, au niveau des traitements de délais, ça va ressembler au groupe 2, c'est parce qu'ils sont inscrits à l'intérieur, là, du 45 %, là.

M. Villeneuve : Donc, il y a 55 %... Et ça, vous allez nous revenir, à savoir c'est quoi, les délais de ces 55 % là qui dépassent le cadre que vous vous êtes donné.

Mme Gouin (Marie-Josée) : Exactement. Oui.

M. Villeneuve : À la page 48 de votre rapport annuel... Écoutez, en fait, c'est les décisions rendues, 2013‑2014, pour l'ensemble du Québec. Est-ce que ça serait possible d'avoir ça, la nature des décisions par région, par MRC, ou si c'est un secret gardé... Non? On pourrait l'avoir?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Écoutez, même, je pense qu'au niveau des annexes, là, vous avez le rapport annuel, mais, oui, on pourrait l'extraire. Oui, les annexes, déjà, au niveau du rapport annuel par région.

M. Villeneuve : ...pouvait avoir ça, ça nous permettrait... parce que, de voir les demandes qui proviennent de certaines régions... J'allais dire : Est-ce qu'on peut l'avoir par comté?, mais ce ne sera pas nécessaire, on va y aller par région. On va y aller par région, ça va être correct.

Vous allez avoir à traiter — je l'ai dit tantôt, là, mais je veux le redire — des dossiers fort importants, puis on avait parlé, lorsqu'on s'est rencontrés la dernière fois, entre autres, du projet de TransCanada PipeLines, Énergie Est. C'est un projet qui va demander des ressources particulières, je présume? Ou, si vous avez toutes les ressources nécessaires pour répondre à un tel projet, vous devrez... Ou, si vous devrez procéder par mandat donné à des firmes extérieures pour ce projet-là?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Nous, on va traiter ce dossier-là avec nos effectifs à la commission. C'est certain que ça va demander beaucoup de travail de la part des analystes, notamment les agronomes. Et on en a seulement deux : un au bureau de Québec et un au bureau de Longueuil. Le pipeline traverse le Québec.

M. Villeneuve : Vous avez deux agronomes seulement, c'est ça, attitrés à ça?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Oui, deux agronomes seulement, oui, au niveau de nos analystes.

M. Villeneuve : C'est parce que ça, ça m'amène à... Tantôt, vous disiez, puis les gens avant vous disaient : Vous savez, les analystes ou les commissaires, lorsqu'ils rentrent chez eux le soir, ils aimeraient ça pouvoir dire : J'en ai fait plus puis j'ai avancé, mais là vous risquez d'avoir un peu l'effet inverse à ce niveau-là, étant donné la charge de travail que vous allez avoir. Alors, c'est une question aussi... En tout cas, je fais tout simplement souligner le fait qu'il y a un risque peut-être de démobilisation par rapport... Et ça m'amène à vous poser la question au niveau des absences. Vous en avez parlé tantôt. Au niveau des absences, on comprend, au niveau... pour les femmes, mais, au niveau maladie, c'est quoi, les taux d'absence de la commission?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Au niveau des taux d'absence, habituellement, on se range dans la moyenne de l'administration publique. Mais il est certain qu'on est une petite équipe, là, on n'est pas beaucoup, là pour surveiller le territoire agricole, là. Ne serait-ce qu'on rend les décisions, on rend des décisions sur des demandes d'autorisation, mais on surveille aussi l'application de la loi, des deux lois, hein? Ne serait-ce qu'au niveau aussi avec les enquêteurs, les analystes, on n'est pas beaucoup, s'il en manque un des deux... Pour avoir vécu ça dans les derniers mois, lorsqu'il nous en manque un sur deux, bien, on travaille beaucoup avec une charge commune. Ça nous a amenés à travailler avec une charge commune aussi, hein, pour ne pas que certains dossiers restent en retrait, là. Notre système nous le permet aussi maintenant. Notre nouveau système nous permet de travailler efficacement au niveau de la charge commune. Donc, c'est vrai que ça met une pression, ça met les délais, et les analystes travaillent fort et de bonne foi. Lorsqu'ils voient leur charge augmenter parce que les demandes d'autorisation rentrent, ça met une pression. Est-ce que ça va induire plus de fatigue, de congés de maladie? Écoutez, je n'ai pas de boule de cristal, mais disons qu'il y a beaucoup de pression sur le peu de personnes qu'on a, qui sont employées à la commission.

M. Villeneuve : O.K. Vous avez suivi la commission. Bien sûr, aujourd'hui, vous étiez présente, mais vous avez suivi les travaux, j'en suis convaincu, des autres personnes que nous avons rencontrées. Vous avez vu les critiques qui ont été apportées à la commission. Vous avez par ailleurs bien répondu, je pense, tantôt, à certaines de ces critiques-là. Mais il n'en demeure pas moins qu'il y a une perception, je ne dirais pas d'inefficacité, mais les gens se posent la question : Pourquoi tant de délais? Pourquoi telle décision versus telle autre décision? On comprend que ceci peut expliquer cela, mais ce n'est pas toujours perçu... Les gens n'ont pas toujours l'information aussi complète pour être capables d'apprécier une décision qui a été rendue par la commission. Bon.

Maintenant, est-ce que vous pensez travailler sur un plan pour tenter de répondre d'abord aux différentes questions qui ont été posées ici en termes de délais? Est-ce que vous comptez élaborer un plan d'action? Parce que là vous avez un défi, là. Je reviens sur les délais, mais vous avez un défi colossal, là : ça va être de démontrer qu'avec 85 ETC, d'ici 2016, vous allez être aussi performants de 2016 à 2017 que vous l'avez été jusqu'à maintenant dans la mesure des chiffres que vous nous donnez. Et, advenant... Parce que... Non, mais, si vous vous bâtissez un plan, vous allez probablement constater, à mon avis... puis je ne veux pas présumer des résultats, mais il y a des grosses chances que, si vous travaillez sur ce plan-là, vous allez arriver à des constats qui risquent d'être de pire en pire, je vous dirais, en termes de délais. Est-ce que vous travaillez là-dessus présentement?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Deux choses : on a une planification de la main-d'oeuvre 2011‑2014 qui nous indiquait, avec le nombre de retraites et les possibilités de diminution d'effectif, que les conséquences seraient les délais. En parallèle, ce qu'on a fait — et ce n'est pas de cette année, les délais, je vous ai dit que la pire de nos années était 2011‑2012 — on a mis en place un autre comité au niveau du processus, hein, au niveau de revoir nos processus. On revoit l'ensemble de nos formulaires de demande d'autorisation. Ne serait-ce que le guide des sablières, gravières, qu'on a fait aussi pour permettre une cohérence au niveau des demandes d'autorisation. Donc, ça, c'est pour les sablières, gravières.

On va y arriver, aussi, au niveau des morcellements. Morcellements, il va y avoir un nouveau formulaire avec une nouvelle annexe. Ça, c'est prévu pour l'automne. On a déjà travaillé sur ça pour être en mesure d'avoir des meilleurs éléments possible, de demander au demandeur les éléments qu'on a besoin, avoir des formulaires beaucoup plus précis pour que, nous, lorsqu'on a la demande, lorsqu'on a les documents, on ne soit pas obligés de retourner au demandeur en disant : Il nous faudrait ci, on a besoin de ça. Donc, on a travaillé beaucoup, là.

M. Villeneuve : Tout à fait.

• (18 h 10) •

Mme Gouin (Marie-Josée) : Donc, tout ça, dans notre planification... Parce que les délais, on les voyait, on les subit, là. Donc, on a travaillé beaucoup la révision de l'ensemble de nos formulaires. Ça, c'est pour l'automne, mais c'est beaucoup de travail. Ne serait-ce que l'information pour la résidence, d'obliger les municipalités de nous inscrire, là, la superficie minimum ou, lorsqu'on a besoin des distances séparatrices, d'avoir vraiment ces informations-là. Donc, en conséquence, pour essayer de gagner du temps, on a revu... ou on revoit — on termine l'exercice bientôt —l'ensemble de nos formulaires. Ça, ça faisait partie de notre plan d'action.

Processus. Dans nos processus qu'on a travaillés aussi beaucoup, c'est, avec les analystes, de travailler des grilles d'analyse communes, les deux bureaux. Je vous parle de charge commune aussi, là — on parle de Québec, Longueuil — d'être capables d'avoir les... cibler les mêmes points sur des demandes spécifiques. Ça, on a travaillé sur ça dans les dernières années.

Donc, le travail est déjà amorcé au niveau de revoir nos processus. Juste de revoir les processus, on le fait aussi en même temps, en parallèle avec notre système de mission. On travaille aussi avec un dossier électronique présentement. On est capables de travailler à deux sur un... Avant ça, on avait un dossier papier, là, tu promenais le dossier papier. Maintenant, on travaille vraiment avec un dossier électronique, de sorte qu'une technicienne juridique peut travailler la nature... la nature juridique de la demande et puis on peut peut-être travailler, déjà, un peu plus au niveau de la carto ou revoir la cartographie. Donc, on est capables d'échanger, de travailler plus efficacement.

Avec tous les efforts qu'on a faits, on en arrive encore à des résultats. Il nous reste encore des efforts à faire, mais on a travaillé beaucoup au niveau de l'organisation du travail, même avec les commissaires, la mise au rôle. Le fait de siéger seul, ça peut amener peut-être d'autres contraintes, mais dites-vous qu'on a l'ensemble des éléments pour rendre la bonne décision, là. Je veux dire, ce n'est pas à un ou à deux qui va changer la décision, là; les commissaires sont compétents, ils ont vraiment tous les outils nécessaires pour rendre la bonne décision.

Donc, ce processus-là, ce plan-là est fait. Après ça, il reste à savoir : Est-ce qu'on peut réviser certaines choses, au niveau de la loi, au niveau administratif? Au niveau de l'article 85, là, il y a des choses qu'on pourrait changer, qui pourraient améliorer le traitement de certains dossiers.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme Gouin. On se dirige vers Mirabel. Merci, M. le député de Berthier. Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Merci. Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Je vais vous lire un extrait du verbatim de 1997, où il y a une phrase que j'aimerais vous lire : «On s'est donné une vision, on s'est donné un plan, on s'est donné une organisation. On a fait face à 1 million de compressions : on a diminué nos effectifs de 138 à 106, on a diminué notre niveau d'encadrement de trois cadres, et on a réduit nos délais de 43 % à 44 %», ce qui vous prouve que le problème revient tout le temps, même après toutes ces années-là, même après tous vos efforts.

J'ai regardé le nombre d'employés que vous aviez et j'ai vu qu'il y avait neuf avocats et avocates, en fait, sept femmes et deux hommes, comme avocats. J'ai regardé la liste que j'ai, moi : j'ai un agronome. J'ai regardé qu'il y avait 15 préposés au secrétariat et deux agentes au secrétariat aux informations. Ce que je comprenais de votre groupe de travail, c'est qu'il y avait une préparation de dossiers quand il y avait une demande, alors, en voyant, là, tous les avocats, les techniciens en droit, en arts, en informatique, etc., que le commissaire, quand il avait le document en main, qu'il avait la demande, qu'il y avait une grille d'établie puis que... si ça cadrait tout, le commissaire avait juste à regarder et qu'il disait : Bon, mon avis à moi, avec tous les éléments que j'ai, voici ma décision. Est-ce que je me trompe?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Bien, écoutez, une partie, c'est bien. Oui, c'est vrai, il y a des cartographes qui localisent la demande dans notre système de géomatique. Oui, il y a des techniciennes juridiques qui vont prendre le formulaire de demande et ils vont formuler d'une façon juridique la demande qui nous est demandée. L'analyste, lui, ce qu'il fait, il va analyser le traitement, mais c'est le commissaire qui en apprécie... c'est lui qui va écrire la décision. Et je veux juste rappeler qu'en... Les données que vous avez sorties pour 1997 au niveau du... Vous parliez qu'ils étaient à 106 ETC à ce moment-là, mais, en 1998, on a eu la justice administrative, là. Là, ce qu'on a fait : Bon, parfait, on a ramené encore... on a déjudiciarisé les choses, on a amené un élément de plus. On a fait en sorte que maintenant on a l'orientation préliminaire, ce qui n'était pas là avant. Mais c'est le commissaire au bout de la ligne... Puis c'est le commissaire qui signe la décision, puis les commissaires, puis je les comprends très bien, c'est leur contenu à eux, là, on ne peut pas prendre des éléments... Il y a des éléments d'analyse, mais c'est eux qui vont écrire la décision, là.

Mme D'Amours : Parce que, vous savez, il a été question, là, dans les deux jours, sur les nominations de ces commissaires-là, est-ce qu'il y avait... Et vous l'avez mentionné, tout à l'heure, qu'ils sont deux pour débuter parce qu'il y en a qui n'ont pas la connaissance puis pour... Bon. Bien, pour que ça aille plus vite, est-ce qu'on ne devrait pas revoir effectivement les nominations de ces commissaires-là? Est-ce que, si on avait une grille, là, d'évaluation ou une grille, là, pour les embaucher, ces commissaires-là, il y aurait des critères, selon vous, qui seraient préférables, préalables au poste de commissaire?

Mme Gouin (Marie-Josée) : La question est intéressante. Ce qu'il faut que je vous rappelle, c'est qu'avec les emplois supérieurs, à l'automne passé, on a travaillé le profil d'emploi. Il existait déjà, on avait un profil d'emploi, une description de tâche, une description d'emploi, qui datait de 2007. Avec le contexte qu'on connaît, hein, réglementaire, avec tout ce qui peut changer puis ce qu'on a amené aussi au niveau complexité au niveau des dossiers, on a retravaillé un profil d'emploi pour le commissaire. Les emplois supérieurs détiennent ce profil-là. Donc, c'est établi qu'à tant de pourcentage, bien, on fait l'analyse de dossiers plus simples ou on est soumis à faire, dans certains cas, les demandes d'exclusion où est-ce que ça devient plus complexe. Donc, on a aussi indiqué aussi les connaissances nécessaires pour faire le travail de commissaire.

Mme D'Amours : Selon vous, est-ce que ça a été appliqué?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Selon moi, oui.

Mme D'Amours : Alors, avec tout ce qu'on a dit, comment expliquez-vous que plusieurs ex-commissaires deviennent des travailleurs autonomes et qu'ils vont de l'autre côté de la clôture pour aider les producteurs ou, en tout cas, ceux qui vont faire une demande? Y a-t-il quelque chose en quelque part que ces commissaires-là ont vu, qu'il y a une faille ou qu'il y a... pas une faille, mais, je vous dirais... je vais prendre le terme anglicisme, là, un «fast track»? Est-ce qu'il y a quelque chose? Parce que, si eux le font puis qu'ils réussissent, alors comment se fait-il, là, quand ils étaient commissaires ou travailleurs chez vous, qu'ils ne pouvaient pas le faire?

Mme Gouin (Marie-Josée) : Là, je comprends votre question, mais, dans nos décrets, il n'y a pas de clause de non-concurrence qu'on pourrait appeler, disons, là, de non-emploi ou de travailler dans le même milieu, là. C'est fait ainsi. Est-ce qu'il y a des choses à changer à ce niveau-là? Peut-être, là, mais rien n'empêche... Il n'y a rien d'écrit dans nos décrets de nomination nous empêchant, à la fin de notre terme, de travailler comme consultant ou...

Mme D'Amours : M. le Président, ce n'est pas ça que je remets en doute, c'est plutôt la façon de faire. Comment se fait-il qu'eux arrivent à trouver des solutions pour que ce soit plus rapide puis qu'un producteur agricole qui ne prendra pas une personne de se...

Mme Gouin (Marie-Josée) : Non, mais ça ne veut pas dire que c'est plus rapide parce que c'est un mandataire, là. Non, non, non. Excusez, c'est vraiment... Mais même, je pense, mes collègues en ont discuté aussi, là, des rencontres publiques avec un mandataire... Et non pas qu'ils font très, très bien leur travail, là, arrivent avec plus de jurisprudence, c'est leur métier. Monsieur, madame qui vient se présenter devant nous, on les accompagne, comme commissaires. Au niveau de la justice administrative, là, on a un rôle d'accompagnement aussi. C'est certain que les commissaires seront d'accord avec moi en leur disant : Si les gens... On va leur demander : Avez-vous d'autres informations? Êtes-vous sûrs que vous nous avez dit telle chose? On le connaît, nous, le territoire, comme commissaires, on va les accompagner.

Quand les municipalités... ou un demandeur est accompagné d'un mandataire, bien là, c'est au mandataire de faire ce travail-là. Il nous produit les éléments, nous... Et puis, parfois, ils vont arriver avec une demande de modification parce que c'est leur business, c'est leur travail, mais ce n'est pas plus rapide parce qu'il y a un mandataire, il ne faudrait pas croire ça. Et il n'y aurait pas plus d'autorisation parce que c'est un mandataire, là. C'est vraiment une façon de fonctionner différemment pour les commissaires lors de l'audience publique. C'est une autre façon de travailler que d'accompagnement avec des gens qui se représentent seuls.

Mme D'Amours : Il me reste-tu du temps?

Le Président (M. Morin) : Continuez, je ne vous arrête pas.

Mme D'Amours : Merci. Quand un producteur agricole demande de ces services ou qu'il ne les demande pas... Quand il fait une demande, ce qu'on a entendu aujourd'hui, c'est que probablement qu'ils ne l'ont pas faite convenablement, qu'ils ne l'ont pas... et ça, ça retarde son processus. Quand ils prennent une personne, ils s'assurent que, quand il dépose le document, il soit complet.

Alors, pour nous... en tout cas, pour moi, ma compréhension, c'était que, si on prend quelqu'un qui connaissait ça, ça serait moins long. Je ne vous dis pas, quand... le dépôt du dossier, c'est moins long ou plus long. Je vous dis : S'il a été déposé puis qu'il est complet, c'est plus facile de prendre une décision pour vous — donc, les délais sont normaux — que si on dépose une demande puis que ce n'était pas complet puis qu'on lui demande... qu'on lui dit : Bien, votre demande n'est pas complète, ou avez-vous pensé... Je ne doute pas de votre sincérité quand vous voulez aider les gens, mais comment se fait-il qu'il ne pourrait pas y avoir quelque chose, comme vous dites, là? Probablement, vos demandes par... Vos formulaires, est-ce qu'ils sont complexes? Oui? Si c'est ça, est-ce qu'il y aurait lieu, à ce moment-là, de se dépêcher de faire en sorte que les formulaires soient plus accessibles, je dirais, au niveau de la compréhension?

• (18 h 20) •

Mme Gouin (Marie-Josée) : Exactement ce qu'on a fait. Dans le but d'améliorer le dépôt, ou du moins la qualité des documents qui nous sont déposés, on travaille nos formulaires. Et déjà on a commencé. Même si nos formulaires n'ont pas terminé d'être révisés, on travaille déjà. Dès l'ouverture des dossiers, on a une grille. Est-ce qu'on a un bon plan? Pourtant, les formulaires sont présentement assez clairs. Ne serait-ce qu'au niveau d'un plan on demande un plan de localisation, juste un croquis pour localiser, à l'échelle. Pas besoin d'avoir, dans certains cas, un plan d'arpenteur. Mais parfois, bien, peut-être que le plan n'est pas assez clair. Donc, à l'ouverture des dossiers, on retourne une lettre avec : Veuillez nous envoyer tel, tel, tel document. On le fait. En parallèle, ce qu'on fait, c'est la révision de nos formulaires. Et, oui, ça va aider le traitement des dossiers, ne serait-ce que pour avoir des meilleurs documents dès l'ouverture des dossiers.

Et ce n'est pas la quantité de documents qui est importante, c'est la qualité. Parfois, un argumentaire de deux pages versus un argumentaire de 15 pages, il n'est pas mieux, l'argumentaire de 15 pages, là. L'argumentaire de deux pages bien précis, bien concis, ce qu'on va indiquer dans nos formulaires de demande qui sont quand même assez précis, bien, on va être en mesure d'avoir des meilleurs éléments pour monter nos dossiers de demande d'autorisation.

Le Président (M. Morin) : Merci. C'est le temps que nous avons. Mme Gouin, de Saint-Julien, on vous remercie beaucoup, et M. Legault. Donc, bon retour à la maison.

Et je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 h 22)

(Reprise à 18 h 25)

Le Président (M. Morin) : Nous reprenons nos travaux. Bonjour, messieurs. Si vous voulez bien vous identifier. Et on vous a avec nous pour une demi-heure, donc profitez-en.

M. Louis-V. Sylvestre

M. Sylvestre (Louis-V.) : ...Sylvestre, avocat de Berthierville oeuvrant principalement dans le domaine de la protection du territoire agricole depuis plus de 30 ans. J'ai travaillé pendant... ouf! 18 mois à la commission, au tout, tout début, et, à la suite, j'ai fait des études, et, depuis une trentaine d'années, je suis dans ce domaine-là. Je ne cacherai pas mon allégeance libérale, d'une part, et, d'autre part, évidemment, les clients que je représente, qui sont des municipalités, des MRC, des membres de l'UPA puis des investisseurs, des entreprises commerciales, des entreprises industrielles de tous les horizons, de, je dirais, Gatineau jusqu'à Gaspé et de Carignan jusqu'à Amos.

Il y a mon collègue Me François Chartrand qui est avec moi. J'ai déposé... J'ai été convoqué vendredi après-midi, et j'ai rédigé un bref mémoire — du moins, je le pense — qui se résume en 12 idées principales, dans une approche problème-solution.

Tout d'abord, on vous a parlé de cohérence administrative. Je me permets, du fait des connaissances personnelles que j'ai eues au tout début de la loi, de vous dire que la Loi sur la protection du territoire agricole a d'abord été un souci libéral à l'époque de M. Bourassa : Kevin Drummond, Normand Toupin et tous ces gens. Ça n'a pas abouti parce qu'on craignait, à l'époque, des recours en indemnisation, que ça serait de l'expropriation déguisée.

Il y avait l'élection de 1976, vous vous en souvenez, pour les plus vieux d'entre vous. René Lévesque avait la même hésitation, et j'ai su par Jean Garon et Albert Alain que la façon d'éviter une déclaration... une inconstitutionnalisation par voie judiciaire de cette loi-là, c'était précisément par la modulation d'un organisme permettant d'y déroger pour éviter d'être taxé de faire de l'expropriation déguisée, d'où la Commission de protection du territoire agricole, dont la mission première, ce n'est pas de prohiber, c'est d'autoriser lorsque les circonstances le permettent ou le justifient.

Donc, nous devons en arriver à une cohérence législative. Il n'est pas question d'abolir la commission parce que ce serait rendre les choses éminemment plus complexes.

Le Président (M. Morin) : M. Sylvestre?

M. Sylvestre (Louis-V.) : Oui?

Le Président (M. Morin) : J'ai besoin de vous arrêter juste quelques instants parce que j'ai besoin du consentement pour qu'on termine après l'heure...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Oui.

Le Président (M. Morin) : Tu hésites? Est-ce que... Consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Morin) : Allez-y. Je m'excuse d'avoir...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Non, mais c'est comme si j'étais à la Cour d'appel : on me donne une demi-heure, mais il faut que j'en fasse 25, oui?

Le Président (M. Morin) : Non. Allez-y.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Alors, à la page 3 de mon mémoire — je ne le lirai pas — je vous donne quelques exemples du besoin pressant de moderniser la loi. Par exemple, la présomption d'érablière fait référence, à l'article 1, deuxième alinéa, à des abréviations : ERFI, ERFT, ERBB, etc. Ces abréviations-là n'existent plus, elles sont dépassées, complètement caduques, ce qui fait que, quand on est en matière d'érablière, il faut interpréter, selon les intentions, selon les circonstances ou le contexte : Est-ce une érablière? N'est-ce pas une érablière? Peut-on la couper? Ne peut-on pas la couper? Puis-je faire une porcherie dans une érablière? Est-ce une érablière? C'est un potentiel acéricole? Simplifions les choses, et ça, ça peut se faire par voie législative.

Deuxième exemple, la résidence d'agriculteur, on dit : Une personne ayant pour principale occupation l'agriculture. C'est quoi, un agriculteur à présent? Je vous pose une question bien honnêtement : Laurent Pellerin, est-ce un agriculteur? Combien de temps passent les producteurs céréaliers devant des «computers» à échanger des options sur le marché de Chicago par rapport au temps qu'ils passent sur un tracteur? Même chose pour les maraîchers : Gerry Van Winden, est-ce que c'est un agriculteur ou ce n'est pas plutôt un administrateur de société agricole? Alors, ça nous met dans un niveau d'incertitude qui fait qu'on est obligés de déposer des demandes d'autorisation pour avoir des licences. Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de rendre la définition du privilège de l'article 40 de la résidence d'agriculteur de façon plus flexible et plus moderne?

• (18 h 30) •

On soulevait la production biologique. Oui, effectivement, il y a des petits producteurs biologiques. Il y a des petits producteurs de... des éleveurs d'animaux qui respectent le principe que l'animal est un être sensible. Ils ont des plus petits troupeaux. Eux, parce qu'ils n'ont pas la rentabilité immédiate, ils se voient dénier le droit d'avoir leur résidence sur leur ferme. Pourquoi? Ils sont différents, oui, mais ils sont égaux devant la loi. Est-ce que, oui ou non, ils s'occupent d'agriculture? La commission a développé avec le temps une jurisprudence à l'effet qu'il fallait avoir le revenu, la rentabilité, et tout ça. La rentabilité est quelque chose de bien relatif. Ça prend une réflexion législative à cet égard.

L'agriculture. Je suis à la page 6. C'est quoi, l'agriculture? À l'époque du début des vignobles, du début de la transformation agroalimentaire. Tous les problèmes qu'on a eus, de la fromagerie à l'île d'Orléans, le cheddar, où, parce qu'on prenait du lait qui n'était pas pasteurisé, on était pour donner la brucellose et la tuberculose à tout le monde! Même la transformation, même l'activité agricole est tellement restrictive que ça complique les dossiers, et on se voit contraints de déposer des demandes d'autorisation. Il y a encore là matière à réflexion.

La société en nom collectif. Comme vous le savez, on ne peut pas vendre deux lots contigus. Une société en nom collectif n'a pas de personnalité juridique. Mais là il y a-t-il contiguïté entre un lot qui appartient à une société en nom collectif et un individu? Encore là, c'est un problème. La commission dit que oui; moi, je dis que non. Il y a une incertitude. Il y a lieu, encore là, de moderniser la loi.

Alors, c'est quatre exemples bien simples où il y a un effort de modernisation et de mise à niveau de la loi sur la protection du territoire agricole.

Le titre 2, la connaissance non divulguée de certains faits. Énormément de temps est consacré par les commissaires à des échanges, à des rencontres, à des discussions, à des études, et je n'ai aucune information privilégiée à cet égard-là, sinon ce que les maires et préfets me disent et les gens de l'UPA me disent. Ça prend du temps. Combien? Je l'ignore. Je ne fais aucune admission là-dessus. Mais ce que je constate par ailleurs, c'est que, dans le cadre du devoir d'agir équitablement, tous ces faits, ces communications, ces informations ne sont pas nécessairement divulgués aux demandeurs, tant et si bien que, quand la commission dit : Il est porté à la connaissance de la commission que, qu'est-ce qui a été porté à votre connaissance que je n'ai pas su? Des échanges de téléphone, des courriels, etc. Ça, c'est profondément inéquitable.

Et, si vous lisez l'article 12, deuxième alinéa, qui est à la page 8 de mon exposé, il est mentionné : «La commission peut prendre en considération tous les faits qui sont à sa connaissance. Elle n'est pas tenue de les divulguer.» Pourtant, l'article 2 de la Loi sur la justice administrative qui dit que la commission est tenue d'agir équitablement... Je cite l'article : «Les procédures menant à une décision individuelle prise à l'égard d'un administré par l'Administration gouvernementale, en application des normes prescrites par la loi, sont conduites dans le [...] devoir d'agir équitablement.» Si on agissait équitablement, je vous dis bien honnêtement, si on était plus spécifiques au niveau de la législation sur ce qu'est le devoir d'agir équitablement, on simplifierait, encore là, beaucoup de choses.

Le droit de contester trop restreint devant le TAQ. Mme la présidente a commenté la chose. J'ai siégé sur le comité aviseur présidé par Lorne Giroux à l'époque où Michel Pagé était ministre de l'Agriculture. Il y avait une immense impasse; on est en train de la revivre. Les gens non satisfaits d'une décision de la commission se voient presque automatiquement contraints de demander la révision de celle-ci. N'importe quel juge que vous connaissez, demandez-lui s'il est plaisant, un, de se réviser soi-même ou d'être révisé par un autre. C'est profondément déplaisant. On n'aime pas se faire dire qu'on a tort. Se faire casser en appel, ce n'est déjà pas facile, mais s'autoréviser, c'est extrêmement difficile.

Dans l'affaire de Saint-Pie, qu'on invoque pour justifier le fait que l'administré ne peut pas faire valoir ses moyens devant le Tribunal administratif du Québec, on dit que la commission a une expertise telle qu'elle ne peut pas être soumise au tribunal administratif. Saint-Pie, c'était quoi? La famille Lacasse avait une usine à Saint-Pie-de-Bagot puis ils voulaient l'agrandir bout à bout pour que la chaîne de production puisse utiliser l'entrepôt dans une superficie à être exclue de la zone agricole. C'était simple de même.

Devant la commission — c'est moi qui l'ai fait, ce dossier-là — ça a pris 30 minutes; il fallait aller souper. Savez-vous combien de temps ça a pris devant les tribunaux judiciaires? 10 ans. Deux fois le circuit complet jusqu'à la Cour d'appel, retourner au Tribunal administratif du Québec puis remonter à la Cour d'appel pour agrandir un entrepôt bout à bout. La commission a dit : Non. Nous, on connaît ça. Vous allez faire l'entrepôt sur la piste Sanair.

Est-ce que ça prend un niveau d'expertise tel qu'il faille avoir un diplôme en agronomie pour le faire? Quand c'est simple, gardons les choses simples. Et le Tribunal administratif du Québec, lui, avait dit : Bien, écoutez, un entrepôt, on ne peut pas le bâtir ailleurs qu'à l'extrémité de l'usine qui est là, hein? Bien non, il fallait judiciariser, judiciariser, judiciariser. Tout ça pour quoi? Pour réduire la compétence ou le pouvoir d'intervention du Tribunal administratif du Québec et reconcentrer tous les pouvoirs au niveau de la commission.

Il n'y a plus d'exutoire possible, là. Et, dans ce sens-là, à l'époque, la commission se révisait. De 1978 à 1989, c'est la commission qui se révisait. Ça posait tellement de problèmes à l'époque à Michel Pagé, à Yvon Picotte et puis à Robert Bourassa qu'on a dit : Est-ce qu'il y a une solution? On a créé le Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole, et ce tribunal-là, justement, venait à bout... entendait la preuve au complet et statuait. Il y avait beaucoup moins d'irritants puis il y avait beaucoup plus de satisfaction au niveau des justiciables. Et c'est ce que, je pense, Me Jean-Guy Provencher vous a dit aussi à l'époque. D'autant plus que le Tribunal administratif du Québec est composé de gens qui sont indépendants et impartiaux. Ils ont une compétence équivalente à, puis ils sont encore plus indépendants et impartiaux.

Le Président (M. Morin) : Je vais vous demander d'en arrêter là. Et, si vous voulez poursuivre, hein, c'est selon les questions.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Excusez, j'ai abusé.

Le Président (M. Morin) : Vous aviez 10 minutes, et ça passe vite.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Oui, ça va. Non, non, je vais me plier à...

Le Président (M. Morin) : Je suis certain que...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Le texte est là de toute façon.

Le Président (M. Morin) : Oui, merci, Me Sylvestre. M. le député de Beauce-Sud.

M. Dutil : Merci. Alors, oui, donc, le texte va nous être fourni? Vous avez soulevé un point que je trouve pointu, bien précis, qui est les autres usages qui sont incompatibles, peut-être, avec l'agriculture, mais qui sont absolument nécessaires. Je veux dire, on a le même problème, quand il s'agit d'agrandir une usine pour la production, que vous avez soulevé avec le dossier de Bagot. Ça ne peut pas être ailleurs que là. Si ça ne peut pas être ailleurs qu'en continuité avec l'usine qui existe, que ce soit un zonage agricole de la meilleure qualité du monde ou non... Et, sinon, l'usine risque de péricliter. Si j'ai bien compris, c'est ça, votre point de vue. Il arrive un moment donné où il faut...

M. Sylvestre (Louis-V.) : C'est une des situations. Là, je vais vous donner une autre situation. Vous avez un Belge ou un Hollandais qui vous soumet un projet de cultivars d'orchidées en provenance de Taïwan. Il a besoin de 20 000 pieds carrés de serre puis il a besoin d'une maison. Il a besoin d'un petit morcellement. 20 000 pieds carrés de serre, de cultivars d'orchidées, c'est aussi payant que 500 hectares de sols céréaliers voués au maïs. Là, il faut en faire la démonstration, mais morcellement, morcellement, morcellement, on s'en réfère aux statistiques.

Alors, c'est pour dire que chaque cas est un cas d'espèce, et c'est faux qu'on puisse en arriver à une volonté de cohérence administrative. Et les commissaires sont là pour décider selon ce qu'on vous a dit, là. Le gros bon sens, moi, à mon sens, c'est la rationalité sur la preuve qui est soumise, ne pas chercher à justifier par des statistiques, et des moyennes, et une cohérence administrative, y aller cas par cas. Et c'est la raison pour laquelle la commission a été créée.

M. Dutil : M. le Président, la question sur le morcellement m'apparaît particulièrement importante, parce qu'effectivement, quand on a créé la commission, on a pris pour principe que plus c'est gros, mieux c'est, hein? C'était un petit peu la tendance du temps que, si tu veux produire quelque chose, si tu en produis plus puis tu es plus gros, ça va être meilleur, ce qui est totalement faux, on le sait aujourd'hui, là. Dans l'ensemble de ce qui existe sur la planète Terre, ce n'est pas parce que tu es plus gros que c'est mieux. D'ailleurs, les gens qui pèsent 400 livres le savent, par rapport aux gens qui pèsent 150 livres, hein? C'est un peu ridicule comme exemple, mais c'est ce qu'on constate.

Donc, est-ce que le morcellement devrait être pris par la Commission de protection du territoire agricole puisque, de toute façon, ça reste de l'agriculture? Puis, à la fin de la journée, comme les entrepreneurs dans l'industrie vont faire un petit garage ou un gros garage, on peut avoir des agriculteurs qui font une petite chose puis des agriculteurs qui font une grande chose, en tenant compte...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Tu sais, il y a une dynamique dangereuse. La loi, avec l'évolution, a restreint beaucoup les possibilités d'usages résidentiels en zone agricole, principalement dans le bassin de Montréal, ce qui fait que, dans le bassin de Montréal, on est rendus, sur du terrain résidentiel desservi, à des coûts de l'ordre de 25 $, 30 $ et 40 $ le pied carré. Donc, un tout petit terrain dans le bassin montréalais pour une résidence unifamiliale, c'est 100 000 $ plus TPS, TVQ. Puis je ne vous dis pas centre-ville de Montréal, là, je vous dis 25, 30 kilomètres.

Donc, l'unité spatiale de base est à 100 000 $. Les pressions sont énormes pour qu'en périphérie on finisse par trouver un petit morceau de terre pour venir à bout de s'établir, pas parce qu'on veut y faire de la petite agriculture à petite échelle, tout simplement parce que les prix des évaluations ont tellement monté qu'on essaie de trouver un exutoire, une porte de sortie en zone agricole. Et c'est là où il se trouve des pressions.

M. Dutil : ...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Par contre, quand on dépose — excusez, M. Dutil — quand on dépose la demande d'autorisation et qu'on a un projet agricole, on peut établir un barème spatial ou un certain critère de rentabilité.

• (18 h 40) •

M. Dutil : Oui. Bien, par contre, M. le Président, ce qu'on discute ici, entre autres choses, c'est les deux Québec. Vous nous parlez du Québec où il y a de la pression, puis nous autres, on parle aussi du Québec où il y a de la dépression, si je peux m'exprimer ainsi, là. Et on a plusieurs centaines de municipalités qui sont en perte de population pour des raisons démographiques, hein? Avant ça, les petites municipalités s'accroissaient, même si elles s'accroissaient moins vite que les grandes villes, mais aujourd'hui elles diminuent de population.

Est-ce que vous estimez que la pression est la même pour la construction d'une résidence et que le risque que vous soulevez est le même dans des endroits où il y a des pertes de population?

M. Sylvestre (Louis-V.) : La dévitalisation, j'en traite précisément aux pages 12 et 13 de mon exposé, c'est une tragédie, une grave tragédie. En ce moment, à mon bureau, là, j'ai des entreprises qui ont des problèmes, et on parle d'une centaine de licenciements possibles. On ne peut pas appliquer la loi de la même façon dans les municipalités qui sont en voie de dévitalisation, où le gouvernement du Québec investit pour tenter de soutenir les services, et, d'un autre côté, faire preuve de la même rigueur. Et ça, à mon sens, ça serait d'amender l'article 62 de la loi pour y ajouter, par-delà les critères 9 et 10, une considération spéciale, quitte à ce qu'il y ait une référence territoriale, que toutes les municipalités qui sont identifiées comme en voie de dévitalisation ou dévitalisées fassent l'objet d'un souci majeur.

L'autre point, c'est le développement durable. La Loi sur le développement durable existe depuis 2006, mais la Cour suprême du Canada avait déjà internalisé le développement durable en 2001 dans l'arrêt Hudson. Et, par surcroît, Lucien Bouchard, comme je le dis dans mon exposé, avait lui-même exigé que l'on mette, à l'article 1.1 de la loi sur la protection du territoire, qu'on doit appliquer la loi dans une perspective de développement durable. Et qu'est-ce que le développement durable? J'en traite aux pages 14 et 15 de mon exposé. C'est quoi, le développement durable? C'est tenir compte du volet environnemental, tenir compte du volet économique et tenir compte du volet social. Vous ne pouvez pas rendre une décision dans une perspective de développement durable si la décision que vous rendez met au chômage 100 personnes, si la décision que vous rendez ne permet pas la création de 25, 30 emplois. Ce n'est pas respecter le texte de loi lui-même. Est-ce qu'il faut y mettre une emphase?

Les décisions que je lis... Puis je ne pointe personne. Puis je ne veux pas être pointé non plus, je dis la vérité. J'ai lu que le développement durable tel que plaidé par Me Sylvestre signifiait qu'il faudrait tenir compte de tout ça, alors que la volonté du législateur, la vôtre, c'est qu'on est dans une société verte.

Le Président (M. Morin) : Me Sylvestre, il y a le député de Mégantic qui veut vous adresser quelques questions.

M. Bolduc : Beaucoup de passion, monsieur... maître...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Pardon?

M. Bolduc : Beaucoup de passion, maître...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Mais j'espère que je suis convaincant.

M. Bolduc : Oui, convaincant. J'ai plusieurs questions. On va essayer d'être très efficaces.

Une voix : ...

M. Bolduc : Oui, je sais. Il reste... À la page 23, vous dites, à propos de l'article 62.6 : «...pour rendre une décision [...] la commission doit avoir reçu l'avis favorable des personnes intéressées...» Et, en bas, vous dites :

«Il se trouve donc là une disproportion des moyens et un pouvoir abusif donné essentiellement à l'UPA qui bénéficie d'un monopole de représentation.» Est-ce que vous avez une solution par rapport à ça?

M. Sylvestre (Louis-V.) : Moi, je ne... Dans un souci... Je vous l'ai dit, je suis d'allégeance libérale, tant politique que philosophique. Dans une société libre et démocratique, respectueuse du principe de pluralisme, je ne conférerais pas de statut particulier à l'UPA. J'abrogerais toutes ces dispositions-là. Ceux qui représentent le monde agricole se feront entendre, mais certains ne seront pas plus égaux que d'autres. C'est simple comme ça. L'UPA a les moyens, est capable de faire valoir ses moyens. Elle est capable d'argumenter, elle intervient en cour. Elle est capable, devant les comités de MRC, de faire valoir son point de vue. Mais est-ce que ça empêche d'autres d'avoir droit de regard? Parce que ce que l'article 65 vous dit, comme surtout l'article 62.6, sur les îlots déstructurés, c'est un droit de veto qu'on donne à l'UPA sans le dire.

62.6 — je suis à la page 23 — il mentionne, et je cite : «Toutefois, pour rendre une décision sur une demande soumise en vertu de l'article 59, la commission doit avoir reçu l'avis favorable des personnes intéressées au sens de cet article.»

Qui sont les personnes intéressées? La municipalité locale, la MRC et l'UPA. C'est en vertu de l'article 59. Est-ce que c'est légitime dans une société libre et démocratique, respectueuse du principe de pluralisme, dans une perspective de développement durable? Je vous soumets que non. Je ne me ferai pas des amis, je le sais, mais je vous dis ce que je pense.

M. Bolduc : Une dernière question, puis je la trouve extrêmement pertinente, à l'intérieur du développement durable, naturellement. Mais vous nous dites, à la page 25, qu'étant donné que l'eau est appelée, au cours des 30 prochaines années, à être l'une des ressources les plus précieuses qui soient... Puis, après ça, vous parlez du changement climatique. Ça, là, c'est quelque chose de fondamental, sur lequel, actuellement, on n'a rien de prévu puis on n'a rien planifié. Comment vous en êtes arrivé à faire cet état de fait là?

M. Sylvestre (Louis-V.) : Bien, M. le député...

Le Président (M. Morin) : En 30 secondes, Me Sylvestre. En 30 secondes.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Je connais trop de sites où l'eau est contaminée, n'est plus valable, même pas pour irriguer des champs de fraises, et où on vend des fraises «by the side». Puis il y a des gastroentérites qui surviennent, par expérience.

Le Président (M. Morin) : Merci. M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Oui, M. le Président. Si Me Sylvestre veut continuer sur son explication à la réponse.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Bien, écoutez, c'est que j'ai eu à travailler sur les terres maraîchères, j'ai eu à travailler sur la tourbière de Lanoraie puis, en tout cas, à Rivière-du-Loup et tout, et, à l'occasion d'ingénieurs dont je retenais les services, on s'est aperçu que certains pays, comme par exemple l'Allemagne de l'Est, la Pologne sous le régime soviétique, 40 % de leurs nappes souterraines sont irrémédiablement contaminés. En France, on met des engrais extrêmement puissants en Champagne, la Champagne crayeuse. L'eau souterraine n'est plus buvable pour les femmes enceintes et les jeunes enfants. Bretagne et Normandie, 30 % à 40 % des eaux souterraines sont contaminées.

Quand on arrive à Lanoraie-Lavaltrie, la culture du tabac, au cours des 40 dernières années, a fait que les eaux souterraines sous la nappe de sable fait que l'eau, à plusieurs endroits, est dangereuse, ne peut plus être bonne pour la consommation humaine. Quant aux pesticides qui sont étendus lors des cultures, évidemment, quand il arrive des gros coups de pluie, ça, ça va dans les eaux de surface. Les eaux de surface servent à irriguer. Alors, quand vous vendez les légumes de Norton Creek, par exemple, dans Sherrington, bien, il y a du Roundup dedans puis il y a différents ingrédients qui font que parfois les cultures sont contaminées.

Dès lors, vendre ou penser à exploiter ces cultures-là, si on continue ce régime-là, ça pose problème. L'eau étant un facteur essentiel à l'agriculture, à mon sens, il doit rentrer dans la commission de protection du territoire le mandat d'examiner la chose.

M. Villeneuve : Ça m'amène... Parce que j'aime bien ce que vous venez de dire. Parce que tantôt je vous écoutais, lorsque vous parliez des trois éléments du développement durable, qui est l'économique, le social et l'environnement. Considérez-vous, d'après ce que je viens... En tout cas, je viens de vous entendre. Est-ce que vous considérez que l'environnement est peut-être l'enfant pauvre des trois composantes du développement durable, actuellement, ou a été l'enfant pauvre? On n'est pas dans le sujet de la commission, là, mais je vous pose la question tout de même.

M. Sylvestre (Louis-V.) : L'estimation des... Je ne peux pas... Écoutez, c'est une question encyclopédique et systémique. L'environnement, enfant pauvre? Quand on voit des tragédies sociales, quand on voit des employés perdre leur emploi, quand on voit des agriculteurs ne pas être capables de se financer, ils ne sont pas capables de morceler... Il y a toutes sortes de tragédies. Alors, quantifier les tragédies... Moi, j'ai vu une tragédie environnementale, j'ai vu des tragédies sociales puis j'ai vu des tragédies économiques. J'ai assisté à des suicides, à des faillites. Alors, lequel est le plus tragique? Je veux dire, évitons les tragédies puis mettons-nous en mode solution. Je n'ai pas de jugement à porter là-dessus.

M. Villeneuve : D'accord. Merci. On pourrait en parler longuement. On n'a pas beaucoup... on a peu de temps. Écoutez, tantôt, vous avez abordé le fait que la commission... puis, moi aussi, ça m'a surpris, parce que je ne suis pas un expert comme vous dans le domaine, mais ils regardent beaucoup... Lorsqu'un projet est déposé, une demande est déposée, ils regardent revenus, rentabilité. Et tantôt vous sembliez dire que ça peut être très relatif, tout ça, et je suis assez d'accord avec vous. Et est-ce que la commission, dans ses critères, c'est un critère qui peut être vraiment décisif?

M. Sylvestre (Louis-V.) : Bien, écoutez, pour ce qui est de l'application de l'article 40, oui, et, pour ce qui est de l'entité agricole rentable, oui, dans sa cohérence administrative, où effectivement elle tient compte de la rentabilité du projet. Évidemment, il y a des calculs qui se font, mais on se fait référer au CRAAQ, au centre de recherche statistique du ministère de l'Agriculture, alors c'est tel type de pratique agricole, vous devez rentrer dans tel, tel, tel barème.

Moi, j'y crois plus ou moins parce que je vois de petites entreprises agricoles minuscules faire plus de profits que de grosses entreprises céréalières ou laitières. Pour moi, c'est beaucoup... C'est un peu comme un bureau d'avocats. Ce n'est pas parce que vous avez 150 avocats que vous êtes plus rentables, plus efficaces qu'un bureau comme le mien, où nous sommes peu nombreux.

M. Villeneuve : Question... Tantôt, vous aviez... en tout cas, vous avez parlé de la connaissance, que la commission avait à sa connaissance des faits et que cette connaissance-là des faits, ils n'étaient pas obligés de la rendre publique. Côté transparence, je veux juste voir : Est-ce que, selon vous, c'est un manque de transparence? Est-ce que la commission devrait être obligatoirement... Est-ce qu'elle devrait être obligée de rendre tout ça public?

• (18 h 50) •

M. Sylvestre (Louis-V.) : Le texte de loi dit : l'association accréditée, qui est l'Union des producteurs agricoles, a droit... est partie intéressée. Donc, il y a des échanges directement entre la commission et l'UPA, il y a des rencontres. Je pense que vous avez été préfet dans une ancienne vie, vous avez participé à ces rencontres-là. Il y a des dossiers qui sont nécessairement discutés, des orientations à long terme qui peuvent concerner nos dossiers, nos clients et le justiciable québécois. Est-ce qu'on a accès à ces communications-là? Pas du tout. Est-ce qu'on devrait y avoir accès? Je vous soumets, en droit, oui. Donc, le commissaire a une obligation de réserve et de retenue. Hors de l'audience, hors de la rencontre, hors des documents publics, il n'y a strictement aucun contact.

M. Villeneuve : Donc, il y aurait un travail à faire au niveau de la transparence à ce niveau-là. C'est ce que je comprends de... Tout à fait, tout à fait. D'accord, d'accord.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Bien, je vous soumets respectueusement que oui. Oui, oui, il y aurait un travail à faire.

M. Villeneuve : Moi, je n'ai pas d'autre question, M. le Président.

Le Président (M. Morin) : Ça va. Mme la députée de Mirabel.

Mme D'Amours : Oui, merci. Bonjour, M. Sylvestre. Bonjour, monsieur. Je reviens à votre façon de penser quand vous parliez, là, tout à l'heure des fleurs qui viennent de l'Asie et qui demandent très peu de superficie mais qui seraient très viables, et qu'il y aurait un refus parce que c'est une superficie qui est x. La vision de la commission ou, à tout le moins, ce que j'en ai bien compris, c'est qu'eux autres c'est à long terme. Ça veut dire que, si ce producteur agricole là fait 10 ans, quand il va quitter, qui pourrait reprendre et quel... Parce que ce ne sera peut-être pas la même production, et là ce bout de terrain là ne sera pas assez payant, en termes d'argent, pour faire de l'agriculture à des... produits conventionnels. Comment vous, vous pouvez débattre sur une courte vision comme ça versus, eux, la vision longue qu'ils ont du...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Je vais répondre de deux façons avec un petit peu d'humour. J'aime les beaux risques, et, en second lieu, comme disait John Maynard Keynes, «in the long run we are all dead».

Mme D'Amours : Je suis contente.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Alors, moi, si un agriculteur, un jeune me propose un élevage de poneys du Shetland, en multiplication génétique avec, j'embarque, je le soutiens, je le défends. Après ça...

Mme D'Amours : Vous le croyez.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Je le crois. Pourquoi je ne le croirais pas? La bonne foi se présume toujours. Pourquoi pénaliser avec le modèle agroproductiviste? Il n'y a pas juste ça dans la vie. Et la diversification des productions... Les atocas... J'ai travaillé pour les producteurs d'atocas à l'époque; on ne les croyait pas, les producteurs d'atocas. J'ai travaillé pour les bleuetières dans la tourbière de Lanoraie; on ne les croyait pas, ces gens-là, à l'époque. C'étaient des affaires d'hurluberlu. Voyons donc! J'ai même représenté une communauté religieuse qui voulait faire des hosties en blé biologique. Ça a été refusé par la commission. Mais ne riez pas, c'est vrai! 80 % des hosties vendues au Québec sont importées des États-Unis.

Alors, il n'y a pas de limite. Il n'y a pas de limite à l'inventivité, à la créativité. Alors, pourquoi la pénaliser? Pourquoi la pénaliser? Pourquoi faire des procès d'intention? Ça s'appelle prendre des risques, mais la commission est là pour les prendre, ces risques-là.

Le Président (M. Morin) : Allez, madame.

Mme D'Amours : Merci, M. le Président. Est-ce que vous pensez... Parce que, là, on parle de la CPTAQ, mais c'est tout relié, hein, il y a toutes des ramifications à faire un peu partout. Et la vision... ou le mot «agriculture» — parce que vous en parlez dans ça aussi, de revoir le terme, de revoir ça — est-ce que vous pensez que d'actualiser... Parce qu'il faut penser que c'est le garde-manger québécois, qu'il faut garder nos superficies. Vous êtes d'accord avec ça?

M. Sylvestre (Louis-V.) : Entièrement. Plus que ça, madame, si vous permettez, en aparté, je vous dirais qu'avec le réchauffement climatique nous allons perdre des érablières du sud du Québec, de la Montérégie. Demandez au Jardin botanique, ils vont vous dire : Dans 25 ans, il n'y aura plus de sucres. Il faudrait, en ce moment, faire de nouveaux décrets ou faire des inclusions importantes dans le climat des Laurentides et puis du côté de la Beauce et de Mégantic.

Mme D'Amours : D'accord. C'est beau pour moi. Vous dites, à la page 20... J'aimerais ça revenir à votre document. À la page 20, vous dites que l'«interprétation actuelle qu'en fait la CPTAQ reste figée sur la volonté d'assurer la pérennité du territoire agricole». J'aimerais ça que vous élaboriez là-dessus.

Le Président (M. Morin) : 40 secondes, Me Sylvestre.

M. Sylvestre (Louis-V.) : C'est ce que... Pardon?

Le Président (M. Morin) : 40 secondes. Allez, allez.

M. Sylvestre (Louis-V.) : C'est la vision du développement durable qu'ont des commissaires, à savoir que le développement durable veut dire que le sol agricole ne doit pas changer, doit rester en réserve de la république.

Mme D'Amours : Que pensez-vous de ma question sur les commissaires, à revoir la nomination de ces commissaires-là avec des grilles d'évaluation ou des grilles...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Je n'ai jamais voulu être commissaire; je ne suis pas assez familier avec ça. Je pense que c'est beaucoup plus dans le texte de loi et le modus operandi qu'il faut intervenir. Je vous propose d'ailleurs, pour les délais, de prévoir que, lorsqu'une demande d'autorisation est déposée, comme la Loi sur la justice administrative le prévoit, le tribunal administratif a trois mois pour rendre une décision, la commission a trois mois pour se prononcer sur une déclaration, pourquoi ne pas dire : Quand une demande d'autorisation vous est déposée, vous, la commission, vous avez six mois pour rendre votre décision; si vous ne la rendez pas dans les six mois, c'est autorisé?

Le Président (M. Morin) : O.K. Merci.

Mme D'Amours : M. le Président, j'aimerais juste apporter un point d'information, s'il vous plaît.

Le Président (M. Morin) : Si j'ai le consentement. Avec consentement, moi, je peux tout faire.

M. Villeneuve : Consentement.

Le Président (M. Morin) : Merci, M. le député de Berthier.

Mme D'Amours : C'est que, bon, vous avez parlé de votre allégeance politique, mais, pour les téléspectateurs qui nous regardent, on vous a invité... En fait, on a passé par le Barreau, justement, pour ne pas avoir de personnes qui avaient des allégeances politiques, ne serait-ce que pour le libéral. Il y avait eu un certain questionnement. Alors, pour bien préciser la chose, vous avez été choisis par le Barreau, on vous a contacté...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Je ne parle pas au nom du Barreau. Ça, c'est clair.

Mme D'Amours : Non, non, non. Non, mais nous, notre choix d'avocat...

M. Sylvestre (Louis-V.) : Et je vous l'ai dit par souci d'honnêteté, parce que j'ai déjà été attaqué, par la voix des journaux, par le président de l'UPA, à l'effet que, etc. Alors, c'est dans ce sens-là que, par souci d'honnêteté et d'intégrité, je voulais le préciser, pour ne pas qu'on pense que je suis à la solde de la...

Mme D'Amours : Bien, mon intervention était pour justement clarifier ça.

M. Sylvestre (Louis-V.) : Bien, j'apprécie. J'apprécie la chose.

Mme D'Amours : On a demandé au Barreau de nous présenter des dossiers... des personnes, c'est-à-dire, des maîtres qui avaient une expertise, et on a eu votre nom. Alors, je voulais juste...

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la députée de Mirabel. Merci aux collègues. Me Sylvestre, merci beaucoup.

M. Sylvestre (Louis-V.) : ...Me Chartrand.

Le Président (M. Morin) : Merci à votre coéquipier, collègue. Et bon retour à la maison.

Je lève la séance, et la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 57)

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