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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, May 29, 1996 - Vol. 35 N° 19

Consultations particulières sur le projet de loi n° 33 - Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives


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Table des matières

Auditions


Intervenants
M. Rosaire Bertrand, président
Mme Solange Charest, présidente suppléante
M. Jean Rochon
M. Pierre Marsan
Mme Nicole Loiselle
M. Russell Copeman
*Mme Marie-Claire Daigneault-Bourdeau, AHQ
*M. Jacques-A. Nadeau, idem
*M. Raymond Roberge, idem
*M. Paul Landry, idem
*M. René Dubois, APPSQ
*Mme Monique Émond, FACEF
*Mme Louise Blain, idem
*M. Richard Garand, RESQ
*M. Jacques L'Espérance, idem
*Mme Anne Malouin, idem
*M. Roger Migneault, idem
*M. Claude Castonguay, Comité d'experts sur l'assurance-médicaments
*M. Rénald Dutil, FMOQ
*M. Georges Henri Gagnon, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures vingt-quatre minutes)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Avant qu'on débute nos travaux, je me dois de commencer tout de suite, même si le ministre n'est pas arrivé. On a encore une fois une très, très grosse journée devant nous; on a trois groupes cet avant-midi et on ne peut pas se permettre de prendre beaucoup de retard. Alors, je m'excuse devant vous, l'Association, les gens vont prendre des notes et vont rencontrer le ministre dès qu'il va arriver, et c'est enregistré, de toute façon. En même temps, j'en profite pour dire à mes collègues qu'il y a une nouvelle «cédule» qui va être probablement distribuée ce midi. On a été obligés d'ajouter des groupes, compte tenu de l'importance du projet, et le ministre et le représentant de l'opposition, dans les deux cas, voulaient quand même permettre au plus grand nombre de gens possible de se présenter. Alors, il y a une nouvelle «cédule» qui va vous être remise, possiblement ce midi, quand toutes les ententes vont être prises avec les groupes. Alors, je...

M. Marsan: Juste un commentaire sur le fait qu'on a une nouvelle «cédule». Étant donné que le ministre, à plusieurs reprises hier, nous a dit qu'il voulait prendre le temps d'étudier comme il faut son projet de loi, est-ce qu'on pourrait peut-être ajouter le nombre de journées plutôt que d'augmenter le nombre d'heures? Le 24, on est obligés d'arrêter, comme vous le savez.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On ne peut pas ajouter, on a déjà un autre projet qui est «cédulé» pour jeudi prochain, alors, on doit malheureusement y aller comme ça. On doit étirer les heures vers la fin de la journée à la place.

M. Marsan: Mais vous avez entendu comme moi que le ministre avait l'intention de prendre le temps qu'il faut...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'ai surtout remarqué que vous l'aviez bien entendu.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Marsan: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je vous rappelle le mandat. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Vaive (Chapleau) sera remplacée par M. Beaudet (Argenteuil).

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. À l'ordre du jour aujourd'hui, nous recevons l'Association des hôpitaux du Québec, l'Association professionnelle des pharmaciens salariés du Québec, la Fédération des ACEF, le Regroupement d'employeurs de la santé du Québec et la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Alors, nous recevons immédiatement l'Association des hôpitaux du Québec. Je vous demanderais de vous présenter, nom, titres, etc. Vous avez 20 minutes de présentation de début, de remarques préliminaires, et on procède à l'échange après. Merci.


Auditions


Association des hôpitaux du Québec (AHQ)

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, je suis Marie-Claire Daigneault-Bourdeau, présidente de l'Association des hôpitaux du Québec et présidente du conseil d'administration du centre hospitalier régional du Suroît, à Salaberry-de-Valleyfield. Et permettez-moi de vous présenter, M. le Président, les membres de notre délégation. À mon extrême droite, le Dr Paul Landry, directeur des affaires publiques et professionnelles, M. Raymond Roberge, directeur à la recherche et au développement et adjoint au vice-président exécutif, M. Jacques-A. Nadeau, vice-président exécutif; et à ma gauche, Me Ghislaine Gosselin, directrice des affaires juridiques.

M. le Président, l'Association tient à remercier particulièrement les membres de la commission des affaires sociales pour leur invitation à participer à la présente consultation sur le projet de loi n° 33. Ce projet de loi est fondamental, puisqu'il constitue un nouvel élément très important de notre système de protection sociale. Il est aussi fort complexe, et ses implications sont nombreuses, que ce soit en termes social, économique et en gestion de l'information.

Dans ce contexte, nous déplorons vivement que le gouvernement n'ait pas jugé bon d'accorder une plus longue période de réflexion. Nous trouvons ce projet très important et nous voulons y collaborer. Et, compte tenu des enjeux majeurs, nous considérons essentiel que l'Association des hôpitaux du Québec apporte sa contribution à la bonification de ce projet.

L'AHQ regroupe près de 200 établissements publics du Québec, majoritairement des centres hospitaliers, mais aussi des centres d'hébergement et de soins de longue durée, des établissements reconnus comme centres de santé ainsi que des organisations reliées au domaine de la santé et des services sociaux.

L'AHQ a pour mission d'assister ses membres dans la réalisation de leur mandat individuel et collectif, de les assister par des interventions de représentation et par le développement d'outils et de services appropriés pour qu'ils remplissent leur mandat.

L'objectif ultime des activités de l'Association des hôpitaux du Québec est de favoriser l'accessibilité à des services de haute qualité pour l'ensemble de la population québécoise. Et c'est pour ça qu'on tient tant à se prononcer sur ce projet de loi et à être vigilants.

Et, d'entrée de jeu, je vous citerai une phrase du comité Demers, avril 1994, qui dit ceci: «Notre système de santé est une courtepointe laissée inachevée au milieu de laquelle l'absence de couverture de coûts de médicaments crée un trou béant». Il y a plus de deux ans que la problématique relative à l'accès aux médicaments pour une grande partie de la population est très bien définie. Et on reconnaît, de façon générale, la nécessité de mettre en place un régime de protection qui couvre l'ensemble de la population, et on en est.

Pour sa part, l'AHQ est très sensible à cette problématique, et depuis plusieurs années nous avons souligné les limites sérieuses des différents programmes actuels, notamment la circulaire «malades sur pied». Malgré leur cumul au fil des ans, ces programmes n'ont pas permis d'assurer un accès équitable et satisfaisant aux médicaments et services pharmaceutiques. Qui plus est, l'application de ces programmes a révélé des failles importantes qui sont carrément venues pénaliser des clientèles et nuire à la qualité des services.

Le progrès de la technologie et, plus récemment, le contexte budgétaire difficile que nous connaissons ont eu pour effet d'accélérer le virage ambulatoire, et on le sait. Si les personnes séjournent de moins en moins longtemps à l'hôpital et qu'elles sont de plus en plus traitées sur une base externe, il faut s'assurer qu'elles puissent bénéficier de l'accès aux thérapies médicamenteuses nécessaires. Et, à cet égard, il est bien évident qu'un programme d'assurance-médicaments devient essentiel pour éviter que l'hôpital ne devienne la seule solution pour accéder à des médicaments que les malades ne pourraient pas se payer autrement.

(10 h 30)

Et, plus récemment, nous avons le Comité d'experts présidé par M. Claude Castonguay qui a proposé les fondements d'un régime général d'assurance-médicaments qui tient largement compte du contexte social et économique. C'est donc avec intérêt que l'Association des hôpitaux a accueilli les travaux du comité Demers ainsi que du Comité d'experts de M. Castonguay, puisqu'ils constituaient des jalons essentiels en vue de se doter d'un régime d'assurance-médicaments.

Nous nous retrouvons aujourd'hui devant le projet de loi qui traduit les intentions du gouvernement, mais il nous reste à voir si le régime proposé, pour reprendre la métaphore utilisée par le comité Demers, s'adapte bien à la courtepointe de notre système de santé en ce qui regarde ses principes de base et son fonctionnement. Et, d'entrée de jeu, il nous apparaît important et essentiel de mettre en garde le gouvernement et de souligner trois aspects qui nous inquiètent grandement: Premièrement, les pouvoirs, les importants pouvoirs réglementaires que se réservent le gouvernement et le ministre sont largement discrétionnaires et laissent dans l'ombre un certain nombre de dimensions du régime proposé; deuxièmement, les objectifs de récupération financière qui coïncident avec l'instauration du régime colorent fortement la démarche gouvernementale; et, troisièmement, l'introduction d'une mesure sociale d'une telle ampleur constitue à nos yeux une révision majeure du panier de services assurés et ne devrait pas se faire d'une manière précipitée.

Plus spécifiquement, l'Association des hôpitaux du Québec souhaite sensibiliser la commission aux thèmes suivants, qui nous apparaissent à la base du régime proposé: la portée du régime proposé; l'étendue de sa couverture et son caractère mixte; l'accessibilité et l'équité; la qualité des services à la personne; le contrôle des coûts du régime et sa gestion; la gestion de l'information. Et ces questions nous apparaissent suffisamment importantes pour recommander, sur plusieurs plans, que le gouvernement prenne le temps de bonifier ce projet, parce que c'est un maillon essentiel de notre régime de protection sociale.

Et c'est dans un esprit de franche collaboration que l'Association vous soumet aujourd'hui ses commentaires et ses recommandations et vous réitère sa volonté de collaborer pleinement. Et si vous m'autorisez, M. le Président, je demanderai à M. Nadeau d'expliciter davantage les thèmes que je viens de mentionner. M. Nadeau.

M. Nadeau (Jacques-A.): M. le Président, j'aborderai le premier thème: la portée du régime proposé.

Le régime général d'assurance-médicaments constitue un ajout majeur et essentiel aux programmes déjà existants permettant à tous les citoyens d'accéder à des services de santé. Ce régime vient combler une lacune importante. L'évolution économique, sociale et, sûrement, l'agenda d'assainissement des finances publiques font en sorte que le gouvernement propose un régime qui diffère sensiblement des autres régimes. Ça constitue en ce sens un virage important.

Le gouvernement propose une approche de protection de base, avec une participation financière des bénéficiaires, afin d'assurer à l'ensemble de la population un accès raisonnable et équitable aux médicaments et services pharmaceutiques. M. le Président, je veux être bien compris, nous sommes fondamentalement d'accord avec l'orientation consistant à procurer une protection de base à l'ensemble de la population dans le cadre d'un régime prévoyant une contribution des assurés tenant compte de leur capacité de payer.

On nous annonçait un régime universel. Je pense que c'est clair que, avec tous les autres régimes, on obtient une protection universelle, mais il ne s'agit pas d'un régime universel. Le régime cohabite avec d'autres régimes, par exemple celui de l'assurance-hospitalisation, par exemple celui des accidentés du travail, celui des victimes d'actes criminels, des accidentés de la route. Ces régimes comportent leurs propres barèmes de protection et des règles précises en ce qui regarde les responsabilités de paiement.

Il ne fait aucun doute, M. le Président, que le gouvernement devrait poursuivre ses efforts et mettre très clairement à son agenda l'harmonisation et, si possible, l'unification des régimes d'accès aux services pharmaceutiques et aux médicaments. Il y a des dangers de glissement importants. Si les gens sont dans un régime qui est moins avantageux, il y a des dangers de glissement vers des régimes plus avantageux.

Le gouvernement a choisi d'instituer un régime qui met à contribution le secteur privé, c'est-à-dire les compagnies d'assurances offrant des assurances individuelles, collectives. Le gouvernement a choisi aussi un régime qui met à contribution des employeurs gérant leur propre régime. Et le gouvernement a choisi aussi d'instituer un régime qui met à contribution la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Nous nous retrouvons donc dans un régime général qui coexiste avec trois sous-régimes d'assurance.

Le premier d'entre eux, à gestion publique, il couvre généralement les personnes âgées et les gens de l'aide sociale. Le deuxième, à gestion privée, couvre les régimes collectifs d'assurance ainsi que les régimes d'avantages sociaux gérés par les employeurs. Le troisième, c'est les assureurs privés qui offrent des assurances individuelles. Dans ce cas, l'assureur agit comme un agent de réclamation qui perçoit les primes des individus selon le montant fixé par le gouvernement. Il y ajoute ses frais d'administration et met en commun avec les autres assureurs la totalité des risques pour lesquels des primes ont été souscrites.

Pour ces entreprises, en dehors du fait de leur permettre d'inscrire des clientèles en vue de leur vendre éventuellement d'autres services complémentaires, nous ne voyons pas le bénéfice qu'elles peuvent retirer de cette formule. Quant au consommateur, il ne bénéficie pas vraiment de la concurrence; et, en plus, s'il est éligible à des ajustements ou à un remboursement de sa prime, il doit attendre à la fin de l'année.

Dans ce sens-là, on pense que ce troisième sous-régime mérite d'être bonifié, il est perfectible. Et, dans ce sens-là, on demanderait au gouvernement de regarder deux tableaux. D'une part, de laisser jouer les lois du marché à l'intérieur de balises de protection et de non-discrimination; la concurrence devrait jouer en faveur du consommateur. Ou, d'autre part, dire à l'État: Bien, assumez les risques individuels, et on ne le donne pas à l'assurance parce qu'il n'y a pas d'intérêt, et ça simplifierait énormément la gestion. Alors, je pense que ça mérite d'être regardé.

L'autre élément dont je veux parler, c'est évidemment les pouvoirs réglementaires, que nous trouvons particulièrement disproportionnés. Le régime se traduit par une architecture générale précisant les principes de base, le partage des responsabilités. Cependant, la plupart des modalités opérationnelles, notamment le niveau réel de protection, les balises en ce qui concerne leurs contributions, l'exemption totale ou partielle des primes, les conditions permettant la couverture des services fournis par les établissements seront définis par règlement. Nous, on pense que c'est des pouvoirs qui sont trop gros et trop largement discrétionnaires et qu'on aurait intérêt à ce que ce soit plus transparent pour la population.

De même, toute la question de prépublication. On oublie la question de prépublication, et on ne peut mettre en vigueur des règlements sans qu'il y ait prépublication. Et, même, on pourrait donner des effets rétroactifs à certaines mesures. Je pense qu'à ce chapitre on devrait avoir un peu plus de transparence, et je pense que c'est dans l'intérêt de tout le monde, parce que, si on veut que la population comprenne bien, il faut bien lui expliquer.

Le deuxième thème que je vais aborder, c'est l'accessibilité et l'équité. La question de l'accessibilité, c'est une valeur fondamentale de notre société. On sait fort bien, et des études le démontrent, que des barrières économiques significatives ont un effet direct sur la consommation pour les clientèles les plus démunies. Évidemment, s'il y a une sous-consommation, on peut comprendre que les gens peuvent se retrouver ailleurs dans le système, et notamment au niveau de l'hospitalisation. Ce que l'on sauve d'une main, on ne voudrait pas le payer de l'autre main. Bon.

Dans ce sens-là, ce qui nous préoccupe particulièrement, c'est les gens à faibles et moyens revenus. Ces personnes-là, nous, on pense qu'après le seuil qui a été déterminé dans la proposition du gouvernement, automatiquement, ils passent avec une franchise et une coassurance qui va tout de suite à 750 $. Nous, on pense qu'il serait préférable de rendre progressive l'échelle d'exemption partielle pour dépasser les seuils qui varient actuellement de 14 800 $ à 30 700 $ selon qu'il s'agit d'un adulte ou d'une famille. Ça nous paraît extrêmement important, parce qu'on ne voudrait pas que des gens, que le citoyen qui est tout de suite après celui qui bénéficie de l'aide sociale se retrouve dans une situation où il n'a pas les moyens. Je comprends que le régime est meilleur que ce qu'il y avait avant, et c'est vrai, il faut le dire, mais, quand même, si on mettait une progression dans l'échelle, je pense qu'on assurerait à ce citoyen-là une meilleure protection.

Le deuxième élément que nous voulons soulever, c'est sur l'approche que va adopter le gouvernement en ce qui concerne les personnes âgées hébergées en CHSLD. On sait que ces gens-là ne sont pas couverts par la loi fédérale sur la santé au même titre que ceux qui sont admis en centre hospitalier. Mais, à notre avis, il importe de maintenir, pour ces clientèles qui sont parmi les plus vulnérables de notre société, une approche d'abord très humaine et qui ne leur impose aucun fardeau bureaucratique additionnel. Il importe aussi que l'approche qui sera retenue dans leur cas soit équitable par rapport aux autres personnes âgées et ne constitue pas un incitatif à l'institutionnalisation. C'est-à-dire que, si on est en établissement puis que tous les médicaments sont nécessairement payés, parce qu'on sait que c'est des milieux de vie, quand on est sur le bord d'être en institution, bien, on aurait tendance à favoriser l'institutionnalisation parce qu'on ne paiera pas les médicaments. Or, on sait que, dans ces cas-là, généralement, les médicaments peuvent être assez coûteux. Alors, je pense qu'il y a quelque chose à regarder sur le plan de l'équité.

(10 h 40)

Il y a aussi, je pense, quelque chose qu'il faut regarder, qui nous apparaît important, c'est la définition d'«enfant». On sait qu'il y a des gens des régions éloignées qui doivent faire des études dans des milieux des grandes villes, et ces gens-là ne seraient pas considérés comme des personnes à charge de la famille. Je pense qu'il y a quelque chose à regarder de ce côté-là.

Il y a aussi toutes les modalités en ce qui concerne les changements de régime. Quelqu'un est sur l'aide sociale, se trouve du travail; il est au travail, il se retrouve sur l'aide sociale; comment on organise toutes ces modalités-là? Et il faudrait que ça soit particulièrement léger pour ne pas qu'on pénalise ces gens-là. On est préoccupés par ça.

Le troisième thème que je veux aborder, c'est toute la question de la qualité des services. Je pense que cette approche-là vise aussi le programme qui a instauré une qualité de service. Et je sais que vous êtes préoccupé par cette question-là, M. le Président. La meilleure approche pour favoriser la qualité des services, c'est la Revue d'utilisation des médicaments. Et il y a un réseau qui existe au Québec, nous sommes un promoteur très actif de ce Réseau-là, et je pense qu'on devrait miser davantage sur le Réseau. Si on veut atteindre un haut niveau de qualité des services pharmaceutiques, il faut absolument qu'on ait Revue d'utilisation des médicaments. Ça nous paraît excessivement important. D'ailleurs, M. Castonguay l'a soulevé. Et, nous, on pense que c'est important de dissocier cette fonction-là de celle de contrôle des paiements puis des coûts. On sait que la RAMQ va avoir une responsabilité à cet égard-là, mais, nous, on ne pense pas qu'en ce qui concerne l'utilisation et la Revue d'utilisation des médicaments ça devrait être la RAMQ. Je pense que c'est une responsabilité du ministère et c'est une responsabilité du ministre, et je pense que c'est lui qui devrait s'assurer que ces services-là, cette Revue d'utilisation là soit disponible, et non pas à travers la RAMQ qui est un agent-payeur.

Le quatrième thème, M. le Président, il s'agit du contrôle des coûts. Et, ça, c'est particulièrement important. On trouve que le projet n'en parle pas beaucoup. Vous savez, en 1994, on parlait de 2 000 000 000 $; on a dit tantôt que c'est plus élevé que la rémunération qui est consacrée aux médecins. De 1988 à 1993, il y a eu des augmentations, en moyenne, de 13 % par année. Donc, c'est une composante extrêmement majeure de notre système de santé, et il faut absolument qu'on contrôle les coûts.

C'est quoi, les facteurs de contrôle des coûts? Bien, qu'est-ce qui augmente les coûts? C'est la consommation, les clientèles qui sont susceptibles de consommer plus de médicaments, et c'est aussi le prix des médicaments. Bon. En ce qui concerne la clientèle, je pense qu'on peut agir chez les professionnels. Le médecin, c'est un agent extrêmement important, il prescrit; il faut sensibiliser le médecin. La Revue d'utilisation des médicaments va aider le professionnel à mieux prescrire les médicaments et éviter la surmédication, éviter des prescriptions non appropriées. C'est un élément qui est extrêmement important, sur lequel on peut agir.

L'autre élément, les prix, ça, c'est un élément qui est plus difficile mais qui est particulièrement important. Bon. On sait qu'au Québec, par exemple, on contrôle assez bien le prix des médicaments. Où on a beaucoup de difficultés, c'est sur le prix des nouveaux médicaments. Et là on a des problèmes. On sait aussi qu'au Québec on protège davantage les médicaments brevetés par rapport aux médicaments génériques. Je ne dis pas qu'il faut revoir cette situation-là, d'aucune façon, mais je me dis: En retour d'une protection particulière, est-ce que les entreprises qui ont un brevet plus long que dans d'autres provinces canadiennes ne pourraient pas nous aider davantage à faire face à la situation? Et, dans ce sens-là, on pourrait avoir une négociation un peu plus serrée avec ces gens-là. Bon.

L'autre élément qui est extrêmement important, c'est les coûts d'administration du système et les coûts de gestion qui seront facturés par les différentes entreprises. Ça, il faut s'assurer que ça soit bien léger. On n'a pas d'idée, à ce moment-ci, quand on parle de coûts de gestion, de ce que ça peut être. Mais, si c'était 20 %, si c'était 25 %, bien, à 176 $ plus 25 %, plus la taxe sur tout ça, ça commence à faire pas mal d'argent. Donc, il faut que l'administration de ces régimes-là soit particulièrement légère pour qu'on puisse avoir des coûts administratifs qui soient particulièrement bas. Et je pense qu'il ne faut pas se cacher, le ministre va rendre publics les coûts de ces différents programmes là, et, à mon sens, il devrait rendre publics aussi les coûts des entreprises d'assurances pour ce qui regarde l'aspect du programme général. Je pense que la transparence à cet égard pourrait aider grandement. Nous, on vous le dit, c'est majeur, le contrôle des coûts. Si on ne contrôle pas les coûts, on ne sera pas en mesure de supporter le système dans cinq ans, dans quatre ans ou dans 10 ans. Et qu'est-ce qu'on va faire? On va désassurer certains médicaments. Donc, ça pourrait poser des problèmes sérieux.

Le dernier élément, M. le Président, c'est le thème de la gestion de l'information. Écoutez, c'est clair que, pour supporter tout un réseau comme ça, ça prend des systèmes d'information et de gestion. Et, nous, on est particulièrement préoccupés. On sait qu'il y a le dossier pharmaceutique, qui contient des informations concernant l'état de santé d'une personne; c'est des renseignements personnels. Il y a un défi technologique à bâtir ces systèmes-là, mais il y a un défi éthique en même temps. Nous, on est préoccupés, on veut qu'il n'y ait pas de discrimination, on veut que les personnes, la confidentialité soient protégées. Et c'est assez important qu'on veut que le gouvernement s'assure de ça avant de mettre en vigueur la loi n° 33.

En conclusion, M. le Président, l'Association réitère son accord quant à la nécessité de mettre en place le régime d'assurance-médicaments permettant d'assurer à tous les Québécois une couverture de base pour les médicaments et les services qui y sont reliés. Nous souscrivons aussi au principe selon lequel les bénéficiaires de ce régime doivent y contribuer à des niveaux tenant compte de leur capacité de payer, mais on déplore que ce régime se mette en place dans un contexte très, très rapide. Il faut prendre le temps de bien faire les choses. On déplore aussi que le pouvoir réglementaire nous apparaisse excessif; vous manquez un peu de transparence, et je pense qu'il y a moyen de corriger ça. On est préoccupés par les clientèles à faibles revenus; je pense que, les plus démunis de notre société, il y a moyen de s'en occuper. On est préoccupés par la qualité et on est préoccupés par le contrôle des coûts. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Merci, M. le Président. Je remercie beaucoup la présidente et la délégation de l'Association des hôpitaux du Québec, qui nous assurent d'une collaboration très intensive depuis un an et demi, et particulièrement au cours des derniers mois. Vous avez soulevé beaucoup de choses. Je vais essayer de revenir sur l'une ou l'autre de celles-là pour clarifier le plus possible pendant le temps qui nous est alloué.

D'abord, vous me permettrez un commentaire sur le rythme, parce qu'on dit que ça va trop vite. Évidemment, j'ai déjà entendu ça aussi de votre part au cours des deux dernières années. Il y a un rythme auquel on essaie de s'adapter. Tout ce que je veux rappeler là-dessus, c'est qu'on n'essaie pas de faire aller les choses plus vite qu'elles peuvent aller, mais qu'on essaie, nous aussi, de nous adapter à ce qui est l'ensemble du contexte socioéconomique du Québec, qui demande des réajustements importants.

On sait qu'on est, et au monde et au Canada spécialement, un des gouvernements qui ont un bon rattrapage à faire. Là, je ne veux pas rentrer dans ce discours-là, mais c'est une réalité dans laquelle on est, et chaque semaine, chaque mois qui n'est pas utilisé correctement quand on peut avoir un bon rythme, il nous coûte cher à tous points de vue. Alors, ça, je veux juste rappeler ça, et se rappelant aussi que la bonne vieille loi de Parkinson marche toujours, je pense, qui dit que les choses tendent à prendre le temps qu'on leur alloue. Alors, si on se donne deux ans, on va prendre deux ans à discuter d'une chose. Par contre, je suis conscient qu'il ne faut pas bousculer. Alors, tout ce dont je veux vous assurer, là, c'est qu'on sent qu'il y a des contraintes énormes qui nous obligent à être très efficaces et à fonctionner bien. On est très soucieux d'informer le monde et de travailler tout ça avec tous les partenaires. Autrement, ça ne marchera pas, on est bien conscients de ça.

Je voudrais, de tout ce que vous avez dit, retenir trois choses pour le moment, que je vais mettre sur la table. Je ne veux pas prendre tout le temps, mais je pense que vous avez ouvert là-dessus, et c'est important de donner certaines précisions. La question du pouvoir réglementaire trop vaste. Là aussi, je suis très conscient que c'est toujours délicat et important de bien ajuster ce qu'on fait dans la loi et dans les règlements, qu'on ne veut pas légiférer par voie de réglementation, et ni le contraire non plus. Par contre, vous nous faites beaucoup de commentaires aussi sur la nécessaire souplesse et flexibilité dans la gestion d'un système comme ça et d'être capables d'ajuster et de s'adapter avec ce qui va évoluer. Le concept qui est là et qui ne me semblait pas différent de toutes les législations dans ce domaine-là, c'est qu'il y a une loi qui donne clairement toute la structure, toute l'armature, tous les principes, les objectifs, les organes, comment le système va marcher et tout ce qui n'a pas besoin d'être crampé dans une loi mais qui peut l'être par voie réglementaire. Ce n'est pas une décision en catimini, les règlements. Les règlements, c'est fait par un gouvernement, c'est publié, les gens peuvent réagir là-dessus et il y a tout un processus démocratique pour ça, mais c'est un processus plus souple.

(10 h 50)

Alors, s'il y a des choses précises que vous identifiez qui ne sont pas et qui, d'après vous, devraient être dans la loi, parce qu'on risquerait effectivement de légiférer par voie de réglementation, je pense que c'est ça qui nous aiderait, parce que l'intention, ce n'est pas une loi-cadre générale, ce n'est pas une charte; c'est assez précis à plusieurs égards pour tout ce qui va définir le système. Alors, ça, s'il y a des points là-dessus, je pense que ça nous aiderait beaucoup qu'on identifie sur quoi il faut discuter pour ajouter dans la loi ou baliser autrement dans la loi ce qui peut se faire par voie de réglementation. Première chose.

Deuxième, les coûts et le contrôle des coûts. C'est effectivement très important; et, d'ailleurs, c'est une des raisons qui nous amènent, parmi d'autres... En plus des raisons d'équité et d'accessibilité aux médicaments, il y a un problème de contrôle de coûts dans ce domaine-là, et qui est dû à différentes causes, comme on le sait. Comme dans l'ensemble du secteur de la santé et des services sociaux, il y a une question de prix qui joue, mais il y a une question de jeu des clientèles aussi. Et, dans l'augmentation importante des coûts dans le domaine des médicaments, il y a eu aussi le fait que la population vieillit, il y a eu le fait qu'on a eu un problème important de chômage, qu'il y a plus de gens qui sont dans des situations de pauvreté et que ça amène des problèmes de santé et une plus grande consommation de médicaments, et il y a la façon dont on gère la consommation en termes d'information des gens, le prescripteur, le distributeur, le consommateur et tout le monde.

Maintenant, ma question est de voir comment, là aussi, vous pouvez nous aider, parce qu'on est vraiment rendus – ça fait deux ans de travail qui se fait là-dessus, ce n'est pas de la génération spontanée, tout ça – on est obligés d'être un peu plus précis si on veut vraiment continuer à améliorer. Il y a beaucoup de choses là-dedans qui sont conçues pour assurer un bon contrôle des coûts. Un rôle élargi a été donné au Conseil consultatif de pharmacologie pour qu'il prenne plus en compte aussi, dans la valeur du médicament, sa valeur thérapeutique et la valeur qualité-prix aussi, et qu'on ait là un moyen, avec l'industrie pharmaceutique, de peut-être mieux gérer le coût. En plus, la Revue d'utilisation des médicaments, vous en avez parlé, c'est prévu. On a rencontré hier soir le Réseau de revue d'utilisation des médicaments qui le fait en établissement présentement. Et là on prévoit, dès le début du régime, en instaurer un pour tout ce qui est en ambulatoire, et il y aura les deux réseaux à faire travailler ensemble. Alors, ça... Puis, d'ailleurs, vous avez votre collègue de droite qui était avec nous hier et qui connaît bien, je pense, le système tel qu'il fonctionne déjà. Vous avez une expérience avec ce qui s'est déjà établi. Alors, il me semblait qu'on avait là le rôle du CCP, la révision d'utilisation des médicaments qui s'ajoute là-dessus. L'affaire, c'est qu'on a un régime qui devient contributif, où les gens sont impliqués aussi. Chacun assume sa responsabilité. C'est quelque chose qui va amener une sensibilisation plus grande des gens. Il y a tout un jeu possible du générique, un meilleur équilibre entre le générique et l'innovateur aussi; ça fait partie de la responsabilité plus grande donnée au CCP, et il y aura aussi un rapport de force différent qui va s'établir.

Et, finalement, ce n'est pas dans le projet de loi comme tel, mais ça a été dit quand on a annoncé le développement de ce système-là que le gouvernement doit se donner une meilleure politique du médicament en général, au-delà de ce régime-là, qui va comprendre un meilleur travail intersectoriel avec d'autres secteurs comme l'Industrie et Commerce, mais qui va comprendre aussi tout un secteur d'information pour l'ensemble de ceux qui sont impliqués là-dedans. Bon, il y a tout ça dedans. Le CCP, le RUM, la participation des gens, le jeu du générique et de l'innovateur, l'information. Encore là, qu'est-ce qu'il faudrait de plus ou de mieux pour être bien sûrs qu'on ne manque pas quelque chose pour le contrôle des coûts?

Je finis, M. le Président, pour ne pas prendre trop de temps, sur la question de l'information et de la confidentialité. Ça aussi, c'est très sensible et c'est très crucial. Maintenant, ce qu'on pense qu'on fait présentement, c'est qu'on ne lance pas une nouvelle chose, on essaie d'harmoniser et de mieux intégrer le fonctionnement de ce qui existe déjà. On a déjà un régime public qui couvre 1 500 000 personnes et qui gère un système d'information pour être capable de bien donner les médicaments à ces gens-là.

Les assureurs privés, qui déjà assurent 4 500 000 personnes, ont aussi tout un dossier qu'ils gardent sur les gens et ils gèrent cette information-là. Dans le réseau de la santé, avec tout le réseau hospitalier, entre autres, on a développé une capacité de gérer des dossiers où il y a beaucoup d'informations confidentielles. Il y a tout un bagage, il y a toute une pratique qui est déjà là, et ce qu'on fait, comme on dit souvent, on attache mieux les morceaux pour avoir un système qui, en étant mieux attaché, va même protéger mieux la personne. Il y a des moyens de protéger la confidentialité, et le système d'information, s'il est mieux intégré, peut donner une meilleure protection en termes de qualité de service. Ne serait-ce que le logiciel de gestion du médicament qui fait que, quand on a une prescription qui est remplie et qui est donnée aux gens, le pharmacien peut avoir devant lui le dossier des gens, savoir tout de suite s'il y a des risques d'incompatibilité entre médicaments, et le reste. Alors, il y a l'aspect très positif d'un meilleur système d'information, avec une pratique d'un réseau, d'un système qui a appris à gérer de façon confidentielle le médicament. Alors, là aussi, sur quel point vous avez décelé là-dedans ou sur quel point il faudrait être plus attentifs pour être sûrs qu'on n'a pas un risque de ce côté-là? Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci.

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, M. Nadeau répond à la première question, et M. Roberge à la deuxième.

M. Nadeau (Jacques-A.): M. le Président, le pouvoir réglementaire, évidemment, c'est vrai, M. le ministre, qu'il y aura les publications puis que les gens vont pouvoir se faire entendre, mais ce n'est pas vrai pour la première année. La première année, il n'y aura pas de prépublication, et le projet de loi le dit. Et, même, vous pouvez revenir rétroactivement. Ça, ça nous paraît un peu fort. Et, dans ce sens-là, comme on veut bien que tout le monde soit informé, on va dire: Bien, écoutez, il me semble que, même cette année, ça devrait être publié, puis il me semble qu'il ne devrait pas y avoir d'effet rétroactif à ce programme-là. Donc, cette préoccupation, on l'a regardée. L'article dans lequel vous dites comment va être fixé le prix de l'assurance, vous avez très bien mis des prémisses, des bases dans l'article de la loi. Et c'est l'article 41. Alors, vous dites très clairement sur quoi vous allez vous baser pour fixer le coût de l'assurance, c'est très clair. Or, nous, on pense qu'au niveau de certains autres articles il pourrait aussi y avoir des balises. Et, dans ce sens-là, nous autres, on est prêts à travailler avec vous puis à vous faire des suggestions pour qu'on puisse introduire un certain nombre de balises. On est prêts à faire ça.

M. Rochon: Juste une précision, M. le Président, si je peux, là-dessus. Parce que, là, vous référez sûrement, en parlant du premier règlement qui ne sera pas soumis à une prépublication, à l'article 77 de la loi qui dit que, pour le premier règlement, il n'y aura pas de publication. Maintenant, ça, ça a été mis là pour une raison bien simple, c'est que tout ce qui est le contenu des règlements et tous les paramètres du système, on les discute en commission parlementaire présentement, et ça va être discuté jusqu'à l'adoption du régime. Après ça, tout changement va devoir être en prépublication pour que les gens puissent voir évoluer le système. Alors, ce n'était pas fait, ça, pour éviter quoi que ce soit.

M. Nadeau (Jacques-A.): Donc, vous nous assurez que ce qui va entrer en vigueur dans le cadre du programme des médicaments, il va y avoir une prépublication.

M. Rochon: Non. Ce que je vous dis, c'est que ce qu'on avait vu, c'est qu'il nous semblait que ce n'était pas nécessaire pour le premier, parce que toute la discussion du régime et toute l'information et toute la publicité qui est faite présentement par les différentes activités mettent tout sur la table et que c'est à partir de ça que les décisions vont être faites et qu'on aura entendu, même, une consultation beaucoup plus vaste et beaucoup plus large que ce que, souvent, on entend et qu'on peut avoir avec la prépublication d'un règlement. C'était ça, le rationnel, si vous voulez.

M. Nadeau (Jacques-A.) : Mais, de toute façon, c'est tellement important, ce programme-là, que, si vous avez le temps, n'hésitez pas à prépublier. Je pense que ça pourrait aussi aider.

M. Rochon: Bon. Bien, là aussi, vous nous aideriez beaucoup en nous pointant ce qu'on irait chercher probablement plus comme information. Parce que, si c'est pour tout réentendre les mêmes choses pendant deux mois, on comprendra que ça nous aura coûté cher pour se redire les mêmes choses pour être bien sûrs qu'on a compris.

M. Nadeau (Jacques-A.): Oui, oui. O.K. Mais, nous, on va fournir des éléments très précis sur lesquels on aimerait que vous introduisiez des balises dans la loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Deuxième point?

M. Nadeau (Jacques-A.): Le troisième point, puis, après ça, je vais passer à mon collègue: tout celui de l'information. M. le ministre, ce qu'on vous dit, c'est que c'est très clair, pour gérer ce programme-là, ça nous prend des systèmes d'information à date. Je sais qu'il y en a, mais ils ne sont pas prêts à l'heure actuelle. On va avoir ça d'ici quelques mois et ça va nous... Mais c'est nouveau, c'est nouveau. Et les liens avec les établissements, et tout ça. Le dossier pharmaceutique, il y a des informations sur l'état de santé de la population. C'est clair, il ne faut pas le cacher, c'est vrai. Et, nous, on veut s'assurer que le droit des personnes va être bien protégé au moment où on va introduire ces systèmes-là. C'est ça qui est notre préoccupation, puis je pense que vous avez exactement la même préoccupation que nous.

M. Roberge (Raymond): Sur le contrôle des coûts.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci.

(11 heures)

M. Roberge (Raymond): Sur le contrôle des coûts, je pense qu'on s'entend bien – puis M. Rochon l'a résumé – sur le fait que c'est un des enjeux majeurs. Ce qu'on vous pose d'emblée, c'est le fait que c'est un enjeu pas juste à l'intérieur du régime général qu'on nous propose, mais c'est un enjeu de société, ça déborde très largement. Je pense que le rapport de M. Castonguay le mettait en évidence: on a des hausses annuelles d'à peu près 13 % entre 1988 et 1993. Je ne sais pas, maintenant, exactement. Les dépenses de médicaments sont devenues une dépense de santé plus importante que la rémunération des professionnels de la santé à l'échelle canadienne. C'est donc des éléments qui nous laissent entrevoir que, si cette dépense-là n'est pas plus contrôlée dans l'avenir, ça va devenir la dépense de santé au Québec. Ça veut dire beaucoup plus que la rémunération des professionnels, beaucoup plus que les budgets du réseau d'établissement. Ça va devenir la dépense. Donc, ce n'est pas juste dans le cadre du régime, c'est vraiment un défi de société.

Vous avez fait référence à la situation économique de la province. Bien, l'argent qu'on va mettre là-dedans, on ne le mettra pas dans d'autre chose. Et que ce soit dans le cadre des dépenses publiques ou que ce soit dans le cadre des dépenses privées, ici, on parle d'un régime de base où c'est l'État qui établit les règles de base de protection des personnes, mais il y a aussi tous les régimes complémentaires, on fait référence aux régimes d'employeurs aussi. Ça aussi, c'est de l'argent qui va dans les médicaments et c'est de l'argent qui n'est pas disponible pour autre chose.

Donc, le défi de contrôle, je pense qu'il est majeur. Il est majeur puis il ne rentre pas en contradiction avec la qualité d'accès. Au contraire, je pense, dans ce dossier-là, si on est capable de contrôler les coûts, on va être capable de maintenir l'accès; si on n'est pas capable de contrôler les coûts, ça va être en termes de qualité de services qu'on va le payer tantôt.

Les risques qu'on voit là-dedans, ce n'est pas bien, bien compliqué à calculer. Si on contrôlait mieux qu'actuellement les dépenses de médicaments puis qu'on ramenait, par exemple, la croissance à 10 %, bien, dans 10 ans, ce régime-là serait devenu complètement inaccessible, on aurait des primes à 300 $ ou à 400 $. Pensons juste à indexer les primes, indexer la contribution des usagers sous forme de franchise et de coassurance, imaginez ça, qu'on ramène à 10 % la croissance des coûts, dans 10 ans, ce ne sera pas drôle. En tout cas, je ne sais pas si les salaires vont suivre, mais ce ne sera pas facilement accessible.

M. Rochon: Bon, je ne veux pas prendre tout le temps, mais je suis obligé de faire un commentaire là-dessus, parce qu'il faut qu'on discute des problèmes puis s'entendre qu'on les définit bien de la même façon ensemble, là. C'est majeur, le contrôle des coûts. Donc, on dépense 2 200 000 000 $ sur les médicaments, globalement, public et privé, tout ce qui s'achète, y compris l'estimation des gens qui n'ont pas d'assurance actuellement. Les augmentations, vous référez à ce que M. Castonguay, dans le travail avec son comité, a sorti, puis on peut suivre en en parlant ensemble...

M. Roberge (Raymond): Les médicaments prescrits et non prescrits, oui, effectivement, votre rapport...

M. Rochon: Non, mais, parce qu'il y a des chiffres comme le 13 %, je pense que ça référait à ce qui était vraiment l'augmentation des coûts du système public, spécialement.

Une voix: Pendant les années quatre-vingt.

M. Rochon: C'est ça, dans le cours des années quatre-vingt. Donc, il faut faire attention, parce qu'il y a eu... L'ensemble du médicament, après les années quatre-vingt, dans la décennie, il va augmenter d'un peu plus de 15 %. Maintenant, quand on regarde les dernières années, il faut voir la courbe aussi, c'était parti en descendant, cette affaire-là. Alors, ce n'est pas quelque chose qui continue à augmenter, qui n'est même pas resté stable; la courbe a commencé à se corriger.

Revenons aux mêmes sources que vous avez citées pour qu'on ait les faits en ligne. Pour la période de 1989 à 1994, si on regarde un dernier bloc, c'était rendu à 9,5 % d'augmentation. Ça va baisser. Et si on prend la période plus serrée, 1992-1994, ça a varié, cette année, de 8,6 % à 6,1 % d'augmentation. Et il y avait eu, pendant cette période-là, je veux juste qu'on démystifie certaines choses, un gros effet de clientèle sur le régime public par du transfert encore plus grand de monde, une plus grande proportion de gens plus âgés et des clientèles d'aide sociale.

Le point est, me semble-t-il – c'est là que je voudrais être sûr qu'on est bien enlignés – le 2 200 000 000 $ qu'on dépense, avec un régime qu'on va généraliser, qui va devenir un seul régime géré de la même façon, avec un système de base, avec tous les mécanismes que j'ai rappelés tout à l'heure qu'on se donne, est-ce que ce n'est pas justement là qu'il va y avoir une différence énorme entre la situation actuelle par rapport à la situation dans laquelle on va être, où, là, on va être en situation d'être capable de contrôler le coût global, et, s'il y a une partie du système ou l'autre qui voit une augmentation, elle pourrait être compensée par les autres clientèles, dépendant de l'évolution de la population, parce qu'on aura généralisé le système. Actuellement, c'est qu'on a un système qui est morcelé. Donc, il y a des parties: la partie publique peut prendre un grand coup d'augmentation, l'autre ne l'a pas. On a vécu ça dans le domaine de la santé, par ailleurs, aussi.

Alors, moi, j'avais l'impression, quand vous dites qu'il faut être conscients de ça, que c'est justement un des atouts énormes de ce régime-là. Ça nous met en place le système pour être capable de les contrôler, ces coûts-là. Ils sont déjà partis en baissant. Donc, il n'y a pas vraiment de crainte à y avoir, à moins qu'on gère l'affaire d'une façon complètement foutue.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Court commentaire, M. Roberge, rapidement.

M. Roberge (Raymond): Je pense que c'est clair. On s'en va vers moins de fractionnement, plus de capacité de gestion d'ensemble. Notre propos est à l'effet... Puis, effectivement, vous le dites, il y en a un certain nombre, de mesures, à l'intérieur du projet qui adressent ou qui touchent la question des coûts, ne serait-ce que le rôle du CCP, la Revue d'utilisation, etc.

Notre préoccupation, c'est peut-être que, devant l'importance de la question, un, on s'assure que le gouvernement, parce qu'il s'agit d'une question publique, d'ordre public, se donne les moyens d'effectuer un contrôle des coûts serré sur toutes les composantes, non seulement à l'intérieur du régime public, mais aussi pour l'ensemble des dépenses médicaments. Donc, pas juste les dépenses publiques de médicaments...

M. Rochon: Bien, vous nous direz ce qu'il faut faire de plus, parce qu'autrement on ne peut pas le découvrir comme ça.

M. Roberge (Raymond): À cet égard-là, il y a la question des régimes de base versus les régimes complémentaires. Si on contrôle les régimes de base, est-ce qu'on va contrôler les régimes complémentaires aussi? Est-ce qu'on va avoir un levier de ce côté-là? Puis d'avoir, au niveau d'ensemble, une vision peut-être plus intégrée de l'ensemble des mécanismes qui permettent d'agir sur les prix, sur la consommation, sur les professionnels, qu'ils soient médecins ou pharmaciens, et aussi au niveau de l'information à la population, et je pense que c'est là un des leviers majeurs, peut-être, l'information à la population.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Y compris l'invitation du ministre. C'est que, même si, dans quelques minutes, on termine déjà cette audition-là, il vous invite à...

M. Roberge (Raymond): D'accord.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...envoyer des commentaires, parce qu'on ne peut pas tout passer, malheureusement.

Je passe maintenant la parole au porte-parole officiel de la santé et des services sociaux, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci, M. le Président. À mon tour de vous remercier pour nous avoir donné un mémoire extrêmement important et des recommandations très judicieuses. Je sais par expérience, pour avoir été dans le réseau, que l'Association des hôpitaux, lorsqu'elle se présente en commission parlementaire, elle représente vraiment ses membres; elle a beaucoup de crédibilité.

Ceci étant dit, M. le Président, je voudrais d'abord faire référence au début du mémoire, à la page 3, et c'est seulement un commentaire, où vous dites qu'«il est bien évident qu'un programme d'assurance-médicaments devient essentiel pour éviter que l'hôpital ne devienne la seule solution pour accéder à des médicaments que les malades ne pourraient se payer autrement». Je pense que c'est une mise en garde qui est extrêmement importante et qu'il y a un danger là. Je pense qu'on peut facilement percevoir qu'il y aurait des médecins qui pourraient être tentés, pour des raisons humanitaires en tout cas, d'aider des patients qui ne sont pas capables de payer des médicaments parce qu'ils sont trop chers.

Mon autre commentaire, c'est dans les trois aspects qui vous inquiètent – je dois vous dire qu'ils nous inquiètent aussi et qu'ils inquiètent beaucoup d'organisations qui sont venues jusqu'à maintenant témoigner devant nous – et j'aimerais les reprendre. D'abord, vous dites que, le projet de loi, il y a d'importants pouvoirs réglementaires que se réservent le gouvernement et le ministre. Je pense que ça ne peut pas être une première, je vais vous dire, c'est une deuxième, puisque nous le constatons d'abord avec la loi 83, qui a donné au ministre des pouvoirs de fermer n'importe quel établissement sans aucun critère, puis, là, on arrive, cette année, avec ce projet de loi n° 33 qui fait référence à une quinzaine de pouvoirs réglementaires. Alors, quand on regarde la loi comme telle, bien, ça va être un règlement qui va toujours décider: ça va être le prix, ça va être qui, ça va être toutes sortes de réglementations associées, et ça va être difficile à suivre, vraiment, où on veut aller. Et un gouvernement pourrait, pour toutes sortes de raisons autres que des raisons de santé et de bien-être, par son pouvoir de réglementation, intervenir sur d'autres sujets, par exemple, pour régler le problème du déficit du Québec.

Deuxième point. Ici, je ne voudrais pas lancer une polémique, mais ça a été l'introduction du ministre, c'est votre troisième aspect: ne pas se faire d'une manière précipitée. Le ministre nous dit que ça va vite, qu'il y a du rattrapage. Nous, nous répondons qu'il y a eu de bonnes étapes qui ont été franchies, en continuité avec ce qui avait été fait lors de l'établissement de la Loi sur les services de santé et les services sociaux et suite, évidemment, au rapport Castonguay, qui nous a permis d'avoir le régime que nous avons maintenant. Le ministre dit qu'il y a du rattrapage. Par la suite, il y a eu des correctifs, je pense qu'il fallait qu'ils soient apportés, avec la loi 120, et aussi les premières indications de la récupération, je pense, qui étaient manifestées par le «Défi qualité-performance».

Quand on nous dit qu'il y a encore du rattrapage, nous, ce que nous recevons comme information à ce moment-ci, c'est que c'est une question de coupures et c'est une question de priorités pour un gouvernement. Si la santé, c'est vraiment une priorité pour le gouvernement, on pourrait déposer un tel programme, suite au rapport qui a été fait par M. Castonguay, dans lequel on ne retrouverait pas de récupération de taxes. C'est là que le bât blesse et c'est là que nous avons une difficulté sérieuse avec ce projet de loi. Je ne pense pas que M. Castonguay, quand il a fait la réforme des services de santé, il avait un objectif de récupération de taxes. S'il l'avait eu, ç'aurait été extrêmement difficile. L'objectif qu'il poursuivait, c'était de doter les Québécoises et les Québécois d'un véritable système de santé, et c'est ce qu'il a fait. Je pense que l'ensemble des Québécoises et des Québécois en ont profité au cours des 20 ou 25 dernières années.

Mais, maintenant, nous avons un régime pour lequel on ne peut qu'être d'accord avec le principe – je pense que c'est l'unanimité de tous les intervenants, des deux côtés – il faut doter les Québécoises et les Québécois d'un régime universel d'assurance-médicaments, mais il ne faut pas que ce soit en même temps un programme de récupération de taxes. Ce qui nous apparaît maintenant, eh bien, c'est vraiment cet objectif qui est visé, et nos inquiétudes sont à l'effet qu'on va aller de façon précipitée. J'apprécie toujours quand le ministre dit qu'il ne faut pas bousculer, j'espère qu'on aura le temps de le travailler et qu'on pourra terminer les audiences que nous faisons actuellement puis, ensuite, passer article par article. On peut siéger durant l'été, on peut siéger au mois d'août, au mois de septembre et on pourrait entendre vraiment et intervenir et recevoir peut-être d'autres mini-mémoires, si vous me permettez, qui pourraient toujours enrichir un plan aussi important pour notre société.

(11 h 10)

Je voudrais, en terminant, vous entendre sur le deuxième objectif que vous avez identifié comme objectif de récupération financière. Après vous avoir dit que, pour nous, c'était une taxe qui était quand même déguisée, et si on pouvait retirer de ce programme la récupération de taxes, le 196 000 000 $ qui a été mis au budget, au dernier budget du Québec, est-ce que, à ce moment-là, le projet aurait un caractère de plus grande acceptabilité?

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, M. Nadeau.

M. Nadeau (Jacques-A.): M. le Président, c'est sûr que le Québec traverse une période difficile, c'est clair qu'il faut mettre de l'ordre dans nos finances publiques et c'est clair qu'il y a de la récupération qui se fait dans la santé comme dans d'autres secteurs, l'éducation, et tout ça. La santé étant 30 % des dépenses de l'État, il faut que la santé fasse sa part comme les autres. On est conscient de ça, même si c'est difficile.

C'est sûr que la récupération qui se fait à l'intérieur du programme médicaments, c'est évident que c'est pour ça qu'on va de façon un peu précipitée. Je veux dire, si on ne la fait pas là, cette récupération-là, on va la faire ailleurs. Je suis conscient de ça. Et, de toute façon, je pense qu'on protège les citoyens en respectant la capacité de payer des citoyens, et ça, ça me paraît excessivement important.

Mais, d'un autre côté, je pense qu'il ne faut pas faire en sorte, pour la récupération financière, qu'on aille vite et qu'on oublie des pans importants de ce programme-là. Il faut qu'on prenne le temps de bien camper le programme parce qu'il y a des impacts considérables pour les citoyens. Je pense – je ne sais pas si c'est une affaire de quelques mois ou quoi – qu'il faut prendre le temps de s'assurer que le programme est très bien et qu'on n'aura pas de problème par la suite, parce qu'on met en place une partie importante de notre système de santé, on le voit par les coûts, et c'est pour l'avenir qu'on est en train de faire ça. On veut absolument protéger la population, on veut que toute la population ait accès aux médicaments en tenant compte de la capacité de payer, et c'est sûr que le caractère budgétaire fait qu'on va plus vite. Nous, on ne veut pas arrêter, mais on dit: Assurons-nous, puis prenons un peu de temps, si on en a besoin, pour faire en sorte que ce qu'on met, c'est parfait, qu'il n'y a pas de lacunes et qu'il n'y a pas de trous. C'est ça qui est notre préoccupation.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le député.

M. Marsan: Oui, en même temps que vous faites cette affirmation, vous dites, je pense, un peu plus loin peut-être, à la page 14, qu'il faut relever les plafonds étant donné qu'ils sont assez près du seuil de pauvreté. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que c'est vraiment la position de l'organisation actuellement, qu'il faut relever ces plafonds dans les tableaux qui nous sont donnés?

M. Nadeau (Jacques-A.): Écoutez, on n'a pas été en mesure de faire des études sur le montant, tel quel, des plafonds. Mais notre préoccupation, c'est que, quand vous passez, par exemple, celui qui est sur l'aide sociale puis qui vient tout de suite après et qui n'est pas couvert par le programme de la RAMQ, dans lequel il ne paie pas, tout de suite, lui, il s'en va avec une coassurance qui l'amène jusqu'à 750 $ et avec une prime. On dit: Ça, est-ce qu'il y a moyen que ce soit gradué? Si c'était gradué, je pense que ça serait plus facilement acceptable. À ce moment-là, ça ne réduit pas les coûts, mais ça suppose qu'on va les partager différemment entre la population, et peut-être que ceux qui ont une plus grande capacité de payer vont payer un petit peu plus.

M. Rochon: M. le Président, je suis obligé de rappeler une information pour ne pas qu'on parte sur une discussion qui ne correspond pas à la réalité. Le système, il n'est peut-être pas assez gradué, mais il est gradué. Les plafonds, pour des gens qui sont en bas du revenu, ils commencent même à payer... D'abord, il n'y a pas de prime, puis, deux, il y a un plafond à 300 $. Alors, tous les gens qui sont présentement dans un statut de... même si on oublie les statuts sociaux pour ne revenir qu'à un statut de revenus... Mais des gens passés dans le nouveau statut de revenus, ceux qui sont présentement des prestataires de la sécurité du revenu, ils ne paient pas de prime, puis ils ont un plafond à 300 $, de même que les personnes âgées qui ont le maximum...

M. Nadeau (Jacques-A.): C'est au-dessus de ça, notre préoccupation, M. le ministre.

M. Rochon: Bon, au-dessus de ça, il y a un créneau, encore là, on peut jouer avec. Puis vous pouvez nous faire des suggestions où on peut le situer...

M. Nadeau (Jacques-A): C'est ça qu'on pense.

M. Rochon: ...mais, de 10 000 $ à 15 000 $, par exemple, pour l'individu seul, ou 18 000 $ à 30 000 $ pour la famille, on parle d'une augmentation graduelle de 40 $ par tranche de 1 000 $ dans le créneau de la prime. Donc, la prime est graduée aussi. Et, après ça, la prime est complète. À un certain niveau, elle est complète.

M. Nadeau (Jacques-A.): Et la coassurance?

M. Rochon: La coassurance s'applique, c'est ça. Mais, quand on dit 750 $ – je ne veux pas prendre plus de temps qu'il faut – il faut faire attention. Hier encore, on nous donnait l'exemple de 750 $: si quelqu'un était obligé de payer son 750 $ dans le même mois, comment il va pouvoir faire ça? Bien, ça, ça serait quelqu'un qui aurait consommé pour 2 700 $ de médicaments dans le mois, s'il s'est rendu à son plafond. Wo!

M. Nadeau (Jacques-A.): Mais ça arrive, hein.

M. Rochon: Non, mais attendez, là, on va monter un régime pour le 90 % des cas. Des gens qui, dans l'année, même en prenant des personnes qui sont les plus gros utilisateurs, les personnes âgées, qui utilisent plus de 3 000 $ de médicaments dans l'année, c'est la petite proportion, l'infime proportion des gens qui font ça dans l'année. Bon, là, on va parler du cas spécial de la ciclosporine, d'un traitement intensif. Quand on sera rendu à la marge, on va gérer les cas à la marge en jouant entre le jeu de l'établissement et du régime. Si on fait le régime qui va être efficace, qui roule, pour le cas sur 1 000 ou sur 10 000 qui arrive, on ne va pas y arriver.

Je veux juste ramener les choses en proportion. Quand on dit que le système n'est pas gradué, ce n'est pas vrai. Il n'est pas correct, il faut l'améliorer, O.K. Mais là on a besoin des points précis, parce que de lancer une affirmation comme ça, ça ne nous aide pas. Ça fait depuis deux ans qu'on discute, puis qu'on délibère sur ça. Il faut être clair là-dessus, là.

M. Nadeau (Jacques-A.): Non, je pense que c'est très clair en ce qui nous concerne. On a toujours parlé du citoyen qui est au-dessus de l'aide sociale, qui n'est pas couvert par le régime de la RAMQ. C'est ce dont on a toujours parlé. Alors, on parle du même citoyen. Et, ça, vous avez raison, la prime, elle, elle est progressive, mais on dit que la coassurance ne l'est pas. Est-ce que la coassurance ne pourrait pas l'être? Parce que, des cas comme vous avez mentionnés, il y en a, puis il y en a, du monde qui paie des médicaments cher. On veut s'assurer que ces gens-là ne seront pas privés de médicaments.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je m'excuse, parce que, quand même, j'ai à gérer du temps des deux côtés. Encore une fois, je suis convaincu que vous allez revenir avec d'autres recommandations que vous allez envoyer à la commission ou directement au ministre. Mais je dois permettre aux députés de l'opposition de procéder parce que le temps d'un côté est écoulé.

Une voix: C'est beau.

M. Marsan: Alors, merci, M. le Président. Un peu plus loin dans votre mémoire, à la page 15, vous parlez des centres hospitaliers de soins de longue durée, et on peut penser aussi aux centres d'hébergement. Vous vous interrogez sur l'approche qu'adoptera le gouvernement en ce qui concerne les personnes hébergées dans les CHSLD, et on peut penser que c'est la même chose pour les centres d'hébergement. J'aimerais vous entendre là-dessus. C'est quoi, vos inquiétudes pour les patients qui sont dans des unités de soins de longue durée? Et je pense que ça pourrait aussi s'appliquer pour les centres d'hébergement.

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, Dr Landry.

M. Landry (Paul): M. le Président, comme vous savez, une bonne partie de nos membres sont des établissements de longue durée. On a aussi une préoccupation pour les personnes âgées en perte d'autonomie. Comme vous savez, ces personnes-là sont très souvent affectées, de plus en plus, par des troubles cognitifs importants. Et nous souhaitons, autant que faire se peut, que les établissements de longue durée deviennent des milieux de vie et des milieux de soins, mais des milieux de vie. Ce qui nous semble pertinent, c'est que les personnes âgées, dans ces milieux-là, ne soient pas pénalisées par toutes sortes de tracasseries bureaucratiques ou technocratiques qui viendraient compliquer la gestion, leurs activités de vie quotidienne, qui sont déjà très pénibles pour la plupart d'entre eux.

D'autre part, on ne voudrait pas non plus créer des iniquités par rapport aux gens qui vivent dans des milieux naturels, qui feraient en sorte que certaines familles pourraient être incitées, à cause de coûts de médicaments qui pourraient atteindre 1 000 $, de glisser vers une institutionnalisation qui n'est pas absolument nécessaire dans certains cas. Il faudrait éviter que le nouveau régime soit un incitatif à une institutionnalisation puis, d'autre part, éviter aussi de taper sur la tête des personnes âgées en institution. Donc, on met la commission, le gouvernement en garde contre ce point-là qui nous semble majeur.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Dernière question, M. le député. On fera la conclusion.

M. Marsan: Bien, j'apprécie votre commentaire. Hier, le ministre est intervenu en mentionnant qu'en ce qui concerne les établissements de santé – et, de ma compréhension, c'est les centres d'hébergement et aussi les centres de longue durée – le dossier des médicaments continue d'être absorbé par le budget global. Ce n'était pas seulement les hôpitaux, c'était l'ensemble des établissements. En tout cas, je pense que, ça, c'est un point qui est important.

Votre deuxième commentaire, l'incitation à institutionnaliser peut être très présente, dans le régime tel qu'il est actuellement. J'apprécie que vous apportiez ce commentaire à l'attention de la commission, je pense que c'est extrêmement important à ce moment-ci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Conclusion, M. le député.

(11 h 20)

M. Marsan: Je voudrais, en terminant, juste avant la conclusion, M. le Président, vous demander si vous avez eu le temps de réfléchir aussi à la fameuse liste qui doit être concoctée par le CCP, le Conseil consultatif de pharmacologie. Nous, nous pensons qu'il faudrait intégrer... Je ne vous dis pas le libellé de la loi, je n'ai pas les compétences pour vous faire une suggestion, mais on pense que le critère coût devrait être exclu des critères importants qui doivent être retenus par le Conseil consultatif. Nous pensons que, au contraire, le critère de recherche scientifique, le critère d'études multicentres, les critères qui sont habituellement associés à l'excellence de la recherche pourraient nous donner des indications sur ces médicaments qui sont souvent très coûteux et, à cause de leur coût, actuellement, ne sont pas accessibles pour des patients vivant des maladies extrêmement graves. Est-ce que vous seriez d'accord à ce qu'on puisse introduire cette idée que le critère coût ne soit pas retenu par le Conseil consultatif en pharmacologie?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Rapidement.

Mme Daigneault-Bourdeau (Marie-Claire): M. le Président, M. Roberge.

M. Roberge (Raymond): Écoutez, je pense que ce n'est pas un point qu'on a voulu aborder en profondeur dans notre mémoire, mais je pense qu'on va tous s'entendre rapidement sur le fait que la liste qui va être proposée au ministre, ça ne doit pas, par définition, être une liste à rabais – je pense que ce n'est pas l'intention non plus – mais une liste qui tient compte des coûts dans l'approche coûts-bénéfices. Et je pense que vous insistez beaucoup sur l'approche pharmaco-économique qu'on doit commencer à introduire dans notre gestion des médicaments. Là-dessus, on se rejoint bien quand on parle de contrôle des coûts; en voilà une, façon de...

Souvent, le médicament va être dispendieux, va être très dispendieux, on parle de milliers de dollars par année pour certaines catégories de patients, mais il va peut-être sauver de l'hospitalisation puis il va peut-être sauver d'autres formes d'aide, il va peut-être accélérer un traitement. Donc, on pense que la préoccupation pharmaco-économique doit être extrêmement présente. Puis ce n'est pas synonyme de liste à rabais, je pense.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Une minute chacun, MM. le député et le ministre, pour conclure.

M. Marsan: Oui, M. le Président, en une minute. D'abord, remercier nos invités pour la qualité des échanges que nous venons d'avoir. Il y a plusieurs choses qui seront retenues: je pense au dernier commentaire du Dr Landry, qu'il ne faudrait pas que le régime devienne un incitatif à l'institutionnalisation; je pense aussi à la Revue d'utilisation, vous souhaitez que ça ne relève pas de la Régie de l'assurance-maladie, comme tel; les informations que vous nous donnez sur les contrôles des coûts, sur le système d'information et, en plus, tout ce qui est inclus dans le mémoire. Nous, notre intention, c'est de l'aborder, au moment où on va étudier article par article. On comprend que ça prendra sûrement un certain temps, ou un temps certain, mais nous espérons que nous aurons le temps de le faire comme il faut; et, à la fin, ce sera à l'avantage de toute la société, de toutes les Québécoises et les Québécois. Alors, encore une fois, un gros merci pour la qualité de vos témoignages.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Rochon: Merci. Deux points seulement dans le temps qui nous est donné. Je voudrais mettre l'accent, en concluant, sur le fait qu'il faut demander à ce régime-là d'être le meilleur qu'on peut se donner présentement, mais qu'on ne peut pas nous demander de régler des choses qui se règlent ailleurs et autrement.

Je vous donne un exemple de ça, dans notre échange, sur lequel on n'a pas pu revenir: le contrôle des coûts, global et total, avec les régimes complémentaires, par exemple. En dehors de ce qu'on aura à assurer dans un régime de base bien contrôlé, il y a le marché, qui va toujours être le vrai régulateur de tout ce qui peut être complémentaire. S'il y a des gens au Québec, et qu'il y en a assez, capables de faire fonctionner, de répondre à une offre de choses complémentaires, qui sont capables d'acheter plutôt que de changer leur auto, bien, ça, il existera quelque chose ailleurs. Ce qui est important, c'est que la population ait accès à tout ce dont elle a besoin et que, pour ça, on contrôle le coût. Alors, je voudrais bien qu'on fasse attention, à un moment donné, pour ne pas qu'on veuille en faire plus grand, par ce régime-là, que n'importe quel régime peut faire.

Deuxième point où je veux faire un rapport avec ça, je ne pense pas que ce soit tout à fait exact, M. le Président, de dire qu'à une autre époque, même si c'était une époque de développement, dans les années soixante-dix, quand on s'est donné l'assurance-santé, moi, je me rappelle, à ce moment-là, il y avait aussi une préoccupation de coûts très importante. À ce moment-là, on n'était pas dans la problématique où on est actuellement, on était en développement, mais il y avait le problème... Et nos interlocuteurs de ce matin sont là pour le juger, le grand drame à l'époque, c'était de contrôler la croissance des coûts des hôpitaux et un peu aussi celle des médecins qui se pointait. Mais c'était surtout ça. Et, par un régime d'assurance-santé, on voulait aussi se donner un outil de gestion qui contrôlait ça et qui arrêtait de nous mettre dans des sagas annuelles.

Donc, dans le domaine de la gestion des services de santé et des services sociaux, il y a toujours eu une composante du coût, la question de ce qu'une société peut se payer et comment elle veut se distribuer et une dépense et un service. Ça fait partie de la problématique de façon intrinsèque.

Je finis en disant qu'on va tout faire, en effet. J'apprécie beaucoup votre contribution, on va tenir compte de tout ce que vous nous dites. Mais j'espère et j'ai confiance qu'on sera tous capables de faire quelque chose qu'on peut faire le mieux présentement et qu'on ne rêvera pas à l'excellence en perdant le mieux, qu'il nous glisse dans les mains parce qu'on attend le jour où on pourrait peut-être avoir l'excellence. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Le temps passe vite. Je vous remercie beaucoup.

J'invite maintenant les gens de l'Association professionnelle des pharmaciens salariés du Québec à prendre place.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, on a du temps à reprendre et je voudrais bien qu'on termine à 13 heures tel que prévu. Alors, j'ai organisé le temps, actuellement, pour arriver en conséquence, mais à la condition qu'on commence.

Alors, nous recevons maintenant l'Association professionnelle des pharmaciens salariés du Québec. Je vous invite à vous présenter, et vous avez 20 minutes pour vos remarques préliminaires.


Association professionnelle des pharmaciens salariés du Québec (APPSQ)

M. Dubois (René): M. le Président, M. le ministre Rochon, M. Castonguay, que je suis content de voir ici, représentants du ministère qui sont dans la salle et distingués membres du gouvernement, Mmes et MM. les députés et les membres de l'opposition, nous vous remercions de l'opportunité que vous nous accordez de vous soumettre notre humble opinion à cette commission.

Nous désirons également remercier et féliciter M. Castonguay ainsi que les membres de son équipe et les spécialistes qu'il a consultés pour avoir présenté un rapport tout à la fois concis et suffisamment exhaustif sur des voies de solution dans l'établissement d'un régime d'assurance universel. Nous y référerons au besoin.

L'APPSQ est la seule association qui représente les pharmaciens salariés. Elle a été fondée en 1967 en vertu de la Loi des syndicats professionnels. Notre association représente donc les pharmaciens salariés qui sont dans le milieu de pratique privée, qui représentent 63 % des pharmaciens; l'autre 37 % sont des propriétaires de pharmacies.

Brièvement, en ce qui regarde le régime, nous croyons que le régime A, tel que suggéré dans le rapport, nous semble le plus apte à répondre aux besoins de base pour l'ensemble de la population, d'autant plus que toute personne qui désire à ce moment-là une couverture plus complète pourra l'obtenir auprès des assureurs privés.

Quant à l'administration, nous croyons que le système 1 du mode 1 est celui qui va garantir le meilleur contrôle de la participation des personnes actuellement non assurées par aucun régime.

Nous croyons aussi que le principe de la mutualisation des risques, dont il est question dans le mémoire de M. Castonguay, devrait aussi s'appliquer à l'honoraire des pharmaciens et à la liberté du patient de choisir le pharmacien de son choix. Ça veut dire que, si nous avons un régime universel, nous croyons que le même honoraire du gouvernement devrait s'appliquer aussi pour les assurances privées, et le principe de choisir le pharmacien de son choix, comme le gouvernement l'a toujours fait, doit être aussi appliqué par les assureurs privés.

Ceci dit, notre principale intervention quant au projet de loi n° 33 portera sur le chapitre VII, qui traite des dispositions modificatives, Loi sur l'assurance-maladie.

(11 h 30)

Selon nous, l'honoraire professionnel devrait être versé au pharmacien exécutant ou instrumentant les ordonnances émises aux citoyens du Québec, bénéficiaires du régime d'assurance-médicaments, comme c'est le cas pour tous les autres professionnels de la santé. Pour votre gouverne, je vous dirai que les pharmaciens exécutants et instrumentants, ce sont les pharmaciens qui, dans une pharmacie, livrent la prescription au patient. C'est eux qui sont sur le front et qui traitent avec le patient pour lui donner des conseils, pour livrer son médicament, pour contacter le médecin, s'il y a lieu, pour faire des changements, pour donner des opinions. C'est ces pharmaciens-là. Ces pharmaciens-là sont des pharmaciens salariés et sont aussi des pharmaciens propriétaires. Donc, la raison pour laquelle nous disons que c'est le pharmacien instrumentant qui doit recevoir l'honoraire... les raisons qu'on apporte sont les suivantes.

Premièrement, dans les années soixante-dix, la proportion des pharmaciens salariés par rapport aux propriétaires était d'environ 40 % des effectifs en pharmacie communautaire – si je vous reporte toujours aux années soixante-dix et à aujourd'hui, c'est pour essayer de faire valoir l'évolution qu'il y a eu depuis les années soixante-dix. En 1970, c'était tout à fait normal. Et je me souviens que M. Castonguay, qui était là à ce moment-là, nous avait bien dit: Nous négocierons avec l'association la plus représentative. Or, c'étaient les pharmaciens propriétaires, qui groupaient 60 % des pharmaciens, et les salariés, 40 %. Je crois que la décision était sage, surtout que c'était un début et que ça s'appliquait à une petite partie de la population. Aujourd'hui, la situation a été complètement renversée, les pharmaciens salariés représentent 63 % des effectifs puis ils accomplissent la majorité des actes en pratique privée. Je dis «la majorité», parce qu'à 63 % c'est évident, mais il ne faut pas dire que ce sont seulement eux qui accomplissent les actes à la pharmacie. Ce ne sont pas seulement eux. Une partie des propriétaires le font aussi, mais les propriétaires, souvent, c'est bien obligatoire, ont des occupations administratives dans leur pharmacie, et ce sont en majorité des salariés qui le font, malgré qu'eux aussi participent et posent des actes en pharmacie.

Dans les années soixante-dix, le régime couvrait les prestataires de la sécurité du revenu. Par la suite se sont ajoutées, comme le rapporte M. Castonguay dans son rapport, les personnes de 60 à 64 ans, les personnes de 65 ans qui recevaient le supplément puis, ensuite, toutes les personnes âgées. Se sont ajoutés à ça les médicaments pour les maladies transmissibles sexuellement.

Aujourd'hui, là où ça a changé beaucoup, c'est qu'on veut appliquer un régime universel d'assurance-médicaments. Il va donc s'ajouter les personnes assurées, 15 % de la population, selon le rapport, 1 125 000 personnes. Or, cela implique probablement une augmentation du nombre d'ordonnances en pharmacie, ce qui va affecter énormément les gens qui exécutent des prescriptions, et la réorganisation de la distribution des médicaments et des services pharmaceutiques. Il va falloir se réorganiser autrement, et je pense que ces pharmaciens salariés, les pharmaciens exécutants, doivent ensemble organiser des systèmes de réorganisation. Par conséquent, le moment actuel ne saurait être mieux choisi pour changer les règles du jeu et généraliser la remise de l'honoraire aux salariés et aux propriétaires qui exécutent les prescriptions, de sorte que tous les pharmaciens impliqués participent au processus de négociation.

Dans les années soixante-dix encore, le coût des médicaments était établi par la Régie, mais les pharmaciens pouvaient obtenir un prix plus avantageux auprès des fournisseurs, tout le monde sait ça. Depuis, le prix est négocié par la Régie directement avec les fournisseurs, puis le prix réel d'acquisition a été établi et l'honoraire a été réajusté, ce qui veut dire qu'il y a moins d'implications sur l'achat de médicaments; il est fixé, le médicament.

Dans les années soixante-dix, la pharmacothérapie n'avait pas l'importance qu'on lui préconise aujourd'hui. Aujourd'hui, la pharmacothérapie est devenue un élément essentiel d'une politique de santé. Le rapport du comité Castonguay, d'ailleurs, lui accorde un chapitre complet qui a été préparé par une experte en la matière. Toutefois, on doit vous dire que les interventions de la part des pharmaciens salariés auprès des médecins demeurent ardues et laborieuses. Ces difficultés sont bien identifiées dans notre enquête, si vous consultez l'enquête 1994 de l'APPSQ, au chapitre des interventions, en page 13. C'est pourquoi nous avons remis le rapport de 1994 qui traite... et le chapitre principal à consulter dans ça, c'est «Les interventions». En ce qui regarde les interventions, elles sont très difficiles. Les raisons qui rendent difficiles les interventions de la part des pharmaciens, c'est que les médecins sont difficiles à rejoindre; deux, c'est qu'ils n'ont pas le temps – il n'y a peut-être pas de deux là-dedans, là, mais c'est une des causes principales – de communiquer avec les médecins.

Dans les années soixante-dix, il n'y avait pas d'honoraires spéciaux pour rationaliser et optimiser la prise de médicaments. Ça n'existait pas. Aujourd'hui, l'honoraire spécial est alloué – il y a un honoraire d'alloué – pour les refus et les opinions pharmaceutiques. Cette procédure amène encore l'utilisation des connaissances professionnelles du pharmacien exécutant. C'est lui qui doit avoir les connaissances, c'est lui qui est sur la ligne de front et c'est lui qui doit participer à ça.

Dans les années soixante-dix encore, les propriétaires de... Je vous situe un peu historiquement ce qui se passait. Dans les années soixante-dix, les propriétaires de pharmacies de bonne envergure – dans ce temps-là, c'étaient, quoi, 150, 200 prescriptions par jour – permettaient des périodes de relaxation et de repas à leurs pharmaciens parce qu'ils mettaient deux pharmaciens en service quand ils avaient ce nombre-là de... Aujourd'hui, c'est tout à fait différent. Il y a des économies qui se font, puis ce n'est pas toujours à l'avantage de la distribution et des services des médicaments. Le pharmacien salarié, même s'il est devenu, de par sa formation – parce qu'on les prépare pour ça à l'université – plus qu'un facteur administratif dans la distribution des médicaments et qu'il doit s'impliquer directement dans les services pharmaceutiques qui s'y rattachent, il est soumis toutefois à des conditions déplorables et impropres à la délivrance des services pharmaceutiques. Par exemple, 63 % des salariés n'ont pas de période de relaxation par tiers de journée – ils remplissent 25, 30, 40 prescriptions à l'heure, ils n'ont pas de relaxation – deux tiers des pharmaciens doivent prendre leurs repas au laboratoire tout en demeurant en service. Remarquez que ce n'est pas général en pharmacie – il ne faudrait pas généraliser, là; ce n'est pas du tout ce qu'on a l'intention de faire – mais, si on regarde aux pages 10 et 15 du rapport de l'enquête des pharmaciens salariés, on va voir les proportions. Ça se tient dans les 60 %, 63 %. Puis ça dépend du type de pharmacie aussi.

On est bien conscient, par exemple dans une clinique médicale, qu'un pharmacien qui va prendre son repas au laboratoire, il peut toujours voir ce qui se produit dans le laboratoire. Souvent, dans la période du midi où il va prendre son repas tout près ou à même le laboratoire, les médecins sont partis dîner eux-mêmes, puis il y a moins d'ouvrage à ce moment-là. Le milieu de travail rend plus facile une situation. Mais, quand on arrive dans une pharmacie à grand plancher, où l'on remplit 50 prescriptions par heure, ou même au-dessus de 20 prescriptions à l'heure, de manger dans le laboratoire, c'est assez ardu. Il faut le faire.

Ceux qui ne comprennent pas comment il se fait que les compétences du pharmacien sont sous-utilisées cesseront de s'en surprendre le jour où ils donneront aux pharmaciens instrumentants plus de pouvoirs dans l'organisation de leur travail. C'est pour ça qu'on dit: «Or, cela ne sera possible que le jour où l'honoraire leur sera directement versé.»

(11 h 40)

Les modes de paiement de l'honoraire professionnel en pharmacie pour les pharmaciens instrumentants. C'est clair que, dans l'honoraire professionnel, il y a deux composantes: une, c'est l'expertise du pharmacien, la deuxième, c'est tout le rapport logistique, les aides techniques, les inventaires, le local et tout le reste, qui permet à cette expertise de se concrétiser au bénéfice du patient. Donc, nous suggérons trois modes possibles de payer les honoraires aux pharmaciens salariés et aux pharmaciens exécutants.

Ça pourrait être... L'honoraire est versé en entier directement au pharmacien instrumentant. Si ce dernier n'est pas propriétaire du lieu d'exercice, il s'entendra avec lui sur les frais à payer pour bénéficier du support logistique, comme cela se fait chez les autres professionnels de la santé. On verrait mal... On ne verrait pas le ministère payer l'honoraire du médecin au propriétaire de la clinique médicale ou de la bâtisse où il pratique. Dans le moment, c'est ça qui se produit. L'État pourrait réaliser des économies d'échelle en plafonnant la rémunération versée à un pharmacien donné par une norme qui établirait le nombre de prescriptions à l'heure. Par la suite, il pourrait se faire, avec le propriétaire et les pharmaciens salariés et les pharmaciens instrumentants, des négociations. Ça prendrait un décret pour le faire.

L'autre, c'est les expertises. La partie d'expertise sur le 7 $ d'honoraire pourrait être remise au pharmacien instrumentant. Alors, le pharmacien instrumentant n'aurait que cette partie-là et pourrait encore négocier avec le propriétaire, et puis les frais administratifs seraient négociés avec les propriétaires de pharmacie. Le troisième, c'est qu'une rémunération de l'expertise pourrait être remise au pharmacien exécutant sous forme de salaire. Cette mesure, à notre avis, pourrait à la fois remplacer la rémunération à l'acte et servir de plafonnement à l'avantage de l'État. Une norme raisonnable sur le nombre de prescriptions à l'heure est encore nécessaire pour éviter qu'il se fasse des abus et pour permettre au pharmacien de pouvoir donner de l'information et de donner des services pharmaceutiques. Nous croyons que ces trois mesures, d'ailleurs, inciteraient plus de pharmaciens à délaisser des tâches administratives pour poser des actes professionnels.

Actuellement, en ce qui regarde l'opinion pharmaceutique, il y a des pharmaciens qui seraient prêts à faire chez eux, à préparer chez eux des opinions pharmaceutiques, mais la question du paiement, c'est que souvent ce n'est pas accepté qu'ils reçoivent le paiement complet. Dans l'ensemble, le pharmacien salarié, s'il était payé en honoraires, c'est qu'il pourrait, avec un nombre de prescriptions, augmenter ses heures de service de manière à ce qu'il y ait plus souvent deux pharmaciens en service.

Donc, conclusion: On propose que l'honoraire professionnel soit versé au pharmacien instrumentant; que des normes soient établies sur le nombre d'ordonnances à l'heure admissible pour un pharmacien instrumentant; que l'APPSQ participe directement aux négociations de l'honoraire professionnel en vue de l'établissement d'un régime universel d'assurance-médicaments; qu'un décret soit établi pour obliger la négociation multipatronale entre pharmaciens instrumentants et propriétaires de pharmacie, ceux qui sont propriétaires; que, dès l'application du régime universel d'assurance-médicaments, l'honoraire pour l'opinion pharmaceutique soit immédiatement versé directement au pharmacien instrumentant et que des mécanismes soient prévus pour la fourniture de services pharmaceutiques en dehors des pharmacies, qui pourraient être préparés chez lui. Alors, je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est moi qui vous remercie. Si je comprends bien, tel qu'il est indiqué ici, c'est Mme Nicole Mayot qui vous accompagne, pour fins d'enregistrement.

M. Dubois (René): Oui, et vous m'excuserez...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il nous fait plaisir de la rencontrer aussi.

M. Dubois (René): Mme Mayot nous accompagne. Elle est administratrice. Nous ne pouvions pas inviter tous les pharmaciens salariés à venir, la salle n'aurait pas été assez grande.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je vous remercie.

M. Dubois (René): Ils ne sont pas dehors pour contester, d'ailleurs.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le ministre.

M. Rochon: Merci, M. le Président. Je vous remercie beaucoup pour votre présentation et d'avoir accepté notre invitation. Je prends bonne note de ce que vous nous dites, mais est-ce que c'est juste de comprendre qu'il y a... Vous nous sensibilisez à beaucoup d'éléments qui sont reliés à la situation et aux conditions de travail des pharmaciens salariés.

M. Dubois (René): Oui.

M. Rochon: On disait, avec les intervenants qui vous ont précédés, qu'on ne peut pas, je pense, raisonnablement, à l'occasion de la mise en place d'un nouveau régime comme celui-là, penser pouvoir revoir toutes les pratiques dans un milieu. Il y a beaucoup de choses, d'ailleurs, que vous mentionnez qui, je présume, sont en discussion entre les pharmaciens salariés et les pharmaciens propriétaires pour voir qu'est-ce qui peut s'améliorer de ce côté-là. Mais, pour être très clair, je ne voudrais pas qu'on se donne de fausses expectatives; dans la mise en oeuvre d'un système comme ça, il ne m'apparaît pas qu'on pourrait penser, et même si on prenait tout le temps qu'on voulait prendre, à changer de façon aussi drastique les pratiques professionnelles qui sont en place, ce qui ne veut pas dire qu'on ne peut pas en discuter autrement aux tables appropriées et voir comment les choses peuvent évoluer de ce côté-là.

Mais est-ce que c'est vrai – et c'est la question que j'aimerais vous poser – que, dans le régime qu'on a au Québec, le pharmacien, en tant que professionnel et selon les règles qui gèrent les professions et, singulièrement, l'Ordre des pharmaciens, c'est un professionnel qui a vraiment beaucoup de marge de manoeuvre, qui peut assumer beaucoup de responsabilités en tant que professionnel, en vertu de la Loi sur la pharmacie, et qui, surtout si on le compare à d'autres autour de nous, à l'extérieur du Québec, est en situation, de par son statut professionnel, d'être un véritable partenaire dans une opération comme celle-là?

M. Dubois (René): Oui. Moi, je vous répondrais que oui, c'est vrai, et je devrais vous dire ici que, s'il pouvait réellement le mettre en pratique – c'est que le contexte de travail ne le permet pas – s'il pouvait réellement, il faudrait peut-être doubler le nombre de pharmaciens salariés pour qu'il y ait réellement des services pharmaceutiques. Mais il y a un contexte actuellement où un propriétaire vous dit: Ah! nous autres, ici, on en a tant à remplir, là, et tu t'en tiens à ça et... bon. Et l'autre, il est salarié. Et, comme on n'a pas de décret qui nous permettrait de faire une négociation multipatronale, chaque salarié dans chacune des pharmacies doit discuter avec son patron. Ça le place dans une situation quasiment intenable.

De l'autre côté, quand vous me dites: Les propriétaires et les salariés vont sûrement discuter, je pense qu'à la suite de cette présentation-là la balle est partie. Là, on devrait avoir un come-back, comme on dit. Ha, ha, ha! Alors, nous autres, on ne demande pas mieux. Remarquez qu'à date ils ne nous ont jamais consultés. Mais on ne demande pas mieux que de participer avec eux autres, on ne demande pas mieux que de prendre des arrangements. Il n'y a pas seulement... Et, quand on parle de l'honoraire versé au pharmacien exécutant, il y a tous les propriétaires qui exécutent dans les pharmacies. Ce sont des choses qui feraient partie de ça aussi. On ne le néglige pas. On admet aussi que les propriétaires ont des responsabilités administratives à remplir et on dit: Oui, il faut que vous négociiez. Alors...

La Présidente (Mme Charest): Est-ce que ça va?

M. Rochon: Oui. Merci.

La Présidente (Mme Charest): Merci, M. Dubois. M. le député de Robert-Baldwin, s'il vous plaît.

M. Marsan: Oui. Merci, Mme la Présidente. Merci d'avoir accepté l'invitation de la commission. Dans votre mémoire, je crois que c'est à la page 2, vous mentionnez que: «Cela – le régime – implique probablement une augmentation du nombre d'ordonnances en pharmacie et la réorganisation de la distribution des médicaments». C'est surtout sur l'augmentation du nombre d'ordonnances que j'aimerais vous entendre. Nous avons au préalable rencontré des groupes qui nous ont dit: Bien, comparativement à actuellement, où les gens paient 2 $ – les personnes âgées, là – jusqu'à un maximum de 100 $, bien, maintenant le régime va être beaucoup plus coûteux et peut-être qu'il y aurait moins de prescriptions, le régime étant trop cher. Par contre, il y aurait 1 000 000 de personnes qui, théoriquement, devraient être assurées, je pense. Est-ce que c'est de ce côté-là?

Alors, ma question, c'est: Voulez-vous juste nous dire comment vous envisagez qu'il y ait une augmentation du nombre d'ordonnances, avec l'application du nouveau régime?

M. Dubois (René): Oui. Premièrement, ces 1 125 000 personnes qui, dans le moment, n'ont pas souvent les moyens de faire remplir leurs prescriptions, elles vont voir le médecin et elles disent: Ah! on va prendre ce qui est le moins cher possible, on va acheter au comptoir; ou bien non, elles ne vont pas voir le médecin parce qu'elles savent qu'elles ne pourront pas payer la prescription. L'autre chose, c'est que ces 1 125 000 personnes, le fait qu'il y ait une assurance qui est établie, elles vont y aller, là, chercher leurs choses. Il va peut-être y avoir une petite prime à payer, mais c'est beaucoup moins que de payer tout ensemble. On sait que, quand quelqu'un a une assurance, là... Moi-même, quand je suis rentré, à un moment donné, dans des emplois où j'avais une assurance... C'est la même chose, hein. Je ne me gêne pas. Puis, quand j'ai eu 65 ans, je n'ai pas exagéré non plus. Mais, quand on a une assurance, on ne se gêne pas pour y aller.

(11 h 50)

Quant aux autres gens de la population qui disent: Ah! ça va nous coûter ci, ça va nous coûter ça, il va peut-être y avoir, au début, un petit ralentissement, mais il reste que les gens ont besoin de médicaments. Le pharmacien va être là, aussi, pour leur dire: Écoutez, madame, ce médicament-là, vous en avez besoin. Il pourra peut-être saisir l'occasion pour dire: Écoutez, madame, monsieur, ce médicament-là, vous pourriez bien vous en passer. Il va rendre service à la population, il va lui sauver de l'argent à elle, il va aussi éviter qu'un médicament lui soit donné pour rien. Mais il faut, à ce moment-là, que le pharmacien qui est sur le front puisse avoir le temps de parler avec le patient.

La Présidente (Mme Charest): Merci, M. Dubois.

M. Marsan: Merci.

La Présidente (Mme Charest): Alors, je vais procéder aux remerciements de fermeture. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: De nouveau, je vous remercie bien sincèrement d'avoir attiré notre attention sur les revendications que vous avez, et je pense qu'on prend bonne note de ce que vous souhaitez. Alors, merci bien.

La Présidente (Mme Charest): Merci, M. le député. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, pour le mot de la fin.

M. Rochon: Je vous remercie beaucoup aussi. Même si l'instauration d'un nouveau régime ne pourra pas tout régler, j'espère que ça va créer des conditions qui vont vous permettre d'évoluer dans des conditions plus satisfaisantes sur le plan professionnel. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Charest): Alors, merci, M. le ministre. Nous allons suspendre, quelques minutes, le temps de permettre à la Fédération des ACEF de se présenter à la table. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 52)

(Reprise à 11 h 56)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous recevons maintenant les représentants de la Fédération des ACEF. Je vous demande de vous présenter. Le ministre s'en vient. Vous avez probablement le temps de vous présenter et de commencer vos remarques, si on veut, justement, vous permettre tout le temps nécessaire.


Fédération des ACEF (FACEF)

Mme Émond (Monique): Alors, je me présente, mon nom est Monique Émond. Je suis représentante de la Fédération des ACEF. Particulièrement avec Louise Blain, à côté de moi aussi, nous sommes toutes les deux responsables des dossiers sociaux au sein de la Fédération des ACEF.

Si vous nous permettez, étant donné que notre mémoire, que vous avez, je crois, tout le monde, dans les mains, était quand même assez court, on va prendre le temps de le lire au lieu de le présenter par morceaux. On va essayer de lire ça avec un peu d'intonation, pour ne pas vous ennuyer.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On est des toffes!

Mme Émond (Monique): J'espère. Vous avez besoin!

La Fédération des associations coopératives d'économie familiale, donc la FACEF, travaille depuis maintenant plus de 25 ans à l'amélioration des conditions de vie de la population. Les ACEF membres rencontrent quotidiennement des individus et des familles qui connaissent des difficultés financières pour les aider à régler leurs problèmes budgétaires, tout en intervenant plus largement sur les causes de ces problèmes. Déjà, dans les années soixante, les ACEF identifiaient le coût des soins de santé comme une des principales causes de l'endettement des ménages et réclamaient l'instauration d'un régime d'assurance-maladie universel. Par la suite, nous avons suivi de très près l'évolution du système des soins de santé et nous nous sommes impliqués activement dans ce dossier depuis les tout débuts du processus de la réforme en cours, réagissant contre la tendance au désengagement de l'État dans ce domaine par la privatisation et la désassurance de certains services.

Depuis quelques années, nous nous intéressons de façon plus particulière à l'accessibilité aux médicaments, à cause, notamment, de l'usage de plus en plus important de ceux-ci dans le traitement des maladies et de l'augmentation exponentielle de leurs coûts, ceci dans le contexte du virage ambulatoire qui obligera les usagers à assumer les coûts des médicaments autrefois fournis durant leur séjour à l'hôpital.

Nous nous prononçons donc en faveur d'un régime d'assurance-médicaments universel et nous apprécions l'invitation qui nous est faite de venir vous faire part de nos commentaires sur le régime proposé. Nous regrettons cependant le caractère précipité de cette consultation. À notre avis, ce nouveau régime comporte des enjeux importants qui auraient mérité un large débat public. De surcroît, il nous manque plusieurs éléments concrets pour pouvoir en évaluer correctement les retombées, par exemple les montants de la prime familiale.

(12 heures)

Comme nous l'avons dit, nous sommes d'accord avec l'instauration d'un régime d'assurance-médicaments. Ce régime devra cependant avoir comme objectifs prioritaires de favoriser un accès équitable pour tous aux médicaments et d'assurer un meilleur contrôle de la consommation et des coûts des médicaments. C'est donc en fonction de ces objectifs que seront orientés nos commentaires sur le projet de loi. Il faut préalablement rappeler et garder en tête que, selon l'enquête Santé Québec 1992-1993, la majorité des personnes non assurées, donc principalement visées par ce projet de loi, ont un revenu modeste et n'ont pas, par conséquent, une grande capacité de paiement. Ce sont des employés contractuels, des travailleurs autonomes, des employés de PME qui n'offrent pas de plan d'assurance privé, des chômeurs, des étudiants adultes, des personnes trop malades qui sont, de ce fait, refusées par les assureurs privés. À ce nombre viennent s'ajouter les bénéficiaires de la sécurité du revenu et les personnes âgées de 65 ans et plus.

Donc, ce qu'on va vous apporter dans un deuxième temps... je vais demander à Louise de partir sur l'autre côté, qui est vraiment la concrétisation de nos propositions.

Mme Blain (Louise): Le premier bloc, c'est sur la contribution des citoyens au régime. On commence par la prime. Dans un document du MSSS faisant la recension des options en matière de financement d'un programme d'assurance-médicaments, on mentionne que l'utilisation des primes est considérée comme la voie la plus régressive du point de vue de la répartition du revenu. Le législateur, ayant quand même choisi cette option, semble vouloir en amoindrir les conséquences en introduisant une échelle progressive à l'intérieur de laquelle certains ménages, en fonction de leurs revenus et de leur taille, seront exemptés en partie ou en totalité du paiement de la prime. Cependant, les paramètres établis en ce qui regarde les seuils de revenus nous semblent beaucoup trop bas et ne tiennent pas compte de la capacité réelle de payer de la population visée. De plus, alors que le rapport Castonguay fixait à 15 000 $ de revenus annuels le seuil de base au-dessous duquel les ménages étaient entièrement exemptés du paiement de la prime, le ministre fixe ce seuil à 10 400 $, montant minimum établi par le ministère du Revenu pour couvrir les besoins essentiels de la population.

Nous proposons donc minimalement que le seuil de 15 000 $ de revenus annuels suggéré dans le rapport Castonguay soit retenu comme étant le seuil de base au-dessous duquel tous les ménages seraient exemptés entièrement du paiement de la prime. Nous proposons également qu'à partir de ce seuil l'échelle progressive établie par le projet de loi – c'est-à-dire surtout les paramètres qu'on a vus après – pour chacune des catégories de ménage, à l'intérieur de laquelle certains seraient exemptés partiellement ou entièrement du paiement de la prime soit beaucoup plus large pour chacune de ces catégories-là et que le seuil maximum pour une exemption de prime aille au-delà des 30 700 $ de revenus annuels proposés.

Il est important ici de considérer que les seuils de pauvreté estimés par le Conseil national du bien-être social pour 1996 sont de 16 175 $ pour une personne seule et de 32 089 $ pour un ménage de quatre personnes. Demander, par exemple, à un individu qui gagne 14 800 $ par année ou à une famille de quatre personnes qui gagne 30 700 $ de payer entièrement leur prime, comme le propose le ministre, nous paraît irréaliste.

Pour ce qui est de la franchise, la coassurance et le plafond. Par ailleurs, nous sommes d'accord avec la proposition du législateur d'exempter du paiement de toute contribution les enfants de zéro à 18 ans ainsi que les étudiants à temps plein de 18 ans et plus à la charge de leurs parents. Nous sommes également d'accord avec une progressivité dans la fixation des plafonds pour ce qui est de la coassurance. Nous croyons cependant que les montants fixés pour les contributions des citoyens devraient l'être, comme pour la prime, en fonction de leurs revenus et de la taille du ménage et non pas en fonction de la catégorie sociale ou en fonction de l'âge.

Nous proposons donc que tous les ménages exemptés entièrement du paiement de la prime soient également exemptés du paiement de la franchise et que le montant fixé pour le paiement d'une coassurance de 25 % soit de 300 $ par adulte. Nous proposons de plus que les ménages dont les revenus sont sous le seuil de 15 000 $ de revenus annuels soient exemptés de toute contribution et nous proposons que les adultes faisant partie d'un ménage exempté partiellement du paiement de la prime paient une franchise de 100 $ et une coassurance jusqu'à 500 $. Il va sans dire que tous ces paramètres devraient être indexés au coût de la vie annuellement.

Pour ce qui est de la compensation et de la pénalité. Les mécanismes de compensation pour les ménages à très faibles revenus établis dans le projet de loi ne tiennent pas compte du problème de liquidités vécu quotidiennement par ces ménages. Payer entièrement le montant de la prime, même étalé sur 12 mois, avant de pouvoir, au bout d'un an, être compensé représente pour ces ménages un fardeau supplémentaire que la plupart ne seront pas en mesure d'assumer sans couper ailleurs dans un budget déjà réduit au minimum.

Selon les chiffres déjà avancés par le gouvernement, pour un ménage avec enfants, ça pourrait facilement occasionner un coût additionnel de 35 $ à 40 $ par mois. Ajouter à cela une pénalité en cas de non-paiement, cela revient carrément à pénaliser la pauvreté. Les ménages à faibles revenus risquent donc de payer plus cher une prime qu'au départ ils ne devraient même pas payer, puisqu'ils sont reconnus comme devant bénéficier d'une exemption en raison, justement, de leurs faibles revenus. Nous recommandons que les modalités du projet de loi en ce qui concerne la compensation soient révisées de telle sorte que les ménages bénéficiant d'une exemption de prime en partie ou en totalité n'aient à débourser que le montant qu'ils auront effectivement à assumer.

On va parler maintenant de la gestion et du financement du régime. La gestion. Le ministre de même que le comité Castonguay semblent avoir exclu d'emblée la possibilité que ce nouveau programme d'assurance-médicaments soit géré par le régime public. Pourtant, selon une étude de Sylvie Rheault, économiste au MSSS, comparant les modalités de financement d'un tel régime, un système public contrôlé par l'État constitue la meilleure solution pour réduire les dépenses des citoyens. De plus, un régime public permettrait une plus grande progressivité pour ce qui est de la contribution demandée aux usagers et rendrait ainsi ce régime davantage équitable et accessible à tous.

Il est donc regrettable, à notre avis, que, sans plus de débats, le ministre ait opté pour un régime mixte, cédant tout le marché de la population active aux assureurs privés. À notre avis, c'est un choix davantage guidé par un souci de diminuer les dépenses publiques et par la tendance à la privatisation des services publics commandée par le marché plutôt qu'un choix politique axé sur une meilleure accessibilité aux soins de santé. On peut d'ores et déjà s'inquiéter des conséquences prévisibles de ce choix politique; on en donne quelques-unes à l'autre page.

Le coût des primes sera probablement plus élevé puisque, à la prime de base qui sera fixée par le gouvernement en consultation avec les assureurs privés, viendront s'ajouter les frais d'administration déterminés par chaque assureur et peut-être des taxes; là, ce n'est pas encore clair si ça va être taxé ou pas, mais peut-être une taxe. On peut effectivement s'attendre à ce que les assureurs incluent dans ces frais les montants qu'ils débourseront en marketing et en publicité pour accaparer leur part de marché.

Une autre conséquence, c'est qu'à moins d'un contrôle très strict de la part du gouvernement on peut prévoir des augmentations de coûts importantes d'une année à l'autre, puisque les compagnies chercheront inévitablement à augmenter leur part de bénéfices. De plus, les assureurs en profiteront pour offrir des assurances complémentaires en jouant particulièrement sur l'insécurité provoquée dans la population par la réforme actuelle, principalement par le virage ambulatoire. On peut déjà voir à la télévision une publicité en ce sens, de la Croix Bleue. Ceux qui ne l'ont pas vue, c'est: 1-800-371-BLEU. On oblige – c'est ça qui est important – donc la population non assurée, population particulièrement vulnérable, à magasiner une assurance privée, à essayer de comprendre les différents contrats qui lui seront présentés et à subir les pressions des assureurs pour vendre leurs produits. Beaucoup de personnes risquent donc de se retrouver avec un plan d'assurance trop cher, qu'elles ne seront pas en mesure d'assumer. Enfin, ce nouveau type de programme social universel géré par le privé risque d'ouvrir la porte à un désengagement progressif de l'État au profit du secteur privé.

Nous demandons au gouvernement de reconsidérer les différentes options quant à la gestion de ce régime et d'envisager la possibilité d'instaurer un régime public d'assurance-médicaments pour toute la population présentement non assurée. À défaut d'opter en faveur d'un régime public pour les personnes non assurées collectivement, nous recommandons que le régime mixte de gestion offre le choix aux personnes de 18 ans à 64 ans de s'assurer soit auprès de la RAMQ ou auprès d'un assureur privé. C'était l'une des options proposées dans le rapport Castonguay, et nous croyons qu'à défaut d'un régime public cette option permettrait à l'État d'offrir une concurrence au secteur privé, ce qui pourrait maintenir les primes à un niveau acceptable.

Nous recommandons que le gouvernement encadre les méthodes de vente des assureurs privés, par exemple exiger que les contrats soient clairs et sans ambiguïté sur les assurances qui seront obligatoires et les assurances qui seront optionnelles et sur les frais d'administration, etc.

Nous recommandons que le gouvernement fasse une contre-offensive publicitaire pour informer adéquatement la population sur le régime, sur les démarches à effectuer, sur le rôle et sur les obligations des assureurs privés, sur les attitudes préventives à adopter face à l'offensive des assureurs.

Pour ce qui est du financement, un petit mot. Pour mieux répartir les coûts du régime entre les différentes composantes de la société et réussir ainsi à maintenir la contribution des citoyens à un niveau acceptable, diverses voies devront être explorées pour financer les coûts du régime assumés par l'État. Nous tenons à souligner ici qu'il serait important que les montants épargnés en médicaments par les hôpitaux grâce au virage ambulatoire soient systématiquement réinjectés dans le régime d'assurance-médicaments. De plus, pour éviter le désengagement des employeurs qui contribuent déjà à une assurance pour leurs employés et pour assurer une répartition équitable dans le financement de ce régime, les employeurs qui ne contribuent à aucun régime d'assurance pour leurs employés devraient être tenus de verser une contribution à l'État.

Le contrôle des coûts et de la consommation des médicaments. Pour éviter une augmentation des coûts des médicaments, qui, à long terme, pourrait mettre en péril un tel régime, il ne suffit pas de mettre à contribution les consommateurs. Les médicaments ne sont pas un bien de consommation ordinaire, puisque la dépense liée à cet item est, la plupart du temps, hors de leur contrôle. On ne peut s'en remettre aux seuls consommateurs pour décider du bien-fondé de la prescription parce qu'ils ne possèdent pas l'information adéquate. De plus, une étude américaine a démontré que, chez la population à bas revenus, un copaiement, même modeste, peut réduire aussi bien l'usage d'agents essentiels que de produits moins essentiels, risquant de provoquer à moyen terme une détérioration de la santé de ces personnes et donc une augmentation des coûts des soins de santé. Donc, parallèlement à l'instauration d'un régime universel d'assurance-médicaments assumé en grande partie par les citoyens, il est donc important de mettre à contribution les autres acteurs concernés, les médecins, les pharmaciens, les industries pharmaceutiques.

(12 h 10)

Selon le rapport Castonguay, la croissance annuelle moyenne des dépenses en médicaments per capita a été, entre 1984 et 1993, de 11,8 % au Québec, comme dans l'ensemble du Canada. Étant donné cette croissance exponentielle, le gouvernement, s'il veut véritablement contrôler le coût et la consommation de médicaments, devra instaurer des mesures énergiques. Or, sur ce sujet, le projet de loi est très timide. Il se contente de renforcer les organismes de contrôle déjà existants et d'inciter à une plus grande formation et information des prescripteurs par l'instauration d'un Comité de revue d'utilisation des médicaments, tout en manifestant l'intention d'instaurer une politique globale des médicaments. L'absence, par exemple, de mesures concrètes favorisant l'utilisation accrue des médicaments génériques de même que d'une politique d'encadrement de la pratique médicale nous questionne sur la volonté politique du gouvernement d'intervenir vigoureusement dans ce domaine.

Par ailleurs, selon le rapport Castonguay, les prix des nouveaux médicaments sont très élevés et constituent un facteur significatif dans l'augmentation du coût de l'ensemble des médicaments. De plus, les compagnies pharmaceutiques dépensent deux fois plus en publicité qu'en recherche. Un contrôle de la commercialisation des produits pharmaceutiques s'impose. Or, comme ces deux secteurs relèvent du gouvernement fédéral, ça nous questionne également sur la capacité du Québec de développer une politique globale cohérente et efficace visant à contrôler le coût et la consommation des médicaments.

Il y a deux propositions concernant la liste des médicaments assurés. D'abord, pour contrer les effets pervers du virage ambulatoire, nous croyons nécessaire d'inclure dans la liste des médicaments assurés les fournitures médicales et pharmaceutiques requises qui auraient été fournies par l'hôpital si le séjour avait été prolongé. De même, les fournitures et accessoires présentement fournis aux personnes handicapées par le biais de divers programmes spécifiques devraient continuer de l'être. Enfin, nous recommandons qu'aucun médicament reconnu pour son efficacité ne puisse être exclu ou non admis sur la liste sous le seul prétexte de son coût trop élevé.

Le comité Castonguay proposait dans son rapport la création d'un groupe de concertation composé de divers intervenants du milieu pour faciliter la coordination entre les différents conseils et comités impliqués dans la gestion du régime. Nous reprenons cette idée, mais nous proposons que ce comité inclue également des représentants de la population. Son mandat devrait comprendre la supervision de la mise en place du régime et de l'application des mesures proposées. Il devrait enfin avoir le pouvoir de faire des recommandations pour en améliorer le fonctionnement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Rochon: Merci beaucoup, M. le Président. Je vous remercie très sincèrement. Vous avez un excellent mémoire, avec beaucoup d'éléments qui vont nous permettre de réanalyser et de valider l'ensemble du système qui est proposé.

Vous me permettrez peut-être, à titre d'échange d'informations, de proposer certaines précisions auxquelles vous pourrez réagir. Bon. Il y a des choses avec lesquelles on est entièrement d'accord, là, même si ce ne sont pas des choses qu'on a jugé qui devaient se retrouver dans le projet de loi comme tel, mais qui vont être intégrées nécessairement dans l'ensemble de la politique du médicament. Parce que, pour qu'un régime comme ça fonctionne, avec les outils qui sont donnés pour contrôler et la distribution efficace et adéquate du médicament et les coûts, avec le rôle élargi du Conseil consultatif de pharmacologie, le rôle que prend la Régie de l'assurance-maladie, le Comité de revue de l'utilisation des médicaments, au-delà de ça, dans une politique où le ministère aura une responsabilité plus directe, on va devoir sûrement donner suite aux recommandations du rapport du groupe de M. Castonguay, singulièrement au titre que vous avez donné comme exemple, de la publicité, d'information à l'ensemble des citoyens de même qu'aux distributeurs pour que, vraiment, les gens puissent s'approprier ce régime et assumer leurs responsabilités à tous les niveaux. Aussi, en ce qui regarde le groupe de concertation, au niveau de la gestion, ça pourra peut-être prendre une formule différente, mais le ministère, se donnant et gérant une politique du médicament, devra avoir une table, un groupe ou un lieu de concertation où, nécessairement, il faudra que les représentants de la population, des consommateurs soient représentés et aient un mot important à dire au niveau même des politiques.

Maintenant, pour notre échange. Évidemment, tout système ne peut pas être parfait. Un système comme celui-là pourrait peut-être... Et on peut voir comment on peut le rendre encore plus progressif. Mais quand vous dites qu'avec le jeu de la prime et du plafond on a un système qui est régressif, est-ce qu'il n'y a pas des éléments qui en font... encore, il pourrait être plus progressif, mais c'est plutôt un régime progressif que vraiment régressif. D'abord, la prime, les gens qui sont en deçà d'un certain revenu en sont exemptés complètement; au-dessus d'un certain revenu, il y a un créneau où, la prime, elle est appliquée graduellement. Là, on propose par tranches de 40 $ par 1 000 $ de revenus additionnels entre un plancher et un plafond. Et, au-delà d'un certain niveau, évidemment, tout le monde paie la même prime et tout le monde a le même plafond. Les plafonds aussi sont ajustés en fonction des revenus et des clientèles. Ça, ça suit une de vos recommandations. Au-delà du revenu maximum où le régime même ne fait pas l'ajustement progressif, il faut reconnaître que, même en partageant autrement les coûts, le gouvernement, le régime public va assumer encore, par les taxes des citoyens, à peu près 800 000 000 $ par année du coût total qui est de 2 200 000 000 $. Donc, plus que le tiers du coût total du système va continuer à être assumé par le gouvernement. Et, ça, les gens qui sont dans des revenus supérieurs y contribuent directement par leurs taxes, à maintenir cette contribution du gouvernement. Il y a donc des éléments qui veulent faire le régime progressif avant et après un certain créneau. Et, ça, j'aimerais voir si vous pensez, voir jusqu'où, comment, à moins de changer le système complètement, on pourrait l'étirer.

Là, ça me ramène à mon deuxième point, et je vais arrêter là-dessus pour le moment. Les créneaux qu'on a retenus. Le rapport du comité Castonguay, effectivement, avait proposé un créneau de 15 000 $ à 25 000 $, qui était pour le ménage, dans le rapport. Dans les travaux qui ont dû être faits, le comité, d'ailleurs, de M. Castonguay nous proposait de continuer à valider un certain nombre de choses, de refaire des simulations, parce que le comité a travaillé dans un temps excessivement court, à peu près quatre à cinq mois pour faire ce travail-là, et les travaux ont continué avec le ministère. Et quand on regarde l'échelle qui est proposée, qui a été amenée à être beaucoup plus détaillée... L'éventail, on ne parle pas d'un seul créneau de 15 000 $ à 25 000 $; vous avez vu, pour un individu... On suit, en fait, comme vous l'avez dit, ce qui est de la structure de l'impôt Québec, mais on a majoré, parce que, pour un individu, si mon information est correcte, le créneau le plus bas de taux d'imposition est à 8 000 $; nous, on est partis à 10 400 $ pour majorer un peu. Mais, dès qu'on arrive à un ménage à deux adultes ou un adulte et un enfant, le niveau de départ est même plus, c'est à 16 900 $; il est même plus élevé que le 15 000 $. Et si c'est vrai que, pour l'individu seul, on va de 10 400 $ à 14 800 $, pour la famille complète de deux adultes et deux enfants, on va au-delà du 25 000 $, on se rend jusqu'à 30 700 $. Je veux juste rappeler ça, parce que c'est la même idée, c'est le même concept, mais qui a dû être développé un peu plus, et sur un éventail qui va de l'adulte seul, l'adulte avec un enfant, un adulte, deux enfants, deux adultes, deux adultes et un enfant, deux adultes et deux enfants et plus, qui est la structure de l'impôt bonifiée.

Là, tout l'enjeu est vraiment de voir jusqu'où on peut demander une contribution des gens. Si on prend toute cette échelle et qu'on la monte un peu plus, évidemment, ça fait un régime encore plus généreux et ça l'améliore de ce point de vue là. Par contre, la participation via la taxation et les fonds publics nous amène à faire une économie moins grande qui va devoir être répercutée ailleurs dans le domaine de la santé, comme économie. Alors, il y a ce jeu-là à garder.

En terminant, je vais juste apporter une précision. Dans la page 10 de votre mémoire, vous faites référence, et on a eu ça avec ceux qui vous ont précédées, à une statistique du rapport de M. Castonguay. Quand on parle du taux d'augmentation du médicament, c'est vrai, c'est une des denrées qui a le plus augmenté, mais il faut toujours se rappeler que, les chiffres qui sont donnés dans le rapport de M. Castonguay, ça réfère au régime public, comme augmentation, et non pas au coût de l'ensemble du médicament, qui a augmenté, mais pas dans des proportions aussi grandes que ça. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Allez-y.

Mme Blain (Louise): Bon, premièrement, on n'a pas dit que c'était un régime régressif, on a dit qu'un système de primes qui est le même appliqué à tout le monde, c'est un régime régressif, sauf que, là, effectivement, vous avez établi des échelles qui le rendent un peu plus progressif. Sauf que, ce qu'on dit, c'est que ce n'est pas encore assez progressif, parce que, en bas de 15 000 $, les gens sont très pauvres et, pour un individu, payer la prime et payer peut-être jusqu'à 750 $ de plafond plus la franchise au complet, c'est beaucoup trop pour une personne qui gagne, disons, 10 500 $. C'est des budgets d'extrême pauvreté. Ce qu'on reproche aussi, c'est que, bon, quelqu'un peut avoir pratiquement le même revenu que quelqu'un qui est sur l'aide sociale et, lui, il va avoir un plafond de 750 $, alors que l'autre a un plafond de 300 $. Alors, nous, ce qu'on propose, c'est plutôt d'y aller avec une progressivité dans les plafonds, c'est-à-dire que, pour une même catégorie de revenus, le plafond soit de 300 $, pour une autre catégorie, qu'il soit de 500 $, une autre catégorie, de 750 $, et non pas y aller... Quelqu'un qui gagne 7 000 $ par année, pourquoi son plafond serait de 750 $?

M. Rochon: Bon, c'est ça...

Mme Blain (Louise): Il n'y a pas de progressivité à ce niveau-là, et c'est des revenus d'extrême pauvreté. Les gens ne seront pas capables de payer, finalement. Même s'il ne se rend pas à son 750 $, on le sait, mais...

(12 h 20)

M. Rochon: Non, non, je vous comprends, mais juste une précision. D'abord, c'est un problème de gestion. De mettre un plafond qui suit le revenu par tranches de 1 000 $, par exemple, comme on ne sait pas d'avance combien les gens gagnent, ce n'est pas gérable en termes de gestion des systèmes en temps réel. Ce que le système, le régime veut essayer de faire pour que vous puissiez... Je ne sais pas si vous avez remarqué cet aspect-là, c'est que, même si on veut ramener le revenu et ne pas faire de différence entre les gens par classes sociales, pour les plafonds, comme on ne peut pas y aller par le revenu pour pouvoir gérer le système, tous ceux qui sont présentement des prestataires de l'aide sociale n'auront aucune prime à payer et un plafond à 300 $, de même que pour les personnes âgées qui ont le supplément maximum du revenu garanti. Pour les personnes âgées qui ont le supplément partiel de revenu garanti, qui est un groupe de revenus, il y a un plafond à 500 $, et là les autres ont un plafond à 750 $.

D'autre part, il faut bien remarquer qu'il y a beaucoup de personnes actuellement qui dépenseraient 750 $; pour beaucoup de ces gens-là, dans le régime actuel, 750 $ de plafond, ça veut dire 2 700 $ de factures de médicaments. Il y a beaucoup de ces gens-là, s'ils ont ce problème-là actuellement, qui n'ont aucune couverture. Là, au lieu de payer 2 700 $, ils paieraient 750 $.

Mme Blain (Louise): Oui, mais le régime est là pour rendre ça plus équitable. Alors...

M. Rochon: Encore plus.

Mme Blain (Louise): C'est sûr qu'au lieu de payer 2 700 $, c'est mieux de payer 750 $, sauf que, si on veut vraiment qu'il y ait une équité entre tout le monde, on pense qu'il y en a qui ne sont même pas capables de payer 40 $ par mois parce que, une fois le loyer payé, il n'en reste presque plus pour manger. Alors, c'est le choix entre le médicament ou manger. C'est des choix comme ça. Puis ce qui vient s'ajouter à ça et dont on a parlé là-dedans, c'est la question de la pénalité puis la compensation. Les gens qui devront payer. Quelqu'un qui gagne, avec ces plafonds-là, 10 400 $ puis qui a une prime à payer, je ne sais pas, moi, une prime familiale à payer de 300 $ ou 400 $ – parce qu'on ne sait pas à combien va se chiffrer une prime familiale – il ne sera pas capable de la débourser, sa prime de 300 $ à 400 $, avant d'être remboursé l'année suivante, en plus, peut-être, d'être obligé de payer une franchise et peut-être d'être obligé de payer des médicaments. Puis, en plus, s'il saute un mois, si son chèque ne passe pas, un mois, il va avoir une pénalité. Ou comment ça va fonctionner? Ça nous inquiète, ce niveau-là, parce que, souvent, les gens n'ont même pas la liquidité pour payer la franchise. C'est pour ça qu'on demande des exemptions de franchise pour les plus faibles revenus. Alors, c'est à ce niveau-là que ça nous inquiète, au niveau de la progressivité puis de l'équité, là, entre les différents groupes.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Complément de réponse? Non. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci, M. le Président. Et à mon tour de vous remercier bien sincèrement pour la qualité du mémoire que vous nous présentez ce matin. Je pense que vous avez sûrement travaillé beaucoup, et vous nous faites des recommandations extrêmement pertinentes et surtout bien investiguées.

Je vais vous faire un premier commentaire sur votre proposition 15, où vous dites que vous recommandez qu'«aucun médicament reconnu pour son efficacité ne puisse être exclu ou non admis sur la liste sous le seul prétexte de son coût trop élevé». Eh bien, depuis que nous entendons des groupes, nous suggérons toujours aux gens, et c'est votre suggestion, s'ils sont d'accord pour qu'on puisse introduire dans le projet de loi, au moment où le CCP, le Conseil consultatif de pharmacologie, doit dresser la liste des médicaments qui vont être assurés, eh bien, qu'on introduise les mots nécessaires... je n'ai pas le libellé, mais qu'on introduise que le critère coût ne devrait pas être retenu et qu'au contraire les critères qui sont basés sur la recherche scientifique à propos d'un médicament, l'efficacité du médicament et aussi la reconnaissance qui est faite seraient les critères qui seraient davantage retenus. Alors, nous recevons très bien l'ensemble de vos propositions, et particulièrement votre proposition 15, qui va dans le même sens que nous avons dit.

Je voudrais aussi vous poser une seule question. Je vais laisser la parole ensuite à mon collègue, le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui est le porte-parole officiel de l'opposition en matière de protection du consommateur. Mais vous avez quand même dit, à la page 5, et ça sera très rapide... vous parlez de pénaliser la pauvreté. Alors, nous comprenons, là, que, pour l'ensemble des contribuables, bien: un, il faut payer une prime; deux, une franchise; trois, une coassurance; quatre, des frais administratifs dans certains cas; cinq, possiblement une TPS; six, une TVQ. Et, en plus, si vous ne payez pas, bien, vous avez une pénalité en vertu de la loi de l'impôt. Vous savez donc que la loi de la santé amende la loi de l'impôt; c'est assez nouveau dans l'évolution. Et, vous, vous dites: «Ajouter à cela une pénalité en cas de non-paiement, cela revient carrément à pénaliser la pauvreté.» J'aimerais vous entendre sur ce sujet.

Mme Émond (Monique): Bien, en fait, je pense que ça dit ce que ça dit, c'est-à-dire que les gens qui ne réussissent pas à payer mensuellement, par exemple, leur prime, souvent, ce n'est pas nécessairement par négligence ou parce qu'ils ont oublié qu'il y avait un chèque qui passait, c'est souvent parce qu'ils n'ont pas les moyens de le faire. Ça fait qu'on dit: Si on rajoute en plus la pénalité équivalente, si on veut, à la prime, ça veux dire que tu doubles, là. Il y a quelque chose qui ne marche pas dans le système. C'est que ces gens-là, s'ils ne sont pas capables de payer la prime de base, ils ne sont pas plus capables de payer une amende. Alors, ça, nous autres, on considère que c'est un problème important dont il faut tenir compte.

M. Marsan: Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, et suivie du député de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Loiselle: Oui, merci. Moi, je dois dire que je suis très, très heureuse de vous entendre ce matin parce que je partage – et, ça, c'est en tant que citoyenne, là – les mêmes préoccupations que vous dans certaines orientations du projet de loi sur l'assurance-médicaments. Quand vous avez dit, tantôt, que le projet de loi, finalement, l'assurance-médicaments se veut comme un régime équitable, il y a certaines orientations qui vont faire que ce régime qui se veut équitable va appauvrir une bonne couche de notre société qui, déjà, vit sous le seuil de la pauvreté. Vous allez les appauvrir davantage. Puis, moi, ça, c'est ma grande préoccupation. Puis je ne parle pas seulement des personnes de la sécurité du revenu, je parle aussi de certaines personnes aînées. Dans mon comté, moi, la plupart des personnes âgées vivent sous le seuil de la pauvreté. Alors, de leur demander une contribution financière, si minime soit elle, ça va les appauvrir davantage.

Et, moi, j'ai des gens qui me disaient en fin de semaine qu'en quelque part ils vont soit se priver de leurs médicaments soit en prendre moins que ce qu'ils sont supposés prendre comme médication durant une journée. Et ils vont détériorer davantage leur état de santé et on va les retrouver dans des centres hospitaliers. La Coalition Solidarité Santé, il y a une dizaine de jours, me disait qu'au niveau des assistés sociaux c'est exactement ça qui va arriver: les gens vont soit se priver dans la nourriture, vont être obligés de couper dans l'épicerie ou ne prendront pas leurs médicaments. Puis la même chose va arriver: on va retrouver ces gens-là dans des centres hospitaliers.

Moi, j'aimerais, étant donné que vous êtes ici aujourd'hui puis que, souvent, j'ai l'impression que je suis à prêcher seule dans le désert les effets pervers de ces orientations-là...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Toute seule...

Mme Loiselle: ...au niveau...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...je ne suis pas d'accord.

Mme Loiselle: Non, mais au niveau des assistés sociaux. Je parle au niveau de mes collègues de l'autre côté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Même là, je ne suis pas d'accord non plus.

Mme Loiselle: J'aimerais vous entendre davantage, parce que vous avez la chance aujourd'hui de le dire directement au ministre. Qu'est-ce qui va arriver pour les personnes qui sont pauvres, pour les personnes, déjà, qui sont sous le seuil de la pauvreté, pour les personnes âgées qui vivent avec des petites pensions? Qu'est-ce qui va arriver si on ne modifie pas l'assurance-médicaments aujourd'hui pour ces gens-là?

Mme Émond (Monique): Bien, ce qui va arriver, c'est ce qui arrive là. Il faut voir que ça arrive aujourd'hui, là. Je veux dire, les personnes qui sont sous le seuil de la pauvreté aujourd'hui font des choix, des fois, assez cruels, je dois vous avouer. Et on en reçoit partout dans nos bureaux. Donc, on le voit, où sont les coupures. Souvent, on disait, et on dit encore: Les gens, le seul endroit où ils peuvent jouer, souvent, c'est sur l'alimentation, par exemple, parce que ce n'est pas quelque chose de fixe. Tu ne peux pas jouer sur le loyer, négocier avec ton propriétaire un mois puis dire: Ça te «déranges-tu» si on... Donc, le seul endroit où ils jouent, c'est souvent sur l'alimentation. Et là, si on ajoute encore des montants supplémentaires sans augmenter les revenus en conséquence, le choix, des fois, va être encore plus cruel, à mon avis. C'est: Est-ce que je choisis effectivement un médicament ou je coupe encore dans l'alimentation?

C'est pour ça que, nous autres, ce qu'on offre, dans le fond, au ministre, c'est de peut-être repenser tous les paramètres de ça puis de voir à tenir compte d'une clientèle qui est vraiment très défavorisée dans notre société. C'est-à-dire que, nous, on part de 15 000 $ et moins. On a fait des budgets, on a viré ça à l'envers avec tous les dossiers qu'on avait. On a sorti des budgets de ce type-là, puis ça n'a pas de sens, ça ne passe pas. Donc, il faut vraiment, à mon avis, repenser et rehausser certains seuils et étirer encore un peu plus, je pense, pour tenir compte de la réalité financière des gens, la réalité économique.

Mme Loiselle: Le fait que le gouvernement, il y a quelques mois, s'est désengagé, là – je reviens toujours aux familles monoparentales puis à tous les bénéficiaires, finalement, de l'aide sociale – dans les soins dentaires, les services optométriques, puis la nouvelle loi n° 115 qui a dit que, maintenant, si tu vas faire pour la première fois une demande ou une nouvelle demande pour recevoir de l'aide sociale, tu dois vider complètement ton compte de banque à zéro. Étant donné que les gens vont arriver à l'aide sociale avec zéro en banque à cause de ce nouvel article-là de la loi n° 115, est-ce que c'est un peu comme dérisoire de leur dire: Videz votre compte de banque à zéro, mais, maintenant, en plus, on va vous demander une contribution financière pour votre assurance-médicaments. Je veux juste vous entendre. Est-ce que, pour vous, si on n'augmente pas les barèmes des assistés sociaux, les prestations d'aide sociale, il y a vraiment un danger au niveau de ces personnes-là?

(12 h 30)

Mme Émond (Monique): Bien, en tout cas, ce ne sera pas M. Rochon qui va nous entendre, mais certainement Mme Harel, lors de la proposition du changement au niveau de l'aide sociale, parce que, nous, on se prépare aussi à intervenir sur la nécessité d'augmenter les barèmes d'aide sociale. Sinon, tu sais, il y a des affaires qui ne passent plus dans la vie. Là, ça commence à ne plus passer.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je fais juste remarquer que ce sont les mêmes personnes, ici, qui vont vous entendre.

Mme Émond (Monique): Ah! bien, c'est merveilleux. Alors, on vous annonce notre prochain mémoire sur la réforme de l'aide sociale, en tenant compte de cette réalité dont vous parlez.

Mme Loiselle: Oui, mais le danger est peut-être que le projet de loi du ministre sera déjà adopté. C'est ça, le danger.

Mme Émond (Monique): C'est ça.

Mme Loiselle: Si on ne sonne pas tout de suite l'alarme, même si on arrive à la réforme de l'aide sociale, le projet de loi sur l'assurance-médicaments va être en vigueur ou adopté.

Mme Émond (Monique): Oui, oui.

Mme Blain (Louise): Mais c'est pour ça aussi qu'on propose qu'en bas de 15 000 $ les personnes n'aient aucune contribution à payer, parce que 15 000 $ et moins pour vivre, c'est vraiment le minimum. Mais on est conscientes que les propositions qu'on fait, c'est difficile à gérer, sauf qu'on se disait – on rêve peut-être en couleur, c'est sûr – mais que, par un régime public, ce serait beaucoup plus facile d'y aller par le biais de l'impôt, et, à ce moment-là, l'assurance-médicaments serait un régime plus progressif qui tiendrait davantage compte de...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. À mon tour de souhaiter la bienvenue aux représentantes de la Fédération des ACEF, Mme Blain, Mme Émond. Les ACEF sont des interlocuteurs très crédibles depuis longue date dans le domaine de la budgétisation, des finances familiales. Je sais qu'au moins une ministre du gouvernement actuel a fait ses classes avec les ACEF et j'imagine que Dr Rochon, le ministre de la Santé, pourrait en parler à la ministre de l'Éducation pour en savoir un peu plus, au besoin.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est aussi un endroit pour passer des messages. Ha, ha, ha!

M. Copeman: Il y a également, évidemment, le ministre délégué aux Relations avec les citoyens qui vous décrit, à chaque fois qu'il vous voit, comme des partenaires essentiels pour lui, ministre responsable de la protection du consommateur. Alors, on souhaiterait, globalement, je pense, que les recommandations que vous faites lors de votre mémoire trouvent écho auprès du gouvernement en général et du ministre de la Santé et des Services sociaux en particulier en ce qui concerne le projet de loi n° 33.

Vous avez fait un assez grand nombre de critiques. Celle avec laquelle j'aimerais commencer, c'est celle de la contribution des citoyens au régime. Il est très clair que vous prêchez pour des contributions moins substantielles, au niveau de la prime, de la franchise, de la coassurance et du plafond, pour divers niveaux de revenus. Vous savez sans doute que le régime actuel, s'il est adopté tel quel, va avoir un effet de faire épargner au gouvernement du Québec 300 000 000 $, en ce qui concerne la contribution que le gouvernement du Québec fait maintenant au programme d'assurance-médicaments – on parle de seulement la première année, 1996-1997 – une réduction de 300 000 000 $ pour le gouvernement du Québec dans les dépenses reliées aux médicaments, et ça, pour une période de temps qu'on ne sait pas, parce que le projet de loi n'est pas en vigueur. Il sera peut-être en vigueur le 1er janvier, alors on parle de 300 000 000 $, peut-être sur quatre ans, qui peut représenter, pour l'année financière prochaine, une somme importante dont le gouvernement du Québec se désengage au niveau de l'assurance-médicaments.

Est-ce que vous seriez plus à l'aise avec un projet d'assurance-médicaments universel qui serait, je dirais, en anglais, «revenue neutral», qui n'engendrerait pas un désengagement du gouvernement du Québec en matière de programme d'assurance-médicaments?

Mme Blain (Louise): Bien, c'est sûr, on demande un régime public, nous. On demande que ce soit la RAMQ qui assure l'ensemble des personnes et, au minimum, qui assure ceux qui veulent être assurés par... Ceux qui ne veulent pas aller dans le privé, ça, c'est le minimum, qu'ils aient au moins le choix de s'assurer à la RAMQ. Mais, si c'était possible que ce soit... Parce que, pour nous... De toute façon, au départ, en 1970, il y avait le projet d'inclure les médicaments dans le programme d'assurance-santé, et on pense que tout ça fait partie d'une politique intégrée de santé, puis les médicaments constituent un élément très important dans cette politique-là, et que toute cette politique-là devrait être gérée et contrôlée par l'État.

M. Copeman: Mais est-ce que vous le demandez au même niveau de financement qu'on voit actuellement ou est-ce que vous acceptez que le gouvernement du Québec se retire? On parle, cette année, de 300 000 000 $ dans le financement des médicaments et peut-être, l'année prochaine, d'une somme supérieure, si on doit comprendre que le régime serait en marche pour les 12 mois de l'année. Est-ce que vous acceptez que le gouvernement du Québec se retire financièrement de 300 000 000 $ cette année et de plus l'année prochaine ou est-ce que vous souhaitez que le gouvernement du Québec, par le biais de son programme d'assurance-médicaments, maintienne le niveau de financement des médicaments au Québec tel qu'il est présentement?

Mme Blain (Louise): Bien, pour nous autres, s'il ne coupait pas, c'est sûr que les primes seraient moins élevées, on pourrait exempter plus de personnes. C'est sûr. On pense aussi qu'on pourrait aller chercher de l'argent ailleurs, comme on le propose, chez les employeurs, parce que le danger qu'il y a, c'est que les employeurs qui contribuent présentement se désengagent en disant: Bon, bien, maintenant, il y a un régime universel; on rouvre les conventions collectives. Ou, s'il n'y a pas de convention collective: On se désengage, point final. Alors, pour éviter ça, mettre à contribution même les employeurs qui ne participent pas présentement. Donc, il y a des moyens d'aller chercher des revenus là où il y en a, là où il y a de l'argent aussi, mais c'est bien sûr que, s'il n'y avait pas de coupures budgétaires, ça favoriserait un régime encore plus accessible.

M. Copeman: O.K. Une dernière, M. le Président, si vous me permettez. À part les critiques très pertinentes que vous faites au niveau de la contribution des citoyens au régime, la gestion d'un régime public versus mixte – et vous vous êtes prononcées pour un régime public – vous avez fait référence, dans votre mémoire, à l'absence de mesures de contrôle sur les prix, ce que je trouve très pertinent également, parce que, si les prix des médicaments augmentent de façon importante, et les primes probablement, les déductibles, la franchise, la coassurance et peut-être la contribution du gouvernement du Québec vont augmenter, et vous avez fait référence également à l'exclusion des médicaments à cause de leur coût.

Une question qui n'est pas une question-piège, mais une question difficile, j'avoue: En vous prononçant en faveur d'un régime public universel comme vous avez fait, si vous étiez appelées à voter sur le projet de loi n° 33 tel quel, êtes-vous capables de l'appuyer tel quel, avec tout ce qu'on connaît actuellement?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ce n'est pas une question piège, là, vous avez dit.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Émond (Monique): Peut-être qu'on pourrait se donner une semaine pour répondre à cette question.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: Prenez le temps que vous voulez, madame.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ha, ha, ha!

Mme Émond (Monique): C'est parce que je ne l'ai pas bien saisie.

M. Copeman: J'essaie de comprendre.

Mme Émond (Monique): Je n'ai pas saisi. Oui, allez-y.

M. Copeman: J'essaie de comprendre. Si les inconvénients que vous voyez...

Mme Émond (Monique): C'est un critique de l'opposition, ça, hein?

M. Copeman: ...puis vous avez – oui, tout à fait – beaucoup d'inconvénients, et je pense que vous allez vous entendre avec moi, est-ce que les inconvénients qui sont dans le projet de loi actuel sont plus importants? Est-ce que les effets négatifs sont plus importants que l'effet positif qui pourrait découler du projet de loi?

Mme Blain (Louise): Bien, je pense qu'il nous manque un petit peu d'éléments, entre autres en ce qui concerne les primes. On nous dit que ça va être à peu près de 176 $ pour une personne, mais on ne connaît pas ce que ça peut donner pour un couple, pour une famille. Alors, on manque d'éléments, mais...

Mme Émond (Monique): Bien, les frais qui s'ajoutent, aussi, qu'on ne sait pas...

Mme Blain (Louise): C'est ça, il y a...

Mme Émond (Monique): Les frais d'administration, il y en a qui parlent de 15 %. J'ai entendu 40 % à un moment donné, ça fait qu'on ne sait pas ce que ça signifie. Taxables, pas taxables? Ça fait que, à un moment donné, il nous manque comme des éléments aussi...

M. Copeman: O.K.

Mme Émond (Monique): ...pour avoir les chiffres réels de ce dont on parle.

M. Copeman: Oui.

Mme Blain (Louise): Sauf qu'on est d'accord avec une assurance-médicaments, puis ça fait longtemps qu'on veut qu'il y ait une assurance-médicaments, parce qu'on le sait, que le 15 % d'un assuré, pour ceux qui sont malades, évidemment, ça leur coûte beaucoup plus cher que ce que peut-être le régime va leur coûter.

M. Copeman: Oui.

Mme Blain (Louise): C'est avantageux pour les personnes qui présentement sont malades et qui n'ont aucune assurance. Donc, c'est important, à moyen terme, d'offrir une assurance, même à court terme – ha, ha, ha! – mais sans que ce soit précipité comme geste, et qu'on prenne le temps de réfléchir à tout ça. Sauf que, le projet de loi, il ne comprend pas nécessairement les paramètres, et on peut jouer sur les paramètres beaucoup, ça fait que... En tout cas. Les principes du projet de loi, en gros, sauf ce qui concerne l'assurance privée, le recours aux assureurs privés, ça peut aller. C'est les paramètres avec lesquels on est obligés de jouer qui... Puis la question des pénalités, bon, c'est ce qui nous fait un petit peu peur.

(12 h 40)

M. Copeman: Oui. Un petit commentaire: C'est le dilemme, entre autres, auquel on fait face, nous, députés de ce côté de la table. Nous sommes en faveur, en principe, d'un régime d'assurance-médicaments universel; il s'agit de savoir si on est en faveur de ce projet qui est devant nous. C'est ça, le dilemme qu'on a et c'est ça, en partie... On espère que ces auditions vont nous éclairer là-dessus.

Mme Émond (Monique): Nous aussi.

M. Copeman: Merci.

Une voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions? S'il n'y a pas d'autres questions, M. le député, vous voulez conclure?

M. Marsan: Oui. D'abord, de nouveau vous remercier pour la qualité de votre présentation et aussi la qualité des échanges que nous avons eus avec vous. Tantôt, j'ai omis de vous présenter ma collègue, la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, qui est aussi notre porte-parole en matière de sécurité du revenu. Vous l'avez bien compris, je pense, par la qualité des interventions qu'elle a faites.

Nous, nous vous rejoignons très rapidement quand vous dites que tous les paramètres ne sont pas connus dans le projet de loi. Je pense que ce serait important qu'on sache exactement ce sur quoi nous allons voter, qu'on connaisse les primes, qu'on connaisse les barèmes d'application. Nous, on les a reçus, je vais vous dire, c'est par un communiqué de presse qu'on a appris les minimums, les maximums, ce que pourraient être les véritables barèmes d'application. Je pense que ce serait important qu'on puisse les savoir au moment où nous aurons à prendre une décision aussi importante. En plus des considérants pour le projet de loi, je pense que vous nous avez entrouvert une porte, aussi, sur les difficultés des personnes qui souffrent de pauvreté. Je pense que c'est très apprécié aussi, ces commentaires que vous nous faites.

Et, enfin, le critère coût qui ne doit pas être retenu dans les médicaments, bien, c'est un autre point sur lequel nous allons, nous, défendre le projet de loi article par article. Nous avons l'intention d'intervenir et nous aurons tout près le mémoire que vous nous avez présenté ce matin. Alors, encore une fois, nous souhaitons que ce projet de loi, comme vous l'avez indiqué, puisse être étudié, qu'on prenne le temps de le faire comme il faut. Nous avons des inquiétudes actuellement, nous souhaitons qu'on puisse prendre le temps de le faire comme il faut, qu'on puisse intégrer les éléments extrêmement importants et intéressants que vous nous avez mentionnés. Alors, merci beaucoup pour la qualité de votre présentation.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le ministre, pour la conclusion.

M. Rochon: Merci, M. le Président. Moi, je vous remercie aussi. Je comprends très bien votre message qui, je pense, nous dit: O.K. pour un régime d'assurance-médicaments, mais assurons-nous de le bonifier le plus possible avant de l'adopter. Vous nous dites: Ça devrait être un régime public. Là-dessus, je vous le dis tout de suite, parce que c'est depuis deux ans qu'on travaille là-dessus, hein, l'idée a été lancée de regarder la faisabilité d'un programme de ce genre-là même avant que le gouvernement actuel soit élu, et on a repris la balle au bond du comité Demers qui avait dit: On ne s'en sort pas si on n'a pas un régime de ce genre-là. Donc, depuis deux ans, par étapes, on a pensé à ça, alors ce n'est pas improvisé d'hier matin.

Dans une situation comme celle où on est, il y a déjà 4 500 000 personnes sur 7 000 000 qui ont une assurance dans des régimes privés collectifs où l'employeur participe. Pour les gens qui sont assurés, les employeurs participent déjà. On a vraiment la situation très concrète que, si on transférait ça dans un régime public intégralement, c'est tout cet argent-là qui serait déjà investi par des gens employeurs et employés dans des régimes collectifs et qu'il faudrait faire recirculer par une taxe – vraiment une taxe, à ce moment-là – pour le réinvestir pour financer le régime. Et il y a une bonne partie de l'effort qui serait faite et qui ne serait que remplacée par des modalités différentes, ce qui existe déjà comme situation pour 4 500 000 personnes. Alors, ça, je le rappelle parce que c'est une réalité qui est différente de ce qu'était la réalité quand on a fait le programme d'assurance-santé, par exemple, où il y avait des régimes privés d'assurance-santé, mais qui étaient marginaux. Ce que ça offrait, ce n'était pas du tout de la même ampleur. C'est pour ça qu'il nous a semblé qu'on est plus dans une situation qui se se prête vraiment à un partenariat d'une gestion et du privé et du public, mais qui gère ensemble un même système qui est donné dans une loi, qui est balisé dans des règlements. Ça, c'est le deuxième commentaire que je voulais faire en complément pour qu'on se comprenne bien là-dessus.

L'essentiel du contrôle du programme sur le médicament – l'assurance – va être assuré par la loi et par les règlements. La prime, la loi prévoit qu'elle est fixée par le gouvernement, et la prime pour le régime public et l'ensemble de la prime, et même les paramètres généraux pour les assurances de ceux qui devront s'assurer dans le privé – ceux qui ne sont pas assurés actuellement et qui ont besoin d'une prime individuelle – ça va être contrôlé, ça aussi, par le gouvernement qui va déjà établir le jeu de la concurrence pour que les collectifs s'ajustent par rapport à ça. Il n'y a donc pas... et ça, je sais que c'est une question importante. Il faut qu'on soit sûrs que les paramètres contrôlent bien le système de sorte que juste le mécanisme et la pression de l'indexation ne fassent pas déraper. Mais là on pourra le voir en détail. Mais ça, ça a été vu par le comité Castonguay et ça a été intégré dans le système – je pense qu'il faut le voir – en plus de tous les mécanismes: rôle élargi du comité consultatif de pharmacologie, révision de l'utilisation des médicaments. Il y a une série de mécanismes qui sont là pour assurer le contrôle et des coûts et de la consommation de médicaments, pour qu'elle soit plus adéquate, et pour qu'on baisse le coût là-dessus.

On est toujours porté – l'autre remarque que je voudrais qu'on se rappelle pour notre réflexion qui va continuer dans les prochaines semaines – à prendre les exemples les plus extrêmes dans la distribution. C'est évident qu'il y a des gens qui sont dans des situations où le médicament leur coûte très cher, mais il faut se rappeler que la moyenne des gens, dans l'ensemble du Québec, présentement, consomme pour à peu près 200 $ par année. Alors, ce n'est pas la grande majorité des gens qui va se rendre même au plafond.

Pour ceux qui sont prestataires d'aide sociale, on fait disparaître les classes, on sera juste sur une échelle de revenus, mais les gens qui vont se retrouver dans ce nouveau contexte-là, qui sont présentement des prestataires d'aide sociale, ce qu'ils consomment, eux, c'est en moyenne 400 $ par année qui va être réparti: 100 $ qu'ils vont payer, en moyenne, et 300 $ par le régime public. Il y a donc une répartition qui est faite. Pour les personnes âgées, leur moyenne de consommation est de l'ordre de 750 $ à 800 $. Le régime va en assumer les deux tiers, et eux vont payer le tiers. Alors, ça, c'est important de se rappeler ça aussi pour voir à partir d'où on travaille la bonification.

Maintenant, c'est sûr que, pour des gens, en faisant un système où on répartit plus équitablement... Je pense que notre collègue rappelait une situation où il y a effectivement des gens qui sont prestataires d'aide sociale présentement qui ne paient absolument rien pour tout médicament, devant payer jusqu'à un plafond de 300 $ – pas de prime, mais un plafond de 300 $ – et ça va être plus. Même si, en moyenne, ça va leur coûter 100 $ par année puis que le régime va en assurer 400 $, ils vont payer un peu plus. Ce à quoi on est confrontés, puis je pense que vous êtes placées pour nous aider à apprécier ça, c'est que la situation actuelle fait que, si quelqu'un qui était prestataire de l'aide sociale ne paie absolument rien, dès qu'il veut en sortir, pour passer de 6 000 $ de salaire à 8 000 $ ou à 10 000 $, même dans les créneaux qu'on a actuellement, il paie tout d'un coup sec. Et, en général, c'est des gens qui ne sont pas dans un régime collectif, qui, très souvent, ne peuvent pas avoir une prime individuelle qui leur coûterait deux fois, trois fois le montant dont on parle, que le régime actuel va leur payer, et qui souvent ont dans la famille des gens qui ont une condition de santé qui est exclue par les régimes privés, actuellement, ce qui va être impossible dans l'autre système. Donc, effectivement, certaines personnes vont payer un peu plus, mais ce qui va faire que les autres, les petits salariés, vont avoir les mêmes conditions que tout le monde, et eux vont payer beaucoup moins.

Je veux rappeler ça, parce qu'il faut qu'on se mette en condition qu'il y a un contexte de finances publiques important. On peut bonifier ce système-là, puis on va en discuter. Tout ce qu'on bonifie de ce côté-là, par exemple, a un certain coût, et il va falloir le récupérer ailleurs dans le régime de la santé et des services sociaux ou dans le régime de l'éducation ou ailleurs. Il y a un contexte de finances publiques sur lequel je ne reviendrai pas, mais qui nous donne une balise un peu incontournable actuellement. Là, il y a la première règle d'équité, donc, comme partage, et, après ça, une fois qu'on va s'entendre que, oui, c'est équitable ou pas de faire cette récupération-là ou cette économie là-dedans, comment on la répartit également, en se disant bien qu'on a une situation actuelle à laquelle on veut se comparer par rapport à ce que le régime peut améliorer et ce qui sera améliorable encore plus dans l'avenir, je pense qu'il faudra voir un peu jusqu'à quel point le pas qu'on fait est assez important et assez définitif pour être une amélioration nette et nous mettre en position pour pouvoir continuer à améliorer.

Alors, je voulais redonner un peu cette rétroaction pour que cette réflexion continue. Et, même au lendemain de votre comparution ici en commission, s'il y a d'autres idées qui vous arrivent ou d'autres précisions par les dossiers que vous étudiez, on peut continuer à se parler, et vous pouvez nous aider jusqu'à la dernière minute. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup et je suspends les travaux jusqu'à cet après-midi, après la période des questions, soit vers 16 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 49)

(Reprise à 16 h 20)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous recevons maintenant le Regroupement d'employeurs sur la santé au Québec. Je vous souhaite la bienvenue. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes de remarques préliminaires et je vous invite à nous présenter les personnes qui vous accompagnent, avec leur titre.


Regroupement d'employeurs sur la santé au Québec (RESQ)

M. Garand (Richard): Bonjour. Premièrement, j'aimerais effectivement vous présenter les quatre personnes qui sont présentes au nom du Regroupement d'employeurs sur la santé au Québec.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): S'il vous plaît, s'il vous plaît, j'aimerais avoir l'attention de tout le monde. Merci.

M. Garand (Richard): D'abord, à ma gauche, Mme Anne Malouin, de la société Domtar; à mon extrême droite, M. Roger Migneault, de la société Gaz Métropolitain; M. Jacques L'Espérance, de la Société conseil William M. Mercer; et moi-même, Richard Garand, Alcan.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous pouvez y aller.

M. Garand (Richard): Oui. Alors, M. le ministre, mesdames et messieurs, d'abord, c'est avec grand plaisir que nous avons accueilli votre invitation de venir vous faire part de nos réactions au projet de loi n° 33. En premier lieu, permettez-moi de vous présenter le RESQ, c'est-à-dire le Regroupement d'employeurs sur la santé au Québec, qui regroupe présentement une quinzaine d'employeurs importants au Québec. À cet effet, nous avons déposé auprès, je crois, de Mme Lamontagne, ou une de ses représentantes – ou représentants – un court texte qui décrit ce qu'est le RESQ et les objectifs que nous poursuivons. Quant aux propos d'aujourd'hui, nous vous présenterons de façon très succincte les commentaires relatifs aux dimensions qui nous concernent, nous, représentants des entreprises, qui avons mis sur pied des régimes collectifs à l'égard de nos employés relativement aux soins de santé et, notamment, aux médicaments, qui, vous comprendrez, représentent une forte proportion des coûts de ces régimes.

Alors, l'objectif premier du regroupement du RESQ est d'être un centre d'influence sur le système de soins de santé au Québec, et nous voulons plus particulièrement agir en partenaires avec les différents intervenants concernés. Les membres du RESQ ont constamment le souci à la fois de la compétitivité des entreprises québécoises et également de leur rôle comme citoyen corporatif et ayant un rôle social au Québec. Le RESQ supporte le gouvernement en ce qui concerne le rôle des régimes collectifs dans l'application du présent projet de loi.

Nous avons quelques commentaires à vous partager sur les éléments de la protection. D'abord, le RESQ est d'accord à l'effet que, dès le 1er janvier 1997, il y ait des régimes agréés offerts aux citoyens non assurés du Québec par les assureurs faisant affaire au Québec; également, que le régime de médicaments pour les personnes de 65 ans et plus, administré par la RAMQ, soit modifié dans le même sens que le régime offert à l'ensemble des citoyens du Québec. De plus, le RESQ désire que les règles soient différentes en ce qui a trait aux régimes individuels versus les régimes collectifs. Le RESQ demande que les paramètres soient choisis pour avoir un effet minimal sur l'ensemble des régimes collectifs existants, y compris ceux qui ont adopté des régimes que l'on qualifie de régimes flexibles, et que ces paramètres soient élaborés en étroite collaboration avec les employeurs. Selon le RESQ, le traitement fiscal entre les régimes individuels et les régimes collectifs concernant, notamment, la taxe de 9 % devrait être harmonisé. Le RESQ se questionne sur le bien-fondé d'offrir une couverture aux enfants sans ticket modérateur pour les sensibiliser à l'utilisation des coûts.

Quelques commentaires sur la dimension administrative qui constitue un élément important pour nous, représentants des entreprises. D'abord, l'identification des primes pour la protection du régime général nous apparaît un cauchemar administratif auquel nous devrons faire face, vous comprendrez, dans un délai très court. Également, l'émission des certificats annuels nous apparaît être une lourdeur administrative qui pourrait avantageusement être remplacée par un moyen plus simple et qui rencontre les objectifs du ministre. Le RESQ demande que la méthodologie de mutualisation des risques soit revue, voire éliminée.

Également, plusieurs questions, après une lecture approfondie du texte, nécessitent toujours des éclaircissements. À titre d'exemple, je voudrais vous mentionner les délais d'adhésion, la question des employés dits contractuels, surnuméraires, temporaires, à temps partiel, ceux qui ont un statut d'employé régulier mais qui, au cours de leur carrière, bénéficient ou profitent d'un congé sans solde ou encore qui ont le malheur d'être mis à pied pour de courtes périodes et qui sont constamment soit chez l'employeur ou en mise à pied, et d'autres cas semblables.

Également, il importe de vous souligner que les employeurs qui ont un régime dit pancanadien, c'est-à-dire qui s'adresse à des populations d'employés à travers les autres provinces, il nous faudra harmoniser également avec ces groupes-là, et nous tenons à souligner que, généralement, il s'agit d'un seul et même régime avec les mêmes caractéristiques, ce qui alourdit également la dimension administrative reliée à ce sujet.

En conclusion, le RESQ conclut qu'il est essentiel que la loi prévoie que l'entrée en vigueur ne soit obligatoire qu'à la fin des conventions collectives, comme cela s'est déjà fait dans le cadre de la loi n° 116, notamment. Le RESQ conclut que l'entrée en vigueur au 1er janvier 1997 est prématurée, voire impossible pour les employeurs, et demande d'en différer l'application aux régimes collectifs au 1er janvier 1998. Enfin, le RESQ conclut que, étant donné le rôle que leur confère la loi, la présence des employeurs sur les conseils et comités est requise. Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Merci beaucoup. Je vous remercie beaucoup d'avoir accepté l'invitation de rencontrer la commission, parce que, en tant que représentants des employeurs, vous êtes déjà partie prenante au domaine de l'assurance-médicaments pour 4 500 000 Québécois et Québécoises, ce qui est déjà important, et un partenaire qui est nécessaire pour améliorer ces systèmes-là et les étendre à l'ensemble des citoyens du Québec.

Il y a des courts commentaires que j'aimerais faire, et je vous demanderai deux questions sur votre présentation, pour partir. Vous faites un commentaire au sujet de la mutualisation des risques. Vous dites: Ça devrait être revu, voire aboli. Je suis un peu surpris de ça, parce que c'est une mesure à laquelle, je pense, même au niveau du travail du comité présidé par M. Castonguay et, par la suite, proposée par les assureurs eux-mêmes, en disant que, si on veut vraiment avoir un système général, qui couvre tout le monde, pour couvrir tout le monde, si on ne veut pas faire d'exclusion ou de sélection – ce qui deviendrait une exclusion – pour des raisons d'âge, de santé ou autre, et pour qu'on ne risque pas qu'il y ait des biais plus ou moins aléatoires, qu'un partenaire ou autre parmi les assureurs aurait une trop grande proportion de risque, ils ont trouvé que c'était une solution, qu'à partir d'un certain montant, pour les régimes collectifs – je pense à partir du premier dollar, pour les primes individuelles, les régimes individuels – on mutualise le risque de sorte qu'on s'assure que, collectivement, on puisse supporter le risque, où ça devient gérable, à ce moment-là. Je ne sais pas si vous voyez d'autres inconvénients ou d'autres difficultés qui n'auraient pas été vus présentement, qui étaient à la base de votre commentaire.

Deuxième chose, l'harmonisation des régimes pancanadiens. J'aimerais savoir un peu pourquoi vous faites ce commentaire-là, parce que, d'abord, les régimes de santé sont provinciaux, ce n'est pas canadien. Le seul élément canadien de notre système de santé – on est porté à dire ça, le système de santé du Canada – mais c'est une formule de financement qui en fait un système canadien. C'est des systèmes des provinces, et la formule de financement, je ne veux pas faire de débat là-dessus, mais, comme le financement fédéral est de moins en moins important, c'est de moins de moins dans la place. Et, si on parle du médicament plus spécialement, déjà, les provinces ont développé, différentes provinces, à peu près toutes ont un régime quelconque, et il n'a jamais été question, puis ça ne s'est jamais posé comme question de ne pas avoir un système tant qu'il ne serait pas harmonisé. C'est une responsabilité du gouvernement du Québec pour ses citoyens. Bon. Ça, c'est mes deux commentaires.

(16 h 30)

Les deux questions qu'il faudrait vraiment que vous nous expliquiez pour qu'on puisse vous suivre... Quand vous dites que l'identification des primes pour la protection du régime général serait un cauchemar administratif et que l'émission des certificats annuels amène une lourdeur administrative inutile... Alors, le cauchemar avec l'identification des primes, expliquez-nous ça un peu, là, pour qu'on puisse vous suivre. Et la question des certificats, on ne voit pas très bien qu'est-ce que vous voulez dire par ça. Alors, si vous pouvez élaborer là-dessus, quant aux idées que vous avez, ce que vous proposeriez, ça nous serait utile.

Finalement, ma deuxième question. Ce que vous suggérez, c'est une espèce de système d'agrément des régimes actuels pour ne pas les modifier du tout, plutôt que de faire des ajustements pour avoir un régime de base qui est disponible partout ou n'importe quel autre régime. Si, dans un régime collectif, on s'assure qu'on offre ce qui correspond au moins au régime de base et plus, ça va, mais... Et il a semblé, à l'analyse jusqu'ici, que vouloir monter un système d'agrément, ce serait pas mal compliqué par rapport à ce que chacun des systèmes fasse les ajustements qu'il faut pour s'assurer qu'il offre à l'intérieur de sa prime, de son régime, de sa police, l'équivalent du régime. Alors, j'aimerais aussi que vous nous expliquiez un peu comment ça risquerait d'être plus simple d'aller dans un système d'agrément que ce qui est proposé présentement.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous pouvez y aller.

M. Garand (Richard): M. le ministre, j'aimerais vous proposer de répondre à votre premier commentaire qui a trait à la mutualisation des risques, puisque cela constitue une surprise. Et, puisqu'il s'agit de matière très technique effectivement, j'aimerais demander à M. Jacques L'Espérance de vous faire part de nos commentaires à ce propos.

M. L'Espérance (Jacques): Alors, en ce qui concerne la mutualisation, premièrement, il faut être très clair que le problème que l'on a, ce n'est pas avec les régimes individuels, c'est seulement les collectifs. Que les régimes individuels soient mis en commun, mutualisés à partir du premier dollar, on pense que c'est la façon de faire si on veut fonctionner avec ce qui est proposé. Alors, notre commentaire s'applique seulement aux régimes collectifs.

On a un certain nombre de problèmes, c'est qu'il y a des gros employeurs qui sont prêts à prendre tout le risque. Alors, ce qu'on se dit, c'est: Pourquoi les forcer à mutualiser une partie? Actuellement, dans les régimes collectifs, il se fait de la mutualisation – je pense que les trois employeurs autour de moi ici en font – mais probablement que ce que l'on retrouve dans le marché, c'est plus à partir, par exemple, d'un montant de 5 000 $ ou 10 000 $ par individu par année. Ce que le projet de loi nous propose, c'est 2 700 $, ce qui est bas, et il va y avoir mutualisation si on accède, disons, à 2 701 $, pour dire quelque chose. Dans un régime privé, actuellement, ce qui serait mutualisé, c'est 1 $. Là, ce que vous nous dites, c'est mutualiser 2 701 $. Pour mettre des chiffres, là – on n'a pas eu le temps de faire tellement d'études – normalement, ce qu'on appelle une prime de mise en commun va être autour de 2 %, 3 %. Les risques importants, on met une prime de mise en commun à l'assureur; avec la formule qui est proposée dans le projet de loi, on tourne autour de 25 % à 30 %. Alors, c'est selon ce qu'on voit. Et, dans le rapport Castonguay – je vois M. Castonguay...

M. Rochon: Ça ne correspond à rien de ce qu'on a eu comme chiffres, là.

M. L'Espérance (Jacques): Bien, c'est ça, là. Dans le rapport Castonguay, on parlait plus de 5 000 $, parce que l'autre formule tombait à 5 000 $, c'était déjà moins pire, et, nous, on pensait que c'était à partir de 5 001 $. Alors, effectivement, peut-être qu'il y a des incompréhensions. C'est les informations que l'on a eues. Il n'y a pas une tonne de chiffres là-dessus...

M. Rochon: Oui, il y a... C'est ça.

M. L'Espérance (Jacques): ...mais c'est le genre de problème. Le problème de base, philosophique, c'est qu'on dit: Les employeurs, si j'ai 300 employés puis j'ai telle masse, je suis prêt à assumer...

M. Rochon: Bon.

M. L'Espérance (Jacques): ...un risque. Le mien sera 7 000 $, l'autre sera autre chose.

M. Rochon: Écoutez, là, je vais faire un commentaire là-dessus...

M. L'Espérance (Jacques): O.K.

M. Rochon: ...c'est justement philosophique, là. Mais c'est important qu'on s'entende...

M. L'Espérance (Jacques): Absolument.

M. Rochon: ...parce que, si on dit que la solution qu'on cherche, c'est un régime général...

M. L'Espérance (Jacques): Oui.

M. Rochon: ...pour tout le monde, y compris ceux qui ont des problèmes de santé importants puis ceux qui, en raison de leur âge, risquent de coûter plus cher... Parce que, si vous me dites qu'un gros assureur et employeur peut se débrouiller tout seul parce qu'il est assez gros pour assumer ses risques, première question: Êtes-vous prêts, tous ceux qui vont se présenter et qui sont des mauvais risques, à les prendre pareil?

M. L'Espérance (Jacques): Absolument.

M. Rochon: Puis, deuxièmement, si vous êtes prêt à le faire comme gros employeur, est-ce que, pour permettre que de plus petits employeurs et assureurs qui ne pourraient pas le faire, eux, on applique la même règle à tout le monde? C'est philosophique. Ou bien on se donne un régime général et tout le monde... ou bien vous éliminez les plus petits – c'est qu'il y a un ou deux gros qui prennent le contrôle de l'opération – ou bien tous ceux qui sont là peuvent rester et continuer de faire quelque chose, et la mutualisation implique tout le monde. Je ne sais pas si je comprends bien, là, mais je pense que c'était ça qui était la règle de base. C'est peut-être plus philosophique que de faire...

Bon. Là, à partir du niveau, à un moment donné, il s'agira de mettre les chiffres en ligne. Ça ne devrait pas prendre bien, bien de temps, ça. Mais je pense que la chose de base, si on veut que tout le monde puisse être couvert, indépendamment de son âge et de sa condition de santé, il faut que les assureurs qui sont impliqués puissent porter le coût ensemble. Alors, s'il y a un gros qui le porte plus facilement seul, bien, il va le porter encore beaucoup plus facilement s'il est avec tous les autres, me semble-t-il. Je ne peux pas voir le problème que ça cause et je ne peux pas voir ce que vous avez comme solution alternative pour les autres qui ne seraient peut-être pas assez gros tout seuls pour tenir le coup. Autrement dit, c'est là le système dans lequel on est, où les gros, les riches et ceux qui sont mieux s'en tirent et il n'y a pas de problème. On met le système en place en bonne partie, un des principaux objectifs, pour partager les mêmes services à tout le monde, y compris ceux qui ne peuvent pas être dans cette situation-là. Vous voyez? Alors, c'est vraiment... la philosophie est importante.

M. L'Espérance (Jacques): Oui, la philosophie est extrêmement importante et je pense qu'il faut...

M. Rochon: ...pour compléter, parce qu'il ne faut pas qu'on discute de quelque chose qui ne correspond pas à la réalité. Je ne veux pas exagérer, mais, si vous étiez d'accord, je pense que M. Castonguay pourrait peut-être faire un commentaire là-dessus, parce qu'il a regardé ça en détail, sur ce que ça veut dire comme coût, la mutualisation, juste pour qu'on suive bien là-dedans. Est-ce que c'est possible, M. le Président?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, d'accord. Allez-y, M. Castonguay.

M. Castonguay (Claude): Merci. Écoutez, la question de la mutualisation des risques, pour les régimes collectifs, ce sont les assureurs eux-mêmes qui nous l'ont proposée dans leur mémoire quand ils sont venus devant notre Comité. On a eu l'occasion d'en discuter à plusieurs reprises. Une façon... D'ailleurs, le gouvernement ne leur a pas imposé une mécanique mais leur a demandé aussi, à date, de développer eux-mêmes un système. Une façon qui pourrait être très simple et peu dispendieuse, à laquelle, d'ailleurs... que l'on a déjà discutée, pourrait prendre la forme suivante. C'est que les assureurs paient les réclamations qu'ils ont à payer avec tous leurs assurés. On sait que le coût, en moyenne – et on a les données – ça va être en dessous de 200 $ par année par bénéficiaire, en moyenne.

Alors, si on parle d'une mutualisation des risques au-dessus de 2 500 $ de dépenses, c'est des cas vraiment très exceptionnels. Alors, la façon dont ça pourrait fonctionner, c'est que les assureurs comptabilisent les réclamations qu'ils ont payées au-dessus de 2 500 $ pour une personne et périodiquement, tous les trois mois, à une fréquence sur laquelle ils s'entendent, ils font une compensation entre eux: celui qui a versé un peu plus que la moyenne retire et celui qui a versé moins paie. On compense de cette façon-là. Ça peut être fait très simplement.

Je vous rappelle aussi qu'en matière d'assurance automobile, comme vous le savez, tous les assureurs, toutes les personnes peuvent être assurées pour l'assurance automobile. Le système est plus complexe que celui que je vous décris parce que les données sont différentes. Malgré tout, c'est loin de coûter le 25 % ou 30 % que vous avez mentionné. L'administration du système en matière d'assurance automobile coûte très peu et fonctionne très bien. Je n'ai jamais entendu de critiques sur ce système-là. Il permet à tout le monde d'être assuré.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Allez-y.

M. L'Espérance (Jacques): Juste pour être bien certain. Vous dites: Les assureurs mettront en commun ce qui est au-dessus de 2 500 $. C'est déjà une énorme différence avec notre compréhension qui est: Si quelqu'un frappe 2 501 $, on part du premier dollar. Mais, ça, c'est l'information qu'on a eue du comité technique. Alors, moi, je veux bien que ce ne soit pas ça, on veut bien que ce ne soit pas ça. Et, à ce moment-là, probablement que c'est peut-être 5 %, le coût, je ne sais pas. Et il y a beaucoup moins de problèmes. Il y a certains... Probablement que parmi les employeurs il n'y a pas unanimité, qu'il y aurait des problèmes, mais c'est déjà très différent. Notre coût n'était pas des coûts administratifs. Il y a des problèmes administratifs rattachés à ça et...

Je peux peut-être enchaîner avec une autre réponse, un autre point; après ça, je laisserai les gens autour de moi. L'autre point étant technique aussi, c'est le cauchemar administratif de la séparation de primes. Je veux faire le lien avec ça. C'est que, pour être capable d'identifier le 2 500 $ – prenons ce montant-là – c'est 2 500 $ dépensés dans le régime général. Un employeur qui a un régime qui rembourse à 90 % après une franchise de 25 $ – pour dire quelque chose – et qui a une liste de médicaments plus élaborée que le régime minimum va être obligé de découper pour chaque personne: bien, ils ont reçu tant de remboursement dans le régime de l'employeur, mais il y a seulement une partie de ça qui relève du régime général, et ça, c'est extrêmement complexe. C'est complexe pour les réclamations et, pour les primes, c'est un cauchemar. Et ce n'est pas pour ne pas le faire, là. À moins qu'on ne comprenne mal, c'est énorme comme problème.

M. Rochon: Peut-être que là aussi on pourrait apporter une clarification. On peut se réveiller, puis le cauchemar va être fini.

M. L'Espérance (Jacques): Peut-être.

Des voix: Ha, ha, ha!

(16 h 40)

M. Rochon: Moi, je pense que ce qui est proposé, c'est qu'il y ait un régime général qui existe partout et qui soit disponible pour tout le monde. Si un groupe a un collectif qui est plus généreux que ça, qui nous coûte plus cher mais qui est plus généreux, puis qu'ils veulent rester avec ça, bien, ils restent avec ça.

M. L'Espérance (Jacques): Oui.

M. Rochon: Alors, il n'y a pas une partie de ce qu'ils vont réclamer qui va être dans le régime général puis une autre partie dans autre chose. C'est que, si le groupe, avec un employeur, a un régime qui est meilleur, qui est plus généreux, puis qu'ils sont prêts à continuer de payer plus cher, bon, bien, ils continuent dans ce régime-là, puis c'est tout. Le général ne s'applique pas à eux. On se comprend?

M. L'Espérance (Jacques): Ça, on le comprend...

M. Rochon: Bon. Donc...

M. L'Espérance (Jacques): ...mais il faut être capable d'identifier la portion du général. Si mon régime est plus généreux et coûte 300 $ par année, comparativement, disons, au coût moyen de 175 $ dont on a parlé, il faut que je sois capable d'identifier: Si j'avais l'autre régime, ça me coûterait tant. Et ça, c'est complexe, c'est extrêmement complexe et c'est...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est la difficulté qu'on a, tout le monde se consulte.

M. L'Espérance (Jacques): Exactement.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Et c'est toujours sur le temps du ministre.

M. Rochon: O.K. Bien, je vais arrêter là. Je pense qu'on...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rochon: Je pense qu'on pourra voir, mais... Qu'il y ait des problèmes administratifs pour mettre une nouvelle affaire en place, ça ne me surprend pas. La question qui est importante pour moi, c'est: Y a-t-il des solutions aussi? S'il y a un problème puis une solution, c'est réglé.

Mais toutes les informations jusqu'ici, on va revérifier ça, par exemple. C'est qu'effectivement on me dit que, dans ce que vous dites, il va falloir s'assurer au moins de vérifier les primes, là, et que là il y a une équivalence à faire, que ce n'est pas quelque chose qui est un cauchemar. C'est peut-être un problème, me dit-on, mais on va vérifier puis on va s'assurer de changer le cauchemar en rêve.

M. L'Espérance (Jacques): Ce qu'on a suggéré au comité technique là-dessus, c'est qu'on a demandé: Pourquoi vous voulez ça? Et ce qu'on comprend, c'est que, pour être capable qu'une personne... Pardon?

M. Rochon: Le comité technique, c'est qui, ça?

M. L'Espérance (Jacques): C'est les gens... Le comité d'information. On l'a appelé le comité technique.

M. Rochon: Ah bon! C'est une rencontre qu'il y a eu, une rencontre d'information. O.K.

M. L'Espérance (Jacques): C'est ça. Oui, oui, parce qu'on avait besoin d'éclaircissements sur le projet. Je m'excuse, M. le ministre.

M. Rochon: Non. C'est correct, là.

M. L'Espérance (Jacques): On a demandé: Pourquoi vous voulez qu'on identifie... Dans un régime qui coûte 300 $, pourquoi identifier que ça coûte 160 $ pour le régime général? Et on nous a dit: C'est pour permettre l'exemption pour les personnes à plus faibles revenus. Ce que l'on dit, c'est uniquement ça. Et l'objectif est tout à fait louable, il n'y a pas de problème.

M. Rochon: C'est ça.

M. L'Espérance (Jacques): Pourquoi ne pas dire aux gens, par exemple: Ce que vous pourrez déduire, ce sera le montant moyen des régimes individuels – mettons que c'est 175 $, là – ou ce que vous avez payé, et non pas avoir besoin d'identifier dans le régime collectif: Est-ce que c'est 162 $ ou 185 $ ou...

M. Rochon: Ça, c'est des bons points qu'il faut qu'on regarde, là. Si...

M. L'Espérance (Jacques): Le partenariat, M. le ministre.

M. Rochon: ...on peut faire simple, on ne fera pas compliqué.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le député de Robert-Baldwin.

M. L'Espérance (Jacques): Il y avait d'autres questions. Je ne sais pas si les gens veulent...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Une autre réponse sur une autre question? Allez-y, madame.

Mme Malouin (Anne): Oui, c'est ça. Il y avait aussi le point de l'harmonisation des régimes pancanadiens. Alors, là-dessus, M. le ministre, je voudrais, premièrement, vous dire qu'il y a des paramètres définis, spécifiques, ici, qu'on doit, dans le cadre de ce qu'on vient de discuter, d'ailleurs, où le régime global de l'employeur inclut le régime universel... Alors, dans ce cadre-là, une entreprise qui a des employés à travers le Canada et qui a une protection égale pour tout le monde devra ressortir ces gens-là, encore une fois, pour pouvoir identifier le régime universel et les comptabiliser à part, ce qui nous apparaît très compliqué.

M. Rochon: Qu'est-ce qu'ils font présentement dans les autres provinces? Ce n'est pas ça qu'ils font?

Mme Malouin (Anne): Bien là, avec... On n'a pas un besoin, présentement, d'identifier les gens qui ont un régime universel, par exemple, une protection différente avec une série de paramètres définis. La protection des employés à travers le Canada est la même partout. Il s'agit juste d'une complémentarité, alors qu'ici on parle d'éléments spécifiques à identifier.

M. Rochon: Oui. Ce qu'il faudra reconnaître, là, si toutes les choses qui vont être différentes, on voulait les éviter, ça, ce ne sera pas possible parce qu'on crée un nouveau régime. Alors, il y a des choses qui vont se faire différemment. Il faudra voir si, avec les moyens de gestion puis les moyens informatisés qu'on a aujourd'hui, une fois que le logiciel est fait, c'est des choses qui peuvent se faire raisonnablement facilement, pour faire les ajustements une bonne fois, puis, après ça, on part puis on y est, ou si, vraiment, on crée quelque chose qui devient incontournable. Mais c'est des bons points. On va prendre ça en note puis on va s'assurer que...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci, M. le Président. Vous avez beaucoup de misère avec le député de Robert-Baldwin, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Toujours. Allez-y, toujours sur le même temps.

M. Migneault (Roger): La question de M. le ministre était...

M. Rochon: Je pense que je vais passer dans le rouge!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il y en a peut-être qui vont être contents.

M. Migneault (Roger): ...relativement au système d'agrément. En fait, on ne parle pas de système comme simplement de composante d'un régime. C'est-à-dire que les employeurs ont développé, de façon à mieux répondre au coût et à mieux répondre surtout aux besoins de leurs employés, des systèmes de base avec des modules, ce qu'on appelle couramment des «flex». Alors, évidemment, un système de base, par exemple, pourrait soit équivaloir au régime général ou davantage. C'est le cas actuellement, d'ailleurs, pour la majorité des régimes collectifs. Ce qui fait que les limites, quelquefois... Lorsqu'on parle de franchise, on parle de coassurance, on parle de limite, par exemple, de déboursés. Un groupe d'employés pourrait décider, après négociation avec les syndicats, en l'occurrence, des limites et avoir un régime qui, en bout de ligne, va au-delà du régime général, mais pour, par exemple, la limite de 750 $, elle pourrait être 1 000 $, parce que le groupe a décidé, lui, que c'est 1 000 $ qu'il désirait avoir comme limite. Ça ne fait pas en soi un régime moins généreux que le régime général, mais c'est par choix des individus, et les régimes flexibles ont été développés sur cette base-là pour mieux répondre aux besoins des gens.

Alors, c'est dans ce sens-là qu'on parlait d'agrément et qu'il était possible de maintenir des régimes en place tels qu'ils sont dans le moment, parce qu'ils sont déjà plus généreux. Alors, ça nous éviterait ainsi d'avoir à modifier trop de régimes, d'avoir à renégocier avec les syndicats et... Enfin, le point, c'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Maintenant, le député de Robert-Baldwin. Je vous demanderais d'avoir des réponses un peu plus courtes de façon à pouvoir permettre aussi à la députée...

M. Marsan: Des questions trop longues.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...de Rimouski de poser quelques questions avant de clore.

M. Migneault (Roger): Les questions sont complexes. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député.

M. Marsan: O.K. Je vous remercie, M. le Président, et merci à vous. Je pense que, tout de suite, les éléments de votre mémoire nous permettent un échange assez intéressant. Alors, je voudrais, juste avant de terminer le volet qui vient d'être discuté, soumettre à vos commentaires: Si j'ai bien compris, quand on parle d'un régime collectif, maintenant on devra parler de la sommation des régimes de base ou de l'addition de tous les régimes de base, et si les employeurs veulent les bonifier, bien, libre à eux de les bonifier. Est-ce que c'est votre entendement aussi?

M. L'Espérance (Jacques): Si votre question est qu'il y a 150 employés et que chacun devra avoir un certificat du régime individuel et que l'employeur en mettra par-dessus, ce n'est pas notre compréhension, là.

M. Marsan: O.K. C'est ce dont je voulais être certain.

M. L'Espérance (Jacques): O.K. Collectif, il y a un design qui est au moins aussi généreux que le régime minimal.

M. Marsan: De base.

M. L'Espérance (Jacques): C'est ça.

M. Marsan: Plus.

M. L'Espérance (Jacques): Ça ou plus.

M. Marsan: Alors, votre définition de «régime collectif» deviendrait «régime de base plus».

M. L'Espérance (Jacques): Ou «régime de base».

M. Marsan: Ah! ou régime de base.

M. L'Espérance (Jacques): Un employeur pourrait dire: Tout ce qu'on offre, c'est le régime de base: mêmes paramètres, 100 $ de franchise, etc., et c'est ça qu'on offre...

M. Marsan: C'est beau.

M. L'Espérance (Jacques): ...mais sur un contrat collectif.

M. Marsan: D'accord. Je vous remercie. Deuxième question. Je pense que ce n'est pas paginé, mais c'est vos commentaires sur la protection. Vous parlez d'une taxe. Selon votre organisation, le traitement fiscal entre les régimes individuels et collectifs, concernant la taxe de 9 %, devrait être harmonisé. Je voudrais savoir votre interprétation. Est-ce que, d'après vous – actuellement, je crois, vous payez la taxe de vente du Québec sur les primes que vous avez – on aura à payer aussi cette taxe de vente, et possiblement la TPS aussi, après l'introduction du nouveau régime, d'après votre interprétation?

M. Garand (Richard): Notre compréhension est à l'effet que les régimes de groupe comportent une taxe de vente de 9 %, alors qu'une protection sur une base individuelle ne comporte pas la même contrainte, et, dans ce sens-là... Prenons l'exemple où deux personnes sont membres soit d'un régime individuel, soit d'un régime collectif; par hypothèse, supposons qu'elles ont exactement les mêmes paramètres d'âge, de santé et de consommation des médicaments, une paierait 9 % de plus que l'autre, c'est-à-dire celle qui fait partie d'un régime de groupe. C'est la distinction qu'on y voit.

M. Marsan: Bien, je pense que c'est important, là, ce qui est signifié, puis... Donc, si on a notre nouveau régime en place – vous l'appelez «régime collectif», mais qui peut être le régime de base modifié – vous nous dites qu'il y aurait l'application de la taxe de vente provinciale sur les primes qui serait chargée aux régimes collectifs, mais pas aux régimes individuels.

M. Garand (Richard): C'est le cas à l'heure actuelle.

M. Rochon: Ça, c'est la situation actuelle.

M. Garand (Richard): C'est la situation actuelle.

M. Marsan: C'est ça.

Une voix: C'est la taxe de 9 %...

M. Rochon: C'est la situation actuelle et, s'il n'y a rien qui est changé, ça continue comme ça: les primes...

M. Garand (Richard): C'est ça, c'est ça.

M. Rochon: ...individuelles ne sont pas taxées et les autres sont taxées.

M. Marsan: Alors, la question, c'est: Avec le nouveau régime – et je leur demande leur interprétation; si vous voulez nous donner la vôtre, ça va être aussi...

M. Rochon: Non, non, non.

M. Marsan: ...bien reçu – est-ce que les gens qui vont se doter d'un régime de base auront à payer une taxe de vente sur la prime qu'ils auront à débourser, selon votre compréhension du nouveau régime?

(16 h 50)

M. Garand (Richard): Je pense qu'il faut faire une distinction. Quand on parle d'un régime collectif, c'est un régime mis en place par un employeur pour une collectivité d'employés, et ça, ça représente nos employés et ce pourquoi on est ici. Quand on parle...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Actuellement, ça, c'est 9 %.

M. Garand (Richard): Ça, c'est 9 %.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Et quelqu'un qui a une police individuelle, une personne, il ne paie pas.

M. Garand (Richard): Quelqu'un qui, individuellement, s'assure auprès d'un assureur pour une protection individuelle...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Pour une personne, il ne paie pas.

M. Garand (Richard): ...lui, il ne paie pas ce 9 %. Et notre compréhension, c'est que le scénario va demeurer le même une fois la loi en vigueur. Donc, il y aura une distorsion de 9 % entre les deux individus, un faisant partie d'un groupe et l'autre étant tout seul assuré avec un assureur.

M. L'Espérance (Jacques): Éventuellement. Mais, comme il y aura... Je m'excuse. Comme il y aura obligation de s'assurer, il y a un gros danger, avec ça, qu'il y ait un transfert des régimes collectifs aux régimes individuels, étant donné qu'ils sont moins chers pour la même protection. Or, ce qu'on dit, c'est que ça devrait être harmonisé.

M. Marsan: Harmonisé dans le sens qu'il faudrait charger la taxe provinciale aux régimes individuels aussi. C'est ça, ma question. Et j'aimerais bien que le ministre puisse réagir aussi.

M. L'Espérance (Jacques): Idéalement, ce serait zéro partout.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. L'Espérance (Jacques): Si c'est deux partout, ça répond à l'objectif.

M. Marsan: O.K. Alors, je comprends qu'on aura à poursuivre notre questionnement pour voir si l'application de la taxe de vente sur les régimes collectifs deviendra, avec le nouveau régime, la même application pour les régimes individuels.

Le point suivant, vous mentionnez, vous suggérez, vous questionnez le bien-fondé d'une couverture aux enfants sans ticket modérateur pour sensibiliser les utilisateurs au coût. On peut penser que ce sont quand même les parents qui devraient payer, qui vont payer les primes pour un régime peut-être familial. En tout cas, j'aimerais vous entendre là-dessus. Sensibiliser les utilisateurs, c'est les enfants que vous voulez sensibiliser au coût dans le domaine des médicaments?

M. Garand (Richard): J'aimerais demander à M. Roger Migneault de répondre à cette question.

M. Migneault (Roger): En fait, je pense que tout le monde vise tout de même une plus saine utilisation des services de santé et surtout des médicaments. Pour nous, les employeurs, les médicaments, soit dit en passant, représentent 50 % du coût de nos régimes de soins de santé. Alors, évidemment, lorsqu'on vient interférer dans le domaine des médicaments, il faut s'assurer que les coûts ne seront pas importants, du moins.

Pour ce qui est des enfants, on revendique l'aspect sensibilisation à l'utilisation tout simplement à titre de ticket modérateur, parce qu'on sait que c'est une forme de ticket modérateur. On l'a fait avec les personnes retraitées, avec le 2 $. Alors, c'est purement pour répondre à cet enjeu-là. De plus, les employeurs, depuis quelque temps, ont démarré tout le processus de promotion de la santé justement dans le but d'avoir un meilleur contrôle de leurs coûts et de façon également à ce que les participants utilisent pleinement et judicieusement les régimes. Alors, ne pas avoir de coût freinant l'utilisation peut amener à de l'abus, et ceci ne cadre pas dans un esprit global d'une meilleure utilisation des frais et, par conséquent, réduction des coûts.

M. Marsan: Le seul commentaire que je fais là-dessus, c'est que, si on va de l'avant en mettant un frais modérateur pour les enfants, bien, c'est les parents qui vont payer le frais, on s'entend? Ils paient déjà, je pense, des primes assez importantes, franchises, etc., peut-être la TVQ aussi. Alors, je ne suis pas certain que d'appliquer un frais modérateur pour les enfants, ce serait, à ce moment-ci en tout cas, quelque chose qui améliorerait ou bonifierait le projet de loi. Alors, ça termine les questions, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest: Merci, M. le Président. Merci, messieurs, mesdames. Si je me réfère à votre commentaire sur la protection, vous dites que le régime de médicaments pour les personnes de 65 ans et plus, administré présentement par la RAMQ, doit être modifié dans le même sens que le régime qu'on va offrir à l'ensemble de la population. Alors, si je vous interprète bien, vous êtes d'accord avec le principe de base, un des principes de base du régime qu'on veut mettre de l'avant, qui est celui de considérer les revenus et non pas l'âge comme facteur déterminant des primes et des conditions pour en bénéficier. Et ça, ça me réjouit, parce que je pense que, là-dessus, un groupe comme le vôtre qui appuie le principe de base de répartir la richesse collective de façon équitable, c'est un plus, il me semble, qu'il faut souligner.

Maintenant, j'en viendrais à ma question. Vous demandez que les paramètres soient choisis pour avoir un effet minimal sur l'ensemble des régimes collectifs existants. Ça semble vous inquiéter, parce que vous dites: «que les paramètres soient choisis pour avoir un effet minimal». Est-ce que vous avez identifié des paramètres qui devraient faire partie du système?

Mme Malouin (Anne): Alors, les paramètres qu'on a identifiés, premièrement, c'étaient, naturellement, la franchise, la coassurance et le débours. Comme mon collègue l'a dit un peu plus tôt, on pense que, si des normes se limitaient, par exemple, à un débours maximum sans donner des détails particuliers au niveau de la franchise ou de la coassurance, on aurait quand même des régimes qui sont relativement égaux et, à ce moment-là, la population du Québec serait couverte équitablement. Mais, en même temps, ça permettrait aux employeurs d'avoir un peu plus de souplesse du côté administratif, ce qui est très important pour nous.

Mme Charest: Merci, madame. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Pas d'autres questions? M. le député de Robert-Baldwin, dernière question.

M. Marsan: Oui, M. le Président. À la fin, dans vos conclusions, vous dites que l'entrée en vigueur le 1er janvier 1997 est prématurée, voire impossible, pour les employeurs et vous demandez d'en différer l'application, particulièrement pour les régimes collectifs, au 1er janvier 1998. J'aimerais vous entendre sur les délais que vous demandez, l'importance de ces délais-là, l'urgence de vous les accorder, aussi.

M. Garand (Richard): Alors, dans un premier temps, évidemment, notre souci est de bien comprendre le projet de loi. Vous comprendrez que c'est très technique, et, encore aujourd'hui, on a eu des clarifications sur des dimensions que l'on croyait autres, d'une part.

Deuxièmement, nos systèmes administratifs devront être ajustés pour tenir compte des dimensions cauchemardesques qu'on vient de changer en rêves et...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garand (Richard): ...vous nous voyez tout réjouis. Mais il reste encore des dimensions administratives avec lesquelles il nous faut composer: changer nos systèmes, les adapter, communiquer avec nos populations, ajuster nos régimes qui sont, d'une province à l'autre, des régimes qui sont négociés. Ça fait beaucoup de matière en vue du 1er janvier 1997. C'est dans ce cadre-là qu'on dit: On est d'accord avec le principe, les objectifs que vous poursuivez. S'il vous plaît, permettez-nous de souffler, de prendre des décisions qui nous impliquent pour l'avenir; qu'elles soient bien faites, ces décisions-là, et non pas prises à la dernière minute, avec les erreurs que ça peut comporter.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Complément de réponse, si j'ai bien compris?

M. L'Espérance (Jacques): Bien, quitte... Oui, complément de réponse, parce que c'est... Le point fondamental, c'est qu'administrativement c'est à peu près impossible pour les employeurs, et même pour les assureurs. Un petit exemple: la franchise différente pour les enfants de celle des adultes, les assureurs ne font pas ça. Les assureurs font: employé, personne à charge, qui sont conjoint et enfants, en un seul bloc. Alors là, si on veut 100 $ de franchise pour le conjoint puis zéro pour l'enfant, ce n'est pas faisable. Il y a des petites choses quelque part, mais qui ne sont pas administrables.

Alors, ce qu'on dit: Vous êtes d'accord pour laisser l'administration ou la responsabilité au secteur privé par les régimes collectifs. Parfaitement! Mettons, peut-être, une limite de 750 $ ou de 1 000 $ annuelle, obligatoire; juste ça, pour l'année prochaine, on vivra avec ça. Donc, que personne n'ait un débours extrême dans l'année, je pense que c'est le point fondamental. Regardons, prenons le temps de regarder les autres paramètres, la mutualisation, etc., pour être sûrs que, lorsque ça va partir, ce sera une voiture à quatre roues et non pas... déjà un peu «dessoufflée».

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est bien important.

M. L'Espérance (Jacques): Bien important! On croit.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Autre question? M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui. Nous avons l'impression que l'ensemble du dossier est davantage relié à une récupération de certaines dépenses qui ont cours actuellement. Dans le livre des crédits, ou dans le dernier budget, on identifie un montant de 196 000 000 $ à récupérer. Je ne sais pas si, en regardant le dossier, c'était une interprétation que vous donnez à la présentation du projet de loi n° 33. Nous considérons qu'au-delà du principe d'assurer de façon universelle toutes les Québécoises et tous les Québécois, eh bien, il y a cette dimension de récupérer des taxes, malheureusement.

M. Garand (Richard): Vous comprendrez que notre propos aujourd'hui est à l'effet de souligner des dimensions qui sont des difficultés à rencontrer dans un délai relativement court, des dimensions aussi de souci d'équité à l'interne par rapport à nos différentes populations qui font partie d'un même employeur et qui se retrouvent dans différentes provinces, et d'un souci de faire les choses correctement. C'est essentiellement sur ces dimensions-là qu'on veut attirer l'attention du ministre et de ceux qui auront à légiférer.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Conclusion, M. le député.

(17 heures)

M. Marsan: Oui, peut-être en guise de conclusion, sur ce point-là, d'une façon particulière. C'est parce que, d'un côté, vous demandez qu'on puisse retarder l'entrée en vigueur, et, nous, nous savons qu'il y a des impératifs – ils sont écrits dans le budget – de récupération de taxes. Alors, j'ai l'impression qu'il va y avoir une difficulté pour le parti ministériel, le gouvernement du Parti québécois, à donner suite à cette recommandation-là. Mais, en ce qui nous concerne, nous préférons prendre le temps qu'il faut pour établir un régime de la bonne façon pour qu'il puisse rejoindre les besoins de l'ensemble de la population, mais aussi relativement facile à administrer.

En terminant, je voudrais vous remercier, parce que le questionnement que vous avez provoqué, vous avez dit tantôt que ça a permis d'éclairer de votre côté, mais ça a permis aussi d'éclairer plusieurs des députés qui sont ici, et c'est très apprécié, la qualité du document que vous nous avez présenté. Alors, un gros merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le ministre.

M. Rochon: Oui, M. le Président. Merci beaucoup de votre contribution, de votre collaboration. Peut-être pour continuer à s'aider à réfléchir dans le même sens, faire brièvement quelques commentaires sur les derniers échanges. La différence de taxation entre les régimes collectifs et individuels, c'est effectivement une situation qui existe. On peut dire que c'est un peu historique.

Quand on a imposé une taxe sur les régimes collectifs, il n'y avait à peu près pas de régimes individuels. C'était très peu puis ça ne semblait pas vraiment significatif dans le portrait. Éventuellement, c'est quelque chose qui pourrait toujours être considéré. À court terme, c'est peut-être moins évident. Surtout, quand même, qu'il faut considérer qu'il y a des avantages que les gens ont dans un collectif qui ne sont peut-être pas nécessairement transposables dans un régime individuel, toutes proportions gardées. Si quelqu'un paie plus cher pour avoir plus d'avantages dans un régime collectif, c'est peut-être plus difficile, au-delà du régime de base, à assurer dans un régime individuel. Il y a peut-être une forme de compensation en termes d'équité pour la personne qui paie la taxe. Mais c'est un bon point. Je ne pense pas qu'à court, court terme c'est quelque chose qui peut nécessairement changer, mais c'est quelque chose, je suis d'accord, auquel il faut réfléchir puis voir qu'est-ce qui, éventuellement, devra être fait à ce sujet-là.

On est revenus une couple de fois sur la question des équivalences. Moi, je comprends très bien que, si on avait pu avoir une approche... Et ça a été considéré, ça, je sais qu'au niveau du comité présidé par M. Castonguay on a travaillé là-dessus. On en a reparlé aussi sur la base du rapport du Comité. Si on avait pu dire: Tous ceux qui sont en place, ne changez rien, on va avoir un système... Mais ça prendrait un système d'équivalence. Il faudrait pouvoir dire: Votre système, tel qu'il est, avec ce qu'il offre, avec un plafond plus haut, une coassurance différente puis une franchise plus basse ou des choses du genre, tout ça mis ensemble, ça revient à l'autre. Et toutes les analyses qu'on a faites en faisant le tour de la question plusieurs fois, ça montrait que, là, si on voulait gérer une chose comme ça, on aurait besoin de temps puis de développer une expérience, et ça serait pas mal compliqué. C'est-à-dire que tous les régimes ne bougent pas, puis on développe un système d'équivalence plutôt que de demander à tout le monde de faire le minimum d'ajustements qu'il faut pour rendre disponible, s'assurer que la base est là, quitte à protéger le reste du système. Mais l'idée est intéressante, mais elle est un peu... Vue de notre point de vue, on va y réfléchir encore, mais je dois avouer qu'elle nous apparaît un peu académique, qu'il y a du travail à faire là-dessus. Il faut que ça soit gérable, ça aussi.

Puis il faudrait, en plus d'avoir le mécanisme, qu'on s'entende – puis là on va peut-être avoir un débat là-dessus – pour dire qui va être le juge final de l'équivalence. On peut avoir des critères, mais ce n'est pas mathématique, ça, c'est assez complexe. Ça prendrait une instance que tout le monde reconnaît comme étant l'arbitre final de l'équivalence, ou qui demanderait à des régimes de faire une modification ou l'autre. Ça pourrait devenir une gestion pas mal complexe, nous semble-t-il.

Je voudrais vous rassurer sur une chose, la question du contrôle des coûts. Ça, vous l'avez mentionné, plusieurs groupes le mentionnent et on en est très conscients, c'est essentiel pour un système comme ça. D'ailleurs, c'est parmi les différentes raisons qui ont amené progressivement, au cours des dernières années, à penser à un régime d'assurance-médicaments. Il y a des questions, d'abord, d'équité, pour rendre le médicament accessible à tout le monde indépendamment de sa capacité de payer, mais la question des contrôles des coûts l'a été aussi. Comme ça avait été le cas quand on s'est donné une assurance-hospitalisation puis une assurance-santé, il y avait des objectifs d'équité, mais il y avait une situation de difficulté de contrôler les croissances de coûts dans ce domaine-là. Mais, ça, je voudrais vous rassurer, parce que, si vous lisez bien attentivement – puis il faut le relire quelques fois pour aller chercher tout ce qu'il y a dans le projet de loi – il y a des mécanismes de prévus.

Le Conseil consultatif de pharmacologie va avoir un rôle élargi, et ça va faire partie de ses préoccupations de voir le rapport qualité-prix dans la confection de la liste. La révision de l'utilisation des médicaments existe déjà pour les établissements sur la base de cette expérience-là; le projet de loi en institue une pour l'ensemble de l'utilisation du médicament. Il est prévu que, dans une politique générale du médicament, il y aura des programmes d'information aux prescripteurs, aux distributeurs et à la population en général, aux consommateurs. L'ensemble du régime, au-delà des paramètres financiers, va comprendre ces mécanismes-là; c'est essentiel qu'on contrôle les coûts.

En terminant, sur le délai, moi, je suis bien d'accord avec vous. Si on pouvait se donner encore un an ou deux, on pourrait développer le système encore plus puis on pourrait se préparer encore plus. Le dilemme dans lequel on est vraiment, là, c'est qu'en plus de l'objectif d'équité sociale pour le problème d'utilisation du médicament, on ne s'en est jamais cachés, il y a une situation budgétaire. Il faut sortir d'une situation où on est endettés comme ce n'est pas possible, plus que n'importe où au Canada, puis on a un déficit qu'on ne peut plus laisser aller comme ça. Il faut qu'on baisse le déficit. Ça, je pense que tous les partenaires l'ont reconnu. Et si on arrivait à la décision que ce n'est pas faisable de faire une certaine économie là-dessus en instaurant un système qui nous donne une plus grande équité, bien, il va falloir le faire ailleurs dans le domaine de la santé. Et il y a un exercice assez important qui a été fait pour voir comment, dans l'ensemble du système de santé et des services sociaux, on peut partager l'effort et ramener notre système, comme les autres pays, à un niveau de financement qui est plus bas que ce qu'on a actuellement, se comparant à d'autres pays, pour être capables de vivre selon nos moyens.

Alors, ça, à un moment donné, il y a un problème de vases communicants là et il va falloir tenir compte de ça aussi. On ne peut pas ne pas être capables d'agir avec une certaine efficacité sur tous les fronts en même temps. Il va falloir qu'on fasse quelque chose là-dessus, mais on reconnaît que ce n'est pas facile. C'est pour ça que, là-dessus, on apprécie votre collaboration, votre contribution. On veut la garder puis on va garder le contact pour continuer à compléter l'information dont vous avez besoin. Merci.

La Présidente (Mme Charest): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Merci à Mme Malouin, à MM. Garand, Migneault et L'Espérance. Nous allons suspendre, une minute, le temps que la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec prenne place.

(Suspension de la séance à 17 h 7)

(Reprise à 17 h 8)

La Présidente (Mme Charest): Messieurs, si vous voulez bien prendre place. À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons démarrer.

Alors, je demanderais à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec de nous présenter les personnes.


Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ)

M. Dutil (Rénald): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, mesdames et messieurs, je vais vous présenter d'abord le Dr Georges Boileau, qui est à ma droite, et directeur des communications à la Fédération, et le Dr Georges Henri Gagnon, qui en est le directeur des affaires professionnelles.

La Présidente (Mme Charest): Et vous, vous êtes...

M. Dutil (Rénald): Et moi-même, mon nom est Rénald Dutil, je suis président de la Fédération des médecins omnipraticiens.

La Présidente (Mme Charest): Merci.

M. Dutil (Rénald): Alors, voici. Nous avons préparé un court avis, mais le nombre de pages ne témoigne pas de l'importance que nous accordons à ce dossier. Il s'agit pour nous d'un dossier fort important que celui d'un régime universel d'assurance-médicaments. Et, d'entrée de jeu, je vous dirais que la Fédération est en faveur, en principe, d'un régime universel d'assurance-médicaments. Et le principal motif qui sous-tend notre accord à un tel régime, c'est d'abord l'accessibilité aux médicaments. Comme médecins, nous sommes à même de constater presque tous les jours dans nos pratiques quotidiennes les difficultés d'accès à des médicaments pour une certaine partie de notre population, et je pense qu'un tel régime va permettre de résoudre cette difficulté.

Nous avions été entendus par la commission parlementaire sur l'utilisation des médicaments en mars dernier, et déjà nous nous étions prononcés pour un meilleur contrôle des médicaments. Nous nous étions prononcés pour une formation plus grande au niveau de la formation de base du médecin, mais aussi au niveau de la formation continue sur l'utilisation de la technologie informatique, sur l'amélioration – si possible, parce qu'elles sont déjà bonnes – des relations entre les médecins, les omnipraticiens et les pharmaciens, l'utilisation de nos comités de pharmacologie, de lignes directrices, de programmes de revue d'utilisation des médicaments, tous des moyens qui nous permettront d'améliorer non seulement l'accessibilité mais la qualité des services pharmaceutiques qu'on dispense.

(17 h 10)

Alors, ces commentaires sont plus généraux. Nous sommes donc tout à fait d'accord avec l'article 2 du projet de loi, qui définit l'objectif général de ce projet de loi, soit «d'assurer à l'ensemble de la population du Québec un accès raisonnable et équitable aux médicaments requis par l'état de santé des personnes.» C'est d'autant plus important que, dans le cadre de la réforme des soins de santé, de l'emphase qu'on met sur les soins ambulatoires, l'accessibilité aux médicaments, et surtout à des médicaments fort coûteux, peut devenir beaucoup plus difficile dans le cadre ambulatoire, parce que l'on sait que, pour un malade admis, il n'y avait pas de coûts à supporter pour certains médicaments, et ce sont souvent les plus dispendieux qu'on utilise dans cette phase. Alors, pour réussir notre virage ambulatoire, il faut absolument résoudre cette difficulté qui est d'avoir accès à certains médicaments qui sont fort coûteux.

Ces commentaires un peu plus généraux étant faits, nous allons en faire de façon plus spécifique, mais nos commentaires vont porter sur l'accessibilité aux médicaments, les mécanismes de contrôle, de formation, d'information, les systèmes de communication et la confidentialité, aussi, qu'il nous faut accorder lorsqu'on parle de systèmes de communication.

La Fédération n'a pas l'intention de se prononcer sur les modalités de financement du futur régime. C'est une question qui est, à nos yeux, aussi fort importante, mais on préfère laisser à d'autres groupes le soin de discuter de cette question.

Alors, quelques commentaires spécifiques sur certains articles. Au chapitre IV du projet de loi, Section I, l'article 51, qui traite du Conseil consultatif de pharmacologie, on y définit qu'il devrait y avoir un président et neuf membres. Nous sommes d'accord avec ce nombre. On préconise quatre experts en pharmaco, entre autres. Nous recommandons, au lieu de quatre experts en pharmaco, peut-être d'augmenter un peu le nombre de médecins, un médecin omnipraticien et un médecin spécialiste, tous deux en pratique clinique. Bien sûr, il va de soi que ces médecins devront avoir des connaissances peut-être plus pointues en pharmacologie. C'est qu'il est bien important que ce comité puisse faire le lien entre la pratique médicale et les fonctions de ce Conseil consultatif de pharmacologie.

À l'article 69, qui traite du Comité de revue de l'utilisation des médicaments, nous avons également une recommandation principale sur la composition de ce Comité. Nous croyons que devraient s'y retrouver aussi les médecins prescripteurs, et nous recommandons deux médecins omnipraticiens, dont l'un exerce en cabinet privé et en CLSC et l'autre en établissement. Pourquoi deux médecins omnipraticiens? C'est qu'on voudrait bien que ce Comité de revue de l'utilisation des médicaments tienne compte de l'environnement professionnel dans lequel travaillent ces médecins. Quand vous travaillez en établissement comme dans un centre hospitalier de courte durée, et même de longue durée, vous travaillez à l'intérieur d'un CMDP ou d'un service médical. Il y a un service de pharmacie, il y a un comité de pharmacologie, donc il y a là un environnement professionnel qui nous permet plus facilement d'évaluer la qualité des services pharmaceutiques dispensés, la qualité des prescriptions faites par les médecins. Si vous travaillez en cabinet privé ou en CLSC aussi, vous avez à traiter une clientèle un peu différente de celle qu'on retrouve dans nos centres hospitaliers ou dans nos centres d'accueil, mais surtout, vous travaillez dans un environnement professionnel où il n'y a pas de comité de pharmacologie, il n'y a pas de pharmacien sur place, et ça peut créer un contexte différent. Voilà pourquoi on pense que le Comité de revue de l'utilisation des médicaments devrait bien refléter les divers milieux de pratique, et nous suggérons que s'y retrouvent deux omnipraticiens, mais qui exerceraient dans des milieux différents.

À l'article 70 de cette même Section, on parle de critères d'utilisation des médicaments. Bon. Peut-être la nuance est-elle mince, mais nous préférons l'expression «lignes directrices» plutôt que «critères». C'est celle qui est utilisée. Lignes directrices sur l'utilisation. Parfois, on utilise les mots «protocole» ou «guide de pratique», mais ce sont des lignes directrices. Et ces lignes directrices devraient être soumises au Collège des médecins du Québec et à l'Ordre des pharmaciens du Québec avant d'être adoptées par le Conseil consultatif de pharmacologie. Je pense que ces lignes directrices doivent servir de guide, et ces lignes directrices doivent toujours permettre au médecin clinicien de garder son autonomie professionnelle dans l'intérêt de son patient. En général, les lignes directrices ou les guides de pratique sont faits de cette façon.

Toujours dans l'article 70, 4°, bon, on parle d'analyser et d'évaluer, sous forme non nominative, le profil général de prescription ou de dispensation des professionnels de la santé. Il faut faire attention, dans l'analyse d'un profil général de prescription. On ne recommande pas de libellé spécifique ou très différent, là, pour cet alinéa; cependant, lorsqu'on analyse un profil général de prescription ou de dispensation, il faut tenir compte, là, de certains critères très particuliers. Entre autres, certaines pratiques médicales auprès de clientèles spécifiques peuvent donner lieu à un profil de prescription qui est fort différent du profil général. Aussi, dans l'interprétation d'un tel profil, faut-il en tenir compte. Et nous avons des expériences à cet égard. Il existe actuellement des profils de pratique pour l'exercice de la médecine, et on sait fort bien que l'analyse purement statistique d'un profil de pratique peut conduire à des interprétations fort aberrantes et inappropriées, compte tenu, là, de certains milieux de pratique.

Toujours dans le même article, au sixième alinéa, on parle de «développer des stratégies de formation, d'information et de sensibilisation». Nous sommes tout à fait d'accord avec de telles stratégies, mais nous croyons qu'il faut impliquer non seulement le Conseil consultatif de pharmacologie, mais aussi le Collège des médecins, l'Ordre des pharmaciens du Québec, donc les ordres professionnels, la Fédération des omnipraticiens du Québec et la Fédération des médecins spécialistes du Québec.

On parle de stratégies de formation, d'information et de sensibilisation, et là je fais référence, par exemple, au Conseil d'évaluation des technologies de la santé du Québec, qui a créé un comité sur les lignes directrices et qui a voulu, justement, s'associer à chacun de ces organismes pour en arriver à développer des stratégies d'implantation de ces lignes directrices qui soient vraiment fonctionnelles et efficaces. Et c'est avec ces divers organismes qui connaissent bien la réalité de leur milieu que le Conseil pense pouvoir réussir de telles stratégies d'implantation. Alors, je pense qu'un tel exemple s'applique ici.

Au huitième alinéa, l'on parle de l'évaluation de ce programme de l'utilisation des médicaments, et le projet de loi parle d'une personne ou d'un organisme externe. C'est bien flou. Tout cela a besoin d'être précisé. Mais les remarques que l'on fera, c'est qu'il faut distinguer entre les impacts économiques et les répercussions sur la qualité des soins, ce que ne fait pas cet alinéa. Et, lorsqu'on analyse la répercussion sur la qualité des soins, nous recommandons que ce dernier aspect soit du seul ressort du Collège des médecins et de l'Ordre des pharmaciens du Québec.

Enfin, toujours dans des commentaires un peu plus spécifiques, à l'article 71, on parle d'un mandat qui n'excède pas quatre ans. Je pense que ces mandats devraient varier de deux à quatre ans afin d'assurer la continuité du Comité. Et les honoraires, traitements ou allocations des médecins qui siègent sur ces comités ne devront pas faire partie des enveloppes budgétaires prédéterminées. Comme vous savez, nous sommes enfermés dans des enveloppes, comme d'autres groupes, d'ailleurs. On l'admet.

(17 h 20)

Nous allons faire quelques commentaires sur ce qu'on appelle les RUM, les Revues d'utilisation des médicaments, puisque c'est un aspect fort important. Le projet de loi prévoit un comité provincial de revue d'utilisation des médicaments. Nous sommes d'accord qu'un tel comité existe. Par ailleurs, nous croyons qu'il devrait exister à une échelle plus locale des comités de revue d'utilisation des médicaments. Nous pensons que, dans tout établissement où existe un conseil de médecins, dentistes et pharmaciens, ce conseil devrait mettre sur pied un comité sur l'utilisation des médicaments. Il existe déjà un comité de pharmacologie. Le mandat du comité de pharmacologie pourrait être élargi pour jouer ce rôle de comité de revue d'utilisation des médicaments.

Et cette revue d'utilisation des médicaments devrait se faire à partir de lignes directrices qui font partie, finalement, de l'évaluation de la qualité des soins médicaux et pharmacologiques dispensés dans les établissements où il y a un service médical. Par exemple, dans un CLSC ou un centre d'hébergement et de soins de longue durée, la revue de l'utilisation des médicaments fait aussi partie de l'évaluation des soins, et cette revue pourrait être assumée par ce service médical, mais, dans l'exercice de ce mandat, il faudrait s'assurer de la présence d'un pharmacien. Et je pense que c'est possible. Dans les centres d'accueil et de soins de longue durée, il y a déjà des pharmaciens qui, sans être résidents, agissent à titre de consultants. Il est possible, cela existe dans plusieurs de ces milieux, d'ailleurs, de former de tels comités avec la participation d'un pharmacien. Dans les CLSC, il n'existe pas de pharmaciens, mais je pense qu'il est possible, par entente avec un CMDP voisin, de profiter de l'expertise d'un pharmacien pour mettre sur pied de tels comités de revue de l'utilisation des médicaments.

Toujours dans la question des revues d'utilisation des médicaments, l'article 76 du projet de loi définit certaines fonctions de ce Comité, et c'est dans le chapitre de la réglementation. Nous pensons que le gouvernement devrait consulter le Conseil consultatif de pharmacologie et le Comité de revue de l'utilisation des médicaments et non pas la Régie de l'assurance-maladie du Québec lorsqu'il s'agit de déterminer les services requis sur le plan pharmaceutique. Là, on est vraiment dans l'évaluation de la qualité des soins, de la pertinence – la pertinence fait partie de l'évaluation de la qualité – et je pense que ce n'est pas dans la compétence la Régie, mais c'est dans la compétence, d'abord, des comités qu'on a formés, le comité consultatif de pharmaco, le Comité de revue de l'utilisation des médicaments, où se retrouvent des représentants des ordres professionnels concernés, médecins et pharmaciens.

Quant aux systèmes d'information en appui du régime, c'est une question qui est fort importante, fort complexe aussi. Je vous dirais qu'il est très important pour les médecins prescripteurs d'avoir accès au dossier médical des patients qu'ils traitent. Nous sommes actuellement dans une situation où, lorsque vous êtes consulté par un patient qui n'est pas votre patient habituel ou un patient qui a passé des examens ailleurs, il est difficile d'avoir accès à l'ensemble de son dossier médical, et ce, même si le patient nous donne toutes les autorisations requises. Pour la prescription pharmacologique, nous faisons face au même problème. Il est donc important que le médecin prescripteur puisse avoir accès au dossier complet de son malade, avec son autorisation, bien sûr.

Nous, comme Fédération, nous travaillons sur un projet de réorganisation des soins de première ligne et nous allons d'emblée proposer qu'il y ait un dossier médical uniforme dans chacun des territoires, sous-régions, même une région donnée. C'est bien sûr qu'un dossier médical à l'échelle de la province, c'est une question beaucoup plus complexe, plus large, mais je pense qu'il nous faut vraiment disposer d'un fichier, de banques de données qui nous permettent de connaître les médicaments pris par le patient que l'on traite. Et c'est loin d'être toujours évident, comme je l'expliquais. Il nous faut disposer également d'un logiciel sur les interactions médicamenteuses.

Mais, bien sûr, avant de mettre sur pied un tel système centralisé – à l'échelle de la province ou à l'échelle d'une région, là, peu importe – il y a beaucoup d'autres discussions qui s'imposent, car les enjeux sont très importants. Et il nous faudra absolument résoudre toute la question de la confidentialité des données. Nous avons été participants au projet-pilote de la carte à microprocesseur, qu'on appelle la carte à puce, dans la région de Rimouski. Je pense qu'on a réussi à assurer la confidentialité des données qui se retrouvent sur cette carte à puce. Il est sans doute possible d'en arriver à pouvoir disposer d'un fichier plus central qui permettrait, toujours, bien sûr, avec l'autorisation de la personne, au médecin prescripteur d'avoir une vision, une bonne connaissance du dossier médical de son patient et des médicaments qui ont pu lui être prescrits dans d'autres milieux. Et ça devient beaucoup plus facile, à ce moment-là, d'évaluer la pertinence d'une prescription, de revoir l'ensemble des médicaments pris par des personnes.

On s'est plaint souvent de la surconsommation de médicaments, particulièrement chez les personnes âgées. C'est un problème qu'on ne nie pas. Nous ne sommes pas ici pour en discourir, de ce volet particulier, mais il s'agit là, quand même, d'un problème fort important et, dans les solutions, il faudra vraiment que le médecin prescripteur ait accès à l'ensemble du dossier du malade qui le consulte et, entre autres, à son dossier pharmacologique. Le pharmacien aussi doit disposer d'un certain nombre d'informations pour en arriver à jouer son rôle de pharmacien.

Alors, voici, je m'arrête là-dessus, et nous sommes, bien sûr, disponibles.

La Présidente (Mme Charest): Merci, M. Dutil. Maintenant, nous entendrons M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Merci, Mme la Présidente. Bien, je vous remercie beaucoup pour votre contribution. Avec tous nos projets, on vous voit presque à toutes les semaines présentement et on apprécie cette contribution. Je suis content de voir que, du point de vue des médecins praticiens, qui sont eux aussi des partenaires essentiels, comme prescripteurs, dans la gestion du médicament, dans l'ensemble, ce projet de loi rencontre votre accord et que vous trouvez qu'on peut l'appliquer, en voyant des bonifications qu'on peut y faire.

Je voudrais faire un commentaire et une question, un commentaire qui est un peu une information à échanger avec vous. Quand vous parlez de l'article 51, qui, effectivement, quand on le lit comme ça, peut sembler impressionnant en disant que le Conseil consultatif de pharmacologie est composé de quatre experts en pharmacologie, c'est une section, ça, qui a été transférée, je pense, à peu près intégralement de la loi actuelle, qui définit l'organisation et le fonctionnement du CCP, du Conseil consultatif de pharmacologie; c'est déjà comme ça que c'est dit. Ça a toujours été interprété, dans la pratique, que ces experts en pharmacologie sont aussi des praticiens et des médecins, en général. Actuellement, par exemple, des quatre qui tiennent les sièges d'experts en pharmacologie, il y a un néphrologue, un intensiviste, un omnipraticien et un pharmacien. Ça a toujours été un peu... La compréhension, dans la pratique, de ce que sont les experts ne réfère pas seulement à des pharmacologues, mais à des médecins qui sont aussi des gens qui sont des cliniciens. Bon. Il faudra voir si le langage devrait être plus serré, mais ça existe déjà depuis longtemps, il y a une pratique d'établie. Je voulais au moins donner ça comme assurance, que, même si la loi...

M. Dutil (Rénald): Oui.

M. Rochon: ...n'était pas changée, on continue dans ce sens-là.

J'ai une question à vous poser. D'abord, le commentaire que vous faites au sujet de la Revue d'utilisation du médicament est très intéressant, et c'est un des éléments essentiels d'un régime d'assurance-médicaments. Au niveau des établissements, ça existe déjà et ça fonctionne très bien; on a entendu, hier soir, les représentants du Réseau de revue d'utilisation des médicaments dans les établissements. On a compris que c'est un système qui s'est développé au cours des cinq dernières années; je pense qu'ils fêtent leur cinquième anniversaire, là, dans un mois ou quelque chose du genre. C'est un système qui s'est développé à partir de la base, beaucoup, et ils nous ont fait des commentaires très intéressants sur comment ce système-là peut se monter. Et sûrement que, pour le compléter avec la partie ambulatoire, dans le domaine de l'utilisation du médicament, il y a là toute une expérience à partir de laquelle on va travailler.

Est-ce que ça ne peut pas nous amener – c'est là ma question – dans la façon de développer comme vision ce système de révision du médicament, et tablant sur l'expérience qu'on a acquise depuis cinq ans dans les établissements, à garder cette notion de territoire, qui devient aussi importante, je pense, pour la vision de l'organisation de la pratique médicale, et qu'on pourrait avoir une participation, une implication de la base, au-delà des établissements, sur les territoires, sur les régions du Québec, de sorte que les médecins, entre autres, quand ils participent à ça, puissent apporter le même genre de contribution pour l'ensemble de la population d'un territoire, comme on le fait présentement au niveau des établissements? Je ne sais pas si ça peut rentrer dans vos plans ou rejoindre vos plans, c'est-à-dire, de réorganisation de la pratique médicale.

(17 h 30)

M. Dutil (Rénald): Alors, M. le ministre, vous me permettrez quelques commentaires avant de répondre directement à cette question. Il est vrai, comme vous dites, que le Conseil consultatif de pharmacologie inclut actuellement des médecins cliniciens – j'en connais quelques-uns d'entre eux – et donc, je veux dire, il est apparu naturel à ce comité qu'il y ait des médecins cliniciens. Et je pense que la loi doit traduire une réalité plutôt que l'inverse. Alors, pourquoi ne pas le traduire dans la loi? L'assurance sera là...

M. Rochon: Ça va sans dire, mais vous aimeriez mieux qu'on le dise.

M. Dutil (Rénald): C'est bien ça. L'autre commentaire. Le Réseau de revue d'utilisation des médicaments, dans les CH, existe, bien sûr. Il faudra le systématiser dans tous les établissements où il y a un CMDP. Que je sache, ce n'est pas encore systématisé. Alors, je pense qu'il faut aller de l'avant partout où il existe un conseil des médecins et dentistes. L'infrastructure pour évaluer les soins existe déjà.

La question que vous me posez, elle est fort pertinente, elle est aussi intéressante. Elle est intéressante. Je pense qu'à partir du moment où il y aura une structure régionale – et on a eu, lors d'une autre commission parlementaire, l'occasion de vous en informer – nous allons présenter un projet de réorganisation des soins de première ligne qui inclut des propositions structurantes, dont un département de médecine générale régional; on pourrait l'appeler autrement, là, mais, pour les fins de la cause, appelons-le comme ça. Et ce département aura, bien sûr, divers mandats et, à l'intérieur d'un département, il serait possible d'établir des comités de revue d'utilisation des médicaments à l'échelle d'un territoire. Je pense que c'est une idée qui est intéressante et qui mérite d'être poursuivie, mais, dans le moment, je veux dire, on n'aurait pas l'infrastructure pour le supporter. Il faudrait vraiment voir cette structure d'abord, là, et l'analogie se fera avec l'établissement, finalement. Je veux dire, pour les patients ambulatoires traités hors établissement, un tel comité pourrait exister.

Un tel comité, pour nous, ce n'est pas là pour créer de la coercition; c'est surtout pour évaluer les profils de prescription, faire de la formation, de l'information et des stratégies d'implantation de guides de pratique ou de lignes directrices. Ce serait ça, la fonction première de tels comités. Et je pense que c'est de cette façon qu'on arriverait vraiment à améliorer la qualité des ordonnances pharmaceutiques.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui, bien, à mon tour de vous remercier d'avoir accepté notre invitation. Je constate encore une fois, à la lecture de votre mémoire, que vous êtes toujours intéressés à être associés, à être de véritables partenaires dans tout ce qui se passe dans le dossier de la réforme, aujourd'hui particulièrement dans le programme d'assurance-médicaments.

Première question. C'est votre commentaire sur l'article 70, où vous... D'abord, vous préférez parler de lignes directrices, vous l'avez mentionné, sur l'utilisation de médicaments, plutôt que de critères d'utilisation. Mais vous dites que ces lignes directrices devraient être soumises au Collège des médecins du Québec et à l'Ordre des pharmaciens. Ça, c'est l'article 70.2°. Et, au 70.8°, j'ai l'article ici: «assurer l'évaluation du programme de revue de l'utilisation des médicaments par une personne ou un organisme externe». Et, vous, ce que vous nous dites, c'est que: «Si on distingue entre des impacts économiques et des répercussions sur la qualité des soins, nous recommandons que ce dernier aspect – la personne ou l'organisme externe – soit du seul ressort du Collège des médecins du Québec et de l'Ordre des pharmaciens». Et, par expérience, quand la Fédération des médecins omnipraticiens ou d'autres organisations médicales nous disent que c'est du seul ressort du Collège des médecins, habituellement, il y a de bonnes raisons.

Juste avant de vous laisser la parole, j'en profiterais pour saluer dans l'audience l'ancien président du Collège des médecins, le Dr Augustin Roy, et je suis certain que, lui et nous, nous sommes très intéressés à vous écouter.

M. Dutil (Rénald): De savoir le Dr Augustin Roy dans mon dos, ça me rend plus insécure.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dutil (Rénald): Ceci étant dit, c'est que l'on parle ici d'évaluer la qualité des soins, et l'évaluation de la qualité des soins dans notre organisation actuelle – et nous souhaitons qu'il en soit encore ainsi pour longtemps – appartient aux ordres professionnels. Et les deux ordres professionnels concernés par l'évaluation de la qualité des soins dans ce dossier, c'est le Collège des médecins du Québec et l'Ordre des pharmaciens du Québec. Voilà pourquoi on vous dit, bon, à l'article 70.2°, que les lignes directrices doivent être soumises à ces deux ordres, parce que, lorsqu'on fait des guides de pratique ou des lignes directrices, ça a un impact important sur la qualité des services dispensés. C'est pour ça qu'on souhaite qu'il y ait consultation, à ce niveau, des ordres professionnels.

Et l'article 70.8°, là on parle d'évaluer la qualité des soins, finalement. Dans l'évaluation de ce projet, il y a plus que la qualité des soins, bien sûr, il y a les répercussions économiques, mais il y a aussi l'aspect qualité des soins. Et, sur cet aspect, il nous apparaît tout à fait logique de recommander que ce soit seulement le Collège des médecins et l'Ordre des pharmaciens qui soient mandatés pour évaluer la qualité des soins.

M. Marsan: Alors, c'est clair. Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Tout de suite?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Tout de suite.

M. Copeman: Bonjour, docteur. Il y a une chose qui m'a frappé un peu dans votre mémoire, c'est le fait que vous n'en parlez pas trop, c'est le moins qu'on puisse dire, d'un potentiel impact sur la santé de la population, de la sous-utilisation des médicaments. Et je m'explique un peu. On a eu d'autres groupes, avant aujourd'hui, qui ont exprimé une certaine réserve quant aux barèmes d'application des primes, franchise, coassurance, plafond – surtout des personnes à bas revenus – et à l'impact que ça pourrait avoir sur la consommation des médicaments, entre autres la sous-consommation, et les coûts que ça peut entraîner dans l'état de la santé de la personne et les coûts éventuels sur notre système de santé, soit par hospitalisation ou autres interventions médicales. Avez-vous une opinion sur cette question, la question de la contribution demandée des personnes, des Québécois et des Québécoises, suivant les barèmes qu'on connaît, les paramètres qu'on connaît, et l'impact que ça pourrait avoir, selon votre opinion, sur l'accès aux médicaments?

M. Dutil (Rénald): Oui, nous avons fait une réflexion. D'abord, je vous ai dit d'entrée de jeu que la Fédération était d'accord avec ce projet de loi parce qu'il permettait, beaucoup mieux qu'aujourd'hui, une accessibilité aux médications requises. Donc, on est très sensibles à cet aspect d'accessibilité pour tous les usagers de notre système de santé.

Bien sûr, le coût de la franchise et de la coassurance pourrait présenter un certain nombre de problèmes, et nous en avons discuté. Il pourrait arriver que, d'une façon ponctuelle, certaines personnes aient à prendre des médicaments et n'aient pas un sou pour les payer. Je pense qu'il nous faudra établir certains mécanismes de dépannage, mais je me fie quand même à la dynamique de notre système de santé pour couvrir ce genre de problème qu'on peut avoir, pas uniquement pour des gens qui relèvent de la sécurité du revenu, mais qui ne sont pas inaptes au travail, ou chez des personnes qui... Bon. On peut les avoir dans tous les groupes de travailleurs. Le travailleur a très peu de revenus; on ne peut pas toujours prévoir l'instant où on sera malade et où on aura besoin de payer 60 $ pour une prescription. Alors, il faudra prévoir des mécanismes de dépannage. Je ne suis pas sûr que ça doive se retrouver dans un projet de loi, mais il faudra quand même que le système soit organisé pour être capable de dépanner d'une façon ponctuelle le citoyen ou la citoyenne qui aurait un tel problème. Il ne faudrait pas établir un régime parallèle à celui qu'on veut établir pour ce type de situation. Parce que je n'ai pas besoin de vous dire qu'on pourrait très rapidement en arriver à ce que ce type de situation soit très, très fréquent et à un régime à côté, parallèle à ça.

De quelle façon le mécanisme de dépannage doit-il être établi? Je n'ai pas d'idée arrêtée là-dessus, mais une chose est certaine, c'est que la prescription que reçoit une personne dans une phase aiguë, elle n'a pas de sous, sa franchise n'est pas acquittée ou son maximum de coassurance non plus, il faudra qu'elle ait accès à des médicaments, il faudra qu'elle y ait accès. Alors je dis, moi: Pensons à un système de dépannage; c'est probablement possible sans qu'on ait nécessairement besoin de l'enchâsser dans le projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, allez-y.

(17 h 40)

M. Gagnon (Georges Henri): Je peux peut-être ajouter ici que ce que le Dr Dutil dit est vrai. Mais, pour ceux qui ont pratiqué dans le régime – j'ai pratiqué à Rimouski pendant des années – même, on avait de la sous-utilisation dans ce temps-là même si les médicaments ne coûtaient rien. Donc, il ne faut pas penser que c'est une chose nouvelle qui va peut-être être empirée par ce système. On a eu des personnes âgées, surtout... le sac brun, ça existait encore. Et puis il y avait une sous-utilisation des médicaments, même si ça ne leur coûtait rien. Alors, il va falloir qu'il y ait un contrôle, et par les gens qui prescrivent, par les médecins qui traitent ces patients-là et qui les suivent de près aussi, mais pas nécessairement uniquement par ce système-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui, M. le Président. Vous faites mention, et je pense que c'est important, là, que vous souhaitez améliorer l'accessibilité aux médicaments dans l'ensemble du système pour les patients admis ou traités sur une base ambulatoire. Nous, nous avons des craintes que le Conseil consultatif de pharmacologie puisse utiliser un critère non écrit qui est: lorsque le médicament est trop coûteux, bien, on l'étudie plus longtemps. Il est moins accessible, il n'est pas sur la liste qui est recommandée au ministre puis qui va par la suite à la Régie de l'assurance-maladie. Alors, j'ai l'impression que vous abondez dans le même sens, mais, nous, ce que nous souhaitons, c'est que, dans le projet de loi, on puisse inscrire que le critère de coût ne peut être utilisé par le Conseil consultatif et qu'il devrait faire place à des critères auxquels vous êtes habitués, des critères de reconnaissance scientifique, études multicentres, reconnaissance, publication, etc. J'aimerais vous entendre à ce sujet-là.

M. Dutil (Rénald): Écoutez, pour nous, c'est d'abord le critère qualité des soins qui prime. Donc, un produit qui peut offrir la même qualité de soins qu'un autre produit, s'il est beaucoup plus cher qu'un autre, bien... je veux dire, je pense qu'on ne peut pas nier la réalité économique, là, mais on doit d'abord faire primer la qualité des soins. Si vous me dites: Parce qu'un produit est beaucoup plus cher, il donne de meilleurs résultats, cependant, mais on ne l'inclura pas dans la liste parce qu'il est plus cher, je serai en désaccord avec ça, M. Marsan. Mais, à qualité égale, on ne peut pas faire abstraction, bien sûr, des coûts d'un tel programme.

M. Marsan: Alors, il faudrait trouver une formule pour retenir vos commentaires, parce que je pense que c'est exact que, lorsque deux médicaments peuvent avoir le même résultat bénéfique pour le patient, bien, il faut sûrement prendre celui qui est le moins coûteux. Par contre, celui qui est extrêmement essentiel et reconnu, bien, il faut que l'accessibilité de ce médicament-là puisse être donnée aux patients, sur, évidemment, prescription.

M. Dutil (Rénald): Maintenant, il faut bien évaluer tous les volets d'une telle question, parce qu'un médicament peut être plus coûteux qu'un autre qui semblerait donner de bons résultats dans l'immédiat, mais à moyen terme, en sera-t-il ainsi? On peut se poser des questions. Quelles seront aussi les répercussions économiques pour l'ensemble du programme? Sur ça aussi, il faut se poser des questions. Mais, pour nous, comme Fédération, je veux dire, c'est d'abord le critère qualité des soins qui doit primer, bien sûr sans faire abstraction des coûts et du financement d'un tel programme.

M. Marsan: Mais c'est peut-être là que votre recommandation d'ajouter un médecin omnipraticien pourrait être sagement utilisée, en tout cas, au Conseil consultatif. C'est votre recommandation, à la page 2.

M. Dutil (Rénald): Oui.

M. Marsan: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Est-ce que vous seriez prêt à faire votre conclusion, M. le député de Robert-Baldwin?

M. Marsan: Oui. De nouveau remercier nos invités qui ont si gentiment répondu à nos questions. Puis aussi, je pense, ça a donné un éclairage certain au projet de loi. Nous, nous souhaitons que ce projet puisse être étudié article par article, et plusieurs des commentaires que vous nous avez faits, nous souhaitons qu'ils puissent être intégrés au projet de loi. Nous avons des craintes, cependant. Nous craignons que ce que nous appelons, nous, la récupération de taxes, eh bien, qu'elle nous impose peut-être une échéance un peu plus rapide que prévu, et on aurait voulu prendre le temps d'étudier comme il le faut un projet de loi qui a une portée aussi importante pour notre société. Alors, de nouveau, je vous remercie bien sincèrement pour vous être déplacés, mais aussi pour la qualité de votre présentation et la qualité de vos échanges. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le ministre.

M. Rochon: Je vous remercie, M. le Président. Je vous remercie beaucoup aussi pour votre collaboration. Et je suis assez heureux, dans l'ensemble, de voir qu'on peut aller de l'avant et qu'on aura la chance, je pense, là, malgré le contexte budgétaire très difficile et les efforts budgétaires qu'il y a à faire, de pouvoir réaliser une économie sur l'utilisation des fonds publics, mais en s'assurant que la contribution additionnelle qui est demandée aux gens pour permettre cet objectif serve aussi un objectif important qui est de faire un pas énorme dans la gestion du médicament, et pour assurer que le 2 000 000 000 $ ou 3 000 000 000 $ qu'on dépense par année au Québec soit réparti autrement et assure l'accessibilité et une plus grande équité pour porter le coût du médicament.

Je vous remercie de votre collaboration et je vous remercie à l'avance pour celle que vous allez nous donner dans les prochains mois pour la mise en oeuvre d'un système comme ça, parce qu'on va avoir besoin de votre collaboration et on y compte bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Au nom de la commission, merci beaucoup. Est-ce que vous vouliez donner un commentaire?

M. Dutil (Rénald): Pas du tout, je voulais remercier la commission de nous avoir entendus.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, au nom de la commission, merci beaucoup. Les travaux sont ajournés à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 46)


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