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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Wednesday, April 6, 2005 - Vol. 38 N° 110

Consultation générale sur le projet de loi n° 83 - Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-neuf minutes)

Le Président (M. Copeman): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, chers collègues! Ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales.

Je vous rappelle notre mandat. Nous sommes réunis afin de ? et c'est un changement de terme, hein, nous sommes réunis afin de compléter et non pas de poursuivre ? compléter la consultation générale et les auditions publiques sur le projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Girard (Gouin) va être remplacé par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve). Voilà.

Auditions (suite)

Le Président (M. Copeman): Merci. Je vous rappelle, chers collègues, ainsi qu'à tous ceux qui sont ici présents dans la salle, que l'utilisation des téléphones cellulaires est interdite. Alors, je prierais tous ceux qui en font usage de bien vouloir les mettre hors tension.

Je fais rapidement lecture de l'ordre du jour. Nous allons très bientôt entendre et échanger avec les représentants du Réseau de santé de La Matapédia, qui sera suivi par l'Association du Québec pour l'intégration sociale, l'AQIS, et, à 11 heures, autour de 11 heures, Dynamique des handicapés de l'Estrie, terminer la matinée avec l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, l'AQDR, section Granby.

n (9 h 40) n

Nous consacrons, ce matin, 45 minutes aux auditions, c'est-à-dire 20 minutes pour les groupes pour faire leur présentation, et c'est suivi par un échange d'une durée maximum de 25 minutes avec les parlementaires des deux côtés de la table.

J'ai bien indiqué que nous complétons la consultation générale, et il y a une expression en anglais: «We saved the best for last.» Alors, vous ne devez pas être gênés, messieurs, c'est les meilleurs en dernier, si on peut le dire. Alors, c'est avec plaisir que nous accueillons M. Tremblay et M. Tremblay ? c'est plus facile pour le président, hein, quand j'ai juste à dire M. Tremblay ? M. Tremblay, du Réseau de santé de La Matapédia, M. Jacques Tremblay. Bonjour, M. le président.

Réseau de santé de La Matapédia

M. Tremblay (Jacques): Bonjour.

Le Président (M. Copeman): C'est vous qui allez débuter la présentation?

M. Tremblay (Jacques): Oui.

Le Président (M. Copeman): Nous vous écoutons.

M. Tremblay (Jacques): Donc, je suis accompagné de M. Gilles Tremblay, qui est le secrétaire du conseil d'administration et directeur général du Réseau de santé de La Matapédia.

Bonjour, M. le Président, bonjour, M. le ministre et Mme la députée, les personnes présentes aussi dans la salle. Avant de débuter, je tiens à vous remercier, au nom du conseil d'administration, de nous recevoir ce matin, à un moment donné, pour écouter quand même notre position concernant la loi, étant donné qu'on est un petit établissement dans une grande région.

Premièrement, le Réseau de santé de La Matapédia est issu de la fusion, en décembre 2003, du Centre hospitalier d'Amqui et du CLSC de la Vallée de la Matapédia. Ces deux établissements étaient déjà regroupés sous un même conseil d'administration depuis 1998.

Le Réseau de santé de La Matapédia porte les missions CLSC, CHSLD et CHSGS et il couvre une population de 20 000 personnes, répartie entre 18 municipalités, sur un énorme territoire de 5 376 km². La population y est plus âgée que la moyenne québécoise et le revenu familial parmi les plus bas au Québec. La MRC de La Matapédia est aux prises avec un exode massif de sa population. L'économie est basée sur l'agriculture et sur l'exploitation forestière. Ce n'est pas nécessairement rose, de ce temps-ci, dans la Matapédia.

Le Réseau de santé de La Matapédia est donc un petit établissement situé en région rurale et éloignée, dont les ressources financières sont durement touchées par les orientations récentes du financement per capita.

Deuxièmement, considérations générales. Globalement, le projet de loi n° 83 harmonise les termes et les désignations des établissements et des agences, et intègre d'une manière logique les modifications apportées à la Loi sur les services de santé et les services sociaux dans les dernières années. Le conseil d'administration du Réseau de santé de La Matapédia le reçoit avec intérêt.

Toutefois, le conseil considère qu'il ne tient pas toujours compte, dans ses dispositions, des tailles relatives des instances locales. Il nous semble mieux adapté aux centres de santé et de services sociaux créés en milieu urbain dans les derniers mois à partir de plusieurs CLSC, CHSLD et CHSGS qu'aux réalités des centres de santé et services sociaux formés d'un seul CLSC, CHSLD et CHSGS que l'on retrouve en région. Citons comme exemple l'exclusivité de fonction du commissaire à la qualité, la création d'un comité des usagers par installation de CHSLD ou la création d'un poste de DSI dans chaque instance locale.

Par ailleurs, les obligations faites aux CSS et à leur directeur général en matière de prestation de services et d'accessibilité aux services de base comme aux services spécialisés sont beaucoup plus claires que les moyens qui leurs sont donnés pour les assumer. Le mandat des agences et celui des RUIS en regard des ruptures de services de base et des ententes de continuité et de complémentarité de services pourraient être plus explicites et surtout accompagnés d'obligations spécifiques et de moyens tangibles.

Par les faits... Il y a une petite erreur ici, c'est le conseil d'administration du CSS et non le cadre. Donc, à corriger. Donc, par les faits, le conseil d'administration du CSS, qui est responsable de la mise en place de réseaux de services intégrés, de la conclusion d'ententes formelles avec l'ensemble des partenaires institutionnels, communautaires et privés du milieu, ne peut compter que sur la capacité de son directeur général et de son équipe de direction à mobiliser et convaincre ces mêmes partenaires pour assumer ses responsabilités. Dans le cas où l'un ou l'autre de ces partenaires externes fait défaut, l'obligation demeure mais sans réel moyen de l'assumer.

Nous en vivons actuellement un exemple frappant avec une absence totale d'anesthésiologistes installés dans notre établissement. Nous avons interpellé, pour résoudre cette crise, l'ensemble des instances concernées: l'agence régionale, l'Association des anesthésiologistes, la Direction des affaires médicales du ministère de la Santé et des Services sociaux et même M. le ministre lui-même. Tous sont dans l'impuissance d'affecter un ou deux anesthésiologistes à la couverture de notre population et doivent compter sur la bonne volonté individuelle d'anesthésistes dépanneurs. Si nous avons pu à date, par un véritable jeu de patchwork, éviter les ruptures majeures de services, il nous est impossible de planifier nos activités chirurgicales au-delà de la dernière période de couverture confirmée et nous vivons constamment avec l'épée de Damoclès de ruptures de services suspendue au-dessus de nos têtes. On va en parler tout à l'heure.

Dans un autre ordre d'idées, le conseil d'administration accueille très favorablement la section de la loi portant sur ? un autre petit bogue ici, c'est sur l'informatisation, non sur l'information, c'est sur ? l'informatisation ? si vous voulez en prendre note ? de certains éléments de dossier et l'accès rapide et fiable aux informations cliniques pour les intervenants concernés par un même client. Nous saluons tout particulièrement les efforts déployés pour garantir la sécurité et la confidentialité des données mises en banque.

Toutefois, il nous apparaît nécessaire de porter à votre attention que le déploiement, l'entretien, et le support technique, et la tenue à jour de tels systèmes est hors de portée de nos moyens actuels, tant financiers que techniques. Les coûts de déploiement et d'opération de ces systèmes doivent être bien évalués au préalable et les sources de financement suffisantes bien identifiées afin d'assurer le succès des systèmes d'information clientèle.

Au-delà de ces considérations générales, nous souhaitons apporter des commentaires plus précis sur certaines dispositions du projet de loi n° 83.

Troisièmement, la fonction de commissaire aux plaintes. Le retour à une fonction de commissaire aux plaintes en lieu et place de commissaire à la qualité en réduit la portée. Actuellement, le commissaire à la qualité couvre les plaintes, la gestion des risques et la qualité, aspects qui nous semblent interreliés et axés sur le développement de la qualité des services. Réduire ce rôle aux seules plaintes centre l'attention du commissaire sur des éléments de non-qualité, ce qui constitue à notre avis un contre-message par rapport à la promotion de la qualité.

De plus, l'exclusivité de fonction qui lui est imposée par le projet de loi n° 83 n'est pas applicable à un petit établissement comme le nôtre, où le nombre de plaintes ne justifie pas un poste exclusif. Si on reçoit 15, 18 plaintes par année, c'est le maximum. Cette disposition aura un impact budgétaire non négligeable qui se traduira sans doute par une compression ailleurs dans les activités de l'établissement. Et je répète cette phrase: Cette disposition aura un impact budgétaire non négligeable qui se traduira sans doute par une compression ailleurs dans les activités de l'établissement, et ce n'est pas nécessairement ce que le conseil souhaite. Enfin, le conseil d'administration est un collectif et est de ce fait mal placé pour encadrer au quotidien le commissaire aux plaintes. Il devrait continuer à relever du directeur général, tout en remettant ses recommandations au conseil d'administration.

Quatrièmement, l'obligation de solliciter l'agrément aux trois ans. Le conseil d'administration du Réseau de santé de La Matapédia souscrit sans réserve à la nécessité de promouvoir et d'améliorer constamment la qualité des services. Le conseil comprend aussi que le processus d'agrément peut être un moyen efficace d'animer une démarche de qualité dans un établissement. Toutefois, le conseil considère qu'il devrait demeurer maître de choisir des moyens de gestion de la qualité dans son établissement, en tenant... de l'environnement de gestion avec lequel il doit composer.

n (9 h 50) n

Avec le financement per capita qui est en place depuis l'an dernier, le ministère de la Santé et des Services sociaux impose des compressions majeures aux établissements des régions éloignées qui se traduiront par le non-financement des développements de services qu'il exigera. Il nous semble inopportun de restreindre en plus l'autonomie de gestion du conseil par l'imposition des démarches coûteuses d'agrément aux trois ans. De plus, le conseil trouve incongru que la loi ne précise aucune conséquence si l'agrément sollicité n'est pas accordé.

Cinquièmement, la création du comité de vigilance. Ici encore, le projet de loi n° 83 impose des moyens précis au conseil en regard des obligations que lui confie la loi. Le conseil d'administration a des responsabilités précises en matière de qualité, de pertinence et d'efficacité des services. Lui imposer un comité de vigilance est afficher la conviction du ministère des Services de santé et sécurité... ministère de la Santé et des Services sociaux, excusez, que le conseil n'a pas la maturité... ? 'est parce que c'est ça qui me fait mal, là ? le conseil n'a pas la maturité et le sérieux nécessaires pour exercer les pouvoirs et obligations que lui confient les articles 170 à 174 de la loi. Les pouvoirs d'enquête confiés à l'agence nous semblent suffisants pour traiter les cas déviants sans imposer une solution générique à un problème particulier.

De plus, il nous semble incestueux que le comité de vigilance soit formé des membres de ce même conseil et qu'il ait le mandat de veiller à ce que le conseil d'administration s'acquitte de façon efficace de ses responsabilités en matière de qualité des services. Nous voyons mal comment les membres du comité de vigilance qui participent aux décisions du conseil pourraient avoir plus de poids réel en sous-comité que celui qu'ils ont d'influencer, par leurs interventions lors des séances du conseil, les décisions qui sont prises.

Dans les faits, cette disposition du projet de loi n° 83 transfère sur les épaules de trois personnes bénévoles la responsabilité de la manière dont le conseil d'administration s'acquitte de ses responsabilités en termes de qualité des services. C'est beaucoup leur demander. Ici aussi, le conseil devrait conserver le pouvoir de choisir les moyens qu'il entend prendre pour assumer ses responsabilités et obligations.

Sixièmement, l'obligation de nommer un DSI. L'article 183 de la loi stipule que le conseil doit préparer un plan d'organisation de l'établissement qu'il administre. Le conseil devrait encore là avoir le choix de la forme et du modèle de gouverne qui convient le mieux à son établissement. Imposer une direction par corps professionnel nous semble contradictoire, alors que les instances locales doivent éclater les silos existants et favoriser le partenariat intersectoriel et interdisciplinaire. De plus, la création d'un poste de DSI, pour un petit établissement qui a déjà choisi de se doter d'un poste de RSI, implique des coûts inutiles.

Septièmement, les rôles des agences et des RUIS dans la continuité des services. L'article 340 de la loi impose aux agences d'intervenir pour favoriser la conclusion d'ententes de services interétablissements. Dans les faits, et nous le vivons actuellement en anesthésie, ni l'agence ni l'établissement demandeur ou l'établissement interpellé ne peuvent contraindre un médecin omnipraticien ou spécialiste à couvrir une interruption de services.

Malgré le bien-fondé des dispositions de l'article 340, alinéa 7.3°, et la collaboration effective des directions générales concernées et de l'agence, les moyens effectifs manquent cruellement et la prestation de services essentiels, comme l'anesthésie, continue à dépendre de la bonne volonté individuelle des médecins concernés.

Les RUIS n'ont aucune obligation réelle, sauf celle de faire des recommandations aux agences ou au ministre pour prévenir les ruptures de services à court, moyen et long terme. C'est comme le baiser d'une soeur. Les établissements membres du RUIS ont aussi une obligation d'apporter leur contribution auprès des autres établissements du territoire couvert par le RUIS pour prévenir les ruptures de services. L'intention est là, mais les mécanismes de coordination sont imprécis, et actuellement tous invoquent des carences d'effectifs pour se dégager de ces responsabilités, et c'est ce qu'on vit présentement.

Selon le conseil, le ministre devrait pouvoir compter sur une équipe d'intervention de crise pour couvrir toute interruption dans les services de base que sont la chirurgie générale... ? on se rappelle qu'il y a quelques années on a eu la perte de deux chirurgiens dans l'espace de 10 jours, un décédé, l'autre parti dans l'Ouest, et arrangez-vous vous autres mêmes ? donc les services de base que sont la chirurgie générale, l'obstétrique, l'anesthésie et la radiologie. Cette équipe de crise devrait pouvoir compter sur une participation annuelle minimale et obligatoire de tous les médecins de ces spécialités, sans quoi les populations continueront d'être prises en otages, comme c'est le cas actuellement. Cela redonnerait tout son sens au serment d'Hippocrate ? j'ai manqué de dire «hypocrite», mais c'est «Hippocrate». Mon directeur, il dit: Ne fais pas ça.

De plus, la table régionale des chefs de départements de médecine spécialisée devrait toucher les activités médicales particulières prévues à l'article 361.2 de la loi en plus de celles de l'article 361.1, et ce, pour les spécialités de base telles que la chirurgie générale, l'anesthésie et la radiologie.

Enfin, les RUIS devraient inclure les centres de services de santé, qui sont les premiers clients, dans leurs instances de consultation et de planification. Il y a beaucoup plus de place dans la conception proposée pour les RUIS pour les questions stratégiques reliées aux services tertiaires et quaternaires que pour l'accessibilité et la continuité aux services de base, qui représentent environ 80 % de la consommation de services.

Huit, les comités des usagers. Le projet de loi n° 83 prévoit la création d'un comité d'usagers par installation de CHSLD, ce qui selon nous crée des structures inutilement lourdes. À titre d'exemple, nous opérons deux installations offrant de l'hébergement de longue durée, une de 98 lits et une autre de 23 lits. Il serait inopportun d'avoir un comité d'usagers pour 98 clients et un autre pour seulement 23 clients. Ici encore, on devrait faire confiance aux conseils d'administration et ne leur demander que de s'assurer que l'ensemble des besoins des usagers soient pris en compte par le comité des usagers.

En conclusion, par ces observations, nous souhaitions mettre en lumière que le projet de loi n° 83 ne prend pas suffisamment en compte la réalité des petits centres de services santé et sociaux, qu'il manque de moyens pour que soit garantie la prestation des services de base dans tous les CSS, qu'il augmente les obligations et les contrôles sur les conseils d'administration bénévoles des établissements de santé. Déjà lourde, la tâche de ces administrateurs bénévoles ne doit pas être inutilement augmentée au risque de voir une désaffectation des membres de la communauté.

Nous espérons que ces réflexions vous permettront de mieux saisir la réalité de nos petits établissements situés loin des grands pôles urbains. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. Tremblay. Alors, afin de débuter l'échange, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, messieurs Tremblay, si je peux m'exprimer ainsi, merci de votre visite. Ça fait déjà quelque temps qu'on se connaît. On s'était vus en mars 2003, je me souviens très bien. Vous m'aviez déjà expliqué la façon dont vous fonctionniez, avec une intégration assez intéressante, particulièrement en santé mentale. On en parlait tantôt, avant le début de nos débats.

Évidemment, votre contribution est importante parce qu'elle nous permet effectivement de nous concentrer sur la réalité des plus petits milieux. Et le fait que vous dites «nous sommes un plus petit milieu» témoigne du fait que nous n'avons pas appliqué la formation des réseaux de façon uniforme et rigide. Vous le savez très bien dans votre région, vous en êtes un. Il y a également d'autres centres de santé et services sociaux, comme celui des Basques, par exemple, où le nombre de citoyens couverts est très petit sur un territoire cependant assez grand. Alors, je pense que c'était la raison pour laquelle on voulait que chaque région établisse son modèle.

Et bien sûr cette petite taille comporte son lot de problèmes, hein, ne nous en cachons pas. Vous en avez énuméré plusieurs, en commençant par la pénurie, que vous vivez actuellement, d'anesthésistes ou d'anesthésiologistes ? je ne suis pas sûr comment ils veulent qu'on les appelle, ces jours-ci. Et, moi qui reçois les situations d'une façon régulière, je sais bien que votre établissement et d'autres également, d'ailleurs, dans la même région, Gaspésie?Bas-Saint-Laurent, sont souvent menacés, particulièrement en anesthésie. Et chaque fois on réussit effectivement, avec des efforts importants, et de votre part, et de la part du ministère, et de l'Association des anesthésistes, à trouver un peu, souvent à la dernière minute, une solution, puis ça vous empêche de planifier j'en suis certain.

Est-ce que vous avez des ententes en vue avec, par exemple, le Centre hospitalier régional de Rimouski ou le RUIS de Laval pour essayer d'avoir une stabilisation de ce phénomène-là ou vous en êtes encore à vous fier aux médecins dépanneurs de façon, là, prévisible?

M. Tremblay (Gilles): La situation qui prévaut actuellement est la dernière option que vous venez de décrire, c'est-à-dire qu'on se base présentement uniquement sur la disponibilité des médecins dépanneurs pour couvrir nos périodes en anesthésie. On vit assez régulièrement, depuis les dernières semaines, de petites ruptures en anesthésiologie.

n (10 heures) n

J'utilisais mon téléphone cellulaire de manière interdite tout à l'heure pour valider où on en était rendus dans la situation, et, pour vous donner un exemple, on est couverts présentement jusqu'au 12 avril, à 17 heures. On va avoir une rupture de services qui va s'étendre du 12 avril, 17 heures, au 16 avril, à 8 heures, et après ça on reprend jusqu'au 23, avec un autre anesthésiste dépanneur, et là on a une rupture pour la fin de semaine. Donc, on est toujours un peu chaotiques.

On a tenté des approches à la fois avec le RUIS et à la fois avec nos partenaires régionaux, et je vous dirais qu'on n'a pas vraiment senti de sensibilité à notre situation. Ce qu'on nous a très bien fait valoir, là, c'étaient les situations déjà problématiques qui étaient vécues dans les établissements les plus gros et que malheureusement ils ne pouvaient pas dégager personne pour venir nous aider. Donc, dans certains cas, il n'y avait pas de volonté, je pense, du groupe d'anesthésistes. Je n'irais pas à présumer que ça signifiait une mauvaise volonté de la direction de l'établissement. Les contacts, entre autres entre notre établissement et le CHRR, le Centre de santé et de services sociaux de Rimouski-Neigette, maintenant sont excellents au niveau des deux directions générales. On se parle constamment, on se tient informés des situations que l'on vit, mais, ni lui ni moi, on ne peut imposer, même en passant par la Direction des services professionnels et même en passant par le CMDP, on ne peut...

M. Couillard: Et même par moi.

M. Tremblay (Gilles): ... ? et même par vous d'ailleurs, hein, la loi est faite comme ça, c'est une réalité ? on ne peut imposer à un médecin d'aller couvrir une interruption de services dans un autre établissement. Et là-dessus je vous dirais que la bonne volonté, au niveau de l'anesthésie, est particulièrement plus difficile à trouver que dans d'autres spécialités comme la radiologie ou la chirurgie, où les équipes de dépanneurs semblent être un peu plus fortes.

Autre facteur très inquiétant en chirurgie, c'est qu'on voit passer les anesthésiologistes dépanneurs présentement, c'est des gens qui sont en préretraite ou en retraite ? ils demeurent quand même actifs dans le dépannage ? mais qui sont tous très âgés. Donc, on peut présumer que, d'ici quelques années, on pourrait se retrouver devant une situation où il n'y aurait même plus de liste de dépanneurs, et ça nous préoccupe, je vous dirais, beaucoup.

Ce qu'on sent aussi ? peut-être que c'est une mauvaise perception ? au niveau des régions, c'est que la réponse qui nous est souvent offerte est d'augmenter les équipes dans les centres hospitaliers universitaires ou universitaires intégrés, d'augmenter les ressources en ville pour pouvoir desservir les régions. Ça peut à prime abord paraître intéressant, sur le plan mathématique, là, on augmente les ressources, d'un côté, il y a l'obligation de couvrir les plages horaires, de l'autre côté, mais, quand on regarde toute la dynamique et la vie départementale en anesthésie ou en chirurgie, les interactions qu'il devrait y avoir avec les médecins omnipraticiens, là, on ne crée pas de solution, chaque individu vient pour sa période à lui et n'a pas dans le fond la responsabilité d'assumer une vie départementale.

Et, comme, dans nos établissements, il y a deux niveaux de médecins, il y a les omnipraticiens qui couvrent les services d'urgence, d'hospitalisation de base, soins intensifs, la médecine générale, et les spécialistes, comme les dépanneurs anesthésistes, chirurgiens ou radiologistes, là, cette interaction-là entre les deux équipes est très importante, puis ça, on ne l'a pas. On l'a vécu en chirurgie pendant la première année de notre rupture de services. Maintenant, on a un chirurgien installé et on commence à voir se rétablir cette interaction-là. On peut discuter de certaines situations ou de certains arrimages qu'il doit y avoir entre l'équipe de médecins omnipraticiens internes et le représentant du département, là, qui est installé sur place.

M. Couillard: Malheureusement, je pense qu'il faut quand même envisager le type de solution que vous avez mentionné, peut-être pas nécessairement avec les entités universitaires, mais avec votre pôle régional. C'est peut-être plus proche comme ça. Parce que la réalité est la suivante. En anesthésie, heureusement, on a plusieurs des grosses cohortes de résidents qui vont bientôt graduer, donc le nombre de spécialistes disponibles, au cours des prochaines années, va graduellement augmenter chaque année. Ça fait que, compte tenu des choix de carrière puis du type de pratique que les jeunes médecins fraîchement diplômés recherchent maintenant, c'est très difficile, même lorsque les postes sont disponibles ? vous en savez quelque chose ? de convaincre quelqu'un, à un ou à deux, de venir s'installer à plein temps.

Alors, la solution qu'on est en train d'explorer dans plusieurs régions, qui semble porteuse d'avenir, c'est de faire ces ententes de desserte non pas avec nécessairement des hôpitaux universitaires, mais en premier lieu on demande à la région elle-même de voir si, au niveau régional, au niveau du pôle régional, on pourrait, par exemple, accorder un, entre guillemets, surplus d'effectifs en anesthésie ? je prends l'exemple là ? avec charge cependant, pour ce département, tout le département, et non pas seulement les deux ou un nouveaux arrivants, mais tout le département, de s'engager de façon formelle et écrite à une desserte régulière et stable pour un établissement comme le vôtre. La même chose exactement se produit entre Rivière-du-Loup, par exemple, et Notre-Dame-du-Portage ou entre Montmagny et l'Hôtel-Dieu de Lévis. On a ce genre de situation partout au Québec. Et je ne pense pas nécessairement que l'augmentation des effectifs, au cours des prochaines années, va obligatoirement apporter une solution. Je pense qu'il faut commencer à être imaginatif, là, pour cette question-là.

Pour en revenir aux éléments de votre mémoire, parce qu'on a relativement peu de temps devant nous ? je pense que c'est important cependant qu'on échange sur ce qui vous préoccupe de façon quotidienne, cette question des effectifs médicaux ? la question du traitement des plaintes. Vous savez, les gens qui se sont manifestés en représentant les usagers, ou les patients, ou les personnes qui reçoivent des services, nous ont dit: Donnez-nous un endroit où on peut clairement s'adresser pour déposer notre plainte. Et ce qu'on a remarqué également, dans notre groupe de travail dont le rapport a été déposé il y a quelques mois, c'est que, partout où on trouve qu'il y a eu... pas partout, mais là où il y a eu des problèmes identifiés ? je suppose que chez vous ça va bien, là ? mais partout où il y a eu des problèmes identifiés, ce qu'on remarque, c'est une sorte de déconnexion entre le traitement des plaintes puis les membres du conseil d'administration. On voit un conseil d'administration qui n'est tout simplement pas au courant qu'il y a eu des problèmes de tel ou tel type dans son établissement et que les actions ont été ou n'ont pas été prises. Alors, il nous semblait très important de refaire ce lien-là entre le conseil d'administration et le traitement des plaintes. Et je dois dire qu'en général la création du comité de vigilance, le rattachement au conseil d'administration sont des choses qui ont été en grande majorité très bien reçues. Là, vous apportez une coloration différente qui vient, je crois, de votre caractéristique de plus petite taille, et on la reçoit, là, on trouve ça important comme remarque.

Même chose pour le commissaire local, lorsque vous dites qu'effectivement, pour un petit établissement, ça peut être très lourd d'avoir à justifier un poste exclusif. Il ne faut pas nécessairement mélanger exclusif et temps plein. Peut-être que vous pourriez fort bien partager un commissaire local avec un réseau voisin, de population moindre également, et partager également les frais qui en découlent. Je pense qu'on peut certainement envisager ce genre de situation-là. Et on est disposés à permettre que, dans certains cas, le commissaire local puisse exercer des fonctions qui ont trait à la qualité justement ou qui mesurent la satisfaction des usagers. Alors, je pense que vous voyez qu'il y a des accommodements possibles, là. Est-ce que vous ne pensez pas qu'il y aurait moyen d'être... je dirais, de s'adapter, pour un établissement comme le vôtre?

M. Tremblay (Jacques): On parlait d'effectif médical, une réalité qu'on est en train de vivre. Dans les mois qui viennent, à un moment donné, on a encore une perte potentielle de cinq médecins qui s'en vont de la région. Et, je peux vous dire une chose, à un moment donné, le cri d'alarme s'en vient, dans la Matapédia, parce que...

Un exemple. Lorsqu'il arrive un médecin, normalement, ça arrive assez régulièrement, c'est un couple, deux médecins. C'est très bienvenu. Mais, lorsqu'ils s'en vont, c'est deux aussi. Puis, quand c'est deux couples, c'est quatre, tu sais. Ça fait que qu'est-ce qu'il arrive à ce moment-là? En tout cas, c'est la situation qui s'en vient.

Si on parle au point de vue anesthésistes, ce qui nous aide beaucoup à l'heure actuelle, il y a quelqu'un qui travaille dans un grand centre mais qui vient nous dépanner, à un moment donné, parce qu'il vient de la région. Ça, c'est l'aspect d'appartenance à la région. Et ça, on peut vous dire, s'il n'était pas présent, on aurait un problème majeur, dans la Matapédia, d'anesthésistes.

M. Couillard: Vous avez, je crois, un groupe de médecine de famille, là.

M. Tremblay (Gilles): Un GMF, oui.

M. Couillard: Est-ce qu'il est bien fonctionnel?

M. Tremblay (Gilles): La difficulté du GMF dans le fond est la même que celle que, nous autres, on retrouve au quotidien, c'est-à-dire que c'est la précarité des effectifs médicaux. Les quatre départs dont M. Tremblay vient de faire état, ce sont quatre médecins... trois médecins membres du GMF, là ? un n'était pas membre du GMF ? et on est en train de travailler avec eux sur les conséquences de ce départ-là, parce que deux de ces quatre médecins-là pratiquaient à Causapscal, qui est un des trois pôles de notre territoire, donc ça laisse découverts, leur départ, là, des services médicaux courants pour peut-être 80 % à 90 %, là, de la clientèle. Il y a deux autres médecins qui sont là à temps partiel.

Il y a une difficulté majeure aussi qui est de composer avec les obligations de base que ces médecins-là ont à couvrir, les services, les activités médicales particulières à l'hôpital: garde à l'urgence, obstétrique et hospitalisation. Et je vous dirais que probablement que la solution qu'on va devoir appliquer à court terme, c'est de transférer une partie du volume à l'urgence, tout en sachant que ce n'est pas la place, là, et de mettre une espèce de solution temporaire, le temps qu'on ait appliqué du... que nos mesures de recrutement aient produit des résultats.

M. Couillard: Dans la minute qu'il me reste, je vais vous suggérer une autre solution. Plutôt que de faire ça, c'est d'aller voir votre directeur régional de médecine générale et de demander une redistribution des AMP, ce qu'il est possible de faire région par région, sur la base de ce qu'on appelle un réseau d'accessibilité. Alors, si vos médecins sont d'accord pour offrir l'accessibilité dans leur cabinet ou ailleurs qu'à la salle d'urgence, de façon correcte, il est certainement possible pour une région d'avoir l'autonomie de décider d'attribuer des AMP pour ça. Et c'est beaucoup mieux que de tout renvoyer à l'urgence. Ça a été fait ailleurs. Alors, je vous suggérerais peut-être de...

M. Tremblay (Gilles): Que la pratique de famille devienne une AMP pour notre région. C'est ce que je comprends?

n (10 h 10) n

M. Couillard: Lorsque c'est dans le cadre d'un réseau d'accessibilité, avec accessibilité garantie. Il faut que les médecins s'engagent également à donner une accessibilité des plages horaires, parfois les plus désagréables, les plus défavorables, mais c'est là que les gens souvent ont besoin de consulter. Mais, dans tous les cas où ça a été offert, on a, dans toutes les régions où ça a été fait, accordé des heures d'AMP pour ça. Je vous suggère d'envisager cette solution-là avant d'aller... de tout envoyer vos gens à la salle d'urgence.

Le Président (M. Copeman): Merci. J'ai une demande d'intervention de la part de Mme la députée de Matapédia. Ça prend le consentement des membres parce qu'elle n'est pas membre de la commission. Je présume il y a consentement. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci. Alors, je m'excuse de mon retard, j'étais en commission sur l'énergie. Mais je m'en serais voulu de ne pas vous entendre et d'être ici présente pour le restant de cette séance avec vous. Et, moi, M. le ministre et les collègues qui sont là, ça fait des années, ça fait 10 ans maintenant que je suis députée et qu'on travaille avec les personnes qui sont là effectivement à faire en sorte que les besoins soient répondus pour une population de 20 000 habitants, et ce n'est pas facile. Et, moi, je vous le dis, M. le Président, les gens qui sont là, c'est des vaillants, c'est des vaillants et ils travaillent toujours avec des situations difficiles. Et nous avons à acheminer régulièrement des personnes vers des services de santé, à 1 h 30, c'est-à-dire vers Rimouski, ou à une heure de route, dans des situations qui ne sont pas faciles, des conditions de route difficiles, des conditions hivernales comme on a chez nous.

Alors, pour moi, je veux aussi vous dire que des fois, quand on recrute, on essaie de recruter des médecins, des spécialistes... Parce que chez nous c'est un drame quand on perd des chirurgiens, un. On en a deux au plan d'effectifs, on en a perdu deux en même temps. Et on a monitoré ? je vais le dire comme ça parce que c'est vraiment comme ça qu'on le vivait ? on a monitoré avec les plages de temps puis on disait: Bon, là c'est comblé, là ça ne l'est pas, là ça ne l'est pas. Et on était considérés comme en état d'urgence aussi par le ministère de la Santé, à Québec.

Alors, moi, je veux juste vous dire que, comme députée, je reconnais le travail très, très tourné vers la clientèle que vous faites, vers les personnes âgées. Parce qu'on a aussi une population vieillissante. Alors, ce n'est pas facile. Moi, je veux reconnaître votre travail. Puis j'ai trouvé que le contenu de votre mémoire est quand même extrêmement intéressant, puis ce n'est pas pour être complaisante que je dis ça. Alors, c'est tout ce que j'avais à dire. Puis je suis très contente que vous ayez pu vous faire entendre aussi lors de cette commission. Voilà.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, M. Jacques Tremblay, M. Gilles Tremblay, ma collègue vous a souhaité une bienvenue de la part de l'opposition officielle. C'était important. Vous savez que c'est notre dernière journée de commission parlementaire, nous siégeons depuis le 9 février dernier, et c'est la première fois que nous entendons le point de vue, si vous voulez, d'une région rurale. Alors, pourtant, je crois que vous êtes notre 88e mémoire ou en fait que nous recevons... vous êtes le 88e organisme. Et il fallait le faire. Alors, je vous en félicite.

C'est évident que les points de vue exprimés l'ont souvent beaucoup plus été du point de vue... Évidemment, c'est une loi omnibus, hein, c'est une loi dans laquelle on retrouve... C'est la première fois, je crois, dans le domaine de la santé et des services sociaux, qu'il y a une loi omnibus. Habituellement, ce sont des lois du niveau municipal, on les appelle les lois autobus, c'est-à-dire qu'on peut rentrer toutes sortes de choses dedans. Alors, il y a de tout dans cette loi-là, évidemment. On a entendu beaucoup de groupes de personnes âgées notamment sur toute la question de l'hébergement en résidence privée. Mais le point de vue rural, là, c'est la première fois qu'on l'entend.

Et ce que je comprends de ce que vous nous présentez ce matin, c'est que les règles, quand elles sont mur à mur, elles ne sont pas sur mesure et elles, disons ? je vais prendre une expression latine ? elles ne fittent pas pour vous. Alors, je me demande s'il n'y aurait pas lieu, honnêtement, là, s'il n'y a pas lieu pour le ministre et le ministère d'examiner ce qui pourrait être adapté pour des centres comme le vôtre qui couvrent de très grands territoires mais pour une petite population. Hein, c'est comme inversement proportionnel.

Mais je voudrais peut-être revenir aux ruptures de services. Mais auparavant vous nous dites, dans votre mémoire ? je crois que c'est à la page 5 ? vous dites: «Il nous apparaît nécessaire de porter à votre attention que le déploiement, l'entretien, le support technique et la [mise] à jour de [systèmes d'informatisation] ? pour la conservation, la circulation de l'information patient, là, à la fois clinique et autre ? est hors de portée de nos moyens actuels, tant financiers que techniques.» J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Parce qu'une fois la loi adoptée comment vous allez procéder, comment vous allez faire? Puis également vous entendre... Parce que, dans quelques jours, quelques semaines sans doute, enfin, aurons-nous les crédits du ministère pour l'année 2005-2006. Alors, vous dites que le per capita vous a... Je crois que c'est dans votre mémoire. Attendez, j'ai vu ça à un moment donné.

Une voix: À la page 6...

Mme Harel: C'est la page 6, hein.

Une voix: ...au quatrième paragraphe.

Mme Harel: Tout à fait. Alors, c'est le financement per capita qui vous impose des compressions majeures. J'aimerais ça vous entendre là-dessus également. Merci. M. Gilles.

M. Tremblay (Gilles): Pour le premier volet de votre question, Mme Harel, ce qui nous inquiète... excusez, ce sur quoi on voulait attirer votre attention ? parce que je ne peux pas vous dire qu'on est inquiets, là, au point d'en faire de l'anxiété ? mais ce sur quoi on voulait attirer votre attention, c'est: jusqu'à date, le déploiement des systèmes d'information s'est fait souvent avec un financement qui n'était pas complètement attaché ou qui prévoyait une contribution significative de l'agence et de l'établissement. Dans certains cas, dans le passé, on a même eu carrément des mises en demeure, là: Vous déployez tel système avec le peu qu'on vous donne ou ça va vous coûter le double dans deux ans ou dans trois ans quand on l'imposera à tout le monde. Ça a été le cas du système SIIATH, là, avec la gestion des banques de sang.

On a aussi souvent constaté ? puis ça a été fait encore cette année avec le déploiement des systèmes de requête-résultat, là, qui permettent l'échange des résultats de laboratoire entre le requérant, qu'il soit médecin ou qu'il soit un service de l'établissement, et le laboratoire ? le déploiement de ces systèmes-là a été mal estimé, les coûts de déploiement ont été mal estimés. Et là, là-dessus, je ne voudrais pas jeter de pierre à personne. Comme on avance dans des domaines qu'on connaît très peu, on avance en augmentant notre risque d'erreur. Puis le risque d'erreur, en gestion, c'est une réalité avec laquelle on doit composer à tous les jours. Mais les dernières expériences qu'on a vécues nous amènent à craindre que le déploiement de ces systèmes-là et les coûts de récurrents qui vont y être associés ne soient pas pris en compte. Et, s'ils nous sont laissés, autant le renouvellement des équipements, les licences de maintenue, de mise à jour des logiciels que l'obligation d'avoir du personnel technique sur place pour répondre aux problèmes techniques ou faire de la formation des utilisateurs, si on reste avec ces coûts-là, on ne sera pas capables de les assumer.

Et de là le lien se faisait avec le financement per capita. On est une région en forte décroissance de population. Les gens qui restent chez nous souvent sont les personnes âgées qui n'ont pas le moyen de s'en aller et des jeunes qui, pour une raison ou pour une autre, là, demeurent dans la région. Et, en forte décroissante de population, on a une pression financière à la baisse qui est créée uniquement par ce mouvement de population là et on doit maintenir un niveau de services minimal, et ça nous oblige non pas à dégager une nouvelle offre de services à partir d'enveloppes supplémentaires qui nous viennent, mais à transformer ce qu'on est.

Je ne voudrais pas laisser entendre qu'on est en carence globale de ressources financières. On a quand même 27 millions de dollars qui sont consentis aux services de santé et aux services sociaux dans la Matapédia. Ce qui nous pose une difficulté, c'est de transformer notre organisation à la fois en prenant en compte les services qu'on doit offrir actuellement, en prenant en compte les réalités de conventions collectives, les engagements qui sont pris envers le personnel actuel et les besoins qui sont à développer.

Dans les ententes de gestion qu'on passe avec l'agence, on a déjà discuté de la nécessité d'augmenter de manière très significative l'offre de services en santé mentale, au niveau des jeunes. Présentement, ce qu'on pourrait dégager actuellement, c'est plus du personnel au niveau technicien: technique sociale, travailleur social, du personnel infirmier, des infirmières auxiliaires. Ça, on pourrait réaménager des fonctions. Mais le besoin est plus pour des psychologues, là. Donc, on est dans une espèce de no man's land ou de zone de transformation, là, pendant laquelle on doit à la fois préparer ce qui nous est demandé, puis c'est nécessaire pour les besoins de la population, et en même temps prendre en compte que les ressources actuelles, on est obligés de les payer quand même.

Il y a des opportunités qui vont se dégager dans le temps avec les mises à la retraite, ces choses-là. Ça peut prendre trois à cinq ans, là, selon les modélisations qu'on a faites, mais ça nous crée une pression vraiment particulière qui, je pense, est unique aux régions éloignées qui sont considérées comme... je n'ose pas dire riches, là, mais je dirais en excédent de ressources par rapport à d'autres, là. Parce que je ne pense pas qu'on soit nécessairement riches, là. Je pense que la difficulté est beaucoup plus, dans le vieillissement de notre population, d'arriver à combler globalement les besoins de la population, là, que de dire: Il y en a trop à un endroit et pas assez dans un autre. Donc, c'est cette double dynamique là.

n (10 h 20) n

Et on parlait tout à l'heure de... Mme Doyer parlait de l'équipe de gestion qu'on a chez nous. On est 14 cadres au Réseau de santé de La Matapédia. On est probablement le... ou le deuxième établissement, entre guillemets, le plus performant, selon les analyses qui sont faites, là, en termes de gestion, performant en termes de faiblesse de coûts, je vous dirais, là. Ça nous crée aussi des difficultés quand on doit faire face à des obligations comme ce qui est prévu présentement dans le projet de loi aussi. Comme on est très peu, on est limités dans notre capacité à dégager des gens. C'est une réalité vraiment, là, qui est, je vous dirais, paradoxale et, par certains moments, ça devient un casse-tête, là. Il faut trouver un moyen de l'oublier, là.

Mme Harel: Je vous remercie, là, de ce que je considère être comme un témoignage au nom des régions rurales, hein, parce que ce que vous nous exprimez, d'autres n'ont pas pu venir le dire, mais le diraient de la même façon, j'imagine, aussi, hein?

M. Tremblay (Gilles): J'imagine, oui.

Mme Harel: Vous êtes parmi les MRC, je crois, parmi les 10 MRC qui ont une population à la fois vieillissante et, je crois, avec un très faible niveau de revenus, je pense également, hein?

Une voix: Oui, tout à fait.

Mme Harel: Dites-moi, en matière d'interruption de services, le ministre vous disait tantôt envisager que les PREM, là, les plans régionaux d'effectifs médicaux, si j'ai bien compris, puissent prendre en considération, au niveau régional, des affectations supplémentaires pour couvrir les régions. Est-ce que c'est ce que je comprends? Quant aux spécialistes, ce seraient les PREM qui affecteraient des spécialistes supplémentaires pour pouvoir couvrir les régions?

M. Couillard: C'est-à-dire que l'établissement de nos invités, aujourd'hui, a un PREM d'anesthésistes, je suppose, mais qu'ils ne sont pas capables de remplir parce qu'il n'y a pas personne qui y va. Alors, la solution qu'on est en train de dégager dans plusieurs régions, c'est de dire: Vous allez aller à votre pôle régional, vous allez voir si eux accepteraient, moyennant une augmentation de leur effectif, de s'engager, pas de façon... sur le coin d'une table, là, mais de façon formelle, à apporter une solution pour les ruptures de services près de chez eux, parce qu'ils sont le pôle régional, ils ont la responsabilité pour leur région. Maintenant, ils nous disent: On est en pénurie d'effectifs aussi. D'accord, mais on peut travailler là-dessus.

Mme Harel: Oui, M. Tremblay, je pense.

M. Tremblay (Jacques): Peut-être une parenthèse pour compléter. On prend un exemple. Lorsqu'on demande à un centre de santé de nous dépanner, à un moment donné, au point de vue anesthésie, puis c'est impossible, il manque d'effectifs, à un moment donné, ils demandent une résolution à notre établissement, à notre réseau de santé pour qu'eux autres aient un anesthésiste supplémentaire. C'est la réaction de notre réseau de santé, et ça, c'est complètement, excusez, ridicule.

Mme Harel: C'est pour ça que je veux vous entendre là-dessus. Parce que ça, c'est la position des fédérations de médecins spécialistes, hein, mettre les spécialistes dans les capitales régionales.

M. Tremblay (Gilles): Il y a une situation particulière à l'équipe d'anesthésie qui est présentement, là, au Réseau de santé de Rimouski-Neigette. Il n'y a pas une très grande ouverture de leur part à venir supporter les établissements qui sont, dans le fond, dans leur zone d'influence, là. Parce qu'on gravite alentour de ce pôle régional là. Et on a eu une rencontre, directeurs généraux, directeurs des services professionnels et présidents de CMDP, pour essayer d'améliorer les corridors de services entre nos établissements, et c'est là que cette demande-là nous avait été faite: Non seulement on ne peut pas aller vous aider, mais on vous demande un anesthésiste de plus qu'à notre plan pour répondre aux besoins régionaux.

Il y a du travail à faire avec... probablement avec cette équipe-là en particulier. Et c'est partagé, je vous dirais, avec l'agence. On a un excellent support de l'agence du Bas-Saint-Laurent là-dessus. Il y a eu, encore cette semaine, une rencontre privée, c'était au niveau de la radiologie, celle-là ? quand je dis «privée», c'est entre médecins, là ? où les gens ont discuté de la nécessité de voir plus large que l'établissement lui-même, de voir la responsabilité régionale d'une manière beaucoup plus large que dans les frontières, les murs de l'organisation qui est à Rimouski.

Mme Harel: Est-ce que les privilèges ne devraient pas devenir régionaux plutôt que par établissement? Le Danemark...

M. Couillard: ...Dr Dugré.

Des voix: ...

Mme Harel: Le Danemark... Vous savez, le ministre a envoyé une délégation au Danemark, mais, en lisant le compte rendu, je me rendais compte qu'au Danemark c'est régional, c'est régionalisé.

M. Couillard: Mais le Danemark, c'est un petit pays très concentré en population. Là, on a des régions qui sont très vastes et très...

Le Président (M. Copeman): Écoutez, je veux...

Mme Harel: Ici, encore plus...

Le Président (M. Copeman): Je veux bien laisser la discussion un peu floue, mais malheureusement il n'y a plus de temps, nous avons déjà dépassé le temps à la gauche. M. Jacques... M. Tremblay, très brièvement.

M. Tremblay (Jacques): Oui, la conclusion de la conclusion, si vous me permettez, M. le Président. La réalité, à l'heure actuelle, du Réseau de santé de La Matapédia, c'est qu'avec les coupures qu'il y a eu en forêt, à un moment donné, dans les dernières années, il y a perte de 300 emplois. Il y a encore des coupures, cette année, qui s'en viennent, il y a encore un 200 emplois qu'on perd. À l'heure actuelle, 1er juin 2005, le bureau du médecin de Causapscal ferme, plus aucun médecin.

Ensuite de ça, à un moment donné, c'est qu'on parle... à un moment donné, il y a une insécurité qui se fait, à l'heure actuelle, dans le secteur Causapscal, il y a de l'angoisse. On va prendre un exemple. On parle du domaine de la santé mentale. On a eu un suicide hier matin, on en a eu un avant-hier, dans le secteur Causapscal, et, si on regarde ce secteur-là, à un moment donné, on est plus haut que la moyenne provinciale, c'est officiel, puis ce n'est pas normal qu'on laisse ça de même. Nous autres, on est bien contents d'être venus nous exprimer ce matin là-dessus, mais...

Le Président (M. Copeman): Alors, M. Jacques Tremblay, M. Gilles Tremblay, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom du Réseau de santé de La Matapédia.

J'invite immédiatement les représentants de l'Association du Québec pour l'intégration sociale à prendre place à la table.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Copeman): Alors, la commission poursuit ses travaux. C'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes de l'Association du Québec pour l'intégration sociale. Mme la présidente Cholette, bonjour. Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation, et je suis dans l'obligation d'être très strict dans l'attribution des temps. Ce sera suivi par un échange d'une période maximum de 25 minutes, divisées équitablement, par les deux côtés de la table.

Nous connaissons Mme Milliard, Mme Navert, mais je tiens à peut-être vous demander de les présenter puis par la suite débuter votre présentation.

Association du Québec
pour l'intégration sociale (AQIS)

Mme Cholette (Lucie): Bonjour. Alors, je vous présente Susie Navert, qui est conseillère à l'AQIS, et notre directrice générale, Diane Milliard.

Alors, M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, vous le savez, l'AQIS est un organisme qui est voué à la cause des personnes présentant une déficience intellectuelle. Nous regroupons plus de 84 associations qui oeuvrent dans le domaine, à travers tout le Québec. Nos membres sont principalement des associations de parents, bien que nous comptions également des membres affiliés, dont des comités d'usagers de centres de réadaptation en déficience intellectuelle. L'inclusion pleine et entière à la société des personnes présentant une déficience intellectuelle est notre priorité.

Nous tenons d'abord à vous remercier de nous accueillir aujourd'hui. Ça nous permet de faire notre part pour tenter d'améliorer le projet de loi. Notre première remarque manque totalement d'originalité. À l'instar de plusieurs groupes, nous ne pouvons que dénoncer les désolants 30 jours ouvrables accordés pour faire l'analyse du projet de loi avant le dépôt de notre mémoire. Ce projet de loi, lequel, pensons-nous, en contient plusieurs, est d'une importance telle qu'il changera le portrait québécois en matière de dispensation des services de santé et des services sociaux. Ce qui devait être une simple loi d'harmonisation contient plusieurs autres dimensions qui auraient mérité chacune un débat social.

Dans un tel contexte, notre réflexion ne s'est attardée qu'à quelques articles du projet qui touchent particulièrement nos membres, même si ce n'est pas des articles qui leur sont spécialement destinés. Nous allons aborder la question de l'organisation des réseaux locaux et des services de première et de deuxième ligne, celle de la certification des résidences privées, la communication de renseignements sans consentement et les services de conservation de renseignements.

n (10 h 30) n

Bien que nous prônions l'inclusion et les mêmes droits pour tous, nous sommes conscients des efforts supplémentaires que cela demande. La réalité, c'est qu'une adaptation est souvent nécessaire pour inclure les personnes qui vivent avec une déficience intellectuelle, et cela, dans presque tous les domaines, la dimension médicale incluse. Idéalement, les services généraux de santé devraient être disponibles en première ligne pour tout le monde, y compris les personnes qui vivent avec une déficience intellectuelle. En réalité, nous nous questionnons très fortement sur la capacité actuelle du réseau d'offrir adéquatement ces services à cette catégorie d'usagers.

Vous avez lu dans notre mémoire, nous avons fait une consultation, et les professionnels de la santé ne sont pas prêts à recevoir nos gens. Nous avons même eu de la difficulté à intéresser la Fédération des médecins omnipraticiens à participer à notre projet. Nous ne faisons pas partie des priorités, nous ne représentons que 3 % de la population. Et de façon générale les professionnels de la santé ne sont pas à l'aise devant nos enfants, petits et grands, ils ne savent pas comment s'adresser à eux. Et une consultation médicale avec une telle personne demande plus de temps qu'une consultation avec la population en général. On n'est pas prêt à nous accueillir. Évidemment, ces données sont loin de nous rassurer.

Oui, il y a des lacunes présentement. Nous voulons nous assurer qu'elles ne seront pas plus grandes avec la réorganisation des services. C'est pourquoi nous exigeons des garanties de base avant de procéder à des changements aussi importants. Nous voulons la consolidation des services de première ligne avant d'y adhérer.

Nous devons nous rendre à l'évidence, nous avons encore beaucoup de sensibilisation à faire avant que la société soit prête à inclure nos personnes dans toutes ses sphères d'activité. Présentement, malgré une politique d'intégration dans les services de garde, nos enfants sont peu présents. Malgré une Loi sur l'instruction publique qui stipule que la place première de tout enfant est la classe régulière à l'école du quartier, le taux d'intégration en classe régulière de nos enfants est ridiculement bas. La participation de nos adultes sur le marché du travail est plus que limitée. Même l'inscription aux activités de loisir des villes ou des associations récréatives est compliquée. Nous ne sommes pas prêts à sacrifier la qualité des soins accordés à nos enfants.

Quand on parle de première ligne, si on prend comme exemple des services de physiothérapie ou d'ergothérapie, si les accidentés de la route, si les accidentés du travail passent encore en priorité, si les personnes venant des urgences passent avant nous, notre tour ne reviendra pas vraiment souvent. Réapprendre à marcher après un accident, c'est concret, c'est court dans le temps. Mais qui se soucie d'un enfant vivant avec une déficience intellectuelle qui ne marche pas à 18 mois? Et ça, c'est quelque chose qui est très possible avec un suivi en ergothérapie. On pense souvent que c'est normal parce que l'enfant est réputé lent à apprendre.

Nous voulons de la fluidité dans les deux sens entre les organisations de première et de deuxième ligne. Le projet de loi ne réglera pas le problème de pénurie de professionnels. Nous ne voulons pas passer d'une liste d'attente à une autre. Avec le réaménagement, à certaines places, on parle d'intervenants pivots dans chaque établissement. La stabilité des intervenants, c'est primordial quand on vit avec une déficience intellectuelle. Si vous voulez vraiment mettre l'usager au centre des préoccupations, nous croyons qu'il devrait y avoir un intervenant par personne pour assurer le lien entre les différents établissements. La crainte des parents face à ce départage de la première et de la deuxième ligne est telle que certains d'entre eux, les plus aguerris, pour ne pas dire les plus vieux, pensent que nous devrions faire reconnaître la déficience intellectuelle comme une spécialité. Si l'histoire se répète, les parents vont encore perdre au change.

Et je vous donne ici le résultat de la fusion des CLSC sur mon... La dernière fois que je suis venue, je vous avais parlé de notre allocation de répit, chez nous, le 250 $ aux six mois. Alors, avec la création du CSSS, il y a eu fusion de CLSC et, harmonisation de pratiques oblige, alors on a voulu avoir une gestion plus simple. On nous a dit, à nous, les parents, que la gestion serait beaucoup plus simple. Alors, depuis le 1er avril, au lieu de recevoir 250 $ pour six mois, que l'on dépense et qu'on envoie nos pièces justificatives, alors ils ont changé un petit peu la donne: maintenant, on dépense le 250 $, on envoie les pièces justificatives et on se fait rembourser. Et là j'aimerais vous dire qu'il y a beaucoup de parents qui n'ont pas les sous pour le prendre, cet argent-là de répit, ce 250 $ là. Alors, si, ça, c'est l'exemple de mettre l'usager au centre des préoccupations, moi, je suis bien préoccupée par la réforme.

Nous croyons important d'exiger une formation adéquate des professionnels face à la déficience intellectuelle. Nous demandons l'établissement d'un échéancier pour ajuster la démarche. À l'article 99.8, on parle déjà d'évaluer la satisfaction de la population. Il est important d'être plus précis à ce sujet et d'inclure dans le projet de loi des objectifs de résultat évalués à temps fixe. Nous, on vous suggère peut-être après deux ans. Un tel ajout est d'ailleurs déjà présent. Si on regarde le projet de loi n° 56, à l'article 33, on prévoit déjà des temps très spécifiques dans le temps, où il doit y avoir des rapports d'effectués pour voir si ça fonctionne, et, si ça ne fonctionne pas, on peut réajuster le tir tout de suite.

Nous voulons l'instauration d'enveloppes budgétaires protégées. Comment s'assurer que les argents qui sont aujourd'hui destinés à la déficience intellectuelle le seront encore demain? La déficience intellectuelle, ça ne fait pas de bruit, ça ne saigne pas, puis les résultats des interventions, c'est à très long terme. Ce sont tous des facteurs qui nous font craindre qu'on va se retrouver en queue de liste des priorités. L'équité intrarégionale, c'est un principe qui est juste et noble, et c'est certain qu'il n'y a personne qui est contre ça. Mais nous ne voulons pas perdre ce que nous avons mis tant de temps et d'énergie à acquérir. Rappelons-nous que, lorsque nous parlons des services aux personnes les plus vulnérables, la sagesse du vieil adage populaire «mieux vaut prévenir que guérir» devient on ne peut plus appropriée.

Nous aimerions être rassurés que tous les usagers seront rapidement desservis. Nous aimerions être assurés que personne ne se retrouvera assis entre deux chaises. Et cela arrive souvent dans les cas, par exemple, de double diagnostic où les établissements se renvoient la balle. En somme, nous sommes préoccupés non seulement par le maintien des services, mais aussi par l'amélioration de la qualité de ces services pour les personnes présentant une déficience intellectuelle et leurs familles. Nous craignons également que la réorganisation envisagée ne remédicalise la déficience intellectuelle. Nous sommes enfin sortis du modèle médical pour progresser vers un modèle de services sociaux; on aimerait conserver nos acquis.

Des événements plus ou moins récents ont clairement démontré le besoin des personnes vulnérables, en résidence privée, d'être adéquatement protégées contre l'abus ou la négligence. Nous avons écrit notre mémoire en insistant sur ce besoin pour toutes les personnes vulnérables, pas seulement les personnes âgées en perte d'autonomie, mais aussi les personnes ayant une déficience intellectuelle ou physique, celles qui ont des problèmes reliés à la santé mentale ou à la toxicomanie. La certification obligatoire devrait donc s'étendre à toutes les clientèles vulnérables.

Nous croyons que le processus de certification se doit d'être le plus simple et le moins coûteux possible. Nous voulons éviter la création d'un réseau clandestin de résidences plus ou moins recommandables. Les normes pourraient à la limite ne pas être aussi élevées que dans les établissements publics. Après tout, ce ne sont pas des hôpitaux, mais des milieux de vie.

Est-ce que la certification est le bon outil, ou un permis quelconque ne ferait-il l'affaire? Nous n'en savons rien. Ce qui nous apparaît toutefois primordial, c'est qu'il y ait une véritable possibilité d'inspection dans toutes les résidences où se trouvent des personnes vulnérables. Cela implique une équipe en nombre suffisant, du personnel adéquatement formé, l'obligation pour les propriétaires de laisser entrer les personnes responsables de délivrer le permis ou le certificat ainsi que les personnes chargées d'enquêter suite à une dénonciation. Et le gouvernement doit avoir la possibilité de contraindre les contrevenants à régler les situations inacceptables.

La certification prévue n'aurait probablement pas amélioré les conditions de vie décrites dernièrement au Centre Rachel simplement parce que les gestionnaires n'auraient probablement pas demandé la certification. Voilà donc la meilleure preuve qu'une forme quelconque de certification ou de permis doit être obligatoire. Toutefois, quelle que soit la décision prise, il importe qu'elle soit appliquée. Et nous avons en tête le registre des résidences pour personnes âgées, bien que, dans la loi, depuis un certain temps, il n'est toujours pas finalisé.

Nous avons dit que ces résidences sont des milieux de vie. À cet égard, nous demandons l'assouplissement des règles de visites pour les proches des personnes hébergées dans des ressources de type familial ou les ressources intermédiaires. Il est déplorable qu'un parent ne puisse visiter à sa guise son enfant adulte.

Un mot sur les organismes communautaires. Le projet de loi semble vouloir leur donner des devoirs ou, à tout le moins, les mettre à contribution. Est-ce qu'on va leur en donner les moyens? Les organismes communautaires sont des ressources qui sont très fragiles, le plus souvent pauvres en ressources humaines et monétairement. Je vous donne un exemple: le Regroupement pour la trisomie 21, qui est à l'oeuvre depuis 20 ans, qui dessert au-delà de 250 familles et qui ne reçoit absolument aucune subvention gouvernementale, il doit s'en remettre à la générosité de la population. Dans ce contexte, les services offerts par les organismes communautaires sont toujours très précaires.

n (10 h 40) n

Parlons maintenant de la question de la transmission d'informations sans le consentement. Vous n'êtes pas sans savoir à quel point les organismes de défense des droits sont frileux lorsqu'on parle de la confidentialité de leurs dossiers. C'est que leurs membres ont déjà été échaudés. Lorsqu'ils sont pris en charge par un établissement, ils n'ont souvent plus d'intimité. Une information confidentielle qu'ils transmettent à un des membres de l'équipe multidisciplinaire se répand très souvent à l'intérieur de l'établissement, verbalement, et même quelquefois à l'extérieur de l'établissement, et cela, dans le but de mieux renseigner les intervenants pour qu'ils ajustent leurs interventions. Le but est donc noble, mais la finalité est que tout le monde est au courant de l'information, et ce, malgré le contexte légal où la confidentialité doit être rigoureusement acceptée.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux le sait bien, et il l'a d'ailleurs souligné lors de cette commission, malgré les balises actuelles, la confidentialité est un peu utopique. Que sera-t-elle si on assouplit les règles? Que deviendra-t-elle si on laisse au bon jugement de chacun quelles informations doivent être soumises? Le ministre s'est dit prêt à assouplir le projet de loi et à rendre plus explicite la transmission d'informations dans le cadre des plans de services individualisés. C'est bien. Sauf que nous ne comprenons pas en quoi il serait compliqué de faire signer un consentement à l'usager ou à son tuteur. N'est-il pas supposé être présent lors de l'élaboration de son plan de services? Ne serait-ce pas une façon de lui laisser un contrôle sur sa vie, de le responsabiliser?

Dans le même ordre d'idées, pourquoi, lors d'un transfert à un organisme communautaire, ne ferait-on pas signer un consentement à l'usager? Lorsqu'on lui annonce cette décision, n'est-il pas présent physiquement? Quelles sont les raisons qui justifient d'enlever le besoin de consentement? Nous espérons que le ministre pourra nous éclairer à ce sujet, car notre compréhension actuelle nous fait craindre au plus haut point les conséquences des changements proposés.

La confidentialité, ça devrait être pris très au sérieux. Si vous nous parlez de professionnels de la santé, de médecins, d'infirmières, de pharmaciens, ces gens sont soumis à un code de déontologie très strict qui traite de la confidentialité. Mais, lorsqu'on parle d'entreprises d'économie sociale, d'organismes communautaires, qui va s'assurer du respect de la vie privée?

Contrairement au flou des articles sur la transmission d'informations sans consentement, ceux qui touchent les services de conservation de certains renseignements aux fins de la prestation de services de santé sont très encadrés. Les principes de respect du droit à la vie privée, de la transparence, du consentement obligatoire irrévocable, de la non-discrimination, du droit à l'information, de la limitation de l'utilisation et de la communication de renseignements, droit d'accès et de rectification des données factuelles, responsabilité et imputabilité en matière de sécurité, confidentialité, garantie de sécurité, ce sont des principes auxquels nous adhérons, mais nous croyons que ces mêmes principes devraient être appliqués à la transmission d'informations.

Comment pouvons-nous nous assurer que les informations recueillies par les services régionaux de conservation ne soient ensuite transmises à d'autres sous le couvert des articles 3, 4 et 5 du projet de loi? Les articles de la transmission ne viennent-ils pas annuler les beaux principes des articles sur la conservation?

Par ailleurs, certains groupes souhaitent que les usagers aient la possibilité de retirer une ou des informations de la banque de conservation, ce à quoi le ministre a rétorqué que l'intervenant perdrait alors confiance en l'outil. Donc, on met tout ou on ne met rien. Et, si on ne met rien, bien l'intervenant doit procéder à l'analyse de façon traditionnelle, il va poser des questions, et l'usager peut répondre en toute franchise ou retenir les informations de toute façon. Alors, on n'est pas plus avancé. Toujours afin de laisser à l'usager le contrôle des informations qu'il veut transmettre, pourquoi ne pas simplement cocher une case, si des informations ont été retirées? À ce moment-là, l'intervenant peut aller questionner l'usager, qui transmettra de vive voix, s'il le juge pertinent, la teneur de l'information retirée. Ça évitera également que des usagers refusent ou retirent leur consentement à la création de ce dossier.

La confiance de l'intervenant est importante, nous en convenons, mais la confiance de l'usager est également importante. On le répète, le système actuel, bien que sévère, est très imparfait. Il ne faudrait pas ouvrir la porte plus grande qu'elle ne l'est déjà. Voilà pourquoi nous exigeons que la notion de consentement demeure à la base, donc tout aussi bien pour la transmission d'informations.

On se pose également des questions... Je vais abréger un peu parce que le temps file. Toute la question de la gestion et du fonctionnement de la banque de conservation, c'est une tâche administrative de plus. Les médecins manquent déjà de temps, est-ce qu'on n'alourdit pas leur tâche en leur demandant de faire d'autres choses?

Également, à l'article 2, on se questionne sur la pertinence de l'article 245, au paragraphe h.3, qui prévoit que la régie va pouvoir «recueillir et conserver» pour transmettre des renseignements à propos des médicaments. Je ne sais pas si quelqu'un d'entre vous a essayé dernièrement d'appeler à la régie. Moi, je travaille dans une pharmacie et je rencontre très régulièrement des gens qui doivent téléphoner à la régie pour certains renseignements; ce n'est pas accessible. Quand les gens me disent: J'ai passé une journée au téléphone et je n'ai même pas réussi à être en attente sur la ligne parce que, ils me disent, les lignes sont occupées, rappelez plus tard, les lignes sont occupées, rappelez plus tard, et, quand finalement tu as la ligne, tu peux attendre une heure, deux heures au téléphone avant qu'on te prenne, c'est inimaginable. Alors, je pense que la régie présentement, elle a déjà beaucoup de choses à faire. Comment on va réussir à... Comment cette régie va réussir à avoir de nouvelles tâches, à accomplir des nouvelles tâches qui sont très importantes, parce qu'on parle de confidentialité de dossiers, de vie privée? On se demande encore comment elle va réussir à gérer ça.

Le Président (M. Copeman): Mme Cholette, je vais juste vous indiquer: il reste un peu plus que 1 min 30 s, là.

Mme Cholette (Lucie): Alors, je termine. Je termine en vous réitérant que nous attendons avec beaucoup de fébrilité l'annonce des argents destinés aux personnes ayant une déficience intellectuelle et à leurs familles, tel que nous l'a promis ou en tout cas nous en a parlé à plusieurs reprises, l'an dernier, au cours de la dernière année, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Merci beaucoup.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, madame. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, Mme Cholette, Mme Navert et Mme Milliard, pour votre visite aujourd'hui. Effectivement, le domaine de la déficience intellectuelle est un domaine où des investissements ont été faits et seront encore nécessaires. Vous connaissez très bien la situation, on a déjà échangé là-dessus, il a fallu créer un nouveau programme, en fait entièrement nouveau presque, pour les troubles envahissants du développement. D'ailleurs, M. Bouchard, le président de l'Association des CRDI, récemment nous demandait de changer le nom des CRDI pour: CRDI ? centre de réadaptation en déficience intellectuelle ? et TED. Là, on réalise que bien sûr, beaucoup de ressources ayant été affectées là, la clientèle que je pourrais qualifier de non-TED, en déficience intellectuelle, à bon droit, est en retard dans les investissements, on est d'accord avec ça. Il y a eu 5 millions, au cours de l'année actuelle, pour justement le répit auquel vous faisiez allusion, mais, pour les services directs, on sait qu'il faut faire plus d'efforts. On verra ce que le budget nous apporte à cet effet-là.

Je rappelle également qu'il s'agit d'une enveloppe budgétaire protégée, dans le cadre de la gestion par programme. Il y a un programme qui s'appelle, comme vous le savez, Déficience intellectuelle et TED. Je pense qu'il est important de bien départager ce qui devrait être fait en première et ce qui devrait être fait en deuxième ligne. Un centre de réadaptation en déficience intellectuelle, c'est un établissement spécialisé, donc un établissement de deuxième ligne. M. Bouchard nous disait aussi qu'il faudrait s'assurer que les gens en première ligne prennent également leur part de responsabilité dans cette clientèle-là, et je pense que c'est une remarque qui est tout à fait justifiée.

Pour ce qui est de la protection des renseignements, on a déjà exprimé clairement que non seulement l'information serait explicite, mais le consentement serait explicite lors de la transmission des renseignements de l'intérieur de l'établissement vers un partenaire, par exemple une entreprise d'économie sociale, ou popote roulante, ou un groupe communautaire, là, pour les clientèles qui vous occupent. Donc, de ce côté-là, on est assez... on est très ouverts même aux remarques qui nous ont été faites, comme vous le faites ce matin.

Vous avez parlé des médecins. En fait, les médecins qui ont fait l'objet du projet pilote sur ce type de système de transmission de renseignements se déclarent, à toutes fins pratiques, unanimement, là, extrêmement satisfaits, et non seulement ça n'alourdit pas leur tâche, ça l'allège, au contraire. Parce que, pour avoir fait la pratique, quand vous êtes obligé de passer une heure ou deux heures pour essayer, à gauche, à droite, par téléphone, d'obtenir des résultats de laboratoire et des renseignements, en fait c'est là que votre pratique devient alourdie. Et le fait de bénéficier de transmission efficace de renseignements, c'est très bénéfique non seulement pour les médecins, mais pour les gens qui ont les services.

Et c'est pour ça que cette question du consentement est si importante. Parce que, lorsqu'on fait des sondages à la population, la très grande majorité, plus de 90 % des gens ? en fait, c'est 95, même, pourcent des gens ? disent que, oui, ils vont consentir. Ils veulent que les renseignements soient transmis parce qu'ils savent que ça va leur être bénéfique pour la qualité et la continuité des services. Et certainement la nécessité d'encadrer mieux la transmission d'informations entre l'instance locale et le partenaire est importante, et on va s'y adresser.

n (10 h 50) n

Pour ce qui est de la question de la Régie de l'assurance maladie du Québec, il ne s'agit pas de renseignements par téléphone, il s'agit de ce qui est déjà disponible sur le plan numérique, le profil pharmacologique, que tout le monde nous dit. Et pour les gens que vous représentez également, c'est important. S'il y a une chose qui est essentielle, c'est d'avoir la liste des médicaments que quelqu'un prend, pour éviter de faire des duplications de prescriptions ou de créer des effets secondaires avec des coexistences de médicaments qu'on ne connaît pas. Et je pense que ça, c'est excessivement important.

Est-ce que, sur le plan de la... Comment vous voyez ce partage des responsabilités entre la première ligne et la deuxième ligne, là, pour les gens en déficience intellectuelle, avec le modèle qui dirait que le centre de réadaptation en déficience intellectuelle a une mission régionale de niveau spécialisé? Mais qu'est-ce qui pourrait... ou mieux être fait, plus près des gens, en première ligne?

Mme Cholette (Lucie): Nous, ce qu'on aimerait, finalement, c'est que les gens qui ont une déficience intellectuelle restent rattachés au centre de réadaptation, qu'au lieu de passer en première ligne directement, qu'il puisse y avoir... ? comment je vous dirais ça? ? qu'ils puissent rester au niveau du centre de réadaptation pour des services qui sont encore...

Je regarde, c'est certain que quelqu'un qui a une déficience intellectuelle légère, qui se présente aux urgences, va être quand même probablement assez bien traité. Si vous vous présentez chez un médecin de médecine générale avec un enfant qui ne parle pas, avec un enfant qui a une déficience profonde, ils ne savent pas comment les traiter. Et présentement on sait qu'il y a beaucoup de centres de réadaptation qui ont des médecins qui desservent la population qui est plus alourdie, et on pense que, jusqu'à un certain point, même si ces médecins-là font de la médecine de première ligne, ils ont une clientèle spéciale et ils devraient rester peut-être au niveau des centres de réadaptation. On a très peur de revenir en arrière. Parce que présentement les choses qui sont offertes dans...

Je regarde, dans ma région, les services d'orthophonie sont offerts en première ligne, et c'est très, très peu, là, je veux dire, c'est à peine si on réussit à les voir. Si tu ne vas pas en privé, là, au niveau public, c'est à peu près inexistant, les services qui existent. Alors, on a peur que, si on tombe en première ligne, on va tomber comme en arrière de tout le monde. Parce que, comme je vous le disais, souvent c'est des traitements qui sont à long terme. Tu fais de la physiothérapie avec un enfant qui a une déficience intellectuelle, bien tu peux faire de la physiothérapie ou de l'ergothérapie longtemps, là. Il a 15 ans, il a 20 ans, puis tu peux encore en faire avec. Ce n'est pas limité dans le temps.

M. Couillard: Mais vous recommandez cependant la consolidation des services de première ligne dans votre...

M. Cholette (Lucie): Oui, parce que, si, effectivement, un jour, la première ligne serait apte à nous recevoir... C'est ce qu'on vise effectivement, ce qu'on veut. Ce qu'on pense, c'est qu'elle n'est pas prête présentement. On n'aimerait pas passer en première ligne d'ici un an, d'ici deux ans; on pense que les gens ne sont pas prêts à nous recevoir.

M. Couillard: Mais est-ce qu'à votre avis il y a quelque chose dans le projet de loi actuel qui vous empêche de continuer ce que vous vivez actuellement au niveau des médecins de centres de réadaptation ou la réalité d'aujourd'hui? À ma connaissance, il n'y a rien qui empêche qu'on continue comme c'est actuellement. Est-ce que vous voyez des articles précis où on dit qu'il faudrait que ça cesse, cette façon de faire, par exemple, que d'avoir l'accompagnement des médecins, des CRDI ou des...

Mme Milliard (Diane): ...à ce qu'on comprend, c'est qu'actuellement les personnes qui ont une déficience intellectuelle vont d'abord devoir aller au CSSS à partir du moment où elles auront besoin d'un traitement. Et, par la suite, si le traitement est un traitement qui est dit non spécialisé, il sera... il pourrait, parce que ce n'est pas certain pour nous qu'il serait traité au CSSS. Et, si on identifie qu'il a un besoin spécialisé, il pourrait aller au centre de réadaptation.

Le problème qu'on a, c'est que, les services spécialisés, qu'est-ce qui va être dans les services spécialisés? C'est-à-dire que Mme Cholette disait tout à l'heure: Un enfant qui a une déficience intellectuelle, de 18 mois, qui ne marche pas, est-ce qu'on va considérer que c'est un service spécialisé, ou on va dire: C'est à cause de sa déficience, ce n'est pas grave, on va attendre? Est-ce que, par exemple, un enfant qui ne parle pas, qui a une déficience intellectuelle ? puis on sait qu'ils ne sont pas prisés par les orthophonistes actuellement ? va se ramasser encore plus longtemps sur la ligne d'attente parce qu'il ne sera plus dans un service spécialisé, il va être dans un service de première ligne, donc en arrière-queue parce que le milieu régulier ne sera pas pressé de le desservir?

C'est que, pour nous, la ligne des services spécialisés et la ligne des services génériques offerts à l'ensemble de la population est loin d'être claire. Et en fait on ne s'appuie pas sur des impressions. C'est comme Mme Cholette le disait tout à l'heure, c'est qu'en 2002-2003 et 2003-2004 nous avons fait des consultations dans le cadre d'un projet Accès Santé, pour lequel nous recevons une importante subvention du gouvernement fédéral, pour s'assurer que les services de santé de première ligne, comme on les mentionne actuellement, sont accessibles aux personnes. Nous sommes allés à Québec, un milieu urbain; nous sommes allés à Sept-Îles, un milieu éloigné; nous sommes allés au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Et ce qu'on nous dit... On a rencontré des intervenants, on a rencontré des parents, on a rencontré des personnes du Mouvement Personne d'Abord, et les difficultés actuelles, on ne les a pas inventées, là, ça fait l'objet d'une compilation actuellement. Puis on dit, bon: C'est très difficile de garder le médecin... un même médecin longtemps. Vous allez me dire: C'est pareil pour tout le monde. Mais, quand on a une déficience intellectuelle, c'est encore plus problématique parce que c'est important d'avoir une identité, de pouvoir avoir toujours la même personne.

Le délai d'attente en salle d'urgence est catastrophique. Souvent, même en salle d'urgence il y a des parents âgés qui nous ont dit qu'ils ne voulaient même pas soigner leur enfant de 50 ans parce qu'ils considéraient que ce n'était pas du tout de leur ressort. Les parents sont mal à l'aise face aux autres patients. Les infirmières veulent que le parent demeure là parce qu'elles ne savent pas comment dealer avec la personne, donc les parents doivent s'absenter du milieu de travail. Ce n'est pas toujours possible, quand on a un travail dans un... en privé, c'est presque impossible. Dans le domaine du réseau de la santé et des services sociaux, peut-être qu'on peut prendre des congés sans solde, mais ça devient problématique pour la famille. Souvent, les parents qui accompagnent un adulte ne sont pas pris au sérieux. On dit: Bien non, ça n'a pas de bon sens, voyons donc, ils le protègent bien trop.

Il y a aussi, pour les personnes qui ont une déficience intellectuelle, bien là, écoutez, ce qu'ils nous disent, là, c'est que les médecins ne les comprennent pas. Il n'y a pas d'incitatif financier, comme Mme Cholette le disait tout à l'heure. C'est sûr que, quand on soigne une personne qui a une déficience intellectuelle, il faut d'abord la mettre à l'aise, il faut adapter sa communication dans un langage clair. Et vous savez qu'une consultation de médecin, c'est quoi, en termes de carte, là, c'est 15 minutes? On n'a même pas eu le temps de lui demander finalement c'était quoi, son problème, puis on dit... Donc, c'est effectivement très problématique.

M. Couillard: Et je pense que le temps doit presser, mais je terminerais en disant que, comme convenu, les visites dans les ressources intermédiaires et ressources familiales qui accueillent les clientèles telles que les déficients intellectuels vont commencer ce printemps et qu'on accepte également très positivement vos remarques sur la nécessité d'étendre une forme de certification également aux résidences qui accueillent des clientèles telles que celles que vous représentez aujourd'hui. Vous l'avez bien exprimé aujourd'hui, et je pense que la logique est là. Et les événements récents également nous montrent que c'est nécessaire.

Cependant, ce que j'ai cru remarquer, c'est que les problèmes vécus dans ce type de résidences là sont très souvent de l'ordre de l'environnement physique ? salubrité ? plus que de l'ordre des services. C'est un peu différent par rapport aux personnes âgées. Il va peut-être falloir faire un ajustement de ce côté-là.

Le Président (M. Copeman): Ça va? Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme Cholette, merci à vous, merci à Mme Milliard et à Mme Navert de venir en commission parlementaire nous présenter la somme dans le fond de vos expériences, de vos connaissances. Le ministre... Ma collègue la députée de Rimouski et porte-parole de l'opposition en matière de services sociaux... alors je vais donc procéder très rapidement, parce qu'elle pourra échanger avec vous.

Le ministre vient de mentionner qu'il était à regarder la possibilité d'élargir la certification aux résidences privées d'hébergement pour des personnes vulnérables qui sont autres que des aînés. Mais ça reste encore une certification facultative. Et vous avez bien expliqué ? j'espère qu'il aura l'occasion d'en prendre connaissance très attentivement ? pourquoi cette certification doit être une certification obligatoire et pourquoi les résidences privées de personnes vulnérables qui ne sont pas nécessairement en perte d'autonomie, comme vous l'expliquez très bien dans votre mémoire, mais qui sont des personnes vulnérables, pourquoi, compte tenu du vieillissement aussi de la population mais compte tenu des demandes de plus en plus grandes pour de l'hébergement pour des personnes vulnérables... comment il est important que ce soit obligatoire, parce qu'il n'y a pas vraiment un... la loi de l'offre et du marché ne s'applique pas vraiment.

Alors, je pense que là-dessus le ministre devrait aussi prendre en considération presque l'unanimité ? je crois que c'est même l'unanimité ? de tous les intervenants qui sont venus devant la commission parlementaire à l'occasion de cette dernière journée pour nous dire clairement qu'il est de son intention de ne pas créer un système à deux vitesses en matière d'hébergement.

n (11 heures) n

Alors, je sais que ma collègue veut vous interroger aussi. Peut-être juste une question: Comment il se fait que les parents, dans les ressources intermédiaires et les ressources familiales, ne peuvent pas visiter les enfants? Est-ce qu'ils le peuvent à des moments précis? Est-ce qu'il y a des règles du jeu? Comment tout cela se passe?

Mme Cholette (Lucie): Souvent, la famille qui reçoit l'enfant, elle est chez elle, alors elle reçoit quelqu'un chez elle et il y a des règles. Alors, si les parents veulent aller, il faut qu'ils s'annoncent d'avance. Des fois, les règles, ça va être le dimanche après-midi ou... Ça l'empêche... Je vous dirais, si votre enfant est dans la ville voisine et vous avez affaire à la ville voisine pour x raisons, dire: Ah bien, je vais arrêter, je suis à côté de chez mon fils, je vais arrêter le voir comment il va, la plupart du temps, tu ne peux pas faire ça. Les responsables des familles d'accueil ne veulent pas. Ils disent que c'est une intrusion dans leur vie privée.

Mme Charest (Rimouski): C'est assez particulier.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Bienvenue, mesdames. Je trouve, suite à votre commentaire, que c'est quand même assez particulier. On accepte de recevoir moyennant une rétribution, donc ça devient un service rétribué, ça demeure... ça devient une résidence d'hébergement privée pour une personne vulnérable, et il me semble qu'à ce titre-là on ne devrait pas avoir de règles d'heures de visite, là, fixes, parce que...

Est-ce que vous êtes à même, dans ces cas-là, de pouvoir vous assurer de la qualité du milieu de vie et aussi des types de services? Est-ce qu'ils sont de qualité? Est-ce que les personnes dans ces maisons sont bien traitées? Est-ce que vous avez des possibilités, avec des heures de visite aussi rigides, de pouvoir avoir l'heure juste par rapport à ce qui se passe avec les personnes vulnérables qui sont hébergées comme ça?

Mme Milliard (Diane): Mais, en fait, quand on parle de familles d'accueil ou de ressources intermédiaires, il faut quand même dire qu'ils sont sous la responsabilité de centres de réadaptation.

Mme Charest (Rimouski): Oui, c'est vrai.

Mme Milliard (Diane): Donc, minimalement, là, je pense qu'il y a une qualité qui est donnée par le centre de réadaptation. Mais une règle est très fixe. Nous, en fait... C'est comme disait Mme Cholette, quand tu as un fils de 40 ans, puis que tu as envie d'aller le voir, le dimanche après-midi, puis tu ne t'es pas annoncé ce dimanche-là, tu ne peux pas y aller. C'est dans un objectif... Ce n'est pas toujours dans un objectif de dénoncer puis de dire: Mon fils est maltraité. C'est juste dans un objectif de garder un lien familial. Mais actuellement ça ne se peut pas, les centres de réadaptation... Je ne pense pas que ce soit formalisé dans les contrats, mais ce n'est pas possible pour les parents d'aller dans une ressource intermédiaire, dans une famille d'accueil sans aviser. Et, si elles le font, elles se font réprimander par le centre de réadaptation.

Donc, à ce moment-là, si on s'annonce, bien c'est facile de mettre la poussière en dessous du tapis. Mais il n'y a pas toujours de poussière en dessous du tapis à mettre, aussi, là. Il faut dire qu'il y a des familles d'accueil qui accueillent très bien nos jeunes, puis les ressources intermédiaires aussi. Mais c'est cette espèce de... Ça laisse comme une suspicion aux parents de dire: Est-ce que mon fils est bien ou est-ce qu'il n'est pas bien? Alors, pourquoi ne pas permettre... en tout cas d'élargir, d'avoir une souplesse plus grande? Je ne dis pas à tous les jours puis à n'importe quelle heure du jour, mais au moins d'avoir une souplesse plus grande pour permettre aux parents d'aller visiter leurs enfants.

Puis, écoutez, ça fait très longtemps que c'est soulevé, ça. Je pense que même Me Ménard, quand il est passé en commission, en a parlé. Ce n'est pas légiféré, mais il y a comme quelque chose, là, qu'on n'est pas capable de saisir. Il y a une interdiction non formelle, mais ce n'est pas possible de visiter les jeunes.

Mme Charest (Rimouski): Merci. Dans un autre ordre d'idées, je reviendrais sur la certification des résidences privées d'hébergement pour personnes vulnérables. Le ministre vous a laissé voir qu'il aurait une ouverture, là, pour les personnes vulnérables, mais, moi, je tiens à vous informer que, nous, de l'opposition officielle, on veut que cette certification-là soit obligatoire, qu'elle ne soit pas facultative, parce qu'on a vraiment fait le choix de s'assurer qu'il n'y aura pas deux types de résidences privées d'hébergement, une pour ceux qui vont avoir la certification et ceux qui ne l'auront pas. Parce qu'on sait très bien que ceux qui auront la certification pourront même justifier des prix parfois un peu plus élevés parce qu'ils sont certifiés et que celles qui de toute façon ne demanderont pas la certification, on n'est pas certain non plus de la qualité et on ne pourra pas aller vérifier.

Alors, moi, je pense que là-dessus je suis heureuse de constater que vous en arrivez à la même conclusion. Et je tiens à vous dire que vous pouvez compter sur nous pour défendre cet élément-là parce qu'on le pense majeur. C'est fondamental, là, pour la qualité de vie et pour aussi assurer la sécurité. Des événements comme on a vus dernièrement, là, la maison Rachel, à Montréal, je pense que ce n'est pas la seule, il y en a sûrement d'autres, et il ne faut pas... Et, même s'il y en aurait juste une, c'est injustifié. Et on ne doit pas avoir de tolérance par rapport à ça, ça doit être la tolérance zéro par rapport à ce qui peut se passer dans ces résidences soit pour aînés ou pour personnes vulnérables.

J'aimerais revenir sur toute la question de la première ligne et de la deuxième ligne. Jusqu'à maintenant, grosso modo, vous aviez accès, dans certaines régions, à certains types de services en deuxième ligne, le fait que, bon, vous avez très bien expliqué vos craintes par rapport à la première ligne. Mais, moi, j'aimerais savoir: À partir de votre connaissance du territoire, du Québec, compte tenu que vous regroupez des gens quand même de toutes les régions du Québec, si j'ai bien compris, vous évaluez la continuité des services, l'accessibilité des services, surtout de deuxième ligne, est-ce que c'est à peu près similaire d'une région à l'autre? C'est quoi, le portrait que vous en faites de la deuxième ligne, celle qui existe présentement?

Mme Milliard (Diane): Présentement, c'est très inégal au niveau des services de deuxième ligne. Que ce soit dans un centre de réadaptation ou dans un autre, ce ne sont pas les mêmes services sur une même base qui sont offerts aux personnes. Bon, il y a des réalités régionales, je pense, qui sont là et qu'on ne peut pas... lesquelles sont nécessaires. Mais les services de deuxième ligne, on ne se leurre pas, actuellement, au Québec, il y a 1 300 personnes qui sont sur liste d'attente pour les services de deuxième ligne. Donc, si on décide que ces personnes-là éventuellement pourraient avoir besoin de première ligne, je pense que la file d'attente va se prolonger encore plus.

Il y a 650 personnes qui sont en attente de besoins d'hébergement, donc, ça, c'est des services spécialisés offerts par les centres de réadaptation. Ça, 650 personnes, ce qu'il faut voir, c'est plus que les personnes, il faut voir les familles, donc où l'adulte vit, il faut voir l'environnement qui est préoccupé, il faut voir la famille qui vieillit. Donc, les listes d'attente en deuxième ligne sont déjà énormes. Ça fait qu'écoutez, quand on dit qu'on veut aller en première ligne, là, vous comprenez nos inquiétudes.

Mme Charest (Rimouski): Merci, je voulais vous l'entendre confirmer. Parce que je pense que, quand ça vient d'un organisme comme le vôtre, c'est tout à fait crédible. Ce n'est pas toujours la même chose quand ça vient de l'opposition, vous comprenez? Alors, je préfère que ce soit vous qui nous le confirmiez. Merci, madame.

Le Président (M. Copeman): Alors, merci beaucoup, Mme Cholette, Mme Milliard, Mme Navert, d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom de l'Association du Québec pour l'intégration sociale.

n (11 h 10) n

Et j'invite immédiatement la représentante de la Dynamique des handicapés de l'Estrie inc. à prendre place à la table.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paquin): Mme Bérard, bonjour. Mme Bérard représente la Dynamique des handicapés de l'Estrie. Mme Bérard, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, et nous vous écoutons avec beaucoup d'attention. Par la suite, on va continuer avec une période d'échange.

Dynamique des handicapés
de l'Estrie inc. (DHE)

Mme Bérard (Luce S.): Bonjour, M. le ministre de la Santé, mesdames messieurs les distingués membres de la commission. Nous vous remercions de nous accorder cette audition. La Dynamique est un organisme de promotion et de défense de droits des personnes handicapées. Elle oeuvre en région de la Haute-Yamaska et aussi dans les régions environnantes. Malgré cela, mon intervention peut avoir une portée plus universelle.

Je suis moi-même arrivée à la retraite par voie de l'invalidité. Je suis active au sein de l'AQDR et aussi, depuis deux ans, présidente de la Dynamique des handicapés. En fin de carrière active, j'ai fait un diplôme en santé communautaire et plus récemment un diplôme en éthique, de sorte que le mémoire que j'ai déposé porte une couleur éthique. La visée de notre mémoire est de faire en sorte que la loi n° 83 soit davantage porteuse d'humanité.

Toute loi a une triple portée. D'abord, elle est coercitive, puisqu'elle prescrit, elle oblige et, si on désobéit, elle sanctionne; c'est là le bâton, dans le modèle de la carotte et du bâton. La loi est aussi incitative parce qu'elle finance et qu'elle crée des orientations par ses programmes; c'est là la carotte. Mais la loi, aujourd'hui, dans le contexte moderne, peut être aussi un moyen d'appropriation morale, de sorte que les sujets, qu'ils soient des intervenants en santé, des usagers ou des citoyens, s'approprient les valeurs qui sont contenues dans la loi et les font siennes. On n'est plus dans un contrôle externe de carotte et de bâton, mais dans un contrôle interne, et toute l'humanité qu'il y a dans les personnes peut ainsi être mobilisée.

L'éthique, c'est plus que le minimum légal qui prescrit, l'éthique, c'est le hautement moral, c'est ce qui va de soi, qui vient... l'élan du coeur qui mobilise l'humanité de la personne. J'ai fait une analyse éthique du projet de loi ? sommairement, quand même, parce que les délais étaient courts pour soumettre le mémoire ? et j'y vois des éléments positifs et d'autres un peu lacunaires.

D'abord, la définition de «professionnel de la santé» évoque des personnes qui sont membres des ordres professionnels, qui respectent un code des professions. Il y a là appropriation possible du code de déontologie, de sorte que le professionnel de la santé internalise des valeurs et se comporte de façon bien. C'est une richesse pour le système de santé. Mais on y observe des lacunes, entre autres parce qu'on manque de médecins spécialistes et de médecins généralistes. L'accès pour l'usager est limité d'avoir les services. De plus, comme se sont les médecins qui manquent, c'est toute la pyramide de professionnels qui dépendent de lui qui est un peu bloquée. En CLSC et en CRDI, j'ai noté qu'il y avait des intervenants qui auraient pu être membres d'ordres professionnels et qui ne le sont pas. Il y a un vide éthique là. En milieu hospitalier, on note qu'il y a des comités d'éthique clinique, des comité d'éthique de la recherche. C'est un plus, mais ça ne mobilise qu'une élite de personnes. Nous voulons rejoindre la masse de la population.

La loi n° 83 augmente le nombre de comité d'usagers. Là aussi, c'est un plus, mais il faut comprendre que ces usagers qui sont à l'intérieur du réseau formel sont des gens malades qui ont une capacité bénévole restreinte, qui sont très vulnérables, et souvent, sur ces comités, il y a beaucoup de rotation, les durées de participation de chacun sont limitées. Et, quand il y a encadrement, parfois il y a des influences qui peuvent venir parfois de la direction, de sorte que la capacité de servir au niveau éthique de ces comités est limitée. Mais ils doivent être là.

Je note, au niveau des instances locales, dans la loi, on décrit que chaque instance pourra se donner un projet clinique et organisationnel. C'est bien, la particularisation, mais il peut y avoir des variantes de compréhension de l'éthique et des lacunes.

Je note encore que la loi n° 83 va s'adjoindre de nouveaux partenaires tels les groupes communautaires et les entreprises d'économie sociale. À ces niveaux, il n'y a pas de professionnels ou quasi très, très peu, et les employés réguliers qui entrent sont plus ou moins formés pour faire les tâches auprès des malades ou des handicapés et sont encore moins formés à l'éthique.

Je note aussi, avec l'évolution de la technologie médicale et peut-être une nouvelle gestion des ressources, la durée de l'usager dans le réseau formel de la santé est de plus en plus courte. Le renvoi à domicile, en maintien à domicile, est plus fréquent et plus rapide, et de cette façon on est hors du réseau formel, on est chez soi, dans sa maison privée, dans son logement.

Je note encore que le mécanisme de plaintes, à l'intérieur de la loi n° 83, est amélioré. Mais, porter plainte, pour une personne malade, c'est toujours une tâche émotive à considérer, qui est pénible. Notre approche à nous, en groupe communautaire, c'est de mettre l'accent sur la prévention, la sensibilisation, la promotion des droits. Et notre approche est une approche d'éthique dialogique; c'est beaucoup moins antagonisant et beaucoup plus thérapeutique pour la personne elle-même.

Encore, l'indemnisation sans égard à la faute, le projet de loi n'en parle pas. Si on passe à une approche classique en matière de plainte puis on va jusqu'à la poursuite judiciaire, la loi de la preuve, les coûts pour faire de telles procédures appauvrissent une personne déjà malade qui peut-être ne gagne pas. Il y a des tensions émotives, et, si les procès durent très longtemps, une personne peut mourir avant de voir la fin de son procès. Ce n'est pas ce qu'il y a de plus éthique.

Un grand point, pour les 30 prochaines années, c'est l'inversion de la pyramide démographique. Beaucoup de personnes vont arriver à la retraite, vont être en perte d'autonomie. On va retrouver, dit-on, deux travailleurs pour cinq personnes dans la population, ce qui met beaucoup de charge sur les aidants. Ce ratio peut faire qu'uniquement au niveau de la disponibilité horaire il peut y avoir une négligence, un abandon d'une personne, et c'est là un vide éthique.

Actuellement, en 2001, la Commission des droits de la personne avait fait un rapport sur l'exploitation des aînés. On y notait de l'abandon des familles et une certaine indifférence de groupes professionnels. Il y a donc un manque éthique déjà présent dans la population.

Enfin, les aidants naturels sont parfois limités. D'une part, moi, j'ai noté, dans la population, des personnes âgées, des personnes handicapées qui sont sans aidant naturel et abandonnées. D'autres aidants sont épuisés, ils peuvent devenir violents, abusifs et même sournoisement inciter à l'euthanasie. Je note donc un vide éthique, et actuellement, tel que la loi n° 83 est faite, elle n'est pas assez mobilisatrice des valeurs pour combler ce vide.

Ma collègue, Mme Laverrière, et moi-même demandons ici de faire un virage humanité en santé, de sorte qu'il y ait appropriation morale des valeurs de la loi pour toutes les couches de la population. C'est là un idéal sans doute, mais nous sommes très concrets dans notre approche.

Dans le texte de loi, au sein du réseau formel, nous proposons de nommer la fonction éthique. À l'article 93.6, premier paragraphe, on nomme sept services généraux des instances locales: la prévention, l'évaluation, le diagnostic, le traitement, la réadaptation, le soutien, l'hébergement. Il manque une fonction: la fonction éthique. Et justement, cette fonction, elle croise tous les autres secteurs d'intervention. Imaginez que vous auriez une famille, vous auriez huit enfants et que vous n'en nommiez que sept, comment est-ce qu'il serait, le huitième, qui ne serait jamais nommé de son nom? Bien, l'éthique, nommez-la. Nommer, c'est donner d'être. Si vous croyez que cette loi est éthique, mettez le mot «éthique» au moins dans la loi.

À l'article  95.5, au quatrième paragraphe, on annonce que le ministre pourra émettre des orientations ministérielles, et c'est la belle place pour venir ajouter des prescriptions en matière d'éthique. Actuellement, on nomme l'accès, l'intégration, la qualité, l'efficacité et l'efficience; ce sont des valeurs de système. Il faut aussi avoir des valeurs qui s'adressent aux personnes.

Hors réseau formel, dans la communauté, ceux-là qui font la sensibilisation, qui font la promotion des droits, ce sont les groupes de promotion et de défense de droits, tels l'AQDR et la Dynamique des handicapés dans notre région. Nous demandons au législateur de reconnaître le précieux de notre mission éthique, de respecter l'autonomie de nos groupes et de les financer adéquatement.

Le financement en régie régionale nous a été refusé, à la Dynamique, depuis quatre ans, et, à l'AQDR, ils reçoivent moins de 5 000 $ par année, ce qui est insuffisant pour avoir une personne et faire le soutien.

n (11 h 20) n

J'ai soumis à Mme Lamontagne un document additionnel où il y a des lettres. Entre autres, il y a une lettre de l'Agence de la Montérégie qui nous explique que nos demandes de subvention à l'agence ne peuvent être rencontrées, il faut différer vers la SACA. Nous nous questionnons sur la pertinence de ce choix, puisque déjà il y a une philosophie d'intervention, au niveau des CAAP, au niveau des comités d'usagers. Nous sommes, nous, dans la communauté, les groupes de défense de droits. Il devrait y avoir une continuité, dans la loi n° 83, pour assurer un développement de valeurs et de faire que ces valeurs soient développées directement au niveau de la communauté et qu'elles soient vivantes, avant qu'on tombe malades, de façon à ce que l'usager soit déjà informé de ses droits. Au moment où il est malade, il ne peut pas bien s'en tirer.

On note aussi que, dans la loi n° 83, il y a des portes ouvertes pour mettre de l'éthique. Entre autres, à l'article 76.6, on note que le ministre, de concert avec l'agence, peut confier à des groupes communautaires de promotion et défense de droits des missions dans le domaine de la santé mentale. Il faudrait rajouter la déficience physique et le vieillissement, parce que, nous aussi, on fait de la promotion des droits. Encore à l'article 120, au paragraphe 7.8°, on décrit les fonctions de l'agence, et là il y a une belle petite clause qui dit que l'agence doit développer des mécanismes de protection des usagers et de promotion et de défense de droits. Bien, ce que je vous parle ici, l'approche éthique, c'est l'approche novateur. Pourquoi nous renvoyer à la SACA? Je note enfin que la Protectrice des usagers, qui est venue au mois de mars vous présenter son mémoire, demandait justement d'augmenter la sensibilisation et la promotion des droits.

J'arrive en deuxième partie de mémoire, où j'ai un ensemble de points. Entre autres, pour ce qui est de l'accès à l'information sans consentement de l'usager, j'ajoute la nécessité du principe... principe de nécessité et de ne pas étaler l'information.

Au niveau des partenaires, par exemple les groupes communautaires qui auraient à tenir des archives, nous avons vu des personnes qui ont subi des représailles, considérant leur cas. Et, pour ce qui est de l'obligation de confidentialité du tiers, classiquement on comprend que c'est la secrétaire du médecin qui doit rester confidentielle. Mais, dans des situations où on a des bénévoles, où on tient des ateliers de soutien puis il y a plusieurs usagers qui se partagent les vécus, ou des aidants, dans le soutien, souvent ça devient des lieux de commérages qui sont répétés. Il y a une philosophie à développer là.

Je suis aussi sensible à une condition qui est très blessante, c'est la confidentialité après mandat. Quand une personne quitte le réseau de la santé puis elle s'en va travailler dans un autre ministère, ce qu'elle a appris sur les gens, au niveau du réseau de la santé, elle ne devrait pas le répéter dans l'autre ministère. Ces cas sont nocifs, entre autres, dans les cas où on a vu des gens aller à l'aide sociale puis servir de banques d'informations.

Au niveau du plan individualisé, on a l'impression que le projet de loi se soucie plus d'un continuum d'information à l'intérieur de son réseau que donner un suivi à l'usager. Nous avons des cas où il y avait des données médicales qui indiquaient qu'il y avait besoin d'intervention, puis ça n'a pas été transmis à l'usager.

Dans les pratiques de télésanté, je souligne que, si le patient donne consentement pour être traité, ce n'est pas pour faire de l'éducation ou de la formation; le consentement devrait être renouvelé. Puis de plus les belles machines qui permettent peut-être la télésanté pour les régions rurales, ça ne remplace pas la présence humaine. Avant tout, le soignant, il soigne par sa relation d'humanité.

Enfin, le principe d'hiérarchisation dans la loi ne doit pas être absolu. Dans certains cas, s'il manque de médecins généralistes puis on a un médecin spécialiste, on pourrait aller directement au médecin spécialiste.

Je demande aussi, que la Loi de la santé publique, qui est une des lois modifiées aussi par cette loi, qu'on modifie le principe pour davantage abouter le préventif avec le curatif. Ça ne donne rien de dépister rapidement le cancer du sein sur une masse populationnelle si, quand une personne a une tumeur, elle ne peut pas rentrer dans le réseau de la santé parce qu'il manque de médecins.

Au niveau des services d'urgence, nous demandons aussi qu'on considère l'urgence psychosociale. S'il y a une personne qui vit de l'abus dans sa maison privée, je veux qu'il y ait des intervenants qui agissent vite pour évaluer la situation, obtenir son consentement, puis, deuxièmement, si la décision est de l'envoyer en résidence, qu'il y ait des places de disponibles en résidence. Actuellement, ça dure des années, ce processus-là, et la violence continue.

En résidence privée, comme l'ont dit mes prédécesseurs, nous demandons à ce qu'aussi on élargisse à autre chose que les personnes âgées pour que les personnes handicapées, des cas lourds qui sont maintenues en résidences de type familial ou autres types de résidences bénéficient des mêmes attraits. Et sans doute le certificat devrait être obligatoire.

J'ai un souci pour l'équité intergénérationnelle. C'est bien sûr, dans les prochains 30 ans, il va y avoir beaucoup de personnes en perte d'autonomie, mais il ne faut pas s'arrêter à cette seule idée que ce qui est en perte d'autonomie est une personne âgée. Si on a un jeune enfant qui a besoin de réadaptation tôt dans sa vie, peut-être avant même de rentrer à l'école, ou encore qu'on a des jeunes qui deviennent handicapés avant d'avoir fini leurs études puis d'accéder au travail, des jeunes parents qui deviennent handicapés ? ce qui est le cas souvent avec la sclérose en plaques ? ces gens-là devraient avoir le droit d'être traités à équité dans le système. Et les logiques d'intégration, quand on travaille très bien à ces niveaux-là, ça permet des réinsertions professionnelles, tandis que chez les aînés, la réinsertion professionnelle, c'est autre chose.

On a mis aussi l'accent ? puis vous allez retrouver ça dans la pochette que j'ai déposée ? sur la nécessité de décentraliser le Programme PAD au niveau local, et nous avons noté, à l'agence, un manque... Parce qu'ils développent des continuums de soins. On parle de déficience, on parle d'incapacité puis on n'a pas prévu de parler du handicap. Le handicap, c'est l'obstacle de fonctionner dans son milieu quand on a une incapacité permanente. Il faut prévoir ça. Toute la solution est là.

J'arrive donc à ma conclusion. Je rappelle ma demande de faire que la loi n° 83 corresponde à un virage humanité en santé. Historiquement, on fait face à un vieillissement de la population qui est un fait unique. Ou bien on peut piquer du nez, voir des situations d'indignité surgir ? peut-être qui pourraient ressembler aux enfants de Duplessis ? ou on peut être sage et prudent, qui est une belle qualité éthique, puis se servir de cette situation qu'on anticipe pour, tous, collectivement, grandir en humanité. On a beau se proclamer hautement moral, si nos valeurs ne nous poussent pas à l'action, c'est qu'elles ne sont pas opérantes. Notre slogan: Penser global, penser défense de droits en santé, penser éthique pour tous.

Le Président (M. Paquin): Merci, Mme Bérard. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, vous avez la parole.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, Mme Bérard, qui, encore aujourd'hui, a déployé une éloquence qui nous rappelle celle qu'elle avait montrée lors du débat sur la loi assurant la protection des droits des personnes handicapées. Et, comme à cette époque, vous avez attiré notre attention sur les valeurs d'humanité et l'éthique, et c'est toujours bien de nous rappeler ces éléments importants.

Certains éléments de votre mémoire pourraient donner lieu à des échanges. Par exemple, vous venez de parler des personnes jeunes handicapées et vous parlez de nécessité de critères spécifiques. Pourriez-vous nous donner des exemples de ce que vous voulez dire exactement par là?

Mme Bérard (Luce S.): J'ai, exemple, deux situations. Une situation, c'est: on a une résidence où est-ce que c'est qu'il y a des personnes âgées principalement, puis il y a quelques cas lourds de personnes handicapées jeunes, des cas de sclérose en plaques très avancés, qui sont placés avec les autres. Puis la vie, eux autres... c'est leur lieu de vie, là. Ce n'est pas toujours très gai de vivre avec des très, très vieux qui sont d'une autre génération. Ça fait qu'à Granby on a la chance d'avoir construit une petite résidence où est-ce que c'est que les gens en sclérose en plaques qui sont jeunes sont dans un compartiment à part avec des soins. Mais, dans d'autres régions du Québec, je sais que, pour la sclérose en plaques entre autres, c'est un problème, les jeunes sont comme noyés parmi un ensemble de personnes très âgées. C'est triste pour vivre.

Puis la deuxième chose, c'est un cas semblable au précédent conférencier. On a des déficients intellectuels qui sont en résidence de type familial, qu'on sait qui sont maltraités; on nous refuse d'aller les voir. C'étaient des membres de notre organisme, puis finalement, là, depuis qu'ils sont déplacés et qu'ils sont rendus là, ils ne peuvent plus participer chez nous. Ça fait que je sais qu'il y a des formes d'abus, de violence, mais la personne déficiente intellectuelle ne peut pas nous le dire, on ne peut pas vraiment agir. Ça fait que, s'il y avait des certificats de conformité, là, ce serait très, très utile.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Pour ce qui est du commissaire local pour les plaintes ? je ne sais pas si c'est un aspect que vous avez regardé, dans votre mémoire, le traitement des plaintes ? certaines personnes nous ont dit que le commissaire local aux plaintes pourrait faire autre chose que juste s'occuper des plaintes, qu'il pourrait également s'occuper de la qualité puis justement de l'aspect d'humanisme et d'éthique. Est-ce que vous seriez d'accord avec cette suggestion?

n (11 h 30) n

Mme Bérard (Luce S.): Je peux parler à partir de mon expérience à moi, qui est une expérience dans la communauté, je ne suis pas à l'intérieur du réseau. À venir jusqu'à date, j'ai accompagné des personnes de chez nous pour lesquelles on a fait une plainte au CLSC, et, quand on nous a répondu, c'était le commissaire à la qualité; là, ils veulent changer ça pour commissaire aux plaintes. Personnellement, je n'ai pas assez de nuances pour voir. Parce que le mot «qualité», ça paraît plus idéal. Mais des fois, là, mettre un beau mot puis qu'en réalité on fait des plaintes... Moi, je me dis: S'ils font des plaintes, qu'ils se nomment comme faisant des plaintes puis que ce soit clair et net pour l'usager qui veut faire une plainte, pour ne pas qu'on commence...

Et puis un rôle éthique. Souvent, il y a comme une contradiction entre les deux, entre la plainte... La plainte est de niveau prescriptif ? on est dans l'approche 1, là, de mes modèles de loi ? tandis que l'éthique, c'est l'approche dialogique. Puis j'ai essayé ça, entre autres j'ai fait une intervention au CLSC, c'était pour une personne âgée, et celui qui m'a reçue, là, au volet personnes âgées, moi, je lui ai dit: Je veux juste te parler au niveau dialogique, il ne m'a pas prise au sérieux parce que je ne portais pas plainte. Il y a un dialogue entre les deux qui doit se faire. Je pense que, si, nous, on fait l'éthique, on fait la promotion des droits, on est dans la sensibilisation populaire, tandis qu'eux à l'intérieur du réseau, il faut qu'ils se nomment comme il faut puis que l'usager qui est pris dans le réseau, il sache à qui s'adresser, c'est le commissaire aux plaintes.

Le Président (M. Paquin): C'est bien, M. le ministre? Merci beaucoup. On va aller du côté de l'opposition officielle, et la parole va être à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, qui est la porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé et à la condition des aînés.

Mme Harel: Bonjour, Mme Bérard. Moi, je n'ai pas eu l'occasion de vous entendre sur le projet de loi portant sur les personnes handicapées, mais je suis très heureuse, ce matin, de votre démonstration personnelle quant à la vision que vous avez, avec l'enthousiasme avec lequel vous nous le communiquez. Je crois qu'il y a des personnes ici présentes qui vous accompagnent également, hein?

Mme Bérard (Luce S.): Ils viennent d'arriver. Moi, je suis montée la veille. Mais ce sont mes collègues de l'AQDR, qui vont vous parler après.

Mme Harel: Bon. Alors, je les saluerai. Je lisais votre bulletin, là, Le billet, le journal Le billet, et c'était intéressant. Je voyais la photo de mon collègue disparu, le député de Shefford, et de l'actuel, aussi, député. C'était un numéro, j'imagine, pour le 15e anniversaire. C'est ça?

Mme Bérard (Luce S.): C'est ça. Ça vient de sortir. On vient juste de le sortir de presse, fin mars.

Mme Harel: Donc, vous fêtez votre 15e anniversaire à titre de...

Mme Bérard (Luce S.): D'organisme communautaire de défense de droits.

Mme Harel: Dans le domaine du handicap physique ou en fait...

Mme Bérard (Luce S.): Pour les personnes handicapées physiques. On a quelques déficients intellectuels, mais on ne prend pas la santé mentale.

Mme Harel: Je trouve fort intéressant... Vous savez que c'est un point de vue inédit que vous nous apportez aujourd'hui. J'ai noté qu'à l'article... attendez, c'est l'article 120 du projet de loi n° 83, vous faites état ? vous en avez parlé ailleurs dans votre mémoire du rôle que l'agence doit jouer notamment à l'égard de la protection des usagers et de la promotion et de la défense de leurs droits. Alors, quand on dit que l'agence doit développer des mécanismes, la question que je me suis posée suite à votre intervention est justement celle de savoir si l'agence doit développer des mécanismes institutionnels ou doit soutenir les organismes de défense de droits qui offrent une participation à part entière et en tant que citoyens à part entière aux personnes qui sont en difficulté.

Mme Bérard (Luce S.): Ma vision à moi, c'est que, l'agence, le réseau de la santé, la loi n° 83 doit soutenir l'ensemble de la communauté, doit soutenir les groupes de promotion et défense de droits. Présentement, on a tendance à tout envoyer ça au SACA puis même à réduire les exigences de reddition comptable aux exigences de l'Inspecteur général des institutions financières. Mais, moi, ce que je veux, c'est qu'il y ait une vision, pas uniquement une vision de réseau formel, mais de réseau aussi qui comprend toute la communauté. Les futurs travailleurs qui vont aller travailler dans le réseau de la santé, ce sont d'abord des gens qui vivent dans des familles. Les personnes qui sont proches d'un usager abusé dans le réseau de la santé, ce sont des gens dans la communauté. Puis, quand on est malade...

Moi, j'ai eu une approche d'aller voir une personne âgée malade qui était abusée. Elle était assez énervée, elle ne voulait même pas que je lui parle. Mais, si j'avais été l'éduquer dans le temps qu'elle se portait bien, elle aurait été ouverte à mon idée puis là elle aurait compris que je ne voulais pas lui faire de mal mais que je voulais l'aider. Sur le coup dramatique de la souffrance, ce n'est pas le temps de faire un discours de défense de droits; il faut le faire avant. Puis, nous, dans la communauté, on est là pour être proches.

Puis, je dois vous dire, là ? vous allez voir dans ma pochette ? on a reçu l'appui de l'éthicien qui est aussi le D.G. du réseau local de Brome-Missisquoi, qui est la région voisine de la nôtre mais où, nous, on va rejoindre des handicapés là-bas. Puis j'ai reçu aussi un appui de l'Office des professions du Québec qui interpelle les ministères aussi dans ça. Ça fait que, moi, je veux une loi qui soit porteuse d'éthique pour qu'il y ait une appropriation morale par tous. Puis là, nous, au niveau local, on va aller porter le message, on va avoir de quoi argumenter. Vous voyez mon enthousiasme. Si vous le reconnaissez, c'est que vous avez des valeurs morales en vous qui se mobilisent. On peut faire la même chose pour d'autres.

Mme Harel: Mais j'aime ça, j'aime ça, là, je peux juste vous dire que j'aime ça beaucoup, votre présentation. Alors, je comprends aussi qu'à l'article 99.5 il nous faut ajouter aux standards d'intégration, d'accès aux soins, de qualité des soins, d'efficacité et d'efficience, le caractère éthique également, hein? Et j'ai bien aimé votre démonstration que, si on ne nomme pas la chose...

Mme Bérard (Luce S.): Ce que l'on ne nomme pas n'existe pas. Il faut commencer par nommer. Puis je pense que Linné, quand il a nommé les plantes, vous savez, avait donné un nom à chacune. À partir de ça, après on peut dire de quoi on parle.

Mme Harel: C'est tellement vrai, vous savez, que, par exemple, ça a été une des grandes revendications des mouvements des femmes des années quatre-vingt de ne pas se considérer comme interpellées lorsqu'on ne parlait que des Québécois ou des Canadiens en fait, et ça a amené tout le monde politique à parler des Canadiennes et Canadiens ou encore des Québécoises et Québécois. Parce que ce qu'on ne nomme pas ne nous interpelle pas, en fait. Et, si l'éthique n'est pas nommée, comme vous dites, elle ne fait pas partie des standards qui sont considérés comme devant être recherchés. Alors, comptez sur nous. Ou bien le ministre le fait ? ce qui sera préférable, il aura notre appui ? ou on le fera avec un amendement qu'on déposera au moment de l'étude article par article du projet de loi.

Mme Bérard (Luce S.): Il y a une nuance à faire, c'est que, si l'éthique doit rester l'éthique, elle ne doit pas être trop prescriptive, parce qu'au moment où vous mettez une punition à côté vous en faites de la déontologie. Ça fait qu'il y a cette nuance-là à faire. Puis, souvent, nous, on est proches de la communauté à la base, on sent les valeurs, les aspirations des gens souffrants, et c'est peut-être le meilleur lieu de lecture éthique. Il faut qu'on ait de la place pour les faire sortir, nos valeurs, puis qu'elles soient opérantes pour qu'il y ait de l'espoir pour nos usagers brimés.

Mme Harel: Mais je comprends que vous voulez quand même que ce soit mentionné.

Mme Bérard (Luce S.): Oui, oui, que ce soit mentionné mais avec une porte ouverte, en ce sens que ça puisse fleurir dans chacune des régions, quelle que soit la caractéristique de la région locale.

Mme Harel: Oui. Alors, je peux continuer?

Le Président (M. Paquin): Allez-y, madame. Oui, allez-y.

Mme Harel: Vous nous avez parlé de résidences privées d'hébergement. Dans le projet de loi que vous avez regardé ? vous avez dit, avec raison, tout le monde l'a mentionné, le peu de temps accordé pour en faire un examen plus attentif ? vous avez vu qu'il y a une certification qui est facultative et non pas obligatoire. Vous savez que la majorité des organismes, dont l'AQDR et autres, FADOQ et autres organismes représentant des personnes aînées, sont venus ici même, en commission parlementaire, demander que cette certification rende les résidences privées, toutes les résidence privées conformes aux critères sociosanitaires pour recevoir en hébergement des personnes vulnérables ou en perte d'autonomie. Alors, quelle est votre opinion sur cela?

Mme Bérard (Luce S.): Personnellement, je ne me suis pas donné beaucoup de temps pour réfléchir parce que, mes collègues, c'est leur thème. Mais je vais vous donner l'opinion de l'éthicien, c'est que, si vous le mettez facultatif, il va y avoir les bonnes résidences, et puis le réseau ira peut-être enquêter dans les bonnes résidences, mais vous allez vous trouver à concentrer les mauvaises résidences. Souvent, ils sont les moins bien payés, ce sont les plus pauvres, puis les moins instruits, puis les plus abusés. Est-ce qu'en mettant ça facultatif on ne va pas ouvrir une porte vers l'abus?

On se veut éthique, mais on n'est pas tout à fait proche, il faut l'être au complet. Ma peur à moi, c'est que ça devienne des lieux qui... Par exemple, pour ma déficience intellectuelle en milieu familial, on m'a refusé d'y aller, puis finalement on lui a refusé de sortir, de sortir de chez eux pour venir à notre groupe communautaire. Mais on fait comme... En voulant bien aider puis en aidant juste à moitié, on empire leurs problèmes.

Mme Harel: En fait, on crée un système à deux vitesses, à ce moment-là. L'AQDR est venue d'ailleurs nous dire qu'il allait y avoir un système de résidences pour les riches puis un système de résidences pour les pauvres parce que finalement, comme vous le mentionnez, souvent ce sont les résidences qui ne se conformeront pas aux critères sociosanitaires qui vont diminuer, si vous voulez, les prix et les tarifs, et c'est tout le danger d'un système à deux vitesses, finalement.

n (11 h 40) n

Mme Bérard (Luce S.): Dans ce que vous dites, il y a l'idéologie du système, mais mon regard à moi, c'est la souffrance des gens qui sont brimés et qu'on ne peut pas rejoindre. Puis souvent on a des déficients intellectuels de 40 ans dont les parents sont morts, il n'y a plus personne qui veille sur eux que nous, les organismes communautaires, puis, quand on ne peut pas y aller, bien ils sont abandonnés à des violences qu'eux-mêmes ne peuvent pas dénoncer.

Mme Harel: En tout cas, Mme Bérard, là, heureusement qu'il y a des gens comme vous qui existent dans notre société, je vous le dis bien simplement, parce que tout ne peut pas être institutionnel, comme vous le mentionnez. L'institutionnel, comme vous l'avez dit, il n'intervient que lorsque ça va mal, il n'intervient que pour prescrire, il ne peut pas faire beaucoup autre chose. Mais, pour que ça aille bien, il faut la participation des citoyens. Et c'est dans ce sens-là que votre témoignage est important aujourd'hui.

Mme Bérard (Luce S.): Dans un cours d'éthique, on nous disait: Ce que le droit ne peut faire, l'éthique peut le faire. Voilà.

Mme Harel: C'est très vrai. Moi, je vais vous dire une phrase de Montesquieu, qui me suit depuis ma première année en droit: «Entre le fort et le faible, c'est la liberté qui opprime, le droit qui affranchit.» C'est donc dire qu'il nous faut aussi des prescriptions dans une société, comme par exemple les certifications, mais ce n'est pas suffisant, il faut en plus des organismes de défense de droits où les citoyens se sentent en tant que partenaires à part entière et indépendamment de leur situation, des déficients ou autres, en fait. Alors, je voyais, dans votre petit billet ? je vais terminer là-dessus vous parliez du suicide.

Mme Bérard (Luce S.): Ah, mais là c'est un nouveau sujet que je n'avais pas traité dans mon mémoire, mais j'avais mis le billet parce qu'on parle de population vieillissante, et puis c'était pour la conséquence, là, que les populations jeunes handicapés seront peut-être délaissées dans un système surchargé.

Mme Harel: En fait, comme on me dit, il me reste peu de temps, mais je souhaitais ? ma collègue est d'accord ? vous interroger quand même sur cette question-là parce que vous parliez de présence humaine des proches. Alors, comment vous favorisez cette présence? Comment peut-on la favoriser? Et vous parliez également du fait... Vous donniez des exemples, là, de personnes qui se sont enlevé la vie et qui étaient atteintes de maladie chronique. J'aimerais ça vous entendre là-dessus, votre expérience est certainement...

Mme Bérard (Luce S.): J'ouvre un petit peu en dehors de mon mémoire, là. Puis c'est tout récent. À l'automne, il y a une dame du nom de Manon Brunelle, qui était une productrice à Télé-Québec, qui éventuellement a développé la sclérose en plaques ? et je dois vous dire que, moi, je suis invalide pour la même maladie et elle s'est suicidée. Dans les médias, ça crée comme un prêt-à-penser émotif pour lequel les gens ne réfléchissent pas. Puis une des caractéristiques de l'éthique, c'est de développer son libre arbitre. Et j'ai voulu donner un contre-discours aux médias puis au prêt-à-penser. Il y a un article dans la... qui s'appelle Prêt-à-penser.

Et souvent on ne va pas plus loin que les préjugés. Et puis, nous, quand on fait la défense de droits... Puis c'est une des raisons pour laquelle je l'ai traité dans mon journal, c'est: Vous n'êtes pas contents, là, vous revendiquez tout le temps des environnements adaptés, ça, puis ça, puis ça, suicidez-vous donc, vous n'êtes pas... Tu sais, on a l'impression que les médias puis le discours dominant nous renvoient cette idée-là de «suicidez-vous donc», ou encore ? pour l'Américaine, là, qui a été débranchée ? bien, «on va vous euthanasier si vous n'êtes pas content».

On ne veut pas ça. On veut avoir une place dans la pleine dignité. Puis je n'ai pas d'expérience, là, de cheminer dans la mort, puis je ne suis pas encore rendue là. Puis, dans notre groupe, on ne fait pas ça, là, l'accompagnement des mourants. Mais je pense que la plus grande dignité qu'il y a de l'humain, c'est d'être en réseau avec les autres humains puis d'avoir des présences humaines près de soi. Le désespoir, il vient quand on n'en a plus de présence humaine. Et elle est là, la richesse: on est des humains, on est une collectivité, on est un aspect social et on se sent bien avec les autres. Moi, je suis en invalidité, puis, si je vous parle avec enthousiasme, c'est qu'au lieu de rester à la maison à ne rien faire j'aime mieux m'y prendre par petits bouts puis venir vous parler.

Mme Harel: Merci, Mme Bérard.

Le Président (M. Paquin): Merci, Mme Bérard, du Dynamique des handicapés de l'Estrie. Le mot «dynamique» vous va très bien, ma chère dame. Merci d'avoir été ici.

J'invite les gens de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées à s'avancer, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paquin): Donc, mesdames de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, section Granby, bienvenue. J'invite la dame responsable à bien se présenter, et de présenter ses collègues, et par la suite de nous faire part de votre mémoire.

Association québécoise de défense des droits
des personnes retraitées et préretraitées,
section Granby (AQDR-Granby)

Mme Lacroix (Martha): Bonjour. Mon nom est Martha Lacroix, je suis responsable de l'hébergement, des résidences privées pour les aînés. Je vous présente notre intervenante sociale du CLSC qui s'occupe de l'accréditation de nos résidences, et puis Mme Cécile Choinière et Mme Solanges Lauzier. Nous sommes ici pour dire notre expérience. Parce que, nous, à Granby, ça marche très bien, alors on va vous dire ce que, nous, on fait puis peut-être que vous pourriez vous en inspirer.

Alors, M. le ministre, mesdames messieurs, permettez-moi, au nom de l'Association québécoise de défense des droits des retraités et préretraités Granby, de la ville de Granby et du Centre de santé et des services sociaux Haute-Yamaska, de vous féliciter chaleureusement pour votre projet de loi n° 83.

L'AQDR-Granby a été fondée il y a plus de 20 ans. Organisme à but non lucratif, l'AQDR a pour mission de défendre les droits économiques, politiques, culturels et sociaux des personnes retraitées et préretraitées de la Haute-Yamaska. Nous comptons présentement plus de 450 membres ayant 55 ans et plus. Comme le stipule notre charte, nous travaillons au regroupement des personnes retraitées et préretraitées dans le but de stimuler, d'organiser et de motiver par des moyens appropriés leur participation à la défense de leurs droits et au mieux-être de leurs semblables. Oeuvrer auprès des aînés, dans le sens de notre mission, exige une compréhension de leurs besoins et une volonté d'y répondre en obtenant leur participation.

Nos principaux champs d'activité sont: les abus et la violence envers les aînés, la lutte contre la discrimination en raison de l'âge, le droit à un logement convenable et abordable, le droit aux soins à domicile et à des services sociaux et médicaux, etc. Par divers moyens tels que des colloques, des conférences, des sessions de formation, nous entretenons chez les aînés dans notre milieu un éveil social aux problématiques énumérées ci-dessus et suscitons leur engagement. Au niveau local, par ses activités, l'AQDR-Granby est très visible dans le milieu et agit comme partenaire à diverses tables de concertation pour les aînés. Reliée à l'AQDR provinciale, notre section partage ses expériences au niveau provincial, qui regroupe 40 sections représentant autant de villes au Québec, 9 000 membres.

Notre expérience. Des quatre thèmes abordés dans le projet de loi n° 83, M. le ministre, le troisième, concernant la certification des résidences privées avec services pour personnes âgées en perte d'autonomie, nous intéresse particulièrement. Il y a une dizaine d'années, nous ressentions déjà le besoin d'une réglementation pour les résidences privées de personnes âgées. Nous trouvons important de vous faire part de notre expérience, car chez nous ça fonctionne merveilleusement bien et à la très grande satisfaction de toutes les parties impliquées.

Le 2 décembre 1996, l'AQDR-Granby déposait son projet de règlement municipal pour les résidences privées d'hébergement logeant plus de deux personnes âgées. Par la suite, un protocole d'entente était signé entre la ville de Granby et le CLSC de la Haute-Yamaska les 16 et 27 février 1998. De plus, en novembre 1998, des modifications au règlement de construction de la ville de Granby ont été apportées afin d'y introduire certaines normes régissant l'aménagement d'une résidence privée d'hébergement. Le 25 avril 2001, la ville de Waterloo appose également sa signature à un protocole d'entente avec le CLSC Haute-Yamaska.

n (11 h 50) n

Quelques mois après la signature, en avril 1999, c'est le début de la visite des résidences privées d'hébergement ayant en leur possession un certificat d'occupation autorisé par la ville de Granby. L'inspecteur municipal est accompagné d'un représentant du CLSC Haute-Yamaska, et ils ont comme mandat de vérifier la conformité du bâtiment, la salubrité et la sécurité des lieux, et de procéder aux interventions nécessaires. L'intervenant social du CLSC de son côté vérifie le degré d'autonomie des personnes en concordance avec le type de résidence et il incite ensuite le propriétaire à signer un contrat social comportant 25 engagements à respecter ? annexe I, que vous avez devant vous, là, 25 critères.

Après ces deux étapes, lorsque la ressource privée respecte le protocole d'entente, la ville de Granby et le CLSC de la Haute-Yamaska émettent un certificat d'accréditation que la résidence doit afficher bien à la vue, et le nom de ladite résidence sera diffusé dans un bottin prévu à cette fin. On procédera de la même manière à la ville de Waterloo à partir de 2001. Fait à noter, l'intervenant social est toujours accompagné de l'inspecteur municipal, ce qui leur permet d'accéder aux résidences sans difficulté.

Notre guide pour les aînés de Granby et région Hébergement et ressources. Le 12 décembre 2000, après un travail acharné de quelques bénévoles et de concert avec le CLSC Haute-Yamaska et la ville de Granby, comme pour couronner l'Année internationale des aînés, nous procédions avec joie au lancement de notre guide pour les aînés de Granby et région Hébergement et ressources, car il fallait bien en faire profiter notre population. Ce guide est disponible à notre bureau de l'AQDR à Granby, à trois pharmacies Uniprix, dont deux à Granby et une à Waterloo, au coût minime de 5 $. L'AQDR procède à une mise à jour du guide aux 18 mois environ. On peut se procurer la partie 2, des résidences ? ce qui énumère toutes les résidences, avec les critères ? au CLSC ou à nos bureaux. C'est un outil fort précieux pour nos aînés et leurs familles. D'ailleurs, M. le ministre, le 22 juillet 2004, nous vous en faisions parvenir un exemplaire ainsi qu'à M. Jean-Louis Bazin, du Secrétariat aux aînés, qui m'en avait fait la demande lors d'un congrès à Drummondville, où il était le conférencier invité.

Notre guide comprend quatre sections. La première section contient les documents officiels et les ententes des villes de Granby et Waterloo avec le CLSC Haute-Yamaska ainsi que les engagements de la ressource privée. Les deux municipalités, conjointement avec le CLSC Haute-Yamaska, se sont engagées à faire une inspection annuelle des résidences privées qui hébergent plus de deux personnes âgées sur leur territoire.

La deuxième section contient une liste alphabétique des résidences accréditées et toutes les informations les concernant: adresse, téléphone, nom du ou des responsables, type de clientèle, nombre de chambres, prix minimum et maximum. Les caractéristiques de chaque résidence sont décrites: ascenseur, système d'appel d'incendie, période d'essai permise, court séjour après hospitalisation; de même pour les services dispensés par résidence: surveillance, soins infirmiers, alimentation, diète, visite médicale, coiffure sur place, équipement adapté au bain, buanderie, loisirs, etc.

La troisième section de notre guide est très utile aux aînés parce qu'elle contient des informations concernant toutes les ressources communautaires, médicales, sociales et gouvernementales, fédérales, provinciales, municipales pouvant les intéresser. On y explique ce à quoi les ressources servent et comment les rejoindre. À la fin de la section, des espaces sont réservés pour des notes personnelles: médecin, pharmacien, notaire, médicaments, personnes à contacter en cas d'urgence.

Enfin, la quatrième et dernière section du guide est celle que nous préférons. Elle s'avère très pertinente pour les aînés et leurs familles qui ont à choisir une résidence. On y décrit les types d'hébergement, public ou privé, ce qui se passe lorsqu'une personne soumet une demande. Toutes les questions à se poser avant la recherche de résidence y sont énumérées. On indique ce qui doit être observé et demandé sur la sécurité, les aménagements, l'accessibilité, les transports, la qualité de vie, les règlements, la restauration, l'entretien, les services médicaux et autres, services compris ou non dans le bail. Chaque item y est énuméré, on n'a qu'à cocher les services offerts pendant la visite de chacune des résidences. Ce faisant, on pourra par la suite comparer les résidences visitées. Cette façon de faire veut permettre aux visiteurs de résidences de choisir selon leurs besoins et leurs moyens. Une qualité de vie, ça se magasine. Prenez les références grâce au bouche à oreille. On ne prend jamais trop de précautions, car il vaut mieux prévenir que guérir. Il est recommandé de se faire accompagner par une personne en qui on a confiance. C'est en pensant à tout cela que l'AQDR-Granby a créé ce guide des aînés Hébergement et ressources, dont nous sommes très fiers.

Pour clore sur ce sujet, dans notre contexte, les résidences privées participent à ce programme sur une base volontaire, mais la presque totalité ont voulu y adhérer; c'est un plus pour elles. Quelques-unes ont d'ailleurs accepté d'apporter les correctifs demandés, à leurs frais, afin d'être accréditées par le CSSS et la ville. Le guide reçoit une belle publicité dans les journaux à chaque mise à jour, mais seules les résidences accréditées y sont inscrites. De plus, ce sont strictement ces résidences qui sont recommandées par le CSSS, les travailleurs sociaux du centre hospitalier et des soins à domicile, les infirmières évaluatrices, etc., afin d'y référer les aînés ou leurs proches en quête d'une résidence d'hébergement.

Suites à notre programme d'évaluation des résidences. Notre programme d'évaluation des résidences se déroule tellement bien que nous avons pensé l'étendre à tout le territoire couvert par notre CLSC et à la province. Au printemps 2001, à l'assemblée générale de l'AQDR, on a accepté que je communique avec les 40 sections de l'AQDR pour leur demander de faire signer une pétition demandant au gouvernement du Québec d'obliger les municipalités à conclure une entente avec les CLSC de leur territoire pour réglementer les résidences privées d'hébergement pour aînés de plus de deux personnes. Par la suite, les pétitions devaient être remises à leurs députés respectifs afin qu'elles soient déposées à l'Assemblée nationale. À l'automne 2001, le député de Shefford, M. Bernard Brodeur, déposa notre pétition totalisant 410 noms, et quelques autres sections ont fait de même, dont Montréal-Nord, Val-d'Or, Drummondville, Roberval. Le 18 septembre 2001, dans le cadre du Parlement des sages, à Québec, nous avons déposé une pétition demandant au gouvernement du Québec d'obliger les municipalités à signer une entente avec le CLSC afin de réglementer les résidences privées.

Quant aux trois municipalités restantes de notre territoire, Bromont, Roxton Pond et Saint-Paul, nous avons communiqué avec les maires et rencontré leurs inspecteurs respectifs. Tous semblaient d'accord avec la nécessité d'une réglementation. Une lettre fut envoyée à chaque conseil municipal. Les choses n'avançant pas, nous avons convoqué une réunion, le 6 mai 2003, avec les représentants de ces trois municipalités, la ville de Granby, le CLSC Haute-Yamaska et une représentante de la Régie du bâtiment. Finalement, ces municipalités hésitaient à cause des responsabilités et auraient aimé que la Régie du bâtiment leur fasse part des résultats de leur inspection des résidences dans leurs municipalités, mais il semble que la régie ne pouvait répondre à cette demande à cause des règlements du ministère du Travail. C'est malheureux, car deux propriétaires de résidences, l'une à Roxton, l'autre à Saint-Paul-d'Abbotsford, désiraient ardemment être inclus dans le guide et être reconnus ou accrédités. Cela semble une impasse qui sera probablement résolue grâce à votre projet de loi, M. le ministre. Comme vous pouvez le constater, ce n'est pas d'hier que nous espérons une réglementation, et nous l'espérons fébrilement.

Dans le projet de loi n° 83, il est d'abord question d'un registre régional pour les résidences de personnes âgées en perte d'autonomie qui pourrait être confié par instructions administratives aux centres de santé et de services sociaux qui sont plus près de la population. C'est une excellente décision. En ce qui nous concerne, c'est une réalité, car le CSSS Haute-Yamaska possède déjà un registre des résidences et les connaît bien. Nous recommandons que cela se retrouve dans le projet de loi sans équivoque. De plus, nous considérons que ce registre devrait être obligatoire et, sur un territoire comme le nôtre où la plus grosse municipalité est de 48 000 habitants, nous n'y voyons pas de problème. Il est évident que seules les résidences certifiées seraient recommandées et pourraient recevoir des personnes ou patients. Nous applaudissons à toutes vos propositions, à date.

Certificat de conformité. Là où nos vues diffèrent, c'est pour le certificat de conformité qui sera émis par le niveau régional. Nous pensons que le niveau local est tout indiqué pour s'en occuper, tant la ville que le CSSS, puisque les résidences sont déjà inscrites au registre du CSSS et que la qualité des services donnés peut facilement être évaluée par le CSSS ? annexe III. C'est ce que nous faisons déjà ici, et nous avons d'excellents résultats.

La troisième condition du certificat de conformité, c'est-à-dire être reconnu par un organisme comme la Fédération de l'âge d'or du Québec, FADOQ, et son programme Roses d'or, nous apparaît totalement inadmissible. Aussi bien intentionnés soient-ils, ces gens n'ont ni la compétence ni la formation pour évaluer les centres d'hébergement. Un intervenant social peut évaluer la qualité des soins et services parce qu'il a la formation nécessaire. Nous pensons également que l'inspecteur municipal engagé par le service d'urbanisme d'une municipalité est beaucoup mieux qualifié, de par sa formation et son travail, pour évaluer la salubrité et la sécurité des résidences qui se trouvent sur son territoire. Ces deux personnes sont des fonctionnaires publics, et nous les voyons mal décerner des médailles ou des étoiles. Avec les comités d'usagers et de résidents que vous projetez, M. le ministre, nous affirmons que les Roses d'or seraient superflues. Nous sommes donc totalement opposés à ce programme.

D'ailleurs, dans un article du Journal de Québec du jeudi 7 mars 2002 ? annexe IV ? Mme Céline Hamel, coordonnatrice régionale des programmes de certification Roses d'or à la FADOQ, nous dit que le centre désirant adhérer au programme doit incidemment verser une cotisation à la FADOQ allant jusqu'à 300 $, selon le nombre de résidents. J'ose espérer que ce n'est plus le cas depuis que cet organisme reçoit une subvention de 225 000 $ jusqu'en avril 2005, pour ce même programme.

L'AQDR, dont la mission première est la défense des droits des retraités et préretraités, possède une charte depuis 25 ans en ce domaine, apprécie au plus haut point ce que vous êtes à faire. Vous dites que l'agence a un pouvoir d'inspection en tout temps pour s'assurer de la qualité des services et lors de l'émission du certificat de conformité ou de son renouvellement aux deux ans. Nous doutons que l'agence puisse visiter toutes les résidences de sa région dans ce court laps de temps. Nous trouvons important de déléguer cette responsabilité au niveau local, et son rôle serait celui de coordonnateur ? celui de la régie, là ? de coordonnateur et d'arbitre.

n (12 heures) n

Le traitement des plaintes par les agences régionales. Concernant la gestion des plaintes dans les ressources privées d'hébergement, nous croyons que les agences régionales devraient continuer à assumer cette responsabilité et ne pas la déléguer aux CSSS locaux. Cette façon de faire assure l'objectivité et la neutralité des intervenants des CSSS qui effectuent l'évaluation des résidences privées d'hébergement afin de les certifier. Nous craignons un conflit d'intérêts si ces deux responsabilités, certification et gestion des plaintes, sont assumées par le même établissement, c'est-à-dire le CSSS. De plus, ceci risque de créer de la confusion chez les propriétaires des résidences privées, au niveau de la perception qu'ils vont avoir de l'intervenant qui à la fois certifie la résidence et à la fois gère les plaintes qui peuvent survenir chez lui. Il sera vu tantôt comme évaluateur, tantôt comme police. L'implication des agences régionales dans le traitement des plaintes est donc primordiale afin de prévenir cette ambiguïté et assurer la pérennité des programmes de certification des résidences privées déjà fonctionnelles dans diverses régions.

Conclusion. Pour terminer, nous accueillons favorablement la loi n° 83 et plus précisément le contrôle de la qualité des résidences privées d'hébergement. Par contre, nous espérons que les modalités d'application de cette partie de la loi ne viendront pas changer les programmes d'accréditation des résidences privées d'hébergement existant dans certaines régions du Québec et qui ont fait leurs preuves, résultats à l'appui. Nous osons croire que cette loi viendra plutôt légitimer et reconnaître les actions entreprises depuis plusieurs années au chapitre des résidences privées d'hébergement afin d'assurer aux aînés du Québec un hébergement de qualité répondant à leurs besoins. Merci.

Le Président (M. Paquin): Merci, Mme Lacroix. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, Mme Lacroix, Mmes Lauzier, Desaulniers et Choinière, pour votre visite aujourd'hui. Je dois dire que votre présentation était énergique et bien organisée, Mme Lacroix, et elle a le grand mérite de nous présenter un modèle qui existe déjà et qui peut nous permettre de résoudre le problème qu'on essaie de résoudre ensemble, à la commission, depuis le début des audiences, c'est celui-ci: Comment faire pour rendre plus étendu que ce que nous proposons le programme de certification sans pour autant en faire quelque chose qui ne sera pas fonctionnel parce que trop complexe, trop lourd et on n'aura finalement pas atteint le but qu'on s'était fixé? Et je constate que vous nous présentez une façon de faire qui... Je pense qu'à Trois-Rivières également ils ont fait le même genre de partenariat entre le milieu municipal et l'établissement de santé.

Et je retiens que vous nous recommandez essentiellement deux choses, c'est d'abord de ramener cette tâche de certification de conformité au niveau du centre local, plus près des gens, du CSSS, et, deuxièmement, vous nous déconseillez d'aller dans la direction que pourtant votre association parente provinciale nous a recommandée, la question des Roses d'or. J'aimerais ça que... Il n'est pas question ici, je dirais, de critiquer le programme Roses d'or, mais de nous dire exactement pourquoi vous pensez que l'utilisation de ce programme comme partenaire ne répondrait pas à nos objectifs et pourrait même être contre-productif. J'ai un peu eu l'impression que vous étiez très, très ferme là-dessus, là.

Le Président (M. Paquin): Mme Lacroix.

Mme Lacroix (Martha): Bien, c'est parce que, nous, on pense que les gens de la FADOQ, ce sont des aînés, comme nous, de la filière, là, ce sont des aînés, et on n'a pas la formation pour aller... On peut bien y aller voir les résidences, parler aux... Êtes-vous satisfaits? Bon. Les gens, ils ne critiquent pas, hein, ils ont peur de critiquer, là, quand il y a trop de monde alentour, là. Ils font ça de un à un, avec... Madame du CLSC qui les voit un à un, ils vont le faire, mais pas avec nous, là. Et les visites sont toujours annoncées. Puis, nous, on ne voit pas, là, les gens. Puis faire payer les résidences aussi pour avoir droit aux Roses d'or ? nous, c'est gratuit, tout à fait gratuit, là, ce sont des fonctionnaires publics qui sont formés pour ça ? on ne voit pas, là, pourquoi que... S'ils veulent y aller, qu'ils y aillent, là, mais on ne voit pas pourquoi on se fierait sur des aînés, là, aussi bien intentionnés soient-ils, plutôt que des fonctionnaires qui sont formés pour ça.

Le Président (M. Paquin): M. le ministre.

Mme Lacroix (Martha): Puis aussi, avec la ville de Granby, c'est ce qui permet au CLSC d'avoir... Vous sembliez être préoccupé par l'accès au domicile. C'est qu'en étant accompagné par quelqu'un de la ville eux peuvent entrer partout. Dans n'importe quel domicile, la ville a droit de rentrer, c'est ce qu'on nous a dit. Alors, c'est pour ça que le CLSC se fait toujours accompagner de quelqu'un de la ville. S'il est avec quelqu'un de Roses d'or, ils peuvent être refusés.

M. Couillard: Donc, vous, actuellement vous visitez puis vous certifiez toutes les résidences inscrites au registre. Est-ce que c'est ce que je comprends?

Mme Lacroix (Martha): Mme Desaulniers pourrait répondre, là.

Le Président (M. Paquin): Mme Desaulniers.

Mme Desaulniers (Josée): Oui. Les résidences qui veulent bien en faire partie nous communiquent, et, nous, on les relance une fois par année, si toutefois ils n'ont pas adhéré, question de voir s'ils ont changé d'idée ou non. Ça fait que notre bottin est quand même assez complet. On a la majorité des résidences inscrites.

M. Couillard: À part celles qui sont inscrites au registre... La presque totalité, vous dites?

Mme Desaulniers (Josée): Il n'y en a que deux actuellement, sur notre territoire, qui ne sont pas inscrites.

M. Couillard: Est-ce que vous avez... Vous devez avoir, comme partout, des situations de clandestinité peut-être. Comment vous faites pour les dépister?

Mme Desaulniers (Josée): Bien, c'est celles-là. C'est ces deux-là.

M. Couillard: Deux? Mais vous savez lesquelles?

Mme Desaulniers (Josée): Oui, oui. Oui, parce qu'on va quand même annuellement...

M. Couillard: Parce que vous êtes plus près des gens. Oui?

Mme Desaulniers (Josée): Annuellement, on va les voir quand même. C'est juste qu'ils ne veulent pas se conformer à nos critères. Mais annuellement, la ville, avec nous, on retourne, on refait nos entrevues avec les membres de famille, avec les résidents, et c'est à eux de voir s'ils embarquent ou pas dans le projet.

M. Couillard: Et les personnes qui vont visiter la résidence, je comprends bien que c'est un membre de la fonction publique municipale et puis un évaluateur, un intervenant social essentiellement du CLSC.

Mme Desaulniers (Josée): C'est moi.

M. Couillard: C'est vous?

Mme Desaulniers (Josée): Oui.

M. Couillard: C'est vous. Bon. Alors, c'est très important que vous nous donniez ce témoignage-là, parce que, moi, au poste que j'occupe, j'imagine tout de suite la réaction des CLSC en général ou des CSS, quand on va leur demander de faire ce que vous faites, bien ils vont nous dire: Ajoutez-nous plus de ressources, plus de personnel pour nous permettre d'accomplir cette mission. Donc, à votre CLSC, est-ce que le fait que vous soyez dégagée pour faire cette mission-là, c'est accompagné d'une diminution de services dans les autres missions de l'établissement?

Le Président (M. Paquin): Mme Desaulniers.

Mme Desaulniers (Josée): Bien, nous, actuellement il y a un sept heures-semaine qui est disponible pour l'évaluation des résidences privées. Donc, annuellement, à toutes les semaines, j'ai un sept heures que je peux aller faire mon évaluation, rapport d'inspection, et tout ça. C'est sûr que je suis moins disponible auprès de la clientèle pour mon mandat hébergement ? parce que j'ai plusieurs mandats dans ma tâche ? mais d'autres intervenants le prennent aussi, là, donc...

Parce que, nous, on y croit aussi à ce mandat-là d'évaluation des résidences privées. Parce qu'on oriente les gens en résidence, donc on veut les orienter dans des endroits qui correspondent à des critères minimaux. Parce qu'on le bonifie aussi d'année en année. Au début, on a commencé avec une version un qui avait 25 critères. L'année suivante ou deux après peut-être, on les a modifiés pour apporter des précisions. Et là on est en cours de faire une version trois. On ajoute à nouveau des choses parce qu'on se dit qu'il y a des choses qui n'étaient pas incluses et on se rend compte que ça peut nuire à la clientèle ou aux services, à la qualité, là.

Donc, le sept heures-semaine n'est pas suffisant, mais on arrive quand même à faire avec ce qu'on a, là. Parce qu'idéalement nous, on aimerait rencontrer un 10 % de la clientèle à l'intérieur des résidences pour avoir en tout cas un portrait. Mais encore là 10 %, ce n'est pas beaucoup, et on n'en rencontre que 4 % à 5 %, 6 % lors des visites. Ça fait qu'on a une idée de la qualité, mais il faut tomber sur les bonnes personnes qui vont bien vouloir aussi nous confier des choses ou être disponibles à nous rencontrer.

M. Couillard: Et, dans les cas où vous allez dans une résidence puis ils ne satisfont pas à vos critères, qu'est-ce qui se produit?

Mme Desaulniers (Josée): On fait une recommandation écrite... bien, verbale lors de la rencontre, évidemment. Par la suite, ils ont une recommandation écrite. On laisse un délai raisonnable; habituellement c'est 30 jours. Mais, dépendamment de la situation, si c'est des choses plus au niveau urbanisme, là ce sera l'inspecteur qui va donner son délai. Et, moi, je me suis donné, avec mon patron, là, comme mandat de relancer après le délai donné. Donc, si j'ai dit: Dans 30 jours, j'aimerais que le menu du dîner et du souper soit affiché en début de chaque journée, dans un mois, je vais retourner voir si vraiment l'application a été faite. Si toutefois elle n'est pas faite, je refais un autre avis écrit en disant que, là, cette fois-ci on pourra agir au-delà que juste aller voir et pas de portée, là, d'effet, finalement. Et là on donne un autre délai, évidemment. Si, à la suite du délai, ce n'est pas respecté toujours, là on peut prendre des mesures en disant: Écoutez, est-ce que c'est sérieux, votre... Est-ce que vous voulez vraiment participer ou vous voulez vous retirer? Et là je pense qu'il y a une négociation qui peut se faire et il y a un retrait qui peut se faire.

M. Couillard: C'est là que ça devient très important. On en a discuté avec d'autres groupes, c'est l'aspect incitatif de ça pour les résidences. Parce que des groupes nous ont dit: Écoutez, c'est bien beau de dire que c'est incitatif d'être certifié puis de le montrer à la porte, si on était dans une situation d'offre et de demande classique, où il y a un petit peu plus d'offres que de demandes de services, il y a plus de places en résidence que ce dont on a besoin, il y aurait un fort incitatif pour le propriétaire de résidence de détenir ledit certificat. Mais, nous disent-ils, on est en fait dans une situation inverse où dans le fond, pour le propriétaire de la résidence, dans la vraie vie, ça ne change pas grand-chose qu'il l'ait ou pas son... Mais chez vous est-ce que ça change quelque chose?

n (12 h 10) n

Mme Desaulniers (Josée): ...vient changer des choses. Et, preuve à l'appui, l'année passée ou voilà deux ans, on a retiré une résidence du bottin pour différents critères, là, non-respect des gens, alimentation, pas nécessairement questionnable, mais, bon, qui ne respectait pas le Guide alimentaire, différents critères, et le retrait a été fait. Différentes lettres avaient été envoyées, des avis, et tout ça, et, à un moment donné, on a décidé d'enlever l'accréditation. Et, bon, il y a eu changement de direction, parce qu'évidemment nous, on ne redonnait pas le certificat tant que la directrice était là parce que c'était la même philosophie qui se poursuivait. Et leur taux d'occupation a diminué énormément, énormément.

Et même d'ailleurs il y a eu une nouvelle administratrice qui est rentrée, et elle est venue me voir en me disant: Écoute, je voudrais le ravoir, c'était quoi, les points? Et elle avait tout fait pour répondre à nos critères, mais, compte tenu que la personne-problème était toujours là, on n'était pas d'accord à aller dans le sens qu'ils souhaitaient, compte tenu qu'on se disait: Ça va se poursuivre. Donc, encore là on a fait des recommandations en disant: Vous voulez être accrédités, nous vous demandons de changer les politiques, changer ci. Et ils viennent tout juste d'être réaccrédités.

M. Couillard: C'est très intéressant, hein, les bonnes idées, on voit qu'elles sont, là, dans le milieu puis dans les établissements, il faut savoir s'en inspirer. Est-ce que vous avez pensé également, dans le futur, également avoir un processus pour les résidences qui accueillent d'autres types de personnes, comme les handicapés intellectuels ou les personnes atteintes de troubles de santé mentale?

Mme Desaulniers (Josée): Bien, sur notre territoire, on a déjà le centre... je dis Butters-Savoy, mais il a changé d'appellation, là, qui s'occupe de ce type de résidences là et d'évaluation des propriétaires et des lieux. Donc, pour l'instant, non. Mais c'est sûr que, oui, à un moment donné, on s'était dit, avec la ville: Est-ce qu'on va ouvrir? Mais déjà, avec notre sept heures-semaine, on a de la misère. Mais ça pourrait être intéressant. Puis santé mentale aussi. Actuellement, on ne le fait pas parce que ça relève du centre hospitalier, je crois, là, donc, à ce moment-là, on ne se mêle pas à ça. Mais c'est sûr que, s'ils adopteraient nos critères, il y aurait peut-être des qualités qui seraient intéressantes, là, à changer dans les résidences.

M. Couillard: M. le Président, je vais terminer, je pense qu'on doit être proche du délai, là, mais c'est tellement intéressant que je veux avoir le plus d'information possible. Je suppose qu'avec la municipalité de toute évidence vous n'avez pas eu de difficulté à obtenir leur collaboration. Est-ce qu'il y a eu des négociations avec la municipalité pour qu'il y ait un inspecteur ou deux qui soient...

Mme Desaulniers (Josée): Le début?

M. Couillard: Oui.

Mme Desaulniers (Josée): Moi, je n'avais pas été impliquée à ce niveau-là, mais je crois que ça s'est fait quand même assez bien. Parce qu'on voulait vraiment avoir une qualité des résidences privées sur notre territoire. Donc, autant la ville que nous, le CLSC, je crois qu'on voulait ça, donc le partenariat s'est très bien fait. En tout cas, moi, je n'étais pas là à ce moment-là, mais, vous, vous étiez là, je crois.

Mme Lacroix (Martha): Oui, puis ça continue. Dans les 25 critères, là, un des critères qu'on veut ajouter ? parles-en donc ? c'est le service des incendies.

Mme Desaulniers (Josée): Bien, là, c'est ça. Actuellement, dans les 25 critères, il n'y a pas de recommandation à l'effet que les gens doivent avoir un plan d'évacuation et un plan de mesures d'urgence. Et on voit très bien ce qui se passe parfois dans des incendies de résidences privées. Et, dans la version trois, on veut rendre obligatoire le plan de mesures d'urgence selon une grille qui a été élaborée par le service des incendies. C'est un cartable rouge, différentes sections, donc chaque résidence aura la même section, même page, même cartable à l'entrée, et aussi le plan d'évacuation qui doit être affiché à la bonne place et avec les bonnes portes aux bonnes places, là, parce qu'il y en a qui croyaient l'avoir bien fait, mais ce n'était pas bien fait. Ça fait que, nous, on exigerait, dans la troisième version, que ce soit maintenant inclus. Donc, les gens qui ne veulent pas se conformer, ce pourrait être un critère de désaccréditation.

M. Couillard: Bien. Merci, mesdames. D'abord, je vous félicite, hein, je trouve que vous rendez un service immense à la population et également aux parlementaires aujourd'hui, là, on apprend beaucoup. Puis je suis certain que les idées vont germer après votre présentation.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le ministre. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, bienvenue au nom de l'opposition officielle, Mme Choinière, Mme Lacroix, Mme Desaulniers et Mme Lauzier. Alors, l'opposition officielle avait beaucoup insisté pour qu'au cours de cette journée et de la journée précédente, hier, nous entendions des groupes qui avaient des points de vue inédits à nous apporter. Et le fait est que, depuis ce matin et puis hier également, les points de vue qui nous sont transmis le sont à partir d'expériences vécues, et c'est extrêmement précieux.

Moi, j'ai eu l'occasion d'inaugurer la maison qui a été bâtie à Granby, là, avec le projet AccèsLogis et dans laquelle, vous savez, il y a finalement ces personnes qui ont pu être désinstitutionnalisées et qui vivent maintenant dans leurs logements tout en ayant les services du CLSC. J'ai eu l'occasion de rencontrer le maire et d'être ministre des Aînés en 1999. Alors, j'ai suivi passablement l'expérience qui a été menée.

Évidemment, ce qui est intéressant, là, je prenais connaissance de vos critères. Alors, je les ai mis de côté, là, pour pouvoir les comparer avec ceux que le ministre va faire publier dans la Gazette officielle tout prochainement, hein? Parce qu'il faut que des critères sociosanitaires soient publiés pour qu'il y ait une certification. Alors, une certification suppose des critères. Puis il avait été question qu'on ait ces critères au moment de l'étude, en commission parlementaire, du projet de loi. Bon, quoi qu'il en soit, le ministre va devoir les publier dans la Gazette. Il y aura 45 jours de consultation, c'est prévu dans le règlement. Et j'attire votre attention pour qu'à ce moment-là vous puissiez les comparer, les critères qui seront publiés, avec ceux que votre expérience vous a en fait amené à élaborer au cours des années. Soyez assurées que ces critères qui nous sont transmis dans votre dossier aujourd'hui vont nous servir aussi pour faire cette comparaison.

Ce serait utile. Lorsque la publication, dans la Gazette officielle, des critères sera faite, ce serait utile que vous puissiez peut-être communiquer avec le secrétariat de la commission pour nous indiquer s'il y a des omissions auxquelles vous tenez beaucoup. Parce que, quand vous dites, dans votre mémoire, avec raison, là, que, votre expérience, vous ne souhaitez pas qu'elle soit mise de côté, je crois que ce serait utile que votre expérience au contraire puisse inspirer notamment les critères. Je ne sais pas ce que vous en pensez, si on peut compter sur vous pour cela.

Le Président (M. Paquin): Mme Lacroix.

Mme Lacroix (Martha): Sûrement.

Mme Harel: Alors, Mme Lacroix, je vous en remercie. Je pense que ça va être un moment important. Lorsque les critères vont être publiés dans la Gazette, c'est 45 jours de consultation. Peut-être, Mme Lacroix aussi pourra en informer l'AQDR de manière à ce qu'ils puissent peut-être intervenir s'il s'avère que les critères ne soient pas à votre satisfaction complète. Ça, c'était le premier élément.

Le deuxième. En regard des deux ressources d'hébergement qui ne se sont pas conformées encore à vos critères et qui continuent à recevoir des personnes aînées en perte d'autonomie, vous les connaissez. Bon. Évidemment, vous, vous appliquez dans ? comment dire? ? un environnement qui n'est pas celui de l'anonymat de la grande ville. Ça crée une autre dynamique quand on est dans une ville de 2 millions d'habitants où un seul quartier... Par exemple, dans mon arrondissement, moi, juste mon quartier, c'est 118 000 de population. Alors, dans l'anonymat de la grande ville, comment faire justement pour identifier ces ressources clandestines que, vous, vous visitez? En fait, elles ne sont plus clandestines, vous les connaissez, vous les visitez. Elles reçoivent elles-mêmes des personnes en hébergement et elles ne sont pas désireuses d'être dans votre bottin. Comment vous voyez ça?

Le Président (M. Paquin): Mme Desaulniers.

Mme Desaulniers (Josée): Bien, c'est des résidences qui fonctionnent avec une certaine clientèle, on ne se le cachera pas...

Mme Harel: C'est-à-dire?

Mme Desaulniers (Josée): Ça peut être des gens qui sont marginaux, ça peut être des gens qui ont une consommation soit d'alcool ou... ou des gens pas de la rue nécessairement, mais des gens qui se satisfont de peu, car ils ont parfois eu peu aussi dans leur vie, ou de faibles revenus. Donc, on retrouve quand même différentes clientèles dans ces ressources-là...

Mme Harel: C'est parce que les services sont moins élevés?

Mme Desaulniers (Josée): Mais, oui, parce que c'est des résidences habituellement de neuf personnes et moins, et c'est des chambres très petites. C'est ça, ça ne répond vraiment pas, à peu près sur toutes les normes, là, de...

Mme Harel: Parce que, vous savez, l'AQDR est venue ici, en commission parlementaire, présenter un mémoire, et M. Boucher qui s'occupe d'hébergement, Maurice Boucher, là, qui était avec le président, disait que, s'il y avait une certification facultative, il allait y avoir un système à deux vitesses, avec des résidences pour les riches puis des résidences pour les pauvres. Et, l'expérience de ces deux ressources, là, qui ne sont pas conformes à vos critères, finalement vous nous dites que ce sont des personnes à faibles revenus qui y habitent.

Mme Desaulniers (Josée): Ils ont plusieurs problématiques. On en retrouve à faibles revenus, donc. Il y en a aussi que ce n'est pas des faibles revenus non plus, c'est plus des gens qui ne veulent pas avoir de règlement, qui ne veulent pas avoir une routine de vie. C'est ça, c'est des gens marginaux, ça revient à dire ça un peu, là. Mais, nous, on finit par savoir. Puis peut-être que, dans les grandes villes aussi, ça pourrait être comme ça. Parce que, quand les gens vont à l'hôpital, ça prend un lieu d'adresse, donc on peut arriver à savoir qui relève d'un endroit où il y a des gens qui habitent chambre et pension.

n (12 h 20) n

Comme ça peut être nos soins à domicile. Nous, on est très proches de ces intervenants-là, là, en étant sur place. Donc, ça peut être nos soins à domicile aussi qui nous disent: Mais finalement je suis allé à telle place, et ça semble plus d'une résidence que d'un fils qui prend soin de papa. Et ça peut être aussi des gens qui nous appellent pour dire: J'ai connaissance qu'il y a des gens qui habitent là, je veux vous le signaler. Et là la ville a le pouvoir de dire qu'ils veulent aller faire une inspection, et comme ça on peut entrer.

Mme Harel: En fait...

Le Président (M. Paquin): Mme Choinière, je pense que vous avez quelque chose à rajouter.

Mme Choinière (Cécile): Mais, moi, je veux rajouter, oui. C'est que, vous savez, les gens, avec la publicité qu'on fait et tout ce que... puis entendre parler que ça va bien, quand une personne va pour magasiner une résidence, elle commence par regarder si le permis est affiché dès l'entrée, et déjà ça donne une sécurité aux gens. Parce que, moi, je me dis: Il faut absolument que nos résidences soient conformes, soient... parce que, vous savez, demain, ça va être notre tour d'aller demeurer là. Donc, il faut prévoir. Donc, il faut absolument que nos résidences soient conformes, il faut que ce soit accrédité. Ça, j'y tiens énormément. Depuis 1996 que je travaille là-dessus.

Mme Harel: C'est formidable. Évidemment, ce qui est formidable, et sans doute peut-être l'agence... Est-ce que votre agence régionale, compte tenu du projet de loi, pourrait continuer à vous reconnaître comme le titulaire de l'accréditation? J'imagine.

Mais, si on revient au fonctionnement, c'est sûr que, dans une ville comme Granby, avec la municipalité... Vous avez aussi un quotidien, je crois, hein?

Des voix: Oui.

Mme Harel: Ça, c'est exceptionnel. Il n'y a pas beaucoup d'autres territoires où les populations peuvent compter sur un quotidien. Parce que, vous voyez, le quotidien, par exemple, à Montréal, c'est le journal La Presse. Alors, en général, les bonnes nouvelles ne sont pas des nouvelles, hein, c'est juste les mauvaises nouvelles qui sont des nouvelles. Alors, c'est certain que, par exemple, l'hôpital, vous, vous avez un hôpital proche de vous, alors, nous, c'est l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont ou le CHUM. Ils ne communiquent pas très bien. Ils ne sont pas en contact même avec le centre local, hein. Parce que la majorité des centres locaux n'ont pas d'hôpital comme partenaire, ils sont des partenaires avec entente, mais pas en tant qu'intégration, comme vous l'avez présentement. Alors, on est dans un autre univers. On est dans un univers où il faut quand même penser... respecter ce que vous faites, mais aussi un autre univers où il faut s'adapter à une autre réalité qui est totalement différente. Oui?

Le Président (M. Paquin): Oui, Mme Lauzier.

Mme Lauzier (Solanges): Oui. Dans le programme d'évaluation des résidences privées d'hébergement, je trouve qu'il y a un volet qui m'apparaît très dynamique puis qui touche des valeurs fondamentales, c'est lorsque l'intervenante fait l'évaluation de la résidence avec la famille. Donc, il y a intégration dynamique des proches de la personne qui va en hébergement, et c'est un facteur de sécurité très important.

Mme Harel: Certainement que ça, c'est peut-être l'élément le plus dynamique, hein? Mais, vous savez, Mme Lacroix, pour rendre justice à la FADOQ, quand ils sont venus, là, je leur ai posé la question, et ils ne cherchent pas à... ils ne veulent pas faire l'évaluation ni clinique, comme celle que fait présentement Mme Desaulniers, ni non plus l'évaluation bâtiment, comme celle que fait la municipalité. Ils l'ont dit au ministre: Nous, on n'est pas habilités pour faire ni l'évaluation clinique ni l'évaluation, si vous voulez, des plans d'urgence ou d'évacuation du bâtiment, de sa sécurité, etc. Ils ont dit: Nous, ce qui peut être fait, c'est l'évaluation de la qualité par la personne hébergée et sa famille. Alors, je pense que ça rend plus justice. Parce qu'ils ne cherchent pas à faire ni le clinique ni, si vous voulez, le physique, si vous voulez.

Une voix: ...

Mme Desaulniers (Josée): Mais est-ce qu'à ce moment-là la FADOQ aurait une grille d'évaluation quand même complète où ce serait plus du personne à personne...

Mme Harel: La grille d'évaluation devrait être celle publiée par le ministre dans la Gazette officielle pour servir de critères sociosanitaires. Il ne peut pas y avoir des évaluations différentes selon le territoire, l'évaluation doit être la même. Alors, le ministre a même parlé d'une consultation actuelle. Ce serait intéressant si vous en étiez aussi. Mais il y a une consultation qui est en cours actuellement. Je sais que le Conseil des aînés a parlé justement d'avoir été impliqué dans cette consultation en cours, sur les critères qui devront s'appliquer. Donc, ce sont des critères uniformes. Mais ceux qui les appliqueront, ça peut dépendre. C'est l'agence, dans le projet de loi du ministre, qui va les désigner.

Une voix: ...

Mme Harel: C'est ça. L'agence va les désigner, va désigner ceux qui vont appliquer les critères. Alors, ce seraient les organismes reconnus par le ministre mais désignés par l'agence.

Mme Lacroix (Martha): C'est décidé, là?

Mme Harel: Bien non, c'est dans le projet de loi. C'est ça.

Des voix: ...

Mme Harel: Non, non, non, Mme Lacroix, vous faites bien d'être venue, là, c'est important...

Mme Lacroix (Martha): C'est parce que vous dites «ce sera». Alors, j'ai dit: Bon.

Mme Harel: Non, les critères eux... C'est pour ça que c'est très important que vous participiez, là, à la consultation sur les critères. Mais c'est pour ça que c'est important que vous communiquiez avec votre agence, pour que votre agence ne vous écarte pas quand elle va avoir à désigner des organismes.

Mme Lacroix (Martha): Bien, on ne veut pas d'organisme, on a la municipalité, nous. C'est pour ça qu'on demande que ça reste comme ça.

Mme Harel: Oui, d'accord. Mais, la municipalité, vous êtes conscients que le ministre, lui, il faudrait qu'il convainque son vis-à-vis des Affaires municipales qu'il impose. Puis les municipalités qui ne voudront pas, il va se passer quoi, là? Parce que les municipalités présentement sont en négociation avec le gouvernement, puis le gouvernement veut leur envoyer plein, plein d'obligations sans leur envoyer l'argent. Les municipalités ne veulent pas ça. Alors, vous voyez bien que ce n'est pas simple, ça.

Le Président (M. Paquin): Mme la députée, malheureusement, le temps est écoulé.

Mme Harel: Merci.

Le Président (M. Paquin): Donc, mesdames, mesdames de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, section Granby, merci de votre présence à l'Assemblée nationale, aujourd'hui. Je suspends donc les travaux à cet après-midi, 15 h 30. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

 

(Reprise à 16 h 14)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, chers collègues! Alors, la Commission des affaires sociales poursuit ses travaux. Nous sommes réunis en dernière séance afin de compléter la consultation générale et les auditions publiques sur le projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives.

Nous allons procéder, dans quelques instants, à l'audition du Beneficiaries' Committee de l'Hôpital Douglas, terminer avec le Comité des usagers du centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue.

Il faut que je procède au dépôt des mémoires non entendus et par la suite terminer les travaux de la commission sur ce mandat avec des remarques finales.

Je suis convaincu que tous les téléphones cellulaires ont été mis hors tension, même avant notre arrivée ici, dans la salle. Et je vous rappelle que nous allons consacrer 50 minutes aux auditions des deux groupes cet après-midi.

Mrs. Bishop, it's a pleasure to welcome you to this Committee. As I do with all groups, I remind you that you have 20 minutes for your presentation, and it will be followed by an exchange of 30 minutes equally divided between members from both sides of the table. Alors, tout en vous souhaitant bienvenue, nous sommes à l'écoute.

Beneficiaries' Committee
(Users' Committee) Douglas Hospital

Mme Bishop (Martha): Mon français a disparu avec mes cheveux, mais j'essaye de parler en français, et patience à ma grammaire qui est non existante.

Le Comité des usagers à l'Hôpital Douglas est le plus vieux en Canada ? cette année, c'est notre anniversaire, 50 années ? et possiblement le premier en Amérique du Nord. Moi, je suis bénévole qui travaille comme bénévole pour ce comité pour environ 20 ans. Alors, c'est les personnes malades mentales qui sont les personnes les plus vulnérables et fragiles. J'ai des choses que je veux parler qui, pour nous, c'est important.

La première, c'est l'actualité du Comité des usagers. Ce n'est pas clair pour nous combien de comités des usagers des résidences des... dans un établissement. Par exemple, l'Hôpital Douglas est dans un seul terrain avec beaucoup de petits pavillons mais avec trois programmes, adults, children et adolescents, et geriatrics. Et, par exemple, nous avons beaucoup de difficultés de trouver des candidats pour les élections. Nous n'avons pas trouvé un candidat pour Child and Adolescent Service depuis quelques années. Et, en 2002, nous avons envoyé 1 000 différentes enveloppes adressées aux parents des enfants et adolescents. Nous n'avons pas aucune réponse. Au moment, notre comité n'a pas un représentant gériatrique parce que cette personne est trop malade. Et, pour avoir peut-être un comité de résidents, un comité de patients externes, un comité de... c'est incroyable.

Nous avons, chanceux, un plus grand budget que les autres comités parce que le comité d'usagers, en ce qui a trait... a plusieurs budgets, mais, pour les autres comités, si nous avons des sous-comités, et sous-comités, et sous-comités, 5 000 $, je ne sais pas comment ces comités fonctionnent avec seulement 5 000 $ et avec 500 $. Alors, nous, la seule et la grande chose... question que nous avons est: Combien de comités? Et est-ce qu'il y a trop des comités? Et est-ce que c'est dans le même terrain ou est-ce que c'est un comité pour ear, nose and throat, obstetrics, gynecology, cancer ou quoi? So, ça, il faut nécessaire d'être clarifié pour nous.

n (16 h 20) n

La deuxième chose qui nous inquiète, c'est la question de confidentialité. J'avais essayé de lire le projet de loi avec mon meilleur français beaucoup de fois, et ça semble que tout le monde a accès des dossiers confidentiels. Il y a des maladies que c'est acceptable, comme cancer, heart, lung, diabetes, mumps, chicken pox. Il y a des autres maladies que ce n'est pas acceptable. Ça, c'est les maladies de sexual transmission ? je ne sais pas le mot en français ? et les malades mentaux.

Si vous avez cassé un os ? j'espère que c'est le mot juste ? et vous allez à l'urgence, est-ce que c'est nécessaire pour l'urgence de savoir tous les médicaments que vous portez? Le lithium, le chloropromazine, le Viagra, est-ce que ça sert des choses pour les os brisés? Et malheureusement il n'y a pas, au moment, une façon de trouver les choses confidentielles sur l'Internet, ou le fax machine, ou quelque chose confidentiel. Il y a un jeune homme de 12 ans qui va faire des choses sur son ordinateur et il sait tout le monde. Et nous avons... Je vois que le Conseil pour la protection des malades recommandait que ça, cette section est vue par l'Access to Information Group.

Nous sommes inquiets que peut-être les ressources intermédiaires, les familles d'accueil, les résidences d'accueil... Quelle sorte d'information est envoyée à ces ressources? Parce que j'avais visité beaucoup, beaucoup, beaucoup de familles d'accueil. Ça, c'est une maison... L'ordinateur, c'est dans la salle de récréation, les dossiers médicaux, c'est dans la cuisine, près du couloir. Tout le monde, les enfants, les visiteurs ont accès. Ça, c'est une maison privée avec les résidents, ce n'est pas une nursing station ou une archive dans un hôpital. Et je pense que, pour les... il faut nécessaire de prendre garde quelle sorte d'information est envoyée aux résidences d'accueil, à l'Urgences-santé, à tout le monde, parce que, si c'est dans les journaux ou... J'espère que vous comprenez ce que je dis.

Une chose que nous avons beaucoup d'inquiétude, nous sommes très heureux que vous vouliez faire une licence pour les résidences privées, mais pas pour les malades mentaux, pas pour les intellectually handicaped. C'est un grand réseau de personnes vulnérables. Et, si c'est optionnal, si c'est par choix, si je suis une propriétaire d'une maison, que c'est sale, qui n'est pas très bonne, pensez-vous que je trouve une licence, d'avoir des inspections? Je pense que c'est nécessaire d'avoir la licence pas optionnelle, mais obligatoire. C'est nécessaire d'avoir une licence si vous voulez vendre des... si vous ouvrez un restaurant. Ça, c'est une entreprise privée, mais c'est nécessaire d'avoir une licence, et je pense que c'est la même chose pour les résidences privées.

Nous avons trouvé ? et peut-être j'ai mal compris une autre chose: le remplacement des membres du C.A. Dans le temps passé, c'est le pouvoir des trois conseils et aussi du comité d'usagers de faire le remplacement. Si vous laissez ça, le remplacement, aux membres du conseil d'administration, je ne suis pas certaine, s'il y a une ouverture au conseil d'administration de Douglas, et notre comité dit: Martha Bishop, c'est notre candidate, je ne suis pas certaine si les autres membres du C.A. supporteraient ça. Pour moi, c'est le CMDP, il faut nécessaire de faire le remplacement si un membre du C.A. a démissionné, ou disparu, ou quelque chose comme ça. Et peut-être j'ai mal entendu cette chose dans la loi.

L'autre question, le comité de révision, que c'est nouveau depuis deux années, quelque chose comme ça, ce n'est pas clair. Il dit qu'il y a un comité de révision dans chaque CSSS, mais est-ce qu'il y a un comité de révision dans chaque établissement qui a son propre C.A.? O.K.? Et la même chose pour le comité de vigilance, s'il y a un C.A. comme les... ou sur les choses comme ça. Et nous sommes très heureuses du comité de vigilance parce que, dans le temps passé, notre comité et notre ombudsman ont fait des rapports, ont fait des recommandations au conseil d'administration, et ce conseil a trop d'autres choses à penser, et il n'y a pas un vrai suivi des recommandations de notre comité et de notre ombudsman. Peut-être, il y a des fois qu'il nous fait des recommandations qui ne sont pas justes, mais il faut nécessaire d'avoir un grand suivi de ces choses comme ça.

La dernière chose qui m'a inquiétée, et j'ai écrit ça dans mon memo, quand j'ai essayé de lire le projet de loi, il n'y a pas un grand changement de loi depuis le bill 120. Maintenant, vous ajoutez l'article 13.1, .2, point quelque chose, et je pense que, chaque fois que vous avez une chose à ajouter, quelquefois... O.K., cette page ici, cet article ici, est-ce qu'il y a une référence? It's like being in the middle of the ocean without a compass. Je pense que, si vous êtes un avocat, vous êtes perdu. Si vous n'êtes pas un avocat... Et beaucoup de personnes qui lisent ça, ce n'est pas un avocat. Peut-être, un grand, grand ouvrage pour vous est de commencer encore au commencement et faire quelque chose qui est cohérent... quelque chose comme ça.

La dernière chose que je veux dire, nous sommes très heureux que le Protecteur du citoyen ait un mandat de superviser ou... ? je ne sais pas le mot juste ? le Protecteur des usagers en matière de health. Et, pour vous amuser, je suis ici, dans cette salle, ici, dans les années 1990, quand il y a des questions du mandat du Protecteur du citoyen, et je suis ici avec d'autres personnes de Douglas, et nous avons dit que nous accueillons favorablement the enlargement of the mandate of the Protector of citizens. Ça, c'est seulement 15 années. Je suis très heureuse, j'espère les autres changements et je suis très heureuse que la commission et le ministre aient fait ce travail.

n (16 h 30) n

Il y a beaucoup de choses que c'est bon dans votre loi, mais les choses que... Ne jamais oublier les pauvres patients, bénéficiaires, clients, usagers... quel mot que vous choisissiez. C'est des personnes très diminuées. Est-ce que vous avez l'expérience que votre médecin vous donne un papier: Signez ça, O.K.? Et, quand j'avais ma première cataracte, je n'avais pas mes lunettes. Je suis sur mon dos: Signez la permission. If I don't sign, they won't remove the cataract, I'll go to the end of the list. Where do I sign? Et, pour les patients âgés, diminués, l'information, de comprendre l'information, il faut nécessaire... Et les pauvres médecins n'ont pas de temps pour faire ça. Nous essayons, dans notre comité, d'expliquer quelque chose comme ça. Mais, au moment, la présente loi, les changements de loi, nous avons beaucoup de difficultés de comprendre pour dire ça à nos patients.

Mais je vous remercie pour faire cet ouvrage. Et j'espère que, chaque fois que vous direz ou ferez quelque chose en santé et services sociaux... souviens les personnes que c'est peut-être un problème d'énumération, de, you know, écriture, de santé des personnes que ce n'est pas très valuable to society, des choses comme ça. O.K.? J'espère que ça fait le 20 minutes.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme Bishop. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, Mme Bishop. Félicitations pour votre présentation et l'effort que vous avez fait de le faire entièrement dans la langue française. Mais je voulais vous dire, si, pendant les échanges, vous êtes plus à l'aise de converser dans la langue anglaise, il n'y a aucun problème, vous n'avez qu'à me répondre en anglais, et on continuera de la même façon. Je voulais d'abord clarifier certains points... Également, si vous ne comprenez... si vous n'êtes pas sûre de comprendre, faites-moi signe.

Je voulais d'abord clarifier les éléments que vous avez mentionnés dans votre présentation. D'abord, sur les budgets des comités des usagers. Bien sûr, ceci n'est pas dans la loi parce qu'il s'agit de règles administratives. Mais il est déjà prévu que les budgets vont augmenter considérablement, compte tenu des nouvelles responsabilités, selon le budget d'établissement, pour des montants beaucoup plus élevés que le 5 000 $ qui est actuellement disponible.

Deuxième élément, sur la question de la circulation de l'information, il faut vraiment... Et je sais que c'est compliqué à analyser dans le texte du projet de loi. Mais, vous voyez, il n'y a personne qui a... il n'y a pas d'organisation qui peut aller chercher des renseignements, autre que les professionnels qui ont un profil d'accès et qui doivent avoir une autorisation et un enregistrement de leur accès. Ou, lorsqu'il y a une transmission entre l'établissement et, par exemple, un groupe communautaire, ce qu'on va ajouter dans le projet de loi, c'est également le consentement de la personne pour que cette information circule. C'est une amélioration qu'on va apporter au projet de loi. Mais il n'y a aucun de ces organismes qui peut aller dans l'hôpital ou dans le dossier puis aller chercher des informations. C'est le contraire, c'est l'établissement qui transmet seulement les informations nécessaires pour le service qui va être rendu avec, ce qui va être ajouté, l'information et le consentement de la personne.

Et, parlant de consentement, j'ai été intéressé par votre dernière anecdote sur la façon dont vous avez signé votre consentement opératoire pour la chirurgie de la cataracte. Ça me rappelle des souvenirs pas trop lointains encore mais qui s'éloignent à chaque année, lorsque j'enseignais aux résidents comment obtenir un consentement opératoire. Je vous assure que ce n'est pas comme ça qu'on l'enseigne. Et ça me fait un peu de peine de voir que c'est fait encore de cette façon. On insiste beaucoup pour que les choses soient plus explicites, qu'on prenne le temps d'expliquer. Et ce n'est pas nécessairement vrai que ça alourdit tant que ça la tâche, si on s'organise correctement pour prévoir une période pour le faire, et le faire correctement, plutôt que de le faire deux ou trois fois à moitié. Alors, j'espère que... Est-ce que vous avez une autre cataracte à avoir besoin d'être opérée?

Mme Bishop (Martha): Oui. Et, avec la deuxième, ils me donnent...

M. Couillard: Vous allez pouvoir comparer, là, j'espère.

Mme Bishop (Martha): Parce que je fais des pressions.

M. Couillard: O.K. Vous allez comparer les deux, les deux façons de...

Mme Bishop (Martha): Oui. Et aussi au Montréal General pour mon mari, je vais faire la pression.

M. Couillard: Pour les questions des certifications, merci pour vos remarques. On a déjà donné l'indication qu'on était certainement prêts à envisager d'étendre une forme de certification pour les autres clientèles vulnérables, comme les personnes avec des problèmes de santé mentale, déficience intellectuelle, toxicomanie, par exemple. Et c'est quelque chose qu'on va certainement considérer.

Pour ce qui est du commissaire local dans l'établissement, ce qui est recommandé actuellement, c'est que le rôle soit exclusif. Mais cependant certaines personnes nous disent: On pourrait permettre au commissaire local d'exercer d'autres fonctions qui ont trait à la qualité ou à la mesure de la satisfaction des personnes. Est-ce que vous seriez d'accord avec ça?

Mme Bishop (Martha): Non, parce que... Oui, il est impliqué par son job avec la qualité. Mais j'avais un peu d'expérience avec la satisfaction des usagers, et nous avons des chercheurs à l'hôpital qui font ça scientifically. Et, moi, l'ombudsman, s'asseoir sur un comité et voir les résultats, les choses comme ça, mais, pour appel à elle de faire... peut-être dans un petit établissement. Mais il n'y a pas des petits établissements maintenant. Ça, c'est un grand CSSS. Et ça, pour faire ça scientifically, properly, ce n'est pas quelque chose de court. Et, pour ajouter trop des choses à l'ombudsman, ça, c'est un vrai conflict of interest. Je sais que notre ombudsman travaille plus de plein temps, and she has no spare time just looking after complaints and, you know, visiting... sitting on a couple of committees.

M. Couillard: We have had a discussion here about the role of the comité d'aide et d'accompagnement pour les plaintes versus the role of defense rights groups for the mental health. And, in this bill, we are suggesting that these groups, interest defense groups could act as aids or accompagnants for a complaint process. But other people have told us, actually AGIDD, which you know probably: Don't do that, keep separate defense des droits and treatment of complaints. What is your opinion about that?

Mme Bishop (Martha): Well, our committee, by mandate, is to defend the common rights, and to aid, and assist. And we've had no trouble doing the two of them. You know, we've accompanied people, we've assisted people, we've defended common rights. One of the questions that I was concerned about... We've had experience of working with CAAP, both our ombudsman and ourself, and we find them an excellent group. They're very professional, very trained, know what they're doing. And I think maybe the individual... Notre ombudsman a dit: Si vous voulez aide et assistance, il y a le Comité des bénéficiaires, et il y a CAAP, et il y a Action Autonomie. Ils donnent le pouvoir. And I think, from word of mouth, just... defending rights only, become sort of protecteur du citoyen or whatever, we were not too taken with the idea of somebody simply having that mandate and no other mandate. Part of a more global mandate, yes.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Bienvenue, Mme Bishop. Vous êtes sans doute la seule parmi nous tous qui était présente à la consultation du ministre Marc-Yvan Côté, il y a maintenant 15 ans, n'est-ce pas? Alors, vous avez fait état, là, de l'ancienneté du Comité des usagers, 50 ans, 50 ans cette année. Vous savez qu'il y a un regroupement des comités d'usagers?

Mme Bishop (Martha): Oui. Et nous sommes très actifs dans ce groupe-là. Et malheureusement il ne fait pas un bref, ce groupe: trop occupé avec les autres choses.

Mme Harel: Nous n'avons pas abordé la question du financement des comités d'usagers. Jusqu'à maintenant, par établissement, la loi obligeait la mise en place d'un comité d'usagers pour lequel, par entente, je crois, le ministère versait 5 000 $... ou l'établissement versait 5 000 $. Avec le regroupement, suite à la loi n° 25 et avec les modifications apportées par le projet de loi n° 83, comment se fera le financement, selon vous?

Mme Bishop (Martha): Il y a une exception pour les comités en psychiatrie, je pense que... intellectually handicapped. Je ne sais pas le mot en français.

Mme Harel: Déficient intellectuel.

n (16 h 40) n

Mme Bishop (Martha): Et nous sommes supposés de recevoir 0,001 % du budget de l'hôpital, et ça reste la même chose pour quelques années, le même pour trois à quatre années. Alors, le budget de l'hôpital monte, et, nous sommes chanceux à Montréal, l'agence a fait une augmentation l'année passée, et aussi le ministre, et nous sommes chanceux, nous sommes finalement reçu 0,001 %. Mais, moi, je travaille comme bénévole beaucoup d'heures par année et, pour cette année, nous avons employé une deuxième personne parce que, beaucoup des personnes, c'est en dehors de l'hôpital, dans les familles d'accueil, les choses comme ça, et ce n'est pas possible pour deux personnes de faire le tour. Mais, moi, j'ai beaucoup de sympathie pour les hôpitaux Notre-Dame, Maisonneuve-Rosemont. 5 000 $, qu'est-ce qu'ils font avec ça? It's not enough to buy stamps.

Mme Harel: Et, Mme Bishop, vous êtes donc active au Comité des usagers.

Mme Bishop (Martha): Pardon?

Mme Harel: Vous êtes active comme bénévole?

Mme Bishop (Martha): Oui, oui, oui.

Mme Harel: Comme bénévole. Et quel est l'accompagnement pour le traitement des plaintes? Le traitement des plaintes se fait au commissaire aux plaintes, le commissaire à la qualité des services?

Mme Bishop (Martha): Nous avons un ombudsman qui travaille plein temps juste pour les plaintes. Avant les choses dans la loi, nous avions une entente avec l'ombudsman que nous faisions les plaintes communautaires... common rights, et elle fait les plaintes individuelles. So, il y a des personnes qui arrivent à notre bureau. Si c'est une plainte individuelle, alors nous accompagnons pour la prochaine porte. Et il y a des fois que Mme Bourassa a envoyé une plainte, elle dit: Ah, everybody in that unit is not getting enough breakfast. It's not just one person. Alors, nous travaillons ensemble. Nous n'avons pas des murs fermés entre les deux, parce que c'est un mélange beaucoup, des fois.

Mme Harel: Et est-ce que les personnes qui font des plaintes s'adressent aussi au CAAP, là... Comment ça...

M. Couillard: Centre...

Mme Harel: Centre d'accompagnement...

M. Couillard: Et d'assistance.

Mme Harel: Et d'assistance.

Mme Bishop (Martha): C'est une chose que l'ombudsman a à faire. Quand une personne fait une plainte et veut une assistance pour écrire une lettre ou quelque chose, il dit: Nous avons le Comité des usagers; la prochaine porte, nous avons le CAAP; et nous avons Action Autonomie. Il donne trois dépliants si la personne veut trois dépliants. So, alors, l'usager ou le représentant légal sait toutes les possibilités de faire à tous les niveaux.

Mme Harel: Ça fait déjà 20 ans que vous êtes active, bénévole active au sein du Comité des usagers. Êtes-vous toujours en contact avec ceux et celles des personnes désinstitutionnalisées qui sont hébergées dans les résidences privées?

Mme Bishop (Martha): Oui. Je sais les personnes depuis quelques années. Vraiment, il y a des résidences privées que c'est très, très bon. Mais, comme tout le monde, il y a sliding scale. Mais il y a des autres places. Et ça prend quelque chose de terrible, pour une personne, de faire une plainte. Par exemple, le fameux Pavillon des pins, à Mascouche, c'est un employé de l'hôpital qui est allé à mon bureau et a dit: Est-ce que vous savez qu'il y a un mort dans le Pavillon des pins? No. Est-ce que vous savez qu'il y a un coroner's report? No. Alors, mais aucune des résidences... Il y a des fois, dans les familles d'accueil... Nous avons 150 que le Douglas a suivis. Ça prend quelque chose de terrible, pour une personne, de faire une plainte. Un homme me dit: Une maison, nous avons fermé, et une résidente ne veut pas sortir parce qu'elle pense: I'll be back on the street again, eating out of garbage pails. Il y a... It can make you cry. C'est terrible.

Mme Harel: Parce qu'ils ne s'attribuent pas le droit de faire des plaintes, ils ne s'attribuent pas... Les usagers des services psychiatriques, ceux avec lesquels vous êtes en contact, ils ne s'autorisent pas de faire des plaintes?

Mme Bishop (Martha): La chose que nous faisons... Parce que la loi, c'est clair, we have to receive the complaint. And, beaucoup des fois, quelques fois par année, une personne arrive, et elle avait un concern: Est-ce que vous voulez une plainte? Oh, non, j'ai peur. Qu'est-ce que c'est, le concern? So, if they say: It's too cold, it's too hot, it's too dirty, alors nous allons à l'unité ou quelque chose, et: Ah, it's a collective complaint. So we make the complaint. But it's, you know, unfortunately... Ça, ce n'est même pas seulement les personnes malades mentales. More people are afraid of making a complaint that, you know, the next time something will happen to them.

Mme Harel: On aura peut-être, cet après-midi ? je ne sais pas si vous serez des nôtres ? on aura peut-être l'occasion d'entendre le ministre proposer des améliorations au projet de loi, entre autres choses d'introduire une certification pour l'hébergement en résidence privée et non seulement aux personnes aînées en perte d'autonomie, mais aussi aux personnes vulnérables. Et la grande question étant: Est-ce que cette certification à partir de critères... Quels seront les critères sociosanitaires? Ça, c'est la première chose. Et la deuxième: Est-ce que la certification doit devenir obligatoire?

Mme Bishop (Martha): Oui, oui, oui. Parce que, si vous avez une mal maison, vous n'allez pas appeler pour une certification.

Mme Harel: Parce qu'évidemment, à partir du moment où il y a certification, vous venez de le dire en fait, ça signifierait qu'on fermerait les yeux sur les situations qui sont inacceptables, hein? On fermerait les yeux comme sur Mascouche, par exemple.

Mme Bishop (Martha): Oui, oui, oui.

Mme Harel: Bon. Il n'y aurait pas de référence de la part des établissements. Mais je ne sais pas s'il y aurait une autre amélioration, qui est de continuer à permettre à la Protectrice des usagers, qui va maintenant être adjointe au Protecteur du citoyen... continuer de faire enquête dans les résidences privées. Même s'il y a peu de plaintes, il y a quand même... Vous voyez, l'an dernier, il y en a eu une trentaine. On a consulté sur le site Internet, il y en avait une trentaine de plaintes dans les résidences privées où il y a eu un rapport de la Protectrice des usagers.

Alors, dans l'état des choses, c'est évident qu'il faut accepter que les personnes vulnérables ou en situation de perte d'autonomie soient des personnes que la société doit protéger, en fait. Il y a un élément de protection, en fait. C'est ce que vous nous dites, là, aujourd'hui, je pense, hein?

Mme Bishop (Martha): Oui, et parce que beaucoup de ces personnes, spécialement les malades mentaux, n'a pas de famille qui est près de lui. Et, quand nous fermons Mascouche, par exemple, il y a deux différents membres des familles, une soeur, par exemple, qui n'avait pas vu sa soeur pour deux, trois années. Elle a sonné la sonnette, une femme a ouvert la porte, et elle a dit: Je cherche ma soeur, Mary-Jane. Mais, I'm Mary-Jane. Et il n'y a pas beaucoup des... Beaucoup des personnes manquent de fighters for their side from their family or friends.

Mme Harel: Heureusement que vous êtes là, Mme Bishop.

Mme Bishop (Martha): Pardon?

Mme Harel: Heureusement que vous êtes là. Fortunately, you exist. Et aujourd'hui c'est une chance qu'on a, hein? C'est la dernière journée, et on reçoit des gens qui nous inspirent. Alors, je veux vous remercier.

Le Président (M. Copeman): Mrs. Bishop, I just want to thank you for your devotion, energy, and courage, not only... in particular over the last 20 years, on behalf of the users and clients of the Douglas Hospital. But in particular I know that you're facing your own health care challenges, these days, and I think I can speak for all of us when we say and when I say that we greatly admire the effort that you made to come and see us today, by bus, from Montréal, and want to thank you very much for having participated in this Committee, on behalf of the Users' Committee of the Douglas Hospital.

Mme Bishop (Martha): Thank you very much.

n (16 h 50) n

Le Président (M. Copeman): Thank you. J'invite maintenant les représentants du Comité des usagers du Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue à prendre place à la table.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Copeman): Alors, chers collègues, la commission poursuit ses travaux, et c'est avec plaisir que nous accueillons, comme dernier groupe, le Comité des usagers des centres jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue.

M. le président Falardeau, Mme Bisson, bienvenue. Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation, qui sera suivie... Et malheureusement je dois être assez sévère dans l'attribution des temps. Et ce sera suivi par un échange d'une période maximale de 30 minutes partagées équitablement entre les parlementaires des deux côtés de la table. La parole est à vous.

Comité des usagers des centres jeunesse
de l'Abitibi-Témiscamingue (CUCJAT)

M. Falardeau (Yves): Bonjour. Merci, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires. Je suis Yves Falardeau, président du Comité des usagers du Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue. Je veux vous remercier sincèrement, au nom des usagers des centres jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue, de l'immense respect dont vous faites preuve en nous permettant de vous présenter le mémoire que nous avons préparé.

Je voudrais vous présenter Doris Bisson, qui est vice-présidente du comité depuis peu, qui vous présentera notre organisme.

Mme Bisson (Doris): Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Alors, notre organisme est le Comité des usagers du Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue. Institué au milieu des années 1990, en vertu de l'article 209 de la Loi sur les services de santé et services sociaux, nous représentons les usagers du Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue, soit actuellement 1 525, dans les environs, 1 525 personnes qui reçoivent les services d'un des centres de notre grande région. Nous sommes actuellement le plus important comité des usagers dans notre région.

Le fonctionnement que nous devons exercer en vertu de la loi sont: renseigner les usagers sur leurs droits et obligations; promouvoir l'amélioration des conditions de vie; évaluer le degré de satisfaction des usagers sur les services obtenus; défendre les droits et intérêts collectifs des usagers auprès des établissements ou de toute autre autorité compétente; défendre, à la demande d'un usager, les droits et les intérêts individuels auprès des établissements et de toute autre autorité compétente; accompagner et assister sur demande les usagers dans toute démarche ou toute situation, y compris quand ils désirent porter plainte.

Le comité actuel a été formé lors de l'assemblée des usagers, le 22 novembre 2004. À ce moment, le comité avait, depuis plusieurs années, une situation de semi-veille, et au su et au vu de la Direction des centres jeunesse et de l'agence régionale. Or, malgré les dispositions de la loi, ni l'agence ni la Direction des centres de la jeunesse n'ont joué le rôle qui leur revient pour que fonctionne correctement le Comité des usagers du Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue.

On savait, au centre jeunesse, qu'une seule personne était membre du comité, malgré que la loi en prévoie un minimum de cinq. On savait que les services n'étaient pas rendus aux usagers conformément à la loi. On savait que, depuis deux ans, aucun dépôt de rapport annuel de comité n'était fait au conseil d'administration, comme la loi y oblige. On n'accomplissait rien, au centre jeunesse, pour que la situation se corrige, malgré l'obligation de la loi à l'effet que la direction doit favoriser le bon fonctionnement du comité. Rien n'a été fait pour que la situation change.

À la suite de pressions exercées sur l'agence et le centre jeunesse par notre président actuel, Yves Falardeau, le centre jeunesse a convoqué une assemblée générale des usagers pour régler la situation. Or, malgré notre élection en bonne et due forme, les usagers du centre jeunesse que nous représentons n'ont pas encore... n'est pas encore le comité qu'il devrait être, O.K.? La plus grosse difficulté que nous vivons, c'est d'obtenir du Centre de jeunesse d'Abitibi-Témiscamingue la reconnaissance et le respect de notre comité des usagers et des fonctions que nous accorde l'article 212 de la loi.

Devant cet énorme obstacle qui empêche les usagers d'obtenir des services auxquels ils ont droit, nous avons débuté un processus de médiation avec le Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue auquel participe, à notre demande, l'agence. Nous vous informons de cette situation pour vous démontrer qu'il ne suffit pas d'adopter une législation, il faut également mettre en oeuvre des mesures pour que la loi soit respectée, comme nous le demandons dans le mémoire que nous vous proposons et que M. le président, M. Yves Falardeau, va tenter de vous résumer dans les prochaines minutes.

Le Président (M. Bouchard, Vachon): Merci, madame. M. Falardeau.

M. Falardeau (Yves): Alors, M. le Président, nous voulons d'abord souligner notre accord pour les mesures progressistes contenues dans le projet de loi n° 83, notamment celles qui touchent les comités des usagers et qui obligent tous les établissements du réseau à se doter de comités des usagers. Nous croyons que les usagers ont le droit et tout intérêt à avoir d'excellents services dans tous les établissements du réseau. Les comités des usagers ont leur place pour les représenter et défendre leurs droits et leurs intérêts. Nous ne pouvons qu'applaudir à cette initiative qui arrive à point nommé pour la sauvegarde des intérêts et des droits des usagers du réseau de la santé et des services sociaux.

Nous voulons aussi vous demander de prendre en considération... Et, quand, M. le ministre, vous parliez de budget tantôt et que vous disiez: On accorde les budgets en fonction des établissements, du budget des établissements, moi, je vous suggère de prendre un autre aspect en considération, soit les différences régionales et les différences dans les établissements, une situation qui est différente d'un endroit à l'autre, d'une région à l'autre.

Dans les centres jeunesse, les usagers sont dans une situation bien différente de celle des centres hospitaliers, des CLSC et des CHSLD. Notre réalité, dans les centres jeunesse, amène souvent nos usagers devant un tribunal, ce qui teinte les services des centres jeunesse et nécessairement des comités. Nos usagers sont parfois de tout petits, des enfants abusés, des jeunes en difficulté dont le développement peut être compromis. Ce sont aussi les parents de ces jeunes. La plupart du temps, nos usagers sont en conflit avec le centre jeunesse qui les prend en charge, car ils ont tendance à refuser qu'on intervienne dans leur vie. Les jeunes vivent parfois en foyer, famille ou centre d'accueil. Comme ils sont jeunes, ils sont dans l'impossibilité de faire appel eux-mêmes au comité des usagers pour que celui-ci défende leurs droits, leur donne de l'information ou analyse la satisfaction de leurs besoins face aux services rendus par l'établissement.

Pour les comités des usagers en centre jeunesse, une des principales difficultés est d'obtenir facilement accès à tous les usagers, notamment ceux demeurant dans les ressources d'hébergement. Il faut donc que l'État québécois trouve rapidement un moyen de donner à ces usagers les mêmes droits et possibilités pour se faire entendre par leur comité. Il faut adapter les mesures contenues dans le projet de loi n° 83 aux réalités des usagers en centre jeunesse et, comme je vous le disais, ailleurs dans le réseau.

n (17 heures) n

Nous sommes contre la position de l'Association des centres jeunesse, qui vous demandait, lors de la présentation de leur mémoire, que la loi n'oblige pas les centres jeunesse à mettre en place des comités de résidents dans les ressources d'hébergement. S'il en était ainsi, il nous serait impossible d'offrir des services à tous nos usagers. Au contraire, il faut selon nous trouver les moyens pour nous permettre d'entrer dans les ressources d'hébergement pour défendre les droits et les intérêts des usagers, qui sont souvent démunis face au pouvoir qu'exercent sur eux les employés des centres jeunesse et les responsables des ressources d'hébergement. Aussi, nous croyons que la création d'un comité central qui aura une permanence et une structure administrative lui permettant de jouer pleinement son rôle sera bénéfique pour la qualité des services dans le secteur de la santé et des services sociaux.

Le comité des usagers du Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue applaudit la proposition de faire passer de un à deux le nombre de représentants issus des comités des usagers. Notre comité voudrait par contre qu'il soit nécessairement inscrit dans la loi que les deux membres soient obligatoirement membres du comité des usagers qu'ils représentent.

Actuellement, en Abitibi-Témiscamingue, la représentante des usagers au conseil d'administration, Mme Nicole Garceau, n'est pas membre du comité, ayant été battue lors des élections de novembre 2004. Nous lui avons demandé récemment de démissionner pour laisser la place à un membre de notre comité. Compte tenu du fait que le projet de loi fera passer l'élection des membres en 2006 et compte tenu que l'ensemble sauf un des membres du conseil d'administration actuel sont des personnes nommées et non pas des personnes élues, nous croyons que notre position prend un sens différent pour la sauvegarde des intérêts des usagers. Il faut un lien direct entre nos intérêts, nos décisions et la personne qui représente les usagers au conseil d'administration. Sans cela, il est impossible de faire jouer le rôle de représentant des usagers comme il se doit.

Un autre gros problème auquel doivent faire face les comités des usagers sur l'ensemble du territoire québécois est la difficulté de jouer pleinement le rôle dévolu par la loi au comité des usagers, du fait que nous n'avons pas accès aux informations nécessaires à l'accomplissement de notre tâche. Notamment, dans les comités des usagers des centres jeunesse, il est impossible d'obtenir la liste de nos usagers. Nous ne pouvons donc les joindre facilement pour connaître leur opinion sur la satisfaction de leurs besoins et sur la qualité des services reçus par l'établissement, une de nos fonctions qui nous est pourtant accordée au comité des usagers. Dans les autres établissements du réseau, la situation n'est pas la même. C'est un autre exemple de la souplesse dont doit faire preuve le législateur pour tenir compte des réalités des établissements, des types d'usagers et des réalités régionales.

Le comité pense que tous les permanents des comités des usagers du Québec doivent être des professionnels qui ont accès, sous certaines conditions strictes, à des renseignements confidentiels permettant de se prononcer sur tout dossier concernant les usagers de l'établissement. Au même titre que les commissaires aux plaintes, les permanents des comités des usagers doivent avoir un minimum d'accès, je le répète, sous de strictes conditions, à certaines informations.

Le Comité des usagers du Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue applaudit aux changements importants concernant les commissaires aux plaintes. Cependant, il ne faut pas oublier que ces modifications visent un objectif de neutralité des personnes en poste et d'indépendance face aux gestionnaires des établissements. Le rapport du groupe de travail sur les mécanismes d'examen des plaintes du ministère avait soulevé ces questions et souligné l'importance d'agir pour contrer les influences néfastes sur les droits des usagers et sur la neutralité du processus qui doit garantir ces mêmes droits.

Il nous apparaît important que les commissaires aux plaintes aient une bonne connaissance des règles de justice fondamentales en vigueur dans notre pays. Nous croyons qu'il est important de procéder à la nomination de nouveaux commissaires aux plaintes et non pas de transférer seulement les personnes en poste actuellement qui ont déjà possiblement, selon nous, subi l'influence des gestionnaires ? justement, influence des gestionnaires, qu'on ne veut pas.

Il nous apparaît inutile de modifier la loi dans le sens des recommandations de neutralité du groupe de travail si on accepte ce qui se passe actuellement dans le réseau, des transferts de responsabilités des employés en poste. Nous avons appris que, sur l'île de Montréal, des commissaires à la qualité des services ont été transférés de façon administrative sous la responsabilité des conseils d'administration, comme le veut le projet de loi n° 83. Aucun processus d'embauche nouveau n'a été réalisé. Nous pensons que c'est irrespectueux pour la commission que vous présidez, M. le Président, car, avant que la loi ne soit adoptée, on agit pour contrer les effets de la loi qui sera adoptée suite à la conclusion de vos travaux aujourd'hui.

Ces processus de transfert à l'interne ont empêché que les conseils d'administration embauchent eux-mêmes les commissaires aux plaintes qui seront sous leur responsabilité. Nous croyons important que les processus d'embauche soient réalisés par les conseils d'administration, sans influence des fonctionnaires, et que ces comités de sélection comprennent obligatoirement des membres des comités des usagers.

Les comités des usagers font peur aux gestionnaires, qui craignent de perdre une partie de leurs pouvoirs. Certains gestionnaires du réseau s'accommodent bien de leur présence et ont avec leur comité de bonnes relations. Par contre, comme c'est le cas en Abitibi-Témiscamingue, plusieurs gestionnaires du réseau public voient d'un très mauvais oeil l'arrivée prochaine de nombreux comités des usagers qui auront le pouvoir de critiquer autant leurs politiques que leurs gestions et qui pourront exiger des modifications dans les pratiques de l'établissement, parfois bien ancrées dans leurs habitudes.

Notre vécu et l'examen que nous avons fait de la situation démontrent que les fonctions des comités des usagers sont incomprises de plusieurs personnes qui ont des postes essentiels dans le réseau. Il nous apparaît important de rappeler que nous sommes en poste pour favoriser la dispense de services de qualité dans les établissements du réseau. Les comités des usagers sont en fonction non pas pour dire aux gestionnaires que tout va bien, comme certains dirigeants aimeraient bien, mais bien pour soulever des questions sur les pratiques qui peuvent avoir un effet néfaste sur les services aux usagers, agir comme chien de garde de la qualité, du respect des droits, des intérêts et des services aux usagers.

En Abitibi-Témiscamingue et au Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue, la direction s'est enfermée dans un dialogue de sourds, en utilisant la langue de bois pour empêcher notre travail, au détriment des usagers. On nous a dit que la défense des droits des usagers ne nous concernait aucunement. On nous a empêchés de toucher notre budget, parce qu'on voulait asservir notre comité, lui dire quoi faire et comment le faire. Ce genre de chantage est légion dans les comités des usagers, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, et a même été dénoncé dans le rapport du groupe de travail, dont la parution a précédé le projet de loi n° 83.

Il faut donc que le ministère de la Santé et des Services sociaux édicte des normes claires et un suivi systématique pour empêcher que les comités soient asservis par les gestionnaires du réseau. Il faut que l'État reconnaisse notre difficulté à se faire reconnaître et à jouer pleinement notre rôle. Des normes claires sont donc nécessaires pour qu'on puisse reconnaître l'importance du travail et des responsabilités accordées.

La question des budgets finalement, M. le Président, est capitale pour les comités des usagers. Quand on veut offrir des services aux citoyens et aux citoyennes du Québec, nous croyons qu'il faut rendre disponibles les ressources financières pour ce faire. Un problème que nous rencontrons est l'éloignement des usagers du bureau du comité. Les comités des usagers des différentes régions doivent parfois faire des centaines de kilomètres pour rejoindre les usagers. Ils doivent également permettre aux usagers de rejoindre le comité avec un numéro sans frais, ce qui augmente les frais reliés à ses dépenses, parfois très importantes. C'est une réalité qui passe souvent sous silence mais à laquelle nous devons faire face, nous, les régionaux. Nous vous demandons de tenir compte de cette réalité.

Nous croyons, M. le Président, que le ministre a certainement une idée précise des montants qu'il veut accorder aux comités des usagers ? et vous en avez fait état, M. le ministre. Il faudra notamment donner des budgets minimums à chacun des comités locaux et comités de résidents. Il faudra également donner un plus important budget au comité central. Le Comité des usagers du Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue croit que la présence d'au moins un employé permanent au comité central est nécessaire pour remplir toutes et chacune de leurs fonctions et que ce montant soit déterminé en fonction du nombre d'usagers et de la grandeur du territoire à desservir.

Ces fonctions, si on veut qu'elles soient remplies, doivent être appuyées des montants nécessaires. Nous croyons qu'un minimum de 60 000 $ par comité est nécessaire pour remplir efficacement toutes ces fonctions. C'est un minimum qui devra être appuyé de beaucoup d'heures de bénévolat, faites par des gens comme nous, qui ont à coeur la défense des droits des usagers, et chez nous, en centre jeunesse, qui ont à coeur les intérêts de notre jeunesse québécoise. Merci.

n (17 h 10) n

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, M. Falardeau, Mme Bisson. Alors, afin de débuter l'échange, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, M. Falardeau et Mme Bisson, de vous être déplacés pour venir nous rencontrer aujourd'hui. Vous avez parlé à quelques reprises, dans votre présentation, de l'importance d'informer, de mieux informer les usagers de l'existence même des comités des usagers. En pratique, d'après vous, quels seraient les meilleurs moyens pour que dans chaque établissement les usagers soient bien mis au courant de l'existence, du rôle et du mandat du comité des usagers?

M. Falardeau (Yves): C'est une question complexe. Nous, je peux vous dire, M. le ministre, la situation actuelle. Quand j'ai moi-même débuté, si on veut, mon rôle d'usager des centres jeunesse, j'ai vu, dans la salle d'attente du centre jeunesse, une pancarte qui disait: Il y a un comité d'usagers. Et j'ai appelé, et on m'a dit que le comité des usagers vivotait, il y avait une personne qui était là. Et j'ai donc appelé à l'agence régionale pour m'enquérir de la situation, de ce qui se passait. On m'a dit que ça faisait deux ans qu'il n'y avait pas de rapport annuel qui avait été déposé. Ça faisait au moins deux ans, et, je pense, beaucoup plus qu'on n'informait pas correctement, comme la loi le prescrit. La loi dit: La direction doit informer personnellement chaque usager, et ce n'était pas fait. Ça a été fait dernièrement, et c'est en processus par une lettre qui est donnée, qui est envoyée à chaque usager. J'ai reçu la mienne dernièrement, après quand même deux mois après avoir signé... peut-être un mois après avoir signé la lettre, que j'ai signée avec la commissaire à la qualité des services.

Comment informer? Je crois qu'il y a des moyens d'informer les usagers, il y a une campagne d'information qui peut être faite. C'est justement mon domaine, la communication. Je pense que dernièrement on a, en Abitibi-Témiscamingue, eu une campagne d'information sur les commissaires à la qualité des services, et on m'a dit qu'à la suite de cette campagne-là les commissaires à la qualité des services avaient eu davantage de travail. Alors, je crois que c'est peut-être ça.

Personnellement, je crois aussi... Quand je suis arrivé, il y avait un document de la Commission des droits de la personne qui existait, que j'ai pris, moi, à la Commission des droits. Et on m'a dit, à la commission: On devrait donner ce document-là. Ça décrivait les droits des jeunes dans des ressources d'hébergement. J'ai demandé à ma fille, qui était dans une ressource d'hébergement, et elle n'avait jamais vu ça. Au centre jeunesse, on m'a dit: Ah, pourtant, je les ai envoyés, on devrait les avoir. Mais cette information-là ne circulait pas. Alors, ce n'est pas nécessairement seulement de faire des dépliants d'information, de les imprimer, il faut aussi s'assurer de leur distribution.

M. Couillard: M. le Président, pour ce qui est du rôle des commissaires locaux, vous avez fait allusion, d'une part, au rattachement au conseil d'administration, ce qui était une recommandation du Groupe de travail sur le mécanisme d'examen des plaintes, mais il y a un autre aspect qui est très important, c'est l'exclusivité du rôle. Et certains intervenants, surtout les établissements à plus petit volume d'activité, nous ont dit qu'on devrait permettre l'élargissement de l'activité du commissaire local à des rôles tels que l'amélioration de la qualité ou la mesure de la satisfaction des usagers. Est-ce que vous seriez d'accord avec cet élargissement qui va un peu au-delà de ce qui était prévu en termes d'exclusivité de services mais qui semble raisonnable pour certains types d'établissements?

M. Falardeau (Yves): Qui semble raisonnable, moi, je ne suis pas d'accord avec ça, M. le ministre, pour la simple raison de la neutralité du travail qui doit être fait.

Moi, j'ai une expérience. J'ai fait une plainte au Centre hospitalier Hôtel-Dieu d'Amos, et la commissaire à la qualité des services m'a offert, dans sa décision, les excuses de la directrice des services professionnels. Je ne peux pas croire qu'elle ait utilisé un processus neutre en faisant ça. Quand on est un commissaire, d'après moi, aux plaintes, on doit utiliser des règles juridiques pour assurer la neutralité d'un processus. On ne doit pas parler au nom de l'établissement et donner des excuses pour l'établissement.

Alors, si vous me disiez que vous allez adopter des normes qui respectent la neutralité, je serais d'accord mais dans le sens du texte du groupe de travail qui parlait de l'importance de la neutralité. Et c'est pour ça qu'eux suggéraient que les commissaires aux plaintes ne fassent qu'un travail exclusif relié aux plaintes. Moi, je pense que... Je vais dans ce sens-là.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

Mme Harel: Oui. Alors, merci, M. le Président. Vous êtes le dernier groupe que l'on entend à l'occasion de cette consultation qui a débuté le 9 février dernier. Alors, je voudrais, M. Falardeau et Mme Bisson, vous souhaiter la bienvenue au nom de l'opposition officielle.

Alors, M. Falardeau, vous êtes venu à cette commission au mois de mars, n'est-ce pas, le 9 mars, il y a déjà presque un mois maintenant. Vous étiez membre du regroupement, je pense, hein, des...

M. Falardeau (Yves): Nous, on est... Mme Bisson est présidente du regroupement, du RAIDDAT, le regroupement d'aide en santé mentale, et je suis le vice-président, et c'est à ce titre-là que j'accompagnais Jean-Luc Pinard, qui agissait pour l'AGIDD, à ce moment-là.

Mme Harel: Oui, tout à fait. Oui, très bien. Alors, en lisant votre mémoire, l'impression que l'on a, c'est qu'il y a eu confrontation, soit avec des personnes en particulier. Est-ce que cette impression est juste? Est-ce que c'est finalement une pratique un peu aveugle ou si vous vous êtes butés à des relations, disons... Comment... Est-ce que le psychologue peut m'aider à les qualifier...

Une voix: Abrasives.

Mme Harel: Abrasives?

M. Falardeau (Yves): Avec la direction, vous parlez, madame?

Mme Harel: Oui, oui.

M. Falardeau (Yves): Moi, je pense que la difficulté, la principale difficulté, c'est la lecture que la direction du centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue fait de l'article 212 de la loi. Il y a trois choses importantes qu'on a de la difficulté à définir. On la difficulté de laisser la place pour la défense des droits. Au conseil d'administration, on ne considère pas Yves Falardeau comme le représentant des 1 525 usagers du centre jeunesse, on le considère comme un membre du public. Et, quand j'ai demandé que la direction me donne un dossier sur le déménagement d'effectifs d'Amos à Val-d'Or, la direction m'a répondu que ce n'était pas les affaires du comité et qu'elle me donnait copie de ces documents-là à titre non pas de président du comité, mais à titre personnel. Moi, je crois que tout ce qui touche ou qui peut toucher aux usagers des centres jeunesse nous concerne comme comité des usagers.

La deuxième difficulté, c'est: devant «toute autorité compétente». Nous avons la fonction, en vertu de la loi, de représenter les usagers devant «toute autorité compétente». Ça veut dire quoi, «toute autorité compétente»? Dans un centre hospitalier, ça va bien, c'est facile d'élaborer. Dans un centre jeunesse, «toute autorité compétente», c'est difficile. Le tribunal, c'est une réalité avec laquelle les usagers chez nous ont à faire face. Est-ce que ça veut dire les représenter devant le tribunal? Pourtant, devant le tribunal, récemment, on a discrédité le comité des usagers ou les usagers qui avaient fait appel à nous.

Une autre difficulté, c'est: la direction doit «favoriser le bon fonctionnement». De quelle façon... Pendant deux ans qu'il n'y a pas eu de dépôt de rapport annuel, est-ce qu'on a favorisé le bon fonctionnement? Moi, je ne le crois pas.

n (17 h 20) n

Et «dans toute démarche», l'autre chose, c'est «dans toute démarche», on accompagne les usagers «dans tout démarche». On m'a dit récemment que... J'étais avec des usagers qui me demandaient de les accompagner. Et on n'a pas beaucoup d'expérience, là. On met en place un comité, on tente d'aider les usagers, mais on veut les accompagner et on nous blâme. On se pose la question: Est-ce que c'est le rôle du comité d'usagers de les accompagner ici, aujourd'hui? Alors que la loi est large, on veut essayer de restreindre l'interprétation qu'on fait de la loi. Accompagner ici? Non, peut-être pas. Il me semble que la loi est quand même assez large. Nous avons la fonction d'accompagner, sur demande, les usagers dans toute démarche qu'ils entreprennent, et ce n'est pas plus compliqué que ça.

Mme Harel: Il existe au niveau régional ? certainement êtes-vous en contact avec eux, là ? les fameux CAAP, là. Quels sont les liens que vous entretenez?

M. Falardeau (Yves): Bien, on a de bons liens, sauf que les centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes ne font pas de défense de droits, ne se prononcent donc pas sur les dossiers à saveur politique, sur les pratiques, sur les politiques qui sont adoptées par le conseil d'administration. C'est pour ça qu'on met des personnes au conseil d'administration, pour que les comités d'usagers puissent avoir l'information, puissent débattre des orientations, des politiques des centres jeunesse. Mais les centres d'accompagnement, eux, ne font pas ça. Alors, les liens sont bons, et ils en font beaucoup d'accompagnement en centre jeunesse aussi, mais ils ne font pas une partie qui nous apparaît très importante des fonctions des comités d'usagers à l'article 212.

Alors, moi, j'ai demandé au CAAP de m'aider, mais ils m'ont dit: Écoute, de la défense de droits, on ne fait pas ça si ce n'est pas une plainte. Et ce n'est pas seulement de la défense de droits. Moi, je voulais qu'ils les accompagnent au centre jeunesse parce que la personne avait une difficulté avec son intervenante. Alors, je lui ai téléphoné pour lui demander d'accompagner la personne. Elle m'a dit: On ne fait pas ça, on l'accompagne seulement s'il y a une plainte, seulement si elle veut faire une plainte, pas si elle veut savoir si elle devrait faire une plainte, pas pour être consultée mais pour faire une plainte.

Alors, nous, c'est des jeunes, c'est souvent des parents qui ont de la difficulté, qui ne comprennent pas souvent le processus, qui ne l'admettent pas non plus, qui sont aux prises, si vous voulez, avec les centres jeunesse, tribunal, Protection de la jeunesse, et qui sont démunis, qui ont besoin d'aide. Ils n'ont pas besoin seulement d'aide quand ils veulent faire une plainte ou quand ils ont pris la décision de faire la plainte, mais ils veulent des conseils, ils veulent qu'on les accompagne, tout simplement.

Mme Harel: Quel est le budget dont bénéficie le comité des usagers?

M. Falardeau (Yves): Nous, actuellement, on a 9 000 quelque cent dollars. Et, pour faire le travail, pour avoir une ligne de téléphone sans frais, pour venir ici une fois à tous les cinq ans, aller dans des regroupements ? il y a un regroupement des comités d'usagers en centres jeunesse qui va se tenir à Chicoutimi, cette année payer des déplacements, on ne peut pas suffire. Et ce qu'on aimerait, nous, c'est embaucher quelqu'un, qu'il y ait un permanent qui soit là pour offrir les services, comme ça se fait dans des organismes de défense de droits, comme ça se fait au CAAP, comme ça se fait dans d'autres organismes qui donnent des services.

Mme Harel: À ce moment-là, plusieurs des organismes sont financés par le SACA, le Secrétariat à l'action communautaire autonome. Est-ce que vous avez fait une demande en ce sens?

M. Falardeau (Yves): On n'est pas admissibles.

Mme Harel: Vous n'êtes pas admissibles?

M. Falardeau (Yves): Je ne croirais pas parce qu'on n'est pas considérés comme des organismes communautaires. Nous sommes des organismes créés en vertu de la Loi sur la santé et les services sociaux, nous n'avons pas de statut juridique à part. Nous ne sommes qu'un comité. D'ailleurs, je me demande, à la Caisse populaire où on a un compte, on l'a ouvert comment, ce compte-là, parce qu'on n'est pas... Quand on ouvre un compte, on nous demande notre charte. On n'en a pas de charte, on est créés par le conseil d'administration.

Mme Harel: Mais le comité d'usagers n'est pas un organisme communautaire en vertu de l'incorporation de la loi...

M. Falardeau (Yves): C'est ça. Le seul comité des usagers en centre jeunesse qui est un organisme institué en vertu de la partie III de la Loi sur les compagnies, c'est celui de Montréal, de ce que le permanent, là, John Brockman, m'a dit.

Mme Harel: Mais, à ce moment-là, c'est que le comité était déjà un organisme existant préalablement, peut-être?

M. Falardeau (Yves): Le comité de Montréal?

Mme Harel: Oui.

M. Falardeau (Yves): Je crois, oui.

Mme Harel: Sans doute l'organisme existait-il, jouait-il ce rôle...

M. Falardeau (Yves): C'est ce qu'on m'a dit.

Mme Harel: ...et ensuite a-t-il été investi du statut de comité d'usagers. Et, dans les recommandations, quelles sont celles qui selon vous sont indispensables?

M. Falardeau (Yves): Vous me posez une bonne question, une question piège. Celles qui sont indispensables, c'est sûrement l'importance du budget. On suggérait, dans le rapport du groupe de travail, entre 35 000 $ et 100 000 $. Moi, je pense qu'à 35 000 $, au Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue, on n'est pas en mesure de donner des services adéquats aux usagers.

Pour embaucher une personne, une personne professionnelle qui pourrait peut-être... Si on aménage la loi pour permettre aux permanents d'avoir accès à certaines informations, il faut engager un professionnel, lui donner 30 000 $, 35 000 $, 40 000 $, lui permettre de faire des déplacements, d'aller d'Amos à Ville-Marie, à Val-d'Or, où est le bureau du comité, à La Sarre, pour voir des usagers et des intervenants. Parce que, nous, on a des centres... il y a des centres jeunesse dans chaque ville de la région, il y a aussi des centres jeunesse dans quelques réserves indiennes, au Lac-Simon, à Kitcisakik, et chaque centre a des intervenants. Nous, parfois, il faut aller rencontrer ces intervenants-là, il faut accompagner les gens, les usagers. Alors, c'est chez eux qu'il faut les accompagner. Alors, 35 000 $, on n'y arrive pas.

C'est pour ça que, moi, j'ai évalué à 60 000 $ minimum. Mais c'est pour ça que je suggérerais qu'on prenne en compte les réalités des établissements. Parce qu'un centre jeunesse ce n'est pas comme un centre hospitalier, là. C'est bien différent, la réalité est bien différente, l'éloignement est bien différent. À Montréal, c'est différent aussi, parce que M. Brockman n'a pas la même distance à faire que nous pour rejoindre les usagers, il n'a pas besoin d'avoir un téléphone sans frais, qui nous coûte quand même un prix assez important.

Mme Harel: ...que les centres jeunesse, le 9 000 $ dont vous nous parliez, il est adopté par le conseil d'administration... ce montant est décidé, plutôt, par le conseil d'administration?

M. Falardeau (Yves): Je ne saurais pas vous dire.

Mme Harel: Mais, dorénavant, vous félicitez, dans votre mémoire, que le comité des usagers aura deux représentants sur le conseil d'administration.

M. Falardeau (Yves): Exactement, oui. Je suis bien content de ça, compte tenu du fait que les centres jeunesse, la façon dont ça va fonctionner avec l'adoption du projet de loi, c'est qu'il va y avoir des comités locaux, comme on avait déjà, nous, depuis 1996, une structure. Quand, en 1996, il y a eu fusion du CPEJ et du centre de réadaptation, on a eu un comité régional qui a fonctionné un peu ? pas longtemps, d'après les procès-verbaux que j'ai vus ? qui avait une structure régionale. Mais c'est difficile à tenir, avec 10 000 $, une structure de cette ampleur-là. Mais là, avec la modification des comités d'usagers un petit peu partout, des comités de résidents aussi qui pourront être dans des foyers d'accueil ? ou on verra comment, là, c'est sûr qu'il faut aménager cette structure-là ? ça va être bien différent. Et il faut tenir compte de notre réalité.

Mme Harel: Qu'est-ce qui vous motive, vous, M. Falardeau, et vous, Mme Bisson? C'était au moment où comme parents vous aviez, disons, un enfant. Mais, après coup, là ? parce que finalement l'enfant est devenu grand, j'imagine ? qu'est-ce qui vous motive à continuer?

M. Falardeau (Yves): Bien, ce qui me motive à continuer... Moi, j'ai étudié à l'UQAM, en droit social, j'ai une maîtrise de l'UQAM en droit social. C'est sûr que le droit, c'est important dans notre société pour comprendre comment elle fonctionne. Les comités d'usagers, c'est aussi de faire respecter des droits. Et c'est dans ce sens-là, depuis ma sortie de l'université, en 1997, j'ai tenté d'aider les gens. Je pense que peut-être je suis un bon Samaritain, là, parce que, vous avez vu tantôt, je ne suis pas seulement président du comité des usagers, mais je m'implique aussi en santé mentale, avec Mme Bisson. C'est d'aider, c'est d'aider des jeunes.

Et là je vois que les jeunes ont des difficultés et ils n'ont pas de ressources. La confrontation avec les centres jeunesse, ce n'est pas facile. Quand un jeune est dans une ressource d'hébergement, il n'a que la personne chez qui il demeure comme référence. Si le comité des usagers ne peut pas les aider, bien... On ne dit pas c'est quoi, nos besoins, on ne dit pas c'est quoi, nos difficultés, on ne dit pas qu'on n'a pas reçu...

n (17 h 30) n

Dans le dépliant de la Commission des droits de la personne, on les énumère, les droits. Mais ces droits-là, les jeunes ne les connaissent pas, en ressources d'hébergement, alors ils ne peuvent pas les exercer, leurs droits. Le droit à l'information, le droit d'avoir de bons services, là, je ne les ai pas par coeur, là, mais c'est des droits qui ne sont pas respectés, qui ne sont pas... dans le cas de ma fille, qui n'ont pas été respectés. Quand je lui ai montré c'était quoi, ses droits, elle a été tout étonnée. Et c'est une enfant qui lit beaucoup, et elle aurait aimé ça. Et, quand je lui ai donné, elle l'a lu tout de suite. Elle a dit: Bon, pourquoi je n'avais pas ça avant, pourquoi je ne connaissais pas mes droits avant?

Mais les gens non plus ne les connaissent pas. Les gens ne regardent pas c'est quoi, les droits des enfants. Les responsables de ressources d'hébergement, les gens en centre d'accueil n'ont pas ce sens-là de penser toujours aux droits des usagers. Ils font des petites erreurs qui, pour eux, deviennent des petites erreurs, mais qui, pour nous, sont quand même importantes, parce que c'est des jeunes, puis des jeunes qui ont besoin d'être respectés, puis qui ne le sont pas toujours à leur juste valeur.

Le Président (M. Copeman): Je pense que ça synthétise assez bien la présentation. M. Falardeau, Mme Bisson, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom du Comité des usagers des centres jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue.

(Consultation)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mémoires déposés

Alors, avant de procéder aux remarques finales, je dois procéder au dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus.

Alors, pour les rendre publics et pour valoir comme s'ils avaient été présentés devant la commission, je dépose les mémoires des personnes et des organismes suivants: l'Association canadienne de protection médicale; l'Association professionnelle des pharmaciens salariés du Québec; le CHSLD Father Dowd, St. Andrew et St. Margaret; la Confédération des organismes familiaux du Québec; la Conférence régionale des élus de l'Abitibi-Témiscamingue; le Conseil des sages-femmes du Centre de santé et de services sociaux du Grand Littoral; Droits-Accès de l'Outaouais; la Fédération québécoise des centres de réadaptation pour personnes alcooliques et autres toxicomanes; le Fonds québécois d'habitation communautaire; l'Institut de réadaptation en déficience physique de Québec; l'Ordre professionnel des inhalothérapeutes du Québec ? et rendu à cette heure-là, si je suis capable de prononcer «inhalothérapeute», là, c'est pas pire; le Regroupement des partenaires du gouvernement en technologie de l'information; le Réseau universitaire intégré de santé de l'Université Laval; les réseaux universitaires intégrés de santé des facultés de médecine des universités McGill, de Montréal et de Sherbrooke; l'Union des consommateurs; et le Voice of English-speaking Québec.

Remarques finales

Alors, je sais, c'est avec grande anticipation qu'on est rendu au stade où nous procédons aux remarques finales. Je vous rappelle qu'il est prévu... il y a 45 minutes de prévues pour les remarques finales: cinq minutes pour la députée indépendante, 20 minutes pour l'opposition officielle et 20 minutes pour les députés ministériels. Sans plus tarder, je cède la parole à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Je serai brève, puisque je veux partager le temps qui nous est imparti avec ma collègue la députée de Rimouski, responsable pour l'opposition des dossiers en services sociaux. J'aurais souhaité bien évidemment, M. le Président, que le ministre puisse intervenir le premier pour qu'on connaisse les améliorations, les amendements qu'il a promis tout au long de cette commission.

Alors, cependant, j'interviendrai donc pour d'abord rappeler que c'est la première fois au Québec que des changements majeurs et substantiels, aussi importants sont introduits dans une loi omnibus. Une loi omnibus, c'est une loi dans laquelle on entre, bon, toutes sortes de considérations, de législations qui n'ont pas nécessairement entre elles un lien. Et c'est le cas habituellement au niveau municipal. Mais je ne sache pas que, dans l'histoire parlementaire, on ait encore eu au Québec, au cours au moins des 40 dernières années, ce genre de loi omnibus ? d'aucuns la qualifient de fourre-tout ? où on retrouve en fait des chapitres entiers de questions qui n'ont pas de lien entre eux.

Et je pense, entre autres, par exemple, au traitement des plaintes des usagers et, par exemple, à la certification des résidences privées d'hébergement, ou encore à la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux, ou à la question de l'informatisation, de la circulation, de la conservation des renseignements cliniques et pharmacologiques sur les usagers, alors toutes choses qui auraient certainement nécessité, pour certaines d'entre elles ? je pense, entre autres, à cette dernière question de l'informatisation ? un projet de loi spécifique.

Alors donc, je rappelle, M. le Président, que, depuis l'arrivée du ministre de la Santé et des Services sociaux à la tête du ministère, toutes les lois adoptées dans le secteur de la santé l'ont toutes été, sans exception, d'une manière expéditive, après un examen sommaire et sous l'effet du bâillon. Alors, nous terminons cette consultation en mettant en garde cependant le ministre qui n'a pas, dans le secteur de la santé, encore éprouvé la nécessité d'un examen article par article attentif d'un projet de loi. Son prédécesseur, le ministre Marc-Yvan Côté, lorsqu'il a introduit le projet de loi sur la santé et les services sociaux, en 1990, a mené la plus longue commission parlementaire de l'histoire de l'Assemblée nationale et a donc déposé son projet de loi en janvier 1990, et il l'a fait adopter au printemps 1991. Alors, je dois rappeler au ministre qu'il y a une bonification qui se fait à l'occasion de ce qui peut apparaître long, là, et qui peut finalement avoir l'impression d'une perte de temps, mais il y a une bonification qui est justement celle d'introduire du temps dans l'examen que l'on fait des législations qui vont avoir beaucoup de conséquences pour la population.

Je voudrais rappeler également, à la clôture de nos travaux, M. le Président, parce que tous les organismes entendus ou presque l'ont fait, que ce soit de la Fédération des médecins spécialistes au Barreau du Québec, en passant par tous les autres organismes représentant soit les citoyens en défense de droits ou soit représentant des citoyens qui offrent des services, tous, tous ont mentionné le manque de temps pour compléter l'étude du projet de loi n° 83. Et je ne voudrais citer que le Barreau du Québec ? et c'est un spécialiste pourtant des lois ? qui a déclaré, et je cite, ne pas «avoir eu la chance de faire une analyse exhaustive et détaillée», et qui ajoutait: «La période de réflexion accordée aux organismes [...] pour fournir leurs commentaires sur un projet de loi fort volumineux [...] nous laisse ? disait le Barreau ? perplexes sur la véritable intention du gouvernement de recueillir des opinions et commentaires sur [le] projet de loi.» Alors, je crois que c'est incontournable de rappeler ce que certainement une très grande majorité des organismes nous ont rappelé, à savoir le caractère expéditif de cette consultation au moment de son déclenchement.

Alors, M. le Président, le ministre a annoncé, à l'occasion des travaux, un certain nombre d'améliorations. Je voudrais lui rappeler qu'au moment du dépôt du projet de loi n° 83, le 10 décembre dernier, il promettait de nous faire connaître un aperçu des critères sociosanitaires pour la certification des résidences pour personnes âgées au début de la consultation. Nous sommes à la fin de la consultation, nous n'avons pas un fin mot de ces critères sociosanitaires qui pourtant sont, comme on le sait, là... vont jouer un rôle extrêmement important.

n (17 h 40) n

Et il nous avait également promis l'avis de la Commission d'accès à l'information sur le projet de loi. Nous avons eu le mémoire de la commission mais non pas l'avis que la commission a transmis au ministre et au Conseil exécutif. Nous avons cherché à l'obtenir par la loi d'accès à l'information; cela nous a été refusé. Nous avons cependant obtenu la partie accessible au public du mémoire au Conseil des ministres et nous comprenons que le ministère lui-même a fait part de certaines inquiétudes quant à l'informatisation, à la circulation, transmission des renseignements et conservation des renseignements sur le dossier clinique et pharmacologique des usagers. C'est là un dossier un extrêmement important. Je rappelle qu'il avait fait l'objet d'un avant-projet de loi spécifique, le dossier santé, là, le dossier santé qu'on a appelé la carte santé, ça avait fait l'objet d'un projet de loi spécifique sur lequel il y avait eu une assez vaste consultation, alors que nous retrouvons des dispositions qui se trouvent à être intégrées dans un projet de loi de 282 articles qui modifie un total de 44 lois.

Alors, le ministère lui-même en fait, dans la rédaction de ce mémoire au Conseil des ministres du 1er octobre dernier disait ceci, et je cite: «Les inconvénients sont de deux ordres: l'augmentation du risque de violation de la confidentialité découlant d'un nombre d'intervenants plus élevé ayant accès à des renseignements cliniques concernant un usager, et ? deuxième ordre ? le risque qu'il y ait détournement de la finalité clinique pour laquelle la conservation des renseignements est prévue.» Alors, il s'agit donc là, je crois, de réflexions très fondées, d'inquiétudes qui sont justifiées et pour lesquelles en fait on n'a pas eu un débat public.

Quand on veut faire des changements substantiels de l'ordre de ceux que le ministre introduit dans la gouvernance, on y va habituellement, M. le Président, par ce qu'on appelait un livre blanc ou un livre vert, le livre blanc énonçant des orientations du gouvernement sur lesquelles il veut consulter la population, ou le livre vert énonçant des hypothèses qui restent ouvertes jusqu'à ce que la consultation soit terminée et que la décision soit prise. Je constate en l'occurrence que le ministre a choisi de procéder par la voie législative, qui est celle qui suit la consultation et non pas habituellement qui la précède.

Alors donc, sur la question de l'informatisation du dossier clinique, du dossier pharmacologique, je crois que nous n'avons pas encore suffisamment regardé de près cette question-là pour en connaître toute la mécanique. Nous le ferons à l'occasion de l'étude article par article. Mais j'informe tout de suite les membres de la commission et le ministre que nous aurons beaucoup de travail encore à faire sur cette question-là.

Quant à la certification des résidences pour personnes âgées, là je dois dire, M. le Président, que nous attendons les améliorations que le ministre sûrement nous annoncera maintenant, puisqu'il a laissé entendre, à l'occasion de la période de questions, qu'il allait élargir aux personnes vulnérables la certification facultative qu'il propose dans le projet de loi. Il a même laissé entendre à la journaliste... au journaliste André Noël, du journal La Presse, le 22 mars dernier, que la situation qui prévalait au Centre d'accueil Rachel, une situation abominable, absolument inacceptable, M. le Président, l'amenait... Et je le cite, là: «"Le reportage donne un éclairage qui va dans le sens des certificats obligatoires, a dit [le ministre]. Ce sont des gens extrêmement vulnérables, on en est conscients... [Alors,] cela ajoute de l'eau au moulin de ceux qui nous demandent d'aller un peu plus loin dans la certification."»

Alors, on ne peut pas dire une chose et faire le contraire. On s'attend donc, M. le Président, qu'en matière de certification des résidences privées pour les personnes âgées en perte d'autonomie, nous nous attendons à beaucoup plus qu'une certification facultative qui dans le fond ne va introduire qu'un système d'hébergement à deux vitesses pour les personnes âgées en perte d'autonomie. Ma collègue aura l'occasion de revenir sur la question concernant les personnes vulnérables.

Je voudrais rappeler également que le projet de loi tel que rédigé ne prévoit aucun mécanisme qui permet un filet de sécurité pour qu'il y ait traitement des plaintes dans les résidences privées non certifiées. Ni le Protecteur du citoyen ne pourra faire enquête, ni la Protectrice des usagers, qui le fait actuellement, ne pourrait, en vertu du libellé du projet de loi, continuer à faire enquête suite à des plaintes qui pourraient être acheminées, ni les agences régionales n'auront ce pouvoir d'enquête dans les résidences privées non certifiées.

Et, plus encore, je rappelle que les visites à l'improviste que le ministre a mises en place l'année dernière et qu'il a élargies aux résidences... c'est-à-dire auxquelles il procède actuellement, mais qui sont des visites d'appréciation sur la qualité de vie des personnes hébergées, eh bien ces visites n'ont pas lieu non plus dans les résidences privées non certifiées. Il y a là une déresponsabilisation qui n'est pas acceptable. Et je rappelle qu'à la fin de nos travaux il y a l'ensemble des intervenants qui représentaient des personnes aînées qui sont venus réclamer une certification des résidences privées d'hébergement pour les personnes vulnérables, une certification obligatoire qui se conforme à des critères sociosanitaires qui vont reconnaître... qui finalement vont reconnaître la responsabilité, notre responsabilité collective en ces matières.

Alors, M. le Président, je vois que le temps file. Je vais simplement rappeler que, si on a besoin de permis pour ouvrir un dépanneur, ou pour ouvrir un débit d'alcool, ou pour ouvrir un restaurant, il serait impensable qu'on n'ait pas besoin de permis alors qu'il y a de plus en plus de personnes en perte d'autonomie qui ont à demander un hébergement privé, compte tenu, M. le Président, également du retrait du gouvernement dans le secteur de l'hébergement de soins de longue durée public.

Alors, je rappelle également que la loi actuelle prévoit que, lorsque la mission d'un centre d'hébergement... plutôt l'article 432, je crois... 437. Je rappelle que nul ne peut exercer des activités propres à la mission d'un centre d'hébergement sans être titulaire d'un permis. Et soyez assurés que nous allons être très vigilants, M. le Président, dans les semaines et les mois qui viennent, pour nous assurer que cette mission de centre d'hébergement, mission qui consiste à offrir un milieu de vie substitut pour des personnes qui ne peuvent plus demeurer chez elles, lorsque cette mission est exercée dans le secteur privé, eh bien que le secteur privé soit tenu d'obtenir ce permis obligatoire qui est prévu dans la loi actuelle et qui en fait est très peu requis actuellement par les résidences privées, alors que... Mon Dieu! M. le Président, vous voyez bien, le temps file. Il reste combien de minutes?

Le Président (M. Copeman): Il reste 5 min 30 s.

Mme Harel: Allez-y, Mme ma collègue.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme la députée de Rimouski, porte-parole de l'opposition officielle en matière des services sociaux, cinq minutes et demie.

Mme Solange Charest

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Je tiens tout d'abord à remercier les membres et le personnel de la commission pour leur assiduité et en tout cas d'avoir participé aux échanges. Je tiens à remercier tous les groupes qui sont venus présenter en commission parlementaire ou qui nous ont acheminé à la commission un mémoire sur le projet de loi n° 83.

Pour moi, le projet de loi n° 83, c'est un projet de loi complexe, et je vous dirais que c'est même un fourre-tout. À preuve, c'est que ce projet de loi là contient 282 articles et modifie 44 lois en différents secteurs d'activité. Et, vous savez, c'est un fourre-tout qui a causé des problèmes non seulement aux parlementaires, mais, je pense, aux partenaires du réseau de la santé et des services sociaux.

Comme l'a si bien dit ma collègue, peu de temps a été octroyé pour que ceux-ci préparent leurs réflexions et puissent faire des recommandations. Ils se sont restreints en quelque sorte à exprimer en priorité ce qui touchait étroitement leur vocation et ils ont exprimé à plusieurs reprises qu'ils auraient voulu s'exprimer sur d'autres éléments du projet de loi mais que malheureusement ils ne le pouvaient pas.

n(17 h 50)n

Je dirais aussi que ce projet de loi là confirme que le volet social demeure le parent pauvre de ce projet de loi. Et ce projet de loi là ne traduit pas du tout la volonté d'équilibrer et de représenter de façon équitable le domaine de la santé et le domaine social. Je vous dirais que, dans le contexte social, politique et économique qui est celui du Québec actuellement, amputer de la vision globale de la santé l'aspect social, comme on le retrouve dans le projet de loi, c'est un précédent dangereux. Et il existe, hein, on le sait, au Québec, une hiérarchisation entre le sanitaire et le social, et le projet de loi n° 83 ne traduit pas ce besoin d'équité et d'équilibre entre le social et le domaine de la santé.

Et, vous savez, dans toute volonté de création de structures, ou d'organisation de réseaux intégrés, ou de services offerts à la population, il aurait été important de redéfinir le rapport entre le social et le médical. Malheureusement, le projet de loi n° 83 ne le fait pas. Et je dirais que la situation de fragmentation qui a été mise en évidence par la médicalisation des problèmes de la population en général et par les problèmes sociaux en particulier, on le retrouve clairement exprimé dans ce projet de loi là.

Et je voudrais vous donner, à titre d'exemple de parent pauvre ? l'aspect social comme tel ? c'est les résidences d'hébergement privées pour les personnes vulnérables, qui relèvent des services sociaux et qui ne font même pas partie, dans le projet de loi n° 83, du programme d'accréditation volontaire. Alors, l'opposition officielle, en accord avec les nombreux organismes qui oeuvrent avec les personnes vulnérables, réclame la certification, et la certification obligatoire. Et, sans certification obligatoire pour les personnes vulnérables ? vous savez de qui on parle, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, d'handicap physique, de déficience intellectuelle, de problème de toxicomanie ou autre ? ça va demeurer plus facile au Québec d'ouvrir une maison d'hébergement privée pour personnes vulnérables que d'ouvrir un bar et même un chenil. Je m'excuse, là, mais la preuve est faite que c'est beaucoup plus facile d'ouvrir une résidence pour personnes vulnérables que d'aller chercher et d'avoir les permis pour faire fonctionner ce type d'établissement.

Dans cette loi fourre-tout on retrouve également un article qui a des conséquences sur l'économie régionale, et ça concerne les corporations d'achats communs des établissements de santé. Ces 11 corporations qui existent au Québec avaient l'obligation, dans la loi actuelle, de tenir compte de l'impact sur l'économie de leurs achats. Bon, on sait tous que c'est 320 établissements du réseau qui achètent chaque année à peu près pour 1,5 milliard, 2 milliards de dollars en achats. Alors, ça, ça nous préoccupe beaucoup, parce qu'on se pose la question pourquoi l'article 158 de la loi n° 83 vient modifier l'article 346 de la loi actuelle, qui existait.

Alors, il y a des inquiétudes par rapport à ce projet de loi. Le temps m'étant compté, je vais quand même insister pour dire que, dans le contexte des prédispositions du gouvernement actuel à la privatisation et à l'élargissement de la tarification pour les usagers, l'opposition officielle entend également réclamer l'introduction dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux des principes: les principes de gestion publique, d'intégralité, d'universalité et d'accessibilité. Je pense que, ça, ça doit demeurer. Et nous allons être très, très vigilantes. Je dis «vigilantes» parce que ma collègue et moi nous y avons... et notre autre collègue aussi, mais ce que je veux dire, c'est à l'intérieur de nos discussions...

M. Bouchard (Vachon): Mon côté féminin.

Mme Charest (Rimouski): Et c'est son côté féminin que j'ai abordé.

M. Bouchard (Vachon): Je suis très d'accord avec ça, il n'y a pas de problème.

Mme Charest (Rimouski): Alors, nous allons être très vigilants pour que ces principes de base soient respectés. Et, vous savez, quand je fais la remarque à l'effet que le domaine social nous apparaît être le parent pauvre de cette loi, je pense, entre autres, à ce qui va venir dans les prochaines semaines en regard de la modification de la Loi de la protection de la jeunesse. Et, s'il y a un projet de loi qui touche les services sociaux, c'est celui-là. Alors, l'absence du social ou en tout cas l'importance moindre donnée au social m'inquiète d'autant. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, pour une période de temps d'une durée maximale de 20 minutes, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Avant de vous céder la parole, je présume qu'il y a consentement pour dépasser l'heure prévue, le cas échéant. Consentement?

Mme Harel: Consentement.

Le Président (M. Copeman): Consentement. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Merci, M. le Président. Donc, en cette dernière journée de consultation sur le projet de loi n° 83, je tiens et nous tenons à remercier sincèrement tous les groupes, associations et organismes qui sont venus témoigner à la Commission des affaires sociales et apporter leur point de vue en regard de cet important projet de loi.

Tout au cours de ces consultations amorcées le 9 février dernier, nous avons pu entendre et apprécier la qualité des réflexions et des propositions qui nous ont été soumises. Et, comme le disait ma consoeur d'Hochelaga-Maisonneuve aujourd'hui, jusqu'à la dernière journée, nous avons eu des contributions très intéressantes et très productives. Je peux vous assurer, M. le Président, que nous saurons en tenir compte au cours des prochaines étapes qui mèneront à l'adoption et à la mise en oeuvre de ce projet de loi.

Avant de dresser le bilan de ces 12 journées d'auditions, il m'apparaît important de rappeler ici les principaux objectifs qui sous-tendent le projet de loi n° 83 et qui constituent et constitueront la trame des ajustements ou bonifications qui pourront y être apportés. D'abord, il s'agissait de faire une harmonisation de notre loi de santé et services sociaux suite à la mise en place des réseaux intégrés de services... ou des instances locales, pardon, et des réseaux universitaires intégrés de santé.

Et on me permettra d'être amicalement en désaccord avec les collègues de l'opposition ? ce ne sera pas la première ni la dernière fois. Moi, je ne suis pas d'accord avec la qualification d'omnibus ou de fourre-tout qu'on y apporte. Il y a au contraire un lien évident entre les quatre grands chapitres de cette loi, et ce lien, c'est l'accessibilité, la continuité et la qualité des services. Alors, qu'on parle d'informatisation, qu'on parle du système de plaintes, qu'on parle de la certification des résidences privées, ce lien à mon avis est très présent et net.

Et je ne suis pas d'accord non plus quant à la prétention que la partie sociale de notre réseau soit le parent pauvre. C'est, à mon avis, au contraire, la première fois que, sur le plan législatif, on affirme de façon très nette l'importance des missions sociales autant d'ailleurs dans des articles de loi que dans les dispositions administratives qui sont en place actuellement.

On me permettra également, toujours sur un ton amical, d'amener l'opposition à une certaine prudence quant à l'utilisation de certains concepts. D'abord, quand on parle de complexité, je soulignerais que ce n'est pas la première fois qu'un projet relativement complexe est apporté à l'Assemblée nationale. Souvenons-nous, par exemple, du projet sur les fusions municipales, qui avait un grand nombre d'articles, de nombreux décrets d'accompagnement. Et on ne fera pas une compétition quant au nombre d'articles et/ou à la modalité d'adoption, mais je pense qu'il faut toujours garder un certain recul et une certaine capacité d'autocritique lorsqu'on reproche quelque chose au gouvernement. Bien sûr, c'est le rôle de l'opposition de le faire, et je l'accepte.

L'autre élément que je relevais dans les commentaires, c'est qu'on nous dit évident, et c'est vrai que ça paraît, je crois, évident pour la population qu'il faut apporter un certain encadrement quant à la possibilité d'ouvrir une résidence privée pour personnes âgées ou pour les autres clientèles. Le citoyen, la citoyenne qui nous écoute ne pourra que se surprendre qu'étant donné cette évidence que ça n'a pas été fait lorsqu'on a introduit le registre des personnes âgées, alors qu'il y avait le rapport de la Protectrice des usagers et le rapport également de la Commission des droits de la personne qui faisaient amplement état de ces questions. Je comprends que les difficultés auxquelles s'est heurté alors le gouvernement sont les mêmes qui sont présentes aujourd'hui, mais nous voulons aller plus loin, nous voulons continuer et compléter ce travail.

Et j'ai indiqué d'ailleurs que, sur cette question, la mise en place du registre était la première étape et je reconnais, je dirais, le rôle fondateur de cette démarche. Mais il faut quand même reconnaître qu'il faut savoir se méfier parfois de l'évidence et des choses qui paraissent simples à régler. On verra tantôt que cette question des résidences autant pour personnes âgées que pour les autres clientèles fait appel à de nombreux partenaires ? d'ailleurs, vous l'avez mentionné vous-même tantôt, Mme la députée ? de nombreux partenaires qui débordent le réseau de la santé et de services sociaux et dont il faut s'assurer de la collaboration.

J'ai parlé brièvement des RUIS. On veut que ces réseaux universitaires intégrés disposent d'une assise légale ? parce que jusqu'à maintenant ils n'existaient que sur le plan administratif ? qui favorisera leur bon fonctionnement et leur permettra de mener à bien les responsabilités qui leur sont confiées. Rappelons que le RUIS, lui, doit faire émerger la concertation, la complémentarité et l'intégration des missions de soins, d'enseignement, de recherche et d'évaluation des technologies des établissements de santé qui ont une désignation universitaire dans notre réseau, à soutenir également les régions de son territoire de desserte dans le maintien de la compétence des professionnels qui y oeuvrent et dans la mission de services à leur population. Figurent également à ce chapitre plusieurs mesures visant à soutenir les partenariats auxquels invite la nouvelle dynamique du réseau, tout particulièrement autour du projet clinique et organisationnel dont chaque réseau local sera doté. Les travaux d'ailleurs sont bien entrepris dans nos réseaux locaux à ce sujet.

Le projet de loi propose aussi, M. le Président, plusieurs moyens visant à améliorer la qualité des services offerts dans le réseau. En font partie l'ensemble des mesures qui permettront de faciliter le recours des usagers au régime d'examen des plaintes, de favoriser leur participation et leur contribution au sein des comités d'usagers et de résidents et d'accroître la vigilance autour de la qualité des services dans l'ensemble du réseau. S'ajoutent aussi à ces propositions des mesures voulant que les résidences privées constituent des milieux de vie sécuritaires et respectueux des besoins, des droits et de la dignité des personnes vulnérables qui y sont hébergées, notamment pour les personnes âgées en perte d'autonomie, mais également pour les autres clientèles vulnérables dont il a été question à plusieurs reprises, incluant aujourd'hui.

n(18 heures)n

Enfin, M. le Président, le fonctionnement en réseau qui caractérise la nouvelle organisation des services de même que la qualité et la continuité des services sont aujourd'hui tributaires de la disponibilité et de la qualité de l'information échangée en temps opportun entre les différents intervenants et producteurs de services. Tenant compte de cette réalité et du retard qu'accuse notre système de santé et de services sociaux en la matière ? il faut le dire et l'avouer ? un nouveau cadre légal est proposé dans le projet de loi en vue de faciliter, dans le respect des règles de protection de la vie privée, le recours aux nouvelles technologies de l'information.

Et il y avait eu d'ailleurs, c'est vrai, lors du dépôt de l'avant-projet de loi sur le dossier santé ou la carte santé, un large débat. On s'est d'ailleurs inspiré des conclusions de ce large débat pour aller de l'avant dans ce projet de loi en évitant les écueils qui étaient apparus lors de cette consultation publique, notamment la question d'une grande banque centrale d'information.

Voici donc l'essentiel des objectifs qui nous animent, M. le Président, et qui témoignent de notre volonté à faire en sorte que le réseau de la santé et des services sociaux dispose des leviers adaptés à sa nouvelle réalité et à la synergie qui doit y prendre place pour assurer à la population l'accès à une gamme intégrée de services de santé et de services sociaux de qualité qui répondent à ses besoins.

De l'ensemble des mémoires présentés à la commission, M. le Président, se dégagent plusieurs éléments de convergence ainsi que certaines préoccupations qu'il est important de souligner ici. D'abord, je constate que les visées du projet de loi sont comprises et partagées par la très grande majorité des organismes qui se sont exprimés. On comprend très clairement que ce projet de loi s'inscrit en continuité des choix faits antérieurement et que, moyennant quelques modifications qui doivent être apportées, le réseau de la santé et des services sociaux disposera d'un outil à la hauteur de la tâche qui lui est confiée et des objectifs qui lui sont confiés.

S'agissant des conseils d'administration, je note une grande ouverture à l'accueil d'un plus grand nombre de représentants de la population et des usagers dans ces instances ainsi qu'un consensus à l'effet que la taille des conseils corresponde aux exigences de leur meilleur fonctionnement et de leur plus grande efficacité.

Je retiens également, M. le Président, que l'intention à l'effet que les mécanismes d'examen des plaintes soient plus accessibles et plus transparents pour les usagers est reçue positivement. Un même accueil est aussi réservé à l'égard des objectifs que nous poursuivons par la mise en place de mécanismes visant l'amélioration de la qualité des services et l'exercice d'une plus grande vigilance en la matière dans tout le réseau.

Les moyens proposés aux fins d'assurer la qualité des services dans les résidences privées hébergeant des personnes âgées en perte d'autonomie auront occupé une bonne partie des échanges au cours de cette commission. Se dégagent principalement de toute cette réflexion un large appui aux objectifs que nous poursuivons ainsi que des pistes de travail intéressantes ? et on en reparlera ? en vue d'améliorer les propositions qui sont contenues dans le projet de loi.

En ce qui concerne l'informatisation et la circulation de l'information clinique, autre sujet largement abordé lors de cette consultation, je retiens, M. le Président, que l'on convient de la nécessité importante et absolue de doter le réseau sociosanitaire d'outils modernes pour soutenir le travail des intervenants et pour assurer des meilleurs services à la population. À cet égard, l'accueil généralement positif réservé à notre projet de création de services de conservation régionaux ne nous fera pas oublier que le recours aux nouvelles technologies de l'information doit toujours s'inscrire dans une démarche qui assure un juste équilibre entre les objectifs recherchés et les outils disponibles, et ce, bien sûr sans compromis pour le respect des droits des usagers.

Face aux craintes manifestées par certains groupes, notamment les syndicats et les organismes communautaires, je tiens à réitérer l'engagement de notre gouvernement à maintenir un système public fort dans le respect des valeurs d'universalité, d'accessibilité, d'équité et de gratuité, mais il s'agit d'une gratuité, on peut dire, qui... que nous en payons collectivement le prix très élevé de ce système de santé, qui caractérise notre réseau de la santé et de services sociaux. Ces valeurs sont au coeur de notre système de santé et de services sociaux, et toutes les mesures contenues dans le projet de loi concourent sans contredit à la confirmation de ces valeurs et non à leur effritement.

À nouveau aussi, je tiens à rassurer le milieu communautaire à l'effet que leur autonomie sera maintenue et respectée. Il est clair pour nous que les organismes communautaires sont des partenaires importants dans la dispensation des services de première ligne et qu'il n'est nullement question de les assujettir au réseau public. Bien au contraire, M. le Président, nous souhaitons fortement que leur participation et leur contribution volontaires au projet clinique de chacun des réseaux locaux s'inscrivent dans une démarche respectueuse de leur raison d'être et de leur façon de faire.

Il m'a semblé aussi que le projet clinique et organisationnel dont le leadership est confié à l'instance locale suscite quelques appréhensions chez certains groupes. Je retiens les commentaires entendus à ce sujet que tous partagent le but visé par ce projet et que tous entendent aussi contribuer étroitement à sa réalisation. La démarche devra toutefois se faire rassembleuse et porteuse de consensus tout en étant attentive à la réalité et aux attentes de chacun des partenaires. Et je puis vous assurer, M. le Président, que la volonté d'assurer la concrétisation et le devenir harmonieux de ce projet est au coeur de nos préoccupations ainsi que des efforts que nous déployons actuellement et que nous continuerons de fournir à cette fin.

La mise à jour de la Loi sur les services de santé et les services sociaux est un exercice important et complexe. Cela exige donc de soupeser judicieusement les choix à faire ainsi que les impacts qui en découleront. Je puis vous assurer, M. le Président, que c'est dans cet esprit que nous poursuivrons notre tâche à la lumière des objectifs qui nous animent et des échanges auxquels ils ont donné lieu tout au cours de la commission.

Je donnerai aujourd'hui un aperçu des changements que nous entendons apporter au projet de loi sans en donner cependant la nature exacte aujourd'hui. Et les collègues qui ont déjà siégé au gouvernement savent bien qu'un long processus, ou un processus important s'engage maintenant, débat avec les collègues du caucus, du Conseil des ministres, comités ministériels, construction législative des modifications proposées, de sorte qu'en temps et lieu celles-là seront proposées et exposées de façon détaillée. Mais nous pourrions d'ores et déjà indiquer, M. le Président, quelques-unes des pièces que nous comptons en faire.

En ce qui concerne la composition des conseils d'administration, j'ai déjà indiqué mon accord à l'effet de reconduire la représentation des sages-femmes là où il existe un conseil de sages-femmes. Et nous souhaitons que, dans un avenir pas trop lointain, il en existe dans la plupart, sinon la totalité de nos établissements de première ligne. Je suis également sensible à d'autres demandes formulées, comme celle visant à rééquilibrer la représentation des membres dans les établissements dépourvus d'un conseil de médecins, dentistes et pharmaciens ou/et d'un conseil des infirmières et infirmiers, et celle mettant à contribution les fondations, dont les représentations également ont bien été entendues.

Pour lever les ambiguïtés perçues dans le partage des responsabilités entre les différents partenaires, il m'apparaît important que certaines clarifications soient apportées au projet de loi. Je pense, entre autres, ici au rôle d'arbitrage confié aux agences et aux responsabilités en matière d'enseignement, de recherche et d'évaluation que se partagent les RUIS et le ministère. Je pense aussi au projet clinique et organisationnel dont la responsabilité première dévolue à l'instance locale devra idéalement traduire les collaborations et les partenariats auxquels la réalisation et la mise en oeuvre de ce projet feront appel.

S'agissant des mesures reliées aux mécanismes de plaintes et à l'amélioration de la qualité, il m'apparaît souhaitable, comme l'ont indiqué plusieurs, que certains liens soient établis entre ces deux préoccupations sans cependant que ne soit altéré l'objectif premier de ces mesures. C'est donc en maintenant le cap sur notre engagement à l'égard des usagers, M. le Président, que nous envisageons de procéder à quelques ajustements des propositions avancées à ce chapitre dans le projet de loi n° 83.

Je suis heureux, et nous sommes tous heureux, je crois, de constater l'attention généralisée que l'on porte à l'amélioration du sort des personnes âgées et des autres personnes vulnérables dans notre société. Le message quasi unanime entendu est celui de la nécessité de se doter de moyens concrets et efficaces pour garantir la qualité des milieux de vie et des services dans les résidences privées hébergeant des personnes âgées et d'autres clientèles vulnérables. Idéalement, estiment d'ailleurs certains, d'ailleurs, ces mesures devraient s'appliquer ? donc, on l'a entendu aujourd'hui ? aux clientèles souffrant de problèmes de santé mentale, ou de déficience intellectuelle, ou de jeunesse en difficulté, qui ont parfois besoin de séjourner dans ces milieux d'hébergement, et nous partageons ces préoccupations.

Et, comme je l'indiquais plus tôt, M. le Président, cette responsabilité concerne bien sûr le ministère de la Santé et des Services sociaux ainsi que son réseau, mais elle interpelle également d'autres secteurs, comme les municipalités, l'habitation, le logement social, pour ne nommer que les plus importants. Et nous avons entendu aujourd'hui un très bel exemple de concertation et de synergie entre ces différents milieux à la lumière de la présentation du groupe de Granby qui nous a indiqué comment ils avaient procédé dans leur région pour réaliser cette collaboration qui est donc tout à fait indiquée pour mener à bien toute opération d'envergure dans ce secteur. Et nous comptons bien veiller à ce que cette collaboration prenne forme.

On m'a convaincu de la nécessité de bonifier les propositions du projet de loi de manière à ce qu'il soit clair que la sécurité, la santé et le bien-être des personnes âgées soient mieux protégés dans l'ensemble des résidences privées. On m'a aussi convaincu que des mesures devraient être envisagées pour mieux protéger d'autres clientèles hébergées dans ces résidences, notamment lorsqu'elles y sont dirigées par le réseau de la santé et des services sociaux, en renforçant toujours la nécessité absolue qu'un lien étroit soit établi avec les autres partenaires impliqués dans la question, notamment ceux du monde municipal.

Enfin, je terminerais sur l'important volet du projet de loi portant sur la circulation de l'information clinique. On se rappellera qu'en la matière deux principales démarches sont proposées en vue de faciliter la circulation sécuritaire des renseignements cliniques, à savoir, d'une part, la création de services régionaux de conservation de ces renseignements auxquels les intervenants habilités auront accès et la communication de renseignements cliniques de l'instance locale vers les partenaires au sein des réseaux locaux de services.

Parmi les différents ajustements que nous comptons apporter au projet de loi, M. le Président, figurera celui très important, parce que mentionné, je crois, de façon unanime au cours de nos débats, celui du consentement explicite de l'usager dans le cadre de la transmission de renseignements le concernant lors de l'établissement d'un plan de services individualisé. Les modifications envisagées à ce chapitre viseront à prendre en compte donc les préoccupations exprimées par les individus et les organisations qui sont venus s'exprimer devant nous à ce sujet.

n(18 h 10)n

Je vous remercie, en terminant, M. le Président, pour la rigueur et la délicatesse avec lesquelles vous avez présidé nos séances. Un peu moins de citations cette fois que lors de nos travaux précédents, je le regrette, mais probablement vous rattraperez-vous dans l'étude article par article. Je tiens également à remercier tous les collègues de l'Assemblée nationale, des deux côtés de la Chambre, qui ont participé aux travaux de cette commission, de même que toutes les personnes qui sont venues présenter le point de vue de leur groupe, association ou organisme. Et je suis d'accord avec ce que disait ma consoeur d'Hochelaga-Maisonneuve, que voilà une occasion de bonifier, un peu comme on fait vinifier un bon vin dans une vieille barrique, mais il ne faudrait pas qu'il y séjourne trop longtemps parce qu'il pourrait tourner au vinaigre, cependant. La contribution de toutes et de tous a été appréciée et aura certainement contribué à éclairer le débat ainsi que les suites qui seront données au projet de loi n° 83.

Je remercie enfin l'équipe de soutien du ministère qui m'a entouré et conseillé au cours de ces travaux, de même que le personnel de la commission, pour leur excellent travail et, comme d'habitude, leur diligence à l'accomplir. Merci et bonne soirée à tous et à toutes.

Le Président (M. Copeman): Chers collègues, tout ce qu'il me reste à faire, c'est de vous remercier pour votre collaboration exemplaire tout au long des travaux de la commission, également remercier le personnel de la commission.

Et, la commission ayant accompli son mandat, j'ajourne les travaux au jeudi 7 avril 2005, à 10 h 30, c'est-à-dire à demain matin, afin d'effectuer un autre mandat. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 11)

 


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