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Version finale

39th Legislature, 1st Session
(January 13, 2009 au February 22, 2011)

Thursday, April 2, 2009 - Vol. 41 N° 7

Consultations particulières sur le projet de loi n° 7 - Loi instituant le fonds pour le développement des jeunes enfants


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures quarante-trois minutes)

Le Président (M. Kelley): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je constate quorum des membres de la Commission des affaires sociales. Donc, je déclare la séance ouverte, en rappelant le mandat de la commission.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 7, Loi instituant le fonds de développement des jeunes enfants.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Girard (Gouin) remplace Mme Lapointe (Crémazie) et M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière) remplace M. Caire (La Peltrie).

Le Président (M. Kelley): Parfait. Merci beaucoup. Juste rappeler l'ordre du jour pour ce matin. Nous avons trois témoins: le Conseil québécois des services de garde éducatifs à l'enfance, la Fédération québécoise des organismes communautaires famille et la Confédération des organismes familiaux du Québec. Donc, un festival des familles, si j'ai bien compris.

Auditions (suite)

Notre premier témoin, c'est le Conseil québécois des services de garde éducatifs à l'enfance. Vous avez le droit à une présentation d'une dizaine de minutes plus ou moins, suivie par un échange avec les membres de la commission. Sans plus tarder, je vais céder la parole à Mme Reilly. Est-ce que c'est bien ça?

Conseil québécois des services de
garde éducatifs à l'enfance (CQSGEE)

Mme Reilly (Sylvie): C'est ça. M. le Président, MM. et Mmes du gouvernement, MM. et Mmes de l'opposition, nous sommes ici, ce matin, à titre de porte-parole du Conseil québécois des services de garde à l'enfance à l'égard du projet de loi n° 7, Loi instituant le fonds pour le développement des jeunes enfants.

Permettez-moi de vous présenter ma collègue, Louise Tremblay...

Mme Tremblay (Louise): Bonjour.

Mme Reilly (Sylvie): ...directrice générale du CPE La Souris verte, à Jonquière, ainsi que moi-même, Sylvie Reilly, directrice du CPE Luminou, de Sainte-Geneviève, et présidente de la table de concertation enfance famille de l'Ouest-de-l'Île de Montréal. Nous sommes aussi accompagnées par Annie Dufour, responsable des communications du conseil québécois. Nous voulons préciser que Mme Francine Lessard, directrice du Conseil québécois des services de garde à l'enfance, est actuellement retenue, car elle est en consultation avec tous les membres BC et qu'un mémoire n'a pu être produit pour ces raisons.

Bien que le conseil québécois soit une jeune association, nous sommes toujours très actifs auprès de nos membres CPE, et ce, pour une amélioration continue de la qualité des services auprès des parents et des enfants. Avant de commencer nos représentations sur le projet de loi n° 7, permettez-nous de vous exprimer notre joie qu'un nouveau fonds soit constitué pour favoriser le développement des enfants 0-5 ans, et nous remercions par le fait même ses instigateurs, soit la Fondation Lucie-et-André-Chagnon, ainsi que le gouvernement du Québec. Nous sommes donc très favorables à cette initiative.

En premier lieu, le conseil québécois aimerait être rassuré quant à la récurrence du financement présentement versé aux BC oeuvrant en milieu défavorisé, de la part de la dernière entente intervenue entre la Fondation Lucie-et-André-Chagnon et le gouvernement, pour le projet Grandir ensemble. Nous pouvons confirmer qu'à ce jour les CPE ciblés ont profité des subventions accordées pour adapter et professionnaliser leurs services selon les besoins de leur milieu. Ils ont soit embauché des ressources pédagogiques, augmenté leurs effectifs, eu recours à des services professionnels pour les interventions directes auprès des enfants et des parents. Ils ont aussi fait de la formation pour soutenir les intervenants, ils ont ajouté des spécialistes à leur équipe pédagogique, acquis du matériel, modifié leurs locaux, organisé des rencontres parents-intervenants RSG. Alors, ce furent des sommes qui ont été très, très bien utilisées.

Actuellement, le conseil québécois effectue la mise en place d'outils et de formation pour les intervenants en milieu familial et en installation. Le tout devra être livré à l'automne 2009. Nous vous rappelons que le but visé par le projet Grandir ensemble était la communication avec les parents.

Nous sommes en faveur de ce nouveau fonds. Par contre, nous recommandons que ces sommes soient allouées à l'ensemble des services de garde, nonobstant le fait qu'il y ait défavorisation ou non. L'étude sur la maturité scolaire démontre clairement qu'il y a des zones de fragilité dans tous les secteurs et que les enfants vulnérables dans un ou plusieurs domaines ont besoin d'aide. Il faut aussi faire attention, car, lorsqu'on prend les données générales par rapport à la défavorisation, ce n'est pas toujours représentatif de la réalité.

Je vais donner un exemple du secteur d'où, moi, je viens. Je travaille dans un centre de la petite enfance qui est situé à Sainte-Geneviève. Nous faisons partie de l'Ouest-de-l'Île, nous n'apparaissons pas comme défavorisés. Par contre, si on prend le tableau synthèse n° 2 du rapport de l'enquête du CSSS Ouest-de-l'Île, nous voyons clairement que 44,9 % de nos familles, à Sainte-Geneviève, sont monoparentales, comparativement à 32,9 % à Montréal. La proportion de la population 20 ans et plus sans diplôme d'études secondaires est de 19,6 %, comparativement à 11,7 % pour Montréal.

Je vais faire un petit exemple de ça. Il faut aussi prendre compte du nombre d'enfants, pas seulement du pourcentage d'enfants qui ont des vulnabirités... vulnabirilités... En tout cas. Pour Pierrefonds-Ouest, on regarde le nombre d'enfants qui est vulnérable en santé physique et bien-être, c'est 13,7 %, ce qui représente 44 enfants. Par contre, si on regarde Cloverdale, À Ma Baie, qui a un pourcentage de 21,4 % pour la même proportion d'enfants vulnérables, ça représente 21 enfants. Alors, j'aimerais qu'on fasse attention aux critères qui peuvent faire que certains enfants n'auront pas les mêmes droits que les autres. Nos services de garde sont fondés sur l'accès universel, et nous pensons que c'est primordial: chance égale à tous.

Mme Tremblay (Louise): Bonjour, tout le monde. Alors, on a assisté un peu aux représentations, hier, parce que c'est un peu notre première expérience... ce n'est pas un peu, c'est notre première expérience en Chambre. Ça nous rendait nerveuses. On s'est aperçues que les gens qui étaient là étaient très bien documentés. Nous, on remplace Mme Lessard, alors on va essayer de faire du mieux que l'on peut. On a quand même la vision du conseil québécois. On lui a parlé, on a échangé, on s'est rencontrés cette semaine.

Alors, si vous vous demandez si le Conseil québécois des services de garde éducatifs à l'enfance est favorable au projet de loi n° 7, bien, la réponse est oui, sans équivoque. Que ce projet soit institué en collaboration avec la Fondation Lucie-et-André-Chagnon, c'est encore oui. On a fait Grandir ensemble avec eux, ça a donné des bons résultats, ça en donne toujours. Alors, on est très favorables. Et nous ajoutons même que l'institution de ce nouveau fonds, bien, c'est un grand pas vers l'avenir puisqu'il vise directement nos enfants. Les enfants en difficulté, il s'agit de bien cibler où ils sont.

Les différentes études l'ont également prouvé, que chaque dollar investi dans la petite enfance rapporte plusieurs fois la mise initiale à la société. Là, on ne vous énumérera pas toutes les études puis en quelle année, puis tout ça, mais je pense que c'est prouvé depuis longtemps. Une autre étude, En route pour l'école, conclut même qu'agir dans les premières années de vie des tout-petits peut permettre d'éviter le décrochage scolaire et améliorer les chances possibles aux enfants vulnérables de réussir.

n(9 h 50)n

Alors, que des argents neufs soient investis, que demander de mieux? Comment ils seront gérés? Bien, nous faisons confiance aux deux bailleurs de fonds quant à la transparence de l'utilisation de ces argents-là puis à la reddition des comptes. Nos seules préoccupations, en fait, sont les suivantes: que les structures de services qui seront mises en place soient indépendantes de toute allégeance politique et que ce soit de l'intervention de terrain disponible à tous les parents et enfants qui en ont besoin, et ce, à court terme.

Dans ce but, le Conseil québécois des services de garde éducatifs à l'enfance se permet de vous suggérer d'inclure l'ensemble des services de garde aux divers projets et de ne pas accorder systématiquement le financement, comme on l'a vu dans certain cas, là, soit aux bureaux coordonnateurs ou aux regroupements régionaux. Il est vrai que 200 000 enfants fréquentent journellement les CPE, ce qui nous permet d'affirmer peut-être 300 000 familles même, parce que plusieurs fréquentent à temps partiel. Mais, notre réserve que ces argents soient attribués systématiquement à des organismes précis, bien, nous nous appuyons sur le fait que beaucoup trop d'enfants vulnérables, par le fait même tous ceux qui ne profitent pas des services, qui ne fréquentent pas les services de garde, bien, seraient plus ou moins visés ou auraient un accès moins facile à ces nouveaux fonds là.

On vous suggère également d'assurer le partenariat avec les partenaires école-CSSS-parents afin de leur garantir la durabilité d'optimiser l'investissement déjà réalisé dans la prime enfance. Nous savons que diverses tables de concertation travaillent à ce niveau depuis plusieurs années, mais c'est parfois très difficile de réunir sur une base régulière des intervenants qui portent différents chapeaux puis ça nous empêche bien souvent de passer à la phase de concrétisation rapidement, là, puis même, des fois, jamais, là. Plutôt que de réinventer la roue, nous pourrions prendre exemple sur Québec en forme, qui semble avoir adopté une formule gagnante. Il existe également certains organismes qui ont prouvé qu'un partenariat bien établi puis poursuivant une seule mission arrive à des résultats probants rapidement et efficacement.

Dans notre coin, à Jonquière, certains d'entre vous le connaissent sûrement, le CREPAS et Écobes ont réussi à baisser le niveau de décrochage scolaire en impliquant activement les parents dans la démarche, ce qui nous prouve que la collaboration avec les parents est primordiale à la réussite de toutes les actions en lien, là, avec les enfants.

Nous croyons également qu'un transfert automatique aux écoles des dossiers traités dans la petite enfance pourrait favoriser la rentrée scolaire et puis maximiser les actions qui sont déjà entreprises. Parce que, là, ce que l'on vit dans la réalité, c'est qu'on fait un grand travail dans le CPE, puis ils recommencent tout à fait à l'école.

En troisième lieu, on suggère également de mettre en place rapidement cette structure-là exclusivement dédiée à cette mission-là aussi. Comme, par exemple, il pourrait y avoir une permanence dans chacune des 14 régions du Québec afin de chapeauter une table qui regrouperait les écoles, les CPE, CLSC et les parents qui veulent bien s'y impliquer. Cette permanence organiserait également des rencontres, des formations pour les intervenants et les parents, mettrait en place des mécanismes de dépistage, de suivi de plans d'intervention et élaborerait et développerait des outils de transfert: exemple, CPE-école. La permanence fournirait et orienterait le parent aussi et le service de garde vers des services professionnels accessibles rapidement et pourrait faire la promotion et la gestion de l'utilisation des services. Puis, bien entendu, elle sera obligatoirement obligée de produire des rapports d'étape à une instance désignée par les bailleurs de fonds.

Enfin, on se dit qu'on devrait élargir les actions à tous les enfants vulnérables et non pas seulement à ceux provenant de milieux défavorisés, qui sont actuellement ciblés par les études, là, afin de ne pas perdre un temps précieux à cibler la clientèle, ce qui est déjà assez établi soit par le CPE, le CLSC ou les autres organismes qui oeuvrent auprès des familles. Nous croyons fermement qu'il y a urgence à ce niveau et qu'il est impératif de passer rapidement à l'action.

Puis là je vais vous apporter un exemple de chez moi, dans mon CPE. Jusqu'à tout récemment, on avait 66 enfants. Depuis plusieurs années, on est très impliqués sur différentes tables, conseils d'administration de fonds d'aide, même à la réussite scolaire. Puis, sur 66 enfants, à chaque année, le taux d'enfants vulnérables a augmenté même si notre clientèle n'est pas défavorisée, là, plus de 50 % sont très bien nantis. On n'a pas encore analysé les pourquoi. Mais il reste que, l'année dernière, en septembre de cette année, il y avait 12 enfants qui avaient des besoins qui nécessitaient les services d'une orthophoniste puis il y en avait d'autres qui nécessitaient d'autres sortes de spécialistes de la santé, ergothérapeutes, même psychiatrie enfant, pédopsychiatres, et tout ça. On a donc engagé, on a eu recours, par les bons côtés, les bons hasards de la vie, à un orthophoniste amené par un parent, qui a évalué tous les enfants, qui forme notre personnel éducateur pour les cas légers et qui a pris en charge les quatre cas les plus graves. Puis je vous dirais que, quatre mois plus tard, vraiment ça donne des résultats très probants puis ça n'a pas demandé un investissement énorme. Alors, nous, on pense que 40 millions par année, c'est bien, ça devrait, surtout étalé sur 10 ans, nous permettre d'atteindre les buts escomptés, en tout cas. Et je vous garantis que les parents qui fréquentent chez nous puis les enfants concernés s'en réjouissent, puis on ne demanderait pas mieux que d'étendre cette pratique-là à tout le monde. Puis ça n'enlève rien aux travailleurs qui sont déjà là, parce que, malgré les efforts soutenus de référence aux services de gratuité ? qu'on pense, CLSC, hôpitaux ? et les compétences des professionnels qui y travaillent... parce qu'on fait affaire avec eux aussi, puis ça va très bien, surtout depuis le protocole CPE-CLSC, c'est magnifique. Mais ils sont souvent placés sur des listes d'attente qui sont longues, puis ça atteint même jusqu'à deux ans, pas rarement, là, souvent.

Les études nous prouvent qu'il faut intervenir rapidement, mais, dans la réelle réalité, ce que l'on vit tous les jours, l'enfant a souvent atteint l'âge scolaire avant d'avoir eu recours aux services, et, dans certains cas, l'enfant qui n'avait au départ qu'un simple retard langagier ou problème de langage est maintenant aux prises avec un trouble de comportement, même des problèmes socioaffectifs. Parce qu'on ne se le cachera pas, quand on n'est pas capable de s'exprimer ou de se faire entendre par ses pairs ? puis on le vit, ça, déjà à 18 mois et deux ans, là ? bien, ça nous amène à une mauvaise... Bien, pas d'expression, tout ce qui ne s'exprime pas s'imprime. Alors, ça paraît beaucoup sur le comportement.

Nous vous remercions pour le temps que vous nous avez accordé afin de vous faire part de notre vision par rapport aux sommes qui seront injectées. Nous pensons que tous les services de garde éducatifs du Québec font maintenant partie prenante des futurs résultats scolaires de leurs clients actuels et qu'une concertation CPE-école serait bénéfique aux enfants, économiserait temps et argent à l'ensemble de la société. Mais n'oublions pas qu'encore un trop grand nombre d'enfants n'ont pas accès à des services de garde éducatifs et que, vous, les décideurs, vous vous devez d'offrir à toutes les familles les mêmes opportunités pour leurs enfants. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Tremblay, Mme Reilly, pour votre présentation. Avant de céder la parole au ministre de la Famille, je veux le féliciter pour sa victoire, hier soir. Il était l'entraîneur en chef de notre équipe de hockey. Les vieux de notre formation politique ont gagné contre les jeunes de notre formation politique grâce au talent du ministre de la Famille qui a bien coaché son équipe.

Alors, la parole est à vous. On va avoir deux blocs de 20 minutes de droit de parole, échange avec les membres de la commission. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Tomassi: Merci beaucoup à M. le Président. Et c'est pour ça, j'ai une voix rauque ce matin. Mais je peux vous dire que nos députés ont des très bonnes jambes pour leur âge, les jeunes l'ont appris à leurs dépens, hier.

Mme Reilly et Mme Tremblay, Mme Dufour, merci beaucoup de vous être déplacées puis d'apporter vos commentaires à cette commission importante. Tout d'abord, vous féliciter, ça n'a pas paru, votre nervosité. Même si c'était la première fois que vous vous présentez, vous avez fait un très, très bon travail, et votre message a été très clair, et on prend bonne note de vos suggestions.

Avant d'aller à vos questions, je voulais peut-être remettre un peu... Il y a un article, là, dans Le Courrier parlementaire, là... faire une mauvaise compréhension, là, des propos ou des choses qui ont été dites. On fait mention, là, de voir le protocole signé. Je veux seulement rappeler à la commission qu'il n'y a aucun protocole de signé actuellement parce que nécessairement la loi n'est pas adoptée. Alors, le gouvernement ne peut pas s'engager à signer un protocole d'entente. Alors, c'est quelque chose qui doit être énuméré. Je comprends que le député de Gouin va me revenir, savoir si ma nuit m'a porté conseil. Alors, je lui ai répondu tantôt que d'habitude les nuits qui me portent conseil, c'est les nuits où est-ce que mon épouse est couchée à côté de moi. Et, comme, hier soir, elle n'était pas à côté de moi...

Le Président (M. Kelley): ...

Des voix: Ha, ha, ha!

n(10 heures)n

M. Tomassi: ...je n'ai pu...

Une voix: ...

M. Tomassi: Non, non, mais c'est correct, là. Ça me fait plaisir. Ça me fait plaisir, parce que c'est une réalité.

Alors, écoutez, je comprends vos propos, que vous êtes en faveur du projet de loi, vous êtes en faveur de la mise en place du fonds. Je comprends aussi que vous avez eu des très bonnes expériences avec la fondation Chagnon, avec le projet Grandir Ensemble. C'est des éléments importants, puis qu'on salut. On salut l'initiative, de un, de la fondation Chagnon et la poursuite qu'ils ont à nous permettre de donner à la société québécoise et surtout aux jeunes enfants tous les outils qu'ils vont avoir de besoin pour réussir.

Vous faisiez mention tantôt d'une excellente concertation dans votre région, qui est le CREPAS. J'ai eu la chance d'aller visiter le CREPAS lors de mon ancien chapeau qui était celui d'adjoint parlementaire sur les dossiers jeunesse, au premier ministre. Et j'ai bien vu que cette concertation locale qui était très forte, non pas seulement de quelques intervenants, mais de toute la communauté, a fait en sorte qu'il y a des résultats qui sont arrivés par la suite parce que cette concertation a permis d'avoir un continuum de services à partir du jeune à aller jusqu'aux parents, à aller jusqu'à l'entreprise et par la suite, là, faire le tour...

Une voix: ...

M. Tomassi: L'employeur, exactement. Et l'essence même du fonds va dans cette direction-là, c'est permettre qu'on puisse établir dans une même région ce continuum de services et faire en sorte que les services puissent être rendus aux enfants.

Nécessairement, puis le Carrefour d'action municipale est venu nous le dire hier, lors de leur présentation, il y a des endroits au Québec où est-ce que la concertation est déjà faite. Les gens, vous l'aviez dit aussi, vous êtes assis à certaines tables, il y a des places où est-ce que la concertation locale est déjà solide, est déjà forte, même si je peux vous dire d'emblée que presque toutes les régions du Québec ont cette concertation. Des fois, il s'agit seulement de rajouter quelques intervenants alentour d'une table pour avoir ce continuum de services. Et la volonté même du fonds, c'est justement de pallier à ces deux éléments-là, de pallier, de dire: Concertation locale existante, oui, parfait, on travaille à partir de là; s'il manque des éléments, on va rattacher. Puis, de l'autre côté, dire: Bon, bien, là, parfait, on a des actions concrètes qu'il faut déployer dans le milieu pour que le service puisse être rendu aux jeunes enfants.

Et vous aviez amplement raison, quand vous en faisiez mention tantôt, de dire: Ce n'est pas parce qu'on n'est pas ciblé une région défavorisée qu'il n'y a pas des besoins spécifiques. Puis ça, je pense que tout le monde est conscient, que ce soit le fonds, que ce soit le gouvernement, que ce soit la fondation, tout le monde est conscient de cette dynamique-là. Puis je peux vous dire d'emblée que tous les services de garde, sans aucune couleur, sans aucune affiliation, tous les intervenants, que ce soient les commissions scolaires, les CPE, les bureaux coordonnateurs, les MRC, auront la possibilité de déposer des projets, parce que, nécessairement, il faut faire ça en concertation. Le porteur de ballon peut être un organisme à un endroit, et un autre, dans un autre endroit. Mais c'est des éléments importants, puis je salue vos choses.

Vous faisiez mention tantôt... Parce qu'on va avoir des groupes aujourd'hui qui vont venir nous parler de certaines expériences qu'ils ont vécues avec Québec en forme, qui n'ont pas été... C'est sûr que, quand un nouveau fonds est mis en place, des fois l'huile n'est pas... la machine n'est pas bien rodée, là, elle n'est pas bien huilée, il faut un ajustement, régionalement parlant. À ce que je comprends d'aujourd'hui, c'est que les irritants qui avaient été notés au début de la mise en place du fonds se sont estompés. Je voudrais peut-être vous entendre un peu, de vos expériences, si vous avez des expériences précises avec Québec en forme, là, vous pourriez peut-être nous parler de ces expériences.

Mme Reilly (Sylvie): Personnellement, je travaille avec la table de concertation enfance famille sur le dépôt d'un projet pour Québec en forme. Nous sommes assis avec scolaire, municipal, CSSS et communautaire. Ça va très, très, très bien. La seule chose qu'on pourrait dire que nous trouvons plus difficile, c'est de faire un portrait, au tout début, où est-ce qu'on n'a pas accès à une permanence ou à quelqu'un qui va nous appuyer dans ce dépôt-là.

On sait tous que, sur les tables de concertation, c'est des bénévoles... bien, des bénévoles, les organismes qui nous envoient ou... et puis ça, c'est difficile parfois parce que les gens ont tous déjà leur charge de travail et la mise sur pied des éléments du dépôt du projet demande énormément de travail. Et, nous, c'est ce qu'on constate, que c'est difficile à l'origine. C'est sûr que l'emphase est mise sur la concertation et sur l'implication de chacun. Par contre, ce n'est pas toujours évident de dégager le temps nécessaire pour l'évaluation initiale des besoins de tout le monde.

Par contre, ça va très, très, très bien. C'est la première fois que je travaille avec tous ces intervenants-là, de différents milieux, et ça a apporté une vision différente, je vous dirais, de... On ne savait pas exactement ce qu'un faisait par rapport à l'autre à l'origine; maintenant, c'est beaucoup plus clair. Et ce qui est ressorti, c'est qu'il faut qu'on travaille de plus en plus concertés. Juste avec les écoles, ce n'est pas toujours évident d'avoir accès aux écoles, et, par Québec en forme, on a établi des alliances assez importantes, et on est fiers de ça.

M. Tomassi: Merci beaucoup. Je vais laisser la parole à mes collègues.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme St-Amand: Merci, M. le Président. Bonjour, merci beaucoup de votre présence, c'est vraiment bien apprécié, d'autant plus que vous avez déjà un rôle de concertation important par vos colloques, forums au niveau québécois.

Vous avez parlé tantôt, puis ça m'a accrochée un petit peu parce que vous avez insisté beaucoup sur rendre le fonds accessible à toutes les familles, vous avez parlé de défavorisés, vous avez parlé de vulnérables aussi. J'aimerais ça vous entendre. Quelle différence vous faites entre les enfants vulnérables versus les enfants défavorisés?

Mme Tremblay (Louise): Bien, écoutez, dans... je ne sais pas si certains d'entre vous ont lu l'étude En route vers l'école, on voit bien la différence, c'est qu'un secteur ou un milieu défavorisé, ça va être souvent des familles qui sont même déjà prises en charge par le CLSC et qui sont dans des secteurs où la pauvreté est élevée, où eux-mêmes, leur état, leur propre état, c'est ce qu'on... Ils sont au seuil de la pauvreté, là. On voit que le FLCP lui-même prend en compte, prend en charge ces familles-là et ces enfants-là.

Tandis que vulnérable, pour nous, vulnérable, ça peut autant être du côté comportemental, langagier, comme je vous disais, socioaffectif. C'est l'enfant dont les deux parents sont des professionnels mais qui ont des charges très lourdes de travail, qui est là, qui est dans son coin, qui ne dérange personne, mais qui a de la difficulté à s'exprimer, qui ne va pas vers les autres, qui n'a pas un développement social harmonieux. Bien, il est aussi apte au décrochage plus tard que l'autre, puis des fois plus parce qu'il n'a pas dérangé personne ni dans la prime enfance ni dans les premières années d'école, mais il ne s'est pas développé globalement, harmonieusement, là. Alors, vulnérable, oui, il y a différentes sortes de vulnérabilité, puis c'est vraiment dans la prime enfance que... Même, je le cite en exemple, un petit problème langagier découle des fois vers un très gros problème de comportement.

Mme St-Amand: Pour vous, vulnérable n'est pas nécessairement diagnostiqué, c'est ce que je comprends.

Mme Tremblay (Louise): Ah! Pas nécessairement, effectivement, puis encore moins à la prime enfance. Puis, quand il n'est pas traité à la prime enfance, bien, je vous dirais qu'il arrive à l'école puis déjà il est en retard, là.

Mme St-Amand: O.K. Juste en complément. Pour soutenir les parents, parce que vous travaillez avec les parents, les CPE qui sont membres de votre organisme travaillent avec les parents, qu'est-ce que vous nous conseillerez comme piste d'intervention avec les parents qui sont quand même... hein, qui ont un rôle primordial dans le développement des enfants?

Mme Tremblay (Louise): Bien, nous, on en fait déjà beaucoup, hein? On est privilégiés. Il y a quelqu'un hier ? parce qu'on a assisté aux représentations ? il y a une des deux dont le discours me touchait. C'est exactement... On est très privilégiés, les CPE, c'est vrai, comparativement aux écoles, qui vont recevoir de 400 à 1 000 enfants, puis la direction, l'administration n'est pas aussi près de leur clientèle. Nous, on est au centre de l'action. Alors, même si on travaille beaucoup, on a toujours une oreille qui est là puis qui écoute ce qui se passe dans la garderie.

Puis on est très, très privilégiés d'avoir les liens que l'on a avec nos clients, avec nos parents, nos enfants, tu sais, à toute heure du jour. On part très tard le vendredi parce que c'est là que les parents vont arrêter et dire: Bien, tu sais, ça a été comme ça, l'éducatrice m'a dit telle affaire. Alors, nous, on fait de l'intervention directe, là, avec notre équipe, notre personnel éducateur. Puis je vous dirais que, si on n'arrive pas à avoir cette concertation-là rapidement, le parent est le premier intervenant auprès de son enfant, il y a beaucoup d'études également, même scientifiques et biologiques, qui prouvent que le parent est pour 80 % dans le développement global et harmonieux de son enfant, ça fait qu'il ne faut quand même pas penser qu'on a la science infuse, loin de là, si on n'a pas la collaboration du parent, on n'arrive à rien avec l'enfant.

n(10 h 10)n

Dans le quotidien, je vous dirais que, la plupart du temps, que ce soit l'enfant qui mord, ce qui est très banal mais qui peut déboucher encore sur des choses beaucoup plus graves, bien, on s'assoit avec le parent, l'éducatrice, la conseillère pédagogique ? les deux parents ? et moi-même, on s'assoit environ une demi-heure, trois quarts d'heure, puis, la plupart du temps, le lendemain matin, c'est terminé, ça n'existe plus. Il faut que tous les adultes autour aient la même constance, la même fermeté puis la même vision pour que l'enfant, lui... Regarde, il y va par imitation, il suit, là.

Mme St-Amand: Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci, Mme la députée. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: Merci, M. le Président. Merci pour vos commentaires, c'est très bien apprécié. J'aimerais vous entendre davantage sur la différence que vous faites entre ce que le fonds privilégie comme clientèle qui est les enfants vivant en situation de pauvreté et ce que vous semblez prendre comme position au niveau de la clientèle des enfants vulnérables.

Mme Tremblay (Louise): J'aimerais ça que vous me le répétiez d'une autre façon, là.

M. Chevarie: C'est parce que le fonds semble... privilégie les enfants qui sont surtout... qui vivent une situation de pauvreté.

Mme Tremblay (Louise): Oui.

M. Chevarie: Mais, si je comprends bien votre position, vous êtes plus orientés vers la clientèle des enfants en situation de vulnérabilité.

Mme Tremblay (Louise): Oui.

M. Chevarie: Est-ce que je comprends bien votre position?

Mme Tremblay (Louise): Oui, oui, oui. Effectivement, oui. On se dit que ce n'est pas juste les enfants... mais pas juste les enfants... Les enfants qui sont en situation de pauvreté doivent être nécessairement pris en charge. Ça, on ne l'enlève pas.

M. Chevarie: Il ne sont pas nécessairement tous vulnérables.

Mme Tremblay (Louise): Mais ils ne sont pas nécessairement tous vulnérables, puis l'inverse non plus. Tous les enfants vulnérables ne sont pas nécessairement tous en situation de pauvreté. Mais la pauvreté, est-ce qu'elle est juste financière ou des fois elle est émotionnelle ou elle est psychologique?

M. Chevarie: Alors, vous, vous dites: Nous, on est entièrement d'accord avec le fonds...

Mme Tremblay (Louise): Ah, absolument.

M. Chevarie: ...mais on aimerait qu'on cible davantage les enfants vivant de la vulnérabilité.

Mme Tremblay (Louise): Oui. Puis qu'on ne soit pas arrêté à une carte démographique, ou géographique, ou territoriale, là, mais plutôt aux enfants et aux parents.

Mme Reilly (Sylvie): Est-ce que je peux ajouter quelque chose?

Mme Tremblay (Louise): Absolument.

Mme Reilly (Sylvie): Dans notre secteur, ce qu'on a fait, lors de la concertation avec les écoles, premièrement, on a fait des vérifications avec les écoles: Est-ce qu'effectivement vous voyez dans votre école ce qui est indiqué ici? Est-ce que c'est les observations que vous avez faites par rapport au secteur, qui disent que la proportion d'enfants vulnérables dans tel domaine... Est-ce que c'est ça que vous rencontrez chaque jour? On s'est fait confirmer par les écoles: Oui, c'est ça.

Après, on est allés un petit peu plus en détail: O.K., qu'est-ce que vous voyez exactement? On a approfondi le tableau. Parce que c'est facile... Comme je vous expliquais tantôt, des pourcentages, c'est bien beau, mais, si on regarde le nombre total d'enfants, dans certains secteurs, le nombre total, malgré le pourcentage moins élevé, est plus élevé. Alors, il faut faire attention des fois avec les statistiques.

Et puis, nous, ce qu'on a fait avec les écoles, ce qu'on a dit: Bon, O.K., à partir de ce constat-là, sur quoi on s'entend qu'on va faire dans les prochains mois? Puis c'est comme ça qu'on en est venus à décider d'un plan d'action. Parce que, dans différents secteurs, ce n'est pas toujours les mêmes domaines qui sont vulnérables. Alors, c'est pour ça qu'on demande que ce soit vraiment territorial. Puis même des fois l'arrondissement X a des... les enfants sont vulnérables dans différents domaines, puis c'est différent d'un autre arrondissement ou territoire. Alors, il faut faire attention. Puis, il ne faut pas se le cacher, là, on ne travaillera pas sur tout ça, là, demain matin. Alors, nous, ce qu'on pensait, c'est de prioriser les actions envers ce qui est le plus urgent, mais avec les écoles.

M. Chevarie: O.K. Une petite question supplémentaire?

Le Président (M. Kelley): Très rapidement parce qu'il y a également votre collègue de Lévis qui veut poser une question.

M. Chevarie: Bon. Bien, je pense que je vais laisser mon collègue...

Le Président (M. Kelley): Parfait. M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Alors, bonjour. D'abord, je voudrais vous féliciter pour votre excellente présentation. Et j'ai retenu de votre présentation que finalement, et c'est un peu l'objectif du projet de loi, c'est qu'au fond ce que vous souhaiteriez, c'est que l'argent soit disponible le plus rapidement possible sur le terrain. Au fond, ça, c'est un des grands objectifs.

Mme Reilly (Sylvie): Oui, sur le terrain. Oui, absolument.

M. Lehouillier: Et c'est un peu l'objectif que poursuit le projet de loi, et c'est la raison pour laquelle on ne se retrouve pas avec un cadre normatif qui prendrait un an à mettre de l'avant et qu'on mise d'abord, vous l'avez remarqué, sur la mobilisation du milieu. Donc, dans votre cas, cette mobilisation-là, elle passerait, par exemple, par une espèce de table qui regrouperait les écoles, les CPE, les CLSC et les parents. J'ai bien compris ça.

Et est-ce que vous souhaitez effectivement que le projet de loi conserve cette flexibilité-là qui permettrait justement aux régions d'y aller un peu en fonction de ce qu'elles ont comme concertation, donc partir avec les acquis, ce qui fait qu'à partir du moment où on veut normer au niveau national on vient bloquer cette mobilisation-là jusqu'à un certain point, et l'objectif du projet de loi, c'est d'éviter le mur-à-mur? Est-ce qu'on pourrait vous entendre un peu plus sur le modèle, sur ce modèle de concertation que vous souhaiteriez à l'image de votre région, par exemple?

Mme Tremblay (Louise): Bien, écoutez, chez nous, il y a déjà plusieurs tables qui existent, hein? On a le MIEL, le conseil des partenaires, sur lesquels je siège depuis plusieurs années. Puis la difficulté était justement... est justement, tu sais, qu'on est 15, 20 à la table, puis chacun occupe des postes de direction générale dans différents organismes, alors c'est difficile de rallier nos agendas puis être tous ensemble. Il y en a cinq à une réunion, sept, huit... C'est de là. Écoutez, on n'a pas élaboré beaucoup, on n'a pas eu le temps parce qu'on ne l'a su que la semaine dernière, qu'on venait représenter le conseil québécois. Puis on a travaillé ensemble avec Francine. On n'a pas eu le temps d'aller plus loin. On s'est dit que les instances seraient capables de faire mieux que nous. Mais le fait d'avoir une permanence régionale dédiée strictement à ça, ça, on croit que ça va empêcher justement ce que l'on vit actuellement sur les tables, tu sais, de courir d'un côté puis de l'autre puis qu'on n'arrive jamais à concrétiser rapidement une action, là.

M. Lehouillier: Et ça, c'est le modèle que vous souhaiteriez chez vous, finalement?

Mme Tremblay (Louise): Oui.

M. Lehouillier: O.K.

Mme Tremblay (Louise): Je pense que chez nous ça irait bien. Puis Sylvie ? on ne se connaissait pas du tout voilà quelques jours, là ? vit la même problématique. Nous, à La Souris verte, il y en a certains qui sont au courant, on vend une démarche alimentaire santé dans plusieurs CPE de la province, on fait de la consultation aussi. Puis ce que j'amène là, bien, les autres directions vivent les mêmes choses dans bien d'autres régions. Je parle de Rouyn-Noranda, le haut du Lac-Saint-Jean, même aux environs de Québec, on a été dans Montréal également, c'est assez généralisé. Tout le monde a des bons outils, puis il y a quelqu'un qui l'a dit hier aussi dans sa représentation, les CPE ont tous développé des outils, mais on les a tous faits indépendamment l'un de l'autre. Alors là, c'est une gaspille de temps, d'énergie et d'argent, là.

M. Lehouillier: Bien, merci pour ce beau témoignage.

Mme Tremblay (Louise): Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Gouin.

M. Girard: Merci, M. le Président. À mon tour de saluer les représentants du Conseil québécois des services de garde éducatifs à l'enfance. Mme Reilly, Mme Tremblay et Mme Dufour, je vous remercie d'être venues présenter votre point de vue sur le projet de loi, ce matin. Je comprends que les délais ont été assez courts pour préparer votre présentation, alors merci d'être venues nous rencontrer ce matin.

Avant de vous poser quelques questions, quelques commentaires au ministre. On débute aujourd'hui le jour 2 des consultations sur la Loi instituant le fonds pour le développement des jeunes enfants, et toujours pas de dépôt de protocole d'entente. Je ne comprends pas pourquoi le ministre refuse de donner de l'information qui va permettre aux parlementaires et aux organismes participants de connaître le mode de fonctionnement du fonds. Le projet de loi comporte 16 articles sur la composition de la société de gestion. Le mode de fonctionnement, il n'y a aucun article dans le projet de loi. Mais il y a des explications dans le protocole d'entente, le ministre le sait, il l'a entre les mains, le protocole. La moindre des choses, la moindre des choses, ce serait qu'il le dépose, par souci de transparence.

J'ai l'impression, M. le Président, que l'histoire se répète comme en campagne électorale, là: la Caisse de dépôt, le déficit, la péréquation, la hausse des tarifs. Visiblement, ce gouvernement-là ne gagnera pas le prix de la transparence. Il a entre les mains des informations, il y a eu une négociation sur un protocole d'entente entre la fondation et son ministère. Je pense que, pour la bonne marche de nos travaux, il devrait le déposer dès maintenant pour les organismes nombreux qui viendront présenter des mémoires aujourd'hui dans le cadre de ces travaux et des journées qui suivront, les consultations qui suivront. Je me demande ce que le ministre craint en déposant, en faisant preuve de transparence. Donc, je réitère mon appel au ministre de déposer le protocole.

n(10 h 20)n

J'aimerais maintenant poser des questions aux représentants du conseil. Vous nous dites, bon, dans votre présentation, que vous avez eu l'occasion de bénéficier, avec le projet Grandir ensemble, de subventions de la Fondation André-et-Lucie-Chagnon. Pourriez-vous m'expliquer comment vous avez procédé pour avoir le soutien de la fondation, quelles sont les démarches, quelle est la nature du projet Grandir ensemble? Et j'aimerais également savoir: Selon vous, est-il nécessaire d'avoir un intermédiaire, une société de gestion, ou ne serait-il pas plus simple, pour les projets à venir, de passer directement par la fondation Chagnon?

Mme Tremblay (Louise): Bien, écoutez, moi, j'ai très peu d'informations à ce sujet-là, à part le sondage qui a été effectué. C'était un projet qui visait à aider les bureaux coordonnateurs en milieu défavorisé. Je n'ai pas participé ? je ne sais pas si, Sylvie, toi, tu as participé, ou Annie ? à la mise en place. Comment ça a procédé? C'est plus Mme Lessard qui aurait pu vous répondre à ce genre de question là. Je suis vraiment désolée. Ce qu'on nous a fourni par contre, c'était le sondage qui a été effectué auprès des BC, qui font partie du conseil québécois, en milieu défavorisé, qui ont eu des subventions. Comment ça s'est fait? Je l'ignore. Mais on sait comment les argents ont été utilisés, quelles retombées directes ça a fait pour le bien-être des enfants, mais je ne sais pas comment je...

Mme Dufour (Annie): En fait, j'avais l'air muette, jusqu'à maintenant, là, mais c'est que j'agissais plutôt à titre de conseillère pour eux, parce que ça fait seulement quatre semaines que je travaille au Conseil québécois des services de garde, donc il me manque encore énormément de données sur le domaine. Mais je sais que justement ce sondage-là a été effectué très récemment, puisque c'est moi-même qui l'ai effectué auprès des BC membres qui avaient pu bénéficier des subventions dans le cadre du programme Grandir ensemble, et vraiment ce qui ressortait plus, c'était qu'il y avait eu de l'embauche de ressources professionnelles supplémentaires, l'achat de matériel pédagogique, ensuite ils avaient pu aussi... il y en a qui avaient payé des loyers supplémentaires, tout ça. Mais, pour ce qui est de comment ça s'est distribué, malheureusement je ne peux pas répondre plus que mes deux madames ici présentes. Il me manque certaines données encore à apprendre.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Oui. Deuxième question, c'est concernant les critères pour l'approbation des projets. Quels devraient être les critères, selon vous, pour accepter ou non un projet?

Mme Tremblay (Louise): Bien, je pense que, de un, nous, on prône la vulnérabilité, hein, que le facteur de vulnérabilité soit là, que ça regroupe tous les partenaires qui oeuvrent auprès des familles, du secteur. On n'a pas élaboré non plus une marche très précise là-dessus, on n'a pas eu le temps puis ce n'est pas notre mandat, mais le but visé, c'est d'aider les enfants vulnérables, puis de les préparer le mieux possible à l'école, et de réunir tous les partenaires, là. Je ne sais pas si, toi, tu as autre chose à ajouter là-dessus.

Mme Reilly (Sylvie): Bien, par rapport à ça, comme on disait antérieurement, c'est par rapport aux statistiques qu'on va utiliser, on aimerait qu'il y ait vigilance à ce propos-là, qu'on axe aussi sur le nombre d'enfants et non pas seulement le niveau de défavorisation. Comme j'expliquais, certains secteurs aussi, par rapport au rapport, ont... les enfants ont des vulnérabilités dans plusieurs domaines. Alors, il va falloir faire attention à ça aussi parce que, je veux dire, si tu as... dans un secteur où est-ce que les enfants sont vulnérables dans deux ou trois champs, ces enfants-là risquent d'avoir des problèmes à l'école, c'est certain.

Puis il faut aussi axer nos interventions rapidement. Ça, c'est clair avec nous que, si on commence les interventions rapidement par rapport à un enfant qui a un problème de langage aussi simple que ça... qui n'est pas sur une liste d'attente pendant deux ans, qui arrive à l'école puis ce n'est pas encore commencé, les démarches, ça, c'est un gros, gros, gros problème. Dans mon secteur, en tout cas, c'est un gros problème. On n'arrive pas à faire les références aux professionnels assez rapidement. Alors, un petit problème devient un gros problème, et souvent...

Nous, on a fait deux journées de... en fait, deux forums avec les partenaires, deux journées de forum avec des partenaires où est-ce qu'on avait différents intervenants, orthophonistes, chercheurs, tout ça, et c'était clair que souvent, la majorité du temps, si on prend un problème tout de suite à l'origine... Parfois, ce n'est même pas un problème très, très grand. S'il n'est pas traité immédiatement, ça devient un problème par la suite. Souvent, si on s'occupe tout de suite du problème, il n'aura même pas besoin d'aller voir un orthophoniste après, parce qu'on va avoir les outils puis on va avoir les éléments pour aider cet enfant-là.

Puis, d'après les informations qu'on a eues, il faut que les interventions se fassent globalement. On ne devrait pas cibler des enfants systématiquement. Alors, si on dénote, par des observations concrètes, que, dans notre groupe, on a deux ou trois enfants qui ont un petit peu de difficultés avec l'orthophonie, à s'exprimer, on fait des exercices de groupe. C'était très, très, très important, là, de ne pas cibler systématiquement les enfants, à moins de gros problèmes de comportement, là, mais, autrement que ça, il faut que nos actions portent sur un groupe entier en premier lieu. C'est ce que, nous, avec les intervenants et les professionnels, quand on a eu nos journées de rencontre, c'est ce qui est ressorti.

Mme Tremblay (Louise): J'aimerais ajouter quelque chose. Vous parliez de critères. Bien, il serait bien que, dans les critères des projets, il y ait une portion qui soit allouée aussi... ou du moins qu'on fasse attention à ce que les projets mis en valeur, pas qu'ils soient publicisés à grande échelle, mais que la population en soit informée. Il y a souvent des projets... Même, déjà, la population ne sait pas encore, après... ? c'est en 1999, ça fait 10 ans, en tout cas, le virage ? ne sait pas faire la différence entre un CPE, une garderie privée, un BC, un milieu familial, alors encore bien moins... Bien souvent, les parents ne sont même pas au courant de qu'est-ce qui pourrait... des services dont ils pourraient profiter, au complet, là, dans tous ceux-là qu'on peut leur offrir, là.

Ça fait que, oui, il y aura une petite place qu'il devra y avoir dans les critères de sélection des projets... mais en tout cas des projets sélectionnés, comment ils vont faire la promotion, puis qui vont aller recruter vraiment les enfants qui ont des besoins, là. Je pense que ce serait peut-être important de le mentionner, là.

M. Girard: Mon autre question porte sur les administrateurs qui vont siéger à la société, au sein de la société de gestion. Des groupes qui ont fait des présentations hier ont réclamé qu'il y ait des représentants de la société civile au sein de la société de gestion. Qu'en pensez-vous?

Mme Tremblay (Louise): Bien, moi, je suis assez d'accord avec eux. J'ai entendu... Là, je parle à titre personnel, je ne sais pas si c'est au nom du conseil québécois. Oui, je trouve ça bien, les cinq membres ? je pense c'est ce qui a été dit ? qu'il y ait cinq membres du gouvernement et cinq membres de la fondation, mais qu'il y ait des intervenants terrain, je pense que ce serait essentiel.

M. Girard: O.K. Dernière question...

Mme Tremblay (Louise): Mais qui ne soient pas exclusivement représentatifs d'un seul palier, là. Je veux dire, il ne faut pas que ça devienne des allégeances politiques, mais que ça demeure bien à intervenance terrain pour l'ensemble des enfants et des familles québécoises.

Le Président (M. Kelley): Quatre minutes. Et votre collègue veut poser une question.

M. Girard: Donc, une dernière question, ensuite je passerai la parole à mon collègue de Groulx, qui a une question pour vous. Vous disiez, dans votre présentation, qu'il y a des protocoles entre les CLSC, les centres de la petite enfance, que ça fonctionne bien, mais vous disiez qu'il y avait deux ans d'attente. Pourriez-vous préciser un peu plus les contraintes auxquelles vous faites face?

Mme Tremblay (Louise): Bien, ça, je pense que c'est aux hôpitaux, CLSC, vous devriez leur demander, parce que c'est de ce côté-là que ça achoppe, là.

M. Girard: O.K.

Mme Tremblay (Louise): Les travailleurs terrain, eux autres, ça va, sauf qu'ils ne sont pas en nombre assez suffisant, ils sont souvent remplacés. Surtout, le personnel cadre est souvent remplacé, alors des fois ça retarde le processus. Il n'y a pas... Si on parle juste de l'orthophoniste, nous, à Jonquière, on a été deux ou trois ans sans avoir aucune ressource en orthophonie. Là, on en a deux, mais... Si, les services de garde, les CPE, avec la fondation Chagnon, on arrivait à développer un réseau de professionnels autour, bien, ça désengorgerait même les hôpitaux et les CLSC, puis je pense que ça ferait du bien à tout le monde, là.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Groulx.

M. Gauvreau: Je vais commencer à rebours. Ce que vous venez de dire, j'ai eu l'occasion de le constater durant les 20 dernières années que j'ai travaillé à la protection de la jeunesse. Puis il y a encore des endroits au Québec où les enfants, pour recevoir des soins de santé, doivent attendre encore jusqu'à quatre années. Quatre années.

Mme Tremblay (Louise): On ne voulait pas exagérer.

n(10 h 30)n

M. Gauvreau: Non. Bien, j'ai, là-dessus... Malheureusement, j'en ai été bien témoin. J'apprécie beaucoup, mais vraiment beaucoup la différence que vous faites entre la pauvreté et la vulnérabilité. J'ai eu, durant les derniers 20 ans, l'occasion de ne travailler qu'avec des enfants vulnérables, et grandement vulnérables. Donc, on va parler de jeunes enfants victimes d'abus sexuels à l'âge de six, sept, huit mois, là, des trucs comme ça. Et ce n'est pas vrai que tous les enfants pauvres du Québec sont vulnérables, puisque la plus grande richesse des enfants, c'est la richesse que les parents leur transmettent. Quand les parents ne le font pas, là ils deviennent à risque de vulnérabilité, et là on rentre dans tout ce que le système leur donne ou ne leur donne pas. Et j'avoue que je ferais des représentations au ministre sur cet aspect-là parce que l'enfant pauvre n'a peut-être pas toujours besoin de services, mais l'enfant vulnérable a toujours besoin, toujours, toujours besoin de services.

Je dois dire aussi que j'apprécie beaucoup l'approche qui ne favorise pas la ségrégation. Parce qu'on sait très bien que, dans les écoles, l'enfant qui va voir l'orthophoniste au lieu d'être en classe, bien, il va devenir le moron, l'ortho, ou un truc comme ça, et ça crée un problème de plus, alors que, lui, il en a déjà par-dessus les épaules, un grand nombre.

Mais c'est, au niveau de l'organisation de tout ça, quelle place l'organisme que vous représentez pourrait occuper dans l'ensemble du Québec, notamment dans les régions où les tables sont moins populeuses ? non, parce que des tables, il y en a partout, M. le ministre a raison ? où elles sont moins populeuses et pour faire en sorte qu'au lieu de se poser les grandes questions que l'on se pose toujours à toutes ces tables-là ? et je dois dire que j'en ai fait beaucoup ? qu'on puisse se dire: On commence où, on commence quand puis avec quoi?

Mme Tremblay (Louise): Veux-tu répondre à cette question-là?

Mme Reilly (Sylvie): Oui. Je vais citer notre table de concertation en exemple. Parce que, nous, on fonctionne comme ça: on a des rencontres où est-ce que la table, elle est complète, et, quand il y a des projets spécifiques ? comme on a parti un projet 1, 2, 3, GO! ? à ce moment-là, au début, on est tous ensemble, et après c'est seulement les acteurs concernés qui restent sur ce projet-là.

On a 1, 2, 3 GO! qui a commencé et qui a été mis sur pied dans Pierrefonds-Est, qui est dans un secteur de défavorisation importante. Alors, les acteurs de cette région-là se sont mis ensemble et ont continué le projet. Québec en Forme, ça a été la même chose. On a fait une rencontre générale avec tout le monde, et après des sous-comités se sont mis ensemble.

Parce qu'il faut que les gens aient un intérêt. Nous, la première fois qu'on fait la rencontre, c'est pour voir c'est quoi, l'intérêt des partenaires. S'il manque des partenaires ou si on n'a pas la volonté... Parce que c'est beaucoup de travail, là. Ça prend une implication assez importante. S'il y a des partenaires qui sont manquants ou qui ne sont pas vraiment intéressés dans la démarche, ça ne donne rien. Alors, on fait cette activité-là en premier, et par la suite on vote chacun dans nos secteurs, et on prend le projet, et on continue de travailler.

Nous, on a commencé la démarche par rapport au rapport de la même façon. On a fait une grande présentation et après on a demandé aux gens des secteurs: Est-ce que vous êtes intéressés à continuer la démarche? Est-ce que vous avez un intérêt à travailler ensemble? Parce que, ça aussi, c'est important, là, c'est primordial. Et, de ça, il y en a deux, deux régions qui ont décidé d'aller de l'avant... pas deux régions, là, mais deux arrondissements.

Alors ça, c'est la démarche qui est préconisée par notre table à nous. C'est très, très, très important que les gens veulent aller de l'avant par la suite. On ne force pas les gens, là, à adhérer à des choses comme ça. Ça prend beaucoup d'implication et d'investissement personnel.

M. Gauvreau: Qu'est-ce que...

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Parce que malheureusement le temps... Il reste une question de M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. Merci pour votre témoignage. Vous êtes revenues, à deux endroits dans votre témoignage et à une réponse du collègue de Gouin, sur le fait que vous aimeriez avoir une structure locale permanente dans 14 régions, vous avez dit, et qu'il n'y aurait pas d'ingérence politique. Je comprends que ça doit être... L'ingérence politique, vous voyez le ministère de la Famille ou...

Mme Tremblay (Louise): L'ingérence, non. Ce qu'on voulait: que ce ne soit pas donné systématiquement à des structures déjà existantes puis qui portent déjà plusieurs chapeaux. On dit: Bien, la fondation Chagnon, elle est pour ça, elle est pour cette mission-là, alors que tout le monde... qu'elle soit accessible à tout le monde, là.

M. Picard: O.K. Mais, si je poursuis ma réflexion, est-ce que vous seriez prêts à aller jusqu'à proposer peut-être la création de fonds régionaux à partir de la grande fondation pour donner vraiment l'autonomie aux différentes régions qui ont des réalités particulières?

Mme Tremblay (Louise): Peut-être, je ne peux pas vous dire... En tout cas, moi, je ne suis pas en mesure, ce matin, de... Je ne détiens pas la vérité infuse à savoir si ce serait l'idéal. Je pense que comment le faire idéalement, on n'a peut-être pas eu le temps, là, d'y penser trop. Mais je peux vous dire par contre qu'il ne faut pas oublier que les CPE, en tout cas, leur clientèle vulnérable, ils la connaissent déjà, tu sais, chacun des CPE, c'est très, très ciblé, et on le sait.

On a déjà investi des fonds, il y a déjà des outils, il y en a dans tous les CPE, dans toutes les associations, dans toutes les tables qui sont développés. On se dit: Bien, maintenant, au lieu de réinventer la roue puis, tu sais, justement de perdre encore du temps en études, en bavardage, bien, on passe à l'action puis... Bien, nous, on voit que ce passage à l'action là ne se ferait bien qu'en ayant une permanence par région qui au moins va aller chercher un petit peu le meilleur de tout puis qui va passer à l'action. Puis faites-vous-en pas qu'il y en a, des gens qui sont prêts à passer à l'action, sur le terrain, puis qui vont être là, là.

Mme Reilly (Sylvie): Si je peux ajouter?

Le Président (M. Kelley): Mme Reilly.

Mme Reilly (Sylvie): J'aimerais que ces fonds-là soient distribués de façon équitable. Parce que ce que j'ai entendu par rapport à ce qui existe avec les BC, c'est que l'argent était distribué par rapport au taux de défavorisation, et certains BC, dans certains secteurs, n'ont eu presque rien, puis d'autres ont eu beaucoup de sous. Alors, ça, j'aimerais qu'on fasse attention... personnellement, là, ce n'est peut-être pas au nom du conseil, mais j'aimerais qu'on fasse attention à ça, que les sommes soient distribuées de façon équitable pour justement que tous les enfants aient accès à ça.

M. Picard: Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Il me reste à dire merci beaucoup pour votre présentation, et surtout pour Mme Reilly, parce que je suis également député de l'Ouest-de-l'île de Montréal et j'ai beaucoup apprécié les nuances. On peut avoir les moyens au niveau de la richesse, et tout le reste, mais parfois ça cache la réalité des familles pauvres à l'intérieur d'une région qui est perçue comme toujours aisée. Alors, je pense, ça, c'est une autre nuance que vous avez amenée à notre réflexion, qui est très importante.

Sur ce, je vais suspendre nos travaux quelques instants. Et j'invite les représentants de la Fédération québécoise des organismes communautaires Famille à prendre place à la table des témoins.

(Suspension de la séance à 10 h 37)

 

(Reprise à 10 h 40)

Le Président (M. Kelley): Alors, la Commission des affaires sociales reprend ses travaux. Notre prochain témoin, c'est la Fédération québécoise des organismes communautaires Famille, représentée par Mme Leahey, qui est la directrice générale et...

Fédération québécoise des organismes
communautaires Famille (FQOCF)

Mme Blanchard (Francine): Francine Blanchard.

Le Président (M. Kelley): Mme Blanchard, l'administratrice. Alors, la parole est à vous.

Mme Blanchard (Francine): Nous nous excusons parce que Mme Francine Faubert, qui est la présidente, est malade ce matin. Donc, elle ne peut pas être parmi nous. Mais je vous souhaite, à vous, M. le Président, à vous, M. Tomassi, et M. Girard, et messieurs et mesdames présents dans la salle, un valeureux et beau bonjour. Et nous sommes très heureuses de déposer notre mémoire aujourd'hui à cette commission.

Alors, en guise d'introduction, la Fédération québécoise des organismes communautaires Famille est plus que préoccupée par le dépôt du projet de loi n° 7. L'alliance entre le gouvernement du Québec et une fondation pour créer une société de gestion pose plusieurs questions sur la gouvernance de l'État. L'imprécision du projet de loi ne permet pas d'y répondre. D'autre part, bien que le projet de loi ne nomme pas la Fondation Lucie-et-André-Chagnon, il est de notoriété publique, comme en fait foi le communiqué de presse ministériel, qu'il s'agit bien de cette fondation. Or, les membres de la fédération travaillent depuis plusieurs mois, si ce n'est des années, avec cette fondation, soit avec Québec en forme, soit avec Québec Enfants, et sont en désaccord avec plusieurs des façons de faire de cette fondation.

Le projet de loi n° 7, tout comme le projet n° 6 et le fonds Québec en forme, remettent en question le rôle de l'État sans qu'il n'y ait eu de véritable débat public sur le rôle et la gestion de celui-ci. Si les partenariats public-privé dans le développement des infrastructures routières et dans les grands projets de construction ont fait couler beaucoup d'encre, il en est autrement des PPP sociaux que sont les sociétés de gestion touchant au développement social. Pour ceux-ci, peu de voix interpellent l'opinion publique pour recommander la prudence et la critique. Pourtant, il semble y avoir une différence fondamentale: dans le cas des grands chantiers, c'est le gouvernement qui détermine où passera la route, où se construira l'hôpital; dans les PPP sociaux, il semble que les grandes orientations seront déterminées par les investisseurs privés.

Le projet de loi n° 7 a pour but de regrouper dans une société de gestion des fonds provenant du gouvernement et de la fondation Chagnon tout en laissant une porte ouverte à l'injection de sommes provenant de fondations autres. Comme le note le communiqué de presse ministériel du 18 mars dernier, les institutions publiques d'enseignement et de santé et de services sociaux, les services de garde et les municipalités pourront aussi soumettre des projets au fonds de gestion. Assistera-t-on à une privatisation des services publics, à une détermination des priorités de nos institutions publiques par les investisseurs privés, alors que le fonds est composé aussi d'argent public?

Le projet de loi reste muet sur la composition de la société de gestion. Le gouvernement aura-t-il une voix prépondérante? À la lecture des déclarations de la ministre Blais concernant la société de gestion mise en place par le projet de loi n° 6, nous sommes encore plus inquiets. Ainsi, même si l'apport financier de la famille Chagnon représente 25 % des fonds de la société de gestion du projet de loi n° 6, la gestion de la société sera paritaire: cinq membres proposés par le gouvernement et cinq membres provenant de la fiducie familiale Chagnon. C'est déjà discutable. Dans le projet de loi n° 7, la fondation Chagnon met l'équivalent de 62 % des fonds gérés par la société de gestion. En tant que bailleur de fonds principal, la fondation voudra-t-elle être majoritaire?

N'est-ce pas du ressort du gouvernement, depuis la Révolution tranquille, de définir les objets sociétaux en développement social? N'est-ce pas de la responsabilité gouvernementale de définir pour la collectivité québécoise les normes sociales communes, tout en considérant les besoins de la population et la capacité financière de l'État de répondre à ces besoins? Or, dans la création d'une société de gestion où on joint l'argent public à l'argent privé, on peut se questionner sur le rôle du secteur privé dans l'établissement des orientations de l'État pour l'attribution des budgets. Pourtant, ces orientations nous semblent être du ressort de l'État, de son gouvernement et des députés qui sont redevables à la population. Puisque les institutions publiques pourront être financées par ce fonds, n'est-ce pas une façon détournée de privatiser les services publics?

Dans un contexte de restriction budgétaire, l'État, tout comme l'entreprise privée, cherche à réduire ses coûts. Ce n'est pas d'hier que l'État a recours à des organisations non étatiques pour fournir des services à sa place. Plusieurs diront que le recours aux organismes communautaires est une manière pour l'État de sous-traiter et de réduire les coûts de services publics. Mais le mouvement communautaire a une histoire, les organismes communautaires ont leurs propres missions et valeurs, ce qui peut provoquer des tensions entre la commande de l'État et la manière dont ceux-ci vont réaliser le mandat. En fait, les organismes communautaires ne demandent pas le démantèlement de l'État; ils veulent être différents et complémentaires des services publics afin d'avoir la latitude pour répondre à des besoins émergents ou particuliers à des milieux spécifiques. En ceci, ils se distinguent des sous-traitants.

Les fondations ont des normes d'attribution de dons qui leurs sont propres et que les promoteurs doivent respecter. On ne peut que féliciter ces fondations qui injectent dans les milieux des sommes pour des causes qu'elles considèrent justes et importantes. Pour leurs actions caritatives, elles permettent l'émergence d'initiatives ou d'actions que l'État, considérant ses limites financières, ne peut ou ne veut pas soutenir.

Il semble en être différemment dans le cas de la fondation Chagnon qui, dans sa façon de faire, a une portée politique bien marquée. À une question du journaliste Yvon Gilson sur qui décidera quels projets seront ou non financés par le fonds de développement des jeunes enfants, M. Chagnon répond: «C'est nous qui donnons l'orientation des champs d'intervention et qui évaluons les projets. Nous avons des principes directeurs énoncés sur notre site, parmi lesquels vous remarquerez l'importance accordée à notre rôle de [catalysateur], de facilitateur.» Du fait que le fonds gère aussi de l'argent public, n'est-on pas devant un État dans un État?

L'insistance de la fondation Chagnon à multiplier les partenariats financiers avec le gouvernement devrait interpeller les parlementaires et les décideurs publics. Quel est l'intérêt réel de la fondation, si ce n'est d'intervenir directement dans la définition des priorités et des façons de faire de l'État? Elle a déjà créé Québec Enfants, qui dispose de 25 millions pour soutenir des projets qui respectent les orientations de la fondation. N'est-ce pas une manière de dire que l'État ne fait pas correctement les choses et que la fondation veut les changer? Ceci se fait donc sans débat public, sans que les citoyennes et citoyens se prononcent sur la vision, les valeurs et les principes qui sous-tendent les priorités gouvernementales.

Le projet de loi n° 7 laisse la porte ouverte à l'arrivée des fonds provenant d'autres fondations. Celles-ci voudront-elles à leur tour édicter leurs propres règles, leurs propres orientations? Comme le souligne Frédéric Lesemann, ces investissements sociaux n'ont pas une perspective d'approche charitable, ils se donnent comme mission de modifier l'intervention gouvernementale qu'ils jugent inefficace. En fait, dans cette nouvelle gouvernance, l'acteur privé se substitue à l'acteur public.

Le projet de loi n° 7 détermine que la société de gestion fermera ses portes après 10 ans. L'acteur privé se retirera, ayant rempli sa part du contrat. Mais comment le gouvernement assurera-t-il la pérennité des projets financés? Pense-t-on vraiment qu'il n'y aura plus d'enfants pauvres au Québec dans 10 ans?

Le projet de loi n° 7 prévoit, à l'article 9, les frais de gestion du fonds. Peut-on s'assurer, dans le projet de loi, d'un plafond des dépenses de gestion du fonds? Quelle sera la proportion subventions-gestion dans le 40 millions annuel?

La plus grande fondation canadienne, la fondation Chagnon, se dédie à réduire la pauvreté en travaillant à la réussite éducative des enfants. Personne ne peut remettre en question l'importance de l'éducation pour la société québécoise du XXIe siècle. C'est le développement économique, social, culturel et durable de notre société qui en dépend. Le célèbre slogan libéral des années soixante Qui s'instruit s'enrichit est toujours d'actualité. Il faut poursuivre les efforts pour augmenter le niveau de scolarité et de connaissance de la population québécoise.

n(10 h 50)n

Cependant, l'éducation n'est pas la seule façon de réduire la pauvreté et les inégalités sociales que notre système économique engendre. Si les enfants sont pauvres, c'est que leurs parents sont pauvres. D'eux, on ne s'en préoccupe pas beaucoup. En fait, oui, on s'en occupe, mais à partir de théories biopsychologiques et écologiques qui prétendent en quelque sorte que la pauvreté est une maladie transmissible. Selon Michel Parazelli, «les théories biopsychologiques et écologiques associées aux programmes de prévention précoce proposent ? tout en s'imposant ? une interprétation scientifique de ces inégalités à travers une lecture biologique de la pauvreté. Ainsi, la marginalisation sociale et la pauvreté deviennent des déterminants de la santé et parfois comme des états de santé, des souffrances psychiques et non des conditions sociales d'existence résultant d'un système politique et économique générant des inégalités sociales.»

C'est à partir de ces approches théoriques que l'État a mis sur pied des programmes qui ciblent des clientèles vulnérables ? les programmes SIPPE et PSJP, du ministère de la Santé et des Services sociaux, PACE, de l'Agence de santé publique du Canada ? et que la fondation Chagnon intervient. Or, sans nier l'importance de soutenir de façon particulière des individus, adultes ou enfants, aux prises avec des problèmes particuliers, le ciblage à outrance qu'amènent les programmes tels les saines habitudes de vie et le développement des enfants 0-5 ans n'aura-t-il pas pour effet d'augmenter la dépendance des populations ciblées en déresponsabilisant les parents et en prenant trop en charge des enfants qui ont eu la malchance de naître de parents incompétents parce que pauvres? Qu'advient-il de l'universalité des programmes sociaux gouvernementaux si le seul nouvel argent public est consacré à des programmes ciblés?

Les groupes communautaires Famille, ayant une approche plus globale, travaillent à l'«empowerment» de leurs membres, à une prise en charge individuelle et collective pour affronter les problèmes rencontrés par des personnes dans un milieu donné, pour enrichir l'expérience parentale. Quelquesfois, s'attaquer à la pauvreté, c'est aussi réclamer une augmentation du salaire minimum, un gel des frais de services publics, une réduction des achats obligatoires en début d'année scolaire. Il y a une différence d'approche et de respect du rôle et des capacités des parents entre la mise sur pied d'une cuisine collective pour réduire les frais d'alimentation d'une famille tout en respectant le Guide alimentaire canadien et l'inspection des boîtes à lunch des enfants à l'école pour attribuer une note au parent qui l'a préparé et jeter le biscuit inacceptable. Alors...

Mme Leahey (Marie): On va passer par-dessus...

Le Président (M. Kelley): Peut-être en conclusion. C'est juste...

Mme Blanchard (Francine): On va passer à la conclusion? Oui, c'est ça.

Le Président (M. Kelley): On est déjà à 13 minutes. Alors, si on peut conclure, s'il vous plaît.

Mme Blanchard (Francine): D'accord. Alors, si je vais à la conclusion, nous avons dit d'entrée de jeu que le projet de loi n° 7 est imprécis, et, dans sa forme actuelle, il ne devrait pas être adopté. Au-delà des améliorations que l'on pourrait y apporter, l'enjeu démocratique demeure et mériterait un débat public plus large: La société québécoise veut-elle changer le mode de gouvernance? La société québécoise est-elle prête à mettre fin à l'universalité des programmes sociaux? La société québécoise est-elle prête à vivre dans une démocratie où les acteurs privés, fondations ou autres, déterminent les priorités de l'État plutôt qu'une démocratie parlementaire? Sans ce débat, le projet de loi n° 7 ne devrait pas être adopté.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Blanchard. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission, diviser la poire en deux, 20 minutes à ma droite, 20 minutes à ma gauche, en commençant avec M. le ministre de la Famille.

M. Tomassi: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Mme Blanchard, Mme Leahey, bienvenue, merci pour votre présentation. On a eu le plaisir de se rencontrer à quelques reprises, avec Marie, un peu plus souvent parce qu'on était membres tous les deux de la CRE de Montréal, elle comme intervenante et moi comme représentant du caucus ministériel au sein de la CRE, on a eu le plaisir, au cours des dernières années, de travailler ensemble. Merci de votre présentation.

Je comprends quelques interrogations que vous avez vis-à-vis le fonds. C'est des messages qu'on entend. On a les deux côtés. Tantôt, vous faites mention, dans votre mémoire, à la page 13, qu'il y a même d'autres intervenants du secteur public, là, qui pourraient être dans une interrogation à savoir la mise sur pied du fonds. Vous parlez des CSSS, les écoles et les CPE.

En ce qui a trait aux écoles, la Fédération des commissions scolaires vont venir nous rencontrer au cours de ces consultations. On a eu le plaisir d'avoir l'AQCPE, l'Association québécoise des centres de la petite enfance. Tantôt, le Conseil québécois des services éducatifs à l'enfance sont venus nous voir, qui, eux, sont en faveur de la mise sur pied du fonds. Ils ont une expérience tout à fait enrichissante avec la fondation sur plusieurs de leurs dossiers, surtout avec des partenariats qu'ils ont faits avec la fondation.

À votre interrogation à savoir si le gouvernement se déresponsabilise, je ne le crois pas. C'est votre interprétation, puis c'est tout à fait correct si vous voyez comme ça, sauf que le gouvernement prend ses responsabilités. Le fait de mettre en place un fonds qui va venir soutenir le développement des enfants de zéro à cinq ans, c'est une visée qui est très importante pour nous. Puis vous ne le remettez pas en question, en tant que tel, dans votre mémoire. Vous avez un portrait un peu plus large de la situation à savoir qu'il faut aider les familles dans le sens plus large, puis c'est tout à fait correct. C'est une approche qui est ciblée, en quelque façon, en ayant un éventail large.

Je pourrais vous donner l'exemple sur l'aide que le gouvernement apporte et continuera d'apporter sur le décrochage scolaire. Ce n'est pas parce qu'on cible le décrochage scolaire qu'il faut laisser tomber tous les autres enfants. Alors, nécessairement, c'est dans le même principe, là, la volonté. Puis la volonté de s'associer à la fondation, c'est parce que la mission même du fonds cadre avec la mission du ministère de la Famille. Alors, les normes qui sont édictées, ce n'est pas des normes qui sont contraires à la mission du ministère de la Famille, là. Ça cadre bien dans ce que le ministère de la Famille fait et essaie de mettre en place suite à une étude de l'institut de la santé publique, à Montréal, qui vient cibler vraiment le fait de dire qu'il y a une problématique vis-à-vis certains enfants de zéro à cinq ans sur le développement. Alors, c'est un élément qu'il faut prendre en compte. Il faut essayer d'apporter le soutien gouvernemental à ces jeunes enfants pour faire en sorte que ces enfants-là aient la même chance que tous les autres pour leur futur, puis ça, c'est tout à fait noble. Nous, de notre côté, on salue l'initiative puis la volonté de la fondation de pouvoir s'associer au gouvernement pour participer à cette direction.

Je voulais peut-être vous entendre sur deux éléments. Parce qu'on a eu, au cours des derniers jours, des gens qui sont venus nous dire leur expérience positive qu'ils ont avec la fondation Chagnon. À la lecture de votre mémoire, vous apportez certaines interrogations, certains points que vos membres ont eus. Je voulais savoir, d'une part, si c'était au début du fonds, parce que, nécessairement, même les gens qui sont venus nous voir, certains ont dit: Oui, au début, c'était tout nouveau, on rentrait, on ne savait pas comment fonctionner, la fondation non plus. Mais là, actuellement, ça va bien, les gens sont capables de se mettre ensemble, de travailler, puis, oui, les projets avancent, les actions concrètes sont sur le terrain et on est sur une voie d'aller.

Alors, je voulais peut-être vous entendre à savoir: Vos membres, les difficultés qu'ils ont rencontrées, est-ce que c'est au début du processus? Là, on est un an, deux ans après la mise en place de Québec en forme ou Québec Enfants. Vivez-vous les mêmes problématiques? Si oui, quelles sont-elles? Parce qu'on aimerait ça les savoir, savoir si on ne peut pas bonifier la suite des choses avec le projet de loi. Alors, on va commencer avec ça, puis par la suite peut-être d'autres petits questionnements.

Le Président (M. Kelley): Mme Leahey.

n(11 heures)n

Mme Leahey (Marie): Oui. Bien, effectivement, on a passé par-dessus cette partie-là du mémoire parce qu'on n'avait pas le temps de le présenter. Mais nos membres continuent, nous, de nous appeler pour parler de toutes sortes d'irritants de travailler avec la fondation Chagnon. C'est sûr que le discours a changé, mais on n'a pas vu la pratique, nous, changer. Et ça fait quatre ans qu'on nous dit que le discours doit être changé et que la fondation a eu des débuts difficiles, mais que maintenant ils s'améliorent, mais là ça fait quatre ans qu'ils nous disent ça, puis, nous, on n'a pas vraiment vu le changement.

Alors, dans les derniers irritants, je peux vous en conter quelques-uns, là, il y en a d'autres dans le mémoire. Mais un groupe se fait dire par le CAL: Bon, bien, maintenant qu'on va financer ton activité, tu comprends que l'activité que tu as créée, que tu as initiée, tu as développé les outils, nous appartient. C'est un peu gros. Est-ce qu'on demanderait à une commission scolaire: Tu participes, on te donne de l'argent, puis ton programme maintenant n'appartient plus à la commission scolaire? Puis les activités, tu vas les offrir pas à ton groupe de parents qui attend l'argent pour le créer, tu vas l'offrir en fin de semaine. Puis, si tes employés ne veulent pas travailler la fin de semaine, bien, mets-les dehors. Ce n'est pas des relations que je pourrais appeler harmonieuses, loin de là.

D'autres éléments sont beaucoup de cet ordre-là. Moi, je trouve ça... Dans le CAL, actuellement, la fondation Chagnon paie un salaire mais ne paie pas le reste des dépenses, hein? Alors, souvent, c'est le groupe fiduciaire, le groupe communautaire qui est fiduciaire qui doit offrir local, imprimante, encadrement, ordinateur, papier, crayons. Ça, quand on demande ça à des groupes qui sont déjà sous-financés et qui n'arrivent pas à faire leur mission, on leur demande d'encadrer cette personne-là... Et donc là il y a des CAL qui... il y a des groupes qui font partie de CAL en Estrie qui m'ont dit: Bien, maintenant, quand on arrive à la réunion, que ce soit le CSSS ou l'école, bien, on arrive avec notre rame de papier, des crayons pour soutenir l'activité de la fondation privée. Il y a quelque chose d'un peu... On paie deux fois, là. Alors, c'est ce genre d'irritants là tout le temps.

Souvent, aussi, comme les intervenantes l'ont dit précédemment de nous, c'est très long, c'est un processus extrêmement long, et donc, avant que les activités arrivent, ça prend une éternité. Et les sommes sont minimes, hein? En bout de ligne, là, il ne faut pas croire que vous recevez... Les groupes qui pensaient, là, qu'ils iraient chercher une partie d'argent pour financer leurs activités de base ont déchanté beaucoup, là. Les sommes arrivent par petits morceaux au bout. Donc, les services aux parents, parce que, nous, on travaille plus avec les parents, ils sont loin d'être là, là. Ça prend du temps. Alors, 10 ans, ce n'est même pas beaucoup.

Le Président (M. Kelley): M. le ministre.

M. Tomassi: Oui. Vous avez dit quelque chose d'intéressant. Puis plus qu'on se met à parler, des fois, plus qu'il y a des choses intéressantes qui ressortent. Dans vos exemples, vous donnez: quand vous mettez en place un projet, par la suite le projet ne vous appartient plus, appartient à la fondation. Je veux essayer de...

Mme Leahey (Marie): Au CAL, au CAL. Ils n'ont pas dit «fondation», ils ont dit le CAL, là. Je ne veux pas...

M. Tomassi: Au CAL, qui est le...

Mme Leahey (Marie): Qui est le comité d'action local.

M. Tomassi: Bon. Parfait. O.K.

Mme Leahey (Marie): Qui est le rassemblement des partenaires locaux, là.

M. Tomassi: Parfait. Fantastique. Alors, vous ne pensez pas que c'est une bonne initiative, c'est une bonne idée? Tantôt, nous avons eu le... Non, non, mais le député de Gouin sourit, là, mais tantôt nous avons eu le conseil...

Le Président (M. Kelley): De Mercier...

M. Tomassi: De Mercier. J'ai dit le député de quoi?

Des voix: ...

Une voix: Là, il sourit, par exemple.

M. Tomassi: L'important, je fais sourire, c'est ça qui est important.

M. Khadir: On va regretter notre collègue.

M. Tomassi: Ne partez pas de chicane, le député de Mercier.

Le Président (M. Kelley): Ce n'est pas à notre niveau de déclencher une partielle, alors...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Tomassi: Mais l'important, c'est tantôt ? comment il s'appelle? ? le conseil québécois qui est venu nous dire que les centres de la petite enfance à travers le Québec avaient développé des outils, chaque CPE avait développé des outils, mais chacun l'avait développé à l'intérieur même, et par la suite, des fois, en bout de ligne, les mêmes outils étaient repris dans d'autres endroits. Ce serait peut-être intéressant que, quand... un beau projet qui est mis en place par un de vos membres puisse être propagé pour que ça puisse faire boule de neige puis qu'on puisse avoir des résultats. Parce que, si le projet, si le projet que vous présentez... Puis je suis quasiment sûr que tous les projets que vous présentez suscitent une adhésion incroyable et apportent les résultats escomptés. On peut faire en sorte qu'on peut essayer d'attirer plus de gens.

En ce qui a trait sur la question de payer deux fois, sur la question de... le loyer, l'imprimante, je pense que vous aviez eu des discussions avec le ministère de la Famille à plusieurs reprises pour la possibilité de mettre sur pied un comité de liaison où est-ce que les organismes communautaires, la fondation et le ministère pourraient être assis à la même table pour essayer d'enlever ces irritants que vous dites, là, qui sont réels, puis qu'à un moment donné il faut essayer de trouver une solution exacte. Alors, je voulais peut-être vous entendre un peu là-dessus, là.

Sur la question du processus qui est long, je pense que le message est compris. Je pense que M. Chouinard, qui est assis avec nous à l'arrière de la salle, prend des notes, prend des notes et en prend bonne note. Mais vous voyez ça comment, là? Parce que nécessairement, je vous comprends, là, il y a la question des irritants des coûts qui est une problématique. Il y a une ouverture, à savoir: il y a un comité qui pourrait être mis sur place, sur pied pour voir la problématique. Mais, sur le questionnement de dire que le projet ne nous appartient plus, il appartient au CAL puis il peut être propagé, là, je voudrais peut-être vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Kelley): Mme Leahey ou Mme Blanchard.

Mme Leahey (Marie): Bien, je peux y aller, puis ma collègue complétera.

C'est une différence entre partager ses outils et s'en voir dépossédé. Et souvent, quand on travaille dans des organismes communautaires en lien avec les familles, c'est toute une approche qu'on travaille, qui est une approche auprès des familles. Je ne suis pas sûre que le programme... Puis je suis sûre que le programme, dans ce cas-ci, était très bon et très bien développé. Je ne suis pas sûre que tu prends le programme tel qu'il est écrit puis que tu le mets dans un autre contexte où ta relation avec les parents est différente que ça va être aussi bon. Et ça, ce n'est comme jamais pris en compte. C'est comme si les outils étaient universels. Il y en a qui peuvent être universels, mais il y a toujours une adaptation puis il y a toujours le lien que tu crées avec les parents avant d'intervenir, et ça, ce n'est comme pas pris en compte. Et c'est un peu gênant, quand les groupes qui ont de la misère, qui sont souvent fermés l'été, qui développent des projets comme ils peuvent, et tout ça, de se faire dire: Bien là, ton projet, on ne te le paie pas, ça nous appartient. Il y a quelque chose d'un peu cynique, là, dans cette façon-là.

M. Tomassi: Vous parlez plutôt du coût qui n'est pas payé du projet, là.

Mme Leahey (Marie): Pas juste du coût, mais c'est...

M. Tomassi: Parce qu'en réalité je vous comprends, là. Excusez-moi, là.

Mme Leahey (Marie): C'est ça.

M. Tomassi: Mais c'est sûr et certain que ce n'est pas du mur-à-mur, là. Une mesure qui est prise dans Mercier ne peut peut-être pas être valable dans mon comté, là. Ça, c'est tout à fait normal, là, tout le monde peut le comprendre. Mais il y a un élément qui peut être compris.

Je vous donne l'exemple, là. Tantôt, les gens de Jonquière sont venus ici puis ils sont venus nous parler du CREPAS sur la valorisation puis la persévérance scolaire. Or, le modèle du CREPAS nécessairement n'est pas le même qui a été établi dans Lanaudière avec le PREL, mais il y a des éléments qui peuvent être similaires. Alors, au lieu de réinventer la roue, est-ce qu'on peut partir de certains éléments qui sont valables dans votre approche qui pourrait être la même que la nôtre puis adapter des choses?

Alors, il y a deux éléments, à ce que je comprends de vous, c'est que plutôt vous n'êtes pas contre le fait de dire... Parce qu'en réalité le projet de loi est important, là. L'article 2, là, troisième alinéa, qui dit: «Soutenir l'innovation de même que l'acquisition et le transfert de connaissances en ces matières», c'est pour permettre que les bonnes habitudes, les bonnes façons de faire qui sont...

Puis, vous savez, le Québec, là, c'est un territoire qui est très vaste, et on a des gens puis des groupes communautaires partout sur le territoire du Québec, c'est une pépinière d'excellentes idées. On n'est pas seulement une pépinière de PME qui mettent sur pied des beaux projets d'entreprise et des beaux produits puis qui font le rayonnement de partout au monde, même les groupes communautaires le font aussi à leur manière. Et, au lieu de garder ça seulement pour une région X, si on peut prendre cet exemple puis faire en sorte qu'il puisse avoir un rayonnement qui puisse venir aider d'autres communautés, tant mieux, là. On avance. Là, l'important ici, à mon avis, là, puis je pense que vous n'allez pas être contre ça, c'est permettre, en bout de ligne, là, après un an, deux ans, qu'on voie du changement, là, faire cette progression qu'on peut avoir.

Mais je comprends votre interrogation à savoir, sur la question d'un groupe communautaire qui travaille x nombre de mois sur un projet qu'il met en place, puis par la suite le CAL dit: Bon, bien, là, il m'appartient, puis, moi, je n'ai plus d'obligation. Ça, c'est un irritant que je vous comprends, puis c'est un élément que... Celui-là, je peux le comprendre. Mais je ne peux pas comprendre celui de dire: On peut prendre l'élément puis le transposer ailleurs en province ou dans d'autres régions.

Mme Leahey (Marie): Bien, je suis contente, M. Tomassi, de vous entendre parler de la richesse des groupes communautaires et de la pépinière qu'ils sont en innovation sociale.

n(11 h 10)n

Ceci dit, je referais le parallèle entre le matériel que les groupes populaires en alphabétisation ont développé et tout le travail que les commissions scolaires ont développé en alphabétisation. Je pense que les approches sont différentes, je pense que les deux sont très bonnes et je pense qu'un groupe communautaire d'alpha ne pourrait pas prendre le matériel nécessairement de la commission scolaire, et vice versa. Et ce n'est pas parce que...

Il peut y avoir des parties qui sont universelles, on s'entend là-dessus, là, mais c'est aussi des approches différentes, et c'est la variété des approches qui va faire qu'on va rejoindre des populations que peut-être les institutions publiques ont de la difficulté à rejoindre, et l'inverse. Il y a des groupes communautaires qui ne rejoignent pas une population qui est reçue par les services sociaux, et c'est correct. Quand on dit que les groupes communautaires ne veulent pas remplacer les services publics, ils veulent être complémentaires, c'est la richesse de ces approches-là qu'il faut garder.

Mais on est une fédération où, parmi nos membres, les groupes se donnent des éléments de: Moi, je travaille comme ça, on a essayé ça, ça n'a pas marché, ça, ça a marché. Ça existe, là, ce transfert-là de connaissances, et, comme fédération, on invite nos groupes à partager une fois par année leurs bons coups, leurs mauvais coups. Ça fait partie de la vie, ça. Mais ce n'est pas la même chose que de dire: Voici un bloc et, quel que soit le contexte, je le remets ailleurs. C'est ça qui est un peu différent.

Pour votre deuxième question, qui était sur...

M. Tomassi: Le comité de liaison.

Mme Leahey (Marie): Le comité. À l'époque la fédération avait accepté de collaborer avec le comité sur ça. On l'a toujours maintenu. Bon, le comité ne s'est pas réuni parce que le projet de loi n'avait pas été adopté, bon, et tout, et tout. Mais je suppose que nos membres vont nous redire à peu près la même chose. Si on a dit oui une fois, on ne peut pas... Et en général la fédération, vous le savez, collabore avec son ministère port d'attache, qui est le ministère de la Famille. Je ne sais pas si...

M. Tomassi: Une autre petite question, puis par la suite...

Le Président (M. Kelley): Une dernière, parce qu'on arrive...

M. Tomassi: Il ne reste plus de temps? Oui.

Le Président (M. Kelley): Malheureusement, il y a trois demandes d'intervention de vos collègues, mais il n'y aura pas le temps, on a juste le temps pour une dernière question du ministre.

M. Tomassi: L'autre questionnement. Les groupes qui sont venus nous parler depuis hier nous parlent de la volonté et du souhait d'avoir des membres de la communauté civile au sein du comité du fonds de gestion. On a été d'accord avec eux, et les groupes sont venus nous dire... partagent la même opinion qu'on a, c'est qu'il va falloir... oui, aux gens de la société civile, mais des groupes qui n'ont pas... qui ne peuvent pas avoir accès, là. Ce n'est pas mettre des groupes, là, qui vont pouvoir déposer des projets, pour ne pas avoir de conflit d'intérêts, là, en quelque sorte.

Êtes-vous d'accord avec ce principe-là ou est-ce que, pour vous, votre volonté, ce serait de siéger sur ce comité de gestion là, tout en sachant que vous risquez d'être des bénéficiaires du fonds?

Mme Blanchard (Francine): Je vous dirais qu'on avait d'avance manifesté notre intention de travailler en collaboration avec le ministère de la Famille et la fondation Chagnon, mais, à l'heure actuelle, le conseil d'administration ne s'est pas prononcé sur les tenants et aboutissants de cette chose, de cette façon d'agir là.

Mme Leahey (Marie): Parce que, comme on remet en question un peu la façon de faire du projet de loi, on n'est pas allés jusqu'à se poser des questions sur la présence de personnes ou non dans une société de gestion qu'on remet en question.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Malheureusement, comme je dis, collègues à ma droite, il ne reste pas de temps pour d'autres questions. Et je vais céder la parole maintenant au député de Gouin.

M. Girard: Merci, M. le Président. À mon tour de saluer les représentantes de la Fédération québécoise des organismes communautaires Famille. Mme Leahey, Mme Blanchard, merci beaucoup pour votre mémoire. Vous soulevez un certain nombre de questions que j'ai eu l'occasion de soulever hier, au moment des remarques préliminaires sur le projet de loi. Il y a des questions de fond, des questions liées à la gouvernance, à la mission de l'État, à la reconnaissance de l'expertise locale que sont les organismes famille. Je suis bien placé pour en parler, j'en ai plusieurs dans ma circonscription de Gouin, que ce soit le Groupe d'entraide maternelle, la Maisonnette des parents, l'Oasis des enfants, qui font un travail exceptionnel pour les enfants et pour les parents du quartier. Et je pense que cette expertise-là doit être reconnue à travers le Québec.

Je veux revenir, parce que le ministre y faisait référence à sa dernière intervention, sur la composition de la société de gestion. Vous dites avec raison que le projet de loi est muet là-dessus. C'est vrai. On comprend que c'est dans le document, le protocole d'entente, mais il n'y a rien dans le projet de loi. J'imagine... Est-ce que le ministre déposera des amendements au projet de loi afin d'y inscrire de nouveaux articles qui feront référence à la composition de la société de gestion? Il semble que c'est le souhait de plusieurs qui sont venus nous rencontrer.

Le modèle qui nous est proposé par le ministre, c'est un modèle où, la société, ce serait paritaire, là: cinq membres du gouvernement, cinq membres de la fiducie. Est-ce que, pour vous, ce modèle-là, est-ce que le modèle devrait être modifié, il devrait y avoir une représentation plus importante de la société civile au sein de la société de gestion? Est-ce qu'elle devrait être, par exemple, majoritaire, selon vous?

Le Président (M. Kelley): Mme Leahey.

Mme Leahey (Marie): Bien, écoutez, bon, c'est 5-5, mais, nous, on pense que ça devrait être plus gouvernemental que fondation. Déjà au départ, ça ne devrait pas être paritaire.

La présence de la société civile, on a un peu répondu, nous, on n'est pas allés jusque-là. On a entendu, lors du projet de loi n° 6, des groupes dire la même chose aussi sur la présence de la société civile. On n'en n'a parlé à nos membres. La connaissance qu'on a de nos membres, je ne pense pas qu'ils seraient contre la présence de la société civile. Mais là, de là à déterminer le nombre et qui devraient être les représentants de la société civile, on est absolument incapables de vous répondre ce matin là-dessus, là.

M. Girard: Une autre question. À la page 6, vous citez une déclaration de M. Chagnon, je la relis: «C'est nous qui donnons l'orientation des champs d'intervention et qui évaluons les projets. Nous avons des principes directeurs énoncés sur notre site, parmi lesquels vous remarquerez l'importance accordée à notre rôle de catalyseur [et] de facilitateur.» Je comprends que cette déclaration-là, pour vous, suscite des interrogations. Vous vous demandez si l'État conservera la mainmise sur les orientations et les priorités du ministère pour financer un certain nombre de projets.

Qu'est-ce que vous souhaiteriez, au fond, qui apparaisse dans le projet de loi, ajout de nouveaux articles de la part du ministre, afin que vous n'ayez pas le sentiment que l'État délègue une partie de sa responsabilité à une fondation privée? Qu'est-ce que vous proposez finalement pour faire en sorte pour que vous ayez le sentiment et l'impression que c'est l'État qui détermine les politiques publiques et les priorités en ce qui a trait de l'intervention auprès des enfants 0-5 ans?

Le Président (M. Kelley): Mme Blanchard.

Mme Blanchard (Francine): Alors, oui, si je pars de l'expérience déjà vécue par certains organismes communautaires avec des CAL, lors de la formation des comités d'action locaux, les partenaires s'assoient ensemble pour faire une démarche à partir des besoins de la région et trouver des cibles de... ou oeuvrer dans un projet XYZ, et il est... Donc, il y a un projet qui va émerger après plusieurs discussions et qui est porté par le CAL et présenté à la fondation Chagnon via Québec Enfants. Et parfois il est arrivé que le projet en question a été révisé, modifié, refusé parce que ça ne correspondait pas à des critères de la fondation Chagnon.

Il n'en demeure pas moins que les besoins de la population dans un contexte, un milieu, ciblés entre zéro et cinq ans, dans la façon qui est présentée, on juge collectivement que c'est ça qui devait être prioritaire, toujours en ayant la toile de fond des principes directeurs de la fondation, mais il a la couleur locale.

n(11 h 20)n

Alors, je ne sais pas comment le traduire dans un projet de loi, mais, à partir du moment où on respecte tout le processus de la démocratie pour en arriver à émettre un projet puis qu'il se voit refusé parce qu'il ne correspond pas... Alors, la citation de M. Chagnon laisse voir qu'il y a une visée en arrière mais qui peut-être ne correspond pas à la réalité du milieu, alors que tout le processus nous amène à un projet qui correspond au milieu, toujours pour les enfants qui ont des difficultés, qui sont démunis puis qui sont dans les 0-5 ans.

Je ne pourrais pas vous dire comment écrire ça. Mais, nous, dans le contexte, depuis toutes ces années qu'on travaille avec eux, il y a beaucoup d'irritants, et c'en est un, ça. Donc, je ne pourrai pas répondre comment on peut traduire ça dans le projet, mais, dans la vie de tous les jours, il y en a plus d'un, organisme communautaire Famille qui a vécu ça.

M. Girard: Vous semblez nous dire, dans les présentations, qu'il y a eu des expériences qui ont, disons, suscité peut-être un peu d'interrogation ou de démobilisation dans des communautés. Expliquez-nous un peu comment ça fonctionne, le fonctionnement du comité d'action local, quelles sont ses obligations, des expériences concrètes où, à votre avis, il y a eu des problèmes sur le plan du fonctionnement et du respect de l'expertise locale.

Le Président (M. Kelley): Mme Leahey.

Mme Leahey (Marie): J'y vais? Je vais y aller sur un premier exemple, et Francine Blanchard pourra compléter.

Le problème, souvent, c'est qu'on demande aux groupes communautaires de devenir fiduciaires pour le CAL, O.K.? Donc, ce n'est pas le groupe communautaire, l'OCF, l'organisme communautaire qui décide de la personne qui va être engagée, hein, sauf que cette personne-là se retrouve dans ses locaux et elle a des conditions de travail différentes des autres employés de l'organisme parce que la fondation étant plus... financièrement plus à l'aise que le ministère de la Famille qui subventionne les organismes.

Et donc on s'est posé la question: S'il y avait un cas de CSST ou un cas de harcèlement psychologique, qui est l'employeur? Est-ce que c'est le groupe communautaire, mais qui n'a pas décidé de la personne à engager, mais qui paie son salaire parce qu'il reçoit une subvention? Est-ce que c'est la fondation Chagnon, puisque c'est eux qui ont engagé la personne? Alors, c'est ce genre de truc là.

Il faut vous rappeler que les groupes reçoivent, pour faire la fiducie, donc devenir gestionnaires fiduciaires, reçoivent 3 % de l'enveloppe. Je connais peu de programmes où les frais de gestion sont à 3 %, là. Vraiment, si la société de gestion du projet de loi réussit ça, là, je trouve ça génial. Alors ça, c'en est un, genre de problème concret, de difficulté de s'arrimer. Peut-être que Mme Blanchard en a d'autres. Pas pour l'instant?

Le Président (M. Kelley): Pas obligé. C'est juste une suggestion.

Mme Leahey (Marie): C'est ça, c'est parce qu'il y en a plusieurs, de ces exemples-là qu'on a eus. On n'a jamais eu un cas de harcèlement psychologique qui ferait qu'on aurait déposé une plainte puis que, là, on serait allés à la Commission des normes ou au Tribunal du travail pour savoir qui était l'employeur.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Vous nous dites aussi, à la page 10 et 11 de votre mémoire, vous faites référence à la situation financière des organismes communautaires Famille. Je comprends que ça doit être... soit c'est le fruit du hasard ou un concours de circonstances qui fait en sorte que la demande formulée par vos organismes pour ajuster le financement pour tenir compte des besoins de votre expertise et du travail que vous faites dans les communautés était de l'ordre de 15 millions. Or, la contribution du gouvernement au fonds est de l'ordre aussi de 15 millions. Qu'est-ce que ça a suscité chez vous comme réaction quand vous avez pris connaissance du projet de loi?

Mme Blanchard (Francine): Bien, dans les années passées, il y a deux ans environ, quand c'était Mme Courchesne, nous l'avions rencontrée lors d'une rencontre nationale et nous avions présenté la réalité des organismes communautaires Famille. Et elle a appris beaucoup de cette rencontre sur notre réalité et nos besoins et elle a porté beaucoup notre demande en tout cas auprès... Et ça totalisait 15 millions il y a deux ans.

Et, lorsqu'on a appris, à la présentation du budget, l'année dernière, qu'on n'avait que 1,8 million pour rehausser les budgets des OCF et que le 15 millions a été déplacé... ou en tout cas attribué à une fondation, là, à naître une société de gestion, ça a démoralisé les troupes, démoralisé pour beaucoup de choses, parce que ça fait quand même déjà plusieurs années que... depuis le transfert du ministère Santé et Services sociaux et ministère de la Famille, on a connu trois ministères dans ces étapes-là. Donc, il y a beaucoup de mouvance aussi au niveau du ministère, autant des fonctionnaires. Donc, on est toujours en train de présenter qui on est, parce qu'on connaît beaucoup les CPE, mais on connaît peu les organismes communautaires Famille.

Puis tout le monde est enchanté du travail magnifique qui se fait sur le terrain auprès des parents et des enfants, tous les gains au niveau de la prise en charge des parents par eux-mêmes. Il y a beaucoup de belles histoires magnifiques. Puis de voir à travailler en collaboration avec un organisme qui a le 15 millions alors qu'on est peu financés... On l'a établi dans notre mémoire par l'exemple de Memphrémagog. Le nombre de réunions qu'elle doit assumer, elle, dans son organisme, la directrice, qui a peu de personnel, qui siège aussi à des tables de concertation de la petite enfance, qui siège à d'autres niveaux... C'est insoutenable, le travail qu'on doit faire. Et il y a beaucoup à faire.

Donc, comment pouvons-nous travailler en partenariat ? ce n'est pas parce qu'on ne veut pas, mais on a peu de ressources ? quand on n'a pas le minimum décent? On vous dit dans le mémoire que le budget de financement à la mission, moyen, là, d'un organisme famille, c'est 57 500 $, alors que les maisons de femmes ont 127 000 $. Puis, si je peux juste citer dans mon secteur, dans ma MRC, il y a deux centres de femmes qui couvrent Saint-Jean-de-Matha et Saint-Michel-des-Saints. Moi, je suis toute seule pour faire les six municipalités puis je n'ai pas ça, 100 000 $, là, j'ai 70 000 $.

Alors, ça vous montre comment... On veut collaborer, on serait intéressés, parce que, nous, notre intérêt, c'est de rejoindre les parents et les enfants, il y a des besoins, mais encore faut-il être en mesure de l'offrir. Ce n'est pas parce qu'ils vont avoir un projet d'entente qui va toucher la maison de la famille... C'est certain, parce qu'on est un organisme privilégié dans le milieu pour ça.

Et l'autre chose aussi, c'est qu'on veut s'adresser aux enfants, mais, nous, on dit, les organismes communautaires, c'est que, oui, les enfants mais toujours avec les parents. On ne peut pas s'adresser à un enfant, faire une activité de 0-5 ans si on ne travaille pas en même temps avec le parent. Parce que l'enfant, il est à la maison. Qui s'en occupe après qu'il vienne à l'atelier, dans les organismes famille ou dans les CPE? Il retourne à la maison. Le parent, il faut travailler avec lui pour développer les activités de langage, tout ça, donc.

Alors, pour nous, c'est sûr que ça nous a frustrés de voir ça, mais on vit avec, on va composer avec. Mais ça va être difficile de maintenir un partenariat si le ministère de la Famille ne renforce pas le financement à la mission.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Mercier.

n(11 h 30)n

M. Khadir: Mme Leahey, Mme Blanchard, merci d'être là. Bravo pour votre courage parce que vous posez... En fait, tous les groupes que j'ai entendus, d'ailleurs, que ce soit sur le projet de loi n° 7 ou le projet de loi n° 6, à peu près tous, je ne me souviens pas de groupes, il peut y en avoir un ou deux qui n'ont pas manifesté de préoccupation, mais tous les groupes manifestent une préoccupation très importante sur ce rôle prépondérant accordé à une entreprise ou enfin à une fondation privée.

En fait, toutes ces mesures nous ont été présentées par le gouvernement comme des innovations en matière sociale. La réalité est, et je tiens à le redire, que ce n'est pas des innovations, que cette manière pour l'État de se retirer et de confier au secteur privé, parfois dans les meilleures intentions, des rôles qui devraient en principe revenir à l'État a été pratiquée largement aux États-Unis. Or, on sait les conséquences dévastatrices qu'a eues sur la société américaine cette vision du monde ? d'accord? ? cette manière d'approcher notre collectivité, nos communautés. Comment on doit répondre aux besoins sociaux? Bien, les États-Unis de Barack Obama s'en distancient largement, puis on voit toute la fierté que retire le peuple américain de ce président qui est capable de reconnaître les erreurs du passé.

Malheureusement, il y a encore chez nous, et parfois ce n'est vraiment pas par malice ou par mauvaise intention, il y a des gens, des gens souvent fortunés qui ont cette vision du monde. C'est une culture ? d'accord? ? qui fait en sorte qu'ils estiment qu'ils ont... disons, parce qu'ils ont plus d'argent, ils ont plus de droits en société; parce qu'ils ont de l'argent, eux, ils peuvent décider des orientations, exactement comme la réponse que vous a fournie M. Chagnon.

Est-ce que, vous, vous estimez normal qu'en société démocratique, après ce que vous avez introduit dans votre rapport, dans votre mémoire, que, dans une société normale, une fondation privée ait plus d'écoute des ministres et du gouvernement qu'une fédération comme la vôtre qui regroupe, quoi, 200, 300...

Mme Blanchard (Francine): ...

M. Khadir: ...bon, plusieurs centaines d'organismes, pour finalement recueillir, pour sa part, 1,8 million de budget dans le budget de l'année dernière, là, de subventions, et que le gouvernement accorde 15 millions? Est-ce que vous trouvez qu'en société démocratique, c'est normal?

Mme Leahey (Marie): Je peux répondre?

Le Président (M. Kelley): Mme Leahey.

Mme Leahey (Marie): Ce qu'on trouve drôle dans une société démocratique ? et là je reprends ce que j'ai entendu, la semaine dernière, au projet de loi n° 6 ? c'est de se faire dire qu'on va s'occuper d'Alzheimer parce que Mme Chagnon a l'Alzheimer. Je trouve ça très grave. C'est Mme Blais qui a dit ça d'entrée de jeu, que 75 % de l'enveloppe s'en allaient à Alzheimer parce que Mme Chagnon était atteinte d'Alzheimer. Je trouve que c'est une drôle de façon de développer, de...

M. Khadir: Déterminer des priorités.

Mme Leahey (Marie): ...de déterminer des priorités d'État. Ça m'inquiète beaucoup. J'étais déjà inquiète, mais, entendre ça, je vous avoue que j'ai sursauté. Vous pouvez lire le Journal des débats, c'est écrit, je ne l'invente pas. Et donc, oui, il y a une question, ici, démocratique dans l'établissement des priorités.

L'autre chose qui nous achale un peu, c'est ces façons de faire là avec la société de gestion. C'est peut-être un moyen détourné aussi de passer à côté de la politique d'action communautaire, qui est une politique qui régit les relations entre le gouvernement et le milieu communautaire, où le gouvernement a accepté de soutenir le financement à la mission des groupes, des organismes communautaires. Or, si tous les argents, les nouveaux argents publics s'en vont dans les sociétés de gestion, on s'en va vers des ententes de service, des contrats de services, et ça, ça va à l'encontre de la politique gouvernementale.

M. Khadir: Si je comprends la politique des milieux communautaires que le gouvernement s'est engagé à soutenir, sa mission, c'est la lutte à la pauvreté globalement qu'on approche. En grande partie, c'est de lutter contre les déterminants sociaux importants dans un certain nombre de problématiques sociales. Et on sait que la pauvreté et les inégalités sociales ont un rapport important. Est-ce que c'est ça que vous entendez par mission?

Mme Leahey (Marie): Bien, en fait, c'est que la politique d'action communautaire va au-delà de ça, hein, c'est aussi la défense de droits, et tout, et tout. Mais je pense qu'effectivement, quand, dans le mémoire, on fait référence aux inégalités sociales, c'est que la façon dont les chercheurs de la fondation Chagnon travaillent, et c'est aussi maintenant dans certaines officines gouvernementales, c'est de considérer la pauvreté comme une maladie.

M. Khadir: C'est là que je trouve intéressant parce que...

Le Président (M. Kelley): En terminant, s'il vous plaît, très rapidement.

M. Khadir: Oui. Alors, vous mettez le doigt, à la page 8, sur les théories biopsychologiques et écologiques associées aux programmes de prévention précoce, qui considèrent justement, là, une fois que le développement intra-utérin a été peut-être déficient, bien, il y a un problème, c'est biologique, on ne peut rien faire par la suite, pas la peine donc d'investir dans le social pour corriger les autres facteurs qui sont...

Moi, il me semble, à l'époque où je travaillais pour Médecins du Monde, que j'ai côtoyé l'OMS, le PNUD, tout ça, dans les organismes, dans les années quatre-vingt-dix, où ce débat avait cours, hein, PNUD, OMS, UNICEF, Médecins sans frontière, tous ceux qui parlent développement de l'enfant, développement précoce et pauvreté, l'interaction entre les deux, ces théories-là ont été largement rejetées à la fin des années quatre-vingt-dix. Est-ce qu'il y a encore scientifiquement une base à ces théories-là?

Mme Leahey (Marie): M. Tremblay est toujours professeur à l'Université de Montréal et reçoit énormément de subventions pour faire ses travaux qui déterminent entre autres... Il y a déjà eu des travaux, il n'y a pas si longtemps que ça, là ? ce n'est pas il y a 20 ans ? sur la salive des mères enceintes pour prévoir le taux d'agressivité des enfants.

Le Président (M. Kelley): Alors, sur ça, merci beaucoup pour venir ici partager vos expériences.

Je vais suspendre nos travaux quelques instants. Et j'invite les représentants de la Confédération des organismes familiaux de prendre place.

(Suspension de la séance à 11 h 35)

(Reprise à 11 h 41)

Le Président (M. Kelley): Alors, la Commission des affaires sociales reprend ses travaux. On a notre troisième témoin ce matin, c'est la Confédération des organismes familiaux du Québec, représentée par son président, M. Turcotte, et la directrice générale, Mme Dumouchel. Alors, la parole est à vous, Mme Dumouchel, si j'ai bien compris?

Confédération des organismes
familiaux du Québec (COFAQ)

M. Turcotte (Roch): Non, c'est à moi.

Le Président (M. Kelley): Non. À M. Turcotte, pardon.

Mme Dumouchel (Sylvie): À M. Turcotte, oui.

Le Président (M. Kelley): M. Turcotte.

M. Turcotte (Roch): Alors, ça nous fait plaisir d'être ici, ce matin. Et nous avons préparé un mémoire, qu'on n'aura pas le temps de tout lire, je vous le dis tout de suite. On présente notre organisme, puis on va surtout s'attaquer, ce matin, au projet de loi qui est sur la table, et après ça on va offrir une conclusion courte qui va aller dans le sens des débats que vous aviez tout à l'heure, là.

Donc, au prime abord, on pense que ce projet de loi là a été mis en place il y a un an dans un contexte économique complètement différent. Bien des choses ont changé actuellement; on pense que ce projet de loi en tient peu compte. Pour nous qui oeuvrons dans le milieu communautaire, comme ceux qui nous ont précédés, une enveloppe de 250 millions puis de 150 millions, ce n'est pas rien, c'est majeur.

Les organismes communautaires, il faut le rappeler, ce sont des gens du milieu qui se mobilisent, qui se prennent en main et qui font des activités pour répondre aux besoins de leur milieu à partir des ressources qu'ils peuvent obtenir. Malheureusement, dans le milieu communautaire, souvent les ressources sont souvent affectées au financement. Quand tu fais du financement, tu ne t'occupes pas de façon spécifique des activités sur ce pour quoi tu te mobilises.

On aurait pu s'attendre à ce que ce projet de loi là vienne appuyer le milieu communautaire ? je pense que l'organisme qui a précédé l'a très bien dit, ça fait que je ne reprendrai pas le discours qui a été dit là-dessus ? parce que c'est des sommes significatives, importantes.

D'un autre côté, la façon dont le projet est structuré nous apparaît répondre davantage au milieu urbain avec des quartiers défavorisés ciblés. Quand vous arrivez dans des régions comme l'Abitibi ou la Côte-Nord, peu importe, vous allez gérer ça comment? Puis ça ne veut pas dire non plus que, dans certaines régions plus fortunées, il n'y a pas des gens qui sont défavorisés, laissés à eux-mêmes.

Donc, la COFAQ, qu'est-ce que c'est? La COFAQ, c'est une quarantaine d'organismes qui paient une cotisation annuellement, qui assistent à nos assemblées, qui se mobilisent autour de différents projets. Je résume ce que c'est qu'un organisme communautaire. Avant tout, on fait des références, on informe les gens; c'est fait pour ça. Il y a un débat à la fois politique et d'orientation qui se tient avec les gens qui en font, et ça fait aussi des revendications puis des représentations. Dans le langage des fonctionnaires, on appelle ça de la défense de droits. Parfois, il faut peut-être changer nos façons de faire pour améliorer la situation de nos citoyens et concitoyennes.

Alors, question plus spécifique, nous avons fait des états généraux pendant deux ans. Notre rapport est encore sur notre site Internet, vous irez le voir. Et on insiste beaucoup sur les enjeux qui concernent beaucoup de monde ? petite anecdote, en passant ? qui concernent à la fois... qui s'attaquent autant aux milieux défavorisés qu'ou pas, tout le principe des divorces, où on met de l'avant la présomption de garde partagée, où on pense que le droit des enfants à ses deux parents est un droit fondamental, puis on espère qu'un jour la loi va faire en sorte que le juge soit le défenseur de ce droit. Fermez la parenthèse.

Un autre dossier que nous avons traité dernièrement ? vous irez voir sur notre site ? concerne l'adoption au Québec, où on pense qu'une régie de l'adoption réglerait en partie le conflit d'intérêts qu'on présume qui possiblement, peut-être, existe à la direction de la DPJ. On veut à tout prix dissocier l'adoption de la protection de l'enfance. Et ça, ça pourra faire l'objet d'une commission ici, on l'espère bien.

En terminant, nous sommes pour une adoption ouverte au Québec ? je sais que peut-être il y a des positions politiques différentes autour de la table ? pour la possibilité d'une adoption ouverte. Ceux qui ont connu ? encore une petite anecdote, en passant ? puis le milieu défavorisé n'échappe pas à ça... Ce n'est pas parce qu'il y a une fondation Chagnon que ça va changer quelque chose. C'est que, fondamentalement, un jour ou l'autre, quelqu'un qui a été adopté veut retrouver ses origines, tant maternelles que paternelles; c'est fondamental. Alors, nous, on pense, à ce stade-ci, que, dans 25, 30, 40 ans d'ici, les boîtes, dans les fonds des hôpitaux, ça n'existera plus. C'est l'informatique qui va faire en sorte qu'on va détruire tout lien possible existant face à ces enfants-là. Fermez la parenthèse.

On revient au projet de loi n° 7. Mais je pense que ce débat-là, le projet n° 7, est important. Et nos organismes, pour revenir là-dessus, font des cours prénataux, font des relevailles, font des sessions de répit, font des haltes-garderies ? en passant, la COFAQ a été défenseur de ça ? puis ils sont membres chez nous. Alors, à toi, pour le mémoire.

Mme Dumouchel (Sylvie): Merci beaucoup. Le présent projet de loi n° 7 ramène devant l'Assemblée nationale le projet de loi n° 84, dont le processus d'adoption a été interrompu avec le déclenchement des dernières élections québécoises. C'est un projet de loi important, car il vise à favoriser le développement des jeunes de cinq ans et moins. Nous nous devons de souligner l'importance de cet intérêt envers nos jeunes. Ils représentent vraiment l'avenir du Québec, et la voie que nous leur traçons, les efforts consentis pour les amener à maturité, notre capacité à les comprendre et les aimer sont représentatifs de ce que nous sommes et de nos idéaux que nous défendons.

La Confédération des organismes familiaux du Québec, en tant que représentante de plusieurs organismes famille au Québec, est heureuse de participer à cet exercice. Plusieurs des organismes membres de la COFAQ travaillent auprès des clientèles qui sont visées par le présent projet de loi. Que ce soient les maisons de la famille, les haltes-garderies, les regroupements de parents ayant des enfants ayant une déficience intellectuelle ou des problèmes de santé mentale sont autant de groupes qui pourraient être intéressés par ce nouveau fonds.

Vu l'importance de ce projet de loi à la fois par les sommes d'argent en jeu, la dynamique particulière de ce partenariat et l'objectif de ce fonds, la COFAQ a pris le temps, à l'automne dernier, de demander à ses membres leurs réflexions et interrogations sur le défunt projet de loi n° 84. Nous vous proposons de présenter les réflexions issues de cette consultation ainsi que des réflexions du conseil d'administration de la COFAQ et de la direction générale.

Nous remercions la Commission des affaires sociales de l'invitation qui nous est faite de venir exprimer notre point de vue auprès des membres de cette commission.

Un objectif louable mais pas un objectif nouveau. Le projet de loi n° 7 nous propose la création d'un fonds dont le but est de «soutenir le développement global des enfants âgés de cinq ans et moins vivant en situation de pauvreté, afin de favoriser la réussite de leur entrée scolaire et la poursuite de leur scolarité». Ce développement global est perçu comme un tout intégrant différentes dimensions du développement de l'enfant tant sur le plan physique que sur les plans psychologique, cognitif, langagier et affectif.

Cet objectif est des plus clairs et il circonscrit bien ce qui devrait être une des plus grandes priorités de l'État lorsque celui-ci s'interroge sur le devenir des jeunes générations. Il vise principalement les jeunes d'âge préscolaire, la clientèle de nos services de garde, des haltes-garderies. Sur le site du ministère de la Famille, sur la page décrivant les centres de la petite enfance et garderies, l'on explique aux parents qui inscrivent leurs enfants au service d'un CPE qu'ils s'inscrivent à un «programme éducatif favorisant le développement global de l'enfant, ce qui lui permet de développer toutes les dimensions de sa personne».

De même, sur la page Web du ministère de l'Éducation, qui décrit le Programme de soutien à l'école montréalaise et qui vise à pallier aux difficultés particulières des enfants montréalais dans leur cheminement scolaire, l'on découvre que les responsables de ce programme croient que «la complexité des facteurs qui régissent l'apprentissage et la persévérance scolaire exige que l'on intervienne à plusieurs niveaux simultanément en mettant à contribution l'ensemble des acteurs qui peuvent participer à l'amélioration de la situation et en s'assurant qu'ils agissent en concertation».

n(11 h 50)n

Nous pourrions sans doute trouver d'autres références à la nécessité d'agir dès le plus jeune âge auprès des clientèles fragilisées. Les mots clés qui définissent le but de ce fonds sont connus et défendus depuis longtemps par le gouvernement du Québec mais aussi par les organismes communautaires Famille, les services de garde, les écoles, etc., qui oeuvrent au Québec.

L'objectif de ce fonds est louable, mais il est déjà inscrit dans l'action de plusieurs groupes travaillant au Québec et dans le fonctionnement même du gouvernement du Québec. Nous tenons à spécifier que cet objectif n'appartient pas à une fondation ? ni à son portefeuille, de cette fondation ? en particulier, mais doit être celui de la société québécoise dans ce chantier très exigeant du développement de l'enfant. Il fait partie de la vie quotidienne des travailleurs et bénévoles qui oeuvrent auprès des clientèles visées par ce présent projet.

Surtout, cet objectif est au coeur de la vie des parents, et la COFAQ a depuis toujours rappelé l'importance de la reconnaissance du rôle des parents comme premiers responsables des enfants, de leur éducation et de leur bien-être. Lors de nos états généraux sur la famille, l'assemblée délibérante a réaffirmé unanimement le rôle premier d'éducation des familles en tant que responsables de la transmission de la vie et des valeurs.

Un partenariat, mais quels décideurs? Si l'objectif général du fonds est clairement énoncé, nous ne retrouvons pas les objectifs secondaires ou plus spécifiques de ce fonds ni le mode de fonctionnement de la société de gestion qui sera créée à cet effet, ce qui soulève quelques interrogations.

Les actions de ce fonds se feront en partenariat entre le gouvernement du Québec et la fondation Chagnon, tout en mobilisant les communautés locales: groupes communautaires Famille, services de garde, les écoles, les établissements de santé et services sociaux, municipalités, etc. Ces groupes qui seront invités à présenter des projets seront-ils invités à l'élaboration des principes d'attribution de subventions? Pourront-ils participer à l'élaboration des différentes orientations de ce fonds? L'expression même de la mobilisation suggère que les organismes communautaires sont conviés à s'enrôler au service de ce partenariat sans que ces groupes puissent y jouer un rôle décisionnel.

D'autres fonds ont vu le jour au cours des années, Québec en forme par exemple, et bien souvent les groupes communautaires n'ont pas été approchés dans une optique de partenariat, ce qui a mené à un désintérêt envers ces programmes. Les organismes communautaires ont comme tâche d'offrir des services à leur communauté en développant leur propre approche des problématiques. Est-ce que le nouveau fonds est prêt à reconnaître l'expertise des groupes communautaires?

Dans son communiqué de presse annonçant le dépôt de ce projet de loi, le ministère de la Famille parle de partenariat novateur. Sommes-nous dans l'innovation quand ce type de projet semble vouloir s'établir comme norme? Le projet de loi n° 6, déposé en même temps que celui-ci, reprend le modèle pour l'appliquer aux aidants naturels. Or, il existe une forme de partenariat entre le gouvernement du Québec et les organismes communautaires, qui est le Cadre de reconnaissance des organismes communautaires Famille.

Nous sommes en droit de nous demander si cette forme d'alliance du gouvernement et d'un acteur important, par sa capacité d'apporter de l'argent et d'imposer son point de vue, ne remet pas en cause les principes de cette reconnaissance. Les organismes communautaires reconnaissent que l'État joue un rôle social significatif mais non exclusif dans notre société. Des acteurs comme la fondation Chagnon peuvent y apporter leur contribution. Cependant, les organismes de l'action communautaire autonome ne désirent pas se subordonner à une fondation, même si leurs objectifs peuvent être semblables aux leurs. Nous pensons que les organismes communautaires ont besoin d'être supportés et non dirigés.

Au Québec, le Code civil reconnaît aux parents, à l'égard de leur enfant, le droit et le devoir de garde, de surveillance et d'éducation. Les actions qui seront entreprises pour favoriser le développement des enfants ne doivent pas escamoter le fait que ce sont les parents qui demeurent les premiers responsables de leurs enfants. Bien souvent, les parents aussi ont besoin d'aide pour accomplir leurs tâches et leurs devoirs. Il est nécessaire que les responsables soient sensibilisés au fait que l'objectif premier de ce fonds devrait se comprendre comme une aide à la famille afin de réaliser le plein développement des enfants.

Le gouvernement du Québec investira 15 millions de dollars par année et la fondation Chagnon, 25 millions, pour un apport total de 40 millions par année pendant 10 ans. Cette somme est non négligeable, on en est bien conscients. Les organismes communautaires regardent avec surprise le gouvernement du Québec investir dans un nouveau fonds une somme presque égale à celle qu'ils reçoivent annuellement. Cet apport important de nouvelles sommes d'argent est attirant pour les organismes dont les budgets sont contraignants. Elles laissent aussi des doutes sur un potentiel désengagement de l'État vis-à-vis les OCF.

L'ensemble des sommes ne sont pas réservées aux OCF, mais ils seront heureux d'avoir une source potentielle de support additionnel. Les OCF consacrent l'essentiel de leurs ressources à leur mission première et non au développement ou à la création de nouveaux projets. Certains acteurs sociaux, qui seront sollicités pour soumettre des projets à ce fonds de développement, ont des ressources déjà disponibles pour les projets en développement: les commissions scolaires, les réseaux de santé, CLSC. Au contraire, le réseau des OCF pourrait se retrouver défavorisé quant à sa capacité de développer des projets. Nous croyons que les montants attribués le seront pour le mieux-être des enfants, mais il est illusoire de croire qu'elles favorisent le développement des réseaux des OCF. Pour développer les OCF, il aurait fallu investir dans les organismes communautaires Famille.

Il faut se rappeler que les milieux défavorisés sont déjà visés par des programmes spécifiques ? voir plus haut la référence au programme de soutien à l'école montréalaise. Les services de garde, lors de leur création, se devaient d'apporter un soutien particulier au milieu défavorisé. Dans le dernier plan de développement de 20 000 places en garderie, une des priorités pour la création des nouvelles places est l'accueil d'enfants en situation de défavorisation.

Excusez-moi, je me cherche. Est-ce que je peux me permettre un peu encore?

Le Président (M. Kelley): Oui, une ou deux minutes, parce qu'on est déjà rendus à 15. Alors...

Mme Dumouchel (Sylvie): O.K. Parfait. D'accord. Mais comment allons-nous vérifier...

M. Turcotte (Roch): On est rendus à 15...

Le Président (M. Kelley): ...l'élastique est aux limites.

M. Turcotte (Roch): On est rendus à 15. Veux-tu que je passe à la fin?

Mme Dumouchel (Sylvie): Bon. O.K. Parfait. Le projet de loi ne vise pas à apporter des réponses à l'ensemble des questions. Cependant, il ne faut pas se demander de nouveau par qui et comment seront prises les orientations plus spécifiques liées à ce vaste chantier.

Je vous l'avais dit, il est extrêmement long. Parce que nos membres ont été consultés, et on devait être le porte-parole de nos membres.

Le Président (M. Kelley): Non, non. Et je comprends tout ça, mais je veux également préserver...

Mme Dumouchel (Sylvie): Absolument! Mais j'espère que vous allez le lire à fond, par exemple.

Le Président (M. Kelley): Et je veux juste conserver le temps pour une période d'échange avec les membres de la commission.

Mme Dumouchel (Sylvie): D'accord.

Le Président (M. Kelley): Il reste environ 32 minutes. Alors, je propose 16-16. Et je vais passer la parole au ministre, en signalant que déjà votre collègue de Lévis a déjà demandé d'intervenir après vous. Alors, si on peut réserver au moins un temps pour votre collègue de Lévis. M. le ministre.

M. Tomassi: Je vais faire de même. M. le Président, merci beaucoup. M. Turcotte, Mme Dumouchel, merci d'être venus, en commission parlementaire, nous exposer le point de vue de vos membres. C'est toujours apprécié, ça nous permet de mieux comprendre les revendications puis les points que vos membres ont. Puis c'est tout à fait naturel, c'est pour ça qu'on fait des consultations particulières, ça nous permet d'entendre et d'avoir des suggestions qui nous permettront par la suite, avec les collègues ministériels et les collègues de l'opposition officielle et des autres partis, de venir bonifier le projet de loi, faire en sorte que le projet de loi puisse répondre le plus adéquatement possible au bien-être des enfants. Parce que je pense que, là-dessus, à la lecture et à la compréhension de vos paroles, vous n'êtes pas contre... on ne peut pas être contre la vertu, là, vous êtes tout à fait d'accord avec le principe même du projet de loi, avec certaines interrogations sur la société de gestion, sur la place que le gouvernement ou qu'une fondation privée puisse jouer. Je comprends vos interrogations.

On a eu la chance d'avoir des groupes, hier, on a commencé hier cette consultation qui va nous amener à la semaine prochaine, où est-ce que des groupes sont venus nous dire que, pour eux, c'était important que des membres de la société civile puissent être membres du comité de gestion et peut-être des autres comités qui seraient mis en place, comme le comité de pertinence, sur des projets. Vous, dans votre mémoire, vous allez encore plus loin quand vous dites, à la page 12, là: «Afin d'éviter la subordination des organismes communautaires à une fondation privée, il est nécessaire que la future société de gestion inclue des représentants des différents partenaires invités à soumettre des projets.»

Là, on a un problème parce que vous allez être en conflit d'intérêts. Et je ne sais pas si vous avez eu le plaisir de lire le rapport du Vérificateur général du Québec, qui est venu dire à plusieurs reprises, quand le Vérificateur a été vérifier certains organismes communautaires qui obtenaient des fonds du gouvernement, qu'il y avait à bien des reprises des conflits d'intérêts où est-ce que des membres siégeaient sur deux comités, celui qui octroyait la subvention et celui qui obtenait la subvention.

n(12 heures)n

Alors, vous ne pensez pas que c'est peut-être plus sage, et plus correct, et de façon de gouvernance beaucoup plus normale que, oui, des membres de la société civile doivent siéger sur le comité de gestion, sur la société de gestion et sur le comité de pertinence, mais, à la limite, là, des organismes qui vont être bénéficiaires du fonds... Vous vous placez en conflit d'intérêts, là, flagrant parce que vous allez prendre des décisions sur de l'argent qui va vous revenir directement, au lieu de prendre une décision basée sur la mission même et sur le bien-fondé. Je ne vous enlève pas que le projet que vous allez déposer va pouvoir être, sauf que, pour enlever toute forme de conflit d'intérêts qui pourrait exister, de saine gestion, vous ne pensez pas que ce n'est pas un peu aller trop loin?

M. Turcotte (Roch): À ce que je sache, on participe sur des consultations pour des budgets. La décision ultime du budget, on n'a jamais participé à ça, ça a toujours été au niveau gouvernemental, quand il s'agit de subvention gouvernementale. Quand il s'agit de la fondation Chagnon, actuellement, elle distribue des fonds, elle a sa propre charte, ses propres critères, c'en est une, chose.

Le jour où vous mettez ça ensemble puis que maintenant vous vous dirigez vers le milieu, là on vous dit simplement ceci... Parce que, pour nous, là, ce n'est pas par hasard que j'ai dit au début: 250 puis 150 millions. Quand on met en place un programme comme ça, le départ est lent. On s'appuie sur les organismes du milieu. Il y a un temps de prise en main du leadership. Après deux ou trois ans, il va y avoir une vitesse de croisière. Puis, dans sept, huit ans, 10 ans, il va y avoir une... vous pouvez dépenser davantage. Le problème, ça va être peut-être de ne pas défoncer le 400 millions quand ça va être parti, la machine.

Mais qu'est-ce qui va advenir après? C'est une bonne, bonne question. Nous, on pense que l'État a déjà un partenariat avec le milieu communautaire, a déjà ses institutions, les CLSC, ses écoles, puis alouette, comme le milieu municipal a déjà ses comités de loisir, et autres, déjà dans le milieu. Puis la fondation Chagnon a déjà son mécanisme. Pourquoi aller plus loin?

Puis, si vous aviez écouté mon mémoire jusqu'à la fin, là, depuis un an, il y a des choses qui ont changé dans l'économie, puis c'est en train de changer au niveau mondial. C'est drôle, actuellement, on ne regarde pas pour prendre des exemples du privé pour aller au public, on prend des exemples puis des façons de faire dans le public pour les appliquer aux entreprises privées en difficulté. Mais ça va plus loin, il y a certains P.D.G. qui sont gênés de se promener avec leur avion d'affaires, maintenant, dans le monde. Il y a une diminution de façon majeure de ces voyages-là un peu partout. Il y a de quoi qui est en train de se passer. Puis ce n'est pas sous la pression du milieu financier que ça se passe, c'est le citoyen payeur de taxes.

M. Tomassi: M. Turcotte...

M. Turcotte (Roch): C'est dans ce sens-là que je le dis. Puis, nous, on pense... Je ne sais pas si ça répond à votre question. Ce projet de loi a été élaboré... ce partenariat a été élaboré il y a un an. Il y a des choses qui sont en train de changer. On espère qu'ici, en faisant la démarche qu'on fait aujourd'hui, ça peut peut-être avoir la possibilité de modifier certaines choses.

M. Tomassi: M. Turcotte, vous ne répondez pas à ma question, là. Parce que c'était une question très précise. Mais je vais vous donner la possibilité d'y répondre par la suite, là. Il y a une grande différence, là. La fondation Chagnon, là, ce n'est pas une entreprise privée, c'est une fondation, oui, privée, mais c'est un organisme créé selon une charte. C'est une fondation qui remet de l'argent à la société. Ils n'en retirent pas un bénéfice pécuniaire à la fin, là, ce n'est pas... Je vous comprends, là, je comprends que la situation économique a le dos très large, mais il ne faut pas mélanger des pommes avec des oranges, là.

Moi, ce que je vous dis, c'est que la fondation Chagnon est une fondation qui permet l'injection de sommes d'argent pour le bien-être des enfants au Québec. Le gouvernement du Québec participe et a l'intention, avec la mise en place du fonds, de participer financièrement pour ce développement-là.

Alors, ma question, à savoir, quand vous dites «la société de gestion qui va être créée», là... Puis c'est là-dessus que je veux essayer de vous amener. La société de gestion est créée. Actuellement, c'est paritaire: cinq membres qui vont être nommés par la fondation, cinq membres qui vont être nommés par le gouvernement du Québec. Je vous dis que des groupes sont venus nous dire que des organismes de la société civile devaient siéger sur ce comité de gestion là. Une ouverture que j'ai faite, j'ai dit: Oui, ce n'est pas une mauvaise idée.

Alors, ma question. Vous allez plus loin que ça, vous dites: Nous, là, on va recevoir de l'argent du fonds, on veut siéger sur cette société de gestion. La question que je vous pose: Vous êtes en conflit d'intérêts, alors vous ne pensez pas... Vous dites: Oui, parfait, la société de gestion, la société civile a le droit d'y aller, mais on n'ira pas aussi loin de ce qu'on marque à la page 12 de notre mémoire.

M. Turcotte (Roch): ...moi, j'aimerais vous répondre. C'est que, bien, admettons, admettons qu'il y a un partenariat à trois, pour les fins de la discussion ? mais je ne crois pas, mais en tout cas ? mettons qu'il y aurait cinq personnes du milieu communautaire. Il faut être sûr qu'ils viennent de différents milieux puis qu'ils ont une différente approche. À ce moment-là, ils ne sont pas décideurs, les 10 autres sont là, tu sais. Ce n'est pas eux autres qui vont décider de l'allocation. Mais, par contre, ils peuvent emmener un éclairage drôlement intéressant par rapport aux projets qui sont soumis, puis comment ça fonctionne, puis les chances de réussite ou pas.

Mme Dumouchel (Sylvie): La communauté civile, lorsqu'on parle des gens, O.K., des civils, tout le monde est associé à quelque chose, que ce soit un... Bon. Je vais vous donner un exemple. Moi, je suis issue des milieux d'organismes de base, des milieux communautaires de base où j'ai eu à travailler avec Québec en forme, j'ai été parmi les premiers, là... premières personnes dans l'Outaouais à travailler avec Québec en forme. Lorsqu'on parle d'organismes communautaires à l'intérieur de ça, les personnes aussi civiles sont associées soit par un CLSC, une municipalité, on a tous, à un moment donné, une association à l'intérieur de ça.

Lorsqu'on parle d'une participation... Moi, cet été, j'avais bien entendu qu'il y avait une possibilité que la confédération, la fédération puisse participer à l'intérieur de ce comité-là pour faire partie, là, et donner une expertise. À savoir si on est payés? Non. Non. Ça, ça, je suis... oui, ça pourrait être un conflit d'intérêts. Effectivement, je suis tout à fait d'accord. Cependant, la Confédération des organismes familiaux du Québec défend des organismes communautaires, représente des organismes communautaires et surtout l'intérêt des familles.

M. Tomassi: Mme Dumouchel, vous avez amplement raison, et c'est pour ça que je voulais que ce soit clair. Il y a deux éléments. Lors de la rencontre que vous avez eue avec le ministère, il y a eu une ouverture à créer un comité de liaison où est-ce que les organismes communautaires Famille, votre confédération et d'autres organismes communautaires puissent être assis pour discuter de certaines problématiques et de certains aboutissements qu'on voudrait avoir.

À ce que je comprends de votre chose, et c'est pour clarifier l'élément de la page 12 qui est très important, vous ne voulez pas, dans la société de gestion, que des membres qui siègent sur la société de gestion soient des membres bénéficiaires du fonds.

Mme Dumouchel (Sylvie): Absolument.

M. Tomassi: Parfait.

Mme Dumouchel (Sylvie): Cependant, cependant, je peux peut-être ajouter quelque chose. Lorsqu'il y aura création, dans l'articulation du projet, lorsqu'il y aura des montants alloués, O.K., aux employés de la fondation ? ou je ne sais pas comment ça va fonctionner ? qu'on pense que, dans les milieux communautaires, soient payés du début jusqu'à la fin du processus, pas quand le projet va être mis en place, du début à la fin. Et, même si le projet ne fonctionne pas, que les milieux communautaires puissent être reconnus pour leur expertise et payés pour leur expertise.

M. Tomassi: Merci beaucoup, Mme Dumouchel. Alors, je vais laisser, s'il y a du temps...

Le Président (M. Kelley): Oui. M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Bonjour. Alors, merci pour le dépôt de votre mémoire et du travail que vous effectuez aussi comme organisation. Alors, moi, dans le mémoire, j'ai retenu en particulier une idée, et j'aimerais ça vous entendre la développer davantage, et j'aurais un questionnement par rapport à ça aussi. Vous dites que, «des 40 millions disponibles annuellement, il est difficile d'établir la part qu'iront chercher les organismes communautaires Famille». Vous dites: «Nous croyons que les montants attribués le seront pour le mieux-être des enfants ? donc, je pense que, de ce côté-là, par rapport à la mission et aux objectifs, tel que le signalait le ministre, je pense que vous souscrivez ? mais il est illusoire de croire que ces sommes favoriseront le développement du réseau des organismes communautaires Famille.»

C'est sûr que, par rapport au fonds qu'on a ici et le projet de loi qu'on a, l'objectif, c'est d'établir justement un partenariat en vue de mettre en commun les expériences et les ressources et les manières de faire qui se complètent. Ça inclut le milieu scolaire. Ce matin, on a, entre autres, le Conseil québécois des services de garde éducatifs qui nous ont dit: Ça prend une consultation la plus large possible. Il faut que les gens s'assoient, il faut que le milieu s'assoit ensemble pour regarder ça. Donc, et eux disent: Ce n'est pas l'apanage exclusif d'un organisme, il faut que les CPE soient impliqués, les CLSC, etc., et les parents au premier chef.

Alors donc, par rapport à ça, la création du fonds, c'est de répondre finalement à un objectif qui est très précis, soit le développement des enfants en milieu défavorisé mais avec une approche de mobilisation des communautés dont vous faites partie. Cela dit, d'investir dans ce fonds-là, ça n'empêche pas le ministère de la Famille de continuer les efforts pour soutenir les organismes communautaires Famille, là.

M. Turcotte (Roch): C'est la question qu'on pose.

M. Lehouillier: Bien, c'est ça.

n(12 h 10)n

Mme Dumouchel (Sylvie): C'est ça, c'est une inquiétude. C'est une interrogation, parce qu'on a peur d'un désengagement de l'État envers les milieux communautaires famille, puisque ça fait... Bon, je pense que notre précédent... la fédération l'a mentionné, il y a deux ans, Mme Courchesne, la ministre Courchesne a entendu nos doléances et a maintenu, oui, 15 millions, et là ce 15 millions là, on le voit apparaître, oups! dans le fonds, dans le fonds du projet de loi instituant... Et c'est quand même 15 millions par année que le gouvernement du Québec va investir. C'est bien, mais je veux... nous, à la confédération, on veut entendre le ministère de la Famille nous dire qu'il ne se désengagera pas.

Et ça, c'est une inquiétude de nos milieux, de nos milieux de base, nos organismes de base, qui se disent: C'est contraignant pour nous, on n'a pas les budgets. Il y a beaucoup de nos organismes qui n'ont même pas encore... qui ne sont même pas encore reconnus par le ministère, premièrement, et, deuxièmement, ils ne sont pas financés. Et là il y a un projet de loi qui arrive, qui a un 15 millions. Donc, il y a une inquiétude.

M. Lehouillier: O.K. O.K., alors, là, je comprends bien. Au fond, vous n'êtes pas contre le fonds, mais ce que vous dites: Nous autres, on est un peu inquiets, est-ce que ce fonds-là... Au fond, votre questionnement est le suivant: Est-ce que ce fonds-là va avoir pour conséquence de réduire nos budgets ou de nous affecter comme organismes, dans le fond? C'est ça. C'est ça, votre questionnement.

M. Turcotte (Roch): Au fond, fondamentalement, est-ce qu'on n'est pas en train de substituer ce comité-là? C'est ça qu'on pose.

M. Lehouillier: Oui. Mais je pense que ce n'est pas l'objectif du fonds. Parce qu'au fond, là, depuis 2004-2005, vous avez eu une augmentation moyenne de 21 %, je pense, au niveau de vos organismes. Donc, ce n'est certainement pas l'objectif. Mais ce qu'on voulait juste vous dire, c'est que... Je veux expliquer que le projet de loi, ce n'est pas son objectif, tu sais, de toucher aux organismes, mais c'est plutôt d'amener les gens à travailler ensemble vers un objectif commun, au fond. C'est un peu ça. En tout cas, c'est la...

Mme Dumouchel (Sylvie): Oui, mais il y a une inquiétude. Moi, je l'avais soumis cet été, il y a beaucoup une inquiétude quant à l'articulation du projet, hein, la façon que ça va être mené, l'écoute qui va se faire à l'intérieur, bon, de la fondation, du gouvernement face au milieu communautaire. C'est vraiment une inquiétude, puis c'est des interrogations que nos organismes, nous, se sont posées. C'est clair que, nous, la COFAQ, on ne remet pas en question du tout le bien-être des enfants, et, si ce fonds-là permet, cet argent-là permet ça...

M. Lehouillier: O.K. Tout à fait.

Mme Dumouchel (Sylvie): ...écoutez, on va être là. Mais on veut être là, on ne veut pas regarder passer le train, on veut être dedans, et nos organismes veulent y être aussi, parce qu'il y a des organismes qui vont peut-être, grâce à ça, permettre de mettre en place des projets qu'ils n'auraient pas pu faire à ce moment-là s'il n'y avait pas eu ce budget-là.

M. Lehouillier: Et en concertation avec le milieu.

Mme Dumouchel (Sylvie): Absolument. Bien, écoutez...

M. Lehouillier: O.K. Merci beaucoup, ça...

Mme Dumouchel (Sylvie): ...nous, on y croit, à la concertation dans le milieu.

M. Lehouillier: Bien, merci, ça répond à ma question.

Mme Dumouchel (Sylvie): D'accord, merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Gouin.

M. Girard: Merci, M. le Président. J'aimerais à mon tour saluer la Confédération des organismes familiaux du Québec. M. Turcotte et Mme Dumouchel, merci pour votre présentation. Votre mémoire reprend certains des éléments dans le mémoire qui nous a été précédemment présenté par la fédération québécoise des organismes famille. Vous nous disiez, Mme Dumouchel, que vous aviez été une des pionnières...

Mme Dumouchel (Sylvie): Justement, oui, oui.

M. Girard: ...sur le plan du partenariat avec Québec en forme, en Outaouais. Pourriez-vous nous faire part de votre expérience?

Mme Dumouchel (Sylvie): Je ne m'en cache pas, ça a été une mauvaise expérience, tout à fait négative. Pendant presque un an, on s'est retrouvés à être parachutés dans quelque chose qu'on ne connaissait pas. On parlait de santé, d'éducation physique, de bien-être pour les enfants, avec des budgets, avec des millions de dollars, et, nous, on était des organismes communautaires et on... en tout cas, moi, j'étais dans la maison de la famille à ce moment-là, et c'est nous qui accueillions, on accueillait les autres organismes communautaires. Il y a eu un désintéressement de la part du milieu parce qu'on n'avait pas l'impression que le comité était à notre écoute. En tout cas, la personne désignée par la fondation, entre autres, n'était pas à notre écoute.

À ce moment-là, nous, à la maison de la famille, on a décidé de se désengager en rapport à ce projet-là. Et on ne le regrette pas, parce que, si vous regardez Québec en forme, si vous vous attardez sur la présence et la collaboration des milieux à l'intérieur de Québec en forme, on voit majoritairement des municipalités, des écoles, des maisons de quartier, et, en 2003, les maisons de quartier n'étaient pratiquement pas financées, à ce moment-là, bien avant le transfert des budgets au ministère de la Famille. Avec le ministère de la Santé et Services sociaux, il y avait peu de budgets alloués à des maisons de quartier. Donc, c'est ce genre d'organismes là, en tout cas, dans l'Outaouais, par mon expérience, qui sont venus chercher ces budgets-là.

Il y a des belles choses qui se passent à Québec en forme, parce que je regardais, entre autres, les projets qui se faisaient, mais, dans le milieu communautaire, on a eu l'impression de ne pas être à l'écoute. Et, lorsqu'on voit... on a de la difficulté, nous-mêmes, à... on n'a pas été payés du tout pour tout le temps qu'on a mis à se rencontrer. C'est nous qui accueillions le personnel de la fondation. Il n'y avait rien. Les déplacements, on les payait, tout ça. Il n'y avait pas de... tu sais, il n'y avait pas de soutien ni de... et on ne savait même pas dans quoi qu'on embarquait. Maintenant, on le sait parce qu'à force de... Mais c'était dans les débuts, et ça a été très difficile.

Mais je prendrais juste, par exemple, un autre projet qui était le Programme d'action communautaire pour les enfants, PACE, qui est quand même un projet de Santé Canada, à ce moment-là. Et, moi, en 1993, j'ai fait partie d'un groupe des premiers organismes qui avaient PACE. Ça a été exactement la même chose. Ils nous ont greffé ça, ils nous ont dit: Vous avez... Et on ne comprenait absolument pas comment ça fonctionnait. Donc, nous, c'était ça.

Mais, moi, l'interrogation... je ne veux pas que ça se reproduise cette fois-ci. Je veux vraiment que les organismes communautaires... Ils n'ont pas toutes ces expertises-là, ils n'ont pas le personnel en place. Majoritairement, ce sont souvent des bénévoles. Il faudrait vraiment s'asseoir avec eux, leur expliquer le but des projets, le partenariat et les tenants de ce partenariat-là, pas se retrouver un petit peu, là, sans... sans écoute, là.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Est-ce que donc votre demande, c'est qu'il y ait des ressources à la disposition des organismes communautaires de la société de gestion afin de vous aider à préparer ou à formuler des demandes qui pourraient être acheminées à la société de gestion?

M. Turcotte (Roch): C'est qu'on...

M. Girard: Oui, allez-y.

M. Turcotte (Roch): Pour répondre à ça, en fait, c'est qu'on veut... parce qu'il y a des réunions, de la collaboration. Tu as des gens des municipalités, tu as des gens des commissions scolaires, tu as des gens de la fondation, tu as des gens du gouvernement, tout ce monde-là est payé. Le milieu communautaire, en face, ils se rendent là à titre bénévole quand eux autres ont l'expertise puis les façons de faire? On trouve ça complètement injuste. On dit: Si vous voulez les appeler, qu'ils soient aussi payés que les gens qui sont autour de cette table-là. Si vous n'êtes pas capables de faire ça, oubliez-les donc, parce que sinon c'est de manquer de respect pour des gens qui sont bénévoles puis qui sont impliqués dans leur milieu.

Puis c'est pour ça que ça déclenche le désengagement. On a l'impression d'être utilisés puis d'être les bouffons. Il y a quelqu'un, en quelque part, qui, un bon matin, parce qu'il est millionnaire ou milliardaire, il décide que, lui, comment ça va marcher, le milieu communautaire, puis que, là, dans cet endroit-là, c'est ça qui va être prioritaire. Pourquoi on n'aiderait pas ceux qui se prennent en main et qu'on ne les supporterait pas?

M. Girard: O.K. Vous avez eu donc l'impression que l'expertise locale, votre expérience, votre connaissance du milieu n'a pas été reconnue à sa juste valeur. Le ministre nous disait que, de son point de vue, il y a eu des enseignements qui ont été tirés de la part de la fondation et qu'il y aura des aménagements et une façon de faire qui sera différente. C'est ce qu'il nous a dit dans le cadre des travaux de la commission. Est-ce que vous sentez actuellement que le partenariat s'établit sur de nouvelles bases? Est-ce que vous sentez qu'il y a un changement et qu'avec cette proposition du nouveau fonds, ça va se faire sur des bases différentes?

M. Turcotte (Roch): Bien, nous, nous, fondamentalement, le milieu communautaire... Puis on est une confédération, en passant, hein? Une confédération, ça n'offre pas des services directement aux gens. C'est les gens en dessous qui... des choses. Ça fait que... Alors, clarifier, là, l'histoire de conflit d'intérêts, là, c'est une autre réalité. Nos conseils d'administration sont formés de gens qui viennent de différents organismes. C'est comme ça que ça fonctionne.

Parce que le milieu communautaire, ça a une logique puis une motivation différentes. C'est des gens passionnés, des gens qui sont capables de mobiliser les gens autour d'eux puis qui sont capables d'agir parce que le problème est suffisamment majeur, puis de soutenir, puis de donner des services, que ce soient des répits, que ce soient des cours prénataux, que ce soient des relevailles, que ce soient des garderies ou des haltes-garderies, etc. C'est ça qui est à la base. Puis nous, on dit... Puis il y a un minimum de décisions qu'ils prennent. On ne veut pas arriver avec quelqu'un de l'extérieur qui dit: Vous allez maintenant... vous êtes des bénévoles, vous allez travailler pour moi puis vous allez le faire dans le sens que vous voulez que j'aille, sans savoir si, dans le milieu, c'est vraiment une priorité. Parce que, si les gens se mobilisent, c'est une priorité. Si les gens, ils sont capables de mobiliser des gens autour d'eux puis de participer à des réunions bénévoles puis d'agir année après année, c'est parce que c'est important. Mais on ne veut pas que ce soit détourné à d'autres fins.

On dit: Vous avez de l'argent, vous avez des fonds, venez les supporter ? c'est ça qu'on dit, fondamentalement ? parce que, là, vous allez être gagnants, puis, dans 10 ans, si, à un moment donné, la fondation se retire puis elle est partie sur autre chose, bien, il y aura une relève qui se prendra puis on pourra continuer. Tandis qu'autrement est-ce que c'est une autre façon de dire: On se désengage?

n(12 h 20)n

Puis c'est une tierce personne. Parce que la fondation aussi se désengage en confiant l'argent à un tiers. Ce n'est plus elle qui prend la décision, c'est un tiers. Le gouvernement, ce n'est plus lui qui prend la décision, c'est un tiers. C'est pour ça qu'on a des problèmes sur la façon de faire. Parce que le gouvernement peut déjà en donner, des subventions, on a déjà des organismes familiaux, il y a déjà un mode de financement. La fondation aussi, elle a déjà son mode de financement. Elle agit déjà, la fondation.

M. Girard: Est-ce que je comprends de vos propos que vous vous posez la question sur la nécessité d'avoir un intermédiaire? Ou vous dites: Il y a déjà une fondation, une fondation qui existe, qui donne de l'argent en fonction des critères qui sont établis et un gouvernement qui élabore des politiques publiques et qui finance des organismes communautaires selon des critères. Vous vous posez la question sur la pertinence d'avoir un intermédiaire.

M. Turcotte (Roch): On disait: Si ça ne marche pas, là, est-ce que le citoyen peut aller se plaindre à son député? Qui va répondre? Est-ce que c'est la fondation qui va répondre ou c'est le ministre? C'est ça, la bonne question. Parce que c'est bien beau, le partenariat, mais, à un moment donné, il faut qu'il y ait quelqu'un qui soit responsable en quelque part.

Mme Dumouchel (Sylvie): Qui est le fiduciaire? Quand on est fiduciaire ? c'est ça, on en parlait ? quand on est fiduciaire, il y a un problème avec un employé ou un projet, les gens ont le droit de se plaindre et de dire: Nous, on n'est pas satisfaits du service, ou de l'activité, ou du programme qui est mis en place. Vers où on va se diriger: celui qui est fiduciaire ou les six organismes en partenariat, ou un seul, ou deux? Qui? Et là, c'est là, la... Et c'est pour ça que...

Les organismes communautaires ont déjà beaucoup seulement avec leur mission globale, leur propre mission. De mettre en place d'autres programmes en partenariat, c'est certain qu'il va y avoir un... pas un désintérêt, mais une fatigue. Les organismes ont un budget à peu près de 55 000 $ environ, les organismes famille, puis on leur demande de mettre en place, en collaboration, en partenariat avec d'autres milieux, des programmes pour les enfants de cinq ans et moins de milieux défavorisés pour la scolarisation, pour des soutiens. Bien, faites en sorte de les soutenir aussi, les milieux communautaires, parce qu'on est là depuis très longtemps, on a une expertise, une façon de penser.

Et, pensez-y comme il faut, les milieux communautaires, ce sont des gens, ce sont des civils. C'est sûr qu'ils siègent sur le conseil d'administration, ce sont des civils, ce sont des personnes qui ont mis en place des organismes communautaires par des besoins de leur... Souvent, c'est par leurs propres besoins. Et, à ce moment-là, il ne faut pas les... il faut les soutenir. Et peut-être un substitut, je ne le sais pas, mais il y aurait une possibilité à ce moment-là. Mais je répète qu'il faut les soutenir financièrement, les organismes familiaux, et pas seulement avec la mission globale, mais aussi avec... pas seulement avec notre budget de mission, mais aussi, si vous nous demandez d'être partenaires, faites en sorte que vous reconnaissez cette forme de partenariat.

M. Girard: Je comprends donc, M. Turcotte, de vos propos que, pour vous, c'est important que le ministère soit imputable, responsable, puis qu'il y ait une reddition de comptes face à ces sommes qui sont engagées, et que vous ne souhaitez pas, dans le fond, qu'on délègue des responsabilités à d'autres, là.

M. Turcotte (Roch): Exact.

M. Girard: O.K. Je comprends ça. Vous mentionnez aussi qu'il doit y avoir une meilleure représentation ou une meilleure... qu'on tienne davantage compte de la...

M. Turcotte (Roch): Représentation, représentation et compréhension au sein... comment ça oeuvre dans le milieu, comment ça fonctionne, pour penser à la relève après 10 ans. Si on a mis 10 ans, c'est parce qu'on pense qu'on pourrait se désengager? Comment qu'on a vu ça, les programmes, que ça existe puis ça tombe. Le milieu communautaire est habitué à ça, hein? Tu as un financement, tu n'en as pas. C'est nouveau qu'on ait un financement pour le milieu de la famille. C'est stable, ça fait deux ans que ça existe. C'est nouveau.

M. Girard: Je comprends aussi que vous souhaitez qu'il y ait une composition différente au niveau de la société de gestion. Vous avez eu des échanges avec le ministre. Le ministre nous dit que, dans le protocole d'entente, qui n'est toujours pas déposé, donc qui n'est pas disponible pour les organismes qui viennent présenter un mémoire, nous, on le déplore puis on souhaite que le ministre change son fusil d'épaule d'ici la fin des consultations, que... il nous dit aussi qu'il y a un comité de liaison. J'imagine que c'est peut-être dans le protocole d'entente, on ne le sait pas, je ne l'ai pas vu, comme parlementaire, plus que vous. J'imagine que le ministre, un jour, nous en informera.

Est-ce que vous souhaitez que, dans le projet de loi ? il y a 16 articles ? le ministre ajoute des articles sur la composition de la société de gestion, la représentation, la société civile et également un volet sur la représentation régionale? Parce que vous y faites référence dans votre mémoire qu'il y a une expertise qui est présente dans les différentes régions du Québec. Est-ce que c'est des amendements que vous souhaiteriez que le ministre apporte au moment de l'étude article par article du projet de loi?

M. Turcotte (Roch): C'est que, nous, en fait, ce qu'on est en train de dire, c'est qu'il doit y avoir quelqu'un qui est responsable de ça.

M. Girard: Bien oui.

M. Turcotte (Roch): Nous, on pense que les gens ont droit de se plaindre, qu'ils ont droit de porter plainte, puis il doit y avoir quelqu'un, en quelque part, qui répond de ça. Ça existe dans le milieu communautaire, en passant, hein? On ne voit pas pourquoi que, si ça existe pour nous autres, ça n'existerait pas pour une fiducie.

Bien, je vais vous rejoindre là-dessus. C'est évident que, nous, on pense que c'est le ministre de la Famille, signataire du protocole, qui est responsable ultimement, mais ce n'est pas écrit. Ça fera peut-être l'objet de négociation, peut-être, je ne sais pas. Si le 15 millions puis 25 millions, il y a un enjeu, peut-être bien que... Je ne le sais pas, là, mais il faut que ce soit clair, ces affaires-là, là. Il y a comme une ambiguïté, là, qui n'a pas été réglée. Je connais...

Mme Dumouchel (Sylvie): Tantôt ? excusez-moi ? vous souligniez... Nous, on souligne l'importance des organismes régionaux, des tables de concertation. On a vu un désengagement du gouvernement, du ministère de la Famille à l'égard... à la dernière... Les organismes régionaux, à part de la table de concertation à Montréal, les organismes familiaux régionaux, les tables, là, ils n'en ont pas eu, de subvention. Et, nous, on demande... O.K., peut-être une table de liaison, mais, moi, j'avais mentionné à la sous-ministre, Mme Bérubé, l'importance aussi des regroupements régionaux famille, qui ont une expertise encore plus pointue parce qu'ils connaissent leur région, ils connaissent leur milieu communautaire. Et je pense qu'eux aussi devraient faire partie prenante, pas de la gestion mais du comité de liaison, pas seulement les... Et ça, ça n'entache pas, ça n'enlève pas l'importance que, nous, la confédération, on veut y être, mais je ne veux pas non plus mettre en dessous du sable et enterrer les tables de concertation régionales de famille qui sont sous-financées et qu'on ne reconnaît plus. Et la confédération refuse ce genre de fonctionnement là. Il ne faut pas que ça se passe à Montréal, Québec, Laval, il faut que ça se passe dans les régions, le prochain projet.

Le Président (M. Kelley): Dernier commentaire, très rapidement.

M. Girard: Vous dites aussi, à la page 10 de votre mémoire, vous posez la question si les milieux qui ne sont pas défavorisés pourront soumettre des projets. Quoi, vous avez une crainte qu'il y ait une concentration uniquement dans les secteurs dits, identifiés comme milieux défavorisés, mais que, dans des secteurs où il y aurait une richesse plus importante mais des poches de pauvreté, que ces milieux-là soient, si vous voulez, un peu oubliés ou... C'est votre crainte? Et est-ce que vous souhaitez qu'il y ait des aménagements dans le projet de loi pour tenir compte de la réalité de milieux qui ne seraient pas dits, identifiés comme défavorisés mais où il existe des poches de pauvreté?

M. Turcotte (Roch): C'est qu'on pense que, dans les régions comme la Côte-Nord, la Basse-Côte-Nord, l'Abitibi, l'Arrière-Pays, ils ont une façon de faire, puis il y a aussi une pauvreté qu'ils admettent ou pas. Ils ne sont pas cartographiés. Moi, je regarde les villes comme Québec, Montréal, Trois-Rivières, les zones, les poches de pauvreté en milieu urbain sont cartographiées, tout le monde, c'est reconnu. À Lévis aussi, il doit y en avoir. C'est ciblé, là. C'est le bâti comme tel, etc., qui fait que les gens se regroupent là. Mais, dans le reste du Québec, ce n'est pas nécessairement comme ça.

On veut que les gens soient sensibles à financer des projets qui rejoignent ces gens défavorisés et via les parents. Parce que ce qui a été dit précédemment, tu rejoins les parents pour rejoindre les enfants. Ce n'est pas compliqué, ça, là, là. On veut que ça soit pris en considération.

Mme Dumouchel (Sylvie): Et, les maisons de la famille ? vous connaissez le fonctionnement des maisons de la famille ? c'était une inquiétude. Lorsqu'on a consulté nos maisons de la famille, ils nous ont dit: Nous, on ne peut pas stagner à dire: Bon, toi, tu es défavorisé; toi, tu n'es pas défavorisé. Lorsqu'on offre des activités et des services auprès de la famille, c'est auprès de la famille. C'est pour ça qu'on dit qu'on est toujours pauvre d'un autre... on est toujours plus pauvre qu'un autre, hein? Et, à quelque part, je pense que, oui, tous les milieux, tous les secteurs, les quartiers, les villes et les organismes ont le droit de présenter des projets, même si la clientèle...

n(12 h 30)n

Parce que c'est quoi, défavorisé? C'est ça, c'est pour ça que, nous, c'est une question que les maisons de la famille se posaient. Lorsqu'on offre des activités, on ne l'offre pas seulement en milieu défavorisé, malgré que majoritairement des activités sont gérées et sont dirigées vers eux. Donc, il ne faut pas non plus ? comment je pourrais dire le terme? ? inscrire... C'est ça que les gens aiment des maisons de la famille, les milieux pauvres aussi, c'est de dire: Moi, je ne me sens pas catalogué comme étant d'un milieu pauvre. On souhaite, les maisons de la famille souhaitent que ce soit exactement la même chose lorsqu'il y a des projets mis en place, que ce soit pour l'ensemble de la famille.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Dumouchel... Oui?

M. Tomassi: ...M. le Président, je ne veux pas qu'ils partent sans que le commentaire soit fait. Je vous inviterais à lire l'article 1 et l'article 14 du projet de loi. Quand vous dites qu'il n'y a personne qui est redevable sur la création du fonds, je veux seulement vous dire que l'article 1 est très clair: «Est institué, au ministère de la Famille et des Aînés, le fonds...» Et l'article 14 dit: «Le [ministère] de la Famille est chargé de l'application de la présente loi.» Alors, il y a quelqu'un qui est redevable, ça va être le ministre de la Famille vis-à-vis les parlementaires et devant l'Assemblée nationale.

M. Turcotte (Roch): ...

Le Président (M. Kelley): Et, sur ça, il me reste à dire merci beaucoup aux représentants de la Confédération des organismes familiaux du Québec.

On va suspendre nos travaux jusqu'à 15 h 30, en cette même salle. La salle va être barrée. Alors, si les personnes veulent laisser les documents, on peut le faire en pleine sécurité. Merci beaucoup, tout le monde.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

 

(Reprise à 15 h 35)

Le Président (M. Kelley): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des affaires sociales reprend ses travaux.

Je vais vous rappeler le mandat de la commission. Elle est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 7, Loi instituant le fonds de développement des jeunes enfants.

Nous avons deux témoins cet après-midi, la Centrale des syndicats du Québec et la Fédération des commissions scolaires du Québec. Alors, on existe maintenant, notre question existentielle est réglée, alors je vais céder la parole au président de la Centrale des syndicats du Québec, M. Réjean Parent.

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

M. Parent (Réjean): Merci, M. le Président. Donc, en vous indiquant que je suis accompagné de Luc Allaire, conseiller syndical à la centrale.

Je vous dirais, pour peut-être la première fois depuis que je participe à une commission parlementaire, je me serais senti plus à l'aise assis à la place du ministre, à pouvoir l'interroger assis à cette place, dans le sens où le projet de loi, je vous dirais, nous laisse plutôt en questionnement, compte tenu de sa brièveté et compte tenu de tout ce qui s'est dit autour. Je vous dirais, bon, évidemment, on parle d'un fonds pour le développement des jeunes. Évidemment, dans un contexte comme celui-là, qui serait pour le développement des jeunes? Je pensais même qu'une partie des budgets de l'État devait être consacrée au développement des jeunes.

Je regarde, dans notre environnement, on représente des gens qui travaillent tant dans le secteur santé et services sociaux, dans le secteur de l'éducation, dans la petite enfance, tous les services prénataux, des CLSC, des CSSS. J'étais sur le territoire du Saguenay? Lac-Saint-Jean hier, où je constate, je veux dire, qu'à la fois on a de bons programmes, mais certaines fois il manque de ressources pour pouvoir, je veux dire, rencontrer l'ensemble de la population. Les infirmières que je rencontrais me disaient: On ne se peut plus, il y a des gens qui sont abandonnés à leur sort.

On a développé des services à la petite enfance, des centres de petite enfance, des responsables de services de garde en milieu familial, mais en même temps on a, par le biais d'une loi, coupé des ressources éducatives, conseillers pédagogiques, dans ces réseaux-là, avec la loi n° 125, si mes souvenirs sont bons ? on n'est pas à un chiffre près. Je regarde: maternelles quatre ans en milieu défavorisé, moratoire depuis 1998 sur la création de maternelles quatre ans en milieu défavorisé, mais pourtant c'est un programme qui existe. Animation Passe-Partout, préscolaire cinq ans.

Ça, quand on dit: Pourquoi une telle loi, pourquoi la création d'un tel fonds dans un contexte où il existe des programmes gouvernementaux pour le développement des jeunes du Québec?, bien on réalise en même temps, en parallèle, qu'on a comme, au fil du temps, amoindri, dilué, tu sais, le service d'État. Ces programmes-là souffrent de certaines carences et ils pourraient être bonifiés. Ils produisent certains bons résultats et ils pourraient être encore plus performants.

Mais, dans le moment, on nous amène aujourd'hui avec un fonds, un fonds, 15 millions. Ça fait un peu paradoxal aussi, hein, 15 millions de la taxe du tabac pour développer les jeunes. Tabac et jeunes, ça ne développe pas beaucoup, mais, bon, c'est de l'argent, hein? Et fort probablement que c'est un projet qui est fondé sur le principe que l'argent n'a pas d'odeur, mais, nous autres, ça nous heurte un peu, je veux dire. Un fonds où le gouvernement du Québec, dans une dynamique, créerait ce fonds avec un comité de gestion, avec quand même le projet de loi. Tu sais, en termes de transparence, c'est-à-dire, bien, qui va contribuer? Bon, il faut lire un communiqué de presse, il faut aller voir le budget du gouvernement pour constater que derrière il y a la fondation André-Chagnon. Il pourrait y avoir d'autres ministères que le ministère des Finances qui peuvent contribuer, il pourrait y avoir des legs de d'autres. Un comité où finalement il y a une gouverne paritaire, je veux dire, il y a des élus puis... ou du moins du monde désigné par des élus et des gens désignés par un millionnaire québécois, tu sais, en termes de... Puis, aïe!, on nous dit qu'il y aurait un protocole, protocole qu'on ne voit pas non plus. Donc, ça ne pèche pas par excès de transparence pour ce qui est de ce projet-là. En tout cas, à sa face même, c'est ce qu'il n'y a pas dedans, là, qui nous interpelle dans le moment. Le genre de gouverne, tu sais.

n(15 h 40)n

Depuis quand, je veux dire, dans des programmes gouvernementaux, dans des missions d'État, là, spécifiques puis ce que j'ai mentionné pour le développement des jeunes ? puis il me semble que, là, on est dans un rapport direct ? on va se condamner, je veux dire, à créer un fonds parallèle? Je ne comprends pas trop la passe. Je pense que le gouvernement pouvait de lui-même oser dépenser ou tout au moins investir dans ses propres programmes sans demander la permission à un conseil, à une fondation. Je veux dire, je comprendrais qu'une fondation intervienne... Je veux dire, si on était dans le tiers-monde, qu'il y ait une fondation quand on n'a pas les moyens puis les ressources, mais là on est supposé d'être une société... On ne parle pas d'une économie émergente ou d'un pays en voie de développement, là, on parle du Québec. Et en plus dans un contexte où on renvoie ça puis pour recevoir des projets, puis là, c'est...

Évidemment, on parle aujourd'hui de fonds pour le développement des jeunes. Puis il y a différents fonds. La semaine passée, c'est le premier ministre qui annonçait sa stratégie jeunesse, puis: Envoie, un petit fonds pour contrer le décrochage! Vous avez entendu la première vice-présidente de la centrale sur le fonds pour les proches aidants. On a le fonds sur les saines habitudes. Tu sais, à un point tel, nous, on se demande: La journée où M. Chagnon s'en va ailleurs, faut-u fermer le Québec?

Tu sais, moi, je pense qu'il y a là une drôle d'abdication de la part du gouvernement par rapport à ses responsabilités. En tout cas, ça... Et ça nous heurte profondément, je veux dire, de penser que du monde peuvent s'acheter un État. Je veux dire, dans certains coins du monde, on dirait: On est en pleine république de bananes. Je veux dire, on a un appareil gouvernemental, on a un gouvernement, on a une haute fonction publique, mais on va avoir du monde qui vont venir s'installer à une table, et là: Nous, on met de l'argent puis on va vous dire comment le dépenser. Et là je vois l'éparpillement de projets de tout acabit, tout un paquet de savants qui vont venir dire: Bien, on devrait procéder de telle ou telle façon.

Moi, si M. Chagnon veut donner de l'argent, s'il veut être charitable, je salue ça. Moi, j'aime mieux une société ou un pays solidaire. Mais, s'il faut avoir de la charité, que voulez-vous, vivons-en, mais il y a toujours bien une limite. S'il a besoin d'aide pour savoir à qui il devrait faire ses chèques, bon, il pourra appeler le ministre de la Famille, là, mais on n'a pas besoin d'un comité de gestion de fonds, des fonds d'État déterminés par une parité d'administrateurs de la fondation Chagnon. Ça fait que vous...

Mais ça, je dirais qu'on est plus à poser des questions, aujourd'hui. À la lumière de ce qu'on connaît, il n'y a aucun intérêt, du point de vue de la Centrale des syndicats du Québec, que de souscrire à une pareille loi, de voir un État abdiquer à ses responsabilités.

Là, ce n'est pas des farces, on parle du développement des jeunes. Et en plus, dans 10 ans, quand on fermera le fonds, j'espère que tous les jeunes vont être développés, parce que, s'il n'y en a pas de développés, on fait quoi, là? On dit: Oups! il n'y a plus de M. Chagnon, il n'y a plus de monsieur millionnaire, ça fait que... qu'ils tombent dans le sous-développement.

Ça fait que je vous dis bien sérieusement: Pourquoi une telle loi? Quelle nécessité s'impose dans un contexte où, quand on parle du développement des jeunes, les responsabilités qui incombent, les programmes qui existent, les programmes... Et ce n'est pas supposé de se substituer aux programmes gouvernementaux, et on voit qu'il y a des carences dans les programmes gouvernementaux. Je ne dis pas que c'est des carences qui sont arrivées la semaine dernière puis je ne veux pas le faire porter au gouvernement actuel, pas plus qu'à l'ancien. Je dis tout simplement que, si on a des efforts puis si on a de l'argent à placer dans le développement des jeunes, bien, il y en a, des coups à donner en petite enfance, je veux dire, à renforcer notre capacité d'amener les jeunes des milieux défavorisés aux services de la petite enfance. Alors, ça va agir sur la stimulation, ça va agir sur le cognitif, sur le langagier, sur le culturel.

Donc, on a les portes d'entrée, mais on a un gouvernement qui semble vouloir renoncer à son budget pour dire: On va confier le soin à une cogestion mais pour... tu sais, je vais comme ? excusez l'expression ? barguigner, je veux dire, la capacité de décision pour avoir un peu de charité. Il me semble que ça ne fait pas sérieux de la part d'un gouvernement. C'était tout, M. Kelley.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission, en commençant avec les députés à ma droite. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Tomassi: Alors, merci. Merci beaucoup. M. Parent, je voudrais vous souhaiter encore une fois la bienvenue. Vous qui êtes un habitué des commissions parlementaires sur divers sujets, et c'est tant mieux. Vous apportez vos représentations, vos vues sur les divers projets de loi qui sont déposés par le gouvernement, ce qui fait en sorte que des fois vos commentaires viennent bonifier des projets de loi, des fois non. C'est tout à fait normal. C'est ça, la démocratie, ça permet à avoir cet échange. Je ne vous convaincrai pas aujourd'hui, là, de votre position, puis vous ne changerez pas de position quand vous allez sortir d'ici, puis je suis complètement en accord avec ça, c'est tout à fait correct.

Le fait de dire que le gouvernement se déresponsabilise, je ne crois pas. Le gouvernement a pris l'intention, et l'intention est de travailler en collaboration avec des acteurs du milieu qui veulent participer au développement du Québec. La fondation Chagnon en est un exemple, de gens, de fondations qui veulent participer au Québec. Ils l'ont fait à d'autres instances. On a eu des groupes qui sont venus nous dire ici tout le travail qui est fait actuellement en collaboration avec la fondation Chagnon, que ce soient les CPE ou l'action municipale, le carrefour de l'action municipale, qui est venu nous dire que l'apport que la fondation fait sur le terrain est bénéfique.

Pour nous, l'essence même du projet de loi, c'est une loi qui est mise en place, la reddition de comptes, c'est le ministre de la Famille qui va l'avoir, le projet de loi est très clair en cette matière. Avant vous, il y a eu la coopérative des associations familiales qui sont venus nous parler puis avaient la même interrogation. J'ai fait le point au micro avant qu'ils partent, et, quand j'ai été le voir, il m'a dit: Oui, je le savais, mais j'ai voulu que vous le disiez au micro, que c'était ça, que le ministre de la Famille était redevable vis-à-vis le ministère et vis-à-vis les parlementaires.

On a mis au clair, la première journée, que le Vérificateur général du Québec a le droit de venir vérifier les livres de la société de gestion parce que la société de gestion va être une entreprise de l'État, parce que le gouvernement nomme au moins 50 % des administrateurs de la société. Ce n'est pas fait en vase clos, là, le ministère garde ses entrées. La mission même de la fondation, on y a adhéré parce que ça répond à l'essence même du principe qui guide le ministère de la Famille depuis ses tout débuts. Puis, si vous lisez, l'historique du ministère de la Famille va dans ce sens-là, qui est reporté aussi dans le projet de loi, dans les premiers articles, surtout l'article 2, 1 et 2 du projet de loi.

Bon, c'étaient mes commentaires. Vous avez les vôtres, et je les respecte. Je voulais peut-être vous poser une petite question, M. Parent. Vous, en tant qu'organisation syndicale, la CSQ, la corporation, la Centrale des syndicats du Québec, j'aurais aimé ça savoir votre participation à la vie sociale du Québec. Là, je comprends que vous êtes une... Puis ce n'est pas, ce n'est pas... Je veux voir, là, jusqu'où qu'on peut aller avec cette collaboration. Je sais que la CSN est portée plus sur le développement de l'économie sociale, la FTQ aussi, dans un certain sens. Dernièrement, ils ont investi pour l'achat d'un terrain pour une coop d'habitation dans le secteur chaud de Montréal-Nord. Je voulais savoir de vous, de votre part, votre participation s'établit sur quels points. Quels projets vous mettez de l'avant ou vous financez avec l'aide d'autres collaborateurs, à la limite aussi le gouvernement, là? Je ne le sais pas, là, je ne me suis pas renseigné, là. J'aimerais peut-être vous entendre.

M. Parent (Réjean): Sur notre participation. Bien, je vous dirais, en partant, je veux dire, dans ne serait-ce que l'origine puis la provenance de nos membres, on est dans la participation sociale à temps plein, je veux dire, quand on est dans les institutions scolaires, dans les institutions collégiales, dans le système de santé et services sociaux, quand on est dans les centres de petite enfance, quand on est dans le loisir, le communautaire. Ça fait que déjà, là, je veux dire, on est au service de la population en ligne directe, là, on est dans la première vague.

Mais, si vous regardez, sur l'implication sociale, l'engagement social de la centrale, ça se traduit de différentes façons, plus souvent qu'autrement, je veux dire, à soutenir financièrement différentes demandes à la limite de nos moyens. C'est sûr qu'on n'a pas les moyens de l'État. Je dirais, dans nos plans de grande réussite, toute la question de l'éducation à un avenir durable, au-dessus de 1 000 établissements scolaires, c'est un programme qu'on supporte à bout de bras, un peu de subventions de RECYC-QUÉBEC. Mais c'est un programme, quand on parle de développement durable, qui touche une éducation fondée sur des valeurs de solidarité, de démocratie, de développement écologique et solidaire, donc c'est pacifiste.

n(15 h 50)n

M. Tomassi: ...je vous comprends, oui, oui.

M. Parent (Réjean): Donc, dans ce sens-là, je veux dire, oui, voilà un engagement qui se marque dans la société, qui a marqué des milliers de jeunes depuis 15 ans et qui se traduit... Je veux dire, on pense que beaucoup de vos confrères et consoeurs s'y réfèrent. On voit, dans différents forums de jeunes, les référents, je veux dire, au travail qui a été fait dans l'ensemble des établissements. Donc ça, je dirais, c'est peut-être la plus grande, de soutenir...

On participe aussi au réseau de la mutualité, au Conseil de la coopération, donc axés beaucoup sur la solidarité, la coopération. Et, dans ce sens-là, je pense qu'on peut présenter, je dirais, une fiche assez gagnante sur notre engagement social. On dépasse nettement nos préoccupations corporatistes.

M. Tomassi: Dans votre mémoire, à la page 7, vous indiquez, là, dans la section Les forces: «De plus, nous réitérons l'importance de préciser dans le projet de loi, comme il a été prévu, que toutes les activités financées par le fonds ne comprendront pas celles qui résultent des programmes réguliers établis ou approuvés par le gouvernement.» Ça, je crois que vous venez répondre à l'article 2, le troisième alinéa, là, qui parle: «Les activités, projets et initiatives qui peuvent être financés par le fonds ne comprennent pas ceux qui résultent de programmes réguliers établis ou approuvés par le gouvernement.» Est-ce bien ça?

Une voix: Oui.

M. Tomassi: C'est bien ça? Alors, vous avez compris que les activités régulières d'un organisme ne seront pas financées par le fonds, mais c'est des activités autres qui vont être financées par le fonds. C'est ça?

M. Allaire (Luc): Oui.

M. Tomassi: Merci. Alors, moi, je n'ai plus d'autre question, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Parfait. Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme St-Amand: Merci, M. le Président. M. Parent, merci beaucoup de partager votre point de vue. Dans un premier temps, j'aurais trois volets à ma question, si vous permettez, M. le Président. Je voudrais juste être sûre que je comprends bien. Le point de vue que vous nous partagez, vous vous faites le porte-parole des enseignants, des personnels de soutien, des professionnels, c'est à cet égard-là que vous exposez ce point de vue là? Est-ce que je... Je veux juste bien comprendre.

M. Parent (Réjean): Bien, comme président de la CSQ, je porte le point de vue de la Centrale des syndicats du Québec, qui reflète un point de vue personnel du réseau scolaire toutes catégories confondues, du réseau collégial, les gens qu'on représente, comme celles et ceux qu'on représente en santé et services sociaux, comme celles et ceux qu'on représente dans d'autres domaines.

Mme St-Amand: O.K. Ce que je veux savoir, c'est que c'est vraiment notre personnel enseignant qui est dans nos écoles, puis tout ça. C'est ce point de vue là. Je comprends que c'est ça.

Expliquez-moi. Tantôt, vous avez dit: Il y a le fonds de ci, il y a le fonds de ça. Puis là je ne comprends pas bien, mais est-ce que c'est parce qu'il y a trop d'argent? Tantôt, vous avez dit: Là, si on se ramasse avec un fonds de ci, un fonds de ça...

M. Parent (Réjean): Non. Regardez...

Mme St-Amand: Juste comprendre votre point de vue. C'est important.

M. Parent (Réjean): Regardez, non, non, quand j'ai mentionné les fonds, moi, je regarde le nombre de créations de fonds que le gouvernement est en train de faire actuellement: le fonds d'aide aux proches aidants, on a le fonds sur les saines habitudes de vie, le fonds... je dis «fonds», tout au moins, dans la stratégie jeunesse, un nouveau fonds de 50 millions, 10 millions par année, 5-5, et là, aujourd'hui, on a le fonds... Mais c'est... Pourquoi ce besoin de création de fonds à l'infini de la part du gouvernement, d'avoir des comités de gestion en parallèle à tout ça?

Moi, là, que la fondation... Puis je n'ai rien contre la fondation André-Chagnon, là. Je vais être bien clair aussi, là. On est pour le développement des jeunes. Que des gens qui, plutôt que de dépenser ou d'aller placer ça dans les îles Cayman, veuillent faire du bien chez nous, on est pour ça. Mais où le bât blesse, c'est en quoi le gouvernement... Je veux dire, je trouve ça un peu vénal, là, dans le sens de se retrouver à dire: On va mettre 15 millions pour avoir un 25 millions, puis en plus on va donner la commande, sur le 15 millions qui est de l'argent d'État, puis on va se faire faire contrôler par d'autres. C'est dans ce sens-là.

Tu sais, moi, que le gouvernement, là, dépense l'argent des contribuables puis rende des comptes, comme le dit le ministre, parfait, c'est son rôle. Puis, pour ce qui est de M. Chagnon, s'il veut s'engager dans la communauté, il n'a pas à mettre l'État sous condition. Parce que c'est comme ça qu'on le prend, le projet de loi, c'est comme ça qu'on prend les autres projets de loi. Tu sais, à un moment donné, c'est de mettre sous condition puis avec... Puis là, après ça, on pourra regarder peut-être l'avenir, dans quoi il le placera puis comment il le placera, je veux dire, en termes de projets.

Ça fait qu'on pense qu'il y a des services de base, il y a des services qui pourraient être de qualité, qui pourraient être, dans le moment, renchaussés. Puis, plutôt que d'aller placer 15 millions dans un fonds qui va appeler, je veux dire, à se découvrir des nouvelles vertus d'aide aux jeunes, là, bien, il faudrait tout au moins faire opérer puis faire fonctionner les programmes qui sont déjà dessinés par l'État, pour ce 15 millions là.

Puis, pour le restant, si M. Chagnon veut s'investir dans les communautés, libre à lui, libre à lui. Puis il n'a pas besoin d'une loi pour faire ça. Puis, s'il a besoin du gouvernement pour se faire guider puis aider: Vous savez, M. Chagnon, vous pourriez mettre votre argent à tel endroit ou telle place, bien, il se le fera dire, mais ça ne prend pas encore une loi pour faire ça. Ça fait que ce n'est pas une question qu'il y a trop d'argent, c'est une question que de mettre l'État sous condition pour avoir du financement, ça nous apparaît inapproprié.

Mme St-Amand: Est-ce que, du point de vue de la CSQ, l'intervention précoce auprès des enfants ? hein, on parle du 0-5 ans ?  est-ce que c'est un point de vue que la CSQ partage dans l'importance de cette intervention-là?

M. Parent (Réjean): Oui, parce que, si vous regardez les propositions qu'on a mises de l'avant, là aussi, je veux dire, en termes d'engagement social, pour poursuivre dans la lancée du ministre, on a une campagne d'éducation, j'ai tourné, j'ai fait l'ensemble de la province, on a dégagé cinq grands axes, et l'un de ces axes-là pour justement favoriser la réussite éducative, pour favoriser la persévérance scolaire, c'est de travailler en amont. Ça fait que donc on ne remet pas en question qu'il faut...

Je vous le dis, travailler pour les jeunes, développer les jeunes, le développement intégral des jeunes, il n'y a aucun problème de fondement là, là. Puis que cette volonté-là soit au ministère de la Famille, qu'elle soit dans plusieurs ministères ? parce que je pense que ça peut être une responsabilité partagée par plusieurs ministères, puis y compris par le gouvernement ? ce n'est pas un problème non plus. On n'a pas une objection sur le fonds, de savoir: Écoutez, occupez-vous pas des enfants, ils vont grandir tout seuls à l'école. Ce n'est pas ça, le message qu'on place. On est dans: Pourquoi cette loi? Qu'est-ce qu'elle nous ajoute de plus? Qu'est-ce qu'elle vient... En quoi bonifie-t-elle une situation?

Je veux dire, je vous ai parlé de programmes qui existent depuis moult années, qui ont des carences majeures. Mais là on se crée un fonds à côté. C'est comme si on conditionnait, je veux dire: Bien, pour avoir un 25 millions de charité, on va mettre un 15 millions d'État puis on ira aux projets au jour le jour, vaille que vaille, avec des messieurs et mesdames de la fondation Chagnon qui nous dirons si c'est des bons ou mauvais projets, alors que l'État, je veux dire, je pense qu'on... En tout cas, tout au moins, on doit avoir un gouvernement souverain, souverain, au sens qu'on a des parlementaires qui ont à administrer le bien public. Bien, administrez-le puis, tu sais, dépensez le 15 millions à la bonne place, sans avoir besoin de la permission de M. ou Mme Chagnon, là, puis ceci dit, là, en toute considération pour eux. Et je salue leur engagement au Québec. Puis, s'ils veulent en mettre, ils en feront, mais ils n'ont pas à conditionner l'État.

M. Allaire (Luc): ...ajouter un point. Quand on parle de programmes réguliers, dans les services des centres de la petite enfance, il y a des besoins importants qui ne sont pas comblés, notamment dans les milieux défavorisés. Si on va voir dans les milieux défavorisés, il y a très peu d'enfants qui vont dans les centres de la petite enfance. Il pourrait y avoir un développement important de ce côté-là, et ça aurait des effets bénéfiques, comme le montrent plusieurs recherches.

Même chose pour les services de garde en milieu scolaire. Les enfants qui sont dans les maternelles quatre ans et dans les maternelles cinq ans passent beaucoup d'heures aux services de garde en milieu scolaire. Il y a un rapport du Conseil supérieur de l'éducation qui réclamait une hausse de la qualité des services de garde en milieu scolaire, qu'on augmente la formation des gens qui y travaillent. On a souscrit à ce rapport-là, il y a un comité, d'ailleurs, qui a été mis sur pied en collaboration avec le gouvernement, mais on ne voit pas les résultats encore.

Donc, si le gouvernement a de l'argent à mettre, pour nous, ce serait beaucoup plus dans les services publics, dans ces services publics là, entre autres, qui pourraient améliorer les services à la petite enfance. Et on l'a mentionné d'entrée de jeu dans notre mémoire, qu'on est d'accord pour intervenir très tôt dans la petite enfance parce que toutes les études montrent que ces enfants, quand ils arrivent à l'école, ils sont au même niveau que les enfants de milieux favorisés. C'est une condition gagnante, là, pour réussir leur parcours scolaire.

Le Président (M. Kelley): Merci. M. le député des Îles-de-la-Madeleine, suivi par M. le député de Lévis. Alors, M. le député des Îles.

n(16 heures)n

M. Chevarie: Merci, M. le Président. Merci de votre présence. J'aimerais mieux comprendre votre position par rapport à votre allusion sur le désengagement de l'État. Quand je regarde les gestes posés par notre gouvernement, je pense, c'est significatif, encore au dernier budget, pour le réseau de la santé et pour le réseau de l'éducation, qui détiennent près de 50 % du budget de l'État. C'est des indexations, des augmentations de 5,7 % pour le ministère de la Santé et des Services sociaux et un peu plus que 3 % pour l'éducation. Et, quand je pense à tous les besoins sociaux et de santé, c'est illimité, puis les ressources sont limitées. Et, si je donne l'exemple des fondations dans les centres hospitaliers, les fondations dans les centres hospitaliers, il y a une partie de ces argents-là, une très grande partie qui va au financement de certains équipements, et les fondations vont chercher leur argent par des souscriptions populaires et par des dons aussi de mécènes ou de personnes généreuses.

C'est sûr qu'il y a un conseil d'administration qui est indépendant de l'hôpital, qui administre ces fonds-là. Et il y a même des personnes qui vont donner un don, faire un don, et qui vont le faire de façon orientée, en ce sens que, s'ils ont, par exemple, un proche qui a vécu à domicile longtemps et qui a reçu des soins à domicile, ils peuvent dire: Moi, je souhaiterais que ce don-là soit orienté vers des équipements qui vont soutenir davantage encore le programme de soutien à domicile. Et, je me dis, dans ce sens-là, on permet ça, puis Dieu merci, parce que, s'il fallait enlever toutes les fondations des centres hospitaliers, il y aurait des lacunes assez extraordinaires au niveau des équipements, même si ce n'est pas encore assez.

Alors, j'aimerais vous entendre encore sur votre réaction par rapport à la création de ce fonds-là versus le désengagement de l'État.

M. Parent (Réjean): C'est dur pour un prof, hein? J'ai l'impression... Je ne dois vraiment pas être clair, là. Votre question, là, un, je veux dire, elle impliquerait fort probablement un grand temps pour ce qui est de parler de l'économie du Québec, puis de la vision, puis des revenus, puis de la juste fiscalité, et tout ça. On va se sauver de ça aujourd'hui, on va s'éviter ça.

Mais on va revenir aux fondations. Vous me parlez de fondations. Je viens du réseau scolaire, il y a des fondations, dans le réseau scolaire, par établissements. À ma connaissance, là ? je veux être sûr que je vais éviter de me faire reposer la question, quoi ? à ma connaissance, ces fondations-là auxquelles vous référez, je ne pense pas que l'hôpital... En tout cas, de la connaissance que j'ai du milieu de l'éducation, là, tu n'as pas l'école qui met son budget dans la fondation pour après ça déterminer l'utilisation du budget de l'école par rapport à ce conseil d'administration parallèle à l'école. Et c'est la même chose, que ce soit la Fondation du CHUM, je ne pense pas que...

Qu'il y ait des dons orientés, on n'a rien contre, je l'ai dit. Que M. Chagnon veut faire le bien, saluons ça, plutôt que d'aller mettre son argent dans des évasions ou abris fiscaux, on ne peut que le bénir et le saluer. Où on dit... À quelque part, je veux dire, en quoi ça prend une loi pour instituer un fonds, que le gouvernement doive mettre de l'argent, sa propre contribution? Pas plus ça dans le milieu hospitalier, pas plus ça dans le milieu de l'éducation.

Et là ce n'est pas une charge contre les fondations. Je veux dire, il y a des fondations... Au niveau de la CSQ, on retrouve la Fondation Laure-Gaudreault qui est issue de son association de retraités, la Fondation Monique Fitz-Back. Ce n'est pas une charge contre les fondations, c'est tout simplement de dire: Le budget de l'État, mais pourquoi... On essaie juste de voir à quoi il sert, ce projet de loi là, en quoi ça... Qu'est-ce que ça ajoute à la capacité de l'État?

Que M. Chagnon veuille dépenser 25 millions par année, tant mieux, merci, mais, pour le dépenser, il va conditionner que vous devez mettre 15 millions puis après ça il va vous orienter comment vous dépensez votre 15 millions? Puis, dans x années ou dans un autre fonds que vous nous annoncerez peut-être à la session suivante, là il va mettre 12 millions puis il va vous en demander 37, puis il va vous conditionner comment vous dépensez votre 37? C'est là où on dit: Écoutez, dans quoi on est en train de s'embarquer?

Le restant, là, démêlons. L'aide à l'enfance, le développement des jeunes, on est pour. Que des gens, que des mécènes au Québec veuillent faire du bien avec leur argent, on les salue, mais que le gouvernement, je veux dire, gère l'argent des contribuables, je veux dire, en toute conscience, en toute connaissance, sans se faire conditionner que, pour avoir... je veux dire, pour aller chercher 50 millions de charité, il va falloir en mettre 10, 20, 25, 100, puis en plus il va falloir avoir des non-élus qui vont venir, je veux dire, finalement gouverner le budget de l'État. C'est ça, la porte d'entrée. Aujourd'hui, c'est une brèche. Ça peut avoir l'air très simple. Aïe! c'est 10 ans, c'est le... Il n'y a rien là. C'est 5 millions, une journée; aujourd'hui, on parle de 15; puis, la semaine passée, c'était 10.

Il me semble que, tu sais, si on regarde ça dans l'ensemble, on dit: Pourquoi ces lois-là? Mais après ça, là, faites-nous pas dire qu'on est contre les fondations, qu'on est contre les mécènes puis contre les gens qui veulent faire du bien au Québec. Tant mieux s'ils veulent en faire. Mais, s'ils veulent s'acheter un État, bien là, il va falloir leur dire: Écoutez, ce n'est pas de même que ça se passe. Qu'ils fassent comme vous, qu'ils se fassent élire.

Le Président (M. Kelley): Dernier commentaire court du député de Lévis, s'il vous plaît.

M. Lehouillier: Oui, bien, c'est ça, un petit peu en continuité à ce que vous venez de dire. D'abord, merci pour votre mémoire. Et c'est que vous dites que l'objectif du projet de loi en soi, il est louable. Donc, ce n'est pas les principes du projet de loi que vous remettez en question, d'après ce que je vois. Vous, ce que...

Une voix: ...

M. Lehouillier: Non, non. Mais vous? Non, non, mais c'est ça que je comprends, là. Mais ce que vous dites, dans le fond, c'est que vous dites: Oui, mais ça, ça doit passer par l'État, un peu comme vous le dites... Parce que je veux bien comprendre votre objectif. C'est que vous dites: «...il serait préférable d'instaurer des services publics bien organisés et financés de manière récurrente...»

Parce que l'objectif du fonds, ce n'est pas de se substituer aux services publics, mais c'est vraiment de maximiser les ressources qu'il y a déjà sur le terrain, de venir les épauler. C'est ça, l'objectif. Et c'est sûr que, là, à partir de ce moment-là, bien là on retrouve toutes les notions de l'État partenaire. Nous, on pense que l'État peut être partenaire avec le milieu là-dedans et qu'on peut aider. Parce qu'on sait très bien, et les études le démontrent, que l'État a beau ajouter des moyens, il y a des limites aussi à sa capacité. Et là, à un moment donné, on essaie d'aider. Et ce n'est pas... L'objectif, c'est plus de maximiser les ressources sur le terrain. Et c'est pour ça que le projet de loi offre une flexibilité qui permet aux gens... Il y a des organismes qui sont venus nous dire: Bien, écoutez, nous, là, amenez-nous l'argent rapidement puis on va dire bravo, puis on est prêts à se concerter dans nos milieux pour passer à l'action.

Alors, vous, ce que vous dites, et est-ce que je comprends bien que ce que vous dites: Oui, nous, on est d'accord avec les principes de ça, mais il faudrait que ce soit finalement fait en passant par des services publics, donc augmenter les services publics? Est-ce que c'est bien ça que vous proposez?

M. Parent (Réjean): Deux choses. Ce qu'on propose, c'est que l'argent de nos impôts soit gouverné, soit administré par le gouvernement du Québec. Puis, dans le cadre actuel, quand on parle précisément de ce projet-là ou du développement des jeunes, il y a déjà toute une série de programmes gouvernementaux qui enregistrent certaines carences. Ça fait que déjà...

M. Lehouillier: ...partenariat, là.

M. Parent (Réjean): Bien, partenariat... Moi, je pense que le partenariat, là... J'essaie de voir la couleur du partenariat. On n'a rien contre le partenariat. Si M. Chagnon ? je reviens à la fondation ? veut travailler avec la communauté puis veut instaurer des comités puis si en plus il souhaiterait avoir l'avis gouvernemental, vous lui donnerez, l'avis. Mais je ne vois pas en quoi, je veux dire, il faut conditionner ça par 15, 20, 25, 30, 40 millions: Je te mets de l'argent, puis, je veux dire, on va vous dire comment vous le dépensez puis on va vous dire comment intervenir de façon étatique. Ça fait que, moi, le partenariat, là...

L'autre aspect, là, quand vous dites «les études», là, je vais vous dire, il y a toutes sortes d'études, hein? Mais, dans le moment, là, de plaider qu'on est le lieu du monde, le berceau du monde pour ce qui est des services gouvernementaux, des services publics, des services sociaux, là, il faut regarder un peu comment ça se passe. Il y a d'autres études ailleurs, là. L'exemple, je veux dire, des camarades danois: eux autres ont choisi, ils ont pris l'option que la petite enfance, les services à la petite enfance, la fréquentation du centre de la petite enfance, c'était obligatoire. Puis, je veux dire, évidemment, bien, ça a des incidences sur les jeunes des milieux défavorisés. Là, ce que décrivait mon collègue Allaire tantôt, c'est: jusqu'où, à un moment donné, en milieu défavorisé, déjà, là, que tu te sens comme «cheap» dans une société ? entre guillemets, là, «cheap», évidemment c'était pour M. Kelley ? mais, dans ce contexte-là, comment... de faire la bataille pour aller te chercher une place pour tes enfants, alors que tu...

Donc, il y a tout ça, là, je veux dire. Comment est-ce qu'on peut créer, je veux dire, un... Bien, moi, je pense que, quand vous me dites: Êtes-vous d'accord avec les principes?, on est d'accord avec le principe d'intervenir en amont.

Le Président (M. Kelley): En conclusion, s'il vous plaît...

M. Parent (Réjean): J'ai fini.

Le Président (M. Kelley): ...parce que je dois passer la parole à ma gauche. M. le député de Gouin.

Une voix: ...à gauche.

Le Président (M. Kelley): Le député à ma gauche. Façon de parler au porte-parole de l'opposition officielle. Si on veut la formalité, on peut faire la formalité. M. le député de Gouin.

M. Girard: Merci. Merci, M. le Président. Merci à M. Parent et M. Allaire pour votre mémoire et votre présence cet après-midi. Merci pour la qualité de votre mémoire, de votre réflexion.

n(16 h 10)n

Vous nous dites, à travers le mémoire qui nous est présenté ? ma première question sera la suivante: Il y a une multitude de fonds qui sont créés presque de façon simultanée. Avez-vous l'impression qu'il y a eu, derrière ça, une réelle réflexion gouvernementale pour mesurer l'impact de l'ensemble de ces fonds-là sur la gouvernance, sur la mission de l'État, sur la reddition de comptes puis sur la reconnaissance de l'expertise locale qui existe dans les écoles, les centres de la petite enfance, les CLSC, tous les partenaires institutionnels, les organismes communautaires famille? Avez-vous ce sentiment-là, à la lecture des 16 articles du projet de loi déposé par le ministre?

M. Parent (Réjean): Moi, en tout cas, je vais être très prudent avec votre question, M. Girard, dans le sens où je suis convaincu que le ministre et son gouvernement tentent, je veux dire, d'apporter des solutions. Et, de ce côté-là, est-ce que la réflexion... est-ce qu'on a assez réfléchi ou pas assez réfléchi? Est-ce que mes questions sont pertinentes ou impertinentes? On peut s'aborder comme ça. Moi, je préfère le regarder sous l'angle: il y a comme une volonté de vouloir intervenir, tu sais, sur la petite enfance, sur l'enfance, accompagner les jeunes, voir à leur développement. Et je vais saluer cette volonté-là.

Mais en même temps je pense que, notre point de vue, c'est les moyens puis ce qui est développé. Je pense qu'on a comme fait abstraction, il y a comme une partie qui... Je ne sais pas si la main droite ignorait ce que la main gauche faisait, mais il y a comme une partie qui a été comme omise, et peut-être certains ajustements, peut-être certains engagements permettraient d'atteindre les mêmes résultats, préserveraient l'intégrité de l'État, quant à nous, là. Parce que je ne suis pas sûr qu'on regarde l'analyse à long terme là-dedans, là. Mais je suis convaincu que ce n'est pas seulement que... Tu sais, c'est quand même un projet qui était dans les cartons depuis un bout, ça fait que j'ose croire que les gens du ministère ont potassé le dossier, là. Ça fait que je ne veux pas atteindre l'intégrité des personnes, je pense qu'on est en train de débattre de l'idée.

Nous, on dit: Il y a un filon, il y a des principes, pouvoir accompagner les jeunes, la petite enfance puis favoriser... Mais en même temps on dit: L'État doit préserver son intégrité, puis on n'a pas à conditionner, je veux dire, nos engagements par de la charité sur la porte d'à côté puis de mettre des gens qui ne sont pas des élus, je veux dire, qui vont venir déterminer, là, je veux dire, c'est quoi que vous faites, comment vous le faites. Puis, aujourd'hui, la porte, l'entrée est mince puis elle va aller en s'élargissant. Tu sais, la semaine passée, il y en avait plus de la fondation... il y en avait plus du gouvernement puis moins de la fondation. Aujourd'hui, on en a un peu plus de la fondation puis moins du gouvernement. Mais, un jour, ça sera quoi, le rapport? Puis la pérennité de tout ça, puis... Tu sais, on envoie des mauvais messages avec ça. Mais je dirais que je ne pense pas qu'ils n'ont pas assez réfléchi, je dis: On n'a pas réfléchi de la même façon. Ça m'apparaîtrait plus correct.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Est-ce que votre crainte, ce n'est pas que, dans le futur, il y ait multiplication de fonds et que d'autres mécènes demandent une formule similaire à celle qui nous est présentée dans le projet de loi n° 6, dans le projet de loi n° 7, qui feront le choix d'investir des sommes pour aider des communautés ou aider des groupes dans notre société et que le gouvernement devra allonger un montant pour créer un nouveau fonds? Est-ce que vous craignez qu'on ouvre la porte à ce que d'autres mécènes demandent la même chose que ce qui est reproduit dans les projets de loi nos 6 et 7?

M. Parent (Réjean): Bien, c'est une crainte qu'on a. Même dans le projet de loi n° 7, il faut le trouver, là, il y a un petit alinéa qui dit: Et d'autres ministères pourront contribuer. C'est la porte ouverte à quoi? C'est combien y aura-t-il de ces fonds? C'est quel genre de nouvelle gestion de l'État? En tout cas, chose certaine, sous cet aspect-là, ça impliquerait qu'il y ait un bon débat public puis une réflexion en profondeur. Il s'agit d'être milliardaire, millionnaire, d'avoir sa fiducie, sa fondation, de dire: Bien, écoutez, M. le ministre, ou Mme la ministre, ou M. le gouvernement ? pour ne pas personnaliser ? moi, je suis une bonne âme, je veux faire le bien, je suis prêt à mettre tant d'argent, vous en mettez tant, puis... C'est donc une autre façon, je veux dire... Puis là, si on veut se construire des chimères, on peut aller loin. C'est même du genre, tu sais, l'espèce de... les projets, les projets de qui, des projets de comment, le saupoudrage.

On voit, là, actuellement, là, on est tout en train de demi-mesures puis de quart de mesures, du saupoudrage, de l'éparpillement, pas toujours des projets de même qualité, et on fait un peu d'activisme de projets. Ça fait que c'est certain que... Comment dire? S'en aller dans cette voie-là, c'est quelle sorte de Québec qu'on est en train de se construire? Puis il y aura combien de centaines de millions, un jour, qui seront sous la gouverne de fiducies ou de comités de gestion paritaires, puis: Je t'en donne si tu fais comme je te dis? Parce qu'en même temps c'est une remise en question, je veux dire, de la gestion même de l'État, l'approche qu'a la fondation.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: À la page 6 de votre mémoire, puis je me permets de relire l'extrait pour le bénéfice du ministre: «Il nous semble qu'il aurait été plus démocratique que ce projet de loi soit plus explicite et qu'un document aussi important que le protocole d'entente entre les parties soit rendu public pour cette consultation de la Commission des affaires sociales.»

Pourquoi c'est important pour vous qu'un document de cette nature-là soit rendu public pendant les consultations particulières sur le projet de loi n° 7?

M. Parent (Réjean): Bien, d'abord, un, vous voyez, on est énormément en questionnement, on dit: Quel est le sens profond, quelle nécessité de ce projet de loi? Déjà, il faut aller chercher l'information sous différentes formes. On ne retrouve pas, bon, c'est qui, les partenaires éventuels, c'est quel type de comité de gestion. Le ministre doit ajouter, là. Mais ce qui va faire loi un jour, c'est ce qui va avoir été adopté par l'Assemblée nationale, pas tout ce qui est le contour. Et un protocole, il y a quoi dans ce protocole-là? Tu sais, on essaie...

Bon, je présume que M. Chagnon et sa dame ont des bonnes intentions, là, sa fondation, mais, s'il y a un protocole, pourquoi qu'il n'est pas disponible pour qu'on ait... si on est en train d'être consultés, de faire le débat sur un projet comme celui-là qui interroge les manières de faire de l'État, là? Pour prendre la question du député, il dit: Un nouveau partenariat. Je veux dire, c'est quoi, ces nouveaux partenariats là? En quoi est-ce utile puis pourquoi est-ce utile?

Mais, dans ce cadre-là, est-ce qu'on peut avoir la toile de fond au complet, le tableau au complet pour être en mesure, je dirais, de réagir, ou de poser les bonnes questions, ou de comprendre, je veux dire, la substantielle moelle du projet? C'est pour ça que j'ai dit d'entrée de jeu: Aujourd'hui, je me serais senti plus à l'aise assis à la place du ministre à poser des questions à quelqu'un qui me présente le projet de loi, parce que ça nous suscite plus de questionnements que de réponses, ce projet-là.

M. Allaire (Luc): Là-dessus...

Le Président (M. Kelley): M. Allaire, complément de réponse?

M. Allaire (Luc): Sur cette question-là, c'est que, moi, j'ai eu à écrire le mémoire. Lorsque j'ai regardé le projet de loi, si je m'étais fié seulement sur le projet de loi, j'aurais eu beaucoup de difficultés à savoir de quoi il en retournait. C'est pour ça que j'ai vérifié dans le communiqué de presse, dans le budget, et c'est là que j'ai découvert de quoi il s'agissait.

Mais là les parlementaires vont voter sur un projet de loi où le mot «fondation Chagnon» n'est même pas mentionné. Alors, vous fouillez dans le projet de loi, il n'est jamais mentionné, alors qu'on sait très bien que c'est de ça qu'il s'agit. Il y a un protocole d'entente qu'on retrouve aussi dans les documents budgétaires, mais là on n'en est pas... il n'est pas mentionné non plus. Alors, on est consultés sur un projet de loi, alors que tous les éléments sur lesquels on devrait se questionner se retrouvent dans d'autres documents qui ne sont pas disponibles. Et le protocole d'entente, c'est un bel exemple parce que c'est ça qui va déterminer qui va avoir le pouvoir.

Comme par exemple, sur le conseil d'administration, on se réfère au fonds sur les saines habitudes de vie; ce n'est pas dans le projet de loi non plus. Il y a beaucoup de questions comme ça qu'on ne trouve aucune réponse dans le projet de loi. Et, quant à faire une commission parlementaire, pourquoi ne pas déposer ces documents-là pour qu'on puisse les discuter, et non pas arriver après, quand la commission parlementaire va être terminée, et là on va peut-être avoir d'autres questions, mais il n'y aura pas d'autre consultation.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: J'espère que votre appel sera entendu, et que le ministre a attentivement écouté vos propos, et qu'il changera son fusil d'épaule ? on est au jour 2 de la consultation, il reste deux autres journées de consultation ? et que le ministre déposera le protocole d'entente pour le bénéfice de ceux et celles qui seront affectés par ce projet, qu'il fera preuve de transparence et qu'il le rendra public. Je pense que votre demande est tout à fait légitime et fondée. Et la question qui nous vient, c'est: Pourquoi le ministre ne veut pas le déposer? On n'a toujours pas réponse à cette question-là. Peut-être que le ministre...

M. Tomassi: Je vais le déposer. J'ai dit que j'allais le déposer.

M. Girard: Peut-être que le ministre pourra nous répondre pourquoi, dans le cadre des consultations particulières, il ne veut pas le déposer.

M. Tomassi: M. le Président, juste une question de règlement, là, parce qu'il fait des affirmations, là. En début de remarques préliminaires, j'ai bien dit que nous allions déposer le protocole d'entente lors de l'étude détaillée article par article, nécessairement parce que le protocole d'entente, de un, n'est pas signé, de deux, les consultations publiques viennent, en bout de ligne, améliorer, bonifier les éléments. Alors, je vais répondre à sa question en temps et lieu. Posez vos questions. Et par la suite on suivra les choses.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. Et je pense qu'en conclusion c'est toujours mieux, M. le député de Gouin, d'adresser à la présidence plutôt que solliciter un débat via vos commentaires. Je pense qu'on a fait le point...

n(16 h 20)n

M. Girard: Oui. Mais je vous rappelle, M. le Président, que j'ai bien mentionné que je souhaitais que le protocole d'entente soit déposé dans le cadre des consultations particulières et je l'ai dit à plusieurs reprises.

Le Président (M. Kelley): C'est bien noté, mais...

M. Girard: Le ministre a fait un autre choix: de le déposer au moment où ce sera l'étude article par article, après que l'ensemble des organismes aient été consultés. Alors, ceci étant dit, j'ai d'autres questions à poser sur le mémoire présenté par la CSQ.

Dans les présentations que nous avons eues, il y a des groupes qui réclament qu'au sein du conseil de gestion de ce fonds il y ait une représentation de la société civile. Certains ont exprimé un malaise qu'il n'y ait qu'une représentation de représentants de la fondation et de représentants du gouvernement mais que l'expertise existante, que ce soit à travers les centres de la petite enfance, les organismes famille, les écoles, que ces partenaires de la société civile ne soient pas partie prenante des décisions qui seront prises à la société de gestion. J'aurais aimé vous entendre là-dessus.

M. Parent (Réjean): Vous savez, quand on ne souscrit pas à la création de ce fonds-là, vous aurez compris qu'on n'a pas parlé longtemps sur qui devrait y être ou ne pas y être, là. Ça fait que, dans cette dynamique-là, ce serait difficile pour nous de vous dire qu'il devrait y avoir ou ne pas y avoir la société civile. Notre préoccupation, c'est de s'assurer que les deniers publics, ils sont gérés par l'État. Puis, pour ce qui est de la fondation, s'ils veulent s'investir dans certains domaines en partenariat ou en coopération avec le gouvernement du Québec puis qu'ils veulent associer plus large, de façon à encore mieux ancrer dans les milieux puis avoir un bon éventail de projets, bien, ça leur appartiendra à eux autres, là. Moi, je pense que c'est difficile de vous dire qu'il faudrait qu'il y ait la société civile sur ce comité de gestion dans un contexte où on ne croit pas que c'est la voie à emprunter.

M. Girard: Je comprends de vos propos, donc, que le 15 millions investi par le gouvernement sur une période de 10 ans, donc 150 millions, vous jugez que cette contribution importante ne nécessite pas de transiter par un fonds et par la suite par une société de gestion, que l'État pourrait, à chaque année, utiliser ce 15 millions pour mieux appuyer des ressources déjà existantes qui oeuvrent à améliorer la situation des enfants 0-5 ans. C'est ce que je comprends de vos propos.

M. Parent (Réjean): Exactement. Je pense que... De ce côté-là, je ne pense pas que le gouvernement ait de permission à demander à quiconque, et surtout dans un contexte où, tu sais, il y a de très bons programmes gouvernementaux qui produisent des effets, qui, sous certains aspects, sont peut-être sous-carencés puis qu'il faut les améliorer justement pour aller chercher... Je pense aux milieux défavorisés puis à la petite enfance, je pense à recréer ou à remettre un meilleur cursus éducatif dans les centres de la petite enfance puis un meilleur continuum avec le réseau de l'éducation. Et c'est tout ça, là, je veux dire. Je pense que des chantiers, le gouvernement en a puis je ne pense pas qu'il manque d'imagination pour pouvoir investir de ce côté-là. Puis il n'a pas de permission à demander à la fondation Chagnon pour dépenser 15 millions. Ça, ça ne nous rentre pas, là.

Le restant, après, sur le 25 millions, la fondation, je vous le dis, vous ne pouvez pas empêcher un coeur d'aimer, puis, au contraire, s'il veut s'investir dans le développement social du Québec, on va le saluer, là. Puis je ne pense pas qu'il ait besoin de demander plus la permission au ministre, si ce n'est que, s'il souhaite être accompagné ou pouvoir intervenir de façon plus pertinente puis pouvoir compter sur les expertises gouvernementales des différents ministères, bien, ça, c'est du partenariat, mais ce n'est pas à la fondation Chagnon à gérer nos impôts.

M. Girard: Je comprends aussi, à la page 9 de votre mémoire, vous nous dites, par exemple, que le 15 millions pourrait être utilisé notamment à rétablir les budgets qui ont été réduits au niveau des bureaux coordonnateurs qui gèrent les services de garde en milieu familial, dans lequel vous êtes, disons, fortement... votre centrale syndicale est fortement impliquée, on l'a vu au cours des derniers mois. Donc, j'aurais aimé vous entendre là-dessus et nous expliquer un peu l'impact des coupures qu'il y a eu au niveau des budgets pour la mise sur pied des bureaux coordonnateurs et de l'impact que ça a sur les services de garde en milieu familial.

Le Président (M. Kelley): M. Allaire.

M. Allaire (Luc): Il y a quelques années, là, quand il y a eu l'implantation des bureaux coordonnateurs, on avait déploré que cette implantation-là s'accompagnait de compressions budgétaires. L'exemple qui nous préoccupait le plus à l'époque, c'étaient les postes... Il y avait des postes de conseillères pédagogiques ? je dis conseillères parce que c'est surtout des femmes qui occupaient ces postes-là ? qui donnaient des services de conseil pédagogique auprès des éducateurs dans les centres de la petite enfance et aussi dans les services de garde en milieu familial.

C'était un service qui était très, très, très utile parce que, pour ces femmes-là, qui ont une formation générale de 45 heures qui est obligatoire mais par la suite elles reçoivent des enfants des fois qui ont des besoins particuliers, des enfants qui ont des troubles de comportement, des enfants qui ont plus de difficultés langagières... pour toutes sortes de considérations, avaient accès à des conseillères pédagogiques dans leur milieu, et il y avait une proximité aussi avec le centre de la petite enfance. Donc, il y avait un très bon service.

Ces postes-là ont été abolis à ce moment-là, et même l'Université du Québec à Montréal, qui offrait ce cours-là, le certificat, a été obligée d'arrêter d'offrir le certificat parce qu'il n'y avait plus de postes. Ces gens-là, ils pouvaient former des gens, mais il n'y avait plus de postes dans le réseau.

Alors, s'il y a un service qui mériterait d'être reconduit, c'est bien celui-là, et, si le gouvernement a de l'argent à investir, on souhaiterait qu'il aille plutôt de ce côté-là plutôt que de demander à la fondation Chagnon, de lui demander comment l'investir. Et c'est un service aussi qui est un service qui va durer dans le temps, un service qui est régulier, qui a des besoins et qui va durer après les 10 ans, lorsque ce fonds-là sera terminé, là.

Le Président (M. Kelley): Ça va?

Une voix: ...

Le Président (M. Kelley): Il reste quatre minutes, quatre, cinq minutes.

M. Girard: Parfait, oui. Vous nous dites également, à la page 8 de votre mémoire, que le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport devrait accroître la qualité au niveau des services de garde en milieu scolaire et des défis que vous devez relever, notamment en milieu défavorisé, milieu où il y a une concentration importante de l'immigration.

Vous pensez donc que, bon, les 150 millions qui seront mis à la disposition des communautés sur une période de 10 ans pourraient notamment être peut-être mieux utilisés en appuyant davantage les services de garde en milieu scolaire. Parlez-moi un peu des défis auxquels vous faites face, compte tenu de la réalité particulière dans le milieu défavorisé, où il y a une concentration aussi forte d'immigration.

Le Président (M. Kelley): M. Allaire.

M. Allaire (Luc): Oui. Si on regarde, par exemple, dans le milieu défavorisé où il y a des maternelles quatre ans, un enfant va passer deux heures et demie à la maternelle et le reste de la journée dans le service de garde en milieu scolaire. Donc, c'est presque sept heures et demie, des fois huit heures qu'il va passer dans le service de garde en milieu scolaire. Et ce qu'on remarque, c'est qu'il y a un gros besoin. Quand il y a eu les états généraux, on a accru la quantité de services de garde en milieu scolaire, on a offert le service à beaucoup d'endroits, mais il y a un défi qui n'a pas été relevé à ce moment-là, c'est la question de la qualité.

Par exemple, si on regarde la formation des éducatrices, quand on travaille dans un centre de la petite enfance, on demande qu'elles aient un D.E.C., deux éducatrices sur trois, c'est obligatoire qu'elles aient une formation collégiale. Dans les services de garde en milieu scolaire, on demande seulement un D.E.S., un diplôme d'études secondaires. On pense que le besoin de formation de ces éducatrices-là est l'équivalent de ce qui est demandé dans un centre de la petite enfance, alors qu'il devrait y avoir une formation collégiale de ce côté-là.

Le Conseil supérieur de l'éducation, d'ailleurs, a émis une série de recommandations pour accroître la qualité. Il y a un comité qui a été mis sur pied par le ministère de l'Éducation, auquel la CSQ a contribué avec l'Association des services de garde en milieu scolaire, les commissions scolaires, et il y a eu un consensus pour accroître la qualité. Le rapport est sur le bureau... a été déposé à la ministre. La ministre a répondu que c'étaient de très bonnes suggestions, de très bonnes recommandations, mais il n'y a pas eu de suites qui ont été données, on n'a pas vu d'argent sonnant qui a été dépensé pour accroître la qualité. Alors, on se dit que, si le gouvernement aura, comme vous le disiez, 150 millions à investir pour les 10 prochaines années, il y a sûrement des bonnes idées qui pourraient être reprises là et qui font consensus dans tout le milieu.

Le Président (M. Kelley): Dernière...

M. Allaire (Luc): Et là on parle de partenariat, là.

n(16 h 30)n

M. Girard: Vous nous dites aussi, à la page 8 de votre mémoire, que vous craignez pour la pérennité des services offerts, avec le fonds tel que présenté dans les 16 articles du projet de loi n° 7. Vous vous demandez ce qui va se passer au terme des 10 ans. Donc, il y a des communautés, des gens qui vont s'investir dans des projets puis, au terme de 10 ans, terminaison du fonds. Vous craignez qu'il y ait une mobilisation, j'imagine, dans les communautés, autour de projets qui seront un peu une expertise, qui seront un peu abandonnés. C'est ce que je comprends de vos propos?

M. Parent (Réjean): Dès le point de départ, là, le fait d'avoir fixé 10 ans... D'ailleurs, je le disais en préambule: Pourquoi 10 ans? Puis ça veut dire que tous les enfants du Québec, dans 10 ans, les jeunes vont être développés, fine pointe, puis... Donc, c'est dans ce sens-là, qui est de le placer dans le temps, de développer... Puis c'est une des appréhensions. Depuis quelques années, là... là je ne parlerai pas précisément de ce projet de loi là mais de plusieurs mesures qui sont mises en place de façon temporaire, des stratégies, des enveloppes dédiées, et là, tu sais, c'est drôle, après... Oui, mais c'est pour combien de temps? On fait quoi après?

Ça fait qu'on crée une dynamique où, plutôt que de développer, je veux dire, des axes d'intervention qui seront pérennes puis qui vont avoir une efficacité, entre guillemets, là, dont on peut être assuré, là on lance un fonds, on met en place certains projets, certains qui seront sûrement de très grande qualité et d'autres, plus douteuse, puis avec tout ce qui pourra tourner autour, là, je veux dire, les amis des amis. Ça fait que, dans ce cadre-là, bien, les choses qui fonctionnent, bien, peut-être les abandonner 10 ans plus tard... Parce qu'on le voit, là. Je regarde, dans le domaine scolaire, il y en a une, stratégie pour intervenir autrement, où on a des appréhensions. Tu sais, le financement, là, il va-tu être encore là l'année prochaine? Ça fait que c'est donc sur cet aspect-là, là, les appréhensions par rapport à la pérennité, par rapport à ce qui marche. Les affaires qui ne marchent pas, même quand ça disparaît, ça, c'est moins pire.

Le Président (M. Kelley): Alors, sur ce point, merci beaucoup, M. Parent, M. Allaire, pour votre contribution à la réflexion des membres de la commission.

Je vais suspendre quelques instants et je vais demander aux représentants de la Fédération des commissions scolaires du Québec de prendre place à la table des témoins.

(Suspension de la séance à 16 h 32)

 

(Reprise à 16 h 35)

Le Président (M. Kelley): Alors, la Commission des affaires sociales reprend ses travaux. Le dernier témoin pour la journée, c'est la Fédération des commissions scolaires du Québec, représentée par son président, M. André Caron, Mme Pâquerette Gagnon, directrice générale, et M. Camil Turmel. Alors, sans plus tarder, je vais céder la parole à vous, M. Caron. Et bienvenue devant la commission.

Fédération des commissions
scolaires du Québec (FCSQ)

M. Caron (André): Merci. M. le Président, membres de la commission, mesdames messieurs. D'abord, vous remercier, remercier les membres de la commission de nous recevoir et d'entendre nos réactions face au projet de loi n° 7.

Comme vous le savez assurément, la Fédération des commissions scolaires du Québec a pour mission de promouvoir l'éducation préscolaire et l'enseignement primaire et secondaire. La fédération représente les 60 commissions scolaires francophones du Québec ainsi que la commission scolaire du Littoral.

Parmi les principaux mandats qui nous sont confiés, la fédération a comme objectifs de défendre les intérêts de ses membres et de faire avancer la cause de l'éducation au Québec. La fédération produit notamment, à la suite de consultations auprès de ses membres, des mémoires, des avis, des recommandations et des propositions afin de soumettre des positions sur des projets concernant le système public d'éducation, dont le projet de loi n° 7 dont nous discutons aujourd'hui.

Ma présentation se divisera en quatre parties. Dans un premier temps, j'irai très brièvement en introduction. Par la suite, je ferai part de certains éléments motivant notre appui au projet de loi n° 7 ? ça va faire différent avec les discussions qu'on vient d'entendre. Et je poursuivrai en portant à votre attention les ajouts que nous croyons pertinent d'inclure au projet de loi, pour enfin conclure en formulant un certain nombre de recommandations.

La Fédération des commissions scolaires du Québec est heureuse de contribuer aux travaux de la Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale en faisant part de ses commentaires concernant le projet de loi n° 7, projet de loi qui démontre que le gouvernement reconnaît l'importance d'interventions précoces auprès des enfants afin de contribuer à leur développement et à leur réussite. Nous accueillons favorablement le projet de loi. Depuis plusieurs années, la fédération souligne la nécessité d'offrir des services éducatifs à la petite enfance. Nous constatons que les services actuellement dispensés à la clientèle 0-5 ans sont à la fois insuffisants et pas toujours adaptés aux situations familiales et socioéconomiques de ces enfants.

Au début de la présente année scolaire, nous avons retenu comme priorité de l'année la réussite des élèves et la persévérance scolaire, sujet qui est très d'actualité ces temps-ci, n'est-ce pas? Ce projet de loi constitue, selon nous, un appui significatif au développement de la clientèle jeune.

Voici maintenant les principaux éléments qui motivent notre appui au projet de loi.

Entre zéro et cinq ans, les enfants traversent une phase de croissance accélérée. Des difficultés sont susceptibles d'apparaître dès les premières années de leur vie. Plusieurs recherches démontrent que les premiers apprentissages des enfants ont un impact sur la réussite scolaire, donc déterminant pour leur avenir. À titre d'exemple, selon certaines études, les enfants moins bien préparés lors de leur entrée à l'école sont susceptibles de présenter des difficultés scolaires de même que des problèmes sur le plan du comportement et des habiletés sociales.

Il est reconnu que le statut socioéconomique des familles est d'une grande importance au regard de la réussite et de la persévérance scolaire. Les taux d'échec et d'abandon scolaire sont plus élevés dans les milieux défavorisés, des études le démontrent. La qualité de vie au cours de la petite enfance a un impact important sur le rendement scolaire et sur les comportements des enfants. Devant ce constat, il est essentiel de travailler avec les plus démunis, jeunes et adultes, afin de leur donner des outils pour améliorer leur situation et leur permettre de mieux faire face au contexte scolaire.

Des études démontrent aussi que le milieu socioéconomique dans lequel l'enfant a grandi est étroitement lié aux compétences langagières, élément important associé à la réussite scolaire. À ce chapitre, nous sommes à compléter un chantier amorcé à l'automne 2008, consistant à tenir des assises régionales sur la persévérance scolaire à travers toutes les régions de la province de Québec. Ces assises ont comme objectif notamment d'identifier des mesures qui pourront contribuer à améliorer la situation un peu partout au Québec.

n(16 h 40)n

Nul besoin de vous rappeler que la persévérance scolaire est liée à plusieurs facteurs qui sont d'ordre personnel, interpersonnel, familial, social, environnemental et scolaire. Les impacts sociaux et économiques sont énormes pour notre société. À titre d'exemple, les jeunes sans diplôme s'impliquent moins dans la vie communautaire, ils font moins de bénévolat et manifestent moins d'intérêt lorsque vient le temps de voter. En octobre dernier, l'économiste Pierre Fortin évaluait à tout près de un demi-million de dollars le coût d'un non-diplômé, individu et société confondus.

Dans le rapport Savoir pour pouvoir: entreprendre un chantier national pour la persévérance scolaire, rapport présenté le 17 mars dernier par M. L.-Jacques Ménard, président du groupe d'action sur la persévérance scolaire, on y propose 10 actions pour améliorer la persévérance scolaire au Québec et on en retrouve deux concernant la clientèle 0-5 ans. À titre de membre du groupe d'action, la fédération confirme une fois de plus l'importance à accorder aux enfants âgés de zéro à cinq ans et appuie toute action allant en ce sens.

Parmi les gestes qui pourraient éventuellement être mis en priorité afin d'améliorer les chances de réussite de l'élève à l'école, il y a ceux touchant la lecture et l'écriture. Dans diverses recherches portant sur des enfants d'âge préscolaire ayant participé à des activités touchant la lecture et l'écriture à la maison ou à la garderie, ceux-ci sont de meilleurs lecteurs. D'ailleurs, les enfants qui réussissent bien à l'école ont souvent été initiés très tôt à la lecture. Ainsi, l'acquisition de connaissances liées à la lecture et à l'écriture peut se faire dans la famille, à la garderie et à travers diverses activités vécues dans d'autres milieux.

L'action des parents est aussi un facteur déterminant dans la réussite des élèves. Et vous savez que le métier de parent ne s'apprend nulle part, aucune faculté, au Québec, n'existe là-dessus. Il est essentiel que les programmes offerts aux enfants de 0-5 ans influencent les compétences parentales. Les programmes devront avoir comme objectif d'améliorer la compétence et la confiance des parents face à leur enfant.

Maintenant, permettez-moi de vous proposer quelques ajouts que nous croyons pertinent d'inclure au projet de loi.

Une approche intégrée de services impliquant une collaboration entre les différents partenaires des milieux concernés est essentielle pour assurer la réussite des actions mises de l'avant. Les interventions faites auprès de la clientèle 0-5 ans devront s'harmoniser avec celles existant à l'école. Considérant que le fonds pour le développement des jeunes enfants veut valoriser la réussite de leur entrée scolaire, il est incontournable que tout développement soit articulé dans un contexte systémique, y incluant les partenaires de l'école, notamment le réseau de la santé et des services sociaux.

Les projets financés par le fonds devraient s'inspirer des recherches en cours et des pratiques qui, à ce jour, ont démontré leur efficacité afin de favoriser la réussite des jeunes et améliorer la persévérance scolaire. La diffusion des connaissances acquises et des meilleures pratiques doivent être prises en considération dans le scénario de mise en place de ce fonds. Les résultats de la recherche devraient, à notre avis, influencer la formation qui serait offerte au personnel ayant à intervenir auprès d'une clientèle qui manifeste des caractéristiques particulières. Afin d'assurer une chance égale pour tous, les activités et les projets qui seront financés devront prendre en considération les caractéristiques sociales et économiques de la population concernée.

En conclusion, la Fédération des commissions scolaires du Québec reconnaît qu'il est primordial d'accroître l'accès de la population à des services éducatifs de qualité. De plus, nous croyons qu'une loi ciblant une clientèle vivant en situation de pauvreté, loi qui favorise la rentrée scolaire des jeunes à l'école, constitue une action qui contribue à l'augmentation du nombre d'élèves avec diplôme ou qualification à la fin de leurs études de niveau secondaire.

Nous avons la ferme conviction que le développement des jeunes enfants 0-5 ans est non seulement la responsabilité des parents, mais aussi celle de toute la société et que l'accès à des services de qualité aura un impact positif sur la persévérance scolaire. Un des principaux défis dans l'application de cette loi demeure l'harmonisation et la complémentarité des mesures qui seront mises en place, et les recommandations suivantes iront dans ce sens.

Premièrement ? quatre recommandations ? que les services mis en place soient adaptés aux caractéristiques culturelles et socioéconomiques des communautés, particulièrement en ce qui concerne les milieux défavorisés.

Deuxièmement, que les interventions qui seront faites auprès des clientèles ciblées soient harmonisées avec celles de l'école et de ses partenaires, toujours dans le but de favoriser la réussite de la rentrée des jeunes à l'école.

Troisièmement, que les projets retenus s'inspirent de pratiques prometteuses et qu'on s'assure de leur diffusion.

Et finalement, que les programmes mis en place incluent deux principes d'apprentissage reconnus, soit leur intensité et leur durée.

En terminant, eu égard à l'expertise du réseau des commissions scolaires en matière de services aux enfants et à la communauté, nous tenons à vous signifier que nous sommes disposés à travailler avec tous les organismes concernés afin d'offrir les services les mieux adaptés aux jeunes enfants du Québec. Merci beaucoup de votre écoute.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Caron. On va passer maintenant à une période d'échange avec les membres de la commission, deux blocs d'environ une vingtaine de minutes, en commençant avec M. le ministre de la Famille.

M. Tomassi: Merci beaucoup, M. le Président. M. Caron, Mme Gagnon, M. Turmel, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. C'est toujours un plaisir de vous rencontrer. C'est toujours lors de bonnes nouvelles qu'on se voit, M. Caron, puis c'en est mieux comme ça parce que ça fait en sorte qu'on fait évoluer les choses.

J'aimerais avant tout remercier la Fédération des commissions scolaires pour l'apport qu'ils font à la société québécoise et surtout sur ce beau défi de société qu'on a, celui de la persévérance scolaire. Je crois qu'il y a des belles choses qui se font à travers les commissions scolaires, au Québec, qui ont besoin d'être propagées pour faire en sorte, comme vous disiez, que les bonnes méthodes soient reprises ailleurs. Des fois, on a la fâcheuse habitude de vouloir réinventer la roue, quand il y a des bonnes choses qui se font un peu dans les régions du Québec. Je le disais tantôt, le Québec, sous la forme du milieu communautaire, que ce soit en entreprise et que ce soit aussi à travers les commissions scolaires, on est une pépinière de bonnes idées qui se mettent... Il s'agit seulement de propager cette bonne nouvelle. Et je crois qu'avec la mise en place de vos assises que vous avez mises en place... Je pense que celle de Montréal a eu lieu dernièrement, là.

M. Caron (André): S'en vient.

M. Tomassi: S'en vient. Il y en a une autre, là. Je vous ai vu à la télévision, à un moment donné, là. Mais c'est un... important. Puis je pense que c'est bien que tous les intervenants puissent se mettre ensemble pour essayer de régler cette problématique. Et ce n'est pas, puis vous le disiez vous aussi, là, ce n'est pas seulement le devoir du gouvernement. Le gouvernement, oui, il a un rôle à jouer, mais il y a aussi les autres intervenants qui ont un rôle important à jouer. Et, pour nous, pour le gouvernement, bien, si on est capables d'aller prendre les bonnes choses qui se font un peu partout, bien, tant mieux, c'est un plus pour la société, pour la société québécoise. Et il en est de même avec ce projet de loi, le projet de loi qui instaure ce fonds pour le développement des jeunes enfants 0-5 ans, qui a mis une attention particulière pour le milieu défavorisé.

Vous dites, dans votre mémoire, à la page 6, là, que «la fédération souligne la nécessité d'offrir des services éducatifs à la petite enfance». Je veux seulement vous rappeler qu'au Québec, avec la mise en place des centres de la petite enfance, qui ont été créés en 1997 et qui ont été continués par les gouvernements successifs, on fait en sorte qu'il y a un programme éducatif qui est mis à la disposition des enfants et des éducateurs, un réseau qui va être complété avec 220 000 places d'ici l'automne 2010, l'engagement de créer 15 000 nouvelles places par la suite, qui va rendre le réseau à 235 000 places de services éducatifs. Puis il y a tout le reste, là, tout le reste des autres services de garde qui ne sont pas subventionnés mais qui ont quand même l'obligation d'avoir un programme éducatif pour les enfants. Alors, ça vient en quelque sorte répondre à ce questionnement-là.

Dans vos commentaires, vous faites mention du rapport Ménard sur la persévérance scolaire. Il y a deux éléments qui touchent directement les jeunes enfants 0-5 ans, deux mesures qui sont importantes pour nous. C'est tout ce... on va dire, cette passerelle entre la petite enfance et l'école, préparer les enfants à l'école primaire par la suite. Parce qu'un des constats qu'on fait, c'est que, avec l'étude qui a été faite avec l'institut de... la Direction de la santé publique de Montréal, qui est venue dire qu'il y a un manquement dans ce cheminement-là qu'il faut essayer d'aller prendre, l'essence même du fonds vient en quelque sorte, là... La volonté, c'est d'essayer de répondre le plus adéquatement à cette problématique.

n(16 h 50)n

Il y a des projets qui vont pouvoir surgir. On n'a pas la prétention d'avoir les réponses à tout, et je ne pense pas que la fondation Chagnon non plus a l'intention d'avoir réponse à tout, sauf qu'on est conscients d'une chose, que, oui, il y a des choses qui se font de façon extraordinaire en région, qui peuvent être transposées avec des modifications. Parce que c'est sûr, le mur-à-mur ne peut pas exister au Québec. Alors, c'est des éléments qu'ils vont pouvoir mettre de l'avant.

Je voudrais peut-être vous entendre un peu plus sur cette question de passerelle entre la petite enfance et l'école, là, qui est un élément important, là, je n'en doute pas, et surtout dans le domaine... peut-être dans les milieux défavorisés, où est-ce que cette passerelle des fois est un peu plus difficile, difficile à combler. Quel genre de pistes de solution que vous avez vues actuellement ou que vous entrevoyez, là, avec les assises que vous avez débutées?

M. Caron (André): Mme Gagnon, peut-être.

Le Président (M. Kelley): Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Pâquerette): Merci. Évidemment, nous sommes à tenir...

Une voix: ...

Mme Gagnon (Pâquerette):Il ne faut pas que j'y touche? Il est très sensible?

Nous sommes à tenir les assises, alors on n'a pas, à ce moment-ci, le bilan des assises. C'est un bilan qu'on aura au mois de mai, qu'on adressera à la ministre de l'Éducation pour lui apporter certains constats, certaines pratiques qui sont gagnantes dans certains milieux.

Lorsqu'on affirme l'importance des passerelles, du pont entre la petite enfance, les services de garde, tout ce moment où les jeunes arrivent dans des CPE, dans des services avant la rentrée, ce qu'on affirme dans notre mémoire puis ce qu'on prétend être possible à faire, c'est que chaque milieu se donne une façon, une table, une concertation pour mettre les ressources ensemble pour s'assurer qu'un enfant, lorsque, pour toutes sortes de raisons, on a détecté certaines difficultés, qu'elles soient liées à son milieu familial, son milieu, des difficultés langagières, peu importe, sa situation économique... Lorsqu'on le sait, déjà il a trois ans. Pourquoi attend-on pour en parler, hein, dans le fond, pour se le dire, pour se préparer pour son entrée à l'école? Ça se fait dans certains milieux, c'est ce qu'on nous dit, ça se fait, mais c'est méconnu.

Alors, nos assises prennent ce sens-là aussi, de faire connaître les pratiques, de se les adresser et se dire: Si une pratique est intéressante en Montérégie, au Lac-Saint-Jean, pourquoi on ne la fait pas connaître pour essayer d'en tirer les meilleures conclusions? C'est dans ce sens-là. Pas créer de nouvelles structures, pas créer de nouvelles instances. On pense qu'on a beaucoup, beaucoup d'instances, beaucoup de collaborateurs, mais parfois on intervient insuffisamment ensemble, là. C'est dans ce sens-là.

M. Tomassi: Bien, écoutez, je vous remercie beaucoup. Puis je ne prendrai plus du temps de question parce que j'ai mes collègues... Vous avez éveillé l'esprit de questionnement de leur part. Alors, je leur permettrais de vous poser des questions...

Le Président (M. Kelley): J'ai effectivement...

M. Tomassi: ...à travers le président, bien sûr.

Le Président (M. Kelley): Oui. J'ai effectivement cinq demandes d'intervention, alors je vais les prendre en ordre. Mais, si on peut être disciplinés, on va essayer de passer le plus grand nombre de questions possible, en commençant avec M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Oui. Bonjour. D'abord, je voudrais vous féliciter pour ce très beau mémoire et la qualité aussi de vos propositions. Alors, moi, j'en suis par rapport aux services qui sont... qui doivent être, comme vous dites, adaptés aux caractéristiques culturelles et socioéconomiques des communautés. Évidemment, la stratégie d'intervention de ce fonds-là s'appuie précisément sur la mobilisation des communautés locales. Et, dans votre mémoire, vous dites qu'il faut favoriser «une approche intégrée de services impliquant une collaboration» et que «les services mis en place devront être adaptés aux caractéristiques culturelles et socioéconomiques des communautés».

Alors, justement, le projet de loi vise à être le plus souple possible parce que, vous l'avez dit tantôt, il n'y a pas une région qui a à peu près le même fonctionnement. Les intervenants des fois peuvent différer d'un à l'autre. Alors, comment vous voyez ça à travers le projet de loi, cette adaptation aux caractéristiques culturelles et socioéconomiques? Est-ce que vous trouvez que, le projet de loi, ce qu'il fait est suffisant par rapport à ça, donc que c'est un projet de loi axé sur la souplesse, ou si vous souhaiteriez y avoir d'autres éléments d'ajoutés pour assurer cette adaptation aux caractéristiques culturelles et socioéconomiques des communautés?

M. Caron (André): Je pense que, dans une de nos recommandations, on cible cette... La première recommandation, hein? Quand on dit: «...que les services mis en place soient adaptés aux caractéristiques culturelles et socioéconomiques des communautés, particulièrement en ce qui concerne les milieux défavorisés», ce qu'on veut dire, c'est que cette fondation-là... que ce fonds-là ait comme encadrement ces caractéristiques-là parce que, vous l'avez dit, hein, ce qui se passe en Gaspésie, puis au Lac-Saint-Jean, puis à Montréal, ce n'est pas pareil, c'est complètement différent.

M. Lehouillier: Donc, vous ne voyez pas un fonds qui serait normé à partir du central, à partir de Québec?

M. Caron (André): Non, pas du tout, pas du tout.

M. Lehouillier: O.K. Je comprends très bien. Ça répond...

M. Caron (André): Ça ne réussit pas, et je pense qu'au Québec on a fait cette démonstration-là que, quand ça vient d'en haut vers le bas, je pense que les chances de succès sont moins bonnes que quand ça vient du bas vers le haut.

M. Lehouillier: Du bas vers le haut. Donc, vous répondez à ma question. Et je laisse la chance à mes collègues...

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos: Merci. Merci, M. le Président. Merci beaucoup pour votre présence aujourd'hui, votre mémoire, votre présentation. Moi aussi, j'allais prendre cette première recommandation que vous avez mentionnée, d'adapter les services aux caractéristiques culturelles et socioéconomiques des différentes communautés.

Je ne cache rien à personne lorsque je vous dis que je représente une circonscription qui a comme majorité des gens qui ne parlent ni l'anglais ni le français comme langue maternelle. Ce sont des gens qui sont nouveaux au Québec, qui ont... Évidemment, c'est un quartier aussi qui est très transitoire, et beaucoup des personnes qui vivent dans ce quartier-là sont des personnes qui sont au début de leur expérience dans la société québécoise, et qui amène son lot de défis, trouver du travail... Ce sont des gens qui sont de plus en plus plus éloignés du Québécois de la majorité, au niveau religieux, au niveau des pratiques, des coutumes, etc.

Maintenant, vous savez évidemment que nous avons des collègues qui questionnent la pertinence des commissions scolaires, mais soyez assurés qu'il y a certains qui croyons que les commissions scolaires connaissent bien mieux le milieu que certains collègues qui ont l'impression que tout se passe de la même façon. Comme mon collègue vient de mentionner, nous reconnaissons cette connaissance, cette expertise que vous avez dans vos milieux différents.

Moi, j'aimerais vous poser une question: De quelle façon ces parents-là de ces différentes communautés pourraient être impliqués dans ce processus-là lorsque ça va venir, le temps va venir d'adapter ces services-là? Nous avons des personnes qui sont très différentes de ce qu'il y a ailleurs au Québec dans ces communautés culturelles. Je parle précisément des communautés culturelles minoritaires. Quelle façon... Avez-vous des suggestions à nous donner à ce niveau-là pour ceux qui vont évidemment avoir à faire la répartition de ces fonds-là puis adapter les services aux milieux culturels?

Le Président (M. Kelley): M. Caron.

M. Caron (André): J'aurais tendance à vous dire que vous avez répondu à votre question. La commission scolaire étant l'organisme ou le gouvernement local le plus près de votre communauté, si je reprends votre exemple à vous, et qui connaît très bien chacun de ces milieux, parce que même la commission scolaire, par exemple la commission scolaire de Montréal, c'est différent dans l'est que dans l'ouest, et il y a des quartiers qui sont différents, donc la commission scolaire... Et M. Tomassi y a fait référence, M. le ministre, hein, que les commissions scolaires sont bien branchées sur leur milieu, et si... Nous, dans notre mémoire, ce n'est pas pour rien qu'on vous a dit qu'il faut que ce soit en harmonie avec les gens qui sont là puis en partenariat avec les gens qui sont là. Donc, la commission scolaire, à mon avis, c'est peut-être la meilleure place pour venir sonder ce que le milieu a besoin. Mme Gagnon, pour poursuivre.

Le Président (M. Kelley): Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Pâquerette): J'ajouterais à ce propos que, si le... On conclut en disant qu'on offre nos services, hein, dans le fond, dans le cadre de ce projet de loi là, pour contribuer. Il y aurait là une erreur grave de faire cheminer ce projet sans l'apport des commissions scolaires. C'est nous qui recevons les enfants de cinq ans et parfois de quatre ans, dans certains milieux, et nous sommes... nous représentons un partenaire incontournable dans ce dossier-là.

Alors, c'est ce qu'on vous dit, dans le fond, après-midi, c'est: Il n'y a pas de recette magique, hein, il y a plein de projets possibles, mais les commissions scolaires doivent être impliquées, via leurs établissements évidemment, parce que ça va se passer dans l'école, quelque part, dans les milieux.

Le Président (M. Kelley): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: Merci, M. le Président. Merci pour votre mémoire. Je n'ai pas de question comme tel mais un commentaire, mais vous pourrez réagir après mon commentaire.

D'abord, j'ai beaucoup apprécié votre mémoire puis je pense qu'il identifie bien le projet de loi et pour, entre autres, la clientèle qui est ciblée, les enfants de moins de cinq ans, les enfants qui vivent en situation de pauvreté et tous les impacts du soutien précoce à cette clientèle et l'effet direct sur la persévérance scolaire. Et maintenant les éléments que vous soumettez à la Commission des affaires sociales comme étant des éléments à ajouter pour bonifier le projet de loi, moi, je les reçois bien, j'entends bien ces éléments-là. Alors, je voulais simplement vous faire part de ces commentaires-là. Merci.

Le Président (M. Kelley): Avez-vous des réactions, M. Caron?

M. Caron (André): Bien, ce n'est pas... c'est une réaction à une réaction. Vous avez remarqué, dans notre mémoire, qu'on s'en tient au projet de loi, et, ce qui s'est dit et écrit à l'extérieur du projet de loi, on ne commente pas.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Mégantic-Compton.

n(17 heures)n

Mme Gonthier: Très brièvement. Tout à l'heure, vous avez entendu, vous avez assisté... d'ailleurs, vous en avez fait mention au début, on a dit: Bon, prenons le 150 millions, mettons-le dans le système, le gouvernement va le gérer, et tout ça. Et, en ce qui concerne la fondation Chagnon, on comprend qu'on veut faire du bien, mais qu'ils gèrent leur argent, et puis tout ça. Et puis, moi, j'ai une préoccupation parce que je suis une députée de région.

Alors, j'imagine que, pour qu'il y ait des sommes, on crée une masse critique, d'une part, et qu'on s'assure d'une distribution adéquate sur l'ensemble du territoire du Québec. On comprend que les besoins sont énormes, ils vont au-delà probablement de nos moyens financiers, et, pour s'assurer que le maximum de besoins est confié... Est-ce qu'une association comme celle qu'on est en train de créer n'est pas une façon justement de s'assurer que même les gens qui vivent... les enfants de zéro à cinq ans de ma région à moi, qui est un peu éloignée de Montréal, ne recevront pas aussi une juste part de ces sommes-là? Est-ce que ce n'est pas une méthode, entre autres, de se servir de l'expertise, entre autres, gouvernementale qui connaît et qui a des devoirs vis-à-vis l'ensemble du territoire? Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Caron (André): Justement, ça va être le défi du fonds, hein, ou du groupe de gestion. J'entendais ça tantôt, là, qu'il y aurait une société, je n'ai pas vu ça dans le projet de loi, là, mais qu'il y aurait une société qui serait chargée de répartir ces fonds-là. Ça va être un défi pour cette société-là de s'assurer de l'équité, hein? Et je pense que ? je redis, je reprends les mots de Mme Gagnon ? la commission scolaire, qui est branchée sur le terrain, permettez-moi cette expression-là, est la mieux placée pour aider en partenariat, hein, à l'évaluation des besoins du milieu et améliorer l'équité que vous recherchez.

Mme Gonthier: Sur l'ensemble du territoire du Québec, évidemment.

M. Caron (André): Bien oui.

Mme Gonthier: Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Il reste le temps pour... Merci beaucoup pour la discipline. Alors, la dernière question pour Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme St-Amand: Merci, M. le Président. Alors, je suis vraiment, vraiment contente de vous entendre, d'entendre vos propos, particulièrement au niveau de l'harmonisation, le ministre en a parlé tout à l'heure, parce qu'effectivement je suis issue du milieu des commissions scolaires dans une autre carrière, et vraiment c'est une préoccupation qu'on puisse bien préparer les enfants.

J'aimerais vous entendre sur... Est-ce que vous pensez que la Fédération des commissions scolaires pourrait jouer un rôle dans ce projet-là? Et, si oui, lequel il pourrait être?

M. Caron (André): Écoutez, à chaque fois qu'on a été interpellés par le gouvernement, soit pour donner notre opinion, comme on le fait aujourd'hui, ou pour jouer un rôle... puis il y a un exemple qui me vient en tête avec la Stratégie d'action jeunesse qui a été renouvelée la semaine dernière, mais l'autre Stratégie d'action jeunesse, où on avait eu le mandat de faire la promotion de la formation professionnelle, je pense qu'on s'est acquittés de notre tâche. Et, quand le gouvernement nous interpelle, interpelle la fédération ou les commissions scolaires en général, on répond. Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Pâquerette): J'ajouterai que notre propos, après-midi, c'est une invitation à nous interpeller pour notre implication. On veut le faire, on veut être partie prenante parce qu'on y croit puis on pense que c'est important. Actuellement, au Québec, on est rendus là. On est rendus dans un projet qui est collectif pour la persévérance, pour la réussite des enfants. On est rendus là, tout le monde, et ce n'est pas juste le réseau de la santé ni de l'éducation. Alors, nous, on offre notre collaboration entière là-dedans. On a, dans notre loi, dans la Loi sur l'instruction publique, une obligation de reddition de comptes, une obligation d'équité, hein, de services, et tout. Donc, on est bien placés, je pense, pour prendre la parole là-dedans et pour contribuer, là, dans le sens de ce projet de loi là.

Mme St-Amand: Je vous remercie.

Le Président (M. Kelley): Ça va? Merci beaucoup. M. le député de Gouin.

M. Girard: Merci, M. le Président. À mon tour de saluer M. Caron, Mme Gagnon et M. Turmel aussi. Merci pour votre mémoire. Je veux revenir sur un certain nombre d'éléments contenus dans votre mémoire que vous nous avez présenté.

D'abord, vous nous parlez, là, de partenariat et vous indiquez à quel point, bon, les commissions scolaires sont impliquées dans les communautés, ont développé une expertise. J'aimerais savoir... Parce qu'il y a eu des débats, au cours des derniers jours, lors du dépôt des mémoires des différents groupes, où le ministre nous a donné un peu plus de détails sur le fait qu'il allait y avoir une société de gestion composée de façon paritaire de cinq membres de la fondation et de cinq membres de la part du côté gouvernemental. Tout ça est dans le fameux protocole d'entente, là. Il n'y a pas grand-chose dans le projet de loi, mais tout ça est, semble-t-il, dans le protocole d'entente. C'est pour ça qu'on aimerait avoir le document.

Moi, j'aimerais savoir, de votre part... Vous nous dites que c'est important, que les services qui vont être mis en place doivent être adaptés aux caractéristiques culturelles et socioéconomiques des communautés en ce qui concerne les milieux défavorisés les plus susceptibles de bénéficier des investissements à venir. Est-ce que je comprends, donc, que vous souhaiteriez qu'il y ait des représentants de la société civile au conseil de gestion pour tenir compte de l'expertise existante, que ce soit à travers les centres de la petite enfance, les commissions scolaires, les organismes famille? Est-ce que, pour vous, c'est important afin de respecter le partenariat et l'expertise existante à travers tout le Québec?

M. Caron (André): Bien, je pense que oui, et je peux peut-être donner comme exemple: il y a eu une société de formée en 2000, qui s'est appelée Fonds Jeunesse. C'est la société qui a suivi le Forum jeunesse de l'an 2000. J'ai fait partie de cette société de gestion là pendant quatre ans. Et il y avait des gens de tous les... il y avait des jeunes, des syndicats, le monde des affaires. Puis ça revient rejoindre un commentaire qui a été fait tantôt. À l'analyse d'un projet qui venait du terrain, qui venait des milieux vers en haut, à être analysé, c'est de même qu'on a eu un succès dans cette gestion-là. Et je pense que la panoplie de personnes qui pourront faire partie de cette société de gestion là, même si ça ne fait pas partie du projet de loi puis que je vous ai dit qu'on ne commenterait pas sur autre chose que le projet de loi, je pense qu'on peut émettre cette opinion-là que des gens qui ont l'expertise et un vécu du terrain et de la problématique ne seront que bénéfiques.

Mme Gagnon (Pâquerette): J'ajouterais, si vous permettez.

M. Girard: Oui. Allez-y, allez-y, madame, allez-y.

Mme Gagnon (Pâquerette): Le risque de ne pas le faire est très grand pour la société, à mon avis. On est dans un contexte financier difficile, et, si on devait se tromper et refaire en silo ou réinventer des pratiques qui sont déjà existantes, faute d'avoir pris l'information où elle est, je pense qu'on ferait une erreur majeure. C'est dans ce sens-là qu'on offre notre collaboration.

M. Girard: Est-ce que je comprends de vos propos que vous voulez éviter qu'il y ait une forme de... je ne sais pas, de structure parallèle qui soit créée avec peut-être des objectifs nouveaux par rapport aux projets, aux communautés qui sont déjà existantes, qui ont développé une expertise au niveau de la petite enfance, là? Vous, c'est important pour vous qu'on...

Mme Gagnon (Pâquerette): Qu'on soit à tout le moins présents, c'est ça.

M. Girard: ...ne tente pas de réinventer la roue, mais qu'on utilise les expertises existantes dans les communautés. Puis Dieu sait, bon, qu'elles varient d'un endroit à l'autre, selon les commissions scolaires, les communautés. Évidemment, la façon de travailler en Gaspésie ou au Saguenay?Lac-Saint-Jean n'est peut-être pas la même qu'à Montréal, dans certaines communautés. Je pense qu'il faut tenir compte de ça aussi.

Mme Gagnon (Pâquerette): Il y a une structure de gestion, ou peu importe comment elle s'appelle, elle se nomme. Ce qu'on dit, c'est à tout le moins d'y être, hein?

Tantôt, on a mentionné le rapport Ménard; c'est un bel exemple pour nous. On y a été associés. On a été associés. S'il avait fallu qu'on ne le soit pas... On parlait de persévérance scolaire. C'est louable que la société civile prenne la parole, mais, dans la société civile, fait partie aussi un gouvernement local qui est la commission scolaire, et sa mission première, c'est la réussite des élèves au Québec. Donc, ce serait assez surprenant de ne pas être associés à ce projet de loi.

M. Girard: Avez-vous été consultés avant... dans l'élaboration du projet de loi n° 7?

M. Caron (André): Non.

Mme Gagnon (Pâquerette): Non.

M. Girard: Vous nous dites... Bon, vous parlez du partenariat et d'autres modifications au projet de loi. Juste pour que je puisse comprendre: Quel article vous souhaiteriez modifier, du projet de loi n° 7, pour inclure les éléments que vous souhaiteriez modifier au niveau du partenariat, la formation du personnel, prise en compte de la recherche, le lien avec l'école, l'équité, tout ça? J'aimerais ça voir quel article vous aimeriez modifier. J'essaie de voir, là, à travers le projet de loi existant, où on pourrait insérer les commentaires fort pertinents que vous nous faites dans le mémoire que vous nous présentez aujourd'hui.

M. Caron (André): On n'a pas fait cet exercice-là et on pensait peut-être qu'en vous faisant les recommandations aujourd'hui votre rôle, quand vous serez rendus article par article, ça va être de prendre en considération ce qu'on vous a recommandé et de les incorporer dans un langage de loi, ce qu'on n'est pas habilités à faire.

M. Girard: Pour pouvoir le faire, à ce moment-là, je comprends qu'il faudra qu'il y ait de nouveaux articles qui soient déposés par le ministre...

Mme Gagnon (Pâquerette): De nouveaux articles...

M. Caron (André): Des ajouts, effectivement.

M. Girard: ...afin qu'on puisse discuter. Parce qu'à partir des articles existants, certaines des modifications que vous nous proposez sont difficilement applicables, selon les...

n(17 h 10)n

Mme Gagnon (Pâquerette): ...plus de l'ordre d'ajouts, hein, que de modification d'articles.

M. Girard: Parfait. Parfait, je comprends bien le message. L'autre aspect que je veux aborder avec vous, vous nous dites, à la page 10, Prise en compte de la recherche et le transfert des connaissances, vous nous dites: Il faudrait éviter d'investir dans des secteurs d'activité n'ayant pas démontré leur efficacité. Il va falloir tenir compte de la recherche qui doit guider le choix des projets ou des programmes à retenir.

Le projet de loi indique, et c'est ce que le ministre nous a dit dans ses remarques préliminaires puis au cours des consultations particulières, qu'il doit financer des projets qui n'existent pas. J'essaie juste de concilier ça avec votre propos sur le fait qu'il faut éviter d'investir dans des secteurs d'activité qui n'ont pas démontré leur efficacité.

Est-ce que, quand on regarde les résultats au niveau du décrochage scolaire à travers le Québec, est-ce qu'il y a peut-être de nouvelles initiatives ou de nouvelles façons de faire qu'on devrait mettre sur la table? J'aurais aimé vous entendre là-dessus. Je veux essayer de comprendre le sens de cette proposition-là.

Une voix: Mme Gagnon.

Le Président (M. Kelley): Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Pâquerette): Notre compréhension du projet de loi, «doit financer des programmes qui n'existent pas», ça ne veut pas dire, quant à nous, que ce ne seraient pas des parties de projets qui existent qu'on va venir bonifier, mais on ne veut pas refinancer des programmes qui le sont déjà. On n'est pas dans ce contexte-là.

Quand on parle de la recherche, de fouiller un peu plus, c'est qu'il y en a une multitude, de recherches. On n'a pas nécessairement toujours une culture, au Québec, de s'appuyer sur des recherches. On fait mention, à la page 6, d'une recherche qui démontre l'importance, pour la préparation à l'école, de faire lire les jeunes, d'avoir un contact avec la lecture. Il y a des recherches qui viennent appuyer ça, on sait que ça existe.

Alors, ce qu'on dit dans le fond, c'est: Assurons-nous de mettre en place des projets qui vont s'appuyer sur des recherches gagnantes et non pas reprendre... Parfois, on a tendance à revenir en arrière puis dire: Bon, ça a déjà marché. Essayer de s'appuyer sur des recherches qui peuvent nous amener un peu plus loin, qui peuvent faire réussir les élèves.

Actuellement, on a eu beaucoup de renouveaux pédagogiques, de réformes, et on fait quand même un constat qu'on a encore beaucoup, beaucoup, beaucoup de gains à faire sur la persévérance, sur la réussite. Alors, on dit, dans le fond: Appuyons-nous un peu plus sur des recherches qui ont démontré que certaines pratiques sont porteuses, quelles que soient les régions.

M. Girard: O.K. Je veux revenir aussi sur la... Vous me parlez de l'équité dans l'attribution des ressources, prendre compte des caractéristiques sociales et économiques des populations concernées. Est-ce que vous pensez que, qu'il y ait uniquement une société de gestion au niveau national, avec des représentants de la fondation, des représentants du gouvernement, c'est suffisant ou vous estimez qu'il devrait y avoir une consultation des instances régionales?

Vous faites référence au fait qu'il existe déjà dans certaines régions des tables où se réunissent des commissions, des commissions scolaires, des organismes communautaires, des centres de la petite enfance. Ça varie, j'imagine, d'une région à l'autre. Est-ce que vous jugez utile que... Parce que vous demandez qu'on tienne compte de la réalité d'une région à l'autre et qu'il y a un traitement puis il y a une réalité qui est différente. Est-ce que ça devrait se refléter aussi dans le projet de loi pour être certain que ce ne soit pas du mur-à-mur mais du sur-mesure?

M. Caron (André): Je ne sais pas si ça devrait être dans le projet de loi ou dans une réglementation qui va supporter le projet de loi, parce que je pense qu'il faudra que cette société de gestion là consulte les milieux pour s'approprier les vrais problèmes. Sans ça, on va se ramasser encore dans le mur-à-mur, et puis je pense que ça a été démontré que ce n'est pas efficace. Donc, si on veut maximiser sur les ressources qui vont être allouées, je pense que ça va être de consulter les milieux. Puis, les commissions scolaires, comme Mme Gagnon le disait tantôt, on est disposés à répondre à ces consultations-là en tout temps.

M. Girard: O.K. Je veux y revenir. Je pense que c'est le ministre qui abordait la question des passerelles entre les CPE et les milieux scolaires. Comment ça se passe? Disons qu'il y a un enfant qui fréquente un centre de la petite enfance, qui éprouve un certain nombre de difficultés et qui entre à la maternelle. Est-ce qu'actuellement il y a vraiment un lien qui se fait, étroit entre l'école de quartier et le CPE de proximité pour s'assurer qu'il y a un transfert, bon, du dossier de l'enfant ou s'assurer qu'on ne l'échappe pas entre le moment où il passe du CPE à la maternelle? Est-ce que c'est quelque chose qui est systématique, qui existe partout, ou il devrait y avoir des améliorations apportées, particulièrement dans les milieux défavorisés? Puis après je vais laisser mon collègue poser une question.

Le Président (M. Kelley): Oui. Parfait. M. Turmel.

M. Turmel (Camil): Oui, je peux peut-être y aller. Je vais vous dire, c'est à géométrie variable. La fluidité est plus présente dans des régions que dans d'autres, on est à même de le constater, et puis je pense qu'il y a amélioration à apporter dans ce secteur-là. D'ailleurs, lorsqu'on parle de partenariat, d'harmonisation au niveau des structures, effectivement c'est pour faire en sorte que les informations suivent, pour ne pas qu'on soit obligé de réinventer la roue à chaque fois que l'élève change de service. Ça, c'est un élément important, Et puis on le vit, comme je vous le mentionnais, de façon peut-être... On nous parle d'expériences heureuses dans des secteurs, mais, dans d'autres secteurs, c'est à construire, c'est une évidence, au Québec.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Groulx.

M. Gauvreau: Alors, bonjour, merci d'être venus nous rencontrer. J'ai une seule question assez précise. Vous avez dit avec justesse qu'il ne fallait pas aller au-delà des pratiques déjà existantes, évidemment créer des nouveaux silos, des nouveaux courants, qu'il fallait rester branché sur le terrain. Et je me posais la question suivante: Actuellement, est-ce que les commissions scolaires siègent aux différentes tables 0-5 ans qui existent, où je sais qu'il y a des groupes communautaires, des CPE, il y a souvent des gens des CSSS, etc.?

Le Président (M. Kelley): Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Pâquerette): Là, on est encore obligés de dire que c'est à géométrie variable. Parfois, c'est sur invitation, ces tables-là, hein? Il y a des milieux où les collaborations sont extraordinaires, il y a d'autres milieux où c'est plus difficile parce que... C'est pour toutes sortes de raisons. Parfois, c'est lié aux organismes; parfois, c'est lié aux personnes. Mais c'est un peu ce qu'on prétend ici encore, là, il faut s'associer, il faut se donner des orientations au niveau régional pour être assis aux mêmes tables, le réseau de la santé, les réseaux qui touchent la petite enfance, pour pouvoir donner les meilleurs services. Mais, encore là, on est obligés de constater que ce n'est vraiment pas pareil partout au Québec, là.

M. Gauvreau: Est-ce que je comprends de votre réponse qu'il serait plus que souhaitable que des commissions scolaires puissent intégrer les tables déjà existantes qui ont déjà des expertises en 0-5 ans ? notamment, il y a les gens des CPE, que nous avons rencontrés ? de façon à être proactifs et préparer l'avenir des enfants?

Mme Gagnon (Pâquerette): Dans la mesure où notre contribution est souhaitée et souhaitable. Parce qu'on ne se cherche pas des tables, hein, on en a beaucoup.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Gagnon (Pâquerette): Mais, quand c'est souhaitable et souhaité, on est là, hein, puis on est partants, c'est certain, parce que c'est gagnant, hein, on gagne du temps. Quand on sait ? je le disais tantôt, je le répète ? quand on sait déjà, quand il y a un réseau qui sait déjà qu'un enfant a besoin d'aide, il a trois ans, pourquoi attendre? Il faut s'en parler, il faut se préparer à l'entrée de cet enfant-là dans notre réseau.

M. Gauvreau: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Mercier.

M. Khadir: Alors, bonne fin d'après-midi. Mes salutations, M. Caron, Mme Gagnon, M. Turmel. J'ai capté une partie du début de votre présentation, ensuite la fin. En fait, c'est parce que les nombreux députés de mon parti ne peuvent pas remplir...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Khadir: C'est ça, j'ai dû suppléer quelques-uns.

M. Tomassi: Vous faites bien ça.

M. Khadir: Vous avez dit, Mme Gagnon, que vous souhaitiez être partie prenante d'une manière quelconque, d'être consultés, d'avoir votre mot à dire dans les choix, les orientations de ce fonds, dans le soutien à la petite enfance, surtout dans la perspective d'améliorer la persévérance scolaire, d'améliorer son intégration à l'école.

J'ai appris, ce matin, que, dans une revue qui s'appelle Montréal centre-ville, l'hiver dernier, en fait l'hiver 2008, M. André Chagnon avait été interviewé par un journaliste, M. Gilson, qui disait... En réponse à sa question: Qui décidera des projets qui seront ou non financés par le fonds de développement des jeunes enfants?, M. Chagnon a répondu: «C'est nous qui donnons l'orientation des champs d'interventions et qui évaluons les projets. Nous avons des principes directeurs énoncés sur notre site», auxquels il référait, donc, le journaliste. Est-ce que, vous, vous seriez à l'aise avec une structure où la partie privée qui contrôle 50 % des sièges au C.A. énonce d'avance un peu comment elle conçoit, disons, les prises de décision?

M. Caron (André): Bien, écoutez, tout à l'heure, j'ai mentionné, malheureusement avant votre arrivée, que, nous, aujourd'hui, on commentait le projet de loi qu'on a lu, le projet de loi n° 7. Ce qui s'est dit, écrit ou discuté en commission parlementaire ou des déclarations de M. Chagnon, le contexte est peut-être différent. Nous, on désire être associés dans les priorités qui seront établies pour le projet de loi n° 7 ou l'après-projet de loi n° 7. Maintenant, écoutez, le gouvernement aura une décision à prendre aussi là-dessus, là, comment est-ce que ça va se faire et puis les priorisations. Puis la consultation, nous autres, on est toujours disposés à la faire.

n(17 h 20)n

Mme Gagnon (Pâquerette): Je pourrais ajouter qu'il serait encore vraiment dommage de voir apparaître des critères ou des balises, des orientations qui risqueraient d'être déconnectés de la réalité, sur lesquels on n'aurait pas été consultés. Si on n'est pas partie prenante au départ, il faudrait à tout le moins avoir la possibilité d'être consultés pour pouvoir donner notre opinion là-dessus. On pourrait se tromper si on fait autrement, hein? On peut avoir des bons points de vue, mais, si on ne va pas sur le terrain, on pourrait peut-être passer à côté.

M. Khadir: Bon. Ce que je comprends, c'est que, s'il y a un espace de consultation, il faut qu'il y ait une influence, que ce ne soit pas déterminé d'avance, quels que soient les intervenants. D'accord?

Comme il y a deux théories globales qui s'affrontent dans le développement de l'enfant, une qui dit: Tout se joue finalement dans le développement intra-utérin puis dans les deux à trois premières années; l'autre qui dit: Oui, ça a de l'influence, mais les facteurs socioéconomiques donc, par exemple, les éléments d'inégalité sociale, et tout ça, peuvent avoir une plus grande importance...

Moi, dans le milieu où j'ai vécu, où j'ai travaillé grâce à Médecins du Monde, dans des forums dans l'action humanitaire, c'est des questions qu'on se pose aussi, hein, parce qu'on intervient souvent dans des populations où il y a beaucoup d'enfants en bas âge, puis il faut savoir où on agit. Les théories qui mettaient l'accent sur la toute petite enfance, l'enfance précoce ou intra-utérine, c'est-à-dire qui donnaient la prépondérance à ça ont été largement rejetées quelque part à la fin des années 1990, début des années 2000.

Vous dites qu'il faut appuyer notre travail, les orientations sur la recherche disponible. Pour ce qui est de la commission scolaire, ce que vous en connaissez, actuellement où on en est dans la compréhension des choses au Québec, selon vous? Quelle est la part... Est-ce qu'il y a une prépondérance, d'abord? Si oui, c'est laquelle? Si non, bien, comment il faut régler ça?

Mme Gagnon (Pâquerette): Je ne m'appuierai pas sur des recherches, là, je ne vous donnerai pas le nom de recherches, mais la prépondérance, pour nous, notre croyance, c'est... Tous les facteurs socioéconomiques, les facteurs de la famille jouent un très, très grand rôle. On rejette le fait que tout se fait... un ou deux ans, là. On dit: Il y a plusieurs influences qui jouent encore. Donc, de là la contribution essentielle de 0 à 5 ans pour la réussite des élèves. Est-ce qu'on a un appui scientifique?

M. Turmel (Camil): Peut-être un indicateur...

Le Président (M. Kelley): M. Turmel, en complément de réponse.

M. Turmel (Camil): Peut-être un indicateur. Lorsqu'on regarde les taux de décrochage, on remarque 20 points de différence dans un secteur où on a un rang décile 1 et 2. Les rangs déciles sont influencés par la scolarité de la mère et puis l'inactivité des parents. Et puis prenez une région où vous avez du 1, 2, exemple, vous avez un taux de décrochage peut-être de 20 %. Vous prenez une région où on a du 9, 10, qui est complètement à l'autre extrémité, on a tout près de 40 %. Donc, pour nous autres, cet élément-là, il est déterminant, puis c'est pour ça qu'on l'a placé dans notre première recommandation.

M. Khadir: J'aimerais juste conclure en disant: Si je vous ai posé la question, c'est que, dans ce que je connais de l'action dans le domaine de l'enfance qu'à date la fondation Chagnon tend à appuyer, ou la fondation reliée à la famille Chagnon, c'est la conception un peu biopsychologique qui met beaucoup l'emphase sur la phase de développement intra-utérin, d'où le soutien à la mère, etc., et la toute première enfance, qui est prépondérante dans leur vision. Donc, je suis en... Parce que, moi, je partage plutôt l'autre vision, qu'il faut agir sur les déterminants socioéconomiques. Je suis content de voir que votre argumentation va un peu dans le même sens. Merci.

Le Président (M. Kelley): Bien, sur ça, merci beaucoup. Le grand débat en anglais, on parle de «Nature-Nurture», hein? Ça, c'est un débat qui ne date pas d'hier. Merci beaucoup aux représentants de la Fédération des commissions scolaires du Québec, M. Caron, M. Turmel, Mme Gagnon, pour votre contribution.

Sur ça, je vais ajourner nos travaux au mardi, le 7 avril, à 9 h 30, dans cette même salle, afin de poursuivre des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 7, Loi instituant le fonds pour le développement des jeunes enfants. Merci beaucoup. Bonsoir. Bonne fin de semaine.

(Fin de la séance à 17 h 24)


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