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Version finale

39th Legislature, 1st Session
(January 13, 2009 au February 22, 2011)

Wednesday, April 8, 2009 - Vol. 41 N° 9

Consultations particulières sur le projet de loi n° 7 - Loi instituant le fonds pour le développement des jeunes enfants


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Table des matières

Journal des débats

(Dix heures trente-six minutes)

Le Président (M. Kelley): Je demande à tous les membres de la commission de prendre place, s'il vous plaît. Je constate quorum des membres de la Commission des affaires sociales, commission travaillante de l'Assemblée nationale.

Donc, je déclare la séance ouverte en rappelant le mandat de la commission: la commission est réunie afin de compléter ? soulignez le mot «compléter» ? les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 7, Loi instituant le fonds pour le développement des jeunes enfants.

Mme la secrétaire, par hasard, est-ce qu'il y a des remplacements aujourd'hui?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Girard (Gouin) remplace Mme Lapointe (Crémazie); M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière) remplace M. Caire (La Peltrie).

Le Président (M. Kelley): Parfait. Merci beaucoup. Ce matin, on a deux témoins: La Confédération des syndicats nationaux, suivie par le Regroupement des organismes communautaires Famille de Montréal. Alors, on a convenu une présentation de plus ou moins 10 minutes ? il y a une certaine latitude de la présidence ? suivie par un échange avec les membres de la commission.

Auditions (suite)

Alors, sans plus tarder, je vais céder la parole aux représentants de la Confédération des syndicats nationaux, représentée par sa vice-présidente, Mme Denise Boucher.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Mme Boucher (Denise): Alors, je comprends que les témoins sont appelés à la barre. Alors, les personnes qui m'accompagnent: Josée Roy, adjointe au comité exécutif de la CSN, et Marie Roy, du Service des relations de travail, volet recherche.

Alors, merci, M. le Président, M. le ministre, membres députés. Alors, personne ne peut contester l'urgence de mobiliser les divers acteurs afin que les enfants vivant dans des situations difficiles puissent, eux aussi, réussir leur entrée à l'école et poursuivre leur cheminement scolaire, mais la voie poursuivie ici n'est pas la bonne. Pour la CSN, l'arrivée de ces fonds ? parce qu'on fait quand même le lien aussi avec l'autre qui a été en présentation la semaine dernière ? mixtes participe à la transformation du rôle de l'État et à l'émergence d'une nouvelle gouvernance. Progressivement, l'État abdique certaines de ses responsabilités et s'associe avec des acteurs privés en vue de répondre aux besoins de la population. Ces fonds visent des objectifs et des groupes-cibles différents, mais ils ont des liens de parenté avec le fonctionnement opaque des partenariats public-privé qui se développent au Québec et dans divers pays et pour lesquels plusieurs inquiétudes se confirment.

Une des faces cachées de ces fonds est le sous-financement. L'état du financement gouvernemental influence les politiques publiques et l'allocation des ressources qui en découle. La situation actuelle des finances du gouvernement n'est pas favorable au développement ou à l'élargissement des politiques publiques, et ce, d'autant plus que le gouvernement, au lieu de redresser les finances publiques, se prive de revenus en octroyant des baisses d'impôt. Ces fonds cogérés et cofinancés posent la question de l'intrusion du privé dans le secteur public. Aucune mesure de protection, aucune règle de gouvernance, aucune règle éthique, aucune obligation n'est édictée. On laisse place au développement en silo de ces fonds.

La CSN est préoccupée par la constitution de fonds public-privé dans le champ du social et par l'émergence d'un nouveau mode de gouvernance. Elle ne peut donner son aval à ce projet de loi purement administratif dont les impacts sont éminemment politiques. La création de ce fonds soulève de nombreux enjeux et questionnements, notamment sur la transformation du rôle de l'État, auxquels le gouvernement doit répondre. C'est pourquoi la CSN recommande que le gouvernement tienne dans les plus brefs délais un débat public large sur la pertinence de fonds mixtes public-privé complémentaires aux programmes et aux politiques publiques et fasse rapport.

Dans cette réflexion, la CSN rappelle que l'État, comme ultime responsable du bien commun, doit exercer ses obligations spécifiques d'orienter, planifier, organiser, financer et rendre compte de l'action publique, tout comme il lui incombe d'encadrer et d'actualiser la régulation des divers acteurs de la société. L'État doit conserver la maîtrise d'oeuvre et la responsabilité de définir ou d'actualiser les politiques publiques et les stratégies dans lesquelles se réalisera l'ensemble des activités et opérations découlant des projets financés par un fonds mixte.

n (10 h 40) n

Comme nous constatons que l'argent est déjà prévu et que sa création semble imminente sinon faite, la CSN recommande que le gouvernement suspende la création d'autres fonds ? ici, on tient compte des fonds, soit du fonds de saines habitudes de vie, proches aidants, et celui aussi du développement des jeunes enfants ? jusqu'à la publication d'un bilan de mi-parcours portant notamment sur les priorités retenues, la pertinence des réalisations et leur impact sur les personnes cibles, sur l'offre de services publics et sur les organismes intervenant sur le terrain; que ce bilan soit déposé à l'Assemblée nationale.

Dans le contexte où la création du Fonds pour le développement des jeunes enfants... semble-t-il assez imminent, nous croyons que des modifications substantielles doivent être apportées afin de garantir notamment la transparence, l'imputabilité, le respect des acteurs sur le terrain ainsi que la complémentarité avec les politiques publiques. La CSN recommande donc que des représentantes et des représentants de la société civile siègent au conseil d'administration de la société de gestion, de même qu'à tout autre comité.

De plus... On fait de l'effet!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Boucher (Denise): De plus, nous croyons qu'il est également d'intérêt public de suivre l'évolution des activités, des projets et des initiatives et de rassembler en un rapport annuel de quoi juger de la performance d'ensemble des résultats atteints ainsi que de la satisfaction des clientèles visées et des acteurs associés. En fait, ces informations de performance et de résultats sont essentielles pour faciliter le suivi du fonds mixte et l'appréciation de sa contribution, en complémentarité des services publics, d'un programme ou d'une politique gouvernementale. C'est pourquoi la CSN recommande que la société de gestion dépose au ministre un rapport annuel rendant compte de l'ensemble des activités, projets et initiatives et présente un bilan financier, que ce rapport soit déposé à l'Assemblée nationale et soit rendu public.

Enfin, en matière de reddition de comptes, il y a une zone grise, à savoir si le Vérificateur général aura droit de regard sur les activités du fonds. Pourtant, compte tenu des possibilités, des risques toujours présents de dérapage ou d'imprévus dans une entreprise semblable, il faut prévoir d'emblée qu'une autorité puisse examiner de près les pratiques et les documents officiels découlant de la mise en oeuvre de ce fonds mixte et fasse rapport. À cette fin, la CSN recommande que le Vérificateur général ait droit de regard sur l'ensemble des activités de la société de gestion et fasse rapport.

Pour notre dernière recommandation, nous croyons que le gouvernement se doit de déposer rapidement une politique et un plan d'action gouvernemental pour le développement des jeunes enfants, que le fonds y soit rattaché et que ce dernier s'inscrive en soutien à la loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Pourquoi? Parce que la lutte à la pauvreté demeure un enjeu de société. Les écarts se creusent entre les riches et les pauvres, la pauvreté des enfants s'accentue et elle devient une urgence sociale. Il est fort à craindre que cette progression s'accroisse en raison des effets de la crise financière et économique et de la récession. D'ailleurs, les fermetures d'entreprise et les pertes d'emploi se multiplient, et de plus en plus de familles et d'enfants se retrouvent dans des situations difficiles. Il faut intervenir auprès des enfants vivant en situation de pauvreté, mais, si nous n'agissons pas auprès des familles pour améliorer leurs conditions de vie, il est fort probable que la situation des enfants demeurera inchangée à moyen et long terme.

Nous cherchons à éviter le ciblage de clientèles et nous voulons miser sur une approche qui devrait viser tous les enfants vivant en situation de vulnérabilité, et à soutenir leurs parents dans l'exercice de leur rôle parental, et ce, peut importe leur origine socioéconomique.

De plus, nous ajoutons que les orientations et les décisions ne peuvent être fonction de choix idéologiques ou d'intervenants non gouvernementaux; elles doivent être prises en fonction des enfants et de leur famille, et ils est essentiel que les parents, les organismes qui oeuvrent sur le terrain y soient associés étroitement. Il est aussi de première importance que les partenaires du fonds reconnaissent l'expertise des intervenantes et des intervenants, les pratiques existantes, et qu'ils s'appuient sur elles pour le développement des programmes et des projets.

Pour la CSN, et je termine là-dessus, le fonds doit proposer une approche universelle, englobante pour tous les enfants de 5 ans et moins et leur famille, et non pas stigmatiser les enfants vivant en situation de pauvreté, afin de contrer les dédoublements, d'harmoniser les différentes interventions ministérielles et communautaires, de s'assurer de la pertinence de la complémentarité et de la pérennité des activités et des programmes qui seront développés par le fonds pour le développement des jeunes enfants. Alors, voilà, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Boucher, alors pour cette présentation. Et je suis prêt à céder la parole au ministre de la Famille et député de LaFontaine. M. le ministre.

M. Tomassi: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Boucher, Mmes Roy, bienvenue à cette commission. Comme vous êtes des habituées des commissions parlementaires et d'échanges entre parlementaires, je vais aller rapidement à votre mémoire, de un, vous remercier énormément de la contribution que vous faites en déposant un mémoire. Je sais que la vision globale de la finalité, à savoir le bien-fondé du fonds, n'est pas la même, pour diverses raisons, puis c'est tout à fait correct, c'est ça qui permet à des projets de loi d'évoluer dans le bon sens et que plus de gens possible puissent y adhérer. Vous faites mention dans vos recommandations, quelques recommandations que je voudrais me permettre de vous redire, des choses qui sont dites depuis le début de la commission parlementaire. De un, vous demandez à ce que des gens de la société civile puissent siéger au conseil d'administration de la société de gestion. C'est une recommandation qui a été dite par plusieurs groupes qui sont venus nous voir; nous trouvons la suggestion... une bonne suggestion qui puisse aider à cette compréhension.

De deux, la mise en place. Des groupes sont venus nous parler de la mise en place d'un comité de pertinence, où est-ce qu'un comité serait mis en place pour étudier et faire le suivi des demandes d'aide ou des demandes de projet et où, là aussi, des membres de la société civile pourraient y siéger, recommandation que nous trouvons porteuse, et la mise en place d'un comité de liaison. Un comité de liaison qui en bout de ligne ferait le passage de certaines problématiques qui pourraient surgir, avant qu'elles surviennent, que les groupes communautaires qui seront directement touchés par la mise en place du fonds, pour avoir accès au fonds, puissent trouver écho avec les gens du ministère et les gens de la fondation, pour que les problèmes qui ont surgi peut-être lors de la mise en place du fonds Québec en forme ne puissent pas retrouver effet avec la mise en place de ce nouveau fonds. C'est des avenues qui nous semblent porteuses pour la suite des choses.

D'autres éléments de votre mémoire concernant le Vérificateur général, je crois que j'ai répondu à la question à savoir s'il faut être encore plus précis dans le projet de loi, dans la loi, question qu'on va regarder attentivement, parce que, pour nous, la question était claire, là, le Vérificateur a le droit de vérification sur le fonds. Le fonds crée une société de gestion, et le ministre de la Famille en est responsable; il y a un dépôt à l'Assemblée nationale d'un rapport. Est-ce que le rapport, il faut qu'il soit plus large? C'est des discussions. C'est pour ça qu'une commission parlementaire nous permet d'avoir des échanges et nous permet de venir bonifier le projet de loi par la suite. Je sais que mon collègue va me faire encore mention du protocole d'entente, que je déposerai lors de l'étude détaillée article par article. Pour nous, c'était important que les gens puissent venir discuter, venir parler du projet de loi, les problématiques que les gens voyaient à travers le fonds. Il y a toute la problématique des organismes communautaires qui sont venus nous parler sur les frais administratifs; je pense que c'est un irritant majeur pour certains groupes qui pensent que le 3 % ou le 5 % n'est pas suffisant dans l'établissement. Or, c'est tous des éléments qui pourraient être discutés lors de ce comité de liaison pour essayer d'en arriver.

Or, écoutez, je vais laisser la place à mes collègues, s'ils ont des questions ou si vous voulez apporter un commentaire, mais je vous remercie beaucoup de vos commentaires, de votre mémoire. Plusieurs points vont être pris en considération pour la suite des choses.

Le Président (M. Kelley): Mme Boucher, avez-vous des réactions?

n (10 h 50) n

Mme Boucher (Denise): Bien, je suis contente de voir que le ministre a eu de l'écoute sur l'ensemble des éléments qu'il rapporte qu'il va ajouter au prochain projet de loi. En même temps, ça va peut-être le rendre un petit peu plus substantiel, parce qu'on peut considérer qu'il y a peu de choses dans ce projet de loi là, qu'il est plutôt à caractère administratif, mais c'est pour ça qu'on parlait qu'il y avait aussi un volet plus à caractère politique. Parce qu'au-delà d'administrer la question du fonds il faut qu'il y ait des mises en garde.

Mais je rappelle que, pour nous, on pense qu'on ne peut difficilement arrêter... je vais prendre l'expression: On ne peut pas... difficilement arrêter le train, parce qu'il semble bien parti pour ces trois fonds-là. Mais je vous rappelle qu'au-delà de ça, nous, il faut qu'on puisse faire un bilan de ça, et il ne faudrait pas que ça devienne maintenant la voie de sortie pour le gouvernement, d'aller vers des fonds, vers la possibilité qu'il y ait de plus en plus de mécènes qui contribuent et que le gouvernement se déresponsabilise de sa charge, de sa part qu'il a à faire.

Donc, au-delà de la question d'argent, je pense aussi à des politiques. Donc, c'est pour ça aussi qu'on ramène la question de la proposition 6, sur tout le volet de la politique auquel on devrait... sur toute la question de la politique du développement des enfants, qui, pour nous, devrait englober, parce que plein de ministères sont rattachés, hein, le ministère de la Justice, l'Éducation, Sport et Loisir, en tout cas plein de monde, mais en même temps tout le monde fait des choses, mais en même temps il n'y a rien qui suit, et on a peur d'échapper les enfants, mais peut-être aussi d'échapper les parents dans leur part de responsabilité à l'égard des enfants, parce que, ça aussi, il ne faudrait pas l'oublier. Donc, je suis contente de voir que vous tenez compte de ça, mais en même temps je vous rappelle qu'on a des préoccupations qui sont, je pense, tout à fait légitimes dans le contexte d'un désengagement de plus en plus grand de l'État sur ses responsabilités sociales.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme St-Amand: Merci, M. le Président. Mme Boucher, Mme Roy, dans un premier temps, je comprends bien que, sur le fonds, en termes de besoins pour les enfants 0-5 ans, vous reconnaissez qu'il y a vraiment un besoin à cet égard-là, pour assurer à ces enfants-là ? on parle des enfants de milieux défavorisés, là ? assurer un meilleur début de vie par la suite, à l'entrée scolaire. Pour vous autres, c'est comme une évidence, au-delà de certaines positions que je comprends bien que vous avez affirmées, là, sur le projet de loi.

Mme Boucher (Denise): Il y a des problématiques importantes à l'égard des enfants de zéro à cinq ans, et ça, là, de dire que nous, là, on ne reconnaît pas ça, je pense que ce serait de nous dire qu'on n'en tient pas compte. On en tient compte. Ce qu'on trouve, par exemple, ce n'est pas par la voie qui est prise là qu'on doit trouver la solution, et, pour nous, ça, ça nous préoccupe. On sait qu'il y a des choses extraordinaires qui se font sur le terrain, on a peu ou pas d'évaluation de ce qui se fait actuellement sur le terrain pour les enfants de zéro à cinq ans. Donc, il y a peut-être là aussi... On ne l'a peut-être pas mis en recommandation, mais vous m'amenez à réfléchir là-dessus: est-ce qu'on ne devrait pas ajouter aussi une recommandation qui serait à l'effet qu'on puisse répertorier ce qui se fait pour les jeunes de zéro à cinq ans et qu'on... Il n'y a pas un modèle, mais on pense que celui qui fait en sorte que là on prend... et, pour nous, c'est ça, notre inquiétude, qu'on passe par le biais d'une fondation qui met de l'argent, une association, et on le dit, qui devient une association de partenariat privé-public et philanthropique, si on décidait d'ajouter un autre p, pour nous, ça, ça nous inquiète, parce qu'on considère que, là-dessus, le gouvernement se désengage de sa part de responsabilité à l'égard de cette communauté-là.

Mme St-Amand: Juste pour compléter ce que...

Le Président (M. Kelley): Madame.

Mme St-Amand: ...je veux savoir si c'est surtout... Il y a déjà des organismes qui existent, vous l'avez dit, et, nous, je pense que le niveau des discussions qu'on a eues ici, c'est de dire: il faut respecter ça. Si on travaillait... Parce qu'il y a déjà des concertations aussi dans les régions, à des niveaux différents, qui se font. Est-ce que, pour vous, c'est une bonne voie, de respecter ce qui se fait déjà et de plutôt travailler à partir des concertations déjà existantes?

Mme Roy (Josée): Bien, on est bien conscients de ce qui existe sur le terrain, il y a beaucoup de choses qui se font. Ce qui est un peu difficile, c'est d'avoir une vision... ou, en tout cas, comme Mme Boucher l'a mentionné, c'est peu répertorié. Ce qu'on pense, c'est que ça prendrait plus une meilleure coordination. La fondation Chagnon est déjà impliquée sur le terrain, aussi.

Ce qu'on pense, nous, c'est que ? puis on le met dans notre recommandation 6 ? quand on parle de politique et de plan d'action gouvernemental, on parle là de coordination, parce qu'il se fait des choses sur le terrain par le biais du ministère de la Famille et de l'Enfance, par le biais de la fondation Chagnon, par le biais du ministère de la Santé et des Services sociaux, les centres jeunesse, les CSSS, etc., il y a plein de choses qui se font auprès des familles et qui visent particulièrement la clientèle des 0-5 ans. Il faudrait à notre avis une meilleure concertation, une vision de ces interventions-là à travers un plan d'action gouvernemental, une politique gouvernementale. Et on pense que les contributions des mécènes comme la fondation Chagnon... on n'a pas de problème avec le fait que M. Chagnon investisse au Québec l'argent qu'il a fait au Québec plutôt que de l'envoyer dans un paradis fiscal, c'est très correct, mais on pense que ça devrait demeurer dans le cadre d'une politique gouvernementale, parce que c'est les élus finalement qui ont à établir les politiques, les priorités d'investissement et la coordination de ce qui se fait sur le terrain, puisque c'est eux qui doivent rendre compte.

Alors, pour nous, que l'argent de la fondation Chagnon... C'est souhaitable qu'ils investissent, mais il faut que le gouvernement et l'État demeure le maître d'oeuvre là-dedans, le coordonnateur de ce qui se fait sur le terrain et que ce soit appuyé effectivement sur les intervenants terrain, qui connaissent très bien les clientèles et qui sont en mesure de savoir les besoins dans chacun des lieux où ça peut se passer.

Mme Boucher (Denise): Peut-être en complément, Mme Roy.

Le Président (M. Kelley): Complément, Mme Roy, en complément à Mme Roy, si j'ai bien compris.

Mme Roy (Marie): Je voudrais juste rajouter, parce que vous mentionnez les enfants 0-5 ans en milieu défavorisé. Nous, on pense qu'il faut vraiment élargir ce concept et on est inconfortables avec ça, parce que, oui, les enfants en milieu défavorisé éprouvent des difficultés, les familles aussi, mais il y a d'autres enfants qui vivent dans d'autres milieux qui sont aussi vulnérables. Et, quand on cible les enfants en milieu défavorisé, on exclut ces enfants-là. Je veux juste faire le rapport avec... Tout le monde parle du décrochage scolaire, qu'on doit dire maintenant «la persévérance», là. Bon. Mais ces enfants-là ont aussi des difficultés, et, nous, on n'est pas d'accord qu'on les exclue. Je pense que, sur le terrain, les groupes qui seront actifs, ils ont une préoccupation pour les enfants en milieu défavorisé, ils ont développé des approches, ils connaissent les besoins. Mais on ne doit pas faire ça au détriment des autres enfants qui ont aussi des besoins et des familles qui des fois ont besoin d'être soutenues dans leur rôle parental.

Alors, ce qu'on souhaite, c'est vraiment une vision beaucoup plus intégrée des enfants 0-5 ans. Et, sur le terrain, compte tenu des groupes, des organismes qui sont présents, ils pourront cibler davantage et voir quelles sont les meilleures actions à poser pour favoriser le développement global de ces enfants-là, soutenir les familles, faciliter l'entrée à l'école et assurer le cheminement scolaire. Alors, on est... Le ciblage des enfants ne nous convient pas, et je me permets de dire qu'on a été déçus qu'il n'y ait pas de chercheurs qui soient venus... pas tous du même avis, mais aussi ouvrir à différentes avenues en ce qui concerne les besoins et le développement des enfants. On trouve ça dommage qu'ils n'aient pas été entendus.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Oui. Bonjour. Alors, merci pour le dépôt et la présentation de votre mémoire. C'est fort intéressant. Moi, ma question touche la recommandation 3. Vous avez dit que des modifications substantielles devraient être apportées, là, surtout pour assurer la transparence, l'imputabilité et le respect des acteurs sur le terrain. Mais on sait, puis c'est un peu ça, l'objectif du projet de loi, c'est de tenir compte des concertations régionales, qui sont différentes d'une région à l'autre, et des mécanismes, qui varient beaucoup d'une région à l'autre par rapport à l'implication, entre autres, de la société civile. Et là, ce que vous dites, c'est: «...le gouvernement doit adopter un règlement traitant des modes de gouvernance, des obligations des partenaires et des règles encadrant l'évolution des rapports et des pouvoirs des acteurs en cause.» Alors, finalement... Et là, on parle finalement de l'intégration de la société civile.

Quand vous dites: «...le gouvernement ? c'est la troisième partie du mémoire, là ? doit adopter un règlement traitant des modes de gouvernance, des obligations des partenaires et des règles encadrant l'évolution des rapports...», pouvez-vous élaborer... Avez-vous élaboré un petit peu davantage là-dessus? Ou comment vous voyez ce règlement-là?

Le Président (M. Kelley): Mme Roy.

n (11 heures) n

Mme Roy (Marie): Bien. Je pense que plusieurs organismes qui se sont présentés ici ont parlé qu'il y a un protocole d'entente qui existe entre la fondation Chagnon et le gouvernement qui balise le fonctionnement, les règles de gouvernance, etc., et qui n'a pas été déposé. Je pense que ça a été soulevé par différents organismes. Alors, quand on questionne la transparence: Comment on peut avoir une entente entre un gouvernement et une fondation et que les règles qui vont régir le tout ne sont pas connues publiquement?, comment on fait pour faire rapport?, comment on fait pour que les groupes sur le terrain soient au clair par rapport aux façons de faire, etc.?

Alors, ce qu'on demande, c'est qu'il y ait un cadre législatif, et la mesure qu'on trouvait, c'est de dire: Qu'il y ait un cadre réglementaire où ces éléments-là vont se retrouver, et la transparence et l'imputabilité, on sera au clair par rapport à ce que ça représente. On sera aussi au clair sur les rôles des partenaires, le rôle des organismes et comment on va fonctionner pour les solliciter.

Tout à l'heure, M. le ministre parlait d'avoir un cadre... un comité de liaison, un comité de pertinence. Nous, on est d'accord avec ça puis on veut que les membres de la société civile y soient, mais on veut aussi que ce soit balisé. Ça ne peut pas être juste intuitif, qu'on dise: On va mettre un comité de pertinence, etc.

Alors, c'est pour ça que, dans la réflexion qu'on faisait, on disait: Ça prend quelque chose de structuré, puis on aurait aimé ça travailler à partir du protocole d'entente, mais, comme il n'a jamais été déposé, on ne l'a pas fait. Et c'est en lien avec ce qui existe sûrement dans le protocole d'entente, qu'on pourrait voir comment les choses peuvent se déployer. Mais, nous, on pense que ça prend plus qu'un protocole d'entente. Dans les règles qu'on se donne dans les entreprises privées, nous, souvent on se fait dire: Non, c'est de la responsabilité de l'employeur, donc on n'a pas à vous dire ça. Quand le gouvernement est associé dans une telle entente avec un partenaire privé, je pense qu'il faut aller au-delà de ces règles, et que les choses soient transparentes, et que, l'imputabilité, on soit au clair par rapport à comment on va assurer cette imputabilité-là. Et c'est un peu la vision qu'on développait dans le cadre du mémoire.

M. Lehouillier: Donc, ce que vous voudriez, c'est qu'à tout le moins, dans le protocole d'entente, qu'on définisse clairement cette gouvernance-là et, deuxième élément, que la société civile soit associée à la gestion du fonds, au fond, là. C'est ça que vous souhaitez par rapport à cette orientation-là.

Mme Roy (Marie): C'est ça. Et à tout autre comité, je précise.

M. Lehouillier: O.K. Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Alors, il n'y a pas d'autre demande d'intervention à ma droite, alors M. le député de Gouin.

M. Girard: Merci, M. le Président. Merci aux représentantes de la CSN pour leur mémoire. Mme Boucher, Mme Roy, les deux Mme Roy, pour la présentation de votre mémoire. Avant de vous poser quelques questions, je veux revenir sur quelques remarques que le ministre a faites suite à la présentation de votre mémoire.

Le ministre à nouveau nous a fait part de son ouverture à ce qu'il y ait des représentants de la société civile qui siègent à la société de gestion, au comité de pertinence et au comité de liaison. On aurait aimé que le ministre nous indique à quel article de son projet de loi il fait référence quand il parle de la présence d'un représentant de la société civile à différents comités. Est-ce que son intention, c'est d'ajouter des nouveaux articles à son projet de loi qui permettront d'intégrer ces représentants-là? Nous le souhaitons. Est-ce que c'est l'intention du ministre? Il ne nous l'a pas indiqué, mais je pense que c'est un élément central et incontournable qui a été évoqué par plusieurs partenaires et organismes qui sont venus présenter des mémoires dans le cadre de ces travaux de consultation.

Et je rappelle, M. le Président, que nous sommes au jour 4 des travaux et que le ministre n'a toujours pas ? on termine nos consultations ? déposé son protocole d'entente alors qu'on termine les consultations. Je comprends de l'intention du ministre que ce sera disponible uniquement pour les parlementaires. On aurait souhaité que tous les groupes concernés par ce projet puissent avoir accès à ce document-là au moment des consultations, puisqu'il semble y avoir plus d'éléments dans le protocole que dans le projet de loi.

Ceci étant dit, je veux revenir à la page 11 du mémoire de la CSN. Vous nous dites essentiellement que vous trouvez que le projet de loi est un projet de loi, disons, de portée générale ou exclusivement administrative et que vous avez jugé, ce que je retiens de vos propos, que les éléments fondamentaux qui devraient gouverner la gestion du fonds, la reddition de comptes, son imputabilité, le choix des projets, ne se retrouvent pas dans le projet de loi. Donc, est-ce que je dois comprendre de vos propos que vous souhaitez qu'il y ait des amendements dans le projet de loi pour que les principes auxquels vous tenez se retrouvent dans des articles précis dans le projet de loi déposé par le ministre?

Mme Boucher (Denise): Alors, à la question que vous me posez, je vous réponds oui. D'ailleurs, je... Marie le disait tout à l'heure, mais en même temps vous venez de le dire, c'est très inquiétant que le protocole qui a été fait ne soit réservé uniquement qu'aux parlementaires, parce qu'on l'a dit, ça demeure un débat de fond, cette question-là, sans aucun doute. Et souvent, quand on pense qu'on veut chercher à cacher quelque chose, il y a quelque chose à cacher, donc ça, c'est d'autant plus inquiétant, et c'est de là que s'appuient nos diverses réserves.

Et ce que, nous, on dit là-dessus, c'est... et effectivement il faut que ce soit... d'ailleurs, on trouve qu'il y a un manque de transparence, bon, on a tout dit ça tout à l'heure, mais que, pour nous, pour être capable de contrer cela, je pense qu'il faut le rendre public et qu'il y ait un cadre réglementaire qui va permettre effectivement de pouvoir avoir des assises sur lesquelles les parlementaires de même que la société civile pourront se rattacher, pour être capable d'amener les critiques ou les interventions pour stabiliser la chose s'il devait y avoir des écarts.

Et on demande aussi... et que dans la loi il y ait tout autre mécanisme. On n'est pas là, nous, pour faire les mécanismes, les articles de loi, mais on pense que ce serait de sécuriser, de nous sécuriser autour, je le rappelle, toujours autour des trois fonds qui sont mis en place. Et je vous rappelle qu'on a une réserve, s'il y en avait d'autres, on est inquiets. Et je pense que, pour ces trois fonds-là, il faut que les balises soient bien faites. On sait qu'il y en a un qui n'en a pas eu, de dépôt législatif, on en a eu pour le projet de loi n° 6, projet de loi n° 7, mais il me semble que ça doit être fait.

Sur la question... parce que c'est revenu tout à l'heure, et puis je vais en profiter parce que vous avez aussi souligné la question de représentants de la société civile. Mais l'exemple qui nous est venu en tête, à la CSN, en regard de qui pourrait siéger dans les conseils d'administration, on ne veut pas nécessairement, dans le conseil de gestion, on ne veut pas que ce soit l'ami de l'ami. Il nous semble, pour nous, qu'on pourrait très bien demander aux organismes nationaux d'être présents. Probablement qu'il y en a qui diraient: Oui, mais ils vont être maîtres et parties. Mais je vous rappelle qu'il existe un projet de loi, qui est de tout à fait un autre ordre mais pour lequel on est maître et partie, mais on réussit à s'entendre et à faire une bonne gestion d'un fonds, c'est le fonds national d'Emploi-Québec, qui est sur le fonds du 1 %, où existe la Commission des partenaires du marché du travail et où on a un droit de regard d'ailleurs sur la question du fonds, la gestion, comment s'appliquent les politiques d'Emploi-Québec. Donc, je ne dis pas que c'est ce modèle-là, mais on pensait à ce type de modèle là. Donc, il me semble que ça pourrait être un référant qui pourrait être utilisé si on avait à monter ou à faire connaître qui ferait partie du comité de gestion.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Justement sur le... ceux qui font partie du conseil de la société de gestion, l'Association québécoise des centres de la petite enfance nous a recommandé, entre autres, qu'au niveau des administrateurs qui seraient nommés par le gouvernement, qu'un certain nombre pourraient être recommandés par le Conseil de la famille et de l'enfance et d'autres par le Comité consultatif de lutte à la pauvreté, qui fait des commentaires sur les politiques gouvernementales en matière de lutte à la pauvreté, qui évalue ces comités-là. Est-ce que c'est une proposition qui vous apparaît intéressante au même titre que celle que vous venez de nous présenter, là, pour le siège qu'a la CSN?

Mme Boucher (Denise): Je pense que les propositions, elles doivent être jugées au mérite. Mais ce qu'on cherche à vouloir éviter, c'est que, dans le comité de gestion, ce soient les amis des amis.

M. Girard: Je comprends aussi que, pour vous, un protocole d'entente, ce n'est pas suffisant, il doit y avoir... greffé dans la loi, il doit y avoir un volet où on fait référence au fait qu'il y aura un cadre réglementaire, donc des projets de règlement qui apparaîtront dans la Gazette officielle et qui nous permettront d'avoir un peu plus de renseignements sur le mode de fonctionnement. Donc, vous, vous souhaitez vraiment qu'il y ait des projets de règlement rattachés au projet de loi?

Mme Boucher (Denise): Oui, tout à fait, parce que ça nous permet de pouvoir suivre ce qui peut se faire autour de la question des fonds, et c'est souvent par ce biais-là qu'on peut avoir l'information.

M. Girard: Vous nous dites aussi, à la page 9 de votre mémoire... vous abordez, à la fin de la page, que vous souhaitez éviter qu'il y ait des dédoublements ou de l'éparpillement. Vous n'êtes pas le seul organisme qui, dans le cadre des travaux, avez évoqué la crainte qu'il y ait dédoublement et éparpillement. Parce que, il faut se le dire, il y a beaucoup d'intervention qui se fait au niveau de la petite enfance au Québec, que ce soit à travers les centres de la petite enfance, les CLSC, qui interviennent dans les quartiers, le ministère de la Santé, il y a une série de programmes. Alors, ma première question: Comment faire en sorte que l'on évite un dédoublement ou un éparpillement de l'action gouvernementale en matière de petite enfance?

n (11 h 10) n

Mme Boucher (Denise): Alors, je vous ramène à la dernière proposition, où, la proposition 6, on indique que le gouvernement devrait déposer rapidement une politique et un plan d'action gouvernemental pour le développement des jeunes enfants, parce que c'est par le... Généralement, quand on dépose une politique, on essaie de faire en sorte que les divers intervenants ministériels soient rattachés et ils aient chacun une part d'obligation.

Donc, pour nous, on pense que ça nous permettrait d'avoir le regard sur ce qui se fait. Et on y inclut aussi la question du fonds parce que, ça, c'est un nouveau joueur qui arrive, là, à l'intérieur déjà des mécanismes gouvernementaux. Donc, on pense que là pourrait se faire aussi la création des harmonisations possibles autour de ça puis éviter la question des dédoublements.

M. Girard: Mais vous avez l'impression qu'à l'heure actuelle il y a trois fonds qui sont créés mais qu'il n'y a pas d'assise comme une politique gouvernementale ou un plan d'action clair qui détermine le champ d'intervention de ces fonds-là. C'est votre sentiment à l'heure actuelle?

Mme Boucher (Denise): Oui. Mais particulièrement sur celui-là. Mais en même temps on pourrait se poser la question... on n'est pas sur l'autre projet qui a été entendu la semaine dernière, mais comment il se fait que celui-là, si je reviens sur celui de la semaine dernière, le projet pour les personnes aidantes, comment il se fait que c'est le ministère des Aînés qui a la responsabilité, quand en même temps on a toute une politique qui est déposée par le ministère de la Santé et des Services sociaux sur toute la question du développement... services de soins à domicile? Alors, pourquoi? Alors, on ignore ce que fait la main droite et ce que va faire la main gauche? Alors, pour nous, ça, ça nous inquiète. Dans ce cas-là, c'est moins évident, c'est moins probant, mais en même temps, pour nous, il nous semble que l'intervention gouvernementale, c'est lui qui doit demeurer maître d'oeuvre, et d'éviter le plus possible ce type d'éléments qui pourraient arriver.

M. Girard: Je comprends donc que vous voulez éviter que chacun travail en silo, là, qu'on ait des mandats et que chacun des fonds, des ministères finissent par se recouper et qu'il n'y ait pas de liaison entre chacun des intervenants, qui veulent tous le bien commun, qui veulent tous le bien de la petite enfance.

Je veux revenir sur une autre recommandation, à la page 12 de votre mémoire, vous souhaitez que la société de gestion dépose un rapport annuel du bilan des activités. Donc, on sait que c'est un fonds qui est prévu sur une période de 10 ans. Vous nous dites: Il faut qu'à chaque année à l'Assemblée nationale il y ait dépôt d'un rapport pour faire le bilan des activités. Puis vous nous dites, si ma mémoire est bonne, à un autre moment dans votre mémoire, qu'il faut aussi qu'il y ait un bilan de mi-parcours. J'aurais aimé vous entendre sur ces deux aspects-là.

Mme Roy (Josée): Sur la recommandation 4, pour nous, il est important que la... parce que ce qu'on comprenait du projet de loi, c'était la portion gouvernementale investie dans le fonds qui faisait l'objet d'un rapport au ministre. Et ce qu'on souhaite, c'est que ce soit l'ensemble des activités de la société de gestion, par transparence, justement pour qu'on voie ce qui se passe, qu'on puisse constater les impacts des investissements de ce fonds-là, parce qu'en fait, en faisant ça, on décide de prioriser des investissements aussi au niveau gouvernemental. Alors, on pense que c'est important que l'ensemble des activités de la société de gestion puissent faire l'objet d'un rapport pour qu'on voie l'impact que ça a sur les acteurs, l'impact que ça a sur les services publics et les impacts en général.

Et, comme on travaille dans du nouveau, ces trois fonds-là, les saines habitudes de vie, les proches aidants des aînés et le développement des jeunes enfants, c'est du nouveau, on croit qu'avant de s'embarquer dans tout nouveau projet de fonds du même type, on est dans le champ social, on est dans le champ des politiques publiques, on est à la marge des services publics, très, très proche, on pense qu'il y a un besoin de faire un bilan sérieux de ces trois fonds-là, des activités, des impacts que ça a, comme je viens de dire, sur les services publics, sur les acteurs, sur les objectifs mêmes de ces fonds-là: est-ce qu'on atteint les objectifs poursuivis?, avant de s'embarquer dans tout nouveau projet du même type.

Parce que là on parle de mobiliser des argents assez importants dans des priorités. Est-ce que c'est vraiment des priorités qui sont souhaitées au niveau du gouvernement? Il faut faire le bilan de ces projets-là parce qu'on est vraiment dans l'utilisation des fonds publics, on doit en rendre compte à la population et on doit faire les débats qu'il faut autour de ce que le gouvernement doit prioriser comme actions.

M. Girard: Ma dernière question, après ça je vais passer la parole à mon collègue de Groulx. Vous le dites dans votre mémoire, il y a déjà le fonds sur les saines habitudes de vie; à votre connaissance, est-ce qu'il y a un bilan qui a été fait du fonds et qui vous a été transmis pour vous permettre de faire évaluation? Parce qu'il y a eu beaucoup de critiques, vous le dites dans votre mémoire, sur la façon de le gérer les relations avec les partenaires, bon, que ce soient les organismes Famille et d'autres intervenants. Le gouvernement décide d'aller de l'avant et d'en proposer d'autres, mais est-ce qu'il y a eu, à votre connaissance, des évaluations, des documents qui ont été transmis à tous les partenaires impliqués pour être en mesure de faire une évaluation de ce premier fonds-là avant de procéder à l'adoption, à la création de deux autres nouveaux fonds?

Mme Boucher (Denise): Bien, moi, je pense qu'on aurait eu intérêt à faire l'évaluation de celui-là. Il y a eu des gens qui ont fait des retours, il y a eu des analyses qui ont été faites autour de la question du fonds. On a entendu aussi des critiques qui sont venues aussi des organismes communautaires qui ont été interpellés à monter des projets, qui leur ont été refusés, des organismes qui ont senti une forme d'autoritarisme de la fondation Chagnon à leur égard. Donc, il nous semble que, à la lumière de ça, on aurait dû faire un bilan, ce qui n'a pas été fait, vraiment un bilan sérieux fait par le gouvernement de son implication à l'égard de ça.

Donc, je pense que, oui, il y aurait eu nécessité. Et c'est pour ça qu'on le demande aussi dans ces projets-là. Le projet de saines habitudes de vie, il n'y a pas eu de dépôt de loi qui l'a mis en place comme tel. Et là on le fait à partir de projet de loi n° 6, projet n° 7 ? on l'a dit au début, vous l'avez dit vous-mêmes ? tu sais, ce n'est pas un projet de loi qui est très, très soutenu, dans le sens que... quatre pages, trois pages qui expliquent un peu... c'est très, très d'ordre administratif, qui va gérer qui, qui va faire quoi, mais dans le fond, un coup qu'on a mis les argents, c'est un peu ça. Mais, pour les règles, après, de gouvernance, rien n'apparaît sur qui, comment... est-ce qu'on reconnaît les organismes déjà en place? Est-ce qu'on a fait les bons choix? Est-ce que... Ça, rien n'apparaît. Donc, pour nous, on aurait dû faire un bilan, et c'est pour ça qu'on rappelle... Pour nous, là, ces trois fonds-là, pour nous, là, c'est difficile de dire non, ils sont déjà en marche, on sait déjà qu'il y a du monde qui ont été embauchés pour déjà travailler sur la question du développement des jeunes enfants.

Donc, là, on se dit: Là, wo! Mais arrêtez. Arrêtez, prenez le temps de faire les évaluations, de voir si les bonnes choses sont aux bons endroits, de faire en sorte qu'on puisse évaluer les comités de gestion, qu'on puisse aussi avoir le rapport du Vérificateur général, qu'on mette les règlements s'il y a des modifications, des changements à apporter, qu'on fasse des évaluations, qu'on ait les rapports aux années. C'est pour ça aussi qu'on dit qu'il faut qu'il y ait... On sait que les projets sont pour 10 ans, mais qu'après cinq ans, qu'on puisse aussi faire l'évaluation. C'est fait dans à peu près... dans beaucoup d'autres types de projets ou d'autres obligations gouvernementales, c'est dans l'ordre, quand on instaure des éléments, de faire des bilans après cinq ans. Pourquoi, dans ce cas-là, on n'en parle pas?

Donc, nous, on ramène le gouvernement d'une certaine façon à l'ordre en lui disant: Vous avez des obligations, il y a de l'argent de la population qui est mis à l'intérieur de ça, et on attend une bonne gestion des choses.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Groulx, dernière question.

M. Gauvreau: Oui, très courte. Je vais revenir au bas de la page 9, quand mon collègue vous a parlé du problème de dédoublement. Est-ce que vous avez une crainte aussi que potentiellement, vu l'absence de plan d'action gouvernemental, on peut se retrouver non seulement avec des situations de dédoublement, mais, parce que ce fonds-là va toucher plusieurs ministères, que l'on puisse se retrouver dans le désengagement de certains programmes existants dans certains ministères, Éducation, Santé et Services sociaux ou autres?

Mme Boucher (Denise): C'est ce qu'on dit à partir du début de notre mémoire, où on indique que, dans des situations où le gouvernement, bon... c'est, bon... Il y a une situation de crise actuellement, il y a une situation, aussi, choisie par le gouvernement à l'effet de faire des baisses d'impôt, donc il y a moins d'entrées d'argent, il y a un mécène qui décide de mettre de l'argent, mais on peut connaître les raisons pour lesquelles il décide mettre des argents, on sait qu'il va avoir, lui, recours à des abris fiscaux et à toutes sortes d'autres choses, sans aucun doute, ce qui fait en sorte que... Puis on n'est pas contre le fait qu'il place son argent au Québec, là, on l'a dit tout à l'heure, mais en même temps... donc, on met ça là.

Nous, ce qui nous inquiète, c'est que la formule qui est utilisée, c'est une forme de partenariat privé-public, on sait ce que ça veut dire, c'est généralement un désengagement de l'État dans ses responsabilités. Et ce qu'on rappelle, c'est que, là, on est dans les responsabilités à caractère social, on parle d'enfants, on parle de familles, on parle de parents, et, nous, on pense qu'il faut que tout cela se tienne et que ce soit cohérent. C'est pour ça qu'on rappelle la politique, qu'on voit à la sixième recommandation de notre mémoire, où on dit: Bien, là, attachons les choses, évitons la question des silos et évitons aussi que le gouvernement profite de ces situations-là pour se désengager.

n (11 h 20) n

M. Gauvreau: Dans les balises qui sont fixées souvent dans certains programmes gouvernementaux, on va accorder pour les régions des montants ou des... relativement au PIB des régions. Par exemple, la MRC de mon comté est la quatrième au niveau du PIB au Québec mais l'avant-dernière en termes de réussite scolaire, on a à peu près les pires taux de décrochage scolaire au Québec, mais les argents ne viendront pas parce qu'on est les quatrièmes au niveau du PIB.

Est-ce qu'il existe d'autres balises, dans vos expériences, qui nous permettraient, des régions qui ne sont pas centrales, de bénéficier d'une juste part relativement à des problématiques qui sont très graves, parfois plus graves que dans certains centres?

Mme Roy (Josée): Bien, ce qu'on répond là-dessus...

Le Président (M. Kelley): Mme Roy.

Mme Roy (Josée): Oui. Ce qu'on pourrait répondre là-dessus, c'est tout le volet où on fait la promotion, que les mesures... que le fonds s'adresse... ne cible pas en particulier... des clientèles en particulier. Là, vous le dites, vous n'êtes pas nécessairement un milieu pauvre, mais votre décrochage scolaire est élevé, alors vous n'êtes pas ciblés. Alors, c'est la critique qu'on fait des mesures ciblées, c'est que ce n'est pas nécessairement... c'est vrai qu'il y a plus d'enfants vulnérables dans les milieux pauvres, mais il n'y a pas seulement des enfants... il y a des enfants vulnérables dans d'autres milieux aussi, et la réussite scolaire, c'est important pour tous les enfants, peu importe le milieu socioéconomique. Alors, on met en garde le fait de cibler autant et aussi précisément ? c'est même dans le titre du projet de loi ? les enfants 0-5 ans en situation de pauvreté. On pense que des enfants vulnérables, il y en a dans d'autres milieux, dans d'autres régions qui ne sont pas nécessairement sur les cartes de défavorisation.

Alors, il faut que le fonds puisse être ouvert à répondre à des besoins de l'ensemble des enfants et non pas seulement à certains. De toute façon, plusieurs recherches le montrent aussi, c'est que la stigmatisation de certaines clientèles, ce n'est pas non plus toujours très positif comme résultat.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Mercier.

M. Khadir: Merci, M. le Président. Bienvenue, Mme Boucher, Mmes Roy. J'ai dû rater la première partie de votre présentation parce que j'étais en conférence de presse justement sur ce sujet, j'y reviendrai plus tard, sur la fondation Chagnon.

D'abord, une chose que je voudrais, moi, profiter, parce que vous en avez parlé, pour le préciser, on parle souvent de l'argent de la fondation Chagnon, que la famille Chagnon investit au Québec. Très intéressant, c'est louable. Il y en a d'autres qui font autrement, qui font des détournements de fonds ou qui le placent dans des comptes en Suisse. Donc, à cet égard-là, c'est bon. Il faut cependant rappeler que, sur le 1 840 000 000 $ qui ont été la vente d'actions de Vidéotron, 1,4 milliard ont été placés dans la fondation, mais ceci a coûté au gouvernement à peu près 1 030 000 000 $. Je vous déposerai le document qui le prouve, c'est une fiscaliste qui est loin d'être membre de Québec solidaire, qui a déjà écrit un livre dont un chapitre est consacré à ça. Donc, en fait, c'est de l'argent qui nous appartient. Ce qui rend encore plus pertinent... à 75 %, là, le 1,4 milliard. Autrement dit, c'est de l'argent des contribuables, c'est de l'impôt que nous payons tous, hein, y compris le président de la Commission des affaires sociales, c'est de notre argent, d'accord, à trois quarts, donc ce qui rend plus pertinent, lorsque vous êtes préoccupés par le contrôle démocratique de ces fonds, et de s'assurer que ça répond à des exigences démocratiques en matière d'orientation de dépenses, dans les affaires sociales, pour lutter contre la pauvreté.

Vous avez, dans votre recommandation, demandé donc de suspendre tout autre fonds. Est-ce que vous seriez, compte tenu ? moi, je n'étais pas rendu là dans ma réflexion il y a deux semaines, mais on a eu plusieurs questions ? qu'il y a ces préoccupations-là, est-ce que vous estimez légitime que les députés, ici, de la Commission des affaires sociales entendent la famille Chagnon ou ses représentants sur nos interrogations, sur nos préoccupations? Est-ce que vous pensez... vous souhaiteriez que nous les entendions?

Mme Boucher (Louise): Dans une première version de notre mémoire, que vous n'avez pas parce qu'on ne vous l'a pas donnée, on avait un paragraphe où on disait que la famille Chagnon devrait être effectivement entendue. Alors, je suis tout à fait à l'aise si vous en faisiez la demande, mais en même temps c'est toujours les difficultés, parce que probablement qu'ils vont considérer qu'ils sont, comme souvent le... leur droit de gérance va peut-être leur interdire de pouvoir venir. Mais, s'ils sont si ouverts, moi, à mon avis, ils ne devraient pas être gênés de venir, et vous pourriez très bien les inviter. On l'avait déjà indiqué dans une première version.

M. Khadir: Pour un autre fonds, M. le Président, pour un autre fonds, Mme Blais, la ministre des Aînés, les avait priés, ils ont répondu par la négative. Moi, j'ai envoyé une lettre la semaine dernière, j'ai reçu la réponse lundi, ou c'était hier, je ne me rappelle plus, encore par la négative. Moi, en tout cas, ça ne me rassure pas. Alors, je voulais juste, simplement dire que, compte tenu de ça, il y a des préoccupations, puis qu'en plus, au départ, alors qu'il s'agit de fonds publics directs et indirects, c'est-à-dire, le 1 milliard dont on vient de parler qui est sous le contrôle de cette fondation, il y a un refus de venir s'expliquer devant les députés, qui sont quand même les représentants démocratiques du peuple.

Ce matin, en conférence de presse, moi, j'ai annoncé que, la position de Québec solidaire, c'était de demander au gouvernement non pas un moratoire sur d'éventuels fonds, mais un moratoire sur les deux fonds proposés par les projets de loi n° 6 et n° 7 en attendant de faire l'évaluation de ce qui a été fait, par exemple, dans le programme Québec en forme et l'ensemble des autres interventions de la fondation Chagnon. Est-ce que vous êtes peinés... Est-ce que vous seriez mal à l'aise à ce qu'on aille aussi loin, c'est-à-dire de dire simplement: Pourquoi se précipiter? Ces fonds-là sont là, faisons l'exercice avant, puis agissons après.

Le Président (M. Kelley): Mme Roy.

Mme Roy (Josée): Là-dessus, on a fait la réflexion, parce que ça aurait pu être une demande. La chose sur laquelle on s'est penchés, c'est sur le fait que la fondation Chagnon intervient déjà énormément sur le terrain au niveau du développement des jeunes enfants, peut-être moins sur les proches aidants des aînés, là, mais, au niveau du développement des jeunes enfants, ils sont déjà extrêmement présents, et ça nous questionnait déjà avant qu'il y ait les deux fonds qui soient créés sur comment encadrer dans les politiques publiques l'intervention sociale de mécènes, de gens qui ont le goût d'investir, parce qu'il y a effectivement des problèmes. Ce n'est pas mauvais en soi, mais, comme on est dans le champ du social, qu'on est si proches des services publics, on est si proches des interventions publiques, on se posait déjà la question avant la création des fonds: Comment on fait pour encadrer l'action des acteurs privés qui ont envie de s'investir socialement, comment on fait pour rattacher ça à des politiques publiques?

Et, bon, ce qui fait que ce n'est pas absolument... On a préféré dire: Bien, faisons l'étude de ces trois fonds-là, mais ça nous avait aussi effleuré l'esprit de, bon: y a-t-il moyen d'attendre puis de prendre une pause? Pourquoi est-ce qu'on est si pressés? Mais, sur la base du fait que la fondation est déjà très présente sur le terrain et que, peu importe, les actions qui sont faites vont avoir des influences sur les politiques publiques, sur ce qui se fait. Alors, on était un peu dans cette réflexion-là puis dans cette mouvance-là: Comment on fait pour encadrer ça? Le fonds peut être un moyen, mais il faut que ce soit mieux balisé que ça, c'est clair.

Mme Boucher (Denise): Alors, c'est pour ça que je...

Le Président (M. Kelley): Mme Boucher.

Mme Boucher (Denise): Très court. Juste que je rappellerais à M. Khadir que la recommandation 1, à notre avis, elle est importante de faire le débat public, et dans les plus brefs délais, pour que tout le monde soit au fait de ce qu'ils attendent autour de la question des gens qui sont prêts à mettre des argents, mais aussi les obligations du gouvernement, et, à notre avis, ça, ça devrait se faire rapidement pour éviter qu'on se retrouve dans une situation où il y aurait un plus grand désengagement de l'État.

Le Président (M. Kelley): Alors, sur ce point, Mme Boucher, Mme Roy, Mme Roy, au nom de la commission, merci beaucoup pour votre contribution à ce débat public. Je vais suspendre quelques instants et je vais demander aux représentants du Regroupement des organismes communautaires Famille de Montréal de prendre place, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 11 h 29)

 

(Reprise à 11 h 33)

Le Président (M. Kelley): Alors, nous allons poursuivre nos travaux. Le deuxième témoin ce matin, c'est le Regroupement des organismes communautaires Famille de Montréal, représenté par sa présidente, Laurence Lagouarde, et la coordonnatrice, Carol Gélinas. Alors, Mme Lagouarde, la parole est à vous.

Regroupement des organismes
communautaires Famille
de Montréal (ROCFM)

Mme Lagouarde (Laurence): Merci beaucoup. Je tiens à préciser d'entrée de jeu que vous avez une énorme faute d'orthographe sur votre page couverture de notre mémoire. Ça vous montre la précipitation avec laquelle nous avons dû travailler, et on s'en excuse.

Alors, d'abord, merci de nous recevoir pour entendre notre position sur le projet de loi n° 7. Dans un premier temps, nous présenterons rapidement notre regroupement, par la suite notre position, adoptée la semaine dernière en assemblée générale extraordinaire, et nous terminerons avec quelques pistes de solution à explorer.

Le ROCFM, le Regroupement des organismes communautaires Famille de Montréal, existe depuis maintenant 11 ans. Il compte 43 organismes membres. Le point de vue que nous développerons sur les enjeux liés au projet de loi n° 7 est celui d'un organisme siégeant depuis 11 ans dans de multiples lieux de concertation régionale autour des questions concernant les familles.

Nous participons depuis sa création au comité famille de la conférence régionale des élus et, depuis maintenant un an, nous sommes intensivement impliqués au comité régional d'action concertée pour le développement des enfants, comité initié par la Direction de la santé publique de Montréal dans les suites du rapport de l'enquête sur la maturité scolaire.

Notre point de vue est également nourri par les expériences des organismes membres du regroupement impliqués dans leur communauté en soutien aux familles dans l'ensemble des dimensions de leur vie au quotidien et qui ont une longue expérience de mobilisation et de concertation.

Notre regroupement a de vives inquiétudes quant au projet de loi n° 7. Nous souhaitons partager nos questionnements, témoigner de nos expériences ainsi qu'explorer quelques pistes de solution.

Je vous présente maintenant la position telle qu'adoptée par nos membres la semaine dernière. Considérant la responsabilité sociale du gouvernement du Québec envers la population, considérant l'absence d'information complète et transparente quant à la nouvelle forme de gouvernance qui s'installe au Québec dans le champ des services sociaux, considérant le non-respect par le gouvernement de la politique gouvernementale sur l'action communautaire, considérant les expériences difficiles déjà connues à travers le Québec avec Québec en forme, Québec Enfants ainsi qu'à Montréal avec les initiatives 1,2,3 GO!, nous demandons un moratoire sur toute entente entre le gouvernement du Québec et la Fondation Lucie-et-André-Chagnon, une analyse des impacts de cette nouvelle gouvernance sur les enjeux politiques et théoriques, sur l'organisation des services publics et de l'action communautaire ainsi que les répercussions pour la population. Nous demandons également qu'un large débat public ait lieu sous la responsabilité du gouvernement du Québec.

Concernant la responsabilité sociale du gouvernement du Québec envers la population. S'il est souhaitable que l'ensemble des acteurs d'une société se sentent solidairement responsables les uns des autres, c'est au gouvernement du Québec que revient la responsabilité d'être le maître d'oeuvre de ses politiques et d'être redevable devant la population, en toute liberté, sans conditionnement privilégié par le pouvoir de l'argent d'un de ces acteurs.

Considérant l'absence d'information complète et transparente quant à la nouvelle forme de gouvernance qui s'installe au Québec dans le champ des services sociaux, à ce moment-ci, est-ce que la population du Québec possède une information suffisamment consistante et éclairée sur les enjeux liés aux différents partenariats public-privé sociaux: Québec en forme, soutien aux aidants naturels, Stratégie jeunesse et le futur Québec Enfants, pour que la députation puisse refléter la volonté des électeurs quand ils iront voter ce projet de loi? Comme le disait un slogan largement adopté en 2003: J'ai jamais voté pour ça! On ne peut isoler chacun de ces PPP sociaux, car c'est en les analysant dans leurs ensembles que l'on voit se dessiner un nouveau projet social au Québec.

Considérant le non-respect par le gouvernement de la politique gouvernementale sur l'action communautaire, depuis les dernières années, nous avons vu se multiplier les ententes de service entre le gouvernement et les organismes communautaires autonomes. Quand on dit que le gouvernement a augmenté le financement des organismes, c'est surtout en entente de service et non au financement à la mission, comme il s'était engagé à le faire en reconnaissant le sous-financement du secteur famille. La politique gouvernementale devrait servir à reconnaître et à soutenir la mission des organismes, qui consiste avant tout à être des lieux d'accueil, de défense collective des droits et de transformation sociale. De toute évidence, nous n'avons pas la même définition de la transformation sociale.

Le gouvernement prépare également une réforme du droit associatif qui permettrait à deux personnes d'être requérants pour la création d'un nouvel organisme. Ce nouvel organisme pourra être administré par un seul administrateur. Est-ce que cette réforme servira à contourner la résistance qu'opèrent les organismes qui veulent conserver leur mission et maintenir une distance critique face à l'État en créant des OBNL plus serviles? Question.

Considérant les expériences difficiles déjà connues à travers le Québec avec Québec en forme, Québec Enfants ainsi qu'à Montréal avec les initiatives 1,2,3 GO!, un enjeu du travail en concertation et les inégalités entre les acteurs qui transforment les liens en rapports de pouvoir, les malaises et les inconforts vécus au sein de ces espaces nous préoccupent. Les organismes communautaires font du travail en concertation depuis fort longtemps, développant de multiples partenariats, et ce, sous plusieurs formes, afin d'améliorer les conditions de vie des familles. Dans le modèle de concertation privilégié par les projets dont on parle maintenant, la coordination est encadrée par le promoteur, ce qui colore, oriente et force les façons de faire. Par des moyens pas nécessairement élégants, on arrive à contourner les voix dissidentes ou simplement différentes. Ce dont nous témoignent également les organismes membres du ROCFM, c'est que trop souvent les consensus obtenus au sein des concertations sont faux, puisque peu de discussions et encore moins de débats sur la lecture que les acteurs font de la situation ont lieu. On présume que tous partagent la même vision sans qu'il y ait eu de dialogue réel. Plutôt que d'innover dans les façons d'animer ces lieux qui favoriseraient la prise de parole et la diversité de points de vue, la culture qui prévaut trop souvent a pour effet de bâillonner, d'exclure, de marginaliser et, en bout de ligne, de démobiliser.

n (11 h 40) n

Lors de notre premier contact avec la fondation, il y a six ans, leur représentant utilisait déjà l'argument d'être une jeune fondation, d'avoir fait des erreurs, d'avoir appris et de faire autrement. Il y a deux ou trois ans, on nous servait les mêmes excuses, et, encore aujourd'hui, chez Québec Enfants, on redit la même chose. Le Centre 1,2,3 GO! tenait exactement le même discours. Est-ce que la fusion des deux organisations permettra de mieux apprendre des erreurs du passé? Nous en doutons fort, puisque, au-delà de faire des repentirs sur le passé, nous croyons que les principes directeurs qui orientent le travail demeurent les mêmes.

Nous demandons donc un moratoire sur toute nouvelle entente entre le gouvernement du Québec et la Fondation Lucie-et-André-Chagnon, une analyse des impacts de cette nouvelle gouvernance, enjeux politiques et théoriques, organisation des services publics et de l'action communautaire, ainsi que les répercussions pour la population, qu'un large débat public ait lieu sous la responsabilité du gouvernement du Québec. Trop souvent, les bonnes intentions sont invoquées pour justifier les PPP sociaux. Nous aimerions que la réflexion se fasse à un autre niveau. Le débat ne porte pas sur être pour ou contre la vertu mais bien de saisir ce qui est défini dans la vertu. Il nous semble que, pour aller plus loin dans l'analyse, il nous faut sortir du bon ou du méchant, du pour ou du contre, du vrai ou du faux.

Afin de bien comprendre ce qui est en jeu, nous proposons qu'une analyse sérieuse et rigoureuse des différentes dimensions à prendre en compte soit faite ainsi qu'une évaluation indépendante des impacts sur les communautés. Les effets pervers et non désirés produits par les initiatives ne sont jamais documentés par les promoteurs, et le fardeau de la preuve repose sur les autres acteurs en présence, qui ne possèdent pas les mêmes moyens pour faire la démonstration de leurs points de vue.

Comme plusieurs autres acteurs, le ROCFM se questionne énormément sur les pouvoirs démesurés que peut exercer la Fondation André-et-Lucie-Chagnon sur les décisions du gouvernement. Comment une fondation dont la seule légitimité est d'avoir de l'argent peut influencer les priorités de l'État dans notre système dit démocratique? Que savons-nous des futures ententes qui sont peut-être actuellement en discussion entre le gouvernement et la FLAC ou d'autres fondations? La ministre Thériault a annoncé aux organismes communautaires en santé et services sociaux qu'elle était à négocier une entente avec un autre fonds privé.

Au coeur des enjeux actuels, la vision du monde portée par les projets des PPP sociaux nous semble fondamentale. Dans quel monde voulons-nous vivre? À partir de quelle théorie s'appuient les modèles d'intervention qui nous sont proposés? L'ensemble de l'oeuvre de ces PPP sociaux nous donne fortement l'impression d'être une entreprise de normalisation de l'agir humain. De la grossesse jusqu'à l'âge de 30 ans, on nous trace la voie du bon comportement. La réalité a vite fait de nous rattraper pour nous inculquer un peu d'humilité si notre désir de contrôle se fait trop insistant.

Une des raisons majeures qui crée de l'inconfort dans ces projets d'action concertée est la confusion des genres. On veut entrecroiser des logiques qui s'opposent, et, dans le jargon de l'ingénierie sociale, on parle de «top down», venu d'en haut, versus «bottom up», issu de la base. Un autre principe fondamental de cette ingénierie se résume par «tous sous un même toit». Ainsi, une vision technocratique et virtuelle des liens entre les différents partenaires peut faire croire que, si l'on dessine le modèle d'organisation idéalisé, nos objectifs pourront être atteints. La réalité est beaucoup plus complexe, riche et diversifiée, et ce n'est pas parce que notre dessin ressemble à une pomme, possède toutes les caractéristiques d'une pomme que ça goûte les pommes.

Ici, le parallèle avec l'agriculture devient parlant. Depuis quelques années, nous sommes très sensibles à la biodiversité en agriculture. Les dangers pour l'équilibre écologique de la planète que représente l'action du géant Monsanto nous préoccupent grandement. Il faudrait également se soucier de la biodiversité des individus, des familles et des organisations. Lors de la fusion dans le réseau de la santé et des services sociaux, nous craignions que la logique hospitalocentrique s'imposerait au sein de la nouvelle structure des CSSS. À peine quelques années plus tard, nous réalisons que nos craintes n'étaient pas sans fondement. On peut observer une diminution significative des services sociaux en CSSS. Avec le développement de projets en PPP, c'est à un autre rétrécissement du filet social auquel nous assistons. Le réseau public est dépouillé d'une autre partie de son mandat, comme si, là aussi, on pouvait faire la démonstration qu'au privé on fait mieux et moins cher.

«La fondation ? et je cite ? souhaite que son action contribue à faire en sorte que les gouvernements adoptent des actions préventives efficaces, à caractère universel et permanent, et qu'ils mobilisent l'ensemble des acteurs concernés, prioritairement au Québec, afin qu'eux aussi adoptent une approche de prévention de la pauvreté et de la maladie.» Assistons-nous à la création d'un deuxième Institut national de la santé publique?

Les investissements du gouvernement dans les PPP sociaux ne règlent en rien les énormes besoins en orthophonie, orthopédagogie, psychoéducation, organisation communautaire. Si les enfants nous tiennent tant à coeur, il faudrait peut-être leur fournir les services auxquels ils ont droit.

Lors de la présentation de Mme Lyse Brunet, directrice générale de Québec Enfants, au Comité régional sur la maturité scolaire, répondant à la demande d'illustration d'un plan local d'action concertée d'une expérience de Québec Enfants, Mme Brunet nous a mentionné les activités suivantes: atelier de stimulation pour les enfants, haltes-garderies, activité parents-enfants. Ce sont toutes des activités qui sont réalisées majoritairement par les organismes communautaires famille. Pourquoi faudrait-il constituer un nouveau fonds pour soutenir et développer ce qui est déjà existant et sous-financé?

Depuis quelques années, le raisonnement pour déterminer les priorités d'action s'appuie sur une vision strictement économique, médicale et psychologisante. La dimension sociale semble être évacuée. Quand on en parle, c'est pour la réduire à des indicateurs d'identification de population dite à risque ou vulnérable sur laquelle on souhaite intervenir, ceci ayant pour conséquence de créer encore plus de stigmatisation et de repousser encore plus dans la marge des personnes qui auraient davantage besoin de solidarité, d'accueil et de liens de proximité. Ces familles souhaiteraient sûrement davantage être reconnues, soutenues et valorisées dans leur expérience plutôt que d'être «intervenues».

L'éternelle question se pose ici: Souhaite-t-on s'attaquer à la pauvreté ou aux pauvres? La prise en compte des causes structurelles de la pauvreté est constamment évacuée pour ne privilégier que l'intervention sur les individus. Comme ce type d'organisation sociale se fait à partir de mesures statistiques, dépendamment du score d'un territoire, il y aura ou pas de déploiement. Alors, si une famille habite sur le mauvais territoire, elle n'aura pas accès à ces services.

Évidemment, nous avons une grande sensibilité envers les personnes qui rencontrent d'énormes défis dans leur vie quotidienne, mais nous croyons que nous devons relever collectivement ces défis en construisant sur les solidarités plutôt que sur la stigmatisation. Les changements qui se dessinent dans le type de gouvernance et dans l'organisation des services sociaux sont majeurs et nécessitent, selon nous, un temps d'arrêt afin de permettre que l'ensemble de la population en soit saisie et puisse en débattre.

Conclusion. Malgré les disproportions des moyens et les difficultés rencontrées, nous continuons à vouloir améliorer le cadre dans lequel se tissent les liens sociaux et contribuer à la construction d'un monde commun. C'est pourquoi nous proposons quelques pistes de solution à explorer. Afin de permettre un débat ouvert, nous voudrions que soient envisagées de nouvelles façons d'animer les lieux de prise de parole, tant au niveau local, régional que national.

Comme la parole précède l'action, nous identifions qu'après tant d'années d'expériences il est fondamental de revoir les mécanismes utilisés lors des rencontres entre les partenaires si nous voulons changer les rapports de pouvoir en rapports de collaboration. Nous aurions tous avantage à innover par l'utilisation d'outils de délibération, par exemple, ceux proposés par Georges Legault ou Raymond Massé. L'utilisation de ces mécanismes permettrait concrètement de réduire les effets de rapports inégaux et démontrerait une réelle volonté de faire autrement, plutôt que d'en rester aux bonnes intentions.

Nous proposons également que les personnes responsables d'animer les lieux de concertation soient formées dans cette perspective et ne soient ni en lien d'emploi ni encadrées par les promoteurs des projets.

En terminant, nous réitérons notre position en demandant un moratoire sur toute entente entre le gouvernement du Québec et la FLAC et proposons notre collaboration au gouvernement pour explorer les pistes de solution suggérées. Merci de votre attention.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme la présidente. Alors, il y a un petit dépassement dans le temps de présentation. Il y aura deux blocs de 20 minutes, à ma droite et à ma gauche, en commençant avec M. le ministre.

M. Tomassi: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Lagouarde, Mme Gélinas, bienvenue. Merci d'être avec nous. Seulement pour reprendre, à la page 2, sur le slogan, je voulais seulement vous rappeler que, dans la pluralité des votes, le Parti libéral, depuis 1990, obtient le plus grand nombre de votes. Or, en termes de population, si on le transporte sur le nombre de votes, je crois que les gens ont su pour qui voter.

Dans votre mémoire, vous faites beaucoup de points. Vous remettez en question certaines organisations. Vous remettez aussi en question les initiatives 1, 2, 3 GO! Alors, je voudrais peut-être vous entendre plus spécifiquement, là, puis je pense que certains de nos collègues seraient intéressés à vous entendre là-dessus.

n (11 h 50) n

Mme Gélinas (Carol): On ne remet pas en question les organisations, on questionne certaines façons de faire et certaines expériences difficiles qui se sont effectuées avec ces promoteurs-là, d'action concertée dans les communautés. Donc, on l'a illustré par quelques exemples, mais effectivement, dans les communautés, c'est souvent difficile quand un promoteur arrive avec un cadre, une vision.

La concertation, peu importe qui est le promoteur, on s'entend que c'est un défi. Alors... mais, quand on arrive avec des façons de faire... puis c'est ce qu'on s'est fait dire: Oui, on comprend, les premières années qu'on est arrivés dans des territoires, on est arrivés avec des façons de faire un petit peu imposées, on n'a pas su respecter les dynamiques qu'il y avait dans les communautés, prendre en compte ce qui se passait, mais on est conscients de ça, on le modifie, on veut harmoniser nos façons de faire en respectant les milieux. Mais je vous dirais que ça perdure. Et de quoi on veut témoigner, c'est qu'actuellement c'est encore difficile dans des quartiers. Ce n'est pas... Je ne fais pas une généralisation, que c'est difficile dans tous les quartiers, mais... Et c'est aussi dans ce sens-là que notre proposition de faire une analyse puis une évaluation des impacts sérieuse permettrait davantage de documenter ces difficultés-là.

Je vous dirais que, nous, on reçoit les témoignages de plusieurs quartiers, la majorité des quartiers où il y a des initiatives 1, 2, 3, GO! actuellement à Montréal, et c'est très, très difficile, et à tel point que c'est difficile de les nommer et de les régler même dans les communautés, parce que les rapports qui s'y passent, les rapports de pouvoir, la loi du silence ne permettent pas de nommer les choses. Comme regroupement, on ne peut pas ne pas témoigner de ça. Comment les nommer de façon... comment dirais-je? L'idée, ce n'est pas de faire des «splashes» puis des scandales, on n'est pas là-dedans du tout, du tout, mais comment arriver à nommer les choses dans un cadre accueillant pour pouvoir parler et discuter, et que ce soit pris en compte, et corriger les situations? On n'a pas trouvé encore.

Mais on n'a pas le droit de ne pas le dire, qu'il y a ces problèmes-là. Parce que des études qu'on citait sur les initiatives 1, 2, 3, GO! démontraient que, dans un premier temps, ça stimule la mobilisation dans les communautés, mais, dans un deuxième temps, les conflits qui s'opèrent au sein du consortium créent complètement l'effet contraire, et c'est ce que la recherche a prouvé, créent de la démobilisation. Alors, il faut nommer pourquoi que ça se passe, si on veut le régler. Sinon, on demeure dans des conflits de pouvoir où quelqu'un se tait, quelqu'un ne nomme pas. L'idée, ce n'est pas de rester là-dessus, il faut aller plus loin. Alors, c'est un peu l'alignement de nos propositions.

M. Tomassi: Bien, je vous comprends. La question que je n'arrive pas à comprendre, puis vous allez excuser mon ignorance, c'est que, depuis le début, les gens qui sont venus nous parler nous parlent toujours de ces difficultés dans des termes très généraux, très vagues, sans avoir d'exemples précis. Alors, c'est bien beau qu'on puisse... parce qu'en réalité... je vais vous dire une chose, les difficultés ne surviennent pas seulement quand la mise en place de fonds, que ce soit Québec en forme, saines habitudes de vie, même quand le gouvernement, comme entité, met en place des programmes, il y a des difficultés. Il y a des organismes qui tombent entre deux chaises parce que leur mission n'est pas celle que le programme a établie. Alors, les difficultés rencontrées ne sont pas propres à un fonds.

Vous en faites mention dans vos documents, puis même les autres groupes, vous venez nous dire: Les difficultés rencontrées par rapport aux fonds qui ont été établis, en mettant de côté tout le reste des difficultés que vos groupes ont dans certains autres dédales administratifs, gouvernementaux, où est-ce que des programmes sont mis en place pour répondre à un besoin, et nécessairement certains groupes n'ont pas accès aux programme, aux fonds. Ces difficultés-là surviennent, où des groupes... On est tous députés, on a tous eu des organismes communautaires qui sont venus dans nos bureaux nous dire des problèmes qu'ils vivaient vis-à-vis un programme ou un autre, c'est tout à fait... Tu sais, des fois, c'est plate, là, on essaie de leur donner un coup de main, mais cette difficulté-là n'est pas propre au fonds... avec la fondation Chagnon, là, elle est propre au système, de la volonté, dans la direction qu'un gouvernement entend aller pour le bien-être d'une population.

Je lisais votre mémoire. Vous remettez même... je ne sais pas si vous remettez en cause aussi l'institut de la santé publique, là...

Mme Gélinas (Carol): Non, mais...

M. Tomassi: ...mais, en réalité, vous comprenez, le fait est de dire: On est ici pour essayer de bonifier un projet de loi, puis je salue votre démarche, avec des éléments... Dans la page 8, la conclusion, vous dites aussi que, dans ces tables de concertation, les responsables de l'animation de la concertation ne doivent pas être des gens... des promoteurs des projets. Moi, je vous répondrais: On devrait non plus avoir des gens qui vont être bénéficiaires du fonds qui animent les choses. Or, c'est des éléments où est-ce que... au lieu d'inscrire seulement une partie de la vision, marquez donc aussi la deuxième, disant: Écoutez, même ceux qui profitent du fonds ne devraient pas faire partie de la concertation.

Vous comprenez un peu le fait d'avoir un ensemble... une vue d'ensemble, beaucoup plus large. Et, Mme Lyse Brunet, qui est en arrière de vous, je suis content quand vous dites dans votre mémoire qu'elle a dit que ce sont toutes des activités qui sont réalisées majoritairement par les organismes communautaires famille, parce qu'on le dit depuis le début, la mise en place du fonds, les organismes principaux qui vont profiter du fonds vont être les organismes communautaires famille. Pourquoi? Parce que le but ultime, la vision gouvernementale et la vision de la fondation pour venir en aide aux enfants 0-5 ans, on est conscients que le travail que vous faites, c'est un travail qui est remarquable, qui est apprécié puis qui est nécessaire vis-à-vis... Et je suis content que vous le marquiez.

Or, la vision de la fondation, qui se traduit par les paroles de leur directrice générale, vient confirmer la volonté non pas celle seulement gouvernementale, mais celle aussi de la fondation, de venir en aide et de support. C'est plus, là: Pourquoi faudrait-il constituer un nouveau fonds? C'est parce qu'au lieu de verser seulement 15 millions on verse 40 millions de dollars par année, qui vont venir directement en aide aux enfants que vous allez prendre soin. Or, je veux que ce soit clair. Je voudrais qu'on voie ça comme une bonification, comme... puis ça n'enlève pas, là... puis j'écoute... je vois le député de Mercier qui va nous revenir... Je comprends le principe de gérance, où est-ce que ces gens-là n'apprécient pas cette façon de faire, mais, en bout de ligne, est-ce qu'on est prêts à investir de l'argent qui va venir en aide aux enfants? C'est ça, la question. Et, si on répond oui à la question, on peut mettre en place des mesures qui vont venir baliser, qui vont venir contrôler, qui vont venir édicter des façons de faire. Mais, en bout de ligne, le but ultime du gouvernement et de la fondation, et le vôtre aussi, j'en suis extrêmement sûr, à 100 %, c'est pour le bien-être des enfants.

Le Président (M. Kelley): Mme Gélinas.

Mme Gélinas (Carol): Oui. Bien, quelques précisions peut-être, au niveau de notre proposition, peut-être pour la clarifier, elle semble mal comprise. Quand on parle de l'animation des lieux de concertation, ce n'est pas... c'est qu'on ne dit pas que ce n'est pas... actuellement, quand c'est des personnes qui sont attachées dans un lien d'emploi ou dans le lien d'encadrement, parce que c'est comme ça que le projet aussi est construit, de Québec Enfants, c'est que le fonds vient encadrer, soutenir et encadrer. Donc, ça oriente, ça, ce n'est pas neutre. Donc... Déjà, tu places les partenaires dans un rapport de pouvoirs différents. Ce n'est pas égalitaire. Donc, nous, on essaie de voir dans... pour faire un partenariat, on comparerait ça à l'image classique, et excusez-moi le cliché éculé, un mariage libre et volontaire a plus de chances de fonctionner qu'un mariage forcé. Tu sais, si mon père va me vendre à quelque part, peut-être que je ne serai pas heureuse.

Donc, l'idée, c'est de... on croit fondamentalement aux valeurs démocratiques. Donc, l'idée, c'est de dire: Comment on réduit ces effets de rapport de pouvoir qui viennent perturber le bien... le fonctionnement d'une concertation. Donc, ce qu'on propose, c'est qu'il y ait vraiment... puis ça, c'est... c'est parce que ça fait deux, trois ans qu'on réfléchit sur tous ces obstacles-là, la concertation. Qu'est-ce qui est un irritant? Puis pas être juste sur le mode de chialage, mais de dire: Comment on est capables de le régler, ce problème-là? Parce qu'il est fondamental. Ça fait que, nous, ça nous apparaît qu'une personne qui est formée pour animer... Animer, là, ce n'est pas juste défiler un ordre du jour puis ce n'est pas juste manipuler, c'est comment on met en valeur la richesse de l'ensemble des partenaires qui sont là. Donc, c'est un métier. Ça fait que, là, si c'est n'importe qui qui s'improvise à faire n'importe quoi, on se rend compte que c'est un pivot dans le... ça fait une différence dans les milieux où ça fonctionne puis dans les milieux où ça se tiraille. Donc, on dit: C'est un élément gagnant pour tout le monde. Voilà pour ça. C'est peut-être plus clair, je ne sais pas.

M. Tomassi: Je remercie...

Mme Gélinas (Carol): Bien, j'aurais aimé ça continuer, mais...

M. Tomassi: Oui, allez-y.

n (12 heures) n

Mme Gélinas (Carol): On ne questionne pas du tout... on ne remet pas en cause la légitimité de l'Institut national de santé publique, c'est tout le contraire, on se demande pourquoi ça en prend deux. On en a déjà un. Alors, c'est... parce que, quand on lit la mission de la fondation, sur papier, c'est quasiment de créer un deuxième Institut national de santé publique, et on ne voit pas... en tout cas, on ne comprend pas, on ne comprend pas.

Puis, je vous dirais, le bien-être des enfants, évidemment que tout le monde le souhaite, mais on ne peut pas réduire la question là, ça serait prendre des raccourcis, parce que concrètement, là, au quotidien, il y a plein de dimensions à prendre en compte, et, quand on essaie de faire des réductions et des raccourcis, bien on prend les murs aussi, et ça ne favorise pas les communautés à avoir la capacité d'agir. Puis c'est après, je vous dirais, le partage de nos expériences où on essaie de... pourquoi on continue à être dans les espaces qu'on trouve inconfortables, c'est parce qu'on veut travailler à l'amélioration des conditions de vie des familles et des enfants, puis on tente de trouver des solutions. En même temps, si on ne les nomme pas, les problèmes, on ne les règle pas. C'est facile d'être... on serait tellement heureux d'être: Hou! On est tous ensemble, heureux! Mais regarde, il y a des visions qui s'affrontent, il faut avoir des espaces pour les dialoguer, et, si ces espaces-là n'existent pas, bien on met un couvert par-dessus, on les enterre, puis après ça ça va faire... ça ne donnera pas des bons résultats.

Alors, il me semble, on est en 2009, on est capables, il me semble, d'innover dans nos façons d'être ensemble, puis c'est ce qu'on... c'est comme ça qu'on tente de participer et c'est pour ça qu'on est au comité régional sur la maturité, depuis un an, on investit énormément de temps et d'énergie, avec les moyens qu'on a, on s'entend, hein? Mais... donc, on voudrait être aussi un acteur crédible, mais il faut avoir les moyens pour le faire. Donc, le fonds, si c'est pour réaliser des actions et de la concertation, ça ne consolide pas les acteurs, parce que, dans une concertation, et ça... La semaine passée, au comité sur la maturité scolaire à Montréal... on est en train de définir notre groupe, comme comité régional, comment on s'appelle, comment on se présente, hein, bon, tout le monde est là, les fonds sont là, la fondation, les ministères, bien, je pense, M. Lessard vous a fait une belle présentation hier, j'étais très contente de l'entendre, donc c'est en construction, c'est un processus, hein, ce n'est pas un modèle unique, figé, et on se disait: Dans une concertation, il faut opérer un déplacement, il faut que chacun, pour un objectif commun, se déplace un peu, ne fasse pas juste son petit kit. J'y arrive... mais, dans un déplacement, on prend des risques aussi, puis c'est ça qui est le fun, de faire le nouveau, mais, dans une concertation, un CPE, là, il va rester un CPE dans sa mission et son financement, il est garanti. Le CSSS va rester le CSSS, la ville de Montréal, elle reste la ville de Montréal, la Santé publique reste la Santé publique.

Le seul qui n'est pas consolidé comme acteur autour de la table, qui, dans le déplacement, peut perdre son identité... puis ce n'est pas parce qu'on ne veut pas contribuer, mais ne se résume pas qu'à être un exécutant d'un programme, on a une mission, une vision, une organisation, il faut que celle-ci puisse continuer pour qu'on puisse se projeter dans autre chose, et ça, à ce moment-ci, pour notre réseau, ce n'est pas assez appuyé. Donc, c'est pour ça qu'on a des réticences à toutes ces modifications-là, sans parler des enjeux démocratiques, mais ça, je pense qu'il y a d'autres partenaires qui l'ont suffisamment nommé.

Le Président (M. Kelley): J'ai deux demandes à ma droite, et il ne reste que six minutes. M. le député des Îles-de-la-Madeleine, suivi par M. le député de Lévis. Si on peut avoir des questions courtes et des réponses plus courtes, tout le monde aura son droit de parole. M. le député.

M. Chevarie: Je vais y aller assez rapidement. D'abord, merci de votre présence. Dans votre mémoire, à la page 6, vous mentionnez, entre autres, que les services sociaux... qu'il y a une diminution significative des services sociaux du réseau de la santé et des services sociaux. Ça me surprend un peu, parce que les services sociaux, au cours des dernières années, n'ont jamais été visés, d'une part, au niveau des plans de redressement de quelconques établissements, ou par la plupart, et l'autre élément, c'est qu'il y avait une clause, lors de la mise en place des centres des services sociaux, à l'effet que les argents ne pouvaient pas transiter à partir du social vers l'hôpital, mais que l'inverse pouvait se faire par ailleurs. Et ça, c'était déterminé et inscrit dans les modalités budgétaires et réglementaires lors de la création des services sociaux. Alors, je ne pense pas qu'il y ait eu une perte significative, au contraire, au niveau des services sociaux, depuis quelques années, puis ça... j'aimerais ça vous entendre ou avoir un peu plus de précisions là-dessus.

Mme Gélinas (Carol): Dans la réorganisation des CSSS, le mandat CLSC a quand même été diminué... la réorganisation... les énergies prises en réorganisation pour les fusions de territoires, la nouvelle configuration du réseau a drainé beaucoup, beaucoup de ressources, d'argent et de mobilisation et de démobilisation. Mais la nouvelle organisation en service clientèle fait que, si tu ne rentres pas dans une case service clientèle, tu n'as pas accès à des services, là. Si tu n'es pas identifié dans un service clientèle, tu n'en n'a pas. Puis c'est... tu passes en... Il faut que tu t'inscrives là-dedans, si tu ne fittes pas dans le carreau, tu n'as pas accès. Une famille qui a, mettons, qui sent le besoin d'avoir... puis qui a besoin de services, puis... Tu sais, on n'est pas que le seul organisme en soutien aux familles, hein, vraiment pas. On n'a pas cette prétention et ne voudrait pas le devenir non plus... mais fort peu d'accès à des services en CLSC actuellement. Tu sais, hier, j'entendais, dans les propositions d'Isabelle Samson, dans les suites du sommet sur la maturité scolaire, parlait d'une espèce de première ligne où les familles pourraient avoir accès... elle comparait le mal de tête et le neurochirurgien, là. Effectivement, les CLSC, c'était leur mandat, mais on n'a pas eu le temps de le mettre en oeuvre jusqu'au bout, ce réseau-là, donc il n'a pas pu jouer son rôle. Et, dans ce sens-là, avoir accès à un service en CLSC, c'est de plus en plus difficile. En tout cas, c'est la réalité. Je ne sais pas comment s'organisent les budgets, mais la réalité, les familles nous disent qu'ils ont de moins en moins de services, et c'est de plus en plus ciblé en programmes, et il y a moins d'accessibilité pour l'ensemble des familles quand ils ont des défis à relever.

M. Chevarie: Peut-être un dernier commentaire, M. le Président...

Le Président (M. Kelley): Oui, oui. Je voulais proposer votre collègue de Lévis, mais...

M. Chevarie: Juste pour préciser. Effectivement, je pense qu'il y a eu une analyse, une nouvelle orientation par rapport à la prestation des services. On a réorienté vers des clientèles ciblées, mais il n'y a pas eu de diminution significative de services sur le plan social.

Mme Gélinas (Carol): Il y a un déplacement, en tout cas. Les familles nous disent qu'elles n'ont pas accès.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Lévis, courte question et réponse, s'il vous plaît.

M. Lehouillier: Oui, bien, très rapidement. Bon, vous parlez un peu de la responsabilité du gouvernement, et je pense qu'il y a quand même un plan d'action qui existe au niveau de la famille, entre autres, vous parlez aussi de la nouvelle gouvernance, mais, moi, ce qui m'intéresse par rapport... et des expériences difficiles qui ont été vécues, là, au cours des dernières années. Mais ce qui m'intéresse, c'est que, dans votre mémoire ? et là j'aimerais ça vous entendre là-dessus ? c'est comme s'il y avait quelque chose de plus fondamental, une espèce de remise en question plus fondamentale, lorsque vous dites, en conclusion: «...nous voudrions que soient envisagées de nouvelles façons d'animer les lieux de prise de parole, tant au niveau local, régional que national. [...]Comme la parole précède[...], nous identifions qu'après tant d'années d'expériences, il est fondamental de revoir les mécanismes utilisés lors des rencontres entre les partenaires...»

Est-ce que vous remettez en question la concertation telle que nous la vivons dans les régions? Est-ce que c'est ça?

Mme Gélinas (Carol): Non, non, je ne la remets pas en question, je veux la bonifier, justement la bonifier pour... puis là, je ne sais pas si c'est applicable à tous les espaces de... c'est parce que, tu sais, les concertations qui sont concertées, il y en a, hein, il y a beaucoup de lieux, alors... et chacun de ces...

M. Lehouillier: Ça varie d'une région à l'autre, également.

Mme Gélinas (Carol): Tout à fait, tout à fait, puis je suis assez au courant de comment ça se passe aussi dans les régions du Québec, là, même si on vient de Montréal. Ce que je dis, c'est que, dans ces espaces-là, il faut aller plus loin ensemble, mais, pour aller plus loin ensemble, il faut être novateurs, il faut ouvrir nos façons d'être en dialogue puis de faire nos discussions. Justement, parce qu'il y a des fois où il y a des réunions... je ne sais pas, là, il y a des réunions, tu vas là, tu dis: Bien, là, on ne serait pas venus, puis ça n'aurait comme pas rien changé, hein? Des fois, c'est des tables de conversation, des fois, il ne se passe rien, des fois, c'est plate, des fois, les gens sont là en touristes. Pour redonner un souffle et de la vie à ces lieux-là, pour justement ne pas leur faire perdre du sens... C'est ce qu'on a souvent eu comme commentaire, c'est: Bien, finalement, ça devient tellement technocratique comme lieu que ce n'est plus vivant, il n'y a plus de vie, puis là le sens de notre implication... puis là je l'entends des groupes communautaires, mais je l'entends de la panoplie des partenaires, là, qu'ils soient institutionnels, communautaires... c'est dangereux d'y perdre le sens, justement, parce qu'il y a une multiplication de ces lieux-là. Si, d'un coup, c'était devenu très à la mode, et tant mieux parce que c'est porteur, mais comment ne pas les dénaturer, ces lieux de concertation là, qu'ils restent vivants, animés, qu'ils soient porteurs et qu'ils donnent du sens? Je ne remets pas du tout en question, c'est... mais il y a des outils qui existent pour qu'on soit en mode de parole différent, pour que ce soit plus... qu'on aille plus loin, qu'on aille plus loin.

n(12 h 10)n

Mme Lagouarde (Laurence): Et pour diminuer les rapports de pouvoir. Je pense qu'il y a aussi une question qui est en jeu là. C'est que ces nouveaux mécanismes là pourraient justement amener différents partenaires autour de la table qui arrivent avec différentes compétences et expertises, les amener à être sur à peu près les mêmes niveaux. Ça, ce n'est pas ce qu'on retrouve présentement, dans plusieurs concertations. Ce n'est pas ce que nos membres nous disent, dans plusieurs concertations où il y a des rapports de pouvoir. On ne les éliminera pas totalement, mais il y en a.

Donc, si on peut contribuer en disant: On est dans une ère postmoderne, essayons d'avoir des outils postmodernes. Voilà.

M. Lehouillier: ...

Le Président (M. Kelley): Pardon, M. le député de Lévis. Je dois tourner à ma gauche. M. le député de Gouin.

M. Girard: Merci, M. le Président. À mon tour de saluer les représentantes du Regroupement des organismes communautaires Famille de Montréal, Mme Lagouarde et Mme Gélinas aussi. Merci pour votre mémoire. Ma première question va porter sur un élément de votre mémoire, à la page 7, qui reprend un peu les propos qui ont été tenus hier par la Direction de la santé publique, qui nous disait essentiellement que, de leur point de vue, dans l'enquête sur la maturité scolaire à Montréal, il y a un grand nombre d'enfants vulnérables qui sont situés dans des quartiers qui ne sont pas reconnus comme étant défavorisés. Et M. Lessard s'inquiétait de ce fait-là et recommandait au ministre d'apporter des modifications à son projet de loi afin que les projets approuvés par le fonds ne soient pas uniquement dans les quartiers défavorisés, où il y a un très grand nombre d'enfants vulnérables, mais aussi dans des quartiers où il y a un nombre d'enfants qui vivent des difficultés importantes mais qui, à cause des données et des statistiques, ne sont pas comptabilisés comme un quartier de nature défavorisée. Ça, on le vit dans plusieurs circonscriptions, peu importe la couleur des comtés que nous représentons à l'Assemblée nationale.

J'aurais aimé vous entendre, puisque vous oeuvrez dans différents quartiers de Montréal, votre regroupement, certains qui sont comptabilisés ou qui sont vus comme étant des quartiers de milieux défavorisés, puis il y a des catégories, là, 1, 2, 3, bon, et d'autres qui sont dans des quartiers qui le sont moins, et m'expliquer, m'en parler davantage, de cette problématique-là, et qu'est-ce qu'on devrait faire pour faire en sorte qu'on ne laisse aucun enfant derrière, aucun enfant qui n'ait pas accès à des services, ou des familles qui n'aient pas accès à des services, parce qu'on veut améliorer la situation de tous les enfants, peu importe dans quel quartier ils vivent.

Mme Lagouarde (Laurence): Bien, c'est sûr que, comme le disait M. Lessard hier, quand on tombe, aussi, par rapport à des indicateurs, hein, on va forcément éliminer un certain nombre de gens, puisqu'il faut rentrer dans des silos, et donc beaucoup d'intervenants ont parlé ici de stigmatisation.

C'est sûr que, nous, dans notre approche, l'approche des groupes est une approche globale, c'est-à-dire qu'on ne s'adresse pas aux gens et on ne reçoit pas les gens par rapport à des problématiques mais bien par rapport à l'individu qu'ils sont et l'expérience de parents ou de vie qu'ils ont.

Donc, c'est sûr que, les indicateurs, ce que ça amène, c'est qu'on transforme des besoins en droits, à un moment donné. Donc... en fait on remplace, pardon, c'est l'inverse que je voulais dire, on remplace les besoins. Et ils sont essentiels. On n'est pas là à dire non plus qu'il n'y a pas de besoins pour les enfants. Au contraire, on travaille avec et on le voit bien, bon.

Pourquoi ce découpage 0-5 ans? Aussi, ça, ça nous interpelle énormément. Ça veut dire qu'à partir de six ans les enfants, tout va bien, ils n'ont plus de problèmes et tout est... ça veut dire que l'école, à ce moment-là, prend en charge quelque chose? Comme on le nommait dans notre mémoire, il y a d'autres besoins que ça. Il y a d'autres besoins au niveau de services directs aussi. Mais c'est sûr que nous, dans notre approche, quand on voit les indicateurs tels qu'ils sont nommés par l'enquête sur la maturité scolaire ou d'autres, et on se dit: Mais quel découpage on va faire aussi? Comment on va fonctionner, on va faire, on va fonctionner? En territoire de CSSS? On va sectionner en territoire de voisinage, comme dans l'enquête sur la maturité scolaire? Comment on détermine, avec quels indicateurs on détermine?

Donc, quand on disait que la pauvreté, ce n'était pas une maladie, hein, je veux dire... Donc, si on travaille avec des indicateurs qu'habituellement on va davantage voir par rapport à des maladies, dans la prévention, bien, sur du social, pour nous, ça nous pose un énorme problème. Et effectivement, comment faire pour intervenir auprès des familles qui ne sont pas sur le bon territoire? C'est ce qu'on soulève aussi, ça nous pose d'énormes questions.

Le Président (M. Kelley): Mme Gélinas.

Mme Gélinas (Carol): Bien, c'est des logiques comptables. Tu sais, un indicateur, c'est un indicateur, ce n'est qu'un indicateur, ça ne reflète pas la vérité. Donc, quand on rentre dans trop de logique d'indicateurs, ils rentrent en conflit les uns avec les autres puis on construit des irrationalités, là.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Parce que M. Lessard, dans une des recommandations de la Direction de la santé publique, hier, nous demandait de cibler plus largement, donc de modifier l'article 1 du fonds qui invite à soutenir des projets pour des enfants de moins de cinq ans vivant en situation de pauvreté. Est-ce que je comprends de vos propos que vous souhaiteriez que la définition soit élargie, à l'article 1 du projet de loi? Est-ce que c'est ça, votre proposition?

Mme Lagouarde (Laurence): Bien, c'est sûr que, comme je vous dis, nous, on fonctionne avec l'approche globale, hein, on ne fonctionne pas avec des parties de l'humain, on fonctionne avec la totalité de l'humain. On est une somme d'expériences, de vécus, on ne peut pas détacher certaines choses, on ne peut pas donc... Je pourrais vous faire une réponse en vous disant: C'est sûr que plus large, c'est mieux que plus petit, mais ça ne change pas le fond du problème quand même. On est quand même dans une logique, dans une vision où les individus sont pris en compte par rapport à la multiplication de leurs problématiques. Il me semble que nous sommes autre chose aussi que ça.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Oui. Ensuite, j'aimerais aborder aussi avec vous... Bon. À quelques reprises dans votre mémoire, vous soulignez certaines difficultés qu'ont vécues des organismes communautaires famille qui ont eu des liens avec la fondation. Pouvez-vous me donner quelques exemples concrets de moments où il y a eu des difficultés? Elles étaient de quelle nature? Est-ce qu'il y a des correctifs qui ont été apportés? J'aurais aimé donc en savoir davantage.

Le Président (M. Kelley): Mme Gélinas.

Mme Gélinas (Carol): Oui. Je pense que ce serait intéressant que le gouvernement peut-être dégage ces sommes pour faire une étude de comment ça s'est passé. Je ne veux pas être dans le potinage puis sortir des exemples, mais je pense qu'il y a des exemples dans Québec en forme. Mais je trouve que ce serait vraiment la peine de le documenter comme il faut. Vous comprendrez que, nous, on a 55 000 $ par année de fonctionnement, on ne peut pas faire des études de ce type-là, mais il nous est rapporté des exemples. Sur une entente individuelle, groupe à fondation, deux ans de négociation, accompagné d'un avocat, ça commence à être lourd avant d'arriver à une entente. Un autre groupe qui m'ont dit qu'ils ont quitté Québec en forme la semaine dernière, parce qu'ils faisaient une activité de psychomotricité avec les enfants, et l'organisme, un groupe famille, donc voulait faire une activité parents-enfants aussi, inclure les parents dans l'activité. Québec en forme a refusé. Ils ont dit: O.K., au moins, que la personne qui ferait l'activité avec les enfants puisse faire un contact, un lien avec les parents, même si on ne les intègre pas dans l'activité. Ça aussi, ça a été refusé.

Donc, on est payé à l'acte pour un petit bout. Donc, ça ne respecte pas l'esprit, la mission du groupe famille qui fait du travail parents-enfants. Même si on veut mettre l'accent sur l'enfant, ça va, mais il faut le faire avec les parents aussi. Donc, bien le groupe finalement s'est retiré, il y a deux semaines, du projet. Bon. Bien, je pense que, sur le site de la Fédération québécoise des organismes communautaires Famille, vous aurez, là aussi... Parce que le Québec Enfants, c'est plus en région, ce n'est pas à Montréal que ça s'est déployé. Bon. On sent qu'il y a une volonté. Il y a une volonté, là, d'amélioration, puis on sent qu'il y a une ouverture, puis ça évolue. Mais on souhaiterait que le gouvernement soit assez actif dans ce dossier-là pour justement permettre des paramètres de participation qui feraient que l'ensemble des partenaires pourraient être respectés.

J'entendais «un mécanisme de plainte» hier, je ne sais plus qui a pu proposer ça. Je trouve que c'est peut-être une bonne possibilité, pour justement, quand il y a les difficultés, tu es isolé avec tes difficultés, comment pouvoir faire face à ça. Ce n'est pas juste le subir. En violence conjugale, hein, la première chose qu'on dit, c'est qu'il faut la nommer, la violence. Ça fait que commençons par ça.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Le ministre nous a indiqué que, dans le protocole d'entente, il y avait des éléments en lien avec la composition du conseil d'administration, société de gestion, le comité de pertinence, le comité de liaison, tous des éléments qui ne sont pas dans le projet de loi. Il n'y a pas d'articles qui font référence à ça. Est-ce que vous souhaiteriez que le ministre précise dans son projet de loi? Et vous faites référence au fait que, de votre point de vue, par moment l'expertise locale et votre expertise n'est pas reconnue. Afin que de telles situations ne se reproduisent pas, est-ce qu'il devrait y avoir des articles dans le projet de loi qui assurent une participation de la société civile aux prises de décision dans l'attribution des projets?

n(12 h 20)n

Mme Lagouarde (Laurence): Je dirais que nous ne nous sommes pas rendus jusqu'à ce genre de technicalités. Notre position même, le fait de demander un moratoire et un large débat public ne nous a pas amenés à discuter, et en fait on n'a pas voulu tenir compte de ce genre de technicalités dans nos discussions, parce que ça va plus loin que ce que, nous, on demande. C'est-à-dire, ça nous amène ailleurs. On n'est pas là. Nous, on a une position aujourd'hui, c'est le moratoire, le débat public, la demande d'un large débat public. Il y a des questions de fond qui ne sont pas nommées, qui ne sont pas posées. Quand on nomme, dans notre mémoire, avec quelle vision du monde ces projets-là sont amenés, nous, nos inquiétudes à ce niveau-là.

Je vous dirais qu'au niveau des différents comités, des personnes qui s'y trouvent, on verra en temps et lieu. À la limite, si jamais on... Et, comme vous me l'avez nommé souvent, nous n'avons pas le protocole d'entente. Donc, il est très difficile de dire quoi que ce soit à partir de ce moment-là.

M. Girard: O.K. Je comprends donc que vous auriez souhaité avoir... vous dites dans votre mémoire que vous auriez considéré qu'il y a une absence d'information complète et transparente quant à la nouvelle forme de gouvernance. Je comprends que vous avez une partie de l'information, hein? Vous avez préparé votre mémoire, vous n'avez pas toute l'information, et vous auriez souhaité que, du côté ministériel, il y ait une plus grande transparence au moment de la préparation de votre mémoire, que vous n'avez pas eu toute l'information. Je retiens ça. Vous n'êtes pas le seul organisme qui en a fait mention.

Vous dites aussi dans votre présentation que vous considérez qu'il y a un non-respect de la Politique gouvernementale sur l'action communautaire. Pourriez-vous m'en dire davantage?

Le Président (M. Kelley): Mme Gélinas.

Mme Gélinas (Carol): Oui. Bien, la politique, quand elle a été adoptée, de reconnaissance et de soutien de l'action communautaire autonome, c'était pour... on reconnaît le rôle, la mission des organismes dans l'ensemble de ce qu'ils sont, d'avoir une distance critique avec l'État, de transformation sociale, de lieu d'accueil, et reconnaissait le financement à la mission des organismes, et il y avait... J'avoue que je ne suis pas de super près de ce temps-ci... c'est un dossier que j'ai moins suivi, avec le regroupement québécois d'action communautaire autonome, mais il y avait tout le principe de la prépondérance du financement à la mission.

Alors, pour qu'un groupe puisse exercer sa mission, jouer son rôle dans sa communauté, il faut qu'il soit soutenu puis reconnu à une hauteur décente et adéquate. Quand le ministère de la Famille nous a accueillis... quand on est... ils nous ont... bien, sortis du ministère de la Santé pour nous accueillir au ministère de la Famille, le ministère reconnaissait le sous-financement chronique du secteur famille. Et donc, avec toutes ces différentes ententes... parce qu'on nous dit qu'il y a eu un rehaussement du financement des groupes famille, on est arrivés à une entente de service, pour un projet de garderie, pour un projet machin... tout à la pièce. Donc, la prépondérance du financement en entente de service devient plus grande, à peu près, que le financement à la mission. Et ce type de projets là, aussi, cet investissement-là dans la communauté, c'est comptabilisé comme l'argent qui vient dans le communautaire. Mais pas... C'est sûr, ça s'inscrit dans la mission, mais ce n'est pas une mission autonome, et c'est là que ça heurte. Puis je dirais que ça heurte fort, parce que... les groupes... vous l'avez posée à d'autres, mais je répondrai: le 15 millions, pour 15 millions, c'est sûr, on parle... c'est un autre débat. Mais ça a heurté, ça a choqué et, pire, ça a humilié. Ça, c'est pire. Ça fait que les gens se sont sentis humiliés par un choix où on nous dit: On va vous reconnaître, on reconnaît votre travail, on reconnaît, vous êtes financés et... Bien, ce n'est pas un bon sentiment.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Mercier.

M. Khadir: Merci, M. le Président. Mme Lagouarde, Mme Gélinas, je tiens à vous féliciter pour le courage que vous avez démontré par la clarté de vos propos et en fait la nature de votre revendication, qui va plus loin qu'à peu près tout ce qui a été signalé jusqu'à présent à cette table, même si vous rejoignez la préoccupation d'à peu près, je dirais, l'ensemble, presque unanimement, des intervenants sur le déficit démocratique qui semble y avoir dans la constitution de ces deux fonds.

Je voudrais juste, pour le bénéfice de M. le ministre et du député de Gouin qui demandaient des exemples précis qui ont contribué à ce que, moi-même, je me fasse une meilleure idée de ces deux projets de loi, c'est dans Le Devoir du 6 avril, c'est une enseignante de la Montérégie qui nomme ces exemples: Ce nouveau partenariat public-privé... Non, je m'excuse. Voilà. Alors: «La fondation ne fait pas qu'investir de l'argent; elle s'investit en imposant ses conditions, ses directives. Nous le vivons dans une commission scolaire de la Rive-Sud de Montréal. La fondation intervient dans l'élaboration de la grille horaire au préscolaire. Elle se manifeste également par des activités à l'heure du dîner ou des activités parascolaires, en dehors de la grille horaire. Il en résulte, par exemple, que le gymnase n'est plus accessible après les heures de cours. Tel enseignant aimerait animer un groupe d'improvisation au gymnase. Impossible! "Québec en forme et la fondation" occupent déjà les lieux», puis il donne d'autres exemples.

En fait, l'anecdote, en soi, ce n'est pas un problème. Au-delà de ces anecdotes, ce qui est soulevé ici, c'est un modèle. C'est assez ironique... L'ironie du sort a fait qu'aujourd'hui même, alors qu'un groupe demande un moratoire sur ce projet de PPP ? on peut convenir qu'on peut l'appeler un PPP social, partenariat entre le public et le privé ? le jour même où on questionne ça, le jour même où Mme Forget donne sa démission, la ministre des Finances, qui représentait l'âme des PPP au Québec, un modèle économique de vision d'abandon de l'État, de recul de l'État, qui est une vision qui est largement, maintenant, remise en question, hein? On dit que, si on est dans une crise économique, c'est largement à cause du fait que beaucoup d'États, parfois de bonne foi, ont laissé au privé une trop grande place. Donc, c'est un questionnement sur ça. C'est un questionnement sur le modèle de charité, parce qu'il s'agit d'une charité. C'est une oeuvre utile, on en convient, il faut répondre à ça. Mais est-ce que c'est le rôle d'individus riches et puissants ou c'est le rôle de l'État?

Je dépose un document, M. le Président, à l'Assemblée, à l'appui de mon argument, parce que, dans mes calculs, et je voudrais que M. le ministre soit attentif à ça.

M. Tomassi: Je suis toujours attentif, M. le député.

M. Khadir: Selon mes calculs, se basant sur le document qui est le chapitre consacré à la fondation Chagnon par la fiscaliste Brigitte Alepin, elle prétend, si je me fie sur ses calculs, qu'à 72 % la fondation Chagnon, là, le 1,4 milliard, c'est dû à l'impôt dont on s'est privé, c'est l'État qui a financé. Donc, dans le 1 milliard, là, des trois fondations, sur 10 ans, le 500 millions mis par la fondation, plus le 500 millions pour l'État, en fait, en réalité, 85 % de l'argent est mis par l'État et seulement 15 % par la fondation Chagnon, si on considère le fait que la fondation, à 70 %, a été financée grâce à l'argent de nos impôts, d'accord? Parce que l'impôt appartient à l'État. Si une fondation ne le paie pas, c'est de l'argent que, nous, on s'est dispensés, de notre argent qu'on leur a donné.

Donc, à partir de là, il me paraît très raisonnable de demander, comme le Regroupement des organismes communautaires Famille de Montréal, de demander un moratoire, parce qu'il y a un vrai débat démocratique: comment admettre qu'un acteur privé qui n'a contribué au final, à partir de son propre argent, que pour 15 %, détienne le contrôle à 50 % de décisions, quelles que soient la valeur et la vertu intrinsèques de ces décisions? Si vous voulez commenter: est-ce que c'est raisonnable de penser comme ça?

Le Président (M. Kelley): Très brièvement, parce qu'on arrive à 12 h 30. Alors, court commentaire.

Mme Lagouarde (Laurence): Merci de souligner notre courage. Effectivement, ça demande du courage d'indiquer, de nommer comme ça l'approche que nous avons voulue et la contribution que nous voulons donner. C'est bien important pour nous de dire qu'effectivement notre position, elle est mûrement réfléchie, qu'elle a été votée par l'ensemble de nos membres en assemblée générale extraordinaire.

Je voudrais vous rappeler aussi que les organismes communautaires famille de Montréal seront aussi les petites souris travaillantes sur le terrain quand ces projets-là vont débarquer. Donc, c'est très interrogeant pour nous.

Le Président (M. Kelley): Alors, sur ça, je vais remercier les représentantes du Regroupement des organismes communautaires Famille de Montréal pour votre contribution à notre réflexion.

Je vais suspendre nos travaux jusqu'à 15 h 30, dans cette même salle.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

 

(Reprise à 15 h 30)

Le Président (M. Kelley): On va reprendre nos travaux. Je vais rappeler le mandat de la commission: la commission est réunie afin de compléter ? compléter ? les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 7, Loi instituant le fonds pour le développement des jeunes enfants.

Alors, nous avons deux témoins qui nous restent. Le premier, c'est la Fondation de la pédiatrie sociale et l'Assistance des enfants en difficulté, représentées par le Dr Gilles Julien. Alors, sans plus tarder, je vais céder la parole au Dr Julien. Vous avez un droit de présentation d'une dizaine de minutes, mais il y a une certaine latitude, alors... Mais la parole est à vous. Dr Julien.

Fondation pour la pédiatrie
sociale et Assistance d'enfants
en difficulté (AED)

M. Julien (Gilles): Merci beaucoup. C'est un grand honneur d'être ici pour pouvoir parler à la commission parlementaire, avec un document qu'on a intitulé Bien faire pour tous les enfants du Québec: un consensus. D'abord, le temps est assez court, donc je vais... je voudrais quand même saluer l'initiative du gouvernement du Québec avec la fondation Chagnon, qui consent finalement à investir dans les petits enfants, puis sur un modèle qui ressemble beaucoup, on le souhaite, à l'idée qu'un village s'occupe bien de ses enfants. On dit ça beaucoup puis, dans notre pratique de pédiatrie sociale, on est très promoteurs de ce concept-là, puis là, tout d'un coup, il y a des moyens qui se mettent en place, des sommes d'argent qui vont théoriquement nous aider à arrimer nos pratiques autour de ce concept-là.

Je suis aussi un partenaire de la fondation Chagnon depuis longtemps. M. Chagnon nous a aidés à mettre sur pied nos centres de pédiatrie sociale et continue à le faire. Et le principe le plus important pour moi à ce stade-ci, c'est de saluer cette initiative-là mais aussi de s'assurer que les fonds vont être mis au bon endroit au bon moment, et surtout pour les enfants les plus vulnérables du Québec.

On dit toujours que les enfants sont tous vulnérables; c'est vrai, ils ont tous besoin du même type d'outils et d'accompagnement. Dans les milieux plus défavorisés, c'est encore plus... c'est désastreux, parce que la vulnérabilité est plus grande parce qu'il y a plusieurs facteurs qui s'accumulent, et c'est prioritairement envers ces enfants-là qu'il faudrait porter nos initiatives dans le futur, en sachant très bien que, si on investit tôt... et ça, c'est tout à fait bien démontré, probablement que tout le monde qui ont circulé ici vous l'ont souligné. Au plan scientifique, c'est super bien démontré que cet investissement-là, il permet au cerveau des petits enfants de se développer de façon plus constante, de façon plus importante en termes de volume mais en termes aussi de raffinement du cerveau, qui permet de vivre une vie plus pleinement, d'utiliser ces outils et ces moyens, d'avoir l'inhibition qu'il faut pour ne pas tomber dans la délinquance, la drogue ou autre chose, d'avoir les outils pour rentrer à l'école préparé et de pouvoir réaliser ses rêves. Ça, c'est très clair maintenant et c'est appuyé au plan scientifique. Donc, cette initiative-là est particulièrement intéressante pour tous ceux qui sont préoccupés par le développement des jeunes enfants du Québec.

Ce qu'on souhaite, dans un deuxième temps, c'est que ça puisse se faire avec une forme de mobilisation terrain, qu'on appelle. On appelle ça mobilisation du milieu, mais la vraie entité, c'est la mobilisation terrain. Ça veut dire le milieu communautaire, c'est sûr, mais les établissements, les systèmes locaux, les écoles, la police, les CLSC, les centres jeunesse, comme on fait en pédiatrie sociale, mais particulièrement les parents, les familles. On oublie souvent que les familles sont au centre de tout ce qui se passe autour de l'enfant, c'est le premier intervenant, et, nous, on est tous là en appui à la famille pour supporter l'enfant dans son développement.

Puis, en plus, c'est clair que c'est au niveau terrain que se trouvent les solutions. Et il n'y a pas de solution qui devrait, jamais, venir d'en haut sans mobiliser les familles autour de ces concepts-là. Il faut que les projets, aussi, prennent la couleur des milieux, si on veut que les impacts sur les petits enfants de toutes les actions qu'on peut entreprendre puissent se réaliser.

La pédiatrie sociale, c'est un concept qui est assez utilisé depuis quelques années, qui est assez galvaudé aussi, parce qu'il y a plusieurs personnes maintenant qui disent faire de la pédiatrie sociale. Nous, on appelle ça la pédiatrie sociale en communauté justement parce qu'elle est centrée sur la mobilisation, et plus que la mobilisation, l'«empowerment», le pouvoir qu'on suscite auprès des familles d'agir auprès de leur enfant, seules ou avec aide. Et c'est un concept très particulier qui donne vraiment la parole d'abord aux familles, même si c'est des familles qu'on juge incompétentes, ou inappropriées, ou délinquantes, ou ce qu'on veut. Et, chose assez étonnante, c'est que ce type d'approche mobilisatrice des familles permet aux familles de retrouver le pouvoir qu'ils ont besoin pour faire fonctionner leur famille et assurer le développement de leurs enfants. La pédiatrie sociale est vraiment basée là-dessus et s'applique à définir des modèles d'action intégrés, intensifs, tout ce qu'on sait qui marche. C'est des choses qui ont déjà été prouvées partout. Mais de le faire avec la famille dans la communauté, donc des actions très concertées, très locales et très liées à l'entourage de l'enfant, qui ciblent essentiellement les besoins globaux des enfants et les droits des enfants.

Alors, notre modèle d'action est toujours basé sur une évaluation des besoins globaux des enfants avec la famille et de plus en plus avec l'ensemble des systèmes. Dans nos cliniques, il y a toujours des gens de la DPJ, des CSSS, des écoles, du milieu, de l'entourage de l'enfant, qui viennent participer avec nous pas juste à l'action, mais à l'évaluation des besoins, à la définition des droits... c'est-à-dire à l'établissement des droits bafoués des enfants, sur lequel on peut agir parce qu'on a une convention qui nous permet de le faire. Et le consensus qui est tiré de cette expérience-là permet d'amener des modèles d'action qui font consensus et où le parent devient un participant important même s'il y a des lacunes.

Et ça, c'est un processus qui est tout à fait novateur, dans le sens qu'habituellement les parents que, nous, on voit, c'est des parents souvent en grand état de vulnérabilité aussi, qui transmettent à leurs enfants cette vulnérabilité-là, ces parents-là, habituellement on leur dit: Bien, il faut que tu fasses ci, ça, ça; si tu ne fais pas ça, tu vas être puni, il va arriver telle affaire. Et ça, ça ne marche pas, parce que c'est des gens qui ont tellement été exclus qu'ils se sentent encore exclus, puis il n'y a pas moyen de faire passer des actions autour de ça, même s'ils savent que ça prend toutes sortes d'affaires, pour élever leurs enfants, qu'ils n'ont pas.

Donc, l'approche de pédiatrie sociale est beaucoup, beaucoup centrée sur cette espèce d'apprivoisement et de transfert de pouvoirs ou de mobilisation de pouvoirs des familles. Et ce que ça crée, c'est beaucoup d'accompagnement associé pour les enfants. Alors, quand le parent fait une partie d'accompagnement, il en fait 10 %, 50 %, 100 %, nous, on essaie de venir compenser avec le parent, avec son accord, ce qui manque. Alors, on va créer des modèles d'accompagnement de toutes sortes, pour les devoirs, les loisirs, pour manger, pour mieux se loger, pour être piloté par un adulte. Et ça crée une espèce de mouvement autour de l'enfant qui va porter l'enfant à se développer de façon beaucoup plus harmonieuse.

Et on offre des services globaux de santé à leur niveau, très accessibles, qui permettent d'éviter que les enfants tombent entre deux chaises, comme on voit tous les jours. Donc, on est toujours présents sur la trajectoire de l'enfant au moment où l'enfant a un besoin, que ce soit à l'école, que ce soit en protection, que ce soit en santé physique, que ce soit au plan psychologique, que ce soit dans son besoin, même, identitaire.

La pédiatrie sociale, aussi... l'approche de la pédiatrie sociale en communauté, là, c'est important de le souligner, elle est appuyée maintenant par l'Université McGill et l'Université de Montréal. On est des sites de formation universitaire interdisciplinaire pour les médecins, les pédiatres, les psychologues, les art-thérapeutes, les psychoéducateurs, etc.

Pourquoi la pédiatrie sociale se pointe à une commission comme ça? C'est parce que c'est une approche qui permet d'agir tôt sur... très tôt en fait, là, dès que l'enfant a un besoin, sur la trajectoire des enfants. Elle se fait avec la famille, en interrelation avec la famille et en interrelation avec le milieu, dans un contexte d'approche globale et harmonieuse et dans un modèle innovateur qui est toujours centré sur les besoins non comblés et les droits bafoués, ce qui nous permet de toujours créer un modèle d'action adapté à chaque enfant et de développer les services en conséquence. J'accélère un peu pour rester dans mon temps.

n(15 h 40)n

Je veux juste vous dire aussi que le développement de la pédiatrie sociale est amorcé au Québec, c'est-à-dire qu'on a deux centres importants à Montréal, qui sont les centres de formation, d'expertise et d'innovation. Et il y a déjà des nouveaux centres en émergence à travers le Québec, et ce sont des centres qui sont basés dans les communautés, souhaités par la communauté. Ça peut être un organisme communautaire qui décide de faire de la pédiatrie sociale. Gatineau, c'est la DPJ qui a décidé de mobiliser les forces pour développer un centre de pédiatrie sociale, en complémentarité avec leurs services. Donc, le modèle est très, très souple, adapté aux besoins locaux et pas un modèle McDonald, c'est un modèle de duplication à partir des besoins locaux, qui donnent la couleur locale au modèle de pédiatrie sociale.

L'objectif est clair, là, c'est vraiment d'assurer et de desservir l'ensemble des enfants vulnérables du Québec dans un avenir de cinq à 10 ans. Nous, on pense que la pédiatrie sociale est un des fils conducteurs importants qui pourrait nous amener à dépenser ce fonds-là dans une perspective de soutien aux enfants vulnérables du Québec. On a fait les preuves, depuis quelques années, que ce modèle-là est ancré dans les communautés, mobilise les communautés, est porteur d'un potentiel de créer ce mouvement-là autour des enfants. On le voit à partir de la reconnaissance médiatique bien sûr, mais même publique, populaire. À la guignolée, on est partis, il y a cinq ans, de... La guignolée, qui est un appui populaire monétaire important, il y a cinq ans, on a ramassé 1 600 dollars; cette année, on a ramassé près d'un demi-million de dollars, par des gens qui viennent donner... par des enfants qui viennent donner leur banque de sous noirs. Et ça, c'est une reconnaissance importante d'un mouvement qui fait du sens pour la population aussi.

La pédiatrie sociale est donc un des fils conducteurs, d'après nous, du déploiement de l'aide aux jeunes enfants vulnérables du Québec. Et nous... En conclusion, c'est clair, on a une obligation de réussite. Si, d'ici 10 ans, on dépense 4 millions et qu'on ne réussit pas, on a un problème sérieux, et la société québécoise ne s'en relèvera pas, parce que c'est... pendant 10 ans, la quantité d'enfants de 0-5 ans qu'on pourrait adresser avec ce fonds-là... s'attend à ce que, dans 10 ans, on retrouve des enfants qui vont nous remplacer, qui vont utiliser leur plein potentiel, et on va éviter des désastres nationaux comme les enfants qui sont... que 25 à 30 % des enfants ne sont pas prêts à rentrer à l'école à quatre ans, cinq ans parce qu'ils n'ont pas ce qu'il faut, ils n'ont pas les outils nécessaires. Et on ne pourra pas nous reprocher de ne pas avoir investi en petite enfance, en prévention de tous les problèmes sociaux qui affectent les enfants et les familles aujourd'hui.

Donc, c'est une espèce de cri du coeur qui veut qu'on fasse bien avec cet argent-là, avec cette mobilisation-là du gouvernement avec le privé, que nous saluons encore une fois, et nous voulons être partie prenante de ce processus-là. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Dr Julien. Je suis prêt maintenant à commencer la période d'échange avec les membres de la commission. Je vais céder la parole au ministre de la Famille.

M. Tomassi: Merci beaucoup, M. le Président. M. Julien... Dr Julien, bienvenue à cette commission qui se veut importante pour la suite des choses. La mise en place d'une consultation particulière permet aux groupes de venir discuter et venir parler des bonifications qui peuvent être apportées à un projet de loi. Nous l'avons fait depuis les deux dernières journées, nous finissons aujourd'hui avec vous, M. Julien, et COSMOSS, que nous allons avoir le plaisir d'entendre un peu plus tard.

Vous nous avez parlé de votre fondation, de la promotion de la pédiatrie sociale. À ce que je comprends de vos remarques, vous avez mis en place un processus qui est très novateur dans cette mobilisation des communautés, faire en sorte que tous les intervenants d'une même communauté prennent cette volonté de venir en aide aux enfants de 0-5 ans. La mission, l'objectif principal du fonds, qui est celle de s'occuper des enfants... du développement des enfants de zéro à cinq ans en milieu défavorisé... ou défavorisé, là... Parce que je veux que ce soit clair, là, il y a des groupes qui sont venus nous dire, lors des auditions, qu'on catégorisait certains endroits, là, de territoires, ce qui n'est pas indiqué nul part ni dans le projet de loi ni dans le protocole, que le député attend impatiemment. C'est surtout pour venir répondre à un besoin fondamental, puis je pense que vous le dites si bien dans vos explications.

Je voulais peut-être vous entendre un peu sur cette question de mobilisation, qui semble être des fois un peu problématique vis-à-vis certains groupes. La volonté de la fondation et du gouvernement, c'est que cet argent-là ne soit pas dépensé mais soit investi pour le bien-être des enfants, et vous le mentionnez si bien dans vos propos. Alors, cette mobilisation que vous mettez en place, je sais que vous avez... un des endroits étant d'Hochelaga-Maisonneuve, et l'autre, si je ne me trompe pas, c'est dans Notre-Dame-de-Grâce ou Côte-des-Neiges. Côte-des-Neiges. Vous avez fait mention qu'il y a d'autres endroits en province qui attendent la mise en place de votre fondation.

Alors, je voudrais peut-être vous entendre sur cette mobilisation que vous créez. Elle se passe comment, la collaboration que vous avez avec les intervenants? Est-ce que les regroupements communautaires, les groupes communautaires, les organismes communautaires famille, que ce soit à Montréal, les initiatives 1, 2, 3, GO! ou les autres intervenants, là, qu'on a eu le plaisir d'entendre, est-ce que ces gens-là participent avec vous à la mise en place de ce processus?

M. Julien (Gilles): Absolument. En fait, une des caractéristiques de l'approche de pédiatrie sociale, c'est une approche réseau. On n'a jamais eu la prétention de faire ça tout seul. Quand s'est développé le projet d'Hochelaga, il y a plusieurs années, ça a été un projet qui s'est développé à partir de très peu finalement, où... moi, j'ai toujours été affilié à un CLSC, sur la Côte-des-Neiges, Hochelaga ou d'autres CLSC dans la province, même à Gatineau, à Hull à l'époque, j'étais toujours rattaché à un CLSC pour pouvoir agir de cette façon-là dans la communauté.

Comme ça n'allait pas assez vite à mon goût, je l'ai fait, toujours associé à un CLSC, mais de façon un petit peu plus... impliqué directement dans la communauté. Dans Hochelaga, ça s'est concrétisé par un noyau finalement qui a mobilisé la communauté progressivement et en faisant des actions qui portaient et qui tiraient l'attention de la population, et c'est la population qui progressivement est venue mettre des morceaux, spontanément. Il n'y a pas eu de tables de concertation ou d'histoire comme ça, c'est qu'on a fait une action, des visites à domicile, des visites à l'école, et tranquillement les gens disaient: Oh! Moi, je veux collaborer à ça, ça fait du sens, et il y a un propriétaire de maison qui nous offrait un local, il y a l'école qui nous passait une pagette, et le voisinage qui nous appelait pour aller voir leurs enfants. Donc, ça s'est créé sur une forme un peu spontanée et progressive.

Quand on a créé Côte-des-Neiges, sept ans plus tard, là on l'a fait de façon beaucoup plus structurée parce qu'on avait avancé dans le modèle, le modèle était mature. Et, dans Côte-des-Neiges, qui est un milieu complètement multiethnique pratiquement, on avait un enjeu majeur. On se disait: Est-ce que cette approche-là, qui fait du sens dans la population québécoise de souche, va pouvoir s'appliquer dans une population multiethnique? On faisait le pari que oui, mais ce n'était pas simple. Même M. Chagnon hésitait à investir parce qu'il se disait: Ce n'est pas sûr qu'ils vont réagir de la même façon. Mais effectivement il y a eu le même consensus, mais là c'est les groupes communautaires du quartier, il y en a plusieurs, qui progressivement se sont associés à nous. On a supporté certaines de leurs initiatives, ils nous ont apporté certaines des leurs, et je peux vous dire qu'actuellement Côte-des-Neiges fonctionne à à peu près 50 % des services offerts par notre centre et 50 % de services complémentaires offerts par un groupe d'organismes communautaires du quartier avec lesquels on est en interrelation étroite.

Et ce que c'est devenu, ça s'appelle le Centre de services préventifs à l'enfance, c'est vraiment ce qu'on souhaitait, c'est qu'il est créé un mouvement progressif où est venu adhérer non plus seulement, là, juste les familles du milieu, mais des groupes communautaires: le CLSC, forcément; le Centre jeunesse Batshaw est maintenant associé à des projets d'envergure avec nous dans Côte-des-Neiges. Et ça se crée... qu'on pense à l'idée du mouvement en spirale, là: on fait un petit bout; les gens viennent, ils nous aident à faire un autre petit bout. C'est vraiment le processus. Mais ça ne s'est pas fait sur le modèle traditionnel des tables de concertation ou des espèces de consensus obligatoires de la communauté, parce que ça, c'est lourd, ça prend du temps. J'avais vécu ça dans d'autres organismes, puis ça n'arrive pas à déboucher.

n(15 h 50)n

Nous, on l'a fait sur une méthode très, très souple où les gens peuvent venir, ils sont toujours les bienvenus, autant les familles que les organismes communautaires. Nos processus d'évaluation, quand on fait une évaluation d'enfant, la première fois, c'est autour d'une table de cuisine, et tout le monde est invité. Il vient des gens de la DPJ, des gens du CLSC, des gens des écoles, les parents peuvent inviter leurs amis, leurs voisins. Il y a vraiment, là, même au niveau clinique, cette espèce de consensus là qui crée le mouvement, mais ça se fait avec la communauté et progressivement. On ne l'impose pas, on dit: On va offrir un service aux plus démunis que vous ne rejoignez pas, parce qu'on a une proximité importante avec les familles, mais ça crée une adhésion qui est toujours renversante.

Moi, ça fait 20 ans, je n'en reviens jamais, et, tous les jours... Même, tantôt, au centre d'achats, ici, à Québec, là, Place Laurier, tu sais, il y a un couple de personnes âgées qui me suit: Êtes-vous bien le Dr Julien? Je dis oui. Ah! on vous a envoyé des sous, on vous suit. Ça crée ça, là, ce consensus-là autour des enfants. Alors, c'est sûr que mon souhait, c'est que le fonds marche sur ce processus-là, parce que, écoutez, on vient d'avoir... C'est comme je vous disais, le village vient d'avoir un héritage qui dit: Bien, vous allez maintenant pouvoir agir comme vous voulez avec vos enfants, puis on vous en donne... vous avez la capacité, puis vous allez créer vos outils. C'est ça, le concept. Je ne sais pas si ça répond à toutes vos questions?

Le Président (M. Kelley): M. le ministre.

M. Tomassi: Oui, oui, oui, M. Julien, amplement. Vous répondez quoi à ces groupes qui ont certaines réticences à la venue du fonds dans la mission, disons, la mission... même si la mission du fonds et celle du ministère est la même en bout de ligne, parce que, si la mission n'était pas la même, le gouvernement n'aurait pas investi et n'aurait pas adhéré à la volonté de créer le fonds pour venir en aide aux jeunes enfants. Pour vous, là, vous qui faites affaire avec la fondation, vous qui adhérez actuellement au fonds et que vous voyez que la volonté est là pour la mise en place de ce fonds pour venir en aide aux enfants, là, vous leur répondez quoi?

M. Julien (Gilles): Moi, j'ai développé une entreprise sociale. Pourquoi? J'ai été dans plusieurs hôpitaux puis au moins 20 CLSC du Québec, j'ai travaillé à la DPJ de Montréal, DPJ de Gatineau, j'ai fait les systèmes. Et, dans tous ces systèmes-là, j'avais les mains un peu liées, c'est compliqué. Il y a des horaires, il y a des syndicats, toutes sortes d'affaires, et on ne peut pas bouger vite, alors qu'avec les petits enfants, si on ne bouge pas vite, on perd l'enfant, ce n'est pas compliqué. Donc, il faut apprendre à bouger vite. Et le modèle qu'on a développé, c'est un modèle d'entreprise sociale. Et c'est sûr qu'il y a 10 ans, quand M. Chagnon est venu me visiter, c'est un entrepreneur privé, et il y a eu des affinités claires de modèles. C'est-à-dire, M. Chagnon avait une entreprise privée capitaliste qui fait de l'argent, moi, j'avais une entreprise sociale, capitaliste ou autre, elle n'est même pas caractérisée, qui fait du service aux enfants.

On a un produit à vendre, on a un produit à livrer et on a développé sous ce modèle-là. et c'est, jusqu'à deux, trois... il y a deux, trois ans, il n'y avait aucun investissement gouvernemental dans mon entreprise. C'était uniquement populationnel et fondation privée, sinon je n'aurais pas pu le développer de cette façon-là et de façon aussi puissante, finalement. Et, pour moi, le partenariat... et maintenant il y a au moins trois ministères actuellement qui nous supportent, et ce modèle-là public-privé, pour moi, est très gagnant si l'objectif est clair, si l'objectif est que dans 10 ans il n'y a plus d'enfants qui ne sont pas prêts à rentrer à l'école, puis qu'ils naissent tous égaux, qu'ils ont accès aux mêmes outils de développement, là on va être gagnants. Mais je pense qu'avec une méthode comme ça il y a des grosses chances de réussite.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme St-Amand: Merci, M. le Président. Dr Julien, c'est vraiment un privilège de vous avoir avec nous aujourd'hui et ça fait vraiment du bien d'entendre parler du bien des petits enfants. Sincèrement, là.

Moi, je voudrais savoir, en région, la pédiatrie sociale, est-ce que ça se peut, d'une part? Est-ce qu'on a des organismes pour faire ça? Et l'autre chose que je voudrais savoir, c'est: Si oui, quelles seraient les recommandations, si on voulait... Parce qu'il y a une volonté qui s'est dégagée ici depuis plusieurs jours de vouloir travailler à partir des organismes du milieu, existant déjà, en tenant compte de la coloration de chacune des régions, parce qu'on sait que les besoins ne sont pas toujours nécessairement les mêmes, ou la réalité n'est pas toujours la même. Mais est-ce qu'on peut le faire à partir des organismes existants? Et puis, qu'est-ce que vous auriez comme alignement à nous donner par rapport à ça?

M. Julien (Gilles): C'est drôle, parce que, ce matin, j'étais à Saint-Georges de Beauce, je donnais une conférence à l'hôpital, là, pour les médecins, les gens des CLSC, la DPJ, du communautaire, et ils me disaient: Bien, c'est un modèle urbain. Ce n'est pas un modèle urbain, c'est un modèle... Montréal, c'est gros, là, mais, vous le savez, c'est un paquet de villages, Montréal. Hochelaga, c'est un village, Côte-des-Neiges, c'est un village, puis il y a des villages dans le village. C'est partout pareil, c'est juste la distance entre les villages qui change. Ça, ce n'est pas trop compliqué.

J'ai travaillé dans la Beauce, j'ai travaillé dans la région de Montmagny, dans la région de Gatineau, je connais ces réalités-là. Et notre modèle est facilement applicable en région. D'ailleurs, Trois-Rivières est le premier à avoir souhaité développer un projet de pédiatrie sociale, avec la Maison coup de pouce. La Maison coup de pouce, ça fait 20 ans qu'ils sont dans un HLM, dans un milieu très sensible de Trois-Rivières, et ils sont venus nous voir en disant: Nous, on est intéressés à développer l'approche. On a travaillé avec eux. Maintenant, il y a Maternaide qui est associé, deux groupes communautaires. Ce n'est jamais simple, hein, les groupes communautaires, non plus, là. Il ne faut pas rêver en couleurs, les groupes communautaires, ils sont en compétition, ils ont des mandats. Il y en a beaucoup. La concertation n'est pas facile. Donc, on a vécu ça à Trois-Rivières. Mais on s'est vus samedi soir, et c'est clair que, là, le consensus, il est là. Les groupes communautaires vont travailler ensemble. Il y a déjà un pédiatre qui circule dans trois organismes communautaires, qui fait de la pédiatrie sociale.

Dans la Beauce, on allait plus loin. On disait ce matin... Ils ont rapidement été enchantés par le modèle puis il y a déjà des gens du CLSC puis de l'hôpital qui se mobilisent. Ça va vite, ces systèmes-là, quand il y a des gens qui se mobilisent. Là, on s'est dit: Comment on va desservir les petits villages? Il y a une infirmière, elle dit: Moi, j'ai à peu près 20 villages, ça n'a aucun bon sens. Mais ça, c'est possible. En pédiatrie sociale, ça prend une base. Après ça, pourquoi on ne crée pas d'unités mobiles? Tu sais, ils font Prévost Car, eux autres. Je dis: On va voir le président de Prévost Car, on lui demande un autobus, on la transforme en clinique mobile, puis on va faire les villages. C'est tout. Ce n'est pas compliqué.

Mais c'est ce type d'accès là qu'il faut donner à toutes les populations, même dans les rangs. C'est un vieux rêve, l'histoire de l'autobus. Je l'ai ramenée ce matin, mais on avait pensé à ça dans la région de Gatineau il y a 15 ans, pour les enfants handicapés avec besoins spéciaux, que la physiothérapeute, l'ergothérapeute puissent se déplacer dans les villages vers les enfants et non pas les enfants qui viennent à l'hôpital attendre des mois, des années avant d'avoir des services, c'est nous qui devons nous déplacer.

C'est un gros changement d'attitude que je mets de l'avant, puis ça s'appliquerait de façon excellente. Ce n'est pas une approche compliquée, là, mur à mur, c'est une approche souple. Il s'agit que des personnes se mobilisent, qu'on mobilise les gens du milieu. Dans chaque village, il y a sûrement moyen de ramasser deux, trois personnes qui vont assurer la continuité.

Nous, on fonctionne avec du personnel clinique, mais des centaines de bénévoles dans nos deux centres. On refuse des bénévoles. Les gens veulent s'impliquer: les personnes âgées, des étudiants universitaires, ils veulent venir faire quelque chose pour les enfants. On a cette capacité-là d'attirer, pourquoi ne pas utiliser ça? Là, on démultiplie nos forces, ça coûte beaucoup moins cher, et l'investissement finit par produire des résultats sérieux.

Clairement, en région... j'ai hâte qu'on s'attaque plus aux régions. À Gatineau, on va commencer en septembre. Trois-Rivières est déjà en marche. La Beauce, ça va bouger vite. À Montréal, on en a une couple d'autres. Québec, c'est lent, ça prend du temps, Québec, ça prend des consensus, mais ça va venir. Mais Trois-Rivières, c'est déjà en branle, et c'est un beau modèle.

Mes réponses sont trop longues, M. le Président?

Le Président (M. Kelley): Non, non, pas du tout, pas du tout. C'est très intéressant. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: Merci, M. le Président. Dr Julien, c'est très intéressant comme propos, et vos commentaires sont également rafraîchissants.

Vous avez dit que nous avons un devoir de résultat, avec des ressources de 400 millions sur une base de 10 ans. Afin d'assurer ce résultat, qui en fait... on vise que nos enfants, au maximum, puissent naître égaux puis grandir en santé également, selon vous, quelles seraient les activités prioritaires à considérer par ce fonds pour justement aider ces enfants-là?

n(16 heures)n

M. Julien (Gilles): Je parlais de fils conducteurs. Je pense qu'avec un fonds comme ça... C'est drôle, il y a des gens qui m'ont dit: Ah! 400 millions, ce n'est pas tant que ça, dans le fond. Moi, je trouve ça énorme. 40 millions par année, bien investis, si on manque notre coup, là, c'est vraiment l'échec du Québec, pour moi. Heureusement, je vais être plus vieux puis peut-être que je ne pourrai pas critiquer de la même façon. Mais on a ce devoir-là d'arriver à un résultat majeur. Pour ça, ça nous prend des fils conducteurs. Des fils conducteurs, c'est des projets qui fonctionnent, des projets qui créent de l'adhésion et qui créent du mouvement.

Parce qu'il y a beaucoup de choses à faire. La prétention qu'on a, nous, en pédiatrie sociale, c'est de créer dans un secteur donné, relativement restreint, une gamme de services complète aux enfants les plus vulnérables, auxquels ils vont avoir accès totalement. Donc, il n'y a pas de problème d'accès, à cause d'une méthode. La méthode, c'est simple, c'est de l'apprivoisement et c'est de la présence sur une trajectoire de l'enfant, du départ jusqu'à l'arrivée. Ça a l'air gros aussi, mais on réussit à faire ça à cause de la proximité. Si un enfant est en danger, peut-être... le parent va souvent venir nous le dire. Hier, j'ai fait une clinique incroyable. Là, j'ai une mère qui m'amène sa petite de cinq ans qui a été abusée sexuellement. Il y en a un autre, il vient de faire une tentative de suicide. Ils ne trouvent pas preneur. Ils vont à l'hôpital, l'hôpital n'a pas ce qu'il faut pour les recevoir, pour les garder, ils rassurent tout le monde puis ils se croisent les doigts pour ne pas qu'il y ait récidive. Bébé, la petite se fait abuser sexuellement; la mère ne croit pas au système, mais elle veut protéger sa fille. Le signalement est déjà fait, mais ça prend deux, trois jours. Elle veut tout de suite. Elle nous l'amène. On est capables de faire toute l'évaluation, il n'y a pas besoin d'aller à l'hôpital subir tous les autres traumatismes d'un examen par des étrangers, on se connaît, et on est capables de mettre en place tout un système rapidement. Puis elle va y adhérer. Elle n'ira pas à l'hôpital, elle ne veut pas y aller. Et ça devient d'une complexité incroyable.

Dans le milieu... ou ça va être un voisin qui va nous dire: Tu devrais peut-être aller faire un tour, cet enfant-là est en danger. Mais là, on travaille, nous... on ne travaille pas isolés, là. La DPJ est au courant quand il y a des cas d'abus physique, d'abus sexuel. La semaine passée, c'est une travailleuse sociale de la DPJ qui m'amène une mère de 31 ans qui est avec sa petite fille de 18 mois. Elle vient d'apprendre qu'elle l'a brassée. Il y a un signalement, il est retenu, mais la travailleuse sociale dit: Cette mère-là est tellement victime, je ne suis pas capable de l'amener à lui enlever son enfant, on va la revictimiser davantage. Qu'est-ce qu'on fait? Alors, on a des réponses à ça. C'est sûr qu'on va protéger l'enfant, on a d'autres outils, tout ça, en accord avec la DPJ.

On a maintenant des outils puissants. On a un outil qui s'appelle le Cercle protecteur de l'enfant, qui est en expérimentation à McGill, qui est fait par Mme Trudel, qui est en arrière de moi, qui est une avocate-médiatrice qui travaille chez nous à plein temps et qui a monté ce projet du cercle qui permet de s'asseoir autour de l'enfant avec la famille, la DPJ, l'école, tous ceux qui sont impliqués, et de faire un consensus autour d'une problématique grave: Qu'est-ce qu'on va faire avec ça? Est-ce qu'on va le signaler? Est-ce qu'on va retenir le signalement? On discute de ça ensemble. Est-ce qu'on va le placer? Est-ce qu'on va le faire adopter? Et, quand on amène ça au tribunal avec la DPJ, là il y a un consensus qui est déjà fait dans le milieu. C'est très, très puissant. Puis, ce modèle-là, déjà l'évaluation... les évaluateurs sont un peu renversés des résultats et vont le publier dans deux ans. Mais on va pouvoir l'appliquer à l'échelle du Québec.

Donc, c'est... il y a beaucoup, beaucoup à faire, mais il y a beaucoup de choses connues. Qu'est-ce qu'on doit faire? On le sait, ce qu'on doit faire. Il faut juste assurer la présence et l'accessibilité. Et toutes les ressources sont là. Puis, quand il en manque, dans des centres comme la pédiatrie sociale, ça mobilise les volontaires, les bénévoles. J'ai des bénévoles qui font de l'aide aux devoirs. Un enfant qui va mal à l'école, l'école ne peut pas lui offrir l'aide aux devoirs, pour toutes sortes de raisons. On va mobiliser un bénévole qui va aller à la maison pour faire ses devoirs. Ça, c'est les enfants pauvres, là. Il a besoin d'un grand ami parce que le père ne veut rien savoir, puis il a des troubles de comportement parce qu'il se fait rejeter par son père, bien le grand ami va prendre la place puis il va faire ce bout-là. Ça change complètement les... Ça ne coûte rien, là. Ça n'a rien coûté, ça, cette affaire-là. Sauf qu'il faut mettre la structure en place pour réaliser ces actions-là.

Moi, je suis partisan d'une approche... ça va toujours un peu contre la Santé publique, mais cas à cas. Mais, à la fin de l'année, je viens de faire un drôle de mouvement de santé publique, parce que ça change la vie de centaines d'enfants dans mon quartier qui vont se mettre à réussir à l'école, qui vont être moins délinquants, qui vont persister à l'école puis qui vont être plus en santé, parce qu'on travaille aussi sur les déterminants de la santé. La médiatrice, elle travaille avec les propriétaires pour améliorer les conditions de logement, parce que, s'il y a des moisissures... Moi, je vois l'enfant à tous les mois avec des troubles respiratoires... Je suis tanné de donner des antibiotiques. On va aller travailler avec le propriétaire sur une base de médiation pour changer le logement.

Donc, toutes des actions comme ça. Il y en a, des groupes qui font du logement, mais ce n'est pas connecté comme ça, là, avec tout un système qui est capable de faire les liens, capable de faire de la pression, qui est capable, au besoin, d'aller en litige si le propriétaire ne veut pas bouger. Ça fait que ça va loin.

Je vais un peu loin, là, mais je vous explique comment on fonctionne dans le quotidien. Le quotidien, c'est ça, là. Vous venez de vivre une journée de pédiatrie sociale. Mais là on est une équipe, il y a des bénévoles, on est capable d'appeler, on a du répit, on a plein d'affaires.

M. Chevarie: Question supplémentaire, M. le Président?

Le Président (M. Kelley): Très, très brièvement, 30 secondes.

M. Chevarie: C'est ça. On a reçu plusieurs groupes ou organismes lors des audiences de la commission, et certains privilégient plus une approche universelle auprès des enfants, sans distinction des caractéristiques des enfants, ou des familles, ou des problématiques. Le fonds vise principalement des enfants vivant en situation de pauvreté. J'aimerais avoir votre opinion à cet effet-là.

M. Julien (Gilles): Les mesures universelles, on est tous pour, tu sais, on veut que tous les enfants du Québec aient accès à tous les services, sans distinction de race, de classe, de tout ce qu'on veut. Ce n'est pas comme ça que ça marche, la vie. C'est sûr que les enfants de Westmount, j'en ai, des enfants de Westmount de temps en temps, parce qu'on offre tellement des bons services qu'il y a des gens de Westmount qui viennent, sur la pointe des pieds, chercher nos services. On ne les refusera pas si l'enfant est vulnérable, puis il l'est souvent, ce n'est pas une question, là, de pauvreté monétaire nécessairement, sauf que, si on a un mouvement à faire puis si on a des choses à prouver, au Québec, il faut passer par les enfants les plus défavorisés.

Mais là, je ne sais pas si vous vous rendez compte, mais c'est 30 % de nos enfants. Regardez les statistiques scolaires, c'est probablement... un quartier comme Hochelaga, c'est presque 50 % de nos enfants dont la vie est basculée. J'ai des décrocheurs en maternelle, dans Hochelaga, à la Côte-des-Neiges aussi, moins, mais, dans un milieu comme Hochelaga, là, qui est assez typique, le taux de décrochage est énorme. Le taux... Dans une journée, là, 75 % des enfants que je vois ont déjà été abusés sexuellement. Si ce n'est pas un drame national, là, on repassera! Et il y a beaucoup de violence physique, il y a beaucoup de... Vous allez dire que c'est des parents stigmatisés par la société. Oui, c'est sûr, ils sont complètement exclus, ils ne croient plus en rien. Puis ce n'est pas des anecdotes, là, c'est ma clientèle de tous les jours. Je fais quatre jours de 12 heures, moi, de clinique par semaine, j'en vois. C'est typiquement ça, et ces gens-là ne méritent pas ça, et surtout ces enfants-là ne méritent pas ça. Plus on va stigmatiser les parents, plus les enfants vont être stigmatisés.

Donc, il faut créer un autre modèle pour 30 % de nos enfants du Québec, et, si on réussit avec ces 30 % là, là, on vient de baisser sérieusement la délinquance, la criminalité, le réussite scolaire et le rêve de vie de toute personne. Ils en ont, des rêves, mes enfants, là, ils sont pleins de rêves. Ils n'ont même pas l'impression qu'ils sont pauvres, puis ils ne mangent pas tout le temps. Là, il faut commencer par eux autres. Les autres suivront, mais ils ne sont jamais exclus en cours de route, mais notre modèle, il est là d'abord pour les enfants les plus vulnérables.

J'expliquais, ce matin, la vulnérabilité, je vous l'ai dit au départ, elle est partout. L'enfant qui a un père médecin puis une mère avocate, on voit ça souvent, il n'est pas nécessairement moins vulnérable; c'est un peu plus caché, c'est plus difficile d'accès, mais là, l'accès est plus difficile, de l'intervention vers les parents. Nous, à partir du moment où on croit aux parents... je ne veux pas m'étendre là-dessus, mais notre évaluation, c'est à peu près une heure, la première fois; elle est multidisciplinaire, et tout. Le parent, la plupart des parents repartent en disant: C'est la première fois qu'on m'écoute, c'est la première fois que j'ai l'impression d'être quelqu'un, puis c'est la première fois qu'on me dit que j'ai une force. Parce qu'une de nos techniques, c'est de trouver les forces. On n'en trouve pas une, on en trouve plusieurs, puis on mise sur les forces. Puis là ils essaient de me raconter toute leur vie, puis je dis: Non, j'en ai assez entendu, je ne veux plus en savoir. Tout le monde sait ça, là, tu es assez victimisé comme ça, je ne veux plus en entendre parler. Je veux savoir c'est quoi, les forces. C'est ça, la méthode, c'est aussi simple que ça. Et là, à partir de là, c'est de la mobilisation. Puis là ça mobilise la rue, puis le voisin, puis le quartier, puis l'homme d'affaires, puis c'est comme ça que ça marche. Et ça, c'est clair, je vous le jure, ça fait 20 ans que je le fais, je le vois tous les jours. Je n'ai pas besoin de faire des évaluations compliquées, universitaires, à tour de bras pour montrer que ça marche, ça marche, et ça fait du sens. Mais on va le prouver, on va prouver que nos actions, le cercle protecteur, il va être démontré scientifiquement.

Notre projet d'accès à l'école pour les quatre ans, qui fonctionne à merveille, il est en train d'être évalué par l'Université du Québec. Dans deux ans, vous allez avoir une évaluation sur Accès à l'école. On va les avoir, les preuves scientifiques, mais la preuve populationnelle, elle est là, là, elle est claire.

n(16 h 10)n

Le Président (M. Kelley): En conclusion, parce que je dois retourner à M. le député de Gouin pour poursuivre l'échange avec vous, Dr Julien. M. le député de Gouin.

M. Girard: Merci, M. le Président. À mon tour de saluer Dr Julien pour sa présence en commission parlementaire, pour la qualité également de son mémoire. Je m'en voudrais de ne pas vous dire à quel point Mme Harel, l'ancienne députée d'Hochelaga-Maisonneuve, m'a beaucoup parlé de vous et de votre engagement dans cette circonscription, et Carole Poirier, qui est aussi la nouvelle députée d'Hochelaga-Maisonneuve, qui lui a succédé, aussi m'a beaucoup parlé de votre engagement dans d'Hochelaga-Maisonneuve, donc je veux saluer ce que vous faites pour les enfants et l'impact que vous avez dans Hochelaga-Maisonneuve. Et je comprends que votre objectif, c'est d'étendre votre action un peu partout à travers le Québec, et votre rêve qu'il y ait des interventions sur tout le territoire, dans toutes les régions du Québec.

Ceci étant dit, je veux revenir un peu sur la question que posait le député de Îles-de-la-Madeleine, parce qu'on a reçu hier la Direction de la santé publique, M. Lessard, que vous connaissez sans doute, et lui nous disait qu'à Montréal il y avait actuellement un peu plus de 3 800 enfants qui bénéficiaient, là, du programme des services intégrés en périnatalité puis de la petite enfance. Il y a eu une enquête récente, comme vous le savez, sur la maturité, la maturité scolaire, qui révélait qu'il y avait un certain nombre de voisinages, qu'il y avait un très grand nombre d'enfants vulnérables qui ne sont pas reconnus, dans des quartiers dits défavorisés.

Et le point de vue de la Direction de la santé publique est à l'effet que, si on cible uniquement les quartiers défavorisés, on risque de laisser un certain nombre d'enfants vulnérables, qui vont éprouver des difficultés dans leur vie ou dans leur parcours scolaire. Et, de leur point de vue, il faut qu'on ratisse un peu plus large que les quartiers défavorisés, évidemment, où il y a une intervention ciblée qu'on doit faire, mais, de leur point de vue, il faut élargir, parce que sinon on va laisser un certain nombre d'enfants sans services, qui en auraient grandement besoin, même dans des quartiers qui sont jugés moins défavorisés.

Moi, j'aurais aimé ça vous entendre un peu plus longuement sur le point de vue de la Direction de la santé publique, par rapport à votre expérience comme pédiatre social.

M. Julien (Gilles): Je suis pédiatre social, mais j'ai été impliqué en santé publique pendant des années. J'ai été directeur du Département de santé communautaire de Montmagny, de l'Hôpital Sainte-Justine. J'ai aussi quitté la Santé publique à cause de la lourdeur, à cause aussi du fait qu'à l'époque, aujourd'hui un peu moins, il y avait souvent des grands programmes universels comme ça qu'on essayait d'appliquer... pensez au programme Naître égaux, que le gouvernement avait appuyé d'ailleurs avec raison parce que c'était un super beau programme, mais qui n'est jamais rentré dans les communautés, surtout dans les communautés vulnérables. C'est un beau programme universel qui devait changer complètement la périnatalité au Québec. Naître égaux et Vivre en santé ? j'ai oublié le nom exact, là ? c'est Christine Colin qui avait mis ça de l'avant, qui était sous-ministre à l'époque. C'est un super programme, un super programme évalué qui devait vraiment tout changer, mais il n'a jamais rentré. Je l'ai vu passer à Gatineau à l'époque et dans Hochelaga, où j'étais, et les gens vulnérables n'y croyaient pas. Ça venait d'en haut. C'était compliqué parce que ça venait d'en haut. Et ils n'ont pas réussi l'arrimage avec la population vulnérable. Si on ne s'attaque pas d'emblée à la population vulnérable, on va manquer le bateau encore une fois.

Et l'autre problématique, elle est éthique pour moi, parce que, si on me parle d'une équité sociale... c'est sûr qu'il faut s'adresser à tous les enfants vulnérables, je suis parfaitement d'accord avec ça. Dites-moi que vous allez appuyer la formation d'un centre de pédiatrie sociale à toutes les 10 rues du Québec, je vais vous appuyer, mais là ce n'est pas ça, l'enjeu. L'enjeu, c'est qu'on a une somme d'argent à dépenser, en 10 ans, pour changer le Québec, la façon de faire. Si on commence... Et l'autre chose, c'est que je suis un partisan du «bottom-up», du bas vers le haut. Si on ne change pas la base, on oublie ça, le haut ne peut jamais faire ça. Dans toute mon expérience professionnelle, je n'ai jamais vu de programmes universels qui ont vraiment pénétré et laissé leur marque, surtout pour les plus vulnérables. Donc, il faut vraiment y aller de bas en haut. La pédiatrie sociale, elle s'est créée comme ça. À partir d'une petite business de rien dans Hochelaga, on est en train de changer des choses au Québec en pédiatrie sociale. Et c'est vraiment «bottom up». Et toute ma référence, elle vient de ma clientèle de base.

Donc, oui, la Santé publique a raison de parler de programmes universels, qu'il ne faut pas laisser tomber des enfants. On ne veut pas laisser tomber d'enfants entre deux chaises, mais on a une cible. Il faut se donner une cible. Il faut fonctionner... Tu sais, c'est un fonds partenariat privé-public. Allons-y sur le modèle d'entrepreneurship, où on dit: Si on change 30 % des plus démunis, là, on vient de changer complètement la carte du Québec. Si on essaie de faire le 100 %, je suis convaincu qu'on n'arrivera pas à un résultat aussi puissant que si on change les 30 % les plus vulnérables, qui deviennent subitement non plus des boulets pour la société, mais des gens utiles à la société, en pleine possession de leurs moyens.

Il faut réfléchir sur une base plus entreprenariale. C'est sûr que ça fait bizarre de parler comme ça, là, quand on parle des enfants, parce qu'on a tous une mission, une vocation puis on veut tous bien faire. Mais, si on veut vraiment bien faire, réussir notre coup, il faut vraiment échapper le moins d'enfants possible, mais cibler ceux qui sont déjà perdus.

Tu sais, un enfant qui a un retard global de développement à trois ans, qui est obligé d'attendre deux ans pour être vu à la Clinique de développement à Sainte-Justine, au Montreal Children's, pour faire un diagnostic ? il n'a pas eu de services, là ? qui va attendre un autre deux, trois ans pour avoir des services, ça, c'est comme pas équitable, ça n'a aucun sens, ça n'a aucun bon sens. Cet enfant-là, il est perdu, là, il ne réussira jamais, jamais, jamais. Si on l'attrape à deux ans, les chances qu'on rattrape son retard de développement en tout ou en partie... est très grand. Il faut penser plus ce type de modèle là.

Dans Côte-des-Neiges, on a mis sur pied un système pour les enfants autistes. Moi, je vois deux enfants nouveaux autistes par semaine, nouveaux, qu'on a à notre clinique de Côte-des-Neiges; on a un problème d'autisme dans Côte-des-Neiges en particulier, et deux nouveaux par semaine. On les voit, nous, habituellement à un an et demi, deux ans. C'est assez précoce. Et on est capables de faire le diagnostic provisoire sur place le même jour, on est capables de mettre sur pied les services le même jour, avec une psycho-éducatrice qu'on a avec nous. Les enfants vont venir déjà dans des groupes d'enfants autistes. On a un regroupement de parents du quartier qui va s'occuper des parents pour les aider à assimiler le diagnostic.

On va faire le diagnostic final. Nous, ça ne presse pas, il y a deux ans... On a besoin du diagnostic final pour qu'ils rentrent à l'école, à quatre ans, dans une classe adaptée. Ça fait qu'on a deux ans pour préparer le diagnostic final. Puis là on a réussi à convaincre le Dr Fombonne, au Montreal Children's, qui est une sommité en autisme, qui a 300 enfants sur sa liste d'attente, qu'il n'y arrivera jamais, il en voit un ou deux par demi-journée, puis c'est compliqué, il vient chez nous signer le diagnostic, puis il repart. On fait ce qu'il faut avant, on fait ce qu'il faut après. On est rendus avec six petites classes autistes avec le système scolaire, quatre ans, cinq ans, dans la Côte-des-Neiges. Donc, nos enfants rentrent à quatre ans dans une classe autiste. On a réussi ça avec le CSPE avec à peu près pas de moyens. Et on fait des camps d'été. Là, les gens veulent nous voir parce qu'on a même un camp d'été, avec le Centre communautaire Côte-des-Neiges, d'enfants autistes.

On est très, très liés, là, avec les autres groupes communautaires pour faire ça. On ne réussit pas ça si on essaie de regarder ça d'en haut puis on veut des mesures universelles, ça ne marche pas. En tout cas, je ne suis pas un partisan de ça.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Le projet de loi, à l'article 1, indique que l'intervention doit se faire auprès des cinq ans et moins. Vous, votre fondation, elle intervient jusqu'à quelle catégorie d'âge?

M. Julien (Gilles): Dans Hochelaga, c'est 0-12, 14 ans. Pour nous, il y a une notion de trajectoire, tu sais. C'est important qu'on soit là dans les moments clés. Les moments clés, c'est la naissance, c'est la transition vers le service de garde, vers un an et demi, deux ans, l'entrée à l'école, à quatre ans, cinq ans, le passage au secondaire. Alors, si on est là... Puis les autres moments difficiles de la vie, là, mais nos grosses étapes, c'est ça. Pour nous, c'est important d'être présents sur le trajectoire tout le temps.

n(16 h 20)n

Dans le même principe qu'on disait tantôt, il faut faire des choix. Dans la Côte-des-Neiges, quand on a ouvert, on a ciblé davantage les 0-5 ans, et on voit aussi les 5-12 ans parce qu'on est très liés au système scolaire. Donc, moi, je visite une dizaine d'écoles à chaque mois, primaires. Donc, on est impliqués avec eux. Mais notre majeur est le 0-5 ans. Dans un choix de société, le faire pour les 0-5 ans, il y a une grande logique et ça fait du sens. On dit, on va d'abord s'assurer que le zéro... C'est comme les vaccins, on va vacciner pour l'hépatite en quatrième année puis on va finir par tous les attraper. C'est exactement ce qui arrive. Là, on dit on va tout voir les 0-5 ans vulnérables, on va finir par tous les attraper. Et c'est là que c'est le plus rentable. Il faut parler de rentabilité.

6-12 ans, ils ont déjà des troubles de comportement; ce n'est pas simple, là, je suis obligé de les médicamenter, l'école en arrache, ils les excluent. Ça coûte une fortune. Les écoles n'ont pas les ressources, ils en ont de moins en moins. Avec la taxe scolaire à Montréal, ils vont nous couper ça encore, ça n'a aucun sens, là, mais c'est un autre débat. Mais, dans le 0-5 ans, on a la chance de changer quelque chose rapidement, parce que le cerveau, il est vite, là, il est mobile. Et toute la stimulation qu'on donne va changer les choses systématiquement. Donc, il y a une logique de système, il y a une logique de société à cibler. Là, on cible 0-5 ans, on cible les plus vulnérables et on surveille comment on va dépenser notre fonds. Et il faut des résultats rapidement, pas juste au bout de 10 ans. Si on fait ça, on est gagnants.

Le Président (M. Kelley): M. le député.

M. Girard: Votre fondation, qui la finance? Et à quelle hauteur la fondation Chagnon finance-t-elle vos projets? Je voulais avoir une avoir une réponse à ces deux questions-là.

M. Julien (Gilles): Bonne question. Au préalable, je voulais juste vous faire remarquer que Mme Harel a été une des supporters de première ligne, même quand on était tout petits et pauvres. Donc, c'est important pour Mme Harel. On lui doit beaucoup de soutien moral, entre autres.

Actuellement, on a trois entités juridiques, là, qu'on est en train de transformer. Il y a AED, l'Assistance d'enfants en difficulté, qui est un centre de services, CSPE, qui est un centre de services dans Côte-des-Neiges, et, depuis deux ans, la Fondation pour la promotion de la pédiatrie sociale. Tout ça va se transformer cette année en Les centres de pédiatrie sociale du Québec, pour pouvoir affilier nos nouveaux centres. Et le financement des deux centres de services... En fait, le développement des deux centres de services a été supporté au départ à peu près intégralement par la fondation Chagnon. Quand M. Chagnon est venu, il y a 10 ans, il a dit... Il a bien vérifié ses affaires, il a vérifié ses mises puis il a dit: Vas-y, développe, je supporte. Alors, il a financé AED au début 100 %, CSPE, 100 %, il y a six ans, et sur un modèle décroissant.

Actuellement, on est à peu près à un financement du tiers de nos centres, la fondation Chagnon, tout le reste vient de différentes autres fondations, il y en a plusieurs. Il y a Fondation McConnell, qui finance le cercle protecteur de l'enfant, là, qui est Alliance droit santé. Il y a d'autres entreprises capitalistes qui financent d'autres projets, et on est très contents de ça. Et la population en finance de plus en plus. Au point qu'on s'est dit que notre modèle de développement de nouveaux centres serait financé éventuellement à 50 % par des fondations privées, des hommes d'affaires locaux, mais sur une base locale. Donc, on veut que 50 % de financement vienne du local, des levées de fonds, La guignolée du Dr Julien qu'on veut appliquer à tous nos nouveaux centres de pédiatrie sociale au même moment. Donc, il y a un financement de 50 % et un 50 %, on l'espère, viendrait du gouvernement sous forme de ? on a déjà des pourparlers là-dessus ? sous forme de prêts de service des CLSC, de la DPJ, éventuellement des écoles.

On a tout ça dans nos deux centres, mais on veut en faire un modèle pour bien camper que le système public québécois est très impliqué dans nos centres de pédiatrie sociale. Ça ne peut pas se faire sans la participation des institutions actuelles du Québec. Donc, notre financement varie comme ça. Mais, avec la fondation Chagnon, c'est en mode décroissant, et M. Chagnon a décidé de subventionner une partie de notre fondation pour le développement. Il finance aussi le réseau de formation de pédiatrie sociale du Québec avec les universités. Donc, il y a une participation importante de la fondation Chagnon dans le modèle de pédiatrie sociale, et c'est pour ça que j'étais content que M. Chagnon, en plus, s'implique dans le 0-5 ans avec le gouvernement du Québec de cette façon-là.

Le Président (M. Kelley): J'ai une demande d'intervention de votre collègue. Alors, il reste à peu près quatre minutes.

M. Girard: O.K. À ce moment-là, je vais y aller rapidement, là. Si je comprends bien, la fondation Chagnon finance directement votre fondation sans intermédiaire, par une société de gestion, vous avez négocié directement, vous, comme entrepreneur, disons, social, et M. Chagnon, vous avez négocié une entente. Vous nous dites dans votre mémoire que vous souhaitez que les enfants de toutes les régions puissent bénéficier des services de la pédiatrie sociale, que vous voulez le développer, notamment dans un certain nombre de régions plus particulièrement, vous voulez ouvrir des nouveaux centres.

Donc, si je comprends bien, vous vous attendez à ce que la société de gestion créée par ce projet de loi finance votre développement à nouveau. Donc, vous allez recevoir de l'argent de la fondation Chagnon actuellement par l'entente que vous avez négociée et vous souhaitez aussi que la fondation Chagnon et le gouvernement, à travers l'autre fondation, à travers la société de gestion, financent également vos projets pour que vous puissiez vous développer, là. Je comprends bien, un peu, vos attentes, là?

M. Julien (Gilles): Bien, essentiellement, le soutien financier qu'on souhaite, c'est que, par exemple, le centre de pédiatrie sociale de Trois-Rivières, qui fait déjà un consensus important, ou à Gatineau, ou ailleurs, fait une demande à la société de gestion. Il devrait y avoir, à la société de gestion, cette espèce d'idée qu'il y a un fil conducteur qu'on devrait privilégier. C'est clair. Il y a une attente que la société de gestion soutienne encore, dans sa démarche, des fils conducteurs. L'idée, c'est qu'il n'y ait pas de saupoudrage ici et là, là, qui fait que le fonds soit dilué. L'idée, c'est d'avoir des fils conducteurs. La pédiatrie sociale est un fil conducteur, elle a été appuyée par la fondation Chagnon depuis le début.

Je suis fier de ça, on a réussi à démontrer quelque chose d'intéressant qui est clairement un fil conducteur. C'est sûr qu'on s'attend à ce que le 400 millions tienne compte... enfin que la société de gestion du 400 millions tienne compte de ce fil conducteur là, et, quand Trois-Rivières, Gatineau ou Québec va dire: On a besoin d'un fonds pour nous supporter en pédiatrie sociale pour les 0-5 ans, qu'ils soient pris en considération particulièrement.

Le Président (M. Kelley): Autre question, le député de Groulx.

M. Gauvreau: Je suis très triste. J'ai travaillé en protection de la jeunesse depuis plus de 20 ans, Dr Julien, vous allez comprendre que je suis ce que vous faites depuis fort longtemps. Je vais me permettre une mise en garde: Lorsqu'on évalue si on va signaler en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, ça veut habituellement dire qu'on a déjà les deux pieds dans l'article 39. Je vous mets en garde là-dessus.

Sur le saupoudrage ? je vais me résumer à ça ? j'essaie de comprendre. Parce que, dans les régions dites couronnes, ce qui existe, ce sont des tables, et il n'y a rien d'autre. Quand je dis «rien d'autre», habituellement pas de pédiatres, surtout pas de pédopsychiatrie, où, à peu près partout à l'extérieur de Montréal et de Québec, il faut attendre jusqu'à quatre ans avant de penser recevoir des services, alors l'enfant, il est déjà exclus dès le départ. Il existe déjà des mécanismes existants finalement, qui sont habituellement des tables de concertation 0-5 ans. Et vous arrivez avec les différents principes, là, de fils conducteurs de la pédiatrie sociale. Comment pensez-vous ou voulez-vous vous arrimer avec les peu d'énergies qui sont déjà présentes et qui sont nettement insuffisantes à travers le Québec?

Le Président (M. Kelley): Dr Julien.

M. Julien (Gilles): C'est une question complexe. Bien, au préalable, je veux juste vous dire que les rapports avec la DPJ ont changé drôlement. J'ai rencontré toutes les DPJ du Québec la semaine dernière avec M. Hotte, qui m'a présenté comme étant un partenaire important avec eux ? ça a changé! ? et on a des projets conjoints intéressants vraiment pour mobiliser davantage les communautés autour de la protection, sans s'investir de porteurs de la loi, là, c'est clair. Quand je dis «on regarde ça ensemble», c'est plus comment... en fait c'est d'assister l'évaluation, plus que d'autres choses, du risque ou du signalement. On est très, très près, maintenant, de la plupart... en fait surtout à Montréal, mais ça a été le cas dans Gatineau à l'époque aussi, on est très près de ce mécanisme-là, et c'est clair qu'on respecte la loi, puis on a un avocat avec nous qui surveille nos faits et gestes pour éviter qu'on s'approprie des choses qui ne nous appartiennent pas. Ça, je veux vous rassurer là-dessus.

Pour ce qui est de la question... là, je...

M. Gauvreau: ...des tables, je parlais de tables, là où il y en a.

n(16 h 30)n

M. Julien (Gilles): Oui, Oui. Écoutez, ce que je peux vous répondre, c'est sûr qu'il y a des grosses lacunes, au Québec, en santé mentale, il y a des lacunes en déficience intellectuelle, il y a des lacunes partout, là, tu sais. C'est devenu tellement lourd qu'il y a plein d'enfants qui tombent entre deux chaises. On n'est plus même capables d'avoir des services de réadaptation pour nos enfants en troubles de développement. C'est désastreux. Donc, il faut repenser. Encore une fois, il faut repenser notre modèle de créer en communauté des services plus intégrés, pas tertiaires, là.

Puis ça aussi, on en discutait à l'hôpital ce matin. C'est sûr que les services tertiaires, on ne peut pas les multiplier à l'infini, mais qu'est-ce qui arrive dans les services? Je vous ai donné l'exemple de l'autisme tantôt. Dr Fombonne, là, il est débordé. Il me dit: Moi, j'en ai 300 à voir. Je ne sais pas comment. En plus, sa psychologue qui fait les évaluations tombe enceinte, il a de la misère à la remplacer, ça va encore retarder. On offre... Nous, on fait de la première, deuxième ligne avec une équipe minimale de professionnels. Notre équipe, là, c'est un médecin, un pédiatre, un art-thérapeute qui fait, je dirais, 90 % de nos besoins psycho. Avec mes enfants qui sont des polytraumatisés, bien on est capables de faire 90 % au moins. Donc, je n'ai pas besoin vraiment beaucoup du pédopsychiatre, à tel... J'en ai un, pédopsychiatre, qui vient dans Hochelaga une journée par mois en consultation. Elle vient juste nous piloter dans des dossiers plus complexes, elle repart.

Le Président (M. Kelley): En conclusion, s'il vous plaît, parce que je dois céder la parole.

M. Julien (Gilles): Mais on vient comme bonifier le tertiaire. C'est-à-dire qu'en faisant tout ça avant le tertiaire n'a pas à se mêler de ça. C'est comme l'urgence de l'Hôpital Sainte-Justine, s'ils ne voyaient pas toute la première ligne, ils pourraient performer puis faire de la troisième ligne comme du monde. Non, mais c'est le même principe. Donc, il faut changer ça parce que jamais on ne réussira à faire voir par les grands spécialistes du monde les petites affaires de rien qui peuvent se régler dans la communauté. C'est ça, le principe.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Mercier.

M. Khadir: Merci, M. le Président. Dr Julien, j'aime ce que vous faites, même si vous dites que vous êtes financés par des capitalistes ou la fondation Chagnon. Vous êtes un pédiatre social, moi, je suis en... si je suis médecin et si je fais de la politique avec la médecine, c'est avec un de nos pionniers, Dr Virchow, hein, qui disait, au XIXe siècle, que la politique, c'est comme la médecine appliquée à une nation. Parce qu'il y a des mesures qu'on prend, de politique publique, de santé publique, que vous avez pratiquée, qui ont des impacts considérables.

Je voudrais vous dire, Dr Julien, que j'estime ce que vous faites, parce que vous... en fait l'essentiel de votre propos, c'est comment humaniser le système, un système qui est généreux au départ mais qui devient lourd et qui parfois n'est pas capable d'agir et de bouger là où il faut, d'accord, même en reconnaissant le problème.

Alors, ma question: Est-ce qu'avec ce projet-là... ce projet-là aurait pu être financé par le ministre de la Famille de l'époque, quand vous l'avez créé, quand vous avez initié votre projet, ou le ministre de la Santé... Est-ce qu'autrement dit il y a une nécessité que ce soit financé par une fondation privée? Et, comme je ne possède que quelques minutes, je vous prie de me donner des réponses très brèves, parce que je vais venir là où je veux venir avec vous.

Le Président (M. Kelley): Dr Julien.

M. Julien (Gilles): Les questions se complexifient, là. Mais...

M. Khadir: ...vous êtes allé voir le gouvernement?

M. Julien (Gilles): Le gouvernement n'est pas accessible à un petit pédiatre qui se promène en bicycle dans Hochelaga.

M. Khadir: Et vous auriez besoin d'une Mercedes, c'est ça, le problème.

M. Julien (Gilles): Monsieur, j'ai eu besoin d'une Mercedes, qui est venue. D'ailleurs, c'était assez spécial, parce que, quand M. Chagnon est venu avec sa Mercedes noire et son chauffeur, mes pairs sont venus me voir après en me disant: T'es-tu dans la mafia, ou quoi? Mais, bon. Mais M. Chagnon s'est déplacé pour venir voir un docteur en bicycle parce qu'il trouvait ça...

M. Khadir: J'ai compris.

M. Julien (Gilles): Donc, le gouvernement n'aurait pas fait ça.

M. Khadir: Donc, le gouvernement n'a pas répondu. Alors, moi, je m'en désole, parce que, si, par exemple, mon parti est au pouvoir, c'est sûr, hein, malgré les accusations de soviétisme qu'on nous lance, qu'on n'aurait pas du tout reluqué à l'idée d'appuyer une initiative, un entrepreneurship social de cette sorte, soyez-en assuré.

Maintenant, comme médecin, vous savez que, quand on administre un médicament, j'attire l'attention du ministre, qui est très... moi, j'appuie le Dr Chagnon... d'accord, ça ne veut pas dire appuyer le fonds.

M. Tomassi: J'apprécie ça.

M. Khadir: Excellent! Alors, comme médecin, quand j'administre un médicament, j'ai besoin de savoir les effets secondaires aussi, O.K.? Les effets bénéfiques, ce que vous faites, ça, c'est un effet bénéfique incontestable. Mais regardez le problème. Vous avez dit qu'il manque des pédiatres, des médecins, des pédopsychiatres. Vous savez qu'il y a 10 ans il y a un gouvernement, au Québec, qui a baissé les effectifs médicaux, pourquoi? Ça, c'est...

Une voix: ...

M. Khadir: Bon, peu importe, c'est les mêmes raisonnements qui prévalent aussi chez vous.

Des voix: ...

M. Khadir: Un instant!

Le Président (M. Kelley): S'il vous plaît! Et rapidement, M. le député de Mercier.

M. Khadir: Vous savez pourquoi, Dr Chagnon, on a coupé les effectifs médicaux et les dépenses sociales? Parce qu'on a dit: L'État n'a pas les moyens. Or, actuellement, la ministre des Finances de ce gouvernement combat les pratiques fiscales agressives des fiducies et les fondations qui détournent, soit par évasion fiscale soit par évitement légal, fiscal, quelque chose de l'ordre de 8 à 10 milliards de dollars par année des deniers publics. Alors, Dr Chagnon, ma question est la suivante...

Des voix: ...

M. Khadir: Dr. Julien, je m'excuse, Dr Julien. Je suis désolé, je suis désolé. Dr Julien, si on fait ça, si, par le travail honorable que vous faites, en ne critiquant pas, en ne prenant pas une distance vis-à-vis les sources de ce financement... parce que j'ai déposé, ce matin, un document qui prouve qu'aux trois quarts les fonds de la fondation Chagnon ont été rendus possibles grâce à des rabattements fiscaux, donc c'est de l'argent des contribuables, d'accord? Si on encourage ce genre de pratique fiscale, fondation, fiducie familiale, et tout ça, est-ce qu'on ne vient pas aggraver les causes du problème qu'on est en train de combattre?

Le Président (M. Kelley): Je sais que la question est vaste, mais si on peut avoir une réponse courte, s'il vous plaît.

M. Julien (Gilles): Bien, moi, je ne veux absolument pas faire de politique. Ce qui est clair pour moi, c'est qu'on ne peut nettement pas laisser entre les mains de l'État tous ces enjeux-là. À partir du moment où il m'arrive des gens... puis je suis très fier de ça, au point que des gens du Québec qui ont réussi, qui ont fait de l'argent, qui, comme on le voit dans d'autres communautés culturelles d'ailleurs, mais on ne l'a jamais vu au Québec, là, ça s'est fait, M. Chagnon est un des premiers... À ma connaissance, il n'a pas des... on ne l'a jamais poursuivi pour crime de... je ne sais pas quoi, c'est légal donc, et, au lieu de se sauver dans des paradis fiscaux, M. Chagnon est venu investir pour les enfants du Québec. Je trouve ça extraordinaire. Il y en a d'autres, hein? Jean Coutu commence à... le fait, je l'ai invité à le faire davantage au Québec.

Il y a plusieurs personnalités comme ça qu'il faut mettre à l'avant-scène, parce que... qu'est-ce qu'ils ont créé? M. Chagnon, il a créé Vidéotron. C'est génial. Jean Coutu a créé une chaîne de pharmacies, tu sais. On voit Jean Coutu puis on se sent rassuré, on aime mieux aller voir M. Jean Coutu parce qu'il a l'air d'un bon monsieur. Non, mais c'est important, parce que, dans l'imaginaire québécois, c'est des gens qui sont des formes de guide, tu sais. Je ne veux pas savoir qu'est-ce qu'ils font le soir ou les fins de semaine, ça ne m'intéresse pas. Je veux, par exemple, que ces gens-là influencent le Québec. En plus, qu'ils l'influencent en investissant leur fortune avec la société québécoise, je trouve ça génial.

Pour moi, c'est très clair, je n'ai aucun doute là-dessus, pour moi, il n'y a pas d'effets secondaires importants. Il y a assez de gens qui se sont sauvés du Québec avec des fortunes, qui sont allés les investir ailleurs pour eux-mêmes. Là, il y a des gens qui investissent au Québec pour nos enfants. Je trouve ça extraordinaire.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup.

M. Tomassi: ...

Le Président (M. Kelley): M. le ministre, s'il vous plaît. Alors, il y a des débordements dans les trois enveloppes. Mais il me reste à dire merci beaucoup, Dr Julien, pour venir partager vos expériences et votre expertise avec les membres de la commission.

On va suspendre quelques instants, mais je vais demander aux représentants de COSMOSS de Bas-Saint-Laurent de prendre place rapidement. Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 38)

 

(Reprise à 16 h 41)

Le Président (M. Kelley): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Notre prochain témoin, c'est la Communauté ouverte et solidaire pour un monde outillé, scolarisé et en santé, COSMOSS du Bas-Saint-Laurent. On voit que vous êtes solidaires et ouverts à plusieurs membres. Alors, je vais céder la parole très rapidement au président, M. Michel Lagacé. Vous avez le droit à une présentation d'une dizaine de minutes, suivie par une période d'échanges avec les membres de la commission. M. Lagacé, la parole est à vous.

Communauté ouverte et solidaire
pour un monde outillé, scolarisé et
en santé (COSMOSS Bas-Saint-Laurent)

M. Lagacé (Michel): Je ne suis pas le Capitaine Cosmos! Donc, M. le Président de la Commission des affaires sociales, M. le ministre de la Famille, chers parlementaires, c'est avec un immense plaisir qu'en tant que représentant du partenariat COSMOSS de participer à cette consultation particulière de la Commission des affaires sociales en lien avec le projet de loi n° 7 instituant le fonds pour le développement des jeunes enfants. Je suis accompagné par M. Gérald Beaudry, directeur général de la Conférence régionale des élus du Bas-Saint-Laurent, de Mme Emma Savard, professionnelle à la CRE, Mme Marie-Josée Pineault, professionnelle à l'agence de la santé et des services sociaux, qui est à mon extrême droite, et Mme Ghyslaine Dionne, de la Commission scolaire du Fleuve-et-des-Lacs, pour m'assister lors de nos échanges. Merci à la présidence et aux membres de cette commission de nous accorder ce temps précieux.

COSMOSS signifie effectivement une communauté ouverte et solidaire pour un monde outillé, scolarisé et en santé ? c'est très payant au Scrabble ? donc, COSMOSS n'est pas une entité légale mais simplement un regroupement volontaire de partenaires qui, depuis 2004, ont convenu ensemble d'harmoniser leurs services au bénéfice des enfants vulnérables et de leurs parents de la grande région du Bas-Saint-Laurent. Nos quatre sphères d'intervention sont une entrée scolaire réussie, des saines habitudes de vie, la persévérance scolaire et une intégration socioprofessionnelle durable.

Notre démarche regroupe des organisations publiques communautaires et associatives, autant au plan régional que local. Nos horizons et champs de compétence sont différents, c'est pourquoi nous ne prétendons pas représenter l'ensemble des préoccupations de nos partenaires par cette présentation mais plutôt porter un regard sur le projet de loi en cause en envisageant son application dans une communauté comme la nôtre. Notre intention est de faire valoir l'essentiel des conditions requises ? les conditions de réussite ? pour assurer une action concertée porteuse de résultats sur la santé, le bien-être et la réussite éducative de tous nos enfants. Après avoir situé notre démarche actuelle de concertation en faveur des jeunes et des leçons apprises de notre expérience depuis 2004, nous aborderons le projet de loi autour des deux dimensions suivantes: la façon dont nous entrevoyons le déploiement du fonds et les préoccupations que nous souhaitons partager avec vous en regard du projet de loi.

M. le Président, le projet de loi n° 7, qui prévoit la création du fonds pour le développement des jeunes enfants, vient positionner le développement global des enfants âgés de cinq ans et moins vivant en situation de pauvreté comme un objet commun de société. La littérature étant probante à cet égard, l'intervention précoce auprès de ces enfants vise notamment à favoriser une entrée scolaire réussie et la poursuite de leur scolarité. Depuis 2004, COSMOSS travaille d'ailleurs autour de ces déterminants de la santé qu'il est possible de modifier, notamment les conditions de vie des enfants, et voit ainsi la plus-value des interventions concertées. Voici les grandes lignes des leçons que nous avons apprises depuis 2004: une adhésion volontaire des partenaires concernés est nécessaire; il faut un leadership partagé ne devant pas reposer sur un seul réseau; il faut du soutien à la mobilisation, à la liaison et évidemment à l'action; une gouvernance convenue et partagée doit être définie; il faut respecter les différences et les capacités des différents milieux; une bonne communication est un incontournable pour améliorer la reconnaissance de la plus-value de l'action concertée, de même qu'une vision globale et transversale du développement des enfants et du soutien aux parents et aussi aux communautés; et enfin, une acceptation d'agir sur une longue période est nécessaire à l'engagement.

Voici maintenant pourquoi nous adhérons au fonds pour le développement des jeunes enfants et comment nous entrevoyons son déploiement. Nous constatons qu'il agirait comme une bougie d'allumage de la mobilisation autour des besoins des jeunes enfants, qu'il apporterait un soutien de qualité et qu'il permettrait d'agir pour les jeunes de l'ensemble du territoire bas-laurentien et, de plus, qu'il contribuerait à une meilleure harmonisation de l'offre de services pour les enfants et la parents.

Nous sommes cependant préoccupés par les aspects suivants. D'abord, la fragilité de la mobilisation et la saturation des milieux. En effet, force est de constater que ce sont souvent les mêmes gestionnaires et intervenants qui se retrouvent autour des instances de concertation. Le partenariat et ses résultantes impliquent une charge de travail supplémentaire considérable. Au cours des dernières années les milieux ont été sursollicités par différentes démarches nécessitant de la concertation. Il convient de tenir compte de cette prémisse si l'on veut s'assurer d'une poursuite d'une participation active.

Deuxièmement, nous sommes préoccupés par le besoin de souplesse et d'adaptation régionale et locale, les initiatives provinciales doivent avoir la volonté de s'adapter et de savoir s'inscrire à l'intérieur de des démarches existantes pertinentes. Il faut s'assurer de ne pas compromettre les travaux en cours. En ce sens, un rapprochement sur la base des objectifs visés et communs permet de partager les attentes et les moyens. Par exemple, étant donné la mobilisation locale et régionale déjà en cours au Bas-Saint-Laurent avec COSMOSS, il pourrait plus stratégique et efficient de regrouper les ressources humaines dédiées aux quatre sphères d'intervention ci-haut mentionnées plutôt que de créer une instance parallèle.

Troisièmement, il faut considérer la simplification des procédures. Toujours sur la base de l'objectif poursuivi par une mesure provinciale, celle-ci devrait d'abord prendre en compte les analyses et portraits existants avant d'en exiger de nouveaux. Des dépôts à l'entrée continue respecteraient davantage le déroulement des travaux en cours et les charges respectives des personnes impliquées. Aussi, l'ensemble des partenaires associés à un projet devraient s'entendre pour un outil unique de reddition de comptes.

Quatrièmement, la poursuite d'un investissement équilibré entre les ressources humaines et l'action tangible est à maintenir. Notre expérience de première phase de COSMOSS nous a enseigné que l'émergence et le maintien d'une concertation nécessitent un soutien humain dédié. Les ressources humaines déjà en place ne peuvent assurer de tels mandats en plus de leur engagement quotidien. En ce sens, toute demande de mobilisation additionnelle doit considérer le temps imparti pour ce faire. Il est également nécessaire d'avoir des actions concrètes issues de cette mobilisation afin de maintenir la motivation et l'engagement.

Cinquièmement, pour ce qui est de la notion de pauvreté des communautés... nous apparaît plus constructive. Le projet de loi précise, à l'article 1, qu'il a pour but de soutenir le développement global des enfants âgés de cinq ans et moins vivant en situation de pauvreté. En fonction de l'expérience acquise dans notre milieu, il nous apparaît souhaitable que cette notion de pauvreté dépasse la pauvreté des individus pour inclure celle des communautés. Cela permettrait d'agir plus globalement et ainsi augmenter le mieux-être d'un plus grand nombre d'enfants.

Sixièmement, il faut s'assurer du respect des meilleures pratiques. Le concept de développement global des enfants, tel que libellé à l'article 2 du projet de loi, mérite à notre avis un encadrement rigoureux si l'on veut éviter des dérapages au niveau des actions à mettre en oeuvre. Dans le contexte où le fonds sera appelé à financer des activités ou des initiatives qui seront souvent le fruit d'une mobilisation locale, il faut s'assurer du respect des meilleures pratiques en arrimage les différents réseaux.

Enfin, l'atterrissage territorial nous préoccupe particulièrement. Dans un contexte où l'intersectoriel est un incontournable pour améliorer réellement les conditions de vie des jeunes et de leurs parents, il devient impératif de s'harmoniser. Malgré tout, force est de constater que différentes mesures continuent d'arriver en région par silo. Sur la base de ce qui précède et sachant qu'aux plans régional et local on fait toujours appel aux mêmes acteurs, l'arrivée de nouvelles mesures et de leur exigences propres impose une pression telle qu'elles peuvent miner les avancées durement acquises.

Actuellement, la démarche COSMOSS nous permet de veiller à l'émergence des nouvelles et à l'optimisation de celles-ci dans leur déploiement vers jeunes et leurs familles. Ceci commande des énergies considérables en termes d'analyse des impacts et afin de rassurer les partenaires locaux. Pour nous aider dans cet effort, une harmonisation nationale des actions, des engagements et des équipes de travail dédiées est vivement souhaitée. La publication de la Stratégie d'action jeunesse 2009-2014 annonce une préoccupation en ce sens. Le travail de concertation et d'harmonisation prévu démontre une direction très intéressante. Il nous apparaît qu'il faut simplifier cet effort pour concrétiser davantage un atterrissage en douceur dans nos différentes régions.

n(16 h 50)n

À un plan régional et local, étant donné l'importance des ressources humaines affectées à la mobilisation, une mutualisation des équipes s'impose afin de maximiser le potentiel de nos interventions. Les personnes dédiées au développement des jeunes doivent travailler en synergie sous le leadership de la région, gardienne de la mobilisation et en soutien à l'atterrissage des dites mesures. Afin d'assurer une adaptation de l'action aux réalités territoriales, il importe au national de bien préciser les objectifs à atteindre et les clientèles ciblées, mais également de laisser convenir aux régions de l'opérationnalisation des démarches.

En conclusion. De notre point de vue, l'apport du fonds sur le terrain solidifierait le réseau des partenaires dédiés à la petite enfance. Il contribuerait également à combler les vides et les ruptures de services au bénéfice de tous. L'expérience acquise avec le fonds en termes de partenariat autour du développement global des enfants devrait demeurer au-delà d'une opportunité financière. La marge de manoeuvre, la souplesse et l'allégement des procédures sont quelques-uns des ingrédients essentiels d'une mobilisation réussie. L'action concrète doit primer sur l'administratif. C'est à ces conditions que le déploiement d'un fonds pour le développement des jeunes enfants pourra recevoir un accueil favorable dans les régions du Québec et atteindre les objectifs visés au bénéfice des jeunes et de leurs parents. Merci de votre attention.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Lagacé. On va passer maintenant à une période d'échange avec les membres de la commission, une vingtaine de minutes des deux côtés de la table, en commençant avec M. le ministre.

M. Tomassi: Merci beaucoup, M. le Président. M. Lagacé, M. Beaudry, Mme Savard, Mme Pineault et Mme Dionne, je crois, alors merci de venir nous entretenir de vos expériences. J'ai eu, dans une autre vie antérieure, pas trop lointaine, le plaisir de vous rencontrer à deux reprises, une fois pour venir vous rencontrer faisant suite à ma nomination comme adjoint parlementaire, à savoir où la stratégie jeunesse dans votre région en était rendue, et la deuxième, lors d'une belle annonce, la mise en place du projet travailleur de rue. À la lecture des résultats partiels que je vois ici, c'est un beau succès, succès que vous aviez manifesté lors de cette présentation. Et je vous remercie beaucoup et merci pour les bons mots concernant la nouvelle stratégie d'action jeunesse qui a été lancée par ma collègue la député de Gatineau et qui s'étend sur cinq ans. C'était une recommandation et une volonté du milieu qu'on a entendue qui fera en sorte que vos belles mesures puissent s'étaler dans le temps et avoir une continuité. Je pense, c'était ça, la volonté.

Merci beaucoup de vos commentaires constructifs concernant la mise en place du fonds. Je crois que nous avons tous cette volonté d'apporter ce soutien au développement des jeunes enfants. Il y a beaucoup de choses qui se font au Québec, vous le dites, vous aussi, à travers des organismes communautaires qui sont présents. Je comprends votre message, à savoir la charge de travail qui leur sera imposée pour faire ce travail de concertation ou autres mesures qui devront même être en place, devra être prise en compte, parce que c'est nécessaire. Et, je pense, c'est le message qu'on a entendu des groupes, surtout des organismes communautaires famille qui sont venus nous rencontrer durant les trois jours de consultation.

Vous nous parlez aussi de la simplification des formulaires de la reddition de comptes, qui doit être importante, qui doit être un processus qui doit être léger, qui doit, oui, répondre aux principes même de saine gestion, mais qui doit être facile à comprendre et à mettre en place. Et ça, je crois que c'est des messages qui... c'est de l'eau qui est apportée au moulin pour qu'on puisse faire en sorte que ce projet puisse démarrer du bon pied. Puis je pense que la volonté et de la fondation et du gouvernement et, je crois, de l'entièreté des collègues ici, à l'Assemblée nationale, c'est que des projets puissent avancer, qu'on puisse en quelque sorte un peu avoir cette passion que le Dr Julien, qui était ici avant, puisse être propagée à travers la province de Québec, faire en sorte que ce développement des jeunes enfants puisse être transmis et qu'on puisse avoir des jeunes enfants prêts à relever des défis du futur, en pensant que ces jeunes-là aujourd'hui qui ont cinq, six ans seront des députés, ministres et des premiers ministres, et des gestionnaires, des maires, des présidents de CRE. Alors, c'est important de leur donner toute la chance possible.

En ce qui a trait à l'essence même du protocole... pas d'entente, mais du protocole de fonctionnement de la fondation vis-à-vis les groupes, vous énumérez quelques recommandations qui me semblent pertinentes. Quand vous me parlez de simplification des processus, qui est un élément important qui revient, la reddition de comptes, avez-vous des exemples précis de, peut-être, mesures qui ont déjà été mises en place? Vous avez une expérience avec la fondation Chagnon. Ou des mesures que vous voudriez peut-être voir arriver pour que ce soit plus, on va dire, «friendly», là, dans la manière de mettre en place ce fonds?

Le Président (M. Kelley): M. Beaudry.

M. Beaudry (Gérald): Peut-être. Je sais que, la semaine dernière, j'étais à Trois-Rivières et on parlait d'une expérience à Montréal où l'ensemble des partenaires avaient convenu d'un seul outil de reddition de comptes. Ce qu'on veut vous signifier également par ça, c'est que, dans les actions de mobilisation qu'on met de l'avant, ça implique un ensemble de partenaires, autant du côté de certains ministères, vous avez fait référence au Secrétariat à la jeunesse et... ça fait qu'il faudrait en arriver à ce que chacun des partenaires s'entende pour un outil. Parce qu'à la base les gens qui sont impliqués au niveau de la mobilisation, les agents de concertation, etc., s'il y a cinq formulaires différents à remplir, avec cinq niveaux d'exigences différents, qui plus est, quatre, cinq dates différentes, on vient que les gens prennent de leur meilleur temps à remplir du papier et non à soutenir les milieux, dans leur exercice de mobilisation, pour répondre aux problématiques vécues par les enfants et leurs parents.

M. Tomassi: Ah! Vous parlez de la mise en place par le fonds d'un formulaire simple qui serait applicable à tous les projets?

M. Beaudry (Gérald): Le fonds en soi, il y a une reddition de comptes à faire, la plus simplifiée possible, on vous l'a dit, mais de faire en sorte que, dès qu'il y a des actions qui interpellent d'autres partenaires, lorsque ces modèles de reddition de comptes sont élaborés d'abord au central, disons-le, qu'on ait le souci de les harmoniser avec les autres partenaires, mais, quand ça atterrit au niveau local et que ça transite souvent par le palier régional, qu'on convienne de façons de faire les plus simples possible, sans escamoter les obligations de reddition de comptes bien sûr, mais simplifier le travail. C'est dans ce sens-là qu'on vous l'amène. C'est plus que juste avec le fonds et la société de gestion, c'est élargi également à l'ensemble des partenaires.

M. Tomassi: Vous voulez dire le gouvernement au complet. Dans la mise en place, dans l'idéologie du fonds, la mise en place d'un comité de liaison où des représentants de la société civile mais surtout des groupes qui pourront être bénéficiaires du fonds, la mise en place de ce comité-là pourrait ? à la limite, là, je vous lance l'idée ? permettre de discuter de ces problématiques-là, de voir quel genre de formulaire pourrait être plus standard, pourrait être plus facile à remplir, à gérer, vis-à-vis les autres partenaires. Croyez-vous qu'une initiative comme ça, qui serait incluse dans le protocole d'entente, pourrait être une bonne suggestion à proposer pour la suite des choses?

M. Beaudry (Gérald): Bien, essentiellement...

Une voix: ...

M. Lagacé (Michel): Oui, merci, excusez. Essentiellement, effectivement, tout endroit où est-ce qu'il va y avoir des discussions pour permettre d'avoir les outils les plus simples possible, les plus accessibles possible. Dans le fond, ce qu'on veut, c'est faire du terrain, puis ça, je pense que ça nous apparaît extrêmement important, donner la chance aux enfants qui vivent de la pauvreté à réussir la réussite... à vivre la réussite. Je pense que c'est un élément très important. Donc, d'avoir des outils, qu'on puisse convenir ensemble de la façon dont la reddition de comptes se fasse, avec des outils effectivement minimaux. Parce que, dans d'autres vies, je suis aussi préfet, dans d'autres vies, je suis aussi maire, puis à l'occasion on a un peu des petits goûts sûrs en bouche par rapport à la reddition, alors qu'on devrait passer plus de temps auprès de ceux pour quoi le fonds est mis en place, les gens.

M. Tomassi: Vos expériences avec la fondation Chagnon jusqu'à maintenant, avec les divers programmes que vous avez eus, se situent dans quelle échelle de collaboration? Est-ce que c'est plus vers beaucoup de collaboration ou le moins de collaboration?

M. Lagacé (Michel): Si vous permettez, essentiellement je pense que c'est une relation gagnant-gagnant. Ce qui se vit au Bas-Saint-Laurent, je pense, il y a deux paliers chez nous, il y a un palier régional, sous lequel dans le fond l'ensemble des partenaires, dans le fond, identifient les voies à suivre, les opportunités, les pistes d'action à suivre; puis, au niveau local, dans le fond c'est comment ça se passe sur le terrain, puis on a emmené... Mme Dionne pourra témoigner tantôt plus avant. Donc, il y a une relation de confiance qui a été mise en place. On a appris à se connaître puis dans le fond de faire en sorte que les choses puissent s'adapter à la hauteur de nos réalités, de nos besoins. Et ça, je pense que c'est gage de réussite pour ce qui est des actions qui sont en train de prendre place au niveau du Bas-Saint-Laurent, au bénéfice notamment de nos jeunes et de leurs parents.

M. Tomassi: Bien, merci beaucoup, hein, M. le président.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Trois-Rivières.

n(17 heures)n

Mme St-Amand: Merci, M. le Président. Ça faisait vraiment longtemps que j'entendais parler de COSMOSS, je suis vraiment contente de vous avoir rencontrés, et vous reflétez bien la réputation que vous avez.

Évidemment, on a parlé beaucoup ici depuis quelques jours de l'importance de la concertation dans les milieux, de ne pas dupliquer, reproduire les modèles qui existent déjà, ne pas alourdir ce qui est déjà là. J'aimerais ça vous entendre principalement au niveau du champ d'intervention. Quelles sont les recommandations que vous privilégiez, mais beaucoup plus versus la clientèle, versus les petits enfants, versus les parents, qu'on ne doit pas négliger non plus, parce qu'on sait que les enfants retournent? Vraiment, quelles seraient les recommandations que vous nous feriez en termes d'intervention?

Mme Dionne (Ghyslaine): Je pense que c'est l'intervention directement auprès des parents dans la reconnaissance de leur rôle et l'accompagnement dans ce rôle-là. Moi, dans mon vécu... Moi, je suis très terrain, vous allez voir, je vais vous parler d'expérience pratique, là. Ce que j'ai eu dans ma pratique ? je suis dans une commission scolaire, j'ai travaillé avec des jeunes mères, avec leurs enfants ? c'est la non-connaissance du rôle qu'ils ont à jouer en termes de préparation à la rentrée scolaire. Quand on les aide, quand on les accompagne, quand on les accueille, quand on les apprivoise, ils ont plaisir à apprendre ça, ils ont plaisir à le faire, et ça les renforce dans leur rôle de parents. Donc, on touche les parents vulnérables puis on les aide à devenir une personne adéquate dans ce premier rôle qui les concerne encore.

Dans les actions où, moi, j'ai réussi à mobiliser des parents, c'est parce qu'on le prenait par le bord des enfants. Parce que c'est encore ce qui les concerne le plus, même si, à quelque part, ils n'ont pas toujours la conscience de ce qu'ils ont à faire. Mais c'est cette étape-là. Il faut les reconnaître, les reconnaître au local, les reconnaître dans la communauté et les accompagner. Quand je le regarde par le bord des intervenants, ce qu'on me dit, c'est: La mobilisation, la mobilisation, parce qu'on ne sait pas qu'on doit faire ça. Mais, à partir du au moment où les gens apprennent ça, ils veulent le faire. Donc, il faut être proche d'eux, il faut les accompagner, puis il faut les accompagner pas à pas dans la mesure d'où ils sont et les amener vers une préparation des enfants vers l'école bien sûr, parce qu'on sait que c'est important, mais, moi, j'ai vu des parents retourner aux études parce qu'on a vu l'importance de ce que ça représentait. Alors, il y a un gain au niveau du parent, il y a un gain au niveau de l'enfant plus âgé, qui est un ado aussi qui peut-être va décrocher. C'est un changement au niveau du travail, de la cellule de base d'une société. Puis, tous les gens, toutes les structures autour, qu'on a des mandats, des connaissances, on a de l'expertise, on a de l'intervention possible, il faut être en appui puis il faut être en accompagnement.

Chez nous, principalement au Témiscouata, on a 30 % de gens qui sont analphabètes. Ça veut dire, ça, que ce qui est écrit qui rentre dans les maisons n'est pas lu. Donc, ça veut dire une personne qui leur parle, qui leur explique les choses. Donc, ça veut dire de l'accompagnement pointu dans le quartier, dans le village, dans le milieu. Ça veut dire une maison de famille qui est proche, un lieu où je peux arriver, aller acheter un petit pyjama pour la première fois, après ça m'associer à une cuisine collective, après ça parler que j'ai de la misère à faire les devoirs avec les enfants, et les amener progressivement dans le parcours jusqu'à temps qu'ils soient capables d'être à l'aise de rentrer à l'école et d'accompagner leurs enfants dans la maternelle quatre ans, cinq ans.

J'ai fait de la formation auprès de parents pour les préparer à qu'est-ce qu'on avait besoin pour accompagner des enfants au niveau scolaire. Quand on les prend en maternelle quatre ans, ces parents-là, ils sont inquiets, ils ne savent pas ce qui s'en vient, ils sont faciles à mobiliser. Parce que c'est vers le futur qu'on s'en va. Quand les parents ont passé une première année scolaire, qu'ils ne sont pas capables de suivre, ils sont déjà en échec, ils se cachent. Ils ne peuvent pas être mobilisés facilement. Donc, la prévention chez les petits. On pense, avec le réseau de santé, aux cours prénataux. Oui, on s'occupe beaucoup du petit bébé, du poupon, comment le faire manger, l'allaitement, bon, les couches, et tout. Mais le trottineur de trois ans, on a besoin d'enseigner aux parents de les accompagner pour qu'ils sachent ce qu'ils ont à faire là, puis, trois ans, quatre ans, pour arriver jusqu'à l'école. Ça, c'est moins évident.

Il y a des familles qui vivent dans des maisons, dans des maisons reculées, dans des fonds de rang, c'est les gens du quartier, c'est les gens du milieu, c'est les gens du village qui peuvent y aller, d'où la centralisation. La mobilisation de COSMOSS, qu'est-ce qu'elle permet, c'est d'aller dans les forces vives du milieu puis de travailler avec ces gens-là.

Mme St-Amand: Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Dionne. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: Merci, M. le Président. Votre démarche, COSMOSS, c'est vraiment une belle approche de réseautage. Je regardais votre structure, c'est assez imposant et impressionnant. Et je regardais également vos sphères d'intervention, et la première, c'est permettre une entrée scolaire réussie, donc ce qui veut dire, vous avez une cible d'enfants de moins de cinq ans, ce qui est très intéressant et qui est concordant avec le fonds. Maintenant, comment est-ce que le fonds pourrait s'inscrire concrètement dans votre démarche, COSMOSS? Et qui pourrait être le porteur des demandes de ressources budgétaires par rapport aux activités que vous pourriez identifier?

Le Président (M. Kelley): M. Beaudry.

M. Beaudry (Gérald): Comme vous pouvez constater à la lecture de la structuration qui est là, juste rappeler que COSMOSS, c'est un continuum moins 9 mois-30 ans. Donc, toute la dimension de la continuité, éviter qu'il y ait des craques, etc. Comment le fonds peut être en support? On dit toujours que la table régionale COSMOSS est une interface entre la réalisation qui se fait dans le milieu. Notre rôle, c'est de faciliter le travail qui se fait au plan local, tel que Ghyslaine en parlait, mais également c'est un lieu d'atterrissage des mesures. Ça fait que la façon concrète dont ça va se dérouler, la mise en oeuvre du fonds, c'est de dire: Bon, bien, ce fonds-là, c'est quoi, les objectifs, comment ça peut s'inscrire de façon complémentaire à ce qui se fait déjà et comment on peut utiliser déjà les leviers qui sont en place? Surtout, éviter de recréer quelque chose en parallèle.

Tout à l'heure, M. le président parlait... M. le ministre parlait de notre expérience avec la fondation Chagnon. Quand est arrivé le déploiement de Québec en forme, Québec Enfants, etc., ça a transité par ce véhicule-là, cette plateforme de concertation à l'échelle régionale et locale. Ils ont dit à l'échelle régionale... les leaders du milieu, des ministères interpellés, des organismes communautaires, etc., on a convenu ensemble de l'urgence d'agir, mais d'agir ensemble. Ça fait que le fonds, son apport sera... la lecture en sera faite par comment il peut être complémentaire à ce qui existe déjà. COSMOSS ne prend pas la place de personne. Il vient faciliter le travail de l'ensemble des partenaires et vient surtout faire un exercice de veille et de déceler les opportunités pour atteindre les objectifs toujours qu'on s'est fixés en regard des diverses clientèles.

Ça fait que c'est de cette façon-là qu'on voit l'apport du fonds, venir consolider la mobilisation. On l'a dit dans le texte: C'est fragile. Il ne faut jamais rien prendre pour acquis, c'est comme dans d'autres domaines. Il faut toujours la soutenir, cette mobilisation-là. Mais le travail se... Je suis là depuis le début, et on regarde l'évolution aujourd'hui, on est très fiers des résultats obtenus, parce que, ce qu'on vise par ça, c'est des changements de pratiques, d'arrêter d'être en silo, en corridor, que chaque intervenant, chaque partenaire sache qu'est-ce que l'autre à côté fait, et y a-tu une craque dans le système. Puis on a vu des résultats très concrets, là, entre un organisme communautaire qui accueille des jeunes et le centre jeunesse: Ah! Tiens! Regarde donc ça! Moi, rendus à tel moment, ils quittent, ils tombent dans le vide, là, du protocole de référence rapidement. Woups! Il est pris en charge. C'est dans ce sens-là qu'on parle du continuum de services, et c'est de même que le fonds peut mieux nous supporter.

M. Chevarie: Question supplémentaire?

Le Président (M. Kelley): Oui.

M. Chevarie: Oui? Merci. Est-ce que vous êtes à l'aise avec, je dirais, la clientèle ciblée des enfants vivant en situation de pauvreté?

M. Lagacé (Michel): Bien, essentiellement, dans le fond, on a une approche, à l'intérieur du mémoire, qui signifie davantage sous l'angle... et de la communauté aussi. Parce que, dans nos milieux, quand on regarde le Bas-Saint-Laurent, avec les indices de développement socioéconomique qui sont là, qui sont extrêmement alarmants, 42 municipalités fortement dévitalisées sur 140 quelques au Québec, donc... 42 sur 116 au Bas-Saint-Laurent. Donc, c'est clair effectivement que, de la façon dont, nous, on voit les choses, on parle plus effectivement de la communauté qui vit la pauvreté puis en même temps aussi les enfants qui sont à l'intérieur de ces communautés-là. Donc, c'est beaucoup plus large.

Mme Savard (Emma): Ce que je peux ajouter, Michel, c'est qu'on vise les enfants en situation de pauvreté, mais, pour agir, c'est la communauté. Donc, c'est toute la communauté qui est en situation de vulnérabilité qui doit aider ses enfants, qui doit aider aussi les jeunes parents qui sont vulnérables, là.

M. Chevarie: ...interpellés.

Mme Savard (Emma): Oui.

M. Chevarie: Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Gouin.

n(17 h 10)n

M. Girard: Merci. Merci, M. le Président. À mon tour de saluer les membres de COSMOSS Bas-Saint-Laurent. Merci pour votre mémoire.

J'ai un certain nombre de questions à vous poser. La première portera sur le fait que, dans le cadre de nos travaux, il y a eu des demandes de plusieurs groupes à l'effet que, sur la société de gestion qui est comprise dans le protocole d'entente ? qu'on n'a toujours pas! ? il y a cinq membres nommés par le gouvernement et cinq membres nommés par la fondation Chagnon. Il y a eu des demandes à l'effet qu'il y ait des membres de la société civile qui soient membres nommés par le gouvernement, pour qu'il y ait une représentation des milieux. Des groupes qui sont venus nous voir aussi veulent s'assurer qu'on va tenir en compte l'expertise locale. Vous en êtes un bel exemple, puisque vous vous réunissez sur une base régulière et vous vous concertez.

De votre point de vue, est-ce qu'il y a des modifications qu'on devrait apporter au projet de loi ou des précisions pour faire en sorte que le point de vue des régions, comme la vôtre, soit pris en compte et qu'on ne fasse pas du mur-à-mur mais du sur-mesure qui tienne compte des réalités, qui sont différentes à Montréal qu'elles ne le sont par exemple dans le Bas-Saint-Laurent? J'aurais aimé vous entendre à ce sujet-là.

M. Lagacé (Michel): Tout à fait, dans le sens où est-ce que, lorsque les conférences des élus ont été mises en place, on sait que dans le fond c'est en lien avec les élus, et ce qu'on trouve très intéressant, c'est qu'effectivement, dans le cas du Bas-Saint-Laurent, neuf membres de la société civile viennent nous accompagner par rapport à l'atteinte de nos objectifs, donc le plan de développement régional. Et, dans ce sens-là, d'avoir des ressources pertinentes qui pourraient influencer de façon positive et les orientations à mettre en place sur les différents éléments, on pense effectivement que ça pourrait être intéressant. Et, vous avez tout à fait raison, le fait qu'il puisse y avoir aussi une représentation intéressante puis surtout très intéressée des régions à être associées au comité de gestion, je pense que ça pourrait être un élément qui pourrait être bénéfique aussi pour la suite de ce fonds-là.

M. Girard: J'aimerais savoir aussi, dans votre région, pour ma gouverne, quels sont les principaux besoins en matière de petite enfance, dans la région du Bas-Saint-Laurent, que vous avez exprimés. Est-ce que vous êtes l'une des régions aussi dans lesquelles on vit un mini-baby-boom, comme dans plusieurs régions du Québec? Je serais curieux de vous entendre à ce sujet-là.

Mme Dionne (Ghyslaine): Effectivement, on a des familles de quatre et cinq enfants. Alors, à l'échelle de nos MRC, là, on a un mini-baby-boom. C'est sûr qu'il y a des choses au niveau d'assurer les revenus des familles, il y a l'économie, qui est saisonnière: la forêt, l'agriculture, les pêches, bon, c'est fréquent chez nous, on comprend la situation. Il y a la préparation aux enfants pour le monde scolaire. Dans ma commission scolaire, on sait qu'il y a des enfants qui arrivent, il leur manque 1 200 heures de stimulation pour embarquer dans le réseau. Alors, ils sont décrocheurs là, alors ça veut dire: ils vont redécrocher au secondaire, ça, c'est sûr. Au niveau de la santé, au niveau alimentaire, on a cinq cuisines collectives juste dans la MRC de Témiscouata. La crise alimentaire, le coût des denrées, bon, je veux dire... On a des problématiques au niveau social, dans les dépendances; ça fait partie du portrait. Donc, si les parents vivent des dépendances, on comprend que la situation de protection des enfants, du bon développement, je veux dire, ça nous inquiète, ça nous préoccupe. Est-ce que vous voyez d'autres choses?

Une voix: ...

Mme Dionne (Ghyslaine): Ah! L'indice de mesure du développement de la petite enfance, qui a été déployé, là, dans l'ensemble des commissions scolaires, qui va nous donner, en juin, dans le fond l'indice, là, de développement des enfants à leur rentrée scolaire en maternelle quatre ans, puis qui va revenir en rotation pour avoir leur évolution. Et ça, c'est une...

Le Président (M. Kelley): Mme Savard, voulez-vous ajouter ou...

Mme Savard (Emma): Oui. Bien, peut-être un élément qui est simple, mais c'est la communication. Les parents connaissent quand même peu les ressources disponibles, puis ça on travaille là-dessus, à simplifier l'accès, la connaissance des ressources puis à faciliter aussi la communication d'une ressource à une autre, aussi du service de garde à l'école. Donc, la communication, ça ressort beaucoup comme besoin de la part des parents, mais aussi entre les ressources, puis ça, il y a un travail quand même assez majeur, là, qui est fait là-dessus.

M. Girard: Dites-moi, vous avez été consultés au printemps dernier par la précédente ministre de la Famille sur les besoins exprimés par les conférences régionales des élus en termes de places en services de garde. Si ma mémoire est bonne, je pense que le nombre de places demandé était de 1 780 d'ici 2010. Combien en avez-vous obtenu dans la région?

M. Lagacé (Michel): Près de 250, je crois, là...

M. Girard: D'ici 2010?

M. Lagacé (Michel): ...autant en services, dans le fond, en CPE qu'en milieu familial.

M. Girard: O.K. J'imagine donc que ça, ce doit être un élément qui vous préoccupe, puisque madame me disait qu'il y a de nombreuses familles quatre enfants et plus. Alors, j'imagine qu'il y a des parents qui doivent solliciter la CRE ou le réseau des centres de la petite enfance régional, parce qu'il y a un manque de places; j'imagine, ça, c'est des préoccupations que vous avez au niveau des besoins 0-5 ans. Est-ce que je me trompe? Peut-être que vous pourriez m'élaborer davantage, puisqu'on a des représentants de la CRE ici qui ont participé, j'imagine, à la rédaction du rapport.

M. Lagacé (Michel): Dans le fond, on a identifié de façon concertée, on a fait une étude qui a permis d'identifier l'ensemble des besoins sur l'ensemble du territoire Bas-Laurentien. Et d'ailleurs, à la dernière rencontre du conseil d'administration, on a adopté la volonté d'avoir une porte unique pour ce qui est de l'identification au niveau des places qui sont disponibles ou... Puis en même temps faire le répertoire des besoins au niveau des parents. Donc ça, c'est fait, et ce qui est clair que, là-dessus aussi, je pense qu'on va continuer à faire notre travail de concertation, d'identification des besoins puis de solliciter une réponse aux besoins.

Le Président (M. Kelley): Monsieur...

M. Beaudry (Gérald): Oui, bien sûr, il y a le débat sur le nombre de places traditionnelles, etc. Mais, compte tenu de la configuration du territoire, où c'est très déployé en milieu rural, etc., la mobilisation à travers COSMOSS permet aussi d'identifier des façons de répondre à ces problématiques-là sur des modèles qui sont propres à nos réalités territoriales. Je pense à des combinaisons entre le milieu scolaire, le milieu municipal, le milieu communautaire, etc. Cette mobilisation-là amène également la recherche et, très souvent, la réponse à des problématiques adaptée aux réalités du milieu.

M. Girard: J'imagine que pour vous, bon, le déplacement, bon... Le territoire est beaucoup plus grand, ça pose un certain nombre de difficultés sur le plan de l'organisation de certains services, puis quelqu'un qui habite à Montréal et qui doit amener son enfant dans un service de garde est probablement davantage à proximité qu'il ne l'est dans votre région de Bas-Saint-Laurent. Donc, j'imagine que, dans l'offre de services, peu importe que ce soit dans le secteur de la santé, de l'éducation ou des centres de la petite enfance, vous devez tenir compte de ça?

M. Beaudry (Gérald): D'ailleurs, hier, on déposait le rapport fait pour le plan de développement du transport collectif en région, et toutes les problématiques sont bien identifiées, autant au niveau des étudiants, au niveau des personnes âgées, au niveau des personnes à faible revenu, etc. Ça fait que c'est pour ça, à votre question de départ: quels sont les aspects... C'est un ensemble d'actions qui doivent être complémentaires si on veut sortir, affronter les problématiques, les défis auxquels ont est conviés. Parce qu'il y a une chose qui nous unit, tout le monde, tous ces passionnés-là en région autant au plan régional que local, c'est qu'on ne peut pas se permettre d'échapper des jeunes. Ça, là, c'est d'abord ça, pour l'avenir de la société, à tout niveau, un jeune en difficulté, il faut tout mettre en oeuvre pour faciliter son développement.

M. Girard: C'est ça. Donc, je comprends. Si le ministre, visiblement, n'a pas saisi la même chose... Vous avez demandé 1 780 places, juste qu'on se comprenne bien, vous me dites vous en avez obtenu 231. Donc, je comprends que ça va prendre des nouvelles places en services de garde dans la région de Bas-Saint-Laurent pour répondre aux besoins des jeunes familles. Donc, on se comprend bien là-dessus, que c'est une de vos demandes au niveau des priorités 0-5 ans.

M. Lagacé (Michel): Ça fait partie effectivement des besoins, puis effectivement, là-dessus aussi, on va être vigilants puis on va souhaiter avoir toute la collaboration qu'on a habituellement.

M. Girard: Maintenant, c'est enregistré pour le bénéfice du ministre. Je veux également rappeler, bon, dans votre document, à la page 4 et 5, vous nous dites qu'il y a des... Vous nous parlez des partenaires, la table régionale, vous mentionnez l'ensemble des partenaires autant sociaux, bon, communautaires, est-ce que la table, et pour les projets que vous avez, est-ce que vous recevez du financement gouvernemental de différents... que ce soit du CSSS, du CLE? J'aurais aimé comprendre un peu, là, comment vous financez vos projets.

n(17 h 20)n

M. Beaudry (Gérald): Pour l'ensemble du continuum, actuellement on est sous entente avec le Secrétariat à la jeunesse pour une personne à la coordination. Pour ce qui est de tous les autres frais liés à ça, on répète: COSMOSS est un regroupement volontaire, et c'est dans ce sens-là que chacun y met les énergies. Ce n'est pas la grosse structure, là. Mais nécessairement il y a besoin d'une personne à la coordination régionale, et la clé du succès, la clé de nos résultats, c'est les agents de COSMOSS, les agents de mobilisation à l'échelle des territoires, dont Ghyslaine en est une.

Qu'est-ce qu'on a fait pour en arriver à ce financement-là? Encore là, quand on identifie ensemble des façons de faire qui sont porteuses, on se pose la question: Qui peut le faire? Et déjà, bien cette mobilisation-là, tout le monde en a là dans ses organisations. Ça fait qu'ensemble on a mobilisé du financement pour assurer les ressources humaines. Ça fait que cette mobilisation-là, c'est le Secrétariat à la jeunesse, c'est des fonds privés, c'est des ministères, Emploi-Québec, Éducation, et bien sûr la commission jeunesse et la conférence des élus.

M. Girard: J'en profite pour saluer la présence de la députée de Matapédia, du Bas-Saint-Laurent, qui est l'une de celles d'ailleurs qui revendique auprès du ministre de la Famille un nombre plus important de places pour sa circonscription électorale.

M. Tomassi: Je vais la rencontrer demain. Je la rencontre demain.

M. Girard: Tout comme le député de Rimouski, d'ailleurs.

Je veux revenir sur un des éléments de votre mémoire, à la page 9, dans la section, là, Qu'est-ce qui nous préoccupe?, vous nous parlez de la fragilité de la mobilisation et de la saturation des milieux. Vous nous dites, bon, que c'est souvent les mêmes gestionnaires qui se retrouvent sur les différentes instances de concertation. Il y a des groupes qui, dans le cadre des consultations, nous ont dit souhaiter qu'il y ait une reconnaissance de l'engagement. Il y a beaucoup de ressources humaines qui sont consacrées à la réalisation de projets particuliers. Est-ce que vous croyez que, dans le cadre du financement des projets du fonds, les organismes ou les partenaires qui engagent des ressources financières ou des ressources humaines importantes pour la réalisation de projets particuliers, on devrait tenir compte de ça dans le financement des projets? Parce qu'il y a des groupes qui sont venus nous dire: Bien, il y a des ressources humaines qui ont déjà des tâches importantes dans le cadre de l'organisation d'activités d'organismes famille, on nous demande une implication supplémentaire sur des projets, mais on n'a pas nécessairement les ressources humaines ou financières pour pouvoir le réaliser. Est-ce que ça fait partie des éléments auxquels vous faisiez référence dans la section, là, de votre mémoire?

M. Beaudry (Gérald): Je pense qu'il faut avoir un équilibre entre les fonds investis au niveau des ressources humaines et le support à des activités, également. Ça fait que c'est à regarder là, à ce moment-là, lors des projets, mais toujours en s'assurant que le fonds vient agir de façon complémentaire, que ça ne prend pas la place de toutes les autres mesures qui existent chez l'ensemble des partenaires.

Le Président (M. Kelley): Une dernière question.

M. Girard: O.K. Vous nous parlez aussi, à la page 10, de la pauvreté des... bon, au niveau des communautés, de préciser le sens de l'article 1. On a eu un débat... Bon, plusieurs groupes ? vous avez peut-être entendu certains commentaires, là, de groupes qui vous ont précédés ? qui nous ont indiqué qu'ils souhaitaient qu'on élargisse la définition au niveau des objectifs en termes de financement, que le fonds ne soutienne pas uniquement les enfants 0-5 ans vivant en situation de pauvreté, mais... parce que, selon leur point de vue, il y a des enfants qui seraient pauvres, mais dans des quartiers plus favorisés. Est-ce qu'à votre avis l'article 1 devrait être élargi pour qu'il y ait un financement plus large ou, de votre point de vue, on devrait uniquement concentrer l'intervention dans les secteurs défavorisés selon les différentes cartes et analyses et statistiques qui sont diffusées par de nombreux organismes gouvernementaux locaux?

M. Lagacé (Michel): Essentiellement, tantôt, M. Beaudry l'a dit, je pense qu'on n'a pas les moyens de perdre un enfant qui vit la pauvreté. Donc, dans notre cas à nous, c'est pour ça qu'on a une approche plus à l'intérieur de la communauté comme facteur de soutien au niveau des enfants qui vivent la pauvreté. Donc, dans ce sens-là, ce qu'on veut, c'est, à partir du moment où est-ce qu'il y en a un, on veut le trouver, le soutenir puis faire en sorte qu'il puisse vivre des réussites. Donc ça, je pense que ça... On ne voudrait pas dans le fond qu'un enfant devienne une statistique. Ça, ça... Une réussite, oui, mais pas une statistique.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Mercier.

M. Khadir: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue à toutes et à tous. C'est un beau nom, COSMOSS. C'est très généreux et en même temps ambitieux. Puis en fait ce que je vois, c'est que c'est une table de concertation où il y a beaucoup, beaucoup de public puis aussi quelques partenaires privés, en fait un seul que j'identifie, il y en a sans doute d'autres, il y a la fondation Chagnon, mais disons que c'est très équilibré, d'accord? Il n'y a pas un partenaire privé qui peut exercer une influence prédominante, qui mette en doute le caractère, je dirais, démocratique de la démarche. C'est ce que je comprends.

Dans vos plans... c'est-à-dire vos objectifs, par contre, ce que je remarque, c'est que ça colle beaucoup finalement aux objectifs souvent repris par la fondation Chagnon, c'est-à-dire ? j'essaie de le retrouver pour ne pas les trahir, c'est quelle page déjà, si vous m'aidez? Six, voilà ? alors: Permettre une entrée scolaire réussie; promouvoir de saines habitudes de vie; encourager la persévérance scolaire et la réussite éducative; favoriser une intégration sociale et professionnelle durable. Est-ce que vous avez dû changer quelque chose? Est-ce que vous existiez avant la collaboration de la fondation Chagnon?

Une voix: Oui.

M. Khadir: Oui.

M. Beaudry (Gérald): Peut-être juste faire un petit recul en arrière. Quand on a commencé à imaginer un certain groupe, prendre conscience des réalités présentes, les constats qu'on a faits, je veux dire: il faut agir. On s'est défini un modèle d'organisation. On a identifié, avec nos partenaires notamment de l'agence santé et services sociaux ? Marie-Josée était une partenaire de premier plan ? c'est quoi, les bonnes pratiques, etc. Un coup qu'on a eu convenu qu'il fallait agir, agir ensemble, on a regardé qu'est-ce qu'il se faisait, et: est-ce qu'on a des opportunités à saisir? C'est ce qui nous a amenés à être en relation au départ avec la fondation Chagnon.

Et à la question: Est-ce que c'est la fondation Chagnon qui nous a amenés à modifier notre discours? Je dirais non. Est-ce qu'en cours d'expérience depuis ces cinq années... est-ce qu'on s'est influencés mutuellement? Je dirais oui, pour améliorer toujours nos façons de faire. Et j'ai la prétention de dire que c'est de part et d'autre.

M. Khadir: Par souci de clarté, je dois dire que, ce matin, en conférence de presse, en point de presse, de la part de mon parti, j'ai annoncé une demande d'imposer un moratoire à la création de ces fonds, non pas parce que cette action... J'ai même eu... Chez une amie membre de mon parti, j'ai eu un témoignage comme quoi, par exemple, Québec en forme, là, avait permis l'accès à des enfants de familles pauvres qui n'auraient pas eu autrement l'accès à des activités sportives qui leur avaient été très bénéfiques. Donc, on peut reconnaître qu'il y a une action qui est bien, mais il faut juste s'assurer que la multiplication de ces actions ne vienne pas, ailleurs, introduire des effets secondaires dont j'ai discuté ? vous étiez là ? avec le Dr Julien.

Maintenant, si on propose au ministre votre modèle, c'est un modèle où la fondation Chagnon est un membre, mais pas prépondérante, avec une table large qui implique des gens de la communauté, des gens des différents ministères, des services de santé, des tables régionales d'autres natures. Est-ce que vous penseriez que ce serait un meilleur modèle? Parce que votre modèle, je pense, exportable. Non?

M. Lagacé (Michel): Bien, je pense que dans le fond il est exportable, mais ça dépend... Comme CRE, on a toujours dit, depuis cinq ans, pas de mur-à-mur au Québec, dans le fond qu'on s'adapte en fonction des besoins puis des réalités territoriales. Dans notre cas à nous, le COSMOSS répond à la volonté des gens de faire ensemble, de se concerter, de se mobiliser. Est-ce que c'est pareil partout au Québec? Je ne le sais pas, mais, chose certaine, chez nous, ça marche.

Le Président (M. Kelley): M. Beaudry.

M. Beaudry (Gérald): Et peut-être juste préciser également que ce modèle, c'est un modèle de concertation, ce n'est pas un modèle de gestion.

M. Khadir: Je comprends, mais...

M. Beaudry (Gérald): Ça, c'est très important à souligner.

M. Khadir: D'accord. Mais, si, par exemple, le modèle de gestion s'inspirait un peu de ça en impliquant une plus grande variété de partenaires, moi, c'est sûr que, comme parti, on aurait pu appuyer... on n'aurait pas été pognés à demander un moratoire.

Une voix: ...

M. Khadir: Non, parce qu'actuellement le modèle de gestion, c'est 50 % à la fondation Chagnon et 50 % tout le reste. Là, il y a un problème, surtout quand on tient compte que le financement...

M. Tomassi: ...50-50.

M. Khadir: Comment?

M. Tomassi: O.K., non, mais c'est parfait, là. Continue, là, puis c'est enregistré. C'est bon, ça.

M. Khadir: J'enregistre.

M. Tomassi: Continue.

M. Khadir: Et je voudrais qu'on retienne ça non pas contre moi, mais pour moi...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Khadir: ...pour dire que...

Le Président (M. Kelley): S'il vous plaît, en conclusion, parce qu'on anticipe le débat sur l'article 1, si j'ai bien compris.

M. Khadir: D'accord. Alors, je souhaite simplement que, si, comme les rumeurs ? certaines rumeurs, pas toutes les rumeurs ? le veulent, le ministre actuel de la Famille devient le ministre des Finances...

Des voix: ...

M. Khadir: Ah! C'est déjà fait? Bon. Bien, quand même, à d'autres niveaux, il encourage un modèle plus démocratique à chaque fois qu'on fait intervenir des fonds publics, surtout quand on sait que même le fonds privé est grandement appuyé par les fonds publics. Merci.

Le Président (M. Kelley): Alors, sur ça, il me reste à dire merci beaucoup aux représentants de COSMOSS. C'est un très bel exemple d'une région qui travaille ensemble. Alors, merci beaucoup pour votre présence.

Je vais suspendre, quelques instants, et on va revenir avec les remarques finales.

(Suspension de la séance à 17 h 29)

 

(Reprise à 17 h 34)

Le Président (M. Kelley): Alors, la commission va reprendre ses travaux pour le dernier droit qui est les remarques finales. J'aurais besoin de consentement pour un dépassement de cinq minutes, parce qu'il y a une enveloppe de 15 minutes...

Une voix: Consentement.

Remarques finales

Le Président (M. Kelley): ...alors pour terminer nos travaux à 17 h 50. Alors, on va prendre les remarques finales dans l'ordre suivant: député de Mercier, pour un droit de parole de 1 min 30 s; le porte-parole de l'opposition officielle, pour une droit de parole de six minutes, et le ministre, pour un droit de parole de 7 min 30 s. Alors, sans plus tarder, M. le député de Mercier.

M. Amir Khadir

M. Khadir: D'abord exprimer ma déception du fait que le ministre de la Famille n'ait pas été nommé ministre des Finances. Bon, mais ça, c'est une autre histoire.

Une voix: ...

M. Khadir: D'accord. En fait, j'ai fait la proposition pour Françoise David, ça n'a pas marché, alors je ne pense pas que...

Je reviens sur le fait que, si j'ai dû, ce matin, annoncer que, de la part de notre formation, nous demandions un moratoire aussi bien pour la constitution de ce fonds que celui du projet de loi n° 6, ce n'est pas pour remettre en question l'orientation de lutte à la pauvreté, de soutien aux proches aidants, du développement des jeunes en bas âge, en bas de cinq ans, c'est simplement de dire qu'il ne faut pas, à travers cette action et ce genre de mesures là, venir agir de manière qui est incohérente avec d'autres aspects du travail qui, selon ce que j'ai entendu de la part de l'ex-ministre des Finances... devait être fait, c'est-à-dire une lutte à l'évasion fiscale, et à l'évitement fiscal, ou à tout ce qui s'approche de ce qu'on appelle les pratiques fiscales agressives. Parce que c'est autant de moyens dont l'État se prive, ce qui fait que par ailleurs probablement d'autres que Dr Julien viennent frapper à la porte du gouvernement, puis on leur dit: On n'a pas les moyens, on ne peut pas supporter ces initiatives, qui sont pourtant heureuses, qui sont pourtant nécessaires. Donc...

Le Président (M. Kelley): En terminant.

M. Khadir: ...notre demande de moratoire, c'est un appui au fond des choses mais un rejet du modèle de partenariat financier qui est derrière.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le député de Gouin.

M. Nicolas Girard

M. Girard: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je veux remercier les nombreux groupes, organismes qui ont eu l'occasion de présenter des mémoires. Ils sont venus nous rencontrer dans le cadre de ces consultations particulières. Je sais qu'ils n'ont pas eu beaucoup de temps pour préparer leurs mémoires, mais ils ont présenté des mémoires de grande qualité. On a eu des échanges fort intéressants et fort productifs, assez diversifiés. Et donc l'opposition officielle a pris beaucoup de notes des modifications qui ont été demandées par de nombreux organismes et partenaires lors de cette commission parlementaire.

Donc, on termine aujourd'hui nos consultations particulières, puis le moins qu'on puisse dire, M. le Président, c'est que le ministre a des devoirs à faire pour que son projet de loi tel que formulé soit modifié, parce que, pour le moment, il ne crée pas de consensus. Et je pense, M. le Président, et je l'ai dit à plusieurs reprises dans le cadre des travaux de cette commission, que le ministre ne s'est certainement pas aidé en présentant un projet de loi qui est muet sur plusieurs éléments fondamentaux, comme la gouvernance, la présence de la société civile, la concertation des milieux, le mode de fonctionnement, la reddition de comptes, l'imputabilité, la reconnaissance de l'expertise locale, l'évaluation des résultats et des projets du fonds.

Au fil des travaux, on a un peu eu l'impression que le ministre a dévoilé au compte-gouttes des éléments qui étaient inclus dans le fameux protocole d'entente, dont nous n'avons toujours pas copie à la fin des consultations particulières. Malheureusement, et je le dis très sincèrement, le ministre n'a pas voulu le déposer au cours de cette consultation-là. Je pense que le fait de le déposer dans le cadre des consultations particulières aurait certainement aidé les parlementaires et l'ensemble des organismes, associations qui ont participé au débat à mieux comprendre les objectifs du fonds et du gouvernement. Le ministre a choisi de ne pas le remettre aux parlementaires ni aux organismes participant dans le cadre des consultations particulières. Malheureusement, ce sera uniquement au moment de l'étude article par article, selon l'engagement qu'a pris le ministre.

Je le déplore, je le déplore, parce que c'est quand même un fonds de 400 millions de dollars, dont 150 est investi par le gouvernement, 250 par la fondation Chagnon, sur une période de 10 ans. Il me semble que la moindre des choses aurait été qu'on puisse avoir tous les éléments, tous les documents, toute l'information au moment de la consultation particulière. Et, pour nous, c'est très clair, comme opposition officielle, qu'il y a des détails fondamentaux qui ne sont pas dans le projet de loi, qui visiblement, selon les dires du ministre, seraient contenus dans le protocole d'entente, mais, pour nous, il est clair qu'on n'a pas l'intention de signer un chèque en blanc au fonds qui est présenté par le ministre.

n(17 h 40)n

J'ose espérer que le ministre a pris bonne note des commentaires et qu'il va présenter des amendements importants au projet de loi, et je spécifie bien «au projet de loi», au moment de l'étude article par article que nous aurons l'occasion de faire en commission parlementaire.

Il y a plusieurs groupes et partenaires, comme le Conseil de la famille et de l'enfance, qui ont réclamé un véritable débat public sur le bien-fondé, là, des fonds qui sont cogérés. Le gouvernement procède rapidement en donnant une partie de l'information aux partenaires, y compris aux parlementaires et aux législateurs. Et je veux dire qu'il y a plusieurs commentaires qui ont été faits, fort pertinents. Il y a des groupes qui s'interrogent sur le fait qu'il n'y a pas suffisamment de vision globale du gouvernement, un plan d'action gouvernemental qui précède l'adoption des deux fonds: loi n° 6 et loi n° 7. Il y a des craintes au niveau du dédoublement, des craintes au niveau de la représentation de la société civile, des craintes au niveau de la reddition de comptes.

Je veux cependant mentionner et je tiens à le rappeler au terme de ces travaux, que l'opposition salue la contribution de Lucie et André Chagnon à travers leur fondation. Des mécènes comme eux au Québec, on en aurait besoin davantage. Et personne, personne ne remet en question leur engagement envers les enfants, et ils le font, c'est louable, c'est de bonne foi, et ça, pour nous, c'est très clair, au niveau de l'opposition officielle. Nos interrogations portent davantage sur le fait que c'est le gouvernement du Québec qui élabore les politiques publiques et qu'il ne doit pas, là, déléguer ces pouvoirs et ceux de ses élus à des partenaires privés, doit toujours garder la maîtrise d'oeuvre et le contrôle sur les orientations et la vision et les actions qu'il doit poser au niveau des enfants 0-5 ans, et plusieurs organismes, plusieurs associations sont venus nous le dire dans le cadre de ces travaux.

Ces travaux se déroulent au même moment où il y a aussi des travaux qui se déroulent pour l'adoption du projet de loi n° 6, qui rejoint plusieurs éléments du projet de loi n° 7, et nous avons les mêmes interrogations sur les projets de loi nos 6 et 7, et on aurait souhaité, dans les deux cas, avoir accès aux protocoles d'entente, que les deux ministres fassent le choix de la transparence. Et j'espère qu'au terme de cette consultation très rapidement le ministre fera parvenir à l'opposition officielle le contenu du protocole d'entente afin qu'il puisse être disponible pour les parlementaires, mais pour l'ensemble de ceux et celles qui ont participé à nos travaux. Et je suis convaincu que le débat public réclamé par plusieurs sur ce type de fonds pourra se faire beaucoup plus rapidement une fois qu'on aura l'ensemble des informations, l'ensemble des documents et un protocole d'entente sous la main, puisqu'il semble y avoir plusieurs détails et plusieurs éléments qui s'y retrouvent.

Donc, M. le Président, la balle est dans le camp du ministre. L'opposition officielle est en attente pour voir quelles seront les modifications qu'il entend apporter à son projet de loi, des modifications qui nous apparaissent incontournables et fondamentales, puisque c'est quand même un fonds de 400 millions de dollars. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le ministre.

M. Tony Tomassi

M. Tomassi: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Alors, nous en sommes rendus à terminer cette session démocratique de consultations particulières de groupes qui sont venus nous parler, durant trois jours, sur la mise en place du fonds pour le développement des jeunes enfants. Nous avons entendu beaucoup de choses, beaucoup de groupes sont venus nous parler sur la composition du fonds. La majeure partie des groupes qui sont venus en commission parlementaire sont en faveur de la mise en place du fonds. Ça, il ne faut pas l'oublier, il ne faut pas... Le consensus général, l'unanimité, c'est quelque chose, dans cette vie, qui ne peut pratiquement, des fois, jamais être atteint. L'important, c'est que les groupes qui sont venus, la grande majorité sont en faveur du fonds, des objectifs du fonds. Et je crois aussi entendre le député de l'opposition officielle, qu'il tend à comprendre la nécessité de venir en aide aux jeunes enfants.

Il y a des modifications qui vont devoir être apportées nécessairement, nous l'avons dit tout au long du parcours de cette commission parlementaire, qui est une nécessité. On fait des consultations particulières pour entendre des groupes, pour entendre les commentaires des groupes, des collègues députés de part et d'autre, venir bonifier un projet de loi, ce que nous allons faire nécessairement avec la collaboration de tous et chacun, avec la collaboration aussi des partenaires qui vont être impliqués dans la mise en place du fonds.

Nous sommes emballés sur la volonté et sur cette façon de faire et cette collaboration que le gouvernement du Québec, que l'ensemble de la population du Québec a obtenus depuis les dernières années par la fondation Chagnon, par M. et Mme Chagnon; c'est un plus. Le député de Gouin le disait si bien, on en aurait besoin de plus, de gens comme eux qui viennent apporter un apport considérable à la société québécoise. Pour le gouvernement du Québec, la volonté de mettre sur pied le fonds s'inscrit dans la mission même ? dans la mission même, puis je veux que ce soit clair ? dans la mission même du ministère. Le ministère ne se déresponsabilise pas de ses responsabilités. La volonté du gouvernement de s'associer avec la fondation Chagnon s'inscrit dans cette mission du ministère. Et, si on lit attentivement le document qui met en place le ministère de la Famille et de sa mission, on retrouve cette même mission dans la mise en place du fonds. Et cette vision commune que nous avons avec la fondation Chagnon nous a permis la mise en place de ce fonds. Et c'est dans cette direction-là qu'il faut le regarder.

Nécessairement, il y a des modifications à apporter, qui vont être incluses dans le protocole d'entente, qui est en constante évolution. Si le député de Gouin est bien conscient, lors de la mise en place de d'autres fonds avec la fondation Chagnon, par son propre parti, le même processus avait été établi. On n'a pas réinventé la roue. Alors, je suis un peu surpris des fois de sa critique, mais c'est tout à fait naturel, puis je le comprends, je ne lui en veux pas; c'est un processus qui est normal, on joue chacun notre rôle. Mais l'important ici, c'est qu'on puisse trouver le terrain d'entente pour que les enfants du Québec, les petits enfants, ceux, comme je disais tantôt... feront l'envie de nous, des grands-parents, puissent avoir toutes les chances possibles de leur côté. Et, pour nous, c'est un élément essentiel que le gouvernement puisse continuer dans cette direction.

Nous avons la collaboration de partenaires qui sont venus avec nous, aujourd'hui et les autres jours, nous dire tous les bienfaits de sa mise en place, de cette volonté de mobilisation, de concertation. Oui, probablement, il y a des difficultés sur le terrain qui ont été mises à jour durant les années, mais c'est tout à fait normal, puis les modifications... L'important, c'est qu'il y ait des modifications, il y ait une compréhension. Et le dernier groupe, COSMOSS, qui est venu nous parler pour dire qu'on a évolué, en parlant du fonds et de COSMOSS, on a évolué tous les deux dans la même direction, dans une pensée évolutive pour qu'on puisse améliorer la façon de faire... Et c'est dans ce sens-là que nous allons continuer à avancer.

Il faut aussi dire que le gouvernement ne s'est jamais déresponsabilisé. Il faut aussi rappeler aux partis de l'opposition que depuis 2003 l'aide financière aux familles du Québec a augmenté de plus de 60 %. Alors, c'est un élément essentiel. Ce n'est pas une... déresponsabilisé. Le gouvernement est là pour appuyer, pour soutenir les familles, et, depuis 2003, je crois que notre bulletin est excellent. Et, oui, il y a encore des besoins, on l'admet, il faut travailler dans ce sens-là, et la mise en place d'un fonds comme celui-là permet cette évolution, cette permission d'arriver à un consensus, à un travail d'équipe.

On a bien entendu les groupes qui avaient des préoccupations. Je le répète, on n'est pas ici pour imposer quoi que ce soit. Et je souhaite avoir la collaboration du député de Gouin, de l'opposition officielle, et aussi du député de Mercier, qui, en tout dernier lieu, avec le regroupement COSMOSS, a ouvert une porte sur l'acceptation du fonds, tout en ayant une attention particulière à la composition. Alors, sa condition d'acceptation du fonds, c'est la composition du conseil de gestion. J'en prends bonne note, je pense qu'on en a tous pris bonne note. Et il hoche la tête en affirmant cette position... que je remercie beaucoup, parce que, je pense, c'est assez important qu'on puisse trouver parmi nous cette unanimité qui pourrait permettre rapidement qu'on puisse aller de l'avant.

En terminant, M. le Président, vous savez, c'est mon premier projet de loi, c'est toujours émotionnant, il y a une émotion. Et je voudrais quand même remercier les gens, les collègues de la partie ministérielle, qui ont fait un travail remarquable tout au long de la session, les députés de l'opposition officielle, les recherchistes, qui ont été changés à quelques reprises, mais tout à fait normal, au député...

n(17 h 50)n

Des voix: ...

M. Tomassi: ... ? oui, oui ? et le député de Mercier, à mon attachée politique, Florence Thivierge, qui prend part au développement du Québec en donnant naissance, très bientôt...

Une voix: ...

M. Tomassi: ... ? oui, oui, il va y avoir de la place ? à Mme Line Bérubé, qui est la sous-ministre, qui nous accompagne dans ce beau projet, et aux gens... Andrée Dionne, Ginette Plamondon, Marlène Cadorette et ? je ne revois pas Sokun Cheang, qui était le légiste qui nous a accompagné durant ? Nathalie Smith et Sonia Jean, qui sont au ministère, qui font un travail remarquable.

En terminant, M. le Président, merci à vous et à votre secrétaire pour le travail extraordinaire, pour la manière que vous avez mené ces travaux pour ce premier projet de loi. Et on souhaite que les travaux sur l'étude détaillée article par article puisse aller rondement, qu'on puisse adopter ce projet de loi rapidement pour le bien-être des enfants du Québec. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. Merci beaucoup pour l'ensemble des membres de la commission. Sur ça... Merci beaucoup également à la secrétaire, qui a organisé nos travaux.

Mémoires déposés

Sur ça, je vais... La Commission des affaires sociales ayant accompli son mandat... Oh! Pardon. Une chose que je dois déposer: le mémoire de l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux et le mémoire de l'Association des centres jeunesse du Québec, qui n'ont pas été entendus en audition. Et on peut trouver ces deux mémoires sur le site Greffier de l'Assemblée nationale.

Sur ça, je vais... j'ajourne nos travaux. Nous avons accompli notre mandat. J'ajourne nos travaux à jeudi 9 avril, à 9 h 30, dans cette même salle, afin de compléter les consultations particulières et compléter le mandat d'initiative sur le phénomène de l'itinérance du Québec. Merci beaucoup, bonsoir, et à demain matin, 9 h 30.

(Fin de la séance à 17 h 52)


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