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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Tuesday, August 27, 2019 - Vol. 45 N° 24

Order of initiative on the future of the news media


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Discussion générale concernant le déplacement de la commission en région

Auditions (suite)

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ)

Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ)

Association des médias écrits communautaires du Québec (AMECQ)

Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec

Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec (ARCQ)

Association des journaux régionaux du Québec (AJRQ)

Hebdos Québec inc.

MPV Radio inc.

Intervenants

M. Enrico Ciccone, président suppléant

M. Harold LeBel

M. Samuel Poulin

Mme Isabelle Melançon

M. Louis Lemieux

Mme Marwah Rizqy

Mme Catherine Dorion

Mme Catherine Fournier

M. Christopher Skeete

M. Simon Allaire

Mme Jennifer Maccarone

M. Jean-Bernard Émond

*          Mme Sonia Éthier, CSQ

*          Mme Nicole de Sève, idem

*          M. Stéphane Giroux, FPJQ

*          Mme Catherine Lafrance, idem

*          Mme Gabrielle Brassard-Lecours, AJIQ

*          M. Simon Van Vliet, idem

*          M. Yvan Noé Girouard, AMECQ

*          M. François Beaudreau, idem

*          Mme Amélie Hinse, Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec

*          M. Sylvain Racine, idem

*          M. Martin Bougie, ARCQ

*          Mme Tanya Beaumont, idem

*          M. Éric Tétreault, idem

*          M. François Carrier, idem

*          Mme Sylvie Goneau, AJRQ

*          M. Michael Sochaczevski, idem

*          M. Benoit Chartier, Hebdos Québec inc.

*          M. Renel Bouchard, idem

*          Mme Josée Pilotte, idem

*          Mme Isabelle Vachon, MPV Radio inc.

*          Mme Catherine Vachon, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Ciccone) : S'il vous plaît, veuillez prendre place.

Des voix : ...

Le Président (M. Ciccone) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

M. LeBel : ...

Le Président (M. Ciccone) : Oui, M. le député.

M. LeBel : ...si possible.

Le Président (M. Ciccone) : Oui, allez-y.

Discussion générale concernant le déplacement
de la commission en région

M. LeBel : J'aimerais avoir de l'information de la commission sur... Je pense que ça faisait consensus ici, on voulait se déplacer en région, au moins deux régions, pour aller entendre les médias régionaux. J'aimerais savoir où on en est rendus avec ça. Le temps presse, et, si on veut se rendre en région, permettre aux gens de venir déposer des mémoires, on devrait avoir une décision le plus rapidement possible.

Le Président (M. Ciccone) : Mais je crois comprendre que la demande a été acheminée auprès de la Commission de l'Assemblée nationale, puis nous sommes toujours en attente d'une décision, là.

M. LeBel : J'invite tout le monde à faire des pressions auprès de cette commission pour qu'elle décide rapidement de nous autoriser les frais, parce que tout le monde serait heureux, je pense, d'aller entendre les gens en région de ce qui se passe en région par rapport aux médias. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci, M. le député, votre message... Oui, monsieur...

M. Poulin : ...je remercie le député de Rimouski de nous rappeler à l'ordre. C'était un souhait de l'ensemble des membres de la commission, de se déplacer en région. Entre autres, on avait ciblé deux régions où on souhaitait passer du temps pour pouvoir rencontrer les médias, prendre le temps de les écouter, de les entendre. Alors, de notre côté, nous avons réitéré le souhait d'aller visiter ces deux régions-là, et effectivement, M. le Président, vous faites bien de le rappeler, on est en attente de la décision de la Commission de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Oui, Mme la députée de Verdun.

Mme Melançon : Merci. Je suis totalement d'accord avec le collègue de Rimouski, on s'en était parlé. Moi, ce que je tiens à mentionner... parce que, malheureusement, dans le salon bleu, ça a déjà été dit que, si la commission était lente, puis si notre... la ministre avait dit : C'est long, puis c'est long, la commission, puis je ne comprends pas que ce soit si long. Puis là — je vais regarder le député de Saint-Jean — on s'était tous regardés en se disant : Bien là, c'est parce que tout allait très, très bien. Je veux juste exprimer à la caméra que ce n'est pas le souhait des élus, actuellement, de retarder quoi que ce soit dans cette commission-là. On a toujours mis vraiment l'épaule à la roue. Tout le monde travaille en collégialité. Mais là il faut quand même qu'on puisse avoir rapidement un retour parce que, rendus à la fin du mois de septembre, on va tous être à l'Assemblée nationale et on n'aura plus le temps d'aller en région, on le sait très bien. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ciccone) : Merci, Mme la députée. M. le député de Beauce-Sud.

M. Poulin : ...en terminant, pour faire du pouce sur ce que ma collègue la députée de Verdun vient de dire, effectivement, on est en attente de la Commission de l'Assemblée nationale, qui ne relève pas du gouvernement du Québec puis qui ne relève pas de la ministre. Je pense que le souhait de l'ensemble de la population du Québec, c'est que cette commission-là puisse aller rapidement. C'est le souhait également du gouvernement du Québec. Alors, je pense que nos travaux vont bien jusqu'à présent, vont rondement, et on est en attente, effectivement, de la Commission de l'Assemblée nationale, qui, je souhaite le rappeler, ne relève pas du gouvernement du Québec. Mais je pense que le point d'ordre de mon collègue de Rimouski pourra peut-être amener une pression supplémentaire, particulièrement auprès de la présidence de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Et moi, je souhaiterais qu'on débute la commission, on a des invités qui sont avec nous aujourd'hui. Merci beaucoup.

Alors, la commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières concernant le mandat d'initiative portant sur l'avenir des médias d'information.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements pour ce mandat?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Labrie (Sherbrooke) est remplacée par Mme Dorion (Taschereau) et Mme Hivon (Joliette), par M. LeBel (Rimouski).

Le Président (M. Ciccone) : On m'indique qu'il y a consentement pour les remplacements suivants pour toutes les séances de cette semaine.

La Secrétaire : M. Asselin (Vanier-Les Rivières) sera remplacé par M. Allaire (Maskinongé) et Mme Grondin (Argenteuil), par M. Thouin (Rousseau).

Le Président (M. Ciccone) : Oui, Mme la députée de Verdun.

Mme Melançon : Nous allons, bien sûr, donner notre consentement, mais ce que nous souhaiterions du côté, aussi, gouvernemental, c'est que la collaboration puisse aller dans les deux sens pour ce genre de collaboration dans les différentes commissions.

Auditions (suite)

Le Président (M. Ciccone) : Merci, Mme la députée de Verdun.

Cet avant-midi, nous entendrons la Centrale des syndicats du Québec, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, l'Association des journalistes indépendants du Québec et l'Association des médias écrits communautaires du Québec.

Maintenant, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Centrale des syndicats du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole est maintenant à vous.

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Mme Éthier (Sonia) : Merci, M. le Président. M. le Président, membres de la commission, je vous remercie beaucoup de permettre à la CSQ de présenter son point de vue sur l'avenir des médias. Je vous présente Mme Nicole de Sève, conseillère au dossier, et moi-même, Sonia Éthier, présidente de la Centrale des syndicats du Québec.

Vous le savez sûrement, la CSQ représente 200 000 membres et compte 10 fédérations, 240 syndicats affiliés en fonction de leurs secteurs d'activité et, en particulier, nous représentons le Syndicat des employés en radio-télédiffusion de Télé-Québec.

Donc, la CSQ tient vraiment à souligner l'initiative de cette commission, qui est non partisane et qui est vraiment très importante, parce que l'écosystème dans lequel évoluent l'ensemble des médias est plus que transformé, on le sait, on le voit, par... cette semaine, les nouvelles technologies de l'information.

Donc, comme vous avez pu le constater à la lecture du mémoire, nous avons choisi de consacrer presque exclusivement notre mémoire aux enjeux entourant Télé-Québec, parce que c'est notre télévision publique nationale et aussi pour son rayonnement en région. D'ailleurs, nous connaissons quand même bien Télé-Québec, puisque nous y sommes intéressés depuis plusieurs années, et on croit que son unicité réside dans sa mission d'éducation, de culture et d'information totalement différente des réseaux privés. Donc, on réitère que le gouvernement a la responsabilité de protéger la seule chaîne publique québécoise, dont la voix permet à l'ensemble de la population de participer à tous les grands débats qui la concernent. Et c'est un élément que nous avions dit, en 2004, dans notre mémoire, lorsqu'il y a eu la consultation du groupe de travail chargé de l'examen de Télé-Québec.

Puisque vous avez pris connaissance du mémoire, nous allons quand même aborder les éléments qui nous semblent les plus importants et on va vous faire part de nos recommandations. Premièrement, dire que Télé-Québec, c'est une petite et une grande télévision publique nous amène à faire trois constats qui sont vraiment très importants. L'auditoire de Télé-Québec est en hausse. Entre autres, on sait que Télé-Québec a rejoint 3,8 millions de téléspectateurs en moyenne chaque semaine et donc 51 % des francophones. Et rappelons aussi que 75 % des émissions sont offertes sur le site Internet telequebec.tv, lancé en 2004, et on y retrouve quand même 963 000 visiteuses et visiteurs par mois, et ce site est le cinquième site télévisuel le plus visité.

• (9 h 40) •

D'ailleurs, dans son rapport annuel, le diffuseur public précise qu'en tant que média public francophone multiplateforme Télé-Québec doit être présente sur toutes les plateformes numériques pour répondre à son mandat d'accessibilité sur le territoire. D'ailleurs, dans une entrevue radiophonique, la ministre de la Culture suggère une piste de réflexion très intéressante, qui est d'utiliser la plateforme numérique de Télé-Québec pour diffuser de l'information, en disant que celle-ci est sous-exploitée, et ça rejoint, vous allez voir, une de nos demandes. Et rappelons qu'en 2018, dans le cadre de la nouvelle politique culturelle, l'ancien gouvernement a octroyé 13,7 millions de dollars à Télé-Québec sur trois ans pour accroître la diffusion de contenu audiovisuel sur la plateforme telequebec.tv. Donc, une première recommandation, c'est que nous tenons à souligner cette contribution supplémentaire, qui a été bienvenue pour Télé-Québec, et on demande aussi au gouvernement du Québec d'assurer à l'ensemble du réseau de Télé-Québec le financement qui lui est nécessaire pour lui permettre de se développer adéquatement.

Donc, un autre élément important, depuis 2014, on retrouve sur le site Web du diffuseur La Fabrique culturelle, qui est un média à 100 % numérique. Et, comme vous le savez sûrement, on y retrouve 1,1 million de visites d'internautes, plusieurs membres et des demandes de branchement. C'est donc une plateforme unique qui constitue un canal d'information culturelle régionale, parce que vous savez que nous sommes dans 10 régions, 10 régions, plus précisément, et ce qui est bien important, c'est que ça contribue à la vitalité économique des régions.

Mais il y a quand même une certaine problématique, c'est qu'il y a 340 000 ménages qui n'ont pas accès à Internet, malgré le programme Branché qui avait été lancé en 2016, et il y a seulement neuf projets qui ont été acceptés sur les 82 soumis. Donc, une deuxième recommandation, c'est qu'on pense que le gouvernement devrait peut-être accélérer le financement de ces projets en attente dans le cadre du programme Branché afin de permettre à toutes les régions d'avoir accès à Internet. Et on a aussi une autre recommandation, qu'on invite le gouvernement à déposer un plan qui vise à déployer un service de haute vitesse performant dans toutes les régions du Québec et de discuter avec les MRC qui sont intéressées par ce projet.

Malgré la présence dans les 10 bureaux régionaux, on sait bien que, les citoyens, il y a un droit, je dirais, fondamental, mais qu'ils ont le droit de se reconnaître et de revendiquer une présence à l'écran à travers leur fenêtre nationale. Donc, on l'avait mentionné à la page 7 de notre mémoire, cette absence se vérifie aujourd'hui, on le sait, et risque de se faire sentir encore plus, parce que les hebdomadaires régionaux de la presse écrite sont durement touchés, et ça laisse craindre à des déserts médiatiques, que plusieurs régions ou localités n'auront accès à des nouvelles qui les concernent.

On se rappelle, hein, que les géants du Web, par une concurrence, on va dire, déloyale, ont déjà entraîné la fermeture de 28 % des journaux régionaux, et ça continue, et ça, depuis 2010, donc on est inquiets. Et les problèmes vécus par Le Groupe Capitales Médias illustrent l'ampleur du problème, et on pense que le gouvernement doit trouver des solutions qui sont durables. Et on prend un petit moment pour exprimer notre solidarité envers les travailleuses et travailleurs qui traversent cette période. Et on veut quand même saluer le geste du gouvernement pour l'aide ponctuelle apportée. Et il faut trouver collectivement des solutions, mais c'est vraiment à court terme qu'il faut le faire.

En fait, on croit que Télé-Québec ne peut pas remplacer ces médias, ça, c'est bien important de le noter, mais elle peut contribuer à maintenir une vitalité d'information dans toutes les régions. Peut-être devrions-nous consacrer plus d'efforts à la production d'émissions d'affaires publiques ou de bulletins d'information régionaux. C'est une question qu'on peut se poser ici. Donc, une autre recommandation, on invite le gouvernement à réfléchir à accorder un mandat d'information régionale à Télé-Québec. Donc, c'est une réflexion qu'on soumet.

Sur la question du financement, on sait que les dépenses, à Télé-Québec, sont plus importantes que les revenus. Il y a eu, dans le rapport annuel, un déficit, un manque à gagner de 4 millions. Et, malgré l'aide supplémentaire qui a été apportée, c'est un pas dans la bonne direction, mais c'est insuffisant. Pour nous, il faut un financement qui est stable et récurrent. Est-ce que le gouvernement pourrait faire plus? On pense que oui. Et donc on a quelques petites solutions, c'est-à-dire qu'on invite la commission... le gouvernement d'investir une partie de la taxe de vente du Québec perçue par Revenu Québec — puis je pense qu'il y d'autres organisations qui ont aussi soumis ces propositions — auprès des grandes compagnies comme Amazon, etc., dans des mesures aux médias québécois, particulièrement Télé-Québec, et aussi... Et, à l'image de ce qui se fait dans certains pays européens, est-ce que le gouvernement du Québec pourrait étudier la possibilité d'obliger les gros joueurs de l'information à payer des impôts et des redevances à l'État du Québec pour contribuer au financement des médias québécois? On sait que le fédéral a fermé la porte à cette possibilité, mais on croit que le gouvernement du Québec pourrait faire preuve d'un courage politique afin de permettre aux médias régionaux de continuer leur mission.

Donc, en conclusion, ce que je pense qu'il est important de retenir, c'est la pérennité de Télé-Québec, son développement régional, en assurer le financement. Et rappelons-nous aussi qu'une information de qualité, c'est aussi le gage d'une démocratie en santé. Et je le rappelle... je l'ai dit au départ, mais que Télé-Québec, c'est un bien collectif, et le gouvernement a la responsabilité de protéger la seule chaîne québécoise dont la voix permet à l'ensemble de la population de participer à tous les débats.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous sommes maintenant rendus à la période d'échange, et on commence avec la partie gouvernementale pour 15 minutes, avec le député de Beauce-Sud.

M. Poulin : Merci beaucoup, M. le Président. Je vous salue. Merci également pour votre présence en commission parlementaire ce matin. Merci de nous parler également de Télé-Québec. On ne répétera jamais assez l'importance de cette télévision québécoise, l'importance de la financer, de la soutenir, également de tenir des émissions d'affaires publiques, vous l'avez bien signifié. Depuis déjà plusieurs années, à Télé-Québec, on a assisté à un tournant qui est fort intéressant, où on retrouve de nouvelles émissions d'affaires publiques qui brassent, qui remettent en question, et qui, je crois, font bouger le Québec, et offrent surtout une programmation de grande qualité aux Québécois.

Évidemment, il faut investir dans Télé-Québec. Le nerf de la guerre, on l'a vu, là, depuis déjà plusieurs jours, le nerf de la guerre, ça demeure l'argent. Alors, il faut investir des sommes financières qui sont importantes, je pense qu'on l'a fait également dans le dernier budget, mais tout part aussi de la projection qu'on souhaite donner à Télé-Québec.

Avant, peut-être, de venir à ma question, vous nous avez parlé d'Internet haute vitesse. Effectivement, c'est très important. Le gouvernement du Québec va proposer un plan, au cours des prochaines semaines, des prochains mois, qui va viser à répondre à ce souhait d'avoir Internet haute vitesse le plus rapidement possible dans toutes les régions du Québec, donc, qui va nous permettre, effectivement, de consommer à son maximum des médias québécois. Donc, ça, c'est un élément fort important sur lequel on est déjà au travail. Ça aurait dû être fait depuis longtemps, mais, pour l'instant, on agit.

Et je veux vous parler du mandat, que vous proposez, d'information régionale du côté de Télé-Québec, dans un moment où, oui, on souhaite une diversité d'information dans les différentes régions, mais à un moment où on a déjà des médias régionaux privés, dans les régions du Québec, qui vivent des moments aussi extrêmement difficiles. Vous avez fait référence, tout à l'heure, à Capitales Médias. Alors, j'aimerais avoir votre vision sur une cohabitation entre un nouveau modèle d'information publique en région, où Radio-Canada se trouve déjà, et le fait qu'on a déjà des joueurs privés mais également des hebdos coopératifs, que ce soit du Web, de la télé, de l'écrit, et là d'en ajouter un autre, tout dans cette optique du souhait d'avoir une pluralité d'information, de la diversité d'information, d'avoir plus de joueurs qui se retrouvent dans la même région. Mais comment vous verriez cette cohabitation-là, qui ne pourrait pas nuire à des joueurs en place qui ont déjà des défis?

Mme Éthier (Sonia) : Bien, écoutez, ce que je disais tout à l'heure, il ne faut absolument pas qu'on installe une compétition. Ça, c'est vraiment important dans le traitement que la commission va devoir traiter, dans les réflexions que vous allez avoir, il n'est pas question d'entrer en compétition. Je pense qu'il peut y avoir une complémentarité, et Télé-Québec peut assurément avoir un rôle à l'intérieur de toute la question de l'information.

M. Poulin : Est-ce que, dans ce rôle-là, vous voyez quelque chose d'extrêmement précis? C'est sûr que les bulletins de nouvelles régionaux quotidiens demeurent très importants. Ça se fait en complémentarité, souvent, avec le quotidien du coin, parce qu'on sait que, quand même, pour remplir un bulletin de nouvelles de 30 minutes à tous les jours, ou de 45 minutes, ou d'une heure, ça nous prend du contenu, ça nous prend de la nouvelle, donc ça nous prend des journalistes qui vont sur le terrain, qui creusent la nouvelle, qui, par exemple, dans une région comme le Saguenay—Lac-Saint-Jean, ont à couvrir un large territoire. Alors, ça prendrait des ressources assez importantes, parce que l'objectif, ce serait de le faire mais de le faire bien, de ce que je comprends de ce que vous me dites.

• (9 h 50) •

Mme de Sève (Nicole) : Il y a une différence entre dire : Nous allons avoir une chaîne de télévision publique qui ferait de l'information quotidienne... Il peut y avoir différentes hypothèses qui sont développées, exemple un bulletin d'information régional et local qui pourrait être hebdomadaire ou mensuel, ce n'est pas... ou bien des émissions d'affaires publiques qui mettent en jeu des enjeux régionaux. On a déjà eu Droit de parole, mais ce n'était pas très local et régional. Il peut y avoir cette mission-là qui est confiée...

Si on a été capables de créer Espaces autochtones, c'est parce qu'il y avait une population qui était tout à fait oubliée dans l'appui journalistique au Québec. Bien, si on est capables de le faire et de rendre enfin... parce qu'ils vont avoir enfin leur premier bulletin francophone hebdomadaire à compter de l'automne, bien, pourquoi on ne le ferait pas pour l'ensemble de la population qui vit dans des régions où... Je m'excuse, mais moi, j'ai commencé, quand j'étais très jeune, au Clairon de Saint-Hyacinthe, mais je sais que la plupart des hebdos... ou des hebdos, même, de quartier dans plusieurs villes ont disparu. Il n'est plus question de ce qui se passe. Mes marchands ne savent pas à qui s'adresser. Ce n'est pas vrai qu'ils vont tous annoncer dans la La Voix de l'Est, La Tribune ou quoi que ce soit. Donc, qu'est-ce qu'on fait pour faire rayonner pas simplement la nouvelle nationale, mais la nouvelle régionale, les enjeux régionaux, qu'ils soient économiques, qu'ils soient sportifs, qu'ils soient culturels? Et c'est pour ça qu'elle a sa place, je suis convaincue.

Maintenant, le modèle est à travailler avec Télé-Québec. Mais, si on a été capables de développer ce créneau-là en matière de La Fabrique culturelle et d'être capables de développer et de faire connaître nos artistes qui sont partout en région, on est capables de le faire pour l'ensemble des autres médias d'information sans écraser personne, parce que, de toute façon, il y en a la majorité qui sont déjà morts. Alors, pourquoi ne pas utiliser ce que nous avons peut-être de meilleur, qui est notre télévision publique?

M. Poulin : Bien, Mme Éthier et Mme de Sève, elle était là aussi, mon interrogation, à dire : Si on ajoute un nouveau joueur, de quelle façon on peut y trouver bien sa place sans que ça enlève quelque chose aux autres? Puis, je pense, vous mettez le doigt sur un bobo hyperimportant. Les «success stories», si vous me passez l'expression en anglais, qui existent déjà à la télévision québécoise, avons-nous la possibilité de les déplacer davantage en région, qu'ils parlent davantage des régions? Notre Tout le monde en parle, à Radio-Canada, ils ne se sont pas bien, bien déplacés dans les régions au cours des dernières années, puis Dieu sait que c'est un succès à la télévision québécoise. Alors, de faire parler les régions dans nos émissions de télévision québécoises actuelles, je pense qu'il y a des incitatifs que nous devrions créer pas seulement à Télé-Québec, mais également dans les grandes chaînes de télévision, à dire : Parlez-nous plus des régions et mettez en valeur cette information régionale là.

Je me souviens d'une émission à Radio-Canada, La petite séduction,qui se promenait dans les villages du Québec puis qui mettait en valeur les trésors de nos villages au Québec, et il en faudrait plus, de ça, il en faudrait plus, de moments où on peut mettre en valeur ce qui se passe dans nos régions. Alors, je pense, vous avez bien raison, puis effectivement Télé-Québec doit être un partenaire précieux. En vous remerciant, je vais céder la parole à un de mes collègues.

Le Président (M. Ciccone) : Je reconnais maintenant le député de Saint-Jean.

M. Lemieux : Merci, M. le Président. Évidemment, vous l'avez dit d'entrée de jeu, votre mémoire est beaucoup concentré sur Télé-Québec, mais j'ai aimé entendre ce que vous avez dit par rapport aux raisons pourquoi vous en arrivez là et la description que vous faisiez, entre autres de la région autour de Saint-Hyacinthe, des médias écrits. Et c'est un peu ça que je voulais vous entendre nous dire, dans la mesure où, aussitôt qu'on parle de Télé-Québec puis d'information, tout le monde pense au passé. On est en 2019, vous réclamez de l'Internet pour tous, partout, tout le temps, à haute vitesse, parce qu'on veut faire pas nécessairement ce qu'on a connu dans le passé en termes de contenu et de production télévisuelle, mais je vous ai entendues répéter ce qu'on a entendu de la ministre, la semaine dernière ou la semaine d'avant, qui parlait d'une plateforme de contenu écrit aussi. Quelqu'un me soulignait récemment qu'il y a probablement plus de contenu écrit sur la plateforme de radiocanada.ca/info que... sinon nulle part ailleurs, que dans beaucoup d'autres plateformes de médias écrits. Donc, il y a une espèce de convergence des contenus en ce moment.

Expliquez-moi ce que vous avez en tête. Et je comprends que vous êtes la partie syndicale, là, O.K.? D'ailleurs, Télé-Québec vient nous voir mercredi après-midi, on va pouvoir leur demander à eux. Mais, de votre point de vue, ces contenus-là régionaux, locaux auxquels vous rêvez, ce serait quoi?

Mme Éthier (Sonia) : Bien, je pense que Mme de Sève a bien répondu, tout à l'heure, sur la spécificité que Télé-Québec peut avoir. Et moi, j'insiste sur le fait qu'il y a une question de démocratie, d'expression de la démocratie par rapport à ce que Télé-Québec peut faire et sa mission première, hein, mission première, on l'a dit tout à l'heure : éducation, culture, information. Et je pense que les citoyennes et citoyens des régions doivent et peuvent avoir accès à ce qui se passe au niveau régional pour exprimer leur... en toute démocratie. Par exemple, quand il y a des élections, s'il n'y a pas de médias écrits ou s'il n'y a pas de possibilité pour les citoyens de connaître ce qui se passe dans leur région, bien, je pense que ça pourrait être un aspect qui pourrait être abordé par Télé-Québec, là.

M. Lemieux : Justement... À moins que vous ayez quelque chose à rajouter, madame?

Mme de Sève (Nicole) : Vous parlez de... Il y a un exemple, moi, qui me vient en tête. Quand entendons-nous parler du secteur des pêcheries sur les grands médias télévisuels? Rarement, sauf quand il y a une crise de la morue ou bien non qu'on n'est pas capables de sortir nos bateaux pour la pêche au crabe, nos crabiers. Il me semble que ça, ça peut être intéressant, dans une région, de poser l'ensemble des enjeux, qui peut être même repris, après ça, sur la scène nationale, mais d'essayer de voir, dans le quotidien, qu'est-ce que ça veut dire, la crise des pêcheries, comment ça peut se résorber. C'est dans ce sens-là où il y a des enjeux.

À part Montréal, là, il y a des enjeux au Québec. Je suis une petite fille de Montréal, ça fait que je n'ai pas de problème de le dire, mais il y a des enjeux qui sont sérieux dans le développement économique, dans le développement culturel. La vitalité des cégeps en région, tout ce qui se fait au niveau de la culture dans nos cégeps, qui n'est jamais repris. C'est bien beau, le Rideau vert, c'est bien beau, La Cordée, c'est bien beau, mais il y a des choses qui se passent. C'est dans ce sens-là où il peut y avoir cet agenda politique qui nous permet de fouiller certaines questions qui vont aller chercher le coeur des gens. Ils vont savoir qu'on parle de Maria, de Carleton ou d'ailleurs. Puis ça, c'est important, mais on n'en entend jamais parler. On va parler... oui, quand ils vont sortir le bateau, puis quand ils vont rentrer, puis les quotas, mais il y avait d'autres choses à discuter dans ces enjeux-là.

Donc, ça peut être un exemple. Je ne parlerai pas au nom de Télé-Québec, mais ce que je veux dire, c'est qu'il y a... l'imagination au pouvoir, ça peut faire des merveilles.

M. Lemieux : J'ai presque envie de vous dire que vous prêchez à un converti, mais en même temps je voudrais vous entendre davantage sur votre vision de ce que ce serait... Et je comprends très bien que ce n'est pas vous qui faites la programmation. Mais les arguments, là, sur la montréalisation des ondes, déjà hier, en une demi-journée, on en a empilé pas mal. Puis je suis d'accord avec vous par rapport aux besoins que les régions ont de parler au reste des Québécois, mais ils ont besoin de se parler entre eux aussi. Ils ont besoin de savoir c'est quoi, les faits, pour être capables d'en discuter dans une grande émission d'affaires publiques et une tribune, dont vous parliez tout à l'heure, qui ressemble à La Fabrique culturelle,j'en suis, mais il faut qu'on commence par savoir ce qui se passe chez soi. Est-ce que c'est ça, votre vision? Est-ce que vous voulez que Télé-Québec participe à la dissémination de l'information de base dans les régions aux régions?

Mme de Sève (Nicole) : J'aurais envie de vous répondre, monsieur, que, si jamais vous allez dans ce sens d'élargir le mandat de Télé-Québec, il y a plusieurs intervenants, au Québec, qui vont être heureuses et heureux de s'asseoir pour discuter de ce que... Mais ce n'est pas aujourd'hui que je vais vous dire comment ça va se faire, de toute façon, je n'ai pas cette capacité-là, mais on peut s'asseoir et de voir. Et à ce moment-là, là, vous pouvez asseoir vos MRC, vous pouvez asseoir plein d'actrices et d'acteurs, vos réalisateurs qui sont déjà dans le champ, qui sont déjà dans le milieu et de voir ça serait quoi. Et on peut y aller progressivement, on ne va pas transformer ça du jour au lendemain.

Mais je pense qu'aujourd'hui on ne peut pas... même vous, vous ne seriez... vous ne pourriez pas le faire. Donc, essayons de dire : L'acceptez-vous, l'élargissement du mandat, comme gouvernement? Si vous l'acceptez, si vous le passez, à ce moment-là, on va se rasseoir, groupe de travail, puis on va avancer, puis on peut avancer très vite.

M. Lemieux : On va en reparler avec Télé-Québec demain, puis je ne veux pas aller trop loin dans le dossier par rapport à la direction et pas le syndicat. N'empêche qu'en 2011 le rapport Payette, qui était probablement le dernier rapport conséquent par rapport à ce qu'on est en train de faire aujourd'hui, proposait d'étudier la faisabilité d'une plateforme d'information interrégionale. J'ai presque envie de dire que c'était très visionnaire, à l'époque parce que c'est un peu ce dont on est en train de parler en ce moment. D'ailleurs, en 2012, ils ont travaillé là-dessus puis ils ont effectivement publié un projet relativement concret, à l'époque. Vous opinez du bonnet, vous le connaissez aussi bien que ce que j'ai pu en lire moi aussi. Sans dire : Oui, c'est ça que ça prend, c'est l'esprit de ce que vous voudriez voir, je pense, je veux savoir.

Mme de Sève (Nicole) : Encore une fois, je vous répète que, oui, il y a des choses qui étaient très intéressantes dans le rapport Payette. Moi, je nous invite, si vous prenez cette orientation-là, que nous nous assoyons et nous regardons comment nous pouvons le développer.

M. Lemieux : Vous avez parlé de démocratie tout à l'heure. Effectivement, c'est un leitmotiv. Il n'y a pas personne qui vit, ces jours-ci, sans savoir que l'information est reliée à la démocratie. Le problème de ceux qui viennent nous voir, c'est qu'ils ont besoin de retrouver une marge de manoeuvre financière. Ce que je conclus de ce que vous nous dites, c'est qu'il faut élargir le mandat, mais ça va prendre des gros moyens pour aller avec aussi.

• (10 heures) •

Mme Éthier (Sonia) : C'est incontournable pour nous, puis je pense qu'on... Je lisais le rapport de Daniel Giroux, de l'Université Laval, qui... il y avait un élément qui était très important sur le soutien financier des gouvernements, puis je pense que ça vaut la peine de se rappeler que l'information, ce «n'est pas un bien comme les autres — là, je le cite. D'abord parce [que ça] contribue au dynamisme de la vie démocratique d'une société [...] qu'elle tisse des liens de nature diverse entre les personnes qui la composent.»

Et il y a plusieurs caractéristiques qui sont importantes, parce que les frais encourus par la collecte de nos nouvelles, son traitement, sa diffusion, c'est le même coût si on diffuse pour 10 000 ou pour 100 000 personnes. Et là ce qui apparaît de plus en plus, je dirais, déterminant dans le paysage, c'est que les nouvelles, lorsqu'elles sont publiées, échappent au contrôle...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Éthier (Sonia) : Pardon?

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Éthier (Sonia) : Oui, bien, c'est ça, c'est que je pense que le gouvernement devra se questionner sur est-ce qu'on investit davantage, parce que c'est une question de démocratie puis je pense qu'il y a... une société serait gagnante à ce que les gens puissent connaître...

Le Président (M. Ciccone) : Merci.

Mme Éthier (Sonia) : ...oui.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je dois respecter le temps, malheureusement. Merci beaucoup.

Mme Éthier (Sonia) : Parfait.

Le Président (M. Ciccone) : Je cède maintenant la parole, pour près de 10 minutes, à l'opposition officielle, soit à la députée de Verdun. Allez-y.

Mme Melançon : Bien, moi, vous étiez sur une lancée, je vous laisserais quelques minutes, en tout cas, une ou deux minutes si vous voulez terminer, parce que, là, je vous ai sentie pressée vers la fin. Est-ce que vous aviez d'autres choses à ajouter? Parce que c'était quand même intéressant.

Mme Éthier (Sonia) : Bien, ce que je disais par rapport au questionnement sur l'information qui n'est pas un bien, hein, comme d'autres biens... et c'est tout à fait dans l'intérêt du gouvernement, et des citoyennes, et des citoyens que, justement, les citoyens puissent exercer leur démocratie, prendre connaissance des enjeux régionaux qui les concernent pour être capables de se les approprier puis de s'exprimer aussi.

Alors, est-ce qu'on peut penser que le gouvernement laisse passer la parade, entre guillemets, et puis... on l'a salué tout à l'heure, là, le 5 millions qui a été rapidement prêté, là, pour qu'on puisse continuer. On pensait de poursuivre jusqu'en décembre, ça ne sera malheureusement pas possible. Mais c'est vraiment très... Puis là, en plus, je regardais, ce matin, dans les médias, le gouvernement du Québec a dépensé 3,7 millions en publicité sur la plateforme du géant Web, 12 % en 2018‑2019, mais 9 % l'année précédente. Alors là, il y a une question à se poser : Est-ce qu'on peut continuer comme ça? Est-ce qu'il n'y aurait pas des éléments qu'on pourrait... des gestes que le gouvernement pourrait poser pour encourager les médias régionaux pour être capable de les sauver puis sauver cette démocratie, nécessaire aux citoyennes et citoyens?

Mme Melançon : Merci. Je voulais que vous puissiez aller jusqu'au bout de votre idée, donc, merci.

Je vais avoir quelques questions en rafale pour vous, si vous permettez. D'abord sur l'exemplarité de l'État, hein, on a voté une motion, à l'Assemblée nationale, et j'ai posé la question à différents groupes hier, à savoir est-ce que vous avez fait certains calculs, de votre côté, à savoir où va se retrouver l'équilibre. Est-ce qu'on doit, comme élus, demander à l'Assemblée nationale ainsi qu'au gouvernement des publicités? On ne peut pas complètement ignorer les grands joueurs du Web, mais en même temps ça prend aussi l'équilibre. Et je voyais les différents tableaux, là, qui nous montraient l'explosion, justement, où on utilisait peut-être trop ces géants du Web. Alors, je ne sais pas si vous, vous avez fait un calcul en pourcentage à ce que cela représente. J'ai posé différentes questions, plusieurs m'ont dit non, là. Ce n'est vraiment pas une trappe, c'est juste pour savoir si vous l'avez regardé.

Mme Éthier (Sonia) : Nous n'avons pas fait ce travail-là.

Mme Melançon : D'accord. J'ai trouvé ça intéressant, à l'intérieur du mémoire, vous parlez des 10 bureaux régionaux. Donc, il y a quand même des régions où il n'y a pas de bureaux régionaux, actuellement, donc où il pourrait y avoir un désert, dont on parlait hier, un certain désert médiatique. Est-ce que vous pouvez me cibler là où il n'y en a pas et là où on devrait en avoir? Et, dans un deuxième temps, est-ce que vous avez calculé combien est-ce que ça pourrait représenter... combien on a besoin pour arriver à peu près là où vous nous amenez? Est-ce que vous l'avez chiffré?

Mme Éthier (Sonia) : Absolument pas, non, on n'a pas chiffré toute cette question, là. Au fond, ce qu'on voulait faire, c'est d'amener des pistes de réflexion pour la commission, pour réfléchir, pour trouver des solutions.

Mme Melançon : Parce qu'il faut réfléchir un peu à l'extérieur de la boîte, hein, on l'a dit assez souvent, là. Je pense que, le modèle, on est arrivés à une fin en soi, là. Si on est tous là en commission, c'est qu'on voit qu'on a besoin de nouveaux modèles d'affaires, on a besoin de réfléchir. Alors, je vais réfléchir à l'extérieur de la boîte avec vous ce matin. Par exemple, puis je le lance comme ça, là, en toute réflexion avec vous, si on mettait Tou.tv, Illico... si tout le monde pouvait se regrouper sous un même chapeau pour tenter, justement, d'être attrayant pour la population pour pouvoir se retrouver avec, bien sûr, des vitrines plus régionales, sous un chapeau qu'on pourrait identifier comme étant Télé-Québec, est-ce que vous pensez que c'est quelque chose qui est faisable?

M. de Sève (Nicole) : Vous êtes rendue pas mal loin dans votre réflexion, dans les fusions d'organigrammes et d'organisations. Tou.tv se retrouve sur le site de Radio-Canada, Illico, à ce que je sache, c'est privé, et Télé-Québec, c'est notre seule télévision publique. Une proposition comme la vôtre m'inquiète, dans le sens que... est-ce qu'on risquerait de perdre, justement, cet aspect, qui est extrêmement important, qui fait que Télé-Québec est une télévision publique? Ça, ça m'inquiète. Pas fermée, mais, encore là, j'aurais envie de dire qu'on met un peu la charrue en avant des boeufs, pour prendre une belle expression québécoise, dans le sens que, si vous acceptez, comme commission parlementaire, de recommander qu'il y ait, oui, un élargissement du mandat de Télé-Québec et qu'on soit capables de... dans des formules, je pense que, là, à ce moment-là, il pourrait y avoir ces ouvertures-là, parce que ces mesures...

Je vais prendre un exemple. Moi, j'étais de la négociation pour le Régime québécois d'assurance parentale. Quand on me demandait combien c'était pour chiffrer, je leur disais : Voulez-vous, on va reconnaître les principes, le congé pour les mères, les pères, puis après les actuaires vont aller à la Régie des rentes puis vont le calculer. Bien, je vous fais la même proposition : Pouvez-vous être capable de regarder un principe, un élément qui fait que, oui, et maintenant, après ça, prendre à des groupes qui ont l'expertise de dire combien ça va coûter, combien de taxes, combien on va imposer la masse salariale, si on ferait un fonds, déjà... C'est dans ce sens-là que... Vous nous posez des questions de mise en oeuvre, et nous ne savons même pas si la commission va recommander quelque chose, ça fait que c'est un peu ça.

Mme Melançon : Je vais vous interrompre quelques secondes, là.

M. de Sève (Nicole) : Pas juste vous, là.

Mme Melançon : Je pense qu'on est tous là pour réfléchir ensemble.

M. de Sève (Nicole) : Oui, mais pas aller aussi loin.

Mme Melançon : On en profite, mais je ne veux pas imputer à quiconque ou... je ne veux pas aller là-dedans, je ne faisais que lancer une idée. On vient de dire qu'il fallait réfléchir à l'extérieur de la boîte, chose que je faisais.

Je vais revenir à Mme Éthier, alors. Je lisais bien, à l'intérieur, aussi, du mémoire, en page 9, sur Netflix, vous êtes donc d'accord avec l'idée qu'on puisse faire un fonds dédié avec le nouvel argent qui entre, actuellement, au gouvernement, si j'ai bien saisi, là, la portée, en page 9, là, de votre mémoire. Donc, vous, vous êtes d'accord avec un fonds dédié. Moi, j'étais un petit peu plus large lorsque j'ai fait la proposition, là, je voyais vraiment un fonds pour et la culture... Parce que, dans le fond, là, on a un contenant, puis le contenant, bien, c'est les Facebook, c'est les GAFA, on va se le dire comme ça. Le problème, c'est le contenu, et là, actuellement... et c'est dans le droit d'auteur. Il est là, le problème, là, c'est sur le droit d'auteur, tant pour... Là, on parle des médias, moi, je le voyais un peu plus large, parce que le contenu québécois... tout est dans tout. Mais vous, vous étiez un peu plus directe. Pouvez-vous aller plus loin dans votre idée, s'il vous plaît?

• (10 h 10) •

Mme Éthier (Sonia) : Bien, sur la proposition qu'on a faite, je pense qu'à la base ce qu'on se disait, c'est que, sur la question de la taxe de vente du Québec — c'est à ça que vous référez — qui est prélevée, bien, à la base, est-ce qu'on peut répondre à cette question-là? Si le gouvernement accepte de prendre une partie de ce qui est prélevé pour investir dans les médias, dans les médias et dans Télé-Québec... bien, premièrement, oui ou non? Si c'est oui, combien? Et on va régler une partie du problème, parce que je pense que c'est une source de revenus qui... c'est faisable. Je ne pense pas que ça, c'est une volonté politique, c'est faisable, ça peut se faire.

Puis ensuite, bien, l'autre possibilité que nous disions, c'était de percevoir des impôts, là, sur les grands joueurs, parce que... Je regardais aussi, il y a quand même 74 % de la part que se partagent Facebook, Google sur 6,8 milliards en publicité au Canada. Ce n'est quand même pas rien, tout ça, là, ce n'est pas rien. Ça fait que je pense qu'il y a des gestes à poser, il y a une... Ça, ça part de la volonté politique. Et une fois que ça, ça sera fait, moi, je pense que, quand on a des revenus supplémentaires, bien, il reste qu'après il y a bien des choses qu'on peut faire puis qui vous seront soumises en commission, ici, par les différents intervenantes et intervenants.

Le Président (M. Ciccone) : Je reconnais la députée de Saint-Laurent. Il vous reste 26 secondes.

Mme Éthier (Sonia) : Oh! j'aurais dû parler moins.

Mme Rizqy : Mme Éthier, je l'ai fait, le calcul, avec mes collègues, juste avec une taxe GAFA de 3 %, c'est 20 millions. J'aimerais vous entendre rapidement. Il y a une réforme collégiale — je sais que, le principe, on est d'accord, Mme de Sève, mais il faut aussi trouver des solutions, après ça, pour le long terme — réforme collégiale... l'Université de Washington a créé un nouveau cours qui s'appelle «Calling Bullshit», c'est pour aider aussi les citoyens à comprendre c'est quoi, de la vraie information, puis voir ce qui est de la désinformation. Dans notre réforme collégiale, est-ce que ce serait souhaitable?

Le Président (M. Ciccone) : Mme la députée, il ne reste plus de temps, malheureusement.

Mme Rizqy : Bien, est-ce qu'on peut avoir un oui ou un non, avec consentement, ou une courte réponse, avec consentement?

Le Président (M. Ciccone) : Oui? O.K., on rajoute du temps, on a un consentement. Une réponse rapide, s'il vous plaît.

Mme Éthier (Sonia) : Bien, je ne saurais pas quoi vous répondre sur la question de la réforme collégiale, mais à votre...

Mme Rizqy : ...formation de la citoyenneté, est-ce que, justement, on est rendus là, avec tellement de désinformation, qu'on pourrait faire ce que l'Université de Washington a fait et créer un nouveau programme de trois crédits qui, justement, s'appelle «Calling Bullshit»?

Mme Éthier (Sonia) : Je pense que ça va être aux gens du réseau collégial de répondre, mais, sur le fond de ce que vous dites, sur la question de la désinformation...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît, en terminant.

Mme Éthier (Sonia) : ...je suis tout à fait d'accord, parce que, là, les gens s'informent sur Facebook, c'est quand même... il y a une prise de conscience à faire.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée de Taschereau pour une période de 2 min 30 s.

Mme Dorion : Merci, M. le Président. J'ai 2 min 30 s, je vais essayer d'aller vite. Bon, on parle de plus en plus, à travers le monde, d'impôt sur les grands joueurs du numérique, d'imposer leur chiffre d'affaires qui est fait chez nous. Ils font des centaines de millions chez nous, ne paient aucun impôt, et cet argent-là, qui serait récurrent puis qui grandirait en même temps que la révolution, qui arriverait dans nos coffres... la révolution numérique, excusez-moi, qui arriverait dans nos coffres pourrait nous permettre de financer les médias à long terme, l'information au Québec à long terme.

Moi, en ce moment, je suis plutôt inquiète de la non-position du gouvernement ou des députés, aussi, du gouvernement dans cet enjeu-là. On ne les a pas entendus parler de cette question-là. On a entendu beaucoup de gens, en commission, venir nous dire : C'est une des options qui est à regarder puis qui est très importante. Au fédéral, c'est la même chose, ils sont complètement sur le neutre. Même eux, ils le disent : Ah! pas tout de suite... Ah! il faut voir... bon.

Puisqu'il s'agit quand même de la sauvegarde puis de la vie de notre culture, de notre information locale, de ce qui anime notre identité — c'est beaucoup plus large, l'information touche à beaucoup plus que juste l'information elle-même — qu'est-ce qu'on fait si le fédéral refuse de bouger, refuse, sur le long terme, de faire quoi que ce soit? Est-ce que ça pourrait être une bonne idée de tenter de rapatrier, comme ça s'est fait à d'autres époques... Aujourd'hui ça nous apparaît bien extraterrestre, mais c'est des mobilisations qu'on pourrait faire lever, de rapatrier tous les pouvoirs en communications, en culture, de façon à dire : Bien, nous, notre spécificité dans le monde, on va avoir tous les pouvoirs pour la protéger. J'aimerais avoir votre avis là-dessus.

Mme de Sève (Nicole) : Je pense que, dans l'état actuel des relations fédérales-provinciales, rapatrier tous les pouvoirs, c'est un peu beaucoup. Par contre, si on est capables d'aller chercher des ententes très significatives sur la main-d'oeuvre, de rapatrier des pouvoirs, notamment, en ce qui concerne l'immigration, je suis convaincue qu'on peut faire des pas de géant sur la culture, d'autant plus que, comme vous l'avez si bien dit, c'est un créneau de notre identité et qui est extrêmement important pour la population québécoise. Ça vaut la peine de tenter le coup. Il peut y avoir une mobilisation citoyenne. Il y en a eu, du temps du gouvernement Harper, des mobilisations citoyennes pour sauver Radio-Canada, si vous vous souvenez, très fortes. Donc, il y a moyen, sûrement, de pouvoir augmenter les pouvoirs. Je ne suis pas certaine que, dans le cadre actuel, on pourrait tout rapatrier, mais je pense qu'on est capables. Sinon, bien, faisons à notre tête, soyons maîtres chez nous.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Rimouski pour une période de 2 min 30 s.

M. LeBel : On ne peut pas commencer sur des meilleurs mots, «maîtres chez nous», ça commence bien. Tout le monde ici, autour de la table, se dit nationaliste de ce temps-ci, là, tous les partis politiques sont devenus des nationalistes. Bien, si on est vraiment nationalistes, il faut aller revendiquer à Ottawa ces mesures-là, rapatrier nos pouvoirs. C'est une question d'identité, c'est une question de culture, c'est une question de langue, c'est beaucoup plus large que l'avenir des médias, à mon avis.

Sur l'avenir des médias, peut-être aussi... Moi, je vous fais une parenthèse, les salles de presse ont certaines responsabilités déjà aujourd'hui. J'ai beaucoup de témoignages de journalistes en région qui veulent vendre leurs topos au national, puis ça ne passe jamais. Ils essaient bien de parler des crabiers puis du bateau, mais à part le traversier Matane-Godbout, il n'y a rien qui passe au national. Et il y a une responsabilité aussi des grands médias de laisser, de temps en temps, leurs journalistes en région prendre un peu de place aux nouvelles nationales. Puis on concentre beaucoup... Le Journal de Québec, maintenant, on aime le hockey, M. le Président, Le Journal de Québec, on va voir Les Remparts, mais bien rare qu'on voit l'Océanic ou les Saguenéens, on parle des Remparts. Pourtant, c'est des équipes de hockey dans nos régions, qui font partie de notre identité aussi en région. Le Théâtre les gens d'en bas, au Bic, ils sont en grandes difficultés, actuellement, on se bat. Mais, si ce théâtre-là était ici, à Québec, on en entendrait parler, il ferait la première page des journaux, mais là on est en région, on en entend moins parler. Ça fait que c'est hyperimportant, là, ce que vous dites.

Et je reviens rapidement, Télé-Québec, effectivement, il y a quelque chose à faire avec ça, plusieurs en parlent. Hier, quelqu'un nous parlait des mutuelles de services, parce qu'un peu comme disait mon collègue, là, Télé-Québec, il faut qu'il prenne de la place en région, mais il faudrait qu'il ait une façon de concerter avec les médias qui sont déjà en région. Si Télé-Québec pourrait aller chercher ce qui se passe aussi avec les médias en région puis les propulser au niveau national, il y aurait peut-être quelque chose à faire. Moi, Télé-Québec, O.K., mais avec une certaine concertation, quelque chose de nouveau qu'on pourrait faire avec les médias qui existent déjà en région.

Le Président (M. Ciccone) : En 30 secondes, s'il vous plaît.

M. LeBel : Désolé.

Mme Éthier (Sonia) : C'est une excellente conclusion. Il faut qu'il y ait une concertation, puis, on le disait tout à l'heure, il n'est pas question, dans les solutions ou les propositions qu'on fait, de remplacer les médias qui existent. Oui, effectivement, il pourrait y avoir une belle concertation, puis c'est une excellente idée.

M. LeBel : Merci.

Mme de Sève (Nicole) : Prenez juste l'exemple de Radio-Canada, qui va aller chercher des journalistes dans d'autres médias écrits et qu'ils font témoigner dans des émissions et tout, on peut le faire dans une région, on peut le faire avec l'antenne régionale, qui va prendre les gens du quotidien ou des gens d'hebdos et de dire, sur cette question-là... c'est possible.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant Mme la députée de Marie-Victorin pour deux minutes.

Mme Fournier : Merci beaucoup. Je trouve que votre proposition est extrêmement intéressante lorsque vous mettez le doigt sur la nécessité d'assurer la diversité de l'information partout dans nos régions. Donc, il n'est pas question de remplacer, mais bien d'assurer la diversité. Puis ça me fait penser que, dans plusieurs pays scandinaves, comme la Norvège, la Finlande, c'est exactement ce qu'ils ont fait pour assurer la vitalité des médias en région. Lorsqu'il y avait très peu de médias dans une région donnée, le gouvernement, par exemple le gouvernement suédois, le gouvernement norvégien, a décidé de subventionner un joueur public pour venir l'ajouter dans l'équation et ainsi donc assurer la diversité des médias. Donc, ça me faisait vraiment penser à ce qui se fait là-bas.

Maintenant, on a beaucoup parlé du futur, de l'avenir de Télé-Québec, mais est-ce que vous avez des membres... est-ce que vous représentez des membres, à la CSQ, qui sont à Télé-Québec? Et quel est l'état actuel des choses?

Mme Éthier (Sonia) : Bien, oui, on l'a dit, d'entrée de jeu, on représente le syndicat des employés de Télé-Québec, qui sont environ 460 travailleuses et travailleurs, là. Et, bien sûr, Télé-Québec, on le sait, a des difficultés financières, a été aidé par le gouvernement, mais je pense qu'il faut que Télé-Québec continue de vivre, que le gouvernement continue de le faire rayonner. Comme on disait, c'est la télévision publique qui nous appartient, et je pense que tous ces travailleuses et travailleurs mettent la main à la pâte pour faire en sorte que Télé-Québec rayonne. Et d'ailleurs combien de Gémeaux ont été remportés par la qualité de ce qui se fait? Puis ça, bien, ça passe par les travailleuses et travailleurs. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Alors, merci beaucoup. Merci beaucoup pour votre contribution à ces travaux. Surtout, merci, Mme de Sève, pour votre grande passion. Merci beaucoup.

Je suspends les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 20)

(Reprise à 10 h 22)

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants des fédérations professionnelles des journalistes du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole est maintenant à vous.

Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ)

M. Giroux (Stéphane) : Alors, merci, M. Ciccone. Mon nom est Stéphane Giroux, et je suis président de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec. Je suis accompagné par notre directrice générale, Catherine Lafrance. Et on devine que vous avez pas mal tous lu notre mémoire, alors je ne le lirai pas intégralement ce matin. Je vais résumer les points et ensuite porter attention sur les événements des derniers jours.

Notre organisme existe depuis 50 ans. Il s'agit d'un OBNL qui regroupe environ 1 800 journalistes au Québec, répartis dans plus de 250 médias écrits et électroniques. Pour vous donner une idée, 35 % de nos membres viennent de la presse écrite. La FPJQ est une association professionnelle qui s'est donné le mandat de défendre la liberté de presse et le droit du public à l'information. Nous intervenons chaque fois que cette liberté nous semble menacée, que ce soit à cause de facteurs économiques, de situations politiques ou de contextes juridiques. Nous sommes régulièrement appelés à agir quand nos membres se font refuser l'accès à des assemblées publiques ou qu'ils ne peuvent obtenir des documents publics, pour ne nommer que ces exemples. La FPJQ distribue aussi une carte de presse, qui est reconnue à travers le monde. Pour l'obtenir, nos membres professionnels doivent démontrer qu'ils travaillent de façon régulière pour une ou plusieurs entreprises de presse et doivent s'engager à adhérer et à respecter notre code de déontologie.

Il a beaucoup été question des médias dans la crise que l'on connaît mais peu des journalistes. Alors, je vous invite donc à vous poser cette question : Qu'est-ce que c'est, un journaliste? Et voici comment on vous répond, à la FPJQ : C'est quelqu'un qui exerce une fonction de journaliste, la personne qui travaille à la diffusion d'informations ou d'opinions sur des questions d'actualité dans une optique d'intérêt public, au service des citoyens et non pas d'intérêts particuliers. Cette définition est, à notre sens, importante, parce que, si on ne sait pas ce que fait un journaliste, on ne comprend pas bien pourquoi il faut défendre le ou les médias pour lequel ou pour lesquels il travaille. Si on ne comprend pas bien qu'un journaliste travaille pour le public et seulement pour lui, le but de l'exercice auquel nous nous adonnons aujourd'hui est futile.

La FPJQ a été témoin, depuis un demi-siècle, de grands changements dans le monde médiatique, mais la crise dans laquelle des journaux sont plongés n'a aucune mesure avec tout ce que nous avons vu jusqu'ici. Un rapport du Forum des politiques publiques au Canada a recensé la fermeture de 225 hebdos et 27 quotidiens depuis 2010. C'est des centaines de postes de travailleurs de l'information qui ont disparu durant cette période, et c'est sans compter la menace qui pèse sur les quotidiens du Groupe Capitales Médias. Il faut endiguer la saignée, stopper cette érosion de l'information avant que des régions entières du Québec ne se retrouvent dans une espèce de trou noir. Pour ce faire, alors, nos recommandations sont les suivantes.

Nous demandons à Québec de mettre sur pied une aide pour plusieurs types de médias, qu'ils produisent de l'information quotidienne ou hebdomadaire, numérique ou imprimée, que leur modèle d'affaires repose sur l'abonnement ou la gratuité des contenus. Cette aide pourrait prendre la forme d'un crédit d'impôt pour les entreprises de presse semblable à celle annoncée dans le dernier budget fédéral.

Nous demandons une réduction de l'effort financier imposé aux journaux, notamment en diminuant la compensation exigée dans la valorisation des matières résiduelles, le recyclage.

Nous demandons au gouvernement du Québec qu'il fasse pression sur Ottawa pour que des redevances pour la presse productrice de contenu journalistique soient exigées aux entreprises du GAFA. J'espère qu'on n'a pas besoin de répéter que veut dire «GAFA».

Nous demandons au gouvernement québécois qu'il fasse pression pour qu'Ottawa amende ses lois sur le droit d'auteur pour contraindre les géants du Web à respecter les droits d'auteur en obligeant les plateformes en ligne qui publient du contenu journalistique à conclure des ententes avec les auteurs de contenu.

Nous demandons au gouvernement québécois qu'il revendique auprès d'Ottawa la gestion des droits d'auteur et des redevances qui y sont associées au nom de la souveraineté culturelle du Québec.

Nous demandons à toutes les municipalités du Québec qu'elles recommencent à publier leurs avis publics dans les journaux régionaux et, évidemment, on demande à Québec de les contraindre à le faire. Nous demandons la même chose au gouvernement, qu'il soit provincial ou fédéral.

Sur l'urgence d'agir, les quotidiens et les hebdos ne peuvent tout simplement pas lutter à armes égales avec Google et Facebook. Ils font face à un ennemi 1 000 fois plus puissant qu'eux. Notre mémoire, à l'instar de plusieurs autres, démontre la profondeur de la crise dans laquelle sont plongés les journaux, mais c'est l'actualité des derniers jours, quand Le Groupe Capitales Médias a annoncé qu'il se plaçait sous la protection de la Loi sur la faillite, qui prouve hors de tout doute l'urgence d'agir. La fermeture de ces six quotidiens, si elle devait se réaliser, représenterait la disparition de la moitié des quotidiens de langue française au Québec. Imaginons un instant ce qui arriverait si le seul journal pour la région de l'Outaouais fermait ses portes, même chose pour Trois-Rivières, Granby, Sherbrooke et, évidemment, Saguenay, la perte de couverture journalistique en région serait catastrophique pour ces communautés, et l'effet domino de ces fermetures.

Je pense au Soleil, qui assure une présence dans l'Est du Québec et la Gaspésie, où on ne retrouve aucun quotidien. J'ai moi-même commencé ma carrière en Gaspésie en écrivant pour Le Soleil. Les réactions ont été nombreuses depuis cette annonce. Certains remettent en question le modèle d'affaires des journaux et se demandent, par exemple, pourquoi les contribuables devraient payer pour soutenir une presse qui n'est plus financièrement viable. La réponse est simple : Parce que le prix à payer pour la société québécoise serait énorme. Le prix à payer, c'est la disparition des sources d'information, la fin, dans certaines régions, de l'essentielle pluralité des voix dans une démocratie en santé et le retour à l'obscurantisme. En région, ce sont souvent les journalistes de la presse écrite qui couvrent les assemblées des conseils municipaux, qui s'intéressent au travail des élus, par exemple. Sans eux, les décisions seraient prises derrière des portes closes sans que les citoyens n'en soient avisés. C'est la porte ouverte à des petites dictatures, on en a vu.

• (10 h 30) •

Oui, la presse a besoin de l'aide de l'État en ce moment. Elle est loin d'être la seule industrie dans cette situation. L'avionnerie s'est aussi tournée vers le gouvernement, les industries culturelles le font régulièrement, pour ne parler que de ceux-là. Plusieurs voix s'élèvent déjà pour laisser entendre que, si la presse est subventionnée par l'État, elle devient un outil de propagande. Bien, il n'en est rien. Donnons l'exemple de Radio-Canada, qui est financée en partie par le gouvernement fédéral, et son service de l'information est l'un des plus crédibles et respectés au Canada. La majorité des grands médias adhèrent à un code de déontologie très strict, qui les met à l'abri de toute influence extérieure. Et je vous rappelle la description des journalistes que nous avons faite un peu plus tôt, les journalistes travaillent pour le public, seulement pour le public, et des mécanismes existent pour protéger et assurer l'indépendance journalistique. Je vous remercie.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, M. Giroux. C'est maintenant le temps de passer, justement, à la partie gouvernementale pour une période de 15 minutes. Je reconnais le député de... voyons, Beauce-Sud. Merci.

M. Poulin : Merci, M. le Président. Je pense que vous ne l'oublierez plus d'ici la fin de la semaine ou la fin de la journée, du moins.

Merci à la FPJQ d'être avec nous aujourd'hui, fort apprécié. Félicitations pour votre campagne, également, que vous avez mise en place sur les réseaux sociaux, qui vise justement à mettre de l'avant le travail qui est fait par nos hebdos locaux, entre autres, mais, bien sûr, par les quotidiens et la presse dans son ensemble. Il ne suffit pas non plus de prendre une photo puis de la mettre sur les réseaux sociaux, on s'entend. Il faut poser des gestes, et je pense que ces gestes-là devaient être posés il y a plusieurs années, doivent l'être aujourd'hui et devront l'être dans le futur. Alors, sachez que vous avez une oreille attentive des élus de l'Assemblée nationale également pour le futur.

On a beaucoup de questions, du côté de la partie ministérielle, alors je vais faire très vite. Vous avez parlé d'indépendance des médias, du droit des auteurs, on pourra y revenir, mais je veux parler de votre relation avec les patrons de presse, compte tenu du fait que vous avez à lutter pour s'assurer qu'on puisse avoir des salles de nouvelles qui sont remplies, des salles de nouvelles qui visent une destination, qui est celle de donner le plus d'informations possible aux citoyens. On veut également protéger le journalisme d'enquête, on veut s'assurer qu'il y ait plus de ressources qui y soient accordées mais, au même moment, on ne veut pas délaisser la nouvelle quotidienne, qui est très importante, entre autres dans les régions.

Donc, quelle est votre relation avec la majorité des médias de presse au niveau de la façon dont on peut mettre en place nos salles de rédaction? Parce qu'on parle beaucoup des revenus dans le cadre de cette commission parlementaire là, et c'est important, mais l'investissement, qui, pour plusieurs, peut être considéré comme une dépense — moi, j'aime mieux parler d'investissement — il faut aussi en parler, alors le fait qu'on investit dans une salle de nouvelles, ce que ça rapporte, pas juste en termes de publicité, mais ce que ça rapporte en termes de crédibilité, également, de l'information. Alors, actuellement, quelle est votre relation avec les principaux médias pour la place des journalistes dans les salles de nouvelles et s'assurer qu'on puisse en avoir le maximum?

M. Giroux (Stéphane) : Je vais laisser Mme Lafrance répondre.

Mme Lafrance (Catherine) : Merci, Stéphane. Merci. On n'a même pas besoin d'appuyer sur le bouton. C'est bien, ça se fait tout seul.

Bien, écoutez, première des choses, nous, à la FPJQ, évidemment, on ne fait pas d'ingérence, on ne se mêle pas d'administration des salles de rédaction des entreprises de presse, des modèles d'affaires. On n'a ni les compétences ni l'intérêt pour le faire. Cependant, notre relation — pour répondre à votre question — avec les entreprises de presse et les grands patrons, patronnes d'entreprise de presse, elle est excellente. Plusieurs sont membres chez nous, d'ailleurs. Pourquoi? Parce qu'on travaille tous dans le même but. Le but, c'est de faire de l'information la meilleure information possible pour le public québécois, et c'est ce qu'on a à coeur aussi. Donc, on défend non seulement le droit du public à l'information mais la qualité de l'information.

Et non seulement la relation des patrons d'entreprise de presse, elle est bonne avec nous, mais les patrons d'entreprise de presse se parlent. Ils ont de bonnes relations entre eux. Évidemment, vous vous en doutez bien, ils sont tous dans la même industrie, malgré la compétition et malgré ce qu'on peut croire vu de l'extérieur. Cependant, ils sont tous bien conscients que, écoutez, pour reprendre, si vous voulez, un exemple ou une allégorie avec ce qui se passe dans l'actualité en ce moment, la forêt brûle, et il est temps d'endiguer ça, il est temps de contrôler tout ça. Je pense que les patrons de presse ont à coeur, d'abord et avant tout, l'information. Ce sont des gens qui sont impliqués dans le milieu de l'information. Beaucoup sont d'anciens journalistes. Ils ont toujours fait de l'information toute leur vie, pour la plupart. C'est ce qu'ils défendent d'abord et avant tout avant de défendre des intérêts financiers.

Bien sûr, ils ont ça à coeur, mais je ne suis pas sûre qu'en ce moment ça soit leur seule préoccupation. Je pense qu'ils veulent tous éviter les fermetures et ils veulent tous conserver, continuer à embaucher des journalistes. Et, dans le meilleur des cas, idéalement, d'ici quelques années, ils aimeraient tous réembaucher des journalistes. Parce que je vous rappelle qu'au Québec, au cours des dernières années, il s'est perdu des dizaines et des dizaines, voire des centaines d'emplois de journaliste dans la province, dans toutes les régions. Il y a des régions qui sont moins bien desservies maintenant qu'elles l'étaient il y a encore quelques années, et ça, c'est terrible. C'est terrible pour les travailleurs, pour les emplois mais pour la population d'abord et avant tout.

Donc, je pense que tous s'entendent pour dire qu'il faut, oui, sauver la presse mais il faut que la presse ne soit plus sur l'espèce de respirateur artificiel sur lequel il est branché depuis des années. Il faut que la presse soit viable. Il faut qu'elle soit prospère. Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas se mettre à penser à une certaine prospérité? Le Québec, la société québécoise et les Québécois méritent une presse écrite en santé, en santé financière, en santé et méritent que tous les territoires soient couverts et que des journalistes puissent travailler partout, parce que, comme on le dit et on le répète, les journalistes travaillent pour le public. J'espère que ça répond à votre question. J'ai débordé un peu.

M. Poulin : Non, mais fort intéressant. Merci beaucoup. Je vais céder la parole à l'un de mes collègues de la partie ministérielle.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je reconnais le député de Sainte-Rose.

M. Skeete : Merci beaucoup, M. le Président. Merci et bienvenue. Je pense que vous êtes bien placé, M. Giroux, pour parler de la réalité des médias anglophones, j'aimerais ça vous entendre. Comment ça se compare, les médias d'expression anglaise, versus la situation, l'état des faits ou l'état actuel, là, des médias francophones et anglophones? S'il y a un écart, j'aimerais ça l'entendre. Et aussi comment vous voyez cette crise-là dans l'optique, justement, où est-ce que les GAFA, bien, vraiment, sont plus traditionnellement en anglais? Donc, on pourrait penser que les médias anglophones sont plus vulnérables par cette compétition plus internationale, j'aimerais ça vous entendre.

M. Giroux (Stéphane) : Bien, les médias anglophones au Québec font face aux mêmes problèmes que les médias francophones. Le problème est universel à travers le Canada, à travers l'Amérique du Nord. Au Québec, puis je me fie, évidemment, au fait que j'ai travaillé dans quelques médias anglophones, quelques médias francophones, ça se rejoint beaucoup. La différence, c'est que, du côté anglophone, ces médias-là doivent en plus faire face à la diminution constante de la communauté anglophone.

The Gazette, à Montréal, comparé à ce que c'était il y a 25, 30 ans, c'est tout mince, là. Ils peinent à faire une couverture adéquate parce que les ressources, les budgets ne sont plus là. Ils appartiennent, évidemment, à des intérêts financiers importants où peut-être que le... ils voient l'avenir différemment. Je pense au Sherbrooke Record, où j'ai publié mes premiers textes il y a 33 ans. À l'époque, c'était un grand quotidien, même si le tirage était très mince. Maintenant, c'est un tout petit journal qui en arrache chaque année. Je parlais à l'éditrice, l'autre jour, qui disait : On n'est jamais sûrs si on va être là l'année prochaine. En Gaspésie, il y a un tout petit hebdo qui s'appelle The Spec, qui existe depuis au-dessus de 40 ans. Eux autres, ils survivent presque uniquement par abonnements, par des nostalgiques, et ils reçoivent des dons, ils reçoivent de la publicité locale mais, encore là, eux autres ne savent jamais, d'une année à l'autre, s'il va être encore là. C'est pour ça que, du côté anglais, c'est plus complexe. On le sait, eux autres, c'est la perte de marché publicitaire et la décroissance démographique qui les affectent encore plus.

M. Skeete : Pour résumer, au Secrétariat des relations avec les Québécois d'expression anglaise, on met beaucoup d'emphase pour réduire l'exode des Québécois d'expression anglaise du Québec. Donc, si d'un côté le gouvernement agit concrètement là, compte tenu des résultats de cette commission, on serait en mesure, peut-être, d'aider aussi la communauté anglaise et les médias anglophones.

M. Giroux (Stéphane) : Ah! absolument. La FPJQ défend la presse, le journalisme au Québec, qu'il soit francophone ou anglophone. Et d'ailleurs...

Mme Lafrance (Catherine) : Et même la presse ethnique.

M. Giroux (Stéphane) : Plusieurs de nos membres représentent la presse ethnique. Les communautés culturelles, bien souvent, ont des journaux au Québec, et ceux qui respectent notre code de déontologie font partie, évidemment, de notre organisation.

M. Skeete : ...merci beaucoup. Je cède à mes autres collègues.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Maskinongé. À vous la parole.

M. Allaire : Merci, M. le Président. Hier, la question me brûlait les lèvres — finalement, je pense, vous étiez vraiment la bonne organisation pour recevoir cette question-là — moi, je m'interroge beaucoup sur la santé du métier de journaliste, actuellement. On le sait, plusieurs intervenants nous l'ont dit aussi hier, c'est une crise qui était quand même prévisible, là. Déjà, il y a 10 ans, il y avait des signes avant-coureurs. Il y a eu, au cours des 10 dernières années, beaucoup de réorganisations, probablement engendrées par l'employeur, des concessions qui ont été demandées, d'ailleurs, aux journalistes pour un peu, probablement, en prendre un peu plus dans leur cour, là. On parlait des journalistes-orchestres, là, hier. Est-ce qu'il y a eu beaucoup de journalistes qui ont quitté la profession par eux-mêmes dans les... Vous en avez peut-être abordé un peu tantôt... vous l'avez abordé tantôt, là, mais j'aimerais que vous alliez un petit peu plus loin là-dedans, donc, pour nous démontrer est-ce que, vraiment, le métier de journaliste, là, a perdu une certaine expertise, là, au cours des dernières années.

• (10 h 40) •

M. Giroux (Stéphane) : Énormément, énormément. Je n'ai pas de chiffre à vous donner, mais la plupart des grandes salles de nouvelles au Québec ont offert des forfaits, des packages, là, de mise à la retraite pour leurs employés les plus séniors, qui, par définition, coûtent plus cher. On engage des jeunes de plus en plus de façon précaire, des petits contrats à court terme, pour une fraction des salaires qui ont déjà existé dans le milieu. Les revenus, les conditions de travail qu'on connaissait dans les années 80, c'est fini. Il y a eu une époque où — bon, hier, les représentants de La Presse en ont parlé — la semaine de quatre jours était la norme. Ça fait des années que c'est fini, ça. Les salaires stagnent depuis très longtemps. On est chanceux, dans nos renouvellements de convention collective, si on réussit à avoir le coût de la vie. On essaie de garder nos acquis. Il y a de moins en moins de journalistes syndiqués. Les salaires sont bas. Le salaire moyen, c'est 50 000 $ par année. Ce n'est pas mauvais mais, pour un journaliste qui a passé quatre ans à l'université... À un moment donné, on veut se marier, on veut avoir des enfants, on cherche une stabilité. Il y en a beaucoup qui sont tentés de quitter le métier. Et je vais laisser Catherine compléter là-dessus, parce que je crois...

Mme Lafrance (Catherine) : Je ne veux vraiment pas t'interrompre.

M. Giroux (Stéphane) : Oui. Mais ce qu'il faut retenir, c'est que... Oui, je connais beaucoup de gens qui ont quitté la profession. C'est souvent des jeunes, hein? Ils ont fait quelques années, cinq, six ans, ils sont toujours en bas de l'échelle, ont toujours très peu de séniorité, et puis ils sont dans la jeune trentaine, puis on les voit, ils quittent, ils deviennent attachés politiques, attachés de presse, responsables des communications dans le privé. Il y en a beaucoup, de ça. Toutes des professions nobles, mais ultimement ils ne font plus de journalisme pour l'intérêt public.

Mme Lafrance (Catherine) : Est-ce que je pourrais compléter?

M. Giroux (Stéphane) : Je vais laisser Catherine compléter, oui.

Mme Lafrance (Catherine) : Je suis vraiment désolée. Je voulais juste compléter, parce qu'évidemment nous, dans nos bureaux de la FPJQ, on voit les membres, on leur donne leur carte de presse, on connaît un peu leur historique, si vous voulez, de carrière, là. Et, oui, effectivement, Stéphane a raison, c'est assez effroyable de voir les changements dans la profession. Et, quand on parle des journalistes, peut-être qu'on devrait dire aussi «travailleurs de l'information», parce qu'il y a des journalistes qui ont quitté mais il y a des photographes qui ont quitté le métier, il y a des caricaturistes qui ont quitté le métier. Ça a un effet domino sur toutes les strates, si vous voulez, de cette profession-là.

Ça a un impact aussi sur les journalistes pigistes, qui sont peut-être plus nombreux qu'ils l'étaient avant parce qu'il est de plus en plus difficile d'obtenir un emploi stable. Certains le font par choix, mais d'autres le font parce qu'ils n'ont pas le choix non plus. Le salaire médian, le salaire moyen des pigistes a baissé. C'est devenu presque impossible maintenant, au Québec, de vivre quand on est pigiste. Je pense que... et là je ne donnerai pas ma main au feu, là, mais je pense que le salaire est à peu près 22 000 $ par an, le salaire moyen pour les pigistes au Québec, et ce sont souvent des gens qui travaillent énormément. Ce n'est pas parce qu'ils ne travaillent pas beaucoup mais c'est parce que le prix au feuillet, bien, c'est devenu presque dérisoire. Les conditions sont de plus en plus difficiles pour tous les types de journalistes, si vous voulez, et de travailleurs de l'information.

M. Allaire : Merci.

Le Président (M. Ciccone) : ...le député de Saint-Jean, il vous reste 1 min 50 s.

M. Lemieux : Oupelaïe! Merci, M. le Président. Je ne peux pas m'empêcher de remarquer une phrase de votre mémoire, parce que j'enchaîne sur ce que vous disiez, Mme Lafrance : «Pendant que les postes de journalistes disparaissent, le gouvernement concentre son aide aux infrastructures numériques. La question qui se pose, c'est : À quoi serviront ces infrastructures quand il n'y aura plus de journalistes pour les alimenter?»

En fait, vous avez, en bons journalistes que vous êtes, travaillé beaucoup en questions et un peu en réponses aujourd'hui. Vous avez posé la question : Qu'est-ce qu'un journaliste?, vous avez fourni la réponse. Vous avez posé la question, puis je voudrais revenir là-dessus, M. Giroux : Pourquoi payer pour ces services-là? En fait, la question est double, parce que les gens, maintenant, ne paient plus ou, en tout cas, généralement parlant, là, on donne l'information. Donc, dans le fond, ce qu'on va faire ou ce qu'on attend que le gouvernement fasse, c'est de payer pour le public qui ne paie pas pour avoir l'information en espérant que ça s'améliore.

Mais il n'y a pas vraiment de bonne solution, parce qu'il n'y a pas encore de bon modèle d'affaires, jusqu'à preuve du contraire. Vous avez dit tantôt que ce n'était pas dans votre cour, les modèles d'affaires, mais, de votre point de vue, qu'est-ce qu'il faut qu'on fasse pour que les citoyens du Québec, qui ont droit à l'information en vertu de l'article 44 de la charte, aient plus d'information, aient encore une aussi bonne, sinon une meilleure information partout sur le territoire?

Le Président (M. Ciccone) : En 30 secondes, s'il vous plaît.

M. Lemieux : Woups! Excusez-moi.

M. Giroux (Stéphane) : Alors, très rapidement, l'information n'est pas gratuite. Les gens pensent que parce qu'ils lisent un grand titre sur leur téléphone cellulaire, c'est gratuit. Elle doit être payée. Et, comme on l'entend depuis hier, le fait est que des géants comme Google, Facebook, ramassent notre contenu...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant.

M. Giroux (Stéphane) : ...le distribuent gratuitement, et puis on n'est pas rémunérés au bout du compte.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, M. Giroux. Je reconnais maintenant la députée de Saint-Laurent pour une période de 10 minutes.

Mme Rizqy : Bonjour. Bonjour, Mme Lafrance, M. Giroux, bienvenue. Tantôt, vous avez dit : Il faut sauver la presse. Puis moi, j'ai envie de dire : Il faut sauver la démocratie, notre pilier. Et, si vous... Vous autres aussi?

M. Giroux (Stéphane) : Il ne peut pas y avoir de démocratie s'il n'y a pas de presse libre.

Mme Rizqy : Exactement. Puis ça, c'est le plus haut tribunal, aussi, du Canada qui l'a dit. Et on est en train de réfléchir, oui, à des solutions immédiates, parce qu'il y a urgence d'agir, le feu est pris. On peut faire cette commission puis on va la faire, mais en attendant il y a quand même une mise à jour économique puis il y en a un, pompier, il s'appelle le ministre des Finances. C'est lui, là, qui a la capacité, là, lors de sa mise à jour économique, de dire : Non seulement, oui, on fait une aide immédiate, mais non seulement ça, on peut avoir une taxe GAFA immédiate pour le Québec. On est autonomes. On a notre propre Agence de revenu du Québec, où est-ce qu'on peut collecter les géants du Web, puis immédiatement il y aurait des entrées d'argent. On peut le faire dès la mise à jour économique, qui arrive au mois de novembre. On peut aussi s'assurer d'avoir des redevances. Tout ça, c'est quelque chose qu'on est capables de faire, et on ne pourra pas attendre.

Mais je veux aussi... Hier, on en a parlé, des chiffres puis de la fiscalité. Moi, j'ai envie aussi de voir un peu plus au court et moyen terme, parce qu'éventuellement nous, on va écrire un rapport. En Éducation et en Enseignement supérieur, il y a des questions qui se posent au niveau collégial. Vous avez préparé 30 secondes avant d'y croire. Dans la réforme collégiale, pensez-vous qu'on pourrait réfléchir à ce que ce cours entre dans le cursus obligatoire? Parce que, clairement, clairement, il y a de la désinformation. La vitesse, là... l'infobésité, c'est un nouveau terme, parce qu'il y a tellement d'information que les gens ne sont même plus capables de savoir le vrai du faux, et on gobe de l'information sans nécessairement vérifier si elle vient même d'une source fiable.

M. Giroux (Stéphane) : La désinformation, les fausses nouvelles, c'est probablement la pire catastrophe du XXIe siècle dans la démocratie, et c'est un petit peu à la lumière de ça qu'on a lancé le programme 30 secondes. C'est une des grandes réalisations de la FPJQ. Maintenant, oui, j'aimerais ça que ce soit enseigné, pas juste au collégial, au secondaire puis, si c'était juste de moi, au primaire, parce que la désinformation commence très tôt.

Et une des grandes raisons pourquoi le grand public est rendu méfiant envers la presse, n'est plus trop sûr si on doit nous croire, nous faire confiance, c'est justement parce que les gens, là, ils consultent leurs nouvelles non pas dans un journal reconnu mais sur leur page Facebook. La page Facebook, là, l'algorithme, il n'est pas programmé en fonction de ce qui est vrai, de ce qui est faux, il est programmé en fonction de vos croyances. Alors, les gens reçoivent des avis, des «updates», puis on ne sait jamais, c'est tellement bien fait maintenant, là, que c'est à s'y méprendre. Vous et moi, on sait faire la différence, on a une formation, mais quelqu'un à la maison qui a perdu l'habitude de lire son journal avant d'aller travailler le matin, peut-être que cette personne-là ne le sait pas. Moi, j'ai des gens dans ma famille, très, très bien éduqués, qui viennent me voir : J'ai entendu dire telle affaire, c'est-u vrai? Je suis, là : Non, où tu as vu ça? Puis là je regarde le titre. Ah! là, je vois ce qui s'est fait, je vois la manipulation qui s'est faite. Puis les gens qui font de la déformation, qui font de la... eux autres, bien, ils sont tout aussi habiles, ils vont aller dire : Non, non, c'est les médias traditionnels qui font de la propagande, c'est eux autres qu'il faut se méfier.

C'est parce que nous autres, on a une formation pour bien le faire, un code d'éthique à suivre et puis, évidemment, on doit montrer patte blanche à chaque fois qu'on publie quelque chose. On a un conseil de presse qui nous force à respecter nos normes déontologiques. C'est pour ça que, selon nous, un programme comme 30 secondes devrait faire partie d'un curriculum à l'école. Catherine aimerait compléter.

• (10 h 50) •

Mme Lafrance (Catherine) : Je veux juste vous dire et vous annoncer que ce formidable programme, 30 secondes — je prêche pour notre paroisse, évidemment — eh bien, il connaît un tel succès qu'on est en train de travailler sur une version, justement, pour des adultes et éventuellement on travaillera sur une version aussi pour, enfin, tous les adultes, pour les gens un peu plus âgés aussi, parce que c'est toutes les couches de la société qui est frappée par ce phénomène de, je dirais, désinformation mais aussi de manque de connaissance des médias. Alors donc, on travaille là-dessus, et je pense que plus cette formation sera donnée d'une façon ou d'une autre, mieux ça sera.

Et je voudrais juste reprendre ce que vous disiez à propos de l'énoncé économique. Oui, l'argent est le nerf de la guerre, et on est ici, entre autres, pour parler de ça, bien sûr, mais je vous rappelle que, dans notre campagne qu'on a lancée très récemment, dont il a été question il y a quelques minutes, ce qu'on dit, nous, à la FPJQ, c'est : C'est toute la société qui doit soutenir ses journaux, toute la société. Je pense aux municipalités qui, depuis plusieurs années, ont cessé de publier les avis dans les journaux. Pour les municipalités, c'est une infime partie de leur budget, je pense que c'est moins de 2 %. Pour un journal, c'est un sérieux coup de main. Il faut que les municipalités recommencent à publier leurs avis dans les journaux. Il faut que le gouvernement du Québec publie dans les journaux ses avis, ses publicités. Il faut que le gouvernement fédéral le fasse également. Il faut que l'entreprise privée le fasse. Il faut que toute la société se mette à comprendre que, si elle n'encourage pas les journaux, bien, ils vont mourir. C'est comme vouloir avoir un restaurant de quartier, un restaurant au coin de chez soi, puis jamais ne vouloir y aller, bien, il ne va pas pouvoir continuer à exister, ce restaurant-là. Donc, tout le monde doit mettre la main à la pâte et tout le monde doit soutenir les journaux.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je reconnais maintenant la députée de Verdun.

Mme Melançon : Merci beaucoup. Alors, bonjour à vous deux. Merci d'être là. Moi, j'ai décidé, bien sûr, de joindre votre mouvement. On a été plusieurs à le faire. Et, non, ce n'est pas uniquement de prendre une photo et de dire que je soutiens mon journal mais c'est aussi de pouvoir mettre de la publicité dans les journaux, c'est une façon de soutenir nos journaux locaux. Et sachez que c'est en ce sens où moi, j'ai voulu le faire, que plusieurs élus l'ont fait. Et j'invite vraiment l'ensemble de la population à prendre une photo, bien sûr, avec leurs journaux, et dire qu'ils le soutiennent, et le lire, et le dire. Alors, voilà, je voulais simplement faire ce point.

C'est très intéressant, la campagne 30 secondes, de savoir aussi qu'on va élargir le tout, parce que, oui, c'est vrai que souvent on peut s'y méprendre, et savoir qu'on va y aller avec les adultes. J'espère qu'on pourra, du côté de l'Assemblée nationale, tenter de vous aider là-dessus, parce que c'est vraiment... c'est de l'éducation, de l'éducation grand public. Alors, bravo pour ça!

Mme Lafrance (Catherine) : ...

Mme Melançon : J'ai passé le message, voilà. Je veux revenir. Hier, on a entendu plusieurs syndicats qui nous disaient : Oui, on a besoin d'investissements qui viennent de l'État, justement, pour revoir, dans le fond, le modèle économique des médias mais que ces investissements-là viennent avec des obligations. Et je me lance et je vous pose la question, parce qu'il a déjà été question pour les journalistes d'avoir un statut, un ordre professionnel aussi pour pouvoir, justement, rassurer. Vous parliez de méfiance, tout à l'heure, M. Giroux. Est-ce que la FPJQ, là-dessus, a une nouvelle réflexion? Parce que je me rappelle, là, ça fait presque huit, neuf ans, là, où cette discussion-là avait eu lieu. Où est-ce qu'on en est, de votre côté?

M. Giroux (Stéphane) : Écoutez, la question a été largement débattue lors de la sortie du rapport Payette au début de la décennie. Le principe semble intéressant à certains égards si c'est pour distinguer ceux qui se collent ou non à un code déontologique. Mais, si le gouvernement ou un organisme non journalistique a son mot à dire sur notre façon de travailler, c'est non. C'est pour cela que les détenteurs de la carte de presse, par exemple, de la FPJQ, jouissent d'une bonne réputation, parce qu'ils doivent se soumettre à des critères sérieux et rigoureux. C'est pour ça... selon nous, faire partie d'un organisme reconnu auquel les grandes organisations de presse sont déjà impliquées est un rempart suffisant. Mais je vais être honnête avec vous, la question continue à diviser, même parmi nos membres.

Quant à un ordre professionnel, là, c'est beaucoup plus difficile. Un ordre professionnel comme ceux qui représentent les médecins, avocats, ingénieurs, c'est absolument incompatible avec la liberté d'expression telle que garantie par la Charte des droits et libertés. On ne peut pas s'imaginer un monde où la liberté d'expression, d'opinion, de faire des reportages, de contester le gouvernement serait tributaire d'une permission d'un organisme de contrôle. Un journaliste qui dérange se ferait réduire au silence si, tout à coup, l'organisme de contrôle devenait politisé. C'est impensable puis juridiquement impossible, alors c'est pour ça que la question n'est même pas soulevée dans la plupart des pays occidentaux.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Il reste 10 secondes, Mme la députée.

Mme Melançon : Oh! zut de zut! J'aurai d'autres questions, principalement sur le recyclage, où on va devoir aussi, bien sûr... On veut prendre les GAFA, là, on veut leur parler. Bien, Amazon est souvent ignoré, avec le suremballage, les boîtes de carton, on va devoir en reparler.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée de Taschereau pour 2 min 30 s.

Mme Dorion : Merci. J'ai lu votre mémoire, qui est superintéressant, puis on appuie beaucoup, beaucoup des suggestions que vous faites là-dedans, qui sont intelligentes et à suivre absolument.

Mais j'ai une autre question, et là je ne veux pas vous mettre mal à l'aise, c'est vraiment une question que beaucoup de gens, surtout dans ma génération, se posent, et j'aimerais avoir des réponses à leur donner. Il y a eu une baisse de confiance envers les journalistes dans les dernières années. Il y a beaucoup de monde qui disent : Moi, je ne consomme même plus ça, je ne crois plus à ça. Sur le blogue de la FPJQ, il y a Jean-François Cliche qui écrivait à ce sujet puis qui disait : «Cette confiance, nous l'avons collectivement laissé s'étioler au fil des décennies, même si notre métier en dépend.» Et on ne s'en parle pas entre journalistes, comme si on n'avait pas de pouvoir d'action là-dessus.

Là, la confiance du public, moi, je la vois comme plus que jamais nécessaire, surtout s'il faut financer une partie de la vie médiatique avec des fonds publics. Est-ce que la FPJQ ou les journalistes se posent la question entre eux, à savoir est-ce qu'on a une responsabilité dans cette désaffection-là du public? S'il y en a une, est-ce qu'on fait partie aussi du problème? Et, dans les deux cas, est-ce qu'on peut faire partie de la solution puis comment pour regagner la confiance du public, qui est vraiment nécessaire à notre démocratie?

M. Giroux (Stéphane) : Je peux répondre. Dans le fond, effectivement, il y a eu une érosion. Durant les années 80, en télévision, dans l'écrit, il y a eu une espèce de virage vers ce qui rapporte financièrement pour les entreprises de presse plutôt que la qualité. Ça devenait plus payant de mettre quatre journalistes sur les faits divers que de mettre un correspondant à Washington, mettons. Et puis on ajoute à ça l'arrivée de l'Internet, des médias sociaux, qui a ouvert la porte à la désinformation, les gens se mêlent, et puis là on se retrouve dans une situation où, effectivement, les gens ne sont plus trop sûrs s'ils peuvent faire confiance ou non. Oui, on se pose la question sur la crédibilité, et ça me fait plaisir de vous annoncer aujourd'hui que ça va être le thème de notre congrès au mois de novembre, à Saint-Sauveur.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Giroux (Stéphane) : Et puis évidemment les députés, s'ils ont des doutes, là, ils sont invités à participer.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Rimouski pour 2 min 30 s.

M. LeBel : Oui, bonjour. «Québec demande à Ottawa qu'il impose aux entreprises du GAFA», «Québec fasse pression sur Ottawa afin d'amender les lois», «Québec revendique auprès d'Ottawa la gestion des droits d'auteurs». Qu'est-ce qu'on fait si Ottawa n'écoute pas?

M. Giroux (Stéphane) : Écoutez, Ottawa, en ce moment, est dans la même situation que plusieurs autres pays qui font face à ce problème-là. Puis je pense qu'à l'international ce qu'on découvre, c'est qu'il y a une certaine... hein, qui bouge en premier? On vient de voir que la France s'est décidée à agir. Le président américain dit : Bien, si vous faites ça à mes GAFA, moi, je vais taxer votre vin. Il y a des enjeux qui dépassent malheureusement ça, mais ce serait bien le fun que quelqu'un se réveille, à Ottawa, parce que le gouvernement à Ottawa, qu'il soit conservateur ou libéral, ils ont laissé tout couler il y a une dizaine d'années.

• (11 heures) •

M. LeBel : Est-ce que vous seriez fiers de nous si la commission, de façon unanime, on s'entend pour revendiquer tous ces droits-là qu'on devrait avoir d'Ottawa? Si on s'entendait dans une déclaration unanime, tout le monde, qu'on demande à Ottawa de bouger, vous seriez fiers de nous?

M. Giroux (Stéphane) : Je pense que ça va faire partie de votre travail et de votre message.

M. LeBel : On va essayer. On va essayer de vous rendre fiers.

M. Giroux (Stéphane) : L'histoire du Québec s'en est...

M. LeBel : Moi, j'ai juste un commentaire, puis c'est un peu en lien avec ce que ma collègue vient de dire, on écoute les bulletins de nouvelles maintenant, il y a une grande partie des bulletins de nouvelles que ce n'est pas des topos, c'est des commentateurs qui viennent nous dire quoi penser. Moi, j'aimerais mieux avoir un topo de temps en temps dans mes régions puis de décider moi-même qu'est-ce que j'ai à penser avant de me le faire dire par un commentateur. Vous ne trouvez pas qu'il y a un problème là? De plus en plus, c'est comme ça, tu ouvres le topo, tu as cinq minutes de discussion avec un commentateur. Il me semble... Il n'y a pas un problème là?

M. Giroux (Stéphane) : La question est intéressante et puis... J'ai participé à une étude, il y a quelques années, avec le syndicat Unifor, puis on avait fait l'analyse du coût des reportages, et le fait est, là, qu'une enquête journalistique peut coûter jusqu'à 10 000 $ et peut-être même 100 000 $ sur les gros dossiers...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Giroux (Stéphane) : ...et puis une chronique, ça ne coûte rien, ça ne coûte rien. Alors, des fois il y a des médias à court de budgets pour faire du journalisme d'enquête...

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, M. Giroux.

M. Giroux (Stéphane) : ...vont faire du commentaire.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je reconnais maintenant la députée de Marie-Victorin pour une période de deux minutes.

Mme Fournier : Merci. C'est superintéressant, puis je voulais justement faire du pouce sur ce qu'ont dit, avant moi, les collègues de Verdun, Taschereau et Rimouski concernant toute cette question-là de la confiance, puis je pense que ça a un lien avec la place de plus en plus grande de l'opinion dans les médias. Et la députée de Verdun faisait référence au statut de journaliste, qui a déjà été discuté dans les années passées, mais je vous soumets bien humblement que je crois que c'est une partie de la solution, dans le sens qu'il y a beaucoup de gens qui perdent confiance dans l'information parce que c'est devenu difficile pour le citoyen de distinguer ce qui est de l'opinion versus ce qui est une information rigoureuse, vérifiée, écrite par des journalistes qui, eux, suivent un code de déontologie auquel ne sont pas tenus des chroniqueurs ou des blogueurs, par exemple, qui n'ont pas le statut de journaliste ou qui ne sont pas journalistes. Donc, vous ne croyez pas que ça pourrait être, disons, une idée à réétudier dans ce contexte-là, par exemple, à votre congrès du mois de novembre?

M. Giroux (Stéphane) : On peut certainement en parler, mais vous voyez tout de suite le problème, où il y aurait deux statuts de journaliste : un pour ceux qui font de l'opinion, qui ont certaines responsabilités, d'autres, ceux qui font de la nouvelle, qui ont d'autres responsabilités. Moi, j'ai toujours l'inquiétude de : Un instant, j'ai la liberté de presse, j'ai le droit d'écrire ce que je veux, où je veux, quand je veux, comment je veux. C'est là, là. Je veux dire, la liberté de la presse, la liberté d'expression, c'est un des plus grands dons de la démocratie, ça peut être mal utilisé. Moi, j'ai toujours dit : Ça serait le fun si les journaux étaient un petit peu plus sérieux dans la façon de séparer bien précisément ce qui est la nouvelle, ce qui est l'information, mais ce n'est pas si simple que ça, tu sais.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Fournier : Mais le citoyen au coeur de ça, je pense qu'il a besoin de davantage d'outils pour distinguer les deux parties de l'information.

M. Giroux (Stéphane) : L'éducation, l'éducation.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre présence. Votre contribution est inestimable pour cette commission.

Je demanderais cependant au groupe de l'Association des journalistes indépendants du Québec de prendre place rapidement, car nous avons quelques minutes de retard.

Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 4)

(Reprise à 11 h 5)

Le Président (M. Ciccone) : On prend place rapidement, s'il vous plaît. Merci beaucoup.

Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des journalistes indépendants du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole est à maintenant vous.

Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ)

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bonjour. Gabrielle Brassard-Lecours, présidente de l'Association des journalistes indépendants du Québec et journaliste indépendante. Je suis d'ailleurs une récipiendaire de la bourse de 30 secondes, du programme qui a été exposé juste avant moi. Donc, voilà, merci beaucoup de nous recevoir à la commission.

À l'instar de nos collègues, donc, de la fédération des journalistes professionnels du Québec, et ceux de la Fédération nationale des communications, à laquelle nous sommes affiliés, et de la plupart des groupes qui défilent devant vous cette semaine, on partage les inquiétudes quant à l'avenir des médias, comme nous le démontre aussi la récente crise chez Le Groupe Capitales Médias. Nous partageons également plusieurs des solutions qu'ils proposent pour sortir de l'impasse.

Pour vous mettre en contexte, l'Association des journalistes indépendants s'est fondée à Montréal en 1988. Elle défend l'indépendance des journalistes face aux pressions économiques et politiques qui s'exercent sur le métier et elle participe, par ses actions et son discours public, au renouvellement des perspectives sur le journalisme indépendant et l'évolution des pratiques journalistiques contemporaines.

Il était important pour nous aujourd'hui de témoigner de la réalité particulière des journalistes indépendants dans cette crise, dont mon collègue va vous parler dans quelques instants. Sachez toutefois que les journalistes pigistes indépendants sont de plus en plus nombreux. Même quand ils travaillent à temps plein dans les médias, ils sont souvent sur des sièges éjectables. Ils sont aussi présents autant à Montréal que partout dans la province. Les pigistes sont d'ailleurs parfois les seuls correspondants régionaux qui alimentent nos médias nationaux. Et les journalistes de l'AJIQ sont aussi des professionnels au même titre que tous les autres journalistes qui répondent à un code déontologique et travaillent avec rigueur et éthique. Il y a d'ailleurs de nombreux journaux et magazines qui dépendent largement des pigistes pour leur contenu.

M. Van Vliet (Simon) : Bonjour. Simon Van Vliet, vice-président de l'AJIQ. Donc, les conditions de travail des journalistes pigistes comme Gabrielle, et moi, et les membres de l'AJIQ sont caractérisées par une très grande précarité. Mais, à une certaine époque pas si lointaine, des journalistes de renom quittaient leurs postes salariés et syndiqués pour devenir pigistes. C'est le choix qu'a fait notamment René Lévesque en 1956. Et beaucoup de gens, à cette époque-là, choisissaient la liberté et l'autonomie professionnelle que confère le statut de pigiste pour développer, avancer leur carrière, pouvoir faire plusieurs choses différentes, pas être dépendants d'un seul employeur. Et c'est ce qu'on pourrait appeler l'âge d'or de la pige, là, où on avait beaucoup d'opportunités, des bons tarifs, des contrats décents. Ça, ça s'est poursuivi, disons, jusqu'au tournant des années 80, puis, à partir de là, on a vu un virage brutal vers la précarisation du statut et des conditions de travail des journalistes indépendants.

Aujourd'hui, dans certaines rédactions, c'est 30 % à 50 % des effectifs de la salle de rédaction qui sont des surnuméraires, c'est-à-dire des pigistes qui sont sur le «payroll», si vous me passez l'expression, mais qui n'ont aucune sécurité d'emploi, qui sont à contrat à la semaine, au mois. Et pour les autres, bien, sauf quelques rares exceptions, là, les tarifs qui sont pratiqués dans l'industrie ont stagné depuis le début des années 80, ce qui fait que les pigistes ont vu leurs revenus diminuer d'à peu près 30 % en 30 ans, entre les années 80 puis le début des années 2010. Et la tendance à la précarisation s'est accélérée grandement dans les années 90‑2000 et préfigurait à bien des égards la crise que le milieu connaît depuis une dizaine d'années dans son ensemble.

• (11 h 10) •

Il faut dire que l'absence d'un cadre de négociation collective désavantage très nettement les journalistes indépendants, qui n'ont pratiquement aucun pouvoir de négociation individuel face aux grands groupes de presse. D'autant plus que le marché québécois, tant dans le secteur de la presse écrite, des quotidiens, les hebdos, les magazines que dans la presse audiovisuelle, en radiotélévision... sont contrôlés par des oligopoles qui profitent de leur position dominante pour imposer des contrats abusifs, pour maintenir des contrats au strict minimum, ce qui pousse bien des pigistes à diversifier leurs activités, notamment en prenant des contrats à côté, parfois dans des zones déontologiques plutôt floues, et surtout de faire plus avec moins en moins de temps.

Depuis le tournant des années 2000, la plupart des éditeurs de périodiques au Québec exigent de la part de leurs collaborateurs pigistes des cessions complètes de droits sans aucune autre rémunération qu'un cachet de première publication souvent déjà minime. Parfois, on demande même de renoncer aux droits moraux dans les contrats, et, sans signer ces contrats-là, on ne peut pas collaborer. Donc, c'est ce qu'on appelle les contrats d'adhésion, c'est non négociable. Et donc cette espèce de spoliation là des journalistes indépendants par les entreprises de presse, à bien des égards, est très similaire à celle qu'on connaît avec les Google, Amazon et Facebook, qui reprennent, sans payer, des contenus produits à grands frais par des entreprises de presse. Et c'est la même réalité qui fait que les entreprises de presse sont aujourd'hui au bord de la faillite pour certaines et que de nombreux journalistes indépendants peinent à joindre les deux bouts en travaillant à la pige, et c'est pour ça que ma collègue va maintenant vous parler de l'enjeu du financement des médias.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Alors, il y a plusieurs propositions qu'on a entendues ici depuis le début des travaux de la commission ainsi que la solution qui est... une des solutions qui est envisagée pour Le Groupe Capitales Médias, qui ne sont pas nouvelles à celles de l'AJIQ. La plupart des médias indépendants et beaucoup de médias communautaires qui sont... qui survivent, certains depuis 30 ans, d'autres qui sont plus récents, qui se sont formés sur le Web, se forment dès le départ en coopérative ou en organisme à but non lucratif non seulement pour des raisons économiques, mais pour des raisons évidentes d'indépendance, qui est une valeur cruciale et indissociable de notre métier de journaliste.

Si la syndicalisation des journalistes est venue assurer l'indépendance des salles de rédaction par la mise en place de conditions favorisant le respect de la déontologie journalistique, la protection syndicale n'a jamais complètement éliminé la possibilité pour les propriétaires de s'immiscer dans les salles de nouvelles. En 2013, une étude du Conseil de presse du Québec soulignait d'ailleurs que la convergence d'intérêts commerciaux, publicitaires et corporatifs au sein des grands groupes de presse menace l'indépendance journalistique. Il semble évident, et depuis longtemps, que l'unique modèle actionnaires-publicitaires ne fonctionne plus pour les médias. Il est impératif de repenser l'économie complète des médias. Aucun média ne devrait être la propriété d'un seul individu ou d'une poignée d'actionnaires.

Mais, dans cette foulée, à notre avis, il est essentiel de pouvoir bénéficier d'une aide de l'État, que ce soit sous forme d'aide récurrente au fonctionnement ou pour des projets spéciaux. Cette aide étatique doit être équitable et ouverte à tous les médias. En France, une enveloppe budgétaire dédiée aux médias est assurée, peu importe le gouvernement au pouvoir. D'autres initiatives innovatrices existent aussi, comme le site Web jaimelinfo.fr, qui réunit plus d'une centaine de médias que le public peut financer à la carte. Même chose aux États-Unis, avec la très récente apparition de civil.co, une plateforme qui héberge des rédactions de partout dans le monde, financée par le public via une cryptomonnaie interne, ce qui permet la décentralisation complète de la plateforme. La mise en place de programmes de financement calqués sur ceux destinés au secteur culturel permettrait non seulement aux médias traditionnels de traverser la crise actuelle, mais également de favoriser l'émergence de nouveaux médias qui explorent des modèles économiques, techniques et éditoriaux qui offrent de nouvelles voies au journalisme indépendant de qualité.

M. Van Vliet (Simon) : Ce modèle-là du système culturel, il existe depuis des décennies. Il est déjà en application dans certains secteurs de l'industrie des médias, dont la production télévisuelle et cinématographique, les périodiques, les médias communautaires. Ce système-là existe depuis plus de 50 ans et n'a jamais donné lieu à des ingérences politiques notables, même pour les sociétés d'État, qui sont financées en majeure partie directement par l'État. C'est pour ça qu'on suggère de reproduire cet écosystème de financement là dans le système... dans l'écosystème des médias et, pour cela, donc, de reconnaître les médias d'information comme des organisations culturelles qui peuvent être admissibles à du soutien similaire aux industries culturelles et aux organismes artistiques. Plus spécifiquement, on peut s'inspirer de la mécanique qui existe en créant des programmes balisés et normés sous forme de soutien au fonctionnement mais aussi aux projets pour les organismes à but non lucratif, de crédits d'impôt, de prêts, de garanties de prêt pour les organismes à but lucratif et des mesures directes de soutien pour les journalistes indépendants sous forme de bourses de recherche, de création, de formation, de production, comme c'est le cas pour les artistes.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Van Vliet (Simon) : Enfin, ça fait 15 ans que le modèle de la négociation collective a été évoqué, d'abord dans le rapport Bernier en 2003, ensuite dans le rapport Payette en 2011. Cette idée-là de s'inspirer de la loi sur le statut de l'artiste, c'est ce qu'on prône, à l'AJIQ, depuis 30 ans. Merci de le considérer.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Beauce-Sud pour une période de 15 minutes.

M. Poulin : Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre présentation fort intéressante. Très intéressant également, quand on parle d'indépendance des médias, donc, de vous entendre particulièrement sur ce volet à titre de journalistes indépendants.

J'ai plusieurs questions, je vais essayer d'y aller de façon assez courte. Au niveau de la rémunération des journalistes indépendants, pour les gens qui nous écoutent à la maison, vous avez dit que, depuis le début des années 80, ça a stagné, alors, ça, ça ne date pas d'hier. On peut penser à quoi, en termes de rémunération? Certains sont rémunérés au mot, d'autres au texte, d'autres à l'ampleur de l'exclusivité. Donc, j'aimerais que vous nous dressiez un portrait de la rémunération que vous avez.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bien, c'est un des gros problèmes pour les journalistes pigistes, c'est qu'en ce moment, au Québec, il n'y a pas de tarification de base, donc c'est vraiment à la carte et c'est vraiment selon l'entreprise pour laquelle on travaille.

On peut vous donner un exemple. Par exemple, Le Devoir, qui a le même tarif depuis à peu près 25 ans, paie, par exemple, 50 $ pour un texte de 500 mots. Vous comprenez que ce n'est pas beaucoup, hein? C'est ça. Donc, ils paient 50 $ pour... oui, c'est ça, 500 mots... 250 mots, donc 100 $ pour un texte, ce qui n'est pas assez pour vivre. Donc, vous comprenez qu'il faut qu'on multiplie beaucoup les contrats pour pouvoir payer la vie avec ça. Il y a les magazines, il y a certains magazines qui paient un petit peu, par exemple 125 $ au feuillet — un feuillet, c'est 250 mots ou 1 500 caractères — mais ce n'est vraiment pas le cas dans les médias en général, là. C'est très fluctuant, ce qui fait que c'est difficile de... Le portrait est très, très inégal, de la tarification. Et justement c'est pour ça qu'on prône un peu un statut plus balisé qui nous permettrait au moins d'avoir un tarif de base, peu importe pour qui on travaille, et l'AJIQ travaille beaucoup en ce sens-là.

M. Van Vliet (Simon) : Si je peux ajouter, donc on a Le Devoir à 50 $ du feuillet, là on est dans la moyenne de ce qui se fait en presse écrite quotidienne. Il y a des endroits où ça va descendre jusqu'à 35 $ du feuillet, parfois même moins. Parfois, c'est un forfait unique pour un texte, peu importe le nombre de mots, parfois avec une photo, qui n'est pas rémunérée. On peut avoir des publications, surtout des publications scientifiques ou des publications spécialisées, qui vont aller jusqu'à 135 $, 150 $ du feuillet. Ça, c'est en presse écrite.

La photographie de presse, là, c'est tout un autre secteur où, là encore, il y a une très grande disparité : parfois on paie les photos, parfois on ne les paie même pas, parfois on demande à un photographe professionnel d'en faire mais parfois on demande au journaliste, qui n'est pas photographe, de simplement fournir une photo prise avec son téléphone. Et, dans le domaine de la radiotélédiffusion, là, souvent on est soit dans des tarifs horaires sous forme de surnuméraire, ou à contrat, ou carrément à forfait, avec des forfaits à la journée, des forfaits à la semaine.

Donc, on a une disparité énorme qui fait que c'est très dur, surtout pour les journalistes qui débutent dans le métier, de savoir qu'est-ce qu'il est raisonnable d'exiger. Parce qu'évidemment la question de la rémunération, elle n'est jamais abordée dès la commande par le client ou quand on soumet une proposition au client. On soumet une proposition : Ah oui, ça vous intéresse? Parfait. Puis là c'est seulement en cours de route que, là, il faut finir par poser la question : Mais c'est combien que vous payez? Puis là souvent on a la mauvaise surprise de réaliser qu'on va travailler deux jours, une semaine sur un projet qui va nous rapporter 200 $, 500 $ si on est chanceux. Alors, c'est vraiment ça, l'enjeu de base, la rémunération, clairement.

• (11 h 20) •

M. Poulin : Et j'imagine que, dans la valorisation du métier de journaliste, il doit être extrêmement difficile, auprès de vos membres, de dire : Justement, toi, tu demandes combien?, versus un autre, puis de quelle façon on peut négocier, puis en même temps offrir un certain standard en lien avec la rémunération. Donc, ça doit être extrêmement difficile.

Et comment vous faites pour naviguer, à l'ère de l'exclusivité? On a vu des médias québécois remercier des journalistes s'ils partageaient leur voix, par exemple, avec d'autres médias qui sont en compétition. Alors, vous, comment vous faites pour réussir à naviguer, à l'ère de l'exclusivité? On comprend que votre texte est exclusif. Lorsque vous le vendez, vous vendez également une exclusivité, vous vendez une nouvelle, en tout cas, du moins, le plus souvent possible. Mais comment vous faites pour réussir à tirer votre épingle du jeu puis à convaincre les directeurs d'information que, même si, dans deux ou trois semaines, ils vont vous lire dans un autre média, peut-être sur un autre sujet... Alors, comment vous faites pour traverser le temps de l'exclusivité?

M. Van Vliet (Simon) : Bien, il y a beaucoup de règles implicites, évidemment, il n'y a aucune règle formelle. Mais ce qui est certain, c'est que beaucoup du développement de carrière des journalistes indépendants se fait sur une base de relation de confiance avec les rédactions, ce qui fait que, si on propose un sujet à une rédaction, bien, on attend minimalement d'avoir une réponse de ce média-là avant de le proposer ailleurs. On peut aller jusqu'à dire : Si vous ne le prenez pas, je vais aller le proposer à quelqu'un d'autre. C'est une question de confiance, à ce moment-là, de dire : Bien, moi, je suis confiant de pouvoir continuer à avoir des contrats avec cette entreprise de presse là. Il s'agit seulement de faire preuve d'un certain jugement et de s'assurer de nouer des relations avec les rédactions avec lesquelles on collabore. Puis ce n'est pas facile parce qu'il y a énormément de pression dans les rédactions, il y a énormément de roulement aussi, avec toutes les coupures de postes qu'il y a eu, ce qui fait que c'est très, très difficile. Puis c'est vraiment une question de parfois marcher sur des oeufs, parfois se retenir de proposer quelque chose à une entreprise de presse concurrente de peur de perdre les contrats plus réguliers qu'on a avec une autre entreprise. C'est un travail d'équilibriste sur un fil très précaire.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Ce qu'il faut ajouter aussi, c'est qu'il y a plusieurs entreprises qui comprennent bien cette clause d'exclusivité là et qui exigent qu'on cède la totalité de nos droits d'auteur. C'est-à-dire qu'ils achètent notre texte pour 100 ans sur toutes les plateformes, «forever», qu'on ne peut pas du tout, du tout vendre ailleurs, tout ça. Donc, ça aussi, c'est difficile, parce que ça fait qu'on ne peut pas, là, justement, proposer ailleurs.

Puis souvent les pigistes qui ont du succès, là, disons, bien, ils tirent leur épingle du jeu, par exemple, en proposant un sujet mais en proposant des angles différents à plusieurs médias. Donc, comme ça, ils peuvent un peu rentabiliser le même sujet mais pas tout à fait avec le même angle. Mais ça, c'est dans le cas où, justement, on ne se fait pas demander de céder nos droits d'auteur. Et nous, on conseille souvent à nos membres de ne pas accepter ce genre de contrat là, mais en même temps ils ont besoin de manger, ils ont besoin de vivre, donc on se retrouve dans un cercle vicieux qui est un peu difficile. Puis c'est pour ça qu'on revendique un peu d'avoir un statut un petit peu plus affirmé, là, pour qu'on puisse se protéger un peu de ça.

M. Van Vliet (Simon) : Parce que, dans la réalité, si je peux me permettre, c'est seulement les journalistes les plus privilégiés qui peuvent se permettre de refuser de céder leurs droits, qui peuvent se permettre de renoncer à collaborer avec un média, parce qu'ils savent qu'il va y en avoir d'autres. Mais la plupart des jeunes journalistes qui commencent n'ont pas ce luxe-là de dire non à des clauses abusives comme celle de renoncer à ses droits d'auteur.

M. Poulin : Puis vous êtes des entrepreneurs aussi, alors l'objectif, c'est que... Quand on a un contrat, si on dit non une fois, ils risquent de ne pas nous rappeler, par la suite, puis ils disent : Arrange-toi, c'est ça?

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Exactement. Donc, c'est un jeu d'équilibre où on veut cultiver un peu nos bonnes relations avec les rédactions. Donc, c'est ça, on navigue...

M. Poulin : Peut-être que je vois une opportunité pour vous — avant de céder la parole à mon collègue — parce qu'on a beaucoup parlé de niches et l'importance d'avoir des niches extrêmement précises. Évidemment que, s'il y aurait une direction de dire : Sur une masse salariale, il y a des crédits d'impôt dans les salles d'information, et tout ça, c'est sûr que, là, on entre dans quelqu'un qui est embauché, si on parle de la masse salariale. On pourrait définir par la suite le journalisme en tant que tel, qui pourrait être, donc, les journalistes à la pige, et tout. Mais, dans un volet où on veut des niches en région, où on veut plus d'exclusifs, on veut plus de journalistes d'enquête, on veut plus de médias d'information en région qui couvrent des sujets extrêmement précis, est-ce que vous voyez une opportunité pour les journalistes indépendants de s'inscrire rapidement dans ce volet-là et qui pourrait aider vos membres, d'une certaine façon?

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Vous voulez dire une niche spécialisée?

M. Poulin : Si le gouvernement, dans sa façon dont on souhaite que l'information soit communiquée, donc qu'il y ait plus de médias de niche ou encore, du moins, de sujets de niche... est-ce que vous voyez une opportunité pour les journalistes indépendants d'avoir des sujets très précis qui pourraient être supportés davantage?

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bien, je pense que, oui, ça pourrait être une option, dans la mesure où on a plusieurs de nos membres qui sont déjà un peu spécialisés, là, c'est-à-dire qui ont des enjeux avec lesquels ils se sentent plus à l'aise de... ils ont des sujets qui leur tiennent plus à coeur que d'autres, donc, j'imagine que ça pourrait être une option. En même temps, je vous dirais que, par exemple, l'aide fédérale qui est annoncée en ce moment n'aidera pas les médias qui sont nichés, justement, spécialisés, donc ça va être un peu...

M. Poulin : ...prendre un média qui existe déjà et l'amener vers certaines niches ou l'amener vers certains volets qui ne sont pas suffisamment apportés, entre autres les régions du Québec.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bien, ça veut dire que ce serait plus intéressant, si c'était à un niveau individuel, que pour des médias indépendants, qui seraient obligés, un peu, de transformer leur mission, si vous voulez. Mais, à un niveau individuel, oui, j'imagine que ça pourrait être une option.

M. Van Vliet (Simon) : C'est qu'il y a deux grands modèles pour vivre de la pige : c'est soit on se spécialise puis on devient la personne de référence que les médias vont appeler s'il y a des sujets à faire en agriculture, en agronomie, en sciences, mais l'autre modèle, c'est d'être un généraliste, mais là on se retrouve à travailler un peu dans les platebandes des médias généralistes, qui ont déjà leur personnel, et donc on a les restants, si on veut, on a les cahiers spéciaux, on a les commandes que les gens réguliers n'ont pas le temps de faire ou refusent de faire parce qu'ils ont des clauses de conscience dans leur contrat que, comme pigistes, on n'a pas. Donc, c'est ça, la réalité des journalistes indépendants qui ne se spécialisent pas, c'est que ça leur laisse très peu d'espace pour développer leur marché, si je peux dire.

M. Poulin : Merci beaucoup. Je laisserai la parole à...

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. M. le député de Saint-Jean, vous avez la parole.

M. Lemieux : Oui. Quatre minutes, c'est ça?

Le Président (M. Ciccone) : 4 min 3 s.

M. Lemieux : Trois secondes?

Le Président (M. Ciccone) : Oui, quatre minutes.

M. Lemieux : Quatre minutes. Merci, M. le Président. Vous avez beaucoup parlé de vos conditions de travail, de rémunération. Je voudrais parler de la réalité terrain, parce qu'à la page 3 de votre mémoire vous dites : «Si les journalistes indépendants vivent des difficultés liées à la précarité et aux contrats inéquitables dans les grands centres, la situation est pire en région.» Et là je pensais que ça voulait dire avec les médias régionaux, mais vous rajoutez : «Pourtant les journalistes indépendants des régions représentent une force pour nos médias concentrés à Montréal.»

La réalité au quotidien pour la majorité, là, de vos membres, c'est qu'ils travaillent en région pour Montréal ou pour les grands centres ou ils travaillent en région pour les médias régionaux?

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bien, ils travaillent en majorité pour les médias qui sont concentrés à Montréal, parce que souvent, en région, il n'y a qu'un seul journal, qui a déjà un peu ses employés. Donc, oui, c'est sûr qu'il collabore, là. Par exemple, on a des membres en Abitibi, on en a deux, trois, qui collaborent régulièrement avec Radio-Canada en Abitibi mais ils alimentent aussi, tu sais, un peu Radio-Canada national quand c'est nécessaire et ils témoignent souvent... Ils alimentent beaucoup les médias qui sont à Montréal, parce que souvent les médias concentrés à Montréal n'ont pas de correspondant en région ou très peu, donc ils font un peu les deux, mais c'est aussi parce que les opportunités de travail, s'ils se concentrent seulement sur les médias de leur région, sont un peu limitées pour les journalistes indépendants.

M. Lemieux : On a parlé de gruyère et de désert médiatique à certains endroits sur le vaste territoire québécois, et ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de monde dans ces vastes territoires là. Je vous signale que je suis député de Saint-Jean. Saint-Jean-sur-Richelieu, 100 000 personnes, 11e ville au Québec, on a deux hebdos et une station de radio musicale, donc, et la montréalisation des ondes fait en sorte qu'on n'en voit pas, de médias de Montréal. M. le député de Rimouski et moi, on partage la même opinion là-dessus. Mais, dans votre cas, ce territoire-là, il vous appartient. Le problème, c'est vos clients, parce que vous êtes capables de le couvrir, vous êtes suffisamment nombreux pour le couvrir, c'est juste qu'il n'y a pas personne pour acheter votre matériel.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : ...puis ça, bien, c'est lié à l'enjeu plus large de la montréalisation générale de l'information, là, qui a bien de la misère à sortir de la métropole, et tout ça. Donc, c'est sûr que, par ricochet, bien, ça atteint aussi les journalistes indépendants.

M. Lemieux : Mais on s'entend... je ne sais pas si on va s'entendre, mais la nature médiatique étant ce qu'elle est, la montréalisation des ondes, on ne remettra pas le génie dans la bouteille, là, ça, c'est pas mal réglé. Mais est-ce qu'on peut produire plus et mieux de contenus régionaux, au moins, pour les régions et interrégional? Après tout, l'Internet, ça marche des deux bords, hein?

• (11 h 30) •

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bien, tout à fait, puis nous, à l'AJIQ, en général, on prône le travail collaboratif. Donc, c'est pour ça qu'on fait appel... on encourage nos membres à vendre le plus de sujets possible au plus de médias régionaux, nationaux, montréalais, tout ça. Donc, moi, je pense qu'une des solutions aussi à une partie de la crise, c'est le travail collaboratif, là. On n'est plus à l'époque où on peut travailler en silo. Puis, si on pouvait sortir un peu du modèle actionnaires-publicitaires puis qu'on se batte pour tirer notre bord de la couverte... ça serait très bénéfique de pouvoir travailler beaucoup plus ensemble, justement, interrégionaux, avec Montréal. Ça nous paraît essentiel de sortir d'un carcan individualiste, là, à travers cette crise-là.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Van Vliet (Simon) : Bien, il a été question, là, de donner un rôle régional à Télé-Québec, par exemple. C'est certain que les pigistes en région pourraient être une source d'information importante pour une espèce d'agence de presse régionale que Télé-Québec pourrait devenir. Ça, ce serait très intéressant, relativement à faible coût.

M. Lemieux : C'est la question que je n'ai pas le temps de vous poser. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée de Verdun.

Mme Melançon : Merci beaucoup d'être présents aujourd'hui. On va tenter de mettre un peu de viande autour de l'os, parce que, dans le fond, c'est très intéressant, puis vous arrivez justement avec une nouvelle idée avec le statut de l'artiste, et, moi, c'est un peu plus là-dessus, là, où je voudrais nous guider ensemble. L'attractivité, donc, au milieu journalistique, on en a parlé un peu plus tôt ce matin et hier aussi avec un professeur d'université, et on comprend qu'avec la diminution des conditions socioéconomiques que vous vivez, 30 % en 30 ans, là, ce n'est pas rien, là, on va se le dire. Je pense que de savoir et d'expliquer aux gens qu'il n'y a pas vraiment d'encadrement sur votre métier, c'est assez surprenant, surtout lorsqu'on fait le choix, comme vous le disiez un peu plus tôt, de devenir journaliste indépendant.

Vous savez qu'avec la politique culturelle, donc, qui a été déposée par l'ancien gouvernement et qui a été bien acceptée, je vais le dire comme ça, là, par le nouveau gouvernement, il y a les deux lois sur le statut de l'artiste qui doivent être réouvertes. J'imagine que ce que vous souhaitez aujourd'hui, et c'est ce que j'entends, c'est qu'on puisse introduire dans ces lois-là... parce qu'une fois que les lois sont faites et sont fermées, c'est difficile de les rouvrir, mais là, comme on doit les réouvrir avec la nouvelle politique culturelle, j'imagine que votre souhait, c'est que vous puissiez intégrer ce statut de l'artiste là pour avoir un encadrement.

M. Van Vliet (Simon) : Absolument. Puis vous parliez, avec nos collègues de la FPJQ, du statut de journaliste, à l'AJIQ, bien, on a, depuis les débuts, une revendication sur la reconnaissance du statut juridique des journalistes indépendants spécifiquement, et c'est parce que la Loi sur le statut de l'artiste venait d'être adoptée quand l'AJIQ a été fondée.

Il faut savoir que la négociation collective existe seulement dans la loi sur les métiers de la scène et de l'audiovisuel et que les... bien, oui, donc la scène, le théâtre, la danse et la télévision, l'enregistrement sonore mais pas dans le domaine de la littérature. Donc, nous, c'est certain qu'une grosse partie des revenus des journalistes pigistes se fait en presse écrite, dans les magazines, donc, dans ce qui retomberait sous le coup de la loi sur la littérature. Donc, si on envisageait d'intégrer le statut de... la reconnaissance des journalistes indépendants comme artistes au sens de la loi, il faudrait, à tout le moins, inclure dans la loi sur la littérature le même mécanisme de négociation collective que celui qui existe dans l'autre loi.

L'alternative, ce serait de créer un régime particulier pour les journalistes indépendants, mais c'est certain que ce serait un peu contre-productif de créer une loi spécifique à un corps de métier alors qu'on a déjà deux lois qui encadrent l'ensemble des professions de la culture. Et donc il s'agirait simplement d'élargir un petit peu la portée de ces deux lois-là pour inclure les métiers de la culture et des communications. Et à ce moment-là, effectivement, ce serait le bon moment de le faire dans l'étude de ces deux lois-là, qui datent d'il y a plus de 30 ans, quand même.

Mme Melançon : Tout à fait, mais qui avaient quand même été réouvertes au début des années 2000, je me souviens très bien de ces moments-là. J'en prends bonne note. Je ne sais toujours pas à quel moment on va être à l'intérieur de ces deux lois, puisque j'ai déjà posé des questions en ce sens-là. Je ne sais pas à quel moment, là, du côté gouvernemental, on a l'intention de rouvrir, mais sachez que j'ai bien entendu... et je connais plutôt bien ces deux lois-là, donc on pourra sans doute s'en reparler.

J'aimerais revenir avec vous sur... Vous avez parlé d'une possible agence de presse régionale, là, avec Télé-Québec, là, un peu ce qu'on mentionnait tout à l'heure, et je sais que vous êtes très au fait. Mais il y a aussi des problématiques avec La Presse canadienne,actuellement, parce qu'il y a un effet domino avec la situation qu'on vit depuis deux semaines avec les six quotidiens en région, là. Si on n'a plus des quotidiens à nourrir, cette agence de presse là va être mise à mal, assurément, alors il faut s'assurer d'une survie. Est-ce que vous ne voyez pas, dans un doublon comme celui-là, une possibilité, justement, qu'on affaiblisse un pour essayer de redonner un peu à l'autre?

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Moi, j'ai envie de dire que, si La Presse canadienne engage nos journalistes indépendants, c'est super. Mais, si ce n'est pas le cas, bien, justement, nous, on essaie de trouver, dans le fond, des espaces pour que nos journalistes puissent vivre, puissent couvrir leurs histoires. Si ça se fait à travers soit une agence régionale ou un genre de plateforme, on n'est pas fermés à ça. Tu sais, on ne veut pas affaiblir personne, là, on essaie juste de trouver un peu des solutions, là, mais, oui...

Mme Melançon : Parfait. Non, mais c'est parce que moi, j'essaie de le voir quand même dans la globalité, vous comprenez? Puis j'entends très, très, très bien aussi votre proposition, mais ce que j'entends en même temps, c'est que, pour vous, la meilleure façon de donner des emplois aux journalistes indépendants, c'est la diversité des sources d'information.

M. Van Vliet (Simon) : C'est certain. Puis, pour répondre à votre question un peu plus globale, il y aurait peut-être des possibilités de convergence, si je peux utiliser ce mot-là sans la connotation politique, entre La Presse canadienne et une éventuelle agence régionale de Télé-Québec par le biais d'une association coopérative entre deux organisations. C'est là qu'on est, et il faut aller vers ça, de mettre en commun nos ressources pour faire mieux avec le peu de ressources qu'on a et être capables d'aller générer davantage de revenus pour l'ensemble des joueurs du milieu. Donc, oui, la crise met en cause, éventuellement, la survie de La Presse canadienne en français au Québec, mais peut-être qu'il y a une opportunité, dans cette crise-là, de redéfinir les rôles des différents acteurs de l'information au niveau régional.

Mme Melançon : Lorsque vous parliez tout à l'heure de la renonciation des droits moraux, est-ce que — et je ne connais pas la réponse, donc c'est une vraie, vraie, vraie question — un journaliste indépendant a droit de regard sur le titre qu'il y aura à son article?

M. Van Vliet (Simon) : S'il renonce à ses droits moraux, certainement pas. S'il n'y renonce pas, a priori, oui, mais ça dépend vraiment des pratiques dans les rédactions.

Mme Melançon : C'est inégal.

M. Van Vliet (Simon) : Il y a des rédactions qui demandent de suggérer des titres et des sous-titres, il y a des rédactions qui n'en tiennent pas compte, donc c'est très variable. Mais je vous dirais que la renonciation aux droits moraux va beaucoup plus loin que ça, parce que ça permettrait théoriquement à un média de reprendre des éléments de contenu, notamment des citations attribuées à une source, puis de les mettre dans un encadré publicitaire dans un contexte complètement différent. Je veux dire, il y a peu de médias qui font ça mais ils s'arrogent le droit de faire ça.

Et, accessoirement, on parlait des droits d'auteur aussi, beaucoup de contrats demandent les cessions de droits pour les adaptations au cinéma, au théâtre, en roman, alors que les entreprises de presse n'ont ni les moyens ni l'intention d'exercer ces droits-là mais se les réservent pour éviter d'avoir à demander la permission ultérieurement.

Mme Melançon : Je crois qu'on va devoir se reparler, parce qu'on est vraiment pressés dans le temps, puis il y en a tellement à dire. Mais sachez une chose, pour un statut... en tout cas, dans le statut de l'artiste, je pense qu'il y a vraiment un lieu d'atterrissage possible, il faut le regarder de tous les angles. Je vais céder la parole à ma collègue, qui brûle d'envie de vous poser des questions.

Le Président (M. Ciccone) : Je reconnais la députée Saint-Laurent pour 1 min 45 s.

• (11 h 40) •

Mme Rizqy : Bonjour. L'an dernier, j'étais au Salon du livre et j'ai eu l'occasion de rencontrer Frédérick Lavoie et Jasmin Lavoie, deux journalistes internationaux indépendants qui sont partis, bien, de Chicoutimi, allés à l'extérieur du pays, un au Pakistan, en Inde, et ils ont fait un échange épistolaire qui a donné un livre, Frères amis, frères ennemis. Et je trouvais que, quand ils sont revenus au Québec, mais... ils ont donné des conférences, ils ont publié un livre, mais que non seulement ils ont couvert la presse internationale, et même suite à... qu'ils reviennent au Québec, ils nourrissent nos réflexions de qu'est-ce qui se passe, là, à l'extérieur du pays, qu'est-ce qui se passe à l'intérieur du Québec. Ils font beaucoup, quand même, de conférences. Et j'étais en train de réfléchir à comment qu'on peut aider... car, évidemment, on ne devient pas riche en publiant, nécessairement, un livre et pas riche quand on fait la couverture internationale de façon indépendante. Et j'ai regardé même... Est-ce que vous avez réfléchi, par exemple, à des mesures de défiscalisation? J'ai vu aussi que, par exemple, Frédérick Lavoie a aussi une bourse... une subvention, pardon, du Conseil des arts canadien pour la publication d'un deuxième livre. J'aimerais vous entendre sur... défiscalisation et aussi possibilité d'avoir des subventions, parce qu'il y a aussi la pédagogie qui se fait à travers tout ce travail par la suite, quand ils reviennent ici, au pays.

Le Président (M. Ciccone) : En 25 secondes, s'il vous plaît.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : ...que c'est des pistes intéressantes. Mais je peux vous dire, pour les connaître aussi, ils ne gagnent pas super bien leur vie. Il n'y a personne qui a payé leur billet d'avion pour qu'ils s'installent en Asie, tout ça. Moi-même, comme je disais, je suis récipiendaire de la bourse 30 secondes, qui va m'amener à faire 15, 20 ateliers, cet automne, à travers le Québec, mais, tu sais, c'est 3 000 $, là, c'est loin d'être un salaire annuel.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Donc, il faut réfléchir, mais, oui, c'est dans nos plans d'obtenir plus de bourses.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée de Taschereau pour 2 min 30 s.

Mme Dorion : Je n'ai pas longtemps puis j'ai deux questions, ça fait que, pour la première, vous pouvez y aller dans une réponse la plus courte possible. Vous parlez beaucoup de soutien public. Est-ce qu'on devrait, pour permettre ça, entre autres, imposer les géants du numérique?

M. Van Vliet (Simon) : Oui, mais peut-être qu'on pourrait envisager d'autres choses, comme de taxer les achats publicitaires au Canada. Il y a des entreprises qui ont les moyens d'acheter de la publicité, pourquoi est-ce qu'elles ne contribueraient pas à un fonds à travers une taxe sur leurs achats publicitaires?

Mme Dorion : Merci. Puis on parle aussi beaucoup de but non lucratif. On sait qu'il y a des journalistes, en ce moment, qui essaient de créer une coop pour sauver les journaux de Capitales Médias. Il y a d'autres tests qui sont avancés, des OSBL, des petits organismes média sans but lucratif. Pouvez-vous nous dire en quoi c'est un avantage ou quels sont les avantages de ça par rapport aux modèles qui sont soumis à la pression du profit puis du clic?

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bien, on l'a un peu exposé tout à l'heure, mais nous, on pense qu'il n'y a aucun média qui devrait être la propriété unique d'un individu ou de deux, trois actionnaires. Le modèle coopératif, OBNL, ça remet un peu le pouvoir aux artisans et aussi aux lecteurs, et donc ça peut changer beaucoup la donne sur, un, le type d'information qu'on fait, hein, parce qu'on parlait un peu de la crise de confiance, il y a ça aussi dans la crise des médias, puis on n'en parle pas beaucoup, mais peut-être que, si l'information était un petit peu plus proche des gens, les gens se sentiraient plus investis dans leurs médias et, quand il y a des crises comme ça, se sentiraient plus interpelés, et peut-être qu'il y aurait aussi moins de crises. Et, c'est ça, donc ce modèle-là remettrait un peu le pouvoir dans les gens qui font le journal et dans les gens qui le lisent, et on pense que ce serait une des solutions.

M. Van Vliet (Simon) : Regardez, La Presse a été capable d'aller chercher plusieurs centaines de milliers de dollars en dons depuis qu'elle est un OSBL. Je ne pense pas qu'il y a beaucoup de gens qui auraient donné de l'argent à La Presse quand elle appartenait à Power Corp. Donc, il y a clairement un levier là qui renforce la confiance, qui donne le contrôle au public sur l'information et qui est très clairement porteur pour nous. D'autant plus que, on ne se le cachera pas, des entreprises de presse qui font de l'argent avec l'information, il n'y en a pratiquement plus, donc peut-être que c'est le temps de mettre le modèle à but lucratif de côté pour ce qui est de produire de l'information.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Maintenant, la parole est au député de Rimouski pour une période de 2 min 30 s.

M. LeBel : Merci. J'ai appris beaucoup, je ne connaissais pas votre situation comme ça puis comment vous travaillez, les relations avec les médias. J'ai appris beaucoup de votre présentation. Vous êtes beaucoup en région? Il y a beaucoup de pigistes qui sont un peu déployés partout au Québec?

M. Van Vliet (Simon) : Il y en a beaucoup. Il y en a qui font leur travail pour des magazines ou des publications spécialisées qui ne sont pas forcément basées à Montréal puis il y en a un certain nombre qui alimentent ou alimentaient les quotidiens nationaux par leur travail. Mais, oui, on n'a pas de chiffres, mais il y en a plusieurs dizaines, voire quelques centaines, là, d'éparpillés, si je peux dire, à travers le Québec.

M. LeBel : Dans le fond, dans l'objectif de diffuser de l'information qui vient des régions sur les grands médias nationaux, pour que le Québec sache ce qui se passe dans les régions, vous êtes des éléments importants là-dedans. Je comprends qu'en vous aidant, en vous soutenant, on va faire en sorte aussi qu'on va parler des régions du Québec dans les grands médias, et vous faites partie de la solution, et ça, c'est ce que j'ai compris. Et, pour ça, il faut peut-être... avec le statut d'artiste, qu'on pourra regarder, là, mais, effectivement, ça fait partie de la solution pour faire connaître les régions.

L'international aussi, là, on vient d'en parler. Hier, les gens de La Presse nous ont parlé de ça aussi, il y a de moins en moins d'information qui vient de l'international. Vous faites aussi partie de la solution là-dedans, parce que vous produisez de l'information internationale.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Tout à fait. On a énormément de pigistes qui voyagent, et, moi, c'est un de mes chevals de bataille, pour avoir fait une maîtrise en journalisme international ici, à Laval. On trouve ça très important, surtout que c'est un peu le parent pauvre, là, de l'information au Québec, je trouve, l'information internationale.

Et par ailleurs l'indépendance des journalistes leur permet aussi de partir, hein, puis de voyager, c'est juste que c'est difficile pour eux. On a deux ou trois pigistes qui sont capables de rentabiliser leur voyage, quand ils partent à l'étranger, en vendant plusieurs piges, mais, tu sais, ils ne font pas un profit énorme. Cependant, comme les régions, souvent, c'est des journalistes qui sont des genres de correspondants pour les médias nationaux ici, donc, souvent, ils sont les seuls sur place à couvrir un conflit ou un enjeu important.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Donc, oui, on est là-dedans aussi.

Le Président (M. Ciccone) : Mme la députée de Marie-Victorin, la parole est à vous pour deux minutes.

Mme Fournier : Merci beaucoup pour votre présentation. Il y avait beaucoup de franchise dans votre mémoire aussi. Je pense que c'est un des avantages de l'indépendance.

À la page 4 de votre mémoire, vous faites le lien, justement, entre les balises déontologiques qui fléchissent, la qualité de l'information qui diminue, avec la crise de confiance du public à l'égard des journalistes puis du monde des médias en général. Je trouve ça intéressant, que vous dressiez un tel lien de causalité. Je me demandais, selon vous, de votre perspective, quelles sont les raisons qui font en sorte, justement, que les balises déontologiques diminuent et affectant, du coup, la qualité d'information.

M. Van Vliet (Simon) : Il y a deux éléments de réponse. De un, il y a le fait que les médias eux-mêmes ont de moins en moins d'indépendance financière, donc dépendent de plus en plus de leurs revenus publicitaires, ils sont prêts à faire de plus en plus de compromis. Dans la soi-disant muraille de Chine entre la publicité puis la rédaction, il y a de plus en plus de trous.

Et, d'autre part, les pigistes sont dans cette situation-là au niveau individuel et sont parfois obligés d'accepter de faire des cahiers spéciaux qui sont en réalité des publireportages, de faire parfois du marketing de contenu qui n'est pas identifié comme tel. Ça, c'est la pression économique qui s'exerce tant sur les entreprises de presse que sur les journalistes eux-mêmes qui explique ça. Il y a un lien très, très clair de cause à effet.

Mme Fournier : Est-ce que vous sentez une certaine pression pour produire un contenu qui va générer des réactions, par exemple, virales sur le Web? On parle souvent de la dictature du clic, tout ça. Est-ce que c'est une expérience que vous voyez sur le terrain?

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bien oui, c'est sûr. Puis, tu sais, nous, on ne connaît aucun journaliste indépendant qui vit 100 % de la presse écrite pure et dure en faisant juste du journalisme, là. Tu sais, on est obligés de diversifier notre activité, et ça nous arrive de faire des top 10 pour MSN, là. Tu sais, on fait ça des fois juste parce que, bien, c'est vite fait, c'est payant, tout ça.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant.

Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Mais ce n'est évidemment pas notre aspiration profonde.

Mme Fournier : C'est bon. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup à vous deux pour votre contribution.

J'inviterais, s'il vous plaît, l'Association des médias écrits communautaires du Québec à prendre place rapidement, s'il vous plaît.

Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 48)

(Reprise à 11 h 50)

Le Président (M. Ciccone) : Veuillez prendre place, s'il vous plaît. Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des médias écrits communautaires du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent, à procéder à votre exposé. La parole est maintenant à vous.

Association des médias écrits communautaires
du Québec (AMECQ)

M. Girouard (Yvan Noé) : Bonjour. Yvan Noé Girouard, directeur général de l'AMECQ. Je suis accompagné du président de l'association, François Beaudreau.

L'AMECQ a été fondée en 1980, et, présentement, on a 81 journaux qui sont membres. On entend par journal communautaire... qui est un journal de propriété collective et de gestion démocratique. Alors, nous, nos journaux, c'est de l'information locale et régionale. On pourrait dire aussi hyperlocale, parce qu'on a des tout petits journaux qui font de l'information dans leurs villages. Je vois autour de la table, ici, il y a quelques députés qui ont des journaux communautaires dans leurs circonscriptions, alors vous savez pas mal dans quoi ça consiste, et leurs difficultés de financement aussi. On va y revenir tantôt.

Il y a une étude qui a été menée par la firme Advanis-Jolicoeur en février 2018, auprès de 3 150 personnes, qui démontre que le nombre moyen de lecteurs par foyer est de 1,39, que le temps lecture moyen est de 30 minutes et que la durée de conservation d'un exemplaire est de 9,2 jours. Et de plus 94 % des sondés affirment que leur journal communautaire reflète bien la communauté locale. Alors, ce sont des gens qui, dans leur milieu, disent : Il n'y a pas d'information qui vient chez nous, donc on va prendre des moyens puis on va se doter d'un outil d'information. Ce sont, pour la plupart, des bénévoles, O.K.? Je dirais, l'AMECQ, il y a près de 1 500 bénévoles dans l'ensemble des journaux, 700 qui sont de façon plus régulière. Puis, on pourrait dire, des employés de soutien qui sont payés... qui font du travail administratif et des pigistes, ça pourrait aller autour de 200 personnes, mais, généralement, ce sont des bénévoles. Et, même s'il y a des employés payés, il y a des bénévoles qui gravitent autour d'eux. Je vais laisser la parole à François.

M. Beaudreau (François) : Vous savez, pour produire un journal communautaire, il y a beaucoup d'énergie qui est dépensée pour récolter les fonds nécessaires pour la survie de ces journaux-là, pour le fonctionnement de ces journaux-là. Parmi les ressources qui sont à notre disposition, il y a la publicité locale. Elle aussi, elle souffre du développement du Web, des achats en ligne, des choses comme ça. Dans nos petites municipalités, là, beaucoup de nos commerces ferment, puis ils ne seront pas remplacés, puis ce n'est pas nécessairement faute de relève, hein? Alors, c'est plus difficile pour nous. Cela dit, nos journaux continuent quand même d'offrir une vitrine intéressante à cette clientèle-là, parce que ce n'est pas tous les commerces qui se destinent au Web, au commerce branché. On a encore une place de choix vis-à-vis de ça, sauf qu'on a des revenus autonomes, comme ça, qui s'en vont en diminuant.

Et puis il faut mentionner aussi qu'est-ce qui était important pour nous, c'est la publicité gouvernementale. On parle ici d'un énoncé de politique gouvernementale qui remonte à 1995 et puis qui a été préparé par le Conseil exécutif, qui invitait les ministères, les sociétés d'État, les organismes qui relèvent des ministères à allouer 4 % de leur budget de publicité existant, 4 %, aux médias communautaires. On s'entend, les médias communautaires, ce n'est pas seulement les journaux, c'est aussi la radio, c'est aussi les télévisions autonomes. Bon, ça n'a jamais été atteint, cet objectif-là, sauf qu'il y a longtemps, dans les années 90 et au détour des années 2000, il y avait suffisamment de revenus publicitaires générés par l'État québécois qui étaient investis dans les journaux communautaires, qui permettaient même de faire nos frais avec ces montants-là, hein? On parle, par exemple, au détour des années 2000, là, il y avait à peu près 500 000 $ qui étaient alloués à l'ensemble des journaux communautaires. 2018, l'État québécois a dépensé 78 000 $ dans les journaux communautaires, répartis dans 80 journaux. Contentez-vous, le fédéral : zéro avec une barre. Donc, ce serait primordial, à ce moment-là, que les médias écrits communautaires reçoivent la part qui est prévue, la juste part qui est prévue à cet énoncé de politique gouvernementale là.

Et puis ensuite je vais vous parler brièvement du numérique, du papier versus le Web. Vous le savez, peu importe le support, hein, qu'il soit numérique, qu'il soit papier, pour les médias communautaires, l'enjeu, c'est la production du contenu, d'un contenu de qualité. Ça, on s'assure de le faire, nous autres, avec notre association, qui va dispenser des formations continues, qui va dispenser des formations thématiques dans le cadre de différentes activités, qu'on rejoint tous nos membres, nos 80 membres... 81. Mais, maintenant, pour alimenter le contenu sur une plateforme Web, évidemment, c'est différent un petit peu du papier. Vous savez, quand on met en ligne une page Web, vous avez en moyenne quatre secondes pour attirer l'attention du lecteur, c'est très différent du papier. Et puis les revenus, évidemment, sur le Web, ne suivent pas du tout. On n'a pas trouvé le modèle d'affaires, on le cherche.

Vous savez, des fois, comme Yvan Noé le mentionnait tantôt, on a des communautés qui sont à petite échelle, hein, qui ont 400... par exemple — vous connaissez ça, vous, M. Émond — à Saint-Aimé—Massueville, il y a 400 portes. Quand vous faites le tour, là, dans votre campagne, il y a 400 portes. Ce n'est pas beaucoup, hein, mais, pour rejoindre ces gens-là, évidemment, si on met une publicité Web, bien, avec le nombre de clics, on n'y arrivera pas, hein? On a même des journaux qui ont été jusqu'à faire du porte-à-porte pour dire : Visitez notre site Web, tout ça. Non, le papier est encore pertinent chez les médias écrits communautaires. Yvan Noé le mentionnait tantôt, c'est 1,39 lecteur par foyer, qui passe au-delà d'une demi-heure là-dessus. Alors, dans ce contexte-là, il est primordial que l'État québécois rétablisse sa politique d'achat conformément à cet énoncé de politique gouvernementale. Pour nous, là, c'est une question de survie et puis c'est essentiel. Voilà, je te repasse la parole.

M. Girouard (Yvan Noé) : O.K. Je voudrais vous parler de la problématique de RecycleMédias. Actuellement, le montant demandé, le montant moyen, aux journaux qui dépassent le 15 tonnes est de 3 000 $ par année, dont une partie sous forme de publicité pour RecycleMédias. Le contrat publicitaire de deux ans a été donné, là, à une agence du gouvernement qui s'appelle l'agence Challenge Média. Le gouvernement du Québec se doit d'intervenir, surtout en considérant que cette taxation est déjà perçue plusieurs fois par les papeteries, les imprimeurs, les journaux. Alors, l'intervenant RecycleMédias ne fait que contribuer au déclin des journaux communautaires. Malgré les récentes subventions accordées par le ministère de la Culture et des Communications et aussi du ministère de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques à RecycleMédias, nous persistons à croire que cette taxe devrait complètement être abolie. Cette taxe ne fait que confirmer que les journaux et, par ricochet, l'information locale et régionale qui est transmise sont considérés, excusez-moi, comme des déchets.

Alors, les journaux communautaires, quels sont nos défis à relever? Nos principaux défis sont variés : l'adaptation au Web et au vidéojournalisme, l'arrimage entre la version papier et les médias sociaux, l'atteinte de l'objectif du 4 % en matière de publicité gouvernementale, la migration du journal communautaire vers le multimédia, la mise à contribution des MRC pour la création de médias communautaires régionaux, la recherche de personnes aptes à faire du financement et à s'occuper du sociofinancement, le maintien des trois principales sources de financement, gouvernemental, municipal et publicitaire, la recherche de solutions pour contrer le vieillissement des bénévoles et l'exode des jeunes. Malgré ces défis de taille, les journaux communautaires de l'AMECQ persistent à penser que, dans 10 ans, ils existeront toujours. La principale fierté des journaux est leur longévité. Le fait d'avoir réussi à durer en étant toujours là pour leurs communautés et surtout en étant appréciés par leurs lecteurs, ne jamais tomber dans la facilité et demeurer pertinents constitue un credo pour la plupart des journaux communautaires. Le journal communautaire est aimé des petits et des grands, des enfants et des grands-parents. On peut sentir l'attachement de la population au journal communautaire, qui est, entre autres, là pour donner des moments de gloire à des individus ordinaires. En somme, un journal communautaire, c'est un reflet de la communauté. Quand leur journal parle d'eux, que ce soit d'un bénévole d'un organisme du milieu, d'un artiste local ou d'une personne ordinaire qui vient d'accomplir un geste extraordinaire, les gens s'y reconnaissent.

En conclusion, bien, j'aimerais dire que les journaux écrits communautaires jouent un rôle de premier plan dans la production et la diffusion de l'information dans leur milieu. Plus encore, un média écrit communautaire est un lieu de débat, d'expression, un outil de développement, un outil essentiel pour appuyer la production artistique et culturelle qui émane des régions. Les médias communautaires du Québec font partie de l'essence même de nos régions. Toujours disponibles, ils ont survécu aux nombreux changements des dernières années, que ceux-ci fussent politiques, technologiques ou sociaux. Ils résistent aux pressions et aux changements. Le dévouement des bénévoles permet de conserver ces parties intégrantes du tissu social des régions desservies, car les médias écrits communautaires sont là pour renseigner les résidents locaux sur ce qui se passe dans leurs quartiers, dans leurs villages.

• (12 heures) •

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Merci beaucoup.

M. Girouard (Yvan Noé) : Je lance un cri du coeur : Sauvons les médias écrits communautaires.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je pense que les députés vous ont entendu. Je passe maintenant la parole au député de Beauce-Sud pour 15 minutes.

M. Poulin : Merci, M. le Président. M. Beaudreau, M. Girard, merci pour votre présence, merci pour votre témoignage, également, en commission parlementaire. Merci de rappeler l'importance du papier parce que, dans cette ère du numérique, on pourrait oublier assez facilement l'importance, oui, effectivement, de l'industrie, qui en est une, avec les imprimeries qui sont fort importantes, entre autres dans les régions du Québec, mais l'importance, qui est encore agréable, d'aller chercher son journal, de le lire, de l'étendre sur la table, d'acheter un livre papier, pas seulement de le consommer de façon numérique. Et ça, c'est pour tous les âges, hein? On pourrait penser que les jeunes, on aime mieux le numérique, là. Moi, dans mon cas, j'ai un très grand plaisir à lire du papier. Voyez-vous, j'utilise énormément de papier ici, en commission parlementaire, puis ça me fait grandement plaisir de le faire. Et vous faites bien de le réitérer, en région et dans les grands centres, l'importance, donc, du papier, des médias communautaires aussi. On aura, tout à l'heure, l'association des radios communautaires et d'autres gens qui oeuvrent dans le secteur. Vous êtes souvent le seul média au monde à parler des gens de cette région-là, à parler des gens de la municipalité, alors ça, c'est très important. Et, quand on parle de démocratie, de préserver l'importance de l'information, il faut inévitablement préserver les médias communautaires.

Mais ça ne date pas d'hier, hein? 2004, Dominique Vien, qui était une excellente députée de Bellechasse, avec qui j'ai eu le plaisir de travailler, rédigeait, à titre d'adjointe parlementaire à la ministre de la Culture et des Communications... à ce moment-là, elle était adjointe parlementaire de Line Beauchamp, avait rédigé un rapport fort intéressant, que j'ai eu la chance de lire en fin de semaine, Les médias communautaires au Québec. Aviez-vous collaboré, à l'époque? Bien, probablement que votre association, oui.

M. Beaudreau (François) : Oui, on a été interpelés.

M. Poulin : Probablement que votre association... certainement. Et ce qu'on retrouve à l'intérieur de ce rapport-là, dans certains cas, c'est une mine d'or, c'est des choses qui auraient dû être faites, qui auraient pu être faites. Il y a des choses qui ont été faites, mais on voit qu'il y a des problématiques qui existaient en 2004 et qui existent encore aujourd'hui. Entre autres, on dit : «Plusieurs médias communautaires ne [génèrent] pas suffisamment de revenus pour assumer pleinement l'embauche des employés nécessaires, ils font appel aux programmes d'emploi des gouvernements du Québec et du Canada. Cependant, ces programmes n'autorisent que des emplois sur une base ponctuelle et généralement peu rémunérés, ce qui ne permet pas à l'employé de s'engager à long terme dans l'organisme. Ils constituent des solutions palliatives acceptables, mais qui ne permettent pas de combler les besoins de personnel régulier.» Alors, j'imagine que c'est encore un défi au niveau de l'embauche aujourd'hui.

Autre sujet qui était abordé dans cet excellent rapport, on disait : «La notoriété des médias communautaires auprès des annonceurs, des groupes et des individus des collectivités visées» est un défi. Depuis 2004, est-ce que vous avez réussi ou sentez-vous que vous pourriez vous doter d'une stratégie pour laquelle le gouvernement pourrait être partenaire pour sensibiliser davantage les entreprises? Je parle du privé, de l'argent privé à investir dans nos médias communautaires écrits.

M. Beaudreau (François) : Pour sensibiliser les... on est assez présents. Ça dépend de la taille des médias, ça dépend des endroits. Si vous prenez, par exemple... on a des médias qui ont un tirage de, quoi, 400, 600 exemplaires, le cercle est assez restreint. À quelles entreprises... des fois, c'est des villages où est-ce qu'il y a une désertification de l'activité commerciale et industrielle, hein, c'est déporté vers les villes plus grandes, ce serait plus difficile. Les journaux qui ont des plus grandes tailles... On en a, des journaux à Montréal, par exemple, et puis ailleurs qui ont au-delà de 40 000 exemplaires en tirage. Eux le font bien, eux réussissent à intéresser... bien, investir, on s'entend, on parle d'investissements publicitaires. Dans la participation, à ce moment-là, ça émane plus des citoyens, bon, qu'ils soient corporatifs ou pas, mais ça émane plus des citoyens. C'est de l'information qui est prise en charge par le milieu. C'est ça, un petit peu, les journaux qui sont membres de l'AMECQ.

M. Poulin : En même temps, et je vous fais une suggestion, moi, je suis député de Beauce-Sud, donc une région extrêmement rurale, j'ai 24 municipalités, j'ai des petits médias dans chacune des municipalités, j'ai même des journaux municipaux — là, c'est autre chose, c'est géré par la municipalité — mais le coût de publicités dans vos médias n'est pas très élevé et rejoint énormément de gens quand on le compare au per capita. Alors, de dire qu'il y a seulement 400 personnes dans la municipalité, oui, mais le coût de la publicité est tellement peu élevé que je rejoins énormément de gens, somme toute. Et moi, je vous invite... puis je pense qu'on devra réfléchir, comme commission parlementaire, à vous appuyer dans cette stratégie de mise en valeur des médias écrits communautaires, qui rejoint énormément de gens et qui coûte très peu, en termes de publicité. Une moyenne, un quart de page chez vous, là, ça peut coûter combien?

M. Beaudreau (François) : Bien, chez nous, on a 21 000 exemplaires, ça va coûter à peu près 400 $

M. Poulin : Pas cher, monsieur, là.

M. Beaudreau (François) : Non. Ça fonctionne, aussi, hein?

M. Poulin : Bien oui, je le sais, que ça fonctionne, je le sais.

M. Beaudreau (François) : Bien, vous voyez, les revenus gouvernementaux ont fondu. On survit, hein? Alors, on fait notre job sur le terrain.

M. Poulin : Mais c'est important que le coût de la publicité... vous réussissiez à rejoindre énormément de gens, et c'est encore peu élevé.

M. Beaudreau (François) : ...que vous le mentionniez, M. le député, parce que, justement, on entame une démarche prochainement auprès des intervenants des journaux communautaires comme ça — Yvan Noé pourrait vous en parler un petit peu plus longuement — pour rapprocher, justement, le milieu dans lequel on évolue, chacun, pour rapprocher les gens du milieu, de quelque horizon qu'ils soient, qu'ils soient du milieu commercial ou sans but lucratif, pour les rapprocher de leurs médias communautaires.

M. Girouard (Yvan Noé) : Effectivement, dans une petite municipalité, les commerçants se disent : Je dois être là, parce que le commerçant, il s'identifie aussi au milieu communautaire. La mentalité est différente dans les villes plus grandes, là. Mais je ne sais pas, je prends en note votre suggestion, mais je ne sais pas si d'augmenter le coût de la publicité, ça va être bien vu de la part des commerçants dans les petites municipalités, bon, en tout cas.

M. Poulin : ...pas demandé de doubler, là. Il y a peut-être un juste milieu à y avoir aussi.

M. Girouard (Yvan Noé) : Peut-être, mais il faut voir, c'est libre à chacun de nos journaux, hein, nous, on ne se mêle pas de leur gestion. On a un projet présentement, on a une étude qui va être mise en marche cet automne, on veut faire le portrait de l'artisan de la presse communautaire, aussi bien l'employé, le bénévole, aussi les organismes communautaires qui participent au journal communautaire, parce qu'il y a beaucoup de journaux qui reçoivent des communiqués de la part des organismes communautaires de leur milieu, alors on veut avoir leur opinion aussi à eux. Et, bien sûr, les commerçants locaux vont être questionnés sur leur perception du journal communautaire dans lequel ils annoncent, puis on pourra peut-être ajouter une question à savoir s'ils sont prêts à augmenter le coût.

M. Poulin : C'est fort important. Moi, j'ai oeuvré dans les médias communautaires, à la radio, j'ai renouvelé des sciences... des licences, pardon, avec le CRTC. On avait un gros travail de pédagogie à faire sur la vente de la publicité dans les médias communautaires à l'effet que ce n'était pas très élevé. J'ai travaillé en radio privée, là, je parle de la radio, on vendait un spot de 30 secondes 100 $, et à la station communautaire, on le vendait 30 $, tu sais, et pourtant j'avais des très bonnes cotes d'écoute puis j'avais, tu sais, de très bonnes possibilités d'être entendu.

Au niveau du taux de lectorat des médias communautaires, on parle des territoires, là, qui sont couverts, là, par vous, là, vous parliez de 21 000 portes, mais est-ce que vous avez les moyens d'étudier le taux de lectorat ou est-ce qu'on pourrait, justement, vous appuyer dans cette mesure de taux de lectorat qui vous permettrait d'aller davantage devant les annonceurs?

M. Girouard (Yvan Noé) : ...une étude qui a été faite en janvier 2018, là, vous pouvez la consulter, elle est en ligne sur notre site Web www.amecq.ca.

M. Poulin : Est-ce que vous pouvez partager peut-être quelques faits saillants avec les membres de la commission?

M. Girouard (Yvan Noé) : Vas-y.

M. Beaudreau (François) : Oui, bien, justement, le taux de lectorat, le taux de pénétration, qui est très bon, le taux de perception des publicités aussi. Je n'ai pas les chiffres, là, en mémoire, là, je n'ai pas l'étude avec moi. Tu pourrais donner les faits saillants, tu as, toi, le résumé.

M. Girouard (Yvan Noé) : Bien, oui, j'ai le taux d'appréciation, j'ai... Qu'est-ce que vous voulez savoir, exactement, comme...

M. Poulin : On pourra peut-être se reparler, puis, pour nos travaux, c'était pour prouver le taux de lectorat de vos médias écrits communautaires, de prouver que les gens le lisent et que... C'est ça que je souhaitais entendre, là.

M. Girouard (Yvan Noé) : C'est là. Moi, je vous invite à aller sur notre site puis aller lire l'étude détaillée, là, c'est assez volumineux.

M. Poulin : O.K., parfait, parfait, on va s'en occuper sans problème. Alors, je vous remercie puis je vais céder la parole à un membre de mon gouvernement.

Le Président (M. Ciccone) : Alors, je cède la parole au député de Sainte-Rose.

M. Skeete : Merci, M. le Président. Je me demande, dans vos données, c'est quoi, l'âge moyen des consommateurs des journaux communautaires.

M. Girouard (Yvan Noé) : Il est assez élevé. La moyenne d'âge... attendez un petit peu, 65 ans et plus, c'est sûr que c'est le plus élevé, c'est 57 %, parce que... en région, parce que les...

• (12 h 10) •

M. Skeete : Je pose la question parce que... puis c'est un constat que je fais, là, ce n'est pas une opinion, mais je me demande si, justement, la difficulté à transitionner vers l'ère numérique est due au fait que les gens sont habitués d'avoir leur journal. Moi, j'ai la chance de me souvenir aussi des journaux quand il n'y avait rien d'autre, puis je suis un consommateur, maintenant, de mes nouvelles de manière numérique, ça fait que je pense que je suis bien positionné pour voir les deux côtés. Je me demande si vous n'êtes pas un peu en décalage de qu'est-ce que les médias nationaux ont vécu. Et je me demande si, en focussant sur la clientèle qui ne veut pas, justement, faire cette transition numérique là, vous ne vous mettez pas davantage en péril. Je me demande si vous avez analysé ça.

M. Girouard (Yvan Noé) : Mais on se met... On a engagé un programme, là, du ministère de la Culture et des Communications. On a le réseau ADN, là, des agents de développement numérique. Alors, depuis quelques mois, on a une personne qui travaille chez nous pour ça, trouver des solutions, comment dire à nos journaux : Voici, il existe des médias sociaux par lesquels vous pouvez, là, faire connaître davantage le journal. On travaille là-dessus, il n'y a pas de problème.

Maintenant, c'est sûr que, dans les petites municipalités en région, la population, elle est vieillissante, puis il y a des villages... je lisais un reportage dernièrement, là, il y a peut-être une vingtaine de villages qui peuvent fermer, là, au cours des deux, trois prochaines années...

M. Poulin : ...en passant.

M. Girouard (Yvan Noé) : Hein?

M. Poulin : Ce n'était pas vrai, ça.

M. Girouard (Yvan Noé) : Ce n'est pas vrai, ça?

M. Poulin : Hein, Harold, ce n'était pas vrai?

M. Girouard (Yvan Noé) : Bon, tant mieux, bonne nouvelle.

M. Poulin : «Fake news».

M. Girouard (Yvan Noé) : Tant mieux. Et les jeunes, quelqu'un me disait : Oui, mais les jeunes, dans les villages, ils pourraient travailler sur le numérique pour le journal. Oui, mais le jeune, là, il s'en va ailleurs, il quitte le village, il s'en va étudier à l'extérieur, et tout ça. Est-ce que lui aurait le goût de dire : Moi, je suis à Sherbrooke puis je vais travailler pour le petit journal qui est à Lingwick, par exemple? Je ne le sais pas.

M. Skeete : Vous êtes le deuxième à venir ici puis d'évoquer une tendance démographique aussi. Puis je pense que ça, c'est dans l'angle mort — chers collègues, je vous soumets ça — un peu de nos analyses, il y a aussi un enjeu démographique. Alors, la solution ultime, je pense, doit passer par une considération démographique aussi par rapport à la solution qu'on va avoir, parce qu'on parle de la montréalisation des médias en même temps qu'il y a un... on vide nos régions. Alors, je pense qu'on doit aussi s'attarder là-dessus. Bien, merci beaucoup.

M. Beaudreau (François) : ...M. le député, que cette clientèle-là, 57 % de nos lecteurs, mérite aussi d'être desservie, hein, fut-elle âgée de 65 ans et plus. Et, deuxièmement, on multiplie les efforts, à l'association, pour le virage numérique, formation après formation, et tout ça, et puis on emboîte le pas. Et puis c'est encore un petit peu délicat de nos jours, parce qu'il y a des régions où est-ce que le Web, bon, ne voyage pas à la même vitesse que chez nous, par exemple, tu sais.

M. Skeete : Vous avez un bon point, et ce n'était surtout pas pour dire que les citoyens plus âgés, qui consomment encore le papier, ne sont pas importants, sauf qu'on cherche une solution à moyen, long terme, et j'aimerais ça, du moins... peut-être je suis un peu arrogant de penser ça, mais j'aimerais ça que la solution qu'on propose soit viable dans 30, 40 ans, alors c'est pour ça que je pose la question, la démographie et la tendance aussi. Merci beaucoup, M. le Président.

M. Girouard (Yvan Noé) : ...aussi la solution, on est conscients qu'il faut prendre ce virage numérique. Vous savez, dans notre étude, on posait la question : Est-ce que vous savez que votre journal... Parce que les journaux qui ont été... les gens qui ont été interviewés, c'étaient tous des gens issus... dans leur région, c'était un journal qui était aussi sur le Web. On leur demandait : Savez-vous que votre journal est sur le Web?, bien, je pense qu'il y en avait 47 % qui disaient : Oui, on le sait. Mais combien allaient le consulter, là? C'était 5 % des gens qui allaient voir le journal sur le Web. Alors, ce qu'on veut faire présentement, en se servant des médias sociaux, Facebook, entre autres, Instagram, et tout ça, c'est d'inciter les lecteurs de ces journaux-là à aller sur le Web pour aller lire le journal aussi, on travaille là-dessus. La solution, là, moi, je ne l'ai pas encore, mais on cherche.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Saint-Jean pour 1 min 40 s.

M. Lemieux : Pas beaucoup de temps. Je voulais vous rappeler qu'hier j'ai dit, à un moment donné, que, Le Groupe Capitales Médias, la crise qu'ils ont vécue la semaine dernière, ça avait le bon côté d'amener les projecteurs sur cette commission et que le public entende davantage parler de ça. Mais je me trompe ou, de votre côté, c'était presque une mauvaise nouvelle, dans le sens que tous les projecteurs allaient aller là, justement, puis que le secteur communautaire n'allait pas recevoir l'oreille, l'attention et les soins qui font en sorte que vous, vous n'avez pas déclaré faillite ou bien vous n'avez pas demandé la protection du tribunal contre la faillite la semaine dernière? Mais le cri du coeur que vous avez essayé de lancer, en terminant, puis le président, vous l'a laissé faire, mais de justesse... mais je regrette que personne ne le voie, là, parce que, dans le mémoire, vous avez écrit ça tout petit partout, puis là, à la fin, c'est très gros, c'est : «Sauvons nos médias écrits communautaires!» Vous êtes en péril, à quelque part, là, vous, là.

M. Girouard (Yvan Noé) : On est en péril pour différentes raisons. Il y a la publicité qui n'est pas au rendez-vous, surtout la publicité gouvernementale, si ce n'était seulement que le 4 %, ce serait bien. Il y a la publicité locale, que c'est difficile aussi pour les commerçants locaux. Il y a aussi le vieillissement des bénévoles, le recrutement des bénévoles, on voit que nos bénévoles sont âgés. Écoutez, moi, ça fait 29 ans que je suis là. Quand je suis arrivé, j'étais dans la jeune trentaine dynamique...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Girouard (Yvan Noé) : Hein?

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Girouard (Yvan Noé) : En terminant? Bien, c'est ça, c'est la difficulté. Les bénévoles d'âge plus jeune, ils ne sont comme pas là, et les... Vous m'avez fait perdre le fil.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je suis désolé de vous couper dans votre cri du coeur à chaque fois, mais je dois respecter le temps. Je reconnais maintenant la députée de... voyons, Saint-Laurent pour une période de 10 minutes.

Mme Rizqy : Bonjour, messieurs, bienvenue parmi nous. Juste avant de commencer, tantôt, le député de Beauce-Sud avait un rapport. J'imagine qu'il prend l'engagement de le déposer à la commission et surtout un engagement de tenir tout ce qui était inscrit avec son gouvernement, parce que...

M. Poulin : Le rapport est déjà public, effectivement.

Mme Rizqy : Oui, mais le rapport...

M. Poulin : Est-ce qu'on en...

Mme Rizqy : Mais je n'ai pas terminé. Je pense que je m'adresse à la présidence et je n'ai pas terminé.

Le Président (M. Ciccone) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Poulin : Oui, absolument.

Mme Rizqy : Mon propos, c'est que, puisque nous sommes le 27 août 2019 et non pas le 27 août 2018, la campagne est loin, est terminée, la campagne électorale, je pense qu'aujourd'hui on doit faire un travail vraiment rigoureux, mais aussi un travail qui nous apporte des solutions. On peut regarder le passé ou on peut agir maintenant. Puis, si on veut agir maintenant, si vous déposez le rapport puis que vous prenez l'engagement de mettre les solutions que vous avez mentionnées immédiatement de l'avant, on va vous soutenir. Fin de la parenthèse.

Maintenant, je me tourne vers vous... Mais je n'ai pas entendu si vous allez dire oui, si vous prenez tous les engagements là-dedans, mais vous êtes quand même maintenant au pouvoir. Alors, je me tourne vers vous, parce que justement, tantôt, vous avez mentionné que certains députés, dans leur comté, ont des journaux communautaires. Bien, c'est le cas, par exemple, pour ma collège la députée d'Acadie et moi-même, on a le Journal des Voisins, qui fait un travail vraiment remarquable, hyperlocal, et c'est des réalités, là, vraiment du quotidien.

Tantôt, j'entendais les gens qui disent, d'une part : Moi, j'aime ça papier, d'autres qui disent : Ah! non, non, il faut faire un virage numérique. Je regarde, par exemple, chez nous, dans notre comté, bien oui, il y en a beaucoup qui aiment avoir leur journal papier puis qui l'annotent, puis d'autres que c'est aussi pour des raisons d'acuité visuelle. Moi-même, je souffre de sécheresse oculaire, donc j'achète encore mes livres papier puis j'aime bien lire mes livres papier, j'aime ça, lire mon journal papier encore.

En ce qui a trait à la question d'augmenter vos tarifs publicitaires, je ne pense pas que ça appartient à nous de commencer à vous dicter comment faire. Puis d'ailleurs l'indépendance et la distance nécessaires... faire en sorte, je crois, que ce n'est pas notre rôle, à moins que je me trompe, de vous dire comment tarifer vos publicités, vos placements publicitaires, hein, n'est-ce pas?

M. Girouard (Yvan Noé) : Non, ce n'est pas à nous de faire ça. De toute façon...

M. Beaudreau (François) : Mais... Oui, vas-y.

M. Girouard (Yvan Noé) : Bien, on peut discuter avec nos membres, mais, en tout cas...

M. Beaudreau (François) : On respecte la gestion de normes de nos membres, hein?

M. Girouard (Yvan Noé) : Vous savez, on fait des rencontres régionales, et on rencontre nos journaux, puis on discute avec eux pour savoir qu'est-ce que nous, l'AMECQ, on peut faire pour eux puis, bon, qu'est-ce qu'ils aimeraient éventuellement qu'on fasse pour les aider. Mais la question de publicité, c'est sûr, on a des rencontres en Abitibi au mois de septembre, et, en Gaspésie, on va discuter de ça aussi.

Mme Rizqy : J'ai eu, à quelques occasions, la chance d'aller à FM 103,3, qui est dans le comté, je crois, de ma collègue de Marie-Victorin, et on discute de sujets, des fois, qui sont moins populaires. À l'époque, moi, une des premières fois que j'ai été invitée, c'était pour parler de la lutte contre les paradis fiscaux, puis justement c'est vraiment... ça nous donnait l'occasion de vraiment discuter de façon beaucoup plus longue, hein, parce que les entrevues, souvent, dans les radios communautaires, bien, ce n'est pas du six minutes où est-ce qu'on doit vraiment condenser notre propos, des fois on a 30 minutes, des fois même une heure, et ça nous permet d'aller beaucoup plus en profondeur avec, bien, le journaliste qui nous interroge mais aussi avec la population, des fois on prend aussi des appels. Trouvez-vous, justement, que ça nous permet de faire davantage, des fois, de pédagogie avec le travail qui est fait avec le communautaire?

• (12 h 20) •

M. Beaudreau (François) : ...de pédagogie aussi puis d'importance d'être près du terrain qu'on couvre. Je pense aux sempiternels gaz de schiste, ça a commencé chez nous, ça, hein? À Saint-François-du-Lac, il a commencé à y avoir des forages exploratoires, tout ça, on a été les premiers à couvrir ça, pas parce que c'était un scoop, tout ça, mais c'était anodin, c'était dans le champ d'un agriculteur et puis... qu'on connaissait, tout ça, puis on a approché ça, et puis on a commencé à gratter ça un petit peu. Puis plus tard, après ça, quand il y a eu... quand les médias plus importants se sont mis à s'intéresser à cette question-là, bien, ils nous consultaient. On travaille avec notre milieu. Et puis... de pédagogie aussi, quand on est invités, on va dans les écoles, on va leur parler de comment rédiger un communiqué, des choses comme ça. Et puis plusieurs le font, hein, dans nos membres, c'est sûr.

Mme Rizqy : Oui, d'ailleurs... puis j'ai étudié, et vécu en Estrie, et même travaillé comme professeure pendant presque 10 ans. Puis d'ailleurs, par exemple, les algues bleues, c'est le réseau communautaire qui s'est mis ensemble et... par la voix de différents journaux, puis en Estrie, il y en avait quand même beaucoup, de journaux communautaires qui ont permis, justement, de mettre en lumière une problématique très, très, très locale, qui a pris des proportions nationales.

Je reste encore dans le communautaire, par exemple la Télévision Rive-Sud, qui est toujours, je pense, encore dans le comté de Marie-Victorin, et ça nous permet, encore une fois, d'avoir des émissions mais aussi, pour plusieurs, leurs premiers emplois dans le monde des médias. Et ma collègue la députée de Fabre, elle, elle aime beaucoup... elle émane du communautaire et elle nous parle souvent que ça donne la première chance et même, des fois, une occasion à d'autres de trouver une tribune et de se donner les outils pour, par la suite, prendre davantage d'assurance. Est-ce que je me trompe?

M. Beaudreau (François) : ...on a une jeune chroniqueuse qui tient des blogues, qui fait des chroniques sur les parutions, les livres, les livres québécois qui sont parus, et puis ça lui offre, à ce moment-là, un tremplin qu'elle apprécie beaucoup, d'avoir ce rayonnement-là beaucoup plus important que sur le Web, par exemple, et puis de rejoindre une clientèle comme ça, là, à chaque fois. Oui, oui, c'est sûr, puis c'est tellement vrai, ce que vous dites, c'est sûr que, souvent, des gens qui ont été formés dans les médias communautaires, après ça, vont malheureusement nous quitter mais pour de meilleurs jours. Voilà.

Mme Rizqy : Oui. Merci beaucoup. Puis, puisque c'est à la jeunesse... je regarde le député de Beauce-Sud, qui est aussi secrétaire à la jeunesse, je sens qu'on a eu son oreille très attentive, à ce moment-ci.

Des voix : ...

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. S'il vous plaît, ne pas vous interpeler, s'il vous plaît. Vous savez que vous ne pouvez pas vous interpeler, M. le député. Maintenant, je cède la parole à la députée de Verdun.

Mme Melançon : Écoutez, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. C'est vrai que vous êtes une école, je vais dire ça comme ça, mais je le dis avec beaucoup de remerciements dans la voix, parce que les jeunes... puis on voyait, tout à l'heure, des journalistes indépendants qui étaient avec nous, disaient à quel point ça pouvait être complexe. Il faut se faire d'abord la main aussi, il faut avoir des endroits où on peut débuter. Et, bien sûr, vous les perdez rapidement, là, c'est ce que j'entends aussi dans votre propos.

Je veux quand même revenir sur... On a reçu Marie-Ève Martel hier devant la commission, qui nous a parlé de problématiques, quand même, en région, et je voulais savoir si, de votre côté... parce que, bien sûr, là, on parlait de quotidiens ou d'hebdos en région, mais je voulais savoir si vous viviez aussi ces mêmes problématiques là. Si vous devez, par exemple, couvrir de l'information municipale, est-ce que c'est facile d'avoir le lien avec la municipalité ou avec les élus ou si c'est compliqué?

M. Girouard (Yvan Noé) : Ça dépend des municipalités. Il y a des endroits, la collaboration est très, très bonne puis il y a d'autres endroits... Je pense à un village dans Chaudière-Appalaches où j'ai dû me rendre pour aller rencontrer le maire, c'est que les bénévoles écrivaient... il y avait deux bénévoles, ils ont écrit des textes, mais ça allait à l'encontre, peut-être, de l'idéologie de la municipalité, du maire entre autres, et la directrice municipale n'avait pas aimé. Elle a même téléphoné au ministère de la Culture et des Communications pour dire que le journal n'existait plus, mais qu'elle voulait que la subvention soit transférée à la municipalité. En tout cas, des affaires comme ça, là, c'est des histoires d'horreur, si bien que les deux bénévoles ont cessé d'écrire leurs chroniques sur la politique municipale. Mais, bon, en tout cas, ça, c'est un exemple qui ne va pas... ce n'est pas généralisé, mais il y a des cas comme ça qui arrivent de temps à autre.

Mme Melançon : Et donc j'imagine que vous êtes aussi à la merci... parce qu'on parlait de publicité tout à l'heure, un peu comme les autres, à la merci de... s'il y a des gens qui n'aiment pas ce que vous écrivez, ne mettront pas nécessairement de publicité, et, bon, là...

M. Girouard (Yvan Noé) : Il y a des journaux que leurs locaux étaient dans l'édifice municipal, là, dans le centre communautaire et que le maire a décidé de... bon, le journal, là, vous sortez de là. Il y a deux cas comme ça.

Mme Melançon : Vous vous êtes fait évincer.

M. Girouard (Yvan Noé) : Oui, oui, absolument. Mais, bon, dans d'autres cas, c'est très bien, là. La municipalité va donner un montant et ils vont publier leurs pages, là, les séances du conseil vont être publiées dedans, de... En général, ça va bien, mais il y a quelques cas où, quand c'est affreux, c'est affreux.

Mme Melançon : Et depuis les dernières années, est-ce que... Il y avait combien de médias, disons, il y a 10 ans, communautaires écrits? Puis aujourd'hui? Est-ce que vous en avez perdu beaucoup dans les dernières années?

Le Président (M. Ciccone) : En 25 secondes, s'il vous plaît.

M. Girouard (Yvan Noé) : Dans les 10 dernières années, non, mais on en a déjà eu 100, disons, dans les années... fin des années 90, début 2000, là, on était 100, donc, on a baissé à 80.

Mme Melançon : O.K., parfait. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, Mme la députée. Je reconnais maintenant la députée de Taschereau pour une période de 2 min 30 s.

Mme Dorion : Merci, M. le Président. On comprend, de votre mémoire ainsi que de celui de beaucoup d'autres, qu'il va falloir une multiplicité de mesures pour soutenir les médias en général puis les médias communautaires en particulier, des mesures qui vont soit venir des fonds publics, d'une manière ou d'une autre, soit d'une partie du public. Parmi ces mesures-là, est-ce que vous considérez que ça serait une erreur, de ne pas faire contribuer les géants du numérique, qui sont à l'origine de la crise des médias, qui font des millions, des centaines de millions de dollars au Québec et qui ne paient pas d'impôt?

M. Girouard (Yvan Noé) : Bien, c'est sûr qu'ils devraient contribuer, là, mais il y a aussi le fait que... Je ne sais pas si le gouvernement du Québec... où il place son argent. Si seulement que le gouvernement du Québec respectait le 4 % de publicité, ça irait déjà beaucoup mieux. Est-ce que le gouvernement du Québec va faire de la publicité sur Google, sur Facebook, et tout ça, là? Je ne sais pas s'il y a des chiffres que vous... ça serait à vous de me le dire. Mais c'est comme... il faut que le gouvernement du Québec commence par être un bon citoyen corporatif lui-même, là.

Mme Dorion : Pour l'idée du 4 %, je suis vraiment d'accord avec vous, puis on est... Mais en fait c'est... on va de plus en plus reprocher au gouvernement d'avoir mis beaucoup de publicité dans les géants du numérique, justement. C'est sûr que, là, c'est rare que je vais être compréhensive avec le gouvernement, mais je suis d'une génération qui est sur les réseaux sociaux beaucoup, puis... Là, le gouvernement va être pris entre deux choix avec cet argent-là, soit soutenir les médias ou soit atteindre les gens qu'il veut atteindre avec sa publicité. Des fois, il veut atteindre principalement les jeunes, des fois il veut être sûr d'atteindre une partie de la population, puis, avec la publicité, c'est beaucoup plus facile.

Par contre, ce n'est pas normal, que les compagnies, les géants du numérique fassent autant d'argent avec un contenu qui est créé par vous, par vos membres ou par d'autres journalistes et qu'ils ne paient rien en redevances. Donc, s'ils font de l'argent, moi, ça devrait revenir aux médias, finalement, qui sont la raison pour laquelle les gens vont sur les plateformes, se branchent sur Internet, etc.

Une voix : ...

Le Président (M. Ciccone) : En 20 secondes, s'il vous plaît.

Mme Dorion : Allez-y.

M. Beaudreau (François) : Oui, excusez. Ils viennent exploiter nos contenus, mais je pense que votre réflexion, votre suggestion, elle est d'autant plus appropriée. On parlait tantôt des médias régionaux que sont, par exemple, dans notre coin, Le Nouvelliste ou La Tribune,tout ça, nous autres, ça nous ébranle aussi. C'est nos locomotives, c'est... quand on voit le travail, là-dedans, qui est bien fait.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Rimouski pour 150 secondes.

M. LeBel : Merci. Merci. Des fois, il y a... c'est... puis en lisant votre mémoire, on le voit, des fois, il y a juste des choses qui ne seraient pas si compliquées à changer, puis ça vous donnerait un coup de main. Je pense, entre autres, à Postes Canada, que vous dites, qui est... que c'est très cher, là, faire la diffusion. Peut-être juste une façon que Postes Canada adapte ses affaires à votre réalité ou aux besoins, ça aiderait. D'ailleurs, je pense qu'il faudrait mettre Postes Canada dans notre déclaration commune de revendication par rapport à Ottawa, on va le rajouter dans nos affaires.

Le recyclage, ça aussi, il me semble qu'on devrait être capables, au niveau du gouvernement, de dire : Bien là, il y a une situation particulière, est-ce qu'on est capables d'adapter notre programme, ne pas vous traiter comme on traite tous les autres, parce que...

L'autre élément, vous êtes les seuls à en avoir parlé, puis on en a parlé un peu tantôt, c'est le vieillissement de la population. Il ne faut pas prendre ça comme un problème, là. La population vieillit dans nos villages, puis là on a besoin de vous autres, on a besoin des médias communautaires comme vous autres, qui vont continuer à parler à ces gens-là, à ces gens-là de 65 ans et plus. Puis moi, je suis content de voir, là, le pourcentage de 65 ans et plus qui vont lire vos affaires. C'est très important, là, ces gens-là, il ne faut pas les laisser isolés. On sait que la population vieillissante devient isolée. Vos médias, c'est une façon de sortir de l'isolement. Moi, je prends ça en note, je suis porte-parole aussi du dossier des aînés. Pour moi, ce que vous venez de dire là, je vais garder ça dans ma réflexion par rapport à comment on va adapter nos sociétés au vieillissement de la population. Vous êtes des outils importants pour faire en sorte que nos aînés ne soient pas isolés. Puis les médias communautaires, c'est des médias proches du monde, proches de nos communautés. On veut la revitalisation du monde rural, on veut s'assurer que nos villages vivent, bien, pour ça, ça prend aussi des médias communautaires qui vont parler des villages, qui vont parler entre eux autres, des médias comme le vôtre aussi, des bulletins de liaison, mais ça prend ça pour que le monde puisse se parler puis qu'on puisse continuer à vivre dans nos villages.

Puis les médias communautaires, c'est aussi une façon de faire passer des courants d'idées différents. Je pense, entre autres... Il y a plusieurs artistes qui écrivent dans certains médias. Chez nous, on a un média, Le mouton noir, qui amène, tu sais, des idées différentes. C'est très, très important, et ça va faire partie, sûrement, de nos revendications. Merci. Ce n'est pas une question, c'est un appui total.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, M. le député. Mme la députée de Marie-Victorin pour deux minutes.

Mme Fournier : Merci beaucoup. Moi, ça va faire bientôt trois ans que je suis députée, et, quand je suis arrivée, il y avait deux journaux communautaires qui couvraient ma circonscription. Il y avait, bien sûr, le Point Sud mais également MédiaSud, qui était mené par feu Maurice Giroux, mais qui a depuis, malheureusement, fermé ses portes, faute de relève. Pourtant, il était entièrement déjà sur le Web. Le journal Point Sud est encore distribué partout dans ma circonscription, puis c'est ça qui est intéressant, c'est tangible. En même temps, tout le monde peut mettre la main dessus, va couvrir des histoires qu'aucun autre média ne couvre, toutes les belles choses qui se font, justement, dans le milieu communautaire.

Et on a parlé beaucoup de la réalité en région plus éloignée. Des journaux communautaires comme ça, mais les journaux aussi en milieu urbain ont de la difficulté, également, à renouveler leurs bénévoles. Pourtant, eux ne sont pas affectés par l'exode des jeunes, par exemple. Est-ce que vous avez étudié ça, le phénomène plus spécifique des journaux communautaires en milieu urbain? Pourquoi c'est si difficile d'aller recruter, par exemple, de nouveaux bénévoles?

M. Girouard (Yvan Noé) : On ne s'est pas penché vraiment là-dessus, mais... C'est sûr que tout est plus difficile, les rapports, les contacts humains, en milieu urbain, on dirait... bon, les gens sont tassés les uns sur les autres, c'est vrai, mais ils ne se connaissent pas. Dans une petite municipalité, tout le monde connaît à peu près tout le monde, c'est juste ça. Moi, je vois juste ça, comme raison, là.

(12 h 30)

Mme Fournier : Donc, l'effritement du sentiment de communauté dans les milieux plus urbains, vous diriez?

M. Girouard (Yvan Noé) : Sentiment d'appartenance, peut-être.

Mme Fournier : Oui, sentiment d'appartenance.

M. Beaudreau (François) : Les gens la consomment, les gens embarquent dans un média communautaire et puis pour la durée, c'est-à-dire qu'ils vont passer 20, 30, 40 ans à collaborer avec leur journal. Quand arrive le moment de renouveler, souvent, on n'y pense pas — on se pense éternel un petit peu — c'est comme, on s'y prend un petit peu tard. On veut installer ça aussi chez nos membres, on en parle...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Beaudreau (François) : ...d'être conscients de cette réalité-là et puis de penser à la relève aussi, de travailler aussi fort là-dessus que pour le virage numérique, qui, en passant, chez les médias communautaires, est supporté par les journaux papier.

Mme Fournier : Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, M. Beaudreau, M. Girouard. Merci beaucoup pour votre contribution.

Chers collègues, merci beaucoup de votre participation. Je vous rappelle que cet après-midi nous serons à la salle Marie-Claire-Kirkland.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures pile. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 33)

(Reprise à 14 heures)

Le Président (M. Ciccone) : La commission reprend ses travaux afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières concernant le mandat d'initiative portant sur l'avenir des médias d'information.

Cet après-midi, nous entendrons la Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec, l'Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec, l'Association des journaux régionaux du Québec, Hebdos Québec et le MPV Radio.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et ainsi que les personnes qui vous accompagnent, à procéder à votre exposé. Vous avez maintenant la parole.

Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec

Mme Hinse (Amélie) : Merci. Bonjour à tout le monde. Merci de nous avoir invités à cette commission, on est très heureux. Donc, je me présente, Amélie Hinse, je suis la directrice générale de la fédération, et je suis en compagnie de Sylvain Racine, qui est président de la fédération ainsi que directeur général de la Télévision régionale des Moulins, à Terrebonne.

M. Racine (Sylvain) : C'est bien ça.

Mme Hinse (Amélie) : Voilà. Donc, j'imagine que vous aviez tous pris connaissance du mémoire qu'on a déposé en mai dernier, si je ne me trompe pas, donc on ne va pas revenir le lire en entier devant vous, mais on va peut-être insister un peu sur les points principaux qu'on pensait important de mettre de l'avant aujourd'hui.

Mais avant ça j'aimerais présenter un peu c'est quoi, les télévisions communautaires autonomes au Québec. Il y a 40 membres, à la fédération. On est présents dans 14 des 17 régions administratives de la province. Les télévisions communautaires autonomes couvrent à peu près 400 municipalités partout dans la province, ce qui est quand même beaucoup. C'est souvent des municipalités qui ne sont pas desservies par les médias, les grands conglomérats, les médias traditionnels, surtout en ce qui a trait à la télévision. Les TV produisent en moyenne six heures de programmation originale par semaine sur à peu près 39 semaines par année. Il y a une majorité des télévisions qui sont fermées l'été, mais elles sont fermées... c'est qu'elles ne diffusent pas de la programmation originale, mais souvent elles vont, en fait, la produire, donc filmer et le montage, etc. De ces six heures-là, en moyenne, il y a presque deux heures complètes qui sont de l'information locale par semaine, donc ça, c'est quand même assez important.

Les TV, sinon, c'est 112 emplois à temps plein plus une trentaine à temps partiel, mais c'est surtout à peu près 1 000 bénévoles qui gravitent autour des télévisions communautaires partout au Québec. Et puis le contenu qu'on produit, qui est... Je vous inviterais à aller voir la programmation des télévisions dans vos régions. J'ai regardé, puis il y en a dans pratiquement toutes vos circonscriptions, probablement que vous les connaissez déjà. En Gaspésie, il y en a quatre dans la circonscription de la Gaspésie, et ils sont très nécessaires parce que la télévision se... les grands réseaux ne se rendent que très rarement à Mont-Louis. On produit pour à peu près 550 $ de l'heure les émissions, ce qui est à peu près 10 fois moins cher que la télévision commerciale ou la télévision d'État, donc ça, c'est quelque chose qui est considérable.

Vous avez déjà vu... parce que, bon, c'est votre deuxième journée quand même, puis vous avez eu un bel exposé de Marie-Ève Martel hier sur l'importance des nouvelles locales, comment c'était indispensable à la démocratie. Eh bien, les médias communautaires en général, donc nous aussi en particulier, on participe à cette démocratie-là, parce que les médias communautaires, c'est aujourd'hui le seul espace citoyen où les gens, la population peut s'exprimer librement, où ils peuvent se sentir représentés à la télévision. Donc, c'est pour ça qu'on pense qu'on est d'autant plus importants.

On assure, évidemment, une information de proximité, qui est devenue de plus en plus rare avec la montréalisation de l'information, avec la concentration des médias. Puis, je dirais, ce qui fait notre plus grande particularité par rapport aux médias plus traditionnels, c'est que nos médias sont là pour servir l'intérêt public et non les intérêts pécuniers. Donc, nous, on n'est pas là... les télévisions communautaires ne sont pas là pour faire de l'argent, mais bien pour dépenser l'argent pour servir le citoyen en information, en culture, éducation, c'est notre mission de base.

Donc, c'est un très grand moteur aussi de développement des régions, et ça, on ne le dira jamais assez, parce que les régions où il n'y a pas de médias, qui ne sont pas capables de se voir à la télé, s'entendre à la radio, se lire dans les journaux, c'est sûr et certain que le développement économique et social ne peut pas se faire pleinement. Donc, on pense que, là aussi, on a un très grand rôle à jouer. Maintenant, je vais passer la parole à mon président, Sylvain Racine, qui va parler un peu des dernières réglementations du CRTC puis l'impact que ça l'a eu sur nous.

M. Racine (Sylvain) : En effet, le CRTC révise sa politique environ à tous les cinq ans, et, lors de la dernière révision en 2016, ils ont adopté une réglementation qui permet aux câblodistributeurs de réaffecter l'argent de la licence communautaire vers les stations dites locales. Stations locales, pour votre information, c'est TVA Sherbrooke, TVA Gatineau. Or donc, il est question de prendre l'argent destiné à la télé communautaire pour le verser à l'entreprise privée. Ça s'est déjà fait, parce qu'il y a plusieurs câblos qui se sont prévalus de cette réglementation-là. Entre autres, Shaw, à Vancouver, s'en est servie, il y a également Rogers, dans la région d'Edmonton et de Toronto. Vidéotron ne l'a pas encore fait dans la licence de Montréal, mais ça demeure une inquiétude pour les télévisions qui sont dans la couronne de Montréal, qui pourraient être affectées grandement par une telle réaffectation de l'argent. Alors, si Vidéotron décidait, du jour au lendemain, de fermer son canal communautaire et de ne plus subventionner les télévisions — il y a sept télévisions communautaires dans la couronne de Montréal — bien, c'est des pertes de financement très, très, très importantes que les télévisions communautaires subiraient. Donc, c'est pour nous une espèce d'épée de Damoclès qui plane au-dessus de nos têtes et qui nous inquiète grandement. Ça fait partie de l'ensemble des autres sujets d'inquiétude, mais, vous allez voir, on en a quelques-uns à vous présenter à ce sujet-là.

Une voix : ...

M. Racine (Sylvain) : Oui. J'aimerais aussi vous parler du fameux 4 % de publicité gouvernementale. Vous savez, les télévisions communautaires, nous n'avons pas droit à la publicité conventionnelle. Je ne peux pas faire de publicité, dans un poste de télévision, pour une entreprise, je ne peux pas donner de prix, je ne peux pas donner de produits, je ne pas faire grand-chose, donc j'ai très peu d'accès à la publicité dite conventionnelle. On a droit à la commandite de prestige : Cette émission vous est présentée grâce à la collaboration de X, mais il n'y a pas beaucoup de gens qui sont intéressés à juste subventionner une télévision communautaire. Ils veulent vendre leurs produits, et on les comprend.

Alors, ça a pour effet que la seule publicité... auquel on a vraiment accès, c'est la publicité gouvernementale, ce fameux 4 % qu'on n'atteint jamais. Si on regarde le dernier rapport, la moyenne pour l'ensemble des ministères et des agences gouvernementales, c'est environ 3 % qu'on a atteint. Je pense que Mme la ministre Nathalie Roy, dans une de ses premières interventions, a soulevé cette problématique-là. Il faudra voir maintenant comment on peut essayer de trouver une solution à ce problème. En fait, c'est un décret qui a été énoncé. On souhaiterait que ça passe comme une loi, plutôt, pour forcer l'ensemble des ministères et l'ensemble des agences à respecter ce fameux 4 %, parce que c'est de l'argent supplémentaire qui arriverait dans les télévisions communautaires sans pour autant impliquer de dépenses additionnelles pour le gouvernement. L'argent, il est déjà là, il est dans les ministères. Les budgets sont déjà alloués pour la publicité. Qu'on donne le 4 % à tous les médias communautaires, et on va s'en porter que mieux, définitivement.

• (14 h 10) •

Mme Hinse (Amélie) : Sinon, ce que je voulais ajouter avant de terminer, en fait, c'est que la crise des médias actuelle, ce pour quoi on est en commission aujourd'hui, ce n'est pas une crise de manque d'intérêt du public. Les gens, toutes les études l'ont démontré, consomment les nouvelles locales, en veulent, pensent que c'est important et indispensable pour la démocratie puis l'exercice de la citoyenneté. La crise, elle est financière, et puis les revenus sont en baisse pour tout le monde, la télévision, pour tous les médias, en fait, les journaux, télés, radios. Et puis évidemment on essayait... on essaie d'apporter des solutions, on redouble d'efforts pour l'autofinancement, mais même les grands conglomérats ne l'ont pas trouvée, la solution miracle.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Hinse (Amélie) : Donc, c'est sûr qu'on ne prétend pas avoir, nous non plus, la réponse, mais on pense qu'avec votre aide, votre participation, on va y arriver.

Le Président (M. Ciccone) : Alors, merci beaucoup. Je vous remercie pour votre exposé. Maintenant, je suis prêt à entendre la partie gouvernementale pour 15 minutes, avec le député de Beauce-Sud.

M. Poulin : Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre participation à cette commission parlementaire et votre mémoire, qui était fort intéressant. Nous recevions un peu plus tôt aujourd'hui les médias écrits communautaires, nous allons recevoir les radios communautaires tout à l'heure, alors bien content de pouvoir entendre, cette fois-ci, la télévision communautaire.

Évidemment, lorsqu'on pose cette question-là ici, on peut parler des revenus, des dépenses, des investissements, mais vous l'avez effleurée de bon aloi, toute la question de la publicité mais également le coût d'une publicité lorsqu'on se retrouve, par exemple, dans les télévisions communautaires, le coût de production qui peut être plus élevé, par exemple, qu'un spot de radio de 30 secondes, ou encore l'écrit comme tel, ou ce qu'on peut retrouver à l'intérieur des pages radiophoniques. Alors, j'aimerais savoir le coût de production moyen, on va dire ça comme ça, d'une publicité dans la télévision communautaire, que ce soit, entre autres, les publicités de prestige, que vous appelez, lorsqu'un commanditaire achète, et également le coût qu'il coûte à acheter, en moyenne, là, pour le commerçant ou encore l'industrie.

M. Racine (Sylvain) : Bien, en fait, comme on n'a pas droit à la publicité conventionnelle, il y a très peu de publicité qui circule sur les canaux communautaires. La publicité, quand on dit «la commandite de prestige», bien, évidemment, les coûts de production ne sont pas tellement élevés, parce qu'on parle de quelques secondes en début où on dit «cette émission vous est présentée grâce à la collaboration de», ça ne nécessite pas nécessairement des investissements importants. Par contre, si on regarde les coûts par rapport à la publicité gouvernementale, bien, on parle d'environ 45 $ par parution de 30 secondes.

M. Poulin : Vous me parlez de l'achat ou de la production?

M. Racine (Sylvain) : De l'achat.

M. Poulin : L'achat. L'achat, hein?

M. Racine (Sylvain) : De l'achat, parce que la production, ce n'est pas les télés qui la font, c'est des agences.

M. Poulin : En sous-traitance, O.K., d'accord. Concernant le 4 %... puis je vais revenir au rapport de Dominique Vien, qui est un bon rapport, soit dit en passant, je tiens juste à le signifier, sur les médias communautaires, qui a été déposé en 2004, et il y a des éléments fort intéressants à l'intérieur concernant le placement gouvernemental. Et là, vous allez voir, ça ne touche aucune bannière politique, ce que je vais dire. Je pense que tout le monde y passe. Alors, on dit : «L'adoption par le gouvernement, en février 1995, de la Politique concernant certaines dépenses de placement publicitaire visait à accroître les dépenses publicitaires du gouvernement dans les médias communautaires jusqu'à un minimum de 4 %. Après 10 [ans] d'application de cette politique — on est en 2004, O.K., donc après 10 ans, là, donc de 1994 à 2004 ou de 1995, on dit, selon les données d'application de cette politique — force est de constater que cet objectif n'a jamais été pleinement atteint.» Alors, ce que vous nous dites aujourd'hui, en 2019, est vrai mais, en 2004, était aussi vrai. Alors, ça prouve qu'il y a un effort à faire et, je pense, ça devra être écrit presque noir sur blanc à l'intérieur de notre rapport. Et : «Selon les données fournies par [le directeur général] de l'information gouvernementale, responsable de l'application de la politique, les placements globaux du gouvernement se situent en moyenne à 2,5 % [au] total des sommes investies en placement publicitaire.»

Et les sociétés d'État, on le vit aujourd'hui dans les nouvelles, où Le Devoir a fait un bon travail de nous dire, les sociétés d'État, quel était le pourcentage... c'est important de se rappeler que les dépenses des médias communautaires en 2004 ne représentent que 1,3 % de leurs dépenses globales de placement publicitaire. Et la mission de certaines sociétés, on pense à Loto-Québec, à la Société des alcools, peut sembler contradictoire avec la nature du matériel publicitaire axé sur des produits ne pouvant parfois pas être diffusés dans ce type de média, donc ça revient à ce que vous nous disiez tout à l'heure. Or, la presque totalité des budgets de Loto-Québec et de la SAQ est actuellement consacrée à des campagnes marketing de produits et non à des campagnes sociétales. Alors, ça aussi, c'est un enjeu qui est fort important, de voir de quelle façon on dépense cette publicité-là des fois, oui, à des fins sociétales mais aussi des fois à des fins de marketing proprement dit. Donc, pour les médias communautaires, il peut y avoir un élément fort important pour les campagnes sociétales, entre autres, de dire : On achète un pourcentage de produits parce qu'on souhaite sensibiliser davantage la population, entre autres dans les régions du Québec. Alors, je trouvais fort intéressant ce passage de ce rapport.

Et, si on disait... et je vous pose la question bien humblement, si on réussissait, oui, comme gouvernement, à atteindre ce 4 %, et je pense que c'est l'objectif que nous avons, collectivement, les sociétés d'État, et on le constate ce matin, doivent faire une réflexion beaucoup plus grande et puis beaucoup plus profonde de la façon dont ils investissent leur financement, est-ce qu'on devrait réfléchir à un pourcentage extrêmement précis qu'il pourrait être très avantageux de le mettre à l'intérieur du communautaire, et au niveau gouvernemental, et peut-être au niveau également des entreprises privées? Puis je vous demande la question, puis je trouve ça important, sur le coût de votre publicité, parce que ce n'est pas énorme, là. 45 $ l'achat, ce n'est pas élevé, et vous rejoignez beaucoup de gens. Alors, de quelle façon on peut avoir des réflexes de se tourner vers vous pour pouvoir rejoindre ces gens-là?

Mme Hinse (Amélie) : Bien, cette question-là, en fait, on se la pose depuis longtemps, parce qu'à chaque année ou presque on rencontre, en fait, soit les directeurs des communications de tous les ministères, puis en fait le travail est toujours à refaire parce qu'il y a un roulement de personnel particulièrement élevé. Bon, ça, je le comprends, mais on a... Cette année, à l'interne, au ministère de la Culture, ils ont fait une espèce d'enquête interne au sein des ministères pour savoir, bon, pourquoi, comment ça que vous n'investissez pas dans les médias communautaires malgré le décret qui existe. Et puis la réponse, c'est souvent : Bien, on ne le savait pas, puis tout le monde se relance la balle. Donc, nous, on ne sait plus à quelle porte cogner, en fait, parce qu'on cogne aux portes à toutes les années.

Et puis pour revenir sur ce que vous disiez sur la moyenne de 2,5 % en investissement, vous savez, le 4 %, en soi, bon, c'est sûr qu'on pourrait demander 6 %, 12 %, 20 %, là, tu sais, il n'y aurait pas de limite, sauf que 2,5 % en moyenne, c'est un peu biaisé de le montrer comme ça, parce que, si on regardait la médiane, qui est un chiffre qui parlerait beaucoup plus, ce serait bien en deçà de ça, parce qu'il y a un ministère ou une agence qui a investi 36 % de son budget, mais évidemment c'est sur... 44 000 $ sur une année, donc ce n'est pas un montant énorme au bout du compte, quand même, mais ça fait augmenter la moyenne considérablement puis ça ne veut rien dire, là, finalement, là. Donc, déjà, si le 4 % était respecté par tous les ministères... Parce que, là, c'est un tiers des ministères seulement qui ont rempli leur... je ne dirai pas un quota, mais qui ont investi dans les médias communautaires, un tiers seulement. Donc, on parle de 2,5 %, mais il y a les deux tiers qui ont investi zéro.

Donc, c'est ça, je ne pense pas que... Oui, je pense que de parler d'un pourcentage, de l'élever... Parce que, on ne se le cachera pas, depuis 10 ans, les investissements en publicité gouvernementale ont chuté drastiquement, donc le 4 % reste le même. Même s'il était atteint, je pense qu'on n'arriverait même pas au niveau des investissements qui étaient faits il y a 10 ou 15 ans parce que les montants, ils ont diminué à la source, puis ça, bien, on veut bien le comprendre, là, tu sais, tout le monde essaie de maximiser. Puis la publicité Web coûte beaucoup moins cher que la publicité traditionnelle, donc ça permet de rejoindre plus de personnes en investissant moins. Donc, c'est plein de facteurs un peu comme ça.

M. Poulin : Très intéressant, ce que vous dites là, Mme Hinse. Puis, sur le numérique, bien, deux éléments. Est-ce qu'il ne faudrait pas encourager davantage les combos? Je m'explique. On sait qu'on l'a vu, entre autres, au niveau privé, de dire : Une radio communautaire et une télévision communautaire pourraient travailler davantage ensemble au niveau de la vente de publicité, même si on sait que, les lois, au CRTC, il y a certains défis. Et mon autre question est : Est-ce qu'on pourrait, d'une certaine façon, imaginer une possibilité également qu'on puisse mieux travailler en collaboration également, oui, avec différents journalistes qui se retrouvent à la fois à la radio communautaire et à la télé communautaire, qui pourraient réduire un certain coût de main-d'oeuvre mais qui assurent quand même une source d'information qui peut être complémentaire? Parce que, souvent, un journaliste communautaire dans une radio, il va avoir 25 heures-semaine — je vous donne un exemple — puis vous pourriez, vous, lui offrir 15 heures-semaine, donc on aurait un beau 40 heures-semaine à offrir à quelqu'un, dans la région, qui fait du média communautaire. Alors, comment votre fédération pourrait travailler davantage, exemple, avec les radios puis, je dirais même, avec les médias écrits pour peut-être réduire un peu notre coût de masse salariale puis voir à plus long terme pour offrir une meilleure information, avec peut-être les mêmes... les trois fédérations qu'on rencontre aujourd'hui?

• (14 h 20) •

Mme Hinse (Amélie) : Bien, ça, c'est des questions qu'on s'est déjà posées, puis c'est évidemment dans un monde idéal, absolument. Sauf que, quand on regarde les territoires couverts par les licences de radio, de TV, les endroits où il y aurait un chevauchement qui serait pertinent, qui couvrirait les mêmes... soit MRC, ou comtés, ou villes, très, très peu, parce que...

Une voix : ...

Mme Hinse (Amélie) : ...c'est ça, souvent, dans un endroit où il y a une télévision communautaire, bien, il n'y a pas un besoin, nécessairement, de la population de se partir une radio ou un journal. Donc, je ne dirais pas qu'on se sépare le territoire, mais ça adonne comme ça, et, bien, on pense que, de toute façon, c'est très bien parce que ça permet d'avoir des nouvelles locales sur un territoire beaucoup plus grand.

M. Poulin : Oui, à certains endroits, par exemple, on a les deux. Donc, peut-être qu'à ce niveau-là il y a quelque chose à regarder.

Télévision numérique, le virage numérique, je veux vous entendre là-dessus. Si les gens vous écoutent, c'est qu'ils sont dans le confort de leur foyer, souhaitent écouter la télévision communautaire. Comment vous voyez le transfert vers le numérique? Moi, je pense à Beauce.tv, chez nous, là, qui a toutes les archives de la télévision communautaire, de beaux trésors se retrouvent sur le Web. Je crois beaucoup également au domaine des archives, lorsqu'on veut aller retrouver quelque chose facilement qui s'est fait à la télé communautaire à une certaine époque. Même que nos grands diffuseurs ont un gros travail à faire pour rendre faciles nos archives sur le numérique. C'est du gros travail, ça coûte assez cher. Mais souvent on aimerait ça réécouter une reprise de Virginie puis on ne peut pas le faire. Alors, je me dis, il y a peut-être une façon qu'on peut créer des choses davantage. Alors, je veux vous entendre sur ce virage numérique qui est superimportant.

Mme Hinse (Amélie) : Avant de laisser parler Sylvain, Beauce.tv, ce n'est pas une télévision communautaire, par contre, là, c'est vraiment régional et...

M. Poulin : Ils ont été achetés par le privé récemment, mais avant c'était communautaire.

Mme Hinse (Amélie) : Non, en fait...

M. Poulin : C'était la télévision communautaire de Beauceville, qui l'a mis sur Beauce.tv.

Mme Hinse (Amélie) : Non, exactement, c'est là que vous vous trompez, mais on pourra en parler.

M. Poulin : Non, non.

Mme Hinse (Amélie) : Oui, je les connais très bien. Beauceville sont membres chez nous.

M. Poulin : Bien, Martin... Vous connaissez Martin?

Mme Hinse (Amélie) : Oui, bien, c'est ça, Martin a pris le canal, l'ancien canal. Beauceville a été obligée de se transférer sur un autre canal, mais il n'a pas acheté, ça a été fait de manière insidieuse, je dirais.

M. Poulin : Mais la télévision communautaire de Beauceville se retrouve sur Beauce.tv, au niveau des archives.

Mme Hinse (Amélie) : Oui, très possible.

M. Poulin : Bon, parfait. Merci.

M. Racine (Sylvain) : Bien, d'ailleurs, grâce au Plan culturel numérique, il y a plusieurs de nos télévisions qui ont pu bénéficier de subventions pour créer des archives et mettre sur archives des émissions que... Je sais que, chez nous, en tout cas, on a des émissions qui datent de 1978 qui sont maintenant en archives et que les gens peuvent aller visionner, des gens qui ont participé, alors c'est toujours bien agréable pour ces gens-là d'avoir accès à l'information.

Mais le numérique a aussi un côté un petit peu insidieux, parce qu'il ne faut pas oublier que nos subventions, nos sources de revenus proviennent du canal linéaire, actuellement, toutes les sources de revenus à part le PAMEC, et ça coûte cher, le numérique, ça coûte cher, les médias sociaux, mettre nos émissions en archives, mettre notre programmation... Nous, on a beaucoup d'émissions en direct qui sont simultanément diffusées sur le Web. Bien, tout ça, ça coûte cher, mais on n'a pas de revenu qui nous provient d'Internet, actuellement, aucune source de revenus. Alors, c'est un endroit où on aimerait éventuellement qu'il y ait des interventions qui se fassent, parce qu'on participe au contenu, mais il n'y a pas d'argent qui nous vient d'Internet. Alors, pour nous, c'est plus difficile, ça demande des efforts considérables. On est conscients que c'est une nécessité qu'on soit sur Internet, mais on n'a pas les revenus qui viennent avec la dépense.

Mme Hinse (Amélie) : C'est un peu ça, le problème, parce que la plupart de nos membres sont présents en ligne, c'est-à-dire qu'il y en a qui vont diffuser en direct sur Internet, en simultané, que sur le canal linéaire. Il y en a qui vont mettre leur émission en ligne le lendemain que c'est diffusé pour la première fois.

Une voix : ...

Mme Hinse (Amélie) : Oui, mais c'est évident que c'est nécessaire pour rejoindre plus de gens, pour rejoindre ceux qui n'écoutent pas la télévision — je parle de la machine — sauf que, c'est ça, ça ne rapporte à peu près rien de plus, mais c'est des dépenses supplémentaires puis c'est là, le problème. C'est pour ça qu'on en a parlé, puis je pense que tout le monde qui va passer devant vous va en parler, de l'importance de faire participer ceux qui offrent le moyen que l'information se rende aux gens, Internet, les canaux comme ça puis les nouveaux canaux de distribution, ils doivent participer à la création du contenu, sinon c'est sûr que ça ne peut pas... on ne peut pas survivre.

M. Poulin : Bien noté. Merci beaucoup.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Saint-Jean.

M. Lemieux : Pour combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Ciccone) : 1 min 26 s.

M. Lemieux : Merci beaucoup, M. le Président. Je voulais justement essayer de comparer, parce que, vous avez raison, on a tous des télés communautaires, mais il y a quelque chose de particulier, c'est qu'elles ne se valent pas toutes, elles ne sont pas toutes semblables. Je ne connais pas aussi bien Beauce.tv que mon ami de Beauce-Sud, mais je sais qu'il y en a qui sont très agressives sur le Web, d'autres moins. Je voudrais que vous me fassiez un petit portrait, avec les 40 secondes qu'il vous reste, d'où on est dans la moyenne. La bonne moyenne, la bonne fourchette de la moyenne, elle se situe où par rapport au genre de contenu qu'on fait et au genre de contenant qu'on envoie sur le Web?

Mme Hinse (Amélie) : Oui, j'ai des chiffres, mais je dirais que 80 % de nos membres sont présents en ligne. Puis c'est sûr que, pour le direct, c'est loin d'être tout le monde qui peut le faire, puis il y en a que c'est par contrainte du câblodistributeur, parce que le câblodistributeur, qui, lui, considère qu'il paie pour la production, veut avoir l'exclusivité parce que, pour beaucoup de ses membres, de ses abonnés, c'est-à-dire, c'est un moyen de rétention, d'offrir le canal communautaire.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Hinse (Amélie) : Donc, il faut qu'il attende de le mettre... que ça passe à la télévision avant. Mais sinon c'est la très, très grande majorité de nos membres qui sont en ligne, là.

M. Lemieux : Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je suis prêt maintenant à reconnaître un membre de l'opposition officielle. Mme la députée de Verdun.

Mme Melançon : Bonjour à vous deux. Merci beaucoup d'être présents aujourd'hui. Écoutez, je vais vous poser certaines questions, et rappelons-nous une chose, on n'est pas des experts du CRTC ici, on laisse... Actuellement, c'est un autre palier de gouvernement, là, qui regarde le tout. Mais je veux quand même que vous puissiez expliquer pourquoi vous n'avez pas le droit de faire de la publicité, parce que c'est important, là, que les gens puissent bien comprendre.

M. Racine (Sylvain) : Je vous dirai qu'au cours des 10 dernières années j'ai participé à trois reprises aux audiences, j'ai comparu devant le CRTC, et, à chaque fois, on arrivait avec les mêmes demandes d'accès à la publicité. Maintenant, il y a un lobby qui se fait, venant des stations dites commerciales, qui, eux, prétendent que la tarte, elle est déjà petite et qu'ils ne veulent pas la partager. Moi, je ne suis pas d'accord avec ce principe-là. Je ne pense pas que Ford Canada va annoncer à la télévision communautaire de Beauceville. Et je n'ai rien contre ça, mais il faut penser à une publicité plus locale. Le fleuriste du coin va annoncer, le petit garagiste va annoncer, et ça n'enlève rien aux médias nationaux, mais le lobby fait en sorte qu'ils font des pressions auprès du CRTC continuellement pour ne pas qu'on ait accès à la publicité commerciale.

Mme Melançon : Alors, ma prochaine question sera la suivante. Depuis tout à l'heure, on parle du 4 %, et, juste pour éclairer ceux et celles qui nous regardent ou ceux qui ne le savent pas, ce 4 % là n'est pas atteint, année après année, puis ce n'est pas parce qu'il y a un manque d'intérêt, là. Moi, je peux vous dire que j'ai déjà été directrice de cabinet dans une autre vie, là, au ministère de la Culture, où on faisait écrire les ministres, je pense que vous vous rappelez très bien de ça, où on faisait envoyer la note. Et malheureusement, dans un premier temps, je vois... puis je regardais les chiffres, encore une fois, avec consternation, je vais dire ça comme ça, où c'est dommage qu'on ne soit pas en mesure d'atteindre le 4 %. Mais, si on l'atteignait, le 4 %, en dollars sonnants, ça représente quoi? Parce que des pourcentages, on peut en parler, là, puis ça... il faudrait juste avoir une idée pour que tout le monde puisse être sur le même pied d'égalité.

M. Racine (Sylvain) : Bien, je peux quand même vous dire que, si on atteignait le 4 % aujourd'hui, on serait quand même très loin des sommes qu'on avait il y a une dizaine d'années. On s'entend que les budgets publicitaires ont été réduits considérablement, et le pourcentage étant ce qu'il est, bien, hein, c'est une cause à effet, alors c'est sûr que ça ne serait pas suffisant. Nous, on souhaiterait que le 4 % soit refermé, c'est-à-dire que ça soit une loi ou quelque chose du genre. Puis, si c'était bonifié, bien, ce serait encore mieux, parce qu'évidemment les télés communautaires, on ne se le cachera pas, l'argent, c'est le nerf de la guerre, et actuellement, bien, on manque d'argent, définitivement.

Mme Hinse (Amélie) : Je dirais que c'est à peu près...

Mme Melançon : On ne fera pas une grosse guerre, c'est ce que j'entends, là.

Mme Hinse (Amélie) : On ne tofferait pas longtemps. Mais c'est de 12 000 $ à 15 000 $, à peu près, par télévision, on est une quarantaine. Puis ça, c'est pour les TV, parce qu'après ça la production et les prix ne sont pas les mêmes pour la radio et les journaux. Donc, je ne pourrais pas parler en leur nom, mais je dirais que ça pourrait ressembler à ça pour nous.

Mme Melançon : D'accord. Vous me parlez de 112 emplois. Je le disais un peu plus tôt avec les médias écrits communautaires, j'imagine que vous êtes une école extraordinaire et j'imagine aussi que les jeunes qui peuvent sortir de certains cégeps ou certaines universités vont chez vous, se font la main, et vous les perdez rapidement aussi, j'imagine.

• (14 h 30) •

M. Racine (Sylvain) : Évidemment qu'on les perd rapidement. Si je vous donnais la liste des journalistes que vous connaissez qui ont passé par la télévision communautaire, vous seriez peut-être surprise. Qu'on pense à Jocelyne Cazin, qu'on pense à Joël Goulet, qui étaient à TVA, qu'on pense à... il y en a une multitude, une multitude. Ils ont pour la plupart passé par les télévisions communautaires et ils sont venus se faire la main. Et, bon, évidemment, dès qu'ils sont bons, on les perd un petit peu. Moi, j'en ai perdu un il y a quelques mois à peine, il est parti à Radio-Canada. C'est ça, puis c'est normal, on est une école.

Mme Melançon : C'est une pépinière.

M. Racine (Sylvain) : Voilà.

Mme Melançon : Alors, dites-moi, là, j'ai bien lu, là, mais moi, je veux vous l'entendre dire, puis je ne veux pas qu'on aille là-dedans, là, mais je veux vous entendre... la suite, parce que, là, on est là pour parler de l'avenir des médias.

M. Racine (Sylvain) : Bien, l'avenir des médias va passer, selon moi, par la réforme du système, qui est en révision, actuellement, au CRTC. On sait qu'il y a une commission qui a été créée également au CRTC pour revoir la loi. On ne sait pas où ça va nous mener, on ne sait pas jusqu'où ils vont pouvoir se rendre. Il va y avoir un changement, peut-être, de gouvernement ou pas, alors ça reste un gros point d'interrogation pour nous, l'avenir.

Mme Melançon : Comme on est quand même à la remorque, je dirais, du CRTC, de notre côté, j'imagine que, tout comme moi, vous avez été surpris d'apprendre que, le 11 janvier dernier, le gouvernement du Québec n'a pas cru bon déposer aucun mémoire pour la révision des deux lois, celle en radiodiffusion et celle en télédiffusion. Moi, de mémoire, là, je n'ai pas souvenir qu'on ait laissé un pan aussi important... malheureusement, qu'on n'ait pas comblé ce vide-là. Je me rappelle qu'on a déjà déposé... et là je vous pointe un peu plus du doigt, là, qu'on avait déposé des demandes bien claires, on était ensemble là-dessus. J'imagine que vous étiez surpris de voir qu'on n'avait pas pris le crayon pour déposer la position du Québec.

M. Racine (Sylvain) : Bien, on se pose toujours bien des questions. Évidemment, on souhaiterait que les intérêts du Québec soient toujours défendus. Maintenant, je ne connais pas les motivations qui sont derrière cette décision-là, mais évidemment nous, en tout cas, on fait des représentations et on va continuer d'en faire.

Mme Hinse (Amélie) : On travaille toujours en... bien, pas en collaboration, mais on contacte toujours le ministère de la Culture quand il y a dépôt de mémoire au CRTC, parce qu'eux demandent à voir le nôtre, parce qu'ils veulent nous appuyer, parce que souvent... parce qu'on sait... Le ministère, c'est un allié pour nous, il finance les TV. Puis on n'est peut-être pas d'accord sur tout, puis on demande l'indexation, au minimum, de notre programme d'aide, sauf que, c'est ça, on travaille ensemble. Puis, quand je les ai contactés, ils m'ont dit : Non, je ne pense pas qu'on va en écrire un cette année.

Mme Melançon : D'accord. Moi, ça, ça me trouble, et, je tiens à le répéter ici, il faut assumer un leadership. On peut bien parler de l'avenir des médias en long et en large, mais encore faut-il que le gouvernement prenne la plume lorsque c'est le temps. Moi, je veux vous remercier vraiment d'être présents aujourd'hui, parce qu'il y a une chose que je me rappelle... Et j'invite aussi les élus à participer aux télés communautaires. Je sais que vous demandez ça. Ces six heures de programmation dont vous parlez, là, vous avez besoin de les combler. Nous autres, on est des personnages qui ne vous coûtent rien. Je le dis un peu à la blague, mais, très honnêtement, on doit faire plus d'émissions publiques, vous le disiez tout à l'heure. J'espère vraiment qu'on va continuer puis j'espère que tous les élus ici vont aller au micro devant la caméra des télés communautaires. Et vous pouvez compter sur moi, parce qu'on va continuer à poser les bonnes questions, parce que l'avenir des médias, je vous le dis, ça passe par le CRTC, en télévision. Vous êtes la première télé que nous recevons aujourd'hui. Vous allez pouvoir compter sur moi pour que je puisse continuer à m'assurer qu'on ait une présence assidue, parce que le Québec mérite d'avoir une voix à Ottawa. Merci beaucoup.

M. Racine (Sylvain) : ...règle générale, on a une excellente collaboration de la part des élus, et que tout le monde participe volontiers à nos émissions.

Mme Melançon : Tant mieux. C'est de la musique à mes oreilles.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Est-ce que vous avez d'autres intervenants? 1 min 15 s, Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Je vais y aller un peu plus au niveau des chiffres, si vous me permettez, parce que tantôt vous avez parlé que — ma collègue l'a souligné — il n'y a pas eu de demande au niveau du CRTC en janvier dernier. Et il y aura bientôt une campagne électorale au niveau fédéral. Est-ce que vous pensez qu'il serait important que le gouvernement du Québec ait des demandes, notamment, pour aller de l'avant avec une demande sur une taxe GAFA, qui peut générer... Quand même, juste pour Facebook, une taxe de 3 % peut générer 20 millions d'entrées d'argent pour le Québec seulement. Pensez-vous que ça devrait être une demande immédiate lors de cette campagne?

Mme Hinse (Amélie) : C'est évident que le momentum, il est parfait, là. Vous allez terminer les travaux de la commission, puis eux vont être en campagne électorale, c'est le moment idéal. Le panel d'experts en charge de la révision de la loi a sorti en juin dernier ce qu'il avait entendu dans ses consultations, mais ça va aller à l'année prochaine avant qu'il remette son rapport. On ne sait pas quel gouvernement qu'on va avoir là, mais c'est le temps, là, de leur dire qu'est-ce qu'on veut, là.

Le Président (M. Ciccone) : Bien, merci beaucoup. Merci beaucoup. Je suis maintenant rendu à reconnaître un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Taschereau, pour 2 min 30 s.

Mme Dorion : Je me pose une question. Beaucoup de mémoires disaient : Ce 4 % là, c'est essentiel. Pourquoi ça ne s'est jamais fait? Puis, bon, c'est de l'argent qui diminue, en plus, comme vous le disiez tantôt. Mais en même temps on reconnaît aussi, dans beaucoup des mémoires, le rôle essentiel, la fonction du service essentiel à la population de l'information, puis de l'information locale, puis de l'information communautaire, puis ça, moi, je suis à fond là-dedans, je l'ai remarqué plusieurs fois. Tu sais, autant, sur les réseaux sociaux, on va cibler des gens qui nous ressemblent ou qu'on veut atteindre, autant... Quand j'ai, moi-même, commencé à écrire dans un journal communautaire de quartier à Québec... puis là, si je veux rejoindre mon voisin à qui je ne parle jamais, je veux rejoindre du monde, c'est différent puis c'est sur une base géographique. Ça rapproche les gens, c'est vraiment essentiel.

Puisque c'est un besoin essentiel, puisque les fonds publics vont être nécessaires pour faire survivre les médias communautaires en général, pourquoi est-ce qu'au lieu de dire : Bien, mettez donc de la publicité, le gouvernement, dans nos médias... pourquoi est-ce qu'on n'exigerait pas plus clairement : Participez donc à notre financement, au fonctionnement de manière récurrente, sans qu'on ait besoin de toujours faire des demandes à toutes sortes de patentes? Est-ce que ça ne pourrait pas être plus simple? Parce que, d'un point de vue gouvernemental, faire une pub très, très efficace pour pas cher ou moins efficace pour plus cher...

M. Racine (Sylvain) : Il existe déjà un programme, au ministère de la Culture, qui s'appelle le Programme d'aide aux médias communautaires, qui aide financièrement au fonctionnement. C'est un programme qui est en révision, actuellement. On doit participer, d'ailleurs, et soumettre nos idées à cet effet-là. Bon, on souhaite toujours que le programme soit bonifié, mais c'est quand même... Ça fait plusieurs années que, sur le plan du fonctionnement, on a de l'aide gouvernementale, et, pour certaines télévisions, ça peut représenter tout près de 40 000 $ à 45 000 $ par année.

Mme Dorion : Puis ça serait... c'est comme gênant d'en demander plus? Qu'est-ce qui fait que...

Mme Hinse (Amélie) : Ah non! On ne se gêne pas.

M. Racine (Sylvain) : On ne se gêne pas pour le faire.

Mme Dorion : Non, hein? O.K., parce que ce serait une bonne idée qu'il y en ait plus, finalement.

M. Racine (Sylvain) : Mais il y a des normes, c'est basé sur le nombre d'heures de production, etc. Alors, on respecte le programme, mais là le programme, il va être en révision.

Mme Dorion : Donc, ce serait une bonne idée qu'il soit bonifié?

M. Racine (Sylvain) : Bien, absolument.

Mme Dorion : Ça vous libérerait, finalement, plus que de...

M. Racine (Sylvain) : On ne dira pas non à ça.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Rimouski pour une période de 2 min 30 s.

M. LeBel : Merci beaucoup. Bonjour. J'ai déjà été dans les télés communautaires, du temps que j'avais des cheveux, ça fait déjà assez longtemps, et l'importance de l'autonomie, pour moi, c'est ça qui est majeur. Mais, quand je suis à Rimouski, moi, je suis câblé Telus, quand je veux voir le conseil de ville, c'est maCommunauté qu'il faut que je syntonise. Quand je suis à Québec, je suis câblé Vidéotron, si je veux voir les choses de la ville, c'est MAtv. Et, quand... On dit que Bell, il y a un autre système, tvONE. Puis là Rogers, mais, quand on va sur leur site, eux autres, quand... si tu cliques «télé communautaire», tu tombes sur MAtv, maCommunauté puis ces affaires-là. C'est quoi, vos relations avec les câblos?

• (14 h 40) •

M. Racine (Sylvain) : À la fin des années 70, quand la loi sur la télévision communautaire a été créée, c'était une exclusivité des câblodistributeurs. Donc, quand Bell est arrivée sur le marché avec les satellites, etc., ils n'avaient pas droit à ça. Maintenant, Bell, avec la fibre, ils sont un peu plus dans la section câblodistributeur, ils ont maintenant droit... On a fait des demandes aux dernières audiences, en disant : On souhaiterait être diffusés par l'ensemble des câblos d'un territoire donné. Moi, dans mon territoire, Vidéotron représente à peu près 50 % des abonnés. Si j'étais également diffusé sur Bell, bien, je rejoindrais facilement 90 %, 95 % de ma population. Mais actuellement, encore une fois, la façon dont les règles sont faites au CRTC, bien, on n'a pas cette possibilité-là, qui serait, je pense, une solution idéale.

M. LeBel : Et MAtv puis maCommunauté, ces affaires-là, c'est comme des télés communautaires maintenant?

M. Racine (Sylvain) : Bien, MAtv, ce n'est pas une station communautaire, hein, ça reste une station qui est du câblodistributeur comme tel, qui est financée à même les fonds communautaires, mais...

M. LeBel : C'est de la compétition qui ne devrait pas être faite, à mon avis. On devrait garder les télés communautaires autonomes.

M. Racine (Sylvain) : Bien, vous savez, encore une fois, dans la dernière réglementation, le pourcentage qui était alloué aux télés communautaires, qui était, à l'époque, 2 %, a été coupé à 1,5 %, parce que le CRTC disait : Il y a trop d'argent dans le communautaire.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Racine (Sylvain) : Ce qu'il voulait dire, je pense, c'est qu'il y a trop d'argent au niveau des câblos, mais les câblos ne le partagent pas avec les télés communautaires autonomes ou très peu, alors c'est ce qui fait qu'on a moins de sous.

M. LeBel : C'est comme la météo, ce n'est pas fiable.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je reconnais maintenant la députée de Marie-Victorin pour deux minutes.

Mme Fournier : ...à Longueuil, j'ai la chance d'être couverte par la Télévision Rive-Sud, donc TVRS, sur le territoire de l'agglo. Malheureusement, c'est juste diffusé pour les gens qui ont Vidéotron à la maison, comme vous l'avez si bien dit. Puis, dans votre présentation, ça m'a interpelée, le fait que vous disiez que vous sentiez que vous aviez comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête en ce qui a trait aux licences en raison, justement, des fameuses décisions du CRTC. Alors, j'aimerais que vous puissiez nous en dire plus à ce sujet-là. Où en sont vos discussions avec Vidéotron? Est-ce qu'ils ont vraiment l'intention de retirer leur licence? Quelle est la situation?

M. Racine (Sylvain) : Écoutez, c'est très difficile à dire, parce qu'on est conscients que MAtv, c'est quand même un groupe de personnel syndiqué. Vidéotron ne va pas annoncer, trois mois d'avance ou quatre mois d'avance, qu'ils ont l'intention de le fermer, ça va se faire comme ça. Alors, on ne sait pas. Nous, ce qu'on se dit, ce n'est pas : Est-ce qu'ils vont le faire? La question qu'on se pose, c'est : Quand vont-ils le faire?, parce que les concurrents l'ont fait ailleurs. Et, personnellement, je vous le dis, si j'étais à la tête de TVA, bien, je réclamerais ces sous-là pour aider mes stations locales. Mais, comme je suis à la tête de la fédération, je dis non à ça, parce que c'est de l'argent du public qui va aller, encore une fois, à l'entreprise privée, et ça ne devrait pas être le cas.

Mme Hinse (Amélie) : Et surtout ça ne va pas financer des vraies nouvelles locales, selon nous, parce que nous, on est présents dans des petites municipalités, puis ce n'est pas vrai que TVA va venir couvrir quelque chose à Warwick, là, parce qu'il a pris l'argent de la télévision communautaire pour aller couvrir le local, tu sais, donc...

Mme Fournier : ...on n'a pas non plus de petites stations, par exemple, de TVA à Longueuil.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Fournier : Bien sûr, on est couverts par la télé nationale. Donc, à ce moment-là, dans toute la périphérie, on se trouverait à perdre de l'information.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup pour votre grande contribution à cette commission.

Je vais suspendre quelques instants pour permettre à l'Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 14 h 43)

(Reprise à 14 h 46)

Le Président (M. Ciccone) : Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.

Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec (ARCQ)

M. Bougie (Martin) : Merci. Mmes, MM. les commissaires, citoyens à l'écoute, mon nom est Martin Bougie et je suis directeur général de l'Association des radios communautaires du Québec, ARCQ pour les intimes. Je suis aujourd'hui accompagné de Tanya Beaumont, notre présidente, François Carrier, notre vice-président, qui est aussi directeur général de la radio CHIP Pontiac, et Éric Tétreault, également administrateur de l'association et directeur général du FM 103,3 à Longueuil.

Donc, nous sommes l'Association des radios communautaires du Québec et vous remercions de l'opportunité que vous nous donnez de prendre part à cette conversation collective sur l'avenir des médias et du droit du public à l'information. Ce droit du public à l'information doit être au centre de nos préoccupations, parce que les vrais perdants, si on ne fait rien, ce seront les citoyens du Québec. Nous avons une responsabilité collective de préserver ce droit.

La radio aussi est un média d'information, et la radio communautaire ne fait pas exception. Ce débat nous anime et nous interpelle. Présentes dans le paysage médiatique québécois depuis bientôt 50 ans, c'est aujourd'hui une quarantaine de radios communautaires qui desservent des centaines de municipalités au Québec. 24 heures par jour, sept jours par semaine, ce sont 250 employés et 2 000 bénévoles qui participent à la programmation et la gestion de nos organisations. Elles sont solidement ancrées dans leur milieu, appuyées par plus de 20 000 membres qui prennent part à leur vie démocratique.

La radio communautaire est aussi un outil de démocratisation des médias en ouvrant ses ondes aux citoyens et aux différents groupes communautaires. Nos radios sont toutes portées par une mission qui trouve une grande partie de sa pertinence aujourd'hui dans la production d'une information de proximité. Pour les médias nationaux et régionaux, qui s'adressent à un large public, qui doivent faire des liens à partir d'enjeux plus globaux, toute nouvelle locale n'est pas forcément pertinente. Par exemple, en temps d'inondations, ces médias ne peuvent s'attarder à faire le point sur la situation prévalant dans tel ou tel village, c'est beaucoup trop pointu pour leur angle, et pourtant cette information est cruciale pour les citoyens directement touchés. Combien de nouvelles ne seraient pas traitées sans la présence de médias consacrés à l'information de proximité?

Le citoyen a aussi besoin de ce regard local ancré dans sa réalité quotidienne, un regard porté par un interlocuteur qui comprend sa réalité, qui partage ses valeurs, son histoire, sa culture, sa langue et qui parle avec son accent. Nos radios vivent au rythme de leurs communautés. Chaque jour, plus de 300 nouvelles locales et hyperlocales sont produites par les journalistes dans nos radios, favorisant ainsi la mobilisation des citoyens devant les enjeux locaux.

Grâce à un modèle d'affaires hautement adaptable, la radio communautaire a su s'implanter dans des milieux aux réalités très diversifiées. À l'heure où on cherche de nouveaux modèles d'affaires, nous pourrions commencer par observer les composantes de notre écosystème médiatique et miser sur la complémentarité de ceux-ci au profit du citoyen. Si la spécialité d'un média privé est d'opérer dans des marchés les créneaux avec un potentiel commercial, force est de reconnaître que de moins en moins de marchés offrent un rendement intéressant. L'actualité nous le rappelle à chaque jour, l'information a une valeur sociale très forte mais sa valeur économique est négative. On ne peut plus se fier aux lois du marché pour garantir l'information.

La radio communautaire, comme nombre d'entreprises d'économie sociale, a tendance à s'installer dans des marchés qui ont des besoins mais qui sont jugés non rentables par le secteur privé. Selon nos données internes, le surplus moyen d'une radio communautaire, le surplus moyen annuel, est de moins de 2 000 $, démonstration faite du faible intérêt commercial des marchés que nous desservons. Et pourtant elles font de l'information de proximité. Pourquoi? Parce qu'elles poursuivent une mission collective cherchant à maximiser l'impact social.

La radio communautaire, c'est aussi une garantie de service local pour la collectivité qui la crée. En effet, son modèle de propriété collective fait en sorte qu'elle ne peut être achetée. Sa mission ne peut être changée sans un large consensus social, un large consensus pour ses uniques propriétaires, c'est-à-dire les membres de sa communauté. La radio communautaire devient donc un rempart contre le mouvement de concentration des médias et de montréalisation de l'information. Par son modèle de gouvernance démocratique encourageant la participation citoyenne, la radio communautaire s'assure de la pertinence de ses programmations. Citons l'exemple des conseils d'administration de nos radios, qui sont tous composés de citoyens s'impliquant bénévolement à la gestion stratégique de leurs médias.

L'ancrage de la radio communautaire dans sa communauté est réel. Si on mesure la valeur d'un média par l'appui qu'il reçoit par sa communauté, la radio communautaire, dont l'existence même est le résultat d'une volonté collective de se doter d'un média local producteur d'information de proximité, eh bien, ça représente une grande valeur aux yeux de ses citoyens.

• (14 h 50) •

Mme Beaumont (Tanya) : Cette mission, elle est bien noble, elle est vitale pour nos communautés mais elle a un coût. Nos radios consacrent entre 25 % et 40 % de leurs dépenses de programmation à la production d'information de proximité. Elles évoluent dans un environnement réglementaire complexe qui fait sa spécificité mais qui apporte aussi son lot de défis. Elles doivent assumer les mêmes dépenses de base qu'une radio privée. Elles font face aux mêmes défis liés au numérique. Elles doivent faire face à la transformation des métiers de la radio, à la multiplication des plateformes de diffusion et aux changements des habitudes de consommation. Elles fonctionnent souvent avec des moyens limités, et la ligne entre survie et viabilité peut être mince. Cette réalité les empêche souvent d'offrir des conditions de travail compétitives, ce qui a un impact sur leur capacité d'embauche et de rétention de leurs ressources.

Même s'il y a plusieurs beaux exemples de gens qui font carrière dans nos radios, elles sont, pour plusieurs, le point de départ, la première expérience concrète avant de passer dans les médias privés et publics. On peut le voir comme un problème ou comme une opportunité de reconnaître le rôle de formation que nous jouons. On dit souvent qu'on fait des miracles avec des petits moyens en radio communautaire, mais on se pose la question : Est-ce vraiment nécessaire? En bout de ligne, c'est la qualité du service aux citoyens dont il est question. Un secteur communautaire habilité à pleinement réaliser sa mission ne serait-il pas un objectif collectif à viser pour préserver le droit du public à l'information?

Si l'ARCQ est l'humble porte-parole de ses membres, c'est d'abord et avant tout un regroupement de radios qui ont envie d'évoluer ensemble et de mutualiser leurs efforts pour contribuer à l'épanouissement de notre secteur. L'information est le moteur de nos actions. Nous travaillons actuellement à la mise en place d'une agence de presse interrégionale, plateforme alimentée par les contenus de nos radios. Cette plateforme a comme objectif d'augmenter la découvrabilité des contenus de nos médias et de faire rayonner l'information locale.

S'il semble déjà y avoir un consensus social sur la nécessité de soutenir nos médias d'information, une question se pose : Qui doit payer? Les citoyens? Nous faisons face à la culture de la gratuité mais nous croyons que la propension d'un citoyen à payer pour un service d'information est proportionnelle à la valeur qu'il lui accorde. Dans le cas des radios communautaires, c'est en moyenne 30 % des revenus qui provient des levées de fonds diverses. Nos communautés contribuent déjà à leurs médias. La communauté d'affaires? On n'achète pas de la publicité dans un média pour l'encourager mais parce qu'il est efficace pour rejoindre un public cible. Une partie de la responsabilité va donc vers les médias, qui se doivent d'être crédibles, professionnels et pertinents.

Le droit du public à l'information, c'est notre responsabilité à tous. Dans le contexte où le marché ne permet plus de garantir des services d'information, nous croyons qu'il est de l'obligation de nos élus à mettre en place des mesures, des pratiques et des politiques pour soutenir la production d'information.

Parlons de publicité gouvernementale. Les messages du gouvernement sont d'intérêt public. Il est de la responsabilité de nos élus de s'assurer de rejoindre le plus de citoyens sur le plus grand territoire possible. Dans ce contexte, l'achat de publicité dans les médias locaux n'est plus un mal nécessaire mais bien un moyen du gouvernement d'atteindre ses objectifs de communication. Actuellement, on peut pointer du doigt certaines pratiques qui pourraient être changées pour le bénéfice de tous. Si les placements publicitaires dans les GAFA peuvent faire partie d'une stratégie globale, on ne peut pas tout mettre nos oeufs dans le même panier, on doit diversifier les placements. Même en publicité traditionnelle radio, les achats gouvernementaux sont souvent concentrés dans les réseaux de Bell et Cogeco, qui rejoignent essentiellement les agglomérations urbaines. N'oublions pas que 50 % de la population vit en dehors des centres urbains. Le gouvernement du Québec s'est donné une directive d'investir au moins 4 % de ses achats publicitaires dans les médias communautaires. Cet objectif n'a jamais été atteint depuis sa mise en vigueur il y a plus de 20 ans, et ça devrait être écrit noir sur blanc dans votre rapport.

Nous appuyons, à l'ARCQ, toute mesure qui viendra supporter le coût de la mission d'information de nos médias. C'est la survie... qui en est question. Fonds de soutien au journalisme, crédit d'impôt pour entreprises privées, redevances des GAFA et des fournisseurs d'accès, plusieurs solutions sont présentement sur la table, nous croyons qu'elles doivent être étudiées. Mais toute solution mise en place devra reposer sur des critères objectifs basés sur l'intérêt du citoyen et les besoins de nos régions. Le rôle de l'État n'est pas de décider du sort de tel ou tel groupe média mais de s'assurer que chacune de ses composantes de notre écosystème, notamment les éléments privés et collectifs, contribuent aux objectifs en ayant les moyens de jouer leurs rôles respectifs et complémentaires.

En conclusion, parce que le respect du droit à l'information est une responsabilité collective, l'ARCQ recommande que le Québec se dote d'une politique publique en information. Parce que la radio communautaire a l'information de proximité au coeur de sa mission, une gouvernance démocratique apportant ancrage et pertinence, une garantie de service local par sa propriété collective, un modèle économique adaptable centré sur la finalité sociale et peut jouer un rôle important et complémentaire dans le maintien du droit à l'information...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Beaumont (Tanya) : ...l'ARCQ recommande que le rôle essentiel de la radio communautaire dans le maintien de l'offre d'information locale et régionale soit reconnu et que ce rôle soit soutenu par des mesures concrètes de support à la production et de diffusion de nos contenus journalistiques et d'encadrement des ressources. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je vous ai donné 25 secondes. Merci. Merci pour votre exposé. Nous sommes maintenant rendus à la période d'échange d'une durée de 15 minutes avec la partie gouvernementale, et on débute avec le député de Beauce-Sud.

M. Poulin : Mme Beaumont, M. Carrier, M. Bougie, M. Tétreault, merci pour votre présentation fort intéressante.

Deux, trois éléments. J'ai été dans les stations de radio communautaires, j'ai fait des renouvellements avec le CRTC. Je sais c'est quoi, qu'il y ait des pourcentages de gospel que je dois mettre à ma programmation ou je dois tenter de rendre ça le plus intéressant possible, à longueur de journée, avec les contraintes que le CRTC nous met, qui ne sont pas toujours mauvaises en tant que telles, qui sont des fois de bon aloi puis qui permettent justement aux radios communautaires de diffuser un contenu qui est différent. Cependant, la radio, elle est là pour rester. Malgré tout ce qu'on a pu dire dans les dernières années, malgré les crises qu'il a pu y avoir dans le monde des médias, la radio est un média qui a traversé le temps parce qu'il a toujours réussi à se renouveler. C'est sûr qu'il y a des défis. On pense à l'art du «pretape», là, qui est rendu très à la mode, où les animateurs radio ne sont plus du tout en direct, où ils animent leur météo d'avance, ils diffusent ça plus tard. Bref, le métier d'animateur radio a changé énormément. Le métier de journaliste également a changé aussi.

J'aimerais que vous parliez de l'expertise que vous avez développée mais qu'on se doit encore de développer dans les radios communautaires. Parce qu'il ne faut pas se leurrer, il y a de la compétition. Lorsqu'un citoyen décide, par exemple, d'écouter des stations de radio, il y a différents choix qui s'offrent à lui. Donc, pour assurer une fidélité à son auditoire, c'est un défi, puis vous n'avez pas nécessairement les mêmes moyens puis vous avez des contraintes supplémentaires qui vous sont mises devant le CRTC. Alors, de quelle façon pouvons-nous continuer de convaincre les publicitaires de se tourner vers vous? Puis qu'est-ce que le gouvernement pourrait faire pour tenter, malgré les contraintes du CRTC, qui, je le rappelle, ne sont pas toutes mauvaises... On pourrait quand même vous appuyer dans cette compétition-là du monde radiophonique, qui est superimportant. Pour plusieurs de ces radios, quand je regarde les membres que vous avez... qui a diminué avec le temps, quand je regarde les membres que vous avez, il n'en demeure pas moins que vous êtes très souvent la seule radio au monde à parler de ces gens-là, alors c'est important en termes d'information locale et régionale. Donc, qu'est-ce qu'on peut faire pour vous aider et vous appuyer au niveau de l'expertise dans ce monde extrêmement compétitif?

• (15 heures) •

M. Tétreault (Éric) : Je suis bien placé pour en parler parce que j'ai une station de radio, je gère une station de radio depuis 25 ans à Longueuil et j'ai tout le débordement de Montréal. Et chez nous, oui, j'ai des employés, j'ai des bénévoles, mais c'est tous des gens qui, à quelque part, ont un mandat de qualité en ondes, et ça, c'est fondamental. Si je n'ai pas cette notion de qualité là, on n'existe pas, parce que, sur la bande FM, on peut se promener, il y a 32 stations dans la grande région de Montréal, ça fait qu'il y a 32 autres raisons de m'écouter. Donc, ça, c'est sûr, puis, je pense, c'est la même chose pour pas mal l'ensemble des stations de radio, la notion de qualité, elle est là.

Souvent, les gens ont toujours l'aspect de la perception du milieu communautaire, mais, je peux vous dire, avec les années, on a beaucoup évolué. Le milieu a beaucoup évolué puis également l'écoute a beaucoup évolué. C'est sûr, il y a une fragmentation, mais aujourd'hui les gens sont beaucoup plus aptes à, nécessairement, nous essayer, à nous aimer puis à nous écouter à chaque jour. Donc, la notion de qualité, on ne peut pas la coller nécessairement à qu'est-ce qu'on fait. La preuve, c'est qu'on forme énormément de gens, des journalistes, des animateurs, on est vraiment une pépinière à l'ensemble du Québec. Nous, c'est 34 stations de radio partout au Québec qu'on rejoint, donc c'est quoi, c'est plus d'un million de personnes qu'on rejoint par semaine.

Souvent, il y a toujours cette notion-là de... cette mauvaise perception là du milieu communautaire, ce qui a toujours tendance à nous aplanir un peu. Mais il ne faut pas oublier aussi qu'on a un modèle d'affaires qui est un modèle d'entreprise d'économie sociale, qui est un modèle unique, et on ne l'a pas parti voilà deux ans, là, ça fait 40 ans qu'on l'a parti. Donc, il y a une grande expertise que le ministère, aussi, possède. Notre ministère de la Culture est au courant de ça. On lui fait comme des redditions de comptes à chaque année pour avoir une certaine subvention.

Donc, moi, c'est un point, par rapport à la qualité, que... je fais le lien. Il y a un beau modèle, au Québec, même précurseur mondialement, d'un réseau des radios communautaires qui produit énormément d'information partout au Québec, puis il est sous-exploité, puis souvent on n'en parle pas beaucoup. Parce que, dans les grands réseaux — je suis bien placé, à Longueuil, pour, nécessairement, le savoir — on essaie d'éviter de mentionner d'autres médias et, encore plus vrai, un média comme le nôtre.

Vous savez, notre force, nous, c'est qu'on appartient à la communauté, on est gérés par la communauté et aussi on est alimentés par la communauté. C'est un peu le modèle du média de demain, ça. C'est qu'est-ce qu'on est, en tout cas, 34 stations de radio et plus de 160 médias communautaires au Québec, mais souvent, c'est ça, on n'en parle pas beaucoup dans les revues. Il y a certaines stations de Montréal qu'on parle, mais moi, je suis bien placé, à Longueuil, je suis à côté des camions, je les vois passer, de tous les réseaux, et c'est très rare qu'on parle de qu'est-ce qu'on fait. Ça fait que, oui, la qualité, il y en a beaucoup. De toute façon, je sais qu'il y a des gens qui passent dans notre réseau, vous pouvez nécessairement témoigner de la qualité qu'il y a chez nous.

M. Poulin : En terminant, avant de céder la parole à mon collègue, j'aimerais qu'on parle du virage radiophonique numérique. On regarde QUB Radio, là, je prends l'exemple national, mais bien d'autres, Radio-Canada, la radio de Radio-Canada a fait un virage assez important en mettant ses podcasts qui sont disponibles. Nous-mêmes, là, ce soir, on va réécouter certaines entrevues qu'on a manquées, parce que maintenant on peut consommer... comme la télé, on peut consommer la radio lorsqu'on le veut. Quel impact ça a auprès des radios communautaires, ce changement-là? Puis est-ce qu'on pourrait vous supporter davantage dans un virage numérique, sur du podcast qui est disponible en ligne, sur une accessibilité qui est plus facile, de votre côté?

M. Bougie (Martin) : Bien, écoutez, la radio communautaire est une radio d'abord et avant tout, puis on fait face au même environnement que tout le monde. Au Canada, on dit, en fait, que, dans les 35 ans et moins, il y en a moins... plus de 50 % qui n'ont pas de récepteur FM à la maison. Alors, un récepteur radio, c'est ça, et ça va être ça demain, et pour nous, pour nos médias, c'est les auditeurs de demain à qui il faut penser, hein? De plus en plus, nous serons des producteurs de contenu avec des plateformes de diffusion à notre portée. Donc, il faut que nos médias s'adaptent, là, c'est une question de survie, en fait. Il faut s'adapter aux auditoires qui s'en viennent, parce que leur monde est différent, ceux qui ont 15, 20 ans aujourd'hui. Il ne sera pas différent demain, ils vont continuer à vouloir consommer les contenus où je veux, quand je veux, comme je veux. C'est fini, l'heure des rendez-vous en radio. Ton émission de jazz le jeudi à 7 heures, ça m'intéresse, mais je ne veux pas l'écouter le jeudi, pas à 7 heures, je veux l'écouter sur mon... donc il faut qu'on aille là.

Et nos métiers sont en pleine transformation. On ne doit plus seulement rendre une nouvelle... parce qu'on est ici pour parler d'information aussi, on ne peut plus juste rendre une nouvelle au micro, il faut aussi l'agrémenter d'images puis d'un petit texte pour le site Internet. On a un réalisateur audio, ça va prendre un réalisateur numérique, bien sûr, bientôt pour faire un lien avec les réseaux sociaux. Donc, vraiment, on fait face à ce changement-là puis on n'y fait pas exception. On a un modèle d'affaires, comme disait Éric, qui est là depuis plus que 40 ans. Bon, le buzz sur Internet, c'est l'interaction entre les auditoires et les producteurs. Bien, nous, nous sommes des médias interactifs depuis notre création. Notre modèle d'affaires, il est là. Il suffit juste de l'encourager.

Si je peux me permettre de glisser un peu sur votre question précédente, qu'est-ce qu'on peut faire? Qu'est-ce que le gouvernement peut faire pour nos médias? On a parlé du coût de la mission dans notre exposé. Il faut savoir, nos médias font face aux mêmes dépenses de base qu'une radio mais dans un marché ou un créneau qui n'est pas rentable, et pourtant on continue à dépenser entre 25 % et 40 % de nos budgets de programmation dans la production d'information. C'est là qu'il faut qu'on soit aidés. Si on croit ce modèle-là, qui est collectif, démocratique, qui est vraiment bien implanté déjà, on n'a pas besoin de réinventer la roue, on est implantés dans notre paysage, si on y croit, supportons nos services d'information.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je reconnais maintenant le député de Saint-Jean.

M. Lemieux : 34 stations, mais l'autre chiffre que j'ai retenu de ce que vous avez dit, c'est un million d'auditeurs. Je ne connais pas le placement média. Je connais les médias, mais, le placement, je n'en ai jamais fait mais j'ai une bonne idée de comment ça fonctionne. Quand je dépense, que ce soit du 4 % ou que ce soit n'importe quoi d'autre, là, le 4 % gouvernemental ou n'importe quelle campagne de pub, je veux acheter national, j'achète national. Il m'en manque combien dans ma couverture nationale? Puis est-ce que je me trompe ou vous êtes ce qui fait la différence du total?

M. Bougie (Martin) : Écoutez, on parle aussi... puis je pense que c'est important, pour moi, c'est crucial dans le débat, c'est la responsabilité du gouvernement dans son placement publicitaire. On peut parler de pourcentage mais on peut parler de sa responsabilité. Le gouvernement ne peut pas avoir une attitude comme l'acheteur privé, qui va rechercher à rejoindre un certain pourcentage de son public cible, donc j'achète Montréal, Québec, puis je patche dans quelques régions, puis j'ai atteint mon objectif. Non, le gouvernement, ses messages, ce sont des messages d'intérêt public, il doit s'adresser à un maximum de citoyens sur le plus grand territoire possible.

Ce million d'auditeurs là qu'on a, oui, ils sont dans les zones urbaines, mais il ne faut pas oublier qu'il y en a plusieurs qui sont en région, en fait, la grosse majorité, et pour lesquels notre radio est le seul média à qui on parle. Donc, oui, en radio, je peux acheter chez Bell et Cogeco, mais est-ce que je parle à la population de la Côte-Nord? Est-ce que je parle à Carleton, à Gaspé? Est-ce que je parle à... Bon, la liste est longue, mais je pense que c'est ça qu'il faut ramener au centre. En tant que gouvernement, mais en tant qu'organisme public, on a cette responsabilité. Alors, la publicité dans nos médias, ce n'est pas un mal nécessaire, non, non. Je pense que c'est une logique de gagnant-gagnant qui permet, oui, de financer nos médias mais d'augmenter la portée des messages du gouvernement.

M. Lemieux : Voilà pour la publicité. Merci du message. Parlons de contenu, maintenant. Le mixte radio d'une radio communautaire moyenne, au Québec — désolé de ramener ça à une moyenne, là, mais il faut qu'on se comprenne puis il faut qu'on ramène ça à quelque chose de comparable — radio parlée, radio musicale, radio d'information, on est où dans le mixte de... la moyenne des ours, là?

M. Tétreault (Éric) : Bien, la moyenne... Veux veux pas, de toute façon, on est régis par le CRTC, ça fait que la moyenne est assez facile à faire. À quelque part, chacun a son mandat du CRTC à respecter. Il y a un contenu oral à respecter, il y a des catégories de musique à respecter, ça fait qu'en vrai le format, il se ressemble. C'est sûr qu'il y a peut-être un choix musical qui peut changer, mais les contenus francophones, c'est la même réalité pour tout le monde, et donc on vit avec ça. Puis aussi, par rapport à l'information, il y en a qui ont différents mandats. C'est sûr que, dans certaines régions, c'est souvent... la salle de nouvelles, c'est la seule salle de nouvelles qu'il peut y avoir. Bien, aussi, dans des grandes régions... Je peux vous dire qu'à Longueuil on a besoin des trois médias communautaires qui sont là, parce que sans eux, bien, il y aurait un grand vide démocratique.

M. Lemieux : Oui, bien, justement, mon collègue de Beauce-Sud, tout à l'heure, parlait aux gens de la télé communautaire en disant : Il me semble qu'il y aurait des alliances naturelles. On est en 2019, et vous êtes multiplateformes de plus en plus, n'est-ce pas? Je lisais, d'ailleurs vous l'avez... ce que vous avez dit tout à l'heure, vous l'avez écrit au paragraphe 45, le principal défi, il n'est pas technique, c'est les métiers de la radio qui évoluent. Vous êtes de plus en plus multiplateformes. Vous ne pourriez pas travailler ensemble, avec la radio, puis avec la télé, puis l'écrit?

M. Tétreault (Éric) : Bien, écoutez... content, comme, d'entendre ça parce qu'en 2009 j'ai préparé un plan d'affaires pour réunir l'ensemble des médias communautaires. Ce projet-là a été appuyé par Christine St-Pierre, qui était ministre à l'époque, qui est venue lors du lancement au Théâtre de la ville, à Longueuil, qui était emballée, nécessairement, par ce projet-là parce que ça pouvait faire boule de neige partout au Québec. Malheureusement, le monde communautaire, c'est difficile de travailler ensemble et ça a été difficile. Ensuite, bon, la télé a eu ses raisons, puis le journal a eu plein d'autres raisons, donc, du fait qu'avec le temps, bien, à quelque part, ce projet-là s'est effrité et s'est éteint voilà pas longtemps, avec, nécessairement, comme le décès d'un des fondateurs...

• (15 h 10) •

M. Carrier (François) : Si on me permet également, il y en a déjà, des collaborations, il faut dire. Puis, dépendamment aussi de l'écosystème où on est, nous autres, chez nous, dans le Pontiac, c'est sûr qu'on collabore avec les journaux locaux qui y sont et davantage aussi parce que nous, on a deux communautés de langues différentes, donc les anglophones et les francophones, donc on s'assure de faire tout ça. Mais moi, je peux dire que, déjà, lorsque c'est nécessaire, on le fait, à mon avis, puis c'est très complémentaire, ce qu'on a pour le moment.

D'ailleurs, si on regarde... tantôt, votre question concernant, entre autres, ce qu'on fait tous les jours, parce que je pense que l'information, c'est vraiment ce qui nous intéresse, nous, durant les inondations qu'on a vécues récemment, on était vraiment seuls sur notre territoire avec 19 municipalités à couvrir, ce qui n'était vraiment pas évident. Et notre rôle a tellement été nécessaire et gratifiant, je dirais, à cet effet-là, et c'est là qu'on a attiré le plus d'auditeurs et aussi de publicité locale, aussi. Ça, il ne faut pas l'oublier également, on a quelque chose d'intéressant, je pense, à offrir. Et je pense que c'est comme ça également qu'on réussit, de notre côté, à avoir notre image de marque, c'est-à-dire d'être là, d'être présents quand c'est le bon moment. Il y a des événements parfois malheureux mais il y a des événements où ce qui est intéressant, c'est que les gens pensent à nous maintenant. Ils pensent directement, à savoir, oui, il y a des médias sociaux... mais à 27 reprises, nous, de notre côté, on a dû intervenir pour faire en sorte que des rumeurs ne soient pas propagées dans notre communauté, ce qui n'était pas évident. Alors, c'est ce genre de chose là aussi, je pense, qu'il faut retenir en termes d'information.

M. Lemieux : J'avais souligné le paragraphe 45, mais il y a le 47 que je trouvais passionnant aussi : «Le pouvoir a changé de mains. De plus en plus, nous devenons des producteurs de contenu — je fais rapidement parce qu'il ne reste pas beaucoup de temps — [...]il doit être au service et complémentaire au produit en ondes.»

J'ai retenu aussi un autre chiffre, tantôt : 2 000 $, la différence entre la fin de l'année puis les profits puis les pertes, là. Avez-vous les moyens de compléter le virage? Parce que ça en prend un, de toute évidence, avec les podcasts puis tout ce dont on parlait, là. Avez-vous les moyens de le faire?

Le Président (M. Ciccone) : 45 secondes.

M. Bougie (Martin) : Bien, est-ce qu'il y a quelqu'un au Québec qui a les moyens de le faire en ce moment? Je pose la question. Ce n'est pas... mais ça demande des investissements énormes, et puis c'est beaucoup plus un centre de coûts qu'un centre de profits, présentement. On n'a pas le choix d'être là, comme je le disais tantôt, ne serait-ce que pour faire face aux prochains auditeurs. Il faut être là, mais c'est des énormes investissements. Le Plan culturel numérique a contribué, mais c'est une longue marche pour nos médias, pour essayer, oui, de mettre ensemble la mission de radiodiffusion sur toutes les plateformes, là, dans les conditions financières qui sont les nôtres.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je suis maintenant prêt à reconnaître un membre de l'opposition officielle. Mme la députée de Verdun.

Mme Melançon : Merci. Merci à vous quatre d'être présents. Je connais assez bien les radios communautaires, parce qu'on a déjà fait le tour, on s'est parlé à quelques reprises aussi. Je veux aussi souligner, pour ceux et celles qui nous écoutent, actuellement, l'importance, bien sûr... là, vous l'avez dit, en sécurité publique, on le voit... on l'a vu chez vous, là, dans le Pontiac, dernièrement. Moi, je me rappelle, là, d'un échange qu'on avait eu avec Natashquan, parce que, justement, il n'y a personne qui se rend là-bas, puis, lorsqu'il arrive, en tout cas, des événements, qu'ils soient malheureux ou, en tout cas, d'ordre de sécurité, le gouvernement est toujours bien, bien, bien heureux de pouvoir se tourner vers vos radios.

Moi, je vais passer un commentaire tout de suite, puis ça aura été dit, puis j'aurais dû le faire aussi tout à l'heure avec les télés communautaires. Pour plusieurs, lorsqu'on parle des radios ou des télés communautaires, on se rapporte aux années 80, où il y avait des problèmes majeurs de décor ou, en tout cas, où le son ne sonnait pas tout à fait juste. Juste dire aux gens, là, qui n'ont pas écouté la radio communautaire dernièrement, c'est formidable, ce que vous faites avec des montants, en tout cas, pas substantiels dans le cas où on parle actuellement. Mais je peux vous dire que, pas plus tard que la semaine dernière, j'étais avec CFUT, donc, j'étais avec Robert Bernard, et je suis allée écouter, on a du temps, on peut échanger, on est à Shawinigan, où on peut prendre le temps, justement, d'échanger. Et bravo pour le travail que vous faites, je voulais minimalement le dire.

Je lisais aussi que, pour arriver à boucler la boucle... Moi, je me rappelle toujours de CKRL, qui fait son radiothon. Cette année, je pense que c'est autour de 50 000 $ qu'on a été capable d'amasser, hein, avec le radiothon. Ce n'est pas drôle d'être obligé, à chaque fois, là, de passer le chapeau, je vais dire ça comme ça, bien que ce ne soit pas... mais il faut que vous soyez créatifs à chaque fois.

Bien sûr, le 4 %... puis là vous me voyez arriver, là. Pourquoi le 4 % puis pourquoi... On doit faire un travail, mais je pense qu'on va devoir aussi se baser ailleurs, parce que ça ne fait pas deux, trois, quatre ou cinq reprises qu'on essaie de faire atteindre le 4 %, là. J'ai joué dans ce film-là, je le sais, de quoi il est question, c'est superdifficile. Puis je le disais tout à l'heure, je pense que, dès qu'il va y avoir une sortie de 1 $ qui sera faite par le ministère du Conseil exécutif, parce que c'est là où c'est rendu pour la publicité, bien, il y a 1 $ qui part, mais il y a un pourcentage qui devrait automatiquement être versé dans un autre compte, là, pour assurer que ça s'en aille dans les médias communautaires. Ça, je suis prête à faire ce débat-là.

Je veux quand même vous poser la question, parce que, là, on est en radiodiffusion, et je l'ai posée... vous m'avez entendue, tout à l'heure, dire... moi, j'étais surprise de voir que le gouvernement du Québec n'ait pas voulu déposer quoi que ce soit à Ottawa, et ça vous regarde, vous aussi. Quelle aurait été une demande que vous auriez pu faire pour la révision des deux lois au CRTC?

M. Bougie (Martin) : Par rapport au gouvernement du Québec?

Mme Melançon : Oui.

M. Bougie (Martin) : Bien, en fait... Bien là, écoutez, c'est de juridiction fédérale, là, je ne veux pas me prononcer sur... Mais en fait, nous, on a déposé un mémoire dans le cadre de cette révision-là, puis c'est clair, bon, on parlait des contraintes du CRTC, les contraintes... Nous, oui, ça complexifie un peu la gestion de nos médias, mais on pense que ça nous campe aussi dans la... ça nous force à réaliser notre mission.

Mais la chose la plus importante, puis ça peut toucher aussi les discussions qui ont lieu ici concernant les GAFAM de ce monde, mais je pense que c'est aussi que l'espace canadien, mais ici l'espace québécois, soit ouvert aux joueurs, mais que tous les joueurs qui sont dans cet espace-là jouent les mêmes règles du jeu, autant au niveau réglementaire que fiscal. Alors, on ne peut plus aujourd'hui — je le crois, c'est mon avis, et je le partage, là — tolérer qu'il y ait des grandes entreprises qui viennent, qui vont chercher nos contenus, nos revenus. Il y a une cassure au niveau économique aussi, là. Ce n'est pas nécessairement les producteurs de contenu qui font l'argent dans les territoires numériques, là. Donc, c'est les fournisseurs d'accès, c'est les grands, c'est les GAFA de ce monde, donc il faut retrouver une certaine équité fiscale dans ce monde-là.

Mme Melançon : J'ai une question pour M. Tétreault. Tout à l'heure... Moi, je me rappelle, en 2009, là, de ce que vous aviez fait comme proposition, c'est très clair dans ma mémoire. Là, vous me dites que c'est fini, mort, enterré? Parce que j'étais pour vous... Là, vous m'avez devancée, je voulais savoir on en était où.

M. Tétreault (Éric) : C'est vrai que c'est fini, mort, enterré parce que celui qui m'a aidé à mettre ça en place, il est décédé voilà un an.

Mme Melançon : Oh!

M. Tétreault (Éric) : Il s'appelait M. Maurice Giroux.

Mme Melançon : Oui, bien sûr, bien sûr.

M. Tétreault (Éric) : Il a été le membre fondateur de notre station de radio. Donc, oui, à quelque part, chacun avait des intérêts un peu différents là-dedans, donc tout ça est parti dans différentes directions. Moi, j'ai toujours continué, c'est moi qui ai préparé le plan d'affaires. J'avais quand même pas mal de données de tout ça, mais la télé avait d'autres objectifs.

Il ne faut pas oublier aussi que c'est quand même difficile d'amener... Moi, je travaille déjà avec le privé, je suis en partenariat avec plein de privés autour de moi, je n'ai aucun problème avec ça, mais le domaine communautaire, il a d'autres philosophies et d'autres valeurs, ça fait que ce n'est pas toujours évident de, nécessairement, amener à travailler ensemble. Mais, si aujourd'hui ce projet-là serait... nécessairement, là, 10 ans après, bien, je pense qu'on serait un joueur... un des plus gros joueurs sur le territoire, ça, c'est sûr.

Puis la Rive-Sud, c'est grand, là, on ne s'en rend pas compte, c'est 500 000 de population, hein, si on prend l'accès à environ, là, 10 minutes des ponts, et on est, quoi, cinq... il y a cinq hebdos et trois médias communautaires, c'est comme le territoire de la Capitale-Nationale. On n'est pas beaucoup pour couvrir tout ce qui se passe, je pourrais vous dire. Ils ont besoin de leurs médias communautaires et principalement d'une station de radio aussi, puis c'est pour ça qu'on est là. Puis on n'a pas de radio régionale, il n'y a pas de télé régionale, comme disait tantôt Catherine, il n'y a pas... ce n'est pas payant. Ils sont juste l'autre bord du pont, ce n'est pas du tout dans leurs plans. Il y a Radio-Canada qui a essayé de faire quelque chose, à un moment donné, aussi, canal 10/30, puis ça n'a pas fonctionné. Ça fait que notre modèle, nous, qui est, à quelque part, sans but lucratif, avec d'autres façons de financer, c'est le modèle qui fonctionne dans un marché extrêmement compétitif.

Mme Melançon : Je vous pose la question parce que, c'est pour les membres de toute la commission, là, il ne faut pas qu'on commence à dire : Oui, peut-être est-ce qu'on pourrait essayer de les marier de force, là. Je pense qu'on a entendu clairement qu'il y a... Non, mais c'est vrai, c'est parce qu'on va devoir écrire quelque chose, à un moment donné, puis je voudrais que ce soit bien enregistré.

M. Tétreault (Éric) : ...c'est de nous reconnaître et d'investir. Ce n'est pas un don, ce n'est pas... Tu sais, le 4 %, souvent, bon, O.K., on va lui donner le 4 % pour qu'il se ferme. Ce n'est pas ça, c'est d'investir. Puis même, ce n'est même pas 4 %, dans notre tête à nous, 4 %, on parlait de ça en 1996. On est en 2019, c'est 6 % aujourd'hui, et c'est ça qui doit être investi dans les médias communautaires. On parle, nécessairement, pour les 160 qu'il y a au Québec, c'est ça qui manque présentement puis c'est ce coup de pouce là qu'on a de besoin. Et ça, en plus, ce n'est même pas... c'est de l'argent qui est déjà là. C'est de répartir différemment, ce n'est pas du nouvel argent.

Mme Melançon : Je voulais surtout indiquer, M. Tétreault... c'était surtout le fait de dire : Bien, on ne peut pas faire des économies d'échelle en allant mettre et la télé, et l'écrit, et la radio ensemble. Ce n'est pas ça, le but. Parce que, vous savez quoi, le travail que vous faites, là, il est trop important au quotidien pour qu'on essaie de faire des économies. Il n'y en a plus, d'économies à faire. Je pense que vous l'avez...

M. Tétreault (Éric) : ...dire, on est spécialistes là-dedans.

Mme Melançon : Ah oui.

M. Tétreault (Éric) : Ça fait 25 ans, moi, que je monte des échelles, là.

Mme Melançon : Vous l'avez fait, l'effort.

M. Tétreault (Éric) : Je suis pas mal spécialiste là-dedans, je peux vous dire.

Mme Melançon : Tout à fait, tout à fait. Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Ciccone) : 1 min 50 s.

• (15 h 20) •

Mme Melançon : O.K., 1 min 50 s. Si on se tourne vers l'avenir, là, pour vous, il est heureux, parce que, là, je vois que vous êtes quand même là, on s'en est quand même sorti, et je voyais les chiffres, un peu plus tôt, où on démontrait qu'en publicité il s'en était moins perdu en radio que dans les autres médias. Est-ce que c'est vrai? Puis là je continue à vous regarder parce que c'est vous qui êtes...

M. Tétreault (Éric) : ...moi, chez nous, j'ai une baisse quand même assez importante. C'est sûr que la radio s'en sort mieux par rapport à son format, par rapport au numérique, ça, c'est sûr et certain. Mais, nous, c'est toute la volonté du gouvernement d'investir qui n'est pas là. Parce que les montants, c'est des montants ridicules qu'on a, en placement publicitaire national, c'est ridicule. J'aime mieux même ne pas le dire, comment c'est ridicule. Par rapport à la portée qu'on a puis les gens, nécessairement, qu'on rejoint sur le territoire, c'est des montants qu'on trouve... On a bien beau essayer de travailler avec les agences, tout le monde, il n'y a rien qui bouge parce qu'au gouvernement ça ne bouge pas, le lien ne se fait pas.

M. Bougie (Martin) : Parce que... si je peux me permettre, je vous dirais que, oui, au niveau de la vente de publicité, on note surtout que la publicité locale ne décroît pas très vite, preuve en est faite de l'importance que les commerçants voient pour la contribution de nos radios. Mais il faut comprendre aussi que la plupart de nos radios sont dans les marchés qui sont peu attrayants pour les grands annonceurs nationaux commerciaux, alors c'est pour ça que l'impact des achats gouvernementaux est si important.

Juste un mot sur le 4 %...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Bougie (Martin) : Pardon?

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Bougie (Martin) : Oui, je vais juste terminer rapidement. Je veux juste le mettre... Le 4 %, en 2017‑2018, il était de 1 million, à 3,2 %. Atteindre le 4 %, ça voulait dire 1,2 million, divisé par les 160 médias communautaires, On parle de 7 800 $ en moyenne, annuellement, par média. Donc, ce n'est pas la solution, c'est une partie de la solution.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je suis prêt maintenant à reconnaître la députée de Taschereau pour 2 min 30 s.

Mme Dorion : Merci. Je lisais, dans votre mémoire, que vous recommandiez que «les règles [...] soient les mêmes pour tous, peu importe leur taille, leur nature et leur provenance». Ça veut dire quoi?

M. Tétreault (Éric) : ...information locale, on en produit, on a 50 journalistes dans notre réseau, on couvre toutes les régions du Québec. Juste chez nous, c'est cinq à huit nouvelles par jour qu'on diffuse en ondes, 13 bulletins qu'on met sur Internet, qu'on met sur Facebook, tout ça, c'est énorme. Mais on a de la misère à faire reconnaître ça. Je regarde juste, là, les dernières semaines, on parle rarement de ce qui est produit dans nos salles de nouvelles. On est là, on est un joueur important au Québec.

Mme Dorion : Mais c'est quoi, les règles qui devraient être les mêmes pour tous?

M. Bougie (Martin) : Bien, sur les règles ici, on faisait aussi beaucoup référence aux règles fiscales, là, j'en ai parlé tantôt, c'est l'équité fiscale, l'équité par rapport à tous les joueurs qui sont là. Donc, oui, tu es un joueur, tu offres tes contenus. Au Québec, bien, on a des taxes à payer, et il faut que ce système-là tourne et aide à financer ceux qui produisent des contenus.

Mme Dorion : Donc, vous parlez plus spécifiquement de quelles compagnies?

M. Bougie (Martin) : Bien, c'est, en gros, les GAFA de ce monde, là, oui.

Mme Dorion : Vous en avez parlé, d'autres en ont parlé, l'information, surtout l'information de proximité locale, est un bien public. C'est une nécessité, dans une société en santé, d'en avoir puis qu'il n'y ait pas de désert médiatique où on n'est plus capables de comprendre notre société. Pouvez-vous nous dire... Vous avez parlé de l'économie sociale, qui est un modèle de demain pour les médias. La crise des médias, en ce moment, en tout cas, nous indique un peu... c'est une des voies, peut-être, à suivre. Pouvez-vous nous dire en quoi ce serait préférable, pour la qualité de l'information, pour le bien public que ça représente, par rapport à l'entreprise privée, dont la raison d'être est le profit?

M. Bougie (Martin) : Bien, écoutez, comme on disait dans notre présentation, il y a un écosystème en place. L'entreprise privée a sa spécialité, nous avons la nôtre. Pourquoi une propriété... La propriété collective, qu'est-ce que ça amène? C'est la garantie de service. Une radio communautaire ne peut pas être achetée, sa mission ne peut pas être changée. Donc, à l'heure où est-ce qu'on voit les médias... L'entreprise privée doit maximiser le rendement. Je ne porte pas de jugement, c'est sa nature, et l'information, ça coûte cher, ça ne rapporte rien, et donc c'est normal qu'on coupe là en premier. L'entreprise sans but lucratif, elle est sans but lucratif, mais elle a un très grand but social.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Bougie (Martin) : Donc, cette information-là, on continue à la faire et... donc, la propriété collective et aussi la participation à la gestion démocratique, qui nous permet de rester pertinents.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Rimouski pour 2 min 30 s.

M. LeBel : Merci. Chez nous, à Rimouski, j'ai une bonne radio communautaire qui est très présente un peu partout. Aux Îles-de-la-Madeleine, la radio communautaire, c'est La vie des Îles, ce n'est pas compliqué. Puis on est loin des caricatures de François Pérusse, là, quand qu'on parle des radios communautaires, tu sais, on est rendu ailleurs.

Je me pose quand même une question sur le placement média du gouvernement. Je ne me trompe pas, là, c'est le... services partagés du Québec qui choisit, il y a une direction ou il y a une décision qui est prise d'acheter de la publicité un peu partout. Est-ce que vous pensez que le placement média, qui n'est déjà pas beaucoup dans le milieu communautaire, dans les radios communautaires... est-ce que vous pensez qu'il est distribué équitablement dans toutes les régions du Québec?

M. Bougie (Martin) : Non. Premièrement, c'est une directive hein, on va se le dire, ce n'est pas une politique, donc il n'y a personne qui est tenu de le faire. Donc, ensuite... Là, j'ai perdu mon fil. Votre question était sur la...

M. LeBel : Bien, c'est parce que c'est un groupe de fonctionnaires à Québec qui décide de placer les...

M. Bougie (Martin) : Ah! l'équité. O.K. Il n'y a aucun objectif d'équité dans l'énoncé, il n'y a aucun objectif d'équité, aucun objectif de couverture territoriale, rien. C'est juste une volonté de placer un pourcentage dans les médias communautaires.

M. LeBel : Ça fait qu'on pourrait atteindre... Mettons que c'est 2 %, 3 %, là, qu'on est rendus, les 2 %, 3 % pourraient être focussés à Québec puis à Montréal, puis ils auraient atteint... ça serait du placement dans le milieu communautaire, puis il pourrait n'y avoir rien dans les régions.

M. Bougie (Martin) : Bien, ça pourrait être ça, oui. C'est pour ça que nous, on prône... on rappelle que c'est une responsabilité du gouvernement, de s'assurer qu'il va placer dans toutes les régions. Puis, à ce moment-là, ce placement-là dans les médias communautaires vient aider à maximiser la portée de ces messages-là.

M. LeBel : Est-ce que vous...

M. Carrier (François) : Si je peux me permettre également...

M. LeBel : Je n'ai pas beaucoup de temps, mais... juste deux secondes. Est-ce qu'on pourrait penser que la décision de faire du placement média dans le milieu communautaire en respectant l'enveloppe pourrait être prise par des directions régionales d'une façon équitable?

M. Carrier (François) : Je pense que, oui, il y aurait moyen de le faire. Nous, on veut juste... Entre autres, un exemple rapide, maladie de Lyme, c'est dans notre région où on peut avoir le plus haut taux d'avoir cette maladie-là, et pourtant on n'a eu aucun placement publicitaire. Par contre, je prends mon auto, j'arrive à Montréal, j'écoute une autre station de radio et là je l'entends à quelques reprises. Alors, il y a quelque chose là-dedans, là, il y a une analyse qui n'est pas faite. Et même chose aussi lors des élections municipales, également, qui ont eu lieu en 2017, ça a été vraiment assez pitoyable. De notre côté, on avait des postes pour travailler pour les élections, mais c'était à Gatineau qu'on entendait, justement, cette publicité-là et pas chez nous, et il y a 150 kilomètres entre les deux.

M. LeBel : C'est l'effet de la centralisation des décisions à Québec. Souvent, les gens qui prennent des décisions ne connaissent pas les réalités des régions et ne connaissent pas les radios communautaires dans les régions. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Je suis prêt maintenant à reconnaître la députée de Marie-Victorin pour deux minutes.

Mme Fournier : Merci beaucoup à vous quatre. Moi, d'entrée de jeu, je vais répondre à l'appel de M. Tétreault et témoigner de la qualité qu'on retrouve dans les radios communautaires. Évidemment, je connais bien Éric. Je souligne aussi la créativité incroyable dont ils font preuve, parce que ce n'est vraiment pas facile, le marché de la région de Montréal, évidemment, la compétition avec les réseaux nationaux. Mais c'est tellement important, d'un point de vue démocratique, parce que, sans la présence des médias communautaires comme les vôtres, on n'aurait tout simplement pas accès à des nouvelles locales, à des nouvelles régionales.

Puis tantôt j'interpelais, donc, l'Association des médias écrits communautaires puis... qui me faisaient part que c'était vraiment au niveau du sentiment d'appartenance en milieu urbain qu'il fallait travailler pour augmenter l'attractivité des médias communautaires. Et, au 103,3, justement, à Longueuil, je sais, Éric, que vous avez travaillé beaucoup sur un projet pour faire, justement, mousser ce sentiment d'appartenance, puis je trouvais que ce serait une bonne idée que tu en fasses part ici, aux membres de la commission, comment ça a été généré.

M. Tétreault (Éric) : ...c'est un projet identitaire. On s'est rendu compte que, sur le territoire, l'identité manquait ou peut-être qu'il n'y avait pas de porteur de drapeau sur l'aspect identitaire, et on a décidé, vu que la radio, c'est un haut-parleur qui rejoint l'ensemble de la population, qui divertit puis qui, aussi... on est toujours en contact avec la population, on s'est dit : On a un rôle à jouer là-dedans de, nécessairement, s'assurer que les gens, bien, ont bien été informés, mais aussi sont fiers d'habiter un territoire. C'est plus facile de passer un message comme ça à la radio que de le mettre sur papier, ça, c'est sûr et certain. Mais, nos médias, on a un mandat aussi, bien, culturel, musical, tout l'aspect identitaire, on a un mandat très important dans notre communauté. Nous, à Longueuil, comme c'est un projet qui nous tient à coeur, c'est vraiment de faire rayonner cette fierté-là d'habiter notre territoire.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. Merci beaucoup pour votre contribution aux travaux de cette commission.

Je vais suspendre les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants de l'Association des journaux régionaux du Québec... Il y aura également interprétation simultanée, on va vous l'expliquer. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 30)

(Reprise à 15 h 33)

Le Président (M. Ciccone) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des journaux régionaux du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.

Association des journaux régionaux du Québec (AJRQ)

Mme Goneau (Sylvie) : Merci. Sylvie Goneau, je suis la directrice générale de l'Association des journaux régionaux du Québec, et Michael Sochaczevski, qui est un membre du conseil d'administration.

Doris Haddock a dit : «La démocratie n'est pas quelque chose que nous possédons mais bien quelque chose que nous exerçons.» Notre mémoire parle justement d'un outil démocratique et l'inquiétude que les communautés anglophones du Québec affrontent avec la menace imminente de la fermeture des journaux anglophones communautaires. À la une, nous pouvions lire : Fermeture imminente des journaux de Capitales Médias, une triste réalité. Mais je voudrais vous rappeler que le Stanstead Journal, un journal qui a servi sa communauté anglophone depuis 1845, a publié son dernier journal le 29 mai 2019. 16 journaux communautaires anglophones ont fermé les portes depuis 1980. Dans la majorité de ces instances, ces communautés n'ont aucune autre source d'information locale, et c'est cette même absence de nouvelles qui contribue au sentiment d'isolement, de séparation et de désinformation dans les communautés anglophones du Québec.

Le travail de collaboration entre le gouvernement et le QCNA doit débuter aujourd'hui si nous voulons maintenir la diffusion de nouvelles locales libres d'influence partisane. Le QCNA voit d'un bon oeil cet exercice de consultation et garantit au gouvernement son entière collaboration dans l'atteinte de nos objectifs respectifs, qui est d'assurer la survie de nos journaux locaux, leur intégrité et surtout leur indépendance journalistique. Cette survie à laquelle nous faisons référence est d'une importance vitale pour le développement, l'épanouissement et le bien-être des communautés anglophones.

Nous pouvons lire, dans l'étude effectuée par le QCNA et financée par le Secrétariat des relations avec les Québécois d'expression anglaise, que les médias communautaires contribuent à informer les gens sur la santé et les services sociaux, aider à comprendre les enjeux communautaires, en plus d'informer sur les décisions politiques locales. 40 % des gens qui ont accès à un journal communautaire se disent informés, contrairement à 25 % des gens qui n'y ont pas accès du tout. Nous pouvons aussi lire qu'un grand nombre de citoyens n'ont tout simplement pas accès à des médias communautaires et, dans ces situations, 82 % de ces citoyens se tournent vers des médias nationaux, qui contiennent très peu et souvent aucune information locale.

Nous avons choisi trois enjeux qui, dans notre opinion, pourront faire une différence indispensable dans la viabilité économique des journaux communautaires. Je vais vous parler de la distinction entre le modèle d'affaires des journaux communautaires francophones et anglophones.

Voici ce qui est écrit sur le site Internet de la commission de la Culture et des Communications. La vision est : «Être le catalyseur d'une culture unique, diversifiée, accessible, inclusive, laquelle appelle aux partenariats et à la participation citoyenne.» Mais le Québec n'a pas qu'une seule culture, et nous sommes un peuple diversifié, et nous devons être inclusifs. Dans le programme de financement Soutien aux médias communautaires écrits, il n'y a aucune considération pour cette diversité.

En français, nous définissons «journaux communautaires» automatiquement comme étant un OBNL issu de la communauté, du bénévolat. Par contre, dans la culture anglophone, la National Newspaper Association définit «journaux communautaires» comme «tous journaux qui s'affichent étant engagés à servir une communauté spécifique». Nous pouvons aussi retrouver une définition similaire avec Wikipédia et dans les travaux universitaires.

Plus de 65 journaux communautaires reçoivent un financement du ministère, et seulement deux sont anglophones. Ces journaux reçoivent en plus le fameux 4 %, que personne ne semble recevoir, de publicité du gouvernement. Nous demandons à la commission de reconnaître que nous atteignons tous les objectifs du programme, sauf le modèle d'affaires. Les journaux communautaires anglophones du Québec servent leurs communautés, produisent des nouvelles originales appuyées sur la réalité locale et encouragent la participation via son implication dans les organismes communautaires, comme le QCGN, en plus de cultiver une attitude d'excellence parmi ses membres. Nous rencontrons tous les critères, sauf un : nous ne sommes pas un OBNL. Mais d'utiliser ce seul élément pour refuser l'appui aux journaux communautaires est discriminatif en plus de démontrer une malconnaissance du sujet, parce que seulement trois journaux sur 32, au Québec, remplissent ce critère.

• (15 h 40) •

M. Sochaczevski (Michael) : Mr. President, «membres distingués», thank you for hearing us and for understanding the importance of local news.

I'm a board member of the QCNA and I'm the publisher of The Suburban newspaper, Québec's largest English weekly newspaper. On Wednesdays, we publish over 100,000 copies, that compares to 45,000 copies by the Montreal Gazette on Wednesday. We've been in business for 50 years. We've seen and undergone much technological change. We have survived and we have thrived.

This year, we will have a loss, and the cause is the Québec Government, not the Internet, not technological change, not lack of customers, just the policies of the Government. Good news, most of these policies were inherited. But, if you do not change them now, you will preside over the demise of the community newspaper industry in Québec.

Four problems we can fix. Number one : Government Public Works not using advertising for newspapers. You've heard this before. When the last election came, Premier Legault did not go visit Google or Facebook, but he did come to visit The Suburban and many other local newspapers. When the Government needs to broadcast a message, say changing the election date, they use full-page adds in the newspapers because they know people will see it and will read it. They don't put it on the Internet where somebody might see it, they don't just put it on their Web site and hope somebody is going to go there, but, when it comes to publishing their obligations, or public tenders, or job openings, or whatever else the Government must advertise, then, it is OK? No, it is not. And to spend those millions of dollars that end up in foreign pockets instead of keeping those dollars within the province, spending in local media, that's foolish. And then you bail out the papers that fail because you understand that local news is important.

Number two : legislation allowing municipalities to not publish their bylaws. Two years ago, legislation was introduced exempting municipalities from publishing their bylaws in newspapers. This creates a lessen-form democracy and leads nowhere good. Some municipalities continue to publish their bylaws, but they pick and choose which ones. Readers think they see everything. That's not a good situation. «Chers membres» of the panel, when was the last time you checked out your municipality's Web site to see what laws changed? Anybody? Because I didn't either. I don't know anyone who does. Are we better off? So, Hampstead saves a few thousand dollars from their multimillion-dollar budget, and its 8,000 households have no idea that it's illegal to water their lawn on Wednesday — I'm making that up. Oh! you didn't know? Too bad. It's on our Web site. Too late, law is passed. It's not a good idea for anyone, but, if you don't correct it fast, it will be too late. There will be no more local media to publish in, and then you spend money bailing out the newspapers that fail because you understand that local news is important.

Problem three : the recycle tax, a noble idea gone wrong. In 2010, it was introduced to help cover the cost of the recycling box. A few problems. Paper, which is easily recyclable, and valuable, and gets sold for value, is treated the same as the items that have no value in the box. The tax has increased more than 500% since 2010. Imagine your house. Taxes are, what, $10,000 on your house? Imagine now they're $50,000. Can you afford that? We can't afford the increase either. Over the last four years, our industry has reduced the tonnage by 20%, only to be met with an increased cost per ton. Imagine The Suburban is the only newspaper left. We have to pay the whole $9 million? The law doesn't work, it's ridiculous. When La Presse stopped printing, everybody's cost per ton jumped. We have no input on the cost, we have no ability to decrease our share, and 65% to 75% of the recycling ends up in the garbage anyways.

Last one : help is too long and too onerous. There are good government programs. In December 2017, I applied for a grant to help study and convert our print paper into an Internet paper, which will happen over time, but we cannot get ahead of our readers' habits. We have moved, but we can't go faster than the readers. We applied for the program, we paid... past phase I, we didn't have phase II.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Sochaczevski (Michael) : It's been two and a half years. We were the only one who could apply because the documents were so long and so complicated to fill out. Out of 30 members of the QCNA, we were the only ones who managed to hand in the documents and we're still waiting, two and a half years later.

Le Président (M. Ciccone) : Thank you, sir. Thank you very much. Nous sommes maintenant rendus à la période d'échange avec la partie gouvernementale pour une période de 15 minutes. Et je reconnais le député de Sainte-Rose.

M. Skeete : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Goneau, thank you very much for being here. J'aurais une question pour vous par rapport... Mme Goneau, en passant, par rapport... vous avez touché sur un point important, notamment à l'intérieur de... puis, vu que vous avez touché rapidement, je veux juste essayer de comprendre. Vous avez parlé de... les affiches de santé et services sociaux, les indications d'éducation à l'intérieur des journaux. Pouvez-vous me parler un peu plus de ça? C'est quoi, l'impact précis dans la communauté d'expression anglaise par rapport à ces notifications-là qu'on peut trouver dans les journaux locaux communautaires?

Mme Goneau (Sylvie) : Merci. Dans l'étude qui a été faite par QCNA en collaboration avec le secrétariat — je ne redirai pas le nom parce qu'il est vraiment long — on est allés chercher, justement, des témoignages de gens, ce qu'un journal communautaire veut dire pour eux. Puis certains des communautaires, je les ai pris en note ici, c'est : «Nous voulons savoir ce qui se passe dans la communauté, et notre journal est la source de cette information.» Quand on a un média local dans la communauté, on se sent informé, branché, en santé, énergisé, impliqué. Les médias stimulent l'économie locale avec un partage d'information sur les emplois, sur les investissements, au niveau de la santé et les services sociaux, les campagnes de vaccin, les services sociaux en cas de sinistre ou l'aide, les changements au niveau des services sociaux. Ce sont tous des éléments que les gens ont ramenés dans l'étude comme étant une source d'information qui était vitale et primordiale à leur bien-être.

M. Skeete : Merci beaucoup pour cette clarification-là. Vous avez aussi parlé d'une différence d'écart entre les plans d'affaires, ce qu'on reconnaît dans le réseau francophone pour financer, puis vous avez parlé, notamment, d'une différence de définition du mot «communautaire». Je vous demanderais, s'il vous plaît, d'ajouter un peu là-dessus.

Mme Goneau (Sylvie) : Oui, bien, c'est typique pour nous. Dans la culture francophone, quand on parle de communautaire, que ça soit le centre communautaire, tout ça, ce qu'on vient à l'idée tout de suite, c'est, tu sais, les soupers spaghetti, le bénévolat, le tee-shirt, les activités pour les jeunes, puis tout ça. Mais, dans la communauté anglophone, quand on parle de «community» puis surtout «community news», «local community newspapers», on fait référence à une nouvelle qui est locale, qui est issue du milieu, un journal qui est enraciné dans sa communauté, qui dessert l'information à laquelle les gens ont besoin pour, justement, se sentir branchés, pour que la communauté puisse évoluer, s'épanouir, se sentir comme si elle était vraiment partie intégrante.

Puis il faut se souvenir qu'au Québec c'est à peu près un petit peu plus de 1 million de citoyens qui sont anglophones, c'est 13,7 parties de la population. Ils sont souvent très isolés, puis c'est à l'intérieur du journal communautaire qu'on se sent, justement, branchés puis qu'on se sent pleinement québécois, impliqués. Donc, quand on regarde, quand on fait allusion seulement à un modèle d'affaires, on exclut toute la richesse que le journal communautaire livre à sa communauté, son engagement et son dévouement de livrer une nouvelle qui est juste, et puis qui est locale, puis qui est démocratique en même temps. Ce n'est pas juste de l'appuyer seulement sur un mot, il faut regarder au-delà de la formule. Puis, je vous le garantis, il n'y a pas un propriétaire d'un journal communautaire au Québec qui va faire retraite millionnaire, je vous le dis.

M. Skeete : Merci beaucoup. You were... sir, a couple of moments ago, about a fourth problematic, you ran a little bit over time. I'd like you maybe to give us a little bit more information about the help that's there, people, historic governments, this Government. The Government wants to help, but there are problems accessing. Can you give me a little bit more detail there?

M. Sochaczevski (Michael) : Absolutely. There was a great government program announced to help us convert to the Internet, not today, to do a proper study, to do a study of our readers, to do a study of what they want and how to convert it, great program. The documents were so onerous to do. Of the 30 newspapers in the QCNA, only one managed to fill it out. And it had to be in French, OK, but it's just another hurdle and another burden. And the level of detail and questions that were in there were enormous. It took almost a full-time personal month to fill this out. Then we hand it in, that's just phase I. Congratulations, you qualified for phase I. Here is your prize : another document, three times as big. Now, you fill out the documents for phase II. We hand that in, we make the deadline and we haven't heard since.

M. Skeete : How long ago was that, sir?

M. Sochaczevski (Michael) : We started the process in December 2017. We finalized phase II maybe six months ago. Still waiting.

M. Skeete : OK. So, would it be fair to say that... Because, in the past budget, we doubled the allocation for the secretariat. And one of the ways that we support communities, the Government of Québec that is, is by helping build capacity, and one of the ways that we build capacity is by helping various community groups with giving them resources in order to access government programs that exist. That's something that's useful?

M. Sochaczevski (Michael) : That would be wonderful. Thank you.

M. Skeete : OK. Wonderful?

M. Sochaczevski (Michael) : Wonderful.

• (15 h 50) •

M. Skeete : OK. I would like you also to speak a little bit more about the recycling tax. I had heard about this before because I've had some conversations with Barrell, not to name him, and Barrell was quite passionate about his plea about the recycling tax. Can you give me a sense... Because I think Quebeckers in general would say that recycling is a good thing and that creating any type of incentive that removes the desire of companies to produce less paper... I think Quebeckers would tell us : Well, you know, we like this, we like this idea of putting a cost on waste. Can you help me understand the bone that you have to pick with that particular aspect of...

M. Sochaczevski (Michael) : At the outside of the recycling tax, we all thought it was a good idea. No problem, we'll pay our share, part of it was in dollars, part of it was in advertising. We were happy to be good corporate citizens. As we worked to reduce our tonnage, we were penalized. Ah! you worked hard, you reduced your tonnage, guess what? Next year's per-ton rate went up three times.

M. Skeete : So, you're saying, at the same time that you reduced your... the amount of waste...

M. Sochaczevski (Michael) : We reduced the number of tons...

M. Skeete : ...the rate went up.

M. Sochaczevski (Michael) : ...the rate went up to cover the difference. So, there is no incentive in the tax because when La Presse stopped printing, I got... my bill went up three times.

M. Skeete : So, La Presse leaves the paper market, and then the amount doesn't change.

M. Sochaczevski (Michael) : I'm the only guy left.

M. Skeete : So, the waste went down, but the amount doesn't change, and you guys got stock with the rest of the bag.

M. Sochaczevski (Michael) : Exactly.

M. Skeete : I see.

M. Sochaczevski (Michael) : The law, as it is, doesn't work. It creates a disincentive. The incentive is now : print under a certain threshold, then you don't have to pay it all. A whole bunch of papers don't pay at all because they're under a certain threshold. If you add up all those papers, it's a significant amount.

M. Skeete : I see. Thank you very much.

Mme Goneau (Sylvie) : I would just like to add to that, newspapers are archived. Newspapers are archived because of their important democratic informational content, right? They also represent the community's culture, the community's history. Everything that happens in a community is written in the newspapers. You find the people's history, and trials, and tribulations, and successes. They're all reported in newspapers, which is why they are so important, and they're archived, right?

M. Skeete : So, if I understand your point correctly, you're trying to say, then, that here we are taxing this waste, and you're saying : Well, that's not waste, it's actually similar to a book.

Mme Goneau (Sylvie) : Yes.

M. Skeete : It's not recycling a glass bottle, it's similar to a book, which...

Mme Goneau (Sylvie) : Exactly.

M. Skeete : Do we tax a book?

Mme Goneau (Sylvie) : You don't tax a book, right? And I understand taxing a can of empty beans, but I don't understand taxing and comparing a newspaper to a can of empty beans. I really don't get that. And that's disrespectful towards our communication, and our transparency, and the way this civilization communicates with its population and how the communities communicate and bind amongst each other. This is the tool that makes a community blossom and thrive, and we are taxing it like an empty can of soda. Something wrong with that.

M. Skeete : Thank you for clarifying. M. le Président, j'ai terminé.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Maintenant, la parole est au député de Saint-Jean.

M. Lemieux : Je vous ai bien entendue, Mme Goneau, but your president, your chairman was also saying that, when it started, it was a very good idea, it just went wrong somewhere, so much so that... isn't that true that last year, under our Government, and the year before that, most of RecycleMédias extra funds needed for that upgrade you're were talking about, and the fact that it was multiplied by two or by three because La Presse stopped printing, it was pardoned, sort of thing. There was a bigger credit last year and the year before that, wasn't there?

M. Sochaczevski (Michael) : ...last year.

M. Lemieux : Yes. OK. Parlons de «community papers», madame.

Mme Goneau (Sylvie) : Excusez...

M. Lemieux : Oui, Mme Goneau.

Mme Goneau (Sylvie) : ...mais c'était quand même très minime, là, sur la facture totale, là.

M. Lemieux : Oui, oui, je n'ai pas dit que...

Mme Goneau (Sylvie) : Oui, oui. Tu sais, parce qu'il ne faut pas dire... tu sais, parce qu'on a... Puis je comprends la volonté, puis moi, je suis très reconnaissante de ce qui a été donné, tu sais, mais...

M. Lemieux : C'est juste ça que je voulais entendre. C'est correct.

Mme Goneau (Sylvie) : Oui, bien, c'est ça, mais il ne faut pas se dire qu'on a résout le problème.

M. Lemieux : Non, non, non, mais, cette année, il y a eu un énorme effort de fait dans le budget.

Je veux parler des «community newspapers». Je comprends très bien la sémantique de l'affaire. On pourrait même faire de l'étymologie puis on pourrait faire un petit peu aussi de prospective à l'intérieur des cultures particulières, des communautés. On peut s'en aller voir la Gaspésie et l'importance des «community newspapers» en Gaspésie, même si, dans certains cas, ils sont privés. Et, dans votre rapport, le tableau que vous nous donnez est très éloquent. Quand on compare, entre autres, les journaux francophones hors Québec et les journaux anglophones au Québec, c'est presque inversement proportionnel, ils sont pas mal tous OBNL francophones puis ils sont pas mal tous entreprises, bon. Mais, moi, ce que je veux savoir, c'est, à part le 4 % du communautaire, là, dont on a parlé avec les médias écrits communautaires, avec les radios communautaires, avec les télés communautaires, le fameux 4 %, à part ce 4 % là, qu'est-ce que ça va changer pour vous si on considère cette façon de voir le «community newspaper» comme si c'était un journal communautaire? J'imagine que vous demandez ça pour avoir ce statut-là.

Mme Goneau (Sylvie) : Bien, tout à fait, parce que, un, on ne peut pas obtenir le 4 % à moins d'être reconnu puis on ne peut pas être reconnu dans le programme si on n'est pas un OBNL, donc on vient systématiquement d'éliminer tous, sauf trois, journaux communautaires anglophones, au Québec, de recevoir tout financement du Québec, sauf la transformation numérique. Donc, nos homologues francophones reçoivent du financement au fonctionnement, un appui au fonctionnement, puis, nous, de notre côté, tous les journaux ne peuvent pas y accéder. Puis là on ajoute à ça le 4 %, parce que, si tu es reconnu à l'intérieur de ce programme-là, bien là, tu es incorporé dans le fameux 4 % que... j'aime l'idée du 6 %, là, mais, c'est ça, tu es finalement incorporé à l'intérieur de ça.

M. Lemieux : Yes, perhaps we can chat on that a little bit.

M. Sochaczevski (Michael) : If I can just add to that, if you add our proper share, not a lot but just our proper share, we have 1 million Anglophones in the Province of Québec, if we get our proper share of advertising, and you take off the recycling burden, and you put back the municipal bylaws having to publish, we'll take care of ourselves. We won't need a handout; you won't need a bailout to Groupe Capitales or anybody else.

M. Lemieux : Yes. We'll keep talking about that for 1 min 30 s, because it's a level-playing field in that respect, whatever you just mentioned, it's the same thing for most papers in Québec in terms of the RecycleMédias tax and in terms of the other automatic gains they had from the cities that they don't get anymore after Bill 122, and all of that. It's a level-playing field. My question, my point was, if you're the biggest newspaper, if The Suburban is so big and so businesswise, why is it so important to get the community recognition? Because all you're going to get there is 4%.

M. Sochaczevski (Michael) : ...

Mme Goneau (Sylvie) : Si... mais juste... pardon.

M. Lemieux : He was just telling me something important there.

M. Sochaczevski (Michael) : The 4% is 4% of your spending budget. Your spending budget is enormous. The dollars that trickle down to my fraction of that 4% is as significant for our enterprise. The trickle-down effect of the dollars kept in this province affects the newspapers...

M. Lemieux : Sorry, I just have 20 more seconds. I thought that, businesswise, it was more a good deal for you to get the advertising dollars then the 4%, or eventually 6%, that we were talking about earlier.

M. Sochaczevski (Michael) : I'm talking about the advertising dollars, the advertising dollars coming out of...

M. Lemieux : But that's what the community...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Goneau (Sylvie) : En fait, dans nos recommandations au gouvernement, c'est un... c'est de pouvoir modifier la définition, justement, pour qu'on puisse y avoir accès, au 4 %, mais aussi c'est d'incorporer un 13 % de publicité dirigée aux médias anglophones, parce que ce 13 % là représente la population québécoise.

Le Président (M. Ciccone) : Merci, Mme Goneau. Merci beaucoup.

Avant de poursuivre, est-ce que je peux avoir le consentement pour redistribuer le temps de Mme la députée de Taschereau, qui a quitté, avec les partis d'opposition?

Des voix : ...

Le Président (M. Ciccone) : Mais c'est l'opposition...

Des voix : ...

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Alors, je donne la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis pour un temps de 11 min 30 s.

• (16 heures) •

Mme Maccarone : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup pour votre mémoire. J'ose espérer que d'autres membres de la communauté vont déposer également leurs réflexions pour que les membres de cette commission puissent en prendre connaissance, parce que ce que vous avez partagé avec nous, c'est très important. Ça fait que merci beaucoup.

Mme Goneau, je ne sais pas si vous voulez compléter qu'est-ce que vous avez commencé à dire, ça fait qu'étant donné qu'on a deux minutes de surplus je vous cède la parole.

Mme Goneau (Sylvie) : Oui, justement, on représente tous les journaux communautaires du Québec, donc, tu sais, les membres, donc, c'est tout près de, tu sais, une trentaine de journaux, là, anglophones. Et puis le 4 %, pour nous, c'est important, mais ajoutez à ça... on représente une communauté qui est vraiment isolée. Même à l'intérieur d'un centre urbain, une communauté, tu sais, d'expression anglaise se sent isolée. Donc, pour nous, c'est 13,7 % de la population que les journaux desservent. Donc, on demanderait au gouvernement, dans son budget de publicité et puis d'annonces publiques... c'est de s'assurer que ce pourcentage-là retourne, justement, vers les médias anglophones pour s'assurer que les communautés à travers le Québec sont bien informées, et bien desservies, puis au courant de ce que vous faites, parce que vous faites des bonnes choses, il faut s'en vanter des fois, et vantez-vous à ce que le monde le lit.

Mme Maccarone : Merci. J'étais supercontente de voir le tableau que vous avez élaboré, avec le partenariat que vous avez avec l'APF, l'Association de la presse francophone. Entre autres, étant donné... dans mon comté de Westmount—Saint-Louis, je fais la lecture du Westmount Independent, Canadian Jewish News, The Suburban, The Senior Times, alors j'ai trouvé ça fort intéressant de voir le partenariat puis la collaboration que vous avez déjà en place.

J'aimerais vous entendre un peu par rapport à, exemple, l'impact sur The Sherbrooke Record, par exemple, parce qu'on sait que la distribution, ça se fait par l'entremise de La Tribune. What can... just to show how it's not just an anglophone community issue, it has a direct impact because they're tied together, right? So, the anglophone and the francophone medias are really... it's a marriage, in many cases, in many of the communities. Can you explain to us a little bit about the impact on the francophone media and how that will have a contributing impact on the anglophone media?

Mme Goneau (Sylvie) : Oui. En fait, dans certaines communautés... certaines communautés, je pourrais dire, sont très choyées parce qu'on retrouve plusieurs formes de médias, on va avoir des médias communautaires francophones et des médias communautaires anglophones. Par contre, dans certaines autres communautés, on retrouve un ou l'autre, et puis plusieurs endroits à travers le Québec n'ont plus aucune source de média communautaire, elles sont disparues presque à jamais.

Dans les communautés où on retrouve un média communautaire, souvent, maintenant, on trouve une collaboration où il y a une page qui est insérée à l'intérieur du journal communautaire, puis cette page-là va représenter la communauté, si c'est un journal anglophone, soit la communauté francophone ou, à l'inverse, ça va être une page anglophone. Mais ce n'est pas suffisant pour nourrir la communauté, puis vraiment bien informer, puis garder les gens à l'affût de qu'est-ce qui se passe en ce moment.

Je voudrais dire, la menace de fermeture n'affecte pas nécessairement juste les journaux anglophones, mais on fait face à ça quotidiennement, nous. Et puis, comme je disais, souvent, dans les communautés où c'est un journal anglophone, quand il disparaît, il ne reste aucune autre forme de média communautaire anglophone. Il n'en reste... il n'y a juste plus rien.

M. Sochaczevski (Michael) : Nobody wants a handout, not a French paper, not an English paper. All we want is an environment where the laws are not making it more restrictive. It's a tough, competitive environment today, we understand that. We're rising to the challenges, but the laws in place by the Government cannot take away from what we had before, at a time when we're dealing with all these other changes.

Mme Maccarone : Could you tell the members of this committee a little bit more about the impact of finding talent, right, so journalists, for the anglophone media networks or any other minority language networks? I know we're tied right now, we're speaking with regards to the anglophone community, but it's not the only minority language community that will have a significant impact with the decline of local print newspapers. I know, for example, The Suburban, the distribution is completely changed in Laval, for example, not at all the same type of news, not the same paper. In fact, it's not news, it's entertainment, right, it's completely evolved. So, what about having access to journalists and the impact that that's had on you?

M. Sochaczevski (Michael) : Go ahead.

Mme Goneau (Sylvie) : O.K. On a justement le... Patrimoine Canada a financé un programme de stagiaires pour des journalistes ou d'autres services professionnels que les journaux avaient de besoin, puis, en région éloignée puis même certaines régions urbaines, les journaux qui avaient postulé puis qui voulaient avoir, justement, un stagiaire, un journaliste, tout ça, se sont désistés du programme parce qu'ils étaient incapables de trouver un journaliste qui était prêt à se déplacer en région. Souvent, la subvention n'est pas adaptée aux conditions de vie, au coût de vie. Les jeunes ne veulent pas nécessairement aller s'installer aux Îles-de-la-Madeleine pour travailler à la radio communautaire, ou à Blanc-Sablon, ou, tu sais, en Gaspé pour travailler dans le journal communautaire. Et puis ces gens-là, ils se retrouvent avec zéro ressource puis ont déjà de la difficulté à fournir de l'information journalistique. Souvent, ils prennent des journalistes à la pige.

M. Sochaczevski (Michael) : Also supply and demand : smaller population, smaller pool of students to pool from, higher prices you have to pay.

Mme Maccarone : And less advertising.

M. Sochaczevski (Michael) : And less... Well, advertising is there, we just have to provide the value for the customers. We can, we will. News is important. You understand, we understand, news is important. The format is the question. The format today is still a hard print copy. We have 225,000 readers; I know 20,000 of my readers are reading online. But, if I go tell my advertisers that I have 20,000 readers online instead of the 225,000 readers that they want to advertise to, they're not paying. So, I will get there, we will move, but today we're still in print. And, in Laval, the Chomedey News is still in print, and all the community newspapers in the Pontiac, it's the only source of local news available. The Economic Sense is still a print newspaper today.

Mme Maccarone : Still in print, but the distribution has significantly changed, hasn't it? I mean, we know now, for example, it's not coming in the Publi-Sac anymore because that's too expensive. And so, we're having to be more creative in how we're getting that news out to the community, which is of concern specifically for our seniors, as we've mentioned here many times, over and over again, so that they're not isolated, so that they do have access to that local community news.

As a former advertiser myself, I've bought advertising, I used to sell it, often, by saying — I don't know if anybody out there is listening — that if you're trying to date somebody, and you're doing it in the dark, and you're winking, the only person that knows that you're doing it is you. So, advertising is really crucial, important to get the word out there.

You mentioned earlier, when you were talking about the conversion to Web and the program, and I understand the difficulties behind the program. All of that work and effort that went into working toward that, how much money did that represent for you in terms of funding that you would have received toward a conversion program?

M. Sochaczevski (Michael) : How much money did we spend or how much money...

Mme Maccarone : How much money did you spend and how much were you hoping to receive as part of a subsidy?

M. Sochaczevski (Michael) : We probably spent $10,000 to $15,000 in time and organization. We had to create a study and send it out to be eligible. The first phase paid us back probably about $17,000, so we were even for the first phase. But now we were able to apply for phase II. If we are successful in phase II, it could represent about $200,000 to help us in a year-long conversion.

• (16 h 10) •

Mme Goneau (Sylvie) : Puis le problème avec ce programme-là, spécifiquement ici, dans tous les membres que le QCNA a, il y a un journal seulement qui a eu la capacité puis les ressources de remplir au complet le formulaire puis de passer à travers du processus. Quand QCNA a approché le programme pour dire : Nous, on voudrait avoir le financement qui va représenter l'ensemble des membres, puis QCNA va aider avec cette transformation-là, puis nous, on va faire l'étude, puis pour tous les différents journaux, puis aider avec la mise en place, le gouvernement... le programme nous a répondu : Bien, on vous donne le maximum qu'un journal peut recevoir. Bien là, j'ai dit : Bien là, ce n'est pas à l'avantage... Si tu me donnes le même montant que chacun... un montant que chacun peut aller chercher, j'ai dit, moi ce n'est pas viable, puis c'est une perte pour les journaux. Ils sont aussi bien de le faire eux-mêmes, parce qu'il y a trop d'argent sur la table. Mais il n'y avait pas d'ouverture d'esprit pour qu'un organisme qui représente les journaux communautaires puisse, elle, faire les démarches pour aller chercher ces subventions-là pour que les journaux puissent faire une transition numérique. Donc, on est encore dans une impasse, même quand les journaux veulent avancer. Puis, comme organisme, nous, on tente de faciliter cette transition-là, on a une fin de non-recevoir du programme qui est déjà mis en place par le gouvernement.

Mme Maccarone : Vous avez mentionné auparavant... accès aux fonds de Patrimoine Canada . Est-ce que votre organisation a aussi accès à des fonds de Patrimoine? Et les plus petits organismes qui sont des OBNL, est-ce qu'eux, ils ont accès à, mettons, des fonds d'ententes Canada-Québec? Et, si oui, comment est-ce qu'ils peuvent faire une application pour recevoir ces fonds-là?

Mme Goneau (Sylvie) : Mon Dieu!

Le Président (M. Ciccone) : En 30 secondes, s'il vous plaît, 30 secondes.

Mme Goneau (Sylvie) : QCNA reçoit son financement... une partie de son financement opérationnel par PCH, et puis les membres, ses membres peuvent postuler sur la majorité des programmes gouvernementaux canadiens, parce que la définition n'est pas limitée sur un plan d'affaires. Donc, ils desservent la communauté pour le gouvernement du Canada, ils remplissent un service des langues officielles...

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Rimouski pour un temps de 3 min 15 s.

M. LeBel : Bien, j'en ai gagné un peu. Merci. Bien, bonjour. J'aimerais... Il y a une semaine ou deux, là, c'était la crise de Capitales Médias, les grands quotidiens, et tout ça. Et là, bien, les gens qui nous écoutent, ils nous entendent parler des journaux communautaires, ils peuvent dire, que : C'était quoi, là, qu'est-ce qui s'est passé?, comme si on ne parlait pas de la même chose. Mais on parle des mêmes enjeux, du droit des citoyens à avoir de l'information, et je suis content qu'on prenne le temps d'en parler.

Ce que vous dites par rapport à votre communauté, c'est la même chose qu'on a dans les régions. C'est important, d'avoir des médias communautaires qui parlent de notre monde, qui parlent de chez nous, qui parlent de nos affaires, de nos... Puis ce serait même important que, des fois, ce qui se passe dans votre communauté, on entende, nous autres aussi, chez nous, de ce qui se passe chez vous. Des fois, il faut partager ces informations-là, je trouve ça important.

Tantôt, vous avez parlé de la différence entre un journal communautaire, là, puis votre définition. Il faut trouver une solution à ça. Mais en même temps ça voudrait dire, si je prends votre définition, mon hebdo local devient un journal communautaire?

Mme Goneau (Sylvie) : ...dans le programme comme tel, il y a une limitation sur le nombre de publications. Tu ne peux pas avoir un quotidien, ça ne cadrera pas.

M. LeBel : C'est un hebdo?

Mme Goneau (Sylvie) : Il y a un maximum de fois que le journal peut être publié pour rentrer dans la catégorie «journal communautaire».

M. LeBel : O.K. En tout cas, il faudra regarder ça comme il faut, parce que c'est sûr que, moi, chez nous, l'avantage, là, le journal... l'hebdo local de Rimouski, bien, c'est sûr que c'est très communautaire, là, ils parlent des gens de chez nous, mais ce n'est pas un journal communautaire à notre façon. Il faudrait... en tout cas, il faut... Mais je suis sûr qu'on est capables de faire ça, me semble, on est du monde intelligent, on devrait être capables d'y arriver.

Mme Goneau (Sylvie) : Moi, je pense que oui. On est allés sur la lune, apparemment, à un moment donné. Ça, c'est vraiment plus simple. Vous et moi, un café.

M. LeBel : On devrait être corrects. Sur le recyclage, vous avez allumé beaucoup de lumières, là. Il faut regarder comme il faut qu'est-ce qui s'est passé. Votre explication tantôt, là, je pense que ça nous alerte, là, si la loi ne donne pas les résultats.

Dans votre mémoire, vous ne parlez nullement du fédéral. Presque tous les autres mémoires en ont parlé, sur le fait que le fédéral devrait imposer les Google, Amazon, les affaires de ce monde pour aller chercher un peu d'argent pour aider, entre autres, le financement des médias communautaires, protéger les journalistes, les droits d'auteur des journalistes. Et il y a une grande... ça semble faire consensus, là, qu'il faudra faire de la pression sur le gouvernement fédéral pour participer à résoudre le problème de la crise des médias au Québec. Est-ce que vous êtes de cette mobilisation-là? Est-ce que vous êtes de cette réflexion-là aussi?

Le Président (M. Ciccone) : In 30 seconds.

M. Sochaczevski (Michael) : The federal Government gave a grant for writers this year, a tax credit for writers this year. So, we called the federal... because our taxes are due now, we called the federal Government, they said : MRQ is processing this. We called MRQ, he says : I don't know. What do we do? There's a tax credit available, the federal Government says MRQ is taking care of it, MRQ doesn't know what's... Please, coordinate so that the programs out there, we can take access to, please.

Le Président (M. Ciccone) : Thank you. Thank you. Merci. Merci beaucoup. Je suis maintenant prêt à reconnaître la députée de Marie-Victorin.

M. LeBel : ...petit dernier mot.

Le Président (M. Ciccone) : Bien, si la députée de Marie-Victorin veut laisser répondre.

M. LeBel : Ah! bien non, garde-les, là.

Le Président (M. Ciccone) : Pour 2 min 15 s.

Mme Fournier : Merci beaucoup pour votre présentation. Mme Goneau, vous avez, en fait, commencé votre exposé en nous expliquant la différence, dans la culture anglophone versus la culture francophone, bon, de la définition de «médias communautaires», si on veut, mais vous avez omis de parler... Quand même, il y a une différence, justement, entre la culture francophone et la culture anglophone, dans la philanthropie. Par exemple, on sait que, dans la culture anglo-saxonne, c'est une culture beaucoup plus ancrée.

Donc, dans ce contexte-là, ma première question serait : Pourquoi, puisque, dans le milieu anglophone, il y a cette culture-là qui est plus développée, le modèle d'affaires d'économie sociale, d'OBNL ne serait-il pas un modèle intéressant pour vos médias anglophones? Et ma deuxième question, à laquelle vous pourrez répondre en rafale, concerne peut-être plus spécifiquement... Je sais qu'il y a un média, en Estrie, un média anglophone, je crois, qui fonctionne par abonnements, c'est un média local. Je me demandais si c'était une pratique répandue dans le milieu anglophone. Si oui, pourquoi? Si non, est-ce que ça pourrait être une voie de solution?

Mme Goneau (Sylvie) : Il y en a. Juste pour... je vais commencer avec votre dernière question. Il y en a, des journaux qui choisissent l'abonnement pour limiter le coût de distribution, justement, parce que les journaux tentent de limiter les coûts le plus possible pour pouvoir avoir une entreprise qui est viable, économiquement viable, puis pouvoir continuer à livrer la nouvelle, donc ils n'ont pas le choix. Puis il y a certains endroits qu'ils couvrent tellement des grands territoires que d'avoir une livraison à chaque porte n'aurait pas de sens non plus, nécessairement. Ça fait qu'il y a différents enjeux qui font... qui parlent de différentes façons de livraison.

Puis, pour ce qui est du modèle d'affaires, bien, écoutez, il y en a certains... Il y a un nouveau... Le Gleaneravait fermé, puis là il est réouvert, il est seulement sur Web, il a très peu de parutions mais il en a quand même. C'est un OBNL maintenant, donc, oui, ça arrive. Le Spec, à Gaspé, c'est un OBNL. Mais, tu sais, le Stanstead, qui a fermé, il était...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Goneau (Sylvie) : ...il a commencé en 1845. Je veux dire, il y en a beaucoup, de ces journaux-là. Ils n'ont pas été ouverts hier, là, tu sais, ça fait que tu ne dis pas à quelqu'un qui a une entreprise : Ferme ton entreprise pour la convertir en OBNL pour que tu puisses aller chercher des subventions.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Merci beaucoup pour votre contribution. Thank you very much, sir, for your contribution.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre à Hebdos Québec de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 17)

(Reprise à 16 h 20)

Le Président (M. Ciccone) : Je souhaite la bienvenue aux représentants d'Hebdos Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que la personne qui vous accompagne, ou vice versa, ou les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole est maintenant à vous.

Hebdos Québec inc.

M. Chartier (Benoit) : Alors, merci, M. Ciccone, de l'accueil cet après-midi à l'Assemblée nationale, on est très heureux. Alors, je me présente, je suis Benoit Chartier, je suis président d'Hebdos Québec. Hebdos Québec est une association d'hebdomadaires à la grandeur du Québec. Je reviendrai un petit peu plus tard vous expliquer qu'est-ce qu'Hebdos Québec. Personnellement, je suis président éditeur d'un groupe de presse qui édite cinq journaux. Entre autres, parmi les cinq journaux que nous éditons, nous éditons Le Courrier de Saint-Hyacinthe, qui est le doyen de la presse française en Amérique du Nord, fondé en 1853. Nous sommes à notre 169e année d'existence, et, je vous le dis tout de suite, on est ici aujourd'hui, on va aller à 200 ans, c'est notre but.

Alors, ceci dit, à ma gauche, j'ai le président de notre comité mémoire d'Hebdos Québec, notre ami Renel Bouchard, qui a présidé le comité pour mettre à jour notre mémoire qu'on vous a déposé au mois de juin. M. Bouchard est aussi éditeur du journal Le Canada Français et propriétaire de plusieurs autres journaux à travers la province de Québec. Et, à ma droite, j'ai Mme Josée Pilotte, éditrice fondatrice du journal l'Accès Laurentides, qui est un journal publié à Saint-Sauveur, et qui est une entrepreneuse très connue dans la région des Laurentides.

Alors, je vais vous brosser un peu le portrait d'Hebdos Québec. Alors là, on n'est pas du tout dans le communautaire ici, là, cet après-midi. Dans le cas d'Hebdos Québec, Hebdos Québec va parler au nom de l'ensemble de la presse hebdomadaire régionale du Québec. Alors, on parle de 120 hebdomadaires, 3,4 millions d'exemplaires imprimés par semaine, distribués à chacune de vos portes, vous, les députés, dans vos comtés, et à toutes les autres portes des résidents du Québec, près de cinq millions de lecteurs, 150 millions de chiffre d'affaires, 900 emplois directs, près de 1 200 à 1 300 emplois indirects, une couverture totale du Québec. Comme je l'ai mentionné, chacun de vous reçoit un journal de votre comté. Nous avons une salle de rédaction qui vous suit, chacun de vous. Vous devez connaître, probablement, chaque journaliste de votre comté qui couvre votre territoire. Nous connaissons aussi vos attachés de politique très bien. Donc, on est vraiment intimement liés.

Aussi, les 120 journaux qui sont publiés au Québec depuis de nombreuses années sont tous publiés par des entrepreneurs. C'est ça qui est important. Alors, ici, chaque éditeur, comme on peut mentionner, est vraiment à l'affût de tout qu'est-ce qui se passe à son journal et il est vraiment... excusez un peu l'expression, là, mais il est vraiment au bat, présentement, avec la publication de ses journaux. Alors, c'est vraiment une association qui est à but lucratif, qui existe depuis de nombreuses années, et qui touche à l'ensemble des Québécois, et qui joue un rôle majeur dans la démocratie. C'est qu'est-ce qui est important à mentionner.

Je vais céder la parole à mon collègue Renel Bouchard, parce qu'on a quand même une liste d'épicerie pour vous, parce que je vous avoue que les temps sont durs depuis trois ans. Bon, on a eu l'histoire de Capitales Médias la semaine passée, c'était peut-être un peu annoncé depuis deux ans, mais, même dans la presse régionale hebdomadaire, les temps sont extrêmement difficiles. On parle d'une baisse majeure des revenus pour l'ensemble des journaux depuis de nombreuses années. On ne reviendra pas, là, sur toutes les causes de ça, je pense qu'on les sait toutes, là. On en parle depuis deux semaines, là, ad vitam paparmane, comme on peut dire. Et par contre nous, on s'est penchés... puis on a plusieurs solutions à vous proposer aujourd'hui. Et alors à toi, Renel.

M. Bouchard (Renel) : Merci. Merci de nous recevoir et de nous écouter. Alors, je voudrais attirer votre attention d'abord sur le fait que la presse hebdomadaire mais la presse écrite en général, dans le moment, ne traverse pas seulement une crise, on traverse un changement social qui va nous mener ailleurs, qui va changer notre société et qui va changer surtout notre industrie, notre façon de voir.

Alors, on pense qu'on est rendus à une époque où il va falloir une forme d'aide permanente pour la fabrication des produits journalistiques, pour soutenir le journalisme professionnel et, forcément, nos salles de rédaction, que ce soient les salles de rédaction des hebdos comme les nôtres ou d'autres salles de rédaction dans la radio ou chez les quotidiens.

Alors, les changements permanents qu'on souhaite. Évidemment, le gouvernement... vous l'entendez depuis deux jours, vous allez l'entendre pour le reste de la semaine, là, il faut que le gouvernement aille chercher de l'argent chez ceux qui profitent de l'information. Et, cet argent-là, bien, on pense qu'il y en a une partie qui, de façon permanente, doit revenir pour soutenir les salles de rédaction. Alors, on pense que la première mesure, c'est évidemment de contribuer à 25 % de la masse salariale des équipes qui sont nécessaires pour produire l'information dans nos journaux.

Vous en avez entendu parler assez largement tantôt, mais évidemment le problème du... la taxe sur le recyclage est très importante dans notre industrie. On remercie les deux derniers gouvernements, qui ont fait un effort important dans les deux derniers budgets pour nous soulager un peu, mais je voudrais juste vous faire remarquer qu'une taxe imposée comme celle-là aux journaux, pour le recyclage du papier, c'est quelque chose qui est unique dans le monde, au niveau où on parle. Alors, on ne pense pas que les journaux au Québec devraient avoir à payer une taxe comme ça. On pense qu'on devrait être considérés comme le livre, dans le fond, puis qu'on aura... c'est mettre un poids supplémentaire sur les journaux à une époque où on ne peut pas se permettre, où on n'a pas des marges de manoeuvre pour payer ces montants-là, qui sont quand même assez importants. Heureusement, le gouvernement nous a aidés dans le dernier budget, mais il n'y a rien de fait pour le prochain. Pour la prochaine année, dans l'année 2019 qu'on budgète, là, on n'a rien, on n'a rien de prévu. Alors, je pense que c'est un problème important sur lequel vous devriez vous pencher pour nous aider.

Il est clair que la crise des avis publics a frappé les hebdos plus que d'autres, parce qu'on couvre les 1 300 municipalités du Québec. Puis il ne faut pas se le cacher, là, quand le gouvernement a permis que les avis publics sortent des journaux, ça s'est fait à vitesse grand V. Il nous en reste, il y a des municipalités qui ont continué de vouloir contribuer, dans le fond, à l'information locale et régionale de leur coin de pays, mais la majorité, ils sont sortis. Puis il ne faut pas se conter d'histoire, là, un avis public, dans le fond, d'un site Web d'une grande ville, là, ça n'a pas d'impact, puis le problème, c'est que souvent ça fait l'affaire de certains élus, même, malheureusement. Alors, la population, elle, elle mérite d'être informée, de savoir ce qui se passe, et on pense que les avis publics doivent revenir dans les journaux. Ils peuvent revenir sous forme numérique ou sous forme papier mais ils doivent revenir dans des organes d'information régionale.

Et il y a même des municipalités qui ont commencé à se faire des bulletins, à faire leurs propres bulletins d'information, qu'ils vont sortir aux deux semaines, par exemple, puis ils vont vendre... ils ont commencé à vendre de la publicité là-dedans, comme s'ils voulaient devenir eux autres même des journaux. Alors, il y a un besoin d'information mais il y a un besoin d'information qui va être fait avec du recul puis par des professionnels. On ne peut pas laisser les municipalités s'en aller dans ce secteur-là parce que, finalement, si on laisse aller les choses comme elles vont là, dans une dizaine d'années, on va avoir le même... non seulement des déserts journalistiques dans certaines régions, comme vous l'avez déjà entendu, mais en plus la démocratie municipale va ressembler à la démocratie scolaire qu'on a aujourd'hui, donc un désintérêt de la population qui est généralisé. Alors, ça serait des conséquences assez graves, parce que la démocratie municipale, c'est un des piliers de notre organisation sociale, au Québec.

Je vais vous parler aussi de l'apport de la publicité gouvernementale. Malheureusement, la publicité gouvernementale, elle passe par un secrétariat qui a trois agences d'accréditées au gouvernement pour gérer ces campagnes-là, et ces trois agences-là, là, la dernière chose qu'ils veulent avoir, c'est de ce casser la tête avec des hebdos communautaires puis, en plus, encore moins avec des hebdos régionaux. Puis, avec une centaine de journaux, pour faire des campagnes là-dedans, tout est compliqué pour eux autres. Puis, regarde, c'est bien plus facile de prendre un gros budget de 1 million, là, puis mettre ça dans leur... ils ont tous formé, quasiment, des compagnies soeurs pour gérer les publicités numériques. Alors, ils font une cote comme agence de publicité puis ils donnent le sous-contrat de gérer la publicité numérique, la programmatique à une de leurs filiales. Ça fait que, de même, c'est vite fait, c'est bien payant pour eux autres, mais ça ne rend pas service aux citoyens du Québec. Je pense que le...

Pour vous donner un exemple, nous autres, les hebdos, on a une agence de publicité nationale qui dessert l'ensemble de notre industrie au complet puis qui serait très bien capable de faire les placements publicitaires pour l'ensemble de nos journaux puis pour même d'autres médias aussi. Mais, quand ça passe directement par les grandes agences de Montréal, on s'entend, là, le Québec, ce n'est pas la préoccupation principale, et malheureusement c'est mal réparti. On n'est pas les premiers à vous le dire mais on ne sera probablement pas les derniers, mais on pense qu'on devrait avoir une part importante de ces budgets-là, qui pourrait aller jusqu'à 30 % à 40 %. C'est parce que c'est ce que représente le poids des régions.

• (16 h 30) •

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Bouchard (Renel) : Alors, en terminant, il y a deux aides particulières qu'on doit vous demander pour une période de transition. Il y en a une qui nous apparaît plus importante que d'autres...

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Le temps est écoulé, mais je pense que vous allez avoir le temps de revenir, une chance de revenir, là, je suis persuadé. Je regarde le député de Beauce-Sud, vous avez la parole.

M. Poulin : Oui, mais vous pouvez continuer, monsieur, oui.

Le Président (M. Ciccone) : Parfait.

M. Bouchard (Renel) : ...qui est la crise des commerces de proximité. Aujourd'hui, là, le petit... dans une région... une ville comme Saint-Jean ou Saint-Hyacinthe, on a 2 000 commerces, et ces commerces-là, c'est en grande majorité des commerces de proximité qui souffrent du Walmart, qui souffrent d'Amazon, qui souffrent de tout ça, donc ils sont dans la même crise que nous autres. Alors, une des choses qu'on vous demanderait puis qu'on pense qui pourrait aider non seulement nous autres, mais aussi ces commerces-là, on pense que, pour une période de transition, le gouvernement pourrait donner un crédit d'impôt additionnel. Mettons que quelqu'un a un commerce de détail qui est propriété d'un petit commerce dans une ville, s'il décide d'acheter de la publicité dans notre journal, soit de la publicité papier ou soit de la publicité numérique, parce que tous nos journaux, aujourd'hui, offrent des produits numériques aussi, alors, quand il achète de la publicité chez nous, son crédit d'impôt devrait être égal à... ça devrait être déductible d'impôt à 150 % pour raffermir le lien entre les petits commerçants, qui sont, à 90 %, 95 %, de nos villes, dans nos régions, et c'est la grosse majorité de nos commerçants... Et il faut être conscients du fait aussi que le plus grand expert en marketing qu'un grand nombre de ces petits commerçants là vont voir dans leur vie, ce n'est pas un V.P. marketing, ils n'ont pas le moyen de s'en payer. Puis ce n'est pas une agence de publicité qu'ils vont voir non plus, ça prend des budgets de 50 000 $, 100 000 $ pour être capable de faire affaire avec une agence. Alors, leur plus grand expert, entre guillemets, pour faire leur propre promotion, c'est souvent quelqu'un de notre équipe d'hebdos, de conseillers.

Alors, notre dernière demande, on pense que, pour une période de transition, on pourrait avoir... bon, Hebdos Québec, à travers sa fondation, pourrait recevoir un montant de 4 millions, qui nous permettrait de revisiter toutes les salles de vente et les salles de rédaction aussi des 100, 120 hebdos au Québec et de reformer toutes nos équipes de vente traditionnelle à des nouveaux produits, au numérique, parce que, dans nos salles, on a du personnel de tous les âges, bien entendu, mais on a du personnel, de façon importante, dans une période de transition comme celle-là, qui doit être recyclé pour mieux servir l'ensemble des petits commerces de nos villes, de nos régions. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Beauce-Sud, toujours.

M. Poulin : Absolument. Ce ne sera vraiment pas très long. Félicitations pour votre mémoire très concret, très clair, et il y a plusieurs solutions. Également, vous avez souligné le rôle des agences de médias, vous dites, des V.P. marketing, et tout ça, mais c'est important, ce que vous dites, parce que souvent les concessionnaires automobiles se font conseiller par des firmes de plein d'endroits, qui disent : Là, ton budget, là, il faut que tu mettes au moins 80 %, 90 % sur les réseaux sociaux, c'est là que ça se passe, là, ton journal, oublie-le. Et, je pense, pour moi, il y a non seulement une méconnaissance du marché publicitaire, une méconnaissance d'où les gens se trouvent. Au-delà de l'importance de l'information régionale et de sauvegarder nos hebdos dans nos localités, je pense que ces agences de marketing là, qui sont parfois des bien-pensants, devraient plutôt se rapprocher de la réalité. Je pense qu'ils ont intérêt à vous connaître, et ça, c'est très important, tout comme ils ont intérêt à connaître les médias communautaires, qu'on a entendus plus tôt aujourd'hui.

Hebdos Québec, vous avez reçu, en 2017‑2018, un montant de 293 992 $ et, en 2018‑2019, un montant de 73 000 $, pour un total de 367 000 $. Ça avait été donné, donc, par une subvention pour couvrir une partie des frais liés à la réalisation du projet intitulé Virage numérique intégré Web — plateforme de contenu et application mobile. J'aimerais savoir, avec ces sommes-là qui ont été remises, ce 367 000 $, est-ce que ça atteint vos objectifs. Est-ce que ça a permis de faire ce virage numérique là? Ça avait été donné par le ministère de la Culture à l'époque.

M. Chartier (Benoit) : Exactement, voilà, ça fait à peu près deux ans que le montant...

M. Poulin : Oui, effectivement.

M. Chartier (Benoit) : ...c'est la plateforme Millenium. Nous nous sommes associés à une plateforme européenne qui nous a aidés à numériser notre contenu sur les tablettes et mobiles, mais, bon... et en même temps, parallèlement à ça, ça nous a aidés aussi à nos ateliers de montage, là, en lien à la production de nos journaux. Écoutez, oui, ça a réussi à aller rechercher du leadership numérique et ça a été très, très intéressant pour l'association. Ceci dit, nous, je ne crois pas qu'à l'association nous allons renouveler l'expérience avec cette plateforme-là. On va plus laisser chaque éditeur opérer ses liens numériques avec la communauté.

M. Poulin : O.K. Donc, est-ce que ce 367 000 $ là, vous jugez que... a permis d'atteindre les objectifs que vous souhaitiez?

M. Chartier (Benoit) : Oui, oui, nécessairement, là.

M. Poulin : Oui, du moins exploratoires?

M. Chartier (Benoit) : Du moins exploratoires. Mais moi, je veux revenir sur le fait des conseillers, que vous dites, publicitaires, au niveau numérique. Ça, il y a un grand rôle qu'on ne parle pas beaucoup, présentement, depuis le début de la commission, c'est le rôle des agences de publicité au Québec. Ils se sont jetés dans les bras du GAFA, carrément, ils ont laissé tomber les médias traditionnels du Québec. Bon, il faut dire, aujourd'hui, que les grandes agences appartiennent à tous des grands consortiums japonais, ou européens, ou américains, mais c'est un fait, ça, que les agences n'aident pas les médias traditionnels, n'aident pas la presse écrite, présentement, depuis les trois, quatre dernières années, conseillent leurs clients, que ce soit le concessionnaire automobile, le fabricant automobile ou... Même à ça, à la SAQ ou Hydro-Québec, ils font affaire avec des grandes agences, et c'est eux qui conseillent les gens d'aller annoncer sur le GAFA, là, et ça, c'est très, très insidieux comme technique, et en même temps c'est très dévastateur pour l'ensemble des médias traditionnels.

M. Bouchard (Renel) : Puis ça fait aussi qu'il y a beaucoup de lecteurs qui ne sont pas... beaucoup de citoyens qui ne sont pas rejoints par ces moyens publicitaires là. Vous savez, des fois, quand on est dans cette industrie-là, qui a des passages difficiles, on se pose des questions. Nous autres, récemment, dans notre organisation... On est à Victoriaville, où il y a le journal La Nouvelle. C'est un très bon journal, qui est là depuis bien longtemps. On veut savoir qu'est-ce que les gens pensent de notre journal. On a fait un sondage au printemps, bien, il y a 74,4 % de la population qui lit notre journal au moins une fois par semaine. C'est un journal qui est publié deux fois par semaine. Dans 61 % des foyers qui lisent le journal, il y a plus que deux lecteurs, puis il y a 51 % des lecteurs seulement, de tous ces lecteurs-là, qui consultent le site Web. Et, parmi les lecteurs, les gens de 55 ans et plus, bien, les trois quarts, là, ils s'informent uniquement sur papier.

Le problème des agences de publicité, pour revenir à ce que Benoit disait : ils accélèrent un mouvement social qui est naturel. Ça s'en va vers ça, mais eux autres, ils accélèrent ça en fonction de leurs intérêts à eux autres, pas en...

M. Chartier (Benoit) : ...c'est ça.

M. Bouchard (Renel) : ...oui, donc pas en fonction des besoins puis des intérêts des communautés qu'ils desservent puis des clients qu'ils desservent, nécessairement. Alors, il y a comme une dysfonction entre les projections des budgets publicitaires numériques et l'endroit où la population est rendue là-dedans. Alors, c'est sûr qu'on s'en va, à chaque année, de plus en plus vers le numérique, mais on n'est pas là puis il y a une partie de la population qui n'est pas là. Il faut en tenir compte, puis c'est important que le gouvernement en tienne compte aussi quand il fait de la publicité.

M. Chartier (Benoit) : Ces agences-là auraient dû être invitées à la commission, venir parler de leurs pratiques. Moi, je vous le dis, c'est une pratique qui est... Enfin, en tout cas, ils auraient dû être invités puis ils auraient dû être ici pour répondre à vos questions.

M. Poulin : ...un échange préalable à ce niveau-là. L'important, c'est de laisser beaucoup l'espace, effectivement, à vous. Mais, sur les agences, comme telles, de placement, là, effectivement, il y a des enjeux qui sont extrêmement spécifiques puis très importants. Je pense que mon collègue de Richelieu avait effectivement une question.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. À vous la parole, M. le député de Richelieu.

M. Émond : Merci, M. le Président. J'attendais d'être reconnu, monsieur...

Le Président (M. Ciccone) : Oui, mais c'est parce que je voyais des députés qui s'interpelaient, là. Merci.

M. Émond : Merci beaucoup. Merci pour votre présence. M. Chartier, vous êtes ici, bien sûr, à titre de président d'hebdos médias. Vous avez dit, un peu plus tôt, que vous êtes également éditeur pour cinq hebdomadaires, dont dans ma région, à Sorel-Tracy.

M. Chartier (Benoit) : Exactement, Les 2 Rives,le célèbre journal Les 2 Rives, de Sorel.

M. Émond : Exact. J'en profite, d'ailleurs, pour saluer Marcel, Jean-Philippe, avec qui j'ai eu le bonheur d'accorder une entrevue ce midi.

M. Chartier (Benoit) : Et mon ami Jean-Philippe, exactement.

M. Émond : Je souligne la présence, également, de Philippe, un propriétaire d'un autre journal dans un autre coin de la Montérégie, qui suit les travaux avec beaucoup...

M. Chartier (Benoit) : ...ici avec nous, là, qui nous écoute.

M. Émond : ... — exact — Philippe, que j'ai connu, avec Anne-Marie, dans une autre vie. Puis c'est volontaire que je nomme les gens par leur prénom, parce que, selon moi, les hebdos régionaux, vous faites partie de la famille dans chacune de nos régions. Vous êtes essentiels à la collectivité puis...

M. Chartier (Benoit) : On connaît vos attachés, on vous connaît tous personnellement.

M. Émond : D'accord. Ceci étant dit, j'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt de votre mot que vous avez publié, à saveur éditoriale, dans les derniers jours, dans vos hebdos, une pratique pas très courante, je pense, c'était la première fois que je vous lisais, puis un véritable cri du coeur.

• (16 h 40) •

M. Chartier (Benoit) : Exactement.

M. Émond : Vous avez mentionné, dans votre mot, un peu comme M. Bouchard l'a fait tantôt, le retrait de la publication des avis publics de la part des municipalités, qui a été mis en place précédemment. Est-ce que vous avez mesuré l'impact financier chez vos membres d'Hebdos Québec mais également chez vous, avec vos cinq publications?

M. Chartier (Benoit) : C'est plusieurs centaines de milliers de dollars. Et je ne comprends pas encore... là, je m'excuse, mais je ne comprends pas encore le gouvernement libéral, précédant le gouvernement de la CAQ, d'avoir accepté... Nous avions fait des présentations ici. Je suis venu ici... pas dans cette salle-là, parce qu'elle n'existait pas, là, je suis venu dans le salon rouge, là, dire qu'on ne devait pas retirer les avis publics. C'était le ministre des Affaires municipales, à l'époque, là, monsieur... enfin, son nom m'échappe, là. Et, pour nous, là, déjà, voilà deux ans, la crise était commencée dans les médias, puis là, en plus, on nous enlève les avis publics dans l'ensemble du Québec. On parle de millions de dollars pour les hebdos.

Au-delà des sous, c'est aussi une démocratie qu'on enlève, là. Alors, les gens veulent se tenir informés de qu'est-ce qui se passe dans leur ville, dans leur région, ils veulent savoir les changements de zonage. Là, on l'envoie, comme dit Renel, sur le site Internet de la ville, dans le troisième onglet, 10e page, en bas. Ça prend quasiment... il faut que tu ouvres le «sitemap» de la ville pour comprendre où aller lire l'avis. Quant à moi, c'est carrément antidémocratique, ce geste-là. On m'avait expliqué qu'on était en 2017, à l'époque, puis que c'était comme ça, la vie, aujourd'hui. On m'avait même dit : S'il y avait un journal qui partirait aujourd'hui, probablement que les avis publics seraient juste sur l'Internet. Mais, pour nous, là, c'est assez critique puis c'est dommageable, c'est un préjudice.

M. Bouchard (Renel) : Pour donner des chiffres, ça peut représenter à peu près 5 % du budget d'un journal.

M. Émond : O.K. Dans votre mémoire, vous dites également que vos hebdos sont la meilleure tribune, pour un député, maire, pour rejoindre les électeurs en région. Nous le faisons tous, je crois, dans nos régions respectives, publier non seulement sous forme d'entrevue, de communiqué, mais de publicité, là, pour...

M. Chartier (Benoit) : Nous sommes là tout le temps.

M. Émond : Oui, oui, exact. Je m'excuse. Tantôt, vous avez parlé des GAFA, bien entendu. Avec des intervenants précédents, on a des collègues qui ont dit que la tendance, le phénomène est là pour rester. On n'est pas en train de dire que c'est une bonne chose ou que c'est une mauvaise chose, mais, dans ce contexte-là... Puis on essaie, avec différents intervenants, de faire sortir des chiffres. Quel serait, selon vous, le pourcentage acceptable, pour les unités gouvernementales, le gouvernement mais les députés ou autres unités gouvernementales, pour le taux de placement dans les médias traditionnels versus la publicité numérique dans les GAFA? Est-ce qu'un 20 %-80 %, un 10 %-90 %...

M. Bouchard (Renel) : Je vais répondre à votre question mais de façon un peu différente. Au lieu de donner des budgets immenses, mettons, à placer sur Facebook... C'est qu'à l'intérieur des budgets, même les placements sur Facebook et les placements sur Google ou les autres formes de publicité numérique, si vous... il y a aujourd'hui au moins une dizaine de formes de publicité numérique qui finissent par rejoindre les GAFA d'une façon ou d'une autre. Alors, c'est que ces campagnes-là, il faut prendre l'habitude... il faut que nos commerces prennent l'habitude de les planifier, justement, avec des personnes locales, des gens comme nos représentants publicitaires, ou les représentants publicitaires des quotidiens, ou ceux de la radio, mais ne pas faire affaire directement avec les GAFA ou ces choses-là. Il faut que ça... Il faut trouver un moyen...

Dans le fond, dans l'évolution de notre industrie... Nous autres, on travaille en région, puis ce qu'on essaie de... On a commencé à chercher... Dans le moment, c'est un moyen de régionaliser le fameux courant de publicité numérique. On n'ira pas à l'encontre de la publicité numérique. On l'intègre dans nos plateformes. Vous pouvez aller voir... Par exemple, il y a un site Web qu'on a lancé cette semaine, notre organisation, on a 21 hebdos au Québec, ça s'appelle icisolutions.ca. Vous allez voir, là, c'est une panoplie d'une dizaine, douzaine de formes de publicité numérique. Alors, on est à une époque où, dans nos hebdos, là, je peux vous dire que, d'ici très peu de temps, vous ne pourrez plus acheter juste une publicité papier chez nous. Notre publicité, quand vous allez l'acheter chez nous, elle va être à la fois papier, elle va être à la fois sur votre site Web, si vous en avez un, elle va être sur un site Web d'une autre organisation, elle va être sur votre page Facebook puis sur la page Facebook de notre organisation automatiquement. Ça n'existera même plus, une publicité papier, comme tel. On s'en va dans la bonne direction.

M. Émond : ...M. Bouchard, je vous remercie. Puis je vais juste passer la parole à mon collègue de Saint-Jean pour lui permettre de poser rapidement sa question.

Le Président (M. Ciccone) : M. le député de Saint-Jean, vous avez 50 secondes.

M. Lemieux : 50 secondes? M. Bouchard ou M. le président, dans votre recommandation pour l'incitatif pour les commerçants, c'est clair, là, 50 %, tout ça... mais, juste avant, quand vous l'expliquez, vous dites : Toute l'économie régionale est tributaire de la santé des hebdos, c'est 95 % de notre chiffre d'affaires. Mais c'est aussi bon pour tout ce monde-là, ce que vous êtes en train de demander?

M. Bouchard (Renel) : Exactement, ça va renforcer... Dans le fond, pour beaucoup de ces petits commerçants là, qui en arrachent aussi dans la crise des médias de proximité parce qu'ils ont des nouveaux concurrents, eux autres aussi, Amazon, qui est le plus facile à énumérer... alors ces gens-là... C'est une mesure qui aiderait non seulement nous autres, mais qui aiderait tous les petits commerces de proximité dans toutes nos villes puis nos régions.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Bouchard (Renel) : J'ai terminé.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, formidable, formidable. Je vais passer maintenant la parole à l'opposition officielle pour une période de 11 min 30 s. Je donne la parole à la députée de Verdun.

Mme Melançon : Alors, bonjour. Merci beaucoup de vous être déplacés. Je veux saluer les gens qui vous accompagnent aussi derrière. Alors, merci beaucoup d'être présents. C'est important, votre présence, et vous faites bien de dire que votre présence dans chacune des régions, hein... Vous êtes une forme de tissu social, je vais dire ça comme ça. Et je vais vous poser une question, puis je ne veux pas avoir l'air dure, mais je sais que vous avez la réponse, mais je veux que tout le monde puisse l'entendre : Pourquoi un annonceur se tourne vers les GAFA, actuellement?

M. Chartier (Benoit) : Deux raisons, peut-être trois. Un, peut-être le prix qui est moins cher; deux, parce que peut-être qu'il y a une certaine agence de publicité ou un conseiller à l'extérieur de notre périphérie... lui conseille d'aller sur le GAFA; et aussi peut-être au niveau du ciblage, là, parce que, le GAFA, on parle beaucoup... parce que c'est mesurable et ciblable. Alors là, ça, c'est un peu l'argument massue qu'a le GAFA face aux médias traditionnels.

Mme Melançon : Je vous pose la question parce que moi, là, dans Verdun, je le sais, que mon hebdo va être un peu partout, va être dans tous les commerces, va rester là pendant plusieurs jours, va les atteindre, les gens... plus difficile à savoir le nombre de clics. Mais en même temps est-ce qu'on peut se dire, entre nous, qu'à un moment donné, le nombre de clics, on peut se poser des questions sur ce qu'on nous vend?

M. Bouchard (Renel) : Vous savez qu'on dit souvent, dans l'industrie, qu'un taux de clic de 0,08 %, moins de 1 %, c'est un bon taux de clic moyen. Bien, si un journal est distribué à 50 000 copies, pensez-vous qu'il n'y a pas 50 personnes qui vont le lire? Voyons donc. Tu sais, le problème qu'on a, nous autres, dans notre industrie, on n'est pas capables de le mesurer sous cette forme-là.

M. Chartier (Benoit) : On n'a pas le clic officiel de l'ordinateur, du serveur, mais on peut parler quand même de 1,5 lecteur par copie, minimum. À 50 000 copies, là, on rejoint quasiment 75 000 personnes.

Mme Melançon : Donc, on peut peut-être se dire, entre nous, qu'il faudrait répéter ce qu'on est en train de se dire là. Là, je vois des gens derrière qui font signe : Oui, oui, oui. Mais on a acheté, à un moment donné, une mode, je vais dire ça comme ça... Puis, bien sûr, là, je vous le dis, là, moi, je suis sur Facebook, je suis sur Twitter, vous l'êtes aussi...

M. Chartier (Benoit) : On l'est tous.

Mme Melançon : ...mais je pense qu'on doit prendre... on a pris ce virage-là. Mais je voulais vous poser la question, parce que je pense que c'est des choses qui doivent être dites à un moment donné, et... Le 2 mai dernier, vous en faisiez part, il y a eu une motion à l'Assemblée nationale pour parler de l'exemplarité de l'État. Moi, j'ai une question pour vous, parce que vous êtes mieux branchés que quiconque : Est-ce que vous savez s'il y a eu ou non une directive qui a été émise par le gouvernement, actuellement, pour la publicité?

M. Chartier (Benoit) : Non.

Mme Melançon : Non, vous ne le savez pas ou, non, il n'y en a pas eu?

M. Chartier (Benoit) : Non, il n'y a pas eu de... On n'a pas vu de changement, pas à notre connaissance, là. Moi, je n'ai pas vu de changement. D'ailleurs...

Mme Melançon : D'accord. Donc, ça va être intéressant, là, aussi, à ce qu'on puisse, tout le monde ensemble, là, voir peut-être à exiger des directives de la commission. Parce que, dans le fond, quand on fait une motion comme ça à l'Assemblée nationale, qui est votée...

M. Chartier (Benoit) : Il est supposé y avoir des suites.

Mme Melançon : ...bien sûr, qui est votée à l'unanimité, moi, je m'attendais que, le 3 mai, rapidement, il y ait un sous-ministre ou une ministre...

M. Chartier (Benoit) : Oui, mais vous allez affronter vos agences de publicité qui vous conseillent...

Mme Melançon : Clairement, mais...

M. Chartier (Benoit) : ...et ils vont vous dire : Vous ne faites pas la bonne décision. C'est ça qu'elles vont vous dire, les agences de publicité et de placement.

Mme Melançon : M. Chartier, est-ce que vous étiez là, tout à l'heure, lorsque je disais qu'à chaque dollar qu'on veut investir... puis là je parlais aux médias communautaires, mais à chaque dollar qui doit sortir, bien, qu'on envoie un pourcentage...

M. Chartier (Benoit) : Bien oui.

Mme Melançon : Bien, je pense qu'il va falloir qu'on fasse la même chose avec nos hebdos si on veut avoir la suite dans les idées.

M. Chartier (Benoit) : Ça va prendre une loi en bonne et due forme, votée à l'Assemblée nationale, pour que ça puisse devenir réalité pour les médias traditionnels du Québec.

• (16 h 50) •

Mme Melançon : Génial. J'ai deux petites questions en rafale, parce qu'après ça j'ai ma collègue aussi qui veut intervenir. Le 25 % pour la masse salariale, est-ce que vous, vous l'avez défini ou non? J'explique ma question, parce que, là, il y a le député, tantôt, de Richelieu, là, qui est allé dans mon 80 %-20 % que je pose depuis hier, mais, moi, ce que je veux savoir, c'est que, dans le 25 % de la masse salariale, est-ce que c'est la masse salariale juste de la rédaction. Comment vous le voyez... de la masse salariale, de votre côté?

M. Bouchard (Renel) : On parle de tous les employés qui sont affectés à la production du journal, parce que ce n'est pas juste les journalistes. Maintenant, dans les salles de rédaction modernes, avec les nouveaux médias, on a des gens qui sont spécialisés dans les plateformes Facebook, on a des graphistes qui sont spécialisés pour faire à la fois des maquettes sur papier et retransmettre ça sous forme numérique. Alors, les salles de rédaction, c'est moins... ce n'est pas cloisonné comme avant. Alors, je pense qu'un des problèmes qu'on voyait, à l'origine, dans la mesure fédérale qui a été annoncée, ça semblait trop restrictif, ça ne représente pas les salles de rédaction modernes.

Mme Pilotte (Josée) : ...

Mme Melançon : Pardon? Je n'ai pas entendu.

Mme Pilotte (Josée) : Nos journalistes sont devenus multitâches aussi.

Mme Melançon : Ah! oui, tout à fait, tout à fait, d'accord, excellent. M. le Président, comme vous voulez...

Le Président (M. Ciccone) : Je passe la parole à la députée de Saint-Laurent. À vous la parole.

Mme Rizqy : Oui, effectivement, on n'explique pas comment ça se fait, que les gens comme Facebook et Google, qui... Alphabet... ne sont pas présents. C'est comme arriver à une scène d'accident, prendre la déposition des témoins, des accidentés, des victimes, puis de laisser aller le chauffard, puis on ne lui demande pas c'est quoi, son avis à lui, puis comment ça se fait qu'il ne paie pas d'impôt.

Mme Pilotte, je suis contente de vous voir. Vous représentez un journal qui est aussi dans un milieu touristique, puis les gens, souvent, quand ils arrivent dans un milieu touristique, bien, ils ne savent pas tout ce qui se passe, mais des fois ils rentrent dans un café puis ils l'ont, votre journal, ils peuvent savoir les différentes petites activités qu'a lieu... À moins que je me trompe, la dernière fois, moi, je suis allée dans les Laurentides, j'ai pu voir votre journal puis je savais qu'il y avait quelques activités où est-ce que je pouvais prendre part...

Mme Pilotte (Josée) : Oui, exactement.

Mme Rizqy : Donc, ça permet aussi... Il y a aussi, là-dedans, une économie sociale qui se crée, puis tout ce que ma collègue disait, en matière de tissu social, que vous êtes capables de vous maintenir en région.

Mme Pilotte (Josée) : Bien, nous, on représente 10 municipalités, 10 petites municipalités qu'on doit faire rayonner, c'est quand même un grand territoire. Alors, vraiment, je veux dire, c'est un journal qui essaie vraiment de faire rayonner tous les petits villages, tu sais, à chaque semaine, puis écrire la petite histoire, à chaque semaine, de ça, d'aller à tous les conseils municipaux de chaque ville, alors c'est beaucoup pour des petites salles de presse. Maintenant, on a peut-être un journaliste, deux journalistes à temps plein. Alors, c'est beaucoup de travail pour...

Mme Rizqy : Pour couvrir 10 municipalités.

Mme Pilotte (Josée) : Oui.

Mme Rizqy : Mais, d'entrée de jeu, on l'a mentionné, vous êtes une femme entrepreneure. Je suis pas mal certaine que vous payez vos impôts.

Mme Pilotte (Josée) : Oui.

M. Chartier (Benoit) : On les paie tous.

Mme Rizqy : Oui, bien, j'aimerais ça entendre vraiment Mme Pilotte à titre de... Vous, vous n'avez pas beaucoup parlé mais vous avez quand même bien parlé, puis je vais donner l'occasion à Mme Pilotte de pouvoir nous parler de sa réalité à titre de femme d'affaires aussi. Vous, vous payez des impôts, vous assurez aussi la masse salariale sur vos employés. Si je vous dis que vos revenus publicitaires, évidemment, vous le savez, sont imposables, mais Facebook, pour une portion de 2,9 milliards de dollars de revenus qui ont été générés au Canada en matière de revenus publicitaires, ont payé zéro impôt, êtes-vous heurtée?

Mme Pilotte (Josée) : Je suis scandalisée, moi aussi, oui, puis c'est difficile... Tu sais, je veux dire, moi, je regarde... pour un petit journal comme moi, c'est difficile. Je veux dire, on paie énormément d'impôt, on peut se le dire, alors c'est difficile, même, de faire de l'argent, tu sais, pour un entrepreneur comme moi. Tu sais, je veux dire, j'ai deux journaux, je veux dire, on fait vivre une vingtaine de familles, je veux dire, on participe à l'économie locale, on essaie d'inciter à l'achat local aussi, à l'esprit d'appartenance. Donc, oui, c'est scandaleux quand on entend ça, surtout qu'ils viennent voler notre contenu, en plus.

M. Chartier (Benoit) : En plus.

Mme Rizqy : En plus, oui. Et là je vais reprendre mon petit chapeau de fiscaliste, si vous permettez. Lorsque l'article 19, dans la loi de l'impôt, avait été rédigé, on voulait vraiment s'assurer que, les dépenses publicitaires, on favorise la presse écrite locale. Maintenant, on sait qu'on n'a pas modernisé la loi. Par conséquent, tous les médias numériques peuvent avoir quand même droit à cette dépense. Il y a, évidemment, une campagne fédérale qui se dessine maintenant, il me semble qu'il serait juste et à propos d'avoir des revendications pour le gouvernement du Québec... Pour tous les partis politiques qui veulent avoir notre vote, qui veulent nous représenter et qui sont des défendeurs de la grande démocratie, il me semble que la moindre des choses, c'est d'avoir une taxe GAFA puis de moderniser, justement, l'article 19 de la loi de l'impôt pour s'assurer que, justement, la presse écrite non seulement soit sauvegardée, mais que notre démocratie ne soit pas en péril.

Mme Pilotte (Josée) : Oui, tout à fait.

Mme Rizqy : Pour la mise à jour économique qui arrive prochainement, à l'automne 2019, au niveau du gouvernement du Québec, pensez-vous que le Québec... Avez-vous cette demande-là face... un peu comme à l'instar de la France... et va de l'avant avec la taxe GAFA, qui pourrait générer immédiatement, là, juste avec Facebook... je n'ai pas fait Google, inquiétez-vous pas, je vais faire mes chiffres, je vais mettre à jour mon tableau, mais peut générer 20 millions de dollars? Il me semble que, dès maintenant, le ministre des Finances du Québec peut agir. Il a la capacité... Et, Revenu Québec, on est autonomes, on est indépendants, on n'a pas besoin d'Ottawa pour agir. On l'a fait pour Netflix, maintenant il faut s'occuper de Facebook. Pensez-vous que, dès la mise à jour économique, on devrait avoir déjà un engagement du gouvernement actuel?

Mme Pilotte (Josée) : Bien, je crois que oui, je pense que c'est clair.

Mme Rizqy : Bon, moi aussi, c'est clair. Moi, je n'ai plus de question.

Le Président (M. Ciccone) : Il reste 1 min 20 s.

Mme Rizqy : Si vous avez des demandes, c'est le temps, là, vous avez le micro.

M. Bouchard (Renel) : ...par exemple, Benoit, il est propriétaire d'un journal qui est à copie vendue, moi, Le Canada français, à Saint-Jean, et nos lecteurs paient la TPS puis la TVQ quand ils achètent leur copie. C'est facile de ne pas payer ses taxes quand on fait affaire avec Facebook, mais, quand on fait affaire avec nous autres, on...

M. Chartier (Benoit) : Moi, honnêtement, c'est incompréhensible, ce qu'on vit depuis les quatre dernières années, là. On est comme dans un film où le monde marche à l'envers, là, c'est de coup dur en coup dur tout le temps, tout le temps, et on dirait que personne... les paliers gouvernementaux ne réagissent pas à tout ça, puis je ne suis pas le premier à le dire. Bon, il y a eu la France, là, qui a quand même réagi, mais on voit que Donald Trump a quand même répondu assez...

Mme Rizqy : Oui, mais ils se sont entendus hier, là.

M. Chartier (Benoit) : Oui, bon, enfin...

Mme Rizqy : Alors là, c'est réglé, il ne taxera pas le vin, ils vont aller de l'avant, il y a une entente. Et j'aimerais juste vous répondre... Avant de faire la lutte contre les... avant de me lancer en politique, je faisais la lutte contre les paradis fiscaux...

M. Chartier (Benoit) : Oui, oui, oui, on vous a vue à la télévision.

Mme Rizqy : ...je le fais encore. Et j'aimerais vous dire que, dans le cas de Netflix, on l'a faite, la bataille, là on va la faire pour Facebook. Et il y a aussi des choix personnels que tous les députés...

M. Chartier (Benoit) : Puis Google aussi, parce que Google est le plus gros joueur qui fait le plus mal, présentement.

Mme Rizqy : Oui, oui, tout le monde, oui, absolument, vous avez raison, là je prenais l'image de Facebook. Et, si vous me permettez, c'est qu'il y a une réalité... tous les députés, on peut choisir de ne pas faire de publicité. Moi, c'est un choix que j'ai décidé de faire. Je n'en fais pas, de publicité sponsorisée sur les médias sociaux, zéro puis une barre.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup.

M. Chartier (Benoit) : Bravo! Félicitations!

Des voix : ...

Le Président (M. Ciccone) : Je vous demanderais, s'il vous plaît, de ne pas applaudir dans une salle de commission. Je passe maintenant la parole au député de Rimouski pour 3 min 15 s.

M. LeBel : Bonjour. Pour les avis des municipalités, je suis d'accord avec vous, mais, pour l'instant, personne ne veut s'engager... Du côté gouvernemental, on ne s'est pas engagé de revenir en arrière, mais c'est certain qu'on ne peut pas faire... on ne peut pas passer à côté de ça dans notre rapport final, il faudra en parler.

M. Chartier (Benoit) : C'est M. Coiteux, d'ailleurs, son nom m'est revenu, là, qui avait fait le changement de...

M. LeBel : ...

M. Chartier (Benoit) : Pour la loi n° 22, oui, c'est ça.

M. LeBel : Le placement média, je suis d'accord avec vous, là, c'est très centralisé, aucune idée de l'impact dans les régions. Est-ce qu'une nouvelle façon, pour le gouvernement, de faire le placement média, en décentralisant les décisions dans les directions régionales des ministères, pourrait être une façon de coller le placement aux réalités des régions puis plus proche de vos journaux? Ça pourrait-u être une façon?

M. Bouchard (Renel) : Les centres de décision sont conscients de chacune des régions du Québec. C'est sûr que ça peut avoir un... ça va avoir un impact sur les placements. Des régions vont exister, premièrement... puis ce qui n'est pas toujours le cas dans les grandes agences à Montréal, puis, bon, s'ils existent, les régions, ils vont placer dans leur région, ils vont avoir des budgets pour ça. C'est une des solutions possibles. Ce n'est pas la seule mais c'en est une.

M. LeBel : Parce que souvent les directions régionales des ministères le voient, les directeurs voient la situation, puis ils n'ont pas le pouvoir de placer... ils font des activités en région mais ils ne peuvent pas, eux autres même, décider de mettre une publicité dans leur hebdo, parce qu'il faut que ça passe par Dieu le Père, qui est à Québec, qui décide tout.

M. Chartier (Benoit) : Exactement.

M. Bouchard (Renel) : Tu sais, il y a quelqu'un qui vous donnait l'exemple, là, la maladie de Lyme, là, ils font la publicité à Montréal, mais il n'y en a pas, de bibittes pour ça...

M. LeBel : Ce matin, à Radio-Canada à Rimouski, le propriétaire du journal Le Placoteux — c'est un hebdo du Kamouraska — disait... parce qu'on a proposé ici souvent, là, le crédit d'impôt à la masse salariale pour les journalistes ou un fonds pour les journalistes, le propriétaire disait : «Pour faire virer un journal, il y a l'équipe de graphisme, de publicité, etc. Quand on voit les autres secteurs d'activité qui reçoivent de l'aide, c'est pour tous les employés. Pourquoi ce ne serait pas la même chose pour nous? Il faudrait être plus équitable.»

M. Bouchard (Renel) : Bien, c'est pour ça qu'on vous dit que la taxe, le 25 % sur la masse salariale, ce serait sur la masse salariale de tous ceux qui produisent, qui sont attachés à la production du journal. On voit ça plus large.

M. LeBel : Mais on a quand même, nous autres, l'objectif de s'assurer qu'il y ait des salles de nouvelles solides.

M. Bouchard (Renel) : Solides, oui.

M. LeBel : Comment on fait pour s'assurer de tout ça?

M. Bouchard (Renel) : Bien, tu sais, il faut... tu ne peux pas donner de subvention à un journal qui n'a pas une bonne... qui n'a pas une salle de rédaction qui fait de l'allure, là. Il y a un minimum que le... Bien, le fédéral est en train de regarder ses... il veut mettre un minimum de journalistes. Il faut qu'il y ait un minimum de journalistes puis que ça aille même en priorité à subventionner une masse salariale pour les journalistes, c'est une excellente chose. C'est une excellente chose parce que, tu sais... Mais je comprends la difficulté, pour un gouvernement, quand il fait des règlements, de tirer une ligne. Mais il est clair que c'est une priorité, de subventionner d'abord les journalistes et tous ceux qui gravitent autour pour faire...

• (17 heures) •

M. Chartier (Benoit) : ...les photographes...

M. Bouchard (Renel) : Un photographe de presse, c'est nécessaire.

M. Chartier (Benoit) : ...secrétaires de rédaction, correcteurs, infographes, producteurs de contenu.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

M. LeBel : Parce que vous faites de l'excellent travail dans nos régions, mais vos salles de journalistes, c'est de plus en plus petit, et on a des grandes régions, c'est difficile à couvrir. Ça fait qu'on couvre les villes principales puis on...

Des voix : ...

M. LeBel : C'est ça.

M. Bouchard (Renel) : Il faudrait inclure les pigistes, parce que, dans une région comme la vôtre, les pigistes sont extrêmement importants, à cause des distances qui sont grandes.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée de Marie-Victorin pour une période de 2 min 15 s.

Mme Fournier : Merci beaucoup. Je vais y aller rapidement. J'ai deux questions, vous y répondrez en rafale.

Je crois que c'est une excellente idée, le 50 % de crédit d'impôt pour la publicité pour les PME, mais je vous lance la question : Réalistement, est-ce qu'on doit rester, dans le monde de l'information, vers un modèle d'affaires axé sur la publicité quand — on va se parler franchement — par exemple, un quart de publicité dans un hebdomadaire local, ça peut coûter autour... en tout cas, chez nous, ça coûte 1 000 $, ça peut être en page 15, un peu plus loin parfois, puis je pourrais couvrir, par exemple, l'équivalent de 1,5 fois la taille de ma circonscription pour le même montant sur les réseaux sociaux? Donc, je me demandais si vous aviez quand même la réflexion vers un autre modèle d'affaires qui pourrait être possible, parce que c'est ce à quoi on réfléchit ici, notamment, à la commission.

Deuxièmement, la question des Publi-Sac, qui est quand même très abordée dans l'actualité par les temps qui courent, ça représente combien, en termes financiers, pour les hebdos locaux? Je pense que c'est important qu'on en parle. Et quelles pourraient être les solutions si ce n'était pas des Publi-Sac?

M. Chartier (Benoit) : Je vais répondre à la question du Publi-Sac puis je laisserai mon collègue Bouchard répondre à la question de la publicité. Au niveau du Publi-Sac, nécessairement, là, il y a un enjeu majeur aussi, on en parle dans le mémoire. On n'en a pas parlé ici, là, mais il y a un enjeu majeur en lien avec le fait que le Publi-Sac fait partie intégrante de l'écosystème de la presse hebdomadaire au Québec. C'est notre réseau de distribution, qui nous aide à aller à chaque porte à toutes les semaines à un coût raisonnable. Alors, c'est clair que, là, on entend des débats, là, autour du Publi-Sac, entre guillemets, environnementaux, qui fait que, bon, il y a peut-être quelques villes qui se questionnent à savoir est-ce que c'est nécessaire encore et est-ce qu'on ne devrait peut-être pas... on devrait peut-être jouer plus sévère avec le Publi-Sac. C'est sûr que ça va avoir un impact direct sur chaque hebdo, ça, c'est clair.

Mme Fournier : Vous n'avez pas le montant en particulier?

M. Chartier (Benoit) : Bien, un montant en particulier... C'est au niveau des taux de distribution, des coûts de distribution, selon le coût de distribution et la diffusion du journal en question. Alors, il y a des hebdos qui tirent... Dans ta région, Le Courrier du Sud est à 120 000 copies, alors ce journal-là dépense beaucoup pour distribuer ses journaux. Il y a d'autres journaux où c'est 20 000, 25 000 copies de diffusion. Alors, ça varie selon les journaux, sauf qu'on ne peut pas...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant.

M. Chartier (Benoit) : ...la problématique. Le réseau du Publi-Sac est comme très important.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Merci beaucoup. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission et merci pour votre grande passion pour vos hebdos ici, du Québec.

Je fais une pause pour accueillir le MPV Radio, qui prendra place dans quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 4)

(Reprise à 17 h 7)

Le Président (M. Ciccone) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de MPV Radio. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole est maintenant à vous pour 10 minutes.

MPV Radio inc.

Mme Vachon (Isabelle) : Bonjour. Je suis Isabelle Vachon, je suis vice-présidente de MPV Radio. Je suis accompagnée de Catherine Vachon, qui est la présidente de MPV Radio. Et, tout de suite, nous sommes soeurs, alors c'est le même Vachon, on va régler ce détail-là tout de suite.

Alors, M. le Président, Mmes et MM. les parlementaires, merci d'être ici. Si vous êtes ici, c'est parce que vous avez un intérêt pour les médias, pour les médias en région, pour l'information. Le nom de notre entreprise le dit, radio, MPV Radio, on n'est propriétaire d'aucune station de radio, nous sommes une maison de représentation en publicité nationale. Et on va vous parler du nerf de la guerre, on va vous parler d'argent, parce que l'argent, c'est ce qui fait vivre les médias en région et c'est ce qui manque cruellement en ce moment.

Je suis dans cette salle et j'étais dans le salon rouge depuis hier à écouter tous les intervenants avec énormément d'intérêt. C'est notre raison d'être, nous, à MPV Radio, la radio régionale, donc... une maison de représentation en publicité nationale spécialisée dans l'obtention des budgets publicitaires pour les stations de radio régionales. On a bâti notre crédibilité sur notre expérience, notre expérience du terrain, notre connaissance des médias, de l'intérieur comme de l'extérieur. En fait, Catherine et moi, on a oeuvré toute notre vie dans les médias. C'est une entreprise familiale, MPV Radio, c'est nos parents qui l'avaient, qui l'ont bâtie. Mon père a passé sa vie dans les médias, «born and raised». Désolée d'utiliser cette expression anglaise, mais c'est vraiment ce que nous sommes.

• (17 h 10) •

Je vous dirais que, maintenant, on représente, à ce jour, une trentaine de stations de radio au Canada mais, pour la plupart, des stations au Québec, que des stations de radio francophones. On en a sur la Côte-Nord, dans l'Est du Québec, dans les Laurentides, dans les Hautes-Laurentides, dans les Bois-Francs, la Montérégie, le Témiscamingue, la Gaspésie, la Beauce. Ça résonne. Ça nous donne, ça, une vision claire de ce qui se passe sur le terrain et ça nous donne une légitimité aujourd'hui, même si on est une entreprise, de vous dire comment les budgets du gouvernement ont fondu comme neige au soleil. Ça fait 10 ans que je suis chez MPV Radio. Je vous dirais qu'en 10 ans la situation s'est détériorée. Il y a 10 ans, quand on avait des placements du gouvernement, c'était, pour plusieurs ministères, pratiquement systématique, d'utiliser toutes les stations de radio régionales, c'était très important. Et maintenant, bien, les agences choisissent certaines régions pour toutes sortes de raisons, mais une chose est certaine, c'est qu'en ce moment il n'y a aucune campagne du gouvernement qui couvre toutes les régions du Québec. Et nous, on négocie avec l'agence de publicité Cossette, on les voit, les budgets, on voit ce qui se passe. Et notre rôle, c'est de nous assurer que toutes les stations, toutes les régions du Québec, toutes les régions que nous représentons soient retenues dans la planification des campagnes publicitaires qui touchent tous les Québécois.

Aujourd'hui, je vais vous parler spécifiquement des placements du gouvernement du Québec. Bien, le gouvernement doit quand même être un leader et montrer l'exemple. En tant que maison de représentation en publicité nationale, on se fait la voix des stations de radio régionales qu'on représente. Et, comme je vous le disais, on le constate, que les campagnes publicitaires fondent, et, quand on demande pourquoi, on nous dit : Ah! on n'a pas d'argent. C'est indéfendable. On ne peut pas dire : C'est parce qu'on manque d'argent. Vous avez de l'argent pour un grand marché comme Québec, vous avez un grand... vous avez de l'argent pour Montréal, pas d'argent pour Sorel, pas d'argent pour Baie-Comeau, pas d'argent pour Rimouski, pas d'argent pour Sept-Îles. Il n'y a pas de citoyens de deuxième classe au Québec, à ce que je sache. Il y a des gens qui paient des impôts et qui ont droit d'être informés. Pas d'argent, pour nous, là, ce n'est pas une excuse qui est justifiable, et c'est une situation que l'on qualifie d'injuste.

Puis ça devient préoccupant quand il s'agit de messages d'intérêt public qui concernent la sécurité et la sécurité des Québécois. Par exemple, on pense à des ministères comme le MSSS, des campagnes de grippe. Pourquoi est-ce qu'on peut se justifier de dire qu'il y a certains marchés où il n'y aura pas de publicité? Puis on parle de... Moi, j'ai des marchés exclusifs, là. À Mont-Laurier, la station de radio qui est là, c'est la station de radio de la région. Si vous voulez écouter autre chose, vous allez avoir Radio-Canada, qui est une station de radio de grande qualité mais qui n'a pas de publicité. Mais, si le MSSS veut dire à ces gens-là qu'il y a une campagne de vaccination contre la grippe, par exemple, bien, il faut utiliser la station de radio régionale. C'est important de le faire, c'est important de parler à ces gens-là. Donc, quand il est question de sécurité, on se dit : Il y a une inéquité. Il faut absolument que tous les gens du Québec, que tous les citoyens, et peu importe leur appartenance géographique ou démographique, doivent être exposés avec la même fréquence, la même intensité aux messages du gouvernement, ça, c'est une question d'équité. Et ce n'est pas le cas, il y a des stations qu'on représente qui en reçoivent, d'autres qui en ont une fraction et d'autres qui n'en ont pas du tout. On est tellement dedans, je peux vous donner un exemple de ce que c'est, une campagne qui est étrangement planifiée. Il y a eu une campagne sur les algues bleues. C'est important, les algues bleues, dire aux gens : Lavez vos bateaux, attention, nos lacs, nos forêts, notre écologie. Des stations des Hautes-Laurentides, des Basses-Laurentides, de Lanaudière, de l'Estrie... personne n'a le message. C'est incompréhensible. Pourquoi? On ne le sait pas.

Alors, c'est pour ça qu'on vous parle aujourd'hui puis qu'on vous dit : En tant que parlementaires, en tant que députés, il est important de s'assurer que le message passe, que vous deveniez des leaders, de dire : Nous, on veut que ça, ça se rende aux gens qui paient des impôts et qui ont besoin de savoir cette information-là, et surtout que le dollar publicitaire du gouvernement, gouvernement du Québec, c'est un moteur d'économie régionale. Les Québécois ont le droit à une information de qualité, peu importe la région où ils vivent, et cette information doit être ancrée dans leur réalité. C'est ce que leur offre la radio régionale privée. C'est un média traditionnel dont l'écoute demeure très stable au fil des ans, mais dont la survie est menacée par un glissement des budgets publicitaires vers le Web.

Bien sûr, on en parle depuis le début de cette commission, des fameux GAFA. Annoncer sur Google, Facebook, c'est des dollars qui sont dépensés à l'extérieur du Québec. Les budgets publicitaires dépensés en radio régionale sont directement injectés dans l'économie locale pour une meilleure vitalité économique. Annoncer sur le Web en région — et ça, c'est important pour nous — n'a pas du tout, mais pas du tout le même impact qu'en milieu urbain, car la population y a plus difficilement accès, Internet étant souvent moins rapide, moins accessible et moins performant. On le sait, on parle de, quoi, 340 000 familles qui ne sont pas branchées. Il y a des analphabètes, il y a des gens qui n'ont pas accès à l'information en région autrement qu'en écoutant la radio régionale, et c'est vraiment important. Et, quand on nous dit parfois, lors de planifications de campagne : Nous allons prendre les grands marchés, et, pour le, on ira sur le Web, j'ai envie de leur dire : Mais faites l'inverse, c'est dans les régions, qu'on doit annoncer à la radio. Je ne dis pas de ne pas le faire dans les grands marchés, loin de là, mais de se contenter des grands marchés et de dire : Le Web va faire le reste pour les régions, selon nous, c'est manquer sa cible.

D'ailleurs, il y a eu une campagne de publicité, il n'y a pas si longtemps, de la SAAQ, c'était sur le cellulaire au volant. Il y a des grandes routes qui sont extrêmement dangereuses au Québec, on pense à la 117, la 138, la 158. Les stations qui desservent la population qui vit sur ces routes-là n'ont pas été sélectionnées dans la campagne de publicité, et, à l'époque, le ministre Poëti avait dit : On a manqué notre cible. Bien, il faut, selon nous, apprendre de ça et utiliser les outils. Les stations de radio régionales, elles sont là, elles sont écoutées, elles sont vivantes, mais elles veulent continuer de vivre et elles ont besoin de l'argent des publicités du gouvernement. Mais ce n'est pas de la charité, c'est une meilleure distribution du budget pour que le gouvernement puisse mieux passer son message. Donc, tout le monde gagne : votre argent est mieux distribué, la population est mieux informée, et les stations de radio reçoivent leur part de ce budget-là, et, pour nous, c'est extrêmement important.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Vachon (Isabelle) : En terminant, les bénéfices, bien, c'est un outil de survie essentiel pour la radio régionale dans un contexte qui est difficile. On a parlé beaucoup de la crise des médias, et je trouve qu'on n'a pas beaucoup parlé de la radio. Puis je tiens à dire que la radio, c'est un média d'information, que c'est un poumon pour les régions puis ça permet à la culture de demeurer vivante. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, merci beaucoup. Ça paraît, que vous travaillez à la radio, vous avez arrêté à zéro seconde. Bravo! Bravo! Je suis prêt maintenant à reconnaître la partie gouvernementale pour 15 minutes. Le député de Beauce-Sud, la parole est à vous.

M. Poulin : Merci beaucoup, M. le Président. Wow! Mme Vachon... Mmes Vachon, merci infiniment pour ce beau témoignage, j'en ai presque des frissons. J'ai fait de la radio privée, je me souviens de voir, dans mon «log» de radio, MPV Radio et de savoir exactement les placements publicitaires que vous faisiez. Merci également de faire de la business en famille. J'imagine que ce n'est pas toujours facile mais ça permet de traverser le temps, et ça, c'est important. Quand vous parliez que vos parents avaient fondé l'entreprise, je suis allé voir sur votre site Internet. C'est fort intéressant, votre historique, et j'aurais beaucoup de plaisir à discuter plus amplement avec vous, malgré le 15 minutes qui nous est alloué, de notre côté.

Je veux revenir sur la publicité gouvernementale. Je suis extrêmement préoccupé par ce que j'ai entendu, entre autres dans les choix publicitaires qui sont faits. On a beau investir pour faire la conceptualisation d'une publicité, mais, si la diffusion, elle est ratée, pour moi, la publicité n'existe pas. Et, si on fait un choix, comme société — bien, on fait un choix aussi, comme gouvernement — de faire de la conceptualisation, de faire des publicités et qu'on les diffuse mal, pour moi, j'y vois un grand problème.

On se connaît depuis quelques secondes, mais j'imagine que vous avez déjà transmis ces revendications-là et j'aimerais savoir la réponse que vous avez eue, au Secrétariat à la communication gouvernementale.

• (17 h 20) •

Mme Vachon (Catherine) : ...représentations auprès du gouvernement. On a fait des représentations, à plusieurs reprises, auprès de Cossette, qui est responsable des achats mais pas de la planification de tous les ministères. C'est sûr que les agences jouent un rôle très important. Et, quand on a rencontré le gouvernement — parce qu'en fait ça ne date pas de la crise des médias, qu'on revendique une équité dans la distribution des messages publicitaires du gouvernement au Québec, parce que c'est une grande injustice, selon nous, et les stations qu'on représente se sentent vraiment comme des citoyens de seconde zone, personnellement, parce qu'on considère qu'ils ne valent pas la peine d'être exposés à un message et aussi comme source de revenus très importante pour leurs stations de radio — on nous a répondu que le mandat, c'était bel et bien de diffuser en région, mais les régions, c'est comme un grand fourre-tout. Il y a les centres urbains puis il y a les régions, puis les régions, bien, ce n'est pas juste Sherbrooke, Trois-Rivières, Gatineau et, bien, Rimouski, parce que c'est des villes dans lesquelles il y a des stations régionales appartenant à des groupes comme Bell et Cogeco. Et ça, c'est des achats, je dirais, sans vouloir être péjorative, faciles pour les agences, parce qu'ils disent : Ça y est, c'est réglé, on a acheté les réseaux, on a acheté les régions. Vous n'êtes pas sur la Côte-Nord, vous n'êtes pas à Baie-Comeau, vous n'êtes pas à Sept-Îles, vous n'êtes pas à Gaspé, vous n'êtes pas à Matane, vous n'êtes pas à New Carlisle, vous n'êtes pas à Mont-Laurier, vous n'êtes pas à Granby, et, jusqu'à tout récemment, ils n'étaient pas à Saint-Georges de Beauce. On s'est battu bec et ongles, et ils ont reconnu que c'était un non-sens. Donc, il y a, je pense, une... je ne sais pas si c'était un manque de personnel, un manque de ressources.

On se fait dire aussi que c'est facile, avec les réseaux sociaux, parce qu'on a des résultats à la semaine en termes de sondages et de fréquentation, alors que, pour la radio, quoique ça tend à changer parce qu'on a maintenant une deuxième source de sondages...

M. Poulin : Les PPM.

Mme Vachon (Catherine) : ...mais avec Numeris, en région, pour ceux qui avaient les moyens de s'abonner...

M. Poulin : De se le payer, bien oui, très dispendieux.

Mme Vachon (Catherine) : ...parce que ça coûte cher, un sondage par année, à l'automne, mais... Puis c'est plus difficile de montrer ça à ton client, que ça soit le gouvernement ou que ça soit GM, de dire : Bon, bien, on va se fier sur les sondages d'automne, quand il y en a un, ou des sondages d'automne d'il y a trois ans, ou pas pantoute, on va y aller parce que c'est la seule station. Parce que c'est facile de comprendre que, quand tu es dans un marché exclusif puis qu'il y a une station de radio, bien, les gens écoutent cette station de radio là, tu sais, mais c'est plus difficile à défendre. C'est un peu la lecture que nous, on en fait.

M. Poulin : Non, mais vous avez raison. Nous, on a fait de nombreux sondages en Beauce, puis j'étais, le matin, le plus écouté, toutes stations de radios de Québec concurrentes dans ma région. Puis c'est vrai, puis ça augmentait vite, à part de ça, ça allait super bien.

Mais l'enjeu que vous soulevez est très important, sur le snobisme envers les régions du Québec. Et, depuis que je suis député, donc ça ne fait même pas un an, on doit se battre, dans tous les ministères, partout à travers le Québec, pour rappeler c'est quoi, les régions du Québec, donc ce que vous nous dites aujourd'hui ne me surprend pas. Et vraiment ce n'est pas des compétitions entre régions, c'est une méconnaissance et/ou un snobisme qu'il y a, que ce soit lorsqu'on développe des programmes, lorsqu'on fait de la politique publique, où on oublie, effectivement, certaines régions du Québec. Alors, moi, je ne suis pas surpris, tout en étant surpris, en étant préoccupé sur le fait qu'on exclut certaines régions de messages publicitaires. Alors, vous me dites : Ça ne date pas d'hier. Sachez qu'on va tenter de trouver la solution afin de sensibiliser davantage aux gens qui font les achats. Oui, effectivement, il y a Cossette qui peut faire certains placements publicitaires, mais, d'abord et avant tout, ça passe de la commande puis d'une volonté du client...

Mme Vachon (Isabelle) : Voilà, c'est la commande. Tout est là.

M. Poulin : ...exactement, la volonté du client de bien faire ses placements publicitaires à la grandeur du Québec. Et ça ne coûte pas plus cher, là, vraiment, là, c'est des choix qu'il faut faire.

Mme Vachon (Isabelle) : Les gens qui vivent en région, là, ce n'est pas une punition, c'est un désir. C'est un plaisir, de vivre là et d'être là. Et c'est vrai qu'il y a toujours quelque chose d'un peu péjoratif quand on parle des régions. Non, les régions, c'est les régions, c'est des gens qui sont là, c'est des entreprises qui sont belles, des gens qui ont envie de vivre là, qui ont envie d'avoir leurs budgets publicitaires. Ils ont envie d'entendre parler de vous, ils ont envie d'entendre ces messages-là. Et surtout, dans les régions, bien, il n'y a pas de «mixed media» autant que dans les grands centres, donc la radio devient encore plus importante, ça devient un véhicule important et majeur.

Mme Vachon (Catherine) : Pour ajouter peut-être à une question qui avait été posée : Quel serait le pourcentage idéal de répartition publicitaire entre les GAFA et les médias traditionnels?, on ne peut pas répondre à cette question-là facilement, parce qu'en région, justement, comme il n'y a pas de «mixed media», bien, il devrait y en avoir plus. Puis en plus ils n'ont pas accès à Internet haute vitesse encore, ça va sûrement venir, donc il devrait y en avoir plus. Donc, c'est une répartition... c'est un travail, puis, ce travail-là, je ne suis pas certaine qu'il est fait correctement. Puis c'est un snobisme peut-être, oui, mais c'est surtout une méconnaissance, tu sais.

M. Poulin : Oui, bien, on en est là. Puis, avant de céder la parole à mon collègue le député de Saint-Jean, je pense que, si... et c'est pour ça que, tout à l'heure, on l'a abordé, les agences de presse, la façon dont on explique à nos clients où ça fonctionne, où ça fonctionne moins. J'étais à Chapais-Chibougamau cet été, la radio, le journal a un rôle clé hyperimportant. On fabrique des vedettes locales incroyables avec nos stations de radio et nos différents médias. Alors, c'est évident qu'il va falloir faire un tour de roue supplémentaire, mais, si le gouvernement donne l'exemple, je pense qu'il y a bien des gens qui vont suivre par la suite. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Jean.

M. Lemieux : J'ai déjà animé Génies en herbe, alors on va... Vous vous souvenez comment ça marchait, Génies en herbe? Là, on est rendus à la fin, ça va aller vite. Je veux juste savoir, dans votre vision des choses et dans la pratique que vous faites, est-ce que c'est la même chose, selon vous, dans les mêmes marchés, pour l'écrit.

Mme Vachon (Catherine) : Je suppose que oui, je suppose que oui. Nous, évidemment, c'est la radio, qui est notre client, mais la façon dont on se fait répondre, dans les agences, sur la façon dont les choses sont planifiées... C'est sûr que nous, on est tributaires des réseaux, des réseaux de radio. Donc, quand ils disent qu'ils s'en vont... on couvre les régions, je m'excuse, Rimouski, bien, ça ne couvre pas New Carlisle.

M. Lemieux : Ah! puis ils ont leur propre station, à New Carlisle, et René Lévesque était...

Mme Vachon (Isabelle) : Oui, c'est ça, mais elle n'est pas achetée.

Mme Vachon (Catherine) : Mais elle n'est pas achetée, c'est ça.

M. Lemieux : Oui, non, je sais bien. Bien non, mais, je veux dire, ça ne couvre pas New Carlisle. Bien, vous n'auriez pas gagné à Génies en herbe, c'est juste cinq secondes.

Bon, l'autre question, relativement rapide : Est-ce que c'est la même réalité? Puis je n'essaie pas de ménager le gouvernement là-dedans, là, mais vous avez d'autres gros clients à part le gouvernement, hein, vous avez parlé de GM, vous avez d'autres gros clients nationaux. Est-ce que c'est le même combat?

Mme Vachon (Isabelle) : Pas pour tous les clients.

M. Lemieux : Parce que?

Mme Vachon (Isabelle) : Parce qu'il y en a qui reconnaissent la valeur de la radio régionale et qui l'utilisent amplement. Il y a des grands clients qui regardent où sont leurs concessions. S'il y a une station de radio, ils l'achètent systématiquement, et ça existe.

Mme Vachon (Catherine) : On a des franchisés... bien, prenons un exemple au hasard, McDonald's ou Tim Hortons à Mont-Laurier, s'il y a de la publicité nationale sur sa station de radio locale et qu'il voit un impact direct sur ses ventes, il reconnaît la valeur de l'apport publicitaire en radio, bien, il va revenir.

Mais, juste pour ajouter, le gouvernement, ce n'est pas un client comme les autres. Le gouvernement, en plus de vouloir rejoindre, avec une stratégie efficace, le plus de gens possible, a le devoir... bien, un devoir moral d'équité. Donc, c'est ça qu'on défend. Mais là, en plus, s'ajoute la question de survie dans le cas d'une crise. Ça fait que, là, ce n'est plus une question juste d'un budget qu'on n'a pas, puis qu'on devrait avoir, puis que ce n'est pas juste, c'est que, là, cet argent-là, on en a besoin pour notre survie. Ça fait qu'avant de parler d'opération sauvetage, si on pouvait juste régler cette question-là, qui est un «win-win», là, bien, au moins on aurait un petit bout de chemin de fait, puis après ça on verra s'il y a d'autres solutions qui pourraient être apportées.

M. Lemieux : Je suis tout à fait d'accord, d'autant plus que c'est une responsabilité, de la part du gouvernement, de parler à chaque citoyen, quelle que soit l'urgence, ou la cause, ou la raison, là. À quelque part, il n'y a pas de citoyens de deuxième zone, mais il y en a qui sont dans une zone... Moi, je dis toujours que Montréal, c'est juste l'autre moitié du Québec, hein? C'est méchant, de le dire comme ça, mais à quelque part, quand on est dans les régions, on finit par le voir, là, à quelque part. Vous alliez dire quelque chose, je vous ai coupée.

Mme Vachon (Isabelle) : Bien, j'allais dire que le seul moment où le gouvernement utilise toutes les stations... bien, pas le gouvernement, mais, quand c'est le temps des élections, quand c'est le temps de faire sortir le vote, le DGEQ achète systématiquement toutes les stations de radio.

Une voix : ...les partis, hein?

Mme Vachon (Catherine) : Les partis? Non.

Mme Vachon (Isabelle) : Non, pas les partis.

M. Lemieux : Justement, faites notre éducation et puis... à moins que des mains se lèvent de mon côté de la table, il nous reste 3 min 10 s.

Une voix : On est les derniers, on peut continuer.

M. Lemieux : Non, non, mais il y en a d'autres.

Le Président (M. Ciccone) : Quatre minutes.

M. Lemieux : Ah! quatre minutes, c'est encore mieux, faites notre éducation. Parce que j'ai travaillé toute ma vie dans les médias, mais le placement média, ça reste encore un mystère, puis je pense que c'est parce que les gens qui travaillent dedans veulent que ça le reste, à quelque part. C'est dur à suivre. Même quand on est dans les médias, c'est dur à suivre. Pourquoi vous, vous faites ça? Pourquoi ils ont besoin d'intermédiaires? Pourquoi vous faites juste ceux-là puis pas les autres? Parce qu'il y en a d'autres, indépendants, tu sais.

Mme Vachon (Catherine) : Bien, dans les régions, ils n'ont pas... la vente nationale, c'est très différent de la vente locale, où les gens ont leur représentant sur place qu'ils vont rencontrer, les commerces de proximité, puis, bon, ils se connaissent, et tout. Pour la vente nationale, c'est de la négociation avec des agences du Québec, de Toronto, même des États-Unis, puis ça prend, disons, une expertise un peu différente. Et, nous, pourquoi on a une expertise en radio régionale? Parce que les grands groupes ont déjà une force de vente qui est capable de faire ça pour leurs stations.

M. Lemieux : Là, vous venez de mettre le doigt sur... pas une partie du problème mais une partie de la raison pour laquelle le grand public ne comprend pas. Quand on dit «nationale», dans la tête du monde, c'est national. Alors, quand vous dites «les grands groupes», vous parlez des deux grandes chaînes qui sont assises à la table nationale. Mais combien de pourcentage du Québec, en têtes de Québécois, ils couvrent, les deux grands groupes radio au Québec, grosso modo, là? Plus ou moins 5 %?

Mme Vachon (Catherine) : Bien, je ne pourrais pas vous donner de pourcentage, mais ce qui arrive, c'est que ces groupes-là, Cogeco et Bell, sont présents dans les mêmes marchés, les deux. Ils sont achetés, les deux, dans les mêmes marchés. Il y a comme une surexposition dans certains marchés puis une non-exposition ou sous-exposition dans d'autres. Qu'est-ce que ça représente, comme pourcentage? Il faudrait faire le calcul, là. On le sait, où est-ce qu'ils sont : Montréal, Québec, Gatineau, Sherbrooke, Trois-Rivières, Rimouski.

• (17 h 30) •

M. Lemieux : Je vais poser ma question à l'envers. Combien du Québec est un désert... Combien de... pas de pourcentage, mais... la proportion québécoise non desservie ou mal desservie, parce qu'il y a des exceptions, comme Beauce, là, récemment, mais combien du territoire est mal desservi, quand on dit : Ah! on a acheté national, nous autres, on a fait un «mixed media» puis on a mis national radio?

Mme Vachon (Catherine) : Bien, comme Isabelle disait tantôt, dans toutes les régions qu'on représente — on ne les représente pas toutes — le seul organisme gouvernemental qui retient les stations qu'on représente, c'est Élections Québec, et ça tend à baisser dans tous les ministères. Le ministère des Transports annonçait, le MSSS annonçait. Là, c'est des pinottes, puis des fois, certaines stations, zéro.

M. Lemieux : On s'est fait dire, tout à l'heure... là, c'est vrai que mon temps achève, par exemple, mais on s'est fait dire, tout à l'heure, que même les médias sociaux... oui, on peut remonter, après ça, jusqu'aux GAFA, mais que M. Bouchard, d'Icimédias, avec les hebdos, disait : On est capables de gérer l'investissement média de notre client. Mon vendeur de souliers, qui me donne 10 000 $ pour sa campagne, il en veut un peu, de médias sociaux ou il en veut même beaucoup. Puis, si moi, je lui place... faire du placement, je n'ai pas compris ça encore, là, mais, si moi, je lui place, au moins je peux faire une cote là-dessus, au moins je peux gérer sa campagne, il y a de l'argent pour moi là-dedans. Le «mixed media», il a changé énormément. Est-ce qu'on est rendus au bout du changement, là, ou ça continue de bouger énormément?

Mme Vachon (Isabelle) : On n'est pas au bout du changement.

M. Lemieux : Non?

Mme Vachon (Isabelle) : Je pense qu'on ne verra pas le bout.

Mme Vachon (Catherine) : On remarque, cependant... nous, dans les achats qu'on reçoit par les clients nationaux réguliers, qui sont les bannières, là, les grosses bannières qui sont présentes dans tous les marchés, on a remarqué, au fil des ans, là, avec l'arrivée des médias sociaux, des tentatives de... bon, cette année, woups! tout d'un coup, on n'avait plus de budget ou une baisse de 80 % puis on apprenait par la bande que ça s'en allait aux réseaux sociaux...

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Vachon (Catherine) : ...puis l'année suivante, ils revenaient.

M. Lemieux : Merci. Vous gagnez Placements en herbe. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant un membre de l'opposition officielle, Mme la députée de Verdun.

Mme Melançon : Mmes Vachon, bonjour. Vous avez été très assidues, je tiens à le dire, là, on voyait, hier, votre écoute. Et ce que je comprends de ce que vous abordez, c'est d'abord qu'il n'y a pas de coordination régionale, un manque de connaissances quand il y a quelque chose qui se passe dans une région puis que, finalement, on ne l'aborde pas dans ladite région où est-ce qu'on devrait le faire. La différence, je vous dirais, entre la... puis là c'est ma lecture à moi, là, puis vous me corrigez si j'ai tort, mais la différence entre la pub gouvernementale puis la pub qui vient de grands acheteurs, c'est que ça rapporte aux grands acheteurs, puis ils le savent, que ça leur rapporte dans certaines régions, alors que, le gouvernement, ça ne rapporte pas. Et c'est sur ces balises-là, je trouve, où il y a une déficience, puis là on en apprend jour après jour, heure après heure, là.

Je connais très, très bien CHLC, mon ami Georges Daviault, parce que moi, j'ai fait le choix, un jour...

Mme Vachon (Isabelle) : ...nous écoute, en ce moment.

Mme Melançon : Ah! bien, alors, cher Georges, je te salue. Il va rire, parce que je les connais très bien. Moi, j'ai fait le choix d'aller à Baie-Comeau il y a plusieurs années, j'ai habité la Côte-Nord pendant près de cinq ans. Et c'est vrai que, lorsque l'on parle des régions, c'est comme si on parlait des régions, hein, parce qu'on veut... Et pourtant, et pourtant, les régions, c'est le nerf de la guerre du Québec. Et je suis très fâchée d'entendre ce que vous m'avez... ce que vous avez dit tantôt, je vais le dire comme ça, là. Je trouve ça dérangeant, choquant, et je ne sais pas qui s'occupe du côté gouvernemental, puis je vous regarde, puis là je n'envoie pas aucune flèche, je tiens à le dire officiellement, mais il va falloir qu'il y ait un spécialiste à bord, puis qu'il reste là, puis qu'on ait du monde de talent qui vont comprendre ce qu'on est en train de discuter, actuellement, puis qui vont rester là aussi, parce qu'il y a souvent des jeux de chaise musicale, c'est vrai. Puis dans les ministères, là... Moi, j'ai été à la tête d'un ministère comme ministre, mais j'ai aussi été dans des ministères comme directrice de cabinet, puis on avait beau envoyer des directives... et là vous me voyez venir. Le 2 mai dernier, parce que je sentais la chose venir, j'ai moi-même présenté une motion à l'Assemblée nationale, qui a été votée par l'ensemble des élus. Et là j'apprenais tout à l'heure... j'ai posé la question, parce que je ne le savais pas, s'il y avait eu une directive, et clairement on m'a répondu que non, on m'a dit qu'on n'avait rien vu encore, de changement. Je pense qu'un des gestes urgents à poser, c'est celui-ci. Et là je me tourne vers les membres de la commission et de la partie gouvernementale : passez le message. Moi, je ne serai pas fâchée si ça commence là, là, mais, honnêtement, il y a quand même un problème. Entre le 2 mai... juin, juillet, août, bientôt septembre, quatre mois, on a voté une motion à l'Assemblée nationale. Je comprends qu'on revient de vacances, là, puis je comprends, mais je pense que tout ne ferme pas l'été. En tout cas, moi, mon bureau de comté, ça a roulé tout l'été. Ça fait que, mesdames, je veux juste vous dire que, ce côté-là, moi, je l'ai entendu, moi, je vais le défendre. Puis, s'il y a un manque de leadership, bien, je vais prendre l'oxygène qu'il y a puis je vais le prendre, le leadership, s'il faut qu'on le prenne. Mais clairement, actuellement, il y a une directive qui aurait dû être donnée.

Je vous reviens sur l'idée des GAFA, puis j'entendais... donc les Google et Amazon, les Facebook qui viennent, puis j'ai posé la question tout à l'heure, puis, j'imagine, c'est la même chose, parce qu'à la radio il y a aussi des clics, hein? Vous autres, vous le savez, combien de personnes viennent cliquer. Puis souvent, du côté des Amazon et Google, ils veulent faire calculer le nombre de clics. Comment est-ce que vous... Êtes-vous compétitifs? Je vais dire ça comme ça, puis là, «let's go», vendez-moi votre affaire, parce que...

Mme Vachon (Catherine) : Vas-y.

Mme Vachon (Isabelle) : Bien, en fait — tu pourras compléter — si la radio est compétitive?

Mme Vachon (Catherine) : En termes de qualité de sondages?

Mme Vachon (Isabelle) : Bien, oui, en qualité... en termes d'écoute, de sondages et de réinvestissement dans... ne serait-ce que ça. Parce que l'argent qui est dépensé dans la station de radio locale, elle reste dans la région, elle est réinvestie, tu sais, c'est un dollar qui se promène puis qui revient. Celui qu'on prend puis qu'on envoie dans les GAFA, on l'envoie par en arrière puis on l'envoie en Californie.

Mme Melançon : Puis on ne le voit plus.

Mme Vachon (Isabelle) : Puis on ne le voit plus.

Mme Melançon : C'est ça. Alors, hier — vous étiez là, et je vous ai senties même un peu interpelées — il y a un groupe... et là j'oublie lequel, je ne voulais pas aller refouiller dans chacun de mes onglets, mais il y a un groupe qui a dit : Tout ce qui s'appelle publicité, qui est envoyé dans les GAFA... parce que, dans le... les gens reçoivent un crédit d'impôt, hein, les entreprises qui font de la publicité, là, peuvent avoir un crédit d'impôt. Si on les soustrayait pour pouvoir, justement, vous rendre encore plus attractifs, est-ce que vous pensez que ça peut changer le visage de la façon dont sera faite la publicité chez certains?

Mme Vachon (Catherine) : Bien, il faudrait voir les raisons pour lesquelles les agences de publicité, qui ont quand même beaucoup de pouvoir, à ce que nous, on en comprend, en termes stratégiques, elles choisissent d'aller vers les médias sociaux.

Nous autres, quand on parle d'équité, on parle d'équité en termes géographiques, mais je pense que démographiques aussi, c'est important. Puis de s'adresser juste aux jeunes, bien, tu rates ta cible, surtout quand tu dis que les vieux sont... parce qu'ils disent ça beaucoup, là, qu'en radio régionale l'auditoire est plus âgé. Mais, quand j'entends une publicité du MSSS dire que les dangers de la grippe sont particulièrement sévères chez la population plus âgée, bien, comment ça se fait, que vous n'êtes pas à la radio, là? Tu sais, il y a quelque chose, dans une uniformisation de planification, qui ne tient même pas compte de la cible à laquelle tu t'adresses. Puis, en termes de mesures, la radio devient de plus en plus compétitive, avec une nouvelle firme de sondage avec laquelle les stations deviennent beaucoup partenaires. Il y a eu beaucoup de partenariats qui ont été signés, parce que c'est plus abordable, puis la mécanique est... passe par le streaming sur le Web, donc ça va être mesurable de façon aussi compétitive que ce qu'on retrouve sur le Web.

Mme Vachon (Isabelle) : Sur le Web, oui, avec des données hebdomadaires, là, ce qu'on n'a pas avec Numeris, en ce moment.

• (17 h 40) •

Mme Melançon : J'en ai parlé un peu plus tôt, et là ça va être un peu plus une critique, du CRTC... parce que, de toute façon, vous connaissez par coeur, vous autres, le CRTC, là, j'en suis persuadée. Qu'est-ce qu'on devrait, comme Québécois, dire à Ottawa, actuellement, des lois sur le CRTC en radiodiffusion?

Mme Vachon (Isabelle) : À quel niveau?

Mme Melançon : Bien, en représentation, parce qu'on a manqué certaines ouvertures pour aller... Parce que vous savez qu'ils ont réouvert les deux lois.

Mme Vachon (Isabelle) : Oui, oui, oui.

Mme Melançon : Moi, je veux savoir, si vous étiez ministre de la Culture, qu'est-ce que vous iriez dire directement à Ottawa pour défendre les intérêts du Québec au CRTC.

Mme Vachon (Isabelle) : Bien, en fait, c'est de maintenir, du moins, ce qu'on a en ce moment, là, de ne pas détruire ce qui est en place. Je ne sais pas si c'est à ce niveau-là, que vous voulez m'amener, mais pour maintenir la culture vivante, il faut qu'elle soit exposée dans toute sa diversité, et, pour ça, ça prend des médias un peu partout, ça prend des médias différents puis ça prend des médias régionaux, puis ça, il ne faut pas toucher à ça.

Mme Melançon : C'est très clair et c'est très bien entendu. Je veux juste vous dire, si les artistes font des tournées dans chaque région, c'est justement pour pouvoir faire, hein, rayonner leur savoir-faire, puis là je...

Mme Vachon (Catherine) : ...

Mme Melançon : Pardon?

Mme Vachon (Catherine) : Ils aiment ça.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Melançon : Bien, oui, c'est exactement là où je m'en allais, ils veulent aller... justement, ils veulent faire la tournée.

Mme Vachon (Catherine) : Bien oui, absolument.

Mme Melançon : Et je veux juste revenir sur la radio, parce que vous parlez de démographie. Souvent, on se dit qu'on est dans une population vieillissante, là, mais est-ce que je suis rendue «out» à ce point-là, de penser que je suis... Moi, j'aime ça, la radio, puis je pense que je ne suis pas trop vieille, mais je pense que les jeunes aiment ça, la radio.

Le Président (M. Ciccone) : En 20 secondes, s'il vous plaît.

Mme Vachon (Catherine) : Bien, je pense que, oui, les jeunes aiment ça, la radio. Oui, ils sont... Nos enfants ont 25 ans, là, puis ils ne sont pas... ils sont nés avec la radio qui jouait dans la maison mais ils ont des habitudes de consommation différentes. Mais je pense qu'en région, quand tu y retournes, parce que, bien souvent, tu vas étudier dans un grand centre, tu reviens en région, tu veux savoir ce qui se passe à ton conseil de ville, tu veux savoir si ton équipe de balle molle a gagné, puis ça, ça ne changera pas, puis il y a juste la radio qui peut te donner ça...

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je suis prêt, maintenant, à reconnaître la députée de Taschereau pour 2 min 30 s.

Mme Dorion : Merci. Bonjour. Merci pour la présentation. J'aimerais savoir, dans la trentaine de radios que vous représentez, est-ce que toutes font de l'information. Est-ce que toutes ont un journaliste? Puis est-ce que c'est de l'information locale, sur quoi ils travaillent?

Mme Vachon (Isabelle) : Oui. Toutes les stations de radio font de l'information locale mais pas au même niveau. Elles y vont selon leurs moyens, et malheureusement, bien, les moyens diminuent. Et souvent, bien, c'est là qu'elles ont tendance à couper, parce que c'est ce qui coûte cher, souvent, dans une station de radio, mais elles sont écoutées pour ça, les stations de radio locales...

Mme Vachon (Catherine) : C'est leur raison d'être.

Mme Vachon (Isabelle) : ...parce que c'est leur raison d'être, parce qu'elles parlent aux gens de leur région. Puis d'ailleurs le taux de rétention d'un message sur une station de radio locale est plus important que s'il est entendu sur une station nationale, par exemple. Vous vous promenez en voiture, vous entendez le même message sur votre station de radio locale de votre ville, il s'adresse à vous. Vous l'entendez, le même message, sur une station de radio nationale, il s'adresse moins à vous. Ça fait que c'est pour vous dire à quel point ce qui est diffusé sur une station de radio locale est important.

Mme Dorion : Mais donc il y a des journalistes qui, sur place, pour la radio, enquêtent sur la réalité locale.

Mme Vachon (Isabelle) : Sur place, bien oui, certainement. Oui, oui, oui.

Mme Vachon (Catherine) : De la même manière que dans les hebdos. Pas de salle de nouvelles dans une station de radio locale, ça ne se peut pas, même s'il y a juste un journaliste. Mais c'est sûr qu'à un moment donné, quand tu n'as plus les budgets, tu coupes, tu coupes, tu coupes. Les réceptionnistes sont aussi un peu vendeuses, un peu...

Mme Vachon (Isabelle) : Un peu scriptes, un peu routage, un peu tout.

Mme Vachon (Catherine) : ...un peu scriptes, un peu routage, un peu comptabilité. S'il y a un poste où on essaie de garder une certaine étanchéité puis une certaine indépendance, c'est celui du journaliste, puis c'est important qu'il soit là, sinon ça n'existe plus. Ce n'est pas de la radio divertissement de la façon dont on l'entend dans les grands centres, c'est une radio d'information.

Mme Dorion : Puis, dernière question, il nous reste 15 secondes, mais est-ce qu'on devrait imposer le revenu des GAFA, ici, qui ne paient pas d'impôt, des grandes entreprises numériques pour redistribuer ça?

Une voix : Oui.

Mme Dorion : Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. Je suis prêt, maintenant, à reconnaître le député de Rimouski pour une période de 2 min 30 s.

M. LeBel : Merci. J'ai posé la question aux gens des radios communautaires sur l'équité des placements médias, ils n'étaient pas certains mais ils avaient deviné que ce n'était pas équitable, là, même dans son propre réseau, il y avait des radios communautaires en région qui n'avaient pas les mêmes montants que d'autres, puis le gars du Pontiac, qui disait que, lui, il vivait quelque chose par rapport à la maladie de Lyme et que l'investissement en médias était fait dans les Laurentides ou bien ailleurs, tu sais. Ça fait que je pense qu'il y avait quelque chose là. Les hebdos nous ont dit à peu près la même affaire. Puis là, moi, quand je vois ça, là, ça me met en beau saint-sacrement, de voir que le ministère des Transports, aucune campagne régionale, Hydro-Québec... Puis quel imbécile qui a pensé qu'en mettant ça juste à Rimouski, il va couvrir tout le Bas-Saint-Laurent? Tu sais, il y a peut-être des cours de géographie qui devraient se donner, au gouvernement.

Puis, tu sais, quand on parle des GM puis McDo, à Rivière-du-Loup, GM et McDo, c'est sûr qu'il va dire à son réseau : N'achetez pas à Rimouski, ce n'est pas ma clientèle, il faut acheter... — bien, Groupe Simard, je les connais, moi, la gang de Rivière-du-Loup — c'est là qu'il faut aller. Tu sais, c'est eux autres, qui vont rejoindre la clientèle. Les autres, ils ont allumé, les GM et les McDo. Pourquoi il n'y a personne, au gouvernement, qui allume? Puis augmenter aussi les budgets, augmenter la publicité dans nos médias régionaux. On parle d'équité, mais, je pense qu'on est rendus là, il faut aussi encourager nos médias, augmenter la publicité. Dans le Bas-Saint-Laurent, une personne sur quatre qui a 65 ans et plus, quelqu'un devrait aussi allumer que c'est des personnes vieillissantes, qu'on doit passer par la radio si on veut les atteindre, puis passer par la radio pas juste à Rimouski, partout, à Montmagny, à Rivière-du-Loup, à Matane, à New Carlisle, un peu partout.

J'ai posé tantôt... je me suis dit : Est-ce qu'une façon de faire ça, de s'assurer que ça va en région, de décentraliser la décision aux directions régionales des ministères plutôt que de garder ça à Québec, ça pourrait être une des solutions?

Mme Vachon (Catherine) : Bien, au fond, ce qu'il faut, c'est bien, bien simple, là, c'est que ça soit systématiquement dans toutes les régions, parce que le message, il s'adresse très, très rarement à une partie de la population. Un message du gouvernement, c'est un message qui s'adresse à l'ensemble des Québécois, sauf, je ne sais pas, moi...

Mme Vachon (Isabelle) : ...où il y a des régions qui ne sont pas touchées...

Mme Vachon (Catherine) : Oui, oui, bon, c'est ça.

Mme Vachon (Isabelle) : ...ou un problème d'Hydro-Québec sur certains ponts ou certains barrages.

Mme Vachon (Catherine) : Mais le pot...

Mme Vachon (Isabelle) : ...le cellulaire au volant...

Mme Vachon (Catherine) : ...la grippe, ça s'adresse à tout le monde, donc ça devrait être systématique, puis il n'y a plus de calcul à faire, c'est comme ça, puis c'est tout le monde qui l'a.

Le Président (M. Ciccone) : En terminant.

M. LeBel : Juste dire que ce n'est vraiment pas une punition, de vivre en région, puis il y a plein de choses qui se vivent en région, puis on a besoin d'entendre parler de ça, puis on a besoin de donner à nos médias la possibilité d'en parler : les cégeps, les universités, la recherche, la culture, le ROSEQ, dans l'Est du Québec, il y a plein de choses à faire. Merci.

Le Président (M. Ciccone) : Merci, M. le député de Rimouski. Je reconnais maintenant la députée de Marie-Victorin pour deux minutes.

Mme Fournier : Merci beaucoup pour votre présentation. Je partage la surprise et l'indignation, en quelque sorte, de mes collègues quant au placement publicitaire qui est réalisé par le gouvernement, surtout quand on pense que c'est des informations d'intérêt public, donc des choses, comme vous l'avez bien dit, qui doivent être entendues par un maximum de Québécois partout en région. Entendons-nous bien, il y a quand même, je dirais, peut-être deux types de publicité gouvernementale. Il y a tout ce qui est d'intérêt public, donc les informations, vous avez fait référence au cannabis, on a parlé de maladie de Lyme, et tout ça. Bon, il y a aussi l'autre partie, qui est peut-être plus la promotion de certaines politiques publiques ou, par exemple, quand on fait la promotion du budget, tout ça, qui ne sont pas nécessairement dans la même catégorie, en tout cas, de mon point de vue. Et je serais curieuse, justement, de savoir quelle est la proportion, si vous avez l'information, entre, je dirais, peut-être les campagnes d'information publiques versus la promotion, disons, de certains programmes gouvernementaux.

Mme Vachon (Catherine) : Bien, d'une manière générale, comme on disait tantôt, la plupart des messages sont d'intérêt public mais relèvent également de ce qu'on appelle la publicité du gouvernement du Québec. La SAAQ... la SAQ et les loteries, c'est sûr qu'on ne peut pas mettre ça dans la même catégorie, que tout le monde a droit de savoir que le rosé est en vente cette semaine, mais il reste quand même que c'est planifié par les mêmes gens selon les mêmes barèmes. Puis, quand on va au-delà de l'équité puis qu'on parle de moteurs de survie économique, bien, moi, je ne fais plus de distinction, rendue là, parce que je me dis que, les SAQ, il y en a partout, puis pourquoi ne pas avoir la publicité de la Société des alcools dans toutes les régions? Pourquoi certaines plutôt que d'autres?

Le Président (M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Fournier : Est-ce que vous catégorisez ou vous rentrez tout ça dans la même...

Mme Vachon (Catherine) : Mais ce n'est pas nous qui faisons les catégories, c'est les agences elles-mêmes, puis ça rentre dans le budget global du gouvernement.

Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, Mme Vachon et Mme Vachon. Je vous remercie pour votre contribution.

La commission ajourne ses travaux jusqu'à demain, mercredi 28 août 2019, à 9 h 30, au salon rouge. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 17 h 50)

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