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Version finale

40th Legislature, 1st Session
(October 30, 2012 au March 5, 2014)

Wednesday, August 14, 2013 - Vol. 43 N° 50

Special consultations on the report entitled Innovating for a Sustainable Retirement System (D’Amours Report)


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Table des matières

Auditions (suite)

Aon Hewitt inc.

Mercer (Canada) ltée

Morneau Shepell Ltd.

Normandin Beaudry, Actuaires conseil inc.

Towers Watson Canada inc.

PBI Conseillers en actuariat ltée

Institut canadien des actuaires (ICA)

Syndicat canadien de la fonction publique, Québec (SFPQ-Québec)

Intervenants

M. Irvin Pelletier, président

Mme Agnès Maltais

M. Henri-François Gautrin

M. Jean-Marie Claveau

M. Alain Therrien

M. Raymond Bachand

M. Marc Picard

M. Gilles Chapadeau

Mme Nicole Ménard

*          M. Claude Lockhead, Aon Hewitt inc.

*          M. Jocelyn Tremblay, idem

*          M. Michel St-Germain, Mercer (Canada) ltée

*          M. Hubert F. Tremblay, idem

*          Mme Danielle Lamarche, Morneau Shepell Ltd.

*          M. Gino Girard, idem

*          M. Richard Béliveau, idem

*          M. Richard Bourget, Normandin Beaudry, Actuaires conseil inc.

*          M. Pierre Parent, idem

*          M. Martin Gélinas, idem

*          M. Pierre Charrette, Towers Watson Canada inc.

*          M. Stephane Jean, idem

*          M. Charles Lemieux, idem

*          M. Pierre Bergeron, PBI Conseillers en actuariat ltée

*          Mme Nathalie Jutras, idem

*          Mme Sonia Massicotte, idem

*          M. Michel C. Simard, ICA

*          M. Jacques Lafrance, idem

*          M. Denis Latulippe, idem

*          M. Denis Bolduc, SCFP-Québec

*          M. Marc Ranger, idem

*          M. Jean Belleville, idem

*          M. Sylvain Pilon, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente et une minutes)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte et je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur le rapport intitulé Innover pour pérenniser le système de retraite, communément appelé le rapport D'Amours.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Dubourg (Viau) est remplacé par M. Bolduc (Mégantic) et M. Dubé (Lévis) par M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière).

Auditions (suite)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, Mme la secrétaire. À l'ordre du jour, nous avons, pour cet avant-midi... nous rencontrons des représentants de la firme Aon Hewitt — je ne sais pas si je le prononce bien, en tout cas vous me corrigerez — représentée par M. Claude Lockhead et M. Jocelyn Tremblay; par la suite, les représentants de la firme Mercer, M. Michel St-Germain, Hubert F. Tremblay; et, en fin d'avant-midi, Morneau Shepell, représentée par Danielle Lamarche — Danielle-e — Gino Girard et Richard Béliveau.

Alors, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue aux représentants de Aon Hewitt. Et puis, avant de leur laisser la parole, je leur dis tout simplement que c'est une rencontre de 45 minutes, alors je vous demanderais d'essayer de vous limiter à une présentation de 10 minutes pour permettre les échanges. Au niveau des échanges, nous faisons actuellement un petit recalcul. Je vous dirai tout à l'heure, là, combien le temps est réparti... le 35 minutes est réparti entre les différents groupes parlementaires.

Alors, M. Lockhead ou Tremblay, vous avez la parole, en présentant votre entreprise d'abord, et vous présenter personnellement tous les deux aussi.

Aon Hewitt inc.

M. Lockhead (Claude) : Alors, tout d'abord, merci beaucoup de nous permettre de présenter nos observations à la commission. Nous espérons qu'avec nos interventions... En fait, avec nos interventions, on cherche à contribuer positivement à faire avancer le système de retraite québécois.

Alors, je me présente, mon nom est Claude Lockhead, je suis associé exécutif chez Aon Hewitt et chef de la pratique de consultation dans le domaine des régimes de retraite. Avec moi, Jocelyn Tremblay, associé principal également dans la pratique retraite et responsable de notre clientèle dans le secteur public.

Aon Hewitt est un leader mondial dans les services-conseils et solutions d'impartition en capital humain. Nous aidons les organisations du secteur public et du secteur privé à résoudre des problèmes complexes reliés à leur programme d'avantages sociaux, incluant leur régime de retraite. Nous sommes présents au Québec depuis plus de 45 ans et représentons une force importante avec nos 565 employés répartis à nos bureaux de Québec et de Montréal. Nous sommes responsables d'environ 200 évaluations actuarielles parmi les quelque 800 régimes de retraite sous la surveillance de la Régie des rentes du Québec.

M. Tremblay (Jocelyn)  : Alors, bonjour tout le monde. Alors, comme introduction, mentionnons d'entrée de jeu... ce qu'on dit, c'est bravo au comité d'experts pour le travail accompli, 18 mois de travail à réfléchir sur comment améliorer le système d'épargne-retraite. Alors, de façon générale, on est d'accord avec les constats. Nous sommes d'accord avec les constats et plusieurs des recommandations qui sont formulées par le comité D'Amours. Toutefois, on souhaite suggérer des améliorations sur certains éléments qui sont recommandés.

Je pense que tout le monde s'entend sur le fait que le statu quo, au niveau de l'épargne-retraite ou du système que nous avons, n'est pas une option. Alors, il faut faire quelque chose. Par contre, il nous apparaît clair qu'il y a certains éléments qui sont recommandés... certaines des recommandations méritent une plus longue réflexion pour assurer l'adhésion d'un plus grand nombre d'intervenants. Alors, quand on cherche à apporter des solutions, il faut viser une adhésion large, et donc prendre un peu plus de temps serait approprié, d'autant plus que, les conditions favorables que nous connaissons depuis le début de l'année 2013, il y a une embellie dans la situation financière des régimes de retraite, et ça, ça nous donne un peu plus de temps pour réfléchir sur certaines des recommandations.

Alors, profitons de la hausse des taux d'intérêt que nous connaissons, des rendements des marchés qui sont bons, qui améliorent la santé financière, en plus, les mesures d'allégement qui sont là, tous ces éléments-là nous donnent un peu plus de temps. Alors, il y a moins d'urgence d'agir sur certains éléments, et certains éléments méritent qu'on réfléchisse un peu plus. Et, contrairement à ce qui est mentionné dans le rapport, où il est dit que toutes les recommandations sont indissociables, bien, nous, on est d'opinion contraire et on pense que certaines recommandations pourraient s'appliquer et d'autres non. Alors, tout n'est pas indissociable dans les recommandations du rapport d'Amours.

Alors, le premier élément, la rente longévité — c'est les recommandations, dans le fond, 1 et 2 du rapport D'Amours — alors, ça, c'est un élément qui serait, à notre avis, dissociable du reste des recommandations. Donc, en gros, on est en accord avec les objectifs qui sont poursuivis par l'introduction de la rente longévité, objectifs poursuivis étant, dans le fond, de mutualiser les risques de longévité. Alors, on sait que c'est très, très difficile à prévoir, cette longévité-là, et donc de les mutualiser, ça renforcit le système, donc on est d'accord avec ça.

Par contre, il y a des défis clairs associés à la rente longévité. Et deux défis qui nous apparaissent évidents, c'est pour les bas revenus. Alors, pour les bas revenus, ça ferait en sorte que... d'introduire la rente longévité, ça impliquerait des diminutions dans ce qu'on appelle le supplément de revenu garanti, et donc cet élément-là, à notre avis, n'est pas souhaitable. Donc, pour chaque dollar, par exemple, de rente qu'on recevrait de la rente longévité, on perdrait, en quelque sorte, 0,50 $ en supplément de revenu garanti. Donc, ça ne nous apparaît pas souhaitable. Et il y a tout l'élément de la compétitivité des entreprises québécoises évidemment qui est soulevé, à l'effet que, si on implante ça, bien, nos entreprises du Québec se retrouveraient moins compétitives que les entreprises qui sont ailleurs, parce qu'elles auraient à verser des cotisations dans ce système-là. Alors, il y a la compétitivité qui est un élément important.

L'autre chose, pour les employeurs qui offrent un régime à prestations déterminées, on privilégie, plutôt que la coordination — on sait que le rapport recommande que l'on se coordonne avec la rente longévité — nous, on recommande plutôt l'exemption, c'est-à-dire que, si un employeur offre un régime à prestations déterminées, bien, les travailleurs seraient exemptés de participer à la rente longévité au lieu de se coordonner. Pourquoi on est de cette opinion-là? Bien, ça assurerait un traitement égal entre les employeurs du secteur public et les employeurs du secteur privé parce que présentement les recommandations obligent la coordination pour les employeurs du secteur public, et ce n'est pas obligatoire pour les employeurs du secteur privé. Donc, avec l'exemption, tout le monde serait traité égal, ce qui, selon nous, est une bonne chose, et c'est plus simple. Alors, on sait que notre système n'est pas des plus simples, alors, si on peut trouver des façons de le rendre plus simple, bien, allons-y. Alors, c'est pour ça qu'on privilégie l'exemption plutôt que la coordination. Claude.

• (9 h 40) •

M. Lockhead (Claude) : Alors, sur les éléments de pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées, en commençant par la méthode de financement qui est suggérée, tout d'abord, rappelons qu'une méthode de financement vise deux objectifs. Tout d'abord, un financement stable et ordonné, donc, pour les promoteurs de régime, cela veut dire une cotisation qui est stable et pas trop volatile. Et le deuxième objectif, c'est la sécurité des prestations, donc pour les participants, cela veut dire que les fonds seront au rendez-vous pour respecter les engagements.

Afin de rencontrer ces objectifs, on aurait souhaité que le comité d'experts privilégie une méthode plus moderne que la méthode de capitalisation améliorée. Alors, sans tomber dans les méthodes très compliquées, comme les méthodes stochastiques, qui sont difficiles à comprendre, onéreuses pour les plus petits régimes, il existe des méthodes de projection relativement simples que tous les régimes de retraite peuvent se permettre avec les outils d'aujourd'hui.

Notamment, nous savons que la Régie des rentes du Québec a travaillé, avec des régimes particuliers et également avec son comité technique sur les régimes à prestations cibles avec une méthode de projection de la solvabilité qui rencontre justement les objectifs que je viens de mentionner. De plus, cette méthode de projection pourrait être calibrée pour le secteur public par rapport au secteur privé afin de refléter l'aspect de pérennité de ces organisations-là.

Au moment où le comité d'experts a écrit son rapport, il y avait une urgence d'agir pour remplacer la base de solvabilité comme base de financement. Toutefois, depuis le début de l'année, comme Jocelyn a mentionné, avec la hausse des taux d'intérêt, les bons rendements, les mesures d'allégement qui ont été annoncées pour 2014‑2015, s'il n'y a pas de catastrophe d'ici à la fin de l'année, les employeurs vont voir une baisse de cotisation d'équilibre importante l'année prochaine. Alors, on pense que ça donne... D'ailleurs, on suit un échantillon du régime de retraite, et le degré médian de solvabilité, depuis le début de l'année, est passé de 69 % à 84 % au 31 juillet. Alors, on pense que ça offre au gouvernement une fenêtre d'opportunité pour réfléchir un peu plus longtemps sur une méthode de financement ordonnée pour les régimes de retraite à prestations déterminées.

Si le gouvernement opte quand même pour la méthode de capitalisation améliorée, il y a deux aspects qui, à notre avis, méritent d'être revus. Un, le taux d'actualisation après la retraite, qui est basé ou qui est suggéré d'être basé sur des obligations corporatives long terme. Alors, les obligations corporatives, c'est un bassin très restreint, et on pense que ça va donner... ça va offrir de la volatilité dans les taux d'intérêt et dans la capitalisation. Alors, c'est un des aspects qu'on suggère de modifier, si la capitalisation améliorée est retenue. Et, l'autre aspect, on croit qu'il n'est pas nécessaire d'exiger que les cotisations d'équilibre ne puissent pas être réduites s'il y a des gains qui sont réalisés par le régime de retraite. Donc, on pourrait bien refléter les gains et réduire les cotisations d'équilibre sans toutefois reconsolider les déficits sur une période de 10 ans.

Concernant le partage des coûts, nous saluons la recommandation d'avoir plus de flexibilité dans la loi pour permettre les formules de partage de coûts entre les participants et les employeurs. Toutefois, on aimerait souligner que le partage des déficits ne représente pas nécessairement une recette miracle et peut quand même soulever des questions d'inéquité : inéquité notamment entre les participants actifs et retraités si on demande aux participants actifs d'assumer l'ensemble des déficits; inéquité entre les jeunes travailleurs et les plus âgés. Par exemple, comment expliquer à un nouveau travailleur qu'il doit payer 2 % ou 3 % de plus de son salaire pour le déficit auquel il n'a pas contribué parce qu'il n'était pas participant? Alors, ça offre des défis d'inéquité entre les participants et des défis de communication.

Pour les régimes du secteur public, une recommandation d'un partage automatique 50-50. Ce qu'on suggère, c'est que la loi puisse reconnaître d'autres formules de partage, lorsqu'il y a entente entre les parties. Alors, ça, c'est sur l'élément des partages de coûts. Si on va sur les autres éléments, restructuration des régimes...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Excusez, monsieur...

M. Lockhead (Claude)  : Oui?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Pour les autres éléments, peut-être que vous pourriez profiter de la période d'échange pour les faire valoir parce que votre 10 minutes sera terminé.

M. Lockhead (Claude)  : Il est déjà écoulé.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci. Pour le partage du temps, j'ai dit que je vous reviendrais. Dans le recalcul qu'on a, ça serait 15 min 30 s pour le parti gouvernemental; l'opposition officielle, 15 minutes; et le deuxième groupe d'opposition, quatre minutes.

Mme Maltais : Est-ce qu'on fait ça en 15-15? Comment on partage le temps?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : C'est comme vous préférez. On peut partager le temps...

Des voix : ...

M. Gautrin : ...on aime mieux en un seul bloc, je pense.

Mme Maltais : Oui, 15 minutes, on va avoir peut-être...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, Mme la ministre?

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, tout le monde. Bonjour. C'est le retour de cette commission parlementaire qui avait abordé en juin le suivi du rapport D'Amours. Bonjour, messieurs d'Aon Hewitt, c'est un plaisir de vous voir. Merci de nous avoir déposé ce mémoire.

On va voir beaucoup, aujourd'hui, la... C'est la journée des actuaires, si j'ose dire, plus le Syndicat canadien de la fonction publique ce soir. Vous êtes des experts en matière de calcul de solvabilité des régimes de retraite, vous avez beaucoup de clientèles. Première question, très rapide : Votre clientèle, est-ce que vous avez… Parmi vos clients, qui avez-vous? Avez-vous une variété? Avez-vous du public, du privé?

M. Lockhead (Claude)  : Oui. Bien, en fait, on a, parmi notre clientèle, un bon pourcentage, probablement 40 %, secteurs… 35 %, secteurs public, parapublic, et 60 % à 65 %, secteur privé.

Mme Maltais : D'où l'on voit le fait que vous abordiez l'équilibre entre ces secteurs-là dans votre mémoire. Merci beaucoup. Écoutez, M. D'Amours et les experts nous ont présenté leur rapport comme étant un rapport qui devait être... qui se tenait d'un seul bloc, la raison en étant principalement que, si on décide de mettre en place la rente longévité, il peut y avoir un impact sur les entreprises, sur les charges sociales qui sont tant aux personnes, aux individus qu'aux entreprises. Alors, ça s'associe donc à une renégociation des régimes à prestations déterminées actuels. Donc, c'est pour ça qu'on parle de «tenant d'un seul bloc». Il y a aussi, bon, évidemment, cette méthode de la capitalisation améliorée, et tout ça. Donc, il y a plusieurs éléments, mais que les experts et M. D'Amours nous présentent comme un tout.

Vous semblez ne pas être d'accord et dire que certains éléments doivent être dissociés. Je veux vous entendre sur deux choses. D'abord, quels sont ces éléments qui doivent être dissociés? Je pense que vous touchez, entre autres, à la rente longévité. Deuxièmement, j'ai lu votre mémoire et je sais que vous dites que la rente longévité pourrait affecter le supplément de revenu garanti et pourrait affecter la compétitivité des entreprises québécoises. Alors, vous dites, en même temps : D'accord. Alors, est-ce que vous êtes pour ou... La deuxième question, c'est : Est-ce que vous êtes pour ou contre la rente longévité? Est-ce que vous pensez que c'est une solution viable? Et, si elle l'est, quelles sont les conditions de la mise en place de cette rente longévité ?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. Lockhead.

M. Lockhead (Claude) : Alors, laissez-moi répondre tout d'abord à votre première question sur les éléments qui sont dissociables. La rente longévité, c'est un nouveau programme public, universel pour l'ensemble des travailleurs. On pense que la série de recommandations... il y a une quinzaine de recommandations qui touchent la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées. Et la grande majorité de ces recommandations-là n'ont pas de lien direct avec la recommandation de la rente longévité, sauf probablement la coordination. Donc, beaucoup des recommandations qui touchent la pérennité des régimes de retraite pourraient être dissociées de la rente longévité.

C'est sûr qu'il y a d'autres dispositions, sur l'âge maximal de retrait d'un REER et ces choses-là, qui vont probablement... qui sont en ligne avec la rente longévité. Mais la majorité des recommandations qui touchent la pérennité des régimes à prestations déterminées peuvent être dissociées de la rente longévité. Et, parmi les recommandations qui touchent la pérennité des régimes à prestations déterminées, on pense qu'il y a une série de recommandations qui pourraient être mises de l'avant plus rapidement. Et celles qui touchent la capitalisation pourraient être réfléchies plus longuement avant d'arriver à une méthode, là, pour les régimes de retraite québécois.

Mme Maltais : Question qui s'ajoute automatiquement suite à votre intervention... Bon, on sait que le mandat original, qui était le premier, là, le premier mandat des experts et de. M. D'Amours, était de voir à assurer la survie des régimes à prestations déterminées. La solution qui nous a été amenée est beaucoup plus englobante, elle revoit véritablement, en fait... les mots, c'est «vise à assurer la sécurité financière à la retraite». Donc, on passe de certains régimes particuliers à l'ensemble des régimes de retraite. Est-ce que, d'après vous, cette solution nous amène à assurer véritablement la sauvegarde des régimes à prestations déterminées, ce qui était le mandat initial du rapport D'Amours?

M. Lockhead (Claude) : Notre conclusion sur cette question-là, et on l'a mentionnée dans nos présentations à nos clients dans des déjeuners-causeries, la série de recommandations, qui est tout à fait souhaitable pour guérir un malade qu'étaient les régimes de retraite à prestations déterminées, ou à tout le moins le soigner, on pense que ça n'encouragera pas la mise sur pied de nouveaux régimes de retraite à prestations déterminées, d'une part.

Et, d'autre part, on pense que, dans le secteur public, avec cette série de recommandations là, qu'elles soient améliorées ou pas, on va réussir à sauver les régimes à prestations déterminées, mais que, dans le secteur privé, on ne croit que les recommandations qui sont mises de l'avant vont stopper l'érosion qu'on observe depuis plusieurs années dans le secteur privé, un mouvement vers les régimes à cotisation déterminée. On ne croit pas que... Ça va peut-être ralentir l'érosion, mais ça ne la stoppera pas. Aussitôt que les employeurs verront une amélioration de la santé financière des régimes de retraite, ils vont probablement en profiter pour transférer le risque en mettant en place des régimes à cotisation déterminée, pour ceux qui ne l'ont pas déjà fait.

• (9 h 50) •

Mme Maltais : Donc, vous voyez encore un risque pour les régimes à prestations déterminées dans cette solution. On aura sûrement…

M. Lockhead (Claude) : En fait, il y a beaucoup d'éléments pour gérer le risque, là, pour améliorer la gestion des risques et pour améliorer la stabilité des coûts, mais on ne voit pas d'éléments là-dedans pour améliorer la participation des travailleurs québécois à de tels régimes de retraite.

Mme Maltais : Dernière question, parce que j'ai d'autres collègues qui veulent vous poser des questions : Quelles sont… Vous avez dit : Il y a des choses plus urgentes, la rente longévité demande beaucoup d'attention, parce que vous avez soulevé, entre autres, ce qu'on a vu, le problème de l'harmonisation avec la sécurité du revenu garanti. Quelles sont les urgences, pour vous, actuellement, dans le régime québécois actuel?

M. Lockhead (Claude)  : Si on nous avait posé la question il y a un an ou neuf mois, là, au moment où le comité d'experts a écrit son rapport, on vous aurait dit : Il faut régler la question de la méthode de financement sur base de solvabilité, qui n'est pas une méthode de financement ordonnée, et que ça cause toutes sortes de problèmes.

Aujourd'hui, on pense qu'on a une fenêtre d'opportunité pour prendre le temps de réfléchir un peu plus là-dessus en raison des éléments qu'on a mentionnés. Puis la rente longévité, pour les raisons qu'on a mentionnées tantôt également, on pense qu'il faut prendre plus de temps pour la regarder puis la mettre en place d'une façon ordonnée.

Les interventions à prioriser, elles sont sur la page qu'on vous présente, là. On pense qu'il y a des éléments qui sont relativement faciles à mettre en place, qui pourraient améliorer la gestion des risques. Le partage des coûts, par exemple, on pense qu'il y a un intérêt à fixer rapidement les balises applicables au partage des coûts parce qu'il y a plusieurs secteurs — dans le secteur public surtout, un peu dans le secteur privé — qui discutent autour de partage de coûts, mais sans connaître les règles qui éventuellement seront en vigueur. Alors, si on avait des règles en vigueur rapidement, ça aiderait les acteurs à discuter sur cette question-là.

L'achat des rentes, donc libérer les engagements du régime si on projette les achats de rentes, avec la montée des taux d'intérêt, il pourrait y avoir des opportunités intéressantes pour les régimes de retraite à procéder à des achats de rentes.

Comptes distincts pour les employés actifs et retraités, une suggestion qui est très intéressante, qui peut être mise en place rapidement, c'est une belle recommandation.

Et, dernier élément, mais qui ne touche que très peu de clients à la Régie des rentes du Québec, les régimes interentreprises. Alors, il y a des régimes interentreprises dont la situation financière est dramatique, très difficile, en raison notamment des orphelins, donc des employeurs qui se sont retirés de ces régimes-là. Il faudrait trouver une solution rapidement à cette problématique-là.

Mme Maltais : Merci, messieurs.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Dubuc.

M. Claveau : Merci, M. le Président. Bonjour, bienvenue. Alors, vous parlez que vous êtes plus ou moins d'accord avec le régime de… la rente de longévité. Par contre, vous adhérez aux objectifs et vous parlez qu'on pourrait atteindre les mêmes objectifs par d'autres mesures. Quels sont ces types de mesures là que vous voulez proposer qui pourraient donner des résultats aussi intéressants?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. Lockhead.

M. Lockhead (Claude)  : Bon. Tout d'abord, effectivement, quand on regarde les objectifs de la rente longévité, la mutualisation du risque de longévité, augmenter l'épargne-retraite des Québécois, on ne peut pas être contre, donc je pense que c'est un beau programme, etc. Puis on ne dit pas que ce n'est pas la solution à privilégier ou que ce n'est pas la meilleure solution, c'est peut-être la meilleure solution évidemment si on atteignait les défis qu'on a mentionnés.

Mais je pense qu'on pourrait regarder d'autres solutions, puis des solutions qui impliquent peut-être un peu plus les institutions financières dans le secteur privé plutôt que de mettre en place un régime public géré par des organismes publics, là. Donc, ça pourrait être un programme obligatoire avec les mêmes paramètres, là, qui sont suggérés, mais géré via le secteur privé, par exemple.

M. Claveau : Puis, en même temps, vous êtes quand même préoccupés, vous avez des inquiétudes quant à l'urgence de l'implantation d'un tel régime, ce qui pourrait nuire à vos entreprises, entre autres par rapport à la compétitivité avec d'autres entreprises d'en dehors du Québec. Et vous avez fait une réflexion par rapport à, justement, la compétitivité avec les autres entreprises. Mais est-ce que vous avancez qu'un tel régime devrait être fait suite à une concertation pancanadienne, par exemple?

M. Tremblay (Jocelyn)  : Bien, on pense que ce serait peut-être opportun, effectivement, de le faire. Dans le fond, ce qu'on dit à propos de la rente longévité, c'est qu'on n'est pas à 100 % contre, là. L'objectif visé par ça est tout à fait louable, là, parce qu'il faut réaliser qu'il y a 2 millions de travailleurs québécois qui n'ont pas de régime à prestations déterminées ou qui ne sont couverts par aucun régime parrainé par un employeur, là. Ces 2 millions de travailleurs là, le fait de mettre en place la rente longévité leur assurerait, à 75 ans, un revenu de base. On comprend que le temps que ça prend pour que ce revenu-là s'accumule, c'est sur un horizon de 40 ans, donc l'horizon est long, mais, si on ne commence pas aujourd'hui, on n'y arrivera jamais. Donc, on n'est pas contre la rente longévité. Ce que l'on dit, c'est qu'avant de l'implanter il faut quand même réfléchir à certains éléments associés à l'implantation d'un tel programme, notamment l'impact sur le supplément de revenu garanti, alors comment on concilie les deux sources de revenus.

Et l'autre chose, c'est la compétitivité. Et nous, on n'est pas des experts en compétitivité d'entreprises, là, mais, si, demain matin, on demande aux employeurs du Québec de cotiser x % de plus, est-ce que ça les met vraiment en désavantage économique par rapport aux autres? Alors, c'est un questionnement que l'on doit avoir. Il faut y réfléchir comme il faut avant de se lancer dans l'aventure. Puis aussi, pour répondre à votre question, il faut... ce serait probablement une bonne idée de discuter avec nos partenaires hors Québec pour voir, eux, quel genre d'alignement peuvent-ils prendre là-dessus. Donc, on n'est pas contre. Il faut retenir ça, là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : D'accord. Merci. Bienvenue, merci d'être présents. Moi, j'aurais une question par rapport justement à la compétitivité des entreprises québécoises par rapport au reste des autres provinces. En tout cas, vous êtes revenus à deux reprises là-dessus. Vous savez, quand on parle de tarifs horaires qu'on va donner aux employés, vous voyez la distinction entre le privé puis le public. Souvent, on dit que le privé, ils ont des salaires plus élevés que le public. La raison, c'est qu'il y a d'autre chose que le public va offrir qui va faire en sorte qu'on va être prêts à renoncer à une partie de salaire pour justement avoir ces acquis-là.

Quand vous parlez de la compétitivité parce que des entreprises vont justement donner un montant d'argent supplémentaire pour protéger le futur de ces employés, est-ce que vous avez peut-être réfléchi à l'idée qu'étant donné qu'il n'y a pas une parfaite mobilité de la main-d'oeuvre dans le Canada, que, si on augmente justement les paiements qui vont être destinés à la retraite longévité qu'ils vont tout simplement le retenir sur le salaire, qu'ils vont faire en sorte que leur compétitivité va demeurer par rapport aux autres provinces, en attendant que celles-là effectivement emboîtent le pas, s'ils ont à l'emboîter, mais qu'il y aurait un règlement automatique sur le marché pour faire en sorte que la compétitivité des entreprises québécoises ne soit pas érodée par l'accumulation, justement, de paiements qu'on fait dans la rente longévité… Est-ce que vous avez réfléchi à ça dans votre modèle? Parce que moi, honnêtement, là, je pense que cette solution-là va s'appliquer puis elle sera très simple à s'appliquer. Mais est-ce que je suis le seul à penser ça, là?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. Tremblay.

M. Tremblay (Jocelyn) : Dans le fond, ce que vous dites, c'est que, le fait d'être préoccupés par la compétitivité, peut-être qu'on devrait réfléchir au fait que les entreprises vont réagir en réduisant, par exemple, les salaires des travailleurs. C'est un peu votre point. Ils peuvent réagir de cette façon-là.

M. Therrien : Bien, c'est qu'ils vont tout simplement déplacer un montant de la masse salariale qui est destinée aux travailleurs pour le mettre dans la rente longévité. Le travailleur, lui, ne va pas se trouver nécessairement à être désavantagé. Je ne vous dis pas que ça va être du un pour un, mais ils vont protéger une certaine compétitivité de cette façon-là. Et, pour les gens qui auraient... on appelle ça en économie, là, des anticipations adaptatives, ou qui sont un peu myopes dans leur façon de procéder à des décisions, eux, s'ils ont un salaire qui s'affaiblit puis ils ne savent pas pourquoi, il n'y a pas assez de mobilité de main-d'oeuvre pour faire en sorte qu'on aille travailler dans les autres provinces. Parce que, là, c'est ça qui va faire en sorte qu'on va ajuster le salaire à travers les provinces, c'est la mobilité des... qui est quand même limitée, là, on s'entend là-dessus, là. D'aller travailler dans les autres provinces, ce n'est pas nécessairement très facile à faire. Est-ce que vous avez vu ça ou vous avez discuté de ça? Parce que je sais que le Conseil du patronat a élaboré beaucoup là-dessus, a critiqué en partie le rapport D'Amours à cause de ça. Je ne sais pas. Où en est votre réflexion par rapport à ça?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. Tremblay, en un peu moins d'une minute.

M. Tremblay (Jocelyn)  : En un peu moins d'une minute? Bien, honnêtement, là, la réflexion sur l'aspect compétitivité puis réaction des entreprises, c'est un peu moins notre champ de compétence, entre vous et moi. Je vais être très honnête, là. Mais vous soulevez un élément... Dans le fond, ce que vous soulevez, c'est que les employeurs vont réagir d'une façon pour demeurer compétitifs. Donc, c'est un peu ce que vous soulevez. Puis, dans le fond, j'aurais tendance à dire que ce n'est pas tout à fait illogique de penser que les employeurs vont réagir de cette façon-là, parce que, s'ils deviennent... Donc, ils vont faire des ajustements à quelque part, là. Donc, c'est une façon de voir les choses qui est intéressante.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et nous passons maintenant la parole aux représentants de l'opposition officielle. M. le député de Verdun.

• (10 heures) •

M. Gautrin : Je vous remercie, M. le Président. Je vais avoir un certain nombre peut-être de questions qui n'ont pas été couvertes dans votre présentation, qui a été extrêmement claire et éclairante. Vous n'avez pas touché d'autres manières de financement... que celles qui sont suggérées à l'heure actuelle dans le rapport D'Amours. Vous avez déjà, dans le passé, publié un certain nombre de documents, en particulier en ce qui touche ce qu'on appelle les régimes à prestations cibles ou les régimes à financement salarial. Est-ce que vous pourriez brièvement rappeler les grandes caractéristiques? Parce que, lorsque j'ai lu les mémoires, il y a parfois une incompréhension de ce que c'est qu'un régime à prestations cibles. Il est implicite dans le rapport D'Amours en autant que la rente de longévité est un régime ipso facto à prestations cibles, mais ils ne le disent pas. Alors, comment vous voyez, vous, les régimes à prestations cibles? Ou peut-être vous pourriez faire parvenir à la commission, si le président l'autorise, le document que vous aviez écrit en 2008, si je ne me trompe pas, sur les prestations cibles?

M. Lockhead (Claude)  : Alors, merci. Oui, effectivement, on a écrit un premier document en 2008 sur le sujet. On en a écrit deux autres en 2012. Alors, c'est un sujet qui nous…

Des voix :

M. Lockhead (Claude)  : C'est un sujet qui nous passionne. On ne pense pas que c'est la solution à tous les maux, là, ce n'est pas la solution pour tous non plus, mais on pense que c'est une façon d'élaborer des régimes qui sont viables à long terme.

Alors, c'est quoi, un régime à prestations cibles? En quelques mots, c'est un régime où les parties négocient les taux de cotisation employés-employeur. Donc, on sait exactement les intrants dans le régime de retraite en termes de cotisations. Avec ce budget de cotisations, on élabore une cible ou une promesse de rentes aux participants, évidemment avec les marges de sécurité nécessaires pour ce type de régime là.

Alors, comment fonctionne le régime de prestations cibles en cours d'existence? Alors, si jamais il y a des surplus, au-delà de certaines marges, on peut améliorer les prestations ou accorder de l'indexation. S'il y a un sous-financement, alors c'est la cible qu'on ajuste à la fois pour les participants actifs et les retraités. Alors, c'est un véhicule qui permet à la fois aux employeurs de gérer leurs risques parce que leurs coûts sont stables et connus, et ça permet aux participants de mutualiser le risque de longévité, notamment le risque d'investissement, et ça leur permet une planification financière intéressante pour la retraite, parce que ce n'est pas un capital qui s'accumule, c'est plutôt une promesse ou une cible qu'on vise à la retraite. Alors, ils ont une bonne idée, dans une marge assez confortable, là, du niveau de rente qu'ils vont recevoir à la retraite.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Verdun.

M. Gautrin : J'ai une deuxième question, dans un autre ordre d'idées, que malheureusement, avec le temps, vous n'avez pas pu aborder, qui est toutes les prestations de transition lorsque quelqu'un quitte.

Vous savez, à l'heure actuelle, que la réalité du marché du travail a considérablement évolué depuis le moment où on a créé les régimes de pension. Si, dans le temps, très souvent, vous rentriez dans une entreprise et vous restiez employé pour le temps de votre carrière… Souvent des personnes plus jeunes maintenant vont faire quelques années dans une entreprise, vont changer d'entreprise, vont aller… Et là donc la rente de transition est importante. Le rapport change de calcul par rapport au reste du Canada et va baisser, en quelque sorte, la rente de transition.

Comment vous voyez, vous… Oui, au début, il y avait un intérêt pour les employeurs, pour pérenniser, en quelque sorte, leurs employés d'avoir un régime de pension. C'est moins le cas maintenant puisque les gens vont quitter plus souvent. Comment vous voyez à la fois l'intérêt pour l'employeur de créer un régime à prestations déterminées et les questions qui sont dans le rapport sur la rente de transition… enfin, les paiements de transition, excusez-moi?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. Lockhead.

M. Lockhead (Claude)  : Alors, j'imagine qu'on fait référence ici à la recommandation sur les valeurs de transfert. Le constat, c'est que les valeurs de transfert, dans le contexte économique des dernières années, sont trop élevées. C'est le constat du comité d'experts. Alors, ils recommandent de changer la méthode de calcul. Notre mise en garde là-dessus, c'est de ne pas le faire seulement pour les travailleurs québécois parce que sinon on se retrouverait, avec nos travailleurs québécois, avec des valeurs de transfert plus faibles que leurs collègues des autres provinces et parfois dans des mêmes régimes de retraite. Alors, ça, c'est une mise en garde.

On ne dit pas que les valeurs de transfert ou que les normes de pratique pour calculer les valeurs de transfert sont présentement adéquates, ce qu'on suggère, c'est plutôt de référer la question à l'Institut canadien des actuaires et que, s'il y a lieu de changer la norme de pratique, on le fasse pour l'ensemble des Canadiens, pas seulement pour les Québécois, qui pourraient se retrouver désavantagés.

M. Gautrin : Dans ce cadre-là, vous êtes en accord avec une recommandation des gens qui vont venir cet après-midi, de l'Institut canadien des actuaires, qui recommandent qu'on ait une étude à cet effet-là et en particulier sur la prime de risque ou la manière dont on calcule la prime de risque à l'intérieur… dans les questions de transfert.

Je vais passer la parole à mon collègue d'Outremont, qui avait quelques questions, et, si j'en ai d'autres encore à vous poser, si après... si d'autres collègues... bien il nous restera du temps à la fin, M. le Président.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Merci, M. le Président. La question va porter sur la rente longévité et ce qui se fait au Canada. Je vais faire un préambule en disant votre première phrase : Le statu quo n'est pas une option. Je pense qu'il faut toujours garder ça en tête parce qu'il n'y a aucune solution qui est parfaite puis on perd du temps en essayant de rechercher toujours la perfection.

Quand j'étais ministre des Finances — évidemment, toutes les provinces sont préoccupées par ça — la solution Régie des rentes augmentée de façon dramatique était une solution que Finances Québec, nous n'acceptions pas, Finances Canada non plus, M. Flaherty, à cause du coût sur l'économie. Et l'idée de la rente longévité, pour le faire... qui est au fond une augmentation de Régie des rentes à partir de 75 ans — simplifions les choses — est une idée qui n'était pas sur la table, que je trouve très intéressante, originale, avec deux enjeux, le supplément de revenu garanti — mais ça se règle avec une entente avec le ministère fédéral, si c'est une option canadienne — et la partie canadienne. Et, vous avez raison, avant de mettre ça en place, on devrait au moins essayer que ce soit un système canadien.

Vous êtes une grande firme canadienne. Avez-vous… pouvez-vous nous éclairer sur le… Parce que moi, je ne suis plus en discussion avec les autres provinces. Comment vous... Quel serait l'appétit pour cette solution-là? Parce que la plupart des autres provinces étaient plutôt favorables à augmenter le Canada Pension Plan, l'équivalent de la Régie des rentes. Évidemment Québec, Alberta, Ottawa, on a mis un frein là-dessus. Cette idée-là me semble intuitivement une idée de la rente longévité qui pourrait faire consensus, parce qu'elle atteint les mêmes objectifs à un coût plus stable. Est-ce que vous avez eu des échos de vos clients à travers le Canada, gouvernementaux ou privés, qui disent : Oui, voici une idée originale qu'on devrait travailler à l'échelle canadienne?

M. Lockhead (Claude)  : À ce sujet-là, on n'a pas eu des discussions directes avec plusieurs intervenants des autres provinces. On en a eu quelques-unes avec nos collègues des autres bureaux, là, à travers le Canada. C'est clair que nous aussi, on trouve que cette solution-là de la rente longévité, c'est une solution qui est beaucoup plus ordonnée que d'augmenter le Régime de rentes du Québec ou le Canada Pension Plan en doublant les prestations ou en doublant le MGA, là. D'une part, on évite tout le problème de financement parce qu'on le fait de façon ordonnée. C'est un régime qui serait capitalisé. Et là-dessus on salue, là, cette recommandation-là, que ce soit un régime capitalisé et ne pas créer les iniquités qui ont été créées dans le milieu des années 60. Il y avait des raisons, là, dans le milieu des années 60, pour que ce soit fait comme ça, c'est correct. Mais, aujourd'hui, si on avait à bonifier ou à offrir un nouveau programme à l'ensemble des travailleurs québécois ou idéalement à l'ensemble des travailleurs canadiens, de le faire via un régime capitalisé nous apparaît la meilleure solution pour éviter ces problèmes-là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Et vos collègues des autres bureaux, est-ce qu'ils semblent avoir un appétit pour cette solution-là? Parce qu'au fond c'est un des défis que nous avons comme Québécois, c'est de vendre cette solution-là au Canada. Ce serait beaucoup mieux pour la compétitivité de l'économie, parce qu'on est déjà 4 % de plus, à peu près, de taxes sur les masses salariales, de plus que dans les autres provinces. Monter ça à 5,6 %, il y a un danger. Ce n'est pas les gens qui vont aller se déplacer, c'est les employeurs qui vont déplacer les emplois en partie, hein? Y a-t-il un appétit dans... ou un intérêt? Est-ce qu'ils vous ont demandé d'aller présenter ça, puis vous êtes allés présenter cette solution-là dans vos autres bureaux au Canada ou...

M. Lockhead (Claude)  : Bien, on l'a présentée à nos collègues, puis effectivement la réaction, c'était que cette approche, ou cette solution, ou cette recommandation-là était préférable, là, à une augmentation directe, là, du CPP ou du RRQ, là. Ils trouvaient l'idée originale, innovatrice, intéressante, que ce soit capitalisé. Mais il n'y a pas eu de discussion soit avec des entreprises soit avec les gouvernements des autres provinces là-dessus.

M. Bachand : O.K. Mais il y a un accueil qui... Ce n'est pas une porte fermée, en partant, sur l'idée. Juste une dernière question, je reviens sur un commentaire que vous avez fait sur le partage des cotisations. Vous êtes pour le principe 50-50, mais avec l'exception : Bien, si vous vous entendez différemment, faites-le différemment. Et il y a juste une personne qui n'est pas à la table, en général, directement, c'est le contribuable. Et ça, ça me fait penser... Je veux dire, ça fait 40 ans qu'on sait que, si tu bois, tu ne devrais pas conduire ton auto. Depuis qu'il y a une loi 0,08, tu vas en prison, c'est drôle que tu le sais un petit peu plus.

Alors, laisser aux gens s'entendre sur une règle différente 50-50, est-ce que ça n'a pas conduit aux résultats qu'on a aujourd'hui aussi, dans beaucoup de cas, pas tous, là? Parce que c'est un ticket modérateur exceptionnel, là, 50-50, parce que, comme travailleur, comme syndicat, tu paies. Alors, je suis curieux de voir pourquoi… Je comprends que vous représentez vos clients aussi, peut-être que c'est pour ça, vous n'êtes pas... ce n'est pas juste vous qui parlez. Mais pourquoi vous ouvrez cette porte plutôt que de stabiliser une règle?

• (10 h 10) •

M. Lockhead (Claude) :Bon, tout d'abord, pour le contribuable ou le payeur de taxe, 50-50, ça dépend c'est 50-50 de quel chiffre. Ça peut être 40-60 d'un chiffre qui est beaucoup plus petit puis ça va coûter moins cher au contribuable. Alors, 50-50 n'est pas une fin en soi. C'est sûr que c'est un ticket modérateur, comme on peut dire, ou c'est un élément pour amener les deux parties à discuter lorsqu'il y a des problèmes, mais, si on a un 45-55 ou un 40-60, on arrive aux mêmes objectifs.

Alors, nous, ce qu'on dit, c'est de montrer un peu plus de flexibilité pour ceux qui... pour les parties qui s'entendent sur d'autres éléments de leurs régimes de retraite. Ce n'est pas tous les régimes de retraite qui valent 20 % ou 25 % de la masse salariale. Alors, que ce soit 50-50 ou 40-60, pour moi, c'est la réponse qui est importante. Donc, en offrant cette flexibilité-là, les parties peuvent s'entendre sur d'autres éléments, réduire les prestations ou augmenter l'âge de retraite, mettre en place des réserves d'indexation notamment, des réserves de fluctuation, comme certains groupes ont fait, qui offrent une gestion des risques fort intéressante et qui mettent à l'abri un peu le contribuable sur les fluctuations de coût.

M. Bachand : Ce que je vous entends dire, c'est… Vous êtes encore quand même dans le 40 % ou dans le 45 %. Vous n'êtes pas dans un régime qui serait beaucoup plus faible, là, comme contribution de l'employé.

M. Lockhead (Claude)  : Oui. Il faut savoir aussi d'où on part, là. Il y a des régimes qui partent à 35 % ou à 30 %, là, de la part des employés. Donc, que ce soit 40 % ou 45 %, pour nous, c'est un élément de l'équation, l'autre élément, c'est le coût des prestations. Donc, c'est important d'aborder ces deux éléments-là et de donner la flexibilité aux parties de s'entendre là-dessus.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Oui, M. le député de Verdun, pour 2 min 30 s.

M. Gautrin : Je vais être assez, assez... Je ne vous poserai pas les questions sur le RVER. Vous avez des interrogations. On est en commission parlementaire début septembre, je vous invite de venir nous présenter vos commentaires à ce moment-là.

Je vais revenir, à l'heure actuelle, sur une idée qui a été mise de l'avant par le SCFP. Au lieu d'avoir une provision pour écarts défavorables, ils ont l'idée d'avoir une caisse à part qui soit, en quelque sorte, pour être en mesure de voir les fluctuations ou les problèmes d'un régime et pouvoir éventuellement a posteriori pouvoir indexer les rentes, si jamais cette caisse — enfin, je présume un petit peu, on pourra aller voir ce soir — est excédentaire. Comment vous vous positionnez par rapport à ça?

Parce qu'il y a quand même un problème, voyez-vous, d'autant... On veut évidemment donner, au moment de la retraite, une certaine stabilité dans les revenus. Mais maintenant, avec la longévité qui accroît de la part de la population, il faut aussi que cette stabilité dans les revenus puisse durer, c'est-à-dire se maintienne tout au long jusqu'au terme de la vie. Donc, comment vous réagissez par rapport à cette proposition du SCFP?

M. Lockhead (Claude)  : Alors, si on parle de la réserve de fluctuation et d'indexation, nous, c'est...

M. Gautrin : ...

M. Lockhead (Claude)  : Pardon?

M. Gautrin : Indexation a posteriori.

M. Lockhead (Claude)  : Exactement. Donc, ce n'est pas de l'indexation garantie, c'est de l'indexation si l'argent est disponible. Et la réserve peut servir pour les fluctuations, entre-temps. Alors, c'est un concept qui a été élaboré, là, pour les villes notamment. Et on est des fervents de cette approche-là, d'avoir une réserve explicite. On pense que ça offre une stabilité intéressante dans les cotisations, dans le financement du régime, parce que, là, on a une réserve explicite qui peut supporter des déficits ponctuels, par opposition, par exemple, à des réserves implicites dans les hypothèses, ce qui est suggéré par la capitalisation améliorée. La capitalisation améliorée, c'est des hypothèses plus conservatrices. Donc, des réserves implicites dans les hypothèses, ça n'absorbe pas les déficits ponctuels. Alors, l'approche que vous mentionnez, qui est une réserve de fluctuation et d'indexation, offre une stabilité dans le financement et en même temps, si l'argent est disponible au-delà d'un certain niveau, permet d'indexer les rentes des retraités. Alors, ça nous apparaît une approche intéressante.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et ça termine le temps alloué à l'opposition officielle. Je cède maintenant la parole à M. le député des Chutes-de-la-Chaudière pour quatre minutes.

M. Picard : Merci, M. le Président. Merci, messieurs. Tout à l'heure, vous avez dit que vous n'étiez pas 100 % contre le… J'aurais pensé que vous n'étiez pas 100 % pour. Mais, en tout cas, j'aimerais peut-être que vous élaboriez, tout à l'heure, pourquoi vous n'êtes pas 100 % contre, là?

Mais, au niveau de… Vous dites que les recommandations n'encouragent pas la mise sur pied de nouveaux régimes à prestations déterminées, ceux du public vont survivre. Et vous dites : Secteur privé, l'érosion va continuer donc on va aller de plus en plus vers les… à cotisation déterminée. C'est quoi, la solution, pour freiner l'érosion? Ma première question.

M. Lockhead (Claude)  : Dans le secteur privé… et, si vous regardez l'expérience, là, de certaines entreprises récemment dans le secteur des pâtes et papiers notamment, où l'employeur voulait éliminer le risque de financement des régimes à prestations déterminées probablement en mettant en place des régimes à cotisation déterminée mais où les syndicats ne voulaient pas transférer le risque à chacun des individus, à chacun des participants, ce qu'ils ont mis en place, dans certaines entreprises du secteur des pâtes et papiers, c'est des régimes à prestations cibles.

Nous, on pense que, dans certaines situations, certains groupes, certains secteurs d'activités, c'est un type de régime de retraite qui offre une alternative intéressante au régime à cotisation déterminée pour ne pas transférer entièrement le risque aux travailleurs et offre une alternative intéressante à l'employeur parce que son coût est connu. Alors, pour nous, c'est une forme, pour les travailleurs, d'offrir une certaine cible, une certaine garantie, une mutualisation des risques et qui ferait en sorte que, dans certains secteurs, certaines entreprises, surtout dans le monde syndiqué, où on pourrait sauvegarder une certaine forme de prestations déterminées…

M. Picard : O.K. Merci. Au niveau… vous dites qu'il n'y a peut-être pas urgence parce que les taux de rendement ont augmenté depuis six mois, sauf qu'on voit que ça a augmenté beaucoup en six mois, ça peut descendre encore beaucoup en six mois. Et vous dites que, dans vos interventions à prioriser, il y aurait intérêt à fixer rapidement les balises applicables. Donc, vous dites : Il faudrait, dans certains secteurs… Est-ce que c'est le secteur privé, le secteur public, qu'il faudrait baliser les prochaines ententes, je vais dire, là? Est-ce que ma compréhension est bonne?

M. Tremblay (Jocelyn)  : Bien, ce qu'on dit, en balisant, c'est le partage… certains mécanismes de partage des coûts. Là où on dit où on peut prendre un peu plus de temps, c'est sur la méthode financement, par exemple, ou ce qui est suggéré dans le rapport D'Amours, c'est la capitalisation améliorée. Alors, nous, on pense qu'il y a des méthodes, comme on disait, il y a des méthodes qui sont plus modernes, qui existent déjà à la Régie des rentes du Québec, qui ont été élaborées, qui fonctionneraient, qui assurent une meilleure stabilité dans le financement, etc.

Donc, plutôt que d'agir rapidement sur la méthode de financement puis d'aller avec la capitalisation améliorée, par exemple, prenons… je ne dis pas de prendre huit ans puis y réfléchir, là, mais prenons quelque temps puis assurons-nous qu'on va arriver avec une méthode qui va tenir dans le temps, qui va stabiliser, qui pourrait tenir compte des particularités entre le secteur public et le secteur privé parce qu'ils ne sont pas confrontés aux mêmes risques, par exemple, de faillite. Alors, on pourrait avoir une méthode plus efficace que la capitalisation améliorée. Ça, c'est un élément où on dit : Prenons un peu plus de temps.

M. Picard : Vous abordez, dans votre mémoire, peut-être, la révision de l'âge de la retraite. C'est quoi, votre opinion là-dessus, en tant que...

M. Tremblay (Jocelyn)  : Disons que, sur l'âge de la retraite, très certainement, hein, il y a une amélioration de la longévité, on vit de plus en plus vieux. Et le Québec, particulièrement, on va vieillir plus rapidement que les autres provinces, et donc… Puis le fédéral a commencé à agir sur le programme de sécurité de vieillesse. Donc, on se dit : Est-ce qu'il ne serait pas opportun de réfléchir sérieusement à la possibilité de reporter l'âge de la retraite au niveau du Régime de rentes du Québec, par exemple? Alors, on soulève le point où on pense que c'est peut-être une voie à prendre au niveau de la Régie des rentes du Québec.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup, M. Tremblay et M. Lockhead, de votre participation très intéressante et constructive à notre commission.

Et je suspends maintenant nos travaux quelques minutes pour permettre au prochain groupe… les représentants du prochain groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 10  h 19)

(Reprise à 10 h 24)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons recommencer nos travaux. Vous savez, on est dans les premiers groupes, il ne faudrait pas prendre de retard parce que ça va être dispendieux en fin de journée.

Une voix : ...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Oui, ils sont là. Alors, nous recevons des représentants de l'entreprise Mercer, à qui je souhaite la bienvenue. M. St-Germain et M. Tremblay, vous avez une dizaine de minutes pour nous présenter votre mémoire, et ensuite nous procéderons à un 34, 35 minutes d'échange. Alors, vous avez la parole après vous être présentés.

Mercer (Canada) ltée

M. St-Germain (Michel) :Oui. Alors, merci, M. le Président. Mon nom est Michel St-Germain, je suis accompagné d'un collègue, Hubert Tremblay. Nous sommes tous les deux actuaires chez Mercer. Et je veux vous remercier de nous donner l'opportunité de partager avec vous notre vision un peu du système de retraite. Je suis un peu le porte-parole des autres actuaires chez Mercer. Nous sommes une firme mondiale mais très présents au Québec. Nous servons un peu plus de 100 régimes à prestations déterminées, et nous avons à peu près une soixantaine d'actuaires qui servent ces régimes-là, et je suis un peu le porte-parole de cette force-là.

Écoutez, notre position, c'est que, dans une très large mesure, nous supportons toutes les recommandations du comité D'Amours. Je vais élaborer avec vous un peu sur quelques-unes de ces recommandations-là, qui sont importantes, avec quelques suggestions d'amélioration de ces recommandations.

D'abord, au niveau des mesures proposées pour la capitalisation améliorée, nous supportons l'élimination de l'obligation de baser le financement sur la solvabilité des régimes et nous supportons le principe d'une mesure unique qui s'applique à tous les régimes et qui est un peu réglementée par la législation. Nous aimerions que la mesure du taux d'intérêt soit un petit peu plus ajustée au niveau des obligations disponibles sur le marché canadien, et ça pourrait facilement être fait, par exemple, au lieu de les baser sur des obligations corporatives, les baser sur un indice des obligations provinciales avec peut-être une marge additionnelle.

Un élément qui nous préoccupe beaucoup, c'est la recommandation au niveau de la provision pour écarts défavorables. Dans le secteur privé, cette recommandation-là va être très, très mal perçue parce que la législation ne précise pas l'appartenance de cette provision. Et, dans le secteur privé, les actionnaires et les conseils d'administration vont être très préoccupés d'un arrangement où la prise de risque ou la génération de rendement additionnel va aller dans un environnement où la propriété n'appartient pas. Alors, ces gens-là vont être incités à réduire les risques des régimes de retraite pour éviter que les bénéficiaires de ces risques-là soient inconnus. Alors, si les actionnaires des entreprises qui répondent des régimes de retraite prennent des risques, ils veulent être rémunérés de ces risques-là plutôt que d'être obligés d'envoyer les produits de ces risques-là dans un environnement où la propriété est incertaine. Alors, moi, je vous encourage, si vous tenez à avoir une provision pour écarts défavorables qui est importante, à en préciser la propriété, auquel cas vous auriez une réaction beaucoup plus positive des répondants des régimes.

De la même façon, les exigences... les mesures proposées indiquent que seulement que 20 % de l'excédent au-dessus de la provision d'écarts défavorables peut être utilisé pour financer des congés de contribution. À notre avis, ce 20 % là est trop élevé, particulièrement dans un contexte où vous n'avez pas corrigé l'asymétrie des surplus des régimes de retraite, qui est un irritant majeur au développement des régimes à prestations déterminées.

Nous aimerions que les mesures proposées s'appliquent à tous les régimes de retraite au Canada, de sorte qu'on puisse dire qu'on a une façon uniforme et cohérente d'évaluer les coûts des régimes de retraite et de rapporter la valeur non seulement aux régimes de retraite qui sont sujets à la loi des régimes complémentaires, mais aussi aux régimes qui en sont exemptés, en particulier les régimes dont le gouvernement est responsable. À notre avis, une valeur d'un régime de retraite est la même pour les policiers de la ville de Montréal que pour les policiers de la Sûreté du Québec.

Nous reconnaissons que, pour le secteur public, l'impact des mesures proposées est important et qu'il va en résulter des augmentations de coûts importantes. Et moi, je vous encourage à prévoir une mesure de transition qui dure longtemps et peut-être une mesure de... une période d'amortissement qui est un petit peu plus longue pour les secteurs publics que pour le secteur privé.

Nous supportons aussi les mesures proposées au niveau des valeurs de transfert en autant qu'elles s'appliquent à toutes les provinces au Canada. Ce serait injuste que les travailleurs québécois reçoivent, à la terminaison d'emploi, des prestations de départ qui sont moins élevées que dans les autres provinces.

Les mesures proposent différentes mesures qui vont aider à l'administration des régimes de retraite, particulièrement lorsqu'on parle de restructuration des régimes et de partage de coûts avec les employés. D'ordre général, nous supportons l'ensemble de ces mesures-là. Ça va permettre aux répondants des régimes de retraite d'adapter leur régime aux nouvelles conditions. Je vais demander à François d'élaborer maintenant sur la rente longévité.

• (10 h 30) •

M. Tremblay (Hubert F.) : Oui, certainement. La rente longévité, pour nous, fait partie d'une réflexion plus large sur l'épargne-retraite. Michel a parlé des régimes à prestations déterminées. Ici, on regarde les choses de façon plus large et on regarde comment se comporte l'épargne chez les Québécois.

Le bureau de Mercer à Melbourne, en Australie, tient un indice sur la situation des régimes de retraite à travers le monde. Il place le Canada, donc le Québec, au sixième rang sur 18 pays, pour la qualité du... la solidité du système de retraite. C'est donc dire qu'il y a des forces dans le système de retraite, mais il n'y a pas seulement des forces, il y a aussi des lacunes, des choses à corriger. Puis, selon nous, la rente longévité, c'est une façon, il y en a d'autres, mais c'est une façon de corriger certaines de ces lacunes-là. C'est une solution intéressante, ça permet de mettre en commun les risques de longévité et les risques de placement et ça permet aussi d'être plus efficaces dans l'accumulation d'épargne-retraite pour les travailleurs, compte tenu des frais, qu'on s'attend qu'ils soient plus bas, des frais de gestion pour la rente longévité.

Par contre, pour nous, il y a trois conditions très importantes qui doivent être rencontrées pour rendre le système viable et efficace. Premièrement, on devrait avoir un mécanisme similaire qui serait mis en place dans les autres provinces canadiennes également pour éviter de créer... de miner la compétitivité des entreprises du Québec et aussi pour simplifier la vie aux employeurs qui ont des travailleurs dans les différentes provinces, donc, pour ne pas avoir à administrer des programmes trop différents. Ensuite, pour ce qui est... la deuxième condition, c'est qu'on pense, comme le suggère le comité, que la rente doit... le régime doit être pleinement capitalisé. Donc, on ne doit pas assister à des transferts intergénérationnels entre les plus jeunes, entre les plus vieux. Donc, ça, c'est une autre condition importante. Et finalement on pense que la gouvernance du programme devrait être confiée à un organisme indépendant plutôt qu'au gouvernement ou à la Régie des rentes du Québec. Donc, ça, c'est pour les trois conditions principales.

Évidemment, il y a des enjeux pour les travailleurs à plus faibles revenus. On a vu plus tôt les discussions sur la réduction éventuelle du supplément de revenu garanti, mais c'est tout l'aspect de forcer de l'épargne, forcer l'épargne supplémentaire pour le groupe de ces travailleurs. Pour nous, pour nous, ces gens-là sont déjà bien couverts par les programmes existants, ils ont déjà un bon remplacement de revenu à la retraite. Également, ils n'ont pas toujours soit la volonté ou la capacité d'épargner davantage pour dédier une plus grande part de leurs revenus disponibles à épargner pour la retraite.

Puis, bien, on a parlé du supplément de revenu garanti, puis il y a aussi un aspect de longévité, il y a une corrélation. Dans les études de mortalité récentes, on a identifié une corrélation entre le revenu et l'espérance de vie. Donc, dans un contexte de rente longévité, ça pourrait vouloir dire que les travailleurs à revenus plus faibles vont toucher la rente longévité pendant une plus courte période que les travailleurs à revenus plus élevés. Donc, ça, c'est des considérations importantes aussi.

Finalement, on croit que d'augmenter la complexité du système de retraite par l'incorporation de rentes longévité, ça va rendre ça encore plus complexe. Donc, il y un défi de communication, un défi d'éducation aux travailleurs pour leur donner les capacités de prendre en main leur retraite et leurs finances de façon plus générale. Michel.

M. St-Germain (Michel) : Oui. Alors, je vous remercie, c'étaient nos commentaires, ça va nous faire plaisir de répondre à vos questions.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, merci beaucoup. Et nous passons maintenant à la période d'échange. Et je cède la parole à Mme la ministre.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. M. St-Germain, M. Tremblay, bienvenue, merci d'avoir décidé aujourd'hui de porter votre éclairage sur le rapport D'Amours. Vous avez assisté à l'échange précédent, je sais que vous étiez dans la salle, donc on commence à avancer dans la compréhension du rapport D'Amours, de son impact sur les régimes de retraite, sur la société, sur les revenus des retraités, mais aussi des conditions de mise en application du rapport D'Amours.

Vous parlez, en page 13, dans votre mémoire, de ces conditions par rapport à la rente longévité. Je l'ai dit tout à l'heure d'entrée de jeu, M. D'Amours, ses experts disent bien : C'est un tout. Si on veut sauver le régime de retraite, si on veut assurer la sécurité financière, ils nous proposent un modèle, mais ils disent : On ne peut pas prendre des morceaux du modèle seulement, il faut y aller en bloc.

Un des morceaux majeurs, c'est vraiment la nouveauté, c'est l'innovation, c'est la rente longévité. Tout le monde a été surpris de ça, ça n'existe pas ailleurs, mais c'est une possibilité, tout à coup, une nouvelle fenêtre qui s'ouvre pour dire : Bon, est-ce qu'on pourrait travailler autrement maintenant au niveau de la sécurité financière des retraités?

Maintenant, cette rente longévité, en général, on l'a vu ce matin et vous aussi, vous le soulevez très bien, d'autres mémoires vont venir le soulever, on nous parle de conditions pour le mettre en place, ces conditions étant un arrimage avec le fédéral. En page 13, vous le dites : Elle devrait s'appliquer à tous les travailleurs canadiens, pas seulement aux travailleurs québécois. Vous dites qu'elle devrait respecter l'équité intergénérationnelle. Donc, à quelque part, vous dites qu'actuellement la façon dont c'est proposé ne respecte pas l'équité intergénérationnelle. Ça, j'aimerais vous entendre là-dessus.

L'autre, vous dites que la gouvernance devrait être indépendante du gouvernement. Ça, ça m'a un peu surprise. J'aimerais ça qu'on m'explique en quoi la Régie des rentes n'est pas indépendante ou le gouvernement n'est pas indépendant. Moi, ce que je sais, c'est que les régimes publics sont très bien gouvernés, ce sont ceux qui sont les moins en danger actuellement, donc. Et puis il y a l'arrimage avec la sécurité du revenu garanti.

Sur la question... sur ces conditions, est-ce que ce sont des sine qua non? L'arrimage avec le fédéral, par exemple, le fait que ce soit, pour vous, fait avec tous les... que ce soit un modèle qui s'applique sur tout le Canada, est-ce que c'est fondamental? Jusqu'à quel point cette condition devient une condition de mise en place? L'arrimage avec le SRG, supplément du revenu garanti, est-ce que c'est une condition essentielle et pourquoi? J'aimerais ça vous entendre là-dessus parce que c'est quelque chose d'important. Ça revient partout, cette idée de l'arrimage à travers le système canadien.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. St-Germain.

M. St-Germain (Michel)  : Oui, alors je vous remercie de votre question. D'abord, dans votre préambule, moi, je crois que c'est très séparable. Je ne comprends pas la position du comité d'experts de dire que c'est indissociable, autre que de vous forcer à prendre une décision. Moi, je pense qu'il y a deux enjeux complètement séparés. Le premier enjeu, c'est de s'assurer que les régimes du secteur privé, et j'entends par là les régimes à prestations déterminées, sont flexibles et sont bien administrés. Et l'autre enjeu, c'est : Est-ce qu'on devrait transférer une partie de l'épargne collective du secteur privé à des régimes qui sont parrainés par le public? Je pense que c'est deux questions séparées. Et vous pouvez d'un côté répondre rapidement aux premières questions parce qu'il y a un très, très grand support pour les recommandations du comité D'Amours sur comment rendre les régimes actuels plus efficaces.

Et, l'autre question, vous devriez prendre plus de temps pour vous entendre avec les autres provinces. Et, pour répondre à votre question, moi, je pense qu'on a lieu d'avoir un système bien intégré au Canada. Il y a le gouvernement fédéral qui est présent, les provinces qui sont présentes puis il y a beaucoup d'entreprises nationales qui essaient d'avoir des régimes nationaux bien coordonnés. Il y a des mouvements de population. Je pense qu'il y a lieu de faire un effort pour s'assurer que le régime qui est proposé, qui est un transfert de l'épargne privée à l'épargne publique, se fasse de façon bien coordonnée au Canada.

Je pense que ce qui est proposé est fondamentalement injuste pour les travailleurs à faibles revenus. On leur demande de mettre de l'argent de côté pour capitaliser une rente de retraite qu'ils vont recevoir moins longtemps que les autres et donc qui va avoir comme principal résultat de recevoir une réduction des prestations de supplément de revenu garanti du gouvernement fédéral. Moi, je pense que c'est injuste à l'égard des travailleurs à faibles revenus et que ça devrait être corrigé, et c'est corrigible.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Donc, même si on a un système québécois, là, on a la Régie des rentes du Québec, on a un système...

M. St-Germain (Michel) : Je n'ai pas répondu à votre question sur l'administration...

Mme Maltais : Oui, tout à fait.

M. St-Germain (Michel) : Bien, je m'excuse. À mon avis, il y a une différence entre l'administration et la gouvernance. Je voudrais m'assurer que vous le compreniez bien. En fait, ça devrait être administré par la Régie des rentes. Notre position, c'est que la gouvernance de ce régime-là devrait être indépendante du gouvernement ou, en tout cas, donner l'apparence d'indépendance. Je n'ai aucun problème à ce que ce soit la régie qui administre ce régime-là. Il y a des modèles qui existent, en fait, dans d'autres provinces, au fédéral et dans l'Ontario, puis je vous encourage à regarder pour vous assurer que les gens qui sont responsables de la gouvernance de ce régime-là sont vraiment indépendants du gouvernement et en assurent une perpétuité. J'ai, entre autres, le régime des enseignants en Ontario et le régime qui administre les biens du régime de pension du Canada, ces modèles-là sont très intéressants.

Mme Maltais : Et quel est le problème?

M. St-Germain (Michel) : Au niveau de la...

Mme Maltais : Quel est le problème auquel... que vous identifiez comme étant un problème de gouvernance au Québec par rapport à d'autres régimes?

M. St-Germain (Michel) : On parle de l'administration collective. Je pense que, dans le rapport D'Amours, on parle de 4 milliards de dollars qui sont mis par année, c'est une somme énorme. Et c'est important que les gens qui gèrent ce 4 milliards de dollars là soient, si vous voulez, à l'abri des influences politiques, des élections, et ainsi de suite. Je pense qu'il y a moyen de construire un système de gouvernance qui fait que les gens qui prennent ces décisions-là, ce sont des vrais professionnels, ils prennent des décisions à long terme avec ces argents-là. Encore là, je vous encourage à regarder le régime des enseignants de l'Ontario et celui du fédéral.

• (10 h 40) •

Mme Maltais : O.K. Je n'embarquerai pas dans un débat sur la gouvernance, je ne suis pas... mettons que ce n'est pas l'essentiel du rapport. On pourrait en débattre longtemps.

L'autre, c'est sur le supplément du revenu garanti. Écoutez, moi, suite à votre rapport... votre mémoire et aux autres qui sont venus, j'ai demandé effectivement à la Régie des rentes de voir quel serait l'impact sur les bas revenus d'un régime qui ne serait pas harmonisé ou en tout cas avec lequel on n'aurait pas d'entente avec le fédéral sur le supplément de revenu garanti.

Dans des revenus moyens de carrière — je dis bien «de carrière» — de 30 000 $ à peu près, donc on est vraiment dans la classe moyenne... revenus... moyenne carrière, la rente longévité rapporterait 6 000 $, mais on se trouverait à soustraire aux citoyens 3 000 $ de supplément de revenu garanti s'il n'y a pas d'harmonisation, s'il n'y a pas de... Donc, il y a 3 000 $ qui... la personne recevrait plus à cause de la rente longévité, mais la rente longévité découle d'une cotisation tandis que le supplément de revenu garanti vient des impôts et des taxes à travers tout le Canada. Donc, on soulagerait le gouvernement fédéral pour charger les employeurs et les entreprises... les employés et les employeurs. Donc, on a véritablement... effectivement, les actuaires nous ont soulevé ici un problème d'entente, d'harmonisation qui est important. Il y a 43,7 % des Québécois, des retraités québécois qui reçoivent des suppléments de revenus garantis. On ne parle pas, là, de petits chiffres de personnes affectées.

Je vous remercie de nous avoir soulevé, vous, ainsi que les autres — je n'ai pas eu le temps d'en parler, là — les autres actuaires, ce problème qui est sérieux, là, d'harmonisation avec le fédéral. Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Oui, M. le député de...

M. Chapadeau : Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Chapadeau : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. À la page 9 de votre mémoire, vous parlez de cinq suggestions pour améliorer la flexibilité, la latitude... en fait, cinq améliorations supplémentaires pour augmenter le niveau de flexibilité. Et, au deuxième paragraphe, vous parlez de la législation québécoise qui «ne prévoit pas de mécanisme donnant aux promoteurs de régimes de retraite la latitude nécessaire pour déterminer à quel moment ils veulent capitaliser leur…» Et vous faites... vous nous parlez de la législation ontarienne. Et, à la fin, vous dites qu'il faudrait que ça soit mis en place le plus rapidement possible au Québec, là, cette flexibilité-là, cette latitude-là à savoir à quel moment on verse… on capitalise les régimes de retraite. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur les suggestions que vous nous faites, là, pour améliorer les règles de capitalisation.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. Tremblay.

M. Tremblay (Hubert F.) : Certainement. En fait, c'est beaucoup une question de gestion des liquidités pour les entreprises. Souvent, compte tenu... On a parlé des limites à l'utilisation des surplus. Souvent, les entreprises vont avoir tendance à cotiser les cotisations minimales requises aux régimes de retraite. Dans ce contexte-là, ça ne leur donne pas beaucoup de latitude. Et ils ne veulent pas en mettre plus une année, ils ne peuvent pas le faire, en mettre plus une année. Donc, ça peut avoir tendance à retarder la capitalisation des régimes. En fait, ça… toujours le minimum.

Ce qu'on voit dans les autres législations — vous avez cité la législation ontarienne, fédérale — ce qu'on voit, c'est une possibilité pour les entreprises de cotiser davantage que le minimum une certaine année et cette cotisation excédentaire au minimum peut être reportée aux années suivantes. Donc, encore là, c'est une question de gestion des liquidités. On cotise plus une année et on va déduire ce montant-là d'une cotisation l'année suivante. Ça a tendance à accélérer la capitalisation des régimes. Et c'est souvent à l'avantage autant de l'employeur que des employés, des participants au régime. L'employeur gère bien ses liquidités et le participant au régime voit des sommes entrer plus rapidement dans la caisse de retraite. Et, si jamais les choses se déroulent comme il faut, s'il y a des gains dans le futur, si les choses vont bien, dans un bon environnement, à ce moment-là l'employeur va pouvoir déduire ces cotisations-là dans le futur. Donc, c'est l'idée derrière cette suggestion d'amélioration là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci. Bien, écoutez, je reviendrais avec les chiffres qu'on a vus tantôt, qui m'ont... En tout cas, j'avais déjà lu ces chiffres-là auparavant, ça m'a un peu troublé. On est dans une détente monétaire depuis 2008. Les banques centrales ont baissé fortement leurs taux d'intérêt. Et on a vu que, depuis six mois, là, depuis fin 2012, milieu 2013, le degré de solvabilité a passé de 69 % à 84 %. Malgré que les taux obligataires ont monté un peu, mais il n'y a pas vraiment eu de saut extraordinaire, il n'y a pas eu de phénomène extraordinaire à ce niveau-là, on a vu quand même une réaction très forte de la solvabilité. Alors, moi, j'aurais quelques questions à poser là-dessus.

D'abord, m'expliquer, là, s'il y a un lien très fort puis qui est insoupçonné, mais surtout me parler de l'urgence parce que, quand on a parlé du rapport D'Amours, on parlait beaucoup de l'urgence d'intervenir. Bien là, quand on voit ce degré de solvabilité là augmenter fortement et qu'on avait une situation qui était vraiment catastrophique au niveau du rendement monétaire, moi, ce que je vous demanderais : Est-ce qu'il y a encore urgence? Est-ce qu'on pourrait dire : Regarde, on va respirer par le nez puis on va voir s'il n'y a pas des mesures qui seraient peut-être moins... moins explosives que la rente longévité? Je ne sais pas si je m'exprime bien, là. Mais est-ce qu'on ne pourrait pas tout simplement arriver avec des solutions qui soient peut-être moins novatrices puis on arriverait à des objectifs qui seraient louables? Je ne sais pas si c'est clair, ce que je vous demande là, là...

M. St-Germain (Michel) : Oui. Oui, je vous comprends. D'abord, vous mettez le point... Les régimes de retraite courent un risque de taux d'intérêt qui est extrêmement élevé. C'est la réalité d'un régime à prestations déterminées, c'est la réalité de faire une promesse de rente, la promesse que vous faites et la valeur de cette promesse-là va varier avec les taux d'intérêt. C'est peut-être dommage, mais c'est la réalité, et il faut vivre avec. Et un de mes rôles, c'est d'aider les promoteurs du régime à vivre avec ce risque-là.

Sur l'urgence d'agir, et je vais me concentrer là-dessus, sur les mesures proposées dans le comité D'Amours sur le financement des régimes de retraite, écoutez — je vais le dire comme ça — la situation actuelle de financement des... la réglementation du financement des régimes de retraite, c'est un fouillis. Ça fait huit années, avec mes clients, avec toutes sortes d'autres organisations, qu'on passe de mesures d'exemption à autres mesures d'exemption, qu'on passe de mesures temporaires à autre mesures temporaires. Cette question-là a été analysée, suranalysée et analysée encore, je pense qu'il est temps de décider.

Vous avez... ou le gouvernement a mandaté un groupe d'experts de faire ces recommandations-là. Ces experts-là, ils sont compétents, ils vous ont fait des recommandations. Moi, je les supporte. Moi, je vous dis : Agissez là-dessus. Ce qui est proposé, ce n'est peut-être pas parfait, si vous pouvez continuer à analyser, vous allez peut-être trouver une façon de les perfectionner, mais je pense que, comme les Anglais disent : «It's good enough.» Prenez votre décision et implémentez quelque chose parce que vraiment c'est embarrassant, la situation actuelle.

M. Therrien : Donc, autrement dit, il faut faire quelque chose, et on ne peut pas laisser le marché se corriger et, par le fait même, redresser la barre de financement des caisses de retraite. C'est ce que vous nous dites, là.

M. St-Germain (Michel) : Bien, moi, en fait, ce que je dis, c'est que, si vous cherchez des excuses pour ne pas agir, c'est facile à trouver. Et j'ai un paquet de clients aussi, là, qui cherchent des excuses pour ne pas agir. Il faut arrêter de chercher des excuses pour ne pas agir.

M. Claveau : M. le Président. Peut-être une question...

M. Therrien : O.K. Merci. Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Dubuc.

M. Claveau : Vous parlez, dans votre mémoire, d'exclure les entreprises de moins de 25 employés et puis également des gens à faibles revenus. Bien, ce n'est pas nécessairement une nécessité, compte tenu de leur capacité, d'aller plutôt vers un CELI. Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus, l'exclusion d'une partie, là, de travailleurs et d'individus.

M. St-Germain (Michel) : …RVER...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : En une minute, monsieur...

M. St-Germain (Michel) : Oui. Bon, essentiellement, notre position sur les RVER, c'est que, si vous visez des entreprises de moins de 25 employés, vous imposez une obligation à ces entreprises-là qui est démesurée par rapport à l'avantage. Au niveau des CELI, le gros défi, maintenant, dans le régime de retraite, c'est que... Accumuler du capital dans un CELI, c'est tout aussi efficace que dans un régime de retraite, et, en fait, que, pour les bas salariés, c'est une meilleure façon d'accumuler pour la retraite. Et je trouve que les RVER ne reflètent pas cette réalité-là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et nous passons maintenant du côté de l'opposition officielle, et je laisse la parole à M. le député de Verdun.

• (10 h 50) •

M. Gautrin : Je vous remercie, M. le Président. Et je vais d'abord commencer par une remarque, après je rentrerai avec vous sur les provisions pour écarts défavorables.

Lorsque la ministre vous a posé la question sur la gouvernance, moi, je suis assez d'accord avec vous, il faut que la gouvernance soit séparée du gouvernement et des choses gouvernementales. Et moi, j'ai un autre argument qui est le suivant : la rente de longévité est une rente qui va être essentiellement à prestations cibles, mais il peut arriver à un moment que, s'il n'y a pas les rendements, à ce moment-là, accumulés, que la gouvernance soit obligée de baisser éventuellement les prestations.

Alors, si le gouvernement se voit obligé de baisser les prestations, politiquement ça amènerait à savoir : Est-ce que c'est lui qui est responsable de la gouvernance de devoir réinjecter des fonds? Parce que, politiquement, ça serait extrêmement difficile de baisser, à ce moment-là, pour l'ensemble de la population, même si c'est justifié sur le plan économique et sur le plan actuariel de devoir le faire. C'est pour ça que moi, j'adhère complètement à ce que vous dites. Il faut que la gouvernance soit séparée complètement des questions gouvernementales. C'est un autre argument par rapport à ceux que vous avez donnés.

Je vais revenir avec vous, si vous me permettez, parce que vous êtes rentré, à l'heure actuelle... Vous trouvez que, dans le rapport D'Amours, l'augmentation à 15 % de la prestation pour écarts défavorables est trop importante, que vos clients auraient de la difficulté éventuellement à le payer si on n'a pas réellement établi qu'il y avait les… Et je ne ferai pas le débat aujourd'hui sur qui est propriété des excédents d'actif. Est-ce que vous maintenez la même position si on modifiait les régimes de prestations déterminées vers les régimes à prestations cibles ou des régimes à financement salarial, où, à ce moment-là, le risque est plus partagé ou est supporté par les bénéficiaires?

M. St-Germain (Michel) : Écoutez, dans un régime à prestations cibles — et, en passant, j'ai l'honneur de partager avec la régie… de travailler sur le comité technique de la Régie des rentes — dans un régime à prestations cibles, pour être bien précis, il n'y a pas de risque à l'employeur, le risque est entièrement supporté par les employés. Et, à mon avis, c'est aux employés, et aux retraités, et à leurs représentants de décider s'ils veulent ou non une provision pour écarts défavorables. Dans ce cas-là, la propriété de la provision pour écarts défavorables, elle est très claire, elle appartient aux participants. Et ce que je vous dis, c'est que, dans un régime à prestations déterminées où l'employeur prend son risque, ce serait mieux si la propriété de la provision pour écarts défavorables appartenait à l'employeur.

M. Gautrin  : Comme c'est précaire, c'est réellement... dans la situation actuelle, que vous voudriez… si on ne change rien, vous voudriez vraiment que ces éléments-là soient précisés dans la loi. C'est bien ce que je comprends?

M. St-Germain (Michel)  : Oui. Et, en fait, si vous ne les précisez pas, je vous dis que les conséquences de ne pas les préciser, c'est que les employeurs vont vouloir aller vers des politiques de placement plus conservatrices, de générer des rendements qui sont moins élevés parce qu'on ne connaît pas qui bénéficie de ces rendements-là.

M. Gautrin  : Merci. Vous n'avez peut-être pas lu ou entendu la question que j'ai posée par rapport au mémoire du SCFP, qui voudrait prendre les provisions pour écarts défavorables ou ce qu'ils appellent pour les risques, etc… soient incluses à l'intérieur d'un fonds qui soit différent que les services courants et les services de correction. Comment vous vous positionnez par rapport à ça et à la possibilité, si jamais, dans ce fonds, on se trouve en excédent par rapport à ce qui devait être prévu dans la loi pour les provisions défavorables, à ce moment-là, on puisse faire une indexation, a posteriori, c'est-à-dire pas à priori, mais a posteriori, des régimes de retraite, comment...

M. St-Germain (Michel)  : En fait, il faut laisser le choix aux parties de s'entendre sur ce genre d'arrangement là.

M. Gautrin  : …la flexibilité, oui.

M. St-Germain (Michel)  : Sur la flexibilité. Ça existe déjà, ce genre d'entente là. C'est certain que la loi l'encadre mal. Et je pense qu'il y a certaines des recommandations du comité D'Amours qui vont permettre d'encadrer ce genre d'arrangement là. Mais ça existe maintenant. Il y a des régimes qui ont volontairement choisi d'établir des réserves pour l'indexation future.

M. Gautrin  : Dans le cas, particulièrement… le travail qui a été fait, qui n'est pas dans le rapport D'Amours, mais au niveau du MAMROT, avec les employés municipaux, il est à cet effet-là.

M. St-Germain (Michel) : Ça existe dans le milieu municipal, mais ça existe aussi dans le secteur privé. Je sais qu'ici que ce que je dis c'est très confidentiel et qu'il n'y a personne d'autre qui l'entend, mais...

M. Gautrin : Bien sûr.

M. St-Germain (Michel)  : Et je ne mentionnerai pas le nom d'un client, mais, disons, que c'est une grande compagnie de chemin de fer — et ce n'est pas le MAM — qui a ce genre d'arrangement là depuis plusieurs années, et ça fonctionne bien.

M. Gautrin :Merci. Je crois que mon collègue d'Outremont va pouvoir continuer. Et, si jamais il reste un peu de temps à la fin, je reviendrai.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Merci, M. le Président. Merci d'être ici. Trois choses. Mais, d'abord, je voulais juste saluer votre suggestion à la page 7. Au fond, vous êtes d'accord qu'on utilise un taux d'actualisation en fonction des taux des obligations des sociétés bien établies. Mais, comme le marché n'a pas la profondeur souhaitée puis ça pourrait être trop volatile, prenez donc… même objectif, mais un indice obligations Canada, obligations provinces plus un «spread», ça serait plus stable et plus... Je pense que c'est quelque chose de très concret, qu'on peut facilement retenir.

Sur la rente longévité et en présumant, là — de toute façon, on est dans un monde imaginaire — qu'il y ait une entente avec Finances Canada que le SRG ne serait pas réduit… Mais je vais vous poser la même question que… Vous l'avez entendue, la question que j'ai posée à vos collègues de l'autre firme, tout à l'heure, sur… vos collègues à travers le Canada. Parce que Mercer est une grande firme canadienne. Je connais certains des gens qui travaillaient chez vous, à Toronto, etc. Avez-vous discuté de cette nouvelle idée, la rente longévité présentée et... Et est-ce que c'est un espoir raisonnable qu'on pourrait effectivement en arriver... Y a-tu une... Quel est l'état de la réceptivité que vous...

M. St-Germain (Michel) : Oui, bien, je serais tenté de répondre. En fait, je porte plusieurs chapeaux, là, chez Mercer, je suis membre du conseil d'administration de l'Institut canadien des actuaires et sur le conseil de l'accord qui va témoigner l'année prochaine et j'ai participé à ces rédactions-là.

Je vais répondre à cette question comme ça. Une chose qui m'impressionne au Québec, c'est la facilité à laquelle on peut être solidaires les uns des autres. Je n'ai pas besoin de vous dire qu'à Toronto ce désir d'être solidaire, là, il existe moins qu'au Québec. Ce que je vous dis, c'est que vous avez une pente à remonter à Toronto à justifier, en fait, une intervention de l'État pour reconnaître que le système actuel d'épargne-retraite ne fait pas un tellement bon travail et qu'il y a lieu de transférer une partie de ces responsabilités-là du secteur privé au secteur public. Ça ne sera pas facile à vendre à Toronto, je vous dis ça.

M. Bachand : Je vous interromps parce que le gouvernement de l'Ontario — puis si on met le NPD, les libéraux ensemble — était favorable, au fond, à une augmentation importante du Canadian Pension Plan basée sur la position syndicale. Peut-être que c'étaient des enjeux politiques qui les faisaient se prononcer comme ça, mais il semblait y avoir un consensus, peut-être pas dans le milieu des affaires, mais dans la société politique ontarienne pour bouger sur cette dimension-là. Il me semble que la rente longévité est peut-être une façon plus adéquate, plus ordonnée, plus... moins dommageable pour l'économie aussi.

M. St-Germain (Michel) : Je n'avais pas comparé les politiciens du Québec aux politiciens de l'Ontario, mais je peux comparer le milieu d'affaires du Québec au milieu d'affaires de l'Ontario. Et le milieu d'affaires du Québec est beaucoup plus favorable à la rente longévité que le milieu d'affaires de l'Ontario.

M. Bachand : O.K. Puis dans l'Ouest?

M. St-Germain (Michel) : L'Ouest ressemble plus à l'Ontario qu'au Québec.

M. Bachand : À l'Ontario, oui. Bien, ça dépend qui dans l'Ouest. Ça va. Je vais te laisser terminer. J'avais une autre question, mais ça va.

M. Gautrin : Bien, alors, moi, je...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Verdun.

M. Gautrin : Alors, écoutez. Vous, vous avez plaidé brillamment sur la nécessité d'avoir, disons, un accord pancanadien sur beaucoup des mesures qui sont proposées à l'intérieur du rapport D'Amours à l'heure actuelle. Si vous conseillez les législateurs que nous sommes, quelles sont les mesures que nous pourrions ou que nous devrions prendre à court terme pour corriger, en quelque sorte, ce que vous avez très gentiment appelé le fouillis. Et j'en suis un de ceux qui a contribué au fouillis, d'après votre document, sur l'utilisation des surplus et des excédents d'actifs. Quelles sont les mesures qu'on peut faire et qu'on devrait faire si on a à préparer... ou si le gouvernement a à préparer un projet de loi? Et quelles sont les mesures qui nécessitent, bien sûr, soit une entente avec l'ICA… ce n'est pas une entente, mais, enfin, une participation de l'ICA, ou une entente interprovinciale, ou une entente au niveau du comité des ministres des Finances qui travaillent aussi sur cette question, si je ne m'abuse, M. l'ex-ministre des Finances?

M. St-Germain (Michel) : Oui, bien, écoutez, au niveau des régimes publics… privés de retraite, les recommandations du rapport D'Amours sont claires : Éliminez l'exigence de financer selon la solvabilité; financez les régimes de retraite selon un indice d'obligation qui est approprié; ayez une période d'amortissement qui varie entre 10 à 15 ans; ayez des conditions spéciales pour les régimes du secteur public qui sont sujets à la loi. Et moi, je prendrais comme position que les valeurs de transfert à la terminaison d'emploi — et ça, c'est important que ça soit fait à la grandeur du Canada — que ce soit basé sur la façon dont ces valeurs-là sont financées plutôt qu'une valeur équivalente, qui était la base qui avait été recommandée par l'Institut canadien des actuaires. Ces recommandations-là, elles sont très concrètes dans le comité D'Amours, et je vous encourage à les aborder.

Pour ce qui est de la rente longévité, ce que je vous dis, c'est : Prenez le bâton de pèlerin, allez voir les autres provinces, allez voir le gouvernement fédéral et allez leur dire qu'il y a un consensus au Québec en faveur d'une question qui est comme ça, et est-ce qu'il n'y a pas lieu d'étendre ce consensus-là parmi les autres provinces canadiennes.

• (11 heures) •

M. Gautrin : O.K. Je comprends bien ce que vous nous dites à l'heure actuelle. Même... on ne touche donc pas à la rente des transferts, c'est-à-dire à la manière dont on calcule le transfert. Ça, ça doit être négocié pancanadien, rente de longévité aussi. Tout ce qui touche, par contre, la gestion, en quelque sorte, des régimes à prestations déterminées, on pourrait éventuellement clarifier la loi. Est-ce que je résume grosso modo votre position?

M. St-Germain (Michel) : Absolument. Juste pour peut-être préciser, au niveau de la valeur de transfert, je pense qu'il y a eu consensus aussi, à l'extérieur du Québec, d'ajuster cette valeur de transfert là.

M. Gautrin  : Mais vous regardez… si vous allez écouter, cet après-midi, le mémoire de l'ICA, ils ont des méthodes de... ils veulent revoir la méthode de transfert, par exemple l'ajout du 0,9 % pour prime de risque dans le calcul du transfert, ou des choses comme ça, ce qui est relativement technique. Mais il est nécessaire d'avoir une entente aussi et laisser les paramètres établis par l'Institut canadien des actuaires.

M. St-Germain (Michel) : Non, ce n'est pas nécessaire. Je veux bien préciser là-dessus.

M. Gautrin : Ah bon! Alors, je ne comprends pas.

M. St-Germain (Michel) : Oui. En fait, ce qu'on a donné comme mandat à l'Institut canadien des actuaires, c'est de trouver un indice qui représente, lorsqu'on termine son emploi, la même valeur entre une somme forfaitaire et la rente qu'on a droit. Ce qui est proposé par le comité D'Amours, c'est de regarder cette question-là de façon complètement différente. Ce n'est pas basé sur une valeur équivalente, mais de donner à quelqu'un qui termine son emploi un montant qui correspond à la façon dont cette rente-là a été financée. Alors, c'est une perspective complètement différente de ce qu'est les prestations de départ.

En fait, si vous voulez impliquer l'Institut canadien des actuaires, assurez-vous que vous posez la bonne question, et la bonne question, c'est : on devrait payer des prestations de départ selon la façon dont elles sont financées plutôt qu'une valeur de prestation de départ qui correspond à une valeur qui est équivalente. Alors, position là-dessus, posez la question à l'Institut canadien des actuaires pour la suite.

M. Gautrin  : O.K. Mais vous faites partie de l'institut, enfin vous êtes actuaires, vous faites partie aussi de l'Institut canadien des actuaires, donc vous êtes partie au débat, à ce moment-là. Je vais soulever la question cet après-midi avec... lorsqu'ils auront la chance de venir témoigner devant nous. Je pense que vous clarifiez correctement la question à cet effet-là. Tu as d'autres questions, Raymond?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Oui, bien, j'étais un peu surpris dans le RVER, bien, pas surpris complètement, mais que vous suggériez de limiter l'obligation aux entreprises de 25 et plus. Il y a quand même eu un large débat puis un large consensus, au Québec, parce que c'était quelque chose de majeur, mais de mettre en place… que les employeurs soient finalement le canal par lequel 2 millions de Québécois peuvent épargner, un peu comme ils l'ont fait avec le système kiwi, en Nouvelle-Zélande, comme ils l'ont fait dans d'autres pays. Et, pour que ça marche, il faut qu'à peu près tous les employeurs contribuent. Là, on a choisi la barre... quand on regarde le nombre d'employés dans les PME, on avait choisi la barre. Mais même je pense que la FCEI, la plupart... on aura l'occasion d'en rediscuter, mais la plupart des groupes patronaux ont accepté… ce n'était pas leur premier choix, mais ils ont accepté que c'était possiblement un choix raisonnable.

M. St-Germain (Michel) : Je n'ai pas la même lecture que vous, M. Bachand, malheureusement. Ma position, c'est que le fardeau que vous allez imposer à ces... en fait, ce n'est même pas des PME, moins que 25 employés, c'est des très petites entreprises... le fardeau de choisir une compagnie d'assurance, d'établir un canal avec cette compagnie d'assurance là, que ce fardeau-là est démesuré par rapport à l'avantage qu'on offre aux employés. Écoutez, épargner pour la retraite, c'est drôlement facile. Vous vous promenez ici, à côté, sur le coin de la rue, là, puis vous allez rencontrer quatre banques qui sont prêtes à vous établir des REER ou vous ouvrez votre ordinateur et vous avez accès à toutes sortes de produits pour épargner pour la retraite. À mon avis, le fardeau que vous imposez est démesuré par rapport à l'avantage que vous accordez.

M. Bachand  : Je respecte votre opinion, mais la réalité nous a démontré, par rapport à ces millions de Québécois, qu'au fond c'est une décision complexe. Moi, je me suis posé la question : Pourquoi, quand on fait une adhésion obligatoire avec un «opting out» plutôt qu'un «opting in», parce qu'effectivement vous dites que c'est facile, pourquoi l'adhésion reste à 80 % quand vous êtes obligé, mais vous avez le droit d'en sortir, alors que, si c'est votre choix personnel, c'est l'inverse?

Puis j'ai observé ça, puis je me suis dit : Au fond, c'est parce que la décision d'épargner, de choisir ton produit financier, même si c'est Desjardins qui dit : Voici le bon portefeuille de placement, c'est une décision complexe pour le travailleur moyen, le travailleur à temps partiel qui existe au Québec, alors que, si tous les choix sont faits par défaut, portefeuille de placement par défaut selon ton âge, cotisation par défaut... totalement libre d'en sortir, il y a une adhésion beaucoup plus massive. En tout cas, c'est l'expérience Grande-Bretagne et Nouvelle-Zélande.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci de ce commentaire, M. le député d'Outremont, mais le temps pour l'opposition officielle est terminé. Alors, M. St-Germain, vous pourriez peut-être répondre sur le temps de la deuxième opposition, s'ils acceptent. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière, c'est à vous la parole.

M. Picard : Merci, M. le Président. Tantôt, M. St-Germain, vous avez dit que c'était le temps d'agir. Et donc vous dites que le rapport D'Amours, même si M. D'Amours dit que c'est indissociable, vous, vous dites : Il y a des parties qu'on pourrait faire rapidement. Avez-vous un échéancier à recommander au gouvernement pour dire : Là, c'est le temps d'agir, il faut que ça se passe rapidement? Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus.

M. St-Germain (Michel) : Oui, absolument. Bien, on a annoncé le prolongement des mesures temporaires pour deux années, alors, ce qui se termine en 2015. Moi, il me semble que les entreprises qui ont des régimes à prestations déterminées devraient connaître quelque part avant l'été 2014 quelles sont finalement les normes de financement permanentes qui vont exister. Alors, moi, j'aimerais vous proposer cet échéancier-là.

M. Picard : Merci. Tantôt, vous avez parlé d'obstacles réglementaires. Vous avez parlé de fouillis. C'est quoi, les principaux obstacles réglementaires qu'on pourrait éliminer rapidement?

M. St-Germain (Michel) : Bon, au niveau du financement des régimes de retraite, c'est d'éviter de lancer le message qu'on peut s'attendre continuellement à un assouplissement des règles quand les choses vont mal. Ce que vous avez, le message que vous lancez aux marchés, là, c'est qu'on peut prendre des risques. Si les risques ne paient pas, tout ce qu'on a à faire, c'est d'aller voir le gouvernement ou l'organisme de réglementation pour demander des mesures d'assouplissement puis on va les avoir. C'est une mauvaise façon de gérer un régime de retraite, où il devrait y avoir une permanence et une stabilité des coûts. Alors, il n'y a aucune entreprise qui gère sa business de cette façon-là, et c'est le message que vous lancez aux régimes de retraite.

M. Picard : Merci. Tantôt, vous avez dit que les régimes du Québec se classaient sixièmes sur 18 et vous avez parlé des forces et faiblesses. Pouvez-vous nous dire les forces et les faiblesses rapidement? Mais aussi est-ce que vous avez évalué, si on applique les recommandations du rapport D'Amours, là, selon vous… Je sais que vous n'avez probablement pas fait le calcul précis, mais on va s'améliorer, j'espère, mais à quel niveau, si vous le savez?

M. St-Germain (Michel) : Oui. En fait, bien, je vais mentionner deux forces et deux faiblesses. Nos deux forces, c'est qu'on a un système qui est diversifié. Comparé à plusieurs autres provinces, les Québécois ont différentes sources de revenus, alors de sorte que, s'il y en a une qui ne fonctionne pas, on peut se relier à d'autres. Et, je vais peut-être vous surprendre, au bout de la ligne, on a un système de gouvernance des régimes publics, même si j'ai dit qu'il y a lieu de l'améliorer, qui est raisonnablement solide, comparé aux autres entreprises, en particulier comparé aux États-Unis. Notre système de gouvernance des régimes publics est beaucoup plus solide que les Américains.

Deux faiblesses qu'on a, et on l'a mentionné, c'est la couverture des travailleurs à salaire moyen dans des régimes de retraite. On a un faible taux de couverture, on a un des plus bas, des plus faibles au monde. Et malheureusement les frais de gestion de l'épargne individuelle, au Canada, sont plus élevés que dans plusieurs autres pays. Alors, s'il y avait moyen de corriger ces choses-là... Je pense que la rente longévité va régler en partie le problème de la couverture des salaires moyens. On va offrir un produit qui existe. Je pense aussi que les RVER vont corriger cette question-là.

M. Picard : O.K. Merci. Est-ce qu'il me reste du temps, M. le Président?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Moins d'une minute.

M. Picard : Je vais permettre à M. St-Germain de répondre au député d'Outremont.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Est-ce que vous avez un commentaire à rajouter, M. St-Germain, en 45 secondes?

M. St-Germain (Michel) : Oui, je voulais dire que je suis d'accord avec son diagnostic. Il y a trop de Québécois qui sont incapables de gérer leur épargne-retraite et de prendre des décisions. Et c'est la raison pour laquelle je pense que la rente longévité est une solution intéressante. C'est triste à dire, mais on enlève aux Québécois une décision que plusieurs ont de la difficulté à prendre, et c'est la raison pour laquelle on supporte cette avenue-là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. St-Germain, M. Tremblay, merci beaucoup de votre apport à notre commission.

Et je suspends quelques minutes pour permettre aux représentants de la firme Morneau Shepell de prendre place.

(Suspension de la séance à 11 h 9)

(Reprise à 11 h 12)

Le Président (M. Gautrin) : Il me fait plaisir de vous accueillir, représentants de Morneau et Shepell. Je comprends qu'il y a Mme Lamarche, M. Girard et M. Béliveau. C'est ça? Alors, vous avez la parole en principe pour une dizaine de minutes, pour présenter votre mémoire, et ensuite les parlementaires ministériels auront une quinzaine de minutes pour vous poser des questions. Et je reprendrai mon poste pour vous poser des questions aussi.

Morneau Shepell Ltd.

Mme Lamarche (Danielle) : Bonjour. En premier lieu, j'aimerais remercier la commission de nous accueillir ce matin et nous donner l'opportunité de présenter notre perspective sur les recommandations du rapport D'Amours. Je suis Danielle Lamarche, associée de Morneau Shepell. Je suis accompagnée de Richard Béliveau et Gino Girard, qui sont également associés de la firme.

Morneau Shepell compte plus de 3 000 employés au Canada, dont 1 300 au Québec. Nous offrons des services en régime de retraite depuis plus de 50 ans. Nous comptons parmi nos clients les plus importantes organisations de la province tant dans les secteurs public et parapublic que dans le secteur privé. Nous saluons l'initiative gouvernementale d'avoir mandaté des experts afin de se pencher sur les régimes complémentaires de retraite et sur l'avenir du système de retraite québécois. Tout comme le comité D'Amours, nous sommes d'avis que les régimes de type prestations déterminées représentent la meilleure façon d'assurer la sécurité financière à la retraite. Nos commentaires de ce matin vont porter sur trois éléments.

Le premier, la rente de longévité. Une proportion significative de travailleurs n'a pas accès à un régime collectif d'épargne-retraite, alors l'adoption d'une approche collective et obligatoire nous paraît appropriée. Par contre, la cohorte des baby-boomers est à l'aube de la retraite, et leur sécurité financière peut paraître le problème le plus urgent à régler. La rente de longévité ne vise pas à solutionner leurs problèmes, et c'est parfait. On ne doit surtout pas s'embarquer dans un autre transfert intergénérationnel comme ça a été fait avec le Régime de rentes du Québec en 1966. Selon nous, on doit privilégier l'adoption de mesures incitatives pour inciter les travailleurs, les baby-boomers à demeurer plus longtemps sur le marché du travail.

Parlons maintenant du niveau de revenu visé par la rente de longévité. Alors, on l'a mentionné, les travailleurs à faibles revenus bénéficient déjà d'un excellent niveau de remplacement de revenus à la retraite. Si on les faisait participer à la rente de longévité, ce serait pratiquement désastreux pour eux. Ils seraient forcés d'épargner à court terme sans vraiment pouvoir bénéficier de revenus complets additionnels à la retraite étant donné la baisse anticipée du supplément de revenu garanti. Par contre, la prestation offerte pour les travailleurs à revenus moyens est insuffisante. Nous croyons donc que la rente de longévité devrait plutôt couvrir les gains entre 25 000 $ et 75 000 $ pour atteindre l'objectif de protection visé, et non les premiers 50 000 $ de gains.

Quant à la structure de gouvernance, nous souhaitons une participation du secteur financier privé québécois, plutôt que de tout concentrer auprès d'un seul gestionnaire. La gestion des épargnes des Québécois doit être effectuée dans un contexte de saine compétition et de diversification. Finalement, avant de mettre sur pied un tel régime, ne devrait-on pas attendre les conclusions des réflexions sur le Régime de pensions du Canada? N'oublions pas qu'une introduction prématurée de la rente de longévité risque de nuire à la compétitivité des employeurs québécois si ceux des autres provinces n'ont pas à financer de régime équivalent.

Mon deuxième commentaire porte sur le financement, sur la base de financement elle-même et la restructuration de la promesse de rentes. Tout d'abord, nous sommes entièrement d'accord avec l'élimination de la solvabilité pour les régimes du secteur privé. Ce changement très important permettrait de limiter l'abandon des régimes à prestations déterminées que nous observons depuis la dernière décennie chez les employeurs du secteur privé. L'élimination de la solvabilité atténue également dans leur cas les hausses de coûts associées à la nouvelle base de capitalisation améliorée.

Par contre, les municipalités et les universités, vous savez, n'étaient plus assujetties à la solvabilité depuis 2007. Alors, dans leur cas, la capitalisation améliorée représente des hausses de coûts tout simplement démesurées. Le rapport lui-même indique des hausses de cotisation requise de l'ordre de 10 % à 20 % de la masse salariale. Peu d'institutions peuvent absorber de telles hausses. Malgré des réductions importantes de prestations pour les participants à ces régimes, le solde des coûts pour l'employeur entraînera des réductions des services offerts par les municipalités et les universités ou des hausses des coûts de ces services. Il faut être prudents et éviter de mettre en place de nouvelles politiques qui nous amèneraient à rouvrir de récents débats.

Nous sommes d'avis que la capitalisation améliorée ne rencontre pas trois principes essentiels d'une base de financement. Une base de financement doit refléter la politique de placement du régime et le niveau de garantie associée aux prestations offertes, par exemple une indexation conditionnelle si la situation financière le permet, plutôt qu'une indexation garantie. La base de financement doit aussi comporter obligatoirement des marges de sécurité qui pourraient être plus élevées pour les entreprises du secteur privé par rapport à celles du secteur public qui sont pérennes. Et la base de financement, finalement, doit promouvoir la stabilité des coûts à court terme. Cet objectif est d'autant plus important lorsque les coûts sont partagés avec les participants et qu'ils en subissent les variations.

L'utilisation proposée d'un taux d'actualisation qui est basé sur les obligations corporatives ne rencontre pas, selon nous, un objectif de stabilité. À titre illustratif, une évaluation en date d'avril 2013, qui est la date de publication du rapport, par rapport à une évaluation en date de juillet 2013, donc seulement trois mois plus tard, aurait entraîné des variations de coûts de l'ordre de 6 % à 8 % de la masse salariale étant donné uniquement les variations du taux des obligations corporatives au cours de cette période. Ces variations sont énormes et mettent en doute la base de capitalisation améliorée comme étant appropriée. Nous préconisons l'utilisation d'une approche qui présume de la continuité du régime, mais qui inclurait un encadrement plus rigoureux de la marge de sécurité. Cette approche permet d'équilibrer adéquatement l'objectif de prudence pour les participants avec celui de stabilité des coûts autant pour le participant que pour l'employeur.

En ce qui concerne la restructuration des prestations, nous sommes entièrement d'accord avec la possibilité de réviser des droits acquis. Pour assurer la pérennité d'un système de retraite, il faut revoir les prestations et non seulement hausser des cotisations. Évidemment, on envisage la réduction des prestations après une hausse acceptable et raisonnable des cotisations. Il est également très important de privilégier la négociation afin de permettre que les parties s'entendent sur la nécessité d'agir et sur les mesures à privilégier. Nous comprenons qu'en l'absence d'entente le comité suggère que le promoteur puisse unilatéralement éliminer l'indexation des rentes. Cependant, puisque très peu de régimes offrent de l'indexation automatique, une mesure visant l'ensemble des prestations accessoires serait préférable.

Il est également souhaitable de faire participer les retraités de manière raisonnable aux efforts de redressement. Ça va d'ailleurs dans le sens de l'équité intergénérationnelle. Si les retraités ne font pas d'effort, ce seront les participants actifs et l'employeur qui devront le faire.

L'utilisation du droit unilatéral par l'employeur nécessite le versement d'un montant forfaitaire équivalent à la réduction des prestations. Pour plusieurs organisations, cette obligation peut représenter un fardeau financier très important. On doit permettre l'amortissement des sommes dues sur une période raisonnable et non pas en un seul versement.

• (11 h 20) •

Finalement, le comité recommande des mesures de restructuration temporaires qui se terminent après cinq ans. Il serait judicieux de considérer des mesures de restructuration permanentes qu'on retrouve dans les nouveaux types de régimes, à titre d'exemple, les régimes à prestations cibles comme en Alberta, en Colombie-Britannique ou plus récemment pour les entreprises du secteur des pâtes et papiers du Québec, ou encore le type de régime à risques partagés comme on retrouve au... Nouveau-Brunswick, oui. Il faudrait également permettre des approches comme celle proposée par les secteurs universitaire et municipal québécois, qui a mené au projet de règlement déposé en mai dernier par le gouvernement.

Mon dernier commentaire porte sur le calcul des valeurs de transfert. Alors, nous sommes d'accord avec la révision de la méthodologie du calcul des valeurs de transfert, mais, comme les autres intervenants, on considère qu'il est impératif qu'un changement apporté à cette méthodologie soit applicable dans l'ensemble des juridictions canadiennes pour éviter que les participants québécois soient pénalisés par rapport à ceux des autres juridictions.

Alors, en conclusion — je suis à l'intérieur de mon 10 minutes — suite à la publication du rapport D'Amours, le gouvernement a agi rapidement pour accélérer la mise en place des RVER. Nous souhaitons qu'il continue d'agir avec célérité afin que le système de retraite des Québécois demeure l'un des plus performants au monde. Alors, mes collègues sont disponibles pour répondre à vos questions. Vous n'avez pas idée comment qu'ils ont hâte de prendre la parole. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et je cède maintenant la parole à Mme la ministre.

Mme Maltais : Merci beaucoup, Mme Lamarche, M. Béliveau, M. Girard, merci de votre présence. Merci d'avoir préparé ce mémoire pour nous. Votre mémoire rejoint quelques-uns des mémoires qui nous ont été déposés entre autres par des firmes d'actuaires sur certains points qu'on a déjà commencé à discuter, entre autres l'importance de l'harmonisation avec le régime fédéral, la protection des bas revenus, l'harmonisation donc avec la sécurité du revenu garanti. Ça, on en a débattu. Je souligne que vous le notez vous aussi. Vous notez aussi les problèmes sur la capitalisation améliorée, de la baser sur des obligations corporatives, qui sont beaucoup plus volatiles. Je sais qu'on en a... c'est présent dans plusieurs mémoires, donc merci de soulever ça aussi.

Il y a deux choses, toutefois, qui sont plus particulières dans votre mémoire. La première, c'est... vous êtes... Vous semblez véritablement des promoteurs ou défenseurs des prestations cibles. J'ai lu dans votre mémoire que vous croyez véritablement que ce peut être une solution à une partie des problèmes des régimes à prestations déterminées. Je vous ai bien entendue, madame, vous avez dit : Nous croyons que nous devons protéger les régimes à prestations déterminées. Mais, dans votre mémoire, on nous parle beaucoup des prestations cibles. J'aimerais ça vous entendre parler des avantages ou désavantages des prestations cibles.

M. Girard (Gino) : Peut-être faire la première partie de la réponse, puis je suis sûr que Richard va ajouter. Oui, c'est vrai qu'on parle des prestations cibles, mais, en fait, je pense que le message fondamental qu'on a tenté de passer, c'est que la stabilité des régimes, qu'on les appelle prestations cibles, coûts partagés, prestations déterminées mais avec du financement, par exemple, d'une indexation qu'on ne garantit pas, nous, ce qu'on pense, c'est que fondamentalement il faut que les deux côtés de la médaille puissent bouger ensemble, les cotisations, la valeur de l'actif et la valeur du passif.

Et il faut, si on veut vraiment penser des régimes qui vont durer cinq ans, 10 ans, 15 ans, 30 ans, 50 ans… on ne pense pas qu'une invitation de restructurer à l'intérieur d'un délai fixe une fois pour toutes, ça va régler le problème pour 30 ans des prestations déterminées. On n'a pas cette prétention-là que l'exercice, limité sur cinq ans, d'inviter à revoir les acquis va nécessairement solutionner le problème à long terme.

Ce qu'on voudrait, par contre, c'est que les initiatives qui permettent beaucoup de flexibilité dans les prestations elles-mêmes aient bien communiqué cette flexibilité-là aux participants, que ça soit la solution à privilégier. À ce titre, le travail fait par le MAMROT récemment, entre autres, qui a été mentionné, visait justement de dire : Introduisons des prestations qu'on va financer, mais qu'on ne garantira pas. Donc, c'est un peu, je pense, le message de...

M. Béliveau (Richard) : En fait, si je peux juste ajouter un point, c'est qu'on juge que, si on veut avoir un système qui va durer à long terme, il faut trouver l'équilibre juste entre la sécurité des prestations, qui est très importante, mais aussi la stabilité des coûts. On voit qu'un système qui crée trop de volatilité va faire en sorte que les employeurs du secteur privé, par exemple, vont délaisser. Alors, si on veut que ça fonctionne, est-ce que c'est, par exemple, de s'en aller complètement vers un système public comme la rente de longévité, au fond, puis dire : Bon, on lance la serviette, le secteur privé ne sera jamais intéressé là-dedans, ou... Nous, on ose croire que, si on crée un système où on crée le bon équilibre, on va continuer à attirer les employeurs à mettre des régimes sur pied. Et on pense qu'un système bien diversifié, avec une bonne part qui est assumée par le secteur privé et le secteur public, un bon équilibre dans tout ça va nous amener la meilleure réponse à long terme pour le Québec.

Mme Maltais : Est-ce que cet équilibre, pour vous, est possible avec la rente longévité, mettons, harmonisée avec le fédéral? Donc, vous êtes d'accord avec ce principe de finalement transférer un peu plus de responsabilités au public et un peu plus d'obligations au privé envers les régimes de retraite en créant une rente longévité?

M. Béliveau (Richard) : Bon, là-dessus, dans notre mémoire, on indique qu'on souhaite une participation plus importante du secteur privé financier québécois à tout ce mécanisme-là parce qu'actuellement ce qui était prévu, c'était essentiellement de confier ça à un seul gestionnaire, la Caisse de dépôt et placement du Québec. Alors, on trouve que, et pour la mutualisation des risques de longévité et pour la mutualisation des risques de placement, les deux, on devrait trouver une formule qui va mettre tout le monde ensemble, le privé, le public, et la rente de longévité actuellement ne fait pas ça. Donc, on indique qu'on aime le principe, mais on souhaiterait avoir une part plus importante, dans tout ça, du secteur privé, ce qui nous assurerait, dans le fond, une saine compétition et une saine diversification des risques. Et on pense que c'est peut-être des concepts théoriques mais qu'au bout du compte on serait gagnants.

Mme Maltais : Je reviens sur les prestations cibles. C'est parce que le rapport D'Amours, il origine d'un problème au Québec, qui était qu'à cause de la crise financière de 2008 on a eu vraiment des problèmes de solvabilité de nos régimes à prestations déterminées. Et le danger qu'on a actuellement, c'est de voir les entreprises transférer les régimes de prestations déterminées en régimes à cotisation déterminée. La différence entre les deux, c'est que la prestation, elle est fixe, les retraités peuvent donc prévoir d'avance quel sera leur niveau de vie; la cotisation déterminée, ils connaissent leur cotisation, mais ils ne connaissent pas leur niveau de vie quand ils vont être rendus à la retraite.

Et les prestations cibles sont une espèce de nouveauté qui a été trouvée, qui… D'ailleurs, on en parlait tout à l'heure avec le député de Verdun, on a fait pour la première fois un projet de loi sur une papetière, sur les papetières, puis où on a parlé des régimes à prestations cibles. Mais, dans votre mémoire, vous en parlez, vous semblez être ceux qui en parlent le plus. C'est vraiment pour savoir, là, parce que c'est une particularité de votre mémoire : Est-ce que, pour vous, voilà le type… Est-ce qu'on devrait, par exemple, favoriser la mise en place d'un régime à prestations cibles? Est-ce que vous trouvez que c'est un outil intéressant?

M. Béliveau (Richard) : Oui. On a entendu les autres mémoires. Les gens ont dit, avant nous, qu'ils croyaient que c'était quand même une solution qui pouvait être utile, qui devrait faire partie des solutions, peut-être pas la solution magique à tous les problèmes. Nous, on ne croit pas qu'il y ait de solution magique à tous les problèmes, mais effectivement on croit que les régimes à prestations cibles sont une bonne piste de solution qui pourrait nous aider beaucoup.

Il y a un petit bémol que j'ajouterais à ça, c'est qu'actuellement, dans la façon dont ces régimes-là sont déployés, on ne touche pas au passé, et nous, on croit que c'est un élément fondamental. Si on veut, par exemple, ramener les employeurs du secteur privé à la table, il faut ouvrir le passé, il faut que ça fasse partie de l'équation, comme d'ailleurs ça fait partie de l'équation dans le rapport D'Amours, avec la période de restructuration.

C'est la même chose dans le cadre d'un régime à prestations cibles, il faut pouvoir mettre tout sur la table si on veut vraiment intéresser les employeurs du secteur privé à cette nouvelle solution-là. Sinon, ça risque de devenir un peu lettre morte, à notre avis. Si vous regardez l'expérience des régimes de financement salarial, on ne peut pas dire que ça a été un grand succès, donc c'est similaire un peu. M. Gautrin mentionnait ça dans ses interventions. Ça fait qu'on croit qu'il faut trouver quelque chose évidemment pour que tout le monde soit intéressé à ça. C'est notre position.

M. Girard (Gino) : Je voudrais juste ajouter très, très rapidement, là. «Prestations cibles» pris à l'extrême comme étant «l'employeur a seulement une cotisation fixe», un peu ce qui a été fait, c'est une façon de faire, par exemple, qui est certainement préférable à un cotisations déterminées, par exemple. Mais, à l'intérieur de ça, qui est peut-être, mettons, à l'extrême de l'idée d'un prestations déterminées mais l'employeur n'a pas de risque, il y a toute une palette de choses qui peuvent être faites, comme ce qui a été fait ou pensé par le MAMROT, comme à coûts partagés, où non seulement l'employeur continue de garder une certaine variabilité du coût selon la situation... Nous, on dit qu'il faut se tourner vers quelque chose où les prestations sont plus flexibles, pas nécessairement prestations cibles comme on le connaît, mais nécessairement plus de flexibilité dans les bénéfices eux-mêmes.

Mme Maltais  : Merci beaucoup de ces quelques précisions. L'autre sujet que je voulais aborder, c'est sur les municipalités. Vous avez véritablement abordé directement ces régimes-là — universités, municipalités — dans votre mémoire. Vous avez quelques commentaires. Vous dites évidemment que vous voulez… Vous proposez qu'on réduise la période de négociation à deux ans. C'est très court pour une négociation, à première vue. Donc, il y a une proposition de... Vous dites que ça accroîtrait les tensions. Vous êtes des spécialistes des régimes municipaux, je pense que vous en avez beaucoup ou, en tout cas, vous vous intéressez beaucoup à ce sujet-là, si vous êtes les seuls qui les nommez tels quels.

Vous dites que ça pourrait être difficile de s'entendre et vous proposez, concernant le pouvoir unilatéral, que les réductions visent tous les types de prestations accessoires. Donc, vous suggérez d'ouvrir plus large tout en accordant une balise, c'est que le gouvernement réglemente sérieusement, là, ce qui pourrait être fait, d'encadrer... pour faire encadrer par le législateur les décisions possibles, potentielles de l'employeur. J'aimerais ça vous entendre là-dessus parce que c'est aussi une particularité, c'est un des endroits où on sent le plus de pression pour résoudre les problèmes de solvabilité des régimes.

 (11 h 30)

M. Girard (Gino) : Oui. Soyons clairs, là. Quand on regarde le rapport D'Amours et les illustrations du rapport sont tout aussi claires, l'application directe de la capitalisation améliorée dans les secteurs municipaux et universitaires essentiellement augmenterait la facture de 20 % à 25 % de la masse salariale. Donc, nécessairement ça nous convierait à revoir les acquis, et pas de façon anodine, là. Ce n'est pas une boutade de dire qu'on augmente les coûts de 25 % de la masse salariale. Donc, oui, ça nous a un peu interpellés parce qu'on a plusieurs clients dans ces secteurs-là et puis...

Il y a eu plusieurs initiatives. Je me rappelle, il y a à peu près deux ans, un certain ministre des Finances, qui est présent ici, invitait ce secteur-là à négocier, et plusieurs ont pris la balle au bond et ont commencé. Maintenant, comment on fait pour négocier dans un contexte législatif qui est en constante mutation? Donc, nous, et de la même façon que ce qui a été dit, tout à l'heure, par Mercer, M. St-Germain, on serait terriblement heureux que le ciel soit clair très rapidement pour qu'enfin on puisse s'asseoir à la fois avec les employeurs et les syndicats et connaître clairement règles du jeu.

Et on ne pense pas qu'une négociation sur cinq ans, surtout lorsque la négociation amène des questionnements sur les droits acquis, sert bien les intérêts des employeurs et des employés. Si vous êtes assis et que vous savez que votre syndicat est en train négocier et possiblement des droits acquis, vous êtes à l'aube de la retraite, notre grande crainte, c'est que des gens disent : Je me pousse deux ans plus tôt que ce que je croyais parce que j'ai peur qu'on vienne toucher à mes droits acquis. Donc, on pense que ça va très mal servir les gens si on est conviés à un seul rendez-vous, de laisser une très longue période d'incertitude, à savoir quelles sortes de disposition essentiellement on va avoir à la fin, là. Donc, clarifions les règles du jeu, lançons le chantier et qu'on établisse le plus rapidement possible quels seront les régimes de retraite de l'avenir.

Mme Maltais : Oui, mais vous dites «le plus rapidement possible», mais, en même temps, vous dites : Si on va vers la rente longévité, il faut s'entendre avec... il faut harmoniser avant, sinon on brise la compétitivité des entreprises puis on touche aux bas revenus. Ça fait qu'il y a quand même... Je comprends, dans votre message, qu'il y a quand même... Est-ce que c'est une condition, cette harmonisation?

M. Girard (Gino) : Là-dessus, vous ne nous avez pas posé la première question que vous avez posée aux deux autres.

Mme Maltais : Est-ce que les éléments sont indissociables?

M. Girard (Gino) : Exact. Et je vais répondre à la question que vous ne nous avez pas posée, c'est-à-dire : Est-ce que les éléments sont dissociables? Moi, je vois — là, je parle pour moi — je vois le rapport vraiment comme en trois sections. La rente de longévité, c'est une section en soi. La base de capitalisation à long terme et les droits acquis, la restructuration, c'est un deuxième sujet. Et toute la pléiade d'autres modifications touchant un meilleur partage, la gestion des risques, les valeurs de transfert, etc., je vois ça comme une troisième section qui, elle, pourrait être mise de l'avant très rapidement.

Mme Maltais  : Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Dubuc.

M. Claveau  : Oui. Bonjour, bienvenue. Alors, peut-être une question. Vous nous suggérez une participation des retraités à l'amélioration des régimes qui… de la situation financière des différents régimes. Moi, j'aimerais connaître, vous, qu'est-ce que vous nous suggérez comme taux puis comment la participation des retraités pourrait être établie?

M. Béliveau (Richard) : Bien, comme on disait tantôt, il faut regarder à élargir possiblement... Présentement, bon, ça se limitait à l'indexation des rentes. Il y a peu de régimes qui ont de l'indexation, donc, pour nous, évidemment, c'était déjà un premier pas pour dire : Il faut probablement penser à élargir ça, sinon on va se ramasser à avoir à, dans le fond, faire payer les employés actifs aujourd'hui pour les déficits qui ont été accumulés dans le passé. Donc, c'est une première piste de solution.

L'autre piste de solution que je mentionnerais, qu'on pense, c'est possiblement même de songer à, par exemple, une cotisation qui pourrait être temporaire, qui irait dans un fonds, qui pourrait servir éventuellement même à bonifier les prestations, si, dans le futur, la situation financière s'améliore, mais quelque chose du genre pour faire un effort, des retraités, pour redresser la situation. Donc, je vous donne deux pistes, là, qu'on avait en tête quand on a écrit ça.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Bonjour, merci. Très rapidement. Quand on a vu l'équipe du rapport D'Amours venir ici, ils ont insisté beaucoup sur la rente longévité et sur la mutualisation des risques. Ils disaient que c'était un des avantages indéniables de cette formule-là. Si on exclut les revenus faibles, parce que vous le proposez, puis avec raison… Ce que vous proposez, c'est quand même assez juste par rapport à... qu'ils sont déjà bien protégés et ça réglerait en partie le soutien du revenu garanti du fédéral. Est-ce qu'il n'y a pas un paradoxe entre ces deux-là, donc mutualisation du risque et d'exclure les revenus faibles? Je voudrais vous entendre là-dessus, sur cet affrontement-là au niveau idéologique.

M. Girard (Gino) : Je ne crois pas qu'il y ait un affrontement. En fait, ce qu'on essaie de dire ici, c'est que la mutualisation des risques via les programmes sociaux protège déjà excessivement bien les bas revenus. Là où ça commence à rapidement dégrader, et le rapport D'Amours le dit, là, en disant : Bien, voici où on est très, très bons, là, les faibles revenus, par rapport aux pays... OCDE et les grandes économies. Maintenant, dès que les revenus se mettent à monter, on est loin d'être aussi bons. Et c'est pour ça que, dans notre suggestion, on dit : Bien, si la rente de longévité allait de l'avant, pourquoi ne pas viser la plage des salaires de 25 000 $ à 75 000 $, plutôt que de zéro à 50 000 $? Donc, c'est à peu près l'idée intégrale de la rente mais sur une plage... qui eux semblent vraiment avoir beaucoup plus de difficultés à avoir un remplacement de revenu adéquat. Et je ne vois pas, là, d'antithèse entre la mutualisation et les faibles revenus.

M. Therrien : ...contradiction, selon vous? O.K., merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, et ça termine le temps pour la partie gouvernementale. Et je cède la parole à M. le député de Verdun.

M. Gautrin : Je vous remercie, M. le Président. Merci pour votre présentation. Je vais poursuivre sur l'interrogation qui a été soulevée par mon collègue de Dubuc. Vous dites, et vous l'avez dit dans votre présentation à un moment : Tout doit être sur la table, il faut même... Dans votre présentation, vous avez dit : On peut avoir une réduction des droits acquis éventuellement lorsqu'on est en train de revoir ça. La grande question... Et donc vous plaidez pour une plus grande flexibilité, à ce moment-là, et je comprends votre position.

Le problème que j'ai — et j'ai déjà joué dans ce jeu-là — c'est le concept de négociation tripartite. C'est-à-dire, vous avez, d'un côté, l'employeur, qui est clairement établi, vous avez souvent, représentant les participants actifs, le syndicat qui représente tout ça — des fois, il y a plus qu'un syndicat, en général, ils s'entendent — et vous avez aussi les retraités. Et comment vous... Et vous comprenez bien que, si vous êtes amenés à devoir diminuer, en quelque sorte, ou si l'entente, la flexibilité amène à devoir diminuer les droits acquis, il est important qu'il y ait une adhésion à la fois de chacun des trois groupes, retraités, participants actifs et employeurs. Comment vous voyez cet... Quel mécanisme... Parce que vous comprenez bien et vous savez à quel point — je m'en rappelle — le mouvement syndical haïrait la négociation tripartite ou etc. Comment vous voyez ça actuellement, de manière à obtenir un consensus avec des gens qui ont des positions qui parfois sont des positions assez contradictoires?

M. Girard (Gino) : Je ne commenterai pas sur le dernier bout de votre question...

M. Gautrin : Le «contradictoires»?

M. Girard (Gino) : Sur les relations entre les syndicats et les retraités, mais...

M. Gautrin : Non, non, mais c'était, historiquement, certains éléments. Et il y a des cas où ça a marché extrêmement bien. Et je ne vous demande pas de commentaire. Et je sais, par contre... Bon, je vous raconterai en privé.

• (11 h 40) •

M. Girard (Gino) : Je ne crois pas qu'il y ait de réponse simple. Votre question est excessivement pertinente, mais très... S'il y avait une solution simple dans ces trucs-là... Par contre, je vais juste mentionner ça, on est rendus dans des situations où il y a des employés actifs qui cotisent 10 % ou 11 %, ou qui vont être appelés à cotiser 12 % de leur salaire pour bénéficier de prestations nettement moindres que la génération qui vient juste de quitter à la retraite. Si les prochains soubresauts ou si, par exemple, dans l'application de la capitalisation améliorée intégrale, on les amenait à cotiser encore davantage et/ou réduire de façon beaucoup plus importante, à un certain moment donné, je pense que la question… bien que je ne réponds pas à votre question, mais je pense que l'idée de faire participer l'ensemble des participants à un régime s'impose. Est-ce qu'on peut vraiment…

Et là maintenant, quant à la mécanique, il me semble que, si, par exemple, il y avait des balises que, lorsque les efforts des actifs atteignent, par exemple, x % de la masse salariale, est-ce qu'on ne pourrait pas exiger une cotisation, par exemple, des retraités, ne serait-ce que la moitié de l'effort des actifs ou 30 % de l'effort des actifs? Si les actifs consentent 3 % de plus de cotisations et/ou réduction des bénéfices, est-ce que ce serait complètement inadéquat de penser qu'à ce moment-là on est légitimés, par exemple, d'exiger une cotisation de 1 %, le tiers des retraités? C'est une idée comme ça, là, mais l'idée, c'est peut-être de baliser l'effort de un et de l'autre.

M. Gautrin : Mais j'échange avec vous, à l'heure actuelle. Est-ce que, justement, de trop baliser, on ne diminuerait pas la flexibilité? Parce qu'il existe — et je suis bien d'accord avec vous — il existe des cas où il y a eu une entente réellement tripartite, je pense, dans certaines municipalités, etc., où il y a eu réellement une entente qui a été… Et on pourra vous en citer quelques-uns. Mais il y a aussi des ententes où ça n'a pas eu lieu. Alors, là, vous... que nous, dans la loi, on serait en mesure à surbaliser ces éléments-là, ce qui retirerait de la flexibilité aux parties, à ce moment-là. C'est ça qui est…

M. Girard (Gino) : Oui…

M. Gautrin : Vous comprenez? Vous êtes ici quelqu'un qui plaidez — et j'adhère totalement avec votre plaidoyer — sur une plus grande flexibilité, donc une diminution, en quelque sorte, de la surréglementation qu'on a pu voir au fil des ans, parce qu'on corrige... Comme je disais encore un peu en blague, il serait temps peut-être qu'on revoie toute la plomberie de la maison au lieu de réduire un peu un tuyau par-ci, deux tuyaux par-là, un joint par ici, etc. Donc, je suis d'accord avec ça. Mais votre approche ne réduit pas la… augmente la rigidité et ne diminue pas la flexibilité...

M. Girard (Gino) : En fait, on pourrait imaginer évidemment…. Ma collègue, lorsqu'elle a fait les commentaires initiaux, on disait : On mise et on croit fermement que d'abord et avant tout ça doit passer par une libre négociation qui inclut tous les acteurs concernés. La balise que je mentionnais, qui était… — moi aussi, j'échange — essentiellement, la balise, c'était peut-être : En cas d'échec, de... voici ce qui pourrait être fait et... un genre de «safe haven», là, en…

M. Gautrin : Vous plaidez, par exemple, dans le cas municipal, contrairement au rapport D'Amours, qu'on puisse mettre sur la table, comme droits à négocier, autre chose que strictement l'indexation, mais possiblement, par exemple, la date de prise de la retraite ou d'autres avantages qui sont prévus. Donc, vous laissez plus de flexibilité, en quelque sorte, aux parties pour pouvoir choisir les manières d'atteindre un plus grand équilibre.

J'ai une dernière question avant de passer la parole peut-être à mon collègue d'Outremont. Vous êtes probablement au courant de cette position du SCFP, qui dit, à l'heure actuelle : Les prestations pour écarts défavorables — ce n'est pas comme ça qu'ils l'appellent, mais enfin ça équivaut à la même chose — soient comptabilisées dans un compte à part dont éventuellement on pourrait, donc, prévoir des cas de mauvais rendement et pouvoir éviter, en quelque sorte, la baisse des prestations… mais pourraient être utilisées aussi pour une indexation a posteriori. Aon Hewitt, à vrai dire, est un peu en faveur de cela. Est-ce que, vous, vous êtes aussi assez en faveur ou vous n'avez pas…

M. Girard (Gino) : Oui, tout à fait. Dans tout le spectrum qu'on appelait les régimes cibles à coûts partagés, etc., ce type d'arrangement là trouve sa place.

M. Gautrin : C'est bon. Mon collègue d'Outremont avait peut-être quelques questions, et, sinon, je pourrais revenir après.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : …oui, deux dimensions, une qui est nouvelle, mais la première, la question que j'ai posée à vos collègues... Et puis merci d'être ici. Le bulletin que vous avez diffusé aussi à tous vos clients, donc à travers le Canada... Sur la rente de longévité, qui doit idéalement être canadienne, quelles sont les réactions que vous recevez de vos collègues, soit de leurs clients mais même des collègues de votre firme, par rapport, évidemment, au grand débat d'augmenter la Régie des rentes, mais qui est un débat qui ne s'en va nulle part?

M. Béliveau (Richard) : Je pense que dans le... Ce qu'il faut se dire, c'est que, là, nous, on a travaillé très fort, au Québec, là-dessus, mais ma première constatation, c'est que, dans le reste du Canada, ils n'étaient même pas au courant. On travaille avec nos collègues, par exemple, des bureaux à travers le Canada. Donc, les gens ne sont pas nécessairement au courant.

La première chose qui est importante, c'est, donc, que le gouvernement fasse part de cette possibilité-là pour que les gens soient au courant. On les a mis au courant, nos collègues, évidemment. Ils ont trouvé l'idée intéressante. Mais est-ce que c'était à nous à les mettre au courant ou est-ce que ça ne devrait pas faire partie de la stratégie?

Parce qu'effectivement c'est une approche très intéressante, mais présentement, il ne faut pas se le cacher, dans le reste du Canada, c'est l'expansion du Régime de pensions du Canada qui est leur préoccupation première et c'est là-dessus qu'ils focussent — excusez l'expression anglaise. Donc, si on veut changer le cap, je pense qu'il faut... on se doit d'aller introduire ça de façon plus officielle. Alors, ça, ça serait mon premier commentaire. Donc, j'étais d'accord avec M. St-Germain au niveau du bâton de pèlerin, je pense qu'on a un peu de travail à faire.

Et, bon, à savoir : Est-ce qu'il y aurait un intérêt là-dessus?, je pense qu'il y a beaucoup de mérite au concept avancé par la rente de longévité, avec les quelques commentaires qu'on a faits qu'on juge qui amélioreraient la chose. Mais, effectivement, par rapport à une expansion, il me semble que c'est une avenue très intéressante.

M. Bachand  : O.K. Merci. Sur un autre sujet. Vous êtes l'un des seuls, je pense, en disant : «La solution [évidemment à tous nos problèmes] devra forcément passer par l'adoption de mesures incitatives pour encourager [les] travailleurs à demeurer plus longtemps sur le marché du travail et […] encourager les employeurs à les retenir et les embaucher.» Et là vous passez à autre chose.

Il est clair que, comme gouvernement, nous, on avait d'abord ajusté la Régie des rentes; au fond, on l'a harmonisée avec le reste du Canada en récompensant les retraites plus tardives et en décourageant les retraites plus hâtives. On avait aussi fait deux mesures fiscales pour baisser presque à zéro les impôts des travailleurs de 65 ans et plus et les taxes sur la masse salariale pour la tranche de 5 000 $ à 15 000 $ de revenus gagnés. Le gouvernement actuel a suspendu... il n'a pas aboli, mais il a suspendu ça. Quand un ministre des Finances suspend, c'est parce que ça n'existera plus. Mais avez-vous des idées particulières sur les mesures incitatives? Parce que vous avez mis cette phrase-là, vous m'avez laissé sur mon appétit.

M. Béliveau (Richard) : Écoutez, on ne veut pas se... remplacer le gouvernement. Donc, avec beaucoup d'humilité, la seule chose qu'on a ajoutée... Parce qu'on est tout à fait d'accord avec l'idée d'avoir des mesures incitatives pour que les gens restent au travail. Donc, tout effort du gouvernement en ce sens nous apparaît comme souhaitable. Il y a encore des barrières qu'il serait bien d'enlever.

La seule idée un peu peut-être particulière, c'était de dire : Les gens qui sont dans des situations plus précaires, qui n'ont pas eu d'épargne-retraite, des gens, des... On parle, là, des baby-boomers qui sont à l'approche de leur retraite ou à 10 ans de leur retraite. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de voir que, par exemple, s'ils ont des soldes non utilisés d'épargne dans leurs REER ou dans leurs CELI — et, souvent, les gens ont des sommes astronomiques là-dedans, qui n'ont jamais été utilisées — de créer une façon de pouvoir transférer ces sommes-là à d'autres contribuables qui, eux, seraient intéressés? À l'intérieur de limites raisonnables, on n'essaie pas d'enrichir les riches, là, je veux que ce soit très clair, ce n'est pas l'idée. Et que le gouvernement pourrait voir évidemment que ces sommes-là vont revenir rapidement dans l'économie par les gens qui vont recevoir des sommes des autres contribuables. Ils vont, à ce moment-là, utiliser ça pour consommer versus des placements ou des revenus d'intérêts, d'impôt, si vous voulez, différés au niveau des REER et des CELI.

Donc, c'est un peu notre idée de dire : Il y a peut-être quelque chose qui nous permettrait à court terme d'un peu, en plus, encourager les travailleurs à rester, mais il y a peut-être une autre solution qui permettrait, sans nuire aux recettes fiscales du gouvernement, là, de trouver une façon, dans le fond, de rebalancer l'équation, en autant que ça ne pénalise pas les finances du Québec, mais que tout le monde trouverait un peu son compte, finalement. C'était ça l'idée, je pense, qu'on avait soulignée dans le mémoire.

M. Bachand  : O.K. Merci. Bien, j'ai vu ça dans la note en bas de page 8. J'ai imaginé immédiatement l'appétit des marchés financiers pour créer un produit qui va aller capter toutes ces cotisations inutilisées. Un ancien collègue, qui est maintenant Londres, là... ils vont être très habiles à aller ponctionner ces sommes-là que les gens n'ont pas utilisées. Mais c'est un peu un transfert aux riches, par ailleurs, parce que, si les gens qui ont utilisé 100 % de leur capacité REER, oui, souhaiteraient épargner plus, mais tu t'en vas chercher cette déduction fiscale là chez ceux qui ne l'ont pas faite pour la transférer… Puis sûrement que les marchés financiers seraient avides de ça.

• (11 h 50) •

M. Béliveau (Richard) : Bien, si je peux peut-être juste ajouter. Il faudrait limiter ça. On ne pourrait pas penser transférer des sommes astronomiques à un seul contribuable, parce que ce n'est pas l'intention de cette mesure-là. L'intention, c'est vraiment d'utiliser cette espèce de manque là… Parce qu'il ne faut pas se le cacher que ces marges-là ne seront possiblement jamais utilisées autrement. Donc, il nous semble qu'il y a moyen de faire quelque chose. Je ne donnerais pas de déductions fiscales pour les montants contribués à partir de ces sommes-là, mais seulement à l'abri d'impôts à l'intérieur, par exemple.

Donc, je pense qu'on n'est pas là pour dire ça serait quoi, le système, on est là pour dire : Il nous semble, là, qu'il y a quelque chose là qu'on pourrait réfléchir, arriver peut-être avec une solution qui permettrait, là, d'alléger. Parce que c'était dans le contexte où on disait : On est conscients qu'il y a des baby-boomers qui sont à l'approche, à l'aube de la retraite, c'est un besoin pressant, ils n'ont pas suffisamment d'épargne, qu'est-ce qu'on va faire avec ces gens-là? On va les avoir, là, rapidement dans le visage, là. Alors, qu'est-ce qu'on peut faire à part leur dire qu'ils vont devoir travailler? Alors, on essaie d'être créatifs un peu puis de dire : Il y a peut-être quelque chose là qui pourrait être fouillé, tout en évitant d'enrichir les riches — je pense que c'est clair — et aussi en préservant l'intégrité des finances, là, du Québec.

M. Bachand : Merci, merci monsieur...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Verdun, 1 min 30 s.

M. Gautrin : Je vous remercie. Bon, il me reste peu de temps. J'aurais voulu poser la question sur le transfert; je ne le ferai pas. J'aurais une question plus globale. Quelles sont, d'après vous, compte tenu de tout ce que vous avez dit, compte tenu de ce qu'il est nécessaire d'avoir des ententes pancanadiennes, etc… qu'est-ce que vous nous suggérez de mettre en priorité dans une loi ou une modification législative à court terme?

M. Girard (Gino) : À court terme, nous, ce qu'on souhaiterait, c'est que les règles de financement soient claires, les règles du jeu soient claires sur ce qui peut être discuté puis ce qui peut être repensé, et ce, pour l'ensemble du secteur privé et du secteur public, parapublic. En ce qui a trait à la rente de longévité, on serait inquiets de partir un système, et une administration, et une idée avant même de connaître la conclusion des échanges entre les ministres des Finances. Imaginons qu'on part la machine et que, 12 mois plus tard, il y a une extension du Régime de pensions du Canada, qu'est-ce qu'on fait, là? Est-ce qu'on...

M. Gautrin : Sur la capitalisation améliorée?

M. Girard (Gino) : Sur la capitalisation améliorée telle que décrite, nous, on aimerait une meilleure balance, là...

M. Gautrin : C'est ce que j'ai compris.

M. Girard (Gino) : ...entre la sécurité et la stabilité. Là, on a mis beaucoup d'oeufs dans la sécurité au détriment, on pense, de la stabilité des coûts.

M. Gautrin : Pour ce qui est de la rente de transfert, du mécanisme de...

M. Girard (Gino) : On est complètement d'accord à la revoir dans un contexte pancanadien.

M. Gautrin : Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et je passe maintenant la parole à M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard : Merci. Et je tiens à vous remercier pour votre mémoire. Vous savez que, cet automne, nous aurons des élections, des élections au niveau municipal, au niveau municipal. Et, lorsque vous parlez de la durée de la période de...

Des voix : ...

M. Picard : Y a-tu un problème?

Des voix :

M. Picard : Des élections municipales cet automne. Et, au niveau de la durée pour restructurer, vous nous recommandez que ça soit deux ans au lieu de cinq ans. Je pense que c'est sage, parce que les mandats au municipal sont de quatre ans. Si on donne à un conseil municipal de négocier pendant cinq ans, il risque d'y avoir un changement puis on alourdit la machine. Et vous dites qu'on devrait négocier pendant deux ans et, après ça, peut-être décréter... Je vais prendre le terme «décréter». Le rapport D'Amours disait : Bien, si l'employeur décrète, il faut qu'il mette la même somme, grosso modo.

Est-ce que vous considérez, devant l'urgence de la situation, si vous... qu'on devrait mettre ces mesures-là en vigueur pour le 1er janvier 2014, vu qu'on va avoir des élections en novembre, pour que ça débute, là, pour qu'on puisse finir par avoir une entente pour revoir les régimes de retraite?

M. Girard (Gino) : …1er janvier 2014 ou... Le message principal, c'est d'agir rapidement pour clarifier. Votre suggestion du 1er janvier 2014, soit, ça serait sûrement bienvenu, ça me semble évidemment excessivement rapide, dans un contexte où, dans nos commentaires, on disait à la fois, là, de bien clarifier la base d'évaluation, les règles du jeu de ce qui peut être fait, de ce qui peut être discuté, incluant les droits acquis et le fonctionnement de l'ensemble. On est, à toutes fins pratiques, rendus, là. Donc, est-ce que c'est une bonne idée? Oui. Mais est-ce que c'est réalisable? Vous êtes mieux placés que moi pour y répondre.

M. Picard : O.K. Sur un autre sujet. Vous n'êtes pas les seuls à indiquer qu'on devrait peut-être exempter certains employeurs qui offrent un régime de retraite au lieu d'avoir une coordination. Sauf que, dans le monde actuel, les employés changent d'employeur fréquemment. Il me semble que ça… Ou ma compréhension est mauvaise. Il me semble que ça serait complexe à la fin parce qu'un employé que son employeur a un régime pourrait être exempté, donc, lorsqu'il retirerait sa rente de longévité, il en manquerait des bouts, là, mais il le recevrait par son employeur. Puis il me semble qu'on augmenterait le risque parce qu'on ne mutualise pas le risque.

M. Béliveau (Richard) : Je pense que l'objectif de la rente de longévité, c'était d'adresser le fait qu'il y a pratiquement 50 % des travailleurs qui n'ont pas de régime. Donc, on ne voit pas… Pour ceux qui en ont, des régimes, je pense que le constat était que ces gens-là, ils vont avoir un revenu décent probablement à la retraite. Même s'ils changent d'employeur à quelques reprises, ils ont des épargnes-retraite, l'enjeu étant : il y en a qui n'en ont pas, ils n'ont pas de régime collectif d'épargne-retraite comme un régime à prestations déterminées avec leur employeur, etc.

Donc, le fait que, pendant qu'ils travaillent auprès d'un employeur qui a un régime, ils n'aient pas de rente longévité — c'est votre point — et que, lorsqu'ils changent d'emploi et qu'ils vont travailler pour un employeur qui n'offre aucun régime, que là, à ce moment-là, ils cotiseraient, je ne vois pas la problématique. Parce que l'idée, c'est qu'effectivement, à ce moment-là, on sait qu'il n'y a plus de couverture de retraite et c'est là qu'on veut qu'il y ait quelque chose qui soit fait, on appelle ça rente de longévité, mais c'est ce trou-là qu'on essaie de bloquer pour s'assurer que l'ensemble des Québécois ont une base, là, minimale, là. Donc, d'après nous, s'ils ont un régime déjà auprès de leur employeur, entre guillemets, ils sont corrects, ce n'est pas ceux-là qui nous préoccupent, c'est ceux qui n'en ont pas. Donc, c'est de là que vient l'idée de l'exemption.

M. Picard : Merci, c'est beau.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, Mme Lamarche, M. Girard, M. Béliveau, merci énormément de votre apport à notre commission.

Aux membres de la commission, je leur dis que vous pouvez laisser vos choses ici ce midi, la salle va être sécurisée.

Et, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 57)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte et je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur le rapport intitulé Innover pour pérenniser le système de retraite, communément appelé le rapport D'Amours.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la firme Normandin Beaudry. Et, pour la répartition du temps, c'est la même chose qu'avant-midi, tout le monde est au courant. Vous avez une présentation d'une dizaine de minutes; ensuite, un 35 minutes d'échange réparti entre les partis qui sont ici présents. Alors, je vous laisse donc la parole pour une dizaine de minutes. Dans un premier temps, présenter votre firme et faire votre présentation de votre mémoire. Alors, je laisse la parole à monsieur?

Normandin Beaudry,
Actuaires conseil inc.

M. Bourget (Richard) : Bourget.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. Bourget.

M. Bourget (Richard) : M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, je me nomme Richard Bourget, je suis actuaire et associé chez Normandin Beaudry. Je suis accompagné de mes collègues Pierre Parent et Martin Gélinas, également actuaires et associés de la firme.

Firme de propriété québécoise, Normandin Beaudry compte plus de 120 employés et offre des services de consultation en rémunération et avantages sociaux. Merci de nous avoir invités à participer aux travaux de la commission sur le rapport du comité d'experts présidé par M. D'Amours.

La situation démographique particulière du Québec est un enjeu de société important et incontournable. Si nous voulons atténuer le fardeau financier des générations futures, nous devons collectivement agir maintenant afin d'accroître la sécurité financière à la retraite. Pour nous, le constat tiré du rapport du comité d'experts ne fait aucun doute, le statu quo n'est pas une option. Au cours de la dernière décennie, plusieurs régimes de retraite ont malheureusement été terminés avec des promesses de rente non tenues et des milliers de retraités québécois ont vu leur rente être réduite suite à ces terminaisons.

Comme l'ont mentionné le comité d'experts et la Régie des rentes du Québec lors de leur passage à la commission, les enjeux démographiques ont joué un rôle prépondérant et continueront d'influencer le système de retraite, principalement en regard du déficit d'épargne constaté. Nous souhaitons porter votre attention sur deux éléments qui cadrent bien le contexte auquel le Québec sera confronté.

D'abord, le risque important de longévité. En page 3 de notre mémoire, on présente un tableau qui illustre les risques de longévité et qui montre l'évolution de la proportion des individus de 65 ans qui vivront jusqu'à 95 ans. Jusque dans les années 60, trois femmes de 65 ans sur 100 atteignaient l'âge de 95 ans. En 2009, c'est près d'une femme de 65 ans sur cinq qui atteint cet âge. Et, en 2036, on projette que plus d'une femme de 65 ans sur quatre va atteindre cet âge. On note aussi, dans le tableau, une évolution similaire pour les hommes. Par conséquent, il en coûtera de plus en plus cher pour assurer la sécurité financière à la retraite. Et, selon nous, ce serait une erreur de ne pas s'y préparer collectivement dès maintenant.

Enfin, selon les données présentées en 2011 par la commission sur la participation au marché du travail des travailleurs de 55 ans et plus, la population québécoise âgée de 15 à 64 ans, soit le moteur de l'économie du Québec, diminuera de 3,3 % d'ici 2030. Ce sont eux qui, tout en étant moins nombreux, devront supporter les coûts grandissants d'une population vieillissante. Le défi, pour le Québec, sera d'autant plus grand que, pendant cette même période, la population âgée de 15 à 64 ans augmentera de 7 % à 12 % en Ontario, au Canada et aux États-Unis. Nos générations futures seront passablement sollicitées, et nous croyons souhaitable d'éviter de leur transférer le fardeau financier de la retraite.

Nous croyons que les objectifs choisis par le comité d'experts sont bien servis par les valeurs et principes retenus, en particulier l'équité intergénérationnelle, la responsabilisation et la mutualisation. Pour nous, la sécurité financière à la retraite, c'est l'affaire de tous dès maintenant. De façon générale, nous accueillons favorablement les recommandations du comité d'experts, car elles sont cohérentes et bien appuyées sur les principes et valeurs énoncés. Toutefois, elles sont formées dans un contexte de compromis qui interpelle tous les partenaires sociaux. Il y a du pour et du contre pour tous dans ces recommandations. Selon nous, il est souhaitable de prioriser la mise en œuvre des quatre éléments suivants, soit la rente longévité, la méthode de financement de la capitalisation améliorée, le partage des coûts et la possibilité de restructurer les droits acquis.

Commençons par la rente longévité. Selon nous, elle représente une solution efficace qui assure un certain niveau de sécurité à la retraite tout en responsabilisant les travailleurs et les employeurs. La rente longévité serait pleinement capitalisée, ce qui favoriserait l'équité entre les générations. En s'accumulant graduellement, elle bénéficierait davantage aux jeunes travailleurs du Québec. De plus, en mutualisant le risque de longévité à compter de 75 ans, elle aurait aussi pour effet de réduire la pression sur le financement des régimes à prestations déterminées. Comme c'est une innovation, la rente longévité ne cadre pas parfaitement dans l'environnement actuel. Certains enjeux plus sensibles ont trait aux travailleurs à plus faibles revenus, notamment l'effet sur leur supplément de revenu garanti et l'appel à l'épargne plus significatif pour ces derniers.

En analysant les enjeux, il faut garder en mémoire que les autres solutions étudiées au Québec et ailleurs au Canada, entre autres, la bonification du Régime de rentes du Québec et du Régime de pensions du Canada, auraient aussi un effet sur le supplément de revenu garanti de ces travailleurs et de l'épargne qu'on exige d'eux.

Pour nous, l'importance d'épargner pour la sécurité financière à la retraite demeure une priorité sociale pour le Québec. Et, pour cette raison, nous croyons qu'il faut aller de l'avant avec la rente longévité. Si le gouvernement juge approprié d'accompagner les travailleurs à plus faibles revenus face aux enjeux d'épargne, nous croyons qu'il serait préférable d'utiliser d'autres mesures fiscales prévues à cette fin au lieu de le faire à même la rente longévité.

Deuxième élément à prioriser, pour nous, c'est la méthode de financement de la capitalisation améliorée. À notre avis, cette méthode est appropriée, car elle favorise la prise en charge des risques de financement, principalement durant la carrière des travailleurs. Pour sécuriser les rentes des retraités, une plus grande prudence est de mise au moment de la retraite, et la méthode recommandée prévoit cette prudence. L'approche recommandée viendrait aussi grandement simplifier les règles de financement actuelles, ce qui serait salutaire.

Pour certains régimes, entre autres dans les secteurs universitaire et municipal, l'effet de la méthode recommandée serait une augmentation substantielle à court terme des cotisations de financement. Pour faciliter l'introduction de cette nouvelle et unique méthode, nous croyons opportun de prévoir une mesure transitoire pour les régimes des secteurs universitaire et municipal, par exemple une période initiale d'amortissement des déficits accumulés plus longue, évidemment établie en respectant l'équité entre les générations.

• (14 h 10) •

Troisième élément à prioriser, c'est le partage des coûts. Le principe de partage des coûts est déjà bien présent dans le domaine des régimes de retraite. On n'a qu'à penser au plus gros régime de retraite au Québec, le RREGOP, et aussi au niveau du secteur universitaire.

La recommandation sur le partage des coûts contient plusieurs éléments distincts. Dans son ensemble, elle favoriserait la transparence et la responsabilisation. Elle devrait surtout susciter des discussions entre les jeunes et les moins jeunes travailleurs, en particulier dans les régimes où la nouvelle méthode de financement augmenterait les cotisations. Toutefois, l'imposition d'un partage de coûts à parts égales visant le service courant pourrait aller à l'encontre de certaines ententes déjà convenues et des efforts de négociations des parties. Pour pallier ces enjeux, pour les régimes des secteurs universitaire et municipal, la recommandation pourrait être modifiée pour rendre obligatoire le partage à parts égales du service courant, mais aussi prévoir, si les parties en conviennent, des proportions différentes pour le partage des coûts.

Le quatrième élément à prioriser serait la possibilité de restructurer les droits acquis. Le rapport du comité d'experts propose un cadre qui permettrait, au besoin, d'adapter les régimes afin d'atteindre un juste équilibre entre la sécurité des prestations et la capacité de payer des parties. Si un tel encadrement avait été en place, il aurait permis d'apporter des solutions constructives pour éviter la terminaison de certains régimes de retraite et éviter ou limiter la réduction des rentes versées à des milliers de Québécois. Le gouvernement du Québec a convenu, par voie de négociation avec ses cadres, en 2012, des modifications avec effet rétroactif à leurs régimes de retraite. En échange, le gouvernement verse des cotisations dans la caisse des participants. Voici un bel exemple de ce qui pourrait arriver si on permettait un tel environnement pour les autres régimes de retraite au Québec.

La recommandation du comité d'experts prévoit un droit unilatéral à l'employeur qui peut être un irritant pour certains. Pour nous, ce droit unilatéral n'est pas essentiel. Nous sommes d'avis qu'un faible pourcentage des régimes se prévaudra éventuellement de règles de restructuration, mais la possibilité de restructurer sera toutefois essentielle pour ces régimes.

En conclusion, les enjeux démographiques frapperont le Québec plus tôt et plus fortement que toute autre population en Amérique du Nord. Le Québec ne peut se permettre d'attendre, il doit agir et faire preuve de leadership. Nous croyons que les recommandations formulées proposent un juste équilibre qui mène à une solution globale. Toutefois, nous avons formulé dans notre mémoire des ajustements aux recommandations qui vont dans le sens des objectifs visés par le rapport du comité d'experts. Nous encourageons donc la commission à les considérer.

En terminant, une révision d'une telle ampleur du système de retraite québécois soulève certaines préoccupations que nous voulons partager avec la commission. Un des principes fondamentaux de l'encadrement législatif actuel est la protection des droits des individus, protection qui a parfois pour effet de nuire à la pérennité des régimes. Donc, tout en protégeant, le mieux possible, les droits des individus, nous souhaitons que l'encadrement législatif soit beaucoup plus flexible pour permettre la mise en place de solutions qui viseraient le bien-être collectif et le maintien des régimes de retraite. Aussi, le rapport du comité d'experts formule des recommandations soulignant l'importance de simplifier l'encadrement législatif. Il sera primordial, à notre avis, de respecter cette notion de simplification afin d'éviter de recréer un environnement où l'exception devient la règle, comme c'est trop souvent le cas actuellement. Merci de votre attention.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, M. Bourget. Et nous passons maintenant à la période d'échange. Et je laisse la parole maintenant à Mme la ministre.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Bourget, M. Parent, M. Gélinas, bienvenue à cette commission parlementaire, merci d'accepter d'apporter votre éclairage sur le rapport D'Amours. C'est un enjeu important que cette pérennisation des régimes de retraite, le fait d'assurer la sécurité financière des personnes qui prennent leur retraite, et je vous remercie de participer à ce débat. On voulait un vaste débat social. Je trouve que le ton et la teneur… la tenue de nos débats de ce matin, de ce type de commission parlementaire reflète exactement ce qu'on voulait, c'est-à-dire échanger librement, ouvertement pour le mieux-être des citoyens québécois.

D'entrée de jeu, il y a quelque chose qui m'a touché l'oreille immédiatement. Vous avez parlé d'un contexte de compromis. Vous dites : En fait, le rapport D'Amours, la suggestion est faite dans un «contexte de compromis». J'aimerais voir, là, qu'est-ce que vous voulez dire par ça, que vous expliquiez un peu ça.

M. Bourget (Richard) : Depuis plusieurs années, le gouvernement a dû mettre en place différentes mesures pour faciliter le financement des régimes de retraite, et toutes ces mesures-là n'ont pas mené à une solution permanente, comme on peut le voir. Et, quand on regarde l'ensemble de ce qui est proposé, on se rend compte qu'on va devoir faire des compromis sur différents éléments. On va devoir peut-être financer plus rapidement les prestations qu'on s'est promises pour favoriser la sécurité des rentes à la retraite. Si on finance plus rapidement, ça veut dire qu'il y a peut-être des cotisations qui vont augmenter, peut-être qu'on va devoir requestionner, se requestionner sur comment on se partage ces coûts-là. Donc, ce contexte de compromis là vient dans ce sens-là. Il y a des entreprises qui vont trouver que les coûts coûtent très cher, il y a des villes qui vont trouver que ça coûte très cher, il y a des syndicats qui vont avoir aussi des positions par rapport à ça. On dit : On pense qu'il faut ouvrir… Le débat est très bien lancé au Québec. Il faut s'assurer que, dans les régimes de retraite, on travaille tous pour assurer la pérennité et, si on continue comme ça, à garder toutes nos positions, on ne règlera pas l'enjeu des régimes de retraite au Québec.

Mme Maltais : D'accord. Merci, c'est clair. Alors, dans votre mémoire, vous abordez aussi un peu le contexte, ce qui est très bien. Vous parlez du contexte démographique, qui est très… c'est vraiment un enjeu important depuis longtemps au Québec. Vous nous parlez aussi, là, des valeurs sur lesquelles on s'entend, les principes de base du rapport D'Amours, l'équité intergénérationnelle, la responsabilité. Ce sont des choses de contexte qui sont extrêmement importantes. Ce sont des grands principes, là, qui sont à la base du rapport. Vous les rappelez, c'est très bien.

Une chose que vous dites aussi — puis je vais en arriver à ma question préliminaire que j'ai eue avec plusieurs présentateurs de ce matin — c'est… M. D'Amours nous présente le rapport comme un tout. Évidemment, ce qu'on cherchait d'abord, c'était une solution à la fragilité, à l'insolvabilité des régimes à prestations déterminées, c'est devenu : assurer la sécurité financière. On a eu une réponse plus globale qui est venue du comité d'experts. Les gens, ce matin, disaient qu'on pouvait vraiment séparer les choses. La rente longévité, on la séparait des régimes... des solutions à amener aux régimes à prestations déterminées. Vous, vous faites un lien véritablement — ce que fait M. D'Amours, d'ailleurs — entre la rente longévité et la pression qui existe sur les régimes à prestations déterminées, la théorie étant que, si on met en place la rente longévité, comme on assure la partie de vie d'après 75 ans, on enlève de la pression sur les régimes à prestations déterminées. J'aimerais ça que vous nous expliquiez un peu votre vision de ça, du fait que les deux sont liés parce que c'est une partie importante de la théorie qui est menée par le groupe d'experts.

M. Bourget (Richard) : En fait, on pense effectivement que tous les morceaux se tiennent. C'est une solution globale. Elle n'est pas parfaite. On propose certains ajustements à ça, mais de façon globale. La rente longévité, effectivement, en prenant en charge pour l'ensemble des travailleurs la sécurité à la retraite à compter de 75 ans, ça enlève cette pression-là sur les promoteurs de régimes à prestations déterminées. Donc, ce faisant, on est capables possiblement de retrouver un environnement… Ça change l'environnement des régimes de retraite.

Aujourd'hui, on a des déficits à financer, mais, dans quelques années, quand les déficits vont avoir été éliminés, si on a en place des régimes où on ne couvre que les droits jusqu'à 75 ans de façon générale, donc il y a beaucoup moins de pression, peut-être qu'on va revoir la conception de nos régimes en fonction de cet environnement-là et peut-être que ça va être un environnement qui va être plus susceptible de maintenir des régimes à prestations déterminées s'il y a une partie du risque qui est prise en charge.

L'Institut canadien des actuaires a sorti une étude, la semaine dernière, qui parle de la longévité qui augmente encore. Donc, ce risque-là est présent et enlève la motivation aux promoteurs des régimes de retraite de prendre en charge ces risques-là. Ça fait que, si on le met collectivement ensemble, avec des bons mécanismes et financé de façon réaliste, d'avance, on devrait être capables d'enlever toute cette pression-là sur les promoteurs individuels et leur permettre de mettre leurs efforts sur l'élément important pour eux, qui est la partie de la retraite jusqu'à 75 ans.

Mme Maltais : Merci. Vous nous parlez que vous êtes d'accord avec la capitalisation améliorée. La plupart des gens, d'ailleurs, en parlent de façon positive. Mais vous ne nous amenez pas la nuance que nous ont amenée les autres firmes d'actuaires, à l'effet qu'il ne faudrait pas se… la valeur sur laquelle on se base ne serait pas la bonne. On parle des obligations corporatives, on nous a parlé de leur volatilité. Qu'est-ce que vous en en pensez? Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?

M. Bourget (Richard) : En fait, nous, on est demeurés sur le principe. On pense que de financer, de prendre plus de prudence, à compter de la retraite, pour sécuriser les rentes des retraités, c'est approprié. Si, dans le cadre des discussions, on arrive à un indice qui est similaire à celui-là mais un peu plus large pour rencontrer les enjeux de financement, on va répondre aux enjeux. Le vrai élément dans la méthode de capitalisation améliorée, c'est qu'elle accélère le financement des prestations, O.K., et elle protège la sécurité à la retraite. Donc, si on met ce principe-là en place — nous, on a resté à ce niveau-là — effectivement, l'indice pourrait être regardé, voir s'il y a un indice qui est mieux approprié à tous les enjeux de l'ensemble des régimes de retraite.

M. Parent (Pierre) : Donc, peut-être pour conclure, on est tout à fait à l'aise avec la proposition qui a été formulée ce matin par quelques intervenants, à l'effet d'utiliser un indice qui tiendrait davantage compte des obligations de provinces avec des ajustements. Je pense que ça va dans le sens de sécuriser le financement de la portion de la retraite.

• (14 h 20) •

Mme Maltais : Dans votre mémoire, en page 9, premier paragraphe, vous dites : «…il serait opportun de prévoir, de façon transitoire, une période initiale d'amortissement des déficits accumulés plus longue pour les régimes des secteurs universitaire et municipal.» Mais vous dites : «Toutefois, la période initiale d'amortissement devrait, selon nous, être établie dans le respect de l'équité intergénérationnelle souhaitée.»

Donc, comment est-ce qu'on devrait mieux respecter l'équité intergénérationnelle dans cette restructuration des droits acquis? J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Parce que c'est un des principes de base auquel on tient beaucoup, c'est le fondement même... Un des fondements du rapport D'Amours, c'est l'équité intergénérationnelle, ce que vous soulignez vous-mêmes d'entrée de jeu dans votre rapport.

M. Parent (Pierre) : Au sujet de l'équité intergénérationnelle, nos propos ne visent pas à faire égard à ce qui est prévu par le rapport D'Amours. On pense que ça respecte les principes d'équité intergénérationnelle. Ceci étant dit, comme on le mentionne, il se peut que, pour certains régimes du secteur municipal et universitaire, à court terme, la charge financière soit importante. Alors, en allongeant la période, ça va permettre, dans le fond, d'alléger le fardeau dans les premières années. Alors, ça va dans ce sens-là. Mais, quand on exprime que ça doit se faire dans un principe d'équité intergénérationnelle, ça signifie évidemment qu'aller au-delà d'une période de travail normale serait, à notre avis, de transférer ça à une génération subséquente, ce qui n'est pas souhaitable dans un principe, là, de vouloir respecter l'équité intergénérationnelle.

Mme Maltais : O.K., je comprends bien maintenant. Ça réfère un peu aussi à ce que les gens nous ont dit, là, que, si on utilisait la capitalisation améliorée aussi, la hausse serait un peu brutale peut-être pour certains régimes.

Dernière question, de mon côté. Vous parlez d'encadrement, d'encadrement additionnel pour réviser les droits acquis pour le service passé. Vous pensez que nous devrions encadrer la renégociation ou les... ces régimes-là. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. C'est sur le… sur cinq ans pour s'entendre sur les restructurations, là. Vous dites que certains régimes auront besoin d'un encadrement additionnel pour réviser les droits acquis pour le service passé. Est-ce que, comme d'autres, vous pensez que, si on donne ce droit aux partenaires privés, ou aux municipalités, ou aux universités de décréter à la fin du cinq ans de négociation, il nous faudrait baliser ce qui est faisable de façon unilatérale?

M. Bourget (Richard) : En fait, au niveau de la restructuration des droits acquis, ce qu'on pense, c'est qu'il est important d'avoir un encadrement qui va... où les partenaires au régime de retraite vont avoir le goût de venir s'asseoir et de convenir de mesures pour assurer la pérennité du régime de retraite. Généralement, ces encadrements-là prévoient davantage que ce soit par voie de négociation ou de consultation. Donc, d'imposer des choses, ça rend des fois les éléments un peu plus délicats.

Ce qu'on pense, c'est qu'il n'y a pas énormément de régimes de retraite, au Québec, qui vont passer par la restructuration, mais ceux qui vont passer par là, ils vont avoir besoin d'avoir cet encadrement-là, sinon ils vont devoir se terminer. Et ce qu'on dit, c'est qu'il est plus important de créer cet... donner la possibilité aux gens qui veulent restructurer leurs droits de le faire et laisser ces gens-là, les partenaires, établir eux-mêmes les balises dans lesquelles ils vont discuter de ces éléments-là. Mais présentement ils ne peuvent pas avoir cette discussion-là, la loi interdit ces éléments-là.

Mme Maltais : Est-ce que vous croyez qu'il faut mettre en oeuvre le rapport de façon intégrale ou si vous pensez qu'on peut mettre en oeuvre le rapport par parties, ce qui a semblé être la proposition portée par les mémoires précédents?

M. Bourget (Richard) : Nous, on pense que, de façon globale, les recommandations se tiennent, c'est un tout, effectivement. On devrait le mettre en place en même temps, c'est une chose; de prendre le temps de bien faire les choses, c'est une autre chose. Peut-être que de développer un programme comme la rente longévité peut prendre effectivement plus de temps que de mettre en place une nouvelle méthode de financement. Mais de faire tous les morceaux nous apparaît important, parce qu'il y a un certain...

La rente, comme on l'expliquait tantôt, la rente longévité vient enlever une pression sur les régimes à prestations déterminées. Le financement, la méthode de financement nous permet de rajuster le financement pour sécuriser les rentes des retraités. Et, dans certains cas, on va peut-être avoir besoin de partager les coûts de façon différente ou de rouvrir les droits passés. Donc, de permettre ces encadrements va... ça va... on va peut-être avoir besoin de faire ça quand on va déplacer un des morceaux. Ça complète, là.

M. Parent (Pierre) : Bien, je pense qu'il y a plusieurs intervenants, ce matin, qui sont venus mentionner qu'ils avaient besoin de règles précises et permanentes. Et, dans ce sens-là, on pense que le fait d'aller de l'avant ou de ne pas aller de l'avant avec une rente longévité, ça fait partie de ce tout dans lequel… pour restructurer les régimes, je pense qu'il faut avoir également une bonne orientation si ça va aller de l'avant, parce que le lien avec l'intégration, le lien avec le partage de coûts, je pense que, si l'exercice veut être complet et se faire sur une base à long terme pour les différents régimes de retraite, bien la rente longévité, la création d'un nouveau programme et la volonté du gouvernement d'aller de l'avant de ce côté-là nous semblent être reliées pour faire en sorte qu'effectivement les gens trouvent des solutions permanentes.

Parce que la première question qui va se poser quand les gens vont mettre les morceaux ensemble, c'est : On travailles-tu dans un contexte où elle va être là, la rente longévité, ou elle ne sera pas là? Alors, je pense que je nuancerais un peu le fait, là, que ce sont des blocs complètement dissociables. Je pense qu'il y a des liens à faire. Et essentiellement, sans avoir un échéancier identique pour chacun des éléments mais au moins d'avoir une orientation, je pense que ça permettrait aux différents intervenants des régimes de retraite de trouver des solutions appropriées et viables à long terme.

Mme Maltais : Merci beaucoup.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Chapadeau : Merci, M. le Président. Merci pour votre mémoire. Moi, j'aurais une question — puis vous avez échangé un peu avec la ministre, tantôt — par rapport à la capitalisation améliorée. Vous y êtes favorables, là, c'est ce que reflète votre mémoire. Est-ce que cette approche de capitalisation améliorée, dans le cas de la terminaison du régime de retraite, est-ce que ça pourrait avoir des conséquences négatives sur les retraités? On a vu le dossier de… le cas de White Birch ici, à Québec, là. Donc, est-ce que cette approche-là pourrait avoir des conséquences négatives sur les retraités?

M. Bourget (Richard) : En fait, l'approche de la capitalisation améliorée vise un régime et elle va aller sur un principe de continuité, donc, que le régime se termine. Ce que le rapport D'Amours propose, c'est qu'en cas de terminaison on continue à évaluer les engagements des régimes de retraite sur la base de la solvabilité, et c'est ça présentement qui crée des enjeux. Donc, à long terme, la capitalisation améliorée va faire en sorte qu'on va davantage… on va mettre plus d'argent pour nos prestations qu'on accumule pour le futur. Donc, sur un plus long terme, la méthode de la capitalisation améliorée va davantage sécuriser les retraités parce qu'il va y avoir plus d'argent de mis de côté pour sécuriser ces rentes-là au moment de la retraite. On propose de la financer de façon à prendre les risques principalement durant la carrière active. Ça fait que, quand on arrive à la retraite, normalement les actifs pour payer les rentes, ils sont accumulés, et là, si on les gère de façon prudente, comme il se doit, l'argent devrait être là pour payer ces gens-là. Donc, c'est une méthode qui devrait, en principe, améliorer la situation des retraités dans une éventuelle terminaison de régime de retraite.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député, une minute.

M. Chapadeau : Non, ça va.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Ça va? D'abord… Oui. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Très rapidement. Vous insistez évidemment sur la rente longévité, mais vous parlez aussi, là, de créer une culture d'épargne davantage chez les individus. Et moi, j'aimerais vous entendre par rapport au RVER, là, si éventuellement la mise sur pied du RVER pourrait à la limite contrecarrer les déficits qu'on a dans certains fonds de pension, là, ou dans certaines…

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : ...

M. Bourget (Richard) : Les RVER, c'est un autre outil qui va aider à cette épargne-là. On se donne des moyens pour épargner. Le constat du rapport du comité d'experts dit : Il y a une insuffisance d'épargne, il y a un déficit d'épargne, les gens ne mettent pas suffisamment d'argent de côté pour leur retraite. Donc, on cherche des moyens pour le faire. La rente longévité vient dire à l'ensemble des Québécois : À compter de 75 ans, il y a un régime additionnel qui va venir couvrir votre risque de longévité. Quand on additionne ça avec la rente du Régime de rentes du Québec et la sécurité de la vieillesse, il y a une grosse partie, pour un bon nombre de travailleurs québécois, de la sécurité financière qui est assurée à compter de 75 ans. Donc, ça laisse la période entre la date de retraite, qui est un choix individuel au Québec, et 75 ans pour couvrir avec l'épargne.

Donc, avec cette rente longévité là, on vient redéfinir un peu la place de l'épargne. Il y en a, de la place pour l'épargne privée, pour des régimes de retraite, pour de l'épargne avec les RVER. Et, si on dit aux gens : Vous avez à couvrir la période d'une date de retraite que vous choisissez jusqu'à 75 ans avec votre épargne privée, à ce moment-là on définit un peu plus facilement nos objectifs. Peut-être que, quand... Quand on a un horizon défini, c'est plus facile, ça nous tente plus de mettre de l'argent de côté parce qu'on sait on en a pour combien… qu'est-ce qu'on a à couvrir. Donc, dans ce contexte-là, on pense qu'on crée une certaine culture d'épargne encore plus intéressante.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, M. Bourget. Et nous passons maintenant la parole du côté de l'opposition officielle, M. le député de Verdun.

• (14 h 30) •

M. Gautrin : Je vous remercie, M. le Président. J'ai un peu de… Je voudrais savoir qu'est-ce que vous… Comment vous comprenez la rente de longévité? Je vais vous poser les questions suivantes : Est-ce que la rente de longévité, pour vous, est un régime à prestations cibles, c'est-à-dire que les cotisations sont clairement définies et pour l'employeur, et pour les participants, et qu'essentiellement le bénéfice pourra être modifié, ou est-ce que le bénéfice, qui est 0,5 % du MGA dûment indexé, lui, reste fixe, et les cotisations peuvent bouger, c'est-à-dire le poids?

Je me permettrais de vous signaler simplement que, dans la rente de longévité, évidemment on parle sur le long terme. Et vous avez très justement, dans votre mémoire, soulevé le problème démographique dans lequel la longévité va aller en augmentant, l'espérance de vie à 65 ans que vous projetez actuellement sur… en 2036, vous projetez à 21,6 %. Dans 40 ans, elle sera encore… le nombre de personnes qui dépassera 95 ans sera encore plus important.

Alors, dans la rente de longévité, est-ce que la variable… puisque la variable qui va augmenter va être la longévité des gens, c'est-à-dire l'espérance de vie, est-ce qu'il va falloir jouer sur les cotisations des employeurs et des employés ou diminuer les prestations, ce qui rendra éventuellement moins intéressante cette articulation dont vous parlez avec un régime de prestations déterminées?

M. Bourget (Richard) : La question, elle est fort intéressante. Telle qu'elle est présentée, la rente longévité, pour nous, c'est un régime à prestations cibles. Elle est décrite en disant : À l'exception de l'âge où débute la rente, tous les paramètres peuvent être adaptés dans le futur de façon à assurer la pérennité du régime. Donc, ça peut être les cotisations, ça peut être le niveau de la rente, ça peut être le niveau de l'indexation de la rente. Je rappelle que, dans ce qui est proposé, la rente, elle est indexée.

Donc, il y a des gens qui vont gérer ce programme-là, et, dans le temps, compte tenu des événements, si la longévité s'améliore, et tout, les cotisations vont être mises. L'objectif est vraiment de stabiliser la cotisation au 3,3 % le plus longtemps possible. Il y a d'autres outils qui sont donnés, mais, un jour, s'il y a des enjeux, si l'expérience est défavorable, il y a des gens qui vont devoir prendre des décisions courageuses qui vont probablement affecter soit l'indexation de la rente, soit le niveau de la rente ou soit la cotisation. Ce jour-là, à ce moment-là, les décisions seront prises en conséquence.

M. Gautrin : Mais vous comprenez, à ce moment-là, qu'il y a quand même des fluctuations et des possibilités puisqu'il y a une variable qu'on sait qui va certainement croître, tel que vous l'avez clairement démontré, d'ailleurs, dans votre document, qui est la longévité, c'est-à-dire le nombre… l'espérance de vie et le nombre de… Vous avez deux variables, vous avez l'espérance de vie à 65 ans et le nombre de personnes qui ont plus que 95 ans. Donc, vous comprenez, ceux qui ont plus que 95 ans, c'est des gens qui vont percevoir la rente de longévité pendant 20 ans, et même plus que ça après. Donc, vous voyez actuellement la pression qu'on va avoir sur ce régime-là éventuellement?

C'est pour ça que moi, je vous ai expliqué les réticences que je peux avoir et je sais qu'on peut en tirer par la gouvernance. C'est qu'à un moment ou l'autre la pression sociale va amener le gouvernement, même si on dit : Elle doit être pleinement capitalisée par l'employeur et les citoyens, de devoir rajouter ou réinjecter des fonds avant qu'on baisse les cotisations — ça, c'est ma crainte personnelle sur la rente de longévité, mais vous voyez le risque qu'il y a à ce moment-là — ou gêner considérablement les entreprises en augmentant indûment une taxe sur la masse salariale, qui à quel point est néfaste sur le plan économique, comme vous le savez bien. C'est un commentaire, hein? Je vous comprends que…

M. Parent (Pierre) : Bien, si je peux me permettre de poursuivre, là. Les enjeux que vous positionnez sont tout à fait appropriés. Je pense que, dans ce qui est exprimé à l'intérieur du rapport D'Amours, sans avoir décrit le fondement de leurs calculs, là, sur le 3,3 %, il semble y avoir une préoccupation vis-à-vis avoir des hypothèses prudentes pour le fait qu'on ne soit pas dans une situation où on a 50 % des chances que ça fonctionne puis 50 % que ça ne fonctionne pas puis, dès qu'il y a un petit accident, on commence à avoir des problèmes sérieux de financement.

Alors, je pense que, dans la construction finale de ce projet-là, il faudra vraisemblablement intégrer à l'intérieur des paramètres vos préoccupations vis-à-vis le fait qu'on n'a aucune garantie sur l'espérance de vie ou le taux de rendement, mais de faire preuve d'un peu de prudence pour que, si ça ne se produit pas aussi bien qu'on le souhaiterait, bien il n'y a pas des mesures difficiles qui doivent être prises au premier rendez-vous difficile, là.

M. Gautrin : J'ai d'autres questions. Si vous avez entendu les intervenants ce matin — et je pense que vous le partagez — il y a un certain nombre de mesures qui sont incluses dans ce qu'on appelle le rapport D'Amours actuellement, qui nécessitent une coordination, en quelque sorte, avec ce qui se passe dans les autres provinces. Dans ce cadre-là, d'après vous, quelles sont les mesures les plus urgentes qu'on devrait prendre ici, au Québec, avant qu'on se soit entendus, disons, ou qu'on ait négocié soit avec les autres ministres des Finances des autres provinces, soit avec les gens qui travaillent sur les modifications au régime canadien de pensions? Il y a quand même un certain nombre de mesures. Quelles sont celles que vous nous suggérez d'inclure rapidement dans une loi avant même, disons, cette coordination qu'on doit faire avec les partenaires canadiens?

M. Bourget (Richard) : Bien qu'on pense que l'ensemble des mesures sont appropriées…

M. Gautrin : …de façon globale, hein, j'ai compris votre position.

M. Bourget (Richard) : …à court terme, on pense que celles qui sont peut-être les plus faciles à mettre en place, c'est possiblement celles au niveau de la méthode de financement. Donc, et il y a des enjeux, depuis une dizaine d'années, qui n'ont pas été réglés. Il y a une réflexion qui est faite, il y a de quoi sur la table. Travaillons à partir de là, mettre de quoi… On pense qu'on est facilement capables de mettre de quoi à court terme, comme certains intervenants l'ont dit ce matin, mais ça n'empêche pas qu'en parallèle les autres dossiers peuvent avancer.

M. Gautrin : …moi, j'utilise… Parce que les êtres politiques utilisent souvent des images. Je dirais, il faut, à l'heure actuelle, que, dans le cadre de la Loi sur les RCR, on refasse toute la plomberie de la maison parce qu'on a trop longtemps réparé des bouts de joints et des bouts de tuyaux qui fuyaient à droite et à gauche, à la pièce, et que maintenant il est temps d'avoir une révision complète, et voyons particulièrement à maintenir la pérennité, mais revoir aussi le mécanisme de financement. Est-ce que vous partagez ce point de vue là aussi?

M. Bourget (Richard) : Tout à fait.

M. Gautrin : Et un des objectifs qu'on doit avoir, c'est bien sûr l'équilibre intergénérationnel, mais aussi, d'après moi, d'après moi, la flexibilité. Autrement dit, à moins que vous ne soyez pas d'accord là-dessus, mais j'ai cru que vous l'étiez, que la flexibilité à rechercher, ça veut dire ne pas avoir un mécanisme qui soit trop rigide et qui gène les négociations entre les partenaires dans un régime de retraite. Autrement dit, la règle qu'on devrait avoir, c'est rechercher une plus grande flexibilité.

M. Parent (Pierre) : Exact.

M. Gautrin : Merci.

M. Gélinas (Martin) : Si je pouvais me permettre un petit commentaire, bien, dans le document qui vous a été passé, qui tentait de résumer un peu nos propos à la page 3, on mentionne… quelles…

Des voix :

  Des voix :

M. Gélinas (Martin) : …celles qu'on devrait prioriser. Donc, je pense que ça devrait être un bon aide-mémoire, là, par rapport à cette question-là. Et on a bien mentionné tantôt que, par rapport à la rente longévité, ça devrait être un élément qui devrait être tout le temps considéré dans l'évaluation de nouveaux systèmes pour pérenniser la retraite. Donc, ce n'est pas quelque chose qu'on devrait prendre mis à part, mais de dire… Il faudrait peut-être établir les règles du jeu pour savoir qu'est-ce qu'on voudrait faire avec ça. Les méthodes de financement, mon collègue en a parlé. Les partages de coûts aussi sont importants à établir rapidement, dans le cadre que vous avez mentionné aussi, pour permettre aussi peut-être, dans certains régimes, de restructurer des droits, ça pourrait être essentiel de le faire…

M. Gautrin : Il nous reste un peu de temps avant que je passe la parole. J'ai deux petites questions. Vous êtes préoccupés, bien sûr, pour qu'on assure aux Québécois et aux Québécoises à la retraite un revenu décent. Moi, j'ai la préoccupation aussi de maintenir ce revenu, surtout sur un horizon, comme vous l'avez bien justifié, où la personne en retraite va vivre plus longtemps. Je comprends que la rente de longévité soit un élément qui, puisqu'il est indexé, va régler en partie ce problème-là. Comment vous vous positionnez?

Je comprends aussi que les régimes indexés a priori ont un coût de service courant qui est extrêmement lourd. Toutes les mesures, qui soient d'une indexation ad hoc, c'est-à-dire lorsque ça génère des excédents d'actif qu'on pourrait même, comme le suggère la SCFP, par exemple, de les mettre dans un fonds à part ou etc., comment vous vous positionnez par rapport à ça, c'est-à-dire l'indexation éventuelle d'utilisation des excédents d'actif pour une indexation a posteriori?

M. Bourget (Richard) : Bien, l'approche recommandée par le comité d'experts, avec la méthode de la capitalisation améliorée, intègre à l'intérieur des hypothèses un certain nombre d'éléments de prudence, et dans les mécanismes aussi. Donc, si l'expérience, elle est favorable, avec cet argent-là qu'on met de côté on va générer des revenus de placement et globalement on pourrait se ramasser éventuellement avec des surplus, O.K.? Et ces surplus-là pourraient être…

• (14 h 40) •

M. Gautrin : Et, éventuellement, même aussi ça dans une caisse à part. La comptabilisation, autrement dit, de ce qu'on appelle les provisions pour écarts défavorables, les PED, de pouvoir le capitaliser à part et éventuellement, si ça génère dans les PED des excédents d'actif, de pouvoir les utiliser pour une indexation a posteriori.

M. Bourget (Richard) : C'est une approche qui a le même objectif que la méthode de la capitalisation améliorée, c'est-à-dire de sécuriser les rentes à la retraite. Au lieu de le mettre dans des hypothèses, on le met dans un fonds de stabilisation. C'est des mécanismes différents pour arriver aux mêmes objectifs.

M. Gautrin : Merci. J'ai une dernière petite question sur le calcul des valeurs de transfert. Vous savez qu'à l'heure actuelle le rapport veut modifier les calculs de valeur de transfert. J'imagine que vous êtes d'accord avec ce qui est intervenu. Il ne faut pas qu'on se singularise au Québec par rapport aux autres, il faut qu'on ait une entente. Et on va évidemment poser la question lorsque les gens de l'ICA vont être là cet après-midi, de savoir comment ils… Mais vous êtes d'accord aussi sur ça, j'imagine?

M. Bourget (Richard) : Tout à fait. Et, dans le rapport du comité d'experts, on parle… on incite la Régie des rentes du Québec à entreprendre des discussions sur cette nouvelle base-là avec l'Institut canadien des actuaires.

M. Gautrin : Je crois que mon collègue d'Outremont, M. le Président, voudrait terminer avec quelques questions.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Je pourrai le faire, enfin, mon cher collègue. Vous avez tantôt parlé de, parmi les choses à mettre en place rapidement, cette question du partage des coûts pour avoir des règles du jeu aussi claires, du 50-50. Mais encore là, dans votre mémoire, vous arrivez en disant : Bien non, n'imposez pas le 50-50… dit : Si les parties en conviennent. Est-ce que l'expérience passée n'a pas démontré que c'est un problème, justement, particulièrement dans le secteur municipal, où les droits de négociation sont particuliers, disons? Et donc pourquoi vous voulez… Je comprends que le principe de base, c'est : on veut que les gens s'entendent, mais, dans ce cas-ci particulier, «it defeats the purpose », comme on dit.

M. Bourget (Richard) : En fait, deux éléments. D'abord, ce que le rapport du comité d'experts propose, c'est un partage de coûts à parts égales pour les services courants. On ne parle pas des déficits passés, juste des services courants. Ce que nous, on dit ici, c'est qu'on sait que ça, dans certains cas, ça va aller à l'encontre des ententes entre les parties qui ont été signées, des ententes récemment qui ont été signées avec des pourcentages légèrement différents. Ça fait que ce qu'on dit, c'est que, pour ouvrir une certaine ouverture par rapport à ça, on pourrait dire dans la loi que, par défaut, c'est un partage de coûts 50-50, sauf, si les parties en conviennent, le partage obligatoire pourrait se faire sur des pourcentages différents.

M. Bachand : Le partage serait là par défaut…

M. Bourget (Richard) : Oui.

M. Bachand : …sauf si les parties en conviennent et non pas : Convenez-en. Parfait.

M. Parent (Pierre) : Et, par exemple, c'est une chose d'avoir un partage du coût du service courant à 50-50, mais un partage du coût 40-60, par exemple, à la fois du coût de service courant et du déficit, on pourrait débattre longtemps de qu'est-ce qui est le plus protecteur, là, dans une perspective, là, du régime. Alors, c'est dans le sens qu'on veut apporter des nuances.

M. Bachand : Merci. Il ne me reste pas grand temps. Je voudrais juste souligner aussi, pour les gens qui nous écoutent et les membres de la commission qui ne l'auraient pas capté, que Normandin Beaudry, bien sûr, c'est la firme où siège aussi René Beaudry, qui était membre du comité D'Amours. Vous le saluerez et le remercierez de la part… du travail qu'ils ont fait au cours de ce temps-là.

Dans la rente longévité, vous parlez de l'importance d'administrateurs chevronnés capables de prendre des décisions difficiles en toute indépendance. Est-ce que ça veut dire que vous remettez en question… Ça a été abordé ce matin, puis je commence… je comprends pourquoi. Maintenant, ce n'est pas le rôle de la Régie des rentes. C'est, quand la Régie des rentes même veut faire des changements sur le fond, il fallait que ce soit approuvé par arrêté en conseil. Puis les gouvernements, tous partis confondus depuis 15 ans, ont toujours jammé et refusé, sauf nous, la dernière fois, où on a accepté de recalibrer les régimes, alors que le régime canadien a une disposition que, si vous n'êtes pas en équilibre actuariel, vous coupez la rente, vous coupez les bénéfices, vous augmentez la cotisation, mais vous ne pouvez pas être dans une situation instable, ce que je pense qu'on a mis dans notre loi, mais avec un pouvoir au Conseil des ministres de le défaire. Mais au moins on a déjà fait cette balise-là. Est-ce que vous… Quand vous dites «indépendance», vous pensez à quoi?

M. Bourget (Richard) : En fait, on ne remet pas en cause les recommandations du comité d'experts. Ce qu'on dit, c'est que gérer un régime à prestations cibles, ça prend des gens courageux parce qu'un jour, si l'expérience est défavorable, il va y avoir des décisions à prendre, et les décisions devront être prises en toute indépendance, ça veut dire dans le seul et unique intérêt de la pérennité du régime. Donc, peu importe qui les prend, ces décisions-là, s'assurer de les prendre.

Un intervenant, ce matin, disait : Les risques, dans un régime à prestations cibles, sont supportés uniquement par les participants et les retraités, c'est peut-être à eux à prendre ces décisions-là. Nous, on dit : Ça va prendre des gens qui vont avoir le courage de prendre ces décisions-là le temps venu.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci. Et ça termine le temps alloué au parti de première opposition. Je laisse maintenant la parole au député de Chaudière-Appalaches pour un quatre minutes.

M. Picard : Chutes-Chaudière, M. le Président. Merci, M. Beaudry, M. Parent, M. Gélinas. Ça, c'est constant, là, Chutes-Chaudière, Chutes-de-la Chaudière, n'importe quoi. Mais sérieusement, là, au niveau de... ce matin, les gens qui ont témoigné, qui nous ont fait part de leurs réflexions, ils nous parlaient qu'ils avaient une certaine crainte, concernant la rente de longévité, avec la compétitivité des entreprises au Québec. Vous, vous n'abordez pas cet item-là. Est-ce que vous pourriez élaborer? Est-ce que les gens de ce matin qui ont allumé une lumière jaune l'ont... En tout cas, j'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Bourget (Richard) : En fait, c'est que, comme on l'explique un peu dans notre mémoire, c'est que présentement il y a des réflexions qui se font ailleurs qu'au Québec, dans les autres provinces, sur qu'est-ce qu'on fait pour améliorer la sécurité à la retraite. O.K.? Donc, on pense qu'il va aussi se faire quelque chose en dehors du Québec.

La rente longévité vient... c'est une proposition qui est faite, mais, si on se rappelle il y a 18 mois et même depuis… on en entend parler, il y a aussi des analyses de regarder la rente du Régime de rentes du Québec comme étant une... améliorer la rente du Régime de rentes du Québec comme une option. Donc, on dit : Peu importe ce qui va se passer, il va se passer de quoi au Québec comme ailleurs au Canada — nous, ce qu'on pense — et, à ce moment-là, au niveau de la compétitivité des entreprises, il va y avoir un impact autant au niveau des entreprises du Québec que des entreprises canadiennes. Donc, pour nous, c'est un enjeu qui va s'éliminer de lui-même quand toutes les pièces vont être en place.

Mais présentement il y a des réflexions aussi en dehors du Canada, il y a eu quelques rencontres des ministres provinciaux sur comment on peut faire ces choses-là. Et donc, si ça arrive avec une bonification du Régime de pensions du Canada, il va y avoir une cotisation requise des entreprises canadiennes pour ce régime-là, qui va être le pendant de la cotisation pour la rente longévité au Québec.

M. Picard : O.K. Donc, si je poursuis votre réflexion, si, au RPC, il y a une révision, nous, on devrait peut-être continuer avec notre rente de longévité et non pas adhérer au même principe que le RPC, qui... En fin de compte, c'est la proposition de la FTQ d'augmenter le Régime des rentes puis que le RRQ et le RPC se suivent, comme depuis plusieurs années. Vous, vous dites : On devrait quand même conserver notre régime distinct si ça avance du côté du RPC, là. On s'entend bien?

M. Bourget (Richard) : Exact. La rente longévité, telle qu'elle est proposée, elle est simple, c'est une rente payable à compter de 75 ans. Le Régime de pensions du Canada comme le Régime de rentes du Québec prévoient des rentes payables à 65 ans qui sont anticipables. Il y a aussi d'autres mesures sociales derrière ça. Donc, de bonifier le Régime de pensions du Canada, à notre avis, va coûter beaucoup plus cher que le 3,3 % qu'on requiert au Québec pour la rente longévité. Donc, on pense que... C'est pour ça qu'on appuie la rente longévité, c'est une façon efficace de répondre à un enjeu de longévité et de sécurité financière à des coûts abordables pour le Québec.

M. Picard : Dernier point concernant... Vous parlez de restructurer les droits acquis. Le rapport D'Amours propose une méthode. Vous, vous dites : Ça en prend un, mais vous dites : Qu'est-ce que M. D'Amours propose avec son groupe, ce n'est peut-être pas... on ne doit pas aller aussi loin. Qu'est-ce que vous proposez comme encadrement pour obliger les parties à discuter puis à négocier?

M. Bourget (Richard) : Ce qu'on dit, c'est que ça prend absolument la possibilité dans la loi de restructurer. Il ne faut pas la forcer, c'est un choix des parties. Vous allez rencontrer, dans le cadre de vos travaux, les parties aux régimes de retraite, soit les employeurs, les syndicats et les retraités. Demandez à ces gens-là c'est quoi, les conditions que ça leur prend pour qu'ils puissent s'asseoir pour s'assurer de… pour prendre des décisions dans le sens de la pérennité des régimes de retraite.

Ce qu'on dit, c'est que, le droit unilatéral qui est proposé, ce qu'on a entendu peut être un irritant. Ce droit unilatéral là à l'employeur, il n'est pas sans conséquence pour l'employeur, il y a des sommes qui doivent être injectées, donc, dans le régime de retraite. Donc, si ces conditions-là qui sont proposées par le comité d'experts ne sont pas suffisantes pour que les gens viennent à une table et s'asseoir pour trouver des solutions pour la pérennité des régimes de retraite, on dit : Trouvez... on ne connaît pas ces conditions-là, mais demandez à ces gens-là qu'est-ce que ça leur prend. Mais il faut qu'on en parle parce que la situation, elle est critique, elle est là.

M. Picard : O.K. Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière. Et je dis à MM. Bourget, Parent et Gélinas merci beaucoup de votre présence et de votre participation à notre commission.

Et je suspends les travaux quelques minutes pour permettre aux représentants de la firme Towers Watson de prendre place.

(Suspension de la séance à 14  h 50)

(Reprise à 14  h 52)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons recommencer nos travaux. Il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à MM. Lemieux, Charrette et Jean, de la firme Towers Watson. Et je vous laisse la parole pour une dizaine de minutes pour vous présenter d'abord et présenter votre mémoire. Vous avez la parole.

Towers Watson Canada inc.

M. Charrette (Pierre) : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, bonjour, messieurs. Towers Watson est heureuse d'avoir reçu votre invitation et de présenter ses observations sur les recommandations présentées dans le rapport du comité D'Amours. Notre firme est une des plus importantes sociétés internationales de stratégie et de gestion des ressources humaines, de rémunération, d'avantages sociaux et de gestion du changement. Nous offrons des services actuariels, des services de consultation en matière de gestion de l'actif et d'administration des régimes, ainsi que des services-conseils relativement aux régimes de retraite à prestations déterminées et à cotisation déterminée.

Cet après-midi, Towers Watson est représenté par mes collègues Stéphane Jean et Charles Lemieux, et moi-même, Pierre Charrette. Nous sommes des conseillers oeuvrant principalement dans le domaine des régimes de retraite. Je dirige l'unité de retraite de notre bureau de Montréal, M. Jean dirige l'équipe de Towers Watson responsable des nouveaux développements dans le domaine de la retraite, et M. Lemieux est un membre de l'équipe du suivi de la réglementation régissant le domaine de la retraite.

Nous tenons à remercier les membres du comité d'experts pour les constats présentés dans leur rapport concernant l'état du système de retraite québécois, les réflexions et les solutions possibles aux problèmes qu'ils ont identifiés. En participant à cette consultation, nous désirons contribuer au soutien et à l'amélioration de notre système de retraite. Nous croyons que les régimes à prestations déterminées constituent un moyen important de fournir un revenu stable aux travailleurs québécois à la retraite. Je cède maintenant la parole à M. Jean.

M. Jean (Stephane) : Merci. Puisque nous offrons des services-conseils relativement aux régimes de retraite, nous sommes bien au fait des multiples enjeux et défis auxquels font face les employeurs qui offrent des régimes de retraite. La baisse des taux d'intérêt et le faible rendement au cours des dernières années ont entraîné une détérioration de la situation financière des régimes de retraite à prestations déterminées. Cette détérioration de la situation financière des régimes de retraite a mené de nombreux employeurs du secteur privé à revoir les prestations payables de leurs régimes de retraite.

De plus, la complexification du cadre législatif et la fréquence des changements à la réglementation ont entraîné, dans certains cas, des coûts additionnels tant sur le plan administratif que sur les prestations. Ainsi, de nombreux employeurs n'offrent plus de régimes de retraite à prestations déterminées à leurs employés. Ces régimes de retraite ont souvent été remplacés par des régimes à cotisation déterminée.

Nous croyons qu'une réglementation permettant l'établissement de régimes de retraite à prestations cibles devrait être adoptée le plus rapidement possible. La stabilité des coûts est un objectif recherché par plusieurs entreprises, qui, au cours des dernières années, ont liquidé leurs régimes ou ont même fermé leurs régimes de retraite aux nouveaux participants afin de les remplacer par un régime à cotisation déterminée. Il est primordial pour le maintien des régimes à prestations déterminées que les employeurs puissent offrir des régimes de retraite qui offrent des prestations… de type à prestations déterminées, mais qui peuvent varier selon le niveau de capitalisation du régime sans que des cotisations additionnelles de l'employeur soient nécessaires.

Le gouvernement devra aussi s'attaquer à la propriété de l'excédent d'actif des régimes de retraite. Au cours des dernières années, les répondants de régimes de retraite ont dû verser des cotisations d'équilibre élevées afin de rétablir la situation financière de leurs régimes. Or, les règles actuelles prévoient qu'en cas de liquidation du régime avec excédent l'employeur doit faire parvenir un projet d'entente aux participants afin de partager cet excédent. Ce problème est mieux connu sous le nom de l'asymétrie entre la prise de risque et le bénéfice de la prise de risque.

Certaines propositions avancées dans le rapport D'Amours, notamment d'exigence de la provision pour écarts défavorables, la PED, plus élevée, amplifient les inquiétudes concernant les propriétés d'excédents d'actif à la liquidation des régimes. Les répondants ont peu d'intérêts à améliorer la capitalisation des régimes et à verser des cotisations additionnelles qui ne pourront pas leur être remboursées lorsque la situation financière du régime le permettra ou qu'ils devront être assujettis à des ententes avec des participants en cas de liquidation. À la base, les répondants de régimes à prestations déterminées s'engagent à fournir une rente à la retraite de leurs employés, ils ne s'engagent pas à verser des excédents d'actif en cas de liquidation. À cet effet, nous appuyons la recommandation du comité d'experts qui permet l'utilisation de l'excédent d'actif en cours d'existence du régime. Nous croyons cependant qu'il ne devrait pas y avoir de limite sur le montant qui peut être utilisé au-delà de la provision raisonnable pour écarts défavorables.

Nous appuyons la modernisation et la simplification des règles de capitalisation des régimes de retraite. Toutefois, avant d'adopter un nouveau cadre financier, il y aurait lieu d'envisager d'autres modèles de capitalisation et leurs effets possibles sur la situation financière des régimes et sur les variations possibles de cotisations. À court terme, les règles de capitalisation proposées par le comité d'expert auraient généralement pour effet de diminuer les cotisations des régimes de retraite à maturité élevée lorsqu'ils sont en déficit. Or, dans le cas de régimes de type dernier salaire et de moindre maturité, c'est-à-dire ayant une proportion élevée de participants actifs, il est probable que les règles proposées résulteront en une hausse de cotisations patronales. Des règles produisant des cotisations plus élevées pour des régimes de moindre maturité n'encourageront pas la création, le maintien et la croissance de régimes à prestations déterminées.

Nous croyons que la proposition de revoir la méthode de calcul de valeurs de transfert est intéressante et mérite d'être considérée, bien qu'il y ait certains enjeux pour les régimes de retraite comptant des participants dans plusieurs provinces. Cela ne devrait pas décourager le gouvernement d'effectuer des changements à la méthode pour le calcul des valeurs de transfert. Toutefois, nous l'encourageons, à condition de travailler avec les gouvernements des autres provinces afin d'en arriver à une méthode qui s'appliquera de façon uniforme au Canada. Je cède la parole à Charles.

M. Lemieux (Charles) : Nous croyons qu'une saine gestion des risques est souhaitable pour la pérennité des régimes de retraite et pour les organisations qui les parrainent, surtout lorsque les régimes sont de taille importante. Cependant, même si certaines propositions émises par le comité d'experts visent précisément la problématique de la gestion du risque des régimes de retraite, nous considérons que l'ensemble des propositions présentées dans le rapport D'Amours pourrait créer des risques plus importants que ceux qui existent aujourd'hui.

La politique de gestion des risques, la politique de capitalisation, la politique de placement d'un régime de retraite devraient être considérées dans leur ensemble et non individuellement. Dans cette optique, dans le contexte où les risques financiers reposent essentiellement sur les épaules de l'employeur, la responsabilité de la politique de capitalisation, de la politique de placement, de la politique de gestion des risques financiers devrait incomber exclusivement aux répondants du régime.

Le cadre législatif devrait reposer sur les principes suivants. Tout d'abord, en premier lieu, il y a un régime de retraite, c'est-à-dire un engagement entre l'employeur et ses employés qui décrit les prestations payables selon les circonstances, soit, par exemple, la retraite, la cessation d'emploi ou le décès. Le texte du régime ou l'engagement indique aussi comment les coûts sont partagés, c'est-à-dire qui paie les coûts des prestations et quelle partie, l'employeur ou les participants, assume les risques financiers, c'est-à-dire subir une hausse de cotisation ou une réduction des droits pendant l'existence du régime. C'est la base du système.

En second lieu, il faut une structure de gouvernance pour encadrer le régime de retraite, il faut établir une politique de placement, une politique de gestion des risques. La partie qui assume les risques financiers devrait être responsable de l'établissement de ces politiques. Dans un régime à prestations déterminées, ces politiques devraient être la responsabilité de l'employeur. Dans les régimes à coûts partagés ou les régimes à prestations cibles, un comité de retraite formé de représentants de l'employeur et de participants devrait en avoir la charge.

Finalement, un comité de retraite devrait être en charge de l'administration du régime et de l'application des politiques. À cet effet, nous appuyons la recommandation permettant à un régime de retraite d'acquitter une partie ou la totalité des rentes en versements au moyen de l'achat de rentes garanties auprès d'un assureur. Nous croyons que cette mesure devrait être adoptée rapidement afin de faciliter la gestion des risques financiers. L'employeur devrait faire partie prenante de toute décision concernant cette option.

Par ailleurs, la proposition du comité d'experts de porter de 7 % à 15 % le coefficient employé dans la formule du calcul de la provision pour écarts défavorables, ou la PED, produirait une PED obligatoire exagérément élevée pour un bon nombre de régimes. Nous soumettons que la formule actuelle de la PED doit être revue complètement. Je cède maintenant la parole à M. Charrette.

• (15 heures) •

M. Charrette (Pierre) : En conclusion, nous considérons que plusieurs recommandations du comité d'experts vont dans la bonne direction pour atteindre l'objectif de pérenniser les régimes de retraite à prestations déterminées. Certaines d'entre elles pourraient être mises en place à très court terme, afin d'encourager le maintien des régimes de retraite à prestations déterminées existants, par exemple l'achat de rentes. Toutefois, nous devons constater que certaines autres recommandations auraient pour effet de nuire au maintien et à la création de régimes de retraite et devraient être modifiées avant leur adoption.

Par ailleurs, nous soulignons que l'un des plus grands irritants en matière de financement des régimes à prestations déterminées, soit l'asymétrie entre la prise de risque financier et l'attribution de l'excédent d'actif, n'a fait l'objet que de recommandations partielles du comité d'experts. Nous encourageons vivement le législateur à corriger cette asymétrie. De plus, nous suggérons que les pouvoirs en matière de gouvernance soient alignés sur la prise de risque financier. Enfin, une législation permettant l'établissement d'un régime à prestations cibles devrait être adoptée le plus rapidement possible. Nous serons heureux de répondre à vos questions en rapport avec nos observations ou avec d'autres aspects des recommandations proposées. Merci de votre attention.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, messieurs. Et nous passons maintenant à la période d'échange. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, MM. Lemieux, Charrette et Jean, à cette commission parlementaire. Merci d'avoir pris le temps et l'énergie de nous écrire ce mémoire et de nous présenter votre éclairage sur le rapport D'Amours. Si je ne m'abuse… Bien, une question d'abord pour bien comprendre, je l'ai posée à un Aon Hewitt en commençant la journée : Quel est votre type… quels sont les... votre type de clients? Est-ce que vous avez du public, du privé, du syndical? Comment vous fonctionnez?

M. Charrette (Pierre) : Nous avons effectivement des clients dans le domaine privé et dans le domaine public. Nous faisons du conseil auprès des régimes autant à prestations déterminées qu'à cotisation déterminée, alors nous faisons la gamme des services pour le marché.

Mme Maltais : Au Québec, ça? Merci.

M. Charrette (Pierre) : Au Québec.

Mme Maltais : Oui. Le rapport D'Amours est présenté par le groupe d'experts et par M. D'Amours comme un tout. Vous semblez assez… je vais vous dire, assez frais concernant le rapport lui-même et surtout la recommandation de la rente longévité. Je voyais dans votre mémoire que vous dites même : «Nous croyons qu'il serait préférable de modifier et de simplifier la réglementation actuelle afin d'encourager les entreprises à offrir des régimes de retraite ou d'épargne à leurs employés.» Donc, vous n'êtes pas chaud envers cette création, cette innovation que serait la rente longévité.

M. Lemieux (Charles) : Bien, la rente longévité, ça fait partie d'un tout. C'est sûr que c'est les pouvoirs politiques qui vont devoir décider à savoir comment devrait être constitué le système de retraite. Ce qu'on note par contre, c'est que la rente longévité en elle-même représenterait une nouvelle taxe salariale qui devra être prise en considération au niveau total. Et de plus la rente longévité qui est proposée est un développement, pour l'instant, seulement québécois, donc les employeurs qui ont des employés dans plusieurs provinces vont devoir coordonner l'ensemble de leurs avantages sociaux. Ça entraîne des complexifications plus importantes. Je pense que l'esprit de notre mémoire était d'avoir une perspective de simplification du cadre législatif et des règles en matière de retraite. Donc, c'est dans cette perspective-là que nos commentaires étaient effectués.

Mme Maltais : Donc, vous considérez que la rente longévité est une complexification du système et un frein à la compétitivité des entreprises québécoises?

M. Lemieux (Charles) : Pour l'instant. Il faut regarder si les autres provinces décident d'adopter la rente longévité. À ce moment-là, ça va être un système pancanadien, mais on pense que le débat a à dépasser les frontières québécoises par rapport à cet élément-là.

Mme Maltais : C'est parce qu'il faut qu'on se décide, au Québec, avant d'en parler ailleurs. Ça fait que j'essaie d'avoir l'opinion des gens ici, en commission parlementaire, leur opinion sur la rente longévité. Alors, ce que j'essaie de comprendre, c'est : Est-ce que, pour vous, la rente longévité est quelque chose de positif, une avancée intéressante, ou si, pour vous, c'est…

Il y a «oui, c'est bon» qu'on a entendu particulièrement tout à l'heure, avec Normandin Beaudry. Il y a «oui, si», si on s'entend avec les autres provinces et tout. Ou il y a «non, ce n'est pas bon, ce n'est pas ça qu'il faut». Ça peut être, par exemple, bonifier la RRQ, ça peut être augmenter les PD. Vous vous situez où, dans la palette, là? Il faut être sans gêne, c'est une commission parlementaire très…

M. Jean (Stephane) : Je pense que ce qui est clair, en tout cas, pour notre firme, c'est que la retraite doit être basée sur trois éléments, l'épargne privée de l'individu, un régime de retraite de son employeur et les régimes d'État. Je pense que c'est comme ça qu'on réussit à avoir un bon revenu de retraite. La balance entre la rente de l'État, l'épargne personnelle et les régimes privés, que j'appellerais, est peut-être… il y a peut-être un débalancement présentement.

Donc, on a vu, puis je pense que je l'ai mentionné durant mon introduction, il y a beaucoup d'employeurs qui ont terminé leurs régimes de retraite à prestations déterminées, donc ça a créé un poids supplémentaire aux employés, aux participants. Donc, est-ce qu'il y a lieu plutôt d'essayer de valoriser les régimes de retraite privés, de valoriser l'épargne personnelle en premier? C'est un débat de société, mais moi, mon opinion serait peut-être de corriger un peu le provisionnement et la façon qu'on… pas administrer, mais qu'on gère les risques au niveau des régimes de retraite à prestations déterminées présentement.

Mme Maltais : L'objectif, le mandat qui avait été donné par le précédent gouvernement à l'équipe d'experts autour de M. D'Amours, c'était justement d'aider à pérenniser ou à sécuriser les régimes à prestations déterminées. Si j'ai bien compris, vous considérez que les recommandations du rapport D'Amours n'aideraient pas à sécuriser le régime à prestations déterminées ou n'encourageraient pas les entreprises à mettre sur pied de nouveaux régimes à prestations déterminées.

M. Jean (Stephane) : Je n'aime pas critiquer, mais la…

Mme Maltais : ...parce qu'on essaie de comprendre les choses…

M. Jean (Stephane) : Oui. Mais, je pense qu'une des choses qui n'a pas été vraiment adressée dans le rapport d'Amours, c'est comment promouvoir les régimes de retraite. Si vous faites un peu le tour, on a mentionné qu'on a beaucoup de clients, beaucoup d'entreprises privées, il n'y a pas beaucoup de gens qui pensent mettre en place un régime de retraite, ils veulent plutôt s'en débarrasser le plus rapidement possible. Comme j'ai mentionné, il y a beaucoup de régimes à prestations déterminées qui ont terminé — je pense que la Régie des rentes vous a présenté certaines statistiques — c'est un enjeu. C'est un enjeu, je pense. C'est un enjeu québécois, c'est un enjeu canadien, c'est un enjeu mondial, mais c'est quand même un enjeu parce que c'est un des piliers importants pour assurer un bon revenu de retraite.

Mme Maltais : Est-ce que vous pensez que, si on accélérait la mise en place d'une réglementation concernant les régimes à prestations cibles — ce qui a été évoqué par d'autres et que vous avez évoqué tout à l'heure — est-ce que vous pensez que ça pourrait aider certaines entreprises à essayer de mettre sur pied des régimes de retraite? Est-ce que vous avez ce son de cloche là de la part des entreprises? Est-ce qu'il y a un intérêt pour les régimes à prestations cibles qui s'ouvre? J'essaie de voir.

M. Jean (Stephane) : Certainement. Je pense que c'est une des solutions. Comme on a mentionné dans notre mémoire, on favorise que ça soit adopté le plus rapidement possible. Il y a eu un dépôt de loi pour deux entreprises au Québec pour créer des régimes à prestations cibles. En tout cas, l'opinion qu'on a, préliminaire, de ce qu'on a vu rapidement, c'est que ça semble être vraiment favorable, c'est très simple, peu complexe. Donc, ça va... c'est un pas dans la bonne direction.

Mme Maltais : O.K. C'est sûr que, si on a accepté de faire ça, c'est parce que c'étaient des régimes en difficulté, où les retraités risquaient de se retrouver le bec à l'eau, et où… Ce qu'on essaie d'éviter, c'est que les entreprises passent de prestations déterminées à cotisation déterminée, où, là, on change complètement l'équilibre en jeu, on transfère le poids de l'employeur à l'employé. Prestations cibles semblait un intermédiaire, mais dans des cas bien particuliers. La réflexion qu'on a à faire, c'est : Qu'est-ce qu'on fait avec les régimes à prestations cibles? Est-ce que ça devient véritablement un outil qu'on privilégie?

M. Jean (Stephane) : Je peux commenter là-dessus. Je pense que le transfert se fait déjà de façon incroyable depuis les 10 dernières années, là. Comme j'ai mentionné, les régimes à prestations déterminées, beaucoup ont été fermés aux nouveaux employés, donc ce transfert de risque là a été fait peut-être au détriment de certains employés. C'est déjà fait. On est un peu… on est comme… on est un peu trop tard, mais on peut toujours s'améliorer.

Mme Maltais : Qu'est-ce qu'on doit faire rapidement?

M. Jean (Stephane) : Bien, comme on a mentionné, on a dit : Les prestations cibles, c'est un pas dans la bonne direction, l'achat de rentes, revoir aussi, on a dit, la méthode de financement des régimes, je pense que c'est tout des choses qui se font dans la bonne direction.

Mme Maltais : D'accord. Merci beaucoup.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Dubuc.

• (15 h 10) •

M. Claveau : Oui, dans la continuité... Bonjour. Bien, merci d'être présents. Et, dans la continuité de Mme la ministre un peu, vous semblez, comme les autres groupes qui sont venus ce matin, être préoccupés, par rapport à la rente de longévité, sur la compétitivité des entreprises. Et vous énoncez que probablement qu'on devrait entamer préalablement des négociations avec les autres provinces ou le gouvernement canadien. Est-ce que c'est bien… au départ, c'est la première étape que vous suggérez dans votre mémoire qu'on devrait entreprendre avant l'établissement d'une rente longévité?

M. Lemieux (Charles) : Présentement, la beauté entre le Régime de rentes du Québec et le Régime de pensions du Canada, c'est que c'est deux régimes qui sont très similaires. Donc, c'est une approche, que ce soit un régime… Que ce soit pour un travailleur québécois ou canadien, ça offre des prestations similaires. Donc, l'idée de changer le système social par un régime… par une rente longévité, bien, si on considère à changer la manière dont la rente, qui est financée par les travailleurs mais encadrée par le gouvernement… bien, il y a lieu d'avoir un esprit similaire partout pour le Canada. Donc, la première étape, elle est vraiment de s'entendre entre les différents paliers de gouvernements provinciaux, à savoir c'est quoi, la solution à l'épargne de retraite et au système de retraite pour les travailleurs québécois et canadiens.

M. Claveau : C'est bien.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Bonjour. Merci. Écoutez, je voudrais revenir sur un aspect, là, que vous n'avez pas traité avec les questions, là. Mais les excédents d'actif, vous dites que c'est facile de… en tout cas, ce que j'ai lu, là, c'est plus simple d'augmenter les cotisations quand il y a un manque au niveau de la capitalisation que d'éliminer les excédents d'actif dans le cas contraire. C'est ce que vous…

M. Lemieux (Charles) : C'est ce que la loi prévoit. Présentement, un régime à prestations déterminées, s'il est en déficit, la loi exige qu'un employeur finance ce déficit-là. Lorsque le régime est en situation d'excédents d'actif, à la liquidation, la loi prévoit qu'il doit y avoir un projet d'entente de partage entre les participants et l'employeur. Donc, quand ça va mal, c'est l'employeur qui doit financer le régime de retraite. Si ça se termine puis qu'il y a eu un surplus, l'argent n'est pas à celui-là qui a eu à subir les risques dans le cours d'existence du régime. Donc, il y a une déconnexion entre qui prend les risques et qui a les récompenses pour ce risque-là.

M. Therrien : Dans le rapport D'Amours, ils parlent, entre autres, là, du cas des Pays-Bas, où est-ce qu'on détermine, là, des paramètres de capitalisation. Dans le cas où est-ce qu'il y a des excédents, par exemple, on pourrait y aller avec une indexation pour récompenser un peu, là, les gens d'avoir payé leur dû, là. Est-ce qu'il y aurait moyen d'encadrer ce genre de remboursement et puis justement de faire en sorte que, quand il y a des manques dans la caisse de retraite, ce soit réévalué de façon automatique ou de façon plus précise afin de protéger les deux parties à l'intérieur d'une législation qui soit juste envers ces deux parties-là?

M. Lemieux (Charles) : À la base, un régime de retraite, c'est une entente, c'est un contrat entre un employeur et ses employés qui indique qu'est-ce qui est payable, quand. Donc, à ce moment-là, le régime de retraite à prestations déterminées, tel qu'on le connaît aujourd'hui, à la base, c'est : à la retraite, on va payer une rente au participant, tant et aussi longtemps qu'il est en vie. L'employeur s'engage à payer cette rente-là à travers son régime de retraite, il va financer les risques s'il y a lieu, s'il y a des déficits. S'il y a des surplus par rapport à ça, l'argent devrait lui revenir, ne devrait pas aller servir à des bonifications aux participants. Si l'employeur veut offrir ces bonifications-là, il pourra le faire, mais, à la base, l'entente, l'engagement, c'est vraiment les prestations qui sont définies dans un texte entre l'employeur et les participants et les employés.

M. Therrien : O.K. Dernière petite question, là. Vous en avez parlé, mais je voudrais juste revenir là-dessus. On voit un glissement, là, vers les cotisations déterminées, là. C'est ce qu'on a noté. Puis vous avez dit qu'on arrive quasiment trop tard, là. Et puis vous arrivez dans votre réflexion puis vous dites que la rente de longévité, bien vous la questionnez, puis c'est correct, là. Mais moi, je vous dis : Est-ce que ça ne correspond pas à un rempart justement pour éviter que les prestations déterminées puissent survivre et ne pas céder sa place aux cotisations, le fait qu'on aurait une rente longévité? Même si c'était un peu encadrant, là, pour le privé, mais au moins dire : Regardez, si vous avez des prestations déterminées, on va vous donner l'oxygène pour pouvoir poursuivre dans cette veine et éviter justement un manque de capitalisation. Est-ce que c'est un… Si ce n'est pas un rempart, est-ce que vous en proposez un concrètement à très court terme pour qu'on puisse éviter ce glissement?

M. Lemieux (Charles) : Le système a besoin d'une réglementation plus souple. Et les divers éléments du système, que ce soit la rente longévité, le Régime de rentes du Québec, l'épargne privée ou l'épargne personnelle font partie d'un tout. Donc, il n'y a pas de solution unique. Une solution qui va affecter un ou l'autre de ces éléments va nécessairement avoir des répercussions sur les autres éléments. Comprendre que le régime de retraite de même que les charges sociales font partie d'un tout qui s'appelle la rémunération d'un employé. Donc, il faut avoir une perspective plus globale par rapport aux solutions qui vont être apportées aux différents éléments.

M. Therrien : Donc, à la limite, vous faites confiance au privé pour justement remplir ce manque-là. Vous faites confiance aux différents intervenants pour justement faire en sorte d'éviter, là, cette pénurie de capitaux là, c'est ce que vous me dites en gros, à travers un bouquet de mesures de toutes sortes aidées par le gouvernement, entre autres les RVER puis des choses comme ça, tout simplement.

M. Jean (Stephane) : Oui.

M. Therrien : O.K.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Ça va?

M. Therrien : Oui. Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et je passe maintenant la parole du côté de l'opposition officielle. Et je reconnais M. le député de Verdun.

M. Gautrin : Je vous remercie. D'abord, je vous remercie sur la qualité de votre mémoire. Vous avez pris la peine quand même de regarder chacune des recommandations du rapport D'Amours et de faire des commentaires sur chacune des recommandations.

Donc, j'ai compris que vous étiez dans les mesures qu'il fallait faire à court terme, et vous le rappelez à Mme la ministre. L'achat d'une rente, d'assurer en quelque sorte le paiement de la rente auprès d'un assureur, vous êtes en faveur de cette mesure-là. Est-ce que je comprends : bien que, si, à ce moment-là, il y a une assurance, en quelque sorte, du paiement de la rente auprès d'une assurance qui serait payée par le service courant — je comprends bien, la prime d'assurance serait payée à même le service courant — il ne devrait plus être nécessaire d'avoir une provision pour écarts défavorables aussi importante ou le... Est-ce que c'est le cas, d'après vous?

M. Jean (Stephane) : Effectivement, si la rente est achetée auprès d'une compagnie d'assurance, le risque est transféré à la compagnie d'assurance...

M. Gautrin : C'est bien ce que je pense.

M. Jean (Stephane) : ...qui ne fait plus partie de la caisse de retraite. C'est le problème présentement qu'on a. Le risque…

M. Gautrin : J'ai bien compris ça.

M. Jean (Stephane) : Même s'il y a un achat de rente, le risque reste toujours avec la caisse de retraite.

M. Gautrin : Donc, si on ouvre cette possibilité comme telle d'assurer, comme tel, à partir du service courant, il n'y aurait plus pour vos employeurs, qui sont vos clients en partie, l'obligation de constituer une provision pour écarts défavorables?

M. Jean (Stephane) : Pour cette partie-là, oui, pour ceux qui ont été assurés, mais les employés seraient protégés en ayant une rente auprès d'une compagnie d'assurance.

M. Gautrin : Oui, je comprends, je comprends bien. Il y a une deuxième chose que je vois dans votre mémoire. Alors, je reviens donc dans votre mémoire, recommandation qui est la recommandation 5, je crois, Affectation de l'excédent d'actif. Bon. Vous plaidez très fortement pour que l'excédent d'actif appartienne... et il faut clarifier ces quelques choses là. Je vous dirais que... Et je vais vous poser après une petite question sur l'article 146.3, parce que moi, je suis le père de cet article sur lequel vous n'êtes pas d'accord.

Une voix : ...

M. Gautrin : Non, non, mais... Donc, je reviens. D'abord, vous êtes en faveur de constituer un compte de cotisations d'équilibre, c'est-à-dire quel que soit... et même on pourrait mettre dans ce compte les prestations... les PED, c'est-à-dire les prestations pour écarts défavorables pourraient être capitalisées dans ce compte d'équilibre. Donc, vous êtes assez proches de la position SCFP, si je la qualifie dans ce sens-là, d'avoir un... Je sais, je ne voudrais pas vous associer, mais...

M. Jean (Stephane) : Non, non, c'est bien, c'est bien.

M. Gautrin : Non, non, mais je comprends les collègues de...

Une voix : ...

M. Gautrin : Mais, au moins sur le principe d'avoir un compte… une comptabilisation différente, vous êtes d'accord.

M. Jean (Stephane) : Oui. Oui. Bien, onotre recommandation indique quelque chose, un mécanisme similaire à ce qui se fait en Colombie-Britannique et en Alberta.

M. Gautrin : Absolument. Absolument. Maintenant, je vais revenir. Je vais vous poser une question plus personnelle, en quelque sorte. 146.3, vous savez comment ça s'est fait, c'était un projet qu'on avait fait quand on était dans l'opposition à l'époque où on n'était pas avec... on était réellement dans une grande période où il y avait des excédents d'actif. Et donc, on n'était pas en train de combler des déficits, on était réellement dans une période avec des excédents d'actif.

Et là on plaidait à ce moment-là, du moins moi, qu'il fallait quand même qu'il y ait... si des excédents d'actif se généraient à l'intérieur d'un régime, il puisse y avoir une partie qui venait des investissements qui avaient été faits par les retraités, donc, qu'ils puissent pouvoir… écoutez, avant que l'employeur puisse toucher les excédents, avoir accès des excédents d'actif, une forme de consultation de la part des retraités. C'est à peu près la logique qui nous avait mis dans un principe d'équité dans 146.3.

Là, vous dites : L'application... Parce que je ne suis pas dogmatique dans la mesure, je dis : Si jamais on s'est trompés, essayons de voir… Et là vous, vous soulevez que 146.3 a posé des problèmes. Et, si je regarde, après, les gens qui vont venir après, donc l'ICA… L'ICA, de la même manière, resoulève la question et dit : Vous avez surréglementé, à l'heure actuelle, dans la loi, dans les modifications que vous avez amenées à la Loi sur les RCR et, en surréglementant, vous avez pénalisé en quelque sorte les tentatives qu'il pourrait y avoir chez certains employeurs de verser des excédents de cotisations, c'est-à-dire plus que les cotisations minimales. Est-ce que ça a été vraiment un problème généralisé? Est-ce que j'interprète mal ou…

• (15 h 20) •

M. Jean (Stephane) : Pas généralisé, je vous dirais, mais…

M. Gautrin : Est-ce que j'interprète mal ou pas?

M. Jean (Stephane) : Non, non, c'est une bonne observation que vous faites. Pas de façon générale, mais certains de nos clients n'ont pas versé de cotisations additionnelles à cause de ce fait-là, c'est certain.

M. Gautrin : Il faudrait…

M. Lemieux (Charles) : J'ajouterais un exemple. On a des clients qui ont des régimes enregistrés, dans d'autres provinces, en situation de surplus. Ils ont songé et ils ont donné des bonifications aux participants de leurs autres provinces et ils ont exclu les participants du Québec pour la simple et unique raison qu'ils ne voulaient simplement pas avoir cette épée de Damoclès là, qu'on appelle le principe d'équité, au-dessus de leur tête. Donc, il y a des cas très précis qui sont arrivés, par une réglementation qui est beaucoup trop floue, qui a découragé... qui a privé des travailleurs québécois d'une bonification de leurs régimes de retraite simplement parce que le processus est beaucoup trop complexe.

M. Gautrin : La réglementation floue, mais a été copiée, si vous voulez, dans l'application de terminaison de régime. C'était, dans les faits, une espèce de mimique de l'un sur l'autre.

Là, actuellement, la position de l'ICA, c'est de dire : Au mieux, il faudrait revoir ça ou être en mesure de voir… peut-être maintenir le principe d'équité, mais avoir une application qui soit beaucoup plus, disons, flexible, si je puis me permettre, à ce niveau-là.

Sur le niveau de la flexibilité, toujours sur là, vous dites : Il y a un manque de flexibilité, dans le rapport D'Amours, dans l'obligation d'avoir des provisions pour écarts défavorables à 15 % plutôt qu'à 7 %, tel qu'il est dans la loi, en disant : Dans le fond, les écarts défavorables pourraient être négociés en fonction du niveau de risque des investissements. Autrement dit, la politique de placement doit être reliée en quelque sorte avec la politique de… avec le montant en quelque sorte de la provision pour écarts défavorables. C'est à peu près votre position.

M. Jean (Stephane) : C'est à peu près... Vous faites un bon résumé.

M. Gautrin : Et vous allez… Vous faites un pas de plus en disant : L'obligation de rembourser, pour les cotisations excédentaires qui auraient été versées par l'employeur à… le 20 % est une rigidité qu'il faudrait lever à l'intérieur de la loi et le ramener au niveau de la table de négociations entre les parties pour savoir... en fonction évidemment du régime. Est-ce que je comprends bien votre position?

M. Jean (Stephane) : Oui, effectivement. Oui.

M. Gautrin : O.K. J'ai…

M. Charrette (Pierre) : Juste pour ajouter là-dessus…

M. Gautrin : Oui, excusez-moi.

M. Charrette (Pierre) : …ça revient à votre point que vous avez fait au début, en termes de : Est-ce que permettre l'achat de rentes pourrait réduire la PED? C'est exactement dans cette optique-là…

M. Gautrin : Absolument.

M. Charrette (Pierre) : …où est-ce que c'est un outil additionnel pour la gestion de risque, et, si les risques sont bien gérés, la PED devrait être moindre.

M. Gautrin : Alors, j'ai appris quelque chose ce matin. Des fois, il faut avoir l'humilité de le dire lorsqu'il y a… Moi, je croyais qu'il y avait la même approche entre l'ICA et le rapport D'Amours quant à la valeur de transfert. Ce qu'on m'a dit, c'est qu'il y avait deux approches complètement différentes sur le calcul de la valeur de transfert. Qu'est-ce que vous voyez, vous, actuellement, comme étant… Est-ce que vous êtes proches de la position de l'ICA ou proches de la position qui… du rapport D'Amours? Il n'y a pas seulement des variables… des questions sur les paramètres, qu'on m'a dit, mais il y a des questions sur la philosophie même de calculer sur les valeurs de transfert. Je ne voudrais pas rentrer là-dedans, parce que je n'ai pas regardé en détail moi-même à tête reposée, mais j'ai appris que je comprenais mal. Excusez-moi de…

M. Lemieux (Charles) : On pense que la proposition de revoir comment on calcule les valeurs de transfert est une proposition intéressante. C'est sûr qu'on reconnaît la perspective historique. La position de l'ICA par rapport à la valeur de transfert telle qu'on la connaît actuellement est assez différente de ce qui est proposé dans le rapport D'Amours, mais on reconnaît que la proposition émise dans le rapport D'Amours est un développement intéressant, qui mérite d'être investigué plus loin, d'être poussé et de regarder plus en détail.

M. Gautrin : J'aurais encore beaucoup de questions, mais on a un temps limité, M. le Président. Je pense que mon collègue d'Outremont ou ma collègue de Laporte auraient peut-être une question à poser.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Merci, M. le Président. Je remarque aussi et je vous remercie — là, on n'en parlera pas — que vous appuyez le principe des RVER, là, des régimes volontaires d'épargne-retraite. Dans la rente longévité, vous soulevez, à juste titre, je pense, l'importance d'une certaine harmonisation avec le Canada. Vous savez qu'il y a des discussions sur la bonification du Régime des rentes ou du Régime de pensions du Canada, mais qu'ils n'ont pas eu le consentement des deux tiers des provinces, puisque le Québec et l'Alberta ont dit non, mais il y avait quand même pas mal de mouvement de ce côté-là.

Vous êtes une grande firme nationale, même question que j'ai posée à vos collègues. Depuis le rapport D'Amours, la rente longévité, qui est une innovation — parce que, moi, c'est une idée que personne n'avait mise sur la table avant le comité d'experts — comment est-elle reçue? Vous en avez discuté avec vos collègues à travers le Canada, on a dit : «Nice thing in Québec», on va aller… Ou est-ce que c'est une idée qui peut résoudre un problème de fond, comme, moi, je pense puis par ailleurs qui a même des avantages par rapport à la bonification du Régime des rentes?

M. Lemieux (Charles) : La rente longévité est, comme vous l'avez mentionné, quelque chose de nouveau qui n'avait pas été entendu dans le débat. C'est sûr que le débat qui fait rage par rapport à qu'est-ce qu'on fait par rapport au Régime de pensions du Canada ou du Régime de rentes du Québec, il y a plusieurs voies qui sont proposées, c'est-à-dire soit on bonifie le Régime de pensions du Canada ou de rentes du Québec, soit on y va plus du côté de l'épargne personnelle avec le modèle du RVER. L'Alberta, la Colombie-Britannique penchent plus, présentement, de ce que je comprends, vers une option de type plus à cotisation déterminée, un volet épargne. Donc, c'est simplement une nouvelle idée qui est lancée et c'est une idée de plus qui va être considérée dans le débat, qu'est-ce qu'on fait avec l'épargne à la retraite.

M. Bachand : Mais ma question était : Vous, vos collègues... soit vos clients, vos collègues, dans les bureaux, cette idée-là, qui est quand même... elle est nouvelle, mais elle est là, maintenant, depuis le mois de mai à peu près, est-ce qu'il y a un intérêt pour cette idée-là? Parce que, si nous, effectivement, au Québec, on décide... Je comprends qu'il faut décider, en principe, à un moment donné : Voici une bonne solution d'avenir. Elle serait beaucoup plus intelligente si elle était harmonisée. Donc, il faudrait prendre le bâton de pèlerin puis vous mandater et tous les experts pour dire : Allez vendre cette idée-là au reste du Canada. Est-ce que vous avez des premiers commentaires, les premiers échos de...

M. Lemieux (Charles) : Mais je pense, c'est ça, il va falloir la vendre parce que c'est perçu comme une taxe supplémentaire par les employeurs présentement.

M. Bachand : …Canada Pension Plan aussi, et elle faisait… Je ne savais pas que BC avait basculé, parce qu'à part l'Alberta et le Québec on était tout seuls avec le fédéral. Tous les autres… Si le Québec avait dit oui, là – et le SCFP m'en veut encore sur ça — je veux dire, il y aurait eu un projet de régime des rentes et de CPP amélioré sur la table. Alors, la rente longévité, c'est quand même moins coûteux. Et plus approprié, étant donné l'âge visé aussi, je pense. Mais ça, c'est un autre débat.

M. Lemieux (Charles) : C'est à discuter. Je veux dire, je pense que la première réaction de nos clients, c'est : Une taxe supplémentaire. Puis, comme j'ai mentionné tantôt, bien, le rapport D'Amours n'adresse peut-être pas assez ou pas… le fait de création de régime à prestations déterminées, ou de valoriser ça, qui est un des piliers importants de l'épargne-retraite pour un participant.

M. Bachand : O.K. Merci. Alors, merci. Nicole?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Mme la députée de Laporte.

Mme Ménard : Merci beaucoup. Bonjour, messieurs. Alors, dans votre mémoire, vous parlez que «l'uniformisation des règles de capitalisation pour les secteurs privé et public [résulterait] en une augmentation des cotisations pour la plupart des employeurs du secteur [privé]». Alors, vous pensez que des règles de transition devraient être prévues pour tenir compte du fardeau financier. Alors, j'imagine que vous avez déjà eu une réflexion là-dessus. Est-ce que vous pouvez nous parler de règles de transition?

• (15 h 30) •

M. Lemieux (Charles) : En tout cas, je pense que, les règles de transition, vous en avez déjà vu, ça peut être des périodes d'amortissement plus longues, donc... Mais ces règles de transition là devront être réfléchies au fur et à mesure que les nouvelles règles de capitalisation sont adoptées. Je pense qu'il faut établir, un, quel est l'impact des nouvelles règles de financement quand elles sont adoptées. Un coup qu'on aura une idée, une meilleure appréciation de l'impact de ces hausses-là, à ce moment-là, il va être plus facile d'établir des règles de transition vers ces nouvelles règles de financement là.

Mme Ménard : Merci. Ça va, merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Ça va? Merci beaucoup. Et nous passons maintenant la parole au représentant du député… au député de Chutes-de-la-Chaudière…

M. Picard : C'est beau, merci...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : …représentant du deuxième groupe de l'opposition.

M. Picard : Merci, M. le Président. Si je décode bien votre rapport — et merci pour votre mémoire, là — qu'est-ce que vous dites aux parlementaires, c'est que la rente de longévité il y a beaucoup de questions… C'est peut-être que le remède est trop gros pour l'instant, il faudrait peut-être en… Il faudrait en discuter avec nos partenaires canadiens. Vous avez une crainte aussi sur l'ingérence politique peut-être à long terme. On ne sait jamais, parce que ça évolue dans le temps, même si on dit qu'on ne mettra jamais les mains là-dedans, là. Ça, on a déjà vu ça.

Et qu'est-ce que vous dites, c'est qu'il y aurait peut-être d'autres ajustements qui pourraient être faits dans l'immédiat, qui pourraient améliorer, qui pourraient faire la promotion des régimes de retraite. C'est quels autres moyens? Vous en énumérez quelques-uns, mais de façon très générale. Si j'en prends un ici, là, vous dites : «Adapter le cadre législatif afin de permettre l'ajustement des droits acquis...» C'est un beau vœu pieux. Mais avez-vous… C'est parce que, pour permettre une saine discussion, c'est beau dire qu'il faut modifier la loi, mais ça prend peut-être des incitatifs. Donc, j'aimerais vous entendre de façon globale là-dessus.

M. Lemieux (Charles) : Bien, parmi les pistes de solution qu'on voit à court terme pour aider et donner de l'oxygène dans le système, on le mentionnait tout à l'heure, il y a l'achat de rentes pour les participants retraités. Ça permettrait d'éliminer du risque dans certains régimes de retraite. Quand on pense à la notion de droit acquis, bien on pense que tout peut être mis sur la table. On ne l'a pas entendu, mais il n'y a pas de débat par rapport à la hausse de l'âge de retraite. On a entendu, tout à l'heure, dans le groupe précédent : La longévité augmente. Le Régime de pensions du Canada, la pension de sécurité de vieillesse, l'âge de la retraite normal a augmenté à 67 ans. Il n'y a pas de débat qui a été mis sur pied, à savoir : Comment est-ce qu'on peut ajuster un régime de retraite qui a été mis en place aujourd'hui?

On peut regarder toutes les prestations accessoires, prévoir un nouveau cadre législatif, mais il faut aussi regarder d'autres idées parmi les règles en cours. Donc, on pense que, parmi les solutions à court terme pour donner de l'oxygène au système, bien il y avait l'achat de rentes, la gestion des risques, très important, donc…

Une voix : Les prestations cibles aussi, là.

M. Lemieux (Charles) : Les prestations cibles.

M. Picard : Mais aussi, ce matin, il y a quelqu'un qui disait que le manque de règles permanentes… Actuellement, les employeurs, là, ne savent pas sur quel pied danser parce que les règles sont temporaires sur… on rajoute des temporaires aux temporaires, puis tout ça, là. Est-ce que vous confirmez qu'est-ce qui a été dit ce matin, que, si on avait des règles plus claires, ça inciterait peut-être les employeurs à offrir des régimes de retraite?

M. Jean (Stephane) : C'est évident, parce que, lorsque les règles changent, je dirais, on change un peu le contrat. Donc, quand on a des règles permanentes, on peut être capable de savoir dans quel domaine, carré de sable on joue. Présentement, on ne le sait pas parce que ça change à chaque année.

M. Picard : O.K. Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière. M. Lemieux, M. Charrette, M. Jean, merci beaucoup de votre participation à notre commission.

Et je suspends nos travaux quelques minutes pour permettre aux représentants de PBI Conseillers en actuariat ltée de prendre place.

(Suspension de la séance à 15  h 34)

(Reprise à 15  h 37)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît. Nous continuons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants de la firme PBI Conseillers en actuariat ltée.

Et, avant de vous céder la parole, je voudrais passer un petit message aux membres de la commission. Petit changement à l'ordre du jour, c'est qu'à 17 h 30, sur notre ordre du jour, c'était : Suspension. Alors, on va enlever le mot «suspension», et, à 17 h 15, nous allons entendre les représentants du Syndicat canadien de la fonction publique. Je remercie les représentants de ce syndicat d'avoir accepté ce changement à l'horaire, ce qui nous permettra de terminer nos travaux pour la journée vers 18 h 15, 18 h 20. Merci.

Alors, mesdames messieurs, d'abord, il me fait plaisir d'accueillir des madames aussi comme invitées, c'est que vous êtes les deuxième et troisième durant toute la journée. Content de voir qu'il y a des actuaires aussi de sexe féminin, heureusement. Alors, après vous être présentés, vous avez en tout une dizaine de minutes pour présenter votre mémoire. Vous avez la parole.

PBI Conseillers en actuariat ltée

M. Bergeron (Pierre) : Merci. Alors, je me présente. Je suis Pierre Bergeron, actuaire associé chez PBI Conseillers en actuariat. Je suis accompagné, à ma gauche, de Nathalie Jutras, qui est actuaire associée également dans notre firme, et de Sonia Massicotte, qui est notre avocate. Donc, on a ajouté également une touche légale à notre présentation, on a… Je ne sais pas si ça va la simplifier ou si ça va la compliquer, mais on verra tantôt.

Donc, dans un premier temps, on tient vraiment à vous remercier de nous avoir invités à venir vous rencontrer, à venir vous expliquer un peu nos positions, nos préoccupations, nos pistes de solution. Alors, on comprend que c'est un défi de taille que vous avez à résoudre ou à tenter de trouver des solutions. On espère que notre expérience, notre expertise, qui est un peu différente, je dirais, des bureaux traditionnels d'actuaires-conseils, pourrait vous être d'une utilité. À cet égard, dans notre mémoire, on a… puis je ne reviendrai pas là-dessus compte tenu du 10 minutes, mais on a présenté quand même diverses pistes de solution qu'on a mises en place au cours des 20 dernières années auprès de divers régimes.

D'entrée de jeu, il faut s'entendre sur le sujet de discussion. Je pense que c'est relativement clair pour tout le monde, mais il y a deux enjeux qui sont quand même très compatibles mais très différents aussi, c'est la pérennité et la survie des régimes à prestations déterminées, d'un côté, et, d'un autre côté, d'assurer que les Québécois bénéficient d'un bon système d'épargne-retraite. Donc, ce n'est pas inconciliable. C'est vrai que c'est interrelié, mais, pour nous, il s'agit quand même de deux chantiers un peu distincts. Alors, on répond d'avance à une question qui a été posée tout le long de la journée. On pense que, le rapport D'Amours, les recommandations ne sont pas un tout indissociable, on pense qu'il y a plusieurs chantiers de travail dans ce rapport-là. On aura l'occasion d'échanger avec vous là-dessus.

• (15 h 40) •

Un des chantiers, c'est la rente longévité. L'autre chantier, c'est la pérennité, et la viabilité, et la promotion — on l'oublie souvent, cet aspect — des régimes à prestations déterminées. Alors, il ne faut pas oublier aussi que, dans la problématique des régimes à prestations déterminées, on vit une problématique réelle et actuelle, alors que, la rente longévité, on parle d'un régime qui va avoir son plein effet au cours des 40 prochaines années. Donc, déjà là, on pense que ça milite en faveur d'avoir des chantiers différents.

Le grand constat auquel on adhère totalement, évidemment, du rapport D'Amours — puis là je pense qu'on parle des 115 premières pages — c'est l'importance des régimes à prestations déterminées, la force de ces régimes-là, leur importance comme outil économique. On n'en parle pas souvent, mais c'est des caisses de retraite qui ont des visées à long terme. C'est très important pour faire certains types de placement, aussi la sécurité financière, la planification, la gestion de la main-d'oeuvre, la rétention de la main-d'oeuvre et l'attraction de la main-d'oeuvre. Donc, ce sont des régimes qui sont très, très efficaces. Une longue histoire courte : ils permettent de mutualiser les risques de survie et de rendement entre tous les membres.

On dit souvent qu'un régime à prestations déterminées, comparativement à un REER ou à un régime d'accumulation, va nous permettre, en bout de piste, de payer jusqu'à deux fois plus de rentes à la retraite. Bon, il y a beaucoup de raisons… ça, mais une question de frais, de mutualisation et de choses comme ça. Juste pour dire, mais, pour l'instant, je pense que tout le monde s'entend à ce niveau-là. Donc, le défi, c'est d'assurer la survie et mettre en place un cadre législatif qui permet de les développer.

Un bref retour sur notre portrait de départ. En fait, si on veut trouver des solutions, il faut un petit peu comprendre où on en est puis qu'est-ce qui nous a amenés là. Alors, l'état de nos régimes actuellement, bien, il faut revenir un peu aussi là-dessus, on a deux bases de calcul présentement, nous, ce qu'on appelle les bases de financement. Il y a une base de capitalisation ou de continuité, donc on s'assure qu'on mette assez d'argent dans une caisse de retraite pour éventuellement payer les droits des travailleurs et travailleuses et les rentes de retraités. Et il y a aussi un test de contrainte qui a été introduit en 1990, qui est le test de solvabilité. La solvabilité, c'est un test théorique de terminaison, donc ça vise un objectif tout à fait différent. Ça veut dire : Si on ferme, on ferme la shop, il manque de l'argent, est-ce qu'on coupe les rentes si l'employeur n'est pas solvable ou en cas de faillite? On sait que, depuis une dizaine d'années, on a peut-être eu une vingtaine d'employeurs qui ont été dans cette situation-là. Mais le test de solvabilité vise à sécuriser cet aspect-là, donc terminaison, hypothèque.

Les méthodes, les hypothèses actuarielles qu'on prend présentement sont totalement différentes d'une base à l'autre, et j'irais plus loin, c'est que les bénéfices qu'on évalue ne sont pas du tout les mêmes. Quand on termine un régime, souvent les retraites anticipées ou les subsides pour combler la Régie des rentes, des choses de même, ne sont pas payables aux membres. Donc, on n'évalue pas les bénéfices puis on n'évalue pas sur les mêmes bases. Ça fait que, pour nous, c'est deux sujets, ça adresse totalement deux objectifs.

Donc, pour compliquer un peu le dossier, maintenant, quand on arrive au niveau des régimes assujettis, bien, là, la Régie des rentes ou la Loi sur les régimes complémentaires exige qu'on prenne ces deux bases-là. Dans le secteur privé, les régimes assujettis, c'est correct, le risque de terminaison est là. Et notre point de départ, c'est que, pour les municipalités, entre autres, et universités, on n'utilise que la base de continuité. Pourquoi? C'est parce qu'une municipalité ou une université, il y a une pérennité, il y a une survie. Et c'est un peu la même logique un peu pourquoi, par exemple, le RREGOP, les gens de la CARRA sont venus devant vous et vous ont dit : Nous, on ne fait pas ça, la solvabilité, on ne termine pas le régime, on a une vision à long terme. Donc, c'est un peu le même rationnel.

Maintenant, on part d'où, on en est rendus où? On a souvent parlé d'un chiffre de 41 milliards, selon les chiffres de… au 31 décembre 2012. Simplement pour vous illustrer un peu comment les chiffres peuvent bouger, si on regarde les régimes assujettis à la solvabilité, le déficit réel est de 27 milliards, selon les chiffres de la Régie des rentes; le déficit des municipalités et universités est de 5 milliards. Donc, on ne parle pas d'un déficit de 41 milliards en termes de problématique à financer, on parle de 32. C'est énorme, on en convient. Mais juste pour vous dire qu'en une ligne on a un écart de 9 milliards… on peut avoir un écart de 9 milliards dans nos chiffres. Donc, pourquoi les universités ne sont pas assujetties? J'en ai expliqué un peu. Il y a le pacte fiscal, on pourrait revenir là-dessus. Mais il faut aussi que vous compreniez que, dans la loi, présentement, il y a des règles particulières qui s'appliquent aux municipalités, notamment l'obligation de faire des provisions pour écarts défavorables sur le bilan de continuité, ce qui est différent dans un cas de solvabilité.

Donc, l'origine de nos problèmes, on pourrait en parler longtemps, mais il faut essayer de comprendre ce qui est de nature structurelle ou conjoncturelle. Mais on avait un cadre législatif qui ne nous aidait pas du tout. On peut penser, si on veut mettre la faute sur quelqu'un, on pourrait parler de la loi de l'impôt, avec le 110 % maximum. Ça a été corrigé, la Régie des rentes vous l'a dit, c'est rendu à 125 %. Mais, moi, avant de parler de pratiques passées ou de comportements historiques, il faut comprendre que cette pratique-là ou ce comportement a été guidé par un encadrement qui était peu ou pas favorable, un encadrement évidemment de conflit. Vous vous souvenez sans doute du moratoire sur les surplus, la loi n° 195, et toutes ces lois-là, et les débats, et les partages de congés de cotisation, les poursuites, la Singer, la Simmons. En fait, on pourrait retourner un peu dans le temps.

Donc, déjà énormément de mesures ont été prises par le législateur. Donc, il faut regarder ce qui est déjà en place, comment on peut concilier les recommandations de D'Amours avec ce qui a déjà été mis de l'avant. On a des provisions pour écarts défavorables qui sont arrivées depuis 2010. L'impôt nous permet 125 % de marge. La Régie des rentes a même changé un petit peu son rôle, dans le sens qu'elle encourage et elle incite très, très, très fortement les comités de retraite à mettre des marges pour écarts défavorables dans les hypothèses actuarielles. Elle statue sur le taux maximum actuariel qu'on peut utiliser. Vous avez vu la CARRA avec un 7,5 % ultime d'intérêt? Bien, dans les régimes privés, c'est 6 % maximum par année qu'on a le droit de prendre, donc c'est 6 % ou moins. Donc, on a déjà un certain encadrement qui nous permet de développer des marges qui a été mis en place. Donc, il faut en tenir compte, de tout ça, puis je pense qu'il faut essayer de mettre tout ça ensemble.

Donc, nos constats, en fait, si on dit qu'est-ce qui a mal été, le constat un, c'est au niveau de la gestion des risques et de l'absence de politique de financement, de politique sur les prestations et de mesures de gestion de risques, que ça soit en appariement actif-passif, combiné au cadre légal, ça a été une grosse, grosse source de problèmes.

Je rajouterais un point, c'est que, dans le temps, l'article 125 de la loi faisait en sorte que la régie ne surveille les évaluations actuarielles qu'à la capitalisation des bénéfices qui sont inscrits au texte du régime. Donc, quand on a des engagements dans des actes accessoires, bien, on s'est ramassés, dans plusieurs dossiers, dans la situation où l'argent ne rentrait pas dans les caisses de retraite compte tenu que le pouvoir de la régie se limitait à superviser le financement de ce qui était écrit dans le texte du régime, malgré qu'on pouvait avoir des contrats ou des ententes opérationnelles de 15 ans qui garantissaient des bénéfices. Donc, comme le financement n'est… Donc, je pense qu'il y a aussi un peu de travail à faire à ce niveau-là pour s'assurer que, quand on a des objectifs retraite, ceux-ci soient adéquatement financés. Sinon, on se ramasse dans des problèmes.

Donc, au niveau des bases de financement, le grand problème qu'on a vus, c'est la base de solvabilité. Tout le monde s'entend pour dire : C'est trop volatile. Tous les autres bureaux avant ça vous ont dit... Contrairement à la fusionner à l'autre base — parce que cette base-là vise à protéger les travailleurs, les retraités en cas de terminaison réelle de régime, ça, ça arrive dans la vraie vie — donc, nous, notre position, c'est de dire : Non, on devrait garder les deux bases, mais enlevons les irritants de la base de solvabilité, trouvons une façon d'enlever cette volatilité-là extrême et ce fardeau-là, en termes de cotisations, sur les employeurs.

Bon, je vais sauter un peu de points. Mais vous avez calculé qu'au 31 juillet effectivement le degré de solvabilité était rendu à 85 %. Selon nos calculs à nous. Donc, par rapport au 27 milliards de tantôt, c'est comme un 10 milliards qui vient de disparaître. On ne vous dit pas ça pour vous dire qu'il ne faut rien faire, il faut se complaire, c'est juste pour illustrer la volatilité, c'est simplement dans ce but-là, nos commentaires, dans ce sens-là, qu'est-ce qu'on doit faire.

Alors, si on passe rapidement aux remèdes... si on passe rapidement aux remèdes, au niveau des recommandations 3 et 4, la base de financement, nous, on est, au contraire, totalement… on considère que le rapport D'Amours est à contre-courant, de vouloir fusionner les bases de financement de tous les régimes. Ne serait-ce que de penser au régime de retraite à financement salarial, qui est une innovation québécoise très intéressante qui a vu le jour dans quelques dossiers présentement, c'est une base qui doit être là. On sait que les régimes à prestations cibles s'en viennent; qu'on soit pour, qu'on soit contre, ça s'en vient. Et est-ce que c'est logique d'avoir la même base de financement? On ne le pense pas non plus. On est à l'ère des régimes à prestations à deux volets, vous en avez parlé un peu tantôt. Donc, est-ce que le risque des municipalités est le même que du secteur privé par rapport à une terminaison réelle? On ne le pense pas non plus. Donc, dans ce sens-là, on pense que, de fusionner les bases… deux bases qui servent à deux objectifs très distincts et très différents, ça serait faire fausse route.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : …vous pourrez continuer lors de la période d'échange? Parce que votre 10 minutes est pas mal passé.

M. Bergeron (Pierre) : Ah! Bien, O.K. Si vous me donniez juste un 30 secondes?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : D'accord.

M. Bergeron (Pierre) : Je fais une petite conclusion.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Oui, allez-y.

M. Bergeron (Pierre) : Des fois, je pars comme ça. Alors, on va en parler, mais, dans les adaptations qu'on suggère, c'est, par exemple, les fonds de sécurité de retraite ou un niveau cible de solvabilité mais dans le cadre d'une protection accrue des droits des travailleurs, élargissement des pouvoirs de la régie. Au niveau de la restructuration des régimes, on en reparlera. Puis, au niveau des gestions de risques proposées, bien, vous avez compris que, suite à notre lecture du passé, on est totalement pour toutes les mesures de mettre en place des politiques de financement, de prestations et ce genre de choses là. Et la rente longévité, bien, on verra si on en parle. Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et je passe la parole maintenant du côté de… partie gouvernementale. Mme la ministre.

• (15 h 50) •

Mme Maltais : Bonjour. Bonjour, M. Bergeron. Mme Jutras, Me Massicotte, bonjour. C'est vraiment… Je vous remercie d'avoir accepté de venir à cette commission parlementaire nous présenter votre vision, premièrement.

Tout à l'heure, on voyait Towers Watson, qui a beaucoup, beaucoup d'entreprises privées et quelques publiques auprès d'eux, et ils ont, entre autres, la gestion de régimes à cotisations déterminées. Nous allons en parler. Vous, quel est un peu le type de gens avec qui vous travaillez? Vous êtes assez… un actuaire qui est plus présent, je crois, du côté des associations syndicales, du côté des…

M. Bergeron (Pierre) : En fait, on a… puis je laisserais ma collègue compléter, mais, au niveau… On travaille beaucoup avec, d'une part, les comités de retraite ou de fiduciaires, donc on travaille pour une cinquantaine de régimes, pour des actifs de l'ordre de 15 milliards de dollars. Dans ça, il y a plusieurs régimes multiemployeurs, il y a des régimes à prestations cibles aussi, il y a deux régimes à financement salarial, deux des trois au Québec, nous en sommes les actuaires, on a participé à leur mise en place. Mais, au-delà de ça, on a énormément de syndicats et d'associations qu'on conseille, on a certains employeurs aussi, mais on a je dirais qu'au niveau du Québec sûrement une centaine de syndicats ou associations locales, évidemment, pour les aider dans la conception, la détermination des objectifs… et politiques de prestations, des choses comme ça.

Mme Maltais : Merci. Vous avez répondu à ce qui est un peu ma question préalable. C'est-à-dire que vous m'avez dit déjà : La question va venir. Je vous dis : Nous, on pense que la… il est possible de segmenter le rapport D'Amours, en tout cas, que ce sont plusieurs questions différentes. Est-ce que vous voulez élaborer là-dessus, s'il vous plaît, sur le fait que les experts du comité D'Amours ont demandé que ce soit considéré comme un tout? Pour empêcher justement d'avoir une trop grande pression sur la compétitivité des entreprises, ils disent : Pour sauver les prestations déterminées, enlevons-leur de la pression en créant la rente longévité. Donc, en prenant… en partageant les gens après l'âge de 75 ans, en les mettant sur une espèce de régime public, c'était dans l'intérêt de sauver les régimes à prestations déterminées. Vous ne semblez pas chaud envers la rente longévité, vous en parlez comme étant un régime à prestations cibles ou si vous…

M. Bergeron (Pierre) : Bien, en fait, la rente longévité, on l'a définie dans notre mémoire, effectivement, comme un régime à prestations cibles capitalisées. Quand on dit qu'on n'est pas chauds, en fait, on préfère l'option, pour diverses raisons, de bonifier le Régime de rentes du Québec. Les irritants pour ne pas bonifier le Régime de rentes du Québec cités par le comité D'Amours, c'est des irritants qui peuvent déjà être adressés de par le Régime de rentes. De dire que la rente doit être capitalisée, oui, on peut capitaliser un volet RRQ deux, par exemple. On peut, dans le RRQ un, RRQ deux, empêcher le transfert et l'iniquité par rapport aux positions déficitaires, des choses de même. Donc, quand on regarde les cinq ou six éléments que M. Godbout vous a mentionnés, on pense qu'on peut les adresser directement dans le cadre d'un RRQ deux.

Mais la rente longévité, pour citer M. Jean, le directeur général de la régie, je pense qu'il a dit que c'était un minimum. Oui, c'est louable, mais c'est un minimum. Alors, c'est sûr qu'évidemment on comprend qu'il va y avoir des contraintes par rapport aux capacités de payer et, à tout ça, des contraintes économiques qui vont découler de certaines études. Mais, si on parle juste en termes de retraites, et en termes d'objectif retraite, et de ça, c'est un minimum. C'est un pas dans la bonne direction, c'est ce qu'on dit dans notre mémoire, on dit : Un pas dans la bonne direction. Par contre, c'est un pas minimum.

Et on préfère l'option RRQ. Si ce n'est pas l'option RRQ, on suggère quelques bonifications à la rente longévité, dans le sens qu'on ne puisse... On vous propose de ne pas réduire les droits accumulés. Parce qu'on propose de tout coordonner ça, tout mettre ça ensemble et de permettre à tout le monde de tout planifier facilement, mais, dans la mesure où on ne peut pas dire au travailleur avec combien d'argent il va partir parce que les rentes pourraient être coupées, on pense que la rente de base, pour ce qui est accumulé, ne devrait pas pouvoir être réduite de quelque façon que ce soit. Et ce n'est pas tellement plus risqué parce que, de toute façon, tout l'argent mis de côté pour l'indexation est déjà conditionnel dans le cadre des recommandations du rapport D'Amours.

Mme Maltais : Oui, c'est quand même... c'est un régime à capitalisation, là, donc normalement l'argent est là. Mais vous gérez déjà des régimes à prestations cibles, d'après ce que vous avez dit, donc vous êtes habitués à ce type de régime. Il me semble que vous semblez assez critiques, ça me paraît contradictoire.

M. Bergeron (Pierre) : Non, comme on vous dit... C'est parce que c'est une question de planification de retraite et d'un régime public, qu'on va dire, entre autres... Je vais vous donner un exemple. On dit : On va coordonner ça avec nos régimes privés. Mais moi, si aujourd'hui on prend des décisions, on a des visions de 10 ans, 15 ans, 20 ans, quand on conçoit un régime de retraite, en disant : Bien, là, sur un plan économique de régime public, je pense que mon participant va avoir 20 % de son salaire d'une rente longévité dans 40 ans, et là on conçoit l'objectif retraite avec l'employeur privé et le syndicat privé, et je me ramasse, au bout de 30 ans, que la rente n'est plus de 0,5 %, elle est de 0,3 % pour des considérations plus macroéconomiques et globales, c'est un tout petit peu difficile à arrimer, là.

Au niveau d'avoir des objectifs ou des réserves, on était totalement pour. Par exemple, on parlait des régimes de retraite à financement salarial dans lesquels on capitalise les réserves d'indexation conditionnelles après coup. M. Gautrin parlait du modèle... du MAMROT, par exemple, on a participé au comité des travaux du MAMROT, dans lequel on a été actifs et sur lequel on a parrainé la mise en place justement de régimes à deux volets, avec des conditions... et la gestion de risque.

Mais c'est juste une question, aussi peut-être… Si on a deux choix... Il y a aussi le fait que la rente longévité prise toute seule comme ça... Tout le monde nous a parlé de compétitivité ou qu'est-ce qui va arriver au niveau du Régime de pensions du Canada. Il faut convaincre l'impôt aussi que ça ne rentre pas dans nos facteurs d'équivalence. Est-ce qu'on fait cavalier seul là-dedans ou on ne le fait pas?

Je pense qu'on vise tous à peu près la même chose. Je pense que la rente longévité est un pas dans la bonne direction, mais, s'il y a quelque chose qui se passe au niveau… peut-être que c'est mieux de voir s'il y a quelque chose qui se passe au niveau du Régime de rentes du Québec, en fait, comme ça avait été annoncé dans le budget. S'il ne se passe rien là, je pense qu'il… ce n'est pas mauvais, mais je pense que… On suggère, entre autres, de tenir compte des périodes d'obligations familiales, que la RRQ reconnaît mais que la rente longévité ne reconnaîtrait pas, et de permettre une meilleure planification à tout le moins pour les droits accumulés.

Mme Maltais : Vous savez que, bon, le député d'Outremont, tout à l'heure, a rappelé qu'à un moment donné le Québec n'était pas d'accord avec le rehaussement du RPC, du Régime de pensions du Canada. Nous, quand on est arrivés au gouvernement, quand on est allés à une rencontre des ministres des Finances, on a ouvert sur l'étude du rehaussement du Régime de pensions du Canada, donc, et des régimes publics. Donc, on a quand même essayé de voir, là, quelle serait la meilleure manière, étant donné qu'on savait que le rapport D'Amours s'en venait, quelle serait... On a ouvert toutes les portes pour essayer de voir quelle est la meilleure façon de sécuriser financièrement les personnes qui s'en vont à la retraite. Donc, on recherche actuellement vraiment la meilleure façon d'assurer la sécurité financière des gens, c'est l'esprit du rapport D'Amours. Mais l'esprit du rapport D'Amours aussi, c'était de sécuriser les régimes à prestations déterminées.

Vous semblez dire dans notre mémoire qu'il serait possible de véritablement simplement sécuriser le régime à prestations déterminées en revoyant les règles. J'aimerais ça que vous nous expliquiez un peu ce qui pourrait être fait qui pourrait sécuriser les régimes à prestations déterminées, car, comme vous le dites vous-mêmes, il y a de plus en plus de gens qui commencent à s'intéresser aux régimes à prestations cibles ou à d'autres régimes, il ne faut pas laisser fuir les gens vers des régimes qui sécurisent moins que le régime à prestations déterminées.

M. Bergeron (Pierre) : Oui. Bien, en fait, il y a des exercices qui relèvent des parties puis il y a des choses que la législation ou la réglementation devrait encourager ou stipuler. Donc, dans des choses qui devraient être prévues, je pense que les comités ou les parties devraient se doter de politiques de prestations, comme c'est recommandé dans le rapport D'Amours. Ça, c'est un. Politiques de prestations, c'est d'avoir des objectifs retraite clairs et de savoir où on s'en va finalement par rapport à quand on fait un régime de retraite. Donc, quand on fait dans nos calculs dans ce genre de dossiers là, on met ça en place depuis 20 ans, quand on peut… on tient compte des divers risques qu'il y a derrière et on tient compte de qu'est-ce qu'on peut espérer avoir comme rente à la retraite, mais pas… moins d'y aller, par exemple : On a de l'argent, on indexe, on n'a pas d'argent, on… C'est vraiment de dire c'est quoi, notre but, c'est quoi, notre objectif retraite.

Donc, ça a été une lacune qu'on a observée, que les gens ne définissaient pas clairement leurs objectifs ou les changeaient rapidement en cours de route. D'avoir des politiques de financement, qui paie quoi, comment, à quel rythme, c'est très important. On a un petit dossier qui, lui, il n'est pas solvable, mais — c'est un groupe de 26, 27 personnes — par contre, avec sa politique de financement, il rentre très, très bien, parce qu'il y a cinq, six ans… il y a 10 ans, en fait, il y a eu une politique de financement qui permet de rentrer dans les budgets. Il y a des...

Évidemment, il y a les bases de calcul à appliquer. Si les valeurs de transfert… La recommandation… à cette recommandation-là, nous sommes favorables, donc, de travailler avec l'Institut canadien des actuaires et de revoir les valeurs de transfert, en autant que ça soit… les travailleurs du Québec ne soient pas désavantagés par rapport aux autres. Donc, ça va nous permettre de voir un peu où on va. D'avoir 10 ans pour financer les déficits consolidés sur une base permanente plutôt que cinq ans, ça nous donne aussi un peu d'air à terme. C'est sûr qu'on ne peut pas imprimer un chèque à court terme, mais les parties vont devoir également avoir à travailler sur la conception de leurs régimes et revoir certaines dispositions.

Donc, c'est à peu près le genre d'exercice qui se fait présentement quand on revoit un dossier. On commence par travailler sur l'objectif retraite, on essaie d'éliminer d'un texte de régime ce qui est source de surplus… Mais c'est vraiment du local, ce n'est pas une législation qui peut venir nous aider là-dedans, savoir si ma pénalité en cas de retraite anticipée est assez élevée ou pas assez élevée, si mon… cotise, ou si… tout ça. Donc, on essaie d'arrimer. Donc, on travaille de même sur le terrain avec les clients.

Mais le contexte qui nous manque autour, peut-être, c'est de sensibiliser les gens aux objectifs retraite, politiques de financement, d'avoir un cadre clair de financement, sur quoi on se base. On va vous dire la même chose que les autres, je pense. Dans les priorités, c'est sûrement la première priorité, là, de définir... On a beau parler de restructurer, mais, si on ne sait pas sur quelle base on calcule, nous autres, on est un peu bloqués, là, dans la vraie vie, là.

Mme Maltais : Merci beaucoup. J'ai des collègues qui veulent poser des questions, je vais leur laisser la parole.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Chapadeau : Vous avez mentionné le fait d'élargir les pouvoirs de la Régie des rentes du Québec. Quels seraient les pouvoirs que vous souhaiteriez qui soient élargis?

• (16 heures) •

M. Bergeron (Pierre) : Bien, je vais vous donner un exemple concret, c'est : dans le temps, on ne lisait pas la loi, l'article 125 d'aujourd'hui, là, mais, dans le temps… En fait, la régie, quand elle regarde un rapport actuariel et la capitalisation d'un régime, elle s'assure que, tout ce qui est écrit dans le texte du régime, l'argent rentre dans une caisse. Mais on peut avoir, puis c'est quand même assez fréquent dans un environnement syndiqué, des conventions collectives, des ententes opérationnelles ou une stabilité. On a vu ça chez Alcan, une entente de 15 ans de stabilité opérationnelle. Et là, dans ça, c'est écrit que telle bonification… et c'est des bénéfices qui sont garantis pendant une longue période de temps. Et, compte tenu que c'est juste écrit dans une convention collective, ce n'est pas reflété dans le régime, bien il n'y a aucune capitalisation à la base de ces bénéfices-là. Ce qui arrive, c'est qu'au fur et à mesure que ça arrive, à chaque année, on se retourne de bord, on dit : Bien là, l'indexer aux retraités, O.K., on le fait. Donc, ça ne me permet pas de capitaliser à l'avance. On indexe puis on paie après coup ou en même temps, là. Vous comprenez?

Donc, le fait que la régie ne se limite qu'aux textes de régimes, c'est un peu hérétique, là, selon nous, là. S'il y a d'autres contrats… Un contrat, c'est un contrat global, un texte de régime, c'est un contrat, c'est reconnu par la cour. Une convention, c'est un contrat. Donc, ça assurerait un meilleur arrimage entre les promesses et les ententes négociées.

M. Chapadeau : Merci. À la page 24 de votre mémoire, vous mentionnez que «de nouveaux outils très efficaces sont maintenant disponibles pour mettre en place des programmes de rétention de la main-d'œuvre». Donc, avez-vous des exemples de ces outils-là qui seraient… qui permettraient aux participants de reporter sur une base volontaire, là, leur retraite?

M. Bergeron (Pierre) : Bien, en fait, on a travaillé dans une dizaine de dossiers sur des programmes de rétention de main-d'œuvre. Là, il y en a cinq, je pense, qui sont en application présentement. Donc, en fait, ce qui arrive, c'est qu'au niveau du régime de retraite maintenant on a beaucoup, beaucoup de flexibilité. Donc, on peut reconnaître le plein salaire du membre même s'il ne travaille pas à plein temps, on peut lui créditer une pleine année de participation aussi et on peut même verser une partie de sa rente, en plus, pour compenser une perte de salaire.

Donc, par exemple, dans un environnement ou sur un travail de… Prenons un horaire de quatre jours où la personne, pour garder l'expertise, former les temporaires qui veulent rentrer, avoir un départ à la retraite plus graduel, bien, le poste peut être partagé… mais ça tombe dans les ressources humaines, mais le poste peut être partagé. La personne, elle, qui reste là, elle travaille moins, elle a une petite compensation du régime de rentes qui lui permet, dans le fond, de maintenir son revenu, pas totalement mais à un niveau acceptable, mais, en plus, elle accumule un an à chaque fois, et ces années-là de report qui se rajoutent sur la pension ont un effet de levier assez intéressant.

C'est le même concept que de dire : On a un gros REER, on va attendre deux ans de temps qu'il fructifie, on le prend après. Et ça, on a au moins cinq expériences, et ça fonctionne quand… C'est quand même trop récent pour vous dire : Écoutez, tout le monde en profite. Ça dépend des postes, ça dépend des types de travail, mais c'est intéressant et c'est puissant. Là-dessus, ce qu'on recommande, c'est qu'il y ait une meilleure éducation de la part, entre autres, de la régie sur les outils disponibles pour que les gens… On arrive là, on parle de ça puis c'est comme si c'était une nouveauté à chaque fois, là, alors qu'on devrait être actif dans ce sujet-là.

M. Chapadeau : Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Dubuc.

M. Claveau : Dans votre mise en contexte, vous parlez que vous avez 15 régimes à prestations déterminées où les risques sont assumés par les participants. Pouvez-vous nous parler un petit peu du mécanisme dans lequel…

Mme Jutras (Nathalie) : En fait…

M. Claveau : …fonctionnent ces régimes?

Mme Jutras (Nathalie) : Pardon. Donc, oui, effectivement, on a une quinzaine de régimes de retraite où le risque est en partie pris par les participants. Pierre tantôt parlait des régimes à financement salarial, c'en est deux d'entre eux. Mais aussi dans la clientèle de PBI, PBI a un bureau à Vancouver et un bureau à Montréal, on a de nombreux régimes interentreprises. Et je ne sais pas si la plupart d'entre vous le savez, mais, à l'extérieur du Québec, il est quand même possible, dans ce type de régimes là, d'avoir des genres de prestations cibles, donc on peut réduire les prestations acquises.

Par contre, dans les régimes avec lesquels on travaille, cette situation-là est arrivée très peu fréquemment, de réduire, parce qu'ils ont mis en place des concepts qui sont particulièrement intéressants. Donc, un des éléments qui a été mis en place, c'est donc d'avoir des comités paritaires. Donc, ces comités de fiducie là ont autant des représentants des participants que des employeurs. Et il y a beaucoup de travail qui est effectué au niveau de la politique de prestation, la politique de financement et la politique de capitalisation aussi.

Parmi les exercices qui sont faits, ces régimes-là ont mis en place des provisions pour écarts défavorables avant même que la loi le prévoie au Québec. Moi, j'ai… des régimes qui sont québécois, qui sont de cette nature-là. Et, dans le milieu des années 90, ils étaient vus un peu comme des extraterrestres parce qu'ils n'utilisaient pas leurs surplus et ils n'ont pas fait d'amélioration, ils n'ont pas pris de congé de cotisation, ils les ont mis de côté. Et on se retrouve maintenant, 20 ans plus tard, avec des régimes qui sont solvables. Moi, j'ai des régimes qui sont en excédents d'actif, donc on fait le calcul de la PED pour voir quelle portion pourrait être utilisée.

Et ça, c'est fait… Il y a beaucoup de mécanismes qui doivent être mis en place pour que ça fonctionne bien. Le premier mécanisme qui doit être mis en place, c'est vraiment de faire un exercice, par exemple, au niveau de la démographie, s'assurer que, si on fait… que le vieillissement de la population va faire en sorte qu'on met de l'argent de côté. Puis c'est tout un exercice de communication, vous en conviendrez, avec les membres, les participants puis le comité de retraite en tant que tel, de montrer un très gros surplus, par exemple, de 120 % sur base de capitalisation puis de dire : Non, non, dans 20 ans, tu n'en auras pas assez si on fait vieillir le groupe.

Il y a des exercices comme ça qui ont été faits. Et on a aussi fait des scénarios de stress à la caisse de retraite, dont on a analysé des éléments de signes noirs, là, donc les situations qui sont supposées ne jamais arriver puis qui sont arrivées à deux, trois reprises au cours des 15 dernières années. Donc, par exemple, la combinaison d'une diminution importante du taux d'intérêt en même temps qu'un crash boursier, ça, ce n'est pas supposé arriver, mais on a vu que… l'expérience nous a démontré que ça arrive. Donc, on fait des scénarios de cette nature-là, puis on regarde comment le régime réagit à ces situations-là, et on essaie d'établir des cotisations, des prestations surtout qui vont passer le temps.

M. Claveau : Alors, c'est une dernière…

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, c'est terminé.

M. Claveau : Ah! C'était terminé?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : C'est terminé pour le moment. Alors, votre temps alloué était déjà terminé. Alors, je passe la parole maintenant à M. le député de Verdun.

M. Gautrin : Je vous remercie, M. le Président. Je vous remercie aussi pour votre présentation. J'aurais un certain nombre de questions. Il y en a une première sur la rente de longévité que vous avez abordée. Vous êtes, en principe, d'accord avec ce qui se passe dans les autres provinces, de favoriser plutôt une augmentation du régime du RCR… du Régime de rente du Québec, du RRQ, je veux dire, plutôt que d'aller vers une rente de longévité, c'est-à-dire de porter la couverture de 25 % à 50 % tel que réfléchissent actuellement certaines autres provinces. Est-ce que c'est bien ce que je comprends?

M. Bergeron (Pierre) : Oui. C'est une question aussi, comme je disais tantôt, là, de compétitivité, l'impact sur le supplément de revenu garanti, en tout cas, tout ce qu'on mentionne dans le mémoire… Oui.

M. Gautrin : Et vous voulez aussi, à ce moment-là, hausser le salaire admissible, à ce moment-là, non plus sur la base du MGA, mais sur la base du montant de la CSST. Est-ce que je comprends bien votre position?

M. Bergeron (Pierre) : Oui. Oui, puis vous voyez l'impact sur le graphique. On vous illustre que ça enlève éventuellement beaucoup de pression sur le secteur privé.

M. Gautrin : Et il était important, vous l'avez… de rappeler, parce que vous le signalez dans votre mémoire, que, grosso modo, sur une longue période, c'est-à-dire de 12 ans, la provision médiane… — est disparue, là — la provision médiane des caisses de retraite était à 5,1 %, etc.

M. Bergeron (Pierre) : Rendement?

M. Gautrin : Le taux de rendement.

M. Bergeron (Pierre) : Bien, dans les années 2000, le rendement des caisses de retraite a été à 5,1 % effectivement.

M. Gautrin : 5,1 % essentiellement…

M. Bergeron (Pierre) : Depuis 20 ans, les rendements médians étaient à 8 %.

M. Gautrin : Par contre… Là, vous dites : Si vous allez dans ce qu'on appelle une rente de longévité, vous dites qu'il y aurait des principes qu'il faudrait reconnaître. Et vous avez reconnu au départ que la rente de longévité était un mécanisme de prestations, une rente type prestations cibles. On se comprend là-dessus. Mais vous dites : Il ne faudrait jamais que la rente de longévité baisse parce que, vous dites, la provision éventuelle pour l'indexation serait suffisante pour tenir compte des fluctuations de provisionnement de cette rente. Est-ce que je comprends votre position?

M. Bergeron (Pierre) : C'est ça. Donc, on pourrait agir sur le service futur ou utiliser la provision pour indexation. Donc, les rentes cumulées ne devraient logiquement pas baisser. Un peu le concept d'un RRFS, par exemple.

M. Gautrin : Je comprends. Je comprends. Alors, et là vous dites : Il ne faudrait pas forcer l'articulation, mais laisser l'articulation au choix des parties s'ils veulent articuler lorsqu'on est dans une situation de régime à prestations garanties. C'est à peu près ce que je comprends chez vous.

M. Bergeron (Pierre) : Vous comprenez très bien.

M. Gautrin : Parfait. Ça, ça va bien sur tout ce qui touche cet élément-là. Vous n'êtes pas d'accord du tout de la manière dont on… sur ce qu'on appelle la manière de provisionner les régimes avec la capitalisation améliorée. Vous avez des objections, vous voulez maintenir les deux types de tests, à la fois le test de capitalisation et le test de solvabilité.

M. Bergeron (Pierre) : Oui, pour tenir compte du risque réel de terminaison.

M. Gautrin : Pour tenir compte du risque réel, à ce moment-là, pour…

M. Bergeron (Pierre) : …certains mécanismes pour pallier à la volatilité de ça.

• (16 h 10) •

M. Gautrin : Je comprends ça aussi. Il y avait... O.K. Alors, je reviens sur le… J'ai une chose que je n'ai pas comprise chez vous. Vous dites : On veut maintenir la provision pour écarts défavorables à 7 %, alors que la provision pour écarts défavorables est proposée à 15 % dans le rapport D'Amours.

M. Bergeron (Pierre) : En fait, une provision… puis je passerai la parole à ma collègue, mais une provision pour écarts défavorables de 7 % nous donne une probabilité d'à peu près 80 % qu'un régime qui l'a constituée soit encore solvable au bout de trois ans. Si on avait eu une provision de cet égard-là avant la crise de 2008, on voit qu'en date d'aujourd'hui on ne serait pas non plus si mal placés, alors que les valeurs de transfert n'ont même pas été revues encore, donc. Puis, combiné au fait qu'on limiterait l'utilisation des excédents d'actif à 20 %, etc., donc on pense que c'est suffisant.

M. Gautrin : Et, dans votre philosophie par rapport... et vous êtes assez semblables, même si une bonne partie de votre clientèle est issue du monde syndical, vous dites : Il faut une recherche d'une plus grande flexibilité dans la Loi sur les RCR, comme les gens qui représentaient les parties patronales jusqu'ici. Autrement dit, vous laissez plus de flexibilité à la table de négociation pour les régimes de pension. C'est votre approche là-dessus.

M. Bergeron (Pierre) : Oui. Au cours des années, on a eu à travailler dans des restructurations, puis, à un moment donné, ça devient un petit peu lourd de faire approuver nos projets de restructuration. Parce qu'on en a déjà fait, des restructurations, dans les 10 dernières années au Québec, et on pense qu'on devrait avoir un cadre plus flexible à cet égard-là, oui.

M. Gautrin : Je vais vous demander d'expliciter, parce qu'il y a une différence légère, mais il y en a quand même une, entre ce qu'on appelle les régimes à prestations cibles, qui ont été explicités par Aon ce matin si vous étiez présents, et les régimes... enfin ce qu'on appelle les régimes à financement salarial, il y a une similitude, mais il y a une différence, et l'utilité par rapport à la maturité du régime. Est-ce que je me trompe ou pas?

M. Bergeron (Pierre) : Bien, la différence majeure au niveau des RRFS, il faut comprendre que les régimes dont le financement est très bien encadré par la loi au Québec, on est obligé de provisionner des réserves avec de l'argent neuf, des provisions, des réserves pour indexation. Donc, on met de l'argent de côté, et ça nous fait des réserves de sécurité automatiquement, on n'a pas besoin d'autres genres de réserve. Ça fait des réserves importantes pour ça, mais des réserves dédiées. Donc, si ça va bien, personne n'est lésé, on va indexer nos retraités avec cet argent-là. Si ça va très mal, bien le risque est mieux partagé. Donc, il y a déjà des mécanismes d'encadrés dans la loi ou d'enchâssés dans la loi qui nous permettent d'assurer une saine capitalisation et d'assurer une équité intergénérationnelle. Donc, la...

M. Gautrin : Ça, c'est des régimes à financement salarial?

M. Bergeron (Pierre) : À financement salarial, c'est comme ça. Cibles, c'est la même chose, mais ce n'est pas encadré… ça n'existe pas au Québec, là, mais ce n'est pas encadré dans la loi. Il faut qu'on le fasse par des politiques... c'est fait par des politiques de prestations? Veux-tu élaborer?

Mme Jutras (Nathalie) : En fait, si on a un régime à prestations cibles, le 7 %... en partant, quand on met le régime en place, le risque est avec les participants, c'est clair. Et d'ailleurs c'est un enjeu, là. Quand on parle de régime à prestations cibles dans notre mémoire, on mentionne qu'il faut que... c'est sous certaines conditions bien précises. La communication, c'est un élément qui est clé pour les régimes à prestations cibles, il faut que les participants comprennent bien dans quoi ils s'embarquent.

Une fois que ça, c'est dit, une fois qu'on sait qu'il y a une possibilité de réduire les prestations, bien ce qu'il est important de considérer là-dedans, c'est que, le risque qu'on va décider de prendre dans le régime de retraite, est-ce qu'on a besoin vraiment d'aller à 15 % si, tout le monde, c'est clair en partant?

Nous, on croit que c'est aux parties de décider le niveau de risque qu'il devrait y avoir dans le régime de retraite, dépendamment de la politique de financement, la politique de placement puis la politique de prestation, et c'est aux parties à encadrer cette provision pour écarts défavorables là. Et, dans certains cas, comme je vous le mentionnais tantôt, la provision pour écarts défavorables qui a été utilisée par certains de nos clients, elle est au-delà du 7 %. Donc, ça va d'un côté comme de l'autre. Ça va vraiment dépendre. Par exemple, si on a un régime de retraite qui a décidé d'immuniser complètement son passif, bien est-ce qu'on a besoin d'avoir 7 %? Probablement pas, parce que là, les prestations sont bien protégées.

M. Gautrin : Et, en termes d'exemple — et je poserai la question dans à peu près 1 h 30 min, lorsque la SCFP viendra témoigner — il y a eu des ententes dans les municipalités du type que vous venez de décrire. Si je comprends bien — enfin, on leur posera la question — Saguenay a été dans ce sens-là, et certaines... dans certaines municipalités. Est-ce que je me trompe ou pas?

M. Bergeron (Pierre) : Non, vous ne vous trompez pas. En fait, même historiquement, je vous dirais même que, dès 2003, ce type de mécanisme là avait été mis dans certains régimes au niveau municipal. On l'avait mis en place dans cinq ou six régimes selon des modalités un peu différentes. Depuis ce temps-là, bon, il y a eu des changements, un nouveau cadre de financement, etc., ça a compliqué un peu les dossiers. Mais effectivement il y a une entente au niveau de Montréal et de Saguenay qui font un concept...

M. Gautrin : Quelque chose qui a fonctionné.

M. Bergeron (Pierre) : C'est quelque chose qui a fonctionné...

M. Gautrin : Qui fonctionne, excusez.

M. Bergeron (Pierre) : Bien, nous, ce qu'on avait mis en place en 2003, de 2003 à 2006, dans d'autres dossiers qui ressemblaient à ça a fonctionné aussi en termes de mesures d'atténuation de…

M. Gautrin : Je terminerai avec vous puis après je passerai la parole à mon collègue d'Outremont, qui a des questions à poser aussi. Si je vous posais la question : À l'heure actuelle, quelles sont les priorités… Il y a des choses qu'il faut évidemment arriver au niveau pancanadien ou au niveau de négociations. Mais, à l'heure actuelle, dans une loi à court terme, qu'est-ce que vous pensez qu'il faut inclure dans une loi à court terme actuellement?

M. Bergeron (Pierre) : En tout cas, on va vous dire un peu la même chose que les autres, de clarifier le cadre de financement applicable. On aura beau parler de restructuration, ou de ci, ou de ça, si on ne sait pas c'est quoi, les chiffres et comment on les calcule, on tourne en rond. Donc, de clarifier le cadre de financement, c'est majeur. Il y a d'autres… Tout le volet gestion de risque, aussi, je pense que ça peut s'adresser très rapidement. Pour le reste, vous avez raison, c'est une question d'arrimage et de vos volontés. On parlait valeurs de transfert, ça dépend de l'Institut canadien des actuaires. RPC, rente longévité, bien, ça dépend des discussions et où vous allez. Mais définitivement clarifier les règles de financement.

M. Gautrin : Mon collègue d'Outremont…

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Oui, merci, M. le Président. Bonjour, merci d'être ici et de votre mémoire. Sur la rente longévité, évidemment votre position de fond, ça reflète aussi vos clients et l'augmentation du Régime des rentes du Québec, et donc ce qu'il y a là-dedans. Mais vous proposez, à la page 12, de hausser le taux maximal de rentes de 25 % à 50 % et le salaire admissible en fonction de celui couvert par d'autres régimes comme celui de la CSST. Avez-vous estimé le coût annuel de votre proposition globalement dans l'économie sur le PIB? Combien de cotisations additionnelles ça représente?

M. Bergeron (Pierre) : Non. En fait, notre proposition est plutôt que le gouvernement ou que la Régie des rentes fasse les travaux requis pour analyser cette option-là avant de l'écarter et de ne pas l'envisager, là. En tout cas, on n'a pas fait de calculs à ces niveaux-là, c'est clair.

M. Bachand : Bien, je vous suggérerais d'en faire parce qu'à l'époque quand le SCFP… La première proposition… Elle a évolué et elle a été modifiée avec le temps, mais la première proposition du SCFP — j'avais eu des discussions intéressantes avec Michel Arsenault par la suite là-dessus, j'étais ministre des Finances — un calcul rapide du ministère des Finances, avec l'aide de la Régie des rentes, bien sûr, c'était de l'ordre de… Puis là j'y vais de mémoire, ça date d'il y a deux ans, c'était de l'ordre de 6 à 8 milliards, 9 milliards de dollars par année dans un contexte où l'économie du Québec, comme l'économie mondiale, n'allait pas très bien pour les finances des entreprises, des travailleurs, etc.

Ce n'est pas par caprice qu'on a écarté cette solution-là. Puis d'ailleurs, quand c'est des sommes aussi considérables, tu arrêtes d'en discuter, là, tu sais, parce que tu n'es plus à : Bon, on va le faire à 6 milliards plutôt que 8 milliards, ou à 5 plutôt que 6. Mais c'étaient des sommes considérables. Je sais que, depuis ce temps-là, la proposition a évolué, que les coûts sont moindres. Peut-être que vous pourrez… — je regarde en arrière de vous — que vous pourrez nous en parler, on va vous écouter avec plaisir cet après-midi.

La rente longévité — il y a quelqu'un qui l'a souligné, je n'avais pas vu ça à l'origine — a un avantage aussi — c'est un des collègues, mon collègue, ce matin, qui l'a souligné — c'est que c'est peut-être un incitatif à l'épargne parce que, comme à partir de 75 ans, tu vas avoir une rente étatique, entre guillemets, additionnelle, la complexité d'épargner — puis je ne sais pas jusqu'à quand je vais vivre, puis etc. — qui est très complexe pour le citoyen de prendre, là, au moins, tu peux avoir une cible précise : O.K., j'ai besoin d'un montant d'argent entre 65, 75 ans — les experts peuvent plus facilement le calculer — donc je dois économiser tant. Ce n'est plus mon facteur de risque, je vais vivre jusqu'à 82, ou 85, ou 90, etc. Et donc ce système à deux étages, Régie des rentes, 65 ans, rente longévité, 75 ans… Effectivement, un des grands problèmes du Québec, du Canada aussi, mais globalement, c'est que les gens n'épargnent pas assez d'eux-mêmes pour leur retraite. Alors, je ne sais pas si vous avez un commentaire sur ça. Je vois que votre collègue… Je pose la question à vous, mais je vois que votre collègue brûle de parler, oui.

Mme Jutras (Nathalie) : Oui, je brûle de parler. En fait, le seul danger… Il faut faire attention avec la rente longévité. Elle s'applique aux services futurs, donc, avant qu'elle soit pleinement déployée, ça va prendre beaucoup d'années. Mon inquiétude par rapport à ça, c'est que les gens aient l'impression, au bout de 15 ou 20 ans, que c'est suffisant et qu'ils dépensent leurs REER avant 75 ans. Et vous avez entendu certains de mes collègues ce matin mentionner le fait que les espérances de vie continuaient d'allonger. Alors, il y a un certain risque avec ça. Mais, une fois que c'est pleinement déployé, je suis d'accord avec vous.

M. Bachand : Et vous avez raison, et je sais qu'il y a… La plupart de vos collègues ont dit que la force et la prudence financières, c'est que ce régime-là soit capitalisé, et donc que moi, comme individu, je ne retienne… je ne bénéficie que ce dont… le nombre d'années pour lesquelles j'ai cotisé. La tentation, je pense que M. Castonguay va venir nous le dire, puis ça a été… et d'autres, c'est dire : Non, non, payez donc pour tout le monde. Mais ça, c'est un transfert générationnel important si on fait ça comme ça.

• (16 h 20) •

Mme Jutras (Nathalie) : Puis on ne fera pas ça. Donc, si on améliore la Régie des rentes du Québec, on veut vraiment aller avec quelque chose qui va être capitalisé. Donc, ça, c'est important, là : une amélioration au Régime de rentes du Québec, on y va avec quelque chose qui va être capitalisé, pas dans la structure actuelle, parce qu'il faut arrêter de transférer aux générations suivantes.

M. Bachand : O.K. Merci. Ça va.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et je cède la parole maintenant à M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard : Merci. Seulement une petite question. Votre recommandation 4, qui parle de la capitalisation améliorée, à la page 17, vous avancez l'idée d'adopter un fonds de garantie du Québec… de garantie au Québec. Je voudrais connaître le pourquoi ça, ça va, les modalités, qui met l'argent. On aimerait vous entendre là-dessus.

Mme Massicotte (Sonia) : Bien, à vrai dire, ce qu'on a regardé principalement, c'est de se questionner sur la possibilité de mettre en place un tel fonds de garantie. Ce que nous, on a remarqué de l'analyse, c'est qu'en 2005 il y a eu un document de questions-réponses qui a été publié par la Régie des rentes du Québec au sujet du document de consultation Vers un meilleur financement, puis ça avait été rejeté pour des raisons principalement que je vous dirais… — puis je ne veux pas rentrer trop dans le technique — pour des risques moraux parce qu'on disait que ça allait encourager, d'une certaine manière, à décourager le financement ou le meilleur… le financement adéquat, si on veut, du régime.

Par contre, par la suite, ce que nous, on a remarqué, c'est qu'en 2007 il y a eu un document de l'OCDE, puis, contrairement au fait de dire… Ils sont venus préciser certaines choses au niveau des fonds de garantie et ils sont même venus dire que ça pourrait être souhaitable dans certains cas dans la mesure où on respectait certains critères, puis ces critères-là étaient notamment la limitation au niveau de la couverture des prestations, que le participant partage juste une partie des risques, qu'il y ait des cotisations et des prélèvements qui devraient être axés sur les risques puis de mettre en place aussi des règles de financement précises et cohérentes pour que le fonds… pour le fonds de garantie, pour s'assurer aussi d'une gestion prudente des actifs et des passifs. Ça fait qu'ils mettaient quand même certains critères en place à cet égard-là. Ça fait que nous, ce qu'on recommande à cet égard-là, c'est peut-être de se requestionner sur l'opportunité d'avoir peut-être un fonds de garantie si on arrime ça avec des règles de financement particulières.

M. Picard : O.K. C'est beau. Il me reste du temps, oui?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Oui, oui. Vous avez encore deux minutes.

M. Picard : Oui? Au niveau de… si je comprends bien votre position sur la rente de longévité, vous nous dites : Bien, ça pourrait être un RRQ 2.0, mais il faut attendre de s'entendre avec le RPC. Donc, ça pourrait devenir un RPC-RRQ 2.0, c'est ça? Puis capitalisé pour s'assurer qu'on respecte les différentes générations, c'est bien ça?

M. Bergeron (Pierre) : C'est ça.

Mme Massicotte (Sonia) : C'est exact. On est même ouverts à regarder les prestations accessoires pour cette rente 2.0 là. Donc, est-ce que les subventions pour la retraite anticipée, est-ce qu'on les révise? Est-ce qu'on encourage une manière différente de verser cette rente-là? On est ouverts à ça, mais on regarde…

M. Picard : …vous seriez même ouverts à ce qu'on tienne compte des événements familiaux? Si j'ai…

Mme Jutras (Nathalie) : Bien, étant une dame…

M. Picard : Non, non, non, mais ce n'est pas… Je pose la… On est ici pour…

Mme Jutras (Nathalie) : Bien, je trouve que c'est un point qui est important à être encouragé. On doit tenir compte, je pense, des périodes d'obligations familiales. Ça se définit à différents niveaux. Ça va peut-être être appelé à évoluer au cours des prochaines années, qui sait? Les congés pour prendre soin des aînés, ça pourra peut-être être créé, on ne sait jamais. Moi, je pense que ces événements-là, on doit en tenir compte.

M. Picard : Sauf que, si je…

Mme Jutras (Nathalie) : C'est les femmes qui portent les enfants.

M. Picard : Mais, sans porter de jugement, là, si je comprends bien, vous voulez que ce soit distinct du RRQ, mais il y aurait beaucoup de similarités, là. C'est ça?

Mme Jutras (Nathalie) : Il y aurait beaucoup de points communs, effectivement.

M. Picard : De points communs? O.K. C'est beau. Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière. Merci beaucoup, Mme Jutras, Mme Massicotte et M. Bergeron, de votre apport à la commission.

Et je suspends les travaux quelques minutes pour permettre aux représentants de l'Institut canadien des actuaires de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 24)

(Reprise à 16  h 26)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux en recevant les représentants de l'Institut canadien des actuaires, à qui je souhaite la bienvenue. Et cette rencontre-ci et celle qui va suivre, c'est des rencontres d'une heure, alors ça fait un petit changement dans la répartition du temps.

D'abord, à nos intervenants, je vous dirais qu'on vous laisse une période de présentation d'au plus 14, 15 minutes — vous n'êtes pas obligés de vous rendre là, là, mais vous avez cette latitude-là; et parti gouvernemental, 20 min 30 s; l'opposition officielle, 19 minutes; et deuxième opposition, 5 min 30 s.

M. Gautrin : Parce qu'on fait une heure. Il y a des gens que...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Parce que c'est inscrit une heure à l'agenda, simplement. Alors, messieurs, vous avez…

Institut canadien des actuaires (ICA)

M. Simard (Michel C.) : Merci, M. le Président…

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : ...15 minutes pour vous présenter, et présenter votre organisme, et présenter votre mémoire.

M. Simard (Michel C.) : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis Michel Simard, le directeur général de l'Institut canadien des actuaires, mieux connu sous le nom de l'ICA, l'organisme national de la profession actuarielle au Canada. Regroupant plus de 4600 membres, l'ICA sert l'intérêt du public en veillant à ce que les services et les conseils actuariels fournis par la profession soient de la plus haute qualité.

J'ai à mes côtés M. Jacques Lafrance, qui est le président de l'institut, et M. Denis Latulippe, qui a fait partie du groupe de travail de l'ICA ayant analysé les recommandations du rapport du comité D'Amours. Jacques oeuvre principalement dans le domaine des régimes de retraite, et Denis, maintenant professeur et directeur de l'École d'actuariat de l'Université Laval, a passé la majeure partie de sa carrière dans le domaine des régimes de retraite, notamment auprès de la fonction publique québécoise. Jacques.

M. Lafrance (Jacques) : D'abord, l'institut tient à féliciter le comité D'Amours pour la rigueur de ses travaux et la clarté de ses recommandations. Je tiens à souligner que le comité, d'ailleurs, comprenait trois membres de notre profession à son compte.

De façon générale, nous sommes d'accord avec les constats formulés dans ce rapport. L'institut appuie plusieurs des changements proposés par le comité D'Amours. En particulier, nous appuyons ceux qui permettraient une souplesse accrue dans la conception de nouveaux types de régimes de retraite qui répondent aux souhaits des parties en termes de partage de risques. Il y a une forte demande pour de nouveaux genres de partages de coûts et de risques. Pour cette raison, nous invitons le gouvernement à adopter rapidement des modifications visant à assouplir le cadre réglementaire des régimes de retraite.

Les règles de capitalisation des régimes de retraite sont au coeur du travail des actuaires. Nous croyons que ces règles doivent viser un juste équilibre entre la stabilité des cotisations et la sécurité des prestations. Nous observons que l'approche de capitalisation améliorée proposée par le comité D'Amours aurait en général pour effet d'augmenter la stabilité des cotisations tout en diminuant, par contre, la sécurité des prestations des participants advenant la dissolution du régime. Avant d'adopter une telle approche, le gouvernement devrait être conscient des effets de celle-ci. En fait, nous invitons le gouvernement à définir les objectifs que doivent viser les règles de capitalisation s'appliquant aux régimes de retraite. Une fois ces objectifs bien établis, nous sommes d'avis qu'une autre approche que celle proposée par le comité D'Amours pourrait mieux y répondre.

• (16 h 30) •

Un des problèmes importants du cadre réglementaire actuel, c'est qu'il n'encourage pas les employeurs qui parrainent un régime de retraite à accélérer volontairement la capitalisation de leur régime. De plus, certains aspects des règles actuelles font en sorte qu'on veut éviter… En fait, c'est mauvais, c'est perçu comme étant mauvais qu'on ait un surplus dans un régime de retraite. Notons en particulier le traitement asymétrique des déficits et des excédents ainsi que les règles ayant trait au traitement équitable des participants lorsque le régime est bonifié alors qu'il affiche un excédent.

Malheureusement, les propositions du comité D'Amours ne favorisent pas le versement de cotisations plus élevées que le minimum requis par la loi. Comme je le mentionnais il y a un instant, nous croyons que les règles de capitalisation doivent viser un juste équilibre entre la stabilité des cotisations et la sécurité des prestations. Nous sommes confiants qu'il soit possible d'adopter des modifications qui procureraient à la fois plus de stabilité et plus de sécurité. Par exemple, enlever les obstacles à une accélération du paiement des déficits ou à la constitution volontaire d'une réserve en prévision des jours plus difficiles irait en ce sens.

Depuis quelques décennies, la profession actuarielle a adopté des normes concernant le calcul des valeurs de transfert payable aux participants dont l'emploi se termine. L'élaboration de ces normes et les modifications qui ont été faites au fil des ans ont fait l'objet d'une réflexion approfondie et d'une large consultation, notamment auprès des gouvernements, afin de s'assurer qu'elles répondent bien aux objectifs visés par celles-ci. À notre avis, les normes actuelles sont appropriées en regard des objectifs formulés par le gouvernement et les divers intervenants. D'ailleurs, nous tenons à souligner que toutes les lois régissant les régimes de retraite au Canada exigent présentement l'utilisation de ces normes.

Par contre, nous sommes ouverts à l'idée d'une révision de ces normes, encore plus s'il y a un consensus à l'échelle canadienne à ce sujet. Le comité D'Amours propose une nouvelle méthode pour le calcul des valeurs de transfert qui produirait des valeurs moins élevées. Si seulement le Québec décide d'adopter cette nouvelle méthode, cela causerait certains inconvénients. Notamment, des participants québécois recevraient des valeurs inférieures à celles versées aux autres participants d'un même régime. À notre avis, le maintien d'une approche uniforme au Canada est nettement préférable. Denis.

M. Latulippe (Denis) : Je vais enchaîner avec une des propositions importantes du comité D'Amours, soit la mise en place d'un nouveau programme géré par l'État, c'est-à-dire la rente longévité. Je dois dire d'abord qu'il n'y a pas de consensus parmi nos membres quant à la pertinence ou non de mettre sur pied un tel régime. Toutefois, nous désirons vous soumettre quelques commentaires dans l'éventualité que le gouvernement aille de l'avant avec ce nouveau concept.

Tout d'abord, il faut éviter de reporter systématiquement une partie du coût du programme sur les générations futures. Pour cette raison, nous appuyons la recommandation du comité D'Amours de financer la rente longévité sur la base d'une pleine capitalisation. L'institut souscrit également au principe d'accorder les prestations en fonction du nombre d'années de cotisation de chaque travailleur. En d'autres termes, nous ne serions pas favorables à ce que le calcul des prestations reconnaisse une période accomplie avant l'entrée en vigueur du programme.

Il serait aussi important de soumettre ce programme à une gouvernance rigoureuse, considérant l'importance des risques assumés par l'État en regard de la longévité et pour éviter une concentration excessive de notre patrimoine retraite. De plus, vu qu'il entraînerait une coordination des prestations versées par les régimes de retraite, une coordination pancanadienne de ce programme serait nettement souhaitable, car bon nombre de régimes de retraite comptent des travailleurs au Québec et dans d'autres provinces.

Finalement, il faudrait veiller à ce que la rente longévité soit bien adaptée aux enjeux propres à la population à faibles revenus, notamment en ce qui a trait aux effets sur les prestations versées en vertu du supplément du revenu garanti.

M. Lafrance (Jacques) : En guise de conclusion, l'institut désire souligner que l'amenuisement des régimes de retraite à prestations déterminées et de leur couverture constitue une menace pour la sécurité future des Québécois. Malgré quelques aspects positifs, nous croyons que la mise en application des recommandations du rapport D'Amours aura peu d'impacts sur l'avenir de ces régimes de retraite.

Certes, nous souhaitons que soient rapidement adoptés des changements autorisant la mise en place d'autres genres de régimes de retraite, comme les régimes à coûts partagés et les régimes à prestations cibles. Toutefois, et peu importe la décision du gouvernement quant à la rente longévité, il faudra toujours veiller à accorder une place privilégiée aux régimes à prestations déterminées, car, dans de nombreux cas, c'est l'employeur et non les participants qui est le plus apte à assumer les risques de fluctuations financières liés à la protection à la retraite.

Nous croyons qu'il est possible d'adopter un ensemble équilibré de mesures visant la protection des régimes de retraite pour les participants et la création d'un environnement qui incitera les promoteurs de régimes de retraite à maintenir et à rehausser les régimes à prestations déterminées. Maintenant, nous serons prêts à répondre à vos questions. Merci de votre attention.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup. Et nous passons la parole du côté gouvernemental, Mme la ministre.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Je vais saluer M. Lafrance, M. Simard, M. Latulippe, qui connaît bien la Régie des rentes du Québec pour en avoir été, je crois, actuaire en chef déjà, dans un passé...

M. Latulippe (Denis) : Oui, déjà, oui.

Mme Maltais : Oui. Bonjour, bienvenue. C'est un plaisir de vous entendre aujourd'hui, puis de vous recevoir, puis d'entendre votre… de voir l'éclairage que vous nous apportez sur le rapport D'Amours. Si vous permettez, je vais vous poser quelques questions qui sont plus d'ordre général, vu que c'est quand même l'ICA.

Le rapport D'Amours est basé sur quelques affirmations de départ, mais il y en a une : Le statu quo n'est plus possible. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette affirmation qu'il est nécessaire de faire une refonte de nos régimes de retraite et que les régimes à prestations déterminées sont menacés à l'heure actuelle?

M. Lafrance (Jacques) : Tout à fait d'accord. D'ailleurs, ce n'est pas la première fois que je viens ici parler à l'Assemblée nationale. Et le constat qu'on a fait, la menace que peut représenter la baisse des régimes à prestations déterminées sur la sécurité des revenus des Québécois, ça fait plusieurs années qu'on le mentionne. On a mis… On a publié quelques livres blancs à ce sujet, qui contiennent différentes recommandations. Nous sommes toujours confiants. Il y a des changements qu'on peut faire pour améliorer le système, pour faire en sorte qu'il va y avoir plus de régimes de retraite et de meilleurs régimes de retraite. Mais, oui, effectivement, nous sommes d'accord avec le constat que fait le comité D'Amours à ce sujet.

Mme Maltais : Il y a quelques firmes d'actuaires qui ont dit qu'étant donné la hausse des taux d'intérêt on pouvait respirer, souffler et prendre un peu plus de temps pour essayer de voir, là, la pertinence et les impacts de l'arrivée d'une rente longévité. Êtes-vous d'accord avec cela, que ça nous… ça enlève un peu de pression sur cette partie du rapport D'Amours?

M. Lafrance (Jacques) : ...

M. Latulippe (Denis) : Bien, je dirais, tant mieux, s'il y a un peu d'air frais dans le système parce que les dernières années ont été particulièrement difficiles. Je dirais aussi que ça nous ramène à votre première question, là. Ça ne devrait pas être un prétexte pour ne pas agir. Pour revoir le cadre de financement de ces régimes-là, je pense que c'est plus que dû.

Il faut aussi avoir à l'esprit — puis je lisais un article tout récent — que la conjoncture financière, économique, financière, au niveau des taux d'intérêt, notamment, nous donne un petit peu de répit. On voit se poindre aussi l'amélioration de la mortalité, qui va créer — je voyais un article récemment — une hausse des coûts des régimes de retraite parce qu'il va falloir actualiser. Donc, tant mieux s'il y a un peu d'air frais, mais il n'y en a pas énormément non plus. Donc, je pense qu'il est impératif de revoir le cadre de financement de ces régimes-là.

Mme Maltais : Je dirais que les taux d'intérêt sont peut-être un peu plus volatils que la baisse démographique, qui, elle, est inéluctable. Alors, effectivement, c'est peut-être… Ce moment est peut-être un bon moment pour passer à l'action, en tout cas, pour réfléchir un peu plus sérieusement. Mais, dans notre tête, ce n'est pas pour retarder les choses, mais c'est pour être bien sûrs de faire les choses de façon posée, sereine, non précipitée, mais sérieuse, vraiment.

Le rapport D'Amours est un tout, d'après les experts du rapport D'Amours, la rente longévité étant là pour essayer d'enlever de la pression sur les régimes à prestations déterminées. Et puis on est aussi dans une idée vraiment de non seulement régler le problème de quelques régimes, mais d'essayer d'assurer la sécurité financière de Québécois, Québécoises qui n'ont pas de régime actuellement.

Est-ce que vous pensez, vous aussi, que c'est un tout et qu'on ne peut pas… Il y a des gens qui nous ont dit : Il y a comme trois parties dans le rapport D'Amours, la rente longévité, il y a la capitalisation et les transferts puis il y a les autres mesures. J'aimerais ça avoir votre opinion sur ce qui a fait l'objet du débat aujourd'hui.

• (16 h 40) •

M. Lafrance (Jacques) : Notre position, c'est que, non, ce n'est pas… Ça ne fait pas un tout, parce qu'on dit : Priorisons d'abord la survie des régimes de retraite et un encadrement... et favorisons un encadrement qui va faire en sorte que ces régimes-là vont s'épanouir. Ça, on peut le faire peu importe la décision du gouvernement par rapport à une rente longévité. La rente longévité, une des raisons pour lesquelles ça n'a pas fait consensus parmi nos membres, je peux dire... même si on n'est pas une grande profession, je peux vous dire que les actuaires sont capables d'avoir des points de vue assez partagés sur des questions et des points de vue assez tranchés.

Alors, on n'a pas réussi à avoir un consensus à savoir si, oui ou non, on est favorables à la rente longévité. Par contre, je peux vous dire que ceux qui sont favorables ne sont pas si favorables que ça au point de dire : Ah bien, je vais déchirer ma chemise pour effectivement mettre en place la rente longévité. D'un autre côté, il y en a qui sont vraiment contre, dans le sens que c'est juste une question philosophique : Quel est le rôle de l'État par rapport au rôle des employeurs et des participants par rapport à la sécurité financière de la retraite? Alors, nous, il y en a qui sont plutôt réticents à voir un rôle accru de l'État dans ce contexte-là.

Mme Maltais : O.K. Donc, c'est peut-être aussi cette question philosophique du rôle de l'État et de sa présence qui fait que vous avez aussi regardé d'un œil un peu plus noir cette idée de confier l'actif à la Caisse de dépôt et placement du Québec?

M. Latulippe (Denis) : Je vous dirais… Puis, comme le mentionnait Jacques, on ne peut pas avoir l'unanimité au sein de la profession. C'est peut-être un point de vue un peu plus personnel. Je vous dirais, par rapport à ça, la sagesse populaire aussi bien que les théories les plus évoluées nous disent qu'on ne doit pas mettre tous nos œufs dans le même panier. Si c'est vrai pour un individu ou un petit régime, je pense que c'est d'autant plus vrai pour une grande société, toute une société.

Il n'y a pas de doute que la Caisse de dépôt a joué puis continue de jouer important au Québec, ça a été un moteur de développement extrêmement fort. Personnellement, je ne suis pas convaincu que de mettre la totalité des sommes de la rente de longévité, qui serait très importante… Ça a pris 50 ans pour constituer 50 milliards dans le Régime de rentes, ça va en prendre moins de 10 dans la rente longévité. De tout mettre ça dans le panier de la Caisse de dépôt, ça commence à faire une concentration de capital assez importante. Puis je ne suis pas convaincu, personnellement, que c'est la solution à adopter.

De la même façon, de confier la responsabilité fiduciaire de ça à la Régie des rentes... La régie joue aussi un rôle très important, puis le joue très bien. Mais, entre autres, elle a la responsabilité de surveiller, d'encadrer puis de monitorer le système, puis on viendrait lui dire : Bien, tu vas gérer un régime de prestations cibles de très grande importance puis, entre autres, tu vas être responsable de la politique de placement, qui a un impact déterminant sur les résultats. Je trouve qu'on concentre beaucoup les responsabilités au sein de mêmes institutions. Puis, si on met en place la rente longévité, il faut savoir que l'essentiel de notre capital retraite va être dans des fonds publics, c'est-à-dire le Régime de rentes puis la rente longévité, là, une bonne partie. Donc, ça me pose certaines questions personnellement. Mais c'est un point de vue bien, bien personnel.

Mme Maltais : Oui, c'est la rente après 75 ans. Quand même, les gens conservent tout à fait leurs responsabilités quant à leur rente de retraite jusqu'à 75 ans. Une des choses que vous soulevez, comme beaucoup de monde, c'est cette importance d'harmoniser, si on la met en place, la rente longévité, avec le reste du Canada, à cause, entre autres, de l'impact sur le supplément du revenu garanti. J'aimerais ça vous entendre un peu là-dessus : Est-ce que vous pensez que c'est possible? Est-ce que vous avez… Il y a beaucoup… Le député d'Outremont a souvent posé la question : Avez-vous eu des échos de vos partenaires ou de vos membres sur l'accueil?

Des voix : ...

Mme Maltais : Je ne veux pas vous voler votre question. Je peux vous passer les miennes, M. le député. Mais vous l'avez soulevée... le député d'Outremont l'a soulevée plusieurs fois parce qu'on a eu ce… on a régulièrement… À peu près tout le monde est venu nous dire : On va avoir un problème avec le supplément de revenu garanti, on va voir un problème avec la compétitivité. Ce sont les deux arguments principaux. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Latulippe (Denis) : On peut peut-être se partager la réponse peut-être, là. Pour revenir sur nos préoccupations premières — puis Jacques enchaînera sur la dimension pancanadienne — les préoccupations premières, vous l'avez résumé, c'est par rapport au supplément du revenu garanti, d'une part. Ce n'est pas que ce n'est pas que ce n'est pas possible, c'est tout à fait possible. Mais ce qu'il faut voir, c'est que, si on met en place la rente longévité, on se prive de sommes importantes au niveau du supplément de revenu garanti. Donc, les Québécois, les entreprises, les travailleurs ou les contribuables continueraient de financer une partie de ce régime-là tout en se privant d'une partie des prestations auxquelles ils auraient autrement eu droit. C'est la première préoccupation.

D'un point de vue de coordination, ça a un impact du point de vue du supplément de revenu garanti. Ça a aussi un impact pour les régimes complémentaires parce que, comme on le mentionnait, les régimes complémentaires sont coordonnés avec les régimes d'État que sont le Régime de rentes du Québec et le Régime de pensions du Canada et ils le seraient aussi vraisemblablement avec la rente longévité. Bien, encore là, ça introduit une asymétrie, là, dans les droits des participants québécois à ces régimes-là par rapport à ceux des autres provinces.

Vous avez raison — puis je vais passer la parole à Jacques — de soulever la question : Qu'est-ce qu'on en dit dans les autres provinces? Bien qu'on n'ait pas eu d'échos très officiels. Mais c'est un élément important aussi.

M. Lafrance (Jacques) : En fait, on n'a pas eu de discussions directes avec les autres gouvernements du Canada à savoir qu'est-ce qu'ils pensent de la rente longévité. La seule occasion qu'on a eue, c'est de parler avec une organisation qui regroupe les organismes de surveillance des régimes de retraite, et ils étaient plutôt silencieux sur la question. Je pense qu'ils laissent le Québec en débattre, puis on verra après.

Et, parmi nos membres, si on parle à nos membres du reste du Canada, je dirais qu'il y a une plus grande réticence évidemment par rapport à ça. Peut-être qu'ils sont plus réticents justement à un rôle accru de l'État dans la sécurité financière des individus qu'on peut l'avoir au Québec.

Mme Maltais : On va se retrouver dans une position intéressante, qui peut être inconfortable mais qui permet d'innover. C'est que, là, les gens sont venus... toutes les firmes d'actuaires sont venues nous demander : Clarifiez les règles, s'il vous plaît, clarifiez les règles.

On sait que, depuis la crise de 2008, il y a eu ici des lois qui ont été passées qui ont permis d'alléger, d'alléger les règles de remboursement des déficits. On a essayé de pallier à la crise. Et ça a été fait de concert, ça a été proposé par l'ancien gouvernement puis ça a été voté ici, ça a bien passé, puis en se disant, à chaque fois… Moi, je me souviens de mon collègue Sylvain Simard, M. Jean, le président de la Régie des rentes, aussi l'a entendu dire : Bien, c'est en attendant, puis ça va se résorber. Mais ça ne se résorbe pas, ces déficits de solvabilité. C'étaient des règles passagères qu'on est obligés de continuer, de perpétuer, hein? Ça devient quasi des règles pérennes. Puis les gens ne veulent plus travailler dans un environnement comme ça.

Mais, en même temps, on nous dit : Il faut que vous vous décidiez, l'Assemblée nationale, il faut que le gouvernement, il faut que l'Assemblée se décide sur quelles sont les règles. Mais, en même temps, si on décide que c'est la rente longévité, on ne peut pas la mettre immédiatement en place parce qu'il faut d'abord s'entendre avec le Canada, ça a un impact. Donc, ça devient… Vous comprenez, là, que c'est assez complexe? Parce que, si on décide de la rente longévité, si on décide que la rente longévité va se mettre en place au Québec et qu'on se dit : Un jour — le jour où on aura une harmonisation avec le Canada — est-ce que ça va avoir une influence sur la façon dont les gens vont négocier les régimes à prestations déterminées, puisque maintenant ils seront sur une plus courte période parce qu'ils se termineront à 75 ans?

M. Lafrance (Jacques) : Il y a plusieurs volets à votre question.

Mme Maltais : Il y a plusieurs volets au sujet actuel.

M. Lafrance (Jacques) : Alors, je vais commencer par dire… par laisser la question pour la fin. Il y a moyen… Il faut parler de qu'est-ce qu'on a fait au Québec et de qu'est-ce que le reste du Canada a fait aussi, des mesures temporaires qu'on a vécues dans la dernière décennie. Est-ce qu'il fallait le faire? Possiblement que oui, je pense qu'on n'était pas contre. Mais, oui, il faut penser des mesures permanentes, un cadre clair permanent et révisé qui fait en sorte qu'il va y avoir une meilleure gestion des risques des régimes de retraite. Il va faire en sorte aussi, et ça, c'est un élément qu'on y croit beaucoup, qui, si ça favorise l'employeur à mettre plus d'argent dans les régimes de retraite en prévision des mauvais jours, on n'aurait peut-être pas vécu la situation qu'on a vécue dans les dernières années. Alors, il faut que ça soit bon.

Et ça, quand j'ai commencé ma carrière, on disait : Ah, on a un surplus, c'est bon. Rendus dans les années 90, avoir un surplus dans un régime de retraite, c'était quelque chose qu'il fallait absolument éviter. C'est tout à fait anormal et, on pourrait dire, tout à fait aberrant. Un régime qui affiche un excédent devrait être un bon régime, puis ça devrait être une situation qu'on devrait favoriser. Il y a différentes règles qui font en sorte que les employeurs n'en veulent pas, d'excédents. Il faut essayer de travailler à changer ces règles-là. Ça, c'est la première chose.

Dans ça, on aurait un cadre permanent. Si on un cadre permanent qui… De façon générale, les régimes ont toujours un petit surplus ou un gros surplus, c'est mieux. Et je pense que, la profession actuarielle, d'une façon générale, en parlant aux employeurs ou aux parties intéressées, de plus en plus, je pense que les membres de notre profession disent aux gens : Soyez prudents et, avant de faire des promesses, soyez vraiment sûrs du coût de ces promesses-là à long terme et en fonction… et utilisez plus de marge de prudence. Je pense qu'il y a un mouvement de ce côté-là, et il y a de l'avenir là-dedans.

Mais il ne faut pas mettre des freins aux gens en disant : Mettons des marges de prudence, donc on va essayer de bâtir des petits coussins. Puis, non, quand vous êtes dans une position de coussin, à ce moment-là c'est mauvais parce que vous ne pouvez pas… Si vous faites des améliorations, à ce moment-là, il faut que vous ayez un principe d'équité qui vous… et qui n'est pas sûr à savoir si, oui ou non, la modification va être acceptable. Alors, il faut avoir des règles simples qui favorisent justement une meilleure gestion prudente des régimes de retraite. Alors, ça, ça serait le premier élément.

Par rapport à votre deuxième volet à votre question, à savoir : Est-ce que la rente longévité pourrait avoir un effet sur les régimes à prestations déterminées?, c'est dur à dire présentement. C'est nouveau, c'est... mais, en fait, c'est hypothétique. C'est certain, on a entendu des échos d'employeurs qui disent : Au fond, si l'État prend un plus grand rôle, ça veut dire qu'il y a un plus petit rôle pour moi, puis, à ce moment-là, si c'est vraiment tout petit, je ne ferai plus rien. Est-ce que ça va être généralisé? Personnellement, je ne le crois pas. Il va y avoir toujours une place pour les régimes de retraite d'employeurs. Mais c'est une possibilité, surtout, je dirais, pour la petite et moyenne entreprise, que ça va enlever des incitations à faire un effort pour avoir leurs propres régimes de retraite.

• (16 h 50) •

Mme Maltais : Merci beaucoup.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Chapadeau : Merci, M. le Président. Merci pour votre contribution assez importante. Moi, j'avais une question par rapport à votre mémoire, à la page 8. Vous dites, dans votre mémoire : «L'ICA souhaite que de nouvelles méthodes d'évaluation actuarielles plus modernes soient envisagées même si elles n'ont pas été proposées dans le rapport.» Et vous dites : «Le gouvernement devrait établir des principes de capitalisation, de gestion des risques et de prestations dans un cadre entièrement intégré...» Pouvez-vous nous parler davantage de votre vision, ce que le gouvernement devrait faire et quels sont les éléments sur lesquels on devrait légiférer?

M. Lafrance (Jacques) : Je vais vous donner un exemple. Je suis le gouvernement. On pourrait décider, comme gouvernement, qu'effectivement... Ce que je viserais, c'est que, 90 % du temps, un régime est 90 % solvable. Admettons, c'est comme un objectif qu'on viserait, qui est assez simple, qui, en fin de compte, est moins responsable de la population. Je suis prêt à accepter que les régimes de retraite, à un moment donné, s'ils se terminent, bien il va manquer un peu d'argent mais pas trop, qu'il y ait quand même une probabilité assez élevée que ça se produise que, en fin de compte, il y ait un petit déficit ou qu'il n'y ait pas beaucoup de déficits. Alors, ça, c'est un objectif qui est relativement simple. À partir de ça, essayons de bâtir des règles qui feraient en sorte qu'on l'atteindrait, cet objectif-là. Et ce qu'on dit, c'est qu'on est prêts à travailler de concert avec la Régie des rentes ou avec le gouvernement pour essayer de trouver… D'abord, définissons les objectifs et définissons un ensemble de règles qui l'atteindraient le mieux possible, cet objectif-là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci. Bienvenue, messieurs. Écoutez, je regardais, là, vous faites un parallèle entre la rente longévité et la RRQ, en tout cas certains parallèles, là. Et puis je suis content que vous souleviez que les actuaires ne s'entendaient pas parce que je pensais que vous vous entendriez puis… parce que vous n'êtes pas comme les économistes, là. Mais bon, ça a l'air que vous êtes comme les économistes. Alors donc, je vous poserais la question suivante — je me fais un peu l'avocat du diable, là : Moi, je vous dis que vous avez le choix entre bonifier la RRQ ou tout simplement la rente longévité. Pourquoi un, pourquoi l'autre? Je veux dire, si vous dites : C'est mieux, la rente longévité, pourquoi? Parce qu'il y a certains individus avant vous qui ont parlé de, tout simplement : On pourrait bonifier la RRQ puis on arriverait à des résultats intéressants. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Latulippe (Denis) : Moi, je vous répondrais : Par rapport à ça, vous avez une décision importante à prendre, à savoir le rôle de l'État dans le système de retraite. Une fois que vous prenez cette décision-là, si vous dites : Oui, on va de l'avant avec une bonification du rôle de l'État, on vous inviterait à cibler l'intervention pour qu'elle soit la plus efficace possible. Puis, dans ce sens-là, la rente longévité nous apparaît préférable à une bonification générale du RRQ parce que… pour les raisons qui sont mentionnées dans le rapport, d'ailleurs, là : la difficulté de prévoir en fin de vie, etc., là. Donc, s'il y a une décision d'aller dans ce sens-là, je pense que… Puis je ne peux pas parler pour 4 000 actuaires au Canada ou 1 000 au Québec, là, mais je pense que ce qui est proposé est intéressant par rapport à ça.

M. Therrien : O.K. Vous soulevez aussi l'inquiétude que vous avez par rapport au fait que, si on arrive avec une augmentation des cotisations dans le secteur public, il y aurait une conséquence sur les taxes ou, en tout cas, sur les dépenses ailleurs et que ça vous préoccupait. Et, quand on a rencontré les gens qui présentaient le rapport D'Amours, ils ont insisté sur le fait qu'on n'a pas le choix. Peu importe ce qui arrive, peu importe ce qui va arriver, il va falloir qu'on intervienne de toute façon, alors aussi bien le faire de façon concertée à l'intérieur d'un régime comme ça.

Moi, je vous dirais — puis je vous poserais la question en même temps : Si tu arrives avec une rente comme ça, au moins, ceux qui vont avoir à payer ce manquement-là, ça va être en partie les cotisants, qui vont hériter finalement, en bout de ligne, en fin de vie, d'un revenu plus élevé, et aussi le gouvernement. Mais, au moins, on s'assure que la moitié de ce fardeau-là soit supportée par les gens qui en retireront les bénéfices. Est-ce que vous êtes d'accord avec ce que je vous dis là ou…

M. Latulippe (Denis) : Par rapport à ça, si vous dites : On n'a pas le choix, une société a toujours le choix du niveau de revenus qu'elle veut transférer à ses personnes retraitées, d'une part, puis elle a aussi le choix de savoir qui doit payer. Ce que les entreprises vont venir vous dire, puis ce n'est pas nécessaire à nous de vous le dire, mais aux entreprises, que le problème avec ça, c'est une taxe sur la masse salariale par rapport à un régime qui est financé par les impôts généraux qui s'appelle le supplément de revenu garanti, là. Un des privilèges de l'existence, c'est d'avoir le choix de ses problèmes, là. On a quand même certains choix, là.

M. Lafrance (Jacques) : Je voudrais rajouter là-dessus, là. Par contre, sur le principe de ne pas reporter le coût aux générations futures, nous sommes tout à fait d'accord avec ça. Donc, si l'État décide de mettre en place la rente longévité, nous sommes tout à fait d'accord avec le principe que ce soit payé à même les cotisations versées par les participants actuels et non pas, dès le départ, dire : Bien, ah! moi, Jacques Lafrance, comme je suis assez proche de la retraite... on va te donner un petit cadeau, là, on va te donner plus, une rente longévité plus élevée que je n'aurais pas payée. Non. Un calcul en fonction des nombres d'années de cotisation, on est tout à fait d'accord avec ce principe-là.

M. Therrien : O.K. Merci beaucoup, messieurs.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Le temps du parti gouvernemental étant expiré, je cède la parole à M. le député de Verdun.

M. Gautrin : Merci, M. le Président. Alors, d'emblée, je vais commencer par vous dire que votre rapport est d'une extraordinaire clarté, ce qui fait que ce n'est pas difficile de vous poser des questions, mais ça voudrait dire qu'on essaie de rerépéter ce que vous avez dit. Vous avez très clairement présenté votre rapport de la manière suivante : présenté un résumé de la recommandation du rapport D'Amours et fait vos commentaires les uns après les autres.

D'emblée, je vais poser un certain nombre de questions quand même, un, parce que je me sens concerné par le dernier élément de ce qu'on appelle… ce que vous appelez l'approche d'équité sur la gestion des excédents d'actif. M. Latulippe, vous vous rappelez probablement — vous étiez dans votre fonction à l'époque — lorsqu'on a amené ça, ça a créé peut-être, d'après le témoignage des actuaires de... Je crois que c'était Towers Watson qui ont fait cette remarque, ils ont dit : Oui, ça a créé certains problèmes.

Vous concluez : Soit il faudrait supprimer ces articles qui sont dans la Loi des RCR, ce qui me fait un peu mal au cœur, ou vous dites : Il faut revoir ces règles, voire les éliminer. Bon, supposons qu'on laisse tomber le «voire les éliminer». «Par exemple, les règles pourraient être modifiées afin de simplifier les processus ou de prévoir une méthode claire et simple d'utilisation équitable.»

Rappelez-vous quand même qu'au moment où on avait pensé à ça, c'était une situation où on était réellement en supplément... en excédent d'actif à peu près dans tous les régimes, il faut quand même... la situation ayant considérablement évolué. Est-ce que vous êtes prêts au moins à nous conseiller, nous, les législateurs, quels seraient... Tout en maintenant cette espèce de principe d'équité, qu'est-ce qu'on pourrait avoir comme éléments qui simplifieraient l'implication? Je comprends que vous préférez la suppression, si j'ai bien compris. Je vois M. Latulippe qui rit.

M. Lafrance (Jacques) : Au minimum, une plus grande clarté. Un des problèmes avec la règle actuelle, c'est que, si je… Par exemple, Denis représente les participants et moi, je suis l'employeur. On s'entend pour faire une bonification au régime de retraite, on passe à travers le processus de l'approbation et moins de 30 % des participants s'opposent, donc on pourrait présumer que tout va pour le mieux et tout va bien. Non. Avec le processus actuel, il suffirait d'une poignée de participants qui diraient… demanderaient à un arbitre, dire : Non, ce n'est pas équitable pour nous autres, et ça met tout...

Une voix : ...

M. Lafrance (Jacques) : Effectivement. Alors, ça met tout en question. Alors, ça, à tout le moins, il faudrait avoir une plus grande clarté de ce côté-là et une plus grande, en fin de compte, précision à savoir qu'est-ce qui se passe avec la validité de la modification. Ça, c'est un minimum.

L'autre chose, on pourrait aller plus loin et on pourrait se poser la question : Pourquoi, tout simplement, ne pas laisser aux parties le soin de décider comment serait affecté l'excédent pour une bonification? Et on peut aller encore plus loin. S'il n'y avait pas de telles règles, à ce moment-là je pense qu'il y aurait plus de régimes de retraite qui seraient en situation d'excédent, et ce serait meilleur pour tout le monde.

• (17 heures) •

Moi, je peux vous donner mon exemple personnel, puis je peux… dans le sens que je participe assez régulièrement à des assemblées annuelles de participants à des régimes de retraite. Dans le secteur privé, la donne a changé énormément. Et, oui, il y a 20 ans, souvent la question, c'était : On a un excédent, pourquoi qu'on ne l'utiliserait pas pour faire des bonifications? Aujourd'hui, ce n'est pas ça du tout. M. l'employeur, mettez plus d'argent dans le régime de retraite parce que j'ai peur pour ma rente. C'est ça, moi, qui est important, d'après moi. Quand je serai retraité, je m'en fous de l'excédent, je veux être sûr de recevoir ma rente.

M. Gautrin : …d'accord avec l'évolution qu'il y a eu dans les mentalités sur… J'ai une deuxième question qui est de mieux comprendre, à l'heure actuelle, les manières pour calculer les valeurs de transfert. Moi, il y a une personne qui a témoigné avant vous, je ne sais pas, qui disait : Il y a un changement radical de philosophie dans le calcul des valeurs de transfert. Et comprenez bien que les valeurs de transfert vont devenir de plus en plus importantes parce que les personnes, actuellement, bon, font… Avant, les gens rentraient dans une entreprise, restaient toute leur carrière en général puis prenaient leur retraite. Là, à l'heure actuelle, très souvent, ils vont quatre à cinq ans dans un secteur, vont dans un autre secteur et un autre secteur. Donc, l'importance, à l'heure actuelle, de bien comprendre et de bien baliser les valeurs de transfert.

La manière dont vous le calculez actuellement, vous calculez sur un taux basé sur le taux à sept ans, des machins du… des éléments du fédéral, c'est-à-dire le taux de rendement à échéance des obligations du fédéral, vous acceptez le partage entre 10 ans et 10 ans entre eux. Vous incluez à l'intérieur un 0,9 % qui est la prime de liquidité que vous incluez dans la formule, et, en se basant là-dessus, vous arrivez, donc, à ce moment-là, à avoir, pour un premier palier, pour les 10 premières années, qui est i1-10, en fonction du nombre d'années qu'on compte, en fonction du rendement en quelque sorte pour les obligations du fédéral, puis pour plus de 20 ans, vous avez un 0,5 % plus un 0,9 % qui rentre… C'est votre formule à l'heure actuelle.

Ce qui est un changement, et ils veulent utiliser la courbe de Fiera que vous avez... Mais la courbe de Fiera est un truc qui est utilisé principalement, si je comprends bien, moi, pour les valeurs comptables et pas des valeurs actuarielles que... À ce moment-là, d'une part, la courbe de Fiera, basée sur les rendements des bonnes obligations — et on l'a vu déjà pour les témoignages des gens qui sont venus — il y a très peu d'éléments là-dedans, donc on est soumis à de très fortes fluctuations. Les personnes qui sont venues témoigner avant ont dit : On pourrait avoir des fluctuations importantes sur trois mois ou quatre mois simplement parce qu'il y a peu d'éléments dans le calcul.

Moi, la manière dont j'ai compris ça, mais alors je comprends que je l'ai mal compris… Seulement, je comprends… Des fois, j'ai un peu d'humilité des fois. Là, tel que je l'avais compris, c'est qu'on changeait simplement le type, le type de Bond sur lequel on calculait les premiers taux d'intérêt, c'est-à-dire ils proposaient de supprimer, ce qu'on avait fait, la prime de liquidité, c'est-à-dire… Bon, je ne comprends pas pourquoi, mais enfin vous allez peut-être m'expliquer pourquoi, si vous êtes d'accord ou pas avec la suppression du 0,9 % de la prime de liquidité, premièrement. Ils maintenaient le 0,5 %, puisqu'ils disaient : Bon, dans le fond, c'est comme ça, puis ça marche assez bien, on va le conserver. Et ils prenaient, ils prenaient, à ce moment-là, le taux basé sur la courbe de Fiera et basé sur les rendements des cinq ou des sept compagnies qui ont des rendements acceptables.

Je ne voyais pas tellement de changement de philosophie entre les deux. Il y a quelqu'un qui est venu témoigner tout à l'heure — vous avez peut-être entendu — qui dit : Il y a un changement radical de philosophie. J'avoue que je n'avais pas compris. Est-ce que vous pourriez m'expliquer s'il y a un changement radical de philosophie? Je sais qu'à la fin on dit : Il faut qu'il y ait des discussions entre l'ICA et la Régie des rentes, on ne peut pas y aller comme ça — excusez-moi — en garrochant ça comme à travers… Mais quel changement de philosophie entre les deux, je ne l'ai pas compris.

M. Lafrance (Jacques) : Je ne dirai pas que…

M. Gautrin : …en lisant votre texte et le texte de la régie. Et est-ce que je résume assez correctement la manière dont les choses se…

M. Lafrance (Jacques) : Il n'y a pas… je ne vois pas de changement radical de philosophie, c'est un… on appelle ça un rajustement, dans le sens qu'au fond ce que je comprends du comité D'Amours, c'est qu'il faut tenir compte du calcul de la valeur de transfert du fait que ceux qui restent dans le régime de retraite doivent assumer un certain risque. Donc, ceux qui sortent l'argent du régime de retraite, on doit tenir compte dans le calcul du risque qui reste dans la caisse de retraite. On peut être d'accord ou en désaccord avec ce principe-là, mais c'est ce qui est proposé par le comité D'Amours.

Comme je l'ai dit d'emblée, la norme actuelle sur les valeurs de transfert a fait l'objet de nombreuses discussions, des points de vue très partagés. Et, si vous parlez à un actuaire, vous allez... et on se remémore toutes les discussions qu'il y a eu là-dessus, ça a été un processus assez ardu et qui a fait des mécontents. Et on ne peut pas plaire à tout le monde. Est-ce qu'il y a une recette qui est parfaite? La réponse, c'est non. Alors, il faut développer une recette qui répond à certains objectifs. Si l'objectif, effectivement... et ce n'est pas ça qui nous a été dit par le passé par les gouvernements, mais, si les gouvernements s'entendent, au Canada, pour nous dire : L'objectif, effectivement, c'est de tenir compte qu'il y a un risque quand on laisse l'argent dans le régime de retraite, effectivement il faudrait changer notre méthode de valeur de transfert.

Présentement, la méthode est plutôt de dire : Soyons assez... Le participant qui reçoit son argent, s'il place son argent par lui-même, devrait être raisonnablement sûr qu'il devra produire la même rente à la retraite en tenant compte, par contre, qu'il y a effectivement une prime de liquidité. Alors, je n'irai pas dans le détail du principe de la prime de liquidité, qui, elle non plus, n'a pas fait l'unanimité, loin de là. Mais en fin de compte ça répondait à certains objectifs assez clairs. Si les objectifs changent, oui, il faut changer la norme. Ce qu'on vous dit, c'est qu'on est prêts à discuter avec les gouvernements pour changer la norme si on doit changer les objectifs.

M. Gautrin : ...central à l'heure actuelle, compte tenu... Si les gens qui quittaient il y a 20 ans étaient relativement peu nombreux, ça va au contraire se multiplier maintenant de plus en plus, compte tenu des choix de carrière des gens qui sont plus jeunes.

M. Latulippe (Denis) : Oui, effectivement, la question de la mobilité est importante. Mais ce que je voudrais ajouter, c'est que la question des valeurs de transfert, ça a aussi un impact très important sur toute la question de la solvabilité puis de l'évaluation de la solvabilité. Donc, dans la révision des hypothèses ou des critères qui servent à établir les valeurs de transfert, il faudrait aussi avoir comme objectif un certain rapprochement, là, entre la solvabilité et la capitalisation, de tenter de réduire toutes les complexités dont vous êtes de plus en plus conscients, là, qui existent dans cette dualité capitalisation-solvabilité. Je pense qu'il y aurait une belle opportunité à ce niveau-là.

M. Gautrin : Est-ce que, si on s'en va au financement sur la capitalisation améliorée, c'est-à-dire ne plus tenir compte des risques de solvabilité, à ce moment-là... et, je comprends bien, pour le financement, pas pour... est-ce que ça, ça réglerait votre question, votre questionnement que vous avez soulevé?

M. Latulippe (Denis) : Mais, en fait, ce qu'il faut voir, c'est que ce qui nous est recommandé, là, dans le rapport, c'est de financer les régimes sur base de capitalisation améliorée et non plus de les financer sur base de solvabilité, avoir une seule et même approche, sauf qu'il faut bien voir que la solvabilité demeure importante, notamment à la dissolution d'un régime. Puis, comme...

M. Gautrin : Ça, je suis d'accord.

M. Latulippe (Denis) : ...élus qui êtes évidemment très sensibles aux préoccupations des citoyens, il faut voir qu'on vient accroître le risque, si on opte pour ça, qu'un régime se termine avec un déficit de solvabilité. Puis c'est dans ce sens-là aussi que, si on a à revoir les hypothèses sous-jacentes à tout ça, il faut avoir aussi cette préoccupation-là.

M. Gautrin : Avant de passer la parole, j'ai une dernière question et une... que j'avais soulevée. Vous êtes en faveur, vous l'avez dit tout à l'heure, d'une approche qui aille vers la rente de longévité, c'est-à-dire ce qu'on propose actuellement dans le rapport D'Amours. Néanmoins, c'est indirectement, cette rente de longévité, une forme de prestation cible. On se comprend bien à cet effet-là. Donc, les premières variables vont être au départ les contributions à la fois des employeurs et des citoyens.

Deuxième variable, ce qui peut être bougeant, c'est les prestations qu'on va accorder comme telles. Ce qui est un paramètre qui, à mon sens, va aller en croissant, c'est la longévité de la population. Autrement dit, et Dieu nous en bénisse, on reste vivants plus longtemps. Et, si on projette à l'heure actuelle les courbes de longévité, un des témoins avant vous l'a rappelé, on peut prévoir, à l'heure actuelle, que la partie des gens qui atteindront plus que 95 ans vont arriver presque plus que le quart des gens de cette cohorte, de cette cohorte d'âge.

Alors, moi, j'ai un peu de difficultés, à ce moment-là, dans la rente de longévité, en disant : Oui, les paramètres de cotisation sont fixes, mais les paramètres qui sont ce que vous recevez vont aller en diminuant, si je puis dire, à cause de l'augmentation de la longévité. Vous comprenez ce que je veux dire? Alors là, je me dis, le risque que j'ai, comme gestionnaire, comme gouvernement, c'est que la pression sociale, à ce moment-là, où je devrai combler des pertes à l'intérieur de ma caisse, même si elle a été extrêmement importante, va m'obliger, moi, à remettre de l'argent à partir du fonds consolidé, etc., parce que le risque que j'ai comme élu… — et il faut être bien conscient, on est des élus, nous, qui prenons des décisions et qui sont des gens qui sont tributaires de se faire réélire — de dire : Bien, voici, je vais diminuer de 25... de 10 % la rente de longévité, dans 40 ans... enfin, ceux qui seront à ma place dans 40 ans vont dire : Bien non... Alors, à ce moment… Vous voyez le risque que je vois dans ce cadre-là?

• (17 h 10) •

M. Latulippe (Denis) : D'abord, le risque de longévité, il est bien réel, là. Je vous dirais, si on regarde par rapport au passé, par rapport aux 50 dernières années, on vit plus vieux maintenant parce qu'on a contrôlé la mortalité infantile puis parce qu'on a contrôlé les maladies en milieu de vie.

M. Gautrin : Excusez-moi.

M. Latulippe (Denis) : Par contre, si on regarde vers l'avenir...

M. Gautrin : Excusez-moi. Moi, je parle de l'espérance de vie à 65 ans qui croît aussi, hein?

M. Latulippe (Denis) : Non, non, non. Excusez, excusez. Oui, oui. Si on regarde vers l'avenir, ce qu'on voit, c'est que les gains d'espérance de vie vont se faire essentiellement aux âges plus avancés. Puis il y a des statistiques. J'allais citer des statistiques qui viennent de la France puis de l'Angleterre, où, au cours des dernières années, on parle de trois mois de gain d'espérance de vie à 65 ans par année. C'est énorme, là. Donc, il y a un risque effectif. Évidemment que ce risque-là, si on va de l'avant avec la rente longévité, il va se concrétiser dans le financement puis dans le fonctionnement de ce régime-là. Puis les questions que vous soulevez sont tout à fait justes, puis c'est pour ça aussi qu'on dit que ça prend une gouvernance rigoureuse de ce régime-là, parce qu'on a beau confier à un conseil, quel qu'il soit, la gouvernance de ça, à un moment donné, ça vous interpelle comme élus.

Là, ce qui est intéressant puis ce qui crée une soupape par rapport à ce que vous mentionnez, c'est qu'on est dans le long terme. On n'est pas dans des contextes où le financement varie de six mois en six mois, de telle sorte qu'on a des crises à tous les deux ans, là. On a vraiment une perspective long terme. Donc, si on se donne des moyens appropriés dans des projections adéquates puis par des mécanismes de gouvernance qui sont robustes, là, je pense qu'on peut quand même arriver à faire quelque chose d'intéressant avec ça.

Parce qu'un des points que vous soulevez, c'est qu'on en vienne à devoir renflouer ça à même les impôts généraux. La rente longévité, telle qu'elle est présentée, c'est un peu un modèle hybride entre un régime public puis un régime d'assurance… un régime de retraite conventionnel, là. Puis je pense que, si on va de l'avant, il faudrait maintenir cette philosophie-là puis éviter que ça devienne quelque chose qui doive être renfloué. À moins que la pression que vous allez avoir, c'est plus du côté des entreprises, en disant que c'est une taxe sur la masse salariale puis ça retombe trop au Québec, ces programmes-là retombent trop au Québec sur les épaules des employeurs, là. C'est un débat que vous aurez à vous…

M. Gautrin : D'où l'importance, qui était un élément qui est dans le rapport, que la gouvernance de ceci soit complètement séparée des activités gouvernementales.

M. Latulippe (Denis) : Là, il y a comme un encadrement à très haut niveau. Ça vous interpelle comme élus. C'est un régime d'État, donc ça interpelle l'élu. Mais il faudrait éviter qu'il y ait une pression politique indue qui s'exerce dans la gestion… je ne dirais pas quotidienne, là, mais dans la gestion régulière de ce régime-là, donc, de prévoir un bon balisage entre ce qui est de la responsabilité de ceux qui en auront la gestion puis ce qui est de la responsabilité des élus ou des parlementaires.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Il reste 1 min 30 s, là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Vous avez deux bonnes minutes.

M. Bachand : Deux bonnes minutes. Oui, c'est vrai. Alors, je vais faire un lien avec la gouvernance, puis je veux terminer avec les RVER. Mais, sur la gouvernance, si je comprends bien, puis c'est important, ce que vous dites, il y a trois volets. Il y a le volet qui gère le cash. Moi, je suis un partisan de la taille de la Caisse de dépôt, qui est déjà petite relativement, et que le risque est réduit si... parce que la diversification des actifs est importante, mais c'est un autre débat. Il y a le… qui fait les politiques de placement. Est-ce que ça devrait être un deuxième groupe? Et il y a l'indépendance, si jamais il y a un déficit actuariel parce que les rendements n'ont pas été au rendez-vous, l'indépendance de changer les paramètres. Et ça, je pense que vous mettez le doigt sur quelque chose de très important, parce que les gouvernements ont de la difficulté avec ça, alors qu'une régie, comme on a la Régie de l'énergie ou d'autres régies, on peut changer les régisseurs si on n'est pas contents, mais au moins il y a un mécanisme d'indépendance, et je pense qu'il faut retenir votre idée…

M. Latulippe (Denis) : Oui, mais, en même temps, il faut que cette responsabilité-là, qui est confiée à une entité, soit encadrée par une loi, donc par le fruit d'actions d'élus, là. Donc, par exemple…

M. Bachand : Et les lois peuvent être changées.

M. Latulippe (Denis) : ...il faudrait envisager de hausser le taux de cotisation, mais il faudrait baliser les hausses annuelles. Je pense que c'est déjà prévu d'ailleurs. Donc, il y a certains mécanismes qui devraient être prévus par loi, donc de votre responsabilité. Puis, une fois que ça est bien établi, la responsabilité plus de gestion de fiduciaire revient à l'entité qui en a la gestion.

M. Bachand : Et les lois ont l'avantage qu'elles doivent être changées par l'Assemblée nationale, et c'est beaucoup plus délicat et difficile que simplement un arrêté en conseil ou un décret, pour les gouvernements. Donc, la loi est préférable à un règlement sur les balises qui sont les balises collectives, je pense, dans les éléments...

Je voulais parler, si vous me donnez une minute, M. le Président, sur les RVER, parce que vous… Et on revient avec ce débat-là, sur lequel on avait longuement réfléchi : Est-ce qu'on vise les entreprises de cinq employés ou de 25 employés? À un moment donné, moi, mon rêve ou ce que j'imagine, c'est un système relativement simple, comme les systèmes de paie aujourd'hui. Avant, c'était compliqué. Quand j'avais une PME, il y a 40 ans, là, puis je remplissais les grands cahiers d'assurance chômage, et tout ça, pour 15 artisans, c'était d'une complexité absolue. Aujourd'hui, c'est très simple parce qu'il y a des grands systèmes de paie informatisés, je vois ça un peu, et que donc le coût pour l'entreprise ne sera pas élevé.

Par ailleurs, si on veut des coûts faibles pour les employés, il faut toucher le cinq et plus et non pas le 25 parce que, là, sinon, il nous échappe — puis là, de mémoire, mon chiffre n'est peut-être pas correct — 800 000 personnes, 600 000 personnes du 2 millions qu'on vise. Et là le coût que les compagnies d'assurances vont faire pour gérer le régime ne sera pas à 0,8 % ou 0,75 % ou en bas de 1 %, comme on le souhaite, il va être plus élevé. Alors, c'était… c'est pour ça que le… Et finalement le milieu patronal a accepté, peut-être pas de gaieté de cœur, mais a accepté le cinq employés plutôt que le 25.

M. Latulippe (Denis) : Évidemment, il n'y a pas de réponse magique, là, c'est de savoir où on tire la ligne. Effectivement que, si on met la barre plus haute, il y a des gens qui sont laissés sur les lignes de côté. Par contre, ça rend ces régimes-là plus intéressants pour les autres. Je pense que vous aurez des échos. Je pense à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante ou même les assureurs qui vont offrir les produits, là, ils vont pouvoir vous apporter un éclairage complémentaire par rapport à ça.

M. Bachand : Là, je termine, M. le Président. Après le budget, la FCEI n'avait pas critiqué cet aspect-là à ce moment-là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci beaucoup pour ce commentaire. Et je laisse la parole à M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard : Merci, M. le Président. Merci pour votre mémoire, qui est d'une très, très grande clarté. J'aurais quelques petites précisions, deux questions. Pour ce qui est de la rente de longévité, vous dites : «Le mode de gouvernance proposé [doit] être revu.» Et aussi, quelques paragraphes auparavant, vous dites : Oui, on peut aller voir qu'est-ce qui s'est fait aux Pays-Bas, mais on devrait regarder ce qui s'est fait en Ontario et au fédéral. Mais je voudrais vous entendre pour savoir pourquoi on doit aller voit qu'est-ce qui s'est fait en Ontario et au fédéral dans les règles de gouvernance?

M. Latulippe (Denis) : Bien, en fait, première chose que je disais, c'est que la gouvernance, c'est un enjeu très important, puis je pense que les échanges qu'on a eus en témoignent. Deuxièmement, donc, il faut y prêter une grande attention. Puis ce qu'on dit, c'est que, dans le reste du Canada, on a mis en place un certain nombre… il y a un certain nombre de grands fonds publics qui sont gérés par des entités publiques. Il y a le RPC, le Régime de pensions du Canada, qui est l'équivalent du RRQ; il y a le régime des fonctionnaires fédéraux; en Ontario, il y a le régime des enseignants... Donc, il y a un certain nombre de régimes, puis, dans ces provinces-là, on a fait le choix de ne pas tout confier à la même institution.

Donc, ce qu'on dit : Considérant l'importance de l'enjeu, prenons le temps de le regarder comme il faut puis d'élaborer la meilleure solution. Puis, dans l'élaboration de cette meilleure solution là, on a beau être particulièrement inspirés, on a intérêt à regarder ce qui se fait ailleurs. C'est simplement ce qu'on dit, là.

M. Picard : O.K. C'est de ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier.

M. Latulippe (Denis) : Bien, c'est une préoccupation dont il faut se soucier. Puis il y a une réflexion à poursuivre là-dessus, là. Puis, dans la poursuite de la réflexion, on a intérêt à regarder d'autres modèles. C'est simplement ça qu'on dit.

M. Picard : O.K., merci. Au niveau… «L'ICA encourage le gouvernement à adopter rapidement un cadre réglementaire simple et souple qui autorisera également la mise en œuvre des régimes de retraite à prestations cibles.» Vous ne pensez pas que ça va occasionner peut-être un glissement de prestations déterminées vers ce genre de régime là? Vous n'avez pas de craintes? C'est parce que tout le monde nous dit que prestations déterminées, c'est le meilleur. Puis les retraités aussi nous le disent, là. Donc, j'aimerais vous entendre.

M. Lafrance (Jacques) : Mettons en place d'abord un cadre qui favorise les régimes à prestations déterminées. Oui, il va y avoir des employeurs qui n'en veulent plus, de régimes à prestations déterminées, et ils s'entendent avec la partie... avec leur syndicat pour dire : Allons-y plutôt vers un concept à régime prestations cibles. Présentement, ce n'est pas permis. Alors, moi, si je suis l'employeur, je ne suis plus intéressé au régime à prestations déterminées, prestations cibles, ce n'est pas permis, la seule autre solution qu'il me reste, c'est cotisation déterminée. On pense, nous, comme profession, que quand même le régime à prestations cibles peut constituer pour plusieurs employeurs et groupes d'employés une meilleure solution qu'un régime à cotisation déterminée, et il faut le permettre. Laissons justement de la souplesse.

Pour répondre à votre question, oui, effectivement, ça va faire en sorte que certains régimes à prestations déterminées vont être peut-être terminés pour être remplacés par les régimes à prestations cibles. Mais, si, de façon générale, on a un encadrement encore meilleur et plus flexible pour les régimes à prestations déterminées, bien peut-être qu'on va être, comme on dit, en «win-win situation», où on va avoir plus de régimes à prestations déterminées puis aussi des régimes à prestations cibles.

• (17 h 20) •

M. Picard : Si je comprends bien, si on fait… je veux dire, si on fait le ménage dans le fouillis administratif que les gens nous ont parlé aujourd'hui, pour optimiser les conditions gagnantes des régimes à prestations déterminées, le glissement qu'il risque d'y avoir est peut-être moindre. Puis je comprends que, lorsque vous dites : Prestations cibles, il y a des gens qui n'en veulent pas de prestations déterminées, bien là ils vont aller au moins au deuxième dans la catégorie.

M. Lafrance (Jacques) : ...en fin de compte, on mutualise les risques parmi les participants, c'est que… pour plusieurs situations, c'est une meilleure situation qu'un régime à cotisations déterminées, où chacun est responsable de son propre avenir.

M. Picard : O.K. Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière. Et je dis à M. Lafrance, M. Latulippe, M. Simard : Merci beaucoup de votre participation à notre commission.

Et je suspends nos travaux quelques minutes pour permettre aux représentants du Syndicat canadien de la fonction publique, secteur Québec, de prendre place.

(Suspension de la séance à 17  h 21)

(Reprise à 17 h 26)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous continuons nos travaux. Et je souhaite la bienvenue à MM. Bolduc, Ranger, Pilon et Belleville, représentants du Syndicat canadien de la fonction publique, section Québec. Est-ce que c'est bien de dire ça? Alors, vous avez jusqu'à une quinzaine de minutes pour vous présenter et présenter votre rapport, et je vous laisse la parole.

Syndicat canadien de la fonction publique,
Québec (SFPQ-Québec)

M. Bolduc (Denis) : Alors, merci. Merci, M. le Président. Merci à la commission pour l'invitation qui nous a été faite. Je salue la ministre, Mme Maltais, vous, parlementaires.

Je me présente, Denis Bolduc, secrétaire général du SCFP-Québec, et mes collègues, Marc Ranger, qui est directeur-adjoint du SCFP-Québec depuis février. Dans sa vie antérieure, il était conseiller chez les cols bleus à la ville de Montréal. C'est un peu l'architecte de l'entente historique qui a eu lieu avec les cols bleus de Montréal. Sylvain Pilon, notre recherchiste, notre représentant à la table de travail du ministère des Affaires municipales sur les régimes de retraite. Et Jean Belleville, actuaire-conseil pour les syndicats du SCFP-Québec et directement impliqué dans plusieurs règlements novateurs intervenus à ce jour.

Le SCFP, au Québec, c'est 112 000 membres, c'est le plus grand affilié de la FTQ. On a près de 30 000 membres dans le monde municipal. 70 % des travailleurs syndiqués dans les municipalités au Québec sont au SCFP, 10 500 membres dans le secteur universitaire, 17 500 membres dans le secteur énergie, ici on parle d'Hydro-Québec. On a également quelques dizaines de milliers de membres dans le secteur privé, autant sous juridiction fédérale que sous juridiction provinciale. Et le SCFP, au Canada, c'est le plus grand syndicat au Canada, 620 000 membres.

Au SCFP, on est fiers de dire que ça fait trois ans qu'on se préoccupe sérieusement du dossier des régimes de retraite qui sont en crise. Avant même le début des travaux du comité D'Amours, on a tenu deux jours de rencontre extraordinaire à Montréal, on a choisi une approche axée sur la communication et la transparence pour amener nos gens en mode travail, en mode recherche de solutions. C'est ce qu'on a fait. Il y avait 628 participants à cette rencontre-là, tous et toutes des leaders dans leurs syndicats locaux. Le document synthèse qu'on a adopté lors de cette rencontre-là, on dit là-dedans — un an avant D'Amours : Le statu quo n'est pas une option. On l'a dit un an avant D'Amours.

On est la seule organisation syndicale au pays qui a réussi à dégager une position commune pour l'ensemble de ses syndicats sur la question des régimes de retraite. Ne cherchez pas ça ailleurs au Canada, vous ne le trouverez pas. Puis, en plus, on ne l'a pas seulement dit, on l'a fait. On l'a fait avec les cols bleus de Montréal, à l'Université de Montréal, les cols bleus de Laval, on l'a fait avec les gens à Saguenay, les cols blancs à Saguenay, Société Radio-Canada. Alors, on pourrait vous donner plusieurs exemples comme ça. On a assumé un leadership important dans ce dossier-là.

Donc, à ce jour, on a des beaux résultats, on a des résultats concrets. Ce qu'on dit, c'est : Il faut rester calme. Il faut ne pas paniquer. La roue a commencé à tourner, puis il faut donner aux parties les outils nécessaires pour leur permettre de réaliser leurs ententes à elles.

Les gens qu'on représente, ce n'est pas des extraterrestres, c'est des gens qui vivent sur la même planète que vous et moi. Ils sont conscients des problèmes actuels, des dangers qui nous guettent si on ne fait rien, si on n'agit pas, si on ne fait pas les ajustements nécessaires dans nos régimes de retraite. Et, il ne faut pas l'oublier, c'est leur régime de retraite à eux, qu'ils ont mis de longues années à bâtir. Donc, ils doivent comprendre ce qu'on leur demande, la solution qu'on leur propose doit être accessible et transparente.

• (17 h 30) •

Puis, au SCFP, donc, ce que je suis en train de vous dire, c'est qu'on n'a pas attendu le comité D'Amours, on ne s'est pas croisé les bras en attendant que les solutions viennent d'elles-mêmes ou d'ailleurs, puis on a dit : On va faire la démonstration que c'est possible de faire quelque chose.

Puis, pour nous, la solution D'Amours, c'est une approche académique à un problème pratique. D'Amours, il lance un débat technique. C'est un débat pour experts, c'est complexe, c'est pour initiés. Puis il est loin de faire l'unanimité chez les actuaires, vous les avez entendus aujourd'hui. Et il nous dit tout d'un coup que, depuis 30 ans, tout le monde s'est trompé dans ce dossier-là. On dit : Voyons donc! Voyons donc!

L'expérience du terrain, on l'a. Nos régimes à prestations déterminées sont en danger, on ne nie pas ça, c'est vrai, mais la cause, nous, ce qu'on dit, la cause est structurelle, puis ça nécessite une meilleure gestion des risques. Ce qu'on dit, c'est que D'Amours veut réinventer la roue; nous, on a commencé à la faire tourner.

Puis il y a un point qui nous laisse quand même perplexes, c'est : D'Amours, le comité D'Amours est complètement muet sur les travaux… c'est des travaux extrêmement importants qui ont eu lieu à la table du ministère des Affaires municipales puis qui se sont déroulés sur une période d'un an et demi. Puis ces travaux-là, ils ont accouché sur un véritable consensus négocié avec les vrais intervenants sur le terrain. Tous ceux qui sont à négocier des régimes de retraite, ils étaient présents à cette table-là. On parle de l'Union des municipalités du Québec, de la ville de Québec, de la ville de Montréal, les autres organisations syndicales au Québec. La Régie des rentes puis le gouvernement étaient représentés par le biais du ministère des Affaires municipales. Et, pour un comité d'experts qu'on dit indépendant, neutre, permettez-moi de vous dire que taire ça, c'est une lacune très importante, je dirais une faille dans la réflexion, et ça ne fait pas sérieux.

La proposition D'Amours, c'est une formule mur à mur qui ne tient pas compte des réalités de chacune des parties. Et la majorité des propositions qu'il avance vont dans la même direction. Ce qu'on veut, c'est alléger le fardeau et le risque des employeurs, le transférer aux participants puis diminuer, donc, les conditions à la retraite. Résultat : on tire tout le monde vers le bas.

Le véritable objectif, ça devrait plutôt être d'assurer un revenu adéquat à la retraite pour tout le monde. C'est ça, c'est ça, l'objectif ultime. Puis nous, on s'inspire largement des travaux du ministère des Affaires municipales pour vous suggérer une nouvelle approche qu'on appelle l'approche PFSI, provisionnement avec fonds de stabilisation et d'indexation. Puis la beauté de cette proposition-là, c'est qu'elle est exportable à tous les régimes. C'est une approche prudente qui assure un financement, un meilleur financement puis qui préserve des revenus adéquats à la retraite.

Puis l'autre avantage — puis, celui-là, il n'est pas insignifiant — c'est : Nous, on sait comment nos membres réagissent à l'approche qu'on leur suggère, il faut éviter absolument les décisions unilatérales. On n'a pas besoin de créer des chicanes, des frustrations qui vont laisser des traces des années durant, on n'a pas besoin d'un tel fiasco.

Les firmes d'actuaires que vous avez entendues aujourd'hui, on les croise, leurs représentants, à nos tables de négociation. Puis certaines d'entre elles supportent l'approche qu'on vous propose, le PFSI. Et d'ailleurs, ils vous l'ont dit aujourd'hui. C'est quoi, ça, cette approche-là? En fait, ce qu'on dit, c'est : Il faut constituer une réserve spécifiquement financée à même le service courant. Nous, on fixe un objectif de 20 % constitué graduellement au fil des années; D'Amours, lui, il suggère 15 % sous la forme d'une peine. Nous, on va plus loin encore que D'Amours à cet égard-là.

Et comment on va la bâtir, cette réserve-là? Bien, en haussant les cotisations puis en remodelant les droits et les prestations pour la participation future. Puis à quoi elle va servir, cette réserve-là? D'abord à éviter les catastrophes qu'on a connues ces dernières années puis elle va servir de coussin en cas de coups durs, de chute de rendement dans le futur puis à procurer des ajustements d'indexation mais conditionnelle, à la retraite, pour les années de participation futures. Ça, c'est une de nos réponses à une meilleure équité intergénérationnelle.

On a des exemples, dans notre structure, où les gens ont accepté, à très forte majorité —on parle ici de 90 % et plus — de cotiser 2 % à 3 % des salaires en plus, puis, par-dessus ça, de réduire en même temps des droits équivalant, dans certains cas, à 3 %, 3,5 % des salaires. Faites le total de ça, là, c'est énorme, c'est colossal. Puis c'est ça, la réalité, puis c'est ça qu'on n'entend jamais sur la place publique. Mais, pour arriver à un résultat comme celui-là, ça prend de la souplesse, il faut laisser la place à la libre négociation, il faut que les gens impliqués puissent faire leur choix eux-mêmes. Ce qu'on vous demande, c'est : Donnez-nous les outils pour agir, mais ne nous imposez rien.

Quelques mots sur le test de capitalisation améliorée proposé par le comité D'Amours. Il a un très grand défaut, il ne tient pas compte du tout de la pérennité des organisations. Pourtant, il y a six ans, après des années de réflexion, des années de discussion, il a été convenu de soustraire certaines organisations au test de solvabilité. Pourquoi? Parce que la nature même de ces organisations fait en sorte que les risques de terminaison du régime sont à peu près, à toutes fins pratiques, inexistants. C'est… une ville, une université, Hydro-Québec sont de cette catégorie, même s'ils ne sont pas, dans la pratique, dans l'application.

Puis là, d'Amours, ce qui arrive, c'est que ce qu'il nous dit, c'est qu'il propose de jeter tout ça à la poubelle, toute la réflexion qui a été faite, il fait fi de cette réalité-là puis il suggère un seul test pour tout le monde, le même. Aucune justification, dans son rapport, expliquant une remise en question d'une décision aussi importante, somme toute récente puis qui a pourtant été longuement mûrie. Nous, on trouve ça méprisant. Et le résultat de tout ça, si on applique intégralement cette proposition-là, on vient de doubler artificiellement les déficits dans ces organisations-là. Avant même qu'on mette en place des solutions, on double la grosseur de la montagne qu'il faut franchir. Puis ça, ça vient malmener inutilement, injustement le principe d'équité entre les générations.

La question des droits acquis. D'abord, le principe de base, nous, ce qu'on dit : On ne change pas les règles du jeu rétroactivement. Et les droits acquis, c'est un sujet tabou, c'est un sujet tabou. Il y a quelques années, là, on n'aurait même pas pu en parler. Mais on est responsables, on ne fait pas l'autruche, on sait que, dans des situations exceptionnelles, où les gens cotisent déjà à un niveau élevé, où il n'y a plus de marge de manoeuvre, bien un groupe pourrait être amené à regarder cette avenue-là. Mais ce qu'on dit, c'est que, par le biais de la négociation, uniquement par le biais de la négociation, il pourrait être envisageable de reconsidérer certains acquis dans des situations particulières, exceptionnelles.

Vous allez nous dire : C'est bien beau, le principe de la liberté de négociation, mais — j'entends déjà la question — qu'est-ce qu'on fait, qu'est-ce qu'on fait en cas d'impasse dans les négociations? C'est une question sur laquelle on a longuement réfléchi. Et le comité d'Amours laisse entendre que les syndicats sont les responsables en cas d'impasse des négociations. C'est le mythe de l'employeur responsable puis du syndicat rigide. Je peux vous dire que le contraire existe.

On vous suggère une approche novatrice, respectueuse des parties puis qui respecte le principe de la libre négociation. On propose un mécanisme de conciliation où on retrouverait un comité formé d'un conciliateur et de deux autres personnes, deux assesseurs qui représenteraient chacun une des parties. Ça pourrait être un actuaire, par exemple. Puis, au terme du processus de négociation, le conciliateur, seul ou avec une des deux parties, aurait la possibilité de soumettre une proposition sur les points en litige, mais uniquement les points qui concernent le régime de retraite. Puis les parties auraient l'obligation, l'obligation de la soumettre à leurs instances respectives pour approbation ou rejet. Et donc, dans le cas d'un syndicat, on parle de l'assemblée générale. Dans le cas d'une ville, on parle du conseil de ville, pas du comité exécutif, du conseil de ville. Et, s'il y a un rejet, bien on retourne à la table de négociation, mais avec toute la pression que ça peut mettre sur les parties. Et, si les trois membres du comité s'entendent sur une solution commune, la solution s'applique sans autre formalité. On s'oppose donc à toute proposition qui donne à l'employeur la possibilité de revoir unilatéralement la formule d'indexation. C'est ce genre de partisanerie qui est d'ailleurs palpable à plusieurs endroits dans le rapport D'Amours.

• (17 h 40) •

En conclusion, en conclusion, M. le Président, le SCFP-Québec et le comité D'Amours, on fait le même constat : il faut agir. D'Amours se donne une mission : renflouer la caisse selon une approche qu'on dit dogmatique, une approche idéaliste puis sur le dos uniquement des participants. Nous, ce qu'on dit, au SCFP, on dit : Pour demander aux travailleurs de faire des sacrifices, il faut de la transparence. Ils doivent comprendre ce qu'ils font, ils doivent comprendre leurs décisions. Il faut que les solutions proposées soient justes, responsables puis qu'elles tiennent compte de la nécessité d'assurer des revenus de retraite adéquats, évidemment compte tenu des efforts qu'on leur demande.

Et donc l'approche PFSI qu'on suggère est simple, mais pas simpliste. Elle est dynamique, non statique puis elle est flexible dans le temps. Elle s'appuie sur toute la rigueur actuarielle de l'Institut canadien des actuaires — vous avez une étude récente dans l'annexe C de notre mémoire, de janvier 2013. Elle s'appuie aussi sur un véritable consensus auprès des parties qui ont à négocier des régimes de retraite — je parle de la table du MAMROT. Puis elle s'appuie aussi sur 50 années d'expérience, au SCFP, sur le terrain, à négocier avec les employeurs. Et surtout — je vous l'ai dit au départ, mais je conclus avec ça — elle s'appuie... elle est acceptée, elle est comprise par une forte majorité de nos membres lorsqu'ils ont à prendre des décisions aussi importantes sur un sujet aussi important que leur sécurité financière pour les dernières années qu'ils vont passer sur cette terre. Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci. Et je cède maintenant la parole du côté ministériel. Mme la ministre.

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Alors, bonjour M. Bolduc, heureuse de vous retrouver. M. Ranger, Me Pilon, M. Belleville, qui est l'actuaire, de ce que je comprends, merci beaucoup de venir nous présenter votre point de vue aujourd'hui.

Aujourd'hui, c'était une journée plus actuaire, là. Vous venez… on sent qu'on a des participants qui sont ici, ce qui est très différent. On sent qu'on n'est plus dans l'approche… mais vraiment des gens qui, comme vous le dites, ont les deux mains à la pâte, des gens qui vivent de façon pratico-pratique toutes les difficultés de la pérennisation des régimes de retraite puis qui sont en contact constant avec les comités de retraite, avec les patrons, avec les conventions collectives. Alors, c'est vraiment... on a un peu un aperçu de ce qu'on va voir la semaine prochaine. Parce que c'est un peu ça. Cette semaine, c'est un peu des experts ou des gestionnaires; la semaine prochaine, c'est des gens qui participent vraiment aux régimes de retraite.

Écoutez, vous avez dit : Donnez-nous des outils pour agir, ne nous imposez rien. Il y a pourtant un constat dans le rapport D'Amours qui, jusqu'ici, a été partagé par à peu près tout le monde, c'est : Le statu quo, il ne faut pas, c'est impossible. J'ai plutôt l'impression que votre présentation est du côté du statu quo. Alors, vous dites : Donnez-nous des outils pour agir, mais je n'ai pas l'impression que vous voulez une remise en question véritablement de la façon dont on fonctionne actuellement. Ça fait que j'aimerais ça que vous me clarifiez ça, là, jusqu'à quel point vous voulez des outils imposants ou si c'est juste des modifications peut-être règlementaires ou législatives qui vous donneraient un peu plus d'espace. Qu'est-ce que vous voulez dire par «donnez-nous les outils pour agir, mais ne nous imposez rien»?

M. Bolduc (Denis) : C'est des modifications législatives qui vont nous donner plus d'espace pour trouver des solutions aux tables de négociation. Pourquoi on imposerait un 50-50? Pourquoi on imposerait des choses qui feraient en sorte qu'on a une solution qui est déjà mâchée, et tout ça? La réalité, là, de chacune des tables de négociations, la réalité à Montréal n'est pas la même qu'à Québec, puis on pourrait descendre la grosseur des villes comme ça : n'est pas la même qu'à Saguenay, pas la même qu'à Trois-Rivières puis que dans une municipalité dans Bellechasse. Chaque, chaque, chaque employeur, versus la partie syndicale, ils ont des couleurs, ils ont un régime de retraite propre à eux. Ce n'est pas la même solution qui peut s'appliquer dans tous les cas. Pas de solution mur à mur. Donnez-nous les outils, faites en sorte qu'on n'ait pas de barrières, là, sur où on peut agir. Puis, la réalité : Les gens vont avoir à prendre des choix.

Ce qu'on vous dit aujourd'hui, c'est que nos gens, ils sont responsables. On est capables de se présenter devant eux puis de leur dire : Les régimes de retraite sont en danger, il faut faire quelque chose. On l'a dit un an avant D'Amours, là, que le statu quo... On dit : Bien, on va faire notre recette, c'est : on va corriger... en fait, on va se prémunir. Évidemment, nous, on suggère une caisse de 20 %, là, un coussin de 20 % pour se prémunir des dangers ou des fluctuations du marché. Le déficit passé, il y a un contrat de travail qui a été négocié, qui a été signé, nous, on agit immédiatement, on est prêts à agir immédiatement à régler le présent, prendre les mesures qui s'imposent pour le futur, pour se parer aux mauvais coups du futur, puis inévitablement ça va avoir un impact sur le passé, ça va venir réduire la pression du passé. Puis, avec les années, si on parle des municipalités, des universités, des organisations pérennes, avec les années, on va effacer le déficit, on va s'être parés pour les coups durs. Puis on pense que, si on a tous les outils pour ajuster, bien, on va être capables de faire des choses.

M. Ranger (Marc) : Puis, pour aller plus loin sur votre question, dans le fond, les changements législatifs qu'on a de besoin... on parlait de mettre sur pied un comité de conciliation avec assesseurs — actuaire patronal, actuaire syndical — à partir d'une banque de données. Ça demande des changements à l'article 54, 55 du Code du travail. Si la ministre du Travail, par exemple, constate que, dans un dossier, il y a une impasse dans les négociations, ça n'avance pas, d'elle-même, elle pourrait demander, imposer la conciliation. Et, dans notre mémoire, pages 40, 41, on donne un mandat très, très encadré au comité de conciliation, ils ne peuvent pas faire n'importe quoi. Pérennité du régime, équité intergénérationnelle, toutes les balises sont là. Donc, ces gens-là ont un mandat. Et on ne voulait pas laisser un conciliateur seul, parce que c'est un sujet qui est complexe, et la recommandation… Et, dans bien des cas, quand il y a des négociations difficiles, un conciliateur, actuellement, peut faire des recommandations. Mais là, si la recommandation est unanime, elle s'applique sans autre formalité.

Et, en plus, on vous demande d'imposer un délai strict : 60 jours, maximum 120 jours. Donc, les parties, il faut qu'elles fassent le ménage. Prenons les négociations à la ville de Québec. Il y a une impasse, on doit faire le ménage le plus possible. La ville ou le syndicat des cols bleus qu'on représente pourrait demander ce recours-là, ou vous-même, vous pourriez demander ce recours-là, avec des modifications minimales. On met sur pied le comité de conciliation. Ça fait une pression énorme sur les parties parce qu'en bout de ligne une recommandation même du conciliateur seulement, on est obligés de la soumettre, ou une recommandation majoritaire. Ça fait que ça, on mise là-dessus. Même chose, vous avez… vous êtes sur le point d'adopter un décret, là, suite au consensus du MAMROT, pour qu'on ait de la flexibilité pour mettre sur pied le fonds de stabilisation. Actuellement, on ne pourrait pas le faire. Ça fait qu'on dit : Donnez-nous cette marge de manoeuvre là, ces outils-là.

Plus loin encore. Parce que, dans notre mémoire, on dit : Les droits acquis, là — quand Denis en parlait — c'est un sujet tabou dans les syndicats. Nous, ce qu'on dit, c'est que, si on a un régime qui est vraiment en très, très grande difficulté, là, bien, à une table de négociation, si on a amené nos cotisations à 10 % du salaire puis qu'on n'est plus capables d'en demander plus aux gens, bien je peux vous dire qu'on va recommander à nos gens de regarder peut-être la rente au conjoint ou une rente accessoire puis dire, à ce moment-là… Actuellement, on ne pourrait pas le faire parce qu'on ne peut pas changer le passé pour nos participants actifs, les années qu'ils ont faites. Si on est vraiment dans le trouble, ça se peut que, de façon rationnelle, pragmatique, on choisisse de prendre cette voie-là. Ça prend un changement législatif pour ça.

Par contre, on dit — puis on a entendu des questions aujourd'hui — la fameuse cotisation 50-50 ou par défaut une cotisation de 50-50, je m'excuse, on n'est pas du tout d'accord avec ça. On l'a prouvé, là, on a des gros règlements, là, avec des gros syndicats puis des… d'importance, laissez-nous négocier. Si ça traîne, bien n'importe qui pourra demander la mise sur pied du comité de conciliation puis intervenir. Mais on ne veut pas de carcan.

Et, Denis le disait, nos membres, là… Chez les cols bleus de Montréal — hein, s'il y a un syndicat qui est vu comme un syndicat revendicateur, là — on a commencé deux ans avant le temps à expliquer à nos gens que le train s'en venait, que ça prenait des changements importants parce que notre régime était en difficulté. Ils ont accepté à 95 % de hausser de 3 % leur cotisation, de partager le déficit dans le futur 55-45 quand c'était 100 % la ville, de faire des changements, de repousser l'âge de la retraite. Ce n'est pas parce qu'on a imposé les mains, là, mais on a dit : Le régime, si on ne fait rien, il va être dans le trouble.

Mais, si vous nous donnez un cadre législatif trop serré, bien, c'est bien de valeur, les parties vont se braquer. Nos gens ont accepté des changements intelligents parce qu'ils les ont compris, mais il ne faut pas nous braquer là-dedans. Peut-être que les cols blancs de Montréal puis les policiers vont trouver leur solution à eux autres. Ce n'est pas la solution des cols bleus. Laissez les gens décider.

Mme Maltais : La question de la rente longévité, vous ne l'abordez pas — je sais que la FTQ va probablement l'aborder, c'est un peu la... c'est la fédération de vos syndicats. Est-ce que c'est parce que vous… Je sais que vous vous rangez derrière la position de la FTQ, qu'on entendra. Mais est-ce que vous pensez, puisque vous avez véritablement des syndicats qui sont impliqués dans le milieu municipal et dans le milieu universitaire, est-ce que vous pensez quand même que cette rente longévité devrait s'appliquer dans ces milieux où vous avez vraiment, là... vous êtes très engagé comme syndicat?

M. Bolduc (Denis) : Je vais vous répondre brièvement, Marc va compléter. La FTQ, justement, va venir vous rencontrer. Nous, on fait… C'est écrit dans le rapport. Je ne vous l'ai pas dit dans la présentation, mais on fait nôtres les recommandations de la FTQ sur les points qu'on ne traite pas dans notre rapport, le RVER, la rente de longévité. Et donc on va laisser la FTQ venir expliquer leur position.

M. Ranger (Marc) : On souriait tantôt parce qu'on se disait : On espère — puis c'est légitime, c'est vous qui posez les questions — qu'on ne passera pas notre période de questions à répondre à cet enjeu-là. Mais, si on avait à le simplifier bien gros, on trouve que c'est un très, très petit pas dans la bonne direction.

J'écoutais tantôt le député d'Outremont, M. Bachand, dire : Les demandes de la FTQ, les demandes syndicales étaient bien trop importantes. Mais, dans le fond, si on commençait à ajuster… augmenter le maximum des gains admissibles, comme le Régime québécois d'assurance parentale... Nos membres à nous — on l'a fait, le débat — ils sont prêts à mettre plus d'argent aussi sur la table. Ça fait qu'au lieu d'avoir une petite rente... C'est un pas, là, mais le 0,5 %, qui n'est même pas garanti puis qui est à partir de 75 ans, nous autres, nos membres sont prêts aussi, pour l'ensemble des Québécois, de mettre plus d'argent, de cotiser davantage pour qu'on ait quelque chose qui ait un peu plus d'allure qu'actuellement au niveau des régimes publics.

• (17 h 50) •

Mme Maltais : O.K. Merci. Non, on ne s'organisera pas pour que vous nous fassiez toujours la même réponse, là. On respecte tout à fait que vous ayez chacun vos… que vous ayez bien négocié vos champs de compétence.

Vous nous parlez beaucoup du fonds de... Comment on appelle, donc, le fonds qu'on a mis sur pied, là, récemment? Ah, O.K., qui va... On a prépublié le règlement. Est-ce que vous pensez que c'est applicable à d'autres? Parce que je comprends que c'est applicable dans votre domaine, c'est une solution. Est-ce que ça pourrait… Est-ce que ce modèle-là, vous pensez qu'il a de l'avenir?

M. Bolduc (Denis) : Nous, on pense... on prétend, on prétend que ça peut être appliqué à tous les régimes, à tous les régimes...

Mme Maltais : Tous les régimes, y compris les régimes privés?

M. Bolduc (Denis) : Oui, oui, incluant les régimes privés. Ça se peut qu'il y ait des modifications, des petits ajustements, là, à faire, là, dans la conception, là, mais nous, on pense que ça peut être appliqué à tous les régimes. En fait, c'est un fonds, c'est une réserve qui est mise sur pied avec des cotisations supplémentaires, à même le service courant, pour pallier aux mauvais coups. Alors, effectivement, nous, on prétend... on a cette prétention-là, oui.

M. Ranger (Marc) : La beauté de notre approche, ce n'est pas parce qu'on est plus fins que les autres, mais, plutôt que de miser sur des surplus hypothétiques à venir, nous autres, immédiatement, avec l'approche qu'on a, le PFSI, c'est que, je prends l'exemple des cols bleus de Montréal, bien, il y a 2,2 % de leurs cotisations salariales qui s'en va dans ce fonds-là maintenant. On n'attend pas que des surplus descendent du ciel, là, comme le rapport D'Amours le prétend. Nous autres, c'est : Déjà, on met de l'argent de côté, déjà, dans les coûts de services courants, on fait les efforts qu'il faut, on l'a expliqué à nos membres. Et ça, oui, c'est exportable.

Puis l'employeur, comment il peut contribuer? Bien, dans certains cas, on a réduit le fardeau de l'employeur de quelques points de pourcentage, 7 millions de dollars par année, par exemple, à Montréal. Bien, en réduisant ce fardeau-là, ils peuvent aussi mettre de l'argent dans le fonds de stabilisation. Ça fait que les deux, on est partenaires là-dedans, on fait des efforts puis après ça… Mais c'est tout de suite, ce n'est pas dans deux... 10 ans… deux, trois, cinq ans.

Mme Maltais : J'ai été étonnée d'un commentaire que vous avez fait dans votre présentation de mémoire, disant que l'objectif du rapport D'Amours était d'alléger le fardeau des employeurs. On a plutôt eu ici des gens qui sont venus nous dire que ça augmentait le fardeau des entreprises, ce qui fait que ça allait nuire à la compétitivité des entreprises québécoises. Puis vraiment, dans l'idée du rapport D'Amours, c'est une augmentation de la masse… des charges sociales sur la masse salariale. Alors, j'ai été un peu étonnée de votre point de vue. Peut-être que vous étiez sur un élan. Mais je pense que l'objectif du rapport D'Amours, peu importe, peu importe si vous n'êtes pas d'accord avec le résultat, mais c'est d'assurer la sécurité financière des gens. En quoi l'application du rapport D'Amours pourrait alléger le fardeau des employeurs puisqu'on augmenterait les taxes sur la masse salariale?

M. Bolduc (Denis) : Bien, en fait... Puis on ne veut pas, disons, cibler le comité D'Amours, mais il y a quand même certaines constatations qu'on fait, par exemple, sur la composition même du comité, où on représente... La voix syndicale, la voix des travailleurs n'est pas présente au sein de ce comité-là. Il y a une firme... Il y a une personne sur le comité qui a de l'expérience au cours des cinq dernières années sur les tables de négociations, puis je peux vous dire que c'est... il représente la firme avec laquelle on a des problèmes aux tables de négociation.

Et, quand on lit le rapport, nous, on a cette impression-là qu'on veut alléger le fardeau pour les entreprises. Puis ce qu'on suggère, c'est : on protège la rente de base — hein, c'est un exemple, hein, il le dit carrément — on protège la rente de base, puis tout le reste, là, c'est volatile, on peut jouer là-dedans, on peut même imposer, donner... on donne un outil à l'employeur au cas où on ne s'entend pas, hein? Et on ne voit pas cet outil-là à la partie syndicale. C'est un peu pour ça que je vous ai dit : Le mythe, là, de l'employeur responsable puis du syndicat rigide, là, puis que le contraire existe, là… Dans le rapport, on ne sent pas ça, on sent le parti pris patronal dans le rapport.

Mme Maltais : Merci. Si je dis les mots «White Birch», je vais vous dire qu'on peut se comprendre sur : Parfois, l'employeur est rigide.

M. Ranger (Marc) : Peut-être qu'on a pris un raccourci, là, au niveau de la présentation, mais, dans le fond, la règle de la capitalisation améliorée, nous autres, c'est une façon artificielle, pour les municipalités puis les universités, de mettre un poids, tellement énorme, une pression tellement énorme sur les parties, que finalement les participants vont être obligés de couper dans leurs droits pour être capables de rencontrer ces obligations-là. Ça fait que nous, on dit... Puis, dans le municipal, M. D'Amours l'avait dit presque avec le sourire : Oui, les déficits passeraient, sur papier, de 4 à 8 milliards de dollars. C'est quoi, la résultante de ça? C'est tellement important comme effort que c'est sûr que les villes vont se tourner, comme il y en a qui ont fait ici, puis dire : La capacité de payer des citoyens n'est pas là. Mais, en même temps, ils se fient sur une règle qui, pour nous, n'est pas applicable. Ça fait qu'on dit : En bout de ligne, on serait obligés de sabrer dans vos régimes de retraite. Ça fait qu'on a pris un raccourci pour arriver à alléger.

Mme Maltais : Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, sept minutes.

M. Chapadeau : Merci, M. le Président. Merci pour votre excellente présentation. D'ailleurs, le député de Verdun l'a souligné à quelques reprises ce matin, l'excellence des mémoires, des propositions qui sont… que vous faites dans votre mémoire.

Vous parlez de la fierté, là, de voir que certains de vos groupes qui sont affiliés aient pu s'entendre sur des enjeux fort importants comme celui-là. Je comprends que, pour vos membres et pour les directions, c'est fort important... c'est des enjeux qui sont fort importants. Donc, chaque fois que vous réussissez une entente, j'imagine que vous avez de quoi à être fiers d'avoir imaginé puis trouvé des solutions, là, pour pouvoir vous entendre avec les différentes parties prenantes.

Pouvez-vous nous dire quels sont les principaux paramètres et les principes qui ont guidé ces ententes-là? Je veux juste citer les cols bleus de la ville de Laval, en juin 2012, il y a eu une entente, les cols bleus de la ville de Montréal, vous en avez parlé un peu tout à l'heure, les employés de soutien de l'Université de Montréal, les cols blancs de la ville de Saguenay. Donc, si vous pourriez élaborer un peu sur ces principaux… ces paramètres-là.

M. Ranger (Marc) : Dans le fond, ce n'est pas compliqué, ça tourne toujours un peu autour des mêmes points. D'abord, souvent, ça passe par une hausse de la cotisation salariale. Ça fait qu'on explique à nos gens qu'il faut mettre plus d'argent dans les régimes. Si on regarde, à Montréal, la cotisation était de 35 %-65 %, on a ramené ça à 55 %-45 %.

Il y a la question du partage des déficits. Selon les dossiers, il y en a qui ont trouvé d'autres solutions, qui ne partagent pas les déficits dans le futur, mais il y a d'autres endroits où on a accepté la notion de partage des déficits. Par contre, en acceptant la notion de partage des déficits comme sacrifice, on a dit, puis c'est dans le mémoire aussi : La gouvernance, il faut la revoir, des régimes de retraite. Ce n'est pas vrai que, si on est plus au bâton, c'est l'employeur qui décide de tout puis que nos gens vont subir en bout de ligne. Un vrai paritarisme de ce côté-là.

La notion de l'âge de la retraite, ce fameux dossier-là. Nous, on dit : Ça aussi, pas de mur-à-mur. Mais on l'a adressé dans certains groupes, parce que, dans certains groupes, c'était : Après 30 ans de service, automatiquement tu peux prendre ta retraite. Puis, bien sûr, on est conscients qu'aujourd'hui les gens vivent plus longtemps, ça fait qu'on a regardé des questions de déplafonnement, de repousser l'âge de la retraite, mais pas mur à mur parce qu'il y a des catégories d'emplois où ça peut être logique de l'amener à un certain niveau puis il y en a d'autres où ça ne l'est pas. Donc, chacune des parties, localement, peuvent regarder cette réalité-là.

Ensuite, la question des... M. D'Amours appelle ça des bénéfices accessoires, nous, ce n'est pas le cas, on n'appelle pas ça des bénéfices accessoires. Mais, si les cotisations salariales sont déjà assez élevées, bien ça se peut qu'on revoie, par exemple, la rente au conjoint comme avantage puis qu'on la remodule. Bien, ça, ça sauve aussi des coûts pour le régime de retraite.

Ça fait qu'essentiellement ce qu'on regarde, on préserve l'intégrité de notre régime à prestations déterminées, mais on fait des réaménagements pour dégager des marges de manœuvre, marges de manoeuvre pour créer le fonds de stabilisation, fonds de stabilisation qui, dans l'avenir, on disait : Bien, lui, il va pallier. Ça fait que, pour l'employeur aussi, c'est un allégement, parce que, quand on a un fonds de stabilisation qu'on propose à aller graduellement jusqu'à 20 %, bien, s'il y a des mauvais coups, l'employeur ne sortira pas de l'argent de ses poches, ça va se prendre dans le fonds de stabilisation puis, on dit, de façon bien prudente.

Puis sur ce point-là, parce qu'il y a le concept d'équité intergénérationnelle aussi, là, nous, on a trouvé un peu la solution. On demande aux participants actifs, donc à nos travailleurs actuels qui ne sont pas encore à la retraite, de mettre plus d'argent, souvent beaucoup plus d'argent dans le régime de retraite. M. D'Amours dit : Bien ce n'est pas juste, toute la pression est sur ces gens-là. Nous, ce qu'on dit, c'est que ces gens-là à qui on demande plus d'efforts, les travailleurs actuels, eux, si jamais il y a assez d'argent dans ce fonds de stabilisation là, bien on va venir aménager une indexation supérieure pour eux autres, pas les retraités — on ne change pas les règles du jeu s'ils sont déjà à la retraite — mais les travailleurs à qui on demande un effort supplémentaire, on va leur donner plus éventuellement. Et ça, comme discours et comme résultat, dans tous nos groupes, les gens ont acheté ça.

Et les retraités ont supporté nos règlements. Ils n'ont pas demandé à avoir plus. Ils ont dit : Non, c'est correct, vous respectez que, nous autres, on ne touche pas aux règles du jeu. Par contre, les nouveaux travailleurs, ils en font plus… C'est ça, nous autres, l'équité intergénérationnelle : Tu en fais plus, tu es plus jeune, tu en mets plus d'argent? Mais toi, on va venir améliorer davantage, si l'argent est là, l'indexation. Puis, en même temps, on évite d'avoir un régime à prestations… Puis les nouveaux, comme on voit des fois dans des organisations, prestations, puis, woup!, à partir d'une telle date, c'est un cotisation déterminée. Ça, c'est catastrophique dans nos groupes parce que les gens voient ça comme à deux vitesses puis traité différemment. Mais là j'ai répondu trop longuement. Désolé.

M. Claveau : Il reste combien de temps?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Il reste deux minutes. Oui, M. le député de Dubuc.

• (18 heures) •

M. Claveau : Oui. Par rapport aux droits acquis, je voulais vous entendre. Vous classez… vous faites une distinction entre les participants actifs, participants retraités. Vous dites : C'est absolu, il ne faut pas toucher aux prestataires retraités, dans les solutions.

M. Ranger (Marc) : Exactement, oui.

M. Claveau : Mais je voudrais vous entendre là-dessus parce que ça vient limiter quand même le cadre de négociation.

M. Bolduc (Denis) : On dit, on dit aussi qu'on pourrait s'adresser aux retraités concernant l'indexation. S'il y a des formules d'indexation prévues dans un régime, on pourrait s'adresser aux retraités et, seulement, seulement s'ils sont d'accord, on pourrait prendre des mesures, par exemple, de suspendre l'indexation, mais pas au-delà de là, puis pas s'il n'y a pas d'accord. Bon.

Pour nous autres, c'est important parce que les gens qui ont pris leur retraite, là, sur certaines… Ils ont pris une décision, il y a 10 ans, ils ont pris une décision et une décision éclairée avec des chiffres en main, puis tout ça. Et, aujourd'hui, 10 ans plus tard, s'ils n'ont pas bénéficié d'indexation, là, leur rente qui était adéquate à l'époque peut-être déjà ne l'est plus 10 ans plus tard, à cause de l'inflation, etc. Parce qu'il y a beaucoup de régimes qui n'ont pas de formule d'indexation automatique, là. Puis les formules d'indexation, de pleine indexation, c'est l'exception. Alors, nous, on dit : Les gens ont pris des décisions, assumons le passé, hein, puis travaillons pour le futur. C'est un principe... C'est un principe, on tient à ça. On tient à ça. On ne peut pas…

Mais je pourrais me permettre… Mais, regardez, on dit «rétroactivement»… Parce que toucher aux droits acquis pour les retraités, c'est toucher rétroactivement à leurs rentes, là, prendre une décision, changer les règles du jeu en cours de route. On a eu, dans le dernier budget du gouvernement, une mesure qui a été appliquée rétroactivement concernant des bouteilles de vin… les taxes sur l'alcool. Ça a fait un tollé, hein, ça a fait un tollé pour quelques centaines de dollars par restaurateur. Et on le ferait pour les retraités puis ça serait correct?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci. Et nous passons du côté de l'opposition officielle. M. le député de Verdun.

M. Gautrin : Je vous remercie, M. le Président. Je vais commencer par une remarque. Vous dites : Laissez-nous la chance de négocier, au lieu d'avoir le 50-50, de pouvoir le négocier. Je me permettrais de rappeler aux parlementaires de cette commission que nous avons déjà, il y a quelques mois, passé une loi qui était le résultat d'une négociation du gouvernement avec les agents en services correctionnels. Et, au cas où vous ne le saviez pas, cette loi que nous avons passée… Parce qu'il fallait qu'on la modifie, c'est un régime public qui n'était, bien sûr, pas couvert par la Loi sur les RCR. Nous avons entériné la décision du gouvernement à ce moment-là de négocier un partage 55-45 quant aux participations au régime de retraite. Je dis ça pour commencer simplement, pour rappeler que, nous, les parlementaires — M. le Président, vous vous en rappelez certainement — on a entériné ceci dans la loi qui a été adoptée, je crois, il y a quelques mois.

Je ne sais pas si vous avez été là aujourd'hui, vous avez remarqué que j'étais très, très intéressé par ce que vous appelez le fonds de stabilisation et d'indexation. Et vous avez remarqué qu'à chaque fois que j'ai posé la question — et je faisais référence plus spécifiquement à votre mémoire — l'ensemble des actuaires ont démontré une ouverture, sinon une certaine empathie vers ce mécanisme, comme vous dites avec raison, qui est à la fois un provisionnement a priori et une éventuelle indexation a posteriori, qui sont les deux clés du fonds que vous êtes en...

Est-ce que vous pourriez nous... Et je m'adresse à vous, qui êtes des gens de terrain. Vous l'avez non seulement pensé sur le plan théorique, vous l'avez expérimenté. Quelle est la réaction ou comment ça se développe? Alors, vous représentez, bien sûr, le secteur public en grande partie et vous représentez aussi des gens dans le secteur privé. Est-ce qu'on a essayé de le tenter aussi dans le secteur privé? J'aimerais connaître un peu… Parce qu'il est clair que c'est une loi… une voie — excusez-moi — qui permettrait de clarifier bien des choses, qu'il faudrait évidemment encadrer dans la Loi sur les RCR, vous comprenez bien. Mais est-ce que… Quel était le type d'adhésion que vous avez eu autour de ça et dans le secteur public et éventuellement dans le secteur privé?

M. Ranger (Marc) : Non seulement en termes d'adhésion, mais ça a été l'élément clé qui a fait en sorte que nos gens ont supporté à très, très forte majorité les règlements qu'on leur a proposés — hein, on disait tantôt, à Montréal, à 95 % — parce que c'est une mécanique qui est simple. Hein, on disait tantôt : Vous allez payer plus, c'est vrai; vous allez prendre votre retraite plus tard, c'est vrai; on réaménage des droits, c'est vrai; par contre... Et on n'a pas fait de promesses, on a été... Et c'est pour ça qu'il faut faire confiance à l'intelligence des gens quand on leur donne l'heure juste. On leur a dit : Peut-être que c'est uniquement dans 10 ans qu'on va être capables de voir les bénéfices de cette approche-là et que vous allez pouvoir commencer à le voir. Mais tout ça, les gens, quand ils ont vu que, oui, puis on préserve l'intégrité de notre régime, puis il faut faire ces efforts-là, ça a été un raz-de-marée d'appuis, mais il a fallu le commencer longtemps à l'avance.

Un, pour commencer à l'avance, c'est de dire : Il y a un vrai problème. Nous autres, on ne s'est pas mis la tête dans le sable, on n'a pas eu peur de dire que nos régimes sont en crise. Puis, quand on dit «un problème structurel» — je reviens encore sur cet exemple-là — les cols bleus de Montréal, il y a 5 500 cols bleus actifs, travailleurs, 5 500 retraités. Avant, on disait : Une année de mauvais rendements, ce n'est pas grave parce qu'on va se reprendre. C'est encore vrai parce que les rendements boursiers actuellement sont excellents. Sauf que, là où ce n'est plus vrai, c'est qu'il y a un retraité pour un travailleur, et c'est pour ça que ça prend... Et ça, nos gens, on leur a dit aussi clairement.

Puis j'entendais ce matin des firmes d'actuaires : Il faut faire attention parce que, s'il arrive des grands changements, il va y avoir un exode des gens, qui vont se dépêcher à prendre leur retraite. Ce qu'on a fait dans tous les règlements, on leur a tellement dit longtemps à l'avance qu'il allait y avoir des changements que ça n'a pas changé les habitudes des gens. Montréal, cols bleus, il n'y a pas eu un départ à la retraite de plus que normalement tout le temps qu'on a négocié. On est arrivés à l'assemblée générale, on n'en avait pas parlé avant. À l'assemblée, on a dit : À partir de maintenant, si vous acceptez les changements, demain matin c'est ça qui est effectif. On a coupé des rachats de temps, des gens qui ne pouvaient plus racheter des années de service, des... Mais ils ont eu connaissance de ça à l'assemblée, et ils ont pris une décision éclairée, puis ils l'ont supportée. Ça fait qu'il n'y a pas eu de raz-de-marée

Il faut le faire comme il faut, il ne faut pas le faire par coup de force. Mais cette approche-là — ça fait que je résume, là — c'est simple à expliquer. Réserve : vous mettez de l'argent. Votre argent, oui, c'est vrai qu'il va servir en cas de coup dur aussi. Vous payez plus puis l'employeur va en profiter? Non, le régime va en profiter.

M. Gautrin : Question, simplement : Les versements ou les provisions pour écarts défavorables sont versés dans le fonds ou sont maintenus de... ou sont versés dans le fonds, en général?

M. Ranger (Marc) : ...une comptabilité distincte.

Une voix : De l'argent réel.

M. Ranger (Marc) : Oui, oui. Bien, je vais...

M. Gautrin : Parce qu'à partir du moment où vous avez un tel fonds il est moins nécessaire d'avoir une provision pour écarts défavorables?

M. Ranger (Marc) : Ce n'est plus nécessaire, plus nécessaire.

M. Gautrin : Donc, à ce moment-là, ce que l'employeur contribuait ou doit… devait contribuer, le 7 % que l'employeur... voire le 15 %, tel que suggéré dans le rapport D'Amours, à ce moment-là, peut aller dans le fonds de stabilisation?

Une voix : ...

M. Ranger (Marc) : ...on dispose de la PED. Nous, on dit : Il ne faut pas avoir une réserve à 20 %, puis une autre de 7 % à 15 %.

M. Gautrin : Absolument. Je comprends ça.

M. Ranger (Marc) : On dit : C'est le fonds de stabilisation, il fait la job, et on n'a pas besoin de PED.

M. Gautrin : Bien, écoutez, je vous remercie. On va continuer à voir. Mais j'ai remarqué... Vous avez probablement remarqué qu'on a posé des questions ce matin à l'ensemble des gens, des représentants des différents groupes. Même les actuaires qualifiés, excusez-moi, de «patronal» — si tant est qu'on peut qualifier un actuaire de patronal — ont… non, non, mais ont adhéré... Disons, les actuaires dont les bureaux ont plus traditionnellement des clients qui sont d'origine patronale — je suis plus correct là-dedans? — à ce moment-là, ils ont adhéré aussi à ce type d'approche. Alors, je vous remercie de l'avoir mis de l'avant, et ça devrait être un élément important dans notre réflexion.

Il y a une deuxième chose qui me préoccupe beaucoup, moi, c'est le calcul des transferts. Autrement dit, les gens... Vous comprenez qu'on est dans une situation où, en général, si... moi, je regarde au moment où moi, je... Les gens commençaient à rentrer dans une entreprise et ils faisaient leur carrière, pour la plupart, ils faisaient leur carrière dans la même entreprise ou dans le même groupe. Ce n'est plus le cas. On voit actuellement une mobilité importante dans... Donc, la manière dont on fait les calculs des rentes de transfert est importante.

Dans votre document, vous dites quelque part que la méthode actuellement est parfaitement inéquitable. C'est ce que vous affirmez. Enfin, je peux le retrouver dans votre document, je l'ai lu correctement, ne vous inquiétez pas. Là, le rapport D'Amours propose une autre méthode. Vous avez vu les discussions que j'ai eues, parce que je n'avais pas bien compris, avec l'ICA à l'heure actuelle? Vous, votre position, c'est quoi, à l'heure actuelle, par rapport à la rente de transfert? Et vous comprenez bien que ça va être de plus en plus important. Il va être probable que quelqu'un va faire cinq ans à la ville de Montréal, puis après il va aller travailler chez Hydro-Québec, puis après il va aller travailler, je ne sais pas, moi, sur autre chose. Ça va être de plus en plus courant. Moi, je le vois, par exemple, pour mes enfants. Alors que moi, j'ai été tout le temps, quasiment, avant d'être élu, dans le même employeur, là, maintenant, les enfants bougent beaucoup plus dans… Qu'est-ce que vous suggérez à l'heure actuelle?

• (18 h 10) •

M. Ranger (Marc) : On a été une des seules organisations syndicales à l'adresser, ce problème-là, où on dit : Il faut trouver une solution équitable, on est conscients… Même si, dans les municipalités et les universités, normalement, c'est des cheminements de carrière, hein, les gens, il y a moins de roulement dans les universités et dans les… Malgré que, dans les municipalités, des gens vont arriver des fois plus tardivement au travail. Mais, malgré ça, nous, on s'est penchés là-dessus puis on s'est dit : C'est vrai qu'actuellement le système qui est là est inéquitable, et il faudrait tenir compte… si j'ai 15 années de service dans un régime et j'ai 15 années dans l'autre, je devrais retrouver les bénéfices de 30 années de service. Et…

M. Gautrin : C'est exactement ce que je pense.

M. Ranger (Marc) : Et nous aussi, on est là. Et, ça, on est prêts aussi à faire les efforts là-dessus. Maintenant, sur les détails ou la mécanique, je lui ai dit d'être court, mais notre actuaire va vous…

M. Belleville (Jean) : Alors, je vais être très court, hein? Il y a deux aspects. Il y a l'aspect du calcul de la valeur puis il y a l'aspect du calcul des droits. Ce que vous venez de discuter, c'est la question des droits, hein? On veut s'assurer que, 30 ans à deux, trois, quatre endroits qui avaient des régimes identiques, au bout du compte le membre reçoit le bon montant de rente, soit capable de s'acheter le même montant de rente.

Maintenant, le calcul de la valeur, c'est une autre chose. Tout le monde l'a décrié, tout le monde le dit : Le calcul de la valeur devrait être révisé. Des gens de l'ICA ont dit aussi : C'est un élément excessivement complexe. Nous, ce qu'on dit dans le rapport, c'est qu'on devrait songer, O.K., à faire en sorte que le calcul de cette valeur-là soit plus en ligne avec le financement dont il fait l'objet, cette prestation-là, à l'intérieur d'un régime et on propose une certaine approche, qui est différente mais qui est basée sur cette prémisse, laquelle prémisse est différente de celle actuellement en vigueur.

M. Gautrin : Je comprends, et d'autres collègues vont vouloir aborder la question, je voudrais avoir la chance de pouvoir continuer à échanger sur cet élément-là. Ça fait partie des éléments qui sont importants pour moi et que je réfléchis, mais je n'ai pas nécessairement une solution ad hoc. Je suis sûr que les ministériels aussi. Mais vous comprenez bien que c'est probablement un des problèmes importants qu'on a dans les régimes de pensions pour le futur. Mais je ne voudrais pas prendre le débat et monopoliser le temps sur cette question-là. Je pense que mon collègue d'Outremont a quelques questions à poser.

M. Bachand : Oui, bien, merci. M. le Président, vous permettez?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Merci, bonjour. Plaisir de vous voir. Puis je voudrais d'ailleurs, ce que vous... Je voudrais commencer à féliciter aussi M. Ranger, vous n'étiez pas seul là-dedans, mais les cols bleus de Montréal… et le faire ici en commission... Je l'ai déjà fait publiquement, à plus d'une reprise d'ailleurs, et même pendant que vous négociiez et que ça a été long comme négociation… Puis le maire de Montréal, qui, lui aussi, était patient dans ce cas-là, parce qu'il soutenait l'approche, il me disait : Raymond, aie confiance, on va arriver… Et moi, publiquement, j'essayais de résister aux pressions en disant : Non, ils vont arriver à un règlement. Mais je vous félicite de l'avoir fait. Je ne suis pas toqué sur le 50-50. 45-55, c'est dans le même «ball park», mais ce n'est pas du 20-80 ou du 30-70, alors, on s'entend, c'est du partage de risques presque moitié-moitié. Mais je tenais à faire ça.

Je note aussi avec intérêt, là, votre proposition de réserve, là. À 20 %, c'est quand même costaud. Et je trouve intéressante votre demande de conciliation, là. C'est un mécanisme, là. Il faudrait réfléchir, là, avec le 60 jours. Mais il faut que ça soit un mécanisme assez, assez fort pour vraiment changer la dynamique quand la dynamique est paralysée.

Et vous avez une ouverture — puis après ça, je vais revenir sur une autre question — puis je salue l'ouverture, elle est timide, par exemple, sur l'âge de la retraite, que vous avez à la page 13. J'ai toujours, moi, soulevé cette question-là, toujours en faisant la même nuance que vous, qu'il faut distinguer les tâches. Un col bleu dans les égouts de Montréal, puis dans le système électrique, là, puis dans l'aqueduc, à 60 ans, il mérite sa retraite. Un col blanc n'est pas aussi magané physiquement, etc. Je comprends que le stress, là... Là, je vais avoir toutes sortes de mails, en disant… Mais ce n'est pas le même stress, on peut peut-être travailler plus longtemps quand on a une espérance de vie plus longue quand on est col blanc que quand on est col bleu. Il faut distinguer les tâches, je pense, aussi. Un pompier qui a 125 livres d'équipement sur le dos, là... À 60 ans, tu ne t'en vas pas dans un feu avec 125 livres d'équipement sur le dos. Alors, il y a des principes, mais, après ça, il faut ajuster ça. C'est un petit peu timide, par exemple, l'âge de la retraite, dans ce que vous dites, mais on sent une première ouverture.

Puis, après ça, je m'en vais sur les RVER. Je ne sais pas si vous voulez commenter ce que je viens de dire. C'était un commentaire plus que des questions, à ce moment-ci. Je comprends, là, que… Mais c'est vous qui êtes en face de moi. Puis Michel Arsenault… je suppose que c'est lui, ou sinon la FTQ sera là. Mais c'est quand même un dossier qui a été porté à l'échelle du Canada par le SCFP, bon, la FTQ au Québec, oui, mais par le SCFP à l'échelle canadienne depuis plusieurs années. Et, pendant les deux, trois dernières années où j'étais ministre des Finances, ce dossier de bonification du Régime des rentes a toujours été là. On partage la même préoccupation sur l'enjeu qu'il n'y a pas assez d'épargne pour les retraites globalement. J'avais aussi, moi, et j'ai toujours un enjeu sur les coûts pour l'économie, parce qu'à un moment donné tu peux tuer ton patient quand le remède est trop dur.

Votre proposition, aujourd'hui, dans sa version 2013, là, parce qu'elle a évolué — puis je ne suis plus à la table du ministre des Finances — elle coûte combien à l'économie québécoise? Savez-vous? Avez-vous ce… Je sais que je vous ai vu quand je posais la question, tout à l'heure, ah vous avez dû… Est-ce que c'est un ordre un peu plus raisonnable que le 6, 8, 9 milliards, là, que…

M. Pilon (Sylvain) : Écoutez, j'ai entendu vos commentaires, tantôt, quand vous parliez de chiffres. Je ne veux pas rentrer dans une guerre de chiffres, mais nous, on a fait évaluer les coûts par Bernard Dussault, qui est l'ancien actuaire en chef du RPC dans les années 1990, puis la réponse qu'il nous donne : Ça coûte 3,4 % de plus. Alors, présentement, on cotise 5 % et quelques poussières, chaque partie, là, employeurs et employés, à la Régie des rentes. Ça augmenterait, ça ferait passer ce coût-là de 5 % à 8,4 %.

M. Bachand : 3,4 % partagé...

M. Pilon (Sylvain) : 3,4 % de plus.

M. Bachand : ...partagé moitié-moitié ou 3,4 % pour l'employeur?

M. Gautrin : ...

M. Bachand : Donc, 6,8 %?

M. Pilon (Sylvain) : Exact.

M. Bachand : 6,8 %, oui.

M. Pilon (Sylvain) : Et ça, c'est pour doubler, ça, c'est pour doubler, faire passer de 25 % à 50 %, pas du MGA à 50 000 $, là, mais du montant, là, équivalent de la CSST ou du RQAP, là, de 66 000 $. Ça fait que c'est la base de calcul qu'on a. Ça serait peut-être intéressant de mettre en contact les gens qui ont fait les calculs au gouvernement puis M. Dussault. Sûrement qu'ils seraient en mesure d'arriver à une entente, mais c'est...

Puis il faut voir ça comme de l'épargne forcée. Puis on pense que c'est plus intéressant que le RVER, un régime volontaire d'épargne-retraite où l'employeur n'est pas obligé de cotiser. Nous, on est bien plus de l'approche du ROER, régime obligatoire d'épargne-retraite. Et, avec le régime public, la bonification de la Régie des rentes, bien, c'est l'équivalent, là, de l'épargne forcée pour tous.

M. Bachand : Je vais prendre votre chiffre, 6,8 %, là, puis... ce qui est quand même, si on le mettait en milliards de dollars, je n'ai pas le... mais c'est massif comme ponction dans l'économie, donc il faut le faire graduellement sur je ne sais pas combien d'années, parce que, quand le PIB augmente de 1 % ou... etc. Et aussi, ça vient quand même, parce que c'est beaucoup, 6,8 %... le régime de retraite canadien, mais québécois, est quand même basé sur un certain équilibre entre ce qui est public, ce qui est privé, ce qui est l'épargne personnelle aussi, les grands régimes de retraite comme les vôtres, l'épargne personnelle, etc. Si tu vas chercher 6,8 %, tu viens déséquilibrer ça. Ça, c'est une autre préoccupation.

Je suis d'accord avec vous sur les RVER. Maintenant, la rente longévité, qui est une nouvelle idée, hein, qui n'existait pas, je pense, il y a un an, à moins… — moi, je n'en avais pas entendu parler, puis mes fonctionnaires ne m'avaient pas amené cette idée-là — c'est quand même dans la même logique d'augmenter obligatoirement l'épargne, peut-être insuffisante à vos points de vue, intéressant de cibler 75 ans plutôt que 65 ans. Mais je vais vous laisser commenter un peu sur ça. Parce que vous n'avez pas commenté sur ça. J'aimerais ça…

M. Pilon (Sylvain) : Non, mais juste pour vous dire qu'on a discuté avec M. D'Amours après la présentation de son rapport, puis il nous disait carrément que, la rente de longévité, il s'était inspiré de la campagne du SCFP pancanadienne pour la faire. Puis, je vous dirais, là, pour répondre à l'argument de compétitivité envers les entreprises, il y a beaucoup de provinces au Canada qui étaient en accord avec... d'augmenter la... de bonifier la Régie des rentes... de bonifier le RPC. Il y avait le Québec qui faisait bande à part avec l'Alberta, je crois, là. Et puis, si le Québec avait dit oui, bien ça serait chose faite. Ça fait qu'à partir du moment que c'est toutes les provinces qui augmentent il n'y en a plus, de problème, l'argument de compétitivité des entreprises ne tient plus, là, tout le monde est sur le même pied.

M. Bachand : Mais il y avait un enjeu. Dans la conjoncture économique, il y avait un enjeu majeur à ce moment-là.

Mais vous qui êtes canadiens, là — même si vous êtes le SCFP-Québec, bien vous avez un syndicat canadien — dans la mesure où Ottawa aussi bloque l'augmentation du Canada Pension Plan, là... Et je comprends que, dans les provinces... Puis les provinces n'étaient pas favorables, en tout cas. Puis les provinces... Il y avait une majorité de provinces — je suis d'accord avec vous — d'accord. Ça a peut-être bougé un peu depuis ce temps-là. Je vais vous poser la même question que je posais aux autres, qui n'ont pas vraiment répondu : Est-ce que, comme premier pas, la mise sur pied d'une rente longévité, est-ce que, selon vous, vos collègues des autres provinces, on pourrait avoir un consensus plus rapide que la Régie des rentes?

• (18 h 20) •

M. Ranger (Marc) : Évidemment, on va passer du temps sur cette question-là. Vous êtes bon.

M. Bachand : ...puis vous êtes l'acteur canadien fondamental là-dedans.

M. Ranger (Marc) : Oui, on ne va pas faire un cours là-dessus, mais je vous dirai qu'on n'est pas convaincus, on est loin d'être convaincus que c'est suffisant. C'est très tardif, puis c'est la réaction qu'on a un peu de nos collègues aussi, là, à partir de 75 ans, etc. Mais tout le monde dit que c'est un pas dans la bonne direction, on ne dira pas le contraire, là. C'est un petit pas dans la bonne direction, mais il n'est même pas garanti. Ça fait que c'est pour ça que nous, on dit : On aime mieux miser sur notre campagne publique. C'est une position de négociation, là, à 6 point quelque chose, là. On va se parler. Mais on va préparer Michel Arsenault pour la semaine prochaine.

M. Bachand : Oui, mais à 6 point... Quand une position t'amène en faillite économique, tu ne discutes pas : 6,8 %, c'était majeur. Je ne veux pas dire ça, mes mots exagèrent, mais c'était tellement gros sur l'économie que, tu sais... Mais vous êtes un fin négociateur si vous avez réussi à… ce que vous avez fait dans les municipalités. Mais merci beaucoup.

Une voix : ... il reste quelques secondes?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : En fait, il reste 10 secondes, je pense que c'est le temps que j'aurais pour passer la parole à M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Gautrin : J'aurais eu d'autres questions, mais, enfin...

M. Picard : Merci. Merci pour le mémoire. Moi, j'ai seulement une question, c'est une demande surtout. Vous avez vanté l'entente — que vous qualifiez d'historique — de Montréal. Est-ce que ce serait possible d'avoir les simulations actuarielles pour voir, l'entente, qu'est-ce que ça va faire à la ville de Montréal? Parce que moi, je ne vous cacherai pas, je suis député, je représente les gens de la ville de Lévis, lorsqu'ils ont su que le gouvernement du Québec avait mis 500 millions dans les régimes de retraite de Montréal... J'en ai entendu parler souvent, là. Puis je ne dis pas qu'il y a... En tout cas, ça, ça a été fait. Mais vous vantez votre système, vous avez des ententes un peu partout, mais moi, en tant que législateur, j'aimerais bien voir la vision dans le long terme de ces ententes-là. Est-ce que c'est possible de l'avoir ou…

M. Ranger (Marc) : Bien, c'est certainement possible de voir si on peut avoir des documents là-dessus. Parce que, quand on a négocié, évidemment, les négociateurs du côté de la ville de Montréal aussi faisaient des simulations de nos actuaires pour voir : Est-ce que ce qu'on met sur pied est suffisant? Puis dans quel état va se trouver notre régime avec ces conditions-là dans cinq ans, dans 10 ans, dans 15 ans, dans 20 ans? Les conclusions auxquelles les deux parties sont arrivées avec les hypothèses actuarielles, c'est : On vient... Il est possible qu'il y ait un ajustement du coût de service courant d'ici 2018 d'à peu près 1 % pour stabiliser. Puis, ça, on était prêts à faire face à ça. Mais, ensuite, on se disait : Tous les... pas «tous les scénarios», là, l'actuaire me chicanerait, mais en très forte probabilité que, notre régime, on venait de régler les problèmes. Ça fait que c'est ce qu'on a fait. Mais on regardera votre demande pour voir ce qu'il est possible de faire. Jean, as-tu quelque chose à rajouter là-dessus?

M. Belleville (Jean) : En fait, à la table de négo, il y avait des demandes de l'employeur, O.K.? Et, quand on a déterminé quels étaient les efforts qui étaient nécessaires, quand ils ont été déterminés et qu'on a mis en place justement ce fonds de stabilisation et d'indexation, on avait un résultat où on travaillait sur le futur, O.K., mais, en travaillant sur le futur, on savait qu'on impacterait également le passé, O.K.? Et ça aussi, c'est des éléments qui sont entrés dans la décision pour l'employeur de dire : Ça fait notre affaire, cette chose-là, O.K.?

Et ces chiffres-là sont quand même beaucoup plus difficiles quand même à évaluer, hein, quel est l'impact direct sur le passé. O.K.? Mais ce qu'on a fait... c'est qu'on est capables de quantifier quel est le niveau de protection qu'on accorde à l'employeur par rapport à son déficit futur, hein, parce que ça sert à ça justement, ce fonds-là de stabilisation. Alors, ces scénarios-là, l'employeur les a calculés, il a fait les siens, il les a gardés chez lui aussi, également, O.K.? Et il s'en est montré satisfait.

M. Ranger (Marc) : Puis, si on parle de réserve, l'équivalent, à Montréal, la réserve, c'est 13 %; ville de Laval, c'est 15 %. On va un peu plus loin dans notre... On ne dit pas de changer les ententes qu'il y a eu là, mais on va un peu plus loin pour dire : Graduellement, il faudrait amener ces réserves-là à 20 %. Et là, à ce moment-là, on est dans... on ferait plaisir à tous les actuaires.

M. Picard : O.K. Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski) : Merci, M. le député. Merci énormément, M. Bolduc, M. Ranger, M. Pilon, M. Belleville, de votre participation à notre commission.

À toutes et à tous, je souhaite une bonne soirée, car, compte tenu de l'heure, je lève la séance, et la commission ajourne ses travaux à demain matin, 9 h 30.

(Fin de la séance à 18 h 25)

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