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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Wednesday, June 11, 2014 - Vol. 44 N° 3

Continuation of the debate on the budget speech


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Table des matières

Organisation des travaux

Remarques préliminaires

M. Carlos J Leitão

M. Nicolas Marceau

M. Christian Dubé

Discussion générale

Autres intervenants

M. Raymond Bernier, président

M. Ghislain Bolduc

M. Jean Habel

Mme Rita de Santis

Mme Élaine Zakaïb

M. Saul Polo

M. Claude Surprenant

M. Richard Merlini

M. Marc Carrière

M. Bernard Drainville

M. Amir Khadir

Journal des débats

(Quinze heures cinq minutes)

Le Président (M. Bernier) : Bonjour, bon après-midi. Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte et je demanderais bien sûr, comme d'habitude, à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires. Au nombre de personnes que nous sommes, donc, il faut être capable de respecter cette consigne, je pense que c'est très important.

La commission est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours du budget, conformément à l'article 275 du règlement.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Matte (Portneuf) est remplacé par M. Merlini (La Prairie).

Organisation des travaux

Le Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Donc, je vous souhaite une bonne séance de travail, un bon débat. On a un travail d'environ une dizaine d'heures à faire ensemble. Donc, je souhaite des débats intéressants, des échanges intéressants et dans le respect de chacun d'entre nous.

Avant d'entreprendre nos travaux, je vous informe des règles du débat que nous amorçons aujourd'hui. La répartition des temps de parole pour les 10 heures qui sont consacrées à la poursuite du débat sur le discours du budget a été faite conformément à l'entente relative au fonctionnement de l'Assemblée et des commissions parlementaires, aux fonctions parlementaires ainsi qu'aux aspects budgétaires pour la durée de la 41e législature. À cet égard, je vous informe des enveloppes du temps accordé à chaque groupe parlementaire ainsi qu'aux députés indépendants. Au niveau de la partie gouvernementale, 4 h 45 min; l'opposition officielle, 2 h 51 min; deuxième groupe d'opposition, 1 h 54 min; députés indépendants, 30 minutes. On nous a informés que les députés indépendants seraient présents à cette séance dans quelques… un petit peu plus tard.

Nous débuterons par les remarques préliminaires du ministre, du porte-parole de l'opposition officielle, du porte-parole du deuxième groupe d'opposition, qui disposeront chacun de 20 minutes. Le temps utilisé sera pris à même les enveloppes de temps respectives de chacun des groupes parlementaires. Le temps inutilisé par un groupe parlementaire sera ajouté à son temps pour le débat. Nous procéderons par blocs de 20 minutes, incluant les questions et les réponses. J'appliquerai la règle de l'alternance entre les députés du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés de l'opposition.

Enfin, selon la pratique établie à ce jour, l'étape du débat débutera par une intervention du porte-parole de l'opposition officielle une fois les discours d'ouverture faits. Je dois vous dire également que, bien sûr, ces débats-là sont enregistrés, ils sont enregistrés, ils sont chronométrés, donc on procédera aux ajustements des blocs au fur et à mesure pour s'assurer du respect du temps de parole global qui est accordé à chacun des groupes parlementaires. Ça va?

M. le ministre, vous disposez d'un maximum de 20 minutes. Monsieur…

M. Marceau :

Le Président (M. Bernier) : Oui.

M. Marceau : …avant que nous ne commencions. Pour la période de ce débat, pendant lequel il y aura des blocs, là, de 20 minutes, est-ce que vous nous donnerez une règle quant à la longueur des réponses en proportion de la longueur des questions? Est-ce que ce genre de…

Le Président (M. Bernier) : Oui. Ce que je souhaite, bien sûr, c'est d'avoir le plus de réponses possible au niveau des questions, donc que les réponses soient, si on veut, correspondantes à la question.

M. Marceau : …là, on s'entend, là.

Le Président (M. Bernier) : C'est ça. Normalement, c'est comme… c'est de cette façon, normalement, que je préside les commissions, de façon à m'assurer que le temps de parole, surtout au niveau des groupes de l'opposition, que le temps des questions soit respecté. Donc, en fonction de la question, la réponse est en conséquence.

M. Marceau : Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Est-ce que ça vous va?

M. Marceau : …parfait.

Remarques préliminaires

Le Président (M. Bernier) : Ça vous va. M. le ministre, vous disposez d'un maximum de 20 minutes pour vos remarques préliminaires.

M. Leitão : Très bien.

• (15 h 10) •

Le Président (M. Bernier) : La parole est à vous.

M. Carlos J Leitão

M. Leitão : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bon après-midi, tout le monde. Comme nous le savons tous, le 4 juin dernier, j'ai présenté le budget 2014‑2015. Ce plan budgétaire repose essentiellement sur deux piliers : d'abord, la relance de l'économie et de l'emploi par des actions que nous jugeons structurantes; et également par le redressement des finances publiques, et ce redressement-là se fait par une gestion rigoureuse des dépenses de l'ensemble de l'appareil gouvernemental. Ce n'est pas une question de faire un ou l'autre, c'est une question de faire un et l'autre parce que la relance de l'économie passe nécessairement par le redressement des finances, et aussi le redressement des finances ne peut pas se faire si l'économie n'est pas en bon état.

Mais peut-être, si on commence au début, si vous voulez, et pourquoi nous nous trouvons ici. Nous nous trouvons ici parce qu'en fin de compte, au 31 mars 2014, on aurait dû être à l'équilibre budgétaire, c'était ça, le plan de Mme Jérôme-Forget, M. Bachand, M. Marceau dans son premier budget. Donc, on allait tous dans la même direction, et 2013‑2014 devait être une année d'équilibre budgétaire. Or, évidemment, ce n'est pas ça qui est arrivé, et, jusqu'à septembre 2014… pardon, 2013, mon prédécesseur, ainsi que son gouvernement, maintenait que tout était en ligne et que l'équilibre budgétaire serait atteint. Or, ça n'a pas été le cas. On a appris, en novembre, qu'il y avait un déficit de 2,5 milliards, puis par la suite nous avons confirmé que c'est 3,1 milliards.

Maintenant, pourquoi je soulève cette question? Parce qu'à mon avis — ça, c'est mon opinion — cela est arrivé parce qu'il y a eu une espèce… une perte de focus, une perte d'intérêt de la part du gouvernement dans l'atteinte d'équilibre budgétaire parce qu'il y avait d'autres priorités, à cette période-là, à l'automne 2013, d'autres mesures, d'autres sujets sont devenus prioritaires pour le gouvernement, et donc la question des finances publiques a passé en deuxième lieu, et aussi, je pense, une espèce de… un manque de conviction, puisqu'on se disait : Bof, écoutez, un déficit de 2,5 milliards, ce n'est quand même pas la fin du monde, c'est très peu en pourcentage du PIB, donc on peut le rattraper plus tard. Évidemment, quand on pense qu'on peut le rattraper plus tard, c'est que plus on attend, plus les problèmes deviennent complexes. Et c'est un peu ce que nous avons dû faire, parce que, cette année, 2014‑2015, évidemment le déficit potentiel aurait été beaucoup plus que 2,5 milliards, et donc nous avons dû prendre des mesures assez sérieuses, assez rigoureuses en termes de contrôle des dépenses pour atteindre nos cibles budgétaires.

Alors donc, si rien ne se faisait, on serait avec un déficit d'au-delà de 5 milliards cette année, au-delà de 7 milliards l'année prochaine. Nous jugeons que ce déficit-là est de nature structurelle, c'est-à-dire que l'augmentation… le rythme de croissance des dépenses est plus élevé que le rythme de croissance des revenus, donc il fallait remédier à ça. Et nous allons remédier à ça par des efforts substantiels, des efforts exigeants, bien sûr, mais presque entièrement du côté des dépenses. Donc, cette année, 2014‑2015, nous allons réduire le rythme de dépenses projetées de 3,8 milliards de dollars, et puis, l'année prochaine, un autre 3,9… dollars pour arriver à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Parce qu'à notre avis l'équilibre budgétaire en 2015‑2016 est incontournable, il faut absolument… On est déjà deux ans au-delà de ce qui avait été… ce qui était la cible du gouvernement du Québec au départ. Donc, ça va faire six ans de retour à l'équilibre budgétaire, je pense que c'est quand même… c'est assez.

Donc, il va falloir absolument qu'on soit capables d'arriver à l'équilibre en 2015‑2016. C'est notre priorité et c'est ce à quoi nous allons nous engager. Alors, comment on va y arriver? On va y arriver par un contrôle très, très serré du rythme de croissance des dépenses de programmes. Donc, cette année, en 2014‑2015, les dépenses de programmes devraient être augmentées de seulement 1,8 %, et l'année prochaine, 2015‑2016, ça sera de 0,7 %. C'est très exigeant, je ne me fais pas d'illusion, ça ne sera pas facile. Mais ça doit être fait, et, à notre avis, ça va être fait.

Aussi, nous avons diminué certaines dépenses fiscales. Et il est important de préciser que, ce faisant, nous avons quand même laissé 80 % des crédits d'impôt, nous avons éliminé 20 %. Et nous croyons qu'à moyen terme il faut davantage réduire l'impôt général plutôt que d'y aller de mesures spécifiques à certaines industries ou à certaines entreprises. Donc, notre compétitivité, à notre avis, ne doit pas reposer uniquement sur les crédits d'impôt, mais nous allons laisser aussi à la commission qui sera annoncée demain, la commission de la réforme fiscale, le soin d'examiner les crédits d'impôt individuellement pour voir lesquels sont pertinents et lesquels maintenant ne sont plus tellement utiles. Nous allons aussi contrôler les dépenses des organismes et des sociétés d'État. Et toutes les sociétés d'État, Hydro-Québec, Loto-Québec, SAQ et Investissement Québec, sont appelées à contribuer, mais c'est clair aussi que la contribution va venir principalement d'Hydro-Québec.

Mais il y a aussi trois nouveaux outils que nous nous donnons pour nous donner l'armature nécessaire pour réaliser nos objectifs de contrôle des dépenses, parce qu'évidemment ce sera difficile, et, si on ne se donnait pas ces outils additionnels là, je ne pense pas qu'on pourrait y arriver. Alors, quels sont ces outils? Il y en a trois, principalement. D'abord, les commissions auxquelles on a déjà fait référence. Une a été annoncée aujourd'hui, la commission de revue des programmes, ça a déjà été annoncé, sa composition, son mandat, ses échéanciers, et une autre qui sera annoncée demain, la commission de revue de la fiscalité, la réforme fiscale. Aussi, c'est déjà connu qu'elle devrait être présidée par M. Luc Godbout, et les autres membres de la commission vont être divulgués, annoncés publiquement demain, ainsi que le mandat de cette commission-là. Cette commission-là ne sera pas permanente; elle doit rendre un rapport final en décembre 2014. Ultimement, la décision sera d'ordre politique. Donc, quelle réforme, quelles suggestions seront mises en pratique ou pas, ce sera évidemment le choix du gouvernement, mais ce choix-là va s'inspirer bien sûr des travaux de cette commission-là pour nous donner une réponse éclairée à ce sujet-là.

Le deuxième outil, c'est qu'on se donne aussi un cran d'arrêt. Un cran d'arrêt, ce que ça veut dire, c'est que, dorénavant, n'importe quelle autre mesure ou programme qu'on décide d'introduire parce que ça pourrait être socialement souhaitable de le faire ou quoi que ce soit, très bien, on le fera, mais il faudrait qu'il soit financé à l'intérieur des enveloppes existantes, donc il faudrait que quelque chose d'autre soit éliminé pour faire place à ce nouveau programme. Ça, c'est quelque chose qui va être en place au moins jusqu'en 2016, et on verra par la suite si ça se poursuit; fort probablement que ça va continuer d'une façon ou d'une autre.

Dans les documents du budget, il y avait un petit fascicule que moi, je trouve très intéressant, où on regardait un petit peu l'évolution des pressions sur les… — c'est ça, merci — donc, Le défi des finances publiques, et sur les pressions qu'il y a sur les dépenses de programmes. Et, en fin de compte, ces pressions viennent de trois endroits : une question démographique, donc l'augmentation des clientèles, qui explique à peu près 20 %, donc 1/5 des pressions sur les coûts. Donc, si les dépenses de programmes augmentent, disons, de 5 % par année, un point de pourcentage vient de la pression démographique, augmentation de clientèles. Les deux autres facteurs qui sont très importants, c'est l'augmentation des coûts et des prix, donc les salaires, la rémunération ainsi que les prix des biens que l'État achète, que ce soit en santé ou en éducation, et, troisièmement, l'ajout de nouveaux programmes au panier de services. Donc, en mettant un cran d'arrêt, donc, tu n'en ajoutes plus. Ça, déjà, c'est 35 % de la pression sur l'augmentation de programmes qu'on va diminuer. Et puis, en regardant de façon plus systématique les possibles gains de productivité et d'efficacité à l'intérieur de l'appareil étatique, là aussi on peut aller chercher un autre 35 % de diminution de la pression sur l'augmentation des dépenses de programmes.

• (15 h 20) •

Troisièmement, le troisième élément important dans la... le troisième outil important dans notre effort de contrôle des dépenses, c'est le gel des effectifs. Donc, nous allons nous donner, je pense, pour la première fois la capacité de geler les effectifs non seulement à l'intérieur des ministères — ce qui peut se faire déjà, et ça s'est déjà fait et se fait relativement facilement — mais aussi dans la fonction publique et parapublique au sens large. Depuis cinq ans, en moyenne, les effectifs totaux de la fonction publique définie largement, secteurs public et parapublic, augmentaient, bon an mal an, de 6 250 personnes par année, et ça, c'est après les départs à la retraite. Donc, nous allons geler ça. Donc, il n'y aura pas d'augmentation de 6 250 effectifs. Et puis, en plus, on va utiliser les départs à la retraite, c'est quand même 15 000 par année, et on va se donner les pouvoirs d'employeur pour réallouer ces ressources humaines dans les secteurs où nous pensons qu'ils seront les plus utiles à la société et à la livraison de ces programmes-là. Donc, ces trois outils vont nous aider beaucoup à remplir… à atteindre nos cibles de contrôle de dépenses : les deux commissions, le cran d'arrêt et le gel des effectifs.

Comme j'ai dit au départ, la relance de l'économie, évidemment, constitue un pilier aussi important que le contrôle des dépenses publiques, et, en effet, l'endettement public devient vraiment, vraiment problématique si l'économie stagne. S'il n'y a pas de croissance économique, alors là, la dette, aussi élevée qu'elle est, elle est déjà très élevée, mais, si, en plus, l'économie est quasi stagnante, alors, là, ça devient particulièrement préoccupant. Alors, il faut mettre en place des moyens, des mécanismes qui vont contribuer à accélérer la croissance économique.

Parce qu'en 2013 force est de constater que la croissance est tombée en panne. Un taux de croissance d'à peine… du PIB réel, de 1,1 %, c'est très faible. C'était 1,5 % en 2012, qui n'était déjà pas très fort, et puis ça a ralenti à 1,1 %. Ailleurs au Canada pendant la même période, la croissance est passée de 1,7 % à 2 %, une très modeste accélération, mais ici, de 1,5 % à 1,1 %, c'est quand même pas bien, si on peut ainsi le dire. Et ce qui a contribué particulièrement à cette performance économique très lente, c'est le recul des investissements privés, investissements machinerie et équipement, qui ont reculé de 6 %. Et c'est ça qui était l'élément principal.

Les dépenses de consommation, les dépenses des ménages n'étaient pas particulièrement robustes, mais je ne pense pas que c'était une surprise. D'ailleurs, rendu à ce point-ci dans le cycle économique, je pense qu'on ne doit pas s'attendre à de très fortes hausses des dépenses des consommateurs. Donc, la croissance économique dans les années à venir passe inévitablement par une reprise d'investissements et une reprise des exportations. Si on n'est pas capables de faire ça, on n'arrivera pas à accélérer la croissance économique.

Alors, nous mettons en place une série de mesures qui visent justement à promouvoir l'investissement et à accélérer la croissance économique. Il y a cinq axes d'action, si vous voulez, et ces cinq axes sont les suivants, qui avaient été décrits dans le budget : d'abord, une série de mesures pour les PME; deuxièmement, notre stratégie maritime; troisièmement, le Plan Nord; quatrièmement, les ressources naturelles au sens plus large, pas seulement dans le Nord; et finalement, le PQI, donc les investissements publics.

Alors, regardons un peu ces cinq mesures, ces cinq axes d'action. D'abord, pour ce qui est des PME, nous allons donner ce que je pense être un coup de pouce assez intéressant en réduisant de 8 % à 6 % et puis à 4 % le taux général d'imposition des PME manufacturières. Donc, à 4 %, ça deviendra un taux d'imposition équivalent à la moyenne canadienne. Cet allégement fiscal va profiter à 7 500 PME manufacturières au Québec. Donc, c'est un premier pas dans la bonne direction.

Deuxièmement, il y aura une déduction fiscale pour les coûts de transport des PME en région éloignée qui pourront donc bénéficier d'une aide supplémentaire, pour ceux qui sont éloignés des grands centres.

J'aurais dû mentionner aussi, avant les PME, que, dès notre arrivée au pouvoir, nous avons mis en place un programme d'incitation à la rénovation domiciliaire, le programme LogiRénov, que nous pensons que ça peut donner un bon coup de pouce justement au programme de construction résidentielle. Et d'ailleurs peut-être qu'on le voit déjà un petit peu. Nous avons remarqué que les mises en chantier pour le mois de mai étaient... pour le mois d'avril étaient à la hausse. Donc, ça peut être déjà un pas dans la bonne direction. Et aussi le Conference Board a aussi publié ses indicateurs de confiance des consommateurs. Il en va que la confiance revient et revient à grands pas. Ça ne se traduit pas encore par une activité économique plus accélérée, mais la première étape, c'est la confiance.

Donc, nous revenons aux PME. La réduction du taux d'imposition, qui est très important. Aussi, il y a un 20 millions de dollars consacré à Export Québec pour aider les PME à développer, consolider et diversifier les marchés hors Québec. Comme j'ai dit tantôt, c'est par l'exportation qu'on va devoir stimuler notre économie. Nos grandes entreprises, les Alcan de ce monde, exportent beaucoup et sont très efficaces à cet égard-là. Ce qu'il nous manque, c'est que nos PME puissent aussi participer aux exportations.

La grande récession qui a frappé l'économie mondiale nord-américaine, canadienne, québécoise en 2008‑2009 a eu un effet particulièrement sévère sur les PME, tant ici qu'ailleurs, qu'en Ontario, par exemple. Beaucoup de ces PME ont fermé boutique. Donc, notre capacité d'exporter a été affectée par la grande récession. Et donc, pour qu'on puisse bénéficier d'une reprise des exportations, il faut s'assurer que les PME qui sont encore là soient capables de percer les marchés étrangers, particulièrement aux États-Unis, qui sont notre marché traditionnel.

Nous avons aussi des mesures pour favoriser l'innovation dans les PME, deux mesures importantes à cet égard-là : le programme Créativité Québec, qui sera doté de 150 millions sur trois ans pour supporter les projets d'innovation; et aussi un congé de cotisation au Fonds de services de santé pour l'embauche de nouveaux employés spécialisés dans des projets d'innovation. Ce congé d'impôt... de cotisation, pardon, va bénéficier à 175 000 PME québécoises.

Un autre aspect de la problématique des PME, c'est le démarrage, la création d'entreprises. Une chose à laquelle nous avons constaté, c'est que la création d'entreprises au Québec, elle n'est pas aussi vigoureuse qu'ailleurs au Canada, en Ontario surtout. Donc, il faut essayer de faciliter le démarrage d'entreprises, parce que ce sont celles qui vont démarrer aujourd'hui qui vont devenir les Bombardier de ce monde, on l'espère, dans quelques années. Il faut commencer quelque part. Donc, les programmes pour le démarrage sont importants. Et, à cet égard-là, là, il y a trois mesures. D'abord, la capitalisation du fonds Anges Québec Capital est augmentée de 100 millions de dollars. Et il y a aussi un nouveau fonds de capital de risque de 375 millions de dollars en partenariat avec le secteur privé et le gouvernement fédéral.

Le Président (M. Bernier) : Vous avez une minute pour conclure, vous avez une minute pour conclure, monsieur.

M. Leitão : Une minute pour conclure? Merci. Je pense que ma montre marche plus lentement. Mais, très bien. Écoutez, alors donc, pour conclure, il y a aussi le Plan Nord, la stratégie maritime, qui sont des axes de développement très importants. On pourra y revenir, on pourra y revenir plus tard.

Mais j'aimerais juste finir — quelques secondes — avec un programme d'investissement public, donc le PQI, les investissements en infrastructures, qui sont une partie importante de la croissance économique. On l'a vu encore hier... lundi à la Conférence de Montréal, M. Larry Summers qui a beaucoup parlé de ces sujets-là. Nous allons le faire de façon considérée, de façon... en tenant compte de la capacité de payer de l'économie québécoise. Mais, pour cette année, 2014‑2015, quand même, 11,5 milliards, c'est à peu près 3 % du PIB, ce n'est pas insignifiant, un tel niveau d'investissement public. J'arrêterais ici, et donc on pourra poursuivre après. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Vous aurez l'occasion, dans les prochaines heures, de donner d'autres informations. Merci, M. le ministre.

Une voix :

• (15 h 30) •

Le Président (M. Bernier) : Oui, on a beaucoup de temps devant nous, effectivement. Merci, M. le ministre. M. le député de Rousseau, porte-parole officiel en matière de finances, la parole est à vous pour un bloc de 20 minutes pour votre présentation.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Parfait. Merci, M. le Président. Alors, je vous salue, donc. Je voudrais saluer M. le ministre et mes collègues de Bourassa-Sauvé, Sainte-Rose, Mégantic, Laval-des-Rapides; évidemment mes propres collègues, le député de Richelieu, le député de Sanguinet, le député de Marie-Victorin; et les gens de la deuxième opposition, le député de Lévis puis le député de Groulx. Alors, je voudrais vous saluer et j'espère que nous aurons de bons débats.

Je profite aussi de cette occasion qui m'est donnée pour saluer les fonctionnaires, les hauts fonctionnaires, toute l'équipe du ministère des Finances qui est présente avec nous pour ce débat, qui, j'ai pu le constater, fait un travail remarquable, au service du Québec toujours. Et je sais la qualité du travail qui se fait là-bas et je sais que le ministre a bénéficié de cet excellent travail, ce qui n'empêche pas évidemment que le nouveau budget qui a été présenté peut contenir des choix politiques, des choix qui sont différents de ceux que j'aurais faits, que ceux que nous aurions faits. Ces choix-là, c'est légitime, on peut avoir des visions différentes et… Donc, j'aurai l'occasion, dans les prochaines 9 h 30 min qu'il nous reste, avec mes collègues, de critiquer ces choix politiques qui ont été faits. Mais je sais que, quant à l'appui que le ministre a reçu de la part de l'équipe qui l'entoure, cet appui aura été, j'en suis certain, formidable. Et je suis content de savoir que, pour la suite des choses, cet appui-là se maintiendra. Donc, que mes collègues et les hauts fonctionnaires soient salués.

Alors, effectivement, le nouveau budget incarne des nouveaux choix. J'aimerais quand même dire d'entrée de jeu que le cadre financier qu'il contient est très semblable, est très, très semblable à celui que j'avais présenté le 20 février dernier, à bien des égards, que ce soit quant au profil des dépenses et des revenus pour la suite des choses, que ce soit quant aux prévisions et surtout… et même aussi, à certains égards, quant aux mesures. Il y a des mesures qui reviennent aussi, et c'est tout à fait normal parce que les choix qui ont été faits le 20 février puis les choix qui ont été faits en juin s'appuient sur une même réalité, et ce n'est pas complètement surprenant qu'il y ait des choses qui soient semblables.

Maintenant, je l'ai dit, il y a des choix politiques qui ont été faits, qui sont très différents aussi. Et ces choix politiques, j'aurai l'occasion, là, d'en reparler dans quelques minutes, dans une trentaine de secondes. Avant de le faire, par contre, j'aimerais juste revenir sur une remarque que le ministre nous a faite d'entrée de jeu en nous disant qu'il y avait eu une perte de focus dans notre gouvernement. Écoutez, ça m'a fait sourire. C'est comme de dire que l'ancien gouvernement libéral avait perdu le focus à cause de la corruption galopante au Québec et que c'est ce qui expliquerait les cibles ratées aux dépenses, les hausses de revenus auxquelles les Québécois ont été conviés par l'ancien gouvernement. C'est un peu dire le même genre de phrase. Alors, c'est à peu près n'importe quoi.

L'autre chose que je voudrais dire, puis j'y reviendrai évidemment, c'est qu'il y a dans le budget beaucoup de nouvelles dépenses. Il n'y a pas… Le nouveau gouvernement fait beaucoup de nouvelles dépenses. Il y en a pour 800 millions sur trois ans. Et j'ai entendu le ministre dire qu'on avait échappé… Alors, regardez, il y avait des nouvelles dépenses que nous avions l'intention de faire, d'intégrer à notre cadre financier de la même façon que vous intégrez vos nouvelles dépenses. Il y en a pour 800 millions. On aura l'occasion d'y revenir pendant le débat.

Maintenant, je vais revenir sur la facture plus générale du budget, sur les éléments les plus importants. J'ai eu l'occasion de dire à plusieurs reprises que c'était un budget de promesses brisées et je pense que c'est encore un qualificatif qui s'applique parfaitement à ce budget. Je vous rappellerai que le nouveau gouvernement a été élu sur la base de promesses de croissance économique plus forte. Or, le budget… On n'est pas dans le court terme, là, on n'est pas dans l'attente d'un effet libéral, là. Le budget incorpore des prévisions, on les voit en chiffres, noir sur blanc, dans le budget, des prévisions qui sont du même ordre que celles que nous avions présentées dans le budget de février dernier, même type de croissance économique.

En fait, s'il y a quelque chose qui change beaucoup, c'est les prévisions de croissance économique dans le budget par rapport à ce qu'il y avait dans le cadre financier du député de Robert-Baldwin alors qu'il était candidat du Parti libéral en campagne électorale. Là, il y a un très, très grand écart. Mais, par rapport au budget de février dernier, il n'y a pas d'effet libéral, aucunement. Les écarts… d'ailleurs, il faudra bien qu'on nous explique pourquoi il y en avait de si importants, là. Il y avait un 2,1 % de croissance économique dans le cadre financier du Parti libéral, alors qu'on voit dans le budget qu'on est à 1,8 %. On aimerait bien savoir pourquoi le ministre des Finances, à l'époque candidat libéral, a inscrit des nouveaux… une croissance économique si forte.

Évidemment, ça a permis de faire des promesses aux Québécois fort importantes. Cet écart de croissance économique, appliqué dès la première année, ça permet de générer des revenus supplémentaires au fil du temps. Et on en arrive à tout près de 9 milliards de revenus supplémentaires. Quand on compare le cadre financier qui a été déposé par le ministre cette semaine… pas cette semaine, la semaine dernière, et le cadre financier du Parti libéral, on voit qu'il y a un écart de 9 milliards aux revenus sur l'horizon, 9 millions qui évidemment ont été utilisés pendant la campagne électorale pour promettre bien des choses aux Québécois. Donc, il y a quelque chose de quand même assez désagréable dans tout ça.

Sur l'emploi, l'effet libéral, non plus, n'est pas très, très… Enfin, il ne va pas dans le bon sens, on va dire ça comme ça. Il va plutôt vers moins d'emplois. Le chef du Parti libéral, le ministre des Finances nous ont dit bien des choses, en campagne électorale, sur l'emploi. Or, on a retrouvé le chiffre de 47 800 dans le plan budgétaire du nouveau gouvernement, 47 800 emplois qui ont été créés en 2013. Et on sait que, pour 2014, on prévoit 31 300, M. le Président. Alors, j'aimerais bien savoir, si 47 800 ce n'était pas bon, comment il va qualifier 31 300 pour 2014. Et j'aimerais aussi ajouter que ce… Vous savez, on a eu nos divergences, l'opposition… bien, enfin, le Parti libéral et nous, sur la façon de mesurer l'évolution de l'emploi. On peut utiliser aussi les données mensuelles, et, là-dessus, je vous signale que ce n'est pas spectaculaire non plus, là. On parle de 50 000 emplois à temps plein perdus en deux mois. Peut-être que ça se rétablira, puis moi, je le souhaite pour le Québec, je le souhaite pour les Québécois, j'espère que l'emploi va progresser de façon plus importante, mais, une chose est certaine, c'est qu'à ce jour, s'il y a un effet libéral, il ne va pas dans le bon sens, il est négatif. On parle d'emplois perdus, d'emplois moindres, que l'on utilise la méthodologie que moi, je préfère, qui est celle d'un horizon plus long, ou bien qu'on utilise les données de court terme, là, qui semblent être la préférence du chef du Parti libéral.

M. le Président, donc, l'effet libéral sur la croissance économique, l'effet libéral sur l'emploi, il n'est pas visible. En tout cas… Puis je ne parle même pas de la réalité, hein? Je parle dans les documents budgétaires. Dans les documents qui nous sont présentés, les prévisions du ministère des Finances, il y a, de toute évidence, moins d'emplois pour cette année et l'an prochain et il y a une croissance économique tout à fait conforme à celle qui était prévue. Il n'y a pas de différence là-dessus.

Maintenant, il y avait une promesse phare du chef du Parti libéral en campagne électorale qui était celle d'augmenter les dépenses en infrastructures, les investissements en infrastructures de 15 milliards, donc. Cette promesse, on le sait maintenant, elle est passée à la trappe. C'est une promesse qui, dans le fond, a été faite sans qu'on évalue correctement ce qu'elle impliquait. Étant donné l'endettement du Québec, étant donné les cibles de réduction de la dette en proportion du PIB que nous nous devons de respecter, c'était une promesse tout simplement irresponsable.

Et je sais très, très bien qu'arrivé au gouvernement le nouveau ministre des Finances s'est fait taper sur les doigts puis il s'est fait dire par les hauts fonctionnaires : Ça ne fonctionne pas, ce n'est pas possible; si on fait ça, c'est la décote. Et je sais très bien que c'est ce qui est arrivé. Et je sais très bien aussi que c'est quand même un problème important parce qu'à partir du moment où ce 15 milliards n'existe plus pour le Parti libéral ils sont pris au dépourvu, ne sachant plus comment on peut faire pour faire croître l'économie. Alors, c'est le drame, là, que le Parti libéral va vivre dans les prochaines années parce qu'il a perdu le seul outil qu'il connaisse.

Autre promesse brisée, autre promesse non respectée, celle de ne pas augmenter les impôts des Québécois. Déjà, on sait qu'il y a eu une hausse du prix de la bière et du vin, une hausse des taxes sur le tabac. On va supposer que, quand le ministre des Finances ou quand le premier ministre parlait en campagne électorale, ils avaient en tête les impôts sur le revenu ou les taxes à la consommation, les taxes générales plutôt que les taxes spécifiques. Alors, on peut mettre de côté les taxes sur la bière et le vin, les taxes sur le tabac, s'il le désire, mais il n'en demeure pas moins que, sur la question du fractionnement du revenu pour les retraités, il n'y avait rien de tel. En tout cas, à ma connaissance, là, je n'ai pas entendu le ministre des Finances, en campagne électorale, au moment d'un rallye libéral, dire aux gens : Vous, là, les gens qui ont moins de 65 ans puis qui êtes à la retraite, on va vous taxer, on va vous imposer plus fortement. Je n'ai pas entendu ça.

• (15 h 40) •

Maintenant, autre hausse du fardeau fiscal, il y a évidemment la réduction des crédits d'impôt de 20 %. Ça non plus, je n'ai pas entendu le député de Robert-Baldwin ni le premier ministre annoncer à nos entreprises qu'on allait réduire les crédits d'impôt de 20 %. Je n'ai jamais entendu ça en campagne électorale. En fait, ils se sont engagés formellement à ne pas augmenter le fardeau fiscal des contribuables. Les contribuables, ça inclut à la fois les particuliers et les entreprises.

Les coupes dans les crédits d'impôt — et on aura l'occasion d'y revenir pendant le débat — évidemment, ça a un impact sur les entreprises, ça a un impact sur la compétitivité du Québec pour attirer des investissements. J'ai entendu le ministre des Finances, ce matin, tenter de minimiser l'impact de cela. Je pense qu'il sous-estime grandement la fragilité et la férocité aussi, la fragilité de notre situation puis la férocité de nos compétiteurs, qui n'attendent que cela. Ils n'attendent que cela. Les États qui nous entourent en Amérique du Nord sont extrêmement agressifs. Ils le sont plus que jamais au lendemain de cette récession qui a saigné bien des économies, et je pense qu'il les sous-estime grandement.

Mais, si 370 millions, ça ne l'inquiète pas, imaginons ce que ce sera quand on ajoutera le 650 millions supplémentaire. On parle de 1 milliard de dollars, là, d'augmentation du fardeau fiscal de nos entreprises. Et là je le répète puis je le réitère, là, quand, en campagne électorale, a-t-il dit à nos entrepreneurs : Je vais augmenter votre fardeau fiscal de 1 milliard de dollars? Quand, en campagne électorale, avons-nous entendu ces gens-là nous dire ça? Moi, je n'ai jamais entendu ça, je ne crois pas que ça a été dit. En fait, on nous a dit qu'on n'augmenterait pas le fardeau fiscal des Québécois, et moi, à ce que je sache, là, les entreprises font partie des contribuables québécois. Alors, 1 milliard, ça représente, là… si on prend le niveau de l'impôt actuel des sociétés, ça représente une hausse du fardeau fiscal des sociétés de 30 %. 30 % de plus, regardez, c'est très important.

Ce matin, il y a le mot «catastrophe» qui a été utilisé. Le ministre des Finances n'avait pas l'air très à l'aise avec ce mot-là; bon, il pourra trouver un synonyme s'il le désire. Mais moi, je peux vous dire que 30 %, ça va avoir un impact. Ce n'est pas vrai qu'il n'y aura pas d'impact. Regardez, le fait que les impôts des sociétés ont des impacts sur l'investissement, sur le comportement des entreprises, c'est extrêmement bien documenté dans une très vaste littérature. Et, on le sait nous-mêmes par l'expérience, les crédits d'impôt ont permis d'attirer des investissements, ont permis de maintenir des emplois au Québec. Vous jouez avec le feu, M. le ministre des Finances, j'en suis complètement convaincu.

Puis, on aura l'occasion d'élaborer là-dessus, vous avez parlé de votre commission sur la fiscalité. Moi, j'ai la désagréable impression que les conclusions de cette commission sont déjà écrites et je pense qu'il y a beaucoup de gens qui sont comme moi. On sait donc, d'ores et déjà, que l'objectif, là, ça va être, donc, de justifier le milliard de coupures dans les crédits d'impôt, dans les aides fiscales. Donc, il va falloir avaliser ça, d'une part, puis trouver la meilleure manière d'aller chercher ce milliard du côté de l'impôt des sociétés. Moi, je trouve que vous réduisez beaucoup, d'ores et déjà, le mandat de cette commission, vous l'encadrez beaucoup trop fortement. Si vous voulez les laisser réfléchir, laissez-les réfléchir librement puis ne leur passez pas vos commandes difficiles. Demandez-leur plutôt de réfléchir puis de trouver des ajustements qui seraient intéressants.

En tout cas, regardez, je suis très inquiet de ça, très inquiet de tout ça. Puis je vous rappelle simplement… je l'ai fait déjà, mais je vais vous le redire : En 2003, ça a été la même histoire. En 2003, nouveau gouvernement libéral, ils arrivent et, sans réflexion, sans étude, coupent de 20 % les crédits d'impôt. Et qu'est-ce qu'on a fait? Bien, au bout d'un an, après avoir constaté les dégâts, en particulier dans le secteur des biotechs, là — le secteur des biotechs qui avait commencé à s'implanter au Québec de façon importante puis, pendant l'année, il a déménagé à Toronto, là, pendant cette année-là, a déménagé à Toronto — eh bien, au bout d'un an, on a dit : Ah! bien là, zut! On s'est trompés puis on va rétablir les choses. Ils ont remis en place les crédits d'impôt au niveau où ils se trouvaient pour plusieurs d'entre eux, mais il était trop tard.

Je veux dire, constituer une grappe d'entreprises, là, c'est précieux. Une fois qu'on l'a, il faut la nourrir, il faut la garder, il faut la conserver. Et l'effritement de ces grappes-là, ça va avoir des conséquences à long terme. Et vous allez voir que de rebâtir ces grappes-là, ce n'est pas simple. Je pense que vous… en tout cas, je vous invite à y réfléchir très fortement et j'aurai l'occasion de vous poser des questions sur les éléments puis les études que vous avez utilisés pour arriver à des conclusions comme celles-là.

Maintenant, je vois qu'il me reste moins de temps. Sur la vision de développement économique du nouveau gouvernement, je l'ai dit déjà, là, donc, le fait que le 15 milliards de dépenses en infrastructures soit disparu, ça vous a un peu coupé les jambes, j'en suis bien conscient. On va vous donner le temps de vous retourner de bord, mais, pour l'instant, on voit bien qu'il n'y a pas grand-chose dans votre budget. Quand on compare ce qu'il y a dans le budget avec la politique économique qu'on avait déposée, qui contenait à la fois des mesures pour stimuler la recherche et l'innovation, qui contenait tout ce qu'il fallait pour moderniser notre secteur manufacturier qui traîne de la patte, qui a traîné de la patte depuis 10 ans, résultat, entre autres, de l'appréciation du dollar canadien, quand on voit aussi que, dans notre politique économique, il y avait des mesures pour le commerce extérieur, qu'il y avait des mesures pour l'électrification des transports, tout ça de manière intégrée puis intelligente, je ne peux pas… enfin, la comparaison, disons, n'est pas agréable pour vous, je trouve, quand je regarde ce que j'ai trouvé dans votre budget. Même s'il y a quelques mesures qui, prises isolément, peuvent être intéressantes, la vision d'ensemble, là, disons, n'est pas convaincante.

Sur le contrôle des dépenses, j'aurai l'occasion d'y revenir aussi, disons, je veux simplement signaler l'opacité de votre plan budgétaire. Je trouve qu'il n'y a pas beaucoup d'information, et, encore à ce jour, on ne sait pas trop grand-chose sur ce qui va se passer avec l'étalement du salaire des médecins. Puis, sur la santé, on ne sait pas… enfin, on sent une timide volonté d'aller vers le financement d'activités, mais j'aurais bien… je m'attendais que vous l'affirmiez de façon très, très forte, mais on n'a pas vu grand-chose dans votre plan budgétaire, sur le virage vers les soins à domicile non plus. Or, c'est clairement la voie dans laquelle nous devons aller.

Je signale d'autres reculs, entre autres sur les services de garde. En campagne électorale, je n'ai jamais entendu le Parti libéral nous dire qu'il allait freiner le développement des places en CPE, je n'ai jamais entendu ça. On a entendu que vous ne toucheriez pas aux tarifs, que vous n'augmenteriez pas de 7 $ à 9 $ puis que vous allez vous contenter d'indexer. Là-dessus, vous livrez, mais on sait que la commission sur la fiscalité va servir à vous dédouaner pour une augmentation plus importante pour la suite des choses, et les Québécois vont se retrouver avec le pire des deux mondes, là, donc, c'est, à la fois, plus de tarifs, mais pas plus de places en garderie. Alors, ça va être très… C'est très curieux.

Et, sur le pétrole, là aussi, il y a une volte-face assez intéressante. Alors que vous parliez de loto-pétrole en campagne électorale, bien il semble vous allez aller de l'avant parce que j'imagine que vous comprenez qu'on ne veut pas ne pas saisir cette occasion qui est fort importante pour le Québec.

Alors, regardez, un budget de promesses brisées, je pense que ça résume bien ce que je pense. Les reculs sont nombreux. Évidemment, mes collègues et moi, nous allons profiter de ce débat pour creuser chacun des problèmes, chacune des promesses brisées qu'on a pu constater dans le budget. Merci, M. le Président.

• (15 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Rousseau. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de finances publiques et député de Lévis à ses remarques préliminaires pour une période de 20 minutes.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Et je tiens à mon tour à saluer tout le monde de cette commission-là qui… nous le savons tous, elle est très importante. Je reconnais des collègues qui étaient au gouvernement avant puis je les salue, là. Je pense que ça va être intéressant de travailler dans ce rôle-la, dans ce rôle d'opposition là. Je salue les nouveaux arrivants au niveau du gouvernement. Je pense que tout le monde est d'accord qu'on a une tâche et que vous avez une tâche assez incroyable de redresser les finances publiques, puis, je vais le redire, ça ne sera pas une surprise pour personne, nous allons vous donner, à la coalition, avec mon collègue ici de Groulx, le maximum de disponibilité et, je dirais, d'opposition constructive pour vous aider dans cette lourde tâche là. Nous serons critiques, mais nous serons là pour amener des idées et peut-être faire des suggestions.

J'aimerais dire aussi que je pense que c'est… l'importance pour moi de cette Commission des finances publiques, M. le Président, que vous avez la chance de présider. Il faut se remettre dans le rôle, de la façon dont moi, je le vois, et vous me direz si je fais erreur plus tard, parce qu'on va avoir bien du temps de s'en reparler. À mon sens, les 125 députés de l'Assemblée nationale nous donnent ce forum-là pour poser des questions, pour avoir le temps de réfléchir à des éléments qu'on n'a pas toujours le temps, au salon bleu, de questionner, de prendre le temps. Alors, quand vous me donnez aujourd'hui une dizaine d'heures qui est répartie entre les deux groupes, je pense qu'on doit profiter de ces moments-là importants pour faire le bon questionnement puis, je dirais, de mettre la partisanerie de côté et d'en profiter pour poser les bonnes questions, parce que je pense que c'est un exercice excessivement sérieux.

J'aimerais aussi faire le lien avec le rôle qu'on aura en commission parlementaire. Parce que, là, aujourd'hui, on parle du budget pour une dizaine d'heures, mais, comme vous savez, il y a un lien très important avec les crédits, hein? On n'a pas eu la chance depuis longtemps de regarder les crédits. Là, on va avoir la chance dans les prochaines semaines. Et, M. le Président, notre nouveau ministre des Finances, aujourd'hui, a donné une ligne très claire sur les dépenses, mais il faut faire le lien avec les crédits. Et j'y reviendrai un petit peu tout à l'heure, parce qu'on a un besoin de documentation qui est important, puis je reviendrai sur ce point-là tout à l'heure.

Donc, la Commission des finances publiques, pour moi, dans un des rôles que je lui vois, c'est de faire le lien souvent entre les Finances et le Trésor, parce qu'on a à travailler sur les deux, et c'est un peu ce qu'on demande, de la complicité entre notre ministre des Finances et le président du Conseil du trésor, qui viendra à la Commission des finances publiques aussi. Alors, pour moi, ça, c'est un rôle important qu'il ne faut pas oublier.

Si je vais un peu plus dans des éléments qui vont nous préoccuper au cours des prochaines semaines, je vous dirais que je commenterais sur trois blocs — puis ça ne sera pas une surprise, là — dans le budget du ministre des Finances, c'est au niveau, c'est sûr, des revenus, c'est sûr, des dépenses, mais aussi, je dirais, dans l'implication pour le contribuable. Parce que, dans le fond, une question de budget, c'est une question de garder l'équilibre entre les revenus et les dépenses, mais on a toujours le même contribuable qui, à la fin, si cet équilibre-là… pardon, si cet équilibre-là n'est pas là, bien, on se retrouve toujours à soit l'endetter ou à le taxer. Alors, je vais parler au niveau des revenus.

J'ai dit qu'on était peut-être moins satisfaits de l'aspect économique du budget du ministre des Finances, pas parce que les intentions ne sont pas là. Je crois que… Et j'en reparlerai, là, au cours de la présentation, un peu plus en détail avec mon collègue, mais c'est sûr qu'il y a des éléments dont vous avez parlé, les cinq axes, etc., on reconnaît qu'il y a des éléments qui sont là, mais on a peut-être plus de difficultés à voir le fil conducteur et des objectifs beaucoup plus précis. Vous allez m'entendre souvent, dans les prochaines semaines, parler d'objectifs, et j'y reviendrai parce que, pour moi, on sent peut-être moins cette cohésion-là du côté revenus qu'on le sent du côté des dépenses, puis j'y reviendrai, mais je pense que c'est un message important à passer.

Pour ce qui est des dépenses, j'ai salué, et je le redis, qu'il y a eu un exercice de courage au moins sur l'aspect… — et je ne le dis pas négativement, là — sur l'aspect théorique d'attaquer, dans ce premier budget là… Moi j'aurais voulu qu'on arrive à un équilibre budgétaire encore plus rapidement, mais je pense que, dans l'état où ce nouveau gouvernement là a pris les finances publiques, je pense qu'à la lumière des vrais chiffres, là, qui nous ont été révélés, je pense que c'était un exercice qui était beaucoup plus grand que tout le monde avait pu penser. Et on reviendra sur l'importance d'un directeur de budget dans une de nos discussions, je pense, M. le Président.

Mais ce qu'il est important de dire, c'est que nous saluons, à la coalition, l'effort qui est fait, et nous l'apprécions, de redresser le plus rapidement possible les dépenses. Maintenant, ce que j'aimerais mentionner, et je vais le dire parce que j'ai tellement eu de difficultés dans mon… Et je regarde en ce moment les gens qui nous écoutent, je vais demander d'avoir beaucoup de rigueur au cours de quatre prochaines années, non seulement au ministre, mais à son équipe, aux députés puis aussi à l'équipe du ministre des Finances qui…

Je pense qu'on se targue, et à raison, d'avoir une très bonne équipe au ministère des Finances. Mais, moi, il n'y a rien qui m'insultait le plus — puis je vais le dire avec les mots les plus gentils et doux possibles — de me faire dire par l'ancien gouvernement que ce gouvernement-là contrôlait les dépenses, alors qu'on sait très bien maintenant que c'était archifaux. Et ce que je ne voudrais pas, c'est qu'on se rembarque encore dans cette guerre-là, de se faire dire que l'on contrôle les dépenses alors que ce n'est pas vrai.

Alors, pour moi, M. le Président, il va être absolument important, absolument important qu'on s'entende clairement sur la terminologie, sur la documentation et, lorsque l'on met des faits sur la table à savoir que les dépenses sont sous ou hors contrôle, qu'il n'y ait pas de discussion sur la terminologie, mais qu'on sache qu'une cible, c'est une cible puis elle ne peut pas changer avec la température en fonction des gens qui veulent dire : Regardez, on contrôle bien les dépenses, alors que tout le monde sait, peut-être à part eux, qu'on contrôlait effectivement les dépenses. Et ça, pour moi, c'était important, parce que, quand je vous disais que le rôle de la Commission des finances publiques, c'est de venir se dire les vraies choses ici, supportées par des faits, pour ne pas que cette situation hors contrôle que nous avons vécue pendant 18 mois puisse continuer d'arriver. Pour moi, c'est excessivement important et ça fait partie de notre rôle. Je pourrai y revenir en détail s'il y a des gens qui ont des questions là-dessus, ça me fera plaisir.

Maintenant, dans l'urgence d'agir, ce que je dirais au ministre des Finances aujourd'hui, M. le Président, c'est que nous, on débat un peu, chez nous, entre, je dirais, une grande joie incommensurable sur le fait d'attaquer les dépenses versus une certaine réserve. C'est qu'on met en place certains comités, puis je le comprends, il y a un exercice qu'on veut rigoureux, on veut faire attention de faire certains choix, mais, en même temps, le danger de la comitite est souvent un gage de reporter en avant des décisions que l'on trouve douloureuses.

Alors, je salue le comité qui a été mis en place ce matin. Il y en a un autre qui va l'être demain. Mais il reste que, si je regarde le rapport du Vérificateur général qui nous a été déposé ce matin, ce que moi, j'appelle le musée des horreurs, on fait juste changer la version du musée des horreurs, il y a beaucoup de choses. Puis tout le monde l'a lu rapidement ou a vu les grandes lignes du rapport du VG qui a été déposé ce matin, Il y a des choses qu'on peut adresser rapidement. Il y a des choses qu'on peut faire qui ne doivent pas attendre un comité qui va être mis en place aujourd'hui, qui va faire rapport à l'automne ou en décembre.

On a, M. le Président, besoin, et c'est ce qu'on s'attend de ce gouvernement-là, s'il est sérieux dans le besoin de redresser les finances publiques, d'agir sur certaines choses, autant dans les dépenses que dans les revenus, mais je fais une emphase sur les dépenses. Et, on l'a vu, ce matin, avec le rapport du VG, lorsqu'on parle de l'accessibilité aux livres d'Hydro-Québec, ça, c'est une chose, mais, ce matin, ce que le VG nous a dit, c'est que dans, par exemple, les partenariats privé-public qui ont été faits sur les aires de services, sur le fait que la commission… pas la commission, mais le CSPQ, qui est le Centre des services partagés, qui a un rôle important à bien faire les achats du gouvernement, qui ne fait pas du tout son rôle... Alors, il y a plusieurs éléments qui ont été déposés par le VG, et on n'a pas besoin d'attendre un rapport sur la fiscalité ou sur la révision des programmes pour agir rapidement puis être capable d'étancher ce déficit important là.

Alors, moi, ce que je demande, pour être très clair, c'est au ministre de nous dire, et c'est là-dessus qu'on va insister… Oui, vous avez un programme… différents programmes à termes, sur la prochaine année, de préparer votre prochain budget, mais, moi, ce que je voudrais sentir, dans votre contrôle des dépenses, c'est qu'il y a des choses qu'on va faire beaucoup plus rapidement. Vous l'avez adressé dans certaines choses en disant : Bien, on va aller à 20 % dans certaines dépenses, etc. Mais je pense qu'il faut aller plus loin dans la gestion des finances publiques. Puis je vais aimer vous entendre sur des choses, là… Tout à l'heure, j'ai donné l'exemple des achats au CSPQ, mais on peut parler des dossiers informatiques. Alors, il y a plusieurs choses que nous, nous avions soulevées dans notre programme puis qu'il nous fera plaisir d'aller un petit peu plus en détail dans ça.

Donc, j'ai parlé du côté des revenus, j'ai parlé du côté des dépenses. Sur les revenus, avant d'aller au contribuable, j'aimerais dire que, philosophiquement, le fil conducteur que nous cherchons… Puis d'ailleurs j'ai eu la chance d'en parler avec le ministre des Finances puis d'en toucher un peu avec le ministre de l'Industrie et du Commerce, moi, je crois qu'on n'a pas les moyens non plus d'attendre du côté des revenus étant donné les chiffres d'emplois que nous avons obtenus depuis quelques semaines. Et je n'irai pas entrer dans : Est-ce que c'est plus un problème du dernier gouvernement, du nouveau? On a ce problème-là aujourd'hui. On le sait, notre croissance des emplois, elle est anémique. Et je ne pense pas, encore une fois, que c'est le temps de faire de la partisanerie. Ce qui est important, c'est de trouver des solutions.

• (16 heures) •

Et j'aimerais vous dire… vous soulever, puis d'ailleurs je l'ai mis sur les réseaux sociaux ce matin, je pense qu'il y a un consensus qu'un des éléments clés que nous avions mis dans la campagne était les zones d'innovation, qui étaient, M. le Président, dans le livre de M. Legault sur le Projet Saint-Laurent. Et autant j'apprécie les cinq axes du ministre des Finances, autant je crois que l'élément des zones d'innovation que nous avions expliqué, pour moi et pour notre groupe, est excessivement important. Et, s'il y avait un message que j'aimerais passer aujourd'hui, M. le Président, c'est qu'il y a de ces éléments-là qu'il nous ferait absolument plaisir de continuer à partager avec les gens du gouvernement pour que certains de ces éléments-là soient repris dans certaines régions du Québec parce qu'il y a un besoin de le faire. D'ailleurs, le chef de la coalition en a parlé dans des endroits, comme par exemple dans son comté à L'Assomption, où on a une perte d'emploi de 1 300. On ne peut pas remplacer une entreprise qui avait 1 300 employés en allant chercher une entreprise du jour au lendemain. Mais est-ce qu'une zone d'innovation qui viserait une dizaine, une vingtaine, une trentaine d'entreprises, sur un axe d'un an ou deux... ça, c'est possible de le faire. Et, je le redis, on a besoin de soumettre certaines idées pour les revenus.

Maintenant, où on est vraiment malheureux… Et je pense qu'un ministre des Finances, ça a le droit de changer d'idée. Alors, je le dis avec beaucoup d'humour, dans les rencontres prébudgétaires que nous avions eues, nous avons dit : O.K., nous reconnaissons le besoin de faire le redressement des finances publiques, mais nous avons bien dit aussi qu'il fallait penser au contribuable. Puis moi, je ne peux pas m'empêcher… Puis j'ai la chance, avec mes collègues ici, d'avoir plusieurs économistes alentour de la table. Le député de Rousseau est quand même reconnu pour plusieurs de bonnes idées qu'il a déjà eues en tant qu'économiste. Nous avons quelques économistes, dont notre ministre des Finances. Mais on sait une chose : qu'il y a 60 % du PIB qui vient de la consommation. Alors, moi, j'ai un peu de problèmes à penser que, si on essaie de relancer l'économie puis qu'on ne donne pas un petit peu d'argent au contribuable… je pense qu'on s'enlève un outil, et encore plus lorsque non seulement on ne l'aide pas, mais on continue de le taxer.

Moi, je suis complètement renversé d'avoir la réponse du ministre de l'Éducation qui nous dit que 500 millions d'augmentation des taxes scolaires sur les prochaines années, c'est acceptable et c'est raisonnable. On n'a pas... Je pense qu'il y avait eu un engagement, et d'ailleurs le député de Rousseau l'a dit tout à l'heure, il y avait un engagement du Parti libéral de ne pas augmenter le fardeau fiscal, mais là on est en train de dire que non seulement on ne le gèle pas, mais on l'augmente. Et, sur ça, ce que nous avions demandé, puis, encore une fois, il reste encore un peu de temps pour changer, peut-être pas dans le budget parce qu'on le votera demain, mais ça serait bon que, peut-être durant l'été ou au cours des prochains mois, il y ait peut-être des réaménagements, parce que ce contribuable-là, notre citoyen a besoin d'un petit signal, n'a peut-être pas besoin, des fois, de... Il comprend, puis je pense qu'on demande... j'ai bien compris le message, on demande à tout le monde de faire un effort, mais, dans le cas du contribuable et particulièrement, je dirais, pour les familles puis la classe moyenne, il y a besoin de faire quelque chose, et ce budget-là l'oublie.

J'ai dit tout à l'heure qu'on allait avoir un rôle… et c'est ce que nous voyons, nous, comme opposition, c'est d'être capables d'avoir ce rôle-là de non seulement demander quels sont les objectifs, hein, les objectifs en termes de revenus, les objectifs en termes de dépenses, qu'est-ce qu'on fait avec le contribuable, mais de nous donner aussi des indicateurs. Parce que, ça, je l'avais demandé au député de Rousseau quand il était dans son rôle, il y a quelques mois de ça, j'avais demandé, au tout début, dans ma première rencontre, j'avais dit : Faire un budget, ce n'est pas juste mettre des chiffres ensemble, mais on peut avoir un budget qui balance, mais, si on n'a pas comme objectif d'aller mettre des indicateurs qui viennent montrer qu'on s'améliore...

Parce que balancer un budget, c'est une chose, mais est-ce qu'en même temps on améliore les temps d'attente dans nos hôpitaux? Est-ce qu'on améliore le taux de décrochage scolaire? Est-ce qu'on améliore nos entreprises? Il faut être capable de regarder les deux. Et, je vais vous dire, vous allez nous trouver tannants dans les prochaines semaines, mais nous allons demander à questionner ces objectifs-là, ces indicateurs-là, pour être capables de mesurer le gouvernement. Et je rappellerais, aujourd'hui, à tous ceux qui sont ici — parce qu'on va être excessivement tannants, pour ne pas dire d'autres mots — qu'on n'invente rien, c'est déjà dans la Loi de l'administration publique qui a été votée en 2001, qui dit que, lorsqu'on discute les budgets et les crédits, il faut avoir les objectifs. Ces objectifs-là, qu'on retrouve de plus en plus dans les rapports de gestion de nos différents gestionnaires, mais il faut aussi les retrouver lorsqu'on discute des budgets. Et c'est ce que nous allons faire avec vous non seulement pour monter la barre un peu puis de dire c'est quoi, votre objectif, mais pour être capables, M. le Président, de mesurer notre ministre des Finances dans la réalisation de ses chiffres et de ses objectifs.

Je dirais, en conclusion, que — je le redis, encore une fois, avec beaucoup de positivisme — nous avons une chance aujourd'hui d'avoir un consensus, dans la population, qu'il faut faire un virage important. Il y a un consensus, dans la population, de le faire. Il y a un consensus, je pense, autour de la Commission des finances publiques, que les faits sont là, on est dans une situation financière difficile. Et je crois, M. le Président, qu'à moins que je ne comprenne pas les différents messages, du côté du gouvernement, là, vous avez six, presque sept représentants qui ont cette volonté-là, je pense qu'on a une équipe très compétente, du côté du ministère des Finances, qui est prête à vous supporter et à vous donner l'information, je le redis, du côté de notre formation, on va être là pour supporter, mais questionner, mais, en même temps, je veux penser aussi que, du côté de l'opposition officielle, il y a ce devoir, il y a cet intérêt-là de le faire correctement.

Alors, je veux vous dire que j'espère que nous aurons des discussions constructives, parce qu'on a tous le même objectif, et c'est ça que les contribuables, c'est ça que les citoyens s'attendent de nous, c'est qu'on vous pousse à faire un petit peu mieux parce que la situation est difficile, puis, dans ce contexte-là, on va être là pour ça. Merci beaucoup, M. le Président.

Discussion générale

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Lévis, de votre présentation. Nous allons passer maintenant à l'étape du débat. Donc, c'est l'opposition officielle qui va débuter ce premier bloc.

M. Marceau :

Le Président (M. Bernier) : Oui, vous avez des questions?

M. Marceau : Oui. Bien, effectivement, j'ai apporté des documents, des copies pour les collègues, de manière à… enfin, au moins une copie pour le ministre, là, de… Je peux donner ça au secrétariat?

Le Président (M. Bernier) : Oui, pas de problème.

M. Marceau : Il y a trois documents.

Le Président (M. Bernier) : On les reçoit. Vous voulez qu'on…

M. Marceau : C'est pour distribution.

Le Président (M. Bernier) : Pour distribution?

M. Marceau : Déposer, distribution. Enfin, ce sont des documents officiels, là.

Le Président (M. Bernier) : Bon, c'est bien.

M. Marceau : Ça va?

Le Président (M. Bernier) : Donc, un premier bloc de l'opposition officielle en matière de finances. M. le député de Rousseau, la parole est à vous, pour un bloc de 20 minutes.

M. Marceau : Parfait. Merci, M. le Président. Alors, écoutez, moi, j'aimerais commencer par des questions de croissance économique… Si on peut donner à M. le ministre — oui, parfait, impeccable — les documents…

Alors, en fait, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, j'ai apporté essentiellement, du plan budgétaire qui vient d'être déposé, les pages A.24 et A.25, là. C'est le cadre financier du gouvernement. J'ai aussi apporté le cadre financier du mois de février, du budget que nous avions déposé, les mêmes pages. À cette époque-là, c'étaient les pages A.26 et A.27. Et j'ai apporté le cadre financier du Parti libéral du 18 mars dernier, M. le Président, pour rappeler à la mémoire du ministre les prévisions qui étaient incorporées à ce cadre financier. Et j'inviterais le ministre à prendre la page 5 du cadre financier du Parti libéral.

Le Président (M. Bernier) : Je veux mentionner que les documents sont déposés pour fins…

M. Marceau : Sont déposés, oui.

Le Président (M. Bernier) : …pour fins d'information.

M. Marceau : Bien, les budgets sont déjà déposés, les deux, là, il n'y a pas de problème. C'est simplement pour aider la…

Le Président (M. Bernier) : …pour la discussion ici, à la commission.

M. Marceau : Le débat, voilà, oui. Mais, le cadre financier, j'imagine que les collègues l'ont aussi, de l'autre côté, mais je voulais simplement m'assurer que le ministre ait le cadre financier du Parti libéral sous la main. C'est pour ça que j'en ai apporté une copie. Donc, à la page 5, le ministre trouvera le cadre financier, au tableau 2, du Parti libéral. Et je l'invite tout simplement à consulter maintenant la page A.24 de son budget, la page A.24 de son plan budgétaire. Et je voudrais simplement qu'il constate avec moi les écarts fort importants qu'on trouve quant aux revenus dans le cadre financier du Parti libéral, par rapport au budget qu'il a déposé. Les écarts, comme je le disais, sont de l'ordre de… Vous avez, par exemple… vous pouvez prendre la ligne «Total des revenus consolidés». Puis, écoutez, on pourrait débattre sur le fait qu'on utilise avant ou après mesures que vous aviez mis dans votre cadre financier.

Mais vous pouvez comparer avec moi, si vous le voulez, la page A.24, les revenus consolidés dans le cadre financier du gouvernement déposé en juin et dans le cadre financier du Parti libéral, vous allez constater que les écarts sont fort importants. On parle d'un écart, là, à l'année 2018‑2019, de 3,3 milliards de dollars et d'un écart, là, sur cinq ans, de 8,8 milliards de dollars. Je ne sais pas, peut-être… Sur les faits, est-ce que vous êtes d'accord sur le fait qu'il y a un écart de 8,8 milliards? C'est une question très simple.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : …c'est évident : 72,6; 69,3. Ça ne prend pas une…

• (16 h 10) •

M. Marceau : O.K. Alors, là-dessus on est d'accord? Maintenant, je voudrais simplement vous rappeler que la raison de base, là… enfin, celle qu'on connaît bien… Parce qu'évidemment on ne connaît pas l'ensemble des gestes que vous avez posés pour arriver à votre cadre financier. Mais vous aviez reconnu, à l'époque de la campagne électorale, que le taux de croissance du PIB réel que vous prévoyiez pour 2014, était de 2,1 %, alors que, dans votre budget, celui que vous venez de déposer, vous prévoyez 1,8 % pour 2014.

Maintenant, j'aimerais rappeler un certain nombre de chiffres à ceux qui nous écoutent. Tout d'abord, le Mouvement Desjardins fait, lui aussi, des prévisions de croissance économique, la Banque Laurentienne, la Banque Royale, TD, enfin, plusieurs personnes en font. Lorsque vous étiez économiste à la Banque Laurentienne, vous aviez prévu 1,8 % avant l'élection. Ça, c'était avant l'élection. Chez Desjardins, c'était 1,7 % avant l'élection. Et simplement pour qu'on convienne, là, qu'il n'y a pas eu de changement dramatique, après l'élection, Desjardins a refait une nouvelle prévision à 1,7 %. Donc, 1,7 % avant, 1,7 % après, les prévisions n'ont pas changé. Chez la Laurentienne, je vous disais que c'était 1,8 %. À la Banque Nationale, à RBC, chez TD, on était à 1,9 % avant l'élection. 1,9 %. Ce qui m'amène à vous demander : D'où avez-vous sorti le 2,1 % en campagne électorale?

M. Leitão : Est-ce que je réponds?

Le Président (M. Bernier) : Oui. Allez-y, M. le ministre.

M. Leitão : Je ne sais pas comment ça se passe dans la…

Le Président (M. Bernier) : Oui. Allez-y.

15391 15391 M. Leitão : Très bien.

Le Président (M. Bernier) : Ce que je fais, c'est que je vous donne environ la même proportion de temps de réponse que le temps de la question.

M. Leitão : D'accord.

Le Président (M. Bernier) : Pour que soient balancées les choses.

M. Leitão : D'accord. O.K. Alors, pour ce qui est des prévisions que nous avions faites en campagne électorale, oui, en effet, elles étaient plus agressives que celles qu'on retrouve dans le cadre financier, il y a deux raisons essentiellement à ça — dans le cadre financier, je veux dire, dans le budget — il y a deux raisons essentiellement à ça.

D'abord, quand on fait un budget, on doit être extrêmement prudent et extrêmement conservateur. Donc, on a utilisé des hypothèses que moi, je considère qui sont très conservatrices, qui sont très prudentes. Je demeure convaincu que la croissance économique, cette année, 2014, surtout au deuxième semestre… vont nous surprendre par leur vigueur. Ça sera pas mal, à mon avis, plus robuste que ce qu'on voit ici maintenant. Et, en 2015 surtout, la croissance va être plus rapide. Je demeure convaincu de ça.

Cependant, pour faire un budget qui soit crédible, il faut que ce budget-là se base sur des hypothèses hyperprudentes. Donc, il y a beaucoup de prudence qui est bâtie dans le processus budgétaire pour qu'on puisse arriver à nos cibles, pour que la même situation qui s'est avérée en 2013‑2014 ne se reproduise plus. En 2013‑2014, on prévoyait une augmentation des revenus de 5,9 %. C'est comme ça qu'on arrivait à l'équilibre. Évidemment, ce n'est pas ça qui s'est passé. Alors donc, on commence par des hypothèses de croissance économique qui sont plus prudentes que ce que je pense que ce sera le cas.

Deuxièmement, l'autre raison qu'on voie une différence entre le cadre financier préélectoral et ce qu'on a dans le budget, c'est le point de départ. Le point de départ est très différent. Je vous ramène aux conclusions du groupe d'experts Montmarquette-Godbout sur la situation réelle au 7 avril, qui a été confirmée par la suite par le Vérificateur général. Les dépenses, ce que mon collègue d'en face a considéré le déficit potentiel, les dépenses s'étaient emballées et auraient atteint un tel niveau si on ne mettait pas en place des moyens, des mesures pour les contrôler.

Pour ce qui est de la croissance économique, un peu la même chose, la première moitié de l'année 2014 a été marquée par une continuation — et mon collègue l'a bien remarqué dans ses observations — par une continuation de la détérioration de l'emploi. Donc, l'emploi a été faible non seulement en 2013… et, encore là, on ne va pas revenir sur nos histoires de comment on compte les emplois créés ou pas, mais on sait très bien que, pour avoir une bonne idée de la tendance pendant l'année, sur ce qui se passe de janvier à décembre, alors cette tendance, en 2013, était très faible, reflétée dans la croissance du PIB de seulement 1,1 %, et s'est poursuivie en 2014, avec un premier semestre 2014, avec un premier cinq mois 2014 avec encore des pertes de 30 000 ou 40 000 emplois. Donc, l'économie du Québec tourne au ralenti. Effet libéral : évidemment, ce n'est pas instantané, mais, comme j'y ai fait un peu allusion dans mes remarques, je pense qu'on commence à remarquer une légère augmentation de la confiance et des mises en chantier. Ça devrait se répercuter au deuxième semestre.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Merci. En tout respect, M. le Président, je conclus que le ministre des Finances, alors qu'il était candidat libéral, n'était pas extrêmement prudent. Il nous a fait un cadre financier qui n'était pas prudent, qui n'était pas conservateur. Il a présenté, donc, quelque chose qui était…

Une voix : Agressif.

M. Marceau : «Agressif», je crois, que vous avez utilisé comme terme? Vos promesses, donc, étaient des engagements électoraux agressifs.

Le Président (M. Bernier) : Ça, c'est des termes d'économistes, ça.

M. Marceau : Oui, oui, oui! On s'entend. On s'entend, M. le Président. Je ne sais pas si c'est sage de se présenter devant les électeurs avec des engagements qui sont agressifs, au sens économique du terme. Je ne sais pas si c'est sage de dire aux électeurs que… ou de leur promettre des choses sur la base de revenus qui ont été gonflés. C'est le premier commentaire que je ferais.

Puis, deuxièmement, vous avez dit que le point de départ n'était pas le même, et puis là, encore une fois, en tout respect, je regarde les revenus consolidés puis votre point de départ, il est plus faible dans votre cadre financier de campagne, et donc vous ne pouvez pas plaider que c'est parce que votre point de départ n'était pas bon, là. En fait, vous partez d'un point de départ plus faible et puis vous avez gonflé pour arriver plus haut. Vous ne partez pas de plus haut, là. En tout cas, je ne comprends pas votre argument, si je puis m'exprimer comme ça. Par ailleurs, l'essentiel de l'action vient de votre 2,1 % plutôt que votre 1,8 % d'économiste à la Banque Laurentienne. C'est là qu'est l'essentiel de l'action. Et, répercuté sur de nombreuses années, ça donne ce que ça donne.

Alors, écoutez, je vais laisser aux gens… Moi, évidemment, je pourrais porter un jugement. Les mots que je pourrais utiliser sont durs. Je ne le ferai pas parce qu'on est en situation de commission parlementaire puis je veux demeurer courtois, mais je pense que les électeurs pourront tirer leurs conclusions quant au gonflement des revenus dans votre cadre financier.

Maintenant, je voudrais aller… je voudrais aborder la question d'emploi, et là très rapidement. Si 47 800, ce n'est pas bon, comment qualifiez-vous 31 300 pour 2014?

M. Leitão : Est-ce que…

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Écoutez, on revient aux chiffres d'emploi. Vous savez très bien que le 40 et quelques mille, c'est la moyenne annuelle. Le 30 et quelques mille, c'est la moyenne annuelle. Comme j'ai déjà dit, on le disait en campagne électorale, je le répète encore ici : Pour moi, la meilleure façon de voir la progression de l'emploi, c'est ce qui se passe pendant l'année. L'année 2013 n'a pas été bonne, surtout au niveau de l'emploi à temps plein, et ça s'est vérifié, ça s'est confirmé par les chiffres de croissance du PIB qui sont très faibles. Mais, pour clarifier cette situation-là, on va le dire ici tout de suite, l'engagement que nous avions pris pendant la campagne électorale, les 250 000 emplois sur cinq ans, on tient… on maintient cet engagement-là. Ce n'est pas une promesse. On ne va pas promettre de créer des emplois. Ce n'est pas l'État qui crée des emplois, c'est le secteur privé. Mais c'est notre objectif.

Nous avions donné comme objectif, en mars 2013, pendant la campagne, que l'économie québécoise créerait 250 000 emplois sur cinq ans. Et cet objectif demeure, c'est-à-dire — qu'est-ce que ça veut dire concrètement? — que nous avons pris le pouvoir, si vous voulez, le gouvernement, au mois de mai 2014, et le niveau total d'emploi, en mai 2014, avec les données de Statistique Canada, c'était 4 015 000 personnes au travail. Donc, notre objectif, le petit baromètre que j'ai au bureau, chez moi, au ministère des Finances, c'est que, mai 2019, donc d'ici cinq ans, le niveau total d'emploi se situe à 4 265 000 personnes. C'est ça, notre objectif. C'est vers ça que toutes les actions que nous allons mettre en place vont se diriger. Tout le monde doit avoir des objectifs dans la vie. Nous, le nôtre en tant que gouvernement, c'est celui-là. Donc, nous maintenons le cap sur cet engagement-là, cet objectif-là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Donc, vous nous dites : Dans cinq ans, il faut qu'on soit à 4 millions… à 250 000 de plus au mois…

M. Leitão : De mai à mai 2014‑2019.

M. Marceau : Regardez, donc vous me dites : On fait abstraction complètement, on ne tient pas compte de tout ce qui va se passer jusque-là. Le reste, hein, d'une certaine manière, ce n'est pas important. Parce que c'est ça que ça revient à dire.

M. Leitão :

M. Marceau : Bien, regardez, si vous me dites que vous ne voulez pas tenir compte des moyennes annuelles, vous ne voulez pas savoir ce qui s'est passé avant… On pourrait très bien avoir 4 millions… on reste à 4 millions pendant les 59 prochains mois puis, au 60e, on monte de 250 000 puis votre objectif va être atteint, ce qui est complètement absurde.

M. Leitão : Non…

M. Marceau : Je veux dire, vous êtes d'accord avec moi que ce n'est pas ça que vous voulez.

M. Leitão : Ça ne va jamais arriver. Ça ne va jamais arriver comme ça.

Le Président (M. Bernier) : Un instant! Je vais juste vous rappeler les règles.

M. Marceau : Oui, je sais. Donc, c'était…

Le Président (M. Bernier) : Normalement…

M. Marceau : On s'est laissé aller.

Le Président (M. Bernier) : Si vous vous interpellez mutuellement, là, on va peut-être avoir des problèmes. Il faudrait peut-être passer par la présidence.

M. Marceau : Alors, ça n'arrivera pas, M. le Président. On n'est pas…

Le Président (M. Bernier) : Ça va être plus simple, et on s'assure de bonnes discussions.

M. Marceau : On n'est pas partis pour avoir des problèmes. Je voulais juste montrer l'absurdité du raisonnement, M. le Président. On ne peut pas faire abstraction du niveau de...

Le Président (M. Bernier) : ...d'économistes.

M. Marceau : Oui, oui, absolument.

Le Président (M. Bernier) : O.K.

• (16 h 20) •

M. Marceau : On ne peut pas faire abstraction du niveau de l'emploi au fil du temps puis de cette évolution… C'est important de savoir, justement, si telle année a été meilleure que l'autre. Puis, pour le mesurer, on ne peut pas se fier simplement au point de départ, au point d'arrivée. Ce qui se passe entre les deux, c'est fort important.

Si, aujourd'hui, on passait de 4 millions… demain, à 4 250 000, puis qu'on restait à 4 250 000 pendant les 60 prochains mois, je serais très heureux, je serais très heureux, pas mal plus que si on reste à 4 millions pendant 60 mois puis qu'au bout de 60 mois on monte de 250 000. Dans les deux cas, votre objectif est atteint, mais, dans un cas, il y a beaucoup, beaucoup de Québécois, 250 000 personnes qui travaillent de plus; dans l'autre cas, il n'y a personne qui travaille de plus. C'est très différent, M. le Président. Et j'aimerais que le ministre oreconnaisse que ça n'a pas de sens, ce qu'il vient de dire.

Le Président (M. Bernier) : C'est beau. Est-ce que vous avez… C'est beau?

M. Marceau : C'est fini, ce point-là.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Vous savez très bien que ça ne peut pas arriver comme ça, ça ne va pas arriver comme ça. Au fil des cinq prochaines années, il y aura des… Il y aura même des mois où ça sera négatif. Wow! Oui, ça va arriver. Mais c'est seulement pour vous indiquer… Comme j'ai dit tantôt, nous avons tous besoin d'objectifs, de cibles réelles, concrètes, et nous, la nôtre, c'est celle-là, de 4 265 000 en mai 2019. Évidemment que, d'ici là, beaucoup d'eau va passer sous le pont et on va voir bien comment les choses vont évoluer. Mais tout ça pour vous dire que, si on commence à faire des calculs comme : Bon, cette année, c'était 40 000, l'année prochaine, c'est 30 000, vous n'allez jamais… En tout cas, ce n'est pas de cette façon-là que moi, je regarde l'évolution d'une économie.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui. Juste, si je ne m'abuse, vous n'avez pas qualifié le 31 000. Je vous demandais de le qualifier, le 31 000 emplois de cette année.

Le Président (M. Bernier) : Oui.

M. Leitão : Bien, écoutez, encore une fois on sait très bien que, si on utilise des moyennes annuelles, la moyenne de 2013 était élevée parce qu'en début d'année c'était… Fin 2012, début 2013, c'était très fort, donc ça a fait monter la moyenne pour l'année 2013. Donc, nécessairement, la moyenne annuelle pour 2014, même si tout va aller bien au deuxième semestre, la moyenne va être nécessairement moins élevée que la moyenne de 2013. Mais, encore une fois, si on regarde les moyennes annuelles, on n'a pas le vrai portrait de ce qui s'est passé pendant l'année, pendant l'année 2013 et pendant l'année 2014. Donc, moi, je n'aime pas regarder l'évolution de l'emploi… et ça peut se retourner contre moi, regardez, c'est très clair. Mais je n'aime pas regarder l'évolution de l'emploi en moyenne annuelle, je préfère regarder l'évolution de l'emploi de la façon que ça se passe pendant l'année, de janvier à décembre. C'est comme ça que je regarde l'évolution de l'emploi. D'ici un an ou deux, qui sait, ça pourrait me donner des mauvais résultats, mais je vais maintenir à la même méthodologie.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui. On aura l'occasion d'évaluer votre performance sur la base de votre façon de regarder les choses. Il n'en demeure pas moins que, quelle que soit, de toute façon, la façon de mesurer l'emploi, à ce jour ça ne se passe pas bien, mais on verra pour…

M. Leitão :

M. Marceau : …on verra pour la suite des choses. Sur le 15 milliards, là, sur lequel vous avez dû reculer… un certain nombre de questions à poser. La première, c'est : Lorsque vous étiez en campagne électorale et puis que vous promettiez ce 15 milliards là, vous n'aviez pas envisagé le fait que c'était incompatible avec la capacité de payer des Québécois?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Excusez-moi.

Le Président (M. Bernier) : Là, la question est : Est-ce que vous avez envisagé, en ce qui regarde le 15 milliards, de…

M. Leitão : Est-ce qu'on avait, pardon, exagéré?

M. Marceau : Bien, pendant la campagne électorale, j'imagine que, lorsque vous avez… vous avez dû vous dire : Il y a un… Si on dépense 15 milliards de plus, c'est 15 milliards de plus à la dette. On a des ratios dette-PIB à respecter. Qu'aviez-vous en tête pour qu'on maintienne notre crédibilité auprès de nos agences de notation? Qu'est-ce que vous aviez prévu?

M. Leitão : Écoutez, c'était…

Le Président (M. Bernier) : Ça va? Écoutez, allez-y.

M. Leitão : 15 milliards sur 10 ans, ce n'était pas 15 milliards d'un coup, hein? On se comprend que c'était 1,5 milliard de plus par année sur 10 ans. On pensait que c'était faisable. Encore une fois, on revient au point de départ. À ce moment-là, on était à 10 milliards de dollars, en termes d'investissements annuels. Et donc nous pensions que nous pouvions relever ça.

Nous avons changé d'appréciation, oui, à court terme, c'est vrai. Pourquoi? Parce que, encore une fois, pour l'année 2013‑2014, le déficit s'est avéré être 3,1 milliards. On aurait dû être à l'équilibre budgétaire, ça n'a pas été le cas. On devait être, après ça, à 2,5 milliards, ça commençait déjà à compliquer les choses. Mais, au bout du compte, on se retrouve avec 3,1 milliards de dollars de déficit en 2013‑2014. Donc, ça commençait à être un peu plus risqué.

Et puis par la suite, étant donné l'effort, en termes de contrôle des dépenses qui était nécessaire pour qu'on puisse atteindre les cibles d'équilibre budgétaire, nous avons jugé prudent de ralentir cette croissance d'investissements publics en 2015‑2016 jusqu'à ce qu'on revienne à l'équilibre budgétaire. Pour 2014‑2015, l'année en cours, cette année, nous avions quand même augmenté à 11,5 milliards, c'est quand même 3 % du PIB, c'est quand même important. L'année suivante, oui, on va ralentir la cadence étant donné notre capacité de payer. Mais je vous rappelle aussi que le PQI, c'est un plan sur 10 ans. L'année prochaine, on sera rendus au PQI 2015-2025; après ça, 2016-2026. Donc, je pense qu'il faut voir ça comme une cible mouvante.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Marceau : Oui, je vois qu'il me reste une trentaine de secondes. Je veux simplement faire un commentaire.

Le Président (M. Bernier) : Bien, je peux ajouter une partie… deux minutes, là, par rapport au temps que vous n'avez pas pris.

M. Marceau : Non, moi, je veux juste faire un petit commentaire, simplement pour dire qu'en campagne électorale, votre chef, le premier ministre, n'a pas eu cesse de dire que le véritable déficit n'était pas de 2,5 milliards, mais bien de 3 milliards. Il disait ça. Il dit : Ce n'est pas vrai que c'est 2,5 milliards, c'est 3 milliards, le déficit. Il a dit ça à plusieurs reprises, dans plusieurs rallyes libéraux et… Non, il avait raison, mais il n'en demeure pas moins que la promesse de 15 milliards était faite sachant, affirmant, connaissant et croyant que c'était 3 milliards. Et là vous me dites, aujourd'hui, que c'était 3… Ah! j'ai découvert que c'était 3 milliards et donc je ne peux pas le faire. Je veux dire, ça ne marche pas très bien, là.

Ou bien le premier ministre ne disait pas… Enfin, il a dit, en campagne électorale, à plusieurs reprises : Ça va être 3 milliards, ça va être 3 milliards puis, en même temps, je vais vous en mettre 15 milliards de dépenses en infrastructures de plus, 10 fois 1,5 milliard. Alors, cette raison-là ne peut pas facilement être invoquée, pas plus le fait qu'il y a un contrôle des dépenses à faire. Le contrôle des dépenses, évidemment il doit être fait, et votre budget prévoit que vous allez contrôler les dépenses puis que vous allez arriver à des cibles, à un équilibre budgétaire l'an prochain. Et donc il n'y a rien qui a changé dans le cadre financier, il n'y a rien qui a changé dans les informations que vous aviez. La seule chose qu'il y a, je pense, puis malheureusement… puis, encore une fois, je pourrais utiliser des mots très durs, mais je pense que vous aviez fait une promesse qui n'était pas raisonnable puis qui n'était pas compatible avec la capacité de payer du Québec, puis vous l'avez découvert durement à votre arrivée. C'est tout. C'est un commentaire. M. le ministre peut répondre, évidemment.

Le Président (M. Bernier) : Avez-vous des mots à ajouter?

M. Leitão : Juste, très rapidement, pour dire qu'encore une fois c'est 15 milliards sur 10 ans, donc 1,5 milliard par année. Cette année, 2013‑2014, oui, on est à 11,5 milliards d'investissements publics, c'est substantiel. L'année prochaine, oui, nous allons ralentir un peu la cadence. Quand on regarde les ratios d'endettement, oui, nous regardons les ratios d'endettement, dette-PIB, ce n'est pas seulement la dette, mais c'est aussi le dénominateur de PIB. Or, le PIB, la croissance du PIB nominal est pas mal plus lente que ce qui avait été pensé…ce qui avait été prévu avant. Donc, il faut que ce ratio-là demeure atteignable.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Donc, nous allons passer du côté gouvernemental, et je vais donner la parole à M. le… Lequel de… M. le député de Mégantic? Qui prend la parole? M. le député de…

M. Bolduc (Mégantic) : Oui. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Mégantic, la parole est à vous…

M. Bolduc (Mégantic) : Merci.

Le Président (M. Bernier) : …pour un bloc de 20 minutes avec les échanges avec le ministre.

• (16 h 30) •

M. Bolduc (Mégantic) : Je voudrais tout d'abord saluer mes collègues des deux oppositions, mes collègues ici du gouvernement, M. le ministre. Le budget du 4 juin dernier a confirmé que l'équilibre budgétaire sera atteint en 2015‑2016. Dans les documents, il est indiqué que, pour atteindre l'équilibre budgétaire, la cible de croissance des dépenses consolidées sera fixée à un taux inférieur à celui des revenus. Ainsi, pour les deux prochaines années, la croissance des dépenses consolidées sera de 1,7 % en moyenne par année, alors que celle des revenus s'établira en moyenne à 3,2 %. En particulier, la croissance des dépenses de programmes s'établira à 1,8 % en 2014‑2015 et à 0,7 % en 2015‑2016.

Le 3 juin dernier, dans son rapport spécial qui portait sur la vérification du solde budgétaire pour l'année 2014‑2015, le Vérificateur général du Québec a indiqué que les coûts de reconduction reconnus des programmes totalisaient 68 115 000 000 $, pour une croissance annuelle reconnue de 6,7 % par rapport au budget des dépenses 2013‑2014. Selon le Vérificateur général, l'information disponible lors de la préparation de la mise à jour économique et financière de l'automne 2013 et du budget du 20 février dernier permettait au gouvernement de reconnaître l'importance des efforts à fournir, soit plus de 3 milliards, pour atteindre l'objectif des dépenses de programmes. Cet objectif était établi à 2 %, soit un taux de loin inférieur aux 6,7 % nécessaires pour rencontrer la croissance des coûts de reconduction des programmes reconnus par le Secrétariat du Conseil du trésor.

Ce constat, fait par le Vérificateur général le 3 juin dernier, avait aussi été soulevé par les deux experts en finances publiques, soit M. Claude Montmarquette et Luc Godbout, mandatés par le gouvernement pour faire la lumière sur la situation financière du gouvernement. Les experts ont constaté qu'au cours des dernières années un effort important a été consacré au contrôle des dépenses. La croissance annuelle moyenne des dépenses de programmes a significativement fléchi ces dernières années. Malgré cet effort, les experts indiquent qu'il existe une dynamique poussant à une augmentation des dépenses supérieure au cadre financier prévu.

Je me suis demandé ce qu'étaient les coûts de reconduction. J'ai trouvé la réponse dans les documents budgétaires du 4 juin dernier. En effet, j'ai appris que la croissance des dépenses publiques est généralement influencée par trois grands facteurs. Premièrement, la croissance des dépenses publiques varie selon l'évolution des clientèles qui bénéficient des services. Par exemple, les clientèles qui bénéficient des services peuvent être les enfants en CPE, les étudiants et les usagers du système de santé. Deuxièmement, la croissance des dépenses publiques varie avec la variation des prix dans la prestation des services publics, c'est-à-dire l'inflation touchant les achats d'équipements et les médicaments ainsi que les hausses salariales. Troisièmement, la croissance des dépenses publiques varie avec la bonification ou l'intensification des services, comme l'introduction d'un nouveau programme, la bonification des services existants ou encore les rattrapages salariaux.

Selon le Vérificateur général du Québec, pour 2014‑2015, l'écart entre les coûts de reconduction reconnus des programmes par le Secrétariat du Conseil du trésor et l'objectif de dépenses du programme établies au... février 2014 représente un effort de 3 248 000 000 $. Selon le Vérificateur général du Québec, la forte croissance des coûts de reconduction reconnus des programmes provient de plusieurs éléments. D'entrée de jeu, dans son rapport, le Vérificateur général du Québec a indiqué que les annonces du précédent gouvernement totalisent 605 millions. Ces éléments contribuent à eux seuls à hausser d'environ 1 % le taux de croissance des dépenses de programmes. À ce titre figurent notamment la politique économique Priorité emploi, la politique de solidarité ainsi que les promesses faites aux universités dans le cadre du Sommet sur l'enseignement supérieur.

De plus, il est indiqué dans le rapport du Vérificateur général du Québec que la rémunération est l'élément le plus important des dépenses de programmes puisqu'elle représente près de 60 % de celles-ci. Selon le Vérificateur général du Québec, les dépenses de rémunération devraient augmenter, en 2014‑2015, d'environ 4 % par rapport à l'année 2013‑2014. Cette hausse s'explique principalement par les paramètres d'indexation salariale prévus aux ententes de rémunération, soit 2 % pour 2014‑2015, les progressions à l'intérieur des échelles salariales, les ajouts d'effectifs. À cet égard, on dénote une hausse moyenne de 6 250 effectifs dans les secteurs public et parapublic depuis cinq ans.

Dans son rapport, le Vérificateur général du Québec a indiqué que la rémunération est l'élément qui contribuera le plus fortement à la hausse du taux de croissance reconnu des dépenses de programmes en 2014‑2015, soit environ 2,5 % de l'ensemble de ces dépenses. Certains engagements majeurs pris par le gouvernement dans le passé au chapitre de la rémunération et qui impliquent une croissance de plus en plus importante des dépenses au fil des ans expliquent une telle situation en 2014‑2015. À titre d'exemple, les ententes que le gouvernement a signées avec les médecins spécialistes prévoient des augmentations... croissance de la rémunération, près de 33 % sur cinq ans.

Enfin, dans ses explications, le Vérificateur général du Québec parle de la croissance importante de la dépense relative aux régimes de retraite comme le facteur de dépassement. La dépense relative aux régimes de retraite représentera une augmentation de 27 % par rapport au budget de 2013‑2014, et elle a contribué pour près de 1 % à la hausse du taux de croissance reconnu des dépenses de programmes.

Somme toute, de l'avis du Vérificateur général du Québec, la présence d'engagements contractés par les gouvernements précédents s'échelonnant sur plusieurs années limite la marge de manoeuvre pour réduire les dépenses. Le Vérificateur général du Québec indique qu'un risque non négligeable est particulièrement présent lorsque les coûts découlant de ces engagements connaissent une croissance supérieure à celle estimée pour les revenus. En effet, pour les financer, le gouvernement devra trouver des nouvelles sources de revenus ou encore réduire ses autres dépenses. M. le Président, ma question est la suivante : J'aimerais savoir ce que fera le gouvernement pour contrôler ses dépenses.

Le Président (M. Bernier) : Et c'est la question. Allez-y, M. le ministre.

M. Leitão : M. le Président, merci. Merci beaucoup pour la question. En effet, le contrôle des dépenses, c'est la pierre angulaire de notre budget. Nous jugeons que le Québec se trouve dans une situation de déficit structurel, c'est-à-dire où les dépenses augmentent plus rapidement que les revenus de façon systématique, de façon régulière. Et donc, pour corriger la situation, il faut qu'on renverse les tendances et il faut que la croissance des dépenses soit, comme vous avez remarqué, inférieure à la croissance des revenus pendant une période soutenue.

Alors, comment nous allons arriver à contrôler les dépenses? Premièrement, je dois vous dire que nous allons — donc, c'est notre principal objectif — arriver à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Pour nous, c'est incontournable, c'est ce qui va arriver. Alors, pour contrôler la croissance des dépenses, il y a d'abord un contrôle rigoureux pour cette année, l'année courante. Donc, les différents ministères ont reçu leurs crédits. Donc, ils savent exactement à quoi s'attendre en termes de dépenses pour cette année. Le point de départ, encore une fois, était particulièrement difficile puisque la machine s'était un peu emballée. N'oublions pas que la dernière fois qu'il y a eu un budget, au Québec, qui a été voté, approuvé, et tout ça, on remonte à novembre 2012. Donc, depuis, il n'y a pas eu vraiment d'effort systématique de contrôle des dépenses. C'est ce que nous allons faire maintenant.

Cet effort est très exigeant et surtout pour 2015‑2016. Cet effort ne serait pas réaliste si on ne mettait pas en place les trois outils dont j'ai fait allusion tantôt, c'est-à-dire : les commissions, commission de révision de programmes, commission d'examen sur la fiscalité; ainsi que le cran d'arrêt, donc on n'ajoute plus de nouveaux programmes sans trouver d'économies ailleurs; et le gel des effectifs. Ces trois mesures, ces trois outils vont nous permettre d'atteindre nos cibles de contrôle de croissance des dépenses.

La révision des programmes, à mon avis, c'est un élément crucial, important, significatif. Tantôt, le député de Rousseau nous disait que, ah, bof, c'était comme ça en 2003, vous allez refaire la même chose. Justement, une des grandes différences entre 2003 et aujourd'hui, c'est cette commission permanente de révision de programmes qui va nous… De façon systématique, on va regarder tous les programmes et on va voir… on va finir par éliminer des programmes entiers s'ils ne sont plus pertinents. Donc, ce n'est pas seulement une question de réduction de dépenses ici et là de façon ponctuelle, ça va être de façon structurelle et de façon permanente.

Pour ce qui est de la fiscalité, l'examen de la fiscalité, celui-là, au contraire, cette revue, elle est bien délimitée dans le temps. Donc, pour revenir à la question du député de Lévis, ce n'est pas un exercice… ce n'est pas une commissionnite qui va durer éternellement. C'est d'ici la fin de l'année, décembre 2014, c'est quand même relativement court, on parle de six, sept mois où cette commission-là va nous donner des recommandations très pratiques et très immédiates pour revoir la fiscalité au Québec, pour la rendre plus simple, plus efficace, plus équitable et, donc, ouvrir la voie sur un nouvel avenir pour la fiscalité au Québec.

Finalement, le gel des effectifs, c'est aussi un moyen qui est très puissant. Parce que ce que j'ai appris en arrivant ici, c'est que le contrôle que l'État a sur tout ce qui est système parapublic, ce contrôle-là est un peu… il n'est pas optimal. Donc, il faut se donner les outils nécessaires pour pouvoir vraiment d'abord dénombrer… ne serait-ce que dénombrer combien de personnes travaillent dans le système parapublic. Tous les réseaux, fonds, commissions, etc., on va bien dénombrer tout ça et on va se donner les pouvoirs d'employeur, avec les 15 000 départs à la retraite, donc, de comment réallouer ces ressources humaines pour qu'on puisse maintenir la livraison de services aux citoyens et en même temps diminuer la rémunération totale dans l'appareil parapublic surtout.

Donc, ces trois moyens-là, ces trois outils-là vont nous permettre d'atteindre nos cibles. Et je dois vous dire que nous demeurons particulièrement focussés à atteindre ces cibles-là. Et, encore une fois, pour revenir aux suggestions du député de Lévis, si, en cours d'année, on voit qu'on s'éloigne de ces cibles-là, eh bien, on n'hésitera pas, on n'hésitera pas à mettre en place des mesures additionnelles pour s'assurer que ces cibles-là seront atteintes. Donc, on va suivre de très près l'évolution des dépenses pour s'assurer qu'on atteint ces cibles-là.

• (16 h 40) •

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Mégantic, avez-vous des questions additionnelles en regard du sujet?

M. Bolduc (Mégantic) : Non, merci.

Le Président (M. Bernier) : Non? Donc, nous allons aller au député de… M. le député de Sainte-Rose, la parole est à vous.

M. Habel : Oui, merci, M. le Président. Premièrement, j'aimerais saluer le ministre des Finances, le député de Baldwin, j'aimerais saluer aussi les groupes formant l'opposition officielle, du deuxième groupe d'opposition et de notre gouvernement. J'aimerais faire un léger préambule.

Parce qu'un budget, c'est une photo, ça prend en compte la situation antérieure et ça donne la vision aussi qu'on veut avoir dans le futur. Donc, le député de Lévis parlait tantôt d'un exercice de courage, de redresser les finances publiques. Je suis d'accord avec lui, il faut qu'on redresse les finances publiques pour améliorer la vie de tous les Québécois. On est là-dedans aussi. On a proposé cinq axes : l'investissement privé des PME; la stratégie maritime de l'est à l'ouest; la relance du Plan Nord du nord au sud; mettre en valeur les ressources naturelles, notamment avec Hydro-Québec; et aussi le financement en investissements et en infrastructures. Et, dans le budget du 4 juin dernier, nous avons appris que le gouvernement allait proposer, au cours des 10 prochaines années, une enveloppe de 90,3 milliards pour renouveler et moderniser nos investissements en infrastructures. Et j'ai voulu approfondir un peu le détail du budget, et vous me permettrez de donner quelques exemples, surtout dans le secteur de la santé, parce que je suis aussi sur la Commission de la santé et des services sociaux.

Donc, tout d'abord, dans le secteur de la santé, le gouvernement va investir 17 milliards pour la rénovation et la modernisation du parc immobilier des établissements du réseau de la santé et des services sociaux. En particulier, notre gouvernement va soutenir la réalisation de près d'une dizaine de projets majeurs, dont le CHUM, l'Hôpital Sainte-Justine, le CUSM, l'Hôpital Maisonneuve. Au niveau de l'Hôpital Sainte-Justine, ça touche l'ensemble de la région métropolitaine, dont mon comté, qui est Sainte-Rose, où les enfants de ma circonscription peuvent aussi accéder à cet hôpital.

De plus, il y a plusieurs projets, dans le secteur de la santé, qui sont en planification, en mode étude, soit dans l'ensemble de la région du Québec, par exemple, la construction d'un nouvel hôpital sur le site de l'Hôpital Enfant-Jésus de Québec, la construction d'un nouvel hôpital à Vaudreuil-Soulanges, le Centre intégré de traumatologie et l'Unité mère-enfant à l'Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, et la nouvelle aile de l'hôpital de Verdun. C'est un plan pour la région métropolitaine pour créer un quartier de santé qui couvre l'horizon de l'est à l'ouest du Québec, ce qui va favoriser la région métropolitaine, dont le comté de Sainte-Rose.

Lors de la campagne électorale, j'ai été heureux d'apprendre que notre gouvernement allait compter et mettre en place un plan d'action pour la métropole pour la santé, notamment dans le développement du Quartier de la santé. Situé autour du centre hospitalier du CHUM et du Centre de recherche du CHUM, tirant aussi bénéfice de la présence du Centre universitaire de santé McGill, le Quartier de la santé permettra de consolider la place de Montréal au sein des 10 plus importants pôles de santé en Amérique du Nord. Ce projet nécessitera le recouvrement d'une partie de l'autoroute Ville-Marie et contribuera grandement au développement de l'économie du Québec dans le domaine des sciences de la vie en devenant un pôle d'attraction d'entreprises de biotechnologie et de recherche biomédicale. Ce projet confirmera l'avenir de Montréal parmi les grandes métropoles innovantes de l'Amérique du Nord.

Et, à ce sujet, M. le Président, je vais vous donner quelques exemples des améliorations qu'on vise à faire dans le gouvernement, notamment à l'hôpital de Verdun, qui est toujours dans la région de Montréal. Notre gouvernement s'est engagé à améliorer l'accès des soins avec la modernisation de l'hôpital de Verdun. On peut constater que, dans le PQI 2014‑2024, notre gouvernement s'est engagé à relancer le projet de modernisation de l'hôpital de Verdun en inscrivant ce projet à l'étude. À l'heure actuelle, la vétusté des installations de l'hôpital, des chambres, hébergeant jusqu'à quatre patients, l'exiguïté des places communes et les corridors encombrés peuvent compromettre la qualité et la sécurité des soins. Ce projet va bénéficier aux patients de Verdun et à tous les patients du sud-ouest de Montréal.

L'Hôpital du Sacré-Coeur, qui, pour le bénéfice des gens de mon comté, est situé… qui est très proche de la circonscription de Sainte-Rose, qui est l'autre bord de la rivière des Mille Îles… Ce projet de notre gouvernement, qui soutient l'Hôpital du Sacré-Coeur de façon continue depuis des années, est un axe important pour les gens de Laval parce qu'il donne accès à l'Hôpital du Sacré-Coeur, mais il existe aussi la réalité que nous avons un hôpital à la Cité de la santé de Laval et aussi l'hôpital de Saint-Eustache qui peut contribuer au bénéfice de notre population.

Les importants investissements consentis à l'établissement de Sacré-Coeur ont d'ailleurs permis la création d'un nouveau service d'urgence et d'une unité ultra-moderne de soins coronariens. Il est aussi rendu possible le réaménagement des services de réadaptation en ergothérapie et en physiothérapie, de même que des unités de chirurgie, de médecine de jour et d'endoscopie. Les soins ambulatoires de médecine interne, la clinique de chirurgie et de chirurgie cardiaque et celle d'endocrinologie ont aussi fait l'objet de travaux.

Lors de la campagne électorale, mon collègue de Saint-Laurent, M. Jean-Marc Fournier, indiquait que, pour sa circonscription, la circonscription de Saint-Laurent, l'Hôpital de Sacré-Coeur était un projet qui était prioritaire. Cet hôpital joue un rôle central dans l'offre de soins hospitaliers non seulement à Saint-Laurent et dans le nord de l'île de Montréal, mais aussi à Laval et aussi pour les institutions universitaires de l'ensemble du Québec. La modernisation et la mise à niveau des installations sont essentielles.

Je constate donc que le budget du 4 juin dernier a permis de réaffirmer l'importance de procéder à des travaux de modernisation dans l'Hôpital Sacré-Coeur de Montréal, un projet qui est à l'étude, en plus de la modernisation des soins à l'Hôpital Sacré-Coeur, dont le Centre intégré de traumatologie et l'Unité mère-enfant. Pour moi, la concrétisation de ce projet-là se traduira nécessairement par un accès meilleur aux soins de la santé et aux services pour les patients. Ce que souhaite entreprendre l'Hôpital Sacré-Coeur se situe dans la jonction des deux priorités de notre budget, soit la relance de l'économie du Québec avec des investissements substantiels dans nos infrastructures et la modernisation de nos établissements en santé.

Au niveau de la santé, on a couvert un certain horizon. On peut aussi parler du transport, M. le Président…

Le Président (M. Bernier) : Vous avez environ une trentaine de secondes pour conclure votre énoncé. Par la suite, au prochain bloc, le ministre aura l'occasion de vous répondre sur le sujet. Mais je vous donne une trentaine de secondes pour conclure votre bloc.

M. Habel : Parfait, M. le Président. Donc, je vais résumer par le fait qu'on aurait pu parler aussi du transport et vous dire qu'on a une approche rigoureuse et transparente pour la gestion des projets.

Et ma question, M. le Président, aussi, qui résume aussi l'analyse du PQI, qui répond aux besoins et à la priorité des Québécois, c'est que j'aimerais savoir si ces investissements seront suffisants si on prend en compte aussi le respect de la capacité des Québécois…

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Sainte-Rose, on aura l'occasion de revenir avec votre question dans le prochain bloc. Je vous redonnerai la parole.

M. Habel : O.K., parfait.

Le Président (M. Bernier) : Parce que, là, le bloc, en ce qui concerne la partie gouvernementale, est maintenant épuisé. Donc, M. le ministre, on revient avec le prochain bloc pour répondre à la question du député de Sainte-Rose.

Nous allons donc passer au deuxième groupe d'opposition. C'est M. le député de Lévis, vice-président de la commission, à qui je donne la parole pour un bloc de 20 minutes.

• (16 h 50) •

M. Dubé : Merci beaucoup. Alors, j'ai expliqué tout à l'heure que… Avant peut-être de rentrer dans le détail de l'année, j'aimerais qu'on puisse discuter votre vision de quatre ans, du ministre des Finances, parce que je pense que c'est important de regarder vos grands objectifs sur quatre ans et, après ça, ramener ça à la première année puis avoir cette discussion-là autant sur les revenus… sur les trois composantes, les revenus, les dépenses et l'impact sur les contribuables.

Puis j'aimerais peut-être, M. le Président, amener le ministre puis les gens qui nous écoutent aujourd'hui… parce qu'il y a tellement de temps qui est passé… Je regarde le sous-ministre des Finances, ici, qui est rendu un expert à préparer ces documents-là ici. J'aimerais au moins lui rendre hommage en disant qu'on devrait prendre quelques minutes pour regarder ces documents-là, parce qu'il y a tellement de temps qui est passé dans ça que je suis certain que les gens vont apprécier qu'on prenne quelques minutes pour regarder les documents.

Je vous amènerais à la page A.24 parce que je pense que, dans ça, pour ceux qui veulent regarder à la maison… Lorsqu'on parle des revenus consolidés autant que des dépenses consolidées, l'année 2013‑2014 montre des revenus consolidés du gouvernement de l'ordre de 93 milliards, presque 94 milliards, qui étaient en croissance sur l'an dernier de 4,2 %. C'est beaucoup d'argent, ça, 4,2 % de croissance des revenus. Puis, dans ça, il faut se rappeler qu'il y avait quelques éléments non récurrents, dont l'harmonisation de la TPS, des choses comme ça. Mais, dans cette année-là, en 2013‑2014, donc l'année qui s'est complétée il y a quelques mois, là, le 31 mars, on a eu des croissances des dépenses consolidées de l'ordre de 5,7 %, là, qui est le meilleur estimé, puis ça, ça inclut la dette. Je le mentionne parce que c'est là qu'on dit que notre modèle d'affaires ne peut pas continuer comme ça. On ne peut pas continuer à avoir des revenus, au moment où les gens, les entreprises sont surtaxés, qui croissent à une hauteur de 4,2 %, ce qui est énorme, mais en même temps avoir des dépenses — et c'est là que je disais que les dépenses étaient hors contrôle, particulièrement dans la dernière année — à une hauteur de 5,7 %.

Alors, ce que je note puis, je pense, qu'il est important de le noter pour tout le monde, c'est que, sur votre vision de quatre ans, cinq ans, lorsqu'on prend 2014‑2015, 2015‑2016, 2016‑2017, 2017‑2018 — puis là je vous rappellerai qu'on va être en élections à quelque part en octobre 2018 — il faudrait voir votre plan. Il est quand même... je ne dirais pas ambitieux, mais je pense que c'est correct de le voir comme ça. Vous avez une croissance des dépenses beaucoup plus basse, on joue dans le 3 %, 3,1 % — les gens le voient bien, je pense, à la page A.24 — mais on voit aussi qu'au lieu d'être à 5,7 % de croissance des dépenses vous êtes plus dans la zone de 2 %, alors. Puis je pense que, dans la première année… je veux juste noter que, bien que les gens peuvent penser que c'est ambitieux, il faut penser que, sur deux ans, c'est 5,7 % plus 1,9 %. Je veux m'expliquer, là… Vous pensez à 1,9 % de croissance, mais on a manqué la cible par 3 % l'année d'avant. Alors, je veux juste mentionner que cet équilibre-là que vous essayez d'atteindre est ambitieux.

Maintenant, le point que je veux faire — puis tout à l'heure, quand je vais vous poser ma question — c'est de dire que, malgré tout ça, d'avoir une croissance des revenus plus modeste, mais qui est quand même assez importante à 3 %, de ramener les dépenses, ce que vous réussissez à dégager, c'est un équilibre budgétaire avec un petit surplus pour la première fois en 2017‑2018, parce qu'il faut dire que la Loi sur l'équilibre budgétaire, tout le monde le comprend bien, tient compte des argents qu'on met au Fonds des générations.

Mais pourquoi je le mentionne? Parce que notre premier ministre, votre premier ministre, qui est notre premier ministre à tous, a bien dit que ça serait seulement à ce moment-là qu'on pourrait avoir un répit fiscal pour les contribuables. Alors donc, je trouve que, même si c'est ambitieux, ce n'est qu'en 2017‑2018… C'est pour ça, tout à l'heure, que je veux faire... Je veux vous demander de bien répéter à tout le monde que c'est votre compréhension que, malgré ces objectifs ambitieux là, de réduction des revenus, qui ne tiennent pas compte — je le mentionne pour être transparent — des augmentations de taxes scolaires, etc., là, on ne voit pas ça là-dedans, là, mais que ce n'est qu'en 2017‑2018 qu'il y aurait une réduction possible, une fois que vous aurez trouvé, par la commission d'examen sur la fiscalité, 650 millions à chaque année, que ce serait seulement dans cette année-là qu'il y aurait une réduction du fardeau fiscal des contribuables. C'est bien ça?

Le Président (M. Bernier) : Merci. Oui, M. le ministre.

M. Leitão : Oui, on va commencer à donner, donc, un répit... non, on va continuer — je vais revenir — on va continuer à donner un répit aux consommateurs, aux contribuables québécois une fois qu'on va commencer à dégager des surplus budgétaires. Dans le cadre que nous avons ici, donc la page A.24, en effet, les surplus budgétaires vont commencer à se manifester en 2017‑2018. Mais, encore une fois, ça, c'est ce que je considère, moi, un cadre financier, un cadre budgétaire extrêmement conservateur. Si, en effet, l'économie performe mieux, comme je pense que ça va être le cas, ça se pourrait qu'on commence à dégager des surplus un an avant, ça se pourrait très bien, si la croissance économique, vraiment, est plus élevée que le 2 % qui est inclus ici. Donc, nous, ce que nous nous sommes engagés à faire, c'est que, dès qu'il y aura des surplus budgétaires, oui, la moitié de ces surplus-là vont être envoyés à la réduction de la dette et l'autre moitié à l'allègement fiscal des contribuables. Peut-être, si je peux juste compléter…

Le Président (M. Bernier) : Oui, oui.

M. Leitão : J'avais dit aussi de continuer l'allègement, parce que, quand même, dans ce budget, nous avons évité d'augmenter les frais de garde. C'était quand même un choc tarifaire important pour les familles avec deux enfants en garderie. Ce choc-là n'a pas eu lieu.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Dubé : Alors, je vais continuer. Puis j'apprécie, donc, ce que vous dites. Puis je pense que c'est important pour les gens de comprendre. Vous, dans votre perception ou dans votre philosophie, vous avez aimé mieux poser un… je dirais un jugement plus moyen. Ce n'est pas un budget, selon vous, qui est très agressif, mais qui n'est pas non plus très optimiste, si je vous… Encore une fois, je ne suis pas un économiste. Vous en êtes un très bon, à ce qu'on me dit, là, mais… Mais je vous amène peut-être sur les facteurs…

M. Leitão : …budget conservateur.

M. Dubé : Conservateur? O.K. Mais je vous amène sur un élément. Puis c'est parce que, tout à l'heure, je vous ai dit : Qu'est-ce qui peut, selon vous, faire que, même si c'est un budget modeste… qui fait que ça pourrait déraper à quelque part? Parce que moi, je trouve que c'est loin, donner le répit fiscal en 2017‑2018. On en a parlé, je trouve… Qu'est-ce qui fait que ça pourrait aller plus vite ou même que ça pourrait… Les gens pourraient se dire : Bien, on nous le promet, mais… Qu'est-ce qui pourrait aller mal?

Et je veux juste poser le… vous amener à des éléments de réponse, s'il vous plaît, sur les deux pages suivantes. Encore une fois, là, je regarde les gens qui ont travaillé sur ce document-là. La page A.28 parle beaucoup. Parce que, si on pouvait avoir la chance de mettre ces tableaux-là… Mais on le fera peut-être plus tard. Je pense que le député de Rousseau aimerait bien ça, présenter ce tableau-là. C'est le tableau à la page A.28 où on voit justement cette espèce de mont Everest qu'on a eu en 2013‑2014, sur la croissance des dépenses consolidées. Et vous, vous dites que la croissance va être limitée à 1,9 %, 1,3 %, 1,7 %. Comment vous voyez ça aujourd'hui, là? Ça, vous avez déjà fait ce budget-là il y a quelques semaines. Est-ce qu'aujourd'hui vous croyez encore, avec ce que vous entendez, que c'est encore un budget qui… Parce que la croissance des dépenses, on le voit, là… — on reviendra sur les revenus tout à l'heure — c'est quand même énorme de contrôler ces dépenses-là à ce niveau-là, comparé à ce qu'on a vu dans les trois, quatre… Je pense que les gens voient très bien, lorsqu'ils regardent la page A.28, que c'est énorme, ce que vous voulez faire comme exercice, là.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui. Mais, regardez, si on continue à observer ce graphique-là, la tendance était déjà là. Donc, en 2011‑2012, on avait réussi à ralentir un petit peu. En 2012‑2013, on avait réussi à ralentir davantage à 2,5 %. En fin de compte, 2014‑2015, on continue la même tendance. L'aberration, l'aberration, c'était 2013‑2014. Oui.

M. Dubé : Ce que je veux dire, je veux que les gens comprennent, puis c'est important, M. le Président, pour le ministre des Finances, que chaque… 1 %, ça n'a pas l'air gros. Si mon budget, c'est 100 $, puis je me trompe de 1 %, bon, je me trompe de 1 $. Mais, quand j'ai un budget de 90 milliards puis que je me trompe de 1 %, bien, c'est 900 millions ou 1 milliard.

Ça fait que je veux juste dire que vous avez raison, on jouait dans la zone de 3 %, mais là on s'est trompé puis on est allés à 5,4 %. Moi, je trouve que votre objectif est très ambitieux à 1,9 %. Je le respecte. Je dis : C'est ça qu'il faut faire. Mais vous tromper de 1 %, ça aurait aussi un effet de 900 millions, un peu comme on a eu avec le dernier gouvernement. Moi, ce que je vous demande aujourd'hui… Vous me dites que, même si vous trouvez que l'ensemble de vos revenus et dépenses, c'est un budget moyen, c'est ni trop ambitieux ni pessimiste, vous me dites qu'aujourd'hui vous confirmez à tout le monde que c'est un objectif normal d'être à une croissance de 1,6 % sur trois ans malgré ce qui est arrivé dans les dernières années.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Je n'utilisais pas le mot «normal». C'est un objectif… Je ne veux pas utiliser le mot que vous avez utilisé, qui commence par un a, je ne veux pas utiliser ce mot-là. Mais je vais utiliser le mot «sérieux», c'est un objectif sérieux. Et c'est exigeant. C'est très exigeant. Ça, ce n'est pas… ce n'est pas… Je ne me cache pas là-dessus. Non, non, non. Mais nous demeurons absolument engagés à respecter cet engagement-là.

Deux choses ici. D'abord, c'est quelque chose qui s'est déjà fait et qui se fait ailleurs au Canada. Ça se fait en Ontario, ça se fait en Colombie-Britannique. Le gouvernement fédéral l'a fait aussi. Je ne comprends pas pourquoi on pense qu'au Québec on ne peut pas le faire. On ne peut pas arriver à empêcher que les dépenses de programme augmentent au-delà de 1,8 % pour une courte période. Donc, ça s'est fait ailleurs et ça peut se faire ici. Je ne crois pas que ce soit impossible.

Le Président (M. Bernier) : …M. le député.

• (17 heures) •

M. Dubé : …M. le Président, si vous me permettez, parce que, comme j'ai à peu près… il me reste une dizaine de minutes. Je veux avoir… Que les gens comprennent bien la… Excusez l'image. C'est l'image globale, là, la vision que vous avez sur quatre ans. Puis après ça on pourra aller un peu plus dans le détail. Moi, je vous amène tout de suite à la page E.4 du même document, toujours, parce que…

Une voix :

M. Dubé : … — E, pardon, E.4 — parce que, là, vous… Tout à l'heure, j'ai fait remarquer qu'il y avait des éléments de revenus qui étaient maintenant plus modestes, on avait une croissance des dépenses… fait qu'on va avoir un équilibre budgétaire qui nous permet un jour d'être à l'équilibre, c'est en 2015‑2016, et même peut-être un jour d'en redonner aux pauvres contribuables qui sont étouffés. Mais on a un effet sur la dette. Et ça, vous en avez parlé un peu dans votre budget. Je sais que, si ce n'est pas déjà fait, vous allez être dans un avion pour aller à New York bientôt pour rencontrer quelques agences de crédit, je suis certain…

M. Leitão :

M. Dubé : Oui, peut-être après la commission…

M. Bernier : On fait la commission pour commencer.

M. Dubé : …vous pourrez nous en reparler. Mais ce que je voudrais que les gens réalisent, puis je veux que vous l'expliquiez, c'est qu'à la page E.4 on a, en fait, le résultat de tout cet exercice-là. Parce qu'on voit les revenus, les dépenses dans la page que je vous parlais tout à l'heure, mais là, malgré un équilibre budgétaire que vous souhaitez pour la première fois, enfin, en 2015‑2016, on va quand même continuer de mettre des montants substantiels sur la dette, hein? Puis les gens comprennent ça. Parce qu'on a beau avoir un équilibre budgétaire, on met encore de l'argent dans les infrastructures, puis plus élevé que l'amortissement, donc ce qui veut dire qu'on remet 4, 5 milliards de plus sur la dette à chaque année.

Pourquoi je le montre? C'est qu'on est rendus… Puis ça, pour moi, j'aimerais que vous me parliez de vos objectifs à terme, M. le ministre, si vous me permettez, un peu comme on a parlé des croissances de revenus puis de dépenses. Ce tableau-là montre très bien que, malgré les promesses qu'on avait eues du précédent gouvernement, on a eu une croissance de la dette sur le PIB, qui est un des objectifs que je vais vous demander, hein?

Votre objectif à vous, si je comprends bien, c'est de ramener la dette sur le PIB à 50 %, on va dire 51,6 %, si je prends la même période de référence que, tout à l'heure, votre déficit, là, de 2017‑2018. Moi, ce que je vous demanderais aujourd'hui… Parce que, là, je regarde 2014, c'est 54,3 %, ça n'a jamais été aussi haut, où là vous allez encore un peu plus loin, on va à 54,9 %, avec un budget que vous dites, bon, modeste, moyen, là, je ne sais plus lequel utiliser. Mais moi, j'allais vous demander : Quand vous allez rencontrer les agences, là, quelle est la marge de manoeuvre que vous avez avec ce chiffre-là? Parce que c'est beau leur dire : 50 % en 2018 puis peut-être 45 % en 2025, qu'est-ce qui arrive si les revenus ne sont pas au rendez-vous, que l'emploi n'est pas là, que la dépense… les croissances des dépenses ne sont pas à 1,9 % mais à 2,4 % ou à 2,6 %? Quel va être le signal d'alarme, là, sur ce chiffre-là, par rapport aux agences de crédit, qui ont un impact important sur notre coût de la dette, là?

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : En effet, la situation de la dette est sérieuse, le niveau d'endettement, à 54,3 % du PIB, elle est très élevée. Elle a déjà été plus élevée que ça, d'ailleurs. Le sommet a été atteint en 1998, sous un autre gouvernement, sous un autre ministre des Finances à l'époque, où c'était 57,7 %. Donc, nous avons déjà été capables de ramener ce ratio à un niveau plus bas. Par la suite, il a recommencé à accélérer avec la grande récession de 2008‑2009 et les mesures qu'on avait mises en place pour faire face à cette récession-là.

Maintenant, nous nous engageons dans une… Maintenant, il y a deux choses qui sont quand même différentes des cycles précédents. Nous nous engageons à contrôler l'évolution de ce déficit-là. Un facteur qui alimente la croissance de la dette, c'est, en effet, le programme d'investissement public en infrastructures. Nous devons faire ces investissements-là parce que notre infrastructure en a besoin, il y a des raisons de sécurité, de… Beaucoup d'années avant, vous et moi, nous n'étions pas en politique à ce moment-là, mais on voyait que les budgets de maintenance n'étaient pas là du tout, et donc les choses se sont détériorées, et là, maintenant, on fait face à un déficit d'infrastructures énorme. Donc, nous devons maintenir la cadence à cet égard-là.

Mais, pour revenir à votre point, un scénario, disons, noir, un scénario qui, à mon avis, n'est pas probable, où il y aurait une autre récession très sévère ou, enfin, quelque chose où les revenus commençaient à manquer et, à nouveau, il y aurait des déficits, si jamais ça arrivait… encore là, ce n'est pas ce qu'il y a dans les cartons mais, si jamais ça arrivait, à ce moment-là, il faudrait être très, très prudents avec nos investissements en infrastructures. Il faudrait peut-être, à ce moment-là, se rendre compte que nous ne pourrions pas maintenir cette cadence-là, si jamais on tombait dans un tel scénario.

Juste peut-être une autre chose qui est très différente du passé, c'est que, cette fois-ci, depuis déjà les années 2011, je pense, ou 2010, on a créé le Fonds des générations, et le Fonds des générations, c'est quelque chose qui est extrêmement utile. Et, quand on parle aux agences de notation, c'est vraiment un facteur qui les rassure parce que contrairement... Les autres provinces n'ont pas de telles choses. Même l'Alberta n'a pas une telle chose. Donc, c'est un fonds qui a des revenus maintenant qui lui sont dédiés et qui commencent à augmenter assez rapidement. Il est déjà rendu... en 2019, par exemple, il va y avoir 16 milliards dans le Fonds des générations, donc c'est substantiel. C'est un outil qu'il n'y avait pas avant et qui maintenant est très puissant.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Lévis.

M. Dubé : Bien, pour continuer dans la même ligne… Puis, encore une fois, mon objectif, c'est… Les gens comprennent bien que vous aussi vous avez des objectifs. Donc, on se résume, vous avez des objectifs de croissance de revenus, vous avez des objectifs de croissance de dépenses qui sont assez ambitieux. Vous avez mis clairement des objectifs au niveau de la dette. Donc, vous dites : 2014‑2015, ça sera la dernière année où on aura une croissance de la dette.

Moi, ce que je veux savoir : Quand vous allez voir les agences, si jamais, du côté... — puis je pense que c'est là que vous aviez l'erre d'aller — si jamais les revenus ou les dépenses ne sont pas au rendez-vous, est-ce qu'il va y avoir un réajustement, par exemple, au niveau des infrastructures, pour que, si c'est le maximum qu'on vous laisse aller, à 54,9 %... Parce que ce n'est pas juste le montant de la dette qui est important, c'est est-ce que le PIB sera là pour faire ce fameux ratio là.

Moi, ce que j'aimerais vous demander : Comment proche on est, selon vous, de cet élément-là qui fait que vous trouvez que vous êtes à la bonne place, là? Vous avez des objectifs de revenus, de dépenses et de mesures de la dette. Comment proche vous pensez qu'on est? Et quelle est votre marge de manoeuvre si vous aviez à prendre des décisions — qu'on n'aimerait pas prendre aujourd'hui — soit sur les infrastructures ou sur les dépenses?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Je pense que nous sommes à la limite. Avec le profil que nous avons ici, de...

M. Dubé : ...plans sur la croissance... sur le ratio de la dette?

M. Leitão : Ratio dette-PIB. Avec le profil qu'il y a ici...

M. Dubé : Quel serait, selon vous, un des ratios les plus importants, comme objectif à mesurer?

M. Leitão : 2015, on est presque à 55 %, 54,9 %. Je pense que c'est un pas à ne pas franchir. La...

M. Dubé : ...

Le Président (M. Bernier) : Oui, juste pour s'assurer qu'il donne les réponses à vos questions. Allez-y.

M. Leitão : Non, non, c'est...

Le Président (M. Bernier) : C'est correct? Allez-y, M. le député de Lévis.

M. Dubé : Parce que moi, je pense que vous avez... en tout cas, c'est clair, vous l'aviez très bien indiqué dans les documents, je pense que les gens comprennent qu'on peut rester à ce niveau-là. Mais, si vous étiez mal pris, là — parce qu'on l'a vu, des fois, ça peut déraper dans les revenus, on l'a vu, écoutez, l'emploi n'a pas l'air d'être là, j'espère qu'on aura des bonnes nouvelles dans les prochains mois — avez-vous, en langage de baseball, une «wild card», ou avez-vous quelque chose que vous pouvez sortir du chapeau? Parce que, quand vous dites qu'on est si proches, on est à 54,9 %, on est déjà dans l'année 2014‑2015, est-ce qu'il y a des choses, au niveau des revenus, au niveau des dépenses, qui vous permettraient d'être sûr qu'on va rencontrer cet objectif-là?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Cette «wild card» ou ce plan b, appelons-le ce qu'on voudrait, n'inclut pas les augmentations de taxes ou impôt. Donc, si jamais on était mal pris, comme vous le mentionnez, on ne va pas commencer à augmenter les taxes, ou les impôts, ou quoi que ce soit, pour fermer le trou. Si jamais on retombait en déficit... ce n'est pas quelque chose qu'on prévoit ou qu'on anticipe, mais, si jamais ça arrivait, il faudrait qu'on regarde de façon très sérieuse, encore une fois, les dépenses.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Dubé : Merci. Excusez-moi, c'est parce que c'est une conversation que je trouve intéressante. J'aimerais vous dire, puis je le dis avec beaucoup de respect, que, lorsqu'il y a une augmentation des taxes scolaires, c'est une façon indirecte de passer... parce que ce 500 millions là qu'on passe aux consommateurs, il n'est pas dans les dépenses qu'on a ici, là. Alors, moi, je veux juste qu'on comprenne bien que l'objectif, selon ce que vous nous dites, c'est un quatrième objectif, c'est de retourner aux contribuables, quand on aura atteint l'équilibre. Mais, lorsque j'entends ce que le ministre de l'Éducation nous a dit dans les derniers jours, il y a quand même 500 millions d'augmentation des taxes scolaires et qu'on ne voit pas dans ça, ici, là. Je veux qu'on se... Vous avez la même compréhension que moi, là.

M. Leitão : Oui.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (17 h 10) •

M. Leitão : Oui, mais ça, c'est un problème qui ne vient pas d'aujourd'hui, hein? Ça vient de l'année passée, des années précédentes. Pour cette année et l'année prochaine, notre focus est sur le retour à l'équilibre budgétaire. Les commissions scolaires ont leur rôle, ont leurs sources de revenus, on va les convaincre, on va les amener à limiter les augmentations. Mais, pour l'instant, elles ont encore leurs sources propres de revenus.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Je vous invite à… Il vous reste environ une minute.

M. Dubé : Bien, c'est ça. Alors, ce que j'aimerais dire dans la prochaine intervention… Là, on a parlé d'un plan de quatre ans. Merci, je pense que c'est clair. Je pense que, pour tout le monde, il y a une compréhension où vous voulez aller. Moi, j'aimerais qu'on revienne, après ça, dans la prochaine année, parce que je pense qu'un des éléments où on a manqué dans le dernier gouvernement, c'est : non seulement on avait des objectifs, mais il n'y avait pas de mesure. Et, moi, cette mesure-là, surtout dans la première année, quand tout le monde comprend comment il est critique de ne pas dépasser le fameux 55 %, soit en atteignant les revenus, soit en atteignant les dépenses, bien, il va falloir qu'on se dise… peut-être dans notre prochain bloc que je ferai avec le député de Groulx, c'est de voir comment vous allez faire pour mesurer… Parce que ce que j'ai souvent entendu comme argument, c'est que malheureusement c'est très difficile à mesurer, la performance, la machine est tellement lourde. Et ça, je sais que c'est peut-être plus la préoccupation de votre collègue au niveau du Trésor, mais là, aujourd'hui, vous me dites que vous allez le suivre de près. Il va falloir voir puis expliquer aux gens comment vous allez faire pour suivre ça de près pour qu'on n'ait pas besoin du plan B, là. Alors, ça sera pour la prochaine fois.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. le député de Lévis. Donc, on aura l'occasion de revenir sur ce point dans un bloc suivant. Maintenant, nous allons revenir au député de Sainte-Rose. Je ne veux pas me tromper de fleur. Allez-y.

M. Habel : Oui. Merci beaucoup. Je vais tenter d'être plus concis et rapide, M. le Président. J'avais parlé du secteur de la santé en premier bloc. Je voulais aussi rappeler, pour le bénéfice des téléspectateurs, qu'on allait investir en infrastructures 90,3 milliards sur 10 ans. Donc, le transport, on avait 20,5 milliards sur les réseaux routiers, 7,6 milliards pour le transport en commun, dont l'axe du système rapide par bus sur Pie-IX qui va toucher ma circonscription et l'ensemble de Laval, de Montréal à Laval, 2,3 milliards pour les logements sociaux communautaires, dont 3 000 logements et 500 pour les itinérants. Donc, juste pour vous rappeler, M. le Président, qu'on a une approche rigoureuse et transparente pour la gestion des projets, et je pense que c'est important de le mentionner, parce que, le PQI 2014‑2024, c'est la première fois qu'on va avoir la liste de tous les projets de 50 millions de dollars et plus. Donc, ça va permettre aux contribuables et montrer aux contribuables qu'on agit avec transparence, et on leur montre les projets.

Donc, M. le Président, ma question, c'est que j'aimerais savoir si le niveau des investissements en infrastructures présentés dans le PQI 2014‑2024 répond aux besoins et aux priorités des Québécois. J'aimerais savoir si ces investissements sont suffisants, si on prend en compte la capacité de payer des Québécois.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, de… C'est une bonne question. Est-ce que ces investissements sont suffisants? Évidemment, on aimerait toujours en avoir plus, et plus, et plus, mais il faut prendre en considération deux facteurs. Le premier, évidemment, c'est la capacité de payer, donc combien on ajoute à la dette. Et, deuxièmement, c'est la capacité de… comment on dirait ça, la capacité de livrer ces projets-là. Ça ne sert à rien d'annoncer toutes sortes de choses si on n'a pas la capacité de concrétiser ces investissements-là, ce n'est pas une bonne chose de le faire.

Alors, il y a eu beaucoup de changements depuis quelques années. Certains ont été amenés par le précédent gouvernement, et c'était très bien, en ce qui concerne un contrôle, une gestion plus rigoureuse des investissements publics en infrastructures. Alors, 90 milliards sur 10 ans, c'est beaucoup. En chiffre rond, c'est 20 % du PIB. Donc, je pense que c'est, encore une fois, à la limite de ce qu'on peut se payer en tant que société.

Est-ce que ces investissements-là répondent aux objectifs des Québécois et aux besoins des Québécois? Je pense que oui. Un tiers de… pas tout à fait un tiers, mais, excusez-moi, mais, je vous dirais, un cinquième, 20 %... 23 % de ces investissements-là sont dans le réseau routier, un réseau qui est pas mal malmené dernièrement, les viaducs, les ponts, les autoroutes, les routes. Donc, je pense que même de mettre 20 milliards de dollars en 10 ans dans le secteur routier, c'est très significatif. Le deuxième poste, tout de suite après, presque 17 milliards, ce qui est 19 % du total, sur 10 ans, dans la santé et les services sociaux. Donc, je pense que ça reflète aussi les besoins et les valeurs de la société québécoise.

Pour revenir à la question du montant total, pour cette année, cette année 2014‑2015, encore une fois, là, 11,5 milliards de dollars, c'est 3 % du PIB. Quand on regarde ce qui se passe ailleurs dans le monde, c'est exigeant comme engagement de mettre 11 milliards en programmes d'infrastructure de façon à ce que ça soit livrable. Donc, c'est un engagement très fort. Et, encore une fois, ça représente les mêmes proportions en termes de réseau routier, de santé et services sociaux, éducation, etc. Donc, je pense que ça reflète les priorités des Québécois et ça reflète notre capacité de payer.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Sainte-Rose, avez-vous d'autres questions en regard de ce sujet?

M. Habel : Non. Non, ça va.

Le Président (M. Bernier) : Ça va? Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

• (17 h 20) •

Mme de Santis : Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde. Il y a deux objectifs principaux avec ce budget. D'abord, il y a le redressement des finances publiques et, deuxièmement, il y a la relance de l'économie, remettre l'économie sur les rails. Ma question va toucher la relance de l'économie.

Il y a des enjeux économiques qui limitent les revenus de l'État. En 2013, la croissance de l'économie du Québec a ralenti, amenant même certains analystes à estimer qu'elle était en panne. Les chiffres montrent que le Québec n'a pas pu profiter de la reprise en cours chez nos principaux partenaires. En effet, en 2013, la croissance de l'économie s'est ralentie. La croissance du PIB réel, qui s'élevait à 1,5 % en 2012, n'était que 1,1 % en 2013. En comparaison, au Canada dans son ensemble, la croissance du PIB est passée de 1,7 % en 2012 à 2 % en 2013. Pourquoi cette faiblesse dans la croissance du Québec? Un, c'est le ralentissement de la demande intérieure. Deux, il y a un recul marqué des investissements des entreprises.

Après deux années consécutives de forte croissance, les entreprises québécoises ont fortement réduit leurs investissements en 2013. Pourrons-nous parler de l'effet du Parti québécois? En 2013, la confiance des entreprises comme des consommateurs n'était pas au rendez-vous. Ceci a eu pour conséquence que le marché du travail a stagné depuis janvier 2013. À ce moment, le niveau d'emploi au Québec atteignait 4 048 200, alors qu'un an plus tard il était à un niveau comparable, de 4 058 000, moins de 10 000 de différence. Ces défis économiques impactent directement les finances publiques en limitant la croissance des revenus de l'État.

Nous avons des enjeux pour les prochaines années. L'économie québécoise commence, par ailleurs, à ressentir les effets des changements démographiques sur la capacité de travail et la création de la richesse. En 2014, la population des 15 à 64 ans, soit celle en âge de travailler, reculera pour la première fois. Après avoir atteint un sommet à 5 427 200 personnes en juillet 2013, la population des 15 à 64 ans au Québec a commencé à diminuer au cours des derniers mois. Dans 17 ans, 25 % de la population du Québec aura 65 ans et plus. La diminution du bassin des travailleurs potentiels pourrait avoir des effets négatifs sur la croissance économique au Québec. Ces conséquences peuvent être atténuées par une baisse du taux de chômage et par une meilleure utilisation de la main-d'oeuvre disponible.

Le gouvernement s'est donné comme objectif de rétablir l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Des mesures ont déjà été annoncées pour améliorer l'efficacité de l'action gouvernementale, dont, un, une gestion rigoureuse des dépenses de l'ensemble de l'appareil gouvernemental et, deux, la création d'une commission sur la révision permanente des programmes.

L'assainissement des finances publiques est une condition essentielle à la stabilité de l'économie. Toutefois, le gouvernement doit également agir pour relancer l'économie et l'emploi. Le gouvernement fait, d'ailleurs, de l'économie sa priorité. À cet égard, dès les premiers jours de son mandat, le gouvernement a agi rapidement en ce sens et a annoncé deux mesures pour favoriser la relance et la création d'emplois.

Première mesure, l'instauration du crédit d'impôt pour la rénovation résidentielle LogiRénov, annoncé le 24 avril dernier. Grâce à ce nouveau crédit d'impôt, environ 220 000 ménages bénéficieront d'un allègement fiscal, atteignant un peu plus de 333 millions pour les années 2014‑2015 à 2015‑2016. Il permettra également de soutenir 20 000 emplois dans l'industrie. Deuxième mesure, c'est l'augmentation de 42 millions du budget affecté aux travaux sylvicoles, annoncée le 29 avril dernier, portant ainsi l'enveloppe totale à 225 millions. Cette bonification permettra de maintenir et de créer des emplois dans les régions.

Toutefois, le gouvernement doit aller encore plus loin pour favoriser la croissance de façon structurante et à court terme. Agir sur la productivité sera un des leviers importants de la croissance économique. Dans ce contexte, que fait le gouvernement pour relancer l'activité économique et créer des emplois tout en construisant les bases d'une croissance à la fois solide et durable?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Merci beaucoup. Écoutez, la croissance économique, comme nous savons tous, passe ultimement par une reprise de l'investissement. C'est l'investissement qui va amener une croissance plus rapide, ce ne sont pas les... une accélération des dépenses de consommation qui va être le déclencheur, c'est l'investissement, et la clé de l'investissement, c'est la confiance. Donc, il faut rétablir la confiance, la confiance surtout des PME pour qu'elles puissent investir, pour qu'elles puissent se moderniser, pour qu'elles puissent devenir plus innovantes, plus efficaces, plus productives et donc profiter des opportunités dans les marchés étrangers, particulièrement aux États-Unis.

Alors, qu'est-ce que nous allons faire? Nous avons mis en place une série de mesures qui vont aider les PME, d'une réduction de l'impôt général à des mesures qui vont favoriser l'innovation, le capital de risque qui est plus disponible, donc des mesures, d'ailleurs, qui ont été très bien accueillies par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, donc le groupe qui représente les PME. Ils étaient très, très encouragés, très contents de ces mesures-là.

Mais ultimement il y a aussi une question, si vous voulez, de philosophie et d'approche. Moi, je pense que le rôle de l'État, qui est très important dans l'économie, n'est pas un rôle dirigiste. Ce n'est pas l'État qui va diriger l'économie, ce n'est pas l'État qui va identifier les entreprises ou les secteurs gagnants, c'est à l'entreprise privée de jouer ce rôle-là. C'est à l'État de fournir les moyens qui sont structurants et qui donnent une vision de long terme. Alors, nous, à cet égard-là, au-delà des PME, il y a deux mesures ou deux axes d'action qui sont, à mon avis, très, très importants, et on n'a pas beaucoup parlé de ça, on ne semble pas trop faire attention, mais je pense que c'est particulièrement important.

D'abord, c'est la stratégie maritime, la mise en oeuvre de la stratégie maritime. La stratégie maritime, en fin de compte, c'est une stratégie qui tourne autour du transport. Nous voulons améliorer les moyens de transport pour que nos entreprises puissent justement profiter des nouvelles opportunités d'affaires, surtout celles qui vont se manifester en Europe avec l'accord de libre-échange Canada-Europe. Donc, c'est une stratégie qui regarde vers l'avenir et qui regarde vers l'extérieur du Québec et, donc, de mettre en place des mesures plus efficaces, de bien coordonner les moyens de transport pour qu'on soit capables de profiter de ces opportunités-là. Et l'industrie du tourisme fait aussi partie de cette chose.

L'autre axe, l'autre grand axe de développement et de croissance économique future, ce sont les ressources naturelles. Au Québec, nous avons des ressources naturelles considérables, des ressources minières, et pas seulement dans le Nord, dans le Sud aussi, des ressources minières, des ressources énergétiques, des hydrocarbures. Donc, nous sommes riches en ressources naturelles. Beaucoup d'autres juridictions aimeraient bien avoir les ressources que nous avons. Et nous avons l'intention d'utiliser ces ressources-là comme levier de développement.

Je trouve quand même un peu étrange de voir que les PME québécoises, par exemple, sont très intégrées dans le processus, dans le «supply chain» d'entreprises énergétiques en Alberta, par exemple. Donc, on fournit, on est des fournisseurs de l'industrie énergétique en Alberta, et pourtant ici, au Québec, nous avons aussi une industrie minière, et je pense que les liens de l'industrie minière avec les fournisseurs locaux, ces liens-là peuvent et doivent être améliorés.

Et donc ça aussi, ça va faire partie de notre plan de relance économique, les ressources naturelles, la stratégie maritime ainsi que, comme vous avez mentionné, de mettre en place des conditions propices à ce que les PME se modernisent, deviennent plus efficaces, l'accès au capital, capital de risque, à l'investissement. Ce sont toutes des mesures que nous pensons comme être un levier important dans la croissance économique future.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée, autre élément, autre question?

Mme de Santis : Non.

Le Président (M. Bernier) : Non? Donc, je vois le député de Mégantic. Vous avez une question, allez-y.

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. J'aimerais aborder la question de la dette. La dette constitue un enjeu important pour tous ceux et celles qui ont à coeur l'avenir du Québec, comme en a fait mention tout à l'heure le député de Lévis qui questionnait le ministre là-dessus. Pourquoi est-ce important? Parce que l'endettement a un impact direct sur la capacité du Québec à financer les services publics. Le service de la dette représente en effet une proportion importante de l'ensemble des dépenses du gouvernement.

En 2013‑2014, le gouvernement a consacré 10,6 milliards au service de la dette, ce qui représente plus de 11 % de ses dépenses. Ce montant est plus élevé que les dépenses du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, qui représentent 10,4 milliards en 2013‑2014. Cela dépasse également l'ensemble du soutien financier direct offert par le gouvernement aux personnes et aux familles, soit le total des allocations familiales, de l'aide de dernier recours et de l'aide financière aux études. Plus les coûts relatifs à la dette sont élevés, moins il y a de ressources financières disponibles pour le financement des services à la population ou pour améliorer la compétitivité fiscale du Québec.

Dans le cadre du budget 2014‑2015, le ministre des Finances a publié un fascicule fort intéressant, intitulé Le défi des finances publiques du Québec. À la page 6, on y voit un graphique qui montre l'évolution du poids de la dette par rapport à la taille de l'économie, soit la dette brute en pourcentage du PIB. Le graphique nous montre que, jusqu'en 2009, le niveau de la dette a augmenté à un rythme moins rapide que le PIB. Il en est résulté une diminution importante de la dette par rapport à la taille de l'économie, le ratio dette-PIB a diminué.

Depuis 2009, toutefois, la dette a augmenté plus rapidement que le PIB. Comment faut-il expliquer cette augmentation? Tout d'abord, les déficits budgétaires qui ont été encourus en raison de la récession économique, ensuite l'augmentation importante des investissements en immobilisations que le gouvernement a dû réaliser pour remettre en état les infrastructures publiques, routes, viaducs, écoles, hôpitaux, etc. Le ratio de la dette brute sur le PIB est passé de 50,3 % au 30 mars 2009 à 54,3 % au 31 mars 2014. Ma question, M. le Président, est : Quelles actions le ministre des Finances prend-il pour réduire le poids de la dette?

• (17 h 30) •

Le Président (M. Bernier) : Vous avez environ deux minutes que je vous accorde sur le sujet. Vous pourrez revenir par la suite, mais là je vous accorde deux minutes.

M. Leitão : D'accord. C'est une question, d'ailleurs, très importante, un sujet particulièrement névralgique, au Québec. Parce qu'on nous avait mentionné, nous sommes à 54,3 % du PIB; l'année prochaine, 2015, on va être à 54,9 %. Nous sommes, et de loin, la province canadienne la plus endettée. Cette dette vient de loin, des gouvernements précédents, au pluriel. Ça reflète aussi la situation très particulière qui s'est développée depuis 2008-2009 en termes de grande récession mondiale et d'accélération marquée des investissements en infrastructures, ce qui était nécessaire.

Alors, quels moyens nous prenons pour maîtriser cette croissance de la dette? En fin de compte, ce dont on parle ici, c'est le ratio dette-PIB. Donc, oui, nous allons faire attention au numérateur, donc à la croissance de la dette — et, comme on a échangé avec le député de Lévis, il va falloir faire attention à cet aspect-là — mais ensuite le dénominateur. Donc, si nous arrivons à accélérer la croissance du PIB, le poids relatif de la dette va être beaucoup plus gérable que si on ne le fait pas. Donc, à mon avis, la question de la dette est importante, et elle est particulièrement néfaste ou particulièrement difficile à gérer si l'économie stagne, si le PIB n'augmente pas. Si le dénominateur est très faible, ce ratio-là, oui, risque d'exploser, et là ce serait un problème majeur. Mais, si nous arrivons à ce que le dénominateur continue de croître plus rapidement que le numérateur, alors là ce ratio va graduellement diminuer.

Juste une dernière chose, rapidement. Comme j'ai mentionné aussi, un changement majeur qui a eu lieu depuis les années 2000, c'est que nous avons maintenant le Fonds des générations. Le Fonds des générations est unique au Canada. Les autres provinces ne l'ont pas, même la riche Alberta a quelque chose de différent, n'a pas ça. Et le but du Fonds des générations, c'est justement de diminuer ou d'«offsetter», en bon latin, le poids de la dette. Et le Fonds des générations, c'est un fonds qui maintenant a des sources de revenus qui lui sont dédiées. Donc, c'est un fonds qui va continuer à croître. En 2019, on va être à 16 milliards de dollars, et ça va s'accélérer dans les années suivantes.

Le Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Merci, M. le ministre. Nous allons donc passer à un nouveau bloc, du côté de l'opposition officielle. M. le député de Rousseau?

Mme Zakaïb : En fait, ce sera moi, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Oh! Quel plaisir. Mme la députée…

Mme Zakaïb : …de Richelieu.

Le Président (M. Bernier) : …de Richelieu. Allez-y, Mme la députée de Richelieu. La parole est à vous.

Mme Zakaïb : Tout d'abord, je désire vous saluer, saluer le ministre, saluer l'ensemble des collègues de l'Assemblée nationale et aussi les gens du ministère des Finances et de l'Économie, avec lesquels j'ai eu le plaisir de travailler durant les 18 mois qui ont précédé la dernière élection.

Ma première question, M. le ministre, est relativement simple. En tout cas, la question est simple, je ne sais pas si la réponse est simple : Combien est prévu dans votre budget pour l'augmentation de rémunération des médecins pour la prochaine année?

Le Président (M. Bernier) : Alors, une question courte. M. le ministre.

M. Leitão : Et une réponse courte. Notre collègue le ministre de la Santé continue de négocier avec la fédération des médecins, donc je suis confiant qu'il réussira à atteindre un accord, un arrangement. Mais sinon, sinon, le budget total de dépenses en santé et services sociaux est clairement établi dans les documents et ce budget-là va être atteint. S'il n'y a pas d'accord avec les médecins, il faudra trouver les montants requis ailleurs…

Le Président (M. Bernier) : Merci…

M. Leitão : …ailleurs dans le ministère.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Zakaïb : M. le ministre, la page A… Pardon, c'est vrai, je dois attendre que vous me nommiez, je m'excuse.

Le Président (M. Bernier) : Allez-y, Mme la députée.

Mme Zakaïb : À la page A.32 de votre budget, il y a une variation en millions de dollars, pour l'année 2014‑2015, de 973 millions. J'imagine que c'est l'argent neuf qu'il y a de prévu pour l'ensemble du ministère, donc, 973 millions. Est-ce que l'augmentation salariale des médecins sera puisée à même cette variation dans les dépenses de programmes pour le ministère de la Santé?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui, oui. Tout à fait. Absolument.

Mme Zakaïb : Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que l'enjeu est d'à peu près 700 millions de dollars de plus par année qui serait… Si la négociation ne porte pas fruit et qu'on doive donner aux médecins ce qui était prévu dans l'entente qui avait été signée au préalable, est-ce qu'on parle d'un montant approximatif de 700 millions?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bien, écoutez, comme je vous ai dit tantôt, des négociations se poursuivent entre le collègue de la Santé et les fédérations des médecins. Il n'y a pas de chiffre final, il n'y a pas de résultat final de cette négociation-là. Mais le budget total des dépenses totales en santé et services sociaux sont très bien décrites ici, elles ne vont pas dépasser ce montant-là. Donc, quelque réallouement qui se fasse doit se faire à l'intérieur de ce budget total qui a été décrit ici.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Zakaïb : Si je comprends bien, le 973 millions, ça équivaut à 3 % de variation aux programmes, donc une augmentation de 3 % pour l'ensemble du ministère de la Santé, de laquelle on devra déduire un montant substantiel si aucune entente n'est conclue avec les médecins, en fait, pratiquement tout l'argent neuf ou 70 % de l'argent neuf en santé. Là, vous me dites que, peu importe… En fait, si on n'arrive pas à une entente, on va puiser à même ce 3 % d'augmentation des dépenses de programmes en santé l'augmentation salariale des médecins. Il n'y aura pas de cran d'arrêt ailleurs, ça va se prendre dans cette enveloppe-là. C'est ça?

M. Leitão : Bien, il y a un cran d'arrêt, c'est-à-dire…

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Marceau : Bien, c'est ça, le cran d'arrêt.

M. Leitão : Excusez-moi. Je devrais attendre aussi qu'on…

Le Président (M. Bernier) : C'est parce qu'il faut faire les enregistrements. Si vous allez trop rapidement…

M. Leitão : Je comprends.

Le Président (M. Bernier) : …ça devient compliqué pour ceux qui doivent faire les enregistrements. Ce n'est pas pour vous imposer un règlement pour un règlement, c'est simplement pour permettre aux gens de suivre vos débats… suivre nos débats.

M. Leitão : Je comprends…

Le Président (M. Bernier) : Donc, allez-y.

M. Leitão : Je comprends. Je ne suis pas habitué à ça, alors je vais…

Le Président (M. Bernier) : C'est mon travail de vous aider.

M. Leitão : Je vais m'ajuster. Donc, le chiffre global est là, et il y a les crans d'arrêt, donc, si… Et d'ailleurs les fédérations des médecins sont conscientes de l'enjeu. Ils ont dit qu'ils sont prêts à collaborer, prêts à négocier, c'est ce qu'ils font. Et donc, écoutez, je ne présume pas de dénouement de ces négociations-là, je pense qu'on arrivera à un accord.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée de Richelieu.

Mme Zakaïb : Merci, M. le Président. Si je comprends bien, donc, le cran d'arrêt s'applique à cette même enveloppe de 973 millions, ça ne s'appliquera pas ailleurs avec d'autres ministères, avec… donc, c'est l'ensemble des établissements, c'est les soins aux patients qui vont être touchés, parce que les dépenses en santé, les dépenses de programmes en santé de 3 %, c'est déjà une bonne compression par rapport à ce que le ministère vous demandait. Dans la liste d'épicerie, là, des ministères, celle que le Vérificateur général a qualifiée d'équivalent à 4 milliards, là, dans cette liste d'épicerie, il y a toujours un gros montant qui provient de la Santé. Donc, si je comprends bien, on alloue à l'ensemble du ministère de la Santé une augmentation de 973 millions, de laquelle on devra soustraire l'augmentation salariale qui sera consentie aux médecins pour l'année 2014‑2015, et ainsi de suite.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : L'augmentation salariale des médecins est comprise dans ce montant-là. Donc, si, par malheur, ils n'arrivaient pas à une entente… Encore là, c'est un scénario que je n'anticipe pas, on arrivera à une entente. Mais, si, par un accident de… «Act of God», ça n'arrivait pas, il faudrait trouver les montants équivalents ailleurs dans le budget de la Santé.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Zakaïb : Donc, vous êtes d'accord avec moi quand on dit que chaque dollar qui va être alloué à l'augmentation salariale des médecins, c'est 1 $ de moins en soins aux patients.

M. Leitão : Si on n'arrive pas à… si on…

Mme Zakaïb : …pas d'entente, chaque dollar de plus qui sera versé aux médecins, dans la prochaine année, par augmentation salariale, ce sera 1 $ de moins dans les soins.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, allez-y.

M. Leitão : Mais les médecins fournissent des soins à la population. Donc, je ne serais pas d'accord avec vous pour dire qu'on va fournir moins de services. Et les médecins sont là, ils travaillent, ils travaillent très fort. Donc, je ne vois pas ça comme étant une diminution des services de santé.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Allez-y, Mme la députée.

• (17 h 40) •

Mme Zakaïb : Là-dessus, M. le Président, je dois dire à l'ensemble du peuple du Québec et au ministre que je suis consciente que les médecins travaillent fort, et loin de moi l'idée de prétendre le contraire. Et je pense que, tous les Québécois, on aimerait que nos médecins gagnent plus cher, comme on aimerait que nos enseignants gagnent plus cher, comme on aimerait que les gens qui gardent nos enfants dans les CPE gagnent plus cher.

Maintenant, le premier ministre l'a dit lors d'une de ses réponses au budget, ce droit-là est toujours limité par la capacité de payer des Québécois. Et, dans ce cas-là, on sait que l'ensemble des augmentations qui seront prévues en santé l'année prochaine, c'est 973 millions, et c'est très peu comparativement à ce que le ministère de la Santé avait demandé. Et, à chaque fois qu'il y aura une augmentation consentie aux médecins, naturellement on devra trouver cet argent-là à même cette même enveloppe de 973 millions. On est d'accord là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : On est d'accord là-dessus, et les détails, les détails de ces chiffres-là seront fournis par le ministre de la Santé quand il va nous expliquer... quand il va faire le point sur les crédits de son ministère.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Zakaïb : M. le ministre, est-ce qu'il y a une date fixée ou un échéancier pour cette entente avec les médecins? Parce qu'on a déjà une portion de l'année de faite et, vous savez, on a tous eu à vivre des compressions budgétaires en cours d'année, on sait comment ça fait mal quand on a déjà six mois de faits, imaginez si on arrive à neuf, 10 mois afin d'atteindre cette cible. Est-ce qu'il y a un échéancier qui est fixé pour l'entente avec les médecins pour permettre au ministère d'atteindre la cible de 973 millions, uniquement de 973 millions d'augmentation?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Il n'y a pas d'échéancier fixe. Donc, on ne donne pas de date butoir. Je pense qu'on est capables de fonctionner sans de telles choses. Mais évidemment il faut que ça se fasse dans les plus brefs délais. Et, encore une fois, je ne suis pas impliqué directement dans ces négociations-là, mais, de ce que j'entends de mon collègue de la Santé, ça ne va pas prendre six mois ni six semaines, ça va se faire relativement rapidement.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Zakaïb : Merci, M. le Président. On l'espère tous. On aurait tous aimé que ce soit avant, j'imagine. Nous partageons des buts communs, en fait, des objectifs communs, nous voulons atteindre l'équilibre budgétaire, nous voulons le faire en coupant le moins de services possible. Vous comme nous, nous pensons que la création de richesse au Québec provient des entreprises, que c'est les entreprises qui créent des emplois, qu'un des grands enjeux de nos entreprises au Québec, c'est leur compétitivité. En fait, c'est leur capacité à concurrencer les entreprises un peu partout dans le monde.

Dans le budget, quand on prend les politiques de développement économique de votre gouvernement… Et Mme la députée de Bourassa-Sauvé vous a posé une question tantôt, vous nous avez dit : Bon, pour stimuler l'emploi, premièrement il y a la réduction d'impôt, qu'on trouve à la page B.23 du document. Et, à la page B.23, on nous dit qu'en baissant le taux d'imposition pour l'année… là, je ne prends pas l'année 2014-2015, mais bien l'année prochaine, 2015-2016, parce que là ce sera une année complète, ça représente à peu près 34 millions par année et ça touche 7 500 entreprises. Un petit calcul rapide : ça, ça fait 4 500 $ par entreprise. On ne peut pas penser vraiment que c'est ça qui va faire que nos entreprises soient concurrentielles puis soient capables de se battre contre les champions mondiaux, là. 4 500 $ par entreprise, c'est la grande… Et, à chaque fois qu'on vous pose des questions, la grande mesure économique, là, c'est la réduction d'impôt. Vous croyez vraiment que cette réduction d'impôt là va amener nos entreprises à être compétitives?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : C'est un premier pas dans cette direction-là. C'est quelque chose que les PME québécoises nous mentionnaient depuis déjà un certain temps que leur taux d'imposition était plus élevé que la moyenne canadienne. Donc, c'est un premier pas dans cette direction. C'est quand même… Où on était avant, c'était un régime d'imposition… comparativement à nos voisins dans les autres provinces, n'était pas compétitif. Donc, de cette façon-là, je pense qu'on répond partiellement aux anticipations et aux demandes des PME, surtout dans le secteur manufacturier. Mais nous avons aussi d'autres mesures d'action capital, d'action capital de risque pour favoriser le démarrage d'entreprise. Je pense que c'est très important, l'accès aux marchés extérieurs. Donc, il y a toute une série de mesures. Celle-là, la réduction d'impôt, elle est importante, surtout pour le message qu'elle envoie que nous sommes déterminés à promouvoir ce secteur de l'économie.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Zakaïb : M. le Président, il me reste combien de temps à peu près?

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste environ huit minutes.

Mme Zakaïb : Parfait. Rapidement, je vais vous… on va en parler, du fonds de capital de risque. Vous savez, j'ai passé 20 ans de ma vie en capital de risque. Ce qui est prévu au budget, c'est la recapitalisation de Teralys, un fonds de fonds, comme on appelle dans le métier, donc un fonds qui existe déjà, qui est en recapitalisation parce qu'il a investi ses sommes, et ce fonds investit dans d'autres fonds qui, eux, investissent dans des entreprises en démarrage.

Maintenant, des entreprises en démarrage, ce ne sont généralement pas celles-là qui sont les plus compétitives, hein, on comprend bien, au début. Et ça prend un certain temps avant de créer ce fonds de fonds qui, lui, va créer des fonds qui vont finalement trouver des entreprises ou, en tout cas, investir dans des entreprises.

Selon vous, quel est l'impact de la création de Teralys ou de la capitalisation de Teralys — qui était, de toute façon, prévue dans les cartons du ministère, on en conviendra vous et moi — quel est cet impact-là, l'impact de la création de Teralys sur la compétitivité des entreprises du Québec?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bon, écoutez, en faisant ça, nous allons aussi… ce n'est pas tout à fait la même chose. Il y a de l'argent fédéral qui est aussi injecté dans ce fonds-là. Il y aussi, bon, la Caisse de dépôt et Investissement Québec qui participent. Donc, l'effet levier est très important.

Quel va être l'effet réel, immédiat sur l'économie? Évidemment, la disponibilité du capital est le nerf de la guerre dans le processus d'investissement. Nous savons tous qu'en ce qui concerne le capital de risque, les banques commerciales, ce n'est pas tout à fait leur créneau d'expertise. Donc, c'est très nécessaire… c'est très utile d'avoir de tels véhicules au Québec, et d'ailleurs ces véhicules-là que nous avons ici sont quand même plus performants que ce qui existe ailleurs au Canada.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Zakaïb : M. le Président, je suis parfaitement d'accord avec le ministre que des fonds comme Teralys sont pertinents. Maintenant, leur impact, selon moi, sur la compétitivité des entreprises est à très, très, très long terme.

Maintenant, à la page B.13, nous parlons d'un programme, Créativité Québec, avec une enveloppe de 150 millions gérée par Investissement Québec sous forme de prêts et de garanties de prêt. Investissement Québec fait déjà des prêts et des garanties de prêt. Je dirais à la blague : Le fonds s'appelle Créativité Québec, mais, disons, on n'a pas utilisé beaucoup de créativité pour trouver une façon de rendre nos entreprises plus créatives parce qu'on va faire ce qu'on a toujours fait, c'est-à-dire des prêts et des garanties de prêt par Investissement Québec.

En quoi est-ce que ce nouveau programme amène de l'eau au moulin à la créativité ou à la compétitivité de nos entreprises par rapport à ce qui s'est fait par le passé par Investissement Québec sous forme de prêts et de garanties de prêt depuis qu'Investissement Québec existe?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bon, cela s'adresse maintenant à des entreprises de taille un peu plus grande. Je ne présumerais pas de ce qu'Investissement Québec… enfin, je ne présumerais pas s'ils vont réussir ou échouer. Je pense qu'il y a aussi un nouveau leadership à ce ministère-là, à cette institution-là et je pense qu'ils vont réussir à rendre ce programme plus efficace et plus performant.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Zakaïb : Merci, M. le Président. M. le ministre, quand vous êtes arrivés au pouvoir, il y avait, au ministère des Finances, qui, à ce moment-là, regroupait aussi l'Économie, une politique industrielle que je connais assez bien et un programme de gazelles, un programme de gazelles qui recevait l'assentiment de tous les acteurs. En fait, ce matin, dans La Presse, M. Jean-Philippe Décarie a dit : On a coupé les jambes aux «Gazelles». Les gazelles, pour ceux qui nous écoutent, ce sont les entreprises qui présentement sont en croissance.

Le ministère, avec Investissement Québec et les CLD, était arrivé à trouver des critères objectifs pour déceler quelles sont les 300 entreprises au Québec qui connaissent présentement la meilleure croissance. Et vous allez être d'accord avec moi qu'il faut qu'il y ait plus de moyennes entreprises au Québec. On ne peut pas avoir que de petites entreprises, il faut qu'il y ait des moyennes entreprises. Vous êtes d'accord avec moi que c'est celles qui créent de la richesse, qui exportent, qui font de la formation de travailleurs. C'est celles qui font en sorte que, dans chacune des régions, il y a des petites entreprises autour d'elles.

Pourquoi avoir tassé la Politique industrielle et le Programme des gazelles pour les remplacer par des mesures qui finalement ont peu d'impact sur la compétitivité des entreprises et sur le fait que nos entreprises innovent, qu'elles soient en mesure d'être créatives, mais également de devenir nos fleurons de demain? Pourquoi avoir tassé des politiques structurantes pour les remplacer par des politiques qui n'auront aucun impact à court terme?

• (17 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui, aucun impact à court terme, on verra bien. Maintenant, pour ce qui est du Programme des gazelles et de la Politique industrielle, vous avez raison que ce n'est pas quelque chose qui… tant à mon collègue de l'Économie que moi-même, une approche que nous privilégions, en termes, si vous voulez, philosophiques.

De plus, cette politique que vous aviez annoncée à l'automne 2013, elle n'était pas financée, il n'y avait pas de crédits, il n'y avait pas de montants qui pouvaient la… Donc, même si maintenant nous étions très enthousiastes et nous voudrions continuer ce processus-là, cette démarche-là, il aurait fallu trouver les moyens financiers pour poursuivre ça. Mais ce n'est pas quelque chose que nous jugions, à l'époque et maintenant, quelque chose de très utile.

Vous avez raison, vous avez raison qu'il faut que les entreprises québécoises, les PME passent de P à M, donc qu'elles grandissent, qu'elles puissent devenir plus efficaces. Et c'est ce qu'Investissement Québec va faire. C'est ce que le ministère du Développement économique… c'est son mandat. Et ça ne va pas se limiter à 300 entreprises.

Donc, ce que nous trouvions de discutable dans cette approche-là, c'était que, bon, très bien, on va en identifier 300 et puis les autres… C'est une entreprise qui est toujours, à mon avis, très périlleuse quand c'est l'État qui se met à identifier les entreprises qui sont gagnantes, et puis les autres doivent attendre une autre politique industrielle qui verrait le jour peut-être dans un avenir pas très lointain de chez nous.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Petite conclusion?

Mme Zakaïb : M. le Président, effectivement, Investissement Québec continue, pour toutes les autres entreprises, de faire ce qu'il a toujours fait, des prêts et des garanties de prêt. Investissement Québec et tout ce qui est offert par le ministère peut être offert à toutes les autres entreprises. Maintenant, quand on va aux Olympiques, on n'y va pas avec tous nos coureurs, on y va avec les meilleurs. Et, si on avait 300 entreprises, au Québec, qui sont des moyennes entreprises, imaginez ce que serait notre économie. On a…

Et accélérer la croissance… Et, encore une fois, l'État ne choisit pas les meilleures, l'État a trouvé une façon de les identifier à partir de critères objectifs puis sur la croissance passée des entreprises. Et là il y a 500 entreprises qui attendent la réponse, 500 entreprises qui ont passé à travers le filtre très serré des résultats financiers et 500 entreprises qui pourraient croître. Et vous savez qu'à même nos petites entreprises du P de PME, là, il y en a très peu qui se rendent à M. Et, si on pouvait aider celles qui sont dans une lancée pour se rendre à M, d'y aller encore plus vite avec de la formation, avec des mentors, avec des chargés de projet qui font arriver leurs projets, avec Investissement Québec qui leur trouve des occasions d'affaires partout à travers le monde, un programme qui a été réfléchi par les gens du ministère, avec Investissement Québec, avec les CLD… Je vous invite, M. le ministre, à y réfléchir à deux fois parce que vous êtes en train d'enlever au Québec la meilleure idée qui est arrivée depuis deux décennies pour développer l'économie du Québec. Parce que les programmes, comme vous parlez, puis Investissement Québec, ça fait longtemps que ça existe, mais des moyennes entreprises, on n'en a toujours pas ou presque pas.

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme la députée.

Mme Zakaïb : Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci de votre enthousiasme et de votre participation. Nous allons maintenant passer, pour un nouveau bloc, avec la partie gouvernementale. Nous sommes limités un peu dans le temps, mais nous allons entamer cette partie-là. C'est M. le député de Laval-des-Rapides qui va prendre la parole…

M. Polo : Merci…

Le Président (M. Bernier) : Allez-y, M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Polo : Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, je tiens à féliciter puis à remercier le ministre des Finances, avec qui j'ai eu l'occasion de travailler dans le passé. Et, dans le budget qu'il a présenté et déposé la semaine dernière, je reconnais la même rigueur et la même assiduité qu'il a toujours eues, notamment dans ses anciennes fonctions comme économiste en chef à la Banque Laurentienne. Donc, lorsque le député de Lévis fait mention, effectivement, que nous comptons, au gouvernement, parmi l'un des meilleurs économistes au monde, bien je dois également peut-être lui rappeler et lui clarifier que le ministre des Finances… le ministre des Finances a été reconnu par une institution internationale, Bloomberg, comme étant l'un des tops trois parmi ses prédictions économiques sur une période de 18 mois, trimestrielles. Et c'est là l'importance du travail et de l'analyse que le ministre des Finances a effectuée, justement, lorsqu'il parle de prévisions, si on peut dire, modérées et même conservatrices dans ses prédictions de la croissance des revenus, justement, pour ajuster la croissance des dépenses en fonction, justement, d'une croissance de revenus modérée. Et, si jamais, en cours de route, l'économie nous donne des surprises et des rebonds économiques, et c'est ce qu'on va s'atteler à faire au cours des prochains mois, entre autres avec le ministre des Finances et le ministre de l'Économie, bien, tant mieux, ce sera au bénéfice de nos concitoyens, ce sera au bénéfice de notre économie et ce sera aussi au bénéfice des services que notre gouvernement non seulement compte offrir, mais compte justement bien financer.

M. le ministre, le budget du 4 juin dernier a montré l'ampleur des défis que le gouvernement doit relever pour atteindre l'équilibre budgétaire en 2015 et 2016. Le déficit budgétaire de l'année 2013‑2014 s'élève à 3,1 milliards, soit 600 millions de plus que prévu par le gouvernement précédent il y a à peine trois mois. Pour 2014 et 2015, si rien n'était fait, le Québec serait confronté à des déficits respectifs de 5,9 milliards et de 7,6 milliards, ce qui éloignerait de nouveau le Québec du retour à l'équilibre budgétaire. J'ai été heureux de voir que le gouvernement a fait des choix responsables et nécessaires pour ramener le déficit budgétaire à 2,3 milliards en 2014‑2015 puis complètement l'effacer en 2015‑2016, qui était d'ailleurs notre engagement, pendant la dernière campagne électorale, de respecter cette cible du retour à l'équilibre budgétaire.

Les Québécois se réjouissent certainement dans le cadre financier que le gouvernement présente pour le retour à l'équilibre budgétaire, qui ne comporte aucune augmentation d'impôt ou de taxe, donc aucune augmentation du fardeau fiscal pour les contribuables, à l'exception des mesures auxquelles une majorité de citoyens adhère. En effet, l'essentiel de l'effort sera réalisé par le gouvernement grâce à une compression importante de ses dépenses — et j'en suis convaincu que les citoyens s'en réjouissent parce que c'est également au gouvernement de faire sa part — et plusieurs mesures mises en place dès maintenant, notamment : des mesures de contrôle des dépenses, pour l'ensemble des ministères et des organismes, de plus de 2,7 milliards en 2014‑2015 et plus de 2,4 milliards en 2015 et 2016; un effort des sociétés d'État, des organismes autres que budgétaires non subventionnés et des fonds spéciaux de plus de 400 millions pour la période 2014‑2015 et de plus de 170 millions pour la période de 2015 et 2016; le gel global de l'enveloppe d'effectif en 2014‑2015 et en 2015 et 2016; et ainsi qu'une réduction des dépenses fiscales de plus de 250 millions de dollars en 2014‑2015 et de près de 1 milliard en 2015‑2016 sera également nécessaire pour réduire les déficits. Pour l'avenir, la mise en place dès cet automne, et annoncée également aujourd'hui, de la commission sur la révision permanente des programmes et la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise dont les recommandations guideront le gouvernement dans ses efforts pour contrôler ses dépenses…

Avant de poser ma question, permettez-moi de vous présenter quelques exemples, M. le ministre. Au sujet de la lutte contre l'évasion fiscale, malgré de nombreuses initiatives mises en place par les gouvernements successifs, l'évasion fiscale, le blanchiment d'argent, la collusion et la corruption sont des phénomènes toujours présents au Québec. Les efforts de lutte contre l'évasion fiscale permettent notamment d'améliorer l'équité pour les contribuables qui acquittent la totalité de leur impôt et d'assainir les pratiques commerciales dans certains secteurs, notamment le secteur de la cigarette et du tabac au Québec. Les données que j'ai prises directement sur le site Internet de Revenu Québec montrent que les initiatives récentes de lutte contre l'évasion fiscale sont payantes et ont permis au gouvernement d'accroître de façon substantielle ses revenus.

La récupération fiscale dans le secteur des planifications fiscales abusives est un autre sujet important à aborder. Les données de Revenu Québec indiquent qu'entre la période de 2008‑2009 jusqu'à 2012 et 2013 le gouvernement a pu récupérer près 400 millions de dollars grâce aux règles antiévitement…

Le Président (M. Bernier) : M. le député, je dois vous interrompre, et vous aurez l'occasion de reposer votre question à notre retour, parce que, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 19 h 30. Merci de votre participation.

Est-ce que la salle demeure fermée pour que les gens puissent laisser leur matériel?

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Il n'y a pas d'autre activité. Normalement, on devrait... Pardon?

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Donc, je suspends les travaux jusqu'à 19 h 30. Merci.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 19 h 32)

Le Président (M. Bernier) : Alors, bonsoir. La Commission des finances reprend ses travaux. Alors, je vous souhaite bonne soirée à tous, de bons échanges.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours du budget. Et nous allons poursuivre nos échanges avec le député de Laval-des-Rapides. Il vous reste environ 12 minutes, M. le député de Laval-des-Rapides, à votre bloc du côté gouvernemental. Allez-y.

M. Polo : Merci beaucoup, merci beaucoup, M. le Président. Comme je le mentionnais avant qu'on termine notre session précédente, selon mes recherches, les données de Revenu Québec indiquent qu'entre 2008… la période de 2008‑2009 et 2012‑2013, le gouvernement a pu récupérer près de 400 millions grâce aux règles antiévitement particulières mises en place par le gouvernement précédent, le gouvernement du Parti libéral, et à l'action d'une unité spécialisée dans la lutte contre les planifications fiscales agressives, PFA, de Revenu Québec.

Les données de votre budget, M. le ministre, révèlent que les pertes fiscales dans le secteur de la construction sont estimées à 1,5 million annuellement. Or, les données de Revenu Québec font apparaître que, de 2009‑2010 à 2012‑2013, les différentes actions de lutte contre le travail au noir et la non-déclaration des heures travaillées dans ce secteur ont permis de récupérer 1 milliard de dollars, ce qui représente près de 300 millions de plus de récupération fiscale par année, et, en 2012‑2013, soit la dernière année pour laquelle les données sont disponibles sur le site Internet de Revenu Québec, la récupération fiscale dans la construction s'est élevée à plus de 400 millions. Ainsi, malgré de nombreuses initiatives mises en place depuis le milieu des années 90, l'évasion fiscale, le blanchiment d'argent, la collusion et la corruption sont des phénomènes toujours présents dans ce secteur. Il resterait un peu plus de 1 milliard de pertes fiscales par année à récupérer dans ce secteur.

Certains réseaux de travail au noir s'organisent parfois sous la forme d'agences de placement. Un tel stratagème leur permet de détourner les retenues à la source et les cotisations sociales des travailleurs. Les données de Revenu Québec indiquent, de plus, que plus de 20 millions sont annuellement récupérés par les actions entreprises par le gouvernement, et la politique de divulgation volontaire permet aux citoyens de régulariser leur situation fiscale en divulguant de façon spontanée et complète les omissions ou les fausses déclarations qui leur ont permis d'éviter de payer des impôts et des taxes. Si la divulgation répond aux conditions applicables, Revenu Québec n'impose pas les pénalités prévues par les lois fiscales et n'intente pas de poursuite judiciaire de nature pénale. Or, on apprend, sur le site de Revenu Québec, que ce programme a permis de récupérer plus de 300 millions entre les périodes de 2008‑2009 et 2012‑2013.

Question, M. le Président : J'aimerais savoir quelles sont les initiatives que le gouvernement compte mettre en oeuvre pour augmenter ses revenus tout en respectant sont engagement de ne pas augmenter le fardeau fiscal, les impôts, les taxes qui ne font pas consensus dans la population. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. M. le ministre.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Chers collègues, bien, en effet, c'est une question importante. Nous avons toujours à coeur de rendre le système fiscal le plus équitable possible. Donc, dans le budget que nous avons déposé le 4 juin dernier, il y a une série de mesures qui vont augmenter les revenus de l'État.

Pour l'année 2014‑2015, c'est à peu près 300 millions au total et, pour 2015‑2016, c'est à peu près 350 millions au total. De ces efforts-là, probablement qu'un des principaux, c'est justement la lutte à l'évasion fiscale. Alors, depuis déjà plusieurs années, le gouvernement… Et cette lutte à l'évasion fiscale, pour cette année, 2014‑2015, devrait nous rapporter 111 millions additionnels et, 2015‑2016, 133 millions additionnels. Donc, nous intensifions la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir et dans toutes les sphères de l'économie où ces risques-là sont importants.

Qu'est-ce que nous allons faire concrètement? Nous allons améliorer le contrôle fiscal dans le secteur de la construction, nous allons assurer une présence accrue dans certains secteurs à risque, nous allons implanter des modules d'enregistrement des ventes, les fameux MEV, le MEV, dans le secteur des bars et des restos-bars et nous allons aussi accélérer le traitement des dossiers judiciaires en matière pénale. Toutes ces nouvelles initiatives, donc, comme j'ai dit tantôt, devraient nous rapporter 110 millions de plus.

Nous avons aussi mis en place quelques mesures qui, à notre avis, améliorent l'équité du régime fiscal. Et une des mesures importantes à cet égard-là, c'est la révision de l'âge d'admissibilité au fractionnement des revenus de retraite entre conjoints. Depuis 2007, le régime d'imposition des particuliers comporte ces mécanismes-là qui permettent aux couples touchant un certain revenu de retraite de fractionner et donc réduire le fardeau fiscal. Grâce à ce mécanisme, un particulier peut ainsi transférer à son conjoint jusqu'à 50 % de ses revenus de retraite admissibles. Or, les revenus de retraite qui sont admissibles sont ceux qui viennent de régimes de pension agréés. Et nous pensons que ça provoque une iniquité avec d'autres contribuables qui, eux, par exemple, utilisent un REER et ne peuvent pas fractionner leurs revenus avant l'âge de 65 ans. Donc, ce que nous avons fait pour corriger cette iniquité, c'est que dorénavant l'âge d'admissibilité à cette mesure sera établi à 65 ans, sans égard aux sources de revenus de retraite.

D'autres mesures de revenus, c'est évidemment les taxes spécifiques sur le tabac et sur les boissons alcooliques. Nous pensons que le tabagisme est toujours un phénomène à combattre. Ça nous coûte, à la longue, à long terme, en termes de dépenses accrues de santé, quand même des sommes importantes. Alors, si on peut diminuer ce fléau-là, nous avons tous à gagner à long terme. Et une légère hausse de la taxe sur le tabac peut aller dans cette direction-là. Évidemment, quand on fait ça, il faut aussi qu'on soit conscients que ça peut aussi avoir un effet sur la contrebande. Donc, nous avons aussi pris en considération cet aspect-là. Donc, il y a 1 million de dollars de plus qui va être utilisé à la lutte contre le...

Une voix : …lutte à la contrebande de tabac.

• (19 h 40) •

M. Leitão : Merci beaucoup. Après 7 heures du soir, je commence à perdre mes mots. Pour ce qui est des boissons alcooliques, il y avait aussi une iniquité entre les taxes qui s'appliquaient aux produits d'alcool vendus dans les points de vente, donc les magasins, les dépanneurs, la SAQ, et ceux consommés dans les restaurants. Donc, nous allons uniformiser cette taxe-là pour mettre fin à cette iniquité et, ce faisant, nous allons aussi quand même aller chercher des revenus additionnels.

Donc, en tout et pour tout, 300 millions de dollars en 2014‑2015, à peu près 350 millions de dollars en 2015‑2016, c'est l'effort qu'on demande aux contribuables québécois. Comparé à ce qu'on fait du côté du contrôle des dépenses, vous comprendrez bien que c'est minime, mais c'est quand même considérable.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Laval-des-Rapides ou…

M. Polo : Bien, à titre de question complémentaire, parce que je pense qu'il nous reste du temps au niveau de ce…

Le Président (M. Bernier) : Environ quatre minutes, quatre, cinq minutes.

M. Polo : M. le ministre, j'aimerais vous interroger sur la révision de l'âge d'admissibilité au fractionnement des revenus de retraite entre conjoints. C'est une mesure que vous avez annoncée la semaine dernière et qui a soulevé quelques questions au niveau de la population. Je pense que certaines personnes… Et je pense que la tribune est parfaite pour que vous puissiez expliquer un peu plus en détail à qui s'applique-t-elle. Donc, j'aurais des questions sur cette annonce-là en particulier.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Ça s'applique surtout aux personnes qui ont pris des retraites anticipées, des personnes qui avaient des régimes de pension agréés et qui avaient la possibilité de prendre leur retraite avant l'âge de 65 ans. Et donc, depuis 2007, ces personnes-là, en faisant ça, pouvaient fractionner leurs revenus avec leur conjoint, si le conjoint avait un revenu inférieur, bien sûr, et, en même temps, ces personnes-là avaient aussi la possibilité, le droit évidemment de continuer à travailler dans d'autres domaines, et donc nous… pendant que d'autres contribuables, ceux qui avaient surtout des REER, évidemment, ne peuvent pas toucher leur REER avant l'âge de 65 ans.

Alors, en faisant ça, nous… donc, en arrangeant… en amenant l'âge d'admissibilité à ce programme-là, pour tout le monde, à 65 ans, nous pensons qu'en faisant ça nous allons être plus équitables pour toute la société. C'est vrai aussi, on ne se cache pas, qu'en faisant ça nous allons chercher des revenus additionnels. Mais je pense que l'objectif principal de cette mesure était de rétablir une iniquité qui existait depuis déjà un certain temps.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Polo : C'est tout, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Vous avez terminé. M. le député de Mégantic, est-ce que c'est…

M. Bolduc (Mégantic) : Est-ce qu'on a le temps de commencer une autre question?

Le Président (M. Bernier) : Oui, vous avez le temps. Vous avez un trois, quatre minutes, oui.

M. Bolduc (Mégantic) : O.K. Le Québec fait face à un déficit budgétaire se prolongeant depuis la récession de 2009. Les dépenses croissent toujours plus vite que les revenus, ce qui est la définition même d'un déficit structurel. Le gouvernement a déployé toujours plus vite que les revenus… Excusez-moi. Le gouvernement a déployé un plan de redressement qui a réduit graduellement le déficit depuis les trois dernières années. Toutefois, les finances publiques se sont détériorées à nouveau en 2013‑2014, notamment en raison de la conjoncture économique moins favorable à ce qui avait été prévu. Or, les déficits contribuent à l'alourdissement continu de la dette et de la croissance du poids des intérêts à acquitter par rapport à l'ensemble des dépenses gouvernementales.

Le rapport remis au gouvernement, il y a quelques semaines, par deux éminents experts des finances publiques, M. Luc Godbout et M. Claude Montmarquette, a permis de disposer d'un portrait réaliste des finances publiques. Le déficit budgétaire de l'année 2013‑2014 s'élève à 3,1 milliards, soit 600 millions de plus que ce qui était prévu par le précédent gouvernement il y a à peine trois mois. Pour 2014‑2015 et 2015‑2016, si rien n'est fait, le Québec sera confronté à des déficits respectifs de 5,9 milliards et de 7,6 milliards, ce qui l'éloignerait de nouveau du retour à l'équilibre budgétaire. Donc, on voit un accroissement du poids de la dette. Cette situation serait inacceptable.

Le Québec doit donc retrouver l'équilibre budgétaire dès 2015‑2016. Déjà, en 2014‑2015, le service de la dette représentera 10,8 milliards, soit 11 % de l'ensemble des dépenses consolidées et plus que les dépenses pour le soutien aux personnes et aux familles. Si rien n'est fait, le poids de la dette augmentera, continuera d'augmenter, transférant ainsi un fardeau important aux générations futures. Or, comme vous le savez, il est d'autant plus urgent d'agir que la population en âge de travailler commence à diminuer au Québec. Il y aura moins de travailleurs, dans les prochaines années, pour supporter la dette.

Selon les données de l'enquête sur la population active de Statistique Canada, la population de 15 à 64 ans, soit celle qui participe le plus au marché du travail, a progressé de seulement 0,1 %, en 2013, au Québec et de 0,6 % au Canada. En raison du vieillissement de la population, le bassin de travailleurs potentiels devrait diminuer au cours des prochaines années au Québec, contrairement au Canada, où il continuera de progresser. De 2014 à 2024, la population de 15 à 64 ans devrait décroître en moyenne de 0,2 % par année au Québec; au Canada, on anticipe une croissance moyenne de 0,3 % par année. En 2013, on recensait, au Québec, 393 237 personnes âgées de 10 à 14 ans alors que la population de 60 à 64 ans comptait 521 769 personnes. Donc, au cours des prochaines années, le départ massif anticipé de travailleurs à la retraite entraînera une diminution du bassin potentiel de main-d'oeuvre.

Le Président (M. Bernier) : Votre bloc est maintenant terminé.

M. Bolduc (Mégantic) : Je terminerai plus tard, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Vous aurez l'occasion de vous reprendre, il y a encore plusieurs blocs auxquels vous pourrez poser vos questions sans problème. Nous allons donc retourner au deuxième groupe d'opposition pour un bloc de 20 minutes. M. le député de Lévis.

M. Dubé : Alors, merci beaucoup, M. le Président. En fait, avant de passer la parole à mon collègue le député de Groulx, j'aimerais revenir maintenant un petit peu plus spécifiquement sur une des trois composantes que nous avons adressées en fin d'après-midi, à savoir les revenus. Le ministre des Finances nous a bien expliqué, là, qu'il y avait cinq axes de développement, là — je les répète pour nos auditeurs, là — au niveau des PME, au niveau des mines, des hydrocarbures, le Plan Nord, la stratégie maritime puis les infrastructures. Bon.

On a bien vu, un petit peu plus tôt, que la croissance des dépenses, bien que… j'allais dire modeste ou pas trop ambitieuse pour rester prudent dans les prévisions — c'est ce que le ministre des Finances nous a dit — on avait quand même une croissance à la hauteur de 3,9 % en 2014‑2015. Alors, moi, ce que j'aimerais lui demander… Puis je verrai tout à l'heure… on verra avec mon collègue, on ira un petit peu plus pointu dans certains éléments comme la PME. Mais, si je vous demandais… si je demandais au ministre des Finances aujourd'hui… Sur un objectif de quatre ans, on a entendu, par exemple, qu'une des mesures, c'était les mesures d'emplois, hein? On dit : On veut augmenter nos revenus de tant, mais on a aussi des mesures de… où on serait satisfait de notre programme sur quatre ans, c'est que si on avait une création d'emplois de, par exemple, 250 000 emplois.

Moi, ce que j'aimerais lui demander, c'est : Est-ce qu'il est capable de nous dire, par exemple, quand on regarde les cinq axes de développement, lesquels, vous pensez, qui vont être les plus rentables en termes d'emplois? C'est-u au niveau des PME? Est-ce que c'est au niveau, par exemple, des mines et hydrocarbures? Est-ce que c'est au niveau des… J'aimerais ça que vous nous en parliez un petit peu, ce qui va faire que, lorsqu'on aura la chance de discuter un peu les crédits, on verra si l'argent est mis dans les bonnes choses pour être capables justement d'avoir l'impact sur ces revenus-là.

J'aimerais vous entendre sur les priorités et surtout les objectifs que vous avez en termes d'emplois et si vous en avez en… d'autres indicateurs. Parce que je pense qu'on s'entend tous que ce que les Québécois s'entendent, c'est qu'ils ne veulent pas payer plus d'impôts, ils veulent que plus de gens travaillent pour que plus de gens puissent payer de l'impôt. Et ça, on le respecte très bien. Mais j'aimerais que vous nous mettiez, à travers vos cinq axes, lesquels sont prioritaires puis en… question d'emplois, je pense, c'en est un, à moins qu'il y ait d'autres indicateurs qui pourront nous aider à mesurer votre performance dans les prochaines années.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui, en effet, c'est une bonne question. Écoutez, il y a des mesures qui vont vous rapporter des dividendes à court terme et d'autres qui vont porter des dividendes, à cet égard-là, à plus moyen et long terme. Les mesures qui sont les plus efficaces à court terme sont celles qui concernent le crédit d'impôt LogiRénov, pour la rénovation domiciliaire, qui, à notre avis, devront générer presque 3 milliards d'investissements, donc de dépenses, suivi des mesures qui favorisent les PME. Donc, les emplois futurs vont venir surtout de la reprise économique, de la croissance, qui, elle, vient de l'investissement. Et, pour redémarrer l'investissement à court terme, les mesures sur les PME sont les plus efficaces.

Les autres, stratégie maritime, Plan Nord, ressources naturelles, sont aussi très efficaces, très utiles, mais évidemment leur répercussion sur l'économie, ça va prendre un peu plus de temps. Ce n'est pas immédiatement que l'exploration minière va résulter dans une ouverture d'une nouvelle mine, etc. Donc, ces choses-là prennent du temps. À court terme, PME, rénovation domiciliaire, c'est là qu'on va trouver le plus...

• (19 h 50) •

M. Dubé : Est-ce que je peux peut-être...

Le Président (M. Bernier) : Oui. Allez-y, M. le député de Lévis.

M. Dubé : Si vous me permettez, M. le Président. Bon, j'apprécie ça, mais, si je restais sur quatre ans, avant d'aller dans cette différence-là, de court terme, long terme, si on regardait ça globalement sur le quatre ans, est-ce que... Par exemple, vous me dites : Les infrastructures, en termes de dollars, ça vaut peut-être 3 milliards d'investissements, que si vous n'aviez pas fait le crédit rénove, par exemple, LogiRénov… Est-ce que... Mais de combien de personnes vous pensez qu'on crée des emplois sur quatre ans? Je reviens toujours à votre objectif de 250 000 emplois. L'argent que vous mettez dans ces crédits-là pour générer de... Le 3 milliards qui va être investi, vous pensez qu'il y a combien d'emplois sur quatre ans qui vont être créés par ce programme d'investissement ou de crédit à la rénovation?

M. Leitão : Nous pensons que...

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Excusez-moi. En ce qui concerne le crédit LogiRénov, le crédit à la rénovation domiciliaire, ça devrait soutenir 20 000 emplois.

M. Dubé : ...de quatre ans.

M. Leitão : Non, c'est plus court que ça, parce que ce programme-là, c'est seulement deux ans.

M. Dubé : Effectivement. C'est seulement sur deux ans.

M. Leitão : C'est ça. Et c'est pour ça que c'est un programme à très court terme et qui va avoir un effet sur l'économie à court terme. Ça va soutenir 20 000 emplois dans cette industrie-là. Par la suite, sur trois ans, les mesures qui concernent les PME, la réduction d'impôt, le congé de cotisation, enfin, toute une série pour les PME dont nous avons parlé tantôt, ça, ça serait la deuxième mesure qui, à notre avis, va générer à peu près 2 milliards de dollars d'investissement privé.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Dubé : D'investissement privé. Puis est-ce que je peux vous demander d'être assez gentil pour dire, le même 2 milliards, vous voyez que ça peut faire combien d'emplois pour la PME, d'emplois supplémentaires, on parle toujours, là, qui se positionnent dans ce 250 000 emplois là.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : 2 milliards de dollars d'investissement privé, ça, c'est un peu difficile à calculer que les crédits pour la rénovation domiciliaire, mais ça devrait soutenir au moins... à peu près 10 000 à 15 000 emplois. Et ça, c'est...

M. Dubé : 10 000 à 15 000 emplois pour les PME.

M. Leitão : Oui. Par les PME, oui.

M. Dubé : Par les PME, pour... Qui n'auraient pas été fait, par ailleurs, s'il n'y avait pas eu, par exemple, ces baisses d'impôt là ou de crédits supplémentaires pour la PME. Puis, si vous me permettez, M. le Président, parce que ça...

Le Président (M. Bernier) : ...M. le député de Lévis. Je vous écoute.

M. Dubé : Ça me permet de préciser l'ensemble du plan de quatre ans. Donc, les trois autres domaines ou les trois autres axes, pardon, qui sont au niveau du plan maritime, vous les voyez un peu plus à long terme. Pouvez-vous me les passer, si vous preniez le Plan Nord ou les trois qui restent? En termes d'emplois, je parle.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : En termes d'emplois, ça devient extrêmement complexe, à ce moment-ci, vous donner des chiffres précis en ce qui concerne la création d'emplois par ces moyens-là. La stratégie maritime, le Plan Nord, les ressources naturelles, les hydrocarbures, ce sont des investissements qui sont à très haute teneur en capital. Donc, l'impact direct de ces investissements-là sur la création d'emplois n'est probablement pas très élevé. Cependant, l'impact indirect de cette accélération d'activité économique, minière, énergétique, etc., c'est difficile à quantifier, mais l'ensemble de ces mesures, sur une période de cinq ans, devrait contribuer à créer les 250 000 emplois dont nous parlons depuis la campagne électorale.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Lévis.

M. Dubé : Je vais continuer dans cette voie-là, parce que ce qui me préoccupe un petit peu, c'est de... Bon, vous m'avez dit : On parle peut-être de 10 000, 15 000 emplois du côté des PME, on parle de peut-être une vingtaine de mille emplois du côté du programme, mais il en reste beaucoup pour atteindre le 250 000. Parce que, là, on a peut-être touché 35 000, 40 000 emplois. Puis on le voit, là, que c'est sur un programme sur quatre ans. Est-ce que votre chiffre de 250 000, c'est quelque chose que vous avez mis de façon arbitraire ou vous avez vraiment des chiffres qui vous viennent du côté…

Je répète ma question : Même si c'est sur quatre ans, même si c'est à long terme, est-ce que vous avez une idée, là… les mines, le Plan Nord, la stratégie maritime, qui vienne appuyer le 250 000 que vous avez? Parce que moi, j'ai hâte de vous mesurer sur une base annuelle pour regarder… puis là, en ce moment, je n'ai pas vraiment de réponse sur les trois autres axes, là.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Malheureusement, M. le député, M. le Président, la science économique n'est pas une science exacte, on ne peut pas prévoir, prédire ces choses-là avec ce degré de précision là. L'emploi va venir de la croissance économique qui, elle, va venir de la confiance des consommateurs et des investisseurs qui vont investir, ça va venir aussi de l'exportation. Donc, c'est l'évolution de l'économie qui va nous donner cette création d'emplois là.

Et, si vous voulez, je vous réfère à la page C.21 de notre document budgétaire, où nous avons détaillé certains indicateurs économiques, la prévision de ces indicateurs économiques là. Et donc on voit qu'avec la création… avec la croissance du produit intérieur brut de 1,8 % cette année, 2 % l'année prochaine, donc, c'est ça qui va donner lieu à la création d'emplois.

Aussi, si vous regardez les choses d'une façon historique, au cours des 10 dernières années, en moyenne, emplois créés au Québec, à peu près entre 35 000 et 40 000 emplois. C'est ça, notre rythme moyen de croissance de l'emploi en excluant les récessions, bien sûr. Alors, nous, en moyenne, 50 000, ce n'est pas un chiffre qui est particulièrement hors du normal, ça suggère seulement une accélération de la croissance relativement mineure par rapport à notre moyenne historique pour pouvoir atteindre ces chiffres-là. Où exactement ces emplois vont se situer? Est-ce que c'est cette industrie, ou l'autre, ou l'autre? Ça, c'est quelque chose que… La science économique n'est pas encore parfaite à ce point-là pour qu'on puisse aujourd'hui arriver à une telle conclusion.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Lévis.

M. Dubé : La raison pour laquelle je me permets de… Avant de passer la parole à mon collègue, de vous dire que c'est important d'aller un petit peu plus loin, je pense, M. le ministre, parce que, lorsqu'on décide qu'on favorise un axe versus un autre, c'est parce qu'on va y mettre plus ou moins de fonds pour générer la croissance. Ce que je veux comprendre, c'est que… Vous me dites, si je lis entre les lignes, là — puis vous préciserez si je n'ai pas bien compris : Il se crée peut-être, de toute façon, 150 000 emplois sur quatre, cinq ans. Nous, on va en créer 250 000, donc on va essayer de créer plus d'emplois en ayant une stratégie spécifique, soit maritime ou sur le Plan Nord.

Moi, ce que je veux comprendre, c'est que, si vous n'avez pas fait encore une analyse pour aller chercher plus d'emplois qui sont générés du côté du Plan Nord, ou peu importe, est-ce que vous allez mettre l'argent au bon endroit pour générer, justement, le 100 000 emplois supplémentaires dont vous parlez? Parce qu'on a bien vu, là, vous avez dit, par exemple : 50 000 emplois pour la première année. On voit que le début de l'année est anémique, hein? Ce n'est pas de votre faute, vous venez d'arriver, là. Mais on veut quand même vous évaluer sur votre première année aussi. Alors, je veux vous entendre là-dessus parce qu'il faut être sûr que ce n'est pas juste un voeu de 250 000 emplois. Il va falloir, à un moment donné, commencer à mesurer puis dire : Bien, on réajuste comment le tir si le Plan Nord ne fonctionne pas parce que les gens ne viennent pas investir, ou la stratégie maritime, on met combien d'argent dedans? Vous me suivez, là? Je veux juste être sûr que les gens comprennent bien que ce n'est pas un voeu pieux d'aller chercher 100 000 emplois, là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

• (20 heures) •

M. Leitão : Écoutez, là, je pense que… L'économie, encore une fois, n'est pas une science aussi exacte que ça. C'est quelque chose qu'on ne peut pas vous dire aujourd'hui comment ça va évoluer à ce degré-là de précision. Les mesures qu'on met en place sont basées aussi sur les atouts, sur la richesse, sur la composition de l'économie du Québec. Or, nous avons, au Québec, des ressources naturelles, elles sont là, elles sont importantes, et donc c'est un levier très important pour la croissance économique à l'avenir. Et ce n'est pas vraiment l'État qui va investir dans les ressources naturelles. Il y a une partie, oui, ou il y a le Fonds du Plan Nord où on peut, jusqu'à 1 milliard de dollars, prendre des participations. Mais c'est surtout l'investissement privé, local et étranger qui va donner lieu à cette croissance-là et puis ce sont les effets multiplicateurs de cet investissement-là qui vont créer l'activité économique et qui vont ultimement générer la croissance d'emplois.

Alors, nous pensons que c'est tout à fait dans l'ordre du normal, du concevable qu'avec les atouts que nous avons, avec les leviers qu'on va utiliser on puisse générer les investissements privés nécessaires qui vont nous mener à cette création d'emplois là.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député. M. le député de Groulx.

M. Surprenant : Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Bonsoir.

M. Surprenant : Le ministre des Finances a présenté un discours sur le budget en deux volets, et je voudrais, donc, parler du volet budget de la relance et de l'économie, qui comportait cinq axes, mais le premier axe concerne l'appui aux PME, parce que je suis particulièrement préoccupé par l'emploi.

Alors, une mise en contexte. On a actuellement un écart de richesse, par rapport au reste du Canada, le Québec, un revenu moyen qui est de 24 % inférieur à la moyenne canadienne et de nos voisins de l'Ontario, ce qui impacte, au niveau des recettes fiscales, 8 milliards de manque à gagner à l'heure actuelle. Alors, c'est énorme. Puis évidemment que, si on avait un revenu moyen équivalent aux autres... à la moyenne canadienne, on aurait un excédent et non pas un déficit, actuellement, budgétaire. Alors, les nouvelles récentes concernant l'emploi parlent d'un 26 700 de pertes à temps plein. Malgré qu'il y a une création mais à temps partiel, on a quand même un écart négatif. Alors, je réitère, là, que le ministre des Finances a parlé d'une promesse de créer 250 000 emplois et je suis inquiet.

Alors, à la page 8 de son document, il y mentionne — le document-ci — que «les PME sont le coeur de l'économie québécoise» et il en est très fier. «À elles seules, les PME représentent la moitié des emplois totaux et 70 % des nouveaux emplois.» Par ailleurs, à la page 38, il mentionne qu'il annonce la réduction de 20 % des taux de crédits d'impôt. Alors, ça me préoccupe beaucoup. Ce sont quand même... lorsqu'on parle de crédits d'impôt, on parle bien souvent d'entreprises qui créent des emplois à valeur ajoutée, donc à revenus moyens plus élevés. On en a perdu beaucoup, de ce genre d'emplois là, au profit de d'autres régions du monde au cours des dernières années.

Alors, ma question est celle-ci : Actuellement, est-ce qu'il a... Ces réductions de crédits d'impôt de 20 % «across the board», comme on dit, d'un bout à l'autre, il me semble qu'elles auraient pu être faites avec plus de discernement que cela. Alors, nous, on prônait effectivement aussi la réduction des crédits d'impôt, mais on voulait réduire au niveau des grandes entreprises, qui, selon nous, ces crédits d'impôt là vont directement au niveau des profits. Alors, on croit qu'il est important de supporter les PME, qui sont créatrices d'emplois. Et j'ai l'impression que le gazon est arraché en même temps que les mauvaises herbes, avec cette mesure-là. Alors déjà, également, des entreprises annoncent revoir leur plan d'embauche, et ça m'inquiète beaucoup. Alors, je demande au ministre des Finances : Comment a-t-il fait ses calculs et comment évalue-t-il le risque, au niveau de l'emploi, par cette mesure?

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Groulx. M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, pour préciser, les 250 000 emplois, ce n'est pas une promesse. Il n'y a personne qui peut promettre de créer des emplois à cette hauteur-là. C'est un objectif, c'est une cible, c'est ce sur quoi nous allons ultimement être jugés par la population. Ce n'est pas l'État qui crée 250 000 emplois.

Maintenant, PME et crédits d'impôt. O.K. Donc, la situation fiscale est sérieuse. Comme vous avez mentionné et que ça a été dit plusieurs fois ici, le déficit potentiel, si rien n'était fait, aurait été très élevé, ce qui était inacceptable. Donc, nous avons mis en place des mesures importantes pour contenir la croissance des dépenses. Tous les secteurs de la société doivent participer à cet effort-là. Pour nous, les crédits d'impôt, c'est une dépense, c'est une dépense fiscale. Donc, ça fait partie de l'échiquier total. On ne pouvait pas passer à côté de cette partie-là. Donc, oui, on va limiter la croissance des dépenses de programmes en santé, en éducation, les autres missions de l'État et aussi dans les dépenses fiscales. On ne pouvait pas laisser ça à l'extérieur.

Pour ce qui est d'une analyse plus fine de l'impact de ces choses-là, bien sûr ça va se faire dans les deux commissions qu'on met en place maintenant. On va passer à travers les différents crédits d'impôt un par un. On va voir s'il y a lieu de réduire encore davantage ou s'il y a lieu de les laisser là où ils sont. Je vous rappelle aussi qu'on a diminué ça de 20 %, donc il y a encore 80 % des crédits d'impôt qui sont là. Ces crédits d'impôt, soyons clairs aussi, ça bénéficie surtout les grandes entreprises. C'est surtout les grands gagnants. Les grands bénéficiaires de ce régime-là, ce sont de grandes entreprises informatiques et autres. Les PME, oui, certaines PME aussi, c'était important pour elles, mais les grands, grands bénéficiaires, ce n'étaient pas les PME. D'ailleurs, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, donc le groupe qui représente les PME, était très contente, très satisfaite du budget, parce que justement, depuis longtemps qu'ils prônaient, et qu'ils prônent toujours une réduction des crédits d'impôt et ils préféraient surtout une réduction du taux d'imposition, ce que nous avons fait. Alors, je pense que les mesures qu'on a mises en place pour les PME sont des mesures structurantes et importantes et qu'elles vont mener à une augmentation de l'investissement par ces entreprises-là, ce qui est très important pour l'avenir du Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Un court commentaire, M. le député de Groulx?

M. Surprenant : Je crois comprendre par vos propos qu'au niveau des crédits il y aura peut-être possibilité, là, effectivement, d'en discuter, mais peut-être de réévaluer peut-être un petit peu la mesure. Est-ce que je comprends bien?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : On va les analyser un à un, et certains pourraient être éliminés au complet, d'autres pourraient rester là où ils sont. On va faire l'étude au mérite de chacun. Mais je vous dis aussi, puisque nous sommes en période de transparence, je vous dis aussi que notre préférence, en ce qui concerne l'aide aux entreprises, notre préférence est que cette aide-là soit de façon générale et pas ciblée à certaines industries ou secteurs en particulier. Si on veut faire ça, si on juge qu'un certain secteur mérite une attention particulière à cause de compétition internationale ou quoi, il y a d'autres outils que l'État a pour accomplir cet objectif-là.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous allons donc revenir du côté du gouvernement. Donc, M. le député de Mégantic, vous aviez…

Une voix :

Le Président (M. Bernier) : Non, vous n'êtes pas supposé dire ça, effectivement. M. le député… Levez la main. Lequel? M. le député de Mégantic, allez-y.

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. J'en étais au point au point où on parlait d'un déficit d'emploi créé par le… ou l'augmentation des retraites des gens âgés et une diminution, si on veut, des jeunes qui entrent sur le marché du travail. Donc, l'arrivée des jeunes sera insuffisante pour remplacer cette génération. On parle ici d'un déficit, là, de l'ordre de 130 000 emplois.

Donc, des efforts importants à réaliser maintenant dans ce contexte, les efforts à réaliser pour retourner à l'équilibre budgétaire se chiffrent à 3,8 milliards en 2014‑2015 et 3,9 milliards additionnels en 2015‑2016. D'ici 2015‑2016, ce sont donc des efforts de 7,7 milliards qui devraient être réalisés. De façon générale, le gouvernement peut agir sur deux leviers pour retrouver l'équilibre budgétaire, soit stimuler l'économie pour accroître les revenus et mieux contrôler les dépenses.

Ma question, M. le Président, est la suivante : Dans ce contexte, pouvez-vous m'indiquer pourquoi vous avez décidé de réduire les dépenses fiscales? Et cela nuira-t-il à l'économie?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (20 h 10) •

M. Leitão : Merci. Merci, cher collègue. Comme on l'avait dit tantôt au député de la deuxième opposition, nous avons décidé d'aller dans cette direction pour plusieurs raisons, d'abord, parce que tout le monde, tous les secteurs de la société doivent contribuer à cet effort important de redressement et de retour à l'équilibre budgétaire. L'équilibre budgétaire, à notre avis, est une condition sine qua non d'un développement économique futur. Pour restaurer complètement la confiance des investisseurs, des particuliers, tout le monde, il faut qu'on démontre qu'on est capables de contrôler nos finances publiques, et donc tout le monde doit participer à l'effort, et ça aurait été inapproprié de ne pas regarder du côté de ces dépenses fiscales aussi. Ça, c'est la première raison que nous l'avons fait.

Deuxièmement, nous l'avons fait aussi parce que nous pensons que ce système-là a ses limites. Ça fait au moins une bonne vingtaine d'années qu'on a ces outils-là, crédits d'impôt, qui étaient utilisés et très utiles à attirer les entreprises à s'installer chez nous. Mais éventuellement il va falloir penser à mettre fin à ce type d'intervention là parce que, si une entreprise opère ici seulement parce qu'elle est habituée à l'aide de l'État, je ne pense pas que ce soit une solution durable et à long terme.

Donc, nous ne sommes pas sûrs… moi, je ne suis pas sûr de l'efficacité du programme de crédits d'impôt en général. C'est pour ça que ça va être examiné de façon exhaustive par la commission de réforme fiscale et d'évaluation de programmes pour voir si, en effet, il s'agit d'un outil, d'un système qui soit si efficace que ça. Je pense que, si c'était tellement efficace, la croissance économique au Québec aurait été beaucoup plus élevée au cours des dernières années.

Le Président (M. Bernier) : Ça va, M. le député de Mégantic? Oui. M. le député de La Prairie, bonsoir.

M. Merlini : Oui, bonsoir, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Bienvenue. Donc, je vous donne la parole.

M. Merlini : Merci beaucoup. M. le ministre, certains analystes, certains commentateurs et même certains députés de la 41e législature accusent le gouvernement de reculer sur les prévisions économiques avancées dans le cadre budgétaire du Parti libéral du Québec, notamment en ce qui a trait à la croissance économique et à la création d'emplois. Or, il est important de rappeler qu'avec le budget 2014‑2015 le gouvernement engage la première étape de ce passage nécessaire que nous devons emprunter pour rétablir l'équilibre budgétaire. Il s'agit d'un virage important pour la prospérité du Québec et pour les générations futures.

Ce budget s'inscrit toutefois dans un contexte difficile, alors nous devons composer avec une situation de départ qui n'est malheureusement pas idéale, et le Vérificateur général nous en a fait l'illustre démonstration cette semaine avec son rapport qu'il a déposé à l'Assemblée nationale. C'est le moins qu'on puisse dire.

En 2013, la croissance de l'économie du Québec a ralenti, amenant même certains analystes, par exemple le Mouvement Desjardins, à estimer que la croissance était effectivement en panne. Les chiffres montrent clairement que le Québec n'a pas su profiter de la reprise en cours chez nos principaux partenaires commerciaux. Alors, le PIB réel n'a crû que de 1,1 % en 2013, l'investissement non résidentiel a reculé de 6 % en 2013, l'investissement en machine et matériel a chuté de 6,6 % en 2013 après avoir progressé de 13,5 % en 2012, et l'investissement en construction non résidentielle a diminué de 5,5 % en 2013. L'emploi a également stagné en 2013, les niveaux entre janvier 2013 et 2014 sont pratiquement identiques, à 10 000 emplois près, et cette stagnation de l'emploi se poursuit. Alors, en mai 2014, soit 17 mois plus tard, le nombre d'emplois est encore… est plus bas qu'il n'était. Il était à un niveau inférieur que celui qui avait été observé à la fin de l'année 2012.

Alors, ainsi, M. le ministre, au moment de prendre le pouvoir, on ne peut que constater que les revenus de l'État sont affectés par la faiblesse de la croissance économique. Alors, ma question est la suivante : Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il est important de baser sur des prévisions économiques prudentes… Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il est important d'avoir des prévisions économiques prudentes dans le cadre de votre planification budgétaire?

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de La Prairie. M. le ministre.

M. Leitão : Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, c'est très important, mais je vous dirais même qu'avant de faire ça ce que nous avons aussi fait cette année et ce qu'on va faire dorénavant, c'est que nous allons commencer le processus budgétaire de l'autre côté, c'est-à-dire nous allons commencer par les prévisions de revenus, donc qu'est-ce qu'on peut, de façon prudente et conservatrice, s'attendre en terme de croissance économique, croissance de revenus. Puis, une fois qu'on a établi ce chiffre-là, là on va dire : O.K., très bien, alors qu'est-ce qu'on peut se payer comme dépenses? Ça, c'est une fois qu'on a atteint l'équilibre budgétaire. C'est comme ça qu'on va opérer pour s'assurer, justement, qu'il n'y a pas de surprise.

Alors, dans ce contexte-là, pour qu'il n'y ait pas de surprise, comme ça a été le cas, d'ailleurs, en 2013, on va utiliser des hypothèses de croissance économique et, donc, de croissance de revenus qui sont hyperprudentes, hyperconservatrices. D'ailleurs, c'est un peu ce qui se passe dans d'autres juridictions. Si nous regardons les budgets, surtout du gouvernement fédéral, en ce qui concerne leur croissance de revenus, c'est vraiment hyperblindé en termes de prudence. Ils utilisent les consensus du secteur privé, ils diminuent de 10 milliards de dollars pour le PIB nominal et puis, en plus de ça, ils mettent une réserve de prudence. Donc, c'est une façon très, très conservatrice de construire un budget et c'est dans cette direction que j'aimerais bien qu'on y aille, nous aussi.

On ne peut pas y aller tout de suite parce que nous sommes encore en territoire déficitaire relativement important, mais, une fois qu'on aura retrouvé l'équilibre budgétaire, donc pour la suite des choses, c'est comme ça qu'on va opérer, avec des hypothèses de croissance de revenus extrêmement prudentes pour que justement on n'ait plus de mauvaises surprises, dans le sens : Oups! Nos revenus n'étaient pas au rendez-vous et donc, là, on a un problème déficitaire, et il faut réduire les dépenses davantage. Donc, il faut partir d'une base qui soit très solide au niveau des revenus.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.

M. Merlini : Oui, en complémentaire. La croissance économique que vous aviez prévue pendant la campagne électorale, à ce moment-là, en réponse à ceux qui vous accusent d'avoir maintenant supposément reculé, vous l'avez basée, en fait, sur quoi, sur les données que vous aviez. Parce qu'on savait qu'il y avait eu un budget qu'il manquait les crédits. Mais qu'est-ce qui vous a permis, là… Là, on comprend la situation, que vous avez été obligé de reculer. Mais là qu'est-ce que vous répondez à ça?

M. Leitão : On a eu besoin de…

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Excusez, M. le Président. On a eu besoin, oui, d'ajuster notre tir parce qu'en effet la croissance économique, pour la première moitié de cette année, a été extrêmement faible, comme c'était le cas en 2013 aussi. Encore une fois, je demeure convaincu que la croissance économique réelle, pour le deuxième semestre de cette année et pour l'année prochaine, 2015, va être supérieure à ce que nous avons indiqué dans nos documents budgétaires. Mais, comme j'ai mentionné tantôt, ce n'est pas prudent de bâtir un cadre budgétaire avec de telles prévisions de croissance économique. Donc, si, à la fin du processus, on a une belle surprise, on ne demande pas mieux, ça sera beaucoup plus facile à gérer que le contraire, si on doit s'ajuster parce qu'on avait été trop agressifs au départ avec la croissance économique et les choses ne se passent pas comme ce qu'on avait prévu.

Alors, pendant la campagne électorale, nous avions prévu un taux de croissance de 2,1 % pour cette année et quelque chose de similaire pour 2015. Cette année, étant donné un très mauvais premier semestre, une telle croissance n'arrivera pas. Mais, pour le deuxième semestre et pour 2015, je suis encore convaincu qu'on va être capables d'avoir quelque chose de plus robuste que ce qui est indiqué dans notre budget.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie, avez-vous d'autres questions?

M. Merlini : Non, merci. Ça va pour moi, merci.

Le Président (M. Bernier) : Ça va pour vous. M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Merci beaucoup, M. le Président. Ça fait plaisir d'être à mon tour de pouvoir intervenir et saluer le ministre, mes collègues de l'opposition, deuxième opposition, et mes collègues, ainsi que tout le personnel du ministère qui est ici, là, que, depuis plusieurs années, on a la chance de le croiser, que ce soit pour l'étude des budgets, là, annuels.

Moi, ma question se tournerait, à ce moment-ci, sur toutes les cotes de crédit du Québec puis versus un peu ce qu'on voit ailleurs au Canada. Et on a pu voir, là… Je prends juste Moody's comme exemple, là, qui, jusqu'à l'année 2000, avait une cote A-2, ici, pour le Québec; en 2005, A-1; et maintenant le AA-2. Depuis 2006, Standard & Poor's qui est assez… qui est stable depuis de nombreuses années. Mais, quand on se compare avec les autres provinces, où l'Alberta a eu AAA, la Colombie-Britannique aussi, l'Ontario qui est comme nous… Et je me plais souvent, de par le député… le comté que je représente tout près de l'Ontario, donc je me plais souvent à comparer le Québec à l'Ontario, où on a la même cote de crédit.

On a vu, depuis 18 mois, comment l'économie a pu descendre, a pu connaître un soubresaut, là, dans la mauvaise direction, devait revenir à l'équilibre budgétaire en 2013‑2014, et l'ancien gouvernement, le ministre des Finances, la première ministre qui disaient, jusqu'à la dernière minute avant la mise à jour, là, qu'on a eue en novembre 2013, qu'ils s'enlignaient toujours vers un déficit zéro quand les chiffres montraient clairement, là, que c'est un déficit budgétaire qui attendait le Québec, pour finalement arriver à quelques jours de l'élection, où on nous disait ou on disait aux Québécois que le déficit serait de 2,5 milliards de dollars. On voit aujourd'hui, là, avec ce que le Vérificateur général a fait, ce que le ministère a fait, également le comité, là, avec M. Godbout et M. Montmarquette, c'est 3,1 milliards de dollars, Fitch qui a mis sous surveillance le Québec.

Vous avez travaillé de nombreuses années, M. le ministre, comme économiste. Premièrement, j'aimerais savoir quelles sont les conséquences qui pourraient arriver s'il y avait une décote du Québec. Le fait d'être sous surveillance par certaines agences de cotation, qu'est-ce que ça donne ou qu'est-ce que ça amène comme conséquence au Québec? S'il vous plaît.

• (20 h 20) •

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Chapleau. M. le ministre.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, les conséquences d'une décote, évidemment, c'est quelque chose qu'on… on ne veut pas y aller. On a vu qu'est-ce que ça peut causer quand d'autres pays subissent une telle décote. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le Québec, aujourd'hui, maintient encore, a encore un accès privilégié, un accès facile aux marchés financiers. Nous avons une dette qui est très élevée, et donc, à chaque année, même si on ne faisait absolument rien, même s'il y avait zéro déficit, on n'investissait rien du tout en infrastructures, nous avons quand même plusieurs milliards de dollars que nous devons emprunter à chaque année juste pour rouler la dette existante. Donc, c'est… Et notre facilité et notre capacité à rouler cette dette-là, donc à réemprunter, dépend de la cote de crédit que la dette du Québec a.

Or, si cette cote de crédit diminue pour quelque raison que ce soit — et on pourra voir quelles sont les raisons qui pourraient amener à une telle diminution — ça devient beaucoup plus difficile pour le Québec d'avoir accès aux marchés financiers. Et, si ça devient plus difficile pour nous d'avoir accès aux marchés financiers, ça veut dire qu'il va falloir qu'on paie plus, il va falloir qu'on donne, donc, une prime de risque aux investisseurs qui achètent nos obligations. Donc, les paiements d'intérêt qui sont déjà très élevés — on avait dit tantôt que ça équivalait au budget de l'Éducation, par exemple — et, si on devait payer encore plus en termes d'intérêt parce qu'il y a une prime de risque parce qu'il y a eu une décote, il faudrait, à ce moment-là, générer un surplus primaire, c'est-à-dire qu'il faudrait que nos dépenses courantes soient encore moins élevées par rapport aux revenus courants pour qu'on puisse payer ce service de la dette plus élevé.

Donc, ce serait une situation extrêmement complexe à gérer. Ça forcerait le gouvernement, quel qu'il soit, qui subirait une telle décote à poser des gestes qui seraient vraiment dramatiques. Et c'est quelque chose qu'on veut absolument éviter, tant nous que nos prédécesseurs, tous. Il n'y a personne qui souhaite un tel événement. Donc, si jamais ça arrivait, oui, ça serait particulièrement néfaste pour l'économie du Québec.

Maintenant, qu'est-ce qui pourrait provoquer une telle chose, une décote? En fin de compte, il faut regarder deux choses. Ce que les agences de notation essaient de déterminer, c'est la capacité d'une juridiction à rembourser ses dettes, et cette capacité-là dépend de deux choses : d'abord, donc, du niveau d'endettement et de la situation fiscale, déficit, surplus, etc., mais ça dépend aussi de l'économie, ça dépend aussi de la vigueur, de la croissance de l'économie. Vous pouvez avoir un niveau d'endettement qui est relativement modeste, qui est très bas, mais, si votre économie est stagnante ou même en décroissance, vous allez avoir aussi un sérieux problème vis-à-vis les agences de notation parce qu'elles vont vous dire : Oui, la dette n'est pas très élevée, mais même cette dette qui n'est pas élevée ne pourra pas être remboursée parce que votre économie est en déclin. Donc, c'est aussi important… c'est pour ça que c'est important de travailler sur les deux axes, sur le redressement des finances publiques, pour qu'on puisse dégager une marge de manoeuvre, qu'on puisse fonctionner plus à l'aise, mais aussi sur la croissance économique, pour qu'on puisse diminuer la pression sur les finances publiques. Donc, c'est essentiel qu'on fasse les deux.

Les agences de notation, dernièrement... par exemple, la dernière à agir, c'était Fitch, ils avaient mis le Québec sous surveillance essentiellement parce que... Bon, le niveau de la dette, il n'y avait pas grand-chose de nouveau là-dessus, mais ce qui les préoccupait, c'était la performance économique, donc le fait que la croissance déjà en 2012 n'était pas très forte, en 2013 était encore moins forte. Donc, ce qui les préoccupait davantage, c'était cette descente vers une espèce de stagnation économique. C'était ça qui préoccupait davantage les agences de notation et c'est ça que nous, on devra leur prouver, on devra leur démontrer que nous sommes capables d'accélérer la croissance économique.

Je pense que c'était un de nos collègues qui avait aussi mentionné qu'en plus de toutes les questions auxquelles nous faisons face il y a aussi la question du vieillissement de la population, le fait que la population active, donc le nombre de ceux en âge de travailler, va commencer à diminuer en termes absolus, là, cette année, 2014. Ce n'est pas de la fiction, de la science-fiction, c'est que d'ores et déjà il y a une diminution de la population active. Et on sait très bien que la croissance économique… un des déterminants de la croissance économique et de la création d'emplois, c'est justement la taille de la population. Et, si ça diminue, ça va aussi provoquer un frein important à la croissance future.

Donc, ce sont toutes ces choses-là que les agences de notation surveillent quand elles élaborent leur cote de crédit ou leur opinion sur la dette d'une juridiction. Et, généralement, la façon dont ça fonctionne, c'est qu'ils mettent cette juridiction sous observation, donc un «credit watch», et puis, si le gouvernement pose les bons gestes, bon, ils reviennent à neutre, et, si les gestes ne sont pas jugés comme étant efficaces, de ce «credit watch», là on passe à négatif et il y a une décote.

Le Président (M. Bernier) : Il reste environ 30 secondes, M. le député de Chapleau.

M. Carrière : 30 secondes? O.K. Bien, je reviendrai parce que j'ai d'autres questions sur toute la question de la décote de crédit puis...

Le Président (M. Bernier) : Oui, vous aurez l'occasion, dans un bloc...

M. Carrière : Donc, je pourrai revenir au prochain bloc.

Le Président (M. Bernier) : À votre prochain bloc, vous aurez l'occasion de revenir pour poser toutes vos questions. Merci. Nous revenons du côté de l'opposition officielle. M. le député de...

M. Drainville : De Marie-Victorin.

Le Président (M. Bernier) : …Marie-Victorin, quel plaisir de vous recevoir en tant que vice-président de cette commission.

M. Drainville : Bien oui. Je suis content de vous voir, M. le Président.

Une voix : Par une belle soirée d'été.

M. Drainville : Bien oui. Je salue tous les collègues, dont certains m'ont accompagné dans d'autres commissions, notamment la députée de Bourassa-Sauvé, que je retrouve avec grande joie. Je salue M. le ministre. Vous savez, M. le Président, j'ai fait quelques entrevues avec M. le ministre par le passé.

Le Président (M. Bernier) : ...dans votre ancienne vie.

M. Drainville : Dans mon ancienne vie.

M. Leitão : Et dans mon ancienne vie aussi.

M. Drainville : Et dans votre ancienne vie aussi. Alors, je vais essayer de retrouver, M. le Président, le climat très respectueux et cordial même qui était le nôtre lorsque nous faisions des entrevues, lui et moi.

J'aimerais ça qu'on parle un peu des dossiers Québec-Ottawa. Et, dans le fond, j'ai plusieurs courtes questions à vous poser, M. le ministre des Finances et, si vous n'avez pas d'objection, je vais essayer de les faire les plus courtes possible pour que vous ayez une bonne raison de me donner une réponse qui soit la plus courte possible pour qu'on puisse couvrir le plus de terrain possible.

D'abord, je voulais vous demander : Est-ce que les surplus financiers très importants qui s'annoncent à Ottawa, là, dès l'an prochain, est-ce qu'ils sont, à votre avis, révélateurs de l'existence d'un déséquilibre fiscal?

M. Leitão : Une réponse très courte...

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Une réponse très courte : Non.

M. Drainville : Donc, vous, vous ne reconnaissez pas l'existence d'un déséquilibre fiscal, à partir du moment où il y aura des surplus à Ottawa, là, dès l'an prochain.

M. Leitão : Aujourd'hui, là, 2014, 2015, 2016, non, je ne reconnais pas l'existence d'un déséquilibre fiscal, certainement pas de la même nature qu'on a eu dans les années 90.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Drainville : Donc, il y en avait un auparavant, selon vous?

M. Leitão : Il y en avait un auparavant.

Le Président (M. Bernier) : Je veux juste simplement vous dire : C'est qu'il y a des gens qui enregistrent nos travaux, et, si vous allez trop rapidement, ces gens-là n'ont pas le temps... Si je n'ai pas le temps de vous identifier… Ce n'est pas de vous imposer un rythme ou quoi que ce soit, c'est pour faciliter les enregistrements aux galées. Si on fait ça comme ça, ça devient une discussion, et on...

M. Marceau : On pourrait confondre qui parle.

Le Président (M. Bernier) : Pardon?

M. Marceau : On pourrait confondre…

Le Président (M. Bernier) : On pourrait facilement confondre qui parle, qui pose la question.

M. Marceau : On pourrait attribuer des paroles au ministre qui sont celles...

Le Président (M. Bernier) : Les paroles du ministre, vous les attribuer, et vos paroles, les attribuer au ministre.

M. Marceau : Ce serait dramatique.

• (20 h 30) •

Le Président (M. Bernier) : Donc, ça devient difficile. Donc, je vous demanderais d'avoir une certaine pensée aux enregistrements parce que ce n'est pas facile, à ce moment-là.

M. Drainville : Très bien, merci, M. le Président. Donc, il y en avait un auparavant, mais maintenant il n'y en a plus. Et pourquoi donc?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui. Je ne pense pas qu'il y en ait un maintenant. Et pourquoi? Parce que, dans les années 90, à ce moment-là, le gouvernement fédéral avait mis en place une politique fiscale très… — quel est le nom? — agressive, disons — c'était déjà utilisé, ce terme-là — pour revenir à l'équilibre budgétaire à ce moment-là, et une partie importante de cet effort-là, c'était une réduction unilatérale des transferts aux provinces. Donc, ça, ça a causé un déséquilibre. Les provinces, toutes les provinces — ce n'était pas dirigé spécifiquement contre le Québec, c'est toutes les provinces canadiennes — ont subi cette réduction rapide des transferts fédéraux à laquelle ils ont eu beaucoup de difficultés à s'adapter, donc de là le déséquilibre fiscal.

Cette fois-ci, le gouvernement fédéral a rétabli ses livres, a rétabli son équilibre budgétaire sans réduire les transferts aux provinces et sans réduire les transferts aux individus. Ça a été fait essentiellement par un contrôle serré des dépenses fédérales, des dépenses du gouvernement dans leurs propres opérations, leur masse salariale, etc. Donc, à cet égard-là, la situation aujourd'hui est tout à fait différente de celle des années 90.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Drainville : Mais, dans vos propres documents budgétaires, M. le ministre des Finances, dans le plan budgétaire, vous déplorez le plafond unilatéral qui a été imposé sur les paiements de péréquation et vous déplorez également, dans vos propres documents budgétaires, le nouveau plafond qui a été imposé pour le Transfert canadien en matière de santé, qui a été remplacé par un taux de croissance proportionnel au PIB alors qu'il était… il est encore de 6 %, mais ça achève. Donc, dans les faits, si vous dites que le problème auparavant, c'était l'imposition de diminution dans les transferts, dans les faits, on va vivre la même chose. On vit… La raison pour laquelle Ottawa va être… la première raison pour laquelle Ottawa va être en mesure d'engranger des importants surplus dans les prochaines années, c'est à cause des nouveaux plafonds qu'il a imposé aux provinces, et ce, de façon unilatérale, que ce soit pour la péréquation ou pour le Transfert canadien en matière de santé.

Donc, si votre logique, c'est l'imposition de diminution, elle devrait valoir pour les surplus à venir. Si c'est ça, votre logique, si la distinction que vous faites entre le déséquilibre d'avant et la situation d'aujourd'hui, c'est l'imposition unilatérale de diminution aux provinces, on va vivre ça, on est en train de vivre ça, et donc, selon votre propre définition, on devrait être en déséquilibre fiscal, vous devriez reconnaître que c'est une situation de déséquilibre fiscal parce que c'est la même chose.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Non, respectueusement, ce n'est pas la même chose. Ce dont on parlait dans les années 90, c'était une réduction en termes absolus. Le gouvernement fédéral a réduit ses transferts en termes absolus aux provinces, à toutes les provinces. Ce que le gouvernement fédéral fait maintenant, c'est que les transferts fédéraux continuent d'augmenter, en 2012‑2013 et 2013‑2014, 2014‑2015, les augmentations sont toujours là, ce que le gouvernement fédéral fait, c'est que dorénavant il va… Il a changé sa formule de calcul des transferts pour limiter la croissance, mais les transferts fédéraux vont augmenter toujours. Le Transfert canadien en santé dont vous avez fait allusion tantôt, il ne va pas diminuer, il va passer d'une croissance de 6 % et quelques par année, depuis déjà un certain nombre d'années, à partir de 2017 — ce n'est même pas encore aujourd'hui — cette croissance-là va être limitée à la croissance du PIB. Donc, il n'y a pas de réduction de transferts fédéraux, il va y avoir une diminution du rythme de croissance de ces transferts-là.

Nous, dans nos documents, nous faisons état qu'en effet cette décision d'Ottawa de changer sa formule plus ou moins unilatéralement ne nous convient pas et donc nous souhaitons convaincre, avec nos collègues des autres provinces, convaincre le gouvernement fédéral à revoir sa position et à changer la formule d'augmentation des transferts. Mais il y a toujours augmentation, alors il n'y a pas de diminution des transferts.

M. Drainville : O.K., mais là je… M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Oui. Moi, je ne veux pas faire une bataille, là, de terminologie, là. Dans le fond, ce que je vous dis, et on s'entend là-dessus, c'est que, dans les années qui vont… à venir, qui s'en viennent, Ottawa va accumuler de très importants surplus qui s'expliquent par le fait qu'Ottawa collecte beaucoup trop d'argent pour les besoins qu'il a. Trop de revenus, pas assez de dépenses. Je simplifie à outrance, là, mais c'est ça pareil.

Vous, comme fédéralistes, là, ça doit vous embêter un peu de voir ce déséquilibre, vous êtes obligés de faire toutes sortes de sacrifices. Vous allez être obligés d'imposer à la population québécoise toutes sortes de sacrifices. Vous allez être obligés de nous serrer la ceinture collectivement. Ça va vous obliger à prendre des décisions extrêmement difficiles. Et, pendant ce temps, ils s'apprêtent à accumuler littéralement, là, des dizaines de milliards de dollars de surplus dans, grosso modo, les 10 prochaines années. Vous, comme fédéralistes, là, quand vous voyez ça, vous n'avez pas le goût de dire : Bien là, visiblement, il y a un problème dans la fédération canadienne, il y a trop d'argent à Ottawa pour les besoins qu'ils ont, et donc ils devraient collecter moins d'argent, et nous qui avons plus de besoins on devrait en avoir plus? Il me semble que ça devrait être ça, la logique, là. Non? Ce n'est pas raisonnable, ça?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Non. Non, et parce que, si, en effet, le gouvernement fédéral dégage des surplus importants, il le fait parce qu'il a très bien contrôlé ses dépenses d'opération, ses dépenses opérationnelles. Ce qu'il dépense dans ses ministères, ce n'est pas... Le gouvernement fédéral n'a pas mis la hache dans ses transferts aux individus et aux provinces.

Et, en plus, en tant que fédéraliste, moi, je suis très content de voir notre gouvernement fédéral avoir de larges surplus parce que, fort probablement... enfin je présume, mais c'est fort probable que le gouvernement fédéral, dans les années à venir, passe justement à des réductions de taxes et impôts de façon significative, et nous, en tant que contribuables canadiens, nous allons bénéficier de ces réductions de taxes et impôts que le gouvernement fédéral va se donner. Vous avez raison, il aurait pu choisir d'augmenter ses dépenses, mais j'ai l'impression qu'il va plutôt choisir de réduire ce qu'il retire de l'économie, donc réduire ses taxes et impôts, et nous allons tous bénéficier d'une telle décision.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Merci, M. le Président. Si c'était le cas — et effectivement je suis d'accord avec vous, je pense qu'il y aura des baisses d'impôt, d'autant plus que les surplus vont survenir dans l'année électorale, donc ça tomberait bien, disons, sur le plan électoral, que le gouvernement fédéral annonce des baisses d'impôt — est-ce que ça pourrait, dans votre esprit, créer un espace fiscal pour vous permettre d'augmenter vos revenus, à ce moment-là?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Théoriquement, oui. En effet, si le gouvernement fédéral diminue ses taxes et impôts, ça, on pourrait occuper cet espace-là — «on pourrait» au conditionnel. Mais ce ministre des Finances ne ferait pas ça parce que nous jugeons que les contribuables québécois — et je pense que le député de Lévis serait plus ou moins d'accord avec ça — les contribuables québécois sont déjà assez taxés globalement. Et donc, s'ils peuvent avoir un petit répit qui proviendrait du côté fédéral, ce n'est pas le gouvernement provincial qui irait chercher des revenus additionnels. Même si l'espace serait créé par cette réduction-là, je n'ai pas du tout l'intention de l'occuper.

M. Drainville : Donc, il n'est pas question pour vous...

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Drainville : Merci. Il n'est pas question pour vous de tirer profit d'un éventuel espace fiscal qui pourrait vous être libéré par des baisses d'impôt, c'est très clair. Vous ne souhaitez pas non plus mener de bataille pour augmenter les transferts fédéraux vers le Québec parce que vous jugez que ce n'est pas... vous n'avez pas de cause, dans le fond. Vous jugez que le fédéral dégage des surplus grâce à sa bonne gestion, grâce aux choix budgétaires et vous dites : Comme il n'y a pas de déséquilibre fiscal, il n'y aurait pas de fondement à ce que nous, Québécois, demandions une augmentation des transferts fédéraux. Exact?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (20 h 40) •

M. Leitão : Non, non, pas exact parce que, comme on a dit tantôt, et c'est bien élaboré dans notre budget, certaines décisions par le gouvernement fédéral quant à la suite des choses, donc quant à l'évolution du rythme de croissance des transferts fédéraux, nous sommes en désaccord avec ces décisions-là et, avec nos collègues des autres provinces, nous allons essayer de convaincre le gouvernement fédéral à revoir ses formules de calcul des transferts. On ne va pas… On ne va pas…

M. Drainville : …TCS, là.

M. Leitão : On va commencer par le TCS, par le Transfert canadien en santé sociale, qui lui changerait en 2017. On commencerait par essayer de convaincre nos collègues fédéraux que peut-être la formule n'est pas adéquate. Mais non, on ne va pas partir une guerre. Et ça, on va les faire, ces représentations-là avec nos collègues des autres provinces parce que c'est un sujet qui préoccupe tout le monde. Pas seulement le Québec, mais l'Ontario, toutes les provinces canadiennes souhaitent que le gouvernement fédéral revienne sur sa décision, donc on va travailler conjointement pour changer un peu les choses.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Mais, si ce n'est pas au nom du déséquilibre fiscal que vous allez demander une correction du montant de transferts que vous recevez, si ce n'est pas au nom du déséquilibre fiscal, ce sera au nom de quoi? C'est quoi, le principe que vous allez défendre?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Le principe que nous allons défendre, c'est le principe d'une fédération qui fonctionne bien. Un des facteurs qui nous distingue, au Canada, qui nous a distingués dans tout ce triste épisode de la grande récession et l'effet que ça a eu sur beaucoup d'autres endroits au monde, c'est que justement nous avons, au Canada, une union monétaire et une union fiscale qui fonctionnent bien. Et donc, dans l'intérêt de la préservation d'une union fiscale et une union monétaire efficaces qui peuvent même servir de modèle à nos cousins européens, c'est dans cet esprit-là que nous allons approcher le gouvernement fédéral avec nos collègues des autres provinces pour qu'il maintienne ce système-là de transferts. C'est une particularité canadienne qui est très… je dirais, unique au monde. On ne trouve pas ça aux États-Unis, on ne trouve pas ça en Australie ni en Allemagne, ce système de péréquation et ce système de transferts fédéraux. Ça nous a très bien servi, au Canada, surtout au cours des 30 dernières années, et donc nous allons essayer de convaincre nos amis fédéraux à revoir leur position.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Drainville : Donc, ce n'est pas au nom du déséquilibre fiscal que vous allez mener la bataille, c'est au nom du bon fonctionnement de la fédération. C'est ça? C'est ça que vous m'avez dit en gros?

M. Leitão : Oui.

M. Drainville : O.K. Mais, en tout respect, M. le ministre des Finances, là, si vous voulez obtenir gain de cause, vous allez devoir avoir un rapport de force. Vous dites : Je vais le bâtir avec les autres provinces. Hein, vous revenez constamment là-dessus : On va travailler avec les autres provinces. Vous pensez que… Je ne sais pas, moi, je vous écoute parler puis je vous trouve… je vous trouve trop bon, trop bon gars. En fait, je vous trouve trop bon gars. Non, mais je regarde… je regarde…

Des voix :

M. Drainville : C'est parce qu'Ottawa ne va pas vous faire de cadeau, hein? L'histoire du Québec, que ce soit… peu importe qui est au pouvoir, hein? Puis là c'est… Je vous dirais, Robert Bourassa avait compris ça, ça prend un rapport de force, si tu veux aller faire des gains, ça prend un rapport de force. Jean Charest, quand il est allé chercher un montant d'argent justement pour corriger le déséquilibre fiscal, il avait bâti son rapport de force, c'est-à-dire qu'il avait l'opinion publique québécoise derrière lui. Vous, vous dites : Dans le fond, Ottawa, ils font tout bien, je n'ai rien à leur reprocher, j'ai juste un petit problème de fonctionnement, je vais m'asseoir avec les autres provinces, puis on va s'entendre. Moi, je ne vois pas tellement comment vous allez construire votre rapport de force avec Ottawa dans l'attitude que vous avez présentement.

Par exemple, dans votre plan budgétaire, vous reconnaissez que le Québec va recevoir seulement 18 % du volet Infrastructures provinciales-territoriales du nouveau Fonds Chantiers Canada, hein? Ils vont mettre 10 milliards dans le volet Infrastructures provinciales-territoriales. Le Québec reçoit seulement 18 % de l'enveloppe. Vous saviez ça? Comment vous allez faire pour aller chercher notre juste part? Normalement, on devrait avoir 23 %, ce qui est notre poids démographique.

On s'entend que, je pense, dans le cas du Fonds Chantiers Canada, on ne va pas s'appuyer sur le poids du PIB, je pense qu'il faut y aller avec le poids démographique parce qu'on ne veut pas justement que ces fonds-là servent à renforcer le statu quo, on veut que ces fonds-là servent justement à assurer une répartition qui soit la plus équitable et qui permette, disons, une certaine égalité des chances. Alors, comment vous allez faire pour aller chercher la juste part du Québec, qui ne reçoit que 18 % alors qu'il faudrait recevoir 23 %? Est-ce que vous êtes d'accord qu'il faudrait recevoir 23 % de l'enveloppe?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, «trop bon gars» n'est pas un terme antiparlementaire, c'est correct.

M. Leitão : Merci.

Le Président (M. Bernier) : Donc, allez-y, M. le ministre, vous pouvez répondre.

M. Leitão : Écoutez, les relations fédérales-provinciales, ce n'est pas facile, mais je dois vous avouer que, depuis une trentaine d'années quand même, au Canada, on a réussi à bâtir une bonne relation avec nos amis fédéraux. Ce n'est pas idéal, bien sûr que non, il y a toujours des choses qu'on aimerait et qu'on va renégocier, qu'on va essayer d'obtenir plus. Mais je pense que ce que vous mentionnez, ce que vous faites allusion au rapport de force, je pense que ce n'est pas la seule façon de négocier. Je pense que, quand nous avons une attitude de collaboration, quand nous avons une attitude où on cherche à trouver des solutions plutôt qu'à créer des conflits, je pense qu'à la longue on va sortir gagnant d'une telle attitude. C'est ce que nous allons mettre en place, c'est ce que ce gouvernement va mettre en place, et je pense qu'on va avoir des résultats beaucoup plus intéressants que si on adoptait une attitude beaucoup plus belliqueuse avec nos collègues du gouvernement fédéral.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de… il vous reste environ deux minutes.

M. Drainville : Mais, M. le ministre des Finances, en tout respect, là, vous dites vous-même, dans vos documents budgétaires, qu'on n'a pas notre juste part du Fonds Chantiers Canada puis, dans le fond, vous me dites : On va leur demander gentiment de nous donner notre juste part. Puis, s'ils disent non, vous allez faire quoi?

M. Leitão : On va leur demander encore avec nos amis des autres provinces. Le Fonds Chantiers Canada…

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Encore une fois, je m'excuse, M. le Président. On recommence. On va leur demander encore et on va négocier encore. À ce chapitre-là, les relations que nous avons maintenant avec le ministre fédéral en charge de ce programme-là sont des relations très cordiales. Je pense que nous sommes assez proches de retrouver… de renégocier une entente avec le gouvernement fédéral. Donc, je serais un peu prudent quant à sauter aux conclusions trop rapides de ce qui pourrait être le cas.

Vous êtes aussi certainement au courant que pas seulement au Québec, mais beaucoup d'autres provinces, enfin toutes les autres provinces jugent que l'effort fédéral en termes de dépenses en infrastructures, donc Chantiers Canada, cet effort-là est bien sûr trop modeste, et donc il va y avoir de la pression pour que ce bloc de dépenses fédérales là augmente, lui aussi.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Marie-Victorin, je vous laisse le mot de la fin.

M. Drainville : Il nous reste très peu de temps, effectivement. Je veux juste, M. le Président, dire : En 2008, lors de la campagne électorale fédérale, Jean Charest a déclaré que la question du déséquilibre fiscal n'était toujours pas réglée. On ne peut pas dire que M. Charest n'était pas un fédéraliste. Il a déclaré que ce n'était pas réglé, et…

Le Président (M. Bernier) : Attendez un petit peu, on va laisser finir le député.

M. Drainville : …après l'avoir dit, il y a eu des coupures. Le nouveau cap, le nouveau plafond sur les paiements de péréquation et le nouveau plafond sur le TCS, ils ont été posés après. Donc, Jean Charest a dit, en 2008 : Ce n'est pas réglé, le déséquilibre fiscal, et le gouvernement fédéral en a rajouté, a accru encore plus le problème en coupant et dans les paiements de péréquation… en fait, dans le taux de croissance, et même chose avec le Transfert canadien en matière de santé. Si, pour Jean Charest, il y avait un déséquilibre fiscal en 2008, avant les nouveaux plafonnements du TCS puis de la péréquation, s'il était aujourd'hui ici, je pense qu'il dirait : Le déséquilibre est encore pire qu'il était en 2008. Et je ne comprends pas comment vous, comme ministre des Finances, vous ne pouvez pas dire : Écoutez, il y en a un, déséquilibre, puis je vais me battre pour le corriger.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Une courte réponse.

M. Leitão : Une courte réponse. Vraiment, je ne saisis pas du tout parce que les dépenses fédérales, tant la péréquation que le Transfert canadien en santé, depuis 2008, ne font qu'augmenter. Alors, où est la réduction? C'est un peu loufoque. 8 milliards en 2008, on est rendus à 9,5 milliards en 2014. C'est étrange…

Le Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. le ministre. Vous aurez l'occasion de revenir sur le sujet dans un bloc subséquent. Nous allons passer immédiatement au député de Mercier. Donc, je vais laisser la parole, pour un bloc de 15 minutes, au député de Mercier. Par la suite, nous reviendrons à la partie gouvernementale suite à une entente. Donc, M. le député de Mercier, la parole est à vous.

• (20 h 50) •

M. Khadir : Merci, M. le Président. Merci aux députés de la partie gouvernementale pour me céder cet échange de temps de parole. D'abord, je veux souligner que j'ai eu l'occasion de rencontrer M. le ministre à l'occasion des consultations prébudgétaires avec ma collègue Françoise David, de Gouin. Nous avons formulé un certain nombre de propositions. Je vais revenir, donc, sur une partie de ces propositions là parce que le gouvernement insiste beaucoup sur les problèmes des finances publiques, problème de la dette, la nécessité de l'équilibrer, nous estimons qu'il y a d'autres solutions que couper. On peut aussi éviter de gaspiller de l'argent là où il y a eu des gaspillages et on peut aussi rechercher une plus grande équité entre les contribuables à revenus modestes, les particuliers, et de grandes entreprises, et de grandes fortunes qui paient relativement de moins en moins d'impôt depuis de nombreuses années, tout le monde le reconnaît. Et donc, s'il existe une… s'il peut y avoir une dispute alentour du déséquilibre fiscal entre le Québec et le fédéral auquel ont fait allusion mes collègues du Parti québécois, il est incontestable qu'il y a un déséquilibre fiscal qui s'accroît depuis une trentaine d'années entre les particuliers et les entreprises, d'une part, puis entre la classe moyenne, les faibles revenus, les modestes revenus et les très fortunés.

D'ailleurs, à cet égard-là, j'aimerais attirer l'attention du ministre sur le rapport de la fiscalité des entreprises. Le dernier que j'ai pu consulter date… est paru en 2013 et concerne l'année 2008. Est-ce qu'on va avoir un rapport plus récent sur la fiscalité des entreprises au Québec pour avoir un portrait plus juste, pour savoir qu'est-ce qu'eux paient comme impôt, quelle est leur part par rapport aux efforts consentis par les contribuables ordinaires?

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Mercier. M. le ministre, une courte réponse.

M. Leitão : O.K. Pour ce qui est de la fiscalité des entreprises, bon, il va y avoir la commission sur la réforme fiscale, donc ils vont regarder ces questions-là de la lourdeur ou absence de lourdeur du fardeau fiscal des particuliers et des entreprises. Donc, ça va être regardé maintenant.

Mais, d'une façon un peu plus, si vous voulez, philosophique, je ne vous cache pas que je pense qu'on sortirait perdants collectivement si on augmentait le fardeau fiscal des entreprises. Je pense que les entreprises sont la source de croissance économique, et donc elles doivent aussi jouer un rôle dans l'effort. Et d'ailleurs vous avez remarqué qu'on a joué avec… ou qu'on a changé les crédits d'impôt, par exemple. Mais, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu des entreprises, je pense que ce serait contre-productif d'augmenter l'impôt du revenu sur les entreprises, ça nous donnerait probablement quelques revenus de plus, mais ça serait de courte durée et ça provoquerait toutes sortes d'autres conséquences qui seraient beaucoup plus dommageables pour l'économie.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Mercier.

M. Khadir : Mais je signale au ministre des Finances que ce discours-là, cette réponse qu'il vient de nous donner, c'est essentiellement l'argument invoqué depuis à peu près 25 ans pour consentir de plus en plus de baisses. Si ça devait avoir des résultats positifs, on en saurait quelque chose. Ce qu'aujourd'hui nous constatons, c'est que, depuis 25 ans, il y a une perte de la productivité de plusieurs sociétés qui l'ont appliqué et surtout il y a une baisse de la vitalité économique de nos économies partout en Occident. Il y a eu la crise financière de 2007‑2008 de laquelle les économies occidentales ont peine à se relever et il y a un fossé croissant entre les classes moyennes, les classes avec des revenus plus modestes et ceux qui sont les plus fortunés, au sommet de la hiérarchie, qui contrôlent souvent ces entreprises qui sont de moins en moins taxées. Il y a un déséquilibre profond. Et les économistes réputés, dont, je suis sûr, le ministre actuel doit avoir entendu parler, des économistes des prix Nobel, je parle de Joseph Stiglitz, je parle de Paul Krugman, reviennent… et des milliardaires comme — là, le nom m'échappe pour bien faire, mais… le millionnaire américain — Warren Buffett rappelle qu'il y a un déséquilibre quand des milliardaires paient moins d'impôt que leurs secrétaires, en termes relatifs. D'accord?

Je signale que, par exemple, dans le dernier rapport, qui date de 2008, dernier rapport disponible, même entre entreprises, les grandes entreprises paient deux fois moins d'impôt que l'entreprise moyenne qui, elle, produit des richesses. Il y a déséquilibre là. Il faudrait que les gens soient au courant de ça. Il y a 27 milliards de dollars de crédits d'impôt octroyés pour les dividendes. Parce que vous savez que des dividendes sont imposés la moitié… Quand vous avez un revenu en dividendes, vous êtes imposés à moitié. Quand vous avez un revenu de votre salaire, de votre travail, vous êtes imposés à 100 %. Il y a déséquilibre là aussi. Ça a coûté... En fait, il y a 27 milliards de dividendes qui ont été payés sans impôt, libre d'impôt. Il y a énormément, donc, de… il y a un vaste réservoir dans lequel il y a une marge de manoeuvre que le ministre pourrait appeler à la tâche.

Mais je laisse ça de côté, je signale simplement que le citoyen moyen pour lequel vous comptez couper des services — parce qu'il va y avoir des coupures de services, tout le monde s'entend pour dire ça — aimerait savoir pourquoi est-ce qu'on ne met pas à la tâche les plus fortunés, bien que Warren Buffett, un milliardaire américain, dit : Ils devraient, ceux-là, faire un effort supplémentaire.

Maintenant, M. le ministre, vous avez, à la page 55 de votre plan budgétaire... vous parlez d'un certain nombre d'actions que vous allez mettre en oeuvre en 2014‑2015 pour des contrôles de dépenses, notamment la révision du régime public d'assurance médicaments pour la signature d'ententes particulières avec des fabricants pour la réduction des prix pour les médicaments génériques. J'aimerais signaler à mon collègue et ministre des Finances que, Québec solidaire, depuis 2006, nous avons présenté à quatre ministres de la Santé différents… Parce que c'était M. Couillard qui, ici même, nous entendait, moi et Françoise David, le présenter, le projet de Pharma-Québec, qui consiste essentiellement à mieux négocier le prix de nos médicaments. Il a dit que c'était un projet excessivement intéressant, mais le lobby pharmaceutique était trop puissant à l'époque. Ensuite, j'en ai parlé au ministre Bolduc. Je m'excuse si... bien, en fait, au député de...

Le Président (M. Bernier) : Au député de Jean-Talon.

M. Khadir : ...Jean-Talon d'aujourd'hui. Très bien. J'en ai parlé également au ministre Réjean Hébert et à l'actuel ministre de la Santé, qui était à l'époque président de Fédération des médecins spécialistes. Tous ces ministres m'ont dit que c'est une idée intéressante, on devrait l'explorer. J'en ai parlé aussi à quatre ministres des Finances. Je vous épargne les noms. Il s'agit, si on applique le modèle de Pharma-Québec du modèle néo-zélandais, qui permettrait de faire exactement ce que le Vérificateur général aujourd'hui dit que nos établissements de santé font à une plus petite échelle… D'accord? Ils le font pour les médicaments qu'on utilise dans les hôpitaux. C'est une facture de 610 millions, puis le vérificateur trouve que les écarts de 10 % sont sujets d'inquiétude.

Je vous signale que, la moyenne de ces corporations, sur le 610 millions, là, les acquisitions qu'ils font… ont des prix inférieurs de 30 % à la facture que paie la RAMQ, c'est-à-dire ce que paie la RAMQ aux compagnies pharmaceutiques pour les 3,4 milliards de dollars de médicaments d'ordonnance remboursés par la RAMQ. Vous voyez, c'est un énorme... On a 610 millions, sujet d'inquiétude pour 10 % de différence, mais il y a 30 % de différence pour 3,4 milliards qu'est la facture de la RAMQ pour les assurés du régime public. Est-ce que vous comptez faire quelque chose là-dessus? L'Ontario l'a fait. Sans aller aussi loin que Pharma-Québec, de Québec solidaire ou la Nouvelle-Zélande, l'Ontario a des réductions de l'ordre de 500 millions à 800 millions par année depuis 2006. C'est beaucoup d'argent, M. le ministre. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Merci, M. le Président. Plusieurs choses. Pour ce qui est du taux d'imposition des riches et des super-riches, j'aimerais juste qu'on évite, si on peut, de faire un amalgame avec ce qui se passe à l'extérieur. La situation américaine est très différente de la situation canadienne, de la situation québécoise. Nous n'avons pas les mêmes taux d'imposition qu'aux États-Unis ou les mêmes échappatoires fiscales qui existent aux États-Unis et qui n'existent pas ici. Donc, ce dont M. Buffett se plaint, et avec raison, c'est une situation qui ne pourrait pas vraiment se matérialiser ici. Donc, ça, c'est une chose.

Pour ce qui est des dividendes, évidemment, n'oublions pas que les dividendes sont des paiements qui se font, donc, aux actionnaires d'une entreprise après que l'entreprise ait payé des impôts. Donc, des impôts ont déjà été payés, donc c'est un peu différent.

Mais, pour revenir au coeur de votre question, et on a déjà parlé de ça avant, en effet, les prix des médicaments, c'est un poste de dépenses très important, et j'en suis sûr, oui, qu'il y a des moyens d'aller trouver des économies. On n'a pas besoin de faire des grandes révolutions. Nos voisins ontariens l'ont fait. Ailleurs, dans les pays de l'OCDE, ça s'est fait aussi. Donc, oui, je pense que c'est quelque chose qu'on peut et qu'on doit regarder. Je vous avais déjà dit même, dans nos consultations prébudgétaires, que c'est un sujet qu'une fois la période de préparation budgétaire derrière nous, donc cet été, c'est quelque chose que, moi, personnellement, ça m'intéresse beaucoup d'explorer cette avenue-là.

• (21 heures) •

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Mercier.

M. Khadir : …allez-vous le limiter aux médicaments génériques? Parce que je comprends que le lobby des produits brevetés est très puissant. Il y a un ancien ministre libéral… enfin, un ancien adjoint ministériel libéral qui est maintenant P.D.G. du lobby des pharmaceutiques. Mais ce n'est pas une raison. Je pense que, collectivement, on est rendus là. Il y a eu une commission d'enquête royale au Canada, en 2002 — vous êtes fédéraliste —commission royale instituée par le gouvernement libéral de M. Chrétien, présidée par Roy Romanow, qui disait qu'on paie de trois à six fois trop cher nos médicaments à l'échelle… Trois à six fois, imaginez, c'est énorme. Donc, je vous prie de considérer aussi les médicaments brevetés.

M. Leitão : On va considérer.

M. Khadir : J'ai d'autres propositions…

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Khadir : …qui vont dans le même sens. Je pense… Il me reste, M. le Président…

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste environ 3 min 30 s.

M. Khadir : Très bien. Le Québec est en surplus d'électricité, M. le ministre. Dans le plan budgétaire, vous dites qu'Hydro-Québec Distribution en a pour 75 térawattheures en surplus pour les 10 prochaines années. Ces térawattheures, on les produit actuellement à perte par des chantiers comme la Romaine et par des minicentrales électriques. Il y a un comité d'experts formé par l'ancien gouvernement qui, indépendamment de quiconque, a étudié le projet de la Romaine et nous dit que, dans le contexte actuel, on devrait abandonner les phases III et IV. Ça permettrait d'économiser 4 milliards de dollars aux deniers publics. Finalement, c'est quand même dans le giron des deniers publics, même si c'est Hydro-Québec qui fait des investissements. Et puis, les minicentrales, tout le monde s'entend pour dire que c'est à perte qu'on donne ces contrats-là. Pourquoi?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bon, pour ce qui est de la Romaine, écoutez, on ne va pas commencer maintenant à faire marche arrière, le projet va se terminer. Pour ce qui est des surplus d'électricité, oui, ils sont imposants, 75 térawattheures, mais c'est l'équivalent d'une grosse aluminerie et d'une mine de fer, par exemple. Donc, ils sont imposants, ces surplus-là, mais ils ne sont pas de nature telle qu'ils vont être avec nous pendant des décennies. Ça va se résorber quand même assez rapidement, surtout ceux… Avec la façon dont nous comptons utiliser ces surplus-là pour attirer l'investissement, ces surplus-là ne vont pas durer beaucoup. D'ailleurs, à très court terme, pour l'année 2014, il y a une belle fenêtre d'opportunité pour qu'Hydro-Québec augmente ses exportations aux États-Unis. Donc, je pense que, d'ici un an, ces surplus-là vont déjà être pas mal moins élevés, mais il y a encore de la place qu'on puisse les utiliser comme levier pour promouvoir le développement de l'économie québécoise.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Khadir : La ministre des Finances, en 2009, Mme Jérôme-Forget, la ministre libérale, disait exactement la même chose, que bientôt on va écouler ces surplus. 2009, 2014, ça fait déjà cinq ans, il n'en est rien. Puis les projections qui sont faites par le comité d'experts nous montrent qu'on va être en surplus longtemps. Les alumineries produisent quelque chose. Ces surplus-là, actuellement, nous coûtent… coûtent aux contribuables… on les paie de nos poches pour rien, ça ajoute à la dette. Pourquoi on fait ça?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bien, écoutez, les exportations d'aluminium sont un moyen important et utile pour réduire notre déficit commercial. Donc, je n'ai pas la même opinion que le député de Mercier de ces activités-là. Pour ce qui est des surplus d'électricité qui étaient déjà là avant et qui sont toujours là, n'oublions pas non plus, n'oublions pas non plus qu'il y a eu une récession en 2008-2009, l'activité économique industrielle, aux États-Unis, a beaucoup baissé en 2008-2009 et qu'elle peine à se relever. Donc, la capacité d'exporter a été sévèrement affectée par cet événement cyclique là, un cycle vraiment très fort. Maintenant, on commence à voir que l'économie américaine se replace, et donc la consommation totale d'électricité, en Amérique du Nord, est maintenant sur une pente ascendante, et ces surplus-là vont se résorber assez… relativement rapidement.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, merci. Votre temps est maintenant écoulé, nous allons donc retourner du côté gouvernemental. Et c'est M. le député de Chapleau qui me demande la parole. Je vous l'accorde, allez-y.

M. Carrière : Merci beaucoup, M. le Président. Je veux revenir, là, sur le sujet sur lequel j'étais, là, au bloc précédent, toute la question de la cote de crédit du Québec et quelle influence ça peut avoir sur le budget du Québec et sur les pourcentages, là, d'intérêt, etc. Je veux juste répondre un petit peu… ou faire un peu de pouce sur ce que le député de Mercier disait, là. Il disait que tout le monde s'entendait que les minicentrales, ce n'était pas voulu. Je pense que, si on va dans chacune des régions où sont prévues les minicentrales, il y a des ententes avec les communautés autochtones, c'est du développement économique pour ces communautés-là où le taux de chômage est souvent beaucoup plus élevé que partout ailleurs au Québec. Donc, je pense que cet engagement-là de reprendre la construction de ces minicentrales-là va faire en sorte que ces communautés-là… les ententes qu'il y a eu avec les autochtones, ce n'est, pour ces régions-là, que du positif.

J'aimerais savoir de la part du ministre… J'ai très bien compris, là, qu'il y a deux axes, comment, là, c'est analysé au niveau des cotes de crédit, là, que le redressement des finances publiques et la croissance économique sont deux axes… ou les deux axes sur lesquels les agences, là, de cotation évaluent le Québec, ou toutes les provinces, ou tous les gouvernements. J'aimerais savoir, là, dans le budget… comment ces agences de cotation là, là, vont évaluer, ou ont évalué, ou peuvent évaluer le budget du 4 juin, par rapport aux cotes de crédit, comment les agences de cotation vont prendre ça et quels seront les résultats, vous pensez.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, la parole est à vous.

M. Leitão : Très bien. Merci. Alors, ce que les agences font maintenant, surtout Moody's, S&P et DBRS… surtout Moody's et DBRS, c'est qu'après chaque budget provincial ainsi que fédéral ils émettent une courte opinion de ce qu'ils pensent de ce budget-là, de l'exercice, mais c'est une opinion qui ne comporte pas une appréciation de la dette, c'est juste leur opinion. Et par la suite ils vont faire un examen plus approfondi, ils vont venir parler, donc, au ministère des Finances, poser des questions pour mieux évaluer l'exercice qui a été fait.

Or, ces deux agences-là, surtout Moody's et DBRS, suite au dépôt de notre budget, ont souligné que la tâche qui est devant nous est exigeante, je pense même qu'ils ont utilisé le mot «ambitieuse». Mais ce n'est pas une nouvelle pour nous, nous savons très bien que c'était une tâche exigeante. Donc, ils vont nous juger, si vous voulez, sur notre capacité de contrôler, en effet, le rythme de croissance des dépenses. C'est pour ça que c'est absolument essentiel, c'est primordial qu'on soit capables de livrer les cibles que nous nous sommes données en termes de contrôle des dépenses. Nous allons être jugés sur ça, c'est ça qui a été dit. Donc, nous avons encore, si vous voulez, le bénéfice du doute, mais c'est sur ça qu'ultimement nous serons jugés, sur notre capacité de livrer ces cibles-là de croissance des dépenses de 1,8 % cette année, 0,7 % l'année suivante.

Cela serait extrêmement difficile d'atteindre si on n'avait pas… si on ne s'était pas donné les outils que nous nous sommes donnés, les deux commissions, le gel des effectifs, les crans d'arrêt. Si on n'avait pas fait ça, oui, ça aurait été très, très difficile d'atteindre ces objectifs-là. Mais, avec ces outils qu'on s'est donnés, je pense que ces objectifs sont réalisables, sont atteignables, mais ils ne sont pas faciles, ça va être exigeant. Et c'est pour ça que tout le monde doit contribuer. C'est pour ça que nous avons fait ce que nous avons fait. Nous avons été chercher des revenus additionnels de l'ordre de 300 et quelques millions. Nous avons procédé à des réductions de crédits d'impôt. Donc, c'est un effort généralisé pour s'assurer que cette cible-là de retour à l'équilibre budgétaire soit atteinte. Et, si tel est le cas, nous allons non seulement maintenir notre code de crédit, mais, je suis vraiment confiant, nous allons même être capables d'améliorer notre cote de crédit.

D'ailleurs, dans La Presse canadienne, si on lit un peu ce qui se passe à l'extérieur, c'est quand même encourageant de voir certains analystes canadiens bien reconnus, comme ceux du Globe and Mail, dire à leurs politiciens ontariens : Hé! Regardez un petit peu ce qui se passe au Québec, vous devriez peut-être vous inspirer de ce qui se passe là-bas. Donc, ça fait quand même chaud au coeur de voir que les tendances se renversent à ce niveau-là.

• (21 h 10) •

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Oui. Merci, M. le Président. Écoutez, à toutes les fois que quelqu'un peut dire : Regardez ce qui se fait au Québec… On a quelques preuves dans le passé. Qu'on regarde toute la question du plan d'investissements dans les infrastructures pendant la pire crise économique depuis les 70 dernières années, c'était 42 milliards que nous avions décidé d'investir pour, premièrement, remettre à niveau nos infrastructures, deuxièmement, garder les Québécois à l'emploi. Il y a l'Ontario puis il y a d'autres provinces qui ont copié sur le Québec. Donc, ce n'est pas une première fois.

Puis je vais me permettre encore une fois de parler du Plan Nord, où le Parti québécois a lamentablement échoué. Maintenant, tout le monde s'entend pour dire que c'était un «plan mort». Les investisseurs qui disaient : «Québec : Never Again». Et l'Ontario, pendant qu'au Québec on perdait des emplois, l'Ontario a fait son «Circle of Fire». Comme je disais tantôt, je me compare souvent à l'Ontario parce que j'habite à côté et j'y vais régulièrement. Et c'est un succès, là, tout le développement minier qui se fait dans le Nord de l'Ontario. Donc, c'est deux exemples, comme celui que vous donnez aussi, où souvent les idées qu'on a sont facilement exportables.

Je regarde les différentes, là, depuis… les différentes cotes de crédit des provinces canadiennes et je note, là, dans Moody's, dans Standard & Poor's et dans DBRS, les seules provinces qui ont des moins bonnes cotes de… — excusez-moi — des moins bonnes cotes de crédit que nous sont le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, les territoires…

Le Président (M. Bernier) : Pas de cellulaires.

M. Carrière : …Terre-Neuve-Labrador et l'Île-du-Prince-Édouard. Quand on regarde Standard & Poor's, là, où le Québec est à A plus, nos voisins, l'Ontario, qui est à AA moins, donc une meilleure cote que nous, comment le Québec pourrait faire pour améliorer sa cote de crédit? Et quelles conséquences ça aurait — un exemple, là — si le Québec, là, selon Standard & Poor's, là, passait de A plus à AA moins? Quels seraient les bénéfices financiers, économiques, ou peu importe, d'un tel résultat?

Le Président (M. Bernier) : Alors, M. le ministre.

M. Leitão : O.K. En effet, écoutez, je vous réponds d'abord par la négative. C'est-à-dire, nous sommes rendus à une cote telle que, si jamais, si jamais on était décotés de là où on est, donc, S&P, nous sommes à A plus et, si jamais on baissait d'un cran pour quelque raison que ce soit, on tomberait au même niveau que l'Île-du-Prince-Édouard. Donc, nous sommes déjà à un niveau qui, vraiment… c'est le plancher. Moins que ça, on serait vraiment dans de très, très, très mauvais draps.

Maintenant, pour répondre à votre question : Qu'est-ce qui arriverait si on monte d'un cran, donc si on passe de A plus à AA moins dans l'échelle de S&P?, sur les coûts d'emprunt que le Québec paie maintenant, probablement que la différence ne serait pas très grande parce que maintenant les taux d'intérêt sont très bas. Donc, le Québec continue d'avoir un accès privilégié aux marchés, même avec la cote de crédit actuelle. Et donc, si cette cote s'améliorait, oui, il y aurait… on paierait un petit peu moins, mais ce n'est pas énorme. La valeur d'une amélioration de notre cote de crédit, maintenant, dans les circonstances actuelles des marchés financiers, serait surtout au niveau du message que ça envoie à la communauté d'investissement en général. Donc, les investisseurs étrangers privés se sentiraient beaucoup plus à l'aise à venir investir ici parce qu'ils verraient que, contrairement à… Il y a très peu de juridictions où il y a une amélioration. Si ça se passait, ça serait vraiment une excellente nouvelle au niveau de notre réputation internationale, ce qui aurait un effet très important en termes d'attirer des investissements étrangers.

À terme, une fois que les taux d'intérêt reviendraient à des niveaux plus normaux — parce que, là, c'est extrêmement bas — oui, une meilleure cote se traduirait aussi par des coûts d'emprunt qui seraient plus favorables. Mais je pense que l'effet plus immédiat serait un effet sur la réputation du Québec et aussi, et aussi sur les emprunteurs privés. Parce qu'en fin de compte les grandes entreprises québécoises qui empruntent sur les marchés, leur cote de crédit, d'une certaine façon, est aussi influencée par la cote de crédit du souverain, donc par la cote de crédit du gouvernement qui est derrière eux. Si la cote de crédit du gouvernement s'améliore, nécessairement ça va avoir aussi un effet positif sur tous les emprunteurs privés qui émettent des obligations dans les marchés.

L'inverse est aussi vrai. Si la cote de crédit du souverain, donc de l'emprunteur public, diminue, ça aussi, ça a un effet en cascade sur les grands emprunteurs privés, qui verraient leurs coûts d'emprunt augmenter aussi un peu partout. Donc, c'est extrêmement important non seulement de maintenir la cote, mais d'éventuellement mettre en place des mesures qui contribueraient à une amélioration de cette cote de crédit là.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Merci beaucoup, M. le Président. Comment, au niveau de... le fait que le Fonds des générations… Tantôt, vous parliez, si j'ai bien compris, qu'il serait à 16 milliards, là, éventuellement. Comment ce Fonds des générations là... Et je sais que les cotes de crédit ou les grandes firmes de cotation de crédit, là, en tiennent compte. Mais comment... quel effet positif ou négatif, là, dans un sens... ou, s'il n'y en avait pas, ça aurait sur les cotes de crédit du Québec? Et comment, plus il y aura d'argent dedans ou plus il sera élevé, comment ça peut avoir une influence positive sur les cotes de crédit?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : En effet, c'est un outil vraiment extraordinaire. Je pense que je n'exagère pas en disant que c'est vraiment crucial. C'est ça qui fait la différence. C'est un outil qui n'existe pas dans les autres provinces. Même la richissime Alberta... bon, ils ont très peu de dettes, mais le fonds souverain qu'ils se sont donné, le fonds d'investissement, ce n'est pas grand-chose. Donc, ce que nous avons, ce que nous avons établi, au Québec, depuis déjà un certain nombre d'années est vraiment extraordinaire. Et d'ailleurs je salue mon prédécesseur, qui a su résister à beaucoup de pression et a maintenu le Fonds des générations pendant le temps qu'ils étaient au pouvoir. C'est vraiment crucial.

C'est un outil qu'on s'est donné justement pour démontrer aux investisseurs étrangers, aux agences de notation que nous sommes sérieux en ce qui concerne le contrôle de notre endettement public. Puisque ce fonds-là a maintenant... bon, a toujours eu depuis le début, mais a des sources de revenus qui lui sont propres, donc c'est un fonds qui va croître avec le temps. Plus le temps va passer, plus ce fonds-là va croître. Comme on a dit tantôt, on sera rendus à 16,5 milliards, à peu près, en 2018‑2019. On va commencer à contribuer... donc, ce fonds va recevoir les redevances et ses revenus, arrivé à 2018‑2019, de 3 et quelques milliards de dollars par année. Donc, on commence à approcher presque 1 % du PIB qui va être mis dans ce fonds-là.

Donc, c'est un outil extraordinaire pour démontrer aux agences et aux étrangers que le Québec est sérieux en ce qui concerne le contrôle de sa dette. Nous nous sommes donné un outil qui facilite cette tâche-là. C'est exigeant, c'est très exigeant, parce que, s'il n'y avait pas ça, on aurait atteint l'équilibre budgétaire beaucoup plus tôt. Mais c'est une discipline que nous nous imposons pour nous assurer que non seulement nous arriverons à l'équilibre budgétaire, mais que nous allons continuer à ralentir l'augmentation de la dette avec ces actifs financiers qui s'accumulent. Donc, c'est vraiment une mesure cruciale, dans notre politique de retour à des finances publiques, beaucoup plus simple.

M. Carrière : Merci.

Le Président (M. Bernier) : O.K.? Merci. M. le député de Chapleau.

M. Carrière : J'aurai fini ensuite avec toute la question de la cote de crédit. L'objectif de diminuer la taille de la dette par rapport au PIB, là, qui est à 54 %... 54 % point quelques maintenant, d'ici 2025 la ramener à 45 %, qu'est-ce que ce 10 % là, au niveau de la cote de... voyons! de l'endettement, viendrait donner sur les agences de cotation de crédit? Est-ce que ça ferait en sorte que les «prime rates» — excusez le terme, là — ou tout ça, seraient encore meilleures puisque le taux d'endettement est plus bas?

• (21 h 20) •

M. Leitão : Ce que les agences de crédit vont examiner... Ils ne vont pas attendre jusqu'en 2025, quand on sera rendus à 40 % du… dette-PIB, pour, à ce moment-là, améliorer la cote de crédit, ils ne vont pas attendre si longtemps que ça. S'ils voient que la tendance va dans la bonne direction et que, donc, le ratio dette-PIB commence à diminuer, comme ce que nous pensons qui va être le cas à partir de 2016, donc, quand la tendance va s'inverser, ça, en soi, va être déjà un signal très clair. Et, si, en plus, on est capables de livrer nos cibles de contrôle des dépenses, ça va être un signal très puissant pour nous mener à une éventuelle amélioration de notre cote de crédit. Donc, on n'a pas besoin d'attendre jusqu'à 2025 pour avoir une amélioration de notre cote de crédit. La cible de 40 % dette-PIB, c'est une cible que nous jugeons… et d'ailleurs mon prédécesseur aussi, que nous jugeons être une cible raisonnable. En tout cas, notre économie peut bien digérer… peut vivre avec un niveau d'endettement de l'ordre de 40 % du PIB.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Parce qu'à la page E.55 — là encore je reviens sur les cotes de crédit, là — ça dit : «La cote de crédit d'un emprunteur mesure sa capacité de payer les intérêts sur sa dette et d'en rembourser le principal à échéance. Pour établir la cote de crédit d'un emprunteur comme le gouvernement du Québec, les agences [...] analysent un ensemble de facteurs économiques, fiscaux et financiers.» Pourriez-vous me donner quelques exemples, là, de facteurs économiques et financiers, mis à part de ceux que vous m'avez donnés depuis...

M. Leitão : Ultimement...

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, allez-y.

M. Leitão : Ultimement, l'indicateur économique principal qui est regardé, qui est observé, c'est la croissance du PIB. La croissance du PIB nominal, c'est ça qui ultimement est important. Évidemment, pour arriver à la croissance du PIB, les agences et les prévisionnistes, un peu tout le monde va regarder toute une série d'autres indicateurs qui nous mènent à être capables de prévoir la croissance économique. Donc, tout ce qui est évolution des exportations, évolution de l'investissement privé et surtout aussi quelle est la compétitivité fiscale du Québec vis-à-vis ses voisins, vis-à-vis ses compétiteurs, tous ces éléments-là vont être analysés dans le but d'être capables de bien cerner quelle va être la croissance économique du PIB qui, lui, va déterminer le ratio dette-PIB.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Chapleau? Non? M. le député de Laval-des-Rapides? Lequel? Levez la main. Levez la main, je vais vous donner la parole.

M. Polo : Merci beaucoup...

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Laval-des-Rapides, allez-y.

M. Polo : Merci beaucoup, M. le Président. Il y a quelques minutes, lorsque notre collègue de l'opposition officielle a pris la parole, vous l'avez corrigé sur son choix de mots, qui était de dire que notre ministre des Finances était peut-être «trop bon». Moi, je préfère dire «très bon». Cependant...

Le Président (M. Bernier) : ...commentaire, je l'ai mentionné, c'est bon.

M. Polo : Oui, effectivement. Cependant, j'aimerais également revenir sur... Parce que notre collègue de l'opposition mentionnait que c'était peut-être une caractéristique de notre ministre des Finances. Il faut également mentionner que peut-être une caractéristique de l'ancien ministre des Finances, c'était peut-être qu'il était peut-être trop candide. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il a reconnu, dans le passé, qu'il s'était trompé, O.K.? Et, ce que je veux dire par là, il avait même annoncé et justifié qu'une partie du déficit à l'époque était... si on peut dire, on pouvait le blâmer sur le dos des consommateurs québécois qui auraient trop économisé. Ensuite, il a blâmé l'inflation, et pourtant l'inflation n'explique qu'environ 600 millions sur une augmentation du déficit de 3,1 milliards. Malheureusement, son explication de l'époque n'excuse pas cette différence importante entre l'impact de l'inflation et les mauvaises estimations et mauvais calculs, et peut-être même, l'information qui n'a pas toujours été divulguée au grand public telle que le Vérificateur général l'a divulguée dans son plus récent rapport.

Donc, ma question s'adresse au ministre des Finances sur la question de l'inflation et juste une mise en contexte. Parce que la plupart des économies avancées ont connu un contexte de faible inflation en 2013, au Québec. La croissance de l'indice des prix à la consommation a fortement ralenti. L'IPC, comme c'est appelé dans le langage économique que M. le ministre connaît très bien, n'a progressé que de 0,7 % en 2013, après une hausse de 2,1 % en 2012. Par ailleurs, la décélération des prix a été plus accentuée au Québec qu'au Canada, où la croissance de l'inflation s'est élevée à 0,9 % en 2013.

L'inflation devrait s'accélérer graduellement cette année et l'année prochaine, donc, cette année, autour de 1,3%, et de 2,1 % pour 2015, car ces facteurs exerceront une pression accrue sur les prix, notamment le renforcement attendu de la demande intérieure et des exportations, qu'on compte stimuler avec notre collègue le ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations, et devra entraîner, donc, une hausse du taux d'utilisation de la capacité de production. La dépréciation du dollar canadien devrait exercer aussi une pression à la hausse sur les prix par l'entremise des produits importés. Et donc, pour les quatre premiers mois de 2014, par rapport à la période correspondante de 2013, l'inflation a atteint seulement 0,9 % au Québec et 1,6 % au Canada.

Donc, M. le ministre des Finances, quelles sont vos perspectives concernant l'inflation et de quelle façon justement ça a dirigé vos prévisions pour le budget que vous avez présenté le 4 juin dernier? Et, de façon également plus large, comment cela va se traduire également sur les prochaines prévisions que vous faites, notamment, là, du point de vue très conservateur, très prudent également? Merci.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : En effet, l'inflation est un sujet très important. Les revenus de l'État, les revenus fiscaux évidemment sont influencés par l'évolution du PIB nominal, et le PIB nominal, lui, évidemment est influencé directement par l'évolution de l'inflation. Comme vous avez mentionné, l'inflation, au Québec, en 2013, a été plus faible qu'ailleurs. Elle a été très faible partout en Occident, mais, ici, elle était un peu plus faible qu'ailleurs et, même cette année, elle va demeurer encore légèrement plus faible que la moyenne canadienne. Ça reflète un certain nombre de choses, mais ultimement ça reflète le fait que la demande intérieure, au Québec, n'est pas aussi vigoureuse qu'elle l'est ailleurs chez nos voisins.

C'est très important, cette question de l'inflation, parce que, comme on a dit tantôt, nos revenus, les revenus des gouvernements dépendent en grande partie de l'évolution de cela. Il y a des choses que nous pouvons faire ici pour essayer d'accélérer ça. Donc, une économie plus vigoureuse va nous donner un peu plus d'inflation. Mais il y a aussi des éléments, des phénomènes qui dépassent un peu le cadre du Québec et même du Canada et qu'il faut prendre en considération. Parce que, comme vous avez mentionné, et d'autres collègues l'ont mentionné aussi, nous avons adopté des prévisions de croissance de revenus, moi, j'ai dit, hyperprudentes parce qu'il y a un élément derrière tout ça qui est un peu… un peu troublant du point de vue global, et cet élément-là, c'est ce que certains économistes classifient maintenant de peut-être une période de stagnation structurelle dans les économies avancées, les économies de l'OCDE. Surtout, le grand économiste américain, Larry Summers, qui était, d'ailleurs, à Montréal lundi et a donné une très bonne «lecture», une très bonne leçon à ce sujet-là, je ne suis pas sûr que moi, je partage entièrement son analyse, mais force est de constater qu'il y a certaines questions qu'il pose et qui sont très pertinentes à cet égard-là. Et, pour nous, c'est important, ça, ici, ce n'est pas seulement quelque chose de théorique, dans les nuages, parce que ça va influencer directement la croissance de nos revenus, et c'est pour ça que nous devons être prudents.

Ce à quoi on fait allusion, c'est que probablement le choc financier de 2008‑2009 était tellement sévère que l'économie mondiale, surtout dans les grands blocs de l'OCDE — l'Amérique du Nord, l'Europe, le Japon — a un écart de production qui est tellement grand, donc la différence entre la capacité de produire et ce qui est en effet produit est tellement grande que ça amène des pressions désinflationnistes qui sont très, très, très…

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre.

M. Leitão : O.K.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Vous aurez l'occasion d'y revenir. Nous allons donc donner la parole au deuxième groupe d'opposition. C'est le député de Lévis ou le député de Groulx?

M. Dubé : Je vais y aller pour commencer, si vous voulez bien, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Mais ça me fait plaisir, M. le député de Lévis. Allez-y.

• (21 h 30) •

M. Dubé : Tout à l'heure, pour continuer dans les indicateurs qui permettront de tirer des conclusions que nous allons à la bonne place, vous avez indiqué, M. le ministre, là, à la page C.21, qu'il y avait plusieurs éléments qui nous permettent de vérifier comment on avance en perspective économique. On a parlé du nombre d'emplois, là. Je suis toujours à la page C.21, pour les gens qui nous suivent, et on voit très bien le nombre d'emplois qui est créé, par exemple, en 2014, c'est-à-dire que l'année… ça, c'est une année civile, et d'un 45 000 emplois dans l'année 2015.

J'aimerais vous entendre un peu, M. le ministre, si c'est possible, de parler d'un autre indicateur dont vous avez parlé plusieurs fois dans votre discours budgétaire, c'est, par exemple, le PIB par habitant, qui est un petit peu… qui est presque à la fin de cette page-là, qui, en fait, est une mesure très simple, mais, je pense, qui est assez reconnue, où on prend le PIB puis on le divise par la population du Québec. Et je voudrais vous entendre un petit peu sur deux questions.

Premièrement, on sait très bien qu'avec les chiffres qui sont ici pour l'année 2013 le Québec fait piètre figure si on le compare aux autres provinces canadiennes puis à nos voisins, où, à 44 000 $ par habitant, on est au neuvième rang, si ce n'est pas très proche du 10e rang. Ici, on voit que vous avez une amélioration quand même, je dirais, importante pour 2015, qui vient… La mathématique est assez facile, c'est de prendre le PIB qui aura une croissance assez importante en 2015 et qui expliquerait cette augmentation-là…

Ma question est très simple. Dans votre plan global de quatre ans, comment voyez-vous le PIB par habitant? En termes de dollars absolus, c'est une chose, mais, moi, ce qui me préoccupe, c'est : Est-ce qu'on est capables, sur un horizon de quatre ans, de voir déjà une amélioration de cette neuvième ou dernière position que nous avons et de commencer à rétrécir l'écart de richesse que nos citoyens, un jour, pourront profiter en termes d'avoir des meilleurs revenus?

Alors, si aujourd'hui, en termes très simples, on est au neuvième, dixième rang dans plus ou moins quelques facteurs, vous nous voyez une amélioration en 2015, mais, sur quatre ans, est-ce que vous voyez qu'on pourrait gagner quelques points par rapport à nos voisins en améliorant le PIB, etc.? Je veux vous entendre là-dessus parce que, pour moi, à moins que vous me disiez le contraire, c'est un élément important de mesure au cours non seulement des prochains mois, mais sûrement des prochaines années, là.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Lévis. M. le ministre.

M. Leitão : Oui, bien sûr, le PIB per capita, ce n'est pas une mesure idéale, mais c'est la meilleure qu'on dispose pour pouvoir vraiment comparer différentes juridictions dans l'évolution de l'économie et voir une évolution du niveau de vie. Donc, encore là, ce n'est pas idéal, mais les alternatives ne sont pas meilleures, donc c'est très utile.

PIB per capita, donc, ça dépend du PIB et ça dépend de la population. Or, en ce qui concerne la croissance du PIB global, nous, évidemment, notre objectif, c'est que cette croissance-là commence à atteindre au moins la moyenne canadienne. Donc, on se situe aux alentours de 2 % et quelques par année en termes de croissance réelle. En termes de croissance nominale avec un peu d'inflation, on se trouve dans les zones de 4,5 %, même un peu plus optimiste, 5 % de croissance du PIB nominal. On rentrerait, alors là, sur un horizon de quatre ans, dans la moyenne canadienne.

Pour ce qui est de l'autre, du dénominateur de la croissance de la population, écoutez, la croissance de la population au Québec est très faible. Donc, le PIB per capita va nécessairement s'améliorer parce que le dénominateur va être de moins en moins fort. Et donc, oui, on va gagner quelques places dans ce classement-là, mais cette amélioration va venir des deux côtés, va venir du fait qu'on va produire plus de PIB avec moins de personnes, relativement. Ça veut nécessairement dire, quand on fait ça, quand on produit plus de PIB avec moins de personnes, que, par définition, la productivité s'améliore. Donc, la clé de l'amélioration de notre «ranking» canadien passe nécessairement par une amélioration de la productivité. Si on n'est pas capables de produire plus par personne, là on ne sera pas capables d'améliorer notre position.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Lévis.

M. Dubé : Si vous me permettez, M. le Président, c'est là que je veux en venir un peu. Moi, si j'avais à vous demander à l'avance — je suis certain que vous l'avez, que vous pouvez nous dire ça — ce serait quoi, votre beau bulletin, dans quatre ans, du PIB par habitant en termes de… ce n'est pas tellement de dollars absolus, si vous l'avez, mais est-ce que vous avez une idée qu'on aurait pu gagner un point, deux points dans le classement, qu'on pourrait avoir par rapport au reste du Canada si on est à peu près au dernier rang aujourd'hui? Parce qu'on ne le voit pas sur cette page-là, on ne voit pas ce que vous visez dans votre plan de quatre ans. On le voit très bien pour 2015, mais on ne le voit pas sur quatre ans. Je reviens toujours à mon plan de quatre ans, là, que vous avez bien décrit. Vous voyez avoir gagné combien de points dans ce…

M. Leitão : Ça, c'est…

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Je m'excuse, M. le Président. Ça, écoutez, ce n'est pas facile de voir ça parce que ça va dépendre aussi de ce qui se passe ailleurs. Nous, ce que nous contrôlons, c'est ce que nous faisons.

M. Dubé : …votre objectif, c'est… Je veux juste… Si vous me permettez, M. le Président, là. Ce que je demande : Est-ce que vous avez un objectif d'améliorer notre position par rapport au PIB par habitant? En ce moment, on est le dernier ou à peu près le dernier. Voyez-vous nous améliorer au niveau de ce «ranking» là dans les quatre prochaines années, c'est-à-dire d'arrêter d'être le dernier lorsqu'on compare aux autres provinces?

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Écoutez, ce que nous souhaitons, c'est de revenir à la moyenne canadienne, donc d'être capables d'accélérer la croissance du PIB per capita avec la moyenne canadienne. Où est-ce que ça va nous situer? En cinquième position, quatrième, sixième? Ça, ce n'est pas possible de le chiffrer parce que je ne sais pas qu'est-ce que l'Ontario va faire, je ne sais pas qu'est-ce que l'Île-du-Prince-Édouard va faire. Donc, je préfère me concentrer sur ce que nous allons faire ici, et ce que nous allons faire ici, c'est avoir une croissance du PIB per capita qui soit au moins la même que la moyenne canadienne.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Lévis.

M. Dubé : Si je vous comprends bien…

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Lévis, c'est la même règle, il faut que je sois capable de permettre aux gens de prendre…

M. Dubé : Vous avez raison, c'est parce que la conversation est tellement intéressante que, des fois, j'oublie…

Le Président (M. Bernier) : Oui, ça, je vous comprends…

M. Dubé : …et vous faites bien de me le rappeler, M. le Président. C'est très bien.

Le Président (M. Bernier) : C'est bien. Allez-y.

M. Dubé : Mais je veux juste bien comprendre le point qui est là, là, pour qu'on s'entende bien parce qu'on va avoir plusieurs années à travailler ensemble. Moi, ce que je veux bien comprendre, je veux dire : Votre objectif, je dirais, dans quatre ans, est-ce qu'on serait revenu à la moyenne canadienne du PIB par habitant?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : À la moyenne de la croissance du PIB par habitant. En chiffres absolus, comme vous avez mentionné tantôt, le PIB par habitant, au Québec, est pas mal inférieur à la moyenne canadienne.

M. Dubé : On est au neuvième, si ce n'est pas le 10e rang, alors…

M. Leitão : C'est ça, c'est ça…

M. Dubé : Puis je ne fais pas une grosse différence entre neuf et 10, on est pas mal à la queue. Je veux juste bien comprendre votre point. C'est que, qu'on soit cinquième ou sixième, je n'en fais pas une grande différence non plus, mais ça serait, d'ailleurs, une amélioration très importante, M. le Président. Alors, ma question, c'est : L'objectif général, est-ce qu'il serait d'être à la moyenne canadienne à l'année 2018, lorsque… vous pourriez dire, à mi-chemin, vous avez fait un premier mandat, vous avez réussi à obtenir la moyenne canadienne du PIB par habitant? Que ça soit le quatrième, le sixième ou le cinquième, je ne vous en tiendrai pas rigueur. Mais est-ce qu'on aurait eu une amélioration importante par rapport à notre dernier rang aujourd'hui? Clairement, c'est ça, ma question.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Donc, allez-y, M. le ministre, là, je vous laisse la parole.

M. Leitão : Merci. Oui, je souhaite vraiment qu'on soit capables d'avoir une bonne amélioration, mais, encore une fois, c'est en termes de croissance, donc la croissance du PIB per capita, au Québec, qui a été, dans les années précédentes, inférieures à la moyenne canadienne. Déjà, en deux ans, déjà rendu en 2015, nous voulons que cette croissance soit la même. Donc, on devrait commencer à être capables de fermer l'écart. Par définition, la moyenne canadienne, il y a un nombre de provinces qui sont sous la moyenne. Alors, nous allons avoir une croissance du PIB per capita qui va être plus rapide que la moitié des provinces.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Lévis.

• (21 h 40) •

M. Dubé : Alors, pour continuer dans la même ligne… Parce que je veux faire vraiment la différence entre les souhaits et les cibles. Vous avez dit, tout à l'heure, que 250 000, ce n'était pas un engagement, ce n'était pas une promesse, c'était… Je veux juste faire attention qu'on se comprend bien lorsque vous parlez de cible.

Je reviens toujours sur la question des revenus, parce qu'on pourra, plus tard, aller dans la question des dépenses. Si tout le monde doit faire un effort… Je retourne à la page A.24, dans les revenus. Si vous me permettez, M. le Président, ce que je veux demander au ministre, c'est… On vient de dire qu'on veut avoir des meilleurs revenus, on veut avoir un meilleur PIB. Et, si je prends l'ensemble des revenus autonomes — je suis toujours à la page A.24 — où on est à 74 milliards en 2013‑2014, donc, ça, c'est le meilleur estimé des comptes publics qui vont sortir bientôt cette année, il est intéressant de voir que… Je vais toujours sur votre bloc de quatre ans. Regardez, en 2017‑2018, une progression de 14 milliards de revenus, on passe de 74 milliards dans les revenus autonomes — ça va? — pour aller à 86 milliards. Il est quand même intéressant qu'un des seuls groupes qui n'augmente pas ses revenus, c'est les entreprises du gouvernement. Parce que, si on regarde la croissance des impôts qui sont chargés aux individus, au niveau des cotisations de la santé, les impôts des sociétés, taxes à la consommation, etc., à peu près tout augmente sauf l'impôt… sauf les entreprises du gouvernement. Et j'aimerais beaucoup que vous nous expliquiez, parce que, quand on dit : Tout le monde doit faire un effort…

Puis est-ce que c'est un problème de revenus au niveau des entreprises de l'État? Est-ce que c'est un problème de dépenses? Parce que, là, il faut regarder… C'est, en fait, le net qu'on vise. Alors, je voudrais vous entendre là-dessus. Parce que, quand les citoyens disent : Il faut faire un effort pour tout le monde, bien je vois les sociétés d'État… Est-ce que c'est parce que les revenus sont en baisse puis on ne baisse pas assez les dépenses? Alors, je veux vous entendre un petit peu là-dessus, parce que, ça, c'est quelque chose qu'il va falloir creuser un petit peu plus, mais je vois que c'est peut-être… besoin de creuser un petit peu là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Merci. Oui, alors, la réponse est oui. Qu'est-ce que ça…

M. Dubé : Oui à revenus ou oui à dépenses?

M. Leitão : La réponse est oui. Écoutez, d'abord, l'effort qu'on demande aux sociétés d'État, cette année… pardon, 2014‑2015, c'est un effort substantiel. Cette diminution qu'on voit surtout en 2015‑2016 provient de deux facteurs. D'abord, Hydro-Québec, qui est la plus importante des sociétés d'État, sa contribution est de loin supérieure aux autres, Hydro-Québec, étant donné les contrats qui ont été signés avec les alumineries, étant donné, donc, l'utilisation des surplus d'électricité, Hydro-Québec va, sur quelques années, donc, rapporter un peu moins que ce qu'elle rapporte en 2013 et en 2014. Donc, une partie de la diminution provient d'Hydro-Québec.

La deuxième raison derrière cette diminution-là se trouve à moindre mesure… mais les autres sociétés d'État. Mais force est de constater, comme on l'a vu d'ailleurs récemment, que, dans le cas de Loto-Québec, ce n'est pas nécessairement une industrie en forte croissance. Les jeux de hasard, c'est une industrie, disons, mature, et la croissance des revenus de ce secteur-là aussi a atteint, à mon avis, a atteint son apogée, et ça va être assez difficile de l'accélérer davantage. Pour que l'État génère plus de revenus de cette ligne d'affaires là, disons-le comme ça, il va falloir que les dépenses, donc la rentabilité de Loto-Québec s'améliore, ce qui, d'ailleurs, va être le cas. On a déjà vu qu'ils ont un plan d'affaires qui réduit les dépenses pour qu'ils puissent maintenir…

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. le député de Lévis.

M. Dubé : Peut-être pour vous aider à répondre ou, peut-être mieux, pour être plus clair dans ma question, prenez-les une par une, parce que vous avez bien dit… En fait, quand vous prenez les trois grandes composantes, l'Hydro-Québec, Loto-Québec, la SAQ… Moi, ce qui me préoccupe, c'est quand vous me dites : L'Hydro… O.K., il y a des baisses de revenus parce que peut-être les revenus d'électricité sont… mais il y a une question de coûts.

J'aimerais, si c'est possible, M. le Président, que vous preniez une par une. Hydro-Québec, par exemple, est-ce que c'est elle qui explique principalement la baisse des revenus qu'on voit là? Parce que, si on n'est pas capables de travailler sur l'aspect des revenus, est-ce que ça veut dire qu'Hydro-Québec on laisse aller les dépenses, puis il n'y a pas un contrôle des dépenses? J'aimerais mieux qu'on les prenne société par société, si vous me permettez, parce que, pour moi, c'est un élément… Je le redis, là, c'est le seul groupe qui n'a pas de croissance de ses revenus sur les quatre prochaines années. Alors…

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui. N'oublions pas que le point de départ est très élevé. La contribution d'Hydro-Québec, cette année et surtout l'année passée, était très forte. Donc, ce n'est pas raisonnable de pouvoir penser qu'Hydro-Québec pouvait continuer à ce rythme-là, surtout étant donné les changements structurels qu'il y a dans cette industrie-là. Il y a une fenêtre d'opportunité, cette année, d'augmenter les exportations d'électricité aux États-Unis, mais cette fenêtre-là va se fermer relativement vite dans les années subséquentes, pendant que la production d'électricité aux États-Unis, elle, augmente aussi beaucoup. Avec la production de gaz de schiste, il y a beaucoup de conversion qui se fait, et donc leurs coûts de production d'électricité baissent.

Mais, encore une fois, l'effort qu'on demande à Hydro-Québec cette année, 2014‑2015, c'est un effort considérable, c'est de l'ordre de 150 millions. Pour vous comparer... pour vous situer avec les autres sociétés d'État, cette année, on demande 150 millions de plus à Hydro-Québec; Loto-Québec, c'est 10 millions de plus; et, à la SAQ, c'est 10 millions de plus. Donc, vous voyez l'ordre de grandeur où nous nous situons. C'est vraiment Hydro-Québec qui contribue beaucoup à cette augmentation, à cet effort substantiel.

Nous avons aussi, en demandant cet effort substantiel, nous avons aussi demandé à Hydro-Québec, d'abord, de s'assurer que ça ne se transforme pas en augmentation de tarifs aux consommateurs et aussi qu'ils réduisent leur masse salariale pour qu'ils soient capables de maintenir leurs dividendes, maintenir leur rentabilité à un niveau acceptable.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Dubé : En fait, ce que j'aimerais savoir, c'est : Étant donné cette baisse de revenus là au niveau des quatre prochaines années, est-ce que les efforts du côté des dépenses vont être plus importants pour essayer de compenser cette baisse-là? Et je pense entre autres à la question du gel des effectifs, à... Est-ce que, étant donné qu'on n'a pas encore… comme gouvernement, que nous n'avons pas encore toute l'information sur le nombre d'employés dans tout le réseau de l'État, etc., allez-vous être en mesure de demander un effort raisonnable, important sur le contrôle des dépenses? Si les revenus ne sont pas au rendez-vous, comme vous dites, avec Hydro-Québec, est-ce qu'il va y avoir un effort important sur le contrôle des dépenses, dont le nombre d'employés dans ces différentes sociétés d'État là?

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Nous avons demandé à Hydro-Québec et aux autres sociétés d'État, et ils se sont évidemment engagés à le faire, un gel de la masse salariale pour deux ans. Donc, pour les deux prochaines années, 2014‑2015, 2015‑2016, il va y avoir un gel de la masse salariale des sociétés d'État : Hydro-Québec, Loto-Québec, SAQ et Investissement Québec.

M. Dubé : Je veux juste bien comprendre votre point, si vous permettez, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Allez-y, allez-y.

M. Dubé : On parlait d'un gel des effectifs, et vous dites : Quand... pour la fonction publique, puis, dans le cas des sociétés d'État, pour être très clair, pour ces trois sociétés d'État là, il y aurait un gel de la masse salariale pour…

M. Leitão : Deux ans.

M. Dubé : Pour deux ans. Et ça, vous trouvez que c'est suffisant, du côté du contrôle des dépenses, pour compenser la baisse des revenus que nous avons dans ces trois sociétés d'État là?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : C'est un moyen très fort. D'ailleurs, en chiffres absolus, donc cette année, 2014‑2015, au total, effort additionnel ou pas, le total qu'Hydro-Québec va contribuer aux coffres de l'État, c'est de 3 050 000 000 $. C'est ce à quoi nous nous attendons d'Hydro-Québec. L'année prochaine, 2015‑2016, c'est 2 745 000 000 $; et, en 2016‑2017, 2 830 000 000 $; et, en 2018‑2019, 3,1 milliards. Donc, on voit qu'à court terme oui, il y a une légère baisse. C'est conjoncturel. Par la suite, plus tard, 2017‑2018, 2018‑2019, les contributions d'Hydro-Québec recommencent à nouveau à augmenter.

Juste à titre d'exemple, par exemple, en 2012‑2013, la contribution réelle, en chiffres absolus, d'Hydro-Québec aux coffres de l'État, c'était 2 760 000 000 $; cette année, c'est 3 050 000 000 $; l'année prochaine, 2 740 000 000 $. Donc, c'est quand même un effort soutenu de la part de cette grande société d'État aux coffres de l'État.

M. Dubé : Et ma dernière question, si vous me permettez…

Le Président (M. Bernier) : Oui, allez-y.

• (21 h 50) •

M. Dubé : …pour finir sur ce point-là, puis on reviendra dans... On ira dans les dépenses demain, pour notre part. Est-ce que vous trouvez qu'il est raisonnable, lorsqu'un contribuable regarde le portrait des revenus pour les quatre prochaines années, que c'est les sociétés d'État seulement qui ont une baisse de contribution, alors qu'à tous les autres groupes, que ça soit les sociétés, les contribuables, on ait des augmentations de revenus, alors que les sociétés d'État, elles, peu importe pour les raisons, au niveau des revenus comme dans le contrôle des dépenses, on voit une détérioration de leur contribution? Comment pouvons-nous expliquer ça aux contribuables, M. le ministre?

Le Président (M. Bernier) : Une courte réponse, M. le ministre, parce que le bloc est déjà terminé. Une courte réponse.

M. Leitão : C'est essentiellement conjoncturel. L'effort d'Hydro-Québec était très élevé en 2013‑2014, c'est vraiment une contribution record aux coffres de l'État. C'est un niveau qui n'est pas soutenable pour une entreprise commerciale. Hydro s'en sert quand même, des activités commerciales. Ce niveau-là n'est pas soutenable dans le contexte actuel. Donc, il y aura une légère baisse, mais, plus tard, 2017‑2018, 2018‑2019, ça va recommencer à augmenter.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous allons donc passer du côté gouvernemental. Donc, la parole est au député de Sainte-Rose. Allez-y, M. le député.

M. Habel : Merci, M. le Président. J'ai une courte question, étant donné la précédente séance, où nous avons vu le député de Rousseau brandir le cadre financier actuel du gouvernement. Suite à la réception du rapport du Vérificateur général, nous avons vu la réalité réelle du Québec des derniers mois, du moins la nouvelle réalité. Moi, ce que je voudrais savoir, c'est : Suite à la réception de ce rapport, M. le ministre, qui n'était pas disponible, je tiens à le rappeler aux téléspectateurs, avant l'élection du 7 avril, en quoi ce rapport du Vérificateur général a influencé vos perspectives des finances publiques?

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Merci. Ce rapport a une grande influence parce qu'il a, en fin de compte, confirmé ce que le groupe d'experts Godbout-Montmarquette avait soulevé tout de suite après l'élection, donc le 7 avril. Les experts, qui avaient regardé les finances publiques du Québec, s'étaient rendu compte qu'il y avait vraiment une problématique importante au niveau de l'évolution des dépenses.

Ça a été plus ou moins bien reçu. Moi, j'avais très bien reçu ce rapport-là et j'avais compris l'enjeu, mais je pense, pour ce qui est de la population en générale, il y avait peut-être certains doutes quant à l'importance de ce qui avait été découvert par les experts. Mais le Vérificateur général a confirmé qu'en effet, si rien ne se passait, les dépenses publiques auraient accéléré de façon importante, et on se trouverait, à ce moment-là, avec un déficit qui pourrait atteindre presque 6 milliards de dollars.

Évidemment, notre collègue a mentionné que c'était un déficit potentiel, et, oui, une telle chose, on n'allait pas laisser ça se matérialiser. Et c'est ce que nous avons fait avec le budget du 4 juin, nous avons mis en place une série de mesures pour contenir le rythme de croissance des dépenses.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : En quoi pensez-vous que nos cinq axes pour relancer le Québec vont bénéficier à tous les citoyens?

M. Leitão : O.K.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Je m'excuse encore une fois, M. le Président. Alors, ces cinq axes de développement, je pense qu'il faut les voir sur une base du moyen et du long terme. Donc, il y a des mesures, là, qui sont très court terme, comme le programme LogiRénov pour l'amélioration des dépenses de rénovation domiciliaire. Ça, c'est à très court terme. Il y a les questions des PME, la réduction de l'impôt sur le revenu des PME et toute l'autre série de mesures qu'il y a pour les PME, qui sont aussi plus ou moins à court terme et qui vont contribuer, à notre avis, à une relance rapide.

Après ça, il y a les mesures un peu plus structurantes, à moyen et à long terme, de la stratégie maritime, la relance du Plan Nord, les ressources naturelles au sens plus large, incluant les hydrocarbures, et pas seulement dans le Nord-du-Québec, mais sur tout le territoire québécois. Ces politiques-là, cette direction dans laquelle nous voulons aller, il me semble qu'elle va porter des fruits, des fruits très importants, très intéressants.

Nous avions vu, avant 2012, à quel point les investisseurs étrangers étaient prêts, disposés à investir au Québec, surtout dans le Plan Nord, dans les ressources naturelles du Québec. Ces investissements-là se sont refroidis considérablement. Et maintenant, avec cette relance du Plan Nord, là, on va être capables, là, à nouveau, j'ai bien confiance, de repartir cette machine-là. Encore une fois, ces choses-là prennent du temps, les résultats ne sont pas immédiats, mais c'est un pas important dans la bonne direction.

On a quand même très peu parlé de la stratégie maritime. Il me semble que c'est quelque chose qui est très important aussi. La stratégie maritime comprend toute une série de mesures qui vont favoriser le transport de marchandises et qui vont bien nous positionner ici, au Québec, pour une augmentation, encore là, à terme des échanges internationaux entre le Canada et l'Europe et même aussi pour l'Amérique du Nord, avec l'élargissement du canal de Panamá. Ça va aussi amener une augmentation du trafic de marchandises, globalement.

Et le Québec, historiquement, est très bien situé géographiquement pour être une porte d'entrée importante pour le centre de l'Amérique du Nord, et vers l'Europe et les autres marchés internationaux, donc. Ça a été, d'ailleurs, la clé, si on veut, du développement surtout de Montréal. La grande région de Montréal, historiquement, était devenue la capitale économique du Canada — il y a déjà quelques années de ça, n'est-ce pas? — en grande partie basé sur le transport, sur son industrie du transport. C'est le pôle de transport par excellence en Amérique du Nord. Donc, ce n'est pas nouveau de vouloir à nouveau utiliser cet avantage comparatif, cette situation géographique comme levier de croissance économique. C'est ce que nous allons faire d'une façon très pratique, très pragmatique.

Comme première étape, nous allons établir dans la Montérégie un axe transmodal de transport. Donc là, là, il y a l'autoroute 30, il y a la voie maritime, toutes les voies ferroviaires. Tout ça se croise à cet endroit-là. Donc, je pense que c'est très important de développer ça. Et, en tous les cas, on voit déjà que nos voisins de l'autre côté, du côté de l'Ontario, nos voisins, à Cornwall, pensent aussi déjà d'aller dans cette direction-là. Donc, c'est important que nous, on le fasse pour qu'on reprenne l'avantage qu'on avait et qui était en train de se dissiper graduellement.

Nous sommes tous au courant, par exemple, que l'entreprise Target avait préféré… avait choisi d'établir son grand centre de distribution du côté de l'Ontario parce que c'était pas mal plus difficile, plus complexe, plus bureaucratique de faire ça du côté de la frontière québécoise. Donc, nous ne voulons pas laisser échapper d'autres grands projets comme celui-là. Et ça passe par le développement d'un pôle logistique dans la région de la Montérégie.

Aussi, dans cette stratégie maritime là, le tourisme, c'est une industrie importante. Le tourisme va bénéficier d'une approche nouvelle à cet égard-là. Par exemple, ici même, dans la région de Québec, dans le budget, nous avons mis une somme considérable pour le renouvellement du site Dalhousie pas seulement pour faire un parc, ce n'est pas seulement ça, mais c'est aussi le lieu où les grandes croisières internationales arrivent, et donc c'est un atout très important pour le Québec et pour la ville de Québec pour être capables d'attirer d'autres grandes croisières et qui ne vont pas seulement rester quelques heures à Québec et puis repartir à nouveau, mais qui vont rester ici un peu plus de temps et puis, d'ici, peuvent faire d'autres excursions dans la région ou même aller jusqu'à Montréal. Donc, c'est important que ce site-là soit efficace, soit moderne et soit attrayant pour que ces grandes entreprises touristiques internationales choisissent davantage Québec comme port d'attache, si vous voulez, en Amérique du Nord.

• (22 heures) •

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre. M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : On a parlé de la relance économique. Il y a aussi l'aspect du redressement des finances publiques qui a été apporté, dont deux commissions, la commission de la révision des programmes et aussi la commission de la fiscalité. Au sujet de la commission de la fiscalité, étant donné que je suis un comptable, je connais bien les lois fiscales, puis on voit souvent des aberrations qui se produisent, où une personne pourrait refuser une augmentation de salaire parce qu'elle s'avère moins bénéfique de l'accepter à cause des crédits d'impôt, à cause de tous les aléas de… qui peuvent survenir. Donc, c'est moins payant. Ce que je voudrais savoir, M. le ministre des Finances, c'est : Est-ce que ce type de sujet là pourrait être évalué dans cette commission, cette commission des fiscalités?

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Oui, oui, absolument. La commission de révision de la fiscalité va avoir comme mandat non seulement de revoir la fiscalité des entreprises, et ça, c'est important — on a beaucoup parlé avant de toute la problématique autour des crédits d'impôt, et c'est certainement un sujet qui va être abordé par cette commission-là — mais aussi de ce qui est la fiscalité des particuliers, des individus, des familles, des ménages. La commission va regarder toute cette question-là.

Nous voulons rendre le système fiscal d'abord plus simple. Ce n'est pas normal que des citoyens aient besoin d'engager des fiscalistes pour produire un rapport d'impôt tout à fait normal, tout à fait routinier. Donc, il faut que le système soit plus simple pour qu'il soit plus juste, plus équitable et pour qu'on élimine des aberrations comme celle que vous venez de mentionner, où, à un moment donné, c'est fort probable que des personnes choisissent de travailler moins parce qu'au net le chèque de paie ne va pas compenser l'effort additionnel qui va être mis. Donc, on veut surtout encourager le travail, encourager l'investissement, réduire la complexité et la bureaucratie du système, donc simplement une réforme structurelle de la fiscalité québécoise qu'on va aborder tant du côté des particuliers que du côté des entreprises. Et l'objectif ultime de tout cela, c'est d'avoir une économie qui est plus performante, une économie qui est plus efficace et qui est plus productive.

Comme on avait mentionné tantôt avec le député de Lévis quand on parlait de croissance économique, on parlait de productivité ultimement. Et donc, nous, notre avenir économique, en fin de compte, au Québec, va dépendre de notre capacité d'améliorer la productivité. Et l'amélioration de la productivité, en grande partie, va être le résultat d'une réforme fiscale structurelle importante. Donc, c'est vraiment un pas dans cette direction-là, c'est très important. Nous allons aussi… cette commission va aussi regarder ce qu'on appelle en bon latin le «tax mix», c'est-à-dire les différentes mesures qu'il y a entre impôt sur le revenu, impôt sur la taxe sur la consommation, quel est le mixte idéal, quelle est la meilleure façon de maximiser les revenus de l'État d'une façon équitable et d'une façon durable à long terme tout en stimulant l'activité, le travail, l'investissement. Donc, c'est quelque chose de très important.

Et aussi cette commission-là ne va pas s'embrouiller dans une «commissionarite» qui va durer une éternité. C'est un mandat qui est quand même relativement court, donc c'est-à-dire qu'en décembre 2014 il va déjà y avoir un rapport final qui va être livré au gouvernement. Et puis, suite à ce rapport-là, ça va être à nous, gouvernement, de prendre des décisions.

Donc, non, on n'abdique pas de notre responsabilité, on demande des avis éclairés de la part de cette commission d'experts, bien sûr, mais ultimement la décision nous appartient. Ça sera le gouvernement qui va décider quels types de changements, quels types de mesures on mettra en place pour que l'État soit… En fin de compte, l'objectif de tout cet exercice-là, c'est tout simplement de s'assurer que nous sommes capables de livrer les services publics auxquels nous tenons tellement, éducation, santé, aide aux personnes plus vulnérables, que cela se fasse de façon durable, de façon soutenable. Parce que d'avoir des services publics à crédit, donc en ayant toujours des déficits après déficits, ça, c'est une illusion. On ne va jamais être capables de maintenir un rythme de services publics qui soit durable si, à chaque année, on doit avoir des déficits, on va emprunter continuellement. Donc, il faut qu'on soit capables de faire ça à l'intérieur de nos moyens. Et, à cet égard-là, une réforme structurelle de la fiscalité est un outil très important.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : M. le Président, j'aimerais demander au ministre comment répondre aux gens de mon comté. Moi, je représente Bourassa-Sauvé, et, Bourassa-Sauvé, nous avons au moins 18 % de la population qui est vieillissante, qui a plus que 65 ans, plus que la moyenne de Montréal. Nous avons beaucoup plus de familles monoparentales que la moyenne de Montréal. Nous avons beaucoup plus de personnes qui vivent au seuil de la pauvreté ou avec des moyens moins importants. Et, quand ils nous entendent parler du budget, ces gens ont peur et veulent savoir comment ce budget renforce le tissu social et qu'est-ce qu'il y a pour eux. On aimerait qu'on parle à eux. Alors, je demande au ministre d'adresser ces citoyens-là, qui ne se retrouvent pas seulement dans mon comté, mais ailleurs au Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Leitão : Alors, M. le Président, collègues, comme je viens juste de dire, les services sociaux, les services publics à crédit, ce n'est pas une façon de faire les choses. Donc, c'est une illusion de penser que nous pouvons continuer à livrer des services publics toujours en utilisant la carte de crédit, ça ne marche pas. Donc, l'objectif que nous nous donnons, dans toute cette réforme structurelle, toutes ces choses-là, qui sont peut-être un petit peu trop théoriques pour beaucoup de personnes qui sont très préoccupées par le quotidien, comment payer l'épicerie demain, la semaine prochaine…

Ce que j'allais dire, c'est que la façon dont nous voyons les choses, c'est que nous voulons renforcer les fonctions primaires de l'État, ce que nous jugeons être le rôle principal de l'État, qui sont la santé, l'éducation et l'aide aux personnes vulnérables. Selon nous, dans les temps modernes, c'est ça que l'État doit faire, c'est ça que l'État doit être capable de livrer. Et, pour que l'État soit capable de faire ça d'une façon durable, d'une façon cohérente pour pas seulement une année ou deux, mais pour toujours, il faut qu'on soit capables de changer la façon dont nous faisons les choses. Et donc il faut cibler, il faut cibler l'aide de l'État aux clientèles qui sont plus vulnérables. Et ça, ça va prendre aussi, à mon avis, un changement important dans la façon dont nous abordons les services sociaux au Québec.

Nous avons toujours eu tendance à penser que la meilleure façon de livrer des programmes sociaux, c'est d'avoir des programmes universels, où c'est égal pour tout le monde. Donc, tout le monde a accès, par exemple, aux CPE, aux garderies à coût réduit, tout est égal pour tout le monde. Peut-être qu'on devrait commencer à regarder ces choses-là dans une façon beaucoup plus ciblée, que l'aide de l'État soit vraiment, vraiment ciblée aux personnes qui en ont vraiment besoin. Vous avez mentionné les citoyens de votre comté. Oui, il y en a dans la grande région de Montréal, il y a des clientèles très vulnérables, très fragiles. Et il me semble qu'avant d'avoir des programmes universels pour tout le monde, ce serait beaucoup plus utile et beaucoup plus équitable que ces programmes-là soient ciblés à cette clientèle-là.

Dans notre budget, je vous avoue, nous n'avons pas été capables de faire ça tout de suite, mais c'est dans cette direction que je pense qu'on devrait aller. Nous avons quand même fait certains changements en termes de programmes de services de garde. Nous n'avons pas mis en pratique la suggestion du gouvernement précédent d'augmenter les tarifs de 7 $ à 9 $, on ne l'a pas fait. Ils vont passer 7 $ à 7,30 $, donc ça va déjà éviter un choc tarifaire pour un bon nombre… Oh! C'est tout?

• (22 h 10) •

Le Président (M. Bernier) : C'est tout.

M. Leitão : O.K.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui, merci, M. le Président. Vous avez parlé, tout d'abord, des crédits d'impôt qui ont été coupés de 20 %. Est-ce que vous pouvez nous dire l'impact, avez-vous un tableau qui mesure l'impact, pour chacun des crédits d'impôt, de chacune des coupes sur l'emploi, sur les investissements?

M. Leitão : Il y a un tableau dans le budget — je ne me rappelle pas maintenant exactement, là, à quelle page — où on voit l'impact par crédit d'impôt, donc qu'est-ce que ça veut dire pour le multimédia, ce que ça veut dire pour le… Donc, les 30 et quelques crédits d'impôt — voilà, à la page A.89, c'est ça — donc, on voit les montants, ce que ça veut dire.

Maintenant, est-ce que ça va avoir un effet, un impact sur l'emploi, combien d'emplois vont être perdus ou pas à cause de ces changements-là, c'est quelque chose qui… Puisque le changement était… C'est une première étape, on va procéder, dans les mois qui vont venir, à d'autres changements. On verra à ce moment-là, une fois qu'on aura un portrait global de toute la situation, quel va être l'impact total. Mais nous pensons que l'aide fiscale aux entreprises, de 2,2 milliards en 2014‑2015 et qui va passer à 2 milliards en 2015‑2016 et 1,9 en 2016‑2017, je pense que ce n'est pas ça qui va avoir un effet très significatif sur le nombre d'emplois.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui, O.K. Mais c'est combien, l'effet? Combien, l'effet sur l'emploi et l'investissement?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Je ne pense pas qu'à court terme on puisse chiffrer cet impact-là, parce que les crédits d'impôt, c'est une chose, mais, comme on l'a aussi répété plusieurs fois, il y a d'autres moyens dont l'État peut aider les entreprises si cela est nécessaire.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Donc, vous supposez que l'impact… Enfin, si j'ai bien compris, vous n'avez pas l'impact par secteur des coupes de 20 % dans les crédits d'impôt. Donc, c'est ce que vous avez dit de toute façon, là. Donc, vous n'avez pas été guidés par cette idée, par exemple, d'avoir un impact à peu près équivalent dans chacun des secteurs. Vous avez simplement dit : 20 %, puis on ne sait pas trop qu'est-ce que ça va donner.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : C'est une façon de voir les choses. Ce n'est pas la façon dont nous la voyons. Le but de l'exercice, c'est de s'assurer que tout le monde collabore, tout le monde participe à l'effort de redressement des finances publiques. Les dépenses fiscales, à notre avis, sont une dépense. Et donc, si on regarde toutes les dépenses de l'État, on ne pouvait pas faire autrement que de regarder aussi ces dépenses-là. Comme on a déjà dit plusieurs fois, on n'a rien éliminé au complet. On a réduit de 20 %, il y a encore 80 % qui reste en termes d'aide aux entreprises, et c'est quelque chose que… C'était une première étape. Il va y avoir, dans les mois qui vont venir, une analyse beaucoup plus approfondie de toute cette filière-là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Marceau : Donc, pour l'instant, on a fait ça un peu à l'aveugle, et, dans le futur, on aura plus d'information, puis on sera mieux en mesure d'établir les impacts. Parce que, regardez, ou bien ça sert à quelque chose ou bien ça ne sert à rien, les crédits d'impôt. Ils ont rendu de fiers services dans le passé. Vous, j'imagine, êtes conscient que la fiscalité, plus elle est lourde, plus elle décourage l'emploi, plus elle décourage l'investissement. Et la réciproque de cet argument, c'est que moins la fiscalité est lourde, meilleures sont les chances que, dans les faits, des emplois soient créés, meilleures seront les chances que les investissements se réalisent.

Alors, si vous croyez qu'il y a plus… que la fiscalité joue un rôle — j'ose croire que vous y croyez en tant que ministre des Finances — alors vous allez convenir avec moi que de réduire l'aide et donc augmenter le fardeau des entreprises, ça a un impact. Et vous me dites : On croit qu'il y a un impact, on croit que la fiscalité, ça opère, ça joue un rôle, mais on a coupé de 20 % sans avoir une mesure très claire. Ou bien, si vous en avez une, écoutez, déposez-nous un beau tableau qui nous dise, par secteur, les emplois, les investissements qui vont être mis en péril puis qui vont être réduits par cette coupe de 20 %. Ou bien vous me dites : Ça ne joue aucun rôle, puis, dans ce cas-là, bien, regardez, je ne sais pas qu'est-ce qu'on fait ici.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Les mesures d'aide aux entreprises demeurent très généreuses, elles l'étaient avant la réduction de 20 % et elles le sont encore, surtout quand on se compare à nos voisins, que ce soit en Ontario, que ce soit dans les États voisins américains. Donc, je ne pense pas que ça soit… que, tout d'un coup, on se soit désarmés complètement et que ça va être la catastrophe, et la fuite, et tout va disparaître. Ce sont encore des programmes qui sont très généreux. Et, franchement, je ne pense pas que cette réduction de 20 % puisse avoir un effet si dramatique que ça à très court terme. Comme j'ai dit tantôt, si jamais c'était une problématique, il y a d'autres moyens que l'État peut utiliser pour soutenir ces emplois-là. Et, ultimement, ultimement, si ces emplois-là existent seulement parce qu'il y a des crédits d'impôt, ce n'est pas une situation qui soit soutenable à moyen et à long terme.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Marceau : Oui. En tout cas, en attendant, vous n'avez pas d'étude pour nous montrer l'impact de cela. Ça ne semble pas avoir été mesuré. Vous avez coupé sans vous appuyer sur du solide et vous allez, plus tard, voir quel est l'impact de cela. C'est très bien de le voir plus tard, ça, je suis entièrement favorable, mais je dois avouer que c'est surprenant, là, de penser que ça n'a pas d'impact. Moi, je ne parle pas de catastrophe, là. Simplement, si on coupe de 20 %, à moins qu'on soit bête, là… On ne les avait pas amenés à ces niveaux-là parce qu'on pensait que ça n'avait pas d'impact. On pensait que ça aidait puis ça avait été utile. Maintenant, à partir du moment où on révise, je veux bien, là, mais au moins qu'on s'appuie sur du solide.

En tout cas, peut-être que, ce soir, vous n'avez pas un beau tableau à nous fournir. Vous aurez l'occasion demain, vous aurez l'occasion dans les prochaines semaines de nous donner un tableau qui nous explique qu'est-ce que vous avez envisagé comme impact pour chacune de ces coupures-là. Je ne peux pas croire que vous avez fait ça à l'aveugle sans savoir qu'est-ce que vous faisiez. Je ne peux même pas concevoir que vous ayez pu faire ça. Alors, je me dis, vous avez encore la chance de rétablir les faits. Et vous aurez l'occasion de déposer un beau tableau de ce genre-là qui nous dit un peu qu'est-ce qui vous a guidé.

M. Leitão : Donc, au contraire, monsieur…

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : M. le Président, au contraire, justement, parce qu'en cinq semaines c'était impossible de faire une analyse très fine de toutes ces questions-là. Nous avons délibérément choisi de faire une réduction «across the board» de 20 % parce que ça n'aurait pas été sérieux, ça n'aurait pas été crédible qu'en si peu de temps on puisse être capables d'identifier exactement quel crédit d'impôt était plus performant que l'autre.

Mais je reviens, je reviens à ce que j'avais dit tantôt. Vous parlez de tableau. Je n'ai pas vu de tableau non plus de combien d'emplois ces crédits d'impôt là ont contribué à créer. C'est une mesure qui est utile au début pour attirer certaines industries. Une fois qu'on a déjà atteint une bonne masse critique dans ces industries-là, il doit y avoir éventuellement… on doit être capable de mettre un terme à ce type d'intervention là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : O.K. Merci. Je reviendrai plus en détail demain sur ces questions-là. Je voudrais changer de sujet rapidement. Je voudrais parler d'agences de notation. Je sais que le député de Chapleau a abordé la question tout à l'heure. Premièrement, avez-vous rencontré, depuis le budget, des représentants des agences de notation? Êtes-vous allé en voyage à New York ou à Toronto pour rencontrer des agences?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, est-ce que vous avez voyagé?

• (22 h 20) •

M. Leitão : Vous m'avez vu ici tous les jours. Non, je n'ai pas eu l'opportunité de le faire. Mais, comme vous le savez très bien, c'est quelque chose qui est important pour un ministre des Finances du Québec, qui que ce soit. Et évidemment nous avons dû préparer tout ça en période… en session intensive de l'Assemblée nationale, la préparation du budget, cette commission-ci. C'est fort probable que très bientôt cela se fasse.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Marceau : Oui. Est-ce que toutes les agences ont confirmé le maintien de la cote, est-ce que… de leur cote? Ou est-ce que le ministère a reçu un avis comme quoi la cote ou la perspective pourrait être modifiée?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Je n'ai vu aucun avis à cet égard-là. Comme vous le savez très bien, les agences de notation, après chaque budget, émettent un commentaire sur le budget. Ce commentaire-là, comme Moody's et DBRS l'ont bien mentionné, ne constitue pas une «rating action», ce n'est pas une activité de changement potentiel de cote. Ils vont procéder maintenant à une analyse plus détaillée, plus profonde de la situation.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Marceau : C'est parfait.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Il reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste environ… Bien, si on regarde à l'horloge, il reste environ neuf minutes.

M. Drainville : Très bien. Alors, je voulais juste d'abord préciser… Tout à l'heure, j'ai attribué à M. Charest le rapport de force qui a permis d'obtenir une certaine correction au déséquilibre fiscal. J'aurais dû préciser, M. le Président, que ce rapport de force, il avait été bâti par le gouvernement de Bernard Landry, notamment lorsqu'il a créé la Commission sur le déséquilibre fiscal, la commission Séguin, sur laquelle siégeait notamment l'actuel député de Rousseau. Et ce rapport de force, donc, a été par la suite utilisé par M. Charest pour aller chercher effectivement une augmentation des transferts qui a permis de corriger à court terme une partie, du moins, du déséquilibre fiscal.

Dans le plan budgétaire, toujours dans la section F, il est question de plusieurs dossiers qui ne sont toujours pas réglés, des dossiers Québec-Ottawa, notamment la reconstruction du centre-ville de Lac-Mégantic. Le Québec attend du gouvernement fédéral qu'il contribue à sa juste part des coûts de la décontamination et de la reconstruction du centre-ville.

Il est également question des dividendes d'Hydro-Québec, le fait que les dividendes d'Hydro-Québec n'ont pas droit au même traitement fiscal que les dividendes versés par Hydro One, ce qui fait perdre 330 millions de dollars par année à Hydro-Québec.

C'est quoi, votre… Quel est le sentiment du ministre des Finances sur ces deux dossiers-là? Qu'est-ce que vous allez faire pour permettre au Québec d'obtenir la part, une juste part des… la juste part du fédéral dans l'ensemble des dépenses qui ont découlé de la catastrophe de Lac-Mégantic? Puis qu'est-ce que vous allez faire dans le dossier d'Hydro-Québec et des dividendes d'Hydro-Québec?

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Je suis nouveau en politique. L'approche que j'ai en termes de relations fédérales-provinciales est de toute évidence très différente de la vôtre. Je ne pense que ça soit une question de rapport de force. Je ne vois pas ça de façon adversairielle. Ce n'est pas : Il faut obtenir ce que nous voulons, sinon on est en train de se faire avoir par l'autre partie. Je pense que le fédéralisme canadien, c'est un fédéralisme coopératif, et on sort toujours gagnant en ayant une attitude beaucoup plus constructive quand on négocie ces choses avec nos partenaires fédéraux.

Ces négociations, ces conversations sont continuelles. C'est aujourd'hui, c'est demain, c'est la semaine prochaine, c'est le mois prochain. Ça continue tout le temps, Lac-Mégantic étant un exemple très clair. Nous allons continuer nos pourparlers avec nos partenaires fédéraux là-dessus. Je suis absolument confiant qu'au bout de la ligne la participation fédérale à ces efforts de reconstruction va être là. C'est inconcevable que le gouvernement fédéral, après ce qui a été fait, par exemple, en Alberta suite aux inondations… ça serait inconcevable que le gouvernement fédéral ne participe pas aussi à la reconstruction de Lac-Mégantic. Ça viendra. Ça prendra des négociations, ça prendra des discussions avec nos partenaires fédéraux. Et, si on a une attitude beaucoup plus coopérative, je pense qu'on va certainement sortir gagnant de ces négociations-là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Oui. Est-ce que vous avez des priorités dans les batailles, même si le mot ne s'applique visiblement pas dans votre philosophie des relations fédérales-provinciales? Disons, est-ce que vous avez une priorité dans la liste des dossiers que vous voulez régler? Puis est-ce que vous vous donnez un échéancier pour en régler un ou deux, là, je ne sais pas, là, d'ici la fin de l'été, genre, ou...

M. Leitão : ...

M. Drainville : Pardon?

M. Leitão : Ou trois, ou quatre.

M. Drainville : Oui? Alors...

Le Président (M. Bernier) : Oui, mais un instant. Oui. Finissez votre question, M. le député, là.

M. Drainville : Bien, c'est ça. C'est quoi, les priorités du ministre? Puis il se donne combien de temps pour les régler?

Le Président (M. Bernier) : O.K. C'est bien. M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Très clairement, la première priorité… la priorité — on ne peut pas avoir plusieurs, une priorité — plus immédiatement, c'est le dossier Chantiers Canada. Je pense que nous sommes proches d'arriver à une entente, et donc c'est de ce côté-là que nous allons commencer. Il y a aussi d'autres dossiers qui demandent une plus grande concertation avec nos partenaires des autres provinces. Mais ça va se faire aussi au cours de cet été. Alors, il y a plusieurs dossiers qui sont en cours de discussion. Il y en a un que vous allez certainement soulever probablement demain, donc je profite pour le soulever tout de suite, la commission nationale des valeurs mobilières. C'est aussi quelque chose qui est en train de se négocier. On ne va certainement pas abdiquer de notre position. Notre position reste inchangée. Et, encore là, on va aussi avoir de la coopération et de la concertation avec d'autres provinces pour arriver à trouver une meilleure entente.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Quand vous dites : C'est en train de se régler, vous voulez dire… c'est en train de se régler comment?

M. Leitão : Chantiers Canada, Chantiers Canada.

M. Drainville : Non, mais sur la commission des valeurs mobilières, vous dites…

M. Leitão : Je dis que c'est un dossier qui va certainement… Vous allez certainement le soulever bientôt. Je n'ai pas dit que c'était en train de se régler, j'ai dit que c'est en train de revenir à l'avant-scène. Et c'est quelque chose que le Québec, avec d'autres provinces, maintient la position. C'est d'ailleurs un exemple très clair. Même si nous sommes très amis, très coopératifs avec nos amis fédéraux, on ne va certainement pas céder de ce côté-là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Mais vous n'allez pas céder parce que ce n'est pas dans l'intérêt du Québec de céder. Donc, dans ce dossier-là, il y a un intérêt clairement québécois.

M. Leitão : Dans la commission nationale des valeurs mobilières, oui.

M. Drainville : O.K. Donc, il y a des dossiers, dans votre esprit, où il y a clairement un intérêt québécois qui n'est pas nécessairement celui de l'intérêt du gouvernement fédéral.

M. Leitão : Bien sûr.

M. Merlini : M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. le député de…

M. Merlini : Question de règlement, article 211, que… Le sujet de discussion, c'est le budget, c'est le discours du budget, pas la prochaine chicane avec Ottawa. Alors, le député de Marie-Victorin a bien commencé sa première intervention, mais là on est rendu…

Le Président (M. Bernier) : S'il vous plaît! M. le député, là…

M. Merlini : …dans d'autres dossiers.

Le Président (M. Bernier) : M. le député, je vous en prie. Vous savez, les discussions sur le budget sont très, très larges, O.K., et peuvent emmener divers sujets à ce moment-là, et les interventions des membres peuvent être d'ordre, effectivement, très général et peuvent porter sur divers sujets. Donc, il n'est pas nécessaire que ces interventions prennent la forme de questions au ministre des Finances. On peut avoir des énoncés au niveau des finances publiques, au niveau de sujets qui concernent en général… C'est la tradition ici en ce qui regarde l'étude au niveau du budget. Donc, sur ce, je comprends votre position, sauf que…

M. Drainville : C'est mon temps qu'il prend surtout, là.

Le Président (M. Bernier) : Oui, mais là c'est moi qui le prends comme président. Comme président, je peux prendre le temps que je veux pour gérer la commission. Donc, c'est dans cette perspective-là. Et j'invite le député de Marie-Victorin, il vous reste environ une minute, à faire les conclusions.

M. Drainville : Alors, j'invite le député de La Prairie à lire la section F du plan budgétaire. Vous allez voir, toutes les questions que je pose ou la plupart viennent de là. Maintenant…

Le Président (M. Bernier) : Non. S'il vous plaît, pas d'échange. Finissez, M. le député.

M. Drainville : Mais non, mais je pense que c'est intéressant. La dernière réponse que le ministre des Finances nous a donnée, c'est qu'il souhaite la collaboration, la bonne entente, mais il reconnaît que, dans certains dossiers, il y a un intérêt québécois qui n'est pas nécessairement celui de l'intérêt qui est défendu par le gouvernement canadien. Je trouve ça intéressant. Je trouve ça intéressant. Donc…

M. Leitão : Tous les dossiers sont d'intérêt québécois, tous les dossiers. Ce n'est pas seulement un dossier, tous les dossiers sont d'intérêt québécois. Dans certains dossiers, on peut arriver à une…

Le Président (M. Bernier) : Je vous remercie. Nous aurons l'occasion demain de poursuivre ces travaux. À venir jusqu'à présent, dans cette première portion, ça va assez bien avec les députés jusqu'à la toute dernière minute. Donc, souhaitons que ces discussions se poursuivent dans la même cordialité demain.

Donc, compte tenu de l'heure, je lève la séance de la commission et ajourne ses travaux à demain, après les affaires courantes. Donc, bonne fin de soirée.

(Fin de la séance à 22 h 30)

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