To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Public Finance

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Public Finance

Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Thursday, January 29, 2015 - Vol. 44 N° 28

Special consultations and public hearings on Bill 28, An Act mainly to implement certain provisions of the Budget Speech of 4 June 2014 and return to a balanced budget in 2015-2016


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Association des garderies privées du Québec (AGPQ)

Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec

Conseil du statut de la femme (CSF)

Réseau des conférences régionales des élus du Québec (Réseau des CRE du Québec)

Association minière du Québec (AMQ)

Association de l'exploration minière du Québec (AEMQ)

Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec (APCHQ)

Intervenants

M. Raymond Bernier, président

M. Carlos J Leitão

Mme Rita Lc de Santis

M. Michel Matte

M. Jean Habel

M. Nicolas Marceau

M. Mathieu Traversy

M. François Bonnardel

Mme Lise Lavallée

M. Alain Therrien

M. Gaétan Lelièvre

Mme Françoise David

M. Marc Carrière

M. Gérard Deltell

*          Mme Mona Lisa Borrega, AGPQ

*          M. Samir Alahmad, idem

*          Mme Marie-Claude Collin, Coalition des garderies privées
non subventionnées du Québec

*          Mme Line Fréchette, idem

*          Mme Julie Miville-Dechêne, CSF

*          M. Jean-Maurice Matte, Réseau des CRE du Québec

*          Mme Paulette Lalande, idem

*          M. Richard Deschamps, idem

*          Mme Josée Méthot, AMQ

*          M. Frank Mariage, AEMQ

*          M. Alain Poirier, idem

*          M. Mathieu Savard, idem

*          Mme Valérie Fillion, idem

*          M. Sylvain Tremblay, APCHQ

*          M. François-William Simard, idem

*          M. François Bernier, idem

*          M. Michel Beauchamp, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-cinq minutes)

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte et je demande bien sûr, comme à l'habitude, à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 28, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Drainville (Marie-Victorin) est remplacé par M. Traversy (Terrebonne); Mme Samson (Iberville) est remplacée par M. Bonnardel (Granby); et M. Spénard (Beauce-Nord) est remplacé par Mme Lavallée (Repentigny).

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Donc, voici l'ordre du jour pour ce 29 janvier. Ce matin, nous entendrons l'Association des garderies privées du Québec — bienvenue; la Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec et le Conseil du statut de la femme. Cet après-midi, nous recevrons le Réseau des CRE du Québec, l'Association minière du Québec, l'Association de l'exploration minière du Québec et l'Association des professionnels en construction et habitation du Québec. Donc, nous avons une journée bien garnie.

Auditions (suite)

Je vous souhaite une bonne journée à tous, et nous procédons immédiatement. Donc, la parole est à vous pour une période de 10 minutes, donc, ça nous fera plaisir de vous entendre. Allez-y.

Association des garderies privées du Québec (AGPQ)

Mme Borrega (Mona Lisa) : Bonjour. Alors, je suis Mona Lisa Borrega, je suis vice-présidente de l'Association des garderies privées du Québec. J'ai, avec moi, mes collègues : M. Samir Alahmad, qui est le président de l'association, et Mme France Quirion, qui est administratrice.

Alors, nous vous remercions de l'invitation pour venir offrir notre point de vue aujourd'hui et nous voulons commencer en soulignant à la commission que la modulation des frais de garde en fonction des revenus des parents a été lancée pour la première fois par le premier ministre, M. Philippe Couillard, en mai 2014 alors qu'il a prononcé en point de presse que «personne ne s'opposerait au fait que quelqu'un qui a mon revenu ou des revenus plus élevés dans la société ait à payer 10 $ par jour pour un enfant à la garderie». Ce principe, avancé par le premier ministre, pouvait sembler noble à première vue, mais il n'en reste que les gens qui gagnent le revenu du premier ministre ne sont pas des jeunes parents en début de carrière, alors que c'est la clientèle en garderie. Donc, cette modulation, telle que décrite par M. Couillard, viserait plutôt les familles de la classe moyenne, lesquelles sont déjà surimposées et surtaxées, et ces familles sont loin d'être riches. Une famille avec un ou deux enfants, ayant un revenu familial de 100 000 $ par année est loin d'être bien nantie. Après avoir payé ses impôts, son hypothèque, les taxes municipales et scolaires, sa voiture et autres dépenses, il lui reste peu d'argent à la fin du mois. Cibler ces familles pour équilibrer le coût du programme est injuste et inéquitable.

Il faut rappeler que notre système d'imposition repose sur les revenus de chacun. Plus les revenus sont élevés, plus la facture d'impôt est élevée. Donc, on peut conclure que les parents avec un revenu supérieur paient déjà des montants plus élevés pour leurs places en garderie par le biais de leurs impôts. Si la modulation des frais de garde selon le revenu des parents est acceptable, pourquoi ne pas moduler les frais de scolarité par la suite? Après tout, nous demeurons quand même dans le réseau de l'éducation. Pourquoi ne pas facturer les contribuables en fonction de leurs revenus lorsqu'ils ont recours à nos hôpitaux et aux médecins? Pourquoi investir dans la qualité du développement de nos petits-enfants serait moins important qu'investir dans les autres programmes sociaux?

L'AGPQ croit qu'il est important de se rappeler des objectifs visés par Québec lors de l'instauration du programme. Souvenons-nous qu'en 1997 le gouvernement, à l'époque, a voulu investir dans la petite enfance pour préparer les enfants à l'école. Il a voulu réduire le décrochage, permettre à plusieurs citoyens, en majorité des femmes, d'intégrer le marché du travail. Il voulait permettre à des enfants handicapés, ceux des milieux défavorisés et des enfants de familles immigrantes récentes à socialiser avec d'autres enfants de leur âge pour faciliter et favoriser leur développement global ainsi que l'apprentissage du français et, finalement, enrayer la garde au noir.

L'AGPQ est convaincue que les objectifs visés ont été atteints et que personne ne peut mettre en doute les bienfaits de ce système pour nos enfants et nos familles. L'AGPQ croit qu'il est tout à fait légitime que notre société, 20 ans plus tard, se questionne sur les bénéfices du programme à contribution réduite, les coûts engendrés et la capacité des contribuables à offrir un tel service. Toutefois, toute société responsable doit considérer les déboursés pour la petite enfance comme un investissement et non pas une dépense. L'AGPQ est d'avis que, malgré les coûts élevés de ce programme, ceux-ci s'autofinancent, et il est également le même avis de plusieurs économistes québécois, entre autres M. Pierre Fortin et Luc Godbout. L'AGPQ tient à rappeler que plus de 70 000 citoyens, surtout des femmes, ont réintégré le marché du travail. Ces contribuables paient maintenant des impôts et des taxes et ne comptent plus sur l'État pour subvenir à leurs besoins.

• (9 h 40) •

Depuis 1997, les garderies et CPE se sont déployés de manière exponentielle pour répondre à la demande. Les dépenses engendrées par ces installations contribuent positivement à renflouer les coffres du gouvernement directement ou indirectement, que ce soit par le biais des impôts ou des taxes payés par les garderies privées subventionnées et leur personnel, la construction ou la location de leurs installations, les achats de leurs équipements, les achats de nourriture, etc. Le gouvernement doit avoir une vision globale lorsqu'il se penche sur la question du financement des places subventionnées.

Regardons un peu les chiffres du plan budgétaire 2014‑2015 à la page B.131. L'AGPQ vous cite qu'un centre de la petite enfance reçoit 2 758 $ de plus par jour pour une place en... excusez, 2 758 $ de plus par enfant, par année qu'une place en garderie privée. L'AGPQ dit que rien ne peut expliquer cette... ou justifier cette énorme différence. Malgré cette réalité, 2 758 $ de plus par année, par enfant, un très grand nombre de CPE sont déficitaires ou réalisent très peu d'économies pour faire face à des situations urgentes, comme par exemple la réparation d'un toit. C'est encore le gouvernement du Québec qui doit supporter financièrement le CPE pour faire face à ces obligations. Ironiquement, d'autres CPE ont accumulé, au fil des ans, des surplus importants, au-delà de 250 millions.

L'AGPQ propose au gouvernement des pistes de solution. Premièrement, revoir la contribution réduite universelle pour l'augmenter de 2 $ par jour. De toute évidence, le 7 $ d'aujourd'hui n'a pas la même valeur qu'en 2003. Au début du programme, la contribution parentale représentait 20 % du coût du système, tandis que présentement elle représente moins de 13 %. Il faut aussi revoir le financement. Tel que stipulé dans le plan budgétaire, une place en CPE coûte 2 758 $ de plus par année. Cette différence est énorme, considérant qu'il s'agit, en tous points de vue, du même service offert à l'enfant, puisqu'on y applique exactement les mêmes lois et règlements. Cela veut dire qu'un CPE de 80 places reçoit, par année, 220 000 $ de plus qu'une garderie privée subventionnée de même grosseur. À cela on doit ajouter les taxes municipales que le gouvernement défraie pour le CPE. Selon nos estimés, cela représente plus de 30 000 $ par année, pour un total... Québec débourse donc un supplément de 250 000 $ par installation de 80 places, pour la simple et unique raison que c'est un CPE. Cela fait grimper la différence à 3 125 $ de plus par place par rapport à une place en garderie privée, et, nous vous le répétons, rien ne peut justifier une telle dépense additionnelle.

En principe, une institution sans but lucratif comme un CPE devrait coûter moins cher que son vis-à-vis privé. La gestion de nos finances doit reposer sur une réalité économique et non pas sur une idéologie politique. Le gouvernement du Québec doit réduire la différence entre le financement des CPE et les garderies privées d'un minimum de 150 000 $ annuellement pour une installation de 80 places. Même avec cette réduction de 150 000 $, les CPE continueront de toucher 100 000 $ de plus annuellement de par leur statut d'organisme à but non lucratif. Cette économie représente 160 millions par année pour Québec, presque 800 millions sur cinq ans. En même temps, le gouvernement doit cesser de transférer la facture aux garderies privées subventionnées et leurs employés comme c'est le cas présentement.

À ce jour, malgré 2 758 $ de moins par place, par année que les CPE pour exactement le même travail, le gouvernement ne se gêne pas de sabrer dans le financement des garderies privées subventionnées. Ces coupes exagérées mèneront à une réduction des services et forceront les garderies à niveler par le bas. Pour ajouter l'insulte à l'injure, le gouvernement du Québec a gelé l'entente pour le rattrapage salarial des éducatrices en garderie privée subventionnée. Cette entente visait à harmoniser les salaires des éducatrices en garderie privée subventionnée aux salaires des éducatrices en CPE. Il faut préciser que c'est un gouvernement libéral qui avait signé entente quinquennale il y a trois ans, qui ne la respecte pas cette année.

En conclusion, l'AGPQ tient à rappeler à la commission que M. Couillard a promis de gérer la province différemment, a promis de ne pas augmenter les impôts et a promis d'indexer uniquement les frais de garde pour ne pas avoir un choc tarifaire pour les parents. En réalité, c'est tout à fait le contraire qui se produit aujourd'hui. C'est une solution simpliste que d'équilibrer le budget de la province en transférant le déficit aux contribuables. L'AGPQ réitère sa position, à l'effet qu'elle est contre la modulation des frais de garde en fonction des revenus des parents, et ajoute que l'orientation gouvernementale d'augmenter les frais de garde jusqu'à 20 $ par jour est inquiétante. Le gouvernement du Québec doit maintenir ce programme, qui fait l'envie de plusieurs provinces et autres pays dans le monde. Au lieu de transmettre la facture aux parents de la classe moyenne, le gouvernement aurait dû mieux gérer le système de garde au Québec, comme le propose l'AGPQ depuis des années.

L'AGPQ réitère qu'en appliquant les pistes de solution proposées dans ce mémoire le gouvernement économisera 280 millions par année. L'AGPQ est convaincue qu'avec un changement de philosophie...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Je vous invite à conclure, s'il vous plaît.

Mme Borrega (Mona Lisa) : ...des réaménagements suggérés dans ce mémoire, une volonté politique de la part du gouvernement nous pourrons continuer à offrir ce système à nos enfants et à nos familles pour des générations à venir. Merci de votre écoute.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Merci de votre présentation. Nous allons donc débuter les échanges avec les parlementaires. Donc, du côté ministériel, M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Bonjour, chers collègues, bonjour, tout le monde. D'abord, je m'excuse de mon léger retard, mais, voilà, les choses arrivent...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...bonne note.

M. Leitão : ...l'hiver est comme ça, M. le Président. Vous en prenez bonne note. L'hiver arrive à chaque année, mais enfin... O.K.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...des fois, ça alterne, ça.

M. Leitão : Il y a le printemps après l'hiver, des fois.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Ça alterne d'un côté comme de l'autre.

M. Leitão : O.K. Mme Borrega, M. Alahmad et Mme...

Une voix : Quirion.

• (9 h 50) •

M. Leitão : ...Quirion, c'est ça, merci d'être là. J'ai bien écouté votre présentation. Je dois vous dire d'entrée de jeu que je suis un peu surpris, un peu beaucoup surpris. Je ne pensais pas que votre opinion serait de cette nature-là. Alors, pour vous rassurer, je veux... pas poser la question, mais faire quelques constats.

D'abord, notre intention, c'est de s'assurer que le système des garderies tel que nous l'avons depuis le milieu des années 90 puisse être soutenable à long terme. Ce n'est pas du tout notre intention de déconstruire ce système-là, que nous trouvons qu'il est toujours très utile, et qui, en effet, nous a très bien servis depuis déjà presque une vingtaine d'années, et qui est très original en Amérique du Nord, et donc nous voulons que cela se poursuive. Une des originalités du système que nous avons, c'est cette mixité de secteur public, secteur privé, CPE, organismes à but non lucratif, garderies privées subventionnées, garderies privées non subventionnées; milieu familial, très important aussi. Donc, c'est cette mixité qui rend notre système particulièrement différent des autres, bien sûr, et aussi le coût aux parents.

Pour ce qui est du coût aux parents, la modulation que nous introduisons maintenant, c'est en effet un système différent de ce qui a existé jusqu'à aujourd'hui, mais, encore là, c'est loin d'être, d'abord, une grande révolution, ça se fait comme ça dans d'autres pays aussi. Et, en plus, de la façon dont nous l'avons modulé, ça signifie que... Vous avez mentionné la famille avec un revenu moyen de 100 000 $ par année. Cette famille-là va payer, au maximum, 9 $ par jour, par enfant, un montant autour duquel il y avait un grand consensus au Québec. 9 $ par jour, par enfant, ce serait un montant raisonnable. Et donc, en plus, il n'y a personne, personne qui va payer 20 $ par jour. Le montant maximal qui pourrait arriver pour une famille qui a un revenu annuel de 200 000 $ et plus, le maximum, ce serait 15 $ par jour, par enfant, en prenant en considération tous les crédits d'impôt — fédéral, provincial, tout ça.

Donc, les parents continuent de payer 20 %, à peu près, après la réforme, et l'État continue à assumer 80 % des coûts, donc le système demeure hautement subventionné. C'est vrai que les parents ou les personnes qui ont un revenu annuel de 150 000 $, 200 000 $ par année paient déjà de l'impôt sur le revenu, mais même ces parents-là vont continuer de bénéficier d'un système de garderies qui demeure encore hautement subventionné, beaucoup plus que dans d'autres provinces canadiennes. Donc, je ne vois pas pourquoi est-ce que l'introduction de la modulation des tarifs serait un changement tellement dévastateur qu'il mettrait le système en péril. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Et une deuxième question, si vous voulez, un peu plus pratique, celle-là. Dans la deuxième partie de votre présentation, vous avez aussi mentionné... et c'est quelque chose qui... les chiffres sont différents, mais d'autres groupes l'ont déjà mentionné aussi, que les coûts en CPE sont plus élevés que les coûts en garderie privée. Vous avez mentionné 2 758 $ par enfant par année. Si vous pourriez élaborer un peu plus d'où vient cette différence. Donc, c'est les deux questions : la modulation, que vous semblez évidemment ne pas aimer du tout, et les coûts plus élevés en CPE qu'en garderie privée.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Alahmad.

M. Alahmad (Samir) : Bonjour. Samir Alahmad. Premièrement, si je commence par votre deuxième question, de : Où le chiffre de 2 758 $... C'est vraiment le budget que vous avez déposé, que M. le ministre des Finances a déposé récemment, le dernier budget. Le document s'appelle le plan budgétaire. Il y a une page B.131, il y a un tableau qui dit : Évolution de la subvention moyenne et de la contribution parentale d'une place en services de garde. Les chiffres de 2013‑2014 : subvention gouvernementale pour le centre de petite enfance, c'est 13 988 $; pour une garderie subventionnée, c'est 11 230 $. C'est vraiment le chiffre du budget, le plan budgétaire. Tout ça a été déposé il y a quelques mois.

M. Leitão : ...les coûts différents des deux systèmes.

M. Alahmad (Samir) : Ça, c'est le coût par place, c'est le coût par place. Au CPE, c'est à peu près 14 000 $ par place; en garderie privée, c'est 11 000 $. On a pris toutes les places, le budget divisé par le nombre de places, c'est vraiment à 0,01 $ près, c'est la différence des deux.

M. Leitão : Ma question, c'est : Comment vous l'expliquez? C'est dû à quoi? Les salaires plus élevés, moins élevés?

M. Alahmad (Samir) : Pour nous, c'est sûr — peut-être on est un peu biaisés, mais c'est la réalité — nous, on ne trouve rien qui justifie cette différence. C'est sûr et certain que, un CPE, il y a une structure un peu plus rigide à gérer qu'une garderie privée, mais quand même ça demeure des institutions sans but lucratif, puis, normalement, une institution sans but lucratif doit, selon nous, coûter un peu moins cher que soi-disant les privés, qui sont là pour faire de l'argent. Mais c'est tout le contraire qui se passe ici. Le 2 758 $ par 80 places, c'est 220 000 $ par année. Et, si on inclut la taxe municipale, c'est à peu près 160 millions par année de plus. Sur cinq ans, c'est 800 millions. Nous, on a dit : Au lieu d'aller à un exercice de modulation de frais de garde, avec tout ce que ça implique, plusieurs, plusieurs parents qui se sont prononcés contre... C'est sûr, il y a des gens qui se sont prononcés pour, puis je n'entre pas dans ce débat. Peut-être qu'il y a des gens qui n'ont pas des enfants qui sont dans la garderie, puis, à un moment donné, il dit : Pourquoi je paie pour les autres? C'est un autre débat. Mais, au lieu d'embarquer dans toute cette polémique de modulation, si on avait augmenté le tarif de 2 $ pour tout le monde... Le 7 $ aujourd'hui, ce n'est pas le même 7 $ il y a à peu près 20 ans, puis on gère un peu mieux. Nous, on a proposé... On génère plus d'argent pour maintenir le système, ça fait que...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Leitão : Selon vous, c'est une question de gestion, gestion de...

M. Alahmad (Samir) : Bien, c'est une question de gestion, c'est une question d'efficacité de gestion. Nous — je vous donne un exemple — nous, on gère peut-être... Le directeur, il est là... ou la directrice, on n'a pas des assistants, on n'a pas de structure, mais pour le même travail, hein? On gère exactement la même chose, on est régis par les mêmes lois, mêmes règlements, et une bonne majorité des garderies, elles paient même les salaires des CPE pour leurs employés. Ce n'est pas justifiable. Nous, on dit : Au lieu de 250 000 $ par année, si on demande aux CPE de gérer un peu mieux puis, au lieu de 250 000 $, on enlève 150 000 $, là on vient de dégager, avec le 2 $, à peu près 280 millions.

M. Leitão : O.K. Merci.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Alahmad (Samir) : Puis, pour la question — excuse, là — pour la question : Pourquoi on est contre la modulation?, écoutez... On a voulu, en 1997, avoir un système universel, on a voulu avoir un système à contribution réduite égal pour tout le monde, puis je pense que ce système a été très, très, très bénéfique pour la société québécoise. Il y a, je pense... j'en passe de vous montrer... c'est-à-dire l'économie générée pour l'État, les 70 000 femmes, retour au marché du travail, et ainsi de suite. Ce système, on l'a voulu à tarif unique pour tout le monde. L'enfant de cinq ans, il quitte chez nous, il va à l'école. Ça, c'est la gratuité pour tout le monde. Mais pourquoi deux poids, deux mesures? C'est le même enfant. Des fois, on rentre... Là, là, on encourage la maternelle à quatre ans. Il y a des garderies qui offrent la maternelle chez nous puis il y a des écoles qui offrent la maternelle à quatre ans. Quand tu traverses cette ligne-là : garderies ou CPE?, bien là, là, c'est gratuit. Mais, avant ça, chez nous... mais là, là, on voit toutes sortes de modulations puis on essaie de justifier.

Puis, pour nous, c'est encore la classe moyenne qui va payer. Oui, je peux comprendre, une famille qui, avec 100 000 $ ou... elle va payer 9 $ puis elle a un reçu d'impôt au fédéral. D'ailleurs, c'est pour tout le monde, ce n'est pas grave. Mais on va prendre seulement qu'est-ce qu'elle paie. Elle va payer à peu près le 8 $. Mais, si on fait les calculs selon aussi... C'est les statistiques de Revenu Québec : il y a 40 % des contribuables, ils ne paient pas aucun impôt. Ceux qui font 150 000 $ et plus, ils sont moins de 1 % des contribuables. C'est-à-dire, les contribuables entre les 100 000 $, 140 000 $... il y a à peu près 30 % — 28 % — des contribuables qui vont assumer la presque totalité de la facture. Et ces contribuables avec un ou deux enfants, qui font 120 000 $, 130 000 $, 140 000 $, après avoir payé des montants substantiels en impôt, qu'ils ont un enfant ou deux enfants, ils vont payer 5 200 $ de plus que celui qui fait 140 000 $... Une famille qui fait 140 000 $ par année, ils vont payer, avec deux enfants, 5 200 $ nets après tous les impôts qu'ils paient. Selon nous, c'est encore la classe moyenne qui va payer la facture.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Si les collègues veulent...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Est-ce que vous... Merci, M. le Président. Je vais trop vite. Et bienvenue, merci d'être là et d'avoir présenté votre mémoire. Est-ce que vous avez une idée de combien de familles à 140 000 $ de revenu familial net ont trois enfants dans des CPE? Parce que vous utilisez ces chiffres-là. De combien de personnes on parle?

Une voix : M. Alahmad.

M. Alahmad (Samir) : Je parlais de avec deux enfants.

Mme de Santis : O.K. Alors, combien ont deux enfants?

M. Alahmad (Samir) : Je ne parlais pas avec trois enfants. Moi, je n'ai pas cette statistique. J'ai les statistiques par tranches de revenus, de Revenu Québec, en 2013, par individu, on ne l'a pas par famille. Probablement, le ministère des Finances ou le ministère de la Famille, ils l'ont plus. Mais, si on regarde, tous chiffres confondus, les familles qui vont être appelées à payer la presque totalité de la facture, de l'augmentation, c'est à peu près 28 %, 27 % des familles de la classe moyenne, parce que vraiment ceux qui font 200 000 $ ou 150 000 $, 160 000 $, c'est moins que 1 %, puis on a jusqu'à 40 % des contribuables qui paient zéro impôt. C'est ça, notre réflexion là-dessus.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme la députée.

Mme de Santis : Et, pour vous, la classe moyenne, c'est quoi?

M. Alahmad (Samir) : C'est un...

Mme de Santis : Parce que vous utilisez le mot. J'aimerais comprendre de qui on parle.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Alahmad.

• (10 heures) •

M. Alahmad (Samir) : Écoutez, pour nous, quelqu'un qui fait 120 000 $, 130 000 $, par année, bruts... un revenu, une famille; c'est loin d'être riche. Nous, on considère, cette famille, ça rentre vraiment dans la classe moyenne, et ce n'est même pas la classe moyenne très élevée. Mais, regardez, le 130 000 $ ou 140 000 $... 130 000 $, c'est 65 000 $ par individu. Enlevez les impôts, enlevez toutes les taxes à droite puis à gauche. Qu'est-ce qu'il reste au net? Puis là on rajoute 2 600 $ au net si on a un enfant puis 5 200 $ si on a deux enfants. Écoute, ça représente des montants substantiels au net pour ces familles.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme la députée.

Mme de Santis : Vous suggérez donc qu'au lieu de la modulation on augmente de 7,30 $ à 9,30 $?

M. Alahmad (Samir) : C'est bien ça. Parce que le 7 $, qui était très équitable pour tout le monde — en 2003, c'était très équitable, d'ailleurs c'est le gouvernement du Parti libéral qui a proposé ça, là — qui était très équitable dans ce temps-là, en 2003, le 7 $... mais le 7 $ aujourd'hui, ce n'est pas le même 7 $, la même valeur, le même pouvoir d'achat qu'en 2003. Un petit peu de calcul d'inflation, puis on trouve qu'à 9 $, là... je pense que tout le monde trouverait leur compte.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Leitão : Est-ce que là-dessus...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui. Allez-y, M. le ministre.

M. Leitão : ...peut-être avant de... je ne veux pas prendre votre temps, les collègues, mais quelque chose qui... je pense, c'est important aussi qu'on prenne en considération.

En effet, de changer d'un tarif fixe, ce que nous avons depuis presque 20 ans, à une modulation, c'est un changement important, il y a certaines complexités. Je ne pense pas que les familles québécoises soient si complexes qu'elles ne soient pas capables de gérer ces complexités-là. Ce n'est quand même pas énorme comme... mais c'est un changement important, et ça peut créer un certain stress, et on va s'assurer que l'information va circuler. Mais il y a ici aussi un changement important. Le tarif fixe, qu'il soit 7 $, ou 8 $, ou 9 $, pour tout le monde ça semble être très équitable, mais ce n'est pas équitable, parce qu'une personne, une famille qui a un salaire de 120 000 $ ou plus par année va payer les mêmes 7 $ ou 9 $ qu'une famille qui est monoparentale et qui ne gagne absolument rien. Donc, idéalement, et peut-être qu'on ira dans cette direction-là quand on aura un peu plus de moyens, ça devrait être encore plus modulé, c'est-à-dire que les familles avec un revenu encore... disons, moins de 50 000 $, elles devraient payer zéro — on ne peut pas encore arriver à ce stade-là, mais on va y arriver graduellement avec le temps — et les familles qui gagnent 100 000 $, 150 000 $, 200 000 $, elles vont payer plus, elles vont payer plus, et ça, c'est équitable, à mon avis. Et, même pour ces familles qui paient au net 15 $ par jour, ça demeure un système qui est quand même hautement subventionné, et c'est beaucoup moins cher que n'importe où en Amérique du Nord.

Donc, à mon avis, c'est un changement, un changement important, un changement qui comprend certaines complexités, j'en conviens. Ce que vous avez dit en première partie, c'est aussi important, là. La différence de coûts CPE versus garderies privées, il y a aussi des changements à faire de ce côté-là aussi, oui, mais je tiens à mon point, que la modulation selon le revenu est une formule équitable de tarifer les services publics. C'était juste ça que je voulais mentionner.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. Alahmad, voulez-vous réagir?

M. Alahmad (Samir) : Oui, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, allez-y.

M. Alahmad (Samir) : Oui, s'il vous plaît. Écoute, on ne fera pas un débat, là, est-ce que c'est équitable et non équitable, mais juste une petite réflexion : Une famille qui fait 140 000 $ par année versus une famille qui fait 40 000 $ ou 50 000 $, la différence en impôt supplémentaire que cette famille paie, comparé à d'autres, ça sert à quoi? Si, à chaque service qu'on va utiliser, qu'on va payer plus d'impôt, plus de frais, cette différence d'impôt qu'on paie, ça sert à quoi? À un moment donné, il faut que ça serve à quelque chose. Moi, je suis prêt à payer des impôts, mais, si chaque service... parce que je fais plus que les autres, mais cette double imposition ou quoi... Et, deuxièmement, ce principe d'être équitable ou non équitable... Comme je disais tout à l'heure, l'enfant qui traverse chez nous, de l'autre côté de la rue, qui va à la maternelle, là, là, c'est zéro. Pourquoi c'est bon pour à partir de cinq ans et ce n'est pas bon à partir de quatre ans et moins ou cinq ans et moins comme société? Et, surtout, c'est un système qui s'autofinance.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Portneuf.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé, est-ce que vous aviez terminé?

Mme de Santis : Je voulais...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Allez-y, allez-y, continuez.

Mme de Santis : Je voulais simplement souligner que, quand le montant est fixe pour tout le monde, il y a certaines anomalies qui arrivent. Dans le système actuel, avec 7,30 $ par personne, par enfant, la contribution actuelle nette des personnes qui gagnent 50 000 $ et moins est plus que les personnes qui gagnent 100 000 $ ou 200 000 $. C'est un système que moi, là, je ne trouve pas équitable. Alors, c'est 7,30 $ par enfant, par jour, tout le monde, et ceux qui gagnent moins font une contribution nette plus importante que ceux qui gagnent beaucoup plus. Comment vous réagissez à ça? Parce que, aller à 9 $, cette anomalie va continuer à exister.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Alahmad.

M. Alahmad (Samir) : Mais c'est ça, c'est que ceux qui paient... Là, il faudrait qu'on parte de ce principe-là : l'impôt, ça doit servir à quelque chose. Quelqu'un qui est appelé à payer 40 000 $ en impôt... Une famille qui fait 140 000 $, là, ils paieront à peu près, selon mes calculs, minimum, 60 000 $ en impôt, comparé à une famille qui fait 40 000 $ puis qui ne paie pratiquement pas d'impôt. Bien, à un moment donné, cet impôt-là, ça doit servir à quelque chose. Si, à chaque service qu'on va avoir, on va payer plus, bien il faut voir tout l'ensemble. Les impôts qu'on paie, ça doit servir à quelque chose. Ces familles-là paient des montants substantiels en impôt, et c'est correct, on a besoin de payer l'impôt, on a besoin, comme société, de revenus, mais, à un moment donné, l'impôt supplémentaire, ça sert à quoi? Là, à ce moment-là, qu'on passe dans un système d'impôt unique pour tout le monde, mais là, à ce moment-là, à chaque service on va payer un peu plus.

Mme de Santis : Merci.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Leitão : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, M. le ministre.

M. Leitão : Je pense qu'on pourrait continuer, ce serait une discussion intéressante. Les collègues, je m'excuse, là, je prends tout le... mais c'est...

Des voix : ...

M. Leitão : Parce que, logiquement, là, si on continue cet argumentaire-là, je ne pense pas qu'on soit très loin l'un de l'autre. Quand vous mentionnez : Mais à quoi sert l'impôt que les gens paient déjà?, bon... Ça sert à financer toutes les activités de l'État. L'État, c'est beaucoup plus que juste les garderies. On a beaucoup de choses à payer, incluant 11 milliards, par année, de service d'intérêt sur la dette, et ça, cette facture-là, on va la traîner avec nous pendant longtemps encore.

Donc, ça, c'est une chose. Mais éventuellement, oui, vous avez raison, comme j'avais dit avant, éventuellement on aimerait que cette modulation soit encore plus prononcée, que les gens à bas revenus paient encore moins que 7 $ et que les gens à hauts revenus paient encore plus, mais, pour qu'on puisse faire ce changement-là... et on ne va pas le faire demain matin, ni la semaine prochaine, ni l'année prochaine, mais, pour qu'on puisse faire ce type de changement là, il faudrait... le quid pro quo, la contrepartie, ça serait de baisser l'impôt sur le revenu. Donc, c'est dans cette direction qu'éventuellement on va s'en aller. On ne peut pas le faire maintenant, on n'est pas encore à l'équilibre budgétaire, à court terme ça ne pourra se faire non plus, mais c'est dans cette direction-là qu'on se dirige. Voilà, c'est beau.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Portneuf.

M. Matte (Portneuf) : Merci, M. le Président. Bon matin et bienvenue à cette commission. Lors de votre présentation, puis je veux vérifier si j'ai bien compris, vous avez mentionné qu'un CPE de 80 places, comparé à une garderie de 80 places, il reçoit 2 758 $ de plus annuellement, sans tenir compte, là, des taxes.

Une voix : ...

M. Matte (Portneuf) : C'est bien ce que vous avez mentionné? Comment vous expliquez ça? Pourquoi qu'il y a 2 758 $ qui est versé de plus pour un enfant dans un CPE?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Alahmad.

M. Alahmad (Samir) : Nous, pour nous, on a toujours expliqué ça par l'efficacité de gestion. C'est parce qu'on est régis par les mêmes lois, mêmes règlements. C'est surtout l'efficacité de gestion. Tu sais, l'efficacité de gestion, c'est important. Je vous donne un exemple, puis je ne veux pas rentrer dans le détail, voir pourquoi... Pour nous, c'est un montant substantiel. Pour nous, ce n'est pas justifiable. Le 250 000 $ de plus, un CPE, en face, qui font exactement le même travail que nous, puis ils ont la même infrastructure, l'enfant, il mange exactement la même chose que nous, cette différence, c'est énorme. À un moment donné, quelqu'un, on doit se pencher là-dessus, faire une analyse assez avancée, une analyse neutre, équitable, voir pourquoi ces différences.

Nous, cette différence, ce n'est pas justifiable. L'efficacité de gestion; est-ce que des fois... Je donne un exemple : À un moment donné, tu vas faire une petite réparation, tu vas prendre le premier, le plus cher que tu vas l'avoir ou tu vas magasiner quatre, cinq endroits pour avoir un meilleur coût? Il y a beaucoup d'explications là-dessus, mais surtout dans la gestion, parce que ce n'est pas dans le ratio enfants-éducateur, ce n'est pas dans les autres coûts — matériel éducatif, récréatif — ce n'est pas dans la nourriture, ce n'est pas à nulle part. Et, comme j'ai dit, il y a beaucoup, beaucoup de garderies privées qui paient le salaire... comme les CPE.

• (10 h 10) •

Ça fait que nous, on voit qu'il y a de quoi à faire à ce niveau-là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Monsieur, vous avez terminé? M. le député de Sainte-Rose, environ deux minutes.

M. Habel : Parfait. Merci beaucoup, M. le Président. Premièrement, sur le premier sujet, concernant les modulations des frais de garde, effectivement je dois vous dire que moi, je trouve ça plus équitable, parce que 60 % des familles du Québec vont payer moins que la hausse qui avait été prévue ultérieurement, là, de 7 $ à 9 $, unilatéralement, et qu'avec les crédits d'impôt il n'y a pas beaucoup de personnes qui vont payer 20 $, là. Personne ne va payer 20 $. Au minimum, ça va être 15 $, là.

Mais, pour ce qui est de l'autre sujet... Parce que j'ai lu un peu votre mémoire, puis, en quelque sorte, vous invitez le gouvernement à cesser d'investir dans le béton, là, si je pourrais dire un peu, et vous invitez le gouvernement à aller davantage vers le privé. Moi, j'avais une question qui était simple, là : Croyez-vous que le gouvernement devrait laisser une plus grande place au privé? Et, si oui, pourquoi?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Alahmad? Mme Borrega.

Mme Borrega (Mona Lisa) : Nous, on pense qu'on devrait respecter la mixité de notre réseau. C'est sûr que, la dernière fois, le gouvernement... le dernier appel d'offres, on avait réservé 85 % des places dans les CPE, 15 % dans les garderies privées subventionnées. Nous, on a pensé que ça aurait dû être un peu plus élevé que le 15 %. On croit qu'on a une valeur. C'est une valeur ajoutée d'être mixtes, O.K., dans le réseau. La seule chose qu'on dit, c'est : Comment se fait-il qu'une garderie de 80 places, un CPE de 80 places, il y a 250 000 $ qui s'en va là en plus? Puis il y a une autre question à se poser aussi, comme on a dit dans le mémoire : Comment ça se fait qu'avec 250 000 $ de plus il y en a qui sont en déficit alors qu'il y en a qui font des gros profits? Ça fait qu'on dit : Il faudrait s'asseoir puis examiner la gestion. On trouve que ça, ça devrait être fait avant de penser à cette modulation-là. C'est un exercice qui doit être fait.

Se questionner 20 ans plus tard, c'est normal, et on est d'accord, c'est ce qu'on dit, mais, avant que ça coûte plus cher, est-ce qu'on peut s'arranger pour que ça coûte moins cher? C'est ça qu'on est en train de vous dire ici, à la commission, aujourd'hui. Puis les gens à qui vous voulez passer la facture, ils paient déjà cher d'impôt.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Borrega. Nous allons maintenant poursuivre du côté de l'opposition officielle avec M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Merci, M. le Président. Alors, merci à vous, Mme Borrega, Mme Quirion et M. Alahmad. Et puis, écoutez, votre mémoire évidemment nous a confortés dans notre position. Nous, de notre côté, vous le savez, on avait proposé précisément ce que vous suggérez. Et puis moi, j'ai entendu le débat qui a été initié par le ministre des Finances au sujet de l'universalité et je pense qu'il coupe un peu court. Enfin, je n'ai pas le goût de faire un débat entre lui et moi, mais moi, je retiens vos arguments.

Je retiens deux, trois choses sur l'universalité, puis l'argument peut-être le plus important, puis c'est là-dessus que j'aurais aimé vous entendre, c'est qu'à partir du moment où on module les services publics en fonction du revenu, l'accès aux services publics en fonction du revenu on désincite au travail, hein, on désincite à gagner des revenus. Et c'est assez clair, là, que, dans le fond, pour les hauts revenus, aller... il y a une désincitation à travailler à partir du moment où le fait de consommer des services de garde va augmenter, dans le fond, le taux de taxe effectif auquel sont assujettis les gens les plus riches. Dit en termes plus simples : pour les familles dans lesquelles il y a deux revenus puis où il y a un revenu plus faible que l'autre, hein... il y a des revenus asymétriques comme on en retrouve dans beaucoup de familles, c'est clair que, pour le deuxième revenu plus faible, la question va se poser de l'opportunité ou pas de participer au marché travail. Et, comme c'est encore le cas, je pense, pour 70 % des familles, que le revenu le plus faible est celui des femmes, d'une certaine façon, ce qu'on se retrouve à faire ici, c'est de fragiliser la participation des femmes au marché du travail. On peut facilement convenir... L'exemple que j'ai utilisé hier, c'était l'exemple d'une famille où on gagne 150 000 $ : 110 000 $ gagnés par l'homme et puis 40 000 $, par la femme.

À partir du moment où les tarifs de garde vont augmenter de façon aussi importante que ce qui est proposé par le gouvernement, il y a des gens qui vont se demander si ça vaut la peine, là, pour la femme de participer à un revenu de 40 000 $ mais assujetti à des tarifs de garde correspondant à un revenu familial de 150 000 $. Cette question-là va se poser. Moi, c'est là-dessus que j'aurais aimé vous entendre parler. J'aurais aimé vous entendre nous dire si, dans vos milieux, vous avez eu des discussions de cette nature-là avec des parents et même avec vos employés. Parce que je sais que vous embauchez, vous aussi, beaucoup de... Il y a beaucoup de femmes, là, qui sont les employés de nos garderies. Donc, j'aurais aimé vous entendre là-dessus. L'élément le plus néfaste, dans le fond, de la modulation, c'est ce frein à la participation des femmes. Et je sais que vous êtes en contact avec beaucoup de familles, et donc j'aurais aimé vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Borrega.

Mme Borrega (Mona Lisa) : Je vous remercie de la question, parce que j'aime toujours quand on prend les chiffres puis on ramène ça d'un côté un peu plus humain, et je pense que vous avez vraiment, vraiment, là, frappé juste. Nous, on travaille dans nos garderies à tous les jours, et c'est quelque chose qu'on entend de plus en plus : Je me questionne si je ne devrais pas rester à la maison avec les enfants.

Je vais vous donner un exemple. J'ai une maman à la garderie, elle a quatre enfants, O.K., elle est professeure, puis son mari est professeur. Elle, elle pense sérieusement qu'elle va rester à la maison, elle va arrêter de travailler. J'ai une de mes employées qui est venue me voir puis elle m'a dit... Quand même, en garderie, les éducatrices diplômées gagnent de bons salaires. Elle dit : Avec le salaire que fait mon mari, j'ai calculé, je serais mieux de rester à la maison, tant qu'à... elle demeure loin aussi, faire le voyagement avec l'enfant. Puis elle dit : Peut-être que je prendrais un enfant à la maison pour aider à boucler les choses. Bien, elle, elle va prendre l'argent à la maison, elle va arrêter de payer de l'impôt. Ça fait que tu regardes tout ce que ça peut apporter.

Il y a le fait de réactiver la garde au noir aussi qui nous fait peur. Mais ce que vous dites concernant : Est-ce que les femmes se posent la question?, c'est un gros oui, et je suis certaine que mes collègues ont déjà entendu ça, là, oui. Puis, malheureusement, c'est ça.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Et c'est un grand avantage effectivement des tarifs équivalents pour tous que justement... de prévenir ce genre de questionnement là. Écoutez, je vais laisser la parole à mon collègue de Terrebonne, qui est notre spécialiste en service de garde. Voilà.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Terrebonne, je ne sais pas si c'est votre âge qui vous rend spécialiste au niveau du service de garde, mais...

M. Traversy : En fait, M. le Président, c'est que j'ai déjà fréquenté les services de garde, ce qui fait de moi un spécialiste, là, en soi en la matière. J'ai été sur le terrain.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Vous êtes un de ceux qui a vécu l'expérience.

M. Traversy : Tout à fait.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Allez-y.

M. Traversy : J'ai testé le réseau, alors je peux vous en parler plus longuement.

Mais tout d'abord remercier l'AGPQ d'être présente avec nous aujourd'hui. Toujours aussi intéressant de vous écouter, là, sur les différentes pistes de solution et de proposition que vous nous faites. Très content aussi parce que vous nous permettez de ramener le ministre sur le plancher des vaches, hein? J'ai été très heureux de comprendre que le ministre était surpris de voir votre position dans le cadre, là, du projet de loi n° 28, notamment sur la tarification modulée. Tu sais, des fois, on dit que, lorsqu'on est ministre, on est dans une bulle puis on finit des fois par ne pas être tout à fait conscient de ce qui se passe au quotidien, là. Je pense que vous l'avez ramené aujourd'hui, là, dans la réalité. Et, s'il n'a pas pu peut-être avoir la chance de discuter avec sa collègue de la Famille depuis quelques semaines, quelques mois, aujourd'hui vous lui avez donné l'heure juste sur l'état de la situation dans le réseau des services de garde.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...prêter des intentions non plus, là.

M. Traversy : Non, non, mais ce que je veux dire, c'est que...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mais je veux juste vous ramener sur ça : il ne faudrait pas lui prêter des intentions.

M. Traversy : Mais je suis content, je suis content que le message a été entendu, parce que, M. le Président, moi, ça fait des mois que je joue avec tout ça, que je connais la position de l'ensemble des groupes. Eh bien, j'espère que ça sera peut-être une influence de plus dans la prise de position à venir, parce qu'on est en consultations et, donc, on espère toujours qu'après les discussions puis l'écoute il y aura peut-être des réajustements.

Alors, je lance, là, de bonne foi évidemment, là, cette invitation au ministre des Finances. Puis c'est sans direction, là, plus ou moins, là, sur une personne, parce qu'on a des anciens ministres aussi de notre côté puis on a le député de Sanguinet, là, qui s'arrange souvent pour nous ramener sur le plancher des vaches puis le quotidien. Puis moi aussi, je suis agrippé après la nacelle. Le député de Gaspé ne s'est jamais trop envolé, est toujours resté fidèle, là, donc, aux échos de la population.

Alors là, je m'égare et puis je vais revenir un peu, là, au projet de loi n° 28.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Ce serait intéressant, pour qu'on puisse poursuivre nos échanges.

M. Traversy : Tout à fait. On n'est pas encore à l'étude article par article.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Non. C'est ce que je voulais vous dire.

M. Traversy : Il faut que je me remette...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : C'est que nous sommes...

Une voix : On attend la question.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Nous sommes présentement en consultations publiques justement pour être capables d'apporter de l'éclairage sur le projet de loi, donc il faudrait poursuivre avec les échanges avec nos invités.

• (10 h 20) •.

M. Traversy : Tout à fait. Donc, première chose importante : écoutez, j'ai vu dans votre mémoire, là, tout d'abord quelques recommandations. Je suis plus d'avis, sur certains points, là, de ne pas commencer à comparer les différents modèles. Je vous ai exprimé à plusieurs moments que, le réseau des services de garde à contribution réduite, une de ses forces est sa diversité. Il ne faut pas tomber dans le piège à essayer de dire : Mon réseau est plus fort que l'autre. Puis je sais que, des fois, on a tous nos particularités puis nos avantages, nos inconvénients, mais, si on veut régler la problématique de fond dans le cadre du projet de loi n° 28, il ne faut pas se laisser emporter dans ce style de débat, qui divise plutôt que de réunir autour des vraies choses qui nous intéressent : l'universalité, la politique familiale et le développement des places, qui semble être aussi une de vos priorités.

Donc, j'aimerais vous poser une question suivante... Il y a plusieurs groupes qui sont venus avant vous nous dire qu'ils étaient intéressés à discuter, évidemment, de pistes de solution pour arriver aux objectifs que le ministre des Finances nous a lancés. Une de ces propositions était de dire : Il faudrait qu'on puisse lancer un chantier pour pouvoir regarder toutes les pistes d'optimisation possibles dans le cadre du réseau actuel des services de garde à contribution réduite. On voulait savoir si vous, vous étiez disposés à participer à une telle discussion. Je vois que vous avez, dans votre mémoire aussi, des propositions concernant la tarification des services de garde peut-être plus progressives ou en tout cas, du moins, moins radicales et qui conservent l'universalité. Est-ce que ce serait une avenue intéressante, selon vous?

Une voix : M. Alahmad.

M. Alahmad (Samir) : C'est sûr, on a toujours été disponibles puis on sera disponibles. Comme je disais tout à l'heure, ça prend une réflexion, ça prend une étude assez approfondie, de voir chaque système, comment ça peut être financé et pour pouvoir continuer à travailler, à oeuvrer dans le système sans pour autant — je peux me permettre de le dire — transférer la facture à un groupe de citoyens. On est toujours prêts puis on est toujours disponibles. Puis, je pense, c'est la solution qui s'impose. C'est la solution, c'est une réalité, on ne peut pas travailler autrement, à moins qu'on va improviser.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Terrebonne.

M. Traversy : Merci, M. le Président. Donc, vous êtes le troisième groupe au niveau de la famille... le quatrième, en fait, qu'on reçoit, là, depuis hier, et, je vais vous dire en toute honnêteté, les commentaires ne sont que généralement défavorables à l'égard de la proposition du ministre dans le cadre du projet de loi actuel. Il y a quand même des pistes de solution qui sont proposées, il y a des alternatives. On a eu hier la chance de discuter sur d'autres propositions, en comptabilité notamment, avec le conseil québécois de l'éducation à l'enfance. Alors, il y a différentes pistes de solution, mais on pense que, dans un sommet postchantier, il pourrait y avoir là... chantier, évidemment, là, suite aux discussions du rapport Boisvert, qu'il pourrait y avoir là une solution efficace.

J'aimerais que vous nous parliez aussi d'un aspect de votre projet de loi. Vous nous parlez de rattrapage salarial. Je sais que c'est un enjeu qui vous touche particulièrement à coeur. Quelle est la différence qui vient en plus s'ajouter à toutes les annonces qu'on sait actuellement du gouvernement, qui semblent vous... qui semblent, dans le fond, vous embêter dans le cadre, là, de votre mémoire aujourd'hui? Ce rattrapage salarial là, c'est une entente qui a été faite avec le gouvernement libéral mais qui n'est pas respectée aujourd'hui. J'aimerais juste que vous nous expliquiez un peu plus amplement cette situation.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Alahmad.

M. Alahmad (Samir) : Il y a trois ans, l'Association des garderies privées, on a fait beaucoup de représentations auprès des autorités, parce qu'à un moment donné, justement, c'est la différence du financement entre nous et les CPE pour le même travail. Il y avait des voix qui disaient que... oui, mais vous autres, vos salaires, ce n'est pas... équivaut aux salaires des CPE. Ça fait qu'il y a la portion... Je ne rentre pas trop dans le détail, c'est assez complexe, mais la portion salariale, où les frais variables... dans les CPE et chez nous, il y avait une différence marquée. Nous, on a dit au gouvernement : Il y a beaucoup de garderies au moment où on se parle... Il y a trois ans... et beaucoup plus vrai aujourd'hui qu'il y a trois ans, mais, il y a trois ans, il y avait beaucoup des services de garde subventionnés privés qui payaient exactement le même salaire et suivaient l'échelle salariale des CPE. C'est la seule différence qui existait. Et ces garderies-là sont pénalisées parce qu'elles n'ont pas la portion variable de la subvention. On ne parle pas de la subvention de l'infrastructure, on ne parle pas des autres subventions; seulement variables.

Le gouvernement, ils ont fait des études. On a fait un chantier à peu près un mois, deux mois, trois mois, puis on est arrivés à la solution : O.K., vous avez raison, mais on n'a pas l'argent. On va étaler cet ajustement sur cinq ans pour les garderies qui paient exactement le même salaire que les CPE et on va, oui, faire du rattrapage pour cinq ans. Au bout de cinq ans, vous allez avoir 100 % la portion variable, qui va aider... En fin de compte, ce n'est pas pour nous, comme gestionnaires, c'est pour les employés. On a eu trois ans de ce rattrapage. Malheureusement, cette année, parmi les coupures qu'on a tous subies, et à notre grand étonnement, parce que... je répète, ce n'est pas l'argent, pour nous, c'est l'équité pour nos employés qui font exactement le même travail et qui reçoivent exactement le même salaire que les CPE, le gouvernement, malheureusement, ils ont dit : Non, on gèle ça, cette entente, pour cette année, on ne sait pas l'année prochaine, on va voir. On a trouvé ça un peu spécial, parce que c'est vraiment l'équité pour nos employés. Puis on a négocié ça il y a trois ans avec un gouvernement libéral. Dans le temps, c'est Mme James qu'on a... on a négocié ça avec elle.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Terrebonne.

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Je tenais à essayer d'avoir un peu plus de précisions, parce que, bon, évidemment, dans le document qui nous a été donné, on disait que c'était «l'insulte à l'injure», que c'était un nivellement vers le bas. Donc, je trouvais ça important que vous puissiez nous expliquer un peu plus en détail, là, qu'est-ce qui venait vous chicoter. Puis, évidemment, c'est les employés qui sont directement touchés par ce genre de mesure.

Il y a beaucoup de groupes qui sont venus nous voir pour nous témoigner aussi de situations qui provenaient des parents qui fréquentent vos réseaux, des intervenantes en garderie. Plusieurs nous ont dit qu'il y avait une ambiance ou une atmosphère un peu d'inquiétude, d'anxiété, que la proposition, là, moduler selon les revenus, qui nous est proposée dans le projet de loi actuel allait être compliquée, lourde, complexe, dure à gérer puis que les gens, notamment les jeunes familles, auraient de la difficulté à prévoir un peu le coût que ça pourrait représenter, puis là il y avait plein de particularités : s'il y a divorce, s'il n'y a pas divorce, si on met beaucoup dans nos REER cette année, si on n'en met pas, si... bon, dépendamment du nombre d'enfants. Donc, il y avait toutes sortes de données dans l'équation qui rendaient difficile de prévoir de façon claire, là, les coûts.

Je voulais voir si vous, dans votre réseau, vous aviez des échos, des inquiétudes qui vous étaient transmis par rapport à la proposition du gouvernement.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Borrega.

Mme Borrega (Mona Lisa) : Oui, effectivement, il y a beaucoup d'inquiétude à ce niveau. Un peu comme on le dit présentement, là, les femmes vont se poser des questions : Est-ce que je devrais peut-être arrêter de travailler ou quoi? Mais c'est sûr qu'une des choses où ça va se jouer le plus, là, ça va être au niveau des congés de maternité. Les femmes en congé parental, en congé de maternité vont premièrement se poser la question : Au lieu de retourner au travail en septembre, je vais retourner en janvier, comme ça... Il va y avoir cette question-là qui va être posée. Elles vont calculer leurs salaires puis dire : Bien, peut-être que je devrais travailler moins. Mais, par le même effet, quelqu'un qui a l'opportunité d'avancer en carrière va peut-être prendre la décision : Bien, je vais attendre. Il y a toute sorte de gymnastique qui va se faire. Puis on me dit : Pourquoi faire ça?

On suggère deux pistes : un, revoyons si on ne peut pas faire plus avec qu'est-ce qu'on a en ce moment, puis, deuxièmement, augmentons le 7 $ pour le rendre... Si on l'avait indexé à venir à aujourd'hui, il serait à 9 $. Puis on aurait aimé beaucoup aussi être invités à la commission pour présenter... parce qu'on a présenté quelque chose à la commission sur la révision des programmes, mais on n'a jamais été appelés pour venir en discuter. Ça fait qu'avoir une discussion...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Borrega...

Mme Borrega (Mona Lisa) : ...ce serait super.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...merci. Encore une fois, je dois vous interrompre pour donner la parole au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Granby.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Alors, oui, de mon côté, pour votre bonne gouverne, je n'ai pas fréquenté les services de garde — cela trahit peut-être mon âge — mais mon fils, oui.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Granby, je n'en doute même pas.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Bonnardel : Ah! d'accord, d'accord. Mais, comme ancien porte-parole à la famille, au début de ma carrière politique... On s'est rencontrés maintes et maintes fois, et j'ai comme l'impression en lisant et en voyant votre mémoire que, si on se ferme les yeux, on revient en 2008, et vous avez les mêmes doléances aujourd'hui... ou presque, hormis l'idéologie différente que le gouvernement a aujourd'hui, de moduler les tarifs versus un tarif unique. Je ne pense pas qu'on aurait cette discussion aujourd'hui si on n'avait pas utilisé le réseau à des fins électorales et je m'explique. À savoir, à la naissance de ce réseau, si on avait indexé les tarifs comme on aurait dû le faire, comme pour tous les tarifs en général, on n'aurait pas ce défi aujourd'hui, à savoir : Est-ce qu'on module d'un côté ou on a un tarif unique?

Ma seule question, avant de laisser, moi aussi, la parole à ma collègue qui est responsable de la famille aujourd'hui... À la page 8, vous dites : La contribution réduite universelle, on devrait l'augmenter de 2 $. Hier, on recevait le Conseil québécois des services de garde éducatifs à l'enfance, et eux nous disent : On pense que le tarif unique à 10,30 $ serait l'idéal. Et ma question va être assez simple, à savoir : Quel est le calcul que vous avez fait pour nous dire aujourd'hui que 2 $ seraient l'idéal, pour vous? Et, si vous avez fait ce calcul, quelle serait la contribution parentale? Parce que, il faut bien savoir, la contribution parentale, lors de l'arrivée des libéraux en 2003-2004, était de 17 %. On en est rendu à 13 % aujourd'hui. Eux veulent l'amener à 20 %. Est-ce c'est le même objectif que vous souhaitez avec ce 2 $ par jour? Et, si vous êtes capables de nous énumérer... ou nous dire : Bien, le calcul, on l'a fait ou on a pris ce chiffre, là, pour dire : Bien, c'est ça qui devrait être l'idéal aujourd'hui pour les parents... Voilà.

• (10 h 30) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Alahmad.

M. Alahmad (Samir) : Si on va depuis 2003 à maintenant, avec une simple indexation au coût de la vie, le coût de programmes, on arrive à 9 $, premièrement. Deuxièmement, le chiffre de 2 $, ça a été déjà avancé par l'ancien gouvernement puis ça a été assez publicisé. Puis, dans la majorité des services de garde, les parents... on a eu des discussions avec nos parents, puis les parents étaient tous prêts à payer, peu importe leur niveau de revenus. Chez nous, on a fait des assemblées, on a fait des réunions. La très, très, très grande majorité de nos parents, ils ont dit : On adhère là-dessus, le 2 $. Et le 2 $, ça représentait une évolution normale, que ça soit l'inflation, que ça soit le coût de programmes d'aujourd'hui. C'est pour ça que nous autres, le chiffre, le 9 $, on l'a avancé. Ça a déjà été testé, ça a déjà été accepté. Comparé à la modulation, vraiment, il y a une certaine inquiétude présentement qui n'était pas là il y a deux ans, sur le chiffre de... le 2 $ de plus versus la modulation.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Bonnardel : Une dernière question rapide.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui. Allez-y, M. le député.

M. Bonnardel : Est-ce que, pour vous, le 20 %, la contribution parentale, à savoir la modulation, va amener... Ce pourcentage, pour vous, c'est trop ou ça devrait être moins?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Alahmad.

M. Alahmad (Samir) : Le 20 %, si on se fie au... Depuis le lancement du programme, c'était 20 %. Selon le coût aujourd'hui, le 20 %, ça reste, mais il faut aussi ne pas se lancer uniquement sur le coût de programmes. À un moment donné, il faudrait avoir un certain contrôle des coûts. Là, on a vu qu'est-ce qui se passe dans le dossier milieu familial avec l'explosion du coût avec la syndicalisation puis tout ce qui venait avec. Là, à un moment donné, il faut contrôler ce coût-là. On ne peut pas laisser le coût aller puis on transfère aussi de la même façon la facture à droite puis à gauche.

M. Bonnardel : D'accord.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Oui. Merci d'être parmi nous. Bon, on parle beaucoup des coûts de garderie. Là, on a la proposition qui est faite par le gouvernement. Je vais vous lire ceci : «Au cours des années passées, les gouvernements précédents ont largement utilisé leur capacité d'accroître les revenus de l'État en augmentant les impôts [et] les taxes. Les contribuables québécois sont maintenant parmi les plus imposés en Amérique du Nord, et cette imposition a atteint ses limites.» Donc, c'est dans le discours sur le budget 2014‑2015.

On a assisté, depuis l'arrivée du gouvernement actuel, à des hausses de taxes municipales, hausses de taxe scolaire, hausses d'Hydro-Québec. Donc, ça s'additionne avec en plus la présentation de la hausse des frais de garderie telle que présentée. Et c'est toujours les mêmes qui paient tout ça; la famille moyenne. Donc, vous, avec vos employés et les familles que vous côtoyez, depuis ce discours du budget là, qui semblait dire qu'on avait atteint notre limite... Je ne le sais pas, je pense qu'on n'a pu l'atteindre, de toute évidence, puisqu'on continue. Les familles, autant celles qui travaillent pour vous que les familles qui viennent porter vos enfants en garderie, comment elles réagissent à tout ça?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Borrega.

Mme Borrega (Mona Lisa) : La réaction est une grande déception. Les gens viennent me dire : Moi, quand j'ai entendu ce qu'on nous avait promis, une indexation, on était content, c'était bien pour la famille, puis, tout à coup, le gouvernement arrive au pouvoir, ils veulent revoir les congés parentaux, ils veulent revoir maintenant nos... enlever le système universel. On a arrêté complètement le développement. Parce qu'il faut penser aussi qu'il y a des gens qui n'ont pas de place du tout, là. Alors, c'est pour ça que nous, on dit : Dans l'économie qu'on pourrait faire en révisant qu'est-ce qu'on fait, si on suit nos recommandations, on peut aller chercher de l'argent pour développer, mais il faut voir... c'est important aussi de s'asseoir puis voir c'est quoi, les retombées économiques de ce système-là, avant de vouloir tout chambarder, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Tout à l'heure, le ministre des Finances a dit cette phrase suivante : Je ne pense pas que les familles ne soient pas capables de gérer cette complexité. La vie est compliquée. Selon vous, est-ce que vos familles sont capables de gérer cette complexité?

Mme Borrega (Mona Lisa) : Moi, je pense que...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Borrega.

Mme Borrega (Mona Lisa) : Excusez. Je pense que, si je faisais un sondage... Ils ne sont même pas capables de remplir leurs rapports d'impôt. Ça fait que, de là à aller faire ça... Puis, chaque année, quand on remet... si on remplit un relevé 24, ou quoi, ils viennent me voir puis disent : Je fais quoi avec ça, hein? Ça fait que, non, la jeune famille comme ça, c'est rare, les gens qui vont être capables de gérer cette complexité-là. Puis c'est ça qui les inquiète aussi, parce que c'est comme : à la fin de l'année, ils vont avoir une facture-surprise. Qu'est-ce qu'ils vont faire? On va aller l'emprunter pour être capable de la payer? On va attendre de contribuer aux REER? On n'ira pas en vacances cet été parce qu'on a peur d'avoir peur? Ils ne seront pas capables de le calculer.

Mme Lavallée : Et, selon vous...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme la députée.

Mme Lavallée : Excusez-moi. Selon vous, parce qu'effectivement on comprend que les familles vont payer toujours le 7,30 $ par jour, donc — mais il ne faut pas qu'on s'assoie là-dessus, parce que la facture va arriver à la fin de l'année — comme les gens ont déjà de la misère à contribuer aux REER... Parce qu'on se fait dire qu'il faut contribuer aux REER pour penser à nos vieux jours, hein, parce qu'à un moment donné peut-être que les gouvernements ne pourront pas assumer cette facture-là non plus. Ils n'ont déjà pas les sous pour ça. Selon vous, est-ce qu'ils vont être capables, en mesure d'acquitter une facture qui risque d'être de 1 000 $, 2 000 $, 3 000 $, 4 000 $, 5 000 $?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Borrega.

Mme Borrega (Mona Lisa) : Si on pensait que ce serait facile, on ne serait pas ici. Une des raisons aujourd'hui... On a été les premiers, nous, à se prononcer sur la place publique dès que M. Couillard est sorti avec son annonce, là, au mois de mai, à dire qu'on était contre, parce que, premièrement, il parlait de 10 $ pour des gens qui gagnent son revenu, puis, aujourd'hui, on parle de 20 $ pour des familles qui gagnent son revenu. Ça fait que ce n'est plus du tout, du tout la même chose et ça fait peur à énormément de personnes.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée, 1 min 30 s.

Mme Lavallée : Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : 1 min 30 s.

Mme Lavallée : Je finirais en vous demandant de nous parler de la qualité, parce qu'hier on en a entendu parler. Ça revient souvent, hein, les garderies privées, elles n'ont pas de service de qualité, elles ont beaucoup de plaintes. Juste pour le bénéfice des gens qui nous écoutent et le bénéfice des gens qui nous entourent ici, nous reparler de cette... je ne sais pas si on peut appeler ça une légende urbaine, au niveau de la qualité de vos services.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Borrega.

Mme Borrega (Mona Lisa) : Je vous remercie de votre question. Et il va y avoir des nouvelles statistiques là-dessus. Le registre des plaintes au ministère de la Famille, ce sont les plaintes reçues, O.K.? Il y a deux modèles de gestion de plainte : le milieu privé puis les CPE. Les CPE, les plaintes sont déposées au conseil de parents, au comité de parents, et ça doit être réglé là. Ce qui n'est pas réglé là, ça s'en va au ministère de la Famille. Dans le secteur privé, ça s'en va directement au ministère de la Famille.

Maintenant, avec les représentations qu'on a faites — il y a un comité-conseil des inspections — on va avoir des nouvelles statistiques. Premièrement, le milieu de garderies privées subventionnées et garderies non subventionnées, les plaintes sont comptabilisées ensemble. Ça va être séparé en deux. À l'intérieur de ça, ils vont séparer les plaintes qui sont reçues et les plaintes qui sont retenues. Alors, ça, ça va être séparé en deux. Et, encore, dans les plaintes qui sont retenues — ça veut dire qu'il y a un inspecteur qui y a été puis il a été voir — ils vont séparer les plaintes qui ont été retenues, qui sont non fondées et les plaintes qui ont été retenues avec correctif, et on nous a affirmé que les chiffres vont être complètement, complètement différents.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Merci, Mme Borrega, de cette précision. Écoutez, je remercie les représentants de l'Association des garderies privées du Québec et je demanderais à la Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec de prendre place. Merci de votre participation.

Je suspends les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 10  h 39)

(Reprise à 10 h 41)

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous avons le plaisir de recevoir le groupe représentant la Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec, représentée par Mme Marie-Claude Collin, présidente — bonjour, madame — et Mme Line Fréchette, vice-présidente.

Donc, bienvenue à la Commission des finances publiques. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. La parole est à vous.

Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec

Mme Collin (Marie-Claude) : Bonjour, M. le Président. M. le ministre, MM. et Mmes les députés, bonjour. Je suis Marie-Claude Collin, présidente de la Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec, et je suis dans le réseau depuis plus de 30 ans.

Mme Fréchette (Line) : Line Fréchette, vice-présidente de la Coalition des garderies privées non subventionnée du Québec, et dans le réseau depuis 20 ans.

Mme Collin (Marie-Claude) : La Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec apprécie l'opportunité qui lui est offerte de s'exprimer sur le projet de loi n° 28. Plus particulièrement, nous allons aborder avec vous les lois sur les services de garde éducatifs à l'enfance. Nous avons analysé ce projet en s'appuyant sur les bases budgétaires, ici, émises par le ministère de la Famille et en tenant compte des besoins des parents utilisateurs.

Depuis 1997, avec la venue des CPE, le réseau de garderies au Québec a changé considérablement. Il y a eu l'augmentation grandissante des familles pour l'obtention de places en garderie à contribution réduite, la conversion des garderies privées vers des CPE, la conversion de garderies privées vers des garderies subventionnées et l'implantation des places en milieu familial en grand nombre. Au cours de cette période, les garderies privées non subventionnées ont toujours été présentes pour aider à combler les besoins des parents et à soutenir le réseau.

En 2015, les familles d'aujourd'hui ne sont plus les mêmes. Les besoins ont changé. Après 18 ans d'existence, le réseau est à sa pleine capacité. Le ministère de la Famille, conjointement avec le ministère des Finances, doit maintenant l'ensemble des parents tout en respectant la capacité de payer des contribuables.

Depuis le premier jour de nos revendications en novembre 2011, nous avons dénoncé les budgets faramineux et les surplus dans les CPE ainsi que la fragilité financière du réseau en raison de la construction de nouveaux CPE. En nous basant sur les règles budgétaires et le Programme de financement des infrastructures, pour les CPE nous constatons des sommes astronomiques que les contribuables doivent verser pour la construction de chacune des installations. Il est important de savoir qu'un nouveau CPE reçoit plusieurs millions de dollars en subvention afin de défrayer les coûts de construction, d'acquisition d'un immeuble, d'adaptation aux normes, d'améliorations locatives, le réaménagement, l'agrandissement, les locaux et la rénovation d'une installation. De plus, il va recevoir une enveloppe pour le mobilier et l'équipement. Le CPE va également bénéficier d'une enveloppe pour l'aménagement extérieur paysager. Des enveloppes sont également données aux CPE pour les jeux extérieurs, l'achat d'un terrain, les honoraires professionnels. Une fois construit, le CPE reçoit des subventions pour le fonctionnement — salaires, régimes d'assurance collectifs, régimes de retraite — ainsi que plusieurs autres allocations prévues dans les règles budgétaires du MFA.

Étant donné que le CPE est un OSBL, celui-ci reçoit un remboursement de la TPS et de la TVQ, une exemption des taxes foncières dans la municipalité en raison du pacte fiscal. Si l'on additionne tous les montants subventionnés par l'État, un CPE, chaque place coûte environ 190 $ par jour. Ce chiffre-là nous a été donné par un ministre... un ou une ministre lors d'une émission de radio, à Jean Lapierre, quelques semaines avant les élections 2014.

Les garderies privées non subventionnées sont déjà partenaires avec le MFA en détenant un permis et soumises aux mêmes lois et règlements que les autres partenaires, à la seule différence : des règles budgétaires.

Suite à la demande de l'ex-ministre de la Famille Nicole Léger, nous avons produit l'enquête qui s'intitule Portrait des services de garde non subventionnés au Québec. Cette enquête a été effectuée en collaboration avec le ministère de la Famille. Pour lancer notre réflexion et bien résumer l'objectif de cette nouvelle mesure, considérant la conjoncture économique actuelle, nous devons maximiser l'offre de services dans le réseau des garderies éducatives et répondre aux besoins des familles du Québec aujourd'hui. Ce sont des services qui répondent aux plus hauts standards de qualité, des services qui respectent la réglementation en vigueur, notamment en ce qui a trait à l'obligation d'offrir des infrastructures sécuritaires, un programme éducatif à l'enfance et répondre aux lois et aux règlements du ministère. Les garderies privées subventionnées ou non subventionnées investissent de grosses sommes d'argent, parfois plus de 1 million de dollars, pour la construction d'une installation. Chacune de ces sommes est investie personnellement par le propriétaire de la garderie, bien sûr, avec des partenaires comme, style, les banques et les caisses. Ce sont des entrepreneurs, pour la majorité des femmes, qui ont à coeur les enfants et la satisfaction de leur clientèle, c'est-à-dire les parents.

Il est donc évident que les services de garde québécois, que ce soit CPE, garderies privées subventionnées ou non subventionnées, offrent déjà l'encadrement souhaité aux enfants. La vraie question est maintenant de savoir comment nous pourrions maximiser les places et répondre le plus équitablement auprès des parents du Québec qui recherchent encore aujourd'hui des installations à contribution réduite.

Au cours de la dernière année, le réseau de garde au Québec a atteint une maturité. Nous voyons clairement un phénomène de déplacement d'enfants vers des installations plutôt que vers des places vacantes en milieu familial. Les parents préfèrent payer une somme plus importante pour le bien-être de leurs enfants et opter pour une place en installation plutôt qu'en milieu familial. Actuellement, les listes d'attente des CPE sont composées de nos enfants dans nos installations non subventionnées ainsi que les enfants présentement dans un service de garde en milieu familial, même si celui-ci est à 7,30 $. La véritable problématique tient au fait que les familles veulent des places à contribution réduite en installation. Les familles ne veulent pas payer une grosse somme d'argent au quotidien. Avec le retrait des places fantômes, qui coûtent au contribuable 280 millions de dollars, le gouvernement pourrait faire la conversion, avec cette même enveloppe budgétaire, de tout près de 280 garderies privées non subventionnées de 80 places, ce qui représente plus de 23 000 enfants. Il y a des milliers de places dans les garderies privées non subventionnées, qui pourraient répondre aujourd'hui aux besoins des familles.

En ce qui a trait à la modulation des tarifs de garde, une majorité de parents sont prêts à payer jusqu'à 10 $ par jour, à l'occurrence de 1 $ de l'heure, pour avoir un service. Par contre, avec l'ajustement du côté fédéral, le coût est, malgré tout, plus élevé pour les parents qui occupent une place dans une garderie privée non subventionnée. Mais arrêtons de faire de la spéculation avec les différentes tarifications; les garderies privées non subventionnées, le vrai montant est bien au-delà de 35 $ par jour pour être en mesure bien répondre aux exigences du MFA. Le dernier ajustement du remboursement anticipé fut en 2010. Les parents, tout comme les garderies, ont eu des augmentations du coût de la vie considérables.

Pour faire suite à l'enquête des garderies privées non subventionnées, le coût minimal d'une place est de 47 $ par jour pour rencontrer les frais d'opération et les salaires des éducatrices. Nous sommes en bas du prix d'une place dans un service subventionné. Également, pour le remboursement anticipé, un dépôt des sommes pourrait être versé dans les garderies détenant un permis, afin de minimiser les arrérages des comptes clients. Actuellement, plus de 81 % des parents accusent un retard pour les frais de garde. Nous pouvons affirmer que les places en service de garde ont atteint une certaine maturité, que la demande des places en milieu familial est en déclin au Québec. C'est certainement une piste à approfondir. Une bonification de l'aide gouvernementale dans les garderies privées non subventionnées serait une mesure incitative intéressante au même titre que les garderies privées subventionnées existantes. Plutôt que de développer de nouvelles places dans les CPE, d'engager de nouveaux investissements et de construire de nouvelles installations, nous croyons qu'il serait plus judicieux d'utiliser encore davantage le réseau des garderies privées et d'inclure tous les partenaires.

Nous reconnaissons tous que le Québec a su développer un réseau de garde de qualité appliquant des normes élevées et offrant des services éducatifs adaptés. Le développement de ce réseau est maintenant complété. Maintenant, il faut éviter de fragiliser le réseau de garderies, que nous avons bâti ensemble, en construisant de nouvelles installations souvent à proximité d'une garderie privée non subventionnée.

Dans la conjoncture économique actuelle du Québec, la Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec est d'accord et demande la modulation des tarifs de garde — les parents veulent avoir un réseau équitable aujourd'hui ou universel; la conversion des garderies privées non subventionnées existantes depuis janvier 2012 — les garderies sont déjà construites et en service, elles peuvent être évaluées selon les critères établis; le retrait de 15 % des places en milieu familial lors de la première année — les places en question sont d'ailleurs inoccupées mais, malgré tout, présentement financées à grands coûts par les contribuables; d'alléger le fardeau fiscal des parents avec l'augmentation du remboursement anticipé, qui devrait être revu à la hausse, de 35 $ à 47 $; le dépôt des chèques du remboursement anticipé aux garderies privées non subventionnées détenant un permis du MFA.

Il est temps, avant d'envisager la nouvelle construction d'infrastructures, de s'assurer de compléter le développement du réseau de garderies déjà existant et d'offrir à chaque famille un accès à des places subventionnées et équitables avec la participation des garderies privées non subventionnées. Les Québécois sont fiers de leur réseau de garde. Nous devons, d'abord, nous assurer de combler la demande des parents. À l'origine, la création du réseau québécois de services de garde visait à offrir à toutes les familles un service de qualité, un service équitable, uniforme, sécuritaire et accessible à tous les enfants maintenant.

• (10 h 50) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Collin, de votre présentation. Donc, nous allons entamer nos échanges avec les parlementaires et nous allons débuter du côté ministériel. M. le ministre.

M. Leitão : M. le Président, merci beaucoup. Mme Collin, Mme Fréchette, merci d'être venues et de nous faire part de votre mémoire, de vos préoccupations. C'est bien apprécié, c'est bien noté. Merci beaucoup. Mais, peut-être juste avant de commencer avec vous, j'aimerais juste amener une précision à ce qui a été dit dans le groupe précédent. Un des facteurs qui était mentionné comme étant une source d'inquiétude des parents, c'était que le gouvernement va changer le régime d'assurance parentale. Ça n'a jamais été question de faire quoi que ce soit avec le régime d'assurance parentale. Donc, je pense, on a déjà assez de problèmes à régler comme ça, on n'a pas besoin d'en inventer des nouveaux. Ça, c'est clarifier les choses. O.K.

Maintenant, pour ce qui est de nos oignons... intéressant, très intéressant, votre mémoire. J'ai trouvé surtout intéressante cette question de pénurie de places. En fin de compte, si j'ai bien compris, à votre avis, il ne manque pas de places, les places sont là, c'est une question de réalignement, réorganisation du système pour que les places existantes puissent être comblées. Est-ce que c'est bien ça, ce que j'ai compris?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Oui. Nous, dans les garderies privées, on est rendus à plus de 50 000 places. Il y a à peu près, je pourrais dire... en janvier, on doit arriver à tout près de 60 %, 65 % des places occupées, donc il reste beaucoup de places inoccupées. Donc, on voit que le réseau a atteint une certaine maturité. Des places, il n'en manque pas. Ce qui manque, c'est des places à contribution réduite. De plus en plus, on sent que les parents veulent des installations et non des milieux familiaux. Mais les installations, c'est dans les régions urbaines. Quand on parle des campagnes ou des régions plus éloignées, où c'est des plus grands territoires, comme dans... chez M. Marceau, votre territoire, bien là la garde en milieu familial, elle a sa place, elle est comblée. Puis on l'a vu avec les chiffres, avec des tableaux qu'on a remis à la commission la semaine dernière.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Merci. Une autre question. Et cette fois-ci, les collègues, je promets, je vous laisse la place, parce que j'ai pris beaucoup de temps avant. Mais une question aussi qui revient régulièrement dans nos discussions, c'est cette impression... peut-être plus qu'une impression, mais en tout cas que les familles québécoises sont très désorganisées, les pauvres, elles ne savent pas quoi faire. Vous, dans votre réseau, justement, donc, les frais sont élevés, et donc les gens s'ajustent pour pouvoir aller chercher les compensations fiscales qui existent. Avez-vous cette impression que les familles québécoises sont vraiment si désorganisées que ça qu'elles ont besoin que l'État les prenne par la main et qu'il les amène à la terre promise?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Je dois vous répondre oui. Elles sont désorganisées. Nous, on fait affaire avec le remboursement anticipé. Oui, les gens ne savent pas quoi faire avec les formulaires, l'envoient tard, ne reçoivent pas de réponse. Oui, elles sont désorganisées. Il faut les prendre... je ne dirais pas qu'il faut les prendre par la main; il faut simplifier les demandes. Ça fait que, oui, quand on leur dit qu'ils doivent... Je parle pour notre réseau à nous. Ils doivent faire une demande de remboursement anticipé, ils viennent nous porter les papiers à notre bureau. Mais nous, on n'est pas responsables de ça. On leur dit : Envoyez-les.

Le problème provient aussi un peu des finances, parce qu'une fois sur deux le parent reçoit un accusé de réception et, quand il manque un papier, bien il sait si, le 15 du prochain mois, il a reçu de l'argent. S'il n'a pas reçu de l'argent, il appelle, puis là, bien, le ministère lui dit : Bien oui, vous ne nous avez pas envoyé tel papier. Hé! tu ne pouvais pas me le dire avant, là? Mais je ne dirais pas «la totalité». J'établis toujours la règle du 50-50 : il y a 50 % des parents bien organisés puis il y en a 50 %, des moins bien organisés. Ça, c'est la règle de base partout. Mais, oui, il y en a qui sont désorganisés.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : D'un autre côté — j'en prends bien note — vous constatez aussi que la bureaucratie est complexe, et ça, ce n'est pas seulement dans votre milieu qu'on entend ce constat, et on voit qu'un peu partout au Québec, dans toutes les sphères d'activité, la bureaucratie et la paperasse, c'est un enjeu. Et c'est quelque chose qu'on doit aussi... on prend note.

Je prends note aussi de votre souhait ou de votre désir que le remboursement anticipé soit augmenté. On va aussi regarder ça. Maintenant, je laisse la parole à mes collègues.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, la parole est à vous.

Mme de Santis : Merci, M. le Président. Bonjour. Merci d'être là. Merci de votre mémoire. J'aimerais poser quelques petites questions sur certaines déclarations que vous avez faites dans votre mémoire. Vous dites que «81 % des parents accusent un retard pour les frais de garde». D'où vient ce chiffre?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Suite à l'enquête des garderies privées qu'on a faite à l'époque, ça a été... en collaboration avec le ministère de la Famille... C'est là-dedans qu'on a eu les chiffres de «81 % des parents accusent un retard». Il y a des retards qui sont plus légers, il y en a d'autres qui sont plus élevés. Mais je peux vous dire que ça peut aller, mois après mois, jusqu'à 20 000 $ de comptes clients dans les garderies privées non subventionnées. Lorsque le parent reçoit son chèque, des fois il reçoit des sommes de 500 $, 600 $, 700 $ par mois. Bien, si la voiture brise, cette somme-là s'en va à la voiture; si l'ordinateur est brisé, ça s'en va au changement d'ordinateur. On voit beaucoup de comptes à recevoir à Noël, la rentrée scolaire, aux paiements de taxes municipales puis à l'automne, quand les parents partent en vacances. Nous, on n'est pas payés.

Ça fait que c'est là l'injustice un peu, qu'on demande à ce que, lorsqu'un enfant... Parce qu'on fait la déclaration d'un enfant qui vient dans notre garderie, mais, lorsqu'il vient dans notre garderie, avec le numéro du permis de notre garderie, bien le chèque du parent devrait être automatiquement déposé dans nos comptes bancaires. On éviterait, premièrement, au parent, de lui dire : Tu nous dois 185 $ ou 200 $ par semaine. On lui dirait : Bien, tu nous dois 100 $ par semaine. Déjà, mentalement, dans la tête du parent, ça lui coûte moins cher.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.

Mme de Santis : Donc, le 81 %, c'est pour le réseau privé non subventionné.

Mme Collin (Marie-Claude) : Exactement.

Mme de Santis : Parfait. Aussi, vous dites qu'il y a beaucoup de places en milieu familial qui sont inoccupées et vous demandez un retrait de 15 %. D'où vient ce chiffre?

Mme Collin (Marie-Claude) : On a fait, depuis...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Excusez, M. le Président, j'ai parlé un peu vite.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mais non, ce n'est pas grave, continuez. Ça me permet de donner l'information pour fins d'enregistrement.

Mme Collin (Marie-Claude) : Je suis une passionnée là-dedans.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, et c'est ce que je constate.

• (11 heures) •

Mme Collin (Marie-Claude) : Nous, à la coalition, depuis 2011 qu'on travaille très, très fort, et ça fait deux ans qu'on s'aperçoit qu'il y a un transfert d'enfants. Bon, nos enfants quittent notre installation pas par choix, mais par choix budgétaire, parce que ça coûte 7 $ dans une installation, il y a de la place.

Donc, on voit de plus en plus — et cette année ça a été énorme — ce déplacement-là. Nous, ce qu'on reçoit pour combler nos garderies, c'est les enfants en milieu familial même qui paient 7 $. Bon. Ça a commencé l'année passée. Cette année, on s'est dit : On va faire un exercice. Dans toutes les régions du Québec, on s'est mis une équipe et on a téléphoné dans les milieux familiaux. C'est sûr que je ne m'appelais pas Marie-Claude Collin quand je téléphonais à Blainville, là. Juste à Blainville, j'ai trouvé 300 places de disponibles. Puis les députés et la ministre de la Famille ont les tableaux. Dans plusieurs régions, on a trouvé énormément de places. Puis on a fait à peu près toutes les régions administratives, là, on s'est promenés un petit peu partout. Le constat a été que, dans les milieux urbains, il y a beaucoup de places disponibles à 7 $. On appelait chez la dame qui s'affichait un peu partout, et, lorsqu'on appelait au bureau de coordonnateurs, la place, elle était complète. Donc, on paie pour des... Elle est complète à six. On paie pour la dame pour six enfants, mais en réalité elle en a un ou deux. Puis on en a fait, là, beaucoup, de téléphones, là, des milliers de téléphones. Puis les bureaux de coordonnateurs ne savaient pas que ces gens-là avaient de la place. Ça fait que c'est comme ça qu'on s'est aperçus qu'il y avait énormément de places qui étaient vacantes dans les milieux familiaux.

Ça fait que, si on coupe 15 % des places sur... — attendez, je vais vous dire le chiffre exact — 91 000, bien c'est des places... Pas dans toutes les régions, là. Mais, quand on parle de la région... Rousseau, qui est un grand territoire, que c'est des petites municipalités, les gens se connaissent, donc se font confiance. Mais, dans une région qui est plus urbaine, que ce soit Drummondville, Blainville, Montréal, les gens ne se connaissent plus, ça fait que les gens ne font pas confiance au milieu familial. De là vient que la garde en milieu familial est en déclin.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.

Mme de Santis : J'aimerais comprendre la conclusion du mémoire. Est-ce que vous êtes d'accord que la mixité que nous avons présentement dans le système de services de garde éducatifs est bien? C'est-à-dire, les services de garde privés subventionnés et privés non subventionnés, CPE et milieu familial, est-ce que vous êtes d'accord que cette mixité-là est bien pour le réseau?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Elle est bien pour le réseau, mais ça doit être équitable pour nos parents qui occupent ce réseau.

Il y a des gens dans les garderies privées non subventionnées qui veulent devenir des CPE. Pourquoi en construire d'autres quand il y en a qui sont prêtes à faire la conversion? Il y a des garderies privées non subventionnées qui veulent devenir subventionnées puis il y a des garderies privées qui veulent demeurer privées. Mais les parents qui occupent ces places-là vont devoir... Il faut que ça soit équitable. On parle d'un service universel. Ce n'est pas universel du tout, là. Moi, j'ai des parents qui paient... Puis on a sorti, pour le justifier, des tableaux qu'on a mis en ligne en novembre dernier.

Je pense, ça a été mis en ligne le 27 novembre. On les a faits, là, différents tableaux. Ce n'est pas universel. Si le...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...tableaux sont disponibles dans le mémoire que vous avez déposé?

Mme Collin (Marie-Claude) : Non, les tableaux ne sont pas disponibles mais sont sur le...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Est-ce que vous voulez les rendre disponibles auprès des parlementaires?

Mme Collin (Marie-Claude) : Aucun problème.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Là, à ce moment-là, vous les acheminerez au secrétariat de la Commission des finances publiques. On va s'assurer que les parlementaires puissent les consulter.

Mme Collin (Marie-Claude) : Parfait. On va le faire avec plaisir.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

Mme Collin (Marie-Claude) : Donc, oui, ça a sa place. Le réseau, il est bien construit. Maintenant, avant de faire la construction de nouveaux CPE et de prendre l'argent, bien pourquoi ne pas utiliser les garderies privées non subventionnées qui font le choix de se convertir en garderies subventionnées? Ou, même, il y en a certains qui veulent être en CPE.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.

Mme de Santis : Est-ce que vous savez quels pourcentages des garderies non subventionnées souhaiteraient devenir garderies subventionnées?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Je vais vous dire, à peu près 80 %.

Mme de Santis : 80 %. O.K.

Mme Collin (Marie-Claude) : Mais, écoutez, dans les dernières années, il s'est construit énormément de places en garderie privée, là, on n'est pas fou. Mais, nous, ce qu'on dit : À commencer, là, il faut commencer quelque part. Avant l'appel d'offres de Mme l'ex-ministre Yolande James, en fin novembre 2011, début janvier... fin novembre 2011, lorsqu'elle a annoncé les nouvelles places, il y avait déjà des garderies qui étaient construites à cette époque-là. Nous, dans nos plans d'affaires, on n'avait pas 28 000 places en compétition, on n'avait pas 28 000 places qui venaient s'installer à côté des garderies où on s'est construit. Donc, je pense qu'on peut commencer par les garderies les plus anciennes, tranquillement.

On ne vous demande pas de convertir 50 000 places demain matin, mais, à l'intérieur de la même enveloppe budgétaire, on est capables de faire de la conversion pour que ça devienne plus équitable pour nos parents. Puis, demain matin, on fait l'augmentation du tarif à 47 $; je ne suis pas certaine que plusieurs garderies vont vouloir la conversion. Elles vont vouloir rester privées, parce qu'à 47 $ nos parents vont avoir une certaine capacité de payer plus justement ce que vaut une place en garderie. Parce que chaque dollar investi de la poche du parent qui est plus cher que 35 $, bien c'est 100 % de sa poche, là. Si c'est 40 $, bien, lui, ça lui coûte 5 $ de sa poche, de plus, par jour.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Ça va? M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Merci beaucoup. À mon tour d'être en commission parlementaire et aussi de faire une confidence : tout comme le député de Terrebonne, j'ai fréquenté le réseau de garde. Eh oui!

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...ce matin, que de gens qui sortent des garde-robes.

M. Habel : Je sais, je sais...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Bon, que de «coming out»!

M. Habel : ...mais je dois vous avouer...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Allez-y, M. le député de Sainte-Rose, et, vous non plus, je n'en doute pas.

M. Habel : Mais je dois vous avouer que, moi, c'était dans un milieu familial que j'ai fait l'expérience du réseau de garde, et, à cet égard, j'aimerais poser une question.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...les gens de votre garderie, ça va leur faire plaisir.

M. Habel : Bien oui, je salue toutes les garderies de Laval. À cet égard, certaines personnes prétendent que la qualité des services de garde en milieu privé non subventionné est inégale. Je voulais avoir votre perception par rapport à cette affirmation-là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Non, les services de garde... Vous parlez en installation, là. En installation, on a de très, très, très bons services de garde de qualité. Ce petit cahier là, ici, là, on est obligés de le suivre à la lettre. Que tu sois CPE, subventionné ou non subventionné, milieu familial, tu dois avoir ces mêmes règlements là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...des gens qui nous écoutent, on pourrait peut-être nommer le petit cahier.

Mme Collin (Marie-Claude) : C'est Règlements sur les services de garde éducatifs à l'enfance.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci beaucoup.

Mme Collin (Marie-Claude) : Ça, quand un inspecteur entre dans la garderie, il y a ce livre-là, puis il se réfère toujours à ce livre-là, peu importe le type de garderie qu'on est.

Quand on investit 1 million de dollars dans une garderie, on s'attend à ce qu'il y ait un service hors pair, de qualité, que nos garderies soient extrêmement propres, que notre service avec nos éducatrices soit un service de qualité. Ça fait que jamais, dans nos services de garde, vous n'allez voir des coupures dans la nourriture ou des coupures... Au contraire, nous, là, on n'a pas le droit à l'erreur, parce que, si on fait une erreur, nos parents quittent nos services de garde, tandis que, dans un CPE, s'il y a eu une erreur, bien le parent se tait parce que lui, il ne veut pas perdre sa place à 7,30 $.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Merci. Ça m'a fait plaisir de vous laisser la possibilité de briser le mythe.

Je voulais revenir au niveau des garderies à contribution réduite. À votre avis, il ne manque pas de places dans le réseau des CPE, mais il manque de places à contribution réduite. Puis dans votre mémoire vous avez marqué : «Maintenant, il faut éviter de fragiliser le réseau de garderies, que nous avons bâti ensemble, en construisant de nouvelles installations souvent à proximité d'une garderie privée non subventionnée.» Donc, à votre avis, et je vous permets de développer là-dessus, on devrait faire, dans le fond, basculer les garderies non subventionnées à subventionnées? C'est bien ça?

Mme Collin (Marie-Claude) : Oui.

M. Habel : Pour l'efficience du réseau?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

• (11 h 10) •

Mme Collin (Marie-Claude) : Oui. Bien, les garderies qui sont non subventionnées pourraient se convertir en des garderies subventionnées, toujours en partant, comme je dis, de la plus ancienne.

Pour vous donner un exemple... Dans la région de Québec, il y a une garderie de 80 places privée qui, en septembre, avait ses 80 enfants. Il y a un CPE qui a fait l'ouverture de sa garderie 80 places — c'est une petite municipalité, là, un petit milieu urbain, je pourrais dire — et a ouvert un 80 places. La dame dans sa garderie que ça faisait quelques années qu'elle était ouverte est tombée à huit enfants sur 80. Vous allez me dire qu'il n'y a pas de déplacement d'enfants, là, tu sais? Donc, dans les régions, c'est les mêmes enfants qu'on retrouve sur les listes d'attente.

Maintenant, bien, écoutez, là, ça fait 30 ans que je suis dans le réseau. J'étais là en 1998, quand il y a eu le changement... en 1997-1998, quand on a fait le changement des garderies vers les CPE. Je peux vous dire que le téléphone, durant toutes ces années-là, sonnait, les listes d'attente étaient comblées, il y en avait. Bon, oui, les mêmes enfants se répétaient un peu partout. Je peux-tu vous dire, par exemple, que, cette année, le téléphone ne sonne plus, là? Tous les téléphones qui sonnent, c'est : Je suis insatisfaite de mon milieu familial. Est-ce que vous avez de la place, même si je paie 7 $? Puis je n'inclus pas tous les milieux familiaux. On a toujours 50 % de très bons à 50 % de moins bons, puis c'est pareil dans tout le réseau. Mais c'est de là que viennent nos enfants et c'est les nouveaux poupons qui se rajoutent en cours d'année, parce que les CPE ne les prennent pas au mois de février, donc, qui s'en viennent chez nous parce qu'on a de la place. Mais le téléphone ne sonne plus. Ça fait que, moi, si le téléphone ne sonne plus chez nous, là, avec une garderie du type que j'ai, de qualité, comme beaucoup d'autres au Québec, bien il ne sonne pas plus dans les CPE, parce que le parent prend la liste de garderies, il téléphone dans toutes les garderies puis il met son nom partout pour être sûr d'avoir une place.

Là, ce n'est plus ça aujourd'hui, le téléphone ne sonne plus. Il ne sonne plus chez nous, il ne sonne plus dans les CPE, ça, je vous le garantis.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Il vous reste environ six minutes.

M. Habel : Six minutes. O.K. Parfait. Je voulais savoir comment vous prônez le partenariat qui pourrait exister ou coexister entre les garderies non subventionnées et subventionnées.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Bien, on fait la conversion comme on a fait en 1998, la même chose. On est déjà établis, il y a des règles établies. Donc, on vient nous rencontrer, on vient voir si on peut être subventionné ou non. Puis nous, on est prêts, là. La seule différence qu'on a entre une garderie ou un CPE — même j'inclus les CPE — c'est les règles budgétaires, c'est la seule différence, parce qu'on ne reçoit pas d'argent du gouvernement. Donc, on n'a pas à vous rendre un... — je dis «un dossier», mais ce n'est pas ça — une étude... ou un document, en tout cas, qui fait que... des justifications, là, qui...

Une voix : ...

Mme Collin (Marie-Claude) : L'état des résultats. Merci. On n'a pas à vous rendre l'état des résultats étant donné qu'on ne reçoit pas de l'argent de votre part. C'est la seule différence qu'on a. Demain matin, si on reçoit des subventions, c'est certain qu'on va faire le même exercice.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : C'est ce qu'on appelle une reddition de comptes par rapport à vos activités.

Mme Collin (Marie-Claude) : C'est ça. Merci.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui. M. le député de...

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Non.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Ça va? Vous avez d'autres questions? M. le ministre.

M. Leitão : Oui, c'est cette question de conversion de places que je trouve très intéressante, parce qu'on nous dit souvent que l'on a besoin de x milliers de places par année, le gouvernement est en retard, investissez, investissez. Pourquoi vous ne le faites pas? Blablabla. Donc, vous, dans votre expérience... et, vous venez de le dire encore une fois, le téléphone ne sonne plus, donc les places existent, et les familles souhaiteraient envoyer leurs enfants... le terme que vous avez employé, en installation plutôt qu'en milieu familial. Et donc les garderies de votre réseau, de votre groupe souhaiteraient devenir garderies subventionnées pour pouvoir répondre à cette demande-là.

Maintenant, selon vous, qu'est-ce qui retarde, ou qu'est-ce qui bloque, ou qu'est-ce qui empêche cette conversion-là?

Mme Collin (Marie-Claude) : ...politique.

Une voix : Mme Collin.

M. Leitão : Pardon?

Mme Collin (Marie-Claude) : Idéologie politique.

M. Leitão : De la part de?

Mme Collin (Marie-Claude) : Bien, en tout cas, ça fait trois gouvernements que je passe, là, qu'on négocie depuis 2011, là, il y a des gouvernements que c'est... — voyons, excusez, il y a des mots qu'à matin j'ai de la misère à prononcer — ils sont catégoriques, ils ne veulent pas de conversion de places dans le milieu privé, on dirait qu'on a des cornes, puis tandis qu'il y a d'autres gouvernements... ou d'autres partis, je devrais dire, qui sont d'accord avec nous. Mais j'ai fait l'exercice.

Line, et moi, et plusieurs autres, on a fait l'exercice d'aller rencontrer presque tous les députés. Je dis «députés», là, j'inclus à l'intérieur de ça les ministres de l'Assemblée nationale. On a rencontré presque la majorité des gens autour de la table ici, et tout le monde est d'accord qu'effectivement on est la solution. Tout le monde, dans leurs bureaux, nous ont dit : Ce n'est pas bête, ce que vous dites, c'est vrai, c'est la solution, c'est vrai que vous êtes des services de qualité. Puis, écoutez, là, le service, là, en garderie privée qui n'est pas bon, bien il n'est pas subventionné, tout simplement. C'est tout. On ne vous demande pas de subventionner les 50 000 places. Ceux qui ont ouvert dans la dernière année, là, bien ils le savaient, qu'on était pas mal à la limite.

Le Parti québécois parlait beaucoup du chiffre magique, de 250 000 places. On est rendu à 278 000 places. Je pense qu'on a atteint la majorité, là, avant d'ouvrir... Puis, les garderies privées qui s'ouvrent, là, bien, moi, je ne mets pas la faute sur les promoteurs, je mets la faute un petit peu sur le ministère de la Famille, qui devrait dire : On stoppe. Depuis 2011 qu'on dit : Arrêtez, là, de donner des permis à outrance. Puis, si vous dites que la garderie n'est pas bonne, ou est mal gérée, ou quoi que ce soit, bien c'est de votre faute, ne donnez pas des permis à n'importe qui, assurez-vous que la garderie sera de qualité.

Ça fait que, quand je vous dis que la conversion est faisable... dans nos cas, les critères, établissez-les, venez nous rencontrer. Et, moi, il y a des inspecteurs qui viennent chez nous et dans plusieurs autres garderies et qui nous disent : Je te convertirais beaucoup plus puis j'enlèverais... tel CPE, par exemple, je lui enlèverais sa subvention. On se le fait dire par les inspecteurs qui viennent chez nous. Ça fait que, oui, la conversion avant la construction.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Leitão : J'en prends bien note. Merci.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Nous allons maintenant aller du côté de l'opposition officielle avec M. le député de Rousseau. Vous avez été cité à quelques reprises au niveau de votre territoire.

M. Marceau : Voilà. Bien, je pense, c'est adjacent à Blainville, je pense, c'est ce qui explique...

Mme Collin (Marie-Claude) : ...natal, votre coin, M. Rousseau.

M. Marceau : Ah oui? Vous êtes d'où?

Mme Collin (Marie-Claude) : Saint-Esprit.

M. Marceau : Saint-Esprit. Bon, effectivement, c'est dans mon...

Mme Collin (Marie-Claude) : Avec les cabanes à sucre; et de là vient mon nom.

M. Marceau : Alors, bonjour, Mme Collin. Bonjour, Mme Fréchette. Merci pour votre mémoire et puis pour votre présentation. Écoutez, j'ai une question. En fait, je regardais les... il y a un chiffre à la page... bien, en fait, à la troisième page de votre mémoire qui dit que les places en CPE coûtent 190 $ par jour, puis je voulais juste vous demander à peu près comment vous avez calculé... je ne vous demande de me faire le détail, là, mais... parce que c'est un chiffre que je n'ai pas vu auparavant et puis j'aurais aimé vous entendre sur... J'imagine que ça inclut les investissements en capital, là.

Mme Collin (Marie-Claude) : Tout, tout, tout.

M. Marceau : O.K.

Mme Collin (Marie-Claude) : Tout ce que l'État verse, que ce soient taxes, TPS, TVQ, taxes municipales, et compagnie, tout, ça vient à peu près à ce montant-là. Moi, ça fait quelques fois que je demande à faire calculer ce chiffre-là, et je vous dirais que c'est Mme Léger, lors d'une émission de Jean Lapierre... je crois, c'était une émission... bien, je ne crois pas, je vous le confirme... à l'émission de Paul Houde, une fin de journée, dans une tempête de neige, qu'elle a dit que la place revenait à 191 $ par jour, par enfant, dans un CPE. Ça fait que ce n'est pas un chiffre que j'ai inventé, là.

M. Marceau : O.K. En tout cas, ça, ça inclurait donc à la fois les coûts d'opération, coûts en capital...

Mme Collin (Marie-Claude) : Tout. Exactement.

M. Marceau : ...amortissement, puis, bon, tout.

Mme Collin (Marie-Claude) : Parce que, vous savez, M. Marceau, qu'un CPE, la construction d'un CPE... Et je comparais, je prends toujours le comparable avec un 80 places. Le CPE, le coût de construction, le gouvernement verse 957 000 $, puis ça, se rajoutent à ça, là, d'autres enveloppes budgétaires, là. Ça fait qu'au départ, là, ce million-là pour construire un CPE à 80 places... bon, si tu es un peu moins gros, tu as un peu moins d'argent, mais ça reste que, tu sais, la garderie privée, c'est nous, là, qui l'investissons, là. Puis ce qu'on est en train de faire, c'est qu'on est en train de fragiliser notre réseau, à nous, les garderies privées, parce qu'on vient faire une concurrence déloyale à côté de chez nous, puis là on est en train de perdre nos investissements. Mais ça, il y a des causes morales à ça, là : divorce, parce que, là, l'argent est là-dedans... Vous savez, c'est le premier leitmotiv pour un divorce, hein, l'argent. Donc, ça, c'est : on a hypothéqué, surhypothéqué nos maisons, on a fait des emprunts extravagants, on a, des fois, des partenaires. C'est ça, là. Puis on a un «break-even» assez quand même élevé pour rencontrer nos dépenses et nos frais dans nos garderies, ça fait que c'est pour ça qu'on se doit d'avoir une qualité.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Allez-y, M. le député.

M. Marceau : Une dernière petite question avant de céder la parole à mon collègue.

Les investissements en capital nécessaires... bon, les subventions qui sont versées par l'État pour les CPE sont de, disons, tout près de 1 million de dollars, mais évidemment il y a des ajouts qui sont faits des fois par les CPE. Ma question, c'est : Est-ce que, d'après vous, les investissements nécessaires sont équivalents, dans les garderies privées, équivalents à ceux qui sont faits dans les CPE? Est-ce que c'est à peu près le même montant que ça coûte? Quand vous disiez, là : Les emprunts sont substantiels, pour les gens qui sont chez vous, là, est-ce qu'on parle d'emprunts de 1 million de dollars qui ont été effectués?

Mme Collin (Marie-Claude) : Oui.

M. Marceau : Oui. C'est à peu près l'équivalent, donc?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

• (11 h 20) •

Mme Collin (Marie-Claude) : Bien, oui, c'est les mêmes entrepreneurs qui construisent les garderies, ça fait que c'est les mêmes montants. En 1997, j'avais construit une garderie de 60 places, ça m'avait coûté 400 000 $... en 1996, elle m'avait coûté 400 000 $. En 1998, la même bâtisse se construisait à 800 000 $. Puis là ça s'est mis à monter en flèche. Là, aujourd'hui, on est à peu près à... un 80 places, avec une salle multiservice, parce que moi, j'en ai une... Donc, eux autres, 957 000 $, il faut que tu rajoutes la salle multiservice, bien là tu as un autre 100 000 $ à rajouter. Moi, je l'ai dans ma garderie. Ça fait que c'est tout près de 1 million, 1,2 million, puis là il faut l'équiper, là.

M. Marceau : Oui, oui, c'est ça. Ça, c'est juste le béton puis les murs, là, on s'entend.

Mme Collin (Marie-Claude) : Parce que, là, elle n'est pas équipée, là. Ça fait que, là, se rajoute à ça l'équipement, là.

M. Marceau : Donc, le fait que ce soit en CPE ou en privé, ça ne change strictement rien, ce sont les mêmes types d'installation.

Mme Collin (Marie-Claude) : Exactement.

M. Marceau : Écoutez, moi, pour m'être promené puis en avoir vu, effectivement, c'est ce que j'ai constaté. Mais je voulais juste me le faire confirmer par vous. Merci. Je vais laisser la parole à mon collègue.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Terrebonne.

M. Traversy : Merci, M. le Président. Bien, tout d'abord, vous dire que je suis un peu perplexe, là, par rapport, là, au mémoire que vous avez déposé à la commission aujourd'hui. Vous êtes présentement la première personne qui nous dit être favorable avec la proposition du gouvernement, donc favorable à la tarification, là, modulée selon les revenus, malgré tous les questionnements qu'on a pu entendre. Là-dessus, Mme Collin, j'aimerais ça vous entendre un peu mieux, parce qu'il y a comme un changement de cap, là, important, là, de votre côté.

Vous l'avez dit tout à l'heure, bon, vous connaissez un peu la politique, vous avez parlé du comté de Rousseau, du comté de Blainville. Lorsque vous étiez candidate dans Blainville puis que vous rencontriez les jeunes familles de votre comté, qu'est-ce que vous leur disiez à ce moment-là?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Ils connaissent déjà mon opinion là-dessus.

Nous, on a des parents qui paient 17 $, 18 $, 19 $, 20 $ par jour, même avec le remboursement anticipé. Ça fait qu'eux, la modulation, quand ils l'ont vue, ils ont dit : Bien, nous, ça va nous rapprocher un peu, on va se sentir moins frustrés de payer, tu sais. Bon, moi, je gagne 40 000 $, j'en paie un peu moins, c'est vrai, mais, si j'en gagne 70 000 $, j'en paie un peu plus puis, si j'en gagne 200 000 $, j'en paie beaucoup. Blainville, si on parle pour Blainville, on a le Fontainebleau. Il y a des CPE au Fontainebleau. Il n'y a pas une famille qui a un salaire familial en bas de 200 000 $. Bon, il y en a peut-être un peu, mais mettons que c'est pas mal 200 000 $. Bien, ils paient tous 7,30 $. Même à Fontainebleau, ces gens-là nous disent : Je suis mal à l'aise de payer 7,30 $ quand, au coeur de Blainville, j'ai des familles qui gagnent 40 000 $ puis qui doivent payer 17 $, 18 $, 20 $.

Moi, qu'on fasse la modulation du tarif de garde ou qu'on augmente le tarif de garde à 10 $, ça va venir équilibrer. Mais que ça devienne équitable. Vous parlez d'universalité? Bien, qu'on le mette universel, le réseau. Si on veut rester privé, bien, qu'on augmente le remboursement anticipé pour que les parents puissent être capables de payer ce que vaut la place. Est-ce qu'on peut faire un ajustement aussi au niveau du salaire chez les parents qui viennent dans les garderies privées? On n'aurait pas à investir des subventions pour les frais généraux comme dans les garderies subventionnées. Je vous le dis, une garderie privée, puis l'association avant nous le disait, là, on n'est pas là pour faire de l'argent, on est là pour offrir un service. Moi, dans mon cas, dans ma tête, je suis une institution, j'offre un service, je me dois d'être présente à tous les jours dont les parents ont besoin de ce service.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Terrebonne.

M. Traversy : Écoutez, vous faites partie du réseau comme l'ensemble des partenaires, puis on vous reconnaît, là, l'apport que vous apportez, là, au niveau du ministère de la Famille et des regroupements en milieu de garde.

Bon, c'est sûr qu'on ne peut pas être d'accord sur tout. Moi, je ne pense pas, particulièrement... Terrebonne et Blainville, ce n'est pas très loin, hein, M. le Président, c'est dans une continuité, c'est ce qui nous mène au comté de Rousseau. Moi, je ne suis pas convaincu que les jeunes familles de la classe moyenne de la Rive-Nord de Montréal sont emballées de devoir payer deux fois — par une imposition aux revenus, par la suite par une imposition selon leurs revenus — dans les garderies, là. Ça se peut qu'il y en ait qui disent : Ah! nous, on veut payer plus, puis ça nous fait plaisir de payer deux fois plus.

Le vrai problème, vous l'avez mentionné, je pense, c'est l'universalité du réseau, puis ça, il faut développer les places. On est d'accord, on s'en est parlé dans le projet de loi n° 27, là-dessus on est d'accord; sur la modulation du revenu, on l'est beaucoup moins. Il faut développer les places. Il y en a présentement qui sont à l'étude. Vous nous dites que vous êtes aussi, là, une partie de la solution. C'est ce que j'entends, là, de votre groupe aujourd'hui. Je l'entends de manière positive. En même temps, je suis un peu sensible au fait, là, qu'il faut essayer de garder l'objectif de développer les places plutôt que d'en être à se faire un peu... pas du CPE «bashing», mais essayer de se rehausser versus les autres. Je pense qu'il y a des garderies privées non subventionnées qui font un excellent travail, il y en a d'autres par contre qui méritent de se faire peut-être surveiller un peu plus. Bon, vous l'avez mentionné, c'est 50 %. Je ne pense pas qu'on ait besoin, là, tu sais, de faire une bataille à cet égard-là entre les différents modèles dans le réseau.

L'objectif, ça serait donc que le ministre des Finances, là, octroie de l'argent pour développer des places subventionnées. Une fois qu'il trouve cet argent-là, vous, vous nous dites : On veut être fidèles sous les drapeaux de la république pour présenter, dans le fond, des alternatives pour occuper ces places subventionnées qui vont être disponibles. Mais présentement le retard des places, c'est ce qui crée un gros problème dans l'universalité du réseau puis dans son accessibilité. C'est ça, le fond. C'est ce que je comprends.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Le retard provient du budget, parce que les CPE coûtent très cher à développer. Nous, on investit déjà l'argent pour les infrastructures, on investit l'argent pour les équipements. Tout ce qui reste, c'est subventionner la place. Arrêtons de construire puis de mettre de l'argent dans le béton, mettons donc de l'argent pour les places aux parents. C'est ce qu'ils veulent, les parents. Les places sont disponibles, les garderies sont là, les parents les occupent déjà. Les parents quittent vers des installations subventionnées. Question budgétaire. Donc, aujourd'hui, on est prêt à les offrir, ces places-là, mais, pour être équitable, il faut commencer par les garderies qui étaient là en 2005.

Dans votre comté, Terrebonne, il y a de très, très bonnes installations privées non subventionnées, très bonnes. Allez les visiter une par une. Je vous mets au défi d'aller les voir, ces garderies-là. Vous allez voir la qualité que vous avez sur votre territoire, puis, demain matin, vous allez dire : Pourquoi ne pas les convertir, ces places-là? On a juste à subventionner la place et non subventionner tout l'ensemble, l'enveloppe. On n'a pas à subventionner ça.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Terrebonne.

M. Traversy : Il va sans dire, M. le Président, qu'à Terrebonne, effectivement, il y a des installations qui font un très bon travail. D'ailleurs, là, derrière Mme Collin, il y a des gens qui hochent la tête, là, parce qu'ils connaissent bien aussi le territoire.

Qu'est-ce que vous répondez à ceux qui nous disent : Bien, écoutez, près de 57 % des places privées non subventionnées sont situées dans la région métropolitaine, donc Montréal, la couronne nord, la région? Vous nous dites : On est ouverts, là, à être une partie de la solution, mais en région est-ce que ça ne pose pas un problème si, exemple, en Abitibi, il n'y en a pas, de place privée non subventionnée? Donc, dans le fond, vous proposez une solution, mais elle ne répond pas à tout, elle est juste une partie de ce que ça pourrait peut-être occasionner si le ministre des Finances va dans cette direction.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Regardez, dans les régions, toute la région métropolitaine, la grande région métropolitaine et autour de Québec, il y a plusieurs garderies privées non subventionnées. C'est vrai, vous avez raison, il y a eu une grosse augmentation des places, même il y a eu... qui s'est posé — on en a parlé la semaine dernière — au niveau du Grand Montréal.

Maintenant, dans les régions éloignées, comme en Abitibi... il y a des régions qu'il y a zéro garderie privée puis il y en a qui n'ont même pas de CPE. C'est parce que c'est des régions éloignées où la garde en milieu familial, elle est plus avantagée. Donc, c'est de faire un mixte de tout ça. Dans le comté de monsieur... dans le comté de Rousseau, à Rawdon, il s'est construit une installation dont il y a un besoin, mais elle n'est pas subventionnée, cette garderie-là. Elle pourrait le devenir, subventionnée. Il y en a, des garderies, dans des régions éloignées aussi, puis, aux endroits où il n'y en a pas, de garderie privée, puis il y a un réel besoin, bien allons vers la construction d'un CPE.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Terrebonne.

M. Traversy : Est-ce qu'on s'entend pour dire, Mme Collin, que, dans le fond, là, si on revient à la base, base, base, là, de ce que vous nous dites, là, c'est que ça nous prend des places subventionnées au Québec?

Vous nous dites que vous pouvez être une partie de la solution, mais, en premier lieu, là, il faut qu'il y ait des places subventionnées qui soient débloquées. Là, présentement, là, le ministre des Finances a retardé, avec la ministre de la Famille, le développement jusqu'en 2021‑2022, il y a des projets qui sont sur la table. Est-ce qu'en tout premier lieu, là, une des recommandations que vous pourriez faire au ministre des Finances, c'est de débloquer rapidement, justement, les places en garderie dans le réseau pour... Après ça, on regardera, là, tu sais, de quelle façon vous voulez qu'on le développe puis quel modèle est meilleur qu'un tel, là. Ça, il y a une rhétorique, au Québec, qu'on connaît depuis des années. Mais, pour les jeunes familles, là, puis les jeunes parents, la priorité, là, ça serait-u de développer le réseau puis d'offrir, justement, davantage de places subventionnées que ceux... qui nous est proposé actuellement?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

• (11 h 30) •

Mme Collin (Marie-Claude) : Premièrement, la construction coûte trop cher. Et, nous, quand il y a eu l'annonce des 15 000 dernières places, quand il y a eu l'annonce des projets retenus, on nous a dit que les places allaient être annoncées mais qu'il n'y avait pas de budget pour la construction de ces places-là. On nous a confirmé la même chose par un membre du conseil d'administration au Conseil du trésor. Maintenant, aujourd'hui, bien, c'est vrai, parce que les places ne se construisent pas. Peut-être qu'on n'a pas le budget pour la construction des 85 % des CPE mais peut-être qu'on est capable d'avoir un budget pour la conversion de places, qui coûte beaucoup moins cher. Puis, si on fait le retrait des 15 % des places en milieu familial, qui sont d'ailleurs des places inoccupées, dans une première année, tout de suite, dans la même enveloppe budgétaire, on pourrait faire la conversion des places dans nos garderies, qui ne coûterait pas... tu sais, pas plus d'argent au ministère des Finances qu'aujourd'hui, avec la même enveloppe budgétaire.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. 30 secondes, M. le député de Terrebonne.

M. Traversy : Bien, écoutez, je vous remercie de votre intervention. Il y a des points sur lesquels je partage votre avis; d'autres, évidemment, sur lesquels j'ai beaucoup plus de nuances et moins de réception, peut-être; on pourrait dire ça de manière polie. Alors, évidemment, on va continuer à essayer de pousser pour qu'il y ait davantage de places subventionnées au Québec pour les jeunes parents. Je comprends que vous êtes très, très, très motivés à faire partie de la solution. Maintenant, je vous inviterais aussi à essayer de garder... Le problème de fond, ça reste le manque de places subventionnées sur le territoire québécois, et là-dessus je pense qu'il faudrait davantage trouver un discours commun qu'essayer de se diviser entre différents réseaux.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Nous allons maintenant passer du côté du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Repentigny, la parole est à vous.

Mme Lavallée : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue. Je suis surprise de votre position en faveur de la modulation, parce que, tout à l'heure, vous nous avez dit... bien, pas tout à l'heure, à l'autre commission parlementaire, vous aviez mentionné — on s'en était parlé — que, lorsqu'il s'ouvre une place à contribution réduite, vous perdez une clientèle qui se déplace. Donc, quand on ouvre une place à contribution réduite, on ne crée pas une nouvelle place, mais on transfère une clientèle. Puis tout à l'heure vous avez dit que les parents changent pour une question budgétaire. Donc, j'essaie de suivre votre idée. Et ensuite vous avez dit, tout à l'heure, quand le ministre des Finances vous a demandé si les parents étaient désorganisés, vous avez dit : Oui, d'ailleurs, 81 % des gens accusent un retard. Donc, le budget, il n'est pas évident, ce n'est pas facile à gérer pour les jeunes familles, même les familles qui gagnent 100 000 $, 150 000 $ à deux. C'est quand même la moyenne qui est là. Et vous aviez, des fois, de la misère à récupérer l'argent, les allocations que le gouvernement versait.

Donc, j'ai un petit peu de misère avec ce que vous dites puis ce que vous annoncez, dire : On est favorables à la modulation, d'autant plus qu'en nous disant que les parents sont désorganisés on comprend que la façon de faire du gouvernement actuellement, c'est que les parents dans les garderies à contribution réduite vont continuer à payer le 7,30 $, mais, lorsque le comptable va faire leurs rapports d'impôt, parce que c'est tellement compliqué qu'ils vont être obligés de payer un professionnel pour faire leurs rapports d'impôt, ils vont se ramasser avec une facture qui va peut-être être 1 000 $, 2 000 $, 3 000 $, 4 000 $ à être payée d'un coup, parce qu'avec le ministère du Revenu on n'a pas de possibilité de payer par tranches. Il faut le payer tout d'un coup.

Déjà, vous nous dites qu'ils sont désorganisés. Est-ce que vous croyez vraiment que les parents vont être en mesure, vont avoir cette capacité-là de payer ce montant-là d'un coup, avec la façon dont le gouvernement nous présente la modulation?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Bien, nos parents le font déjà, ça, payer d'un coup à la fin de l'année, parce que, dans le réseau de garderies privées, avec le remboursement anticipé, les parents doivent prévoir leurs salaires de l'année en cours. Et à la fin de l'année... ou, lorsque vous disiez la semaine dernière que le parent quitte la garderie puis s'en va ailleurs... bien, il va devoir payer un montant à la fin de l'année parce qu'il a oublié d'arrêter son remboursement anticipé. Bien, les parents le vivent... À 80 %, les parents le vivent dans notre réseau. À la fin de l'année, ils doivent payer un surplus ou en reçoivent aussi mais doivent le gérer de cette façon-là. Ça fait que donc, à la fin de l'année, les parents avec la modulation vont faire la même chose.

Si le gouvernement veut faire de quoi, c'est soit qu'il fait une modulation ou soit qu'il augmente à 10 $... Puis ça fait longtemps qu'on a ce discours-là : 1 $ de l'heure, responsabilisons les parents, 1 $ de l'heure. Quand on a fait notre tournée, à tous les députés, c'est ce qu'on leur mentionnait, d'augmenter à 10 $ de l'heure ou la modulation, qui viendrait comme faire un équilibre entre les deux. Une famille qui est vraiment à faibles revenus a déjà un soutien du gouvernement, paie un peu moins, puis certaines familles ne paient pas du tout pour envoyer les enfants dans les services de garde. Mais, mettons, à 10 $, à 1 $ de l'heure, tous les parents seront en faveur de payer ça.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Donc, je comprends que le taux fixe pourrait être une avenue plus intéressante pour vous que la modulation. Parce que, je reviens avec ce que vous avez dit tout à l'heure, vous souhaitez devenir des garderies à contribution réduite. Donc, vous êtes conscients que, les parents, c'est ça qu'ils veulent parce qu'ils n'ont pas les budgets. Ils sont obligés de payer chez vous parce qu'ils n'ont pas de choix, ils n'ont pas de place à contribution réduite. Vous le dites : Quand on ouvre une place à contribution réduite, ils s'en vont. Donc, sur le plan du budget, pour eux autres, ce n'est pas qu'ils ne vous aiment pas, parce qu'ils savent qu'ils sont bien chez vous, mais ils s'en vont question d'argent.

Donc, c'est sûr que, si on parle de la modulation telle que présentée, avec le fait qu'ils vont encore se ramasser... Si on garde ça comme ça, on vous subventionne puis on garde la modulation telle que présentée, ils vont encore se ramasser avec une facture, à la fin de l'année, qui va être astronomique, alors qu'ils n'ont pas d'argent. Vous avez 81 % de parents qui accusent un retard, donc ce n'est pas facile, hein... vous avez dit tout à l'heure... hein, depuis quelques mois, mais, malgré un discours du budget qui annonçait qu'il n'y aurait pas... qu'on reconnaissait que les familles étaient déjà surimposées, on a assisté à des augmentations de taxes municipales, taxes scolaires, les frais d'Hydro, et tout ça. Donc, ça, ça se rajoute. Donc, la modulation, elle vient juste perpétuer ce que vous vivez en garderie privée, l'envoyer dans l'ensemble des garderies, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

Mme Collin (Marie-Claude) : Bien, regardez, le parent paie en moyenne entre 37 $ et 50 $ par jour, O.K.? Il doit sortir... mettons, on va mettre un chiffre rond, 200 $ par semaine de sa poche. Si le remboursement anticipé — mettons qu'il en reçoit 100 $ par semaine, bon, 400 $, ou 500 $, ou 600 $, peu importe — est rentré à la garderie, bien le parent, là, il va me devoir 100 $ par semaine. Lui, ça va faire son affaire de payer 100 $ par semaine; l'argent rentre à la garderie, il n'accuse pas de retard, tout est parfait.

Le parent qui accuse un retard, c'est souvent celui qui reçoit son chèque le 15 puis qui ne paie pas. C'est là, là, qu'on a un problème. Il prend cet argent-là puis il met ailleurs. Parce que, cet argent-là, il le reçoit parce qu'il est dans notre service. S'il n'a pas l'argent qui rentre chez eux, je lui dis : Au lieu de me payer 50 $, tu m'en dois 20 $, il va être heureux, lui. C'est ça qu'il veut : ne plus gérer cet argent-là. Je ne l'ai pas, ce n'est pas tentant, c'est parfait. Ça fait que, si on y va avec la modulation, les parents ne l'auront pas, ça fait qu'à la fin de l'année, sur les impôts, ils vont le prévoir. Mais, un parent qui paie 4 000 $, on s'entend qu'il fait au-dessus de 200 000 $, là, il a probablement les moyens de le payer, ce 4 000 $ là. Si on le met à 10 $ par jour, bien le parent va payer 50 $ par semaine; la même chose au CPE. Il ne le verra pas, l'argent, il ne sera pas dans son compte de banque, il ne le gaspillera pas ailleurs.

C'est juste ça, la complexité qu'on a, nous, les garderies privées non subventionnées, parce que, dans les réseaux des CPE puis des garderies subventionnées, ils se font payer. Puis, même à 7,30 $, certains accusent quelques retards.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.

Mme Lavallée : Oui. Je reviens encore à ça parce que je trouve ça important, ce que vous dites au niveau de la modulation. Déjà, lorsqu'on envoie l'argent aux parents, ils le dépensent, hein? Les 81 %, ce n'est pas minime, là, 81 %... Puis ils ne le dépensent pas parce qu'ils veulent faire des folies. Vous venez de dire : Si les taxes municipales rentrent, bien ils vont payer leurs comptes de taxes avant de vous payer. Donc, j'imagine que, si on leur dit : Au mois d'avril de l'année suivante, vous avez un chèque à faire, d'un coup, de 2 000 $, 3 000 $... déjà, s'ils ont de la misère à budgéter, comment vont-ils être capables de budgéter à avril de l'autre année pour dire : Je dois payer 2 000 $, 3 000 $, 4 000 $? Ils ont déjà de la misère à budgéter pour vous payer, vous accusez des retards, puis je trouve ça important, les retards.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Collin.

• (11 h 40) •

Mme Collin (Marie-Claude) : Le fait qu'ils accusent des retards, comme je vous dis, c'est parce qu'ils l'ont, l'argent. Si on fait la modulation, puis ça va rentrer comme... Il y a beaucoup de gens qui ne sait pas ce qu'il paie sur son rapport d'impôt — la RAMQ, toutes sortes de services qu'on paie. Parce que l'hôpital qu'on a gratuit se paie dans nos impôts. Beaucoup de gens ne le sait pas, ça. Ils paient leurs impôts, puis : Bien, c'est correct, j'ai ça à payer.

Ça fait que, la modulation du parent utilisateur-payeur, un peu, bien, lui, il va payer sa part, qui lui revient, selon son revenu. Le discours, là, de payer selon le revenu, là, ce n'est pas d'hier qu'il roule dans le réseau, là. Des parents, là, beaucoup, beaucoup nous disent : Ça devrait être en fonction du revenu. C'est dit souvent, souvent, souvent, c'est répété. Pour répondre à la question; quand j'étais en campagne électorale, bien c'est ce que beaucoup j'entendais : Pourquoi ce n'est pas selon le revenu, même ceux qui paient 7,30 $? Je me l'ai fait dire souvent. Puis, dans plusieurs régions, on se le fait dire. Puis, oui, c'est vrai que, les garderies qui sont subventionnées, bien, les parents vont parler pour eux parce qu'ils ne voudront pas la modulation parce que, là, on vient toucher à leurs poches, même s'ils gagnent 200 000 $. Il y a une mère qui disait à une autre mère qui fait moins que 60 000 $... puis elle, elle en fait 200 000 $ : Aïe! Elle dit : Moi, je ne sais pas comment tu fais, payer la pleine tarification à ta garderie, moi, je fais 200 000 $ par année puis je paie 7,50 $, puis c'est déjà pas mal. Vous voyez le discours des gens, là?

Puis, vous savez, Mme Lavallée, là, on ne pourra pas toute notre vie prendre les gens par la main puis leur dire quoi faire, les gens doivent se responsabiliser.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. 10 secondes pour votre conclusion.

Mme Lavallée : C'est parce qu'il reste que le 200 000 $ que vous donnez... Ce n'est quand même pas une grosse partie de la population, là, on parle de 1 % qui gagne... des gros salariés. Donc, la classe moyenne, c'est elle qui paie ça, cette modulation-là, puis, cette classe moyenne là, je crois qu'ils n'ont pas l'argent... ils ne réussiront pas à mettre de l'argent de côté pour payer en avril ce que le comptable va leur donner. Ils ont déjà de la misère à mettre de l'argent dans des REER et ils peinent à payer toutes les augmentations qu'ils subissent avec ce qui a été annoncé.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, madame. Merci. Donc, je vous remercie, Mme Collin, Mme Fréchette, de votre participation à cette commission et j'invite le Conseil du statut de la femme à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 11  h 42)

(Reprise à 11 h 46)

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc poursuivre nos travaux. Avant de débuter nos échanges et la présentation du Conseil du statut de la femme, est-ce que, de consentement, les membres des formations politiques sont d'accord pour que nous puissions dépasser l'heure qu'il est prévu, soit 12 h 30, pour terminer ces échanges? Consentement?

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci beaucoup. Alors, bienvenue au Conseil du statut de la femme. La parole est à vous.

Conseil du statut de la femme (CSF)

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Merci beaucoup. Alors, merci de m'avoir invitée. Je veux tout d'abord préciser que je suis accompagnée de deux chercheures du conseil : Hélène Charron, à ma gauche, qui est sociologue, et Nathalie Roy, à ma droite, qui est économiste.

Donc, nous sommes heureuses de venir vous parler du projet de loi n° 28, et, d'emblée, je veux vous signifier que le Conseil du statut de la femme est préoccupé par la hausse de la contribution parentale aux services de garde subventionnés. Nous craignons que ces hausses incitent certaines mères gagnant des salaires modestes à quitter le marché du travail ou à rester au foyer après leur congé parental. Donc, ce que le projet de loi n° 28 fait, c'est qu'il offre de moduler les tarifs selon les revenus pour les familles qui gagnent plus de 50 000 $. Cette modulation semble, a priori, équitable, puisqu'elle cible les familles bénéficiant de revenus plus élevés. Pourtant, ces changements vont affecter les familles de classe moyenne. Ça a été dit ici aujourd'hui.

L'impact potentiel de la hausse envisagée de la contribution parentale pour près des deux tiers des familles ayant des enfants en garderie nous préoccupe. Nous avions d'ailleurs envoyé une lettre à ce sujet à la ministre de la Famille en octobre dernier en lui précisant, comme le projet de révision était dans l'air et qu'il y avait pas mal de rumeurs, en lui disant : À notre avis, il faudrait absolument faire une analyse différenciée des sexes sur ce projet de loi. Or, à moins que la situation ait changé, nous n'avons pas été informés qu'il y a eu effectivement une ADS qui a été faite de ce projet de loi, et ce qu'on a essayé de faire dans l'avis qui a été publié en novembre et que vous avez sans doute en main... on a, justement, essayé de faire une analyse différenciée des sexes partielle pour montrer comment ce projet de loi allait toucher davantage les femmes que les hommes. Il faut rappeler qu'en 1997, quand le programme a été créé, il visait à favoriser la participation des mères au marché du travail et aussi à améliorer le développement des enfants en donnant une chance égale à tous. C'étaient de grands buts. Il manque encore de places pour satisfaire tout le monde, nous en sommes conscients, mais on considère que le réseau des garderies à contribution réduite est un des piliers de la conciliation travail-famille. Donc, on le rappelle, 77 % des mères d'un enfant âgé de moins de six ans occupent un emploi. C'est beaucoup plus que ça l'a déjà été. Les trois quarts des familles biparentales disposent, donc, de deux revenus, et on parle d'un revenu moyen, après impôt, de 87 000 $ et, pour les familles monoparentales, surtout dirigées par des femmes, on parle d'un revenu total moyen de 46 000 $.

Donc, disons-le aussi tout de suite, nous sommes soulagés que le gouvernement ait évité de hausser la facture pour les familles gagnant moins de 50 000 $ comme revenus. Pour nous, c'était essentiel que ces familles à revenus modestes soient épargnées, et c'est le cas. Toutefois, nous considérons qu'un revenu moyen, un revenu familial de 50 000 $ et plus, ça ne fait pas de ces familles des familles choyées, des familles riches, au contraire. Et, en plus, avec l'indexation annuelle qui a été annoncée, ça va toucher non seulement les revenus de plus de 50 000 $, mais, d'après ce que je comprends, tous ceux qui mettent leurs enfants à la garderie. Donc, ça veut dire une augmentation pour toutes les familles qui ont un revenu supérieur ou égal à 75 000 $, une augmentation de 9,6 % à 174 % du coût actuel.

• (11 h 50) •

De notre point de vue, et c'est ça qui nous a le plus touchés, je vous dirais, c'est qu'on sent qu'on n'a pas tenu compte, en écrivant ce projet de loi, du fait que, dans la très grande majorité des familles, les revenus du père et de la mère, de l'homme et de la femme, ne sont pas semblables. Dans les statistiques fournies par le ministère des Finances, on donne des beaux tableaux et on dit : Et ça, c'est considérant que les revenus de la mère et du père sont semblables. Or, la réalité est tout autre. Dans 70 % des familles, la conjointe apporte au revenu... excusez-moi, le revenu de la conjointe est inférieur ou égal à celui du conjoint. Donc, on voit là un très grand déséquilibre, déséquilibre qui s'accroît. Plus il y a d'enfants... quand il y a trois enfants, par exemple, on arrive, encore là, à un déséquilibre des revenus entre l'homme et la femme encore plus grand.

Donc, c'est là qu'on s'inquiète, parce que, s'il y a hausse des tarifs de garderie... On sait comment les décisions se prennent dans les couples, et il est très possible que la personne qui gagne le moins soit celle qui se retrouve à rester à la maison pour s'occuper des enfants. Et je vous invite, pour voir que je ne fais pas de la science-fiction, à consulter les familles types. On a fait des calculs en montrant des familles types, et l'effet que ces hausses de tarifs, qui peuvent sembler, à première vue, pas si grandes que ça... comment ces hausses de tarifs peuvent avoir un impact sur des familles. Je vous donne un exemple relativement parlant : une famille ayant trois enfants en CPE — donc, on a eu des enfants coup sur coup; revenu familial de 94 000 $; la mère est vendeuse au salaire minimum, à 21 000 $ — ne croyez pas que c'est l'exception; et plus du tiers du revenu net de la mère servira à payer le CPE. On parle ici d'une hausse de 1 700 $ par an, donc, ce n'est pas rien. Je comprends que la division des revenus, et tout, peut se faire de façon différente dans une famille, mais il reste que, quand un des deux parents est confronté avec cette idée, que le tiers de son revenu passe à payer la garderie, on peut réfléchir à l'intérêt d'aller travailler. Et je vous dirais que c'est encore plus vrai pour les femmes qui travaillent à temps partiel. Je vous rappelle que 22 % des femmes travaillent à temps partiel, seulement 11 % des hommes travaillent à temps partiel. Donc, encore là, c'est une fragilité qu'il faut tenir en compte quand on hausse les tarifs.

Je ne prendrai pas trop de temps, mais je voudrais vous dire qu'aussi ce qui nous a frappés, c'est que, comme beaucoup de Québécois pensent que l'égalité est déjà là, qu'il n'y a plus de problème d'égalité, on a l'impression que les tarifs en garderie touchent autant les pères que les mères. Ça serait bien si c'était le cas, mais toutes les études montrent que les tarifs de garderie ont un plus important impact sur l'emploi de la mère, et non du père, même si on voulait qu'il y ait égalité dans le couple. En fait, c'est un critère qui est plus important pour la mère, pour toutes sortes de raisons qu'on aime ou qu'on n'aime pas, mais qui sont, notamment, que la mère se préoccupe plus de la famille, est encore plus investie dans le travail non rémunéré à la maison. Donc, pour toutes ces raisons-là, il y a un impact plus grand pour les mères.

Et je vous rappellerais que les garderies à 5 $ ont ramené ou ont amené plus de femmes sur le marché du travail. L'étude de Fortin à cet égard est assez parlante. On dénombrait 41 700 mères de plus sur le marché du travail en 2008. Et chez les mères monoparentales... plutôt, je devrais dire, dans les familles monoparentales, qui sont particulièrement dirigées par des mères, le taux d'activité a grimpé de 22 %. Alors, ça, pour nous, c'est vraiment quelque chose d'extraordinaire. On parle de femmes qui étaient à la maison, qui ne travaillaient pas et qui ont pu regagner le marché du travail grâce à ces garderies. Donc, ces femmes-là peuvent être davantage sensibles à des hausses qui, de l'extérieur, ne sont pas si importantes que ça.

Donc, finalement, ce que je veux vous dire, parce que nous sommes honnêtes, on ne peut pas prédire ici combien de femmes, quelles femmes, dans quelles catégories de revenus vont décider, du jour au lendemain, de rester à la maison ou de ne pas retourner sur le marché du travail à cause de ces hausses de tarifs. On ne peut pas faire ça. On a une très bonne économiste. On peut voir ce qui s'est passé dans le passé, mais il est très difficile de prédire l'avenir. Mais ce qu'on vous dit, comme gouvernement, c'est que, nous, ce qu'on aimerait, c'est qu'une ADS sérieuse soit faite de ce projet de loi pour que particulièrement les familles gagnant entre 50 000 $ et 100 000 $... on sent que ce sont là les plus fragiles, qu'on puisse voir quel serait l'effet potentiel de ces hausses de tarifs. Voilà.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Miville-Dechêne. Merci. Nous allons débuter nos échanges. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, mesdames, d'être là. C'est très utile que vous soyez... J'ai aussi bien aimé votre rapport, votre avis, c'est bien fait, il y a toutes sortes de tableaux très intéressants, et je pense qu'on n'aurait pas assez de temps pour discuter de tout ça ici, mais j'ai bien sûr plusieurs questions, et ça ne vous surprendrait pas que je vous dise que je ne suis pas nécessairement d'accord avec vos conclusions.

Je comprends et je partage l'analyse que vous faites de la situation, mais je ne pense pas qu'on va nécessairement aboutir à la conclusion que vous semblez suggérer, qu'il y ait un retrait massif des femmes du marché du travail. D'ailleurs...

Une voix : ...

M. Leitão : Enfin, c'est ce qui circule à gauche et à droite. Mais que certaines femmes pourraient retourner à la maison. Je vous rappelle aussi que c'est un peu la même chose qu'on avait dite quand on a augmenté les tarifs de 5 $ à 7 $, qu'il y aurait eu cet effet-là, et on ne l'a pas vu.

Bon. Mais une chose que je trouve intéressante, c'est le graphique, le tableau que vous avez à la page 29. À la page... non, pardon, pas à la page 29, à la page... celui-là aussi, il est intéressant, mais à la page 24, à la page 24. On pourrait aller après à celui de la page 29. Page 24, donc, le taux d'activité des femmes. Et, vous avez tout à fait raison, et je pense que c'est comme ça qu'on doit le faire, c'est regarder le taux d'activité des femmes à un âge qu'on sait... Une femme de 50 ans, bien, je ne pense pas qu'elle va avoir beaucoup d'enfants. Avec la technologie de nos jours, qui sait? Mais non, O.K.? Alors, ce qu'on voit ici, dans ce graphique, que je trouve très utile et très intéressant, moi, ça me dit deux choses : en effet, il y a une forte augmentation du taux d'activité des mères québécoises, donc, il y a eu un rattrapage entre le Québec et l'Ontario, et on a fait ce rattrapage-là. Maintenant, je pense que ça ne serait pas tout à fait, enfin, logique, il me semble, de penser qu'on peut continuer. On a déjà attrapé la moyenne, surtout de l'Ontario, et on l'a même dépassée, donc le rattrapage a été fait. Et le programme de garderies à subventions a certainement été un des facteurs importants dans ce processus de rattrapage. Mais, voilà, on l'a fait. C'est important de le garder, le système, pas le démolir, bien sûr, mais je ne pense pas qu'on puisse aller chercher beaucoup d'autres gains que ça. Mais ce qui m'interpelle aussi dans ce graphique, c'est que la ligne rouge de l'Ontario, elle aussi, elle a augmenté. Et, en Ontario, à ce que je sache, il n'y a pas de tarif de garde subventionné.

Donc, le processus d'augmentation du taux d'activité des mères ou des femmes en âge d'avoir des enfants, c'est un processus qui est beaucoup plus complexe que simplement les garderies à tarif réduit, qui sont un élément, mais elles ne sont pas le seul élément. Donc, ça, c'était juste un constat que j'avais.

La question que j'ai... j'en ai beaucoup, mais mes amis vont aussi avoir la chance de poser des questions, mais la question que j'ai, c'est une question qui est plus fondamentale, si vous voulez. Parce qu'on parle beaucoup que, bon, on risque de déstabiliser le système et qu'un certain nombre de femmes sortent du marché du travail pour aller à la maison. Mais ne pensez-vous pas que c'est aussi un choix légitime qu'une mère puisse vouloir rester avec son enfant un an ou deux ans? Ce n'est pas un choix légitime, ça aussi?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

M. Leitão : C'est la question. J'ai bien dit «un an ou deux ans». Je n'ai pas dit qu'on rentre à la maison et on lave les couches pendant les 50 prochaines années — ce n'est pas ça — mais que, pendant une période limitée, une jeune mère puisse avoir le désir de rester avec son enfant. C'est juste ça.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Alors, ce qui...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Oui. C'est une question importante. Et bien sûr le Conseil du statut de la femme ne pose aucun jugement sur les différents choix des femmes. C'est-à-dire que bien sûr qu'une femme peut décider de rester à la maison, mais ça dépend des raisons pour lesquelles elle le fait. Nous, comme Conseil du statut de la femme, on dit qu'il est toujours plus risqué pour une femme de quitter le marché du travail pour s'occuper de ses enfants parce qu'elle va perdre des années d'ancienneté, de l'expertise, un emploi. Donc, le risque est là. Le risque est particulièrement important pour les femmes qui ont moins de formation aussi.

Donc, quand vous dites : Pensez-vous que c'est un choix légitime?, je trouve ça étrange que ça arrive dans ce débat-là parce que ce n'est pas vraiment ça dont il est question. Il est question : Est-ce que l'État inciterait certaines femmes à refaire les calculs en fonction de ce que coûte un CPE pour se dire : Bon, finalement, je vais rester chez moi pour ces raisons-là? Nous, on aimerait que les motifs pour lesquels une femme reste à la maison ne soient pas basés sur le tarif des garderies, parce qu'autrement ce n'est pas un choix; c'est finalement : Combien cette famille gagne? Donc, je vous dirais là-dessus qu'il y a un certain nombre de femmes qui... je crois que c'est à peu près 14 %, au Québec, qui restent à la maison, à peu près, selon les estimations, n'est-ce pas? Il me semble que c'est ça. En tout cas, disons «14 %», et, oui, il y a là-dedans toutes sortes de femmes qui prennent toutes sortes de décisions, et c'est très bien. C'est juste qu'il faut que ça soit fait non pas en fonction des stéréotypes et en fonction de la division sexuelle du travail, qui fait que bien sûr c'est la femme qui va rester à la maison pour s'occuper de l'enfant, parce que, vous savez, il n'y a rien qui interdit à un homme de prendre la moitié du congé parental. On s'entend?

Alors, nous, on est pour le changement social, on aimerait que l'égalité se fasse jusque-là. Alors, quand vous dites, vous : N'est-il pas bien que les femmes restent au foyer?, bien je vous répondrais : Et pourquoi pas les hommes?

• (12 heures) •

M. Leitão : Oui, évidemment, et pourquoi pas les hommes aussi? Bien sûr.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Oui. Et, l'autre chose sur votre constat, on ne nie pas effectivement que plusieurs facteurs expliquent le retour sur le marché du travail ou le fait de ne pas retourner sur le marché du travail pour les femmes, c'est vrai, il peut y avoir toutes sortes de facteurs, mais, dans l'étude de Fortin, ce qui est intéressant, c'est qu'on a divisé les facteurs et on s'est rendu compte à quel point la question du prix de la garderie était importante à ce moment-là précisément dans l'histoire. Et, quand vous dites : On a fait ce rattrapage et on ne peut pas monter plus haut, bien je vous dirais que je suis peut-être plus optimiste que vous, moi, j'aimerais que toutes les femmes qui veulent travailler, qui veulent avoir une autonomie économique puissent le faire.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le ministre.

M. Leitão : Nous sommes presque à 80 % de taux de participation. Ouf! Que ce taux-là soit encore plus élevé, il nous semble que ce serait, enfin physiquement, presque impossible.

Mais, pour revenir à votre sujet principal, donc l'inégalité des revenus à l'intérieur de la famille, évidemment c'est un sujet qui est important, je pense que ça dépasse pas mal l'enjeu du projet de loi n° 28, c'est une question sociétale beaucoup plus large que ça. Mais, quand on fait les calculs que vous avez faits pour essayer de déterminer quel serait l'impact possible de ces choses-là, je pense qu'il faut aussi tenir en considération qu'il y a d'autres façons, d'autres mesures, d'autres programmes gouvernementaux — provincial et fédéral — qui sont disponibles pour les familles, et d'ailleurs, tout récemment, le gouvernement fédéral vient d'augmenter sa PUGE, qui est un nom assez bizarre, donc la Prestation universelle pour garde d'enfants. Donc, votre famille de trois enfants, je pense, si on prend en considération l'augmentation de ce transfert fédéral, je pense que ça peut aussi contribuer à changer un peu la donne.

Ce que je veux dire par ça, c'est qu'on fait face à un environnement évolutif, les choses changent. Et je suis d'accord qu'il faut qu'on soit vigilants, il faut qu'on s'assure que la modulation est faite pour ne pas pénaliser les familles à bas revenus. Je pense que c'est ce que nous avons accompli, et, je pense, les familles à bas revenus ne sont vraiment pas... ou très peu affectées par cela. Les familles à moyens revenus, il y a un certain effet. Mais, selon vos propres graphiques, à la page 24... Là, on revient à la page 24... non, pardon, 29 — je me mélange avec mes pages — 29, là où j'étais avant... En fin de compte, ce n'est pas celui-là non plus. Je suis mélangé dans mes choses. Voilà, 15; 15, c'est là que je voulais arriver, et après ça je passe la parole aux autres. En fin de compte, le problème, potentiellement, où certaines personnes pourraient subir une pression importante pour le retour au travail, on parle d'un nombre de familles relativement petit : deux tiers des familles québécoises avec les enfants en garderie ne vont pas être très affectées par les mesures que nous proposons. Les personnes avec un revenu de zéro à 75 000 $, ça, c'est presque deux tiers des familles québécoises avec enfants en garderie, et, pour ces familles-là, il n'y a pas de changement... ou très peu de changements. Au net, elles vont payer même légèrement moins qu'elles payaient avant.

Donc, deux tiers des familles vont être très peu ou pas affectées, un tiers des familles peuvent potentiellement être affectées. Et je prends note de vos préoccupations, et c'est quelque chose qu'on va certainement suivre de près. Mais je ne pense pas que la situation soit si catastrophique que ça. Je vais juste vous laisser réagir à ça.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Je vous dirais que...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne, allez-y.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : ...malheureusement, ni vous ni moi, dans ce cas-là, ne peuvent prédire l'avenir. Parce que, si je comprends bien, depuis novembre, il n'y a pas eu non plus d'analyse différenciée selon les sexes qui a été faite au gouvernement sur cette question-là. Donc, tous les deux, on peut y aller de prédictions. Nous, on a des craintes. Vous, vous dites : Ça ne sera pas si pire que ça. Bon, bien, on nage en plein mystère, là, parce que, dans le fond, on ne le sait pas.

Mais, nous, notre crainte, c'est qu'il y ait un recul de l'égalité, alors c'est pour ça qu'on vient ici, on vient pour vous dire ça. Et effectivement, quand même, pour une famille qui gagne 100 000 $, ça fait une augmentation de 4 $, par jour, du tarif, là. 11,41 $, ce n'est pas rien. Parce qu'évidemment, quand on regarde ça, on essaie de voir qu'est-ce que d'autres pays ont fait face à ces pressions budgétaires puis on va souvent dans les pays scandinaves pour voir quelles sont les solutions apportées. Alors, en Suède, oui, il y a des modulations, on considère que, oui, les gens qui gagnent un peu plus doivent payer un peu plus, mais c'est quand même assez normé, parce que la facture ne doit jamais être plus que 3 % du revenu familial, et les augmentations sont... «toppées» en anglais, sont...

Une voix : Plafonnées.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : ...plafonnées — excusez-moi — à 9,60 $ par jour.

Donc, même dans une modulation, on peut s'assurer que les tarifs de garderie sont un peu moins élevés. Et, dans ce cas-là — je sais que tous les systèmes ne sont pas comparables — mais la Suède est intéressante. Et, au Danemark, carrément, les familles modestes ne paient pas pour les garderies. Parce que vous savez que même 7,30 $, pour une famille à revenus modestes, ça peut être un frein. Bien sûr, il y a des remboursements avant, mais on sait que toutes les familles modestes n'envoient pas forcément leurs enfants à la garderie.

Or, c'était un des buts très importants que ces garderies... que de stimuler les enfants de tous les milieux. Et je vous dirais que ça, ça peut se faire beaucoup mieux quand les enfants peuvent être dans les garderies qu'à pratiquement gratuitement. Là, je pense que, pour les gens qui sont à l'aide sociale, c'est deux jours et demi gratuits, mais, pour les revenus modestes, les gens qui travaillent, c'est encore un obstacle.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le ministre.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Pour vous et moi, 7 $ par jour puis pour quelqu'un qui... ce n'est pas la même chose.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le ministre.

M. Leitão : M. le Président, je finis pour laisser la parole à mes collègues. Juste un commentaire que j'ai déjà fait avant au groupe qui était là avant — je ne sais pas si vous étiez dans la salle ou pas — mais, idéalement, idéalement, ce qu'on souhaiterait, c'est que les familles à bas revenus paient zéro et que le montant augmente selon le revenu, mais, pour rendre cela plus socialement équitable, qu'on procède aussi à une baisse de l'impôt sur le revenu.

Une voix : ...

M. Leitão : De l'impôt sur le revenu. Mais ça, c'est quelque chose qui peut se faire seulement, peut-être un jour, quand on aura les moyens financiers de le faire. Évidemment, avec un déficit encore, pas question de faire ça maintenant. Mais, en principe, moi, je vois l'évolution de ce système dans cette direction-là. Est-ce que je serais capable de convaincre mes collègues? On verra bien. Mais c'est comme ça que je verrais l'évolution du système. C'était juste ça. Merci. Les collègues, si vous avez...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Merci, M. le Président. Merci beaucoup de votre présence et de votre mémoire. C'est fort intéressant de vous entendre.

Moi, je suis allée regarder Statistique Canada pour voir un peu c'est quoi, la population active à travers le pays, O.K., et je suis allée voir qu'est-ce qu'il y a à travers... que ce soit Terre-Neuve, Colombie-Britannique, mais, malheureusement, mes chiffres sont de 25 à 44 ans, pas de 20 à 40. Mais c'est...

Une voix : ...

Mme de Santis : Pardon?

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Avec enfants?

• (12 h 10) •

Mme de Santis : C'est ce groupe-là, O.K.? Et ce qu'on remarque, c'est qu'au Québec, et je vous cite les chiffres que j'ai là, c'est 79,9 % des femmes entre 25 et 44 ans qui sont actives et qu'elles paient maintenant pour les services de garde au CPE ou au subventionné 158 $ par mois, O.K.? Si on regarde, par exemple, en Ontario, où ils paient 998 $, presque 1 000 $, par mois, c'est 76,5 %; à Halifax, où on paie 781 $ par mois, c'est 79,1 %; à Edmonton, on paie 746 $, et c'est 76,4 %. Ce qui est intéressant aussi, c'est qu'à Winnipeg ils paient 451 $, c'est 77,2 %, et il y a des provinces où c'est plus élevé que le Québec et c'est des petites provinces : l'Île-du-Prince-Édouard, c'est ça, et l'autre, c'est... mais je n'ai pas le chiffre pour savoir combien les services de garde coûtent là.

Alors, en regardant ça, moi, je me demande si... Vous faites des commentaires que nous, on va augmenter le prix pour 70 % de la population, et la majorité de ces 70 %, 60 %, paieront un tarif de moins de 9 $ par jour. Comment vous arrivez à votre conclusion? C'est quelque chose que je ne comprends pas.

Une voix : ...

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Je reprendrai peut-être votre calcul, parce que vous vous basez, dans les statistiques de Statistique Canada, sur le taux d'emploi ou le taux d'activité des femmes de 25 à 44 ans. Or, quand on parle de l'effet des garderies, il faut absolument se baser sur le taux d'activité des femmes ayant des enfants de zéro à six ans. Donc, les chiffres que vous prenez ne peuvent pas dire que les garderies au Québec ne sont pas importantes. Ça, je vous dirais ça dans un premier temps.

Mme de Santis : ...que ce n'est pas important.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Mais, ceci dit, je trouve que c'est un argument, et ce n'est pas le vôtre, mais il a été beaucoup dit : Ça ne sert à rien, les garderies, au Québec, puisque les taux d'activité des femmes ailleurs sont aussi élevés. Mais je ne vous dis pas que c'est ça que vous dites, mais ça circule, ça, dans la population. Mais il faut comprendre que les taux d'activité, que ce soit des femmes ou des hommes, sont liés aussi à l'activité économique.

Alors, dans les Maritimes, par exemple, où il y avait un taux d'activité des femmes qui était légèrement plus élevé qu'au Québec, bien il faut prendre en compte qu'il y a eu un boom pétrolier à Terre-Neuve, qu'il y a eu de la création d'emplois, qu'il y a plein de gens qui ont été y travailler et il y a des femmes qui, par ricochet, se sont trouvé des emplois. Donc, le... comment dire, on ne peut pas seulement prendre la question des garderies en disant : Vous voyez, on peut faire aussi bien sans garderie. C'est un calcul qui n'a pas de sens, vous comprenez? Il y a un ensemble de facteurs, dont les garderies, qui expliquent les taux d'activité, et, au Québec, comme on n'a pas eu le boom, par exemple, de Terre-Neuve, bien, nous, dans ce contexte-là, dans les années où il en est question, c'est clair que le taux d'activité des femmes ayant de jeunes enfants a été boosté par les garderies.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

Mme de Santis : Je suis complètement d'accord avec vous, sinon on n'aurait pas à aller de 1997 à 2014 au niveau de la participation de jeunes femmes dans l'activité économique de la province. Je suis d'accord, sauf que, si on regarde la modulation, on voit qu'à 75 000 $ par année, revenu brut ou revenu familial, il y aura une augmentation de 140 $ par mois... par année, pardon, 140 $ par année. Vous croyez vraiment que quelqu'un va décider de ne pas travailler parce que ça coûte 140 $ de plus ou qu'à 85 000 $ c'est environ 400 $, par année, de plus? Je trouve que l'équation que vous faites... je ne la comprends pas.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : ...parce que vous prenez...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne, allez-y.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Excusez-moi, je vais trop vite.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Non, non, ce n'est pas grave. En autant que c'est enregistré, qu'on sait que c'est vous, il n'y a pas de problème.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : D'accord. Vous prenez ce cas-là, mais prenez le cas d'une famille qui fait 100 000 $, où la hausse sera de 4 $ par jour, et imaginez dans ce scénario-là que la mère gagne assez peu d'argent, est à temps partiel. Donc, une hausse qui, pour vous, peut sembler minimale ne l'est pas forcément pour ces familles qui sont quatre sur un revenu de 100 000 $ et où... Donc, si c'est 4 $ par jour, je ne sais pas combien ça fait au bout de l'année, mais ça fait quand même pas mal de sous.

Donc, ce qui peut nous sembler vraiment une petite hausse ne l'est pas tant que ça pour des familles où déjà les finances sont serrées. Et je ne prédis pas l'apocalypse, là, ce n'est pas ce que je suis en train de faire. Il est clair que — on discutait de ça hier — le fait d'être passé... Quand on a fait le système de garderies à 5 $, on est passé de garderies à 25 $ à des garderies à 5 $, donc c'était un énorme progrès, et ça a fait que plusieurs femmes sont retournées ou sont allées sur le marché du travail. On n'est pas en train de dire que toutes ces femmes-là vont retourner chez elles. On est conscientes des chiffres, on est conscientes que la hausse proposée n'enlève pas une... comment dire, le fait que ce système-là reste quand même, au Canada, enviable, mais ce qu'on dit, c'est : Comme on a un bon système qui a fait que beaucoup de femmes sont retournées sur le marché du travail, nous, comme conseil, parce qu'on s'intéresse au fait que les femmes soient autonomes économiquement, on craint que dans certains cas elles prennent des décisions différentes. Mais, encore là, ni vous ni moi ne pouvons prédire ce qui va se passer parce que...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Je vous arrête quelques instants. Le ministre a une question additionnelle à vous poser. Et le temps passe très, très vite, il vous reste environ 1 min 30 s, M. le ministre.

M. Leitão : Oui. Enfin, je vais prendre beaucoup moins de temps que ça. Juste une précision que je veux apporter. Avant, par rapport à votre diapo sur la page 24, donc le taux d'activité des femmes, quand j'avais dit que je voyais ça comme étant difficile qu'on puisse augmenter davantage ce taux-là, je ne veux surtout pas avoir l'air de dire que les femmes ne veulent pas ou ne peuvent pas travailler. Ce n'est pas ça du tout, là. C'est qu'à 80 %... ou presque à 80 %, je pense qu'on a atteint un niveau au-delà duquel il me semble que ce serait difficile qu'il augmente davantage. On est à peu près comme les hommes pour ce groupe d'âge là, pratiquement.

Donc, je ne veux pas surtout donner l'impression que je pense que les femmes ne veulent pas travailler. Ce n'est pas ça du tout. J'ai une femme et deux filles. Ce n'est pas ça du tout que je constate dans la réalité. Ce n'est pas ça du tout. C'était juste la précision que je voulais amener.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...va être bonne ce soir.

M. Leitão : Probablement.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Bon, tant mieux. M. le député de Rousseau, nous allons passer du côté de l'opposition officielle. La parole est à vous, M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui. Merci, M. le Président. Tout d'abord, merci pour votre présentation. Bienvenue. J'ai lu votre mémoire avec intérêt et j'ai trouvé qu'il était plein de bon sens, qu'il correspond pour beaucoup à ce que je pense, à ce que nous pensons ici, de notre côté. Alors, effectivement, moi, je crois qu'il faut être inquiet de l'impact que ça pourra avoir dans les familles dans lesquelles les revenus sont asymétriques, dans lesquelles un conjoint, et, malheureusement, plus souvent qu'autrement, c'est la conjointe, là, a un revenu plus faible que l'autre.

Vous documentez bien que c'est 70 % des familles, en moyenne, là, dans lesquelles, là, les femmes ont des revenus plus faibles que l'homme et vous présentez des cas types qui, je trouve, sont très parlants. C'était le graphique de la page 29 que le ministre a failli nous suggérer de regarder et que moi, j'ai trouvé très parlant, là. Quand on voit que, dans certains cas, on parle de plus de 25 % des revenus du deuxième... hein, 25 % du deuxième revenu de la famille qui passe en service de garde, il va de soi qu'il y a des gens qui vont se poser des questions. Cela par ailleurs a été corroboré à plusieurs reprises depuis deux jours par des groupes, des gens de services de garde entre autres, qui nous ont dit que, dans leurs milieux, l'inquiétude a été exprimée de façon très, très claire par des parents, par même des employés.

Puis j'ajouterais à cela que, dans toutes les études économétriques existantes, et puis que ça soit sur des données internationales, des données américaines, des données canadiennes, québécoises, dans toutes ces études-là, il est très clairement documenté que ce sont les femmes qui réagissent le plus aux changements dans la rémunération nette. Et effectivement un changement dans le prix des services de garde, c'est un changement dans la rémunération nette du travail.

Alors, pour toutes ces raisons-là, moi, je trouve que votre contribution est parfaitement en ligne avec ce que j'espérais lire dans un mémoire, et donc je vous félicite, tout simplement.

Je voudrais ajouter — puis j'aurais aimé ça que vous en parliez peut-être un peu plus : Moi, j'ai l'impression que le taux de pauvreté dans les familles du Québec puis en particulier dans les familles monoparentales a beaucoup diminué grâce à l'arrivée des CPE puis de notre système de services de garde. Vous n'avez pas élaboré là-dessus. Peut-être que vous pourriez nous en parler un petit peu. Moi, je pense que ça a été une contribution fort significative que de permettre à la fois aux familles monoparentales... enfin, aux femmes des familles monoparentales puis à la fois dans les cas où... Dans le cas des familles où il y a deux partenaires, ça a permis de réduire beaucoup la pauvreté, moi, je pense. Ça a été documenté, mais j'aurais aimé vous entendre le dire puis en parler.

• (12 h 20) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Oui. Ce n'est pas forcément facile de le voir partout, mais, dans le cas des familles monoparentales, c'est absolument criant comme différence. Ce qu'on a, et c'est encore dans l'étude de Fortin, c'est qu'entre 1996 et 2008 les mères monoparentales ayant des enfants de moins de six ans ont connu la plus forte hausse d'activité parmi l'ensemble des mères québécoises, c'est 22 % d'augmentation du taux d'activité des mères monoparentales. Et donc, inversement, on est passé, chez ces familles monoparentales à l'aide sociale, de 99 000 à 45 000 familles, et le taux de pauvreté des familles monoparentales avec une femme à leur tête, c'est passé de 36 % à 22 %. Donc, clairement, là, il y a eu un effet extrêmement important, donc je crois que c'est ça qu'on peut documenter.

Toutefois, vous me demandez si on peut documenter la question de : Est-ce que, dans les familles où il y a deux revenus, ça a fait un changement? Bien, c'est évidemment que, si des femmes sont retournées au travail, on peut imaginer que ça a un effet bénéfique sur les revenus. Toutefois, je ne crois pas que nous avons les chiffres disponibles pour pouvoir voir combien les CPE ont permis de sortir de la pauvreté des familles. Je pense qu'on n'a pas tous les chiffres, hein, on ne peut pas vous démontrer tout. Par exemple, un des chiffres qu'il nous manque cruellement, cruellement, c'est qu'on n'a pas accès aux revenus divisés des femmes et des hommes, parce qu'il faudrait rentrer dans Revenu Québec. Donc, on a juste le revenu familial. Bien oui, c'est ça qu'on voudrait, nous, c'est : si on pouvait avoir les revenus des femmes et des hommes séparés, il y a plein de choses qu'on pourrait montrer, qui seraient vraiment intéressantes, mais, pour des raisons de confidentialité ou de... on n'a pas accès à ça. Alors, c'est clair qu'on a certains tableaux, mais on n'a pas toute l'information.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Alors, je vous souhaite la bienvenue. Merci de votre présence. C'est très intéressant. Écoutez, là, à savoir est-ce que les femmes vont être touchées par cette hausse de tarifs là, oui ou non, un peu, beaucoup, allons-y avec la base qu'on connaît en économie. Il y a trois économistes ici actuellement. On s'entend sur bien des choses, oui.

Une voix : ...

M. Therrien : Oui, mais on s'entend sur bien des choses, mais il y a des choses sur lesquelles on ne s'entend pas. C'est pour ça qu'il y en a des deux côtés de la table.

Écoutez, un des principes de base d'économie, on appelle ça la loi de la demande. La loi de la demande stipule que, quand le prix d'un bien augmente, la consommation diminue. C'est une loi. On s'entend tous là-dessus. Puis mon étudiant, quand j'enseignais ça, qui n'avait pas ça à l'examen, je le pénalisais puis je disais : Bien, c'est une des notions de base en économie. Là, on est devant une augmentation des tarifs, on s'entend là-dessus, une augmentation des prix, alors, selon la loi de la demande, il y aura automatiquement une baisse de l'achat de ces services-là. Qu'est-ce que ça veut dire dans le cas qui nous concerne? Il y aura moins d'enfants qui iront dans les garderies. Ça, c'est un fait. Étant donné que 70 % des femmes... dans les revenus familiaux, 70 % du revenu le plus faible est le revenu de la femme et, comme disait mon collègue de Rousseau, que les femmes sont très sensibles aux variations du revenu, il est clair que les femmes vont rester davantage à la maison. C'est une évidence. Et donc, à partir de ce moment-là, je pense que vous avez absolument raison de souligner le fait qu'il y aura un retour des femmes à la maison.

À savoir si le taux d'activité va être influencé fortement, faiblement, il faut... J'apprécie beaucoup la députée de Bourassa-Sauvé, mais, quand on arrive avec des amalgames qu'on va faire entre les variations, entre les provinces, des taux d'activité et au niveau des tarifs en garderie, il faut comprendre que l'étude, l'analyse doit être beaucoup plus corsée et costaude que ça, comme le rapport que vous avez mentionné tantôt, Fortin, arrive et, très clairement, nous dit que le taux d'activité augmente dans les cas où est-ce que les frais de garderie diminuent.

Moi, je voudrais vous parler d'une copie d'une plainte que j'ai reçue à mon bureau de comté. Je sais que vous en avez eu une copie. Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de cette plainte-là. Je sais que le ministère des Finances aussi a reçu cette plainte-là. La plainte, en gros, je ne la lirai pas au complet, mais c'est adressé à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Je vais juste lire quelques bouts, là. Au début, ils mentionnent : «Vous serait-il possible, au nom des femmes du Québec, d'effectuer une enquête pour cause de discrimination à l'égard du sexe concernant le chapitre VI du projet de loi n° 28?» Et là, par la suite, ils mentionnent : «Voici les éléments qui pourraient être considérés.» Et là ils expliquent très clairement, avec beaucoup de bagout, là, pourquoi on se retrouve dans une situation de discrimination. Et je vais juste lire la conclusion, puis je vous laisserai faire un exposé suite à ça : «Conclusion. Les mesures annoncées par le gouvernement Couillard — par le gouvernement, pardon — à l'égard des services de garde éducatifs à l'enfance semblent discriminatoires à l'égard des femmes, et rien n'est prévu au niveau des correctifs à apporter pour assurer aux femmes des droits socioéconomiques équitables, en contradiction flagrante avec ses obligations internationales et sa propre charte des droits et libertés. Dans ce contexte, je demande à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse d'effectuer une enquête sur le chapitre VI du projet de loi n° 28 pour cause de discrimination fondée sur le sexe en introduisant des amendements à une loi en apparence neutre mais qui auront vraisemblablement pour conséquence d'empêcher les femmes d'exercer pleinement leurs droits économiques et sociaux.» Je ne sais pas si vous avez une opinion à ce sujet-là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : J'ai reçu copie de cette plainte, en effet. Évidemment, je ne me prononcerai pas sur le fond dans la mesure où c'est des questions juridiques qui impliquent la charte, les traités internationaux, donc, on a une commission des droits de la personne qui va le faire, mais ce que je vous dirais, en ayant pris connaissance de la plainte : Il est question de discrimination systémique. Or, évidemment, sans discrimination systémique, le Conseil du statut de la femme n'existerait pas. C'est un type de discrimination qui est très pernicieux parce qu'on ne le voit pas tout le temps. L'idée, c'est que, quand une femme ou un homme se présente pour obtenir un emploi, de façon inconsciente il se peut que l'employeur privilégie l'homme plutôt que la femme en se disant : Elle va prendre un plus long congé de maternité que lui, pour toutes sortes de raisons. Alors, «systémique», ça veut dire que ça affecte la société, ce n'est pas individuel. C'est une forme de discrimination qui fait que la montée des femmes, que l'arrivée des femmes dans les postes est plus longue.

Alors, oui, il y a de la discrimination systémique dans la société, c'est un fait, et, nous, ce qu'on démontre dans notre avis, c'est qu'il est clair que cette mesure va toucher davantage les femmes que les hommes, les mères que les pères, étant donné leur situation dans la société, étant donné leurs revenus.

Pour ce qui est de la... comme je vous dis, de : Est-ce que, dans ces conditions, on peut aller jusqu'à dire qu'elle est discriminatoire?, je vais laisser les tribunaux trancher là-dessus. Mais il est clair que, sur certains des facteurs, la société, bien qu'elle se soit énormément améliorée en termes d'égalité femmes-hommes, reste une société où il y a de la discrimination systémique dans certains endroits, et donc il faut que les mesures... il faut que le gouvernement prenne ça en compte quand il établit des politiques, et c'est en général ce qui est fait.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Gaspé a une question à poser. Est-ce que vous permettez, M. le député de Sanguinet?

M. Therrien : Juste compléter, peut-être une minute ou deux, là. Vous avez demandé une analyse différenciée selon les sexes, des répercussions du changement, là, du tarif. Et vous ne croyez pas que le gouvernement est allé très rapidement dans ce changement de tarifs là sans, justement, arriver avec une étude réfléchie sur les conséquences de cette action-là pour le retour des femmes à la maison?

Est-ce que vous ne trouvez pas qu'ils y ont été un peu trop rapidement et qu'il aurait dû y avoir avant ce genre d'étude?

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Ce qu'on a dit, nous, en octobre, c'est qu'il serait plus...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Excusez-moi.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Allez-y, allez-y, il reste peu de temps.

• (12 h 30) •

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Ce que nous avons dit en octobre, c'est qu'il serait prudent de faire une analyse différenciée selon les sexes avant de toucher aux tarifs dans les garderies étant donné que les femmes seraient plus touchées que les hommes. Nous avons dit ça en octobre, donc deux mois, je crois, à peu près... plus qu'un mois en tout cas avant que le projet de loi sorte, et personnellement je crois qu'il n'est pas forcément trop tard pour essayer de faire une telle démarche.

Bien sûr, ce n'est pas si simple que ça, faire une analyse différenciée selon les sexes, mais je crois que quand même le ministère des Finances, le ministère de la Famille... Il y a du monde, là, dans ce gouvernement. Il me semble qu'il y a quelqu'un qui pourrait quelque part essayer de faire une analyse encore plus pointue que celle qu'on a faite, étant donné que vous disposez, sans doute, de chiffres dont nous ne disposons pas et de logiciels. Alors, oui, on a dit que ça serait bien de le faire, on l'a dit dans une lettre à la ministre de la Famille et on continue à le dire.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Il reste 1 min 30 s, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, bienvenue à cette commission. Je trouve très intéressant le contenu de votre mémoire. J'aimerais voir avec vous si vous avez évalué... Comme critiques au développement des régions et des municipalités, est-ce que vous avez évalué l'impact du projet de loi n° 28 notamment sur les familles, pour ne pas dire les femmes, qui résident dans des régions où, par exemple, le revenu individuel et le revenu par ménage est beaucoup plus bas? J'entends, depuis hier, bon, des exemples où on dit : Une famille avec un revenu moyen de 100 000 $, 120 000 $. Je vous dirais que ça me fait sursauter, parce que, comme député de Gaspé, moi, ma réalité, c'est : un revenu de ménage, c'est moins de 30 000 $.

Donc, je suis convaincu que l'impact que vous mentionnez depuis ce matin, vous, et d'autres personnes, est sûrement encore plus grand sur les femmes des régions, malheureusement. Pouvez-vous me dire si vous vous êtes penchés là-dessus un peu?

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Non, malheureusement...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : ...on ne l'a pas fait. Mais je crois que vous avez raison de dire que c'est quelque chose qu'on devrait essayer de faire en fonction des revenus moyens dans les régions. De toute évidence, ça touchera davantage les endroits où les familles ont des plus bas revenus et où la famille moyenne, là, c'est en dessous de 100 000 $, c'est clair. C'est clair. Mais on n'a pas fait cette étude-là.

M. Lelièvre : Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci beaucoup. Mme la députée de Repentigny. La parole est au deuxième groupe d'opposition avant d'aller à la députée de Gouin par la suite. Alors, Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Dans votre graphique à la page 14, ce qu'on constate, c'est que, dans le fond, la classe moyenne, c'est cette classe-là qui utilise le plus les garderies actuellement.

Je reviens sur un article qui a paru dans la revue L'Actualité, où le ministre des Finances, qui à l'époque parlait à titre d'économiste, parlait de l'endettement des ménages. Le «ménage», il inclut les femmes aussi. Et il disait : «Les consommateurs québécois sont essoufflés. Le taux d'endettement des ménages est déjà trop élevé.» Et, lors du discours du budget, il a dénoncé le fait que les gouvernements précédents avaient largement utilisé la capacité d'accroître les revenus en augmentant les impôts et taxes puis que, là, ça avait atteint sa limite. Avez-vous l'impression que, mis à part les belles paroles, on réalise qu'effectivement la capacité de payer des familles moyennes a atteint sa limite et que, depuis l'élection, on a vu un paquet de hausses? Parce que, là, on parle des garderies, les hausses des garderies, mais les familles dont vous parlez ont subi les hausses de taxes municipales, les taxes scolaires, Hydro-Québec. Donc, c'est beaucoup d'ajouts, et il me semble qu'il y a une non-concordance entre le discours et ce qu'on voit puis ce que les femmes subissent, automatiquement.

Le Président (M. Bernier , Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Bon. Évidemment, moi, je ne veux pas faire de politique, je suis ici pour vous parler de la condition des femmes.

Donc, il est clair que les mesures qui font que la vie coûte plus cher pour les femmes, les mesures qui peuvent les décourager de travailler sont préoccupantes, pour nous. Ce qui est très difficile, c'est qu'en même temps on a... 60 % des facultés dans les universités sont maintenant formées de femmes. Donc, on a en même temps une très grande progression des femmes universitaires, ce qui nous fait peut-être oublier que les deux tiers des femmes ne vont pas à l'université. Donc, on a tendance toujours à se concentrer sur celles qui bénéficient finalement de cette grande révolution féministe et qui, en effet, ont des diplômes, réussissent mieux que les jeunes hommes de leur âge, mais on oublie que les deux tiers des femmes n'ont pas d'éducation supérieure et que, pour ces femmes-là, elles ne sont pas dans la construction à faire des salaires de 30 $ de l'heure, elles sont en général dans des emplois moins payés, moins sécuritaires, pas forcément syndiqués, au salaire minimum.

D'ailleurs, pour les congés parentaux, c'est un très grand... Comme on disait, c'est un très grand progrès de notre société d'avoir des congés parentaux, mais les femmes au salaire minimum n'ont pas les moyens de prendre des congés parentaux parce que les congés parentaux sont payés une certaine portion du salaire de base. Donc, c'est une mesure formidable mais qui n'est pas à la portée de toutes. Donc, évidemment, comme je suis une personne progressiste, je me dis qu'il n'y a aucune raison qu'une femme qui soit serveuse n'ait pas droit au même congé parental qu'une femme universitaire. Après tout, les enfants, c'est les enfants. Donc, je vous rejoins dans la mesure où on oublie trop souvent toute cette catégorie de femmes qui n'a pas forcément les études et la formation pour décrocher des emplois à bons salaires.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci. Alors, on nous a parlé, hier et aussi aujourd'hui, de la complexité des calculs au-delà de l'augmentation, mais cette complexité-là des calculs, qui fait en sorte que le projet de loi tel que présenté... oui, les parents vont avoir l'illusion que leurs frais de garde n'ont pas augmenté parce qu'ils vont continuer à payer le 7,30 $ et la fracture — j'appelle ça vraiment une fracture — va arriver à la fin de l'année. Puis, ce matin, il y avait des gens qui nous disaient que les familles sont désorganisées. On ne peut pas prétendre que les familles vont être capables de dire : Je vais me mettre tant d'argent toutes les semaines pour payer ce montant-là, que je ne sais pas à quoi il va ressembler, alors qu'on sait que, les familles, tout l'argent qu'elles ont à toutes les semaines sert à l'usage de la famille. Donc, c'est de leur demander une rigueur... bien, je ne dirais même pas «rigueur», parce que, dans le fond, il y a toujours des surprises dans une famille à toutes les semaines, qui fait en sorte que l'argent, bien, il finit par se dépenser. Vous devez penser que ça va exercer une pression énorme sur les familles de ne pas connaître exactement le montant qui va être payable d'un coup lorsqu'on va produire notre rapport d'impôt, qui va devenir encore plus complexe qu'il l'est déjà, et qu'on n'aura peut-être pas la capacité à payer en un coup ce montant-là, et on sait comment le ministère du Revenu charge en pénalités et en taxes lorsqu'on ne paie pas au moment où on le doit.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : C'est vrai que ça ajoute un degré de complexité. D'après ce que je comprends, le tarif va être prévu dans l'entente de service, donc, quand la famille va signer le contrat avec le CPE ou la garderie subventionnée, le tarif modulé, là, va leur être donné. Toutefois, il est vrai que, quand on ne paie pas sur le coup, l'idée d'économiser pendant 11 mois pour réussir à payer le surplus, ce n'est pas évident pour toutes les familles. Et c'est aussi peu évident qu'à l'inverse j'ai compris que, quand les familles paient 25 $, paient des gros montants, on leur rembourse aux trois mois les... voyons, les impôts qu'elles devraient avoir là-dessus. Donc, effectivement, ça prendrait peut-être une formule pour mettre de l'argent de côté, je ne sais pas que faire là-dessus, mais c'est vrai que la surprise, au moment des impôts, peut être grande et c'est vrai que tout le monde n'est pas comptable et n'a pas une calculette à la main.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Combien de minutes?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Environ deux minutes.

Mme Lavallée : Deux minutes. Ce matin, justement, une garderie privée non subventionnée nous parlait de familles qui allaient à leur garderie et qu'elles ont... 80 %, de mauvaises créances... bien, de créances... de gens qui ne paient pas au moment où les sommes sont dues, parce que le chèque qui arrive du gouvernement, la fameuse allocation qui est versée, si l'auto brise ou s'il arrive une dépense extraordinaire... bien, l'argent va servir à ça et ne servira pas à la garderie.

Donc, on a un problème de finances, on a un problème, puis ce n'est pas nécessairement parce que les gens gaspillent, mais c'est parce que les gens sont endettés, et la capacité de payer a atteint sa limite. Ça a été dit, mais ça ne semble pas être compris, puis, malheureusement, les femmes en paient le prix, de ça.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne.

• (12 h 40) •

Mme Miville-Dechêne (Julie) : ...il y a un petit vice dans le système, parce que ce ne sont pas les familles les plus modestes qui ont accès aux garderies subventionnées. C'est premier arrivé, premier servi. On n'a pas un service universel parce qu'il n'y a pas assez de places. Donc, les familles plus modestes qui doivent aller dans des garderies privées et payer 35 $ par jour, bien je vous avoue que je trouve qu'il y a une iniquité assez forte là étant donné que certaines des places subventionnées sont occupées par des ménages qui font 300 000 $. Alors, je sais que plein de gens parlent d'universalité de notre système, mais il n'est pas universel.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. 30 secondes.

Mme Lavallée : Terminé. Merci.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : C'est beau. Mme la députée de Gouin, la parole est à vous.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Bien, d'abord, je voudrais vraiment remercier le Conseil du statut de la femme d'être ici. Je trouve que ça fait vraiment du bien d'entendre un point de vue féministe sur cette question, et le conseil le fait de fort belle manière, ce qui va m'amener un petit commentaire éditorial à l'intention des collègues, mais peut-être surtout du ministre — et je le dis gentiment : Non seulement il est important que toutes les femmes qui veulent travailler, avec des enfants en bas âge, puissent le faire — je pense que nous sommes d'accord là-dessus — mais je voudrais faire remarquer au ministre qu'une bonne analyse différenciée selon les sexes, une ADS, dont la présidente a parlé nous permettrait aussi de comprendre autre chose. C'est que, les femmes, le mémoire l'indique... oui, accroissement spectaculaire du taux d'activité des femmes mais, depuis quelques années, dans des emplois précaires, avec des salaires qui en fait diminuent, des revenus qui diminuent, les... en fait, les femmes sont souvent à statut précaire. C'est ça qu'une ADS nous dirait. Elle nous dirait aussi que les femmes, même quand elles travaillent à temps plein, assument très majoritairement encore l'organisation familiale, que ce sont elles qui prennent les congés sans solde pour responsabilités familiales; sans solde.

Tout ça pourquoi? Bien, d'une part, parce que c'est un peu culturel, mais, d'autre part, parce que celui ou celle qui va prendre le congé sans solde, c'est celui ou celle qui gagne le moins, parce que ça affecte moins la famille. Pour toutes ces raisons-là, à cause de tous les problèmes de conciliation travail-famille, oui, le CSF a raison de nous alerter au risque potentiel de hausser, de façon substantielle dans certains cas, les tarifs en service de garde. Et, oui, il y aura non seulement des femmes qui vont réfléchir, mais des conjoints qui vont faire comme ça se faisait dans les années 80 et leur dire : Chérie, si on calcule bien, là ce ne serait pas plus simple que tu restes à la maison?

Alors, je pense qu'il ne faut pas négliger ces questions. L'ADS n'a pas été faite. D'ailleurs, je ne sais pas quand est-ce que les gouvernements en font, des analyses différenciées selon les sexes. Il me semble que ça fait longtemps que j'en ai vu. Et je voudrais donc savoir, au terme de ce commentaire : Quelles recommandations — je ne pouvais pas m'en empêcher, je suis tellement contente de vous voir — précises faites-vous au ministre des Finances quant à cette question de la modulation des tarifs en service de garde?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Miville-Dechêne, je vous donne une minute.

Mme Miville-Dechêne (Julie) : Eh bien, je reprendrais de façon résumée ce que je dirais au ministre, c'est qu'il n'est pas trop tard pour, justement, analyser les effets potentiels de ce projet de loi sur les femmes et de réajuster le tir, si nécessaire. Pour moi, la question du tarif unique versus la modulation, ce n'est pas tant ça qui est important, c'est de savoir comment les femmes plus fragilisées dans l'emploi seront touchées.

Donc, de notre point de vue, on ne peut pas ignorer ce risque potentiel, particulièrement dans une société qui se vante d'avoir comme valeur fondamentale l'égalité. Or, si on est une société égalitaire, on ne peut pas passer de projets de loi qui risqueraient de... pas de menacer, parce qu'on n'est pas à ce point-là, mais qui risqueraient de changer un peu la donne en matière d'égalité et qui risqueraient de faire que des femmes choisiraient leur parcours de vie non pas en fonction de leurs aspirations et en fonction de la recherche d'une éventuelle autonomie économique, mais en se disant : Bon, je vais rester à la maison parce que vraiment je ne gagne pas beaucoup et ça va être plus simple pour tout le monde. Alors, ce ne sont pas, pour nous, des bonnes raisons, forcément, de rester à la maison. Nous préférerions que ces choix-là soient faits non pas en fonction de stéréotypes de sexes, mais en fonction d'un désir réel de passer ou non des journées complètes avec des jeunes enfants. Et voilà. Donc, je vous invite à étudier la question encore un petit peu.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Miville-Dechêne. Merci, Mme Roy, Mme Charron. Merci de votre participation à cette commission parlementaire.

Donc, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 14 heures. Merci encore une fois.

(Suspension de la séance à 12 h 45)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la commission reprend ses travaux, et je demande, bien sûr, comme d'habitude, à toutes les personnes dans la salle d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Nous allons poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 28, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Alors, bon après-midi à tous. Il nous fait plaisir d'accueillir un premier organisme, le Réseau des conférences régionales des élus du Québec, représenté par M. Jean-Maurice Matte, Mme Paulette Lalande, M. Richard Deschamps. Bienvenue à vous trois. Donc, comme vous le savez, vous avez 10 minutes pour votre présentation. Par la suite, nous procéderons à des échanges avec les parlementaires. Donc, la parole est à vous.

Réseau des conférences régionales des élus
du Québec (Réseau des CRE du Québec)

M. Matte (Jean-Maurice) : Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, MM., Mmes les députés, merci beaucoup de nous recevoir aujourd'hui dans le cadre de cette commission parlementaire du projet de loi n° 28, que je dois vous avouer... qui nous a frappés de plein fouet. Il y a eu des dispositions à l'intérieur du projet de loi n° 28 qu'on ne s'attendait pas du tout, surtout après une campagne électorale où les régions étaient au coeur du discours du gouvernement. Écoutez, je vais faire une petite partie de la présentation, Mme Lalande va en faire une partie, et M. Deschamps, une autre partie. Après ça, ça va nous faire plaisir de répondre à vos questions.

Les CRE ont été mises en place en 2004 par le gouvernement du Québec, ont été mises en place dans un souci de régionalisation. Leur rôle a été confirmé en 2007, confirmé par une entente de cinq ans au niveau de son financement et des responsabilités supplémentaires et a été encore plus confirmé en 2012, lors de la mise en place de la loi sur l'occupation du territoire, où le rôle du palier régional a été pleinement confirmé.

Le transfert qui est proposé dans la loi, le transfert des responsabilités des CRE aux MRC, il faut comprendre que ça n'exclut pas l'importance du palier régional comme niveau pertinent d'action publique. Et ce que le gouvernement a affirmé lors de la mise en place des CRE, c'est que le développement des régions repose sur un fort leadership des milieux locaux et régionaux. Ce sont des leaders politiques et socioéconomiques des milieux qui connaissent les forces de leurs régions. Ils sont mieux placés que quiconque pour développer le plein potentiel de leurs régions et décider de leur avenir. Le gouvernement croit en la capacité des régions de se prendre en main et de trouver des solutions adaptées à leurs besoins. Il a ainsi voulu leur donner des moyens additionnels. Le problème de la mise en place des CRE, c'est qu'elles ont tellement été efficaces sur les différents territoires du Québec qu'on n'a jamais passé à l'étape de la régionalisation. Le gouvernement a beaucoup utilisé les CRE pour poser des actions dans les régions administratives du Québec, puis c'est correct, et on s'est acquittés de notre tâche d'une façon efficace, mais l'étape de la régionalisation n'est jamais arrivée. Et les CRE, bien c'est plus que de la concertation, c'est de la planification collective par la mise en place du plan quinquennal de développement, c'est des projets innovateurs, structurants qui durent dans le temps, ça joue un rôle d'initiateur, de facilitateur, de médiateur, de coordonnateur de l'action dans les différentes régions du Québec, ça met en réseau les différents partenaires. Et évidemment les CRE ont le rôle d'avoir une utilisation optimale des ressources sur les différents territoires, et évidemment, cette tâche-là, les rapports du Vérificateur général, du Conseil du trésor le démontrent, les CRE ont pleinement rempli ce rôle-là.

Alors, Mme Lalande.

Mme Lalande (Paulette) : Bonjour. D'abord, premièrement, je suis bien contente d'être dans la salle Papineau parce que Papineau, c'est chez moi, c'est dans ma région. C'est un grand patriote, c'est quelqu'un qui croyait beaucoup aux régions, alors je me sens appuyée par lui aujourd'hui quand je vous parle.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...Mme Lalande, on est contents de vous voir.

Mme Lalande (Paulette) : Bien oui, j'espère bien. Écoutez, d'abord, je dois vous dire que j'ai énormément de peine aujourd'hui, parce que jamais, jamais je n'ai pensé qu'un jour je devrais venir défendre les CRE. Parce que c'est la plus belle et la plus grande décision que le Parti libéral a prise en 2004. Et nous, là, nous sommes entrés à plein dans la région de l'Outaouais, et, si nous avons survécu dans l'Outaouais, c'est à cause des CRE, parce qu'il y a 10 ans on s'est pris en main, on a appris à échanger, on avait des partenaires de partout qui venaient nous demander de l'aide et pour lesquels on était ouverts à cet état de choses.

Donc, vous comprendrez que pour moi, là, aujourd'hui, je trouve ça superpénible, parce que je ne comprends pas comment ça se fait que vous avez pensé à abolir les CRE. Parce que, pour nous, là, c'était notre planche de salut. Et c'est pour ça qu'on vous dit : Il faut absolument, absolument que vous préserviez le palier régional puis il faut le maintenir avec des sommes d'argent qui vont faire qu'elles vont survivre. Écoutez, il faut avoir ces sommes d'argent là pour continuer si on veut vraiment être efficaces dans ce qu'on fait. On l'a fait pendant 10 ans, on l'a fait de façon exceptionnelle. Jamais, jamais je n'accepterai qu'on dise que les CRE n'ont pas fait une bonne job. Je parle au nom de l'Outaouais puis aussi au nom du Québec. C'est le plus bel exemple de décentralisation, les CRE. Alors, les CRE, ce qu'on a fait, c'est qu'on avait les fonds, puis, ensemble, tout le monde, on décidait à quel endroit on était pour les faire.

• (14 h 10) •

Vous faisiez affaire avec 21 CRE. Si vous abolissez ça, vous allez être obligés de faire affaire à 101 organismes. Je suis désolée, là, vous êtes peut-être bien bons, là, mais jamais vous ne réussirez, ce n'est pas vrai, parce qu'il faut absolument avoir un palier de concertation. Il faut qu'ensemble les régions, on se prenne en main, et puis c'est ce qu'on a fait et c'est ce qu'on veut continuer. On a des échanges avec... entre le gouvernement, là. Je veux dire, ça va être rendu à 101, ça n'a pas de bon sens, et on va être obligés de renégocier avec les ministères. Cette semaine, il y a un directeur d'un ministère chez nous qui nous a dit : Ça n'a pas de bon sens; plus de CRE, je me sens déculotté. Et je pense que, cette expression-là, on l'entend bien puis on sait ce que ça veut dire, mais, si un président ou un directeur d'un ministère nous dit ça, c'est parce qu'il y a une grosse problématique. Alors, il faut absolument que ce soit maintenu, on ne peut absolument pas passer à côté de ça. Et 20 millions que ça va coûter pour fermer les CRE... imaginez. Et le FDR, à chaque dollar qu'on mettait, il y en a 2 $... plus que 2 $ qui venaient d'ailleurs. Imaginez comment est-ce qu'on recevait de l'argent avec ça ou qu'on pouvait développer les régions.

Ensuite, vous avez toute la désinformation qui a existé. Ce n'est pas vrai que, là, ça coûtait... je ne sais combien, 38 % pour les frais de... Chez nous, ça coûtait 9 %, et je suis persuadée qu'on n'est pas la seule. Il y en avait ailleurs où est-ce que c'est que c'était comme ça. C'est comme si on avait voulu faire une désinformation pour faire passer la pilule. Vous savez, je suis comme très, très, très sensible à tout ça, moi, je viens d'une région et je pense que les régions, on a... on a tous besoin, chacun, des autres, les villes ont besoin des régions, les régions ont besoin des villes, et c'est ensemble qu'il faut absolument travailler, sinon on n'y arrivera pas. J'écoute le ministre des Affaires municipales, qui nous dit : Bien, voyons donc, vous allez avoir 100 millions. Bien, je peux-tu vous dire qu'à... on avait 176 millions? Ça veut dire que les régions, on a 76 millions de moins. Bien là, si vous me dites que c'est la même chose... je ne sais pas, moi, il me semble que je vois une grosse différence de 76 millions et je pense que c'est une réalité.

Écoutez, je pense, messieurs, mesdames, que vous devriez lire l'éditorial du Soleil du 22 juin, éditorial sous la plume de Mme Brigitte Breton, et peut-être que vous pourriez faire le message au premier ministre, qui, le 4 juin, alors qu'il nous disait que le monde rural, on était pour être protégé... il a dit tellement de belles choses dans son discours puis il nous a dit qu'il fallait absolument avoir une considération pour l'humain qui était sur le territoire du Québec. Alors, Mme Breton, ce qu'elle dit dans son éditorial, c'est qu'entre le discours du 4 puis ce qu'on vit présentement, là, il n'y a pas de cohérence, du tout, là, il n'y a pas de suite. Donc, je trouve ça vraiment dommage.

Et je terminerais en vous rappelant une phrase de Félix Leclerc, dans une de ses chansons, qui va peut-être... en tout cas, je suis en train de comprendre davantage ce qu'elle voulait dire, cette phrase de cette chanson-là : La veille des élections, il t'appelait fiston. Le lendemain, comme de raison, il avait oublié ton nom. C'est un petit peu comment je me sens aujourd'hui.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Lalande. Il reste environ 45 secondes, M. Deschamps.

M. Deschamps (Richard) : Alors, écoutez — juste pour essayer de clore comme il faut — nous, ce qu'on pense, c'est que, là, il va y avoir un bris de continuité. Le projet de loi, il ne prévoit qu'une seule et unique façon de faire, c'est de faire la fermeture des CRE, et nous pensons que le gouvernement pourrait apporter de la souplesse, de la flexibilité pour permettre une transition qui est beaucoup plus acceptable et qui nous permettrait de continuer le travail.

Sur les 21 CRE du Québec, là, il y en a au moins 14 qui veulent continuer. Chez nous, à Montréal, le maire a clairement spécifié qu'il voulait avoir un organisme de concertation sur le territoire, et nous pensons qu'au niveau de l'ensemble des régions du Québec il faudrait qu'il y ait une approche beaucoup plus souple qui permettrait la transition, qui permettrait même un transfert et qui permettrait aussi d'obtenir les moyens financiers nécessaires. Donc, une approche plus souple qui permet une option vers la transition, nous voudrions avoir des moyens financiers pour faire ces transferts-là dans beaucoup de CRE, ensuite les régions s'organiseront selon leurs propres modèles particuliers, et je pense que c'est de faire honneur aux élus municipaux que de pouvoir faire ce genre de choix là éventuellement avec les transferts.

Et je terminerai en disant que c'est très important de permettre une utilisation du fonds de développement régional 2014‑2015 et 2015‑2016 pour faire cette transition-là. Donc, nous vous demandons de la souplesse dans le projet de loi, de la flexibilité et de reconnaître que le travail qui a été accompli peut se continuer plutôt que de se terminer et de se réorganiser d'une autre façon. Il faudra investir dans l'ensemble des régions du Québec, y compris dans les grands centres urbains que moi, je représente aujourd'hui, tels que Montréal, Québec ou Sherbrooke par exemple.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Deschamps.

M. Deschamps (Richard) : Ça me fait plaisir, M. le Président.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Vous allez avoir l'occasion de revenir au niveau des échanges avec les parlementaires. Donc, nous allons débuter immédiatement du côté gouvernemental. M. le ministre.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Lalande, M. Matte, M. Deschamps, merci d'être là. Mme Lalande, j'ai bien entendu votre cri du coeur, ce n'est jamais agréable de faire face à ces bouleversements-là, à ces changements-là, alors je comprends votre situation. De notre côté, bon, écoutez, ce que nous cherchons à obtenir, c'est d'alléger les structures et de rapprocher le processus décisionnel le plus proche de la population possible, et nous croyons que les MRC sont le véhicule, sont le moyen idéal de faire ça. Ils ont été élus, ce sont des élus et, donc, qui ont la capacité et maintenant la flexibilité et l'imputabilité pour accomplir cette tâche-là. Donc, de notre point de vue, il s'agit vraiment de donner aux élus locaux, qui sont beaucoup plus proches de la réalité de ce que nous pourrions l'être ici, dans nos cabinets de Québec, la flexibilité et l'autonomie nécessaires pour procéder à ces changements-là.

Maintenant, M. Deschamps, vous avez fini en parlant un petit peu des périodes de transition. Je pense qu'on a, si je ne me trompe pas, les... enfin, les ententes peuvent être maintenues jusqu'à mars 2016. J'aimerais vous entendre un petit peu là-dessus : Quelles autres mesures de transition plus souples, plus importantes vous suggérez?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Matte.

M. Matte (Jean-Maurice) : Oui. Si vous permettez, je voudrais juste... Merci, M. Leitão. Au niveau des structures, on veut alléger les structures, mais on fonctionnait avec une vingtaine de structures et on accepte aujourd'hui de fonctionner avec 101 structures, qui sont les MRC et les villes-MRC, et en plus on est en train de vivre dans nos régions, là, le festival de l'OBNL, là, les commissions des ressources naturelles s'incorporent, puis les forums jeunesse, alors là c'est une escalade de l'incorporation.

Vous avez parlé de l'imputabilité, mais l'objectif de la loi n° 34, qui a mis en place les conférences régionales des élus, c'était exactement un objectif d'imputabilité, de placer les élus municipaux au centre du développement régional. Et on est passé des CRD, où il y avait 70, 80 personnes autour de la table et beaucoup de gens de la société civile, à une conférence régionale des élus où les deux tiers sont composés d'élus municipaux, y compris évidemment les préfets des MRC. Donc, cet objectif-là d'imputabilité, c'était l'objectif de la loi n° 34. Maintenant, oui, on comprend... bon, premièrement, l'abolition des CRE, c'était ni souhaité par la FQM ni souhaité par l'UMQ, hein, ce n'était pas dans le livre blanc, ce n'était pas dans le livre bleu et ce n'était pas non plus dans le programme de la campagne électorale. On cherche à proximiser l'action dans les territoires, mais, s'il n'y a pas plus de palier régional, les villes font faire leurs efforts, les MRC vont faire les efforts, mais il y a des responsabilités qu'ils ne seront pas capables d'assumer parce que c'est inter-MRC, parce que c'est plus régional. Alors, qui va les assumer s'il n'y a plus de palier régional? Ça va être ici, à Québec. Alors là, là, on parle vraiment de centralisation. L'objectif de décentralisation aussi... les fonds qui sont décentralisés sont des fonds qui étaient déjà décentralisés. Le FDR, on ne pouvait pas avoir un fonds qui était plus décentralisé que ça. Les actions du FDR étaient basées sur la volonté des gens des régions et des élus des régions qui décidaient si c'était plus important d'aller vers les ressources naturelles, d'aller vers l'exclusion sociale, d'aller vers l'éducation.

Alors, les objectifs que vous poursuivez aujourd'hui, vous les avez pleinement remplis en ayant une instance de concertation régionale. M. Deschamps?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. Deschamps.

• (14 h 20) •

M. Deschamps (Richard) : Bien, alors, je compléterai en disant que, par exemple, une MRC à Montréal, là, c'est un État... je pourrais dire, c'est presque une structure fictive parce que ça recoupe une entité qui est très difficile à définir. Donc, dans notre cas, là, il nous faut une structure régionale qui regroupe à la fois les élus et les acteurs, les... je dirais, les leaders locaux. C'est ce qu'on a fait au sein de notre CRE. Alors, pour répondre à votre question et relier ça au projet de loi : il y a déjà une difficulté, là, très, très concrète d'appliquer ça de la façon dont c'est proposé.

Mais, au-delà de ça, pour toute la question de la transition, moi, comme administrateur de la CRE, et tous les gens qui y travaillent, présentement on ne peut pas engager de sommes au-delà du 31 mars 2015 qui s'en vient, mais il y a beaucoup de projets qui sont en marche et qui vont se dérouler au cours de l'année. Mais je n'ai pas le choix, en vertu du projet de loi qui est déposé, de ne pas engager d'autres sommes pour continuer et faire cette transition-là, qui devrait exister. Donc, c'est très, très problématique à la fois pour un administrateur, sans compter l'impact réel sur les projets qui... Et les projets, là, ce n'est pas une vue de l'esprit, il y a des besoins qui sont exprimés. Il y a des dossiers qui sont à Montréal, qui... et dans d'autres régions, là — je ne veux pas juste centrer sur Montréal — mais, à Montréal, il y a beaucoup de dossiers à différents niveaux : au niveau de l'immigration, au niveau du développement économique, au niveau du développement social. Il y a des impacts. Il y a des ententes spécifiques où les ministères se retournent et ne savent plus où aller les faire, les continuer de les faire porter, sans compter l'impact sur les ressources humaines que nous avons dans nos CRE, où les gens, bien, avec raison, pourraient quitter puis aller travailler ailleurs.

Donc, tout ce qui a été bâti non seulement avec les CRE du Québec ou avec la CRE de Montréal et avec les anciens CRD, les conseils régionaux de développement, tout ce qui a été tissé, structuré depuis 15, 20 ans, bien on le met complètement de côté avec ce projet de loi là, en tout respect, et on dit : Malgré la volonté que plusieurs régions du Québec ont de continuer avec un espace régional ou un organisme régional, vous devez fermer. Donc, il y a vraiment un hiatus, un espace, là, qui crée beaucoup de problématiques et qui ne nous permet pas de faire le travail sur le terrain.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Je prends note de vos problèmes. Je passe la parole à un autre collègue.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Merci, M. le Président. Permettez-moi...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...le député de Portneuf vis-à-vis moi, je ne savais pas lequel des deux...

M. Carrière : Oui, il prend de la place, on le sait.

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Merci, M. le Président. Permettez-moi de saluer des gens que je connais bien : Mme Lalande, M. Matte et M. Deschamps. Merci d'être ici aujourd'hui et de venir nous présenter votre mémoire, que j'ai lu — vous pouvez voir qu'il est assez barbouillé — et j'aurai sûrement plusieurs questions à vous poser, mais je veux juste faire quelques mises au point.

M. Matte, vous disiez que ni l'UMQ ni la FQM... et je pense que, M. Deschamps, vous avez fait allusion également que, lors des négociations du pacte fiscal transitoire, personne n'était d'accord. Moi, j'ai assisté à toutes les rencontres. À toutes les rencontres qu'il y a eu des négociations, à la fois l'UMQ, à la fois la FQM, à la fois les villes de Montréal et de Québec étaient présentes, et je vous dirai qu'il n'y a pas personne qui a déchiré sa chemise sur la fermeture des CRE. Et le livre bleu de la FQM fait mention à plusieurs endroits — et là je ne l'ai pas devant moi, je pourrais vous dire même la page, et etc., et vous le savez autant que moi — que la MRC devrait être l'interlocuteur principal avec le gouvernement et il parlait également d'une instance régionale. Moi, je pense que le projet de loi permet la souplesse. Vous allez me dire le contraire, et je vais vous demander de m'expliquer qu'est-ce que vous avez besoin comme plus de souplesse pour avoir, former une entité régionale. Et j'aimerais ça aussi que vous m'expliquiez, là, vous en êtes où dans votre réflexion et comment vous allez... ou vous entendez faire votre développement régional ou votre instance particuliers, où chacun pourra déterminer sa façon de faire.

Vous avez fait allusion ou parlé de mur-à-mur également, là, que le projet de loi, c'était du mur-à-mur. Je vous dirai que les CRE ont été formées en 2004, et le projet de loi n° 34 formait les CRE toutes de la même façon : les préfets, les villes de 5 000 et plus et le tiers qu'il était possible d'avoir des gens de la société civile. Donc, c'était assez uniforme, la façon de former une CRE. Le projet de loi, là, je pense qu'il va permettre à chacune des entités... Ce qui est bon en Abitibi ne l'est peut-être pas nécessairement... ou l'Outaouais va peut-être vouloir le faire autrement. Vous avez fait allusion que Montréal est assez différente de bien des régions également. Donc, chacune des régions pourra faire sa concertation et son instance régionale, si elle le souhaite, je pense, comme elle l'entendra, mais je pense que chacune des régions du Québec a la maturité pour décider de quelle façon elle voudra faire sa concertation. Je crois que, oui, il doit y avoir une concertation entre les MRC, à l'intérieur des plus grandes villes également et je pense que chacune des régions pourra le moduler à sa façon et l'adapter, là, à ses besoins.

Donc, ma première question. J'aimerais vous entendre sur... quand vous dites que... et dans vos recommandations, là, vous le demandez, d'avoir plus de souplesse sur votre concertation. Là-dessus, je pense que le projet de loi dit que les sommes sont dévolues aux MRC. Chacune des régions pourra s'asseoir et regarder comment elle veut le faire. Donc, j'aimerais savoir qu'est-ce que vous avez besoin comme plus de souplesse et, deux, où vous en êtes rendus dans votre réflexion sur comment vous allez faire votre... dans chacune de vos régions particulières, comment vous allez faire votre concertation.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Matte, en premier.

M. Matte (Jean-Maurice) : Oui, je peux peut-être commencer.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, allez-y, M. Matte.

M. Matte (Jean-Maurice) : Je veux juste faire un... bon, un petit à-côté — merci, M. Carrière — concernant la FQM et l'UMQ. Évidemment, ils vont faire leur propre représentation ici la semaine prochaine, là, mais, au niveau du pacte fiscal, lorsqu'on dit aux unions municipales : Bien, on a 300 millions à aller chercher dans le monde municipal, mais je serais capable d'aller en chercher 76, millions, dans les CLD puis dans les CRE, ça donne une chance de dire : Bien, oui, elle va le chercher là puis ne touche pas à nos municipalités, ça fait que ça... Mais, dans le livre bleu de la FQM, c'est clair que le palier régional est un palier essentiel et important.

Et, en ce qui concerne le sur-mesure, écoutez, aujourd'hui, on met à la tête des régions les préfets des MRC, alors dans ma région, dans plusieurs régions, on vient d'exclure les maires de villes importantes qui, par la structure de leurs MRC, ne seront jamais des préfets, là. Il y a un système de vote, et tout ça. Alors, ça, on ne peut pas exclure ces gens-là de la concertation régionale. Également, la société civile, qui sont des joueurs importants à l'intérieur de nos régions administratives, doivent avoir leur place au sein de la concertation régionale. Lorsqu'on parle de souplesse, lorsqu'on parle de temps, c'est du temps qu'on a besoin pour être capables de regarder ce qui se passe chez nous, de regarder le portrait, qu'est-ce qu'on garde au niveau régional, qu'est-ce qu'on a besoin de garder, avec qui on le fait. Si le projet de loi est adopté rapidement et qu'on abolit les CRE, on n'a plus le temps de faire ça. Alors là, on met 20 millions «down the drain» pour fermer tout ça et, dans quelques mois ou dans quelques années, on va se demander qu'est-ce qu'on pourrait bien rebâtir, là.

Alors, faisons-le dans une transition qui est harmonieuse. L'abolition rapide, pure et simple des CRE ne nous permettra pas ça. Puis faites confiance aux régions, qui vont se parler. Faites confiance à vos représentants du ministère des Affaires municipales dans les régions administratives, qui sont capables aussi de travailler avec les conférences régionales des élus et d'arriver à un modèle adapté à chacune des régions.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. Deschamps.

Une voix : Oui, si vous me permettez...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Ma deuxième question était — et vous n'avez pas répondu, M. Matte : Vous en êtes rendus où dans votre réflexion et comment, chez vous, vous pensez faire votre concertation?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Matte.

M. Matte (Jean-Maurice) : Bien, en fait, nous, si je parle de ma région, puis je sais qu'il y a plusieurs régions, on parle de 14 régions, puis, en passant, c'est 14 régions où les préfets ont dit : On veut une instance de concertation régionale. Alors, nous, la transition doit se faire, dans notre cas à nous, avec le conseil d'administration de la CRE qui est en place actuellement. Passons la période transitoire, accompagnons le gouvernement dans sa volonté d'atteindre l'équilibre budgétaire, ce qu'on comprend très bien, puis on l'exprime dans notre mémoire, et regardons, une fois la période transitoire passée, quel modèle sera le mieux adapté. C'est-u moins de monde, c'est-u plus de monde? Quel rôle jouent les MRC? Quel rôle jouent les préfets? Mais permettons aux gens qui sont en place actuellement, qui connaissent le passé, qui ont travaillé des plans quinquennaux de développement, donc qui voient l'avenir, de faire cette transition-là, puis on veut le faire avec vous.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Deschamps.

• (14 h 30) •

M. Deschamps (Richard) : Oui. Alors, à Montréal, je peux vous dire que je représente... non seulement je suis solidaire du réseau des CRE, mais je représente aujourd'hui l'ensemble des gens qui sont impliqués au niveau de la CRE et au niveau de la ville de Montréal. Pas plus tard que la semaine dernière, et Mme de Santis est venue assister à notre rencontre, il y avait une réunion du conseil d'administration, les administrateurs, et je peux vous dire qu'aujourd'hui je parle, pour une très grande part, à des gens de... je parle au nom de personnes qui sont extrêmement mobilisées. Ce n'est pas parce que personne ne déchire sa chemise — pour utiliser le terme que vous avez utilisé — publiquement qu'il n'y a pas de mobilisation à Montréal. Je peux vous dire que...

Une voix : ...

M. Deschamps (Richard) : Non, non, mais je veux juste être très, très clair. Je ne dis pas que vous avez dit ça, mais je peux juste vous dire qu'il y a du monde extrêmement mobilisé à Montréal qui a une opinion sur le projet de loi.

Pour répondre aussi à votre question : Qu'est-ce qu'on a de besoin pour plus de souplesse?, bien c'est d'avoir aussi une autre hypothèse que celle strictement de la fermeture. On voudrait qu'il puisse y avoir la possibilité, éventuellement, d'avoir une autre organisation et de pouvoir faire un transfert de ce que nous faisons dans une autre organisation, de basculer nos projets, si vous permettez, tout en respectant le projet de loi et la volonté gouvernementale. Je le répète — M. Matte l'a très bien dit, et je suis d'accord — nous comprenons très bien les problématiques budgétaires du gouvernement, nous n'en avons pas aujourd'hui contre ça. Ce que nous disons, c'est que, le travail qui a été fait jusqu'à maintenant, nous devons le continuer parce qu'il répond à des besoins véritables sur le terrain et qu'un organisme de concertation qui fait du développement social et économique, c'est nécessaire dans chacune de nos régions. La couleur que ça prendra, je suis persuadé qu'il y a des réflexions que l'ont fait présentement, et là ça va être adapté à chacune des régions. Et, vous le savez comme moi — vous avez assez d'expérience, j'en suis certain — pour faire de la concertation et du développement, ça prend des transferts et des budgets. Ça prend des budgets, parce que, si on coupe dans les budgets continuellement, bien on ne peut pas faire le travail véritable, ça devient des coquilles vides. Et c'est exactement ce que l'on voudrait éviter, dans le fond, au gouvernement : que l'on ferme et que l'on reproduise d'autres organisations avec moins de budget qui ne nous permet pas de faire le travail pour lequel je suis certain que le gouvernement voudrait que l'on fasse.

Alors, nous, nous pensons que nous devons avoir les possibilités de faire le transfert budgétaire au niveau du FDR 2014‑2015. Il y aura des discussions, au niveau du pacte fiscal, avec l'ensemble des fédérations, soit la FQM, l'UMQ, ou les villes plus importantes. Il y aura certainement des discussions au niveau du pacte fiscal et il y aura moyen d'intégrer tout ça, mais entre-temps, là, pourquoi jeter le bébé avec l'eau du bain alors qu'il y a déjà un travail qui est en train de s'effectuer? Et pour l'instant, à cause de la façon dont le projet de loi est structuré et est écrit, on voudrait respecter la volonté gouvernementale d'atteindre des cibles budgétaires, mais ça ne nous permet pas de le faire, ça ne nous permet pas... Et c'est là qu'est la souplesse et la flexibilité : obtenir les sommes, qu'on puisse utiliser le FDR 2014‑2015, qu'on puisse aller au moins jusqu'au 31 décembre 2015 puis prévoir comment la transition peut se faire, obtenir les montants d'argent.

Vous savez, si on fermait la CRE à Montréal présentement, ça coûterait 3 millions, parce qu'on a des engagements financiers avec des baux, il y aura les employés à payer, etc., et la conserver ouverte, là, ça nous coûterait — on l'a calculé — 3,8 millions. Ça fait que c'est 800 000 $ de différence entre fermer une structure qui est déjà là, qui fonctionne, qui a des ressources et... la fermer complètement et reprendre le travail peut-être dans cinq mois, dans six mois. Puis il va falloir de toute façon discuter, continuer à discuter. Le gouvernement, il ne peut pas nécessairement non plus aller avec chacun des organismes pour faire les discussions. Il faut qu'il y ait un organisme qui fait la coordination de tout ça et qui représente les voix dans toutes sortes de domaines : en matière d'immigration, en matière de culture, en matière de développement durable, en matière de développement économique. La CRE a un travail qui est large, puis je pense que c'est une bonne chose. Et c'est un respect des élus municipaux. Vous l'avez manifesté, M. le ministre l'a clairement dit également. Et nous pensons qu'en faisant cette transition-là, en la permettant dans le projet de loi, c'est ça qui apporterait de la souplesse et de la flexibilité, nous pourrions continuer à faire notre travail et à continuer les discussions avec le gouvernement du Québec.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Je dispose de combien de temps?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Il reste environ 6 min 30 s.

M. Carrière : 6 min 30 s. Quand j'ai parlé que personne n'avait déchiré sa chemise, j'ai parlé de lors de la négociation du pacte transitoire et non de la nécessité d'avoir de la concertation. J'en suis, j'y crois. Je pense que les régions doivent en avoir et doivent le faire de la façon — et vous l'avez dit, là, à moins que j'aie mal compris — de l'adapter à chacun de ces besoins. Ce qui doit se faire à Montréal ne se fera sûrement pas de la même façon en Abitibi, en Outaouais, en Gaspésie ou peu importe... dans le reste du Québec. Et je pense que c'est sage de l'adapter à chacune de nos réalités et des besoins.

Et là personne n'a répondu sur quoi vous avez à date et sur quoi vous vous décidez de... où vous avez réfléchi aussi. Je pense que vous n'êtes pas rendus là encore. Peut-être que c'est pour ça que vous ne m'avez pas répondu sur comment vous voyez la concertation dans l'avenir. Et là ce que gouvernement dit maintenant et, je pense, où il y a encore de la souplesse... ou la souplesse est là, c'est que les sommes, là... le fonds de développement des territoires, il va être retourné dans les MRC, donc, Montréal également, etc., et, à partir de là, chacune des régions... puis je vais prendre l'exemple de l'Outaouais parce que je la connais bien, la ville de Gatineau, quatre MRC pourront décider ensemble de quelle façon ils vont faire leur concertation, ils vont pouvoir travailler ensemble. Moi, je pense que, et je vais prendre l'exemple de l'Outaouais, elle est suffisamment mature pour décider qu'est-ce qu'ils veulent pour l'avenir et, à ce moment-là, pourra réserver les sommes qui sont dévolues à chacun des cinq territoires et de se formuler... et, le projet de loi, je pense qu'il est clair, ils peuvent se faire une instance régionale à leur mesure et...

Mme Lalande (Paulette) : ...énormément de difficultés. Vous le savez, à part de ça.

M. Carrière : Oui, oui, je le sais.

Mme Lalande (Paulette) : Je m'excuse, je ne sais pas si j'ai...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Non. Bien, ce ne sera pas long, Mme Lalande, je vais vous donner la parole. Je vais laisser le député de Chapleau terminer...

Mme Lalande (Paulette) : D'accord, je vais la prendre après.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...son énoncé. Par la suite, je vous donne la parole, je vous le promets.

M. Carrière : Il faut savoir que Mme Lalande et moi, on a de longues discussions, on se connaît très bien et on s'en parle régulièrement, et, je pense — et je vais continuer et finir ce que je voulais dire — chacun d'entre vous qui êtes ici... bien, je ne sais pas pour vous, M. Deschamps, mais je sais que, pour M. Matte et Mme Lalande, vous êtes à la fois maires, préfets et présidents de CRE et, à moins que je me trompe, vous êtes à la fois membres de la FQM et de l'UMQ, à moins que je me trompe, et à ce moment-là c'est pour ça que moi, je pense que toute la souplesse est là, et vous allez me dire le contraire, et c'est correct, et encore une fois je vais vous encourager à me dire où vous voyez qu'il n'y a pas de souplesse. Et, selon vous — vous avez parlé de la période transitoire d'un an, etc., je pense qu'elle est là — qu'est-ce que vous voudriez voir renforcer dans le projet de loi, qui vous permettrait, selon vous, d'avoir cette transition-là, là, qui... Moi, je vous suggère de laisser la parole à Mme Lalande.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Bien, d'une façon ou d'une autre, Mme Lalande...

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Excusez. Mme Lalande m'a demandé la parole, donc je vous accorde la parole, Mme Lalande. La parole est à vous.

Mme Lalande (Paulette) : Merci. Écoutez, c'est parce que je ne suis vraiment pas d'accord avec ce que M. Carrière a dit.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...

Mme Lalande (Paulette) : J'ai le droit, hein, même, parce que je le connais bien, à part de ça.

Là où ça me fait mal, c'est que, là, les municipalités... puis, je vais dire, les régions, je comprends... on a dit : Bien, on va avoir 100 millions, mais avant on avait 176 millions. Puis là on dit : Ce sont les MRC qui vont décider qu'est-ce qu'ils veulent faire, puis on va demander des argents aux MRC, puis ce sont les MRC qui vont fournir cet argent-là pour le palier régional. Moi, je pense que, un, vous n'avez pas de choix, que, dans le projet de loi, il faut qu'on dise qu'il faut avoir un palier régional et maintenir une instance régionale. Ça, je pense que c'est clair pour tout le monde, on l'a dit tellement. Il faut aussi avoir les sommes d'argent qui vont avec ça sans que ce soient les MRC entre elles qui décident qu'il faut donner tant d'argent. Écoutez, si on était bien riches au Québec, bien, peut-être... mais là on a déjà coupé puis là on va couper encore, puis là on dit : Ah, bien là, si vous voulez avoir une instance de concertation, il va falloir que tout le monde, les MRC puissent donner de l'argent. Je vous le dis, là, ce n'est pas la voie du succès.

Ce que je dis, c'est qu'en même temps que, dans le projet de loi, vous dites que l'instance, le palier régional... je pense que même le ministre a dit que c'était important puis j'imagine qu'on va le retrouver dans les modifications du projet de loi, mais il faut aussi qu'il y ait des sommes d'argent qui soient là pour maintenir... puis je ne vous dis pas que ça va être les mêmes sommes que les CRE, je ne vous dis pas... mais il faut absolument, sinon, là... j'y crois, j'y crois, mais je crois aussi que ça va être difficile pour les régions, puis ce n'est pas ça que je veux.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, M. le député de Chapleau.

M. Carrière : Je veux juste un... puis je vais laisser la parole parce que c'est leur temps, là. Chacune, à la fois l'UMQ... à la fois dans le livre blanc de l'UMQ, à la fois dans le livre bleu de l'UMQ... J'étais maire à l'époque, aussi j'ai été préfet, j'ai été président de la CRE aussi...

Mme Lalande (Paulette) : ...de la CRE, vous savez comment on fonctionnait.

• (14 h 40) •

M. Carrière : Mais, quand vous dites : Il faut que le gouvernement, ce que je comprends, exige un palier, une instance régionale de concertation, mais partout le monde municipal, et j'en suis, dit : Laissez-nous décider ce qui est bon pour nous.

Ça fait que moi, là, je vois un certain paradoxe dans ces deux discours-là. Nous, on dit : Vous voulez en avoir une, instance régionale de concertation, go, faites-la. Là, moi, ce que je vous dis maintenant : Dites-moi ce qui manque là-dedans au niveau de la souplesse pour pouvoir le faire, puis faites-la, chacune des régions, comme vous la voulez, mais est-ce que vous voulez encore que ce soit Québec qui dise : Oui, ça la prend? C'est là-dessus, là, où à la fois la... lorsqu'il y a eu les négos, là, tous ceux qui étaient autour de la table disaient : On est les municipalités, traitez-nous comme un partenaire du gouvernement. Donc, expliquez-moi ce paradoxe.

M. Matte (Jean-Maurice) : Bien, je ne pense pas qu'il y ait un paradoxe, M. Carrière.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Vous avez peu de temps, vous avez à peu près 15 secondes, puis on doit passer de l'autre côté.

M. Matte (Jean-Maurice) : Oui. En fait, je ne pense pas qu'il y ait un paradoxe, je pense que ce que les élus régionaux veulent, c'est décider la couleur de leur instance de concertation, mais ils en veulent une. Maintenant, le fonds de développement des territoires, 100 millions, quand on a déjà coupé dans le CLD puis on a un peu ramolli le pacte rural... C'est sûr qu'une fois que ça va être rendu dans les MRC on ne ramènera pas ça au régional. Vous nous demandez ce qu'on souhaite; on souhaite la reconnaissance de l'instance et on souhaite évidemment du financement qui descend dans cette instance-là, parce qu'une fois que c'est descendu dans les MRC ça ne remontera pas.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Matte. Vous aurez l'occasion de poursuivre, mais cette fois-ci avec les gens du côté de l'opposition officielle, avec le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui. Merci, M. le Président. Alors, M. Matte, Mme Lalande et M. Deschamps, bonjour, merci. Je suis désolé, je suis arrivé en retard, d'autres occupations m'ont forcé à être en retard, mais j'avais eu le temps de lire votre mémoire attentivement, et il a soulevé beaucoup de questions et de questionnements en moi.

Moi, j'ai senti à la lecture que vous étiez très ouverts à des aménagements dans la mesure où on transite vers un nouveau modèle puis que ce que vous cherchiez, c'était, minimalement, que ce soit reconnu, et moi, je pense que la loi, telle qu'elle est présentement rédigée, ne permet pas, ne reconnaît pas cette nouvelle structure qui pourra émerger dans chacune de nos régions. J'aimerais peut-être vous entendre là-dessus, parce que, moi, il m'apparaît assez clair que le poids politique d'une structure qui n'est pas reconnue formellement par l'État, dans sa législation... ça me semble assez clair que ce poids-là va être beaucoup moins important que celui d'une instance qui est formellement reconnue, qui est constituée en vertu de nos lois. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. C'est parce que, moi, ce que ça me donne l'impression, c'est que le gouvernement a un peu agi dans l'objectif de diviser pour régner. En faisant en sorte que le développement régional va dépendre de 101 créatures plutôt que 21, dans le fond, on s'assure que les résistances puis les objections perdent de leur poids.

En tout cas, moi, je vous sens très souples, puis nous autres, évidemment on va pousser dans la direction que vous suggérez, c'est-à-dire faire en sorte qu'il y ait une reconnaissance claire d'une instance régionale, mais j'aimerais ça vous entendre sur le poids politique d'une instance non reconnue dans la loi. J'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Lalande.

Mme Lalande (Paulette) : Oui. Vous avez parfaitement raison, là. Quand on a créé les CRE, on a dit : Les CRE, c'est le palier régional qui va exister, puis on a donné les règles, et tout ça. Ça a bien fonctionné pendant 10 ans, et moi, je trouve que... en tout cas, en ce qui me concerne, c'est la meilleure décision que le gouvernement libéral n'avait pas prise, parce que c'est ça qui nous a permis de travailler ensemble, d'échanger puis de regarder dans la même voie puis de se développer. C'est la différence, comme vous dites, entre ce qui est reconnu et ce qui n'est pas reconnu. C'est pour ça qu'on se dit : Il faut absolument que ce soit reconnu, c'est-à-dire que le gouvernement nous dise : Bien, il va y avoir une instance. S'il y en a qui n'en veulent pas, bien là, écoutez, peut-être qu'à ce moment-là ils auront la possibilité de le faire. Mais il faut que fondamentalement elle soit là pour pouvoir... au moins qu'on ait cette crédibilité, parce qu'on en a besoin.

M. Matte (Jean-Maurice) : Et, si cette reconnaissance-là doit passer par chacune des régions qui propose un modèle au gouvernement et ensuite que le gouvernement le reconnaisse, on va faire notre travail là-dessus.

Aujourd'hui, on est mis devant un fait accompli, on sent l'urgence de se battre, de proposer autre chose, on est en train de s'organiser. Donnez-nous le temps de proposer le meilleur modèle pour chaque région administrative. Et, vous savez, les conférences régionales des élus, les CRD à l'époque, jouent un rôle essentiel sur l'équilibre et le partage de la richesse dans les régions administratives. Fonctionner avec chacune des MRC, les MRC qui aujourd'hui ont plus les moyens, fonctionnent déjà très bien, elles vont avancer, puis les MRC qui sont déjà un peu plus affaiblies pour plein de raisons : concertation plus difficile... elles vont avoir de la misère à suivre lorsqu'on va fonctionner sur le modèle comme ça. Et je ne vois pas pourquoi moi, à partir de ma MRC, je financerais un projet de transport collectif qui est très bénéfique pour une autre MRC, au prorata de la population, puis j'en ai plus... Si je n'ai pas une... ça ne se fera pas. Ça prend une instance régionale qui est capable d'équilibrer les actions et la richesse sur les différents territoires d'une région administrative, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre : Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, M. Matte, Mme Lalande puis M. Deschamps. Écoutez, j'ai lu avec attention votre mémoire, puis on voit que ça a été écrit par des gens qui connaissent la réalité du terrain, hein, des régions.

Écoutez, il y aurait beaucoup d'éléments qu'on voudrait faire valoir, mais peut-être commencer par toute la question... On entend beaucoup du gouvernement l'importance de transiger avec les élus, notamment on nomme, bon, la FQM avec son livre bleu sur la gouvernance de proximité, mais, comme vous l'avez mentionné, la FQM reconnaît la nécessité d'une instance régionale quand même, même si la FQM veut s'impliquer dans différents services de proximité. Puis je pense que le mot «proximité» prend toute sa place quand on sait que, dans la plupart des régions, les MRC ont plus de... des fois, des centaines de kilomètres de territoire chacune. En Gaspésie, on parle de 600 kilomètres linéaires. Je ne suis pas sûr que la notion de proximité que la FQM parle s'accapare une distance de 600 kilomètres, donc je crois qu'il faut faire attention, là.

De dire que les élus municipaux sont d'accord avec cette vision d'abolition des CRE, je pense, c'est faire fausse route, puis j'aimerais vous entendre là-dessus. D'ailleurs, il y a 14 régions sur 21 qui ont confirmé la nécessité de maintenir une instance régionale. Puis une autre préoccupation que j'aimerais vous entendre aussi, c'est : Pendant la période de transfert, période charnière entre la mise en place d'une nouvelle structure éventuellement, six mois, un an, peut-être deux ans, croyez-vous que les régions vont être perdantes? Qu'est-ce qui va se passer au niveau des nombreuses ententes sectorielles, ententes spécifiques qui sont en place? Il y a 12 millions d'entente spécifique en cours dans certaines régions. Qui va prendre la relève? Donc, est-ce que les régions peuvent se permettre un temps mort au niveau de leur développement? Pouvez-vous nous dire qu'est-ce que vous en pensez, de cette période de transition, qui risque d'être très négative pour certaines régions?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Lalande.

Mme Lalande (Paulette) : Effectivement, vous avez parfaitement raison. Même, présentement, on est en train de centraliser, là, on dit : Bon, bien, telle entente spécifique, là, il ne faut plus en faire, là, il ne faut plus continuer, il faut arrêter, ça va être Québec qui va prendre ça.

On arrive avec un autre des ententes qu'on a signées, là, présentement, pour lesquelles on nous dit : Ah! bien là, il faut que vous fassiez ça avant 90 jours, là, parce que, si vous ne le faites pas avant 90 jours, vous ne pourrez pas continuer. Toutes ces ententes-là, là, qui ont fait la force chez nous, en région, c'est tout ça que, là, on se dit : Ah! ça va être d'autres. Puis, des fois, on a l'impression qu'on ne sait pas trop c'est qui, l'autre, là. C'est certain que ça affaiblit les régions, ça. Combien on en a, là, des gens qui bénéficient de tous ces projets-là, qui viennent nous voir puis nous dire : Mais qu'est-ce qu'on va faire maintenant? À qui on va pouvoir parler? Puis, oui, il y a Québec, je suis d'accord, c'est vrai que vous êtes en haut, mais c'est comme... vous êtes assez loin des régions, si on peut dire, là, tu sais, dans le sens que c'est vraiment... il faut avoir un palier régional, une région où est-ce que c'est qu'on est en contact direct avec les personnes qui sont dans le besoin, dans n'importe quelle catégorie. Elles sont dans le besoin, les régions. On a besoin de cette certitude, qu'on est en train de perdre, là. On est en train, là, quasiment, de se dire : Mais qu'est-ce qui va nous arriver dans les régions? On est en train de mourir. Et ça, je l'entends souvent. Et c'est cette période de transition où est-ce que c'est qu'on se cherche, puis on ne le sait pas, et ça, c'est l'affaiblissement du monde rural.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. Matte, vous voulez ajouter?

M. Matte (Jean-Maurice) : Oui. M. Lelièvre... M. le député, excusez, vous demandez : Qui sont les perdants? Les élus ne sont pas gagnants, ça, c'est sûr, puis ils le démontrent, hein : 14 régions sur 21. Ça ne veut pas dire que les sept autres n'en veulent pas. Elles sont toujours en réflexion.

Les citoyens ne sont définitivement pas gagnants de la perte d'une instance de concertation régionale, mais je pense que les plus grands perdants, c'est le gouvernement du Québec, c'est vos ministères dans les régions — ministères de la Culture, des Ressources naturelles, de l'Immigration — qui, aujourd'hui, n'ont plus de partenaire régional pour être capables d'oeuvrer sur le territoire. On leur dit : Il faut que tu ailles t'asseoir avec cinq MRC, ou six, ou sept MRC pour être capable de poser la même action. Ces gens-là, là, ils n'en feront plus, de projet, dans les régions, ils n'en descendront plus, d'entente, ils n'en feront plus, d'action, dans les régions, et je pense que le gouvernement du Québec n'est définitivement pas gagnant de la perte de cette instance-là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Monsieur...

Une voix : Si vous me permettez...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : On laisse M. Deschamps répondre ou si vous avez...

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Allez, M. Deschamps.

• (14 h 50) •

M. Deschamps (Richard) : Merci. Écoutez, je vous ramène à nos recommandations; recommandation 4 : «Que le gouvernement reconnaisse les organismes désignés par les MRC et les villes d'une région comme organismes régionaux pouvant conclure des ententes concernant leur rôle et leurs responsabilités en matière de développement régional.» Donc, s'il y avait ça dans le projet de loi, là, déjà, il y aurait une reconnaissance formelle.

Deuxièmement, on dit : Il faut que l'argent suive ces responsabilités-là. Donc, présentement, là, il y a un fonds de dotation des territoires, là, qui est prévu dans le projet de loi, mais c'est certain que ça ne nous permet pas de faire... de répondre, même, aux engagements parce que c'est prévu strictement pour fermer les CRE. Donc, il faut absolument qu'il y ait un transfert. Nous, à Montréal — pour répondre à une des questions qui a été posée tout à l'heure — on veut faire une fermeture, mais transférer, O.K., par transfert, ce qu'on appelle une fermeture par transfert, et donc il faut donc que le montant d'argent suive pour pouvoir répondre à nos engagements.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député a une question additionnelle, je pense, à vous poser. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre : O.K. C'est intéressant, mais il y a d'autres questions que j'aimerais vous poser, puis je pense que le temps court très rapidement, il reste à peine cinq minutes.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : C'est parce que le temps est limité au niveau de chacun des partis. C'est très intéressant, mais...

M. Lelièvre : On a environ cinq minutes, mais on aura l'occasion d'échanger, peut-être, là.

Toute la question du budget. On a mentionné un budget de 100 millions qui va être affecté au fonds de développement des territoires dans la nouvelle réforme du ministère des Affaires municipales. On sait que 100 millions, comme Mme Lalande l'a mentionné, c'est 76 millions de moins que les budgets actuels, la différence étant, en bonne partie, reliée aux coupures des CLD puis des CRE, mais, en même temps, on dit qu'on veut, avec le monde municipal, réaliser un réel partenariat, on veut faire des leaders du développement de nos élus municipaux, on veut les considérer sur un... disons, avec un statut particulier compte tenu qu'ils sont imputables, etc. Mais est-ce que vous croyez... parce que la plupart d'entre vous, vous êtes des élus municipaux puis d'expérience aussi, croyez-vous qu'avec des commandes plus grandes au niveau des élus, avec du délestage de responsabilités puis à peu près, quoi, 60 % de moins de budget c'est réaliste de penser que les régions vont réussir à relever le défi? Est-ce que c'est un défi un peu... je dirais, un peu ingrat pour les élus municipaux? Est-ce que c'est considérer les élus avec toute la reconnaissance qu'ils méritent, d'agir comme ça?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Matte.

M. Matte (Jean-Maurice) : Si vous permettez. Écoutez, les CLD vont faire leurs propres représentations. La différence entre les CLD et les CRE, c'est qu'ils sont déjà calqués sur le territoire administratif d'une MRC, pour la plupart, donc la transition est en train de se faire. Évidemment, moins 40 millions, ce n'est jamais une bonne nouvelle. Mais, moi, comme maire, je charge des taxes à mes citoyens pour poser des actions chez nous, puis, comme préfet, je charge des quotes-parts à mes municipalités pour poser des actions sur le territoire de la MRC, mais il n'y a personne qui me paie pour de la concertation régionale. Alors, c'est cette perte d'argent là, mais cette responsabilité-là qu'on va me demander de faire ou m'imposer va être très difficile pour les élus municipaux, les préfets à livrer, c'est-à-dire faire la concertation sous le palier de la région administrative, d'où l'importance de maintenir l'instance, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre : Si on revient aux transferts — parce que vous avez des obligations — dans certaines régions, entre autres, si je prends l'exemple de la région chez nous, de la Gaspésie, on a 1,5 million à affecter d'ici le mois de mars pour la liquidation de la conférence régionale des élus. Demain, le ministre des Affaires municipales va être avec les préfets, parce que les préfets ne veulent pas avoir l'odieux de liquider la CRE. S'il y a des passifs, ils ne veulent pas avoir la responsabilité de ça. En termes d'échéance, en termes de budget, pour la prochaine année, qui est extrêmement réduit, est-ce que vous croyez que l'exercice financier 2015‑2016 va être un exercice qui va être peut-être lourd de conséquences en termes de développement régional compte tenu que la majorité des budgets des CRE vont être affectés à des licenciements, à des prestations dues à des départs massifs d'employés, donc peu d'argent dans le développement?

Et, en plus de ça, toute la question du préfet élu au suffrage universel... on veut mettre les préfets de l'avant, on veut leur donner toute la légitimité, mais l'exercice de... l'obligation, par exemple, d'avoir une préfecture au suffrage universel, ce n'est pas complété présentement. Vous ne croyez pas qu'on met un petit peu la charrue avant les boeufs, à quelque part? Est-ce que ce n'est pas un peu improviser d'exiger, dans des délais si courts, autant de bouleversements sans que les régions soient prêtes, finalement?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Deschamps.

M. Deschamps (Richard) : Je pense que vous avez bien... autant M. Marceau que vous, vous avez bien perçu, je pense, ce que l'on dit dans notre mémoire et dans nos recommandations. C'est là qu'on demande de la souplesse.

On comprend les objectifs gouvernementaux, mais c'est évident qu'on ne peut pas faire ce que l'on devrait faire si les montants d'argent sont coupés et si on ne peut que fermer les CRE, que l'on devra rouvrir d'une façon ou d'une autre d'ici quelques mois. Quelle que soit la façon, là, il va falloir avoir une instance de concertation et de développement régional, parce qu'on oublie souvent l'aspect développement. Alors, moi, je pense, et nous pensons, puis c'est là l'objectif du mémoire et de nos recommandations... Puis il y a des impacts, là aussi, sur chacun... On a regardé chacun des articles du projet de loi. Il y a sept recommandations dont on ne vous parle pas, qui ont des impacts très, très précis sur le projet de loi, sans compter qu'il y a des projets, là...

Moi, j'ai un projet, par exemple... Je termine là-dessus. À Montréal, on a ce qu'on appelle le Festival Eurêka!, trois jours au mois de juin, que l'on fait depuis neuf ans sur un budget d'à peu près 900 000 $, hein? Bien, la CRE contribue, avec le Centre des sciences de Montréal. Qu'est-ce que je fais, moi, d'ici le mois de juin? Qu'est-ce qu'on dit aux gens pour tenir cela? Vous allez me dire : Ce n'est pas essentiel. Mais c'est un élément de développement. On pense à la jeunesse, puis on va en avoir de besoin éventuellement, de ça. Alliés Montréal, au niveau de l'immigration, il y a 17 entreprises, grandes entreprises à Montréal qui favorisent l'intégration des personnes immigrantes dans leurs organisations. Si la CRE ne se perpétue pas, ça vient de tomber, on vient de complètement anéantir le travail que l'on a mis pour bâtir ça depuis deux, trois, quatre ans. Ça, c'est concret, là, ce n'est pas nous, là, comme personnes, c'est, sur le terrain, un besoin qui a été manifesté.

Il y a des ententes spécifiques. Tout ça tombe à l'eau. Donc, c'est là qu'on demande de la souplesse pour qu'il y ait une transition et qu'il y ait un financement dans les FDR 2014‑2015 et éventuellement 2015‑2016 si la question de la négociation du pacte fiscal n'est pas complétée.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Deschamps. Nous allons donc passer du côté de la deuxième opposition. M. le député de Granby, la parole est à vous.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Messieurs dames, bonjour. Moi, je viens de la CRE Montérégie-Est, puis je suis un gars de chiffres, puis j'essaie de décortiquer, plus souvent qu'autrement, les bienfaits de ma CRE.

Je lis le communiqué de presse du 5 novembre 2014, et le communiqué dit : «L'organisation régionale a investi près de 6 millions de dollars depuis 2004.» 6 millions divisés par neuf : à peu près 666 000 $ par année. Si on divise ça par les neuf MRC qui sont dans mon territoire, la CRE a géré à peu près 75 000 $ par MRC. La grande question qu'on se pose ici, c'est : Qu'est-ce que la MRC ne peut pas faire que la CRE fait? Puis ma question, c'est que... Avec les nouvelles structures que le ministre et le gouvernement veulent mettre en place, on abolit les CLD. Ce 75 000 $, là, que vous avez, que ma CRE a géré dans mon territoire — j'ai les projets ici, devant moi — si on prenait ce montant puis qu'on envoyait ça avec le montant qui va être géré par la MRC pour les CLD qui vont être remplacés... expliquez-moi, là, puis essayez de me dire que vous êtes indispensables en voyant 6 millions de dollars investis depuis neuf ans à 75 000 $ par année, par MRC. Alors, moi, je me dis : 75 000 $ pour des retombées, supposément, de 32 millions... je me dis : Si ce 75 000 $ là est pris par année puis qu'il est donné aux MRC, en quoi la CRE va être indispensable... que la MRC ne pourra pas faire? Première question.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Lalande.

Mme Lalande (Paulette) : Concertation, monsieur. C'est exactement ça. Quand vous dites, par exemple, que, dans une région, vous avez cinq MRC puis là que chacun, on va travailler en silo, en quelque sorte, au niveau des MRC, tout ce qui peut sortir au niveau régional, vous ne l'aurez pas.

Et là je vais parler pour la CRE de l'Outaouais. Chez nous, là, le transport collectif, si on n'avait pas eu la CRE qui a coordonné puis qui a fait que maintenant, dans chaque MRC, on a un guichet unique, ça ne se serait jamais fait. C'est ça qui arrive quand, dans une région, tu as cinq MRC. Puis là, à ce moment-là... puis tu n'as pas d'endroit de concertation où tout le monde ensemble, on essaie de trouver des solutions pour que tout l'Outaouais profite de ça. C'est ça, la différence entre un palier de concertation régionale puis les CRE. Les CRE... pas les CRE, excusez-moi, les MRC seules n'auraient pas réussi. La preuve, c'est que, quand ils ont commencé le transport collectif au niveau des territoires de chaque MRC, là il n'y avait rien qui ne se passait, puis il y avait des déficits, puis tout le monde disait : Qu'est-ce que c'est qui va nous arriver? C'est la CRE qui est arrivée puis a dit : Regardez, nous, on va prendre le dossier, puis on va le mener à bien, puis on va s'assurer que le transport collectif, chez nous, ça soit une réussite. Après sept, huit ans, à peu près, que ça a commencé, ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est que le transport collectif dans l'Outaouais, c'est une réussite et que, dans chaque MRC, il y a un guichet unique, autant pour le transport collectif que pour le transport adapté. Si vous n'appelez pas ça une réussite, monsieur, bien, écoutez, moi, ce que je dis : C'est une réussite, puis M. Carrière est là pour prouver que c'est exactement ce qui s'est passé.

Donc, c'est ça qui fait la différence entre les MRC... Puis je ne dis pas que... Je suis préfète d'une MRC. Écoutez, je le sais, qu'on fait du bon travail, mais il arrive un moment donné où il y a des dossiers qu'on a absolument besoin d'avoir quelqu'un au niveau régional qui va prendre le dossier, qui va faire la coordination puis qui va faire que ça va être une réussite.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Lalande. Le temps est limité, je veux permettre au député de poser ses questions. M. le député de Granby.

Mme Lalande (Paulette) : Allez-y.

• (15 heures) •

M. Bonnardel : Bien, je reste en lien sur cette concertation. Je reste sceptique, je reste sceptique, madame, et je veux juste vous...

Une voix : ...

M. Bonnardel : Oui. Mais je ne dis pas qu'il n'y a pas des beaux projets, mais, quand je regarde les chiffres, 75 000 $ par MRC, je vois mal comment, moi, si vous me donnez les sous, vous êtes préfet, moi, je suis préfet demain matin, que je ne peux pas réinvestir, trouver une façon d'aller chercher autant de retombées économiques.

J'ai une autre question. À la page 8, vous dites : Les CRE, les frais d'administration, c'est 9 %, puis les frais de concertation, c'est 29 %. C'est quoi, ça, des frais de concertation de 29 %, sur l'enveloppe qu'on vous donne?

M. Matte (Jean-Maurice) : Bon, je vais vous donner un...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Matte.

M. Matte (Jean-Maurice) : Oui, je vais vous donner un exemple là-dessus. Je veux juste répondre à votre autre question, parce que ça l'exprime très bien, le problème qu'on vit aujourd'hui avec ce projet de loi là. Là, vous avez un exemple de votre CRE, qui n'a pas été à la hauteur que vous, vous auriez souhaitée, et là vous étendez ça à travers le Québec.

M. Bonnardel : ...je n'ai pas dit qu'ils n'étaient pas à la hauteur, là. Je vous lis un communiqué de presse, je vous dis : 6 millions d'investissement sur neuf ans, est-ce que c'est beaucoup, pas beaucoup? Je vous parle de chez nous, là. Je prends 6 millions, je divise ça par années, je divise ça par MRC, puis je me dis : Si le gouvernement avait versé 75 000 $ par année à chaque MRC, bien est-ce qu'on aurait eu autant de retombées économiques, est-ce qu'on aurait pu autant aider certaines entreprises, est-ce qu'on aurait pu donner cet argent aux CLD, qui sont aussi des organismes qui existaient jusqu'à tant qu'on dépose cette loi, pour dire : Bien, avec ce 75 000 $, on va pouvoir supporter peut-être cinq, six, sept, huit petites entreprises? C'est la question que je me pose, là, puis, je pense, que tout le monde se pose ici, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Matte.

M. Matte (Jean-Maurice) : Alors, faites-le à l'échelle de la région administrative de la Montérégie au complet, comme l'Abitibi-Témiscamingue, comme Gaspésie‑Les Îles, et vous allez probablement voir qu'il y a eu plus de projets à l'échelle de la région administrative. Mais c'est ça qui nous frappe, là : parce qu'on a un exemple ou des exemples qui sont un peu moins probants, on met tout le monde sur le même palier, puis c'est ça qu'on veut éviter. On veut du sur-mesure. On pense qu'il y a, dans des régions du Québec, des endroits où il s'est investi beaucoup plus d'argent, où la piastre investie du FDR en a rapporté 5,17, puis ça, c'est le rapport.

Maintenant, 9 % de frais d'administration et la concertation. Lorsque le gouvernement souhaite avoir dans les régions une table de concertation VHR, parce qu'il veut au niveau des véhicules hors route que ça se traite au niveau régional, puis qu'il envoie un 50 000 $ dans les régions, bien c'est des frais de concertation. C'est ça. Et le 9 %, il n'est pas sorti de nulle part, hein, ça fait partie des rapports, ça a été validé par le Conseil du trésor, par les rapports du Vérificateur général, qui a passé au peigne fin plusieurs CRE et qui en est arrivé à ce constat-là : alors, concertation, administration et développement.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Deschamps, vous aviez une autre...

M. Deschamps (Richard) : Je vais répondre rapidement. Vous avez dit, M. le député, que vous étiez un homme de chiffres. À Montréal, pour environ un budget, je dirais, qui a varié, là, de 4... qui est présentement à 4 mais qui a déjà été presque à 6 millions, on générait pour à peu près 18 à 19 millions, peut-être même 20, là... des bonnes années, de projets. Ça veut dire que, pour 5 millions qui étaient investis, pour chaque dollar investi, là, on allait en chercher quatre puis cinq à côté, dans d'autres organisations, pour répondre à des besoins de l'île de Montréal. Moi, je ne considère pas ça comme étant un échec. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'autres organisations qui font aussi de l'investissement, qui font un travail. On n'est pas les seuls. On ne dit pas qu'on est les seuls, mais on pense que cet organisme-là rassemble les gens pour avoir une vision commune sur l'île de Montréal. Et, vous savez, quand on a une population de 1,9 million, ça ne se gère pas de la même façon qu'une autre région, tout aussi importante soit-elle. C'est pour ça d'ailleurs qu'on est ici solidairement. Mais, s'il y a 14 régions du Québec qui disent : On voudrait avoir une instance de développement régional, je pense que les députés qui sont ici devraient en tenir compte, bien lire notre mémoire avec nos principales recommandations et assurer...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Si vous me permettez, M. Deschamps. Le temps va rapidement. M. le député de Granby.

M. Bonnardel : Je comprends votre point puis là je vois qu'il y a 11 régions qui ont manifesté leur intérêt de garder les structures comme elles sont. Ce n'est pas l'unanimité, hein, c'est presque 50-50 entre le nombre de... Il y a 21 conférences régionales.

Une voix : ...

M. Bonnardel : Oui, oui. Je comprends, mais ce n'est pas unanime. Puis, de l'autre côté, je persiste et signe en me disant : Si le gouvernement prend ces sous puis qu'il les remet aux CLD, aux CLD, là, des instances qui existaient, là, jusqu'à voilà pas longtemps, comment on ne serait pas capables, avec ces CLD, d'aller chercher autant de retombées économiques? Au-delà de la concertation, avec tout le respect que je vous dois, madame, au-delà de la concertation, qui de mieux que les MRC puis que les CLD pour bien mesurer ce qui est important dans leurs villes, dans leurs régions pour soutenir leurs petites entreprises, soutenir des foires d'hiver, d'été, peu importe? Je me dis : Si je fais le calcul chez nous, 6 millions depuis 2004, 750 000 $ par année divisés par neuf MRC, 75 000 $ par année, je me dis, il me semble que ce n'est pas trop compliqué de regarder ça puis de se dire : Oui, avec toutes les structures puis les plans que vous préparez... Je regarde le plan de la Montérégie-Est, je me dis : Mon Dieu! C'est quasiment un ministère, ce que je vois là. Je trouve ça énorme, énorme, énorme comme structure pour 6 millions d'investissement sur une période de neuf ans. Je suis désolé de vous le dire ainsi, mais je trouve ça peu. Voilà.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Il vous reste une minute.

M. Matte (Jean-Maurice) : Alors, je peux vous confirmer que, dans notre liste, Montérégie-Est sont en plan de fermeture, ils ne souhaitent pas renouveler. Alors, vous avez peut-être la réponse. C'est 14 régions qui ont confirmé leurs instances de concertation, quatre qui sont toujours en réflexion, donc on arrive à 18. Et le CLD a un rôle à jouer, mais on ne peut pas strictement ramener les conférences régionales des élus à un rôle strictement de développement économique. Il y a un rôle de développement social, il y a un rôle de concertation, il y a un rôle d'intervenant privilégié avec le gouvernement, et les CRE ne sont pas strictement conférées à un rôle de développement économique.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Alors, merci de votre participation. Mme Lalande, M. Matte, M. Deschamps, merci d'avoir participé à cette commission parlementaire des finances publiques.

Donc, nous allons demander à l'Association minière du Québec de prendre place, et je suspends quelques instants pour le lui permettre. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 6)

(Reprise à 15 h 11)

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux. Nous avons le plaisir de recevoir l'Association minière du Québec. Bienvenue. Donc, pour votre présentation, donc, simplement vous identifier, et vous avez 10 minutes pour la faire. Par la suite suivront les échanges avec les parlementaires. La parole est à vous.

Association minière du Québec (AMQ)

Mme Méthot (Josée) : Très bien, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les députés, alors je suis Josée Méthot, je suis la présidente-directrice générale de l'Association minière du Québec et je suis accompagnée aujourd'hui de M. Mathieu St-Amant, qui est le directeur des commissions... des communications stratégiques. Désolée.

Alors, je suis heureuse de prendre la parole devant vous aujourd'hui au nom de l'Association minière du Québec. Il était important pour nous d'être entendus en commission parlementaire, puisque ce projet de loi comporte des dispositions venant notamment modifier certaines façons de faire des sociétés minières en regard de l'impôt minier. De façon générale, l'Association minière accueille favorablement les changements proposés. Il demeure toutefois quelques éléments nécessitant des éclaircissements ou qui soulèvent des préoccupations au sein de l'industrie minière. Il est important pour nous de les adresser à la commission, puisque, pour obtenir sa juste part des investissements miniers mondiaux, le Québec doit être compétitif et ne doit surtout pas imposer des coûts administratifs excessifs liés à l'application, entre autres, de la Loi sur l'impôt minier et de la Loi sur les mines.

Avant d'aller plus loin, permettez-moi de vous dire que l'Association minière du Québec a été fondée en 1936 et qu'elle a pour mission de promouvoir, soutenir et développer de façon proactive une industrie minérale québécoise responsable, engagée et innovante.

Vous le savez, les retombées du développement minier sont majeures pour le Québec, il est donc clair que le Québec ne peut se priver de ce développement sur son territoire et il importe qu'il puisse compter sur un environnement favorable à ce développement, notamment par des allègements réglementaires ou administratifs. Le projet de loi n° 28 en apporte quelques-uns, mais du travail de collaboration entre le gouvernement et l'industrie minière demeure encore essentiel pour assurer la compétitivité du Québec et pour rétablir la crédibilité et l'attractivité du Québec auprès des investisseurs. Les enjeux sont majeurs pour l'industrie minière.

Si on parle maintenant plus spécifiquement du projet de loi n° 28 — notez que nos commentaires ne porteront que sur les sections II et III du chapitre IV — d'emblée, l'association voit d'un bon oeil la volonté du gouvernement d'effectuer des investissements en participations dans les entreprises qui exploitent les substances minérales du domaine de l'État, en instituant le fonds Capital Mines Hydrocarbures. L'AMQ a souvent répété l'importance que le gouvernement envoie un message clair à l'effet que les sociétés minières sont bienvenues au Québec. La création de ce fonds, pour nous, est un geste en ce sens, notamment en raison de la constante recherche de financement par les sociétés minières, comme vous le savez.

En ce qui concerne maintenant la section III, portant sur le transfert à Revenu Québec des responsabilités relatives à l'application de la Loi sur l'impôt minier, nous avons divisé notre propos en trois parties, soit la diligence, la divulgation et la transparence et, enfin, les allègements réglementaires et administratifs.

Alors, en ce qui concerne la diligence, l'Association minière du Québec accueille positivement le transfert des activités de vérification relatives à l'impôt minier des sociétés minières du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles vers Revenu Québec. Nous croyons que cela rendra plus efficace le processus de vérification, puisqu'en ce moment on constate des retards considérables dans la vérification. Dans plusieurs cas, le ministre n'a pas émis de cotisation pour des déclarations d'impôt datant de 10 ou 15 ans. Au fil des ans, des employés quittent, et la connaissance des événements qui se sont produits il y a 10 ou 15 ans auparavant se perd. Les documents, tels que les factures et pièces justificatives, peuvent se perdre ou être détruits, puisque les sociétés doivent légalement conserver leurs documents sept ans. C'est sans compter le fait que les systèmes informatiques changent, que les fiscalistes des sociétés minières doivent avoir la connaissance de trois régimes fiscaux miniers, soit celui d'avant 2010; celui de 2010 à 2013; et, maintenant, le dernier, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2014.

Par son manque de diligence, le gouvernement rend beaucoup plus difficiles les vérifications. Des coûts administratifs supplémentaires sont engendrés, rendant impossible un traitement juste et équitable des contribuables. C'est pourquoi l'Association minière du Québec est heureuse que l'article 52 du projet de loi n° 28 instaure la notion de diligence dans la vérification, mais on se questionne sur le délai que permettra le gouvernement pour que la vérification soit considérée comme ayant été faite avec diligence. L'Association minière propose qu'il s'agisse d'un délai de deux ans.

Sur le plan maintenant de la divulgation et de la transparence, l'Association minière a salué la volonté, exprimée par le gouvernement dans son budget 2014‑2015, déposé en juin dernier, de déléguer à l'Autorité des marchés financiers l'établissement de nouvelles normes de divulgation d'informations pour les sociétés minières, favorisant ainsi l'harmonisation avec les autres juridictions, qu'elles soient canadiennes, américaines, européennes ou autres. L'association se questionne donc, toutefois, sur l'absence de disposition en ce sens dans le projet de loi. Il faut comprendre qu'entre-temps le gouvernement fédéral a également entrepris une démarche sur cette question avec le dépôt du projet de loi C-43, Loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif. L'Association minière souhaite que le Québec s'aligne sur les autres provinces et le fédéral pour s'assurer que les façons de faire soient identiques partout au pays.

Ce dont nous avons besoin, en somme, c'est l'uniformité dans les données publiées pour que la base de comparaison soit la même, qu'on ne génère pas de confusion et surtout qu'on ne demande pas aux sociétés minières de faire le travail en double, soit une fois pour le Québec, une fois pour le fédéral. Sur les articles portant, à proprement parler, sur la divulgation et la transparence, le paragraphe 3° de l'article 37 du projet de loi nous pose problème. L'Association minière du Québec fait la lecture que tout le dossier fiscal pourrait être remis au ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, et pas seulement l'impôt minier, et que conséquemment ce dossier pourra être rendu public ou, à tout le moins, devenir accessible, conformément à l'article 215 de la Loi sur les mines, qui stipule que «sont publics tous les documents et renseignements obtenus des titulaires de droits miniers par le ministre aux fins d'application de la présente loi. Le ministre rend publics ces documents et renseignements de la manière qui lui convient.» À moins d'avis contraire de la part du gouvernement, cette analyse soulève de l'inquiétude auprès des sociétés minières, qui jugent recevoir un traitement inéquitable en comparaison, évidemment, avec les autres contribuables, les autres sociétés. L'Association minière du Québec demande donc que la portée de cet article du projet de loi soit précisée afin de bien identifier les données que le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles pourrait demander à Revenu Québec.

Pour terminer sur la question de la transparence, l'Association minière juge floues les modifications apportées à l'article 215 de la Loi sur les mines par l'article 66 du présent projet de loi. Nous estimons que les termes ajoutés n'apportent aucune précision, et c'est pourquoi nous proposerons un libellé dans le mémoire que nous déposerons sous peu à la commission.

Pour l'Association minière, les articles 67 et 68 du projet de loi à l'étude constituent de très bonnes nouvelles, puisqu'ils permettent de protéger des données stratégiques, des secrets industriels ou, bien, des avantages concurrentiels qui, s'ils devaient être dévoilés, pourraient nuire à la compétitivité des sociétés minières au Québec. Toutefois, la correction apportée par l'article 68 du projet de loi à l'article 222 de la Loi sur les mines apporte de la confusion alors qu'on mentionne que la quantité et la valeur de la production ne peuvent être utilisées qu'à des fins de statistiques sans être rendues publiques et que l'article 215 de cette même loi stipule tout à fait le contraire. Pour lever la confusion, il faudrait que soit retiré de l'article 215 le premier paragraphe du troisième alinéa.

Il est important que la quantité et la valeur de minerai extrait ne soient pas rendues publiques individuellement, soit par mine, pour ne pas nuire à la compétitivité des entreprises minières au Québec, qui, de cette façon, exposeraient leurs chiffres à leur concurrence.

En matière d'allègement réglementaire et administratif, l'Association minière profite de l'étude de ce projet de loi pour proposer que soit instauré à Revenu Québec un processus de soumission en ligne des déclarations de l'impôt minier, comme la Loi sur l'impôt permet une telle soumission, et pourrait être créée une section distincte relative à l'impôt minier, ce qui contribuerait donc à faciliter le travail des sociétés minières, du gouvernement et qui réduirait en quelque sorte les délais.

En conclusion, bien que peu de dispositions de ce projet de loi concernent directement l'industrie minière, celles introduites viennent changer de façon importante la façon dont les sociétés minières transigent avec le gouvernement en regard de l'impôt minier. Tout comme ce dernier, l'Association minière du Québec souhaite un processus plus efficace, et le transfert à l'Agence du revenu du Québec des responsabilités relatives à l'application de la Loi sur l'impôt minier est bienvenu. L'Association minière du Québec souhaite être un partenaire du gouvernement et du législateur afin que se poursuive le développement minier du Québec et offre toute son expertise aux membres de la Commission des finances publiques dans le cadre des travaux actuels et futurs. L'Association minière désire également informer la commission qu'elle travaille sur ses commentaires en regard du projet de loi n° 13, particulièrement sur le nouveau régime d'impôt minier, et qu'elle aimerait avoir l'occasion d'être entendue par les membres de la présente commission.

Alors, merci de votre attention.

• (15 h 20) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Méthot, de votre présentation. Nous allons donc débuter nos échanges, mais, juste avant de débuter ces échanges, je demanderais un consentement pour que M. le député de Chauveau puisse prendre la parole au niveau du deuxième groupe d'opposition. Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Merci beaucoup. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, merci, Mme Méthot et M. St-Amant, d'être là. J'ai très bien accueilli vos propos. Vous allez nous laisser votre mémoire que... J'ai pris des notes, mais vous alliez un peu vite. Mais ce sont des ajustements techniques qui sont importants. Évidemment, nous souhaitons que l'industrie soit bien sûr entendue et nous donne vos recommandations, vos suggestions pour que le climat puisse s'améliorer. Et c'était d'ailleurs à cet égard-là que j'avais une... pas nécessairement une question, mais j'aimerais vous entendre un petit peu là-dessus, sur le climat d'affaires au Québec, le climat d'investissement. Évidemment, nous comprenons tous que l'industrie minière est extrêmement cyclique, les prix font ce qu'ils font. Mais comment vous voyez le climat d'investissement, en 2015, au Québec, de l'industrie minière?

Et juste une dernière petite chose. Évidemment que, comme vous avez dit d'entrée de jeu, moi aussi, je trouve que l'industrie minière est extrêmement importante pour le Québec, et ce n'est pas d'hier non plus qu'on a une industrie minière ici et qu'il faut la préserver.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Oui. Bien, comme vous l'avez dit, on travaille dans une industrie cyclique, cependant on sait très bien que le travail qui a été fait au Québec au cours des dernières années soit dans les modifications législatives au niveau de la Loi sur les mines ou toutes les discussions et tous les débats que nous avons eus sur les redevances minières ont fait en sorte de créer énormément d'incertitude et ont fait en sorte de nuire à la crédibilité du Québec auprès des investisseurs, évidemment les investisseurs ici mais les investisseurs à l'étranger. Alors, c'est très difficile actuellement pour les sociétés minières d'aller chercher du financement.

Oui, maintenant, le flou législatif est derrière nous, nous avons maintenant une loi sur les mines, nous avons le nouveau régime d'impôt minier, bien qu'il sera tout confirmé par le projet de loi n° 13, mais quand même il y a du mal qui a été fait, et maintenant on doit rétablir cette situation-là. On doit travailler pour rétablir cette attractivité et pour démontrer aux investisseurs qu'on ne veut pas changer les règles du jeu à tout bout de champ et que maintenant c'est fait et qu'on travaille pour l'avenir.

Or, effectivement qu'on essaie de trouver actuellement des façons... On l'a dit : allègement réglementaire. On a parlé d'allègement, également, administratif. Mais quand même, quand les investisseurs regardent le Québec, de l'étranger, ils regardent les études de l'Institut Fraser... Bien qu'il va y avoir une prochaine publication en mars prochain, on sait très bien qu'on a occupé le premier rang... ou la meilleure juridiction où investir dans le monde, des années 2007 à 2010 et on est tombés au 21e rang en 2014, l'année dernière. Ça a été publié au début de l'année. Alors, effectivement qu'on a du travail à faire pour rétablir cette situation-là et on espère que ça va être en travaillant avec le gouvernement qu'on va pouvoir y arriver. Avec l'annonce du Plan Nord, on voit une volonté d'améliorer les choses, mais on a quand même encore du travail à faire auprès des investisseurs pour faire connaître l'amélioration ou que la situation s'améliore ici. Alors, je vous dirais que c'est ce qu'on entrevoit pour 2015.

On l'a vue, au niveau des explorateurs, une très grosse chute des investissements, et, au niveau des investissements miniers, en matière de projets également, on a vu une chute. Et on prévoit, cette année encore, une chute. Alors, si ça peut répondre à votre question, M. le ministre...

M. Leitão : Oui, ça répond.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Oui, ça répond, et, oui, en effet, je peux vous rassurer que nous nous sommes intéressés, nous aussi, à rétablir ce climat d'investissement, ce climat d'affaires. Évidemment, le changement réglementaire, c'est fait, c'est derrière nous, la loi est là, on ne va pas rechanger les structures de sitôt, donc là on s'entend là-dessus.

Vous avez mentionné aussi que la création du fonds Mines Hydrocarbures, c'est aussi un pas dans la bonne direction, donc, ça envoie le message, le signal que le gouvernement est intéressé à investir dans cette industrie-là. Nous jugeons que c'est une industrie bien sûr qui a de l'avenir.

Dans le contexte, donc, d'accès au capital, comment trouvez-vous l'accès au capital? Bon, le gouvernement, avec ce fonds-là, va être partenaire, mais évidemment, dans votre industrie, le fonds est important, mais il est quand même limité. Alors, comment voyez-vous l'accès au capital privé pour le développement de l'activité minière, pour financer l'activité minière?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : L'accès au capital privé? Bien, en fait, ce qu'on a par rapport aux investissements puis ce qu'on sait par rapport à l'accès au capital actuellement : évidemment qu'on pourrait simplifier la vie de tout le monde si on avait un petit peu plus de certitude au niveau des crédits d'impôt. On le sait, que certains crédits d'impôt ont été retirés dans le budget l'été dernier... ou de l'automne dernier. Alors, dans ce sens-là, ça ne vient pas aider l'accès au capital.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Une dernière chose avant de passer la parole aux collègues : votre discussion sur la divulgation. Il y a évidemment cette harmonisation des règles avec la législation, en fin de compte, internationale parce que ce n'est pas seulement canadien, c'est le G20 qui a pris ce pôle-là. Comment l'industrie voit-elle ce processus-là? Parce que nous, je vais vous dire franchement, nous avons eu des échos un peu contradictoires de la part de l'industrie. Certains membres trouvaient qu'évidemment il faut que le Québec, le Canada s'alignent avec les autres pays de l'OCDE, bien sûr, il y en a bien d'autres qui nous disaient : Bien, écoutez, allez-y doucement, voyons d'abord qu'est-ce que les autres vont faire. Donc, de quel côté de...

Mme Méthot (Josée) : En fait, je ne crois pas que c'est contradictoire, si vous me permettez, je ne crois pas que c'est contradictoire, parce que ce que nous voulons avoir, c'est un système qui va être harmonisé. Alors, effectivement, prenez votre temps, parce qu'on veut s'assurer qu'il soit bel et bien harmonisé. On ne veut pas commencer ici à rendre publiques des données qui sont calculées d'une certaine façon, alors que, quand on va se référer à la méthode... soit à la méthode fédérale ou la méthode avec les commissions des valeurs mobilières, on le calcule d'une autre façon puis qu'on se rende compte que finalement la donnée d'une société minière qui est rendue publique à Londres puis au Canada n'est pas la même pour ce qui est d'une contribution à une même juridiction. Et c'est ce qui va créer de la confusion et énormément de questionnements, et on n'a pas besoin de ça.

Nous, ce qu'on espère, c'est que, quand on va rendre des données publiques, tout le monde, on va parler de la même chose. On ne veut pas avoir des pommes vertes puis des pommes rouges, on veut tout pareil. Comme ça, ça va être beaucoup plus facile pour les sociétés à l'étranger et les sociétés ici également.

• (15 h 30) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Leitão : Évidemment, le consensus au Canada, c'est un peu ça. Les autres provinces aussi, surtout celles où il y a une industrie minière importante, l'Ontario, la Colombie-Britannique, tout le monde souhaite s'harmoniser, mais il faut s'assurer qu'on s'harmonise de façon intelligente pour ne pas se mettre «offside» rapidement.

Voilà. Pour moi, c'est tout. Je vais passer la parole à mes collègues. Je prends bien note de votre suggestion, qu'on puisse soumettre les rapports d'impôt... enfin, qu'on puisse communiquer avec Revenu Québec en ligne. On est quand même au XXIe siècle. Je pense que ça peut se faire. Voilà.

Mme Méthot (Josée) : ...vous êtes en 2014, vous aussi, M. le ministre, oui.

M. Leitão : C'est ça. Très bien. Les collègues, si vous avez des...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Merci, M. le Président. Bonjour et merci de votre présence ici aujourd'hui. Moi, je suis un petit peu désolée. Vous savez, je n'ai aucune expertise dans le domaine des mines et je crois que c'est le cas de plusieurs députés qui siègent. Les commissions parlementaires, on n'a pas nécessairement une expertise des sujets qu'on étudie. Donc, j'aurais beaucoup aimé voir votre mémoire avant que vous soyez là, pour que je sache c'était quoi, les questionnements que vous aviez sur le projet de loi. Alors, ça, ça me rend un petit peu désolée.

J'aimerais parler un peu de transparence. Je vois que, quand le ministre a parlé de divulgation, vous avez fait le lien avec transparence. Moi, simple députée, «divulgation» peut aussi être interprété comme «divulgation, aux autorités, de renseignements», et ensuite il y a un élément de transparence vis-à-vis les données qui vont être rendues publiques. Je crois que tout le monde, on est d'accord que, dans ce qui est la divulgation aux instances à travers le Canada, ça ne devrait pas devoir être un travail qui est fait et refait trois, quatre fois, parce que vous êtes plusieurs juridictions à travers le Canada, et je comprends ça et je suis tout à fait d'accord avec vous, parce que ça, ça coûte de l'argent et ça ne nous donne rien de positif à la fin, rien de qualité. On ne crée rien, on dépense uniquement.

J'aimerais parler de transparence, parce qu'on sait que le courant mondial actuel vise plus de transparence de la part de l'industrie minière. Veuillez nous expliquer, parce que moi, je ne le sais pas, quant aux exigences à la transparence, aujourd'hui où se situe le Québec vis-à-vis les autres juridictions canadiennes et aussi l'OCDE ou à l'extérieur de l'OCDE.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Oui. Très bien. Alors, d'abord, j'aimerais dire que je suis désolée également. Nous avons essayé de faire reporter notre présence en commission pour que vous puissiez avoir le mémoire en main. Malheureusement, on n'a pas pu faire ces arrangements-là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...complexe au niveau de dresser un agenda pour une commission parlementaire avec autant de consultations. C'est pour ça, Mme Méthot. On s'en excuse. Si on avait pu vous accommoder, on l'aurait fait. Mais c'est très, très complexe, là, de pouvoir céduler l'ensemble des gens qui participent à cette commission.

Mme Méthot (Josée) : Et on comprend très bien, et c'est pour ça que nous avons accepté quand même d'être là avant de déposer notre mémoire, que vous aurez la chance, j'espère, de lire.

Quant aux mesures canadiennes en matière de transparence ou de l'OCDE, vous savez que, oui, il y a un grand mouvement mondial comme mesure anticorruption de faire connaître les contributions des entreprises extractives — on parle également du pétrole, on ne parle pas que des mines — de faire connaître, justement, toutes les contributions des sociétés à tous les gouvernements, à tous les niveaux de gouvernement, et c'est dans ce mouvement mondial que s'inscrit le projet de loi que j'ai mentionné dans mon mémoire, qui est le projet de loi au fédéral. Alors, c'est dans ce mouvement-là que le projet de loi a été travaillé avec des organismes, des ONG, non gouvernementaux, l'Association minière du Canada également.

Pour vous dire où se situe le Québec, le Québec dans son... Dans les modifications à la Loi sur les mines qui ont été adoptées en décembre 2013, il y a l'article 215 qui parle de transparence, qui dit qu'est-ce que le gouvernement va rendre public en matière, justement, de redevances, contributions, etc. Alors, oui, vous faites la bonne comparaison entre «divulgation» et «transparence». Les sociétés minières n'ont pas de problème à donner l'information au gouvernement. Le problème, c'est ce qui va être rendu public ou qu'est-ce qui pourrait être rendu public, qui pourrait avoir des impacts sur la concurrence, sur les façons de faire les affaires des sociétés minières. Alors, dans la Loi sur les mines, à l'article 215, on dit que sont publics tout ce qu'on donne au gouvernement et ils sont rendus publics à la discrétion du ministre. C'est à peu près comme ça que ça se dit, là.

Alors, nous, c'est là-dessus qu'on est inquiets, parce qu'on sait très bien qu'il y a des sociétés minières... si je peux parler, par exemple, des minerais industriels, bien, si je rends publiques la production puis la valeur de ce que j'ai produit, bien mon concurrent, il va le savoir, puis, quand il va y avoir des appels d'offres, il va facilement savoir comment me battre dans l'appel d'offres parce que, dans ces minerais-là, on doit soumissionner, on dépose des soumissions. Alors, dans ce contexte-là, on vient d'exposer des données que, normalement, on veut garder privées le plus possible. C'est comme ça qu'on va chercher nos contrats pour vendre la matière. Ce n'est peut-être pas le même cas des entreprises ou des matières qui sont en bourse, mais je peux vous dire que pour les minéraux industriels c'est un vrai problème. Donc, on ne veut pas fermer nos mines ici parce qu'on expose leurs données, parce qu'on veut exposer leurs données, parce qu'on veut être transparent. Il y a quand même, je crois, une limite, pour protéger aussi les emplois ici, au Québec.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.

Mme de Santis : Je crois que c'est important de faire référence au premier alinéa de l'article 215 parce que je crois que c'est là où vous avez un problème et pour que les gens qui nous écoutent sachent de quoi on parle, O.K.? Alors, je vais lire le premier alinéa, parce que ça donne une grande discrétion au ministre. Ça dit : «Sont publics tous les documents et renseignements obtenus des titulaires de droits miniers par le ministre aux fins [de l'application] de la présente loi. Le ministre rend publics ces documents et renseignements de la manière qui lui convient.» Donc, on le laisse à sa discrétion. Alors, si je comprends, c'est là où vous avez un problème.

Mme Méthot (Josée) : Oui, c'est là où on a un problème. Il y a des corrections dans le projet de loi qui protègent des données, puis on en remercie évidemment le gouvernement, d'avoir fait ces modifications-là, mais ces corrections-là aussi amènent une certaine confusion sur ce qui va être rendu public.

Mme de Santis : Parfait. Mais vous êtes d'accord que les choses qui sont énumérées comme des choses qui sont rendues publiques, qu'on retrouve dans l'article 215... vous êtes d'accord que, ça, on les rend publiques. Parce qu'il y a une énumération de cinq éléments.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Oui. Si je peux me permettre. Celui qui pose problème, c'est... la quantité et la valeur du minerai nous posent problème.

Mme de Santis : Ça, ça vous cause problème.

Mme Méthot (Josée) : Oui, oui. Le reste, les redevances minières, nous le savons, les contributions, les autres contributions versées, c'est en ligne avec ce que le gouvernement fédéral veut faire et avec le reste... si je peux le dire comme ça, le reste de la planète en matière de divulgation ou de transparence. Ce qu'on veut, c'est ce qu'on espère, qu'on soit harmonisés, alors, qu'on ne fait pas le calcul ici d'une façon puis que finalement on le présente différemment qu'il pourrait être fait ailleurs. C'est ce qu'on veut : qu'il soit harmonisé.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.

Mme de Santis : Alors, dans le projet de loi C-43, je crois — c'est le projet de loi que vous avez mentionné — ...

Mme Méthot (Josée) : Oui.

Mme de Santis : ...est-ce qu'il y a référence à la quantité et la valeur du minerai extrait au cours d'une année donnée ou, ça, on le retrouve uniquement dans notre article 215?

Mme Méthot (Josée) : Dans notre article 215.

Mme de Santis : On ne retrouve pas ça dans le projet de loi fédéral.

• (15 h 40) •

Mme Méthot (Josée) : Non, on parle de contribution aux différents gouvernements.

Mme de Santis : O.K. Alors, combien de temps il reste?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Il reste environ sept minutes.

Mme de Santis : Sept minutes. Prenons une question qui est beaucoup plus générale : Quels sont les défis auxquels les entreprises minières devront faire face dans les prochaines années? C'est très large comme question.

Mme Méthot (Josée) : Oui, en effet, c'est très large.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Je peux vous parler des défis actuels. Étant donné la conjoncture mondiale au niveau des prix des marchés, les défis actuels sont des défis de trouver les façons de réduire nos coûts de production.

Le Québec est une juridiction à coûts élevés, nos marchés sont éloignés, alors, actuellement, on travaille très fort à réduire nos coûts de production. D'ailleurs — je donnais une entrevue dernièrement — il y a eu des gels de salaire l'an passé dans certaines mines, et on le sait, qu'il y a des mines qui ont fermé. On parle de Cliffs, qui a fermé ses installations parce que les conditions actuelles des marchés ont fait en sorte qu'avec leurs coûts d'opération ils n'avaient pas le rendement espéré, et donc ils ont dû cesser d'opérer. Or, on travaille énormément actuellement à réduire nos coûts, à trouver des façons de faire les choses, être plus efficaces. On parle d'innovation technologique. Ça va passer par l'innovation technologique, ça va passer par la recherche et le développement. Or, on a coupé les crédits d'impôt à la recherche et développement, donc on ne nous aide pas dans nos défis. C'est ce que vous me parlez, les défis. On a aussi des défis de conserver la main-d'oeuvre, d'avoir une main-d'oeuvre compétente. On a des emplois qualifiés et très qualifiés, des bons emplois dans le domaine minier. Or, actuellement, avec le climat mondial, on doit travailler très fort pour s'assurer qu'on va avoir une relève, parce qu'on espère que le climat mondial va s'améliorer, qu'il va y avoir une reprise et qu'à ce moment-là on ait la main-d'oeuvre qu'on va avoir de besoin. Et, évidemment, des défis au niveau des infrastructures... On sait très bien que, pour que certains projets miniers se développent, on va avoir besoin d'infrastructures pour les aider à se développer et on sait que ces projets-là sont pris en compte, je vous dirais, dans le Plan Nord du gouvernement.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

Mme de Santis : Merci beaucoup.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Ça va?

Mme de Santis : Oui.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Est-ce qu'il y a des collègues... M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Oui, j'ai peut-être... Permettez-moi, premièrement, de vous saluer. J'ai peut-être une petite question à vous poser par rapport au fait... Il y a eu un investissement, dans le Capital Mines Hydrocarbures, de 1 milliard, il y a eu aussi l'ajout de 250 millions avec Ressources Québec. Permettez-moi juste de vous poser une question sur les bénéfices que ça peut avoir aussi pour le Sud, parce que moi, je représente la circonscription de Laval. Donc, pouvez-vous élaborer un peu sur les répercussions positives que ça a dans le sud du Québec?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Écoutez, l'industrie minière, on compte 3 800 fournisseurs au Québec pour l'industrie minière. 2 800 sont dans la grande région de Montréal, et, si je me souviens bien, 300, 400 sont dans la région de Québec. Donc, je viens de faire un lien direct. Les projets qui vont se faire dans le Nord vont être payants pour le Sud parce que le Sud, c'est là où les équipementiers sont, c'est là où les bureaux de génie-conseil sont, c'est là... Donc, on peut parler de tous les autres services également qui se retrouvent dans les grands centres. Et, aussi, nos sociétés minières qui ont des mines dans le Nord ont, normalement, des bureaux dans le Sud. On le sait, qu'elles ont des bureaux dans le Sud.

Présentement, nous travaillons, justement, sur une étude pour démontrer que les gens qui travaillent dans le Nord dépensent dans le Sud, parce qu'il y a des questions de : Je dépense où est ma résidence principale, et beaucoup de ces personnes-là, donc, viennent du Sud et travaillent dans le Nord. Alors, il y a un lien direct : s'il y a du développement dans le Nord, c'est certain que le Sud va en profiter parce que c'est là où se font, où se développent les projets pour aller les construire dans le Nord.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...une autre question? Oui, une dernière.

M. Habel : Merci. Avez-vous été capables de quantifier, peut-être, les retombées économiques qu'il pourrait y avoir suite aux investissements de 1 250 000 000 $?

Mme Méthot (Josée) : Non, on n'a pas fait l'analyse à savoir où seront les retombées économiques de... C'est ça.

M. Habel : Mais on a bien vu le lien : que l'investissement dans le Nord favorise le Sud. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bonjour, Mme Méthot, bonjour, M. St-Amant. Écoutez, effectivement, j'aurais bien aimé vous lire avant de vous entendre, mais j'ai bien aimé vous entendre, alors je vais quand même avoir des questions à vous poser. Et, quand je vous lirai, j'en aurai peut-être plus.

Maintenant, j'ai, écoutez, quelques choses à dire pour commencer. La première, évidemment, c'est que nous nous sommes parlé à plusieurs reprises, hein, à une certaine époque en tout cas, et, bon, moi, je reconnais d'emblée toute l'importance de l'industrie minière, sa contribution très, très significative, en particulier dans nos régions, hein, parce que c'est quand même une façon d'occuper notre territoire qui est fondamentale, et j'y crois, à ça. Puis, dans ce contexte-là, quand je regarde le projet de loi n° 28, il y a un certain nombre d'éléments qui, je pense, sont assez consensuels.

Moi, la mise en place de Capital Mines Hydrocarbures, j'en suis. Je trouve ça très bien que l'État québécois s'engage en participant dans des projets miniers. Je trouve ça une très bonne chose. Le transfert à Revenu Québec du traitement de l'impôt minier, je pense que c'est assez naturel, et puis, je suis tout à fait d'accord avec vous, là, quand on a des obligations fiscales à verser à l'État, c'est bien normal qu'en contrepartie on ait des gens qui s'assurent que ça s'est fait correctement puis que, de manière diligente, on vous réponde. Ça, je suis tout à fait d'accord avec vous. Et donc, là-dessus, le gouvernement n'aura pas, de mon côté en tout cas, à faire face à de l'obstruction.

Là par contre où je suis moins à l'aise, et je vous le dis d'emblée puis je le dis aussi au gouvernement parce qu'on n'a jamais eu l'occasion de s'exprimer là-dessus, c'est sur la question de la transparence. Moi, j'estime que les articles... C'est quoi?

Une voix : ...

M. Marceau : 67, 68 constituent un recul, un recul important par rapport aux progrès qu'on avait réussi à accomplir grâce au projet de loi n° 70, à la Loi sur les mines, qui a été adopté en 2013.

À cette époque, le projet de loi sur les mines, ça a été le fruit d'un compromis, là, compromis entre plusieurs parties — vous, d'autres parties du secteur privé, puis des parlementaires — puis moi, je pensais qu'on avait terminé ce débat-là puis je constate qu'il y a du monde qui veulent le rouvrir. C'est là-dedans qu'on s'en va, là, ils veulent rouvrir un débat qu'on pensait avoir fermé. Les dispositions qui étaient dans le projet de loi n° 70 puis qui s'apprêtent à disparaître avec le projet de loi n° 28 sont des dispositions qui assurent la plus grande transparence auprès de ceux qui sont les propriétaires de la ressource. Ceux qui sont propriétaires de la ressource, ce sont les Québécois. Vous en êtes. On vous confie l'exploitation, on vous confie l'exploration, puis c'est normal que vous le fassiez puis que vous fassiez de l'argent avec ça, moi, je suis là-dedans entièrement, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a un rapport qui doit être rendu à l'actionnaire à un moment donné puis au propriétaire, puis ce propriétaire, c'est nous autres.

Donc, il y a un recul dans le projet de loi n° 28, moi, j'estime, en tout cas. Puis je pense qu'on était à l'avant-scène, on était en avant de la parade. C'est vrai, pas tout le monde est rendu là dans le monde, c'est vrai, mais je pense que c'était une bonne chose que nous, on soit en avant de la parade.

Et ça ici, c'est le rapport de l'Alaska, ça s'appelle Alaska's Mineral Industry 2013 — Special Report. Ça se publie à chaque année. En Alaska, pour chacune des mines, pour chacune des mines, j'ai la quantité extraite, le pourcentage de différents minerais qu'on retrouve. Par exemple, j'ai la mine Red Dog Mine en Alaska, j'ai la quantité extraite pour toutes les années, de 1989 à 2013, la proportion de zinc, la proportion de plomb, la proportion d'argent, la quantité de concentrés qu'on est parvenu à produire grâce à ces quantités extraites et, en conséquence, la quantité de zinc produite, la quantité de plomb, encore une fois, la quantité d'argent, le nombre d'employés — j'ai ça — en Alaska, et j'ai même, pour les différents minerais, le zinc, le plomb et l'argent... j'ai l'état des réserves, l'état des réserves, donc la quantité démontrée, la quantité possible, probable. Regardez, on s'approchait de ça. On n'était pas rendu là, là. On n'a jamais eu un seul rapport s'approchant de ce rapport-là qui a été publié au Québec, ce n'est jamais arrivé, mais moi, je croyais qu'on s'en allait vers ça.

Alors, regardez, moi, je croyais que c'était un débat qui était fermé, mais je vous le dis, nous, on n'est pas à l'aise puis on va s'opposer à ces dispositions-là. Nous, on pense que les articles 67 et 68 doivent être retirés du projet de loi, purement et simplement.

Maintenant, moi, je suis tout à fait sensible à ce que vous dites. Je ne veux pas que vous soyez désavantagés par rapport à vos concurrents, je ne voudrais jamais ça, mais moi, je n'ai pas la démonstration... cette démonstration-là ne m'a jamais été faite, que ce genre de dispositions là, ça posait problème commercialement, que ça vous empêchait de faire de l'argent. Moi, je veux que vous fassiez de l'argent, là, on se comprend bien, là, mais je ne crois pas que la transparence supplémentaire qui était dans le projet de loi n° 70 mettait à mal votre capacité de faire des sous. En tout cas, il faudra me démontrer qu'en Alaska les gens ne réussissent pas. Il faudra me démontrer ça. Ça fait que c'est ce que je voulais vous dire. Maintenant, je vais vous laisser réagir, je sais que j'ai parlé longtemps.

• (15 h 50) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : D'abord, on n'a jamais été d'accord à ouvrir nos livres puis à tout donner, on n'a jamais été d'accord.

Oui, on est d'accord avec un niveau de transparence, on est d'accord à donner l'information au gouvernement, aucun problème à donner l'information au gouvernement. Le problème, c'est de rendre cette information-là accessible à tous. Et, je le sais très bien, moi, j'ai parlé avec une société minière du Québec qui m'a dit : Moi, Josée, là, 80 % de ma production est vendue par appel d'offres public. Bien, si tous mes livres sont ouverts, là, bien, demain matin, ma production, elle ne se vendra pas pantoute, et je vais être dans le trouble. Alors, c'est là qu'on intervient puis qu'on dit : Minute, là, il faut protéger ces données-là. Ça ne veut pas dire qu'on ne les donne pas au gouvernement puis que le gouvernement ne les a pas, là, ce n'est pas ça du tout, c'est qu'est-ce qu'on peut et qu'on ne peut pas rendre public pour nuire à la compétitivité des sociétés minières qui ont décidé de s'installer au Québec pour faire des affaires, pour développer des projets. Et on le sait, que dans certains minerais c'est problématique parce que, d'un à l'autre, avec la concurrence, on n'a pas le choix. Voilà. Dans certains minerais qui sont sur les marchés boursiers, il n'y en a pas, de problème. Il y en a d'autres qu'il y en a. Alors, on ne peut pas appliquer uniformément...

Donc, dans ce cadre-là, on dit, nous : Ces données-là... merci d'avoir modifié le projet de loi, parce que c'était ce qu'on avait demandé lors du projet de loi n° 43, que les données qui sont protégées maintenant par les articles 67, 68, si je me souviens bien, soient protégées. Et maintenant c'est dans la modification de la loi, alors nous, nous sommes heureux de ça.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député.

M. Marceau : Bien, écoutez, moi, je vous entends. Je ne suis pas trop certain d'avoir compris ce qu'il y a de différent en Alaska qui se passe au Québec puis ce qui se passe au Québec qui ne se passe pas en Alaska. Je n'ai pas compris. Ce que je sais, c'est qu'en Alaska l'information... puis je vous ai donné tout le détail, là, cette information-là est disponible, et, que je sache, là, il y a des compagnies minières tout à fait... enfin, certains de vos membres ont probablement des exploitations aussi là-bas. J'ai de la misère à voir ce qu'il y a dans l'information qui est révélée en Alaska qu'on ne pourrait pas révéler ici, au Québec, mais, bon, je vous entends. Je vais laisser mon collègue vous poser des questions. Je vous remercie quand même pour vos réponses. Merci.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Donc, je vous souhaite la bienvenue, Mme Méthot et M. St-Amant. Très intéressant. Je dois unir ma voix à celle de la députée de Bourassa-Sauvé et du député de Rousseau, j'aurais aimé voir votre mémoire, mais ça a été très enrichissant, et j'ai essayé de prendre des notes à mesure. Je ne suis pas vraiment féru dans ce domaine-là, je ne m'y connais pas beaucoup, mais, bon, vous avez attisé quand même ma curiosité. J'aurais quelques questions et puis j'espère que vous allez trouver mes questions quand même correctes, là. J'espère que je ne serai pas trop dans le champ gauche, là.

Vous avez parlé de l'Institut Fraser, qui considérait qu'on était au premier rang en 2008. C'est ça?

Mme Méthot (Josée) : De 2007 à 2010.

M. Therrien : 2007 à 2010.

Mme Méthot (Josée) : 2007, 2008, 2009, oui.

M. Therrien : Puis on est tombés à...

Mme Méthot (Josée) : On est rendus au 21e rang.

M. Therrien : 21e rang.

Mme Méthot (Josée) : L'an dernier, l'étude de l'Institut Fraser a publié que le Québec était rendu au 21e rang des juridictions minières où investir au monde.

M. Therrien : O.K. Donc, c'est à cause de la juridiction, vous dites, qu'on est passé de la première à la 21e position, c'est à cause de la juridiction qu'on a adoptée ou qu'on n'avait pas assez adoptée ou... en tout cas, vous disiez qu'il y avait comme une période de latence qui a fait en sorte d'amener de l'insécurité. Est-ce que c'est ça qui explique cette chute de rang là, là?

Mme Méthot (Josée) : En grande partie...

Une voix : ...

Mme Méthot (Josée) : Excusez-moi. En grande partie, le... Vous savez, le monde minier, les investisseurs ont besoin de prévisibilité — je ne sais pas combien de fois on me l'a répété : prévisibilité, prévisibilité, prévisibilité.

Or, quand on parle qu'on veut changer une loi, il faut comprendre que, la Loi sur les mines, il y a eu... en quatre ans, là, il y a eu quatre reprises, on s'est repris à plusieurs fois, là, sur le projet de loi, donc on a énormément parlé de ce qu'on voulait faire, qu'on ne voulait pas faire. Également, au niveau des redevances, quand on a commencé à dire qu'on voulait aller jusqu'à doubler les redevances minières au Québec, bien il faut comprendre que les investisseurs ont commencé tous à backer, excusez l'expression, et également ont commencé à refaire leurs calculs et n'étaient pas en mesure de dire : Quand je refais mon calcul à savoir est-ce que je veux avoir le rendement que je veux avoir sur un projet minier, quand je ne suis pas capable de mettre des chiffres dans mon modèle parce qu'il y a une incertitude, bien je vais aller ailleurs, où il y a de la certitude. Alors, il y a ce volet-là, qui a été très difficile par rapport à ce qui s'est produit.

Également, quand des investisseurs prennent la décision d'investir dans une juridiction pour implanter un projet, alors on fait tout le développement du projet, on travaille à aller chercher nos permis, on commence la construction; les règles du jeu changent. Notre évaluation de rendement sur ce projet-là a été faite en fonction du cadre législatif au moment de la prise de décision, et là on change les règles du jeu. Alors, les investisseurs ont dit : Bien, ce n'est pas facile. Si on va au Québec puis ils nous changent les règles du jeu, on est peut-être mieux d'aller ailleurs, où ils n'ont pas tendance à changer les règles du jeu comme ça. Alors, oui, ça a créé de l'inquiétude, de l'incertitude dans un monde qui a besoin de prévisibilité.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Écoutez, on a tous entendu... bien, en tout cas, on a beaucoup entendu parler, là, du supercycle, le prix des métaux qui a monté, et puis ils appellent ça les supercycles, là, parce que c'est des tendances lourdes, là. Ça a chuté récemment. Moi, j'aimerais savoir la comparaison entre l'activité minière au Québec — et là vous parlez d'incertitude — l'activité minière au Québec durant la période où est-ce que... mettons, de 2010 à 2015, là, et l'activité minière en Ontario, qui est notre voisin, là, si la tendance qu'on a notée au Québec, là, de diminution d'exploitation, ça s'est retrouvé aussi en Ontario, cette mouvance-là vers le bas.

Mme Méthot (Josée) : Ça a été pire ici.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Ça a été pire ici, M. le député. On a comparé les investissements miniers, les investissements en exploration minière, et les gens qui vont passer après nous vont peut-être pouvoir vous donner encore plus d'informations, mais la baisse a été plus importante au Québec qu'elle ne l'a été ailleurs dans les autres juridictions canadiennes. Alors, effectivement qu'il s'est passé quelque chose de différent ici par rapport aux autres autre que juste le cycle des prix.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Bon, vous parliez d'investissement. Mais, en termes d'exploitation minière, là, le tonnage, là, est-ce que ça se ressemble? Mais on a vu aussi tomber le tonnage qui est exploité ici. Comparativement à l'Ontario, c'est-u la même chose, au niveau de la tendance, qu'on a notée?

Mme Méthot (Josée) : Bien là, au niveau des exploitations, en production, on sait qu'ici on a eu des fermetures l'an dernier, je n'ai pas fait la comparaison au niveau des tonnages, mais je peux vous dire qu'au niveau des investissements, parce que c'est de ça qu'on parle, là, des investisseurs, il y a eu une baisse ici plus forte qu'en Ontario.

M. Therrien : O.K. Bon. Parce qu'à un moment donné j'avais regardé puis moi, je n'avais pas regardé les investissements. J'avais regardé l'exploitation puis j'ai essayé de comparer avec l'Ontario. J'aurais aimé ça avoir des informations là-dessus, mais ce n'est pas grave.

Je voudrais revenir sur les coûts de production. Vous parlez des coûts de production, là, qui sont plus élevés au Québec parce que les sites sont plus loin des endroits où on peut transporter le minerai, puis tout ça, puis j'ai trouvé ça bien intéressant. Nous, notre gouvernement, on avait essayé, à l'époque, là, de faire la promotion de la transformation, de faire en sorte que les entreprises, comme les vôtres, qui font de l'exploitation puissent également, dans un endroit assez proche, faire de la transformation si c'était possible. Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est une avenue qui pourrait être intéressante justement pour qu'on puisse trouver un moyen de favoriser la transformation et, de ce fait-là, diminuer les coûts de production de façon à travailler à l'intégration verticale, mais aussi de faire en sorte que cette transformation-là crée des emplois en région? C'est quoi, votre position par rapport à ça?

• (16 heures) •

Mme Méthot (Josée) : Bien, d'abord, une exploitation minière d'extraction minière puis une usine de transformation, là, c'est deux modèles d'affaires bien, bien, bien différents, là, donc on n'aura pas d'impact sur les coûts de production de l'extraction minière parce qu'on fait de la transformation. La loi a été modifiée. On doit maintenant déposer, quand on fait une demande de bail minier, une étude d'opportunité, à savoir s'il y a une opportunité de faire de la transformation, une usine de transformation ici. Certains projets miniers l'ont fait. On sait très bien que, dans le lithium, par exemple, les compagnies ont jumelé extraction avec transformation.

Notre position a toujours été très claire là-dessus. Dans les nouveaux marchés, qu'on appelle plus les minerais plus émergents, nouvelles matières, terres rares, lithium, etc., nous croyons qu'il y a de la place pour des usines de transformation dans ce domaine-là. Les marchés de... ce n'est pas encore très, très cristallisé alors que, dans le cas du fer, par exemple, ou d'autres minerais, c'est plus difficile à ce moment-là parce qu'on est loin des marchés ici, au...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Nous devons passer au deuxième groupe d'opposition. Merci, M. le député de Sanguinet. M. le député de Granby.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Une question avant de laisser la parole à mon collègue qui porte maintenant le dossier. Pour la gouverne de mon collègue de Sanguinet, le Québec a vécu énormément d'incertitude dans l'industrie minière à partir de 2012, et, quand je dis «énormément», c'est «incertitude» en majuscules. On n'a qu'à se souvenir des lois, si je ne me trompe pas, nos 43 et 79, qui n'ont pas été adoptées, et, par la suite, on a réussi, oui, par consensus, dans une situation minoritaire, à faire adopter une loi. Mais ma question aujourd'hui, c'est de savoir... Le Québec recevait... bien, a reçu quand même des montants records de redevances dans les années 2010‑2011 jusqu'à 2012.

Et, dans les documents, les derniers documents, là, qui sont Lepoint sur la situation financière du Québec, à la page 40... 2013‑2014, on a reçu un montant, imaginez, de 44 millions de dollars. C'est une baisse de 147 millions sur l'année 2012, ce qui est majeur. Le gouvernement prévoit cette année, Mme Méthot, 127 millions, trois fois le montant qu'on a reçu l'an passé. Est-ce que vous êtes aussi optimiste que le ministre des Finances?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Je n'ai pas fait les calculs, je n'ai pas encore fait mon sondage, puisque les sociétés minières n'ont pas encore fini de faire leurs rapports d'impôt minier pour l'année 2014, alors c'est difficile pour moi de vous répondre à cet effet-là.

Une chose est certaine, il y a des nouvelles mines qui sont entrées en production, on le sait très bien, mais qui vont... ça va être plus substantiel, je dirais, plus en 2015, le projet Éléonore par exemple, qui entre en production, qui est un gros projet. Alors, oui, ça va venir influencer les redevances, puis effectivement qu'on sait très bien maintenant qu'on est dans un nouvel environnement de Loi sur l'impôt minier, nouveau régime de redevances. Alors, effectivement que ce que j'entends, sans avoir des chiffres en tête, parce que je ne les ai pas, c'est qu'effectivement des sociétés minières me disent : Oups! Oui, on va payer plus d'impôt minier cette année.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Chauveau.

M. Deltell : Alors, merci, M. le Président. MM. — collègue — et Mmes les députés, salutations. Mme Méthot, M. St-Amant, toujours agréable de vous revoir.

Alors, M. le Président, mon collègue de Granby faisait état tout à l'heure de la loi qui avait été adoptée lors du gouvernement minoritaire, mais sa modestie l'a empêché de dire que c'était lui qui avait été à l'origine de cette loi-là. Alors, moi, ça me fait plaisir de le dire et de rappeler que, grâce au député de Granby et à la collaboration du parti qui était ministériel à l'époque, l'opposition officielle actuelle, et finalement avec le vote d'appui du gouvernement actuel, qui était l'opposition officielle, on a réussi à sortir de l'impasse et à quoi... je pense que c'était quatre ans d'impasse législative concernant les mines. Ce n'est pas très glorieux, comme parlementaires, mais heureusement on avait réussi à obtenir ce consensus-là. Et, je tiens à le rappeler, M. le Président, c'était l'initiative et sous l'égide du collègue de Granby.

Maintenant, ça fait déjà 14 mois que ce projet de loi a été adopté, mais l'ennui, M. le Président, c'est que, oui, ça prend une loi, nous l'avons, mais ça prend des règlements aussi. Et on comprend qu'au lendemain de l'adoption de la loi... on était en décembre... janvier, février, il y a eu les élections déclenchées au mois de mars, élections au mois d'avril, on peut comprendre qu'il y a eu un délai. M. le Président, ça fait déjà, quand même, bientôt 10 mois que le gouvernement est en poste... disons, neuf mois, le temps que le Conseil des ministres soit formé, et tout ça. Ça fait neuf mois que le gouvernement est en poste, et, curieusement, les règlements de la loi adoptée il y a 14 mois n'ont toujours pas été déposés. Alors, M. le Président, ma question à nos invités est de savoir : Comment cela peut-il influencer les opérations des minières?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : On a le cadre législatif qui est là, la Loi sur les mines qui a été modifiée, qu'on travaille avec et on travaille avec le gouvernement, je dirais, justement à un comité consultatif mines, avec le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles justement à travailler sur différents dossiers qui vont mener au règlement et à certains guides qu'on attend aussi dans l'application. Alors, moi, je peux vous dire que le travail est en cours. Je ne peux pas vous dire jusqu'où on est rendus, ce n'est pas moi qui ai le crayon dans les mains, mais nous, on collabore à ce que les choses avancent.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Chauveau.

M. Deltell : Je salue et j'applaudis votre collaboration, mais on a hâte que ça accouche. Est-ce que vous estimez que neuf mois, sans avoir de cadre... en fait, 14 mois, mais neuf mois depuis que l'actuel gouvernement est là, sans avoir de règlement, est-ce que ça aide ou non l'industrie?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : On sait que plus le cadre est clair, plus ça aide l'industrie. Actuellement, quand même, avec nos discussions avec les gens du ministère, ils sont quand même capables de dire : Oups! Il faut faire attention à certaines choses. Donc, effectivement, plus le cadre est clair, mieux c'est.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Chauveau.

Mme Méthot (Josée) : Ça aide à la prévisibilité que je vous mentionnais tantôt.

M. Deltell : Bien, voilà, M. le Président. Écoutez, au Québec, on a 21 lois, 41 règlements, 26 guides, il y en a quand même pas mal, là. Or, la dernière loi qui a été adoptée, on ne les a toujours pas, les règlements. Nous, on pense que le gouvernement actuel devrait mettre l'épaule à la roue. J'ai déjà questionné le ministre à cet effet, il m'a dit : Ça s'en vient. Pour l'industrie, M. le Président, pour nos entreprises, pour nos travailleurs, on a besoin d'un cadre réglementaire, et nous souhaitons que ce soit fait, parce que sinon, si on ne fait rien, la pente dangereuse sur laquelle nous sommes inscrits va se poursuivre, va s'accentuer.

M. le Président, savez-vous que, depuis les trois dernières années, on a perdu 70 % de notre financement pour l'exploration? Il y a trois ans, le Québec était capable de lever, comme on dit dans le métier, 360 millions de dollars; l'année dernière, 100 millions, chute de 70 %. On ne peut pas tolérer ça. On en a fait mention tout à l'heure, au cours des cinq dernières années, le Québec est passé du premier rang et est rendu au 21e rang pour l'endroit le plus intéressant pour les investisseurs à travers le monde entier. On était les meilleurs au monde, on est rendus les 21es. On ne peut pas tolérer ça. Et aussi, quand on regarde le financement pour l'exploration, avant nous avions 20 % de ce qui se levait comme argent — mais je n'aime pas cette expression-là, je sais que c'est du mauvais français, mais en tout cas elle dit ce qu'elle veut bien dire — on avait au Québec 20 % des investissements qui se faisaient pour le... le financement qui se faisait pour l'exploration et on est chuté à 14 %.

M. le Président, ça ne va pas bien, ça ne va pas bien, l'industrie des mines au Québec. N'est-il pas temps — et je pose la question à nos invités — de donner le coup de barre nécessaire?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Ce que je peux vous répondre à ça, c'est qu'on y travaille avec le gouvernement, et on préfère qu'on prenne notre temps et bien faire les choses que de les faire trop précipitées et de faire encore plus mal.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Chauveau.

M. Deltell : Merci, M. le Président. J'ai un autre thème à aborder, j'aimerais parler avec vous du MDDELCC.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...peut-être lieu que nos gens puissent comprendre c'est quoi.

M. Deltell : Excusez-moi. Je voulais faire un effet de toge, comme on dit en droit.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui. Bien, l'effet de toge est fait, sauf que...

M. Deltell : Alors, je vais vous parler du ministère du Développement durable et de la Lutte aux changements climatiques, ce que, dans mon temps, on appelait le ministère de l'Environnement. Des fois, c'est tellement simple, il faut faire compliqué. Alors, pour celles et ceux qui nous écoutent, le MDDELCC, c'est ce qu'on a appelé le ministère de l'Environnement. Bon, dans mon temps, on appelait ça... Pour les fins de la discussion, M. le Président, vous me permettrez d'utiliser non pas l'acronyme, mais «le ministère de l'Environnement».

On sait que le ministère de l'Environnement a un rôle majeur, capital dans notre vie, et c'est important, et, oui, il faut respecter l'environnement, et, chaque coup de pelle qu'on donne, il faut penser à la génération future, on est tout à fait d'accord avec ça, mais encore faut-il que le ministère de l'Environnement nous permette de donner les bons coups de pelle au bon endroit puis que ça soit rentable pour tout le monde, et, quand je dis «tout le monde», je pense à nos générations futures.

Alors, M. le Président, ma question à nos invités : Comment se portent les relations entre les entreprises minières et le ministère de l'Environnement? Estimez-vous que vous avez une collaboration efficace et efficiente?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : On est loin du projet de loi n° 28, M. le Président. Oui, en effet, on travaille également avec le ministère de... le ministère du Développement durable et de la Lutte contre les changements climatiques. Excusez-moi.

Une voix : ...

Mme Méthot (Josée) : Oui, évidemment. Et nous avons des discussions également sur des modifications réglementaires pour aider les sociétés minières à mieux opérer ici, pour... Évidemment, on parle d'allégement réglementaire et aussi d'allégement administratif. À ce niveau-là, nous avons des discussions régulièrement, les sociétés minières et nous également, à l'association. On sait que nous avons une nouvelle sous-ministre maintenant au MDDELCC, la nouvelle sous-ministre qui était la sous-ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles en décembre dernier. Alors, pour nous, nous voyons cette nomination d'un très bon oeil pour améliorer la collaboration à laquelle vous faites référence.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Il vous reste environ 45 secondes.

• (16 h 10) •

M. Deltell : Oui, alors rapidement. À l'article 67 — revenons au projet de loi n° 28, — vous parlez de... Vous avez parlé, tout à l'heure, de la question de la divulgation des informations. Mon collègue de l'opposition officielle en a fait état. Qu'est-ce que vous souhaiteriez qu'il se fasse? C'est-à-dire jusqu'à quel point les entreprises devraient divulguer... qu'est-ce que les entreprises pourraient divulguer ce qui, à votre point de vue, serait acceptable?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Méthot.

Mme Méthot (Josée) : Bien, évidemment, ce qui est inclus puis ce qu'on parle au niveau international, c'est les contributions versées aux différents paliers gouvernementaux. Alors, on n'a pas d'objection à ce que les contributions versées aux différents paliers gouvernementaux soient rendues publiques, c'est la tendance mondiale, mais, encore une fois, on aimerait avoir un système qui est harmonisé. Comme la loi fédérale va être mise en place pour tout le Canada, on veut un système harmonisé.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci beaucoup. Merci de votre participation à la Commission des finances publiques, donc, Mme Méthot, M. St-Amant.

Donc, je vais demander à l'Association de l'exploration minière du Québec de prendre place et je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 11)

(Reprise à 16 h 15)

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux.

Nous accueillons l'Association de l'exploration minière du Québec. Bienvenue à vous tous à la Commission des finances publiques. Vous avez une période de 10 minutes pour faire votre présentation. Donc, comme c'est M. Mariage qui débute, la parole est à vous.

Association de l'exploration minière du Québec (AEMQ)

M. Mariage (Frank) : M. le Président, membres de cette commission, chers participants et collègues, au nom de l'Association de l'exploration minière du Québec, je désire remercier la Commission des finances publiques de nous avoir invités à venir vous faire part de nos positions concernant le projet de loi n° 28.

Mon nom est Frank Mariage, je suis avocat spécialiste en droit minier, et associé au sein du cabinet d'avocats Fasken Martineau, et président du conseil d'administration de l'AEMQ.

Avant de débuter, j'aimerais présenter les collègues présents avec moi à cette table. Je suis accompagné aujourd'hui, à ma gauche, de Mme Valérie Fillion, géologue et directrice générale de notre association; également, à ma droite, M. Mathieu Savard, géologue et membre du conseil d'administration; et, à ma gauche, M. Alain Poirier, qui est directeur de projet à la permanence de notre association.

M. le Président, le 11 mai 1965, le projet de loi créant la SOQUEM était déposé par un de nos plus grands visionnaires en matière de développement de nos ressources naturelles, M. René Lévesque. Ce fut le premier jalon qui a contribué à faire émerger au Québec une véritable filière minérale québécoise dont l'expertise est aujourd'hui internationalement reconnue. Cette filière maintient, bon an, mal an, près de 3 000 emplois en exploration seulement. Elle est aussi aujourd'hui le fer de lance d'une industrie qui contribue pour plus de 7 milliards au produit intérieur brut du Québec et qui compte approximativement 54 000 emplois directs et indirects. Fait important à noter, les données de l'Institut de la statistique du Québec nous indiquent que 85 % des travaux d'exploration hors site, soit hors d'un bail minier, sont effectués par des PME d'exploration minière.

Notre évaluation de la situation globale de notre secteur d'activité pour l'année 2014 nous amène à conclure que celle-ci a été particulièrement désastreuse. Nos analyses internes nous indiquent que le financement obtenu par nos PME d'exploration n'a probablement pas excédé les 100 millions de dollars. Un cycle économique très difficile force ainsi nos entreprises à sabrer dans leurs programmes d'exploration. De plus, le Québec a également subi, au cours de ces dernières années, un dur coup à sa réputation internationale avec une chute marquée, depuis 2009, de sa position sur le classement mondial des juridictions les plus attrayantes pour des investissements étrangers. En 2009‑2010, le Québec occupait le premier rang mondial dans le classement annuel de l'Institut Fraser des juridictions offrant un environnement d'affaires équilibré aux investisseurs. En février 2014, il se situait au 21e rang sur 121 juridictions. Le déclin du Québec dans ce classement annuel de l'Institut Fraser repose surtout sur l'incertitude liée à la gestion publique de notre régime minier, la trop grande interprétation dans l'application de sa réglementation — où nous nous classons 58es sur 121 juridictions; l'incertitude autour de son système légal — 46e position sur 121; et son régime de taxation — 60e rang sur 121 juridictions.

Il y a eu, bien sûr, le contexte mondial, soit une crise du financement généralisée pour le secteur minier, mais notre industrie est toujours aux prises avec des enjeux critiques : une réglementation lourde et une application aléatoire et confuse de celle-ci; l'attente et l'incertitude entourant de nouveaux règlements à venir dans le cadre de l'application des modifications apportées à la Loi sur les mines en décembre 2013; des ajustements également attendus au cadre fiscal; la conclusion des audiences idéologiques du BAPE sur la filière uranifère. Notons enfin l'ensemble des coûts reliés à la fiscalité pour les entreprises, incluant les délais de contestation et l'évolution des interprétations, l'incertitude concernant la protection du territoire ainsi que les contraintes à l'exploration.

• (16 h 20) •

Quant au nombre de titres miniers actifs, soit les claims miniers, cet autre indicateur connaît aussi une chute marquée, passant de 237 000 claims en décembre 2012 à 156 000 présentement, soit une chute de plus du tiers du parc de titres miniers au Québec. L'impact de ce dernier élément seulement se solde présentement à une perte de plus de 3 millions par année en revenus fiscaux pour l'État.

Bien que le contexte économique ait contribué à ce déclin, il ne faut pas sous-estimer l'effet pernicieux des mauvaises décisions des derniers gouvernements sur notre secteur. Dans ce contexte, nous souhaitons vous offrir nos commentaires sur certains éléments du projet de loi n° 28.

L'AEMQ est en accord avec la mise en place du fonds Capital Mines Hydrocarbures, particulièrement sur le territoire du Plan Nord. Malheureusement, ce fonds ne vise pas à appuyer l'acquisition de connaissances géologiques, condition essentielle aux projets d'exploration, et donc des futures mines. D'ailleurs, peu d'efforts ont été consentis au cours des dernières années pour supporter l'exploration minière, pourtant nécessaire au maintien du secteur minier, et son développement, et particulièrement sur le territoire du Plan Nord. Dans notre mémoire déposé à la Commission d'examen sur la fiscalité ainsi que dans celui-ci, l'association propose d'apporter des ajustements à certaines mesures favorisant l'exploration. Notons à cet effet l'introduction de paliers de remboursement de crédits d'impôt en exploration minière; des dispositions touchant les actions accréditives; l'harmonisation fédérale-provinciale dans le traitement fiscal des demandes; l'introduction des crédits supplémentaires favorisant l'exploration de nouveaux créneaux minéralogiques, les forages en profondeur et l'utilisation ou le développement de nouvelles technologies.

Sur la question de la divulgation de renseignements stratégiques, nous sommes en accord avec les dispositions proposées dans le projet de loi n° 28 visant à ne pas rendre publique l'information stratégique des entreprises qui recherchent, extraient ou transforment des substances minérales. Nous croyons que ce même principe devrait s'appliquer à la divulgation de renseignements stratégiques des travaux de nos entreprises, puisqu'il s'agit de l'actif le plus important d'une entreprise d'exploration, au même titre que les claims, les brevets, les secrets industriels et les résultats de toute recherche scientifique.

Sur la question de la divulgation et de la transparence, l'association s'oppose à l'introduction de l'article 66, modifiant l'article 215 de la Loi sur les mines et qui rend confidentielles les ententes avec les communautés. Notre association appuie la poursuite de toute initiative favorisant davantage de transparence et une meilleure compréhension du grand public des enjeux financiers et économiques auxquels notre industrie est confrontée. Nous sommes ainsi en faveur de divulguer publiquement des renseignements précis relativement à des contributions ou à des avantages conférés à une communauté.

Notre dernier commentaire porte sur le transfert de la responsabilité de l'impôt minier. Nous sommes en faveur du transfert de la responsabilité de l'impôt minier vers Revenu Québec mais souhaitons souligner ici qu'il y a des efforts importants à consentir afin d'alléger la fiscalité de nos entreprises et leur permettre de consacrer leurs énergies à acquérir des connaissances géologiques.

M. le Président, au nom de l'AEQM, nous vous remercions de l'intérêt porté à nos propositions et sommes à votre disposition pour répondre aux questions des membres de cette commission. Merci.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Mariage. Merci beaucoup. M. le ministre, vous allez débuter avec la partie gouvernementale.

M. Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, à mon tour aussi de vous souhaiter la bienvenue, on l'avait déjà fait avant, je le fais maintenant officiellement, donc bienvenue. Et c'est toujours très utile pour nous d'écouter ce que les différents groupes ont à nous proposer, à nous suggérer pour améliorer nos projets de loi. Je prends bien note de ce que vous avez mentionné.

Avant d'aller un peu plus dans le détail, je dois vous dire qu'évidemment je comprends très bien le rôle essentiel que l'exploration minière joue dans l'économie, parce que, s'il n'y a pas d'exploration, il n'y aura pas de mine plus tard, donc c'est l'élément vital dans tout le processus, et qu'en effet, pour plusieurs raisons, et vous les avez énumérées, cette activité-là au Québec, où on avait une grande expertise... bon, cette activité-là a beaucoup diminué, et donc une des conséquences, c'est qu'on a perdu beaucoup d'expertise. Et, malheureusement, quand on perd de l'expertise, c'est extrêmement difficile de la rebâtir. Alors, nous sommes très au courant de ces questions-là.

Maintenant, pour ce qui est spécifiquement des mesures ou des suggestions que vous aurez à nous faire en termes de mesures qui pourraient aider, stimuler, supporter l'exploration minière, vous avez mentionné les crédits d'impôt. Est-ce que vous pourriez peut-être élaborer un peu plus à cet égard-là? Qu'est-ce que vous souhaiteriez comme mesures de support de la part du gouvernement?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Mariage.

M. Mariage (Frank) : Évidemment, on constate que, premièrement, les crédits ont été coupés de 20 %. Nous, ce qu'on souhaite, c'est toute mesure qui va favoriser l'exploration. On en propose trois principales, la première étant de favoriser, bon, un crédit d'impôt pour l'exploration dans les nouvelles régions, dont, principalement, le Plan Nord. On parle d'un territoire qui fait deux fois la France. Rappelez-vous qu'on connaît à peine 15 % du potentiel géologique du Québec, donc c'est important de favoriser l'exploration dans ces régions-là. Donc...

M. Leitão : ...un petit peu. Donc, crédits d'impôt, mais de façon géographique, donc, dans les nouvelles régions.

M. Mariage (Frank) : Absolument.

M. Leitão : O.K.

M. Mariage (Frank) : Deuxièmement, les crédits d'impôt pour les forages en profondeur. Nous, à l'association, nous croyons qu'il est important aussi de venir en aide à nos régions ressources. Donc, si on pense à l'Abitibi, ça fait 100 ans qu'on fait de l'exploration en Abitibi, et nous continuons de faire des découvertes là-bas. Des mines qui sont en opération, les forages en profondeur coûtent excessivement cher. Si on veut assurer la pérennité de ces mines puis la continuité, le maintien des emplois dans les régions ressources, d'avoir un crédit d'impôt pour les forages en profondeur, c'est la deuxième mesure.

Une troisième mesure, maintenant, pour les nouvelles technologies : le développement de la nouvelle technologie au niveau de l'exploration minière. Vous avez parlé d'expertise dans votre intervention. C'est justement une des choses qui nous maintient au 21e rang du palmarès de l'Institut Fraser, c'est la qualité de notre main-d'oeuvre. N'eût été de ça, on serait encore plus bas dans le palmarès, M. le Président. Alors, nous avons une expertise ici qui est reconnue et que nous sommes en mesure de développer des nouvelles technologies, avec nos partenaires dans les universités, et autres, pour, justement, stimuler l'exploration et nous pensons qu'il serait important et intéressant que le gouvernement introduise un crédit d'impôt à cette fin.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci. Si on peut continuer un peu plus dans cet ordre d'idées là. L'action-capital, bien sûr, il faut des sous pour développer. Nous avons vu... sans vouloir mentionner de noms, parce que je ne pense pas que ça soit nécessairement utile ici, mais il y a eu quand même quelques «success stories» assez intéressantes au Québec récemment, de nouvelles découvertes qui se sont transformées en nouvelles mines qui entrent maintenant en production. Je pense qu'on réussit à l'identifier comme ça, mais en tout cas...

Donc, il y a encore, même s'il y a moins... il y a encore cette capacité-là de découvrir de nouveaux gisements. On est capables... donc, on a encore une certaine réputation d'être de bons explorateurs, et donc d'attirer des capitaux. Est-ce que vous pensez que l'industrie du capital de risque favorise l'exploration, pénalise... Enfin, est-ce qu'il y a des choses que vous aimeriez voir pour s'assurer que le capital qui existe... capital mondial, pour financer des... pour prendre du risque dans l'exploration... est-ce qu'il y aurait des choses, à ce niveau-là, que vous pensiez qu'on pourrait développer?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Mariage.

• (16 h 30) •

M. Mariage (Frank) : Merci pour votre question. On parle de «success stories», oui, il y en a, mais ce sont aussi des découvertes qui ont eu lieu il y a à peu près une quinzaine d'années, les premières découvertes. La dernière découverte significative au Québec, au niveau aurifère, a eu lieu peut-être il y a environ cinq ans.

Alors, au niveau du capital de risque — il y a le mot «risque» là-dedans — le capital, ce qu'il est capable d'assumer, c'est le risque. Il est capable de le calculer dans ses décisions d'investissement. Ce qu'il n'est pas capable de calculer, c'est l'incertitude. Et, malheureusement, c'est ce que le climat des dernières années a créé. Quatre tentatives de réforme de la Loi sur les mines en cinq ans, nous sommes presque à 14 mois après l'adoption du règlement... de la loi, pardon. Il aurait été souhaitable que le projet de règlement soit... et le règlement, soit adopté. Il ne l'est pas encore. Tout le débat sur les redevances minières, tout ça a créé un facteur : de l'incertitude. Et le capital de risque ne fuit pas le risque, mais le capital de risque fuit l'incertitude, malheureusement. Et ça coïncide aussi avec la chute de la place du Québec au niveau du palmarès de l'Institut Fraser. Les investissements ont baissé de façon significative à cause de... oui, du contexte mondial, mais à cause du contexte que nous avons créé au Québec, qui est directement relié à l'incertitude, malheureusement.

Alors, qu'est-ce qu'on peut faire pour favoriser le capital de risque? C'est de créer un climat plus certain, plus prévisible pour que le capital de risque revienne au Québec pour investir.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Donc, si je comprends bien, vous, en termes de mesures spécifiques de la part du gouvernement, vous semblez préférer une refonte des crédits d'impôt. Ce serait dans cette direction-là que vous pensez que l'activité ou que l'action de l'État serait la plus...

Une voix : Significative.

M. Leitão : ...utile, significative?

Une voix : ...de...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier, la parole est à vous.

M. Poirier (Alain) : Oui. Merci, M. le Président. En fait, les actions de l'État devraient être multiples. On prend, par exemple, les actions accréditives. Les actions accréditives, bon an, mal an, vont attirer entre 50 et 75 millions de dollars d'investissement au Québec à chaque année. Ce sont des investisseurs qu'on ne retrouve pas habituellement sur les marchés publics, eux, ils sont là pour une raison particulière, donc, ils investissent au Québec. Ils sont très, très importants dans des années comme les dernières années. Si on a environ 100 millions, cette année, au total, de financement de nos PME, il y en a à peu près 55 qui viennent des actions accréditives. Le fait d'avoir baissé de 150 % à 120 % rend moins attrayante cette mesure-là. Cependant, c'est de l'argent qui est essentiel à notre activité, à nos PME d'exploration pour être sur le terrain.

Pour qu'est-ce qui est des crédits d'exploration, on a aussi, dans notre mémoire, une proposition de modulation. On s'aperçoit que, quand ça va mal, l'État est moins présent pour supporter l'industrie et, quand ça va très, très bien, bien l'État contribue au même niveau à peu près, et, dans des moments où est-ce qu'on pourrait dire qu'on en a moins besoin parce que ça va bien, les capitaux sont là. La façon dont on l'a modulé dans notre mémoire fait en sorte de favoriser, de façon assez constante dans le temps, la participation du gouvernement dans les incitatifs pour l'industrie. En même temps, ça permet au gouvernement d'avoir comme une limite de dépenses, parce que plus que d'argent va être investi, et moins la contribution au gouvernement serait importante. Donc, c'est gagnant-gagnant dans les deux cas.

Les autres places où est-ce que le gouvernement peut faire action, c'est sur sa réglementation. On en a parlé, je vais vous donner un exemple peut-être un peu simple, mais l'article 2 de la Loi sur les mines dit que le gouvernement doit mettre en place une politique de consultation des Premières Nations. On est toujours en attente de cette politique-là. La politique est importante pour savoir quel est le rôle des entreprises, quel est leur rôle, à eux, dans ces consultations-là, quel est le rôle du gouvernement et quel est le rôle des Premières Nations. Ça fait que c'est un des exemples qui vient aider, parce que, dans certains secteurs, il est excessivement difficile pour les entreprises de savoir comment faire et quoi faire et souvent les projets sont sur la glace et sont en attente de. Donc, il y a vraiment plusieurs niveaux où est-ce que le gouvernement pourrait agir.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Poirier. M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci. Est-ce que mes collègues ont des questions? Allez-y.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Merci, M. le Président. Bienvenue. Merci d'avoir déposé votre mémoire, et votre présentation était fort intéressante.

J'ai quelques petites questions. D'abord, dans votre présentation, vous avez fait référence au cinquième alinéa de l'article 215 de Loi sur les mines. Présentement, l'article dit que les données contenues dans une entente conclue entre un titulaire de bail minier ou de concession minière et une communauté ne sont pas rendues publiques. Dans l'avenir, c'est simplement... avec la modification, ce sont les renseignements, les données relativement à des contributions ou à des avantages dont les communautés bénéficient qui ne seront pas rendus publics. J'aimerais comprendre mieux la raison pour laquelle vous êtes contre cette modification.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Monsieur...

Une voix : Savard.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Savard. Bon, bien, M. Savard, la parole est à vous.

M. Savard (Mathieu) : Oui. Donc, la raison pour laquelle on est contre, elle est fort simple. Pour un producteur qui a une capitalisation boursière de 1 milliard, ce n'est pas matériel, les ententes qu'ils vont avoir pour eux, les montants ne seront pas matériels pour les actionnaires. Par contre, pour une société junior d'exploration qui va avoir à négocier avec des communautés d'accueil, avec une capitalisation boursière beaucoup moindre, ça va devenir matériel pour ses actionnaires, puis ils vont être en droit d'avoir cette information-là. Donc, c'est une des raisons principales pour lesquelles, en tant qu'explorateurs, nous, on est pour la divulgation de ces renseignements-là des ententes confidentielles. C'est pour cette raison, en grosse partie.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Mariage.

Une voix : En complément de réponse, M. Poirier va...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : Oui. Merci, M. le Président. D'ailleurs, au mois d'août dernier, à Sudbury, en Ontario, il y a eu une entente entre les ministres des Ressources naturelles visant à ce qu'il y ait divulgation de l'ensemble des ententes avec les communautés, ce qui respecte en fait les règles internationales de divulgation. Quand on sait que 70 % de la capitalisation des entreprises se fait sur le marché canadien, c'est quand même important. Dans la proposition, en fait, on se serait attendus au contraire, que ça soit rendu public directement, ce qui nous laisse croire que le gouvernement du Québec va aussi devoir déposer un projet de loi, puisque le fédéral a déjà déposé un projet de loi venant encadrer cette divulgation. Le gouvernement du Québec a jusqu'au 1er juin pour déposer et faire adopter sa loi visant cette divulgation-là. Et la divulgation donne une pause de deux ans avant qu'il y ait une déclaration.

Mais c'est pour ça qu'on est un peu surpris de retrouver une modification à l'article 215 qui vient dire un peu le contraire que... de l'engagement du gouvernement... a pris.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.

Mme de Santis : Alors, ce que je comprends, c'est que vous voulez que ce cinquième alinéa soit éliminé et que ça, ça serait conforme avec ce que le fédéral fait.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

Une voix : Et les provinces.

Mme de Santis : O.K. Parfait. Donc, ça, c'est plus de transparence, c'est ça?

Une voix : Bien, tout à fait.

Mme de Santis : O.K.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Vous voulez ajouter, M. Poirier?

M. Poirier (Alain) : Oui. Bien, évidemment, c'est par les commissions des valeurs mobilières. La transparence est par rapport aux actionnaires, ceux qui détiennent des actions d'une entreprise de petite capitalisation, de 4, 5 millions. S'il y a des ententes qui font en sorte qu'il y un dilution importante de l'actionnariat selon qu'il y ait une découverte ou pas, ces gens-là se doivent d'être au fait de ça, et c'est beaucoup plus important, comme disait M. Savard, dans une petite entreprise que dans une entreprise qui vaut plusieurs milliards de dollars.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.

Mme de Santis : Alors, merci. J'aimerais maintenant demander une clarification pour que je comprenne. Vous dites que les exigences de la fiscalité québécoise sont très complexes. Pouvez-vous élaborer? Comment c'est plus complexe ici qu'ailleurs?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme Fillion, vous avez un beau sourire, est-ce que vous voulez répondre?

Mme Fillion (Valérie) : Bien, il y a peut-être deux personnes qui comprennent toute la fiscalité minière au Québec. C'est très ardu, c'est complexe. Il y aurait matière à simplifier la chose, c'est ce qu'on veut dire. Même on se demande si quatre personnes au total au Québec peuvent expliquer toute la fiscalité minière dans son ensemble.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : Merci, M. le Président. Il y a également le fait que — et je ne veux pas partir de débat constitutionnel — on a le privilège d'avoir deux systèmes de taxation, ce qui est un peu complexe, particulièrement au niveau des actions accréditives, où est-ce que certaines dépenses vont être reconnues par Revenu Canada mais pas par Revenu Québec. C'est pour ça qu'on parle, dans le mémoire, aussi d'harmonisation, parce que c'est excessivement difficile. Et, pour des petites entreprises, la fiscalité, ça coûte de l'argent. Donc, ils doivent investir des sommes importantes là-dedans. Et, quand il y a une contestation, les délais sont excessivement importants, on a vu des décaissements qui ont pris 24, même 36 mois dans certaines circonstances, et c'est l'entreprise qui, elle, doit supporter ça. Et ça met aussi l'entreprise dans une difficile position, parce que des fois elle doit choisir entre : Est-ce que je poursuis mon travail pour obtenir 100 % du montant ou j'abandonne tout de suite parce que ça va me coûter de toute façon le même montant?

Mais ils sont pris dans cette situation-là, ça fait que c'est très difficile. C'est aussi un coût au gouvernement. On a déjà adressé la problématique aux gens de Revenu Québec sur le coût que ça pouvait avoir au niveau du gouvernement et au niveau de nos entreprises d'exploration.

• (16 h 40) •

M. Mariage (Frank) : En complément de réponse...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, allez-y, M. Mariage.

M. Mariage (Frank) : ...simplement pour vous dire qu'effectivement la réalité, c'est que nos membres en ce moment sont obligés — moi je n'ai jamais vu ça, là, à date, là — de dépenser des sommes considérables pour, justement, contester des décisions, que ce soit de l'Agence du revenu du Canada ou Revenu Québec, qui... Alors que des dépenses ont été acceptées d'un côté, elles ont été refusées de l'autre. Puis pourtant on utilise la même définition... notamment ce qu'on appelle des FEC dans notre jargon, les frais d'exploration au Canada, on retrouve la même définition dans les deux lois. Et là nos membres doivent dépenser des sommes considérables en ce moment pour contester certaines décisions.

Alors, il y a une incongruité en ce moment, et ça, c'est de la fiscalité qui coûte excessivement cher à nos membres. Alors, au lieu de dépenser de l'argent en exploration, ils sont obligés de dépenser de l'argent justement pour contester des mesures ou des décisions.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Ce que vous nous dites, M. Mariage, c'est qu'un vérificateur au niveau fédéral va accepter une dépense puis un vérificateur au niveau du Québec ne l'acceptera pas, ou vice versa.

M. Mariage (Frank) : Et vice versa. Absolument.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

Mme de Santis : ...cela à la page 17 de votre mémoire, vous parlez de l'«incohérence d'interprétation entre Québec et le fédéral», mais retournons un instant à la complexité du régime fiscal ici, au Québec. Est-ce que c'est moins complexe pour l'Ontario? Parce que c'est beau de dire que c'est complexe et... J'aimerais une comparaison. Est-ce que c'est moins complexe pour l'Ontario? Est-ce que c'est moins complexe? Je ne sais pas. Peut-être que c'est moins complexe pour l'Alaska.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Savard.

M. Savard (Mathieu) : Le nouveau régime de redevances, par exemple, on discute avec plein de CFO de compagnies minières qui ne sont même pas capables de nous l'expliquer. D'ailleurs, on propose, nous, que le 16 % revienne, qui était beaucoup plus simple à gérer.

Évaluer un NPV, si on veut, un «net present value», était beaucoup plus simple. Le nouveau système, d'ailleurs, qui a... il y a certains modèles qui ont été roulés dedans, qui prédisent qu'il va être rentable à 2 500 $ l'once au niveau du prix de l'or. Donc, nous, on trouvait que c'était beaucoup plus simple avec l'ancien système de redevances. Ça, c'en est un, exemple, parmi tant d'autres. On parle de complexité, on parle également de délais, entres autres, au niveau des remboursements de crédits. On a été témoins, dans les dernières années... où est-ce qu'il y a des petites PME d'exploration qui ont dû attendre plus de deux ans avant de recevoir des remboursements et qui ont même dû procéder à des financements adossés à ces remboursements-là à des taux d'intérêt de 20 %. Donc, c'est un autre exemple où est-ce que le système, il est complexe. Et il y a énormément de délais aussi, ce qui met souvent en péril la survie de certaines juniors d'exploration.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Sur cette même page 17, vous parlez de la «réinterprétation sans avis des règles sur les demandes 2012 faites par Revenu Québec», créant des retards importants sur les remboursements attendus. Est-ce que vous parlez de cette situation-là ou des situations additionnelles créées par l'introduction de délais sans avis?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Mariage.

M. Mariage (Frank) : On parle de la même situation.

Mme de Santis : La même situation, celle de 2012. Alors, est-ce que maintenant ce problème a été résolu?

M. Mariage (Frank) : Aucunement.

Mme de Santis : Pas du tout? Alors, il y a encore d'autres...

M. Mariage (Frank) : Absolument.

Mme de Santis : Pouvez-vous élaborer un petit peu?

M. Poirier (Alain) : ...M. le Président. Notre compréhension, c'est qu'il y avait, environ, entre 300 et 400 dossiers, excusez l'expression, dans le «backlog» au niveau de l'impôt minier, de façon générale. On sait que les gens... Là, le transfert va s'effectuer entre le ministère des Ressources naturelles et Revenu Québec. On est très au courant... les gens de Revenu Québec sont très au courant de la complexité de la chose. Il y a des efforts qui sont faits pour essayer de les régler. On a des rencontres avec eux. L'objectif, c'est d'essayer d'alléger, encore là, la procédure, le processus. Les demandes sont excessivement longues. Quand ça va bien, c'est 18 mois de délai, à peu près. Mais on comprend que Revenu Québec va s'attaquer à ça, ils le regardent, ils sont bien au fait de la situation, mais on comprend qu'avec le nombre de dossiers ce n'est pas facile, là, mais on sent qu'il y a une réelle motivation, que, dans les prochaines années, ça va pouvoir s'améliorer rapidement.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Oui. Merci, M. le Président. Premièrement, permettez-moi, à mon tour, de vous saluer. J'aimerais poser une question par rapport à une des suggestions que vous avez mises dans votre mémoire pour le crédit d'impôt.

Premièrement, vous parlez d'un crédit d'impôt de 40 %. Une première simple question : Pourquoi vous êtes arrivés à ce chiffre de 40 %?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : Bien, je vais donner l'exemple du forage en profondeur. Un des défis des vieux camps miniers, c'est d'aller explorer plus en profondeur. C'est excessivement difficile avec les types de foreuse que nous avons actuellement d'aller au-delà de 1 kilomètre, et ça coûte évidemment assez cher pour le faire. Ce qu'on se disait, c'est : Les vieux camps miniers, particulièrement l'Abitibi-Témiscamingue, pouvoir posséder une technologie qui pourrait aller plus en profondeur. Mais tu dois aller chercher beaucoup, beaucoup d'argent pour faire ce type de travaux là. Donc, c'est un incitatif. Parce qu'il y a des mines... La mine LaRonde est à 2,5 kilomètres sous terre. Ils ont découvert le gisement plusieurs années après avoir ouvert une mine et avoir continué l'exploration souterraine. Ça a débouché sur cette découverte-là.

Donc, c'est un peu le même processus qu'on tente ici de faire, c'est d'attirer les investisseurs à dire : Bien, oui, peut-être mettre 1 million, ou 2 millions, ou 3 millions à ce type de forages là pour voir ce qu'il y a plus en profondeur.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Habel : Puis vous avez trois éléments, là : vous parlez de l'exploration de nouveaux créneaux et nouveaux secteurs géographiques, vous parlez de forages et vous parlez aussi du développement des nouvelles technologies. Est-ce que vous en avez une que vous trouvez plus essentielle que l'autre ou vraiment vous n'êtes pas capables de la quantifier, là, en termes de priorité, là?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : On va choisir les trois. Vous savez, les...

M. Habel : Si je vous permets peut-être de la prioriser, est-ce que...

M. Poirier (Alain) : Je vous explique. C'est parce que les trois visent quelque chose de différent. Alors, on comprend que les nouveaux territoires, c'est principalement sur le territoire du Plan Nord, donc de vastes territoires, c'est éloigné, tandis que le forage en profondeur va viser plus des anciens camps miniers. Puis les nouvelles technologies... bien, les nouvelles technologies, on peut développer plein de choses, c'est une industrie de recherche et de développement, donc ça fait travailler beaucoup de gens, beaucoup d'universités, de chercheurs, puis tout ça. Ça fait que c'est pour ça qu'on a proposé... Trois, c'est difficile de les prioriser, mais c'est difficile de prioriser l'Abitibi par rapport au Grand Nord ou par rapport à la recherche.

M. Mariage (Frank) : ...différents.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, allez-y, M. Mariage.

M. Mariage (Frank) : Le Plan Nord, l'exploitation de nos ressources, la création de la richesse, donc favoriser l'exploration minière, le fer de lance de l'industrie; la survie des régions ressources, favoriser le forage en profondeur pour la survie de nos régions ressources; troisièmement, les nouvelles technologies, l'expertise au Québec. On a ce privilège-là. C'est le temps de la privilégier pour garder cette expertise et la maintenir.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui. Allez-y, Mme Fillion.

Mme Fillion (Valérie) : Merci, M. le Président. Il y a aussi... quand on parle de nouveaux territoires, nouvelles substances, c'est qu'au Québec on commence à développer une expertise avec des nouvelles substances : les terres rares, le vanadium, le diamant, et puis ça, ce n'est pas du traditionnel. Donc, il faut mettre en place une filière de connaissances là-dedans. Et c'est des travaux aussi, là, qui sont... c'est de la recherche géoscientifique différente qui est non traditionnelle, donc ça demande des coûts plus importants.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Vous aviez 30 secondes, M. le ministre.

M. Leitão : Oh! non, ça va. Peut-être qu'après on pourrait se parler un petit peu. J'aimerais juste éclaircir un petit peu la question de l'harmonisation avec le fédéral. Vous avez parlé d'une réunion qui a eu lieu récemment à Sudbury. Peut-être qu'on pourrait se parler après parce que je...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Leitão : Pas de secret. J'invite tous les collègues à y être aussi juste pour avoir un peu plus d'informations. C'est tout.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Rousseau, la parole est à vous.

M. Marceau : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. Mariage, M. Savard, Mme Fillion et M. Poirier. Merci.

Alors, tout d'abord, je dois vous dire ce que j'ai dit à l'association minière qui vous a précédés, là, encore une fois, que, de notre côté, on reconnaît d'emblée toute l'importance et puis toute la contribution de votre industrie puis l'exploration en particulier, puisqu'elle est encore plus diffuse sur le territoire, puis, donc, elle bénéficie à un grand nombre de municipalités dans le Nord québécois qui, dans le fond, ne vivent que grâce à vous... ou, en tout cas, essentiellement grâce à vous. Donc, on reconnaît ça d'emblée.

Puis, quant aux changements qui sont proposés dans le projet de loi n° 28, j'ai dit ce que j'avais dire tout à l'heure, je crois que vous étiez présents lorsque je l'ai dit. Mais essentiellement, pour Capital Mines Hydrocarbures, pour la gestion de l'impôt minier par Revenu Québec, je pense que vous êtes favorables, et nous y sommes aussi favorables. Pour les questions de transparence, j'ai lu votre mémoire, vous avez entendu ce que j'ai à dire là-dessus, je ne crois pas qu'on soit en parfait accord, bien que je pense que ces questions de transparence ont plus d'impact sur les exploitants que sur les explorateurs, mais cela pourra faire l'objet d'une discussion éventuelle.

Maintenant, moi, je m'étais préparé d'autres questions, et donc je vais aller sur d'autres sujets.

Vous mentionnez l'idée de... pour faire face aux fluctuations dans les prix, puis on sait qu'elles sont importantes, de moduler les crédits d'impôt en fonction des cycles économiques ou ça pourrait être en fonction du prix des minerais. Avez-vous développé un peu plus cet argument-là puis est-ce que vous l'avez soumis à la Commission sur la fiscalité? Est-ce que c'est quelque chose que vous avez abordé avec eux?

• (16 h 50) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : Ce qu'on a présenté à la Commission sur la fiscalité, c'est essentiellement ce que vous retrouvez dans le mémoire. Ce qu'on s'aperçoit quand on regarde, sur un horizon assez long, l'utilisation des incitatifs gouvernementaux, c'est que, dans les moments les plus difficiles comme on vit présentement, il y a moins de support de l'État, et, quand ça va très, très bien, on pourrait dire, si on remonte à 2011-2012, où est-ce qu'on avait des 800... ou des 700 millions d'investis en exploitation, c'était beaucoup plus facile aller sur les marchés et lever des fonds. Il y en avait d'ailleurs beaucoup. Puis c'est pour ça qu'on proposait une modulation, pour aider, justement, les entreprises dans les cycles qui sont plus difficiles, et, quand ça va bien, que l'aide gouvernementale ou l'incitatif gouvernemental soient moins présents puisque moins nécessaires, ce qui permet, selon nous, une économie au gouvernement quand ça va très bien puis une aide au bon moment, quand les entreprises en ont... où ce n'est plus nécessaire pour eux.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député.

M. Marceau : Donc, concrètement, le taux du crédit augmenterait quand ça va moins bien, quand les prix baissent, et puis le taux du crédit baisserait. C'est-u ça que vous avez en tête ou...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : Non, c'est plutôt les paliers... je ne les ai pas par coeur, mais, comme, 40 % pour le premier million; après ça, 25 % jusqu'à 5 millions; et, après ça, stables dans le temps. Donc, ça évite au... si l'entreprise, il y a 800 millions... que le gouvernement donne des crédits d'impôt de 30 % à ce niveau-là. Le fait, c'est que ça aide beaucoup plus les entreprises, les plus petites PME en particulier, qui vont dépenser à peu près 3, 4 millions par année en exploration. Et on en a beaucoup au Québec, on a 90 entreprises. Il y en a évidemment qui se démarquent, qui ont plus de financement, mais généralement ce sont des plus petites entreprises de 3, 4 employés qui ont des budgets plus restreints.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député.

M. Marceau : Donc, en fait, c'est votre proposition qui est à la page 14, là, l'introduction d'une échelle de gradation du remboursement. C'est ça, en fait, que vous suggérez. Puis effectivement vous avez raison de dire que ça contribue à la fois à aider les plus petites entreprises et à passer plus facilement à travers... Enfin, en tout cas, on comprend que, lorsque les dépenses sont plus faibles, la proportion de remboursement que vous obtenez est plus importante, alors, effectivement, ça fait la job de cette façon-là. O.K., très bien. En tout cas, ça, ça m'intriguait.

Ce qui m'amène quand même à vous demander : Est-ce que vous avez constaté des impacts, là, récemment puis immédiats des coupes dans les crédits d'impôt qui ont été annoncées en juin dernier? Est-ce que c'est une cause parmi d'autres, là? On comprendra que, les prix, je pense que c'est le facteur dominant dans tout ce qu'on observe présentement, mais est-ce que ce serait la coupe de 20 %? En fait, une façon de le poser, ça serait de vous demander : Est-ce que la coupe de 20 % ou l'incertitude qui plane sur d'autres, des coupes éventuelles... est-ce que ça contribue présentement à ralentir l'activité?

M. Mariage (Frank) : ...répondre.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Mariage.

M. Mariage (Frank) : Dans ma vie, je suis président du conseil, mais je suis aussi un avocat dans le secteur et je fais beaucoup de financement dans le secteur minier, et ce que je peux vous dire, c'est que, cette année, c'est la première fois en 15 ans que je vois aussi peu d'investissements dans le secteur. Depuis les derniers mois, une baisse marquée de l'appétit... c'est-à-dire, il y avait certaines demandes, mais, malheureusement, l'argent n'y était pas. Le produit semble moins intéressant. Alors, moi, c'est le constat que je fais.

Est-ce que c'est lié à la baisse des crédits? Est-ce que c'est lié à l'incertitude qui a été créée au cours des dernières années? Je pense que c'est toutes ces réponses. Mais la baisse dans les crédits n'a certainement pas aidé.

Mon collègue Mathieu Savard voulait...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Savard.

M. Savard (Mathieu) : Bien, juste pour faire du chemin sur ce qu'on dit. On sait que les crédits, entre autres, au niveau des actions accréditives ont passé de 150 % à 120 % et puis, quand on épluche les chiffres, on voit qu'il y a eu 55 millions en financement accréditif en 2014. Par contre, si on va plus loin, on s'aperçoit qu'il y a seulement quatre ou cinq joueurs qui ont eu accès à une grosse proportion de ce financement-là. Puis ce que ça nous dit, puis c'est ce qu'on voit d'ailleurs sur le terrain, c'est que, le territoire, entre autres, du Plan Nord, là, il n'y en a plus, de sociétés juniors qui explorent le territoire, elles n'ont plus d'argent.

L'accès au financement même accréditif qui devrait être maintenu dans ces moments-là, ce qu'on observe, c'est que les gens, pour avoir accès à ce financement accréditif là, ont besoin d'avoir ce qu'on appelle du «hard cash» d'abord pour payer les frais de financement, les frais d'avocat, et tout, et tout, mais, si tu n'as pas... admettons, pour lever 1 million de dollars en accréditif, si tu n'as pas les 100 000 $ requis pour payer ces frais-là, tu n'y a pas accès, à ce capital-là. C'est pour ça d'ailleurs qu'on propose dans notre document de rendre ces frais-là jusqu'à un maximum mais admissible au financement accréditif. Autrement, le financement accréditif demeure inaccessible pour la plupart des joueurs, qui en ont grandement besoin, qui, souvent... ça va assurer la survie de ces entreprises-là dans des moments plus difficiles.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : O.K. Très bien. Et donc, si le ministre changeait d'idée puis décidait de rétablir le taux du crédit d'impôt, vous seriez contents. On peut dire ça?

M. Poirier (Alain) : On ne s'opposerait pas.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Marceau : J'ai réussi à vous le faire dire. O.K. Je vais changer de sujet, je vais parler d'accès au territoire. C'est un bout de votre mémoire qui m'a bien intéressé, à la page 12, là, les paragraphes 3.1.17. Peut-être expliquer à la commission. Vous faites mention de deux problématiques, là : il y a les territoires sur lesquels il y a une interdiction pure et simple d'explorer, mais il y a des territoires qui sont sous contrainte. Peut-être expliquer à la commission ce que ça veut dire, des territoires qui sont sous contrainte, et puis de quelle manière ça vous... enfin, comment ça se passe dans ces situations-là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier, oui. Expliquez à la commission, mais expliquez aussi aux gens qui nous écoutent.

M. Poirier (Alain) : Oui. Merci, M. le Président. Évidemment, les 10,5 % de superficie où est-ce qu'il est impossible de faire l'exploration, c'est principalement des aires protégées. Les aires protégées, l'engagement du gouvernement est d'atteindre le 12 % en 2015, et il y a le 17 % qui découle de l'accord de Nagoya, en 2020. Notre compréhension de ce 17 % là, c'est que, parce que ça va être plus difficile dans le Sud, ça va être repoussé donc dans le Nord, il y aurait des secteurs dans le Nord qui vont être à 20 % d'aires protégées et même au-delà de ça, puisqu'une partie de la forêt boréale va rester, demeurer ouverte pour l'exploitation forestière.

Le sous contrainte, c'est souvent des projets de parc ou des réserves à l'État. On peut faire l'exploration ou des fois on ne peut plus en faire du tout. On s'entend que, s'il y a un projet de parc qui débarque, je ne pense pas que les gens vont aller vouloir prendre des claims là-dessus. Et il y a aussi la partie des périmètres d'urbanisation qui découle du projet de loi n° 70, où est-ce que tous les périmètres d'urbanisation sont soustraits à l'exploration minière. Donc, notre inquiétude, principalement c'est l'accroissement rapide de ces mesures-là. On a une inquiétude par rapport au territoire du Plan Nord. Parce que vous savez que 20 %, c'est 240 000 kilomètres carrés. Ça fait beaucoup de terrain. Et 50 %, c'est assez majeur. Donc, ce qu'on connaît, c'est que les mines au Québec, à l'heure actuelle, c'est 90 kilomètres carrés. C'est 3/100 de 1 % du territoire. Les claims actifs au Québec sont environ de 4,4 %. Il y a des travaux différents qui se font dessus. Ça fait qu'on trouve que la démarche de vouloir protéger beaucoup de territoire... pas qu'on est contre, mais qu'on puisse avoir le temps, là, de faire des acquisitions de données. On a parlé de l'Abitibi tout à l'heure. Ça fait 100 ans qu'on travaille en Abitibi, et on fait encore des découvertes. Donc, de se priver de territoires et d'exploration... On ne voit pas l'incompatibilité entre faire l'exploration minière et faire des découvertes, les mettre en valeur et la protection de l'environnement à cause du faible impact au sol que nos activités ont.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Mariage (Frank) : En complément de réponse, M. le Président.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, allez-y, M. Mariage.

• (17 heures) •

M. Mariage (Frank) : Vous savez, nous, on n'a pas connaissance d'une juridiction, dans le monde, qui a comme ambition de soustraire 50 % de son territoire à toute activité économique. Si on considère aussi les chiffres que mon collègue vous a donnés, qu'on connaît à peine 15 % du potentiel géologique du Québec, ça fait beaucoup, beaucoup, beaucoup de terrain à explorer.

Encore une fois, l'exploration est le fer de lance de l'industrie. S'il n'y a pas d'exploration, il n'y a pas de mine, un potentiel de création de richesse énorme pour les Québécois et les Québécoises. Alors, c'est sûr que, pour nous, c'est inquiétant, parce que ce qu'il faut, c'est stimuler l'exploration pour pouvoir évidemment permettre la création de nouvelles mines sur notre territoire, qui, à l'heure actuelle, comme le soulignait mon collègue, n'occupe que 90 kilomètres carrés du territoire. Pourtant, aussi, c'est une industrie, l'industrie minière, qui contribue à hauteur de 7, 8 milliards au PIB du Québec. Alors, c'est une industrie qui est très importante mais qui occupe quand même une petite parcelle du territoire.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Mariage. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui. Puis, dans ce contexte-là, j'imagine que vous avez hâte, comme bien des Québécois, de voir le règlement sur... enfin, la possibilité pour les MRC d'exclure certains territoires à l'exploration et l'exploitation. J'imagine que le gouvernement, un jour, va nous rendre public ce règlement.

J'aurais aimé vous parler aussi de l'état... d'après vous, là, parce que vous vous y connaissez bien, en tout cas beaucoup mieux que moi, l'état de ce qu'on pourrait appeler le pipeline de projet d'exploration puis... Vous expliquez très bien dans votre document, là, que ça prend du temps. Ça peut prendre 10 ans, puis qu'un projet sur... je ne sais pas c'est quoi, la fraction, là, mais mettons un sur 150 à un sur 1 000 projets qui est démarré éventuellement va devenir une mine exploitable commercialement. Bien sûr, ce que ça veut dire, c'est que, quand ça prend 10 ans ou 15 ans avant d'arriver à cette étape-là, c'est que ce qu'on va avoir en 2020 puis en 2025, c'est aujourd'hui que ça se fait. Est-ce qu'on doit comprendre de la situation actuelle, là, puis du trou qu'on observe dans l'exploration qu'on est en train d'hypothéquer l'exploitation minière pour 2020‑2025? Est-ce que c'est des craintes qu'on peut avoir légitimement aujourd'hui?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Mariage.

M. Mariage (Frank) : Merci, M. le Président. Effectivement, on parlait de certaines histoires, à l'heure actuelle, dont les mines sont sur le point d'entrer en production ou ont entré en production récemment. Il y en a une évidemment dans la région de Mistassini puis une dans le Nord, dans le projet Éléonore qui résultent de découvertes d'il y a environ une quinzaine d'années.

On dit que maintenant un projet, en moyenne, prend maintenant près de 20 ans, à partir de la découverte. 20 ans, c'est aussi en raison de la réglementation lourde qui pousse, et qui pousse, et qui pousse les délais d'approbation environnementaux, etc. Les statistiques, malheureusement, sont catastrophiques. Pour cette année, on parle... il faut reculer essentiellement presque 10 ans en arrière pour voir les niveaux d'investissement aussi bas dans l'exploration, 10 ans en arrière. On parlait tantôt... la dernière découverte significative au niveau de l'or remonte il y a cinq ans. Alors, effectivement, il y a un problème au niveau de l'exploration, nos membres sont en manque de financement, ont besoin d'aide. Il faut stimuler l'exploration, effectivement. Il n'y a pas de découverte en raison de la baisse des investissements. Et le poids du Québec au niveau des investissements au Canada a significativement reculé. L'année où nous étions les premiers au niveau du palmarès de l'Institut Fraser, on était à peu près à 20 % des investissements totaux au Canada, et, la dernière année complète où on a des statistiques confirmées, c'est-à-dire 2013, on a baissé de 6 % de notre poids relatif au niveau des investissements au Canada. C'est significatif.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. 30 secondes.

M. Marceau : Bien, écoutez, est-ce que vous croyez que le retard qu'on a pris, peut-être, est rattrapable? Parce que, si on veut, en 2030, être en train d'exploiter des mines, est-ce que vous croyez qu'un coup donné maintenant, par exemple, par un rétablissement des crédits d'impôt pourrait changer la donne? Est-ce que vous croyez qu'il y a moyen d'y parvenir?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : Merci, M. le Président. Vous savez, l'exploration minière, c'est une industrie de défis, donc nous, on demande des outils. Donnez les outils à nos présidents de PME pour qu'ils aillent vendent le Québec, et qu'ils lèvent des fonds, et qu'ils ramènent de l'argent au Québec, et qu'ils investissent dans l'exploration minière pour qu'on puisse rattraper ce retard-là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci beaucoup. Merci. Nous allons maintenant passer — merci, M. le député de Rousseau — au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Granby.

M. Bonnardel : ...M. le Président. Merci d'être là, chers amis. J'espère que le gouvernement et que le ministre des Finances ont bien, bien écouté la situation minière, cette incertitude qui a été créée depuis 2012, a bien écouté le fait que les investissements en exploration pour 2014 vont atteindre un plancher record, qu'en termes de mètres forés on va être encore en bas des pires années qu'on a pu connaître en 2004‑2005. Il y va de notre économie, surtout des grandes régions du Nord qui ont vu des explorateurs arriver, développer la ressource, l'exploiter par la suite.

Et j'ai une question fort simple. Au-delà de rétablir certains crédits d'impôt qui pourraient vous satisfaire, vous dites à la page 12 : «L'association demeure par contre inquiète de ne pas trouver de nouvelles mesures incitatives...» N'élaborez pas pendant cinq minutes, donnez-moi-z-en deux, trois pour que le ministre soit bien au fait, peut-être comprendre, au-delà d'un retour de certains crédits d'impôt.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : Bien, rapidement. Évidemment, la modulation des crédits comme on a parlé tout à l'heure, l'introduction de nouveaux crédits pour des secteurs particuliers. La réglementation, les orientations gouvernementales ne sont toujours pas disponibles sur les territoires compatibles. Il y a plusieurs éléments qui pourraient être faits, comme j'ai mentionné tout à l'heure, mais vraiment, à court terme, on a des attentes particulières au budget, on souhaite qu'il y ait des mesures pour pouvoir relancer... que nos présidents de PME aient des outils pour pouvoir aller sur les marchés extérieurs.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Chauveau.

M. Deltell : Merci, M. le Président. Messieurs, madame... toujours les bienvenus ici, à l'Assemblée nationale. Je suis bien content de vous voir, mais je suis très attristé de votre propos. Je pense que, comme l'a dit le collègue de Granby tout à l'heure, le gouvernement doit prendre acte de la réalité actuelle du développement du potentiel minier au Québec. Plusieurs Québécois souhaitaient qu'avec l'arrivée du gouvernement qui a initié le Plan Nord... on s'attendait à ce que ça allait donner un boom, puis une confiance, puis tout ça. Force est d'admettre, M. le Président, que c'est exactement le contraire ou, à tout le moins, on n'a pas beaucoup avancé.

Dans le mémoire déposé par l'association, M. le Président, j'attire votre attention sur le point suivant : 3.1.15 : «L'industrie s'est retrouvée au cours des dernières années régulièrement aux prises avec un ministère qui a travaillé davantage en opposition avec "sa clientèle" en mettant de l'avant des politiques et règlements qui ont défavorisé son développement.» Avec des amis de même, on n'a pas besoin d'ennemis, là. Alors, M. le Président, j'aimerais que nos gens de l'association qui sont présents ici nous expliquent un peu quelles sont les difficultés, comment des gens de l'industrie qui doivent s'attendre à avoir quand même des amis de l'autre bord de la rue, là, des gens au gouvernement... comment les gens de l'industrie font pour travailler avec une clientèle qui... avec un gouvernement, un ministère qui est en opposition avec lui-même.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Mariage.

M. Mariage (Frank) : C'est un constat qui est malheureux, M. le Président. Les relations entre le milieu et son ministère ont déjà été meilleures. Ce n'est certainement pas ce que nous souhaitons. Nous sommes toujours prêts à collaborer avec les gens de notre ministère pour améliorer les relations et travailler avec eux. Je suis obligé de vous dire que, quand on pose la question suivante, très simple, à nos membres : Avez-vous l'impression que le ministère travaille pour vous?, la réponse est non, malheureusement.

Et ça se reflète aussi dans le climat législatif et réglementaire des dernières années, alors les tentatives de réforme auxquelles nous, nous avons participé, la plupart du temps, pour nous objecter à beaucoup de règles qui étaient proposées et qui laissent, malheureusement, un goût amer, là, au niveau de nos relations avec notre ministère. Par contre, un autre constat : ce n'est pas quelque chose qui se retrouve dans nos relations avec les autres ministères et les autres organismes du gouvernement. Les relations sont harmonieuses, et il y a un esprit de collaboration. Et je suis obligé de vous dire que cet esprit-là, à ce jour, n'existe pas avec notre ministère. Alors, on est prêts à collaborer pour changer la situation, on est confiants que ça va arriver, et, malheureusement, le constat est ce qu'il est en ce moment.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Chauveau.

M. Deltell : M. le Président, je tiens à vous rappeler que nous sommes en janvier 2015, on n'est pas en janvier 2014 ou en septembre 2013, à l'époque où le gouvernement du Parti québécois était au pouvoir, avec une ministre qui n'était pas nécessairement une amie naturelle du monde de l'industrie des mines. Voilà des gens qui sont derrière la naissance du Plan Nord et qui aujourd'hui tiennent un propos extrêmement rude à l'endroit du gouvernement actuel. Je sais que le ministre des Finances est attentif aux propos qui ont été tenus — je l'en remercie et je le salue — et je sais qu'il sera porteur de ce point de vue là à ses collègues ministres pour qu'enfin la situation se rétablisse.

M. le Président, ma question à nos invités : Est-ce que, d'après vous, ce message-là se rend au Conseil des ministres?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Mariage.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Poirier.

M. Poirier (Alain) : Je pense qu'on n'a pas l'occasion de s'y rendre pour participer à ces discussions-là. Nous, on fait notre travail, on rencontre des gens, les ministères des Finances, de l'Économie, les gens des ministères des Ressources naturelles, des Affaires autochtones. C'est tous des ministères avec lesquels on travaille. Il y a beaucoup de choses, il y a beaucoup d'éléments sur la table qui auraient probablement dû être réglés plus rapidement, qui nous auraient donné un coup de main.

On espère que les choses vont débloquer. Évidemment, ce n'est pas nécessairement toujours des grandes affaires qui sont importantes, mais c'est le message que le gouvernement doit envoyer : qu'il a une préoccupation par rapport à la situation de l'exploitation minière, et on va l'adresser et on va poser des gestes en conséquence.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Chauveau.

M. Deltell : M. le Président, parmi les choses essentielles à réaliser, c'est le cadre réglementaire. Je vous rappelle qu'il y a 14 mois l'Assemblée nationale a voté à l'unanimité... enfin, je présume que Québec solidaire a voté peut-être contre, mais enfin que les trois partis principaux à l'Assemblée nationale s'étaient donné la main pour adopter une loi, puis, 14 mois plus tard, on n'a toujours pas les règlements.

M. le Président, ma question à nos invités : Comment ça se vit pour l'industrie, le fait qu'on n'ait toujours pas de règlement, 14 mois après l'adoption d'une loi?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Qui répond? M. Mariage?

M. Mariage (Frank) : J'y réponds. Comme j'ai exprimé plus tôt, il aurait été souhaitable que le règlement soit déposé plus tôt. Ce qu'on nous dit, c'est que ça s'en vient. Ça fait plusieurs mois qu'on nous dit le même message. Je vous rappelle aussi qu'il y a beaucoup de dispositions de la loi telle qu'amendée en décembre qui dépendent de la mise en place du règlement. On en a parlé tantôt aussi, la politique sur la consultation au niveau des Premières Nations.

Alors, comment ça se vit? Ça contribue à faire prolonger un climat d'incertitude qui, de notre côté, dure depuis trop longtemps. Il est temps qu'on arrête de réglementer et qu'on permette à nos membres de travailler et de faire ce qu'ils font de mieux, c'est-à-dire de l'exploration pour trouver les prochaines mines du Québec. Je n'ai pas souvenir d'une industrie qui a fait l'objet d'autant de réformes législatives et réglementaires que l'industrie minière au cours des dernières années, et vous le savez, le poids que notre industrie occupe au sein de l'industrie, et l'importance qu'a joué l'industrie minière pour le développement du Québec et la création de la richesse.

Alors, nous, ce qu'on souhaite, c'est que ce règlement d'application, la politique de la consultation... les Premières Nations, soit déposés. Sur ce point, je vous rappelle que l'industrie minière est le plus important employeur des communautés autochtones à travers le Canada, nous avons au-dessus de 100 ententes de conclues avec ces Premières Nations. Alors, on fait notre part et là on demande au gouvernement de créer un climat plus certain pour nous laisser travailler et faire ce que nous faisons de mieux, c'est-à-dire découvrir les prochaines mines du Québec.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Chauveau, 1 min 30 s.

M. Deltell : Combien?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : 1 min 30 s.

M. Deltell : 1 min 30 s. Bien, alors, M. le Président, je répète, et je sais que le ministre des Finances est un homme sérieux et rigoureux et je sais qu'il va porter... et je le souhaite sincèrement, qu'il va porter ce message-là au Conseil des ministres directement, je crois qu'au-delà des démarches qui doivent être faites auprès du ministre titulaire des Ressources naturelles ce message doit aller au plus haut niveau, à la table décisionnelle, là où le premier ministre siège, là où les ministres importants sont là, là où les décisions sur l'avenir de notre nation se prennent. On ne peut pas laisser ternir cette situation-là, on ne peut laisser perdurer cette situation-là.

Et je vous rappelle, M. le Président, que le gouvernement... c'est ce gouvernement-là, c'est ce parti-là qui a mis au monde le Plan Nord, qui a mis au monde ce projet de développer notre plein potentiel. C'est beau, les phrases, mais il faut de l'action, il faut agir. On peut porter ombrage, on peut porter critique sur l'ancienne administration. La population les a jugés aussi. Actuellement, les gens ont voté pour que le gouvernement prenne en main le développement économique. C'était le fer de lance du propos. On peut revenir sur le fait qu'on avait prévu 250 000 emplois puis que le résultat, c'est moins 18 000, mais la réalité, M. le Président, c'est que, s'il y a un point sur lequel le gouvernement doit mettre l'emphase, c'est le développement du Nord, le développement de notre potentiel des ressources naturelles. L'industrie vient de dire de façon très claire et non équivoque que ça n'a strictement rien changé depuis neuf mois. Il est temps d'agir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. le député de Chauveau, mais je veux juste vous rappeler sans faire de partisanerie que, dans une autre commission, il y a eu l'adoption d'un projet de loi en ce qui regarde le Plan Nord, qui a été fait cet automne. Je veux simplement apporter ces faits-là au niveau de la population.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Non, vous ne pouvez pas répondre, c'est moi qui ai la réponse finale.

Donc, merci beaucoup de votre participation. Donc, je vais suspendre quelques instants ces travaux.

(Suspension de la séance à 17 h 14)

(Reprise à 17 h 17)

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux. Avant de poursuivre, je demanderais le consentement des membres de la commission pour poursuivre nos travaux d'au-delà de 18 heures... de quelques minutes, pour faciliter l'audition de nos amis de l'Association des professionnels en construction et habitation du Québec. Bienvenue à vous tous. Bienvenue à M. Tremblay, M. Simard, M. Beauchamp, M. Bernier. Donc, la parole, je crois, est à M. Tremblay. Donc, M. Tremblay, vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Allez-y.

Association des professionnels de la construction
et de l'habitation du Québec (APCHQ)

M. Tremblay (Sylvain) : M. le Président, bonjour. M. le ministre, messieurs, mesdames, parlementaires. Mon nom est Sylvain Tremblay, je suis entrepreneur en construction ici, dans la région de Québec, professionnel en habitation. Je suis aussi président de l'APCHQ, donc, ça, c'est une job à temps partiel pour moi. J'ai des collaborateurs avec moi aujourd'hui que je vais vous présenter : à ma gauche, François Bernier, qui est directeur du Service économique et d'affaires publiques à l'APCHQ; à ma droite, M. François-William Simard, qui est directeur des communications à l'APCHQ; et enfin Me Michel Beauchamp, qui est un avocat-consultant pour l'APCHQ.

Donc, les gens avec moi ont travaillé fort pour vous préparer le mémoire qu'on vous a déposé, donc. Ils sont beaucoup plus connaissants que moi, donc, pour cette raison, je vais leur céder la parole.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : ...minimiser nos connaissances, M. Tremblay. Oui, M. Simard.

M. Simard (François-William) : Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre des Finances et Mmes, MM. les parlementaires, merci de nous permettre d'être présents parmi vous cet après-midi, parce que le projet de loi n° 28... et je vais parler spécifiquement des dispositions qui concernent l'attestation de Revenu Québec, ces dispositions-là sont très importantes pour nos membres, parce qu'on pense que ça va avoir un impact significatif dans le quotidien de nos entreprises, qui sont évidemment dans le secteur résidentiel, dans l'industrie de la construction.

D'entrée de jeu, M. le Président, il nous apparaît important de mentionner que l'APCHQ souscrit entièrement et sans nuance à l'objectif du gouvernement de barrer la route aux entrepreneurs malhonnêtes, que ce soit dans l'industrie de la construction ou dans tout autre secteur. Heureusement, les entrepreneurs qui ne respectent pas les lois dans l'industrie de la construction constituent l'exception et non la règle. Il n'est donc pas question pour nous aujourd'hui de proposer des modifications qui viendraient compromettre cet objectif.

Cela dit, nous pensons que les dispositions qui touchent l'attestation de Revenu Québec doivent être améliorées. Dans leur forme actuelle, elles augmentent grandement le fardeau administratif des entreprises du... du secteur de la construction, pardon, et posent de réels problèmes d'application. Rappelons-nous que l'industrie de la construction est composée, en très forte majorité, d'entreprises de cinq employés et moins, et cela est encore plus vrai pour les entreprises du secteur résidentiel. Pourquoi je fais cette précision, M. le Président? Parce que cela signifie que la plupart des entreprises de notre secteur sont très peu organisées administrativement parlant. Pour illustrer cette dynamique, on dit souvent que plusieurs entrepreneurs en construction ont leur bureau dans leur camion ou dans leur sous-sol.

• (17 h 20) •

C'est donc dire que le gouvernement doit tout faire pour que le projet d'attestation soit le plus simple et le plus convivial possible. C'est dans cette optique que nous vous faisons plusieurs recommandations aujourd'hui.

La première, M. le Président, consiste à s'assurer qu'on limite l'augmentation du fardeau administratif des entreprises. Nous devons nous souvenir qu'il y a quelques années un groupe de travail sur la simplification réglementaire et administrative avait notamment recommandé au gouvernement de contenir le fardeau administratif et de réduire de 20 % le coût des formalités administratives pour les entreprises. Le gouvernement a ensuite adopté la Politique gouvernementale sur l'allégement réglementaire et administratif, qui prévoit que tout projet visé par la politique doit être accompagné d'une analyse d'impact réglementaire et que celle-ci doit être rendue publique. Or, malgré des recherches et des demandes répétées lors des rencontres du comité consultatif de l'attestation, aucune analyse d'impact ne semble avoir... été réalisée, pardon, ou, à tout le moins, rendue publique. C'est pourquoi, M. le Président, nous recommandons au gouvernement d'effectuer une étude d'impact économique avant que le projet d'attestation soit mis en oeuvre. Une telle étude permettrait non seulement de considérer les ressources humaines impliquées chez Revenu Québec, mais aussi l'ensemble des heures-personnes consacrées à la collecte, à la vérification et au classement de l'attestation. On devrait également évaluer l'impact sur les entreprises, car on a trop souvent résumé, dans les discussions qu'on a eues, l'attestation à un geste d'une quinzaine de secondes, alors que, selon nous, il s'agit d'un geste beaucoup plus complexe. Finalement, l'étude devrait documenter les coûts d'un ou de plusieurs scénarios alternatifs, dont des interventions ciblées de la part de Revenu Québec.

Un autre aspect que nous voulons aborder est celui du montant de la franchise et de la fréquence de son renouvellement. Alors que le budget 2014‑2015 du gouvernement du Québec prévoyait que l'attestation allait viser les contrats, entre deux entreprises, qui totalisent plus de 25 000 $ annuellement, la lecture du projet de loi nous amène plutôt à conclure que le gouvernement cherche à couvrir tous les contrats et toutes les relations d'affaires entre entrepreneurs en faisant de la franchise de 25 000 $ une sorte de franchise à vie. Pourquoi parlons-nous de franchise à vie? Parce que, selon ce qui est prévu, il n'est pas question de repartir le compteur à zéro au bout d'une année ou d'un trimestre. Au contraire, que vous transigiez avec un entrepreneur pour 25 000 $ en l'espace de six mois ou en l'espace de 10 ans n'a pas d'importance, puisque vous deviendrez... assujetti, pardon, à l'obligation de fournir une attestation. Dans ce contexte, ne vaut-il pas mieux réclamer immédiatement et systématiquement l'attestation pour être certain de ne pas être, un jour, en défaut? N'oublions pas que 25 000 $ est un montant qui est rapidement atteint dans l'industrie de la construction.

Par ailleurs, nous sommes d'avis que le processus serait passablement allégé si le renouvellement de l'attestation devait être effectué sur une base annuelle plutôt trimestrielle. Cette fréquence aurait l'avantage d'être moins lourde administrativement pour les entrepreneurs et elle ne changerait rien à la bataille que mène le gouvernement contre les entrepreneurs qui ne respectent pas les lois, puisque de toute façon la très forte majorité des entrepreneurs sont honnêtes. Ainsi, le renouvellement sur une base trimestrielle ne devrait être envisagé que dans des cas d'exception que le gouvernement souhaite suivre de près. M. le Président, nous recommandons donc au gouvernement que la franchise soit annuelle et que le montant total des contrats qui nécessiteraient l'obtention d'une attestation soit déterminé par l'étude d'impact que nous avons proposée — ce montant pourrait d'ailleurs être supérieur à 25 000 $ — tout ça parce que l'essentiel devrait être de s'assurer qu'on cible les relations contractuelles de taille importante.

M. le Président, nous tenons également, cet après-midi, à faire une proposition pour permettre de réhabiliter les entreprises qui auraient pu avoir un manquement administratif. À notre avis, cela devrait être un objectif prioritaire de l'attestation. Pour le moment, nous constatons l'absence d'un tel objectif et nous avons plutôt l'impression que l'attestation servira à donner des pénalités sans égard à la gravité de la faute qui aura été commise. Il faut savoir ici qu'une entreprise ne pourrait avoir que quelques heures ou jours de retard sur la remise de ses taxes à Revenu Québec et qu'elle perdrait automatiquement son attestation, ce qui lui empêchera... empêcherait, pardon, d'obtenir de nouveaux contrats. En l'absence de revenus, une entreprise risque de ne tout simplement pas être en mesure de corriger la situation. Les entrepreneurs ne seront pas non plus à l'abri d'une erreur commise par Revenu Québec, qui leur ferait perdre leur attestation. M. le Président, c'est pour cette raison que nous recommandons la mise en place d'une attestation restreinte — d'une durée limitée — à une entreprise qui éprouverait une difficulté à renouveler son attestation. Nous souhaitons être bien compris sur ce point : il n'est pas question de laisser un passe-droit à une entreprise qui aurait délibérément commis une faute ou qui aurait eu un comportement répréhensible à de nombreuses reprises, nous souhaitons plutôt que le gouvernement fasse la distinction entre une entreprise récalcitrante et celle qui commet, sans aucune mauvaise intention, une faute mineure ou occasionnelle en raison soit d'un accident de parcours, de difficultés temporaires ou d'une mésentente administrative. À notre avis, l'attestation trouvera toute sa justification si elle sert à permettre à un maximum d'entrepreneurs de respecter leurs obligations plutôt que de... d'éliminer, pardon, tous ceux qui peuvent avoir un manquement sans égard à la gravité de celui-ci.

Une autre façon d'accroître les chances de succès du projet d'attestation est d'en informatiser sa gestion, et ce, dès sa mise en place. Un entrepreneur, un comptable ou un autre tiers pourrait ainsi obtenir directement de Revenu Québec, sur procuration, la validation et le renouvellement de l'attestation d'un sous-traitant tout en conservant les traces électroniques. En somme... en somme, pardon, en permettant, plusieurs vérifications à la fois et en générant des données fiables dans le cadre des vérifications, le système informatisé serait à l'avantage de toutes les parties. Nous avons soumis une proposition complète à Revenu Québec à cet effet, et il nous fera plaisir de la partager avec vous.

Le dernier élément que nous souhaitons aborder dans notre présentation est celui de la validité de l'attestation. Selon notre compréhension des articles 1079.8.17 à 1079.8.19 introduits à la Loi sur les impôts, si un entrepreneur remet son attestation au moment requis par ces articles, elle vaudra pour tout le contrat, qu'elle soit valide au moment où elle est fournie. L'attestation n'aura donc, à aucun moment au cours de l'exécution des travaux en découlant, à être renouvelée, et aucune nouvelle attestation n'aura à être remise, autre que l'attestation initiale. Nous souhaiterions que le gouvernement nous confirme cette interprétation.

En terminant, M. le Président, vous comprendrez qu'en 10 minutes il a fallu nous limiter à l'essentiel. Notre mémoire contient plusieurs autres recommandations qui, je pense, méritent d'être étudiées, donc nous serons évidemment disponibles pour répondre à toutes les questions qui s'y rattachent. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Simard. M. le ministre, la parole à vous.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour aussi de vous souhaiter la bienvenue, MM. Tremblay, Simard, Beauchamp et Bernier. Bienvenue. C'est en effet un sujet qui peut sembler des fois un peu aride, les lois fiscales, mais dans ce cas-ci c'est particulièrement important parce que nous visons à minimiser l'évasion fiscale au maximum non seulement dans un souci évidemment de nous assurer que tous les taxes et impôts sont perçus comme il se faut, mais aussi pour une question d'équité, que tout le monde suive les mêmes règles. Donc, ça, je pense qu'il n'y a pas d'enjeu, tout le monde est d'accord sur ces choses-là.

Peut-être une petite chose qui... c'est un peu malheureux, les calendriers des consultations sont comme ça, mais vous avez parlé d'une analyse d'impact réglementaire, et en effet Revenu Québec est en train de faire ça, non seulement est en train de faire ça, elle a déjà fait ça, et ça va être rendu public demain. Moi, je ne l'ai pas vue non plus. Donc, demain, ça va être rendu public. Alors, ça aurait été souhaitable qu'on se parle demain ou après-demain, mais voilà, les calendriers sont faits comme ça.

Une voix : ...

M. Leitão : À suivre. Mais, pour répondre à votre questionnement précis : oui, une analyse d'impact a été demandée et, oui, cette analyse va être rendue publique demain, donc on verra bien demain où nous nous sommes rendus.

Maintenant, avant d'arriver à la question, peut-être une précision que j'aimerais apporter quand on parle d'évasion fiscale : Revenu Québec estime que, dans le secteur de la construction, défini de façon large, dans toute la construction, les montants en question se situent aux alentours de 1,5 milliard de dollars. Donc, ce n'est pas insignifiant, c'est même très significatif. Donc, c'est pour ça que c'est très important qu'on s'assure que tout le monde suit les mêmes règles. Je comprends votre préoccupation, pas la lourdeur administrative, et on ne veut certainement pas rendre ça plus complexe. J'ai aussi très bien compris ce que vous avez mentionné sur le fait que, plusieurs entrepreneurs, des PME surtout, bon, leurs bureaux, c'est leurs camions. Et ça ne sera pas toujours un plaisir de se conformer à toutes les règles, donc on va essayer de rendre ça le plus simple possible.

Et, comme on avait parlé avec les groupes qui étaient là avant vous, nous sommes quand même au XXIe siècle, donc le recours à l'informatique pour accélérer et simplifier le processus, évidemment c'est souhaitable.

Maintenant, ma question, c'est un peu de nature générale : Si on revient à l'évasion fiscale et au travail au noir dans votre industrie, quel est, selon vous, le défi principal auquel nous, gouvernement, faisons face pour essayer de minimiser ça, sans pour autant, évidemment, complexifier tellement le travail des entrepreneurs que l'industrie s'arrête? Donc, comment vous voyez cet effort de...

• (17 h 30) •

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.

M. Simard (François-William) : ...peut-être laisser la parole à mes collègues, mais, juste avant, je vais peut-être faire simplement quelques...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, M. Simard.

M. Simard (François-William) : Excusez-moi, M. le Président. Peut-être simplement faire quelques remarques, là, sur ce qui vient d'être mentionné. La première chose, l'analyse d'impact réglementaire, c'est une très bonne nouvelle. Évidemment, vous devinez qu'on va être très attentifs demain. On a hâte de voir les constats qui sont partagés dans cette étude-là, parce que c'est quelque chose... on arrive aujourd'hui avec cette demande-là, mais c'est une demande... moi, j'ai un passé, là, j'étais à la Fédération des chambres de commerce avant et je travaillais sur ce dossier-là, et c'est une demande qu'on a faite depuis environ un an. C'est en janvier 2014, je pense, qu'on a fait la première fois cette demande-là. Donc, tant mieux, on va l'avoir demain, mais je sais qu'on aurait pu l'avoir quand même dans les mois qui précédaient, là, parce que semble-t-il qu'il y avait déjà une étude d'impact qui avait été faite. Mais c'est une très bonne nouvelle, donc on en est très heureux.

Sur la question de l'évasion fiscale, 1,5 milliard, vous avez tout à fait raison, selon les analyses qui sont faites, ce n'est pas insignifiant comme montant et c'est pour ça, nous, aujourd'hui... on a eu beaucoup de discussions dans la dernière année avec Revenu Québec et on est venus vous dire : On n'est pas en désaccord avec le fait qu'il y a une attestation, par contre il y a probablement place à de l'amélioration. Et, dans les choses qu'on a proposées... Parce que vous avez dit : On ne veut pas rendre ça plus complexe. Tant mieux. La meilleure façon, je pense, en partant, de pouvoir dire : On va simplifier tout ça puis on va quand même pouvoir atteindre notre objectif, nous, en tant que gouvernement, c'est de dire : Plutôt que ce soit trimestriel, qui est quelque chose de quand même très lourd à la fin, pourquoi que ce n'est pas annuel comme la plupart des autres vérifications qui sont faites? Et on pense que, de cette façon-là, le système serait beaucoup plus approprié et qu'il y aurait probablement moins de difficultés à l'implantation également de ce système-là.

Pour répondre à votre question spécifique, je ne sais pas si...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Tremblay? M. Bernier.

M. Bernier (François) : En fait, vous posez la question du défi qu'on a à remplir. Le défi, c'est d'éviter, au fond, une espèce de solution mur à mur qui semble être proposée présentement, d'essayer de cibler les choses un peu plus : annualiser un système, c'est une première étape; respecter le fait qu'il y a certaines balises minimums qu'il mérite de s'intéresser. Quand on avait le 25 000 $ comme repère, bien c'était un repère annuel, quand même c'était un chiffre. On souhaite que l'étude d'impact nous renseigne d'ailleurs sur justement où est-ce qu'est le bon niveau de... ou à partir de quel point on devrait commencer à s'intéresser à des relations d'affaires d'une taille significative pour justifier autant d'efforts, là. 25 000 $, ultimement, là, c'est 2 500 $ de TVQ pour un an.

Bon. Donc, il y a à considérer : Est-ce qu'on doit vraiment soumettre l'ensemble des joueurs de l'industrie de la construction à un système de contrôle quand même relativement complet et élaboré pour suivre les montants quand c'est de cet ordre-là? Et justement c'est, quand on réfléchit à ce système-là puis qu'on l'imagine... bien, s'il est justifié, au fond, pour aller chercher des montants comme ça dans l'industrie de la construction, bien pourquoi ne pas le mettre à l'ensemble des secteurs de l'économie? Ils n'ont pas plus le droit que nous autres de payer en retard leurs taxes, là. Et là on commence à imaginer : Mais voyons! C'est beaucoup trop, c'est beaucoup trop sévère, c'est beaucoup trop étendu, c'est beaucoup trop mur à mur.

Donc, le défi, c'est celui de cibler, peut-être en s'intéressant, d'abord et avant tout, à ces entreprises qui présentent un risque, comme les entreprises naissantes, comme des entreprises qui auraient justement eu des difficultés avec les attestations, et là de les suivre d'un peu plus près avec des attestations restreintes, comme on le suggère. Donc, c'est de gérer plus l'exception et d'arrêter de faire des systèmes mur à mur qui nous vient à l'esprit en tout cas comme approche, comme le grand défi, parce qu'il est trop simple de pénaliser toute la classe pour les deux enfants à troubles.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. Tremblay, oui.

M. Tremblay (Sylvain) : Bien, peut-être juste mentionner, M. le ministre, que, dans une habitation, une maison standard, il y a environ 24 sous-traitants. C'est une moyenne que j'ai sortie dans mon entreprise hier. Donc, sortir les attestations, chez nous, on le fait une fois par année. L'année dernière, on en a émis 102. Donc, 102, ça a pris environ deux à trois heures à mon staff de comptabilité pour préparer les attestations. Ça fait qu'imaginez, si on nous demande les mêmes choses pour chaque contrat, pour chaque habitation, pour chaque maison, ça va être d'une lourdeur administrative pour les entreprises qui va être très grande. Chez nous, j'ai le privilège de faire plus de volume, donc j'ai du monde à temps plein qui s'occupe de l'administration, sauf que la majorité des entreprises au Québec, c'est six employés et moins, donc c'est des gens que François-William, tout à l'heure, nous expliquait... Donc, il faut faire attention, là, de ne pas rendre ça trop administratif pour nos entreprises.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Tremblay. M. le ministre.

M. Leitão : Je vous entends, je prends note. Peut-être, mes collègues ont des...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Bon. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, allez-y.

Mme de Santis : Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue. Merci pour votre mémoire. Merci beaucoup d'être là et d'avoir fait cette présentation.

Vous savez, je viens de terminer une rénovation assez importante chez moi et j'ai dû faire affaire avec plusieurs entrepreneurs. Il n'y en a pas un qui n'avait pas deux prix : un prix avec les taxes, un prix sans taxe, et ces gens savaient même que je suis députée, O.K.? Mes parents ont eu un feu, il a fallu faire des rénovations. Les compagnies d'assurance étaient tout à fait d'accord avec les réclamations, mais elles ont besoin de factures pour justifier le travail. C'était tirer les dents pour avoir les factures.

J'aimerais vous poser la question que beaucoup de gens au Québec se posent : Qu'est-ce qu'on fait pour éliminer ce travail au noir? Parce que, pour moi, si on me demande de ne pas payer les taxes, c'est parce que c'est un travail au noir. Et ça, je crois, c'est un élément important des 1,5 milliard de dollars qui ne sont pas collectés à chaque année.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. Bernier, vous avez une solution?

M. Bernier (François) : Bien, écoutez, il y a quelque chose qui est en place présentement, puis ce sont les crédits d'impôt à la rénovation, et qu'on doit, je pense, de part et d'autre, aux... les deux formations politiques, là, tour à tour, ont eu des bonnes idées d'introduire des crédits de nature différente, mais on les a, et il y a, à travers ça, je pense, un très fort incitatif qui est donné aux gens. Si, malheureusement, l'offre est encore faite, il faut que les gens quand même réalisent qu'il y a un bon incitatif sur la table. Et il y a quelque chose qui est particulièrement intelligent dans ce qui est en place présentement, c'est qu'on laisse la chance aux gens d'accumuler leurs factures pour atteindre le seuil qui va rendre ça admissible aux crédits d'impôt. Ces dispositifs-là, qui sont avec nous présentement, bien imaginez ce que vous décrivez si on ne les avait même pas.

Donc, il y a quand même plusieurs personnes autres qui, justement, bénéficient de ces crédits-là, et ça fait une grande différence. Pour nos entrepreneurs, c'est vraiment une augmentation réelle de volume déclaré de travaux, et c'est net, c'est documenté. Donc, c'est un outil vraiment principal qui est à notre disposition, et justement ça fait partie de tout le cadre fiscal. Le fait qu'on décide de le laisser aller, de le laisser partir, bien il faut se demander comment on sera mieux équipés demain matin pour lutter contre le travail au noir. Pour nous, c'est vraiment déterminant dans la lutte présentement, la présence de ces crédits-là au domaine de la rénovation.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Bernier. Mme la députée.

Mme de Santis : Est-ce que vous avez d'autres solutions à suggérer autres que les crédits d'impôt?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Bernier.

M. Bernier (François) : En relation avec la rénovation?

Mme de Santis : Oui, pour que le travail soit déclaré.

M. Bernier (François) : Bien, écoutez, c'est tellement un outil puissant. La fiscalité, c'est le tout premier outil. Si on veut éviter les taxes, bien il faut lutter avec le feu par le feu. Donc, si on est capables de gérer ça de cette manière-là, je pense qu'on aura déjà fait un très, très grand pan de chemin, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Autre question, Mme la députée?

Mme de Santis : Oui. Je note aux pages 17 et 18 de votre mémoire que vous voulez qu'on remplace la référence aux pénalités par référence à... qu'on commet une infraction et qui est passible d'une amende légale. Est-ce que vous pouvez expliquer pourquoi ce changement en nomenclature est important pour vous?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Beauchamp, peut-être?

• (17 h 40) •

M. Beauchamp (Michel) : Oui, M. le Président, Mme la députée. Alors, effectivement, quand on parle d'une pénalité, notamment quand on parle de la Loi de l'impôt, on parle du défaut par un contribuable de remplir une obligation en lien avec ses revenus ou ses déclarations de revenus. Ici, on parle d'une pénalité qui n'a rien à voir avec les revenus et de l'entrepreneur et du sous-contractant, on parle d'une méthode ou d'une obligation qui vise à s'assurer qu'une personne est conforme au niveau de ses obligations fiscales.

Une pénalité, ça implique, tel que j'ai compris le libellé de la loi, une cotisation. Une cotisation, on est obligé de la payer et on se défend ensuite, à moins qu'il y ait une possibilité d'en suspendre l'exécution en raison d'une opposition. Dans ce cas-ci, la façon dont le tout est articulé, on le fait sous forme non pas d'une pénalité, mais d'une amende, on oblige un entrepreneur à obtenir un document puis on oblige un sous-contractant à le lui fournir, on oblige à faire une vérification quant à la validité et quant à l'authenticité et on détermine que, si on ne fait pas, on ne remplit pas cette obligation, vous serez passible d'une pénalité.

Or, une pénalité, en droit fiscal, est rattachée avec une obligation fiscale. Ici, ce n'est pas une obligation fiscale, c'est une obligation de renseignements — je vais appeler ça comme ça : je dois obtenir une attestation qui me renseigne sur le statut fiscal et là, à ce moment-là, je suis en droit de donner un contrat. Et celui qui veut avoir ce contrat doit me fournir une information qui est une attestation, sur son dossier fiscal non pas dans le détail, mais à l'effet qu'il est conforme, il a rempli ses obligations. Alors, ça n'a rien à voir avec l'impôt, ça n'a rien à voir avec un élément qui est en rapport avec la Loi de l'impôt, avec les revenus, avec la fiscalité, c'est tout simplement une obligation, et généralement, quand il y a un manquement à une obligation de cette nature-là, ça constitue non pas une pénalité, mais ça constitue une infraction. D'ailleurs, les lois, les règlements sur les contrats publics en font des infractions. Alors, c'est une infraction. En plus, il a été... ce n'est pas encore mentionné, mais la façon dont il sera constaté que le sous-contractant ou l'entrepreneur n'aura pas respecté son obligation, c'est par une simple constatation d'un représentant de Revenu Québec qui attestera de la chose. On est vraiment dans le constat d'infraction, c'est exactement le principe du constat d'infraction.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Beauchamp. M. le député de Sainte-Rose, vous aviez une question?

M. Habel : Oui. Merci, M. le Président. Comme le mentionnait la députée de Bourassa-Sauvé, effectivement, malheureusement, il y a des pommes pourries dans le panier, puis je salue votre volonté de vouloir faire une lutte contre l'évasion fiscale puis vous conformer à certaines exigences, parce que ça représente 1,5 milliard. C'est très important. J'avais une question par rapport à votre proposition n° 6, parce que j'ai l'impression que ce n'est pas vraiment le but visé par la mesure, là.

La proposition d'une attestation restreinte, à mon sens, pourrait s'avérer difficile à gérer administrativement pour Revenu Québec, puis j'aimerais que vous rassuriez mon inquiétude afin que ça ne soit pas une certaine voie de contournement pour certaines personnes.

M. Simard (François-William) : Je vais peut-être répondre dans un premier temps et peut-être laisser la parole à mon collègue...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Simard.

M. Simard (François-William) : Merci, encore une fois, M. le Président. Merci. Donc, non, ce n'est pas une façon d'offrir une voie de contournement. Puis, nous, c'est vraiment important, c'est une mesure qui est exceptionnelle, qui est offerte à une entreprise. Puis évidemment Revenu Québec, lorsqu'elle constate une... irrégularité, pardon, dans le dossier d'une entreprise, elle va prendre contact avec eux. Pour nous, c'est une façon de dire : Ce n'est pas noir ou blanc, il peut y avoir également une zone grise. Puis parfois une entreprise, malheureusement, ne respecte pas ses obligations fiscales ou encore il y a un manquement administratif, donc par exemple d'aller vérifier l'attestation. Ça ne veut pas dire qu'elle est nécessairement coupable, ça ne veut pas nécessairement dire également qu'elle est de mauvaise foi. Donc, c'est une façon de dire : On va tenter de faire en sorte que ces entreprises-là puissent retourner sur le droit chemin. Qu'est-ce que ça veut dire au niveau de la période? Ce sera à vous de le déterminer, mais une ARQ restreinte pourrait être d'une période de 30 jours, de 45 jours, donc, pour permettre à Revenu Québec de faire les démarches pour s'assurer que l'entreprise puisse rentrer dans le rang, si je peux dire.

Et, quant à la gestion d'une ARQ restreinte, la Régie du bâtiment également fait une licence restreinte. Donc, il y a des exemples qui sont quand même similaires, sur lesquels Revenu Québec pourrait s'appuyer. Ce n'est pas tout à fait la même gestion, mais c'est quand même similaire.

Peut-être M. Bernier voudrait...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Bernier? Bien, allez-y, M. Bernier.

M. Bernier (François) : Juste pour une précision, là, juste qu'on se comprenne bien, là : l'attestation, si on ne l'a pas, c'est terminé, hein? Donc, c'est un automatisme. À la fin d'une période de déclaration de taxes, notre chèque est attendu à 30 jours, il n'est pas là, on ne le trouve pas, là, c'est terminé, là. Le lendemain matin, on n'a pas d'attestation, on ne peut plus gagner notre vie, on ne peut plus aller chercher un autre contrat. C'est un automatisme.

Alors, la réponse qui était donnée tout à l'heure, de transformer le système de pénalité en système d'amende, c'est de changer de registre, c'est de changer de système là où une amende, ça se conteste, et on a des procédures et des délais. C'est de changer de philosophie, là, c'est d'arrêter d'être dans la punition, puis d'être dans la réhabilitation. Donc, régime d'amende, et, également, oui, O.K., ça ne va pas, pouvons-nous convenir, premièrement, d'aviser les gens qu'il y a quelque chose qui ne va pas bien? Parce que, là, c'est sans avis, là. Deuxièmement, c'est d'accorder un délai pour se réhabiliter. C'est donc un petit peu un changement de philosophie qu'on vient suggérer ici pour dire : Est-ce que les entreprises de construction sont à ce point les ennemies de l'État qu'il faut être, tu sais, tranchant comme ça et, s'il y a quoi que ce soit qui ne va pas, bien c'est la fin des émissions, on ne peut plus...

Alors, on introduit ces suggestions-là dans cet esprit-là, là, de donner une petite chance aux gens de se réhabiliter plutôt que des les exclure de l'industrie. Et d'ailleurs, si on le fait et on le fait bien, bien ils iront offrir leurs services en rénovation au noir, tu sais?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Oui, M. le ministre.

M. Leitão : Très, très rapidement. Juste pour vous assurer que, non, nous ne pensons pas que l'industrie de la construction soit l'ennemie de l'État. Ce n'est pas du tout notre objectif. C'est de minimiser l'évasion fiscale, de s'assurer que tout le monde suit les mêmes règles et, en même temps, s'assurer que cela se fait à l'intérieur d'un système qui n'est pas très lourd de façon administrative. Donc, je prends bien note de ça, mais, en même temps, c'est quelque chose que nous devons faire.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Portneuf, vous aviez une interrogation, une question?

M. Matte (Portneuf) : Merci, M. le Président. Et également je veux vous souhaiter la bienvenue. J'ai été surpris de constater que vous avez mentionné que la majorité de vos membres emploient six employés et moins. Avez-vous fait une étude pourquoi c'est si peu en termes de volume? C'est-u à cause de la grandeur de leur bureau qui se trouve dans le camion? Mais comment expliquer le fait qu'il y a si peu d'employés?

M. Tremblay (Sylvain) : Peut-être que je peux répondre.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.

M. Tremblay (Sylvain) : Merci, M. le Président. Moi, je dirais, c'est la culture de l'habitation au Québec. Donc, dans chaque petit village, dans chaque coin, il s'est développé des entreprises, et ces entreprises-là n'avaient pas de grande envergure parce que le marché de l'habitation est quand même... même si ça a bien été dans les dernières années au Québec, ce n'est quand même pas un marché comme les États-Unis. Donc, moi, ce que je pense, c'est qu'à cause de ce fait-là il s'est créé des petites entreprises. Et un entrepreneur en construction, souvent... Je vais prendre l'exemple d'un menuisier où il va trouver son travail intéressant, il va partir sa petite entreprise. Donc, il va devenir, souvent, un sous-traitant pour un entrepreneur général et à l'occasion, bien, il va prendre des contrats pour construire des maisons. C'est comme ça que je l'expliquerais.

Évidemment, dans les grands centres, il y a des entreprises un peu plus structurées, un peu plus grandes qui se sont développées, mais la majorité de nos membres, c'est six employés et moins. C'est ce qui représente l'industrie de l'habitation, là, au Québec.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Matte (Portneuf) : Il reste combien de temps, monsieur?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Il vous reste environ trois minutes.

M. Matte  (Portneuf) : Bien. Mais vous ne fixez pas, là, de nombre minimal pour pouvoir faire partie de votre association? C'est : dès qu'ils ont leur licence, ils peuvent faire partie, là, de votre association.

M. Tremblay (Sylvain) : Notre... M. le Président?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.

M. Tremblay (Sylvain) : Notre organisation représente 17 000 membres entreprises, et je vous dirais que notre organisation représente environ 75 % de l'habitation qui se construit au Québec, donc on est très représentatifs, là, de l'industrie.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Ça va?

M. Matte (Portneuf) : Oui.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. le député de Rousseau.

• (17 h 50) •

M. Marceau : Merci, M. le Président. Alors, bonjour... ou bonsoir messieurs — on peut dire encore «bonjour» — donc MM. Tremblay, Simard, Beauchamp et Bernier. Merci pour votre mémoire, merci aussi pour votre présentation.

Écoutez, d'emblée, donc, je veux vous dire que je suis allé... à la suite de ma lecture de votre mémoire, je suis retourné voir ce qu'il y avait dans le budget de février 2014 pour voir ce qu'on avait prévu puis effectivement, là, j'ai retrouvé le 25 000 $ que vous avez mentionné, en fait le seuil de 25 000 $ à partir duquel les attestations devenaient exigibles. Maintenant, je peux vous dire que ce n'est pas parce que c'était 25 000 $ dans le budget de février et qu'aujourd'hui l'idée semble avoir disparu... ça ne veut pas dire que ce n'est pas une bonne idée, là, d'aller vers le 25 000 $... enfin, de le retirer comme le gouvernement le fait. Je ne le sais pas à ce stade et puis j'ai hâte, moi aussi, de voir l'étude, l'analyse d'impact, là, qui va être publiée demain. Je trouve que c'est une très bonne nouvelle et à la fois pour vous, pour moi et pour tous les Québécois, qui seront à même de mesurer l'impact que ça pourra avoir, là, sur l'industrie de la construction, parce qu'il faut comprendre que, si ça a des impacts trop importants, c'est l'ensemble des Québécois qui vont payer pour, hein, parce que les coûts de construction vont augmenter. Alors, c'est important, là, qu'on ait une législation adaptée puis qu'elle tienne compte du fardeau administratif que ça vous impose. Donc, je suis parfaitement d'accord avec tout ça.

Alors, tout ça pour dire que, moi, la question de l'attestation, j'y suis favorable, nous y sommes favorables de notre côté évidemment, puis là on est dans le monde des modalités puis de la mise en oeuvre de ces mesures-là. Encore une fois, il y avait le 25 000 $, là, qui est différent aujourd'hui de ce qu'il était en février 2014. Pour le reste, je peux vous dire qu'il y a beaucoup, évidemment, de vos propositions qui sont relativement techniques et je peux vous dire que je vais les porter, vos propositions, c'est-à-dire qu'au moment de l'étude détaillée je prendrai le temps de demander et d'interroger le ministre sur chacune d'entre elles et puis pour voir les raisons pour lesquelles les attestations, ça s'incarne de la manière que ça s'incarne dans le projet de loi présentement, et on verra si les réponses qu'on obtient sont satisfaisantes ou pas. Pour l'instant, il y en a un certain nombre qui ont frappé mes yeux, entre autres celle sur la régularisation, là, l'attestation temporaire, si on veut, et là-dessus, moi, la réflexion que je me faisais, c'est qu'une des fonctions de l'attestation, c'est de faire en sorte que les entreprises qui ne sont pas en mesure de l'obtenir régularisent leur situation en appelant chez Revenu Québec puis en disant : Regardez, là, j'aimerais ça faire des affaires, est-ce qu'il y a moyen de régulariser ma situation? Donc, c'est un des objectifs de l'attestation. Là, évidemment, votre proposition ne permettra pas ça, on se comprend bien, mais j'aimerais ça que vous développiez un peu là-dessus. Mais vous comprenez ce que je dis. Moi, de la façon dont je comprenais les choses, c'est que, parce qu'il y a l'attestation et parce que l'attestation est nécessaire pour qu'on puisse faire des affaires, dans la mesure où quelqu'un n'est pas conforme quant à ses obligations fiscales, bien, évidemment, il va être obligé d'appeler chez Revenu Québec puis dire : Bien là, j'aimerais ça m'arranger avec vous puis trouver une manière de rembourser mes dus.

Comme c'est l'objectif qui est poursuivi par le gouvernement, entre autres, là, j'ai l'impression qu'il va y avoir de la résistance, mais, à moins qu'il y ait une autre interprétation que vous ayez de votre côté, je... Je vous écoute.

Une voix : Bien...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : C'est M. Simard?

M. Simard (François-William) : Oui.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Allez-y.

M. Simard (François-William) : Je vais commencer et je vais laisser mon collègue... la suite.

D'abord, sur la question du budget, peut-être une précision : dans le budget de... c'était juin, je pense, également c'était présent également, le 25 000 $, et à ce moment-là on parlait très spécifiquement d'une franchise annuelle, enfin d'un 25 000 $ annuel. Donc, c'est vraiment annuel, et à partir... Bon, bien, on est en 2015. En 2016, on repart le compteur à zéro, et là... tandis que, quand on lit les dispositions du projet de loi, selon notre compréhension, ce n'est plus le cas. Au contraire. Donc, année après année, après année, ça s'accumule, et à ce titre-là on se dit : Peut-être qu'il serait mieux tout simplement de dire : Bien, parfait, vous allez tous devoir fournir une attestation, parce qu'à quelque part, pour les petits contrats, à un moment donné, on va les atteindre, de toute façon.

Sur la question de régulariser, vous posez une question très pertinente. L'objectif de notre proposition, à quelque part, c'est de dire : Parfait, moi, j'ai mon attestation, ça fait six mois, neuf mois que je l'ai, peu importe, et là ça va un petit peu moins bien, mes affaires, parce que j'ai de la difficulté à me faire payer par des sous-traitants ou par... en fait, des contracteurs généraux, j'ai de la difficulté à me faire payer et, pour x raison, oui, j'arrive avec un retard sur mes taxes. Il n'y a aucune mauvaise foi de ce côté-là, il y a probablement une volonté de prendre entente également avec Revenu Québec, sauf que, comme c'est prévu actuellement, malheureusement, il n'y a pas cette possibilité-là. Tout de suite, la personne... enfin, l'entreprise se fait retirer son ARQ, son attestation de Revenu Québec. Qu'est-ce que ça veut dire, concrètement? L'entreprise n'est plus en mesure de pouvoir soumissionner sur des contrats, de pouvoir obtenir des contrats. Et comment voulez-vous qu'elle régularise sa situation si elle n'est plus en mesure de faire entrer de l'argent dans son entreprise? Donc, il faut absolument qu'elle attende que les comptes qui lui sont dus puissent arriver, mais ça, ça prend un certain temps.

Donc, nous, on veut juste dire... parce que l'impact, là... C'est certain que, si on fait ça de cette façon-là, il y a des entreprises qui ne pourront juste pas survivre, et je ne pense pas que ce soit ça, l'objectif qui est poursuivi par cette législation-là. Je ne sais pas s'il y a des choses...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Bernier.

M. Bernier (François) : Non, c'est très clair et très complet comme réponse. On a un souci, au fond, de... On comprend, là, on ne veut pas que l'entreprise disparaisse, on veut qu'elle continue d'avoir les moyens de régler ses comptes. Et ça nous préoccupe. Puis là on cherche une disposition, on cherche une idée, quelque chose qui accorderait... On s'entend, là, toute la démarche va commencer à être entreprise pour régulariser la situation, mais il ne faut pas lui empêcher de poursuivre ses activités.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : En fait, il va falloir trouver quelque chose qui est différent de l'entente de remboursement classique qui est utilisée présentement. Je ne sais pas qu'est-ce que ça pourrait être, mais, en tout cas, je vous laisse y réfléchir, là. Mais moi, je n'arrive pas à trouver à ce stade-ci, puis peut-être que les gens chez Revenu Québec trouveront, mais la seule chose qu'on peut imaginer, c'est que, pour l'instant en tout cas, quand on veut régulariser, il faut s'entendre, puis, si on ne s'entend pas, bien...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Beauchamp, vous semblez vouloir...

M. Beauchamp (Michel) : ...M. le Président. Merci, M. le ministre. Parce qu'il y a beaucoup de nuances dans ça. Quand vous dites : On ne peut pas s'entendre, et tout ça... Moi, je fais du fiscal, j'ai souvent affaire avec Revenu Québec puis j'ai été pendant un temps avocat au contentieux de Revenu Québec. Alors, il y a beaucoup de nuances à apporter qui ne sont pas dans la loi.

Alors, je peux être en défaut parce qu'un tiers n'a pas fait ce qu'il avait à faire. Il faut comprendre que, dans le domaine de la construction, celui qui fait de la construction, l'entrepreneur, le sous-contractant, s'y connaît, c'est son métier. La comptabilité, les rapports de taxes et tout ce qui concerne la fiscalité, il donne ça à des tiers soit à l'interne ou à l'externe. Et, quand c'est une petite entreprise, c'est à l'externe. Et ils se fient que ces gens-là feront ce qu'ils ont à faire. Malheureusement, ce n'est pas toujours le cas, et il peut se retrouver en défaut pas parce qu'il le veut, pas... il n'en est même pas conscient. Ça peut être sa femme qui fait la comptabilité. Lui, il est occupé avec son travail. Alors, on crée ici une situation où vous dites : Il n'aura qu'à appeler. Vous imaginez la quantité de téléphones que vous allez avoir? Revenu Québec a déjà de la difficulté à suffire avec les demandes qui sont générées par les projets de cotisation puis les cotisations. Si en plus, maintenant, vous avez des entrepreneurs qui, pour un manquement mineur, sont obligés de téléphoner, vous allez avoir des difficultés énormes en termes de capacité de répondre à leurs demandes.

S'entendre avec Revenu Québec, qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire s'entendre avec un fonctionnaire. Je vous invite, M. le Président, M. le ministre, à appeler à Revenu Québec, si vous avez une dette fiscale, et demander à parler à quelqu'un du Centre de perception fiscale. Vous allez tomber sur un genre de centre de services où vous n'avez jamais la même personne qui vous répond puis qui ne vous répond jamais de la même façon.

Alors, oui, ce que vous dites, c'est beau dans un monde idéal, mais dans le monde actuel... Et ce n'est pas faire le procès ou des reproches à Revenu Québec. Et il faut avoir une nuance, parce que ce n'est pas si simple et ce n'est pas aussi évident. Quand j'ai un délinquant fiscal, d'habitude, je comprends, il n'aura pas son attestation, mais vous allez avoir un dossier et vous allez avoir une délinquance à répétition. Quand vous avez quelqu'un qui est en défaut de façon sporadique, ou pour des raisons mineures, ou en raison du défaut d'un tiers de remplir le mandat qu'il lui a donné, là vous allez le punir et vous allez punir tous les gens qui sont autour de lui pour ça. Et c'est pour ça qu'on parle d'attestation restreinte, c'est qu'on donne l'occasion à cette personne-là peut-être de prendre conscience que son comptable ne fait pas son travail, que la personne qu'il a engagée pour s'occuper de ses comptes ou de ses remises de... ne fait pas son travail. On lui donne l'occasion de rectifier la situation, mais on ne le prive pas de contrats. Si on le prive de contrats, bien on va le priver de son gagne-pain, il n'aura pas les moyens de se défendre, il n'aura pas les moyens de se représenter. Vous savez, ils sont obligés de faire appel souvent à des tiers, et ça coûte beaucoup d'argent, et c'est complexe. Et ce n'est pas si évident non plus de trouver quelqu'un qui peut appeler pour vous aider.

Alors, il faut donner la souplesse nécessaire, il faut faire des nuances et il ne faut pas tout mettre dans le même bateau.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. Beauchamp. M. le député de Rousseau.

• (18 heures) •

M. Marceau : O.K. Regardez, on va faire quelque chose rendu à l'étude détaillée. J'annonce déjà au ministre qu'il aura amplement le temps de se préparer, là. Bon, on aura une discussion, si vous le voulez bien, sur cette question-là puis on verra s'il y a des aménagements qui pourraient être apportés puis des solutions au problème que vous évoquez. Moi, je suis sensible à ce que vous dites, là. En fait, pour vous dire les choses clairement, j'ai déjà rencontré des entrepreneurs dans mon bureau, dans mon bureau de député qui me disaient exactement ce que vous racontez là, qui avaient des difficultés avec leurs... Ils avaient des obligations fiscales qu'ils n'étaient pas capables de rencontrer puis ils n'étaient plus capables de gagner leur vie à cause de ça. Parce qu'eux autres, à l'époque, ils devaient vendre, par exemple, un certain nombre de leurs actifs. Ils n'étaient pas capables de continuer à opérer. Alors, je suis bien conscient que ça existe, là. Donc, on posera des questions.

Je vous remercie, là-dessus. Et puis on verra ce que ça donnera le moment venu.

Dernière question, peut-être : la recommandation 11, où vous abordez la question des contrats à exécution sur demande. Donc, si je comprends bien, c'est une situation où un entrepreneur embauche un sous-contractant : Tu vas travailler pour moi à différentes occasions pendant l'année, et puis on va s'entendre au fur et à mesure, je te verserai les paiements au fur et à mesure. Vous, ce que vous suggérez, dans le fond, c'est que, quand on prévoit dépasser le seuil de 25 000 $, alors, qu'on exige une... Là, c'est mon interprétation, parce que je ne suis pas certain d'avoir bien compris, là. Mais mon interprétation de ce que vous dites, c'est que vous suggérez qu'on prévoie que, lorsque l'entrepreneur et le sous-contractant prévoiront, donc, par exemple, que l'ensemble des contrats de l'année dépassera 25 000 $, alors il devra obtenir l'attestation, puis, autrement, pas besoin de l'attestation. Est-ce que ça rend justice à ce que vous pensez?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.

M. Tremblay (Sylvain) : M. le Président, merci de la question. La façon de procéder — je vais parler de mon entreprise parce que c'est quand même représentatif, là, de ce qui se passe dans l'industrie : on essaie de négocier, avec 80 % des sous-traitants, des ententes préalables.

Je vais prendre l'exemple d'un plombier. Donc, je vais rencontrer le plombier au début de l'année, à ce temps-ci, puis on va convenir ensemble de prix unitaire, donc, pour un cottage de tant de pieds carrés, il y a un prix de base à un montant x, et par la suite on va convenir : Bon, O.K., une douche de tel et tel type, une salle d'eau... Et, dans le fond, on s'entend avec lui pour l'ensemble de l'année en cours, donc, évidemment, ça facilite pour nous les opérations, et, pour le plombier, bien il n'a pas à soumissionner 100 contrats, c'est des contrats... donc, il fait déjà un effort pour que ce soit le plus économique possible pour lui. Donc, on envoie au plombier, dans le fond, un bon de commande avec les unités qu'il y a à l'intérieur de son contrat. Et, cette procédure-là, on... 80 % de l'habitation est conçue de cette façon-là : faire en sorte de faciliter les choses. Donc, je ne sais pas si, François, par rapport à l'impact...

M. Marceau : Bien...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Oui, M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Juste pour comprendre le lien avec l'attestation. Donc, vous suggérez que, dans le fond, on fasse le cumul de ça pendant l'année, là, mettons, pour... puis qu'à un moment donné, si on franchit le seuil de 25 000 $ ou si on prévoit ou si vous prévoyez faire... Si c'est 1 000 $ par maison puis vous prévoyez en faire plus que 25, bien, dans ce cas-là, on aurait besoin d'attestation. C'est-u ça que vous dites?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.

M. Tremblay (Sylvain) : Oui. Mais, évidemment, le plombier, quand on le rencontre au début de l'année, on a une prévision de vente, donc, projet par projet. Donc, nos prévisions, quand même, on lui dépose : On prévoit faire 100 unités d'habitation de tel type. Donc, évidemment, ça, on a déjà des prévisions d'unités et un volume à lui proposer.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. Bernier.

M. Bernier (François) : Si je peux me permettre. On jugeait important d'en parler parce que c'est la réalité, mais ce n'est pas écrit nulle part dans le projet de loi, des histoires de gré à gré, là, puis tout ça, ce n'est pas prévu. Il faut le faire, puis on a essayé de trouver une façon de l'amener pour en discuter. C'est très important qu'on puisse vivre là-dedans.

Ça fait qu'on comprend... quand on est pour s'engager dans une relation d'affaires avec quelqu'un, puis ça va se dérouler un peu à mesure que... l'activité économique, et tout ça, bien il faut avoir reçu notre attestation, disons, puis l'avoir vérifiée de la bonne façon dans ce contexte-là, puis pas qu'il y ait de questionnement beaucoup, là, plus tard, quand on va subir l'inspection, pour dire : Bien, voyons! Ce n'est pas clair, votre façon de procéder. Ça fait qu'on essaie de donner un cadre par cette proposition-là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. 30 secondes.

M. Marceau : Bien, vous dites que c'est 80 % des maisons que vous construisez qui se construisent... enfin, 80 % du contenu de la maison qui est construit dans une relation comme celle-là avec...

M. Tremblay (Sylvain) : 80 % des sous-traitants, O.K.?

M. Marceau : De vos sous-traitants. Ah! O.K. Pardon. O.K. Je comprends.

M. Tremblay (Sylvain) : On ne parle pas des matériaux, on parle de ceux qui ont de la main-d'oeuvre à l'intérieur des bâtiments. On a ce type d'entente là.

M. Marceau : ...

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Granby.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs. Je voudrais revenir sur l'ARQ, la recommandation n° 7, l'attestation de Revenu Québec. Premièrement, pour le commun des mortels qui nous écoute, c'est du chinois, l'ARQ, parce qu'ils ne savent pas trop de quoi on parle. Vous pourriez peut-être élaborer une minute puis nous expliquer un peu d'où ça vient, pourquoi ça existe, là.

Mais, «envisager l'émission d'une ARQ restreinte à des entreprises qui éprouvent une difficulté à renouveler leur ARQ», est-ce que vous amenez ce point avec ce que vous disiez tantôt concernant le paiement de taxes, là, qui est dû à chaque mois? Si on arrive en retard, bien là je perds mon ARQ puis là, comme vous disiez, je ne peux pas continuer de travailler, à moins d'attendre le montant d'argent qui m'est dû, puis là de le renouveler. Donc, pouvez-vous élaborer un peu sur cette recommandation en premier lieu puis nous donner un portrait de l'ARQ, là, ça fait quoi pour vos sociétés puis votre industrie?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.

M. Tremblay (Sylvain) : L'ARQ, en début de la semaine, je pensais que c'était l'Association des restaurateurs du Québec...

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Tremblay (Sylvain) : ...donc je suis pas mal à la même place que vous. Mais, peut-être pour vous répondre, c'est que toutes les attestations qui nous sont demandées, lesquelles on doit obtenir, c'est de la lourdeur administrative, et toute cette lourdeur administrative là fait en sorte que les entreprises peuvent ou non se conformer au règlement. Je ne sais pas si, François, tu pourrais élaborer un peu plus, mais moi, je pensais que c'étaient des restaurants, en début de semaine.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Bernier.

M. Bernier (François) : Je pense, vous êtes encore sur le questionnement des attestations restreintes, hein...

M. Bonnardel : Oui.

M. Bernier (François) : ...à quoi ça sert dans la vie, hein? Encore une fois, on essaie d'avancer cette proposition-là, mais il y en a peut-être d'autres. L'idée, c'est pour éviter l'aspect extrêmement catégorique de ce qu'on a vu dans la loi, qui, tout à coup, placerait des gens qui ne sont pas nécessairement des mauvaises personnes mais dans l'impossibilité de renouveler leur ARQ pour toutes de raisons mais aussi dans l'impossibilité de gagner leur vie. Alors, on a pensé que d'introduire cette idée-là d'attestation restreinte donnerait une soupape, un délai, un avertissement, une façon de rectifier la situation sans nuire vraiment... Fondamentalement, je ne pense pas qu'on veuille nuire à l'objectif, parce que l'objectif, c'est que les gens, ils rectifient leur situation puis ils continuent sur le droit chemin. Donc, c'est vraiment ça qu'on a voulu simplement avancer avec ce mécanisme-là, qui est d'inspiration, là, pas bien, bien, bien lointaine, puisqu'on a des licences restreintes aussi, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député de Granby.

M. Bonnardel : Puis vous dites, à la page 18, là, autres recommandations, 9, que «l'exigence d'une attestation de la part de tous les membres de la société nous apparaît déraisonnable» et que, pour vous, une ARQ qui va être adaptée aux deux, trois actionnaires d'une société, ce n'est pas adéquat, là, il faudrait que ... C'est ce je crois comprendre, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Beauchamp.

M. Beauchamp (Michel) : Oui, M. le Président, M. le député. Alors, écoutez, c'est parce que, quand on parle d'une société, on ne parle pas d'une corporation. Ce que j'ai compris, là, de la façon dont la loi est conçue, c'est qu'on parle d'une société civile. Quand on a une société civile, on a des membres de la société. La société constitue, sur le plan juridique, une entité, et les personnes qui la composent, ce ne sont pas comme des actionnaires, ce sont des sociétaires.

Là, on demande à ce qu'on obtienne une attestation de chacune des personnes qui composent la société. Or donc, ça devient un fardeau, parce que, moi, il faut que je sache qui fait partie de la société, mais je n'ai pas affaire à tous les sociétaires, j'ai affaire à une personne qui est un représentant de la société. Et là il faudrait que je sache qui sont les membres de la société, il ne faut surtout pas que je me trompe d'un seul nom, je ne sais pas si c'est à jour au niveau de leurs déclarations, je n'en sais rien. Revenu Québec, elle, a les moyens de le savoir, par contre. Alors, quand la société demande une attestation, bien Revenu Québec est en droit de la refuser si les membres ne sont pas en règle. Mais là on demande à ce que moi, j'aie une attestation pour chacun des membres, alors c'est reporter sur mes épaules une obligation que je ne serai probablement jamais capable de rencontrer ou que je ne rencontrerai pas de façon optimale parce que je n'ai pas l'information qu'il faut. Alors, on va se retrouver avec des pénalités ou des infractions parce que je n'aurai pas obtenu toutes les attestions et on va m'obliger... on alourdit mon fardeau inutilement, parce que ça n'apporte absolument rien. En plus, on pense que tous les membres de la société sont dans le domaine de la construction, ce qui n'est pas nécessairement le cas. Comme, une corporation, je peux être actionnaire d'une corporation et ne rien connaître à la construction, même être administrateur et ne rien y connaître. Alors, on va aller chercher des attestations de gens qui n'ont rien à voir, qui sont simplement... ils ont une participation matérielle ou financière, et on va leur demander une attestation à l'effet qu'ils sont conformes avec Revenu Québec pour tout ce qui est leur revenu. Ils peuvent des hommes d'affaires, ils peuvent être des employés. Ça devient une aberration.

En conséquence, la société... oui, c'est correct, Revenu Québec va savoir si la société respecte ses obligations, mais chacun des sociétaires... c'est aller au-delà de ce qui est raisonnable suivant ce qu'on conçoit de ce qu'est une société, et de ce qui devrait nous être demandé, et de ce qu'on est capable, comme entrepreneur ou sous-contractant, de faire.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député.

M. Bonnardel : Dernière question. M. Tremblay, revenez sur ce que vous avez dit au début, là, quand vous parliez de l'ARQ : Bon, ça me prend trois heures, moi, comme entrepreneur, pour statuer l'ARQ. Donnez-nous un exemple. Bon. Vous obtenez un contrat de 1 million, là. Vous nous dites à matin : Là, ça me prend trois heures puis je suis obligé de le faire pour des contrats qui sont moindres. Bien, cette lourdeur administrative, elle ne sera pas payante pour vous, là.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.

• (18 h 10) •

M. Tremblay (Sylvain) : Merci, M. le Président. Dans le fond, que ce soit un contrat de 1 million ou un contrat de 26 000 $, c'est la même lourdeur administrative. Ce qu'on ne veut pas, c'est que ça soit récurrent à chaque habitation. Ce qu'on recommande, c'est de le faire une fois par année, donc, pour s'assurer que toutes les entreprises soient conformes. Dans le fond, ce qu'on demande au ministre aujourd'hui, c'est : Faites attention à ne pas ajouter de la lourdeur administrative à nos entreprises. Donc, on n'est pas contre le principe. Ce 1,5 milliard là, nous aussi, on veut l'avoir, là, en économies d'impôt. Ça a été annoncé cette semaine. Pourquoi pas?

Donc, chez nous, ce que j'ai mesuré, les 102, O.K., qui ont été mesurés l'année passée, les sous-traitants qui ont travaillé pour nous l'année passée, il y en a 49 sur 102 qui avaient... c'étaient des contrats en bas de 25 000 $. Donc, mettons que c'est 50 %. Donc, il y a un 50 % que, si on regarde le seuil du 25 000 $, qui, pour nous, devient... déjà, c'est moins lourd. S'il m'en reste, à la fin de l'année, un autre 50 % et on le fait une fois par année, on n'est pas contre ça. Ma crainte, c'est qu'on le fasse sur chaque unité d'habitation, c'est-à-dire sur chaque contrat. Et là, si on le fait sur chaque contrat, ça va être des milliers d'attestations que nos entreprises vont avoir à remettre. Puis je ne sais même pas comment vous allez faire pour le gérer à l'autre bout, là. Mais c'est impossible, je pense, qu'ils soient capables de gérer ce qu'on va leur envoyer.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Bernier, oui.

M. Bernier (François) : Si je peux donner une précision ou en tout cas... Vous imaginez la terreur, là. On vient faire l'inspection de ça. On dit : Bien, bon, merci, bon, ce matin, on va commencer par le premier paiement que vous avez fait à une entreprise, puis on va regarder à qui vous avez payé, où était le contrat, est-ce qu'on a eu l'ARQ au bon moment, vérifié de la bonne façon sur le site, où sont vos copies, O.K.? On a traversé le premier paiement du premier sous-traitant. Très bien. Maintenant, on va se pencher sur le deuxième paiement ou à quelqu'un d'autre puis là on va remonter la filière de ça. Ce processus-là de vérification n'est pas léger, là, surtout si on fait un processus étendu puis on veut couvrir toutes les relations d'affaires, donc il faut se justifier de tous les paiements ultimement qu'on a faits à chacun, qu'on a été chercher notre attestation au bon moment, qu'on l'a vérifiée, qu'on l'a classée comme il le faut, que c'était la bonne période. Ça, en termes de lourdeur, c'est considérable, considérable. On ne l'a pas encore imaginé, ce que ça pourrait être. Et là on n'a pas trouvé, c'est mal classé, on est insatisfait : pénalité, pénalité.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci.

M. Bonnardel : Une dernière question. Là, c'est la dernière. Est-ce qu'il y a d'autres législations au Canada qui appliquent ce genre d'ARQ ou qui pourraient appliquer cette attestation mais pour tous les contrats, là?

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : M. Bernier.

M. Bernier (François) : Que je sache, non. Si vous permettez. On a un T5018, qui est une invention du fédéral, depuis, quoi, 20 ans, qui documente ce qu'on verse à un sous-traitant dans la construction. C'est un outil de travail, d'ailleurs, qui pourrait être une référence. Si on voulait discriminer entre les plus petits puis les plus grosses relations d'affaires, c'est là, ça existe. Mais, à ma connaissance, ça ne va pas plus loin que ça en termes d'outils ni de... On n'emploie pas beaucoup, à ma connaissance, cette affaire-là pour... Et c'est annuel, effectivement. Et c'est annuel. Puis on devrait commencer effectivement à travailler avec. On n'utilise même pas ce qu'on a.

Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. C'est beau? Donc, je remercie les représentants de l'APCHQ. M. Tremblay, M. William, M. Beauchamp, M. Bernier, merci.

Donc, compte tenu de l'heure, je lève la séance, et la commission ajourne ses travaux à demain, 30 janvier, à 9 h 30.

(Fin de la séance à 18 h 13)

Document(s) related to the sitting