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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Monday, March 23, 2015 - Vol. 44 N° 37

Clause-by-clause consideration of Bill 28, An Act mainly to implement certain provisions of the Budget Speech of 4 June 2014 and return to a balanced budget in 2015-2016


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures onze minutes)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Bien sûr, comme d'habitude, je demande à toutes les personnes de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 28, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Polo (Laval-des-Rapides) est remplacé par M. Huot (Vanier-Les Rivières); M. Drainville (Marie-Victorin) est remplacé par M. LeBel (Rimouski); M. Therrien (Sanguinet) est remplacé par M. Villeneuve (Berthier) et M. Bonnardel (Granby) est remplacé par M. Deltell (Chauveau).

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le secrétaire. Donc, bon après-midi à tous et bienvenue à la Commission des finances publiques. J'invite maintenant le député de LeBel... Oui, M. le député de LeBel?

Demande de directive relativement à la
présence des porte-parole des oppositions

M. LeBel : Avant de commencer, peut-être juste une question de directive. Depuis les années... début des années 90 que je tourne autour des différents cabinets, du Parlement, différentes activités, et c'est la première fois que je vois ça, qu'on convoque une commission parlementaire, sans les porte-parole des deux oppositions. Je comprends que ce n'est pas un outrage, mais est-ce que c'est une nouvelle façon de faire? Est-ce que les commissions vont dorénavant permettre d'être convoquées sans les porte-parole?

Parce que, vous savez, pour moi, ici, c'est un honneur d'être le porte-parole d'un jour devant le ministre des Finances, mais ce n'est pas mon dossier quotidien. Et j'ai un bon porte-parole, qui est nommé par l'opposition, qui se prépare, qui travaille ces dossiers-là, et aujourd'hui on convoque la commission sans s'assurer de sa présence.

Habituellement, de bon aloi et par courtoisie, les leaders se parlaient et les leaders, d'une façon courtoise, pouvaient s'entendre et s'assurer de la présence de tout le monde. Et là il n'y a pas le porte-parole de l'opposition officielle ni du deuxième parti d'opposition. Est-ce que, pour vous, ce manque de courtoisie entre les leaders, là-dessus, qui a fait en sorte qu'aujourd'hui on va faire une commission parlementaire où on va essayer de faire... on va faire notre travail le mieux possible, mais qui est vraiment... C'est la première fois que je vois ça depuis plusieurs, plusieurs, plusieurs années.

Je me demande : Est-ce que, pour vous, c'est une façon de faire qui devrait être répétée?

Le Président (M. Bernier) : Très bien. Je vous entends. J'ai deux députés qui m'ont demandé également la parole, j'imagine, sur un sujet précis. M. le député de Vanier.

M. Huot : Oui. Merci, M. le Président. Je veux peut-être juste répondre au député de Rimouski. Il parlait par courtoisie. Juste mentionner que par courtoisie, il y a eu... entre les différents... de cabinets de leader... s'échangent tout le temps des informations. Mercredi soir, le 18, j'ai le courriel ici, 19 h 52, sur l'horaire des commissions parlementaires qu'on prévoyait en disant : Sujet à changement. On prévoyait... Voici ce qu'on veut comme... Ce qu'on risque d'annoncer comme horaire. Donc, on a le temps d'organiser son horaire en conséquence. Et, par courtoisie, on a enlevé la période de vendredi, qui devait avoir lieu vendredi dernier. Vendredi matin, on avait demandé à ce que la Commission des finances publiques siège. Par courtoisie, ça a été enlevé, mais là, jeudi dernier, l'avis a été donné à l'Assemblée nationale comme quoi on siégeait lundi. Ça laisse le temps quand même de s'organiser, d'arranger son horaire, de retourner de bord.

Et, M. le Président, je suis obligé de vous mentionner aussi l'article 147 du règlement. Le Président tient vraiment une convocation d'une commission parlementaire, il y a des décisions sur le cas... convocation de commission parlementaire, c'est la prérogative du leader parlementaire. L'article 147 du règlement prévoit que «la commission qui a reçu un mandat de l'Assemblée est convoquée par son président, sur avis du leader du gouvernement. L'avis [du leader] indique — bon, comme on l'a fait — l'objet, la date, l'heure, et l'endroit de la réunion.» Il s'agit donc d'une prérogative du leader du gouvernement dans laquelle la présidence ne peut s'immiscer. C'est assez clair.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Chauveau, vous avez des éléments à faire valoir?

M. Deltell : Alors, merci, M. le Président. Je soutiens évidemment la remarque du député de l'opposition officielle, le député de Rimouski. Le député de Vanier, à juste titre, mentionne l'article 147, qui donne les prérogatives et les responsabilités de tous et chacun. Tout à fait raison, c'est vrai que l'agenda parlementaire est dicté par le leader du gouvernement et que la présidence n'a pas vraiment à regarder ce qui se passe. Mais, comme l'a si bien fait le député de Rimouski, c'est une question, à la limite, de courtoisie. Et, depuis toujours, le Parlement fonctionne parce que les partis se parlent — quand je dis «les partis», je parle des partis politiques — les groupes parlementaires se parlent. Et on s'entend. Parfois ça fonctionne, parfois ça ne fonctionne pas. Mais, dans le cas présent, M. le Président, c'est deux sur deux : le porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances ne peut être présent, le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de finances ne peut être présent. Nous sommes devant le ministre des Finances, un homme pour qui nous avons respect et estime. Et justement, parce que c'est un homme pour qui nous avons respect et estime, nous souhaitons pouvoir offrir une opposition qui soit positive, et constructive, et rigoureuse.

D'aucune façon ne comptez pas sur moi pour ne pas être bon aujourd'hui. Je vais faire du mieux que je peux. Mais, M. le Président, en toute modestie, le député de Granby et porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de finances aurait été beaucoup plus à l'aise ici pour faire son travail d'opposition.

On comprend, M. le Président, que dans le cas présent les groupes parlementaires se sont jasé. Ça n'a pas été un dictat qui nous est arrivé ce matin à la dernière minute en disant : Il faut que vous soyez là, puis ça ne fonctionne pas, et tout ça. Et, dès jeudi, de part et d'autre, l'opposition officielle et nous-mêmes avons signalé que nos porte-parole ne pouvaient être disponibles cet après-midi. Et donc, ce faisant, c'est sûr, selon l'article 147, le gouvernement peut faire ce qu'il veut, il a la pleine autorité en la matière. Mais normalement, de courtoisie... Et on comprend que, dans le cas présent, M. le Président, il n'y a pas urgence en la demeure, là, il n'y a pas le feu, là, ce n'est pas une loi d'exception, là, ce n'est pas une loi qui, comme par exemple, prenons l'actualité du jour, concerne ce qui se passe dans nos écoles. Non, c'est un projet global qui touche à bien des sujets. On aura l'occasion d'en parler tout à l'heure. Mais il n'y a pas d'urgence en la demeure. Et, quand, deux fois sur deux, les deux groupes d'opposition ne peuvent avoir leur porte-parole officiel, nous estimons qu'il aurait été de courtoisie élémentaire, juste de reconnaître que nous allions reporter la séance d'aujourd'hui.

Cela dit, c'est une question de directive. Votre bon jugement sera le nôtre. Nous, nous ne contesterons pas les décisions de la présidence, nous n'invoquerons pas des articles de loi ou des jurisprudences qui ne feront pas notre affaire comme on a pu entendre il n'y a pas si longtemps que ça au salon bleu. Laissons ça à d'autres. Mais nous estimons qu'aujourd'hui il eut été préférable de reconnaître que le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de finances et le porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances n'étant pas présents, il eut été préférable de reporter cette séance de travail.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? Donc... Oui?

M. Huot : Oui, M. le Président. Je ne le sais pas si c'est dans la coutume de le faire, mais moi, je peux même déposer la décision, la décision 147.4. C'était même la Commission des finances publiques qui était... il y a eu une décision de la Commission des finances publiques...

Le Président (M. Bernier) : Vous n'avez pas à la déposer, M. le député de Vanier, je vais prendre en considération les éléments sur lesquels je dois rendre ma décision.

M. LeBel : M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Je ne devais pas intervenir, mais vu que la balle vient d'être lancée, je vais... Je pense que ce qu'on est en train de vivre aujourd'hui... ce qu'on dit souvent, c'est : Où est-ce qu'il y a de l'homme, il y a de l'hommerie. Il y a un peu un genre d'effet, là, de la décision de l'outrage de la semaine passée... de possibilité d'outrage. Il y a un genre d'effet où on veut montrer à l'opposition qu'on est capable, comme leader, de décider nous autres mêmes, et c'est de convoquer la Chambre sans prendre soin, par courtoisie, de vérifier la présence des gens. Si c'était si facile ou si ça arrivait souvent... mais ça n'a jamais arrivé. Depuis 15, 20 ans que je suis ça, que ça n'a jamais arrivé, ce genre de situation là, que les deux, pas un, les deux ne sont pas là, deux de l'opposition ne sont pas là, je pense que c'est un... Juste ce fait-là, que c'est la première fois que ça arrive en presque 20 ans, démontre qu'il s'est passé quelque chose. Et nous, par courtoisie, nous allons faire notre travail d'opposition aujourd'hui, et on va poser les questions le mieux possible au ministre des Finances, parce qu'on a un grand respect pour ministre des Finances. Mais c'est certain qu'il s'est passé quelque chose dans les coulisses des leaders. C'est sûr et certain. Ce n'est pour rien qu'on est là aujourd'hui. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le député de Chauveau, vous voulez ajouter?

• (14 h 20) •

M. Deltell : Oui. Bien, écoutez, ce à quoi on assiste aujourd'hui était écrit dans le ciel, parce que jeudi dernier, au salon bleu, à la rubrique concernant les travaux touchant les commissions, le leader du deuxième groupe d'opposition avait interpellé le leader du gouvernement sur cet effet-là, à l'effet qu'il ne pouvait pas être présent aujourd'hui. Donc, on se donnait quand même une marge de manoeuvre suffisante pour ajuster nos violons, ajuster nos flûtes pour s'assurer que tout fonctionne bien et ça a été dit au salon bleu. Alors, encore une fois, M. le Président, j'invite le gouvernement à la diligence, et agir avec courtoisie, et donc reconnaître le fait que, lorsque les deux porte-parole de l'opposition, l'opposition officielle et le deuxième groupe d'opposition, ne peuvent être présents, le débat s'en trouve malheureusement à être un peu affecté.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Le député de Vanier.

M. Huot : Très rapidement, M. le Président, juste revenir sur la question de courtoisie. Dans la pratique, c'est ce qui s'est fait, M. le Président. Mercredi, je l'ai répété : échange de courriels sur le fait... Voici l'horaire des prochains jours de commission parlementaire. Jeudi, avis qui est donné donc d'avance. Oui, les oppositions ont dit... les deux ne sont pas disponibles ni le vendredi ni le lundi alors qu'on voulait siéger les vendredis, les lundis. Par courtoisie, on a enlevé le vendredi, mais on a dit : Le lundi... Je pense que ce qui a été dit, c'est : Arrangez-vous. Parce qu'il y a urgence, pour répondre au député de Chauveau. Il prétend qu'il n'y a pas urgence d'agir. Ça a été mentionné, M. le Président, chaque mois, sans ce projet de loi là qui passe : 35 millions de dollars. Moi, je vois une urgence d'agir, M. le Président, alors procédons.

Décision de la présidence

Le Président (M. Bernier) : Merci. Donc, je vous ai écouté dans vos plaidoyers et donc vous êtes tous des parlementaires d'expérience ici. Il y a plusieurs années à leur actif. Et ce qui base le travail d'une commission parlementaire et ce qui guide le président d'une commission parlementaire, moi, pour en être à ma cinquième année comme président, c'est lors de la Chambre, c'est lors de la Chambre et le quorum. Ce sont les deux éléments sur lesquels je base ma décision de tenir une commission parlementaire. Si je n'ai pas d'ordre de la Chambre, je ne peux pas tenir une commission.

D'ailleurs, au moment où nous débutons nos travaux, vous le savez comme moi, je dois attendre que la Chambre me donne l'ordre de débuter ces travaux-là. Le quorum est essentiel. Je constate cet après-midi qu'il y a quorum. Les discussions entre leaders ne me concernent pas. Je respecte votre argumentaire, mais cela ne me concerne pas en tant que président de la Commission des finances publiques; les deux seuls éléments sur lesquels je dois m‘appuyer sont l'ordre de la Chambre et sont également le quorum, qui est ici présent.

Vous connaissez ma façon de travailler. Plusieurs d'entre vous ont travaillé avec moi depuis plusieurs années et plusieurs séances de travail. Et je travaille toujours dans le respect des parlementaires, mais je travaille toujours également sur les bases légales en ce qui regarde la Commission des finances publiques. J'ai consulté d'ailleurs mon secrétaire pour regarder qu'est-ce qui existait comme possibilité. Il y a déjà eu une décision de rendue sur le sujet où les séances se sont tenues, O.K., même si les leaders n'étaient pas là. Et, sur ça, c'est une décision de juin 1985 par le président Claude Lachance.

Donc, en cette situation, la séance de la Commission de la fonction publique doit se tenir. Merci.

Remarques préliminaires (suite)

La parole est donc...

(Consultation)

Le Président (M. Bernier) : Oui, on peut aller du côté de la deuxième opposition pour députer ces remarques; par la suite, si la première opposition a des remarques préliminaires à faire, je vous donnerai la parole. Donc, M. le député de Beauce-Nord.

M. André Spénard

M. Spénard : Alors, merci.

Le Président (M. Bernier) : Vous avez 20 minutes pour vos remarques préliminaires.

M. Spénard : Pardon?

Le Président (M. Bernier) : Vous avez 20 minutes.

M. Spénard : O.K. Merci, merci, M. le Président. Alors, malgré l'absence de nos leaders respectifs, alors je souhaite la bienvenue au ministre, évidemment, et à tout le monde, et à tous les députés présents en ce lundi après-midi pour nous pencher sur l'étude article par article du projet de loi n° 28.

Évidemment, M. le Président, nous avons toujours été une opposition constructive, mais aussi une opposition qui est vouée à la défense des contribuables et à la défense de la classe moyenne à l'intérieur du Québec.

Le projet de loi n° 28, ça ne surprendra pas personne, c'est un projet de loi qu'on appelle mammouth, un projet de loi qui a 337 articles. Il y en a plusieurs là-dedans qui ne feront pas l'objet de débat entre la Coalition avenir Québec et le parti... et le gouvernement comme tel. Mais il y en a d'autres que le débat va être extrêmement serré entre notre formation et le gouvernement.

C'est un projet de loi qui vise à mettre en oeuvre certaines dispositions du discours du budget. Eh bien, quand on regarde le projet de loi comme tel, on s'aperçoit que le discours du budget, je ne sais pas si tout le monde dormait lorsque le discours du budget a eu lieu le 4 juin, mais on s'aperçoit qu'il y a beaucoup d'articles à l'intérieur de ce projet de loi n° 28 qui ne faisaient pas partie du budget. Et ça, je pense que, lorsqu'on agit de la sorte de la part du gouvernement, on doit s'attendre à ce que ces articles-là, qui n'étaient pas dans le discours budgétaire comme tel... on doit s'attendre à ce qu'il y ait beaucoup plus d'éclaircissement à l'intérieur de ce projet de loi et à l'intérieur des remarques que nous ferons pour ces articles-là.

Le projet de loi n° 28, projet de loi mammouth, évidemment... Nous avons reçu en commission parlementaire une cinquantaine de groupes qui sont venus discuter du projet de loi n° 28 comme tel. À cela s'ajoute, et il faut bien le dire... le projet de loi n° 28 est un peu en continuité avec le projet de loi n° 3 du ministre des Affaires municipales, où est-ce qu'il y avait des coupures importantes dans le milieu municipal, où est-ce qu'ils abrogeaient les CLD, les CRE, et où il a été reconnu coupable, le ministre des Affaires municipales... bien, reconnu coupable, entendons-nous, mais il a eu une remontrance du président de la Chambre, la semaine dernière, en ce qui concerne l'application de certaines mesures du projet de loi n° 3, étant donné que le projet de loi n° 28 n'était pas sanctionné. Et ça, je pense que... moi, c'est la première fois que je voyais ça, en tout cas, pour un parti au gouvernement, d'avoir une remontrance de la sorte du président de l'Assemblée nationale. Parce que le projet de loi n° 28 n'avait même pas commencé à être étudié, n'avait même pas commencé à faire partie d'une commission parlementaire cédulée en bonne et due forme. Alors, je pense qu'avec le projet de loi n° 28 il va falloir être doublement prudent, doublement prudent dans les attentes du ministre.

L'autre chose aussi, et je prends... on a eu une foule de mémoires, mais, moi, il y a des mémoires qui me sont... et sur lesquels on va tabler les articles de loi. Je pense à... Évidemment, il y a des articles, comme je le disais avant ça, il y a des articles qu'on ne perdra pas notre temps là-dessus, là. Mais, quand on commence avec des articles qui disent que... L'article 17, qui parle de la tarification de l'électricité et de la modification des pouvoirs de la Régie de l'énergie... Mais ça, vous comprendrez que ça touche tous les contribuables québécois. Et, lorsque ça touche de façon aussi drastique tous les contribuables québécois, vous comprendrez que la Coalition avenir Québec va se lever debout pour défendre ardemment le contribuable à l'intérieur de ce projet de loi là. Lorsqu'on dit que les revenus ne seront pas considérés par la Régie de l'énergie pour la tarification de l'année subséquente aux revenus ou aux excédents d'Hydro-Québec, bien là je pense qu'on vient de faire un grand pas dans l'augmentation de tarifs, qui... L'autre chose, c'est la modification aussi de l'électricité patrimoniale. Je pense que ça, on va se battre énormément là-dessus aussi.

• (14 h 30) •

Une autre chose qui me surprend aussi dans ce projet de loi, qui touche... et qu'on va défendre ardemment... et ça, j'ai beaucoup de misère à comprendre ça, c'est qu'on fixe à l'intérieur d'un projet de loi des cibles pour les sociétés d'État. Alors, moi, je me pose... En tout cas, il y a une question qu'on va se poser évidemment un peu plus tard : Si ces cibles ne sont pas atteintes, est-ce que les sociétés d'État vont être déclarées illégales étant donné qu'elles ne respecteront pas la loi? Je ne le sais pas. Je n'ai aucune idée là-dessus. Je pense qu'on va demander des éclaircissements en temps et lieu, mais c'est surprenant de retrouver des cibles établies de sociétés d'État à l'intérieur d'un projet de loi. Parce qu'étant donné que ce sont des sociétés d'État en monopole en plus, qui sont en monopole, pour atteindre leurs cibles, ce ne sera pas compliqué, regardez : on augmente les tarifs, on augmente les prix, on augmente ci, on augmente ça. Alors, ce n'est pas...

L'autre chose qui est à l'intérieur de ce projet de loi, qui est, à mon avis, drastique, c'est qu'on s'aperçoit que le gouvernement a abandonné les régions. En sabrant comme ça, il a sabré... Ce gouvernement-là n'a pas seulement sabré avec la loi n° 28, mais, avec le projet de loi n° 3 du ministre Moreau, il faut bien se rendre à l'évidence qu'il a coupé 300 millions dans le pacte fiscal avec les municipalités. Et là, avec le projet de loi n° 28, on arrive en disant : Bien là, écoutez, on va sabrer dans les CRE, puis on va sabrer dans les CLD, pour en arriver à la conclusion que, regarde : On va confier le développement économique aux MRC puis aux instances élues locales et régionales, mais avec rien.

Alors on a toujours défendu, nous, que, pour confier des nouvelles responsabilités... et ça je pense que c'était dans le discours électoraliste de voilà à peu près un an, là, on était en pleine campagne électorale, je pense que c'était le discours électoraliste du gouvernement en place, qui disait : Nous ne transférerons jamais de nouvelles responsabilités aux municipalités sans l'argent qui va accompagner ces nouvelles responsabilités-là pour les assumer. Alors, on s'aperçoit, dans le projet de loi, qu'il n'y a aucun plan b, il n'y a aucune mesure qui nous dit que : Écoutez, on va vous accompagner. On coupe dans les CRE, on coupe dans les CLD, mais voici le plan b. Où est-ce qu'il est, le plan b? Il n'y a aucun plan b dans rien, rien, rien. Aucun plan b pour accompagner personne à l'intérieur du projet de loi.

C'est à l'intérieur aussi de ce projet de loi, ce qui m'a surpris, et ça, on ne s'attaque pas à ça, c'est drôle, tu sais, mais on parle des pharmaciens, on parle même de rembourrage de meubles à l'intérieur du projet de loi pour la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours du budget. Je n'ai jamais entendu parler de rembourrage, moi, M. le ministre, jamais entendu parler de rembourrage le 4 juin, moi, là, là. Je ne sais pas d'où ça sort, ça, ces affaires-là. Je ne le sais pas, je n'ai jamais entendu parler, moi, de l'augmentation des tarifs de garde, contrairement au 4 juin. Je n'ai jamais entendu parler de ça. Puis, contrairement à ça, c'est que, voilà un an, ils nous disaient que les tarifs de garde, que le parti qui était au pouvoir avant eux, c'est-à-dire le Parti québécois, voulait les remonter à 8 $ et 9 $... puis, en période électorale, le gouvernement a déchiré sa chemise pour dire que ça n'avait pas de bon sens. Le discours du budget du 4 juin est muet là-dessus, et on arrive avec des augmentations importantes pour les dispositions budgétaires en ce qui concerne les services de garde.

Alors, moi, je me pose de sérieuses questions, et je pense que tous les citoyens s'en posent. Quel cynisme démontré par le gouvernement face à la population, qui dit une chose en période électorale et qui fait son contraire une fois élu, sous prétexte qu'il n'était pas au courant des chiffres. Écoutez, là, ça, ça tient bien la route, ça a toujours tenu la route, ça, parce que ce n'est pas de notre faute, c'est la faute des autres, etc. Sauf qu'il faut bien se dire que lorsqu'on se contredit toujours comme ça, qu'est-ce qu'on laisse comme impression aux citoyens des institutions politiques et des politiciens qui sont au pouvoir? On laisse une très nette impression que, peu importe ce que vous nous direz en campagne électorale, peu importe les promesses que vous ferez, on sait très bien que vous n'êtes pas tenus de les tenir, et, la majorité du temps, vous ne les tenez pas. Alors, je pense que le projet de loi n° 28 est là pour nous le prouver.

L'autre chose que... et ça, c'est la fédération canadienne indépendante de l'entreprise, qui est venue nous déposer son... et ça, on ne trouve rien là-dedans, là, qui va alléger le fardeau des entreprises. On ne trouve rien là-dedans qui va, tu sais, nous permettre de sortir un peu, d'être plus productifs, de faire avancer le Québec. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante vient nous dire que «le coût des entreprises pour se conformer à la réglementation gouvernementale a augmenté d'un milliard de dollars au Québec entre 2012 et 2014». Quand on parle d'entreprises, quand on parle de PME parce que, vous savez, je pense que M. le ministre est au courant de ça, la majorité des emplois, ce sont les PME. Ça, c'était dans le discours du budget, ça. Ça, je le félicite. La majorité des emplois créés et des emplois qui vont trouver preneur, c'est dans les PME à raison de 70 % ou 75 % de tous les emplois créés au Québec. C'est les PME qui vont les créer. Qu'est-ce qu'on a pour les PME dans ce discours-là? On n'a pas grand-chose. On n'a pas grand-chose, on n'a absolument rien, sauf de déstructurer les régions qui comprennent le plus de PME au Québec. Ce sont les régions qui comprennent le plus de PME. On déstructure les régions, on enlève l'accompagnement économique, on enlève les CLD puis on dit : Regarde, les municipalités s'occuperont de ça. Les municipalités, plus ça va... Et ils sont venus nous présenter aussi, que ça soit la FQM ou l'UMQ, ils sont venus nous présenter leurs mémoires. Et, moi, ce que je retiens de ça, c'est que le gouvernement a décidé de couper, bonjour, de couper 300 millions, puis tu arrives avec le projet de loi n° 28. On recoupe les CLD, on abolit les CRE. Mais ils n'ont même pas les pouvoirs nécessaires, les MRC, pour assumer une gestion des fonds, c'est-à-dire les fonds locaux d'investissement, les subventions données à des entreprises, choses que les CLD faisaient. Il y a complètement absent du projet de loi n° 28 les modifications qu'il faut apporter aux municipalités pour leur permettre de faire ça. Non seulement ça, les municipalités vont être obligées de se créer un comité ou de garder leurs CLD. Il y en a qui vont préférer garder leurs CLD. Ils vont être obligées de se créer un comité pour pouvoir administrer les fonds parce que légalement ils ne peuvent pas le faire.

Alors, quand on dit que le projet de loi n° 28 est un projet de loi qui est fait un peu à la va-vite, puis qu'on met tout dedans, puis qu'on espère que ça va passer comme une balle, je pense que ça ne passera pas, je pense que ça ne passera pas comme une balle.

Non seulement ça ne passera pas comme une balle, mais le fonds solide FTQ de même que Fondaction sont venus nous dire en commission parlementaire que, pour eux, c'était le néant en ce qui concerne qui va administrer leurs fonds parce que c'était les CLD qui administraient les FLS. Qui va administrer leurs fonds? Comment ça va se passer? Les municipalités, on n'a pas entendu parler de rien. C'est quoi qu'on fait pour intervenir avec nos entreprises dans le milieu? Qu'est-ce qu'on fait? Le projet de loi n° 28 est totalement absent de ça. Ils n'ont aucune solution, ils n'ont rien, ils ont des coupures tel que prévu. Le ministre des Affaires municipales a été reconnu d'un outrage au Parlement, et puis le projet de loi n° 28 ne vient pas réparer ça du tout, il vient mettre le dernier clou sur le cercueil. Alors, tout le monde est en attente. Pourquoi? Bien, c'est parce qu'on a voulu faire l'équilibre budgétaire.

On n'est pas contre ça, l'équilibre budgétaire. On était même pour ça, mais, nous, contrairement au gouvernement, c'est qu'on a dit la vérité en campagne électorale, par exemple, puis on avait des méthodes pour aller chercher de l'argent. L'objectif est louable, nous appuyons l'objectif d'arriver à un équilibre budgétaire le plus tôt possible parce que les finances publiques ne peuvent plus se permettre de payer 11 milliards par année juste d'intérêts. Sauf que, regarde, ce n'était pas la même méthode que nous, là. On avait différentes méthodes pour le faire. Et ça, M. le Président, on ne m'enlèvera jamais que la méthode préconisée par le gouvernement, c'est un hachoir à viande, là, pour les services en région, c'est un hachoir à viande pour la petite et moyenne entreprise, qui ne sait plus trop, trop où aller.

• (14 h 40) •

On se pose souvent des questions : Comment ça se fait que nos entreprises n'investissent pas pour la productivité, n'achètent pas des nouvelles machines, etc.? Le dollar américain est bas, on devrait en profiter pour l'exportation. Oui, ça commence tranquillement pas vite l'exportation. Mais pourquoi que les entreprises n'investissent pas et que le bas de laine des entreprises est garni? Mais ils se gardent comptant, pourquoi? Parce qu'ils ne savent pas où est-ce qu'ils s'en vont. Ils ne savent pas avec ce projet de loi n° 28 là comment qu'on va faire, là. Le gouvernement nous a dit, là, en campagne électorale qu'il y aurait de l'allégement réglementaire. C'est zéro puis une balle là-dedans en ce qui concerne l'allégement réglementaire. On n'en parle plus, il n'en est même pas question. M. le ministre des Finances va me dire : Oui, mais ça, ce n'est pas notre créneau, ça, c'est avec le ministre de l'Économie que ça se passe. Oui, mais là, le projet de loi n° 28, qui est un projet de loi mammouth à l'intérieur duquel on parle de rembourrage, on parle des pharmaciens, on parle des services de garde, puis on oublie les entreprises, puis c'est un discours économique pour des mesures budgétaires, bien, moi, je me dis : Je ne sais pas où est-ce qu'on est rendus, là. C'est qui qui va parler des petites et moyennes entreprises à un moment donné? C'est qui qui va parler des régions à un moment donné? C'est qui qui va parler de tout ça? C'est-u le ministre de l'Économie, le ministre de l'Économie qu'on n'entend pas parler? C'est-u le ministre des Affaires municipales? Peut-être que c'est lui qui va nous parler d'économie à l'avenir parce que l'économie est dévolue aux élus locaux, aux MRC, puis aux maires. Je ne le sais pas, mais, en tout cas, moi, le projet de loi n° 28, on va s'y attarder, on va faire une opposition constructive, comme je l'ai dit, mais, par contre, ce n'est pas vrai qu'on va accepter tout ça en bloc puis qu'on va s'en aller, là, en disant que c'est bien beau puis le gouvernement a bien fait sa job. Je pense qu'il y a certains articles qui méritent d'être applaudis, mais il y en a d'autres qui méritent d'être amendés, et ça, de façon substantielle.

Alors, on va travailler avec le gouvernement, M. le ministre, et nous sommes prêts à commencer. Et là-dessus, bien, j'oserais faire une dernière remarque à M. le ministre, c'est que l'ensemble, l'ensemble des rapports que nous avons eus, en commission parlementaire ont tous décrié la façon dont les régions étaient traitées, et ça, sans exception, ont tous décrié la façon dont les régions étaient traitées par ce gouvernement-là à l'intérieur de ce projet de loi n° 28 là. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Beauce-Nord. M. le député de Gaspé, vous avez 20 minutes à votre disposition.

M. Gaétan Lelièvre

M. Lelièvre : Merci, M. le Président. Je salue les collègues qui se présentent aujourd'hui. Écoutez, moi aussi, j'aimerais peut-être souligner le fait que ça a été compliqué un peu de se rendre ici, je vous dirais que, normalement, le lundi, on est dans le comté, hein, en région. Malheureusement, on m'a demandé de me rendre plus vite que prévu puis on a dû... l'avion ne fonctionnait pas, il a fallu se rendre en voiture, coucher à Rimouski, la route fermée. Puis je déplore aussi que la commission... même si je sais que ce n'est pas de votre ressort, M. le Président, vous l'avez clairement exprimé, mais je souhaite puis j'espère qu'à l'avenir nos leaders vont travailler davantage en collaboration, parce que, jeudi, on était présents et la plupart des personnes qui sont présentes aujourd'hui, nos représentants notamment, le député de Rousseau a mentionné son impossibilité d'être ici, aujourd'hui, donc ça avait été mentionné dès jeudi dernier en commission.

Si on revient au projet de loi n° 28, un projet de loi extrêmement important qui comprend beaucoup de dispositions de différents ordres. Vous savez, on a eu l'occasion de rencontrer quelques organismes pendant les auditions, les consultations particulières, ça a été une période, je vous dirais, extrêmement intéressante parce que la plupart des personnes qui sont venues sont venues nous présenter leurs visions ou leurs interrogations, leurs préoccupations en regard du projet de loi n° 28 et des nombreux articles qu'il contient. Nous avons rencontré des gens de la société civile, donc des gens des garderies, les gens des groupes de femmes, des gens du monde municipal, du développement local, régional, des gens du milieu syndical pour les fonds d'investissement, des gens des mines, des gens du domaine de la pharmacie notamment. Donc, c'est un projet de loi qui regroupe beaucoup d'éléments, donc une panoplie d'intervenants se sentent visés, on parle d'au-delà de 300 articles, de mémoire. Et c'est vrai que c'est un projet de loi qui est particulier. On est habitués à avoir des projets de loi omnibus notamment dans le secteur des affaires municipales depuis de nombreuses années, dans quelques autres ministères aussi, mais, au niveau des finances publiques, d'avoir un projet de loi aussi volumineux et aussi étendu en termes de champ d'intervention, c'est particulier, et je pense que c'est un exercice où on va apprendre les bons et surtout, je pense, les mauvais côtés d'avoir un projet de loi aussi large, et j'espère qu'on va corriger le tir parce que c'est vraiment... c'est difficile d'avoir l'expertise dans l'ensemble des champs de compétence qui sont visés par ce projet de loi là. Donc, de là l'importance de travailler en équipe autant au niveau du gouvernement que des oppositions, mais même au sein de nos propres organisations politiques respectives, on a dû travailler beaucoup, là, de façon interdisciplinaire pour tenter de traiter, avec le plus grand mérite, là, qu'il se doit, ce projet de loi extrêmement important.

J'aurais le goût de vous entretenir sur quelques éléments. C'est sûr que 20 minutes, ça peut paraître long pour certains, mais, compte tenu de l'importance du projet de loi, je vais devoir me limiter à certains éléments qui m'apparaissent peut-être des plus, je dirais, pertinents à traiter, là, dans le cadre de mes fonctions de critique à l'opposition au niveau des régions et des affaires municipales.

Je vous dirais que ma première réflexion va s'attarder davantage au niveau des services de garde. Beaucoup d'organismes sont venus nous rencontrer, beaucoup de mémoires ont été déposés, et c'est clair qu'il y avait un consensus qui se dégageait de l'ensemble des personnes et des regroupements qui sont venus nous rencontrer. Les mesures qui sont visées par notamment la nouvelle tarification ne font pas l'unanimité, c'est clair. On sent que c'est une modification majeure du système de fonctionnement établi depuis plusieurs décennies, pratiquement, au Québec. On casse le modèle en place et on le remplace par un nouveau modèle de tarification.

Puis, moi, les éléments qui m'ont frappé beaucoup, c'est notamment l'impact de ce projet de loi là ou de cette modification de la tarification sur notamment les femmes, donc... puis à plusieurs niveaux. Je me souviens, par exemple, des commentaires de Mme Julie Miville‑Dechêne, présidente du Conseil du statut de la femme, et d'autres également, représentants et représentantes, là, de groupes de femmes, qui, hors de tout doute, nous confirmaient que l'impact de l'augmentation tarifaire... Même si, bon, on s'entend que c'est à partir d'un certain montant, des plus faibles revenus de familles ne sont pas nécessairement les plus difficilement visés — ça, le ministre l'a très bien exprimé — mais il reste que globalement un des impacts majeurs et négatifs est à l'effet que 75 % des chefs de familles monoparentales... sont composés de femmes. Donc, ce groupe en particulier va être vraiment attaqué de plein fouet par les modifications qui sont apportées, et à ce niveau-là le Conseil du statut de la femme a été sans équivoque.

Il y a également toute la question de la tarification, de la façon de calculer la tarification. On sait qu'on va se baser sur les revenus de l'année antérieure, mais notre statut d'emploi peut changer. Donc, par exemple, un couple qui aurait un revenu de 150 000 $ ou 100 000 $ en 2014, se sépare en 2015, les deux personnes s'en vont chacune de leur côté, souvent, un des deux va avoir un revenu beaucoup plus bas, mais va être tarifé en fonction du revenu du couple de l'année antérieure, alors que sa situation a changé. Ça, c'est un élément qui a été soulevé à plusieurs reprises, et dont, à mon avis, de mémoire, on n'a pas vraiment amené de réponse concluante à cet effet-là. Puis ça, pour moi, c'est une source de préoccupation majeure parce qu'on parle d'équité. De taxer, de tarifer quelqu'un sur un revenu qui peut être un revenu qui n'est plus exact, pour moi, ça attaque un principe important qui est l'équité et la justice.

Au niveau maintenant du développement régional, un élément qui a fait couler beaucoup d'encre dans les derniers mois, on a pu entendre, en commission parlementaire, de nombreux groupes et représentants, que ça soit au niveau des CLD, que ça soit au niveau de l'Union des municipalités du Québec, la Fédération québécoise des municipalités. Un paquet d'organismes représentant le monde du développement local, du développement régional et le monde municipal se sont présentés en commission pour faire valoir leur positionnement en regard du projet de loi n° 28.

Il faut dire que le projet de loi n° 28 intervient vraiment de façon majeure, hein, au plan du développement local et régional. D'abord, les budgets globaux affectés au développement et à l'occupation du territoire passent de 170 millions à 100 millions. C'est quand même une coupe, là, de 70 millions dans l'occupation du territoire, et ça, ça se retrouve, bon, dans différents domaines. On retrouve la coupure de 70 millions au niveau notamment de l'abolition des conférences régionales des élus, au niveau de la diminution de 60 % des budgets des CLD, etc.

• (14 h 50) •

Donc, c'est clair qu'à ce niveau-là les régions dites rurales, les régions ressources sont frappées de plein fouet. On pense à Solidarité rurale, par exemple, qui est un organisme qui était en place depuis 1991, qui agissait à titre d'instance-conseil du gouvernement du Québec depuis 1997. Donc, cet organisme-là est aboli, aboli complètement, là. On parle de disparition. C'est sûr que c'est un organisme qui jouait un rôle majeur au niveau de la défense des droits et des intérêts de tout ce qui est question de ruralité au Québec. Donc, c'est une perte substantielle.

Au niveau des CRE, bon, bien, les CRE, écoutez, c'est sûr que les CRE... Je n'irais pas jusqu'à défendre aujourd'hui que les CRE étaient des organismes qui faisaient l'unanimité, bon, mais il reste que de là à les abolir également, on aurait pu modifier, améliorer. Je pense que le gouvernement était... Tu sais, c'est tout à fait légitime qu'un gouvernement amène sa nouvelle vision, mais de là à aller jusqu'à abolir la seule instance de développement et de concertation régionale dans les régions, ça m'apparaît une très mauvaise décision, surtout dans les régions rurales. Vous savez, le terme «région» est très galvaudé, hein? Montréal est une région, Québec est une région, la Basse-Côte-Nord est une région, la Gaspésie et les Îles est également une région avec des particularités extrêmement différentes, extrêmement variées. Mais, quand on intervient en coupant des budgets de façon aussi massive, 70 millions, bien moi, je peux vous dire que, pour avoir plus de 30 ans d'expérience dans le développement local et régional dans des régions ressources, c'est clair que les impacts sont énormes. Les impacts sont énormes parce qu'il n'y a pas d'alternative. Dans les régions, souvent, les CRE et les CLD, la plupart du temps, sont les seules instances qui depuis quelques décennies étaient responsables, là, du développement local et régional.

Donc, il y a pas d'organisme autre pour prendre la relève. Et ça peut être différent, par exemple, dans une région comme Québec, où on a des chambres de commerce extrêmement compétitives, performantes, on a à Montréal, par exemple, Montréal International, et on pourrait en nommer une panoplie, d'organismes qui travaillent activement et très efficacement au développement du milieu. Par contre, dans les régions, la loi n° 34 obligeait même les autres organisations en développement local et régional de se retirer et on avait mis en place, avec la loi n° 34, des CLD, donc, des CLD et des CRE. Mais là, avec la loi n° 28, le projet de loi n° 28, on vient abolir les CRE et on diminue de 60 % le budget des CLD. Donc, c'est clair que ça va créer un vide et ça va créer des gros changements dans le fonctionnement de nos régions. Strictement, dans la région Gaspésie—Les Îles, on a évalué la perte budgétaire, strictement l'aspect budgétaire, à 15 millions de dollars, 15 millions parce que, bon an, mal an, la CRE avait un budget entre huit et 15 millions de dollars, et les CLD sont coupés de 450 000 $ chacun. On a six CLD, donc ça fait 2,5 millions de coupures, et, si on rajoute un 10 à 12 millions par année pour la CRE, bien on arrive à environ à une quinzaine de millions de pertes de budget dédié directement à la région Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine.

Vous savez, 15 millions, dans certains milieux, ça peut ne paraître pas grand-chose, mais dans une région comme la Gaspésie, comme l'Abitibi, comme la Côte-Nord, 15 millions, c'est énorme dans le développement local et régional, parce que d'abord, c'est 15 millions qui est investi strictement dans le milieu et qui est géré par des intervenants du milieu, donc des gens qui connaissent la réalité du milieu, qui connaissent les besoins, qui connaissent les promoteurs. Donc, c'est un 15 millions qui est, je dirais, investi de façon extrêmement pertinente, de façon extrêmement efficace. Et, en tout respect pour d'autres niveaux d'intervention, moi, j'irais jusqu'à dire que ce 15 millions de dollars là vaut peut-être plus du double d'un budget qui serait investi par exemple dans l'appareil central, où souvent, malheureusement, on va faire du mur-à-mur puis on va appliquer les budgets de façon vraiment nationale, sans tenir compte des spécificités locales et régionales. Donc, 15 millions, c'est énorme. Et c'est des organismes dans tous les domaines qui vont avoir des manques à gagner, que ce soit au niveau du tourisme, de la culture, des jeunes, du communautaire, du développement local, des gens d'affaires. C'est vraiment une somme extrêmement importante.

Je ne peux pas m'empêcher aussi de souligner ce que mon collègue de la Beauce a mentionné tout à l'heure. En plus, ce qui est décevant, c'est... On confie au... On dit que dorénavant ça va être les MRC qui vont être responsables du développement local, mais les MRC n'ont même pas encore ce pouvoir-là, et déjà la machine est partie pour abolir les CRE, diminuer substantiellement le budget des CLD, et les MRC n'ont même pas le pouvoir habilitant. D'ailleurs, les représentants des fonds de solidarité nationaux sont venus le mentionner. Pour eux, c'était une préoccupation, parce qu'on sait que souvent les grandes organisations syndicales vont financer des budgets de développement local et régional mais vont aussi établir des règles. Et, parmi ces règles, notamment, il y a toute la question de la présence de la société civile qui doit être au rendez-vous pour gérer ces budgets régionaux là, et non pas se limiter strictement à la dimension politique, là, des élus municipaux.

Il reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste environ sept minutes.

M. Lelièvre : Merci. Écoutez, c'est clair que le 15 millions, si je prends le cas de la Gaspésie, le 15 millions sur un 70 millions dans l'ensemble du Québec, bien, ce 15 millions là, les intervenants du milieu vont avoir deux choix, soit dire : Nous, on va composer avec les budgets que le gouvernement nous offre, soit 15 millions en moins, ou : On va compenser via des contributions généralement en provenance du monde municipal. Donc, indirectement, c'est clair que ça peut avoir un impact direct sur le compte de taxes des citoyens. C'était des budgets qui étaient versés en bonne... en majeure partie par le national, donc par l'État québécois. Si on veut maintenir le même niveau de service, oui, c'est sûr qu'il y a un certain pourcentage d'économie dans la gestion, dans l'administration, oui, mais ce n'est pas strictement dans la gestion qu'on va pouvoir récupérer le 15 millions de l'enveloppe qui était dédiée à la région de la Gaspésie et des Îles. Donc, si on veut maintenir le même niveau de services, le même niveau d'investissement dans les dossiers de promoteurs, on va devoir envisager des augmentations possiblement du compte de taxes municipales. Donc, c'est les citoyens en région qui vont devoir suppléer pour le retrait de la part de l'État central. Donc, c'est quand même un élément qui est majeur, parce que les municipalités sont aux prises avec de nombreux autres défis. On parle de 300 millions qui a été coupé dans le pacte fiscal également. Donc, c'est une autre facture qui s'ajoute déjà aux 300 millions du pacte fiscal.

Un élément aussi qui est important... Vous savez, quand on parle de développement local et régional, moi, je me plais souvent à dire que, pour faire du développement local et régional, ça prend un coffre à outils, hein, et il y a des conditions de base. Avant de faire du développement dans une région, il y a des conditions de base qui doivent être présentes. Ces conditions de base là sont notamment les transports, les communications, la santé et l'éducation. Bien, dans le projet de loi n° 28, on s'attaque indirectement aux organisations comme les CLD, les MRC, les carrefours jeunesse. On s'attaque à ces organisations-là qui tenaient le fort en région, puis qui souvent étaient les porteurs de ces dossiers-là, et qui étaient les porte-voix de la population. Avec l'abolition des CLD, des CRE, la diminution des budgets des carrefours jeunesse-emploi, mais aussi l'abolition des conseils d'administration des hôpitaux, de nos anciens CSSS, qui vont être remplacés par des CISSS...

Bon, bien, dans certaines régions, on passe par exemple de 60 administrateurs bénévoles, donc des gens bénévoles, une quinzaine d'administrateurs par hôpital, qui défendaient les intérêts de la région et supportaient les gestionnaires des centres de santé pour s'assurer qu'on ait en région et sur le territoire du CSSS les meilleurs services de santé possible. On parle de 60 bénévoles, donc, dans ma région, qui vont être remplacés par une dizaine d'administrateurs nommés par le ministre, mais aussi rémunérés. Vous savez, M. le Président, ça fait toute une différence, hein. Quand tu es bénévole, puis ta seule paie, c'est le... ou ta seule satisfaction, c'est voir la satisfaction des usagers, des citoyens de ton territoire, bien, tu travailles pour la cause, tu travailles pour défendre les intérêts en santé, notamment, au niveau de la région dans laquelle tu demeures, tu résides, tu es un bénéficiaire directement de ces services-là. Donc, ça t'amène, je pense, à travailler vraiment avec un intérêt, là, des plus élevés. Maintenant, on va remplacer ces 60 bénévoles là par une dizaine de personnes rémunérées dorénavant et nommées par le ministre. Donc, je ne suis pas certain que ces gens-là vont avoir la même détermination puis la même marge de manoeuvre aussi pour pouvoir défendre les intérêts des petites communautés, parce que, finalement, ce sont pratiquement des gens qui vont recevoir un mandat du ministre et également une rémunération, donc pratiquement une reddition de comptes qui va être obligatoire.

Donc, ça, ça m'inquiète aussi beaucoup puis ça inquiète beaucoup les organismes et la population des régions à travers le Québec, parce que la santé, c'est une des conditions de base. Et on sait qu'il y a des gros défis, financiers notamment, à relever au niveau de la santé. Donc, est-ce que nos porte-voix, qui étaient nos administrateurs en région, qui vont être remplacés par des administrateurs payés et nommés par le ministre... est-ce que ces gens-là vont avoir la même capacité et la même détermination à défendre les intérêts du milieu? Ça nous apparaît une forme de centralisation, là, au niveau de la santé.

Donc, beaucoup d'éléments dans le projet de loi n° 28 qui touchent, oui, l'aspect financier, mais aussi ça va au-delà de ça, ça touche également l'aspect, là, du quotidien dans le vécu des régions, notamment sous l'angle du développement local, du développement régional, de la santé et aussi des services relativement... pour ne pas dire très importants que sont les services de garde à l'enfance. Donc, ce sont les éléments que je voulais porter à votre attention, M. le Président, pendant cette première présentation. Merci.

• (15 heures) •

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Gaspé, de votre présentation. M. le député de Chauveau, vous avez des choses à nous dire?

M. Gérard Deltell

M. Deltell : Toujours, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Vous avez 20 minutes pour les faire.

M. Deltell : Je vous remercie, M. le Président. Alors, salutations à vous. Je salue votre sagesse et votre expérience. M. le ministre, députés collègues ministériels, collègues de l'opposition officielle, évidemment, mon collègue de Beauce-Nord, mes salutations.

Alors, M. le Président, comme vous le savez, je viens frapper en relève, mais, quand même, ce projet de loi m'intéresse au plus haut point parce qu'il intéresse et touche directement tous les Québécois, touche directement le portefeuille de tous les Québécois. Il y a certains aspects évidemment qui sont du ressort... qui relèvent des mines, qui relèvent des ressources naturelles, donc ce pourquoi je suis porte-parole au deuxième groupe d'opposition, mais, d'abord et avant tout, ce qui me brusque dans ce projet de loi, c'est qu'il va y avoir des applications, des choses qui vont changer avec ce projet de loi qui n'avaient pas été annoncées ni en campagne électorale et encore moins lors de la lecture du budget. J'y reviendrai un petit peu plus tard.

Donc, M. le Président, qu'est-ce que nous avons devant nous aujourd'hui? C'est un projet de loi, projet de loi n° 28, qui se lit comme suit : Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours du budget du 4 juin dernier visant le retour à l'équilibre budgétaire 2015‑2016. Ça, M. le Président, à tous les budgets, le ministre des Finances se doit de déposer un projet de loi qui met en application les mesures du budget, mais ce à quoi on assiste aujourd'hui, ce n'est pas ça parce que la plupart des mesures qui sont incluses dans ce projet de loi n'ont pas été annoncées lors du budget, et c'est pour ça qu'à sa face même, M. le Président, j'estime que le gouvernement est en porte-à-faux avec ce projet de loi et particulièrement le titre qui le présente.

On sait que c'est un gros projet de loi, mes collègues en ont parlé abondamment tout à l'heure, 337 articles, ça touche 59 lois directement et 10 règlements, donc c'est quand même beaucoup pour un projet de loi. Et ce n'est rien non plus à comparer au fait qu'il y a un petit frère à ce projet de loi, un petit frère qui, lui, comprend plus que le projet de loi n° 13, plus de 600 pages. Alors, le petit frère, disons qu'il est un petit peu gonflé à l'hélium par rapport au projet de loi initial.

Donc, M. le Président, nous sommes, à notre point de vue, devant un projet de loi qui d'abord ne... pas au titre qu'il porte et aussi comprend plein de choses qui n'ont pas été dites ni en campagne électorale ni au budget, alors que c'est la loi qui normalement doit appliquer les mesures budgétaires. Parce que, je tiens à le rappeler, M. le Président, c'est normal que, lorsqu'on dépose un budget... Et le gouvernement a toute l'autorité nécessaire pour le faire. D'ailleurs, jeudi prochain, le ministre des Finances va déposer son second budget. Le gouvernement l'a déposé le 4 juin dernier. C'était le premier budget. Ça faisait à peine deux mois qu'ils avaient été dûment élus par la population, donc l'exercice s'apprenait. On commence à établir les balises, on voit vers quoi le gouvernement se dirige. C'est normal que le gouvernement dépose le budget et mette en application les changements nécessaires découlant du budget dans les lois, mais, comme je vous le disais, dans le cas présent, ce ne l'est pas.

Donc, regardons ce qui touche directement les gens, c'est-à-dire les services de garde, les tarifs d'électricité et, un petit peu plus tard, on regardera aussi d'autres choses qui ne concernent peut-être pas les gens directement dans leur quotidien, mais qui va avoir une incidence dans leur quotidien, c'est-à-dire la Loi sur les mines et également les modifications concernant la Régie de l'énergie.

Regardons donc directement les frais de garde. Les frais de garde, M. le Président, ça touche à peu près tout le monde au Québec. Et quand je dis à peu près tout le monde, moi, je suis grand... en fait, je suis grand, pardon, je ne suis pas grand, mais mes enfants sont grands, mes enfants ont 21 et 23 ans. Je n'ai pas connu l'époque des CPE et les trucs comme ça; par contre, mes enfants, eux, vont connaître ça. Donc, ça nous touche directement comme parents, comme futurs grands-parents, et comme oncles, comme tantes, donc ça touche tous les Québécois quand on parle des services de garde. Et on sait que, lors du dernier budget du gouvernement précédent, le budget du député de Rousseau, je ne nommerai pas son nom, mais le gouvernement précédent avait dit qu'il allait augmenter les tarifs de 7 $ à 9 $. Ils ont présenté ça, ils sont allés en campagne électorale là-dessus et ils se sont fait battre là-dessus. C'était lisière levée. La population a tranché.

Nous, on avait une autre approche aussi. Le gouvernement libéral, le Parti libéral à l'époque, n'avait dit à personne qu'il allait moduler les tarifs en fonction des revenus. J'invite mes collègues ministériels à me contredire. Si, par malheur, je n'ai pas vu ça au cours de la campagne électorale, dites-le-moi et je vais faire amende honorable. Mais non, M. le Président. L'année dernière, on était en plein coeur du débat de ce qu'il y a de plus important en démocratie, c'est-à-dire une campagne électorale où là on joue visière levée, où on met cartes sur table, où on dit : Voici ce que nous allons faire. Et à quel moment le gouvernement, le Parti libéral avait présenté l'option de dire : Nous allons augmenter les tarifs de garderie en fonction de vos revenus? Quand a-t-on entendu ça? Jamais. Et est-ce qu'on l'a entendu le 4 juin dernier lorsque le ministre des Finances a déposé son projet de loi? Jamais.

M. le Président, si ce que je dis n'est pas conforme à la réalité, qu'on m'interrompe tout de suite. Et ça n'arrivera pas parce que c'est la réalité. Ni en campagne électorale, ni lors du budget le Parti libéral et le gouvernement actuel n'avait dit qu'il allait augmenter les tarifs en fonction des revenus. C'est arrivé plus tard. Donc, quand on voit les articles, dans ce projet de loi là, qui touchent les tarifs de garde, et qu'on dit que c'est — je vais remettre mes lunettes, je ne vois pas grand-chose : loi concernant la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget... n'est pas conforme à la réalité, parce que ce n'est pas inscrit dans le budget, cette mesure-là, mais elle est inscrite dans la loi que nous étudions actuellement. Et ça, comme je vous le disais, M. le Président, les tarifs de garderie, les tarifs des CPE, ça touche tout le monde.

Puis, vous savez, en politique, on parle beaucoup d'engagement et tout ça, mais on sait que l'année dernière on était en plein coeur de ce débat-là, et si les gens s'étaient fait élire en disant : Oui, oui, on va augmenter en fonction de vos revenus, bien, on aurait fait le débat. Nous, on ne pense pas que c'est une bonne idée, parce qu'on pense que ceux qui ont des revenus élevés paient déjà pas mal de taxes et impôts. Et aussi, également, on pourra remarquer que, malheureusement, dans l'exercice réel de ça, il pourrait arriver dans des garderies qu'il y ait le petit enfant à 7 $ puis à côté ça va être le petit enfant à 10 $. Pas sûr que c'est ce qui s'appelle l'équilibre et l'égalité des chances à tout le monde. Ça peut être sévère parfois une cour d'école, imaginez une cour de CPE, M. le Président. Donc, on a des réserves par rapport à ça, mais encore eût-il fallu qu'on fasse le débat en campagne électorale. S'ils avaient fait le débat en campagne électorale, c'est beau, c'est correct, vous avez gagné, félicitations pour votre beau programme, puis allons-y... être en désaccord, mais ils auront été élus là-dessus. Ce n'est pas le cas. Tarifs de garderie.

Tarifs, maintenant, d'électricité. Alors ça, c'est un petit peu plus délicat, M. le Président, parce que le projet de loi, l'article 17, touche directement ce que l'on appelle le bloc patrimonial. Qu'est-ce que c'est que le boc... le bloc, pardon, pas le boc... le bloc patrimonial en matière d'électricité? Bien, ça, M. le Président, il faut remonter dans les années 60 alors que les grandes démarches de la nationalisation de l'électricité ont été entreprises. Je dis bien, M. le Président, «les grandes démarches», parce qu'on a tort de penser — dans l'esprit populaire, c'est ça qu'on entend souvent — que la nationalisation de l'électricité, c'est l'oeuvre de René Lévesque en 1962. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai. Historiquement, c'est faux. C'est en 1944 que le premier ministre Adélard Godbout a créé Hydro-Québec en nationalisant une entreprise d'électricité. C'était la première étape, la première nationalisation qui avait été faite en 1964, pas en 1962, en 1964. On va dire : Oui, mais c'est grâce à René Lévesque, en 1962, au gouvernement de Jean Lesage, qu'on a réussi à développer notre plein potentiel avec les mégacentrales hydroélectriques. C'est en partie vrai, mais c'est faire abstraction, entre autres, de Labrieville. Est-ce que ça vous dit quelque chose, ça? Bersimis 1 et 2? Dans les années 50, mes chers amis, en 1952‑1953, le gouvernement de Maurice Duplessis — eh! oui, le gouvernement de Maurice Duplessis — a procédé aux premières installations hydro-électriques majeures du Québec, les mégacentrales électriques sont nées dans les années 50, et ça s'est fait là. Et, par la suite, est arrivé, oui, en 1962, les grandes vagues de nationalisation, bien sûr, et, dois-je le rappeler à mes collègues ministériels actuels, ça s'est fait lors d'une campagne électorale. Le thème de la campagne de 1962 portait justement sur : Êtes-vous pour ou contre la nationalisation des compagnies d'électricité? Et la population a jugé, et la population a dit oui.

• (15 h 10) •

Et pour la petite histoire, M. le Président, rappelons simplement, tant qu'à faire, tant qu'à être dans l'histoire, on va continuer, que la grande décision s'est prise dans un endroit célèbre maintenant : le lac à l'Épaule. Parce que le des ministres, il y avait des gens qui étaient pour, mais il y avait des gens qui étaient contre. Mais il trouvait, en son âme et conscience, que c'était bon pour l'avenir du Québec, de faire ce pas-là, et donc il a convoqué tous ses ministres au lac à l'Épaule. Et finalement, il avait sorti son petit calepin, pour dire : Qu'est-ce que vous pensez d'une élection à telle date? Dès lors, les ministres se sont dit : Hum! Une élection là-dessus? On pourrait regagner majoritaires, et on pourrait encore continuer notre oeuvre pendant quatre ans. Pourquoi pas? Et c'est ainsi que le consensus s'est fait et qu'il y a eu l'élection de 1962, qui aura permis la nationalisation de l'électricité. D'où là est née l'expression : On va faire un lac-à-l'épaule, parce que le lac à l'Épaule, c'était l'endroit qui, soit dit en passant, est situé dans le comté de Chauveau, pour votre gouverne. En fait, il l'était au début. Jusqu'en 2012, c'était dans le comté de Chauveau. Et par la suite on a dit que, quand on fait un lac-à-l'épaule, c'est qu'on se réunit tout le monde pour parler d'un objectif et on l'atteint.

Tout ce détour, M. le Président, pour vous parler du bloc patrimonial. Le bloc patrimonial, c'est quoi? C'était le consensus qui avait été fait à l'époque en disant : D'accord, on nationalise. D'accord, on dépense beaucoup. D'accord, on fait des grandes centrales hydroélectriques. Mais, en bout de ligne, on va quand même se garder cet avantage majeur que nous avons de produire de l'hydroélectricité et de ne pas abuser dans les tarifs. C'est ça, le bloc patrimonial, et ça, ça existe depuis milieu des années 60. Ce consensus-là est établi depuis une cinquantaine d'années, et voilà qu'aujourd'hui d'un trait de plume, sans même s'en être vantés dans quelque campagne électorale que ce soit, ou quelque discours de budget que ce soit, voilà que le ministre des Finances vise par ce projet de loi à attaquer, à notre point de vue, ce point fondamental. Et permettrait donc à quoi? Qui permettrait des augmentations de tarifs. Et c'est pourquoi, M. le Président, nous nous inscrivons en faux devant cette approche, devant l'article 17, qui, à notre point de vue, nous conduit à des augmentations de tarifs qui ne sont pas acceptables.

Poursuivons notre lecture du projet de loi et regardons un petit peu plus loin lorsqu'il est question de la Régie de l'énergie. Alors, je vous ai parlé de l'article 17. La régie... Juste peut-être conclure sur la question du bloc patrimonial parce que, selon l'Union des consommateurs, «la table est mise pour que l'utilisation des tarifs d'électricité à des fins fiscales se généralise», puis que l'article 17 imposera «l'achat à la clientèle québécoise [de] 8 TWh d'électricité provenant du complexe [de] la Romaine», et ce qui pourra augmenter les tarifs jusqu'à un maximum de 400 millions de dollars.

M. le Président, on ne peut pas se payer ce luxe-là. On ne peut pas se payer ce luxe-là. Le bloc patrimonial est là justement pour préserver, pour préserver cette entité-là. Alors, quand on déchire sa chemise parce qu'il y a des augmentations qui sont un petit peu plus hautes que le taux de l'inflation, imaginez ce qu'on va faire lorsque plus tard Hydro-Québec et la régie auront le droit et permettront ce type d'augmentations parce que le bloc patrimonial n'existera plus. Nous avons de sérieuses réserves par rapport à ça, M. le Président.

Et justement, pour que cela puisse se faire, il faut modifier la loi de la régie, et c'est ce que prévoient les articles suivants, jusqu'aux articles 24 de ce projet de loi, qui touchent directement la régie. Et ce qui est drôle, M. le Président, c'est qu'il n'y a pas si longtemps que ça encore, le premier ministre n'avait de cesse de dire qu'il ne fallait surtout pas que le politique se mette les deux mains dans la régie. Mais c'est curieux, M. le Président, ce projet de loi, c'est exactement ça qu'il dit. On vise à changer la façon d'opérer de la régie. C'est notre lecture à nous, et c'est condamnable, d'autant plus, comme je vous le disais, que le premier ministre se targuait, il n'y a pas si longtemps que ça, de dire que ça n'a pas de bon sens de se mettre les deux mains dans la régie.

Le 17 septembre, à une question du chef du deuxième groupe d'opposition, le premier ministre faisait un peu de... sans vouloir faire de la psychologie à cinq cennes, mais, disons, faisait un peu une réverbération de ce qu'il disait parce qu'il nous attaquait en disant : «...ce qu'il propose — en parlant de nous — c'est une erreur politique fondamentale, c'est de repolitiser les organismes comme la Régie de l'énergie et d'aller faire téléguider leurs décisions par l'appareil politique.» M. le Président, c'est exactement ce qu'on voit actuellement dans le projet de loi : faites ce que je dis et ne faites pas ce que je fais. C'est dommage, ce n'est pas ce à quoi on s'attend d'un premier ministre dûment élu. Et c'est pourquoi nous, on pense que cet article-là n'a pas sa place, parce que ça permet d'aller voir... d'aller annihiler ou enfin d'aller gruger le patrimoine, le bloc patrimonial et de donner les pouvoirs à la régie d'agir alors que normalement, théoriquement, la régie doit être distante de toutes les décisions politiques partisanes. Mais ce n'est pas comme ça que c'est écrit tel quel dans le projet de loi.

Peut-être, là, M. le Président, sortons du cadre qui touche directement les gens, je vous ai parlé du tarif de garderie, je vous ai parlé du tarif d'électricité, parlons de la Loi sur les mines. Je dis que ça ne touche pas les gens, mais, en bout de ligne, oui, ça nous touche tous, parce que, le Québec, on est chanceux, on a un extraordinaire avantage, nous avons beaucoup de richesses naturelles, nous avons beaucoup de mines. Nous avons même beaucoup de métaux différents. On raconte même que c'est au Québec, sur notre propre territoire, que l'on retrouve le plus de métaux différents dans le monde. Il n'y a pas un territoire, il n'y a une législation qui a le plus de métaux différents qu'ici dans la province de Québec. C'est donc un avantage formidable. Nous croyons, nous, au Plan Nord. Nous voulons qu'il s'applique. Nous voulons développer le plein potentiel de nos richesses naturelles. On parle de ressources; moi, je préfère parler de richesses naturelles parce que c'est la véritable création de richesse, ça, quand on est capables d'extraire de notre sol des minéraux, des minéraux, des minerais et de pouvoir l'exporter à l'étranger, d'amener de l'argent neuf ici, de pouvoir le transformer, de pouvoir vendre à l'étranger tout notre plein potentiel, c'est extraordinaire. C'est des millions, des milliards de sous neufs qui rentrent ici, et qui font prospérer notre province, et qui font en sorte qu'on est capables de se payer, autant que faire se peut, nos majestueux programmes sociaux, qui, parfois sont un petit peu trop élevés, parce qu'on vit peut-être un petit brin au-dessus de nos moyens, il faut en être conscient. Alors, nous, on est pour ce développement-là.

Mais voilà que ce projet de loi vise à faire quelques modifications qui, à notre point de vue, ne sont pas les bonnes. Comme par exemple, il est question, entre autres, de... Juste pour vous rappeler, M. le Président, il y a 16 mois, en décembre dernier, nous avions voté à l'unanimité à l'Assemblée nationale la Loi sur les mines après certains débats dont nous ferons outre. Mais c'est clair que, n'eût été de l'initiative bonifiée et bonifiante pour notre régime parlementaire du député de Granby, qui avait tendu la main... alors que nous étions le deuxième groupe d'opposition sous l'égide du gouvernement du Parti québécois, nous avons tendu la main à tous les partis politiques pour trouver une solution à l'impasse concernant la Loi sur les mines, le député de Granby avait tendu la main. Le parti ministériel, à l'époque le Parti québécois, avait dit oui. Après moult débats, le parti libéral avait finalement voté pour. Donc, on avait réussi à mettre de côté nos débats partisans pour aller de l'avant avec une loi sur les mines.

Un des facteurs de cette loi-là comportait sur l'obligation des minières de rendre publiques plein d'informations pertinentes pour l'obtention des contrats, l'obtention du développement des mines et également pour l'exploitation de ces minerais-là. Et voilà que l'actuel projet de loi prévoit d'éliminer cet article-là. Nous avons des réserves là-dessus, M. le Président, parce que, si jamais ça amène des gens à faire moins preuve de transparence, ça peut amener de l'inquiétude. Et on sait qu'au Québec comme partout ailleurs on ne peut pas faire de développement de nos richesses naturelles s'il n'y a pas le consensus social. Et, pour obtenir le consensus social, plus on est visière levée, mieux c'est.

Mais aussi, M. le Président, pour nous — et le temps file, je me rends compte que le temps file — ce qui est important, c'est qu'avant de pouvoir attaquer la Loi sur les mines j'invite fortement le gouvernement à faire ses devoirs. Ça fait 16 mois que cette loi a été adoptée, et il n'y a, M. le Président, toujours pas eu de règlement adopté. Et ça, c'est l'essence même, c'est l'a b c d'une loi sur les mines. Vous avez une loi sur les mines? Ça vous prend dans les mois qui suivent une réglementation. Ça fait 16 mois que la loi a été adoptée, on ne l'a toujours pas. On comprend que l'ancien gouvernement était sur le bord de déclencher une élection, il n'a pas eu le temps de le faire, ça peut se comprendre. Mais voilà bientôt un an que ces gens-là sont au pouvoir, dûment élus par la population. Nous souhaitons ardemment qu'ils adoptent rapidement un cadre réglementaire pour la Loi sur les mines. C'est ce que nous demande l'industrie.

Et je tiens à vous rappeler en terminant, M. le Président, que, lors de la commission parlementaire, nous avons entendu des groupes venir témoigner. Et c'est incroyable ce qui a été dit, entre autres de la part de l'association des exportateurs... des exploiteurs, pardon... Pardon. Des gens qui... Non, c'est...

Le Président (M. Bernier) : Des exploitants, M. le député.

Une voix : ...

M. Deltell : Excusez-moi, mon fond de grippe, là, ça commence à paraître un petit peu, mes excuses.

Le Président (M. Bernier) : Des exploitants.

M. Deltell : Me Frank Mariage, qui déclarait : «C'est un constat [...] malheureux, [...]les relations entre le milieu et son ministère ont déjà été meilleures. Ce n'est certainement pas [nous qui le] souhaitons. Nous sommes toujours prêts à collaborer avec des gens de notre ministère pour améliorer les relations et travailler avec eux. Je suis obligé de vous dire que, quand on [nous] pose la question suivante, très simple, à nos membres : Avez-vous l'impression que le ministère travaille pour vous?, la réponse est non...»

C'est terrible, ça, M. le Président. Ce sont les artisans de l'industrie minière qui disent qu'ils ont de la misère à travailler avec le ministère des Ressources naturelles, responsable des mines. Ça n'a pas de bon sens. Dans leur rapport, il a été écrit :

«L'industrie s'est retrouvée au cours des dernières années régulièrement aux prises avec un ministère qui a travaillé davantage en opposition avec "sa clientèle" en mettant de l'avant des politiques et des règlements qui ont défavorisé son développement.»

M. le Président, ça n'a pas de bons sens. Quand les gens qui sont au coeur du développement économique de notre province en développement de nos richesses naturelles, en développant le plein potentiel minier du Québec nous disent : Nos adversaires, c'est l'actuel gouvernement, c'est le ministère, il faut agir. Donc, avant, M. le Président, d'adopter cette loi-là, avant de débattre de cette loi-là, avant de faire en sorte que, dorénavant, la Loi sur les mines sera amenuisée, je demande au gouvernement, concernant les mines, d'adopter le cadre réglementaire nécessaire pour permettre à l'industrie de pouvoir développer le plein potentiel de nos richesses naturelles. Je vous remercie, M. le Président.

• (15 h 20) •

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Chauveau. Est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui veulent prendre la parole? Oui, M. le député de Berthier. La parole est à vous, vous avez droit à 20 minutes.

M. André Villeneuve

M. Villeneuve : Merci, M. le Président. Alors, je veux vous saluer, vous et toute l'équipe qui vous entoure. Je veux saluer évidemment mes collègues de Gaspé et Rimouski, et de notre redoutable recherchiste assis à droite, et évidemment les députés collègues, là, de la partie gouvernementale et évidemment de la deuxième opposition. Alors, je vous salue tous et toutes, et évidemment les gens qui nous écoutent, M. le Président.

M. le Président, je veux débuter en disant un petit mot sur... peut-être est-ce un imbroglio, je ne sais pas, je ne connais pas le fond de l'histoire encore, mais bon, on le saura tôt ou tard, parce que j'ai pris un peu de retard tantôt. Mais je sais que vous avez discuté entre autres... Mes collègues ont déploré le fait que la commission siège cet après-midi. C'est plutôt rare qu'on refuse de siéger, c'est parce qu'il y a vraiment une raison, quand on ne peut pas être là, M. le Président. Si on ne peut pas être là vraiment, normalement, le gouvernement remet le tout. Et je sais que mon collègue de Rousseau avait annoncé... plusieurs de mes collègues avaient annoncé que c'était impossible pour aujourd'hui. Et, bon, je constate que la commission siège tout de même, malgré que le porte-parole de l'opposition officielle n'y soit pas...

Le Président (M. Bernier) : ...

M. Villeneuve : Alors, je voulais juste déplorer ce fait-là, M. le Président. Je sais que vous avez rendu une décision tantôt...

Le Président (M. Bernier) : Parce que ce sont les éléments de base d'une commission, c'est l'ordre de la Chambre et c'est le quorum. Ce sont les deux seuls éléments qui doivent guider notre décision. Merci.

M. Villeneuve : Parfait, parfait. Je suis d'accord avec vous. Ça m'amène à vous parler d'us et coutumes, M. le Président, parce que c'est de ça dont vous parlez présentement, et c'est ça qui est important aussi.

Le Parlement, là, quel qu'il soit à travers le monde, peut écrire des briques de procédures. Nous en avons une belle, brique, ici, au Parlement, et c'est parfait, ça vient cadrer la façon dont les échanges se font, dont tout le fonctionnement du Parlement se fait, mais aussi les us et coutumes. Parce qu'on aura beau en écrire une série, de documents comme cela, on n'arrivera jamais à tout écrire. Donc, qu'est-ce que j'entends par us et coutumes? Bien, c'est le respect des traditions que nous avons ici au Parlement du Québec. Et c'est drôlement important.

Je vais faire une démonstration, si vous me le permettez, M. le Président, de vers quoi j'abonde pour ce point-là. On a adopté une réforme parlementaire ici, les parlementaires, à l'unanimité. Parce qu'on ne le répète jamais assez souvent : les lois sont pour la plupart adoptées ou les motions adoptées à 80 % du temps à l'unanimité. Alors, c'est la preuve que ce beau Parlement là fonctionne très bien, M. le Président. Et donc, en 2009, on a adopté une réforme parlementaire. Et la réforme parlementaire, entre autres, a ratissé assez large quand même sur le fonctionnement, entre autres. Les parlementaires de l'époque, dont j'étais et dont plusieurs ici étaient, se sont dit : Bien, connectons-nous un peu plus sur la réalité de nos familles, entre autres, de la société, en mettant les deux semaines de relâche, vous savez, on a eu droit à deux semaines de relâche. Justement, la réforme, elle avait ce but-là aussi, qu'on puisse être connectés sur la société.

La réforme aussi, ce qu'elle a fait, M. le Président, et là j'arrive au projet de loi comme tel qu'on a devant nous, la réforme aussi, M. le Président, ce qu'elle disait, elle disait : Dans une session, lorsqu'arrive la fin de la session... et loin de moi, ici, M. le Président, de penser et de prétendre d'avoir la moindre idée sur la suite des choses pour le projet de loi n° 28 sur lequel nous sommes aujourd'hui, mais ce que la réforme disait, c'est que, dans une session, s'il y a plusieurs projets de loi, le gouvernement peut, par bâillon, les mettre, hein, il peut en mettre deux, trois, quatre, il peut en mettre plusieurs...

Une voix : ...

M. Villeneuve : Oui, oui, tout à fait. Il peut les mettre dans un bâillon. Les gens comprennent bien. Mais j'aime bien effectivement aussi votre définition. Mais, donc, peut les mettre dans un bâillon.

On s'est aperçu, à l'usage, us et coutumes, M. le Président, on s'est aperçu que cette façon de faire là amenait de graves problèmes, parce que vous comprendrez qu'un bâillon, ça se fait en moins de 24 heures. C'est donc dire que l'on mettait au jeu, si je peux me permettre, comme ça, on mettait au jeu, à l'étude des parlementaires, sur un espace de moins de 24 heures, une étude de plusieurs, mais plusieurs projets de loi. Ça amenait des coquilles, ça amenait des erreurs. Et là donc, dans la réforme de 2009, on a dit : Bon, c'est terminé. Maintenant, dans une session, s'il y a un projet de loi que le gouvernement, pour les raisons qui sont les siennes, s'il décide de l'amener en bâillon, bien ce sera un à la fois.

Tout à l'heure, mon collègue de Chauveau en a parlé un petit peu, M. le Président, du titre du projet de loi qui est devant nous, le projet de loi n° 28 — et je sais que le député de Chauveau a aussi remarqué la même chose que moi — loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin. On dit bien «principalement».

Alors que, dans les faits, le projet de loi n° 28, ce qu'il fait, M. le Président, c'est qu'il introduit en son sein, à l'intérieur même, trois autres éléments importants : on parle des garderies, qui auraient pu faire... ça aurait pu être un projet de loi, hein, je pense qu'on s'entend tous là-dessus, que le sujet est fort important, d'autant plus qu'il modifie considérablement la façon de faire; au niveau de la santé, hein, qui touche plusieurs éléments au niveau de la santé aussi introduits dans le projet de loi n° 28; et au niveau des municipalités, donc des changements à la gouvernance municipale en matière de développement local et régional, abolition des CLD et des CRE.

En fait, M. le Président, le projet de loi n° 28, bien que respectant la lettre de la réforme, assurément ne respecte pas l'esprit de la réforme. Bien, j'en ai pour... je donne un exemple, M. le Président, où ça mène. On a vu le projet de loi n° 10, qui a été adopté sous bâillon, où il y a eu, par le gouvernement, dépôt de plus de 100 amendements à la dernière minute. On a trouvé une coquille, là, récemment, là, hein? Au lieu du 9 février, c'est le 31 mars, les gens qui voulaient se prévaloir de la retraite, bon. Il y a toujours un risque important, lorsqu'on procède de cette façon-là, et le projet de loi n° 28, assurément, M. le Président... bien, on espère qu'il fera exception, mais il y a toujours un risque de procéder comme le gouvernement le fait présentement, et vous me permettrez de... je ne peux pas passer à côté, M. le Président, de m'insurger contre cette façon de faire là.

Donc, évidemment, on sait aussi que c'est beaucoup la façon de faire du gouvernement Harper, à Ottawa, donc il faut croire qu'il y en a qui trouvent moyen de s'inspirer des façons de faire de M. Harper. Bon, s'il a des émules parmi le gouvernement, alors il doit être très heureux de cela, mais, bon, vous comprendrez que ce n'est pas du tout mon assentiment ou mon opinion par rapport au fonctionnement du gouvernement fédéral dans sa façon de présenter des budgets... ou pas des budgets mais des projets de loi, comme on dit, mammouth ou petit pachyderme.

M. le Président, ça m'amène à vous parler, puis je sais que mes collègues en ont parlé abondamment aussi... le projet de loi n° 28, ce qu'il vient faire, entre autres, et j'aurai l'occasion, j'espère, si le temps me le permet, d'en dire plus sur les autres sujets, mais ce qu'il vient faire, entre autres, il vient abolir les CRE. C'est quand même assez incroyable, M. le Président. D'abord, les CRE ont été mises en place par le gouvernement libéral, alors, en 2003, si je ne me trompe pas trop, je crois que c'est en 2003, qui sont venus remplacer les CRD, que vous avez connus, que j'ai connus, donc, les conseils de développement régionaux de l'époque, qui sont venus les remplacer. Et donc le gouvernement de l'époque, en 2003, le gouvernement libéral a mis en place les CRE, et là, en 2015, 2014... bon, on a aussi parlé que le président de l'Assemblée nationale avait statué qu'il y avait peut-être matière à outrage au Parlement de la part du ministre des Affaires municipales. C'est une autre histoire, nous verrons la suite des choses, là, dans les jours et les semaines qui viennent pour, justement, regarder ça de plus près.

Mais, M. le Président, le gouvernement vient abolir... Puis mon collègue de Gaspé l'a dit tantôt, c'est vrai que les CRE ne faisaient pas l'unanimité. Qui peut prétendre ici, sur un sujet précis, particulier, faire l'unanimité? Mais les CRE ne faisaient assurément pas unanimité, mais, par ailleurs, c'était devenu l'instance de concertation. Et là je vous amène, M. le Président... parce qu'on parle de concertation, je veux vous amener, si vous avez des moments libres, là, à votre table de chevet, là, la nuit, là, peut-être lire la loi sur le...

Le Président (M. Bernier) : Je vous écoute, je vous écoute pleinement dans ce que vous me présentez.

• (15 h 30) •

M. Villeneuve : Parfait, parfait. Bien, je ne pourrai pas toute vous la lire, parce que la loi est quand même assez bien étoffée, et j'y étais lorsque ça s'est fait, alors la loi sur l'occupation et la vitalité des territoires. Il est clairement dit dans cette loi-là que le gouvernement doit s'assurer d'une concertation sur le territoire. Il doit y avoir concertation des gens sur le territoire. Que le gouvernement, M. le Président, décide de changer des choses, soit, c'est normal, je pense que chaque gouvernement qui prend place veut, évidemment, déployer, finalement, sa vision, même si cette vision-là, malheureusement, n'a été qu'en partie expliquée à la population pendant une campagne électorale et qu'il y avait des éléments qu'il, pour des raisons qui sont les siennes, n'a pas voulu les dévoiler. On comprendra ici que le gouvernement, lors de la campagne électorale, n'a pas parlé d'abolir les CRE, là, ce n'est pas... Moi, en tout cas, je n'ai pas entendu ça, ni les CDL, d'ailleurs, et ni Solidarité rurale, Solidarité rurale, qui est une instance-conseil du gouvernement fort, fort importante, qui a contribué à faire des régions du Québec, je pense, qui a contribué de belle façon à entendre les gens du Québec, des régions du Québec, et de travailler avec eux à trouver des solutions, à mettre en place des choses. Mais j'aurai peut-être l'occasion d'y revenir, sur Solidarité rurale.

Mais donc, M. le Président, le gouvernement décide d'abolir les CRE. Bon. Mais, le problème, M. le Président, là, que le gouvernement déploie une vision, qu'il nous l'annonce enfin qu'on sache c'est quoi, sa vision, là, si jamais il en a une, que... dans cette vision-là se retrouve le fait d'abolir les CRE, bien, c'est parce qu'il n'y a rien d'autre, là, M. le Président. On abolit quelque chose, mais on ne dit pas... hein, c'est comme si j'annonçais, M. le Président, que je vais démolir votre maison, mais vous dites : Oui, c'est parfait, bon, c'est parfait, et je vais avoir quoi après? Bien, on ne le sait pas, là, peut-être qu'il n'y aura rien pantoute. C'est ça que le gouvernement fait présentement. Et, si vous saviez, M. le Président, et je suis convaincu que vous le savez, si vous saviez le tort que ça fait présentement dans toutes les régions du Québec. C'est inimaginable de poser un geste comme celui-ci.

M. le Président, il y a eu une rencontre chez nous, dans Lanaudière, tout près de 70 représentants d'organismes, 70 — vous avez bien compris — représentants d'organismes qui se sont rencontrés et qui ont tenté de voir comment ils pourraient préserver notamment une façon de faire les choses. Le problème qu'on vit, c'est le problème qu'ils vivent, le problème que nos citoyens, nos gens vivent sur le terrain présentement, c'est qu'on abolit quelque chose, mais il n'y a rien qui vient suppléer. Et, même s'il y avait quelque chose, M. le Président, ça va être quand? Dans un mois, dans trois mois? Le mal qui a été fait, les dommages qui sont causés, pas seulement des dommages économiques... parce que, si ce n'était que ça...

Mais, quand on parle de dommages économiques, M. le Président, on parle de drames humains, on parle de pertes d'emploi, on parle de gens qui avaient engagé un processus de mise en place d'un projet extraordinaire, M. le Président. Mais il ne sera pas réalisé, ce projet-là, il vient de tomber carrément. On vient de démobiliser nos gens, M. le Président. Dommages économiques, soit, mais imaginez la démobilisation que ça provoque. Je donnais l'image de Néron qui joue de la lyre pendant que Rome brûle. Et c'est un peu ce que le Roi-Soleil est en train de faire présentement.

Le Président (M. Bernier) : ...M. le député.

M. Villeneuve : Oui?

Le Président (M. Bernier) : Vous savez très bien quelle personne vous visez, là, donc je vous demanderais de continuer votre exposé, qui est très intéressant, là, sans viser de personnes.

M. Villeneuve : Parfait. Bien, écoutez, ce qu'on voit, c'est que le...

Le Président (M. Bernier) : Je ne suis pas tellement tolérant, dans ma commission parlementaire, sur ce genre de remarques.

M. Villeneuve : Ce qu'on voit, c'est que le premier ministre, présentement, M. le Président, ne nous propose rien, en tout cas, ne nous propose rien qui permettrait justement de ne rien échapper. Et ça peut se faire et ça doit se faire d'une façon ordonnée et correcte, et ce n'est pas ce à quoi on assiste, M. le Président.

Donc, vous avez... Comme je vous disais tantôt, les organismes se sont réunis chez nous, dans Lanaudière. Ils ont tenté, ils tentent de trouver des solutions pour amoindrir le choc, amoindrir l'impact, mais il est déjà trop tard. Il y a des impacts, qui sont documentés, M. le Président. On pourra en faire état durant la commission. J'en suis persuadé, que la suite des choses nous amènera à vous donner des exemples concrets de ces impacts- là, qui sont très, très grands.

Et, vous savez, M. le Président, les régions du Québec contribuent de façon... Et ça aussi, ça va être à documenter davantage, parce qu'on pense des fois que les régions... en tout cas, certaines personnes, bon, peuvent avoir une perception péjorative du développement économique régional. Mais je vous rassure, M. le Président, c'est tout faux, parce que les régions, elles sont dynamiques, elles ne demandent, finalement, qu'à contribuer à l'essor du Québec. Et il est essentiel que les gens des régions, M. le Président, puissent avoir l'appui indéfectible de l'État. Et là ce n'est pas ce à quoi on assiste. On assiste à un désengagement qui va à l'encontre complètement de la loi sur l'occupation et la vitalité du territoire, une loi-cadre, M. le Président, soit dit en passant, qui a été adoptée ici à l'Assemblée nationale à l'unanimité.

Et là présentement, non seulement les us et coutumes, M. le Président, sont bafoués, non seulement on ne respecte pas l'esprit d'une réforme qu'on s'est donnée comme parlementaires ici en 2009 avec le projet de loi n° 28, mais, en plus, M. le Président, j'oserais dire qu'on viole carrément les principes de la loi sur l'occupation et la vitalité des territoires. C'est grave, là. Là, à un moment donné, M. le Président, il faut que les parlementaires puissent non seulement voter des lois, mais s'assurer de leur respect, s'assurer qu'ils respectent ces lois-là, qu'ils les mettent en application telles qu'elles sont écrites, telles qu'elles sont inscrites. Alors, c'est certain, M. le Président, que, quant à l'abolition des CRE, quant au vide malheureux qui est présentement là et qui a des conséquences importantes, on ne pourra que décrier la chose.

Alors, M. le Président, ça, c'est pour les CRE. Maintenant, je sais que mes collègues ont aussi... et je sais que je serai, bon... Assurément, nous sommes plusieurs, ici, autour de la table, on risque d'être redondants, là, au final. Mais je pense qu'il faut le dire et le répéter : Oui, il y a les CRE, mais aussi les CLD. Encore là, M. le Président, les CLD, là... Comment je pourrais vous dire ça? On a réussi, là, depuis les 50 dernières années, à construire au Québec une expertise extraordinaire dans toutes les régions du Québec. Même, d'ailleurs, je donne souvent l'exemple, je prends l'exemple du principe, attendez que le nom me revienne, là, mais le principe qui dit que, lorsque quelqu'un monte dans l'échelon, là, hein, de sa carrière, à un moment donné il a une promotion, il augmente, il a une promotion, il augmente, deuxième, troisième, quatrième échelon. Le principe de Peter, voilà. Et, dans ce principe-là, ce qui est dit, c'est qu'à un moment donné la personne, par ancienneté, obtient le poste supérieur. Alors qu'elle était hyper compétente sur le poste inférieur, lorsqu'elle atteint le poste un peu plus haut, elle devient malheureusement moins compétente dans la matière.

Moi, je dis souvent que les régions, c'est l'inverse. Les régions du Québec, l'expertise qui est développée, qui a été développée depuis les 50 dernières années, M. le Président, là, c'est totalement l'inverse du principe Peter. Nous avons... et ça, je vous invite, là, tous les parlementaires, là, vérifiez les C.V., là, vérifiez les curriculum vitae des gens qui oeuvraient dans les CRE, des gens qui oeuvraient dans les CLD, des gens qui oeuvrent dans les organismes communautaires dans toutes vos régions, vérifiez, et vous allez voir que ces gens-là sont super compétents, parce que c'est des gens qui sont de passion, M. le Président. Ces gens-là, ils occupent des postes, là, avec des compétences qui leur permettraient d'occuper des postes, et de loin en importance, disons-le de cette façon-là, et de loin en importance, mais ils restent là, ils veulent rester là parce qu'ils veulent bâtir le Québec. Ils veulent vraiment insuffler à leur région un dynamisme. Ils veulent construire le Québec. Ces gens-là, M. le Président, ils acceptent, à des salaires des fois beaucoup moindres, de rester là, et ils ont des compétences extraordinaires.

Les régions du Québec, M. le Président, ne demandent qu'à recevoir davantage de pouvoir. C'est à l'État québécois maintenant de libérer ces moyens-là pour que les régions du Québec puissent prospérer dans leur pleine mesure. Ce que fait le projet de loi n° 28 à cet égard-là, c'est totalement l'inverse, M. le Président. C'est fou raide. Je vous le dis comme je le pense. C'est fou raide. Si on regarde ça, là, présentement, ce que fait le gouvernement... les CLD... Alors là, on dit : Bon, on coupe plus que la moitié des budgets des CLD. Et on dit : Bien, là, on ne les abolit pas. Ah! bien non. Bien non. On ne les abolit pas. Ça ne paraîtrait pas bien de dire ça : Abolir. Mais dans la réalité, dans les faits, ce qu'on fait, M. le Président, c'est qu'on retire les moyens aux municipalités de s'assurer d'avoir sur le territoire une porte d'entrée pour justement aider nos entrepreneurs. Parce que, ça, on ne le dira jamais assez, là, mais vous savez, M. le Président, que les entrepreneurs et les petites et moyennes entreprises, c'est eux qui créent le plus d'emplois. On n'est pas déçus puis on n'est pas mécontents lorsqu'une grande entreprise s'installe chez nous. Loin de là, là. Ce n'est pas ça que je dis. Ce que je dis, c'est que les petites et moyennes entreprises créent beaucoup, beaucoup d'emplois, M. le Président.

Et on sait aussi qu'au Québec, au niveau de l'entrepreneuriat, on a un petit problème. Hein? On a un petit problème, parce que ça nous en prendrait plus encore, des entrepreneurs pour justement pouvoir entreprendre des projets, entreprendre des choses, créer des entreprises, créer de la richesse. Et là, ce qu'on vient de faire, on vient de mettre toute une épine dans le pied des CLD, de ceux qui resteront à tout le moins, parce qu'ils auront pratiquement plus du deux tiers de leur budget qui sera envolé, envolé en fumée.

Que feront les municipalités, M. le Président? Les municipalités, ce qu'elles vont faire... Bien, d'abord, il y a des risques. Il y a des risques à ce qu'elles peuvent faire. Elles vont peut-être se dire : Écoutez, le gouvernement vient de nous soutirer des sommes d'argent importantes, on n'a pas les moyens de maintenir la structure comme elle était. Donc, c'est sûr qu'il va avoir des abolitions de postes, c'est clair, pour certaines municipalités. D'autres, peut-être, d'autres municipalités, M. le Président, qui ont des moyens supérieurs, je pense à des grandes villes, pourraient décider, eux autres, de dire : Bien, ce sera chez nous, dans ma grande ville, la porte d'entrée pour faire du développement économique. Et là, on va se retrouver... Vous vous rappelez les commissaires industriels, M. le Président? Ça ne fait pas tellement longtemps, là. Puis, bon, eux autres, là, d'après moi, là, ils ont envoyé leurs C.V., là. C'est commencé, là.

Et là on risque d'assister à de la compétition sur le territoire. S'il y a quelque chose dont on n'a pas besoin, M. le Président, là, c'est bien ça, là, de commencer à se compétitionner, les municipalités, les unes contre les autres. Au contraire, ce que fait les CLD, il permet à tout le monde, en mettant une quote-part équivalente à leurs moyens, d'avoir sur leur territoire un service de qualité avec beaucoup, beaucoup d'expertise. Et là ce qu'on apprend, c'est que le gouvernement décide de retirer des centaines... des dizaines de millions de dollars de ces organismes-là. Et ces organismes-là vont, M. le Président, devoir faire moins, beaucoup moins que ce qu'ils pouvaient faire. Il faut que je m'arrête, là, je pense.

Le Président (M. Bernier) : Eh oui, malheureusement. Je sais que...

M. Villeneuve : Bien, vous aurez l'occasion, j'espère... Nous aurons l'occasion, M. le Président, de rediscuter.

Le Président (M. Bernier) : Je sais que vous avez beaucoup de choses à dire. Et c'est pour ça que vous êtes ici cet après-midi.

M. Villeneuve : Oui, tout à fait. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Et ça me fait plaisir de vous entendre. M. le député de Rimouski, la parole est à vous. Oui, M. le ministre.

M. Leitão : ...suspendre pour 30 secondes?

Le Président (M. Bernier) : Oui, mais... Vous voulez une suspension de 30 secondes?

M. Leitão : Juste pour...

Le Président (M. Bernier) : Ah, O.K. Bon, c'est bien, si tout le monde est d'accord, je vais suspendre pour quelques instants. Donc, je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 15 h 40)

(Reprise à 15 h 44)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Nous en étions, encore une fois, aux remarques préliminaires, et maintenant la parole est au député de Rimouski pour un bloc de 20 minutes.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Merci, M. le Président. En commençant, je vais vous dire que c'est quand même un honneur, c'est la première fois que je me ramasse comme porte-parole devant le ministre des Finances. Ce n'est quand même pas rien, c'est...

Le Président (M. Bernier) : Vous en avez l'opportunité.

M. LeBel : Bien oui, c'est...

Le Président (M. Bernier) : Profitez-en, M. le député de Rimouski. J'en suis fort heureux pour vous.

M. LeBel : C'est vraiment... Je remercie le leader du gouvernement de nous permettre ça aujourd'hui.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. LeBel : Non, non, mais c'est vrai, ce n'est quand même pas rien. Le ministre des Finances, il a une grosse semaine aujourd'hui puis il prend son après-midi pour venir nous écouter, même si les porte-parole ne sont pas là, tout ça grâce au leader du gouvernement. Merci beaucoup. Je suis très heureux. Ça ne m'arrivera pas souvent d'agir comme ça, et je suis très heureux de le faire aujourd'hui.

Ce projet de loi là, mes collègues l'ont dit, c'est un projet de loi mammouth qui touche beaucoup de choses, beaucoup de monde, beaucoup de secteurs de la société, il y a plusieurs interventions, et je le comprends, je le vois, j'espère... Parce que ma première commission que j'ai assistée, c'est la commission de n° 10, où ça a bulldozé fort, ça allait vite, je pense que le ministre était pressé. J'espère que pour n° 28, ça va être un peu plus respectueux de ce que l'opposition peut amener comme propositions de changements. Parce que le député de Vanier disait tantôt : Il y a des coûts à chaque jour, bien, il y a des conséquences aussi de ce que ce projet de loi là propose, il y a des conséquences sur les citoyens, qui peuvent payer, eux autres aussi, beaucoup plus à chaque jour s'il y a des éléments de ce projet de loi là... passent. Et moi, je pense beaucoup à ces gens-là sur le terrain, aux familles, entre autres, et à la classe moyenne, qui peuvent se faire rattraper assez rapidement par les hausses de tarifs qui sont proposées dans ce projet de loi là.

Un projet de loi qui est basé sur un principe qui gouverne le gouvernement depuis son élection, qui est l'austérité... Et ça frappe fort, l'austérité. Ça nous frappe fort en région surtout, et on s'aperçoit, dans les régions, puis dans le Bas-du-Fleuve, on le voit régulièrement, puis il y a des groupements sociaux qui sont en train de se mobiliser, il y a des gens d'affaires qui se mobilisent aussi... où on s'aperçoit que les régions, on est comme vus un peu dans la colonne des dépenses du gouvernement. C'est comme si on était une dépense. À chaque fois qu'on parle des régions, on essaie de voir, de détecter la vision du gouvernement par rapport aux régions, on s'aperçoit que c'est une vision où nous voit, les régions, comme faisant partie d'un problème, hein, faisant partie des dépenses, qu'il faut contrôler absolument.

L'exemple, là-dedans, je dirais, quand le patronat a dit que pour les municipalités dévitalisées, on proposait au gouvernement, ici, entre autres, que, pour les municipalités dévitalisées, on devrait amener... subventionner des familles pour les sortir de ces villages-là, puis les amener en ville, les relocaliser. C'est sûr que chez nous, ça donne un coup, là, parce que pour ceux qui connaissent un peu l'histoire dans le Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie, dans les années 70, on a voulu faire ça. On a voulu relocaliser des gens, on a voulu fermer des villages. On en a fermé certains. Et il y a des villages, pas très loin du mien, où je suis né, où les gens se sont mobilisés. Les curés du village ont ramassé le monde, se sont parlés, les églises étaient pleines, ça a brassé fort, parce que jamais ils ont voulu fermer leurs villages. Je pense à Esprit-Saint, je pense à Trinité-des-Monts, les opérations Dignité, Dignité un, Dignité deux. Et ces gens-là, quand ils ont... ces plus vieux, que je rencontre régulièrement, quand ils ont entendu le Conseil du patronat dire : On va relocaliser, je vais vous dire, ils ont pris ça au sérieux, parce qu'ils se souviennent ce que c'était. Ils se souviennent des mobilisations, ils se souviennent des villages fermés et ils se souviennent des familles déplacées, emmenées dans des HLM. Ils se souviennent de la misère que ça avait donné à beaucoup de monde ici, ils ont ça imprimé dans leur mémoire. Et quand ils ont entendu ça du Conseil du patronat, ça a donné un coup. Et ils n'ont pas entendu, du côté du gouvernement, quelqu'un se lever, dire : Non, non, non. C'était tout de suite, il fallait trouver une façon de s'en sortir, il fallait trouver une façon que le président du Conseil du patronat s'excuse ou essaie de trouver une formule pour s'en sortir.

Depuis ce temps-là, on a entendu le ministre du Développement économique parler de nos entrepreneurs de villages comme des rois du village, avec des gros egos. C'est toujours tous ces mots-là qu'il nous sort, ces déclarations-là. On essaie de nous démontrer qu'un village en région, qu'une région, bien, ça coûte cher, puis qu'on devrait trouver des façons de sortir ces villages-là ou ces régions-là de la colonne des dépenses.

Dans mon comté, là, je le sens à chaque jour. Quand je vais dans le comté, ce qu'on me sort : coupures budgétaires aux commissions scolaires ou fusions. Ça, c'est des transports de moins pour les étudiants le midi pour aller manger. Ce n'est pas que des coupures administratives, là, c'est des coupures qui viennent... qui vont toucher des citoyens, des familles, des jeunes familles qui sont dans le besoin souvent. Abolition des postes d'agents de la protection de la faune, puis, quand on ne les abolit pas, on leur dit : Vous ne sortez pas de vos bureaux. Facile, c'est une belle job de protection de la faune quand tu ne peux pas sortir de ton bureau. Tu sais, tu regardes par la fenêtre pour être sûr, je ne sais pas, d'essayer de trouver une façon de... Mais, ça, c'est ce qu'on sent le terrain, c'est que les gens viennent nous voir. Ils viennent nous voir pour nous en parler.

Coupures du budget dans le réseau universitaire à l'UQAR, réforme du projet de loi de la santé... La loi n° 10, là, c'est le branle-bas de combat, là, tu sais, on enlève l'autonomie des CSSS, on a essayé de ramener ça, de centraliser ça en région, mais pour centraliser tout ça proche du ministre, ou le patient est très loin, puis les personnes âgées surtout, les aînés de nos villages qui sont très loin de ces réformes-là.

Coupe du tiers des budgets pour l'entretien du réseau routier dans les Bas-Saint-Laurent; coupes budgétaires aux municipalités; disparition de Solidarité rurale; coupures dans les CLD; coupures dans les budgets de CJE, ou on oblige les CJE à devenir des guichets. On a dit : Là, votre travail d'animation, d'aller voir les jeunes, d'amener des jeunes, qu'ils soient à l'aide sociale ou pas, des jeunes qui ont besoin de services, fini. Vous allez livrer des services aux CLE, puis vous allez devenir des guichets. C'est ça qu'on entend. Vous devez entendre la même chose dans vos bureaux de comté, je suis certain qu'ils vont vous en parler, ces gens-là.

• (15 h 50) •

Diminution importante des budgets pour les programmes RénoVillage, les programmes d'adaptation à domicile pour les personnes handicapées; fin du programme d'entretien de la route verte chez nous; fin du tarif unique pour les CPE, on va en parler; coupures dans les collèges. Les cégeps, dans le Bas-Saint-Laurent, c'est important. Actuellement, on a beaucoup de difficultés à garder les jeunes, et, si on coupe dans leurs services, on coupe dans leurs formations, ça sera encore pire.

Puis les groupes communautaires qui espéraient avoir plus de moyens pour livrer leurs services pour aider leurs membres pour essayer de proposer des choses nouvelles dans nos communautés, bien, ces groupes communautaires là non seulement n'ont pas été augmentés ou n'ont pas reçu l'argent que tous les partis politiques s'étaient entendus pour dire qu'ils avaient de besoin, non seulement ils n'ont pas reçu ces sommes d'argent là, mais ils font les frais du désengagement de l'État en région. Parce que, quand on coupe dans les commissions scolaires, quand on coupe en santé, quand on coupe dans tous ces domaines-là, les citoyens, où vous pensez qu'ils se ramassent? Où c'est qu'ils vont pour essayer d'avoir des services? Ils se ramassent dans des groupes communautaires. Les groupes communautaires sont... Je suis allé rencontrer les gens de Moisson Rimouski, le comptoir alimentaire. Augmentation de, je pense, de 30 % à 35 % des gens qui vont demander des paniers. Et là on ne parle pas que des gens à l'aide sociale, là, on parle d'étudiants, on parle de jeunes familles, des gens qui sont salariés au salaire minimum. Ça, c'est des groupes communautaires qui sont débordés parce que face à l'impact des mesures d'austérité du gouvernement.

Et ce qu'on voit dans le n° 28, c'est : On poursuit dans cette vision-là d'austérité, de régions qui coûtent cher. Et on continue en augmentant les taxes, CPE, tarifs de CPE, l'Hydro, les municipalités. Parce que, la fin des CLD, en bout de ligne, les municipalités vont l'ont toutes dit, là, en bout de ligne, ils vont se rattraper autrement, ils n'auront pas le choix. Puis, bon, ça va être les citoyens qui devront payer pour.

Peut-être que le ministre avait sûrement vu ça, ou ces gens lui ont donné, mais il existe, au gouvernement, un comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. C'est un comité qui est là pour conseiller le ministre et s'assurer que la loi pour lutter contre la pauvreté soit respectée. Ce comité consultatif là a émis un bulletin en février. Je vais vous en donner quelques lignes, mais c'est... Ils précisent, d'entrée de jeu, que «le comité est d'avis que la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale est un projet de société qui concerne l'ensemble du gouvernement, des acteurs sociaux et économiques et des contribuables. Il estime que le contexte d'austérité — c'est le comité qui en parle — actuel ne doit pas compromettre les efforts consacrés à lutter contre la pauvreté...» Il explique qu'un premier principe qu'on devrait respecter, «selon lequel la dignité de la personne constitue un droit incontournable qui devrait être le fondement de toute mesure fiscale et de toute réflexion sur les programmes sociaux. Cette dignité se concrétise par un revenu décent...» Pour le comité, c'est clair que «le niveau actuel du salaire minimum ne correspond pas à cette définition» de revenu décent. Ce que le comité nous dit aussi : «Un autre [grand] principe devrait sous-tendre [à] une évaluation de la fiscalité et d'accroître la progressivité de notre régime fiscal tout en maintenant l'accessibilité et l'universalité des services publics» partout dans les régions, l'accessibilité et l'universalité des services publics. «Parmi les grands constats — que le comité amène — qui se sont imposés, retenons d'abord que la réflexion actuelle sur l'atteinte du déficit zéro ouvre la porte à de nombreux débats et laisse craindre des reculs, dont l'effritement de notre filet de sécurité sociale et la tentation de recourir davantage aux taxes et à la tarification pour maintenir le niveau des revenus de l'État. Selon le comité, ces mesures régressives affectent surtout les contribuables moins fortunés et nuisent à l'accessibilité des services publics. L'effet des hausses tarifaires sur les conditions déjà précaires des personnes en situation de pauvreté, travailleuses ou non, met en évidence l'insuffisance de leurs revenus et le caractère...»

Il y a un impact clair, là, de ce qu'on est en train de proposer pour les CPE, pour les tarifs d'Hydro, pour l'ensemble des augmentations de taxes qu'on est en train de nous proposer. Il y a un impact majeur et très clair sur les personnes qui vivent la pauvreté. Et je rappelle que ces personnes-là, partout, dans les quartiers urbains comme en région, ces personnes-là sont aidées par des groupes communautaires, des gens qui travaillent soit bénévolement ou avec des plus petits salaires, eux autres aussi, qui travaillent pour aller chercher ces gens-là, pour essayer de les aider à s'en sortir, de les conseiller, défendre leurs droits, leur donner des services. Et ces groupes communautaires, actuellement, sont étouffés par l'augmentation des gens qui vont les voir, mais aussi par un sous-financement qui est criant depuis déjà plusieurs années.

Services de garde. Services de garde, toucher les tarifs, un peu comme le disait le député de Chauveau, moi, je dis : Les jeunes à la garderie, là, on devrait les immuniser contre les classes sociales. Il me semble que les jeunes en garderie, ils en ont assez d'être... quand ils seront plus vieux, ils vont être confrontés aux classes sociales puis aux iniquités de salaire. Me semble qu'à la garderie on pourrait leur laisser la paix un peu, qu'ils pourraient... les jeunes en garderie pourraient être sur le même niveau et avoir accès aux mêmes services, tout le monde. J'ai peur un peu... Parce que c'était le fondement même de la politique familiale pour les services de garde, c'est de s'assurer qu'il y ait une équité, que des jeunes de milieux moins fortunés avec des jeunes de milieux plus fortunés soient ensemble dans les services de garde et aient le même milieu de vie pendant une journée et aient les mêmes services éducatifs, pour faire en sorte que certains des jeunes dans les milieux moins fortunés puissent avoir la chance de s'en sortir. Ça faisait partie d'une vision d'un Québec où on luttait contre la pauvreté et on luttait contre les inégalités sociales, et actuellement je pense qu'il y a un grave recul qui est proposé par le projet de loi.

Même chose pour le travail des femmes. On l'a dit, les collègues l'ont dit aussi tantôt, l'arrivée des centres de la petite enfance, ce n'était pas qu'une mesure sociale, c'était une mesure économique qui a permis à beaucoup de femmes d'entrer sur le marché du travail et d'enrichir plusieurs secteurs de notre économie, et actuellement on sent là qu'il y a une brèche et il y a des femmes qui étaient prêtes... qui sont prêtes à y aller, à être dans le marché du travail, qui sont aujourd'hui à reconsidérer tout ça à cause des coûts potentiels des services de garde.

Concernant les régions, juste vous dire que les CRE... Tu sais, là, on veut abolir les CRE, on a décidé ça, le gouvernement a décidé ça. Il s'est levé un matin et il a dit : Bon, on abolit les CRE, c'est terminé, c'est des structures, sans réfléchir à l'impact. Et en plus, ils décident que ça va se faire. On envoie sur le terrain tout le monde puis on annonce aux CRE que c'est fini. On envoie une note, c'est réglé, puis commencez, réfléchissez à la façon que vous allez dissoudre vos organisations. J'ai assisté, le 12 décembre, à une réunion de la CRE, chez nous, où le directeur régional du ministère des Affaires municipales était là, du MAMOT était là, avec une professionnelle, où on nous expliquait comment on allait désintégrer la CRE, comment on allait préparer la fin de la CRE, comment on allait mettre en place le comité de transition, comment... Je me souviens d'avoir posé la question. J'ai dit : Oui, mais pourquoi vous partez ça? Le projet de loi, il n'est pas adopté. Pourquoi le train est parti puis le projet de loi n'est pas adopté? J'ai dit : Peut-être que le gouvernement va entendre raison puis peut-être que l'opposition va pouvoir discuter avec le gouvernement puis on pourra amener des amendements, peut-être que la CRE pourrait rester, modifiée. Bien, non. On a dit : Non, non, la commande, c'est qu'on abolit les CRE, puis on met les comités de transition en place, puis les MRC vont se réunir, puis...

Tout ça était parti le 12 décembre. Je me souviens d'avoir posé la question : Le projet de loi n'est pas adopté, on devrait attendre un peu. Non, non, c'est parti. Puis, la CRE, on ne s'attendait pas à ça. La première réunion de la CRE que j'ai eue après être élu, je me souviens, mon ministre régional, le député de Rivière-du-Loup, était venu à la table et avait expliqué comment la CRE, c'était efficace puis c'était bon pour la région, etc. Et il avait dit : Avec le député de Rimouski, on va travailler bien ensemble pour le développement de la région, faites-vous-en pas. C'est une grande concertation régionale. Bon, peut-être qu'il n'avait pas eu les lignes à l'époque que la CRE allait être fermée, je ne sais pas, là, je ne comprends pas trop, mais à ce moment-là on ne parlait pas de fin des CRE, et, badang, quelqu'un s'est levé un matin et a dit : Fini, les CRE. Fini, les structures.

Même chose pour les CLD. Les CLD...

Je reviens deux secondes sur les CRE. Juste vous dire que les CRE, avant, c'était les CRCD, un autre... du ministre Chevrette, à l'époque, qui avait mis en place une politique de développement régional. Il avait mis en place... il avait donné un mandat aux CRCD. Mais les CRCD, fondamentalement, c'était les anciens CRD qui avaient été formés par les gens du milieu. La concertation régionale, le développement régional, l'appartenance à une région puis de vouloir se parler ensemble, toute la région, pour se développer, c'est un réflexe qui n'a pas attendu qu'un gouvernement décide de le créer, c'est des gens qui se sont mis en place, qui se sont donné les outils pour développer leur région. Et tout ce que les gouvernements ont fait après, c'est de se dire : Bien, il y a un beau mouvement là de mobilisation régionale, il y a un beau mouvement de réflexion, associons-nous, faisons une entente Québec-régions. Essayons de travailler ensemble pour mieux intervenir dans les régions. Le Parti québécois, à l'époque, avec les CRCD, avait donné un mandat de concertation. Ce mandat a été comme repris par le gouvernement libéral, qui a changé le vocable, qui a appelé ça les CRE, mais jamais, jamais personne n'avait mis en doute l'importance d'une concertation régionale puis l'importance d'une vision, d'une planification du développement régional. Aujourd'hui, tout est laissé en plan, puis on pourra en reparler un peu, parce que ce n'est pas que la structure qu'on met en jeu aujourd'hui.

• (16 heures) •

CLD, c'était la même affaire. La création des CLD, c'était pour qu'il y ait moins d'organismes au niveau local. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu du relâchement après, mais ce qu'on est en train de voir actuellement, par la fin des CLD, il va se créer plusieurs organisations de développement d'entrepreneurship. Et, quand le ministre du Développement économique disait que les CLD coûtaient cher en papier pour faire les ordres du jour puis en procès-verbaux pour les réunions, bien je vais vous dire, il va avoir beaucoup plus d'ordres du jour, beaucoup plus de procès-verbaux de plusieurs, plusieurs autres organismes. Ils vont coûter encore plus cher parce qu'il y aura moins de concertation régionale puis il y aura moins d'unités dans le développement local.

Je terminerais en disant que j'ai été surpris. Un coup élu, je ne m'attendais pas à tout ça, je ne m'attendais pas à tout... Je me disais : On va faire du développement, puis on va travailler avec le gouvernement en partenariat, puis on va essayer de trouver des... Je ne m'attendais pas à ça parce que je n'avais jamais entendu ça pendant la campagne électorale. Jamais, jamais, dans les débats, mon candidat libéral m'a dit que, pour lui, les CLD, c'était la fin, ou les CRE, c'était la fin, ou les CJE, c'était la fin. Au contraire, quand on faisait des tournées, il allait partout pour leur dire que ces gens-là faisaient du bon travail, que c'était important pour la région, que c'est important pour Rimouski, puis c'est important que les CPE, puis...

Le ministre régional, même chose, dans des débats, c'était la même affaire : l'importance des CRE, que lui participait aux CRE depuis déjà un bon moment, puis qu'il avait une vision pour la région, puis que c'était en partenariat. Ça fait que ça a été une surprise de voir, quand les libéraux sont arrivés au pouvoir, ce virement de situation, je ne sais pas comment je peux appeler ça, où on dit : Maintenant, c'est terminé, tout ça. Et l'impact que ça a, c'est ce qui est encore plus dommageable. L'impact, c'est que ça touche des gens, des citoyens, des gens, des familles souvent les plus démunies, ça touche les groupes communautaires, qui n'ont pas beaucoup de moyens pour intervenir puis qui ont beaucoup plus de demandes, et ça touche la fierté des régions, qui comprennent que, pour le gouvernement, les régions, c'est devenu comme secondaire, c'est devenu comme un élément du problème, ça coûte cher, ça coûte cher, des routes en région, ça coûte cher, le transport en région, ça coûte cher développer, faire de l'entrepreneuriat en région. Et ça, c'est très dommageable, ça crée un climat très pesant dans nos régions du Québec.

Et j'espère qu'on va s'en sortir un jour et qu'on va trouver une façon de redonner un message d'espoir aux régions, de sorte... où ils pourront penser que l'État québécois est un partenaire avec eux autres, est un partenaire du développement, un partenaire qui reconnaît leurs spécificités, qui est prêt à moduler les programmes qui sont faits au niveau national et qui reconnaît que, vivre en Gaspésie, que vivre en Abitibi, que vivre dans le Bas-Saint-Laurent, que tout ça, ça fait partie d'un contrat social québécois. Si on veut occuper notre territoire, si on veut l'occuper, notre Québec, bien, il faut s'assurer... Peut-être qu'il y a des choses qui coûtent plus cher en région. C'est vrai, la route, elle va coûter toujours plus cher aller plus loin, mais c'est important si on veut que notre Québec progresse, que notre Québec progresse de partout avec l'aspect régional et rural tant qu'urbain.

Il y a déjà eu un rapport qui a été publié du Conseil des affaires sociales qui disait, là, il y avait deux Québec dans un, mais c'est à partir de ce rapport-là que tout s'est mobilisé dans les années 80, 90. Je ne voudrais pas revenir... Puis je sens qu'aujourd'hui on revient tranquillement aux deux Québec dans un. Même, l'espérance de vie, il y a des différences entre les régions rurales et les régions urbaines, dans des quartiers plus pauvres et les quartiers plus riches, et ça, il faut vraiment s'attaquer à tout ça. Ma vision du Québec, c'est une vision des régions, la vision du monde rural, c'est une vision d'équité, avec moins de pauvreté, et c'est là-dessus qu'il faut travailler. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Rimouski, de votre présentation. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui ont des remarques préliminaires? Non. Donc, je vous remercie pour ces remarques préliminaires.

Est-ce qu'il y a des motions préliminaires? S'il n'y a pas de motion préliminaire... Oui, il y a une motion préliminaire? Oui, M. le député de Gaspé.

Motion proposant d'entendre Solidarité rurale du Québec

M. Lelièvre : Oui, M. le Président, j'aimerais, à ce moment-ci, déposer une demande, en vertu de l'article 244, pour témoigner de l'importance :

«Que la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 28, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016, [tienne] des consultations particulières, et qu'à cette fin elle entende [un organisme extrêmement important, qui n'a pas été entendu à date, qui s'appelle] Solidarité rurale du Québec.»

Donc, c'est une demande que j'aimerais vous déposer et, si vous permettez, je pourrais vous expliquer dans quelle mesure je considère que cet organisme-là pourrait être entendu... ou devrait être entendu.

Le Président (M. Bernier) : Oui, bien, si vous voulez me la remettre, là, puis on va demander de faire une photocopie pour que tout le monde puisse en prendre connaissance. Vous pouvez procéder... Je vous laisse faire ça. Je vais le regarder au niveau admissibilité, là, mais vous pouvez débuter votre présentation.

M. Gaétan Lelièvre

M. Lelièvre : Oui. Donc, on a mentionné depuis... Merci, M. le Président. On l'a mentionné depuis le début de la séance d'aujourd'hui, plusieurs organismes ont été entendus, mais malheureusement certains ne l'ont pas été, certaines personnes également. Parmi la liste des organismes et personnes qui ont soumis leur demande pour être entendus, on dénote notamment l'organisme Solidarité rurale du Québec.

Solidarité rurale du Québec est un organisme qui a été créé en 1991, donc il y a plus de 23 ans, et c'est un organisme qui a agi depuis 1997, et ce, qu'importent les gouvernements qui se sont succédé... Solidarité rurale a agi comme instance-conseil au gouvernement du Québec...

Le Président (M. Bernier) : ...

M. Lelièvre : Oui, O.K. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Vous avez 30 minutes.

M. Lelièvre : Je peux poursuivre?

Le Président (M. Bernier) : Oui.

M. Lelièvre : Oui. Donc, Solidarité rurale du Québec a agi comme instance-conseil au niveau de l'ensemble des différents gouvernements qui se sont succédé pour agir, c'est ça, à titre d'instance-conseil sur toute question touchant ou se rapportant à la ruralité au Québec. C'est ce qui nous a amenés notamment à l'émission de plusieurs avis qui ont été émis à la demande des différents gouvernements et qui ont été émis par l'organisme qui a assumé avec brio, là, son rôle d'instance-conseil en matière de ruralité.

Donc, depuis 1997, on parle de tout près de 20 ans maintenant. Et cet organisme-là était subventionné en partie par son membership, composé d'une vingtaine d'organismes nationaux, et d'au-delà de 200 personnes également, qui étaient à titre individuel, soient des professionnels, différentes personnalités étaient également membres de Solidarité rurale.

Parmi les membres organismes qui étaient membres de Solidarité rurale, certains le sont toujours aujourd'hui malgré la coupure budgétaire importante qui a été affligée. On retrouve notamment le monde municipal : la Fédération québécoise des municipalités, l'Union des municipalités du Québec, l'association des conférences régionales des élus, l'Association des CLD du Québec, l'UPA, donc, représente certains des organismes qui étaient membres, là, depuis sa fondation.

On se rappelle que c'est un organisme qui a été mis en place surtout à partir du monde rural et de l'Union des producteurs agricoles par l'entremise de son président de l'époque; Jacques Proulx avait été l'un des fondateurs, là, de l'organisme, il a assumé la présidence à de nombreuses reprises. Et Mme Claire Bolduc, qui a pris la pôle il y a quelques années pour assumer aussi, avec beaucoup d'efficacité, beaucoup d'intérêt, la présidence de cet organisme national.

Il y a un mémoire qui a été déposé à la commission, mais ce mémoire n'a pas pu être présenté. Moi, ça m'apparaîtrait important de revenir sur ce mémoire-là, sur des éléments qui ont été mentionnés, et idéalement de faire comparaître l'instance qui en avait fait la demande, et, malheureusement, ça n'a pas été accepté. Vous savez, dans le cadre du développement local et régional, il y a notamment la Politique nationale de la ruralité, la PNR trois, communément appelée. La Politique nationale de la ruralité, dans le fond, c'est une politique qui intervient surtout au niveau du monde rural, mais le monde rural, c'est quand même tout près de 1 000 municipalités sur 1 100 au Québec. Donc, 1 000 municipalités sur 1 100 qui étaient admissibles à la Politique nationale de la ruralité, qui, bon, pour la période 2014‑2024, totalisait des budgets de tout près d'un demi-milliard de dollars, 470 millions, et qui se répartissaient à travers différents volets. La Politique nationale de la ruralité, c'est un dossier qui émanait du ministère des Affaires municipales; à titre de ministre délégué aux Régions, j'étais responsable de cette politique-là. Et, parmi les organismes qui agissaient à titre de comité... au sein du comité aviseur qui dressait des recommandations au ministre porteur de la PNR, en l'occurrence le ministre délégué aux Régions, bien Solidarité rurale joue un rôle majeur à ce niveau-là, et ce, au fil de tout près des 20 dernières années.

• (16 h 10) •

Un des mandats de Solidarité rurale était de s'assurer, je dis bien «s'assurer», que le monde rural puisse bénéficier de l'ensemble des budgets mais aussi des autres moyens à sa disposition pour permettre une occupation digne des territoires. Et c'est un mandat que Solidarité rurale a toujours relevé avec un grand brio. Et on peut dire que c'est un organisme aussi qui bénéficiait, je dirais, d'un large consensus, pour ne pas dire une certaine unanimité dans la société. Solidarité rurale a toujours eu un discours qui était, à mon avis, extrêmement bien calibré. C'est un discours qui était constructif puis c'était un discours qui était également extrêmement visionnaire, mais aussi respectueux de l'ensemble des intervenants, des organismes et de l'ensemble également, je dirais, des différents gouvernements qui se sont remplacés. Je pense qu'en aucun moment on a pu reprocher à Solidarité rurale de ne pas assumer son rôle d'instance-conseil auprès de l'État québécois avec toute la diligence puis les compétences qui étaient requises à cette importante fonction.

Dans le processus de développement local et régional, on a parlé beaucoup, dans nos différentes interventions, depuis le début de la séance d'aujourd'hui, de l'importance des outils de développement pour réussir à assumer un développement local et régional maximal. Mais je vous dirais que Solidarité rurale, parce qu'on n'a pas beaucoup parlé, hein, pratiquement pas, dans nos interventions jusqu'à aujourd'hui, Solidarité rurale, je dirais, se campait dans une position ou dans un segment du développement local et régional qui était très particulier, en l'occurrence notamment tout le volet rattaché à la ruralité, et c'est un...

Vous savez, la ruralité a évolué beaucoup dans les dernières années. Quand on parlait de ruralité il y a une quinzaine d'années, on était souvent portés à penser que la ruralité, c'est un mode de vie qui était appelé à disparaître, hein? Puis mon collègue de Rimouski tantôt a parlé de différentes expériences, là, plutôt négatives qui se sont déroulées au sein de la ruralité, notamment en Gaspésie, dans le Bas-Saint-Laurent et dans d'autres régions québécoises. Les opérations Dignité, sont un des exemples, je pense, négatifs à ne jamais reproduire.

Mais, du côté de Solidarité rurale, on avait pris comme mandat non pas de défendre strictement la ruralité, mais aussi de la représenter de façon... avec fierté. Puis ce qui fait qu'aujourd'hui la ruralité, bien, elle n'a plus le même visage qu'elle pouvait avoir il y a une vingtaine ou une trentaine d'années, quand on a commencé à en parler, c'est-à-dire qu'aujourd'hui la ruralité s'exprime de façon très différente, on retrouve de plus en plus des villages qui sont, en termes de population, je dirais, relativement bas en termes de capacité démographique, mais en termes de qualité de vie, en termes de prospects de développement, de perspectives d'avenir, on retrouve beaucoup, beaucoup de potentiel au sein de certains de ces villages qui représentent la ruralité de 2015. Et, ça, si aujourd'hui on peut être fiers de donner des exemples d'occupation de territoire en milieu rural, bien, c'est en bonne partie grâce au travail acharné qu'ont livré les différents acteurs de Solidarité rurale.

Malheureusement, Solidarité rurale a dû mettre fin à une grande partie de ses activités il y a quelques mois, suite à l'annonce, là, du gouvernement du Québec de ne pas reconduire l'aide financière annuelle d'au-delà de 700 000 $ qui était versée à Solidarité rurale depuis pratiquement les tous débuts de ses activités, donc depuis près d'une vingtaine d'années. Donc, l'organisme demeure toujours en opération, son membership est opérant, on parle de 200 membres à travers le Québec, une vingtaine d'organismes nationaux, comme je le mentionnais tantôt, par exemple, de la trempe de la Fédération québécoise des municipalités, l'Union des municipalités du Québec, etc. Mais c'est sûr que l'organisme... Je crois que ça aurait été intéressant d'entendre l'organisme pour que les représentants puissent venir nous présenter comment eux envisagent le futur, comment eux envisagent la défense de cette ruralité-là, hein, qui est partie prenante du Québec, avec pratiquement des budgets réduits à très, très peu de choses : on parle d'une coupure de budget d'au-delà de 80 %. Donc, la plupart du personnel — on parlait d'une dizaine d'employés — a été remercié, et finalement on se ramasse avec un organisme qui tente de poursuivre son mandat, mais avec pratiquement un actionnariat basé sur le bénévolat, puisque ce seront dorénavant des membres du conseil d'administration qui devront tenter de répondre le mieux possible, là, je dirais, au dur défi de défendre et de représenter la ruralité au Québec.

Donc, ça aurait pu être extrêmement intéressant d'entendre ces gens-là parce que c'est un peu un parallèle qu'on peut faire avec la conférence régionale des élus, qui a été abolie. Bien, du côté de Solidarité rurale, le gouvernement ne l'a pas aboli parce qu'il n'y avait pas de loi qui constituait Solidarité rurale, mais c'est un organisme qui était constitué en vertu de la partie III de la Loi sur les compagnies. Mais il reste qu'en enlevant au-delà de 80 % du budget d'opération de l'organisme c'est pratiquement une mise à mort de l'organisme qui a été décidée en même temps. Donc, j'ai assisté à Trois-Rivières en janvier dernier à la dernière assemblée générale spéciale de Solidarité rurale, qui avait été convoquée pour, malheureusement, là, mettre fin à l'ensemble du personnel et à couper l'ensemble des postes, là, qui existaient depuis une dizaine d'années, minimalement, là, au sein de Solidarité rurale.

J'aimerais savoir si, dans le projet de loi n° 28, à partir des quelques éléments que je viens de mentionner — puis on pourra poursuivre par après —j'aimerais savoir si on a évalué... Puis là, ma question s'adresse à M. le ministre : J'aimerais savoir, parmi les éléments qui nous ont emmenés à déposer le projet de loi n° 28, est-ce qu'on a pris en compte le rôle très spécifique et exclusif qu'assumait Solidarité rurale au sein du développement local et régional québécois?

(Consultation)

Le Président (M. Bernier) : La problématique que j'ai, M. le député, c'est que votre temps de présentation, vos remarques sur cette motion ne peuvent pas être fractionnés. Donc, si vous demandez au ministre de répondre à vos questions, à ce moment-là, ça vient de mettre fin à votre temps. C'est pour ça que ce que je vous conseille, c'est de poursuivre votre présentation et, à la toute fin, si vous avez une question à adresser au ministre, bien, là, à ce moment-là, le ministre pourra prendre la parole pour vous répondre s'il le désire. Mais c'est parce que vous ne pouvez pas fractionner votre temps. Vous avez le droit à 30 minutes pour faire votre exposé et je ne voudrais pas être dans l'obligation, là, de revenir et vous couper votre temps là-dessus. Mais je vais m'assurer, et on va faire des vérifications là-dessus.

M. Lelièvre : O.K.

Le Président (M. Bernier) : Là, je vous en prie de poursuivre, là, puis je vais des vérifications là-dessus.

M. Lelièvre : Je vous remercie, M. le Président, pour l'information, qui est importante. Dans ce cas-là, je vais poursuivre ma présentation, puis je conserverai les questions plus vers la fin de ma présentation.

Donc, du côté de la Solidarité rurale, on parle d'un organisme qui a au-delà de 20 ans d'existence au Québec, et, je tiens à le préciser à nouveau, c'est un organisme qui avait un rôle unique et, je dirais, aucune instance ne jouait un rôle parallèle ou semblable, c'est vraiment un rôle exclusif qui avait été reconnu par le gouvernement, par l'ensemble des gouvernements du Québec, là, pour le reconnaître à titre d'instance-conseil. Mais, au-delà de ça, on parle d'une reconnaissance par... quasi unanime de l'ensemble des intervenants locaux, régionaux et municipaux du Québec. Donc, ce n'est quand même pas rien, là, on parle d'un organisme qui a une crédibilité, qui a bâti une crédibilité, qui a bâti une expertise au fil du temps et qui, suite à la décision ou au contenu du projet de loi n° 28, bien, verra probablement son existence lourdement affectée, sinon peut-être même aller jusqu'à, je dirais, la dissolution de l'organisme, compte tenu que plus de 80 % de ses budgets ont été retirés suite à certaines décisions, certains articles contenus dans le projet de loi n° 28 et dans le budget 2014‑2015.

Donc, une décision extrêmement importante, lourde de conséquences. Puis mon collègue, tantôt, de Rimouski a parlé de la période sombre, hein, des opérations Dignité dans certaines régions. Bien, aujourd'hui, moi, je trouve extrêmement dommage, au Québec, qu'on envisage de se passer d'un organisme comme Solidarité rurale, parce qu'on peut penser qu'on est loin de ces actions qui veulent, finalement, toujours attaquer les régions, puis notamment les régions rurales, mais, quand on regarde, malheureusement, certaines déclarations des derniers mois... Puis on dirait que ça n'a jamais été aussi pire, là, c'est vraiment décevant, c'est vraiment inquiétant d'entendre, notamment, la fameuse déclaration du Conseil du patronat du Québec, qui était suivi d'une décision gouvernementale dans les jours qui ont suivi. Je peux vous dire que, pour les intervenants des régions, ça fait mal à entendre, puis c'est extrêmement préoccupant, parce que, quand on entend un organisme aussi, quand même, crédible, là, en tout cas qui l'était avant sa déclaration... c'est sûr qu'avec cette déclaration-là, sa crédibilité en prend un coup, mais c'est quand même le Conseil du patronat du Québec, là, qui affirme que le gouvernement... puis là, ce n'est pas une question qui est posée, là, c'est vraiment une affirmation, on affirme qu'on devrait prendre des budgets dédiés à la dévitalisation pour relocaliser les gens des régions. C'est quand même lourd de conséquences. Je comprends que le président a dû préciser ses pensées et retirer en bonne partie ses paroles, mais, pour moi, là, ça ne me rassure pas davantage comme député de région puis comme critique aux régions et aux Affaires municipales au niveau de la première opposition gouvernementale. C'est clair que ça ne me rassure pas, parce que la parole a été dite, puis c'est quand même une personne, là, qui représente beaucoup d'organisations; on parle du Conseil du patronat. Et que cette déclaration-là soit faite publiquement, c'est quand même inquiétant et préoccupant, puis c'est une des déclarations qui s'ajoutent malheureusement aux nombreux défis que doivent relever les régions actuellement.

• (16 h 20) •

On a parlé tantôt de la question des CLD, de la question des CRE, la question des conseils d'administration d'hôpitaux, les commissions scolaires... On va vivre des territoires de commission scolaire de plus de 700 kilomètres de long, là, si la carte des fusions de commission scolaire est adoptée telle quelle. Bien, 700 kilomètres, là, pour imager ça, c'est ce qu'on propose dans certaines régions, en Gaspésie, en Abitibi. Mais 700 kilomètres, c'est comme si on proposait ou si on mettait en place une commission scolaire qui débutait à Ottawa et dont le territoire se terminerait à Rivière-du-Loup. Est-ce qu'on oserait recommander aux gens des villes, hein, de fonctionner ou... d'accepter une commission scolaire de 700 kilomètres de long, dont le territoire serait d'Ottawa à Rivière-du-Loup? Je pense que poser la question, c'est y répondre. C'est non. Mais, dans plusieurs régions, on doit malheureusement composer avec une carte de fusion des commissions scolaires qui nous proposent des pareils territoires.

Donc, c'est tout ça, les défis des régions, actuellement. C'est la santé, c'est l'éducation, c'est le développement local, c'est le développement régional. L'occupation du territoire, vous savez, ça touche tous les niveaux, hein? J'en parle souvent à des collègues puis... quand j'ai l'occasion d'insister sur l'importance puis toute, je dirais, l'étendue de la question de l'aménagement et du développement du territoire puis de l'occupation du territoire... Ce n'est pas un domaine sectoriel, c'est un domaine intersectoriel. Puis comme critique aux régions, bien moi, j'ai des gens qui m'interpellent, tantôt pour des dossiers de santé, tantôt pour des dossiers de développement économique, tantôt pour des dossiers de jeunesse, des dossiers de ressources naturelles. C'est ça, l'occupation du territoire. C'est un monde en soi, c'est très diversifié.

Et, parmi les organismes qui avaient pour mandat de développer cet aspect-là ou de défendre les intérêts de la ruralité, bien, malheureusement, sur la liste des organismes, on peut les compter sur les doigts d'une main, mais essentiellement ça se limite à Solidarité rurale. Donc, le fait que cet organisme-là n'ait pu être entendu au sein de la commission, je suis convaincu que ça nous prive d'informations qui auraient pu être extrêmement pertinentes et d'autant plus pour ceux qui connaissent la présidente de l'organisme. C'est une personne extrêmement engagée, extrêmement compétente. Et c'est clair que, si on avait pu bénéficier de la présentation de par les administrateurs d'un organisme de grande qualité comme Solidarité rurale, notamment par la présence de Mme Claire Bolduc, qui assume la présidence, ça aurait été très enrichissant. Et cette personne-là a une façon de présenter les choses qui fait qu'on ne peut qu'être intéressés et être extrêmement sensibilisés aux propos qu'elle nous amène.

Donc, à mon avis, c'est une perte, là, pour l'organisme et c'est aussi une perte pour les membres de cette commission, qui aurait été empreinte, là, d'une présentation très particulière puis qui aurait fait ressortir tous les aspects de la ruralité, des aspects qu'on ne retrouve malheureusement pas dans l'ensemble des autres mémoires qui ont été présentés. Et ça, je dis ça sans dénigrer la qualité des mémoires, qui sont extrêmement pertinents, mais, chacun étant compétent dans son domaine et Solidarité rurale ayant un mandat exclusif, bien, c'est clair qu'on a perdu, à mon avis, une information extrêmement de grande qualité, pertinente, d'autant plus avec les enjeux qui attaquent le monde rural dans les dernières années, mais plus principalement dans les derniers mois. Donc, ça aurait été une information complémentaire aux autres informations reçues des différents organismes et personnes qui ont participé à cette commission-là. Donc, je déplore qu'on n'ait pas accepté de les entendre. C'est une forme d'affront, à mon avis, là, à une grande partie des résidents, des occupants des régions, hein, que sont les occupants du monde rural. Puis je le rappelle, là, la Politique nationale de la ruralité, qui a été adoptée en 2002 par un premier gouvernement du Parti québécois, qui a été reconduite par un gouvernement libéral et reconduite pour une troisième fois par le gouvernement du Parti québécois, dont j'avais l'honneur d'être le représentant à titre de ministre délégué aux Régions, bien, cette Politique nationale de la ruralité demeure toujours en vigueur. Mais, malheureusement, on perd une instance nationale. La seule instance-conseil, le seul organisme qui a une expertise pointue dans la ruralité au Québec se voit privé de plus de 80 % de son budget. Donc, sa survie étant menacée, moi, je me questionne beaucoup sur les impacts de cette possibilité de perdre un organisme aussi crédible que Solidarité rurale.

Et je suis convaincu que notre commission serait mieux servie si on pouvait entendre cet organisme-là. Donc, j'espère qu'on va écouter ma demande. J'ai parlé aux représentants de l'organisme dans les dernières semaines. C'est sûr qu'eux sont déçus de ne pas avoir été invités. Ils avaient quand même déposé un mémoire, là, d'une vingtaine de pages. Mais, au-delà de la quantité, hein, de pages, là, ce n'est pas toujours un gage de qualité, mais je peux vous dire, pour l'avoir regardé à de nombreuses reprises, c'est un document de grande qualité. C'est sûr qu'il a été déposé. Je ne sais pas si les membres de la commission en ont pris connaissance, mais ce serait important de le faire tout du moins, parce qu'il y a des éléments qui sont vraiment spécifiques qu'on ne retrouve pas dans aucun autre des mémoires qui ont été déposés ici, là, lors des différentes commissions particulières.

Donc, M. le Président, c'est ce que je voulais vous amener comme demande aujourd'hui. C'est une procédure qui est prévue dans notre mode de fonctionnement à l'article 244. Et je vous dépose vraiment cette demande-là avec beaucoup d'intérêt. Et j'aimerais maintenant peut-être adresser mes quelques questions à M. le ministre, notamment la première, qui consistait à savoir : Est-ce qu'on a évalué les impacts du projet de loi n° 28 sur l'avenir d'un organisme comme Solidarité rurale, qui se voit privé d'une grande partie de son budget? Et l'autre question, c'est : Advenant la dissolution de Solidarité rurale, qui est la seule instance-conseil au gouvernement en matière de ruralité, qui dorénavant assumera ce rôle auprès du gouvernement du Québec? Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Avant de vous donner la parole, M. le ministre, je veux apporter les précisions suivantes. Le proposeur de la motion a 30 minutes. Donc, M. le député de Gaspé avait 30 minutes. Le représentant du chef de l'opposition, O.K., qui se trouve à être ici aujourd'hui, le député de Rimouski, a également 30 minutes. Le représentant du chef du deuxième groupe d'opposition a également 30 minutes. O.K.? Les autres députés ont 10 minutes. En ce qui concerne la partie gouvernementale, O.K., le représentant du premier ministre, qui peut être identifié par vous ou par quelqu'un d'autre, a 30 minutes. Les autres députés ont 10 minutes. Au moment où vous allez prendre la parole pour répondre, exemple, si vous décidez de répondre aux questions du député de Gaspé, vous allez donner vos réponses, vous allez prendre le temps, vous avez le droit, si vous me dites que vous êtes représentant du premier ministre, vous avez droit à 30 minutes, si vous me dites que c'est quelqu'un d'autre, vous avez le droit à 10 minutes. Mais, une fois que vous allez avoir utilisé votre temps de réponse, par la suite, c'est terminé en ce qui vous concerne. D'accord? Les règles sont claires? Merci. Est-ce que vous prenez la parole?

M. Carlos J Leitão

M. Leitão : Je prends la parole, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre... Vous prenez la parole comme...

M. Leitão : Représentant du...

Le Président (M. Bernier) : Du premier ministre?

M. Leitão : Oui.

Le Président (M. Bernier) : La parole est à vous, M. le ministre. Vous avez le droit de 30 minutes de présentation.

M. Leitão : Merci. Et je ne vais certainement pas prendre 30 minutes. Je veux juste mentionner quelque chose, quelques petites choses d'abord. Ce projet de loi, le p.l. n° 28, a été déposé à la fin de novembre. Nous sommes maintenant presque à la fin de mars, et nous n'avons même pas encore commencé l'étude article par article. Je commence sérieusement à douter de la coopération que les deux partis d'opposition veulent...

Le Président (M. Bernier) : Je veux juste vous dire, il faut faire attention dans nos paroles. On ne peut pas mettre en doute la parole et les positions des députés.

M. Leitão : O.K. Je m'excuse.

Le Président (M. Bernier) : Donc, je vous invite à être prudent dans vos remarques.

M. Leitão : Je serai prudent, comme d'habitude.

Le Président (M. Bernier) : Oui, je sais. Vous êtes un homme prudent. Vous êtes un homme prudent, mais je vous invite à le faire.

• (16 h 30) •

M. Leitão : Et, si je ne peux pas douter, je ne doute pas. Je ne doute pas, mais je constate que nous sommes maintenant rendus au mois de mars et on n'a pas encore commencé l'étude article par article de ce projet de loi, qui est très important pour le retour à l'équilibre budgétaire.

Pour ce qui est de la question précise de ce groupe-là, Solidarité rurale, ils étaient sur la liste. Ils étaient invités à venir participer. Ils se sont désistés. Ils ont présenté leur mémoire, nous avons pris connaissance de leur mémoire, je ne vois pas, absolument... raison pourquoi on devrait maintenant interrompre nos travaux pour entendre leur présentation puisqu'ils nous ont fait part de leur mémoire, que nous avons lu, nous avons pris connaissance et que... était très éloquent, bien sûr, mais qui était aussi dans la même lignée que d'autres groupes qui sont venus, comme l'Association des CLD, le Réseau des CRE, la coalition Touche pas à ma région!, donc je ne vois pas qu'est-ce que ça apporterait de nouveau à notre débat de ne pas procéder le plus rapidement possible avec l'analyse article par article. Et c'est tout le temps que je vais prendre. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres personnes qui veulent prendre... Bon. M. le...

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Bien, vous, votre temps est malheureusement terminé, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre : J'avais deux questions. Est-ce que je peux avoir une réponse à ma deuxième question?

M. Leitão : Excusez-moi, c'était quoi, la question?

M. Lelièvre : C'était à savoir, compte tenu de la disparition de l'organisme...

Le Président (M. Bernier) : ...je peux le permettre, là, mais normalement...

M. Lelièvre : Pardon?

Le Président (M. Bernier) : Je vais le permettre, de bon aloi, là, mais...

M. Villeneuve : Une belle collaboration, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : En collaboration. Allez-y, M. le ministre, si vous voulez répondre à la deuxième question, là.

M. Leitão : Juste me rappeler la question, s'il vous plaît.

M. Lelièvre : Est-ce que je peux présenter ma question?

Le Président (M. Bernier) : Oui, allez-y, dites-le.

M. Lelièvre : Est-ce que le gouvernement a prévu qui allait remplacer, comme instance-conseil au gouvernement, Solidarité rurale suite à sa disparition?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Je n'ai pas d'organisme précis en vue, mais, comme j'ai mentionné tantôt, il y a plusieurs organismes qui ont présenté des mémoires à la commission, à notre commission ici. Je ne pense pas que ça soit particulièrement pertinent, à ce moment-ci, de choisir ou désigner un organisme.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Qui prend la parole? M. le député de Berthier, vous avez 10 minutes.

M. André Villeneuve

M. Villeneuve : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, d'abord, j'apprécie votre ouverture, M. le Président, et j'apprécie aussi que le ministre ait pris la peine de répondre à la question, la question, d'ailleurs, que j'entends... La réponse que j'entends de M. le ministre, c'est que, selon lui, il n'y aurait pas d'élément nouveau par rapport à l'audition, qu'on entende, finalement, Solidarité rurale du Québec.

Vous savez, lorsqu'on fait la demande comme ça aux membres de la commission, M. le Président, pour entendre un organisme, vous comprendrez qu'on a fait nos devoirs et on a parlé aux représentants de l'organisme pour savoir s'ils seraient prêts à être entendus par la commission. S'ils ne se sont pas prévalus à l'époque, donc, d'être entendus, c'est la réponse que le ministre a donnée, peut-être était-ce parce que personne n'avait, à ce moment-là, personne ou très peu de gens avaient mesuré l'ampleur, l'ampleur du projet de loi n° 28 et les dégâts qu'il provoque présentement dans le monde rural du Québec. Je soumets cette hypothèse bien humblement, là. Mais, bon, il n'en demeure pas moins qu'à l'heure où on se parle l'organisme, les représentants de l'organisme, si la décision de la commission était celle-ci, de les entendre, ils se feraient un grand plaisir de venir ici vous donner, un peu, leur vision du projet de loi n° 28.

Donc, ce faisant, j'ouvre la porte toute grande de collaboration avec la partie gouvernementale, notamment M. le ministre, s'il ne serait pas prêt, justement, à considérer le fait de les entendre. Parce que, élément nouveau, bien, écoutez, moi, je pense qu'on ne doit jamais faire l'économie de l'information. C'est d'ailleurs... je dis souvent que c'est l'information, finalement, qui est le coeur même de la politique, hein? Quand on n'a pas toute l'information, c'est plutôt difficile de prendre la meilleure des décisions. On peut toujours prendre des décisions, bien sûr, mais sera-t-elle la meilleure? Pas sûr. Alors, j'ouvre la porte et j'ose espérer que la partie gouvernementale entend cette demande-là. Et, alors donc, ils sont prêts à venir vous faire part, finalement, du projet de loi n° 28.

Ceci étant dit, M. le Président, j'ai eu l'occasion... parce que, bon, je sais que c'est un peu redondant, parce que je le dis régulièrement ici, à l'Assemblée nationale, et j'en suis très fier, d'ailleurs, j'ai eu l'occasion, M. le Président, d'être maire et préfet, un privilège extraordinaire. Et, à titre de maire, j'ai eu l'occasion de travailler avec des organismes comme Solidarité rurale, parce que c'est un organisme qui est très facile d'accès, c'est des gens qui sont sur le terrain, mais vraiment sur le terrain. Si vous voulez avoir le pouls, là, d'une région, si vous voulez avoir le pouls des régions du Québec, j'allais dire, 1-800-Solidarité rurale, là, mais c'est à peu près ça, vous pouvez les appeler et vous allez voir, M. le Président, vous allez être étonné de la connaissance fine qu'ils ont du développement des territoires. En fait, pour eux, c'est le coeur de leur engagement et je peux vous dire une chose, pour avoir discuté avec les gens qui travaillent dans cette, j'allais dire, institution, parce que je pense qu'on peut parler d'institution, M. le Président, et c'est de 1991, je pense, alors c'est carrément une institution qui est en péril aujourd'hui. Toute cette expertise, tout ce travail, cette reconnaissance du milieu, mais aussi cette crédibilité qu'ils ont dans le monde rural, c'est étonnant, c'est étonnant. Tantôt, je disais : Difficile d'avoir l'unanimité, mais je pense qu'on pourrait pratiquement vous dire que sur le territoire du Québec, là, quand vous allez dans les régions du Québec et vous parlez de Solidarité rurale, tout ce qu'ils ont fait pour l'avancement des régions au Québec, les recherches qu'ils ont effectuées, les partenariats de recherche qu'ils ont faits aussi, je pense vous dire une chose : Je pense que leur crédibilité, M. le Président, est inattaquable, mais vraiment inattaquable.

Alors, là, la question tantôt, c'était : Est-ce que le projet de loi n° 28 vient sonner le glas, vient finalement annoncer la mort de Solidatiré rurale du Québec? Bien, écoutez, poser la question, c'est un peu y répondre. Quand vous vous faites couper 80 % de votre budget, vous vous faites couper 80 % de votre budget, M. le Président, c'est très clair que vous venez, d'une certaine façon, de signer l'arrêt de mort de l'organisme. J'entends le ministre quand il répond : Bien, écoutez, il y a eu beaucoup d'organismes qui soit déposent des mémoires ou soit sont intervenus pour le projet de loi n° 28, sont venus nous rencontrer. Mais ça revient à ce que je vous disais tantôt, c'est hallucinant, parce que le ministre n'est pas capable de nous dire que la mort annoncée par les mesures du projet de loi n° 28, par les coupures à Solidarité rurale, vont créer un vide. Il n'est pas capable de nous dire quel organisme le gouvernement va mettre en place ou choisir, et c'est là qu'on crée un vide, et c'est là que c'est inacceptable, M. le Président, de créer un tel vide.

Moi, je ne suis pas contre le changement, loin de là, le changement, c'est la base même de l'avancement, si on ne change pas, on est sclérosé et puis on va disparaître, il faut changer, bien sûr, c'est la base même du changement. Mais, quand je vois que le gouvernement veut apporter des changements, et ça, cette fois-ci, c'est une façon, je vous dirais, un peu indécente de le faire, mais qu'on n'a pas... Ils ne sont pas capables de nous dire : Bien, écoutez, il y aura, je ne sais pas, moi, une chaire de recherche ou des chercheurs attitrés, ou on verra comment on va... Voici, on a un plan. Mais on n'a pas de plan, le gouvernement n'a pas de plan. Il dit : On coupe. Alors, on passe le bulldozer, on détruit. Qu'est-ce qui va être reconstruit? On ne le sait pas. On va y penser. Ça n'a aucun sens, M. le Président, de procéder d'une façon comme celle-là.

Moi, je pense que les citoyens du Québec, là, ils s'attendent d'un gouvernement, là, à ce qu'il dise ce qu'il va faire, avoir une vision. Une vision, je l'ai déjà dit d'ailleurs au salon bleu, M. le Président, une vision, ce n'est pas un point de vue. Une vision, c'est un ensemble de points de vue. Et, à ce titre-là, Solidarité rurale était un point de vue important, très important, pour le développement des régions du Québec.

Je reviens à la loi, j'en ai parlé tantôt, que nous avons tous adoptée sur l'occupation et la vitalité des territoires. Solidarité rurale a été consultée à l'époque, et ils ont fait un fichu beau travail, tout comme l'ensemble des partenaires qui ont contribué à ce que nous, parlementaires, ici à l'Assemblée nationale, votions cette loi, M. le Président. Et cette loi, ce qu'elle préconise, c'est l'occupation, la vitalité, le dynamisme de l'ensemble des territoires qui composent le Québec.

Et là présentement, M. le Président, on vient encore une fois démontrer le manque de vision du gouvernement actuel. Et, si ce n'est pas un manque de vision, eh bien, qu'il nous l'exposent, leur vision, M. le Président, ce n'est pas compliqué. Si l'accusation que je porte envers le gouvernement aujourd'hui, présentement, qu'il n'a pas de vision par rapport au développement économique des régions en abolissant les CRE, en sabrant dans les budgets des CLD, si l'accusation que je porte contre le gouvernement, M. le Président, et qu'elle est fausse, bien, ils n'ont qu'à déposer la vision qu'est la leur, que personne ne connaît.

• (16 h 40) •

Et ça, M. le Président, Ça fait quoi? Ça induit, ça induit dans l'esprit des gens une crainte de la suite des choses. On ne sait pas où on s'en va, les gens ne savent plus où va le gouvernement. Et ça, ce faisant, vous savez, comme moi, M. le Président, que la crainte amène la paralysie. La crainte, ce qu'elle fait, M. le Président, elle fait que les gens, pour un moment, pour un instant à tout le moins, arrêtent leurs projets, retardent leurs projets, vont être beaucoup moins proactifs sur le terrain. Ça, le ministre des Finances, là, il est conscient de ça, là. C'est ce qu'on appelle la confiance.

Cette confiance-là, M. le Président, à l'heure où on se parle, elle est drôlement atteinte. À preuve, c'est que les régions du Québec, présentement... Et on le sent à aller sur le terrain, je vous le demande encore une fois, M. le Président, je demande aux membres de la commission, vous avez tous des comptés, vous êtes tous... Allez voir vos organismes, posez-leur la question. Question simple, question simple : Selon vous, si on abolit... Bien, pas si on abolit, parce que c'est ça qui est en train de se produire, même si le projet de loi n° 28 n'est pas... Je ne veux pas revenir sur l'outrage au Parlement, là. Mais, en abolissant les CRE, considérez-vous qu'il va y avoir quelque chose qui va manquer, là, hein? Et les gens vont vous répondre spontanément, et j'en suis convaincu : Oui, non seulement ça va nous manquer, mais ça nous manque déjà. Parce que les gens, ils n'ont plus de repères. Alors, ils perdent des repères où ils pouvaient, tout le monde, s'asseoir autour d'une table et planifier le développement de leurs régions. Ils pouvaient le faire ensemble. Et ce n'est pas ce qu'on voit présentement.

Alors là, M. le Président, je reviens au point de départ, à savoir qu'on demande aux parlementaires de bien vouloir entendre Solidarité rurale. Et des éléments, s'ils en ont à apporter... Bien, s'ils n'en avaient pas, M. le Président, ils auraient, lorsqu'on les a appelés, là, pour leur demander : Qu'est-ce que vous diriez si on demandait aux membres de la commission de vous entendre, est-ce que vous accepteriez?, bien, s'il n'y avait pas d'élément, là, qui, pour eux, semble important à confier ou à dévoiler à la commission, assurément qu'ils auraient dit : Bien non. Ils nous auraient dit : Non, bien, écoutez, non. Ne le proposez pas, on n'a rien de neuf à vous dire. Mais ce n'est pas ça, la réponse.

Alors, moi, je veux bien, quand le ministre me dit que, selon lui, sans même avoir entendu, il y a une loi qui est une loi... En fait, on dit que tous méritent d'être entendus, là, alors, avant que le ministre décide...

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Berthier.

M. Villeneuve : Oui?

Le Président (M. Bernier) : Votre temps est malheureusement terminé.

M. Villeneuve : Ah! désolé, monsieur.

Le Président (M. Bernier) : Je veux juste apporter une information au niveau des parlementaires en ce qui regarde Solidarité rurale. Effectivement, il y a eu désistement le 6 de février 2015 de la part de Solidarité rurale à se présenter devant la commission. Cependant, rien n'empêche l'opposition de présenter cette motion pour réentendre Solidarité rurale. Je désirais apporter des précisions.

M. le député de Beauce-Nord, en tant que représentant du chef du deuxième groupe d'opposition, vous avez le droit à 30 minutes pour faire votre présentation.

M. André Spénard

M. Spénard : Merci, M. le Président. Rassurez-vous, je ne prendrai pas 30 minutes, si ça peut rassurer le ministre. Avant de parler de Solidarité rurale, parce que c'est un organisme que j'ai bien connu, j'aimerais mettre une chose au point, parce que je me suis aperçu tout à l'heure que M. le ministre nous a peut-être prêté des mauvaises intentions en disant que le projet de loi déposé au mois de novembre... Nous sommes rendus à la fin mars et nous n'avons pas encore débuté l'étude article par article. Il faut bien comprendre qu'avec un projet de loi de cette ampleur, qu'on appelle un projet de loi mammouth, qui a 337 articles, il ne faut pas s'imaginer que ça va passer aussi vite que le projet de loi n° 30, qui avait 3 articles sur les bonus aux employés de l'État.

Alors, je pense que, là... M. le ministre, ne nous prêtez pas de mauvaises intentions. On ne vous en prête pas avec ce projet de loi là, mais, par contre, nous allons défendre nos points de vue.

Pour en revenir avec Solidarité rurale, c'est un organisme que j'ai bien connu, parce que, lorsqu'on a fait le pacte national... la Politique nationale de la ruralité, j'étais vice-président, dans ce temps-là, de l'Association des CLD du Québec, et M. Yvon Leclerc était président, je me rappelle, M. Rémy Trudel était ministre des Affaires municipales dans le temps, et Solidarité rurale, avec Jacques Proulx, qui a été le président fondateur, a été d'une importance capitale en ce qui concerne la solidarité, qu'on appelle rurale, mais qu'il devait y avoir entre toutes les régions du Québec.

Lorsqu'on parle de la ruralité au Québec, la Politique nationale de la ruralité, qui a été la première de 2002 à 2007, la seconde de 2007 à 2014, qui a été reconduit par... ce n'est pas une question de parti politique, mais par deux gouvernements différents, un du Parti québécois pour le mettre sur pied, ça a été reconduit par le Parti libéral en 2007, et ça s'en va. Et, écoutez, c'est... puis ça, ce n'est pas n'importe qui qui le dit, là, c'est l'OCDE qui dit : «Le fait que la première PNR[ 2002] et la seconde PNR 2007‑2014 aient été décidées par des partis politiques différents témoigne du consensus interpartis autour d'une politique spécifique de développement rural.» Et Solidarité rurale, je me rappelle, dans le temps, avec Jacques Proulx, qu'on sortait dehors pour bourrer chacun notre pipe, parce que Jacques fumait la pipe comme moi, on sortait dehors bourrer chacun notre pipe, on discutait, puis un gars fort sympathique, ce M. Proulx... Alors, je me rappelle qu'ils ont été d'une grande... d'une importance capitale pour conseiller le gouvernement en ce qui concerne les politiques nationales de la ruralité.

Une autre chose, lorsqu'on parle, ces temps-ci, de l'accaparement des terres agricoles, là, je pense que Solidarité rurale aurait été d'une importance capitale pour nous parler de ça, pour voir la vision globale, pour voir la vision globale de l'agriculture et de la... peut-être d'une certaine souveraineté alimentaire, là. Mais, lorsqu'on parle de ça, l'accaparement des terres agricoles, qui, en milieu rural... Peut-être que sur la rue Sainte-Catherine à Montréal, M. le ministre, que ça n'a pas d'importance puis le monde n'en entendent pas parler, mais, dans les régions comme dans Chaudière-Appalaches, dans la Beauce, en Abitibi, que ce soit en Gaspésie ou dans Charlevoix, lorsqu'on parle de ruralité, d'accaparement des terres agricoles puis de la déstructuration de la région, puis etc., ça vient chercher notre coeur et nos tripes.

Et ça, ce n'est pas l'immigration en région. Nous, ça nous affecte moins que les grands centres urbains. Par contre, on ne part pas pour déstructurer les métropoles en ce qui concerne l'immigration, tu sais, on ne pourrait pas. Mais, par contre, lorsqu'on regarde le milieu urbain vis-à-vis les régions, on sent que plus ça va, plus il y a un clivage entre le milieu urbain et les régions, et ce clivage est accentué par les politiques du gouvernement actuel.

Solidarité rurale avait son importance capitale de consultation, puis ça, je ne peux pas... Moi, je me rappelle, dans le temps que j'étais maire et puis que Solidarité rurale venait, mettons, dans la Beauce, ils se mettaient à une place, mettons, à East Broughton... Puis moi, la première fois, je m'en rappellerai toute ma vie, la première fois... Puis ils venaient à peu près une fois par année, une fois par deux ans, aller prendre le pouls de la région, etc. Et je me rappellerai toute ma vie, la première fois que je suis allé là, je me suis dit : Voyons donc! Ça va tous être des agriculteurs. Moi, je n'ai pas d'affaire à ça, moi, je suis un homme d'affaires, puis les agriculteurs... Je suis arrivé là, bien, je pense qu'il y avait plus d'hommes d'affaires que d'agriculteurs, M. le Président. Alors, là, je suis resté surpris et j'ai vu le rôle de Solidarité rurale.

Je ne vous dis pas que je défends tout ce que Solidarité rurale a fait, mais, au moins, je dois lui reconnaître un rôle, c'est le rôle d'avoir mobilisé les régions, d'avoir fait prendre conscience aux régions qu'elles étaient capables de se développer au même titre que les villes, qu'elles étaient capables de faire de la business, qu'elles étaient capables de faire de l'agriculture puis qu'elles étaient capables de s'entendre avec les hommes d'affaires, puis les villes, puis les municipalités. Ça, je leur reconnais.

Il y a aussi, Solidarité rurale, une chose que j'ai énormément appréciée, puis c'est un concept qu'ils ont développé, puis je pense que le concept vient peut-être de là, c'est l'implication de la société civile au développement du territoire. Et ça, je pense que Solidarité rurale y a été pour beaucoup aussi. On doit au moins le reconnaître, on doit au moins reconnaître qu'avec de maigres budgets cet organisme-là a contribué à l'essor du Québec de façon prépondérante. Je ne vous dis pas de façon économique elle-même; elle a suscité un orgueil de venir d'une région.

Vous savez, avant ça, quelqu'un venait d'une région, là, puis, quand on allait en ville, là, tu sais, ils nous regardaient de travers, puis un peu comme au XVIIIe siècle, quand les Beaucerons arrivaient à Québec, puis ils nous appelaient les jarrets noirs, là, tu sais, c'est parce que... Écoutez, on travaillait pour se rendre en ville puis aller vendre nos produits ou aller acheter des matières ou des... Et puis, tu sais, c'était un peu comme ça, mais Solidarité rurale a réussi à faire, tu sais, à travers tout le Québec, peut-être un exercice de dire : Les régions, c'est aussi important que les villes. Vous êtes aussi important que les régions.

Puis ça, ça a commencé en 1995, 1996, 1997, tu sais, puis là est arrivé le... bon, avant ça, c'était le Groupement économique de Beauce-Centre, c'est arrivé... ça a été en 1997, transformé en CLD et puis... Tu sais, les régions ont commencé à s'occuper d'eux autres mêmes avec l'appui, évidemment, des politiques gouvernementales de ceux qui étaient en poste durant ce temps-là, mais Solidarité rurale a beaucoup contribué. Et ce n'est pas... Même, je sais qu'ils se sont désistés, vous ne m'apprenez rien. J'ai été très déçu que Mme Bolduc, qui est la présidente, ne se présente pas, très déçu. Mais j'aimerais assez l'entendre si le ministre le permet. Mais par contre, si vous jugez non pertinent, bien c'est... Évidemment, vous êtes un gouvernement majoritaire. Alors, je comprendrai la situation.

Mais, M. le Président, je veux qu'on reconnaisse la Solidarité rurale. Même si l'organisme disparaît sous le principe de l'équilibre budgétaire, je ne pense pas que le Québec est gagnant de faire disparaître un organisme comme ça, qui coûte... qui ne coûtait pas grand-chose quand on compare tous les coûts qui sont engendrés par ce processus d'équilibre budgétaire là. Merci, M. le Président.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Beauce-Nord. M. le député de Rimouski, la parole est à vous.

M. Harold LeBel

M. LeBel : J'aimerais plaider à mon tour. Vous savez, ça se peut que, quand tu es condamné à mort, ça ne te tente pas de venir témoigner. Mais je... Bien, c'est ça un peu, hein? Je trouve quand même important de les entendre. En tout cas, si, par nos interventions, on peut leur dire, s'ils nous écoutent, leur dire qu'on aurait aimé entendre ce qu'ils ont à dire puis qu'ils donnent leur expertise...

Le 10 juin 1990, j'étais à la cathédrale de Rimouski. C'était full plein. C'était la Coalition Urgence rurale, qui existe encore dans le Bas-Saint-Laurent, 25 ans. Et dans ces mouvements-là qu'il y avait dans toutes les régions est née la Solidarité rurale du Québec, avec un leader important, car il nous arrivait de l'UPA, Jacques Proulx. Je ne répéterai pas ce que mon collègue vient de dire.

C'était un groupe-conseil que le gouvernement a reconnu comme groupe-conseil, qui ne coûtait pas tellement cher, en tout cas, peut-être sûrement moins cher que la commission Robillard, et qui avait un leadership, un leadership qui nous a amenés et amené le Québec à assumer un leadership en matière de ruralité. Un mot qui, à l'époque... parce que j'étais dans les cabinets, un mot à l'époque où, quand on disait «rural», ça faisait passéiste. Et, grâce à Solidarité rurale, grâce aussi au gouvernement du Parti québécois à l'époque où on a amené la Politique nationale de la ruralité, on a amené la ruralité — puis c'est beaucoup grâce à Solidarité rurale — à un autre niveau.

Et je voudrais remercier deux députés à l'époque qui ont travaillé, parce que, comme je disais, j'étais dans le cabinet, il y avait la députée de Montmagny, votre collègue Maurice Gauvin, Gauvin qu'il s'appelait, et Danielle Doyer, qui était la députée de Matapédia, qui travaillaient ensemble d'une façon non partisane à monter... à nous aider à formuler cette Politique nationale de la ruralité qui a été reprise par après et qui s'est toujours enrichie par les conseils de Solidarité rurale. Parce que, comme dit Solidarité rurale : Tant vaut le village, tant vaut le pays. Et, dans nos villages, il y a des enjeux, des enjeux importants au niveau de l'entrepreneurship. On a des entrepreneurs dans nos villages, puis ce n'est pas tous des rois du village, des entrepreneurs qui développent les villages, qui développent des emplois, qui permettent... Je pense à des villages comme Saint-Anaclet chez nous, ou Saint-Cyprien, des entreprises... Parce qu'il y a moyen de faire des entreprises puis de faire de la transformation dans nos villages quand on encourage ces gens-là.

La forêt. La forêt, c'est important pour nos villages. Et, quand on regarde ce qui se passe actuellement, la menace qu'on a chez nous sur le Programme de création d'emploi en forêt privée, ça a un impact majeur, et Solidarité rurale aurait pu nous en parler. En agriculture, l'accaparement des terres, la relève agricole. On a des enjeux majeurs qui vont toucher le développement de nos régions, le développement de nos villages, et Solidarité rurale aurait pu nous en parler. Les jeunes, permettre aux jeunes de rester. Tout ça se tient. Les carrefours jeunesse-emploi soutiennent dans plusieurs régions un programme qui s'appelle Place aux jeunes. Il y a des jeunes de partout dans des villes qui viennent voir nos villages. Ils viennent s'apercevoir qu'on a des villages qui offrent une certaine qualité de vie. Et ils sont prêts à élever leur famille en village.

Chez nous, il y a des gens, je pense, de la région de Longueuil, qui vont venir pour s'installer, une jeune famille, qui ont loué une maison à Trinité-des-Monts, un petit village. Je pense qu'ils pensent, puis ils se disent qu'ils peuvent avoir une meilleure qualité de vie pour leur famille. Mais c'est sûr que, si, à Trinité-des-Monts, tu n'as pas de services de proximité, tu n'as pas de poste d'essence, pas de dépanneur, pas... Là, tu te poses certaines questions et Solidarité rurale était là pour nous aider à trouver des solutions, entre autres pour développer des services de proximité. Et qui faisait ça? Et c'est ça que Solidarité rurale aurait pu nous en parler : les CLD. Les CLD, contrairement à l'époque où on avait des commissaires industriels consacrés au développement des grandes villes, les CLD avaient une approche pour le monde rural, pour nos petites municipalités. Et ils travaillaient en concertation avec les CLE. Ce qu'on a mis en place, une concertation Centre local d'emploi et CLD pour mettre en place ce qu'on appelle les PALEE, des plans d'action locaux pour l'économie et l'emploi. Et ça, pour prendre en... dans une vision concertée du territoire de la MRC, s'assurer que nos municipalités rurales aient accès au développement, entre autres par des services de proximité pour nos familles, pour nos entrepreneurs, pour nos... les citoyens qui vivent dans ces municipalités-là.

Les CRE avaient une importance aussi dans le développement rural parce que les CRE soutiennent plusieurs ententes spécifiques qui interviennent directement dans le monde rural, autant au niveau de l'action des travailleurs de rue, de l'action communautaire, autant au travail d'aménagement forestier, de la forêt habitée. Les CRE avaient des programmes qui aidaient... ces municipalités avaient des ententes, signaient des ententes avec le gouvernement pour s'assurer que les programmes du gouvernement soient modulés au niveau de la ruralité. Les commissions scolaires, qui étaient autour de la table, les écoles du village; la menace sur les écoles du village, de la dernière école, ça existe encore. Il y a des jeunes qui se promènent de village à aller à leur école secondaire, qui font plusieurs, plusieurs kilomètres en autobus tous les matins et tous les soirs, et ça, il faut s'en parler. Solidarité rurale aurait pu nous amener ça.

Même chose pour les agences de santé : quand on regarde l'augmentation qu'il va y avoir pour le transport ambulancier, pour beaucoup d'aînés dans nos municipalités rurales, il y a un impact majeur.

Bref, comme je disais tantôt, Solidarité rurale a été créée dans une mouvance qui tournait autour d'un rapport qui s'appelait Deux Québec dans un. Et je sens qu'actuellement le Québec s'enligne vers un peu ce même phénomène qu'on avait dans les années 90, qu'on avait réussi à se sortir. Et ça, c'est beaucoup à cause de cette vision d'austérité que le gouvernement nous impose dans chacune de ces interventions. Et cette vision, ou cet acharnement, ou je ne sais pas trop comment appeler ça, sur l'austérité, vient toucher de plein fouet nos villages. Dans un comté comme le comté de Rivière-du-Loup—Témiscouata ou dans le comté de Matane-Matapédia, 42 municipalités, pour le député, faire le tour de toutes ces municipalités-là, à essayer de s'assurer que chacun des maires puis des conseillers municipaux puisse passer à travers ce qu'il est en train de vivre actuellement par le désengagement de nos outils de développement, je vais vous dire, c'est un travail à temps plein. Il faut garder l'espoir. Ce n'est pas toujours facile.

Et Solidarité rurale, c'était un groupe qui venait conseiller et qui faisait en sorte que c'était encore moderne et de vision de parler de la ruralité. Et là on est sur le break à bras, on est sur le reculon; c'est un peu dommage. On était déjà... On était des leaders dans le monde du développement rural et on est en train de perdre ce leadership-là. J'aurais aimé ça que Solidarité rurale vienne un peu brasser le pommier puis vienne nous dire : Bien, il y a encore moyen de faire quelque chose pour nos villages, puis il y a encore moyen de développer nos régions, nos villages, puis nous répéter leur maxime : Tant vaut le village, tant vaut le pays. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, je vais mettre... Oui, M. le député.

M. Lelièvre : ...

Mise aux voix

Le Président (M. Bernier) : On va mettre aux voix. Je dois mettre aux voix la motion, s'il n'y a pas d'autre intervention.

Alors, M. le secrétaire, si on veut appeler aux voix la motion, elle se lit ainsi :

Est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles, «la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 28, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016, des consultations particulières, et qu'à cette fin elle entende Solidarité rurale du Québec».

M. le secrétaire, si vous voulez appeler les parlementaires à voter.

Une voix : Par vote nominal, s'il vous plaît.

Le Secrétaire : M. Lelièvre (Gaspé)?

M. Lelièvre : Pour.

Le Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

Le Secrétaire : M. Villeneuve (Berthier)?

M. Villeneuve : Pour.

Le Secrétaire : M. Spénard (Beauce-Nord)?

M. Spénard : Pour.

Le Secrétaire : M. Leitão (Robert-Baldwin)?

M. Leitão : Contre.

Le Secrétaire : Mme de Santis (Bourassa-Sauvé)?

Mme de Santis : Contre.

Le Secrétaire : M. Huot (Vanier-Les Rivières)?

M. Huot : Contre.

Le Secrétaire : M. Matte (Portneuf)?

M. Matte : Contre.

Le Secrétaire : M. Habel (Sainte-Rose)?

M. Habel : Contre.

Le Secrétaire : M. Carrière (Chapleau)?

M. Carrière : Contre.

Le Secrétaire : M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Je m'abstiens. Et le résultat?

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Donc, 4 pour, 6 contre, 1 abstention. Donc, la motion est rejetée. Donc, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre : M. le Président, j'aimerais déposer une seconde motion concernant également un organisme que l'on souhaiterait être entendu par la commission : il s'agit du Centre de recherche sur le développement territorial, puis c'est en vertu également de l'article 244. Est-ce que vous voulez que j'en fasse une lecture intégrale ou je vous la dépose?

Le Président (M. Bernier) : Déposez-la, mais nous allons avoir de la difficulté à pouvoir vous donner la parole parce que, compte tenu de l'heure et le temps qui nous était imparti, je dois lever la séance de la commission et ajourner ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 heures)

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