To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Public Finance

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Public Finance

Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Tuesday, April 14, 2015 - Vol. 44 N° 43

Continuation of the debate on the Budget Speech


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Remarques préliminaires

M. Carlos J Leitão

M. Nicolas Marceau

M. François Bonnardel

Discussion générale

Autres intervenants

M. Raymond Bernier, président

M. Jean Habel

M. Ghislain Bolduc

M. Saul Polo

Mme Françoise David

M. Michel Matte

Note de l'éditeur : La commission a aussi siégé en matinée pour l'étude détaillée du projet de loi n° 28, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Le compte rendu en est publié dans un fascicule distinct.

Journal des débats

(Dix-sept heures six minutes)

Le Président (M. Bernier) : Alors, bonjour à tous. Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Et bien sûr, comme d'habitude, je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours du budget conformément à l'article 275 du règlement.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme de Santis (Bourassa-Sauvé) est remplacée par M. Hardy (Saint-François).

Le Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Donc, je souhaite la bienvenue à tous les parlementaires qui vont participer à ce débat. M. le ministre, les représentants des oppositions, aussi de la première et la deuxième opposition, bienvenue, le personnel également du ministère des Finances qui vous accompagne, qui nous accompagne afin de bien vouloir répondre à toutes nos questions, le personnel de l'Assemblée nationale. Donc, bienvenue à vous tous.

Donc, avant d'entreprendre nos travaux, je vous informe des règles du débat que nous amorçons aujourd'hui. La répartition des temps de parole pour les 10 heures sera la suivante : le gouvernement, 4 h 45 min; l'opposition officielle, 2 h 51 min; deuxième groupe d'opposition, 1 h 54 min; députés indépendants, 30 minutes.

Nous débuterons par les remarques préliminaires du ministre, du porte-parole de l'opposition officielle et du porte-parole du deuxième groupe d'opposition, qui disposeront chacun de 20 minutes. Le temps inutilisé sera pris à même les enveloppes de temps respectives de chacun des groupes parlementaires. Le temps inutilisé par un groupe parlementaire sera ajouté à son temps pour le débat. Donc, si les remarques préliminaires sont moins de 20 minutes, elles seront ajoutées à l'enveloppe de temps.

Nous procéderons par blocs de 20 minutes, incluant les questions et les réponses. J'appliquerai la règle de l'alternance entre les députés du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés de l'opposition.

Enfin, selon la pratique établie à ce jour, l'étape du débat débutera par une intervention du porte-parole de l'opposition officielle au moment où nous amorcerons nos échanges.

Remarques préliminaires

M. le ministre, sans plus tarder, vous disposez d'un maximum de 20 minutes pour vos remarques préliminaires. La parole est à vous.

M. Carlos J Leitão

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, chers collègues de la députation ministérielle, chers collègues et députés des partis d'opposition, nous aurons le plaisir, au cours des prochains jours, de poursuivre ensemble le débat amorcé avec le dépôt du plan économique et du budget 2015-2016. Ce plan est le résultat des efforts soutenus consacrés par notre gouvernement au redressement des finances publiques et à la relance de l'économie depuis notre arrivée au pouvoir, il y a tout juste un an.

Les Québécois aspirent à une prospérité durable, dont une des conditions de base est l'assainissement des finances publiques. Nos actions visent à leur donner cette prospérité. À cet égard, nous respectons notre engagement, le Québec retrouvera enfin en 2015-2016 l'équilibre budgétaire. Cette étape importante ne constitue pas un point final. Bien au contraire, elle représente un départ et imprime un nouvel élan pour le Québec.

La stabilité financière que nous redonnons au Québec constitue une base solide à la croissance de l'économie et de l'emploi et ouvre la voie à la réduction du fardeau fiscal de tous les Québécois. Cette réduction du fardeau fiscal passera, dans un premier temps, par l'abolition graduelle de la contribution santé à partir du 1er janvier 2017. Les contribuables à faibles revenus verront cette contribution complètement éliminée dès la première année. À terme, c'est 1,7 milliard de dollars qui retourneront dans les poches des 4,5 millions de contribuables québécois d'ici 2019.

• (17 h 10) •

Avant de présenter les principales mesures du plan économique, permettez-moi de dresser un bref portrait des finances du Québec. Les gestes posés dans le budget de juin dernier et dans notre mise à jour économique de décembre ont permis de réduire le déficit prévu de 5,9 milliards pour le ramener à 2 350 000 000 $ pour l'exercice 2014-2015, c'est-à-dire la cible que nous nous étions fixée en juin dernier. Les résultats des derniers mois ont démontré notre capacité à maintenir la croissance des revenus à un niveau supérieur à celle des dépenses. Ce contrôle rigoureux des dépenses et de la croissance des revenus assureront le maintien de l'équilibre budgétaire au cours des prochaines années.

Autre élément important, le poids de la dette du Québec diminuera au cours du prochain exercice pour s'établir à 54 % du PIB. Cette réduction de 0,9 point de pourcentage marque un renversement de tendance, alors qu'il n'avait cessé d'augmenter depuis 2009. Nous maintenons ainsi l'objectif de ramener le poids de la dette à 45 % du PIB en 2025-2026.

Parallèlement à nos actions pour stimuler l'économie, nous poursuivons nos efforts pour contrôler les dépenses et assurer une saine gestion des finances publiques. En plus de la réforme importante en santé que notre gouvernement met en oeuvre, le plan économique prévoit d'autres actions pour poursuivre l'allègement des structures administratives et l'efficacité de leur fonctionnement. Les efforts demandés en 2015-2016, notamment au réseau de la santé et de l'éducation, sont importants, mais ils sont aussi proportionnels à la capacité de payer des Québécois. Nous ne financerons plus nos services sur la dette, c'est-à-dire sur la carte de crédit de nos enfants, ni en taxant davantage les Québécois.

Les réformes structurelles importantes entreprises par notre gouvernement vont permettre de mieux maîtriser l'augmentation des coûts de système et de mieux contrôler les dépenses sans affecter les services, notamment en santé et en éducation. C'est par une gestion plus rigoureuse des dépenses, mais aussi par une plus forte croissance de l'économie que nous retrouverons une plus grande marge de manoeuvre dans le financement de nos services. La croissance économique, justement, a amorcé un net redressement au Québec au cours de la dernière année, soutenue notamment par les exportations internationales de biens, qui ont bondi de presque 11 %. Après deux ralentissements successifs, une croissance du PIB de seulement 1 % en 2013, la tendance s'est inversée, et nous prévoyons une croissance qui devrait s'accélérer à 2 % en 2015.

L'effet de nos actions pour relancer l'économie s'est fait sentir également sur l'emploi. Depuis le début de notre mandat, soit de début mai 2014 à la fin mars 2015, le Québec a créé près de 57 000 nouveaux emplois. Le contexte économique demeure favorable et contribuera à soutenir nos exportations et la demande intérieure. Nous allons poursuivre nos actions pour que le Québec profite pleinement de cette reprise.

Le plan économique que nous proposons a pour objectif d'assurer l'essor et le développement économique et social du Québec à long terme. Il vise notamment à accélérer la croissance grâce à l'allègement du fardeau fiscal, et à l'investissement des entreprises, et à la création d'emplois. Plus spécifiquement, le plan économique du Québec présente des mesures pour alléger le fardeau fiscal des particuliers et des entreprises dans le but d'encourager le travail et l'investissement; deuxièmement, de stimuler l'investissement privé et favoriser le développement économique de toutes les régions du Québec; et, troisièmement, encourager une plus grande participation au marché du travail en assurant une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi. L'ensemble des actions prévues dans ce plan totaliseront 3,4 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années, dont 2,5 milliards en allègements fiscaux. Le plan économique du Québec engendrera des investissements de 13 milliards de dollars.

Le plan économique propose trois mesures qui permettront d'alléger le fardeau fiscal des Québécois de plus de 2 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années. En plus de l'abolition de la contribution santé, nous mettrons en place un bouclier fiscal qui protégera les travailleurs réalisant un effort additionnel de travail. Ce dispositif permettra de limiter la perte de prestations fiscales liée à une augmentation de leurs revenus. L'objectif est de récompenser les travailleurs et de leur permettre de retirer davantage de leur travail. Nous bonifierons également, sur une période de trois ans, le crédit d'impôt à l'égard des travailleurs d'expérience afin de les inciter à rester sur le marché du travail ou à le réintégrer.

Le plan économique prévoit également une diminution du fardeau fiscal des sociétés, qui, à compter de 2019-2020, atteindra 215 millions de dollars par année. Pour y parvenir, le gouvernement privilégiera des mesures d'application générale rejoignant un maximum d'entreprises qui pourront ainsi bénéficier d'une fiscalité plus compétitive. Nous voulons, tout d'abord, offrir aux PME, qui sont le principal moteur de l'économie québécoise, un régime fiscal propice à leur croissance, à l'investissement et à la création d'emplois. À cet égard, deux mesures entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2017 : la réduction de 8 % à 4 % du taux d'imposition déjà annoncée pour les PME manufacturières sera élargie au secteur primaire, et la réduction graduelle de 2,7 % à 2,25 % du taux de la cotisation au FSS pour les PME du secteur des services.

Le gouvernement prévoit également consacrer 51 millions de dollars au cours des cinq prochaines années à des initiatives visant à favoriser la relève entrepreneuriale. Par cette mesure, nous voulons faciliter le transfert d'entreprises familiales entre personnes liées du secteur manufacturier et du secteur primaire, ce qui profitera notamment au secteur agricole.

Le plan économique propose également des mesures qui favoriseront la croissance de l'investissement pour toutes les entreprises, dont la réduction graduelle du taux général d'imposition sur le revenu des sociétés de 11,9 % à 11,5 %, le maintien jusqu'en 2022 du crédit d'impôt à l'investissement relatif au matériel de fabrication et de transformation pour les régions.

Nous agissons également pour que le Québec conserve sa place de chef de file dans plusieurs domaines stratégiques ou sensibles en agissant sur l'efficacité de certaines aides fiscales sectorielles. Nous majorons le crédit d'impôt pour la production de titres multimédias et le crédit d'impôt pour le développement des affaires électroniques. Et nous bonifions le taux de certains crédits d'impôt du secteur de la culture pour favoriser les productions originales québécoises.

Par ailleurs, dans le cadre du plan économique, le gouvernement maintient son appui aux fonds des travailleurs en leur donnant les moyens nécessaires pour poursuivre leur contribution au développement économique du Québec, en particulier dans les régions, et pour favoriser l'épargne des Québécois.

Le deuxième volet de notre plan économique contient plusieurs mesures visant à favoriser la performance du marché du travail. La croissance du Québec, au cours des prochaines années, devra composer avec l'enjeu démographique auquel nous faisons face. Nous devons assurer une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi et favoriser la participation de tous au marché du travail. Des mesures totalisant près de 125 millions de dollars sur cinq ans permettront de soutenir la formation de l'emploi. Ainsi, le seuil d'assujettissement à la loi du 1 % pour les entreprises passera de 1 à 2 millions de dollars de masse salariale, ce qui constituera un important allègement réglementaire pour environ 8 000 entreprises.

Deuxièmement, de nouvelles sommes sont aussi prévues pour répondre aux besoins de formation actuels et futurs des entreprises, notamment en donnant un rôle stratégique à la Commission des partenaires du marché du travail.

Troisièmement, certains programmes de formation seront adaptés afin de mettre un accent particulier sur l'apprentissage en milieu de travail, et le crédit d'impôt pour stage en milieu de travail sera bonifié afin d'inciter les employeurs à recourir davantage à des stagiaires.

Finalement, un nouveau programme, Objectif emploi, encouragera une plus grande participation de la main-d'oeuvre disponible au marché du travail.

Notre gouvernement est convaincu que l'immigration est un atout essentiel pour soutenir le développement économique du Québec. Dans ce contexte, le gouvernement travaille à l'élaboration d'une nouvelle politique en matière d'immigration, de diversité et d'inclusion que ma collègue présentera bientôt. Cette politique sera accompagnée d'une stratégie qui proposera des actions concrètes visant à renforcer la participation des nouveaux arrivants au marché du travail, notamment grâce à une meilleure reconnaissance de leurs compétences. Des investissements de 22,5 millions de dollars sont prévus au cours des trois prochaines années pour la mise en oeuvre de cette stratégie.

• (17 h 20) •

Le plan économique prévoit des initiatives totalisant 406 millions de dollars au cours des cinq prochaines années pour stimuler les investissements privés dans plusieurs secteurs de l'économie québécoise, et ce, autant pour les entreprises d'économie sociale que les PME et les grandes entreprises.

Le gouvernement investira 160 millions de dollars au cours des prochaines années pour, notamment, mettre en place le nouveau congé fiscal bonifié pour les grands projets d'investissement; deuxièmement, implanter la Stratégie québécoise de développement de l'aluminium; troisièmement, réaliser un nouveau plan d'action gouvernemental en économie sociale; et, finalement, appuyer le secteur de l'aérospatiale et le secteur pharmaceutique.

Nous dévoilerons dans quelques semaines les détails de notre Stratégie maritime, impliquant des investissements de plus de 1,5 milliard de dollars d'ici 2020. Cette stratégie mettra à contribution tous les acteurs concernés tant par la mise en valeur et la protection de la ressource marine que par le développement des secteurs de l'industrie maritime. Dans le prolongement de la Stratégie maritime, nous avons aussi prévu des mesures pour soutenir le développement et la diversification du tissu industriel de la région de la Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine. Nous voulons ainsi aider au développement économique des Îles-de-la-Madeleine en tenant compte de leur caractère spécifique.

Comme vous le savez, M. le Président, la Société du Plan Nord est entrée officiellement en fonction le 1er avril. Le gouvernement a d'ailleurs rendu publics la semaine dernière les détails sur le redéploiement du Plan Nord. Au cours des cinq prochaines années, les interventions totaliseront 1,3 milliard, soit 900 millions en investissement pour des projets d'infrastructure stratégiques, 400 millions provenant du Fonds du Plan Nord pour la mise en oeuvre d'initiatives prioritaires et pour l'administration de la Société du Plan Nord. En y ajoutant les initiatives entièrement financées par les différents ministères et organismes ainsi que par leurs partenaires, les interventions réalisées totaliseront près de 2 milliards à l'horizon 2019-2020. Au total, les investissements publics et privés totaliseront plus de 50 milliards à l'horizon 2035.

Dans la même veine, le gouvernement prévoit également des mesures concernant la mise en valeur des ressources naturelles, notamment les mines et les forêts. Le plan économique présente différentes mesures pour favoriser l'exploration minière visant notamment à soutenir l'activité et à faciliter la caractérisation des territoires. Le gouvernement consacrera également 542 millions de dollars en 2015-2016 afin de valoriser la forêt québécoise et la faune. Un soutien additionnel à la vitalité économique des régions forestières est aussi prévu par l'entremise d'investissements du Fonds Valorisation Bois dans le secteur des pâtes et papiers et par le maintien de l'accessibilité aux terres du domaine de la protection... et la protection, et la conservation de la ressource faunique.

Parce que l'égalité des chances fait partie intégrante des conditions préalables à la croissance et à la prospérité, notre plan économique contient un volet social important. Le plan économique prévoit des investissements totalisant 284 millions de dollars pour améliorer les conditions de logement des plus démunis. Ces investissements permettront la construction de 1 500 nouveaux logements sociaux dans le cadre du programme AccèsLogis, mais également l'ajout de 5 800 nouvelles unités d'ici 2020 dans le cadre du Programme de supplément au loyer. Avec ces nouveaux montants, ce sont 7 300 familles de plus qui auront accès à un logement abordable, dont 1 000 familles additionnelles dès cette année. Le gouvernement donne également suite à un engagement en annonçant l'instauration, dès le 1er janvier 2016, d'un nouveau programme d'aide aux aînés pour le paiement des taxes municipales.

La lutte à l'intimidation est également une préoccupation importante de notre gouvernement. C'est pourquoi des crédits additionnels de 4,4 millions seront dédiés au financement du plan d'action pour lutter contre l'intimidation, qui sera déposé prochainement. Ce plan découle directement du forum tenu en septembre dernier et est le fruit d'un engagement personnel du premier ministre.

Alors, en conclusion, M. le Président, un an après notre arrivée au pouvoir, nous pouvons nous réjouir du chemin parcouru et des résultats obtenus. Nous avons accepté les remises en question afin d'éliminer le déficit et de rétablir la solidité financière du Québec. Nous avons construit notre action économique sur des bases solides en rétablissant d'abord l'équilibre budgétaire. Nous parvenons aujourd'hui à franchir le dernier droit, cette étape importante, sans hausse de taxe ni d'impôt, comme nous nous étions engagés à le faire dans la mise à jour économique de décembre dernier. Nous prenons acte des efforts consentis pour atteindre ce résultat et les reconnaissons à leur juste valeur. Ensemble, nous redonnons au Québec sa capacité de faire des choix et de financer les services et les projets qui lui importent.

À partir de cette solidité retrouvée, ce budget engage un ambitieux plan économique proposant de puissants ressorts pour l'action. Les leviers que nous mettons en place permettront de bâtir l'avenir plutôt que de le subir. Ce budget marque ainsi une étape majeure vers un Québec plus prospère, plus fort, plus confiant et plus juste.

M. le Président, je souhaite maintenant que nous abordions nos travaux dans un esprit d'ouverture et de respect et que nos échanges soient constructifs. Je suis convaincu que tous mes collègues des oppositions pourront mesurer le chemin parcouru au cours de la dernière année et qu'ils appuieront nos efforts en votant en faveur de ce budget, qui vise à redonner un nouvel élan au Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, de votre présentation. M. le député de Rousseau, la parole est à vous. Vous avez une période de 20 minutes, maximum.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Parfait. Merci, M. le Président. Alors, tout d'abord, je voudrais saluer les collègues autour de la table et leur dire que j'aborde ce débat en commission parlementaire dans un esprit constructif. Le ministre peut être assuré de tout mon respect. Maintenant, de là à aller jusqu'à voter pour le budget, je crois qu'il y a une marge qui ne sera pas franchie de ce côté-ci, en tout cas

Je voudrais aussi saluer les fonctionnaires qui accompagnent le ministre et puis leur dire que je sais tout le bon travail qu'ils font et que, s'il y a quelque chose qui n'est pas bien dans le budget, ce n'est pas de leur faute.

Une voix : ...

• (17 h 30) •

M. Marceau : O.K. M. le Président, je vais essayer d'aller assez rapidement, faire le tour de quelques points. Un premier qui est important, je pense, c'est que, bien sûr, le gouvernement a déposé un budget. Un budget, c'est un plan, c'est ce qu'on annonce qu'on va faire pour l'année qui vient, et je veux simplement rappeler à tout le monde que ça n'est pas encore un résultat. Le budget, ce ne sont pas des états financiers, c'est le plan de ce qu'on entend faire pour l'année, le chemin qu'on entend parcourir, qui pourrait mener éventuellement à l'équilibre budgétaire. On sera à même de constater l'an prochain, à peu près aux mêmes dates, si, effectivement, on a atteint l'équilibre budgétaire.

Maintenant, je pense que vous m'avez déjà entendu vous dire que j'ai un certain doute quant au fait qu'on va parvenir à atteindre l'équilibre budgétaire. De la manière, en tout cas, qui est décrite dans la documentation du budget, je le redis, je pense que le cadre financier est sensiblement étiré. Qui serait peut-être un anglicisme de «stretché», mais donc c'est étiré, et étiré des deux côtés, M. le Président. Étiré, tout d'abord, du côté des revenus, puisque le gouvernement, dans le document, prévoit une croissance du PIB nominal de 3,8 % — puis le PIB nominal, on le sait, c'est une espèce d'élément de base, là, pour mesurer la croissance des revenus, évidemment, c'est une partie de l'explication, ce n'est pas toute l'explication, mais il n'en demeure pas moins que c'est un facteur important — et la moyenne du secteur privé, là, c'est de 3,5 %. Alors, on aura l'occasion d'y revenir, là, puis de savoir pourquoi le gouvernement a inscrit un 3,8 %, alors que la moyenne du secteur privé, c'est 3,5 %. Mais, quand même, ce qu'il faut comprendre puis retenir, c'est que, du côté des revenus, en tout cas, on n'est pas du côté conservateur de la ligne, on est du côté optimiste.

Puis, du côté des dépenses, la prévision de croissance des dépenses consolidées pour cette année est de 1,5 %, 1,5 %. En fait, pour l'année qui vient de se terminer, là, 2014-2015, les dépenses s'établissaient, là — en tout cas, les résultats préliminaires — à 2,9 % et, aujourd'hui, elles seraient... pour l'année qui commence, là, on entend appliquer un 1,5 %. Moi, je pense que ce n'est pas possible d'arriver à des chiffres comme ceux-là sans couper drastiquement dans les services à la population. Puis, évidemment, les deux secteurs qui sont les plus touchés puis qui sont les plus importants sont la santé et l'éducation. En santé, on prévoit un 1,4 %. 1,4 % de croissance des dépenses en santé, ça ne s'est jamais vu en 15 ans. Par ailleurs, évidemment — puis ça, je pense qu'il n'y a pas grand monde qui s'enfarge là-dedans — c'est très, très loin du 4 % qui était promis en campagne électorale, là. 4 % en campagne électorale, 1,4 % dans le budget. En éducation, on prévoit 0,17 % cette année, on prévoyait 3,5 % dans le cadre financier du Parti libéral.

Bon, moi, je vous dis simplement, je ne crois pas que ce soit réalisable sans que les Québécois souffrent. En tout cas, certainement en santé, c'est une évidence pour moi. J'aurai l'occasion de poser des questions. Vous savez, M. le Président, je n'apprends rien aux gens qui nous écoutent en disant que le ministre des Finances, c'est aussi un peu un ministre de la Santé, et il doit s'intéresser de façon très, très particulière à la santé, il doit connaître ce secteur-là mieux qu'à peu près tous les autres, puisque c'est la moitié du budget quasiment qui est... j'exagère, mais une grande partie du budget qui y est consacrée, et il doit être très familier avec ces concepts-là. Or, j'aurai quelques questions là-dessus en temps et lieu. Mais je retiens, moi, pour l'instant qu'à 1,4 %, dans un contexte de croissance de la population, dans un contexte de vieillissement de la population, dans un contexte d'inflation des prix dans le secteur de la santé, pour moi, c'est quasiment impossible, à moins d'avoir la volonté de couper dans les services.

Alors, je reviens à ce que je disais, quand je dis qu'on est étiré, on est étiré du côté des revenus par des prévisions très optimistes puis, du côté des dépenses, on est sérieusement, sérieusement dans le... bien, en tout cas, d'après moi, on est dans le monde de ce qui est irréalisable. Je vous regarde, puis vous avez, M. le Président... Je ne suis pas en train de vous dire, là — je veux juste être bien clair — qu'on ne pourrait pas parvenir, au Québec, à mener à bien un certain nombre de réformes puis, au bout de quelques années, en arriver à avoir des taux de croissance qui soient beaucoup plus faibles que ceux qu'on a observés dans le passé de façon historique. Je ne dis pas, là, qu'on est condamnés à rester à 4 % ou à 4,5 %, je ne dirai jamais ça, mais je dis que le travail préalable, les réformes nécessaires pour en arriver à avoir des taux de croissance plus faibles n'ont pas encore été réalisés. Je le souhaite, je l'appelle de tous mes voeux, mais il n'a pas encore été réalisé, ce travail. Et de dire tout d'un coup : Je décrète que ça va être 1,4 % cette année, bien, moi, je pense que c'est très périlleux. Et, encore une fois, on aura l'occasion d'y revenir. Tout ça pour dire quand même que, comme on est à la fois dans le très optimiste du côté des revenus et dans l'irréaliste du côté des dépenses, je pense que, l'année prochaine, à cette date-ci, il y a peu de chances qu'on constate un équilibre budgétaire, à moins d'avoir décidé de faire profondément souffrir les Québécois puis d'avoir coupé de façon drastique dans les services. Bon.

Rapidement, sur le fardeau fiscal, malgré les promesses qui ont été faites, le gouvernement a choisi d'augmenter le fardeau fiscal. J'aurai l'occasion d'expliquer plus en détail ce qu'on retrouve dans la documentation budgétaire lors de différents blocs, mais disons simplement que les revenus, donc, cette année, augmentent plus vite que la croissance du PIB nominal. Il y a un beau graphique qui nous présente ça, l'augmentation qui aurait été sans les mesures, puis vous avez l'augmentation avec les mesures, et donc on peut déduire l'augmentation du fardeau fiscal des Québécois. C'est 700 millions cette année, 700 millions auxquels il faudrait ajouter les autres ponctions, les autres tarifs, par exemple les hausses de tarifs d'Hydro-Québec ou bien les hausses de taxes municipales, là, qui pourraient survenir dans les prochains mois, dans les prochaines années.

Du côté des sociétés, il y a un beau tableau qui présente bien la hausse du fardeau fiscal, et là la hausse du fardeau fiscal est assez spectaculaire, là, on parle de 2,5 milliards sur cinq ans. J'aurai l'occasion aussi d'en discuter, mais retenons, M. le Président, là — parce que je veux faire court — qu'on nous avait promis des vallées verdoyantes, puis ce que les Québécois ont eu à vivre jusqu'à maintenant, c'est des... Enfin, ce qu'on leur fait miroiter pour cette année, c'est des coupes dans les services auxquels ils tiennent, en même temps accompagnées d'une hausse du fardeau fiscal. Ça, c'est la réalité à laquelle les Québécois sont confrontés.

Là où, évidemment, les choses sont carrément stupéfiantes, je dirais, c'est du côté économique. Alors là, je viens de parler des finances publiques, des services à la population, mais, du côté économique, on nous avait promis un effet libéral, on nous avait promis que, par la simple présence du gouvernement, les choses iraient mieux. Évidemment, il n'y a rien de cela qui s'est matérialisé, je pense que les Québécois le savent. Et, plutôt que de prendre acte du fait que leur simple présence ne stimule pas l'économie, le Parti libéral aurait peut-être pu, M. le Président, dire : Bien là, je me rends compte que, finalement, quand j'y suis, ça n'arrange pas les choses. Alors, il aurait peut-être pu se retourner de bord puis décider de mettre en oeuvre une politique économique, mais il n'y a pas ... Le choix qui a été fait, ça a été le choix qui a été évoqué à plusieurs reprises par le ministre de l'Économie, c'est celui de ne pas mettre en oeuvre une véritable politique économique. Je ne dis pas qu'il n'y a rien, là. Il y a des mesures, il y a quelques mesures. Mais est-ce qu'il y a un tout cohérent? Est-ce qu'il y a une vision d'ensemble? Pas vraiment. En tout cas, moi, je pense... On aura l'occasion d'en discuter, mais je n'ai pas vu, moi, de vision cohérente.

De la stratégie maritime dont on nous parle, peut-être qu'un jour on verra le document, puis on pourra peut-être en parler plus longuement. Mais, pour l'instant, moi, ce que je comprends, c'est que ce sont des choses qui auront des impacts peut-être à long terme. Mais là, pour l'année prochaine, pour dans deux ans, pour dans trois ans, là, je pense qu'il n'y a rien là-dedans qui va aider l'économie du Québec ou qui va aider notre secteur manufacturier à passer à travers les difficultés qu'il a à vivre.

Le Plan Nord, éventuellement ça pourrait être une très bonne chose pour le Québec que d'avoir prévu, effectivement... Puis, là-dessus, j'en conviens, il faut préparer les choses puis il faut développer nos ressources naturelles. Moi, j'en conviendrai toujours, mais est-ce que, dans le contexte de prix des ressources naturelles actuel, on peut compter sur le Plan Nord pour stimuler la croissance économique québécoise cette année, l'année prochaine et dans deux ans? Non. La réponse, c'est non, c'est évident. Peut-être dans cinq ans, dans 10 ans, puis ça, c'est bien correct. Mais là je vous parle, là, de cette année, de l'année prochaine, de dans deux ans, de dans trois ans, là. Là, il y a du monde qui vivent présentement au Québec, là, ils ne vivront pas tous dans cinq ans puis dans 10 ans, là. Aujourd'hui, il y a du monde qui ont besoin d'emplois, ils ont besoin de croissance économique, et, aujourd'hui, on est forcés d'admettre qu'il n'y a pas de vision puis il n'y a pas de plan pour améliorer la situation économique québécoise.

Et je ne vais pas vous inonder de chiffres, mais quand même assez cocasse de voir ce qui s'est passé avec les prévisions de croissance du PIB réel pour 2014. Dans le cadre financier du Parti libéral en campagne électorale, on prévoyait du 2,1 %, 2,1 %. Dans le budget de juin 2014, on était rendu à 1,8 %. Dans la mise à jour de décembre 2014, on était rendu à 1,6 %. Dans le budget que nous étudions présentement, on était rendu à 1,5 %. Puis, le lendemain du dépôt du budget, le 27 mars, l'Institut de la statistique du Québec a publié ses comptes économiques qui nous disaient que, pour 2014, donc, le taux de croissance a été 1,3 %. On est passé, donc, de 2,1 % à 1,8 %, à 1,6 %, à 1,5 %, à 1,3 %. Ça, c'est la croissance économique en 2014. Alors, on voit que l'effet libéral n'est pas trop, trop présent.

Puis, pour 2015, le budget prévoit un taux de croissance du PIB réel de 2 %. 2 %, là, juste qu'on s'entende, là, sur les... Puis je reprends ici quelque chose qui a été dit par le Mouvement Desjardins, mais, depuis 2001, c'est arrivé à seulement trois reprises qu'on a eu un taux de croissance du PIB réel de plus que 2 %. Et ils nous disent dans leur texte publié le 13 avril, donc hier : «La faible hausse du PIB réel de 0,4 % au dernier trimestre de 2014 rappelle que l'économie du Québec repose sur des bases fragiles. Avec un résultat aussi amorphe — et là ce n'est pas moi qui l'invente, là, c'est Desjardins — l'acquis de croissance pour 2015 est limité. Voilà qui appuie notre prévision de 1,7 % cette année.» Ça, c'est Desjardins, M. le Président. Ce n'est pas moi, là, c'est Desjardins.

• (17 h 40) •

Donc, sur le plan de la croissance économique, on n'a pas grand-chose à se mettre sous la dent, on peut dire ça comme ça, puis il y a des économistes... Puis même Desjardins rappelle encore que l'action du gouvernement soustrait à la croissance économique. La Banque de Montréal le dit. Pierre Fortin, dans un travail qu'il a fait où il a comparé le Québec avec d'autres juridictions, est arrivé aussi à la conclusion que l'action gouvernementale d'austérité, ça soustrayait à la croissance économique. Lui, il arrivait à des chiffres du genre 1 % de croissance qui est soustrait. Or, c'est quand même des chiffres importants. Alors, l'effet libéral, là, on va dire ça de même, là, ça a été remplacé par l'austérité, par l'austérité toxique, puis ça nuit à la croissance économique, puis ça fait en sorte qu'on a les chiffres qu'on a vus au plan de la croissance économique.

L'emploi, je pourrais vous en parler longuement, je dis rapidement, simplement, que le budget a confirmé qu'il s'est perdu 1 100 emplois en 2014 après une création de 48 000 en 2013. Les prévisions pour 2015-2016 sont meilleures, sont de l'ordre de 38 000 emplois. Évidemment, ce sont des prévisions à ce stade-ci, on espère qu'on aura 38 000. Pas moins 1 000, on espère qu'on aura 38 000. N'empêche, il faut quand même rappeler que le ministre et les collègues qui l'accompagnent ont été élus en promettant 250 000 emplois aux Québécois dans un contexte démographique... Moi, je vous le dis, là, très simple, là, 250 000 emplois dans le contexte démographique actuel? Impossible. Impossible. Puis ce n'est pas moi, puis ce n'est pas l'économie, puis ce n'est pas les entrepreneurs qui rendent ça impossible, c'est la démographie. Mais les gens, là, qui étaient autour de la table, là, dans le comité de stratégie du Parti libéral, ils devaient le savoir, ça. Ou bien, s'ils ne le savaient pas, ils étaient mal informés. Prévoir 250 000 emplois sur cinq ans dans le contexte démographique actuel, ce n'est tout simplement pas possible, ça n'arrivera pas. Je vous fais une prévision, M. le Président, ça n'arrivera pas.

Alors, je m'arrête là-dessus. Je vous dis simplement, donc, qu'au plan de la politique fiscale et budgétaire je ne suis pas à l'aise du tout. La politique économique, il n'y en a pas vraiment. Alors, écoutez, malgré tout le respect que j'ai pour le ministre des Finances, on va avoir une belle conversation pendant les prochaines heures, mais ça ne se conclura pas par un appui du Parti québécois au budget. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Rousseau, donc, de votre présentation. Nous allons maintenant inviter M. le député de Granby, du deuxième groupe d'opposition, à faire et à nous présenter ses remarques préliminaires. M. le député.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Alors, encore une fois, salutations à la présidence, au ministre, à ceux qui l'accompagnent du côté ministériel, mon collègue de Rousseau, mon collègue de Beauce-Nord et ceux qui accompagnent le collègue de Rousseau à l'opposition officielle.

C'est impossible de ne pas revenir, M. le Président, quand on est rendus aux 25 heures de débat... Suite au discours sur le budget, on a fait 15 heures ou presque de discours, on est aujourd'hui à l'étape du 10 heures où on va discuter avec le ministre des enjeux de ce qui a été déposé dans ce discours. Et, comme je l'ai mentionné lors du discours voilà déjà presque deux semaines, presque trois même, ce n'est pas le budget 2015-2016 que le ministre a déposé, c'est le budget 2017-2018 parce que le gouvernement a un objectif intéressant — je pense que tout le monde en convient — c'est celui, premièrement, d'atteindre l'équilibre budgétaire. Parce qu'il y a juste un député à l'Assemblée nationale qui ne veut pas retrouver l'équilibre budgétaire, c'est le député de Marie-Victorin. Les 124 autres ont, au moins, cet objectif de retrouver l'équilibre budgétaire. Je suis à l'Assemblée nationale depuis 2007, je n'ai pas vu de budget équilibré ou presque depuis 2007. Et, oui, on a connu la crise malheureuse de 2008, la Caisse de dépôt qui a perdu énormément d'argent. J'ai posé d'innombrables questions lors des mêmes travaux quand j'ai été critique aux finances de 2009 à 2013. Et, quand je dis : On est face au budget 2017-2018, bien, vous comprendrez, M. le Président, il y avait des points intéressants. Est-ce qu'ils auraient été applicables immédiatement? Le gouvernement a décidé que non.

Que ce soit le bouclier fiscal pour la classe moyenne, que ce soit la promesse de la taxe santé — je vais y revenir — taxe santé qui devait être abolie avant la fin du mandat libéral, hein... C'était une promesse du premier ministre d'en arriver à abolir complètement cette taxe, qui est une erreur du passé, là, soit dit en passant. Parce que j'y reviendrai, là, mais ce sont les libéraux qui l'ont mise au monde. Que ce soit de baisser le fardeau fiscal des PME, que ce soient le fonds de santé et sécurité, la relève entrepreneuriale, il y avait des points intéressants, le crédit d'impôt aussi pour garder les travailleurs d'expérience sur le marché du travail. Ça, on peut être d'accord avec ça, mais il faut revenir un peu en arrière pour comprendre pourquoi nous sommes aujourd'hui face à des enjeux aussi importants : le premier, je l'ai mentionné, retrouver l'équilibre budgétaire; l'autre, d'en arriver — mon collègue de Rousseau l'a mentionné — à une compression des dépenses à 1,5 % ou à peu près.

Vous savez, j'ai connu les belles années, les belles années du gouvernement libéral où, supposément, les revenus rentraient à la pelletée. On ne faisait pas attention aux dépenses, on avait une croissance moyenne des dépenses qui était de 4,5 %, 4,7 %, même du 5 % par année — par année — de beaucoup au-dessus du principe de l'inflation. Alors, on dépensait énormément. Et, je le disais lors du discours sur le budget, vous savez, les promesses de 2003 à 2008, si on veut reculer un peu en arrière... même 2003 à 2007, où les libéraux avaient promis mer et monde aux contribuables, c'était une baisse de 1 milliard d'impôt par année, c'était le système de santé qu'on allait revoir. On allait donner un médecin de famille à tous, on allait abolir les délais d'attente dans les urgences et, nécessairement, baisser le fardeau fiscal.

On se souvient... On peut même faire un petit aparté, M. le Président. On est à discuter du projet de loi n° 28 aussi à cette commission, on le faisait ce matin et, dans ce contexte, on était à débattre depuis hier sur le fait que le gouvernement va déposer un rapport préélectoral à la prochaine élection en 2018, mais... Puis je vous ramène ça parce que, vous vous souvenez, M. le Président, en 2003, quand Jean Charest a gagné l'élection, c'est drôle, on a demandé un rapport aussi pour vérifier l'état des finances publiques et on a trouvé curieusement un autre trou, 3, 4, 5 milliards de dollars, et là le gouvernement libéral n'a pas pu remplir ses promesses de réduire les impôts des Québécois.

Et devinez quoi? On a vu la même, même chose quand le Parti québécois a perdu le pouvoir au bout de presque 20 mois, où le Vérificateur général a été mandaté pour faire une vérification, où on a vu une confirmation, là, du déficit de 2,8 milliards qui était prévu à quelques millions près, et soudainement le terme «déficit potentiel» est né, «déficit potentiel». Et je ne me gêne pas de prendre la défense du Parti québécois sur ces questions parce que c'en était complètement ridicule. C'est particulier que je vous dise ça, mais je ne suis pas gêné de vous le dire, c'en était complètement ridicule d'inventer ce terme et de dire aux gens : Ah! bien là, le Trésor avait engagé... Non, le Trésor n'avait rien engagé. Le budget, moi, je l'ai vu, j'ai vu les comptes publics puis j'ai vu un chiffre en bas qui était celui qu'on prévoyait, peut-être à quelques millions près.

Et je vous ramène, donc, à la discussion qu'on avait en souhaitant que le ministre, qui s'est engagé ce matin à dire : On va retravailler la problématique d'avoir un rapport du Vérificateur général vérifié deux mois avant l'élection, possiblement quelques semaines, mais aussi de prendre en considération que, dans un contexte minoritaire, on aura ce rapport... J'espère que, comme le ministre l'a mentionné ce matin, on pourra travailler de façon adéquate pour se préparer à ça.

Maintenant, je vous disais : Il faut revenir en arrière. 2003-2007, ça a été des bonnes années, des revenus, des dépenses aussi qui étaient à hauteur de 4 %, 5 %, comme je le mentionnais. 2008, une crise qui est celle de la Caisse de dépôt, et là, soudainement, les Québécois, qui avaient un taux d'endettement moyen, celui qu'on pouvait connaître dans les autres provinces canadiennes, qui était peut-être à 140 %, donc, dans ces années, il y a énormément de gens qui ont perdu de l'argent, énormément de gens. Les fonds de retraite à la Caisse de dépôt ont perdu énormément de sous. Les gens qui avaient des REER ont perdu énormément de sous et, même, pas été capables peut-être d'aller chercher l'argent perdu, comme la caisse a pu le faire près de six ans plus tard.

Et, dans ce contexte, quand on revient en 2008, M. le Président, on a eu l'après-crise, et il y avait un ministre... Et je n'ai pas le choix, à chaque fois, de revenir à cette situation pour que les Québécois comprennent bien comment le Parti libéral a fonctionné pour nous amener aujourd'hui à ça. Le Parti québécois aussi parce qu'ils ont été au pouvoir pendant 20 mois, mais on ne peut pas leur mettre le chapeau complètement parce que les libéraux ont été au pouvoir depuis 2003. Et on arrive aux années 2009-2010, Raymond Bachand est ministre des Finances, Jean Charest est premier ministre, et la situation est intenable.

• (17 h 50) •

La situation est intenable parce que, déjà en 2010, je me souviens que les gens aux Finances, ça m'est resté... Ça m'a frappé, M. le Président, on parlait déjà du choc démographique, on parlait, là, de la problématique que nous allions vivre — on était en 2010 — en 2016-2030. Je me souviens que les fonctionnaires nous avaient dit lors d'un briefing : Il y aura trois travailleurs pour un retraité en 2016 au Québec parce que nous sommes la deuxième nation au monde la plus vieillissante après le Japon. Et, en 2030, attention! il y aura deux travailleurs pour un retraité. Ça voulait dire quoi, ça? Ça voulait dire imaginez la pression fiscale de ces travailleurs sur le marché du travail pour payer des taxes et des impôts et protéger les acquis sociaux que nos parents et grands-parents ont payés. Ça, les gens ne mesuraient pas encore, mais là ça nous frappe, ça nous frappe. On est en 2010, là, n'oubliez pas ça. Il y a eu l'élection de 2007 minoritaire, l'élection libérale 2008 majoritaire, et là on part encore, on continue, là, sur une spirale, une croissance des dépenses qui continue de monter à hauteur de 4,5 %, 5 % par année et même plus.

Parce que, dans ce temps-là, M. le Président, on ne regardait même pas ce que les entités autres que budgétaires... Un terme qu'on a commencé à utiliser, à comprendre quand le Vérificateur général Renaud Lachance était venu à l'Assemblée nationale parce que la plupart des gens qui regardaient les dépenses regardaient les dépenses de programmes, dépenses de programmes. Bel exemple que je peux donner aux gens, c'est que dépenses de programmes, c'est un ministère. Il existait avant le ministère du Revenu, et on a voté une loi pour ramener le ministère du Revenu à une agence du revenu. Cette agence est sortie du périmètre comptable. Or, il fallait être plus préparé à suivre la croissance des dépenses de ces entités qui étaient autres que budgétaires, sorties du périmètre comptable.

Un peu difficile à comprendre, mais là, aujourd'hui, on a... au moins depuis 2010, on a martelé, martelé... Moi, je l'ai fait, mon collègue de Lévis l'a fait — Christian Dubé, dans le temps — pour être capables d'avoir un portrait plus juste, que nous avons quand même dans les budgets depuis deux ans et même dans les rapports mensuels que le ministère des Finances nous dépose depuis longtemps. Mais au moins, aujourd'hui, on a un peu plus de transparence. Mais il reste encore qu'il y a des entités — Société des traversiers, Régie du cinéma, peu importe — qui n'ont pas encore cette attitude de préparer un rapport où on va savoir exactement, à chaque année, la croissance des dépenses de ces entités.

Et là, M. le Président, Raymond Bachand se rend compte, avec son gouvernement, que la croissance des dépenses est trop forte et que les revenus n'entrent pas, les revenus n'entrent pas. On est en 2010, et il y a des qui vont peut-être se souvenir, en 2010 ce fut l'invention... N'oubliez pas une chose, là, sur un dollar d'impôt, il y a à peu près la moitié, là, la moitié qui va à la santé présentement, il y a le quart qui va à l'éducation, puis on est rendus à 12 % pour le service de la dette, ou à peu près. Donc, trois postes budgétaires qui englobent au-dessus de 80 % du budget global du Québec aujourd'hui, puis on se souvient, là, du choc démographique que je parlais tantôt. Donc, 2010, on invente la taxe santé. On devait aller chercher entre 750 millions et 900 millions de dollars à terme. Parce que, si je ne me trompe pas, la taxe santé a commencé à 25 $, on l'a montée à 50 $, on l'a montée à 100 $ puis, après ça, 200 $ par personne. Donc, il y a eu la taxe santé en 2010, puis tous les tarifs, minimalement, ont été augmentés, tous ceux que le gouvernement pouvait. Taxe sur l'essence, c'est indéniable, hein? Année après année, on a un gouvernement qui taxe l'essence. Et les deux fameux points de TVQ.

Le fédéral a décidé qu'il baissait le fardeau fiscal des Québécois. Fardeau fiscal, c'est la taxe... C'est sûr que, si on paie moins de taxes, on stimule l'économie dans une certaine mesure. Et le fédéral baisse la TPS de deux points, et les libéraux décident, en deux ans, d'aller chercher ces deux points de TVQ. Alors, si on additionne tout ça, taxe santé, les tarifs qui ont été augmentés, taxe sur l'essence, et juste TVQ... J'ai un papier que Michel Girard a écrit dans les derniers jours qui disait : «Allègement fiscal, mon oeil!» C'est près de 16 milliards d'argent neuf qu'on est allé chercher dans les poches des contribuables.

Quand on regarde les revenus globaux, là, bon, bien, quand l'élection de 2012 est arrivée, où le Parti libéral a perdu le pouvoir, on ne balançait toujours pas le budget, M. le Président, on ne le balançait toujours pas. Le Parti québécois est arrivé au pouvoir pendant 20 mois. Et je dois donner à César ce qui lui revient, les libéraux, à la dernière année, en 2012, la croissance des dépenses avait baissé à 3,3 % si je me souviens bien. C'était la première fois que ça baissait depuis que j'étais arrivé à l'Assemblée nationale. Et là, 2014, l'année complète où le Parti québécois a été au pouvoir, on a vu une croissance des dépenses à 4,7 %. On est revenus au même, même niveau que le Québec avait connu dans les dernières années. Et devinez quoi? On ne balançait toujours pas le budget.

Ah oui! on n'en serait pas ici aujourd'hui à débattre d'une situation où l'équilibre budgétaire est un objectif noble. Parce que ce n'est pas compliqué, le ministre des Finances le sait mieux que moi, les agences de notation qui lui disent et qui lui ont certainement dit, tout comme, j'imagine, le collègue de Rousseau quand il était ministre des Finances : Faites attention, faites attention... Même Desjardins disait hier... ne partage pas la confiance du ministre des Finances. Je pourrai y revenir un peu plus tard parce que mon collègue de Rousseau l'a mentionné tantôt.

Et donc on va chercher des revenus additionnels. Depuis 2010, on ne balance pas le budget, on pellette en avant déficit après déficit. On se fout un peu, là, de la situation en se disant : Ah! ça va nous frapper un jour, mais ce n'est pas grave. Vision à court terme pour se faire élire. Arrive l'élection de 2012, le Parti libéral perd, le Parti québécois arrive minoritaire. Ça dure 20 mois, on ne balance toujours pas le budget. 2014, les libéraux gagnent, la majorité, et là on est face à un mur. On est face à un mur, il n'y a personne qui a vu une croissance des dépenses à 1,5 % globale. Globale, consolidée, là, il n'y a personne qui a vu ça. Moi, je n'ai pas vu ça, je n'ai pas vu ça. Quand on regarde que la croissance des dépenses en santé a été en moyenne de 4,5 % à 5 % et que l'éducation l'a été à 3 %, 4 % dans les huit, 10 dernières années, changement de paradigme important, là, important.

Et c'est là qu'on arrive à l'étape de 2015, dépôt de budget et que le gouvernement nous dit : Bien, c'est bien le fun, là, on ne vous a pas augmenté vos taxes puis vos tarifs pour ce budget-ci, on n'a pas touché à vos impôts non plus. Excusez, c'est parce que l'année 2014 qui vient de se terminer, encore une fois la même recette a été celle que Raymond Bachand a mise en place avec Jean Charest et ce que le ministre des Finances, aujourd'hui, et le premier ministre ont décidé de faire. Comment? Bien, simplement en reniant des promesses. En reniant des promesses.

Puis, je le dis bien respectueusement, tous se souviennent... Première chose, là, débat des chefs, débat des chefs où les tarifs de garderie, c'était odieux. Premièrement, le Parti québécois disait : On l'a augmenté de sept à neuf. C'était plus que l'inflation, et là eux déchiraient tout ce qu'ils pouvaient en disant : Non, non, non, les tarifs de garderie n'augmenteront pas plus que l'inflation. Eh bien, surprise, aujourd'hui on est à des tarifs qui iront jusqu'à 20 $. On évalue, pour une famille qui gagne à peu près 85 000 $ en 2015, à une augmentation de 790 $ les frais de garderie.

En 2014, l'essence, M. le Président, c'est indéniable, c'est ce qu'il y a de plus facile, hein, tout le monde a une automobile, peut-être deux, alors c'est 0,01 $, 0,02 $ par année, donc 125 $ qu'on évalue là. Il y a quand même un point positif qu'il faut donner, c'est que le contexte mondial, qui est un contexte à l'avantage des automobilistes présentement que nous n'avons pas connu depuis très, très, très longtemps, fait que la plupart des gens qui sont ici, qui ont une automobile, qui nous écoutent vont sauver facilement entre 10 $ et 20 $ par semaine parce que le prix de l'essence est à 1,00 $ ou 1,00 $, un peu plus, le litre. Alors, tant mieux. Tant mieux, ça, c'est un peu d'oxygène. Mais ça, c'est un bon cycle présentement versus l'offre et la demande de ceux qui sont les producteurs de pétrole. Moins bonne nouvelle peut-être pour ceux qui produisent en Alberta, mais ça, c'est un autre sujet.

On a eu une augmentation de la taxe sur les assurances automobile. Ah! vous allez me dire que c'est minime, mais 40 $... Ça me fait toujours rire quand j'entends le premier ministre nous parler des tarifs d'Hydro-Québec et me dire : C'est seulement 3,50 $ par mois. Bien, si vous saviez les 3,50 $ par mois que j'ai vu d'augmentation depuis que les libéraux sont là en 2003, mais surtout la période depuis 2010, bien, on additionne, M. le Président, après ça, ce qui a été sous-traité...

Le Président (M. Bernier) : Je vais juste vous arrêter 30 secondes, M. le député de Granby. Est-ce qu'il y a consentement — il reste environ 2 min 30 s — pour que le député puisse terminer sa présentation?

M. Bonnardel : Je vais atterrir. Je vais atterrir, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Pardon?

M. Bonnardel : Je vais atterrir, là.

• (18 heures) •

Le Président (M. Bernier) : Ça fait qu'il vous reste environ 2 min 30 s.

M. Bonnardel : Je ne pensais pas qu'il était déjà 6 heures.

Le Président (M. Bernier) : Donc, est-ce qu'il y a consentement pour qu'on poursuive?

M. Bonnardel : Tout le monde a faim, puis moi aussi.

Le Président (M. Bernier) : Continuez, M. le député de Granby.

M. Bonnardel : Je pourrai y revenir. Toujours en terminant, en disant que depuis 2014, depuis l'élection des libéraux, c'est près de 1 300 $ que les libéraux sont allés chercher dans les poches des contribuables, que ce soit taxe scolaire, que ce soient taxes municipales, comme je l'ai mentionné, Hydro-Québec. Tout ça ensemble fait que les contribuables ont payé énormément, énormément pour ce retour à l'équilibre budgétaire. On aura la chance d'en discuter dans les prochaines heures pour faire le point de la situation et comment on va relancer l'économie, comment on va recréer de l'emploi et redonner un peu de pep à une économie qui en a bien, bien, bien besoin et surtout à des contribuables qui ont besoin d'oxygène. Voilà.

Le Président (M. Bernier) : Donc, vos remarques préliminaires étant terminées, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 19 h 30. À tout à l'heure. Oui, vous pouvez...

Je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

(Reprise à 19 h 33)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, bonsoir. La Commission des finances publiques reprend ses travaux.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours du budget.

Discussion générale

Nous en étions rendus à l'étape du débat. Donc, comme le veut la tradition, je cède la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière des finances. M. le député de Rousseau, la parole est à vous pour un bloc d'environ 20, 23 minutes, une vingtaine de minutes.

M. Marceau : Parfait. Une vingtaine de minutes, parfait. O.K. Bien, écoutez, je vais commencer par quelques questions, mais je vais commencer par une question qui m'intrigue, bien sincèrement, une question, en fait, que j'ai déjà posée, M. le Président, à l'Assemblée, au salon bleu, mais, à l'époque, j'avais eu une réponse dans laquelle on m'avait dit : Attendez, vous allez tout savoir ça au budget. Alors, la question était sur les marges de prudence incluses dans les prévisions, marges qui avaient été... enfin, dont on avait eu connaissance à l'occasion du rapport du Vérificateur général sur la mise à jour financière de décembre 2014. Donc, à la page 25 et 26 de son rapport, le Vérificateur général nous disait : Il y a des marges de prudence dans les prévisions. Il y en avait pour 1 077 000 000 $ en 2015-2016, il y en avait pour 1,6 milliard en 2016-2017, et le Vérificateur général disait au paragraphe 45 de la page 26 de son rapport : Ces marges de prudence ne sont pas divulguées dans le point, essentiellement. Puis il invite... Je cherche la phrase. «Par conséquent, notre recommandation précédemment formulée [...] d'adopter une orientation claire concernant la marge de prudence à intégrer dans le scénario économique et dans les prévisions budgétaires, à la diffuser de façon explicite aux différents intervenants et à l'expliquer dans les documents budgétaires demeure pertinente.» Bon, ça, c'est le premier élément.

Et donc, voyant cela, à l'occasion, donc, d'une période de questions, je ne sais plus laquelle, j'ai demandé à notre estimé collègue le ministre des Finances de nous dire ce qu'il en était, et ce à quoi il a répondu : Dans 48 heures, M. le député de Rousseau, je vous dirai ce qu'il en est, et vous pourrez le voir dans le plan budgétaire. Alors, quand j'ai ouvert le plan budgétaire à l'occasion du huis clos, lors du dépôt du budget, bien, j'ai cherché, M. le Président, ces explications et je ne les ai pas trouvées. Alors là, je reviens avec la même question : Où sont-elles, ces marges de prudence? Et y a-t-il des explications à trouver à quelque part? Je commence comme ça, tout simplement, puis je reviendrai.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Alors, pour ce qui est des marges de prudence, je pense qu'il y a deux choses qu'on doit... on doit distinguer deux choses. En termes de marges de prudence comme telles, nous avons... dans notre plan budgétaire, pour 2015-2016, il y a à peu près 200 millions dans le Fonds de suppléance. Et puis, pour 2016-2017, il y a le même 200 millions dans le Fonds de suppléance. Il y a une marge budgétaire aux dépenses de 250 millions et puis il y a la provision pour éventualités de 400 millions. Alors donc, ça, ce sont les montants qui sont inscrits dans le plan budgétaire.

Ce à quoi le député de Rousseau fait allusion, c'est au rapport du Vérificateur général, qui, en effet, peut porter à une certaine confusion. Le Vérificateur général, quand il a, donc, parlé des dépenses, il a mentionné qu'il y a des risques favorables, il y a des risques défavorables. Et, quand on fait le net des deux pour l'année 2015-2016, c'est à peu près 360 millions. Donc, c'est une façon prudente, prudentielle de gérer le budget en identifiant les risques qui sont favorables, qui sont positifs et aussi en identifiant les risques qui sont défavorables. Comme ça, on peut gérer les dépenses de programmes de façon prudente.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau...

M. Marceau : Oui. Bien, regardez, ce n'est pas parfaitement clair pour moi.

Le Président (M. Bernier) : ...l'occasion d'éclaircir tout ça.

M. Marceau : C'est l'occasion de l'éclaircir, M. le Président. O.K. Je vais recommencer. Donc, on se comprend, là, les provisions pour éventualités, si ce n'est pas là-dedans, elles étaient révélées, de toute façon, dans le rapport du VG déjà. Alors, ce n'est pas de ça dont on parle, on parle des marges de prudence. Prenons simplement 2015-2016, 881 millions. Là, le VG, il n'a pas inventé ce chiffre-là, là, il y a quelqu'un qui lui a dit ça à quelque part, au ministère. Il y a quelqu'un qui lui a dit : 881 millions de marge de prudence aux dépenses.

Et là la question que ça posait pour nous, c'est : Est-ce que les dépenses... Là, je prends les dépenses pour... des dépenses... Ça, c'est ça, pour les dépenses, j'essaie de voir si... Est-ce que c'est pour l'ensemble des dépenses ou simplement les dépenses de programmes? Mais disons que c'est pour l'ensemble de dépenses, M. le Président, les dépenses consolidées. Alors, si on prend les dépenses consolidées — je vais prendre mon... — pour 2015-2016, il est prévu, disons, 88 milliards aux dépenses consolidées, auxquels il faut ajouter, bon, comme vous savez, le service de la dette, mais restons à 88 091 000 000 $. Puis là on dit : On a 881 millions de marge de prudence. Et là la question que ça pose, c'est : Est-ce que les dépenses qui vont être effectuées cette année, c'est bel et bien 88 091 000 000 $ ou bien 88 091 000 000 $ duquel on doit soustraire le 881 millions? C'est la question toute simple que je pose.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (19 h 40) •

M. Leitão : Non, non. Pour 2015-2016, c'est ça, pour 2015-2016, le seul... Vous avez mentionné les 800 et quelques millions, là, mais tout ça, maintenant, a été attribué, et la seule chose qu'il reste, c'est le fonds de suppléance à 200 millions. Donc, il y a une marge de 200 millions au fonds de suppléance pour 2015-2016, c'est tout.

Le Président (M. Bernier) : Merci.

M. Marceau : C'est ce qui fait que 681 millions ont été attribués à différents...

M. Leitão : C'est ça.

M. Marceau : Alors, ce n'est plus vraiment des marges de prudence, là.

M. Leitão : Non, mais c'est ce que je vous dis, comme marge de prudence, nous avons 200 millions en 2015-2016 et nous avons le même 200, plus 250 de marge budgétaire, plus 400 de provisions en 2016-2017.

M. Marceau : Non, ça, ça va, le 400... Je restais juste en 2015-2016, là.

M. Leitão : En 2015-2016, il y a 200. En 2015-2016, il y a 200 millions de fonds de suppléance.

M. Marceau : ...puis le 681 a été, lui, attribué. O.K. Bien, je pense que vous allez avoir intérêt à parler au Vérificateur général parce que lui, il était sous l'impression... Enfin, quand on le lit bien clairement... Et ça, c'était à l'occasion du point, là, à ce moment-là, donc au point, lui, il voyait une marge de prudence de 881 pour l'année 2015-2016, là. Soyons bien clairs, là, pas pour l'année 2014-2015, pour 2015-2016. Lui, il disait : Il y a 880... Bon, en tout cas, de toute évidence, il y a quelque chose là, il faudrait qu'on parle au Vérificateur général pour qu'il nous explique comment il a compris les choses.

Je vais quand même dire — puis là on est dans le monde des souhaits, là — ça aurait été bien que vous expliquiez ça dans le document budgétaire, dans le plan budgétaire, mais, bon, vous faites comme vous voulez. Mais disons que, comme vous m'aviez laissé croire que je pourrais trouver la réponse, j'ai cherché en vain, M. le Président. O.K. Alors, je retiens qu'il y a 681 millions qui n'étaient pas des véritables marges de prudence.

Sur l'année 2016-2017, ce qui est prévu, c'est 1 446 000 000 $. Est-ce que le même raisonnement s'applique? Est-ce que je dois comprendre que le 1 446 000 000 $, c'est une marge de prudence aujourd'hui, mais que, dans le fond, quasiment... Bien, tout à l'heure, on peut dire qu'essentiellement 75 %... un peu plus de 75 % a été attribué à des différents ministères. Est-ce que ça va être la même chose pour le 1 446 000 000 $ déjà identifié pour 2016-2017? Est-ce qu'on peut dire que 75 % de ça est déjà prévu, est déjà attribué?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bon, il faudrait... De cela, il y a donc les 800, 850 millions de marge, donc fonds de suppléance, marge budgétaire, provision pour éventualités. Donc, le reste, oui, d'ici 2016-2017, ça sera attribué aux différents postes de dépenses.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Marceau : O.K. Est-ce que vous avez l'intention d'expliquer cela dans les documents budgétaires? Je ne parle pas aujourd'hui, évidemment, dans le futur.

M. Leitão : Non, c'est ça, ce n'est pas... Bon, lors de l'évaluation des comptes publics, le VG verra ça, mais nous, on ne se réconcilie pas avec les données du VG.

M. Marceau : Donc, la recommandation du VG, vous trouvez que, sans vouloir le dénigrer parce que je sais que vous ne voudriez jamais faire ça, donc, vous... La recommandation du VG, donc vous n'avez pas l'intention de l'appliquer pour la suite des choses?

M. Leitão : Non, c'est que... Encore une fois, je pense qu'il y a un peu de confusion parce que ce que le VG a identifié, ça, nous sommes entièrement d'accord. C'est que le gouvernement identifie donc les risques, les risques favorables et les risques défavorables, et c'est ça qui est la bonne méthode de gérer les dépenses publiques. Et puis, au fur et à mesure que l'année fiscale se déroule, bon, ces marges-là vont s'équivaloir l'une à l'autre, et on va arriver aux objectifs de dépenses, aux cibles de dépenses que nous avons.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Marceau : Vous savez quand même qu'il y a des crédits qui sont votés par le Parlement puis qui doivent s'appuyer sur des dépenses qu'on a réellement l'intention d'effectuer.

M. Leitão : ...

M. Marceau : Bien là, de toute façon, regardez, je comprends, là, que, dans le fond, vous aviez encore... Enfin, je comprends qu'il y a eu une mésentente entre le VG puis vous. Pas une mésentente au sens d'un conflit, là, il y a une question de compréhension qui n'est pas parfaitement consensuelle, je pense. En tout cas, les termes qu'ils utilisent puis ceux que vous utilisez aujourd'hui ne sont pas les mêmes. Il se peut qu'à travers le temps on puisse vouloir réaffecter des sommes dans une... Moi, je n'ai pas de misère à imaginer que l'année se déroule... au début, on a prévu de faire des dépenses dans le poste a, b, c, d puis qu'à un moment donné en cours d'année, bien, on se rend compte qu'on va dépenser un petit peu moins dans b pour différentes raisons puis qu'on pourrait prendre un peu de ça pour aller mettre dans le c, mettons. Ça, ce n'est pas quelque chose d'inimaginable, mais ce n'est pas comme des marges de prudence... Enfin, ça ne correspond pas à la compréhension que le VG en a, c'est tout ce que je veux dire. Lui, il voit ça comme une façon prudente de gérer. Là, ce n'est pas exactement de ça dont il s'agit.

Regardez, je vais changer de sujet. Je veux aller sur un sujet très, très pointu, mais que je trouve important, c'est la question du bouclier fiscal. Là, la page, c'est quoi? C'est D...

Une voix : B.19

M. Marceau : B.19. B.19, M. le ministre.

M. Leitão : B?

M. Marceau : Oui. Bien, ça commence à B.19, il y en a à B.20, B.21, B.22, B.23. Bon, en fait, la question vous a déjà... enfin, a déjà été posée à votre collègue la ministre de la Famille, puis, après ça, on en a reparlé, mais je veux juste bien comprendre les orientations qui vous animaient, qui vous guidaient lorsque vous avez fait le choix de ce bouclier fiscal là plutôt qu'un autre. O.K.? Parce que, moi, l'idée du bouclier fiscal, en tant que telle, bon, je pense que c'est généreux, ça corrige, effectivement, un problème qui existe, mais, bon, vous savez comme moi qu'il y a différents... le bouclier pourrait défendre différents types de ménages, pourrait les défendre contre différents types de circonstances. O.K.? Donc, c'est un bouclier, puis il te protège contre quelque chose, puis il protège certaines personnes, puis pas d'autres.

Là, le gouvernement a fait le choix — puis c'est correct — de protéger des mesures qui sont des encouragements au travail. C'est clair, il y a donc deux dispositions qui sont incluses dans le bouclier fiscal : il y a la prime au travail puis le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants. Alors, autrement dit, si une personne voit son revenu s'accroître, sa prime au travail puis son crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants sont, d'une certaine façon protégés, il va y avoir une compensation pour la baisse du crédit d'impôt puis pour la baisse de la prime au travail. Je pense qu'on a une compréhension mutuelle. Ça va là-dessus? Bon, très bien.

Bon, mais on vous a déjà dit en période de questions... en fait, pas à vous, là, mais c'est vous qui avez répondu, je pense, c'est ça. C'était mon collègue le député de Terrebonne qui avait posé la question, puis c'est vous qui aviez répondu. Mais je reviens là-dessus parce que vous avez fait le choix d'inclure dans le bouclier le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants, mais pas les tarifs de services de garde. Puis, en fait, quand une personne voit son revenu s'accroître, il y a deux choses qui se passent, là. Si vous envoyez votre enfant dans une garderie privée, un service de garde privé non subventionné, on va dire, plutôt, bien... puis votre revenu s'accroît, bien, le crédit d'impôt devient moins généreux. C'est contre ça que vous voulez protéger les gens, puis parce que vous les encouragez à aller travailler. Mais, si on adopte — puis je sens que ça va arriver — les changements que vous proposez à la tarification des services de garde, bien, quand les revenus des personnes augmentent, leurs tarifs de services de garde aussi augmentent.

Ça fait que, si votre logique, c'est d'encourager les gens à travailler, puis là vous me dites : Je vais juste les protéger dans une circonstance qui est celle dans laquelle ils envoient leurs enfants dans les services de garde non subventionnés, mais vous ne les protégerez pas quand ils envoient leurs enfants dans des services de garde subventionnés, bien là vous faites un choix qui... Premièrement, la logique voudrait que vous protégiez tout le monde de façon équivalente, là, une espèce d'équité horizontale, qu'on appelle, qui fait en sorte que, quel que soit le mode de garde choisi par les parents, bien, le bouclier protège de la même façon les parents. Ça fait que, là, ce n'est pas le cas, là. Là, si vous êtes en service de garde subventionné, puis votre revenu s'accroît, votre tarif s'accroît, le rythme... Je veux juste vous le dire, là, quand on a un revenu en haut de 75 000 $... Là, je n'ai pas le chiffre avec moi, malheureusement, mais de mémoire... Enfin, je pourrais trouver le rythme, là, mais je pense que c'est 0,039 $ par dollar supplémentaire gagné, donc, s'il y a une hausse des tarifs, là, des services de CPE. Alors, probablement, j'aimerais juste vous entendre sur les principes sous-jacents, peut-être, s'il vous plaît.

• (19 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Donc, il y a plusieurs éléments. Et vous avez raison, c'est un choix. Nous avons choisi d'établir le bouclier fiscal de cette façon-là. Nous nous sommes inspirés de la commission Godbout pour le bouclier fiscal. Mais vous avez aussi remarqué probablement que le nôtre est un petit peu différent de celui qui avait été proposé par la commission Godbout, et cela pour deux raisons, tout d'abord parce que... La première, c'est qu'évidemment nous le faisons à l'intérieur de nos moyens. Si on avait des moyens financiers plus avantageux, évidemment on le ferait plus généreux. Mais, puisque la réalité est telle aujourd'hui, c'est comme ça. Ça n'empêche pas que, l'année prochaine ou dans deux ans, si on a les moyens, on puisse bonifier le bouclier fiscal.

Alors, quand nous avons mis en place le bouclier fiscal, notre première préoccupation, comme vous avez aussi mentionné, c'est l'encouragement au travail. Donc, c'est surtout de protéger la prime au travail pour les familles ou les contribuables à bas revenus. Donc, c'est vraiment ce groupe de personnes que nous ciblons pour qu'elles puissent trouver un encouragement à aller sur le marché du travail et à travailler, à ne pas refuser une augmentation salariale qui pourrait, au net, leur coûter encore plus cher.

Nous avons aussi inclus les crédits d'impôt pour frais de garde pour, donc, bénéficier encore un peu plus des personnes à bas revenus, mais qui ont des enfants en milieu de garde, et donc pour les inciter encore un peu plus. Mais c'est clair que ce qui est important... enfin, le montant important, c'est la prime au travail, c'est là qu'on va chercher le plus gros montant.

Maintenant, encore une fois, pour les personnes à plus bas revenus... Et ça, nous le voyons dans le tableau à la page B.22 budget, ce sont justement les personnes à plus bas revenus qui bénéficient le plus du bouclier fiscal, et ces personnes-là aux revenus de 40 000 $, 45 000 $, même 50 000 $, ces personnes-là, les tarifs de garde après toute l'aide qui est apportée, les tarifs de garde n'augmentent pas beaucoup pour ces personnes-là. Donc, le tarif net est fixe, donc ça ne bénéficie pas... Donc, c'est assez neutre du côté services de garde. Je ne pense pas que ce soit une mesure qui va inciter les parents à aller d'un système à l'autre parce qu'à ces revenus-là il n'y a pas d'impact sur les tarifs. Pour les personnes à plus hauts revenus, là, des fois, la question peut se poser : Est-ce qu'on envoie l'enfant dans un type de garde versus un autre? Mais, à plus hauts revenus, le bouclier fiscal ne s'applique plus ou n'a plus d'effet.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Marceau : Oui, mais là prenez deux pages plus loin, à la page B.24, vous avez des gens visés par le bouclier, puis effectivement, quand on arrive à des niveaux de revenus supérieurs, il y a moins de monde, là, je suis prêt à en convenir, mais il y a quand même encore du monde, puis je ne comprends juste pas pourquoi vous voulez protéger les gens qui utilisent des services de garde non subventionnés puis que vous ne voulez pas protéger les gens qui utilisent des services de garde subventionnés alors que beaucoup des choses qui ont été faites par le gouvernement... Puis, M. le Président, je vous prends à témoin, depuis plusieurs années, ça a été de vouloir rendre neutre le coût, c'est de vouloir s'assurer que ce soit à peu près égal puis de... Moi, ça ne correspond pas à mon choix idéologique à moi, là. Moi, ce n'est pas le choix que moi, je ferais, mais c'est votre choix à vous, là, de vouloir dire que ça devrait être neutre puis que ça devrait être l'équivalent pour subventionné puis non subventionné. Ça, c'est votre discours. Et là ce n'est pas neutre, là, ce que vous faites, il va y avoir deux catégories de parents. Mettons qu'on prend quelqu'un qui gagne 100 000 $, là, une famille qui gagne 100 000 $, s'ils ont 5 000 $ de plus, leur crédit d'impôt services de garde va être protégé s'ils sont en garderie non subventionnée, puis, s'ils sont dans un CPE, bien là ils vont devoir casquer, tout simplement, ils vont subir l'augmentation de tarif qui est prévue.

Et, si vous voulez inciter les gens à demeurer, parce que... Je vais recommencer cette phrase-là. Il y a des gens qui sont venus ici, en commission parlementaire sur le n° 28, qui sont venus vous dire : Il y a des dangers pour la participation des femmes au marché du travail avec l'augmentation, la modulation des tarifs de garde. Je sais que le gouvernement en doute, là, mais il y a des gens qui sont venus dire ça. Puis là vous nous dites — ça, c'est une affaire — vous nous dites : On ne croit pas, là, cette histoire, là, qui a été dite par plein d'intervenants, que, donc, si on augmente les tarifs dans les garderies, ça va amener les gens à quitter le marché du travail. Ça, c'est une partie de ce qui est dit par le gouvernement. Ça a été dit, en tout cas, M. le Président, devant vous pendant l'étude du projet de loi n° 28. Puis là, du même coup... puis là on change de moment ou de temps dans l'histoire, puis là on arrive, puis ont dit : Écoutez, on veut encourager les gens à travailler, on crée un bouclier fiscal puis, pour inciter les gens à travailler, on va protéger le monde, on va protéger la prime au travail des gens quand leurs revenus augmentent, puis, quand ils sont en service de garde non subventionné, on va les protéger...

Le Président (M. Bernier) : 30 secondes.

M. Marceau : ...puis on ne peut pas les ... Oui, je vais arrêter... Moi, je trouve qu'il y a une incohérence, là, autant avec ce que vous avez dit dans le projet de loi n° 28 que dans votre discours de neutralité des modes de garde, puis, évidemment, j'ai de la misère à m'expliquer pourquoi les parents qui utilisent les services de garde subventionnés seraient pénalisés pour ceux qui gagnent 100 000 $ ou 75 000 $. Il va y avoir un impact sur les services de garde, là.

Le Président (M. Bernier) : C'est maintenant du côté du gouvernement à prendre la parole. Je peux vous laisser répondre sur ça si vous le désirez.

M. Leitão : Non, juste rapidement, juste pour dire que...

Le Président (M. Bernier) : Oui, allez-y sur le temps du gouvernement.

M. Leitão : D'accord. Rapidement, pour dire que 93 % des ménages qui vont profiter du bouclier fiscal sont des familles qui ont un revenu net qui n'excède pas 75 000 $. Donc, le bouclier fiscal est conçu pour bénéficier à des familles à bas revenus.

Le Président (M. Bernier) : C'est bien. Donc, je crois que c'est le député de Sainte-Rose qui va prendre la parole.

M. Habel : Exactement. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Sainte-Rose, la parole est à vous.

M. Habel : Merci, M. le Président. Permettez-moi de saluer l'opposition officielle et la deuxième opposition, ainsi que la banquette ministérielle et les gens qui nous accompagnent aujourd'hui pour parler du budget. Après six déficits du budget, enfin le gouvernement nous présente un équilibre budgétaire, retrouve l'équilibre budgétaire. Les agences de notation l'ont confirmé, nos finances publiques sont plus saines et plus solides que jamais et constituent une base pour construire la prospérité de tous les Québécois.

Déjà, la tendance nous le montre, on a une augmentation au nombre d'emplois de 57 000 durant la dernière portion que notre gouvernement est arrivé au pouvoir et on a franchi cette étape sans avoir augmenté les impôts et les taxes des contribuables. Nous nous étions engagés à le faire lors de la mise à jour économique. Nous respectons aussi notre engagement en réduisant le poids de la dette et en allégeant le fardeau fiscal des Québécois tout en contribuant au Fonds des générations.

Ce budget marque une étape majeure, et tout est dans ce budget, M. le Président. Tout est dans ce plan économique pour redresser les finances publiques du Québec, qui se constitue sur deux piliers, c'est-à-dire renforcer les conditions de la croissance économique en réduisant le poids de la fiscalité et aussi en stimulant l'investissement et l'emploi, et, deuxièmement, pour contrôler les dépenses.

Lorsqu'on est allés vers la vision du retour à l'équilibre budgétaire, notre vision était très claire, c'était de réduire les dépenses du gouvernement ou les optimiser. Je peux vous donner, par exemple, un exemple parce que je suis sur la Commission de la santé et des services sociaux. Lorsque le projet de loi n° 10 est venu, on a optimisé le rendement des centres intégrés de services sociaux en abolissant les agences de santé et des services sociaux. Donc, c'était réellement une mesure-phare pour optimiser les dépenses publiques. Et la réduction des dépenses de notre gouvernement s'est faite à la hauteur de 84 % de tout l'ensemble de la réduction de l'équilibre budgétaire parce qu'on avait un déficit potentiel de 7,2 milliards de dollars qu'on a réduit vers l'équilibre budgétaire.

Le budget qu'a présenté mon collègue annonce plusieurs mesures qui visent à réduire le fardeau fiscal des particuliers et des entreprises. Et il est vrai que le fardeau fiscal des Québécois est très lourd, et je peux en témoigner, ayant été comptable et ayant fait la vérification au cours de mes années subséquentes, que le fardeau fiscal est très important et très lourd, et je crois que notre vision de l'optimiser est excellente. Cependant, nous nous sommes engagés aussi à avoir une gestion rigoureuse des finances publiques. Alors, je me pose une certaine question dans un contexte de rigueur budgétaire. J'aimerais savoir si l'allègement du fardeau fiscal doit demeurer une priorité par rapport au financement des services.

• (20 heures) •

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Alors, écoutez, le plan que nous avons mis en place, en fin de compte, repose sur plusieurs piliers. Et, pour répondre à votre question directement et immédiatement, je pense qu'une partie dépend de l'autre. C'est-à-dire l'allègement fiscal, à notre avis, est important, et c'est avec l'allègement fiscal qu'on va être capables d'obtenir une croissance économique plus rapide, ce qui va nous permettre de mieux financer nos services publics.

Mais avant, donc, d'arriver à cette conclusion, permettez-moi peut-être d'élaborer un peu plus. D'abord, le plan repose sur l'atteinte de l'équilibre budgétaire. L'atteinte de l'équilibre budgétaire est importante, et souvent ça a été un peu minimisé par... Que ce soient certains membres de l'opposition ou de la société civile, d'autres observateurs, disent : Oh! bof! Pourquoi l'équilibre budgétaire? Pourquoi ne pas remettre à plus tard? Pour nous, l'équilibre budgétaire fait partie essentielle de ce plan-là parce que c'est un... En étant capables d'atteindre l'équilibre budgétaire, nous allons assurer la stabilité financière du Québec, et la stabilité financière est la condition sine qua non pour pouvoir aspirer à avoir une économie en santé, de l'investissement privé en croissance, etc. Tout le reste, tous les autres plans de croissance économique n'auraient aucun effet ou seraient défaits si on continuait à démontrer au monde, aux marchés financiers notre incapacité de gérer nos finances publiques. Donc, tout d'abord, c'est essentiel de prouver... et d'atteindre cet équilibre budgétaire.

Une fois qu'on a fait ça, où est-ce qu'on s'en va? Alors, pour générer une croissance économique qui soit à la hauteur de nos attentes et qui soit à la hauteur des objectifs et des capacités du Québec, il faut se rendre compte que probablement un des grands obstacles, comme le député de Granby le mentionne souvent, un des grands obstacles à une croissance plus rapide, c'est le fait que notre fardeau fiscal est très élevé. Donc, il fallait, d'ores et déjà, mettre en place des mesures, annoncer la direction dans laquelle nous voulons aller, qui est la direction de baisser, de diminuer le fardeau fiscal tant des particuliers que des entreprises pour que l'économie... pour que tout le monde sache dans quelle direction nous allons aller.

Et c'est avec ces deux conditions-là, donc l'atteinte de l'équilibre budgétaire et l'atteinte de la stabilité financière, conjuguées à l'annonce de la direction où nous allons, qui est d'un allègement du fardeau fiscal... ça, ça constitue les fondations d'une économie qui peut atteindre des taux de croissance plus élevés. Donc, ça, c'est l'essentiel. Si on n'avait pas fait ça, tout le reste n'aurait aucune importance, on ne serait pas capables d'atteindre ça.

Alors, nous commençons par ça, nous commençons par lancer ces fondations qui sont très fortes et puis, par la suite, nous nous en allons dans l'allègement du fardeau fiscal. L'allègement du fardeau fiscal, du côté des particuliers, consiste, dans une première étape, celle que nous avons annoncée... On verra dans des budgets subséquents qu'est-ce qu'on peut faire, mais nous avons annoncé tout de suite deux éléments importants. Le premier, on a parlé tantôt, donc le bouclier fiscal. C'est une mesure importante pour protéger les familles à plus bas revenus parce que le taux effectif d'imposition souvent le plus élevé n'est pas seulement pour les familles à très hauts revenus, mais pour les familles à plus bas revenus, ceux qui gagnent 40 000 $, 45 000 $ par année et qui reçoivent certains transferts fiscaux, évidemment. Ce sont ces personnes-là qui font face souvent à des taux effectifs d'imposition qui sont les plus élevés, donc il fallait alléger cette couche de la population là.

Et l'autre élément de l'allègement du fardeau fiscal des particuliers, c'est la taxe santé. En effet, c'est une taxe qui est loin d'être la plus intelligente, et donc nous nous sommes engagés à l'éliminer. Et donc nous commençons le processus en 2017, et, encore une fois, les premières couches de la population qui vont bénéficier de l'élimination progressive de la taxe santé seront d'abord les personnes à plus bas revenus. Les personnes, les familles à plus hauts revenus, celles-là bénéficieront de cet allègement un peu plus tard. Donc, c'était important de faire ça d'ores et déjà.

Et l'autre partie qui est aussi très importante dans l'allègement fiscal concerne les entreprises. Et, là aussi, nous annonçons nos intentions, et ces intentions-là sont de baisser les taux d'imposition généraux des entreprises. Le plus général possible parce que nous pensons que c'est de cette façon-là que nous allons avoir un meilleur effet sur les décisions d'investissement des entreprises et surtout des PME.

Donc, voilà, allègement fiscal, oui. Allègement fiscal, c'est important pour qu'on puisse aspirer à avoir une économie plus forte, et c'est cette économie plus forte qui va nous permettre de financer adéquatement nos services publics.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Vous avez terminé? Vous avez une autre... Bien, allez-y, M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Non, non, j'ai une sous-question par rapport à l'allègement fiscal encore.

Le Président (M. Bernier) : Bien, allez-y, M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Je vais aller plus au niveau des sociétés. Parce qu'on a mentionné qu'on voulait avoir une réduction fiscale, on a parlé du taux d'imposition de 8 % à 4 %, j'aimerais qu'on parle du taux d'imposition de 11,9 % à 11,4 %. Parce que je pense à mon collègue de Chapleau, qui est limitrophe avec l'Ontario, quel est l'impact pour cette région-là d'aligner... dans le fond, d'avoir le même taux d'imposition que l'Ontario? Est-ce que ça constitue un avantage? Et dans quelle mesure c'est avantageux?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bien, en effet, donc, nous avons choisi la réduction graduelle du taux général d'imposition, de l'impôt sur le revenu des sociétés, grandes et petites, toutes les sociétés, de 11,9 % à 11,5 %. Là aussi, nous nous sommes inspirés des travaux de la commission Godbout. Évidemment, la commission Godbout allait plus loin que ça, elle parlait de baisser de 11,9 % à 10 %. C'est quelque chose que, pour l'instant, nous ne sommes pas en mesure d'aller si loin que ça, mais c'est un objectif que nous gardons toujours en tête, et nous essaierons à l'avenir, si c'est possible, de le faire.

De 11,9 % à 11,5 %, pourquoi 11,5 %? C'est justement comme vous avez mentionné, pour qu'au moins on puisse s'aligner avec les taux d'imposition en Ontario. L'Ontario est, évidemment, notre province voisine. Ce sont nos grands partenaires, ce sont aussi des compétiteurs, alors c'était important de nous assurer que notre régime fiscal soit compétitif avec celui de notre plus grand partenaire économique, qui est l'Ontario, pour éviter que la fiscalité devienne un facteur de décision, de choix d'investissement dans une province versus l'autre. Donc, avec ce taux qui va converger vers celui de l'Ontario, je pense que nous éliminons... enfin, nous minimisons cette compétition fiscale. Et en gardant aussi en tête que, pour les PME, pour les PME manufacturières, en fin de compte, maintenant le régime fiscal québécois est plus avantageux que celui de l'Ontario. Pour les PME manufacturières.

Encore là, on aimerait bien étendre ça aux PME de plusieurs autres secteurs. On y arrivera avec le temps, au fur et à mesure que nous avons les moyens, mais au moins, pour les PME manufacturières, déjà le régime fiscal québécois, au moins, là aussi, ça ne sera pas un obstacle à la localisation de l'investissement versus nos voisins ontariens. Donc, c'était important de s'aligner avec la fiscalité de nos voisins.

• (20 h 10) •

Le Président (M. Bernier) : Merci. Vous avez une sous-question?

M. Habel : ...sous-question au niveau du taux d'imposition, qui va passer de 8 % à 4 %. Ça constitue quand même un avantage concurrentiel pour les PME, qui vont pouvoir en bénéficier au cours des prochaines années. Dans quelle mesure ça va être bénéfique pour les régions du Québec, cette réduction de 8 % à 4 %, pour le secteur primaire?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : C'est ça, parce que ce que j'avais tantôt, c'est que le 8 % à 4 % pour les PME manufacturières, c'est ce que nous avions dans le budget de juin. Dans le budget de mars 2015, nous avons prolongé ça, nous avons étendu ça aussi au secteur primaire. Donc, le secteur primaire, c'est l'agriculture, c'est les mines, les pêches, la forêt. Alors, le secteur primaire, bien sûr, est un secteur qui est particulièrement — presque, par définition — présent et important en région. Alors, les industries manufacturières, c'est très bien, mais, pour pouvoir vraiment... pour que les régions un peu plus éloignées du Québec puissent aussi bénéficier de cet allègement fiscal, pour que les PME des régions du Québec puissent bénéficier aussi de cet allègement fiscal, c'était utile d'étendre ça au secteur primaire, ce que nous avons fait dans le budget de mars 2015.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Portneuf? M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : C'est à moi? O.K. Bien, merci, M. le Président. Bonsoir, les collègues. Bonsoir, l'opposition... les deux oppositions, en fait, M. le ministre.

Donc, comme vous le savez, le ministre a déposé un budget équilibré pour 2015-2016, et je pense que tout le monde est conscient des efforts qu'il reste encore à faire pour arriver à un équilibre budgétaire. Je pense qu'on a entendu parler pendant de longues périodes des risques et de la fragilité de cet équilibre budgétaire là, et ces efforts vont nous permettre de combler un déficit de plus de 7 milliards de dollars qui aurait pu être créé durant cette année. Donc, pour ce faire, on a posé des gestes qui étaient nécessaires et difficiles pour que la croissance des revenus augmente plus rapidement que celle des dépenses. Et le défi va être de maintenir, j'imagine, à plus long terme, cet équilibre-là, qui fait que les coûts avaient tendance, depuis plusieurs années, à augmenter plus rapidement que le PIB. Et on l'a vu — je pense que l'opposition en a parlé très abondamment — où les croissances, entre autres, de la santé, qui représentaient des coûts de plus de 4 % annuellement, puis, étant donné que c'est presque 50 % du budget, bien, ça représente une croissance relativement élevée.

Les derniers rapports mensuels aussi nous confirment que les étapes que nous avons mises en place, la tendance se maintient, ça va dans la bonne direction. Donc, le budget déposé prévoit aussi que l'équilibre va se prolonger durant les années suivantes.

Donc, M. le Président, j'aimerais savoir comment nous assurer que l'équilibre budgétaire durement acquis sera maintenu pour les années à venir. Donc, j'aimerais demander au ministre des Finances quelles sont les mesures qui ont été prises et qui seront prises pour poursuivre l'assainissement des finances publiques.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, comme vous avez mentionné, l'équilibre budgétaire, ce n'est pas seulement, comme j'ai déjà dit, l'affaire d'un soir, c'est quelque chose qu'il faut maintenir par la suite. Donc, nous nous engageons à atteindre l'équilibre budgétaire cette année, 2015-2016. Par la suite, il faut maintenir cet équilibre-là.

Je souligne aussi en passant qu'au Québec, selon notre Loi de l'équilibre budgétaire, quand on parle de l'équilibre budgétaire, ça, c'est après versement au Fonds des générations. Donc, en fin de compte, d'une façon opérationnelle, le gouvernement du Québec génère des surplus opérationnels déjà cette année, 2015-2016, et puis dans les années suivantes.

Comment allons–nous nous assurer qu'on va maintenir cet équilibre-là après versement au Fonds des générations? En fin de compte, notre méthode, si vous voulez, est une méthode qui n'est pas particulièrement complexe. Nous allons nous assurer que les dépenses publiques n'augmentent pas à un rythme plus rapide que les revenus. Alors, si nous pouvons compter sur une augmentation des revenus de l'État, en moyenne, à long terme, 3 % par année, juste pour prendre un chiffre comme ça, 3 %, 3,5 % par année, ça voudra dire que les dépenses publiques ne pourront pas croître à un rythme plus rapide que cela. Donc, il va falloir qu'on soit capables de vivre à l'intérieur de nos moyens et qu'on soit capables d'atteindre ces cibles-là de croissance de dépenses.

Mais est-ce qu'une telle rigueur en termes de contrôle des dépenses... est-ce que, comme on l'a déjà entendu dire aussi, ça va démolir, détruire le modèle québécois? Écoutez, en suivant cette tendance-là, en suivant cette approche de limiter la croissance des dépenses — parce qu'elles augmentent toujours — au rythme d'augmentation des revenus, ce que nous allons obtenir d'ici 2020, c'est que les dépenses, les dépenses consolidées, excluant le service de la dette, atteindraient à peu près 21 % du PIB du Québec. Elles sont maintenant à peu près à 23,2 %. Donc, le poids des dépenses va diminuer légèrement, mais il va revenir à 21 %, il va devenir à la moyenne historique.

Le Président (M. Bernier) : On aura l'occasion d'y revenir, M. le ministre, on aura l'occasion d'y revenir. Nous allons maintenant passer la parole au député de Granby, porte-parole officiel en matière de finances publiques. Allez-y, M. le député.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Alors, je vais amener la discussion, M. le Président, sur l'emploi et sur la Stratégie maritime. Pourquoi? Parce que, lors de la dernière élection, le Parti libéral avait la prétention de dire qu'avec l'effet libéral — vous le savez, tout le monde s'en souvient — qu'ils allaient créer 250 000 emplois, que le plan de relance économique, une partie de ce plan de relance économique, une partie majeure allait être la Stratégie maritime. Le gouvernement, en campagne électorale, parlait d'investissements de 3 milliards de dollars sur une période de 15 ans, on parlait de créer 30 000 nouveaux emplois.

Le Plan Nord, hein, relancer le Plan Nord, on l'a vu la semaine passée, un gros show encore une fois, comme on l'a déjà connu sous la gouverne de M. Charest en 2010-2011 si je me souviens bien, mais avec des conditions économiques, aujourd'hui, qui ne sont pas du tout, du tout, du tout les mêmes que nous avons connues dans un cycle qui était à la hausse, où le prix des métaux, du fer, de l'or, qu'on connaissait à 1 500 $ l'once, le fer, si je ne me trompe pas, qui était à 150 $, ça allait quand même assez bien. On avait même connu, on avait même connu... on avait même atteint des redevances, si je ne me trompe, qui avaient presque atteint 300 millions de dollars et un peu plus...

Une voix : 330.

• (20 h 20) •

M. Bonnardel : 330 lors de la bonne année de 2013, si je ne me trompe. Et, l'année passée, on a atteint un creux, un creux stratégique de 30 millions de dollars ou à peu près.

Je n'y reviendrai pas parce que ce n'est pas nécessairement le débat, là, des conditions de comment on est arrivé à avoir de l'incertitude qui a plané énormément sur l'industrie minière, mais ma première intervention se fait nécessairement sur un plan global, sur un plan d'emploi. Vous avez entendu maintes et maintes fois mon chef, moi-même parler des conditions économiques, comment on pouvait relancer le Québec, comment on pouvait redonner de l'oxygène aux contribuables québécois, et l'emploi, c'est important, les Québécois veulent travailler. On est une population vieillissante, je le répète depuis des années, on veut garder nos gens, nos sages le plus longtemps sur le marché du travail. Les gouvernements veulent trouver des avantages fiscaux pour garder ces gens sur le marché du travail pour accompagner nos plus jeunes, bravo!

Mais, si on regarde le portrait, le vrai portrait de l'emploi, là... Parce que, bon, certains utilisent des chiffres qui sont à leur avantage, mais le vrai portrait de l'emploi en 2014, quand on regarde les trois premiers mois du Parti québécois et les neuf mois du Parti libéral, l'Institut de la statistique l'a démontré, c'est une perte. C'est une perte, pour l'année, totale de 11 000 emplois, ou à quelques dizaines près. C'est une perte. Si on prend lors de l'arrivée du Parti libéral en avril 2014 et on termine l'année, on a une progression — les chiffres, je les ai ici — de 31 300 emplois. Ça, c'est les neuf premiers mois de l'année 2014.

Dans ces conditions, on a posé maintes et maintes fois la question en Chambre, mais c'est important, encore une fois, aujourd'hui, que le ministre nous expose sa pensée et qu'il revienne sur ce qui pouvait être une cible, là, dans le temps — on en a bien rigolé — une promesse ou peu importe. Mais, dans ce budget, on parle de 37 500 emplois pour la prochaine année, on parle de 36 000 pour l'année suivante, on va être loin de l'objectif à atteindre, qui est de 250 000 emplois. Alors, bien respectueusement, le ministre, il l'a presque avoué la dernière fois en se disant : C'est vrai que ça va être difficile d'atteindre l'objectif. Aujourd'hui, il peut juste nous confirmer que c'était peut-être ambitieux d'annoncer en campagne électorale l'objectif de 250 000 emplois. On a voulu frapper un grand coup comme Robert Bourassa l'avait fait voilà quelques dizaines d'années, mais on se rend compte aujourd'hui que l'objectif ne sera pas atteint parce qu'il faudrait avoir une création d'emplois d'au-dessus de 70 000 dans les deux dernières années du mandat, ce qui est à peu près impossible.

Alors, première question fort simple, puis je vais essayer d'approfondir un peu la... surtout par la suite la situation du 31 500 emplois de créés depuis l'arrivée des libéraux pour l'année 2014. Mais, juste avant ça, je veux que le ministre nous expose la situation en peu de temps, là, mais la situation comme on la connaît aujourd'hui, là. Là, 2014, on sait que, depuis leur arrivée, O.K., 31 500. Au global, avec le Parti québécois, les trois premiers mois de l'année, c'est une perte de 1 000. Mais là on a quand même un objectif moindre pour l'année qui s'en vient, le gouvernement l'a mentionné dans son budget. Et, pour l'année suivante, donc on n'arrivera pas à créer l'objectif de 250 000 emplois.

Alors, je veux que le ministre... Je pourrai élaborer par la suite sur l'autre promesse de la Stratégie maritime, mais, au final, au global, on se rend compte aujourd'hui qu'il sera extrêmement difficile... Donc, que le ministre nous dise que c'est un objectif qu'il souhaite atteindre, oui, pour la prochaine année, je suis d'accord, mais qu'on ne sera pas capable d'arriver à l'objectif, que les libéraux souhaitaient avoir, de 250 000 emplois.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, très bonne question parce que je pense que l'emploi, là, il faut parler un petit peu de ça, parce qu'en effet il y a toutes sortes de chiffres qui circulent. Notre engagement était — et l'est toujours — de 250 000 emplois sur cinq ans. Pas en cinq mois ni en cinq semaines, mais en cinq ans.

Alors, d'ailleurs, on avait eu cette discussion lors du dernier budget avec le député de Rousseau, et j'avais dit à ce moment-là que, pour nous, donc, comment on va faire le décompte des emplois, pour nous, on met le compteur à zéro à notre arrivée. On ne peut pas être tenus responsables de ce qui s'est passé avant notre arrivée, donc on met le compteur à zéro au mois d'avril 2014. On verra bien où on va être au mois d'avril 2019, cinq ans plus tard.

Avril 2014, le niveau d'emploi au Québec était de 4 042 000 personnes. Donc, nous allons être jugés, si vous voulez... notre engagement est qu'en avril 2019 l'emploi total au Québec soit de 4 290 000 pour faire 250 000 sur cinq ans. Alors, rapport d'étape, un an plus tard, où nous nous trouvons maintenant au mois de mars 2015? Bon, nous nous trouvons avec 57 000 de plus. Donc, on est déjà à 4,1 millions ou à peu près, comme ça. Donc, on va dans la bonne direction. Donc, oui, il y a de la création d'emplois qui s'est faite au Québec au cours des 10, 11 derniers mois, création d'emplois qui est quand même vigoureuse, surtout depuis les quatre derniers mois. Si vous regardez le tableau que nous avons à la page C.17 de notre plan économique, où on a l'emploi, on voit qu'en effet, depuis notre arrivée, nous avons été capables de renverser la tendance, de stabiliser l'emploi, pour, par la suite, avoir cette augmentation un peu plus récente.

Maintenant, j'aimerais aussi clarifier encore une fois les choses. Quand on parle de moyenne, la moyenne de l'emploi, 40 000, je ne sais pas quelle année, 30 000 l'autre année, la moyenne annuelle, comme vous le savez très bien, la moyenne annuelle, c'est une façon... En campagne électorale, on s'est beaucoup amusés avec ça, on a beaucoup discuté de ça, on a beaucoup parlé de ça, qu'un meilleur indicateur de la vigueur d'un marché du travail, ce n'est pas la moyenne annuelle, mais c'est ce qui se passe pendant l'année. On rigole, mais on a discuté de ça plusieurs fois, et j'ai bien l'impression qu'on va en discuter d'autres fois. Comme par exemple, en 2013...

Le Président (M. Bernier) : Je veux juste essayer de balancer le temps, M. le ministre, pour permettre aux gens de poser des questions et que vous puissiez donner les réponses.

M. Leitão : Vous avez raison, parce que, quand un économiste commence à parler, on... difficile de l'arrêter.

Le Président (M. Bernier) : Bien oui, quand un économiste... C'est pour ça... Et, comme j'en ai plusieurs autour de la table, je vais essayer de vous contrôler.

M. Leitão : Alors, juste finir avec l'emploi, donc, avec l'emploi, juste pour dire que notre engagement, le 250 000, bien sûr, nous y tenons toujours et, après 10 mois, nous sommes en plein dans la trajectoire voulue.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Bonnardel : M. le Président, si je prends trois minutes, j'aimerais ça que le ministre puisse en prendre trois minutes, juste pour qu'on soit...

Le Président (M. Bernier) : Oui, c'est effectivement ce qu'on a fait, là, on a balancé le temps que vous avez pris par rapport au temps présenté par le ministre.

M. Bonnardel : Bon, je comprends la situation des chiffres. Il y a un autre point qui frappe quand même assez fortement la situation de l'emploi au Québec, et c'est nécessairement la création d'emplois à temps partiel, la création d'emplois à temps plein, mais surtout la création d'emplois aussi dans le secteur public, que ce soit municipal, provincial, fédéral et privé. Et, si on prend l'année 2014, si on prend juste depuis l'arrivée des libéraux, là, on prend les neuf premiers mois de l'année 2014, il y a eu 31 500 emplois de créés, mais, sur ces 31 000, il y en a 83 % qui ont été créés dans le secteur public et une perte de 9 100 emplois dans le secteur privé. Et, sur ce 31 500 emplois, il y en a 3 % seulement qui viennent du secteur à temps plein. Le ministre doit convenir qu'un job à temps partiel, ce n'est pas un job à temps plein, ce n'est pas l'équivalent. Oui, c'est un job, c'est vrai que c'est un job. Un job à temps partiel, on peut y travailler 20 heures, on peut en travailler 15, on peut en travailler 25, mais ce n'est pas un job à temps plein.

La situation de l'emploi aussi dans le secteur privé — puis je sais que ça le touche, là, c'est certain — on souhaite voir énormément d'emplois créés dans le secteur privé. Dans le secteur public, O.K., mais, si c'est le secteur public qui débalance le reste et qui donne une création plus grande, on n'avance pas. Et il le sait très bien parce que, quand on regarde les chiffres de l'investissement privé du Québec versus la moyenne canadienne, on est à peu près à 14 % au Québec et on représente 24 % de la population, on a un énorme retard.

Donc, au-delà du débat partisan, là, du salon bleu, là, jour après jour, où on lui pose la question, où mon chef lui dit : Création d'emplois, plan de relance économique, il le sait très bien — ce soir, là, il n'y a personne... oui, il y a des gens qui nous écoutent, là, les caméras de télé ne sont pas là — il le sait très bien, là, que c'est majeur, la situation de l'emploi dans le privé versus le public et qu'on a besoin de création d'emplois à temps plein, puis, on le souhaite, des jobs payantes, payantes. Donc, au-delà de la création que lui dit avoir créée, moi, si je regarde les neuf premiers mois de l'année, là, sur ces 31 500 emplois, il le sait, il y a 3 % qui sont dans le secteur à temps plein et une grande majorité de ces emplois ont été créés dans le secteur public. Est-ce qu'il pense être capable de changer cette dynamique en 2015? Et rapidement, dans le même temps que j'ai pris, comment il pense remettre cette situation en équilibre entre les jobs créés, les emplois créés dans le secteur privé versus le secteur public?

Le Président (M. Bernier) : Il ne faut pas minimiser nos cotes d'écoute, M. le député.

M. Bonnardel : Ah non! Je ne minimise pas, non.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Bonnardel : Il y en a déjà eu des grosses, hein?

• (20 h 30) •

M. Leitão : M. le Président, oui, en effet, c'est une très bonne question. Et, en effet, la qualité de l'emploi, c'est quelque chose qui nous préoccupe, nous voulons, évidemment, que les emplois créés soient de la meilleure qualité possible. Et vous avez mentionné que la création d'emplois par le secteur privé est loin d'être optimale, en effet. Et les mesures que nous avons mises en place, justement, dans notre plan économique, l'allègement du fardeau fiscal pour les entreprises manufacturières, secteur primaire, la baisse du taux d'imposition général, bon, toutes ces mesures-là, leur objectif, c'est de stimuler l'investissement privé parce que la création d'emplois viendra ultimement de l'investissement privé. Comme on s'était dit cet après-midi en Chambre, c'est le secteur privé qui doit créer les emplois. Alors, nous mettons en place des mesures pour stimuler l'investissement, et c'est de là que viendra l'emploi.

Maintenant, le secteur public, secteur privé, en effet, beaucoup d'emplois qui ont été créés dans les derniers mois sont dans le secteur public. De notre côté, évidemment, nous contrôlons la croissance des effectifs. Donc, je ne pense pas que ce soit dans la fonction publique provinciale qu'il y a ces gains, c'est dans d'autres secteurs. Et, souvent, ce sont dans les secteurs des réseaux parapublics, santé, éducation, c'est là qu'il y a un bon nombre de nouveaux emplois. Ça voudrait dire aussi, je pense, que la fameuse austérité toxique, ce n'est peut-être pas si toxique que ça, puisqu'il y a des emplois qui sont créés. Mais vous avez raison que ce que nous souhaitons, c'est la création d'emplois par le secteur privé et qui viendra d'une augmentation marquée de l'investissement, chose qu'on n'a pas vue en 2013. On a commencé à le voir un peu en 2014, et notre objectif en 2015, c'est que l'investissement reparte.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Bonnardel : La vérité, M. le Président, c'est que, d'ici les deux prochaines années... Je l'ai mentionné, je le répète encore une fois, ce budget 2015-2016, rien n'est applicable pour relancer l'économie immédiatement, fortement, avant 2017, il le sait bien. Que ce soit le bouclier fiscal, que ce soit le fait qu'on va commencer à réparer l'erreur du passé qui est la taxe santé à partir de 2017 et on va l'abolir complètement après le mandat libéral — on devait le faire avant la fin de son mandat — que ce soit l'impôt des sociétés, baisser le fardeau fiscal, que ce soient les cotisations au fonds de santé, sécurité, tout ça, il n'y a rien d'applicable dans les deux prochaines années, là.

Et là j'arrive à un point majeur qui était un des points d'importance du plan de relance économique. Tout le monde a rigolé quand on a déposé le Projet Saint-Laurent, quand M. Legault... quand le chef du deuxième groupe d'opposition a déposé son livre. C'est que, soudainement, tout le monde a trouvé un peu sexy de développer une stratégie maritime et de dire : Bien, tiens, nous aussi, on peut faire la même chose. Et, je l'ai mentionné en début d'intervention, les libéraux souhaitaient 3 milliards d'investissement sur 15 ans et 30 000 nouveaux emplois. Bien, on a revu ça à la baisse. De notre côté, on était beaucoup moins ambitieux parce qu'on prévoyait 2 milliards, 10 000 emplois. Et, quand le plan de stratégie... quand j'ai déposé... j'ai demandé au gouvernement... qu'on a regardé le budget, on s'est dit : Écoutez, un instant, là, il y a une annonce qui est faite, là, on parle de 1,5 milliard maintenant sur les cinq prochaines années, on revoit aussi à la baisse, là, la création d'emplois pour ramener ça aussi à 10 000, si je ne me trompe.

Ça fait que, là, quand on s'est dit : Il y a 1,5 milliard d'investissement, on est allés fouiller un peu plus loin, puis là on s'est rendu compte, à la page B.161, que l'impact financier des nouvelles mesures, là, qui sont annoncées dans le budget 2015-2016 pour la stratégie maritime, bien, pour l'année qui est là, qui est commencée depuis le 1er avril, c'est 13,8 millions. Là, on s'est dit : Un instant! Quand j'ai parlé de ça au huis clos devant les centaines de journalistes, là on s'est fait marteler un petit peu en se disant : Non, non, non, il y aura 1,5 milliard d'investissement. O.K. Attendez un instant, là, il y a peut-être des choses qui nous ont échappé dans le programme québécois d'investissement... dans le PQI. Il n'y avait rien.

Alors là, question fort simple — je ne veux pas prendre tout le temps — le ministre... Avec ce qui est indiqué dans le budget, l'impact financier réel, là, l'investissement qui aura lieu pour la prochaine année, on parle de 13,8 millions de dollars, là. Mais, à la page juste avant, la page 160, on parle d'investissement, dans les cinq prochaines années, de 1,5 milliard. Là, je veux qu'il m'explique, le ministre, quelle sorte d'effet de levier qu'il a pu imaginer, là, quelle sorte de comptabilité créative ils peuvent s'imaginer ou créer en nous disant que, sur une période de cinq ans, 170 millions de dollars pourront amener des investissements de 1,5 milliard de dollars, mais surtout pour l'année qui s'en vient, le 13,8 millions.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bon, M. le Président, c'est bien que le collègue soulève cette question parce qu'en effet il semble y avoir un peu de confusion. L'impact financier des nouvelles initiatives annoncées dans le budget 2015-2016 pour la mise en oeuvre de la stratégie maritime, page B.161, les fameux 13,8 millions en 2015-2016, oui, ça, c'est l'impact financier, donc, dans les crédits budgétaires, mais le véritable impact de la stratégie maritime, ce sont les investissements. Donc, c'est l'investissement public et privé qui va générer l'activité économique. Les 13,8 millions, ça, c'est l'impact financier dans l'année 2015-2016. Mais, comme, par exemple, quand vous achetez une maison, évidemment ça va vous coûter 300 000 $, mais, dans l'année 1, le coût de l'amortissement et le coût de l'intérêt pour la première année, ce n'est pas 300 000 $, c'est beaucoup moins que ça, donc c'est un peu cette dynamique-là. C'est 1,5 milliard, oui, d'investissement, et 1,5 milliard par le gouvernement du Québec. L'investissement privé, ça va venir en plus. Donc, 1,5 milliard, et, en termes de dépenses, de crédits, là, dépenses financières, ça, c'est 13,8 millions. Ce sont deux parties de la même médaille. L'investissement, c'est 1,5 milliard pour la période 2015-2020. En 2015-2016, pour l'année 2015-2016, c'est 13,8 millions d'impact financier.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Bonnardel : Oui, oui, Attendez, là. Là, le ministre, là, je pense qu'on ne se comprend pas, là. Moi, ce que je comprends, là, c'est que l'impact financier réel de l'investissement pour la stratégie maritime, c'est 13,8 millions. C'est ça qui est indiqué, là. Ce qui est indiqué à gauche, c'est une prévision, là, c'est ce qu'on souhaite, là. Moi, de l'investissement public, à moins que ce soit dans les crédits, là, ou que ce soit dans le PQI... J'ai demandé aux fonctionnaires qui étaient là, ils m'ont dit : Non, non, c'est dans le PQI. J'ai dit : Oui? Montrez-moi où. Il y a peut-être quelque chose qui m'échappe, là, il y a peut-être de l'investissement au port de Montréal, au port de Québec, il y a peut-être un 300, 400 millions en quelque part qui... Faites juste me... Vous ne me rassurez pas, là. Moi, ce que je vois, c'est que l'impact financier réel de la stratégie maritime pour l'année 2015-2016 est de 13,8 millions. Donc, c'est avec ce 13,8 millions que vous souhaitez créer — on va l'appeler l'effet de levier — un effet de levier pour être capable d'aller chercher...

Parce que je vous ai envoyé une demande d'accès à l'information. L'année passée, là, vous avez mis en place un congé fiscal. Si certains d'entre vous ont le budget 2014-2015, à la page B.59, il y avait les incitatifs fiscaux du budget de l'année passée. Donc, je lui ai envoyé une demande d'accès à savoir combien de sociétés, de compagnies ont pu profiter de ces congés fiscaux, le nombre de navires, le nombre d'entreprises, s'il le faut, valeur moyenne des projets. Et, vous vous souvenez, j'ai posé la question en Chambre, puis c'était zéro, il n'y en avait pas. Alors, je vous le dis bien respectueusement, il n'y en avait pas.

Alors, moi, si on me dit : Il y aura 300 000 $ pour accélérer les investissements dans les infrastructures portuaires commerciales, il y aura 10 millions pour attirer les investissements privés en misant sur des infrastructures logistiques et portuaires, 100 000 $ pour favoriser l'essor du tourisme maritime, 200 000 $ pour la bonification pour les Îles-de-la-Madeleine, crédit d'impôt, 1,5 milliard, coordonner l'action gouvernementale... 1,5 million, pardon, 1,5 million pour soutenir la recherche et l'innovation, moi, c'est ce que le gouvernement s'engage à dépenser.

Le Président (M. Bernier) : Votre temps étant écoulé, si vous désirez répondre à la question qui est posée par le député de Granby, vous pouvez le faire sur le temps gouvernemental...

M. Leitão : Juste très...

Le Président (M. Bernier) : ...sur le bloc du gouvernement, nous retournons à notre...

M. Leitão : D'accord. Juste très rapidement. Parce qu'on...

Le Président (M. Bernier) : Bon.

M. Leitão : ...pourrait peut-être poursuivre après, mais, très rapidement, pour finir avec ce que le collègue a fini, donc favoriser l'essor du tourisme maritime, en effet ça va nous coûter, en termes de dépenses du gouvernement, ça va nous coûter 100 000 $. Mais l'autre côté, à la page 160, le même... favoriser l'essor du tourisme maritime, sur la période 2015-2020, il va y avoir 76 millions qui vont être investis. C'est l'investissement, 76 millions, sur cette période de cinq ans. Cette année, en 2015-2016, le coût estimé est de 100 000 $.

• (20 h 40) •

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Mégantic, la parole est à vous.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Écoutez, M. le ministre, vous étiez en train de nous expliquer comment, pour maintenir les finances et poursuivre l'assainissement des finances publiques, que les dépenses devraient être plus faibles que celles des revenus, donc je vous ramène un peu à votre élan dans lequel vous étiez pour vous ramener sur les explications de ce...

M. Leitão : C'est ça. C'est ça, merci, vous me ramenez à l'ordre.

Le Président (M. Bernier) : Allez-y, M. le ministre.

M. Leitão : Donc, ce que je mentionnais, c'est que, donc, ces efforts-là de contrôle de croissance des dépenses vont ramener le poids des dépenses publiques consolidées à peu près à 21 % du PIB, ce qui était la moyenne historique des années 90 au Québec. Donc, à ce que je sache, à ce moment-là, on n'était pas en train de détruire le modèle québécois. Alors, on revient à la moyenne historique, on revient à l'intérieur de ce qu'il est possible de faire à l'intérieur de notre capacité de payer. Donc, nous allons nous assurer que les dépenses augmentent moins rapidement que les revenus. Donc, nous allons avoir, en suivant la tendance que nous mettons en place maintenant, des dépenses de l'ordre, donc, de 20 % et quelques du PIB. Les revenus vont être légèrement plus élevés, donc à 25 %, mais eux aussi vont diminuer un petit peu parce que nous voulons alléger le fardeau fiscal.

Maintenant, je pense que ce qu'il est aussi important de tenir en considération, c'est qu'évidemment, pour s'assurer que les dépenses augmentent à ce rythme-là, ce qui est contraignant... Dans le passé, oui, comme le collègue de Granby l'a mentionné plusieurs fois, les dépenses augmentaient à 4 %, 5 %, 6 % par année. Alors, pour ramener la croissance des dépenses à un rythme qui soit plus soutenable à long terme, c'est exigeant, c'est contraignant, il va falloir qu'on regarde les façons de faire. Ce n'est pas seulement de faire des petites coupures ici et là, ce n'est pas comme ça qu'on va y arriver. On va y arriver en examinant les programmes de haut en bas, en s'assurant qu'on est capables de livrer les services publics à moindre coût, donc qu'on est capables de bien utiliser la technologie. On est quand même au XXIe siècle, on est quand même dans la deuxième décennie du XXIe siècle, la technologie a beaucoup progressé. Ça se fait ailleurs, où la livraison des services publics est beaucoup plus efficace en utilisant mieux la technologie, ce que nous allons faire aussi.

Une partie très importante de ce processus de s'assurer que le contrôle de la croissance des dépenses est maintenu, c'est ce que nous avons mis en place l'année passée, le cran d'arrêt, c'est-à-dire que nous n'allons pas commencer, démarrer de nouveaux programmes sans que cela... Pour trouver le financement pour de nouveaux programmes, il faut le trouver à l'intérieur de notre dépense actuelle parce que nous nous sommes rendu compte qu'il y a une grande partie de la pression sur l'augmentation de la croissance des dépenses au cours des dernières années... Au-delà de la croissance, bon, de la population, et tout ça, des facteurs démographiques, il y avait aussi deux autres facteurs qui étaient très importants. D'abord, le fait qu'on ajoutait continuellement de nouveaux programmes, de nouvelles dépenses au fil des dernières années, toujours de nouvelles dépenses. Et aussi on s'est rendu compte que les effectifs de l'État augmentaient, augmentaient à un rythme de peut-être 6 000 par année continuellement. Donc, nous nous sommes employés à ralentir, voire même réduire les effectifs de l'État et à utiliser la technologie de façon plus adéquate pour freiner la croissance des coûts et à ne pas ajouter de nouvelles dépenses, de nouveaux programmes sans qu'on soit capables de les financer à l'intérieur de l'enveloppe totale. Donc, ce n'est pas facile. Ce n'est pas l'affaire de seulement pendant un an, et puis on revient aux habitudes précédentes, c'est une nouvelle façon de gérer les dépenses publiques.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Écoutez, ce que vous nous dites là, c'est un peu fascinant. On est en train de parler, selon moi, non pas d'austérité toxique, comme le disent certains, ou de démantèlement de notre tissu social, mais vous êtes en train de nous dire qu'on veut un peu revoir les façons de faire, un peu comme la productivité dans les grandes entreprises internationales, qui requestionnent, revoient leurs façons de faire de façon continue. Mais, au gouvernement, ce n'est pas une pratique normale ou usuelle de faire ça. Est-ce que vous prévoyez qu'on va devoir commencer à innover, créer, impliquer les gens à améliorer la productivité? Comment vous voyez ces choses-là évoluer?

M. Leitão : Je pense que, quand on parle de productivité, c'est un concept qui est peut-être un petit peu mal compris de la population en général. Souvent, on pense productivité : Ah bon! Vous allez nous faire travailler plus. On va juste travailler plus longtemps et gagner moins, etc. Au contraire, la productivité, c'est de donner aux travailleurs — que ce soit le secteur public ou privé — les meilleurs outils possible pour qu'ils puissent faire leur travail d'une façon plus efficace. Ce n'est pas une question de travailler un plus grand nombre d'heures, c'est une question de travailler les mêmes heures ou même moins, mais mieux, avec des outils appropriés. Et dans le... donc, les activités gouvernementales dans le grand secteur des services... Et on a vu que, dans d'autres branches du secteur des services, on en a vu, de très forts gains de productivité au cours des dernières années, des changements technologiques importants. On le voit maintenant dans le secteur du commerce de détail, c'est majeur, ce qui est en train de se passer dans le commerce au détail. Et cette révolution technologique dans le marché de détail change complètement les façons de faire, et ce type de changements technologiques, donc, peut s'appliquer dans d'autres segments du secteur des services, incluant le secteur gouvernemental.

J'ai plein d'exemples en tête dans des pays moins prospères que le Canada ou le Québec où on voit que l'État livre maintenant les services d'une façon beaucoup plus efficace qu'avant. Par exemple, dans mon pays d'origine, au Portugal, il y a eu une énorme révolution dans la livraison des services par l'État. En utilisant l'Internet, en utilisant la haute technologie, ils ont réduit leurs coûts de livraison de services de façon majeure. Je ne vois pas pourquoi nous, ici, nous ne serions pas capables d'accomplir de l'épargne de cette façon-là, là. Tout le processus de permis, toute la bureaucratie qu'il y a, je pense qu'il y a énormément de gains qui peuvent être faits dans la livraison des services publics au Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Laval-des-Rapides, la parole est à vous.

• (20 h 50) •

M. Polo : Merci beaucoup, M. le Président. C'est la deuxième fois que je participe à cet exercice de questionner le ministre des Finances sur le dépôt du budget, puis j'aimerais l'inviter peut-être à revivre un peu ses anciennes fonctions d'économiste en chef, notamment parce que ma question s'adresse sur tout l'impact des prix du pétrole sur les prévisions budgétaires ou les prévisions économiques et de quelle façon le ministre des Finances a utilisé ses analyses ou ses prévisions pour déterminer, justement, de quelle façon ça allait expliquer, justement, non seulement l'état au niveau de l'économie, mais aussi l'effet au niveau de ses prévisions, comme on a pu le constater notamment par la motion présentée par la deuxième opposition aujourd'hui, en termes des prévisions budgétaires ou des prévisions de croissance économique au cours des prochaines années.

Alors, peut-être une première question, M. le ministre, surtout pour nos auditeurs, parce que je crois sincèrement qu'il y a beaucoup de citoyens qui prennent le temps de vous écouter et d'entendre les travaux qu'on fait ici, en commission parlementaire. Expliquez-nous de quelle façon... Parce que, l'an dernier, nous avons vu, au cours des six derniers mois de l'année, une baisse importante des prix du pétrole, qui dépassaient au-delà de 105 $ et qui sont descendus autour de 50 $ en une période très courte. Nous avons constaté également que les grands pays producteurs n'ont pas modulé ou changé leur production de pétrole, ce qui a occasionné une surproduction et, donc, un effet spirale à la baisse qui a grandement bénéficié les consommateurs. Pour ceux qui ont vu le prix à la pompe, l'an dernier, baisser, ça les a grandement bénéficié.

D'autre part, nous avons vu, à titre d'exemple, la province de l'Alberta devoir composer, pour la première fois depuis des années, avec un déficit important de 5 milliards grandement dû au fait que, comme vous le savez, c'est une province exportatrice, productrice de pétrole et qui a été affectée grandement par cette baisse-là. Mais donc j'aurais comme première question : Comment vous expliquez, M. le ministre, les fluctuations... ou l'analyse que vous faites de ces fluctuations-là l'an dernier et les différents facteurs qui ont affecté ou qui expliquent cette grande fluctuation, M. le ministre.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, une bonne question pour vous.

M. Leitão : Une bonne question pour moi. Hélas! je pense que je vais peut-être prendre un peu plus de temps que...

Une voix : ...surprise...

M. Leitão : Un peu par surprise. Vraiment, je suis surpris. Franchement, quelle question! Écoutez, d'ailleurs, c'est une question qui est très importante parce qu'il y a eu, encore une fois, un peu de confusion là-dessus. Beaucoup d'analystes, beaucoup de commentateurs semblaient un peu préoccupés, voire même un petit peu paniqués : Ah! le pétrole baisse, ça veut dire que c'est mauvais.

La première chose que j'ai à dire — bon, tout le monde est au courant, mais c'est utile, quand même, de le rappeler — c'est qu'évidemment le Québec importe tout son pétrole, une bonne partie de l'Ouest canadien, mais en grande partie de l'étranger. Donc, quand le prix de ce produit-là baisse, la première chose qui arrive, c'est que le solde commercial du Québec s'améliore, donc notre déficit commercial diminue. Les importations, ce que nous devons payer pour acheter du pétrole de l'étranger diminue, même si nous gardons le même volume, puisque le prix a beaucoup baissé. Et ça, ça a un effet positif sur le PIB du Québec, le PIB étant juste la somme des dépenses des consommateurs, l'investissement privé, etc., dépenses du gouvernement et, évidemment, les exportations nettes. Alors, les exportations nettes s'améliorent avec la baisse du prix du pétrole.

Maintenant, la baisse du prix du pétrole pourrait être un facteur préoccupant, en effet, si cette baisse-là reflétait une baisse de la demande. Donc, si l'économie mondiale était en difficulté, comme ça a été le cas en 2008-2009 où on a aussi assisté à une baisse rapide du prix du pétrole... À ce moment-là, c'était préoccupant, oui, parce que cela reflétait une baisse soudaine de la demande. Donc, l'économie mondiale était tombée en récession, et ce n'était évidemment pas une bonne histoire. Cette fois-ci, la baisse du prix du pétrole ne reflète pas un choc de la demande. Au contraire, elle reflète un choc de l'offre. Donc, le prix est plus bas, comme vous avez mentionné, parce que les producteurs de pétrole n'ont pas voulu, n'ont pas pu... enfin, n'ont pas diminué leur niveau de production. Donc, il y a une situation de suroffre dans les marchés pétroliers mondiaux, ce qui met beaucoup de pression à la baisse sur les prix. Et ça, pour l'économie québécoise, puisque nous sommes des importateurs de pétrole, est très positif.

Et ça va se maintenir parce que, quand on regarde les phénomènes semblables dans le passé, donc, quand il y a eu une baisse du prix du pétrole qui reflète un choc de l'offre plutôt qu'un choc de la demande, ça prend quand même du temps avant qu'on revienne au prix précédent. Donc, 100 $ le baril et plus, ça ne sera pas demain matin qu'on va y arriver. Nous estimons que ça pourrait nous prendre de trois à quatre ans avant de voir le prix du pétrole revenir au-delà de 100 $ le baril. Donc, pendant toute cette période-là, nous allons, au Québec, en tant qu'importateur de pétrole, nous allons bénéficier de ce phénomène-là d'une façon directe.

Il y a aussi des conséquences ou des répercussions indirectes, puisque la baisse du prix du pétrole ne reflète pas un choc de demande. Puisque la demande demeure forte, surtout aux États-Unis, nous allons avoir une situation où notre solde commercial va s'améliorer parce que les importations diminuent avec la baisse du prix du pétrole, et nos exportations devraient augmenter parce que la demande américaine, elle, est plus forte pour les produits que le Québec exporte. Donc, c'est cette amélioration du solde commercial international, donc les exportations surtout, qui, à notre avis, vont avoir un effet très positif sur l'économie du Québec. C'est de là que va venir notre accélération de croissance économique, donc, qu'on peut attribuer en grande partie à la baisse du prix du pétrole.

Un autre effet important de la baisse du prix du pétrole, c'est qu'avec la baisse du prix du pétrole nous avons vu aussi une baisse importante du dollar canadien. Donc, la baisse du dollar canadien va, elle aussi, bénéficier à nos exportateurs. C'est peut-être important aussi de souligner que, souvent, on associe la baisse de la monnaie avec une augmentation des exportations. La baisse de la monnaie n'a pas vraiment d'effet direct sur le volume d'exportation. Quand le dollar se déprécie, l'effet que ça a sur les exportateurs, c'est une amélioration prononcée de leur marge bénéficiaire. Donc, les profits des exportateurs augmentent et augmentent rapidement avec la dépréciation de la monnaie, et donc c'est avec cette amélioration de marge de profit qu'éventuellement ça devrait se traduire par une augmentation de la production, investissement, production et augmentation du volume d'exportation, augmentation de l'emploi.

Donc, pour toutes ces raisons-là, la forte baisse du prix du pétrole dans la deuxième moitié de 2014 et qui s'est poursuivie un peu en 2015 a un effet direct et indirect très positif sur l'économie du Québec, ce qui, à mon avis, rend notre projection de croissance économique, le 2 % que nous avons du PIB réel en 2015... Nonobstant les craintes de nos collègues de Desjardins, qui semblent trouver ça un peu optimiste, moi, au contraire, je trouve que c'est assez réaliste dans cet environnement-là de baisse prononcée du prix de l'énergie, baisse de la valeur du dollar canadien, augmentation des exportations. Et d'ailleurs d'autres prévisionnistes que Desjardins ont des taux de croissance pour le Québec en 2015 au-delà de 2 %. Donc, nous avons construit notre cadre financier sur des hypothèses de croissance économique qui, à mon avis, sont... Dans le climat actuel, dans la conjoncture actuelle, ce sont des hypothèses de croissance très conservatrices.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. J'ai laissé l'économiste s'exprimer durant cette période. Nous souhaitons la bienvenue et nous donnons la parole à Mme la députée de...

Une voix : De Gouin.

Le Président (M. Bernier) : De Gouin. Allez-y.

• (21 heures) •

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Moi, j'aimerais, ce soir, dans le temps que j'ai, avoir une discussion avec le ministre des Finances sur l'effet de son budget en rapport avec l'augmentation des inégalités sociales au Québec. Mais j'aimerais mettre la table avec un petit peu le postulat suivant, puis on verra bien si le ministre et moi, nous sommes d'accord. J'ai un peu l'impression que ce qu'on nous dit avec ce budget, ça a quelque chose d'un petit peu judéo-chrétien — vous allez peut-être être surpris — c'est : Souffrez maintenant, mais il y a le paradis à la fin de vos jours. Et, quand j'écoute le ministre des Finances et le premier ministre, ce que j'entends, c'est : Nous allons avoir une année exigeante, mais, à un moment donné, là, quand on aura atteint l'équilibre budgétaire, que tout va bien aller, là on va faire deux choses. On va mettre de l'argent, 50 %, dans le Fonds des générations, paiement sur la dette, et l'autre 50 % va aller à des baisses d'impôt. Mais ce que je soumets très respectueusement au ministre, c'est qu'en tout cas parmi les gens que je rencontre non seulement dans ma circonscription, mais ailleurs au Québec personne ne demande de baisses d'impôt, tout le monde se plaint de l'augmentation des tarifs, que ça soit tarifs en service de garde, Hydro-Québec, tarifs de permis de conduire, et même on m'a parlé des permis de chasse. C'est de ça que les gens me parlent.

 Alors, de leur dire : Là, ça va être dur, il faut souffrir un peu, puis, à la fin, il y aura quelque chose comme le paradis, c'est-à-dire qu'on va baisser vos impôts, moi, ce que j'entends, c'est que ça n'impressionne pas tellement les gens, d'abord parce qu'ils ne sont pas si certains que ça qu'on va baisser les impôts, deuxièmement, parce que, de toute façon, on aura tellement augmenté les tarifs qu'ils se demandent vraiment à quoi vont servir les baisses d'impôt, sinon à encore enrichir les plus riches, qui, proportionnellement, bénéficient davantage des baisses d'impôts. Puis, troisièmement, tout ça ne nous dit pas comment le gouvernement va, en même temps, remettre de l'argent dans les services publics, services publics, qui sont l'un des grands, grands facteurs au Québec, je dirais, du fait qu'on a moins d'inégalités sociales que dans d'autres provinces canadiennes et dans l'ensemble de l'Amérique du Nord.

Donc, ce que je demande au ministre des Finances, c'est : Qu'est-ce que je devrais répondre aux gens qui me disent : C'est parce que ça fait déjà un certain temps qu'on a arrêté de croire au paradis à la fin de nos jours, puis là on a un gouvernement qui nous dit que ça serait bien d'y croire? Qu'est-ce que je devrais répondre?

Le Président (M. Bernier) : Vous avez environ deux minutes, M. le ministre, pour...

M. Leitão : Combien?

Le Président (M. Bernier) : Environ deux minutes, parce que je veux essayer de balancer le temps. Mme la députée de Gouin a environ 15 minutes. Donc, pour qu'elle puisse poser le plus grand nombre de questions, je vous donne deux minutes pour répondre.

M. Leitão : O.K. Bon, ça aurait demandé beaucoup plus que deux minutes, mais je vous dirais seulement ceci. Honnêtement, là, ce que nous faisons, à mon avis, est dans... l'objectif de ce que nous faisons est d'assurer la viabilité du modèle québécois. Nous nous étions engagés sur une tendance qui n'est pas soutenable. Si on continuait à faire ce qui avait été fait jusqu'en 2014, on se trouvait dans une situation où notre dette augmenterait continuellement, et, à un moment donné, il y aurait un dérapage majeur, on trouverait ça extrêmement difficile de continuer de financer cette dette qui ne finirait pas d'augmenter.

Donc, ce que nous mettons en pratique maintenant, en place maintenant, ce sont des mesures qui... Je le conviens bien, ça, ce n'est pas agréable. Ce n'est pas agréable de limiter la croissance des dépenses quand on était habitué à avoir des dépenses qui augmentaient, bon an mal an, 4 %, 5 %, 6 % par année. Nous limitons beaucoup la croissance des dépenses et nous faisons ça pour nous assurer que nous sommes capables de maintenir l'essentiel du modèle québécois. Parce que, si on ne faisait pas ça, je pense qu'on se trouverait dans une situation qui serait beaucoup plus complexe que celle où nous nous trouvons aujourd'hui.

Je vous dirais que ce qui rend cet exercice un peu plus pénible et urgent à faire ça, c'est le fait que nous avons accumulé une très grande dette. Je ne vais pas non plus partir des peurs, on a une dette qui nous écrase, tout ça. Nous avons une dette qui est très élevée, et une dette qui est très élevée qui est le produit de décisions qui ont été prises au cours des 30 dernières années par les gouvernements qui se sont succédé, ce qui nous rend maintenant beaucoup plus vulnérables, par exemple, que...

Le Président (M. Bernier) : En terminant, M. le ministre.

M. Leitão : ...que nos amis et nos collègues en Alberta, par exemple, où ils n'ont pas de dette, ils peuvent se permettre d'avoir des déficits. Nous, parce que nous avons une dette très élevée, nous sommes obligés à avoir des finances publiques en ordre pour qu'on puisse maintenir les services publics auxquels nous tenons.

Le Président (M. Bernier) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Bon, écoutez, je sais d'avance que, sur la question de la dette, nous aurons un désaccord important. Non pas que la dette ne soit pas une chose importante, mais, premièrement, je suis toujours frappée — et ça, ce n'est pas seulement le gouvernement actuel, c'était la même chose avec les gouvernements précédents — on est terriblement préoccupés par la dette financière, mais jamais par la dette environnementale, ce qui, pourtant, à moi, me paraît fort important quand je pense à mes petits-enfants.

Alors, laissons de côté ce débat, mais demandons-nous la question suivante, et je la pose au ministre des Finances : Qu'est-ce que je réponds au père de famille de ma circonscription que j'ai rencontré il y a une semaine et qui me dit qu'à cause de toutes les mesures d'austérité qu'on connaît, qui n'ont pas commencé hier, mais avant-hier, soyons assez clairs là-dessus, son fils a dû aller... en fait, les parents ont dû aller dans le secteur privé pour que son fils reçoive un diagnostic d'autisme et qu'il puisse enfin, ayant un diagnostic, bénéficier des services auxquels ont droit les enfants autistes? Il s'est fait dire par l'hôpital de ma circonscription : Vous faites bien mieux d'aller dans le privé parce que, dans le public, je vous le dis, vous en avez pour un an d'attente. Qu'est-ce que je réponds à ce père de famille, qui, heureusement, avait des assurances, hein, ce qui est le cas d'une infime minorité de travailleurs? Qu'est-ce que je lui réponds, que c'est normal, puisqu'il faut souffrir maintenant pour avoir du plaisir plus tard, d'attendre un an pour un diagnostic d'autisme pour son enfant? C'est normal, là? C'est ça qu'on appelle vivre une année exigeante?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Non, pas du tout. Je pense que, là, vous êtes en train, peut-être, de sombrer un peu dans l'alarmisme. Écoutez, s'il y a des problèmes — et il y en a — il y a des problèmes ponctuels dans le système de santé ou dans le système d'éducation, où certaines dépenses ont peut-être été coupées d'une façon irréfléchie, ce sont des choses qui se gèrent. Maintenant, je ne pense pas qu'on puisse utiliser l'exemple que vous avez donné, qui est un exemple très malheureux pour la personne en question... Mais je ne pense pas qu'on puisse prendre cet exemple-là, extrapoler et dire que le système de santé au Québec est dans un tel état. Il y a des correctifs à apporter, et donc je vous invite à voir avec notre collègue le ministre de la Santé, des Affaires sociales pour corriger ces situations ponctuelles. Je ne pense pas que ce soit... Enfin, ce n'est pas, évidemment, l'objectif des réformes que nous mettons en place de provoquer de tels bouleversements.

Le Président (M. Bernier) : Merci.

M. Leitão : Je pense que ça demeure quand même anecdotique.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : M. le Président, j'aimerais, très respectueusement, dire au ministre des Finances que mon exemple n'est tellement pas ponctuel que des témoignages comme ça, j'en ai régulièrement à mon bureau de comté, et mes collègues en ont aussi à leur bureau, et je suis certaine que tous les collègues députés ici auraient de tels exemples à apporter. Il y a un vrai problème non seulement au ministère de la Santé, mais au ministère de l'Éducation. Il y a vraiment des enfants et des familles laissés-pour-compte. Et je ne parle pas seulement des gens les plus pauvres, je parle de bien des familles de la classe moyenne.

Donc, le ministre me dit que je suis peut-être alarmiste. J'aimerais tellement ça, lui dire que je suis juste un peu alarmiste et que j'ai pris un exemple très, très rare. Mais non, non, ce n'est pas ça que je fais, j'ai pris un exemple qui se répète à l'année longue. Et pourquoi j'ai fait exprès de prendre un exemple concret? C'est simple, c'est pour illustrer que l'austérité fait mal pour vrai à du vrai monde et que, quand on me répond : Oui, mais ça ira mieux dans deux ans, trois ans, quatre ans, mais ça ira mieux comment? Le ministre refuse d'aller chercher davantage d'argent dans la colonne des revenus, il se fie sur une croissance économique assez aléatoire — parce que moi aussi, j'ai lu le papier de Desjardins — puis en plus il nous dit : Je vais baisser les impôts et mettre de l'argent dans le Fonds des générations.

Alors, j'aimerais que le ministre m'explique comment, après cette année de souffrance, nous allons retourner à l'organisation de services publics qui vont donner des services aux gens, à toutes les personnes, là, au Québec de façon décente et raisonnable. J'aimerais l'entendre là-dessus.

• (21 h 10) •

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Encore là, je pense que c'est une très bonne question, et vous mettez vraiment le doigt sur l'élément principal. Parce que je pense que, tant en santé qu'en éducation — et ici je fais très attention à ce que je dis, et les mots que j'utilise sont bien choisis, ce n'est pas une erreur, ce n'est pas un accident — en santé et en éducation, la solution n'est pas d'ajouter toujours plus d'argent. Nous avons 32 milliards de dollars dans le système de santé. Justement, ce que nous voulons faire, ce que notre collègue de la Santé, avec les réformes qu'il est en train de mettre en place... c'est de s'assurer que ces 32 milliards de dollars là sont dépensés convenablement et qu'on puisse vraiment éliminer ces aberrations que vous avez mentionnées tantôt. C'est une aberration qu'une personne... Que ça prenne un an pour avoir un diagnostic d'autisme, c'est absurde. Mais, en même temps, c'est également absurde qu'on ait 32 milliards de dollars dans un système de santé, et on n'est pas capables d'adresser de telles situations. Donc, à mon avis, ce n'est pas en ajoutant un autre milliard de dollars qu'on va régler cette situation-là, c'est en s'assurant que ce qui est dépensé maintenant l'est de la bonne façon, et c'est la grande réforme de la santé qui est en marche maintenant qui va amener les réponses à ces questions-là. Juste d'ajouter un autre milliard par-dessus sans changer les structures, l'organisation du système, à mon avis, ne réglerait rien.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Pour combien de minutes, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : 2 min 30 s.

Mme David (Gouin) : J'aimerais souligner au ministre que les changements de structure, lorsqu'ils sont nécessaires — et il sait ce que je pense de la loi n° 10 — peuvent, effectivement, contribuer à améliorer les services publics, mais, dans ce cas-ci, j'ai vraiment de la difficulté à voir comment le changement de structure qui vient d'être adopté dans la Santé va faire en sorte qu'on va avoir davantage de psychologues dans le système public pour être capables de rencontrer des enfants et poser des diagnostics. Il n'y a aucun rapport entre les changements de structure et le besoin qu'on a d'avoir des professionnels de la santé, d'avoir aussi des professionnels dans les écoles qui sont capables d'accompagner les enseignants dans leur travail auprès des enfants pour que ces enfants grandissent en sécurité en développant leur plein potentiel.

Et ce que je reproche au gouvernement actuel, c'est de nous faire croire que, dans deux ans, trois ans, quatre ans, je ne sais pas, peut-être à la veille d'une prochaine élection, là on aura réglé plein de problèmes, on va baisser les impôts, on va être capable de mettre de l'argent dans le Fonds des générations, mais il n'y a pas un mot sur les services publics, pas un mot. On ne nous dit pas : On se servira de l'argent qu'on aura réussi à économiser pour remettre des sous dans les services publics, embaucher davantage de professionnels, donner des meilleurs services aux gens. Non, on fait miroiter cette espèce de mirage qui s'appelle la baisse des impôts, qui profite aux contribuables aux revenus les plus élevés, pendant qu'on aura continué à augmenter les tarifs. Il me semble que c'est une vision qui ne concourt pas à réduire les inégalités sociales.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, il reste peu de temps, mais vous pourrez empiéter sur le temps du gouvernement.

M. Leitão : Le temps du gouvernement, pourquoi pas?

Le Président (M. Bernier) : Allez-y.

M. Leitão : Écoutez, plusieurs choses encore une fois. Revenons à la santé. Vous avez mentionné les changements de structure, donc je pense que vous faites allusion au projet de loi n° 10. C'est une partie, mais c'est une partie. Le changement en santé, en fin de compte, il y a trois composantes à ce changement-là. Le premier, c'étaient les structures, avec la loi n° 10. Le deuxième, c'est le projet de loi n° 20, qui est maintenant en train d'être discuté, qui va revoir l'organisation du travail. Vous avez demandé tantôt : Comment on va chercher de nouveaux psychologues? Mais c'est en réorganisant, en réarrangeant le travail. Puis il y a une troisième partie à cette réforme qui va venir un peu plus tard, c'est le financement des activités, le financement qui va suivre les patients. Donc, c'est une réforme majeure, il faut la prendre comme un tout.

Et, si je peux me permettre, M. le Président, de donner un exemple... Puisque vous avez donné un exemple tantôt, je vais aussi vous donner un exemple qui montre d'une certaine façon que le système de santé au Québec, malgré tous ses ratés et malgré tous ses problèmes, n'est quand même pas si désastreux que ça. Il y a un joueur de foot européen qui a choisi de venir jouer avec l'Impact de Montréal. Je ne veux pas mentionner de nom, mais, probablement, vous savez à qui je fais allusion. Et pourquoi il est venu ici? Il aurait pu faire beaucoup d'argent en Europe. Il est venu ici, justement, parce qu'il a un enfant qui est autiste, et, dans sa réflexion d'où est-ce qu'il allait poursuivre sa carrière, il a choisi de venir ici parce que, justement, il y a un système de santé qui, pour les besoins de son enfant, est bien supérieur à ce qu'il aurait pu trouver en Belgique.

Une voix : ...

M. Leitão : Non. Même après le budget. Donc, tout ça pour dire...

Des voix : ...

M. Leitão : Tout ça pour dire... Et je ne veux pas personnaliser les choses, là. Que le monsieur en question me pardonne, je ne veux pas personnaliser ça, mais juste pour dire que le système de santé que nous avons ici, avec ses 32 milliards de dollars, n'est pas en si mauvais état que ça. Et, à l'intérieur des budgets existants, je pense qu'avec une meilleure organisation du travail et une meilleure organisation de la façon dont il est financé, je pense que nous pouvons beaucoup l'améliorer. C'est ce que je dis. Et de tout simplement ajouter des milliards additionnels, je ne pense pas que ça serait la réponse à la question.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Portneuf. Merci, Mme la députée de Gouin.

M. Matte : Merci, M. le Président. Je voudrais continuer, là, sur la dette, là, mais mes propos seront différents de ceux de la députée de Gouin. J'ai été très heureux de constater qu'après six années consécutives de déficit nous avons présenté un budget équilibré. Puis je voudrais vous dire aussi que les six années de déficit accumulé ont alourdi la dette, là, de 16 milliards. Donc, M. le Président, pour la première fois depuis 2009, le poids de la dette va diminuer de 1 % pour s'établir à environ 54 % du produit intérieur brut au 31 mars 2016.

Nous savons tous que cette dette reste très élevée par rapport à nos voisins et que le Québec est la province la plus endettée. Vous savez qu'une dette élevée est un frein au développement économique. C'est ce qui fait que notre gouvernement, hein, a pris l'engagement de contrôler ses dépenses, mais aussi la dette. Il existe un débat, comme on a pu le voir tout à l'heure, à savoir est-ce qu'on doit réduire la dette, à quelle vitesse doit-on la réduire, à quel rythme, et même certains se permettent de se questionner sur le Fonds des générations.

Donc, une dette élevée entraîne un service de dette élevé — c'est une maxime — et le service de la dette est près de 11 milliards. C'est le troisième poste le plus élevé après l'éducation, la santé et les services sociaux. Ces 11 milliards, ça représente 14 % de notre budget total. C'est vraiment énorme. Donc, ces 11 milliards ne peuvent pas être utilisés à d'autres fins que de rembourser la dette, là, qui est de plus de 200 milliards, là, qu'on a accumulée.

M. le Président, dans ce contexte-là, j'aimerais demander au ministre des Finances si la réduction du poids de la dette doit rester une priorité.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (21 h 20) •

M. Leitão : Oui, M. le Président. En effet, encore une surprise. Quelle surprise, la question qui vient! Une bonne question. Une très bonne question. Blague à part, oui. Ça doit rester une grande priorité parce que, justement, notre niveau d'endettement est très élevé. Nous n'avons pas le choix que de continuer de maintenir nos efforts de réduction de dette, qui se font d'ailleurs à travers le Fonds des générations. Donc, la dette, c'est en continuant de contribuer au Fonds des générations que la dette nette diminue.

Juste pour peut-être ajouter un autre élément, vous avez mentionné plusieurs chiffres, je sais qu'il y a déjà beaucoup de chiffres, mais un autre que je vais vous donner, et qui est très important aussi, et qui démontre que... donc, qui souligne la problématique de notre niveau élevé d'endettement, c'est que, bon an, mal an, même s'il n'y a plus de déficit, là, et c'est fini, cette année, c'est le... Il n'y a plus de déficit et il n'y aura plus à partir d'ici, mais, malgré ça, bon an, mal an, nous devons aller sur les marchés financiers et emprunter des sommes importantes juste pour faire rouler la dette. Donc, cette année, en 2015-2016, il y a 12 milliards que le ministère des Finances doit aller emprunter dans les marchés financiers. L'année prochaine, 2016-2017, c'est presque 20 milliards qu'on doit aller chercher. Une grande partie de ça, plus que la moitié, c'est juste les remboursements, donc, de la dette qui vient à échéance. L'année d'après, 2017-2018, c'est un autre 16 milliards.

Donc, le Québec doit demeurer, malgré, là, le fait que les déficits, c'est fini, là... le Québec doit quand même demeurer extrêmement présent, actif dans les marchés financiers parce qu'à chaque année on va aller chercher quelques dizaines de milliards de dollars. Donc, nous devons maintenir un accès privilégié à ces marchés-là, chose que nous avons maintenant, et, donc, nous devons continuer de maintenir cet accès privilégié. Et une partie de la recette, probablement la partie la plus importante, c'est l'existence même du Fonds des générations qui nous permet de maintenir notre crédibilité et de maintenir cet engagement que nous avons pris, nous, comme gouvernement — mes prédécesseurs, au pluriel, l'ont fait — de réduire le poids de la dette à 45 % du PIB plus tard. Parce que, même à 45 % du PIB, même à ce niveau-là, c'est un bon progrès de la situation telle qu'elle est aujourd'hui, mais, même à ce niveau-là, on va demeurer parmi les plus endettés en Amérique du Nord.

Alors, c'est pour ça que c'est extrêmement important, c'est d'importance capitale qu'on soit capables d'avoir cet accès privilégié, emprunter à de très bons taux, parce que nous devons aller aux marchés chercher des dizaines de milliards à chaque année malgré le fait qu'il n'y en a plus, de déficit. Alors, oui, c'est une partie capitale de notre politique de continuer avec notre approche de réduction de la dette nette en continuant de mettre des sommes importantes dans le Fonds des générations, un fonds que... En termes d'actifs, en 2020, le Fonds des générations va avoir à peu près 20 milliards — c'est facile à retenir — 20 milliards de dollars en 2020. Donc, ça commence à être un fonds qu'on pourrait considérer un fonds souverain, comme il y a dans d'autres pays, assez intéressant, assez important. Nous n'avons pas le même pétrole que, par exemple, les Norvégiens, mais nous avons l'hydroélectricité, nous avons des ressources hydrauliques, et c'est en grande partie ces ressources hydrauliques là qui alimentent le Fonds des générations et qui vont le mener à atteindre 20 milliards de dollars en 2020.

Le Président (M. Bernier) : J'ai une demande du député de Saint-François, qui veut nous poser une question.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Ce n'est pas fini?

M. Matte : Je n'avais pas fini.

Une voix : Je pense qu'il n'a pas fini encore.

Le Président (M. Bernier) : Ah! vous n'avez pas terminé. Bien, allez-y, M. le député de Portneuf.

M. Matte : Mais, M. le ministre, est-ce que c'est réaliste lorsque vous prévoyez qu'en l'an 2025-2026 que notre dette sera aux alentours de 45 % du produit intérieur brut, tu sais?

M. Leitão : C'est réaliste, M. le député, parce que, d'abord, il n'y aura plus de déficit. Donc, avec le budget de cette année, nous nous engageons à atteindre l'équilibre budgétaire et à le maintenir par la suite. Donc, on n'ajoutera plus à la dette du côté des déficits. Et c'est crédible, deuxièmement, parce que nous avons le Fonds des générations, un fonds qui a des sources de revenus qui lui sont dédiées, en grande partie des ressources hydrauliques, mais aussi des redevances minières et d'autres choses. Donc, un fonds qui a des revenus qui sont versés à chaque année et, donc, qui va continuer de croître. Alors, à cet égard-là, oui, d'atteindre 45 % du PIB en 2025, c'est tout à fait réaliste. Et je pense qu'à ces deux conditions-là, qu'on continue de verser les sommes dédiées au fonds des générations et qu'on ne fasse plus de déficit, oui, on va arriver à atteindre 45 %. Ce qui est très bien, mais, encore une fois, ce n'est pas nécessairement : Ah! O.K. Bon, ouf! Tout est réglé. Mais non, même à 45 % du PIB, on demeure une des sociétés les plus endettées en Amérique du Nord.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Portneuf.

M. Matte : Vous avez invoqué, M. le ministre, à plusieurs reprises le Fonds des générations, puis vous misez beaucoup là-dessus. Vous répondez quoi aux gens qui vont dire : Pourquoi investir et mettre de l'argent dans le Fonds des générations plutôt que de rembourser la dette? Pourquoi qu'on ne rembourse pas immédiatement la dette plutôt que de le déposer dans le Fonds des générations?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre. C'est une question, effectivement, que plusieurs se posent.

M. Leitão : Plusieurs questions, et je suis sûr que probablement même le président de la commission serait probablement intéressé à connaître la réponse. Écoutez, nous avons pris le pari que le Fonds des générations peut générer des revenus qui sont substantiellement plus élevés... des rendements, je devrais dire, qui sont substantiellement plus élevés que ce que nous devons payer en intérêts sur la dette. Par exemple, maintenant, 2015, le gouvernement du Québec peut se financer, on peut faire une émission d'obligations à 10 ans de presque, quoi, 2 % maintenant, ce qui est très bien. Le rendement du Fonds des générations, lui, à peu près à 10 %, peut-être un petit peu moins. Mais vous voyez qu'il y a quand même un écart important entre le rendement que nous obtenons avec le Fonds des générations et ce que nous payons pour la dette. Si, à l'avenir, pour une raison quelconque, on voit que les rendements baissent beaucoup ou que les taux d'emprunt augmentent... Enfin, je ne vois pas... j'ai de la difficulté à concevoir un tel scénario, mais, si jamais ça arrivait, alors, à ce moment-là, oui, l'équation n'aurait plus de sens, et alors là il faudrait penser à faire ça d'une autre façon. Mais, tant qu'on a cette grande différentielle, on paie 2 %, on peut avoir un rendement de presque 10 %, on n'a pas intérêt à rembourser directement la dette, mais plutôt à laisser accumuler le Fonds des générations.

Le Président (M. Bernier) : Poursuivez, M. le député de Portneuf.

M. Matte : Puisqu'on parle du Fonds des générations, puis vous nous dites qu'on a fait un pari à savoir qu'il va nous rapporter plus que si on emprunte... Mais par qui c'est géré, le Fonds des générations? C'est–u une institution financière? C'est-u une banque ou...

M. Leitão : Ce n'est pas une banque. Ce n'est pas non plus une caisse...

            Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, on vous écoute.

M. Leitão : Le Fonds des générations est géré par la Caisse de dépôt et placement du Québec, et donc c'est le ministre des Finances, qui, avec la caisse, établit les politiques de placement. Donc, ce n'est pas la caisse qui va investir comme elle, bien, le souhaite, elle va investir selon les directives que le ministre des Finances lui donne en termes de répartition d'actifs, donc, pour s'assurer que nous avons quand même un rendement qui est intéressant sans être trop risqué. Donc, ultimement, c'est le gouvernement, le ministère des Finances, qui décide de la politique de placement.

            Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Matte : Donc, c'est un mandat particulier qui est confié, mais qui reçoit les directives du ministre des Finances, ce qui est différent des autres montants d'argent gérés par la Caisse de dépôt.

M. Leitão : Bon, la Caisse de dépôt, évidemment, elle établit les politiques de placement pour ses déposants, la Régie des rentes et les autres déposants, selon les critères que les déposants eux-mêmes aussi établissent. Donc, ce n'est pas la caisse qui décide unilatéralement d'investir dans x, y, z. Ces politiques de placement sont déterminées par les déposants eux-mêmes, et, le ministère des Finances étant aussi un des déposants avec le Fonds des générations, nous avons toute la liberté et toute la flexibilité d'établir nos politiques de placement.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, de votre participation. Merci à tous les parlementaires d'avoir participé à ces débats.

Donc, compte tenu de l'heure, je lève la séance, et la commission ajourne ses travaux à demain, après les affaires courantes.

(Fin de la séance à 21 h 30)

Document(s) related to the sitting