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Version finale

37th Legislature, 2nd Session
(March 14, 2006 au February 21, 2007)

Wednesday, June 14, 2006 - Vol. 39 N° 21

Consultations particulières sur le projet de loi n° 25 - Loi modifiant la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels et d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures trente-neuf minutes)

Le Président (M. Descoteaux): Nous avons quorum. Je souhaite la bienvenue aux gens qui vont se présenter devant la commission aujourd'hui. Je déclare la séance ouverte. Je rappelle le mandat de la commission: procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 25, Loi modifiant la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels et d'autres dispositions législatives. Je demanderais à toutes les personnes présentes de bien s'assurer que tous moyens de communication cellulaire sont fermés, sont éteints.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Turp (Mercier) est remplacé par M. Bédard (Chicoutimi); M. Valois (Joliette) est remplacé par Mme Caron (Terrebonne); et enfin M. Dumont (Rivière-du-Loup) est remplacé par Mme Roy (Lotbinière).

n (11 h 40) n

Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le secrétaire. Afin de bien aiguiller nos travaux, je vais donner l'ordre du jour. Il y aura tout d'abord les remarques préliminaires. Autant que possible, nous allons avoir 13 minutes du coté ministériel, ensuite 12 du côté de l'opposition officielle et cinq du côté de l'ADQ. Nous allons recevoir tout d'abord l'Association des familles de personnes assassinées ou disparues; à 12 h 15 ou plus ou moins, nous allons recevoir l'Association québécoise Plaidoyer-Victimes; en après-midi, nous recevrons le Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale; le Regroupement québécois des centres d'aide des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel ? les CALACS; puis le Regroupement des innocentes victimes du crime organisé; le Barreau du Québec; le Réseau des centres d'aide aux victimes d'actes criminels.

Remarques préliminaires

Donc, pour les remarques préliminaires, M. le ministre.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Donc, bienvenue à vous, bienvenue aux membres de la commission et bienvenue également aux personnes qui sont présentes aujourd'hui pour la consultation, donc les associations et les personnes qui les représentent.

Brièvement, M. le Président, ce projet de loi n° 25 vise deux choses: d'abord bonifier le régime actuel d'indemnisation des victimes d'actes criminels sous l'aspect des frais funéraires, donc d'augmenter le montant qui peut être remboursé pour des frais funéraires dans le cas du décès d'une victime d'acte criminel, un montant qui n'a pas été ajusté depuis 1972, premièrement, et, deuxièmement, bonifier aussi le régime actuel d'indemnisation pour offrir aux proches des victimes d'actes criminels des services de réadaptation psychothérapeutiques ou psychologiques. Si c'est possible, M. le Président, de le faire, c'est que, dans le budget du ministre des Finances, ce dernier a rendu disponible fin mars dernier un montant de 500 000 $ pour l'année financière actuelle et un montant de 1,5 million de dollars récurrent à compter de 2007-2008.

M. le Président, simplement rappeler que la loi actuelle a été adoptée en 1971 et est entrée en vigueur en mars 1972. Elle était calquée à ce moment-là sur le seul régime d'indemnisation qui existait au Québec en matière de victimes, et c'étaient les victimes d'accidents du travail, donc sur le régime alors existant d'indemnisation d'accidents du travail. Le régime, M. le Président, je pense que, quand l'État québécois l'a proposé et l'a adopté, c'est parce que l'État se responsabilisait face aux problèmes sociaux qui sont causés par la criminalité et par le fait même à l'égard des victimes de violence. Trop souvent, les victimes ne pouvaient obtenir réparation. En 1988, on se rappellera aussi qu'il y a eu une autre loi d'adoptée, qui était la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels, loi qui ne touchait pas à la loi sur l'indemnisation comme telle. Cette loi-là conférait et établissait des droits pour les victimes ? bien énumérés d'ailleurs ? et également prévoyait la création du Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels, également la possibilité de financer des organismes communautaires, et notamment, entre autres, les centres d'aide aux victimes d'actes criminels, qui sont présents maintenant dans 16 régions du Québec.

Si je reviens comme tel au régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels, le régime n'a pas été l'objet d'une refonte depuis son entrée en vigueur, en 1972, donc il y a 34 ans. Lors de la discussion à l'Assemblée nationale pour l'adoption de principe du projet de loi, j'ai fait l'historique à la fois du régime et aussi des tentatives, bien intentionnées, qui ont été faites depuis notamment 1993. Parce qu'en 1993 je voudrais vous rappeler qu'il y a une loi qui a été adoptée sur l'aide et l'indemnisation qui venait refondre, mais cette loi-là n'a jamais été mise en vigueur, donc il y a maintenant 13 ans. Alors donc, il y a eu beaucoup de tentatives qui ont été faites historiquement. Subséquemment, il y a eu un document de réflexion, en 1997, il y a eu d'autres projets, il y a également un autre comité en 2002, il y a une autre tentative en 2003 et 2004, mais finalement le résultat, c'est qu'il n'y a pas eu de refonte de la loi. Et je pense que l'expérience, évidemment, donc, de ces tentatives antérieures démontre que, si ça avait été facile, ça aurait été fait et ce serait fait depuis longtemps, et il y aurait eu des ajustements d'apportés depuis plusieurs années. Et, dans tous ces projets-là antérieurs, on traitait aussi du soutien psychothérapeutique pour les proches et on traitait également de l'importance d'ajuster le montant des frais funéraires.

Il y a aussi d'autres volets, d'autres éléments qui ont été suggérés, comme d'ajuster la liste des crimes dans l'annexe, de pouvoir, par exemple, il y a des... S'il y a quelqu'un du Québec qui est à l'extérieur et qui a été victime à l'extérieur d'un acte criminel, il ne peut pas être compensé. Si quelqu'un de l'externe, de l'étranger est ici et qu'il est victime d'un crime, il peut être compensé, donc il y a toutes sortes d'ajustements qui doivent être prévus. Il y a toutes les modalités aussi d'indemnisation qui actuellement sont inéquitables même envers les victimes, parce que, pour le même type de séquelles, selon le revenu que vous avez, vous pouvez avoir une indemnisation qui est différente. Ça existait, ça, dans l'ancien régime de la Loi sur les accidents du travail, mais ça a été changé. Ça a été changé aussi dans la Loi sur la Société d'assurance automobile du Québec. Donc, maintenant, on distingue les montants, la compensation pour séquelles ou préjudice corporel et également la compensation qui serait reliée à la perte de revenus. C'est ça qui existe dans tous les autres régimes maintenant, et il y a eu des ajustements à cet égard-là.

Donc, ce régime d'indemnisation, c'est vraiment un régime social. Je pense que c'est un régime qui est basé sur ce qu'on appelle la solidarité sociale, et ça repose sur la poursuite d'une meilleure justice sociale.

M. le Président, pour ce qui est du soutien psychothérapeutique ou psychologique, il n'y a rien qui est prévu dans la loi actuelle. Aucune indemnisation ne peut être apportée, ou support ne peut être apporté à cet égard-là, et on comprend très bien, et je pense que, lorsque nous avons des proches qui ont pu vivre de telles situations, le désarroi, le choc que peuvent provoquer des événements qui surviennent, comme soit un homicide, ou une agression sexuelle grave, ou des voies de fait qui laissent la personne avec des séquelles corporelles importantes.

Alors, M. le Président... Puis, si je vais dans les statistiques, aussi, du rapport 2004 de l'IVAC, ce qu'on constate, c'est que ? je n'ai pas celles de 2005 telles qu'elles sont, là; c'est que ? pour les indemnisations des victimes d'actes criminels, il y a eu, en 2004, 3 229 demandes acceptées. De ce nombre de demandes, 60 % proviennent de femmes. Dans ce groupe de demandes acceptées qui proviennent de femmes à 60 %, donc 39 % constituent des crimes de voies de fait et 37 % des agressions à caractère sexuel. Et, dans le nombre total de demandes, il y en a 33 % qui touchent des jeunes de moins de 18 ans.

Alors, M. le Président, les mesures qui sont proposées dans le projet de loi n° 25, je pense que c'est un pas dans la bonne direction. D'ailleurs, si on fait le tour, au Canada, il y a cinq provinces qui ne prévoient aucune indemnisation ou de soutien pour les proches. Il y a au Manitoba, en Nouvelle-Écosse, on accorde de l'aide aux proches en cas de décès seulement, donc en cas d'homicide. La Saskatchewan est en voie d'adopter une loi identique où elle prévoit de l'aide pour les proches uniquement en cas d'homicide. Il y a une province qui prévoit de l'aide à la fois en cas d'homicide et aussi pour les proches de victimes d'autres blessures, d'autres crimes, c'est la Colombie-Britannique, M. le Président. Donc, le projet de loi n° 25, en l'élargissant aux proches, le Québec serait la deuxième province à accorder du soutien psychothérapeutique aux proches des victimes.

C'est sûr que ce n'est pas... On ne peut pas tout faire dans le projet de loi. Je pense que ce que j'ai indiqué, ce qui était important pour moi, c'est qu'il y ait du financement de prévu, parce qu'on peut bien faire toutes sortes de grandes consultations, si on ne peut pas le mettre en vigueur, je pense qu'à ce moment-là ce n'est pas correct. Et donc, c'est sûr aussi qu'il n'est pas facile de délimiter la notion de «proche», et il y a un cadre financier également à respecter. Il y a déjà des premières discussions qui ont eu lieu avec les groupes de victimes avec des gens du ministère à cet égard-là, et je pense qu'il est possible d'arriver à une délimitation qui est équitable pour toutes les catégories de victimes.

n (11 h 50) n

Et, M. le Président, je note très bien aussi les préoccupations qui ont été exprimées par certains groupes et aussi par l'opposition officielle lors de la discussion en deuxième lecture sur justement l'importance du règlement, et à cet égard-là, moi, je peux vous indiquer tout de suite que je suis prêt à inclure dans la loi une disposition pour prévoir que le projet de règlement serait soumis à l'étude de la commission parlementaire avant son adoption. Je pense que c'est correct et je pense que ça permettrait de pouvoir avancer tout en maintenant en tout cas le droit des parlementaires de revoir le projet de règlement suite à des consultations que le ministère aura avec des groupes. Et également ça permettra aussi aux proches de pouvoir... et on l'a répété souvent, il y a des groupes qui l'ont fait, il y a eu des événements aussi, il n'y a pas très longtemps, où on dit: Écoutez, 600 $ pour le remboursement de frais funéraires, là, je pense que ça n'a pas de bon sens. Et le 3 000 $, bien on pourra en reparler, c'est l'actualisation du montant qui était prévu dans la loi en 1972.

Alors, M. le Président, je pense que c'est un premier pas. C'est sûr qu'il serait souhaitable... et d'ailleurs j'ai annoncé aussi en même temps que je créerais un groupe de travail ? parce que ce n'est pas évident, il y a eu beaucoup de comités déjà ? qui est présidé par un expert externe, qui pourrait revoir l'ensemble du régime, évidemment en consultation notamment avec les groupes de représentants des victimes.

Donc, M. le Président, je pense que ce projet de loi là permet de faire un pas en avant pour les proches des victimes. Il y a un suivi aussi qui est important, et, à cet égard-là, moi, je vais aussi proposer, dans le projet de loi, qu'on inscrive que l'IVAC, dans son rapport annuel, fasse une section distincte pour inscrire tous les renseignements, toute l'information relative à l'application de cette loi-là pour déterminer justement comment ça fonctionne, quel est le nombre, quel est le financement qui est requis. Je pense que c'est important que ce soit tout à fait transparent, et ça pourra être dans le rapport annuel de l'IVAC, ça permettra aux gens justement de constater comment ça s'applique et quel est le résultat, combien de proches et combien ça peut coûter. Et éventuellement bien ça pourra peut-être apporter d'autres modifications.

Alors, je pense que, M. le Président, c'est un pas en avant pour les proches des victimes, et, bien honnêtement, ça m'apparaît préférable à attendre, puis à ne pas bouger, puis à ne rien faire, puis dire: Bien, là, on va attendre puis on va refondre tout le régime, compte tenu des expériences antérieures, et d'autant plus que nous avons le financement, annoncé dans le discours du budget. Alors, il m'apparaît préférable donc d'agir, d'apporter des bonifications qui sont, je conviens, plus mesurées, qui sont limitées, mais qui apportent une amélioration aux personnes, aux proches, d'abord aux proches des personnes qui sont victimes d'actes criminels, à l'avenir. Je pense que c'est une mesure qui est concrète, même si elle n'a pas à court terme toute l'ampleur que l'on pourrait idéalement souhaiter, M. le Président, et ça, là, je suis très, très sensible à cet aspect-là. Alors, je pense, M. le Président, c'est que... Voilà, je pense que c'est terminé, mes remarques. Nous avions 12 minutes?

Le Président (M. Descoteaux): 12 à 13.

M. Marcoux: 12 à 13. Bon. C'est l'essentiel de ce que je voulais dire, et indiquer également l'ouverture et surtout en termes de suivi de l'application de ce projet de loi là. Alors, merci, M. le Président.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le ministre. Du côté de l'opposition officielle, M. le député de Chicoutimi.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Oui. Je ne prendrai que quelques minutes, vu notre horaire. Je constate que nous sommes déjà en retard. Alors, je suis heureux de me retrouver ici, évidemment, là, pour entendre des groupes sur un sujet qui nous concerne tous finalement, M. le Président. Et j'entends traiter ce dossier avec toute la rectitude et, je vous dirais, avec tout le sérieux et la rigueur que demande ce type de processus. D'autant plus que nous avons devant nous des gens, et vous le savez, qui soit représentent, sont au contact ou ont été victimes. Et donc je limiterai mes commentaires à ce niveau-là en les assurant que nous demeurons sensibles, en même temps déçus ? et ça, je dois le dire ? du processus dans lequel nous sommes actuellement. Ça, je l'ai dit au ministre, j'invite les groupes à aller... lorsque nous étions à l'adoption de principe, en Chambre, je ne veux pas les répéter ici, mais j'aurais aimé prendre beaucoup plus de temps avec les gens sur l'ensemble des recommandations qu'ils nous font, évidemment sur le projet de loi actuel, mais beaucoup plus, je vous dirais, sur l'ensemble de la refonte des lois d'indemnisation des victimes. Et j'aurais souhaité que ce soit même cet hiver ou encore dernièrement; nous aurions eu, je pense, la possibilité de mieux travailler. Et ça, je ne peux pas faire autrement, au-delà de toute partisanerie, qu'être un peu déçu du processus rapide. J'ai pris connaissance des mémoires mais évidemment à travers la journée que nous avons eue lundi, hier. Donc, je vais tout lire au fur et à mesure, je vais poser des questions. Mais j'aurais souhaité agir avec beaucoup plus de profondeur et, je vous dirais, permettre en même temps aux groupes de prendre tout le temps nécessaire pour nous faire des propositions sur le projet de loi, mais ça pourrait être sur l'ensemble des lois d'indemnisation.

Donc, nous ne sommes pas à une refonte, c'est clair, M. le Président, nous sommes dans certaines améliorations, avec beaucoup de questionnements. Donc, nous prendrons tout le temps nécessaire avec les groupes, en leur disant que nous comprenons aussi, nous, de leur part qu'ils ont dû faire rapidement, parce qu'ils ont été avisés, je pense, à la fin de la semaine dernière qu'il devait déposer des mémoires. Donc, pour eux aussi et surtout, ce fut assez rapide, donc on va tenter de faire vite et bien, M. le Président, en ce qui concerne les consultations.

J'aurais évidemment souhaité que le projet de loi aille beaucoup plus loin. Le ministre fait une ouverture quant aux règlements. Je vous dirais qu'ils doivent être connus avant l'adoption du projet de loi. J'aurais même souhaité que les groupes puissent en discuter, parce qu'on est comme au coeur, là, des éléments. Il suffit de lire le projet de loi pour constater qu'à peu près tout va se faire par règlement. Donc, il aurait été souhaitable que, même lorsque les groupes viennent, on ait au moins en main les règlements pour leur soumettre nos questionnements, qu'on ait leur éclairage. Je les invite à le faire plus tard.

Deuxièmement, sur la notion de «proches des victimes» qui est incluse à la loi, il est clair qu'il faudra faire des amendements au projet de loi. Nous souhaiterons aussi disposer des études sur les coûts, parce que, moi, je veux bien ? et j'entends le ministre quand on nous parle de cadre financier, et ça, c'est vrai pour tous les gouvernements ? mais je souhaite qu'il y ait quand même une étude des coûts, parce que je lisais encore le Barreau qui nous suggérait certaines façons de financer des mesures. Donc, je souhaite avoir une étude de, si on était allé plus loin, qu'est-ce que ça aurait pu donner comme coûts, M. le Président. Parce que je tiens à rappeler que nous ne sommes pas dans un régime d'assurance, c'est un régime d'indemnisation. Un régime d'assurance, il y a des dates, il y a des cotisants puis il y a des montants qui sont versés en fonction de ces deux notions. Dans un régime d'indemnisation, ça répond à une autre priorité. Ça a un but social, un régime d'indemnisation. Alors, avant d'aller à l'encontre du principe d'un régime d'indemnisation, j'aimerais bien comprendre pourquoi. Et, d'être très transparents, je pense que, tout le monde ici, nous avons le devoir d'être transparents envers ces personnes.

J'ai constaté aussi à la lecture rapide des mémoires qu'il y a des éléments intéressants même en termes de processus de révision des décisions en matière d'indemnisation qui sont proposés. Alors, je pense que, de ce que j'ai vu dans le cadre dans lequel les gens ont travaillé, ça nous permet de chercher à bonifier le projet de loi, parce qu'il a besoin de bonifications. Il est clair qu'il ne peut être adopté dans sa forme actuelle, alors nous allons souhaiter des améliorations. Évidemment, nous prendrons... les groupes auront beaucoup à dire, alors nous leur laisserons tout le loisir pour nous éclairer sur ce qui est fondamental et nécessaire, sur quoi nous devons nous pencher plus sérieusement quant aux améliorations que nous devons apporter.

Donc, j'espère simplement, M. le Président, que ces travaux seront utiles et permettront véritablement au projet de loi d'obtenir l'éclairage nécessaire au ministre et à nous, membres de la commission, mais en même temps de nous éclairer sur les améliorations qui doivent être apportées au projet de loi pour qu'il puisse rencontrer une forme qui serait acceptable, M. le Président. Donc, je souhaite en terminant vous dire que cette étape... qu'il ne s'agit que d'une étape, une petite étape mais une étape nécessaire. Toute amélioration est bonne, alors on ne peut pas être contre des améliorations, mais j'aurais aimé être convié à un autre banquet, à un autre repas, M. le Président. Souhaitons qu'à coût terme nous puissions même... au mois d'août, disposer... Nous sommes disposés totalement à parler, mais de l'ensemble de la révision des droits d'indemnisation, et je me ferai un devoir, M. le Président, de me tenir disponible, à quelque date que ce soit, pour que nous puissions passer à une étape, sans dire plus importante, mais qui doit suivre, soit celle d'une réforme globale du régime d'indemnisation des victimes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le député de Chicoutimi. Mme la députée de Lotbinière, avez-vous quelques remarques préliminaires? La parole est à vous.

Mme Roy: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir... Pardon?

n (12 heures) n

Le Président (M. Descoteaux): La parole est à vous.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Ah oui! Il me fait plaisir, au nom de l'Action démocratique, de prendre part aux travaux de cette commission.

Il est vrai qu'il y a une amélioration. Il est vrai que nous aurions souhaité plus. Il est vrai également qu'il s'agit d'un engagement électoral du Parti libéral, et que 125 candidats se sont promenés, à la dernière élection, faisant sienne ces engagements libéraux, et que les Québécois ont voté pour ce parti sous la foi de leurs engagements.

Je suis bien obligée de le rappeler, c'est bien moins que ce qu'on avait promis. Par contre, M. le Président, je me réjouis de quelque chose, c'est que les familles de personnes assassinées ou les proches de victimes d'homicide, qui ont été longtemps sans voix au Québec, longtemps... Parce que c'est assez facile à comprendre. Quand vous vivez un drame comme ça, vous êtes assez bouleversé... à réorganiser votre vie personnelle, vous n'avez encore peut-être pas l'énergie ou la capacité de faire valoir auprès des instances politiques ce qui devrait être corrigé. Cet isolement-là, ce silence-là, il est sur le point d'être rompu, parce qu'on commence à avoir des intervenants forts dans la société québécoise, qui parlent au nom des victimes, qui parle au nom des sans-voix, et la provocation de cette commission en est un exemple.

Donc, je suis contente que ce soient maintenant des personnes reconnues au sein de l'État et qu'ils ont leur voix au chapitre, sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Et j'espère qu'en plus de les entendre nous allons les écouter et nous allons prendre note de leur constatations pour corriger et bonifier ce projet de loi là. Donc, je m'amène ici dans un esprit d'amélioration du projet de loi mais surtout un esprit d'écoute de ces groupes-là qui sont les témoins de gestes difficiles, innommables. Ils l'ont vécu dans leur vie, et je pense qu'on ne peut faire autrement que de prendre en considération ce qu'ils viennent nous dire aujourd'hui.

Auditions

Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme la députée de Lotbinière. Ça clôt les remarques préliminaires. Comme le disait à juste titre le député de Chicoutimi, nous sommes un peu en retard, mais, d'un autre côté, d'aucune façon je voudrais que nos invités se sentent bousculés. Donc, vous prendrez bien, M. Boisvenu, le 15 minutes au complet qui vous est alloué, et, avant de débuter, peut-être nous présenter les dames qui vous accompagnent et par la suite présenter votre mémoire. Donc, bienvenue devant la commission.

Association des familles de personnes
assassinées ou disparues (AFPAD)

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, bonne journée. Alors, je laisserai mes deux collègues se présenter elles-mêmes.

Mme Nemey (Isabelle): Bonjour. Isabelle Nemey, soeur de Diane Nemey qui a été assassinée par son conjoint en 1985. Je suis sur le conseil d'administration de l'association.

Mme Falardeau (Claire): Bonjour. Claire Falardeau, je suis la soeur de Suzanne Falardeau, assassinée au lac Saint-Joseph, en 1988. Je m'occupe maintenant de l'antenne de Québec avec mes collègues, alors qu'on a démarrée dimanche dernier, le 11 juin, ici, à Québec.

Le Président (M. Descoteaux): Merci bien. Donc, la commission vous écoute.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Vous comprendrez, M. le Président, qu'une telle occasion est unique dans l'histoire de l'AFPAD, donc je prendrai peut-être plus que 15 minutes pour la présentation de mémoire, étant donné qu'on a eu très peu de temps pour le préparer et que je n'ai pas eu beaucoup de temps pour élaguer des choses essentielles.

Donc, depuis un an, l'AFPAD a expliqué à travers les médias une situation injuste vécue depuis des années et encore aujourd'hui par centaines de familles du Québec: l'absence de soutien offert aux familles dont un proche est assassiné ou a été enlevé. Le cas de l'assassinat de Brigitte Serre en début d'année 2006 a fait éclater au grand jour l'injustice de ces familles qui sont victimes depuis trop longtemps quant au traitement qu'elles reçoivent de la part de leur gouvernement. Nous avons répété notre message sur le plus grand nombre de tribunes. Nous avons multiplié les rencontres avec des intervenants dans le domaine de l'aide aux victimes. Nous avons sensibilisé de notre mieux les décideurs politiques pour qu'enfin, après 30 ans, ils agissent. Nous avons amorcé un véritable débat public dans ce dossier. Une grande partie de la population est convaincue que notre cause est juste et qu'elle mérite toute l'attention du gouvernement du Québec.

Suite à l'intention du ministre de la Justice, M. Marcoux, de faire adopter la loi n° 25 sans modification, nous comprenons qu'il faut encore expliquer notre situation afin que nous soyons mieux entendus et davantage compris. Nous sommes déçus de la forme actuelle de la loi, mais nous continuons à espérer que notre cause sera prise en compte dans la future loi n° 25. Nous reconnaissons au ministre Marcoux le mérite d'avoir été le premier titulaire du ministère de la Justice à faire bouger les choses, même partiellement, avant la grande réforme de l'IVAC. Nous lui reconnaissons aussi une grande sensibilité envers les familles que nous représentons. Par contre, l'AFPAD n'accepte pas l'argument du ministre à l'effet que son gouvernement n'a pas la capacité financière pour venir en aide aux familles actuelles. Nous tenterons de le démontrer dans le présent mémoire, tout en remerciant le ministère et la commission de le faire.

Créée en 2004 par quatre pères de famille de jeunes femmes assassinées ou disparues, l'Association des familles de personnes assassinées ou disparues est une association québécoise regroupant les familles ayant vécu un tel drame. L'association est née du besoin éprouvé par ces familles de se solidariser et d'influencer des changements judiciaires afin d'assurer une meilleure sécurité de nos familles à travers le Québec et réparer une injustice qui perdure depuis les années quatre-vingt, moment où les gouvernements qui se sont succédé depuis admettaient un besoin de réforme.

L'AFPAD compte aujourd'hui près de 270 familles membres dont un proche a été assassiné ou est disparu. L'association a son siège social à Sherbrooke; une antenne anglophone située dans l'ouest de Montréal dessert la clientèle anglophone de tout le Québec, du Canada et de l'étranger dont un proche a été assassiné au Québec; une antenne dans la région de la Capitale-Nationale a vu le jour, comme on le disait tantôt, le 11 juin dernier, et une prochaine sera mise sur pied dans l'Outaouais, à l'automne 2006. L'AFPAD entend aussi offrir un support aux autochtones du Québec à compter du printemps 2007. On le sait, ces communautés sont laissées plus souvent qu'autrement à elles-mêmes; nous espérons être un support pour elles bientôt. Nous ouvrirons d'ici quelques semaines un bureau permanent à Montréal, dès que le ministère de la Justice aura répondu à notre demande d'aide financière. Enfin, l'AFPAD entretient des liens très étroits avec plusieurs provinces canadiennes, la France, les États-Unis et les universités du Québec où s'enseigne la criminologie.

Alors que plusieurs familles seraient en droit d'attendre du gouvernement des indemnisations importantes... dont un proche est assassiné, notamment dans les cas de récidivistes dont l'État était responsable. Que ces familles aient reçu pendant un plus de 30 ans un maigre 600 $ pour les frais funéraires relève de l'indifférence de la part du gouvernement. On sait que l'État, à travers l'IVAC, indemnise davantage la perte d'un bras, par exemple, que la perte d'une vie. Cette situation est incompréhensible. Quand on invoque que ce dernier programme n'est pas un programme d'assurance, comme celui de la CSST ou de la SAAQ, c'est blessant et humiliant pour les familles ayant un proche assassiné. La question qu'on peut poser à l'auteur de cette comparaison boiteuse est la suivante: Est-ce que l'État avait une assurance pour dédommager en toute justice les familles lorsque des criminels récidivistes ont assassiné leurs proches? L'État n'est-il pas responsable de la sécurité publique? Alors, quelle est la responsabilité de l'État envers ces familles?

Tout programme d'aide à caractère social doit faire preuve de solidarité envers une victime, et qui dit solidarité sociale dit aussi équité dans le traitement d'une situation dont elle n'est nullement responsable, qu'elle soit la victime d'un accident de la route, d'un accident de travail ou d'un crime. Alors que plusieurs familles étaient en droit de recevoir du gouvernement des services psychologiques adéquats, comme ceux qui sont offerts aux criminels dont un proche est assassiné, que ces familles se soient vu refuser pendant plus de 30 ans ce soutien relève d'une grande injustice. Comment expliquer à une famille qu'elle n'a pas le droit à un support ou à une aide lors d'une situation aussi horrible que le meurtre d'un enfant et de sa mère suivi du suicide du père? Est-ce que ces personnes n'étaient pas victimes quelque part et ne méritaient-elles pas le même traitement qu'une victime survivante? Serait-ce que le gouvernement, quand il n'y a plus de victime ni d'assassin, il n'y a plus de responsabilité? Les familles ont besoin d'aide, et cette aide est un investissement pour toute la collectivité et non une dépense pour l'État. Les ravages qu'un meurtre produit dans une famille sont énormes, dévastateurs: divorce, décrochage scolaire, suicide, dépression. A-t-on estimé les coûts encourus par le Québec depuis 30 ans pour ne pas avoir supporté ces familles gravement fragilisées souvent pour toute une vie? Le calcul aurait sur doute démontré l'urgence d'agir, l'urgence d'investir dans ces familles.

Comme nous l'affirmions plus tôt, la loi n° 25 ne doit pas seulement reconnaître des droits aux familles des futures victimes assassinées ou disparues, la loi doit corriger une injustice historique que tous les intervenants dans le domaine de la victimologie au Québec reconnaissent. Nous, les proches de ces victimes, prenons une partie de la responsabilité de la lenteur que les gouvernements précédents ont mis à changer les choses. Notre silence et notre isolement ont été nos pires ennemis. Aujourd'hui, le gouvernement n'a plus de raison de ne pas agir, il en sait plus sur les conditions de ces familles. Sa décision relativement à la loi n° 25 ne doit pas avoir comme seul objectif la visibilité politique pour une prochaine élection. Cette loi doit avoir comme objectifs l'admission et la réparation des multiples torts causés à des êtres humains suite à un manque flagrant de prise de conscience et d'absence des décisions des gouvernements antérieurs.

n (12 h 10) n

Nous sommes en contact depuis des mois avec des familles dans le besoin. J'en ai rencontré personnellement un grand nombre de celles-ci dans leur cuisine et ou dans leur salon. Beaucoup de ces familles, il faut l'affirmer, ont retrouvé une certaine sérénité. Ballottées pendant des années entre le désespoir et l'obligation de vivre afin de soutenir ceux qui restaient, elles sont pour l'AFPAD des témoins précieux. Leur expérience et leur foi dans la vie sont des sources d'énergie nouvelle qu'on essaie de transmettre à celles qui sont encore en mode survie, à se débattre pour comprendre ce qui est leur est arrivé, pour juste garder l'espoir qu'un jour elles pourraient s'en sortir. Supporter adéquatement ces familles requiert des services spécialisés qui ne peuvent pas être pas disponibles dans les CLSC, par exemple. Ce sont des grands-parents, des pères, des mères, des frères, des soeurs, des amis, des cousins qu'il aurait fallu il y a des mois, il y a des années. Contrairement à la victime survivante, pour laquelle la famille peut trouver rapidement dans le système ? soit les CAVAC, les CALACS ou autres ? des services pour la supporter, pour la victime assassinée, rien de tel n'est offert à la famille. L'État a donc une obligation morale d'aider ces familles maintenant. La loi n° 25 présente à nos yeux deux caractéristiques: l'inclusion et l'exclusion. L'inclusion parce qu'elle reconnaît, à une date précise, des droits aux proches des victimes, l'exclusion parce qu'elle laisse sur le carreau trop de familles qui ont un besoin d'aide, alors que la loi créera deux catégories de familles de victimes, celles d'avant la loi, qui seront abandonnées à leur sort, et celles après la loi, qui bénéficieront de support.

Les prévisions des coûts de la loi n° 25 sont sans doute la partie la plus questionnable de ce projet de loi. Pour les victimes, pour les familles de victimes assassinées ou disparues, le ministère, nous le savons maintenant, n'a pas fait d'étude de coûts relativement à l'applicabilité immédiate de la loi pour les familles actuellement dans le besoin. Le ministère a fait des scénarios de coûts qui reposent essentiellement sur des hypothèses à partir de statistiques de l'IVAC, sachant que cet organisme gouvernemental n'a aucun contact avec les familles de personnes assassinées ou disparues et leurs besoins. Le scénario retenu a donc peu de valeur scientifique, il est pure spéculation. Quand le ministre affirme que l'État n'a pas les moyens d'aider les familles actuelles, nous sommes davantage devant une décision politique qui s'appuie sur des hypothèses qui ne reposent sur aucune connaissance de la problématique. C'est donc une décision politique et sociale questionnable qui fera plus de victimes qu'elle en aidera.

L'hypothèse du ministère pose comme postulat que 450 personnes feraient appel à l'aide thérapeutique et estime les dépenses à près de 2 millions de dollars pour l'État, si la loi s'appliquait aux familles actuelles. L'AFPAD a recruté depuis 18 mois près de 270 familles. Tous ont été contactés. Ces familles nous ont fait part de leurs besoins, et nous pouvons ainsi affirmer que l'hypothèse des coûts qui a été présentée au ministre et sur laquelle son ministère s'est basé pour refuser l'admissibilité des familles actuelles à la loi n° 25 est démesurée et excessive. Ce chiffre de 450 personnes n'est fondé sur aucune démarche scientifique tel un groupe d'étude ou un groupe contrôle qui aurait pu être utilisé afin d'appuyer l'hypothèse du ministère. Aucune famille, selon les informations que nous possédons, n'a été rencontrée par des fonctionnaires du ministère de la Justice ou de l'IVAC afin d'évaluer leurs besoins, la fréquence et le type de traitement que nécessiterait leur condition.

Quant à nous, nos projections de coûts sont basées sur la connaissance que nous avons des familles membres de notre association. On l'a dit, près de 1 000 familles ont perdu un proche par assassinat ou disparition criminelle depuis 1989. Nous devons exclure de ce nombre les familles de personnes assassinées qui ne sont pas admissibles à l'IVAC soit à cause de leur passé criminel soit parce que les circonstances du meurtre ne les rendent pas admissibles. L'AFPAD a écarté les familles qui ne veulent pas rouvrir de vieilles plaies de quelque façon que ce soit, des familles pour qui le passé ne se déterre pas, et il y en a beaucoup. Nous estimons donc que le nombre de familles admissibles serait de près de 400. L'AFPAD compte actuellement 266 familles.

Notre évaluation du nombre de familles dans le besoin, mesuré à partir des rencontres et de sondages que nous avons effectués auprès d'elles depuis 18 mois, est d'une quarantaine. Si nous appliquons la règle de trois en fonction du bassin de 400 familles que nous avons préalablement déterminé, nous pouvons estimer que le nombre de personnes qui feraient appel à la loi, à la loi n° 25, serait d'environ 100 personnes, au maximum 150 personnes. On peut garantir que l'échantillonnage sur lequel repose notre hypothèse de coûts est plus solide et sérieux que celui du ministère. Nous voilà donc très loin de la prévision de 450 personnes du ministère. L'investissement nécessaire afin de supporter ces familles adéquatement et les réhabiliter serait donc entre trois et quatre fois inférieur aux prévisions ou à l'hypothèse du ministère. Nous estimons les coûts de l'admissibilité de ces familles actuels entre 350 000 $ et 500 000 $.

Pour les familles survivantes... de victimes survivantes, nos connaissances relativement aux familles survivantes et leurs besoins sont limitées. Nous nous sommes donc contentés simplement de comparer les budgets affectés aux familles de victimes assassinées par rapport aux victimes survivantes. Au Québec, il y a, bon an, mal an, près de 60 meurtres et 5 000 victimes d'actes criminels. Pour chaque dollar que l'État dépense pour la famille d'une personne assassinée, il en dépense 99 $ pour une victime survivante. Selon notre analyse, les familles de personnes assassinées coûtent au Québec environ 700 000 $ par année, incluant les rentes pour études et les frais funéraires, et les victimes survivantes, tout près de 70 millions de dollars.

Nos craintes relativement aux coûts de la loi n° 25 concernent les proches des victimes survivantes. Contrairement aux familles de personnes assassinées, nous sommes persuadés que le ministère est en deçà de la réalité. Si nous estimons qu'à peine 25 % des proches de victimes survivantes admissibles demanderaient de l'aide, les dépenses pour le gouvernement s'établiront davantage autour de 3 millions plutôt que de 1,3 million. D'un côté, en exagérant les coûts, et, de l'autre, en les sous-estimant, vous comprendrez notre questionnement quant à cette prévision. Nous osons espérer, M. le ministre, que l'intention cachée n'était pas d'orienter votre décision vers un refus de notre demande que nous vous adressons depuis un an, soit de rendre toutes les familles de personnes assassinées ou enlevées admissibles à de l'aide.

Pour l'AFPAD, cette loi, si elle est adoptée dans sa forme actuelle, aura un caractère discriminatoire et sera aisément contestable sur le plan juridique. Sur le plan de la solidarité et de l'équité sociale, c'est moralement inadmissible. Nous demandons au ministre de la Justice d'envisager son projet de loi sous l'angle de l'investissement plutôt que de la dépense. Vue sous cet angle, l'admissibilité des familles actuelle coûterait très peu au Trésor québécois et économiserait les coûts sociaux inhérents à l'absence de services. L'AFPAD recommande donc que la loi n° 25 soit adoptée dès la présente session et que toutes les familles de personnes assassinées ou enlevées soient admissibles à de l'aide psychothérapeutique.

L'AFPAD regrette que certains intervenants voient dans notre demande une application rétroactive de la loi. Une loi à caractère social qui a comme objectif de corriger des erreurs passées ne devrait jamais porter une telle étiquette. L'AFPAD propose une alternative à ce dilemme qui effraie tant l'administration publique: la création dans la loi d'un fonds spécifiquement dédié au soutien des familles de personnes assassinées ou disparues actuelles. Ce fonds devra être investi au cours des trois prochaines années et géré par le CAVAC. Ainsi, cette mesure exceptionnelle n'aurait aucune portée récurrente sur les budgets à venir de la province.

L'AFPAD félicite encore le ministre pour son travail. Nous proposons que l'Assemblée nationale soit saisie à chaque année d'un rapport de performance des divers intervenants qui oeuvrent auprès des victimes d'actes criminels. Il est essentiel pour nous que le traitement de ce dossier soit fait dans la plus grande transparence, tant comme les engagements budgétaires des autres ministères du gouvernement du Québec.

M. le Président, vous me permettrez de faire, en marge de ces consultations sur la loi n° 25, un commentaire important concernant le soutien financier que le ministère de la Justice et le gouvernement du Québec devraient offrir à des organismes comme le nôtre qui viennent en aide aux familles de proches assassinés en les accompagnant dans leur drame. L'AFPAD est un des rares organismes représentatifs créés au Québec et au Canada par des victimes pour des victimes. Le support financier de l'État est tout à fait déficient pour des organismes comme l'AFPAD ou l'Association Plaidoyer-Victimes. D'un côté, on nous refuse toute aide au Secrétariat à l'action communautaire autonome du Québec sous prétexte qu'on n'est pas un organisme de défense de droits, et, d'un autre côté, le ministère de la Justice ne soutient aucun organisme pour les dépenses de fonctionnement.

Nous devrions être mieux supportés, M. le ministre, car nous sommes seuls à soutenir ces familles pour mieux s'en sortir. L'utilisation du Fonds d'indemnisation des victimes d'actes criminels, celui qui provient de la saisie des biens de la criminalité, ne devrait pas servir presque exclusivement au financement de structures administratives du ministère de la Justice. Ce fonds, qui provient du grand public, devrait aussi être disponible pour supporter des actions comme la nôtre. Il devrait nous être accessible, comme il l'est pour les CAVAC pour supporter principalement les victimes survivantes.

La loi n° 25 devrait à notre avis être modifiée et donner au ministre le pouvoir d'utiliser ce fonds autant pour les besoins administratifs du ministère que pour des organismes de soutien aux proches des victimes comme le nôtre.

En conclusion, M. le Président...

n (12 h 20) n

Le Président (M. Descoteaux): Permettez-moi de vous interrompre une petite seconde, M. Boisvenu. On m'indique que nous ne pourrons pas poursuivre au-delà de 13 heures nos travaux, ce qui nous permettrait de décaler le second groupe cet après-midi, à 15 heures. À ce moment-là, on dégagerait une plage de temps qui permettrait peut-être, M. Boisvenu, vous permettrait de conclure, et on pourrait revenir à un 15-15 pour ce groupe-ci, 15 minutes, ministériel, 15 minutes, l'opposition officielle, pour clore à... pour terminer à...

M. Marcoux: Mais est-ce que les autres groupes... l'autre groupe est d'accord?

Le Président (M. Descoteaux): Le groupe suivant est d'accord. Donc, vous pouvez poursuivre, M. Boisvenu, ça va.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Merci beaucoup, M. le Président, et merci au groupe qui a bien voulu décaler sa présentation. On lui fera l'honneur d'être présents.

M. le Président, le gouvernement s'apprête à adopter une loi qui a un caractère historique. Depuis le mois de janvier 2005, tout le Québec a suivi notre combat. Beaucoup se sont dits choqués de voir des familles, trop de familles, laissées à elles-mêmes depuis un an, cinq ans, 25 ans, voire 40 ans, sans aucune aide. Pendant ce temps, les criminels avaient tous les égards et le support, toute l'attention du système carcéral et de la justice. Je crois qu'il ne fait aucun doute qu'il faut aujourd'hui rétablir un meilleur équilibre et que les proches des personnes assassinées méritent mieux, méritent plus, et ce, dès maintenant. Il faut donc que la loi n° 25 ait un caractère social sur le plan historique et pas seulement politique.

La plupart d'entre vous connaissez mon histoire, l'histoire de la mort de mes deux filles. Je souhaite aux familles du Québec que leurs proches ne connaissent jamais la mort pas assassinat. C'est le pire drame qu'une famille puisse vivre. Ces familles seront devant un système administratif sans âme, sans considération, sans empathie et sans sympathie. Ces familles seront tout simplement oubliées, ignorées, laissées à elles-mêmes. Je l'ai dit et je le répète, suite au meurtre de ma fille Julie, en 2002, par un récidiviste, mes relations avec l'État québécois se sont limitées à deux timbres de 0,45 $, l'envoi de son certificat de décès pour recevoir le 600 $ et une plainte à l'IVAC qui n'a jamais eu écho. Lors de la mort accidentelle de ma fille Isabelle, en décembre 2005, j'ai été rapidement en contact avec un État humain, disponible et équitable. La différence viendrait-elle du fait qu'Isabelle était une assurée de la SAAQ et que Julie n'avait pas d'assurance pour protéger sa vie contre son meurtrier, un récidiviste?

Les citoyens et citoyennes du Québec méritent mieux, et le Québec peut faire mieux pour les familles de proches assassinés. Si le ministère de la Justice peut faire progresser ? et c'est tant mieux ? les budgets des CAVAC de 30 % en un an, pourquoi ne pourrait-il pas trouver 500 000 $ pour réparer une grave injustice historique? M. le Président, M. le ministre, l'AFPAD vous remercie pour votre écoute, et nous tenons à vous offrir toute notre disponibilité pour approfondir les recommandations que nous vous avons déposées ce matin et être un acteur très actif pour la véritable réforme de l'IVAC.

M. le ministre, avec la loi n° 25, vous êtes le ministre qui êtes allé le plus loin dans la reconnaissance des droits pour les proches des personnes assassinées ou enlevées; nous espérons que toutes les familles actuelles pourront en bénéficier et, tous, être au même rendez-vous. Merci.

Le Président (M. Descoteaux): Merci bien, M. Boisvenu. Donc, pour la période d'échange, M. le ministre, pour une période de 15 minutes.

M. Marcoux: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais remercier M. Pierre-Hugues Boisvenu, qui est le président de l'AFPAD, que j'ai eu l'occasion de rencontrer d'ailleurs à un certain nombre de reprises, ainsi que les deux personnes qui l'accompagnent, Mme Nemey et Mme Falardeau, que j'ai eu l'occasion aussi de rencontrer.

Je voudrais souligner, M. le Président, que nous avons dans la salle aujourd'hui deux personnes d'ailleurs qui ont reçu au cours des dernières années le Prix de la justice, le prix annuel de la justice. Il y a M. Boisvenu qui l'a reçu l'an dernier, et également Mme Arlène Gaudreault, qui est ici avec nous, qui est la présidente de l'Association québécoise de Plaidoyer-Victimes, qui a, elle aussi, reçu le Prix de la justice il y a déjà quelques années. Je ne me souviens pas exactement l'année...

Une voix: ...

M. Marcoux: 1997? Donc, je pense que ça démontre, là, le rôle important que les organismes ont joué dans le développement de notre système de justice et la mise en oeuvre, là, de mesures qui permettent de rendre la justice, je dirais, plus humaine auprès des gens. Je pense que, quand M. Boisvenu mentionnait, juste à la fin: Je souhaite aux familles du Québec que leurs proches ne connaissent jamais la mort par assassinat, je pense que chacun d'entre nous ici partage certainement ce qu'il dit, parce que c'est un drame certainement effroyable. Donc, je voudrais vous remercier pour votre participation, votre présentation.

Il y a peut-être certains éléments que je voudrais souligner. D'abord, pour ce qui est de l'aide actuelle, je voudrais juste simplement rappeler... parce que vous parlez d'investissement, je suis d'accord avec vous là-dessus. Maintenant, si on veut le replacer dans le contexte, au Québec, quand même ? et c'est correct, moi, je suis tout à fait d'accord là-dessus, là ? l'an dernier, c'est, de mémoire, 73 millions à peu près qui ont été consacrés pour l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Et, à cet égard-là, je pense que nous nous situons très, très bien, et c'est correct, par rapport à d'autres régimes ailleurs, et notamment dans d'autres provinces canadiennes. Je pense que vous le savez d'ailleurs, mais je pense que c'est important. Je n'en ai pas parlé dans ma présentation, là, mais, quand on regarde toutes les autres provinces canadiennes, ça varie: l'Ontario, à peu près à 27 ou 28 millions, la Colombie-Britannique, 14 millions, les autres, ça diminue. Alors, déjà, je pense qu'au Québec, en termes de régime social, là, nous sommes, par rapport à ce qui est pratiqué ailleurs, en avance, et tant mieux.

Deuxièmement, oui, vous parlez de demande d'aide financière. Je sais qu'il y a eu des discussions d'ailleurs avec le ministère à cet égard-là, M. Boisvenu. Je pense que c'est en processus. Il y a... Évidemment, nous avons, comme vous le savez, un règlement à respecter puis certaines documentations, là, mais je pense que ça, c'est en discussion. Et, quand vous parlez du SACA, effectivement il n'y a pas actuellement rien. Je sais qu'il va y avoir des discussions avec le SACA, je ne peux rien vous garantir là-dessus. Ce que je peux vous dire cependant, c'est qu'il va y avoir des discussions. Et on se comprend, là, je ne peux pas rien vous garantir à cet égard-là, mais on va le regarder, parce que déjà, du côté du CAVAC, il peut y avoir du financement, des autres groupes aussi, là, pour des projets, mais pas pour du financement.

Il y a une chose, si je comprends, puis avec vous je peux reconnaître, là, que ce n'est pas nécessairement, là, ce qui pourrait être donné, mais vous aviez parlé déjà aussi très brièvement, là, des frais funéraires. Moi, je pense qu'il y a un ajustement, une indexation. Alors, moi, là, de ce côté-là, je pense que c'est un acquis par rapport à ce qui existait. Vous avez souvent mentionné le 600 $, vous aviez tout à fait raison à cet égard-là. Et le 3 000 $, comme je le mentionnais, représente l'indexation, si vous prenez l'indexation annuelle depuis 1972.

En termes de transparence, et vous souligniez qu'il devrait y avoir un rapport, là, en fait, vous dites «sur la performance des divers intervenants» ? je ne suis pas sûr, je pourrais peut-être vous entendre là-dessus ? mais certainement en tout cas sur le plan du suivi, si le projet de loi n° 25 était adopté, si ça pouvait être adopté, à ce moment-là il y aurait annuellement, là, je pense que c'est important, à partir de cette année, des renseignements que l'IVAC devrait consigner dans son rapport annuel. Ce n'est pas dans le projet de loi. J'ai indiqué que, oui, je le proposais comme modification au projet de loi parce que je pense que c'est important que les gens sachent exactement qu'est-ce qui a été consacré, là, par rapport aux prévisions, là, qui peuvent être faites, ce qui permettrait donc d'évaluer évidemment, là, l'application du projet de loi pour les proches des victimes en ce qui a trait à l'aide psychothérapeutique.

n (12 h 30) n

Il y a un sujet, et c'est... Il y a deux sujets, je pense, qui... et vous avez exprimé justement votre point de vue à cet égard-là, c'est sur la question de la rétroactivité. Et ma question est la suivante, là: Est-ce que l'appliquer à des années antérieures pour une catégorie seulement de proches de victimes, parce que, ça, on peut parler de catégories, là, ça ne soulève pas certaines difficultés dans le fond ? pour ne pas employer le mot «éthiques», là, mais ? avec les autres victimes? Et est-ce que ça ne se constitue pas ce que je pourrais appeler une sorte de ? puis je vous donne mes mots, là; une sorte de ? hiérarchisation des victimes en quelque sorte ou de proches de victimes? Ça, j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que je pense... Moi, ça m'apparaît important de regarder l'ensemble des proches des victimes.

Et, deuxièmement, on pourra revenir, M. Boisvenu, après à la question des hypothèses, là. Parce qu'on n'a rien à cacher, là-dedans, au ministère. D'ailleurs, le ministère vous a déjà fait état de certaines choses, mais on pourra y revenir après. Mais, première question, celle sur l'application de la rétroactivité.

Le Président (M. Descoteaux): M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): M. le Président, M. le ministre, je pense que le fond du débat est là et j'essaie depuis, je pense, que vous avez créé le comité, le comité permanent de concertation victimes-ministère, j'essaie de convaincre les autres organismes de la justesse de nos propos.

Et je vais vous donner une comparaison. Ma fille Julie a été enlevée, violée, étranglée, assassinée. Si ma fille Julie n'aurait été que violée, je sais que le centre d'aide et de lutte à caractère sexuel, les CALACS, aurait pris en charge Julie pour cheminer avec elle dans sa thérapie. Pour la famille, ça aurait été un support. Je n'aurais pas été pris avec mon épouse, tout seuls, à réhabiliter Julie. Il y aurait un organisme qui s'occupait de la victime survivante. La même famille qui a vu sa fille assassinée n'a eu aucun support. C'est là qu'il faut faire la différence entre la victime qui est survivante, qui reçoit de l'aide, c'est, pour la famille, un support, c'est aidant pour la famille. Mais, si cette personne-là est assassinée, la famille ne reçoit aucun support pour se refaire, se rebâtir. C'est là qu'est la différence philosophique et thérapeutique entre les deux notions.

Déjà, que la victime survivante soit prise en charge par une organisation, c'est supportant pour la famille, ça permet à la mère de ne pas ramasser un enfant qui est tout défait ou un garçon qui est tout défait ou un mari qui a été battu ou qui a été violenté, qui... à les supporter par des organismes, parce qu'il y a des organismes qui supportent les victimes survivantes, ce qu'on n'a pas pour les familles de personnes assassinées. Il n'y a aucun organisme qui nous supporte.

La dame de Granby qui a été assassinée par son mari et qu'il s'est suicidé après, il reste deux enfants survivants, quatre ans et huit ans. On va donner de l'aide à la famille adoptive mais aucune aide aux deux enfants. C'est là que je dis qu'il y a une différence entre supporter des victimes survivantes ? c'est un support pour la famille ? alors que la famille, si l'enfant est assassiné, elle n'a aucun support. C'est ce que je disais tantôt. Le CAVAC ? l'IVAC, je veux dire ? va vous donner peut-être 10 000 $ parce que vous perdez un bras, on va en donner 600 $ à la famille parce que l'enfant est mort. C'est la différence entre les deux notions, et c'est pour ça que, pour nous, il faut que la loi traite les familles sans égard à la date du crime.

C'est certain qu'on pourrait s'entendre sur une date historique. Pour moi, la date historique m'apparaît celle où un gouvernement au Québec a pris conscience du trou au niveau de l'aide à ces familles-là, et c'est dans les environs des années quatre-vingt-dix. Mais il faut comprendre ces deux notions-là. Si on ne comprend pas ça, c'est certain qu'on va mettre l'étiquette d'avoir une loi discriminante par rapport aux victimes survivantes puis aux victimes assassinées.

Si je reviens à votre première question, par rapport à l'aide financière aux organismes comme le nôtre, M. le ministre, la loi, elle a cadenassé le fonds d'indemnisation des victimes d'actes criminels. La loi, je veux dire, elle a été écrite en disant: On crée le fonds, on reconnaît des organismes d'aide aux victimes, mais ces organismes d'aide là aux victimes, ce sont les CAVACS. Ce qui fait que le fonds d'indemnisation ne sera jamais admissible, pour des fins de fonctionnement, à des organismes comme le nôtre qui est un des seuls organismes, je dirais même le seul au Québec, qui vient en aide aux familles actuellement.

Possiblement que votre loi va changer le contexte. Mais c'est la loi qui est mal foutue. Vous créez un fonds et vous dites, après: Ce fonds-là est l'exclusivité des CAVACS. Moi, j'appelle ça cadenasser une loi ou «hold-uper» un fonds, alors que ce fonds-là devrait avoir une ouverture sur le financement des organismes comme le nôtre, parce qu'on fait un travail semblable à celui des CAVACS.

M. Marcoux: M. le Président, la loi sur l'aide, là, évidemment, détermine les orientations de l'utilisation des fonds du CAVAC, ce qui n'empêche pas évidemment le financement, vous le savez, pour certains projets ou de la recherche. Vous avez raison de dire que, pour le fonctionnement... Puis il y a d'autres organismes, je pense, de même nature que le vôtre qui sont un peu dans la même situation, bon, effectivement. Par ailleurs, il y a du financement possible pour certains projets, je pense, comme ça. Vous le savez.

Juste aussi sur les frais d'administration pour le FAVAC, là, je pense que c'est important de le souligner, puis vous soulevez la question, c'est 5 %, les frais d'administration pour le FAVAC, là, tu sais. Alors, les fonds, là, ne sont pas utilisés, là, pour pallier, puis je pense que c'est important, là, absorber des dépenses d'administration.

Mais juste pour revenir peut-être, deux questions, M. Boisvenu. Est-ce que je comprends, d'une part, que les CAVAC, par exemple, parce que vous y aviez fait référence, n'offrent pas de services de soutien aux proches de personnes, là, qui sont assassinées ou disparues? Parce que ce que je pensais, moi, c'est que les CAVAC pouvaient en offrir, là, aux proches des victimes aussi, pas uniquement aux victimes de crimes autres que l'homicide ou l'enlèvement. Alors ça, j'aimerais que vous puissiez me répondre là-dessus, d'autant plus que vous m'avez cité un exemple, là, sur deux jeunes enfants dans votre région.

Et ma deuxième question: Je peux vous comprendre, mais comment des proches de victimes d'un autre crime... Prenons une agression sexuelle majeure, comprenez-vous, là, qui laisse la personne elle-même pas mal amochée ? puis j'en connais, là ? très amochée, et qui a certainement aussi auprès des proches de cette personne-là un impact, sur le plan de la douleur, et du désarroi, et du choc, qui est aussi important. Je ne veux pas dire que c'est aussi important que l'autre, mais, je veux dire... Et souvent, là, ça ne se termine pas après six mois, ça non plus, les relents et les séquelles psychologiques de ça, tu sais. Alors, je me dis, puis on l'a vu tantôt dans les statistiques, qu'il y en a beaucoup, dans les demandes acceptées à l'IVAC, qui sont justement des cas d'agression sexuelle, une bonne partie, ou des crimes reliées à la violence... Alors, si on dit: On va faire de la rétroactivité, en matière de proches, puis uniquement d'homicides, mais les autres, dans ces cas-là, on dit: Non. Je vous avoue, là, je ne sais pas trop, trop quoi répondre aux autres à cet égard là, bien honnêtement. Puis je vous dis ça, là, on en discute, c'est très humain, ce n'est pas... tu sais.

Le Président (M. Descoteaux): M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): C'est évident que ça prend une compréhension assez sensible de la situation que les familles ont vécue. Et je le répète: Si mes filles Isabelle et Julie avaient été violées ? et je le sais, puisque je connais bien le CALACS en Estrie pour y faire des levées de fonds ? je sais qu'elles auraient été très bien supportées, et, pour la famille, ça aurait été un support, un soutien qu'il y ait un organisme qui s'occupe de notre fille. Lorsque Julie a été assassinée, il n'y a aucun organisme qui s'est occupé de la famille. C'est là la différence, et, M. le ministre, si vous ne comprenez pas ça, je ne peux aller plus loin dans cette affirmation-là.

Et, lorsque vous parlez: Est-ce que les CAVAC donnent des services aux familles de personnes assassinées? Je vous dirais que c'est la plus grande confusion depuis à peu près un mois. Parce que j'ai rencontré un haut fonctionnaire qui me dit: Tu sais, Pierre, les CAVAC ne sont pas mandatés pour aider les familles de personnes assassinées. Alors, quand j'écoute certaines directrices, directeurs du CAVAC qui me disent: Oui, on peut les aider, pour moi ce n'est pas clair. Et, lorsqu'ils les aident, M. le ministre, c'est quatre heures de thérapie. Ce que les familles nous disent: On ne peut pas embarquer là-dedans, Pierre, parce que, si je viens de perdre mon fils...

n (12 h 40) n

Écoutez, en fin de semaine, on a été à Québec, puis il y a une dame qu'on rencontre, le fils a été assassiné. Son auteur l'a brûlé pendant 12 heures pour faire disparaître le corps. Cette famille-là s'est fait voler la mort et la vie de son fils. Ils sont à la dérive depuis cinq ans. Cette famille-là nous dit: On ne peut pas aller en thérapie pour quatre heures, on va juste gratter le bobo. Ce qu'on a besoin, c'est le même type de thérapie qu'une victime survivante qui s'est fait violer, qui peut avoir 20 heures, 50 heures à l'IVAC ou pendant 20 semaines ou 50 semaines. C'est le même type de thérapie qu'on veut, parce que, nous, là, la blessure, elle va être permanente, jamais on ne va retrouver notre fils. Ma fille qui a été violée, je vais peut-être la retrouver un an, deux ans après, un peu mieux équilibrée, je vais être capable de la supporter. Mais la famille qui a vu son fils, son fils unique assassiné, M. le ministre, la blessure va être permanente, et l'état psychologique de la famille risque d'être permanent aussi si elle n'est pas aidée. Et c'est ces gens-là qu'on vous dit aujourd'hui qu'il faut aider.

Le Président (M. Descoteaux): Si vous voulez conclure, M. Boisvenu. Ça va? Nous allons... Le temps est écoulé, M. le ministre.

M. Marcoux: Juste un dernier point, là. C'est que, sur la question des hypothèses de coûts, là, nous, là, et c'est très... le ministère de la Justice en a, et on pourra les circuler, là. Je ne veux pas dire que nous sommes tous d'accord là-dessus, là, mais... puis je sais que vous... mais on pourra en rediscuter. Puis je pense qu'on a fait des travaux à cet égard-là, et on pourra y revenir.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le ministre. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, M. Boisvenu, bonjour, Mme Nemey, Mme Falardeau. Alors, je vais tenter de bien circonscrire, là, par rapport aux questions... aux améliorations que vous souhaitez. Bon. Sur l'effet immédiat de la loi, vous êtes clair. Et c'est pour ça, tantôt, j'écoutais le ministre, et là je ne veux pas faire de leçon de quoi que ce soit, parce que c'est quand même assez dur, là, on est dans la douleur humaine ultime, là, de mesurer tout ça. Mais en même temps, actuellement, ce que vous nous dites, c'est que le ministre disait, là, on créerait peut-être deux catégories de victimes. Comme vous dites, actuellement, c'est qu'on en crée deux par le projet de loi, puis on... disons qu'il y a moins de sensibilité, là, là-dedans. Parce que... et, moi, je ne veux pas faire de leçon à personne, là, je connais les coûts, mais en même temps votre argument sur un régime social par rapport à un régime d'indemnisation, évidemment, un régime d'indemnisation... je veux dire, un régime d'assurance, c'est qu'il y a une date: tu paies une cotisation, tu es assuré à partir du 1er janvier, à partir du moment où tu es assuré, puis, si ton malheur arrive avant, tant pis. Un régime d'indemnisation à des fins sociales, lui, c'est qu'il... à des gens dans l'état où ils sont au moment où le régime commence. Un peu, je vous dirais, si on avait créé un régime d'aide sociale et on dirait: Ceux qui vont perdre leur emploi dans l'avenir et qui, après ça, seront sur l'assurance-emploi et tomberont sur l'aide sociale, bien les prochains, on va les considérer, tous les autres, vous, jusqu'à la fin, jusqu'à 80 ans, jusqu'à votre mort, bien vous n'aurez pas d'aide sociale. Est-ce que... C'est à peu près ce que je comprends de vos arguments sur les deux régimes, qui sont quand même assez différents?

Le Président (M. Descoteaux): M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Je vous dirais, à la limite, c'est comme mon père lorsqu'il a été... il a eu une transplantation du coeur, en 1971, 1972, s'il est diagnostiqué, je veux dire, ou il a besoin d'une transplantation et que le régime est adopté une semaine, deux semaines après, est-ce que mon père serait admissible à l'opération par l'État malgré que le diagnostic est arrivé avant? C'est à peu près la même chose. On a des familles qui sont actuellement dans le besoin, et, si on les laisse sans aucun support, il faut être conscients, tout le monde ici, autour de la table, c'est des familles, je veux dire, qui vont continuer, continuer, continuer à descendre, à descendre. C'est ca que je vous dis. Est-ce que l'État a une responsabilité, oui ou non, devant ces familles-là?

Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Vous parlez de l'évaluation qu'a faite le ministère, des coûts que vous trouvez évidemment... qui n'est pas scientifique, est-ce que vous avez eu accès à des documents du ministère relativement à ça, ou si c'est basé sur des discussions, strictement des discussions que vous avez eues avec eux?

Le Président (M. Descoteaux): M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Non, écoutez, j'ai rencontré M. Turmel avec un de ses collaborateurs à la maison, on m'a présenté ces coûts-là. Je vous dirais, sur le plan statistique, je pense qu'un bon finissant universitaire a fait la même job, là. Mais, sauf que ces coûts-là, ce sont des hypothèses, ce sont des scénarios sans aucun fondement scientifique. Moi, ce que j'aurais voulu faire, c'est que le ministre rencontre, je ne sais pas, moi, 25, 30 familles de notre association et qu'on évalue les besoins. Et, à partir d'une évaluation des besoins, on dit: Voici ce que ça représente comme coûts. On a dit: Non, il y a eu à peu près 1 000 morts au Québec, on estime que ça va donner à peu près ça. Nous, on a rencontré 260 familles, et on compare notre analyse qu'on fait en fonction des besoins des familles, qui nous apparaît plus scientifique, plus valable sur le plan de la thérapie, et on dit au ministère: Vous êtes trois fois en haut des coûts. Parce que ce n'est pas vrai que 50 % des familles vont demander de l'aide. On les connaît, on les rencontre. C'est à peine une centaine, à peu près 50 à 60 familles qui vont demander de l'aide. Et là on n'est pas devant une facture de 2 millions, on est devant une facture d'à peu près 500 000 $, ce qui sont les coûts que j'ai donnés au ministère au mois de février dernier.

Donc, on dit: Est-ce que, devant une facture de 500 000 $, l'État n'a pas une responsabilité de trouver l'argent... Parce qu'on a trouvé 3 millions pour aider davantage les victimes survivantes cette année, M. le ministre. On a trouvé 3 millions additionnels. Est-ce qu'on peut trouver 500 000 $ additionnels pour traiter avec les victimes dont une personne a été assassinée? Moi, ça m'apparaît tout à fait logique à poser comme question.

M. Bédard: Vous faites référence dans votre mémoire à la création d'un fonds spécifique. Pourriez-vous m'en dire un peu plus?

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Mais, moi... Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Descoteaux): Allez. Ça va.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Je ne dois plus avoir l'habitude, après avoir passé 10 ans en Environnement, avec le BAPE, d'attendre votre autorisation.

Le Président (M. Descoteaux): Ça peut aller de façon informelle. Je le préfère, même. Allez-y.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): D'accord. Donc, votre question, vous parlez du fonds. Moi, je pense que, par rapport à une situation particulière qui ne s'éternisera pas dans le temps et qu'on ne veut pas ouvrir, comme le dit le ministre, avoir la tentation d'ouvrir et être critiqué, par rapport à traiter une clientèle en particulier, parce que les gens comprennent mal notre demande, peut-être parce qu'on l'a mal expliquée aussi, je pense que la venue de la création d'un fonds spécifique pour ces familles-là à mon avis m'apparaît une avenue raisonnable, peu coûteuse pour l'État et acceptable socialement.

Moi, je ne crois pas que, demain matin, si le ministre annonçait sur la place publique ce fonds-là qui est créé à l'intérieur de la loi, que le ministre se fasse lapider. Moi, je pense qu'on va reconnaître dans ce geste-là une intention historique de vouloir venir corriger une situation qui, sur un an ou deux ans, va s'arrêter, et qu'on aura une fois pour toutes donné au moins la chance à ces familles-là d'aller chercher des services. Puis si, dans trois ans, les familles ne l'ont pas fait, bien, à mon avis, elles auront passé tout droit, mais on aura eu au moins l'occasion de leur donner la chance d'aller chercher quelque part du support. Puis, je le répète, pour moi, 500 000 $, là, dans l'aide à ces victimes-là, on va le récupérer.

Écoutez, j'étais avec une famille de Magog la semaine passée. La dame attend une opération du coeur. L'événement est arrivé en 1993. Elle n'a jamais eu de support, et ça l'a conduit, aujourd'hui, à avoir une opération du coeur. Comment va coûter cette transplantation-là à l'État? Des millions? Des milliers? Possiblement la facture qu'on demande aujourd'hui, pour cette dame-là uniquement. Donc, je dis: quelque part, on va économiser, et ce 500 000 $ là, pour l'État, quant à moi, va être un investissement très rentable.

Le Président (M. Descoteaux): M. le député.

M. Bédard: Merci. Je ne veux pas revenir sur aussi l'autre question, au niveau des CAVAC. Je pense que vous avez bien répondu par rapport aux services accordés, au quatre heures, je pense que ça dit tout, parce que, dire des fois, bon: les gens sont disponibles, le temps est important aussi, le nombre de services qui est requis, je pense que la démonstration est assez claire à ce niveau.

Je lisais dans le projet de loi des éléments peut-être un peu plus techniques... Je n'ose pas dire «techniques», parce qu'on parle des proches des victimes, là, mais, à 5.1: «Prendre les mesures nécessaires pour contribuer à la réadaptation psychothérapeutique d'un proche d'une victime d'homicide ou d'enlèvement.» Bon. Certain nous proposent, comme le Protecteur du citoyen, d'arriver avec une approche beaucoup plus, je vous dirais, ciblée, là, dans le sens de ne pas laisser à l'interprétation les proches des victimes, et eux, bon, disent: Je crois utile d'insister sur la nécessité de définir cette notion. En effet, la cellule familiale comprenant les conjoints, enfants, les parents, les grands-parents, les frères, les soeurs, les membres d'une famille reconstituée, voire un ami intime de la victime pourrait correspondre, à mon avis, à la notion de «proches visés». Vous, est-ce que vous êtes d'accord avec cette définition de «proches visés»?

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): M. le Président, on a eu une discussion avec le comité de travail, et je pense qu'il semble vouloir y avoir un consensus sur la définition de «victime». Moi, je suis contre l'approche d'avoir une définition dans la loi où on va dire: Voici ceux ou celles qui sont admissibles, en ayant même une définition large. Moi, je suis plus d'accord pour qu'on vienne définir ce que j'appellerais «les victimes évidentes», là, ce que j'appellerais «le cercle familial», notamment. Par contre, de permettre au ministre, à l'intérieur de la loi, selon une évaluation d'un thérapeute ou d'un médecin autorisé et reconnu, d'élargir ça dans des cas bien spécifiques.

Je donne l'exemple encore de Julie, lorsqu'elle est décédée, six mois après, son coloc s'est suicidé. Mais il n'avait pas de rapport... Il avait seulement un rapport, là, de... Ils payaient le loyer ensemble, là. Il n'y a pas de rapport affectif, il n'y a pas de rapport... Bon. Possiblement qu'il aurait eu besoin d'aide, lui. Donc, moi, je me dis: ayons une définition la plus réaliste possible par rapport à une situation, une cellule familiale, mais ne laissons pas la porte fermée à des individus qui pourraient être touchés par un drame.

n (12 h 50) n

M. Bédard: Je vois aussi, au paragraphe 1° de l'article 5.1, on y inscrit, bon: «Prendre les mesures nécessaires ? donc, on va prévoir par règlement de prendre des mesures nécessaires ? pour contribuer à la réadaptation psychothérapeutique d'un proche d'une victime d'un crime, lorsqu'elle considère qu'une telle réadaptation est utile à la réadaptation de la victime.»

On nous propose de créer une forme de droit d'appel, là. Le Protecteur du citoyen, qui disait: Bon, bien ? sur ça, mais sur l'ensemble aussi ? il y aurait avantage à donner accès aux victimes et aux gens qui demandent, là, le fait de pouvoir aller en appel au TAQ pour contester des décisions qui pourraient être prises à ce niveau. Est-ce que vous pensez que ce serait utile?

Le Président (M. Descoteaux): M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Vous savez, les victimes d'actes criminels, de toutes sortes, là, aussi bien les familles de personnes assassinées que les victimes survivantes, elles se reconnaissent victimes à deux occasions: au moment du crime et au moment où ils doivent faire la preuve devant un système comme l'IVAC qu'elles sont victimes. Je vous dirais, la plus grande frustration que, nous, on a eue, des gens dans l'association, c'est de toujours être en contestation devant un organisme comme l'IVAC. C'est très traumatisant, ça demande de l'énergie, et, je vous dirais, vous vous souvenez, lorsque j'ai passé à Tout le monde en parle, les appels téléphoniques chez nous se sont déferlés, pas seulement des familles de personnes assassinées, des gens de tout acabit, des victimes de tout acabit, parce que c'est des gens qui étaient devant l'IVAC et c'est des gens qui avaient perdu toute l'énergie pour aller en contestation.

Donc, moi, ce que je dirais, c'est qu'il faut faire attention. Si on met un mécanisme de contestation ou d'appel, il faut que ce mécanisme-là soit le plus léger possible et favorable à la victime. Je comprends qu'un travailleur qui est accidenté doive faire la preuve qu'il n'a pas fait preuve de négligence. Mais, lorsqu'une victime doit constamment faire la preuve qu'elle n'a pas été négligente, une femme, qu'elle n'a pas été négligente quand elle s'est fait violer, moi, j'ai un problème avec ça, gros problème. Parce que la personne est toujours victimisée puis est toujours en train de se justifier qu'elle est victime. On peut-u avoir un système qui va laisser le bénéfice du doute à la victime et non au système?

M. Bédard: O.K.

Le Président (M. Descoteaux): M. le député.

M. Bédard: Je vais laisser à ma collègue et je reviendrai s'il reste du temps.

Mme Caron: M. le Président...

Le Président (M. Descoteaux): Mme la députée de Terrebonne, bien sûr.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup pour votre présentation, les réponses à nos questions, M. Boisvenu, Mme Nemey, Mme Falardeau. Oui, effectivement, vous avez raison lorsque vous dites que la victime, lorsqu'elle doit effectivement prouver, là, qu'elle est bien victime, et c'est particulièrement fréquent au niveau des agressions sexuelles, où on va souvent demander beaucoup plus au niveau des victimes, c'est extrêmement difficile.

Je suis porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine et, depuis février, au niveau de l'action communautaire. Alors, lorsque vous avez mentionné, tantôt, que le SACA, le Secrétariat à l'action communautaire autonome, ne vous reconnaissait pas comme un organisme de défense de droits, je vous avoue que je suis très, très étonnée, parce que vous faites effectivement de la défense de droits. Pour moi, c'est assez clair, c'est vraiment ça que vous faites. Donc, quelles raisons vous a-t-on données? Quels sont les arguments qui ont été invoqués? Et, si le SACA ne vous reconnaissait pas, la politique de reconnaissance de l'action communautaire doit vous relier quand même à un ministère. Donc, ce serait au ministère de la Justice, qui, lui, doit s'assurer de respecter cette politique de reconnaissance des organismes communautaires dans son ministère. Alors, quelles sont les raisons du côté du SACA?

Le Président (M. Descoteaux): M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): M. le Président, j'ai fait 34 ans au gouvernement dont quelques années comme sous-ministre, donc vous comprendrez que je connais un peu le langage des fonctionnaires lorsqu'on refuse ou on accepte une demande. Et, lorsque je me suis adressé au SACA, il y a un an et demi, la première question qu'on nous a dite: On a regardé votre charte, bon, vous êtes à moitié un, à moitié l'autre, donc vous êtes comme des siamois, et il faudrait que votre mission défense des droits soit 90 % de votre mission. Vous comprendrez qu'au moment où on créait une association nos préoccupations, notre priorité, c'était d'aller vers les familles pour faire du recrutement de familles. Après avoir discuté avec le directeur ou la directrice du temps, pour m'apercevoir dans le fond qu'ils n'avaient plus de sous puis qu'ils ne voulaient plus accepter des nouveaux organismes, donc j'ai dit à madame, j'ai dit: Écoutez, c'est une fausse raison que vous avez là. Une fois que tu creuses un peu, là, tu t'aperçois que dans le fond... C'est que le SACA a regroupé, au Québec, vous le savez, depuis une dizaine d'années ou cinq ans, tous les organismes de défense, qui étaient un peu répartis dans plusieurs ministères, et depuis quelques années la champlure est fermée.

Donc, on se retrouve devant un cul-de-sac comme association. On donne des services, je dirais, à la hauteur que ce que les CAVAC donnent, mais les CAVAC ont leur fonds. Nous, je veux dire, ce qu'on a reçu du gouvernement depuis un an, c'est 17 000 $, ce qui veut dire: pour les 1 000 familles qu'on représente, c'est 17 $ par famille. Ce n'est pas beaucoup. Tout est fait bénévolement. Moi, je mets, par année, dans mon auto, 50 000 km. Je revenais d'un tournoi de golf il y a une semaine, le tournoi de golf bénéfice pour l'association, j'ai eu un accident, ça va me coûter à peu près 1 000 $, je paie de ma poche. Donc, on est vraiment très... Et, nous, tous les dons qu'on reçoit du public, 100 % retourne aux familles, soit sur l'aide financière pour payer les frais funéraires, ou on a créé une bourse d'études, un fonds d'études pour les étudiants qui veulent étudier en victimologie, faire de la recherche pour améliorer les connaissances sur les victimes. Mais aucun des dons, on ne veut le mettre dans l'administration. Donc, ça nous prend de l'aide gouvernementale quelque part parce qu'on remplit une mission qui était, depuis 30 ans, complètement ignorée par le gouvernement. Et, en le faisant, on supporte le travail des policiers, on supporte le travail de la cour, on supporte le travail des CAVAC; à quelque part, on est aidants pour le système.

Le Président (M. Descoteaux): Mme la députée.

Mme Caron: Oui. Est-ce que vous avez... Lorsque vous avez déposé la demande au SACA, quelle demande avez-vous déposée au niveau des besoins comme tels de l'organisme? Et, au niveau de votre préférence, vous souhaitez être carrément rattachés au niveau du ministère de la Justice, ou vous voulez être au SACA, mais, au niveau du besoin réel, qu'est-ce que vous avez déposé comme demande?

Le Président (M. Descoteaux): M. Boisvenu, en 1 minute.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Oui, M. le Président. Écoutez, c'est évident qu'on a une très grande familiarité avec le ministère de la Justice et, depuis l'arrivée de M. Marcoux notamment, on a développé des liens, là, de grande complicité, donc c'est un ministère quand même avec lequel on se sent très à l'aise, mais, quand il vient le temps d'aller chercher des sous, je vous dirais: On va aller se camper à n'importe quel ministère. Et le besoin, c'était, nous, parce qu'on veut partir un bureau permanent à Montréal. On a 260 familles, tout se fait à partir de chez nous, j'y consacre 60 heures par semaine. J'ai pris ma retraite anticipée pour me consacrer à ça. Donc, il faut ouvrir un bureau permanent à Montréal. On veut en ouvrir un éventuellement à Québec parce qu'on a une cinquantaine de familles dans la région de Québec qui ont besoin de support. Donc, on parle ici d'une aide financière au minimum de 100 000 $, et je vous dirais qu'avec ce 100 000 $ là on va en faire à peu près 300 000 $.

Le Président (M. Descoteaux): Merci. Puisqu'on a pris déjà au-delà du 15 minutes de part et d'autre, mais, avant la période de clôture de 13 heures, nous pourrions prendre deux minutes du côté ministériel et deux minutes du côté de l'opposition. Ça vous va? M. le ministre. Ou Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. Bonjour, M. Boisvenu. Une de mes questions a trait à l'aide financière relativement aux personnes, aux proches des victimes qui ont été victimes d'un homicide. Est-ce qu'à l'intérieur du système actuel de santé il n'existe pas de programme pouvant permettre, par exemple, des traitements avec psychologue ou psychiatre? Qu'est-ce qui fait la différence ou qu'est-ce qui justifie, là, le fait qu'on ne puisse pas, avec le programme de santé actuel, répondre aux besoins des familles des victimes?

Le Président (M. Descoteaux): M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Je dirais: pour deux raisons, M. le Président, excusez-moi, Mme la ministre... Mme la députée, je veux dire, pour deux raisons. D'abord, un, on n'a pas beaucoup de spécialistes, au Québec, qui travaillent auprès de familles ayant vécu un traumatisme majeur. Parce que souvent c'est de l'intervention individuelle qu'il faut faire auprès du père ou de la mère, parce que, vous savez, ce qui se passe souvent, c'est que le père abandonne la famille, et c'est la mère qui... Il y a 80 % de divorces, hein, vous le savez? Donc, c'est souvent de l'intervention individuelle mais aussi de l'intervention familiale, et on n'a pas beaucoup de professionnels, au Québec, qui sont à la fois spécialistes dans le traumatisme mais aussi spécialistes dans la thérapie familiale et individuelle en même temps. Donc, on ne retrouve pas ça dans les CLSC, très peu. C'est des ressources très rares qu'il faut souvent développer. Et ce qu'on fait actuellement, c'est qu'on utilise beaucoup, beaucoup actuellement des familles, dans l'association, qui ont passé à travers, qui deviennent un peu, entre guillemets, des thérapeutes pour ces familles-là, pour leur expliquer qu'est-ce qu'ils vont vivre, qu'est-ce qu'ils vont traverser.

En conclusion, peut-être je vous dirais, c'est que, quand une famille comme Mme Labelle, vous vous souvenez, sa jeune fille a été assassinée, découpée à peu près en 50 morceaux. Mme Labelle, tout ce qu'elle a retrouvé, c'est la tête et un bras, quelque chose de même. Quand elle a rencontré la jeune fille du CAVAC, c'est Mme Labelle qui faisait la thérapie auprès de la jeune fille parce qu'elle n'était pas capable de supporter d'écouter une mère de famille parler de son drame de même. Elle était habituée de travailler avec des jeunes, des gens qui étaient agressés dans la rue, qui étaient... Bon, des crimes souvent plus habituels qu'on voit. Mais, avec 60 meurtres, au Québec, par année, et une minorité qui sont très crapuleux, on n'a pas beaucoup de spécialistes qui traitent avec cette clientèle-là au Québec, et surtout pas dans les CLSC. Et, lorsqu'on embarque dans un CLSC puis on veut un psychologue, vous le savez, c'est six mois d'attente.

Le Président (M. Descoteaux): Merci bien. Du côté de l'opposition, deux minutes.

M. Bédard: Oui, rapidement.

Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Je veux en venir rapidement sur le processus de révision pour bien comprendre, là, je suis moins familier sur les contestations au niveau de l'IVAC. Lorsqu'il y a une demande qui est faite à l'IVAC, la révision se fait par qui, se fait où? Elle se fait à l'IVAC même?

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Elle se fait à l'IVAC. Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Descoteaux): Allez, M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Je vais en prendre l'habitude, hein? On va revenir, on m'a dit, au printemps.

Le Président (M. Descoteaux): Je vous avais donné carte blanche.

n(13 heures)n

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Oui, oui. Ce que je disais, c'est que normalement c'est la victime qui doit s'occuper de son dossier, mais elle peut être supportée par un avocat.

M. Bédard: Comme c'est l'IVAC qui prend la décision et, après ça, il n'y a pas d'autres recours?

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Bien, moi, j'ai... Notre spécialiste... Nous, sur le conseil d'administration, on a une victime qui n'est pas une victime d'une personne assassinée... famille d'une personne assassinée, mais est victime de l'IVAC... Excusez-moi. Elle est victime et elle est rendue maintenant à son troisième appel à l'IVAC, troisième fois qu'elle conteste la...

M. Bédard: À l'IVAC?

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): C'est notre spécialiste, elle connaît assez bien la loi maintenant parce qu'elle a dû l'apprendre par coeur pour aller rencontrer les fonctionnaires de l'IVAC pour contester leurs décisions, que, sur notre conseil d'administration, c'est notre spécialiste de l'IVAC et c'est une victime.

M. Bédard: O.K. Puis, très rapidement à la fin, c'est très technique et des fois on vient comme un peu mal à l'aise, là, mais, sur les... Je vois, dans le projet de loi, on prévoit 3 000 $, là, c'est pour ça, quand on parle de chiffres, c'est toujours... et là j'ai lu rapidement dans un mémoire tantôt que ? c'est dans quelle loi? ? on prévoit 4 600 $, là. Ah, c'est à la SAAQ. Écoutez, là, c'est sûr que vous allez me dire, 4 600 $... Bon. Est-ce que ça vous semble raisonnable quand même? Bien, vous allez me dire oui, j'ai l'impression, mais est-ce qu'il y aurait lieu de faire un... au moins se conformer à un ajustement, avec une certaine logique, avec les autres lois, là?

Le Président (M. Descoteaux): Très brièvement, M. Boisvenu.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Oui, M. le Président. Écoutez, on y va avec des exemples, les exemples sont plus colorants, là... Bon. Moi, j'ai perdu deux filles, et les deux services funèbres m'ont coûté environ 8 000 $. C'est sûr que j'aurais pu l'enterrer dans une boîte de carton, ça m'aurait coûté 3 000 $. À 3 000 $, on est à peu près à 50 % des frais funéraires. Si on calcule le service, l'église, la tombe, bon, etc., on est à peu près à 50 %. Donc, les familles dans le besoin, on va continuer à assister... à voir des gens aller quémander pour payer la différence. Avec notre fonds qu'on a créé, on va essayer de les supporter, avec Enfant Soleil, la même chose, on va essayer de les supporter. Parce que, je vous dis, il n'y a pas pire drame pour une famille de perdre quelqu'un, mais il n'y a pas pire second drame d'aller quêter pour enterrer son enfant. Mais le 3 000 $, je vous dirais, ça nous apparaît un minimum, mais ce minimum-là ne sera pas ce que coûtent les frais funéraires.

Le Président (M. Descoteaux): Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour une très, très brève question du député de Robert-Baldwin? Oui? M. le député.

M. Marsan: Oui, merci, M. Boisvenu, Mme Nemey et Mme Falardeau. Je pense que c'est un dossier qui nous touche tous personnellement. Je pense à votre association, c'est pour ça que je vous pose une question rapidement: Est-ce que vous avez fait des demandes de subvention pour l'Association des familles de personnes assassinées au ministère de la Santé et des Services sociaux? Je pense au programme SOC, le support aux organisations communautaires. Et est-ce que vous êtes en communication avec eux pour essayer d'obtenir des fonds évidemment pour avoir une meilleure organisation?

Le Président (M. Descoteaux): En quelques secondes.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): M. le Président, on en a fait là, on en a fait à la Famille. À la Famille, on nous dit: Ce n'est pas un problème familial, c'est un problème de justice, donc allez au ministère de la Justice. À l'autre ministère, on a dit: Écoutez, vous travaillez avec des gens victimes, allez... Tout le monde nous ramène au ministère de la Justice. Et on arrive au ministère de la Justice, il y a un fonds, le Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels, il est à l'exclusivité des CAVAC. Donc, on est comme coincés. Et celui qui s'apprête à nous aider actuellement, et qui n'aura aucun regard sur la dépense, dans le sens qu'on pourra l'affecter au fonctionnement, c'est le gouvernement fédéral. C'est le ministère de la Justice qui va nous verser... Si le provincial nous verse une subvention à l'intérieur du CAVAC... du FAVAC, le ministère fédéral de la Justice va verser un montant égal, et là on pourra l'affecter, ce montant-là, à du fonctionnement. Donc, le fédéral a beaucoup plus de souplesse dans ses critères ? je termine là-dessus, M. le Président.

Parce que c'est sûr qu'il y a une grande générosité au ministère de la Justice, mais avoir des sous puis faire des projets, quand les besoins des clientèles, c'est d'être accompagné, je vous dirais, là, que ça ne nous donne pas grand-chose de faire des projets, là. Une fois qu'on a ouvert notre bureau, qu'on a acheté notre ordinateur puis qu'on... on n'a plus grand-chose à faire sinon que d'accompagner les familles, puis ça, c'est du budget de fonctionnement.

M. Marsan: Juste en terminant, c'est pour vous remercier, mais je pense que vous nous aidez aussi à vous aider, parce que vous nous donnez sûrement beaucoup d'arguments pour continuer, nous, à travailler de notre côté comme députés auprès des ministres et toute la grande famille politique pour supporter une organisation comme la vôtre. Merci.

M. Boisvenu (Pierre-Hugues): Si vous pouvez parler au ministre, là, de la Santé et Services sociaux...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Descoteaux): Mme Falardeau, Mme Nemey, M. Boisvenu, merci de votre présence devant la commission. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 5)

 

(Reprise à 15 h 7)

Le Président (M. Descoteaux): Nous allons reprendre... la commission va donc reprendre ses travaux. Oui, M. le ministre.

M. Marcoux: M. le Président, je voudrais simplement savoir, pour vous dire, parce qu'on a eu des changements dans l'horaire, là, et, pour planifier les travaux, moi, je serais certainement d'accord, après la présentation des groupes, ce soir, de continuer article par article...

M. Bédard: C'est quoi, ça?

M. Marcoux: ...l'étude article par article, le cas échéant, si tous les membres de la commission y consentent.

M. Bédard: Non, non.

M. Marcoux: Alors, je voudrais simplement savoir si c'est possible.

M. Bédard: Pourquoi vous faites cette demande-là au micro, M. le ministre? Pouvez-vous me dire ça?

M. Marcoux: Non, mais...

M. Bédard: Pourquoi on a attendu aussi longtemps avant de passer ce projet de loi là? Pourquoi on n'a pas eu de consultations avant ça? Pourriez-vous me le dire, M. le ministre? Pourquoi, moi, depuis le mois de mars, je demande qu'il y ait des consultations? Pourquoi, depuis le début décembre, je demande des consultations? On fait un travail sérieux ici.

Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Chicoutimi...

M. Bédard: Il veut ma réponse, il l'a eue.

Le Président (M. Descoteaux): On est encore en séance, donc il faut s'adresser au président.

M. Bédard: Bien, s'il veut jouer ce jeu-là, on va le jouer à deux. Pas devant le monde. Très déçu de l'attitude du ministre. Très déçu! À sa hauteur.

M. Marcoux: M. le Président.

Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre.

M. Marcoux: Il n'y a rien là. Écoutez, j'avais demandé, avant de dire un mot, au député de Chicoutimi... On n'a pas pu se parler, M. le Président. On va faire ça, écoutez.

M. Bédard: ...

M. Marcoux: Non, non.

Le Président (M. Descoteaux): Écoutez, juste un instant. On va...

M. Marcoux: Il n'y a rien là.

Le Président (M. Descoteaux): Si vous permettez, on va suspendre les travaux peut-être trois, quatre minutes, cinq minutes.

Des voix: ...

Le Président (M. Descoteaux): La commission suspend les travaux.

(Suspension de la séance à 15 h 8)

 

(Reprise à 15 h 9)

Le Président (M. Descoteaux): Donc, comme premier groupe, cet après-midi, nous recevons l'Association québécoise Plaidoyer-Victimes, représentée par Mme Arlène Gaudreault. Mme Gaudreault, bienvenue devant la Commission des institutions. Vous avez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, suivie d'une période d'échange avec les députés de part et d'autre.

Association québécoise
Plaidoyer-Victimes (AQPV)

Mme Gaudreault (Arlène): Bien. Alors, M. le ministre, M. le Président, MM. Mmes les députés, merci de nous entendre, et j'espère que le climat sera serein.

M. Bédard: Il le sera, madame.

Mme Gaudreault (Arlène): Il le sera? Alors, très bien. Alors, je vais faire une brève introduction et par la suite je vais apporter les commentaires que vous relaie l'Association québécoise Plaidoyer-Victimes par rapport aux modifications qui nous sont proposées.

Alors, M. Marcoux l'a souligné ce matin à plusieurs reprises, il a utilisé le mot «intention», et c'est un fait que la non-reconnaissance des souffrances occasionnées aux proches dans les cas de crimes violents tels que l'homicide, l'enlèvement, l'agression sexuelle, la violence conjugale et familiale, a été dénoncée à maintes reprises et sur plusieurs tribunes et, au cours des années, elle a fait l'objet de nombreuses discussions et recommandations visant une éventuelle réforme de la loi de l'IVAC.

n(15 h 10)n

Je voudrais quand même mentionner qu'au cours des dernières années l'Association québécoise Plaidoyer-Victimes et les autres groupes qui sont ici, aujourd'hui, se sont penchés à plusieurs reprises sur la question des proches. Alors donc, ce n'est pas d'hier que des organismes défendent la situation, l'iniquité des proches de victimes d'homicide. Je donnerais seulement quelques jalons, je ferai seulement quelques rappels:

Déjà, en 1984, nous avons publié une recherche pour le ministère de la Justice du Canada, qui s'intitulait L'indemnisation des victimes d'actes criminels ? Une évaluation du service québécois, où on faisait état des problèmes dont on parle encore aujourd'hui. Lorsqu'il y a eu les événements de Polytechnique, en 1989, notre association est intervenue auprès du gouvernement du Québec pour demander à ce que les familles aient accès à un soutien psychologique, même si ce n'était pas prévu à la loi, et, s'il n'y avait pas eu l'Université de Montréal, qui avait toute une banque de spécialistes, je ne sais pas qu'est-ce qu'il serait arrivé à ces familles-là.

Rappelons aussi que, lors du Sommet de la justice, lors des travaux préliminaires, lors des débats aussi autour des tables de délibération, notre association et les groupes qui sont présents ici, nous avons beaucoup collaboré avec les partis, les différents partis du gouvernement à la réforme sur... la Loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels, qui a été déposée en 1993 et qui n'a pas été mise en vigueur par la suite. Rappelons aussi qu'en 1997 le ministre Bégin a déposé un document de consultation, qui s'intitulait Pour mieux répondre aux besoins essentiels des victimes de la criminalité. Il a mis sur pied aussi un comité de travail, qui a été dissous après deux réunions seulement faute de consensus avec le ministère. Rappelons aussi qu'en 2001 M. Bégin a réactivé un comité consultatif sur la révision du régime d'indemnisation et qu'il y a un rapport qui a été publié, dans une période qui n'est pas très... peut-être pas la meilleure période, je pense, en plein mois de juillet... mais ce rapport s'appelait Vers une réforme au service des personnes ? Rapport et recommandations, en 2002. Le Protecteur du citoyen, aussi en 2002, a déposé un rapport.

Alors, il y a eu quand même plusieurs étapes qui ont été franchies jusqu'à maintenant, sans grand résultat. Depuis lors, il faut souligner, je pense, le travail des groupes comme la Fondation Mélanie-Cabay, le RIVCO et l'AFPAD, qui ont conscientisé le public et les décideurs à l'absence de services pour les proches et l'iniquité actuelle des dispositions prévues dans notre régime d'indemnisation.

Pour clore là-dessus, je dirais qu'en continuité avec nos actions je suis ici, aujourd'hui, je suis toute seule parce que c'est notre assemblée générale annuelle, et c'est l'occasion d'un lancement d'un bulletin qui est consacré spécifiquement à la question des proches des victimes d'homicide, dont je vous ai remis copie, et, ce soir, nous aurons une conférence à laquelle une centaine de personnes vont participer, et c'est sur les morts violentes et l'impact pour les personnes endeuillées, une conférence qui sera donnée par M. Montbourquette.

Donc, la décision prise par l'actuel ministre de la Justice vise donc à réparer des lacunes qui pénalisent de nombreuses personnes qui subissent de graves préjudices. Il permet de témoigner de notre solidarité sociale à l'endroit des familles touchées par un deuil brutal, des personnes, les victimes directes et les victimes secondaires ? je n'aime pas tellement ce mot, mais je pense qu'on peut le comprendre dans le contexte ? qui sont affectées par des événements traumatiques. Et je pense qu'au-delà de nos divergences politiques et de nos appartenances nous sommes invités à faire mieux et plus pour les victimes d'actes criminels, dans la mesure des moyens dont nous disposons.

Maintenant, je vais apporter des commentaires sur les dispositions actuelles et les modifications proposées à l'article 5.1. Mon premier commentaire et le plus long, ce sera l'accès au soutien psychologique. Et je pense qu'il faut en parler parce que c'est une question centrale, parce que... je pense que c'est une question qu'on peut pas évacuer: Pourquoi doit-on donner l'accès psychologique aux proches et qu'est-ce que ces modifications-là viennent changer? Alors, la loi actuelle prévoit que les proches des victimes ne peuvent recevoir un soutien psychologique que s'ils ont été témoins du crime ou, pour reprendre l'expression ? les termes de la loi ? «avoir été blessé à l'occasion de», un critère qui est très restrictif et qui ne s'applique qu'à un petit nombre de victimes. Les modifications qui y sont proposées auraient pour effet d'enlever cette contrainte, qui est injuste. Qu'ils soient ou non présents sur les lieux du crime, ces proches seraient dorénavant admissibles à un soutien psychologique.

Donc, ce sont des modifications qui permettent d'ouvrir davantage l'admissibilité de proches de la victime pour d'autres crimes que l'homicide et l'enlèvement lorsque cette aide est utile à la réadaptation de la victime ou, en d'autres termes, lorsqu'elle favorise le rétablissement de la victime. Et je pense qu'il faut parler de l'importance des proches dans le processus de rétablissement de la victime, si on veut adopter ces modifications-là. On peut parler de toutes sortes de choses, du financement des organismes, des lacunes dans les services, mais je pense que, dans les modifications, c'est une question qui est au coeur des modifications.

Alors, ce que je dirais là-dessus, c'est que l'impact du soutien social sur le bien-être physique et psychologique des personnes qui ont subi de la violence, de l'abus ou de la négligence n'est plus à démontrer. Les pratiques sur le terrain... Et, quand même, il y a des services ici, au Québec, et à travers le Canada, depuis le milieu des années soixante-dix. Donc, les personnes qui ont subi de la violence, de l'abus ou de la négligence, quand on regarde les pratiques sur le terrain, ces pratiques nous montrent que les victimes se tournent d'abord vers leur entourage pour obtenir du soutien. Ce soutien peut être d'ordre émotionnel: de l'écoute, l'effet de donner son temps à la victime, de l'aider à composer avec des situations difficiles; il peut être instrumental: des conseils, de l'aide matérielle, des services tangibles. Toutes les études, sans exception, s'accordent à dire que le soutien de l'entourage est déterminant et qu'il influence significativement la capacité des victimes à surmonter leur traumatisme. Il a un impact sur les états émotionnels des victimes, sur leurs façons de gérer leur détresse, sur le sens qu'elles donnent aux événements et sur leur espoir de réhabilitation. C'est un facteur déterminant parmi les facteurs qui peuvent aggraver ou maintenir les séquelles d'un crime. Et, quand on se retrouve avec des victimes dont la qualité du soutien social est pauvre, les facteurs de risque de développement d'un stress post-traumatique sont très importants, c'est même un des trois facteurs les plus importants dans le développement du stress post-traumatique, le manque de soutien des proches.

À l'opposé, le fait d'impliquer les proches contribue au processus d'intégration de l'événement et représente un aspect thérapeutique dans le traitement. Chose certaine, les victimes s'en sortent beaucoup mieux et beaucoup plus rapidement si elles peuvent compter sur l'appui de leur entourage. Or, pourquoi a-t-on besoin...

Le Président (M. Descoteaux): Mme Gaudreault, est-ce que ça vous incommode? Il y a un peu de...

Mme Gaudreault (Arlène): Oui, ça m'incommode beaucoup.

Le Président (M. Descoteaux): Oui? On va prendre...

Mme Gaudreault (Arlène): Oui.

Le Président (M. Descoteaux): ...15 secondes pour qu'on se replace, et puis...

Mme Gaudreault (Arlène): Oui. Ça m'incommode beaucoup.

Le Président (M. Descoteaux): J'ai vu que vous aviez de la...

Mme Gaudreault (Arlène): Je suis quelqu'un qui enseigne et qui est très sensible aux bruits de fond, et ça m'incommode, pour dire la vérité.

Le Président (M. Descoteaux): Ça va. On peut... Vous pouvez continuer.

Mme Gaudreault (Arlène): Merci. Alors, quels sont les problèmes? Pourquoi est-il important qu'on associe les proches à la démarche thérapeutique pour aider les victimes? Ce qu'on observe dans nos contacts avec les victimes, c'est que très souvent les victimes ne reçoivent pas le réconfort et la compréhension qu'elles attendent de leur entourage. Souvent, l'entourage est distant, il est peu empressé à offrir de l'aide, et les victimes ne sont pas secourues au moment où elles auraient besoin d'avoir un appui. Les victimes vont dire souvent qu'elles ont le sentiment d'être incomprises, qu'on est indifférent à leur endroit. Les victimes vont souvent parler aussi, quand elles réfèrent à leurs proches, à leur entourage... ça peut être les collègues de travail, ça peut être la famille, mais elles vont souvent dire qu'on leur donne des conseils comme d'oublier, de tourner la page, de passer à autre chose, et ce sont des conseils qui sont parfois de bonne foi, mais ils sont souvent interprétés comme une façon de banaliser l'événement ou de nier l'impact.

Je pense que, si vous aviez partagé le repas avec moi ce midi et que vous aviez entendu Mme Falardeau quand elle expliquait qu'est-ce qui s'était passé avec le deuil de sa soeur... Elle disait que la plupart des personnes la fuyaient, étaient tellement mal à l'aise et la fuyaient. Et ça, c'est quelque chose qu'on observe souvent chez les proches. On est nous-mêmes des personnes qui, dans notre vie, même si on n'est pas confrontées à des deuils traumatiques, on a tous vécu des situations de deuil, et on ne sait pas toujours quoi faire avec le deuil. Et, quand c'est un deuil qui est brutal, quand c'est un deuil qui est laid, quand c'est un deuil qui est violent, c'est encore beaucoup plus difficile, et les proches ne savent pas quoi faire. Ils ne savent pas comment composer, hein, les proches ne savent souvent pas comment composer avec la fragilité émotive des victimes, avec la détresse.

Alors, les questions qu'on entend souvent chez les victimes, c'est: Est-ce que je dois être très présent ou au contraire je dois respecter leur solitude? Est-ce qu'il y a danger, quand j'ai un enfant qui est victime d'agression sexuelle, que je le surprotège et que ce soit malsain de le surprotéger? Qu'est-ce que je fais dans une situation où... Qu'est-ce qu'un parent fait dans une situation où l'abus a été commis par le père ou par le conjoint? Comment est-ce qu'on dose sa présence, l'attention qu'on donne à une victime?

n(15 h 20)n

Alors, tout ça pour dire que souvent les proches ne savent pas comment faire, comment réagir, comment agir avec la victime directe.

Et ce qu'observe aussi, les recherches le documentent, c'est que la violence criminelle a un impact très important sur les relations conjugales et familiales. 50 % des couples dans des situations de violence sexuelle, on observe des divorces puis des séparations; dans le cas du meurtre, on observe des pourcentages de 50 à 70 %. Donc, ce sont des événements qui viennent causer des fractures, des cassures, qui amènent des réaménagements aussi dans ces familles-là.

Il faut tenir en compte aussi qu'en indemnisation actuellement, et M. Marcoux, l'a évoqué ce matin ? je pense que c'est M. Marcoux ? le régime d'indemnisation reçoit de plus en plus de jeunes qui sont victimes de violence sexuelle, d'abus, ça peut être par des tiers, mais c'est souvent dans la famille. Donc, on a parlé ce matin de 33 % de la clientèle, et c'est une clientèle de jeunes qui ne cesse d'augmenter. Alors, il faut bien comprendre que, quand tu es parent et que ton enfant a été abusé, agressé, tu ne sais pas, comme parent aussi, comment composer avec cette situation-là. Il y a beaucoup de parents qui disent: Bien, comment on doit interpréter les problèmes de comportement, d'hypervigilance? Qu'est-ce qu'on fait avec les cauchemars de notre enfant? Qu'est-ce qu'on répond à un enfant dont le père l'a agressé et qui est en prison? Donc, je veux dire, ces exemples-là, ces difficultés-là, ces obstacles-là sont un peu, je dirais, des illustrations des problèmes que peuvent rencontrer les proches quand ils sont confrontés à la victimisation. Et donc, on peut peut-être comprendre à la lumière de ces quelques exemples qu'il est utile, dans certains dossiers, je ne dis pas tous les dossiers, qu'il est utile pour un thérapeute de travailler avec le conjoint, avec le père, avec la mère, de travailler avec les parents d'un jeune ou avec une personne qui a des liens significatifs dans son entourage.

La question des proches, du soutien des proches et de l'aide thérapeutique qu'on doit apporter aux proches, on en parle ici, mais, je veux dire, on n'a pas inventé ça, ça se fait ailleurs. Ça se fait dans d'autres problématiques, par exemple dans des cas avec des gens qui ont des problèmes psychiatriques, qui ont des troubles alimentaires, des troubles alcooliques. Et la Revue québécoise de psychologie de 2002 faisait état d'un recensement de 100 projets où on a utilisé cette approche-là, c'est-à-dire de travailler avec des proches pour aider les personnes qui présentent ces difficultés-là, comme on veut le faire ici avec des proches de victimes. Et ce que ça montre, c'est que, dans 83 % des 100 projets qui ont été recensés, il y a des effets bénéfiques.

Alors, si je résume cette question-là, impliquer les proches dans la démarche thérapeutique peut contribuer à aider la victime à exprimer ses émotions à ses proches, à s'affirmer sur le plan de ses besoins, à mieux les définir. Elle peut aussi favoriser une compréhension mutuelle, une compréhension réciproque des difficultés qu'entraîne la victimisation, et je pense que c'est une façon de soutenir et de guider les proches afin d'amener des changements d'attitude, afin que des attitudes... on travaille sur les attitudes qui sont... sur les malaises, sur les maladresses, sur les attitudes qui sont négatives et qui contreviennent au processus de rétablissement des victimes. Ça peut permettre aussi de développer des interactions plus satisfaisantes, ça peut faciliter la résolution de problèmes. Et, fournir du soutien émotionnel aux proches, c'est les aider dans leurs efforts pour accompagner la victime dans son processus de rétablissement.

Alors, dans ce sens-là, les propositions qui sont mises de l'avant, nous croyons qu'elles peuvent faciliter l'atteinte de tels objectifs, que ce sont des propositions qui sont novatrices, et nous les appuyons, et ça fait longtemps qu'on aurait dû faire ces ajustements-là, si on avait été une société qui avait plus de compassion à l'endroit des proches. C'est une façon certainement de mieux prendre en compte les besoins des victimes, c'est une façon aussi de faire une meilleure prévention de l'aggravation des séquelles consécutives au crime. Et je pense que, quand on implique et qu'on mobilise des personnes qui sont importantes au sein du réseau social et familial des victimes, on reconnaît que la victime, ce n'est pas une personne isolée, qu'elle a des liens, qu'elle vit dans un réseau et qu'on doit se préoccuper de ce réseau-là et que, si on se préoccupe bien de son réseau, bien ça va avoir des effets bénéfiques sur son rétablissement.

On est bien conscients que les propositions qui sont mises de l'avant ne permettent pas de compenser tous les torts subis par les proches. Il n'est pas question dans cette loi-là, par exemple, de réparer les préjudices moraux, de réparer... de compenser pour les préjudices, par exemple, reliés à des frais... le fait qu'il y ait des pertes de revenus, qu'on doit accompagner une victime, que ça occasionne des frais de déplacement, des démarches à la cour, et tout ça. Il y a eu des propositions en ce sens-là du ministère de la Justice, en 1997, mais on ne les retrouve pas ici. Il n'y a pas...

Le Président (M. Descoteaux): Mme Gaudreault, peut-être en conclusion.

Mme Gaudreault (Arlène): Il me reste deux pages, mais je veux les faire parce que je trouve, c'est... je pense que c'est des questions de fond. Je vais conclure là-dessus. Sur ce point-là, je dirais que ces aspects-là devraient être abordés lors de la réforme de l'IVAC.

Sur la notion de «proche», maintenant, à l'article 5.2, sur la notion de «proche», pour y aller simplement, je pense que cette... nous, ce qu'on suggère, c'est que la notion de «proche» soit la plus élargie possible et qu'elle tienne compte de la composition des familles actuelles, des personnes qui font partie de la communauté de la victime, des personnes qui ont un lien significatif. Et on devrait éviter, dans la réglementation... on va se donner des balises assez larges pour qu'un plus grand nombre possible de personnes soient admissibles et pour éviter aussi que les personnes qui s'adressent à l'IVAC se voient refuser leur demande à cause de l'étroitesse de la définition.

La réglementation a été soulevée ce matin, vous allez certainement en discuter entre vous aussi. Alors, je vous dirais qu'à la lumière, je dirais, des tentatives, des expériences passées, on voit bien que la réforme de la loi, même si on nous l'a souvent promise, comme je disais tout à l'heure, on a jamais passé à l'action, alors il nous semble que, si on veut avoir une certaine souplesse au niveau de l'application des modifications qui sont proposées, par exemple le nombre de séances, par exemple la définition de «proche», par exemple les frais qui sont accordés, c'est beaucoup plus souple de passer par une réglementation, de l'inscrire dans la réglementation que dans le projet de loi. Et je pense qu'il y a des inconnues aussi actuellement avec ces modifications-là et avec l'application de cette loi-là; je pense que c'est difficile actuellement de prévoir le profil, le nombre de personnes qui vont se prévaloir de ces dispositions-là, le nombre de séances. Alors donc, il y a des choses à évaluer au niveau de la réglementation, et je pense que c'est beaucoup plus souple de le faire de cette façon-là.

Par rapport à la réglementation, nous avons une recommandation, pour l'association, nous recommandons que le ministre de la Justice du Québec dépose, deux ans après l'entrée en vigueur de ces dispositions, un état de situation qui permettrait d'apprécier les difficultés ou non de l'application de ces mesures, les retombées pour les personnes qui s'en sont prévalues et les améliorations susceptibles d'être apportées, et ce rapport devrait l'objet de discussions et de consultations auprès de différents groupes et partenaires.

Un dernier... deux dernières petites choses. Les frais funéraires. Les frais funéraires, nous recommandons que le montant versé à titre de remboursement des frais funéraires soit le même que celui prévu à la Loi sur l'assurance automobile, soit... le montant que j'ai, c'est 4 309 $, ou 4 320 $, peu importe. Je vous dirais là-dessus, je ne sais pas comment vous... je ne suis pas un actuaire, alors je ne sais pas comment on fait les comptes pour indexer les coûts au prix de la vie, c'est quoi l'indexation, mais je peux vous dire, par exemple, qu'en quatre-vingt-treize, dans un document confidentiel, M. Rémillard, il suggérait 3 386 $. M. Bégin, en 1997, il suggérait 3 500 $. Et, en 2002, M. Bégin, il suggérait 3 951 $.

Alors, je pense que les frais funéraires sont assez élevés. L'augmentation que ça représenterait, pour le nombre de demandes que l'IVAC reçoit chaque année, une trentaine de demandes, je ne pense pas que ça... on défoncerait les fonds gouvernementaux, je ne pense pas que ça serait exagéré d'accorder la même chose que pour la Loi sur l'assurance automobile.

Et un dernier commentaire, sur l'article 7: Nous recommandons que les dispositions soient mises en vigueur lors de l'adoption du projet de loi et non pas une date ultérieure fixée par le gouvernement. Vous comprendrez qu'avez toutes les tentatives qu'il y a eu avant, il y a un petit peu de méfiance quand même par rapport à l'adoption de la loi, si je peux m'exprimer ainsi, hein?

Alors, en conclusion, alors j'ai deux petits paragraphes. Nous saluons l'initiative du ministre de la Justice, qui a aussi annoncé la mise en place d'une table de concertation, et nous souhaitons que soit amorcée le plus rapidement possible une réforme en profondeur du régime «d'indem», qui permettrait de revoir aussi d'autres questions qui sont importantes, comme la révision de l'annexe, les indemnités pour les jeunes, le délai pour présenter une demande, les problèmes de disparité avec les autres régimes, et des questions comme celles qui ont été soulevées ce matin, par exemple le fait pour les victimes, quand elles ont des problèmes au niveau de la réadaptation, de faire appel au Tribunal administratif du Québec.

Ceci étant dit, je vous remercie de votre attention. Je sais que j'ai parlé vite, mais j'ai parlé avec émotion et passion. Voilà, merci de votre attention.

n(15 h 30)n

Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme Gaudreault. M. le ministre.

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Merci, Mme Gaudreault, et merci d'être là, parce que je sais que... je pense que c'était votre assemblée générale annuelle aujourd'hui?

Mme Gaudreault (Arlène): C'est la première fois en 25 ans que j'en manque une, alors vous voyez où était mon coeur.

M. Marcoux: Alors, ça indique l'importance que vous accordez et que vous attachez, là, aux changements à apporter au régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels, alors merci beaucoup.

Rapidement, écoutez, je pense que, quand vous dites «que les dispositions soient mises en vigueur lors de l'adoption du projet de loi», moi, je n'ai pas de problème avec ça, là, je ne pense pas que ça cause de problèmes, et je comprends que ça fait du sens, premièrement.

Deuxièmement, pour ce qui est des frais funéraires, évidemment, je vais vous indiquer comment nous l'avions déterminé, bien honnêtement, parce que la Régie des rentes, je pense que c'est 2 500 $, la CSST, c'est 2 567 $ ? bien qu'il y ait d'autres montants qui soient payés, à la CSST, en plus de ça, là ? et la SAAQ, c'est 4 309 $. On l'a établi, dans le fond, en indexant le 600 $ à compter de 1972 à même l'indice des prix, à l'IPC. Et ce qui est prévu dans le projet de loi, c'est que dorénavant ça va être indexé, donc le 3 000 $, là, il va être indexé. Alors ça, c'est déjà prévu, donc on ne restera pas avec un montant fixe, là, qui ne bouge pas année après année.

Sur la question des proches, ce que vous indiquez, c'est qu'il y a des expériences ailleurs, puis vous avez fait état aussi de recherches, là, mentionnant que l'appui ou l'aide psychologique aux proches évidemment aide les victimes. C'est sûr qu'il y a une question qui se pose probablement, puis, je veux dire, évidemment, comment déterminer ce qui est plus utile aux proches, là. Parce que ça ne pourrait pas être ouvert à 10 personnes, c'est bien évident.

Puis, quand vous dites que les coûts font partie des enjeux, c'est vrai, là, on a du financement, mais on n'en a pas pour... et c'est sûr que ce n'est pas mathématique non plus, on ne peut pas... des prévisions sont des évaluations basées sur les cas passés puis les demandes, puis... alors ce n'est pas mathématique.

Maintenant, comment vous voyez ça, vous? Comment vous verriez un critère de détermination, là, pour l'IVAC, de déterminer qui sont... la personne, là, comme on dit, un proche qui... nécessaire à la réadaptation de la victime?

Le Président (M. Descoteaux): Mme Gaudreault.

Mme Gaudreault (Arlène): Vous me posez les grosses questions, hein?

M. Marcoux: Non, mais je...

Mme Gaudreault (Arlène): Bien, il y a certains critères. Je pense que la qualité des liens, la fréquence des liens, je pense aussi que le support, le soutien qu'une personne donne effectivement à la victime, direct, ou ce que la victime pense pouvoir recevoir comme support, c'est des critères qui peuvent être utilisés.

Moi, je vous dirais là-dessus que je pense que, pour toutes les personnes qui sont ici, c'est extrêmement difficile de répondre à une question précise comme celle-là. En même temps, je ne l'ai pas dit dans mon commentaire, parce que je suis allée vite à un moment donné et j'ai été perturbée, mais je dirais aussi qu'il y a une expertise au sein de l'IVAC, la direction de l'IVAC et du personnel de l'IVAC, qui s'est développée au cours des dernières années. On critique beaucoup l'IVAC, mais on oublie de dire aussi qu'il y a une expertise et qu'il y a des gens qui sont dédiés à l'IVAC et qui ont une connaissance aussi des dossiers, parce qu'on accueille déjà des proches à l'IVAC, des personnes qui sont témoins.

Alors, dire... par exemple, de parler du nombre de séances, ça peut être très variable, le nombre de séances: des personnes peuvent avoir besoin de quatre ou cinq séances, d'autres, c'est vrai, peuvent avoir besoin de 52 séances, et, si on suggère 20, ce n'est pas assez. Ça dépend d'énormément de facteurs, je veux dire, il y a la gravité du crime comme tel, mais il y a tous les antécédents de la victime, c'est-à-dire qu'est-ce qu'elle vit aussi au moment du crime, est-ce qu'il y a d'autres épreuves dans sa vie qui l'ébranlent, est-ce qu'elle a vécu d'autres victimisations, est-ce que c'est quelqu'un qui a beaucoup de soutien ou qui en a peu, est-ce que c'est quelqu'un... Il y a les traits de personnalité aussi: il y a des personnes qui sont plus combattantes ou combatives que d'autres. Donc, c'est arbitraire, à quelque part.

Mais je comprends aussi que le gouvernement et ceux qui administrent le régime devront trancher à quelque part, comme on a tranché, à un moment donné, en disant: Bien, on met... On accepte 52 séances de thérapie, parce qu'il y a une capacité de l'État à payer aussi.

Maintenant, je pense qu'il y a une réflexion à faire sur l'aide aux victimes et l'aide aux proches aussi. Peut-être que tout ne doit pas passer par le régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels. Et on vous a demandé, puis vous avez accepté, de mettre sur pied un groupe de travail; je pense qu'il faut examiner ces questions-là. Il y a une responsabilisation, aussi, de toute notre société par rapport à l'ensemble des victimes, et je pense que tout ne doit pas entrer dans le régime.

Le Président (M. Descoteaux): Mme Gaudreault, le sort s'acharne sur vous. Il y a un vote, nous sommes rappelés au salon bleu, il y a un vote.

Mme Gaudreault (Arlène): Je suis victime, c'est ça que vous voulez dire?

Le Président (M. Descoteaux): Je n'ai pas osé utiliser ce terme-là. Mais on va suspendre, et on va continuer avec vous tout de suite après.

(Suspension de la séance à 15 h 35)

 

(Reprise à 15 h 54)

Le Président (M. Descoteaux): Nous allons reprendre nos travaux. Donc, Mme Gaudreault.

Mme Gaudreault (Arlène): Je pense que je reviendrai en fait... En substance, je pense qu'il y a un examen aussi à faire ? puis c'est ce qu'on vous a demandé ? pour le développement des services d'aide aux victimes au Québec, pour qu'on voie les différentes avenues aussi, autres que l'indemnisation, pour répondre aux besoins des victimes, et qu'il y ait une responsabilisation dans des CLSC, dans des hôpitaux, dans d'autres organismes aussi pour répondre aux besoins des victimes.

M. Marcoux: O.K. Merci. J'avais une question à vous poser. Ce matin, nous avons discuté beaucoup avec M. Boisvenu de la question de la rétroactivité, et, bon, je pense que vous savez qu'est-ce qu'il nous a mentionné. Comment vous réagissez, vous, à une rétroactivité, premièrement, et, deuxièmement, qui viserait dans le fond les proches de personnes, là, qui ont, par exemple, été assassinées?

Mme Gaudreault (Arlène): Je vous dirais que, dans un mode idéal, on pourrait souhaiter que tous les proches des victimes au Québec, qu'il s'agisse d'enlèvement, d'homicide, de violence conjugale, aient accès à un soutien psychologique et que, si le gouvernement du Québec, le gouvernement actuel ou le prochain qui sera au pouvoir, veut le faire, on ne pourrait que saluer une telle mesure, O.K.? Par ailleurs, cette proposition-là, elle pose des questions, elle pose des problèmes, je pense, au niveau de l'équité. Je ne pense pas qu'on puisse avoir une loi qui soit rétroactive pour un certain groupe de victimes et qui ne permettrait pas à d'autres victimes, elles, de recevoir du soutien psychologique. Je pense que ce serait difficile de justifier ça.

Je pense qu'on ne peut pas non plus ? vous avez employé vous-même ce mot-là ce matin ? on ne peut pas hiérarchiser les besoins des victimes puis on ne peut pas dire que... C'est sûr que le crime comme le meurtre, l'assassinat, dans l'échelle de gravité des crimes, c'est le plus grave, on s'entend. Maintenant, dans les répercussions du crime, on ne peut pas jauger les répercussions du crime juste à la lumière, non plus, de comment il est défini dans le Code criminel, ou sa gravité dans le Code criminel. Il y a des personnes qui vont subir des crimes moins importants et qui ont d'importantes répercussions et pour longtemps, dépendamment, comme je le disais tout à l'heure, de leurs antécédents, leur situation avant le crime, des événements qui surviennent après le crime aussi, et je me demande comment le gouvernement pourrait gérer une rétroactivité. Est-ce qu'on part de 1972, au moment où la loi a été mise en vigueur? Est-ce qu'on part de 1989, et pourquoi on part de 1989? Est-ce qu'on part d'il y a deux ans, et pourquoi on partirait d'il y a deux ans? Bon. Ça, est un autre ordre de problème.

Et l'autre ordre de problème, aussi, il y a, et je le disais, on peut bien être dans un monde idéal, mais il y a une capacité de l'État aussi, et je ne sais pas à combien vous avez estimé les coûts, je ne sais pas si l'État est capable de le faire, mais, moi, personnellement, ce que j'ai vu et ce que les autres groupes aussi ont vu depuis qu'on tente de faire une réforme de cette loi-là, il n'y a aucun parti politique, que ce soit le Parti québécois, que ce soit le Parti libéral, qui, jusqu'à maintenant, a voulu faire une réforme pour augmenter les coûts de l'administration de ce régime-là; on a toujours dit: On va faire une réforme pour bonifier, mais en même temps, quand on regarde tous les documents déposés, par M. Bégin, par M. Rémillard... Vous savez, on a passé plusieurs ministres de la Justice, là, depuis quelques années, hein, M. Chagnon, M. Ménard, bon, et aucun d'entre eux... et tous les documents officiels du ministère ont été vers une réduction des coûts du régime, et, quand le ministère met de l'avant des coûts actuariels, les coûts sont très élevés.

Alors, si le gouvernement a la volonté politique et a la capacité de le faire, on peut être pour, mais le faire pour une catégorie de victimes, je pense que ce n'est pas équitable. On parle d'une loi qui est inéquitable, et est-ce qu'on va créer d'autres iniquités? Et comment on pourrait justifier, par exemple, auprès de proches de victimes d'agression sexuelle, d'enfants qui ont subi de grandes violences, qu'eux ils n'ont pas accès à l'aide psychologique? Alors, je ne sais pas où vous allez trouver le rationnel, mais ce n'est pas un rationnel qui est facile à trouver. Alors, c'est ça que je répondrais par rapport à ça.

Le Président (M. Descoteaux): Quelques minutes.

n(16 heures)n

M. Marcoux: Peut-être, il me reste quelques minutes, deux choses. Un, quand vous proposez de faire un état de situation deux ans après l'entrée en vigueur, moi, je n'ai pas de problème avec ça, d'ailleurs ce que j'ai indiqué ce matin, c'est que j'irais un peu plus loin, là, je n'avais pas mentionné ça, mais de prévoir que, dans le rapport financier de l'IVAC, le rapport annuel de l'IVAC, qu'il y ait une indication justement de l'application de cette mesure, parce qu'elle est financée, on dit: Il y a 500 000 $, il y a 1,5 million, je pense que c'est important pour voir aussi, pour que les gens puissent voir est-ce que... parce que, comme vous dites, c'est sur des prévisions actuarielles, ce n'est pas tranché au couteau, ce n'est pas un plus un nécessairement. Et donc, après un an même, pour voir qu'est-ce que ça donne, le nombre de proches et le financement qui a été attribué à ça, moi, je pense que c'est important. On ajouterait aussi dans le rapport annuel... l'IVAC le fera, est capable de le faire, je pense, M. Ranger est là...

Mme Gaudreault (Arlène): Je pense qu'on peut faire mieux que ça, aussi, selon moi. Je pense qu'on peut faire mieux que ça avec l'IVAC. On a eu, pendant toutes ces années, des collaborations, quand même, avec l'IVAC. On a beaucoup travaillé avec l'IVAC, je me souviens, dans les années quatre-vingt-dix pour dire: Bon. Les victimes ne sont pas informées de cette loi-là, ils ne la comprennent pas, ils ne la connaissent pas, puis les intervenants non plus. Et ce travail-là qu'on a fait en collaboration fait qu'avec l'IVAC on a pu faire avancer des choses, il y avait de la bonne volonté aussi de leur part.

Et je pense qu'au niveau de ces mesures-là, qui sont dans une réglementation, je pense qu'on devrait pouvoir en discuter avec le personnel de l'IVAC, avec la direction de l'IVAC, pour bonifier. On n'est pas obligé d'attendre deux ans non plus pour faire ça, c'est quelque chose qui peut se faire dans le cadre d'un processus. Et, comme c'est dans une réglementation, c'est plus souple, on peut ajuster. Puis on est là, les groupes, là; ce n'est pas vrai qu'on commence à défendre puis à représenter les droits des victimes juste depuis deux ans, là. Je veux dire, les groupes sont là depuis un moment, et on le suit quand même, ce dossier-là, puis il y a une collaboration avec l'IVAC. Moi, je crois beaucoup qu'on peut faire du travail aussi dans ce sens-là.

Il y a une chose qui est importante aussi ? et je m'étais mis une note tout à l'heure dans mon document ? je pense que, si la loi est adoptée, et je l'espère, il faudra faire un travail d'information auprès des victimes d'actes criminels, parce qu'il ne sera pas simple d'expliquer que, tu sais, la réadaptation est utile à la victime; on a de la misère à le comprendre en lisant la loi. Alors, qui va être admissible, et comment? Donc, je pense que, quand on va mettre en place ces mesures là, il va falloir vulgariser, il va falloir illustrer, il va falloir informer les victimes pour éviter de créer des insatisfactions, puis que ce soit clair, et faciliter aussi le travail des gens de l'IVAC qui reçoivent des demandes et le travail des groupes qui acheminent des demandes aussi.

Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre, en moins d'une minute, s'il vous plaît.

M. Marcoux: Oui. Bien, M. Ranger, de l'IVAC, est ici, il suit nos débats, il est en arrière. Une dernière question sur le concept «utile à la réadaptation» ? puis vous en avez déjà parlé ? mais est-ce que vous le voyez, vous... c'est un critère à laisser souple à la direction de l'IVAC, ou encore de le baliser dans un projet de règlement ? donc il y a déjà eu des discussions avec les groupes, mais c'est loin d'être finalisé, là ? comment vous le voyez, vous? Ce n'est pas très discuté, là, dans...

Mme Gaudreault (Arlène): Oui, c'est ça, on n'a pas eu... on est pris, tout le monde, avec des échéanciers très courts. Je pense qu'il faut quand même qu'il y ait quelques balises, parce que tout ne peut pas entrer dans les filets de l'indemnisation, mais je pense qu'il faut qu'il y ait de la souplesse aussi. Et je pense que, quand vous allez établir cette réglementation-là... je suis certaine que vous allez le faire avec les gens de l'IVAC, puis en grande compétence, vous pouvez reconsulter les groupes là-dessus, on peut prendre le temps de baliser un peu. Mais je pense qu'il faut être assez souple parce qu'on est dans l'inconnu, on est dans l'inconnu, et on ne peut pas dire combien de personnes, ça va être quoi, les profils, ça va être quoi, les demandes, et je ne pense pas que, demain matin, on peut fournir une étude scientifique pour dire qu'est-ce qu'il va se passer. S'il y a quelqu'un qui est capable ici, bien tant mieux, et qu'il se lève ou qu'elle se lève.

Mais je pense qu'on est avec des dispositions qui nous permettent d'aller de l'avant et de répondre à de graves injustices ? et M. Boisvenu avait raison là-dessus ? et iniquités par rapport à des personnes qu'on a historiquement... Alors, ce n'est pas parfait, mais j'espère que ce ne sera pas comme les autres réformes, que ce ne sera pas une tentative de réforme.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, madame. Du côté de l'opposition officielle, M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Merci, Mme Gaudreault. D'ailleurs, nous le souhaitons aussi, que ce ne soit pas une tentative. Et, à la question du ministre d'ailleurs qui me demandait mes disponibilités, je tiens à l'assurer de ma disponibilité demain, le 15 et le 16 ? j'ai vérifié avec le leader ? le 19, le 20, le 21 et le 22, disponible matin et soir pour l'adoption finale du projet de loi et de passer article par article. Ça va me faire grand plaisir, Mme Gaudreault.

Mme Gaudreault (Arlène): On est venu avec beaucoup d'espoir, les groupes, ici.

M. Bédard: Je partage vos espoirs, je vous avouerais, depuis pas aussi longtemps que vous, mais depuis un bon moment.

Mme Gaudreault (Arlène): L'important, c'est le résultat.

M. Bédard: Les appeler à grands voeux.

Mme Gaudreault (Arlène): L'important, c'est le résultat.

M. Bédard: Et voilà.

Mme Gaudreault (Arlène): Et on travaillera ensemble pour la suite des choses...

M. Bédard: J'en suis convaincu. Voilà.

Mme Gaudreault (Arlène): ...parce qu'on n'a pas fini.

M. Bédard: Et, sur la... je vous ai écoutée tantôt, je regardais... et là, évidemment, on ne peut pas avoir des statistiques, mais vous intervenez beaucoup auprès des victimes... et là, sans avoir d'ordre de... bien peut-être un ordre de grandeur... Normalement, le temps, pour une personne... et je comprends qu'on garde des séquelles toute notre vie, peu importe le niveau d'agression, parce que toute personne est différente, donc réagit différemment à un niveau d'agression, mais le suivi, ça dure à peu près... le soutien que vous faites, vous, normalement, c'est combien de temps? Je comprends que les gens reviennent, mais le moment le plus important, là, où la personne se resaisit, reprend une vie plus normale, vous l'évaluez à combien en termes de temps, là?

Mme Gaudreault (Arlène): D'abord, je dois préciser quelque chose, je ne suis pas une thérapeute, puis notre organisme est un organise de défense des droits des victimes, donc il faut que je mette ça en contexte. Mais on est en contact avec les victimes, il y a des organismes aussi qui travaillent en contact direct. Ce qu'on sait... donner quelques balises. Ce qu'on sait, là, avec l'expérience des thérapeutes, avec les expériences d'organismes qui travaillent auprès des victimes, c'est ce que n'est pas toutes les victimes non plus qui ont besoin de soutien psychologique et ce n'est pas toutes les victimes non plus qui vont se désorganiser puis qui vont rentrer... qui vont avoir des deuils très prolongés. On estime que 8 % à 12 % vont développer un état de stress post-traumatique. Et les études en victimologie, ce qu'elles nous montrent, c'est que généralement, dans une période d'un an, les victimes s'en sortent si elles sont aidées rapidement. Ça, c'est important, d'être aidé rapidement, d'être aidé précocement. Ça se peut que dans ces dossiers-là il y ait des interventions très, très ponctuelles parce que ça va viser, par exemple, des interactions qui sont négatives au sein du couple ou du parent à l'enfant, et c'est quatre, cinq rencontres. Et il est fort probable aussi qu'il y ait des personnes pour qui, là, mettons qu'on donne 20 semaines, ce ne sera pas suffisant. Parce qu'il y a des personnes qu'on les voit trop longtemps après, leur situation s'est aggravée, ils ont vécu d'autres épreuves, ça s'est détérioré. Alors, c'est extrêmement complexe, et à ce moment-là il faut... c'est pour ça que tout à l'heure je disais: Il faut avoir des relais. Quand l'aidant ne sera plus capable de prendre ces dossiers-là, il faut avoir des relais, par exemple avec les CLSC, ou avec les CALACS, ou avec...

M. Bédard: ...

Mme Gaudreault (Arlène): Et il faut bien comprendre aussi que toutes les victimes ne vont pas dans le régime d'indemnisation avec des thérapeutes en thérapie individuelle, hein. Et ce pourquoi...

M. Bédard: Quel pourcentage à peu près qui n'y va pas?

Mme Gaudreault (Arlène): Bien, je ne saurais pas vous le dire...

M. Bédard: Oui, c'est ça.

Mme Gaudreault (Arlène): Je ne saurais pas vous dire, mais je peux...

M. Bédard: 20 %, 30 %, 40 %?

Mme Gaudreault (Arlène): Je peux vous dire, je peux vous donner un exemple, O.K. qui illustre...

M. Bédard: Allez-y.

Mme Gaudreault (Arlène): ...et qui touche le financement, qu'a évoqué Pierre-Hugues Boisvenu, mais d'une autre façon. Vous avez un organisme, à Montréal, qui travaille avec les hommes victimes d'agression sexuelle. Vous en avez un au Québec, d'accord, qui a très, très peu de financement. Alors, ces personnes-là ne vont pas nécessairement passer par «l'indem», ils peuvent avoir aussi de l'aide via le financement de cet organisme-là. Pierre-Hugues a quitté, moi, je vous dirais qu'on doit soutenir les groupes d'entraide aussi, parce qu'il y a des personnes qui vont rencontrer un thérapeute individuel, et ça répond à leurs besoins, et il y en a d'autres pour qui les groupes de parole ou les groupes d'entraide, c'est quelque chose d'important. Donc, on a un examen à faire qu'on n'a pas fait, au Québec, aussi sur la réallocation des fonds, sur les services. Mais, l'indemnisation... Vous savez, on a une Loi sur l'aide aux victimes, je le dis souvent, mais c'est des principes, cette loi-là, ce n'est pas la charte, hein, les accusés ont beaucoup plus de droits que les victimes en vertu de la charte, et l'indemnisation reste le seul droit. Le vrai droit pour les victimes, c'est l'indemnisation, et pour certaines victimes.

M. Bédard: Et ça, je suis d'accord, et c'est pour ça d'ailleurs qu'il faut le plus possible l'éviter...

Mme Gaudreault (Arlène): Alors donc, il faut ouvrir ça...

M. Bédard: ...leur application.

Mme Gaudreault (Arlène): ...mais il faut ouvrir d'autre chose aussi.

M. Bédard: Vous voyez où je veux aller ? je veux bien comprendre aussi? Parce que le délai normalement, vous me dites, bon, un an, c'est... si on agit rapidement, un an, pas dans tous les cas mais en général, on fait quand même... la personne reprend un rythme, des fois ça peut prendre deux ans, j'imagine, et des fois c'est toute la vie, mais...

Mme Gaudreault (Arlène): Puis il y en a, c'est toute la vie, exact.

M. Bédard: Et voilà, c'est ça. Mais on peut dire que, rendu à un, deux, ou trois ans, l'intervention, là, dans le sens du régime, là, couverte par le régime, là on couvre à peu près la majorité des cas. C'est que j'ai compris, la grande majorité?

Mme Gaudreault (Arlène): Bien, je ne pense pas qu'on puisse dire ça comme ça, parce que c'est plus compliqué que ça.

M. Bédard: Oui, oui c'est plus compliqué, mais il vient un moment où il faut comme ramener ça à un dénominateur...

Mme Gaudreault (Arlène): Trancher, vous voulez dire.

M. Bédard: C'est ça.

Mme Gaudreault (Arlène): Trancher.

M. Bédard: Parce que tantôt vous faisiez... puis sans donner un avis précis, mais j'écoutais M. Boisvenu avant, puis, je comprends, vous le connaissez très bien aussi, vous l'appelez Pierre-Hugues, donc vous parlez régulièrement avec lui, c'est que, quand on parle d'effet immédiat... Moi, je ne parle pas d'effet rétroactif, je vous dirais, je parle d'effet immédiat, et une loi s'applique immédiatement, donc elle reconnaît les victimes; peu importe à quel moment c'est arrivé, elle les reconnaît. Et je comprends vos craintes en même temps, vous me dites: Oui, mais il ne faut pas monter à 72, dans le sens, bon...

Mme Gaudreault (Arlène): ...capable de le faire...

M. Bédard: C'est ça, oui, oui, mais, je veux dire....

Mme Gaudreault (Arlène): ...si le gouvernement de le faire, bien sûr.

n(16 h 10)n

M. Bédard: ...dans le monde idéal, mais en même temps pour ne pas apeurer quelqu'un qui veut prendre une décision et qui veut donner ces services-là, ce que je vois avec vous, c'est que ceux qui sollicitent des services, donc qu'il y a des coûts associés au régime d'indemnisation, pas les organismes communautaires, mais au régime d'indemnisation... Eux, normalement, dans un délai de un, deux, trois, quatre ans, disons un an, au départ, eux ont reçu des... les services se donnent de façon intensive à ce moment-là, et il faut le faire sinon, là, c'est là qu'il y a plus de séquelles. Je n'ai pas fait ma maîtrise là-dedans, là, mais, pour avoir parlé un peu avec des gens, il faut agir rapidement auprès de ces gens-là. Alors, quand on souhaite tous les deux un monde idéal... Et là, si on se dit: On fait de l'application immédiate de la loi, donc on ne crée pas deux catégories de victimes, par rapport à une date qui, elle, est complètement... il y a un côté absurde à tout ça, là, mais on dit: On est capable de financer ceux qui ont besoin de services, dont les victimes réelles aujourd'hui.

Si on est conscient du fait, comme vous me dites, qu'en dedans de deux, trois ans... Donc, celles avant... Et là, ce n'est pas une fracture, je vous dirais, législative, mais une fracture naturelle, que ces gens-là ne solliciteront pas de toute façon, en général, de services, on s'entend qu'on est capable d'estimer... Il y a un nombre assez limité, là, seulement en termes statistiques, là, si on se base sur les grands paramètres que vous nous donnez, ce qui fait que, si on veut toucher toutes les victimes en vrai, c'est que le coût n'est pas si élevé que ça.

Mme Gaudreault (Arlène): Moi, je pense que cette question-là, vous devez peut-être la poser aux gens qui travaillent en indemnisation. C'est difficile pour les organismes de répondre à une question comme celle-là, et peut-être même que les gens qui travaillent dans le régime IVAC n'ont pas de réponses claires non plus là-dessus, parce que, dans une famille, ça peut être une ou deux personnes. On ne le sait pas.

Il va falloir aussi, dans le cadre de la réforme, revoir le délai dans lequel les personnes peuvent faire une demande, parce qu'il y a des victimes qui vont continuer leur route, vous savez, pendant un an, un an et demi, puis, bon, parce qu'elles ont du soutien, parce qu'elles sont assez fortes, parce qu'elles veulent s'en sortir elles-mêmes, parce qu'elles veulent continuer puis qu'à un moment donné, bon, les problèmes, il arrive un autre événement ou... bon. Donc, ça peut être après un an et demi, aussi, qu'on demande de l'aide. Donc, actuellement, la loi n'est pas très souple, parce que c'est après un an la survenance de l'événement. Donc, c'est des questions aussi qu'il va falloir regarder. Et je dirais là-dessus qu'il faut se donner l'occasion de faire l'expérience, d'ouvrir la porte aux proches et de regarder ensemble qu'est-ce qu'on peut faire, qu'est-ce que ça donne, quelles sont les difficultés qu'on rencontre et comment on peut l'améliorer en cours de route.

C'est pour ça qu'il faut y aller avec une réglementation et y aller aussi avec une collaboration entre les organismes, entre les gens, les gens du ministère. Je pense qu'on est tous concernés par cette question-là. Personne, on n'est à l'abri du crime. On connaît tous quelqu'un. Alors, je pense qu'on a avantage à avoir, je dirais, un esprit généreux puis en se disant aussi: C'est pas tout, on ne calcule pas tout, ce n'est pas scientifique, mais... soyons compatissants, soyons... ouvrons un peu les vannes, parce qu'on ne l'a pas été, on ne l'a pas été du tout envers les proches. Puis c'est honteux pour nous tous qu'on en soit là encore aujourd'hui.

M. Bédard: Sur les proches, moi, ce que je veux, c'est décevoir le moins de gens possible. Le Protecteur nous dit: Écoutez, vous auriez avantage ? le Protecteur du citoyen ? à définir, beaucoup mieux définir la notion de «proche» dans le projet de loi.

Pourquoi? Parce qu'elle peut subir des variations. Parce que la souplesse fait aussi en sorte qu'il n'y a pas de discussions autour d'un règlement, alors qu'autour de la loi il y en a. Parce que la souplesse peut amener des injustices aussi. Parce que là on définit d'un autre côté. Alors, moi, souvent j'ai pratiqué, pas dans ce domaine-là mais dans d'autres, et je vous dirais que c'est ceux et celles qui sont sur la ligne, là, qui sont... deviennent, entre guillemets, des victimes, pour qui la loi devient d'application injuste pour eux.

Et ça, je veux l'éviter le plus possible. C'est pour ça qu'on a avantage à être clair, pour ne pas créer des attentes inutiles sur qui doit être une victime... qui doit être un proche, plutôt. Pas une victime, qui doit être un proche. Là, je vois dans votre... Dans votre mémoire, vous nous parlez, bon, évidemment des ascendants, des descendants. C'est ça?

Mme Gaudreault (Arlène): Des personnes qui ont... On l'élargit avec les personnes qui ont un lien significatif et qui peuvent contribuer au rétablissement de la personne, donc des personnes qui, au niveau de la qualité de leur lien, la fréquence de leur lien, du soutien qu'elles peuvent donner... Et c'est sûr que le rôle des thérapeutes... Parce que ce sont les thérapeutes qui sont en contact avec les victimes qui vont demander à ce qu'un proche ait accès à un soutien. Alors, c'est sûr qu'au niveau de la qualité de l'évaluation, au niveau de la rigueur aussi de l'évaluation, bien vous savez, les administrateurs de l'IVAC vont peut-être fixer des balises à un moment donné comme ils ont fixé dans d'autres cas, en disant: Bien, on va trop loin. On n'est pas capable de... on n'est pas capable de payer.

Mais on est peut-être mieux de ne pas partir avec un... je dirais, une définition qui est trop étroite, se laisser un peu une marge de manoeuvre au départ, quitte à ce qu'on dise: Bien... C'est toujours la capacité de l'État. Je pense que ce n'est pas l'intention, c'est la capacité de l'État.

M. Bédard: Et voilà. Tout le monde est d'accord. Sauf que, moi, proche votre interprétation, moi, je vous dirais: Des gens avec un lien significatif... On peut plaider le contraire, on peut avoir une interprétation contraire, dire: Écoutez, c'est la famille près puis peut-être des gens fondamentaux pour les personnes. «Proches», vous savez, dans l'aspect familial, c'est lié à la famille. Même, à la limite, des fois on a des gens de notre famille qui ne sont pas des proches. Alors, c'est pour ça que je vous dis... Puis en même temps je ne veux pas créer d'injustice auprès de ces gens-là. Il y avait le Protecteur qui nous a proposé... Attendez, je vais vous la lire. À quelle page se retrouve-t-elle?

Le Président (M. Descoteaux): ...en une minute.

M. Bédard: Hé, mon Dieu! En une minute! Vous voyez comment on a peu de temps, malheureusement. «En effet, la cellule familiale comprenant ? bon ? ...

Mme Gaudreault (Arlène): ...

M. Bédard: ... ? oui ? les conjoints, les enfants, les parents, les grands-parents, les frères, les soeurs, les membres d'une famille reconstituée ? bon ? voire un ami intime de la victime pourraient correspondre à la notion.» Alors, est-ce qu'on devrait intégrer «qui ont un lien...» Vous, vous dites un lien...

Mme Gaudreault (Arlène): ...significatif.

M. Bédard: Un lien significatif.

Mme Gaudreault (Arlène): Oui, parce qu'il y a des situations où les victimes, ils n'ont pas de lien, ils n'ont plus de lien avec leur famille, et, à ce moment-là, je veux dire, le lien significatif, ça peut être un ami très près. On peut penser aussi aux personnes qui sont immigrantes, qui arrivent ici, leurs familles vivent dans leurs pays d'origine, ils sont tout seuls. La personne significative, c'est, je ne sais pas, moi, le colocataire. Il peut y avoir toutes sortes de situations. Et, même si on fait quelques erreurs d'appréciation au départ, là, on a tellement fait de grosses erreurs en ne reconnaissant pas l'espace des proches que, maintenant, est-ce que ce serait si grave que ça, ces erreurs-là? Est-ce qu'on pourrait accepter de vivre avec ces erreurs-là, quitte à ce qu'on réajuste après? Je pense, c'est ça, la question qu'on doit se poser.

Le Président (M. Descoteaux): Le temps est écoulé. M. le député de Chicoutimi, M. le ministre, on a quand même une plage de quatre minutes qui s'est dégagée par un groupe parlementaire. Est-ce que vous voulez le partager? Oui. Donc, M. le député de Chicoutimi, deux minutes.

M. Bédard: L'autre chose. Dans la loi, on voit aussi... parce que les règlements, vous savez, moi, j'ai beaucoup de résistance à ça. D'abord, un, j'ai bien pris soin... Pardon?

Mme Gaudreault (Arlène): J'ai lu vos commentaires.

M. Bédard: Oui, oui, oui. Parce que je vous avouerais que j'ai des exemples, qui seraient trop longs, patents, là, vous dire... D'abord, un, sur la mise en vigueur, je vous le dis, l'article 8 ne sera pas adopté dans sa forme actuelle, ça, c'est sûr. Des mises en vigueur «aux dates fixées», je vous avouerais que ça n'arrivera plus, ces choses-là, effectivement. Il faut mettre des dates, de le prévoir dans le temps limite, mais on met des dates fixes maintenant, je vous dirais. Et c'est clair que je suis tout à fait d'accord avec vous, et j'ai entendu le ministre qui était d'accord aussi. Donc, on va s'entendre rapidement là-dessus.

Mme Gaudreault (Arlène): Est-ce que je peux vous dire quelque chose?

M. Bédard: Allez-y.

Mme Gaudreault (Arlène): Par rapport à la réglementation, que, sous M. Bégin, on avait pris cette voie-là, entre autres l'accessibilité des services de réadaptation, notamment un soutien psychothérapeutique, dont la durée serait déterminée par les politiques en matière de réadaptation. Donc, c'est une voie aussi que votre parti avait déjà envisagée et qu'on...

M. Bédard: ...

Mme Gaudreault (Arlène): Sur la durée, mais on parle de l'accessibilité. Peut-être que c'est mal formulé, mais en tout cas...

M. Bédard: O.K. Oui, sur la durée. Non, non, je suis d'accord. Non, non, non, mais il faut le regarder, mais là on est dans la définition de ceux qui ont accès. Et là on est dans le fondamental, là, on est... Et, après ça, bon, la durée, les... entre guillemets, ce n'est pas des détails pour les gens, mais, comment ça va fonctionner, ça, c'est correct, mais, ceux qui ont accès, moi, je vise à être le plus inclusif possible puis, après ça... ou du moins de permettre une certaine latitude pour faire en sorte que la personne qui, elle, va être appelée à exercer son jugement ait toutes les balises nécessaires pour prendre la bonne décision.

Mme Gaudreault (Arlène): Et vous voulez que ce soit...

Le Président (M. Descoteaux): Mme Gaudreault, 15 secondes. Ça va?

Mme Gaudreault (Arlène): ...j'ai assez parlé.

Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre, pour 1 min 30 s.

M. Marcoux: Oui. Simplement un commentaire puis une question. Vous avez parlé du règlement. Enfin, ce que vous indiquez... parce qu'un règlement, c'est vrai que ça peut avoir des effets à un moment donné...

Mme Gaudreault (Arlène): Ça peut être arbitraire aussi.

M. Marcoux: Ça peut être arbitraire, sauf qu'il y a deux choses. Un, ça permet aussi, à un moment donné, plus de souplesse d'ajustement, le cas échéant, là. Puis un exemple, l'aide juridique, on a ajouté le règlement. Autrement, je pense qu'il n'y aurait pas eu de changement, là, tu sais, quand tu retouches dans la loi, premièrement. Deuxièmement, ce que j'ai indiqué aussi... et puis, moi, je peux comprendre les parlementaires qui disent: Bien, écoutez, là... Je pense que ça revient aussi aux parlementaires d'avoir un oeil sur la réglementation, qui parfois a un impact important, et de prévoir dans le projet de loi que le règlement pourra être étudié par une commission parlementaire avant d'être édicté et mis en oeuvre.

L'autre chose, sur la date d'adoption, je suis tout à fait d'accord. Je parlais avec Me Turmel. Il s'agit de voir, si c'est par règlement, là, est-ce qu'on mettre, pour cette partie-là, la loi en vigueur si le règlement n'est pas encore adopté, là. Mais, en tout cas, sur le principe, là, je n'ai pas de problème.

Le Président (M. Descoteaux): Ça va? Merci, madame...

Mme Gaudreault (Arlène): Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Descoteaux): ...pour votre présence devant la commission.

Mme Gaudreault (Arlène): Merci.

Le Président (M. Descoteaux): Nous allons suspendre quelques secondes.

(Suspension de la séance à 16 h 20)

 

(Reprise à 16 h 22)

Le Président (M. Descoteaux): Nous reprenons. Ça va? Bienvenue, Mme Clément, Mme Riendeau. Vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, ensuite suivi de deux périodes, de part et d'autre, de 15 minutes d'échange. Donc, la commission vous écoute.

Regroupement provincial des maisons
d'hébergement et de transition pour femmes
victimes de violence conjugale (RPMHTFVVC)

Mme Clément (Rolande): Bonjour, M. le ministre, M. le Président, Mmes, MM. les députés. Rolande Clément, présidente du Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale et intervenante en maison d'hébergement, en Abitibi, depuis bientôt 20 ans. Je vous remercie de nous entendre. Étant donné la nouveauté de mon mandat, Mme Louise Riendeau, coordonnatrice des dossiers politiques du regroupement, va faire la présentation du mémoire. Je pourrai peut-être répondre à certaines questions par la suite. Alors, je laisse la place à Mme Riendeau.

Le Président (M. Descoteaux): Merci. Mme Riendeau.

Mme Riendeau (Louise): Bonjour.

Le Président (M. Descoteaux): Bonjour.

Mme Riendeau (Louise): Le regroupement qu'on représente existe depuis près de 30 ans maintenant et vise, comme son nom l'indique assez clairement, la prise de conscience collective de la problématique de la violence faite aux femmes et aux enfants, plus spécifiquement la violence conjugale. On regroupe 48 maisons, dans la plupart des régions du Québec, et, en 2004-2005, 43 maisons de nos membres ont accueilli plus de 3 000 femmes et 2 600 enfants. Ça, c'est sans compter évidemment toutes les personnes qui sont vues en dehors de l'hébergement. Donc, c'est donc à partir de leurs réalités qu'on va vous parler aujourd'hui de la Loi sur l'IVAC.

Notre objectif évidemment est que cette loi-là soit cohérente avec d'autres lois, politiques, mesures que le Québec s'est données pour permettre aux femmes victimes de violence conjugale, et à leurs proches, et à leurs enfants d'exercer leur droit à la vie, à la sûreté, à l'intégrité de leur personne, à la liberté, un peu comme le définit notre charte.

Nos positions s'appuient également sur le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels, que le Québec a ratifié, pacte qui reconnaît à chacun le droit d'avoir le meilleur état de santé possible. Et évidemment on s'appuie sur la Convention sur l'élimination de toutes les discriminations à l'égard des femmes, la violence étant une de ces discriminations, et cette convention-là invite les États signataires à prendre des mesures pour permettre à ces femmes non seulement d'échapper à la violence, mais de recouvrer la santé. Alors, comme on le sait, toutes ces mesures-là engagent les États à prendre différentes mesures, à promouvoir les droits.

Comme Arlène l'a dit ? et je vais donc passer rapidement là-dessus ? il y a plusieurs années que des groupes comme les nôtres revendiquent le fait qu'on reconnaisse les préjudices que vivent les proches. Je ne referai pas tout l'historique, qu'Arlène a fait mieux que moi, mais rappelons simplement qu'en 1993 on signait conjointement, Plaidoyer-Victimes, notre association, les CALACS, la Fédération de ressources d'hébergement, un mémoire où on demandait à ce que le droit à la réadaptation soit enchâssé dans la loi, tant pour les proches que pour les victimes.

Donc, en toute cohérence, on accueille très favorablement les mesures apportées par le projet de loi n° 25. Notre présentation va d'une part commenter le projet de loi, donner quelques pistes pour ce qui, en tout cas, sera peut-être un règlement, sera peut-être dans la loi, et proposer des nouvelles mesures à inclure dans le projet de loi n° 25, notamment un amendement à l'annexe qui définit les crimes admissibles.

Alors, sur le projet de loi n° 25, comme on l'a dit, on est très contentes de voir enfin reconnaître le fait que les proches vivent des préjudices, et on salue le projet de loi, et on salue aussi le travail qui a été fait par maintes associations, notamment l'AFPAD, pour réussir à convaincre le ministre là où on n'avait pas, nous, réussi à le faire encore.

On est assez d'accord avec l'ensemble du projet de loi. Sur l'article 5.1, je vous dirais toutefois qu'on aurait préféré que l'aide à l'ensemble des proches ne soit pas assortie d'une condition: que ce soit utile pour la réadaptation de la victime. On peut vous donner comme exemple la question des enfants exposés à la violence conjugale, qui ne sont pas reconnus eux-mêmes comme des victimes, bien que la frontière soit très mince entre le fait d'être exposé et être victime. La recherche nous dit que ces enfants-là vivent une source de stress comparable à s'ils étaient eux-mêmes violentés. Ils présentent un haut niveau de syndrome de stress post-traumatiques, ils ont des troubles de comportement, de l'affectivité, on voit du retrait affectif, des troubles anxieux, des phobies, de l'hyperactivité, différents autres troubles de comportement comme l'agressivité, etc., et ils ont aussi des problèmes de santé physique, des troubles de l'alimentation, des maux de ventre, des maux de tête. Donc, malgré le projet de loi n° 25, ces enfants-là n'auront toujours pas droit à de la réadaptation, à moins que cela ne soit utile à leur mère. On aurait donc préféré que ce soit inclus.

Bon. Après maintes discussions avec le ministre, avec nos collègues des autres groupes, je pense qu'on peut convenir que ce que le projet de loi nous propose, c'est un premier pas. Il est effectivement reconnu que des victimes soutenues par des proches vont recouvrer la santé plus rapidement, donc je pense qu'on pourrait vivre avec cette mesure-là, se disant que c'est un premier pas et qu'il faudra réévaluer les choses. On reviendra un peu plus tard sur la réévaluation. Je passe tout de suite à la question, aux éléments qui ne sont pas définis dans la loi, qui devraient être définis dans le règlement.

Première chose, la notion de «proche». Notre organisme milite pour une notion de «proche» large, moderne. Vous vous rappellerez sans doute, puisque plusieurs d'entre vous étaient là, les discussions que vous avez eues et que nous avons eues aussi ensemble sur la notion de «conjoint» dans le cadre du projet de loi n° 133. Nous ne souhaitons pas vivre les mêmes écueils et nous souhaiterions quelque chose qui répond plus à la réalité. À l'heure actuelle, des proches, c'est parfois, quand on est une personne âgée, la voisine âgée qui vient voir tous les jours si on est en santé. Pour une personne nouvellement arrivée, c'est parfois un membre de sa communauté qui l'aide à s'intégrer. C'est parfois aussi des ex-conjoints, la famille de ces ex-conjoints. Ça prend toutes sortes de formes à l'heure actuelle. Donc, nous, vraiment on milite pour non pas une définition traditionnelle, mais une définition qui permette à ce que des personnes significatives soient reconnues comme proches. Et de toute façon tout cela sera sujet à évaluation par des thérapeutes: Est-ce que ces personnes-là sont suffisamment significatives et aideront à la réadaptation?

En ce sens-là, on ne recommande pas non plus de limiter le nombre de proches, on pense que faire une thérapie, ce n'est pas chose simple dans la vie, et qu'il n'y aura pas une filée à la porte de l'IVAC. Donc, qu'on soit souple, qu'on voie en fonction. Dans certains cas, il y aura plus de proches; dans d'autres, il n'y en aura pas. Donc, on souhaite aussi que ça aille au niveau de la souplesse.

n(16 h 30)n

Pour ce qui est du temps qui devrait être alloué, on voit beaucoup de victimes passer dans les maisons chaque année, comme on vous l'a dit. Il n'est pas aisé de fixer le nombre maximal de séances que, par exemple, une personne endeuillée va avoir besoin, ou qu'un enfant qui a vu son père agresser sa mère puis avoir peur qu'elle meure va avoir besoin, ou qu'un conjoint ou une conjointe de personne agressée sexuelle va avoir besoin. On ne le sait pas. Alors, on s'est dit: S'il faut fixer un maximum, allons à 20 séances, puisque beaucoup de spécialistes nous disent qu'en général ça permet de faire un bon travail, mais permettons une discrétion, permettons une souplesse pour s'adapter aux situations individuelles.

Et enfin la troisième partie de notre présentation va porter sur non pas les proches, mais sur les victimes directes elles-mêmes, qui sont actuellement discriminées, et ce, depuis plusieurs années. Il y a une injustice au niveau des proches, mais il y a une injustice aussi pour certaines victimes.

Déjà en 1993, on soulignait le fait que certaines victimes ne pouvaient pas se prévaloir de la loi, souvent parce que le crime qu'elles avaient subi n'existait pas au moment où la loi a été créée et parce que ça n'a pas été ajouté. Il y a des crimes graves, des crimes contre la personne évidemment, comme le harcèlement criminel, les menaces, les enlèvements d'enfant, les victimes de proxénétisme, les victimes de la traite d'êtres humains, qui ne peuvent pas avoir accès aux bénéfices de l'IVAC. Bien sûr, la traite des êtres humains, c'est une toute nouvelle infraction, mais, si on regarde la question des menaces, ça fait depuis 1985 que proférer des menaces en personne est inscrit au Code criminel. Le harcèlement criminel, ça existe depuis 1993.

Alors, on a un peu regardé la situation du harcèlement et des menaces, puisque c'est des crimes plus présents en violence conjugale, qu'on connaît mieux, pour un peu tracer le portrait et soulever un certain nombre de questions. On s'est dit: Est-ce que c'est parce que ces infractions-là sont rares et marginales qu'elles ne sont pas là?

En regardant les statistiques 2004 du ministère de la Sécurité publique, on voit qu'au Québec il y a eu au-delà de 4 500 infractions de harcèlement criminel et 15 000 de menaces, et c'est les deuxième et troisième crimes les plus rapportés à la police au Québec. Les mêmes statistiques nous apprennent que les femmes sont trois fois plus victimes de harcèlement criminel, et c'est vraiment un harcèlement qui prend des formes spécifiques au niveau des femmes. Les personnes qui vivent ça ont... plusieurs ont entre 25 et 44 ans. On verra qu'en violence conjugale c'est à tous les âges de la vie. Quand on regarde effectivement les statistiques de violence conjugale, on voit que 47 %... que le harcèlement criminel en violence conjugale représente 47 % de l'ensemble des crimes de harcèlement criminel et que, mis ensemble, en violence conjugale, le harcèlement et les menaces, c'est 30 % des plaintes qui sont faites à la police. O.K.? Comme je vous l'ai dit, en violence conjugale, on le retrouve dans toutes les tranches d'âge, ça veut dire qu'il y a des gens qui vivent ça à partir de leur adolescence, donc qui vont vivre longtemps avec des séquelles. Et on voit aussi que les auteurs, quand on regarde en violence conjugale, dans à peu près 40 % des cas, c'est soit des ex-conjoints ou soit des amis intimes. Alors, on peut penser que les femmes et les jeunes filles qui vivent ça ne s'identifieront pas comme des victimes de violence conjugale, parce qu'elles n'habitent avec lui, et elles ne demanderont pas de l'aide à nos ressources et elles risquent de rester seules avec elles-mêmes.

Le Centre canadien de la statistique juridique, lui, nous dit qu'entre ? les statistiques sont un peu vieilles, mais c'est ce qu'ils avaient de plus récent; entre ? 1996 et 1999, le nombre de plaintes rapportées au Canada aurait augmenté de 32 %. Montréal était au deuxième rang des villes où il y en avait le plus, avec, je crois, Saskatoon et Vancouver. O.K.? Donc, on voit que ce n'est pas des crimes rares ou marginaux. Alors, on s'est demandé: Est-ce que c'est parce qu'ils n'ont pas beaucoup de conséquences qu'ils ne donnent pas accès à l'IVAC?

Le Président (M. Descoteaux): Mme Riendeau, je vous interromps simplement pour conclure en deux minutes. Ça va?

Mme Riendeau (Louise): Oui. Bien, écoutez, on voit que ces crimes-là arrivent souvent, ont des conséquences importantes. Quand on parle de harcèlement criminel, là, c'est une femme, là, qui voit son ex-conjoint apparaître n'importe où, à n'importe quel moment de sa vie, qui n'a plus une minute, et souvent ça se passe près de chez elle. Donc, on voit que ça arrive souvent. On voit que ça a des conséquences graves. Pourtant, ces personnes-là n'ont pas accès à l'IVAC.

Alors, nous, ce qu'on demande aujourd'hui, c'est de profiter du fait qu'on a un projet de loi sur la table pour ajouter un autre article qui viserait à modifier l'annexe pour y inclure tous les crimes contre la personne.

Autre élément qu'on souhaite, d'autres l'ont dit, on souhaiterait qu'il y ait une évaluation au bout de deux ans de la loi et du règlement, si c'est le cas, pour qu'on puisse voir, puisqu'on est dans des domaines nouveaux, voir ce que ça donne.

Et, pour conclure, je dirais, bon, on le répète, on est contentes qu'il y ait enfin des mesures pour les proches, mais on pense que c'est aussi une occasion, sans avoir à réviser l'ensemble du fonctionnement de la loi, de modifier l'annexe. Ça nous semble assez simple.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme Riendeau. M. le ministre.

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Merci, Mme Riendeau, Mme Clément. Je vous remercie de votre présentation et puis également du travail que vous faites dans tout le cadre de réadaptation des victimes de violence conjugale. Vous avez eu l'occasion de venir en commission parlementaire d'ailleurs l'automne dernier finalement pour la modification au Code civil, et donc on vous remercie infiniment.

J'ai peut-être un premier commentaire. Je pense que les modifications qui sont proposées répondent aussi à des recommandations qui avaient été faites dans le passé par bien des groupes à partir du document de réflexion de 1997, en passant par d'autres groupes, puis aussi le rapport du comité en 2002, je pense, qui faisait état de l'importance d'apporter de l'aide psychologique aux proches, à la fois pour les proches des victimes d'homicide comme les proches de d'autres types de crimes, parce que c'est en filigrane, ça, très certainement dans les groupes et des documents de réflexion, là, qui ont été produits depuis 1993. Je pense que c'est... oui, il y a d'autres choses... Puis vous avez travaillé beaucoup aussi à faire valoir ces points-là. Alors donc, ça répond certainement en partie, pas totalement je le reconnais je l'ai reconnu dès le point de départ.

Deuxièmement, pour ce qui est de la question de l'évaluation ? je l'ai déjà indiqué tantôt, quand Mme Gaudreault a fait sa présentation ? je suis tout à fait d'accord là-dessus, et même de rajouter que dans le rapport de l'IVAC... je n'ai pas parlé à M. Ranger avant, mais je suis convaincu qu'il va avoir les statistiques, il sera possible d'indiquer justement l'application de cette loi-là en termes de nombre de proches qui ont reçu le soutien psychothérapeutique, et de voir comment ça s'inscrit dans le financement de tout ça, puis ça, c'est important pour les gens. C'est important aussi pour le ministère et pour l'IVAC, parce que, si, à un moment donné, comme il n'y a rien de mathématique là-dedans au point de départ ? on voudrait bien, mais ce n'est pas possible ? bien, si on dit: Écoutez, là, il y en a moins, par exemple, bien tu peux toujours ajuster. Je pense que... S'il y en a trop, dire: Woup... Mais ça permet de suivre l'évolution de l'application de nouvelles dispositions.

Pour ce qui est de l'ajout à l'annexe, et je vous comprends dans votre proposition, là, et vous l'avez déjà fait, il y a des crimes qui ne sont pas prévus actuellement, et vous en avez fait état. Puis, je vais vous le dire bien honnêtement... je pourrais vous dire: Oui, oui, je suis d'accord. En principe, je suis tout à fait d'accord, comprenez-vous, là, je n'ai pas d'objection à ça. Cependant, je vais vous dire que, sur le plan du calcul des coûts, actuellement... parce que, compte tenu de l'ensemble du régime, je pense qu'on aurait un problème avec ça actuellement, tu sais, de dire: On le fait tout de suite, là, si on veut que ça puisse être adopté assez rapidement. Puis je vous le dis bien honnêtement puis bien ouvertement, cependant, c'est clair que c'est un élément qui devra faire partie de la réflexion du groupe dont je vais annoncer, là, j'espère, rapidement la mise sur pied, d'ici une semaine, une semaine et demie au plus tard, avec...

Il y a toutes sortes d'autres questions dont vous parliez aussi, ou Mme Gaudreault, là, la question de la prescription aussi actuellement, c'est 12 mois. Bien, je pense que plusieurs disent: 12 mois, ce n'est pas suffisant, mais je ne peux pas arriver puis tout changer comme ça, là, je pense que ça doit faire partie de l'ensemble. Donc, c'est d'autres éléments. Comme les modalités de calcul des indemnités, actuellement, là, qui sont... finalement la personne qui gagne plus, pour ce même type de séquelle, a un montant plus élevé d'indemnité. Alors, je pense que ça fait partie de l'ensemble.

n(16 h 40)n

Sur la question de... J'aimerais vous entendre sur le nombre... Il y a une question un peu plus pointue puis une plus générale. Sur le nombre maximal de séances, là, ce n'est pas évident, je pense qu'il faudra, dans le projet de règlement, fixer un nombre de séances ? de toute façon, ça va être discuté ? ça peut être 15, ça peut être 20. Il y aura une question puis il y aura des simulations, qui vont être ouvertes aux groupes aussi, là, sur les calculs, qui vont être faites avec l'IVAC et le ministère. Dans d'autres régimes, on prévoit 15. Bon. Moi, je suis loin d'être un spécialiste de l'aide psychologique, là. Je ne sais pas... Est-ce que 15, c'est quelque chose qui a du bon sens? Bien, ce sera à déterminer, là ? vous parlez de 20 ? premièrement, là-dessus. Deuxièmement, il y a aussi... et c'est clair que je veux vous poser la question, parce que c'est un élément qui a été discuté, c'est celui de la rétroactivité. Alors, c'est quoi, votre point de vue là-dessus? C'est sûr qu'idéalement, là, on pourrait dire: Bien, c'est rétroactif pour tout le monde. Bien honnêtement, je vais dire: Financièrement, ça ne rentrera pas dans le montant qui est disponible. Bon, c'est clair. Alors, est-ce qu'on peut le faire pour un groupe en particulier? Est-ce qu'on peut le limiter? J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Riendeau (Louise): Bien, Écoutez, un peu comme le disait Arlène tantôt, c'est sûr que, dans un monde idéal, ce serait bien intéressant qu'on puisse retourner en arrière, et, si c'est possible de le faire, écoutez, tout le monde va être content. Mais ça soulève un certain nombre de questions. Comment peut-on dire que telle victime a un plus grand traumatisme qu'une autre victime et que celle-là pourrait y avoir droit parce qu'elle dans une catégorie particulière, et l'autre pas? Est-ce qu'en le faisant pour une catégorie seulement on crée une nouvelle discrimination? Tu sais, en tout cas, je trouve que c'est une question qui n'est pas facile. Est-ce qu'on a les moyens de faire ça pour une certaine catégorie et qu'on n'a pas les moyens de soutenir des victimes directes? Ça soulève, à notre sens, un certain nombre de questions.

Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre.

M. Marcoux: En ce qui touche l'aspect du nombre de séances, puis tout ça, est-ce que vous avez... Parce que vous travaillez beaucoup, là, dans le domaine de la violence conjugale, est-ce qu'il y a des expériences qui vous indiquent qu'une moyenne maximale de 15... ou que ce serait nécessaire d'aller plus, quand vous regardez, là, de façon générale, en moyenne, parce que vous êtes impliqués dans le domaine?

Mme Riendeau (Louise): Nous, on intervient beaucoup en situation de crise, alors cette expérience-là n'est pas la même que quand on regarde une intervention en post-traumatique. C'est sûr qu'on fait de l'intervention externe avec des femmes. Dans certains cas, ça va être six mois, dans d'autres cas, ça va être un an. On a parlé de 20 semaines, dans le mémoire, en se disant: Un certain nombre de spécialistes nous disent ? pas de 20 semaines mais de séances, pardon ? qu'on peut faire un bon bout. Une des solutions, c'est aussi que le ministère.. On a, au Québec, des spécialistes de l'intervention en post-traumatique au niveau des actes criminels, bien on peut aussi, je pense, se tourner vers ces gens-là pour avoir une indication.

M. Marcoux: Est-ce que, pour la personne, parce que ce qu'on prévoit, là, pour les proches des victimes d'actes criminels autres que l'homicide, ce qui est prévu, c'est la personne, bon, utile, ou la plus significative, là. En tout cas, ce sera à déterminer. Nous avions discuté, quand vous étiez venus, l'automne dernier, de la délimitation de la notion de «proche» aussi, parce qu'on parlait du conjoint, etc. Remarquez que, moi, quand vous mentionniez, tantôt, qu'il y a personnes pour qui peut-être une personne plus âgée, par exemple, peut-être que les enfants ne les voient pas, ou ils ne sont pas là, etc., c'est peut-être quelqu'un qui est avec elle, là, qui peut être la personne la plus significative, puis ça, je suis très sensible à ça. Est-ce que ça peut avoir un impact dans d'autres régimes que vous connaissez, au gouvernement? Parce que, lorsqu'on arrive avec des nouvelles notions, vous savez, la question qui se pose, là, bien, on va dire: Écoutez, oui, ça a bien du bon sens, là, mais ça peut-u avoir un impact pour d'autres régimes, puis éventuellement on va être obligés d'ouvrir aussi dans d'autres régimes, si on accepte cette notion-là dans le cas qu'on présente? Alors?

Mme Riendeau Louise: J'avoue qu'on ne s'est pas posé cette question-là comme ça. dans la mesure où on était invités à définir la notion de «proche», on s'est dit: Qu'est-ce qui répondrait vraiment aux besoins des victimes qui vivent vraiment une réalité particulière, qui ont besoin de soutien? Donc, on est allés dans ce sens-là, et on souhaitait, comme on l'a dit, vraiment être capables de répondre aux besoins de l'ensemble des victimes, donc c'est pour ça qu'on a proposé un interprétation assez large. Mais, ceci dit, ce n'est pas la personne qui va se déterminer comme proche qui va dire: J'y ai droit. Il y aura tout le filtre du thérapeute probablement qui suivra la victime qui dira: Écoutez, moi, je vois que ça n'avance pas, si elle avait davantage de soutien de telle personne... Il y aura une évaluation qui va être faite à ce niveau-là. Alors, pour nous, ça nous semblait une balise utile, là, qui permettrait de vraiment viser les bonnes personnes. Et, pour ce qui est de l'impact sur d'autres régimes, on ne l'a pas estimé.

Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre, question-réponse, deux minutes.

M. Marcoux: Oui. Merci. Dernière. Pour ce qui est de l'évaluation, je suis tout à fait d'accord; l'autre volet également. Bon. On prévoit que c'est par projet de règlement qu'on définirait «les proches», cette approche-là, parce qu'elle nous apparaît plus souple tout en étant quand même encadrée. Je pense qu'on ne peut pas changer le règlement n'importe comment. Et surtout si on dit: Bien, le règlement devra être examiné par une commission parlementaire de toute façon avant d'être mis en vigueur. Je pense que ça permet de pouvoir déterminer quand même avec une certaine rigueur ce qui est contenu dans le règlement. Et je comprends... Puis ça peut être aussi, à un moment donné, une des choses qui vont évoluer, peut-être rapidement d'ailleurs, peut-être qu'après un an, avec l'IVAC... dire, à un moment donné: Écoutez, on peut ouvrir un peu plus, puis je pense que l'application peut être un peu différente. Donc, vous seriez d'accord avec un règlement?

Mme Riendeau (Louise): Oui, bien on était d'accord avec l'idée du règlement pour sa souplesse. Mais, comme on l'a dit, on souhaitait que et la loi et le règlement soient évalués au bout de deux ans et que ça revienne devant l'Assemblée nationale.

M. Marcoux: D'accord. Merci.

Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Merci, merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, mesdames, de votre présentation. Je veux revenir sur un des aspects de votre mémoire. Sur les personnes significatives, je trouve ça intéressant. Là, j'ai vu, il y a deux... Vous avez deux propositions. Vous mentionnez, dans la notion de «proche», ce qu'on retrouve en France. Alors, il y a une loi, en France, un droit pour des proches des victimes. Est-ce que c'est un régime d'indemnisation, ça?

Mme Riendeau (Louise): Oui.

M. Bédard: O.K. Et là il est prévu... on dit, c'est-à-dire une personne, lien de parenté ou d'alliance. C'est ça? Descendant, ascendant, collatéral ou allié. Mais, ces éléments-là... O.K. Mais il y a un «ou» aussi au projet de loi. Là, je lisais... et le «ou» avec... donc qui a un lien significatif. Je vous dirais que la notion de personne... de lien significatif n'est pas nouvelle. C'est pour ça que j'ai tendance à être très sympathique. Pourquoi on vient d'ailleurs juste de l'adopter? C'est ma collègue d'ailleurs qui vient de me le dire. Elle était sur le projet de loi sur la DPJ, et on y inclut le critère de «personne significative». Alors, en plus d'avoir une bonne idée, malheureusement, la bonne nouvelle, c'est que ce n'est pas un précédent...

Une voix: ...

M. Bédard: ...la mauvaise nouvelle, c'est ça, ce n'est pas un précédent. La bonne, c'est que... Alors, on pourrait effectivement le faire, parce que... Donc, la raison ne tient plus. Alors, ça a pour effet de l'agrandir. On n'aura pas de surprise quant à l'interprétation. On l'a fait dans un autre cas. Je suis convaincu que le ministre de la Santé aussi souhaitait non plus ne pas créer trop de précédents à ce niveau. Alors, je vous remercie de la proposition. Et ça rejoint d'ailleurs beaucoup des commentaires que nous avons eus.

Permettez-moi simplement de revenir sur... Vous avez vu, j'ai questionné avant vous Mme Gaudreault ici sur, moi, ce que j'appelle l'application immédiate de la loi, les victimes. Moi, de plus en plus, il y a quelque chose d'assez étonnant de constater que... et là on ne peut pas catégoriser le malheur. C'est ça qui est malheureux là-dedans. La douleur humaine... On ne peut pas créer des cases. Par contre, il y a quelque chose d'assez particulier de constater que quelqu'un qui est le parent d'une victime assassinée, elle, l'État ? et là je regardais le témoignage de M. Boisvenu, lui, il ne reçoit que le chèque pour les frais funéraires, et l'autre lettre, dont je ne me souviens même plus d'ailleurs, est résumé à deux timbres ? ....donc zéro intervention. Pour les victimes ? vous me direz: les proches, c'est une autre chose ? mais, pour les victimes vivantes, elles, elles ont un soutien.

n(16 h 50)n

Alors là il y a une catégorie mais en même temps qui est... Ce qui est particulier, c'est de voir que c'est plus payant pour l'État d'avoir des gens qui ont été tués et assassinés. Alors là, tout de suite, un moment, ça nous réveille. Alors, moi, je dis, le côté positif, c'est quoi, le positif? C'est aller vers le soutien vers ces victimes. Le côté négatif, c'est de le retirer. Quand vous me dites: On sait qu'on va créer deux catégories de victimes. On s'entend. À partir du moment où on crée une date artificielle, il y aura à un moment donné des gens dont la personne donc a été assassinée avant telle date, et ceux après, mais qui sont encore victimes, on s'entend. Ces gens-là, dans ma conception des choses, on ne peut pas être plus victime que lorsqu'on perd quelqu'un. Ça, c'est l'ultime victimisation qu'on peut avoir, là, c'est...

Alors, déjà, on a un problème. Là, on dit: Est-ce qu'on peut au moins permettre à ces gens-là au moins d'avoir droit à des services? Au moins... le mieux... et là, si on va plus loin, c'est de l'ouvrir à tout le monde, et pour tout le temps. Est-ce que vous ne pensez pas qu'on devrait tendre vers le mieux et non de maintenir cette situation-là? Autrement dit, au moins de le concéder à ces gens-là et regarder pour l'avenir, dans le cadre d'une réforme globale, si effectivement on doit, et là pour tout le temps, l'étendre aux proches, mais pour tout le monde. Est-ce qu'on tendrait vers le mieux à ce moment-là?

Mme Riendeau (Louise): Bien, écoutez, le mieux, moi, je dirais, c'est si on pouvait l'étendre à tout le monde.

M. Bédard: Ça, c'est le meilleur, disons, le meilleur, oui.

Mme Riendeau (Louise): Si on ne peut pas, bon, il y a des arbitrages à faire, jusqu'où on recule. En tout cas, ça soulève un certain nombre de questions, mais c'est sûr que la meilleure solution serait de permettre à toutes les personnes qui ont vécu un traumatisme, parce qu'ils sont des proches de victimes... Et ce n'est pas pour rien que ça fait des années qu'on dit qu'il faut s'en occuper, là, mais en tout cas. Où trancher, c'est difficile.

M. Bédard: Sur... je lisais et... ceux qui ont accès aux services, et là je veux que ma collègue... combien de temps me reste-t-il?

Le Président (M. Descoteaux): Huit minutes.

M. Bédard: Encore un peu. Je fais attention, ma collègue, je veux lui permettre de poser des questions. À la page 5 de votre mémoire... et là je veux bien comprendre votre argument. Ce que vous... où vous vous interrogez, c'est, bon: Nous aurions souhaité que la réadaptation psychothérapeutique des proches, prévue au nouvel article 5.1, ne soit pas conditionnelle au fait qu'elle contribue à la réadaptation de la victime du crime. Et là je relisais encore l'article, et là pour... je veux bien saisir votre interprétation pour, après ça, voir comment on peut l'améliorer. Mais je veux être sûr, parce que ce que vous souhaitez, là, j'ai regardé par après, ce que vous souhaitez, évidemment, il y a des gens qu'on peut assimiler presque à des victimes, et là, quel serait l'effet de cet article dans sa rédaction actuelle? Qui ça exclut, qui ça inclut?

Mme Riendeau (Louise): Bien, par exemple, prenons toujours l'exemple des enfants exposés à la violence conjugale. Comme on l'a expliqué, ces enfants-là vivent des conséquences très lourdes de ce qu'ils ont vécu. Admettons que, par bonheur, leur mère, qui a elle-même été violentée, soit assez résiliente et s'en tire pas trop mal; bien, si on ne fait pas la preuve qu'il sera utile à leur mère que ces enfants-là aient du soutien, il n'en n'auront pas. C'est ce que ça veut dire. Bon, on était prêtes à faire à faire un compromis pour l'amendement là-dessus, mais c'est ce que ça veut dire.

M. Bédard: Mais comment on pourrait le... pour éviter cela, est-ce que vous avez regardé les possibilités, enlever le mot... même pas utile, ça ne serait pas...

Mme Riendeau (Louise): Pour éviter ça, il faudrait qu'au fond, comme dans l'autre catégorie, les gens qui ont subi un préjudice aient accès. Mais là on parle de beaucoup de monde, et on est conscientes qu'avec les restrictions budgétaires dont on nous parle...

M. Bédard: Mais comment on peut l'ouvrir sans créer... de donner, là, entre guillemets, cette souplesse-là, parce que là, c'est le cadre. Le règlement, il ne pourra pas modifier ça, le règlement, là. On s'entend, là. Comment on peut, dans la loi actuelle, permettre finalement cette souplesse-là que pourraient apporter des...

Mme Riendeau (Louise): On ne s'est pas penchées sur un libellé particulier. Pour ce qui est des enfants, parce que c'est... mais ça ne couvre pas l'ensemble des proches, on en est bien conscientes. Nous, on se disait: De toute façon, les enfants exposés à la violence, ça devrait être compris dans les gens qui, en raison de l'annexe, ont accès, mais, pour l'ensemble des proches, là, je n'ai pas de proposition de libellé spécifique à vous faire.

Le Président (M. Descoteaux): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme Riendeau. Félicitations à Mme Clément, comme nouvelle présidente du regroupement.

Bien, je pense qu'avec... je relis la dernière question mon collègue, mais je pense qu'avec la signification qu'on a mise à la Loi de la protection de la jeunesse on a identifié directement dans la loi, et non dans le règlement... on a parlé des parents, des grands-parents, on a parlé de la famille élargie et de toute personne significative pour l'enfant. Alors, si on le met même dans la loi, on n'a même pas besoin de le mettre dans le règlement, la signification, puis qu'on l'indique un peu, comme celle que vous proposez, mais peut-être en la copiant plus au niveau de celle qu'on a eue dans la Loi de la protection de la jeunesse... De toute façon, Me Turmel était là, donc, elle est sur ce projet de loi ci aussi, on devrait être capable d'avoir la même formulation, je pense qu'on pourrait à ce moment-là couvrir les enfants aussi, parce qu'ils font partie de la famille élargie et ils sont des personnes significatives pour la victime. Alors, moi, je pense que ce serait une voie pour couvrir les enfants.

Du côté de votre suggestion au niveau des séances, je pense que votre suggestion de se référer aux spécialistes serait peut-être effectivement la meilleure solution, ce seraient les personnes qui seraient le plus aptes à nous donner la réponse.

Et là je veux toucher aux victimes qui sont discriminées. Et ça m'apparaît effectivement extrêmement important. On a eu le débat longtemps, je pense, pour toutes les victimes de proxénétisme. On l'a eu souvent, le débat. Et, moi, je pense que ce sont effectivement des victimes, et, qu'elles ne soient pas considérées comme des victimes, c'est véritablement une discrimination. Et toute la question de la traite des êtres humains, suite à la charte mondiale des femmes, on en a parlé, le comité est sur place, et j'ai vu ? et ma question va être là-dessus, j'ai vu ? que dans votre document, à la fin, vous n'avez pas eu la chance de vous rendre jusque-là, mais le comité a quelques propositions au niveau de l'État, si j'ai bien vu, en conclusion de votre mémoire: «En 2003, dans le cadre de l'examen périodique du rapport du Canada, les membres du comité d'experts de la Convention sur l'élimination de toutes les discriminations à l'égard des femmes [avaient formulé] [...] les remarques et les recommandations...» Là, vous avez nommé quatre articles qui venaient toucher effectivement davantage toute la question de la traite des être humains.

Est-ce qu'on doit les mettre vraiment au niveau de l'annexe? Puis, je pense que la question que mon collègue se posait aussi par rapport à ça: au niveau des nouvelles personnes que vous suggérez, au niveau des victimes, des nouvelles victimes discriminées, est-ce que vous faites une différence entre l'aide, le soutien psychologique qu'on leur apporterait et l'indemnisation?

Mme Riendeau (Louise): C'est des victimes, et, moi, je pense que, au même titre qu'une victime de voie de faits, une victime de quelque crime contre la personne que ce soit, et si on reprend l'exemple qu'on a utilisé, le harcèlement criminel, qui a des conséquences tellement importantes, on peut penser que ces gens-là ont une incapacité temporaire ou permanente, donc peuvent avoir besoin d'indemnisation. On peut certainement penser que ces femmes-là, parce que c'est souvent des femmes, ont besoin de mesures de réinsertion. Donc, quand on parle de victimes, pour nous, c'est au même titre que les autres qui sont reconnues dans l'annexe, et c'est l'ensemble des bénéfices de la loi.

Mme Caron: Je pense que, Mme Riendeau, vous venez d'apporter une précision importante à l'effet qu'effectivement l'indemnisation n'est pas nécessairement permanente. Elle n'est pas nécessairement permanente. Elle peut être une indemnisation temporaire. Et donc, à ce chapitre-là... Parce qu'en fait ce sont véritablement des victimes.

Mme Riendeau (Louise): Oui, c'est des victimes directes.

Mme Caron: C'est réellement des victimes. Et ce n'est pas vrai de penser que c'est des victimes qui seraient indemnisées en permanence.

Mme Riendeau (Louise): Pas plus que d'autres.

Mme Caron: Pas plus que les autres.

Mme Riendeau (Louise): Certaines peuvent l'être, mais, de façon générale, avec des mesures de soutien, les victimes recouvrent la santé et peuvent reprendre une vie plus active.

Le Président (M. Descoteaux): Mme la députée de Terrebonne, une minute.

Mme Caron: Oui. Merci, M. le Président. Au niveau de vos informations, est-ce qu'on a... Vous avez donné des statistiques au niveau du harcèlement criminel et des menaces, est-ce que vous avez des données au niveau de la traite des êtres humains ou au niveau du proxénétisme?

Mme Riendeau (Louise): Dans les délais qui nous ont été impartis, je n'ai pas pu faire la recherche là-dessus, donc je suis allée vers ce que je connaissais le mieux. Bon, au niveau de la traite, on sait que c'est une infraction depuis l'automne. Donc, ça doit être encore assez difficile d'estimer le nombre de victimes, et, non, je...

Le Président (M. Descoteaux): Merci bien, Mme Clément, Mme Riendeau.

Nous allons suspendre le temps pour le Regroupement des CALACS... de bien vouloir prendre place.

(Suspension de la séance à 17 heures)

 

(Reprise à 17 h 2)

Le Président (M. Descoteaux): Donc, nous reprenons nos travaux. La Commission des institutions reçoit le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, les CALACS. Donc, bienvenue devant la commission, Mme Carole Tremblay, Mme Anny Roy. Vous avez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire.

Regroupement québécois des centres d'aide et
de lutte contre les agressions à caractère sexuel
(Regroupement québécois des CALACS)

Mme Tremblay (Carole): Bonjour, M. le Président, bonjour à tout le monde. Merci de l'invitation. Même si les délais étaient courts... On était en congrès pendant quatre jours la semaine dernière, et on n'a pas pu déposer de notes écrites, ce qu'on fera ultérieurement. On est désolées, parce qu'on sait que ça aide des fois, hein, de...

Anny est avec moi. Elle est intervenante dans le réseau des CALACS depuis bon nombre d'années, mais intervenante générale depuis à peu près 13 ans. Et je suis permanente au Regroupement des CALACS.

La présentation qu'on va faire est en trois blocs. On va être assez succinctes. Vous allez voir, il y a nécessairement du recoupage avec des choses qui ont été dites déjà, mais, comme vous êtes déjà bien, bien enlignés, ça va être moins difficile de compréhension.

Alors, dans un premier bloc, Anny va vous présenter notre réseau et les activités que l'on fait auprès des proches et en lien avec l'IVAC. Pour ma part, je vais vous présenter un commentaire général et des commentaires spécifiques sur probablement ce sur quoi vous avez des attentes, c'est-à-dire la définition de «proche», la condition d'admissibilité du proche et le type d'aide qu'on lui offre.

Donc, je vais céder la parole à Anny pour le premier bout.

Mme Roy (Anny): Alors, M. le Président, M. le ministre, MM. Mmes les députés, le Centre d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel est un organisme communautaire. Le premier CALACS fut fondé en 1975, et le Regroupement québécois des CALACS, lui, fut fondé en 1979. Cette association a permis de rompre l'isolement de certains CALACS dans les régions. Parce qu'il y a environ une trentaine de CALACS au Québec, ce qui nous permet une expertise en agressions sexuelles depuis plus de 30 ans.

Nos services sont gratuits, sont confidentiels, et nous avons trois volets dans tous les CALACS. Il y a d'abord le volet d'aide pour les victimes d'agressions sexuelles, qui est un volet d'aide individuelle et de groupe. Il y a aussi de la prévention et de la sensibilisation auprès de la population et il y a de la défense de droits.

Les centres offrent de l'aide aux femmes, aux adolescentes et un soutien aux proches. Ce sont, comme je vous ai dit tout à l'heure, de l'aide individuelle et de groupe.

Je vais vous donner un exemple de ce que je peux voir dans ma pratique, ce qui va vous donner une idée de notre travail dans les CALACS. Alors, il y a à peine quelques semaines, mais comme assez régulièrement dans les centres, j'ai reçu une adolescente qui a été victime d'une agression sexuelle par les drogues du viol. Et cette adolescente-là a amené sa mère avec elle dans une séance ? parce qu'on peut amener les proches en même temps dans le bureau, toutes les deux. Alors, je reçois la mère et l'adolescente, et l'adolescente a presque peu de place pour parler tellement la mère a besoin de parler. Et là je la sens émotive, triste, en colère; ce sont des parents qui se sentent très impuissants, qui ont besoin, qui ont besoin de soutien, qui ont besoin de soutien à long terme. Alors, souvent les conséquences chez ces mères-là, chez ces parents-là, ressemblent aux victimes. C'est: difficulté à dormir, difficulté à manger, difficulté de s'occuper des autres enfants, parce que souvent on n'est pas mère juste d'un enfant, et difficulté à une vie normale comme le retour au travail. Alors, ce que je peux offrir, c'est l'IVAC à l'adolescente mais pas à la mère, et je peux aider la victime à remplir le formulaire IVAC et à remplir sur les conséquences des agressions, pour la bonne continuité du dossier.

Le CALACS offre la relation d'aide pour l'ado, alors il y a une intervenante pour l'ado, mais ça prend aussi une autre intervenante pour la mère. Alors, on prend du temps pour la mère, on offre un soutien de quelques séances, mais les CALACS ne reçoivent pas de financement pour l'aide aux proches. Donc, c'est une réforme où on est contentes parce que c'est un pas vers l'avant, c'est une réforme qu'on trouve timide. Nous aurions souhaité que le projet aille plus loin. Alors, je vais laisser ma collègue poursuivre.

Mme Tremblay (Carole): Oui. Alors, le pas qui a été franchi, le plus important dans le projet de loi n° 25, plusieurs vous l'ont dit avant, c'est l'aide aux proches, qu'on revendique. Je pense que ça n'a peut-être pas été dit, là, tout à l'heure par les intervenants de l'AFPAD, mais le Regroupement des CALACS et les autres regroupements revendiquent l'aide aux proches depuis de nombreuses années, et on avait signé conjointement un mémoire avec les autres regroupements, les autres organismes qui revendiquaient ça depuis très longtemps.

La liste que je pourrais vous faire sur qu'est-ce que devrait comprendre une réforme complète de l'IVAC pourrait être très longue, et je vais pas la faire aujourd'hui, parce que je suis contente d'avoir entendu par M. le ministre et par d'autres que là il va y avoir un comité de travail pour en parler plus amplement. Cependant, je voudrais quand même, moi aussi, insister... c'est drôle, parce que Louise tantôt a terminé avec ce point-là, mais, moi, je commence avec ça, sur la nécessité d'ouvrir l'annexe pour... L'annexe, pour ceux qui sont moins familiers avec la loi, c'est celle qui nomme les actes susceptibles d'être indemnisés, les actes subis susceptibles d'être indemnisés, et c'est vraiment nécessaire de mettre cette annexe-là à jour.

Oui, sur la question du proxénétisme... Je vais parler plus, là, des choses qui sont en lien peut-être avec la violence sexuelle, mais les victimes du proxénétisme et aussi les victimes d'exploitation sexuelle, hein? Le Code criminel a été amendé au début de 2006 pour comprendre, là, les types de crimes modernes, disons, à l'exploitation sexuelle sur Internet, des personnes qui se font filmer à leur insu, là, en train d'avoir des rapports sexuels. Toutes ces nouvelles mesures là en exploitation sexuelle, ce n'est pas couvert actuellement dans l'annexe, ce serait important que ça le soit, comme la traite, etc. Donc, je n'insiste pas plus longtemps là-dessus. Mais donc, victimes d'exploitation sexuelle, proxénétisme, trafic, menaces et harcèlement sexuel. Les commentaires spécifiques que je vais faire vont porter sur l'article 2 du projet de loi, c'est-à-dire sur les éléments que le gouvernement peut définir par règlement et ceux qu'il définit déjà dans l'article 2.

Alors, 3.1: Définition de «proche». L'évidence, bien sûr, c'est d'inclure les personnes apparentées, les conjoints, mais il y a lieu également d'inclure ce que, nous, on a nommé les personnes qui tiennent lieu de père, de mère, de frère, de soeur. On sait que, quand une personne vit un placement ? on voit beaucoup ça en matière d'agressions à caractère sexuel; quand une personne vit un placement ? la personne n'est pas nécessairement adoptée, mais les personnes avec qui cette personne-là est placée en famille d'accueil, souvent c'est les personnes qui tiennent lieu de père, de mère et de famille immédiate, donc d'inclure les personnes qui tiennent lieu et inclure aussi les conjoints non déclarés et autres personnes significatives au plan affectif. Je pense qu'on l'a abordé tout à l'heure avec la notion qui a été ajoutée dans la loi sur la direction de la protection de la jeunesse.

Alors, ici, donc généralement le règlement devrait prévoir une définition large ainsi qu'une ouverture permettant d'évaluer au cas par cas la situation des personnes qui souhaitent se qualifier comme proches. Louise tantôt faisait référence à l'intervention d'un psychothérapeute à cette étape-là, ce que je trouve tout à fait pertinent.

n(17 h 10)n

Il y aurait également lieu de mettre en place un mécanisme de révision pour les personnes à qui l'on va refuser la qualité de proche. Tout à l'heure, je sais qu'il y a eu une question: Est-ce qu'il existe des mécanismes de révision de l'IVAC? Si ma mémoire est bonne, je pense qu'antérieurement il y avait le bureau de révision, mais cette étape-là a été un peu mise de côté ? maintenant, la révision administrative se fait directement à l'IVAC ? et il y a possibilité d'appeler aussi au TAQ sur certains éléments, d'en appeler, de certaines décisions, au Tribunal administratif du Québec. Et je me demande si ce n'est pas la procédure qui devrait être la bonne, là, pour une personne qui se verrait refuser la qualification de proche, si ça ne devrait pas être, là, une mesure qui soit comprise que celle d'autoriser la révision de cette décision-là.

3.2: Les conditions d'admissibilité du proche. En prévoyant qu'un proche ne recevra de l'aide psychothérapeutique que si cette aide est utile à la réadaptation de la victime ? ce qui est prévu, là, à votre projet de loi, l'article 2 ? ça impose une condition. Or, comme c'est souvent le cas pour les conditions d'admissibilité, on craint que celle-ci sera interprétée restrictivement et que l'exclusion des proches deviendra la norme. Pour éviter que ceux-ci, donc les proches, soient considérés comme admissibles... Pour éviter que les proches soient considérés comme inadmissibles ou... non, admissibles seulement de manière... exceptionnellement, on favorise plutôt que cette condition-là soit levée de l'article 2. On serait plus en faveur d'une approche inclusive, même si celle-ci implique que le proche qui requiert de l'aide soit évalué pour se qualifier.

Le type d'aide offert aux victimes. La personne proche qui va se qualifier et qui va devenir admissible à l'IVAC devrait... On dit qu'elle va avoir droit à de l'aide psychothérapeutique, mais elle devrait aussi avoir, nous croyons, des compensations aussi financières pour les frais qu'elle va engager en faveur de sa propre réadaptation et en faveur aussi de la réadaptation de son proche, hein, de la victime, là, qui est son proche. On entend les frais de déplacement, des fois les frais d'hébergement, et tout ça... Ça se peut qu'une... Je ne sais pas, une agression sexuelle survient à Saguenay. La jeune qui a été agressée à Saguenay est maintenant rendue à... elle étudie à Montréal, et sa mère reste à Trois-Rivières, bien ça se peut que, pour rendre tout ça... pour rendre l'indemnisation du proche utile à la victime, ça se peut qu'il y ait d'autres types de frais, hein, qui soient engagés que ceux de l'aide psychothérapeutique, là, pour le proche.

Le nombre de séances. Je n'étais pas du comité de travail qui s'est penché sur la question. Je sais que tout à l'heure, s'il y a des questions, peut-être Anny pourra ajouter des éléments, mais, nous, on le fixait aussi à 20 séances, en laissant une porte permettant d'octroyer un peu plus en cas de besoin.

Je veux juste vous dire que, dans ce domaine-là, il faut, comme dans plusieurs autres, présumer de la bonne foi des personnes et que les proches, les victimes et les thérapeutes, là, n'abuseront pas du système comme tel pour demander plus que nécessaire. Je pense que ce n'est pas l'objectif de personne, ni d'un proche ni d'une victime, de demander à outrepasser en regard des besoins qu'elle n'aurait pas.

Je vais arrêter en vous disant que nous souhaiterions aussi, comme on l'avait fait ? vous vous souviendrez, M. le ministre, et d'autres personnes présentes ici ? comme on l'a fait pour le projet de loi n° 133, sur le bail, qu'une évaluation soit faite dans une période n'excédant pas deux ans de l'entrée en vigueur de ce projet de loi là. Alors, je vais laisser place aux questions. Je pense que ça complétait pour notre part, à moins qu'Anny aurait des choses, mais...

Le Président (M. Descoteaux): Ça va? Merci, mesdames. M. le ministre.

M. Marcoux: Alors, merci, Mme Tremblay, et merci, Mme Roy, et merci d'être là. Je sais que vous étiez très, très occupées au cours des dernières semaines, vous aviez beaucoup d'activités dans votre regroupement. Alors, vous êtes d'autant plus méritoires que d'être ici aujourd'hui. Ça démontre, je pense, votre intérêt, là, pour tout ce qui touche les victimes d'actes criminels.

Simplement, peut-être, suite aux discussions de tout à l'heure avec Mme Riendeau... et M. Ranger, de l'IVAC, qui est ici, me mentionnait qu'il accepte... Et d'ailleurs, selon la Loi sur l'indemnisation, actuellement, là ? puis il pourra plus tard préciser ? «victime à l'occasion de», «enfant exposé à la violence familiale» est admissible aux bénéfices de la loi et de nombreux dossiers de ce type acceptés par l'IVAC... Donc, il faut que l'enfant soit cependant témoin de l'événement subi par son parent. En tout cas, je vous lis, là, ce qu'il m'a préparé, donc je pense que c'est fidèle.

Et, deuxièmement, pour ce qui est des cas de décès, si la victime décédée avait des personnes à charge ? conjoint et enfants ? des rentes leur sont versées. Je ne peux pas vous dire combien, là, mais les enfants jusqu'à 18 ans, ou jusqu'à 25 si étudiants, conjoint, durée à vie sauf si remariage ou cohabitation, alors il y a déjà... donc, en tout cas, pour les enfants, je voulais le préciser, parce que ça ne couvre peut-être pas tout, là, mais déjà il y en a une certaine partie qui sont couverts, et il y a des indemnités de décès aussi dans le cas de personnes à charge.

Donc, pour ce qui est de l'évaluation, on l'a traitée, là, je ne reviendrai pas là-dessus, je pense que je vous ai indiqué ce que nous voulions faire. Je serais intéressé, par exemple, parce que je pense que, Mme Roy, vous êtes intervenante, donc vous avez l'expérience, là, lorsqu'on parle du nombre de séances, et tout ça, est-ce que... c'est quoi, la moyenne? Parce qu'il doit se dégager une moyenne en quelque part. Et, deuxièmement, ou peut-être Mme Tremblay, et je réfère à Mme Gaudreault aussi, qui parlait de la responsabilisation avec d'autres groupes ? il y a l'IVAC, mais il y a aussi d'autres groupes, et on doit... alors, bon, les CALACS sont dans le milieu: Est-ce qu'il y a des liens aussi avec les CALACS, qui sont aussi dans le territoire... maintenant dans toutes les régions du Québec, est-ce qu'il y a des relations qui se font, que vous pouvez travailler en coordination aussi pour soutenir les victimes?

Le Président (M. Descoteaux): Mme Roy.

Mme Roy (Anny): Oui. M. le ministre, alors, évidemment que, dans le meilleur des mondes, ce serait merveilleux de mettre un chiffre là-dessus. Ce qui est très important, c'est de voir que les agressions... là, je vais y aller dans agressions sexuelles, ça ne peut pas être de la thérapie à court terme. Quand on dit «thérapie à court terme», c'est, si on prend les CLSC, si on prend les services qui offrent quatre, cinq, six, qui peuvent aller jusqu'à 10 séances, nous, ce dont on s'aperçoit, c'est que ça fait une petite partie du ménage; après, il y a quelque chose qui va revenir, puis ces personnes-là devront de nouveau redemander des services.

La plupart des CALACS reçoivent beaucoup de victimes d'agressions sexuelles qui ont vécu l'inceste. Dans l'inceste, les familles... il y a une partie de la famille qui est de ton côté puis il y a une partie de la famille qui n'est pas de ton côté. Donc, la partie qui est de ton côté, c'est les victimes qui sont proches qui auront besoin d'aide. Ça veut dire qu'il y a un éclatement de la famille. Si on parle de la période des fêtes, si on parle du... il n'y a plus... la famille n'existe plus. Donc, il y a au moins une grosse année d'adaptation, parce que, si on arrive à la première année de Noël, et de la fête familiale, et de l'année de mariage du couple, bien toutes ces choses-là reviennent, et c'est un temps fou en séances thérapeutiques parce que c'est ce qui prend toute la place. Donc, au moins une année, il y a quelque chose qu'on peut aller vérifier pour solidifier tout ça au niveau de la famille puis des liens familiaux autour, c'est ce que je pourrais ajouter.

Là, j'ai pris l'exemple d'une agression sexuelle qui était au niveau de l'inceste, mais, si on prend ce que je vous ai nommé tantôt en exemple d'agression sexuelle récente, si c'est par rapport à la drogue du viol puis qu'on n'a aucun souvenir de ce qui s'est passé ? parce qu'une des graves conséquences, c'est le non-souvenir ? on est aussi dans quelque chose de vide, et ça, ça prend du temps pour recoller les morceaux, puis que les gens autour de nous... Parce que la plus grande demande de la victime, c'est d'être crue. Alors, les séances permettent d'arriver à ce soutien-là familial autour.

Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre.

M. Marcoux: Bien, je pense que c'est Mme Tremblay...

Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Carole): Bien, c'était sur la question des CAVAC. Alors, c'était là-dessus que vous vouliez m'entendre?

M. Marcoux: Les autres groupes, les CLSC, et tout ça, oui.

n(17 h 20)n

Mme Tremblay (Carole): O.K. Bien, il y a déjà des collaborations étroites entre les organismes qui interviennent auprès des victimes, sur des tables de concertation régionales, où on essaie d'arrimer les services entre les groupes de base qui sont présents en région. Il y a des gros efforts qui sont faits dans ce sens-là, et ça fait souvent apparaître aussi des iniquités. Parce que je... vous le savez, M. le ministre, je ne vais pas... je serais hors d'ordre d'insister beaucoup là-dessus, mais, tout à l'heure, Anny faisait référence au fait que l'aide qu'on offre aux proches en fait n'est pas prévue dans le budget qu'on reçoit. Et aussi tout notre volet d'accompagnement judiciaire, on ne reçoit pas de financement pour ça. Donc, oui, il y a des collaborations étroites qui se font en région sur les tables de concertation, puis quelquefois ça fait apparaître des iniquités.

Mais je trouve ça intéressant, votre question, parce que ça me permet de revenir sur la question de la rétroaction. Est-ce que... Parce que j'ai beaucoup de difficultés à saisir la spécificité de la nécessité... du discours de l'Association des familles des personnes assassinées et disparues en regard de ça. Alors, ce qui ressort beaucoup, c'est, en termes d'élément de critique, c'est, écoutez, ce pour quoi on demande la rétroaction, c'est que, nous, on ne reçoit pas d'aide, et par ailleurs ce qui est dit, c'est... En fait, on en reçoit un peu parce que le mandat des CAVAC a été élargi pour nous en donner parce qu'on n'en recevait pas ailleurs. Mais on ne reçoit que quatre heures, ce qui permet de simplement soulever la gale et de gratter le bobo, ce n'est pas suffisant. Alors, vous m'ouvrez la porte sur la question des CAVAC, et je me demandais si, en termes de solution, ce ne serait pas là plutôt que se trouverait la solution de cette demande-là qui est tellement importante. Et je ne veux pas nier l'importance de ce que vivent les familles des personnes assassinées et disparues, mais en même temps je comprends de leur demande qu'il y a beaucoup de... il faut faire la lecture que c'est beaucoup en termes avec... ils n'ont pas de ressources d'aide. C'est vrai, nous, on en fait, mais on ne le dit pas. On ne le dit pas, parce qu'on n'arrive plus, vraiment plus. Mais, c'est vrai, mettons que je pense à des familles de personnes assassinées, mais pas suite à une agression sexuelle, et qui ne reçoivent rien en nulle part ou qui reçoivent quatre heures des CAVAC, moi aussi, je serais dans l'état où ils sont. Et je me demande s'il n'y a pas plutôt moyen de regarder dans ce sens-là, alors que CAVAC ont eu un élargissement de mandat et des budgets supplémentaires aussi. Je n'ai probablement pas du tout répondu à votre question, et, si vous voulez la reprendre, ça me fera plaisir d'essayer de vous répondre.

M. Marcoux: Non, vous êtes même allée au-delà.

Mme Tremblay (Carole): Je suis désolée.

Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre, il vous reste cinq minutes pour reprendre la question.

M. Marcoux: Mais vous avez fait état tout à l'heure des frais de déplacement, et tout ça; c'est vrai que ce n'est pas couvert actuellement, tu sais, s'il y a d'autres frais. Et, bon, ça, vous avez raison.

L'autre chose, vous avez aussi fait allusion à la question de l'annexe, d'ouvrir l'annexe. Avec vous, je conviens que ce serait souhaitable de le faire, de l'adapter. Ce que je vous dis, il n'est pas là-dedans, et disons que là je vais le regarder avec... il y a un certain nombre d'autres choses aussi à revoir, mais c'est sûr qu'il faudra l'adapter.

Mme Tremblay (Carole): Ce sera un de nos principaux chevaux de bataille quand on va être sur le comité de travail pour la réforme élargie.

M. Marcoux: L'autre chose, sur la révision, le point que vous soulevez, qui est un point important, ce qu'on m'indique, et M. Ranger est ici aussi, c'est que la façon dont ça fonctionne, ce que je comprends, est semblable au fonctionnement de ce qui se passe à la Société de l'assurance automobile, par exemple, là, ou certains autres organismes, où il n'y a pas de bureau de révision comme tel, mais il y a une révision qui se fait par des agents de révision qui ne sont pas les mêmes personnes que celles qui ont pris la décision initialement dans le dossier. Et, si la personne n'est pas satisfaite de la révision, elle peut appeler, je pense, au Tribunal administratif du Québec ? est-ce que c'est exact, Mme Blain? mais pas dans tous les cas, c'est ça? Bon, je ne sais pas dans quels cas, là, mais il y a certains cas où ils peuvent le faire. Et j'imagine aussi que, dans ces cas-là, ils peuvent le faire dans les 90 jours, maintenant, parce qu'on avait modifié la Loi sur la justice administrative pour prévoir que c'était dans les 90 jours. Je ne sais pas si ça s'applique dans ce cas... Pardon? Dans les 60? Bon.

Le Président (M. Descoteaux): ...M. le ministre, on perd des réponses, toutefois, là.

M. Marcoux: Bien, c'est dans les 60 jours, donc c'est mieux que les 90 qui sont prévus, là, comme règle maximale, il y en a qui sont même à 30; je pense que la Sécurité du revenu, ils sont à 30 jours. Alors, je ne sais pas si... Est-ce que, pour vous, le mécanisme de révision, de vos expériences ou de cas que vous avez vécus, a des lacunes? C'est ça, là, parce que vous avez fait allusion au mécanisme de révision.

Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay, pouvez-vous répondre en deux minutes?

Mme Tremblay (Carole): Oui, certainement. J'insisterai moins sur les lacunes comme sur la nécessité d'établir quelque chose, parce que, bien, M. le ministre, je vais faire référence à quelque chose de très concret que vous connaissez, sur la question du bail, le projet de loi n° 133 qui a été adopté, on n'a pas de mécanisme de révision si, par exemple, la personne qui fait la demande d'attestation au procureur, cette demande-là, admettons qu'elle lui est refusée, on n'a pas... on va le regarder dans les deux prochaines années, mais il n'y a pas actuellement de mécanisme de révision. Et, quand je mettais ça dans mes notes, c'était vraiment pour pallier à cette situation-là pour les proches, là, qui se verraient refuser la qualification de «proche indemnisable». Ce n'était que ça.

M. Marcoux: O.K. Ça va. Merci.

Le Président (M. Descoteaux): Ça va, de votre côté? Ça va. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Merci. Merci, M. le Président. Merci, Mmes Tremblay et Roy, c'est très instructif. On vous remercie. Aussi, on s'excuse des délais. Vous savez, normalement d'ailleurs il y a un délai de six jours qui est prévu justement entre l'adoption préliminaire et les consultations pour permettre que vous puissiez faire des mémoires, et nous de les lire. Je vous dirais qu'on a consenti à le faire plus vite à cause du moment où nous avons adopté le principe du projet de loi, soit jeudi passé. Et je tiens à m'en excuser, parce que... Mais, si vous avez d'autres écrits à transmettre, ce soir ou plus tard, ça va me faire plaisir de les lire.

Sur... Et là, je reviens, ce n'est peut-être pas le plus important, mais je m'intéresse à ça peut-être parce que j'ai beaucoup pratiqué dans le domaine administratif, et c'est sur le mécanisme de révision. Et là je veux être sûr, parce que, moi, je n'aime pas des phrases du type: Il y en a, mais finalement il n'y en a pas tout le temps. Donc, la révision, elle est faite par l'organisme lui-même, et il le fait de quelle façon? Est-ce que ce sont des gens... Est-ce que ce sont les mêmes personnes qui révisent? Est-ce que c'est un comité à part? Est-ce que... De quelle façon se fait cette révision-là, tout d'abord?

Mme Tremblay (Carole): Bien, je pense que ce n'est pas... il n'y a pas de comité puis il n'y a pas non plus de... Et ce n'est pas... M. le ministre le précisait tantôt, moi, je ne l'avais pas dit tantôt, mais c'est un autre agent, un agent réviseur qui va réviser.

M. Bédard: Réviseur, c'est ça.

Mme Tremblay (Carole): Oui, oui, c'est ça. Ça, c'est...

M. Bédard: O.K. Donc, c'est une révision purement administrative, du type: elle regarde le dossier, avec certaines représentations.

Mme Tremblay (Carole): Oui, c'est ça.

M. Bédard: O.K. Bon. Sur l'appel au TAQ, et là qui appelle... en quelles circonstances on peut appeler au TAQ, au Tribunal administratif du Québec? Lorsqu'on conteste quoi? Et quand on ne peut pas le faire? Là, évidemment, je suis peut-être précis.

Mme Tremblay (Carole): Je n'ai pas révisé...

M. Bédard: Oui, mais j'aimerais ça être éclairé vraiment là-dessus. Parce que, moi, je vous dirais, ma compréhension, normalement les gens devraient avoir accès au TAQ.

Mme Tremblay (Carole): Bien, tantôt, peut-être que les personnes qui...

M. Bédard: Parce que sinon, s'ils n'ont pas accès au TAQ, c'est qu'ils doivent... Si tu penses que, la loi, l'interprétation qui est faite n'est pas conforme, tu dois aller devant les tribunaux réguliers. Alors, tu dois, par mandamus, et là ça coûte un bras puis une jambe, hein?

Mme Tremblay (Carole): Les yeux de la tête.

M. Bédard: Alors, il n'y a personne pour aller réclamer un service qu'ils vont aller payer 15 000 $. Et c'est pour ça que je veux être sûr, moi. Si c'est possible, en tout cas d'ici demain matin, d'avoir...

Mme Tremblay (Carole): Probablement que les gens qui représentent l'indemnisation, de l'IVAC, vont pouvoir vous répondre plus distinctement, mais je pense que c'est vraiment séparé en grands blocs. Par exemple, je pense qu'on peut demander une révision administrative sur... une révision administrative, là, c'est donc un deuxième agent de la même... hein, que... donc on peut demander une révision administrative sur la question de l'admissibilité, et que ça, c'est portable devant le TAQ.

M. Bédard: O.K. Sur l'admissibilité.

Mme Tremblay (Carole): Sur les questions d'admissibilité. Mais je ne dépasserai pas ça, au risque de vous induire en erreur, O.K., parce que je...

M. Bédard: Oui, c'est ça. Parce que le Protecteur, je vous dirais, il ne viendra pas. C'est pour ça que je le fais ressortir.

Mme Tremblay (Carole): Ah! O.K.

M. Bédard: Le Protecteur du citoyen, il dit la même chose que vous, et c'est pour ça, c'est plus technique. Les gens... Mais, lui aussi, il est...

Mme Tremblay (Carole): Par exemple, une personne, une victime d'agression sexuelle qui... mettons, une femme qui fait de la prostitution mais qui, un soir, se fait agresser sexuellement, mais qu'on lui impute la faute en lui disant: C'est une faute lourde, vous n'aviez qu'à pas pratiquer cette forme-là de travail, alors je pense que c'est sur ces critères-là d'admissibilité que c'est possible d'en... Mais je n'ai que des petites bribes d'exemples comme ça, mais je ne peux pas vous tirer les grandes lignes, là, qu'un juriste pourrait vous faire, là.

n(17 h 30)n

M. Bédard: C'est notre devoir de le faire. J'essayais, je vous dirais, de raccourcir ma recherche en vous utilisant. Je vais devoir la faire ce soir tout seul!

D'abord, un, bon, sur la révision, je pense que tout le monde s'entend, sur la révision de la loi, un peu, et c'est moi qui étais présent d'ailleurs lors du bail, je me souviens... et, de réviser, je pense que tout le monde s'entend là-dessus. Sur le terme «utile à la victime», vous reprenez à votre compte finalement ce qui nous a été représenté tout à l'heure par un autre groupe.

Mme Tremblay (Carole): Oui. On l'avait rédigé dans d'autres termes, en disant: «La personne qui en tient lieu», hein, pour quand on parle plus du père, mère, frère, soeur, mais c'est sûr que ça entre, tout ça, sous le vocable de «personne significative», ça rentre là-dedans, là, tu sais.

M. Bédard: Parfait. Je vais laisser à ma collègue, je reviendrai un peu plus tard s'il reste du temps.

Le Président (M. Descoteaux): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup, Mme Tremblay, Mme Roy. Je vais repartir où mon collègue a laissé. Effectivement, si l'aide aux proches est accordée seulement si c'est utile à la victime, il y a vraiment un problème. Il y a un problème pas seulement pour les personnes significatives, parce que, même si on embarque toutes les personnes significatives mais qu'on maintient que l'aide, elle va être accordée seulement si c'est utile à la victime, bien... ce n'est pas toujours utile à la victime. Oui, Mme Tremblay?

Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Carole): Bien, puis tout à l'heure on se préparait ensemble, puis on évoquait certains exemples aussi, puis on se disait: Bien, par exemple, une mère qui constate que sa petite fille a été victime, ou son petit garçon a été victime d'un abus sexuel ou d'une agression sexuelle par un adulte, cette personne-là, oui, on peut la rencontrer pour aider l'enfant, ce qui rencontrerait le critère d'utilité, mais souvent ça va faire revivre chez la maman qui accompagne sa petite, ça va lui faire revivre ses propres réalités d'inceste qu'elle a vécues étant petite. Et vous savez comment ça peut prendre du temps ? on a vu des cas dans l'actualité; comment ça peut prendre du temps ? avant que les gens dénoncent, et, quand ça fait la réminiscence de ces souvenirs-là de son propre vécu d'abus, il faudrait faire d'une pierre deux coups, si vous me permettez l'expression, et non pas que... Tu sais, je comprends que la mère, là, elle peut être vue comme étant une victime elle-même de sa propre réalité, en autant qu'elle n'ait pas été victime d'inceste avant 1972, hein? Bien, il faudrait aussi, là, qu'il y ait une certaine souplesse, là, pour que, si l'événement, là, qui est couvert par la loi, ça fait revivre aussi des gens... puis que le proche a besoin d'une propre psychothérapie pour lui-même, qu'il y ait de la souplesse au moins pour l'évaluer. On ne dit pas qu'il faut faire du mur-à-mur puis l'inscrire, mais au moins donner la souplesse, dans notre délai de deux ans, pour l'évaluer, ça, en dehors du concept d'utilité pour le proche. C'est ça.

Mme Caron: Ça m'a fait repenser aussi... ? tantôt, j'ai oublié de le dire ? au niveau des enfants dont la mère a été victime de violence conjugale, souvent il y a effectivement des répercussions dans leur propre vie, et souvent on retrouve dans les maisons d'hébergement des jeunes filles dont la mère a été à la maison d'hébergement, là, et que la reproduction, là... on se retrouve au même problème. Donc, en fait, on fait de la prévention à long terme, pour le futur.

Au niveau des personnes qu'il faudrait absolument couvrir, dans la fameuse annexe, je voudrais juste vous poser une question, parce qu'on avait déposé à l'Assemblée nationale ? je ne sais pas si vous vous souvenez? ? une pétition suite à une agression ? la pétition avait été préparée par les centres de femmes; une agression ? sexuelle qui avait été vécue par une jeune femme qui travaillait à l'étranger, et ça s'était produit au moment où elle travaillait à l'étranger ? moi, je pense que je peux dire le nom, parce que c'était public, là, la pétition: Mirlande Demers ? et il y avait une demande pour qu'effectivement on couvre aussi les personnes qui travaillent à l'étranger. Alors, est-ce que vous êtes en accord avec le fait que, quand on va ouvrir l'annexe, de pouvoir ajouter les personnes qui sont victimes à l'étranger, dans le cadre du travail ou dans un autre cadre?

Mme Tremblay (Carole): Dans le cadre de la réforme un peu plus élargie qui est annoncée, ça va être un de nos autres chevaux de bataille. Je ne crois pas cependant que ça va être par... en élargissant l'annexe mais plus en mettant... en tentant de faire ajouter une clause qui prévoie que ce sont les citoyens et les personnes, les Québécois et les Québécoises, qui ont accès à l'indemnisation sans égard au lieu où l'acte criminel est commis.

C'est vrai que, dans le dossier Mirlande Demers, c'est une revendication de fond qu'on a portée et qu'on porte toujours publiquement. Et on a probablement beaucoup plus de demandes que vous pensez de personnes agressées à l'extérieur et qui nous demandent: Quels sont mes recours? Moi qui suis une citoyenne québécoise, là, quels sont mes recours maintenant que je suis revenue au pays? On en a vu, des personnes, de l'Australie, en Allemagne. Et maintenant ça permet ça beaucoup, hein? L'accès à Internet permet maintenant des, si vous me permettez l'expression, entre huit paires de guillemets, des consultations des fois par écrit là où les personnes s'informent de leurs droits relativement à la couverture de l'IVAC. Mais c'est tout un débat, et il va sûrement falloir en discuter.

Le Président (M. Descoteaux): Merci. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Très rapidement. Tantôt... Et là, vous m'avez entendu sur l'effet rétroactif ou immédiat de la loi. Peut-être un élément, parce que tantôt j'ai eu la chance... En allant dîner, j'ai croisé M. Boisvenu sur une des terrasses de la Grande Allée, et on a parlé un peu des CAVAC, et il me disait justement que ce n'est pas dans leur mandat, pour les CAVAC. Ceux qui le font pour les... ils le font, je vous dirais, presque à leur corps défendant, mais la pratique n'est pas établie. Et je vous dirais qu'en général ce qu'on leur représente, c'est que carrément ? les CAVAC, oui, plutôt ? ce qu'on leur représente, oui...

Une voix: ...

M. Bédard: Non, non. On est fatigué un peu, vous savez. Ça a été une grosse semaine. Alors, que ce n'était pas dans leur mandat. Alors, peut-être, oui, les nombres des séances, mais il faudrait aussi faire en sorte de modifier le mandat.

Je voulais seulement vous faire part de ça parce que j'ai eu un peu la même réflexion que vous, et il m'a dit que cette pratique n'était pas retenue. Oui. Allez-y.

Le Président (M. Descoteaux): Une minute, Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Carole): En une minute? O.K. Ça va me permettre de... C'est parce que je n'avais pas tout dit mon contenu sur la question de la rétroaction. C'est parce qu'en fin de semaine on était en congrès, comme vous le savez, et j'ai eu un mandat de mes membres de vous dire que, voilà, la seule admission qu'on peut faire, que je suis autorisée à faire, c'est qu'on est inconfortables avec cette approche-là de la hiérarchisation des douleurs.

Et on voulait vous dire que c'est... Si vous prenez ce chemin-là d'établir une date rétroactive ? on sait que ce n'est pas facile ? ça va nécessairement créer de l'injustice, et on voulait simplement vous donner, par exemple, deux exemples de ce que les intervenantes rapportaient concrètement de... Oui, mais, si la rétroaction est applicable juste pour les proches des familles assassinées et disparues, ça veut dire que... Les filles disaient: Ça veut dire que... Moi, je suis actuellement en train d'aider une mère dont la fille aujourd'hui est enceinte suite à une agression sexuelle, puis ils ne seraient pas admissibles comme proches, que cette mère-là qui vit de la détresse à voir sa fille... Et on pense aussi aux victimes, je l'ai évoqué tantôt, les victimes qui ont vécu l'inceste avant 1972, on ne parle pas des femmes très âgées, là, hein? Avant 1972, on parle des filles de 43 ans, 44 ans qui ont vécu l'inceste et qui... qui vivraient ça probablement comme une importance injustice qu'il y ait une rétroaction qui ne les couvre pas.

Et je veux juste vous dire que souvent de fois on a accompagné... On en voit beaucoup, des victimes d'inceste, parce que c'est beaucoup des victimes qui ne portent pas plainte. On reçoit beaucoup de victimes d'inceste et qui, après s'être adressées à l'IVAC, constatent que le seul recours qu'il leur reste, c'est de prendre un recours au civil, alors que ça coûte si cher pour essayer d'obtenir une petite indemnisation.

Et on pense aussi bien sûr aux interactions négatives que ça crée au sein du couple, et que souvent le conjoint, il nous téléphone puis il nous dit: Ça ne va pas bien. Ma femme a été agressée, ou elle a des réminiscences de souvenirs de son agression étant enfant. On voudrait te voir plus souvent. Enfin, j'arrête là, mais évitez de créer de l'injustice, parce que ça va être reçu comme ça.

Le Président (M. Descoteaux): Merci bien. Mme la députée de Lotbinière, avez-vous une question? Ça va? Non, pas de question?

Mme Roy: Non.

Le Président (M. Descoteaux): Merci. Alors, merci, mesdames, de votre présence devant la commission.

Une voix: ...

n(17 h 40)n

Le Président (M. Descoteaux): Pardon...

(Panne de son)

M. Bédard: Je veux bien comprendre, parce que là j'ai écouté...

Le Président (M. Descoteaux): Je m'excuse, M. le député, est-ce qu'on a... Ça va, l'enregistrement? O.K., ça va.

M. Bédard: Parce que c'est quand même important. Vous avez entendu mes arguments sur le mieux, donc... Parce qu'on va en créer une, injustice, ça, c'est sûr, dans le sens que, moi, vous savez, on a tous des enfants, la plupart, c'est quand même... seulement imaginer ça, là, de perdre un enfant, pour moi, là, c'est vraiment ultime. Alors là, je me dis: Pour ces gens-là, je n'ai pas de remède. Alors, l'injustice, elle va être créée. Et ce que je me dis: Est-ce que je fais un peu plus vers la justice, vers l'équité, vers les services? Alors donc, il faut l'offrir à tout le monde effectivement, c'est ça qu'il faut, il faut tendre vers ça.

Donc, est-ce qu'il faut y aller étape par étape, est-ce qu'il faut y aller sur une partie, sur tout, moi, je peux vous dire, c'est qu'il faut regarder, parce que le fait de ne rien faire, c'est consacrer cette idée-là que ça ne bougera pas, et, moi, je veux plutôt qu'on tende vers cette équité, et le fait de mettre un frein aujourd'hui, quand on a une possibilité, c'est presque se dire que finalement il n'y aura pas de remède. C'est ça, moi, qui me rend très, très mal à l'aise, parce que je pense qu'on doit le faire pour tout le monde.

Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay, en moins d'une minute.

Mme Tremblay (Carole): Moins d'une minute. Je ne voulais pas, par mon intervention, nier, hein, les besoins des familles des personnes assassinées ou disparues, parce que...

M. Bédard: Non, non, ce n'est pas ça. Je vous ai expliqué pourquoi je vous ai représenté ça.

Mme Tremblay (Carole): Oui, je comprends, je comprends. En même temps, tu sais, je me dis: Bien, alors, tirons une ligne rétroactive, mettons tous les proches admissibles, ouvrons-la, cette rétroaction-là, à tous les proches admissibles, à toutes les victimes survivantes et les familles des personnes, mais mettons-la conditionnelle à une évaluation, à une qualification, puis évaluons au bout de deux ans.

M. Bédard: Parce que les victimes survivantes l'ont, le service. Là, c'est pour les proches, de dire: Est-ce qu'effectivement... c'est peut-être comme vous le proposez, peut-être que c'est ça.

Mme Tremblay (Carole): Bien, écoutez, les victimes survivantes, c'est vrai qu'elles ont accès à du support psychothérapeutique, mais les victimes survivantes, mettons, pour qui on pourrait faire rétroagir, là, moi, là, aux CALACS, là, je donne de l'aide psychothérapeutique, mais ce n'est pas moi qui fais que cette personne-là qui n'est pas admissible aujourd'hui, ce n'est pas moi qui lui fournis le salaire quand elle a des réminiscences de souvenirs puis qu'elle ne peut pas fonctionner au travail puis qu'elle reste chez elle. Vous voyez, ça crée de l'injustice pareil. On a beau dire que, sur l'aide psychothérapeutique, qu'ils ont tout ça gratuitement au CALACS, c'est vrai. Les survivants qui ne sont pas admissibles à l'IVAC, c'est vrai qu'ils ont des services chez nous, mais c'est-u juste de ça dont ils ont besoin? Ils ont besoin de plus que ça. Quand une personne est dysfonctionnelle, qu'elle ne peut pas rentrer au bureau, elle a toujours bien besoin d'une indemnité de salaire, et tout ça. Il faut le penser aussi dans ces termes-là, il ne faut pas juste le voir en termes... Parce que l'IVAC couvre... Pour les victimes directes, là, l'IVAC couvre plus large que l'aide psychothérapeutique.

Le Président (M. Descoteaux): Le temps est épuisé de votre côté. Du côté de M. le ministre, deux minutes.

M. Marcoux: Oui. Peut-être simplement un commentaire sur toute la question de la rétroactivité. Puis je comprends très bien le point que vous faites, mais je pense qu'il y a des commentaires aussi qui ont été faits par celles qui vous ont précédées, là, et puis je suis très sensible à tout ça également, puis idéalement, je veux dire, je comprends qu'on pourrait dire: On peut couvrir rétroactivement, là, de façon très, très large, le plus de monde possible, puis ça, je pense qu'il n'y a personne qui nie l'importance et la nécessité et le souhait de pouvoir obtenir de l'aide, puis que ça peut durer pendant un certain nombre d'années, les séquelles.

Cependant, il est clair que ? puis, là-dessus, les études sont disponibles, là, les examens, je veux dire ? c'est clair que, si on veut ouvrir la rétroactivité de façon large, malheureusement on ne pourra pas le financer, c'est bien évident, là. Puis ça, on a des études qui ont été faites. Ce n'est pas des études scientifiques, c'est sûr que ce sont des prévisions. Il n'y a rien de mathématique là-dedans, puis ça peut arriver que les prévisions faites ne se réalisent pas tout à fait; c'est vrai dans d'autres régimes qui ont déjà été adoptés, ça, et puis où on a constaté après quelques temps que c'était beaucoup en plus ou beaucoup en moins, alors que tout le monde faisait pour bien faire. Mais l'évidence, c'est qu'on ne pourrait pas couvrir, avec le financement disponible, une rétroactivité, là, qui est large. Ça, c'est clair.

Mme Tremblay (Carole): Je veux aussi juste préciser que notre position en regard de la rétroaction vaut aussi pour le fonds spécifique qui est demandé. Et c'est tout. M. le Président, merci pour tout ce temps-là.

Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay, Mme Roy, merci bien de votre présence devant la commission.

Mme Tremblay (Carole): De rien.

Le Président (M. Descoteaux): Nous allons suspendre quelques instants pour avoir le Regroupement des innocentes victimes du crime organisé. Deux minutes? Ça va.

(Suspension de la séance à 17 h 46)

 

(Reprise à 17 h 50)

Le Président (M. Descoteaux): Ça va? Nous pouvons poursuivre? Donc, nous recevons le Regroupement des innocentes victimes du crime organisé. Bienvenue, Mme Michèle Forcier, présidente, et M. Maxime Laforest, membre fondateur. Donc, vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire.

Regroupement des innocentes
victimes du crime organisé (RIVCO)

Mme Forcier (Michèle): Bonjour. Je vous remercie. Premièrement, très brièvement, je vais faire un petit historique du regroupement RIVCO. RIVCO a été formé en octobre 2001. Nous sommes tous des parents qui avons eu des membres de leurs familles victimes soit durant la guerre des motards ou victimes du crime organisé. L'isolement a fait qu'à un moment donné on s'est rencontrés par pur hasard de situation. On a regardé qu'est-ce qu'on avait, nous, comme victimes dans notre société, puis on s'est retrouvé devant rien, des parents qui perdaient un enfant et qui n'avaient aucun recours, des victimes qui survivaient mais dont la famille restait pour compte.

Alors, ce que je vais vous présenter, ce ne sera pas juste ce que RIVCO pense du projet de loi, mais ça va bien être ce que nous, nous avons vécu comme parents. Je ne suis pas professionnelle dans ce domaine-là, je ne suis pas criminologue, rien, ce qu'on va vous parler, c'est plus notre vécu, en fin de compte, comme parents de victimes et comme victimes qui ont réussi à survivre à leur attentat, les problèmes qu'on a rencontrés.

Dans les problèmes que nous avons rencontrés, c'est que les victimes n'ont jamais su c'était quoi, leurs droits. Les parents, on se disait au départ, on n'en a pas. Les droits en réadaptation, quels sont-ils? On ne les sait pas. Le droit à l'information, l'information vient au compte-gouttes, c'est quoi, une révision, c'est quoi, le Tribunal administratif, où débute et où finit la loi, les victimes et les parents de victimes ne sont jamais au courant.

Le temps de prescription, pour avoir rencontré d'autres familles, les mères me disaient: Mais, oui, mais comment ça se fait que je n'ai jamais su que c'était juste un an que j'avais pour répondre pour ma fille? Mais, malheureusement, c'est un an, et il est trop tard pour vous. C'est toutes des choses qu'on s'est rendu compte au fur et à mesure. Même, si on parle des CAVAC et des CALACS, moi, la première fois que j'ai entendu parler d'un CALACS, comme mère de victime survivante, c'est au bureau du ministre Bégin, il y a quatre ans. L'agression de mon fils date de six ans. Alors, j'ai été deux ans, où j'aurais pu avoir une certaine aide, même si ça avait été juste l'aide pour remplir le fameux formulaire ? qui n'est pas évident à remplir pour des parents ? je l'ai su trop tard. Puis, tous les parents, aujourd'hui, c'est le même problème. Pourquoi pourquoi c'est au bureau du ministre que j'ai trouvé les formulaires des CALACS? Normalement, j'aurais dû retrouver dans le centre de traumatologie à l'hôpital où mon fils était. Ça aurait dû être disponible ailleurs.

L'information n'est pas véhiculée. Encore aujourd'hui, j'ai encore des parents qui m'appellent puis que je vais même accompagner au CALACS. Au moins, le peu de services que ces familles-là peuvent avoir, au moins ils les ont, le petit de peu de services que les CALACS... C'est ça, ce n'est pas à eux de réglementer sur la loi puis dire si les proches sont acceptés ou non. Mais, quand même, l'aide que ça peut apporter, ça aide beaucoup les familles.

Ce qu'on a regardé aussi, c'est toute la question d'indemnisation des victimes: les victimes se sentent extrêmement frustrées d'être traitées à part des autres victimes. Je veux dire, être victime d'un acte criminel, c'est un acte volontaire, c'est quelqu'un qui décide de te nuire, de te tuer, de te violer, de t'agresser. En faisant ça, il touche à tes proches aussi, à ton père, à ta mère, à ton frère, à ta soeur. Mais comment peut-on penser, ces victimes-là, les indemniser sur une base salariale? Premièrement, en partant, ce n'est pas équitable, parce qu'il reste toujours la question de l'âge de la victime. À 20 ans, la victime ne gagne pas le salaire d'un homme de 50 ans. Vous avez sûrement lu les commentaires du Protecteur du citoyen, qui illustrent très, très bien le phénomène, je l'ai mis dans l'exemple de situation: Deux hommes perdent une jambe à la suite d'un acte criminel. Tous les deux sont ingénieurs; un a 25 ans, gagne 23 000 $, l'autre, 45 ans, 52 000 $. Après convalescence, les deux peuvent reprendre l'emploi, un recevra une rente, le plus jeune, de 8 900 $, le plus âgé, de 17 465 $: deux mêmes victimes, même acte, deux montants différents, deux être humains. Je crois qu'on devrait regarder aussi ce point-là dans la loi, qui est très important. Parce que la victime, quand elle survit, elle sait qu'elle n'aura pas réparation, c'est impossible de tout réparer. L'indemnisation devient un peu comme une petite réparation.

Alors, si je continue, je vais tomber dans les proches, étant moi-même proche d'une victime d'acte criminel, je peux vous dire que ce n'est pas facile. Et, quand je regarde tous les membres de RIVCO, nous sommes partagés en familles, certaines ont eu des victimes qui ont survécu, d'autres, malheureusement, ont perdu des enfants. Maxime, qui m'accompagne, a perdu son frère. Alors, les parents de Maxime, tout ce qu'ils ont reçu, c'est un chèque de 600 $ pour les frais funéraires. Quand, comme parent, tu reçois ça, 600 $, je veux dire, tu aimerais autant ne rien recevoir que recevoir 600 $: c'est une insulte. Ce n'est pas avec 600 $ qu'on va payer les frais funéraires. Je suis consciente aussi qu'on ne pourra jamais indemniser le vrai coût de la perte d'un enfant, c'est impossible, mais, d'arriver et d'émettre un chèque de 600 $, tant qu'à faire, enlevons ça de la loi, c'est plus insultant, ou allons au même bénéfice des autres régimes. Je veux dire, si on compare les autres régimes, on voit qu'il y a une très grande iniquité.

Disons que, pour les proches, moi, mon approche, ce serait que ce soit père, mère, frère, soeur, conjoint, conjointe, enfants de la conjointe s'il y en a, et j'ajouterais «toute personne servant d'aidant naturel à la victime». Je vous dis ça parce que c'est ce que, moi, j'ai dû faire pendant cinq ans. Lors de l'agression de mon fils, il a subi 14 opérations sur une période de cinq ans. Alors, l'aidant naturel a été la mère. Je mets aidant naturel et non pas mère, parce que ça aurait pu ne pas être moi. Ça aurait pu être la grand-mère, ça aurait pu être un ami qui serait venu en aidant naturel, parce que, moi, j'aurais pu être sur le marché du travail ou ne pas être capable de le faire. C'est pour ça que j'arrive avec le point d'aidant naturel, que je trouve que ce serait un bon point, l'aidant naturel.

C'est sûr que, quand je regarde ce que vivent toutes les mères que j'ai entendues, que ce soit cinq ans après, 10 ans après, le mal est encore là, ces gens-là. Mais, quand vous posiez la question, tout à l'heure: Est-ce que la loi doit être rétroactive? Je crois que oui, qu'elle devrait être rétroactive, pour avoir écouté toutes ces mères-là me dire encore la même colère dans laquelle elles sont. Beaucoup de gens même vont arriver, beaucoup de familles vont... des couples vont arriver à des séparations parce que, justement, un s'en sort, l'autre ne s'en sort pas. S'en sortir, c'est très difficile.

Si je regarde ? je veux arriver brièvement à la conclusion, vous comprendrez que je n'ai pas l'expérience de faire cela; je regarde ? dans le temps, toutes les fois où on a parlé de refaire le régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels, je me dis: Dans tout ce temps-là, 34 ans après, on arrive avec le dépôt d'un projet de loi qui vise deux petits points, quand il y a autant de problèmes au sein de l'IVAC. Quand même, au sein des travailleurs de l'IVAC, il y a un gros problème, les employés ne sont pas formés.

Quand je pense à tout ça, puis qu'aujourd'hui on arrive avec juste ces deux points-là, je me dis: Tant qu'à faire quelque chose, pourquoi nous ne revoyons pas... pourquoi qu'on ne reverrait pas le programme au complet? Les problèmes des victimes, on les sait, on sait que l'indemnisation est inadéquate, on sait que le médecin de la victime devrait avoir un poids prépondérant dans le dossier de la victime. Premièrement, ça coûterait moins cher, parce qu'au lieu de passer 24 fois par des fonctionnaires, on arriverait directement avec le point médical de la victime, et la victime pourrait se faire traiter tout de suite. Quand on parle de temps, on parle d'argent.

Et quand je vois, à toutes les fois où il y a eu des élections, le dossier des victimes ressortait beaucoup plus facilement. Ah, c'était comique, là, on promettait mer et monde. Quand RIVCO a été créé, en 2001, nous avons été approchés par l'opposition officielle, qui était le Parti libéral dans le temps. En campagne électorale, la même chose. En campagne électorale, ce que RIVCO a fait, c'est qu'on a demandé le point de vue de tous ceux qui se présentaient. Le Parti québécois avait promis une commission parlementaire, le Parti libéral était allé beaucoup plus loin: il avait promis d'harmoniser tous les régimes en vigueur au Québec et de donner... de voir à ce que tous les régimes, c'est-à-dire, soient égaux, d'avoir le même droit à la réadaptation, le pouvoir du médecin choisi par la victime.

n(18 heures)n

Si on regarde dans ce qui a été présenté aussi par le Parti libéral, il n'y a rien dans la loi n° 25, là, le projet de loi n° 25, je ne vois rien de ça dans ça. C'est pour ça que RIVCO a été très déçu quand on a entendu l'annonce du projet de loi n° 25 et que ça comportait d'augmenter les frais funéraires et de rendre admissibles les proches. Oui, c'est un pas, mais un très petit pas. J'ai encore l'impression qu'on oublie les victimes qui ont survécu et qui restent encore avec le problème administratif d'IVAC et leurs problèmes de santé physique, qui restent toujours pris avec... Puis c'est les familles qui doivent vivre ces problèmes-là en même temps.

Alors, je termine sur ça en me disant que ce serait préférable de regarder la loi vraiment dans son ensemble, en regardant vraiment les besoins des victimes et des familles des victimes. Je vous remercie.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme Forcier. M. le ministre.

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Merci, Mme Forcier, et merci, M. Laforest. Vous disiez, Mme Forcier, que... Bien, c'est la première fois que j'ai l'occasion de vous rencontrer. J'avais rencontré votre prédécesseur, M. Monastesse, déjà à une ou deux reprises. Et quand vous dites: Je n'ai pas d'expérience pour parler, mais vous parlez avec votre coeur, ça, je pense que ce que c'est ce qui est important. Je vais faire peut-être une couple de commentaires puis, après ça, vous poser quelques questions.

Vous avez fait référence à, ce que je dirais peut-être, un peu l'iniquité de certains volets de l'indemnisation. Quand vous dites... quand vous avez cité le Protecteur du citoyen, vous dites: Quelqu'un qui gagne 23 000 $, celui qui gagne 52 000 $, pour le même type de séquelles corporelles, il va recevoir une rente, un montant d'indemnité qui est différent. Vous avez tout à fait raison là-dessus. Et c'était modelé sur la loi, dans le temps, des accidents du travail, qui, elle, comportait ce type de rente ou d'indemnisation, puis ça a été modifié en 1985. Et c'est la même chose avec la Société de l'assurance automobile, où on distingue maintenant l'indemnisation du préjudice corporel. Bon. Donc, dans ce cas-là, ce que vous mentionnez, la perte d'une jambe, c'est la même valeur pour les deux personnes, donc distinguer; et, après ça, la question de remplacement du revenu. Donc, c'est sûr que c'est... Puis, ce à quoi faisait référence le Protecteur du citoyen, vous avez raison, c'est que ça doit être modifié, ce genre de... donc revenir, c'est clair, avec des types d'indemnités où, je pense, comme dans d'autres régimes, il y a d'une part le préjudice corporel qui est de la même valeur pour tout le monde, et la question de perte de revenu, qui, elle, peut être différente. Et ça, c'est ce que je vous ai indiqué, c'est que... Mettre sur pied un groupe de travail présidé par un expert externe, là, mais... certainement, c'est un volet important, c'est-à-dire l'équité dans les modalités d'indemnisation des victimes qui subissent le même genre de préjudice corporel.

Vous avez parlé évidemment des problèmes administratifs de l'IVAC. Ça, là, écoutez, je ne veux pas du tout... Je sais que... Vous avez M. Ranger, qui est ici, donc qui écoute, qui est le directeur de l'IVAC, à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, alors il vous entend bien. Je pense que... Puis c'est fort possible que dans certains cas il y ait des choses qui ne fonctionnent pas. En tout cas, il entend bien ce que vous avez dit, donc je pense que ça indique la collaboration, maintenant, au travail qu'on fait avec la direction de l'IVAC, avec les gens du ministère; je pense qu'il y a un lien, là, qui est important, qui doit être fait. Alors, c'est pour ça d'ailleurs qu'il est ici aujourd'hui. Et ce qu'il me disait: Écoutez, on essaie d'améliorer, ce n'est pas parfait, mais maintenant on fait plus de formation, on a des gens qui sont en psycho-éducation, en psychologie, donc d'essayer d'améliorer, entre guillemets, le service à la clientèle, parce que... Puis je comprends que souvent les gens qui appellent sont des personnes qui peuvent être aussi en état de choc, tu sais, qui ont besoin d'aide puis qui ont besoin d'une oreille attentive à l'autre bout. Alors donc, je pense que le message là-dessus, là, il est bien entendu, de votre part. Je pense qu'il y a eu de l'amélioration, c'est ce qu'il dit: On essaie de le faire. Ce n'est pas parfait, mais on va essayer d'améliorer encore le fonctionnement du service.

Quand vous disiez, au début, Mme Forcier, je pense: Les membres de notre association... ou enfin les victimes qui sont membres considèrent être... qui sont traitées à part des autres victimes, pouvez-vous me donner un petit peu là-dessus ce que...

Mme Forcier (Michèle): Si on parle en ce qui concerne les victimes, les accidentés de la route, on ne peut pas comparer les deux régimes dans ce sens-là. La même chose pour la CSST, parce que la réadaptation CSST n'est pas la même qu'à l'IVAC. Si on compare avec les autres régimes existants, c'est sûr que les indemnités ne sont pas les mêmes.

M. Marcoux: Vous avez raison là-dessus. Puis j'ai eu l'occasion aussi, dès le mois de février, je pense, de dire... Et c'est vrai que les sommes, là, qui sont investies ? puis c'est normal ? ici, au Québec, dans le régime sont de l'ordre de plus de 70 millions. Ce n'est peut-être pas assez encore, mais, si on compare à ce qui se fait ailleurs, partout au Canada puis ailleurs dans d'autres juridictions, là, c'est de beaucoup et de loin le régime le plus généreux. C'est correct. Je pense que ça témoigne d'une valeur de solidarité sociale et de justice sociale. Mais il y a quand même déjà, là, des montants importants.

Je pense qu'en ce qui a trait aux autres régimes ? puis là je comprends ce que vous vouliez exprimer ? que ce soit la Société d'assurance automobile ou la CSST, ce sont des régimes qui sont autofinancés par des cotisations ou des primes. Si quelqu'un... Chaque année, à même ton permis de conduire, ou à tous les deux ans, tu paies une prime; c'est un peu la même chose pour la CSST, ce sont des régimes d'assurance. Je pense que le régime de l'IVAC, en tout cas ce que j'ai indiqué, moi, est davantage ? et, je pense, c'est partout ailleurs aussi ? un régime de valeurs sociales, et qui est financé aussi, un peu comme la sécurité du revenu, à même les fonds généraux du gouvernement. Je pense... Ce n'est pas un régime d'assurance. Je comprends que peut-être qu'on pourrait dire: C'est souhaitable. Mais ce n'est pas un régime qui est autofinancé. Et l'autre, là, on en parle, des primes d'assurance de la Société de l'assurance automobile, actuellement, là, tu sais. Donc, à un moment donné, il faut que ça s'autofinance. Alors, c'est un régime, l'IVAC, qui est un régime, je dirais, social, et c'est vrai qu'à ce moment-là les types d'indemnités sont différents, et elles sont financées à même l'ensemble des revenus généraux du gouvernement.

Quant au projet de loi... Et vous dites: On trouve que ça ne va pas assez loin. Moi, je serais le premier à vouloir aller plus loin tout de suite là-dedans, là. Je pense que... Mais il y a deux éléments. Et puis je comprends qu'on peut dire: Bien, il en faudrait encore plus, puis, moi, je suis bien sensible à ça, mais il faut aussi qu'à chaque fois qu'on pose un geste, à mon avis, qu'on puisse le faire. Et, ici, on peut bien parler puis dire: On pourrait faire ci puis on pourrait faire ça; si on n'a pas de financement, tu sais, je veux dire, on n'aboutit à rien. On pourrait faire une grande consultation, là, et... Mais ce qui...

Là-dedans, au moins, il y a une partie des frais funéraires. Vous dites: 600 $, oui, ça n'a pas de bon sens. Bon, 3 000 $, ça ne couvre pas encore tous les frais, c'est vrai. La Régie des rentes paie 2 500 $ actuellement. Je comprends que quelqu'un qui est cotisant à la Régie des rentes va recevoir soit une rente de veuve, ou une rente de veuf, ou autre chose, là, tu sais, mais, les frais funéraires... La CSST paie 2 500 quelque chose, je pense, 2 567 $. En tout cas, je pense que c'est un premier ajustement, puis ce serait indexé subséquemment. Alors, je ne sais pas si...

Deuxièmement, pour les proches, bien il y a quand même une ouverture, et je ne sais pas si vous considérez que c'est un pas en avant, là, mais pour l'aide psychothérapeutique. Alors, je ne sais pas si... Au moins... Puis je comprends qu'il y a... Puis il y a d'autres choses qui devront être regardées dans un contexte plus grand d'une révision plus générale, qui n'a pas été refaite depuis 1972, hein? Je veux dire, il y a bien du monde qui ont travaillé là-dedans, là, mais, si ça avait été facile, ce serait fait depuis longtemps. Il n'y a rien eu de fait. Donc, il y a une première bonification. Et je me dis: Pour ce qui est des proches, est-ce que ce n'est quand même pas, là, un premier pas en avant, là, pour l'aide psychothérapeutique?

Mme Forcier (Michèle): C'est sûr que, pour les proches, c'est un pas en avant, parce qu'il n'y a absolument rien présentement, là. Ce qu'ont les proches, c'est les regroupements qui existent, les CAVAC, qui peuvent faire un petit pas avec les victimes. Mais c'est sûr que, dans un délai assez court, il va falloir passer aux autres points de la loi aussi.

M. Marcoux: Oui. Je pense que ma collègue... Il reste combien de temps?

Le Président (M. Descoteaux): Quatre minutes, M. le ministre.

M. Marcoux: Quatre minutes. Alors, ma collègue de Matane voulait intervenir. Je voudrais simplement vous dire aussi, là: je pense que les CAVAC... Et, dans leur mission, actuellement... Puis évidemment ça a évolué, les CAVAC, hein? Ça a commencé en 1987, je pense, le premier, là. Il y en a 16, maintenant. Mais, dans leur mission et... ce que j'ai ici, là, la mission des CAVAC, qui a évolué et qui a commencé avec de l'accompagnement dans le système judiciaire... C'était ça, le premier objectif des CAVAC, dans le temps.

Mme Forcier (Michèle): ...manque, des CAVAC, aussi.

n(18 h 10)n

M. Marcoux: Oui. Mais, tu sais, ils disaient: Les CAVAC dispensent des services de première ligne à toute personne victime d'un acte criminel et ses proches ainsi qu'aux témoins d'un acte criminel. L'aide des CAVAC est disponible, que l'auteur du crime soit ou non identifié, arrêté ou poursuivi, donc, en collaboration avec les intervenants du milieu judiciaire. L'intervention des CAVAC auprès des victimes s'appuie sur la capacité qu'ont les victimes, mais... Alors, les statistiques révèlent que près de 15 % de la clientèle des CAVAC sont des proches, actuellement, et les services d'intervention post-traumatique se développent aussi au sein des CAVAC. Je veux juste, en tout cas, le mentionner parce que je pense qu'ils font un bon travail. Mais, en 1988...

Mme Forcier (Michèle): Non, mais ce que je vous relatais comme problème, c'était qu'au tout début, voilà cinq, six ans, c'était très peu connu...

M. Marcoux: Vous avez raison.

Mme Forcier (Michèle): ...mais, depuis qu'on a mieux...

M. Marcoux: Tout à fait. Vous avez tout à fait raison.

Mme Forcier (Michèle): ...qu'ils sont mieux subventionnés, disons qu'on sait. Je sais, j'ai accompagné des victimes dans des CAVAC, et ils ont eu de l'aide.

M. Marcoux: Parfait.

Le Président (M. Descoteaux): Mme la députée de Matane, trois minutes, questions-réponses.

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. Mme Forcier, vous avez soulevé lors de votre présentation le fait que la base de calcul qui est fondée sur le revenu crée certaines iniquités. Comme on le sait tous, les budgets sont des budgets déjà limités, et, comparativement, par exemple, aux autres régimes que vous avez donnés lors de votre présentation, par exemple la Société de l'assurance automobile du Québec ou d'autres régimes gouvernementaux existants, il y a une partie de contribution du bénéficiaire du régime, ce qui permet de bonifier ou d'augmenter l'enveloppe qui peut être distribuée aux victimes. Dans ce contexte-là, sachant à la fois les contraintes financières et les capacités financières aussi de l'État, quelle serait pour vous la proposition qui serait la plus équitable en termes d'indemnisation des victimes, si on excluait la situation du revenu?

Mme Forcier (Michèle): Le point le plus important, je crois, pour les victimes, si on exclut, là, tout ce qui est domaine argent, indemnisation: le médecin traitant. Le médecin traitant, pour la victime, c'est son médecin qui va le suivre tout au long de sa convalescence, c'est lui qui va lui prescrire ce dont il a besoin, c'est lui qui devrait même évaluer les victimes en tout dernier lieu. C'est lui qui va définir tout, c'est le lien direct avec... entre l'agression et la victime, il y a le médecin traitant, il y a la famille. Mais le médecin traitant, c'est lui qui devrait tout régir ça, les besoins de la victime, s'il a besoin de physiothérapie, s'il a besoin d'ergothérapie, pour arriver à ce que tout aille plus vite, qu'il y a moins... comment je vous expliquerais ça, la façon que j'ai vécu ça, qu'il y ait le moins de fonctionnaires possible dans tout ce dédale-là, moins d'autorisations à demander, que ce soit directement le médecin traitant et l'IVAC, qu'on arrive à une entente que... puis que ce soit le médecin traitant aussi qui évalue les séquelles permanentes de la victime. En ayant un médecin traitant, c'est sûr que c'est lui qui est le plus au courant, les opérations qu'il a subies, c'est quoi qu'il a eu comme traitements. La même chose pour le côté psychologique de la victime. Si on regarde... même là, si je compare à un autre régime ? je vais comparer la CSST; on ne parle pas de sous, là. La CSST, dans notre groupe, on a des gens qui sont tous victimes d'actes criminels, qui sont avec l'IVAC, d'autres, CSST. Ça veut dire qu'on n'a pas les mêmes traitements, pourtant on est victime de la même chose. Alors, CSST, la victime a le droit, pour son évaluation psychologique, de choisir son psychiatre. Pourquoi, l'IVAC, on n'aurait pas le droit? Le coût va être le même, mais la victime va se sentir bien plus à l'aise avec quelqu'un avec qui elle a déjà eu des contacts lors de son agression qu'avec un inconnu qu'elle va rencontrer une fois puis qui va lui donner son pourcentage d'incapacité. Ça, ça ne coûte pas de frais au gouvernement, mais pourquoi ça n'a jamais été fait? Là, on ne parle pas d'argent, on parle de changer un médecin pour un autre médecin.

Le Président (M. Descoteaux): Merci bien. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Oui, bonjour, Mme Forcier, M. Laforest. J'aimerais que vous complétiez sur ce que vous mentionniez par rapport aux soins d'accompagnement, là, je veux être sûr... parce qu'on est plus dans le fonctionnement de l'IVAC, je vous dirais, mais actuellement ils ne vous permettent pas, vous me dites... C'est ça que je veux bien être sûr, pourriez-vous...

Mme Forcier (Michèle): ...votre question, désolée.

M. Bédard: C'est ça, au niveau du médecin traitant, même au niveau des soins psychiatriques, vous me dites qu'actuellement il n'est pas possible pour vous de choisir?

Mme Forcier (Michèle): Non, non, c'est sûr que la victime, quand ça arrive, il est amené à l'hôpital, il va avoir un médecin traitant, ce n'est pas l'IVAC qui s'occupe de ça, mais ce qu'on veut dire, c'est lors des évaluations.

M. Bédard: Lors des évaluations.

Mme Forcier (Michèle): Lors des évaluations, ça va être le médecin décidé par l'IVAC qui va évaluer la victime. La même chose pour ce qui est du côté psychologique, ça va être fait par l'IVAC.

M. Bédard: Oui, ils lui font voir une autre personne.

Mme Forcier (Michèle): Oui. Que la victime n'aura jamais rencontrée avant, premièrement. Elle n'est pas très à l'aise. C'est sûr qu'on va se fier au dossier médical, dont l'IVAC a possession.

M. Bédard: Là, excusez-moi de vous interrompre, Mme Forcier. Quand vous n'êtes pas d'accord, qu'est-ce qu'il arrive après? Est-ce que vous avez un appel au Tribunal administratif du Québec?

Mme Forcier (Michèle): Ah! C'est sûr qu'à toutes les fois où on n'est pas d'accord avec l'IVAC, on a droit à la révision.

M. Bédard: Révision, mais, là, la révision ou devant le Tribunal administratif ou c'est la révision administrative?

Mme Forcier (Michèle): Ça, c'est après, on est rendus plus loin, là.

M. Bédard: O.K. Parce que ce que je lis en même... Dans votre mémoire, vous parlez des recours, donc vous dites: «Les victimes d'actes criminels ? et ainsi de suite ? ont la possibilité de faire une demande de révision.» Là, quand vous dites «révision», c'est une révision administrative, là, par les employés de l'IVAC?

Mme Forcier (Michèle): Oui, oui.

M. Bédard: O.K.

Mme Forcier (Michèle): Oui, ça, c'est là présentement. Mais on se rend compte que la révision... moi, je sais pour l'avoir fait pour d'autres parce qu'ils ne savaient pas techniquement comment faire ça, ni les délais. Encore là, établir clairement les délais: Combien de jours on a pour répondre? 30 jours, 30 jours consécutifs, 30 jours ouvrables? Dire clairement à la victime. Il ne faut pas oublier que la victime, elle n'a pas toute sa capacité.

M. Bédard: Mais c'est quoi, le délai pour réviser?

Mme Forcier (Michèle): 30 jours, révision.

M. Bédard: Arrêtez donc! Ah, oui?

Mme Forcier (Michèle): Bien, la dernière fois que j'en ai fait une, c'était 30 jours. Le directeur de l'IVAC serait probablement plus... 30 jours.

M. Bédard: Donc, vous avez 30 jours pour contester, vous me dites?

Mme Forcier (Michèle): Oui. Et c'est 30 jours consécutifs. Alors, je me souviens qu'il y a eu, voilà... en hiver 2004, une commission parlementaire justement sur les tribunaux administratifs, M. Monastesse, qui est avec nous, avait participé.

M. Bédard: Bien, Oui, j'étais là, moi.

Mme Forcier (Michèle): Alors, nous, ce qu'on avait demandé, c'était que déjà, en partant, à la révision, qu'il y ait quelqu'un de nommé pour...

M. Bédard: Un médiateur.

Mme Forcier (Michèle): Un médiateur dans le dossier tout de suite.

M. Bédard: Il n'y a pas de médiateur?

Mme Forcier (Michèle): Non, il n'y a pas de médiateur à la... non.

M. Bédard: Est-ce que vous pouvez faire une demande de médiation?

Mme Forcier (Michèle): Non, parce qu'après, si c'est refusé, bien là ça va aller plus loin, là.

M. Bédard: Bien, avant, il n'y a pas de médiation, c'est vous présentez...

Mme Forcier (Michèle): Non, non, non. La demande se fait par écrit. Ce qui arrive, c'est, quand c'est contesté par l'IVAC, la victime va recevoir comme quoi que ce n'est pas accepté et qu'elle a droit d'aller en révision, qu'elle a 30 jours pour répondre. La victime va répondre, va rajouter des suppléments d'information s'il y a lieu, mais il n'y a pas de médiation qui est faite au sein de la révision. Ça éviterait probablement d'embourber justement les tribunaux administratifs et de couper des frais.

M. Bédard: Je suis étonné, là, qu'il n'y ait pas... je vous avouerais, là. Parce que maintenant tout le monde s'entend que c'est la chose à faire. Puis je vous dirais: Au-delà de ce qu'on fait dans les tribunaux administratifs, même dans les organismes administratifs, je vous dirais, en plus, quand on a affaire à des gens, là, qui ont vécu de tels sévices, des victimes... En tout cas, peut-être qu'on va entendre des gens nous corriger là-dessus, mais je suis assez étonné, là, que ça fonctionne comme ça, je vous l'avouerais, sinon même je vous dirais consterné.

Vous faites aussi état dans votre mémoire d'une lettre reçue par M. Baril... parce que je ne l'ai pas, la lettre.

Mme Forcier (Michèle): C'est tout simplement pour démontrer, au sein de l'IVAC même...

M. Bédard: Sans faire un cas de figure, mais je veux voir. Oui, c'est simplement pour en prendre connaissance.

Mme Forcier (Michèle): Bien, je peux vous dire que la lettre est datée du 14 octobre 2004, qu'il devait avoir une rencontre avec son agent le 12 juillet 2004, dû à une opération le 24 septembre suivant, et qu'en date d'aujourd'hui il n'a toujours pas eu réponse à sa lettre.

M. Bédard: Est-ce qu'on peut avoir dépôt de la lettre? Moi, j'aimerais bien l'avoir. Est-ce que c'est possible d'avoir une copie? Pourriez-vous la déposer?

Mme Forcier (Michèle): Oui. Je ne l'avais pas déposée, par question de taire les noms des agents. Je trouvais que ce n'était pas nécessaire.

M. Bédard: O.K. Pouvez-vous rayer peut-être les noms?

Mme Forcier (Michèle): Je trouvais que ce n'était pas nécessaire.

M. Bédard: C'est beau. Pas tout de suite, là, un peu plus tard.

Le Président (M. Descoteaux): Vous allez nous déposer la lettre, madame, c'est ça?

Mme Forcier (Michèle): Oui.

Le Président (M. Descoteaux): Parfait.

M. Bédard: Je comprends aussi de votre mémoire... Ce que vous souhaitez finalement aussi, c'est que les gens soient proactifs. Là, ce que vous dites: Les gens déjà ont subi une commotion. C'est nous ou les personnes qui sont près de nous... Donc, au-delà des délais, tout ça, normalement on devrait avoir un contact... Au-delà de notre initiative personnelle, il devrait y avoir un aspect un peu plus proactif ? c'est ce que vous souhaitez, c'est ce que je comprends de votre intervention ? pour ne pas découvrir plus tard, comme vous l'avez fait, deux ans plus tard, que vous aviez accès à des services mais que, là, il était trop tard.

Mme Forcier (Michèle): Oui, c'est ça qui est malheureux. Mais c'est sûr qu'en tant que parent de victime je n'avais pas accès à des...

M. Bédard: C'est ça. Bien, là, vous, même pas, vous n'auriez même pas accès, de toute façon.

n(18 h 20)n

Mme Forcier (Michèle): Non, non, non, je n'avais pas accès. Ce que j'ai déploré, c'est de savoir trop tard que les CAVAC existaient.

M. Bédard: Oui.

Mme Forcier (Michèle): Mais c'est sûr qu'en tant que parent de victime, la même chose que les autres, que la victime soit décédée ou survive, on n'est pas reconnu dans la loi, donc on n'a pas droit à aucun service.

Le Président (M. Descoteaux): Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt?

Des voix: Oui.

Document déposé

Le Président (M. Descoteaux): Donc, le document est déposé.

M. Bédard: Ce que je comprends un peu de votre lecture, c'est que... écoutez, là, s'il y avait... que vous êtes déçue, là. Ça, je comprends ça. Est-ce qu'il y a des éléments... si on avait un bout de chemin à faire, vous pourriez nous dire: Écoutez, là, tel, tel élément est fondamental. C'est sûr, pour vous, c'est dur. Ce que vous souhaitez, c'est une révision en profondeur de la loi, mais, s'il y avait... vous nous dites ? bon, vous avez vu le projet de loi ? que tout est «in the bag», là, dans le sens qu'on voit les règlements... Je peux vous dire qu'à l'étape où on est c'est très dur d'avoir une opinion sur à peu près quoi que ce soit, là, mais, vous, là, c'est quoi, là, c'est sur quoi on devrait... s'il y en avait une seule, ou deux, ou trois?

Mme Forcier (Michèle): C'est sûr, l'acceptation des proches fait partie d'une demande très importante. Le médecin traitant. Le médecin traitant de la victime.

M. Bédard: Le médecin traitant.

Mme Forcier (Michèle): Oui. C'est sûr que c'est le point le plus important, que ce soit le médecin traitant qui évalue la victime, que ce soit un psychiatre que la victime connaît, que lui choisit, que la victime ait le droit au moins de choisir ses thérapeutes. Tu sais, quand on parle de post-traumatologie, toutes les victimes vivent à peu près la même affaire. On ne connaît pas de psychologues, on ne connaît pas de psychiatres. Ceux qui nous sont référés ne sont pas nécessairement... le premier ne sera peut-être pas le bon, mais que la victime ait le droit de choisir puis de dire: Non, ça ne fonctionne pas, et je veux choisir, j'en connais un tel. Que ce ne soit pas établi avant. La plupart des victimes vivent le même problème. Dans le groupe, ça a été la même chose jusqu'à temps que chacun arrive puis... à pouvoir changer de thérapeute et faire accepter le fait de changer le thérapeute. Mais que ce soit le médecin traitant qui évalue, même en tout dernier, que ce soit lui qui évalue les dommages corporels de la victime, puis le psychologue ou le psychiatre qui évalue les dommages psychologiques, mais celui qui a traité le patient. C'est très important.

M. Bédard: Et je comprends... vous, est-ce que... pas vous, mais les gens dans votre organisation qui ont subi ça, quelles sont... bien, «subi», qui ont eu à contester, donc à faire... quelles conséquences ça a auprès de ces gens?

Mme Forcier (Michèle): Bien, c'est sûr que, quand la victime ne choisit pas son propre psychologue ou si le psychologue n'est pas spécialisé en posttraumato... c'est tellement un domaine différent, être victime d'acte criminel. Ce n'est pas un divorce, ce n'est pas une séparation, ce n'est pas un burnout, c'est très difficile de faire parler une victime. Alors, c'est sûr qu'on n'a pas le choix de faire affaire avec un spécialiste en post-traumato. Mais, présentement, ce n'est pas nécessairement ça. Si vous êtes chanceux, vous allez tomber sur ça. Parce qu'une simple banque, hein, qu'il y aurait à l'IVAC, une simple banque, là, de spécialistes en post-traumato, que, pour être psychologue là, il faudrait être spécialisé en post-traumato, encore-là, on sauverait des frais, parce que, si la victime est suivie un an par le psychologue et que ça ne fonctionne pas, comme ça arrive très souvent, que là, woups!, il en rencontre un spécialisé en post-traumato et qu'il le fait accepter, on vient de perdre un an. Un an, c'est de l'argent! Et on vient de faire reculer la victime qui n'a pas été traitée durant ce temps-là. Plus vite va aller... plus la victime va avoir, pour ses besoins, tous les spécialistes qu'elle a besoin, plus vite on va arriver à le remettre actif dans la société. Puis la même chose pour la famille. Plus vite on va arriver à aider les parents des victimes, plus vite on va les remettre fonctionnels. Parce que, dans plusieurs cas, des parents qui vont perdre un enfant vont arrêter de travailler pendant un an. On en a un dans notre groupe qui a été obligé d'arrêter de travailler pendant un an. Il reprenait un mois, il arrêtait...

Alors, plus vite on va donner ça aux victimes... ça, ça serait déjà un avantage de plus qui... il n'y aurait pas des coûts énormes à ça. Puis c'est sûr qu'un jour il va falloir penser à égaliser les indemnités, parce que, déjà là, les victimes se disent... eux autres ne regardent pas qui paie, là, eux autres se voient, là, comme victimes, puis, à côté, ton voisin, lui, peut être victime de la route, il va avoir ça, puis toi, tu... non, regarde, toi, toi n'y as pas droit, mais pourtant ce que tu as vécu est un million de fois pire que ce... sans dire qu'un accident de la route ce n'est pas grave, mais ce que tu as vécu, c'est un crime volontaire. C'est quelqu'un qui a décidé de t'agresser, de te tuer, de te violer, de t'enlever la vie, peu importe, et en même temps, bien, la conséquence, c'est que les proches subissent le contrecoup, aussi.

Alors, quand que les victimes regardent ça, eux autres, elles ne veulent pas savoir par qui est financé le régime. Ce qu'elles veulent avoir dans le fond, c'est justice. Il va falloir y arriver un jour.

M. Bédard: C'est sûr qu'on a importé des autres, je dirais, des autres régimes d'indemnisation et de régimes d'assurance collective qu'on s'est donnés, on a importé... on a fait du copier-coller, puis on n'aurait peut-être pas dû faire... Je prends note de vos commentaires là-dessus, entre autres au niveau au moins d'avoir quelqu'un qui a une compétence très particulière dans ces matières-là, parce que ce n'est pas tout thérapeute qui peut commencer à suivre quelqu'un.

Mme Forcier (Michèle): Non, surtout pas en psychologie. C'est très important pour les victimes de criminels, parce qu'elles sont détruites psychologiquement.

M. Bédard: Vous savez qu'actuellement les victimes, les proches ne sont pas visés par le projet de loi. Vous le savez, hein? Les proches des victimes. Merci, puis je vous félicite de votre courage. C'est beau de voir que des gens peuvent transformer les événements les plus malheureux en luttes puis en combats, puis d'une façon aussi digne. En tout cas, je tiens à vous féliciter, tous deux, et votre organisation aussi.

Mme Forcier (Michèle): Ça nous a fait plaisir.

Le Président (M. Descoteaux): Ça va? Merci, Mme Forcier, M. Laforest. Merci de votre présence devant la commission. Nous suspendons jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 26)

 

(Reprise à 20 h 10)

Le Président (M. Descoteaux): Donc, je constate que nous avons quorum. La Commission des institutions poursuit ses travaux, à savoir les consultations particulières sur le projet de loi n° 25. Nous recevons le Barreau du Québec, représenté par Me Marc Sauvé, Me Janick Perreault et Me Éric Cloutier. Bienvenue devant la Commission des institutions. Vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, suivies d'une période d'échange respective, de part et d'autre, du côté ministériel et de l'opposition, de 15 minutes chacune. Donc, la commission vous écoute.

Barreau du Québec

M. Sauvé (Marc): Alors, merci beaucoup, M. le Président de la commission. M. le ministre, mesdames messieurs les membres de la commission, mon nom est Marc Sauvé. Je suis directeur du Service de recherche et de législation au Barreau du Québec, et, pour la présentation du Barreau, je serai accompagné, à ma droite, de Me Janick Perreault, qui est avantageusement connue dans le domaine du droit administratif mais plus particulièrement dans le domaine de la santé et sécurité au travail, les accidents de la route et l'IVAC aussi, de temps à autre.

Le Président (M. Descoteaux): Elle est connue par nos commissions effectivement.

M. Sauvé (Marc): Oui. Et Me Éric Cloutier, qui est en pratique générale et qui notamment pratique en droit administratif, en droit criminel et pénal. Alors, comme vous le savez, les observations et les commentaires du Barreau du Québec ont été consignés... ou sont consignés dans une lettre qui a été acheminée au ministre de la Justice, M. Yvon Marcoux, dans une lettre donc du 19 mai 2006, une lettre du bâtonnier du Québec, Stéphane Rivard.

Il importe de souligner d'abord que le projet de loi comporte certains aspects positifs, qui méritent d'être soulignés de façon plus particulière. Notamment, il s'agit de la réadaptation psychothérapeutique, qui est maintenant ou qui sera accessible aux proches des victimes. Il y a aussi une certaine augmentation des indemnités pour frais funéraires que l'on peut constater dans le projet de loi. Pour les autres aspects du projet de loi, j'inviterais Me Janick Perreault à prendre la parole.

Mme Perreault (Janick): Alors donc, effectivement il y a des aspects positifs, et je vais peut-être m'attarder plus sur les aspects négatifs, sur le projet de loi. Alors, au niveau de l'augmentation des frais funéraires, oui, il est heureux de voir qu'il y a une augmentation. Cependant, l'augmentation à 3 000 $ nous apparaît non suffisante, et en fait même le projet de loi n° 106, qui avait été sanctionné en 1993, prévoyait déjà une somme plus élevée à l'époque, et à l'époque c'était de 3 386 $. Cette somme, revalorisée en date d'aujourd'hui, vaudrait un peu plus de 4 200 $. Donc, on se dit: Si en 1993 on reconnaissait que ça devait être au moins de 3 386 $, on ne voit pas que les coûts ont diminué depuis ce temps, donc on devrait augmenter ce montant.

Toujours en matière de décès, au-delà des frais funéraires, ce qui est aussi triste évidemment, là, c'est la perte de l'être cher. Or, les montants sont peu élevés, et celui qui nous apparaît très peu élevé, c'est celui qui est prévu pour les parents d'une victime qui décède, là, un enfant mineur qui décède d'un crime, et c'est l'article 7 dans la loi actuelle. On prévoit que c'est 2 000 $. Et donc, on se dit: Ça ne devrait pas être seulement les frais funéraires qui devraient être augmentés, mais également l'indemnité de décès qui est versée aux parents. Et l'article 7 actuel de la loi prévoit que cette indemnité est versée pour le parent qui a la garde physique. Alors, dans un contexte de société où il y a des familles reconstituées, etc., ça devrait être modifié.

Tantôt, j'ai parlé du projet de loi n° 106, eh bien, en fait le projet de loi n° 25 donc ne revoit pas le processus d'indemnisation, l'indemnisation elle-même des victimes, alors que le projet de loi n° 106, en 1993, le revoyait. Donc, nous pensons que ça devrait aussi faire l'objet de la réforme de revoir l'indemnisation elle-même des victimes, laquelle est faite en fonction d'une loi qui date de 1931. Donc, elle devrait être actualisée.

Pour ce qui est des proches, donc le projet de loi n° 25 parle de la réadaptation psychothérapeutique des proches, ce qui est une excellente chose. Il y a deux points que je voudrais mentionner là-dessus cependant, c'est lorsqu'on voit, à l'article 2 du projet de loi, qui réfère à l'article 5.1, le paragraphe 1°, on mentionne donc qu'il y aura une réadaptation psychothérapeutique qui pourrait être accordée à un proche lorsque cette réadaptation sera considérée utile. Or, on préférerait un fardeau de preuve plutôt qu'un pouvoir discrétionnaire. Donc, plutôt que d'indiquer que «lorsqu'il considère», il devrait plutôt être mentionné «lorsqu'il est démontré que c'est utile». Et donc, c'est plus facile, je pense, là, de se décharger d'un fardeau de preuve que de laisser ça à la discrétion de la commission, et, n'ayant pas le règlement, c'est encore plus difficile de savoir dans quelles circonstances cette réadaptation serait accordée.

Également, toujours à l'article 2 du projet de loi qui ajouterait l'article 5.1, le paragraphe 2°, donc on parle d'une réadaptation psychothérapeutique d'un proche lorsqu'il y un homicide ou un enlèvement. Alors, je pense qu'il y a beaucoup d'autres crimes qui laissent les proches dans un état qui nécessite une réadaptation psychothérapeutique, et notamment en matière d'agression sexuelle. Je pense qu'au Québec il y a plus souvent de viols que d'enlèvements, et donc c'est un exemple de crime où on devrait penser à la réadaptation psychothérapeutique des proches, pour plusieurs autres crimes que l'homicide et l'enlèvement.

Et mon dernier point que je voudrais mentionner, c'est l'article 7 du projet de loi, où on parle donc d'une entrée en vigueur à partir d'une date précise. Nous, on pense qu'il devrait y avoir une application immédiate, et par conséquent un proche d'une victime d'un crime survenu hier pourrait donc avoir le droit à une réadaptation, et nous croyons que cette personne-là peut nécessiter cette aide tout autant que le proche d'une personne qui sera victime d'un crime demain. Donc, on demanderait une application immédiate de la loi. Voilà.

M. Sauvé (Marc): Alors, c'est essentiellement... je voudrais aussi ajouter que, depuis quand même plusieurs années, le Barreau plaide pour l'harmonisation des régimes d'indemnisation pour des raisons de justice sociale, cohérence législative. Mais, d'une façon plus particulière, la question de la discrimination des victimes d'actes criminels doit être portée à l'attention du législateur, à savoir qu'il semble un peu anormal que les victimes d'actes criminels soient traitées différemment selon qu'elles se trouvent soit dans un contexte d'accident du travail ou dans un contexte d'accident de la route ou dans d'autres circonstances. Alors, on pense qu'il devrait y avoir un effort quand même d'harmonisation des traitements des victimes d'actes criminels. Je ne sais pas si mon confrère voudrait ajouter? Oui.

Le Président (M. Descoteaux): Me Éric Cloutier.

M. Cloutier (Éric): Certains points qui avaient été notés également de notre part, c'est au niveau de la concordance des articles prévus à l'annexe que la loi couvre, donc les infractions criminelles. Alors, on s'est rendu compte que ce n'était pas tout à fait à jour avec le Code criminel actuel, notamment l'exemple qu'on avait, c'est l'article 153, qui n'est pas représentatif, tel que décrit, à celui qu'on retrouve aujourd'hui dans le code. Alors ça, évidemment, ça pourrait être réajusté en conséquence. Il y a également la problématique que le Code criminel, c'est de juridiction fédérale, et, nous, notre loi est de juridiction provinciale, évidemment. Donc, c'est plus difficile d'effecteur un suivi pour toujours suivre le Code criminel. Ce qui pourrait être recommandé à cet effet-là, c'est de mettre une clause un peu fourre-tout qui dirait: Incluant les infractions de même nature actuelle et future. Parce qu'évidemment le Code criminel est toujours en ascension, donc il y a toujours d'autres infractions qui vont venir se rajouter qui pourraient être révisées, et ce serait un peu déplorable de voir une victime se voir refuser un droit parce que l'article n'était pas prévu à la loi en tant que telle.

Alors ça, c'est un problème qu'on avait vu. Et il y a également la question de la suramende. On a vu qu'il y avait eu un amendement au Code de procédure pénale qui prévoyait une suramende de 10 $ qui était attribuable à la CAVAC, ce qui est très bien. Évidemment, il y a toujours une question de financement pour tout régime, alors, dans ce cas-ci, nous, ce qu'on pense, c'est qu'il pourrait y avoir également une suramende qui serait prévue, mais, cette fois, destinée à l'indemnisation des victimes. Alors, c'est quelque chose qui se fait, je crois, en Alberta, si je ne m'abuse.

Mme Perreault (Janick): Manitoba.

M. Cloutier (Éric): Manitoba. Alors, c'est quelque chose qui serait possible ici puis qui pourrait être intéressant au niveau financement. Ça complète.

Le Président (M. Descoteaux): Me Sauvé, ça va? Donc, M. le ministre.

M. Marcoux: Oui. Alors, merci, M. le Président. Merci, Me Sauvé et Me Perreault et Me Cloutier, d'être là ce soir, à cette heure-là, de prendre votre soirée, et je voudrais vous remercier également de la présentation que vous avez faite ainsi que de la lettre que vous nous avez transmise.

J'avais peut-être un commentaire d'abord, et vous pourrez réagir aussi, sur la question des frais funéraires, que vous soulevez avec raison d'ailleurs. Vous notez qu'en 1993 c'était plus élevé. C'est bien sûr, évidemment, la loi de 1993 n'a pas été mise en vigueur non plus par aucun des gouvernements, toutes dénominations politiques confondues, premièrement. Deuxièmement, si ma mémoire est bonne, la Régie des rentes, c'est 2 500 $, la CSST, c'est 2 657 $, et la Société de l'assurance automobile du Québec, c'est 4 309 $. Peut-être que, Mme Perreault, vous êtes plus au courant que moi pour la SAAQ, mais c'est à peu près ça, de mémoire.

Mme Perreault (Janick): Vous avez les bons chiffres.

n(20 h 20)n

M. Marcoux: Évidemment, vous dites: Bien, en Ontario, c'est 9 000 $. Je peux comprendre ça. Évidemment, en Ontario, quand je regarde l'ensemble... les investissements faits par l'Ontario dans l'indemnisation de victimes d'actes criminels, selon en tout cas le ministère de la Justice du Canada, selon ce que le ministère de la Justice du Québec a relevé, en 2004-2005, c'est un montant de 27 millions, à peu près, payé. Au Manitoba, auquel vous avez fait référence, c'est 3 millions. Je comprends que la population est plus petite, mais, toute comparaison gardée, là. Et, au Québec, pour la dernière année, c'est plus de 70 millions qui a été consacré, et avec raison d'ailleurs, je pense que ça représente une valeur de justice sociale, mais qui a été consacré aux victimes d'actes criminels. Alors, si vous le regardez, là, en tout cas certainement au Canada, c'est au Québec que le régime indemnise, là... Et ce n'est pas le plus équitablement, là. Il y a des choses à changer, mais globalement je pense qu'il y a l'investissement le plus important en ce qui a trait au régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Puis, bien, bien... je l'ai expliqué cet après-midi, dans le fond le 3 000 $, on a pris le 600 $ puis on l'a indexé, là, avec l'indice des prix à la consommation depuis cette période-là. Et la loi prévoit que dorénavant ce serait indexé, de sorte que le montant, là, évoluerait au fur et à mesure, tout en reconnaissant très bien que des frais funéraires, là, ça coûte plus cher que ça. Je comprends bien ça, là, tu sais. Mais, à un moment donné, on a dit: Comment on peut l'établir? On peut bien fixer un montant puis ne pas mettre la loi en vigueur, mais je pense que ça, ça n'avancerait pas surtout les proches des victimes. Alors, pour revenir... mais je voulais faire le lien avec l'Ontario. Je pense que, si vous regardez globalement ce qui est consacré, là, aux victimes, pour aider les victimes d'actes criminels.

Il y a, je pense, une recommandation que je vous faites, et c'est vous, Me Sauvé... non, je pense, c'est Me Perreault, sur justement ce souhait d'harmoniser le régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels avec les autres régimes, comme ceux des accidents de la route et pour les victimes d'accidents du travail. J'avais deux questions. La première: Est-ce qu'il y a d'autres juridictions à votre connaissance où c'est harmonisé, où les victimes d'actes criminels reçoivent les mêmes montants que les victimes d'accidents du travail, tout est harmonisé? Ça, c'est ma première question. Ma deuxième question, c'est: Est-ce qu'il n'y a pas une différence entre les régimes, le régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels, qui est vraiment un régime basé, avec raison d'ailleurs, sur ce que j'appelle la solidarité sociale et les valeurs de justice sociale, avec les deux autres régimes, qui sont des régimes d'assurance où, quand vous allez, par exemple, immatriculer votre voiture, vous payez une prime, puis, si vous travaillez, l'employeur paie une prime? Alors, voilà les deux premières questions.

Le Président (M. Descoteaux): Me Perreault.

Mme Perreault (Janick): Oui. Alors, en réponse à ces deux questions, il est difficile quelque peu de comparer l'uniformisation ailleurs sur les différents régimes, parce qu'ailleurs, entre autres, il y a presque toujours des droits de poursuite, et il n'y a pas de régime d'indemnisation équivalent à ce qui se fait au Québec, où on abolit des droits de poursuite. Il y a beaucoup de différences. Comme, par exemple, en Ontario, il y a des droits de poursuite civile. Donc, il y a des particularités qui sont différentes; donc, au niveau de cette uniformisation, c'est plus difficile à comparer. Ceci dit, le Parti libéral du Québec s'était engagé en fait à revoir cette uniformisation des différents régimes d'indemnisation. Et, pour une victime d'un crime, que le crime soit commis dans le cadre du travail, ou au volant d'une automobile, ou avec, par exemple, un couteau, je ne sais pas, moi, dans une ruelle, il est difficile de comprendre que l'indemnisation va être différente parce qu'on n'est pas dans le même régime. Il s'agit d'un même citoyen qui a été victime d'un crime, et on pense que tout le monde devrait être égaux devant la loi.

À votre deuxième question, au niveau du fait ce que n'est pas un régime d'assurance, en fait on a un autre régime d'indemnisation qui n'est pas un régime d'assurance, ce sont les victimes... d'indemnisation à la suite d'un vaccin. Alors, c'est un peu sur le principe d'une solidarité sociale et comme les victimes d'un crime, et on indemnise plus généreusement ces victimes-là que les victimes d'un acte criminel; on les indemnise de façon exactement pareille comme les victimes d'un accident d'automobile, en fait on reprend la Loi sur l'assurance automobile. Donc, je pense que c'est un exemple. Donc, ce n'est pas parce que c'est une assurance ou non, je pense qu'il faut être égaux pour tout le monde. Et, pour les citoyens, là, quand ils sont victimes d'un événement, peu importe le régime qui devrait les indemniser, ils devraient être indemnisés de la même façon.

M. Marcoux: Mon autre question: Est-ce que... Quand je vous donnais, tantôt, les statistiques, en tout cas selon ce que le ministère de la Justice du Canada a indiqué, là, c'est qu'au Québec globalement le régime d'indemnisation annuellement, on investit le plus dans l'indemnisation des victimes d'actes criminels, à moins que vous ayez d'autres statistiques, là, mais la différence est quand même importante déjà.

M. Cloutier (Éric): M. le Président. Alors, simplement, il y a le fait également de dire que, dans le cadre de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, on parle d'une rente à vie, on parle d'un montant qui va lui être versé bimensuellement à vie. Évidemment, je n'ai pas de statistiques à ce niveau-là. Au niveau de coûts, on présumait qu'il pouvait y avoir une certaine variante versus un régime où il y a une indemnité qui va être payée, il y a un système de réadaptation qui va être en place, et, à 65 ans, à compter de 65 ans, l'indemnité est réduite jusqu'à l'âge de 68 ans. Alors, évidemment, au niveau de coûts administratifs, je n'ai pas les chiffres, mais ça pourrait avoir un impact.

M. Marcoux: Je pense que ce n'est pas tellement les coûts administratifs, c'est les coûts globaux du régime. Et, quand... lorsque...

Une voix: ...

M. Marcoux: Non, non, mais l'investissement, c'est-à-dire les paiements de rente, ce à quoi vous faites allusion, donc sont prolongés au-delà de 65 ans, puis ça peut être toute la vie durant. Et ce que vous dites, vous, c'est?

Mme Perreault (Janick): En fait, en Ontario ? vous compariez avec l'Ontario ? l'Ontario, il y a un maximum, et ça s'arrête à ce maximum. Alors, à ce moment-là, évidemment qu'on vient de... on peut... vous venez de réduire le montant qui doit servir à financer le régime. Alors qu'ici les gens sont indemnisés à vie, donc il n'y a pas de montants forfaitaires pour les séquelles, la personne a une rente, contrairement à nos autres régimes d'indemnisation, ce qui entraîne donc des coûts. Alors, évidemment quelqu'un qui vit longtemps. Donc, il y a cet aspect-là, qu'on disait que ça peut être une façon de revoir le régime et qui pourrait réduire le coût du régime, non seulement en termes de gestion.

M. Marcoux: C'est-à-dire... Bien, je veux juste... Bien, là-dessus, d'ailleurs, le point que vous soulevez, il y a une iniquité actuellement dans les modalités d'indemnisation. Je ne sais pas si c'est... Me Cloutier, à laquelle vous référiez, là, mais, pour une même séquelle corporelle, le montant qui est reçu par la victime n'est pas le même selon le revenu de... son revenu de salaire ou de rémunération. Alors, ça a à être revu parce que ça devient inéquitable. Puis vous avez tout à fait raison: les autres régimes ont modifié, à la fois les accidents de travail et la SAAQ, ce mode d'indemnisation là. Alors, c'est...

Et c'est pour ça que j'ai indiqué de mettre sur pied un groupe de travail, pour revoir l'ensemble du régime, parce qu'actuellement il y a même des, à mon avis, ce que j'appelle, moi, des iniquités internes dans les modalités d'indemnisation.

Mme Perreault (Janick): En fait, c'est dans cet objectif, quand je disais que le projet de loi n° 106 avait revu l'indemnisation de façon générale, alors que le projet de loi n° 25 ne le revoyait pas. Et c'est que ce qu'on invitait en fait donc à faire, là...

M. Marcoux: Vous avez tout à fait raison.

Mme Perreault (Janick): ...de revoir tout le processus d'indemnisation.

M. Marcoux: Et vous avez raison là-dessus, je pense qu'il faut le faire. D'ailleurs, je me dis que, si ça avait été simple, ce serait fait. Depuis 1972 qu'il y a eu beaucoup de tentatives de réforme et de refonte ? j'en ai fait l'historique d'ailleurs ? et à peu près à tous les deux, trois ans. Ce n'est pas plus un gouvernement que l'autre, mais finalement, là, il n'y a rien qui s'est fait. Alors, mon extrapolation, c'est que, si ça n'avait pas été compliqué, ce serait déjà réglé; malheureusement, ce ne l'est pas encore.

Maintenant, ma question... J'arrive avec une question plus précise, là. Et vous dites: évidemment, le projet de loi est loin de constituer une révision significative du régime. Vous avez tout à fait raison. D'ailleurs, ce n'est pas l'objectif, on l'avait dit dès le début. Il y a deux bonifications que nous apportons et... puis le financement est là aussi pour les apporter. Je veux dire, ça, c'est important, vous pourrez en discuter pendant longtemps, mais, si finalement il n'y a pas de financement, bien on ne peut rien faire.

Ma question est la suivante: Est-ce que vous considérez qu'il serait préférable d'attendre une grande révision du régime plutôt que de procéder plus rapidement avec une bonification qui apporte une mesure concrète, qui n'est pas complète mais qui au moins apporte une bonification à court terme?

Mme Perreault (Janick): Écoutez, je pense que, pour tous les proches qui nécessitent une aide psychothérapeutique, ils vous diraient: Non, n'attendez pas. Alors, évidemment que, sur cet aspect-là, c'est un gain pour des gens. Et, non, il ne faut pas attendre, il faut dès maintenant voir à les indemniser, ces personnes-là, à leur apporter l'aide.

M. Sauvé (Marc): Par contre, j'ajouterais peut-être que l'adoption de ce projet de loi là ne devrait pas, souhaitons-nous, avoir pour effet de retarder la révision dont vous avez parlé. Alors, ce serait comme une phase I, mais on s'attendrait à une phase II.

n(20 h 30)n

M. Marcoux: ...et je suis tout à fait d'accord avec vous. Et, là-dessus, je pense que, si... J'ai annoncé qu'il y aurait un groupe de travail, qui serait présidé par quelqu'un de l'externe, et, moi, je peux vous dire que c'est clair que la priorité, là, c'est de pouvoir procéder. Mais ça, on ne peut pas faire ça en trois mois. Je pense que ça, là, ce serait... et je ne peux pas non plus garantir d'obligation de résultat à l'autre bout en l'espace de six mois. Tu sais, ce serait conter des chansons, là, mais dire au moins: Est-ce qu'on peut... puis procéder puis essayer de le faire, de le faire avancer, le dossier. Et ça, c'est l'intention très, très ferme. Oui?

M. Sauvé (Marc): Sur ce groupe de travail, seriez-vous ouvert à avoir un représentant du Barreau?

M. Marcoux: Bien, écoutez, on n'y avait pas pensé, mais on va regarder la formation. On en discute d'ailleurs avec les groupes aussi à cet égard-là. Ce que j'avais indiqué aux représentants des groupes ? puis ça, je suis très, très ouvert, hein ? c'est que je ne voyais pas de représentants des groupes de victimes sur le comité, parce que je pense que, oui, une consultation, il faut qu'ils aient la marge de manoeuvre aussi pour pouvoir s'exprimer, puis ça, je pense que c'est bien important... Maintenant, je ne veux pas... Écoutez, là, je n'ai pas d'objection de principe, on va le regarder. Je reçois votre suggestion. Il y a peut-être d'autres groupes aussi, là, qui voudraient le faire, alors on regardera ça.

Pour ce qui est de la date d'application, j'ai déjà indiqué cet après-midi que, moi, je n'avais pas d'objection, là, puis je ne pense pas qu'il y ait de problème à dire «à compter de la date de l'adoption», donc, le plus vite il sera adopté, bien, plus vite il pourra devenir en vigueur. Moi, je n'ai aucun problème là-dessus, là. Je pense que c'est aussi une garantie. Évidemment, il y aura le règlement à finaliser, mais, au moins, pour les frais funéraires, ça pourrait, si je comprends, s'appliquer immédiatement pour toutes les personnes qui malheureusement, on ne le souhaite pas, mais ça arrive. Donc, alors, là-dessus...

D'ailleurs, il y a des groupes aussi qui ont suggéré une évaluation après une période maximale de deux ans. Moi, j'ai même suggéré que l'IVAC puisse, dans son rapport annuel, dès cette année, si la loi entre en vigueur, indiquer... faire un résumé, là, de l'application de la loi, combien il y a de proches, combien ça a coûté, pour justement pouvoir l'évaluer? Parce qu'il n'y a pas... en tout cas quant à nous, on a fait des prévisions, le ministère avec l'IVAC, mais, tu sais, ce n'est pas mathématique, là. Parfois, les prévisions peuvent s'avérer mauvaises, c'est-à-dire que les résultats concrets peuvent être plus ou ça peut être moins. Je pense que c'est important de voir exactement pour ne pas que ce soit mélangé avec le reste. Ça, je pense que c'est clair, là, il y a une somme pour ça puis ça doit servir aux proches et non pas à d'autres choses.

Le Président (M. Descoteaux): Encore une minute.

M. Marcoux: Encore une minute. J'avais une question, une dernière question donc. On a beaucoup parlé aujourd'hui de rétroactivité, et possiblement de rétroactivité pour une catégorie ? je dis bien possiblement, là, ce sont des hypothèses;  pour une catégorie ? de proches de victimes. C'est quoi, votre opinion là-dessus?

Le Président (M. Descoteaux): Me Perreault.

Mme Perreault (Janick): Question immédiate. Alors, c'est-à-dire de ne pas limiter à un crime survenu à partir de telle date. C'est application immédiate de la loi et donc tout proche d'une victime qui a eu un crime et dans la mesure où la réclamation est faite dans les délais, etc., et qui se qualifie et selon les conditions qu'il y aura à l'éventuel règlement, que le proche puisse avoir droit à cette aide psychothérapeutique peu importe la date du crime, contrairement à ce qui est prévu dans le projet de loi, où on voulait mettre une date, ou en tout cas on semblait vouloir mettre une date où est survenu le crime.

M. Marcoux: Oui, mais on va vous dire exactement pourquoi. C'est très simple. C'est qu'il y a 500 000 $ de disponibles cette année et 1,5 million à compter de l'an prochain, récurrents. Alors, les prévisions faites ? encore une fois on va en rediscuter, là, puis ça va être disponible ? elles indiquent que, si on l'ouvre à tout le monde et sans aucune... tous les gens qui veulent en profiter, quel que soit le moment ou la date de commission du crime, les prévisions, c'est qu'on n'arrivera pas, dans les montants de financement.

Mme Perreault (Janick): Mais c'est pour ça que, nous, on ne parle pas de rétroactivité, on parle d'application immédiate, ce qui est différent. L'application immédiate, encore faut-il que le proche donc soit dans le délai du processus de réclamation. La loi prévoit un délai. Donc, qu'il soit dans ce délai-là. Alors, déjà là, donc, si effectivement il y a une limite au niveau des sommes investies, on réduit de toute façon le nombre de réclamations et non pas de proches, il y a longtemps qu'il y aurait eu des traitements qui viendraient demander le remboursement. Donc, c'est pour ça que, nous, on parlait d'application immédiate et non pas de rétroactivité.

M. Sauvé (Marc): Et est-ce qu'il n'y a pas des sources de financement qui pourraient être explorées? Mon ami ici a exploré la possibilité, là, de la suramende, est-ce qu'il n'y a pas des choses qui peuvent être faites justement pour améliorer le sort de ces victimes d'actes criminels?

M. Marcoux: Possiblement, mais, vous le savez comme moi, on ne peut pas faire ça en l'espace de quelques mois, là. Je pense que vous connaissez le processus. Et je pense cependant que c'est une des questions qui devraient être examinées par le groupe de travail lorsqu'on parlera du financement du régime.

Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre, le temps est écoulé du côté ministériel. Vous aurez, M. le député le député de Chicoutimi, 16 minutes.

M. Bédard: Merci, merci, M. le Président. Alors, Me Sauvé, Me Tremblay... Me Perreault, excusez-moi, ma femme s'appelle Janick Tremblay, c'est pour ça. Ha, ha, ha! Alors, et maître... et là j'ai oublié votre nom, excusez.

M. Cloutier (Éric): Cloutier.

M. Bédard: Me Cloutier. Alors, merci d'être présents en si peu de temps, de venir présenter vos commentaires.

Tout d'abord, j'aimerais revenir sur l'idée du fonds, là, parce que tout ça, là, ce qui est étonnant, on parle de... on est dans des principes, en même temps il y a des réalités budgétaires. On sait qu'à une certaine époque il y a même, bon, la suramende de 10 $ qui avait été imposée pour justement servir à des fins particulières. Ce que je comprends de vos représentations, c'est qu'afin de couvrir plus de monde plus rapidement d'ailleurs il y aurait sûrement lieu de regarder la possibilité de se financer avec la même, entre guillemets, la même technique, qui auprès du public ne soulève pas de grand questionnement ou de grandes vagues, puisque la fin est des plus nobles et des plus justifiables, là.

M. Cloutier (Éric): C'est exact. Alors, c'est le même principe que pour la CAVAC, ce qu'on trouve louable, parce qu'évidemment ces organismes-là ont besoin de ressources, mais je pense que ne serait pas mal vu de la part du public que de faire la même chose du côté de l'indemnisation, comme ça se fait au Manitoba. Alors, évidemment, c'est une source à ne pas négliger.

M. Bédard: Sur les coûts, vous avez parlé rapidement aussi des coûts administratifs. J'ai eu des discussions. On me dit que les régimes d'indemnisation ailleurs ont des coûts administratifs moins élevés. Avez-vous, maître... Et ça, là, je n'ai pas d'autres données, là. Mais est-ce que c'est réel?

M. Cloutier (Éric): Malheureusement pour moi, je n'ai pas eu la chance de... peut-être ma collègue, mais je n'ai pas la chance d'explorer cette avenue-là, là.

Mme Perreault (Janick): Non, mais ce qu'on disait, et c'est pour ça qu'on donnait l'exemple des rentes à vie. Que ce soit ici, dans nos autres régimes d'indemnisation, on n'indemnise pas à vie, et dans d'autres provinces non plus, et, dans d'autres provinces, non seulement ce n'est pas à vie, mais parfois même on arrête lorsqu'on atteint un certain seuil. Et, enfin, il me semble que c'est le gros bon sens que, si, à toutes les deux semaines, on envoie un chèque, donc il faut qu'il y ait un employé qui va préparer le chèque, qui va l'envoyer, il y a de la papeterie, il y a des timbres postaux, etc., et on fait ça à toutes les deux semaines à vie, pour des montants très minimes, parce que justement on ne donne pas de montant forfaitaire pour les séquelles, et ça, je pense que c'est des frais de gestion qui augmentent le coût du régime, alors que, si on donnait un montant forfaitaire, donc, si je reviens à la papeterie, la personne qui fait le chèque, etc., c'est une seule fois et non pas à toutes les deux semaines, à vie. Vous imaginez, quelqu'un qui a 15 ans lorsqu'il est victime d'un crime et qui meurt à 95 ans, évidemment que ça augmente le coût du régime, là ? c'est un, et donc sur plusieurs, là! Alors, on dit que ça, ça peut être une idée pour réduire les coûts de gestion. Et, quand on regarde dans les autres régimes d'indemnisation, c'est ça, à 65 ans, les rentes sont réduites pour cesser à 68 ans.

M. Bédard: O.K. Non, parce que j'ai entendu même M. Boisvenu, dans une entrevue, aussi faire référence aux coûts beaucoup plus élevés qui vont à l'indemnisation vis-à-vis l'administration, dans les cas purement du régime, je vous dirais, et j'essaie de le comprendre. On n'a pas pu l'explorer avec lui, là, c'est très rapide aujourd'hui. Et on aura sûrement l'occasion de mieux le comprendre lors des étapes subséquentes.

Sur les délais pour fins de réclamation en vertu de la loi, c'est combien sur le régime d'indemnisation, là, pour les victimes?

Mme Perreault (Janick): C'est une année.

M. Bédard: C'est une année. Parfait.

Concernant le processus de révision, pouvez-vous m'en dire plus un peu? Je pense que c'est le Protecteur du citoyen ? on aurait peut-être avantage à faire une photocopie, là ? qui recommandait vraiment que tout l'aspect... il y a certains aspects actuellement où il y a un appel possible au Tribunal administratif. Lui recommandait que, sur l'ensemble, on puisse avoir une révision au Tribunal administratif du Québec. Pouvez-vous nous en dire plus un peu relativement à ce qu'il est possible et ce qu'il n'est pas possible actuellement de contester?

Mme Perreault (Janick): Il y a deux indemnités, il me semble, il y a deux cas dans la loi qu'effectivement on ne peut pas contester devant le Tribunal administratif, je pense que c'est lorsqu'on donne le maximum ? ça, je ne l'ai pas regardé; le maximum ? qui est prévu dans la loi, et il y a un deuxième cas. Et il y a le délai qui est prévu selon le sujet qui est contesté. Alors, le délai de contestation est différent. Voilà.

M. Bédard: Donc là, ce qui est possible aux gens, c'est simplement la révision devant... pas devant, mais par le...

Mme Perreault (Janick): Dans la mesure où il y a une révision, il y a aussi une contestation devant le Tribunal administratif.

M. Bédard: O.K., dans tous les cas. O.K. Et, dans les deux cas que vous me dites, à ce moment-là, c'est une décision finale et sans appel de l'organisation.

Mme Perreault (Janick): Le délai, il me semble, de mémoire, là, c'est 45 jours et 90 jours, dépendamment si ça porte sur une incapacité ou sur une indemnité.

M. Bédard: O.K. Aviez-vous...

M. Cloutier (Éric): Je confirmais, c'est exact.

Mme Perreault (Janick): Les délais, c'est ça.

M. Cloutier (Éric): C'est administré par la CSST, puis c'est un peu le même processus, effectivement.

n(20 h 40)n

M. Bédard: Sur les frais funéraires, je regardais le mémoire au Conseil des ministres, effectivement on passe de 600 $ à 3 000 $, mais je vois ailleurs, dans d'autre provinces, comme en Colombie-Britannique, c'est 5 000, regardez, le Manitoba, 5 400, Nouveau-Brunswick, 4 000, et l'Ontario, 9 000. Ce que vous dites finalement, et là je comprends votre logique par rapport à 1993, mais, 3 000, évidemment on n'est pas dans le «target», là.

Mme Perreault (Janick): Et c'est ça. Et, quand parlait d'harmonisation avec les autres régimes, c'est que nos autres régimes ici, au Québec, les frais funéraires, le montant est plus élevé. Alors donc, c'est pour ça qu'on disait d'au moins, si, en 1993, on a jugé que ça valait 3 386, on se dit qu'en 2006 ça ne vaut pas moins cher, et le 3 386, revalorisé, là, vaut plus de 4 000.

M. Bédard: La SAAQ, c'est 4 309, c'est ça que je regardais, là.

On parle d'harmonisation; évidemment, on n'est pas dans ce registre-là actuellement, là, avec les autres régimes, peu importe leur nature, là, peu importe avec ce qui avait été dit, si on était dans une réforme, une véritable réforme, là, quel autre élément mériterait effectivement d'être harmonisé? Parce que là on parle des frais funéraires, c'est comme quelque chose de symbolique, là, je le comprends, mais j'ai l'impression qu'il y a bien d'autres irritants, hein?

Mme Perreault (Janick): ...le processus d'indemnisation complet. Alors, je le mentionnais tout à l'heure, c'est... l'indemnisation se fait sur une loi qui est très vieille et donc qui est désuète et qu'il faut qu'elle soit revue. Alors, que ce soit au niveau de l'indemnité de remplacement de revenu, le droit de retour au travail, que ce soient les indemnités de décès de façon générale, non seulement les frais funéraires, là, mais les indemnités de décès qui sont versées, devraient aussi être revues. Alors, il y a différents aspects. Et c'est sur l'indemnisation complète. Les montants...

M. Bédard: Pourquoi simplement les frais? Et là je me le demandais, là; évidemment, ça paraît bien, les frais funéraires, mais pourquoi avoir ciblé seulement les frais funéraires, selon vous?

Mme Perreault (Janick): Parce que c'est dans le projet de loi.

M. Bédard: Non, là, ça, je l'ai lu. Ha, ha, ha! Mais, je me dis, par rapport à toute l'harmonisation, pourquoi avoir tout d'un coup pris... pas tout d'un coup, mais avoir pris les frais funéraires? Mais il y aurait eu d'autres éléments qu'on aurait pu aussi harmoniser, tant qu'à faire du cas-par-cas, là?

Mme Perreault (Janick): Je vous dirais, à ce moment-là, il faudrait demander au gouvernement qui a fait le projet de loi.

M. Bédard: Mais peut-être vous...

Mme Perreault (Janick): Mais c'est ça, sauf que le montant des frais funéraires était très bas, alors j'imagine que les pressions étaient élevées, là, mais...

M. Bédard: Il y avait quelque chose de symbolique là-dedans?

Mme Perreault (Janick): Ça m'est difficile pour moi de répondre, là, mais effectivement que le montant était très bas. Mais je vous dirais, si on y va, si on essaie de cibler... Quand je vous disais que c'est le processus d'indemnisation au complet qui doit être revu, mais, si on essaie de cibler ce qui serait le plus important, je vous dirais, en tout cas, moi, dans ma pratique, ce que je vois avec les victimes, ce serait plus les montants forfaitaires pour les séquelles. Alors, quelqu'un qui perd un doigt a envie d'un montant forfaitaire pour la perte de son doigt maintenant plutôt qu'une petite rente qui lui sera versée à toutes les deux semaines et jusqu'à la fin de ses jours. En bout de ligne, ça représentera peut-être le même montant, sauf que ça ne paraît pas. Alors, la personne voudrait recevoir une somme globale, comme c'est prévu dans les autres régimes. Alors ça, je vous dirais, c'est une modification qui serait fort intéressante qu'elle soit faite rapidement.

M. Cloutier (Éric): J'ajouterais ceci, si vous me le permettez: peut-être la question de la réadaptation, évidemment. Alors, la réadaptation est un élément important à considérer, parce qu'évidemment le but, ce n'est pas de garder la personne sa vie durant dans le régime, c'est d'essayer à un moment donné de la réorienter et de lui permettre d'aller regagner un revenu. Alors, ce n'est pas à négliger, là, dans un projet éventuel.

M. Bédard: Je le pense aussi. Je lisais vos commentaires par rapport à l'article 2. D'abord, un, vous constatez, comme les autres aussi, là, bon, à partir du moment où on n'a pas le règlement, c'est plutôt dur de commenter les visées, là; on ne le sait pas, on aurait souhaité, nous aussi, avoir le règlement, parce que tout est dans le règlement. À partir du moment où on n'a pas le règlement, c'est comme si... Donc, ce qui fait que, même si on adopterait la loi là, il va falloir attendre le règlement quand même.

Alors, sur le deuxième alinéa, les mesures nécessaires, et là vous avez beaucoup de... vous soulevez un doute quant à l'utilisation, bon, les expressions «mesures nécessaires» et «réadaptation utile» laissent beaucoup de discrétion à la commission de santé dans les mesures à prendre au regard des victimes et de leurs proches. Est-ce que vous... Par quoi on pourrait remplacer ces termes?

Mme Perreault (Janick): En fait, ce qui est mentionné à l'article 2 du projet de loi, donc 5.1, le paragraphe 1°, vous pouvez voir, on dit que c'est «lorsqu'elle considère qu'une telle réadaptation est utile». Nous, ce qu'on suggère, entre autres, c'est, lorsqu'il est démontré qu'une telle réadaptation est utile, plutôt que «lorsqu'elle considère». On considère justement que le libellé tel que...

M. Bédard: ...entièrement discrétionnaire. Ce que vous me dites, «lorsqu'il considère», il n'y aura pas de possibilité de contestation, à la limite.

Mme Perreault (Janick): Bien, peut-être que oui, sauf que ça laisse place à une discrétion, alors que, si on met un élément objectif puis on dit: Lorsqu'il est démontré, dans la mesure où la personne se décharge de ce fardeau de preuve, eh bien elle a droit donc aux mesures de réadaptation. Donc, c'était au niveau du libellé qu'on suggérait qu'il y ait une modification.

M. Cloutier (Éric): Un agent pourrait juger... considérer qu'il y a lieu puis un autre agent pourrait considérer qu'il n'y a pas lieu. Comment un décideur peut trancher en révision là-dessus? C'est plus difficile. Alors que, quand on parle de démontrer, on peut établir des critères objectifs, qui évidemment seront établis par la jurisprudence et non par la loi, mais à un moment donné il va y avoir un barème qui va être fixé, ça va être plus facile, à tout le moins.

M. Bédard: Est-ce qu'on ne devrait pas renverser le fardeau, quant à ça?

M. Cloutier (Éric): Évidemment, c'est toujours la meilleure des solutions, mais... Et c'est sûr que, quand on facilite, à ce moment-là c'est l'organisme qui doit...

M. Bédard: Sauf preuve contraire, oui. Il y aurait vraiment une terminologie, hein? Parce que...

Mme Perreault (Janick): Cependant, quand on regarde les autres régimes d'indemnisation, c'est au réclamant de démontrer qu'il a le droit aux indemnités qui sont prévues à la loi.

M. Bédard: Quant au mot «utile», c'est ça, est-ce qu'on le conserve? Pas qu'on le conserve, est-ce qu'il y aurait moyen de...

Mme Perreault (Janick): Bien, en fait, ça, c'était un autre problème, c'est qu'on rend la réadaptation conditionnelle à la nécessité de réadaptation de la victime, et enfin ça va avec le paragraphe 2°, quand je disais qu'il faudrait l'élargir à d'autres crimes, et je donnais l'exemple de viol. On pourrait prendre l'exemple d'une agression sexuelle d'un enfant, peut-être que l'enfant s'en sort bien, mais peut-être que ses parents auraient besoin d'une réadaptation psychothérapeutique, peut-être qu'ils ont énormément de difficultés à vivre avec ce crime, et à ce moment-là l'utilité de la réadaptation serait réelle, par contre elle ne serait pas utile à la réadaptation de la victime elle-même. Donc effectivement on limite beaucoup les cas où la réadaptation serait utile.

M. Bédard: C'est qu'en vrai ce qu'on fait, c'est qu'évidemment on ne les considère pas comme des victimes, mais à la limite on limite même le soutien par rapport à la victime elle-même, là.

Mme Perreault (Janick): Et c'est pour ça qu'on disait que, si le paragraphe 2° est modifié pour ajouter... Et en fait, dans le meilleur des mondes, c'est de mettre l'ensemble des crimes qui sont prévus à l'annexe de la loi, et par conséquent, dès qu'on est un proche d'une victime et qu'il y a une nécessité d'une aide psychothérapeutique, selon les modalités qui seront prévues au règlement, bien la personne aurait le droit aux indemnités.

M. Bédard: Sur le deuxième paragraphe, vous parlez: «Prendre les mesures nécessaires», et là vous dites encore ? évidemment, c'est vague, là: «Prendre les mesures nécessaires pour contribuer à la réadaptation...» Les deux, là, les deux mettent les mesures nécessaires ? excusez-moi ? dans le premier aussi: «Prendre les mesures nécessaires pour contribuer à la réadaptation». Par quoi on pourrait remplacer ces termes pour être plus précis?

Mme Perreault (Janick): En fait, pour répondre, c'est qu'il faudrait voir ce que le règlement prévoit.

M. Bédard: Oui, mais...

Mme Perreault (Janick): C'est ça. Alors donc, quelles seront les mesures nécessaires? J'imagine que le règlement va les élaborer. Alors, nous, ce qu'on voyait comme problématique, c'est plus de laisser un pouvoir discrétionnaire et de limiter cette aide psychothérapeutique à seulement certains crimes, alors qu'on pense que tout crime peut nécessiter une aide psychothérapeutique pour les proches, là. Dans la mesure où on reconnaît que les proches sont aussi des victimes, ce qui est tout à fait louable, eh bien on doit le faire pour l'ensemble des crimes, et c'est pour ça que je donnais, entre autres, les crimes d'agression sexuelle et de viol, là, je pense que c'est un exemple qui peut être facilement envisageable, là, que ça peut nécessiter une aide psychothérapeutique pour les proches.

M. Bédard: Je relis le premier paragraphe par rapport à ce que vous me disiez tantôt, là, je le... «Prendre les mesures»... Donc: «La commission peut, conformément au règlement...» La commission, elle, elle peut...

Mme Perreault (Janick): Lorsqu'elle considère, et c'était ça. Alors, si vous...

M. Bédard: O.K., c'est elle, lorsqu'elle considère.

Mme Perreault (Janick): La commission, et c'est pour ça qu'on disait: Ça lui donne un pouvoir discrétionnaire...

M. Bédard: O.K. Là, j'avais peur que ce soit la victime. O.K., O.K., c'est...

Mme Perreault (Janick): ...ce qu'on trouve que c'est problématique, et on dit plutôt: Lorsqu'il est démontré qu'une telle réadaptation est utile. C'est dans ce sens-là qu'on disait: Changez ce pouvoir discrétionnaire pour mettre un fardeau de preuve.

M. Bédard: Lorsqu'une telle réadaptation... On pourrait... Prendre les mesures nécessaires pour contribuer à la réadaptation d'un proche d'une victime lorsque...

Mme Perreault (Janick): Lorsqu'il est démontré qu'une telle réadaptation est utile...

M. Bédard: Est utile, point.

Mme Perreault (Janick): ...donc changer le «lorsqu'elle considère» par «lorsqu'il est démontré», et donc la personne va démontrer, et j'imagine que le règlement va prévoir...

M. Cloutier (Éric): Pour vous donner un exemple... Si vous me permettez, je vais vous donner un exemple de ce qui pourrait... «lorsqu'il est démontré», ça peut être l'avis d'un médecin traitant qui dit que cette personne-là a besoin d'un suivi psychothérapeutique, puis à ce moment-là ce serait... Il ne faut pas le limiter à ça, mais je pense que ça peut être un bon exemple.

Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Chicoutimi, une dernière minute.

n(20 h 50)n

M. Bédard: Écoutez, je... Une dernière minute. Malheureusement, regardez, on a... Oui, trop vite. Je me disais aussi ? et là, vraiment, là, au risque de me mettre le pied dans la bouche, là ? mais, si on mettait «lorsqu'elle considère qu'une telle réadaptation est utile», point, et enlever «à la réadaptation de la victime». «Lorsqu'il est démontré», au lieu de «considère». Excusez-moi, là. «Lorsqu'il est démontré qu'une telle réadaptation est utile.»

Mme Perreault (Janick): Mais je pense que, si on modifie le paragraphe 2° pour ajouter des crimes, bien en fait 1° et 2° deviendraient un seul et unique paragraphe. Dans la mesure où on dit: Un proche d'une victime d'un crime est aussi une victime et a le droit à l'aide psychothérapeutique, là on n'a plus besoin de laisser donc ce droit-là dans le cas où cette aide serait nécessaire aussi à la réadaptation de la victime.

M. Bédard: O.K., mais, dans le cas qu'on ne fusionne pas les deux, est-ce que... Si on enlève «la réadaptation de la victime», est-ce que ce n'est pas de nature justement au moins à enlever ce qu'on disait? Donc, ne pas le voir nécessairement sous l'angle de la victime, mais aussi de la presque victime, parce que là on parle de gens qui sont presque victimes, là.

Mme Perreault (Janick): Mais je pense...

M. Bédard: Un parent dont le père... dont l'enfant est agressé, c'est sûr que ça doit être...

Mme Perreault (Janick): Mais je pense que ça...

Le Président (M. Descoteaux): Me Perreault, en quelques secondes seulement.

Mme Perreault (Janick): Si on enlève cet aspect-là, ça vient de toute façon donc d'ouvrir la porte à tous les proches pour toutes les victimes. Alors, c'est pour ça que c'est de mixer 1° et 2°, les paragraphes 1° et 2°.

M. Bédard: O.K.

Le Président (M. Descoteaux): Le temps est écoulé.

M. Bédard: Vous n'auriez pas dû le dire.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, Me Perreault, Me Sauvé et Me Cloutier. Merci de votre présence devant la commission. Nous allons suspendre quelques instants pour laisser le temps à la CAVAC de se présenter.

(Suspension de la séance à 20 h 52)

 

(Reprise à 20 h 53)

Le Président (M. Descoteaux): Donc, nous allons poursuivre nos travaux. Nous recevons le Réseau des centres d'aide aux victimes d'actes criminels. Mme Martine Lévesque, bienvenue devant la commission. Donc, vous avez entendu nos règles. Vous avez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, suivie de deux périodes d'échange de 15 minutes respectivement.

Réseau des centres d'aide aux victimes
d'actes criminels (Réseau des CAVAC)

Mme Lévesque (Martine): Bonsoir, M. le Président, bonsoir, M. le ministre. Mmes les députées, MM. les députés, bonsoir. Merci de permettre au réseau de se faire entendre. J'espère que je ne bafouillerai pas trop, avec l'heure tardive. Moi, je me couche à neuf heures habituellement.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Lévesque (Martine): On va être solidaires. On va être solidaires.

Le Président (M. Descoteaux): Pouvez-vous nous résumer ça en quatre minutes?

Mme Lévesque (Martine): Je vais essayer de faire le plus vite que je peux, mais j'ai besoin de rétablir des choses, je pense, d'entrée de jeu, avec la notion des CAVAC, les services qu'on offre. Les oreilles m'ont bourdonné un petit peu aujourd'hui parce que j'ai entendu toutes sortes de choses sur les services offerts par les CAVAC, que j'ai découvertes.

Donc, je vais... Dans le fond, en première partie, je vais vous préciser davantage d'où viennent les CAVAC, quelles sont leurs missions et également les services qu'ils offrent. J'ai des dépliants également. À la fin, vous pourrez en prendre.

Donc, les CAVAC sont nés de l'adoption de la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels, qui date de 1988. À la suite de l'adoption de la loi, les premiers CAVAC ont vu le jour. Moi, je suis la directrice générale du CAVAC de la région Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches, qui, lui, a vu le jour en 1988. Aujourd'hui, je suis le porte-parole du Réseau des CAVAC.

Donc, il y a 16 CAVAC au Québec, qui sont répartis dans tous les districts judiciaires de la province. Le réseau est consolidé quand même depuis peu, puisque, dans les cinq dernières années, il y a quatre nouveaux CAVAC qui ont vu le jour, dont le dernier en lice qui est le CAVAC du Nunavut.

Donc, la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels prévoit des mesures destinées à répondre aux besoins et aux préoccupations des personnes victimes d'actes criminels. De plus, elle définit la notion de victime et reconnaît des droits et responsabilités qui s'y rattachent. Je vous rappelle l'article 2 la loi, qui accorde à la personne victime le droit d'être traitée avec courtoisie, avec équité, compréhension et dans le respect de sa dignité et de sa vie privée. C'est donc à partir de la loi que s'est développée la mission des CAVAC.

Donc, la mission et les services qu'on offre. La mission des CAVAC consiste à offrir des services de première ligne gratuits et confidentiels à toute personne victime d'un acte criminel, à ses proches ? eh oui, à ses proches! ? ainsi qu'aux témoins d'un crime. L'intervention rapide des CAVAC permet de répondre aux besoins particuliers des personnes de tout âge, et ce, que l'auteur du crime soit ou non identifié, arrêté, poursuivi ou reconnu coupable. Je m'attarderai sur trois mots dans ce paragraphe, soient «les proches», «l'intervention rapide» et «les personnes». Donc, les proches, effectivement, depuis la mise en place des CAVAC, en 1988, les proches font partie de la clientèle des CAVAC. Vous comprendrez qu'à la mise en place des CAVAC c'étaient des organismes communautaires qui avaient peu de moyens, donc la promotion des services était faite, je vous dirais, très discrètement, ce qui faisait en sorte qu'il y a peu de proches qui venaient à nous.

Au cours des dernières années, notre budget s'est vu augmenté, la promotion est davantage faite, donc ce qui... maintenant, sur le terrain, il y a plus proches qui s'adressent à nous, et je vous donnerai des statistiques un petit peu plus loin. L'intervention rapide, en fait c'est un... je vous dirais, c'est un grand défi, l'intervention rapide, c'est de répondre rapidement aux besoins d'une personne victime, d'un proche. Parce qu'on sait, en matière de conséquences au niveau d'un crime à caractère criminel, en fait, plus vite on intervient, plus on réduit les conséquences psychologiques. L'intervention rapide, donc on tente le plus possible de la faire, et ce, de plusieurs façons. Nous avons des protocoles avec les services policiers pour que le policier nous réfère le plus tôt la victime ou le proche. C'est vraiment, je vous dirais, le référant de première ligne, le policier, parce que, même s'il n'y a pas de dossier judiciaire, bien le policier, lui, a rencontré la victime, a rencontré les proches bien souvent et peut tout de suite les mettre en lien avec le Réseau des CAVAC. Donc, avec les services policiers, des protocoles dans presque toutes les régions.

Même chose au niveau CAVAC-Info, c'est un service qu'on offre dans les palais de justice. Lorsqu'il y a un dossier judiciaire qui s'ouvre, lorsqu'il y a une autorisation par le substitut du Procureur général, un intervenant CAVAC convoque la victime directement, l'informe de son dossier. Donc, au niveau des victimes directes d'actes criminels qui sont dans un processus judiciaire, elles reçoivent déjà l'information que les services des CAVAC existent; donc, nous sommes proactifs dans ces dossiers-là. Et, au niveau de l'organisation, je vous dirais, de nos organismes, les CAVAC, nous favorisons une organisation qui est souple, c'est des petites organisations, donc ce qui fait en sorte que quelqu'un nous appelle et, dans les deux semaines, il est certain que la personne sera rencontrée. Si on peut lui offrir uniquement une petite rencontre, je vous dirais, de débriefing, c'est ce qu'on va offrir, mais on s'attarde vraiment à faire une réponse rapide au niveau des besoins.

Et je vous précisais également le mot «personne», mais pour vous rappeler que les services sont offerts à toutes personnes, on parle des hommes, on parle des femmes, on parle des enfants victimes d'actes criminels, qu'elles soient ou non dans un processus judiciaire. Dans les faits, au niveau des hommes qui s'adressent à nous et des femmes, on parle d'une proportion de 65 % de femmes, à peu près. Donc, les besoins des victimes sont variés et multiples, on vous l'a répété toute la journée, il en va de même pour les proches. Ils diffèrent selon la personnalité de la victime, le type de victimisation, le contexte dans lequel l'événement s'est produit et le moment où la victime ou le proche également demandent de l'aide.

L'intervenant du CAVAC connaît bien les besoins des victimes d'actes criminels et adhère au principe que la majorité des victimes vivent une crise temporaire due à leur victimisation et qu'avec une aide adéquate elles reprendront rapidement leur fonctionnement normal. Les services des CAVAC prennent différentes formes. Ils sont dispensés dans le respect des besoins des personnes rencontrées. L'équipe que forment les intervenants des CAVAC ont des formations en travail social, en criminologie, en psychologie, en psychoéducation. Ces intervenants-là sont au nombre de plus de 170 dans les 53 palais de justice et dans les 16 sièges sociaux des CAVAC.

n(21 heures)n

Donc, les services qu'on offre. On parle d'intervention post-traumatique et psychosociojudiciaire; je vous définis un peu comment, nous, dans les CAVAC, on définit cette intervention-là. Donc, au niveau post-traumatique, vous comprendrez que, dans notre mission, nous n'avons pas à faire de thérapie auprès des personnes victimes, proches, témoins, qui s'adressent à nous. Donc, on parle de normalisation. Ça veut dire que la personne qui a vécu un acte criminel est bouleversée dans sa vie, où la rencontre qu'on va faire avec elle, ça va être vraiment pour viser à un rétablissement sur les conséquences immédiates du crime. S'il y a eu des crimes antérieurs, s'il y a eu d'autres conséquences, à ce moment-là ce sera à plus long terme, et on verra à la référer vers une thérapie plus long terme.

Ce matin, j'ai entendu, à deux ou trois reprises, on parlait de quatre séances CAVAC. Je vous précise tout de suite que c'est faux. Le CAVAC n'offre pas quatre séances CAVAC. Les quatre séances CAVAC, ça vient d'un cas bien précis qui vient du CAVAC de l'Estrie. Le conseil d'administration de l'Estrie a fait dans le fond un fonds spécial suite aux amendes, dans le fond. Nous, les CAVAC, on reçoit beaucoup d'amendes des sentences que les juges imposent. Donc, c'est un fonds spécial que le CAVAC de l'Estrie a mis en place pour favoriser en fait un suivi psychologique en attente de l'indemnisation ou lorsqu'il n'y a pas possibilité d'indemnisation. Donc, le CAVAC offre les services réguliers qu'il offre à toute victime, à tout proche, mais, si la personne a un besoin en attendant d'être indemnisée, le conseil d'administration du CAVAC de l'Estrie a mis en place ce fonds-là et défraie quatre heures avec un psychologue en pratique privée, donc qui s'ajoutent à ce qui à ce qui est donné normalement dans le réseau des CAVAC.

Donc, quand on parle du nombre de séances dans les CAVAC, je vous dirais que ça varie entre cinq, 10, 12, 15 rencontres, mais l'objectif, pour nous, c'est de répondre aux besoins de la personne qui s'adresse à nous; et on s'entend qu'on ne fait pas de thérapie, ça fait qu'il est certain qu'on ne rencontrera pas quelqu'un sur 52 rencontres, mais on va la suivre durant tout le processus judiciaire, et, s'il n'y a pas de processus judiciaire en matière d'intervention, on va se rendre aussi jusqu'à ce que ses besoins soient complétés.

Donc, l'intervention psychosociojudiciaire, ça, c'est vraiment le volet au niveau du processus judiciaire où on informe la victime sur le processus judiciaire, et on l'accompagne dans tout le processus. L'information sur les droits et recours, donc on donne une information globale sur les droits et les recours qu'ont les victimes d'actes criminels. L'assistance technique, bien sûr on va supporter les personnes pour compléter les demandes au niveau de l'IVAC, au niveau de la CSST, au niveau de la SAAQ, au niveau de la déclaration de la victime également, lorsqu'il y a un processus judiciaire. On accompagne les victimes dans le processus judiciaire et on oriente vers les services spécialisés pour une intervention à plus long terme. Il n'est pas rare qu'on va dire à une personne qui s'adresse à nous: Si, lors de la deuxième rencontre, déjà on voit qu'il y aura des besoins qui seront supplémentaires à ce qu'on peut offrir, que la personne a des besoins au niveau de son rôle parental, on va déjà lui dire: Appelez au CLSC, soyez tout de suite sur une liste d'attente, parce que bien souvent, dans nos CLSC, il y a une liste d'attente, et pendant ce temps-là, nous, on va faire le bout de chemin qu'on est capable de faire. Donc, lorsqu'elle quittera le réseau du CAVAC, il y aura une autre ressource qui la prendra en charge.

Les statistiques en 2005-2006. Donc, du 1er avril 2005 au 31 mars 2006, la clientèle CAVAC a été composée de 15 % par des proches de victimes et 8 % par des témoins. Parmi les proches qui ont reçu les services d'un CAVAC, 47 % étaient concernés par un crime à caractère sexuel, 25 % par une voie de fait, et 7 % étaient endeuillés suite à un acte criminel. Donc, une personne sur quatre n'était pas une victime directe lorsqu'elle s'est adressée au CAVAC. Je vous dis 15 % de l'ensemble des victimes, ça, c'est à peu près 3 500 personnes pour lesquelles il y a eu un suivi. On parle vraiment des personnes pour lesquelles il y a eu un suivi. Je mets de côté toutes les personnes qui se sont adressées à nous uniquement par téléphone ou juste pour une demande.

Maintenant, j'en viens au projet de loi n° 25. D'entrée de jeu, nous pouvons affirmer que les centres d'aide aux victimes d'actes criminels accueillent favorablement le projet de loi modifiant la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. La mise en place de ce projet de loi permettra une complémentarité aux services déjà offerts aux proches par les CAVAC. En effet, le soutien psychologique qui sera indemnisé par l'IVAC constituera une réponse aux proches dont le traumatisme nécessite un soutien thérapeutique adapté à leurs besoins spécifiques. Toutefois, nous sommes soucieux de voir les délais de traitement de l'IVAC accentués par l'ajout de la clientèle des personnes proches. Ces derniers étant déjà très longs, les personnes victimes ou proches peuvent en subir les conséquences et voir les délais de traitement de leur demande prolongés.

Nous souhaitons également que le projet de loi n° 25 soit évalué deux années après son adoption, de façon à documenter notamment le nombre de proches qui auront eu recours à l'indemnisation, le nombre moyen de rencontres par proche et l'atteinte de la réadaptation par ce nombre de rencontres, ainsi que le coût de ces nouveaux services.

Maintenant, venons-en à la notion de «proche» en ce qui concerne les victimes décédées ou enlevées. Nous croyons que l'ensemble des personnes significatives pour la victime, sans référence à la cellule familiale, devraient avoir accès à une aide psychologique lorsque leur état le requiert. Ce matin, plusieurs personnes vous ont mentionné qu'on parle vraiment d'un cercle qui entoure la personne, donc des personnes significatives. C'est la même chose pour le réseau des CAVAC, on pense qu'on ne devrait pas s'en tenir uniquement à la cellule familiale mais y aller avec la notion de personne significative. On croit aussi que l'évaluation de l'état psychologique et des réactions traumatiques devrait être faite par un professionnel, et cette évaluation déterminerait le besoin pour des traitements indemnisés par l'IVAC.

Les intervenants des CAVAC supportent des proches endeuillés par un acte criminel. Ils constituaient la moitié des personnes des proches ayant reçu ces services au cours de la dernière année. L'offre de service consiste à intervenir sur les conséquences psychologiques et à offrir, le cas échéant, l'accompagnement dans le processus judiciaire. On pense notamment aux familles qui ont perdu une victime, et pour laquelle il y a un processus judiciaire, c'est très difficile à vivre pour les parents, donc on accompagne pendant tout le processus judiciaire.

Toutefois, cette aide peut s'avérer insuffisante pour quelqu'un qui a besoin de soutien pour vivre le deuil de la personne disparue. Le recours à l'indemnisation permettrait alors de recevoir une aide psychologique soutenue et appropriée aux besoins de la personne endeuillée. Nous, on va travailler avec les conséquences du crime, ce que ça a fait vivre aux parents, mais vous comprendrez qu'un deuil, ça se règle, bien souvent, on parle d'un an le délai pour... Écoutez, c'est important, si la personne endeuillée a besoin vraiment de plus de temps pour pouvoir, je vous dirais, apaiser cette souffrance-là, qu'elle puisse avoir recours à une aide psychologique à plus long terme.

Le nombre de personnes significatives, dans ces cas-là, pouvant formuler une demande d'indemnisation ne devrait pas être limité. Le professionnel chargé d'évaluer l'état psychologique devrait également estimer un nombre de rencontres pour chacune des personnes significatives, et une formule de groupe pourrait être envisagée pour les proches d'une même victime. Ainsi, le parent d'une victime décédée ou enlevée pourrait bénéficier du nombre de rencontres requis selon son état. Plusieurs facteurs doivent pris en compte pour déterminer le nombre de séances nécessaire, dont le type de traumatisme, la présence de facteurs aggravants, pour ne nommer que ceux-là.

Maintenant, la notion de «proche», dans les crimes prévus à l'annexe sur la loi à l'indemnisation. À ce niveau-là également, nous parlons de personnes significatives, on pense que ça devrait s'appliquer pour ce type de crime aussi. On croit cependant qu'il y a moins de personnes qui vont faire des demandes au niveau de l'indemnisation, puisque les réactions sont moindres lorsqu'on parle des autres crimes, soient les crimes à caractère sexuel, les vols qualifiés, les voies de fait, qui ont des conséquences pour les proches, évidemment, de très grandes conséquences, et ces conséquences-là vont demander moins de réadaptation que lorsque la personne est en deuil. Les CAVAC rencontrent déjà des proches et entreprennent avec eux une intervention axée sur les conséquences de l'événement. La majorité de ces personnes terminent leur suivi en ayant surmonté les perturbations psychologiques reliées à l'événement criminel. L'indemnisation ne serait nécessaire que pour les personnes dont l'état psychologique nécessite une thérapie.

Le projet de loi prévoit qu'un proche pourrait être indemnisé si seulement son rétablissement est utile à la réadaptation de la victime. Cette notion d'utilité vient limiter le nombre de personnes proches qui auraient accès à de l'indemnisation. Cette notion n'est pas sans fondement, puisqu'il est documenté que la réaction de l'entourage peut aggraver ou amoindrir la perturbation chez la victime. Les études démontrent en effet que le soutien de l'entourage est souvent crucial dans le rétablissement de la personne victime. La personne victime devrait cependant être consultée afin qu'elle puisse identifier la personne significative qui pourrait aider à son rétablissement. Nous retrouverons certainement beaucoup de conjoints et de conjointes et d'amis proches dans cette catégorie.

Une difficulté se présente lorsqu'on songe aux enfants exposés à la violence conjugale. Comment peuvent-ils être identifiés comme utiles à la réadaptation de leur mère? Mais on sait que plusieurs d'entre eux sont déjà indemnisés en tant que victimes directes. Nous souhaitons que l'IVAC poursuive en ce sens et indemnise les enfants exposés comme des victimes directes.

En conclusion. Bien que le Réseau des CAVAC soit d'accord et convaincu que les modifications proposées dans le projet de loi n° 25 soient un gain, la prudence demeure de mise. En effet, ce sera dans la réglementation, les critères et procédures que l'on pourra juger de la réussite et de l'atteinte des objectifs, qui visent, selon le ministre de la Justice, à améliorer l'aide et les services offerts aux victimes d'actes criminels.

Les modifications apportées à la loi sont importantes pour les proches des victimes. Elles sont toutefois d'une importance particulière pour les victimes elles-mêmes en raison de la potentielle surcharge de traitement à l'IVAC et des effets non désirés pour les victimes. En effet, récemment, nous avons pu constater l'accroissement des délais de traitement des dossiers des victimes à l'IVAC, ce qui a donné lieu une augmentation du stress chez la victime dans certains cas. Aussi, à notre avis, les nouvelles modifications devraient être assorties de moyens supplémentaires à l'IVAC.

En terminant, nous voulons réitérer que le Réseau des CAVAC est prêt à collaborer en ce qui concerne le travail de révision de l'ensemble de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. L'expertise développée par les CAVAC pourrait certainement fournir des pistes de solution à nos décideurs. Je vous remercie.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme Lévesque. M. le ministre.

n(21 h 10)n

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Merci, Mme Lévesque, et je vous remercie de votre présentation, je vous remercie aussi d'être ici avec nous ce soir. Vous nous disiez que vous vous couchez tôt, ça ne paraît pas, vous semblez être en pleine forme. J'ai eu l'occasion d'aller visiter le CAVAC de la Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches et de rencontrer toutes les intervenantes et peut-être un intervenant ? un intervenant, de mémoire, c'est ça ? et donc je connais le travail que vous faites, vous êtes même au palais de justice de Saint-Joseph de Beauce, donc, la Beauce, ma patrie d'origine, alors... Et donc je pense que je voudrais vous féliciter pour le travail et remercier encore une fois les intervenants et intervenantes.

Vous avez mentionné au point de départ, et je n'ai pas compris tout à fait, parce que vous avez dit: Les oreilles me bourdonnaient aujourd'hui... Est-ce qu'on a dit quelque chose qui ne convenait pas?

Mme Lévesque (Martine): Bien, j'ai constaté que les services de CAVAC sont méconnus, non pas tellement de votre part, mais de la part des groupes, où on mentionnait, bon, les quatre heures CAVAC, on parlait des proches, alors que les CAVAC offrent des services aux proches. Et, moi, je sais, j'en vois, je sais ce qu'on fait comme travail. Et là je me dis: Bon, mais est-ce qu'on ignore cette partie-là, qui fait partie de la mission et qui est dans notre quotidien? C'est pour ça que ça me bourdonnait.

M. Marcoux: À la page 4, au troisième paragraphe notamment, vous indiquez: «Les intervenants des CAVAC supportent les proches endeuillés par un acte criminel.» Bon. Donc, ce sont des proches dont...

Mme Lévesque (Martine): Qui ont perdu.

M. Marcoux: Soit le fils qu'ils ont perdu... Et effectivement nous en avons parlé un peu aujourd'hui, quant aux services que les CAVAC pouvaient fournir dans des cas comme ceux-là. Je crois comprendre que vous dites: Oui, nous, on accompagne beaucoup de proches de victimes d'homicide?

Mme Lévesque (Martine): Effectivement, oui, on accompagne les proches de victimes d'homicide. Et, je vous dirais, le problème bien souvent, c'est que la référence... je ne sais pas quelle personne, mais il y a quelqu'un, ce matin ou cet après-midi, qui a dit: Bon, on a connu le CAVAC un peu tard dans le processus; bien, malheureusement, encore aujourd'hui, ça peut arriver, des choses comme ça. Mais de plus en plus ? bon, je vous parlais de la référence au niveau des services policiers ? on tente aussi d'être très proactif. Bon, je pense... Ce matin, j'étais dans ma voiture et j'entendais, en Beauce ou à Beauceville, où un jeune de 13 ans a été heurté mortellement, bon, bien, je suis arrivée au bureau, et j'avais un appel de mon intervenante de Saint-Joseph qui me disait: Martine, je suis en contact avec la famille, je les ai appelés.

Bon, il y a des choses comme ça, des initiatives qu'on va prendre localement, je vous dirais, mais c'est certain qu'on respecte aussi le voeu des familles, hein? Lorsqu'on s'adresse à une famille, ils ont besoin d'un moment aussi pour vivre leur peine et vivre leur chagrin, et l'intervention, ce n'est pas ça qui vient donner vie à la personne qui est décédée. Donc, il y a un certain respect de ce besoin-là de rester en famille, de rester proche. Mais les CAVAC, les intervenants CAVAC sont formés pour supporter ces personnes-là. Les intervenants, comme je vous le disais tout à l'heure, sont des professionnels: des travailleurs sociaux, des criminologues, des psychologues, donc qui sont capables... et on donne de la formation. À chaque année, toutes les équipes CAVAC reçoivent une formation en post-traumatique, donc on est en mesure, oui, de supporter les familles en deuil.

M. Marcoux: Maintenant, dans quelle mesure... Parce que, compte tenu de votre expérience, là, vous dites: Les proches ont besoin de séances de réadaptation. Bon. Combien? Comment... parce qu'on a parlé de certains nombres de séances, et... Ce n'est pas une question mathématique, mais j'imagine qu'il y a une moyenne qui se dégage. Ça peut varier aussi, selon certains cas, mais c'est quoi, votre expérience, vous, ou celle de vos intervenantes au CAVAC de la Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches?

Mme Lévesque (Martine): À partir de nos expériences, on peut se dire qu'entre cinq et 10 rencontres on stabilise la personne. J'utilise ce terme-là, dans le sens où la personne, bon, est en mesure de reprendre une vie assez normale, entre guillemets. Si on dit qu'on rajoute à ça 15 ou 20 rencontres ? c'est un chiffre très arbitraire effectivement... Ce matin, aussi on vous disait qu'il y a des professionnels qui pourraient tabler là-dessus, y mettre un nombre de rencontres. Mais, lors du comité où on s'est rencontré avec le ministère de la Justice pour en discuter, je pense que le comité était assez à l'aise autour de 15-20 rencontres. On le serait aussi, à l'aise avec ce nombre de rencontres. Je crois qu'il faut effectivement mettre une limite dans le nombre de rencontres.

M. Marcoux: On a évoqué aussi ? je ne sais pas si vous étiez ici, aujourd'hui, là, à ce moment-là ? la question de la rétroactivité, une application rétroactive, donc ouverte pour des crimes qui ont été commis avant, et deux hypothèses, là, hypothétiquement, de dire: Bien, même, on pourrait le faire pour une catégorie de victimes, notamment pour les proches des personnes victimes d'homicide. Bon, d'autres ont dit: On pense que, si vous le faites, faites-le pour tout le monde. C'est quoi, votre sentiment à cet égard-là?

Mme Lévesque (Martine): Le réseau n'a pas de position par rapport à la rétroactivité, mais je peux vous donner mon opinion personnelle, qui serait à l'effet, je pense, d'être cohérent: on parle d'un délai d'un an au niveau de l'indemnisation, et on a un an entre le moment de l'événement... Donc, moi, c'est ça qui m'habite. Je me dis: Bien, il faut être cohérent; si on va dans une ligne, s'assurer qu'on est équitable envers tout le monde. Ça fait que c'est sûr que ça questionne la rétroactivité, au niveau de l'équité.

M. Marcoux: Bien. L'autre élément: vous mentionnez dans votre mémoire qu'il vous apparaît qu'il est important de pouvoir accorder... en tout cas ouvrir sur l'aide psychothérapeutique aux proches. Et, à cet égard-là, est-ce que vous considérez qu'il est préférable de faire un pas en avant pour dire: Oui, on va l'ouvrir, même s'il y a une certaine limite ? et ça, c'est clair, je l'ai toujours dit: Oui, et il y a une certaine limite, là ? ou d'attendre, disons, de faire une révision plus complète de la loi, sur laquelle on a travaillé beaucoup au cours des 25 dernières années? Donc, ce n'est pas facile à faire; pas impossible, certainement, mais pas facile à faire. Alors, c'est quoi, votre...

Mme Lévesque (Martine): Bien, le réseau souhaite effectivement une révision en profondeur, mais on est d'accord pour procéder dès maintenant. Le plus vite ce projet de loi sera mis en application, ce sera des gains pour ces proches-là, qui y ont droit dès maintenant.

M. Marcoux: Puis un dernier commentaire ? je pense que ma collègue de Matane voulait aussi intervenir ? sur l'application ou sur l'évaluation, là, on est d'accord à cet égard-là. Je pense que ça, d'ailleurs, c'est important de le faire pour les personnes concernées et puis aussi pour avoir une évaluation du suivi du projet de loi, pour ne pas que ce soit mêlé avec le reste.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. Peut-être juste une précision. Vous avez fait référence tout à l'heure aux personnes qui vous ont précédée et qui ont parlé des problématiques avec la CAVAC. Est-ce que vous pourriez nous expliquer comment une personne qui est victime d'un acte criminel ou qui a eu à subir une lésion de quelque nature que ce soit, comment, dans le processus qui existe, la connaissance de votre organisme est mise en relief ou à la connaissance des gens qui se trouvent dans une situation comme celle... victimes d'actes criminels?

Mme Lévesque (Martine): Donc, comment les victimes prennent connaissance de l'existence des CAVAC?

Mme Charest (Matane): Comment est-ce que le processus policier, judiciaire informe les personnes?

Mme Lévesque (Martine): En fait, les personnes peuvent s'adresser à nous directement, hein, nous appeler directement. Dans, je vous dirais, ce que révèlent nos statistiques, nos références, en fait, nos principaux référents, c'est les substituts du Procureur général et les services policiers. Viennent en troisième niveau les services sociaux, donc les CLSC, qui vont nous référer, les organismes communautaires également. Donc, habituellement, les victimes nous arrivent... Bon, on a des protocoles avec les policiers. Je pense, pour la ville de Québec, lorsque la carte avec le numéro d'événement est remise à la victime, le numéro CAVAC est à l'endos. Donc, les personnes bien souvent ne savent pas trop, mais elles appellent puis disent: Bien, j'ai ce numéro-là. Ça peut être de cette façon-là. Et, lorsqu'il y a un processus judiciaire, à ce moment-là c'est nous qui contactons les victimes. Donc, lorsqu'il y a l'ouverture d'un dossier judiciaire au niveau d'un palais de justice, les coordonnées de la victime sont remises à l'intervenant CAVAC, qui contacte la victime et qui l'informe des services auxquels la personne peut avoir droit, et la personne utilisera ces services si elle le désire. Ça fait que c'est la façon principale que les gens s'adressent à nous.

Le Président (M. Descoteaux): Mme la députée.

Mme Charest (Matane): Croyez-vous qu'il serait nécessaire qu'il y ait une accentuation de la conscientisation de l'existence de votre organisme aux premières lignes, là? Et j'entends, par exemple, au niveau... Dès que l'infraction est commise, que le corps policier est informé de la problématique, est-ce que vous croyez qu'il devrait y avoir plus d'information de promulguée à ce moment-là ou si vous croyez que le système actuel permet aux victimes d'avoir une connaissance suffisante de votre organisme?

Mme Lévesque (Martine): Je pense que ça pourrait être amélioré. Et je vous dirais que, dans la dernière année, on a beaucoup travaillé là-dessus dans toutes les régions du Québec, vraiment rencontrer les services policiers pour faire connaître nos services. Avec la Sûreté du Québec, ici, dans la région Capitale-Nationale?Chaudière-Appalaches, un dépliant CAVAC est remis à toute victime d'un crime contre la personne. Donc, il y a des avancées.

Mais le problème, aussi, c'est que les gens partent, hein, dans les organisations, donc, souvent, il y a gens qui sont conscientisés, woups!, il y a des gens qui partent, donc il faut refaire la conscientisation.

La campagne de promotion que le ministère de la Justice a collaboré à mettre en place cet hiver, Vous n'êtes pas seul, qui a passé au niveau des médias, ça a aidé énormément. Nous, on a vu une augmentation au niveau de la demande. C'est sûr qu'aussi les sorties comme a fait Mme Simard, avec sa fondation, il y a eu une augmentation des appels au niveau du CAVAC.

n(21 h 20)n

Donc, c'est certain que... Je crois qu'on est dans la bonne voie maintenant de faire connaître les services, mais je pense aussi qu'il va falloir rencontrer encore, à nouveau, les organisations communautaires, les services sociaux, pour bien préciser notre mandat. Ça, je pense qu'il y a encore de la confusion par rapport à ça, bien qu'on soit sur des tables sectorielles, mais, bon, on connaît pas le pointu non plus de chaque organisme, mais c'est peut-être là-dessus qu'on pourrait accentuer vraiment, définir davantage auprès de nos partenaires les services qu'on rend.

Le Président (M. Descoteaux): Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Peut-être simplement... et je peux comprendre, parce qu'on a entendu plusieurs personnes aujourd'hui, lorsqu'un événement comme ceux dont on discute aujourd'hui arrive, bien évidemment c'est souvent les émotions qui passent par-dessus la raison, et bien évidemment je pense qu'il faut être conscient du fait que cette conscientisation à l'existence d'un organisme comme le vôtre peut véritablement aider. Elle doit être faite de façon plus marquée, puisque les événements qui entourent l'acte qui les amène à vous sont des événements qui sont souvent difficiles à vivre et donc qui nous amènent à mettre de côté peut-être d'autres considérations au moment même où on vit ces choses-là.

Est-ce que vous auriez des suggestions pour mettre l'emphase ou véritablement conscientiser les gens qui ont cette problématique-là après un certain temps de recul, parce que les choses qu'ils ont vécues sont difficiles? Est-ce que vous auriez des éléments à nous suggérer pour que véritablement ils soient conscients qu'après coup ou après que le choc est passé ils puissent référer à vous et puis avoir l'aide qu'ils espèrent finalement?

Mme Lévesque (Martine): Il faut soulever le point également que, lorsqu'on est victime d'un acte criminel, on n'est quelquefois non plus pas en état d'entendre ce qui s'offre à nous. On a beau avoir des offres qui sont faites, on n'est pas en état d'entendre ça puis on ne sait pas trop non plus qu'est-ce qu'on a besoin à ce moment-là. Et je vous dirais que bien souvent l'être humain est assez bien fait également, ce qui fait qu'à partir du moment où on devient plus réceptif à une forme d'aide, woups!, il arrive une information, puis on la prend, l'information, puis on a recours à ces services-là. Donc, je pense que c'est une voie aussi, là, de permettre aux personnes de s'adresser au service au moment où elles le ressentent, où elles en ont besoin.

Et c'est certain ? je reviens avec les intervenants: je pense que c'est les intervenants policiers, les intervenants sociaux qui sont les mieux placés pour référer. Ce n'est pas rare d'avoir des appels, nous, du CLSC ou d'une maison d'hébergement pour dire: Bien, j'ai madame qui est avec moi ? si on parle de violence conjugale ? pour l'aspect indemnisation, je vais te la référer, mais je vais faire le suivi avec... tu sais, si elle est déjà en maison d'hébergement, le suivi va se faire là; nous, on n'ira pas juste apposer un autre service qui existe déjà, mais la maison va nous le référer pour qu'on complète l'IVAC, qu'on fasse ce suivi-là avec elle. Ça fait que c'est des choses comme ça qu'on va faire. Ça fait que donc les intervenants nous connaissent, souvent, par rapport à une clientèle, un client qu'ils ont eu, et là, après ça, ça fait boule de neige. J'ai eu un appel, la semaine dernière aussi, d'une éducatrice spécialisée qui me dit: Moi, je recherche des services, un homme agressé sexuellement, où je pourrais le référer? Bien, je dis: On va le recevoir, ça fait partie de notre service. Dans la dernière année, j'ai 25 %, à Québec, des personnes qui sont adressées à moi comme victimes directes qui étaient victimes d'agression sexuelle, et, là-dessus, j'en avais 16 % que c'étaient des hommes. Donc, on ne donnera pas de services à long terme. Il y a un manque à ce niveau-là, au niveau de l'agression sexuelle pour les hommes, mais on va quand même, du moins pour cet homme-là, lui dire que ce qu'il vit, là, ça n'a pas de bon sens, puis de le supporter par rapport à ces conséquences-là. Mais, vous voyez, cette intervenante-là, tout à coup elle a fait: Ah, bien, mon Dou! maintenant, CAVAC, je vais le savoir plus. Mais, souvent, c'est avec un téléphone.

Mais, pour l'instant, je ne sais pas qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus, mais c'est certain qu'il y a toujours place à l'amélioration. On a rencontré les avocats de la défense familialistes aussi dans la région de Québec, il y a deux semaines, mais eux aussi sont en contact quelquefois avec des victimes qui sont auprès d'un avocat en civil, mais qui ont vécu un acte criminel, mais qui n'ont pas eu de services, et, bon, c'est une autre porte pour pouvoir référer. Ça fait que donc je crois qu'on ne doit pas négliger toutes les portes qui peuvent s'ouvrir.

Le Président (M. Descoteaux): Ça va? M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, merci, Mme Lévesque, d'être venue, très heureux de vous avoir parmi nous.

Pour revenir sur ces interventions, et vous savez à quel point je ne doute pas, je connais bien les services chez nous, et je connais leur professionnalisme, mais en même temps je vous écoutais, j'écoutais les gens qui... non plus, j'accorde toute la bonne foi, là, ceux qui sont venus... Est-ce que c'est possible que les services soient quand même... pas uniformes sur le territoire? Autrement dit, cela dépend beaucoup, je vous dirais, de l'initiative de certains. Par exemple, vous dites, vous avez des ententes avec les corps policiers, est-ce que tout le monde a des ententes avec les corps policiers? Ou vous avez des ententes avec les procureurs de la défense, est-ce que tout le monde... Autrement dit, à partir du moment où une bonne idée est utile, et là, vous, vous êtes dans le réseau, mais est-ce qu'il y a un protocole qui est transmis à tout le monde: voici... évidemment, vous pouvez aller plus loin, mais voici le minimum que vous devez faire pour justement rejoindre les victimes, d'être proactifs, les victimes et les proches?

Mme Lévesque (Martine): En fait, au niveau de... Je vous dirais que les bons coups, on se les partage habituellement, hein, ce qui fonctionne dans une région, mais on est aussi tributaires effectivement quelquefois des personnes qui occupent des fonctions, hein...

M. Bédard: C'est clair.

Mme Lévesque (Martine): ... puis quelquefois un protocole se signe dans une région de façon rapide et, dans une autre région, woups!, c'est plus difficile.

Au niveau des protocoles et des références au niveau des services policiers, je n'ai pas fait l'étude, mais je croirais que c'est présent dans toutes les régions, là, mais je vous dis ça sous toutes réserves, je n'ai pas fait la recherche.

M. Bédard: Ce qui... autrement dit, ce que je vous ai... par exemple, est-ce que vous avez le guide, avez-vous, ou vous allez peut-être l'avoir, le guide pour la directrice ou le directeur du CAVAC, c'est: Voici normalement les meilleurs canaux qui vont permettre... évidemment on ne peut pas rejoindre tout le monde, dans le sens qu'il peut arriver qu'on en perde à travers les mailles, mais voici le meilleur réseau qui nous permet de rejoindre à peu près tout le monde?

Mme Lévesque (Martine): Là, est-ce que vous parlez d'approche proactive uniquement, à ce moment-là?

M. Bédard: Voilà, oui.

Mme Lévesque (Martine): Oui. L'approche proactive, je vous dirais, dans le CAVAC-Info, ça, c'est uniforme. Quand je vous disais que, dans un dossier judiciaire, les victimes sont contactées, ça se fait dans tous les palais de justice, partout au Québec, ça se fait.

M. Bédard: Mais... O. K., et des proches, parce que des victimes, il y a un côté plus simple, un peu plus simple par le fait qu'elle est présente, soit elle est dans le processus, soit... alors que la famille, là, on est... ou la personne significative, là, on est dans le mou, là. C'est moins clair un petit peu.

Mme Lévesque (Martine): Au niveau des proches, comme je vous mentionnais tout à l'heure, il y a certaines difficultés quelquefois d'avoir la référence.

M. Bédard: C'est ça que je constate. Puis ce n'est pas... je ne vous accable pas...

Mme Lévesque (Martine): C'est ça, c'est sûr que...

M. Bédard: ...mais, moi, je me faisais... quand je les entendais, je me disais en même temps: On peut en échapper, là. Ce qu'il faut, c'est de s'assurer qu'on en échappe le moins possible.

Mme Lévesque (Martine): C'est pour ça que la collaboration avec les services policiers est vraiment très précieuse.

M. Bédard: Vous êtes une des seules qui avez parlé des délais, des délais de traitement. Effectivement...

Mme Lévesque (Martine): Dans la dernière année, avec la croissance des dossiers...

M. Bédard: Allez-y, oui.

Mme Lévesque (Martine): ...à l'IVAC, on a vraiment vu, ça a déboulé, là.

M. Bédard: ...délai de traitement moyen?

Mme Lévesque (Martine): Ah! Là, on est rendus à six mois, là. Ce n'est pas quand même... des fois, c'est cinq, six mois, et c'est difficile, c'est difficile pour les victimes d'être en attente, et je pense qu'on ne peut pas nier que, la dernière année, il y a eu un volume énorme à l'IVAC, et on le ressent, c'est des personnes qui y travaillent. Donc, on le ressent, et c'est certain que...

M. Bédard: ...qui était dû à un volume élevé?

Mme Lévesque (Martine): Bien, au niveau des agressions sexuelles notamment.

M. Bédard: Avec... O. K., ce qui s'est passé, les dénonciations, il y a eu...

Mme Lévesque (Martine): Au niveau de l'indemnisation, là, ça a eu vraiment des conséquences.

M. Bédard: O. K.

Mme Lévesque (Martine): Donc, à ce moment-là, si on pense qu'on ajoute un type de clientèle et que les ressources financières ne suivent pas au niveau de l'IVAC pour l'ajout de personnel, bien là on se dit: Bien, à ce moment-là, on est mieux de rien faire, quasiment, là, parce que ça va nuire à tout le monde.

M. Bédard: ...les attendre, oui. Puis, qu'est-ce qui arrive pour ces gens-là en attendant? Bien, vous les suivez, vous, vous les...

Mme Lévesque (Martine): Bien souvent, nous, c'est ça. Bien souvent, même, on va dépasser notre mandat, des fois, là, parce que la personne est en attente. Mais il reste que...

M. Bédard: ...additionnel pour ces gens-là d'être en attente, j'imagine.

Mme Lévesque (Martine): Ah oui, oui. C'est ça, c'est un stress additionnel. Et c'est ça, c'est que bien souvent on peut faire des appels pour eux, on encourage, on trouve des moyens parallèles, mais il est certain que, lorsqu'il y a une demande d'indemnisation puis que... malgré qu'on a quand même une porte ouverte avec l'IVAC au niveau des demandes précoces, ça fait que, lorsqu'on constate...

M. Bédard: ...victimes, là, oui.

Mme Lévesque (Martine): ...que la victime a vraiment besoin très rapidement et que les conséquences sont sévères, à ce moment-là on va aller vers une demande précoce, avec bien souvent des réponses positives.

M. Bédard: Là, ce que je vois pour l'IVAC, là, ça ne sera pas de nature à s'améliorer, là. Si on augmente le nombre de réclamants, les délais ne vont pas...

Mme Lévesque (Martine): ...organisation puisse l'absorber. Il faut que l'organisation puisse l'absorber.

M. Bédard: Je ne pense pas qu'il y ait de sommes qui aient été prévues à ce niveau-là.

Mme Lévesque (Martine): Il faut se garantir de ça.

M. Bédard: Puis je ne veux pas accabler inutilement l'IVAC, les gens font... mais, à partir du moment où les dossiers augmentent, il n'y a pas de miracle, hein? Les gens travaillent selon l'horaire, alors il n'y a pas... O. K. Bien, je vous remercie de nous avoir éveillés là-dessus.

Sur... j'ai bien aimé... sur le délai d'un an, là, vous nous dites... puis encore là on n'est pas le précis ni dans les... il n'y a pas d'études qui vont démontrer ça, mais ce que j'ai bien compris de votre intervention, c'est, au niveau des victimes, c'est à peu près un an pour se remettre...

Mme Lévesque (Martine): ...indemnisation.

M. Bédard: Indemnisation.

Mme Lévesque (Martine): Quand je parlais de délai, là, c'est parce que c'est M. le ministre qui parlait de la rétroactivité, et c'est-u à ce niveau-là que vous me questionnez?

M. Bédard: Oui, oui, c'est ça. Oui, oui, ça m'intéresse.

Mme Lévesque (Martine): Oui, c'est ça. Et là je faisais le lien, c'est ça, parce qu'il y a un lien...

M. Bédard: C'est à peu près ça, un an, de toute façon, que les gens soient...

Mme Lévesque (Martine): Dans le fond, IVAC va autoriser... une demande peut être admissible lorsque la demande à IVAC se fait dans l'année suivant le crime. Donc, il y a un délai de prescription, et, en ce sens-là, je me disais qu'on est un peu malvenus de... qu'il y ait un autre délai lorsqu'on parle de proches... C'est vraiment à titre de réflexion.

n(21 h 30)n

M. Bédard: O. K. Vous nous avez entendus tantôt un peu avec le Barreau, là, sur les amendements. Étiez-vous là? Vous étiez là, oui, hein? Qu'est-ce que vous pensez, d'abord, de l'amendement qui consiste... sur: enlever le «considérer» et mettre «démontrer»? «Lorsqu'elle démontre». Parce que «considère», eux, selon leurs prétentions, c'est que ça accorde comme une discrétion. «Considérer», effectivement... Alors, eux disent...

Mme Lévesque (Martine): Nous, en fait, on souhaite un professionnel aussi qui évalue les conséquences. Donc, ce n'est pas... Un proche n'aura pas un suivi psychologique parce qu'il le souhaite, c'est parce qu'il aura...

M. Bédard: C'est parce qu'il y a un besoin.

Mme Lévesque (Martine): Il aura démontré qu'il y a un besoin et qu'il sera la personne qui sera la plus apte à aider la victime dans son rétablissement. Donc, on souhaite que la victime puisse aussi se trouver se prononcer sur qui sera ce proche qui sera en mesure de l'aider. Mais c'est aussi le professionnel qui sera en mesure de dire: Bon, bien, cette personne-là serait en mesure.

M. Bédard: O.K. Est-ce qu'on peut penser... Vous qui intervenez beaucoup auprès de ces gens-là, est-ce qu'on peut penser aussi que ça peut être utile à la réadaptation de la victime, mais il vient un moment, la victime elle-même... Entre autres, on parlait des crimes qui portent sur des enfants, les parents qui sont, eux... Au-delà de la victime qui va bien se remettre, eux vont être dans un état qui peut durer beaucoup plus longtemps. Le fait de dire: Lorsqu'une réadaptation est utile à la réalisation de la victime, bien là on vient de se limiter, là. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'ouvrir là-dessus, d'abord?

Mme Lévesque (Martine): C'est certain, comme on le mentionne, c'est documenté qu'un proche peut être utile à la réadaptation. Donc, si on parle au niveau des victimes d'agression à caractère sexuel, nous, on rencontre bien plus les parents que les jeunes victimes, lorsqu'il y a jeunes victimes, parce qu'on aide le parent à reconnaître les réactions de son enfant et à bien les digérer comme parent. Donc, l'utilité du proche... C'est sûr qu'on pourrait étendre et se dire: Bon, bien, il y a la personne qui est utile à la réadaptation et il y a tous les autres proches, mais tous les autres proches considèrent qu'on va les avoir, nous, dans notre réseau CAVAC. Je considère que, parmi ceux-là, il y en n'aura pas tellement qu'on échapperait, là, parce qu'au niveau, là... on parle des proches des autres crimes, des crimes prévus à l'annexe, donc il y aura un proche qui sera indemnisé pour un processus beaucoup plus long et, les autres proches, si je regarde l'expérience qu'on vit actuellement, les autres proches ont besoin de comprendre ce que vit la victime, ses réactions, d'être en mesure de ne pas juger la personne. Donc ça, là-dessus, il y a un grand bout qu'on fait, nous, déjà.

M. Bédard: Pour revenir à ces proches, sur... Tantôt, je vous disais «les pratiques uniformes», j'ai lu... Évidemment, vous dites: Nous, on couvre les proches. Certains disent: Écoutez, ce n'est pas tout à fait le cas, on peut le prévoir dans sa mission, on peut aussi... Parce que la base, c'est les victimes évidemment, puis je pense que vous en avez beaucoup sur les épaules. Après ça, il y a les proches, et je ne vous dis pas que c'est un ordre de priorité, mais c'est à peu près ça, là. Évidemment, une victime...

Mme Lévesque (Martine): Ce n'est pas un ordre de priorité.

M. Bédard: Non pas un ordre de priorité, mais en même temps on a tous des choix à faire dans la vie, là, dans le sens que, comme directrice, s'il y a quatre dossiers, il y en a trois que c'est une victime, un, c'est un proche... En tout cas, si j'étais à votre place, ma mission... Tu sais, on a... si j'ai un choix de ressources, à un moment donné, victime, agression, viol, tout ça, regardez, là, elle, il faut ne faut surtout pas qu'elle manque de services. Et là je ne vous dis pas que vous le... Et là je fais... À moins que vous me dites: Il n'y a pas de limite à nos moyens. Mais il vient un moment dans la vie, à une journée précise ou à un moment précis, il y a une limite. Si on était un monde parfait, ça ne serait pas le cas, si on était dans... Je ne dis pas ça pour vous faire des reproches mais plutôt pour bien comprendre les commentaires.

Est-ce que c'est possible en même temps que cette pratique par rapport aux proches... Parce qu'à partir du moment où quelqu'un me dit: Écoutez, j'ai parlé aux 200 quelque familles, dans tel cas, ils nous disent: Ils n'en ont pas, de services; dans tel autre, ils en ont eu. Est-ce que c'est possible qu'il n'y ait pas non plus une pratique uniforme par rapport à ça?

Mme Lévesque (Martine): Par rapport aux types de clientèles...

M. Bédard: Là, je vous parle des personnes assassinées.

Mme Lévesque (Martine): Oui, au niveau des types de clientèles, les proches font partie des clients des CAVAC. Moi, avant de dire non à un proche puis de privilégier une victime, si la victime a été victime de violence conjugale, je vais lui dire et je vais d'abord... Je vais dire: Bien, il y a d'autres services qui existent, on va prioriser qu'elle ait des services en maison d'hébergement, puis je vais accueillir le proche, qui n'aura pas de services. Au niveau des victimes, des proches endeuillés, si ces personnes-là disent ne pas avoir reçu de services, moi, je comprends de ces propos-là qu'ils n'ont pas reçu de services dans ce qu'elles attendaient comme services. Moi, j'offre les services qui font partie de ma mission CAVAC.

M. Bédard: C'est ça.

Mme Lévesque (Martine): Si on me demande un autre type de services que ce que j'offre, je ne suis pas en mesure de l'offrir, c'est certain. Ça dépend de qu'est-ce qu'on attend.

M. Bédard: Et, entre autres, l'aide psychothérapeutique. Mais, évidemment, là, ce n'est pas couvert, ça, c'est clair.

Mme Lévesque (Martine): Mais il y a une partie du travail qu'on fait, mais on ne fera pas tout le deuil avec la personne, c'est certain.

Le Président (M. Descoteaux): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Oui, effectivement, je pense qu'on vient de toucher au point qui est vraiment la différence principale entre vous, dans vos recommandations principalement concernant, je dirais, toute l'aide que vous offrez aux proches, et même votre suggestion concernant le rétablissement, si c'est utile à la réadaptation de la victime, et tout ce que les autres groupes sont venus nous dire. Parce que l'aide que vous apportez aux proches, c'est l'aide qui est beaucoup plus reliée à toute la question judiciaire, l'assistance technique, à l'intervention post-traumatique, alors que dans le fond ce qu'ils souhaitent comme services, c'est beaucoup plus. Et à cet égard-là c'est pour ça que les autres groupes ne sont pas en accord, disons, avec votre proposition de limiter ça à seulement si c'est utile à la réadaptation de la victime. C'est que, dans le cas des autres groupes, on considère que les proches sont des victimes finalement. Du fait que leur proche a été une victime, ils sont aussi victimes et ils ont aussi besoin d'aide. Je pense qu'elle est vraiment là, la nuance.

Mme Lévesque (Martine): Bien, en fait, dans le cas des personnes endeuillées, on dit, s'il n'y a pas de notion d'utilité, là... C'est clair que les personnes endeuillées devraient avoir accès à des services d'indemnisation suite aux services qu'elles ont reçus de CAVAC, si elles sont venues vers nous, mais je crois que la nuance que, nous, on apporte au niveau de l'utilité, ce n'est pas de dire... les proches n'ont pas moins de services pour ça. Ce qu'on dit, c'est que nous recevons déjà ces proches-là, les personnes. Si on parle des autres crimes prévus à l'annexe, ces proches-là peuvent venir vers les CAVAC. Ils le font déjà, ils viennent déjà vers les CAVAC. Donc, à partir du moment qu'ils ont... le constat, puis je vous donne l'évaluation de ce qu'on voit en voyant plus de 30 000 personnes par année, c'est qu'habituellement, entre six et 10 rencontres, les personnes sont rétablies. Et on travaille avec les forces de la personne pour vraiment qu'elle reprenne en main sa vie, et je vous dirais que ça fonctionne.

Donc, il y a une partie de ces personnes-là possiblement qui ont besoin de plus, et, à ce moment-là, oui, elles pourraient être indemnisées, bon, avec la notion d'utilité. Mais, pour l'instant, elles vont se rendre dans les CLSC, là, pour avoir une thérapie à plus long terme si c'est besoin, mais c'est une minorité de personnes, je vous apporte, selon l'expertise CAVAC et selon l'évaluation aussi qu'on a de nos clients, parce qu'on évalue nos services. Et la rétroaction qu'on reçoit de notre clientèle est à l'effet qu'ils sont satisfaits.

Mme Caron: Au niveau des CLSC, ce qu'on nous a dit ce matin, c'est qu'évidemment les listes d'attente étaient très longues et que donc, au niveau des services, là, ils trouvaient ça un peu difficile. Je vais vous poser la question que vous vous faites sûrement souvent poser, puis je pense que c'est important de le clarifier: Dans vos données statistiques, vous dites que vous avez offert des services, là, aux proches, 47 % étaient concernés par un crime à caractère sexuel. Moi, j'aimerais que vous précisiez vraiment la différence importante ? et est-ce que vous travaillez en collaboration?, quelles sont les références que vous faites ? entre vous, CAVAC, et les CALACS.

Mme Lévesque (Martine): La principale différence, c'est au niveau de notre clientèle principalement, hein, parce que, nous, on travaille avec les hommes, avec les femmes et avec les personnes mineures, donc en bas de 14 ans. Ça fait qu'il y a une partie de clientèle qui ne peuvent pas se retrouver dans les CALACS, donc qui se retrouvent dans les CAVAC. Tout à l'heure, je vous le mentionnais, nous, on ne fait pas de thérapie. Donc, la personne qui s'adresse à nous, si on parle d'un dossier d'agression sexuelle, une femme qui serait admissible aux CALACS également et admissible dans les CAVAC, qui d'adresse à nous, qui a été victime d'inceste dans l'enfance, on va la rencontrer lorsqu'elle va nous appeler ? parce qu'elle va appeler au CAVAC ? on va la rencontrer puis on va prendre en compte son besoin. C'est certain qu'on ne fera pas la thérapie par rapport à l'inceste qu'elle a subi dans son enfance. Parce que, ce matin, on vous le mentionnait également, ce n'est pas trois, quatre, cinq rencontres, c'est assez long, et ça a eu des conséquences sur plusieurs aspects de sa vie, c'est tous ces aspects-là. Et, bien souvent, avec ces personnes-là, par exemple, on va faire un petit bout en ce qui concerne la dénonciation. La préparation au témoignage, c'est quelque chose qu'on fait régulièrement, mais aussi réfléchir avec la personne, pourquoi qu'elle irait vers une plainte ou non, la dénonciation. Ça fait qu'on va toucher à la dénonciation.

Et, dès le départ, je vous dirais, habituellement, nos protocoles d'intervention, vers la deuxième, troisième rencontre, déjà on informe le client où on va le référer pour répondre aux besoins auxquels il devra répondre. Et actuellement je vous dirais, je vous parle pour moi, dans la région de Québec, où l'organisme CALACS a une liste d'attente, mais ce que je fais, c'est que, lorsque les victimes d'agressions sexuelles s'adressent à nous, je leur dis: Bien, appelez tout de suite à Viol-secours, mettez-vous sur la liste d'attente, et, si vous voulez participer à une thérapie de groupe après, aux services CAVAC, bien au moins vous serez déjà là. Donc, c'est des services qui sont différents, complémentaires, mais quand même différents dans la clientèle et aussi dans les services qui sont offerts.

Mme Caron: Et les références se font bien. Merci.

Le Président (M. Descoteaux): Le temps est écoulé. Merci, Mme Lévesque. Merci beaucoup de votre présence devant la commission.

Mme Lévesque (Martine): Très bien. Merci.

Le Président (M. Descoteaux): Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 40)

 

(Reprise à 21 h 41)

Le Président (M. Descoteaux): Nous allons reprendre, poursuivre nos travaux.

Mémoire déposé

Je dépose afin de... pour valoir comme s'il avait été entendu, le mémoire du Protecteur du citoyen, en date du 12 juin 2006.

Remarques finales

M. le député de Chicoutimi, pour vos remarques finales.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Alors, M. le Président, je vous dirai, comme remarques finales, que tout ce qui mérite d'être fait mérite d'être bien fait, je vous dirais, tant dans le processus que dans le résultat final. Sur le processus, j'ai eu à m'exprimer, M. le Président, lors de mes remarques préliminaires, lors de l'adoption du projet de loi, et je les maintiens. Je crois que nous aurions eu avantage à procéder autrement. Il suffit d'entendre les groupes aujourd'hui pour constater que ce travail-là méritait plus que ce que nous avons fait pendant la journée, bien que ce fut fort constructif, utile. Je pense qu'il aurait été utile de faire plus et avec plus de temps. Alors, au-delà de savoir ce qui s'est passé avant, ce qui a été fait ou non fait, à partir du moment où on décide de poser un geste, bien je pense qu'il faut faire en sorte que cela se fasse dans le cadre le plus respectueux, utile et qui fasse en sorte finalement qu'on arrive au meilleur résultat.

Je vous dirais, je ne vous cacherai pas que ces conditions ne sont pas réunies. Ça ne m'empêchera pas de faire mon travail, vous l'avez vu aujourd'hui, avec tout le sérieux que ça prend, en regardant qu'est-ce qu'on peut faire de plus, de mieux. Et c'est pour cela d'ailleurs que je ne croyais pas qu'il était nécessaire, qu'il était pour le mieux de passer à une étude précipitée, soit ce soir ? demain matin, on aura le temps, vendredi, s'il le faut, lundi prochain ? une étude détaillée en posant les questions, en regardant ce qu'on peut faire de mieux pour ce projet de loi. Et ça, je maintiens mon offre, jusqu'au 22 juin, ça va me faire plaisir, M. le Président, d'être disponible, comme je l'étais auparavant, comme je l'ai souhaité auparavant en plus. Je l'ai fait à chacune des étapes, sans partisanerie. Je l'ai rappelé au ministre même d'une façon même amicale à certains moments, de dire: Nous sommes disponibles à tel moment, lors de l'intersession, au mois de janvier, février, mars, à l'automne passé. Il le sait, et je le faisais sur un ton qui, je pense, était à la hauteur des représentations que nous avons eues aujourd'hui, dans le sens qui étaient sans aucune partisanerie.

Alors, je ne sais pas ce qu'ont fait les gouvernements avant moi. Je peux vous dire qu'à partir du moment où on s'intéresse à cette question il faut bien faire les choses. D'ailleurs, j'ai passé, vous le savez, je le répète, parce que j'ai passé tout près de 45 heures, deux sessions, sur un seul projet de loi, et je ne suis pas avare de mon temps là-dessus, sur la loi d'accès à l'information dont nous venons d'adopter en lecture finale. Alors, je l'aurais souhaité parce que je pense que ce sujet mérite d'être approfondi.

Je ne vous cacherai pas non plus que j'ai des malaises dus au fait que nous n'avons pas les règlements. Je l'avais dit au ministre, j'aurais souhaité avoir les règlements immédiatement. Pourquoi? Parce qu'on aurait pu entendre les groupes immédiatement là-dessus. Parce que c'est dans le règlement que se trouve la plupart des... je vous dirais, de l'encadrement de la réalité que vont vivre ces gens. Nous ne l'avons pas au moment où on se parle. Ça veut dire que, même si on adoptait la loi, elle aurait une portée très, très limitée. On aurait pu avoir même des ébauches de règlement. J'ai même ? la loi d'accès à l'information; j'ai même ? eu une ébauche de politique, M. le Président. Au moins, on aurait pu questionner les gens, profiter de ce temps très court pour voir avec eux de quelle façon nous pouvons améliorer ou atteindre des objectifs, si limités qu'ils soient, à la limite. On n'est pas dans le clinquant, là, on est dans des choses qui touchent... tu sais, qui sont fondamentales.

C'est pour ça que je posais la question sur les frais funéraires. Pas que je ne crois pas qu'ils doivent être augmentés, mais pourquoi avoir choisi strictement les frais funéraires? Et je vous dirais qu'après en avoir discuté, ça m'a comme créé un malaise. C'est vrai que ça frappe, les frais funéraires; c'est vrai qu'on est en retard, 600 $ à 3 000 $, puis on n'est pas encore où est-ce que peut-être on devrait. Puis je ne fais pas la leçon au ministre, je vous le dis en général. Mais ce qui est ressorti, c'est qu'il n'y a pas seulement les frais funéraires.

Alors, sans vous dire pourquoi d'abord les frais funéraires, on pourrait dire: Oui, c'est ce qui était le plus parlant, je vous dirais, mais il y a bien d'autres éléments qui auraient nécessité une intervention rapide. Et c'est pour ça que, si j'avais eu les règlements, si on avait pu discuter plus longuement, on aurait pu voir où on peut encore en faire plus. Parce qu'il faut le rappeler, là: le ministre dit: J'ai eu 1,5 million pour 2007-2008, à partir de l'an prochain; ça comprend aussi les frais funéraires. Qu'est-ce qui va rester pour le reste? Je vous dis que le montant devient assez circonscrit, si on veut. Alors, on n'est plus par rapport aux besoins, là.

Il y a bien d'autres choses. Je regardais même le fonds dont parlait le Barreau, puis ce n'est pas un organisme qui est le plus, je vous dirais, en faveur de la taxation... l'augmentation de la taxation au Québec, là. Eux, comme d'autres, ont proposé le fait de créer peut-être un fonds, qui serait tout à fait vendable en termes publics. Je me souviens que c'est notre gouvernement, à l'époque, sur le 10 $ supplémentaire, qui l'avait proposé, qui l'avait entériné au Conseil des ministres, parce que justement c'est noble et ça répond à des préoccupations de tous nos concitoyens. Évidemment, c'est sur la suramende, donc ceux qui... Sans dire que je suis pour ou contre, je vous dirais que j'ai un préjugé très favorable, et je ne m'en cache pas. J'aurais aimé ça, regarder plus avant, j'aurais aimé ça, avoir les études: combien ça va coûter, être équitable?

Parce que l'équité, qu'on a parlé souvent... Et je ne reproche pas les groupes, là: eux, ils parlent, ils voient les victimes, ils voient les clientèles qu'ils ont; mais l'équité dans l'injustice n'est pas, selon moi, une solution. Je comprends qu'on a des réalités budgétaires, des réalités économiques, mais en même temps on ne peut pas... nous, à partir du moment où on se place là ? et on a eu une démonstration à l'effet que ce qui est avancé par le ministre n'est pas sérieux ? bien j'aurais aimé ça, avoir d'autres choses, aller plus profondément là-dessus, voir quelle est la mesure de nos ambitions. Parce qu'il y a une différence entre 1 million et 50 millions, entre 500 000 $ et 2 millions.

Puis, quand on dit: Arracher des budgets, là, écoutez, là, j'ai siégé au gouvernement, là, j'ai vu des gens arracher des choses quand même plus importantes que ça. Et je ne fais pas le reproche au ministre, là, mais là, maintenant, on est entre nous, là, on n'est pas, je vous dirais, dans un travail à l'arraché exceptionnel, là. Alors, j'aurais aimé ça avoir toutes ces données-là, puis on aurait même pu permettre, si on avait procédé lors de l'intersession ou même dans les dernières semaines, on aurait pu même mettre de la pression, entre guillemets, sur le gouvernement, même sans le ministre, qui aurait profité de nos commentaires.

Là on est pris... il est 21 h 50, le 15 juin, et je ne peux pas vous cacher que j'ai des frustrations à ce niveau. Puis le ministre a beau nous dire: Oui, mais, avant, avant; écoutez, on n'est pas avant, on est aujourd'hui le 15 juin, puis c'est lui le ministre. Ce n'est pas moi qui étais ministre de la Justice avant ça. Puis, si c'était moi, je répondrais de mes actes; aujourd'hui, c'est à lui à en répondre.

n(21 h 50)n

Alors, le fait que ce soit dur, ça ne veut pas dire qu'on ne doit pas bien faire les choses. Moi, je veux l'adoption, je veux qu'on aille plus loin, qu'on avance. Mais je veux bien le faire, et là, à l'évidence, effectivement ça va prendre quelques modifications. J'espère que le ministre a bien pris en note, là, si... on a entendu les commentaires: «personnes significatives», «l'entrée en vigueur», puis là, même si on restait dans les paramètres établis par le ministre... Parce que les groupes, ils n'ont pas le choix, là; en même temps, ils disent: On avance; on n'avance pas comme on le souhaiterait, on n'avance pas comme il nous a été représenté, mais il y a un pas, on le veut.

Alors, je regardais, sur l'annexe, sur les modifications à 5.1 et à 5.2. Et là, moi, au moment où je parle, même si le ministre dirait: Allons-y gaiement puis adoptons, c'est pour ça que j'ai réagi aussi promptement. Si on veut bien faire les choses, on ne peut pas faire ça. Si on veut faire les choses avec rigueur, on ne peut pas faire ça. Puis, vous savez, ce n'est pas mon genre, j'ai trop de respect pour les gens.

Là, je tiens seulement à dire au ministre... Je lui ai mentionné lors de l'étude article par article, mais il suffit d'avoir rencontré les gens du RIVCO, je vous dirais, M. le Président, pour être un peu déçus de ce qui leur était représenté. Et je le dis avec... Parce que ces gens-là ont vécu des choses particulières, et on ne peut pas faire autrement qu'être déçu de la perception qu'ils ont de la politique. Alors, je pense qu'ensemble on mérite mieux que ça, puis on doit faire mieux.

Alors, moi, je souhaite avoir les règlements rapidement, les études, et je veux que le ministre... Et on est tout à fait disponible pour regarder ce qu'on est prêt à améliorer, où on doit aller plus loin. Est-ce que c'est seulement les frais funéraires, on doit donner un coup immédiatement, ou on doit cibler, comme nous ont proposé certains, faire un peu plus?

Et je le dis, là, sur l'effet, entre guillemets, rétroactif. Et ça, là-dessus... J'ai entendu... Puis, vous savez, j'ai un esprit assez juridique, mais je continue à penser que nous devons tendre vers le mieux. Puis ça va prendre des sacrés bons arguments au niveau économique pour nous démontrer qu'on ne doit pas faire ce choix. Puis là, au moment où on se parle, ce soir, à 9 h 50, je n'ai pas ces arguments. Je vais écouter attentivement le ministre, mais ce n'est pas une question de principe.

La question, c'est plutôt: Pourquoi ne pas l'étendre à tout le monde? On peut convenir de l'étendre à eux, mais maintenant pourquoi ne pas l'étendre à tout le monde? Et là on peut discuter en termes économiques et regarder les possibilités. Ça peut être par étapes. On peut se fixer un calendrier. Alors, on l'a fait, d'ailleurs. Oui, ma collègue... Pas ma collègue, mon attachée me disait: Comme on l'a fait avec l'aide juridique.

En aide juridique, le ministre a annoncé: On révise. On révise jusqu'en... Écoutez, on a parlé d'un échéancier jusqu'en 2009, je pense. Alors, on est ouvert à tout ça, mais il faut bien faire les choses. Puis, moi, je n'ai pas le goût de faire quelque chose... Et je regardais les délais de traitement. Et là je ne veux pas accabler les gens de l'IVAC, que je voyais tantôt, là, j'ai trop travaillé devant les tribunaux administratifs pour savoir qu'il vient, un moment, des limites. Tu as des gens qui travaillent, puis, quand les dossiers augmentent, bien tu essaies de faire plus, mais il vient un moment, tu es limité là-dedans. Alors, si on parle sérieusement, quand on sait que déjà il y a une augmentation, que, si on fait ça, il va y en avoir une additionnelle, une pression additionnelle sur ces gens, qu'on va créer des attentes auprès de ceux qui vont réclamer ça, bien là il y a comme des ingrédients, là, qui normalement devraient nous faire prendre conscience qu'on ne peut pas, d'un côté, dire: On va ouvrir ce côté-là, ouvrir même l'indemnisation, sans dire: On va s'assurer d'avoir un processus qui va faire en sorte que les gens ont des réponses puis qu'ils ne vivront pas dans l'insécurité. Je pense qu'ils sont déjà accablés, ces gens-là.

Il faut plutôt viser à restreindre le plus possible leur attente. Déjà, en général, moi, j'en ai traité, l'indemnisation, je vous dirais, au niveau des accidents de travail, même le divorce, même les cas familiaux, comment ça entraîne... Alors, j'imagine... Il ne me reste que quelques secondes, M. le Président, mais j'imagine ce que ça peut être pour des gens qui sont victimes à ce niveau-là.

Alors...

Le Président (M. Descoteaux): Une minute et demie.

M. Bédard: Une minute et demie? Alors, je m'étais pris une série de notes, sur lesquelles on peut... On peut faire mieux au niveau des délais, au niveau de l'annexe, le médecin traitant. Et là je n'ai pas tombé dans la partisanerie, là, parce que j'aurais pu briser toute l'ambiance de cette commission en rappelant les engagements... puis je ne l'ai pas fait, même avec les gens, que je respecte beaucoup, du RIVCO. Puis je ne le ferai pas non plus.

Mais le médecin traitant, c'est un des éléments, je pense, qu'on peut regarder. Qu'est-ce qu'on peut faire de plus? Et, sur le processus de révision et, entre autres, au niveau ? et ça, je veux qu'on éclaircisse ça ? au niveau du processus d'adjudication finale, et la révision évidemment administrative, mais surtout la révision par un tribunal quasi judiciaire, par un tribunal juridictionnel... Alors, tout ça pour dire qu'on a encore du pain sur la planche. Moi, je suis prêt, tout à fait disponible de continuer, et ça me fera plaisir, aux étapes subséquentes, d'aller plus loin et de faire en sorte que le projet de loi soit adopté et qu'on puisse donner une première. Parce qu'on est bien dans les... on est dans les soubresauts, dans le sens qu'il y a le règlement, mais c'est surtout que, tout le reste de la réforme, on l'a vu, là, on n'est pas là.

Alors, c'est une première étape, et, moi, je suis prêt rapidement à bonifier, à améliorer puis à passer à l'autre étape. Puis je répète encore, si ça peut être au mois de septembre, là, de nous convoquer immédiatement et nous dire sur l'ensemble de la réforme. Je suis disponible, à la date que souhaitera le ministre. Au mois d'août... j'ai siégé ici, à peu près trois ans sur quatre, depuis que je suis dans l'opposition, trois ans, au mois d'août. Ça va me faire plaisir de parler de ce sujet important, M. le Président.

Et je tiens à remercier évidemment les groupes qui sont venus, dans des délais très, très, très rapides, ceux qui ont apporté l'éclairage ? évidemment, ma collègue, qui a une bonne expertise évidemment, aux groupes d'intervention, au niveau des femmes violentées, mais en général, alors du support et du questionnement. Puis, vous avez vu, nous sommes bien intentionnés, nous voulons un résultat rapide, mais un beau résultat.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le député de Chicoutimi. Du côté ministériel, Mme la députée de Matane. Oui.

Mme Nancy Charest

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. En fait, en conclusion à ces travaux, je pense que, tout comme le député de Chicoutimi, nous avons à coeur comme gouvernement d'assurer aux personnes qui sont les plus directement touchées par les actes criminels, de leur donner l'aide et le support qu'ils ont besoin. Et je pense que ce que nous proposons dans le projet de loi actuel est une avancée qui est certainement précurseur d'un bon avenir et aussi de résultats positifs pour le futur.

Je voudrais simplement rappeler qu'il y a longtemps qu'on parle de ces questions, des questions qui sont sous-jacentes au projet de loi n° 25. En 1996, par exemple, dans le programme et les statuts du Parti québécois, on parlait et on accordait une importance catégorique aux priorités et aux victimes d'actes criminels. Le Parti québécois reconnaissait que les droits de ces dernières, en adoptant une législation, serait tous indiqués, et on les indemniserait et apporterait pour eux un soutien susceptible de pallier aux graves répercussions de l'acte criminel.

Mme Linda Goupil, dans un communiqué de presse du 6 décembre 1999, dans le cadre du 10e anniversaire de la tragédie de la Polytechnique, réitérait qu'«il faudra notamment de façon prioritaire accorder aux proches des personnes décédées à la suite d'un crime le soutien psychologique nécessaire qui lui permettrait de traverser cette épreuve». Dans les années 2001, M. Paul Bégin, dans un rapport d'un comité consultatif sur la révision du régime, le 29 octobre 2001, proposait 54 recommandations, notamment fournir de l'aide aux proches et augmentation des frais funéraires, proposant à cette époque une augmentation de 600 $ à 3 951 $. Et ça, on parle d'événements, M. le Président, qui se passaient en 2001. La Presse du 1er novembre 2001 parlait d'«un régime d'indemnisation qui sera revu et corrigé».

Nous sommes aujourd'hui, M. le Président, en 2006, et les souhaits établis depuis 1996 sont aujourd'hui choses réalisées, peut-être pas avec toute l'ampleur qu'on aurait voulue, mais l'avancée qu'on a faite aujourd'hui, M. le Président, je crois, permet aux victimes d'actes criminels de pouvoir envisager un avenir qui sera d'autant plus prometteur pour eux et à la hauteur des attentes qu'ils ont de leur gouvernement. Je voudrais tout simplement spécifier que la perfection en ce bas monde, elle n'est pas là, mais que nous avons, comme gouvernement, fait une avancée qui, je crois, permet aux victimes d'actes criminels de croire que nous sommes derrière eux et que nous saurons dans l'avenir être à l'écoute de leurs attentes.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Marcoux: Oui, Merci, M. le président.

n(22 heures)n

Le Président (M. Descoteaux): Ah! excusez. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je n'avais pas l'intention d'intervenir, mais, suite aux remarques de la députée de Matane, c'est bien évident que je vais intervenir. Je trouve ça un peu déplorable d'ailleurs, parce que je pense que notre porte-parole a vraiment fait en sorte tout au long de la journée qu'on garde le débat au-delà de la partisanerie, mais la députée de Matane a décidé d'en faire autrement, donc c'est évident qu'on va répondre, M. le Président.

Il est très clair que le gouvernement du Parti libéral s'était clairement engagé en 2001, par communiqué, avec l'actuel vice-premier ministre, ministre de la Sécurité publique, député de Saint-Laurent, qui était le porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité publique, ainsi que la députée de Bourassa, qui était porte-parole en matière de justice, et ils étaient très clairs dans leurs engagements. Octobre 2001, les députés libéraux ont donc proposé ce qui suit: la création d'un fonds d'indemnisation spécifique pour les victimes du crime organisé, qui sera financé à même les produits de la criminalité ? ils ne sont toujours pas financés ? l'élargissement de la notion de «victime» au-delà du conjoint et de l'enfant, en incluant, selon les circonstances, d'autres membres de la famille immédiate. Mais ce qu'on fait aujourd'hui, on met une restriction, qui à mon avis est extrêmement importante, la restriction qui est de dire: Si les proches... si c'est utile à la réadaptation de la victime...

Le Président (M. Descoteaux): Je m'excuse. M. le porte-parole, M. le député de Chicoutimi a pris la période totale, à savoir les 15 minutes au complet, et évidemment vous m'avez fait signe que vous vouliez intervenir, mais le temps était écoulé. Donc, on m'informe que, n'ayant plus de temps, je dois malheureusement vous demander... Par politesse, je vais vous demander de conclure en cinq secondes.

Mme Caron: Cinq secondes, M. le Président. Il y avait eu aussi un engagement de la part de l'ex-ministre de la Justice, qui, lui, a quitté parce qu'on ne respectait pas ces engagements.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, madame. M. le ministre, avant que vous commenciez, je vais vérifier le temps. 12 minutes, M. le ministre.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais simplement vous dire que... puis je ne veux pas me prendre pour un autre, là, mais je suis certainement fier de pouvoir avoir apporté le dossier de modifications à l'indemnisation des victimes d'actes criminels jusqu'ici. Et j'ai certainement le sentiment du devoir accompli.

M. le Président, ce n'est pas une révision complète, je l'ai dit dès le point de départ, et c'est clair. J'ai d'ailleurs annoncé que je mettrais sur pied un groupe de travail, dont j'espère pouvoir rendre ça public, là, la composition, au cours des prochaines semaines pour qu'ils puissent commencer leur travail sur une révision complète de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Il y a 25 ans... la première tentative de réforme a été en 1983, M. le Président, et, depuis ce temps-là, il y a eu beaucoup de tentatives de refonte de cette loi, sous tous les gouvernements, et on n'a pas eu... il n'y a rien qui a avancé. Donc... Et je ne voulais pas non plus venir avec des projets où on ne serait pas raisonnablement assurés du financement, parce que finalement ça ne marche pas. On l'a vu dans d'autres cas.

Alors donc, dans le discours du budget, le ministre des Finances a annoncé certains montants, qui ne sont pas mirobolants, là ? il y a déjà 73 millions de consacrés ? donc qui viennent s'ajouter à ça, donc 500 000 $ cette année, 1,5 récurrents, pour cette fin-là, à compter de l'an prochain. Et je voudrais vous dire, M. le Président, qu'on a fait diligence après le dépôt du budget. D'ailleurs, le projet de loi a été déposé le 9 mai, à peu près un mois et demi après l'annonce au discours du budget, à peu près en même temps que les autres projets de loi qui ont été déposés, qui faisaient suite au discours sur le budget, dans différents secteurs de l'activité gouvernementale, et je peux vous dire qu'il y a eu beaucoup de travail qui a été fait par les gens du ministère de la Justice avec les gens de l'IVAC, et il y a eu des consultations également avec les groupes. Et je pense que ça, ce sont des courts délais, M. le Président, et donc ça a été très rapide après l'annonce dans le discours du budget pour déposer le projet de loi.

Je pense que ça, c'est important de le mentionner, et on vient bonifier sur deux aspects qui faisaient l'objet de recommandations d'à peu près tous les documents de réflexion ? je les ai tous repassés les uns après les autres ? qui ont été produits depuis qu'on tente de faire des changements à la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, qui, rappelons-le, s'applique à des clientèles qui sont parmi les plus vulnérables de notre société, M. le Président.

Et je vous avais donné certaines statistiques aujourd'hui. Celles de 2005 que j'ai, là, 3 463 réclamations acceptées, 60 % des femmes, 40 % des hommes, 33 % des jeunes de moins de 18 ans, 26 % d'agressions à caractère sexuel, 64 % chez les enfants, 35 % chez les femmes, et 50 % au domicile de la victime. Donc, c'est là qu'on voit l'illustration de tout ce qui touche la violence, les cas de violence conjugale ou de violence familiale, M. le Président. Donc, c'est ça donc que ça viendrait bonifier, le projet.

Je pense que ce que je dégage des représentations qui nous ont été faites aujourd'hui, c'est que le projet de loi est un premier pas, un premier pas important. Je suis d'accord qu'elle doit être révisée, je l'ai annoncé dès le point de départ, je n'ai pas conté de chanson à personne là-dessus. J'ai annoncé également la création d'un groupe de travail. Je retiens également des présentations que la définition de «proche» doit être la plus large possible et qu'elle puisse correspondre à la situation réelle des victimes; complètement d'accord avec ça. C'est clair qu'il faudra l'encadrer sur le plan budgétaire, mais c'est un premier principe, ça, inscrit dans la loi.

Et je comprends également des représentations d'aujourd'hui qu'il doit y avoir de la souplesse dans le cadre de l'application des mesures d'aide aux proches, principalement à l'égard du nombre de séances. Et on a exprimé le souhait aussi que tout ça soit défini par règlement, et j'ai indiqué dès le point de départ que, ce règlement-là, il y aurait une proposition de modifier la loi pour que le règlement ? et je comprends très bien la réaction des parlementaires ? soit soumis à l'étude de la commission parlementaire avant d'être édicté. Et également des propositions d'évaluation après deux ans, non seulement ça, mais que, dans le premier rapport annuel de l'IVAC, si la loi était adoptée, qu'on puisse dès là avoir des statistiques qui permettent de juger de l'application de la loi.

Je dégage également, et je pense que c'est important, que la majorité des représentations ont indiqué qu'ils étaient en faveur de l'adoption du projet de loi et de son entrée en vigueur le plus rapidement possible, et je pense que c'est peut-être là le consensus le plus important, M. le Président. Je retiens également, en ce qui concerne l'implantation de l'application rétroactive des mesures contenues au projet de loi, ce que j'ai entendu aujourd'hui, c'est des réserves sur la rétroactivité, et notamment si ça ne s'appliquait qu'à un groupe et à une clientèle spécifique, et ça, je pense qu'on a eu beaucoup de réserves là-dessus.

Alors, M. le Président, c'est un premier pas qui m'apparaît important, qui touche des bonifications qui, je le répète, avaient été demandées, exprimées dans tous les documents de réflexion qui ont été produits au cours probablement des derniers 15 ans, M. le Président. Et c'est clair que ça ne règle pas tout, mais on fait avancer les choses, M. le Président. Moi, ça me paraissait plus important de pouvoir faire avancer les choses, de poser un premier geste, que de rester dans l'inaction et de reporter pour avoir une révision plus complète.

Et, en terminant, M. le Président, je voudrais simplement vous dire ceci: j'aurais beaucoup souhaité pouvoir adopter ce projet de loi n° 25 au cours de la présente session parce que c'est un premier pas, c'est un premier geste concret. Ce serait dans la loi, l'inscription du principe de l'aide psychothérapeutique aux proches. Nous serions... Il y a trois provinces... quatre provinces au Canada qui prévoient de l'aide psychothérapeutique pour les proches des victimes d'homicide, il y en a une qui prévoit de l'aide psychothérapeutique pour les proches de victimes autres que les victimes d'homicide, nous serions la deuxième province à pouvoir le faire, M. le Président. Et, comme je vous rappelle, ça touche des clientèles qui sont parmi les plus vulnérables dans notre société.

J'aurais beaucoup souhaité pouvoir le faire, de façon à ce que ça puisse s'appliquer le plus rapidement possible, avec la proposition d'un règlement le plus rapidement possible, pour déterminer la notion de «proche», à la fois pour les frais funéraires, parce que 2 400 $, pour des gens, ça représente beaucoup. Et donc, sur le plan strictement humain, je pense que ceux, dans le fond... j'aurais souhaité pouvoir l'adopter. Je peux comprendre toutes les raisons, je ne fais de reproche à personne, mais, sur le plan humain, évidemment ce sont au premier chef les proches des victimes qui en quelque sorte, malheureusement ? et je comprends très bien, je comprends très bien, je comprends tout le processus ? mais qui seront pénalisés.

Alors, M. le Président, je crois... c'est la fin de mes commentaires.

Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le ministre. La commission ayant complété son mandat, nous ajournons sine die.

(Fin de la séance à 22 h 10)


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