Journal des débats (Hansard) of the Committee on Institutions
Version préliminaire
42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Wednesday, August 26, 2020
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Vol. 45 N° 88
Special consultations and public hearings on Bill 45, An Act concerning mainly the appointment and the terms of office of coroners and of the Chief Coroner
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Intervenants par tranches d'heure
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Bachand, André
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Guilbault, Geneviève
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Guilbault, Geneviève
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Bachand, André
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Rousselle, Jean
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Ouellette, Guy
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Bachand, André
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Rousselle, Jean
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Nichols, Marie-Claude
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Ouellette, Guy
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Bachand, André
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Guilbault, Geneviève
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Bachand, André
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Rousselle, Jean
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Nichols, Marie-Claude
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Ouellette, Guy
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Bachand, André
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Guilbault, Geneviève
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Rousselle, Jean
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Nichols, Marie-Claude
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Nichols, Marie-Claude
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Bachand, André
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Ouellette, Guy
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Bachand, André
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Guilbault, Geneviève
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Rousselle, Jean
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Rousselle, Jean
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Bachand, André
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Nichols, Marie-Claude
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Guilbault, Geneviève
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Guilbault, Geneviève
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Bachand, André
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Lévesque, Mathieu
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Rousselle, Jean
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Nichols, Marie-Claude
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Nichols, Marie-Claude
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Bachand, André
9 h 30 (version révisée)
(Neuf heures cinquante-cinq minutes)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour, bon matin.
Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte. Je demande, bien sûr, à toutes les personnes présentes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de procéder
à des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet
de loi n° 45, Loi concernant principalement la nomination et le mandat des
coroners et du coroner en chef.
Avant de débuter, Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire
: Oui, M.
le Président. M. Tanguay (LaFontaine) sera remplacé par M. Rousselle
(Vimont) et Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), par Mme Nichols
(Vaudreuil).
Le Président (M.
Bachand) : Ce matin, nous allons débuter par les remarques
préliminaires, puis nous entendrons l'Association des coroners du Québec,
l'Association des juristes progressistes et la Coalition contre la répression
et les abus policiers.
Remarques préliminaires
Donc, nous allons débuter avec les
remarques préliminaires. Mme la ministre, pour 5 min 34 s.
Bienvenue.
Mme Geneviève Guilbault
Mme Guilbault :
Cinq minutes. Donc, merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour. Bonjour, tout
le monde. Bonjour, M. le Président, Mme la secrétaire. Bonjour, tout le monde.
Je vais quand même prendre le temps, là, de saluer plus précisément, donc, évidemment,
mes collègues députés tout autour de la table. Le député de Vimont, que j'ai le
plaisir de retrouver, j'ai l'impression qu'on vient tout juste de se laisser,
puisqu'on était ensemble vendredi pour l'étude des crédits budgétaires, alors
merci d'être ici. Évidemment, le groupe qui est avec nous ce matin,
l'Association des coroners, que je connais personnellement, ayant passé
quelques années au Bureau du coroner, alors… très heureuse de les retrouver
aussi, merci beaucoup d'être parmi nous. Les gens du ministère qui m'accompagnent
ce matin, merci beaucoup d'être avec nous, et les gens qui accompagnent les
différentes personnes autour de la table.
Donc, je suis vraiment très heureuse. On
commence toujours en disant qu'on est heureux d'être ici, ça va de soi, mais je
dois dire que, ce matin, je le suis particulièrement pour ce projet de loi là,
parce que c'est un projet de loi qui me tient beaucoup à coeur, un projet de
loi... le projet de loi n° 45, qui vise à moderniser la Loi sur la
recherche des causes et circonstances des décès, qui est la loi constitutive du
Bureau du coroner et qui régit l'essentiel de son fonctionnement aussi, une loi
qui date de 1986. Donc, il ne faut pas se <surprendre, près de 35 ans
plus tard, qu'il y ait...
Mme Guilbault :
...un
projet de loi qui me tient
beaucoup à coeur, un
projet
de loi... le
projet de loi
n° 45, qui
vise à moderniser la Loi sur la recherche des causes et
circonstances
des décès, qui est la loi
constitutive du Bureau du coroner et qui régit
l'essentiel de son fonctionnement aussi, une loi qui date de 1986. Donc, il ne
faut pas se >surprendre, près de 35 ans plus tard, qu'il y ait plusieurs
pans de cette loi-là ou, en tout cas, disons, certains éléments de cette loi-là
qui soient un petit peu désuets, et c'est la raison pour laquelle on présente
ce projet de loi là aujourd'hui.
C'est un projet de loi qui, en plus, est
travaillé depuis très longtemps. Ça fait quelques années, au Bureau du coroner,
qu'il y a des gens qui planchent sur ce projet de loi là, en collaboration avec
la DAJ du ministère de la Sécurité publique, pour venir à bout, justement, de
déposer ce projet de loi là et de le faire adopter, idéalement, pour moderniser
cette loi-là. Et je vais en profiter, à ce stade-ci, pour partager en partie le
crédit de ce projet de loi là avec la députée d'Anjou—Louis-Riel, la députée
libérale d'Anjou—Louis-Riel, qui, en 2014, occupait la fonction que j'occupe,
actuellement, de ministre de la Sécurité publique et qui a été la première à
vraiment donner le mandat clair au Bureau du coroner de plancher sur des
modifications législatives. La suite du temps a fait qu'elle n'aura pas déposé,
finalement, de projet de loi, et donc on le dépose aujourd'hui. Mais je voulais
quand même reconnaître le crédit de la députée d'Anjou—Louis-Riel, qui s'était
beaucoup intéressée au Bureau du coroner à l'époque où elle occupait la
fonction.
Donc, toujours est-il qu'aujourd'hui le
projet de loi est déposé. On en est aux consultations particulières. Bien sûr
suivra l'étude détaillée, on aura l'occasion d'aller plus en détail sur chacun
des articles de ce projet de loi là. Mais, vraiment, l'essence de ce projet de
loi là, c'est de moderniser la loi et de permettre, entre autres, au Coroner en
chef d'avoir davantage d'outils et de moyens pour optimiser le fonctionnement
du Bureau du coroner, pour optimiser la productivité et entre autres réduire,
ultimement, les délais. Parce qu'une chose qui me préoccupe beaucoup, moi, M.
le Président, depuis toujours, c'est le délai de livraison des rapports de
coroner, parce que ça a une incidence directe sur les services qu'on donne aux
citoyens, entre autres aux citoyens endeuillés, qui attendent les rapports de
coroner souvent impatiemment, que ce soit pour le processus de deuil ou pour
des recours en tout genre.
Alors, je ne sais pas combien de temps il
me reste, mais je crois que je vais...
Le Président (M.
Bachand) : ...
• (10 heures) •
Mme Guilbault :Deux minutes? Ah bon! Bien, d'abord, je vais ajouter que je
veux remercier aussi non seulement la députée d'Anjou—Louis-Riel à l'origine,
mais aussi toutes les personnes qui, au fil du temps, auront travaillé sur ce
projet de loi, qui connaît enfin son dénouement aujourd'hui… bien, en fait, qui
l'a connu au moment où je l'ai déposé, mais qui connaît la suite aujourd'hui
et, on l'espère, sera adopté, parce que c'est grâce au travail de toutes ces
personnes-là aussi, aux gens du Bureau du coroner qui ont participé de près, à
l'évidence, à la confection de ce projet de loi... On en a des représentants,
d'ailleurs, aujourd'hui.
Alors, je vais conclure sans plus tarder
pour qu'on puisse entrer dans le vif du sujet, non sans vous réitérer à quel
point je suis heureuse d'enfin amorcer ce qui conduira, je l'espère, à une
adoption imminente de ce projet de loi très <nécessaire pour...
>
10 h (version révisée)
<16885
Mme Guilbault :…des
représentants, d'ailleurs,
aujourd'hui.
Alors, je vais conclure sans plus
tarder pour qu'on puisse entrer dans le vif du sujet, non sans vous réitérer à
quel point je suis heureuse d'enfin amorcer ce qui conduira, je l'espère, à une
adoption imminente de ce
projet de loi très >nécessaire pour
l'optimisation du fonctionnement du Bureau du coroner, une institution très
importante dans notre démocratie.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, Mme la ministre. M. le député de Vimont, s'il
vous plaît, pour 4 min 39 s.
M. Jean Rousselle
M. Rousselle
: Merci,
M. le Président. Premièrement, moi aussi, je voudrais vous saluer, saluer le
personnel ici, la secrétaire, et tous les gens qui nous accompagnent, et les
gens du ministère, parce qu'effectivement c'est un travail qui nous aide et qui
nous facilite aussi notre travail, donc c'était… on les remercie.
Un projet de loi très intéressant, et je
voudrais seulement souligner ma collègue de Vaudreuil, sa présence, et puis je
la remercie, quelqu'un qui a une compétence juridique, donc c'est très
important, une professionnelle. Et puis, bien, merci d'être ici parce qu'elle
amène un professionnalisme vraiment important, surtout dans un dossier comme
ça, important.
Oui, projet de loi très intéressant, un
projet de loi… oui, une loi qui avait besoin d'être actualisée, on le sait, la
ministre l'a mentionné tantôt, une loi... depuis 1986. Elle a mentionné aussi
ma collègue d'Anjou—Louis-Riel, justement, qui y a déjà travaillé. J'ai aussi
un autre de mes collègues, M. Coiteux, qui avait travaillé aussi dans le
dossier. Donc, tout ça ensemble fait qu'on le savait, on s'en allait vers là,
on n'avait pas le choix.
Elle parlait, justement… la ministre
parlait aussi du délai de la population. Effectivement, la population se plaint,
avec raison. Vous savez, des fois, pour faire le deuil vraiment, bien, on veut
vraiment avoir les raisons, là, pourquoi. Donc, on va voir, par ce projet de
loi, à essayer d'améliorer, justement, le côté opérationnel.
Il y a aussi plusieurs recommandations qui
sont faites par les coroners. Puis j'ai lu, justement, les mémoires. Merci, le
Bureau du coroner, justement, qui mentionne comme quoi il aimerait ça qu'il y
ait un meilleur suivi sur leurs recommandations. Effectivement, si tu fais des
recommandations puis elles ne sont pas suivies, ça ne sert pas à grand-chose.
Donc, je pense que ça va être important de regarder tous les aspects.
Je sais que la ministre, elle a un grand
intérêt, justement, dans le dossier, étant… a déjà été porte-parole du Bureau
du coroner, donc je comprends son intérêt. J'espère, par contre, qu'il n'y aura
pas de conflit quelque part, parce que des fois, quand on a travaillé à un
endroit, des fois il peut y avoir des petits conflits d'intérêts. Mais je ne
pense pas, je pense qu'on va travailler là-dessus, mais, en tout cas, je le
souligne juste pour qu'on s'en aille vraiment dans le bon sens.
Donc, écoutez, je pense que c'est un
projet de loi qui est important. Je voudrais remercier tous les gens qui ont
fait des mémoires, tous les gens qui vont se présenter ici, justement. Tous les
gens qui se présentent ici, c'est du temps, du temps de préparation, mais c'est…
à cause de vos mémoires puis à cause de votre présence, justement, on peut
vraiment peaufiner la loi qui est proposée aujourd'hui. Donc, on va <travailler…
M. Rousselle
: …
qui
ont fait des mémoires, tous les gens qui vont se présenter ici, justement. Tous
les gens qui se présentent ici, c'est du temps, du temps de préparation, mais
c'est… à cause de vos mémoires puis à cause de votre présence, justement, on
peut vraiment peaufiner la loi qui est proposée aujourd'hui. Donc, on va >travailler
tous ensemble pour avoir la meilleure loi possible, donc…
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, M. le député. M. le député de Chomedey, s'il
vous plaît.
M. Guy Ouellette
M. Ouellette : Merci, M.
le Président. À mon tour de saluer Mme la ministre, saluer les collègues. Effectivement,
Mme la ministre, vous avez une expérience dans le milieu. Je me souviens de la
dernière fois que vous étiez venue en commission parlementaire avec le coroner
Marsolais, et on avait beaucoup discuté du suivi des recommandations.
Je pense que c'est un projet de loi, effectivement,
qui a eu une gestation de plusieurs années. C'est un pas dans la bonne
direction, sauf qu'il ne faut pas que ça se fasse au détriment des citoyens, il
ne faut pas que ça se fasse au détriment de la reddition de comptes, non plus,
et de la transparence. On sera en mesure de discuter. Je regardais le mémoire,
puis on aura l'opportunité, avec nos invités, d'en discuter très prochainement.
J'ai été un peu surpris de voir autant de recommandations.
Peut-être qu'il aurait dû y avoir consultation — ou il y a peut-être
eu consultation — avec l'Association des coroners en cours de
rédaction. Mais je pense que ça va être intéressant d'entendre ce que les gens
ont à nous dire. On va insister beaucoup sur le suivi de recommandations. On va
insister aussi sur le délai de livraison, mais j'annonce déjà mes couleurs, la
transparence puis le droit des citoyens sera au centre de mes questions et de
mes préoccupations, M. le Président.
Auditions
Le Président (M. Bachand) :
Merci infiniment, M. le député. Alors, nous allons passer maintenant à la
période d'auditions. Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de
l'Association des coroners du Québec. Je vous rappelle que vous avez
10 minutes de présentation et, par après, on aura un échange avec les
membres de la commission. Donc, je vous invite à vous présenter et à débuter
votre présentation. Merci beaucoup d'être ici ce matin.
Association des coroners du Québec
M. Dandavino (André-H.) :
Merci. Merci beaucoup. Alors, je m'appelle André-H. Dandavino, je suis
président de l'Association des coroners du Québec. Je suis médecin avec 45 ans
de pratique, en pratique active, actuellement, encore et avec une expertise
comme coroner. Je suis coroner depuis 33 ans avec la nouvelle loi.
Ça nous fait plaisir de présenter ici, ce
matin, un mémoire, d'autant plus que nous avons travaillé plusieurs années avec
la ministre Guilbeault, qui était notre porte-parole et avec qui on a fait… on
a eu à avoir des échanges importants, et c'était notre drapeau, notre
porte-parole du bureau. Alors, nous sommes très à l'aise et très ouverts de
discuter avec la commission aujourd'hui. Le mémoire qui a été présenté était
surtout fait par l'association et mis en page par Me Gélinas, Kathleen
Gélinas, que je vais vous présenter.
Mme Gélinas (Kathleen) :
Bonjour. Donc, effectivement, je <m'appelle Kathleen Gélinas, je suis…
M. Dandavino (André-H.) :
…
le mémoire qui a été présenté était surtout fait par l'association et
mis en page par Me Gélinas, Kathleen Gélinas, que je vais vous présenter.
Mme Gélinas (Kathleen) :
Bonjour. Donc, effectivement, je >m'appelle Kathleen Gélinas, je suis
avocate depuis 22 ans, coroner depuis… nommée en 2014. Donc, je suis heureuse
d'être ici aujourd'hui.
Notre association est une association
composée de coroners investigateurs à temps partiel. Donc, notre association ne
comprend aucun coroner permanent, nous avons 80 coroners en date de juin 2020,
alors, composée de 48 juristes, alors, 35 avocats, et 13 notaires, et 32
médecins.
Donc, vous l'avez constaté, c'est un
mémoire quand même qui est très long, audacieux. On s'est permis d'être
audacieux, on s'est permis de vous faire des recommandations. On sait que ce n'est
pas le format habituel que vous recevez, mais nous avons si peu l'occasion de
parler de notre métier, de notre profession, qui nous tient si cher à coeur. Au
contraire, on écoute habituellement les gens, on rend des rapports, mais on
parle très peu de nous.
Donc, ce qui nous a guidés dans la
rédaction de ce rapport, pour nous, il y avait trois éléments majeurs : un,
l'indépendance, donc l'indépendance de l'institution, l'indépendance de la
profession de coroner; la transparence, c'est un autre élément qui nous a
guidés, donc la transparence dans le processus, que ce soit dans le processus
de nomination, que ce soit dans le processus au niveau du renouvellement, également
au niveau de l'investigation, l'enquête et de la rédaction du rapport; et, un
troisième élément, l'équité, donc, au niveau de l'équité, c'est le traitement
des défunts. Aussi, la rémunération, bien, évidemment, ça ne fait pas partie du
projet de loi n° 45, mais on vous a donné... on a été très audacieux, on
vous a donné beaucoup de pistes et d'enjeux, en partie 3 de notre mémoire,
pour tout le processus réglementaire, qui risque de suivre l'adoption d'un
projet de loi.
Alors, je vais aussi être audacieuse dans
notre présentation, parce que vous l'avez reçu, le mémoire, alors, j'imagine
que vous aurez des questions, on aura l'occasion d'élaborer, mais je profite un
peu du micro pour vous parler un peu de nous, pour vous parler de nos
préoccupations, pour vous parler des différents enjeux, parce que, quand on
pense aux grandes tragédies, je vais en nommer quelques-unes : Lac-Mégantic,
l'incendie de L'Isle-Verte, la tragédie de la côte des Éboulements, naturellement,
tout le monde a en tête le coroner. Quand on pense à des homicides, quand on
pense à des accidents routiers, quand on pense à des noyades, encore là, on
pense au coroner. Encore faut-il savoir que, les grandes statistiques que vous
voyez dans les informations de la Société de sauvetage, où prennent-elles ces
statistiques, ces grandes organisations-là? Au Bureau du coroner, hein? C'est
nous qui compilons les décès de l'ensemble du territoire québécois.
Mais moi, je pense plus loin, puis ça, c'est
souvent méconnu, quand on pense au frère d'un ami qui s'est <suicidé…
Mme Gélinas (Kathleen) :
…encore faut-il savoir que, les grandes statistiques que vous voyez dans les
informations de la Société de sauvetage, où prennent-elles ces statistiques,
ces grandes organisations-là? Au Bureau du coroner, hein? C'est nous qui
compilons les décès de l'ensemble du territoire québécois.
Mais moi, je pense plus loin, puis ça,
c'est souvent méconnu, quand on pense au frère d'un ami qui s'est >suicidé,
quand on pense à un bébé qui est décédé pendant son sommeil, quand on pense à
une maman qui fait son épicerie tout bonnement avec sa marmaille, qui
s'effondre et qu'elle décède, mais moi, je pense au coroner, parce que c'est ça
aussi, notre travail, puis c'est ça, souvent, qui est oublié. On a en tête le
coroner dans les grandes tragédies, mais en fait c'est dans chaque décès
inhabituel, obscur, violent, les gens qui décèdent à domicile sans personne
pour les appeler, pour les trouver, et ça fait quelques jours, quelques mois,
quelques semaines qu'ils s'y trouvent, c'est ça aussi, notre travail, alors, c'est
de donner des réponses, donner des réponses aux familles, expliquer ce qui
s'est passé et surtout le volet recommandation, qui est un volet très important
pour notre société, comment on aurait pu éviter ce décès.
Notre travail, c'est aussi un filet social
important. Ah! ça, on l'oublie également. Parce que, notre loi, telle qu'elle
est rédigée actuellement — et il n'y a aucune modification là-dessus,
je vous rassure — le coroner est également appelé dans toutes les
situations de personnes vulnérables. Que l'on pense à des décès en centre de
détention, que l'on pense à des décès dans des centres de personnes handicapées,
donc, le coroner est aussi appelé, même s'il s'agit d'une mort naturelle.
Pourquoi? Pour s'assurer qu'il n'y a pas eu de négligence, pour s'assurer que
les gens ont bien été traités, qu'il n'y a pas eu d'oubli. Alors, il s'agit
d'avis obligatoires, dans la loi, pour qu'un coroner soit contacté. Alors, vous
voyez, le coroner, ce n'est pas que dans les grandes tragédies, mais on est
également là à titre de filet social.
Le coroner est à la recherche de la
vérité, à la recherche de ce qui s'est passé. Et, dans le contexte actuel, la
profession de juriste et les professions de médecin sont complémentaires. Je le
mentionne, on ne connaît pas l'avenir, on ne sait pas ce qui va se passer au
niveau réglementaire, mais c'est très important de comprendre que, tel que le
bureau est composé actuellement, ça fonctionne très bien. En effet, tant les
juristes que les médecins analysent, tant les juristes que les médecins
cherchent également à comprendre. Les médecins sont davantage formés, on ne se
le cachera pas, au niveau de la nature humaine, l'anatomie, le corps, mais les
juristes naviguent très bien avec tout le volet réglementaire, le volet
législatif. D'ailleurs, les juges, hein… regardons l'institution des juges, les
juges entendent toutes sortes de causes, ils deviennent des spécialistes dans
tous les volets. Si on pense à une situation de vice caché, le juge,
soudainement, bien, doit s'approprier tous les éléments en lien avec la <cause
qui…
Mme Gélinas (Kathleen) :
…
législatif. D'ailleurs, les juges, hein… regardons l'institution des
juges, les juges entendent toutes sortes de causes, ils deviennent des
spécialistes dans tous les volets. Si on pense à une situation de vice caché,
le juge, soudainement, bien, doit s'approprier tous les éléments en lien avec
la >cause qui lui est présentée, et c'est la même chose pour le juriste
qui doit la vulgariser.
Mais le coroner juriste a cette aptitude
de bien s'intégrer dans tout ce qui lui est présenté et de rapidement
comprendre, parce qu'il n'y a pas de formation pour être coroner. Lorsqu'on
fait des présentations au grand public, c'est souvent la question qui nous est
demandée : Mais où est-ce que je peux suivre un cours pour être coroner?
Il n'y en a pas. Donc, c'est la somme de toutes les expériences de nos collègues,
nos propres expériences dès notre nomination qui font en sorte qu'on devient
des coroners. On apprend au fil des décès, on apprend par le partage avec nos collègues.
Je vais prendre l'exemple de ma région, moi, je suis coroner en Estrie, je
couvre plusieurs MRC, mais on a la chance d'avoir des médecins coroners, donc
je ne fais pas d'examen externe, c'est un médecin coroner qui les fait pour
moi, je l'accompagne, je veux bien comprendre, et il est très généreux. Et c'est
comme ça dans toutes les régions. Je parle de la mienne, mais c'est comme ça
dans toutes les régions. Ils nous expliquent, ils nous montrent, ils nous
démontrent tout ce qu'il en est au niveau du décès, au niveau humain, au niveau
de l'heure du décès… et faire l'appariement de tout ce qu'il en est au niveau
des blessures et autres.
Parce qu'il faut savoir que nous, les
coroners, nous reproduisons, nous recréons, nous parlons au nom des défunts. Il
y a rarement des témoins de leurs derniers moments, c'est nous qui
reconstituons ces derniers moments là. Nous sommes la dernière voix de ces
défunts-là, alors c'est d'autant plus important de comprendre ce qui s'est
passé. Alors, dans ce contexte-là, c'est pour ça que je dis que le mariage est
parfait. On a cette grande chance et cette grande capacité d'adaptation là et
de s'entraider, hein? Le défunt ne peut plus parler, c'est nous qui le faisons
pour lui.
Un élément très important dans cette
recherche de la vérité, le coroner doit être libre de penser, il doit être
libre de ses opinions, sans quoi, bien, il y a un risque, il y a un risque de
ne plus dévoiler cette vérité, de ne plus répondre aux questions, et c'est
notre inquiétude. Présentement, lorsque les coroners… Actuellement, il y a une
directive qui existe que, lorsque l'on fait des recommandations, on doit
contacter le destinataire des recommandations. La crainte que nous avons par
cette directive qui n'est pas dans le projet de loi, qui n'est pas dans la réglementation,
c'est la perte de l'indépendance du coroner, c'est de dévoiler des informations
à une <personne…
Mme Gélinas (Kathleen) :
…directive qui existe que lorsque l'on fait des
recommandations, on doit
contacter le destinataire des
recommandations. La crainte que nous avons
par cette directive, qui n'est pas dans le
projet de loi, qui n'est pas
dans la
réglementation, c'est la perte de l'indépendance du coroner, c'est
de dévoiler des
informations à une >personne avant même que la
famille ait pu bénéficier de ces informations-là. Alors, ça fait partie des
différents éléments qui font en sorte que nous sommes très inquiets et que l'on
désire conserver à tout prix cette indépendance.
Et je vais conclure que, vous l'avez vu,
on a été audacieux par différentes modifications qu'on vous propose. Ces modifications
ont pour but, vraiment, de préserver, selon nous, la fonction, la profession de
coroner, tant pour le Coroner en chef, que nous ne représentons pas mais qu'on
a à coeur pour notre institution, que les fonctions que l'on occupe à tous les
jours.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, Me Gélinas. Je cède maintenant la parole à
la ministre pour une période de 15 min 45 s d'échange. Mme la
ministre, s'il vous plaît.
Mme Guilbault :
Merci, M. le Président. Merci à Me Gélinas pour l'excellente présentation
qui a été faite, un vibrant plaidoyer pour la profession. Et je suis très
heureuse qu'elle l'ait fait, parce que… J'ai toujours eu beaucoup d'estime, d'ailleurs,
pour Me Gélinas, mais aussi pour la fonction de coroner et pour Dr Dandavino
aussi, bien sûr, pour les coroners en général. Mais c'est très vrai, ce qu'elle
dit, et je ne l'ai pas mentionné d'entrée de jeu, mais, avec l'arrivée de la
loi en 1986, l'idée, c'était ça, c'était de passer du rôle traditionnel, plus
ancien du coroner, qui était plutôt judiciaire, et tout ça, à un rôle de
protection de la vie humaine, à un rôle social, à un rôle très humain, répondre
à des questions que les survivants se posent puis continueraient de se poser
indéfiniment si ce n'était de l'information précieuse contenue dans les
rapports de coroner. Donc, un grand merci pour la mise en contexte.
Je vais y aller sur certains éléments qui
ont retenu mon attention dans la présentation. Peut-être commencer, justement,
avec la notion d'indépendance, qui est très, très importante, qui est au coeur
de toutes les discussions quand il s'agit de la profession de coroner et du
Bureau du coroner, une indépendance qui est consacrée par la charte, et tout
ça. Donc, c'est toujours une grande préoccupation pour nous aussi, comme
législateurs, de s'assurer de respecter cette indépendance consacrée. Et je vous
entendais dire que vous avez une inquiétude par rapport à l'indépendance, en
faisant référence à une directive ou, en tout cas, une consigne, là, interne,
finalement, qui n'est pas dans aucune loi ni aucun règlement, mais une consigne
interne qui consiste à encourager les coroners à, comme on dit, attacher leurs recommandations
avant de les formuler, à la faveur d'une meilleure application potentielle. C'est
le raisonnement qui est derrière ça. Et donc, comme ce n'est pas dans le projet
de loi et que, dans le projet de loi — dans mon interprétation du
projet de loi, du moins — on n'altère en rien l'indépendance du
coroner, même, bien au contraire, dans les processus de nomination, de
renouvellement, de sélection à la fois du Coroner en chef, du coroner en chef
adjoint et des coroners temps plein ou temps partiel, on prévoit… évidemment,
ce sera dans un règlement qu'on n'a pas ici aujourd'hui, là, donc on ne peut
pas nécessairement avoir tout le détail, mais l'idée, c'est de transformer,
finalement, ces <processus-là…
Mme Guilbault :…
de renouvellement, de sélection à la fois du Coroner en
chef, du coroner en chef adjoint et des coroners temps plein ou temps partiel,
on prévoit… évidemment, ce sera dans un règlement qu'on n'a pas ici
aujourd'hui, là, donc on ne peut pas nécessairement avoir tout le détail, mais
l'idée, c'est de transformer, finalement, ces >processus-là de
nomination puis de renouvellement, qui, actuellement, dépendent uniquement du ministre,
en quelque chose qui va être un peu plus objectif, avec des comités, des gens
qui seraient appelés à évaluer la compétence des personnes avant de les
déclarer aptes à assumer la fonction, comme le dit le règlement.
Donc, moi, je vois ça, au contraire, comme
un éloignement du seul pouvoir politique de vie ou de mort, entre guillemets,
là, sur un coroner ou un coroner en chef. Alors, en quoi est-ce que le projet
de loi, selon vous, pourrait nuire à l'indépendance du coroner ou du Bureau du
coroner?
Mme Gélinas (Kathleen) :
Donc, l'article 46, tel qu'il est formulé actuellement, l'article 46, c'est
vrai que ça… le projet de loi, tel qu'il est monté, éloigne du politique, mais
remet entre les mains d'une seule personne, qui est la Coroner en chef, le
droit de vie ou de mort de certaines investigations qui sont débutées par des
coroners, parce qu'à ce moment-là c'est à la seule discrétion de la Coroner en
chef qu'elle va décider si la complexité des causes des circonstances du décès
l'exige pour retirer une cause. La bonne expédition des affaires, on ignore
quelles affaires. Est-ce que c'est la directive interne du bureau? Est-ce que c'est
selon certains critères occultes?
Donc, c'est pour ça qu'on vous a fait une
recommandation, au niveau de l'article 46, d'évacuer certains éléments qui, notamment
au niveau de la compétence des coroners... bien, chaque coroner doit être actif
dans son ordre professionnel, et la compétence est couverte par chacun des
ordres professionnels des coroners qui sont nommés, parce que, là, on remet, en
fait, entre les mains de la Coroner en chef le droit de vie ou de mort d'une
enquête d'un coroner à temps partiel, sujet à renouvellement. Alors, dans ce
contexte-là, on remet beaucoup, beaucoup entre les mains d'une seule personne
cette discrétion-là, et ce qui fait qu'il y a de l'inquiétude, actuellement,
chez beaucoup de nos coroners.
On l'entend régulièrement, parce que c'est
déjà un petit peu commencé par ce processus de directive interne là, parce que,
on ne se le cachera pas, actuellement, il n'y en a pas, de réglementation au
niveau du renouvellement, le fonctionnement de renouvellement, alors, le
Coroner en chef, on sent qu'il a un petit peu droit de vie ou de mort sur le
renouvellement de nos coroners. Quand ils ne sont pas renouvelés, on ne sait
pas trop pourquoi, on n'a pas d'information. Donc, il y a de l'inquiétude. Si
on ne suit pas les directives du bureau, bien, qu'est-ce qui arrive de l'avenir
de ces coroners-là, qui, eux, tout ce qu'ils veulent, c'est sauver des vies?
• (10 h 20) •
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, merci. Actuellement, en fait, le renouvellement ou non est décidé par le
ministre de la Sécurité publique. C'est sûr que le Coroner en chef envoie un
minimum d'information, mais c'est le ministre, ultimement, qui décide si, oui
ou non, on renouvelle un coroner <à temps partiel. Et là l'idée… Encore
une…
Le Président (M.
Bachand) :…
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, merci. Actuellement, en fait, le renouvellement ou non est décidé par le
ministre de la Sécurité publique. C'est sûr que le Coroner en chef envoie un
minimum d'information, mais c'est le ministre, ultimement, qui décide si, oui
ou non, on renouvelle un coroner >à temps partiel. Et là l'idée… Encore
une fois, le règlement, je suis consciente qu'on ne l'a pas, le règlement, pour
le renouvellement, puis tout ça, mais l'idée, ça va être d'avoir un comité.
Évidemment, le Coroner en chef ou son représentant va être mêlé au processus…
va faire partie des gens qui vont évaluer le renouvellement potentiel — c'est
logique, quand même, c'est le gestionnaire du bureau — mais il va y
avoir une instance officiellement nommée pour… ou constituée pour évaluer le
renouvellement et suggérer au ministre, donc, le renouvellement ou non, ce qui
se fait un peu informellement, mais là ça va être formalisé. Donc, j'essaie
vraiment de voir en quoi est-ce que l'indépendance va être plus affectée, l'indépendance
du coroner va plus être plus affectée par cette modification-là.
Mme Gélinas (Kathleen) :
Je suis heureuse d'entendre qu'au niveau du renouvellement il y aura un
processus qui sera clair, c'était un de nos questionnements. Mais n'empêche que,
dans la gestion quotidienne, présentement, on ne vit pas cette indépendance-là.
Je vous ai nommé l'article 46, en fait, c'était l'article 46 de la
loi, donc l'article 20 du projet de loi, donc… et c'est la raison pour
laquelle l'article 20 du projet de loi, pour nous, c'était primordial. C'est
dans la gestion quotidienne aussi. Ce n'est pas uniquement au niveau du
renouvellement qu'on doit se questionner sur l'indépendance, mais dans le
travail quotidien des coroners, à ce moment-là, sur la gestion de leurs
enquêtes, sur le travail qu'ils font. Et ça, actuellement, bien, quand on
produit un rapport, entre autres, il y a toute une analyse qui a été faite, des
discussions avec, parfois, des partenaires et autres pour sauver des vies, et
là, parfois, on se fait répondre que, si les recommandations ne seront pas
modifiées selon le souhait du bureau, bien, à ce moment-là, on ne pourra pas
être appuyés. Mais où est l'indépendance, à ce moment-là, du coroner dans la
gestion de son quotidien? Et c'est notre plus grande crainte, c'est que, dans
le travail quotidien, on ait l'intervention régulière du Coroner en chef et des
coroners en chef adjoints qui viennent nous dire comment conduire nos
investigations, à remettre le pouvoir entre les mains d'une seule personne. Et
c'est ce qu'amène l'article 20 du projet de loi, c'est qu'on remet le
pouvoir entre les mains d'une seule personne à la conduite du Bureau du coroner.
Le Président (M. Bachand) :Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Merci beaucoup. L'article 20, en fait, si on le résume, l'idée, c'est de
prévoir explicitement la possibilité pour le Coroner en chef de transférer un
dossier, ce qui se fait déjà aussi informellement au bureau, comme vous le
savez tous les deux, pour toutes sortes de raisons, là. Si on prend les cinq
éléments... «sur demande du coroner chargé de l'investigation», bon, là, c'est
difficile de s'opposer si le coroner lui-même ne peut plus ou ne veut plus le
faire, «en cas d'incapacité», «lorsque la complexité l'exige», ça, on peut
penser <à des cas…
Mme Guilbault :…fait déjà aussi informellement au bureau, comme vous le savez
tous les deux, pour toutes sortes de raisons, là. Si on prend les cinq éléments...
«sur demande du coroner chargé de l'investigation», bon, là, c'est difficile de
s'opposer si le coroner lui-même ne peut plus ou ne veut plus le faire, «en cas
d'incapacité», «lorsque la complexité l'exige», ça, on peut penser >à des
cas, là, et c'est déjà arrivé, par exemple, un coroner à temps partiel qui a une
investigation de grande, grande, grande envergure, puis qu'à un moment donné il
dit : Je ne peux pas mettre, moi, 90 heures là-dessus, tu sais, ça fait
fait que, des fois, on le transfère à un coroner temps plein. Donc, ça, c'est
un exemple de circonstance qui pourrait expliquer le point 3°. Et les
points 4° et 5°, ça réfère directement… puis ça m'amène à mon autre point,
dont je suis certaine que vous partagez la préoccupation, sur les délais. Quand
on parle de bonne expédition des affaires ou lorsque le délai n'est pas
complété… le rapport n'est pas complété dans un délai raisonnable, bien, je me
dis, une des façons, des fois, peut-être, de faire en sorte qu'on puisse
réduire globalement les délais… Puis, encore là, c'est sous réserve... il y a
des coroners qui sont plus… qui ont des délais moins élevés que d'autres, des
fois, il y a des circonstances qui justifient ça, je comprends très bien, mais
il reste qu'ultimement l'idée, c'est de réduire les délais pour le bien des
familles qui attendent. Alors, ces articles-là sont prévus pour pouvoir faire
ce type de transfert là quand, à un moment donné, si vous me passez
l'expression, ça ne finit plus, puis il faut demander à un autre coroner, là,
d'achever le travail parce que les familles attendent, puis, bon, vous le
savez, il y a des plaintes, et tout ça.
Alors, encore une fois, en quoi est-ce que
vous pensez que ça pourrait altérer l'indépendance des coroners, plus
particulièrement sous l'angle d'orienter ou d'influencer les recommandations,
en disant : Si tu fais telle «recom», je ne voudrai pas, puis tout ça?
J'essaie de voir le lien avec le fait de se mêler de vos recommandations versus
cet article-là, qui touche un autre volet, quant à moi.
Mme Gélinas (Kathleen) : Si
vous regardez les modifications qu'on vous propose pour l'article 20, on a la
même préoccupation que vous au niveau des délais. Donc, on vous a proposé une
modification qui… Le paragraphe 5° que vous aviez est devenu, pour nous, 3°. C'est…
Oui, on veut bien se préoccuper, nous aussi, des délais, mais le délai
raisonnable doit être imputé au coroner à partir du moment où il a les éléments
d'enquête en main. S'il est encore en attente d'un rapport de police, là, ça
fait un an, en attente d'une décision du DPCP, en attente d'un rapport
d'autopsie, on ne peut pas lui reprocher un délai qui, lui, dépend des
partenaires, c'est la raison pour laquelle on vous a proposé cette
modification-là. On est d'accord que le Coroner en chef pourra, lorsque le
délai est excessif, retirer une enquête, mais à partir du moment où le coroner,
lui, a vraiment tout en main pour rédiger...
Et par contre, lorsqu'on parle de dossiers
de grande envergure, quant à nous, ce n'est pas la complexité des causes des
décès. Si un coroner, par la complexité, parce que c'est de grande envergure,
considère qu'il n'a pas la capacité ou les compétences pour mener à bien cette
investigation-là, bien, ça va toujours, dans notre cas, selon notre
appréciation, dans le premier paragraphe, le coroner chargé de l'investigation
pourra, à ce moment-là, demander lui-même un transfert. Ce qui fait qu'on
demeure très, très, très interrogatifs à savoir <c'est quoi…
Mme Gélinas (Kathleen) :
…de grande envergure, considère qu'il n'a pas la capacité ou les compétences
pour mener à bien cette investigation-là, bien, ça va toujours, dans notre cas,
selon notre appréciation, dans le premier paragraphe, le coroner chargé de
l'investigation pourra, à ce moment-là, demander lui-même un transfert. Ce qui
fait qu'on demeure très, très, très interrogatifs à savoir >c'est quoi, finalement,
la complexité des causes, parce que, si le coroner ne se sent pas capable, c'est
trop lourd... on se rappelle, on représente les coroners investigateurs à temps
partiel, bien, si c'est trop complexe, il peut en demander lui-même le
transfert. Il sera le seul juge de la complexité de l'affaire. Puis, pour la
bonne expédition des affaires, qui est le quatrième paragraphe, encore là,
quant à nous… du projet de loi, bien, la notion de délai, si ce sont des délais
qu'on considère imputables au coroner, bien, encore faut-il, je le répète,
qu'il ait tout en main à ce moment-là. Et on n'est pas contre l'idée de
retirer, c'est vraiment l'objet de notre modification au troisième paragraphe,
là.
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :O.K. Merci beaucoup. Je vais passer à un autre sujet, parce
qu'il me reste seulement trois minutes, puis, comme je vous ai tous les deux ce
matin, j'aimerais ça vous entendre. C'est un peu philosophique, mais en même
temps, pour moi, c'est très pertinent : Qu'est-ce qui, selon vous, fait un
bon coroner? Puis j'aimerais ça vous entendre tous les deux, si le temps nous
le permet.
M. Dandavino (André-H.) :
Bien, moi, je pense…
Mme Guilbault :
Et, en complément, excusez, pour aller rondement, en complément, si vous avez
des commentaires sur les professions qui devraient être éligibles à la
fonction.
• (10 h 30) •
M. Dandavino (André-H.) :
C'est un «catch-22». Écoutez, je pense que, pour être un bon coroner, il faut
être, premièrement, très professionnel. Il faut aussi, également, avoir beaucoup
d'empathie pour le décédé, la famille, mais de l'empathie qui nous permet quand
même de faire notre travail. Et surtout ça prend quelqu'un qui a un esprit d'analyse
et une compétence avec un désir de rechercher la vérité. Je pense que, pour
nous, ce qui est important… quand moi, j'ai été formé il y a 33 ans, c'est,
quand quelqu'un mourait, il ne fallait pas qu'il parte avec aucun secret, que
la société sache qu'est-ce qui était vraiment arrivé, le but premier étant de
sauver d'autres vies.
Maintenant, actuellement, en tant que
médecin avec une expertise différente et avec des juristes qui ont un nouvel esprit
d'analyse, je ne suis pas certain que l'ouverture à d'autres professions va
permettre d'avoir la même qualité de travail que celui qui est fait
actuellement. Et, par exemple, moi, par mon expérience, des cas de coroner
faciles, je n'en ai aucun, parce que je suis capable de les annuler, alors tous
mes cas sont des cas compliqués. Par conséquent, je prends beaucoup plus de
temps pour faire des évaluations, des investigations que quelqu'un qui a une
mort naturelle simple.
Alors, l'ouverture à d'autres professions,
on a des réticences, ça ne veut pas dire qu'on est complètement contre. Mais,
si vous faites bâtir une maison neuve, ce que vous voulez avoir, c'est le sceau
d'un architecte et non pas nécessairement du technicien. C'est dans n'importe
quoi, que ce soit dans… la même chose dans les engineerings. Il y a une
question des crédibilités qu'on risque de perdre. La profession <médicale…
>
10 h 30 (version révisée)
< M. Dandavino (André-H.) :
...contre. Mais, si vous faites bâtir une maison neuve,
ce que vous
voulez avoir, c'est le sceau d'un architecte et non pas nécessairement du
technicien. C'est dans n'importe quoi, que ce soit dans... même chose dans les
engineerings. Il y a une question de crédibilité qu'on risque de perdre. La
profession >médicale, sur le plancher, les gens du milieu vont
considérer que les investigations n'ont pas nécessairement la même force, la
même puissance que quand c'est fait par un professionnel de leur niveau.
Le Président (M. Bachand) :
Me Gélinas, peut-être? Il reste une minute.
Mme Gélinas (Kathleen) : Je
pense, pour faire un bon coroner, que ça prend du professionnalisme, de la
rigueur, de l'empathie. Pourquoi la rigueur? Pour être capable de mener à terme...
vraiment tout couvrir les aspects, penser... Ça prend de l'innovation. Pourquoi
de l'innovation? Pour penser plus loin que ce qui existe déjà, parce que c'est
ça aussi, faire des recommandations, c'est de changer les choses. Donc, être
capable d'être innovant, imaginatif, ça prend aussi ces éléments-là, en plus de
l'empathie et du professionnalisme, parce qu'on accompagne les familles. Mais
on veut éviter que ça se reproduise, et des fois il faut penser... on dit «penser
en dehors de la boîte», c'est ça, aller au-delà de ce qui existe, au-delà des lois,
au-delà des règlements, puis comment ça pourrait être différent. Alors, c'est ce
que je pense qui fait qu'on est un bon coroner.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de Vimont
pour 13 min 15 s.
M. Rousselle : Merci, M.
le Président. Bienvenue, merci d'être ici, on apprécie beaucoup. Écoutez, je
regardais le nombre de permanents, considérant les coroners qui ne sont pas
permanents, selon vous... puis là je le sais que vous représentez les coroners
non permanents, mais, selon vous, il devrait-tu y avoir plus de coroners
permanents dans le milieu? Puis vous êtes là-dedans, j'aimerais ça que vous
m'éclairiez là-dessus.
Mme Gélinas (Kathleen) :
En fait, il y a beaucoup de coroners à temps partiel qui travaillent de façon
permanente, O.K.? C'est la rémunération, beaucoup, qui est différente à ce
niveau-là, parce qu'on a des coroners, dans certaines régions, que c'est eux
qui assument la garde 24 heures sur 24, presque 365 jours par année,
à l'exception de leur période de vacances, donc ils travaillent de façon
permanente, mais ils sont rémunérés selon le mode de rémunération des coroners
à temps partiel. Alors, c'est pour ça que, dans notre mémoire, à plusieurs
reprises, vous voyez que la grande différence dans le travail, c'est le mode de
rémunération.
Le danger, parce que je sais que ça... On
a déjà eu des discussions entre nous sur le fait d'avoir plus de permanents. Si
les permanents sont basés à Montréal ou à Québec, comme c'est le cas présentement,
on risque de perdre la finesse de certaines régions si la nomination de
coroners est orientée uniquement vers Montréal ou Québec. Pourquoi? Parce que
nous, les coroners en région — nous sommes tous les deux, d'ailleurs,
des coroners de région — bien, c'est nous qui organisons nos transports,
c'est nous qui avons une connaissance fine des différents corps de police parce
qu'on agit avec. Moi, je représente six MRC, donc j'ai la Sûreté du Québec, des
corps municipaux. Alors, on a une <connaissance...
Mme Gélinas (Kathleen) :
...
Montréal ou Québec.
Pourquoi?
Parce que nous, les
coroners en région
— nous sommes tous les deux,
d'ailleurs,
des coroners de région
— bien, c'est nous qui organisons nos
transports, c'est nous qui avons une
connaissance fine des différents
corps de police,
parce qu'on agit avec. Moi, je représente six MRC, donc
j'ai la
Sûreté du Québec, des corps
municipaux. Alors, on a une >connaissance
fine du terrain et des partenaires, qui appeler, les hôpitaux, le transport, à
quel hôpital on doit faire le transport, alors que le territoire est très vaste,
et ça, c'est quasi impossible pour... ce n'est pas impossible, mais très
difficile pour un coroner permanent situé à Montréal ou à Québec, de pouvoir
avoir cette connaissance-là du terrain et du fonctionnement. C'est l'avantage
que nous avons d'être dans chacune des régions du Québec, et on peut plus
facilement se déplacer pour faire des examens ou encore pour visiter des
scènes, des lieux de tragédies, des accidents automobiles, des routes. On est
sur le terrain, alors...
Et par contre ce qui manque, peut-être, au
Bureau du coroner, je pense, c'est... pour répondre, pour faire du pouce un
petit peu sur la question précédente de la ministre, ce sont des domaines
d'expertise à qui on pourrait référer. Ce ne sont pas tant des coroners ayant
ces professions-là, mais j'aimerais bien avoir, par exemple, un spécialiste en
toxicologie attaché de façon permanente au Bureau du coroner à qui je pourrais
référer et poser mes questions. Donc, ce sont certains secteurs de spécialisation
qu'il serait intéressant d'avoir au Bureau du coroner pour avoir, en tout temps,
une référence, une expertise. Puis, vous l'avez vu dans le mémoire, la
Colombie-Britannique a un petit peu pris ce modèle-là en créant des unités
spéciales dans leur bureau du coroner, où, justement, les coroners... parce
qu'il y a beaucoup de coroners à temps partiel aussi... les coroners peuvent
référer. Il y a des gens qui ont des expertises précises pour nous accompagner,
et ça, ce serait...
Le Président (M. Bachand) :M. le député de Vimont, s'il vous plaît.
M. Rousselle
:
Merci beaucoup. Tout à l'heure, j'ai écouté un petit peu votre réticence
concernant les autres domaines. Je voudrais vous entendre, parce que j'ai
entendu, vous, M. le docteur, avoir des réticences, mais, si on permettrait à
des infirmiers et des infirmières qui ont une expertise aussi, un bac en
sciences infirmières, de devenir coroner... Je ne parle pas d'un autre domaine,
je parle d'un domaine de la santé. Parce que, là, avez-vous... Parce qu'à un
moment donné on se plaint d'une pénurie d'emplois, pénurie de monde, si on
élargit un petit peu plus à des gens, justement, avec des spécifications, comme
vous avez dit... peut-être qu'on pourrait même, peut-être, l'ouvrir à des psychologues,
ou quoi que ce soit. Donc, dans ce domaine-là, avez-vous toujours une réticence
ou...
M. Dandavino (André-H.) :
C'est sûr, il n'y a rien de blanc, rien de noir, là, tout est gris, ça dépend
de la variation de la couleur. On peut accepter d'autres professions, mais vous
ne pouvez pas... Dans le sens que, si on regarde qu'une grande quantité des
dossiers pour lesquels on peut faire des changements, c'est dans le dossier
médical, pour faire une évaluation, une lecture, pour faire une lecture de ce
qui s'est passé, de ce qui aurait pu être fait, de l'étude des <médicaments...
M. Dandavino (André-H.) :
...mais vous ne pouvez pas... Dans le sens que, si on regarde qu'une grande
quantité des dossiers pour lesquels on peut faire des changements, c'est dans
le dossier médical, pour faire une
évaluation, une lecture, pour faire
une lecture de ce qui s'est passé, de ce qui aurait pu être fait, de l'étude
des >médicaments, ça prend une expertise spéciale que je ne suis pas sûr
que les autres professions ont. Puis je n'ai rien contre les infirmières, même,
qui ont un bac en sciences infirmières, ce n'est pas des sciences, nécessairement,
médicales du même niveau, elles n'ont pas du tout la même formation, elles
n'ont pas du tout la même connaissance du milieu. Je pense qu'il y a une
différence.
Maintenant, le risque — sans que
ce soit trop péjoratif, ce que je dis — c'est d'avoir un nivellement
par la base, là. Tu sais, je suis sûr que les notaires ne veulent pas que leur
secrétaire juridique fasse une partie de leur travail, même si, dans certains
cas, ils pourraient le faire facilement, dans une bonne proportion, mais, quand
vous avez le sceau du notaire, vous avez un sceau du notaire. Si vous êtes un
médecin ou un hôpital qui avez une évaluation par un coroner médecin ou une
autre profession, je ne suis pas sûr que vous allez y donner le même poids. Il
faut faire attention aussi à ce qui est dit par les organismes publics et ce
qui est dit sur le terrain. Moi, ça fait quand même 45 ans que je
travaille sur le terrain, et ce que la population médicale dit et pense n'est
pas nécessairement les belles paroles de certains organismes. Il faut faire
juste attention à ça, là. Vous savez très bien que, dans les corridors, ce
n'est pas la même chose qui se dit qu'ici, là.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols : Merci, M.
le Président. Merci de vos conseils, on en prend bonne note. Relativement à la
formation, moi, j'étais très surprise, là, de prendre connaissance qu'il n'y
avait pas nécessairement une formation commune ou une formation... Oui, c'est
des juristes, mais... Je vous vois réagir, ça fait que peut-être que vous
pourrez répondre... le type de formations communes qui sont données quand on
applique sur le poste pour être coroner.
M. Dandavino (André-H.) :
Il y a une formation, qui est donnée par un nouveau coroner, de quelques jours,
qui, anciennement, était une formation rémunérée, qui, actuellement, ne l'est
pas. Mais moi, je fais partie de l'ancienne génération, là, on me le répète
souvent, là, vu que j'ai été nommé sous la nouvelle loi, je suis un des plus
vieux coroners du Québec, mais à ce moment-là il fallait avoir au moins
10 ans d'expertise médicale ou 10 ans d'expertise en milieu
juridique. Mais, quand vous avez 10 ans d'expertise, vous en avez vu, des
choses, là, vous n'avez pas besoin de vous faire dire par n'importe qui comment
examiner un corps, comment faire des prélèvements. On peut me dire comment
remplir la paperasse, mais je n'ai pas besoin de ça, là, je n'ai pas besoin de
cours. Comme on dit, je n'ai pas lu certains livres, je les ai écrits. Mais, tu
sais, dans le sens qu'il faut faire attention.
Actuellement, parce qu'il manque de
coroners, de plus en plus on diminue l'expertise puis on en demande de moins en
moins. Mais le... Dans un dossier médical, que ce soit... c'est la même
analyse, la même expertise que dans un bureau à tous les jours, alors, à ce
moment-là, on n'en a pas vraiment besoin. La formation qu'on a, c'est la
formation un peu juridique qu'on doit nous donner et la formation, aussi, au
point de vue <papiers...
M. Dandavino (André-H.) :
…dans un dossier médical, que ce soit... c'est la même analyse, la même
expertise que dans un bureau à tous les jours, alors, à ce moment-là, on n'en a
pas vraiment besoin. La formation qu'on a, c'est la formation un peu juridique
qu'on doit nous donner et la formation, aussi, au point de vue >papiers
à remplir, comment ne pas se mettre les pieds dans les plats, des choses comme
ça. Mais, la formation, on l'a déjà.
Mme Nichols : ...d'une formation
de quelques jours, là, on ne parle quand même pas d'une formation universitaire
pour être coroner. Je comprends que c'est sur la base de l'expérience, comme
vous dites, 10 ans d'expérience. Mais maintenant, avec le manque de main-d'oeuvre,
bien, on demande moins d'expertise. Au niveau formation, moi, quelques jours de
formation pour être coroner, je comprends que l'expertise rentre en jeu, mais
je trouve qu'il y a peut-être une amélioration à faire, à ce niveau-là. Comme
vous dites, là, coroner, c'est important, puis on comprend toute l'importance
de votre rôle. Je pense que la formation... puis c'est un avis bien personnel,
puis je vais écouter tous les groupes, qui, peut-être, pourront changer mon
opinion, mais je pense que la formation devrait être une formation commune,
peut-être plus que quelques jours. Est-ce que ça ne devrait pas être une
formation universitaire, peut-être, Me Gélinas?
Mme Gélinas (Kathleen) :
Je fais partie de la nouvelle génération de coroners, pour reprendre
l'expression de mon collègue. Donc, nous avons… à chaque nomination, il y a une
formation qui est, effectivement, donnée aux nouveaux coroners par le Bureau du
coroner, bien souvent par un coroner permanent... ces dernières années, c'était
un coroner permanent dans le domaine médical... que l'on soit juriste ou que
l'on soit médecin, où on nous enseigne, on nous montre le fonctionnement administratif
de la documentation, les types d'ordonnance, et autres. On a un volet
juridique, un rappel de la protection de la vie privée, notamment, les lois, et
autres, tant pour les médecins que pour les juristes, qui n'ont pas eu nécessairement
à travailler avec ces lois-là.
Mais on a aussi un volet médical, donc on
se rend à la morgue, on apprend à manipuler, aussi, la dépouille d'une
personne, savoir ce que vivent nos médecins qui feront nos examens externes,
qui feront ça pour nous, donc, dans le plus grand respect du corps du défunt,
mais également être confrontés au décès et à l'atrocité que vit la famille.
Donc, ça, c'est très important, et on demande aux coroners, d'ailleurs,
d'accompagner les médecins qui feront les expertises pour nous pour bien
comprendre ce qu'il en est.
• (10 h 40) •
Le Président (M. Bachand) :Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols : Oui, en
tout respect, ça reste… j'imagine, c'est une formation qui est en partie sur le
terrain, mais ça reste une formation de quelques jours. Pour l'importance des
dossiers qui sont émis à la fin ou pour l'importance des dossiers que vous
traitez, comme je le réitère, ce n'est que quelques jours.
Je voulais vous entendre sur plusieurs
autres points. On dit souvent... vous en avez parlé, la longueur... tu sais,
pour une famille, là, c'est vraiment long, parfois, attendre un rapport.
Qu'est-ce qu'on peut faire? Des suggestions concrètes, là, que vous pouvez nous
dire ici, au micro, des solutions concrètes qu'on peut apporter pour pouvoir
diminuer ces délais-là, est-ce que c'est d'engager plus de <monde…
Mme Nichols : ...
plusieurs
autres points. On dit souvent... vous en avez parlé, la longueur... tu sais,
pour une famille, là, c'est
vraiment long, parfois, attendre un rapport.
Qu'est-ce qu'on peut faire? Des
suggestions concrètes, là, que vous
pouvez nous dire ici, au micro, des
solutions concrètes qu'on peut
apporter pour pouvoir diminuer ces délais-là, est-ce que c'est d'engager plus
de >monde? Est-ce que... Comment on pourrait fonctionner? Est-ce que c'est
parce que ce n'est pas assez rapide, les rapports de DPCP? Souvent, vous
l'avez, on attend nos collaborateurs ou on attend des... on attend après d'autres
choses pour pouvoir aller de l'avant. Avez-vous des suggestions concrètes?
Mme Gélinas (Kathleen) :
Tout le volet des autopsies, les autopsies hospitalières. Parce qu'il faut
savoir que tout le volet qui est fait en autopsie, ce n'est pas... ça ne passe
pas tout par le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, que,
là, ça, c'est les cas à caractère plus criminel, ou autres, le reste, ce sont
des autopsies hospitalières. C'est très long, nos pathologistes font ça après
leurs heures de travail à l'hôpital. Donc, peut-être regarder du côté du ministère
de la Santé... j'ignore si c'est faisable, mais de dégager des plages horaires
pour ces pathologistes-là, qui nous rendent un grand service à nous. Ils ne
sont pas obligés d'accepter les cas qu'ils font pour nous. Ils le font, ils
font ça le soir, ils font ça la fin de semaine, ils font l'examen, ça se fait
bien, mais après encore faut-il qu'ils fassent la rédaction de leur rapport et
qu'ils nous le transmettent, et ça, ça prend parfois des semaines, voire des
mois.
Effectivement, le volet du DPCP, ce qui se
passe, bien souvent, un policier peut choisir de soumettre ou pas un dossier au
DPCP, il nous informe qu'il le soumet, mais des fois on n'a pas de retour, c'est-à-dire
que le policier a soumis le dossier, le cas a été refusé, mais nous, on ne le
sait pas, on n'a pas de suivi qui est fait avec le DPCP ou avec le policier par
la suite. Lui, il classe son dossier, et des fois c'est un an plus tard, lorsque
la procédure administrative fait en sorte qu'ils revérifient les dossiers, ils
font : Oups! On a oublié d'informer le coroner. Ça, ces petits liens là,
ces éléments-là, il faudrait, dès qu'il y a un dossier coroner, aussi, au
niveau des corps policiers, là, qu'il y ait un suivi qui se fasse de façon plus
particulière avec le DPCP.
Je vais vous donner un exemple. En matière
de... il y a une entente qui existe, l'entente multisectorielle dans le domaine
des services de garde, bien, pourquoi qu'il n'y a pas ce type d'entente là avec
le Bureau du coroner, où est-ce qu'il y aurait une discussion tripartite?
Le Président (M. Bachand) :
En 20 secondes, Mme la députée de Vaudreuil... Ah! M. le président,
allez-y, oui, rapidement.
M. Dandavino (André-H.) :
...mercantile, mais il y a une question, aussi, qui est une question
importante, c'est que les coroners à temps partiel, c'est des coroners qui sont
déjà des professionnels dans un autre... qui ont une pratique active, et, avec
la rémunération qui leur est donnée, pour un cas qui prend à peu près huit à
12 heures pour faire — parce que, contrairement à ce qu'on dit,
ça prend ce temps-là pour faire une bonne investigation — avec le
tarif qu'ils ont, ils vont perdre leur samedi et leur dimanche à faire ce
travail-là, alors, nécessairement... on ne peut pas nécessairement demander à
ces gens-là de mettre tout le temps qu'ils ont sur un rapport de coroner.
Il ne faut pas oublier aussi qu'en
périphérie les coroners à temps partiel sont en contact avec la famille, alors
les familles savent déjà un peu c'est quoi, l'investigation, les <rapports
de...
M. Dandavino (André-H.) :
...
tout le temps qu'ils ont sur un rapport de coroner.
Il ne faut pas oublier aussi qu'en
périphérie les coroners à temps partiel sont en contact avec la famille, alors
les familles savent déjà un peu c'est quoi, l'investigation, les >rapports
de... les conclusions avant même que le rapport final soit sorti.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît.
M. Ouellette : Merci, M.
le Président. Bienvenue à vous. Effectivement, très instructif, votre
présentation et votre audace. Je vous dirais que l'argent, c'est le nerf de la
guerre, là, puis il a l'air, dans le système, d'en manquer un peu ou... Et je
ne veux pas que vous preniez ça de façon péjorative, mais le coroner, c'est un
peu un mal nécessaire. Dès qu'il y a un décès, là, bien, le mot «coroner», il
faut qu'il apparaisse. Qu'il soit naturel, qu'il soit criminel, qu'il soit...
dès qu'il y a un décès, il y a le coroner qui est là.
On a l'impression... les parlementaires,
on a cette impression-là, les citoyens doivent avoir la même impression... on
a l'impression que, bon, c'est obligatoire, le coroner, mais il n'a pas tous
les outils pour travailler, ou, à quelque part, dans la chaîne, là... Bien, la
personne est décédée, bon, il faut qu'ils attendent après ci, il faut qu'ils
attendent après ça, il faut qu'ils attendent le bon vouloir d'un, il faut qu'ils
attendent le bon vouloir de l'autre. Il fait des recommandations, c'est des recommandations.
Des fois, je compare les recommandations du coroner aux recommandations du
Protecteur du citoyen : c'est une recommandation, personne ne s'énerve
avec ça. Et, d'année en année, les recommandations suivent, elles ne sont pas
appliquées, elles ont fait le journal une ou deux fois. Quand les mêmes choses
se reproduisent à des endroits différents, ah! là, ça devient plus intéressant,
ça devient plus important. Comment faire pour tout concilier ça?
J'aurais le goût, dans ma première question,
de vous parler des recommandations puis du suivi, puis on ira dans les questions
techniques tantôt. J'ai mentionné à Mme la ministre, tantôt, quand on avait eu
l'audition du coroner, M. Marsolais, et la présence de Mme la ministre,
qui l'accompagnait... je pense qu'on a passé une grande partie, sinon la
majeure partie de l'audition sur les recommandations, le suivi des recommandations,
la mise à jour des recommandations, et ça, j'ai l'impression que c'est la
partie la plus importante, en tout cas une des parties les plus importantes,
parce que vous avez l'ensemble des faits, vous êtes des professionnels. Je vous
écoutais puis je suis entièrement à la même page que vous.
À la page 39 et 40 de votre mémoire, vous
nous en parlez, des recommandations. Qu'est-ce qu'on peut faire pour
s'améliorer? Je comprends que vous avisez l'organisme. Bon, l'organisme, il
prend son temps, se traîne les pieds, vous allez aviser le gouvernement. Ce n'est
vraiment pas la meilleure affaire à faire, parce que je ne suis pas sûr qu'en
avisant le gouvernement ça va se faire. Peut-être que... On a la chance <d'ouvrir
la loi, là...
M. Ouellette :
...je comprends que vous avisez l'organisme. Bon, l'organisme, il prend son
temps, se traîne les pieds, vous allez aviser le gouvernement. Ce n'est
vraiment pas la meilleure affaire à faire, parce que je ne suis pas sûr qu'en
avisant le gouvernement ça va se faire. Peut-être que... On a la chance >d'ouvrir
la loi, là, on a la chance de travailler dans la loi, peut-être qu'il pourrait
y avoir un «doit», dans les recommandations, au lieu d'un «peut» ou juste une recommandation
qui va être au bon vouloir des gens qui vont la recevoir, ou au bon vouloir du gouvernement,
ou au bon vouloir de votre rapport annuel. Parce ce que c'est le fun, dans
votre rapport annuel, tout ce que c'est qu'on regarde, combien est-ce qu'il y a
de recommandations et depuis combien d'années qu'elles n'ont pas été suivies?
Avez-vous des commentaires là-dessus?
M. Dandavino (André-H.) :
Bien, je pense qu'il y a une ouverture, de la part de la ministre, de demander
que toutes les recommandations qui... Auparavant, les gens n'étaient pas
obligés de répondre aux recommandations. Actuellement, avec les modifications
apportées... et Mme la ministre, lorsqu'elle était porte-parole du bureau, elle
sait très bien qu'elle défendait nos recommandations... à ce moment-là, il
faudrait que les gens soient imputables, et qu'à la fin de l'année, même, que
l'Assemblée nationale soit avisée qu'on a fait des recommandations à
l'Association des restaurateurs ou à l'association... au ministère des
Transports et que ces recommandations-là n'ont pas eu de suivi. À ce moment-là,
ça permettrait à un organisme indépendant, comme vous, de pouvoir juger de
l'évolution du dossier.
Actuellement, on a juste un pouvoir de recommandation,
mais on n'a pas... les gens ne sont pas nécessairement attachés ou obligés de
les suivre. Souvent, moi, je vais faire des recommandations à répétition pour
la même situation. Ça m'irrite à chaque fois que j'ai une nouvelle personne qui
décède dans des situations là. Mais effectivement, si rien ne se fait, c'est
juste... comme vous dites, après 10 fois, bien, les gens vont se demander
qu'est-ce qui se passe. Mais je pense que, dans la loi, la ministre a cette
ouverture-là.
• (10 h 50) •
Mme Gélinas (Kathleen) :
Je vais compléter.
Le Président (M. Bachand) :
Très, très rapidement, il reste...
Mme Gélinas (Kathleen) :
Très, très brièvement. Ce qu'on remarque, les organismes privés sont très
rapides à répondre aux recommandations et font régulièrement un suivi, donc,
des entreprises répondent rapidement et prennent ça vraiment très au sérieux.
Par contre, ce qu'on observe également, c'est... tout l'appareil
gouvernemental, en fait, les différents ministères, et autres, on a
l'impression, bien souvent, que c'est tabletté, on ne sait même pas si ça monte
dans l'organisation, et c'est là, je pense, qu'il y a un pouvoir législatif qui
peut être fait pour obliger que ce soit suivi, respecté et qu'il y ait une
suite.
Le Président (M. Bachand) :
Sur ce, merci beaucoup d'avoir été avec nous ce matin. Je suspends les travaux
quelques instants, merci.
(Suspension de la séance à 10 h 51)
11 h (version révisée)
(Reprise à 11 h 05)
Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Il me fait plaisir d'accueillir les représentants
de l'Association des juristes progressistes. Alors, comme vous savez, vous avez
10 minutes de présentation, et par après nous aurons un échange avec les
membres de la commission. Donc, je vous invite à vous présenter et à débuter
votre présentation. Merci beaucoup d'être ici ce matin.
Association des juristes progressistes (AJP)
Mme Brosseau (Florence Amélie) :
Donc, merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les
députés, bonjour. Je me présente, Florence Amélie Brosseau, je suis
administratrice de l'Association des juristes progressistes du Québec. Je suis
accompagnée, aujourd'hui, de Me Virginie Dufresne-Lemire, membre de notre association,
afin de vous présenter notre position concernant le projet de loi n° 45. Pour le reste de la présentation, alors, si vous
permettez, j'utiliserai l'acronyme AJP pour désigner notre organisation.
Donc, l'AJP est un organisme à but non
lucratif qui unit des avocats, des étudiants et professeurs en droit, des travailleurs
du domaine <juridique et des...
Mme Brosseau (Florence Amélie) :
...de notre
association afin de vous présenter notre position concernant
le
projet de loi
n° 45. Pour le reste
de la
présentation,
d'ailleurs, si vous permettez, j'utiliserai
l'acronyme AJP pour désigner notre
organisation.
Donc, l'AJP est un
organisme à
but non lucratif qui unit des avocats, des étudiants et
professeurs en
droit, des travailleurs du domaine >juridique et des juristes de divers
horizons. L'AJP se veut une force politique vouée à la défense et la promotion
des droits politiques, sociaux et culturels au Québec. En tant que juristes,
nous croyons et nous sommes conscients que, si le droit peut s'avérer un outil
efficace de lutte contre les inégalités sociales, il peut également produire et
reproduire de telles inégalités. La mission de l'AJP est donc de mettre en
lumière ce rôle producteur et reproducteur du droit en matière d'inégalités
sociales et afin d'agir concrètement, évidemment, sur celles-ci. Ainsi, depuis
sa fondation en 2010, l'AJP a pris publiquement position dans le cadre de
plusieurs débats de société, tant auprès de la société civile qu'auprès des
instances gouvernementales, notamment par la présentation d'un projet de... un
projet… d'un mémoire, pardon, dans le cadre du projet de loi n° 32.
C'est parce que les membres de notre
association se sentent concernés par les enjeux sociojuridiques que soulève le
projet de loi n° 45 que nous vous soumettons
respectueusement le présent mémoire aujourd'hui. Tel que vous allez le
constater, notre mémoire aborde des sujets sensibles de par le contexte social
particulier dans lequel il s'inscrit... le projet de loi s'inscrit. Ne pouvant
faire abstraction de ce contexte sociopolitique — et ce contexte est
entre autres ce que nous souhaitons mettre de l'avant aujourd'hui — l'AJP
souhaite formuler certaines précisions quant à son positionnement. Tout
d'abord, elle souhaite tout simplement préciser que nous ne parlons pas au nom
des personnes ou des familles qui pourraient être plus directement concernées
par le projet de loi, et notre objectif, ici, est davantage d'incarner une
posture d'alliés envers eux et elles. Puisque les circonstances ont fait en
sorte, aussi, que nous sommes deux personnes blanches allochtones à s'adresser à
vous aujourd'hui, nous voulons simplement souligner le travail des personnes
blanches non membres dans la rédaction de notre mémoire.
J'aborderai maintenant le contexte social
particulier dans lequel s'inscrivent les recommandations formulées dans le
cadre de notre mémoire. Cette année, au Québec, a débuté l'enquête publique sur
la mort de Pierre Coriolan, survenue en 2017, décédé lors d'une intervention
policière. Au décès de M. Coriolan s'ajoutent les décès de Nicolas Gibbs,
décédé le 20 août 2018, d'Alain Magloire, décédé le 3 février 2017, et de
Bony Jean-Pierre, décédé le 4 avril 2016. De plus, le 14 juin dernier,
nous enregistrions, en moins de trois mois, au pays la mort d'une huitième
personne autochtone. Les décès des personnes précédemment mentionnées ont
suscité diverses réactions, évidemment, dans la société civile, comme vous avez
pu en témoigner, alors, de plus en plus sensibilisée aux violences policières à
l'égard des personnes aux prises avec des troubles de santé mentale, des
personnes racisées et des personnes autochtones. D'ailleurs, le 8 juillet
dernier, le SPVM mettait en place une première politique sur l'interpellation
policière.
Nous soumettons que les modifications
apportées par le projet de loi n° 45 ont le potentiel
de contribuer à la lutte contre la discrimination systémique dans nos
institutions publiques au Québec. Toutefois, sa version actuelle reproduit
certaines inégalités sociales, alors qu'elle devrait, à notre avis, les
éliminer toutes. Comme vous avez pu le deviner, l'analyse du projet de loi n°
45 qui vous est soumise examine les modifications dans le contexte plus précis
des décès <survenant...
Mme Brosseau (Florence Amélie) :
…de contribuer à la lutte contre la discrimination systémique dans nos
institutions
publiques au
Québec. Toutefois, sa version actuelle reproduit certaines
inégalités sociales, alors qu'elle devrait
à notre avis les éliminer
toutes. Comme vous avez pu le deviner,
l'analyse du
projet de loi
n° 45 qui vous est soumise examine les modifications dans le contexte plus
précis des décès >survenant dans le cadre d'interventions policières.
C'est d'ailleurs le phénomène qui nous intéresse tout particulièrement, à l'AJP.
Les propositions qui vous seront formulées visent donc à favoriser la justice
sociale des groupes plus susceptibles d'interagir avec les corps policiers au
Québec. Pour permettre à l'institution du coroner de mener sa mission de façon
juste et équitable à l'égard de tous et toutes, il importe de munir celle-ci de
garanties quant à son impartialité, son intégrité et son indépendance.
• (11 h 10) •
Nous souhaitons rappeler, ici, le rôle
essentiel qu'est celui du coroner dans une société démocratique. L'AJP
considère que, par la recherche objective de la vérité, c'est le coroner qui
agit comme dernier rempart pour la protection des droits des victimes décédées
dans le cadre d'interventions policières et ceux de leur famille. Aujourd'hui,
le rôle du coroner dans la société est d'éviter que les causes du décès d'une
personne ne demeurent inconnues aux yeux de ses proches, de sa communauté et de
la collectivité. Surtout parce qu'il a la mission sociale d'éviter que ne se
reproduisent les circonstances d'un décès, nous sommes d'avis que le coroner
possède un levier significatif pour favoriser une meilleure justice sociale.
Or, une telle mission ne peut être assurée que par une institution hautement
indépendante.
En effet, à la lumière des premiers
articles de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances de décès, «le
coroner est un officier public qui a compétence à l'égard de tout décès survenu
au Québec». Le coroner a donc pour fonction d'effectuer une recherche notamment
sur les circonstances d'un décès et ses causes probables, et nous croyons que
le rôle du coroner, en fait, est fondamental en intervenant dans un contexte d'un
décès survenu par suite de négligence ou bien de circonstances obscures ou
violentes. Vous comprendrez donc que son rôle est essentiel dans le cadre de
décès survenus lors d'interventions policières.
L'exigence d'indépendance du coroner
découle notamment du fait qu'il possède des fonctions et pouvoirs très
similaires caractéristiques d'un juge lors de son enquête. Ce rapprochement
entre le statut du juge et du coroner s'appuie notamment sur les articles 112,
114, 119, 120 et 126 de la loi, qui expliquent les pouvoirs de… qui explicitent
les pouvoirs du coroner en matière d'enquête, mais aussi sur les articles 149 à
155 de la loi en matière de preuve et procédures applicables lors des enquêtes.
Finalement, la Charte des droits et libertés de la personne précise, aux
articles 23 et 56, que même le mot «tribunal» inclut un coroner, donc,
conséquemment, la fonction juridictionnelle du coroner exige sans contredit de
lui conserver une indépendance. Cette fonction juridictionnelle a même été
confirmée par les tribunaux. Tout bien considéré, en raison de son objectif de
recherche de la vérité, l'institution du coroner doit véritablement être
indépendante et impartiale.
Je cède donc la parole, maintenant, à Me
Virginie Dufresne-Lemire, qui pourra vous en parler davantage.
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Bonjour à tous. Merci de nous recevoir. Un exercice comme celui-ci, dans notre société,
est très important. Donc, on vous remercie de l'invitation que vous avez donnée
à l'AJP.
Je vais parler brièvement… un peu
regrouper les recommandations qu'on a. Ce qui doit guider la modernisation de
la loi, un des aspects importants, c'est l'intérêt des familles. On a déjà
expliqué qu'on parlait particulièrement des décès dans le cadre d'interventions
policières, donc ce sont des familles où un <proche a été tué par…
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
...de l'invitation que vous avez donnée à l'AJP.
Je vais parler
brièvement...
un
peu regrouper les
recommandations qu'on a. Ce qui doit guider la
modernisation de la loi, un des aspects
importants, c'est
l'intérêt
des familles. On a
déjà expliqué qu'on parlait
particulièrement
des décès
dans le cadre d'interventions policières, donc ce sont des
familles où un >proche a été tué par un agent de l'État. Ce sont des
situations très particulières. Il faut garder ça à l'esprit, l'intérêt des
familles.
De l'intérêt des familles découle
l'importance de la transparence. Donc, la transparence… je vais parler
particulièrement des articles 26, 30 et 37 du projet de loi, donc l'accès au
rapport de l'agent de la paix, c'est excessivement important. La modification
qui est proposée dans le projet de loi ferait que les familles ne pourraient
plus passer par le coroner pour avoir accès à ce rapport-là, qui est très
important. Je vous réfère... Vous allez entendre, un peu plus tard, M. Popovic.
Son mémoire est extrêmement bien fait, il détaille et donne des exemples. Donc,
je vous référerais à ce mémoire-là, c'est un des documents les plus importants.
Les familles ont besoin de réponses, c'est l'aspect numéro un, et donc l'accès
à ce rapport-là, qui est un document auquel le coroner a accès, est vraiment,
bon, important.
Ensuite... suite à... suivant le besoin de
transparence, ça va être l'importance de tenir une enquête publique lorsqu'il y
a décès dans le cadre d'une intervention policière où la force a été utilisée.
Les policiers ont le pouvoir de force. Il faut s'assurer d'avoir un mécanisme
de reddition de comptes, de recherche de la vérité efficace qui permet aux
familles d'avoir des réponses et qui permet, comme un intervenant l'a dit plus
tôt, de sauver des vies. L'objectif... Les recommandations que le coroner peut
faire permettent de sauver des vies. Et d'ailleurs vous avez ajouté un... vous
proposez l'ajout d'un article qui donne un plus grand pouvoir de suivi au
coroner, ce qui est extrêmement important. On soutient que ce pouvoir de suivi
là, malheureusement, comment il est rédigé — respectueusement soumis — il
n'a pas assez de dents, c'est un article qui est général. Il faudrait donner
plus de pouvoirs au coroner, selon nous : un pouvoir de convocation des
parties pour expliquer les mesures qui ont été prises, l'application des recommandations,
un pouvoir de vérification de l'application des recommandations, un pouvoir de
rédaction d'un rapport complémentaire une année plus tard pour montrer le suivi
pour la population, pour la famille de la personne décédée et pour les
communautés en général.
Je parlerai très brièvement, également, de
l'importance de la publicité des débats. Donc, on permet que le huis clos soit
ordonné de manière beaucoup plus facile. On soumet que c'est extrêmement
problématique. La publicité des débats exige que le huis clos soit une
exception, et la Cour suprême s'est penchée à ce sujet-là. L'enquête publique
du coroner est un tribunal quasi judiciaire, il ressemble à un procès, il y a
énormément de ressemblances, et donc il faut s'assurer de la publicité des débats,
c'est excessivement important tant pour les familles que la collectivité.
Donc... Et, le dernier point, l'enquête
publique, pour s'assurer qu'elle soit crédible, ce qui est excessivement
important dans le contexte, il faut assurer des moyens aux familles. Il y a des
articles qui ont été adoptés, en 2013, à l'unanimité et qui n'ont toujours pas
été mis en vigueur parce que le règlement pour aider les <familles n'a
pas...
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
...le dernier point,
l'enquête publique, pour s'assurer qu'elle soit
crédible, ce qui est
excessivement important dans le contexte, il faut
assurer des moyens aux familles.
Il y a des
articles qui ont été
adoptés,
en 2013, à l'unanimité et qui n'ont
toujours pas été mis
en
vigueur,
parce que le
règlement pour aider les >familles n'a
pas été adopté. Les familles de personnes tuées dans le cadre d'interventions
policières sont souvent des personnes avec certaines vulnérabilités qui n'ont
pas les moyens pour payer un avocat pour être représentées. Et la
représentation est cruciale, dans un exercice comme ça, si on veut qu'il soit
efficace, pour que les recommandations soient efficaces, pour que le coroner
puisse faire ces recommandations-là, assurer le suivi et s'assurer que ça ne se
reproduise plus. C'est ce qui est le plus important et c'est ce qu'on vise ici.
Je vous remercie de votre écoute.
Le Président (M. Bachand) :
Merci infiniment. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme Guilbault :
Oui, merci beaucoup. Merci d'être ici aujourd'hui pour nous éclairer. Je n'ai
pas eu l'occasion de prendre connaissance du mémoire, là, je pense qu'il a été
déposé tout récemment, mais vous en avez fait un très bon résumé. Merci
beaucoup. Et d'abord je veux juste mettre au clair, là… Est-ce que... Quel a
été votre rôle, exactement, dans l'enquête publique du coroner, que ce soit
pour le décès de M. Coriolan ou en général? Avez-vous participé à d'autres
enquêtes publiques des coroners? Quel est votre historique, finalement, de
collaboration avec le Bureau du coroner?
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Dans le cas de l'enquête publique du coroner, j'y ai assisté à titre d'avocate,
mais aujourd'hui je vous parle à titre de membre de l'AJP, c'est deux chapeaux
complètement différents. Par contre, il y a des valeurs entre l'AJP et moi,
comme avocate, qui se recoupent, et s'assurer de la représentativité et de ne
pas continuer de permettre les rapports de force qui sont inégalitaires, et
donc l'AJP est intéressée à ce sujet-là pour ces raisons.
Mme Brosseau (Florence Amélie) :
Si je peux compléter, en fait...
Mme Guilbault :Oui.
Mme Brosseau (Florence Amélie) :
Oui, donc, puisque je suis administratrice de l'Association des juristes
progressistes, en fait… juste préciser, évidemment, que Me Dufresne-Lemire
est membre de notre association. Nous regroupons donc plusieurs avocats et
avocates dans notre association. Lorsque nous avons reçu, en fait, votre
convocation, votre demande, vous nous avez, évidemment, demandé de venir
présenter… ce que nous avons, évidemment, accepté. Par contre, il y a des
membres dans notre association qui sont nettement mieux informés du processus,
et donc il a été une décision tout à fait logique dans le conseil
d'administration d'avoir recours, notamment, à Me Dufresne-Lemire,
évidemment, mais ce mémoire n'a pas été rédigé par Me Dufresne-Lemire,
mais bien par l'Association des juristes progressistes, si je peux préciser, et
voilà. Donc, si nous pouvions revenir... Ça concerne les décisions, aussi, de
notre association et en conseil d'administration, puis on délègue, mais nous
partageons entièrement, en tant qu'association, l'entièreté des opinions et
valeurs qui traversent le mémoire.
Le Président (M. Bachand) :
Merci. Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, tout à fait, j'avais bien saisi la nuance. En fait, l'idée était de faire
valoir votre connaissance expérientielle de la chose et de l'enquête publique,
compte tenu du fait que vous avez directement participé, alors je trouvais ça intéressant
de le noter.
J'aimerais savoir... Comme vous avez
abordé très directement les articles 26, 30 et 37, donc toute la question
de modifier, finalement, le statut des rapports <d'agent de la paix...
Mme Guilbault :
...de
l'enquête publique,
compte tenu du fait que vous avez
directement
participé, alors je trouvais ça
intéressant de le noter.
J'aimerais savoir… Comme vous avez
abordé très
directement les articles 26, 30 et 37, donc toute la
question
de modifier
finalement le statut des rapports >d'agent de la
paix, qui, jusqu'à aujourd'hui ou, en tout cas, jusqu'à l'adoption du projet de
loi, sont considérés comme des annexes au rapport du coroner, donc accessibles en
vertu du même processus que n'importe quelle autre annexe, rapport d'autopsie
ou autre document, et avec le projet de loi on le retire, on lui retire son
statut d'annexe, finalement, pour en faire un document à part qui serait
accessible par d'autres canaux — puis je me permets de vous en parler
directement, parce que le temps n'est pas infini, là, ça fait que je voudrais vraiment
vous entendre là-dessus, comme vous êtes juriste, en plus — notre
prétention, en faisant ça, c'est que... Actuellement, en passant ça en demande
d'annexe comme n'importe quelle autre annexe, vous le savez, c'est exempté des
exigences de la loi sur l'accès à l'information, c'est l'article 180 de la
loi, sur la recherche, je pense, en tout cas, sous réserve, là... c'est bien ça,
180. Donc, en ce moment, par exemple, une famille fait la demande au Bureau du
coroner, dit : J'aimerais avoir le rapport de police attaché à tel rapport
de coroner, et là le Bureau du coroner fait une première analyse, décide est-ce
que, oui ou non, il répond aux critères, parce que, pour pouvoir avoir une
annexe, il faut soit qu'on soit un ayant droit, ou qu'on ait un intérêt personnel
à faire connaître ou reconnaître des droits, ou qu'on soit un ministère ou un organisme
dans la poursuite de l'intérêt public. Si le Bureau du coroner, à son niveau,
juge que la personne, le demandeur ne remplit pas ces critères-là, déjà, elle
peut refuser... il, le Bureau du coroner... la personne qui fait ça au Bureau
du coroner peut refuser l'accès. Si le Bureau du coroner dit : Oui,
parfait, elle a un statut légitime de demandeur, en ce moment, vous savez, c'est
le ministre de la Sécurité publique ou son représentant, donc il y a une personne,
dans le ministère de la Sécurité publique, qui s'occupe de gérer ces
demandes-là pour le ministre, et là la personne du ministère de la Sécurité
publique fait le lien avec le corps de police concerné pour voir si, oui ou
non, on remet le rapport et dans quel état on le remet, dans le sens où des
fois on doit caviarder de l'information, et tout ça, il peut y avoir des
enquêtes en cours, il peut y avoir des mineurs à protéger, il y a toutes sortes
d'enjeux. Et, tout ce processus-là étant exempté de la loi sur la protection...
sur l'accès à l'information, les délais prévus dans la loi, entre autres le
20 jours maximum, 10 jours de plus, donc 30 jours... c'est-à-dire
10 jours de plus, maximum 30 jours, et les recours devant la CAI sont
aussi exemptés, c'est-à-dire sont aussi absents, du fait d'être exemptés de
cette loi-là.
Alors, moi, mon intérêt à faire... à
mettre ça dans le projet de loi, c'était pour favoriser une simplification du processus
pour obtenir les rapports de police pour les familles et peut-être même, je le
souhaite, des délais moindres, parce qu'ils vont demander directement au corps
de police, et le corps de police va être soumis aux exigences de la loi sur
l'accès à l'information. C'est le même type de loi, mais, en tout cas... Donc,
c'est ça. Moi, c'est ça, mon idée. Ça fait que j'aimerais voir ce que vous,
vous en pensez.
• (11 h 20) •
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Je vais faire une réponse assez brève, parce que vous avez M. Popovic qui
va venir parler après nous et qui est, si je peux dire, un spécialiste de cette
question, qui a... qui connaît bien la loi à l'accès à l'information. Et ça
complique, pour les familles, de rajouter un intermédiaire. Pour le moment, les
familles peuvent demander simplement au coroner, et c'est beaucoup plus simple
pour elles. Il faut <avoir...
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
...parce que vous avez M. Popovic qui va venir parler après nous et qui
est, si je peux dire, un spécialiste de cette question, qui a... qui connaît
bien la loi à l'accès à
l'information. Et ça complique, pour les familles,
de rajouter un intermédiaire. Pour le moment, les familles peuvent demander
simplement au coroner, et c'est
beaucoup plus simple pour elles. Il faut
>avoir cet intérêt-là, il ne faut pas complexifier, c'est déjà assez
complexe. Les délais sont déjà beaucoup plus... sont déjà très, très longs pour
les familles de personnes décédées dans le cadre d'interventions policières, et
passer par la loi à l'accès à l'information, selon nous, c'est une fausse façon
de faciliter, ça ne permettra pas un plus grand accès. Je crois qu'il y a
au-dessus de 500 familles qui ont eu accès, via le coroner, aux rapports d'enquête.
Donc, je pense que comment ça fonctionne en ce moment, c'est beaucoup mieux que…
si on le modifie, qu'il y a beaucoup plus de risques de rendre les choses plus
difficiles.
Et je reviendrais à la question précédente
concernant notre expérience quant à l'enquête du coroner, les avocats membres
de l'association vous diraient que ce n'est pas un processus anodin, c'est un
processus qui ressemble énormément à un tribunal. Il y a des dizaines de
documents à analyser, il faut contre-interroger, il faut préparer ces
contre-interrogatoires-là, c'est des contre-interrogatoires serrés dans
lesquels participent les avocats des policiers, les nombreux avocats des
policiers, et les familles ne peuvent pas faire ça, tout d'abord parce qu'elles
n'ont pas les connaissances, elles ne sont pas avocats, ensuite elles sont en
deuil et elles ne peuvent pas contre-interroger le policier qui a tué leur
enfant, par exemple, c'est trop demander, d'où l'importance de la
représentation.
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, merci. Je suis très sensible à ce que vous venez de dire puis je vais y
revenir, mais, pour en revenir... Parce que, comme vous avez nommé les articles
d'accès à l'information, je trouve ça important, là, parce que je veux
clarifier... je veux entendre le point de vue des gens là-dessus, parce que,
moi, comme je vous ai expliqué, ma prétention, en mettant ça dans le projet de
loi, c'était de simplifier l'accès. Vous dites : Les délais sont déjà très
longs. Effectivement, parce qu'actuellement personne n'est soumis à des délais
maximums, étant exempté de la loi, et en plus de ça la décision du ministre est
sans appel... et du Bureau du coroner. S'ils décident : Tu n'as pas droit,
bien, c'est ça, c'est tout, les gens ne peuvent pas aller devant la Commission
d'accès. Alors là, s'ils font la demande directement au service de police, si
le service de police refuse, bien là, la personne peut avoir un recours. Donc,
je voulais juste vous sensibiliser au fait que, pour moi, c'est un gain pour
les familles. Mais je suis ouverte, quand même, à entendre... Si vous pensez
que ça peut être préjudiciable, je suis très sensible à ça, parce que, moi,
c'est vraiment pour les familles puis pour les citoyens, entre autres, que je
veux faire ce projet de loi là.
L'autre chose, c'est que, dans les
enquêtes publiques, qui sont une bonne partie de l'objet de votre présentation,
tout ce qui est produit devant le coroner dans le cadre d'une enquête publique
devient public aussi. Alors, à ce moment-là, souvent, les rapports de police
sont produits en tout ou en partie, ce qui, ça aussi, simplifie l'accès, qui
n'a pas nécessairement de rapport avec le projet de loi, là, c'était déjà comme
ça, mais j'ai quand même ajouté, dans le projet de loi, 140.1, là... je ne sais
plus l'article du projet de loi... en tout cas, ça touche... 140... excusez, c'est
ça, 140… j'ai ajouté 140.1, qui vient spécifiquement rappeler que ce qui est
produit dans le cadre d'une enquête publique est public. Donc, ça aussi, je
considère que ça aide ou ça contribue à la démocratisation de l'information
liée à ce qui est <contenu dans un...
Mme Guilbault :
...ça touche… 140... c
'est ça, 140... j'ai ajouté 140.1, qui vient
spécifiquement
rappeler que ce qui est produit dans le cadre d'une
enquête publique est
public. Donc, ça aussi, je considère que ça aide ou ça contribue à la
démocratisation
de l'information liée à ce qui est >contenu dans un rapport d'un agent
de la paix, encore une fois, pour le bénéfice des familles. Est-ce que vous
voyez d'un bon oeil, vous, cet ajout-là?
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Comme je le disais un peu plus tôt, le fonctionnement de passer par le coroner,
pour les familles, semble le processus approprié. Si la problématique, c'est
qu'avec l'accès à l'information ça permettait peut-être d'avoir des délais plus
serrés, eh bien, rajoutons des délais dans le projet de loi, tout simplement,
et gardons le même processus qui fonctionne et qui est plus agréable pour les
familles que de faire de l'accès à l'information. C'est compliqué, comme processus.
Ensuite, concernant le fait que le rapport
est déposé à l'enquête publique, bon, le rapport n'est pas toujours déposé à
l'enquête publique, le rapport policier ne l'est pas, ça n'arrive pas à tous
les cas. Et peut-être que ça serait une pratique à mettre en place, donc, de
déposer le rapport policier et de mettre en place des enquêtes publiques à
chaque fois qu'il y a décès dans le cas de force, comme ça, ça permettra un
accès encore plus facile aux familles. Donc, faire des enquêtes publiques quand
il y a mort dans le cadre d'une intervention policière avec usage de force et
prendre l'habitude, prendre... que ça devienne l'usage, la norme de déposer le
rapport de police, ce serait peut-être, effectivement, la meilleure façon de
fonctionner et que les familles aient les réponses les plus complètes possibles
à leurs questionnements.
Le Président (M. Bachand) :Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, merci. Sur les enquêtes publiques aussi, que ce soit sur le décès d'une personne
dans le cadre d'une intervention policière ou en général, mais c'est comme vous
voulez, là, peut-être que vous vous intéressez plus à l'échantillon dans le
cadre des interventions policières, mais est-ce que vous avez... parce que je
sais que vous connaissez bien le sujet, est-ce que vous avez une
appréciation plus générale de la qualité de l'exercice? Indépendamment des
éléments précis d'accès à l'information, puis tout ça, il y a l'élément de la représentation
des parties intéressées, les familles comme partie... comme statut de partie
intéressée, mais est-ce que, pour vous... Vous le disiez, ça peut ressembler à
un procès. Bon, c'est sûr, c'est dans un palais de justice, déjà, bon, ça
n'aide pas, comment dire, à dissiper l'impression que c'est un procès, mais il
reste que ce n'est pas un procès, c'est un processus inquisitoire. Donc, pour
ce que vous en avez observé ou de par votre collaboration directe et de par le
fruit du travail, c'est-à-dire les rapports des coroners, les recommandations
qui en découlent, les impressions des familles ou ce que ça peut apporter à la
famille d'avoir le rapport, de voir le travail qui a été fait, de voir les
recommandations qui en découlent, est-ce que vous avez une appréciation
qualitative de cet exercice-là et de ce processus-là?
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
De l'exercice de l'enquête publique? Oui, tout à fait. Les familles le
demandent. Les familles le demandent à chaque fois, doivent rédiger des
lettres, des lettres d'avocat pour demander une enquête publique, ils en ont
besoin. Le rapport du coroner... Et, encore une fois, je vous réfère au mémoire
de M. Popovic, qui est très complet, il a fait l'analyse des rapports du
coroner comparés à ce que donne une enquête publique. Les rapports du coroner
sans enquête publique sont environ d'une dizaine de pages et reprennent
souvent... et ça, il cite le mémoire de maîtrise de Linda Michel, si je ne me <trompe
pas...
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
...je vous réfère au mémoire de M. Popovic, qui est très complet, il a
fait l'analyse des rapports du coroner comparés à ce que donne une enquête
publique. Les rapports du coroner sans enquête publique sont environ d'une
dizaine de pages et reprennent souvent…
et ça, il cite le mémoire de
maîtrise de Linda Michel, si je ne me >trompe pas, son nom de famille,
qui a fait l'analyse des rapports d'enquête du coroner, souvent, ils vont
malheureusement reprendre la version policière, parce que, contrairement à ce
qu'une intervenante disait tantôt, qu'ils sont les derniers témoins de la
personne décédée, les policiers, dans le cadre de décès dans une intervention
policière, ce sont les policiers, les derniers à y avoir été, et ce sont les
seuls à donner leur version, d'où l'importance d'une enquête publique pour
aller chercher la vérité. Et, encore une fois, M. Popovic cite énormément
de personnes qui sont d'accord avec cette idée d'enquête publique, parce que c'est
beaucoup plus complet qu'un rapport de 10 pages, ça… On peut contredire,
on peut aller chercher de l'information, on a des gens qui viennent parler de
formation, on a... donc ça donne un portrait beaucoup plus général, et c'est ce
que les familles méritent.
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, parfait. Merci beaucoup. Et donc, dans les… suivant un peu… découlant de
ça, mais là ce n'est pas juste pour les enquêtes publiques, c'est pour tous les
rapports de coroner, mais il y a aussi, dans le projet de loi, quelque chose
qui ajoute à la force... je ne dirais pas exécutoire, mais du moins à la force
générale des recommandations des coroners et qui contraint désormais les
ministères, organismes ou autres organisations qui sont destinataires de
recommandations à tout le moins à répondre dans les délais impartis par le
Coroner en chef, à répondre sur les intentions et la façon dont ils comptent
donner suite aux recommandations. Est-ce que vous, vous considérez que c'est
une avancée que d'inclure ça dans un projet de loi?
• (11 h 30) •
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Comme je l'ai dit dans ma présentation un peu plus tôt, c'est effectivement une
avancée. C'est un excellent article, mais qui doit être explicité. Donc, de
dire que les organismes visés doivent répondre, selon nous, ce n'est pas
suffisant. Ils doivent répondre... Est-ce qu'ils font juste répondre : On
a appliqué toutes les recommandations, merci beaucoup? Si ça donne ça comme
article, ce n'est clairement pas suffisant. Il faut rajouter un pouvoir de convocation,
un pouvoir de vérification, un pouvoir d'analyse. Il faut ajouter à ce
pouvoir-là, sinon il est dénué de sens, on n'atteindra pas l'objectif. Donc, c'est
un excellent pas en avant. On pense que les recommandations… Malheureusement, il
y a des rapports qui ont des recommandations très intéressantes, je pense au
rapport dans Alain Magloire, mais qu'on réalise, des années plus tard, qu'il y
a certaines choses qui n'ont pas été appliquées qui auraient dû, qui auraient
permis de sauver des vies. Donc, de donner plus de pouvoir au coroner, c'est
effectivement excellent, mais il faut lui donner un réel pouvoir.
Et, juste simplement pour revenir sur...
Vous nous aviez demandé : Est-ce que l'enquête publique ressemble à un
procès ou non? Bien, tout d'abord, les forces... la partie policière est
représentée, chaque policier, par son propre avocat, la fraternité est
présente, les avocats de la ville sont présents, donc ça commence à ressembler
à un procès quand une partie est, si je peux me permettre, surreprésentée. Donc,
c'est logique que l'autre partie soit représentée également, il y a des
contre-interrogatoires. Donc, effectivement, ce n'est pas uniquement dans le
palais de justice. Et, là encore, c'est intimidant pour les familles d'être
dans le palais de justice. Ce n'est vraiment pas juste <à cause...
>
11 h 30 (version révisée)
< Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
...donc ça commence à ressembler à un procès quand une partie est, si je peux
me permettre, surreprésentée. Donc, c'est logique que l'autre partie soit
représentée
également, il y a des contre-interrogatoires. Donc,
effectivement,
ce n'est pas
uniquement dans le
palais de justice. Et, là encore,
c'est intimidant pour les familles d'être dans le
palais de justice. Ce
n'est
vraiment pas juste >à cause du lieu, que c'est comme un
procès, c'est à cause du processus. Le Code de procédure s'applique, le Code de
procédure civile s'applique. Les décisions du coroner peuvent être révisées à
la Cour supérieure. Donc, il y a énormément d'éléments qui le rendent similaire
à un procès qu'on doit prendre en compte, d'où l'importance de la
représentation des familles. C'est terminé?
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de Vimont, s'il vous plaît.
M. Rousselle
: Merci,
M. le Président. Merci d'être ici et... merci, merci. J'ai, moi aussi... On a
eu votre mémoire tardivement, mais j'ai eu la chance de le regarder un petit
peu. Je regarde vos suggestions. Je n'irai pas dans la lignée que la ministre a
été, puisque c'était... ça avait été aussi... j'avais eu des questions
là-dedans, mais vous avez répondu pas mal.
Je regardais au niveau du renouvellement. Premièrement,
je voudrais avoir votre opinion sur la nomination du Coroner en chef. Vous le
verrez comment, vous? Et puis j'aimerais ça vous entendre aussi sur le mandat
de combien d'années vous verriez avec ça. Je le vois dans votre mémoire, mais
j'aimerais ça vous entendre un petit peu plus là-dessus.
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Le rôle du coroner, comme on le présente dans notre mémoire, est un rôle extrêmement
important dans la société. L'institution des coroners est assimilée à un
tribunal quasi judiciaire... est assimilée à un tribunal, même dans la charte,
et donc, selon nous, d'appliquer les mêmes principes qu'à la nomination des
juges serait la chose la plus appropriée, selon nous, pour assurer
l'indépendance.
On a entendu les intervenants, plus tôt,
qui s'inquiètent de l'indépendance de l'institution du coroner. Il est donc extrêmement
important que le coroner ait... ne soit pas redevable, parce que le coroner
doit critiquer, parfois, les institutions, les organisations d'État, et, pour ce
faire, il faut s'assurer d'avoir la liberté de le faire, et, pour ça, avoir un
coroner en chef inamovible serait la meilleure façon de permettre ça.
Encore une fois, tout ça est lié. Si on
augmente son pouvoir de recommandation en assurant sa réelle indépendance, en
faisant des enquêtes publiques, on donne énormément de pouvoir à cette
institution-là qui est parfois un peu délaissée et on lui donne de la
crédibilité, et ça répondrait grandement à un besoin, entre autres, des
familles, mais beaucoup du public à cette crise de la crédibilité de nos
institutions. Et donc de s'assurer d'avoir un coroner en chef inamovible,
s'assurer de l'indépendance, s'assurer de lui permettre d'émettre des opinions,
d'émettre des critiques parfois, ça serait extrêmement important pour la
crédibilité de l'institution.
M. Rousselle
:
Dites-moi, et la nomination, ça serait qui, selon vous, qui devrait le nommer?
Est-ce que c'est la ministre? Est-ce que c'est un comité? Est-ce que c'est les
pairs de cette... des coroners, qui vont... qui nommeraient, comme, le Coroner
en chef? Avez-vous regardé ça sur ce côté-là ou...
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Je ne suis pas certaine <qu'on soit les...
M. Rousselle : …et la
nomination, ça serait qui, selon vous, qui devrait le nommer?
Est-ce que
c'est la ministre?
Est-ce que c'est un comité? Est-ce que c'est les pairs
de cette… des coroners, qui vont… qui nommeraient, comme, le Coroner en chef?
Avez-vous regardé ça sur ce côté-là ou…
Mme Dufresne-Lemire
(Virginie) : Je ne suis pas certaine >qu'on soit les meilleurs
pour faire ce type de proposition là, mais on a une façon de… pour la
nomination des juges, donc qui n'est pas parfaite, mais qui est quand même
intéressante, de laquelle on pourrait grandement s'inspirer pour un rôle aussi
important qu'est le Coroner en chef.
M. Rousselle
:
Dites-moi, au niveau des coroners à temps plein puis des coroners à temps
partiel… puis là j'ai appris, tantôt, qu'ils sont à… il y en a qui sont… ils
ont le côté temps partiel, mais ils sont permanents. Le mandat, est-ce que vous
le voyez renouvelable? Est-ce que vous voyez, à ce moment-là, que ça serait le Coroner
en chef qui devrait les nommer? Parce que, dans le fond, c'est elle qui... comme
vous dites, là, comme un juge, c'est elle qui… Si on veut vraiment une
indépendance, est-ce que vous avez regardé ça aussi, concernant la nomination
de ces coroners-là, que ça soit à temps plein ou temps partiel?
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Je n'ai pas eu la chance de lire le mémoire des intervenants plus tôt, mais je
crois qu'ils sont beaucoup mieux placés que nous, parce que j'ai entendu leur
inquiétude quant à donner autant de pouvoir au Coroner en chef. Donc, je vous
avoue que je ne suis pas certaine qu'on soit l'intervenant le plus approprié
pour commenter ça.
Tant qu'on permet la plus grande
indépendance des coroners nommés selon bonne conduite, s'assurer que ce ne soit
pas… bref, assurer une plus grande indépendance, permettre des mandats parfois,
oui, renouvelables. Un mandat de cinq ans nous semble excessivement court
pour une fonction comme ça, dans laquelle… à laquelle il n'y a pas de
formation, donc qui s'apprend par expérience, donc, avec le temps, on devient
meilleur, j'ose croire. Donc, peut-être que ça peut être un élément important.
M. Rousselle
: Je
regarde aussi, dans la page 6, là, vous parlez de «délai raisonnable indiqué
à l'alinéa 5° doit être défini», disons que vous suggérez un délai de
six mois. Je voudrais vous entendre là-dessus, parce qu'effectivement,
vous avez parlé des familles qui attendent des résultats, des familles… ça,
j'ai tout compris ça, puis avec intérêt, d'ailleurs, mais je voudrais vous
entendre là-dessus. Vous mettez six mois, mais, tout à l'heure, on
entendait, justement, les coroners qui parlaient que, des fois, ils attendaient
après un rapport soit de police, un rapport d'autopsie, un rapport d'autres
organisations. Donc, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Cette question des délais est extrêmement importante. On propose un délai de
six mois, puisqu'on assimile beaucoup la notion de coroner à la notion de
juge, et les juges ont six mois, normalement, pour rédiger leur jugement.
Donc, on trouve que c'est un délai qui a été jugé raisonnable dans le cas des
juges, on croit qu'il y a des similitudes entre les fonctions.
Toutefois, dans le cas de décès dans une
intervention policière, les délais sont excessivement longs, et malheureusement
la loi sur le coroner ne pourra pas remédier à cette problématique entièrement
parce que, quand le coroner fait son enquête, il y a également le BEI, donc le
Bureau des enquêtes indépendantes qui fait son enquête et qui termine par la
suite du coroner. Donc, il y a le coroner, le BEI, mais le <rapport du…
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
...sont
excessivement longs. Et
malheureusement la Loi sur le
coroner ne pourra pas remédier à cette
problématique
entièrement
parce
que, quand le coroner fait son
enquête,
il y a
également
le BEI, donc le
Bureau des enquêtes indépendantes qui fait son
enquête
et qui termine par la suite du coroner. Donc,
il y a le coroner, le BEI,
mais le >rapport du coroner n'est pas... ne peut pas être donné à la
famille avant que le BEI n'ait terminé. Et ensuite c'est transmis au DPCP, donc
Directeur des poursuites criminelles et pénales, pour décider s'il prend une
décision ou pas. Et normalement on se donne six mois, plus ou moins, entre
chaque. Mais, dans certains cas, on est rendus... et, encore une fois, je vous
réfère au mémoire de M. Popovic, il a calculé les délais, c'est des
553 jours pour que la famille ait le rapport dans le cas de décès d'un
proche. Ce sont des délais qui sont inacceptables, d'où l'importance de l'enquête
publique, qui permettra un peu de contrebalancer, parce qu'effectivement on ne
peut pas réduire ces délais-là ou mettre un délai de six mois dans ce type
d'intervention là, donc de permettre une enquête publique, au moins les
familles n'auraient pas à se battre, ils auraient confiance en ce processus-là,
d'aller chercher toutes les réponses. Donc, c'est moins difficile d'attendre
quand on sait que les réponses vont venir. Donc, c'est un peu le contrepoids à
la difficulté de limiter les délais, parce que j'ai effectivement entendu ce
que l'intervenante a dit sur l'attente des documents, etc. Donc, le délai de
six mois, pour nous, c'est important, quitte à permettre des exceptions dans le
cadre d'interventions policières et de permettre une enquête publique pour
contrebalancer le poids du temps pour les familles.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols : Merci, M.
le Président. En effet, le délai est vraiment problématique. Puis je me mets
dans la place des familles qui sont dans l'attente, c'est difficile de faire un
deuil ou sinon de faire un double deuil, parce que j'imagine que, quand on
reçoit, à la fin, quand le... on a l'impression de le revivre deux fois. Donc,
oui, je me mets dans la place de... puis je suis aussi d'avis que les délais
doivent être peut-être mieux encadrés. L'idée du délai maximum est très
intéressante, merci de la partager avec nous.
Relativement à l'accessibilité aussi, je
sais que c'était une de vos préoccupations, l'accessibilité, vous en avez
beaucoup parlé à Mme la ministre. Je partage aussi, là, la problématique
relativement à l'accessibilité, puis je me permets, bien qu'on soit à l'étude
des consultations, de soumettre... vous travaillez, entre autres... vous êtes
un OBNL, vous travaillez avec des juristes qui ont souvent accès à de la
jurisprudence, qui ont souvent accès à de la jurisprudence, à des cas
particuliers, puis on a un outil qui est superefficace, qui s'appelle SOQUIJ,
là où on peut taper par mot-clé le nom d'une personne, le nom d'une partie, le
nom... si on cherche «pension alimentaire», on peut taper «pension alimentaire»,
et où les rapports peuvent sortir, ça pourrait être aussi un outil intéressant,
soit pour vos juristes ou soit pour les familles qui sont à la recherche, là, d'informations
supplémentaires. Je pense que... On est en 2020, on dit toujours : C'est
directement <public. Tout est... C'est des rapports...
Mme Nichols : …outil intéressant,
soit pour vos juristes ou soit pour les familles qui sont à la recherche d'informations
supplémentaires. Je pense que... On est en 2020, on dit toujours : C'est
directement >public, tout est… C'est des rapports, là, qui deviennent, à
la fin, publics, donc je pense que c'est un outil qu'il faudrait, justement,
penser, là, éventuellement, à élaborer, puis j'aimerais peut-être… je soumets l'idée
puis j'aimerais juste vous entendre sur cette idée.
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Tout ce qu'on fait pour faciliter l'accès est, évidemment, une bonne idée. Si
je ne me trompe pas, à Toronto, l'équivalent du BEI rend publics ses rapports
sur son site Internet avec certains caviardages, et donc on n'a pas à faire de
demande à l'accès à l'information, on n'a pas besoin d'avoir de lettre, on n'a
pas de délai, ils sont accessibles sur Internet. Le BEI devrait permettre ça, le
coroner devrait permettre ça, et ne pas avoir à passer par l'accès à l'information,
ce sont des situations qui sont d'intérêt public, en permettant, évidemment, le
caviardage, en mettant certaines exceptions, en mettant en place un système de
protection des personnes citées, etc., là. C'est quelque chose qui existe déjà.
Mais effectivement tout ce qui permet de faciliter l'accès, c'est, évidemment,
le bienvenu. Donc, que le coroner le fasse, ce serait bien que… effectivement.
• (11 h 40) •
Le Président (M. Bachand) :
Mme la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols : Merci, M.
le Président. C'est intéressant de noter, là, l'aspect... le BEI puis des
comparables, aussi, à Toronto.
On en a parlé quand même un petit peu
précédemment avec les différents collègues sur… puis je pense que c'est la
ministre, là, qui a demandé d'avoir, là, un peu l'appréciation sur le travail,
puis je fais un lien avec le groupe qui était là précédemment, là, ils ont parlé,
entre autres, là, des formations. Vous avez vu des rapports de coroner. Il y a
des familles qui travaillent avec les coroners. Puis je le dis, là, c'est sans
préjudice à personne, mais, sur… moi, j'ai un problème avec la formation des
coroners, je trouve qu'une formation de quelques jours, ce n'est peut-être pas
suffisant. Est-ce que c'est arrivé... où les conclusions ou, sinon... où… tu
sais, je ne veux pas... c'est parce que je ne veux pas être… je ne veux pas non
plus nommer des cas particuliers... bien, ou, en fait, votre appréciation sur
le travail ou sur les compétences en… les compétences d'un coroner dans un
dossier ou un autre dossier, là, pour ne pas en cibler précisément...
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Les situations de décès dans le cadre d'interventions policières sont des
situations très particulières, il faut donc des coroners qui soient à l'aise
avec cette situation-là et qu'ils soient capables d'aller chercher l'information,
malgré, parfois, la force policière qui est partie. Donc, c'est une partie qui
est très importante, qui est très respectée, qui a un pouvoir particulier. Donc,
d'aller et de chercher, ça peut parfois être dur, donc il faut avoir des
coroners qui soient à l'aise de le faire. Et ce qu'on observe... et ce n'est
pas moi qui l'observe, ce n'est pas l'AJP, là, c'est un mémoire, là, qui a été
fait, qui a étudié plusieurs rapports de coroners, une quinzaine, si je ne me
trompe pas, et ce <qu'on observe…
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
...c'est une partie qui est très
importante, qui est très respectée, qui
a un pouvoir particulier. Donc, d'aller et de chercher, ça peut parfois être
dur, donc
il faut avoir des coroners qui soient à l'aise de le faire. Et
ce qu'on observe... et ce n'est pas moi qui l'observe, ce n'est pas l'AJP, là,
c'est un
mémoire, là, qui a été fait, qui a étudié
plusieurs
rapports de coroners, une quinzaine, si je ne me trompe pas, et ce >qu'on
observe, c'est que, souvent, à l'époque d'où ce mémoire a été fait — je
ne veux surtout pas faire de reproches aux coroners, en ce moment — on
va reprendre les témoignages policiers tels quels et souvent on va dépeindre la
personne décédée par ses antécédents judiciaires, ses problématiques, ses
antécédents de violence, etc. Donc, c'est sûr que ça peut être problématique,
si on ne fait qu'un rapport d'investigation, parce qu'on ne peut pas aller plus
loin. C'est pourquoi une enquête publique est tellement importante dans ces situations-là,
pour avoir un portrait plus global, pour aller tester les versions, parce qu'on
le voit dans la pratique c'est important de le faire.
Donc, c'est évident que, pour pallier un
peu au caractère compliqué d'une enquête dans le cadre d'interventions
policières où il y a eu un décès, l'enquête publique permet, selon nous, de pallier
ça, parce qu'il y a un coroner qui écoute, qui entend, qui est assisté d'un
avocat. Il y a les parties policières représentées, et, s'il y a modification
au projet de loi, la famille est représentée par des avocats compétents qui
peuvent aussi contre-interroger, donc ça permet vraiment une recherche de la
vérité la plus complète, parce que sinon on n'a que la version policière, à
moins qu'il n'y ait des vidéos, mais, même là, c'est un cas sur je ne sais pas
combien, ce n'est pas la norme. Donc, c'est important, cette enquête publique
là, pour s'assurer que le rapport du coroner soit le plus complet possible pour
faire des recommandations les plus pertinentes possible, assurer un suivi de
ces recommandations-là pour ne plus que ça arrive. Ça reste l'objectif premier.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît.
M. Ouellette : C'est
intéressant de vous entendre. Je vais commencer par votre conclusion, parce que
je pense que c'est très important. Puis vous nous dites, dans votre conclusion
de la dernière page, à la page 13 — puis pour les gens qui nous
écoutent, je pense que c'est important qu'ils l'entendent — vous nous
dites que, les enquêtes du coroner, il ne faut pas que ça soit «des espaces
dans lesquels les dynamiques de pouvoir entre les différents intervenants
l'emportent sur la quête de vérité à la base de telles enquêtes». Je pense que
ça parle, ça aussi.
Et vous nous dites, à votre dernier
paragraphe : «...il est essentiel que la modernisation de la loi repose
sur une augmentation de la transparence envers le public et les proches des
personnes décédées. Cette exigence revêt toute son importance dans le contexte
de la crise de confiance — je vais rajouter "des citoyens" — envers
les institutions publiques.» Je pense que vous auriez écrit juste ça dans votre
mémoire, là, puis vous venez de couvrir l'essentiel puis vous venez de couvrir
la <perception, je vous dirai...
M Ouellette :
…dans le contexte de la crise de confiance
— je vais rajouter "des
citoyens"
— envers les
institutions
publiques.» Je pense que vous auriez écrit juste ça dans votre mémoire, là,
puis vous venez de couvrir l'essentiel, puis vous venez de couvrir la >perception,
je vous dirai, de la population à l'égard de l'institution du coroner puis à
l'égard de ce qui se passe.
Je tique un peu quand vous nous dites que
le Coroner en chef, ça devrait être une nomination un peu comme les juges. J'ai
personnellement une mauvaise expérience dans trop de concentration de pouvoirs
dans les mains d'une seule personne. Ça prend de la reddition de comptes. Un
juge, il est tout seul, il prend ses décisions, sa décision va être influencée.
Un coroner, il a une équipe, il a des recommandations. Je pense qu'il va
falloir faire une certaine différence.
Je vais aussi me permettre… Vous avez
parlé, dans votre mémoire, puis je veux bien qu'on se comprenne, une enquête
publique à chaque fois qu'il y a décès dans une intervention policière. Juste
dans ces cas-là ou... Parce qu'il ne faut pas non plus pénaliser le reste des
citoyens, là, puis les citoyens se disent : Ah! s'il y a un décès, une
intervention policière ou une enquête publique, moi, ce n'est pas un policier,
puis je ne suis pas considéré. Je pense qu'il est très important de regarder
l'ensemble et de s'assurer de la confiance des citoyens envers nos
institutions. Il ne faut pas juste privilégier une partie par rapport à une
autre.
Puis ma dernière question, je pense que ça
pourrait être un signe de bonne foi de la part de la ministre avant l'étude
détaillée ou dans le cadre de nos travaux pour le projet de loi n° 45
qu'elle mette en application son règlement sur les frais. Il y a toutes sortes
d'histoires d'horreur, et il y a déjà un coroner qui m'a dit : Quand je
convoque des membres de la famille à mon bureau dans un décès ou autre chose,
ils ne sont pas remboursés et j'ai l'air de… j'ai besoin de leur parler, mais
il n'y a rien ou ce n'est pas prévu par l'État, le remboursement de leurs frais.
Je pense qu'il y a un manque de professionnalisme là puis je pense que, déjà,
on pourrait le voir, les événements passés. Puis je reviens, parce que j'en ai
parlé avec Mme la ministre tantôt, elle me rappelait amicalement que la fois
qu'on s'était vu en commission avec la Coroner en chef, c'était le 11 septembre 2014,
et j'ai souvenir que le député de Vimont participait à notre commission aussi
cette journée-là, et il en a beaucoup été question. Puis là on a un règlement...
2014, ça fait six ans. Pourquoi ne pas profiter de la modernisation puis
pourquoi ne pas profiter de ce qui <se passe…
M. Ouellette :
...septembre 2014, et j'ai souvenir que
le député de Vimont
participait à notre
commission aussi cette journée-là, et il en a
beaucoup
été
question. Puis là on a un
règlement... 2014, ça fait six ans.
Pourquoi ne pas profiter de la modernisation puis pourquoi ne pas profiter de
ce qui >se passe pour mettre en vigueur, dans le cadre de nos travaux du
projet de loi n° 45, la question des frais? Pas
juste la question des avocats, mais, comme j'ai mentionné, le coroner qui
demande aux membres de la famille de venir le voir, bien, c'est tout à leurs
frais, là. Il y a une dichotomie, à quelque part. Je ne sais pas si vous êtes
en mesure de répondre à mes interrogations.
Le Président (M. Bachand) :
Et je vais vous laisser une minute seulement, désolé.
Mme Dufresne-Lemire (Virginie) :
Je vais parler vite. Concernant le pouvoir du Coroner en chef, de mettre tout
ça dans les mains d'une seule personne, la transparence et l'augmentation de la
transparence permettraient une reddition de comptes par les médias, par le
public, par les organismes militants qui s'assurent du suivi des recommandations,
etc., qui, eux peuvent mettre de la pression. Si on permet une transparence, ça
va permettre de faire contrepoids aux pouvoirs que le Coroner en chef pourrait
avoir.
Concernant les enquêtes publiques, nous,
on soutient qu'une enquête publique devrait avoir lieu chaque fois qu'il y a un
décès dans le cadre d'une intervention policière où la force a été utilisée,
mais dans plein d'autres cas. On n'en a pas parlé, mais ce ne serait pas
uniquement pour ces cas-là, c'est évident. On s'excuse si notre mémoire n'est
pas clair là-dessus, mais c'est évident que ça s'applique à plein d'autres situations.
Concernant les frais, effectivement, je
n'ai pas beaucoup d'explications pourquoi, depuis 2013, ça n'a pas été adopté.
Ça avait été adopté... ces articles-là avaient été adoptés à l'unanimité, ça
n'a jamais été mis en oeuvre. Depuis, il y a eu des demandes, il y a eu des
décès. Ça n'a aucun sens que les familles aient à quémander pour être
représentées, ou autres frais. Et il faut s'assurer aussi que les frais soient
corrects. Un salaire minimum, est-ce que c'est quelque chose de correct? En bas
du salaire minimum, est-ce que c'est quelque chose de correct? Il faut donner
des pouvoirs comparables à ceux de l'autre partie. Dans le cas qui nous
intéresse, c'est la partie policière.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre participation. Je suspends les travaux
quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 50)
(Reprise à 11 h
54
)
Le Président (M. Bachand) :
À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Il nous fait plaisir d'accueillir les
représentants de la Coalition contre la répression et les abus policiers.
Alors, bienvenue à la commission. Je vous rappelle, vous avez 10 minutes
de présentation, après ça on a un échange avec les membres de la commission.
Donc, je vous invite à vous présenter et à débuter votre présentation. Et,
encore une fois, merci beaucoup de participer aux travaux.
Coalition contre la répression et les abus policiers
(CRAP)
M. Popovic (Alexandre) :
Merci à vous, M. le Président. Alors, Alexandre Popovic, porte-parole de
la Coalition contre la répression et les abus policiers, et je suis accompagné
de Mme Tracy Wing, à côté de moi.
Et je vais commencer sans plus tarder. Alors,
pourquoi suis-je ici aujourd'hui? Parce que j'ai bien du mal à dire au sujet du
projet de loi n° 45, projet de loi qui menace l'indépendance des coroners
permanents à l'égard du gouvernement, projet de loi qui va compliquer la vie
inutilement de familles de victimes qui cherchent à avoir des réponses à des
questions de base, projet de loi qui va faire en sorte qu'il y aura encore
moins d'investigations du coroner, donc encore moins de transparence, projet de
loi qui va faire en sorte que des décès de citoyens vont être balayés en
dessous du tapis.
Mais moi, je ne suis pas venu ici pour me
chicaner, aujourd'hui. Je suis venu ici pour voir si on peut s'entendre sur une
couple d'affaires, sur des principes que je qualifierais de fondamentaux.
On peut-tu s'entendre que l'inamovibilité
des coroners permanents est une garantie de leur indépendance à l'égard du
pouvoir exécutif?
On peut-tu s'entendre que ce n'est pas au
gouvernement de dire au coroner quand est-ce qu'il doit commencer à écrire son
rapport?
On peut-tu s'entendre qu'une obligation
d'informer le Bureau du coroner du suivi des recommandations qui n'est pas
accompagnée de conséquences en cas de manquement ça risque de ne pas être pris
au sérieux par des gens qui ne prennent pas au sérieux la protection de la vie
humaine?
On peut-tu s'entendre que les délais de
deux ans pour avoir un rapport d'investigation du coroner, ça fait dur en mosus?
Et, si oui, qu'est-ce que le gouvernement va faire par rapport à ça?
On peut-tu s'entendre que, quand une personne
vulnérable perd la vie dans un centre de réadaptation, le minimum, c'est qu'il
y ait au moins un rapport d'investigation du coroner?
Et on peut-tu s'entendre que, quand une personne
perd la vie alors qu'elle est déjà privée de sa liberté, le minimum, c'est également
un rapport d'investigation du coroner?
On peut-tu s'entendre que les familles des
victimes ne devraient pas avoir à se battre pour avoir droit à des informations
de base comme celles qu'on retrouve dans les rapports d'enquête policière? Parce
que c'est ça qu'on... va arriver si on dit à ces familles-là de s'adresser à la
police. On peut s'entendre que, la police, ça ne leur tentera pas de donner des
rapports d'enquête policière à des familles de victimes, surtout s'ils se
doutent bien que ces familles de victimes là risquent de s'en servir pour
demander justice et pour traîner la police en cour, donc de revenir contre la
police. Et, si on peut s'entendre là-dessus, alors on peut-tu s'entendre que le
rapport d'enquête policière devrait demeurer annexé au rapport du coroner et
que les familles devraient continuer à passer par la Coroner en chef pour les
obtenir?
On peut-tu s'entendre que, quand on perd
un frère, un père, une soeur, une mère dans des circonstances <violentes,
qu'un rapport...
M. Popovic (Alexandre) :
...s'entendre là-dessus. Alors, on peut-tu s'entendre que le rapport d'enquête
policière devrait demeurer annexé au rapport du coroner et que les familles
devraient continuer à passer par la Coroner en chef pour les obtenir?
On peut-tu s'entendre que, quand on
perd un frère, un père, une soeur, une mère dans des circonstances >violentes,
un rapport d'investigation de trois ou quatre pages qui contient zéro recommandation,
ce n'est pas suffisant? On peut-tu s'entendre que les familles méritent mieux
que ça? On peut-tu s'entendre que les familles des victimes méritent d'avoir
toutes les réponses à leurs questions, surtout les familles des victimes qui
ont perdu un proche aux mains de la police. Et, si oui, on peut-tu s'entendre
que le meilleur véhicule de transparence, c'est l'enquête publique du coroner
comme l'a préconisé le coroner Paul Dionne dans son rapport
d'investigation sur le décès de M. Robert Héneault.
On peut-tu s'entendre qu'une enquête
publique du coroner à chaque fois qu'un citoyen se fait tuer par la police, ce
n'est pas une demande déraisonnable? Et, si oui, on peut-tu s'entendre qu'en
moyenne, huit enquêtes publiques du coroner sur ce sujet-là, c'est raisonnable
de demander ça? Comment ça se fait que, dans la majorité des provinces et
territoires canadiens, la législation sur les coroners prévoit des critères
pour tenir des enquêtes publiques du coroner sur les décès de citoyens aux
mains de la police et que la loi québécoise ne dit rien là-dessus? Comment ça
se fait que le Québec est en retard par rapport au reste du Canada sur ce
sujet-là? Comment ça se fait que le projet de loi n° 45 ne dit rien
là-dessus, est muet là-dessus?
On peut-tu s'entendre que ce n'est pas le
coroner ni son procureur qui sont mandatés pour agir à titre d'avocat pour la
famille de la victime? On peut-tu s'entendre que ce n'est pas une enquête
publique du coroner qui est le moment pour s'improviser comme avocat? Moi, je
suis rendu à ma quatrième enquête publique du coroner puis je peux vous dire
que les avocats des polices, là, ils sont vites sur le piton quand c'est le
temps de s'objecter quand que la question est mal formulée.
On peut-tu s'entendre que ce n'est pas aux
familles des victimes de payer de leur poche pour avoir droit à un avocat dans
une enquête publique du coroner quand c'est la police qui a pesé sur la
gâchette? On peut-tu s'entendre qu'avoir droit à une aide financière de l'État
pour ces familles-là, c'est une demande raisonnable? On peut-tu s'entendre que
ça ne va pas mettre le Québec en faillite?
Si on peut s'entendre sur tous ces
sujets-là, je ne serai pas venu ici pour rien. Je vais maintenant passer la
parole à Mme Wing. Merci.
• (12 heures) •
Mme Wing (Tracy) :
Alors, bonjour. Mon nom, c'est Tracy Wing. Je suis la mère de Riley
Fairholm, un adolescent en crise qui a fait un appel à l'aide. Riley a été
abattu le 25 juillet 2018, une balle à la tête. Le policier, dont le nom
m'est inconnu, était à 32 mètres de Riley. Il était barricadé derrière
son... L'intervention n'a pris seulement que 61 secondes. Je suis ici pour
parler au nom de Riley, au nom des autres victimes et des futures victimes, mais
je suis aussi ici pour parler au nom des victimes vivantes, les mamans, les
papas, les grands-parents, les soeurs, les frères, les proches, les amis, pour
exiger que l'État devrait tenir une enquête publique du coroner chaque fois qu'un
citoyen perd la vie où la police a employé de la force. Ça fait 763 jours
que mon fils <m'a été volé...
>
12 h (version révisée)
< Mme Wing (Tracy) :
…les mamans, les papas, les grands-parents, les soeurs, les frères, les
proches, les amis pour exiger que l'État devrait tenir une enquête publique du
coroner chaque fois qu'un citoyen perd la vie où la police a employé de la
force. Ça fait 763 jours que mon fils >m'a été volé, et je n'ai pas
encore reçu le rapport du coroner.
Permettez-moi de vous ramener à la nuit du
24-25 juillet 2018. C'était une journée comme les autres. Riley avait
congé, il a été aux glissades d'eau, on a parlé de son projet pour son «e-store», on a soupé, rien d'anormal, sauf la chaleur.
Quand j'ai été me coucher, vers 21 heures, Riley jouait à UNO avec ses
amis sur le Xbox. À 1 h 42, j'ai reçu un texto de mon fils disant :
Je t'aime. C'est le code, pour nous, qu'il n'allait pas bien. J'ai vu une
lettre au sol, devant ma porte de chambre. Je suis partie à sa recherche parce
qu'il ne répondait pas à mes appels ni mes textos. Je suis arrivée sur les
lieux de l'intervention à 1 h 56 et je pouvais voir qu'une première
répondante faisait des manoeuvres de réanimation sur une victime. Lorsque je me
dirige vers la victime, je suis interceptée par une policière de la Sûreté du
Québec, qui me demande si on peut s'asseoir dans ma voiture et pourquoi je suis
là. Je lui dis que je pense que c'est Riley et je lui demande s'il s'est pitché
devant une voiture. Elle m'a questionnée, interrogée, et je lui ai conté ma vie
et celle de Riley. Je lui ai donné la lettre qu'il m'avait laissée. Elle me dit
qu'elle ne peut confirmer ni infirmer que c'est mon fils et que, si c'était
lui, je ne voulais pas le voir comme ça. Elle me dit d'aller à l'hôpital.
À 3 h 05, nous sommes à l'hôpital.
Le docteur nous dit que c'est mon fils, qu'il est mort et que c'est impossible
de le voir parce que la police est là. Une trentaine de minutes plus tard,
Geneviève Racine, SQ, m'informe que mon fils est décédé suite à une
intervention policière. Pendant 1 h 30 min, son père et moi-même
avons été amenés à croire que Riley était mort par suicide et non par homicide.
Depuis son décès à aujourd'hui, j'ai suivi
toutes les démarches qui me sont accordées par la loi, parce qu'on s'entend
que, si vous êtes tué par la police, les informations sortantes sont le strict
minimum. Au début d'août 2018, j'ai exercé mes droits et j'ai demandé le
rapport du coroner. J'ai aussi conservé des registres de toute correspondance
avec le bureau d'enquêtes indépendant. En décembre 2018, j'ai déposé une
plainte déontologique, qui est présentement en enquête. Depuis septembre 2018,
j'ai écrit plus de 25 lettres d'accès d'information au bureau d'enquêtes
indépendant, à la Sûreté du Québec, à l'hôpital et aux services
préhospitaliers. L'hôpital et les services préhospitaliers m'ont accordé l'information
demandée. Par contre, la plupart de mes demandes d'information au BEI et à la
SQ ont été refusées.
En juin 2019, j'ai déposé ici, à
l'Assemblée nationale, une pétition pour le port de caméras corporelles et
«dash cams» pour tous les policiers <au Québec. En octobre 2019…
Mme Wing (Tracy) :
...l'information demandée. Par contre, la plupart de mes demandes d'information
au BEI et à la SQ ont été refusées.
En juin 2019, j'ai déposé ici, à
l'Assemblée nationale, une pétition pour le port de caméras corporelles et
«dash cams» pour tous les policiers >au Québec. En octobre 2019,
lors de la rencontre avec le DPCP et le BEI, ils m'informent que je pourrais
faire une demande au coroner pour le ou les compléments de rapport. C'est fait.
En novembre 2019, le BEI m'informe que je peux demander une révision.
Alors, j'écris de demander d'avoir l'analyse du DPCP et sur quels éléments de
preuve se sont-ils basés pour se prononcer que la force mortelle était nécessaire,
qu'une balle à la tête d'un adolescent en crise était nécessaire. Je n'ai pas
eu réponse, c'est des secrets professionnels.
À la fin novembre 2019, j'écris au
Coroner en chef, demandant une enquête publique concernant le décès de mon fils,
mais, comme je n'ai pas le rapport, on va attendre cette chose-là. Alors, le
27 juillet 2020, j'écris à la direction de la SQ avec des questions
précises, notamment le nom des policiers qui ont fait feu et les témoins. Le
12 août, je fais un suivi en demandant au moins un accusé de réception, et
je n'ai pas encore reçu un accusé de réception.
Si l'intervention et la force mortelle est
justifiée, pourquoi devrais-je faire ces démarches? C'est pour ces raisons que
je demande à vous, Mme la ministre, de mandater que l'État tienne une enquête publique
du coroner chaque fois qu'un citoyen perd la vie dans des circonstances où la
police a employé la force.
Je veux vous parler un peu de Riley. Mon
fils avait 17 ans. Il était un étudiant médiocre. Il travaillait au IGA, à
la caisse rapide, dans une cantine. Il avait les yeux bleus, cheveux bruns, il
était grand. Il était populaire avec les filles, il était charmant, empathique
et drôle. Il n'a jamais tenté de s'enlever la vie. Il n'avait aucun antécédent
criminel ou judiciaire. Il ne consommait pas ni alcool ni drogue. Il avait des
projets prévus, il avait 17 ans. Mon fils était comme la plupart des
adolescents de son âge, comme vos enfants, comme vos petits-enfants, comme vous
étiez, peut-être, à l'adolescence. Mon fils Riley avait des problèmes de santé
mentale, dépression et l'anxiété. Vous savez, je n'aurais jamais pensé que cela
pourrait m'arriver, arriver à nous autres. Mais, pire que le décès de mon fils,
c'est que l'État me dit que ce n'est pas de mes affaires. Merci beaucoup pour
votre temps.
Le Président (M. Bachand) :
Merci pour vos présentations. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme Guilbault :
Merci beaucoup, M. le Président, et merci à vous deux d'être présents
aujourd'hui. Évidemment, je pense que je parle un peu pour tout le monde autour
de la table en disant que votre témoignage est très, très émouvant, et vous
avez toute mon empathie, comme mère, d'abord, bien sûr, et, évidemment, comme
élue. On veut travailler, nous, au bien commun des citoyens, et je comprends à
100 % pourquoi c'était important pour vous d'être ici aujourd'hui, et je
vous remercie. Ça ne doit pas être facile de faire ces témoignages-là, de faire
les démarches, de répéter son histoire tout le temps, donc je veux vraiment <vous
remercier, merci beaucoup. Et, M. Popovic...
Mme Guilbault :
...et, évidemment, comme élue. On veut travailler, nous, au bien commun des
citoyens, et je comprends à 100 % pourquoi c'était important pour vous d'être
ici aujourd'hui, et je vous remercie. Ça ne doit pas être facile de faire ces
témoignages-là, de faire les démarches, de répéter son histoire tout le temps,
donc je veux vraiment >vous remercier, merci beaucoup. Et,
M. Popovic — on s'est connus dans d'autres circonstances — merci
aussi d'être ici. Quand je dis «on s'est connus», ce n'est pas de la grande,
grande familiarité, mais, dans le temps que j'étais au Bureau du coroner, on
s'est côtoyés, notamment dans une enquête publique de coroner. Donc, alors,
merci beaucoup.
Je vais saisir, je pense, l'occasion
offerte par votre témoignage, madame, sur les délais. Vous dites, ça fait
longtemps que vous attendez le rapport du coroner, et M. Popovic l'a
abordée aussi, la question des délais de livraison des rapports de coroner. Je
l'ai dit ce matin, d'entrée de jeu, c'est quelque chose qui me préoccupe, moi,
les délais de livraison des rapports de coroner. Alors, est-ce que, si vous
avez pris connaissance du projet de loi... Il y a des mesures, dans le projet
de loi, qui visent, entre autres, à offrir au Coroner en chef des possibilités
de gestion — et, encore là, c'est le souhait qui est derrière le
projet de loi — qui, on l'espère, pourraient faire en sorte que les
délais de livraison des rapports de coroner soient réduits. Est-ce que, pour
vous, ce sont de bonnes mesures? Et est-ce que vous avez une appréciation,
comme je disais tout à l'heure, là, de... Je pense, entre autres, peut-être
pour être plus précise, à l'article, je pense, 20 du projet de loi, là, qui
prévoit des raisons pour lesquelles on peut transférer un dossier, puis donc...
mais l'esprit derrière ça, c'est de donner au Coroner en chef des leviers pour
pouvoir améliorer les délais de livraison des rapports.
Mme Wing (Tracy) : Pour
les délais, en ce qui concerne les délais, c'est une bonne idée, mais, s'il
enlève les éléments et les compléments, donc, qui est le plus important... Tu
sais, deux, trois pages d'une investigation, ça ne donnera pas vraiment toutes
les explications et les démarches ou les circonstances du décès, alors, pour
moi, que les compléments... et c'est ça qui est le plus important, que ça reste
avec le rapport du coroner.
Mme Guilbault :
Et, sur les délais... Puis, peut-être, M. Popovic, si vous voulez
intervenir aussi, parce que j'entendais, dans votre présentation à vous, deux
éléments qui me sont parus contradictoires, mais je vous donne l'occasion de le
clarifier, vous avez dit : Ce n'est pas au gouvernement de dire au coroner
quand commencer à écrire son rapport, et vous avez aussi dit : Deux ans
d'attente pour un rapport, on peut-tu s'entendre que ça n'a pas de bon sens? Donc,
je ne sais pas si j'ai mal décodé le premier élément ou mal interprété, mais,
pour moi, il y a quelque chose de contradictoire, dans le sens où, si on se
donne les leviers dont je parlais pour essayer de resserrer les délais, bien,
oui, ça passe par des leviers de gestion, sans s'ingérer dans le rapport comme
tel, avec le but d'éviter, justement, deux ans d'attente pour un rapport, qui
n'a pas de bon sens, puis je suis d'accord avec vous que c'est très long.
Qu'est-ce que vous <pensez de ça?
M. Popovic (Alexandre) :
Bien,
écoutez...
Mme Guilbault :
...
dont je parlais pour essayer de resserrer les délais, bien, oui, ça
passe par des leviers de gestion, sans s'ingérer dans le rapport comme tel,
avec le but d'éviter, justement, deux ans d'attente pour un rapport, qui n'a
pas de bon sens, puis je suis d'accord avec vous que c'est très long. Qu'est-ce
que vous >pensez de ça?
• (12 h 10) •
M. Popovic (Alexandre) :
Bien, écoutez, moi, je pense que le coroner, quand il se sent prêt à écrire son
rapport, il devrait le faire sans délai. Alors, je pense que ça lui appartient.
Et de lui dire de différer la rédaction de son rapport, selon ce que j'ai
compris d'une des dispositions, dont je ne me rappelle pas le numéro, dans le projet
de loi, je ne pense pas que ça va aider dans ce sens-là.
Et vous avez mentionné, Mme la ministre, qu'il
y a une disposition qui prévoit de transférer des dossiers. Je demeure à
convaincre que ça va vraiment améliorer la diligence de la production du
rapport du coroner si on transfère le dossier puis qu'il y a un autre coroner
qui doit repartir à zéro. Cela dit, il y a aussi la problématique à l'effet que
le coroner doit souvent attendre la conclusion de l'enquête du BEI, et il y a
la prise du délibéré de la Directrice des poursuites criminelles et pénales qui
s'ajoute au délai, donc il y a une question qui est complexe à travers tout ça.
Et je dois vous avouer, bien humblement,
que le problème, je le trouve difficile à résoudre, ce problème de délai là,
qui demeure, bien évidemment, inacceptable. Mais c'est pour ça que je crois que
les familles, qui doivent attendre, souvent, comme Mme Wing, plus de deux
ans pour avoir des réponses à leurs questions... pourquoi ne pas leur donner le
meilleur forum pour avoir ces réponses-là? Parce que, un rapport du coroner, on
ne peut pas l'interroger. On ne peut pas avoir des réponses quand on interroge
un rapport du coroner, on est pris avec qu'est-ce qui est écrit dedans. Mais,
quand que les policiers qui sont impliqués doivent venir s'expliquer en public,
doivent venir répondre aux questions des avocats, incluant des avocats de la
famille, je pense que c'est la meilleure façon d'obtenir des réponses, alors ça...
La question des délais, je pense que... et,
à moins qu'on me corrige, on risque d'être pris avec ça pendant un bon bout de
temps, alors, tant qu'à ça, aussi bien avoir un processus qui donne les vraies
réponses au bout du terme, selon moi.
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, vous avez raison de dire qu'il y a une partie des délais qui sont
imputables à des partenaires sur lesquels on n'a pas... Moi, comme ministre, je
ne peux pas, là, influer sur la Loi sur les services de santé, par exemple,
pour les autopsies, ou autres éléments comme ça. Ce qu'on touche aujourd'hui,
c'est vraiment ce qui est du pouvoir du Coroner en chef. C'est pour ça que,
moi, ma prétention, c'est qu'en donnant plus de leviers au Coroner en chef elle
ou il va pouvoir agir sur ce sur quoi elle a directement du pouvoir,
c'est-à-dire les délais qui sont imputables aux coroners eux-mêmes. Puis ce ne
sont pas tous les délais, on en convient, mais je pense que c'est un pas dans la bonne direction.
Maintenant, effectivement, comme
gestionnaires, il y a une question de sensibilisation des partenaires qui doit
se faire puis, comment dire, un leadership à exercer pour continuellement
sensibiliser les partenaires à l'importance d'avoir des délais respectables.
Mais, pour ce qui est du projet de loi comme tel, qui touche la loi
constitutive du Bureau du coroner, moi, c'était mon <objectif. Aussi, si
vous...
Mme Guilbault :
...
la bonne direction.
Maintenant, effectivement, comme
gestionnaires, il y a une question de sensibilisation des partenaires qui doit
se faire puis, comment dire, un leadership à exercer pour continuellement
sensibiliser les partenaires à l'importance d'avoir des délais respectables.
Mais pour ce qui est du projet de loi comme tel, qui touche la loi constitutive
du Bureau du coroner, moi, c'était mon >objectif. Aussi, si vous avez
des suggestions ou, en tout cas, des... quelque chose par rapport, vraiment, à
agir sur les délais qui sont imputables au coroner, sachez que je suis très
ouverte.
Je vais passer à un autre point, sur... puis
là vous l'avez dit, là, un peu, les familles, la représentation des familles
dans les enquêtes publiques. Mais je m'intéresse plus largement... C'est vrai,
vous dites : Ce n'est pas le temps de s'improviser avocats dans une
enquête publique. Je suis parfaitement d'accord avec vous. Moi, l'impression
que j'ai, c'est que, justement, le coroner et son procureur travaillent de
près, normalement, avec les familles dans une enquête publique, là — je
parle des enquêtes publiques. Est-ce que vous avez, vous, une appréciation
qualitative du travail qui est fait, de soutien, de préparation ou
d'accompagnement du coroner et de son procureur, avec les familles, ou autres
parties intéressées — mais là je vais m'en tenir aux familles, parce
que c'est ça qui nous occupe, qui nous préoccupe le plus en ce
moment — dans le cadre d'une enquête du coroner?
M. Popovic (Alexandre) :
Bien, écoutez, Mme la ministre, moi, mon expérience que j'ai, c'est que le
coroner et son procureur, dans les enquêtes auxquelles j'ai pu participer,
étaient pleins de bonne volonté et faisaient vraiment leur possible pour
accommoder les familles. Je pense, entre autres, à l'enquête publique du
coroner sur les causes et circonstances du décès du jeune Brandon Maurice, à
Messines, un jeune âgé de 17 ans, comme M. Riley Fairholm, le 16 novembre
2015. La famille n'avait pas d'avocat, l'État avait refusé de payer les frais
d'avocat pour cette famille-là, et la mère de famille avait elle-même
contre-interrogé le policier qui a tué son fils. C'est vraiment une situation
que j'estime déplorable, et je pense que, rendu là, on parle de bricolage, on
parle d'essayer de s'organiser avec le très peu de moyens du bord.
Mais je pense qu'on peut faire beaucoup
mieux que ça, je pense que le gouvernement, l'État québécois a les moyens de
faire beaucoup mieux que ça, et, franchement, demander une aide financière pour
les familles, comme c'est prévu, d'ailleurs, dans un projet de loi, n° 12, qui a été adopté à l'unanimité, incluant par votre formation
politique, Mme la ministre, le principe fait l'unanimité parmi... et c'est
rare, je pense, à l'Assemblée nationale. Alors, qu'est-ce qu'on attend encore,
sept ans plus tard, pour que ce règlement-là sur l'aide financière aux familles
des victimes, dans le cadre d'une enquête publique du coroner sur un décès aux
mains de la police... Comment ça se fait qu'on attend encore, plus de sept ans
plus tard?
Le Président (M. Bachand) :Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, mais vous pourriez poser la question aussi à mes collègues ici, parce que,
pendant cinq ans, ils ont été là aussi, puis le règlement n'a pas été adopté, donc
je veux juste sensibiliser. Mais moi, je suis en train de réfléchir, justement,
à comment est-ce qu'on devrait concocter... ou qu'est-ce qu'on devrait prévoir
dans ce règlement-là, exactement, pour le baliser de manière intelligente,
équitable et réaliste. Vous voyez la nature de ma réflexion, je suis en train
de <réfléchir...
Mme Guilbault :
…mais moi, je suis en train de réfléchir,
justement, à comment
est-ce
qu'on devrait concocter... ou
qu'est-ce qu'on devrait prévoir dans ce
règlement-là,
exactement, pour le baliser de manière intelligente, équitable et
réaliste. Vous voyez la nature de ma réflexion, je suis en train de >réfléchir
à ça, alors, si vous avez des suggestions, encore là, elles sont les
bienvenues. Comme ce sera un règlement, il n'y a pas de commission, il n'y a
pas d'étude générale, il n'y a pas de… tu sais, donc, si vous avez des suggestions
pour ce règlement-là, encore là, elles sont bienvenues. Je dis ça parce que ça
peut être dans une correspondance après la commission, parce que le temps n'est
pas infini, ici, là. Donc, encore une fois, je suis ouverte.
Un autre point que je voudrais aborder
avec vous — puis on l'a abordé avec le groupe qui vous a précédés, l'Association
des juristes — c'est la question de l'accès à l'information. Vous
savez que, dans le projet de loi, on prévoit d'exclure les rapports d'agents de
la paix des annexes du rapport du coroner, c'est ça. Et vous savez comment ça
fonctionne, actuellement, on fait une demande d'annexe pour avoir le rapport
des agents de la paix, le Bureau du coroner décide, à son niveau, si, oui ou
non, la demande est recevable, la décision est sans appel, ensuite de ça, si
elle est acceptée, c'est traité au ministère de la Sécurité publique, on fait
le lien, et tout ça; si c'est refusé, c'est sans appel, encore une fois, et ça
ne fait pas l'objet d'un encadrement par la loi, donc il n'y a pas de délai
maximum. Alors, qu'est-ce que vous pensez de l'idée de les exclure pour pouvoir
les faire passer par le canal standard, balisé de la loi sur l'accès à l'information
pour qu'il y ait des délais maximums et des appels à la CAI, advenant un refus
ou une décision jugée insatisfaisante?
M. Popovic (Alexandre) :
Alors, je peux vous dire, Mme la ministre, que j'ai quand même beaucoup
d'expérience en matière d'accès à l'information. Des demandes, je ne les compte
même plus, là, j'en ai fait des centaines. J'ai souvent plaidé devant la
Commission d'accès à l'information également. Je peux vous dire que je peux...
en fait, vous prédire que, si on demande aux familles de passer par ce
canal-là, les familles vont frapper un mur, tout simplement, puis je peux vous
dire qu'avoir une audience... à cette heure, c'est des audiences téléphoniques,
avec la COVID, là, mais avoir une audience, juste avoir une audience, ça peut
prendre un temps fou. Alors, moi, je peux vous dire…
Mme Guilbault :
Une audience à la CAI, vous voulez dire?
M. Popovic (Alexandre) :
Oui, une audience à la Commission d'accès à l'information. Écoutez, comme moi,
j'ai fait… j'ai des dossiers, j'ai des demandes, là, qui remontent à il y a
quatre ans, là, donc c'est un processus qui est extrêmement long.
Et je peux vous dire aussi, Mme la
ministre, que je suis en contact avec un certain nombre de familles de victimes
qui sont passées par le processus qui existe présentement, donc d'adresser la
demande à la Coroner en chef, et que des familles des victimes ont réussi à
obtenir des documents, des centaines de pages de documents, qui, si je me fonde
sur mon expérience en matière d'accès à l'information, ne les auraient jamais
obtenus. Alors, je pense que c'est déjà assez dur, pour les familles, de même,
d'obtenir des informations, comme l'expliquait Mme Wing. Ce que vous
prévoyez dans votre projet de loi, c'est de leur rendre la vie encore plus dure,
à ces gens-là.
Le Président (M. Bachand) :Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Parfait, merci. Comme il me reste peu de temps, je vais aborder un dernier
point sur lequel j'aimerais vous entendre. Vous avez parlé de l'indépendance
des coroners, l'importance de l'indépendance des coroners. Je suis tout à fait
d'accord. Et moi, je considère que, dans le projet de loi, on préserve
l'indépendance du coroner, voire on la <renforce, parce qu'on…
M. Popovic (Alexandre) :
...ces gens-là.
Le Président (M.
Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Parfait, merci. Comme il me reste peu de temps, je vais aborder un dernier
point sur lequel j'aimerais vous entendre. Vous avez parlé de
l'indépendance
des coroners,
l'importance de l'indépendance des coroners. Je suis tout
à fait d'accord. Et moi, je considère que, dans le projet de loi, on préserve
l'indépendance du coroner, voire on la >renforce, parce qu'on tasse
encore plus les processus de sélection, nomination et... pas de nomination, ça
continue d'être le gouvernement qui nomme, mais de sélection et de
renouvellement du seul pouvoir politique, là, donc ce sera dans un règlement — je
suis consciente qu'on n'a pas le règlement ici, donc c'est difficile de se
prononcer, mais je vous donne l'esprit général de ce que je compte mettre dans
le règlement — et avoir des comités indépendants qui vont juger de la
qualité des candidats, qui vont produire une liste de personnes qu'ils jugent
aptes. Et ensuite, même chose pour les renouvellements, il y aura un comité, et
tout ça, puis on fait des recommandations au ministre. Alors, moi, je juge que
c'est plus objectif, comme processus, que simplement au bon vouloir d'un
ministre qui décide si, oui ou non, on renouvelle ou on nomme quelqu'un. Est-ce
que vous êtes d'accord avec cette idée-là ou... Qu'en pensez-vous, finalement?
M. Popovic (Alexandre) :
Bien, moi, je ne vois tout simplement pas la nécessité que... d'avoir des
coroners qui ont des mandats de cinq ans, je ne vois pas du tout pourquoi que
la loi est changée dans ce sens-là. Les coroners, c'est un peu... ça a un
statut de tribunal, comme on le sait, en vertu de l'article 36 de la Charte
des droits et libertés de la personne, et donc la garantie d'indépendance d'un
tribunal — et c'est bien connu, et ça a été dit plusieurs fois dans
la jurisprudence — c'est l'inamovibilité. Donc, si, au bout de cinq
ans, le coroner, il ne le sait pas, s'il va encore l'avoir, sa job, il ne l'a
plus, son indépendance, tout simplement. Donc, c'est un recul, et ça risque
d'être la confiance du public envers cette importante institution qu'est le
Bureau du coroner qui va en pâtir, malheureusement.
Le Président (M. Bachand) :Mme la ministre.
• (12 h 20) •
Mme Guilbault :
Oui, bien, comme je disais, l'idée, c'est que le renouvellement du coroner
reposerait sur une recommandation faite par d'autres personnes que des politiciens.
C'est dans ce sens-là que je dis que moi, je trouve qu'on tasse d'autant plus
le processus du politique. Je comprends que vous me parlez d'inamovibilité,
mais, dans la mesure où il y aurait une durée définie, l'idée, c'est vraiment
de le tasser le plus possible du pouvoir politique, justement, pour assurer
cette indépendance, qui est très importante. Quand on pense au fait, entre
autres, que les coroners font beaucoup de recommandations à l'endroit même du gouvernement,
j'estime que c'est important que leur sort ne dépende pas d'un politicien.
Je pense que j'ai probablement écoulé mon
temps, ça fait que je voulais faire... S'il reste du temps, vous voulez réagir?
Le Président (M. Bachand) :Rapidement.
M. Popovic (Alexandre) :
Ah! bien, écoutez, je pense que je ne peux pas parler pour les coroners, mais,
si j'essaie de me mettre à leur place, je pense que je serais beaucoup plus à
l'aise de savoir que je n'aurai pas quelqu'un quelque part dans l'appareil
étatique qui va comme <décider, quelque part, si...
M. Popovic (Alexandre) :
…ah! bien,
écoutez, je pense que je ne peux pas parler pour les
coroners, mais, si j'essaie de me mettre à leur place, je pense que je serais
beaucoup plus à l'aise de savoir que je n'aurai pas quelqu'un quelque part dans
l'appareil étatique qui va comme >décider, quelque part, si ma job doit
être renouvelée ou pas.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. M. le député de Vimont, s'il vous plaît.
M. Rousselle
:
Merci, M. le Président. Merci à vous d'être ici, merci. J'ai regardé avec
attention votre mémoire. Merci de l'avoir préparé, parce que ça prend toujours
du travail, préparer ces mémoires-là. Donc, bien beau que c'est en papier, mais
il y a quelqu'un qui l'a pensé puis quelqu'un qui l'a écrit aussi, donc, merci.
Merci, madame, de votre témoignage aussi. Moi aussi, grande empathie envers
vous. Écoutez, moi, je peux parler comme père, mais aussi comme grand-père,
donc je peux m'imaginer... Donc, vraiment, un témoignage poignant, je peux vous
dire, vraiment, je l'ai pris vraiment d'une manière sensible.
Écoutez, on regarde au niveau équité, on
regarde aussi... indépendance, transparence. Je regarde, dans votre mémoire,
vous vous questionnez sur le fait que... la volonté de la ministre de donner au
gouvernement le pouvoir de nommer un coroner en chef qui n'est pas
nécessairement lui-même coroner. Je voudrais vous entendre là-dessus.
M. Popovic (Alexandre) :
Je ne comprends tout simplement pas l'idée derrière ça, la nécessité de faire
ça. Moi, il me semble que... une personne qui est déjà coroner, qui sait déjà
comment que ça fonctionne, qui connaît ce métier-là, je pense que c'est la
personne qui est la mieux placée pour, disons, être au top de la pyramide, là.
M. Rousselle
:
Effectivement. Tantôt, on a rencontré, justement, l'Association des coroners,
puis ils mentionnaient, justement, que ça prenait un certain temps pour être
habilité, donc ça prenait de l'expérience, dû au fait qu'il n'y a pas de formation
en la matière pour devenir coroner. Vous, est-ce que vous vous êtes penchés
là-dessus, sur le côté formation? Parce qu'on sait bien qu'il y en a qui vont
parler comme quoi ça… oui, on va l'apprendre sur le tas, qu'on pourrait dire,
mais, si on veut être plus efficaces, peut-être… Parce qu'ils ont parlé d'une
formation assez courte. Est-ce que vous vous êtes penchés là-dessus pour
pouvoir avoir les meilleurs résultats possible, là, pour la population?
M. Popovic (Alexandre) :
Eh bien, pour être bien honnête, je n'ai pas la prétention de m'être penché
là-dessus, M. le député de Vimont.
M. Rousselle
:
Bon, merci. J'ai regardé aussi... dans votre mémoire, vous parlez d'effectifs
aussi, qui est un facteur que vous mentionnez, de délais, vous parlez des
régions éloignées manquant de coroners, comme la Gaspésie, Côte-Nord, le Saguenay—Lac-Saint-Jean,
puis là vous en nommez d'autres. Donc, vous l'avez soulevé, mais est-ce que
vous avez eu des idées là-dedans? Parce qu'on a vu aussi, dans les coroners,
l'Association des coroners, il y a aussi des coroners qui... puis c'est
majoritairement des médecins, mais pensez-vous qu'on devrait l'ouvrir,
peut-être, à des infirmières ou des gens qui sont dans le milieu <de la
santé…
73, 70 - - - Imprimé le 18 septembre 2020 à 4 :06
M. Rousselle
:
...vous l'avez soulevé, mais est-ce que vous avez eu des idées là-dedans? Parce
qu'on a vu aussi, dans les coroners, l'Association des coroners, il y a aussi
des coroners qui... puis c'est majoritairement des médecins, mais pensez-vous
qu'on devrait l'ouvrir, peut-être, à des infirmières ou des gens qui sont dans
le milieu >de la santé, comme... On parlait de psychologues tantôt.
Donc, est-ce que vous avez pensé à ce côté-là?
M. Popovic (Alexandre) :
Bien, encore une fois, je dois répondre par la négative, en toute honnêteté, à
cette question-là, M. le député, et... Donc, je dois reconnaître que je ne suis
pas la meilleure personne pour donner une réponse valable à cette question-là.
M. Rousselle
: Bien,
je vous posais la question parce que vous l'avez dans votre mémoire, donc je me
suis dit : Sûrement, ils ont eu une réflexion... À moins que madame soit
capable, là, mais, écoutez... O.K., bien, donc, vous n'êtes pas la meilleure
personne, donc, c'est bon, il n'y a pas de problème là-dessus.
Écoutez, je comprends, on parle de délais,
puis j'en conviens que le délai, c'est le nerf de la guerre parce que — j'écoutais
madame tantôt — c'est les délais par-dessus des délais, puis on
attend. Avez-vous réfléchi, peut-être, que le coroner pourrait peut-être donner
un rapport partiel ou... Parce que j'entendais, tantôt... puis là, si je me
trompe, là... il me semble que j'ai entendu que les coroners rentraient
aussi... communiquaient avec les familles. Est-ce que ça a été le cas pour
madame? Est-ce que... Parce qu'à un moment donné je peux comprendre, l'attente,
là, l'attente, ça doit être abominable, tu as hâte de savoir, puis là vous,
vous attendez depuis déjà quelques...
Mme Wing (Tracy) :
J'aimerais juste répondre que ça a pris 18 mois avant de savoir qu'il a eu une
balle à la tête. Tu sais, je ne pouvais... j'avais demandé au BEI, à la SQ, à
l'hôpital combien de balles qu'il a reçues, combien de projectiles, où. 18
mois. C'est le DPCP qui me l'a dit après qu'elle m'ait expliqué que, les
policiers, il faut que ça tire dans la masse centrale. Après, elle me dit :
Bien, lui, il a tiré à la tête, il n'a pas visé ici. Il a voulu le tuer, c'est
bien écrit, c'est écrit : «La force mortelle était nécessaire.» Puis je
n'ai pas eu d'explication pourquoi que ça a été nécessaire. Les autres
déclarations des autres policiers ne disent pas que c'était nécessaire, il n'y
a pas un chef qui a dit «shoot». Tu sais, c'est de... Une minute qu'ils
l'ont vu, il est là, 61 secondes, il est à terre, il est mort. Ça fait que je
n'ai pas eu d'explication à ce sujet encore, et j'attends, puis je vais
attendre encore du temps, puis je suis patiente, très patiente.
Le Président (M. Bachand) :
Merci. M. le député.
M. Rousselle
: Il
y a patient puis patient, là, mais...
Mme Wing (Tracy) : Bien,
je n'ai pas d'autre option.
M. Rousselle
:
Oui, je comprends.
Mme Wing (Tracy) : Tu
sais, si je crie, là, je vais être la mère qui est fanatique, tu sais, qui veut
juste de la vengeance. Puis ce n'est pas de la vengeance qu'on veut, on veut la
vérité, on veut la justice. On veut apprendre des interventions, on veut faire
mieux. J'espère que vous voulez faire mieux, j'espère que les policiers veulent
faire mieux. Je ne suis pas sûre que ce policier-là, il est fier de son coup,
là, d'avoir <tiré à la tête, à...
Mme Wing (Tracy) :
...tu sais, qui veut juste de la vengeance. Puis ce n'est pas de la vengeance
qu'on veut, on veut la vérité, on veut la justice. On veut apprendre des
interventions, on veut faire mieux. J'espère que vous voulez faire mieux,
j'espère que les policiers veulent faire mieux. Je ne suis pas sûre que ce
policier-là, il est fier de son coup, là, d'avoir >tiré à la tête, à
100 pieds, à la noirceur, à un garçon qui tournait 300 secondes...
sur des 360°, les mains en l'air, verticales. Ce n'est pas pointer un fusil...
Mais je n'ai pas d'explication encore à ça, ça fait que moi, je m'en fais, des
propres scénarios.
Le Président (M. Bachand) :M. le député.
M. Rousselle : Merci. M. Popovic,
dans votre mémoire, toujours, vous parlez que... justement, vous faites
référence aux articles 23, 24, 26, 29 et 31 du projet de loi, là, qui viennent
apporter des changements majeurs au régime de transmission des documents
victime. Donc, ces modifications, est-ce que c'est pour corriger en grande
partie qu'est-ce qu'on vient d'entendre de madame? Est-ce que ça va plus loin
ou... Je voudrais vous entendre là-dessus.
M. Popovic (Alexandre) :
Non, ça ne va clairement pas assez loin. C'est comme... C'est quasiment comme
si on mettait un petit prix de consolation pour les importants reculs en
matière de transparence qu'il y a dans ce projet de loi, et c'est une grande
raison pour laquelle que je suis ici, c'est pour, justement, dire que, déjà, il
y a beaucoup de problèmes de transparence, puis il ne faut pas reculer encore
plus, là. Alors, non, c'est nettement insuffisant, là, les dispositions
auxquelles que vous faites référence, M. le député.
Le Président (M. Bachand) :Mme la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols : Oui, merci,
M. le Président. Mme Wing, j'ai entendu l'histoire, là, que vous nous
racontez. Je comprends que vous êtes patiente. Comme disait mon collègue, il y
a une limite, il y a quand même une limite. Mais je suis curieuse de savoir qu'est-ce
qu'on vous donne, à chaque fois, comme réponse pour reporter le délai, pour...
et pourquoi... qu'est-ce... on vous le donne par écrit, puis c'est quoi,
l'argument, pour toujours reporter?
• (12 h 30) •
Mme Wing (Tracy) : Bien,
le Coroner en chef, il ne donne pas d'argument ou de raison pour laquelle...
Lui, j'attends pour son rapport. Au début, quand je demandais des informations,
bien, c'était toujours : Bien, votre... le dossier est... c'est en train
de se faire enquêter, puis il y a des informations que, si on en parle tout de
suite, bien, ça peut nuire à l'enquête.
L'intervention a pris 20 minutes, de
l'appel 9-1-1 que mon fils a fait pour dire qu'il y avait un adolescent en
crise... 20 minutes plus tard, il est mort. Alors, pour moi, ça ne prend pas
18 mois d'une enquête de BEI. Il n'y avait pas de témoin, il y avait six policiers
et Riley. Alors, c'est ça, les délais, qu'ils me disent, qu'ils sont trois
joueurs, qu'ils sont trois joueurs : on a le BEI, le DPCP, le coroner.
Alors, comme le BEI m'ont expliqué, on est tous sur le plancher de danse, on
danse, mais on ne danse pas à la même chanson. Alors, c'est comme... chaque
organisme est mandaté <à faire...
>
12 h 30 (version révisée)
< Mme Wing (Tracy) :
…qu'ils sont trois joueurs : on a le BEI, le DPCP, le coroner. Alors,
comme le BEI m'ont expliqué, on est tous sur le plancher de danse, on danse,
mais on ne danse pas à la même chanson. Alors, c'est comme… chaque
organisme
est mandaté >à faire certaines choses, mais ils ne peuvent pas les faire
avant qu'un autre organisme ait terminé. Alors, c'est 10 mois pour le BEI,
un autre huit mois pour le DPCP. Le coroner, il a commencé, mais il n'a pas vu
les dossiers encore, les enquêtes. Je ne m'attends pas qu'il regarde ça puis
que, dans une semaine, il va avoir une réponse.
Mme Nichols : Ce que je
comprends, c'est qu'à date vous n'êtes pas au courant du processus. Est-ce que
vous avez accès aux documents au fur et à mesure ou vous n'avez accès, pour le
moment, à aucune donnée de l'enquête, aucun rapport?
Mme Wing (Tracy) : …aucun
rapport d'enquête. Je n'ai pas l'autopsie. Le DPCP m'a informée que Riley avait...
son taux d'alcool, il était à zéro, et de drogue. Parce qu'habituellement on
les voit dans les communiqués, puis moi, je me suis dit : Ah! il n'est pas
dans le communiqué, ça fait que ça devait être qu'il était à jeun, hein? Ça, c'est…
c'est ça, les explications que j'ai. Vous pouvez tout le voir sur le site du
DPCP. C'est deux pages et demie, et une page et demie explique l'article 25.
Mme Nichols : …des
réponses, ce n'est pas des réponses à des questions que vous vous posez,
précisément, soit au DPCP ou…
Mme Wing (Tracy) : Bien,
au DPCP, je leur ai demandé c'était quoi, leur analyse, c'est sur quoi qu'ils
s'étaient fondés pour… puis ils m'ont dit que c'étaient des secrets professionnels,
et je n'avais pas accès. Quand je demande à la SQ combien de policiers sont
arrivés sur la scène : C'est en enquête, demande-le au BEI. Quand je
demande au BEI, ils me disent : Bien, ça appartient à la SQ, demande à la
SQ. J'en ai des… j'ai des cartables pleins.
Mme Nichols : Est-ce que
vous êtes représentée? Avez-vous un avocat ou vous faites toutes ces
démarches-là toute seule?
Mme Wing (Tracy) : Bien,
je fais ces démarches-là par moi-même, avec la Ligue des droits et avec… aussi,
Alexandre m'a aidée beaucoup. J'ai un ami avocat, mais il n'est pas mandaté à
m'aider, c'est un ami de la famille. Parce que la journée, aussi, que mon fils
est décédé, son père a été arrêté pour menaces de mort envers la police, alors
il fallait que lui soit représenté, alors c'est comme ça que notre ami est venu
dans le portrait, mais il n'est pas mandaté.
Mme Nichols : C'est vraiment
terrible, comme histoire, puis les… Je trouve vraiment inexplicables, là, les
délais, durs à vivre aussi, là, pour la famille des victimes.
Vous en avez parlé dans votre mémoire, la représentation
juridique, puis vous voyais bouger un peu quand je parlais de représentation
juridique. Votre position sur la représentation juridique.
M. Popovic (Alexandre) :
Bien, c'est non seulement ma position, mais c'est aussi celle du Bureau du coroner,
parce que… Je cite, à un moment donné, là, le manuel L'Investigation,
qui a été produit en 2001, ça prend un avocat. Les familles, qui deviennent des
<parties intéressées, donc qui deviennent, disons…
Mme Nichols : …
sur
la représentation juridique.
M. Popovic (Alexandre) :
Bien, c'est non seulement ma position, mais c'est aussi celle du Bureau du
coroner, parce que… Je cite, à un moment donné, là, le manuel, L'Investigation,
qui a été produit en 2001, ça prend un avocat. Les familles, qui deviennent des
>parties intéressées, donc qui deviennent, disons, un joueur dans cette
game-là d'enquête publique, ça leur prend un avocat parce que sinon, là, le
déséquilibre entre la représentation des parties devient aussi évident que le
nez au milieu du visage, là.
Mme Nichols : Je suis d'accord
avec vous que ça peut être… quand on arrive dans le monde juridique… Puis je
comprends, non plus, que ce n'est pas nécessairement un procès en tant que tel,
mais que tout qu'est-ce qui entoure tout ça, c'est le monde juridique, là. On
ne se fera pas accroire que c'est autre chose, que c'est une simple enquête, là…
Mme Wing (Tracy) : …si
jamais il y a une enquête pour moi, il y a six policiers qui étaient sur la
scène, plus un autre, alors ils vont être représentés chacun par au moins un, probablement
deux, là, un syndical puis un de la ville, alors ça va faire 13… bien, si je
peux compter… 14 avocats, et moi…
Mme Nichols : …déséquilibre
est vraiment… ça saute aux yeux. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bachand) :
Merci. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît.
M. Ouellette : Merci,
M. Popovic, Mme Wing. Je pense que c'est important que les parlementaires,
Mme Wing, entendent des témoignages comme le vôtre parce que, très souvent,
quand on va légiférer, on légifère sur des documents, sur des choses qu'on a
lues, sur des choses qu'on a entendues. Je pense que, que vous veniez nous le
rappeler, que 763 jours plus tard, vous n'avez même pas l'information de
base, c'est majeur, que vous venez nous rappeler que tout est à vos frais, que
vous faites des démarches, c'est toutes vos démarches à vous, que vous n'êtes
pas conseillée légalement. Ça pourrait être compris dans un règlement qui
pourrait être adopté. Puis je suis très heureux d'entendre que Mme la ministre
va régler le problème, elle. Le PQ ne l'a pas réglé, puis les libéraux ne l'ont
pas réglé, mais elle, elle va le régler. Ça serait extraordinaire qu'elle
puisse le régler avant l'étude détaillée.
J'aurais le goût de vous dire… ou j'aurais
le goût de vous demander, Mme Wing : Est-ce qu'on ne devrait pas, puisqu'on
ouvre la loi, mettre dans la loi, pour les coroners, une série… ou certains
détails d'informations de base que les familles des victimes devraient avoir ou
que le coroner serait en droit… ou qu'il aurait une obligation légale… Parce
que ce n'est pas normal qu'après 763 jours vous soyez encore à vous
demander ces informations de base là. Est-ce que ce n'est pas quelque chose qu'on
devrait inclure dans le projet de loi actuel, puisqu'on rouvre la loi?
Mme Wing (Tracy) : Je
peux vous dire que le BEI m'ont expliqué, quand ils sont venus nous rencontrer
la journée même, qu'eux, ils nous expliquent la façon que ça <fonctionne…
M. Ouellette :
…ces informations de base là.
Est-ce que ce n'est pas
quelque
chose qu'on devrait inclure dans le
projet de loi actuel,
puisqu'on
rouvre la loi?
Mme Wing (Tracy) :
Je peux vous dire que le BEI m'ont expliqué, quand ils sont venus nous
rencontrer la journée même, qu'eux, ils nous expliquent la façon que ça >fonctionne,
alors j'étais toujours au courant que les délais étaient pour être plus longs.
Je ne suis pas sûre que c'est à la place du coroner de m'informer de quand que le
BEI va avoir fini son investigation… parce qu'avant de se rendre au coroner j'ai
le BEI à passer au travers. Après, c'est le DPCP de passer au travers. Puis j'ai
été chanceuse d'avoir eu une rencontre de quatre heures parce qu'il y en a d'autres,
familles, qui n'ont pas ça, qu'eux, ils ont le communiqué qui est envoyé par le
courriel : Et voilà, on ne porte pas accusation.
Puis ce n'est pas nécessairement qu'on
veut qu'il y ait des accusations, mais la responsabilité, c'est que mon fils,
il est mort par une balle, il ne s'est pas enlevé la vie, c'était un homicide.
Si lui aurait tué le policier, on ne serait pas ici, là. Ça aurait… On aurait
eu le rapport du coroner. On aurait eu… Il serait… Je serais en train de le
visiter en prison. Alors, c'est… Ce n'est pas égaux du tout. Et je ne suis pas
sûr que le coroner qui me dit : Ça va prendre du temps... parce que je le
sais, que ça va prendre du temps, puis lui, il n'a pas d'information.
Le BEI peuvent me dire : Il a eu une
balle à la tête, tu sais, il y avait sept policiers. Ils ne me l'ont pas dit. C'était
un policier qui l'a tiré. Ils ne m'ont jamais dit ça, j'ai su ça le
28 octobre 2019. Alors, entre juillet et octobre 2019, j'ai eu mille
et un scénarios dans ma tête. Un, c'était que ça avait pris six minutes, puis
ça, je l'ai vécu pendant au moins… c'est presque 10 mois, là, six minutes.
Alors, le 28 octobre, quand Me Drolet m'a dit que ça a pris
61 secondes, j'ai dit : Ils n'ont pas négocié avec, il faut que
j'arrête l'auto, il faut que je sorte de l'auto, il faut que j'aille derrière
l'auto, il faut que je lève mes bras, pas le temps de parler, là. Ça fait qu'il
y a des manquements. Ça, ce n'est pas des informations qui auraient nui à
l'enquête du tout. Ça fait que je ne suis pas sûre que c'est la place au
coroner de me dire c'est quoi, les délais et pourquoi mon attente, je pense, c'est
à la police, c'est au BEI, c'est au DPCP. C'est eux qui mènent la façon que ça
va être géré, la façon que ça va… la rapidité du… Merci.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre participation aux travaux de la
commission, c'est très apprécié.
Cela dit, la commission suspend ses
travaux jusqu'à 14 heures <cet après-midi. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 39)
Le Président (M.
Bachand) :
...merci beaucoup de
votre participation aux travaux de la
commission, c'est très apprécié.
Cela dit, la
commission suspend
ses travaux
jusqu'à 14 heures >cet après-midi. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 39)
14 h (version révisée)
(Reprise à 14 h 04)
Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! Bon début d'après-midi. La
commission reprend ses travaux. Je vous demande, bien sûr, comme vous le savez,
de vouloir éteindre la sonnerie de votre appareil électronique.
Nous poursuivons les auditions publiques
dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 45,
Loi concernant principalement la nomination et le mandat des coroners et du coroner
en chef.
Cet après-midi, nous aurons le plaisir
d'entendre la Protectrice du citoyen, mais nous allons d'abord commencer avec
la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Alors,
bienvenue. Vous connaissez les règles du jeu, votre présentation, après ça on
aura un échange avec les membres de la commission. Alors, Me Tessier, la
parole est à vous.
Commission des droits de la personne et des droits
de la jeunesse (CDPDJ)
M. Tessier (Philippe-André) :
Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, donc,
Philippe-André Tessier, président de la Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse. Je suis accompagné de Me Geneviève St-Laurent,
qui est conseillère juridique à la Direction de la recherche, à la commission.
Donc, je vous remercie pour l'invitation
faite pour participer à ces consultations particulières sur le projet de loi n° 45,
rappeler, comme nous le faisons à l'habitude, que la commission a pour mandat
d'assurer le respect, la promotion des principes prévus à la Charte des droits
et libertés de la personne, que nous assurons également la protection de
l'intérêt de l'enfant ainsi que le respect et la promotion des droits qui lui
sont reconnus notamment par la Loi sur la protection de la jeunesse.
Conformément à notre mandat, la commission
a examiné le projet de loi afin d'en vérifier la conformité aux principes
contenus dans la charte et faire les recommandations qu'elle estime
appropriées. D'entrée de jeu, je précise que nos observations sont très
limitées aujourd'hui, nous avons fait l'objet d'une... nous allons faire
l'objet d'une lettre. Donc, dans cette analyse, la commission formulait, dans
cette lettre, là, comme je disais, du 31 janvier dernier, deux
recommandations quant aux avis qui devaient être transmis aux autorités
compétentes en cas de décès dans certains lieux en vertu des articles 37 à
40 de la loi que vient modifier le projet de loi aujourd'hui <à
l'étude...
M. Tessier (Philippe-André) :
...donc, dans cette analyse, la
commission formulait, dans cette lettre,
là, comme je disais, du 31 janvier dernier, deux
recommandations
quant aux avis qui devaient être transmis aux autorités compétentes en cas de
décès dans certains lieux
en vertu des articles 37 à 40 de la loi
que vient modifier le
projet de loi
aujourd'hui >à
l'étude.
Le Président (M. Bachand) :On entend très mal, hein? Je ne sais pas si... peut-être parler
plus... le micro bouge... il ne bougera pas. Dr Tessier, personne ne peut
partir avec les micros, mais juste peut-être de parler plus directement dans le
micro, s'il vous plaît. Merci.
M. Tessier (Philippe-André) :
Je vais tenter de me rapprocher, d'accord, excusez-moi.
Le Président (M. Bachand) :
Parfait, merci.
M. Tessier (Philippe-André) :
C'est bon? J'étais dans la salle Pauline-Marois ce matin, donc, les salles plus
modernes avec des micros qui se rendent... alors, je m'excuse, j'ai peut-être
pris un faux pli, un mauvais pli, là, tu sais.
Donc, le projet de loi n° 45
interpelle la commission en lien avec plusieurs de ses mandats. La première de
nos recommandations, d'ailleurs, concerne plus particulièrement la mission que
nous avons de protection de l'intérêt de l'enfant, du respect et de la
protection et de la promotion de ses droits.
La seconde recommandation, quant à elle,
touche nos responsabilités relatives à la protection des personnes âgées ou
handicapées contre toute forme d'exploitation, prévues à l'article 48 de
la charte, mais aussi celles relatives à la promotion de l'égalité et de lutte
contre toute forme de discrimination.
Tout d'abord, il est important de rappeler
que la commission détient le mandat d'enquêter à la suite du décès d'un enfant
dans les situations où elle a raison de croire que les droits de ce dernier ont
été lésés. D'ailleurs, le 11 août dernier, nous avons fait part de nos
résultats d'une enquête menée de notre propre initiative relativement au décès
de la petite fille de Granby, survenu en mai 2019, qui a ému l'ensemble du
Québec et qui a mené à la création de la commission Laurent. Dans le cadre de
ce type d'enquête, la commission peut notamment recommander l'accomplissement,
dans le délai qu'elle fixe, de toute mesure visant à corriger la situation.
Cela l'amène à formuler des recommandations d'ordre systémique aux personnes,
établissements et organismes devant intervenir en vertu de la Loi sur la
protection de la jeunesse ou de la Loi sur le système de justice pénale pour
adolescents.
Comme nous le soulignons dans notre
mémoire soumis encore récemment à la commission Laurent en mai dernier, la
commission est souvent alertée du décès d'un enfant ou d'une situation où un
enfant a subi de graves blessures par l'entremise des médias. Une enquête de
notre propre initiative peut, par la suite, être déclenchée. Ainsi, afin de lui
permettre d'exercer pleinement le rôle que le législateur lui a confié, la
commission recommande d'amender le projet de loi n° 45 pour prévoir d'être
informé, lorsque le coroner conduit une investigation à la suite du décès d'un
enfant, des raisons ayant justifié l'ouverture de celle-ci et des personnes,
établissements ou organismes étant mis en cause. La commission disposerait
ainsi systématiquement d'informations fiables concernant les décès d'enfants en
vue de vérifier si leurs droits ont été lésés et, le cas échéant, proposer les
correctifs appropriés.
Par ailleurs, dans le cadre de nos
responsabilités en regard de la promotion et de l'égalité de la lutte contre la
discrimination et toute forme d'exploitation de personnes âgées ou handicapées,
la commission souhaite réitérer une recommandation formulée dès 2010, mais
toujours d'actualité, afin d'élargir aux centres d'hébergement de soins de
longue durée, aux ressources intermédiaires et aux résidences pour personnes
âgées l'obligation d'aviser un coroner d'un décès et lui donner le pouvoir de
déterminer s'il y a lieu ou non de faire une investigation. Cette
recommandation, que la commission a réitérée dans un mémoire de 2011, n'a pas
été pleinement suivie à ce jour. Il est vrai que, tenant partiellement compte
de notre recommandation <de l'époque, la Loi sur les...
M. Tessier
(Philippe-André) : ...aux
ressources intermédiaires et aux
résidences pour
personnes âgées
l'obligation d'aviser un coroner
d'un décès et lui donner le pouvoir de déterminer
s'il y a lieu ou non
de faire une investigation. Cette
recommandation, que la
commission
a réitérée dans un mémoire de 2011, n'a pas été
pleinement suivie
à
ce jour. Il est vrai que, tenant
partiellement compte de notre
recommandation >de l'époque, la Loi sur les services de santé et les
services sociaux avait alors été modifiée pour donner au gouvernement le
pouvoir de prescrire le contenu d'un formulaire devant être rempli à la suite du
décès d'un usager survenu en... CHSLD — pardon, le lapsus maintenant
légendaire — une ressource intermédiaire, ressource de type familial
ou une résidence privée pour aînés. La loi établit qu'un tel formulaire
pourrait notamment prévoir les cas, conditions et circonstances dans lesquels
il doit être transmis au coroner. Toutefois, il semble que ce formulaire n'ait
jamais été adopté. Pourtant, le constat dressé par la commission en 2010 est
toujours valable aujourd'hui. Ni les dispositions actuelles de la loi ni les
modifications prévues dans le projet de loi n° 45 ne prennent en compte le
contexte particulier de vulnérabilité et de perte d'autonomie, souvent associé
à l'âge, des personnes hébergées dans un CHSLD, une ressource intermédiaire ou
une résidence pour personnes âgées.
• (14 h 10) •
Aussi, donc, dans l'objectif d'assurer le
respect en pleine égalité des droits à la vie, et sûreté, et intégrité garantis
par les articles 1 et 10 de la charte, nous recommandons que le projet de
loi n° 45 soit amendé pour prévoir que les décès survenus dans les trois
ressources dont j'ai parlé plus tôt... qu'ils doivent faire l'objet d'un avis
au coroner, ce dernier disposant du pouvoir de déterminer s'il y a lieu de
faire une investigation. La loi prévoit d'ailleurs déjà que le coroner doit
être avisé de tous les décès survenus dans certains lieux, notamment des lieux
où se retrouvent, sous une forme de prise en charge par l'État, des catégories
de personnes vulnérables. Pensons aux personnes en centre de réadaptation, aux
personnes sous garde dans un établissement de santé et services sociaux, aux
détenus et aux jeunes hébergés dans une unité d'encadrement intensif au sens de
la Loi sur la protection de la jeunesse, aux personnes prises en charge dans
une ressource de type familial ou les enfants sous la garde d'un titulaire de
permis délivré par le ministre de la Famille. D'ailleurs, dans ce dernier cas,
la commission remarque que le projet de loi viendrait, à son article 18,
ajouter les services de garde en milieu familial aux lieux concernés par
l'obligation d'aviser le coroner.
Ainsi, les décès survenant dans les CHSLD,
les ressources intermédiaires, et les RPA, et les ressources offrant de
l'hébergement à d'autres clientèles vulnérables ne seront pas visés par l'obligation
d'aviser le coroner en fonction du lieu. Pourtant, jusqu'en 1991, les décès
survenus dans les centres d'accueil, y compris les centres d'accueil pour
personnes âgées, devaient faire l'objet d'un avis au coroner, sans égard aux
circonstances. En effet, comme la commission le rappelait dans son mémoire de
2011, lors des travaux qui avaient précédé l'adoption de la loi en 1986 : «Le
ministère de la Justice considérait que les personnes âgées hébergées en centre
d'accueil constituaient des personnes — et j'ouvre les guillemets — "grandement
dépendantes d'autres personnes à cause des soins qui leur étaient prodigués"
et que l'obligation pourrait être une mesure dissuasive face à des actes de
maltraitance», maltraitance maintenant codifiée par la loi visant la
maltraitance de 2017. La commission estime que ce constat est toujours valable
près de 35 ans plus tard. C'est d'ailleurs la reconnaissance de cette
situation de grande vulnérabilité qui a justifié l'encadrement des résidences
pour personnes âgées par un régime de certification en 2005.
La commission, donc, a recommandé de
réintroduire dans la loi l'obligation d'aviser le coroner des décès survenus
dans ces lieux, mais de moduler cette obligation faite au coroner de procéder à
une investigation dans ces situations, étant donné que la majorité des décès
dans ces lieux restent attribuables à des causes naturelles. C'est un modèle
qui existe, par exemple, en Ontario, où le coroner doit être systématiquement
avisé des décès de personnes qui séjournent dans les foyers de soins de longue
durée par le responsable <de l'établissement. Le coroner doit...
M. Tessier
(Philippe-André) : …survenus dans ces lieux, et de moduler cette
obligation faite au coroner de procéder à une investigation dans ces situations,
étant donné que la majorité des décès dans ces lieux restent attribuables à des
causes naturelles. C'est un modèle qui existe, par exemple, en Ontario où le
coroner doit être systématiquement avisé des décès de personnes qui séjournent
dans des foyers de soins de longue durée par le responsable >de
l'établissement. Le coroner doit évaluer à chaque fois la pertinence de
procéder à une investigation, contrairement aux autres situations d'avis
obligatoires prévus à la loi.
Ainsi, et en terminant, dans l'objectif
d'assurer le respect en pleine égalité des droits à la vie, à la sûreté, à
l'intégrité garantis par, comme je le disais, les articles 1 et 10 de la
charte des personnes âgées hébergées dans un CHSLD, une ressource intermédiaire
ou une ressource pour personnes âgées, la commission recommande que ce projet
de loi soit modifié pour élargir aux CHSLD, aux ressources intermédiaires et
aux RPA l'obligation d'aviser le coroner, tout en donnant à celui-ci le pouvoir
de déterminer s'il y a lieu ou non de faire une investigation dans ces cas.
Nous vous remercions de votre attention et
nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup, Me Tessier. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme Guilbault :
Oui, merci beaucoup. Mon Dieu! C'est… Ah! mon masque... mais, oui, excusez-moi,
un surcroît de précautions.
Oui, merci beaucoup, M. le Président.
Bien, bonjour, rebonjour à tout le monde et bonjour à vous deux, merci beaucoup
d'être ici. Très, très intéressant, très concis et orienté, comme présentation.
J'ai bien entendu vos suggestions. Ce ne sont pas des suggestions qui sont
nouvelles, on les avait déjà entendues. Il y a eu des discussions, dans les
années passées, là-dessus. Et d'ailleurs c'est en 2012 ou, en tout cas, je ne
sais plus en quelle année, je pense autour de 2012, qu'on avait introduit les
décès par suite de négligence dans la loi, dans la foulée, entre autres, de ces
conversations-là et on s'était dit, en ajoutant les décès par suite de négligence :
Ça peut venir régler une partie du problème, parce qu'avant c'était simplement «obscur»
ou «violent», c'était un petit plus circonscrit.
Donc, est-ce que, selon vos observations,
cet ajout-là dans la loi a néanmoins fait une différence positive en termes de
signalement et en termes, comment je pourrais dire, de sentiment de sécurité ou
de sentiment de surveillance générale... pas de surveillance, mais de
protection, de protection générale?
M. Tessier (Philippe-André) :
Non, je… Oui, je comprends le sens de votre question. Oui, tout à fait,
effectivement, puis on le reconnaît, là, il y a eu quand même des avancées par
rapport à ça, sur la question de la négligence notamment. Puis d'ailleurs la Coroner
en chef, lorsqu'elle vient ordonner l'enquête publique sur la situation visant
les CHSLD, notamment Herron, mais par la suite… donc, évidemment, elle prend
appui sur ces libellés-là de la Loi sur les coroners… bien, pardon, de la
future… refuture Loi sur les coroners, donc il est évident que cette
question-là puisse servir d'assise. Maintenant, il faut comprendre que, nous,
le sens de notre recommandation, c'est véritablement… puis c'était un peu ça
qui avait été établi dans notre avis de 2010 puis dans les recommandations par
la suite, c'est que... littéralement, c'est qu'il y ait carrément un formulaire
qui soit, encore une fois, transmis, annexé. C'est ce qui avait été prévu par
la modification de la LSSSS également, donc, et là il manquait juste des mises
en application de ces éléments-là. Donc, nous sommes devant vous, là, pour vous
dire qu'il reste peu de choses à faire pour mettre cette protection accrue là
en place. Et puis je ne sais pas si ma collègue voulait ajouter quelque chose
sur les aspects de <négligence…
M. Tessier
(Philippe-André) : …annexé, c'est ce qui avait été prévu par la
modification de
la LSSSS également, donc, et là il manquait juste des
mises en application de ces éléments-là. Donc, nous sommes devant vous, là,
pour vous dire qu'il reste peu de choses à faire pour mettre cette protection
accrue là en place. Et puis je ne sais pas si ma collègue voulait ajouter
quelque chose sur les aspects de >négligence... puis je vois le micro
loin, puis je me suis fait avertir, ça fait que je vais avertir ma collègue.
Mme
St-Laurent
(Geneviève)
: Sur la négligence en
particulier, je ne sais pas si le fait de l'avoir ajoutée a tenu ses promesses
dans la loi, parce que ça reste quand même associé à… puis c'est dans le même
article, là, que les dispositions des… les morts violentes ou dans des circonstances
obscures. Et on peut penser que c'est sûr que, dans les CHSLD, par exemple, la
majorité des décès sont de cause naturelle, mais il peut y avoir des décès
accidentels ou une chute, par exemple, où on ne va pas nécessairement associer
ça à de la négligence, mais on se dit que, s'il y avait un avis automatique au
coroner, bien, peut-être que le coroner serait capable de détecter, on va dire,
des patterns où, vraiment, il y a une répétition des accidents qui se
reproduisent où on ne l'aurait pas nécessairement associé à de la négligence et
on ne l'aurait pas dénoncé comme tel pour ouvrir automatiquement une
investigation.
Mais on pense que le mettre dans la loi...
plus que simplement le formulaire, qui est déjà en soi une bonne initiative, et
on aimerait la voir aller jusqu'au bout de la promesse de 2012… que promettait
le règlement. Mais l'idée, c'est aussi de dire que, s'il y a un avis
automatique, et après ça reste au coroner de décider s'il y a lieu d'avoir une
investigation, mais ça permettrait peut-être de détecter certains problèmes de
santé publique. Il y a peut-être certains décès évitables qui pourraient être
détectés de cette façon-là. C'est aussi l'objet de notre recommandation,
au-delà de l'idée de négligence, qui n'est pas toujours évidente.
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Merci. Est-ce que vous recevez, vous, des plaintes qui sont en rapport avec le Bureau
du coroner à l'occasion ou pas du tout? Je ne sais pas si vous avez le droit de
dire ça, là, je pose ma question vraiment en toute candeur.
M. Tessier (Philippe-André) :
Oui, tout à fait. Bien, peut-être, encore une fois, pour préciser, pour ce qui
est de notre mandat en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, puis
on y fait référence en lien avec cette recommandation-là, il est évident que la
LPJ donne à la commission l'obligation d'enquêter pour des situations comme,
par exemple, la situation de la fillette de Granby, ce que nous avons fait. Nous
avons rendu notre rapport public parce qu'il y avait ici situation où il y
avait lésion de droits de l'enfant décédé.
Il faut comprendre qu'une lésion de
droits, c'est ce que nous, on va enquêter, voir s'il y a eu une compromission,
si le système de protection de la jeunesse est venu léser les droits de
l'enfant. Et ça ne résulte pas toujours en situation de mort, évidemment, hein,
il y a toutes sortes de situations de compromission qui vont de la plus simple,
qui est l'interdiction du droit de communiquer avec ses parents, ou ses
grands-parents, ou le membre de sa famille. Mais effectivement le décès d'un
enfant, disons, c'est le summum, et à cet endroit-là, bien, effectivement, il y
a là une compétence concurrente, si on veut. Donc, les coroners... et c'est
dans le cas, là, de la petite Rosalie, de l'année dernière, dans le cas de la
fillette de Granby, la coroner a déclenché des enquêtes publiques dans ces deux
dossiers-là. Mais évidemment c'est une enquête qui est <déclenchée pour…
M. Tessier
(Philippe-André) : ...membre de sa famille. Mais
effectivement
le décès d'un enfant, disons, c'est le summum, et à cet endroit-là, bien,
effectivement,
il y a là une compétence concurrente si on veut. Donc, les coroners... et c'est
dans le cas, là, de la petite Rosalie, de l'année dernière, dans le cas de la
fillette de Granby, la coroner a déclenché des enquêtes publiques dans ces deux
dossiers-là. Mais
évidemment c'est une enquête qui est >déclenchée
pour... au sens de la Loi sur les coroners, de vérifier les circonstances
entourant le décès de l'enfant, alors que nous, de notre côté, on va regarder
la question de la lésion de droits.
Puis il faut rappeler qu'en matière de LPJ
puis de la lésion de droits, c'est la commission, disons, qui a la... qui a
cette compétence-là et cette expertise-là, depuis les 40 dernières années,
d'application de la LPJ sur c'est quoi qui s'est produit dans le réseau, qu'est-ce
qui a fait en sorte qu'il y a eu ce décès-là. Alors, c'est sûr et certain qu'il
ne va pas y avoir de communications sur le fond, parce que ça serait... là,
encore une fois, il y a des garanties qu'il faut respecter de chacun des côtés.
Puis, je comprends bien le sens de votre question, donc, il n'est pas question,
ici, là, de partager des informations confidentielles. Mais évidemment,
lorsqu'on fait ce genre d'enquête là, c'est toujours un peu la même idée, quand
deux entités publiques enquêtent sur un même phénomène, au moins qu'il y ait un
avis, au moins qu'on soit avisés l'un et l'autre que les deux font enquête sur
les mêmes circonstances, peut-être de façon optimale pour les deniers publics,
pour ne pas qu'il y ait de doubles emplois.
Mme Guilbault :
O.K. merci. Mais en fait ma question était : Est-ce que vous recevez des
plaintes ou des signalements en rapport avec le Bureau du coroner, dans le
sens... Puis je vais poser la même question... En fait, je ne la poserai pas au
protecteur parce que je sais qu'ils en ont reçu... ils ont fait une enquête,
même, à l'époque. Mais, est-ce que, vous, dans votre mission, il y a des
plaignants qui s'adressent à vous pour des problématiques qui ont rapport avec
un coroner ou le Bureau du coroner, des délais de rapport, le comportement?
C'est pour ça que je vous dis la question est posée en toute candeur. Peut-être,
ce n'est pas dans votre mandat, il y a d'autres instances peut-être pour ça.
C'était le sens de ma question. Parce que, si oui, je serais intéressée à
savoir de quelle nature sont ces plaintes puis sur quels éléments ça porte.
Mme
St-Laurent
(Geneviève)
: Je dirais que la nature des
plaines qu'on reçoit à la commission est assez peu propice à ce qu'on reçoive
des plaintes sur le... On agit vraiment en matière de discrimination ou en
matière d'exploitation de personnes âgées ou handicapées. Donc, ce n'est pas
nécessairement des domaines, je pense, qui sont...
• (14 h 20) •
M. Tessier (Philippe-André) :
On n'a pas une réponse pour vous, mais disons qu'on peut... Moi, j'infère de
nos mandats discrimination, harcèlement, ou exploitation, ou situation de
lésion de droits. On n'est pas dans fourniture de services publics comme la
protectrice, elle... Puis je comprends que, votre question, vous allez lui
poser, puis à juste titre, parce qu'elle va faire enquête, justement, sur les
services offerts par le coroner. Nous, on n'est pas dans la qualité de
services, là.
Mme Guilbault :
O.K. Puis, sur les enfants, qui était l'autre volet important de votre
présentation, juste pour être certaine, avez-vous fait une recommandation
précise que tous les décès d'enfants soient signalés au coroner? Je n'ai pas votre
mémoire... Est-ce qu'on l'a? Excusez... En tout cas, je ne l'ai pas. C'est ça,
je ne l'ai pas. Mais la lettre à laquelle vous avez référé, je ne l'ai pas lue
dernièrement.
M. Tessier (Philippe-André) :
O.K., c'est correct. Nous, on détient le mandat de faire enquête suite au décès
d'un enfant dans les situations où on a raison de croire que les droits de
l'enfant ont été lésés. Et, nous, ce qu'on recommande ici, c'est qu'on soit
informés... que le projet de loi, finalement... il y ait une bonification au
projet de loi pour qu'on soit informés, lorsque le coroner conduit une
investigation à la suite d'un décès <d'un enfant, des...
M. Tessier
(Philippe-André) : ...nous, on détient le mandat de faire enquête
suite au décès d'un enfant dans les situations où on a raison de croire que les
droits de l'enfant ont été lésés. Et, nous, ce qu'on recommande ici, c'est
qu'on soit informés... que le
projet de loi,
finalement... il y
ait une bonification au
projet de loi pour qu'on soit informés, lorsque
le coroner conduit une investigation à la suite d'un décès >d'un enfant,
des raisons ayant justifié l'ouverture de celle-ci, toujours dans l'idée de
bonifier de notre expertise en lien avec la situation des enfants, des décès
d'enfants, qu'est-ce qui s'est produit, pourquoi il s'est produit quelque
chose.
Il faut comprendre que notre mandat, oui,
il est en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, mais l'enfant ne se
limite pas à l'enfant placé dans une situation de protection de la jeunesse.
L'enfant aussi peut subir ou peut avoir des préjudices et vivre des situations
un peu problématiques à d'autres endroits. Et surtout, lorsque le coroner
décide de faire une investigation, c'est parce que lui aussi a exercé son
jugement puis il a dit : Il y a quelque chose, ici, qui nécessite une
enquête. Donc, ici, on va... d'être informés, là, de ces éléments-là. Je ne
sais pas si ma collègue veut compléter, mais je pense que...
Mme
St-Laurent
(Geneviève)
:Non,
c'est probablement plus dans une perspective de notre mandat assez large de
protection des droits de l'enfant, puis donc...
M. Tessier (Philippe-André) :
C'est quelque chose qu'on a dit à la commission Laurent, d'ailleurs, aussi, je
le précise, là. On a fait cette recommandation à la commission Laurent.
Mme Guilbault :
Puis est-ce que... Puis peut-être que j'ai mal compris ce que vous me dites, mais
il y a la possibilité... en tout cas, ça existait dans notre temps, je ne sais
pas si c'est encore ça, mais de s'inscrire, comme personne ou comme organisme,
comme intervenant systématique, je pense qu'on appelait, ou comme intervenant
automatique puis de recevoir systématiquement des rapports, tu sais, selon une
certaine problématique, selon un groupe d'âge, selon... Autrement dit, est-ce
que vous avez déjà eu ces discussions-là avec le Bureau du coroner, sur la
possibilité de recevoir systématiquement tous les rapports de coroners qui
portent sur des décès d'enfants puis qui pourraient peut-être répondre en
partie, là, aux besoins plutôt qu'une modification législative?
M. Tessier (Philippe-André) :
Il est évident, comme je vous dis, là, qu'il peut... il y a des communications
entre nous puis le Bureau du coroner, là, relativement à des enquêtes. Pour
cette question-là en particulier, je ne peux pas vous donner la réponse, je
pourrais vérifier, mais c'est une excellente suggestion.
Mme Guilbault :
C'était une suggestion, aussi, puis on a quelqu'un du bureau ici, d'ailleurs,
peut-être, qui peut en prendre note.
Mme
St-Laurent
(Geneviève)
: C'est pertinent, comme
échange, là, mais... qu'on reçoive les rapports par rapport à certaines
problématiques, mais notre recommandation, c'est aussi plus de dire... pas tant
le rapport final que d'être avisés dès le début de l'investigation, c'est
surtout ça, parce que nous, on risque de faire, possiblement, une enquête au
même moment sur les mêmes faits, mais selon notre mandat particulier. Donc,
c'est vraiment d'être avisés en amont plutôt que juste à la fin lorsqu'il y a
un rapport. C'est plus dans cette optique-là.
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, merci beaucoup. Il y a déjà une assise, là, sur... il y a un élément dans
la loi... sur la Loi sur la protection de la jeunesse, là, entre autres, un
enfant qui est dans une unité d'encadrement sécuritaire... bien, en fait, on
change justement l'expression, entre autres, dans le projet de loi,
«encadrement intensif», je pense. Ça fait que, donc, vous, vous voudriez qu'on
aille plus loin en précisant que vous devez être avisés dès le moment du
signalement du décès plutôt que... O.K.
M. Tessier (Philippe-André) :
C'est le sens de la recommandation, oui, tout à fait.
Mme Guilbault :
Parce qu'en fait ce que j'essaie de comprendre, c'est est-ce que, vraiment, ça
devrait être dans un projet de loi, ou est-ce que ce n'est pas des choses qui
pourraient déjà s'arrimer avec le Bureau du coroner, entre deux organisations,
ou est-ce que vous me dites : Il y a une fermeture ou il y a <un
problème.
M. Tessier (Philippe-André) :
Non, non, non...
Mme Guilbault :
...dès le moment du signalement du décès plutôt que...
O.K.
M. Tessier
(Philippe-André) : C'est le sens de la
recommandation, oui,
tout
à fait.
Mme Guilbault :
Parce qu'en fait ce que j'essaie de comprendre, c'est
est-ce que, vraiment, ça devrait être dans un projet de loi, ou est-ce que ce
n'est pas des choses qui pourraient déjà s'arrimer avec le Bureau du coroner,
entre deux organisations, ou est-ce que vous me dites : Il y a une
fermeture ou il y a >un problème.
M. Tessier (Philippe-André) :
Non, non, non, je ne vous dis pas ça, non, évidemment, là. Peut-être que c'est
un peu l'esprit qui anime aussi... On était... Lorsque la commission intervient
dans... lorsqu'il y a ce genre de situation là où il y a différents recours. On
a fait un peu la même chose avec la CNESST, on... Il arrive souvent, dans
l'organisation administrative du Québec, que plusieurs institutions ou
plusieurs entités sont responsables d'une même situation, et nous, on pense
qu'il est sage de prévoir, dans une loi, des messages législatifs à l'effet que
ces genres d'informations là doivent se partager, toujours dans l'objectif de
mieux protéger l'enfant, dans l'intérêt de l'enfant, ou la personne âgée, ou
peu importe la personne en situation de vulnérabilité. Ça envoie un indice aux
organisations administratives, également, de cette nécessité-là de ce travail
de concertation là ensemble au bénéfice du citoyen, qui, lui, n'a pas à faire
du «forum shopping» — excusez — ou qui n'a pas à se poser
la question c'est qui qui est responsable de quoi. Ça en revient aussi aux
organisations publiques, de faire ça. C'est un peu l'esprit ou la philosophie.
On l'a dit dans 176 sous l'ancien gouvernement, on l'a répété dans... ce matin,
on était à la commission parlementaire sur le p. l. n° 53,
sur les agences de crédit, tant avec l'AMF et la CAI, donc... excusez, la
Commission d'accès à l'information. Donc, il y a ces passerelles-là, ces
nécessités de communication là lorsqu'il y a différents recours qui sont
importants. C'est peut-être le sens. Mais ça n'exclut pas votre suggestion, qui
est tout à fait...
Mme Guilbault :
C'est très vrai. Non, mais c'est très vrai, ce que vous dites. Il y a une dame
qui était ici juste avant le dîner, là, puis qui parlait de ses propres
démarches à gauche, à droite pour demander les suivis d'enquête d'un et
l'autre, puis des fois ça ne finit plus, là... mais, en tout cas... mais c'est
justement aussi dans l'esprit de simplifier la vie des citoyens, entre autres,
qu'on fait ce projet de loi là et de réduire les délais. Mais là je comprends
que vous, vous n'avez pas nécessairement de point de vue sur la question des
délais ou sur la question du service aux personnes endeuillées, et tout ça,
parce que c'est en dehors de votre mandat.
M. Tessier (Philippe-André) :
Tout à fait, ce n'est pas dans notre angle d'analyse pour ce projet de loi là.
Cela dit, on reconnaît bien que la volonté, l'intention ministérielle, là, dans
les communiqués, et tout, et ce qui a été présenté, ce qui a été publié,
c'était dans le sens d'augmenter puis d'améliorer le service aux citoyens, donc
on a humblement fait deux petites autres suggestions pour dire : Allez
dans ce sens-là.
Mme Guilbault :
Puis est-ce que vous avez quand même une idée, ne serait-ce que comme personne
avisée, observateur des choses publiques, sur ce qui est prévu par rapport...
sur la préservation de l'indépendance de l'institution du coroner dans le
projet de loi? Puis sentez-vous à l'aise si vous n'en avez pas.
M. Tessier (Philippe-André) :
Ce n'est pas un angle d'analyse qu'on a développé. Évidemment, ce qu'on peut
vous rappeler, c'est des choses que, sûrement, d'autres intervenants vont vous
dire sur ces questions-là, mais évidemment vous le savez, qu'il y a des
garanties procédurales, prévues à la Charte des droits et libertés du Québec,
qui prévoient l'audition <devant un...
Mme Guilbault :
...sentez-vous à l'aise si vous n'en avez pas.
M. Tessier
(Philippe-André) : Ce n'est pas un angle d'analyse qu'on a
développé.
Évidemment, ce qu'on peut vous rappeler, c'est des choses que, sûrement,
d'autres intervenants vont vous dire sur ces questions-là, mais évidemment vous
le savez, qu'il y a des garanties procédurales, prévues à la Charte des droits
et libertés du Québec, qui prévoient l'audition >devant un tribunal
indépendant, impartial. Mais évidemment, si vous êtes animée de ces
considérations-là, de ce qui a déjà été prévu par la jurisprudence dans ce
cas-là, nous, on n'a pas d'observations particulières à faire là-dessus. Je ne
sais pas si ma collègue voulait ajouter quelque chose.
Mme
St-Laurent
(Geneviève)
: Non, c'est vraiment... Oui, c'est
ça, au-delà de rappeler qu'il y a l'article 23... les articles 23 et
suivants, là, les droits judiciaires s'appliquent à l'institution du coroner, puisqu'il
est assimilé à un tribunal en vertu de l'article 56 de la charte
québécoise. On n'avait pas de recommandation particulière là-dessus, à la
lecture du projet de loi.
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Merci, et ça compléterait pour moi. Je ne sais pas si mes collègues ont des
questions.
Le Président (M. Bachand) :
Ça va? Merci. M. le député de Vimont, s'il vous plaît.
M. Rousselle : Merci. Premièrement,
merci d'être ici aujourd'hui, on est très contents. J'ai votre lettre ici.
Est-ce qu'on vous allez avoir d'autres notes qui vont suivre, ou on va s'en
tenir à la lettre, ou...
M. Tessier (Philippe-André) :
Non, non, il s'agit de l'étendue de nos recommandations, oui, tout à fait.
Comme je le disais d'entrée de jeu, c'est assez limité, nos observations.
M. Rousselle
:
Parfait, c'est bon. Écoutez, je vous écoutais, donc, effectivement, vous vous
occupez des personnes vulnérables, c'est dans votre mandat. J'ai lu, justement,
dans la lettre, que vous parlez, justement, de la protection des personnes
âgées en ressource... comme vous le disiez tantôt, ressource intermédiaire,
RPA, CHSLD. Dans ce dossier-là, vous demandez, justement, qu'automatiquement, s'il
y a un décès, le coroner soit avisé.
Pendant la COVID-19, vu que ça m'a passé
par la tête, est-ce que vous avez eu des plaintes ou est-ce que vous avez...
Sûrement, en tout cas, j'imagine, parce que, là, les citoyens étant... mettons,
des décès, il y en a eu plusieurs, là, au Québec. Donc, est-ce que vous avez eu
des appels plus nombreux? Est-ce que vous avez eu des cas, là-dessus, que vous
pourriez nous relater, des cas, justement, que peut-être que le coroner aurait
pu s'occuper ou, vous, est-ce que vous avez investigué là-dedans? Je voudrais
vous entendre là-dessus.
• (14 h 30) •
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, c'est une bonne question, puis je pense que ça permet peut-être
d'éclairer les députés de l'état de la situation. Il faut comprendre que, oui,
effectivement, nous avons reçu des plaintes en lien avec la situation des
différents types d'hébergement pour personnes âgées en lien avec la COVID-19.
Cela dit, pour ce qui est d'une enquête publique, nous n'avons pas déclenché
d'enquête publique, nous, de notre côté. Comme vous le savez, la Protectrice du
citoyen a déclenché une enquête publique sur la question, la Coroner en chef a
déclenché une enquête publique. Quand je vous parlais de... dans un souci de
faire en sorte que... Il y a déjà beaucoup de gens qui font des enquêtes.
Alors, on a beaucoup de respect pour le travail de la protectrice, pour le
travail de la Coroner en chef. Donc, on pense qu'il y a déjà, quand même, des
enquêtes là-dessus. Cela ne veut pas dire que nous ne traitons pas les
plaintes, parce que nous recevons des plaintes et nous sommes interpelés par
certains acteurs en lien avec ça. Donc, nous, on va faire notre travail <en
lien avec ces...
>
14 h 30 (version révisée)
< M. Tessier (Philippe-André) :
…faire en sorte que... I
l y a
déjà
beaucoup de gens qui
font des
enquêtes. On a
beaucoup de respect pour le travail de la
protectrice, pour le travail de la Coroner en chef. Donc, on pense qu'
il
y a
déjà,
quand même, des
enquêtes là-dessus. Cela ne veut
pas dire que nous ne traitons pas les plaintes, parce que nous recevons des
plaintes et nous sommes interpelés par certains acteurs en lien avec ça. Donc,
nous, on va faire notre travail >en lien avec ces éléments-là qui sont…
qui visent à principalement venir, si on veut, en lien avec l'article 48 de la
charte qui vise à contrer l'exploitation des personnes âgées, mais aussi aux
droits prévus, aussi, à la vie, à l'intégrité, à la liberté, qui sont les
articles… prévus aux articles 1 à 9, là, donc les libertés fondamentales
prévues à… les droits et libertés fondamentaux prévus à la charte. Donc, nous,
c'est un peu notre angle, notre prise… notre angle là-dessus.
Je peux aussi ajouter qu'il y a des
actions collectives, présentement, devant les tribunaux visant certains types…
et donc nous sommes très au fait de ces éléments-là également.
M. Rousselle
:
Dites-moi donc, parce que vous parlez, justement… le coroner, vous parlez de la
Protectrice du citoyen, est-ce que vous avez des ententes, est-ce que vous vous
sentez comme un égal de… Dans le sens que, quand vous voulez avoir de l'information,
ou quoi que ce soit, est-ce que vous êtes là… Vous dites… Est-ce que vous êtes
considéré comme une troisième roue ou vous êtes considéré comme… j'appelle,
j'ai l'information, on travaille vraiment en partenariat, c'est vraiment…
l'échange est fluide? Est-ce que vous êtes capables de me dire ça, autant du
coroner que la Protectrice du citoyen?
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, écoutez, disons que c'est… Je ne sais pas si… La meilleure façon de vous
répondre, c'est de dire… c'est qu'évidemment la coroner a un mandat, puis, en
vertu de ce mandat-là, elle a déclenché une enquête publique, ce qui est sa
prérogative la plus entière, pour faire la lumière un peu sur les circonstances
liées aux décès en lien avec la COVID; la protectrice, la même chose, en lien
avec les services offerts dans ces établissements publics là. Nous, notre
mandat, il est plus basé sur la question de la discrimination, du harcèlement
puis de l'exploitation des personnes âgées. Donc, c'est sûr et certain que
notre mandat à nous, notre regard à nous est différent, on le disait tantôt,
là. Donc, c'est sur et certain que, nous, notre action ne va pas être la même
que celle des autres institutions, nécessairement, mais oui, effectivement, que
l'on sache l'un et l'autre ce que l'un et l'autre fait, bien, c'est toujours important,
puis c'est une des choses que l'on essaie de faire dans la mesure du possible,
d'être avisé de c'est quoi qui se passe dans un dossier aussi complexe que
celui-là.
Mais je vous parlais de l'action
collective, l'action collective, elle... nous sommes également très impliqués
dans ce dossier-là dans la mesure où il y a là des allégations de violation de
droits prévus à la charte. Alors, c'est là où, nous, notre rôle ou notre action
va se déployer ou va se porter. Quand je vous disais… donnais l'exemple, par
exemple… là, je quitte le champ des CHSLD, mais en matière de protection de la
jeunesse, de ce côté-là, nous… c'est nous qui a la compétence, si on veut,
première pour aller vérifier puis valider qu'est-ce qui s'est passé dans le
dossier de l'enfant en question, mais ça ne veut pas dire que la commission
Laurent n'a pas lieu d'être ou que le travail effectué par un coroner dans un
cas d'un décès d'enfant n'est pas utile. L'idée, c'est toujours la même chose,
c'est que chacun a ses responsabilités puis ses mandats en fonction des lois
propres, là.
M. Rousselle
:
J'en conviens, que chaque personne… chaque groupement a leurs responsabilités,
ça, j'en conviens avec vous, mais <je veux…
M. Tessier (Philippe-André) :
…
n'a pas lieu d'être ou que le travail effectué par un coroner dans un
cas d'un décès d'enfant n'est pas utile. L'idée, c'est toujours la même chose,
c'est que chacun a ses responsabilités puis ses mandats en fonction des lois
propres, là.
M. Rousselle
:
J'en conviens, que chaque personne… chaque groupement a leurs responsabilités,
ça, j'en conviens avec vous, mais >je veux savoir... c'est que vous,
vous faites une enquête, un exemple, ou vous investiguez soit sur… dans un
CHSLD, soit auprès d'un jeune qui a des problèmes, et puis il y a mort qui
suit, est-ce que vos rapports… est-ce qu'on va vous voir, justement, avoir — excusez
l'anglicisme — votre feed-back, votre expertise là-dedans? Parce que,
tout de même, c'est peut-être… puis là je sors… on sort quelque chose,
peut-être un jeune qui... ça fait… ça perdure ce problème-là, ça fait peut-être
longtemps, ça fait longtemps que vous le regardez et vous avez peut-être de
l'information privilégiée à donner, justement, soit au coroner ou soit à la
protectrice, donc est-ce qu'on vous demande des rapports? Est-ce qu'on vous
prend comme un genre de coéquipier là-dedans pour comprendre qu'est-ce qui
s'est passé dans le… tu sais, dans le passé pour faire l'histoire au complet?
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, c'est sûr et certain. Puis, peut-être une précision utile aussi, il faut
comprendre que notre action n'est pas limitée uniquement au décès, hein? Je
comprends que, là, ici, on est dans une modification de la Loi sur les
coroners, donc on est dans ces circonstances-là. Notre mandat à nous, il est
beaucoup plus large, tant pour les personnes âgées que pour les jeunes, donc
des situations d'exploitation financière, exploitation au sens pas
nécessairement financier aussi, psychologique, et tout, donc ces éléments-là…
Puis il y a eu la loi sur la maltraitance qui a été introduite en 2017, qui a
créé aussi des… Là, je ne veux pas rentrer dans toutes les techniques, mais il
y a des plans d'intervention concertés, donc il y a, avec tout… en matière
d'aînés, il y a toute une série d'actions gouvernementales à laquelle nous, on
est associés également, parce que notre action, elle n'est pas liée qu'au
décès, elle est liée à des situations de vie quotidienne, là, pour les
personnes âgées, même chose pour ce qui est des jeunes, là. Alors donc, là, il
y a un autre canevas.
Mais c'est sûr et certain que nous, on est
dans nos rapports, on va déposer notre prochain rapport annuel de gestion à
l'Assemblée nationale, comme la charte le prévoit, à la fin du mois de
septembre. Dans le rapport annuel de la commission, il est toujours prévu la
liste des recommandations que nous avons faites au gouvernement puis aux
différents acteurs. Évidemment, lorsqu'on rend public un rapport, comme on a
fait à la jeune fille de Granby, bien, ce rapport-là, il est public, il est
diffusé — les éléments qui peuvent être diffusés, bien évidemment — donc
les autres acteurs, de toute façon, en prennent connaissance puis peuvent s'en
inspirer, c'est sûr et certain, là.
Le Président (M. Bachand) :Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît... pardon.
Mme Nichols : Merci.
Merci, M. le Président. Je veux juste être certaine, là... moi, il y a un bout
que je ne comprends pas, puis j'imagine qu'il y a sûrement foule à la maison
qui nous écoute, donc peut-être que je ne suis pas toute seule à comprendre....
ça me ferait plaisir de n'être pas toute seule à… Bien, je comprends, là, je
comprends la mission de votre commission, je comprends que vous avez un mandat
quand il y a de la discrimination puis il y a du harcèlement. Puis, un peu plus
tôt, vous avez parlé... mais c'est parce que vous avez dit : Nous, la
commission, on n'a pas déclenché d'enquête publique. Ça veut dire que vous avez
le pouvoir de déclencher cette enquête publique là. Puis je <comprends…
Mme Nichols : …
je
comprends, là, je comprends la mission de votre commission, je comprends que
vous avez un mandat quand il y a de la discrimination puis il y a du harcèlement.
Puis, un peu plus tôt, vous avez parlé… mais c'est parce que vous avez dit :
Nous, la commission, on n'a pas déclenché d'enquête publique. Ça veut dire que
vous avez le pouvoir de déclencher cette enquête publique là. Puis je >comprends
que vous ne l'avez pas déclenchée parce qu'il y en avait d'autres qui l'avaient
déclenchée. Dans quel cas vous pourriez la déclencher? Qu'est-ce que ça prend
pour que vous la déclenchiez? Puis après ça, là, vous nous dites : Bien,
on fait un rapport. Moi, je veux juste chercher à comprendre, tu sais, qui vous
interpelle. Vous sortez un rapport, vous le remettez... là, je comprends qu'il
est dans le rapport que vous remettez à l'Assemblée nationale. Qui fait le
suivi des recommandations? J'ai une petite idée aussi, mais j'aimerais ça que
vous puissiez le… juste peut-être nous le mettre dans l'ordre pour qu'on puisse
comprendre qu'est-ce qu'elle fait, la commission, bien qu'on comprend que vous
intervenez auprès des enfants puis auprès des personnes âgées plus vulnérables.
M. Tessier (Philippe-André) :
Tout à fait. Bien, ça me fait plaisir d'expliquer c'est quoi, le rôle de la
commission. Bien, premièrement, en vertu de la Loi sur la protection de la
jeunesse, on va y aller en deux boîtes, là, c'est ce qu'on a fait… donc, en
vertu de la LPJ, lorsqu'il y a une situation problématique, donc, il y a un
directeur de la protection de la jeunesse qui est mandaté pour poser des gestes
en lien avec cet enfant-là, conformément à la Loi sur la protection de la
jeunesse. Nous sommes, si on veut, la deuxième ligne, en ce sens que, lorsqu'il
y a une problématique dans un dossier où la DPJ intervient, qu'il y ait mort ou
non, là, comme je vous disais, là, ça peut être un droit de communiquer, il y a
toutes sortes de situations qui se produisent qui font en sorte que la DPJ doit
suivre des normes et des règles, et nous, on est là pour venir s'assurer que
les DPJ suivent ces normes et ces règles-là.
Mme Nichols : …d'office.
M. Tessier (Philippe-André) :
Nous, on est là s'il y a, donc, un signalement, s'il y a, donc, une
dénonciation chez nous, dans un cas. Ça peut juste... souvent, c'est un membre
de la famille, ça peut être un intervenant, donc, il y a quelque chose qui se
produit qui nécessite que nous jetions un regard sur ce qui se produit pour
venir voir s'il y a lésion de droits. Si les droits de l'enfant prévus à la Loi
sur la protection de la jeunesse, et autres, ont été respectés, à ce moment-là,
nous, on rend des rapports, on fait des recommandations, que ça soit dans des
dossiers individuels ou des dossiers de nature systémique.
L'enquête la plus connue, récente, qu'on a
rendue publique, c'est celle sur Mauricie—Centre-du-Québec, les familles
d'accueil. Avant, on était au Saguenay, sur la mort d'enfants. On a des
recommandations qui sont non seulement déposées dans nos rapports d'enquête,
mais qu'on met dans nos rapports annuels d'activité, et on parle des suivis qui
doivent être faits par les différentes instances, évidemment, gouvernementales,
vous l'aurez compris, mais aussi d'autres, des tiers, ça peut être, des fois,
des CPE, ça peut être des foyers de groupe, dépendamment c'est qui qui s'est
retrouvé impliqué dans la situation, là.
Maintenant, pour ce qui est de l'article 48,
donc l'exploitation des personnes âgées, là, encore une fois, c'est... l'analogie,
si on veut, c'est qu'on va avoir un dénonciateur, un membre de la famille,
fréquemment, ou quelqu'un dans une banque, ou quelqu'un qui voit qu'il se
produit quelque chose qui met en cause les droits de la personne âgée et qui…
cette personne-là, woups! il se passe de quoi soit au niveau financier, mais au
niveau... par exemple, elle va être isolée, elle va être maltraitée, elle
n'aura pas des <conditions de vie, de santé…
M. Tessier (Philippe-André) :
…membre de la famille, fréquemment, ou quelqu'un dans une banque ou quelqu'un
qui voit qu'il se produit quelque chose qui met en cause les droits de la
personne âgée et qui… cette personne-là, woups! il se passe de quoi soit au
niveau financier, mais au niveau... par exemple, elle va être isolée, elle va
être maltraitée, elle n'aura pas des >conditions de vie, de santé
correctes, elle peut être exploitée, même… de nature sexuelle, on a eu un
jugement récent du TDP là-dessus, donc… Et là, encore une fois, on va avoir un
dénonciateur qui va être chez nous, qui est anonyme, donc, et nous, on va faire
une enquête de notre propre initiative au niveau individuel. Puis ce qu'on va
faire aussi, dans certains cas, c'est qu'on va avoir aussi des regards plus
globaux sur des situations visant les personnes âgées. Donc, c'est un peu les
deux, là… les deux façons qu'on fonctionne.
Mme Nichols : Dans le cas
où il y a un dénonciateur, puis vous allez émettre un rapport, le dénonciateur
peut voir les conclusions du rapport, va avoir le droit au rapport, le contenu
du rapport disponible? Le dénonciateur, celui qui…
• (14 h 40) •
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, en gros, nous, ce qu'on fait, c'est qu'on fait une enquête puis on décide
s'il y a preuve suffisante ou non, dans les circonstances, pour porter le
dossier au Tribunal des droits de la personne. Donc, oui, effectivement, ce
dossier-là d'enquête est porté, puis ça vient, après ça… une fois que c'est
déposé au Tribunal des droits de la personne, bien, ça devient public, c'est un
procès.
Mme Nichols : Très bien.
C'est la partie qui manquait.
M. Tessier (Philippe-André) :
…je m'excuse.
Mme Nichols : Non, c'est
correct, il n'y a pas de problème. Vous avez parlé, puis on parlait tantôt de
Herron, là, la résidence pour personnes âgées Herron, à Dorval, on se disait
que, bien, il y a souvent… il y a eu des indicateurs. C'est quoi, votre… Je
peux y aller en deux volets, là. Un, par rapport aux indicateurs, parce que
moi, je pense qu'il y a un problème, là, il y a eu des rapports d'émis, il y a
eu plein de personnes qui sont intervenues, mais, malgré tout, le permis a été
reconduit. Donc, souvent, la main droite ne parle pas à la main gauche, ou les
rapports… vous en avez parlé tantôt, là, justement, là, vous avez dit : Il
y a des avis, on ne partage pas l'information, il y a une nécessité de
concertation, ça fait qu'il y a vraiment une problématique, là, par rapport à
ça. Vous, comment vous le voyez? Puis qu'est-ce que vous suggérez, le niveau d'intervention,
à ce niveau-là? Puis, la même chose, c'est quoi, votre rapport avec le coroner
dans vos nombreuses interventions? Donc, il y a comme deux volets, mais c'est
parce que je sais que je suis serrée un peu dans le temps.
M. Tessier (Philippe-André) :
Comme je vous dis, notre rôle en matière d'exploitation de personnes âgées, il
est beaucoup plus sur une approche individuelle, en ce sens qu'il doit y avoir
un dénonciateur, une plainte, et nous, on va regarder s'il y a eu exploitation
financière, matérielle ou autre de la personne âgée. Et il est évident que,
dans ce contexte-là, nous, on se retrouve associés à la loi sur la maltraitance,
qui vise à contrer ce phénomène-là. Donc, c'est sûr et certain que... puis je
le précise, c'est pour ça que je disais, tantôt : Il y a d'autres entités,
dont la protectrice, je vous le mentionnais, qui, eux aussi, ont fait des
rapports et font enquête là-dessus. Ça ne veut pas dire que nous, on ne peut
pas, non plus, faire enquête et qu'on ne fera jamais enquête, ce que je vous
dis juste, c'est qu'on est quand même conscients, aussi, qu'il y a d'autres
acteurs étatiques, puis je pense qu'il y a même la Commissaire à la santé qui a
eu un mandat en lien avec ça, récemment. Donc, il y a <d'autres…
M. Tessier (Philippe-André) :
…que je disais tantôt : Il y a d'autres entités, dont la protectrice, je
vous le mentionnais, qui, eux aussi, ont fait des rapports et font enquête
là-dessus. Ça ne veut pas dire que nous, on ne peut pas, non plus, faire
enquête et qu'on ne fera jamais enquête, ce que je vous dis juste, c'est qu'on
est quand même conscients, aussi, qu'il y a d'autres acteurs étatiques, puis je
pense qu'il y a même la Commissaire à la santé qui a eu un mandat en lien avec
ça, récemment. Donc,
il y a >d'autres acteurs étatiques qui
consacrent des ressources de l'État à faire enquête sur une situation donnée, donc
on essaie d'être conscients aussi de ça quand nous, on a d'autres
responsabilités. Et je vous le dis bien candidement comme responsable de cette
organisation, on a d'autres mandats législatifs, donc il faut voir où est-ce
que notre action est la plus importante et plus nécessaire.
Mme Nichols : Oui, en effet,
là, il y a d'autres acteurs, mais je me rends… on se rend compte que,
finalement, dans tous les rapports, bien, on ne tient pas compte des
conclusions des autres acteurs ou sinon on ne fait pas de suivi, on ne tient
pas compte des indicateurs de suivi, on ne tient pas compte de tout ça, puis on
continue à mettre… à transmettre le permis, reconduire le permis ou… bien,
enfin…
M. Tessier (Philippe-André) :
Nous, ce qu'on peut faire, je vous le dis bien humblement, en termes de résultat,
ce qu'on peut faire, c'est amener un dossier en exploitation au tribunal puis
obtenir des condamnations, ce qu'on fait à tous les ans, puis on aura des
chiffres pour vous à la fin du mois, dans notre rapport annuel de gestion. Ça,
on le fait, on va continuer à le faire puis à dénoncer. Puis, d'un autre côté,
ce qu'on va faire, c'est qu'on va continuer à faire des rapports à l'Assemblée
nationale, aux députés puis aux différentes instances, avec des suivis pour
leur dire : Bien, il y a telle problématique, telle problématique. Ça, ça
fait partie de notre mandat.
Mme Nichols : Ah oui,
merci. En terminant, rapidement, c'est quoi, votre collaboration, là... c'est
quoi, votre rôle avec les coroners? Parce qu'on est ici pour parler sur le
projet de loi des coroners, donc c'est quoi, votre rapport? Vous travaillez
comment avec le coroner?
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, comme je le disais, là, dans les circonstances d'un décès d'un enfant, on
pense que ça serait important, encore une fois, là, d'avoir cette intention-là
législative. Mais c'est l'intention… puis je ne dis pas ça parce qu'il n'y a
pas de désir de collaboration, au contraire, là, il y a ce désir-là, puis cette
volonté-là, puis il y a ces informations-là, ces échanges sur le fait qu'il y a
des enquêtes, mais, écoutez, c'est très sommaire comme collaboration, là. Je ne
peux pas vous dire qu'il y a des… il y a un…
Mme Nichols : Il y a des
rencontres, il y a des échanges d'information, il y a des…
M. Tessier (Philippe-André) :
...qu'il y a… Dans les mandats respectifs, compte tenu des dispositions
législatives en cause, il y a… on ne peut pas nécessairement se partager de
l'information comme ça non plus, là, et c'est pour ça que ça prend, des fois,
des indices législatifs, d'où le sens de notre recommandation, pour aider à
cette collaboration-là. On ne peut pas dire qu'elle n'existe pas puis qu'elle
est non désirée, c'est de dire : Ça contribue à cette collaboration-là.
Puis pour ce qui est de l'autre
recommandation, bien là, ça, c'est plus le fait que… ce qu'on dit, c'est que le
coroner devrait être informé. Ce n'est pas nécessairement en lien avec notre
collaboration à nous, c'est plus... les établissements devraient avoir cette
obligation-là d'informer le coroner, qui décidera ou non, oui ou non, de faire
une investigation ou pas, ça, c'est ses prérogatives, mais c'est de dire :
Cette information-là peut venir bonifier puis peut venir prévenir, parce que le
but du coroner, c'est de prévenir des décès, donc de prévenir des situations
comme ça qui se produisent, donc on pense que c'est un outil dont il pourrait
disposer.
Le Président (M. Bachand) :
Sur ce, juste à vous remercier de votre collaboration aux travaux de la
commission.
Je suspends les travaux pour <quelques
instants. Merci.
(Suspension de la séance à
14 h 45)
M. Tessier (Philippe-André) :
…
des décès, donc de prévenir des situations comme ça qui se produisent,
donc on pense que c'est un outil dont il pourrait disposer.
Le Président (M.
Bachand) :
Sur ce, juste à vous remercier de votre
collaboration aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux pour >quelques
instants. Merci.
(Suspension de la séance à 14 h 45)
(Reprise à 14 h 49)
Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Alors, il me fait plaisir d'accueillir le Protecteur
du citoyen. Alors, vous connaissez bien les règles du jeu, alors, vous avez
10 minutes de présentation, et après ça on fera un échange avec les
membres de la commission. Alors, bienvenue, et la parole est à vous.
Protecteur du citoyen
Mme Rinfret (Marie) :
Merci, M. le Président de la Commission des institutions. Mme la ministre…
Le Président (M. Bachand) :
Excusez-moi, Mme la... si vous pouviez juste vous rapprocher du micro.
Mme Rinfret (Marie) :
Bien oui, c'est ça, hein?
Le Président (M. Bachand) :
S'il vous plaît.
Mme Rinfret (Marie) :
Là, je n'étais plus certaine, deux mètres du micro... Bon, attendez un peu...
Voilà.
Le Président (M. Bachand) :
Bon. Merci de votre collaboration.
Mme Rinfret (Marie) :
Bien, écoutez, c'est le minimum.
Alors, scène un, prise deux. Bonjour, tout
le monde. M. le Président de la Commission des institutions, Mme la ministre,
Mmes, MM. les députés membres de la commission, je vous présente la personne qui
m'accompagne, Mme Chloé Corneau, qui est coordonnatrice aux enquêtes en
matière d'administration publique.
Je remercie la Commission des institutions
d'avoir invité le Protecteur du citoyen à participer aux consultations sur le
projet de loi n° 45, Loi concernant principalement la nomination et le
mandat des coroners et du coroner en chef.
Je rappelle brièvement que le Protecteur
du citoyen reçoit les plaintes de toute personne insatisfaite des services des
ministères, des organismes ou encore des instances du réseau de la santé et des
services sociaux. Il veille aussi à l'intégrité des services publics en traitant
les divulgations qui s'y rapportent. Lorsqu'il le juge d'intérêt public et
opportun, le Protecteur du citoyen propose des modifications à des projets de
loi ou de règlements. C'est à ce titre que je présente aujourd'hui à cette
commission nos constats et recommandations concernant le projet de loi
n° 45.
De par son mandat, le Protecteur du
citoyen accorde une attention spéciale aux personnes démunies, que ce soit en
raison de leur condition socioéconomique, de différents facteurs d'exclusion ou
encore d'épreuves qui bouleversent leur vie. Alors qu'il est question, ici, de
l'intervention des coroners auprès des personnes qui ont perdu un proche dans
des circonstances qui peuvent être dramatiques, il va de soi qu'il faut prendre
en compte la vulnérabilité de ces personnes. En des moments aussi éprouvants,
elles doivent pouvoir recevoir des services de <qualité…
Mme Rinfret (Marie) :
…
d'épreuves qui bouleversent leur vie. Alors qu'il est question, ici, de
l'intervention des coroners auprès des personnes qui ont perdu un proche dans
des circonstances qui peuvent être dramatiques, il va de soi qu'il faut prendre
en compte la vulnérabilité de ces personnes. En des moments aussi éprouvants,
elles doivent pouvoir recevoir des services de >qualité de la part du
coroner responsable, de faire la lumière sur les circonstances du décès de
leurs proches, et ce, dans des délais raisonnables.
Venons-en au projet de loi. Je considère
qu'il présente des modifications intéressantes au cadre juridique actuel. Les
avancées concernent notamment la durée et le renouvellement des mandats des
coroners, l'avis aux coroners lors du décès d'un enfant dans un service de
garde en milieu familial et l'obligation de suivi quant aux recommandations de
la Coroner en chef.
J'attire toutefois votre attention sur des
améliorations au projet de loi que je considère nécessaires pour que le Bureau
du coroner puisse agir le plus rapidement possible et accompagner adéquatement
les familles et les proches endeuillés. Les éléments à ajouter, à préciser ou à
revoir concernent donc les délais et le suivi des investigations, la
communication avec les familles ainsi que l'examen sommaire et le suivi de
l'implantation des recommandations.
D'abord, les délais. Ils sont trop longs,
ils pénalisent injustement les proches des personnes décédées et ils atteignent
en moyenne le double des cibles que se fixe lui-même le Bureau du coroner. Tout
cela ne date pas d'hier. En 2014, le Protecteur du citoyen a publié un rapport
faisant état de ces retards, il était alors question d'attente de plus d'un an.
À titre d'exemple, des parents n'avaient pu connaître les circonstances du
décès de leur fils qu'après 15 mois. Devoir patienter aussi longtemps les
avait empêchés d'entamer leur processus de deuil. Pour d'autres personnes, il
était impossible de compléter les démarches administratives importantes à la
suite du décès d'un proche sans les conclusions du coroner.
À l'époque, le Bureau du coroner liait ses
propres délais d'investigation à des partenaires externes comme les corps
policiers ou les pathologistes qui tardaient à lui faire parvenir leurs
analyses. Notre enquête a révélé que les délais imputables à ses partenaires
pouvaient en effet expliquer en partie les délais d'investigation. Cela dit,
une part de ceux-ci demeuraient attribuables au Bureau du coroner, que ce soit
à ses services administratifs ou au coroner.
Il y a six ans, le Bureau du coroner a
accepté l'ensemble des recommandations de notre rapport et a présenté un plan
d'action détaillé sur leur mise en oeuvre. Il s'est fixé entre autres objectifs
de réduire ces délais d'investigation à six mois. Malgré des efforts louables
et les mesures mises en place, les délais ont persisté. Ils sont encore d'environ
12 mois. C'est pourquoi je recommande que le projet de loi ajoute un
article précisant qu'à moins d'exception le coroner responsable doit produire
son rapport au plus tard le 180e jour suivant le <début…
Mme Rinfret (Marie) :
…
des efforts louables et les mesures mises en place, les délais ont
persisté. Ils sont encore d'environ 12 mois. C'est pourquoi je recommande
que le projet de loi ajoute un article précisant qu'à moins d'exception le
coroner responsable doit produire son rapport au plus tard le 180e jour
suivant le suivant le >début de son investigation.
En plus des délais, des personnes se sont
plaintes au Protecteur du citoyen qu'elles avaient de la difficulté à joindre
le ou la coroner au dossier afin d'obtenir un suivi de l'investigation. Nos
enquêtes ont conclu que ces problèmes de communication étaient bien réels. Le Protecteur
du citoyen estime que le projet de loi devrait prévoir que, si l'investigation
se poursuit plus de 30 jours, le ou la coroner responsable doit en informer un
membre de la famille de la personne décédée ou toute personne qui a demandé
d'être avisée. Il ou elle devrait ensuite l'aviser par écrit tous les 60 jours,
et ce, tant que l'investigation se poursuit.
Autre point, le projet de loi prévoit que,
dans certains cas, le ou la coroner pourrait, par un examen sommaire des faits,
clore le dossier sans devoir mener une investigation en bonne et due forme. Les
familles qui apprennent, dans ces circonstances, qu'il n'y aurait pas
d'investigation devraient être mises au fait des conclusions de l'examen
sommaire. Outre la prise en compte de la sensibilité des personnes endeuillées,
celles-ci peuvent avoir besoin d'un tel document pour entreprendre certaines
démarches après le décès.
De plus, les investigations du coroner
sont d'intérêt public. Les conclusions des examens sommaires doivent donc être
accessibles comme le sont les rapports d'investigation. Je suis donc d'avis que
le projet de loi devrait prévoir la transmission par le ou la coroner des
conclusions écrites de son examen sommaire à un membre de la famille de la
personne décédée ou à toute autre personne qui en fait la demande.
Par ailleurs, alors que les
recommandations du ou de la Coroner en chef sont rendues publiques, aucune
information n'est fournie concernant leur implantation. Selon le Protecteur du
citoyen, la mise en place efficiente des recommandations des coroners implique
que le ou la Coroner en chef ait des pouvoirs d'intervention lui permettant
d'en assurer le suivi. Or, la loi actuelle ne permet rien de tel. À cet égard,
nous saluons la nouvelle obligation faite aux personnes concernées d'informer
le Coroner en chef du suivi qu'elles entendent donner aux recommandations. Toutefois,
je propose d'aller encore plus loin pour assurer leur implantation effective.
Je recommande que le projet de loi soit modifié afin de permettre au Coroner en
chef, lorsqu'il ou elle estime qu'aucune mesure satisfaisante n'a été prise par
les autorités d'un organisme à qui une recommandation a été formulée, d'en
aviser par écrit le gouvernement et d'exposer la situation dans son rapport
annuel.
Pour finir, je porte à votre attention la nécessité
d'adopter des dispositions réglementaires pour donner à la loi actuelle son
plein effet. Selon cette loi, le ou la Coroner en chef peut, à certaines
conditions, accorder une aide financière à des membres de la famille d'une
personne décédée. Les montants peuvent couvrir des services d'assistance et de
représentation juridiques lors d'une enquête tenue par un coroner à la suite d'une
enquête du <Bureau…
Mme Rinfret (Marie) :
…
son plein effet. Selon cette loi, le ou la Coroner en chef peut, à
certaines conditions, accorder une aide financière à des membres de la famille
d'une personne décédée. Les montants peuvent couvrir des services d'assistance
et de représentation juridiques lors d'une enquête tenue par un coroner à la
suite d'une enquête du >Bureau des enquêtes indépendantes. Or, jusqu'à
présent, aucun règlement n'a été édicté pour mettre en oeuvre ce pouvoir. Le Protecteur
du citoyen estime qu'un règlement en ce sens devrait être adopté dans les
meilleurs délais pour donner effet à cette mesure et ainsi permettre, en toute
transparence, au Coroner en chef d'accorder une telle aide financière.
Enfin, le Bureau du coroner a de la
difficulté à recruter de nouveaux coroners, particulièrement dans certaines
régions du Québec. Le Protecteur du citoyen est d'avis que le Règlement sur les
critères et procédures de sélection des personnes aptes à être nommées coroners
devrait être modifié pour élargir l'accès au poste de coroner à d'autres
professions qu'aux médecins, avocats et notaires.
Je conclus en revenant sur la nécessité de
réduire les délais actuels dans des contextes où les familles et les proches d'une
personne décédée doivent être informés sur des événements qui changent leur vie
à jamais. Il en va de la nature même du service public d'assurer une réponse
efficace et diligente. Dans ce cas-ci, le caractère humain de cette réponse est
intimement lié à des enjeux de délai, de communication et d'accompagnement.
Je vous remercie de votre attention et
répondrai maintenant à vos questions.
Le Président (M. Bachand) :
Merci infiniment de votre présentation. Mme la ministre, s'il vous plaît.
• (15 heures) •
Mme Guilbault :
Merci beaucoup. Merci d'être ici avec nous. C'est très, très, très intéressant,
votre présentation, parce que… bien, c'est toujours intéressant, les
présentations, mais je sais que vous avez travaillé, au protecteur, très fort
sur une enquête, à l'époque... c'était comme une enquête, là, sur, justement,
le Bureau du coroner, par rapport aux nombreuses plaintes qui avaient été
formulées chez vous, entre autres, sur les délais, mais aussi sur les suivis,
comme vous venez si bien de l'énoncer. C'est pour ça que je trouve ça
intéressant de vous entendre aujourd'hui, parce qu'officiellement la procédure
que vous aviez en cours est terminée, si je ne m'abuse, dans le sens où vous
vous êtes montrés satisfaits, je crois, du plan d'action et du suivi du plan d'action
du Bureau du coroner, soit, mais vous l'avez dit, les délais sont encore
élevés. Vous nous dites 12 mois, moi, j'avais comme information 11 mois,
mais, bon, ça se ressemble, disons que c'est 11 mois et demi, c'est quand
même long, et, moi, ça, ça me préoccupe beaucoup, je l'ai dit ce matin, je le
répéterai tout le long probablement de l'étude détaillée.
Le projet de loi, entre autres choses...
il vise plusieurs choses, mais, entre autres choses, vise à donner des leviers
de gestion au Coroner en chef pour pouvoir agir autant que possible sur les
délais qui sont imputables au coroner. Parce qu'on est tous d'accord sur le
fait qu'il y a des délais liés aux partenaires, bon, puis des fois... moi,
encore tantôt, je disais, il y a aussi, à un moment donné, un rôle du
gestionnaire de faire de la sensibilisation puis de trouver un moyen de
travailler avec les gens pour que ça aille plus vite. Mais les délais dont le Coroner
en chef a le contrôle à l'intérieur de son organisation... un des buts du
projet de loi, c'est de lui donner ces leviers <de gestion…
>
15 h (version révisée)
<16885
Mme Guilbault : ...bon, puis des fois...
moi, encore tantôt, je disais, il y a aussi, à un moment donné, un rôle du
gestionnaire de faire de la sensibilisation puis de trouver un moyen de
travailler avec les gens pour que ça aille plus vite. Mais les délais dont le
Coroner
en chef a le contrôle à l'intérieur de son organisation... un des buts du
projet
de loi, c'est de lui donner ces leviers >de gestion pour pouvoir peut-être
agir d'une certaine façon puis réduire, autant que possible, les délais. À cet
égard, j'aimerais savoir ce que vous pensez de l'article 20 du projet de
loi, c'est une des façons qu'on a mises sur la table pour permettre...
Le Président (M. Bachand) :
Mme Rinfret.
Mme Rinfret (Marie) : Ah
oui, qui est, au fond, les motifs pour lesquels le Coroner en chef pourrait
désigner un autre coroner.
Mme Guilbault :
...et 20, en fait. Je vais ajouter 19, qui est un petit peu différent, mais, si
vous voulez me faire une réponse packagée... 19, dans le fond, c'est la
possibilité de ne pas conduire d'investigation si, finalement, il n'y a pas de nécessité
réelle, puis, pendant ce temps-là, on peut se concentrer sur les
investigations, donc, qu'on a vraiment besoin de faire, ça fait que ça a une
incidence indirecte sur les délais.
Mme Rinfret (Marie) :
Oui. Écoutez, de fait, pour revenir un peu sur votre présentation, je dois
d'emblée signifier l'appréciation que mon équipe a eu de travailler avec le
Bureau du coroner. La collaboration a toujours été là, et il y avait une
volonté réelle de la part du Bureau du coroner d'améliorer, de réduire les
délais, tellement, d'ailleurs, que le délai de six mois, nous, on l'extrait de
la planification stratégique du Bureau du coroner. Donc, c'est le Bureau du
coroner qui s'est fixé un délai de six mois — délai moyen,
entendons-nous, là, de six mois — pour produire ses rapports
d'investigation.
Je vous dirais que j'y vois une... et là
je reviens à votre question plus précise, je vois là une volonté qui s'inscrit
dans tous les efforts administratifs qu'a pu faire, qu'a pu déployer le Bureau
du coroner, en mettant en place un système informatique, en développant des
outils de suivi des enquêtes. On a atteint une limite, et c'est pour ça que
nous nous sommes déclarés satisfaits des mesures réalisées pour implanter les
recommandations. Et c'est pour cela que je suis devant vous aujourd'hui, pour
vous signifier que la voie législative est probablement le levier nécessaire
pour permettre de réduire les délais et permettre la production de rapports
d'investigation à l'intérieur d'un délai moyen de six mois. Les pouvoirs qui
sont conférés au Coroner en chef vont dans la droite ligne, je vous dirais,
d'une saine administration des services publics, on est ici. Et chaque coroner,
tout comme la Coroner en chef, tout comme moi, tout comme n'importe quel
administrateur <public...
Mme Rinfret (Marie) :
...
vont dans la droite ligne, je vous dirais, d'une saine administration
des services publics, on est ici. Et chaque coroner, tout comme la Coroner en
chef, tout comme moi, tout comme n'importe quel administrateur >public
sommes imputables envers les personnes que nous servons, et, à ce titre-là,
nous devons avoir les moyens qui nous permettent, effectivement, de rendre les
services publics de manière efficiente et diligente. Et, pour moi, ce qui est
convenu dans l'article 20 est un pas dans la bonne direction.
Cependant, et j'attire votre attention
là-dessus, déjà, dans la loi, on... ou c'est dans le code de déontologie, là,
je ne me rappelle plus exactement, on parle d'agir avec diligence. Pour moi, un
délai raisonnable, «agir avec diligence», ce n'est pas assez fort. Il faut,
ici, être en mesure de donner un délai et de permettre au coroner... puis on
parle de délais moyens, bien sûr, là... et de permettre à un coroner qui se
voit chargé d'une enquête beaucoup plus complexe, bien, ma foi, d'aller chercher
l'approbation du ou de la Coroner en chef pour outrepasser ce pouvoir-là. De la
même manière, il y a une obligation, un corollaire à tout ça, qui est de tenir
informés les proches, les familles endeuillées, et, en cela, il doit y avoir
une obligation, dans la loi, qui oblige les coroners à informer, à assurer un
suivi auprès des proches.
Donc, vous le voyez... je vais reprendre
votre expression de package... mais on en est là, et je pense qu'on a, ici, une
occasion réelle de donner les outils au Bureau du coroner pour s'assurer que
les personnes qui attendent les résultats d'une investigation connaissent...
aient des attentes réalistes, les connaissent et soient informées du suivi de
leur dossier.
Le Président (M. Bachand) :Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Oui, merci. Puis, en ce sens-là, votre recommandation n° 2,
je la trouve très intéressante, la première aussi, qui, finalement, reprend le
six mois moyen que le Bureau du coroner s'était lui-même fixé. Mais moi, je
vous le dis, je ne sais pas s'il va l'atteindre un jour. Ça fait déjà six ans
qu'il a cet objectif-là, et, en tout cas, il ne s'en est pas encore approché
non plus. Donc, je me dis, là, on fait un pas, comme vous dites, c'est un pas
dans la bonne direction, ce qu'on a mis dans le projet de loi, mais de là à
mettre ça dans la loi, je ne sais pas si c'est réaliste, tu sais. Vous
comprenez un peu ce que je veux dire? Si je l'écris dans la loi, je ne pense
pas que ça va se faire pour autant, par magie, ça fait que, là, est-ce que je
veux le mettre en contravention de la loi en plus? C'est là... puis je vous le
dis en toute transparence, c'est un peu ça, ma réflexion. C'est pour ça que j'y
vais avec des leviers de gestion, en espérant, quand même, que ça <tende...
Mme Guilbault :
...mais de là à mettre ça dans la loi, je ne sais pas si c'est réaliste, tu
sais. Vous comprenez un peu ce que je veux dire? Si je l'écris dans la loi, je
ne pense pas que ça va se faire pour autant, par magie, ça fait que, là,
est-ce
que je veux le mettre en contravention de la loi en plus? C'est là... puis je
vous le dis en toute
transparence, c'est un peu ça, ma réflexion. C'est
pour ça que j'y vais avec des leviers de gestion, en espérant,
quand
même, que ça >tende vers l'atteinte de l'objectif.
La recommandation n° 2,
je la trouve très intéressante parce que, c'est sûr, rien n'empêche, là... c'est
des suivis, là, c'est des appels puis des retours d'appels. Je trouve ça très,
très intéressant, donc je voulais simplement vous dire que je la prends sérieusement
en considération, cette recommandation-là.
L'autre chose que je trouve intéressante,
c'est aussi la numéro 4... Avant d'aller à la numéro 4, en fait, la numéro 2, là-dessus,
ça amène aussi la question des communications avec les familles,
l'accompagnement des familles, le suivi auprès des familles, et tout ça. Est-ce
que, depuis le... peut-être pas depuis 2014, là, mais, en tout cas, dans les
dernières années... bien, en fait, oui, depuis 2014, depuis tout le plan
d'action, et tout ça, la mise en place des mesures, est-ce que vous continuez
d'avoir beaucoup de plaintes qui ont rapport avec le Bureau du coroner?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, d'abord, je vais faire du pouce sur le commentaire que vous faisiez à
l'égard du six mois dans la loi. Il y a moyen de donner un délai législatif qui
permet aussi des exceptions. Je vous dis cela parce que la raisonnabilité d'un
délai, c'est très, très, très élastique. Donc, on aime beaucoup, chez nous,
qu'il y ait un délai au-delà de la... qui, au fond, correspond à la
raisonnabilité d'une organisation, bon. Ça pourrait être «au plus», ça pourrait
être... J'envoie ça, là, comme idée.
Maintenant, la recommandation 2, où on
accorde... on vous propose de faire un suivi auprès des familles, elle est
importée d'une pratique que l'on a chez nous et qui s'inscrit également dans la
Loi facilitant la divulgation des actes répréhensibles à l'égard des organismes
publics.
Maintenant, en ce qui concerne...
Répétez-moi...
Mme Guilbault :
Recevez-vous toujours des plaintes?
Mme Rinfret (Marie) :
Oui, des plaintes, bien sûr, bien oui, on en a, on en a. La moitié des plaintes
qu'on reçoit concernent les délais, et la moitié des plaintes qu'on reçoit sont
fondées, et elles visent les délais, elles visent également l'accompagnement.
Mme Guilbault :
...nombre approximatif?
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre...
Mme Guilbault :
Oui, excusez. Avez-vous le nombre approximatif de plaintes que vous recevez par
année?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, c'est difficile pour moi de vous donner un nombre, parce que, bon,
c'est une petite organisation, mais on a quand même fait l'exercice parce qu'on
savait qu'on venait vous voir, et à la somme des années, donc, depuis 2014, c'est
74 plaintes que nous avons reçues.
Mme Guilbault :
O.K. Et vous me dites que la moitié étaient fondées?
Mme Rinfret (Marie) :
Oui, et la moitié concernaient les délais.
Mme Guilbault :
Est-ce que c'est la même moitié que celles qui étaient fondées?
Mme Rinfret (Marie) :
Non, ce n'est pas la même moitié, ce n'est pas la même moitié.
Mme Guilbault :
O.K. Parfait, merci <beaucoup...
Mme Rinfret (Marie) :
...
à la somme des années, donc, depuis 2014, c'est 74 plaintes que nous
avons reçues.
Mme Guilbault :
O.K. Et vous me dites que la moitié étaient fondées?
Mme Rinfret (Marie) :
Oui, et la moitié concernaient les délais.
Mme Guilbault :
Est-ce que c'est la même moitié que celles qui étaient fondées?
Mme Rinfret (Marie) :
Non, ce n'est pas la même moitié, ce n'est pas la même moitié.
Mme Guilbault :
O.K. Parfait, merci >beaucoup. Donc, c'est ça, la recommandation 4,
simplement vous dire, aussi, que je la trouve intéressante, mais je me demande
si on a besoin de légiférer pour ça, dans le sens où rien n'empêcherait le Bureau
du coroner de faire un suivi de l'application de ces recommandations ou,
disons, de faire une mise à jour du suivi des recommandations qu'il reçoit dans
son rapport annuel, sur son site Internet ou autrement, donc, je le lance comme
ça. Est-ce que vous pensez que ça pourrait être une alternative, sans nécessairement
qu'il y ait un projet de loi ou qu'il y ait un article de loi?
• (15 h 10) •
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
vous avez raison de mentionner que c'est une pratique qui peut se faire
indépendamment de l'avoir dans la loi. Maintenant, je vous dirais que l'avoir
dans la loi, à l'égard des instances qui sont visées par les recommandations, c'est
comme la peur qui est le début de la sagesse. Et, à cet égard-là, de se voir
citées dans le rapport annuel — et je vais prendre, comme exemple,
mon institution, hein? — les instances n'aiment pas cela. Et, à ce
titre-là, le fait que nous ayons ce pouvoir-là nous donne davantage d'appuis
auprès des ministres, voire de l'Assemblée nationale, donc des commissions
compétentes aussi, parce qu'on pense aussi à la Commission de l'administration
publique, la Commission des institutions, qui, parce que nous avons ce
pouvoir-là de faire le suivi de l'application... puis, quand on se déclare
insatisfaits, les commissions peuvent s'en saisir. Donc, il y a là un élément
qui, ma foi, est extrêmement puissant pour une organisation.
Le Président (M. Bachand) :...Mme la ministre.
Mme Guilbault :
Merci beaucoup. Il me reste peu de temps, puis je veux aborder un dernier sujet
et laisser un peu de temps à mon collègue de Chapleau. Puis en fait mon dernier
sujet, ça va être simplement un élément que je vous partage, parce que votre
recommandation n° 6 aussi, je la trouve très, très,
très intéressante, mais ça, ça a rapport avec le règlement, là, sur les
personnes... bien, vous le mettez, probablement... c'est ça, sur les critères
et procédures. Donc, ce n'est pas dans la loi à proprement parler, mais sachez
simplement que ce règlement-là, que je suis, parallèlement, en train
d'élaborer, qu'on est en train, parallèlement, d'élaborer, vise exactement ce
que vous recommandez dans la recommandation n° 6, et
actuellement je compte ajouter trois professions dans les professions éligibles
à la fonction de coroner, qui ne sont pas un très grand secret, quand on
regarde la liste des personnes qui vont venir témoigner ici demain, mais donc
je m'oriente vers ça, alors... Mais, lorsque le règlement est prépublié, si
vous avez des choses à en dire, vos commentaires seront les bienvenus. Je vous
remercie énormément, puis je cède la parole à mon collègue.
Le Président (M. Bachand) :
M. le député de Chapleau, s'il vous plaît.
M. Lévesque (Chapleau) :
Merci beaucoup, M. le Président. Donc, j'en profite pour saluer les <collègues...
Mme Guilbault :
...
pas un très grand secret, quand on regarde la liste des personnes qui
vont venir témoigner ici demain, mais donc je m'oriente vers ça, alors... Mais,
lorsque le règlement est prépublié, si vous avez des choses à en dire, vos
commentaires seront les bienvenus. Je vous remercie énormément puis je cède la
parole à mon collègue.
Le Président (M.
Bachand) :
M. le député de Chapleau, s'il vous plaît.
M. Lévesque (Chapleau) :
Merci beaucoup, M. le Président. Donc, j'en profite pour saluer les >collègues,
Mme la ministre. Merci, merci pour votre témoignage. J'aimerais peut-être vous
entendre sur l'indépendance du coroner. Donc, on a eu quelques réserves qui ont
été soulevées, là, par des groupes précédents, quant à l'indépendance, notamment
en instaurant la durée et une certaine... donc, le renouvellement des mandats,
que ça pourrait avoir un effet sur l'indépendance de leur rôle. Je ne sais pas
ce que vous en pensez, de cette... parce que vous avez dit que vous étiez quand
même favorable à cette mesure-là. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Et
est-ce que vous avez peut-être des mesures qui pourraient favoriser
l'indépendance, dans le fond, du coroner?
Mme Rinfret (Marie) : Je
répondrai à votre question comme ceci : Je ne vois rien, dans le projet de
loi actuel, qui vienne s'ingérer à l'intérieur de l'indépendance des coroners
ou du Coroner en chef. Pour moi, il y a un équilibre entre l'indépendance et
l'imputabilité, la reddition de comptes, l'évaluation des services publics, et,
en ce sens-là, le projet de loi, tel que proposé, là, ne vient absolument pas
brimer l'indépendance ni des coroners ni du Coroner en chef.
M. Lévesque (Chapleau) :
Parfait. Peut-être une autre question, là. Vous avez parlé d'un délai de
185 jours. D'où provient ce délai-là pour pouvoir remettre...
Mme Rinfret (Marie) :
180.
M. Lévesque (Chapleau) : ...185
ou 180, oui, pour remettre, dans le fond, le rapport. Est-ce que c'est
standard? Est-ce que c'est... D'où provient ce chiffre-là?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, et je le mentionne au début de notre rapport, il est tiré de la
planification stratégique du Bureau du coroner. La planification
stratégique 2017‑2022 prévoit... l'objectif du Bureau du coroner était de
publier ses rapports d'investigation à l'intérieur d'un délai de six mois, donc
six mois équivalant à 180 jours... voilà.
M. Lévesque (Chapleau) :
...un petit de temps? Oui, O.K. Peut-être en lien avec ce que la ministre a
posé tout à l'heure, là, vous avez proposé différentes professions qui
pourraient, dans le fond, accéder, là, au travail de coroner. Est-ce qu'il y
aurait d'autres professions que vous voyez... Est-ce qu'il y a d'autres avenues
que vous envisagez, par rapport à ça, pour les coroners?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, notre proposition est d'élargir les critères de sélection pour
permettre à d'autres professionnels que les avocats, les médecins ou les
notaires d'agir comme coroner. Maintenant, je crois qu'au Bureau du coroner,
avec les ordres professionnels et le gouvernement, les législateurs vous allez
être en meilleure position que moi pour évaluer le <type de...
Mme Rinfret (Marie) :
...
maintenant, je crois qu'au
Bureau du coroner, avec les ordres
professionnels et le gouvernement, les législateurs vous allez être en
meilleure position que moi pour évaluer le >type de professionnels qui
peuvent exercer, selon la nature de l'enquête qui doit être tenue, bien sûr.
M. Lévesque (Chapleau) : Parfait,
merci. Ça complète. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bachand) :
Merci. M. le député de Vimont, s'il vous plaît.
M. Rousselle : Merci, M.
le Président. Merci d'être ici, madame... mesdames. Merci d'être ici. Toujours intéressant
de vous écouter, effectivement.
J'ai regardé dans votre mémoire, et puis,
comme vous l'avez dit, justement, à votre... au numéro 6,
là, recommandation 6... puis moi aussi, je suis d'accord qu'à un moment donné
il faut peut-être élargir, effectivement. Puis, comme mon collègue le
mentionnait, bien, vous nous avez comme laissé la porte à dire : Bien,
regardez à qui qu'on pourrait l'ouvrir. Mais tantôt on a écouté les coroners,
l'Association des coroners, qui était ici tantôt, et on a appris que la
formation, ce n'était pas une grosse formation, et, si on veut être performants
puis si on veut vraiment... Comme vous avez mentionné à plusieurs endroits, on
veut faire des suivis, on veut, bon, plein de choses. Est-ce que vous avez
regardé ce volet-là de formation, qui, actuellement, est manquant au Bureau du
coroner?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
c'est n'est pas... ce n'était pas un volet de notre enquête en 2014. Je dois
vous dire que notre recommandation 6 est dans le droit fil de la recommandation
1. On croit fermement qu'élargir les critères de sélection pour permettre à des
professionnels compétents de procéder à des investigations, d'en avoir plus, ça
va permettre de réduire les délais, et, en ce sens-là, s'il faut prévoir une
formation particulière au sein du Bureau du coroner pour permettre à d'autres professionnels
d'agir comme coroner, bien, ma foi, je pense que c'est une excellente pratique,
de faire comme cela. Mais il ne faut pas se... En fait, le message que je veux
vous passer, c'est qu'il ne faudrait pas ne pas ouvrir ces critères-là parce
que la formation n'est pas là, tu sais, c'est...
M. Rousselle
: Je
comprends. Mais tantôt... je reviens toujours... le groupe qu'on a vu plus tôt,
la coroner nous expliquait qu'ils apprenaient sur le tas. Donc, quand tu
apprends sur le tas... on s'attend... Mais là je voulais savoir aussi est-ce
que vous avez eu des plaintes, justement, sur... concernant des coroners qui
n'étaient comme pas opérationnels ou, encore, qui étaient... un fonctionnement
pas correct.
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
je... C'est <parce que...
M. Rousselle
:
...eu des plaintes,
justement, sur... concernant des coroners qui
n'étaient comme pas opérationnels ou, encore, qui étaient... un
fonctionnement
pas correct.
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, je... C'est >parce que je m'adresse à des
parlementaires, là, que j'ouvrirai un peu plus, parce que, normalement, nos
enquêtes sont conduites privément, et tout, là, mais la réponse à votre
question est oui. Oui, on en a eu, des plaintes qui visaient l'attitude des
coroners, on en a eu. Il y a eu également — parce qu'on l'a
documenté, ça, dans notre rapport de 2014 — des coroners qui ont pris
beaucoup d'années pour ne pas rendre un rapport, puis, à cet égard-là, bien, la
Coroner en chef a dû leur retirer leur rapport. Alors, bon, quand on parle de
compétences, oui, il y a une compétence sur le plan de la formation, il y a une
compétence sur le plan personnel, mais il y a aussi le savoir-être qui doit
être là, puis, bien, ma foi, je pense que tout ça, c'est un tout, là.
M. Rousselle
:
Tantôt, on écoutait, juste avant vous, vous l'avez sûrement entendue aussi, la commission
des droits de la personne et de la jeunesse, qui était ici. Ils parlaient,
justement, au niveau de la COVID-19, qu'eux, là, ils ont eu des plaintes, et
tout. Là, je sais que vous allez avoir une enquête là-dessus. Est-ce que vous
avez eu des... En dehors de votre mandat... tu sais, je ne parlerai pas de
votre mandat, là, mais, en dehors de votre mandat, est-ce que vous aussi, vous
avez eu des plaintes, aussi, avant de recevoir ce mandat-là? Parce que... C'est
pour ça que je posais la question, puis en même temps, là, je vous la pose à
vous : Sachant que la commission des droits de la personne et de la
jeunesse, eux aussi, reçoivent des plaintes, est-ce qu'il y a quelque chose, à
moment donné, qui s'arrime, quelque part, entre vous deux?
• (15 h 20) •
Mme Rinfret (Marie) : C'est
intéressant, votre question. Dans la Loi sur le Protecteur du citoyen — et
on se gouverne de cette manière-là en tout temps — dès le moment où
on reçoit une plainte ou un signalement qui vise une question de compétence de
la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, on doit
référer la personne à la commission des droits de la protection de la jeunesse.
On travaille en pleine collaboration à cet égard-là. Et la personne qui fait
appel à nous pourrait choisir, par ailleurs, de rester avec nous pour l'enquête,
et ça, elle doit le faire par écrit. Donc, vous le voyez, il y a quand même un
processus législatif qui nous oblige, nos deux institutions, à collaborer. Bon,
est-ce qu'on aurait besoin de cette obligation législative? Probablement pas.
Maintenant, en ce qui concerne les
plaintes <en lien...
Mme Rinfret (Marie) :
...
nos deux institutions, à collaborer. Bon, est-ce qu'on aurait besoin
de cette obligation législative? Probablement pas.
Maintenant, en ce qui concerne les
plaintes >en lien avec la COVID, alors, moi, je dois vous dire que nos
services sont restés ouverts tout le temps du confinement, donc, dès le 16 mars,
là, moi, mes services téléphoniques et mes délégués, mes délégués adjoints
étaient en devoir. Nous sommes intervenus parce que nous avons eu des
signalements. C'est vrai que les personnes âgées dans les CHSLD, ou les ressources
intermédiaires, ou les résidences privées, les RPA, sont des personnes
vulnérables — elles l'étaient encore plus parce que les proches
aidants ne pouvaient pas y aller — donc on a dû intervenir, nous
sommes intervenus. Après le confinement, j'ai annoncé — parce que
j'ai ce pouvoir-là — une enquête de notre propre initiative
concernant la gestion gouvernementale dans les milieux de vie pour personnes
aînées dans le cadre de la COVID, et nous sommes actuellement en enquête. Un
rapport d'étape est prévu d'ici la fin de l'automne, et le rapport, pour 2021.
M. Rousselle
: Un
rapport, sûrement, bien attendu, ça, c'est certain.
Mme Rinfret (Marie) : C'est
certain, je vous comprends.
M. Rousselle
: Écoutez,
toujours dans la COVID-19... Parce que, même à nos bureaux, on a reçu plein
d'appels, vous le savez, et d'ailleurs tous mes collègues, ici, doivent avoir
eu des appels, c'est certain, des appels de détresse et puis de panique, hein,
c'est un peu... c'est la panique, la COVID-19 n'aidant pas. Dites-moi, est-ce
que vous avez eu des appels aussi? Parce que, là, sûrement, c'est des familles
qui se sont plaintes, j'imagine, là, ça doit être des familles ou... Il y a-tu
eu aussi du personnel soignant qui se sont plaints aussi?
Mme Rinfret (Marie) : Ah
oui, bien oui.
M. Rousselle
:
Parce que, tu sais, eux autres, ayant plein de problèmes à ce moment-là, est-ce
qu'eux aussi ont fait ces démarches-là?
Mme Rinfret (Marie) :
Oui. Écoutez, sans... Je peux vous dire que les signalements nous sont venus de
toutes les couches de la société, tant les proches aidants qui étaient
insatisfaits, tant le personnel soignant, les personnes bénévoles. On a reçu et
on reçoit toujours des signalements. Les plaintes, bien, c'est plus difficile,
hein, parce que les usagers, c'étaient et sont encore des personnes extrêmement
vulnérables, souvent seules, donc c'est pour cette raison-là, d'ailleurs, que
j'ai lancé une enquête de notre propre initiative, étant
entendu que nous avions besoin, comme société, d'avoir le point de vue d'une
institution neutre et indépendante pour être en mesure… Moi, j'ai les pouvoirs
d'aller faire des visites non annoncées dans ces organisations, de rencontrer,
de faire des <appels à...
Mme Rinfret (Marie) :
…étant entendu que nous avions besoin, comme société, d'avoir le point de vue d'une
institution neutre et indépendante, pour être en mesure… Moi, j'ai les pouvoirs
d'aller faire des visites non annoncées dans ces organisations, de rencontrer,
de faire des >appels à témoignage. Alors, on est dans ce processus-là,
actuellement, pour que nous puissions donner aux parlementaires une lecture
impartiale, neutre de ce qui a pu se passer, avec des recommandations que l'on
souhaite les plus opérationnelles possible pour nous rendre meilleurs, hein,
dans… On a fait face à une crise, là, hein, c'est… alors là, ce qu'il faut, c'est
être prêts et être meilleurs.
Le Président (M. Bachand) :
M. le député.
M. Rousselle : Vous avez
parlé que vous êtes intervenus. Pourriez-vous me dire de quelle manière vous
êtes intervenus?
Mme Rinfret (Marie) :
Pardon?
M. Rousselle : Bien, j'ai
compris que… vous avez dit : J'ai intervenu ou nous avons intervenu, donc
je voudrais savoir de quelle manière vous êtes intervenus.
Mme Rinfret (Marie) :
Ah! nous sommes intervenus lorsqu'une personne témoignait, là, d'une situation
qui était inacceptable dans un CHSLD. Nous, on communiquait tout de suite, on
avait… avant même, là, que nous soyons dans… chacun chez soi, là, on avait
identifié des piliers, dans chaque organisation, où on pouvait appeler puis
faire vérifier est-ce que ce qu'on porte à notre attention est vrai. Si
oui, allons-y pour les correctifs, et faites-nous part, là, de ce qui a été
corrigé. Donc, de manière très, très, très concrète, là, on s'assure que les
services publics répondent.
Un autre élément qu'il m'apparaît
important de vous souligner : à titre d'ombudsman, lorsque nous n'avons
pas compétence pour intervenir, nous référons toujours les gens aux services
appropriés. Donc, si on pense… même si je peux intervenir dans un dossier, mais
que je crois qu'en s'adressant à tel autre organisme public ça va aller plus
vite, on va tout de suite référer la personne et ensuite on va demander à cette
personne-là de nous faire un retour pour s'assurer qu'elle ait obtenu la réponse
qu'elle attendait, auquelle elle a droit, de la part des services publics.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Mme la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols : Oui, merci,
M. le Président. Donc, je comprends que, signalement ou plainte, vous êtes
intervenus, là, dans le cadre de la COVID, toujours, là, pour continuer sur les
questions de mon collègue, là, vous êtes intervenus rapidement, vous avez
identifié des ressources, des piliers. Là, vous avez bien vu, évidemment, là, l'urgence
de la situation, la détresse humaine, par les nombreux signalements, les
plaintes. Est-ce que vous en avez informé… Là, je comprends que c'est le Protecteur
du citoyen, mais est-ce que vous en avez informé… Comme, le gouvernement,
est-ce qu'il était au courant? Est-ce que vous avez informé des personnes en
haut de vous, là, de cette situation-là?
Parce que, tu sais, à un moment donné,
personne n'a jamais vécu ça, là, c'est une pandémie mondiale, c'est la première
fois que ça <arrive…
Mme Nichols : ...là,
je comprends que c'est le
Protecteur du citoyen, mais est-ce que vous en
avez informé… Comme, le
gouvernement, est-ce qu'il était au courant?
Est-ce que vous avez informé des personnes en haut de vous, là, de cette
situation-là?
Parce que, tu sais, à un moment donné,
personne n'a jamais vécu ça, là, c'est une pandémie mondiale, c'est la première
fois que ça >arrive. J'imagine, tout comme vous, Mme Rinfret, puis
votre équipe, là, à un moment donné, on ne sait pas quoi faire. Le téléphone
est rouge, il n'arrête pas de sonner. Nous, ça sonnait dans les bureaux de
comté. Ça fait que je peux comprendre que... on vous les référait, donc je peux
comprendre que ça sonnait chez vous aussi. Mais je veux savoir comment ça a
fonctionné, là, l'information, parce qu'il faut aller chercher de l'aide un peu
partout aussi, puis, comme vous dites, bien, souvent, les parlementaires... les
ministres, les parlementaires, bien, ils peuvent faire bouger les choses, ça
fait que... Est-ce que vous avez utilisé le téléphone rouge?
Mme Rinfret (Marie) :
Parce que c'était nécessaire, on l'a fait, c'est clair, et on a toujours eu une
bonne réponse. Mais, dès le moment où on voyait que, sur le terrain, ça ne
bougeait pas assez à notre goût, on faisait appel à un palier hiérarchique
supérieur, ça, c'est clair. C'est notre façon de travailler. On s'assure... On
vérifie d'abord la situation. Lorsqu'il y a un préjudice, ça appelle à un
correctif. Si le correctif tarde, on va à un palier supérieur et on fait ça
tant et aussi longtemps que la personne n'a pas le service public auquel elle a
droit. C'est comme ça en toute matière.
Mme Nichols : Oui, le service
public auquel elle a droit, ce n'était pas non plus évident, hein, tout le
monde...
Mme Rinfret (Marie) :
Bien, comme vous le dites, on était dans une situation exceptionnelle, par
ailleurs, oui.
Mme Nichols : Oui, oui,
oui. Non, puis je comprends aussi, à un moment donné, on s'arrache les cheveux,
là, on ne sait plus... on utilise les moyens qui sont à notre disposition, on
essaie d'en trouver d'autres aussi. On devient — le mot de la
pandémie — créatifs, là. Donc, je comprends que ça ne devait être,
pour vous non plus, pas une période évidente.
La personne, là, qui fait une plainte, là,
soit pendant... là, je sais qu'il y a une enquête, évidemment, mais comment ça
va fonctionner? Celle-là qui fait la plainte, elle va recevoir le rapport de la
protectrice ou... Ça va être quoi, là, le suivi? Un peu comme j'ai posé à la
commission avant, ça va être quoi, là, le suivi de sa plainte?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, nous, dès le moment... puis là je vais vous parler de manière très
générale, là, c'est vrai dans nos quatre mandats, hein, dès le moment où une
personne nous appelle, qu'on considère que sa demande est recevable, il y a un
délégué ou une déléguée adjointe qui est responsable du dossier, ou encore un
délégué professionnel, et, à partir de là, la personne est tenue informée du
déroulement du dossier. On communique ensuite avec l'instance visée, comme je
vous disais, donc, on fait enquête sur les reproches qui sont formulés, on va
voir auprès de l'instance, bien, est-ce que c'est vrai. Et, à partir de ce qui
aurait dû être, bien là, si on constate qu'effectivement il y a un préjudice on
demande que ce préjudice-là soit corrigé, et donc ça appelle <à des
correctifs. Puis ensuite...
>
15 h 30 (version révisée)
< Mme Rinfret (Marie) :
...les reproches qui sont formulés, on va voir auprès de l'instance, bien,
est-ce que c'est vrai. Et, à partir de ce qui aurait dû être, bien là, si on
constate qu'
effectivement il y a un préjudice on demande que ce
préjudice-là soit corrigé, et donc ça appelle >à des correctifs. Puis
ensuite on en informe, soit oralement ou par écrit, selon ce qu'elle désire, la
personne qui nous a déposé la plainte. On donne un délai, toujours, à
l'instance visée pour procéder aux correctifs, et, dès le moment où le
correctif est effectué, nous fermons notre dossier.
Mme Nichols : Puis dans quel
délai, à peu près, vous faites tout ça?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez…
et là, ça dépend vraiment de la nature du mandat : en matière de services
correctionnels, c'est moins de 10 jours; en matière d'administration publique,
dans 60 % de nos dossiers, on réussit à régler les dossiers à l'intérieur
d'un délai de 10 jours; en matière de santé et services sociaux, on est un
deuxième niveau, on intervient après le commissaire aux plaintes et à la
qualité des services, donc là on parle de 60 jours.
Mais ce qu'il faut que vous reteniez dans
tout ça, c'est : quand on n'est pas capables de donner la réponse à la
personne qui fait appel à nous à l'intérieur du délai dans lequel on s'est
engagés, on lui parle, on lui téléphone, on lui dit : On a de la
difficulté à obtenir les documents, il faut faire appel à un tiers. Moi, j'ai
les pouvoirs de commissaire enquêteur, donc je peux avoir besoin d'un rapport
médical, je peux avoir besoin d'un document détenu par une autre instance.
Alors, je le tiens informé toujours du moment où je crois pouvoir lui rendre ma
décision, lui faire savoir si sa plainte était fondée ou non, et, partant de
là, je vous dirais... Et ça, c'est notre engagement dans l'ensemble de nos
mandats, de tenir les personnes qui font appel à nous informées du déroulement
de leur dossier. Donc, je vous dirais que ça fonctionne bien. Quand les gens ne
sont pas satisfaits, ils peuvent se plaindre de nos services, et, à ce
moment-là, moi, j'ai un comité sur la qualité des services, sur lequel je siège
avec les deux vice-protecteurs, et, partant de là, bien, on est capables de
poser des gestes soit en termes de formation de la personne qui a réglé le
dossier ou autrement.
Le Président (M. Bachand) :
Écoutez, merci infiniment d'avoir été avec nous cet après-midi, c'est très,
très, très apprécié.
Cela dit, la commission ajourne ses
travaux à jeudi 27 août 2020, à 10 h 50. Merci beaucoup. Bonne
soirée.
(Fin de la séance à 15 h 33)