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Version finale

39th Legislature, 2nd Session
(February 23, 2011 au August 1, 2012)

Wednesday, August 17, 2011 - Vol. 42 N° 10

Consultation générale et auditions publiques sur le document de consultation intitulé « La planification de l’immigration au Québec pour la période 2012-2015 »


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures quarante-quatre minutes)

Le Président (M. Cousineau): ...s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de tenir une consultation générale et des auditions publiques sur le document intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Kotto (Bourget), le porte-parole de l'opposition officielle en matière de communautés culturelles, remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve).

Le Président (M. Cousineau): Merci. Alors, rapidement l'ordre du jour, rapidement. Ce matin, nous allons recevoir les gens du Conseil supérieur de la langue française, suivi de l'Union des producteurs agricoles, l'Organisation internationale canadienne des droits humains. Et, cet après-midi, nous aurons le Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre pour les personnes immigrantes, l'Association de la communauté algérienne du Québec, l'Ordre des conseillers des ressources humaines agréés. Parfait.

Alors, pour ce qui est du temps de parole, le temps alloué: 15 minutes pour l'exposé de l'organisme, et puis il y aura 45 minutes d'échange par les membres de la commission.

Alors, je m'aperçois qu'on n'a pas de... les représentants de l'ADQ ne sont pas présents, donc ce sera l'opposition... le gouvernement, l'opposition officielle, puis je crois qu'on a un député indépendant.

Donc, vous avez une présentation de 15 minutes. Nous vous écoutons, monsieur. Veuillez vous présenter et présenter la personne qui vous accompagne, puis on vous donne 15 minutes.

Auditions (suite)

Conseil supérieur de la langue française (CSLF)

M. Ouellon (Conrad): Conrad Ouellon, président du Conseil supérieur de la langue française. Je suis accompagné de Robert Vézina, qui est le directeur du conseil. Et M. Delfino Campanile, membre du conseil et qui travaille auprès des organismes communautaires depuis une vingtaine d'années, s'excuse, il ne peut être présent.

Mme la ministre, M. le Président, MM. les députés, pour nous en tenir à la mission du Conseil supérieur de la langue française, nous disons que la connaissance du français ainsi que son utilisation en tant que langue commune peuvent et doivent servir d'outil de développement de la cohésion sociale. La participation des immigrants au développement du Québec est donc hautement favorisée par la connaissance et l'usage de la langue française. De plus, l'intégration socioéconomique en français contribue à favoriser l'usage de la langue commune. En d'autres termes, l'immigrant préférera l'usage de la langue française si cela favorise l'entrée dans le monde du travail tout autant que l'inclusion sociale. Réciproquement, cette intégration socioéconomique entraînera chez lui une préférence pour l'usage du français.

Dans le cadre de la consultation sur la planification de l'immigration, la question qui se pose actuellement ne concerne peut-être pas tant le nombre de nouveaux venus qui arrivent chaque année que notre capacité à les recevoir, à les intégrer. C'est cette capacité qui devrait dicter des choix.

Il faut aussi reconnaître que le maintien d'une société qui vit en français en Amérique du Nord repose, pour une part non négligeable, sur notre capacité d'accueillir ces immigrants et de les intégrer dans nos réseaux économiques et sociaux. Le document de consultation du MICC le reconnaît d'ailleurs clairement. Le conseil traitera de la question à deux niveaux.

Premièrement, il faut mettre en place des conditions favorables à la francisation et à l'intégration des immigrants. Dans un premier temps, il faut accroître les efforts de francisation des immigrants et leur assurer un meilleur soutien dans leurs démarches d'intégration socioéconomique. Plusieurs des orientations du plan d'action du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles pour la période 2008-2013 visent ces objectifs. Les actions annoncées vont dans le sens des recommandations déjà faites par le conseil en 2008 et auparavant. Elles n'ont cependant pas encore eu le temps de produire tous leurs effets, d'autant plus que certaines touchent les attitudes et les perceptions de la société d'accueil. L'avis Le français, langue de cohésion sociale, publié en 2008, est plus explicite sur ces questions.

Le CSLF tient cependant à insister sur un aspect: l'importance de travailler en français. Si l'on veut que les immigrants s'intègrent en français à la société québécoise, il faut faire mieux pour franciser les milieux de travail, afin que ceux-ci deviennent des lieux d'intégration francophone. Cette action comporte deux volets, toujours selon l'avis du conseil paru en 2008. L'ouverture totale du marché du travail aux immigrants et aux membres des communautés culturelles doit devenir une priorité de l'État. Un préalable, cependant: le français doit être clairement la langue normale et habituelle du travail.

Plusieurs études et articles ont traité de la difficulté des immigrants à intégrer le marché du travail au cours des dernières années. De trop nombreux immigrants hautement scolarisés se retrouvent au chômage ou occupent des petits boulots faiblement rémunérés. Cette situation est frustrante et crée un groupe d'exclus, ce qui peut avoir une influence très dommageable sur la cohésion sociale. Dans ce contexte, le conseil est d'avis qu'il est urgent de continuer à proposer des solutions aux difficultés d'embauche des immigrants.

Par ailleurs, le conseil, en accord avec son objectif de faire du français l'outil d'intégration sociale, pense qu'il est important de renforcer les mesures de francisation en entreprise et de soutenir les travailleurs dans leur apprentissage de la langue française. Il faut que les mesures de francisation ne se limitent pas à rendre un nouvel arrivant simplement fonctionnel en français. Les travailleurs doivent aussi avoir une connaissance de la langue telle qu'elle satisfasse aux exigences du marché du travail et leur facilite l'avancement professionnel.

Les programmes de francisation et les efforts de recrutement, dans un contexte d'intégration à la société québécoise, ne peuvent être clairement efficaces que si le français est valorisé en entreprise et utilisé comme véritable langue du travail. En effet, la langue du travail est une composante importante de l'usage de la langue dans le domaine public et, dans le contexte où il y a concurrence entre deux langues, la langue jugée comme la plus utile dans l'espace public risque de devenir la langue d'usage préférée et éventuellement la langue parlée à la maison pour un grand nombre de nouveaux arrivants qui parlent le français et l'anglais.

**(9 h 50)**

Il faut aussi privilégier des gestes qui peuvent amener les nouveaux arrivants à préférer le français à l'anglais. Dans une société où les langues vivent en forte concurrence, le français étant en situation vulnérable, il faut, dans un deuxième temps, que l'immigrant choisisse de faire du français sa langue d'usage public. Et c'est là une voie que souhaite développer le Conseil supérieur de la langue française. C'est ainsi qu'il porte un intérêt particulier à la sixième orientation du plan d'action du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, intitulé Impliquer la société civile et accroître les partenariats.

Pour plusieurs immigrants, l'usage du français est le plus souvent en lien avec les avantages qu'ils peuvent en tirer. Un immigrant a généralement pour objectif l'amélioration de son sort et l'intégration à la société d'accueil. Dit autrement, il espère travailler, gagner sa vie, participer à la vie sociale. Il atteindra beaucoup plus facilement ses buts si la société d'accueil, particulièrement les acteurs sociaux et les simples citoyens de toutes les régions du Québec sont conscientisés aux nombreux aspects positifs de l'immigration.

Le Conseil supérieur de la langue française pense que le temps est venu d'explorer d'autres avenues pour accroître significativement la performance quant à la réussite de l'intégration des nouveaux arrivants. Ainsi qu'on le précise dans l'introduction du mémoire, la relation entre l'intégration et la francisation est bidirectionnelle. Il en est de même des rapports entre l'immigrant et la société d'accueil: ils doivent également devenir bidirectionnels.

Le conseil croit qu'il faut mettre à profit cette période annoncée de stabilité puis de lente décroissance du recrutement d'immigrants, alliée à une demande soutenue de main-d'oeuvre qualifiée pour sensibiliser davantage l'ensemble de la société québécoise à l'importance de l'immigration pour le développement du Québec, d'une part, puis pour mettre en place de meilleures pratiques d'intégration, d'autre part.

Pour y parvenir, tous les acteurs sociaux doivent être mis à contribution et spécialement les nombreux organismes communautaires qui se sont construits, au fil des ans, une grande expertise en accueil, en intégration et en francisation. Ces organismes, de par leur mission, sont solidement implantés dans les milieux que fréquentent les immigrants et les réfugiés, et ils ont su s'adapter rapidement aux divers besoins des nouveaux arrivants. Leur expertise unique est fondée sur leur expérience du terrain.

Le Conseil supérieur de la langue française estime donc que les organismes communautaires doivent bénéficier de ressources additionnelles et stables pour continuer de développer leur expertise, surtout pour la partager avec les institutions publiques et d'autres partenaires sociaux.

Maintenant, quelques réactions au document La planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015. C'est à partir de sa réflexion sur la cohésion sociale et de la nécessité de développer des approches qui favorisent le choix de la langue française par les nouveaux arrivants que le Conseil supérieur de la langue française présente quelques commentaires sur le document La planification de l'immigration pour la période 2012-2015.

Les moyens d'action. Le Conseil supérieur de la langue française est d'accord avec les actions prévues pour favoriser l'intégration au marché du travail, telles qu'elles sont décrites à la page 18. Bien qu'on ne puisse attendre des résultats immédiats de tous les programmes mis en place, il faut reconnaître leur pertinence. On trouve cependant dommage que la vaste expérience de terrain des organismes communautaires ne soit pas mieux exploitée. De plus, le conseil espère vivement que l'harmonisation des services gouvernementaux en francisation, se traduisant par l'ouverture d'un guichet unifié, se fera dans un avenir rapproché.

Le conseil est également d'accord pour la signature d'ententes avec les Alliances françaises et d'autres partenaires à l'étranger dans le but de mieux préparer les candidats à l'immigration à leur arrivée au Québec. C'est probablement la manière la plus efficace et la moins coûteuse de rejoindre une grande partie de ces futurs immigrants. Toutefois, il faut s'assurer que ces partenaires obtiennent le soutien, l'expertise et la documentation nécessaires pour qu'ils fournissent une information juste sur la culture et la société québécoises de même que sur le français qui se pratique ici. Il ne faut pas que certains préjugés de nature linguistique continuent d'être transmis.

En page 24, le ministère dresse une liste partielle de ses actions. Le conseil appuie globalement les actions en matière de diversité, d'intégration sociale et de relations interculturelles énumérées en page 24. Le conseil insiste cependant fortement sur la nécessité de faire participer l'ensemble de la population québécoise à l'intégration des immigrants. Il faut, en premier lieu, accentuer la sensibilisation à l'importance de l'immigration pour l'avenir de la société québécoise et la promotion de l'ouverture à la diversité. À terme, il faut que ces actions débouchent sur une plus forte inclusion sociale des immigrants, qu'ils soient nouveaux arrivants ou déjà établis. C'est d'une meilleure intégration économique et sociale que résultera le choix de la langue commune, le français. Enfin, pour que ces actions produisent de meilleurs résultats, le conseil insiste de nouveau et estime souhaitable, voire nécessaire un partenariat avec les organismes communautaires qui oeuvrent en francisation et en intégration.

Maintenant, les orientations pour la planification. Le Conseil supérieur de la langue française appuie de façon générale les orientations en matière de planification de l'immigration, avec quelques réserves. Son appui doit cependant se lire à la lumière des positions que nous avons exposées dans le mémoire. Il émet cependant des réserves quant à l'orientation 5. L'orientation 5 est: «rééquilibrer progressivement la proportion que représente chacun des grands bassins géographiques de provenance de l'immigration pour qu'en 2015 cette proportion soit limitée à un maximum de 30 % pour chacun de ces bassins.» Nous croyons qu'il serait plus approprié d'intervenir sur les motifs qui sont à la source de cette orientation. Essentiellement, ils font référence aux difficultés d'intégration de certains groupes d'immigrants. Les qualifications professionnelles et les facteurs linguistiques sont souvent en cause. Les diverses actions proposées par le ministère, et le renforcement, si nécessaire, devraient permettre de réduire ces difficultés d'intégration.

Le conseil commente ainsi l'orientation 7: «viser une stabilisation relative du volume des admissions pendant la période 2012-2015, de manière [...] qu'en fin de période, soit en 2015, la moyenne [actuelle] annuelle des admissions s'établisse à 50 000 personnes.» Il est approprié de stabiliser, puis de réduire légèrement le volume des admissions de nouveaux immigrants au Québec. Ce devrait être l'occasion de bonifier, par exemple, l'offre de francisation en entreprise, particulièrement celles qui comptent moins de 50 employés et qui sont susceptibles d'embaucher cette tranche d'immigration qui compte les gens moins qualifiés, qui maîtrisent moins bien la langue française et dont certains, de surcroît, sont plus imperméables aux efforts de francisation.

En conclusion, le conseil est convaincu que la réussite de l'immigration passe par l'accès au monde du travail et que l'intégration à la société québécoise n'est vraiment réussie que si elle aboutit à une véritable inclusion sociale. Ce n'est qu'alors que l'immigrant fera le choix du français langue commune. Le choix de la langue française est en lien direct avec l'accès que la maîtrise de la langue donne au travail, et c'est véritablement la possibilité de travailler en français et de vivre en français qui fixe l'usage de la langue. L'objectif de cohésion par l'usage de la langue française sera alors en bonne voie d'être atteint.

Enfin, la francisation et l'intégration sont une responsabilité partagée. Le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles doit utiliser toutes les ressources et expertises disponibles pour atteindre ces objectifs. Merci.

Le Président (M. Cousineau): Alors, merci, M. Ouellon. Alors, nous allons procéder maintenant à la période de questions. Il y aura des questions en provenance des gens du... de la ministre, et puis du gouvernement, et puis des questions en provenance des membres de l'opposition.

J'aimerais avoir un consentement, si c'est possible, pour permettre au député de Lac-Saint-Jean de poser des questions, sur le temps, évidemment, de l'opposition officielle, s'il y a consentement, parce qu'il n'est pas membre de la commission. Est-ce qu'il y a un... Oui?

M. Auclair: Je pense que, si c'est possible, on pourrait également permettre... Parce qu'il y a un député indépendant. Donc, si jamais... on peut lui permettre aussi l'utilisation de temps.

Le Président (M. Cousineau): C'est déjà prévu. D'accord.

M. Auclair: Parfait.

Le Président (M. Cousineau): Ça va comme ça? Il y a un consentement pour le député de Lac-Saint-Jean? Alors, merci. Donc, Mme la ministre, on vous laisse aller pour le prochain 20 minutes.

Mme Weil: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau): Ça me fait plaisir.

**(10 heures)**

Mme Weil: Alors, merci, M. Ouellon, et c'est M. Vézina -- c'est bien ça? -- qui est avec nous. Merci de votre présentation. Évidemment, on recommence la consultation avec un enjeu de taille, un défi important, un défi auquel s'attaque le gouvernement de façon très, très, très sérieuse depuis ces dernières années, c'est la question de la francisation. Évidemment, beaucoup de mesures, selon nous, les données qu'on a, montrent et donnent des résultats. Donc, j'apprécie, puis je vais vouloir creuser un peu plus des idées que vous pourriez avoir sur la société civile, le rôle des entreprises, etc.

Mais, dans un premier temps, je voudrais revenir sur les orientations, juste pour réitérer votre positionnement. Évidemment, pour moi, c'est très important, chaque organisme, qu'on sache très bien où il se situe. Donc, la première orientation, vous êtes d'accord: «porter progressivement à 50 % la proportion des requérants principaux de la catégorie de travailleurs qualifiés.» Vous êtes aussi pour maintenir majoritaire -- vous, vous dites entre 60 % et 65 % -- la proportion de personnes qui connaissent le français. «Augmenter le niveau de connaissances», ça, c'est une nouvelle orientation qui ressemble à beaucoup d'autres juridictions -- je vous dirais, le Canada aussi -- beaucoup de juridictions qui se rendent compte que la langue, la maîtrise de la langue, c'est l'élément d'intégration le plus important, surtout, évidemment, en emploi, mais dans la société généralement. Vous êtes d'accord pour préserver, si vous voulez, le profil jeune de l'immigration.

Maintenant, sur le dossier de... je vous dirais, on a beaucoup de commentaires, c'est cette notion de bassin. Et donc vous dites que cette orientation pourrait paraître discriminatoire. Évidemment, on ne voudrait pas du tout que l'image du Québec soit une image d'un pays qui veut discriminer. Mais j'entends beaucoup de commentaires qui vont dans ce sens-là, je vous dirais que c'est vraiment la majorité des intervenants, et on va l'entendre durant les prochaines semaines.

En parlant avec, surtout, le milieu économique, je vous dirais, beaucoup d'études sont sorties ces dernières années sur la diversité. On parle beaucoup de diversité et ce que la diversité apporte à un milieu. Il y a juste certains acteurs... Et on l'entendra de la Chambre des commerces, Conseil du patronat, c'est que la diversité en soi est un atout pour les entreprises. Donc, on se pose... Moi, je me pose la question s'il y a lieu de trouver peut-être une autre formulation qui serait plus positive, qui irait dans le sens de rechercher cette diversité qui permet, d'une part, une bonne intégration sociale, parce que... Et, pour la langue, c'est important parce qu'évidemment plus il y a de diversité, plus la langue commune peut s'imposer, hein, parce que la langue de communication devient vraiment la langue commune, qui est le français.

Au niveau de l'intégration dans les écoles aussi, c'est un enjeu. On dit que c'est important d'avoir une diversité, pas de... Et, sur la question économique, c'est vraiment l'enjeu qu'on entend beaucoup, beaucoup parler actuellement, je vous dirais, partout, surtout en Amérique du Nord, que les employeurs cherchent des gens qui viennent d'un peu partout, du monde. Ils cherchent des gens avec des cultures, des approches différentes pour augmenter la créativité de leurs équipes, pour aussi avoir des têtes de pont dans un monde qui se globalise de plus en plus. Alors, j'essaie de voir s'il y a lieu, dans nos orientations, de peut-être identifier la diversité comme quelque chose qui est intéressant, pour que le MICC, dans ses ressources et la distribution de ses ressources, puisse continuer... j'ai parlé d'un radar, mais continuer ses efforts de promotion, de prospection dans tout le monde.

Évidemment, il y a toujours la question de la langue qui est prioritaire. Donc, il y a toujours, dans notre système de points, où les gens qui maîtrisent la langue, évidemment, vont être favorisés par le système de points, et ça, c'est important. Ça permet vraiment de stabiliser. Et on le voit, je pense, ces dernières années. Moi, je l'entends, je suis beaucoup au centre-ville de Montréal, c'est vraiment mon milieu, le centre-ville de Montréal, et j'entends beaucoup le français, et c'est un nouveau français. Il y a plusieurs variations d'accent qu'on entend. Mais ce que je trouve vraiment intéressant, c'est de voir cette richesse qui vient se rajouter dans notre milieu de travail. Et donc je vois des gens qui viennent d'un peu partout, puis la langue qu'ils partagent... c'est ça.

Donc, j'aimerais peut-être vous... J'entends votre commentaire sur le 30 %. Ça semble ne pas passer le test d'acceptabilité. Est-ce que vous pensez que ça pourrait être intéressant, et si vous réfléchissez à la question de la langue surtout, parce que c'est votre expertise, cette notion de diversité, qui pourrait être intéressante?

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): C'est bien clair qu'un chiffre comme 30 % pour parler d'objectif d'immigration, c'est quelque chose qui en soi agace. Ça fait très quota. Puis c'est toujours agaçant un petit peu.

La question de la diversité, à mon avis, c'est un des éléments qu'il faudra, un bon jour, vendre à la société québécoise. Nous, on travaille dans des milieux et avec des gens qui sont intéressés à ces questions. Mais, dès qu'on sort de nos circuits habituels, qui sont les circuits haute-ville de Québec, ou peu importe, là, les milieux un peu privilégiés, il faut bien le reconnaître, les gens ne savent pas ça du tout, là. Et c'est pour ça qu'on dit: Cette notion de diversité, qui, à mon avis, est un avantage pour l'avenir du Québec, pour les entreprises, du point de vue économique, cette question de diversité, il devrait y avoir un vaste effort de promotion de l'idée et des avantages que ça peut apporter à une société qui autrement aurait tendance peut-être à se refermer. Ce qu'elle fait peut-être aussi en dehors de certains circuits.

Moi, je pense que, ça, on ne le sait pas tant que ça que l'immigration est un avantage. Et, lorsque j'écoute des commentaires en sortant des milieux montréalais, certains milieux montréalais, certains milieux québécois, les commentaires que j'entends ne sont pas toujours positifs. Et je suis toujours un peu surpris de voir qu'on constate et qu'on comprend assez mal les avantages de l'immigration. Et ça, ça revient à un autre point de mon rapport où je dis qu'à un moment donné ce n'est plus à l'immigrant de porter tout le poids de l'intégration, il faudra bien qu'un jour les composantes de la société québécoise comprennent que les immigrants, c'est un atout pour le Québec et que l'immigration est un atout. Et je ne suis pas sûr qu'on a fait tous les efforts pour que ça se passe comme ça.

Donc, la notion de diversité, à mon avis, c'est une notion à vendre. C'est une notion à développer et à vendre. Et, à mon avis, pour l'avenir d'un Québec français, c'est essentiel que ça se fasse. Parce que l'immigration occupe une part importante de la population actuelle du Québec et elle en occupera une part encore plus grande dans les prochaines années. Mais c'est à développer, et je ne pense pas que ce soit fait. On a eu tendance à dire, jusqu'à maintenant, de façon traditionnelle, que l'immigrant doit faire ci, doit faire ça, mais on n'a pas souvent insisté sur la nécessité de tous les organismes civils de comprendre les avantages que peut apporter l'immigration et de faire leur part pour l'accueil, et ça, je ne suis pas sûr que ça se fasse partout.

Le Président (M. Cousineau): Mme la ministre.

Mme Weil: Très bien. Ensuite, pour ce qui est de l'orientation 6, donc vous êtes d'accord à maintenir annuellement un minimum de 65 % de la part de l'immigration économique.

Pour ce qui est de la stabilisation, donc, là aussi, vous êtes d'accord avec cette notion. Évidemment, derrière cette notion de stabilisation, c'est quand même des volumes importants qu'on prévoit au cours des quatre prochaines années. Mais l'idée, c'était de... Dans ma tête, là, l'expression que j'utiliserais, c'est vraiment réussir l'immigration, réussir à tout point de vue. Et on a mis en branle une série de mesures, depuis deux, trois ans, très, très prometteuses et qui commencent à donner des résultats. Et c'est de s'assurer que les bonnes nouvelles continuent à se propager et encouragent. Donc, quand les employeurs...

On a des chiffres intéressants, en 2010, qui montrent que la remontée, l'embellie du marché du travail a profité légèrement majoritairement aux personnes immigrantes, et de toutes les catégories. Donc, ça, c'est une bonne nouvelle. On verra, en 2011, si c'est une tendance. Pour l'instant, on reste un peu prudents. Mais c'est quand même des bonnes nouvelles. Parce qu'on sait que cette question d'intégration, ça préoccupe tout le monde et le gouvernement aussi. On a mis beaucoup de mesures en place. Donc, vous, vous voyez donc d'un bon oeil cette notion de stabiliser pour pouvoir bien réussir nos mesures d'intégration, leur donner le temps de produire leurs résultats.

Ensuite, vous dites: Peut-être, éventuellement de réduire -- c'est bien ça? -- 50 000... une réduction... Est-ce que je me trompe? Ce n'est pas peut-être ici... stabilisation. Non, c'est peut-être un autre organisme. Excusez-moi. Mais vous dites de nous assurer de ne pas réduire le financement des services en francisation et en intégration. Et absolument, tout à fait d'accord avec vous. Ce n'est pas l'intention. L'intention, c'était justement de pouvoir nous assurer que ces efforts et ces investissements qu'on fait produisent des résultats.

Maintenant, j'aimerais aller sur cette question des organismes communautaires. Évidemment, beaucoup du financement qu'on fait, tant dans les régions, lorsqu'on fait le... avec les ententes de régionalisation de l'immigration, beaucoup d'efforts qu'on met là-dedans. Et, moi, j'ai fait la tournée des régions pour annoncer ces ententes. Je vous dirais que les organismes communautaires sont vraiment des partenaires. Et les entreprises apprécient... Ce n'est pas dire qu'il ne faut pas faire plus, mais les entreprises apprécient beaucoup le rôle des organismes communautaires parce que l'entreprise peut faire un travail d'intégration assez ponctuel, important, oui, parce que le travail joue un rôle important dans la vie d'une personne, prioritaire, mais qu'autour de ça c'est l'avant, pendant, après, c'est à l'extérieur des heures du travail. Et c'est vraiment là, quand on parle de rapprochements interculturels, que tout ça se fait. Et je suis tout à fait d'accord avec vous que les organismes communautaires... et la société civile a à jouer son rôle.

Et j'aimerais qu'on aille un peu plus loin sur cette question du rôle de la société civile, le rôle des fondations, le rôle des organismes communautaires. On en parle moins ici, au Québec, que dans d'autres juridictions, certainement, de l'Amérique du Nord, où le milieu de la philanthropie est beaucoup plus développé, et déjà, tous les efforts en intégration des immigrants, l'espace qui n'aurait pas été occupé par les gouvernements a été occupé par, justement, les organismes de la société civile. Évidemment, le gouvernement du Québec a dû jouer ce rôle et joue bien son rôle, mais il faut aussi des partenaires dans la société en général qui vont stimuler, comme vous dites... bon, de promouvoir la diversité et d'expliquer aux gens pourquoi la diversité est importante et ce rapprochement interculturel. Mais j'aimerais vous entendre juste un peu plus sur ce que vous voyez quand vous parlez d'organismes communautaires et la société civile.

**(10 h 10)**

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): Je veux peut-être parler d'abord de société civile, parce que je pense que tout est lié là-dedans. C'est l'un des points qu'on développe le plus dans notre mémoire -- qu'évidemment j'ai dû un peu résumer dans ma présentation du début -- ça va avec une des réflexions que le conseil est en train de développer. C'est qu'un bon jour, au-delà de l'obligation d'utiliser le français au travail, il va falloir en arriver à un point où on va choisir de parler français, on va choisir de parler français parce que parler français t'assure l'inclusion sociale, te permet de participer au développement de la société. Et il y a des choses qui ne peuvent pas toujours se forcer. Je ne mets pas en cause les lois linguistiques, elles sont essentielles. Mais, au-delà de ça, quand on tombe dans des choix personnels ou dans des décisions de langue d'usage à la maison, il faut que la personne sente que ce choix-là s'impose, et ce choix-là s'impose quand la personne est socialement admise.

À l'heure actuelle, quand on parle d'une intégration socioéconomique, on dit: La personne trouve du travail en français, c'est réglé. C'est loin d'être réglé parce que, lorsqu'elle a fini sa journée de travail en français, si le groupe francophone ne lui donne pas des occasions de participer à ses activités, elle retourne parmi les siens. Et c'est quoi, l'avantage du français? Ce n'est que le travail. Tu ne vis pas dans une société où ton français te permet de t'intégrer à tout point de vue, et c'est ce point de vue là qu'on veut développer.

Quand je rencontre un organisme... un club social dans la région de Montréal -- je ne donnerai aucun détail, parce que, bon, on le retrouverait -- qui donne des récompenses pour une bonne intégration à des immigrants ou à des élèves issus de l'immigration et quand je leur demande après: Vous avez combien d'immigrants dans votre groupe, dans votre club social?, il n'y en a aucun, bien, c'est quoi, le message? C'est un peu ça, notre idée d'une société civile qui, à un moment donné... Et ça, c'est à Montréal, là, ce n'est pas à Sayabec, là, dans la Matapédia, là, c'est à Montréal.

Quand on aura réussi à accepter que des immigrants participent à toutes les activités sociales et s'intègrent dans ces activités, parce qu'on les reçoit, parce qu'on va les chercher dans certains cas -- parce qu'il va falloir aller les chercher aussi -- c'est à ce moment-là que les gens auront l'impression de faire partie d'une société, et le français va devenir une espèce de choix libre parce que c'est nécessaire pour faire partie de cette société-là et d'en tirer les avantages. Ils ont choisi le Québec au départ, ils avaient donc des préjugés positifs. Il faut peut-être les renforcer et ne pas voir le Québec que comme un... -- on ne sait jamais quel mot utiliser -- comme une nation qui n'a que des contraintes linguistiques. Le fait de parler français, c'est un atout pour la société québécoise, et c'est ce qui fait que le Québec est le Québec. Et les immigrants devraient le sentir plutôt que de sentir que le français n'est qu'une obligation.

Donc, c'est dans ce sens-là que, la société civile, il y a un énorme travail à faire. Ça commence par l'école et... En même temps, je fais attention, les jeunes sont peut-être plus ouverts à ça que les gens de ma génération et de la génération de Robert. Mais en même temps je ne suis pas certain que c'est si ouvert que ça socialement, chacun a tendance à vivre dans son coin, un petit peu. Et ça, ça passe par l'école. Il se fait un gros travail. Donc, société civile, c'est ça.

Les organismes communautaires, je dirais qu'il y a chez eux... J'ai rencontré le TCRI à Montréal, c'est des gens que je connais bien, il y a quelqu'un au conseil qui travaille dans les milieux communautaires depuis 25 ans, M. Campanile, et ils sentent une énorme frustration de voir qu'à un moment donné ils n'ont pas les moyens de faire ce qu'ils pourraient faire et de sentir que, dans certains cas, ils dérangent. Donc, ce sont ces frustrations-là que je passe. Mais vous m'avez dit tout à l'heure que ces organismes-là, de plus en plus, vous cherchez les moyens de... je ne dirais pas de les utiliser mais travailler avec eux. Moi, je pense que c'est dans ce sens-là qu'il faut aller.

Le Président (M. Cousineau): Mme la ministre.

Mme Weil: Je crois très, très sincèrement que ces organismes, c'est vraiment les organismes qui sont plus proches de la personne qui vit l'expérience. Ces organismes-là, les gens qui s'impliquent au niveau des conseils d'administration, les bénévoles, les gens qui travaillent là, c'est des gens qui croient en l'immigration. Et, vous avez raison, il faut constamment vendre l'immigration. C'est le rôle qu'on a. Mais on vit quand même dans une société qui est très ouverte à l'immigration. Ceci étant, c'est beaucoup le mandat qu'on a. Et ces organismes sont très bien positionnés pour aider l'intégration, parce qu'ils sont sensibles aux besoins de la société... la société, c'est-à-dire, bon, les entreprises -- moi, je vois beaucoup les organismes qui travaillent aussi auprès des entreprises -- mais en même temps les besoins de l'immigrant.

Je vais aller sur la question de la francisation, puis je pense que c'est un message que vous envoyez au gouvernement tout entier...

Une voix: ...

Mme Weil: ... -- oui -- c'est cette question de rendre les cours de francisation accessibles aux nouveaux arrivants mais également les immigrants de longue date. Vous parlez des Québécois anglophones. C'est gros, hein, comme... C'est parce que, j'imagine, vous voyez l'enjeu comme étant tellement fondamental que j'imagine que c'est un message à toute la société mais au gouvernement aussi, tout entier.

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): C'est un message qu'on a déjà lancé lors de la parution de l'avis sur la cohésion sociale. C'est que les cours de français devraient être offerts à tous. Un anglophone qui arrive de l'Ontario, ou qui arrive de l'Ouest, ou qui veut se perfectionner en français n'a accès à rien. Il ne devrait pas y avoir de ce genre d'exclusion. Je ne suis pas sûr qu'un Amérindien qui veut perfectionner son français a accès à des cours de français.

Vous allez dire: Oui, ça relève d'autres ministères. Mais c'est un peu ça, là, la francisation, ça devrait être quelque chose qui est offert à toutes les classes de citoyens, y compris ceux qui ont pu apprendre le français, puis qui ont pu le perdre, pour toutes sortes de raisons, et qui, à un moment donné, se réveillent coincés. S'ils ne peuvent apprendre le français, ils vont aller à l'anglais, c'est clair. Donc, c'est en ce sens-là que le message est général.

Le Président (M. Cousineau): Merci. M. le député de Charlesbourg... Est-ce que ça va, Mme la ministre?

Mme Weil: Oui, merci.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Charlesbourg, il reste une minute à votre groupe parlementaire, 1 min 15 s, alors question rapide.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Bonjour à tout le monde. M. Ouellon, la seule question que je me posais ce matin et que j'aurais aimé, là, peut-être avoir un bref commentaire de votre part, c'est l'intégration de la seconde génération.

Alors, on a vu que, dans de nombreux pays, souvent la seconde génération d'immigrants se trouve dans une situation difficile, je dirais, souvent des gens qui sont mal intégrés et qui, donc, ne sont plus de leur pays d'origine et ne sont pas de la société où ils sont intégrés. Et j'avais l'impression qu'au Québec ce genre de problème là ne se présentait pas et qu'on réussissait assez bien l'intégration de la seconde génération, et je me demandais si vous aviez un commentaire à ce sujet-là.

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): Bien, je pense que je réserverai mes commentaires, parce que ce n'est pas une question que j'ai poussée. Mais en même temps je ne suis pas convaincu que cette deuxième génération là s'intègre toujours aussi bien. Ça dépend des communautés. Si vous prenez la communauté haïtienne de Montréal, je ne suis pas sûr qu'il n'y a pas certaines difficultés. Dans d'autres cas, c'est clair que ça va bien. Mais ce n'est pas généralisé. Il y a des problèmes parfois ailleurs. Il y a des rêves qui deviennent inaccessibles tout à coup, malgré les promesses qu'on pouvait avoir. Donc, je n'irai pas plus loin que ça.

Le Président (M. Cousineau): Merci, M. Ouellon. Alors, nous allons passer la parole aux gens de l'opposition. Alors, j'ai 18 minutes pour l'opposition officielle et deux minutes pour le député indépendant. Alors, M. le député de Bourget.

**(10 h 20)**

M. Kotto: Merci, M. le Président. Je me permets de présenter mes excuses pour ce léger retard tout à l'heure. J'ai perdu mon stationnement. C'est la raison pour laquelle je vous ai fait attendre. M. Ouellon, M. Vézina, merci d'être là. J'ai été très attentif à vos remarques. Je reviendrai cependant sur les bassins géographiques, que vous avez évoqués, disons, des réserves relativement à l'orientation ici proposée. Actuellement, ces bassins... enfin en 2010, étaient de 36,8 % pour l'Afrique, 25,4 % pour l'Asie, 21,1 % pour l'Amérique et 16,6 % pour l'Europe. Donc, un rééquilibrage qui ramènerait toutes ces entités à 30 %, au profit notamment de l'Asie et de l'Amérique, mettrait en péril, et vous alliez dans ce sens, si je vous ai bien compris, la proportion de personnes parlant le français, ou la diminuer, tout simplement. Est-ce que vous pouvez élaborer davantage là-dessus? Parce que vous avez émis des réserves, mais je n'ai pas entendu la ministre valider votre critique, disons, constructive comme une avenue qu'elle pourrait éventuellement explorer pour la suite des choses.

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): Bon, j'essaie de retrouver les chiffres, je les... C'était quelle page du document? Est-ce que vous pouvez me donner la...

M. Kotto: La recommandation 7.

M. Ouellon (Conrad): C'est la recommandation 7, mais il y a des chiffres derrière ça.

M. Kotto: Cinq, pardon, cinq. Page 11.

M. Ouellon (Conrad): Bon, je ne sais pas si j'ai bien saisi le sens de votre question, je crois que...

M. Kotto: Vous émettiez des réserves relativement à ce rééquilibrage à 30 % relativement aux bassins d'immigration, en l'occurrence parce que les bassins qui en profiteraient seraient essentiellement, généralement, non francophones versus ce qui se passait antérieurement, où l'Afrique, notamment, était le fournisseur premier, bassin dans lequel on retrouve une majorité de francophones.

M. Ouellon (Conrad): Donc, c'est la diminution, si cet objectif de 30 % était respecté tel quel, ce serait la diminution du nombre d'immigrants en provenance de l'Afrique, Maghreb inclus.

M. Kotto: Exact.

M. Ouellon (Conrad): Bon. Notre réponse là-dessus... Et la source de notre réserve est la suivante: si on se pose des questions sur le rééquilibrage des bassins, c'est à cause de certaines difficultés connues d'intégration d'une partie de ce bassin d'immigration qu'est l'Afrique, bon, Maghreb. Bon. Quand on voit les taux de chômage, d'autres études, des taux de chômage qui étaient de l'ordre de 27 %, 20 %, 17 % chez les immigrants en provenance du Maghreb, par exemple, avec des qualifications qui, théoriquement, devraient leur permettre de se trouver un travail, avec une connaissance du français qui, dans bien des cas, est au moins égale à celle des Québécois d'origine, on se pose des questions.

Et le sens de notre réserve est le suivant: au lieu de viser à atteindre un bassin de 30 % pour cette partie du monde là, n'y aurait-il pas lieu de regarder les causes qui font que ce n'est qu'une partie des immigrants provenant de ce continent qui ont des difficultés d'intégration? Et c'est ce qu'on dit: Il faudrait peut-être regarder ce qui cause le problème et intervenir peut-être plus... Il y a déjà des gestes de posés pour que les portes soient ouvertes dans le cas de l'embauche. Mais on sait aussi qu'il y a beaucoup de problèmes. Donc, c'est dans ce sens-là qu'on a une réserve, en disant: Au lieu de viser le 30 %... Il n'est pas sûr que, dans ce 30 % là, par exemple, venant du continent africain, si on tenait à cette limite, il n'est pas sûr que les difficultés d'intégration et de francisation ne seraient pas encore présentes. Donc, c'est sur les causes du problème qu'on suggère qu'il faut agir d'abord avant de penser à une réduction de ce type-là, d'autant plus que c'est le plus grand réservoir francophone à l'heure actuelle, clairement.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Bourget.

M. Kotto: O.K. Alors, si on allait de l'avant avec cette proposition, vous seriez donc d'avis qu'il faudrait substantiellement augmenter, disons, hausser de manière très importante l'offre en matière de francisation pour contrebalancer, dans l'hypothèse où -- hypothèse, j'entends bien -- on aurait, disons, un plus grand nombre de gens venant de l'Asie ou de l'Amérique, nombre de gens qui généralement ne maîtriseraient pas le français, vous seriez d'avis qu'on augmente substantiellement les moyens d'accompagnement, les moyens d'encadrement pour la francisation.

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): Bien, c'est... Il est assez évident que je ne serais pas contre. Mais il y a une autre partie de l'équation qu'il faut examiner, c'est la part que doit prendre la société civile, c'est-à-dire les Québécois, dans l'intégration de ces immigrants. Ce n'est pas qu'une question d'argent à verser en francisation et en intégration, c'est aussi, je dirais, un vaste mouvement pour que la société d'accueil, à un moment donné, ouvre des barrières. Quand j'entends quelqu'un, encore cette semaine, me dire: Mon mari travaille en recrutement d'ingénieurs, et on sait que, dans plusieurs cas, les ingénieurs refusent de rencontrer des candidats venant d'ailleurs, ça fait partie des choses qu'il faut aller... Et ça, ce n'est pas des budgets de francisation et d'intégration qui règlent ça, c'est une conscientisation de la société civile aux avantages de la diversité et de l'immigration.

Cependant, je dis bien que le fait de réduire légèrement le nombre d'immigrants ne devrait surtout pas être une occasion de réduire les budgets. Il faudrait sinon les augmenter, du moins bonifier la façon dont on francise et, je dirais, s'organiser pour que les entreprises, entre autres, profitent de certains avantages qu'on leur offre pour le faire, et ça, je ne suis pas sûr qu'elles le font.

Donc, il faudrait qu'il y ait, de la part de la société, je dirais, un effort beaucoup plus grand pour que ces gens-là puissent être accueillis. C'est bien beau les franciser, mais, si, après être francisés, ils ne réussissent pas à se trouver un emploi, on n'est pas plus avancés.

Le Président (M. Cousineau): M. le député.

M. Kotto: Ma question, en fait, portait strictement sur la francisation. Je voulais vous entendre réagir sur les moyens aujourd'hui à la disposition en cette matière. Quand on délègue un maximum de responsabilités à des organismes et que parallèlement on restreint leurs budgets, c'est contre-productif. C'est plus dans ce sens-là. La francisation permet la maîtrise du français, du moins si elle est bien faite, et c'est le passeport pour l'intégration, dans un premier temps. Les autres facteurs que vous évoquez, qui sont essentiellement culturels... Bon, les distances culturelles entre le Nord et le Sud, ce n'est pas... disons, c'est un facteur, un obstacle la plupart du temps, mais, quand, au plan international, on informe adéquatement les candidats à l'immigration, quand on leur présente le profil socioculturel du Québec adéquatement, normalement...

Je suis un exemple vivant en la matière. Voyez-vous, je ne suis pas né ici, je suis né à 12 000 kilomètres d'ici. Mais, avant de fouler le sol du Québec, je me suis informé de ce qui s'est passé. J'ai, pour m'intégrer, déposé mes lunettes initiales pour porter les lunettes du pays qui m'a accueilli, parce que j'ai rencontré des gens qui m'ont informé de ce qu'était ce pays. Mais je ne pense pas que c'est l'ensemble de ces immigrants qui ont, disons, l'opportunité de vivre une telle expérience avant d'immigrer. La plupart du temps, c'est un miroir aux alouettes qu'on leur présente, et arrivés ici c'est énormément de désillusions, très souvent. Et je ne sais pas ce que le gouvernement entend faire de cet aspect-là de la sélection. Il est question, disons, de leur perspective, de mettre moins d'emphase sur le prérequis qui est la maîtrise du français. Et ça, c'est ma question: Est-ce que, de votre perspective des choses, c'est de bon augure?

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

**(10 h 30)**

M. Ouellon (Conrad): J'essaie de voir de quelle façon je vais aborder ça. La question des budgets de francisation, je suis tout à fait d'accord qu'il ne faut pas que ce soit réduit, qu'il faudrait que ce soit augmenté, ou que ce soit mieux utilisé, je ne le sais pas, là, mais c'est lié à l'intégration. Et le commentaire que vous avez eu, à mon avis, est le bon. Ce n'est pas parce que quelqu'un décide de venir au Québec et qu'il a suivi une conférence ou deux, ou une journée ou deux ou trois sur ce qu'est la société québécoise qu'en arrivant ici c'est réglé. Et ça, à mon avis -- on en parle davantage dans le mémoire -- la question de l'intégration, il faut que les gens soient beaucoup plus informés que ça, parce qu'autrement ils vont être désillusionnés. Ça, c'est très clair. Et je pense qu'il y a autant d'efforts à faire en intégration qu'en francisation. Parce que votre francisation ne donnera rien si l'intégration ne se fait pas à l'autre bout. Il n'y a pas d'intégration sans francisation, puis il n'y a pas de francisation réussie sans l'intégration à l'autre bout: les deux sont complètement liés.

M. Kotto: ...c'est le continuum qu'il ne faut pas négliger. Donc, vous serez d'avis que, si on n'a pas les moyens, si on n'a pas les capacités d'intégrer, il faille être très prudents relativement au flux d'immigration au Québec. Il faudrait, disons, mettre en adéquation notre capacité d'accueillir, d'accompagner, d'intégrer à tous points de vue, linguistique, culturel, social, économique, versus le nombre que nous ambitionnons d'accueillir chaque année.

M. Ouellon (Conrad): C'est exactement le sens du deuxième paragraphe que j'ai lu. C'est notre capacité à recevoir et à intégrer les immigrants qui doit dicter le choix du nombre. Cependant, cette capacité à intégrer et à recevoir, il y a moyen de l'améliorer. Et c'est là-dessus qu'il faut... c'est ça qui dicte le... Et je pense qu'à l'heure actuelle l'augmenter à 55 000, 60 000, 65 000, ce serait téméraire, parce qu'on a des ajustements à faire, il faut travailler sur la capacité d'intégrer.

M. Kotto: J'ai cliqué sur une des remarques que vous faisiez au début de votre allocution, vous parliez de l'expérience de terrain qui n'a pas été suffisamment prise en considération dans l'élaboration des politiques d'immigration. Est-ce que vous pouvez élaborer davantage, là? Vous parlez de quelles expériences de terrain, de quelles perspectives?

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): J'essaie de voir le sens de la question, là. Je sais que ce n'est pas un piège, là, mais j'essaie de voir, c'est...

M. Kotto: Je ne tends jamais des pièges, M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): L'expérience de terrain à laquelle j'ai fait référence, c'est l'expérience de terrain des travailleurs des organismes communautaires qui vraiment ont les petits problèmes concrets la fin de semaine, le dimanche, la nuit, quand les ministères sont fermés puis qu'il n'y a pas d'autres ressources ou des gens qui ne sont pas capables de réussir à détricoter l'ensemble des services offerts, parce que, dans certains cas, une chatte y perdrait ses petits, là. L'Éducation fait de la francisation, il s'en fait à l'Immigration et à Emploi-Québec, et c'est pour ça qu'on parlait d'un guichet unique à un moment donné pour qu'on puisse s'y retrouver. Nous-mêmes, on a de la difficulté à s'y retrouver. Évidemment, je ne suis pas l'Immigration et je ne connais pas tous les détails, mais les travailleurs communautaires, eux, ont cette tâche d'essayer de guider des immigrants qui, dans certains cas, sont en panique, là. Qu'est-ce qu'on fait quand on débarque puis qu'on veut se franciser? Qu'est-ce que je fais si j'ai des enfants à faire garder et si... Et ça, ce n'est pas clair.

Donc, c'est en ce sens-là que je me dis que les organismes communautaires ont un rôle important à jouer. Leur simple référence aux cas concrets de personnes qui ont des difficultés d'intégration ou d'insertion sociale au Québec, ils ont des expériences que tu ne peux avoir dans un ministère où tu ne vas pas de façon automatique. C'est dans ce sens-là que je dis qu'il faudrait exploiter ça.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Bourget.

M. Kotto: O.K. Et c'est probablement pourquoi le ministère envisage probablement de donner plus de responsabilités à ces organismes. Mais vous conviendrez du fait qu'on est dans une contradiction quand on donne une charge plus importante et qu'en même temps on ne donne pas les moyens adéquats.

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): C'est aussi la recommandation que je faisais de s'organiser pour fournir aux organismes communautaires les moyens pour rendre les services qu'ils sont, dans certains cas, les seuls à pouvoir rendre et pour qu'ils sachent où ils vont quand ils travaillent. Autrement dit, des budgets qui durent six mois, après ça, ça tombe, tu ne peux pas développer avec ça.

Le Président (M. Cousineau): Trois minutes.

M. Kotto: Trois minutes. J'ai deux questions. De votre perspective des choses, est-ce que ce sont avant tout les personnes d'origine étrangère qui ne se donnent pas les moyens de s'intégrer ou c'est avant tout la société d'accueil qui ne donne pas les moyens aux personnes d'origine étrangère de s'intégrer?

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): Le sens du mémoire, et la deuxième partie en particulier, passe le message suivant: on considère que les immigrants, lorsqu'ils viennent ici, sauf exception, veulent s'intégrer. Autrement, je ne vois pas pourquoi tu immigres et que tu te places dans une situation de stress, c'est évident.

Et le sens de notre mémoire, c'est de dire qu'il y a une part de la société qui doit être remplie, c'est-à-dire l'autre partie du contrat, les immigrants, vous avez des obligations, il y en a une autre qui incombe à la société civile et au gouvernement, mais surtout à tous les citoyens, de faire leur bout pour les accueillir, pour les intégrer. Ça ne veut pas dire qu'il faut... Le Québec a ses valeurs, a ses caractéristiques, puis les immigrants, au départ, n'ont sûrement rien contre le fait de faire partie de cette société-là tout en conservant des traits culturels, mais, là, on n'embarquera pas dans Bouchard-Taylor, là. Mais il demeure que le message qu'on passe ici, c'est qu'on est peut-être au point où la société civile va devoir faire sa part et beaucoup plus.

Le Président (M. Cousineau): Une minute.

M. Kotto: Une dernière question. Partant de ce point, est-ce vous êtes conscient que, pour la plupart des immigrants qui arrivent ici, au Québec, pour la plupart d'entre eux, ils arrivent en réalité au Canada, et l'approche intégrationniste, appelons ça comme ça, canadienne, penche davantage vers le multiculturalisme? Donc, ce qui leur permet, d'une part, d'adopter la langue d'expression qu'ils veulent, la langue dominante, c'est l'anglais, et, d'autre part, de vivre avec les valeurs, les coutumes, les traditions initiales, parce que c'est encouragé par le multiculturalisme, et, par conséquent, s'enfermer dans des ghettos et pratiquer -- je caricature un peu -- dans l'auto-exclusion économique et sociale, surtout quand ils sont en marge de l'emploi. La plupart des communautés, notamment la communauté arabo-musulmane, recèlent d'un fort taux de chômage, ça, vous le savez.

Le Président (M. Cousineau): M. Ouellon.

M. Kotto: Tout cela est lié.

M. Ouellon (Conrad): Le conseil est très conscient de cette espèce d'ambiguïté qui circule et qui, je dirais, est systémique, là, ça fait partie du système dans lequel on vit. On est très conscients de ça, et c'est également pour ça qu'on dit: À un moment donné, dans l'état actuel des choses, il faut en arriver à vendre les avantages que la société française du Québec, la société dont la langue officielle est le français, il faut vendre davantage ce qu'elle a à offrir de différent et de mieux qu'ailleurs.

Le Président (M. Cousineau): Merci. Alors, pour les deux prochaines minutes, je vais passer la parole au député de Deux-Montagnes.

M. Charette: Merci, M. le Président, M. Ouellon, M. Vézina, merci pour votre témoignage. À mon tour de m'excuser. J'ai dû m'absenter en début d'allocution pour un suivi à l'arrière. Une petite question bien, bien rapide. Je comprends, à travers votre mémoire et vos propos, que vous êtes en faveur d'augmenter le niveau de connaissance du français chez les candidats de la catégorie des travailleurs qualifiés. C'est une des positions que vous défendez. Maintenant, ma question serait de savoir comment évaluer, selon vous, ce degré de connaissance du français chez le candidat lorsqu'une proportion de plus en plus grande de ces candidats sont acceptés à travers leur dossier seulement, donc, sans même qu'il y ait rencontre avec le fonctionnaire chargé d'évaluer son dossier, il est accepté. Donc, comment, selon vous, pouvons-nous parvenir à évaluer la maîtrise du français et attribuer une note en conséquence?

Le Président (M. Cousineau): En une minute, M. Ouellon.

M. Ouellon (Conrad): En une minute, je vous dirais qu'en tant que linguiste de profession je serais assez mal pris pour trouver une recette qui permette de le faire rapidement. Moi, je pense que le seul test, à ce moment-là, c'est le test de l'emploi. Et une personne qui prétend être capable de faire un emploi en français, si elle ne peut pas le faire, on devrait trouver les moyens de l'aider à parvenir à ce niveau de connaissance qui permet de faire un travail qualifié en français. Mais la question des tests, je laisse ça à des spécialistes du ministère qui s'occupent de ces choses. Mais je pense que ça peut se mesurer, mais ce n'est pas facile, je suis bien d'accord, d'autant plus que les exigences ne sont pas nécessairement les mêmes d'une compagnie à l'autre, là, ou d'un employeur à l'autre. Donc, je n'irai pas plus loin je vais être prudent.

Le Président (M. Cousineau): Ça va, M. le député de Deux-Montagnes? Vous avez un 30 secondes.

M. Charette: Merci. En fait, si j'ai quelques secondes, je faisais plutôt référence à l'évaluation du dossier. Souvent le candidat est accepté sur évaluation de son dossier physique uniquement, sans qu'il n'y ait de rencontre avec le fonctionnaire. Donc, ça me semble difficile de mesurer son degré de maîtrise du français s'il n'y a pas eu d'échange avec qui que ce soit.

Le Président (M. Cousineau): D'accord.

M. Ouellon (Conrad): Je suis nécessairement d'accord, mais, en même temps, est-ce que le fonctionnaire est à même de mesurer la qualité du français nécessaire pour produire un travail qualifié? Je n'en suis pas certain non plus.

Le Président (M. Cousineau): Alors, on vous remercie, M. Ouellon, M. Vézina. Merci pour votre présentation, pour votre présence à Québec ce matin à cette commission parlementaire.

J'invite le prochain groupe à se préparer, je crois que c'est l'Union des producteurs agricoles, et je suspends quelques minutes pour faire le changement de groupe.

(Suspension de la séance à 10 h 40)

 

(Reprise à 10 h 44)

Le Président (M. Cousineau): J'aimerais que vous puisiez vous présenter, monsieur, puis présenter les gens qui sont avec vous de chaque côté. Vous avez 15 minutes de présentation. Par la suite, nous passerons à une période d'échange avec les parlementaires et les gens de votre groupe. Allez-y.

Union des producteurs agricoles du Québec (UPA)

M. Lemieux (Pierre): Oui, bien, bonjour, M. le Président, ça me fait plaisir de venir représenter un mémoire, là, devant la commission. Je suis accompagné de Stéphane Forest, qui est conseiller juridique à l'Union des producteurs agricoles, et d'Hélène Varvaressos, qui est la directrice générale d'Agricarrières, un comité sectoriel de la main-d'oeuvre en production primaire agricole. Je suis Pierre Lemieux, premier vice-président général de l'UPA, responsable des dossiers de formation, main-d'oeuvre et d'autres dossiers, mais, pour aujourd'hui, c'est celui-là qui nous concerne, qui nous préoccupe.

Je vous dirais que notre présentation, on va la faire en équipe. Mais je vais faire un petit bout au niveau de l'introduction, et Stéphane et Hélène vont compléter au niveau de la présentation.

Juste pour vous dire, au niveau de l'UPA, vous savez, c'est la première fois qu'on s'implique vraiment au niveau d'une commission comme celle-là, au niveau de la main-d'oeuvre... Dans le fond, la main-d'oeuvre, pour nous, c'est excessivement important dans un contexte de rareté de main-d'oeuvre. L'agriculture est quand même un secteur économique important au Québec. Et je pense qu'il y a quand même des grands principes, là, qui guident notre organisation, notre province. Dans un monde où ce que la population va être en croissance d'une façon importante, il y a quand même la capacité de nourrir notre monde qui est aussi importante.

Ça fait que, dans le secteur agricole, la rareté de la main-d'oeuvre, elle est aussi vraie que dans tous les autres secteurs. Ça fait que l'immigration, pour nous, devient un chemin, une voie, une avenue intéressante qui a déjà, dans le passé, aussi, contribué énormément à faire en sorte, là, qu'il y a des producteurs étrangers qui se sont déjà établis au Québec en agriculture. On a aussi des travailleurs étrangers qui sont impliqués énormément au niveau du monde agricole. On a aussi des travailleurs étrangers temporaires qui gravitent autour des fermes. Je vous dirais qu'il y en a, juste au niveau des travailleurs étrangers, il y en a plus de 6 000 qui travaillent au niveau des fermes dans le moment.

Et, au niveau de l'UPA, notre rôle principal, comme organisation, c'est qu'on rend des services au niveau des producteurs agricoles, au niveau du recrutement de la main-d'oeuvre; on gère, comme organisation, des centres d'emploi agricole en région; et aussi on a un comité... Le comité sectoriel a mis en place ce qu'on appelle Agrijob, sur l'île de Montréal, pour justement recruter de la main-d'oeuvre, pour aider à recruter de la main-d'oeuvre encore plus au niveau de l'île de Montréal, pour faciliter, en tout cas dans un premier temps, dans les régions périphériques de Montréal.

Et aussi on a quand même eu des projets intéressants avec les centres d'emploi agricole, dans la Beauce entre autres, pour faire de l'intégration de nouveaux arrivants au Québec, étrangers, au niveau des régions.

Je vous dirais aussi que, pour nous, on croit fermement que l'immigration, ça favorise le développement de la société québécoise puis par le fait même au niveau de l'agriculture. C'est une richesse, une province ou un pays qui partage dans le fond sa connaissance par l'immigration; pour nous, c'est un facteur de richesse. Et en même temps, bien, ce qu'on vous dit, le critère de la langue française, pour nous, c'est un critère qui est excessivement important, parce que, ce qu'on a remarqué au niveau, dans le fond, du questionnement, c'est qu'on ne parle pas beaucoup au niveau des régions, dans le fond, le MICC questionne peu l'intégration des immigrants en région. Et, pour nous, c'est une priorité. Je vous dirais que, l'immigration, il va falloir qu'on donne vraiment un coup de barre pour faire en sorte que l'immigration puisse être plus présente en région. Parce que l'agriculture, nous, c'est en région, puis si on veut dynamiser les territoires dans l'avenir... Je pense que le Québec a fait un choix de dynamiser ses régions, dynamiser son territoire, et que ça va pouvoir vraiment... que l'immigration devienne accessible puis qu'elle reste au niveau des régions aussi.

Je vous dirais en même temps que le taux actuel des immigrants, pour nous, je pense qu'aux alentours de 50 000 c'est quand même un taux qui est satisfaisant. Et il y en a quand même déjà un certain nombre, mais il y en a aussi beaucoup qui viennent, des travailleurs étrangers temporaires, un très grand nombre de travailleurs étrangers temporaires. C'est pour ça que, pour nous, au niveau de l'immigration, c'est quand même des dossiers qui sont excessivement importants et pour lesquels on s'est impliqués.

Je vous dirais en même temps que le dossier de la main-d'oeuvre, pour les producteurs puis les productrices agricoles, c'est excessivement important, et c'est des choses qui, pour nous, vont faire en sorte que l'agriculture de demain va pouvoir exister ou pas dans un phénomène de rareté, parce qu'on a de plus en plus en main-d'oeuvre étrangère.

Et, un des éléments sur lesquels on accroche actuellement, c'est au niveau de la qualification. La qualification, actuellement, elle est basée principalement sur la scolarité. Est-ce qu'on pourrait ajouter des niveaux de qualification qui sont différents, entre autres par rapport à la compétence? Parce qu'au niveau d'Agricarrières, les comités sectoriels, on a quand même développé des programmes d'apprentissage en milieu de travail qui font en sorte qu'on réussit à valoriser la compétence dans le fond, où on développe la compétence des gens.

Ça fait que, nous, ce qu'on dit, au niveau de l'immigration: Est-ce que ça serait possible aussi, dans des critères... pas seulement que les baser sur la qualification, mais aussi sur la compétence? Parce que, vous savez, dans le monde agricole, oui, il y a des gens qui travaillent avec des très fortes qualifications, mais aussi il y a des gens qui... mettons si on dit qu'ils sont un petit peu plus manuels, bien, il y a aussi une rareté de ces gens-là. Ça fait que c'est pour ça qu'on dit: Il faut quand même valoriser les individus, mais, par la valorisation, ça pourrait être intéressant de valoriser les individus même s'ils n'ont pas nécessairement des hauts taux de formation. En tout cas, nous, c'est des éléments intéressants qu'on voudrait travailler puis qu'on voudrait que vous teniez compte, là, dans votre analyse des besoins. Ça fait que je passerais à Stéphane.

Le Président (M. Cousineau): Oui. M. Forest.

**(10 h 50)**

M. Forest (Stéphane): Alors, merci, M. Lemieux. Alors, pour aller de façon un peu plus précise dans les sept orientations que nous avions à analyser et à soumettre, là, des propositions ou des commentaires, on pourrait aller à la page 3, là, de notre document et parler brièvement du français. Alors, oui, pour la connaissance et le niveau de qualité du français dans l'immigration, on est d'accord avec la recommandation qui est proposée par le ministère. Pour nous, ça doit être maintenu.

Toutefois, on est conscients que c'est un défi qui est de taille, parce que cette orientation vient un peu en conflit avec une autre que le ministère a de rééquilibrer les bassins d'immigrants. Et, comme vous l'avez discuté dans la précédente intervention, ce rééquilibrage-là va nécessairement se faire au détriment du bassin de l'Afrique qui est majoritairement francophone. Alors, vous avez, je pense, un défi qui est important, mais, pour l'UPA, la clé de l'intégration, c'est le français, donc votre orientation est dans le sens.

Maintenant, votre autre recommandation sur le rééquilibrage, on se dit: il y a peut-être une contradiction entre les deux choix. Puis, le précédent intervenant l'a bien dit, ce n'est pas parce qu'il y a une certaine portion de l'immigration africaine, maghrébine principalement, qui a de la difficulté à s'intégrer... il faut s'attaquer aux causes de cette difficulté d'intégration là plus qu'au fait qu'empêcher ces immigrants-là de s'installer ici. Il y a des bouleversements socioéconomiques dans le monde maghrébin actuellement. Il y a peut-être une opportunité de mieux cibler l'immigration à l'intérieur de ce bassin-là par la connaissance du français, mais également par la qualification. Ça me permet d'aller à ce que disait M. Lemieux sur la qualification.

Oui, dans le système de grille d'analyse, le pointage du français est important, et le pointage de la scolarité, de la diplomation l'est aussi. Or, on ne reconnaît pas les autres expériences de travail. Et, dans le domaine agricole, les expériences de travail peuvent être génératrices de bénéfices pour les entreprises agricoles. On ne veut pas être péjoratifs en disant qu'on a besoin d'une main-d'oeuvre moins qualifiée, plus manuelle. Mais, si cette main-d'oeuvre-là, en plus, a un haut taux de scolarité parce qu'elle a complété un diplôme d'études secondaires et qu'en plus elle a une connaissance aussi bonne sinon meilleure du français que la population actuelle... qui vit au Québec, bien, je pense qu'on a des atouts, là, à regarder.

Alors, c'est sur que rééquilibrage des bassins, c'est un peu plus.. on voit ça un peu plus dans une difficulté compte tenu de votre première recommandation. Je laisserais peut-être la parole à Hélène sur les autres sujets.

Le Président (M. Cousineau): Mme Varvaressos.

Mme Varvaressos (Hélène): Oui. Bonjour. Alors, j'allume ça?

Des voix: ...

Mme Varvaressos (Hélène): Non? C'est beau? Tout est beau? Alors, bien deux points en fait, là, sur la question de la régionalisation de l'immigration et puis sur la question de l'intégration des travailleurs étrangers temporaires.

Sur la question de la régionalisation, alors, nous, comme comité sectoriel de main-d'oeuvre qui est partenaire de l'UPA dans les dossiers de main-d'oeuvre, on participe depuis plusieurs années à des projets d'intégration de personnes immigrantes en région puis on a des belles réussites à ce sujet. Mais on a été surpris de constater qu'il n'y avait pas d'orientation qui touchait la régionalisation de l'immigration. Pourtant, on sait qu'effectivement c'est un défi très important qui attend le MICC, dans les prochaines années, et tous les partenaires du marché du travail. Ça nous surprend d'autant plus qu'il y a plusieurs déclarations qui ont été faites à l'effet que l'immigration serait un levier important du développement régional. Alors, ça, c'est une préoccupation qu'on soulève. Et, à la lumière des expériences qu'on a faites, il nous apparaît qu'il faut beaucoup plus de support aux organismes régionaux pour soutenir l'intégration.

Les expériences qu'on a jusqu'à maintenant nous démontrent qu'il faut vraiment faire du partenariat, de la concertation entre tous les acteurs régionaux pour être capables de soutenir l'intégration. Ce n'est pas quelque chose qui se fait facilement, puis je vous donne un exemple, par exemple: le transport. Les personnes immigrantes qui arrivent à Montréal puis qu'on essaie d'installer dans la Beauce, la principale limite, c'est qu'ils n'ont pas de transport, ces personnes-là. Alors, si on veut les former, si on veut... parce qu'il y a une formation qui est préparatoire à l'emploi, alors déjà tout de suite on a une contrainte qui est liée à la question du transport et déjà on sait que le MICC se retire dans ce projet-là de la question du transport puis l'intégration pour la prochaine année. Alors, ça, c'est quelque chose qu'on déplore.

Par ailleurs, on voulait vous parler aussi de la question des travailleurs étrangers temporaires. On se surprend qu'en agriculture... Vous savez, il y a à peu près autour de 6 000, 6 500 travailleurs étrangers temporaires qui viennent depuis nombre d'années en agriculture partout au Québec maintenant, dans plusieurs productions, et on trouve ça surprenant que ces travailleurs étrangers temporaires là, qui souvent sont là depuis 10, 15 ans chez le même employeur, n'ont aucune possibilité d'appliquer pour devenir immigrants compte tenu qu'ils n'ont pas de diplôme de secondaire V et qu'ils n'ont pas une connaissance du français, là, selon les critères du ministère. Alors, ça, c'est vraiment surprenant.

J'ai piloté personnellement des producteurs qui étaient intéressés à faire immigrer leurs travailleurs et qui ont frappé un mur. Et ça, ça nous surprend d'autant plus que ces gens-là ont déjà un emploi, ils ont des rappels à chaque année qui sont faits pour leurs emplois, ils sont ici depuis très longtemps, ils sont bien intégrés dans leurs emplois, ils ont une bonne connaissance du Québec. C'est sûr qu'il y a des choses à améliorer au niveau du français, mais ils connaissent bien leur travail, et on pense qu'il y a un potentiel, là, très intéressant de futurs immigrants pour le Québec. Alors, c'est la... Je terminerais avec cette question.

M. Lemieux (Pierre): Juste en conclusion, on a quand même une particularité, là, une demande qui est assez urgente, c'est au niveau des médecins vétérinaires. Il y a une pénurie, il y a un manque important de médecins vétérinaires actuellement au Québec pour soigner les animaux. Nous, ce qu'on demande au MIQ, là, c'est d'intervenir au niveau de l'Ordre des médecins vétérinaires pour qu'il accélère, là, la reconnaissance au niveau des travailleurs étrangers pour reconnaître les normes de formation de ces gens-là pour qu'ils puissent exercer le métier de médecin vétérinaire. Actuellement, il y a vraiment une pénurie, une rareté.

Le Président (M. Cousineau): Alors, merci, M. Lemieux. Ça va? Donc, nous allons passer à la période d'échange avec les parlementaires: 18 minutes du côté du parti gouvernemental, 16 et puis deux minutes. Alors, Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Weil: Oui. Alors, merci beaucoup. Surtout je comprends que c'est la première fois que vous vous présentez pour parler de ce dossier extrêmement important. J'irais sur les orientations, mais d'entrée de jeu je veux vous dire que je suis très sensible à ce que vous soulevez sur la question des travailleurs dont vous avez besoin, dont le secteur a besoin pour le développement du secteur et juste le maintien de la main-d'oeuvre dont vous avez besoin.

Je voulais savoir si vous avez vu des modèles ailleurs. Je crois que l'Alberta a réussi à trouver une solution à cette question. Je me demandais si vous avez fouillé la question un peu plus sur cette question de qualifié, non-qualifié. Mais, bon, c'est la question.

Mme Varvaressos (Hélène): Oui, j'ai pris connaissance de ce qui se fait en Alberta. Effectivement, ils ont des normes professionnelles leur permettent de qualifier des travailleurs étrangers temporaires à partir de ces normes professionnelles là. Alors, on est en plein processus, comme M. Lemieux le mentionnait tout à l'heure, de développement. On a déjà trois normes professionnelles en agriculture et on est en train de développer, là, des outils aussi d'évaluation des compétences. Alors, on peut passer par le programme d'apprentissage, mais on peut aussi passer par un processus plus rapide pour des personnes qui ont déjà des compétences, pour évaluer leurs compétences et les reconnaître en milieu de travail.

Alors, c'est une expérience très, très intéressante, là, qui pourrait nous inspirer au Québec, là, pour la reconnaissance des compétences à la fois des immigrants puis des travailleurs étrangers temporaires.

Le Président (M. Cousineau): Mme la ministre.

**(11 heures)**

Mme Weil: Oui, moi, je pense que vous soulevez un enjeu extrêmement important pour l'avenir du Québec et de ce secteur. Et moi, ce que je pense qu'il faudra faire, là, avec Emploi-Québec, et le MIQ, et vous, qu'on poursuive nos discussions, je vous dis ça, là, pour vraiment essayer de creuser la question. Il y a des aspects techniques, mais il y a des aspects de besoin de main-d'oeuvre. Déjà, vous, vous sentez la pression, mais je pense que ces pressions vont aller grandissantes, et c'est un enjeu pour les régions aussi évidemment. Donc, juste pour vous dire l'ouverture que nous avons d'aller plus loin pour regarder cette question-là.

Et vous parlez de compétences, c'est ça, c'est la compétence. On pourra regarder cette question des travailleurs temporaires aussi, évidemment, qui sont déjà intégrés, parce qu'ils sont là... Là, évidemment, ce sera quatre ans, le maximum, mais, même avec quatre ans, ils sont intégrés, ils ont appris des choses, ils ont acquis des compétences, la langue, toutes sortes d'évolutions dans leur parcours, même en quatre ans. Et donc ça peut devenir évidemment une immigration intéressante. Alors, je vous dis ça, là, d'entrée de jeu.

Bon, alors, si on y allait... Donc, évidemment, l'orientation 1, progressivement de porter à 50 %. Évidemment, à la lumière de cette question-là je comprends vos réserves, bon. Bon, maintenir majoritaire la proportion de personnes qui connaissent le français, vous êtes d'accord. D'accord avec l'orientation 3, c'est-à-dire d'augmenter le niveau de connaissance.

Les bassins... J'ai eu l'occasion... Puis je voudrais corriger peut-être le commentaire qui a été fait tantôt, lorsqu'on a rencontré le groupe avant vous, moi, j'ai bien entendu les réserves des organismes, vous n'êtes pas les seuls à vous inquiéter de cette notion de 30 %. Moi, je le sens, je l'entends, je l'ai lu, beaucoup de préoccupations par rapport au message que ça envoie. Donc, on... moi, j'essaye de voir si... Parce qu'on entend beaucoup des employeurs qui nous disent, ils veulent la diversité. La diversité, ça veut dire des gens qui viennent de partout, parce que c'est bon pour leurs affaires à beaucoup de points de vue: au point de vue interne, au point de vue développement de stratégies, perspectives nouvelles. Ils veulent des gens qui viennent de cultures différentes, l'intégration se fait bien, au-delà de la langue, au point de vue culturel et tout, et aussi dans un contexte de globalisation. Ils cherchent des marchés... Ça ne veut pas dire que l'origine de la personne ne pourrait pas être un Français qui se retrouve au Brésil depuis plusieurs années. La connaissance de la langue, ça va toujours se faire. C'est-à-dire, le MEQ a beaucoup, beaucoup de programmes de francisation en ligne, on a des partenariats avec des alliances françaises. Et souvent c'est peut-être un à trois ans avant que la personne arrive, et donc ils ont une base en français, mais ils peuvent perfectionner le français. Et ça donne des bons résultats, ces cours-là. Et ensuite on poursuit les efforts.

Donc, est-ce que cette notion de diversité, c'est peut-être moins un enjeu dans votre milieu? Si on avait une orientation, donc, qui ne parlerait plus de bassins ou de chiffres, de 30 %, mais une notion d'orientation de diversité, vous trouvez ça peut-être porteur ou...

Le Président (M. Cousineau): M. Forest.

M. Forest (Stéphane): Oui. Écoutez, je pense que c'est une avenue qui est intéressante. Toutefois, on va peut-être se retrouver avec un peu la même problématique: est-ce qu'on veut une diversité de partout sur la planète ou on veut des diversités par sous-continents? Vous dites que les entreprises veulent de la diversité. Si on prend actuellement le bassin africain, s'il y a un continent où il y a de la diversité tant culturelle, sociale que religieuse, c'est bien en Afrique. Alors, cette diversité-là, elle est là. Et on a un continent dont le développement, dans les futures décennies, va être exceptionnel. Il y a des niveaux de vie à augmenter, alors il y a des marchés à développer. Alors, dans ce sens-là également, compte tenu de l'importance du critère du français, il y a un défi, mais il est là. La diversité peut être là quand même, moi, je pense, avec les seuils de répartition qui sont actuellement ceux qu'on connaît.

Le Président (M. Cousineau): Mme la ministre.

Mme Weil: C'est ça. Pour continuer sur cette question-là, de diversité, c'est beaucoup aussi de s'assurer que, dans nos ressources et la répartition de nos ressources, on s'assure de toujours chercher, bon, le continent sud-américain, évidemment, donc des gens qui viennent du Mexique, du Brésil, de l'Asie, de l'Afrique. Et l'Afrique, ce n'est pas homogène, vous le soulignez, il y a beaucoup de cultures, de langues, de bassins, là, en Afrique, mais c'est de continuellement s'assurer qu'on continue à regarder un peu partout.

Alors, moi, je suis en train de réfléchir et je vais poser la question à tous les groupes, ou certainement à ceux qui se prononcent sur cette question de bassin, s'il y a lieu, s'il y a lieu d'avoir une orientation.

Le groupe avant vous, le Conseil de la langue française, a souligné que, même la diversité, il faut continuer à vendre cette notion au sein de la société québécoise. Vous, vous venez ici parce que vous êtes intéressés pas l'immigration, vous voyez l'immigration comme un atout, mais que ce n'est pas nécessairement toute la société québécoise qui... c'est une société ouverte, comme toute l'Amérique du Nord, mais il y a encore du travail à faire. Donc, cette question d'orientation pourrait être aussi un signal, un signal d'une société ouverte qui... Et ce n'est pas un mot qu'on voit partout, hein, «diversité». Un commentaire que j'ai eu de quelqu'un qui venait de l'Europe, il était surpris de voir à quel point l'adhésion à la diversité était quelque chose... il entendait des élus prononcer ça constamment, il était assez impressionné. Donc, je pense qu'on a cette adhésion, c'est juste de voir est-ce qu'on veut aller plus loin, et dans les faits, qu'est-ce que ça veut dire, d'adhérer à la diversité?

Pour les autres orientations... Pour les volumes, donc, les volumes, vous êtes d'accord avec cette notion de stabiliser afin de réussir. L'idée, ici, c'était vraiment aussi, d'une part, de... C'est plus ou moins une pause, parce que, 50 000, il faut dire qu'il faut maintenir beaucoup d'efforts en francisation, en intégration, ce n'est pas du tout un relâchement à ce niveau-là, mais de réussir toutes les mesures qu'on a mises en branle depuis ces dernières années en intégration.

Donc, si vous êtes d'accord avec cette notion de... Mais vous dites, vous êtes peut-être aussi en faveur de hausses de volumes d'immigration. Comment vous voyez ça, ces volumes?

Le Président (M. Cousineau): M. Lemieux?

M. Lemieux (Pierre): La hausse... Nous, c'est parce que, compte tenu du grand nombre de travailleurs temporaires qu'il y a, c'est pour ça qu'on dit que le niveau d'immigrants reçus dans le fond pourrait être augmenté, parce qu'on commence à trouver qu'il y a beaucoup d'immigrants temporaires qui viennent pour travailler l'été durant quelques jours puis qui quittent, là, par la suite. Ça fait que c'est pour ça qu'on se prononce pour avoir une possibilité d'augmentation au niveau des immigrants reçus, là, officiellement.

Le Président (M. Cousineau): Un complément de réponse, madame... Non? Ça va? Mme la ministre?

Mme Weil: Sur la question... Juste pour savoir, dans votre milieu, la question de la langue. Est-ce que les employeurs font des efforts, même si c'est des travailleurs temporaires, au niveau de connaissance de la langue? Bon, parce qu'on parle beaucoup du rôle des entreprises, la francisation au sein des entreprises, mais, dans le milieu agricole aussi, est-ce qu'il y a des efforts pour permettre... même sachant qu'il y a... On parle de temporaires, mais à plus long terme, pas saisonniers, là, est-ce qu'il y a des efforts pour aider ces travailleurs à acquérir une connaissance de la langue?

Le Président (M. Cousineau): Mme Varvaressos?

Mme Varvaressos (Hélène): À première vue, là, ce n'est pas évident, quand vous êtes en campagne, en région éloignée, hein, d'organiser des cours de francisation pour une personne, là, dans ton équipe, là, qui est une personne immigrante, là. On va essayer de collectiviser tout ça dans des projets spéciaux.

Alors, par exemple, on parle souvent du projet de la Beauce, mais c'est un projet, je pense, intéressant qu'il faut souligner, depuis huit ans, eux essaient de... Quand ils font la sélection puis le recrutement des personnes qui participent au projet, les personnes immigrantes de Montréal, ils s'assurent d'avoir à l'avance un niveau de français suffisant pour pouvoir participer au projet, compte tenu qu'il y a une formation qui est préalable. Et, pour être capable de suivre la formation qui se donne dans un centre de formation professionnelle, bien, il faut avoir une connaissance minimale du français.

Autrement, c'est sûr qu'en formation continue organiser des cours de français, comme je vous dis, dans des entreprises où est-ce que tu as une personne immigrante ou même si tu as des équipes, des équipes que tu recrutes pendant l'été en pleine saison des récoltes, là, ce n'est pas à ce moment-là que tu vas commencer à donner des cours de français, tout le monde travaille. Puis vous savez qu'en agriculture il y a du travail où est-ce que, pendant quelques semaines, tu fais ton revenu de l'année, là. Alors, c'est sûr qu'il faut que ça s'organise autrement.

Et c'est pour ça qu'il y a des... c'est important, là, de pouvoir aider les organismes qui sont déjà en place puis qui peuvent donner un coup de main à ce niveau-là pour aider les entreprises au niveau d'améliorer la connaissance du français de leurs personnes immigrantes qui sont embauchées.

Le Président (M. Cousineau): Mme la ministre.

**(11 h 10)**

Mme Weil: Oui, je voudrais maintenant revenir sur les questions de la régionalisation. Évidemment, on est dans des orientations pour la sélection, mais, dans le plan stratégique du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, la régionalisation est très importante. Et je veux vous déclarer ma volonté, la volonté de mon ministère d'aller encore plus loin.

Mais, depuis les 10 dernières années, il y a quand même... les chiffres ont doublé pour l'installation en région des immigrants. On a établi la passerelle... Évidemment, on travaille beaucoup avec Emploi-Québec. Le ministère de l'Immigration travaille très étroitement -- et on devra travailler encore plus étroitement -- avec le ministère de l'Emploi sur toutes ces questions d'occupation du territoire. Et c'est beaucoup dans une optique d'occupation du territoire, hein, la Passerelle pour l'emploi qui fait un lien entre les immigrants qui se retrouvent à Montréal pour aller en région. Moi, j'ai eu l'expérience de rencontrer des immigrants qui se sont installés en région, les employeurs aussi, les organismes communautaires qui travaillent. Il y a des ententes qu'on signe avec les acteurs du milieu, donc c'est toujours les CRE, les municipalités, les autres acteurs.

Je pense qu'il y a vraiment une voie intéressante et je peux vous dire que j'ai toute intention de poursuivre dans ce sens-là, de continuer à travailler à appuyer les régions. Je pense que, pour les immigrants, c'est une belle expérience -- c'est ce que je vois -- c'est une belle expérience d'aller en région, l'intégration se fait quand même bien. Et ils commencent souvent la prospection ou l'employeur bien avant que la personne arrive, hein? Avec l'Internet, on peut faire beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses.

Alors, je voulais juste vous dire que oui, c'est un enjeu important, et, dans notre prochain plan stratégique, on aura sûrement lieu de même rehausser cette orientation. Alors, je voulais juste vous rassurer, puis c'est surtout par rapport aux... On ne peut pas donner des points pour des gens qui expriment vouloir aller en région ou autre, parce que ça pourrait être problématique au point de vue juridique, mais c'est une orientation du ministère et du gouvernement.

M. Lemieux (Pierre): Moi, je vous répondrais, Mme la ministre, que...

Le Président (M. Cousineau): Oui, M. Lemieux.

M. Lemieux (Pierre): Je vous répondrais que l'agriculture...

Mme Weil: ...donne des points pour les offres d'emploi validées en région.

Le Président (M. Cousineau): D'accord. Un ajout, M. Lemieux?

M. Lemieux (Pierre): Je vous répondrais, Mme la ministre, qu'on en est conscients, qu'il y a eu une augmentation de travailleurs étrangers immigrants qui sont de plus en plus présents en région. L'agriculture a contribué, comme, je pense, tous les autres secteurs, à ce phénomène-là. On a des beaux exemples de réussite, entre autres dans la Beauce, dans la région de Chaudière-Appalaches. Je vous dirais, j'en ai personnellement chez mon frère, qui est producteur en serre dans la région de Québec, qui a des travailleurs étrangers reconnus à son entreprise. On a aussi des exemples au Saguenay-- Lac-Saint-Jean d'intégration de travailleurs étrangers au niveau des serres. Ça fait que, je pense, le secteur agricole contribue. Mais, je vous dis, au niveau de la présence en région, pour nous, avec le temps, ça va s'accentuer encore plus.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Vimont, vous avez un beau 2 min 30 s.

M. Auclair: Ah! bien, c'est 30 secondes de plus que mon collègue de tantôt.

Le Président (M. Cousineau): Allez-y, allez-y.

M. Auclair: Je me sens très, très gâté.

Bonjour. Merci beaucoup de votre présentation. Écoutez, moi, les éléments qui m'intéressent beaucoup au niveau de l'intégration des travailleurs étrangers, bon, de la main-d'oeuvre et tout ça, vous avez parlé que vous n'avez pas de problème, vous regardez les cibles puis vous dites: Bon, il y a peut-être des possibilités d'augmenter. Vous semblez bien vivre avec ça, quoiqu'il faut que ça se fasse dans une intégration, francisation et tout ça.

Dans les 10 dernières années, il y a plus de... on est près de 400 000 nouveaux Québécois, des gens qui ont fait le choix d'immigrer au Québec. À travers tout ça, si je suis votre logique -- puis je ne suis pas en désaccord avec ce que vous dites, là -- combien vous considérez de ces gens-là, nouveaux arrivants, vous avez réussi à intéresser par la culture, par justement, bon, les régions? Parce qu'on sait que c'est bien beau que les gens arrivent chez nous, mais il faut qu'ils travaillent. Il faut qu'ils travaillent, puis c'est de là qu'ils vont vraiment s'intégrer. Puis c'est de là que l'intégration, selon moi, va passer beaucoup plus que d'autres... beaucoup d'autres programmes. Comment vous les trouvez, vous, de votre côté, pour aller justement vous impliquer? Parce que ça fait partie de votre rôle, pour moi en tout cas, ça fait partie de votre rôle d'aller chercher et de trouver cette main-d'oeuvre-là si elle est déjà ici. Il y en a 400 000 qui sont ici. Il y en a des spécialisés; il y en a d'autres moins. Et qu'est-ce que vous faites comme gestes, vous, pour aller les chercher, les intéresser?

Le Président (M. Cousineau): En une minute.

M. Lemieux (Pierre): Je vais demander à Hélène de répondre, puis je ferai un complément par la suite.

Le Président (M. Cousineau): Oui, Mme Varvaressos.

Mme Varvaressos (Hélène): Bon. Écoutez, on n'a pas de statistiques bien précises, là, sur les réussites en matière d'intégration de personnes immigrantes. C'est une tradition de longue durée en agriculture qu'on accueille des immigrants, surtout pour les récoltes pendant l'été. Il y a autour de Montréal...

M. Auclair: ...puisque c'est du saisonnier, ça.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Vimont...

Mme Varvaressos (Hélène): Oui, mais c'est la réalité, là. Autour de Montréal, Agrijob, je vous dirais qu'on recrute et on place à peu près 2 000 travailleurs de Montréal pour des travaux saisonniers autour de Montréal, alors entre 1 000 et 2 000 à chaque été, des gens qui... Bon, c'est sûr qu'ils ne veulent pas faire carrière en agriculture, mais ils n'ont pas de possibilités d'emploi. Et d'ailleurs c'est étonnant de voir, hein, même on place des fois des médecins puis des vétérinaires, là, des gens pour travailler en agriculture parce qu'ils ne se trouvent pas d'emploi dans leur domaine d'activité à Montréal même. Alors, ils sont surqualifiés, ils sont là en attente puis, bon, ils sont disponibles pour travailler en agriculture pendant l'été, puis, nous, on prend tous les gens qui sont intéressés.

Dans les emplois plus spécialisés en région, bien, c'est plus par le biais de projets. On a des belles réussites. Depuis huit ans, disons que... Mais là tu y vas par projet et ça demande beaucoup d'efforts. À peu près 50 % des personnes qu'on a formées qui sont des personnes immigrantes ont été placées, elles sont stables, encore en emploi présentement.

Le Président (M. Cousineau): D'accord. Merci, madame. On doit passer à l'autre groupe parlementaire, toujours en faisant attention de ne pas parler en même temps pour les fins d'enregistrement. Alors, je passerais la parole au député de... ah! député de Lac-Saint-Jean. Donc, vous avez 16 minutes.

M. Cloutier: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue et vous remercier pour la présentation que vous venez de nous faire. Je suis député de Lac-Saint-Jean, comme le président vient d'en faire mention, et vous avez abordé la question de la régionalisation de l'immigration. Chez nous, Mme la ministre, au Lac-Saint-Jean, nous gérons la décroissance de la population, et l'immigration, son déploiement sur le territoire québécois, a des conséquences importantes. On sait qu'avec le taux de natalité au Québec l'immigration comble une partie importante de l'augmentation de la population, mais le déploiement sur le territoire québécois se fait de façon, je dirais, un peu anarchique. Le Lac-Saint-Jean est particulièrement pauvre en termes de terre d'accueil contrairement à la volonté et je dirais même à la nécessité pour assurer le maintien non seulement de la population actuelle, mais pour qu'il y ait un jour une croissance. Nous vivons une décroissance depuis 15, 20 ans maintenant et une décroissance qui est toujours bien réelle.

Lorsque j'entends la ministre qui nous dit: Il y a eu des efforts de faits, il faut saluer ces efforts, mais la réalité fait en sorte qu'il reste tellement de choses à faire qu'on doit absolument trouver une solution pour le redéploiement. Alors là, tout à l'heure, vous avez abordé le problème de transport pour la région de la Beauce. J'avoue que ce n'est pas quelque chose que je connais. Peut-être nous donner davantage de précisions sur le type de problèmes que vivent les nouveaux arrivants pour s'établir entre autres sur le territoire de la Beauce.

Mme Varvaressos (Hélène): La question du transport, c'est sûr que...

Le Président (M. Cousineau): Mme Varvaressos.

Mme Varvaressos (Hélène): ...excusez-moi, pour des... Quand on recrute des gens à Montréal, des travailleurs de Montréal évidemment, pour aller s'installer dans une région comme la Beauce, c'est toute la famille évidemment qu'on va déraciner puis qu'on va installer dans la Beauce. Ces gens-là en général, je veux dire, ils ont toutes sortes de statuts et, souvent, ils ne sont pas encore même résidents permanents, Il y en a quelques-uns, là, ou ils viennent juste de l'obtenir. Ils n'ont pas beaucoup de... ils n'ont pas d'argent à investir. C'est des gens, là, qui n'ont souvent pas d'auto. Alors, s'ils n'ont pas de transport, je veux dire, ça devient une contrainte majeure. Mais là il y a les enfants pour l'école, il y a la femme aussi qui doit se trouver un emploi. Alors, une ferme, elle ne peut pas régler tous ces problèmes-là d'un coup.

C'est pour ça qu'on dit que ça prend un organisme, des organismes régionaux, des organismes aussi proches des communautés culturelles, là, avec lesquelles on fait affaire, pour aider ces gens-là à s'établir, s'installer, trouver un logement, trouver l'école, trouver un emploi pour l'épouse puis trouver des façons de déplacer les travailleurs de l'entreprise, bon, si on les envoie à l'école aussi se former. Et ça, là, c'est vraiment problématique, la question du transport. Je peux vous dire que c'est un des problèmes majeurs que l'on a présentement, puis je n'ai pas de solution. C'est un problème qu'on discute en agriculture depuis des années.

Le transport, c'est déjà déficient au Québec, dans les régions éloignées, alors les solutions qu'on réussit à trouver pour la formation entre autres, c'est de payer des taxis, les mettre dans des taxis puis essayer de les loger pas trop loin des centres de formation. Quand c'est le temps après ça de les envoyer travailler sur les fermes, là, il faut qu'ils fassent du covoiturage. Alors, il faut qu'ils travaillent dans des entreprises où il y a beaucoup d'employés. Alors, je dois vous dire que ce n'est pas évident au premier abord. Ça prend beaucoup de concertation puis beaucoup de gens qui travaillent sur ces dossiers-là.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier: Je comprends, par contre, de vos propos, ce que vous dites, c'est que les solutions à ça ne sautent pas aux yeux, c'est ça? Ça passe par...

Mme Varvaressos (Hélène): ...cas par cas.

**(11 h 20)**

M. Cloutier: Alors, la ministre, elle a abordé la question... ça sort un peu de ce qui a été déposé dans votre mémoire, mais je ne sais pas si vous avez réfléchi à ça, vous avez un avocat qui vous accompagne aujourd'hui. La ministre, elle a dit: Si on ajoutait des points, des critères d'établissement en région, ça pourrait contrevenir à des dispositions. J'imagine la charte québécoise ou de la charte canadienne, je ne sais pas exactement à quoi vous faisiez référence, Mme la ministre. Mais je ne sais pas si vous avez réfléchi à ça. Parce que vous avez certainement pris conscience, l'UPA, des besoins urgents en région d'immigration. Puis, on a beau voir un peu de résultats, moi, quand je rencontre des nouveaux arrivants chez nous, je suis tellement content. Je leur dit: Vous êtes des pionniers, bravo! Continuez. Je le sais que c'est difficile, mais vous êtes en train de défricher pour ceux et celles qui vont vous suivre. Mais, câline! il reste tellement à faire.

Le Président (M. Cousineau): M. Genest.

M. Lemieux (Pierre): ...premier bout de réponse, puis Stéphane complétera. Regarde, dans un premier temps, au niveau du secteur agricole, ce qu'il faut comprendre, les immigrants, là, mettons, reçus travaillent principalement dans le milieu des services-conseils, si on peut dire. Tu sais, tu as des agroéconomistes, tu as plein de gens qui sont au niveau des services offerts aux producteurs. Ça, eux autres, généralement, c'est des gens qui, après un petit début d'accompagnement, réussissent quand même à se débrouiller facilement, bon.

Au niveau des producteurs, l'élément, dans le fond, la raison pour laquelle on s'est impliqués aujourd'hui, c'est parce que c'est beaucoup plus pour l'avenir. Parce que, si tu me demandes des expériences de passées, on en a peu. Tu sais, on en a quelques-unes que je t'ai mentionnées tantôt, des exemples dans la Beauce, mais la Beauce, c'est vrai parce que ça a été l'entreprise Breton, qui est une grosse entreprise porcine qui avait des moyens puis plusieurs employés. Ça a été plus facilitant. Même si on a travaillé fort pour aider, puis accompagner, puis trouver des façons de faire, ça a été plus facilitant. Quand on est arrivés, comme au Saguenay--Lac-Saint-Jean, l'expérience, c'est un producteur en serre. Il suggérait un programme d'apprentissage en milieu de travail, c'était une personne. Ça fait que, tu sais, il y avait quand même un minimum de facilités qu'on a pu développer ou trouver avec la personne, l'entrepreneur. Et, au niveau des autres expériences que je te parlais qui sont plus dans la région, c'est plus dans la région de Lévis, ça fait que, tu sais, mettons le bassin ou les moyens de déplacement sont plus faciles, si on peut dire. Mais plus on s'éloigne, puis si on veut s'étendre sur le territoire, ça va devenir beaucoup plus difficile.

Les producteurs, dans cette période-là, ce qu'ils font, c'est qu'ils se rabattent beaucoup plus sur la main-d'oeuvre étrangère temporaire. Et là ils fournissent des lieux d'hébergement, puis de proximité, puis de service d'accompagnement pour leur faciliter, dans le fond, la vie, là, au niveau de les amener à l'épicerie, tu sais, c'est les producteurs qui font les transports, c'est les producteurs tu sais, qui les accompagnent partout. Si jamais il y a des problèmes de santé et sécurité, c'est les producteurs qui voient à toute cette responsabilité-là. Et ça, ça fait partie des critères quand tu veux embaucher ces travailleurs étrangers temporaires là. Ça fait que, Stéphane, si tu veux compléter.

M. Forest (Stéphane): C'est pour ça, et je fais le lien avec ce que M. Lemieux dit, c'est que le système de pointage qui est actuellement, ce qu'on en comprend, là, parce qu'on n'est pas familiers avec, c'est qu'on met des données dans la machine pour voir c'est quoi ton résultat. Une des données qu'on met, c'est le français. Une autre des données qu'on met, qui prend beaucoup d'importance, c'est la qualification ou la diplomation, la scolarité. Or, ce que disait Mme Varvaressos tout à l'heure, puis l'exemple de l'Alberta, c'est que ce critère-là pourrait être modulé pour faire en sorte que des personnes avec moins de diplomation, mais avec plus d'expérience de travail arriveraient à se qualifier et, au lieu d'être un travailleur étranger temporaire, devenir un véritable immigrant qui pourrait contribuer, là, à une installation beaucoup plus permanente dans la région. Alors, c'est comme ça, là, qu'on le voyait, qu'on essaie de répondre à l'interrogation...

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Lac-Saint-Jean... M. le député de Bourget.

M. Kotto: Merci, M. le Président, je veux profiter de l'occasion pour vous saluer moi aussi, madame, messieurs. Diplomation versus compétences, expérience. Est-ce qu'il aurait lieu de penser que ça fait -- et ça, c'est quelque chose que j'entends ci et là -- l'affaire d'un certain nombre de milieux d'activités économiques, comte tenu du fait qu'on a affaire, dans les circonstances, à une main-d'oeuvre bon marché?

Le Président (M. Cousineau): M. Lemieux.

M. Lemieux (Pierre): Pas nécessairement. Quand on parle compétence, on a quand même, au niveau d'Agricarrières, recensé les salaires payés au niveau du monde agricole dans certains secteurs. Et je vous dirais que, quand on arrive en région, on se compare proches des salaires payés par le secteur industriel en région. On est rendus assez proches. C'est sûr que, si on regarde au niveau de la main-d'oeuvre étrangère temporaire, actuellement, bien, c'est sûr que ça, c'est moins payé, c'est au salaire minimum, les conditions sont à ces niveaux-là. Mais, quand les gens, dans la main-d'oeuvre, plus, je dirais, là... les besoins qui deviennent un petit peu plus, là, avec des responsabilités, on est, dans plusieurs secteurs au niveau agricole, là, et puis même, dans certains cas, on est même plus élevés que ce qui peut se payer dans le secteur industriel.

M. Kotto: Vous avez dit que le 50 000 par année, comme seuil, vous étiez à l'aise avec ça. Sur quoi vous basez-vous pour le dire? Est-ce que c'est en lien avec des critères scientifiques, des références scientifiques? Est-ce que c'est en rapport avec des statistiques relativement à ce qui s'est passé jusqu'à présent? Parce que les indicateurs d'intégration des immigrants, on n'en a pas encore. Du moins, si je me réfère à ce que la ministre a avancé lors de travaux antérieurs, c'est probablement en 2012 qu'on en aura, des indicateurs d'intégration. Est-ce que c'est sur une base intuitive que vous le dites ou vous avez, de votre perspective, des choses ou des références que nous n'avons pas?

Le Président (M. Cousineau): M. Forest.

M. Forest (Stéphane): Alors, M. le député, c'est sûr qu'on n'a pas fait d'analyse et tout ça, c'est la première fois qu'on s'adresse à la commission qui traite des sujets de l'immigration. Et, oui, c'est un peu intuitif. Il faut maintenir un seuil par rapport à notre démographie. On a un problème de démographie au Québec, et juste cet aspect-là justifie le maintien du seuil qu'on a depuis quelques années.

On a besoin de croissance économique; la main-d'oeuvre qui est disponible crée de la croissance économique. Alors, on ne peut pas se permettre de réduire le seuil de 50 000 personnes annuellement, parce qu'on va avoir des problèmes de main-d'oeuvre, donc on va avoir des problèmes de progression en général de notre économie.

Alors, oui, c'est très intuitif, mais ça fait partie des constatations générales qu'on a tous, là, en tête, là, quand on parle de ce seuil d'immigration là.

M. Kotto: On est sur...

Le Président (M. Cousineau): M. le député.

M. Kotto: ...un terrain qui m'inspire une question en lien avec... je ne sais pas si vous avez lu les travaux, enfin l'essai de ces deux chercheurs, Dubreuil et Marois, qui justement remettent en question les retombées positives en matière de développement économique notamment. Est-ce que vous étiez au fait de cet essai qui a été publié il y a quelques mois?

Le Président (M. Cousineau): M. Forest.

M. Forest (Stéphane): Oui, j'ai vu qu'il y a eu un article, je crois, dans La Presse, puis il y a eu un commentaire de fait par madame... quand c'est sorti. Si c'est de ça que vous parlez, moi, je ne pense pas... puis peut-être M. Lemieux pourrait compléter, là, je ne veux pas répondre pour l'organisation, mais je pense que l'apport de l'immigration est essentiel. Parce qu'il y a des problèmes conjoncturels dans certaines portions d'immigrants, notamment l'immigration maghrébine, au niveau de l'emploi, je ne pense pas que ces problèmes-là, qui peuvent être réglés autrement, justifient qu'on jette le bébé avec l'eau du bain, là.

M. Lemieux (Pierre): En complément...

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Bourget.

M. Lemieux (Pierre): En complément, monsieur...

Le Président (M. Cousineau): Oui, M. Lemieux, en complément.

M. Lemieux (Pierre): Moi, je vous dirais: Peut-être que coût-dépenses peut être regardé. Mais, à court terme, à moyen terme et à long terme, c'est quoi que ça peut avoir comme conséquence? Probablement que le coût-dépenses, dans la formule actuelle, peut refléter une chose. La formule... mettons une façon bonifiée de mieux planifier l'immigration pour répondre à plus de besoins, ou les besoins mieux équilibrés, peut-être va donner d'autres résultats.

Parce que, si on n'est pas capables de combler éventuellement en région le manque de main-d'oeuvre par de l'immigration -- parce que ce n'est pas juste le taux de natalité qui va le combler, c'est ce que ça nous dit -- bien, je pense qu'à quelque part il va y avoir d'autres éléments de dévitalisation qui vont arriver. Et ces coûts-là vont-u être calculés, les conséquences de cette dévitalisation en région? Moi, c'est pour ça que je vous dis: il faut quand même le regarder beaucoup plus dans une perspective de moyen terme et d'amélioration de ce qu'on peut faire.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Bourget.

**(11 h 30)**

M. Kotto: J'ai une dernière question, M. le Président. Vous évoquiez, enfin, le fait que l'intégration des immigrants en région ne figurait pas comme orientation dans le fascicule du ministère. Vous êtes des gens de terrain. De votre perspective des choses, s'il y avait quelque chose qui devrait être fait avec rigueur et célérité pour l'intégration des immigrants en région, ce serait quoi?

Le Président (M. Cousineau): Monsieur? Madame?

Mme Varvaressos (Hélène): Bien, c'est de donner des moyens aux régions, aux organismes qui sont impliqués dans les... Et n'est pas juste un organisme qui est impliqué dans ces projets-là, c'est un ensemble d'organismes. Il faut qu'il y ait une concertation. Il faut leur donner les moyens de pouvoir jouer leurs rôles de façon correcte parce que sinon ça ne pourra pas fonctionner. Alors, ça prend des moyens financiers, ça prend de la concertation, alors ça prend tout ça pour qu'on puisse réussir à le faire. Et faire le lien. Il faut être capable de faire le lien aussi entre les grands bassins d'arrivée, comme Montréal. Et, si on veut aller faire du placement, par exemple, au Lac-Saint-Jean, bien ça nous prend des acteurs régionaux qui ont le goût de le faire, puis il faut les supporter, ces acteurs-là, pour qu'ils puissent être capables de le faire. Il faut leur donner des moyens.

M. Lemieux (Pierre): Moi, je vous dirais...

Le Président (M. Cousineau): M. Lemieux.

M. Lemieux (Pierre): Oui. Je vous dirais, vous savez, les immigrants, ce sont toutes des personnes humaines qui ont des choix de carrière, des choix de vie et qui veulent exercer certains métiers, certaines professions. Si on veut être capable d'habiter les régions, il faut être capable de faire des choix, au niveau des immigrants, qui vont avoir le goût du travail en fonction de ce que c'est que la région va être capable d'offrir ou va lui offrir. Et normalement il devrait se sentir heureux dans sa capacité d'offrir... ou de contribuer. Et c'est ce que je pense qu'il manque actuellement. C'est qu'on a trop classifié une approche en fonction de catégories qui ne reflètent pas nécessairement la réalité des gens et des besoins. Et c'est ça qu'on vous demande, dans le fond. On est-u capable de le réajuster en fonction des besoins pour répondre à l'humain par rapport à son bien-être? Merci.

Le Président (M. Cousineau): Alors, pour les deux dernières minutes, M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette: Merci, M. le Président. Madame, messieurs, merci de votre contribution. Vous avez évoqué la problématique suivante, c'est-à-dire celle où les immigrants temporaires, au niveau agricole, ne peuvent pas se qualifier, même après plusieurs années, pour un statut d'immigrant permanent. Vous n'êtes pas les premiers à aborder cette question-là. Le 31 mai dernier, le groupe HortiCompétences, que vous connaissez sans doute, a également souligné cette réalité. Naturellement, il y a des gens qui se questionnent et d'autres qui remettent en question cette possibilité-là en invoquant l'argument suivant: pour le Québec, ce serait difficilement conciliable d'accepter des immigrants qui systématiquement seraient, par exemple, quatre ou cinq mois, ou six mois par année sur l'assurance-emploi. Donc, c'est un petit peu l'argument contraire. Est-ce que vous avez une façon de répondre à cette logique-là qui viendrait défendre en quelque sorte cette possibilité?

Le Président (M. Cousineau): Madame...

Une voix: ...

Le Président (M. Cousineau): Oui, M. Forest.

M. Forest (Stéphane): C'est qu'il y a...

Le Président (M. Cousineau): Une minute.

M. Forest (Stéphane): C'est que c'est ça, c'est que, si on emploie un travailleur étranger temporaire pendant, je ne sais pas, moi, 25 semaines ou 26 semaines dans l'année, bien, s'il pouvait se qualifier pour devenir un immigrant permanent, bien peut-être qu'une portion de ces gens-là, ce n'est pas tous, c'est sûr, là, pourraient rester toute l'année pour faire d'autres tâches sur les entreprises agricoles. Je ne sais pas si Hélène veut compléter, là.

Le Président (M. Cousineau): Madame...

Mme Varvaressos (Hélène): Bien, de toute façon, les travailleurs étrangers temporaires, je vous dis que les emplois, ils se sont beaucoup allongés en agriculture, hein? Du huit mois, là, dans la région de Montréal, pour des emplois saisonniers, ce n'est pas rare. Alors, il y a des emplois à l'année qui sont offerts. On est en manque de main-d'oeuvre pour des emplois agricoles à l'année, on n'est pas en manque par rapport à ça. Alors, je suis tout à fait d'accord avec la réponse de Stéphane par rapport à ça. On est en manque de main-d'oeuvre pour des emplois à l'année. Alors, ces travailleurs-là, ça, c'est certain qu'on pourrait leur trouver des emplois à l'année sans aucun problème. Mais là aussi on fait face à une question d'emploi saisonnier. Alors, il faut essayer de savoir aussi: Au Québec, au Canada, on en veut-u, de l'emploi saisonnier, ou bien si on n'en veut pas?

Le Président (M. Cousineau): Alors, on vous remercie beaucoup, Mme Varvaressos, M. Lemieux, M. Forest, pour votre présentation, aussi pour votre présence à Québec aujourd'hui. Alors, je demande au prochain groupe de se préparer, l'Organisation internationale canadienne des droits humains.

Je suspends quelques minutes pour le changement de groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 34)

 

(Reprise à 11 h 36)

Le Président (M. Cousineau): Alors, nous reprenons nos travaux. J'invite les gens de l'Organisation internationale canadienne des droits humains de vous présenter, présenter les gens qui... Alors, qui est-ce qui est le porteur du dossier? M. Zapata?

Une voix: ...

Le Président (M. Cousineau): Oui, vous présentez les gens qui sont à la table et puis vous avez 15 minutes pour votre présentation.

Organisation internationale canadienne
des droits humains (OICDH)

Mme Jabouin (Philippa): Bonjour et merci. Alors, je me présente. Philippa Jabouin, avocate et secrétaire générale de l'Organisation internationale canadienne des droits humains. À ma gauche, M. Fabio Zapata, journaliste et défenseur des droits de la personne, et président de notre organisation, et puis Mme Geeta Rasaily, vice-présidente de l'organisation, directrice d'école et leader de sa communauté.

Le Président (M. Cousineau): Alors, bienvenue. Vous avez 15 minutes pour votre présentation.

Mme Jabouin (Philippa): Merci. Nous allons tout d'abord commencer par une brève présentation de l'organisation, puisque nous sommes tout de même une organisation très nouvelle, et après nous aimerions partager avec vous nos recommandations par rapport à la réflexion que nous avons soumise dans le cadre de cette consultation publique.

Nous sommes une organisation non gouvernementale qui a vu le jour en Ontario il y a sept ans et nous sommes établis dans la province de Québec depuis l'année 2010. Nos bases philosophiques se fondent sur la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Charte canadienne des droits et libertés, la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, la Déclaration américaine des droits et devoirs de l'homme, la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et la Convention européenne des droits de l'homme.

Deux autres traités internationaux nous guident également dans notre travail avec les demandeurs d'asile et les immigrants, soit la Convention de Genève relative au statut des réfugiés et la convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Nos objectifs sont les suivants: la protection et la défense des droits humains des immigrants mais également des Québécois et des Canadiens, étant donné notre principe philosophique, les droits humains pour tous, l'accompagnement des immigrants dans leur processus d'intégration, une inclusion sociale holistique des immigrants et finalement la participation citoyenne.

Notre conception de l'intégration. L'intégration va bien au-delà de l'apprentissage de la langue. C'est une interaction culturelle de connaissances et de savoirs, c'est-à-dire une approche à double voie entre ceux qui arrivent et ceux qui sont déjà là. Sans cet échange, un énorme capital humain est perdu à cause de l'impossibilité pour les professionnels d'exercer leurs qualifications. Pour que ce capital humain contribue à la croissance de la productivité et de l'enrichissement culturel de la société d'accueil, il devient alors nécessaire d'établir une politique publique qui considère la qualification et la requalification professionnelle des immigrants comme un droit humain. Nous soutenons qu'une inclusion sociale doit permettre, en toute égalité de droit et de condition, la jouissance des biens de la société d'accueil.

L'intégration va au-delà de la terre d'accueil. En partant du principe que la paix et la justice sont des fondements intrinsèques de la dignité humaine, notre organisation soutient que la coopération internationale du Canada et du Québec doit compenser les pays du Sud pour la perte de leur capital humain et l'extraction de leurs richesses naturelles. En effet, ces richesses sont d'abord stratégiques pour le développement économique, social et démocratique des pays et peuvent ainsi contribuer à solutionner et prévenir des conflits armés internes. Cette compensation contribue donc à l'intégration, puisqu'elle procure au nouvel immigrant une tranquillité d'esprit, sachant que sa famille, restée au pays, peut vivre dans la dignité.

Nos stratégies d'action. Toujours dans le respect de notre mission et dans notre perspective de contribuer à l'intégration des personnes immigrantes, nous avons mis en place les stratégies d'action suivantes: établissement d'un programme d'éducation civile axé sur les droits de la personne, qui s'adresse aux jeunes d'âge scolaire; mobilisation sociale dans la promotion et le respect des droits de la personne; analyse des politiques gouvernementales et des projets de loi concernant les droits collectifs; et la représentation de la communauté immigrante dans les différentes plateformes gouvernementales afin de faire valoir leurs droits.

La présentation des recommandations que nous ferons va se faire à deux. Je vais le faire avec ma collègue, Geeta Rasaily.

**(11 h 40)**

Le Président (M. Cousineau): Alors, Mme Rasaily.

Mme Rasaily (Geeta): Oui.

Le Président (M. Cousineau): D'accord. C'est à vous, la parole.

Mme Jabouin (Philippa): Je vais débuter.

Premièrement, nous proposons des campagnes provinciales de sensibilisation en droits et devoirs collectifs. Ces campagnes sont un instrument stratégique de l'interaction culturelle entre immigrants, réfugiés et Québécois. Nous présenterons un tel projet auprès de Citoyenneté et Immigration Canada ainsi qu'auprès du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles.

Deuxièmement, nous considérons que l'intégration en toute égalité de droits des immigrants, réfugiés et Québécois doit se concevoir dès l'âge scolaire dans les écoles et les collèges, lieux de rencontre privilégiés des enfants et des jeunes. Nous présenterons un projet expérimental aux commissions scolaires pour que les jeunes connaissent aussi leurs droits et devoirs.

Mme Rasaily (Geeta): Le numéro 3. Nous proposons une augmentation des quotas pour éliminer les listes d'attente pour la francisation puisque de nombreux immigrants et réfugiés non francophones attendent six mois à un an avant de suivre des cours. Il s'agit d'une compétence du ministère de l'Immigration, qui doit ainsi faciliter une partie du processus d'intégration et, si nécessaire, subvenir aux organismes communautaires qui renforcent ce processus.

Le quatre. Nous soutenons qu'en matière de francisation il est nécessaire de classer les connaissances et les savoirs des immigrants et des réfugiés pour différencier le contenu et l'emphase de la francisation. Des élèves ayant un grand déficit de qualification et d'autres ayant une formation académique très poussée ne peuvent pas apprendre au même rythme. Il ne s'agit pas de créer des ghettos, mais de promettre une progression de certains en fonction de leurs connaissances, leurs savoirs et leurs différences culturelles.

Mme Jabouin (Philippa): 5. Nous sommes d'avis que, lorsqu'en 2007 les Nations unies adoptèrent l'idée de l'Alliance des civilisations de M. José Zapatero, président d'Espagne, il s'agissait essentiellement d'une alliance avec les gouvernements musulmans non intégristes pour éviter le terrorisme. L'alliance fut un terrible échec, et aujourd'hui c'est le printemps arabe qui démantèle ces dictatures.

Nous formulons l'idée d'une interaction culturelle entre les civilisations comme premier axe d'une politique publique en reprenant les recommandations du rapport Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables, qui permettra aux immigrants et réfugiés d'accéder à une intégration sans racisme ni xénophobie invisible. Les nouveaux arrivants adoptent la nouvelle culture qui les reçoit sans pour autant renoncer à leurs langues et leurs pratiques culturelles qui ne violent pas les droits collectifs.

Mme Rasaily (Geeta): Nous soutenons que la population d'accueil, en côtoyant de nombreuses générations d'immigrants, saura recueillir et faire siennes des valeurs, des connaissances, des savoirs culturels des immigrants et des réfugiés, renforçant ainsi l'identité québécoise.

Nous considérons que l'inclusion sociale des immigrants et des réfugiés est le deuxième axe d'une politique publique provinciale et fédérale. L'accès des immigrants et des réfugiés à l'emploi doit se faire en termes d'égalité en vertu de normes internationales, de la Charte des droits et libertés de la personne et de la Charte canadienne des droits et libertés. À travail égal, salaire égal.

Mme Jabouin (Philippa): Nous nous opposons à toute forme de travail non déclaré. Un tel travail est facilité par les propriétaires de certaines industries de biens et de services. La rigueur de la loi doit s'appliquer à ceux-ci. Il est nécessaire de mettre sur pied des campagnes contre le travail non déclaré. Les immigrants et réfugiés ont recours au travail non déclaré, dans la plupart des cas pour compléter les envois d'argent à leurs familles dans leurs pays d'origine. Souvent victimes de surexploitation, les heures de travail exténuantes rendent ces personnes plus vulnérables aux maladies mentales et physiques, ce qui augmente les dépenses en santé publique.

Nous croyons que l'intégration sociale et la rétention des immigrants se fera plus rapidement si des mesures financières leur facilitent l'accès à la propriété privée et aux demeures subventionnées. Il s'agit d'une aspiration pour toutes les familles, qu'elles soient immigrantes, réfugiées ou québécoises. Nous ne proposons pas de privilèges. Nous soutenons plutôt que la difficulté de rétention des immigrants et des réfugiés est une perte économique et culturelle pour le Québec.

Mme Rasaily (Geeta): Et finalement nous proposons que l'évaluation des connaissances, des qualifications professionnelles et des savoirs des immigrants et des réfugiés, de même que celle des Québécois, doit être une compétence de l'État. Une telle question, qui touche aux droits collectifs des immigrants et des réfugiés, ne devrait pas être laissée aux organismes privés, car c'est un sérieux obstacle à l'intégration. Merci.

Le Président (M. Cousineau): Ça va?

Mme Jabouin (Philippa): Merci.

Le Président (M. Cousineau): Merci. Alors, est-ce que vous avez quelque chose à rajouter, monsieur... Non? Ça va? Alors, nous allons passer...

M. Zapata (Fabio): C'est tout. C'est tout, monsieur.

Le Président (M. Cousineau): Pardon?

M. Zapata (Fabio): C'est tout.

Le Président (M. Cousineau): Nous allons passer la parole à la ministre pour le prochain 20 minutes.

Mme Weil: Oui. Bonjour. Alors, je vous remercie beaucoup de votre présence parce que peut-être que vous êtes... Il n'y a pas beaucoup de groupes qui vont nous parler de ces enjeux très importants, qui sont vraiment des... le respect des droits humains. On parle beaucoup de sélection, l'immigration économique, etc. On parle d'intégration, de francisation. Mais vous nous rappelez l'importance de ces valeurs fondamentales. C'est des valeurs fondamentales pour la société québécoise, et l'immigration humanitaire généralement est très importante pour le Québec. Le Québec adhère évidemment, comme vous le savez, à ces conventions internationales. Donc, je voulais vous remercier d'avoir pris le temps, la peine de préparer un mémoire, de venir ici nous parler de ces enjeux-là et l'importance de sensibiliser les Québécois, et les futures générations, et les enfants toujours à l'importance de lutter contre le racisme, la xénophobie, etc. Donc, ça, c'est d'entrée de jeu.

Pour ce qui est de certaines choses, je voulais peut-être corriger certaines choses. Vous parlez de francisation, des délais d'attente de six mois, un an. Ça, il y a à peu près sept ans, huit ans de ça. Mais on a amené beaucoup de corrections, et l'offre est très variée. Le délai moyen est de 38 jours. Alors, on prend juste le temps de créer les groupes appropriés. Il y a un niveau débutant, intermédiaire, un niveau avancé. Donc, on forme des groupes. Alors, c'est vraiment très rapide, l'accès à la francisation.

Pour ce qui est de l'intégration en emploi, on travaille très fort, depuis ces dernières années, pour réussir. Et on cible, carrément. Il y a un programme, le programme PRIIME d'Emploi-Québec, qui cible les communautés maghrébines, et c'est une subvention salariale pour les employeurs. Et c'est un programme qui donne des résultats intéressants. Le taux de succès est à peu près... de rétention, 83 %. Donc, c'est un programme. Et évidemment on voudrait aller beaucoup dans ce sens-là. On travaille avec des partenaires sur le terrain, beaucoup à Montréal, évidemment, où la communauté se retrouve beaucoup, avec la CRE, la ville, pour justement cibler les communautés qui ont plus de problématiques à intégrer le marché de l'emploi, parce qu'on ne veut pas gaspiller ce talent. Donc, on va dans le même sens que vous le dites.

Là, j'aimerais vous amener sur cette question d'interculturalisme. En fin de semaine, on a eu l'occasion de parler de cette question d'interculturalisme. Peut-être vous entendre un peu plus sur cette approche. Je trouve que c'est très important. Et je pense qu'il faut continuer à réfléchir à nos approches, comme société d'accueil, parce que les outils qu'on peut avoir... J'ai eu l'occasion d'en parler. Toutes les sociétés le font à leur façon, hein? Et ça passe beaucoup, souvent, par la société civile. Et il y a des endroits où c'est plus développé qu'ici, au Québec, dans le sens d'avoir des organismes de la société civile qui exercent un vrai leadership, à ce niveau-là, et qui ont ce sens d'engagement envers l'inclusion. Nous, le gouvernement, évidemment, on a mis sur pied beaucoup de programmes, mais c'est beaucoup plus que le gouvernement pour réussir ce rapprochement interculturel.

Donc, j'aimerais vous entendre peut-être un peu plus sur cette question, si c'est une part de dialogue, une part de volonté de la société d'accueil pour aller rechercher ces personnes. Et peut-être vous entendre un peu plus sur comment vous voyez le gouvernement agir dans le sens du rapport. On a mis beaucoup, beaucoup de mesures en place depuis ce rapport, à peu près 80 %. Il y a une liste de plus de 20 mesures qui ont été mises en branle pour justement répondre à toutes ces recommandations. Mais je pense qu'il y a un intérêt, c'est ce que je ressens, certainement, chez les jeunes, de continuer à réfléchir à cette question de rapprochement interculturel ou...

**(11 h 50)**

Le Président (M. Cousineau): Mme Jabouin?

Mme Jabouin (Philippa): Oui. Alors, pour la question de l'interculturalisme, peut-être on peut résumer ça par une question d'éducation, éducation civile. Parce que le gouvernement a des objectifs qu'il a fixés puis il sait pourquoi ou quelle quantité d'immigrants il aurait besoin par année ou sur une certaine période, mais il faudrait également que la population québécoise soit mise au courant de ce besoin-là. Alors, ce ne sont pas des gens qui arrivent comme ça, bon, pour rependre peut-être des préjugés vulgaires, pour voler les emplois des autres, mais réellement parce qu'on a besoin soit d'une main-d'oeuvre, parce qu'on a besoin de diversifier la population, parce qu'on a besoin de connaissances venant d'ailleurs. Enfin, il y a toutes sortes de raisons qui justifient l'immigration, donc ce besoin-là de mettre la population au courant, en fait de savoir, de comprendre le pourquoi.

Une éducation qui doit se faire également à l'école, comme on l'a dit dans nos textes. C'est un endroit... Il faudrait sensibiliser les jeunes dès le début, parce que nos bases philosophiques, c'est une question de droits. Tous sont égaux, alors les droits de la personne pour tous, ça s'applique, immigrants, réfugiés, Québécois, peu importe. Alors, l'interculturalisme, ça touche tous ces éléments-là.

Le Président (M. Cousineau): Mme la ministre.

Mme Weil: Je ne sais pas si vous connaissez notre campagne Toutes nos origines, qu'on a lancée. C'était, je pense, l'hiver dernier. Je vous invite à aller voir. C'est une campagne justement pour promouvoir la richesse de la diversité. Et c'est une campagne Internet mais qui circule beaucoup. C'est le profil de plusieurs immigrants de différentes origines et en quoi ces gens-là contribuent au développement économique, et social, et culturel du Québec. Et des commentaires qu'on a sont très, très positifs. Alors, on a des campagnes dans ce sens-là pour encourager la société à s'ouvrir, continuellement s'ouvrir à la diversité.

Sur la question... Par rapport aux orientations, je ne sais pas si vous avez, par exemple les volumes, si vous avez un commentaire à faire là-dessus ou... Vous n'allez pas très pointu sur les orientations. Est-ce que vous avez des commentaires plus spécifiques à faire par rapport aux orientations? Il y a les volumes, il y a la francisation, de connaître le français, d'aller sélectionner des personnes avec une meilleure maîtrise de la langue. Il y a cette question des bassins, qu'on a évoquée, puis il y a une sensibilité par rapport à cette orientation-là. J'imagine que vous auriez peut-être un point de vue sur ça.

Le Président (M. Cousineau): Mme Jabouin.

Mme Jabouin (Philippa): Oui. Notre position, essentiellement, ce n'est pas tellement par rapport aux volumes ou aux quotas qui ont été mentionnés dans le rapport du gouvernement, mais plutôt la qualité ou la façon dont ça va se faire, alors non seulement pour les gens qui vont venir, mais ceux qui sont déjà établis ici. Parce que...

Pour revenir à la question de l'intégration et à la question de l'interculturalisme, bon, notre but ici, c'est de parler de la situation des immigrants, des réfugiés, mais il y a plusieurs Québécois qui sont Québécois depuis toujours, depuis longtemps, qui sont nés ici. Je parle de gens qui ont 40 ans et plus, qui sont nés ici et qui peut-être ont toutes sortes d'obstacles, toutes sortes de limites auxquelles ils sont confrontés. Et, bon, peut-être on peut... on les balance comme ça, sans le savoir, dans l'immigration, mais ce ne sont pas du tout des immigrants. Pourtant, ils sont confrontés à des mêmes problèmes.

Et, lorsqu'on parle d'interculturalisme, également, on regarde ce qui se passe en Angleterre en ce moment, c'est la même chose qui s'est passé en France en 2005-2006, ce ne sont pas des problèmes qui sont réglés. On n'en parle peut-être pas tous les jours dans les médias, mais ce ne sont pas des problèmes qui sont réglés, et puis, bon, il ne faudrait pas que ça arrive ici, au Québec.

Mme Weil: Donc, ce que vous dites, c'est de toujours être sensible, alerte à ces questions d'exclusion. Il y a une étude qui est sortie en 2010, étude de l'OCDE, qui place le Canada en troisième place pour l'intégration. Et j'ai appris que les données du Québec ont beaucoup alimenté ces études. Et le Canada se hisse au deuxième rang maintenant pour l'intégration des immigrants par le système scolaire. Et ce qui est souligné dans l'étude, c'est parce que le réseau scolaire au Canada a une approche interculturelle, justement, de rapprochement, de dialogue.

Et j'ai un collègue qui... On parle du réseau scolaire comme un outil d'intégration, alors c'était un peu pour peut-être permettre à mon collègue de continuer là-dessus parce que je sais que c'est un domaine qui l'intéresse beaucoup.

Le Président (M. Cousineau): Alors, on va lui passer la parole, Mme la ministre. M. le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Bonjour et merci d'être là à vous trois.

Dans votre mémoire, à la page 3, là, vous dites clairement quelque chose que je trouve de très important. Vous dites que l'interaction culturelle, «c'est la société d'accueil qui doit être sensibilisée à recevoir et à s'approprier les différentes manifestations culturelles des immigrants». Ce que vous soulevez en fait, c'est que, dans cette question d'immigration, il y a une espèce de responsabilité partagée. Les personnes qui arrivent doivent être conscientes du milieu dans lequel elles s'inscrivent, faire l'effort de s'inscrire dans ce milieu-là, de le comprendre, de l'accepter, de l'intégrer, en quelque sorte. Mais par ailleurs la société d'accueil... On dit bien «accueil». On doit accueillir les gens. Mais les accueillir, c'est aussi les accepter un peu comme ils sont, sachant qu'ils feront l'effort, bien sûr, de s'intégrer chez nous. Et donc j'aime cette idée que vous soulevez, les responsabilités de la société d'accueil. Ça, je trouve ça important.

Et à ce sujet-là, comme le soulignait Mme la ministre, moi, je m'intéresse beaucoup à l'éducation, et il me semble que l'école est un... je dirais, c'est un vecteur d'intégration quand c'est bien fait. Et au Québec on a mis sur pied, il y a quelques années, le cours d'éthique et de culture religieuse, qui est un des éléments de cette politique de compréhension mutuelle. Ça, je pense, c'est important. Quand on regarde le cours d'éthique et de culture religieuse, et quand on le regarde sur son ensemble, là, sur les 11 années, là, primaire, secondaire, ce cours-là veut à la fois expliquer à tout le monde, y compris aux nouveaux arrivants, quel est le cadre dans lequel on s'inscrit, d'où vient la culture québécoise, que sommes-nous, quelles sont nos origines, hein? Si on veut s'intégrer, il faut comprendre la société d'accueil. Et inversement ce cours-là offre aussi, je dirais, une ouverture sur des concepts éthiques et des religions qui viennent d'ailleurs, que ça soit l'hindouisme... bon, et ainsi de suite. Je pourrais aller beaucoup plus loin. On parle, bien sûr, de la vision des Amérindiens, par exemple, des autochtones, etc. Et donc le cours d'éthique et de culture religieuse est conçu comme un élément d'intégration et de compréhension mutuelle des cultures. Souvent les cultures sont rattachées aux religions. C'est un aspect.

Alors, je ne sais pas si vous auriez des commentaires là-dessus, mais, pour moi, cette question, là, d'interaction culturelle m'apparaît intéressante, parce qu'il est inévitable, il me semble, que la culture québécoise doit s'enrichir, en quelque sorte, au contact des autres cultures, sans perdre sa valeur profonde, là. Nous sommes tous profondément Québécois, profondément attachés à ce que nous sommes. Mais bien sûr il doit y avoir une ouverture. Alors, moi, je voyais que ce que vous disiez, là, allait dans ce sens-là. Est-ce que mes propos vous frappent ou si vous êtes d'accord? Avez-vous des commentaires?

Le Président (M. Cousineau): Alors, Philippa...

**(12 heures)**

Mme Jabouin (Philippa): Oui. Alors, c'est le sens qu'on voulait donner à notre texte, et puis ça nous fait plaisir de voir que vous y accordez autant d'importance. Peut-être, ce que je pourrais dire, je ne sais pas tellement si c'est à la mode d'en parler ou pas, mais, pour ce qui est du rapport de Bouchard-Taylor et des accommodements raisonnables, il y a une richesse d'idées, là-dedans, incroyable. Alors, réellement, je ne veux pas répéter ce qu'ils ont dit ou faire aucune prétention, mais dans ce rapport-là il y a tellement de réponses, il y a tellement de réponses.

Le Président (M. Cousineau): Oui. M. le député de Vimont.

M. Auclair: Bonjour également à vous trois. Écoutez, moi, ce qui m'intéresse beaucoup de votre organisme, c'est que vous avez également pied-à-terre en Ontario, et j'aimerais voir avec vous comment ça se passe. Parce que, là, on est au Québec, on regarde ce qui se fait chez nous, mais, si vous pouvez... Est-ce que vous êtes capables... en état de comparer un petit peu? Je sais que... C'est sûr qu'il n'y a pas la francisation, il n'y a pas ce défi-là. Mais, ce qui se passe en Ontario, est-ce que vous pouvez nous faire des points de repère, un petit peu, pour des gestes posés, des gestes qui se font en Ontario, qui seraient peut-être exportables chez nous, qu'on pourrait... les meilleurs éléments, si on veut?

Le Président (M. Cousineau): Qui va nous répondre?

Mme Jabouin (Philippa): Bien, en fait, le chapitre de Québec est vraiment un chapitre à part. On est complètement indépendants de ce qui se fait en Ontario. Alors, on s'est basés de... sur la même philosophie, les mêmes idées, un même groupe de citoyens dévoués qui voulaient travailler pour la cause des immigrants, des réfugiés qui se retrouvaient à Toronto. Bon, il y a tout un bassin, il y a toute une diversité de personnes, qui vient de partout. Mais on serait mal placés en ce moment, là, pour vous faire une comparaison.

M. Auclair: C'était une tentative. Merci.

Le Président (M. Cousineau): Oui. Mme la ministre, est-ce qu'il y a d'autres questions de... Ça va?

Mme Weil: Ça va.

Le Président (M. Cousineau): Ça va bien? Ah! bien, alors nous allons passer du côté de l'opposition officielle. Alors, M. le député de Bourget, vous avez 18 minutes.

M. Kotto: Merci, M. le Président. Rebonjour. J'ai eu l'opportunité de vous saluer en arrivant tout à l'heure. Ce qui domine dans votre exposé et dans vos propositions, c'est surtout les droits. Ça m'a frappé. Vous n'insistez pas beaucoup sur les devoirs. Est-ce que c'est volontaire? Droits versus devoirs des immigrants.

Mme Jabouin (Philippa): Dans ce premier texte que nous avons soumis, oui, nous voulions faire plus d'emphase sur les droits. Comme ça a été mentionné dans nos recommandations, nous avons des projets qui ont été mis sur pied et qui vont être présentés pour des subventions et pour pouvoir les exécuter, qui vont aller plus dans la direction de droits et devoirs collectifs, d'ailleurs un projet pour les jeunes d'âge scolaire, pour leur parler de leurs droits et leurs devoirs, également un autre projet qui va être distribué de façon un peu plus large. Bien, l'idée, c'est de distribuer de façon plus large dans la région de Québec. Mais en effet ça va toucher les deux, droits et devoirs.

M. Kotto: La pertinence de votre action, partant de l'Ontario jusqu'ici, se justifie-t-elle par un événement, un constat? De quoi est née votre organisation?

Le Président (M. Cousineau): Mme Jabouin.

Mme Jabouin (Philippa): L'organisation... Oui. Je dirais, l'organisation est née en effet d'un constat qu'il y avait une carence dans ce domaine, c'est-à-dire que peu connaissent réellement leurs droits. Qu'ils soient immigrants, réfugiés ou Québécois, il y a beaucoup de travail à faire dans ce domaine. Et d'ailleurs ici, dans la région ou dans la ville de Québec, nous sommes les seuls qui mettons l'emphase sur les droits, les droits de la personne, les droits des immigrants, et non seulement une question d'accueil, mais vraiment de droits.

M. Kotto: O.K. Un dernier point, c'est votre point 11. Vous dites: «Nous proposons que l'évaluation des connaissances, des qualifications professionnelles et des savoirs des immigrants et des réfugiés de même que celle des Québécois [doivent] être une compétence de l'État. Une telle question, qui touche aux droits collectifs des immigrants et des réfugiés, ne devrait pas être laissée aux organismes privés, car c'est un sérieux [problème] à l'intégration.»

Quand vous parlez des organismes privés, est-ce que cela comprend également les organismes communautaires?

Mme Jabouin (Philippa): Pour la question d'évaluer les qualifications des gens?

M. Kotto: ...11. Votre proposition 11.

Mme Jabouin (Philippa): Non, non, les organismes privés, non. C'est, par exemple... ça pourrait être le Collège des médecins, le Barreau du Québec. Ce sont quelques exemples. C'est à ça que nous faisons référence. L'Ordre des ingénieurs, l'Ordre des infirmières, des infirmiers.

Le Président (M. Cousineau): Ça va? M. le député.

M. Kotto: Une petite question. Est-ce qu'ils ne devraient pas être impliqués dans la question de...

Mme Jabouin (Philippa): Pardon?

M. Kotto: Ces ordres ne devraient-ils pas être impliqués dans la question de l'immigration, plutôt que d'en être exclus, comte tenu de leur poids, de leur...

Mme Jabouin (Philippa): Je pense qu'ils y sont, jusqu'à une certaine mesure. Mais, puisque c'est la dernière barrière pour réellement avoir accès à une profession et réellement exercer la profession pour laquelle une personne est qualifiée ou pour laquelle elle a obtenu des points pour immigrer ici, tout simplement, le résultat, dans les faits, c'est que c'est un très gros obstacle.

M. Kotto: Vous avez des témoignages qui, disons, soutiennent vos réticences relativement à ces ordres? Et ces témoignages... Je n'ai pas entendu la question, mais je penserais... en hochant la tête, madame, oui. Ces témoignages relèvent davantage de quels corps de métier?

Mme Jabouin (Philippa): Beaucoup de frustrations, je dirais, auprès d'avocats, auprès d'ingénieurs, auprès de professionnels de la santé. Bon, là, on m'avait posé une question avant par rapport à l'Ontario. Je peux vous dire que le Collège des médecins en Ontario a fait beaucoup de progrès là-dessus. Je n'ai pas à me prononcer sur celui au Québec, parce que je ne le connais pas tellement, mais je sais que le nombre d'admissions de médecins étrangers en Ontario a beaucoup augmenté. Parce qu'il y avait un manque. Il n'y a pas assez de médecins. Puis ils ont eu une ouverture de ce côté-là. Alors, si c'était possible ici, ce serait très bien. Sinon, voici la proposition que nous faisons.

M. Kotto: O.K. Merci.

Le Président (M. Cousineau): Ça va? Alors, pour les deux prochaines minutes, M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette: Merci, M. le Président. Mesdames monsieur, merci pour votre présence. Peut-être revenir par un commentaire au niveau des médecins étrangers. Effectivement, le Québec aurait très certainement lieu de s'inspirer de l'expérience ontarienne. On a un problème manifeste au niveau de l'accès, notamment, aux stages en résidence. Il y a plusieurs études qui en font foi. Il y a la Commission des droits de la personne, au Québec, qui a même produit un rapport sur la question. Donc, je partage votre inquiétude à ce niveau-là.

Sinon, une question, pour ma part. Vous avez dans votre mémoire, à travers votre présentation, parlé beaucoup du terme «interculturalisme». C'est un terme qui est en manque, aux yeux de certains, d'une définition claire ici, au Québec. Et vous avez également fait référence aux troubles qui sont survenus au niveau de l'Angleterre, ces dernières journées, et en France, il y a quelques années maintenant. Quelle est la différence entre ce qui pourrait être appelé l'interculturalisme versus le multiculturalisme? Est-ce que vous avez... Est-ce que vous êtes en mesure de distinguer clairement les deux concepts?

Mme Jabouin (Philippa): Eh bien, pour nous, l'interculturalisme, ce serait plus un échange d'égal à égal. Comme on l'a présenté, comme je l'ai dit dans notre présentation, c'est vraiment un échange à double voie. Alors, j'arrive, je donne, j'apprends, je partage, mais également ceux qui sont déjà là me reçoivent, me comprennent, acceptent certaines choses, en rejettent d'autres. Alors, c'est vraiment ça, notre concept de l'interculturalisme. C'est ce double partage, cette ouverture à double voie, cet échange d'égal à égal qui doit se faire.

Le Président (M. Cousineau): 30 secondes.

M. Charette: Et est-ce que ça vous amène à condamner ou déplorer ce que d'autres pourraient appeler le multiculturalisme? Est-ce que vous les mettez les deux clairement en opposition?

Mme Jabouin (Philippa): Non, non, pas clairement en opposition, pas du tout. C'est simplement... Peut-être, ce serait une nouvelle approche, une nouvelle façon de voir les choses. Et, si, pour certains, le multiculturalisme a des lacunes ou n'a pas fonctionné tout à fait, alors l'interculturalisme serait une autre façon de voir les choses.

Le Président (M. Cousineau): Voilà. Alors, écoutez, Mme Jabouin, Mme Rasaily, M. Zapata, merci de votre présence à Québec pour la présentation de votre mémoire. Alors, c'est très intéressant.

Donc, sur ce, j'ajourne les travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 10)

 

(Reprise à 14 h 3)

Le Président (M. Cousineau): S'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le document intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015.

Alors, les représentants de l'organisme Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre pour les personnes immigrantes, est-ce que vous êtes... vous pouvez prendre place, s'il vous plaît, à la table principale, en arrière. Il me fait plaisir de vous recevoir. Bonjour. Alors, vous avez 15 minutes de présentation. Par la suite, nous allons passer à un échange avec les parlementaires et puis vous-mêmes. Et puis, dans un premier temps, pour les fins de l'enregistrement, on vous demanderait de vous présenter, et puis on vous laisse votre 15 minutes.

Comité d'adaptation de la main-d'?uvre
pour personnes immigrantes (CAMO-PI)

M. Boisrond (Frédéric): Alors, mon nom est Frédéric Boisrond. Je suis directeur général du CAMO depuis le 1er août. Je suis accompagné de mon collègue, qui se présentera bientôt.

M. Opula (Lambert): Bonjour. Mon nom est Lambert Opula. Je suis agent de développement au Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre pour les personnes immigrantes.

Le Président (M. Cousineau): Votre nom, monsieur, s'il vous plaît?

M. Opula (Lambert): Lambert Opula, O-p-u-l-a.

Le Président (M. Cousineau): Merci.

M. Boisrond (Frédéric): Alors, le Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre, c'est une entité indépendante financée par la commission des partenaires pour l'emploi. Et notre rôle, c'est de travailler avec différents partenaires dont le secteur privé, le secteur syndical, communautaire, le secteur, aussi, gouvernemental pour proposer des stratégies pour favoriser l'intégration des personnes immigrantes sur le marché du travail, mais aussi pour favoriser le maintien au travail des personnes issues de l'immigration. Entre autre travail que nous faisons, nous proposons, avec nos partenaires, des outils d'intervention adaptés pour des informations, des outils aussi pour favoriser la formation des personnes, l'acquisition d'expériences au travail.

Nous travaillons avec les entreprises et les intervenants pour identifier les besoins en matière d'intégration des personnes immigrantes. Évidemment, bien, nous prenons le temps aussi de regarder les obstacles, autres que dans le milieu du travail, qui nuisent à l'intégration des personnes immigrantes sur le marché du travail. Et nous invitons aussi les partenaires qui travaillent avec nous à travailler à la mise en oeuvre de ces recommandations que nous leur faisons, de ces stratégies que nous leur proposons, pour que ça ne reste pas non plus des lettres mortes.

Alors, nous avons pris connaissance du document de la planification pluriannuelle de l'immigration au Québec pour la période 2012 et 2015, et c'est dans ce contexte qu'on se présente à vous pour vous faire part de notre point de vue sur votre approche et vos politiques qui sont proposées. Et je passe donc la parole à mon collègue Lambert Opula.

M. Opula (Lambert):Merci beaucoup.

Le Président (M. Cousineau): M. Opula.

M. Opula (Lambert): Voilà. Le CAMO, donc le Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre des personnes immigrantes, a constaté qu'au cours des dernières années, donc, entre 1999 et 2010, le volume de l'immigration économique s'est accru considérablement, environ 200 %, et le volume des admissions des immigrants est passé de 45 000 par année en 2007 à 55 000 en 2011. Mais, pendant ce temps, les perspectives d'évolution démographique du Québec se seraient améliorées. Et, à la base, on cite les volumes d'admissions mais aussi le relèvement des naissances.

Ceci a mené à une certaine prise en compte de la donne dont la planification est en cours. Et ce que nous avons remarqué, c'est que le guide de consultation semble préconiser un arbitrage qui vise à améliorer le profil des futurs immigrants en mettant de l'emphase sur la priorisation des candidats francophones et la proportion des travailleurs qualifiés, le rajeunissement des personnes accueillies, le pourcentage de l'immigration économique qui devrait s'améliorer. Mais nous constatons que, dans le guide, l'appariement des compétences aux exigences des emplois créés par l'économie apparaît comme le critère majeur. Donc, on veut que, dans le recrutement des années à venir, les compétences soient branchées sur les caractéristiques des emplois que l'on va créer. Aussi, on compte réduire le volume d'admissions.

Et nous avons pensé que la démarche tendant à améliorer le profil des immigrants à recruter est quelque chose de très important. Néanmoins, nous avons eu à constater aussi que le modèle qui est en train de prendre forme à travers les exigences et les planifications que nous avons suivies, ce modèle, donc, ne dégage pas des orientations vraiment nouvelles. Pourquoi? Parce que la priorisation des diplômés techniques dans la sélection des immigrants économiques, si cela constitue une idée porteuse, néanmoins la préoccupation elle-même n'est pas nouvelle. Depuis 1998, et tout récemment en 2009, on a vu venir une série de critères qui tendaient à améliorer le profil des personnes à recruter. Le Québec a réajusté le nombre de points relatifs à la connaissance de la langue française, au nombre d'années de scolarité, à la pratique d'un métier qui est compris parmi les secteurs en croissance, donc, au pays. Donc, toutes ces mesures qui ont été prises au cours de ces dernières années tendaient à améliorer le profil des immigrants à recruter. Ce qui fait que la démarche actuelle voulant connecter les qualifications à recruter avec les emplois qui se créent n'apparaît pas vraiment comme quelque chose de nouveau. Toutefois, nous pensons que cette démarche est porteuse.

**(14 h 10)**

Le hic que nous marquons porte sur ceci. Depuis un certain temps, le taux de chômage des immigrants, au Québec, ne fait qu'augmenter. En comparant les chiffres des trois derniers recensements, nous avons constaté que, de recensement en recensement, le taux de chômage a augmenté, et considérablement. Pendant ce temps, je venais de le souligner, on a tenu à prendre des mesures qui ont eu pour effet d'améliorer le profil des personnes que l'on a recrutées. Pourtant, malgré toutes ces mesures, la situation que reflète le taux de chômage des immigrants ne s'est pas redressée.

Ceci nous a amenés à nous poser la question de savoir si la réduction du taux... disons, des volumes des admissions, dans l'espoir que l'appariement entre les qualifications et les emplois qui se créent puisse améliorer le processus d'intégration, cela ne constituerait peut-être pas une panacée. Nous, nous avons pensé qu'il va peut-être falloir examiner la possibilité de coupler cette démarche d'appariement des qualifications avec les exigences des emplois, il faudrait peut-être coupler cela avec une autre démarche qui va consister à augmenter le volume de moyens d'intervention auprès des immigrants. Parce qu'il est un fait que l'amélioration du profil, qui a commencé depuis une décennie, n'a pas eu d'effet sur la qualité et le volume de personnes qui s'intègrent harmonieusement.

Nous avons aussi constaté une chose, c'est que, lorsqu'on décompose le parcours de l'immigrant depuis son accueil jusqu'au jour où il s'intègre, on constate qu'à chaque étape du processus il y a au moins un outil pertinent que le Québec a mis en oeuvre pour pouvoir encadrer ses immigrants. Depuis le début, on voit des mesures qui sont prises, au niveau de l'immigration, pour la francisation et pour la préemployabilité, l'employabilité. À chaque étape, il y a des mesures, par exemple le PRIIME. Par exemple, dernièrement, il y a le projet IPOP. Donc, à chaque étape, il y a une mesure très importante, un outil pertinent pour pouvoir encadrer les immigrants.

Lorsque nous faisons le tour des entreprises, dans notre mandat en tant que comité d'adaptation, nous avons constaté que les entrepreneurs qui sont au courant de l'existence de ces outils sont satisfaits des avantages que ça leur procure. Les immigrants qui bénéficient de ces mesures sont aussi satisfaits. Cependant, il reste une chose, c'est que le taux de chômage augmente et que plusieurs entreprises ne sont pas informées de l'existence de ces outils pourtant pertinents.

C'est pour cela que nous sommes arrivés à nous poser la question de savoir si le vrai problème n'est pas au volume des moyens à mettre en oeuvre pour sensibiliser tout le monde, pour que tous les milieux qui sont intéressés à exploiter ces mesures pertinentes puissent s'en servir, ce qui aurait comme effet que davantage d'immigrants vont bénéficier de l'accueil en milieu de travail, et on va assister à une intégration plus rapide, plus harmonieuse, et la pertinence de l'immigration comme démarche sociale pourrait être vérifiée.

Nous avons aussi constaté une chose, c'est que la stratégie québécoise d'intervention ne reconnaît aucun rôle aux communautés ethnoculturelles. Cependant, lorsqu'arrive un immigrant à Québec... au Québec plutôt, après la période de contact, la personne s'en remet à la communauté ethnoculturelle. C'est surtout à partir des communautés ethnoculturelles que la personne obtient les informations sur les ressources qu'offre le territoire québécois pour son intégration. Et ces milieux sont complètement déconnectés. Notre préoccupation concerne surtout les communautés ethnoculturelles qui comptent le plus de personnes parlant la langue française depuis le moment de leur recrutement et qui, arrivées ici, n'ont pas pu trouver d'emploi. Pourtant, elles se recrutent parmi les compétences des secteurs en croissance.

La multiplicité de points de service entraîne des duplications et une fragmentation de l'information sur le bassin de la main-d'oeuvre immigrante et l'offre de service aux entreprises qui en découle. Donc, on a une très forte fragmentation, ce qui fait que, malgré son avantage sur le plan de la flexibilité, l'offre de service actuelle est, bon, certes flexible, mais elle ne permet pas d'améliorer la visibilité des services, moins encore la cohérence des interventions.

Le modèle actuel d'intégration des immigrants au Québec est articulé autour de la loi 101. Cependant, de longues listes d'attente pour l'accès à la francisation contribueraient à retarder le processus de l'intégration linguistique des immigrants, ce qui conditionne aussi les rythmes d'intégration au marché du travail.

Au moment précis où le Québec tente de mobiliser le potentiel d'employabilité de certains segments de la population pour contrer la pénurie de la main-d'oeuvre qualifiée, le rôle des cellules d'évaluation des acquis et compétences obtenus à l'étranger devient stratégique. Cependant, chaque entité se dote de sa propre méthodologie d'évaluation des acquis et des compétences. Je parle ici des institutions qui dépendent des ministères de l'Immigration, de l'Éducation et de l'Emploi et Solidarité sociale. La concertation interinstitutionnelle qui pourrait conduire à l'harmonisation de cette différente grille d'évaluation semble marquer le pas, ce qui constitue un problème.

Le Président (M. Cousineau): En conclusion, s'il vous plaît. En conclusion.

M. Opula (Lambert): En conclusion, le CAMO propose que l'on puisse attacher plus d'importance à l'augmentation de moyens d'intervention et que le Québec puisse entreprendre une réforme qui donc va aboutir à la création de points de service intégrés, c'est-à-dire développer la cohérence pour donner la visibilité à l'intervention, donc des sortes de guichets uniques par entités où le niveau... l'échelle des territoires va être définie.

Et nous demandons aussi qu'un certain nombre de pratiques qui sont considérées comme novatrices puissent être médiatisées de manière à ce que ces pratiques-là puissent être adoptées à la grandeur du territoire. Nous serions très intéressés à ce que le Québec mette de l'emphase au processus des concertations interinstitutionnelles pour harmoniser les grilles des reconnaissances et des acquis, qui sont différentes selon que l'on relève du ministère de l'Immigration, de l'Emploi et Solidarité ou encore du ministère de l'Éducation.

Et nous allons terminer en demandant que certaines pratiques que nous avons observées dans des entreprises puissent être vulgarisées. Nous avons constaté que les entreprises, lorsqu'elles sont confrontées à des besoins spécifiques, elles trouvent des solutions que le Québec n'a pas encore identifiées. Par exemple, le secteur de l'aérospatiale, à travers les comités sectoriels, le CAMAQ, ils ont identifié des méthodes pour pouvoir reconnaître les acquis des personnes qu'ils recrutent à l'étranger, et les méthodes qu'ils ont utilisées peuvent être utilisées aussi dans la régionalisation de l'immigration. Je termine par là.

Le Président (M. Cousineau): Merci, messieurs. Nous allons procéder maintenant à une période d'échange entre les parlementaires et vous. Alors, je vais passer la parole, pour le premier 20 minutes, à Mme la ministre.

**(14 h 20)**

Mme Weil: Oui, merci. Bienvenue. Évidemment, je suis très contente d'avoir l'occasion de pouvoir échanger avec vous, parce que vous avez vraiment une expertise pointue dans peut-être ce qui est le nerf de la guerre, hein, c'est l'intégration à l'emploi, de trouver les stratégies, les meilleures stratégies pour réussir cette intégration.

Je voudrais quand même vous donner des chiffres de 2010. Je ne sais pas si vous les avez, mais, je pense, c'est important que je dise qu'il y a eu quand même des améliorations au niveau... Parce que vous avez parlé d'un portrait qui ne s'améliore pas au fil des années. On sait que, l'intégration, le taux d'emploi est inférieur, pour les personnes immigrantes, à la population native, le taux de chômage est plus élevé, etc. Mais je vais vous donner des chiffres qui montrent une amélioration de 2009 à 2010, et on espère qu'il y a une tendance là grâce à des mesures musclées, là, qui ont été mises en place.

Donc, une nette remontée de l'emploi observée généralement, et les augmentations relatives sont de 7,9 % chez les immigrants, de 1,7 % dans l'ensemble de la population. Donc, ça, c'est intéressant. En 2010, 53,4 % de la création nette d'emplois a bénéficié à des personnes immigrantes. Et tous les groupes d'immigrants ont profité de cette embellie du marché du travail, donc moins de cinq ans, cinq à 10 ans et plus de 10 ans. Le taux de chômage dans l'ensemble de la population, en 2010, est de 8 % et de 12,5 % dans la population immigrante, et c'était 13,7 % en 2009. En 2010, la baisse du taux de chômage est plus importante chez les immigrants, moins 1,2 point de pourcentage. En tout cas, j'ai d'autres chiffres. Vous pourriez aller d'ailleurs sur le site du MICC pour voir ces chiffres.

Alors, évidemment, vous avez cité certaines mesures qui ont été mises en place, le PRIIME, qui donne des très bons résultats. Vraiment, grâce au Programme immigrants investisseurs -- c'est comme ça qu'on finance le programme PRIIME -- on a annoncé une entente entre Investissement Québec et le ministère de l'Immigration pour être capables d'être encore plus efficaces dans le traitement de ces dossiers-là, et on a bon espoir de pouvoir avoir une augmentation de ces demandes-là et donc pouvoir bonifier le programme PRIIME, parce que je pense qu'il y a un consensus que c'est un programme vraiment intéressant.

Il y a d'autres mesures, et je voudrais... Vous avez mentionné IPOP. Il y a des programmes de mentorat aussi. Nous, on finance, la CRE de Montréal, un programme de mentorat, qui a eu un peu de couverture médiatique, surtout dans le journal Les Affaires, et j'ai entendu des témoignages par rapport à ce programme-là, et ça semble aussi -- on n'a pas des chiffres pour l'instant, c'est vraiment des histoires que les gens racontent -- ça semble donner des résultats.

Qu'est-ce que vous pensez de ces genres de programmes de mentorat? C'est vraiment des bénévoles, hein, des gens en ressources humaines, beaucoup, des grandes entreprises. Ils indiquent leur intérêt à participer à ce programme, et ensuite on fait un jumelage avec un nouvel arrivant qui cherche un mentor.

Le Président (M. Cousineau): M. Opula. Oui, bien, M. Boisrond.

M. Boisrond (Frédéric): Oui, merci. Je crois, Mme la ministre, que les chiffres que vous donnez... venez de donner sont très rassurants. Alors, tant mieux si la situation s'améliore. Il y a aussi d'autres facteurs qu'il faut regarder. Ce n'est pas seulement le nombre d'emplois qui est créé, mais la qualité de ces emplois qui sont créés pour les immigrants, la durée de ces emplois et le salaire que... qui est payé comparativement à ce qui est payé à l'ensemble de la population.

Je crois que, pour le peu de temps que j'ai passé à CAMO, en prenant en considération que j'aurais bien fait mon travail de recherche sur mon mandat, je crois que toutes les mesures -- et c'est ce que mon collègue a dit -- toutes les mesures ont leur valeur et apportent des résultats. Des programmes comme les programmes de mentorat, je les connais pour avoir siégé aussi au CRE dans une carrière précédente, je sais que ce sont des projets qui sont vraiment intéressants et qui portent vraiment des résultats intéressants pour les personnes qui y participent. Nous sommes pour ça, pour tout ce qui peut améliorer l'intégration des immigrants au marché du travail et que ça soit cohérent avec les mesures qui sont mises de l'avant pour justement aller chercher les personnes dont on maximise le potentiel d'intégration. Ce qui nous inquiète, c'est quand on met de l'avant des mesures pour maximiser le potentiel d'intégration et qu'on n'arrive pas à faire cette intégration parce que les mesures subséquentes dans le continuum ne suivent pas.

Le Président (M. Cousineau): Mme la ministre.

Mme Weil: Merci. Je voudrais revenir juste sur la question de francisation et sélection, grille de sélection, puis ensuite, donc... il y a des mesures avant, des mesures pendant, des mesures après, hein, pour réussir l'immigration, réussir l'intégration. Dans la sélection, donc, suite au rapport du Vérificateur, d'autres modifications ont été apportées à la grille. Tout ce travail-là évidemment est fait avec Emploi-Québec, où vraiment les professions et métiers en demande sont identifiés. On a modifié la grille en 2009. Quant à nous, la vision, c'est de travailler tous les éléments en même temps, alors qu'il y a une nouvelle conjoncture, c'est les 740 000 emplois qui devront être comblés. Et on l'entend beaucoup plus, les employeurs sentent une pression. Et donc il y a peut-être une convergence de facteurs très, très positifs qui vont faire en sorte que les gens vont carrément s'ouvrir, hein? Parce qu'il y a ça aussi, il y a l'élément de l'employeur qui doit s'ouvrir à cette diversité. Donc, la sélection s'améliore, la francisation qui est entamée lorsque la personne n'est même pas encore arrivée, avec des cours des partenaires qu'on a, les Alliances françaises, etc., partout dans le monde, un cours en ligne qui donne des bons résultats.

Pour ce qui est des chiffres ici, au Québec, le délai moyen d'attente, c'est 38 jours, et on répond à la demande. Donc, on a augmenté beaucoup l'offre, on a varié l'offre, et l'offre répond vraiment à la demande. Mais il faut toujours continuer. Vous avez parlé de s'assurer que la personne est à la hauteur de sa formation, ça, c'est une préoccupation que j'ai. Et c'est sûr que la francisation puis la francisation ajustée à ces besoins, c'est un élément aussi. Je pense qu'il faut continuellement regarder à nouveau ces éléments-là.

Et là j'aimerais vous amener sur votre expertise. Alors, Emploi-Québec et le MICC travaillent étroitement ensemble. On va continuer à travailler étroitement pour répondre à vos préoccupations. Mais là je voudrais vraiment profiter de cette expertise, ce que vous voyez sur le terrain, ce manque de, peut-être, connexion entre les différents acteurs, dont les acteurs gouvernementaux. Peut-être quelques exemples qui vont illustrer le besoin que ces deux ministères continuent à travailler étroitement, il y a la préemployabilité évidemment, puis ensuite Emploi-Québec qui prend en charge la personne. Mais peut-être vous entendre un peu plus là-dessus.

Le Président (M. Cousineau): M. Opula.

**(14 h 30)**

M. Opula (Lambert): Oui. Merci. Et je commencerais par donner un petit commentaire en ce qui concerne l'expérience de mentorat. Personnellement, je suis membre du comité de projet ACTIVER qui est financé par la CRE de Montréal et qui consiste à accompagner des immigrants avec le concours de membres du RAME, donc le regroupement des mentors en employabilité qui sont... mentors affaires plutôt, du Québec. Et ce que j'ai remarqué à la base, que c'est un projet très, très important, c'est un projet porteur. Il y a des résultats, mais, à toutes les réunions, le problème qui est au centre, c'est: Est-ce que ce projet va continuer demain? Il donne de bons résultats, mais la CRE va-t-elle accepter d'y mettre de l'argent encore une fois?

La continuité des expériences. Déjà, le programme lui-même... Souvent, lorsqu'un programme commence à donner des résultats auprès de la population cible, il arrive en fin de cycle. Il est supprimé, alors que la transférabilité des pratiques porteuses, et qu'on a identifiées, n'est pas encore cernée. Alors, ça, c'est un problème très, très sérieux, la continuité des expériences porteuses et la transférabilité de celles-ci. Bon.

Et, pour ce qui concerne la francisation, c'est vrai qu'il y a des choses qui s'améliorent, mais il y a aussi de l'inquiétude. Je prends ici, pour exemple, le cas d'une souche de la population immigrante qui est francophone par excellence et où on trouve le plus de personnes qui ont fait des études techniques: les Maghrébins. Et c'est malheureusement là qu'on trouve le taux de chômage le plus élevé. Ce qui fait qu'il faut peut-être porter la réflexion au-delà des critères comme francisation, pour tout ça, il faut aller au-delà des choses.

Et, lorsque nous avons fait un événement national ici, à Québec, en octobre 2010, l'avis qui est sorti de l'ensemble des participants -- parce que nous y avons convoqué toutes les catégories des acteurs -- l'avis qui est sorti, c'est qu'il faut y ajouter aussi un programme systématique et permanent de sensibilisation des milieux employeurs sur la valeur ajoutée des immigrants à travers des structures communes: les chambres de commerce, les comités sectoriels de la main-d'oeuvre, et, voire encore, disons, les programmes... disons, Emploi-Québec, et la Commission des partenaires du marché du travail. Il faut aussi sensibiliser la population québécoise. Parce que, dans certains cas, les employeurs semblent prisonniers de l'opinion des travailleurs de la société d'accueil. Alors, le problème de la sensibilisation de la population se pose, et ça rajoute à ce que nous avons appelé l'augmentation du volume de moyens pour pouvoir intervenir afin d'accélérer l'intégration des immigrants.

Et, en ce qui concerne le dernier point, je peux vous dire qu'au niveau d'Emploi-Québec nous avons souvent des résultats sur l'efficacité des programmes ou des projets, l'efficacité des projets, l'efficacité des programmes eux-mêmes, mais que de cas malheureux où c'est les entreprises qui profitent des effets des programmes. Je prends l'exemple du PRIIME. On embauche quelqu'un, pour l'organisme qui a encadré les personnes, c'est 100 % de réussite. Pour Emploi-Québec, c'est 100 % de réussite, parce que la cohorte, par exemple, de 12 personnes, toutes les 12 ont trouvé des emplois. Mais qu'est-ce qu'on va voir au bout de six mois, lorsque les effets du PRIIME s'estompent? La personne perd son emploi. Et, à ce moment-là, la période d'évaluation du projet a déjà expiré.

Parce que tous les bailleurs financent la période de suivi pour deux ou trois mois, alors que c'est après six mois que se termine le PRIIME et qu'après six mois la personne perd son emploi et se retrouve dans la rue. Lorsque la personne se retrouve dans la rue, elle revient auprès d'un organisme communautaire pour demander un service. Si l'organisme présente son dossier auprès d'Emploi-Québec, elle va s'entendre dire qu'il faut attendre un moment avant qu'elle n'ait le droit de participer à un autre programme, et, conséquences, la personne se retrouve à la maison, sans emploi, sans perspective. Et c'est ça, la période où nous perdons beaucoup de personnes, qui versent dans la perte du savoir-être, parce que l'estime de soi est attaqué à partir du moment où il n'y a plus de perspective.

Donc, il y a beaucoup de situations malheureuses que nous enregistrons dans nos contacts et avec les entreprises, les comités sectoriels, les organismes communautaires. Donc, il y a vraiment des situations malheureuses. C'est la raison pour laquelle nous pensons que toutes les limitations, par exemple la période qui doit s'écouler avant que la personne ne soit réadmise dans ces programmes, toutes ces questions, toutes ces limitations sont liées au volume des moyens. Ce n'est pas tant dans la réduction des quotas que l'on va résoudre ce problème, c'est plutôt dans l'augmentation des moyens pour pouvoir mieux encadrer les personnes qui sont en contact avec les organismes.

Le Président (M. Cousineau): Mme la ministre.

Mme Weil: Oui. Alors, je pense que tout ce que vous dites résonne beaucoup avec moi, je pense, avec tout le monde ici, au ministère de l'Immigration, des Communautés culturelles. Le PRIIME, et je ne sais pas si, peut-être, la période de référence pour l'évaluation n'est pas la même, mais le chiffre que, nous, on a, c'est 83 % de rétention après la période de six mois. Donc, c'est perçu comme un programme qui est très positif, qui donne des résultats. Donc, ça, c'est un élément.

Ce matin, avec le conseil de la langue française, on a beaucoup parlé du milieu des affaires, les employeurs. Vous, vous avez des employés... C'est-à-dire que les employeurs, c'est les premiers qui doivent s'ouvrir à la diversité, d'où votre suggestion d'avoir une campagne presque en permanence. On a une campagne actuellement, qui s'appelle Toutes nos origines, par websérie, qui est très, très, très populaire, qui reçoit beaucoup d'attention. Et c'est sûr que, moi, j'ai été invitée par la Chambre de commerce de Montréal, et d'autres chambres de commerce en vue... Parce que je pense que c'est... Je suis tellement d'accord avec vous, il faut répéter, répéter, répéter ce message sur l'importance de s'ouvrir à la diversité. Je répète qu'on a quand même une conjoncture favorable, dans le sens qu'il y a une pression sur les employeurs, et on dirait que les gens en parlent plus. Il y a aussi beaucoup de choses, des recherches qui nous viennent d'ailleurs au Canada, Conference Board of Canada et autres, qui ont des analyses très détaillées de la plus-value de la diversité, tout ça qui fait qu'il y a des éléments intéressants pour nous permettre d'aller plus loin.

Vous, les employeurs qui sont dans votre organisme ou avec qui vous faites affaire, qu'est-ce que vous faites, vous, dans vos stratégies, justement, pour les rejoindre, les convaincre à s'ouvrir à cette diversité?

Le Président (M. Cousineau): M. Opula.

M. Opula (Lambert): Merci. Dans notre mandat, pour l'intervention auprès des employeurs, nous avons deux pratiques: ou bien nous passons par les comités sectoriels de la main-d'oeuvre ou la promotion de certains outils qui peuvent permettre aux employeurs de faciliter la gestion de la main-d'oeuvre d'origine immigrante et plus, bon, tout ce qui s'ensuit, comme la formation en gestion de la diversité, tout ça.

Deuxième aspect, nous entrons de temps en temps avec les entreprises qui ont des problématiques particulières pour examiner avec eux... avec elles plutôt, et voir ce qu'on peut faire. Bon. Et nous avons, jusqu'ici, lancé un certain nombre de programmes ou, disons, de projets pour amener les entreprises à comprendre ou, disons, à noter la plus-value de la personne immigrante... je voulais dire plutôt la valeur ajoutée de personnes immigrantes. Nous avons essayé d'amener un certain nombre d'approches qui permettent aux employeurs de comprendre les difficultés qu'ils éprouvent et la nature des difficultés qu'ils éprouvent lorsqu'ils emploient les immigrants.

Nous avons abouti, même, à des situations très difficiles. Ça nous a permis, même, de découvrir certaines situations qui n'étaient pas connues. Par exemple, depuis un certain temps, dans le secteur des transports, par exemple, les entreprises emploient de plus en plus des travailleurs autonomes pour la distribution ou, disons, pour le service à domicile, la distribution des meubles, de tout ça. Alors, qu'est-ce qu'on a remarqué: ces gens n'ont pas de formation, et, lorsqu'ils en ont besoin, il n'y a pas de financement qui s'adresse explicitement à ces gens-là pour améliorer les rapports avec la clientèle d'abord, ensuite les entreprises. Il y a des problèmes qu'on a remarqués, et nous continuons à sensibiliser le milieu.

Aujourd'hui, nous lançons aussi un outil révolutionnaire qui va permettre aux employeurs d'aller jusqu'au-delà de la simple connaissance des outils qui vont permettre aux employeurs, face à un individu particulier, de voir quels sont les problèmes qui peuvent surgir par rapport à son poste.

**(14 h 40)**

Le Président (M. Cousineau): C'est terminé pour ce bloc. Alors, je passerais la parole maintenant au député de Bourget pour le prochain 20 minutes. M. le député.

M. Kotto: Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour, et merci d'être là. Vous dites que des actions antérieures avaient déjà amélioré le profil sociodémographique des immigrants sans infléchir le taux de chômage les concernant. Vous parlez spécifiquement de quelles actions?

M. Opula (Lambert): Ici, je veux faire voir que, par le passé, par exemple, on a décidé d'augmenter le nombre d'années de scolarité pour être admis au Québec, on a décidé d'aller recruter préférentiellement dans le bassin francophone, on a décidé d'aller recruter uniquement les personnes qui possèdent des qualifications dans les domaines qui les préparent vers des secteurs en croissance au Québec. Donc, toutes ces mesures ont permis finalement d'améliorer le profil des personnes recrutées. Malheureusement, pendant toute cette période, bon, hormis les informations que Mme la ministre vient de nous donner pour 2010, jusque-là, pendant au moins une décennie, le taux de chômage des immigrants ne faisait que monter. C'est pour ça que nous avons pensé qu'il faut voir aussi d'autres avenues, ce n'est pas seulement à l'amélioration du profil des immigrants.

Le Président (M. Cousineau): M. le député.

M. Kotto: Il reste néanmoins élevé, malgré le léger fléchissement, ce taux de chômage, parce qu'il fait le double. Quand on prend l'ensemble des chiffres, il fait le double du taux de chômage chez les natifs. Quelque part, donc, il y a un problème. Et, de votre perspective des choses, à quoi attribueriez-vous ce taux de croissance accentué chez les immigrants?

M. Opula (Lambert): Nous avons pensé que, lorsque deux peuples se rencontrent, on ne peut pas dire qu'il y a méfiance ou qu'il y a discrimination, on ne décide pas de discriminer l'autre, mais il y a au moins l'inconfort que l'on sent du fait de se retrouver devant une personne que l'on ne connaît pas, devant une culture que l'on ne connaît pas. On peut, à certains moments... C'est naturel, c'est humain de se sentir dans un certain inconfort. Voilà pourquoi nous insistons sur la nécessité d'une enveloppe pour une campagne ciblée et plus ou moins permanente, qui va avoir pour effet de rassurer les employeurs, qu'ils sont devant... bon, mettons de côté les problèmes du voilage et la conjoncture, la pénurie, mais les rassurer qu'ils sont plutôt devant des personnes qui peuvent participer à la solution du problème de la continuité de la productivité. Nous pensons qu'il faut que les gens se comprennent, et cela, c'est le travail d'une campagne longue de sensibilisation.

Le Président (M. Cousineau): Un complément de réponse, M. Boisrond?

M. Boisrond (Frédéric): Oui, si vous permettez. M. le député, l'essentiel de nos recommandations, c'est de dire que les mesures qui sont proposées actuellement, nous croyons qu'elles sont acceptables et qu'elles sont correctes. L'essentiel de nos recommandations, c'est de dire qu'au niveau des mesures d'accompagnement des immigrants, pour l'intégration et le maintien au travail, il faut repenser cette stratégie-là, surtout, parce que les gens arrivent ici avec les compétences déjà acquises, que ce soit parce qu'ils sont recrutés en fonction de leur formation, du bassin francophone, etc., et malgré tout ils n'arrivent pas à intégrer le marché du travail. Donc, au niveau du continuum d'accompagnement, il semble qu'il y ait quelque chose à faire au niveau de la réaffectation des ressources. Et évidemment, comme l'a exprimé mon collègue, au niveau des obstacles sociaux qui existent en termes de perception, et etc., on a un sérieux travail à faire pour rassurer les employeurs du potentiel qu'il y a derrière cette démarche.

Le Président (M. Cousineau): O.K. M. le député de Bourget.

M. Kotto: À l'aune de vos informations, est-ce qu'ailleurs en Occident une expérience, disons, soutenue de sensibilisation pour transformer l'humain dans le pays d'accueil existe-t-elle? Est-ce qu'il y a un modèle de référence, un modèle vers lequel on pourrait, disons, s'inspirer... à partir duquel on pourrait s'inspirer, oui?

Le Président (M. Cousineau): M. Boisrond.

M. Boisrond (Frédéric): Si vous permettez, je ne vous réponds pas en tant que directeur du CAMO mais en tant qu'enseignant à l'Université McGill sur la question de la diversité. Le seul modèle que je connaisse qui semble vouloir bien, à peu près, fonctionner, c'est le modèle québécois. Et je pense que les événements des derniers jours ailleurs, que ça soit à Londres, que ça soit dans des banlieues à Paris, me portent à me dire que le modèle québécois est probablement un des meilleurs, mais, aussi, aussi fragile que les autres, et que, chaque décision que nous faisons à l'intérieur de ce modèle, nous devons prendre la précaution de comprendre qu'il est excessivement fragile et très menacé.

M. Kotto: Je confirme ce que vous dites, parce que le modèle québécois a notamment inspiré les nouvelles politiques en matière d'immigration en France, parce qu'ils n'en avaient pas, d'approche structurée, jusqu'à il y a quoi, il y a une vingtaine d'années à peu près. Mais ce modèle, chez eux, dans son application, parce qu'ils ont tenté d'aller un peu plus loin relativement aux moyens, justement, investis pour accompagner, pour sensibiliser, pour encadrer, il a atteint ses limites, quelque part dans la démarche, très active et très soutenue au plan financier et ressources humaines, dévie sur d'autres problématiques, aujourd'hui, qui sont essentiellement des problématiques entourant l'intégration, l'identification de l'immigrant à la société d'accueil, première, deuxième génération, et les immigrants nouvellement arrivés.

Donc, je vois se profiler, dans l'hypothèse où on aboutit avec, enfin, cet ensemble de propositions, je vois se profiler la même impasse, parce que les moyens ne suffisent pas. On peut en investir un maximum, les ressources humaines ne suffisent pas. C'est les coeurs qu'il faut changer. Mais comment peut-on arriver à changer les coeurs quand, au plan des sphères d'activité humaine où la représentation est importante, les médias, la politique, il y a une sous-représentation de la diversité? Comment est-ce qu'on pourrait y arriver sans habituer l'inconscient collectif de la terre d'accueil à ces entités diverses qui, ma foi, pourraient être le maillon qui inspirerait la sérénité, à l'inverse de la peur, qui inspirerait la confiance, à l'inverse de la défiance?

Est-ce qu'il n'y a pas lieu de penser de façon holistique l'effort gouvernemental là-dessus? Est-ce que ce défi ne dépasse pas la sphère du MICC? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'avoir, je ne sais pas, moi, un comité de liaison interministériel pour articuler des approches qui convergent vers cet objectif-là? Je pose la question parce que le défi est important. Et je ne pense pas que le seul ministère de l'Immigration peut suffire à le relever.

Le Président (M. Cousineau): Monsieur... oui, M. Boisrond.

**(14 h 50)**

M. Boisrond (Frédéric): Quand on parle de changer des perceptions sur les immigrants -- et j'essaie de vous donner une réponse peut-être un peu courte, face à votre intervention -- mais quand on parle de changer la perception qu'on a des immigrants, il faut voir que, tant que des gens ou un groupe de personnes ne participe pas à l'économie d'un pays, il est mis à l'écart, il est mis à l'index, et on jette un regard différent sur lui, sur ce groupe. Alors, la démarche du CAMO, l'essentiel même de notre mandat, c'est justement d'éviter que certains groupes d'individus, que certaines communautés spécifiques se retrouvent à être mis à l'index parce qu'ils ne participent pas à l'économie, ils ne participent pas à la création de la richesse, ils ne consomment pas et ils sont mis à l'écart.

Donc, je pense que l'idée, c'est de s'assurer que les mesures qui sont mises en place sont des mesures qui permettent non seulement à des groupes d'immigrants d'accéder au marché du travail, mais aussi de pouvoir se maintenir en emploi. Et le regard qu'on jette sur des gens qui travaillent n'est certainement pas le même que celui qu'on jette sur des gens sur l'aide sociale ou sur le chômage.

M. Kotto: Mais vous savez... M. le Président.

Le Président (M. Cousineau): M. le député.

M. Kotto: Mais vous savez, surtout quand on a affaire à des minorités -- elles sont diverses -- à cause des préjugés, à cause de la stigmatisation, qu'il suffit d'un écart au sein d'une communauté X pour que la faute commise -- faute entre guillemets -- par tel ou tel individu soit, disons, étalée à l'ensemble de cette communauté et rende, par conséquent, de manière... disons, par contamination, rende l'ensemble de la communauté responsable de cette faute, donc participe, de surcroît, à l'érection des barrières, des frontières entre cette ou ces communautés et la société d'accueil.

C'est pourquoi j'insistais beaucoup sur le second volet, parce que, voyez-vous, en France, ils ont eu, au plan politique, par exemple, une représentation de la diversité qui a eu un impact énorme dans l'inconscient collectif français. On accepte de plus en plus cette diversité. On n'a pas encore atteint... Malgré le fait qu'ils soient partis très tard, ils ont copié de ce côté-ci de la planète, mais ils ont avancé beaucoup plus rapidement dans ce domaine-là. Au niveau des médias également, la diversité est présente, au niveau du sport. Il faut dire que le sport a été la sphère, avec le phénomène de Blanc-Black-Beur, la Coupe du monde de 1998, ça a été la locomotive qui a servi au déclenchement de toute cette prise de conscience de cette nécessité du vivre-ensemble, de construire ensemble une nouvelle France. Et nous rêvons tous d'un nouveau Québec qui prenne en compte cette diversité.

Et, par contre, les moyens, ce que je constate, les moyens ne sont pas là, les moyens financiers ne sont pas à la hauteur, ne sont pas adéquats, et les ressources humaines non plus. Il y a un certain nombre de personnes qui sont venues en témoigner ici, et c'est important, pour notre part, d'insister là-dessus. Il y a d'autres défis qui reposent sur notre système de valeurs, qui est la clé de voûte de notre identité: la langue, l'égalité entre hommes et femmes, la non-violence, la séparation du religieux de l'État, c'est un autre défi, ça. On en parle dans le cas du projet de loi n° 94 -- j'espère qu'on finira par s'entendre un jour. Mais, pour ce qui est de l'intégration en milieu de travail, pour ce qui est de l'intégration sociale, il y a une idée qui converge dans le sens du manque... disons, de l'inadéquation de moyens financiers et humains pour accompagner, pour faciliter, pour, disons, amener la réussite d'un plus grand nombre dans leurs démarches d'intégration.

Le Président (M. Cousineau): Réaction. M. Opula? M. Boisrond?

M. Opula (Lambert): O.K. Merci. Merci au député pour ces informations importantes. À CAMO, l'année dernière, nous avons reçu une délégation venue de Paris pour s'informer sur les méthodes de travail de CAMO personnes immigrantes parce qu'ils voulaient lancer une structure de même genre au niveau de Paris. Et, pendant nos échanges, ils n'ont pas cessé de nous dire qu'en France ce n'est peut-être pas facile pour eux de réussir notre mandat étant donné qu'en France le fait même de parler de la diversité, ça fait scandale dans certains milieux. Et, en Angleterre, depuis un certain temps, on voyait des problèmes, mais, quoi qu'il en soit, c'est un pays qui a fait un peu plus de progrès en matière de l'intégration de la diversité, et cela se reflète même dans tous les services publics.

Dans plusieurs pays, la Belgique, par exemple, et l'Allemagne, et quelques pays de l'Europe du Nord, il fut des périodes où ce n'était pas facile pour eux de faire passer le message sur l'intégration de l'immigration parce que beaucoup pensaient qu'il fallait traiter le problème des immigrants dans le lot des problèmes des pauvres du pays. Donc, ils ne faisaient pas la différence entre les pauvres et les immigrants. C'est avec le temps que, maintenant, petit à petit, ils commencent à intégrer l'approche immigration comme étant une approche particulière. Et, aux États-Unis, vous le savez bien, là c'est le problème des... là, le professionnel qui a été recruté qui peut faire venir sa famille. Donc, chaque société a sa façon d'aborder la question de l'immigration. Et c'est ce qui fait que les comparaisons interpays arrivent quelquefois à des conclusions qui peuvent ne pas refléter réellement la réalité.

Et nos analyses, nos réflexions portent sur ce que le Québec est et ce que le Québec fait, accepte de faire vis-à-vis des immigrants. Et c'est pour cela que, nous fondant sur cela, nous pensons qu'il va peut-être falloir intégrer certaines autres approches. Et nous sommes arrivés à ce constat parce que nous sommes partis d'un sentiment de peur. Dans notre document, nous faisons allusion à certains points de vue qui ont été médiatisés ces derniers temps et qui visent à relativiser l'importance de l'immigration. Fort malheureusement, c'est au même moment où le Québec, faisant face aux conséquences de la crise financière, trouve la nécessité de réduire le volume d'admissions. Alors, vous vous imaginez, dans les communautés des immigrants, les gens ont tendance à lier le processus visant à réduire les quotas avec des points de vue qui ont été émis dans des publications importantes ces derniers temps et qui sont vus par la population immigrante comme étant des points de vue cherchant à les tasser. Mais, pour nous, nous voyons plutôt la chose autrement, qu'il va peut-être falloir intégrer des nouvelles approches.

Parce qu'il n'est pas vrai de dire que l'immigration ne peut pas résoudre le problème du vieillissement de la population. La vérité est que le Québec ne peut pas aller au-delà d'un certain seuil d'affectation des ressources, parce qu'il y a aussi pas mal d'autres problèmes à résoudre, il n'y a pas que le problème de l'immigration. Nous le savons, nous comprenons cela. Et nous comprenons aussi que le Québec a des défis énormes et qu'il a fait beaucoup, mais il va peut-être falloir coupler la démarche de stabilisation des quotas avec un certain rehaussement du niveau des moyens. Et, à ce terme... à un niveau donné de notre réflexion, nous nous sommes dit: En passant...

Le Président (M. Cousineau): C'est presque terminé, il vous reste, pour conclure, un petit 15 secondes. Merci.

M. Opula (Lambert): Conclure...

Une voix: 15 secondes.

**(15 heures)**

M. Opula (Lambert): O.K. Et on peut baisser de 5 000 $ le coût... disons l'avantage venant de ce 5 000 $ ne peut pas couvrir l'amélioration. Ce que le Québec doit, c'est dire que, pour créer une société apprenante où l'immigration s'intègre, il faut aussi un petit sacrifice. On ne demande pas que le Québec mette tous les moyens, le Québec a beaucoup de problèmes à résoudre.

Le Président (M. Cousineau): Alors, merci, M. Boisrond et M. Opula pour votre présentation et votre présence à Québec, cet après-midi.

Alors, j'invite l'Association de la communauté algérienne du Québec à se préparer.

Alors, je suspends pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 1)

 

(Reprise à 15 h 6)

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Alors, bon après-midi à tous. Il me fait plaisir d'être parmi vous cet après-midi pour présider. J'ai donc l'occasion maintenant de saluer l'Association de la communauté algérienne de Québec, M. Omar Kali, M. Kali, oui, bonjour, Ourdia Naïdji, Mme Naïdji, et Boufeldja Benabdallah, oui? Merci d'être là, C'est un grand plaisir de vous recevoir cet après-midi.

Nous allons avoir une... Vous avez 15 minutes pour une présentation et 20 minutes d'échange par la suite avec les formations politiques. Donc, la parole est vous, M. Kali. Lorsque vous prenez la parole, si vous voulez vous identifier pour fins d'enregistrement, ça va être plus facile.

Association de la communauté
algérienne du Québec (ACAQ)

M. Kali (Omar): Merci, M. le Président. Mon nom, c'est Omar Kali. Donc, je me présente. M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, je vous salue.

En introduction, je voudrais remercier au nom de l'Association de la communauté algérienne de Québec, l'ACAQ, la commission de nous avoir donné l'opportunité, à travers cette consultation, d'apporter notre contribution au débat sur la planification de l'immigration au Québec. J'aimerais présenter les collègues qui m'accompagnent dans cette présentation, Mme Ourdia Naïdji et M. Boufeldja Benabdallah, tous deux membres très actifs de notre association.

Notre mémoire a été préparé en tenant compte des avis exprimés par nos membres lors des rencontres que nous avons eues avec eux. Je comparerais ça à une sorte de mini-consultation, comme le fait le gouvernement à travers cette honorable commission.

L'objet de la consultation générale sur le document de consultation intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015 illustre l'effort que le gouvernement accorde à l'immigration, aux attentes légitimes des personnes immigrantes à l'égard des grandes orientations de la politique d'immigration au Québec. L'ACAQ salue cet effort et souhaite participer à cette consultation en toute impartialité. Nos remarques ont pour seul objectif d'inviter le gouvernement et le législateur à apporter un peu plus de clarification, à faire des modifications si jugées pertinentes et nous permettre, en tant qu'association, de faire bénéficier nos membres de la compréhension de cette planification.

L'Association de la communauté algérienne de Québec a été créée en mai 2009, donc c'est récent, et son siège social est à Québec. C'est un organisme à but non lucratif, à vocation essentiellement culturelle et qui observe une neutralité politique et religieuse.

Notre intervention dans le cadre de cette consultation vous est présentée en deux volets. Dans le premier volet, nous exposerons nos commentaires et recommandations quant aux enjeux de cette planification. Et, dans le deuxième volet, nous vous relaterons les préoccupations de la communauté immigrante algérienne de Québec, de leur vécu, de leurs attentes en matière d'intégration à la société québécoise.

Comme commentaire général, on peut dire, en préambule du document sur les grandes orientations de la politique d'immigration, cinq enjeux sont annoncés. Il s'agit du dynamisme démographique, la prospérité économique, la vitalité du français, l'ouverture sur le monde et sa diversité ainsi que de la régionalisation de l'immigration. De prime abord, l'ACAQ adhère à ces enjeux dont la portée est variable. Cependant, nous pensons que le document gagnerait à présenter avec plus de vigueur l'enjeu Vitalité du français, un incontournable à l'intégration au marché du travail et à la société québécoise en général. Alors, de notre point de vue, cet enjeu donnerait le ton au document et aura sûrement un effet plus crédible, notamment sur les bassins que le gouvernement envisage d'instaurer pour la sélection des futurs immigrants.

**(15 h 10)**

Comme commentaire général également, le document donne un portrait statistique de l'immigration et de son évaluation jusqu'en 2010. Ce portrait met de l'avant l'atteinte des objectifs de la planification 2008-2010 en regard du volume et de la composition de l'immigration. L'approche purement statistique ne rend pas justice à certains résultats mitigés qu'il faudrait examiner avec des analyses plus approfondies pour pouvoir tirer profit du potentiel apporté par l'immigration.

Comme commentaire spécifique, nous réitérons que l'ACAQ adhère aux cinq enjeux énoncés par la ministre en préambule du document. Cependant, nous croyons que l'enjeu vitalité de langue française doit avoir la primauté sur les autres enjeux et être annoncé dans le document comme l'enjeu autour duquel viendraient graviter les autres enjeux. En effet, la langue est un atout important pour intégrer le marché du travail pour les nouveaux immigrants, mais aussi c'est par la langue qu'ils pourront communiquer avec leurs concitoyens et donc s'intégrer plus facilement à la société québécoise en général. L'enjeu fondamental de la langue comme outil de travail, de communication et de culture est à la base de toute édification d'une société. Ainsi, d'emblée, l'ACAQ est d'accord avec l'importance de la maîtrise du français, enjeu principal de notre intervention et reprise tout au long du document de consultation.

Pour la question de la régionalisation de l'immigration, nous nous interrogeons sur cette question via la notion des bassins. Compte tenu de l'enjeu important de la maîtrise de la langue, nous pensons que les nouveaux arrivants doivent provenir majoritairement de régions francophones. Cela permettrait la cohérence requise avec l'exigence de la maîtrise de la langue française. L'approche égalitaire, que je mets entre guillemets, en termes de nombre d'admissions entre les différentes régions risque de pénaliser le Québec en raison d'un défi d'intégration plus grand pour les immigrants qui ne maîtrisent pas la langue française.

Nous recommandons aussi, pour éviter les interrogations, que la question des bassins soit plus claire qu'elle ne l'est dans le document. Cette notion doit-elle prendre en considération le territoire d'appartenance et la connaissance de la langue française? Quels sont les critères utilisés pour définir les bassins géographiques? Qu'en est-il du bassin Maghreb dont nous sommes issus? S'apprête-t-on à en diminuer l'apport humain? De telles questions sont, à notre avis, essentielles, et les réponses doivent nécessairement être claires pour éviter toute ambiguïté.

Compte tenu du vieillissement de la population dans les pays occidentaux, l'ACAQ comprend la volonté du gouvernement de maintenir annuellement entre 65 % et 75 % la part des personnes âgées de moins de 35 ans dans l'ensemble des admissions. Toutefois, nous pensons que les candidats plus âgés ne doivent pas être pénalisés si leur venue au Québec avantageait la société québécoise et leur donnait plus de chances d'épanouissement, particulièrement dans le cas de familles avec de jeunes enfants ou encore de regroupement familial.

L'ACAQ salue les améliorations qui seront apportées aux actions de sélection des candidats. Sur ce point, nous recommandons que les candidats ayant des habilités techniques et professionnelles soient privilégiés par rapport à ceux détenant des diplômes universitaires, maîtrise, doctorat et plus, compte tenu des besoins du marché du travail et de main-d'oeuvre qualifiée, et, par conséquent, assurer une intégration rapide des nouveaux arrivants, sachant que l'obtention de l'équivalence du diplôme universitaire n'est pas évidente.

Pour l'ACAQ, la planification de l'immigration devrait se faire avec les partenaires gouvernementaux, ministères de l'Emploi, de la Solidarité sociale, de l'Éducation, de la Santé et autres, et avec les organismes communautaires qui sont impliqués au quotidien au sein de leur communauté. Il nous semblerait important de commencer par un examen de la situation actuelle afin de capitaliser sur les aspects positifs à privilégier et de corriger les éléments qui n'ont pas fonctionné. Il nous apparaît donc primordial que les décisions soient le fait d'un consensus le plus large possible.

Pour conclure ce volet, permettez-moi de résumer les principales recommandations: donc, hiérarchiser les enjeux et mettre en priorité l'enjeu vitalité de la langue française; définir plus clairement la notion de bassins et ses assises; consolider la concertation avec les partenaires gouvernementaux, les employeurs, les syndicats et les organismes communautaires.

Deuxième volet. Nous vous relaterons la situation des immigrants maghrébins. Pour que la planification 2012-2015 puisse atteindre les résultats escomptés, nous souhaitons que le gouvernement prenne tous les moyens dont il dispose pour améliorer la situation des immigrants, notamment ceux déjà arrivés au Québec depuis les dernières années. En effet, nous reconnaissons les efforts que le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles a entrepris par la mise en oeuvre de plusieurs actions telles que les services destinés aux entreprises québécoises pour recruter les immigrants, les services en ligne pour le recrutement international, etc.

Nous demeurons toutefois perplexes quant à l'impact de ces mesures sur la question du chômage chronique de certaines catégories d'immigrants qui semble s'aggraver d'année après année, notamment pour les Maghrébins dont nous faisons partie. Nous estimons que les actions du gouvernement, dont celles énoncées plus haut, n'ont pas eu l'effet escompté. Par conséquent, il y a lieu de repenser la stratégie d'intégration pour éviter que les nouveaux arrivants ne vivent les mêmes situations difficiles, notamment celle du chômage, de la précarité et du recours à des emplois en deçà de leurs compétences et de leurs qualifications. Il serait opportun que les nouveaux arrivants soient plus soutenus et accompagnés pour assurer la réussite de leur projet d'immigration.

Le gouvernement du Québec a bel et bien constaté dans le document qu'environ 20 % des immigrants admis entre 1999 et 2008 ont déjà quitté le Québec. On veut savoir quelle interprétation peut-on donner à ce résultat. Qui sont les personnes qui ont quitté le Québec? Nous pouvons présumer sans risque de se tromper qu'un certain nombre d'entre elles sont hautement compétentes. Une étude rigoureuse pourrait contribuer à trouver des solutions pour agir sur les principales causes de ces départs et ainsi réduire le plus possible ce taux. Le Québec n'a pas les moyens de se priver d'un tel gisement de bonnes compétences.

Nous connaissons tous les chiffres alarmants du chômage chez les immigrants. Nous souhaitons que cette problématique soit une priorité pour le gouvernement et que des solutions durables à ces problèmes soient apportées rapidement. Aujourd'hui, en 2011, la situation de l'emploi chez les Maghrébins ne s'est guère améliorée, elle s'est même détériorée pour ce groupe d'immigrants, malgré les atouts dont ils disposent, comme un niveau d'éducation et de qualification élevé. Beaucoup d'entre eux sont venus ici avec leurs familles aspirant à une vie décente grâce à l'intégration en emploi. Cette détérioration a des effets tangibles sur des conditions économiques et psychosociales de ces immigrants. Nous apprenons régulièrement que tel ou tel compatriote vit sur l'aide financière de dernier recours, souffre de dépression. Cette impuissance à trouver un emploi est vécue comme un échec par les individus et se répercute sur des problèmes familiaux avec toutes les conséquences que l'on peut imaginer, notamment sur les couples et les enfants.

Ce plaidoyer ne remet pas en cause les orientations gouvernementales en matière d'immigration ni les efforts entrepris dans ce sens. Nous voulons simplement faire part de notre questionnement sur le bien-fondé de la stratégie du gouvernement qui se dessine pour la période 2012-2015 quant à l'avenir des immigrants maghrébins d'aujourd'hui et de demain dans la nation québécoise. Toute planification ne peut se faire sans une analyse rigoureuse de la situation actuelle des immigrants faisant ressortir les facteurs de réussite et les problèmes pour les mesures qui sont mises en place.

Nous croyons que, si le gouvernement se penche sérieusement sur la question des immigrants déjà installés sur le sol québécois, il facilitera la mise en place d'une politique d'immigration efficace et juste et une meilleure planification. Le contraire ne fera qu'accroître le problème de la précarité en emploi des immigrants, aggraver des situations familiales, nourrir des foyers de tensions sociales qui poussent les gens immigrants à la ghettoïsation, avec les conséquences que l'on peut aisément imaginer. Cela est quand même pour le moins paradoxal pour des francophones francophiles ayant de surcroît subi un très sévère processus de sélection.

Enfin, nous considérons que la situation de l'immigration et du chômage des immigrants n'est pas l'affaire uniquement du ministère de l'Immigration. Elle doit être partagée avec d'autres partenaires gouvernementaux, notamment ceux de l'Emploi, de l'Éducation, de la Santé et des ordres professionnels, des syndicats et le patronat.

Nous recommandons au gouvernement la mise en place d'une politique d'immigration et d'intégration cohérente où chacun des partenaires sera imputable selon ses responsabilités et son champ de compétence. Il est urgent d'agir, car le taux de chômage des immigrants au Québec demeure, de manière générale, plus élevé que dans les deux autres provinces accueillant des volumes significatifs d'immigrants. Il est à notre avis inacceptable de sélectionner des compétences pour qu'après une frange non négligeable se retrouve en marge de la société.

Au-delà de la dernière question de reconnaissance des diplômes étrangers, nous assistons avec effarement à un phénomène de plus en plus visible, à savoir le chômage de personnes diplômées d'universités québécoises. Les immigrants issus du Maghreb, faute d'emploi selon leurs compétences, se sont rabattus sur des jobs devenus presque des ghettos ethniques pour une bonne proportion de Maghrébins de tous âges et titulaires de diplômes universitaires; un gâchis toléré même si la société se prive de ressources humaines de premier plan.

Nous cultivons l'espoir que cette commission parlementaire saura aller au-delà de l'approche quantitative pour oser ouvrir un nécessaire débat qui semble rester tabou, celui de la discrimination en emploi que l'État québécois n'a pas réussi à endiguer, et cela même auprès de la fonction publique québécoise qui ne réussit pas à atteindre ses objectifs en matière d'employabilité des personnes issues des communautés culturelles.

Ces observations exprimées par l'Association de la communauté algérienne de Québec ne font qu'exprimer modestement, mais non moins sincèrement, un sentiment basé sur le quotidien vécu des immigrants algériens. Cependant, nous pouvons vous assurer que ce sentiment est celui du père ou de la mère ou encore du jeune, de cette jeune famille immigrante, au chômage ou en emploi dévalorisé, et qui souhaiterait qu'il y ait plus d'équité, plus de reconnaissance des compétences au-delà de leurs origines respectives et au-delà du simple aspect de planification d'immigration pour les années à venir.

À cet effet, l'ACAQ a la conviction que tenir des états généraux au Québec sur l'intégration en emploi des immigrantes et des immigrants serait salutaire autant pour les immigrants actuels que pour ceux qui feront le saut pour venir vivre au Québec.

En terminant, je voudrais vous lire le titre de notre mémoire qu'on a présenté qui résume un peu ce qu'on vient de dire. Le titre est La planification de l'immigration doit se faire en regard des valeurs québécoises et en concertation avec les partenaires gouvernementaux, les employeurs, les syndicats et les organismes communautaires. Je vous remercie pour avoir écouté.

**(15 h 20)**

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Kali, merci infiniment. Nous allons donc passer aux échanges avec les parlementaires. Donc, Mme la ministre, la parole est à vous pour une période d'environ 20 minutes, allez-y.

Mme Weil: Merci, merci beaucoup de votre participation. Vous touchez vraiment au coeur, je pense, de mes préoccupations, des préoccupations de mon ministère, du gouvernement, mais, je vous dirais aussi, de la société, et je pense que c'est ça, la bonne nouvelle. Dans le sens qu'il y a une préoccupation partagée, c'est un constat que je fais depuis quelques années, depuis que les chiffres émergent vraiment. Il y a eu une prise de conscience, il y a quelques années, qu'il y avait un problème. Et, en 2008 surtout, la communauté maghrébine, qui a été bien identifiée... Puis on a des programmes qui identifient carrément la communauté maghrébine, le programme PRIIME, par exemple. Donc, cette prise de conscience qui a mobilisé, peut-être pas encore assez, mais au moins mobilisé les acteurs gouvernementaux pour mettre sur pied des programmes.

Et là, la question, c'est: Comment aller encore plus loin? Alors, avant peut-être d'aller sur les questions, les orientations, vous poser des questions, et je prends note de certains de vos commentaires, cette question d'intégration en emploi, pensez-vous que... Là, je ne sais pas si vous avez entendu, je ne vais pas les répéter, mais il y a des chiffres de 2010 qui sont des améliorations. On ne sait pas si c'est une tendance, mais, par rapport aux taux de chômage et d'emploi chez les immigrants, une meilleure... comment dire, une embellie plus importante chez les immigrants que chez la population native de 2009 à 2010. Vous pourriez aller voir les chiffres sur le site. Mais on ne sait pas encore, c'est trop tôt pour savoir, il faudrait voir les chiffres de 2011, est-ce que c'est vraiment peut-être le fruit des actions stratégiques qu'on a prises, comme le PRIIME, qui est un programme qui est... Je ne sais pas si vous le connaissez, c'est une subvention salariale pour les employeurs où les minorités visibles, les femmes et les immigrants de source maghrébine sont vraiment identifiés comme priorisés. Et le taux de rétention est de 83 %, donc ça donne des résultats. Et l'idée, c'est de pouvoir continuer dans ce sens-là. Un programme comme ça, ça donne des résultats. Il y a des programmes de mentorat aussi qui sont financés... qui sont menés par les CRES, mais financés par le ministère de l'Immigration. Il y a une trousse Diversité qu'on a mise en branle, on a une série de mesures, avec Emploi-Québec, qui ont été mises sur pied.

Mais pensez-vous que la conjoncture actuellement, donc, avec tout... Premièrement, les campagnes de promotion, on a une campagne de promotion sur la diversité qui s'appelle Toutes nos origines, c'est très magnifique comme campagne. Mais, combinaison de tout ça pour mobiliser les employeurs, les acteurs gouvernementaux, la société civile et une conjoncture qui fait en sorte qu'il y a une pression au niveau du marché de l'emploi. On parle de 740 000 emplois qui devront être comblés d'ici 2014 à cause des départs à la retraite.

Avez-vous, comment dire, un certain optimisme? Sentez-vous, malgré les problèmes que vous voyez sur le terrain, sentez-vous, vous êtes ici depuis un nombre d'années, qu'il y a peut-être quelque chose qui change, que les gens s'ouvrent, qu'ils sont conscients, qu'ils veulent agir? Et, après ça, la deuxième question, c'est: Qu'est-ce qu'il faut faire pour travailler vraiment au niveau des employeurs? On a beaucoup parlé avec les groupes qui sont venus ce matin et cet après-midi sur l'importance de travailler sur les employeurs qui doivent s'ouvrir à la diversité.

Le Président (M. Bernier): M. Kali.

M. Kali (Omar): Oui, merci. Nous, nous pensons que, si on compare cette conjoncture avec les années quatre-vingt-dix, par exemple, c'est sûr qu'il y a une amélioration, ne serait-ce qu'au niveau du nombre de personnes qui se trouvent un emploi. Donc, l'optimisme, il est là. Mais, si on veut tirer profit... Parce que les statistiques disent qu'il y a plus de chômage chez les immigrants que chez les personnes natives d'ici, ça c'est une donnée claire. Donc, si on veut agir, diminuer le taux de chômage chez les immigrants, donc il faut agir à différents niveaux. Donc, mettre en place des programmes d'accompagnement, parce que, des fois, les gens, juste parce qu'ils ne sont pas au courant de l'existence de ces programmes, ils ne vont pas aller chercher cette aide-là. Ce n'est pas des personnes qui sont là. Les personnes qui arrivent aussi doivent être accompagnées à différents niveaux de leur intégration, donc au niveau des reconnaissances du diplôme, leur montrer quels sont les domaines où il y a un besoin en emploi, s'il faut aller chercher une formation complémentaire. Mais aussi agir, comme vous l'avez souligné, sur les employeurs. Parce que c'est eux qui sont comme la porte d'entrée. Si eux ne sont pas sensibilisés à faire un effort d'engager des personnes immigrantes, malgré la réticence que des fois on peut comprendre... parce que, quand on ignore quelque chose, on le craint toujours.

C'est sûr, c'est les employeurs. Et, bon, des fois aussi parce que les employeurs travaillent avec des syndicats aussi et les autres ministères, donc, qui, à travers le programme au niveau de l'éducation ou au niveau de la reconnaissance du diplôme, et tout, il nous semble que, si on travaille sur tous ces aspects-là, on va tirer bénéfice de la situation actuelle qui est quand même... La croissance est beaucoup meilleure que ce qu'elle était il y a plusieurs années. Parce que, si, maintenant, on n'arrive pas à enclencher cette dynamique où les immigrants reprennent confiance qu'ils ont leur place dans la société, on risque de manquer le bateau, à mon avis. Je ne sais pas si d'autres collègues ont...

Le Président (M. Cousineau): Monsieur, allez-y.

M. Benabdallah (Boufeldja): Merci. Moi, ça fait 40 ans, messieurs dames, que je suis ici, au Québec. Et donc, j'ai vu des passages, des hauts et des bas. Maintenant, Mme la ministre vient de nous annoncer une bonne nouvelle: 2010, c'est une progression. Nous ne pouvons que nous féliciter de tout ça. Mais, comme on l'a dit dans le document, il faut capitaliser sur ce résultat et puis prévoir... pas prévoir, c'est-à-dire faire des projections et de la prospective pour le futur. Or, si on reste uniquement sur la base d'un résultat qui est très ponctuel, qui est très temporel, nous risquons de rater le bateau pour le futur. Or, le futur se construit, mais il ne se construit pas sur une base de deux ans, je ne vous apprends rien, Mme la ministre, ce n'est pas sur une base de deux ans, mais sur une plus longue base. Et c'est pour ça que nous recommandons, pour capitaliser sur ces résultats et les défaillances qui ont eu lieu, qu'on puisse faire les états généraux de l'emploi des immigrants ici. Ça nous permet de voir clair.

Pourquoi je dis ça? Je dis ça parce qu'il y a eu plusieurs situations au Québec. Prenons le cas de la science -- je vais faire une digression. Le cas de la science. Quand la science a trouvé qu'elle piétinait au Québec qu'a fait le Québec? Et ça a été salué partout. Le Québec a fait les états généraux de la science. Et c'est grâce aux états généraux de la science que sont nés des démarches et des regroupements de chercheurs qui font qu'au Québec on se sent bien en matière de recherche. Donc, dans le domaine de l'immigration, on n'a jamais fait les états généraux de l'emploi chez les immigrants. Faisons cet exercice et amenons, autour de la table, tous les partenaires sociaux, ainsi que les partenaires gouvernementaux, pour, je le répète, tabler sur ces résultats positifs et aussi sur les expériences qui sont négatives, malheureusement.

Je termine sur ceci en disant: même si les résultats sont positifs pour 2010, nous ne suivons pas les statistiques au jour le jour, Mme la ministre et M. le Président, on ne suit pas les statistiques au jour le jour, mais on a nos concitoyens, on a les gens qui sont paupérisés, on a les gens qui disent: Bien, moi, je n'ai pas trouvé mon compte ici, au Québec. Alors, on me dit qu'à Toronto, à Calgary, il y a meilleur à faire qu'ici, au Québec. Et il y en a beaucoup qui s'en vont. Je ne donnerai pas une fraction de notre communauté qui se retrouve, je peux vous assurer, et vous avez les statistiques sur ça, qui sont des diplômés universitaires de très haut niveau: docteur, postdoc, maîtrise, etc., et qui se sont trouvés à faire quoi? À plonger dans les restaurants et à conduire des taxis, non pas être propriétaires de taxis, mais conduire des taxis. Si on est propriétaire, c'est déjà une industrie pas mal.

Donc, il y a une fuite des cerveaux et une fuite des compétences à laquelle vraiment il faut faire attention, et ça vient du fait qu'il y a une incompréhension au niveau du partage des richesses et du partage du travail entre tous les citoyens sans connotation, sans provenance et sans identification d'une personne ou d'une couleur.

**(15 h 30)**

Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.

Mme Weil: Oui, juste un commentaire sur ce qu'on appelle le taux de présence ou de rétention. Il est quand même élevé au Québec, c'est 85,2 %. Et on connaît le profil de ceux qui quittent, c'est ceux qui ne parlent pas français généralement. Le nombre qui parle français, c'est statistiquement beaucoup moins significatif et c'est considéré comme des chiffres... Donc, l'idée peut-être de ces gens qui sont venus au Québec, c'était de se retrouver éventuellement ailleurs au Canada.

Moi, je vous dirais que c'est sûr qu'on n'arrête pas avec ces chiffres-là. Moi, je suis très prudente même par rapport à ces chiffres. C'est juste intéressant de voir que ça ne s'est pas... comment dire, les chiffres sont meilleurs. C'est tout simplement ça pour 2010. Mais tous les groupes qui sont venus aujourd'hui, je vous dirais que l'intégration d'emploi, c'est vraiment un élément important. Et donc comment agir là-dessus? La sélection, peaufiner la sélection, travailler fort là-dessus.

Maintenant, vous, vous parlez de prioriser, cibler les formations techniques, si je comprends bien. Évidemment, l'immigration, c'est toujours un certain dosage, hein, parce qu'il faut aussi prévoir une mobilité latérale. Donc, c'est des gens qui sont éduqués, qui ont des compétences, qui sont généralement plus éduqués que la moyenne ici, au Québec. Donc, ils ont des compétences, une capacité. Et, généralement, les politiques d'immigration un peu partout, ceux qui font la sélection, c'est de rechercher cette capacité de mobilité latérale aussi. Donc, c'est un mélange des deux. On a modifié la grille en 2009 pour vraiment identifier les métiers et les professions en besoin. Mais il faut toujours faire attention avec le marché de l'emploi, parce que le marché de l'emploi change aussi avec le temps. Donc, il faut moduler. Il faut avoir un peu un mélange de toutes sortes d'éléments qui donnent un portrait global de ce qu'on recherche, et en partie pour répondre aux besoins du marché à court terme, mais aux besoins économiques aussi à moyen et long terme, des besoins démographiques, bon, etc.

Donc, peut-être vous entendre, revenir sur cette question du profil professionnel et scolaire, la scolarité des gens qu'on sélectionne, ce que vous en pensez.

Le Président (M. Bernier): M. Kali, madame... La parole est à vous.

M. Kali (Omar): O.K. Merci. Oui. Nous, l'idée qu'il y a en arrière de ça, c'est que, si on amène des gens à les faire quitter leur pays, à laisser des fois leurs familles pour venir s'établir ici, c'est pour leur donner une chance de réussir leur projet d'immigration. Donc, ce qu'on a constaté jusqu'à maintenant, c'est que les gens qui détiennent des diplômes, pour des raisons que je ne peux pas m'expliquer, on parle de la reconnaissance voulue de ces diplômes et non pas de qualifications techniques ou professionnelles pour aller travailler, donc ils se rabattent sur des jobs de moindre qualité, là, comme l'a souligné mon collègue Boufeldja, sur des jobs de taxi, etc.

Donc, c'est ça qui est en arrière de cette idée-là. Donc, nous, nous pensons que les profils techniques et professionnels amèneraient une intégration plus facile au marché du travail et donc plus facile à la société. Et ces gens-là, bon, améliorent la situation économique, la situation démographique, et, par conséquent, tout le monde est gagnant. Je ne dis pas qu'il faut laisser de côté les gens qui ont des diplômes, mais il faut cibler peut-être des spécialités pour lesquelles il y a un risque peut-être qu'elles ne travaillent pas ici.

Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.

Mme Weil: Oui. maintenant, j'aimerais revenir sur cette question du fait français ou de la vitalité. Vous dites qu'il faut mieux expliquer cette notion, qu'est-ce qu'on veut dire. Et, vous, vous voyez ça comme la priorité n° 1. Je pense que ce qui ressort très fortement, lors de ces consultations, c'est la question de la langue. Il y a vraiment un consensus très, très fort. Il y a des consensus sur d'autres points, mais il y a vraiment un consensus fort là-dessus. Donc, c'est un peu ça. C'est cette dynamique de préserver une société francophone qui est un défi, hein, en Amérique du Nord. Donc, il faut mobiliser toute la société, donc tant dans la sélection que dans la francisation, l'intégration.

Et, plusieurs l'ont dit, l'intégration, ce n'est pas juste le gouvernement qui peut s'en occuper, c'est impossible. C'est la société qui doit s'assurer de l'intégration. Puis il faut mobiliser la société civile beaucoup, être capable qu'il y ait d'autres voix qui s'élèvent et qui développent des projets. C'est impossible pour le gouvernement d'agir là-dessus. On a des programmes, on a des incitatifs, on a des campagnes, mais comment faire pour aller plus loin?

Mais peut-être juste vous entendre un peu plus sur cette question de vitalité du français. Vous dites que ce n'est pas très clair. Qu'est-ce qu'on veut? Peut-être vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bernier): En vous identifiant, la personne qui prend la parole. M. Benabdallah, oui.

M. Benabdallah (Boufeldja): Je veux oser dire des choses. Oser dire que, quand on a regardé cette question de bassin et de pourcentage, un petit calcul très rapide signifie que le bassin dans lequel se récolteraient les francophones va être diminué dans cette planification 2012.

Donc, il y a une pénalisation du nombre de candidats aptes à l'immigration, donc une réduction de ce nombre. Et, de ce fait, on trouve le fait français attaqué par la question du nombre d'immigrants qui viendraient. Et, par ricochet, on a vu que, dans ce calcul... vous me corrigerez, M. le Président, on peut se tromper, hein, dans les calculs, mais les techniciens de la chose peuvent nous corriger et nous dire...

Le Président (M. Bernier): Je suis très indulgent.

M. Benabdallah (Boufeldja): Merci beaucoup. Ils peuvent nous corriger. Et, par ricochet, tout ce qui est du secteur Maghreb, tout ce qui est du secteur Maghreb -- je parle du Maroc, Algérie, Tunisie -- se trouve pénalisé par cette question de bassin et par ce pourcentage qui va être une réduction significative. Donc, ça ne contribuera pas au fait français. Au contraire, ça va réduire le nombre de francophones. Et les gens qui viennent de chez nous, sans se targuer, avec toute humilité, je pense que nous maîtrisons le français et nous pourrions avoir un apport très intéressant ici, au Québec.

Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.

**(15 h 40)**

Mme Weil: Oui. Juste pour peut-être clarifier cette question, c'est que, la grille, il faut la voir dans sa totalité, et en même temps on propose de rehausser le niveau de connaissances. Donc, ça, ça sera toujours là comme une orientation. Donc, on maintient... il y a des francophones partout, il y a des gens qui sont capables de parler français qui existent un peu partout.

Je veux revenir sur cette question de bassin. Je vais le dire candidement: il y a une réaction généralement négative par rapport à cette orientation pour toutes sortes de raisons. C'est perçu, à l'extrême, comme discriminatoire et comme si c'est le bassin... Il y en a qui pensent que c'est l'Afrique du Nord ou toute l'Afrique, le continent, qui est ciblé.

Évidemment, moi, en tant que ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles et représentante du gouvernement du Québec, on ne voudrait vraiment pas que ce soit le message qui est laissé. Alors, je regarde d'autres formulations qui pourraient aller dans le sens de la diversité.

Et, je répète, il y a des francophones un peu partout dans le monde, mais il faut mettre beaucoup d'efforts pour les chercher. Alors, il y en a qui... Il y a d'ailleurs des Maghrébins qui vivent en France, il y a des Maghrébins qui vivent en Amérique latine, etc. Et c'est une idée qui vient un peu des études plus récentes, depuis 10 ans, sur l'apport de la diversité aux milieux, au sein de l'entreprise qui cherche des gens d'un peu partout dans le monde, dans un contexte de mondialisation, qui rendent leurs entreprises plus compétitives, mais qui rendent aussi les équipes plus créatives dans leurs approches. Donc, ça prend plusieurs cultures.

Je suis en train de regarder un peu la réaction des gens, parce qu'il y a beaucoup d'études intéressantes. Pour l'instant, il n'y a pas d'autres pays qui ont identifié... ou sociétés qui ont... Ils l'identifient dans leurs approches, et les employeurs sont de plus en plus en train d'en parler. On le voit beaucoup au Canada anglais, aux États-Unis, des études sur cette question, plus récemment ici au Québec.

Donc, juste vous entendre sur cette notion de diversité qui est une richesse en soi. Comme vous l'avez dit, ici, en Amérique du Nord, ce mot-là, il a une belle connotation. Je veux dire, ce n'est pas peut-être tout le monde, mais, généralement, certainement les acteurs qui sont au front, ceux qui viennent ici, tout le monde a le... Mais ce n'est pas vrai partout, hein, on le sait. Alors, est-ce qu'il y a lieu d'aller plus loin et d'en faire une orientation?

Le Président (M. Bernier): Je vous laisse une minute pour donner une réponse avant de passer au député de Bourget. Oui, madame.

Mme Naïdji (Ourdia): Je vais peut-être ne pas répondre mais vous requestionner à mon tour. Ma question, ça serait: Par exemple, au sein de votre ministère ou alors dans d'autres ministères, y a-t-il des études ou des résultats d'études qui démontreraient, par exemple, que la diversité au niveau des entreprises a des impacts positifs et a un impact autant sur l'intégration des immigrants ou alors même sur, je dirais, l'amélioration du bien-être des employés qui sont là-dedans?

Mme Weil: Il y a des études surtout canadiennes et américaines, Ernst & Young tout récemment, Conference Board, une grande étude, et c'est très étoffé. C'est très étoffé, ça va assez loin sur ce facteur diversité. Le milieu de la culture est en train de regarder le facteur diversité. Bon. On a appelé Montréal... C'est Richard Florida qui parle de ces villes créatives. Et la diversité est un élément de ces villes créatives. Mais je vous dirais que depuis 10 ans qu'il y a des recherches là-dessus, mais c'est, depuis peut-être deux ans et la dernière année... Même le Conseil du patronat qui en parle. Demain, la chambre de commerce sera là, on leur posera la question. Le Conseil du patronat a eu l'occasion de se prononcer un peu. Donc, oui, il y a des études, et c'est très, comment dire, c'est très détaillé par rapport à cet élément. Mais l'idée, c'est: si on trouve que c'est quelque chose qui est porteur, est-ce qu'il y a lieu de s'assurer que, nous, nos ressources, on puisse vraiment les répartir partout dans le monde? Je parle souvent d'un radar à la recherche évidemment de personnes qui sont capables de parler le français et qui ont les autres qualités, hein? C'est global, le portrait de la personne.

Le Président (M. Bernier): Merci, Mme la ministre, merci. Le temps étant écoulé du côté du parti gouvernemental, du côté de l'opposition, M. le député de Bourget...

M. Kotto: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier): ...la parole est à vous.

M. Kotto: M. Kali, Mme Naïdji, M. Benabdallah, bonjour. Merci d'être là. J'ai été très attentif à l'exposé que vous avez présenté. Je vais insister sur un point, et ce point, c'est la citation que vous avez ramenée dans votre présentation, la citation de M. Rachid Raffa: «Tant que la lutte à la discrimination en emploi n'est pas une priorité prise en charge à bras-le-corps, il ne faut pas s'étonner du succès des sirènes du ghetto dans certains milieux ethnoreligieux, voire d'une multiplication des demandes [d'accommodement raisonnable], même s'il est difficile d'établir clairement un lien de cause à effet en la matière.»

J'ai expérimenté, il y a un moment, la discrimination. Pour des raisons que je ne veux pas élaborer -- je ne veux pas faire de mon exemple un cas -- il y en a une qui est apparente. Quand on est pygmalien, minoritaire dans une société caucasienne en Europe, à une certaine époque, avec la montée du Front national, on a inévitablement une chance sur deux ou trois de vivre ce genre d'expérience là.

Bref, je reviendrais plus directement sur le cas d'espèce de la communauté arabe au Québec. On va se dire les vraies choses: Le préjugé basé sur la religion -- parce que les Maghrébins sont majoritairement musulmans, si je ne me trompe, ceux qui vivent au Québec, j'ai des amis dans cette communauté-là -- le préjugé basé sur la religion est le principal obstacle au plan de l'embauche, vrai ou faux?

Le Président (M. Bernier): Qui se lance sur une réponse à cette question? M. Kali? M. Benabdallah?

M. Benabdallah (Boufeldja): Il est vrai qu'à certains égards la religion est, pour certains d'entre nous, un frein à l'embauche, particulièrement chez les femmes, particulièrement chez les femmes pour une raison simple: celles qui portent le voile. Les femmes qui ne portent pas le voile ont un peu plus de chance. Les femmes qui portent le voile sont automatiquement reléguées à attendre leur tour, et souvent leur tour n'arrive pas, et elles sont confinées à la maison. Ce n'est pas dévalorisant, la maison, ce n'est pas dévalorisant, mais c'est dévalorisant pour elles, et on en connaît dans notre groupe, dans notre association, des gens qui ont des diplômes, qui ont des niveaux et qui sont même des médecins -- je ne parle pas du secteur médical parce que vous allez me dire: Non, c'est la corporation qui décide, etc. -- et qui se retrouvent vraiment pénalisées.

Et là je vous vois venir, M. le député, à l'effet que, la question de la laïcité, nous, où on est, il va falloir qu'on en discute. Mais je ne veux pas vous saisir les mots à la bouche, mais je pense qu'à un moment donné il va falloir qu'on en discute aussi, même dans le secteur de l'immigration.

Le Président (M. Bernier): M. le député.

**(15 h 50)**

M. Kotto: En fait, ce que je voulais comprendre davantage, c'est l'interaction entre le demandeur d'emploi originaire du Maghreb versus l'entrepreneur ou l'embaucheur d'un pays d'accueil qui a pris des distances depuis quelques générations, déjà, avec la chose religieuse, qu'il est loin de comprendre, qu'il est même loin de comprendre le spirituel, tout simplement. Il y a, dans ce cas d'espèce, dans ce genre de situation, une incompréhension, un dialogue de sourds, parce que, de ce que j'ai appris de mes amis musulmans, le musulman cesse d'être musulman à partir du moment où il met de côté sa religion. Il la porte, sa religion, comme on porte un vêtement, du lever au coucher de soleil.

Et c'est peut-être là qu'il va falloir aussi travailler très fort pour aplanir les peurs. On a peur de l'inconnu généralement. Et, quand on prend la mesure de la distance, disons, de la très grande majorité de la population du pays d'accueil versus le religieux, on peut comprendre un certain nombre de choses. Ça n'a rien à voir avec spécifiquement la religion musulmane, ça a à voir avec toutes les religions exprimées, vécues, assumées. Il y a peut-être lieu d'axer un chantier de travail dans ce sens-là aussi. Vous appeliez à un sommet sur l'emploi. Je pense qu'après l'exercice de Bouchard-Taylor il y a une autre étape à franchir, celle de la compréhension de l'autre.

Certains embaucheurs, entre guillemets -- appelons-les comme ça -- peuvent développer, à l'instar de ce que certains sociologues, en France, ont véhiculé -- certains sociologues proches du Front national -- ont évoqués à certains moments donnés comme des entités inintégrables... Ça n'a pas facilité l'interaction entre la majorité et les minorités. Et vous savez que le préjugé a la peau très, très épaisse. Pour la tanner, ça prendre du temps, cette peau. Et c'est là-dessus que, moi, j'aimerais avoir des propositions venant de vous. Quels efforts... Parce que je posais la question ce matin à d'autres personnes qui étaient là, assises là où vous êtes, à savoir: Quand il y a échec en matière d'intégration, est-ce que c'est la faute des immigrants ou est-ce que c'est la faute de la société d'accueil? La vérité est entre les deux.

Alors, sur la base de cette équation que je vous expose, est-ce qu'il y a lieu de penser qu'il y ait des efforts qui soient faits de la part de ce concitoyen ou de cette concitoyenne d'obédience musulmane versus une société qui a pris des distances depuis des lustres déjà avec la chose religieuse?

Le Président (M. Bernier): Qui répond? Allez-y.

M. Benabdallah (Boufeldja): Je vais continuer. Merci, M. le député, pour cette question. Et c'est là où on retrouve un peu une dimension de cette diversité qu'on salue, on souhaite qu'il y ait cette diversité à l'intérieur des entreprises, à l'intérieur des institutions, etc. Mais cette diversité ne peut être positive que dans la mesure où l'un comprend l'autre.

Et nous sommes convaincus que cette planification de l'immigration de deux ans, de quatre ans ou de 10 ans ne peut être valable que si on fait au moins cet exercice d'un sommet ou de ces états généraux de l'emploi et des immigrants et des immigrantes dans lequel on pourra ouvrir un chantier sur la discussion du fait religieux.

Il ne faut pas bannir des choses ou dire: Le Québec, il a adhéré à la laïcité, par conséquent le religieux n'a même plus place à la discussion. Au contraire, on ne peut pas... Vous l'avez bel et bien dit, le musulman est porteur de sa peau, une peau qui est religieuse, et il ne peut pas se défaire de ça, et ça va apparaître, transparaître tôt ou tard. Comment concilier les choses dans un respect de la société qui est laïque? Comment respecter les autres? Il y a des modalités qu'on peut mettre en place pour changer les mentalités.

Vous l'avez dit tout à l'heure, quand je vous écoutais avec le groupe précédent, vous avez dit: Il va falloir qu'on change les coeurs, il va falloir qu'on amène plus la sérénité que la peur. Et je ne suis pas démagogique quand je dis ça, je le dis parce que... je ne vais pas donner encore ni mon cas ni le cas de mes enfants qui sont grands maintenant, je suis grand-père aussi, et qui, à cause de leur nom, il y a toujours ce frein. Vous vous appelez Mohamed, toujours il y a ce frein. Vous vous appelez Benabdallah. Oh! Benabdallah, toujours cette... Alors, comment changer les coeurs? Comment changer les mentalités? Ça ne se change pas à l'intérieur d'une commission parlementaire. Ça ne se change pas à l'intérieur d'une discussion en tête-à-tête avec des gens qui sont ouverts à la chose. Mais ça vaut la peine d'en faire un débat national.

Nous avons connu le débat Bélanger-Campeau, ça a été extraordinaire pour la société, ça a ouvert des horizons. Et j'ai parlé des états généraux de la science, ça a ouvert des horizons. Le Québec est fort dans ces grands mouvements, dans ces grands rendez-vous de l'histoire du Québec.

La laïcité, on en a discuté, mais ça a été... On dirait qu'on veut cacher pour... Non, il va falloir ouvrir le chantier, il va falloir qu'on débatte. Et, de cette façon, je suis entièrement de votre côté en disant que ça va donner la sérénité et enlever la peur. Et je suis donc du côté de Mme la ministre pour dire: Voilà, on a des paramètres pour améliorer cette notion et cette compréhension de la diversité. N'ayez pas peur de nous qui sommes musulmans. Ça fait 40 ans que je suis ici, et je suis ce qu'on dit «un musulman pratiquant». Jamais un patron ne m'a interdit d'aller faire ma prière ni me dire: Tu es un musulman, etc. Mais, moi aussi, j'ai une responsabilité: comment je montre ce visage pour avoir plus de sérénité et enlever la peur de l'autre?

Et il va falloir amener autour de la table des psychologues, des psychiatres, des sociologues. On en a, des économistes, on peut les écouter, mais il n'y a pas que l'économie qui compte, il y a aussi le discours du coeur. Excusez-moi si je suis un peu émotif sur certains aspects. M. le Président, merci beaucoup.

Le Président (M. Bernier): M. Benabdallah, ça transmet bien l'état d'esprit, votre message. M. le député.

M. Kotto: J'avais terminé.

Le Président (M. Bernier): Vous avez terminé.

M. Kotto: Bien oui, merci.

Le Président (M. Bernier): Donc, moi, je désire vous remercier de votre participation fort intéressante, M. Kali, Mme Naïdji, M. Benabdallah, merci d'être venus à cette commission parlementaire.

Je vais suspendre pour quelques instants pour permettre au groupe... l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 57)

 

(Reprise à 16 h 3)

Le Président (M. Bernier): S'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Alors, je souhaite la bienvenue à l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. M. Florent Francoeur, Mme Diane-Gabrielle Tremblay, Mme Chantal Teasdale et Mme Julie Sylvestre, bienvenue.

Donc, vous avez une période de 15 minutes pour faire votre présentation, en vous demandant, bien sûr, de vous identifier pour fins d'enregistrement. La parole est à vous.

Ordre des conseillers en ressources
humaines agréés (Ordre des CRHA)

M. Francoeur (Florent): Alors, merci, M. le Président. Alors, je vais commencer par effectivement nous présenter. Alors, je suis Florent Francoeur, le président-directeur général de l'ordre. À mon extrême gauche, j'ai Mme Diane-Gabrielle Tremblay, qui est professeure au Département d'économie et de gestion de la Télé-université de l'UQAM. Elle est titulaire de la Chaire du Canada sur les enjeux socio-organisationnels de l'économie du savoir et elle est également directrice de l'Alliance de recherche universités-communautés sur la gestion des âges et des temps sociaux. À ma gauche, Mme Chantal Teasdale, qui est directrice des ressources humaines chez Vegpro international, qui est une entreprise en transformation alimentaire dans la région de la Montérégie. Et finalement, à ma droite, Mme Julie Sylvestre, qui est conseillère prévention et intervention en diversité à la Société de transport de Montréal, la STM.

Le Président (M. Bernier): ...à vous tous.

M. Francoeur (Florent): Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés et membres de la commission, je vous remercie de nous permettre aujourd'hui de vous présenter le point de vue de l'ordre sur le document intitulé Planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015.

Afin de mieux vous situer, j'aimerais d'abord vous dire quelques mots sur l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. Comme tous les ordres professionnels au Québec, il a pour mission fondamentale la protection du public. En fait, nous sommes un regroupement professionnel consacré à l'avancement des ressources humaines dans les organisations, et ce, dans l'intérêt du public.

Des professionnels, l'ordre en regroupe plus de 11 000, dont près de 8 500 sont agréés. Les conseillers en ressources humaines et en relations industrielles, qu'on appelle habituellement les CRIA ou les CRHA, sont présents dans tous les milieux, surtout dans les entreprises mais aussi dans les organismes gouvernementaux, syndicats, institutions d'enseignement et bien sûr les cabinets de consultants en ressources humaines.

Nous exerçons nos activités en relations de travail, en gestion des ressources humaines et en formation en entreprise, et nous nous occupons, bien sûr, de la fonction recrutement. Nous sommes en quelque sorte la porte d'entrée de tout nouveau travailleur dans une entreprise.

Nos réflexions concernant la planification de l'immigration au Québec reflètent donc le point de vue de ces praticiens de tous horizons. En fait, avec nous quatre aujourd'hui ici, vous avez vraiment, je dirais, une belle représentation de l'ordre. Alors, vous avez une spécialiste en matière d'enjeux dans les organisations, une directrice des ressources humaines dans une organisation de plus de 500 employés, de 500 employés à temps plein, dont 20 % proviennent de la clientèle immigrante, et une spécialiste en gestion de la diversité dans une très grande entreprise.

Je mentionne, d'entrée de jeu, que, pour l'ordre, l'accroissement de la population par l'entremise de l'immigration est indispensable pour le Québec. Si l'on considère -- vous savez déjà ces chiffres-là -- que plus de 1,4 million d'emplois seront à pourvoir au Québec d'ici 2019, le recours à un bassin de travailleurs provenant de la population immigrante est essentiel, selon nous. D'ailleurs, Emploi-Québec estime que 17 % des emplois qui seront créés seront occupés par une main-d'oeuvre immigrante. Concrètement, cela veut dire 238 000 emplois nouveaux ou de remplacement à être comblés par les immigrants au cours des prochaines années. Alors, oui à l'immigration.

Mais cependant les orientations du Québec en matière d'immigration doivent être bien planifiées. Au-delà du volume d'immigration et des stratégies pour attirer et retenir les personnes immigrantes au Québec, une stratégie globale et concertée afin d'attirer une main-d'oeuvre qualifiée et répondant aux besoins des entreprises québécoises est essentielle, selon nous, et cela, afin d'abaisser le taux de chômage de la population immigrante et de la conserver au Québec.

Pour l'ordre, l'intégration des personnes immigrantes, et la gestion de la diversité dans le monde du travail, est donc l'un des défis des prochaines années. Il faut s'y attaquer avec compétence et énergie. Il s'agit d'une priorité qui doit aller de pair avec toute stratégie gouvernementale en matière d'immigration.

Malgré un préjugé assez répandu selon lequel les ordres -- on va commencer par les ordres professionnels -- alors selon lequel les ordres font obstacle à la mobilité et font peu d'efforts pour faciliter l'intégration professionnelle des personnes immigrantes, la réalité est, selon nous, tout autre. En effet, de 2007 à 2010, seulement 6 % des demandes de reconnaissance des compétences professionnelles ont été refusées par les ordres professionnels. Ceux-ci contribuent plutôt à l'intégration au travail des personnes immigrantes.

Ce sont plutôt des partenaires privilégiés à la fois des différentes instances gouvernementales appelées à oeuvrer auprès de la population immigrante et des professionnels immigrants. En effet, ils peuvent faciliter, grâce à des ententes comme nous avons souvent avec le MICC, la reconnaissance des acquis et agir comme ressources afin de faire connaître la réalité québécoise de la profession qu'ils représentent.

À titre d'exemple, nous, à l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, avec le soutien du MICC, nous avons réalisé un projet afin de faciliter l'accès des personnes immigrantes à la profession. Ce projet a permis l'implantation d'un module en ligne pour la reconnaissance des acquis des personnes formées à l'étranger. Ce module est destiné à aider des immigrants, avant même leur arrivée sur le territoire québécois, à s'intégrer sur le marché du travail en gestion des ressources humaines.

D'un autre côté, comme je l'ai déjà mentionné, l'apport de l'immigration à la population active du Québec est essentiel dans une perspective de rareté de main-d'oeuvre. En ce sens, l'ordre croit qu'il est primordial, pour la période 2012-2015, d'accueillir des travailleurs immigrants provenant de la catégorie dite économique. Le document déposé en consultation précise du reste que 70 % de l'immigration québécoise est composée de cette catégorie. L'ordre considère que ce taux devra à tout le moins être maintenu pour la période 2012-2015.

Au cours de l'année 2010, le Québec a accueilli 54 000 immigrants. Au-delà du volume, c'est l'adéquation entre le nombre d'immigrants reçus et le nombre d'immigrants en emploi dans leurs domaines de compétence qui est, à notre avis... à notre sens, l'enjeu de la politique d'immigration. Quelque part en 2010, le taux de chômage de la population immigrante était de 13,7 %, alors qu'il n'était que de 7,6 % dans la population native. Selon nous, une augmentation du volume des admissions annuelles en matière d'immigration ne doit pas résulter en une augmentation du chômage chez la population immigrante, au contraire. Le pilier de la politique d'immigration consiste à combler un déficit démographique et surtout à fournir des travailleurs qualifiés au marché du travail.

Ultimement, en concentrant le débat sur le volume et non sur l'intégration en emploi, le Québec pourrait se retrouver avec un surplus de compétences, mais connaître un déficit de main-d'oeuvre. En ce sens, l'ordre croit qu'il faut s'éloigner des chiffres et s'assurer plutôt que les gens accueillis correspondent aux besoins du marché du travail. Une fois cet exercice réalisé, l'ordre croit que la société québécoise doit se concentrer sur l'intégration de ces travailleurs pour qu'ultimement 100 % de ceux-ci trouvent un emploi conforme à leurs compétences.

Je mentionne que, sur le plan de la qualification de la main-d'oeuvre immigrante, les standards actuellement appliqués par le MICC nous semblent satisfaisants. Comme il est mentionné dans le document de consultation, les travailleurs immigrants sont sélectionnés en fonction des besoins du Québec. Ces personnes doivent posséder au moins un diplôme d'études secondaires et les ressources financières pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles durant les premiers mois suivant leur arrivée au Québec.

**(16 h 10)**

Fait intéressant, la main-d'oeuvre immigrante est plus scolarisée que la main-d'oeuvre native. Chez les hommes seulement, 38 % ont fréquenté l'université, soit deux fois plus que la population masculine du Québec.

Selon nous, il ne faut toutefois pas que les critères de sélection s'attardent seulement à la scolarité acquise. Je le redis, il est primordial de s'assurer que les qualifications de la population immigrante sont reliées aux besoins du milieu du travail québécois. À notre sens, il faut non seulement que les travailleurs soient qualifiés, mais aussi qu'ils soient en mesure de postuler aux postes qui sont en rapport avec leurs compétences. On peut bien décider d'accueillir uniquement des Ph. D., mais encore faut-il que nous ayons des postes à combler pour ces mêmes Ph. D.

Au-delà de la question de la qualification des immigrants, l'ordre constate que l'adéquation entre leurs compétences et les exigences du poste à pourvoir est parfois problématique. C'est ce que nous appelons le défi de l'affichage des postes. En effet, nos consultations avec les professionnels membres de l'ordre nous indiquent qu'un très grand nombre des candidatures reçues par les entreprises est tout simplement incompatible avec les postes offerts. Il semble que le message transmis aux personnes immigrantes en quête d'emploi consiste à les encourager à postuler quasi systématiquement sur tous les postes affichés, afin d'augmenter leurs chances de décrocher une entrevue ou un emploi.

La réalité est un peu différente. Comme les critères de sélection sont définis très précisément en vue de l'affichage, les responsables du recrutement dans les entreprises portent leur attention seulement sur les C.V. qu'ils jugent pertinents et rejettent tous les autres. L'envoi massif de C.V. dans les entreprises ne constitue donc pas une stratégie gagnante pour décrocher un emploi, et il faut le rappeler à tous les chercheurs d'emploi.

Par ailleurs, les entreprises embauchent de plus en plus en fonction des besoins de l'entreprise en général et non pas seulement en fonction d'un poste en particulier. Un travailleur qui cadre bien avec la mission, les projets et la culture de l'entreprise dans son entier devient très attrayant pour un employeur. Celui-ci y voit un employé pouvant évoluer dans l'organisation et susceptible d'occuper successivement plusieurs fonctions clés par sa polyvalence et son adaptabilité. Donc, au-delà du savoir et du savoir-faire, le savoir-être est un aspect important dans la décision d'embauche.

On retrouve donc ici une autre priorité, celle d'éduquer tant le travailleur immigrant que l'employeur sur les différences culturelles, et les façons de mieux communiquer et de mieux se comprendre malgré tout. Si cet effort d'éducation n'est pas fait et que des barrières demeurent, les efforts du Québec en matière d'immigration risquent de ne pas avoir l'effet escompté sur la pénurie ou rareté de main-d'oeuvre.

Il est primordial qu'un nouvel arrivant se familiarise avec le marché de l'emploi québécois bien avant d'avoir quitté son pays d'origine. Il reste beaucoup de travail à faire en ce sens afin de démystifier l'équivalence de diplôme et d'éliminer les préjugés en lien avec le processus de sélection. C'est pourquoi l'ordre encourage une meilleure cohérence entre les acteurs de l'immigration afin que les efforts déployés par les immigrants en matière de recherche d'emploi soient mieux ciblés. Et l'Ordre souhaite participer à leurs efforts.

En outre, l'ordre constate que la préparation des travailleurs immigrants au choc des cultures est un autre point sur lequel il faudra consacrer des efforts au cours des prochaines années. Plus spécifiquement, il faut éviter de créer un ancrage négatif entre les employeurs et les immigrants. Nous réitérons que nul ne s'improvise spécialiste en gestion de la diversité. Si le Québec veut relever avec succès le défi de l'intégration de la main-d'oeuvre immigrante dans ses entreprises, tous les acteurs devront adopter une stratégie globale et concertée de gestion de diversité dans le monde du travail.

Nous constatons que des sommes importantes sont consacrées à la gestion de la diversité, notamment pour produire des guides, des manuels, des politiques et des outils destinés aux entreprises. L'ordre salue ces initiatives mais croit qu'il est impératif de rassembler ces outils au même endroit, de concentrer les énergies en un guichet unique et d'éviter de multiplier et de décentraliser les efforts en la matière. Et par-dessus tout nous croyons qu'au-delà des guides, ressources et outils qui existent il faut poser des gestes concrets pour mieux gérer la diversité et s'attarder principalement aux quatre pistes d'action suivantes: d'abord, adapter les pratiques et politiques de gestion des ressources humaines à la diversité; ensuite, lors de l'intégration, bien expliquer les valeurs de l'entreprise à la personne immigrante; puis informer les collègues de l'immigrant sur une saine gestion de la diversité; enfin, former adéquatement les superviseurs de la main-d'oeuvre immigrante, afin qu'ils soient en mesure de gérer efficacement la diversité.

Dans le même ordre d'idées, l'ordre insiste sur le fait qu'il est primordial de ne pas mettre en place un double standard au sein des milieux de travail, soit un pour les travailleurs immigrants et un pour les travailleurs d'origine. Nous devons plutôt privilégier une structure intégrée, accompagnée d'une période d'adaptation.

Le dernier élément sur lequel nous désirons aborder aujourd'hui est la place de la langue française à l'intérieur du processus de planification de l'immigration. Le français a occupé et occupe toujours une place importante dans la société québécoise. Toutefois, 20 % des immigrants ne parlent ni le français ni l'anglais. Dans le contexte québécois, la langue officielle de travail est le français. À titre d'exemple, l'ordre, mais l'ensemble des ordres, nous sommes tenus de délivrer un permis d'exercice uniquement aux personnes qui ont une connaissance suffisante de la langue française.

Dans ce contexte, l'ordre privilégie que les immigrants reçus aient une connaissance suffisante du français ou à tout le moins soient parfaitement au courant de l'importance de la langue française au Québec, ce qui leur permettra de mieux s'intégrer rapidement au marché du travail. L'ordre suggère donc le maintien des standards actuels en matière de reconnaissance du français.

Si nous considérons que près de 15 % des immigrants prennent la décision de quitter le Québec, il est primordial de faire tous les efforts nécessaires pour assurer leur intégration au milieu de travail québécois et ultimement à la société québécoise.

Avant de conclure, l'ordre aimerait souligner une réalité qui n'apparaît pas dans la documentation déposée par le MICC, celle des agences de personnel.

Certains de nos membres nous ont fait part d'un enjeu supplémentaire relativement au défi d'intégration et de rétention des travailleurs immigrants. En effet, de nombreux immigrants ont recours à des agences de personnel afin de se trouver du travail. Le recours à de telles organisations peut être très utile mais aurait aussi, dans certains cas, des effets négatifs pour le travailleur, l'employé et la société. Alors, nous vous signifions simplement que, si vous le souhaitez, nous sommes ouverts à en discuter pendant la période des questions.

En conclusion, l'ordre est conscient de l'ampleur du défi qui attend le monde du travail et la société québécoise. Nous souhaitons donc ardemment jouer un rôle clé dans cet enjeu important. L'ordre rappelle que la gestion de la diversité culturelle et de l'immigration ne s'improvise pas. Elle demande de la préparation et un soutien professionnel. L'ordre encourage fortement les employeurs à mettre en oeuvre des programmes et des politiques qui favorisent de la diversité dans le milieu de travail.

Plus important que tout, l'intégration, que ce soit dans sa forme, ses résultats, ses enjeux et les moyens pour y arriver, doit guider la politique d'immigration du gouvernement du Québec. Rien ne sert de se questionner sur le volume, la langue, la provenance, la qualification ou tout autre critère de sélection si nous sommes incapables de faire en sorte que le chômage ne soit pas plus élevé chez les travailleurs immigrants que chez les Québécois de souche. Tant que nous ne nous attaquerons pas à cette statistique, la politique d'immigration continuera de ressembler à de l'improvisation.

Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre présentation, M. Francoeur. Très ponctuel. Mme la ministre, la parole est à vous, donc, pour un échange d'environ 20 minutes.

Mme Weil: Oui. Merci pour votre présentation. Très heureuse de recevoir un ordre professionnel, parce que, vous le savez, vous l'avez évoqué d'entrée de jeu, ça demeure, comment dire, cette perception de la fermeture des ordres professionnels, certains ordres plus que d'autres. Et, vous, vous avez une expérience évidemment ponctuelle et du travail que vous avez fait avec mon ministère, d'ailleurs, pour développer des outils afin de bien évaluer les compétences des personnes immigrantes. J'aimerais, avec les connaissances que vous avez et sachant que les ordres ont toujours, d'une part, la mission de protection du public et en même temps les efforts qu'ils font, que vous puissiez peut-être dresser un portrait de votre ordre et peut-être d'autres ordres, si vous avez cette connaissance, mais généralement la volonté des ordres d'aller dans le sens de mieux intégrer ou de réussir l'intégration et peut-être l'évolution vraiment, depuis, quoi, trois ans... deux, trois ans, de façon plus pointue. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Francoeur (Florent): En fait, peut-être rappeler le...

Le Président (M. Bernier): M. Francoeur.

**(16 h 20)**

M. Francoeur (Florent): Oui. Merci. Alors, peut-être rappeler le contexte général. On a parlé de l'année dernière, 54 000 immigrants au Québec. Là-dessus, il y a eu environ 4 000 personnes qui ont fait des demandes pour joindre un ordre professionnel au Québec, et 5,8 %... selon les statistiques qu'on a, 5,8 % des demandes ont été refusées, ce qui veut dire un nombre relativement minime. Alors, il faut situer 54 000, versus 4 000, versus le 5,8 %. Et effectivement on peut parler quand même, à ce moment-là, je vous dirais, quand même d'un virage, virage de tous les intervenants, virage du ministère, virage d'Emploi-Québec, virage des ordres professionnels, où il y a vraiment eu une conscientisation.

De toute façon, je vous dirais, quand on le regarde dans le contexte plus global, la pression est faite sur les ordres professionnels. Dans un sens qui est beaucoup plus large, le phénomène de pénurie ou plutôt de rareté de main-d'oeuvre, on le sent venir, et il est particulièrement présent dans les ordres professionnels. Je dirais, par exemple, si on regarde la plupart, actuellement, des ordres professionnels, nous sommes dans un contexte où nous sommes identifiés... Les postes, par exemple, de directeur de ressources humaines, alors ce sont des postes qui sont identifiés dans l'avenir, par Emploi-Québec, par le gouvernement du Canada, comme étant des emplois en demande. Mais, quand on regarde de façon plus générale, les emplois réglementés, alors, sont en demande et seront en très grande demande.

Alors, d'un côté, alors, je vous dirais que ça nous a obligés, si on peut dire, l'ensemble des ordres professionnels, à pouvoir réagir, à dire: Il y a des demandes des entreprises, il y a des demandes de la société québécoise, parce qu'il y a des besoins, et on est probablement capables de placer ces gens-là. Alors, ça a créé un climat d'ouverture, climat d'ouverture qui, à mon avis, va s'accentuer, va finir par toucher l'ensemble des entreprises. On touche une bonne partie des entreprises, mais on va finir par aller plus loin.

Alors, ce que ça veut dire, dans le fond, dans des contextes comme le nôtre, ça veut dire par contre qu'il faut, un peu comme je le mentionnais dans le mémoire, pouvoir, je dirais, spécifier les règles du jeu dès le départ à la personne qui souhaite immigrer, en lui disant, si on prend, par exemple, notre ordre professionnel: Alors, vous êtes de n'importe quel pays et vous souhaitez venir au Québec travailler en gestion des ressources humaines? Alors, soit que vous pouvez entrer en contact avec nous, mais on va immédiatement vous référer à une portion de notre site Web où on va vous expliquer, dans le fond, ce qu'est la gestion des ressources humaines au Québec, quels sont les critères pour accéder à la profession, comment ça fonctionne.

Et on va déjà, dans le fond -- étant donné que, nous, on a un processus d'admission avec un processus d'examen -- alors on va déjà mettre la personne, dans le fond, dans le contexte où: Si vous êtes intéressé à joindre nos rangs -- si on peut dire -- alors sachez qu'il y a un processus d'examen qui s'en vient, sachez qu'on exige l'équivalence d'un diplôme universitaire. Alors, on s'assure dès le départ que la personne qui est intéressée à venir travailler dans le domaine est déjà informée, je dirais, des modalités qu'il va y avoir en cours de route.

Évidemment, on va travailler beaucoup en amont, à ce niveau-là, pour faire en sorte que, lorsque la personne arrive, bien là, à ce moment-là, on a développé d'autres outils. Alors, il y a un processus d'examen. Alors, on a un processus d'examen où on a mis en place des moyens pour aider les gens à réussir nos examens, mais on a mis en place aussi un outil particulier où on va, par exemple, expliquer aux gens le langage québécois du monde du travail. Alors, on n'utilise pas toujours les mêmes mots dans les différents pays, dans beaucoup de cas, alors on va être capables de dire: Lorsqu'on parle de gestion de la diversité, au Québec, ça veut dire ça. Peut-être que dans d'autres pays ça pourrait avoir une connotation différente: relations de travail, syndicalisation... Alors, on va parler beaucoup du contexte, pour, finalement, je dirais, boucler la boucle, pour dire que, lorsque la personne arrive, on pense qu'elle a l'information nécessaire et on pense aussi qu'on est un agent qui aide la personne à passer à travers le processus, pour faire en sorte que cette personne-là puisse arriver en emploi le plus rapidement possible.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Francoeur. Mme la ministre.

Mme Weil: Oui. Tantôt, vous avez mentionné un chiffre, mais le chiffre est de 2009, là, le taux de chômage, chez les immigrants, de 13,7 %. J'ai eu l'occasion de dire ce matin que, bon, en 2010, c'est un peu mieux, à 12,5 %, et qu'il y a d'autres indicateurs, ou d'autres statistiques, d'autres données qui nous indiquent qu'il y a une amélioration. Bon, beaucoup d'initiatives et de programmes, de projets, etc., une certaine mobilisation que le gouvernement a pu initier avec Emploi-Québec, programme PRIIME, etc. Mais on sait qu'il faut continuer dans ce sens-là.

Vous, vous avez beaucoup d'expérience dans le domaine de la gestion de la diversité, et j'aimerais vous entendre sur cette question. Comment peut-on faire, selon vous? Voyez-vous une fermeture des employeurs, des entreprises? Voyez-vous le début d'une ouverture? Comment vous voyez ça? Et comment peut-on faire pour vraiment mobiliser ce milieu? Évidemment, ça prend des employeurs. Le gouvernement peut bien initier des programmes, mais en bout de ligne c'est un employeur qui engage. Vous êtes dans ce domaine-là. Comment vous voyez tout ça?

M. Francoeur (Florent): Le contexte général actuellement, c'est que dans...

Le Président (M. Bernier): M. Francoeur.

M. Francoeur (Florent): Merci, monsieur. Le contexte général actuellement, c'est que, dans beaucoup d'emplois, de postes qu'on affiche, on reçoit de moins en moins de candidats qui, je dirais, soumettent leur candidature, ce qui nous a obligés, au fil du temps, dans le fond, je dirais, à développer nos outils et forcément à développer, je dirais, de l'ouverture.

Lorsqu'on parle... Par exemple, vous avez peut-être vu différents concours, le concours du meilleur employeur, le Défi meilleur employeur, alors différentes stratégies d'entreprise pour pouvoir attirer des talents dans l'organisation. Alors, bien sûr, la question de la clientèle immigrante arrive immédiatement. À partir du moment où on est une entreprise, qu'on a besoin de main-d'oeuvre et qu'on veut s'assurer d'aller chercher la main-d'oeuvre qui est compétente, alors je vous dirais que la question de l'immigration, je dirais, est un outil supplémentaire, ce qui force les entreprises actuellement à, je dirais, développer des outils pour pouvoir non seulement attirer, mais retenir ces employés-là.

Je vais laisser ma collègue vous donner quelques exemples de situations qui sont vécues.

Le Président (M. Bernier): Mme Sylvestre.

Mme Sylvestre (Julie): Oui. Donc, si, dans le fond, je comprends bien ou je peux répondre à la question de comment un peu s'assurer de l'intérêt des employeurs, des organisations, qu'elles embarquent un peu dans la diversité, qu'elles s'ouvrent à la diversité et après qu'elles portent un intérêt à gérer de façon adéquate la diversité, bien peut-être que dans un premier temps ça pourrait être de faire valoir, bon, les avantages de la diversité et de la gestion de la diversité.

Ces avantages-là, bon, sont à plusieurs niveaux. Bon, essentiellement, ça peut être l'augmentation de la performance économique, l'optimisation de la gestion des ressources humaines, d'être une organisation socialement responsable, donc de faire voir... Parce qu'il y a beaucoup d'organisations qui ne voient pas nécessairement la valeur ajoutée. Et, moi, je dis souvent de mettre en perspective -- et les gens le comprennent bien, les gens en entreprise -- de dire: Qu'est-ce que vous voulez obtenir de la diversité, vous, comme organisation? Des sources de coûts ou de conflits, qui sont effectivement possibles, ou bénéficier des avantages de la diversité, devenir une organisation plus innovante, plus créative, être capable de pouvoir aller chercher les meilleurs talents, les meilleures compétences? Donc, de mettre peut-être ça en perspective, c'est quelque chose qui jusqu'à présent, avec mon expérience, allume les gens en organisation, donc de rendre la diversité et la gestion de la diversité dans une optique très réaliste, sans peut-être dorer l'image. Donc, les gens sont plus prêts à essayer, en général.

Et aussi -- bon, ça, c'est pour les avantages de la diversité -- mais de positionner la diversité. Il y a beaucoup de gens en organisation qui ne veulent pas nécessairement mal faire ou être fermés à la diversité, mais de rappeler les contextes légaux, donc de dire pourquoi est-ce qu'il y a certains aspects légaux. Donc, des fois, de nommer un chat un chat, ça remet les pendules à l'heure, de faire un petit survol des changements sociodémographiques du marché du travail aussi, de dire que ça peut être une excellente réponse pour adapter son organisation.

Et finalement aussi, même si, bon, on a beaucoup une approche collective du travail, bien il y a quand même une tendance lourde que les gens en organisation voient beaucoup, c'est l'individualisation du rapport au travail, qui est une tendance lourde. Donc, je pense que ça peut être des pistes pour essayer d'aborder les gens en organisation.

Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Sylvestre. Mme la ministre.

Mme Weil: Je vous amène à une orientation qui va nous amener à parler de diversité. Il y a une orientation qui dit: «Rééquilibrer progressivement la proportion que représente chacun des grands bassins géographiques de provenance de l'immigration pour qu'en 2015 cette proportion soit limitée à un maximum de 30 % pour chacun de ces bassins.» Alors, vous, vous dites évidemment: Ce qui doit primer, c'est les compétences. Donc, vous n'êtes ni en accord ou désaccord avec cette orientation, si je comprends bien.

M. Francoeur (Florent): Bien, en fait, ce qu'on dit...

Le Président (M. Bernier): M. Francoeur.

M. Francoeur (Florent): ...ce qu'on dit là-dessus, c'est... L'important, c'est de pouvoir dire: Si on veut accueillir un immigrant, il faut d'abord qu'on regarde s'il y a des postes où on peut accueillir cette personne-là, au départ. Et on dit: Bien, c'est, dans le fond, tant au niveau de la scolarité, tant au niveau de la région. Alors, il y a des efforts à faire pour s'assurer qu'on puisse dire: On va inviter, si on peut dire, des immigrants, mais on doit s'assurer au départ qu'il y a un minimum de chances que cette personne-là puisse trouver un emploi au Québec.

Le Président (M. Bernier): Merci. Oui.

**(16 h 30)**

Mme Weil: Oui. Merci, M. le Président. Alors, on a eu des échanges aujourd'hui, il y a d'autres mémoires qui vont en parler, au mois de mai, l'orientation a suscité des réactions, et les gens ont vu là qu'on ciblait peut-être... Bien, premièrement, ils voulaient savoir quel bassin. Est-ce que c'est le bassin de l'Afrique? Est-ce que c'est l'Afrique du Nord? Est-ce qu'on cible, bon, le Maghreb en particulier? Alors, beaucoup de gens ont dit: Bien, l'important, c'est surtout de réussir l'intégration. Donc, il y a la Commission des droits de la personne qui va venir, le Barreau, d'autres organismes. Juste vous dire, donc, ça suscite, je pense, on peut le dire, un certain malaise dans la compréhension.

Et j'ai demandé à quelques intervenants: Si on avait une orientation qui va chercher la richesse de la diversité... Parce que les employeurs, et toutes les études le montrent, les employeurs veulent la diversité. C'est ça qui va les rendre plus... Vous avez parlé des études, et justement ce qu'ils cherchent, c'est une multitude d'origines pour éviter d'avoir des milieux homogènes. Le Conference Board, je pense, c'est une des études récentes les plus étoffées. Et on a essayé d'imaginer, et je pose la question aux intervenants, s'il y avait une valeur à avoir une orientation qui pourrait dire qu'on voudrait maintenir la diversité dans nos orientations, afin que la pression, la pression sur nous, l'allocation de nos ressources, on soit toujours... une répartition qui va toujours aller chercher des gens qui seront capables de parler français, ça, ça demeure un incontournable, tout le monde semble être très d'accord avec ça, et donc qu'on doit continuer nos efforts dans ce sens-là. Est-ce que vous avez une opinion sur l'idée d'avoir une orientation dans ce sens-là?

Le Président (M. Bernier): Je perçois que Mme Tremblay veut parler.

Mme Tremblay (Diane-Gabrielle): Oui. Oui, bien, en fait, peut-être sur la notion de bassin, parce que je sais que ça a été utilisé beaucoup quand on a voulu intégrer les femmes davantage dans des milieux masculins, alors c'est toujours une problématique de comment on définit ce bassin. Et je pense que, pour nous, la dimension qualifications professionnelles est vraiment la dimension la plus importante. Et j'étais là, tout à l'heure, quand le groupe précédant disait: Nous, on favorise plutôt les gens avec une formation technique, on pense qu'ils seront intégrés davantage. Bon, moi, évidemment, venant de l'université, je réagissais un peu, parce que nous avons un taux de diplomation universitaire plus faible que plusieurs pays industrialisés, donc je pense qu'on doit maintenir la formation universitaire. Et donc c'est autant de ce côté-là, je pense, que l'on doit définir nos bassins. Plutôt, effectivement, comme on disait, par rapport à la qualification, et là le niveau universitaire est très important.

Et, comme disait ma collègue de la Société des transports, les études ont beaucoup montré l'importance de la diversité pour la créativité, pour l'innovation. Une équipe de travail avec un groupe d'hommes de 25 à 50 ans, très homogène, n'aura pas la même créativité, le même niveau d'innovation qu'une équipe très diversifiée, ça, ça a été très clairement montré. Donc, je pense que, pour les entreprises, bien qu'elles ne le reconnaissent pas toujours spontanément, au fil du temps c'est quelque chose qu'il faut mettre de l'avant. Donc, je définirais plutôt les bassins non pas en fonction de l'origine culturelle, mais plutôt en fonction peut-être de la dimension formation.

Mme Weil: Bien, l'idée, c'est... M. le Président...

Le Président (M. Bernier): Allez-y, madame.

Mme Weil: ...c'est qu'on n'aurait pas besoin d'une formulation qui parlerait de bassins parce qu'on a déjà les autres orientations qui touchent les qualifications avec la grille de sélection. Mais je voulais savoir si avec vos connaissances, surtout du milieu des employeurs... Est-ce que l'employeur actuellement cherche, dans un contexte de mondialisation et où les employeurs cherchent, ceux qui sont vraiment à l'affût, là, des meilleurs talents, il cherche cette diversité? Est-ce que ça pourrait être intéressant d'avoir une orientation dans ce sens-là?

Le Président (M. Bernier): Mme Teasdale.

Mme Teasdale (Chantal): Merci. Je peux vous confirmer, d'une entreprise pour laquelle je travaille, Vegpro international, une entreprise en pleine croissance exponentielle, la diversité, pour nous, c'est un atout. On a, dans les derniers mois, recruté des gestionnaires, des gens avec des bacs, des techniques, des emplois plus opérationnels. Nous avons de toutes les diversités. Alors, il y a une ouverture sur le monde, chez nous, et nous avons vraiment une diversité de cultures immigrantes, mais une diversité d'opinions, de religions. Donc, on retrouve autant des Latinos, des Chiliens, des Péruviens, des Colombiens, mais aussi des Roumains, des Arabes. J'entendais précédemment aussi un monsieur qui disait: Ah! quand on voit Mohammed, on recule. Nous, on eu des Mustafa avec lesquels on a été extrêmement satisfaits au niveau des compétences. Donc, évidemment, la diversité, chez nous, c'est un atout, on en retire beaucoup d'avantages, mais évidemment dans la mesure où l'individu rencontre le profil et possède les qualifications qui sont requises. Et on offre la formation à l'interne à partir du moment où il a un net intérêt, là, à s'intégrer aussi.

Mme Weil: ...en région, mais je vous amène, donc, plus loin...

Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.

Mme Weil: Oui. Je vous amène plus loin. C'est que le Québec ne peut pas être passif par rapport à l'immigration, dans le sens qu'on est vraiment en compétition. Des fois, les gens ne se rendent pas compte. Le Québec est en compétition avec l'Australie, les autres provinces et d'autres États. Donc, on doit vraiment être stratégiques dans nos orientations. Donc, si on veut cette diversité, il faut que le ministère mette des ressources et des énergies pour faire de la prospection, de la promotion un peu partout. Alors, c'est ça, cette idée-là, pour refléter finalement, donc, ce qu'on voudrait éventuellement stimuler comme intérêt auprès des demandeurs qui viendraient d'un peu partout.

Ça ne va pas se faire tout seul. C'est dans ce sens-là. Ça ne va pas se faire tout seul. Il faut que, nous, on travaille là-dessus, donc. Moi, peut-être, ce que je ressens, c'est que les employeurs, ils verraient ça comme une plus-value. Jusqu'à date, généralement, ça suscite un intérêt. Mais, en tout cas, je réfléchis, mais je retiens que vous confirmez que la diversité, en soi, est un atout.

Le Président (M. Bernier): Mme Tremblay, vous voulez répondre?

Mme Tremblay (Diane-Gabrielle): Oui, juste un tout, tout petit commentaire. Dans votre document, j'ai bien aimé la partie évidemment sur les étudiants en maîtrise, doctorat, en postdoc. Et je vous dirais que, selon mon expérience, ce qui est assez dommage, c'est que plusieurs sont emballés par le Québec, par les possibilités d'emploi, souhaiteraient rester, mais ça n'est pas très facile. Contrairement à ce que l'on pense... Non, non, je sais qu'il y a des programmes, mais j'en vois beaucoup, parce qu'ils n'ont pas travaillé suffisamment, ils n'ont pas nécessairement fait toutes les études ici, ils n'ont fait que le postdoc, par exemple.

En tout cas, simplement, je trouvais que c'était intéressant, mais il y a peut-être du travail à faire parce que les postdoctorants, leur nombre d'heures de travail est limité, donc, bref, sans entrer dans tout le détail, là, de chacun, ça n'est... Et ça je trouvais que c'était intéressant, parce qu'on le dit bien, ces gens-là sont déjà intégrés, connaissent la culture, etc., et pourtant il n'y a pas de continuité. Une fois qu'ils ont travaillé à l'université, ils ne peuvent pas aller tout de suite travailler à la STM ou ailleurs, ça n'est pas possible. Alors, lorsqu'ils retournent, bien il y a des risques qu'ils ne reviennent pas. Au moment où ils sont ici, je pense qu'on devrait vraiment en profiter, parce qu'ils ont une très bonne formation, et ça augmenterait notre taux de diplômés universitaires. Alors, c'est un petit truc que je trouvais intéressant mais à creuser peut-être, parce que, moi, je vois beaucoup d'étudiants et de postdocs, là, emballés par le Québec et désireux de s'installer, mais qui ne peuvent pas le faire facilement.

Le Président (M. Bernier): Environ une minute.

Mme Weil: Oui, M. le Président, juste souligner le Programme de l'expérience québécoise, qui a été mis sur pied en 2010, donc qui va chercher et mettre ces gens-là justement sur la voie rapide. On a des bons résultats avec ça. Et je suis tout à fait en accord avec vous, ça, c'est une immigration fort intéressante, et ça inclut les postdocs, ceux qui ont un diplôme ici, au Québec. Et il y a les travailleurs temporaires qualifiés aussi, alors ils sont sur la voie rapide. Il s'agit de continuer à promouvoir ce programme-là, pour retenir ces jeunes qui ont tous les atouts et qui ont, beaucoup d'entre eux, déjà commencé à apprendre le français. Ou bien, s'ils sont dans les universités francophones, ils parlent le français. Alors, je concorde tout à fait avec...

Le Président (M. Bernier): Merci, Mme la ministre. Donc, le temps alloué au gouvernement est maintenant terminé. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle avec M. le député de Bourget.

M. Kotto: Merci, M. le Président. Mesdames monsieur, merci d'être là. Faut-il -- à vous écouter, l'idée est passée -- faut-il aller jusqu'à... faudrait-il, devrais-je dire, aller jusqu'à exiger, au plan de la sélection d'un immigrant, la garantie d'un emploi au Québec, avec évidemment la connexion avec l'employeur, avant de le sélectionner?

Le Président (M. Bernier): M. Francoeur.

M. Francoeur (Florent): Non, on n'irait pas jusque-là. Dans le fond, l'idée, c'est de dire: À partir du moment où notre rôle a été, comme société, de pouvoir informer le futur immigrant que, lorsqu'on arrive au Québec, là, on fonctionne, dans les organisations, de cette façon-là, les différents emplois qui sont disponibles sont les suivants... Alors, oui, il y a du travail qui peut se faire ici, au Québec, pour dire: Bien là, lorsqu'on va faire notre sélection, on va en tenir compte, mais il reste quand même de la place. Je pense qu'il faut laisser de la place à l'individu qui dit: Moi, je vais venir au Québec et je vais faire ma place. Soit que je vais prendre des formations d'appoint, soit que je vais aller chercher une expérience autre. Mais, je dirais, là, le dogmatisme ici n'a pas de place.

Le Président (M. Bernier): Merci.

**(16 h 40)**

M. Kotto: O.K. Vous avez évoqué qu'en 2019 il y aurait 1,4 million, 1,6 million d'emplois à pourvoir. Est-ce qu'on peut anticiper l'identification de ces emplois et du profil au moins pour des... Il y en a 740 000, d'après les chiffres que la ministre a avancés, à pourvoir en 2015. Est-ce qu'il y a moyen de mettre en lumière, en relief le profil de ces emplois pour les mettre en adéquation avec la sélection des immigrants en amont?

Le Président (M. Bernier): M. Francoeur.

M. Francoeur (Florent): Tout à fait. Je vous dirais qu'Emploi-Québec dispose, fournit des statistiques, alors, qui sont extrêmement précises sur le taux d'emploi actuel mais le taux d'emploi futur et les perspectives futures pour, je dirais, une quantité incroyable d'emplois au Québec. Alors, on est en mesure de savoir exactement aujourd'hui quels sont les emplois où les perspectives sont très favorables, favorables ou ne seront pas favorables du tout.

M. Kotto: O.K. Donc, dans cette approche, est-ce qu'on peut aller plus dans la finesse, jusqu'à avoir l'entreprise, l'employeur, nommément, qui à telle ou telle époque aurait besoin de tel ou tel volume d'employés dans tel ou tel secteur?

Le Président (M. Bernier): Mme Teasdale.

Mme Teasdale (Chantal): Merci. En entreprise, on fait une pratique qu'on appelle communément la PMO, qui est une planification de main-d'oeuvre, qui se fait soit dans l'immédiat... Donc, on s'assoit avec nos différents gestionnaires, on regarde le plan d'affaires, le plan stratégique, on regarde dans un horizon... Bon, la semaine prochaine, j'ai besoin de combien de personnes? Dans six mois, dans un an, dans cinq ans.

Je peux déjà vous dire qu'actuellement nous avons de 100 à 200 emplois à combler, mais ce sont des emplois qui ne demandent pas de qualifications particulières. Ce sont des postes d'entrée dans une usine de transformation alimentaire qui roule 12 mois par année, sept jours par semaine ou à peu près, là, pour vous dire que ce n'est pas des emplois saisonniers. Nous avons une difficulté à trouver des emplois. On a épuré le local, donc autour. On a utilisé différentes stratégies de recrutement. C'est impossible. Notre seul recours actuellement, M. Francoeur en faisait un petit peu mention, nous utilisons du personnel d'agence, dont ce sont principalement des gens immigrants qui habitent sur l'île de Montréal, donc qui arrivent en autobus. Et c'est comme ça qu'on réussit à combler.

Mais laissez-moi vous raconter une belle approche de séduction que nous avons mise en place au printemps, bien mars-avril. On avait un bassin de 140 personnes travaillant en agence. On les a invitées à se joindre à nous comme employés, donc avoir les avantages, un salaire garanti, plus haut que ce qu'ils gagnaient avec l'agence. Parce qu'on paie plus que le minimum aussi. Donc, 9,65 $ étant le minimum, on paie plus que ça, là, avec des avantages sociaux, une possibilité d'avancement. Nos employés qui rentrent dans l'organisation progressent rapidement, ils ont des possibilités d'avancement. Sur 140 personnes, on a réussi à aller en chercher 85. Il n'en reste que 35. La raison est fort simple, c'est qu'ils ne veulent pas embarquer dans les règles du jeu de l'emploi. Ce sont des travailleurs. Ils n'apparaissent pas dans nos statistiques d'assurance chômage. Souvent, ils reçoivent de l'argent de sécurité du revenu. Il y a toutes sortes de mécanismes, là, qu'ils arrivent à être payés au noir. Excusez l'expression, mais c'est ça. Alors, malheureusement...

Une voix: ...

Mme Teasdale (Chantal): Alors, c'est une expression québécoise, hein, nous sommes... Voilà. Donc...

Donc, malheureusement, c'est désolant, mais c'est une réalité à laquelle on doit faire face. Et on a utilisé une belle approche, comme je disais, de séduction, de plan de communication, essayer de comprendre, là, pourquoi on... Et on en est là. Donc, où elle est, cette main-d'oeuvre-là dont on a tant besoin? Donc, imaginez-vous, dans cinq ans, si on est en pleine croissance, combien de personnes on va avoir besoin, même dans ces postes-là.

Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Teasdale. M. le député de Bourget.

M. Kotto: O.K. Donc, cette réalité, si je comprends bien, elle appelle un effort, un investissement encore plus important du MICC relativement aux choix, aux sélections. Mais, je ne sais pas, la ministre pourra peut-être nous en parler à un moment donné, voir s'il y a, comment dire, une démarche qui amène l'employeur à se connecter aux marchés extérieurs pour le recrutement, s'il y a réellement, dans l'approche du recrutement, un contact réel, pas virtuel, là, mais réel entre l'employeur ici, qui est mal pris, faute de preneur, avec les immigrants, quels que soient les bassins.

Le Président (M. Bernier): Merci.

M. Kotto: Je ne sais pas si vous considérez l'approche raisonnable, mais...

Mme Teasdale (Chantal): Je pourrais fermer...

Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, Mme Teasdale.

Mme Teasdale (Chantal): Je pourrais fermer la boucle sur un autre volet. Étant donné qu'il y a une dimension agricole chez nous aussi, nous utilisons aussi les services de travailleurs étrangers, donc saisonniers. J'écoutais les gens de l'UPA ce matin, c'est tout à fait notre réalité, là, nous sommes tout à fait dans ça. Mais évidemment nos travailleurs étrangers qui sont ici, saisonniers, aimeraient rester beaucoup plus longtemps. Ils sont déjà intégrés, ils viennent chez nous d'année en année, ils aimeraient rester, ils ne le peuvent pas. Donc, il y a un peu un paradoxe, hein? D'un côté, on se retrouve avec une main-d'oeuvre qui ne veut pas nécessairement se joindre à nous, puis il y en a qui voudraient rester puis ils ne peuvent pas. Alors, c'est un défi.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Kotto: O.K. Elles ne restent pas parce qu'elles ne rentrent pas dans le profil classique, normal d'immigration permanente, c'est ça? Donc, ça, il y a quelqu'un -- je ne sais plus quelle intervenante s'est exprimée là-dessus ce matin...

Une voix: ...

M. Kotto: ...l'UPA, c'est ça -- qui disait qu'il fallait voir ça, considérer davantage les compétences plus que les qualifications. Donc, ça, j'espère que la ministre l'a entendu. Et je posais une question relativement à ça: Est-ce que ce n'est pas là le moyen le plus sûr... Quand on s'attarde... ou quand on priorise la compétence, est-ce que ce n'est pas là un moyen, disons, d'aller exploiter des aubains -- qui a donné «aubaines» -- des aubains -- qui veut dire «étrangers» -- bon marché? Je veux dire, est-ce qu'il n'y a pas des souchiens, au Québec, qui soient capables de faire ce qu'on va chercher ailleurs? Est-ce qu'on a véritablement sondé jusqu'à la moelle le territoire?

Le Président (M. Bernier): M. Francoeur.

M. Francoeur (Florent): Oui. Ce qu'on sait, dans le fond, c'est que de façon générale, je dirais, la pression s'accentue au niveau des employeurs. Parce que de toute façon on a parlé de 740 000 à court terme, 1,4 million à long terme. On sait que, dans le fond, je dirais, le taux de chômage s'en va à la baisse de façon quasi irrévocable à long terme, ce qui veut dire, dans le fond, que l'employeur aujourd'hui, ce qu'il se dit, c'est: J'ai déjà des besoins de main-d'oeuvre, et que ces besoins-là, si on veut continuer à croître, vont s'accentuer.

Alors, je dirais, la contribution du ministère est stratégique, c'est de dire: Bien, il faut faire un appariement entre les besoins de l'entreprise, et les disponibilités et les gens qu'on sélectionne pour venir au Québec, pour faire en sorte qu'il y ait un véritablement appariement. Si, de son côté, madame dit: J'ai besoin de 50 travailleurs pour ce type d'emploi là et qu'à quelque part on en a 50 mais qui n'ont pas la formation, on n'a rien gagné, là. Alors, on a toujours 50 personnes au chômage, et, elle, elle a toujours besoin de 50 personnes. Alors, la stratégie, c'est vraiment l'adéquation entre la formation de la personne qui vient d'arriver au Québec versus les besoins de l'entreprise québécoise.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Kotto: Avez-vous pris connaissance de l'essai de Dubreuil et Marois. Laissez-moi vous dire le titre. C'est Le remède imaginaire. Je ne sais pas si vous l'avez lu. Ce sont deux chercheurs qui, sans déformer leur théorie, considèrent que l'immigration n'apporte quasiment rien, au plan économique et même au plan, disons, d'une alternative, relativement à la décroissance démographique au Québec. Vous n'avez pas... Oui.

Le Président (M. Bernier): Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Diane-Gabrielle): Oui, je peux peut-être un tout petit peu commenter, sans avoir nécessairement, là, cette étude particulière en tête. Je sais qu'il y a des débats effectivement, par exemple, sur les pénuries de main-d'oeuvre. Certains vont dire: Elles sont un peu appréhendées, elles sont à relativiser. Et, moi, ma compréhension des documents que j'ai vus, entre autres Termote et d'autres, là, qui travaillent là-dessus, c'est plutôt que l'immigration n'est pas la solution à tout.

Et personnellement, comme je travaille par ailleurs sur la conciliation emploi-famille, bien, si on parle de diversité, diversité, on parlait... J'ai une organisation qui s'appelle Gestion des âges et des temps sociaux. C'est que l'immigration ne règle pas tout, c'est vrai. Par contre, on a un taux d'immigration plus faible que le Canada et les États-Unis. Alors, cet aspect-là peut apporter un élément. Si on ne tient pas compte du vieillissement de notre population, qu'on ne donne pas d'aménagement aux travailleurs vieillissants, immigrés ou pas, c'est une autre problématique. Si on ne tient pas compte des besoins des jeunes hommes et des jeunes femmes par rapport à leurs familles, c'est un autre...

Alors, pour moi, comme économiste, la compréhension, c'est qu'effectivement l'immigration toute seule ne règle pas le problème, mais l'immigration avec la prise en compte du vieillissement de la population et des mesures dans les milieux de travail, de ce point de vue là, la prise en compte des besoins de conciliation emploi-famille, si on tient compte de ces trois diversités: sexe, âge et culture, on a un élément de solution.

Mais c'est vrai qu'il y a plusieurs personnes, dans les dernières années, plusieurs travaux, outre ceux-là, qui ont dit: Ça n'est pas la seule solution. Et je pense qu'effectivement on ne dirait pas que c'est la seule solution, mais ça fait partie de la solution. Et ça fait partie de la réalité aussi. Parce qu'il y a des personnes qui souhaitent immigrer, il y a des entreprises qui ont des besoins, donc il me semble que ça fait aussi partie de la réalité. Puis je trouve que ce serait intéressant que vous évoquiez un peu les mesures, là, que vous mettez en place.

Le Président (M. Bernier): Mme Sylvestre.

**(16 h 50)**

Mme Sylvestre (Julie): Oui. Je n'ai pas personnellement lu l'essai. J'en ai entendu parler. Bon, on a discuté, donc je crois savoir de quoi il s'agit. Je partage, là, l'avis de Diane-Gabrielle à ce sujet-là puis je ramène un peu le côté plus entreprise ou grande entreprise. Bon, ce n'est pas seulement de dire: Est-ce que la diversité ou l'immigration, les immigrants peuvent apporter quelque chose ou pas?, mais -- je reviens dans la dimension plus d'organisation -- mais c'est: Qu'est-ce que, nous, comme entreprise, comme organisation, on veut tirer, comme bénéfice, de la diversité, comment on veut faire en sorte que ce soit une valeur ajoutée qui nous rende effectivement plus créatifs, et performants, et innovateurs, plutôt qu'une potentielle source de conflit et de coûts?

À ce sujet-là, ce qu'on fait actuellement dans l'organisation pour laquelle je travaille, on s'est fait un petit modèle, je dirais, de gestion de la diversité. On essaie, bon, sur cinq axes essentiellement, donc de prévenir, essayer d'agir de façon proactive, de sensibiliser les gens, sensibiliser les gestionnaires, sensibiliser les conseillers en ressources humaines, sensibiliser les employés. Et dans les employés, à notre compréhension actuelle, on doit avoir une approche globale de gérer la diversité, donc ne pas se limiter à intervenir, à expliquer: Voici comment on est différents, mais donc d'essayer de travailler ensemble. Donc, de trouver ce qui unit les gens, d'augmenter le niveau d'ouverture, le niveau de tolérance des équipes, la capacité à communiquer, donc avoir des mécanismes. Par exemple, c'est normal, quand on est dans une équipe de travail, par exemple, qu'on ne partage pas tous les mêmes idées. Il y a des phénomènes, bon, comme l'ethnocentrisme, bon, plein d'autres, de voir les préjugés, les effets Pygmalion, et tout ça.

Donc, on aborde ça, bien sûr, d'une façon beaucoup plus vulgarisée, mais donc d'aborder ces thèmes-là de façon beaucoup plus globale, pour que tout le monde, peu importe qu'on se trouve dans un groupe minoritaire ou majoritaire, et ça peu importe notre axe de diversité... Parce que, là, on est ici, bon, pour parler plus de l'immigration, mais on travaille aussi sur des axes par rapport aux générations, par rapport au genre. Des femmes dans des milieux non traditionnels, comme c'est le cas à la STM, bien c'est une réalité qu'on a. Bon, la notion de handicap, et tout. Donc, de considérer autant les groupes minoritaires que majoritaires, c'est une pratique gagnante jusqu'à présent. C'est d'orienter aussi notre troisième axe d'intervention, notre organisation, donc de suggérer des façons de faire, de faire des processus ou, bon, d'essayer de formaliser tout ce qui a rapport à la diversité. Enlever le fait que ça peut être perçu par certains comme tabou mais de le rendre comme un autre sujet de gestion, parce qu'on veut en tirer des avantages de productivité et de bien-être pour les employés.

On se positionne de façon à accompagner les gestionnaires, les employés et les conseillers en ressources humaines. Donc, on n'impose pas les choses, on essaie de se rendre indispensable. C'est jusqu'à présent la façon qu'on privilégie d'intervenir. Et finalement on essaie aussi, puisque c'est quand même, bon, tout ce qui est relié à la diversité, des sujets pour lesquels il n'y a pas encore de démarche structurée ou de partage d'information bien établi, c'est encore quand même en développement, donc on essaie d'orienter notre organisation sur les meilleures pratiques.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Kotto: O.K. J'allais dans ce sens-là, savoir si on pouvait avoir accès à des données scientifiques relativement à l'adhésion des employeurs de ce facteur diversité. On ne dispose pas d'étude spécifique encore, vous allez le confirmer ou infirmer, d'étude spécifique en lien avec ce qui se passe au Québec, là-dessus. Je me trompe?

Le Président (M. Bernier): Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Diane-Gabrielle): Vous voulez dire la perception des employeurs? Je ne pense pas qu'il y ait quelque chose sur les perceptions des employeurs.

M. Francoeur (Florent): Non, mais en même temps...

Une voix: ...

M. Kotto: ...excusez-moi.

Le Président (M. Bernier): Mme Tremblay, voulez-vous répéter, s'il vous plaît?

Mme Tremblay (Diane-Gabrielle): Oui. En fait, j'interrogeais un peu. Vous voulez quelque chose... vous demandez s'il y a une étude sur les perceptions des employeurs par rapport à l'intérêt de la diversité?

M. Kotto: C'est ça, des indicateurs, oui, tout à fait.

Mme Tremblay (Diane-Gabrielle): Parce que, ça, je dirais... En tout cas, par rapport à la limite, si on fait une enquête là-dessus, surtout une enquête papier, ils vont tous dire: Oui, on est d'accord, bon, on a des mesures pour. Je pense que ce qui est plus intéressant, c'est... On a deux beaux cas, ici, d'entreprises. Si on fait des études de cas, on peut repérer des entreprises qui ont vraiment compris l'intérêt de la chose. Parce que, bon, une statistique qui nous dirait: 80 % sont d'accord, comme 90 % étaient d'accord pour mettre en place des mesures de conciliation mais sans nécessairement le faire, ça serait un petit peu risqué. Mais je pense qu'on a de beaux cas, par contre, d'organisations, là...

M. Kotto: O.K. Mais vous conviendrez néanmoins qu'il y a encore des efforts à faire dans ce sens-là. Et ça m'amène à une autre question: Est-ce qu'il vous a été rapporté, à un moment x, en matière de placement, les exigences de certains employeurs qui s'attardent sur un certain profil ethnoculturel, disons, pour être correct, disant qu'ils n'en veulent pas ou insistant sur le fait qu'il faille éviter ce profil-là? Moi, sur le terrain, j'ai entendu des histoires d'horreur de ce genre-là, qui peuvent prou ou pas se justifier. Mais, de votre perspective, est-ce que vous avez eu vent de ce genre d'histoire?

Le Président (M. Bernier): Une dernière réponse. M. Francoeur, allez-y.

M. Francoeur (Florent): Oui. Je dirais que de façon générale ces cas-là existent de moins en moins. Il va toujours demeurer des exceptions. Mais ce qu'on peut dire, dans le fond, c'est qu'il y a eu des grands efforts qui ont été faits au cours des années, notamment, encore une fois, en le répétant, parce que les entreprises sont, dans certains cas, désespérément à la recherche de talents et, je vous dirais, quelle que soit l'origine de la personne. Alors, on est plutôt à dire: J'ai un poste affiché, on dépense des énergies considérables à établir un profil de poste, à établir des exigences, et l'étape suivante, c'est de faire en sorte: Est-ce que le C.V. que je reçois, est-ce que j'ai un appariement qui est adéquat avec ça?

Bien sûr, on pourrait penser, on pourrait se dire, je pense qu'il ne faut pas le cacher: Il va rester des entreprises récalcitrantes. Mais je vous dirais que la bonne nouvelle, c'est probablement de moins en moins. Et, notamment avec l'accroissement des problèmes de rareté de main-d'oeuvre, ça va probablement encore diminuer. On voit de plus en plus apparaître, dans les entreprises, un poste, par exemple, de responsable de la diversité dans une organisation. Ce sont des postes qui n'existaient pas nécessairement il y a 15 ans, dans les organisations. Et pourquoi ça arrive aujourd'hui? Bien, parce que d'une part maintenant on a franchi l'étape où ces personnes-là sont embauchées. Ils ne sont pas éliminés au départ, ils sont embauchés. Et on arrive, maintenant, on se dit: Maintenant, il y a des efforts à faire pour les intégrer, pour faire en sorte qu'on va les intégrer, qu'on va les retenir, qu'on va les utiliser au maximum. Alors, on en est rendu à cette étape-là.

M. Kotto: Merci.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Francoeur, Mme Tremblay, Mme Teasdale et Mme Sylvestre. Merci d'avoir participé à cette commission parlementaire. Merci de votre présence.

Donc, compte tenu que nous avons terminé les auditions qui étaient prévues pour aujourd'hui, la commission ajourne ses travaux au jeudi 18 août 2011, à 9 h 30, en cette même salle. Merci. Bonne fin de soirée à tous.

(Fin de la séance à 16 h 59)

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