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Version finale

39th Legislature, 1st Session
(January 13, 2009 au February 22, 2011)

Wednesday, January 20, 2010 - Vol. 41 N° 21

Consultations particulières sur le projet de loi n° 67 - Loi sur l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-huit minutes)

Le Président (M. Kelley): À l'ordre, s'il vous plaît! Je constate quorum des membres de la Commission de la santé et des services sociaux, donc je déclare la séance ouverte, en rappelant le mandat...

Des voix: ...

Le Président (M. Kelley): ... -- s'il vous plaît! s'il vous plaît! -- en rappelant le mandat de la commission. La commission est réunie afin de terminer les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 67, Loi sur l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Drainville (Marie-Victorin) remplace M. Gauvreau (Groulx).

Auditions (suite)

Le Président (M. Kelley): Parfait. Merci beaucoup. On va procéder à notre prochain témoin, la Confédération des syndicats nationaux, représentée par sa vice-présidente, Denise Boucher, et Mme Andrée Lapierre. Alors, Mme Boucher, la parole est à vous.

Confédération des
syndicats nationaux (CSN)

Mme Boucher (Denise): Alors, bonjour, M. le Président. Alors, c'est intéressant, une situation aussi conviviale aujourd'hui, d'être si près, les uns et les autres. C'est plutôt rare qu'on a cette habitude-là. En tout cas, il faudra voir si ça a les mêmes effets, près ou loin. On verra. Alors, voilà, M. le Président.

Alors, pour la CSN, la fusion du Conseil du médicament et de l'Agence d'évaluation des technologies et des modes d'intervention en santé et services sociaux, donnant naissance à l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, est une évolution logique et souhaitable. Cependant, cette création, telle que présentée dans le projet de loi n° 67, laisse anticiper des changements majeurs dans le paysage du système de santé et de services sociaux puisqu'elle sera appelée à guider certaines décisions stratégiques du ministre.

**(9 h 40)**

Nous comprenons aussi que l'INESSS, comme son nom l'indique, est une personne morale qui aura pour mission de promouvoir l'excellence clinique et l'utilisation efficace des ressources dans le secteur de la santé et des services sociaux. Cette mission, telle que définie dans le projet de loi, est louable. Il est légitime, pour tout gouvernement qui se veut responsable, de poursuivre, que ce soit en santé et services sociaux ou dans tout autre domaine, une adaptation efficace des moyens par rapport aux objectifs poursuivis. L'inverse serait d'ailleurs étonnant, car le Québec, comme société, ne peut faire une mauvaise utilisation de ses ressources dans ce contexte actuel marqué par le vieillissement de la population, qui implique un accroissement des besoins. Nous ne voyons donc aucun inconvénient relié à la création d'un institut en santé et services sociaux qui aura pour but réel de rechercher une meilleure efficacité dans l'exploitation des ressources. Cependant, le contexte qui soutient la création de l'INESSS suscite notre vigilance et mérite d'être évoqué.

En fait, le projet de loi n° 67 est développé dans la foulée du rapport soumis par le comité d'implantation de l'INESSS, dirigé à nouveau par M. Claude Castonguay. Il y est fait mention d'une des hypothèses dominantes, contestable et contestée, contenues dans le document de février 2008, En avoir pour notre argent, à savoir l'existence d'un déséquilibre quant à la croissance des dépenses publiques de santé par rapport à l'augmentation de la richesse collective. Ce déséquilibre réduit année après année la marge de manoeuvre financière dont le gouvernement dispose pour financer les autres missions de l'État. Alors, il est plausible de penser que le projet de loi n° 67 s'inscrive dans la continuité du premier rapport de Claude Castonguay, qui, s'il faut le rappeler, faisait l'apologie d'une réduction des dépenses publiques et d'une place accrue du privé en santé.

Parallèlement, il convient de mentionner que le gouvernement du Québec ne cesse de faire valoir la nécessité d'un plafonnement de la croissance des dépenses des programmes à 3,2 % par an au cours des prochaines années, tout en sachant que le taux de croissance moyen de ces dépenses observé lors des sept dernières années s'évaluait à 4,7 % et que l'on sait très bien que, pour ce qui est du Canada, pour être capable de répondre à la crise, ça pourrait jouer autour de 7 %. Alors, c'est assez paradoxal, car c'est ce même gouvernement qui, une fois au pouvoir, a fait de la réduction du fardeau fiscal du Québec une de ses priorités, ce qui a conduit à des baisses successives d'impôt de plusieurs milliards. Ainsi, en établissant des liens entre ces principaux discours et comportements, il y a lieu de se questionner sur la réelle mission qu'entend poursuivre l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux. Alors que le gouvernement s'est fixé une baisse du financement des services publics et des programmes sociaux, l'INESSS va-t-il tout bonnement être un outil attaché à la poursuite de cet objectif? Cette question est appropriée, eu égard à l'importance des dépenses publiques de santé et de services sociaux dans les budgets du gouvernement. La CSN s'inscrira en faux contre toute tentative prétendument scientifique qui viserait à rationner les dépenses en santé et services sociaux en transférant une part importante du financement aux individus. Les conséquences d'une baisse des dépenses publiques en santé et services sociaux seraient à terme néfastes pour le système public. En effet, une diminution des dépenses en santé et en services sociaux impliquerait une accentuation de la pénurie de main-d'oeuvre, intensifierait les problèmes d'accès, se traduirait par une baisse de la qualité et de la quantité des soins et des services à la population, nuirait à la crédibilité du système public, tout en faisant la promotion d'un système privé parallèle. Le gouvernement du Québec, ou encore l'INESSS, a tout intérêt à éviter cette spirale descendante, laquelle risque d'augmenter les inégalités sociales en s'attaquant à l'un des principes fondateurs du régime public de santé: l'égalité d'accès des personnes aux services en fonction de leurs stricts besoins cliniques ou sociaux, indépendamment de leur capacité de payer et de leurs conditions socioéconomiques.

Par exemple, pensons au secteur des soins et de services aux personnes âgées, qui connaît une situation caractérisée par un désengagement de l'État. En effet, nous assistons à une privatisation sournoise mais rapide de l'hébergement, des soins et services à domicile. Pour ce faire, nous souhaitons, dans le contexte du projet de loi n° 67, réitérer notre demande au gouvernement de se donner les moyens de répondre aux besoins des personnes âgées par une offre de soins... publique et... de soins et de services adéquats et suffisants. Nous espérons ainsi compter sur la contribution de l'INESSS à la recherche de réponses publiques aux besoins de la clientèle des personnes âgées.

À cet effet, nous voulons préciser ce rôle de l'institut au renforcement du système public et de dissiper toute ambiguïté quant à l'objectif qu'il poursuit. La CSN estime qu'il faut amender la mission de l'INESSS afin qu'il soit formellement et exclusivement consacré à la consolidation du système public de santé et de services sociaux dans l'exercice de ses fonctions, en continuité avec les valeurs et les choix de la population du Québec. Ainsi, nous recommandons la proposition suivante:

La CSN recommande d'amender l'article 4 du projet de loi de la façon suivante: «L'institut est formellement dédié à la promotion et à la consolidation du système public de santé et de services sociaux du Québec et a pour mission de favoriser l'excellence clinique et l'utilisation optimale des ressources dans ce secteur.»

Une autre recommandation: Que le gouvernement vise un rehaussement de la portion publique du financement des dépenses en santé et de services sociaux et l'abolition des exclusions de la couverture publique de certains actes médicalement nécessaires.

Enfin, la CSN recommande au gouvernement de renoncer immédiatement au mode PPP pour les projets des Centres universitaires de santé McGill et du Centre hospitalier de l'Université de Montréal. Vous le saviez, que j'allais le ramener, sans aucun doute.

Alors, ajoutons que, pour nous, l'intégration d'un volet social à la mission de l'INESSS marque une étape importante de reconnaissance des services sociaux au Québec. Là aussi, il faut poursuivre des gains d'efficience et travailler à combler le retard relatif au socialement nécessaire par rapport au médicalement nécessaire grâce à une amélioration significative des engagements et des budgets. Pour la CSN, le volet des services sociaux est névralgique. Il rejoint nos préoccupations maintes fois exprimées à l'égard de nombreuses clientèles vulnérables du système, notamment les personnes âgées et celles touchées par la modernisation des pratiques en santé mentale et en relations humaines. Il importe pour l'institut de prendre la pleine mesure du champ d'intervention des services sociaux personnels proposé et de bien saisir leurs spécificités afin de contribuer à leur structuration adéquate, avec le concours et dans le respect des divers acteurs et intervenants du domaine. Il demeure vrai que le gouvernement du Québec ne fait pas assez sur le plan des innovations sociales.

Alors, comme recommandation, la CSN recommande un engagement concret et mesurable pour consolider le volet social du système public du Québec. Que le gouvernement rehausse la part des dépenses publiques allouées aux services sociaux personnels assurés.

Concernant le volet de la gouvernance de l'INESSS, il faut, là aussi, un renforcement et un développement de l'expertise publique en santé et services sociaux. Nous émettons à cet égard deux recommandations.

Nous recommandons à l'institut d'expliciter ses liens et la coordination prévue avec l'ensemble des instances, des acteurs et des intervenants appelés à contribuer à la réalisation de sa mission.

Pour cette recommandation, nous sommes d'avis que le projet de loi reste vague quant aux contributions respectives de plusieurs instances, acteurs et intervenants légitimes du système: l'Institut national de santé publique du Québec, le Commissaire à la santé et au bien-être, les ordres professionnels et les organismes d'agrément, pour ne nommer que ceux-là. Ces organismes ont des rôles à jouer en matière de normes cliniques, de pratiques exemplaires ou de modalités professionnelles ou organisationnelles. Ils seront des partenaires naturels de l'institut. Il semble que tout le monde y gagnerait si le projet de loi fournissait des précisions relatives aux relations devant s'établir entre ces organisations et l'institut.

Une autre recommandation: Nous croyons qu'il est important d'expliciter les liens et la coordination prévue avec l'ensemble des instances, des acteurs et des intervenants appelés à contribuer à la réalisation de sa mission.

Dans le même esprit que la proposition précédente, le travail de l'INESSS ne peut se faire en vase clos. L'institut est appelé à collaborer étroitement avec les partenaires que sont les personnels des établissements, non seulement leurs gestionnaires et directions, quand il est question d'agir sur la performance des services, de préconiser des changements ou de systématiser certaines pratiques. Les travailleuses et travailleurs des établissements de même que leurs syndicats souhaitent s'inscrire dans une approche participative et progressive, du bas vers le haut du système, pour s'approprier les changements et être reconnus comme partenaires de plein droit dans la mise en oeuvre des transformations du réseau. Des protocoles existent déjà pour guider les projets pilotes visant des réorganisations du travail pour atténuer l'impact des pénuries. Les syndicats sont prêts à aller plus loin dans ces démarches. Pour la CSN, il est essentiel que l'institut soit un allié des syndicats et facilite leurs contributions pour l'élaboration et l'appropriation des guides de pratique clinique et des lignes directrices. Elle demande que le fonctionnement de l'institut leur réserve une place de partenaires privilégiés dans ses travaux.

De plus, nous ajoutons une sixième recommandation, où nous recommandons de modifier l'article 16 de la façon suivante: «Au maximum cinq des membres du conseil, dont le président, doivent se qualifier comme administrateurs indépendants.» Hein, c'était de 7-11, un truc comme celui-là.

Enfin, je termine là-dessus, et nous terminons avec une dernière recommandation: Le gouvernement se doit d'empêcher la mise en oeuvre de l'article 12 du projet 67 jusqu'à un débat public satisfaisant puisse fournir tout éclairage requis et démontrer les mécanismes assurant la préservation de la confidentialité des renseignements personnels. Alors, voilà, M. le Président.

**(9 h 50)**

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup pour cette présentation. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission, deux blocs de 20 minutes, et je vais commencer en cédant la parole au ministre de la Santé et Services sociaux et député de Jean-Talon.

M. Bolduc: Vous ne serez pas surpris, vu qu'on s'est connus auparavant, que j'ai beaucoup, beaucoup aimé votre mémoire puis j'ai beaucoup aimé votre présentation. Il y a des endroits que je pense qu'il y a des sujets de discussion. On peut être en désaccord sur certains points, mais je pense que vous avez bien saisi où on s'en va avec l'INESSS. Et puis également, dans les présentations précédentes, souvent je parlais des partenaires, je parlais des ordres professionnels puis j'ai mentionné à quelques reprises les syndicats. Puis à la fin, dans votre présentation, vous vous positionnez très bien. Moi, je vous vois comme des partenaires privilégiés. On ne peut faire de transformations, d'améliorations dans le réseau sans que les gens sur le terrain, à la base, participent. Et puis je pense qu'il y a des organisations qui les représentent, et on doit travailler avec ces organisations-là.

Parce qu'on parle de l'INESSS en termes de... d'évaluation des technologies, on parle de l'INESSS en termes d'évaluation des protocoles ou des bonnes pratiques, mais il y a un endroit où est-ce que l'INESSS aussi pourrait avoir un certain effet, c'est au niveau des meilleures pratiques en termes d'organisation du travail. Moi, je pense que c'est tout relié, puis ça, on va le faire avec vous autres. Ça, vous êtes exactement au même endroit que notre gouvernement, le partenariat, le partenariat avec les gens sur le terrain puis nos organisations.

J'ai noté dans votre mémoire un élément où vous parlez de... vous ne voudriez pas que l'INESSS soit un élément de dépolitisation, c'est-à-dire qu'on met un organisme complètement à part. Puis je pense que c'est probablement dans la perspective de Castonguay, où il disait: On pourrait donner à l'INESSS... -- M. Castonguay a bien clarifié sa pensée, là, la semaine dernière, par contre -- mais on... l'INESSS pourrait être le grand consultant pour le panier de services, les prises de décision. Et les gens ont beaucoup interprété ça comme étant un outil pour faire la rationalisation. Ça, je peux vous le dire et je vais le dire clairement: pour moi, l'INESSS, c'est un organisme d'excellence dont l'objectif n'est pas la rationalisation, mais bien de nous éclairer sur les meilleures pratiques et les meilleures façons de faire et d'utiliser les meilleurs outils.

Et puis vous parlez dans le mémoire également que vous ne voudriez pas que ce soit un outil qui servirait à dépolitiser. C'est ce que... je l'ai pris dans ce sens-là. Puis également vous parlez qu'il ne faudrait pas que ce soit une façon aussi de déresponsabiliser le ministre. Comment vous voyez que le ministre ne soit pas déresponsabilisé par rapport à ça? Et puis là, je vous amènerais assez directement sur le lien de rattachement de l'INESSS par rapport à l'indépendance qu'elle devrait avoir, c'est-à-dire complètement indépendante. Ou encore est-ce que c'est logique qu'elle puisse être sous l'égide du ministre tout en respectant les concepts d'autonomie de l'organisation, un peu sur le principe... Je vous dirais, un modèle qu'on a pour l'INESSS, c'est le modèle de l'AETMIS, qui est un organisme qui dépend du ministre mais qui à la fin, par sa crédibilité, a toute l'indépendance et l'autonomie pour fonctionner.

Mme Boucher (Denise): Bien, vous avez soulevé... Je suis contente, dans un premier temps, d'entendre vos propos sur le fait qu'il n'est pas question de rationalisation, que vous voulez vraiment que ce soit un lien où on parle de pratiques, d'excellence. Et je suis aussi contente d'entendre, de votre part, le fait qu'on puisse être des partenaires mais des partenaires dans l'organisation du travail. Je vais... Je n'ai pas besoin de vous rappeler qu'il y a déjà 21 projets pilotes qui sont en piste. Vous avez mis... Le ministère a mis de l'argent. Je pense que... et, de ces 21 là, on devrait avoir les résultats bientôt, d'ici le mois de février. Je pense que c'est un plus, et il y a des objectifs assez élevés autour de certains de ces projets pilotes là. Et donc, si vous êtes après me dire: Oui, on veut ça aussi puis on veut aussi renforcir notre réseau public, si c'est ça que j'entends de votre bouche, je suis très contente.

M. Bolduc: C'est ça que vous entendez.

Mme Boucher (Denise): C'est ça que j'entends de votre bouche? Merci beaucoup.

Pour ce qui est de la... Est-ce qu'on tend à... Moi, je pense qu'on a un organisme qui est... Il doit avoir des comptes à rendre à son ministre, auquel il est rattaché. Et on peut bien le dire, qu'il est dépolitisé, oui, je pense que c'est possible. Il en existe d'autres, types de regroupement, où on a des gens, des conseils d'administration... On peut penser à la CSST, qui fait des rapports à la ministre du Travail, on peut penser à la CPMT, qui a à faire des rapports aussi au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Donc, pour moi, on peut bien vouloir, mais je pense que la responsabilité... On ne peut pas laisser la santé, qui prélève à peu près 43 % du budget du gouvernement du Québec... de donner ça dans une main à côté puis dire: C'est tous vous autres qui allez faire la gestion de l'excellence des pratiques, et tout, puis, moi, je n'aurai pas de regard là-dessus. À mon avis, ça, ça pose un problème d'éthique profond, parce que, 43 % du budget, à mon avis, il faut que le gouvernement et le ministre puissent bien savoir où ça va, ce pourcentage-là, ce grand pourcentage, cette grande ponction du budget du gouvernement. Alors, moi, pour moi, que la place... vous soyez encore présents, qu'il y ait des rapports...

D'ailleurs, ce qu'on indique aussi dans notre rapport, c'est, quand l'institut détermine qu'une chose pourrait ne pas être valable ou valide, on lui demande qu'il vous fasse le rapport, qu'il vous indique les raisons pour lesquelles il le refuse ou il l'accepte, puis on demande aussi que le ministre ait aussi sa raison pour laquelle il le refuse ou il l'accepte. On indique ça aussi dans les rôles qui doivent être faits entre les uns et les autres. Donc, il peut bien avoir sa place, puis on peut bien penser qu'il peut être dépolitisé, mais en même temps votre droit de regard est là. Mais on pense que ça aussi, ça doit être rendu public et qu'on puisse le savoir. Donc, moi, je pense que votre rôle reste encore important là-dessus. Peut-être, Andrée, en complément... Non, il s'allume tout seul.

Mme Lapierre (Andrée): Ah! il s'allume tout seul. On n'a pas besoin de s'en occuper. C'est bien.

Le Président (M. Kelley): Mme Lapierre.

Mme Lapierre (Andrée): Bien, en fait, la question de l'indépendance, il y a deux aspects, là. Il y a une question qui est le degré de ressources que l'institut aura. Parce que là on voit que la fusion des deux organismes, ce que j'ai compris dans le rapport d'implantation, ça représente peut-être des budgets d'à peu près 10 millions. Puis on dit: Avec les... toutes les... l'élargissement de mission qu'on leur confie, ça prendra à peu près le double pour faire ça. Moi, mon inquiétude sur l'indépendance, c'est, si l'institut n'a pas suffisamment de ressources, quelle sera l'indépendance réelle de l'institut. Et sera-t-il dépendant d'organismes externes pour donner la ressource, pour formuler les conseils? Ça, c'est un premier volet.

Puis le deuxième, bien, c'est, à travers toute la notion de performance, comment l'institut va se placer et comment il est appelé à développer, lui aussi, des indicateurs de performance. On a déjà le Commissaire à la santé qui fait de la performance, on a le réseau qui a toutes sortes d'affaires, la caisse qui s'y... s'est rattachée au modèle de performance EGIPSS, là, de... qui est connu aussi. Donc, moi, c'est ce côté-là de l'indépendance de l'institut qui nous inquiétait, en disant: Est-ce qu'on va avoir, là, un organisme indépendant qui va lancer dans le débat, encore une fois, une nouvelle source de modèles, une nouvelle source d'indicateurs? Et c'est dans ce sens-là que, nous autres, on indique que notre indicateur, nous autres... un des indicateurs de performance qu'on a, c'est le degré de financement public de notre système. Nous, si le degré de financement public se développe, ça va nous rassurer, et, s'il recule, bien ça aura beau s'appeler l'excellence, on va avoir peur de ce qui va être en train de se passer. C'est dans ce sens-là qu'on a formulé cette recommandation-là.

M. Bolduc: Là-dessus, je vais vous apporter deux éléments. Un, la transparence, pour nous, est essentielle. Et ce qui est prévu, c'est que l'INESSS rend publiques ses décisions, et puis les décisions, avec le Web aujourd'hui, sont sur le site Internet. Ça va être disponible.

Également, lorsque le ministre reçoit les rapports, bien il commente également les raisons d'acceptation ou de refus, qui... notre expérience autant avec l'AETMIS qu'avec le Conseil du médicament, c'est très, très rare. C'est très, très rare. Et puis il faut l'expliquer à ce moment-là. Et je pense que le fait que ce soit transparent puis publicisé, bien je pense que ça va rassurer les gens. Et vous faites bien de le dire parce qu'on veut que le financement soit adéquat. Par contre, on ne voulait pas créer un nouvel organisme qu'on va dire qu'on va mettre deux fois plus de budget, puis on prend le budget dans des services, puis on les met là. Donc, on pense qu'ils peuvent faire le travail avec un travail d'optimisation en réunissant les deux conseils dans un premier temps. Ça, je pense que c'est la base.

L'autre élément, c'est par rapport aux indicateurs. J'aime toujours ça reclarifier ma pensée. C'est que c'est un réseau qui est quand même gros, vu qu'on gère 27 milliards de dollars. Donc, à chaque niveau, il doit y avoir une évaluation de performance par rapport à ce qui se fait. Puis là je m'explique. Le Commissaire à la santé évalue la performance du système en général dans lequel un modèle comme EGIPSS va servir, plusieurs indicateurs, pour dire de façon indépendante... Et ils rendent leurs rapports officiels c'est quoi, l'état de situation. Et, quand le Commissaire a été créé, le but, c'était que, quelle que soit l'opposition, le gouvernement, qu'on arrive avec quelqu'un de crédible, un genre de vérificateur externe du système de santé.

L'INESSS peut avoir des indicateurs mais par rapport à l'excellence des pratiques, hein? Je veux dire, dans telle maladie, là, exemple le diabète, l'hémoglobine A1c en bas de 7, maintenant vers 6,5, c'est ça qui est recommandé, ils vont nous établir des indicateurs. Des indicateurs de performance également par rapport à certains fonctionnements pratiques. À l'intérieur des établissements, on fait de l'évaluation de performance, également. On regarde le nombre d'heures-soins qu'on utilise, mettons, soins intensifs, le nombre de patients qui est traité par infirmière. Puis ça, ce qu'on vise, là... Puis, vous savez, quand on fait de l'organisation du travail, on ne veut pas manquer de personnel puis on ne veut pas en avoir deux fois plus non plus. On veut avoir un personnel adéquat pour faire le travail. Puis il y a également des évaluations de performance. À l'urgence, la durée moyenne de séjour qu'on s'attendrait sur civière, c'est 12 heures, O.K.?

**(10 heures)**

Ça fait que tout ça, c'est toutes des évaluations différentes. Mais, un bon système, à chacun des endroits, ils ont leurs propres indicateurs de performance. Ça fait qu'à l'urgence on n'utilisera pas EGIPSS, mais on va utiliser des indicateurs pour l'urgence, puis, quand EGIPSS va faire son rapport, il va utiliser des indicateurs du réseau de la santé. Ça fait que c'est complémentaire.

Et puis, nous autres, on a l'intention de le financer de façon adéquate, l'INESSS. C'est un organisme qui est public, qui va demeurer public. Et puis, à l'intérieur de l'INESSS, ce qu'on veut, c'est développer les meilleures pratiques au niveau de l'excellence, et je rajoute les pratiques cliniques, l'évaluation des nouvelles technologies. Avant de rentrer une nouvelle technologie au Québec, il faudrait se faire... savoir si elle est bonne ou elle n'est pas bonne. Le Conseil du médicament fait la même chose pour les médicaments. Un médicament qui est trop cher par rapport aux avantages, bien, il ne sera pas mis sur la liste, puis un médicament qui est adéquat, bien, il va être géré par la liste.

Ce que l'on sait, c'est qu'autant l'AETMIS que le Conseil du médicament tous ceux qui sont venus nous ont dit que c'étaient des organismes crédibles, qui faisaient un excellent travail. Ça fait qu'il ne faut pas reculer, donc il faut avancer. C'est dans cette perspective-là, là, qu'on le fait. Et puis, moi, j'insiste là-dessus, là, c'est vraiment la façon dont il faut voir l'INESSS. On peut avoir des craintes, mais ça va être un organisme qui est indépendant.

Politisation, ça, j'insiste là-dessus. Puis je suis de la même école que vous, c'est-à-dire que les choix de santé, ça relève du politique, hein? Je veux dire, couverture des services... peut-être pas l'organisation sur le terrain, mais décider qu'est-ce qu'on met dans nos paniers de services puis des grandes décisions, ça, ça relève du politique, et on ne peut pas dire: On va transférer ça à un organisme complètement indépendant, puis il va gérer ça, puis le politique, il n'est pas responsable. Et ce n'est pas le but de l'INESSS.

Par contre, quand tu prends une décision, tu aimes t'appuyer sur un organisme objectif, relativement indépendant, qui va te faire des recommandations. Puis je vais vous donner un exemple, puis on donnait l'exemple: s'il y a une pratique qui est rendue inutile, tu sais, l'outil est vraiment... tout le monde reconnaît... Ça nous prend quelqu'un pour nous dire à nous autres: À l'avenir, ce test-là, on ne devrait plus le faire. Et puis l'INESSS va servir à ça. Puis, comme ministre, je pourrais, à la limite, dire: Si ce n'est plus utile, bien, je ne le couvrirai pas dans les services. Ça ne veut pas dire qu'on va l'enlever de la société, mais on ne le couvrira pas. L'INESSS peut arriver -- puis c'est souvent plus ça qu'ils font -- ils vont dire: On a fait un rapport, puis maintenant on peut vous dire qu'à l'avenir on devrait couvrir tel service parce que ça donne telle perspective.

Je veux juste vous donner un exemple: chirurgie bariatrique, hein? Quand on a décidé de le couvert... C'est un service qui est public, qui, en passant, se faisait beaucoup dans le privé et que maintenant on a rendu public à 100 % parce qu'on pense que, quand quelqu'un est opéré, il va faire sa perte de poids, ça va être bon pour sa santé, ça va être bon pour sa condition sociale. Puis, également, quand vous le regardez, ça s'autofinance en deux ans et demi, trois ans. Ce que je paie pour la chirurgie, qui est environ 7 000 $, je vais le sauver en prothèse de hanche, prothèse du genou, puis je vais le sauver également en médicaments. Ça fait que c'est cette perspective-là que... Mais ça nous prend un organisme objectif qui va nous l'expliquer, ça, et qui va faire des rapports, et que tout le monde va s'entendre qu'il n'y a pas de... Ce n'est pas le politique qui va gérer ça. Ça, je pense que...

L'autre chose, puis ça, je voudrais vous entendre là-dessus, c'est... moi, l'importance que j'accorde aux services sociaux dans l'INESSS. On ne peut plus séparer la santé des services sociaux, c'est interrelié, puis les déterminants de la santé, c'est un facteur majeur. Puis on fait beaucoup de place aux services sociaux dans le projet de l'INESSS. Comment vous voyez ça, là, notre application, puis êtes-vous en accord avec ça?

Mme Boucher (Denise): Bien, je pense que, dans le mémoire, on vous l'a dit, qu'on était très favorables à cette... puis qu'on puisse maintenant ne pas juste parler des pilules mais qu'on puisse aussi parler du social, parce que ça, c'est important. On vous dit même aussi: Il y aura une importance de rehaussement qui devra être fait par l'État, pas pour l'INESSS mais pour l'État, dans ce qui touche le social parce que ça, c'est l'enfant pauvre, on le dit. Pour ce qui est des personnes âgées, les soins à domicile, on a encore du travail à faire, c'est du social. Tout ce qui touche la question de la santé mentale, l'aide à la jeunesse, donc, il y a un effort à faire. Puis, nous, on est contentes de voir que là ce n'est plus juste le médicalement requis, mais il y a le socialement requis, on le dit dans le document, puis ça, on trouve que c'est très, très bien.

Ça veut dire que maintenant on va pouvoir... Parce que, des fois, on avait l'impression que ça s'appelait ministère de la Santé et des Services sociaux, mais on avait l'impression qu'on était plutôt souvent dans le ministère de la Santé puis on échappait Services sociaux. Même quand les gens vous parlent, généralement on va dire: Ah, le ministère de la Santé! Mais c'est le ministère de la Santé et des Services sociaux. C'est comme si ce n'était pas perçu par le monde, dans la culture, que le social, il vous était rattaché. Donc, moi, je pense que c'est un plus, et on l'a dit dans le mémoire. Alors, nous, on voit ça d'un bon oeil.

En même temps, ce qu'on dit aussi, c'est qu'il va falloir aussi tenir compte, et ça, comme partenaires, vous avez... Et je pense que le partenariat avec le communautaire demeure important parce qu'ils ont des façons de travailler, ils vont souvent vers des caractéristiques d'immersion sociale que souvent, nous, on ne fait pas, mais je pense qu'eux aussi, par rapport à... Ils devraient être présents parce qu'ils ont une façon de travailler importante, et c'est ce qu'on souligne aussi à l'intérieur de notre mémoire.

M. Bolduc: Oui. Puis on a rencontré les organismes communautaires la semaine passée, puis j'ai adoré leur présentation. Puis on était sur... au même niveau, ils voulaient garder une indépendance, le côté de l'innovation. Puis ce qui est intéressant avec l'INESSS... Puis ça, je tiens à le rappeler également, on ne pourra pas évaluer les meilleures pratiques dans les services sociaux comme on les évalue dans la santé. Ça peut être les mêmes principes d'évaluation...

Mme Boucher (Denise): Non, non, on ne peut pas. Ce n'est pas les mêmes indicateurs non plus.

M. Bolduc: ...mais ce n'est pas les mêmes indicateurs. Et puis, moi, je suis, encore là, de l'école qui pense que, pour améliorer plus la santé au Québec, ça passe par les services sociaux, à cause des déterminants de la santé: la pauvreté, prise en charge des personnes âgées. Et souvent ce n'est pas des médicaments que ces gens-là ont besoin, c'est d'une meilleure organisation de services avec peut-être plus d'aide à domicile. Et ça, je vous dirais que c'est les orientations, je pense, qu'on prend également comme réseau de la santé: il faut qu'on s'occupe de nos personnes âgées, de nos gens avec les maladies chroniques, puis il faut qu'on s'occupe de nos plus démunis, qui, eux autres, ont le plus à bénéficier de ça.

Puis je suis content, dans votre mémoire, vous mentionnez également... Oui, vous voulez parler, oui.

Le Président (M. Kelley): Mme Lapierre.

Mme Lapierre (Andrée): Bien, je vais juste compléter. Moi, j'accompagne les travaux, actuellement, de l'Office des professions du Québec pour la mise en oeuvre de la loi n° 21. Et justement, au niveau des pratiques sociales, on fait là un travail assez considérable d'inventorier, dans les différents milieux, ce que font, par exemple, les techniciens en travail social, les éducateurs, les gens en délinquance. Et là on... C'est des travaux qui se prolongent, là, ça va prendre encore plusieurs mois, mais il y a un début de travail de regarder, d'être capables de définir exactement ce qui se fait dans chaque milieu, quelle est l'intervention de tel technicien et les rapports entre techniciens et professionnels. Et sincèrement il y a toute une structuration qui se développe là.

Hier, on avait la présentation de la Fédération des CRDI-TED, et c'était assez phénoménal de voir toute la somme des différents outils, les grilles, etc. Et, en même temps, il y avait une telle abondance d'outils par rapport à presque, je dirais, l'indigence des services en déficience ou le soutien réel qu'on est capables de donner aux personnes qui vivent avec une limitation, avec une déficience ou avec les proches, etc.

Donc là, moi, je me dis: On... le début des outils, là. Et c'est dans ce sens-là que je pense que ça va être très intéressant. Je pense que, la présentation qu'hier on nous faisait, probablement qu'on va la présenter au colloque de l'AETMIS au printemps pour montrer ce qu'on fait. Puis on a vu des efforts dans ces centres-là pour faire des choses. Mais on est loin d'avoir même le début de l'information sur ce qui se passe. Et ça pose évidemment toute cette question-là d'où ça commence, le financement de ça, les rôles des uns et des autres. C'est un sacré boulot, là.

M. Bolduc: Mais c'est intéressant, ce que vous dites là parce que c'est là qu'on... Il faut voir comment ça va fonctionner en pratique. Un, l'INESSS, ce ne sera pas une imminence grise qui va tout décider. Il faut que ça se fasse avec les gens sur le terrain. Puis, un, quand vous allez avoir votre colloque, déjà les gens vont s'entendre...

Puis, en passant, nos travailleurs sociaux sont formés à l'évaluation, sauf qu'on manque de coordination. Puis il y a beaucoup, beaucoup d'outils, puis, à un moment donné, moi, je vais toujours... Mettons en test de santé mentale, il y en a cinq de développés. Il y en a peut-être un que, scientifiquement, les gens vont dire qu'il est supérieur. Bien, on l'adoptera. Mais, s'il y en a deux de différents, on va dire: Ils sont différents, mais on va être capables d'avoir une coordination puis une cohérence.

Et la façon dont, moi, je le vois, le travail, tout ce travail que vous avez fait... supposons, quand on a une organisation comme l'INESSS, ils devraient, quand, eux autres, ils vont décider comment ils vont travailler ça, travailler avec vous autres. Puis l'INESSS n'aura pas toutes les expertises. Il va aller chercher des expertises au niveau de l'ordre des travailleurs sociaux, l'Ordre des psychologues, les médecins, les nutritionnistes. Mais, quand ils vont travailler, il faut qu'ils aillent dans une perspective de pratique, qu'est-ce que ça va se traduire sur le terrain pour les travailleurs, mettons les travailleurs sociaux, les psychologues, et dans l'organisation du travail.

Puis vous venez de décrire ce qu'on vit comme difficulté. C'est embryonnaire, mais je peux vous dire: Il faut commencer à quelque part. Le but, ce n'est pas de dire par où on commence, c'est de commencer. Puis, une fois qu'on a commencé, on va se structurer, puis on va arriver dans quelques années où, quand vous allez dire: Notre meilleure pratique, c'est celle-là, par l'INESSS, vous allez la diffuser, puis ça va être reconnu partout au Québec, ce qu'on n'a pas actuellement. Ce que vous faites comme travail, si on n'a pas l'INESSS, vous allez le reconnaître comme groupe, mais ailleurs ils ne le reconnaîtront peut-être pas, tandis que là on est capables de généraliser.

Le dernier point que je vais vous parler, c'est la confidentialité. On est au même endroit, on veut que ce soit confidentiel. Il n'est pas question que quelqu'un sache qu'est-ce qui se passe avec un patient. Ce qu'on nous a dit par contre, puis on va probablement réécrire un peu pour être certains de le clarifier comme il faut... Même les gens des services sociaux sont venus nous dire: On comprend que, pour nos clientèles, on ne peut pas faire une évaluation comme sur 30 jours, parfois il faut être capables de retracer la personne ou l'identifiant sur une période de 10 ans pour voir l'évolution, pour... L'objectif, là, c'est, si on fait de l'évaluation, c'était quoi, les meilleures pratiques, pour qu'on puisse l'appliquer aux autres. C'est ça. Ça fait que ça, je suis très, très sensible à ça.

Vous n'en avez pas parlé, mais, à la question du conflit d'intérêts au niveau du conseil d'administration, ça également, c'est quelque chose qu'on est en train de revoir, là, parce qu'on veut vraiment que ce soit, au niveau éthique, impeccable. Ça, c'est des choses qu'on est en train de voir.

Formation du conseil d'administration, vous avez insisté sur l'indépendance. Nous autres également. Le nombre de choses... On aime ça avoir plus de gens indépendants. Puis je comprends que vous voulez être plus présents, mais, moi, je pense que ce qui est important surtout, c'est que ce soit un conseil qui est autonome, indépendant, mais que les gens à l'intérieur ne représentent pas des groupes. Ils se représentent, et on ne veut pas qu'il y ait de conflit d'intérêts. Moi, c'est à peu près la perspective qu'on a. Je ne sais pas s'il reste encore beaucoup de temps, M. le Président...

**(10 h 10)**

Le Président (M. Kelley): Très peu.

M. Bolduc: Très peu, hein? Je vais juste vous remercier...

Le Président (M. Kelley): En conclusion.

M. Bolduc: ...juste vous remercier puis me... vous réitérer... On a eu beaucoup de rencontres dans le passé, vous connaissez mes positions par rapport aux syndicats, je les aime, ça fait que... Juste pour vous dire que je veux qu'on continue à travailler ensemble puis qu'on vous voie vraiment comme des partenaires. On sait que, dans les prochains mois, ça va peut-être être un peu plus de turbulences suite aux négociations, passage obligé, mais, indépendamment de ce qui va se passer là, on veut continuer de travailler avec vous autres pour le bien de notre population. Merci beaucoup.

Mme Boucher (Denise): Est-ce que je dois être inquiète, M. le Président?

M. Bolduc: Mais pas du tout. C'est comme quelqu'un d'autre m'a dit, il dit: Je suis content que tu me dises que tu es mon ami, mais dis-le pas, ça me nuit.

Des voix: ...

Le Président (M. Kelley): Alors, sur ça, je vais passer la parole au député de Marie-Victorin et porte-parole de l'opposition officielle. M. le député.

M. Drainville: Merci, M. le Président. Bienvenue. D'abord, très heureux que vous réitériez votre position sur les PPP. Je la partage. Vous êtes les premiers à le faire, d'ailleurs, je vous remercie.

Sur les précisions à apporter, ça, c'est à la page 11 de votre mémoire, quand vous dites: «...tout le monde y gagnerait si le projet de loi fournissait des précisions relatives aux relations [qui vont] s'établir entre [les] organisations [existantes] et l'institut.» Les organisations, vous parliez, entre autres, de l'Institut national de santé publique, le Commissaire à la santé et au bien-être, les conseils d'agrément également. Moi, je suis tout à fait d'accord avec vous: il y a du flou qui entoure ce projet de loi, le n° 67, entre autres parce que ce n'est pas encore tout à fait clair, son mandat sur la performance. Comment est-ce que son mandat va se démarquer de celui qui existe déjà pour le Commissaire à la santé? Comment est-ce que l'institut va s'assurer donc d'atteindre son mandat qui lui est donné par le projet de loi, c'est-à-dire d'arriver à une meilleure efficacité des ressources et à une plus grande performance également du réseau de la santé et des services sociaux? Alors, moi, je suis d'accord avec vous, je... Par moment, on a l'impression que l'INESSS chevauche ce qui existe déjà, puis ça nous amène d'ailleurs à nous poser des questions sur l'utilité réelle de ce nouvel organisme.

Je suis d'accord également avec vous que le mandat de l'INESSS, ça doit être de renforcer le système public de santé et non pas contribuer à élargir le rôle du privé et des assurances privées dans notre système. Très content que vous le disiez.

Maintenant, j'ai un certain nombre de questions, je dirais, plus factuelles, puis, par la suite, on va passer à une discussion un peu plus... un peu plus de fond. Sur l'article 19, le ministre vient de nous dire qu'il est en train de réfléchir, là, à un amendement. C'est celui sur les conflits d'intérêts. Je ne crois pas que vous vous soyez prononcés dans votre mémoire là-dessus. Est-ce que vous avez une position?

Mme Boucher (Denise): Peut-être juste...

Le Président (M. Kelley): Mme Boucher.

Mme Boucher (Denise): Si vous me permettez, je vais laisser le flou artistique... répondre... permettre à Andrée de pouvoir répondre peut-être l'article 19. Mais, sur la question des PPP, nous l'avons mis -- ça peut paraître comme un peu plaqué, mais ce n'est pas plaqué -- sur la question, entre autres, du CHUM et de... santé McGill. C'est que, par l'INESSS, on cherche à vouloir atteindre l'excellence, et le Vérificateur général a lancé des messages à l'effet qu'on n'était pas dans l'excellence pantoute en allant vers une construction... et même en travaillant dans une pensée de PPP. Alors, c'est pour ça qu'on l'a mis. Parce que je trouvais qu'il y avait comme une contradiction entre vouloir le faire en PPP sur deux institutions importantes, le volet de l'excellence et le Vérificateur général qui dit au gouvernement: Vous êtes après faire fausse route. Alors, c'est pour ça qu'on l'a mis là, puis on considérait que c'était important pour éviter toute contradiction qui pourrait être faite.

Sur la question du privé, pour nous, c'est clair, et c'est l'essentiel de notre document: l'INESSS, il faut que, dans la mission, on l'inscrive, qu'il a à travailler dans une perspective de secteur public, santé publique, et que son objectif n'est pas de faire en sorte de faire des saltos arrière ou des vrilles avant pour trouver la façon dont on pourrait privatiser telle ou telle chose. Je pense qu'au-dessus de 30 % de privatisation, c'est suffisant et c'est même trop. Alors, on est mieux d'arrêter parce qu'il y a un... Puis on parle aussi de pénurie de main-d'oeuvre, et ce qu'on se rend compte, c'est qu'il y a eu un très haut taux de désengagement de médecins dans la dernière année, qui, à notre avis, nous inquiète beaucoup. Donc, c'est aussi pour ça qu'on parle de cela. Alors, pour les autres volets, Andrée.

Mme Lapierre (Andrée): Bien, c'est ça, c'est que le projet de loi, il y a plusieurs flous. Ça fait que je vais essayer d'aller par morceaux. Sur la question de l'indépendance des administrateurs, nous autres, on veut bien que la notion d'indépendance, là, telle qu'on la trouve dans la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État... Mais, en même temps, on veut que ce soient des gens du réseau, qui sont familiers de ces choses-là. Et, moi, j'avais peur parce que, moi, je regarde l'INESSS puis je me dis: Le gros de son trafic, c'est des gens qui vont passer peut-être après nous, là, des gens qui sont dans la fabrication, les industriels. C'est leur porte d'entrée, c'est leur vestibule. Eux autres, ils veulent montrer toutes leurs nouveautés. Mais, nous autres, d'une part, on veut que la mission soit celle de consolider un système public de santé.

On a ça au Québec, on a ça en Amérique du Nord, c'est une spécificité. On pourrait-u, quand on crée une affaire comme ça, le reconnaître et l'avoir comme mission formelle? Parce que ça va faire, là! Sinon, on est dans une situation continentale où on va constamment se faire barouetter les réalités du continent. Et ça, on perd le fait qu'on est un système beveridgien. C'est un atout. Ça ne règle pas tous les problèmes, on le sait. Mais on veut consolider qu'il y a une solidarité sociale qui doit être maintenue. Le développement des services sociaux, ça doit servir à développer la solidarité. Si on ne fait pas les liens entre ces choses-là, ça ne marchera pas. Si l'INESSS n'est pas constant dans sa défense du système public, on va perdre. Ça fait que, là, moi, je ne veux pas que ce soit une vitrine de n'importe quoi, là. Alors ça, c'est un volet important.

Et la gouvernance, dans ce sens-là, bien, la composition, elle va avoir cet impact-là. Donc, on veut des gens qui seront des représentants fiables pour véhiculer cette pensée-là. Et c'est là qu'on pense qu'il faut que les projets de loi mettent les balises. Et ils ne sont pas là présentement. Et, en ayant dit: Bien là, le... la même chose pour sa table de concertation, ça va sortir après par un règlement. Bien là, c'est maintenant, le moment de consultation. Alors, c'est là qu'il faudrait savoir: O.K. Qu'est-ce que c'est, les corps qui vont être consultés, qui vont être appelés à jouer? Puis la question des relations avec les différents liens, bien, c'est important de connaître les liens de hiérarchie là-dedans: qui consulte quoi, le bâti, on parle à travers quel système de performance.

Je comprends très bien, moi, la mission du Commissaire à la santé et je pense qu'il a, lui, le rôle prépondérant en termes de l'évolution des grands systèmes, hein? Le rapport, il a sorti, là, bien, la première ligne... Puis il a répété les mêmes choses qu'on connaît bien. Comment ça se fait qu'il faut répéter pendant deux générations l'évolution du mode de pratique des médecins? Ça nous prend-u un chapeau d'excellence x pour l'entendre? Alors ça, il y a des choses comme ça que... Il y en a un peu marre, là. Puis c'est un peu... Tu sais, on est une drôle de société, là, pour... tu sais, puis là, tout d'un coup, au nom de l'excellence, on va être rassurés. Excusez, là. Je pense qu'il faut savoir exactement pourquoi on devrait être rassurés puis à quelle condition ça va fonctionner. Ça fait que c'est ces éléments-là.

Moi, je pense qu'il faut vraiment savoir qu'est-ce qu'on veut faire comme progrès. Moi, ce qu'on trouvait intéressant avec l'INESSS, c'est l'idée qu'on aurait des bases pour rationaliser des décisions, des données probantes qui permettent de dire: Regarde, ça plus ça, ça fait ça. Bien, on se comprend que, dans le social, on est au début de l'accumulation des preuves. Puis, tu sais, je veux dire, on ne veut pas traîner le retard indéfiniment non plus. Puis on ne veut pas non plus que ce soit une petite approche comptable qui vienne dire: Regarde, on a ces données-là, puis, parce qu'on est capable de compter ici, c'est ça qui va passer. Alors, c'est ça qui est le côté, disons, complexe, là, de cette création-ci.

M. Drainville: Mais, Mme Lapierre, sur la question de la gouvernance que vous évoquez, là, est-ce que vous accepteriez... Nous, on est... L'article 19, là, qui prévoit qu'un membre du C.A. pourrait être ponctuellement en conflit d'intérêts, là, nous, on est totalement, totalement contre. Il n'est pas question d'évoquer, de permettre, d'entrouvrir un tant soit peu la possibilité du conflit d'intérêts dans ce projet de loi là. Ça, c'est... On est d'accord là-dessus?

Mme Lapierre (Andrée): On est d'accord là-dessus.

M. Drainville: Parfait. Sur l'article...

Mme Lapierre (Andrée): En plus, en plus, d'ailleurs, il y a... Toutes les dernières recommandations, qui sont en lien avec la question de la gouvernance, sont à l'effet qu'il n'y ait pas de...

M. Drainville: Bien oui.

Mme Lapierre (Andrée): ...de conflit d'intérêts. Je ne vois pas pourquoi, dans celui-là, on en aurait, puis, dans toutes les autres, on ne veut pas qu'il y en ait.

M. Drainville: Bien oui, bien oui. Voilà.

Mme Lapierre (Andrée): Je vous rappelle juste les derniers par rapport... Entre autres, sur la gouvernance des cégeps, gouvernance des universités, on ne veut pas qu'il y en ait, puis là, tout d'un coup, bang, on accepterait qu'il y en ait là.

M. Drainville: O.K. J'ai...

Mme Lapierre (Andrée): Puis, à l'échelle canadienne, il y a toute une campagne, là, sur... dans les instituts de recherche pour un représentant de la compagnie Pfizer au conseil d'administration de l'institut. Alors, les gens sont inquiets de ce type de conflit d'intérêts là. Il faut prévenir les coups. Et on ne veut pas que des gens qui ont été impliqués dans des organisations qui ont d'autres intérêts, qui sont légitimes...

M. Drainville: Que l'intérêt public.

Mme Lapierre (Andrée): C'est ça, c'est ça.

M. Drainville: Mais il ne faut pas qu'ils aient d'autres intérêts que l'intérêt public.

**(10 h 20)**

Mme Lapierre (Andrée): C'est ça. C'est que là on va avoir accès à une source de données, à toutes sortes de choses très importantes. Alors là, on dit: Il faut assurer ça.

M. Drainville: Il y a d'autres syndicats qui sont venus faire une présentation et qui ont fait part de leur inquiétude face au fait que les employés de l'INESSS seront à l'extérieur de la fonction publique. Ils ne vont pas relever de la Loi sur la fonction publique. Si je ne m'abuse, vous ne parlez pas de ça dans votre mémoire. Est-ce que ça vous inquiète, vous, que les...

Mme Boucher (Denise): Ce qu'on a dit, c'est qu'on a dit que... Dans notre mémoire, on parle du fait qu'il y ait le moins possible de travaux faits en sous-traitance, qui soient à l'extérieur. Et, quand on rappelle que ça doit être du public, pour nous, ça inclut ça. On ne l'a pas mis parce qu'on pense que les autres ont fait les représentations qu'ils avaient à faire. Mais, moi, la fidélité qui est rattachée à l'État quand on est fonctionnaire, je pense que c'est précieux pour un gouvernement qui décide d'aller de l'avant sur différents projets. Les recherches qui vont être là vont être importantes, alors il faut qu'on puisse avoir cet attachement-là.

Mme Lapierre (Andrée): À mon avis, je mets ça, moi, en lien avec, évidemment, les capacités financières qu'aura l'INESSS. C'est l'enjeu de la rétention puis... de l'attraction et de la rétention de personnel compétent. Si l'INESSS n'est pas capable, puis que l'industrie est capable d'offrir plus, puis que, lui, il paie les industries, bien, c'est ça qui est la difficulté. Déjà, au niveau canadien, les mécanismes d'évaluation des médicaments, il n'y en a plus, des mécanismes publics. On est à la solde des recherches que l'industrie fait. Alors, c'est ça, l'inquiétude qu'on a quand arrivent d'autres volets.

M. Drainville: Quand vous entendez le ministre dire qu'il n'aura pas plus de ressources, alors que vous...

Mme Lapierre (Andrée): Ça m'inquiète beaucoup.

M. Drainville: Ça vous inquiète?

Mme Lapierre (Andrée): Bien sûr. Il n'y a pas plus...

M. Drainville: Parce que, vous, vous dites, dans votre mémoire -- je m'excuse de vous interrompre -- vous dites: «Par cette mise en commun des expertises d'évaluation clinique et autres, l'institut aura plus de ressources...»

Mme Lapierre (Andrée): Il y en aura plus, dans le sens qu'il constitue une certaine masse critique en réuniant deux organisations actuelles. Puis on peut penser que, bon, c'est l'optique d'optimisation dont M. Bolduc parlait tantôt. Mais, par contre, considérant l'ensemble des nouvelles missions qui échoient à l'institut, bien là, quand le ministre dit: Je n'ajoute pas d'argent, bien là, moi, je me dis: Bon, il ne faudrait pas rêver trop, trop à ce que l'INESSS va être capable de faire. C'est dans ce sens-là que, moi, je dis: Il va falloir voir.

Puis, c'est ça, on veut, nous, avoir des gens qui sont capables de faire des travaux sérieux, rigoureux. Maintenant, on aimerait que ce soit une fonction publique qui soit capable de donner des niveaux, capable de garder des expertises.

M. Drainville: Dites-nous, madame...

Mme Lapierre (Andrée): Mais ce n'est pas ma tasse de thé, là, exactement.

M. Drainville: Pour les gens qui nous écoutent, là... Puis, dans le fond, ce qu'on souhaite, là, quand on... Enfin, quand, comme société québécoise, on se donne de nouveaux instruments, de nouveaux programmes, ce qu'il faut à la fin, c'est que le Québécois moyen, ou le Québécois tout court, soit mieux traité, soit mieux soigné. Qu'est-ce que... Disons, soyons... projetons-nous un peu en avant, prenons pour acquis que le gouvernement, malgré toutes les doléances qu'on pourrait lui soumettre, décide d'aller de l'avant, fait voter le projet de loi, l'institut est créé. Qu'est-ce que ça aura changé, dans quelques années d'ici, pour le Québécois justement qui souhaite être mieux soigné dans son système de santé et de services sociaux? Qu'est-ce que ça aura changé? Qu'est-ce que ça aura apporté de mieux, la création de cet institut, pour les gens qui nous écoutent puis qui se demandent, c'est quoi... ça sert à quoi de créer un institut d'excellence à ce stade-ci?

Mme Boucher (Denise): Bien, nous, on ne s'oppose pas à la création de l'institut...

M. Drainville: Non, c'est ça.

Mme Boucher (Denise): On pense qu'on est capables... S'il est reconnu, comme dans sa mission, qu'il a à travailler pour que ça demeure dans le public, et qu'on y travaille sur la question de l'excellence, et qu'on reconnaisse, à travers l'INESSS, tout le volet du social, des services sociaux, moi, je pense qu'on vient de gagner. Dans 10 ans, dans 20 ans, on fera... ou dans cinq ans... J'ai l'impression qu'il doit y avoir des dépôts probablement aux cinq ans, généralement c'est des dépôts quinquennaux. Alors, moi, je pense que c'est là qu'il faudra voir est-ce que ça a été efficient, est-ce que ça a été efficace, est-ce que ça nous a donné rien, est-ce qu'il y a des manques.

Moi, je pense qu'il y aura une responsabilité du gouvernement en place et de l'opposition d'avoir un regard, et qu'il soit critique s'il n'a pas atteint les objectifs qu'il doit atteindre. En même temps, on regroupe... Nous, on pense que ça peut être un plus, ça ne donne pas, comment je dirais... À ce moment-ci, ça ne règle pas le problème d'attente en urgence. Mais, si on cherche l'excellence, et qu'on cherche à vouloir optimaliser le plus possible et d'être le plus performant, et que ça travaille pour faire en sorte qu'on puisse gagner, bien, moi, je me dis... Et, si les partenaires sont associés, entre autres les organisations syndicales, dans l'organisation du travail, je pense que, dans quelques années, ça pourra apporter.

M. Drainville: Vous, vous pensez qu'il y en a... Pensez-vous qu'il y en a...

Mme Boucher (Denise): Mais ça, en même temps, en même temps, qu'est-ce que vous voulez, on verra dans cinq ans, quand le mémoire sera... quand ce sera déposé, puis on en jugera.

M. Drainville: Des gains d'efficacité, à votre avis, dans le système actuel, est-ce qu'il y en beaucoup à aller chercher?

Mme Boucher (Denise): Oui. Dans l'organisation du travail, oui, on est convaincus de ça.

M. Drainville: Avec les projets pilotes, notamment, là?

Mme Boucher (Denise): Oui.

M. Drainville: On espère que ça va nous aider.

Mme Boucher (Denise): On espère. Et c'est l'objectif dans lequel on s'est engagés par contrat.

M. Drainville: Oui, voilà.

Mme Boucher (Denise): Je vous indique: on s'est engagés par contrat. Les organisations, les syndicats se sont engagés à aller dans le processus et travailler. Il y a eu des difficultés, on ne se le cachera pas, des difficultés rattachées quelquefois à des administrations réticentes. On a réglé ça avec le ministre à la pièce, et je pense qu'on pourra aller de l'avant.

M. Drainville: Est-ce que la dépolitisation du processus de prise de décision en santé, auquel vous faites référence dans votre conclusion, est-ce qu'elle est souhaitable, cette dépolitisation? Parce que vous dites: Dépolitiser, ça ne doit pas égaler déresponsabiliser le ministre. Mais est-ce que dépolitiser la décision dans le domaine de la santé et des services sociaux, c'est souhaitable, d'après vous?

Mme Lapierre (Andrée): Oui. Il y a une dépolitisation qui est celle de la rationalisation, pas du rationnement, la rationalisation: comprendre les décisions pour lesquelles on le fait. Donc, tu sais, moi, je dis: L'INESSS, ça va prendre peut-être une génération avant qu'on voie des travaux significatifs. Mais les améliorations qu'on voit, c'est comment on pourrait faire des pas vers, par exemple, ce que recommande le Commissaire à la santé, hein? Il arrive à dire: Voici ce qu'on veut faire, voici ce qui est le requis pour la... enfin la consolider, la première ligne, par exemple. Les médecins pour le régime public, ils disent: Comment ça se fait qu'il y a encore des examens de radiologie qui ne sont pas couverts en clinique, alors qu'ils le sont à l'hôpital, hein? Ça, c'est une irrationalité dans la couverture. Moi, je pense que, si on est capables de documenter qu'il y a un avantage à ce que ce soit couvert, bien, moi, je pense que l'INESSS aura aidé à faire ça.

M. Drainville: Et qu'est-ce que vous répondez à ceux, notamment dans le mouvement syndical, qui disent ce que vous dites là? Parce que, nous, on est assez d'accord avec ce que vous évoquez là, cette idée qu'il faut qu'il y ait quelque part des gens qui puissent discuter rationnellement, sans trop de pression, puis qu'ils puissent arriver idéalement avec des décisions ou des recommandations qui vont dans le sens de l'intérêt public, pas de l'intérêt privé, de l'intérêt public, mais certaines personnes au sein du mouvement syndical vont dire: Oui, mais ce que vous voulez, c'est un institut universitaire, ce n'est pas l'INESSS tel que proposé; dans le fond, ce que vous souhaitez, quand vous voulez cet organisme indépendant, c'est un institut universitaire, ce n'est pas ce que l'INESSS va faire. Et là ils s'opposent, à ce moment-là, à la création de l'INESSS. Qu'est-ce que vous répondez à ça?

Mme Boucher (Denise): Bien, ça leur appartient.

Une voix: C'est ça.

Mme Boucher (Denise): On ne se concerte pas, les organisations, quand il y a un dépôt de loi, à se dire: Aïe! comment tu vas te prononcer? Il y a... Des fois, c'est unanime, parce qu'on sent que, là, ça n'a pas de bon sens. Mais, en même temps, le constat qu'on peut faire, c'est qu'autour de ce projet-là, c'est très inégal, les opinions autour du projet. On se le dit entre nous, il y a du monde... Et on a entendu, nous aussi, des affaires très variables d'une... Alors, à mon avis, c'est qu'il y a sans aucun doute du peaufinement à faire autour du projet, en espérant que la commission va servir à éclairer et à donner le bon rôle.

Et, en même temps, on est liés aussi avec une perception d'un groupe de travail qui, à l'époque, était composé -- pour En avoir pour son argent -- de Castonguay, qui, lui, avait une vision particulière de l'INESSS, qui était à l'effet d'introduction du privé, donc qu'on ait tout le contrôle, qu'on sache que ça, ce n'est pas bon, puis qu'on dise: Ce n'est tellement pas bon dans le public, là, ça va être meilleur dans le privé. C'était ça, l'affaire.

Alors, tout le monde travaille avec toutes sortes d'opinions, aussi avec le comité de l'INESSS puis... Alors, moi, avec les... C'est pour ça que vous vous retrouvez avec des organisations syndicales qui ne sont pas unanimes. Il y en a qui ont décidé de ne pas se présenter, ça leur appartient. Mais, nous, comme CSN, la ligne qu'on a décidé de soutenir, c'est celle que vous avez entendue ce matin. Et, pour nous, si le projet de loi devait être adopté, ça devait faire la création de l'INESSS, inquiétez-vous pas, on va suivre ce qui va se passer. Si c'est sur le site Web, on va suivre. Mais on va suivre ce qui va se passer là et, si, dans cinq ans, on se rend compte que ça n'a pas atteint les objectifs que nous nous attendions d'avoir, on répliquera.

M. Drainville: Une toute dernière question: Certains, également, ont exprimé l'inquiétude que la création de l'INESSS était une façon détournée de remettre en question le panier de services et donc d'en réduire l'étendue. Est-ce que c'est une inquiétude que vous partagez?

**(10 h 30)**

Mme Boucher (Denise): On l'a dit... Entre les lignes, on dit: Touchez pas à la question du panier de services. Cependant, on n'est pas fous non plus, s'il y a des affaires qui ne marchent plus dans le système puis qu'on se rend compte que, tu sais... Les ventouses, là, si on voulait en mettre, là, pour enlever la fièvre, là, ce n'est plus bien, bien... ce n'est plus... tu sais, ce n'est plus tellement du temps moderne, ça, là, là. S'il y a quelque chose de mieux puis qu'on se rend compte que ça, ça existe, bien on pourrait peut-être l'enlever. C'est dans ce sens-là que nous... Si c'est ça, il n'y a pas de trouble. Mais, en même temps, nous, on ne veut pas que le gouvernement se déresponsabilise et c'est pour ça qu'on rappelle que, dans la proposition 1, on demande de changer la mission de l'INESSS pour faire en sorte particulièrement qu'elle fasse la promotion d'un réseau public de santé tel que les Québécois se l'ont donné il y a déjà de cela quelques décennies.

M. Drainville: C'est terminé, M. le Président?

Le Président (M. Kelley): Oui.

Mme Lapierre (Andrée): Bien, juste...

Le Président (M. Kelley): Un dernier commentaire, Mme Lapierre.

Mme Lapierre (Andrée): Bien, l'idée, c'est ça, c'est qu'on croit, nous autres, à une valeur ajoutée de faire de la recherche et de savoir comment on développe la connaissance, qu'est-ce qui marche. Mais ça, on souhaite que ce soit participatif et que... c'est une chose, un organisme qui cumule des données puis qui est capable de les systématiser, mais, nous, ce qu'on veut, c'est de voir aussi... c'est l'irrigation de tout ça, comment, à partir des réseaux locaux, on participe d'une culture d'amélioration continue, puis que l'INESSS sert à organiser un certain nombre d'activités et de mise en commun, c'est à ça qu'on croit, et qu'on pense qu'il y a de la place pour ça dans le réseau.

Le Président (M. Kelley): Sur ça, merci beaucoup, Mme Boucher et Mme Lapierre, pour votre contribution à notre réflexion dans cette salle très intime. Sur ça, je vais suspendre quelques instants, et je vais demander aux représentants du Fonds de la recherche en santé du Québec de prendre place devant moi.

(Suspension de la séance à 10 h 32)

 

(Reprise à 10 h 38)

Le Président (M. Kelley): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission va reprendre ses travaux. Nos prochains témoins sont les représentants du Fonds de la recherche en santé du Québec, représenté par son président-directeur général, M. Yves Joanette, et le Dr Howard Bergman. Alors, sans plus tarder, M. Joanette, la parole est à vous.

Fonds de la recherche en
santé du Québec (FRSQ)

M. Joanette (Yves): Je vous remercie, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les députés et autres membres de la commission. Le Fonds de la recherche en santé du Québec, celui-là même qui, pour la population québécoise, structure, organise, soutient, planifie l'ensemble de la recherche en santé au Québec, est très heureux de constater cette intention de création de l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux, puisque c'est un peu la suite logique du travail que fait le Fonds de la recherche en santé du Québec à certaines occasions, puisque le FRSQ -- j'y référerai maintenant comme étant FRSQ pour des raisons de brièveté -- est là pour générer les connaissances et les faits probants, mais n'est pas là pour les disséminer, prendre des décisions relatives à l'efficience, aux coûts, identifier les meilleures pratiques, les diffuser au travers du réseau.

Et donc nous sommes très heureux de voir qu'il y a un exercice que j'appellerais presque de rationalisation du Conseil du médicament, de l'agence des technologies de santé, d'évaluation des technologies de santé, pour créer cet institut qui a encore un mandat plus important, pour bien sûr évaluer les avantages cliniques, les coûts, élaborer les recommandations, maintenir à jour les recommandations dans les guides, diffuser le tout auprès des praticiens, auprès des milieux de pratique, auprès de la population, et, dans ce sens-là, nous pensons que c'est un rôle absolument essentiel, puisque ce serait futile de générer des connaissances qui, par ailleurs, ne seraient pas diffusées dans le réseau et qui ne permettraient pas d'identifier les meilleures pratiques, les plus efficientes et les meilleures pour le public et la population.

**(10 h 40)**

Ceci étant dit, nous avons, dans les quelques notes déposées ici à la commission, simplement souligné comment nous pensons que, pour certains aspects du travail de l'institut, le FRSQ peut être un partenaire, établir des liens de collaboration. Et, évidemment, là où ces liens de collaboration pourront s'établir, c'est autour des questions de génération des connaissances, c'est-à-dire de l'évaluation même de la recherche évaluative. Et cette recherche évaluative est un peu un parent pauvre au Québec en ce moment, on en a besoin, et cette... À l'occasion de la création de l'INESSS, bien on va pouvoir consolider, donner un nouvel envol, un nouveau départ à la recherche évaluative.

Alors, nous, au FRSQ, on voit, par-delà tout le travail qui appartient au domaine qui est d'exclusivité du domaine d'action de l'INESSS, que certains éléments du mandat pourront bénéficier de la collaboration avec le FRSQ, puisque le FRSQ dispose déjà des infrastructures humaines, matérielles, du savoir-faire sur comment identifier les meilleurs projets de recherche sur la base de ce qu'on appelle un processus de comité de pairs. Donc, nous, au FRSQ, quand on prend des décisions sur le soutien de projets de recherche d'individus, qui sont des chercheurs ou autres, ce n'est pas des décisions administratives, c'est basé sur des comités de pairs, où des pairs procèdent de façon extensive à l'évaluation scientifique et à l'identification justement de l'excellence. Alors, ce savoir-faire sur le comment procéder à l'évaluation par comité de pairs et comment faciliter la réalisation de l'évaluation de la recherche évaluative ou de la recherche par ce qu'on appelle «revue systématique», bien, pour ces aspects-là, nous serons très heureux d'offrir notre collaboration.

Mais je dirais que je souhaiterais conclure ce très bref commentaire en disant que, pour le FRSQ, la place de l'INESSS est absolument importante, elle vient occuper un terrain qui lui est propre et qui est absolument important pour, encore une fois, transformer la génération de connaissances en identification des meilleures pratiques et en diffusion des meilleures pratiques, que ce soit pour le médicament, pour les autres interventions en santé.

Alors, nous sommes prêts à répondre à d'éventuelles questions, s'il y en a.

Le Président (M. Kelley): Parfait. Merci beaucoup. Je vais maintenant passer la parole au ministre de la Santé et des Services sociaux pour débuter une période d'échange avec les membres de la commission. M. le ministre.

M. Bolduc: Merci, M. le Président. Lors des auditions précédentes, on a donné la qualité, la crédibilité de l'AETMIS et du Conseil du médicament, puis je veux reconnaître aujourd'hui que le FRSQ est au même niveau, le Fonds de recherche en santé du Québec, un organisme crédible auquel tous les chercheurs font référence. Et je pense qu'on est reconnus, encore là, mondialement. C'est vraiment nos trois organismes au niveau de l'évaluation où est-ce qu'on est reconnus mondialement. Et je tiens à vous féliciter. Je sais que vous avez commencé récemment. Vous êtes, je pense, des personnes très connues dans le milieu de la recherche, très respectées, et je pense que ça va avec la crédibilité du FRSQ. Dr Bergman, je pense, au niveau de la recherche, maladie d'Alzheimer, et Yves, toi, avec l'institut de gériatrie de Montréal, je pense que vous êtes des gens extrêmement reconnus. Je tiens à vous féliciter.

Je trouve ça intéressant que vous positionniez très, très bien... Parce qu'il en a été question tantôt, c'est que c'est comme s'il y avait un flou entre les différentes organisations et différents organismes d'évaluation. Puis je pense que vous avez bien positionné que l'INESSS, ils ne viennent pas jouer dans vos platebandes, mais ils sont complémentaires, O.K., complémentaires. Puis je pense que vous avez bien positionné également qu'il y en a qui font de la recherche d'évaluation fondamentale, qui vont dire: Ça, c'est la meilleure pratique selon les données probantes, et, par contre, ça prend des gens qui en fassent le consensus et puis qui également en fassent la diffusion, et puis ça, je le vois bien.

Je trouvais ça intéressant quand vous parliez également de la question du... le centre canadien Cochrane puis le Réseau francophone Cochrane. Puis ça, j'aimerais ça peut-être que vous preniez quelques minutes pour nous expliquer le fonctionnement avec ce centre-là parce que je pense, quand on fait... quand on parle d'une révision de la littérature avec l'institut Cochrane, c'est reconnu. Je veux dire, quand les gens prennent... font des méta-analyses, c'est vraiment... Cochrane est souvent... est le plus cité, quant à moi. Pouvez-vous nous expliquer un petit peu pour le bénéfice des auditeurs et de l'audience ici?

M. Joanette (Yves): Alors, le centre Cochrane canadien, qui est un peu la copie du centre Cochrane américain, est une organisation qui fait la promotion de ce qu'on appelle les méta-analyses. Alors, je m'explique. Quand on fait de la recherche, on peut y aller en subventionnant un groupe de chercheurs, une équipe, un réseau qui va s'attaquer à une question bien précise, qui va faire une étude bien précise et qui va avoir des résultats bien précis par rapport à la question et à la manière dont la question a été posée auprès de la population qui a été éventuellement invitée à participer. Mais, on le sait, en recherche, il est rare qu'une seule recherche donne la vérité -- d'ailleurs, c'est peut-être un peu comme ça dans la vie, mais c'est autre chose -- ça prend une convergence entre des résultats. Donc, l'idéal, c'est de s'assurer, s'il y a eu trois ou quatre recherches qui ont été effectuées, l'une au Québec, l'autre en Californie, l'autre en France, l'autre en Alberta, etc., qu'il y a une convergence.

Et, à partir du moment où il y a une convergence, bien, là, on se dit: Bien, s'il y a eu un petit biais dans une étude qui a été réalisée à cet endroit-là, bien, ou alors il y a le biais partout sur la planète ou il n'y a pas de biais parce que, dans le fond, voici la convergence. C'est ce qu'on appelle faire des méta-analyses, c'est-à-dire de regarder quelle est la convergence qui existe entre les résultats de plusieurs travaux de recherche. C'est une forme de recherche finalement, mais qui est... qui était peu pratiquée, et pourtant qui est essentielle pour les décideurs publics, pour une organisation comme l'INESSS, pour pouvoir prendre les meilleures décisions sur l'identification des meilleures pratiques et après ça diffuser ces meilleures pratiques là. C'est la raison pour laquelle cette association Cochrane s'est donné comme objectif de promouvoir les méta-analyses, et il y a un volet canadien, qui est associé d'ailleurs aux instituts de recherche en santé du Canada, donc il y a toute la crédibilité de cette organisation fédérale aussi, qui fait la promotion.

Maintenant, au Québec, on a dit: Mais il serait peut-être utile d'avoir un Cochrane québécois, et entre autres qui fait référence à la science en français, et donc il y a un volet francophone du Cochrane canadien. Il y a quelques collègues ici même à Québec, au CHUQ, qui jouent un rôle majeur dans ce dossier. Et nous souhaiterions peut-être amplifier ce volet francophone du Cochrane, en lien avec l'INESSS, pour pouvoir offrir à l'INESSS l'occasion d'avoir encore plus, non seulement de résultats uniques, mais de convergence de résultats. Quand on faisait référence au Cochrane ici, dans nos notes, on faisait référence à cette façon d'identifier des orientations qui dépassent même une seule étude, mais qui sont des convergences d'études.

M. Bolduc: Je trouve ça très intéressant parce qu'il y a une valeur quand même ajoutée à cette collaboration.

M. Joanette (Yves): Oui.

M. Bolduc: Puis une des questions qui est posée ici... Nous autres, dans un premier temps, on dit: On va mettre ensemble l'AETMIS et le Conseil du médicament, on garde les mêmes budgets, mais, si on a une potentialisation, possiblement qu'ils vont faire une meilleure collaboration avec vous.

M. Joanette (Yves): Oui.

M. Bolduc: D'où on en arrive, c'est que... Ce qu'on veut, c'est de la synergie. Et puis, souvent, les gens ont toujours tendance à dire, puis on l'a entendu souvent autour de la table: Il faudrait toujours remettre plus d'argent. Mais ce que je comprends dans... l'évaluation dans laquelle l'INESSS va avoir des collaborations, il s'en fait déjà beaucoup au Québec, il s'en fait dans différents secteurs, mais notre problème, c'est que, même si la pratique est reconnue, elle n'est pas appliquée sur le terrain.

M. Joanette (Yves): Complètement.

M. Bolduc: Et c'est là que l'INESSS vient voir. Comment vous verriez ça? Parce que, moi, c'est là-dessus, puis ça, je veux peut-être défaire ça... On me dit toujours: Il faut toujours que tu mettes plus d'argent dans le réseau. Mais, moi, je me dis: Est-ce qu'on peut d'abord avoir une meilleure cohérence et une meilleure coordination des acteurs dans le réseau? Puis, juste pour avoir une idée, votre budget au FRSQ, il est de combien?

M. Joanette (Yves): Le budget du FRSQ, le budget de base est d'environ 70 millions par année, mais, avec l'ensemble des partenariats qu'on a, c'est environ 100 millions de dollars par année qu'on injecte en recherche au Québec.

M. Bolduc: Le 30 millions, probablement qu'il vient de fonds de recherche de différentes organisations, qui sont différents?

M. Joanette (Yves): Non, il vient, entre autres, de votre ministère, puisque le Fonds de la recherche en santé du Québec...

M. Bolduc: Oui, il y a une partie...

M. Joanette (Yves): ...dépend du ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, mais il vient aussi de partenariats avec des associations, comme par exemple l'association de la maladie de Crohn qui met des... qui consent des sommes pour stimuler la recherche.

M. Bolduc: Puis, si cette recherche-là qui se fait, vous êtes d'accord, ça nous prend un organisme pour coordonner.

M. Joanette (Yves): Complètement.

M. Bolduc: Et la problématique qu'on a eue, c'est que les gens, ils disaient: Ça nous prend plus de recherche, ça fait que je vais remettre des millions dans l'INESSS. Moi, ce que je dis: J'ai déjà des millions qui se fait à d'autres endroits, et de la recherche évaluative en services sociaux, ça se fait également, à ce moment-là, l'INESSS va devenir plus un catalyseur de ce qui se fait ailleurs. C'est comme ça que j'explique aussi: Pourquoi mettre plus d'argent quand on a déjà plein de ressources qui me demandent à être coordonnées au Québec? On ne dit pas qu'il n'y en aura pas plus à un moment donné, mais, pour partir, on n'en a pas besoin. Vous vouliez dire quelque chose.

M. Joanette (Yves): Bien, écoutez, d'abord, ce n'est pas le FRSQ qui va vous dire qu'il y a assez d'argent en recherche en ce moment.

**(10 h 50)**

M. Bolduc: Non, certainement pas, mais...

M. Joanette (Yves): Mais ça, c'est une autre question, j'imagine, qui relève d'une autre commission parlementaire, parce qu'il faut, comme M. Obama l'a fait aux États-Unis, comme l'Union européenne le fait, réinvestir en recherche si on veut qu'on ait... non seulement contribuer à la qualité et le bien-être de la population, mais aussi soutenir notre économie du savoir. Mais ça, c'est un autre discours.

Ceci dit, vous avez tout à fait raison, il y a déjà quantité importante de résultats de travaux de recherche qui sont là mais qui n'ont pas eu l'occasion d'être transférés aux praticiens, au système de santé, pour pouvoir permettre soit, à coût égal, de meilleurs résultats parce que les interventions, les soins proposés sont meilleurs, les approches sont meilleures, soit même avec des potentiels d'économie éventuellement de coûts pour des résultats équivalents.

Donc, vous avez raison, il y a... même, je dirais, à ressources investies relativement similaires, le fait que l'INESSS soit créé, ça va nous permettre d'avoir un partenaire bien identifié, qui, avant, était séparé entre le Conseil du médicament, l'Agence d'évaluation des technologies de santé et d'autres aspects qui étaient peut-être mal couverts. Mais le FRSQ va pouvoir mieux planifier le transfert des connaissances, l'identification des meilleures pratiques par l'INESSS, à partir de la richesse des résultats qui existent déjà et qui se font déjà.

Et, vous avez raison, la recherche en santé au Québec, c'est un de nos fleurons. Je rappelle que le Québec est un des leaders au Canada en termes de recherche en santé, et, à preuve, au niveau des subventions venant du fédéral, le Québec est l'une des rares provinces à avoir plus que sa part démographique en quantité de subventions reçues. On est à peu près à 1,25, même si on était un petit peu plus il y a quelques années puis qu'il y a une tendance dont il faut s'occuper. Mais on a un leadership reconnu dans plusieurs domaines, avec, en plus, la possibilité de travail en réseau grâce aux réseaux de recherches thématiques du FRSQ, qui fait que l'ensemble du Québec est mis à profit, que ce soient les villes, chaque ville, les régions, etc.

M. Bolduc: Et puis, ça, je peux vous assurer que notre gouvernement, en tout cas avec Clément Gignac, qui est le ministre responsable, on travaille en étroite collaboration. Puis, au niveau de la Santé et des Services sociaux, on veut faire du développement à ce niveau-là. Et d'ailleurs, si on est pour faire du développement, on peut décider de dire: On met tout dans l'INESSS puis on leur demande de tout faire leur affaire, ou on voit plus l'INESSS comme étant, à ce niveau-là, un organisme coordonnateur qui est reconnu, puis également on peut peut-être mettre l'argent ou la recherche évaluative à l'endroit où est-ce que les gens en feront le plus. Mais ça, c'est des stratégies qu'on doit s'entendre entre nous autres. Mais, moi, ce que je dis, puis je suis d'accord, je reconnais, il faudrait en mettre plus. À un moment donné, il y a comme une capacité, mais il faut en remettre plus. On peut aussi aller en chercher plus ailleurs, hein, dans les organisations internationales.

M. Joanette (Yves): Bien sûr.

M. Bolduc: Moi, je prône beaucoup ça aussi. Vous savez, quand le NIH décide de mettre de l'argent, qu'on peut participer à des projets puis qu'on va chercher des millions aux États-Unis, on est très, très favorables à ça. Mais, avec le même argent, je pense qu'il y a moyen de faire mieux, et l'INESSS va nous aider. Et, vous avez ouvert la porte, la collaboration, le fait de réunir ces deux conseils ensemble, l'AETMIS et le Conseil du médicament, y voyez-vous des avantages?

M. Joanette (Yves): Comme je l'ai évoqué, je pense qu'il y a un avantage évident à réunir ces deux rôles, parce que je pense que c'est plus que l'addition simple de ces deux rôles qui en résulte, et, pour une organisation comme la nôtre, le Fonds de la recherche en santé du Québec, ça va permettre d'établir une meilleure cohésion, une meilleure synergie, puis une meilleure valeur ajoutée au rôle de chacun. On aurait été inquiets si l'objectif avait été de créer à l'intérieur de l'INESSS toute une mécanique de recherche nouvelle. On est heureux de voir qu'il s'agit d'une institution qui sera coordonnatrice, qui va se concentrer sur son rôle premier qui est l'identification en fonction des coûts des meilleures pratiques, la diffusion, la mise à jour de ses diffusions, etc., et on est heureux de voir qu'il y a cette possibilité de collaboration avec une organisation déjà reconnue qui a comme rôle de générer les nouvelles connaissances, les faits probants sur lesquels se basera l'INESSS.

M. Bolduc: Puis, je veux juste compléter, un organisme comme le vôtre voit très bien la coordination qui va se faire à ce niveau-là, mais, dans le réseau de la santé... Tantôt, on avait les syndicats. Eux autres aussi veulent faire, à un moment, du travail d'évaluation peut-être au niveau de l'organisation du travail... les projets.

M. Joanette (Yves): Oui.

M. Bolduc: Je ne pense pas qu'ils veulent que l'INESSS fasse des projets. Ils veulent par contre que, s'ils ont trouvé des bonnes pratiques, les... le dire à l'INESSS, et l'INESSS, à ce moment-là, va faire en sorte d'être capable de mieux les diffuser. Ça, c'est important parce que... Quand on me parlait tantôt: Vous devriez mettre encore plus d'argent, encore plus d'argent, bien, moi, je pense qu'il faut faire attention. Je dis: Il faut savoir où on va mettre le dollar pour qu'il soit le mieux investi. Mais, en plus de ça, déjà avec les ressources que j'ai par optimisation, je suis capable de faire un niveau de plus, je vais aller chercher beaucoup plus de résultats avec le même argent. Puis, en passant, il y a la définition de la performance, hein? En faire plus avec les mêmes montants.

J'ouvre la porte. Je dis: Peut-être que, dans un an, deux ans, trois ans, sur quelque chose de très particulier, on va dire: On va accorder un budget particulier pour faire une évaluation particulière qu'on pense que ça va apporter plus à la société. Ce sera un choix. Mais je ne vois pas pourquoi on mettrait d'emblée plus d'argent. Ça, on verra ça dans le temps. Ça fait que c'est...

Autrement dit, je pense que... le député de Marie-Victorin l'a reconnu, que j'ai une grande ouverture d'esprit. J'ai également une grande ouverture d'esprit non seulement à améliorer et à bonifier ce qu'il va nous recommander -- puis ça, je pense qu'on est habitués de le faire ensemble -- mais également à ne pas être statique puis à ne pas dire aujourd'hui: Non, non, c'est fini. On jugera au moment voulu c'est quoi, la meilleure structure et également les budgets qui vont être alloués en fonction de l'utilité. Chose qui est certaine, puis je pense que vous le reconnaissez, puis, comme tous nos intervenants, vous êtes très crédibles, mais le FRSQ, au niveau évaluation, est reconnu, je pense qu'il y a un effet positif pour le Québec d'avoir la création de l'INESSS.

Je continue à vous féliciter pour votre très beau travail. On va continuer à collaborer ensemble, et vous pouvez être assurés que notre gouvernement, dans l'économie du savoir, est en arrière. Et je sais que le FRSQ est très bien positionné au niveau canadien puis au niveau international. Merci beaucoup.

M. Joanette (Yves): Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville: Merci, M. le Président. Alors, j'inviterais les gens qui assistent à ces délibérations et à tous ceux et celles qui nous écoutent de ne pas croire nécessairement tout ce qu'a dit le ministre à mon sujet. Je vous demande de demander mon avis, s'il vous plaît, avant de vous faire une tête là-dessus.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: ...

M. Drainville: Oui. Bien, j'ai quelques questions au sujet de votre présentation. D'abord, vous dites... Dans la mission du fonds de l'institut qui est créé par 67, vous parlez donc... Dans votre présentation, vous dites: L'évaluation des avantages cliniques, ça fait partie de la mission du Fonds de recherche, dont vous êtes. Donc, l'évaluation des avantages cliniques que l'INESSS se voit attribuer par le projet de loi, vous dites: Attention! ça fait également partie de notre mandat au Fonds de recherche.

Vous dites également, dans la mission qui est confiée à l'INESSS, il est question de la promotion et du soutien au développement de l'évaluation scientifique. Vous dites, et je vous cite, là: «...cette autre dimension de la mission [de] l'INESSS est au coeur de la mission du Fonds de recherche», donc au coeur de la mission de votre organisme.

Vous dites par la suite: Le FRSQ aimerait ça être partenaire avec l'INESSS dans ses liens avec le centre canadien Cochrane. Vous dites: Le FRSQ souhaiterait établir des liens avec l'INESSS eut égard... eu égard, dis-je, au cadre éthique.

Vous dites: Le FRSQ souhaiterait être l'un des organismes avec lesquels l'INESSS conclura des ententes d'évaluation scientifique.

Vous dites également: L'INESSS devrait faire partie des comités permanents et devrait être invité d'office à siéger sur le comité permanent.

Puis vous demandez également d'occuper un siège au conseil d'administration.

Tellement qu'en vous écoutant je me suis demandé: Est-ce que vous auriez aimé ça être inclus dans l'INESSS?

Des voix: Ha, ha, ha!

**(11 heures)**

M. Joanette (Yves): Alors, la réponse, c'est non, puisque les notes... Bon, vous avez vu, c'est des notes, ce n'était pas un commentaire sur l'ensemble du projet de loi.

Mais essentiellement l'ensemble de ces commentaires traitent du premier rôle, de la première mission de l'INESSS et qui apparaît à l'article 5 du projet de loi, sur 11 points. Donc, essentiellement, tout se rapporte à la dimension évaluation, c'est-à-dire qu'on n'est pas là pour faire... Le Fonds de la recherche en santé du Québec, encore une fois, est là pour générer les connaissances, les faits probants, donc on est les gardiens des bonnes pratiques en recherche, et la recherche évaluative fait partie de la recherche, puis la recherche par méta-analyses fait partie de la recherche en santé. Pour ça, on dit qu'on aimerait... on propose notre collaboration pour que les meilleures approches de recherche puissent être appliquées, pour que les faits probants des meilleures et la meilleure manière d'y arriver puissent être introduites dans la réflexion de l'INESSS qui, après ça, devra faire ses choix.

Et là l'article 2, 3, 4, 5, 6 jusqu'à 11 sur l'identification, les recommandations des meilleures pratiques, la diffusion de ces meilleures pratiques... Alors, nos notes ne traitent essentiellement que de la première mission qui, à ce que je sache ou de ce que je sais... il n'y a pas la prétention que l'INESSS développe une organisation de recherche parallèle, justement, à ce qui existe déjà au Québec, mais qu'on puisse se servir de ce qui existe déjà et qui est justement sous le giron du Fonds de la recherche en santé du Québec. Alors, c'est plutôt une offre de collaboration pour l'ensemble des aspects recherche, mais l'INESSS n'est pas, à ce que je sache, une organisation de recherche. Elle a comme... Elle ne peut pas diffuser les meilleures pratiques si elle ne se repose pas sur les faits probants, et les faits probants, ce n'est pas quelqu'un qui au détour va dire: Voici un fait probant. Il faut qu'il y ait une approche de recherche scientifique valable qui repose sur les meilleures pratiques en recherche, y compris les processus d'évaluation par comité de pairs, de qui fait la recherche par rapport à quelqu'un d'autre et si cette question est raisonnable ou pas en termes de recherche. Et c'est pour cet aspect-là que nous souhaitons offrir notre collaboration.

Alors, non, nous ne souhaitons pas être... ni être englobés ni avoir le mandat de l'INESSS, nous souhaitons plutôt offrir notre collaboration pour le premier article.

M. Drainville: Non, je comprends, mais, quand vous nous dites -- et c'est très explicite: L'INESSS se propose de faire un certain nombre de choses que nous faisons déjà ou qui relèvent déjà de notre mission, bien, moi, je pose à ce moment-là... La question d'englober se pose. À ce moment-là, vous me dites: Non, non, non, attention! bon, on veut garder ce mandat-là.

Alors, je vous pose une question qui est un peu le corollaire de la première: Est-ce qu'il n'y aura pas à ce moment-là des chevauchements entre ce que vous faites et ce que l'INESSS va faire?

M. Joanette (Yves): Écoutez...

M. Drainville: Parce que vous nous dites très clairement: Il y a des choses que l'INESSS se propose de faire qu'on fait déjà. Alors, il y a des risques... Parce que le ministre dit: Moi, je ne vais pas augmenter les budgets de l'INESSS parce que, comme on va... Là, c'est des nouveaux mots, j'attire votre attention là-dessus, là. Il n'avait pas parlé d'organisme coordonnateur jusqu'à maintenant; là, ce matin il nous arrive avec ça. Alors, on sent qu'il précise, au fur et à mesure où on discute de ce projet de loi, son idée, sa pensée sur ce projet de loi, et je l'invite à continuer à clarifier ses idées là-dessus pour qu'on arrive effectivement, à un moment donné, à bien comprendre le mandat de cet institut qui sera créé par 67, si le projet de loi est adopté.

Mais je vous pose la question... Bon, vous ne voulez pas être englobés, très bien, mais à ce moment-là il y a un risque de chevauchement, puisque l'INESSS va faire certaines des choses que vous faites déjà. Alors, où est-ce qu'elles sont, les économies d'échelle? Où est-ce qu'ils sont, les gains d'efficacité, si on se retrouve avec un organisme qui vient créer non pas une clarification des rôles, mais un chevauchement?

M. Joanette (Yves): Écoutez, je pense qu'il y a une nécessité de chevauchement partiel pour toute organisation qui vise à identifier les meilleures pratiques, comme... Encore une fois, je me réfère au premier point de l'article 5, «évaluer les avantages cliniques et les coûts des technologies», ça, ce n'est pas nous, mais «les avantages cliniques des médicaments et des interventions en santé et en services sociaux». Alors, cette évaluation des avantages cliniques des médicaments, des interventions en santé et en services sociaux, bien, ça s'appelle de la recherche en santé. C'est le Fonds de la recherche en santé qui est le mieux placé pour la favoriser. Elle n'est pas nécessairement favorisée dans les directions qui sont nécessaires pour les besoins de la santé publique, et c'est la raison pour laquelle la coordination avec l'INESSS, pour cette dimension-là, permettra d'orienter certains travaux de recherche qui seront faits par les chercheurs du Québec -- et les chercheurs du Québec, ils sont dans la famille du Fonds de la recherche en santé du Québec, dans les centres de recherche, dans les réseaux, dans les groupes, dans les universités -- et les résultats. Parce que, nous, on s'arrête là, on s'arrête à identifier les faits probants. Les résultats de ces recherches seront par la suite utilisés par l'INESSS pour prendre les meilleures décisions sur les meilleures pratiques.

Je vous donne un exemple. On a tous vécu le défi de santé de la grippe H1N1. Le Fonds de la recherche en santé du Québec s'est offert pour offrir un certain nombre de faits probants qui ont été utilisés par les décideurs publics de la Santé publique pour prendre les meilleures décisions relativement à la santé de la population. Dès le mois de juin, mon collègue, Dr Bergman, vice-président aux affaires scientifiques au FRSQ, a mis sur pied -- et c'est une des grandes qualités qu'on a au Québec -- un réseau de chercheurs qui étaient issus de toutes les universités, sous la direction du Dr Guy Boivin que vous avez sûrement entendu plusieurs fois dans les médias, qui a réalisé une recherche rapidement, mais pour laquelle on n'a fait aucun compromis sur l'évaluation par comité de pairs, l'identification des meilleures pratiques, etc., et cette recherche a rapidement, grâce aux ressources qui ont été consenties à la fois par le MDEIE et le ministère de la Santé, donné des résultats, par exemple, sur le taux de... le temps de contagiosité du virus, etc. Ça... Nous, on a joué un rôle pour identifier c'était quoi, les faits, et ces faits ont par la suite été transmis, ont été pris par la Santé publique pour pouvoir prendre les meilleures décisions. Bien, je pense que c'est un exemple de nécessaire, entre guillemets, chevauchement, parce que la Santé publique, elle devait prendre ses décisions à partir de faits probants, mais elle n'était pas là pour faire la recherche. Vous voyez?

Donc, cette coordination va pouvoir se faire pour l'identification des meilleures pratiques, pour le médicament, les interventions en santé, etc., ce qui est... Et c'est à propos de cette évaluation, encore une fois, des avantages des cliniques, des médicaments et des interventions qu'on offre notre collaboration. C'est un point parmi tous les points de l'INESSS, et je pense que l'idée, c'est de faire en sorte que ce soient les chercheurs du Québec qui offrent justement ces faits probants qui par la suite feront l'objet de l'identification des meilleures pratiques.

M. Drainville: Oui. J'admets volontiers que ce n'est pas une question facile que je m'apprête à vous poser, mais, quand on dit qu'on a besoin d'un organisme coordonnateur, là, pour... donc pour s'assurer que le Conseil du médicament et l'AETMIS, bien, travaillent mieux ensemble, je pense que c'est un objectif d'amélioration. Si on veut créer un organisme qui les fusionne, on doit présumer que c'est pour améliorer la situation présente. Et puis le ministre espère qu'il dégagera des sommes d'argent à même les gains de productivité puis d'efficacité qu'il va générer avec cette fusion-là.

Mais, nous de l'extérieur, M. Joanette, on se dit: L'organisme coordonnateur, là, est-ce que ça ne devrait pas être... est-ce qu'il n'existe pas déjà? Puis est-ce qu'il ne s'appelle pas le ministère de la Santé et des Services sociaux? Vous savez, dans une période difficile sur le plan budgétaire comme celle que nous vivons présentement, dans une période où on s'apprête à demander aux Québécois des sacrifices financiers -- encore ce matin, on parle d'une hausse d'un deuxième point de TVQ, et tout ça -- je pense que ce n'est pas déraisonnable, pour bon nombre de nos concitoyens, de se poser la question: Est-ce qu'on a besoin d'un nouvel organisme, d'une nouvelle structure qui sera la fusion de deux structures? Existantes, je veux bien, là, mais tout le monde sait que, quand tu fusionnes deux organismes, tu vas avoir un processus de changement, un processus de transition,. Il va y avoir pendant un certain temps des ambiguïtés, il va y avoir des doutes, il va y avoir une perte d'efficacité. C'est dans la nature du processus que de créer des doutes puis d'amener parfois des hésitations. Donc, les gains d'efficacité, on ne les obtiendra pas nécessairement tout de suite; si jamais on les obtient, ça va être au terme d'un certain processus d'intégration.

Alors, moi, je me pose la question: La création de cet INESSS, est-ce que c'est vraiment prioritaire à ce stade-ci, là, de l'histoire du Québec, là? Est-ce que c'est vraiment quelque chose dont on a besoin prioritairement ou est-ce qu'on ne devrait pas dire au ministère de la Santé: Vous allez vous organiser pour que les organismes existants, l'AETMIS puis le Conseil du médicament, travaillent mieux ensemble, puis on va prendre les équipes existantes au sein du ministère, puis quitte à créer un... je ne sais pas, moi, un bureau coordonnateur? Il y a toutes sortes de façons de créer la coordination au sein d'une institution, au sein d'un ministère et des organismes qui en dépendent, quitte à ce que cette équipe-là se charge également de faire les liens avec votre fonds de recherche, puis avec l'Institut national de santé publique, puis avec le Commissaire à la santé. Qu'est-ce que vous en pensez, vous?

M. Joanette (Yves): Bien, écoutez, on ne va pas commenter sur les priorités ministérielles ou parlementaires, là...

M. Drainville: Là, c'est sur l'idée... Oui.

M. Joanette (Yves): ...mais sur le bien-fondé de cet institut à cet endroit-là dans la chaîne de décision, je suis personnellement... et mes collègues aussi, on est très convaincus que ce n'est pas uniquement que, disons, un institut de coordination, même s'il a ce rôle de coordination, qu'il y a une valeur ajoutée à voir se fondre à la fois le Conseil du médicament puis l'agence d'évaluation des technologies de santé, et de voir une organisation qui a réellement comme rôle d'identifier, en termes non seulement des faits probants pour lesquels, nous, on a un rôle à jouer, mais aussi des coûts de santé, puis etc., les meilleures pratiques, et surtout les disséminer, les diffuser et s'assurer qu'elles sont appliquées partout au Québec pour pouvoir offrir des meilleurs soins puis pour pouvoir offrir des soins probablement plus efficients.

M. Drainville: Mais, M. Joanette, je m'excuse de vous interrompre, mais l'AETMIS vient de se voir confier ce mandat-là par décret. On vient de leur donner par décret, en 2009, le mandat des guides de pratiques et le mandat par ailleurs, également, d'évaluer les pratiques dans le domaine des services sociaux.

**(11 h 10)**

M. Joanette (Yves): Mais je pense qu'il y a un avantage ici, il y a...

M. Drainville: Voyez-vous, tout le monde semble déjà faire... pour l'essentiel, semble déjà faire ce que l'INESSS va faire en vertu de 67. Alors, pourquoi créer quelque chose de nouveau si les organismes existants font déjà le travail?

M. Joanette (Yves): Bien, moi, je salue la création d'un organisme nouveau qui vient fusionner et mettre en synergie des organisations qui étaient déjà présentes, qui avaient peut-être des mandats, mais... Par exemple, l'évaluation des technologies de santé, c'est une chose; le médicament, c'est autre chose. Des fois, il y a des liens entre le médicament puis la technologie de santé. Bravo si on peut mettre ça au sein d'une même institution.

M. Drainville: Bien oui, mais...

M. Joanette (Yves): Et je... mon expérience à moi...

M. Drainville: Qu'ils s'assoient ensemble puis qu'ils la mettent en... qu'ils mettent les connaissances en partage.

M. Joanette (Yves): Moi, je pense qu'il y a quand même un avantage majeur à voir se mettre en synergie à l'intérieur d'une même institution... Et peut-être que mon collègue a un mot à dire.

M. Drainville: Qu'on les fusionne au sein du ministère, à ce moment-là. Si c'est la fusion qui doit nous apporter ces gains-là, qu'on les fusionne au sein du ministère. Pourquoi les fusionner en dehors et les...

M. Bergman (Howard): Avec tous mes respects pour le ministère, je pense que ce serait une erreur de créer un organisme au sein même du ministère. D'ailleurs, cette proposition, je suis fier de le dire, c'est une des recommandations de la commission Clair. J'ai eu l'honneur d'être membre de la commission Clair. Donc...

M. Drainville: Quelle proposition?

M. Bergman (Howard): La proposition de créer ce genre d'institut. On ne l'a pas appelé l'institut national d'excellence, mais... Et en fait c'est la...

M. Drainville: Mais ils proposaient d'être indépendants, dans Clair, hein? Non?

M. Bergman (Howard): En fait, ce genre d'organisme est la tendance qu'on voit dans les grands systèmes de santé, le NICE en Angleterre. Je pense qu'on est rendus, à l'heure actuelle, dans notre système de santé -- et j'ai l'expérience comme médecin clinicien, aussi bien que chercheur dans le système de santé, mais comme clinicien -- d'une grande, grande complexité de notre système de santé, des liens très complexes justement entre des développements de technologie, l'utilisation des médicaments, et comment ensuite le rendre à la population, donc toute la question des meilleures pratiques, et, deuxièmement, avec cette complexité-là, du point de vue de clinicien, comment assurer qu'on a les bons guides et les bons outils de pratique qui sont transférés, qui sont expliqués aux cliniciens, que ce soient des médecins, infirmières, etc. À l'heure actuelle, on n'a pas d'organisme qui réunit l'ensemble de ce mandat-là.

Vous dites: Laissez deux organismes en place, ils vont se parler, etc. Je pense qu'on n'est plus rendus là. Je pense que c'était approprié quand ces organismes étaient créés. Je pense qu'on n'est plus rendus là, de deux aspects qui vont se parler, technologie et médicament. Alors, moi, je pense que c'est tout à fait...

M. Drainville: Pourquoi on n'est plus rendus là? Pourquoi?

M. Bergman (Howard): Parce que... À cause de, un, comme j'ai dit, la complexité de la technologie, la complexité des médicaments, et la complexité de notre système de santé, et le lien entre ces trois aspects-là, et en lien aussi avec les coûts très importants que génèrent ces technologies et ces médicaments.

M. Drainville: Vous pensez que les travaux de l'INESSS vont nous permettre de mieux contrôler les coûts du système de santé et des services sociaux?

M. Bergman (Howard): Moi, je pense que ça va nous permettre de mieux comprendre qu'est-ce qu'il faut faire, basés sur les données probantes, et ultimement de mieux... avoir des meilleures pratiques de santé, des meilleures interventions. Au bout du compte, je pense que, oui, il va y avoir un impact sur notre capacité de contrôler et au moins de mieux comprendre les coûts dans le système de santé et où il faut agir.

M. Drainville: Et, Dr Bergman, vous dites que vous êtes fier de ça, de cette proposition de créer l'INESSS, parce que c'était une recommandation de la commission Clair, sur laquelle vous avez siégé. Vous dites également: C'est dans la tendance mondiale. Vous donnez pour exemple le NICE en Grande-Bretagne. Mais ce que je comprends du NICE en Grande-Bretagne, c'est que c'est un organisme beaucoup plus indépendant de l'autorité politique que celui qui est créé par le projet de loi n° 67. On est d'accord?

M. Bergman (Howard): C'est-à-dire, on est d'accord... On peut être d'accord sur les faits, mais la question...

M. Drainville: On est d'accord, donc? Le NICE est beaucoup plus indépendant de l'autorité politique que l'INESSS qui est créé par 67.

M. Bergman (Howard): C'est-à-dire, la question... Et j'ai regardé des questions de système de santé, d'organisation de services partout... un peu partout dans le monde. Il y a une chose que j'ai apprise, c'est qu'on ne peut pas importer des structures et des modèles d'un système à l'autre. Si NICE est plus indépendant, peut-être que ça pose une... peut-être que ça répond à un besoin dans le système de santé en Angleterre, qui est différent de notre système de santé ici. Qu'on ait choisi ce modèle-là ici... de l'INESSS ici, son lien avec le ministère, bien, ça, c'est une autre chose. Je ne suis pas prêt à me prononcer là-dessus, sur le niveau d'indépendance.

M. Drainville: Dr Bergman, vous êtes un scientifique sans doute de grande valeur, mais vous avez des aptitudes pour la politique également, là. Vous êtes en train de me donner une réponse politique.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bergman (Howard): Est-ce que c'est un compliment que vous me faites?

M. Drainville: Absolument. C'est un compliment.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bergman (Howard): Merci. Et je l'ai pris comme ça.

M. Drainville: Je souhaite que vous le preniez comme ça. Mais, quand vous l'avez recommandé dans Clair puis quand le groupe de travail présidé par Castonguay l'ont recommandé également... Et on le sait parce que Castonguay et Venne sont venus nous le dire, ils nous ont dit, quand on a proposé la création d'un institut d'excellence sur le modèle de NICE -- je crois que c'est Venne qui nous a dit ça: Il devait être véritablement indépendant du ministre. Actuellement, le ministre se propose dans le projet de loi de nommer tout le monde. Il n'y en a pas, d'indépendance.

Et là où je vous dis que vous rentrez un peu dans la politique, c'est que vous me dites: Écoutez, les situations sont différentes d'un pays à l'autre. Moi, avec mes connaissances fort limitées, je pense que l'une des raisons, sinon la condition sine qua non pour laquelle NICE est une bonne idée selon les experts, c'est qu'il est justement indépendant, il est capable d'agir en dehors de la politique et d'arriver avec des avis, je dirais, qui sont peut-être moins soumis aux pressions, donc des avis qui se fondent sur les connaissances, et tout le reste.

Donc, ce que je vous dis, c'est que, si vous voulez donner votre appui à la création de l'INESSS et si vous voulez vraiment atteindre l'objectif poursuivi, vous devriez, je le dis en tout respect, rajouter que, pour vraiment qu'il donne ses fruits, il va devoir vraiment être indépendant. S'il n'est pas vraiment indépendant, et on pense qu'il ne l'est pas, à ce moment-là, il n'aura pas les bénéfices que vous souhaitez lui donner, parce que, pour qu'il ait les bénéfices, il faut qu'il soit capable d'arriver avec des connaissances qui ne sont pas soumises au jeu de la politique. Or, le ministre va s'assurer présumément, en tout respect pour sa bonne volonté, que les gens qui siègent sur le C.A. ne sont pas des adversaires, disons, de sa cause.

Le Président (M. Kelley): Dr Bergman.

M. Bergman (Howard): Je vais vous... Je vais vous laisser, entre vous, faire le débat sur le niveau d'indépendance. Je vais juste dire une chose, par exemple, que l'utilité et l'importance de l'impact de NICE, au-delà de cette question d'indépendance que je vous laisse débattre, c'est la question de la... le mandat, le mandat, la crédibilité des personnes qui vont être nommées à NICE et la crédibilité de ses travaux. Et c'est là qu'est notre mandat de Fonds de recherche en santé du Québec, d'assurer que l'INESSS peut s'appuyer sur la meilleure recherche possible.

M. Drainville: Donc, vous ne croyez pas que l'indépendance est un critère, est une condition sine qua non pour la réussite de l'INESSS.

M. Bergman (Howard): Ce n'est pas dans mon mandat de me prononcer sur le niveau d'indépendance. Je pense que ça, c'est entre vous à débattre, sur le niveau d'indépendance que NICE... qu'INESSS peut avoir ou non.

M. Drainville: Non, mais...

M. Bergman (Howard): Moi, ce que je vous dis, c'est que, pour moi, au-delà de ce niveau d'indépendance, la chose la plus importante, c'est le mandat, la crédibilité des gens qui vont siéger au NICE, la crédibilité de sa démarche, y inclus la recherche, puis y inclus au niveau de ses cliniciens. À mon sens, ça, c'est l'aspect le plus important.

M. Drainville: Et, à notre avis...

Le Président (M. Kelley): ...

M. Drainville: Et je termine là-dessus, M. le Président, je suis conscient du fait que le temps est écoulé. À notre avis, pour qu'il y ait crédibilité, il faut qu'il y ait indépendance. Voilà. Sans indépendance, à notre avis, la crédibilité va être entachée, y compris la crédibilité des décisions qui vont être rendues et des recommandations qui vont être faites. Voilà.

Le Président (M. Kelley): M. le ministre.

M. Bolduc: Bien, je pense que je vais prendre quelques minutes pour bien clarifier ma pensée, puis possiblement que le député de Marie-Victorin va devoir clarifier la sienne aussi. C'est qu'on est sur le sujet «indépendance». Bon, dans un premier temps, il dit: Vous devriez prendre tout ça puis le donner aux gens du ministère, et puis ça va être la tâche du ministère, comme coordonnateur. Ça, vous êtes d'accord, ça n'a pas de bon sens. Mais je tiens à rappeler que les gens qui font ça de la part du ministère, le bras du ministère, ça s'appelle l'AETMIS et le Conseil du médicament. Ça fait qu'on prendrait juste... On ne peut pas demander aux employés actuellement de prendre ces tâches-là puis de les ramener à d'autres employés en pensant qu'eux autres, on va économiser. Ça, c'est clair. Donc, autrement dit, c'est... il faut, là, clarifier sa pensée. Est-ce qu'il veut qu'on prenne les employés, puis on les amène dans le ministère, puis on dit: Ça fait partie des tâches du ministère?

**(11 h 20)**

L'autre élément qu'on nous ramène, on nous dit: Non, non, maintenant, ce n'est pas ça; il faut tellement qu'ils soient indépendants du ministre que l'indépendance est complète. Je ferais remarquer que l'AETMIS, au Québec, et le Conseil du médicament, que tout le monde dit qu'ils sont très bons, ils font un très bon travail; ils dépendent du ministre actuellement. Ce qui fait la différence dans la crédibilité, ce n'est pas la question du niveau d'indépendance, parce que les gens qui sont là-dessus sont reconnus par les autres organisations, les pairs, le FRSQ, de faire un excellent travail.

Et ça prend également un lien avec le ministère parce que, si vous avez quelqu'un de complètement indépendant puis qui n'a pas de relation, on ne pourra pas les appliquer. L'objectif de ça, ce n'est pas d'avoir un concept théorique, c'est qu'à un moment donné ça donne des résultats pour les citoyens du Québec. Ça fait que je pense qu'il faut positionner ça.

Et ce qu'on veut, c'est que ce soit relativement indépendant -- puis je le dis le premier, puis je veux le protéger au cas ou est-ce qu'il y aurait un autre gouvernement qui viendrait, qui voudrait s'immiscer là-dedans -- c'est que les membres vont être nommés par le Conseil des ministres, et on va reconnaître... on reconnaît leur indépendance. Une fois qu'ils ont fait ça, on veut qu'ils travaillent avec les autres organisations, mais on veut également qu'ils aient un lien avec le ministère.

Je pense que c'est important et je pense qu'il est bien positionné. Dans le projet de loi, là, quant à moi, l'indépendance est reconnue, mais il faut qu'on ait un lien avec le ministère. Par contre, comme le député de Marie-Victorin dirait... Il dit: Bien, moi, j'aimerais mieux qu'il soit fait à l'intérieur du ministère. Là, on aurait un problème parce que, là, on aurait... on perdrait ce souci de les garder indépendants, et, oui, les gens du ministère pourraient avoir un impact là-dessus.

M. Drainville: M. le Président, M. le Président, j'invite le ministre... Puis je le dis en toute bonne foi, c'est une question que je pose. Je cherche à connaître les réponses de nos présentateurs, des groupes qui se présentent devant nous, à des questions que je pose, parce qu'effectivement il y a un certain nombre d'hypothèses. Je n'émets pas à ce stade-ci d'opinion tranchée et définitive sur un certain nombre de choses, y compris celle-là. Je pense que c'est important, M. le Président, si on veut avoir une discussion intelligente puis si on veut aller au fond des choses -- puis le ministre, en général, me semble-t-il, l'encourage, cette discussion-là, cette réflexion-là -- je pense qu'il ne doit pas imputer aux gens de cette commission des opinions ou des positions politiques, alors qu'il s'agit d'hypothèses et de questions que nous posons. Et on essaie de voir les différents...

Le Président (M. Kelley): On aura...

M. Drainville: ...les différentes possibilités qui s'offrent à nous.

Le Président (M. Kelley): Je pense qu'on aura le temps. On a des remarques finales aujourd'hui.

M. Drainville: Hein, vous saisissez la distinction?

Le Président (M. Kelley): C'est noté, mais je ne pense pas qu'il y avait de l'abus de la part du ministre. Mais je pense qu'il y a une mise en garde qu'on est en train de tester des hypothèses; les audiences publiques sont là pour ça. Mais je pense qu'on va laisser le ministre terminer son intervention.

M. Bolduc: Bien, je remercie le député de Marie-Victorin de la remarque puis également d'avoir clarifié sa pensée par rapport à ça, parce que, par le ton, je pensais que c'était déjà fixé, puis je vois qu'il est souple dans son approche et que son approche n'est pas cristallisée. Ça fait que j'apprécie énormément.

L'autre élément qui est important, c'est... On sous-entend qu'il va y avoir un changement, puis ce changement-là va prendre cinq ans avant de donner des résultats. Ce n'est pas comme ça que ça va fonctionner, là. L'AETMIS fonctionne bien, le Conseil du médicament fonctionne bien. Une fois que la loi est passée, c'est regroupé et ça s'appelle l'INESSS, mais ils continuent à travailler au jour le jour. Les gens sur le terrain vont continuer à faire de l'évaluation, les rapports qui sont déjà en cours vont se continuer, excepté qu'on va faire une fusion administrative qui... rien a voir avec l'évaluation que se fait sur le terrain. Donc ça, je tiens à le dire, là.

Puis, pour moi, ce n'est pas des suppositions puis ce n'est pas une question, là, c'est un énoncé de faits que, du jour au lendemain, il n'y a pas de bouleversement majeur, et ce n'est pas vrai qu'il va y avoir une période de turbulence pendant trois... deux mois, qu'ils ne continueront pas leur travail. Le lendemain, les employés rentrent au travail, continuent à travailler sur les mêmes projets, et puis progressivement ils vont s'approprier d'autres types de projets. Ça, je veux que ce soit bien clarifié. Et c'est clair, clair, clair, il n'y aura pas de turbulence en créant l'INESSS avec les deux autres conseils, sauf que progressivement, je comprends, c'est qu'il va y avoir une potentialisation et puis il va peut-être y avoir un peu de réorientation, mais pas de changement majeur.

Là-dessus, bien, je vous remercie. Toutes les réponses que vous avez données à l'opposition, j'aurais aimé ça les répondre à votre place, mais elles étaient excellentes. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Sur ça, merci beaucoup, M. Joanette, Dr Bergman. Dans cette salle sont les réunions de caucus du parti ministériel présidées par le frère du Dr Bergman, qui est toujours assis dans la place où se trouve M. Joanette. Alors, si vous voulez une idée où votre frère passe... a passé beaucoup de temps dans ces derniers 15 ans de sa vie comme parlementaire, il a passé beaucoup de temps dans cette salle. Alors, je veux souligner la contribution de la famille Bergman à la société québécoise.

Sur ça, merci beaucoup. Je vais ajourner nos travaux quelques instants. Et j'invite les représentants de l'Association des pharmaciens des établissements de santé à prendre place devant moi.

(Suspension de la séance à 11 h 25)

 

(Reprise à 11 h 31)

Le Président (M. Kelley): Alors, notre troisième témoin ce matin, c'est l'Association des pharmaciens des établissements de santé, représentée, entre autres, par son président, M. Charles Fortier. Alors, sans plus tarder, M. Fortier, la parole est à vous.

Association des pharmaciens des
établissements de santé du Québec (APES)

M. Fortier (Charles): Merci. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, mesdames messieurs. Mon nom est Charles Fortier. Je suis le président de l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec, l'APES, et je suis accompagné ce matin de membres de notre conseil d'administration: à ma droite, Mme Francine Lussier-Labelle, ainsi que Mme Linda Vaillant, à ma gauche, qui est directrice générale de l'association.

L'APES désire tout d'abord remercier les membres de la commission de lui permettre de donner son avis sur le projet de loi créant l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux, l'INESSS. L'APES compte plus de 1 300 pharmaciens oeuvrant dans le réseau public de santé, principalement dans les établissements de santé ayant une mission de soins de courte durée, mais également en soins prolongés et en réadaptation. Ces pharmaciens sont des experts de la pharmacothérapie et sont au coeur des évaluations de médicaments effectuées en établissement de santé tant pour leur inscription au formulaire pharmacothérapeutique de l'établissement que pour assurer un suivi rigoureux de l'utilisation de ces médicaments. C'est donc de ce point de vue unique que nous vous présentons ce matin notre analyse du projet de loi n° 67.

La place du médicament. L'INESSS prend la forme d'un organisme imposant auquel de nombreux mandats sont confiés. L'intégration de deux structures de taille très différente inquiète particulièrement les pharmaciens d'établissement. Le fait d'ajouter à cela toute la composante des services sociaux est aussi préoccupant quant à la place qu'occupera le médicament dans cette nouvelle structure. Le médicament est un outil technologique de premier ordre, sans lequel les refontes que l'on a connues de notre système de santé n'auraient pas vu le jour. À notre avis, l'INESSS doit donc faire au moins autant de place au médicament qu'aux technologies et aux modes d'intervention en santé, et ce, tant dans sa structure que dans la répartition des ressources humaines et financières.

L'évaluation de l'excellence clinique. La mission de l'INESSS est de promouvoir l'excellence clinique et l'utilisation efficace des ressources dans le secteur de la santé et des services sociaux. Par utilisation efficace des ressources, les pharmaciens d'établissement entendent aussi l'usage optimal des médicaments. Or, cet usage optimal doit prévoir des mécanismes de mesure afin d'en assurer le suivi et d'en évaluer les résultats, car la rédaction de guides et de recommandations ne fera pas, à elle seule, le travail. Il faudra aussi déterminer des indicateurs et une façon de mesurer l'atteinte des objectifs fixés au préalable. Qui procédera à ces évaluations? Qui s'assurera de l'analyse des résultats et de la mise en place des correctifs? Il nous apparaît insuffisant que l'INESSS fasse la promotion de l'utilisation efficace des ressources. Il doit aussi être responsable de l'évaluation de l'utilisation de ces ressources.

La définition des technologies. Les pharmaciens d'établissement travaillent à mettre en place depuis quelques années des technologies de prestation de soins et services qui sont directement liés au circuit du médicament en établissement de santé. Ces appareils qui vont du prescripteur électronique au lecteur de code à barres au chevet du patient doivent désormais être intégrés aux technologies qu'évaluera l'INESSS. Jusqu'à présent, ce type de technologies n'a jamais fait l'objet d'évaluation formelle par l'Agence d'évaluation des technologies et modes d'intervention en santé. Or, nous sommes d'avis que toutes les technologies liées au circuit du médicament et à la prestation de soins et services pharmaceutiques doivent dorénavant être intégrées aux technologies étudiées par l'INESSS, puisque ces dernières prendront de plus en plus d'importance et que de nombreux aspects touchant les sécurités des soins offerts aux patients sont liés à l'utilisation de ces appareils. Il faut donc élargir l'évaluation en s'assurant d'ajouter la notion d'utilisation sécuritaire aux éléments étudiés.

Les guides de pratique. L'INESSS devrait élaborer des recommandations et des guides de pratique visant l'utilisation optimale des technologies, médicaments et interventions. Ces guides doivent d'abord et avant tout appuyer les professionnels de la santé dans leurs décisions de traitement sans jamais se substituer à leur jugement clinique. Il est essentiel d'obtenir l'adhésion des divers groupes de professionnels, et la seule façon d'y parvenir est d'élaborer ces guides avec les professionnels du réseau puis de les livrer en les accompagnant d'un mécanisme clair de transfert des connaissances de façon à s'assurer de leur appropriation par tous les professionnels de la santé appelés à les utiliser.

Les délais de production de ces guides sont aussi d'une importance cruciale. Les pratiques novatrices se mettent souvent en place dans les établissements de santé et les nouveaux médicaments y sont, la plupart du temps, étudiés. Or, si des délais indus surviennent entre l'arrivée d'un médicament et la livraison du guide de pratique, il y a fort à parier que des pratiques, bonnes ou mauvaises, auront déjà été instaurées dans les établissements et que les guides auront une portée minimale.

Par ailleurs, il est aussi très important dans le choix des dossiers que l'INESSS ciblera de s'assurer d'un équilibre entre des facteurs de décision liés à la pertinence des cibles à retenir et ceux liés aux pressions économiques. En d'autres termes, les dossiers dont la pertinence est clairement démontrée doivent aussi faire partie des choix que fera l'INESSS, et cela, même si aucun facteur économique n'entre en ligne de compte. Ces dossiers devront, à notre avis, être priorisés, et la façon dont cette priorisation se fera doit être précisée dans le projet de loi.

La valeur thérapeutique d'un médicament. Jusqu'à maintenant, le Conseil du médicament n'a pas été le seul organisme à émettre des avis sur les thérapies médicamenteuses. En effet... en fait, plutôt, les établissements de santé font des choix de médicaments pour leur formulaire pharmacothérapeutique qui reposent sur des avis émis par les comités internes de pharmacologie. Ces avis peuvent parfois varier de ceux produits par la suite par le Conseil du médicament. D'autres organismes émettent aussi des avis sur les médicaments, c'est le cas du Comité d'évolution de pratiques en oncologie, le CEPO, qui a, par le passé, émis des avis contradictoires de ceux du Conseil du médicament, créant ainsi une certaine confusion.

Ces situations posent problème si l'on souhaite mettre en place les meilleures pratiques au Québec et atteindre l'usage optimal des médicaments. Il nous apparaît nécessaire dans le contexte de la création de l'INESSS d'assurer une certaine uniformité dans les méthodes utilisées et les facteurs retenus pour procéder aux évaluations de traitement au Québec. Ainsi, l'INESSS devrait en quelque sorte être le maître d'oeuvre de la mise en place de critères d'évaluation que les organismes cités précédemment pourraient adopter en vue d'uniformiser la façon de procéder à ces évaluations. Un arrimage clair entre l'INESSS et ces organismes est donc nécessaire.

Par ailleurs, les décisions qui seront prises par l'INESSS devraient toutes être diffusées sur le Web, accompagnées de l'argumentaire détaillé les soutenant. Les pharmaciens d'établissement ont besoin de toutes les informations ayant mené aux décisions de l'INESSS afin de s'assurer d'une bonne compréhension de ces décisions, d'y adhérer et de mettre en place les meilleures pratiques dans les établissements de santé en ce qui a trait aux médicaments. Si des informations provenant de l'industrie pharmaceutique ont influencé la décision de l'INESSS, il est aussi essentiel que ces informations nous soient transmises et que les modifications législatives nécessaires pour que ces informations nous soient transmises soient effectuées.

Maintenant, nos préoccupations plus spécifiques. Les établissements de santé utilisent généralement les nouveaux médicaments en tout premier lieu. Il est essentiel que l'INESSS priorise dans son calendrier les médicaments qui ont un impact important sur les ressources des établissements de santé afin d'éviter que des pratiques différentes et parfois non optimales se mettent en place avant que des décisions au niveau national ne soient prises.

La question des médicaments orphelins et de ceux sans avis de conformité préoccupe aussi les pharmaciens d'établissement. Nous vous référons à notre mémoire pour ces questions particulières.

**(11 h 40)**

Enfin, il est inadmissible de ne prévoir aucun ajustement financier au budget des départements de pharmacie lorsqu'un nouveau médicament est ajouté à la liste des médicaments de santé. Comment se fait-il que l'on passe tant de temps à évaluer l'impact économique des ajouts de médicaments à la liste du régime général d'assurance médicaments et que l'on ne se préoccupe à peu près pas de celui dans les établissements de santé? Le budget médicaments global des établissements de santé est sans doute moins important que celui du régime général, mais le choix de certains médicaments au formulaire des établissements peut avoir un impact parfois très important hors du cadre des établissements.

Ressources humaines, pharmaciens et experts. Les pharmaciens sont absents du projet de loi sur l'INESSS. Pourtant, ils sont au coeur des comités d'experts, membres du conseil d'administration de l'actuel Conseil du médicament, et ils ont largement participé à des activités de revue d'utilisation des médicaments par le passé, notamment par leur participation au Réseau de revue d'utilisation des médicaments.

Dans notre mémoire, nous avons fait des recommandations en ce qui a trait à la rémunération des pharmaciens experts. Nous avons aussi proposé la création de postes de pharmaciens au sein de l'INESSS afin de reconnaître le besoin particulier de cet organisme à l'égard des pharmaciens. Ces éléments sont essentiels à la reconnaissance de la valeur des pharmaciens d'établissement dans la réalisation de la mission de l'INESSS.

Conseil d'administration. L'APES appuie les saines pratiques de gouvernance souhaitées pour l'INESSS mais tient à faire une remarque importante. Le libellé actuel de l'administrateur indépendant pourrait mener à l'exclusion des pharmaciens d'établissement, et des clarifications sont, à notre avis, nécessaires. En effet, il est essentiel que des pharmaciens d'établissement puissent siéger à titre d'administrateurs indépendants au conseil d'administration de l'INESSS.

En conclusion, l'APES adhère à la création de l'INESSS malgré les réserves dont nous vous avons fait part aujourd'hui. Toutefois, la place que fait ce projet de loi aux pharmaciens d'établissement est bien mince, et cela est décevant. En effet, au fil du temps, les pharmaciens ont démontré leur expertise en pharmacothérapie tant à l'égard de la sélection des médicaments en se basant sur les données probantes qu'en ce qui a trait au suivi de l'utilisation des médicaments par la mise en place notamment des revues d'utilisation de médicaments.

Les pharmaciens d'établissement sont des experts en pharmacothérapie et sont devenus les bras droits de leurs collègues médecins qui les reconnaissent et les apprécient au sein de leur équipe. Les pharmaciens d'établissement ont aussi largement contribué aux travaux du Conseil consultatif de pharmacologie ainsi qu'à ceux du réseau RRUM et du Conseil du médicament. Il faut donc les reconnaître à leur juste valeur.

Les pharmaciens d'établissement ont à coeur les soins et services qu'ils offrent aux patients du Québec. Ils vivent toutefois la pire pénurie du réseau de la santé avec plus de 20 % des postes budgétés qui sont vacants. La Politique du médicament abordait cette question, en 2007, en soulignant la nécessité de poursuivre l'implantation des technologies, notamment en vue d'éviter les ruptures de services. Trois ans plus tard, la technologie a progressé au sein des départements de pharmacie, mais la pénurie s'est accrue, passant de 16 % à 20 % durant la même période. C'est donc dire que les machines ne semblent pas suffire. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Fortier. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission, et je vais céder la parole au ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Bolduc: Merci pour votre mémoire. Les interrogations, les inquiétudes, on va essayer de les clarifier, mais je pense qu'on est très près l'un de l'autre.

Un, je tiens à reconnaître le travail des pharmaciens en établissement, de tous les pharmaciens. Là je vais mettre une insistance sur les pharmaciens en établissement, compte tenu que vous êtes les représentants. Comme de fait, c'est des gens dévoués, et ils participent énormément à la vie de l'hôpital. Et je peux vous dire, dans mon établissement à moi, où j'étais, les médecins en étaient rendus que souvent ils téléphonaient aux pharmaciens, leur demandaient des informations, parce que le pharmacien est le spécialiste du médicament. Eux autres, ils traitent les patients de tous les médecins, et souvent un pharmacien va avoir plus d'occasions de traiter... de travailler avec un médicament qu'un médecin, parce que souvent il s'occupe de tout l'hôpital.

Et, dans nos hôpitaux, on est en pénurie actuellement. Je pense que vous l'avez reconnu, il y a eu un gros travail de fait depuis trois ans avec les projets SARDM, où on a installé des machines, on a revu les façons de faire. Ça aide, mais ça ne corrige pas toute la pénurie, puis je reconnais qu'il y a une pénurie sérieuse à laquelle on doit s'attaquer, et ça, là-dessus, je pense qu'on doit le faire ensemble.

Vous aviez des craintes dans l'INESSS, puis je suis content de vous l'entendre dire, puis savez-vous pourquoi? Parce que, quand on rencontre d'autres groupes, ils nous disent tous que le médicament prend trop de place. Et puis, moi, je tiens à répéter et je tiens à le répéter encore publiquement, on veut un INESSS équilibré, dans lequel il y a la place pour la santé, l'évaluation des technologies, il y a la place pour le médicament et il y a la place pour les services sociaux. L'un ne doit pas prédominer par rapport à l'autre, et les trois sont importants. Ça, je vous le dis, je le dis devant vous autres, là, vous voyez, je ne suis pas gêné de le dire, les services sociaux vont être très importants, mais on ne négligera pas la place des médicaments.

Et l'avantage de tout mettre ça ensemble, c'est qu'on est très conscients que, quand on fait de l'évaluation de technologies médicales maintenant, c'est qu'on évalue également un épisode de soins dans lequel le médicament joue un rôle. Puis, juste pour vous donner un exemple, moi, j'étais directeur des services professionnels à Alma, et la responsabilité de la pharmacie, c'était la mienne, et je peux vous dire qu'il n'y a pas un protocole dans l'hôpital, il n'y a pas un médicament qui... tu n'avais pas un usage au niveau de guides de pratique sans qu'on ait l'opinion du département de pharmacie. C'était une règle qu'on s'était faite, et il n'y a rien qui était accepté à l'exécutif du CMDP sans que les pharmaciens nous aient fait un avis là-dessus. Puis ça, je pense, c'est la façon de procéder de nos jours dans nos organisations.

J'aimerais ça vous entendre, là, sur votre inquiétude de la place du médicament dans le projet de l'INESSS. Et ce que je vous ai dit, est-ce que ça vous rassure ou ça vous inquiète encore plus?

M. Fortier (Charles): Non, ça ne nous inquiète pas davantage. Mais, nous, on avait une inquiétude, en ce sens qu'on sait que l'AETMIS, c'est quand même une grosse structure; à cela, on ajoute les services sociaux, et on avait peur que le médicament, qui est quand même l'outil technologique le plus utilisé, soit mis de côté, ou qu'il y ait des retards dans l'évaluation, ce qui nous amène, pour nous, dans notre quotidien, beaucoup de problèmes parfois. Donc, c'était l'inquiétude qu'on a. Peut-être que Linda...

Mme Vaillant (Linda): Je veux juste me permettre d'ajouter un élément.

Le Président (M. Kelley): Mme Vaillant.

Mme Vaillant (Linda): Merci. C'est sûr que, même dans l'actuel Conseil du médicament... là, nous, on se place du point de vue des établissements de santé, alors on l'a soulevé, et on y reviendra possiblement, mais on a souvent l'impression, je dirais, que la préoccupation des médicaments en établissement de santé n'est pas, disons, la première priorité, là, du Conseil du médicament. Alors, maintenant, de prendre le Conseil du médicament, qui est une structure effectivement plus petite, là, tant sur le plan des ressources que du volume, intégrer ça à l'AETMIS, ajouter les services sociaux, nous, on se dit: Dans la perspective où on travaille en établissement de santé et que souvent on a déjà du retard, je dirais, par rapport aux besoins qu'on a face aux médicaments et face aux lignes directrices qui pourraient venir éventuellement du Conseil du médicament, on s'inquiète un peu que, dans une plus grosse structure, cette place-là soit réduite. Je pense que c'est une inquiétude qui est tout à fait légitime.

M. Bolduc: Je vais vous le clarifier, ça va être une structure qui va être plus grosse parce qu'on réunit, mais on garde les mêmes budgets, et on s'attend que le médicament reste avec la même grosseur à l'intérieur de cette structure-là. Où il y a de l'optimisation, c'est dans les processus administratifs et également dans une meilleure coordination avec les autres organisations. Mais on ne baisse pas le budget du Conseil du médicament pour la partie qui concerne le travail effectif au niveau du médicament. Ça, pour moi, encore là, c'est quelque chose qui est clair dans mon esprit.

Mme Vaillant (Linda): ...notre questionnement était aussi au niveau des ressources, de s'assurer aussi qu'il y ait suffisamment de ressources qui soient affectées à tout ce qui est lié au médicament au sein de l'INESSS, là.

M. Bolduc: Oui. Bien, ça, c'est... Vous savez, l'INESSS, il va y avoir l'an 1 puis il va y avoir l'an 10. Ça fait qu'il faut d'abord le créer, puis après ça il va y avoir des ajustements. Et, comme vous dites, le médicament étant l'outil technologique le plus utilisé, je pense qu'il va y avoir une place quand même assez importante à l'intérieur de l'INESSS parce que ça fait partie de notre évaluation globale des outils qu'on utilise.

Puis là-dessus je vais vous amener... Je retiens très, très bien ce que vous dites. On peut évaluer des nouveaux appareils pour faire des glycémies, des nouvelles résonances magnétiques, on peut évaluer aussi des nouvelles molécules de médicaments, mais c'est peut-être important aussi d'évaluer des nouveaux procédés pour les médicaments. Là, entre autres, on parlait des codes à barres, toute la stratégie SARDM qu'on a mise au Québec. SARDM, pour ceux qui nous écoutent, c'est l'automatisation de la distribution des médicaments dans laquelle on diminue beaucoup le nombre d'erreurs, et puis, également, ça facilite le travail. Toute la réévaluation aussi des processus, hein, par rapport...

Je vais vous conter mon expérience, ça vaut la peine que je vous conte mon expérience. Je suis allé à Alma voilà à peu près trois semaines, dans le temps des fêtes. Je suis allé visiter la nouvelle pharmacie qu'ils ont installée, qu'ils ont agrandie, et c'est avancé au niveau technologique à un tel point que, plutôt que de venir montrer le médicament au pharmacien, maintenant ils prennent une photo à toutes les étapes du processus lorsqu'ils sont en... pour la préparation de certains médicaments, et le pharmacien peut vérifier pour s'assurer qu'il n'y a pas d'erreur, et on regarde ça également. Et, si le moindrement il y a eu quelque chose d'anormal, le pharmacien est averti. C'est juste pour vous dire qu'on est rendus très loin à ce niveau-là. Ce qu'on veut, c'est que ce ne soit pas juste dans une pharmacie, ce soit dans toutes nos pharmacies du Québec.

J'aimerais ça vous entendre, là, sur ça, je trouvais ça original parce que l'INESSS, moi, je le vois, ce rôle-là, à l'INESSS, de ne pas juste s'assurer les appareils, mais également les meilleures pratiques en termes d'organisation du travail à ces niveaux-là, Ils ne sont pas exclusifs, mais je pense que, du côté du médicament, il y a tellement de gains à aller chercher que ça, ça vaut la peine qu'on y consacre une certaine énergie.

M. Fortier (Charles): Mais, dans ces appareils-là, lorsqu'on a réorganisé le travail avec ces appareils-là, ces appareils-là n'ont pas été évalués par l'AETMIS. Nous, on aurait pensé que les cabinets décentralisés... ou encore, dans l'avenir, les cabinets décentralisés, les robots, les ensacheuses devraient être évalués par l'AETMIS.

Et une autre notion qui est importante, je trouve, qu'on ne retrouve pas dans l'INESSS et qu'on parle en même temps, c'est la sécurité. Ce n'est pas juste d'être efficaces, d'être excellents, mais c'est d'être sécuritaires pour les patients. Et ça, peut-être que le mot utilisé comprend la sécurité, mais je pense que ça vaut la peine qu'on le mette précisément dans la loi. Il faut que ces choses-là soient sécuritaires, et ce mot-là, on ne le retrouve pas dans le projet de loi. Mais, je veux dire, on pense que les appareils devraient être évalués par l'AETMIS au niveau de l'organisation du travail, ce qu'on a... Peut-être que, Linda, tu peux compléter.

**(11 h 50)**

Mme Vaillant (Linda): Bien, juste sur les cabinets, c'est qu'il y a quand même des... Vous avez cité un exemple à Alma, on l'a vu effectivement à d'autres endroits, il y a des problèmes qui sont survenus avec la mise en place de ces cabinets-là, il y a des problèmes de sécurité. Et puis vous l'avez dit, SARDM, là, c'est vraiment un gros projet ici, au Québec, puis on était tout à fait favorables en fait à la mise en place de SARDM. Mais le problème, c'est que... je pense, en tout cas, qu'au moment où ça a été mis en place ça aurait été bien qu'il y ait une étude indépendante qui soit faite de façon... au niveau national pour s'assurer que tous les aspects de ces appareils-là soient vraiment sécuritaires. Parce que, là, il y a le lobby de l'industrie, il y a chaque établissement qui essaie un peu de faire ses propres choix puis de faire son propre circuit du médicament, et on a vu des situations où, en fait, la sécurité aurait pu être mise en jeu sérieusement. Alors là, je pense que c'est très pertinent que tous ces appareils-là soient aussi étudiés par l'INESSS.

Mme Lussier-Labelle (Francine): Oui, je pourrais peut-être rajouter. J'ai fait partie du premier comité consultatif, en 2005, sur les technologies du circuit du médicament, et ça avait été mentionné qu'on devait faire des évaluations de ces technologies avant d'aller de l'avant. Mais je connais plusieurs établissements, là, qui sont en projet pour un prescripteur électronique, c'est énormément de sous, et on ne connaît pas l'impact sur les processus, sur l'organisation du travail, la sécurité, et tout, et tout. C'est important que ces évaluations-là se fassent.

M. Bolduc: Je suis tout à fait d'accord. Et puis je dois vous avouer, moi, je... on ne peut pas le mettre spécifiquement dans la loi parce que c'est global, c'est l'évaluation des technologies, mais, dans ma compréhension, ça fait partie du travail de l'INESSS d'évaluer ça. Entre autres, moi, je pense... comme le SARDM, là, à un moment donné, j'aurais très bien vu que l'INESSS nous recommande peut-être la technologie SARDM, choisir l'appareil, nous dise que c'est quelque chose qu'on doit implanter, et après ça... et puis ils nous font l'évaluation des coûts puis... des coûts, et inconvénients, et avantages. Je retiens très bien.

Côté sécuritaire, je pense que c'est... on va le regarder, c'est peut-être... c'est quelque chose qu'on pourrait regarder parce que la sécurité, c'est peut-être le premier élément qu'on doit regarder face à nos traitements avec les patients.

L'autre chose que je voulais discuter avec vous, c'était... puis je vais le mettre dans la perspective... À la fin, le ministre accepte les recommandations du Conseil du médicament, je signe régulièrement des lettres pour dire qu'est-ce qui est accepté, et c'est là que ça devient intéressant d'expliquer un détail. Il y a plusieurs organismes qui font des recommandations. L'INESSS est le principal au niveau du Conseil du médicament. Mais, comme vous dites, on a un organisme, qui s'appelle le CEPO, pour les médicaments oncologiques, qui peut faire des recommandations différentes. Puis je sais, en tout cas dans le cas de l'Avastin, le CEPO, à un moment donné, a fait des recommandations, parce qu'il y a des établissements qui le donnaient puis il y a des établissements qui ne le donnaient pas. Puis tantôt je viendrai sur les coûts en relation avec ça. C'est que ça prend des mécanismes de coordination. Mais, à la fin, c'est là que ça devient intéressant, quand il y a deux ou trois organismes, malgré que l'INESSS souvent a une prédominance, c'est le ministre qui décide. Ça, je pense qu'il faut conserver ça. Même si le ministre n'est pas médecin, n'est pas pharmacien, il reste qu'il a des conseillers, et ça prend un endroit ultime pour faire l'arbitrage dans toutes ces organisations-là. Et je dois vous avouer, je ne vois pas d'autres endroits qu'au niveau du ministre. Et ça, c'est un élément qui va par rapport au rattachement du ministre avec l'INESSS.

Et les ministres... le ministre également... moi, je sais qu'à l'époque il avait été... suite à des recommandations du CEPO, parce que, là, arrive le financement, à partir du moment que le ministre avait décidé qu'on rentrait l'Avastin dans les établissements, il y avait eu des ajustements budgétaires qui avaient été faits en fonction de ça. C'est là qu'on voit toute la relation de notre réseau de la santé où il faut se garder... on est tous interreliés, il y a du chevauchement -- le mot a été utilisé ce matin, puis je pense qu'il est réel -- on ne peut pas empêcher... on ne peut pas demander aux gens d'être complètement indépendants. Il y a un certain chevauchement, mais ça nous prend des mécanismes d'arbitrage très clairs qu'à la fin il y a quelqu'un quelque part qui doit décider, et c'est ça qui est mis en application.

La question des coûts des médicaments. Moi, j'étais directeur des services professionnels, donc, la médication, c'était mon budget. Dans une année, on calculait notre croissance. C'est prévu dans les budgets qu'il y a une croissance par rapport aux médicaments. La plupart des établissements vont vous dire que ce n'est jamais assez. Mais je peux vous dire, comme DSP, que, oui, il y a des nouvelles molécules qu'on rentrait, puis on évaluait les coûts, puis on savait que ça nous coûterait plus cher selon l'utilisation. Par contre, il y a des molécules qu'on cessait d'utiliser parce qu'il y en avait des meilleures. Ça, je vous dirais que ça, ça relève de l'administratif, et, au niveau du ministère, on en tient compte. Les gens nous disent toujours: Ce n'est jamais assez. Mais je pense que c'est... Comme DSP, moi, je vous dis que je... pas celui qui se plaignait. On faisait des études quand il y avait certains médicaments qui coûtaient trop cher, qu'il fallait faire des projets, on déposait nos projets à l'agence, et ça, ça se fait relativement bien. On sait qu'il y a des endroits qu'il a fallu ajuster.

Une chose qui est certaine, on ne doit jamais s'empêcher de donner le médicament pour une... faute de budget. Si c'est ça qui est nécessaire, c'est accepté au niveau de la pratique, bien c'est ça qu'on donne, puis on discute... on fait la discussion après. Moi, c'est comme ça que je le vois.

Le Président (M. Kelley): M. Fortier.

M. Fortier (Charles): Oui, c'est ça, J'aimerais répondre par un autre exemple en regard du CEPO. Je pense au bortézomib, en 2005, où le CEPO avait envoyé -- tout le monde l'a reçu, là -- un avis nous disant d'utiliser le bortézomib dans le myélome multiple et, quelque temps après, le Conseil du médicament dit de ne pas le faire. Ce qui est compliqué pour nous, c'est qu'on travaille avec des cliniciens, on travaille avec des gens qui ont fait de la recherche et qui veulent utiliser le bortézomib, et le Conseil du médicament dit non au bortézomib parce que ça coûte cher. Mais, pendant ce temps-là, nous, comme établissement, on va acheter de la thalidomide à nos patients, qui coûte aussi très cher. Donc, on n'est pas regagnants au bout de la ligne.

Nous, ce qu'on veut, c'est que les critères... que, si le CEPO en fait, de l'évaluation qu'il tienne compte aussi des facteurs économiques, parce qu'il n'en avait pas tenu compte, ce n'était pas son mandat. Mais que l'INESSS détermine certains critères que vos organismes... Disons, comment je pourrais dire ça? Vos organismes partenaires pourraient utiliser les mêmes critères que le Conseil du médicament, et, au bout de la ligne, si le ministre doit faire de l'arbitrage, bien... Vous comprenez que, quand les organismes n'utilisent pas les mêmes critères, effectivement, ils n'arrivent pas aux mêmes conclusions.

Deuxièmement, dans l'ajout des médicaments, je vais donner juste quelques exemples. Dans le lymphome à CD20 positif, lorsqu'on a rajouté du rituximab au CHOP pour devenir un R-CHOP, on n'a sauvé aucun médicament, mais on a ajouté à peu près 25 000 $ par patient. Quand on a ajouté le Herceptin, on a ajouté à peu près 40 000 $ par patient. C'est des sommes d'argent qui sont importantes, et on n'a pas toujours eu des ajouts budgétaires, et là tu essaies de faire des économies de bouts de chandelles pour, après ça, avoir...

L'Avastin, c'est différent, vous l'avez fait, on a eu une procédure différente pour l'Avastin. Mais, quand je pense au Herceptin, quand je pense au rituximab, quand je pense à l'arrivée de l'irinotécan pour le colorectal en première intention métastatique, on est passé de 4 000 $ par année à 40 000 $ par année. Les conseils d'administration ont tous été secoués un peu de ça quand on a vu les chiffres. Donc, c'est important que les établissements soient aussi supportés parce qu'au niveau du régime général d'assurance médicaments on en rajoute, de l'argent plus facilement que dans les établissements. Je ne sais pas, Linda, si...

Le Président (M. Kelley): Mme Vaillant.

Mme Vaillant (Linda): Oui, je veux juste ajouter un élément. Les deux points que vous soulevez, quant à moi, sont problématiques à cause des délais. Vous indiquez qu'en bout de piste le ministre décide. Bon, soit, là, mais le problème, c'est: le ministre décide quand? Le ministre décide après qu'il a reçu l'ensemble des avis, principalement maintenant l'avis du Conseil du médicament. Et ce que Charles vient de mentionner, c'est qu'on peut se retrouver pendant deux ans, trois ans même... On a des situations, on a plusieurs exemples où ça a pris trois ans. On en a, des molécules, on les utilise au sein des établissements, on a un avis du conseil après. Alors, le ministre décide peut-être, mais il décide quand? Il décide quand ça fait trois ans peut-être que la pratique est déjà mise en place. Est-ce qu'elle est bonne ou est-ce qu'elle est mauvaise? Souventefois, en fait, elle était bonne, dans ce qu'on a pu constater, mais il peut arriver que ce ne soit pas le cas.

Et l'autre problème, c'est la même chose avec l'ajustement du budget des médicaments dans les établissements de santé. Vous dites: Éventuellement, oui, oui, c'est comblé. Je comprends, mais, pendant le trois ans où, nous, on a utilisé des molécules, on a les chefs de département qui doivent expliquer l'utilisation et le coût de ces médicaments-là, il n'y en a pas, d'ajustement. Ils ont plutôt une direction de finances qui est en train de leur dire: Bien, qu'est-ce que tu vas couper l'année prochaine pour pouvoir combler le coût en médicaments qui vient de s'ajouter? Or, les ajustements se font peut-être une fois que le ministre a réalisé que ça, ça va être l'avis du conseil puis que... Bon. Alors, vous comprenez que c'est un problème, le délai. À notre sens à nous, là, c'est probablement ce qui est le plus important dans ce que l'INESSS va avoir à faire et c'est ce qu'il y a de plus difficile. C'est d'arriver à temps, de produire les guides de pratique à temps, suffisamment rapidement pour que les gens puissent agir et que tout le monde sache comment on va utiliser le médicament, qu'on ait la meilleure indication, la meilleure utilisation possible, la plus sécuritaire, et qu'on n'ait pas à se battre pour des budgets une fois que, finalement, il a été reconnu qu'on devrait utiliser tel ou tel médicament en première intention.

M. Bolduc: Deux commentaires. Le premier, je suis très content parce que, malgré que ça fait 18 mois que je suis ministre, j'ai tout compris ce que vous avez dit. Ça fait que c'est déjà...

Des voix: Ha, ha, ha!

**(12 heures)**

M. Bolduc: Puis je me suis aperçu que... ça fait que je ne me trouve vraiment pas déconnecté avec le CHOP, vraiment, là. Je suis vraiment, là... Je suis très fier parce que c'est encore des tests que je fais: Est-ce que je me reconnais encore là-dedans, là? La réponse, c'est oui.

Là, je pense, on a sorti un peu de l'INESSS pour expliquer le fonctionnement, puis je pense que c'est intéressant. Moi, ce que je vois par contre, c'est: quand on a une organisation comme l'INESSS, en collaboration avec les différentes organisations, on parle du CEPO, c'est qu'au moins les gens savent avec qui ils vont faire affaire. Là, il y avait le Conseil du médicament, mais l'INESSS va être encore mieux positionné pour faire les... travailler pour les guides de pratique.

Pour ce qui s'agit des délais, juste pour répondre à ça, pour rassurer les gens, parce que j'étais DSP, je gérais ça... La première règle, on donne le médicament. Après ça, on discute. Puis je peux vous dire qu'on prévoyait quand même dans nos budgets que, oui, il y avait certaines molécules qui pouvaient coûter plus cher, mais on ne se gênait pas de la donner parce que c'est ça qui est indiqué. Et, comme de fait, il y a des délais pour réussir à ce que ce soit généralisé, puis, ce qu'il faut faire, il faut travailler tous ensemble là-dessus pour essayer de les diminuer. Puis ça, je sais que c'est... l'APES, c'est des excellents collaborateurs.

Je vous remercie, surtout de m'avoir permis de savoir que je savais encore des choses en médecine. Ça fait que j'apprécie énormément.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville: Merci, M. le Président. Bienvenue. Je tiens à souligner... je l'ai déjà dit lors de l'étude des crédits, mais je tiens à redire à quel point votre rôle est important dans notre système de santé et à quel point il est, à mon avis, sous-estimé. Et j'apprends de mon collègue ici, à ma droite, là, que l'entente sur la rémunération que vous avez obtenue récemment n'est pas appliquée par tous les établissements.

Mme Vaillant (Linda): Mais c'est une petite proportion.

M. Drainville: Oui, autour de 20 % des établissements, donc, si je comprends bien, qui ne versent pas à vos pharmaciens la rémunération supplémentaire que vous avez obtenue dans cette entente. Je le déplore, et je demanderais au ministre, si c'est possible, de jeter un coup d'oeil là-dessus, parce que je pense que ça va être encore plus important à l'avenir de s'assurer que nos pharmaciens en établissement... que cette fonction-là, que ce rôle-là soit davantage valorisé pour s'assurer que l'on retienne ceux que nous avons et que nous réussissions à en attirer des nouveaux.

Maintenant, pour ce qui est de votre mémoire, d'abord, à la page 3, vous questionnez le rôle du Commissaire à la santé, en relation avec le rôle qui sera confié à l'INESSS. Nous, c'est un questionnement que nous partageons. Vous m'avez peut-être entendu l'évoquer à haute voix. Vous dites, en parlant du Commissaire à la santé: «Comment [le Commissaire à la santé] interviendra-t-il auprès de l'INESSS? Quelle est sa place au sein ou en interrelation avec [l'INESSS] qui, elle aussi, doit promouvoir l'utilisation efficace des ressources dans le secteur de la santé et des services sociaux et développer des indicateurs pour en mesurer la performance?»

Comment est-ce que vous le voyez, vous, le rôle du Commissaire à la santé, par rapport à celui qui serait confié à l'INESSS? Voyez-vous une différence entre les deux?

M. Fortier (Charles): Ce qu'on voit surtout, je pense... Ce qui est important, c'est que les gens s'entendent ensemble... du gouvernement s'entendent pour vraiment préciser des liens fonctionnels qu'il y a entre les deux pour ne pas qu'il y ait un flou. Je ne pense pas que je sois assez ferré en politique pour vous dire vraiment le rôle de chacun, mais ce que je sais, c'est qu'il faudrait vraiment que les gens, ils aient des liens fonctionnels et qu'on sache dès le début quels seront ces liens-là. Et ça, je pense que c'est important. Je ne sais pas, peut-être que, Linda, tu peux rajouter, si...

Le Président (M. Kelley): Mme Vaillant.

Mme Vaillant (Linda): Bien, je pense qu'en fait le questionnement était vraiment parce qu'on avait l'impression qu'il y avait du chevauchement dans les mandats, là, ce n'était pas tout à fait clair. Je pense que la place du Commissaire à la santé doit demeurer, son rôle est extrêmement important, mais il faut qu'il y ait un arrimage avec l'INESSS. Il faut voir comment ça va s'articuler. Et tout ça va dépendre de jusqu'à quel point l'INESSS devrait ou pas faire l'évaluation, au-delà d'envoyer les indicateurs dans le champ. Ça fait que ça, c'était une autre de nos interventions où on se disait qu'il faudrait probablement que l'INESSS fasse aussi de l'évaluation.

M. Drainville: Oui. Le Commissaire à la santé, dans son mandat qui lui a été confié, doit veiller... doit faire l'évaluation du système.

Mme Vaillant (Linda): Exact.

M. Drainville: Est-ce que vous sentez que... ou est-ce que vous comprenez que, dans cette évaluation du système, il va y avoir éventuellement, je dirais, une évaluation des établissements? Est-ce qu'on doit descendre jusqu'à ce niveau-là? Parce qu'évaluer un système macro, de façon macro, bon, c'est sans doute nécessaire, mais est-ce qu'il ne doit pas éventuellement y avoir également une évaluation au niveau micro, là, c'est-à-dire d'être capable de dire: Dans tel établissement, la gestion, par exemple, de l'urgence est très bien faite; par contre, la gestion des listes d'attente en chirurgie, c'est plus problématique, ou la gestion des maladies nosocomiales, c'est autre chose. Est-ce que, vous qui travaillez en établissement -- puis c'est pour ça que je me permets de vous poser la question -- est-ce que vous sentez qu'il y en a... Qui s'occupe de faire cette évaluation-là des établissements, actuellement, de la performance des établissements?

M. Fortier (Charles): Qu'est-ce qu'on entend au juste par performance, M. Drainville? Tu sais, souvent, la performance, on fait... on parle d'argent: on rentre dans nos budgets, on est performant. Souvent, on est évalué aussi en silo, on est évalué sur notre performance à l'urgence, sur notre performance dans les maladies nosocomiales. Mais est-ce que l'ensemble de tous ces éléments-là est évalué à l'intérieur d'un même centre hospitalier de façon scientifique, pas juste de façon administrative, mais de façon scientifique? Probablement qu'à l'intérieur du centre hospitalier on a déjà un comité d'évaluation au niveau du CMDP, on a déjà des comités de prévention d'infections qui se préoccupent de ça. Mais est-ce qu'à travers les établissements on se compare entre nous? Ça, j'en doute, par contre.

M. Drainville: Bon, voilà.

M. Fortier (Charles): Je ne pense pas que... Souvent, ces choses-là, on les garde pour nous, et c'est correct aussi, parce que, quand on fait de l'évaluation, il ne faut pas faire... Il faut faire de l'évaluation pour s'améliorer, il ne faut pas faire de l'évaluation pour pénaliser les gens. Donc, je verrais très mal un comité exécutif du CMDP qui fait une étude par critères objectifs, un comité d'évaluation, et qui va taper sur la tête des docteurs après. Qu'est-ce qu'on veut faire, c'est améliorer la pratique, pas chicaner.

M. Drainville: Non, non, non. Mais l'idée, ce n'est pas de pénaliser, mais qu'il y ait des indicateurs de qualité comparables pour des établissements comparables. Parce que je comprends que tu ne peux pas évaluer... comparer le CHUM avec l'Hôpital de Saint-Jean ou l'Hôpital de Rimouski, là. Ce n'est pas du comparable, ça, là. Mais il y a moyen -- et c'est l'AQESSS qui le reconnaît elle-même, l'AQESSS qui représente les établissements de santé -- de créer des grandes catégories d'établissements de santé qui seraient comparables entre eux.

Et là, moi, la question que je vous pose et que je me pose, c'est: Est-ce qu'il existe actuellement des indicateurs de qualité qui nous permettent de comparer la performance des établissements de santé comparables? Et, moi, je pense qu'ils n'existent pas actuellement.

Mme Lussier-Labelle (Francine): Je pourrais peut-être émettre quelques commentaires.

Mme Vaillant (Linda): Vas-y.

Le Président (M. Kelley): Mme Lussier-Labelle.

Mme Lussier-Labelle (Francine): Merci. On voit la campagne sécuritaire de prestation de soins, c'est un regroupement... présentement, c'est passé du CHUM à l'Hôpital juif général. C'est des outils pour les gens sur le terrain, à évaluer nos pratiques dans différents secteurs: en infectio, en cardio-vasculaire, à l'urgence, l'infarctus, les chutes, le bilan comparatif des médicaments. Et là-dedans on retrouve des indicateurs, des ratios, mais c'est de façon volontaire que les gens vont s'inscrire à cette campagne de santé... prestation sécuritaire. Et on commence à en voir des indicateurs que... C'est des gens de terrain qui ont créé ça, et c'est des indicateurs qu'on pourrait facilement partager entre tous les établissements et se comparer entre...

M. Drainville: Mais personne ne s'en occupe actuellement. Il n'y a pas personne qui s'assure que, d'abord, ces indicateurs-là soient partagés, soient... je dirais même, avant d'être partagés, soient entendus, soient négociés, si on peut dire, entre les établissements de santé eux-mêmes pour s'assurer justement que tout le monde adhère à ça. Parce que, moi, je pense que, pour que les établissements aient le goût d'être comparés puis qu'ils aient surtout le goût de respecter les résultats de ces évaluations-là, il faut qu'ils soient d'abord d'accord avec les indicateurs de qualité, puis là...

M. Fortier (Charles): Tout à fait.

M. Drainville: ...ou de résultat ou de performance. Et je suis d'accord avec vous qu'il faut s'entendre sur ce qu'on veut dire par indicateur de résultat, puis ça doit être, à mon avis, un mélange... il doit y avoir un équilibre sur le quantitatif, sur le qualitatif, etc.

Mais, à mon avis, avec tout l'argent qu'on met actuellement dans notre réseau, qu'on n'ait pas actuellement un organisme qui s'assure que de tels indicateurs existent... Ça devrait être le rôle, en fait, du ministère de la Santé, mais, comme il ne le fait pas, certains ont pu penser que ce serait le rôle de l'INESSS. Moi, je pensais au début que ce serait le rôle de l'INESSS, parce qu'on parlait d'optimisation des ressources, performance, et tout ça. Là, je me rends compte que ce n'est pas du tout... que ça ne fait pas partie du rôle de l'INESSS. Puis, sur la question du système, bien là, on me dit: C'est le Commissaire à la santé qui s'en occupe, donc ce ne sera pas l'INESSS.

Mme Vaillant (Linda): Mais c'est l'une...

M. Drainville: Alors, moi, je...

Le Président (M. Kelley): Mme Vaillant.

M. Drainville: Tu sais, là-dessus, je suis un peu... je dois vous dire, je suis un peu déçu, moi, parce qu'il me semble qu'à 27 milliards, là, on serait dus, au Québec, pour avoir des indicateurs de qualité sur lesquels les établissements s'entendent puis que...

Puis, moi, je vais vous dire franchement... puis vous n'avez pas besoin d'être d'accord avec moi, mais, moi, j'aimerais ça savoir qui sont les établissements de santé qui gèrent le mieux leurs listes d'attente, puis qui sont les établissements de santé qui gèrent le mieux leurs urgences, puis qui sont ceux qui gèrent le mieux les maladies nosocomiales, pas pour pénaliser, pour récompenser puis pour dire aux autres: Ils font... Cet établissement de santé là fait quelque chose de mieux que les autres. Qu'est-ce qu'ils font mieux que les autres? Et on va partager ça avec les autres pour que tout le monde, justement, arrive au même niveau. Puis de cette façon-là, me semble-t-il, on pourrait améliorer, pas en pénalisant, en récompensant, justement, ce qui va bien, mais encore faut-il savoir ce qui va bien, encore faut-il savoir où est-ce que ça se fait pour qu'on puisse, après ça, le partager aux autres. À mon avis, ça, ça ne se fait pas, puis, à mon avis, l'INESSS ne règle pas ce problème-là. Je referme la parenthèse parce que je veux vous amener sur un autre sujet.

Mme Vaillant (Linda): Mais est-ce que je peux juste répondre...

Le Président (M. Kelley): Je pense que Mme Vaillant veut...

M. Drainville: Oui, bien sûr.

Le Président (M. Kelley): Mme Vaillant veut réagir.

**(12 h 10)**

Mme Vaillant (Linda): Je veux juste dire: C'est l'une des préoccupations qu'on soulève, et on est en... on met en place l'Institut national d'excellence et on va mettre en place des indicateurs, on va les envoyer aux cliniciens, on va avoir des protocoles de traitement, on va indiquer aux gens quelles sont les meilleures pratiques. Mais la question que, nous, on se pose, c'est: Qui va les mesurer? Et c'est pareil pour les infections nosocomiales, et c'est pareil pour l'ensemble des exemples que vous venez de donner. Et je ne sais pas, moi, si c'est le rôle du ministère, là, mais, nous, ce qu'on pense, c'est que, si l'INESSS travaille avec les experts terrain, que ces gens-là mettent en place des protocoles, ce sont les meilleures pratiques, ils connaissent les meilleures pratiques, se basent sur les données probantes, ils sont en mesure, tout de suite, de créer des indicateurs pour mesurer le résultat, parce que ça ne nous donne rien de viser l'excellence si on ne mesure pas si on est en route vers l'excellence.

M. Drainville: ...absolument.

Mme Vaillant (Linda): Donc, à notre sens à nous, c'est le rôle de l'INESSS de faire cette évaluation-là, de s'assurer qu'il y a une évaluation qui est faite. On ne peut pas avoir simplement un organisme qui donne des indications et personne qui mesure le résultat.

M. Drainville: Mais qui mesure le résultat du mandat qu'il se voit confié.

Mme Vaillant (Linda): Oui, mais on veut mettre en place les meilleures pratiques, il faut mesurer les meilleures pratiques.

M. Drainville: C'est ça, c'est ça.

Mme Vaillant (Linda): Qui va les mesurer? À notre sens à nous, l'INESSS devrait les mesurer.

M. Drainville: O.K. Ça, si vous avez raison, ce n'est pas clair non plus.

Sur la question... Bon, la page 11, article 13, qui traite de la création éventuelle d'un registre d'informations visant à suivre l'utilisation des médicaments. Alors là, je cite en fait votre mémoire, vous dites: «De tels outils sont indispensables à la mise en oeuvre de la Politique du médicament», etc. «Or, les établissements de santé accusent un retard considérable sur les plans technologique et informationnel. Le Dossier de santé du Québec, que l'on invoque souvent comme étant la panacée, ne permettra pas à court ou à moyen terme d'obtenir ce type de données.» Ah non?

Mme Vaillant (Linda):«À court ou à moyen terme».

M. Drainville: Mais c'est pour ça... c'est pour ça qu'il est créé.

Mme Vaillant (Linda):«À court ou à moyen terme».

M. Drainville: Alors, pourquoi est-ce qu'il ne permettrait pas de le donner?

Mme Vaillant (Linda): Écoutez, on a parlé il y a un instant d'infections nosocomiales, là. On a, pour toutes sortes de raisons, là, peut-être attendu jusqu'à un certain point, et on s'est retrouvés avec une série d'éclosions d'infections un peu partout. Il y a un programme-cadre qui a été proposé par le ministère, qui vise, dans le fond, un peu d'adresser cette question de problèmes d'infections nosocomiales et de gérer l'antibiothérapie. Il y a des unités, il y a des choses qui doivent être mesurées. Les établissements de santé devraient être capables de mesurer ce qu'on appelle la DDD, là, la dose définie journalière d'antibiotiques. On n'est pas en mesure de le faire. Les établissements ne peuvent pas fournir cette information-là, on n'a pas les outils sur le plan technologique pour le faire. Alors, ce qu'on dit, nous, c'est qu'il y a un retard, il faut être conscient de ça. Et on est...

M. Drainville: Il y a un retard dans l'implantation du Dossier de santé du Québec.

Mme Vaillant (Linda): Il y a un retard dans l'utilisation des technologies dans les établissements de santé, et particulièrement dans les départements de pharmacie. On a abordé la question tantôt avec SARDM. SARDM, c'est l'un des volets. Il y a le volet informationnel là-dedans.

M. Drainville: SARDM?

Mme Vaillant (Linda): C'est le truc de robotisation, là, dont on parlait tantôt avec M. le ministre. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que, nous, on ne croit pas qu'à court ou à moyen terme on va être capables de faire ça. Je vous parle d'antibiothérapie, il y a un programme-cadre qui existe pour le faire fonctionner. Il faut être capable de fournir des données; on ne peut pas les fournir, on n'a pas les outils technologiques. Ce n'est pas demain matin, avec le Dossier de santé du Québec, qu'on va pouvoir faire ça, là.

M. Drainville: Pourquoi pas?

Mme Vaillant (Linda): Alors, c'est pour ça qu'on dit «à court et à moyen terme».

M. Drainville: Mme Vaillant, pourquoi pas?

Mme Vaillant (Linda): Parce qu'on n'en est pas là, on est dans un projet pilote qui permet présentement aux pharmacies externes de fournir des données. On est loin de la question des établissements de santé, dans le Dossier santé Québec, là. On n'a pas encore commencé tout à fait à traiter de ce qui va être inclus dans le Dossier santé Québec, en établissements de santé.

M. Drainville: Vous faites référence au fait qu'on est très, très, très en retard dans la mise en oeuvre du Dossier de santé du Québec.

Mme Vaillant (Linda): Je fais référence au fait... Je réponds à votre question. À court ou à moyen terme, à notre avis, ce ne sera pas possible de compter sur le Dossier de santé Québec pour avoir ce type d'information là. Et ce type d'information là est nécessaire à la mesure des résultats dont on parlait tantôt.

M. Drainville: C'est parce que, dans votre mémoire, quand vous dites... vous recommandez, proposition n° 13, «que la mise en place d'un registre d'information»... Bon: «L'APES recommande: que la mise en place d'un registre d'information permettant d'assurer le suivi de l'utilisation des médicaments soit prévu indépendamment du projet de Dossier de santé du Québec.»

Mme Vaillant (Linda): On a des doutes sur la réalisation du Dossier de santé du Québec, qu'il puisse aller aussi loin que ça, pour nous, en établissements de santé. C'est ça que ça veut dire.

M. Fortier (Charles): Qu'il puisse nous permettre de mesurer ce qu'on a appelé tantôt le «defined daily dose», le DDD, en antibiothérapie. Ce n'est pas juste du partage d'information, c'est un peu plus compliqué que ça. Il faut que les systèmes d'information soient plus fins encore que le dossier de santé électronique du Québec. Le dossier de santé électronique du Québec va nous permettre de partager l'information mais ne permettra pas de calculer ce qu'on dit, l'exemple qu'on donne aujourd'hui. Il faut aller peut-être un petit peu plus loin. Puis on travaille dans des milieux spécialisés, aussi. Un hôpital, il faut penser que c'est... Quand... lorsqu'on est hospitalisé, c'est en général un peu plus compliqué. Nos systèmes d'information ont besoin peut-être d'être rehaussés pour chercher la fine information.

M. Drainville: Oui. En tout cas, moi, je tiens à redire, là, que le Dossier de santé du Québec, pour nous, là, c'est une priorité, et on est extrêmement, je dirais... on n'en revient pas de la façon dont cette histoire-là est gérée. On pense que l'informatisation du réseau de la santé, qui ne se limite pas à l'installation du DSQ, je suis d'accord avec vous, on pense que c'est une priorité nationale, c'est une des meilleures façons qu'on ne puisse pas trouver pour aller chercher des gains d'efficience puis des gains d'efficacité, et, de la façon dont ce gouvernement-là gère ça actuellement, c'est un désastre. Bon.

Et je comprends que vous faites une distinction entre les deux, et je comprends exactement ce que vous dites. Vous dites: Dans le fond, le DSQ, malgré les retards, malgré tout ça, même s'il fonctionnait, il ne ferait pas nécessairement...

M. Fortier (Charles): C'est ça, exactement.

M. Drainville: ... -- c'est votre avis en tout cas -- le travail...

M. Fortier (Charles): Qu'on fait référence ici.

M. Drainville: ...que vous souhaitez, que vous souhaitez pour vous, pour vos pharmaciens. Et donc vous dites... Moi, je serais... Spontanément... Je ne suis pas un expert en la question, mais je vous dirais... Mon réflexe, ce serait, si le DSQ fonctionnait, là, s'il était en train de se mettre en oeuvre, parce qu'il y a un volet pharmaceutique très important dans le DSQ, mon premier réflexe, ce serait de vous dire: Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen d'ajuster le fonctionnement du DSQ pour y inclure ce que vous souhaitez? Puis je pense qu'il ne faudrait pas l'exclure, ça, parce qu'encore une fois je pense qu'il faut trouver puis il faut chercher les meilleures façons possible d'obtenir les meilleurs rendements puis les meilleurs résultats avec ce qui existe ou ce qui est planifié actuellement. Et donc d'installer un système informatique parallèle au DSQ, je me dis: Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen d'essayer de faire en sorte que le Dossier de santé puisse s'ajuster éventuellement à vos besoins? Mais, bon, la question est théorique, puisque le DSQ ne fonctionne pas puis il n'est pas parti pour fonctionner avant un bout. En tout cas, dans le domaine pharmaceutique, ça ne va pas très bien, on s'entend. Bon.

Financement spécifique. Là, là, le ministre nous dit: Il va y avoir des gains d'efficience; on va fusionner ces deux organismes-là, il va y avoir des gains d'efficience. Donc, quand vous demandez, vous, «un financement initial spécifique et complémentaire au budget déjà octroyé [...] à l'INESSS», vous entendez le ministre vous répondre: Vous ne l'aurez pas, il n'y en aura pas, parce qu'on va prendre les deux budgets existants, on va fusionner les deux organismes, puis là, comme par magie, on ne sait pas trop comment, là, sans aucune disruption d'ailleurs, aucune... «disruption», c'est un mot anglais, là, mais sans aucune... C'est quoi, le mot qu'il utilisait? Chambardement ou...

Une voix: Turbulence.

M. Drainville: Turbulence, merci beaucoup. Sans aucune turbulence, cette fusion-là va se faire, là, harmonieusement, sans aucune difficulté, tout va marcher comme sur deux roulettes, il n'y aura aucun problème d'intégration ni problème de transition, puis tout d'un coup on va se retrouver avec des gains d'efficience, puis là on va avoir de l'argent supplémentaire, apparemment, pour couvrir les mandats qui s'ajoutent. Comment vous réagissez quand vous entendez ça?

Mme Vaillant (Linda): Écoutez, dans l'optique du médicament -- on va essayer de rester, nous, dans l'optique du médicament -- il y a très certainement des gains à obtenir. Notre préoccupation, là, pour la proposition dont vous parlez, là, c'est de s'assurer que, pour mettre en place l'INESSS, tout ne doive pas reposer sur des économies éventuelles, parce que ça va être long arriver à vraiment mettre en place les meilleures pratiques dans plusieurs secteurs d'activité, qui ne seront peut-être pas tous aussi rentables qu'on le souhaiterait. On l'a vu par le passé, là, ce n'est pas toujours aussi rentable qu'on veut et ce n'est pas toujours nécessaire, là. Ce qu'il faut, c'est de se demander: Est-ce que c'est pertinent? Et, à partir du moment où on va mettre en place tout ça, probablement qu'on va avoir certaines économies, éventuellement. Mais notre crainte, c'est qu'au départ, si on n'ajoute pas au financement actuel, certains éléments ou certains pans, dans le fond, de l'INESSS ne puissent pas être réalisés.

Je vais vous donner un exemple tout petit dans la Politique du médicament. On sait très bien que la mise en place de la révision de la médication à domicile par des... nos collègues pharmaciens de première ligne, là, les pharmaciens du secteur privé, ça va éventuellement rapporter, ça va être de l'usage optimal des médicaments. Ça fait deux ans, trois ans que la Politique du médicament est là. Il y a eu toutes sortes de projets, toutes sortes de gens qui se sont réunis sur la révision de la médication à domicile, et il ne se passe toujours rien. Pourquoi? Parce que ça coûte de l'argent, ça coûte de l'argent de mettre les projets en place, et finalement on ne les met pas en place.

Donc, notre préoccupation, c'est qu'au sein de l'INESSS on ait le même problème, qu'on puisse mettre des structures en place, qui éventuellement vont possiblement générer des économies mais qui, au départ, requièrent des sous, là, pour partir la machine. Ce qu'on dit, c'est: Il faut s'assurer qu'il y ait un financement initial qui permette éventuellement de mettre en place des structures qui vont nous amener vers l'usage optimal des médicaments. C'est ça, là, le but de la proposition 15.

M. Drainville: Moi, je veux que ce soit bien clair, moi, je souhaiterais qu'effectivement cette fusion génère des gains d'efficience. C'est ça qu'on recherche, on recherche ça actuellement, pas juste avec la création de l'INESSS, on recherche ça partout dans le fonctionnement du réseau de la santé. Qu'est-ce que vous voulez, à 27 milliards, on a le droit de se demander... de se poser la question: Comment pourrait-on s'y prendre pour essayer d'économiser à un certain nombre d'endroits pour qu'on puisse prendre cet argent-là puis l'investir dans des besoins prioritaires? Je suis d'accord avec l'idée, moi, des gains d'efficience; je ne les crois pas possibles, en tout cas à court terme, avec la nouvelle bibitte qu'il vient de... qu'il va créer avec 67. Et c'est là qu'à mon avis il ne nous dit pas tout. Je pense qu'effectivement, si tu veux créer une nouvelle machine avec un mandat élargi... Puis là, si vous voyiez tous les gens qui se présentent à votre place, qui viennent dire: C'est formidable, les services sociaux qui s'ajoutent, puis c'est formidable, les guides de pratique qui vont être faits, puis c'est formidable, ci, puis c'est formidable, ça, puis le ministre dit: Oui, on va faire tout ça, là, en plus de ce qui se fait déjà, pas une cenne de plus. Aïe! Tu sais, à un moment donné, là... Puis il me semble que, comme contribuables, surtout dans le contexte actuel, on aurait le droit de se faire dire les vraies affaires.

**(12 h 20)**

Mme Vaillant (Linda): Mais, M. Drainville, en tout respect, je pense qu'en pharmacothérapie il y a des gains à obtenir.

M. Drainville: Donnez-moi un exemple.

Mme Vaillant (Linda): Écoutez, là...

M. Drainville: Ou des exemples.

Mme Vaillant (Linda): En cardiovasculaire, en oncologie. Je pense qu'il y a des gains, là.

M. Fortier (Charles): En antibiothérapie.

Mme Vaillant (Linda): En antibiothérapie. Je pense que les choses que le Conseil du médicament a faites jusqu'à présent sont bonnes. Le problème, c'est l'intégration de ces structures-là, la façon dont ça va se faire puis les avis contradictoires de différents autres organismes. Mais honnêtement je pense qu'il y a des gains d'efficience, peut-être pas à court terme, là, je vous rejoins, mais il y en a nécessairement, possiblement à long terme.

M. Drainville: Mais c'est important, ce que vous dites là.

Le Président (M. Kelley): Dernier commentaire.

M. Drainville: M. le Président, je demanderais votre clémence et possiblement même le consensus de la commission pour entendre c'est quels... Donnez-nous un ou deux exemples, parce qu'on court tellement après ça actuellement, on a tellement le goût de se faire donner des exemples très concrets de ce qui pourrait être fait plus efficacement et plus optimalement dans le système de santé. Donnez-moi... Quand vous me parlez d'oncologie ou de soins cardiovasculaires, d'antibiotiques, donnez-nous des exemples. Qu'est-ce que vous voulez dire?

M. Fortier (Charles): On va...

Le Président (M. Kelley): M. Fortier.

M. Fortier (Charles): Oui. On va donner un exemple, mais ce n'est... Je ne veux pas juger personne, je ne veux pas dire, dès le début, que c'est mal utilisé. Prenons une molécule en gastro, qui coûte peut-être très cher puis qui va peut-être... peut être mal utilisée. L'INESSS va élaborer un guide de pratique. Où l'INESSS devrait investir, probablement, c'est dans la transmission des connaissances: Comment je fais pour m'assurer que chacun des cliniciens qui prescrit lesdits médicaments en gastro ou les pharmaciens qui servent ces médicaments-là ont tous la même connaissance et partagent ce guide de pratique là? Peut-être que, là, je vais avoir une économie à long terme, mais au début ça va me demander un certain investissement pour vraiment transmettre ces connaissances-là puis s'assurer de ça.

Je n'embarquerai pas ce matin dans des exemples très précis avec des noms de molécules, c'est sûr que non, là, mais je donne un exemple fictif. On pourrait dire la même chose au niveau de la MPOC: Comment s'assurer que les médicaments sont bien utilisés? Puis, au-delà de ça, je devrais probablement faire des cliniques de réadaptation pour l'ensemble des malades, tout ça. On doit faire ça, mais sûrement que, si tout le monde... Les guides de pratique, s'ils sont bien faits, s'ils sont faits par des professionnels, s'il y a un transfert de connaissances adéquat... Et ça, probablement qu'on devrait investir de l'argent pour s'assurer que ce soit bien fait. Les économies viendront plus tard, mais il y aura peut-être un investissement qui sera demandé au début.

M. Drainville: Mais, quand vous parlez des antibiotiques, Mme Vaillant...

Le Président (M. Kelley): Mais très rapidement parce que...

M. Drainville: ... -- oui -- vous faites référence au fait qu'il y a surprescription d'antibiotiques et donc qu'on pourrait avoir une utilisation plus efficace des antibiotiques? C'est ce à quoi vous faites référence?

Mme Vaillant (Linda): Bien, écoutez, il peut y avoir une durée de traitement qui est à réajuster, il peut y avoir une formulation. Est-ce qu'on a besoin d'intraveineux pendant 10 jours, sept jours? Quand est-ce qu'on fait le transfert à un médicament par voie orale? Il y a plusieurs choses, vous savez. Écoutez, l'observance des patients aux différents traitements, ça a un impact, ça. Si personne ne mesure est-ce que les patients prennent ou pas leurs médicaments, est-ce qu'on s'assure que les patients, quand ils rentrent pour un infarctus, sortent avec de l'aspirine, tiens, pour être sûrs qu'ils ne reviennent pas à l'urgence... Il y a beaucoup de pratiques qui peuvent être mises en place et qui vont éventuellement générer des économies, mais la question, c'est: Il ne faut pas commencer par l'économie, il faut commencer par mettre en place les structures et être capable éventuellement d'aller chercher de l'économie.

M. Drainville: Ça, c'est le travail de l'INESSS?

Mme Vaillant (Linda): Bien, à notre sens, l'INESSS, c'est son travail, mais ça va lui prendre de l'argent pour faire ça, au départ.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député des Îles-de-la-Madeleine, vous avez une question ou...

M. Chevarie: Bien, un commentaire, mais peut-être que... Je ne sais pas si...

Le Président (M. Kelley): Oui, oui.

M. Chevarie: Oui, je vais y aller?

Le Président (M. Kelley): Il reste les cinq minutes, alors...

M. Chevarie: O.K. C'est que, tantôt, on mentionnait qu'il n'existe pas de système d'évaluation des établissements du réseau de la santé, puis c'est tout à fait à tort qu'on mentionne ça, parce qu'il en existe un. Et je vais prendre quelques minutes pour vous expliquer comment ça se passe.

J'ai été... j'ai fait ma carrière professionnelle dans le réseau de la santé, et, depuis 2005, tous les établissements de santé et de services sociaux sont soumis à des processus d'agrément. Comment ça se fait, ça, ce processus-là? Chaque établissement doit obligatoirement désigner, quand il fera un processus d'agrément... Et c'est un processus continu, aux trois ans. Et, au ministère de la Santé et des Services sociaux, il y a deux organismes qui sont accrédités pour faire ces évaluations-là au niveau de la qualité et de la sécurité des services et des soins. C'est Agrément Canada et le Conseil québécois d'agrément. Et, à ce moment-là, il y a un plan qui est établi, une planification avec les établissements, et on procède à une date donnée où il y a une équipe de visiteurs qui rentre dans l'établissement -- généralement, c'est une équipe de quatre, cinq personnes -- et qui passe une semaine à l'intérieur de l'établissement pour faire le processus, pour évaluer les normes, les meilleures pratiques, les processus cliniques, en fonction des normes reconnues et des meilleures pratiques reconnues. Et il y a des cotes, il y a des évaluations là-dessus, il y a un rapport qui est produit avec des recommandations, effectivement, parce que c'est un processus qui vise l'excellence en termes de qualité et de sécurité, au niveau des services. Et ce n'est pas nécessairement un processus statique, c'est une processus qui se fait en mode continu. Et, à chaque année... à chaque trois ans, c'est-à-dire, on recommence le processus, mais on a un délai de trois ans au niveau de chacun des établissements pour travailler sur les recommandations qui sont faites par l'organisme, que ce soit Agrément Canada ou encore le Conseil québécois d'agrément.

Alors, c'est comme ça que ça se passe. Et on vise évidemment tous les secteurs d'un établissement de santé et de services sociaux, et particulièrement les CSSS sont visés. Alors, c'est les blocs opératoires, c'est l'urgence, c'est les unités de soins, c'est les soins à domicile, c'est les services sociaux, évidemment, les départements de pharmacie, les départements de psychiatrie, ainsi de suite. Alors, c'est un peu comme ça que ça se passe depuis 2005.

M. Drainville: Malgré l'agrément, on a été obligés de faire...

Le Président (M. Kelley): Non, mais, s'il vous plaît, la parole...

M. Drainville: ...la tournée des blocs opératoires, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Non. Monsieur, vous avez épuisé votre temps. J'ai été très généreux à ma gauche. M. le ministre, s'il vous plaît, derniers commentaires.

M. Bolduc: Moi, j'étais visiteur pour le conseil canadien, là, puis je peux vous dire que c'est très rigoureux. On arrive avec une équipe complète, on visite tous les secteurs, et tous les employés de l'hôpital savent que le conseil canadien va être là pendant cinq jours avec un rapport complet d'à peu près 15 à... Je suis très surpris que vous dites qu'il n'y a pas d'évaluation, parce que...

Le problème que vous avez, c'est que les gens nous disent: Il ne se fait pas... Ce n'est pas vrai, il se fait de l'évaluation par le conseil canadien, il se fait de l'évaluation. Après-midi, on va rencontrer l'Association des CMDP. L'AQESSS a des indicateurs. Et tantôt... Je suis très surpris qu'après trois ans comme député de... puis critique dans la santé que vous ne sachiez pas que les données sont disponibles sur le site Web. Et, dans cinq minutes, allez sur un ordinateur, allez sur le site du ministère, vous pouvez avoir toutes les données d'attente...

Le Président (M. Kelley): ...vous adressant à la présidence, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Bolduc: M. le Président, sur le site du ministère, on a les indicateurs de chacun des établissements pour les listes d'attente en chirurgie. Je tiens à rappeler que c'est 93 % qui sont rappelés... qui sont opérés à l'intérieur de six mois. En cardiologie, c'est disponible en temps réel. Au niveau de l'urgence également, les indicateurs sont disponibles. Et les établissements de santé, à chaque année, doivent signer une entente de gestion dont, entre autres, le taux de clostridium, par rapport aux infections nosocomiales, par rapport aux durées moyennes de séjour, le délai pour intervenir dans certaines affaires. C'est une entente avec multiples indicateurs.

Donc, de dire que c'est un réseau dans lequel on ne mesure pas, c'est faux. Le travail est fait. Ça, c'est clair, le travail est fait. Les indicateurs, on les a. Il faut trouver d'autres mécanismes parce qu'il y a d'autres types d'évaluation qu'on doit faire, dont celui de l'INESSS, et je pense que vous pouvez le reconnaître. Puis on ne peut pas dire que, dans nos établissements, on manque de données. On en a énormément. Il y a encore du travail à faire, il faut travailler à partir de ces données-là pour l'amélioration continue.

Beaucoup aimé votre commentaire: On n'est pas là pour chercher des coupables, on est là pour améliorer. Là-dessus, je vous remercie et je vous félicite du beau travail que vous avez fait.

Le Président (M. Kelley): Dernier commentaire, M. Fortier? Comme... On voit qu'il y aura un débat vigoureux autour de l'étude détaillée de ce projet de loi, je suis certain.

Sur ça, on va suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures, en rappelant aux membres de la commission qu'on a une séance de travail qui va commencer immédiatement sur un autre mandat. Bon appétit, tout le monde, et à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président (M. Kelley): À l'ordre, s'il vous plaît! On va reprendre nos travaux. La Commission de la santé et des services sociaux est réunie afin de poursuivre aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 67, Loi sur l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux. Nos prochains témoins sont les représentants de l'association... des Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada (Rx & D). Alors, vous êtes les bienvenus. Qui va lancer la balle?

Les Compagnies de recherche
pharmaceutique du Canada (Rx & D)

M. Perron (Claude): C'est moi qui lance la balle, alors...

Le Président (M. Kelley): Alors, M. Claude Perron.

M. Perron (Claude): C'est bien ça.

Le Président (M. Kelley): Parfait. La parole est à vous, M. Perron.

M. Perron (Claude): Merci, M. le Président. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, Mmes et MM. les députés, nous remercions les membres de la Commission de la santé et des services sociaux de nous accueillir aujourd'hui à titre de partenaire important dans les secteurs de la santé et des sciences de la vie, afin de recevoir nos commentaires et suggestions sur le projet de loi n° 67, qui a pour but de créer l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, ou INESSS.

J'aimerais tout d'abord me présenter: Claude Perron, vice-président, directeur général de Shire Canada et président du comité Québec de Rx & D. À ma droite, M. Denis Rousseau, de Merck Frosst, et, à ma gauche, Mme France Mignault, de Janssen-Ortho. À ma deuxième gauche, M. Ghislain Boudreau, de Pfizer Canada.

Nous représentons Les Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada (Rx & D), qui est une association de sociétés de recherche pharmaceutique de pointe. Nos membres sont engagés dans l'amélioration de la santé de la population par la découverte et le développement de nouveaux médicaments et vaccins qui contribuent significativement à la prolongation et à l'amélioration de la qualité de vie des gens.

Les membres de notre association ont une très forte présence au Québec, où ils emploient près de 8 000 personnes. Avec 28 sociétés pharmaceutiques internationales, le Québec abrite la plus grande concentration de sièges sociaux d'entreprises pharmaceutiques au Canada ainsi que les activités de fabrication ou de recherche de 12 des 15 plus gros... importants groupes pharmaceutiques mondiaux. Bien qu'il représente moins de 25 % de la population canadienne, le Québec récolte une très large part des investissements en recherche et développement provenant des sociétés membres de Rx & D, soit près de 45 %. En investissant en moyenne 17 % de leurs ventes en R&D au Québec, nos membres affichent un niveau d'intensité de recherche bien supérieur à celui des autres secteurs industriels.

D'entrée de jeu, nous tenons à affirmer que les membres de notre association ne peuvent qu'appuyer le principe de la promotion de l'excellence clinique en santé et l'utilisation efficace des ressources. Il en est de même des valeurs sous-jacentes énumérées dans le projet de loi. Puisque le médicament représente une composante essentielle du système de santé, le Conseil du médicament y joue un rôle majeur concernant l'accès en temps opportun aux traitements médicamenteux dont la population a besoin.

Dans un cadre formel bien défini, nos membres interagissent de façon régulière avec le Conseil du médicament, et ce, depuis sa création en février 2003. Il nous apparaît que celui-ci a atteint une belle vitesse de croisière. De même, les commentaires reçus récemment à cette commission font ressortir la qualité du travail des interventions de l'AETMIS. Cependant, la fusion de ces deux organismes, jumelée à son mandat très vaste, soulève de nombreuses interrogations auprès de nos membres quant à l'efficience de l'INESSS, comparé aux deux organismes qu'il va remplacer, dans l'évaluation des technologies médicamenteuses et médicales.

Par conséquent, nous recommandons que l'INESSS donne d'abord priorité au maintien et à l'amélioration des fonctions actuelles du Conseil du médicament et de l'AETMIS avant de consacrer ressources et énergies au nouveaux aspects de sa mission.

J'aimerais maintenant vous parler de l'accès, par les patients, aux médicaments requis par leur état de santé. Les politiques adoptées depuis longtemps par les gouvernements du Québec à l'égard de l'accès aux nouveaux médicaments et de la recherche pharmaceutique ont eu pour effet de maximiser les gains pour le système de santé et la société québécoise. Toutefois, au cours des dernières années... une baisse marquée du nombre de nouveaux médicaments remboursés dans le cadre du régime général d'assurance médicaments. En effet, l'inscription de nouveaux médicaments a diminué de plus de 50 % depuis la création du régime général en 1997. Aussi, le remboursement devient de plus en plus restrictif, puisque près des deux tiers des nouveaux médicaments sont maintenant inscrits à la liste comme médicaments d'exception.

Afin de réellement promouvoir l'excellence et s'assurer que la population québécoise profite de soins de santé de classe mondiale, l'INESSS se doit d'inverser cette tendance et rendre davantage de nouveaux médicaments accessibles dans le régime général. Cela favoriserait par le fait même le bien-être des patients québécois.

D'autre part, le gouvernement du Québec a inscrit depuis longtemps la recherche et l'innovation pharmaceutique au coeur même de sa stratégie de développement économique. Il faudrait donc s'assurer que l'INESSS poursuive la mise en oeuvre de l'approche globale de la Politique du médicament et les politiques de soutien à l'innovation adoptées au Québec, telle la récente Stratégie biopharmaceutique. Ce faisant, Québec continuera à profiter des retombées économiques et fiscales importantes d'une industrie de recherche pharmaceutique dynamique.

Nous proposons, dans notre mémoire, une série de recommandations afin que la population ait un meilleur accès aux nouveaux médicaments. Il nous fera plaisir d'expliquer plus en détail la teneur de ces recommandations aux membres de la commission pendant la période d'échange qui suivra notre allocution.

L'esprit d'ouverture de l'INESSS est essentiel pour nos membres. L'énoncé de la Politique du médicament publiée en 2007 concluait qu'une plus grande transparence dans l'ensemble du processus d'évaluation des médicaments était incontournable. On y ajoutait que cet objectif de transparence devrait être soutenu par la participation de l'ensemble des acteurs au processus, incluant les fabricants de médicaments innovateurs.

**(14 h 10)**

De même, nous sommes d'avis que l'INESSS devrait agir en partenariat dans les domaines d'intervention de nature professionnelle, car l'adhésion de tous les intervenants concernés est essentielle pour apporter des changements positifs et durables. L'INESSS doit donc travailler en étroite collaboration avec les corporations professionnelles ainsi que les associations ou groupes professionnels et de citoyens dans l'exécution de ses évaluations et l'élaboration de ses recommandations.

En ce qui concerne les guides de pratique, l'INESSS devrait agir avant tout comme agent facilitateur pour promouvoir les guides que produisent ou diffusent les différents organismes professionnels et organisations académiques, et cela, pour éviter toute duplication. L'usage optimal constitue un des fondements de la Politique du médicament. Nous tenons à souligner que l'INESSS pourra toujours compter sur la collaboration des compagnies membres de Rx & D pour agir comme partenaires responsables afin de favoriser l'usage optimal du médicament au Québec.

Le Comité d'implantation de l'INESSS, précédé par M. Claude Castonguay, proposait un mécanisme de révision des recommandations de l'INESSS, ne serait-ce que pour s'assurer d'une équité procédurale tout en alignant... tout en augmentant sa transparence. Nous sommes confiants que la mise en place des mesures que nous proposons pour améliorer la transparence et les échanges entre l'INESSS et les fabricants diminueront de façon importante le nombre de dossiers litigieux ou susceptibles de faire l'objet d'une révision.

Néanmoins, nous demandons qu'un mécanisme formel de révision apparaisse dans la loi, autant pour l'inscription de nouveaux médicaments, la revue de classes de médicaments que pour la production de guides de pratique. Les modalités d'un tel processus, dont le recours se ferait sur une base exceptionnelle, pourraient être définies ultérieurement.

Pour ce qui est de la composition du conseil d'administration de l'INESSS et de ses comités, nous constatons que le projet de loi est muet sur les qualifications requises pour les gens qui combleront ces postes. Nous croyons qu'en nommant au sein du conseil d'administration des experts, notamment au niveau de l'évaluation des médicaments, la crédibilité de l'INESSS serait reconnue et permettrait de valider encore davantage les recommandations faites par les comités scientifiques avant d'être transmises au ministre. Voilà pourquoi les qualifications requises pour la majorité des membres du C.A. devraient apparaître dans la loi.

Le rapport du Comité d'implantation proposait la création d'un comité d'orientation qui aurait un rôle consultatif auprès du conseil d'administration. Il agirait comme forum d'échange permanent sur les activités de l'INESSS et sur les grandes orientations à prendre en regard des... aux travaux de l'institut. Il serait formé de représentants de principaux organismes québécois ayant des intérêts touchant les travaux de l'INESSS, tels le MSSS, les associations et ordres professionnels, les associations d'établissements, le milieu universitaire, l'industrie et l'ensemble des citoyens.

Nous demandons qu'un tel comité d'orientation soit créé et inscrit dans la loi.

Puisque les décisions et orientations prises par l'INESSS sont susceptibles d'avoir un impact important sur la mise en oeuvre de la Politique du médicament quant au maintien d'une industrie biopharmaceutique dynamique et innovante au Québec, nous proposons également qu'un représentant du ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation siège au conseil d'administration du nouvel institut.

L'importance du rôle et du mandat de l'INESSS justifie une évaluation régulière et externe de sa performance quant à l'atteinte de ses objectifs. C'est pourquoi nous proposons des critères de performance précis, concernant l'évaluation des médicaments, qui seraient analysés après sa première année d'existence et de façon régulière par la suite.

De même, nous considérons trop longue la période de cinq ans prévue à la loi entre les évaluations externes de l'INESSS. Nous proposons plutôt une période de deux ans entre chacune de ces évaluations.

Finalement, nous recommandons que les états financiers et le rapport annuel de gestion produits par l'INESSS soient présentés par ses dirigeants aux membres de la Commission de la santé et des services sociaux lors d'audiences publiques.

En conclusion, les membres de notre association considèrent que la création de l'INESSS peut constituer une occasion d'améliorer l'accès aux nouveaux médicaments et leur usage optimal, le tout en continuité avec les politiques de soutien à l'innovation adoptées depuis plusieurs années par les différents gouvernements du Québec.

Ce faisant, l'INESSS permettra d'obtenir des gains de productivité et d'efficience par le système de santé et surtout favorisera le bien-être des patients québécois. Je vous remercie de votre attention. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Perron. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vais céder la parole au ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Bolduc: Juste une clarification. Je pense que vous avez dit que vous voulez qu'avec l'INESSS ce ne soit pas moins bien que ce que c'était avec le Conseil du médicament. Comment c'était, avec le Conseil du médicament?

M. Perron (Claude): Bien, je pense qu'on a mentionné qu'on a atteint, si on veut, une certaine vitesse de croisière, c'est les termes qu'on a utilisés, c'est-à-dire qu'on travaille dans un encadrement qui est prévisible. On sait qu'il y a toujours trois révisions par année, on connaît les mécanismes de révision. Alors, on voudrait bâtir là-dessus. Dans le fond, on pense qu'on a atteint un certain niveau d'échange et de planification de travail qui nous permet, si on veut, de travailler dans un cadre un petit peu plus prévisible. Alors, c'est un petit peu, là, le but du commentaire.

M. Bolduc: O.K. Puis l'objectif, puis on l'a laissé savoir, c'est de garder cette prévisibilité-là pour vous autres parce que c'est important au niveau de l'industrie de savoir comment ça va être.

Par contre, juste pour vous... pour clarifier, le médicament va être important. Puis il va être aussi important que ce qu'il était puis on va essayer de bâtir sur ce qu'on a déjà eu, de façon à ce que vous n'ayez pas, mettons, de turbulence. On a utilisé ce mot-là ce matin.

L'évaluation va être importante, mais je tiens à dire que les services sociaux vont devenir aussi importants. Pour moi, alors, il va y avoir trois grands bras: celui de l'évaluation des technologies puis probablement l'évaluation de d'autres types, tout ce qui concerne le médicament, et on rajoute à ça les services sociaux. Et ce qu'on veut, c'est de bâtir en plus avec les services sociaux. Puis souvent les gens ont l'impression que, si on donne à l'un, il faut enlever l'autre; moi, ce n'est pas mes principes de gestion. Moi, j'ai plutôt l'impression que, quand on donne à l'un, on va renforcer l'autre.

Et puis c'est comme ça qu'il faut voir l'INESSS, dans une combinaison de tout ça, parce que c'est un patient ou une population, il faut penser comme ça aussi, maintenant, dans lequel on doit offrir tout, autant le médicament, qui est l'outil le plus utilisé en termes thérapeutiques, qu'au niveau des diagnostics, qu'au niveau de l'épisode de soins, les façons de faire et les modes de pratique.

J'aimerais vous entendre également sur la question des guides de pratique. Pour vous, vous dites: Moi, l'INESSS, comme je le vois, il pourrait coordonner les guides de pratique mais ne devrait pas en faire puis devrait utiliser les autres ressources.

M. Perron (Claude): On parle d'agent facilitateur ou de faciliter... On sait qu'il y a beaucoup de guides de pratique qui sont faits par les différentes associations et corporations, et on se demande s'il y a lieu dans certains cas, de dupliquer ces guides-là et il ne serait pas mieux, à ce moment-là, de travailler davantage en partenariat ou en complémentarité avec les différentes associations pour créer ces guides-là. Alors, je pense, c'est l'essence de notre commentaire.

M. Bolduc: O.K. Oui?

Le Président (M. Kelley): ...vous, M. Rousseau.

M. Rousseau (Denis): Peut-être aussi insister sur le fait que, M. le Président, il y a... On peut dire: Oui, l'organisme a produit tant de guides de pratique, mais je crois qu'au bout du compte ce qui est le plus important, c'est la façon dont ils sont mis en oeuvre dans le réseau, l'impact pour les patients. Alors, on se dit: Il y a des... il y a quand même du bon matériel qui existe. Et, si l'INESSS agit comme agent facilitateur et a une influence sur la façon dont ils sont mis en pratique dans le réseau, ça peut avoir beaucoup d'effet sur la santé de la population.

M. Bolduc: Juste pour vous expliquer un peu comment, moi, je vois ça puis je pense que l'INESSS devrait fonctionner, c'est... D'abord, l'INESSS ne doit pas dupliquer tout ce qui se fait ailleurs parce qu'il va travailler pour rien, qu'il s'est déjà fait de l'excellent travail. Deuxièmement, l'INESSS va travailler en collaboration avec les partenaires, les ordres professionnels, on parle du Collège des médecins, l'ordre des nutritionnistes, les infirmières, dans tout ce qui les concerne pour les meilleures pratiques professionnelles. Il ne faut pas enlever la possibilité à l'INESSS de créer son propre comité pour en faire, comme il ne faut pas dire qu'ils vont tous les faire.

Donc, pour moi, la force d'une organisation comme ça, il faut leur laisser la marge de manoeuvre, l'autonomie de décider sur leur fonctionnement. Mais on part avec un principe: on ne veut pas dupliquer.

On veut également qu'il y ait une certaine uniformité au Québec. Sans être coercitif, je pense qu'il faut être capable d'accepter la flexibilité. Mais il faut accepter qu'à la fin peut-être qu'il va y avoir un guide de pratique, puis, s'il est accepté par l'INESSS, tout le monde devrait s'y soumettre, des guides de pratique qui doivent être revus sur une base régulière parce que la science évolue. Et puis également, puis vous l'avez dit vous-mêmes, c'est que souvent il y a une association qui fait un guide de pratique, mais il reste sur la tablette ou il y a seulement que quelques individus qui l'utilisent, alors que ce qu'on voudrait: que les meilleures pratiques soient diffusées partout.

En passant, le plus difficile dans le changement, ce n'est pas de faire un guide de pratique -- ça, vous assoyez un groupe d'experts, vous savez comment ça fonctionne, et rapidement ils peuvent arriver avec un consensus, avec des petites différences de l'un à l'autre -- c'est de prendre le guide de pratique puis s'assurer que partout, dans toutes les cliniques, que tous les professionnels les utilisent. Moi, je pense que c'est ça qui est plus notre difficulté.

La transparence, je suis d'accord avec vous, il faut laisser savoir de façon officielle, avec des corridors de communication très bien déterminés, en quoi ça consiste.

J'aimerais ça que vous me parliez un peu, là, les mécanismes de révision, comment vous voyez ça.

M. Perron (Claude): Bien, écoutez, je pense, au niveau mécanismes de révision, ce qu'on a dit, c'est... ce qu'on propose, c'est qu'à tous les deux ans, dans le fond, on révise la performance un peu. C'est sûr que, dans notre cas, on doit faire référence à ce qu'on vit déjà avec le Conseil du médicament et de s'assurer que la quantité de dossiers révisés... Regarde, c'est un petit peu ce que vous avez mentionné tantôt, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas de turbulence ou de changement, en tout cas perceptible de notre part, en ce qui a trait au travail déjà colossal qui est fait par le Conseil du médicament. Alors, je pense que c'est plus dans cette optique-là, je crois, que notre commentaire se fait, à moins que mes collègues aient d'autre chose à rajouter.

**(14 h 20)**

M. Bolduc: On est ici pour discuter. Il y a beaucoup d'intervenants qui viennent, puis, à toutes les fois qu'on nous parle, bon, conseil d'administration, tout le monde veut qu'on se tienne très loin des compagnies pharmaceutiques. Ça, c'est des... Vous n'êtes pas des gros méchants, là, mais, pour plusieurs, là, c'est perçu comme étant peut-être les gens à plus surveiller. Comment vous voyez votre stratégie de communication, ou d'intervention, ou la... je vous dirais, l'indépendance de l'INESSS par rapport à votre industrie?

M. Perron (Claude): Bien, je pense qu'on parle d'interactions bien... Je ne me souviens pas les termes qu'on a utilisés dans le discours...

Des voix: ...

M. Perron (Claude): ...structurées et formelles, exact, puis je pense qu'on doit continuer d'agir dans ce cadre-là. Évidemment que l'évaluation de médicament fait partie intégrante du rôle de l'INESSS ou en fera partie intégrante. C'est normal qu'il y ait de l'interaction avec l'industrie, mais je pense que ça doit se faire dans des opportunités, ou des forums, ou des plateformes où il y a des échanges formels qui peuvent être faits, O.K.?

Le Président (M. Kelley): M. Rousseau.

M. Rousseau (Denis): Peut-être, dans les termes plus précis, c'est que, quand on parle d'échanges formels, on sait qu'on doit fournir des dossiers très structurés et consistants au conseil ou au futur INESSS. On veut être capables d'avoir des interactions, par exemple, pour savoir quelles sont les informations qui seront requises dans un dossier en particulier. Ça, c'est vraiment un genre d'interaction précise. Maintenant, lorsque le dossier a été soumis, on aimerait pouvoir apporter certains commentaires parfois sur des évaluations formelles des évidences cliniques qui auront été faites à ce moment-là, ou à la fin, une fois que la recommandation est émise, aussi avoir simplement la possibilité de commenter. Donc, c'est dans ce sens-là qu'on voit une ouverture, et on pense que tout ça doit se faire d'une façon transparente et structurée. Il ne s'agit pas, donc, qu'il y ait quelque chose d'opaque derrière tout ce qu'on propose.

M. Bolduc: Vous attendez-vous à avoir un siège sur le conseil d'administration de l'INESSS?

M. Perron (Claude): Ça, on n'en a pas discuté, je dois vous dire. À ce moment-ci, je dirais non, mais c'est sûr que, si on était invités, on serait certainement intéressés.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bolduc: Bien, écoutez, officiellement -- puis je le dis à toute la population -- la réponse: Vous n'en aurez pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bolduc: Ça fait que, tu sais, je voulais juste clarifier ça avec vous, là. Demandez-le pas pour rien, vous n'en aurez pas. Donc, vous ne l'aurez pas, ça, c'est certain. On veut garder l'INESSS comme étant une structure assez pure, sous le moins d'influence possible.

Les membres du conseil d'administration vont être des membres indépendants, qui vont être là pour leur expertise, qu'on va s'organiser pour ne pas qu'il y ait de conflit d'intérêts. Au niveau éthique, ça va être important. Et c'est certain que, moi, je veux respecter la question de leur indépendance. Je ne veux aucune influence de la part de toute industrie, qu'on parle de l'industrie pharmaceutique, qu'on parle des associations. Je pense qu'il y a des endroits où est-ce qu'on peut discuter. Puis l'INESSS, quant à moi, est une structure qui est pure, c'est une structure idéale. Puis c'est sûr que chaque personne a son passé, mais ce qu'on veut, c'est vraiment une structure dans laquelle les gens vont prendre les meilleures décisions dans une perspective d'excellence. Ça fait que je vous évite une étape, hein, si jamais vous y aviez pensé, mais je suis certain que vous ne vous attendiez pas à ça.

Il y a un endroit, par contre, où il va y avoir différentes interactions, qui sont les tables de concertation. À la table de concertation, il va y avoir des joueurs... Encore là, on veut avoir une table qui est... avec les partenaires, dans laquelle les gens vont émettre des suggestions, mais je vous dirais qu'encore là je trouve que l'industrie, à la limite, devrait se tenir un petit peu loin de ça. Je pense qu'il y a d'autres façons d'avoir de l'influence. Une table de concertation, ça pourrait être peut-être plus au niveau scientifique des recommandations.

Par contre, une place où que l'industrie peut jouer... puis elle va être très, très importante pour moi, ça va être toute la question... Comme vous disiez, vous êtes ceux qui découvrez les médicaments, qui les mettez sur le marché. Vos études, je pense que vous allez les partager avec le Conseil du médicament, par rapport à l'efficacité, et je pense qu'à ce moment-là ça va vous aider comme industrie, parce que les gens vont voir que vous n'essayez pas de vous ingérer, et ça va nous aider également, nous autres, de garder un processus qui est relativement indépendant pour nous permettre de faire une bonne évaluation.

Et là-dessus, moi, je dois vous avouer, au niveau de l'industrie pharmaceutique, moi, je suis un de ceux qui a une vision positive de l'industrie pharmaceutique. Parce que je pense qu'ici, au Québec, on crée des emplois, on fait de la recherche. Également, puis je peux vous le dire comme médecin, un des plus beaux outils pour... qu'on a pour traiter les gens, c'est le médicament, puis je pense que ça va continuer comme ça. Puis vous nous faites de la très, très belle recherche ici, au Québec. Ça, je pense que les gens doivent le voir: au Québec on a une stratégie biopharmaceutique dans cette perspective-là où on est capable de discuter avec l'industrie pharmaceutique pour faire de la recherche et puis être capable de mettre en place les meilleures pratiques.

Vous avez apporté l'affaire du conseil d'administration avec le MDEIE, là. Ça, je ne suis pas favorable à ça. Je vais vous dire... Je veux vraiment avoir une structure qui est pure. Je ne veux pas avoir de l'influence de l'extérieur. On a une stratégie biopharmaceutique, puis il faut jouer ailleurs. Puis, moi, je pense que, les bons produits, on les inscrit, on les utilise. Où il y a un gros avantage, je dois vous avouer, c'est dans les guides de pratique. Les guides de pratique vont nous permettre d'utiliser de façon optimale les meilleurs soins, les meilleures pratiques professionnelles, les meilleurs outils, entre autres au niveau diagnostique puis au niveau thérapeutique, dans lequel le médicament joue un rôle qui est très, très, très important.

Par contre, au niveau gouvernemental, on a des discussions avec le MDEIE dans les stratégies biopharmaceutiques, et ça, il y a... le lien, il est fort, le lien, il est très, très, très fort.

J'ai retenu tous vos messages également pour les... Une chose qui est intéressante, puis ça, je pense qu'il faut qu'on le regarde, c'est comment on peut accélérer tous nos processus pour diminuer les temps entre le moment qu'un médicament est découvert, réputé efficace et qu'on est capables d'en faire profiter notre population québécoise. C'est certain que j'ai également un grand souci pharmacoéconomique, c'est-à-dire que, quand on a un nouveau produit, il faut non seulement qu'on en bénéficie, mais il faut également qu'il y ait un coût qui est raisonnable. Mais ça, vous avez une expertise là-dedans et vous savez que vous ne pouvez pas mettre un produit sur le marché à n'importe quel prix. Mais ce qui... Moi, je suis, encore là, un de ceux qui pensent que, quand nos patients sont bien soignés, on a une économie à la fin, hein?

Puis le plus bel exemple qu'on a, si vous traitez bien votre patient puis qu'il ne fait pas d'accident cérébrovasculaire, il ne fait pas de maladie cardiaque ou encore il ne fait pas une paralysie et qu'il va, après ça, être mis dans un lit, je pense qu'il y a une économie à faire, puis ça, c'est toute la... le domaine de la pharmacoéconomie. Et je pense que c'est là qu'on a ce qu'on appelle une situation gagnant-gagnant, c'est-à-dire l'utilisation de vos produits, qui vous permet de faire des profits, faire de la recherche, me permettent de diminuer mes coûts de santé à long terme. Et puis c'est dans cette perspective-là qu'on doit faire notre évaluation du système de santé, qui, en passant, a 27 milliards... Puis je veux faire le message, ce 27 milliards, ça a l'air d'être un gros chiffre, c'est un 27 milliards très bien utilisé.

Et, quand les gens me disent: Il me semble qu'il y en a beaucoup, il y en a beaucoup, mais, quand vous rentrez dans le système hospitalier, vous allez chez le médecin et quand il faut traiter bientôt 8 millions de Québécois, il faut voir que ça prend des ressources extrêmement importantes. Et chacun d'entre nous, on trouve que ça coûte cher, sauf que, quand on rentre à l'hôpital, ce que les gens ne voient pas, 10 jours à l'hôpital, c'est des coûts de 7 000 $, 8 000 $, 10 000 $, c'est que chacun d'entre nous, un jour, on est appelés à en bénéficier. Peut-être pas à chaque année, mais on est appelés à en bénéficier. Et je peux vous dire que, sans dire qu'il peut... on ne peut pas faire d'amélioration puis d'optimisation, le 27 milliards, il est très, très, très bien utilisé.

Dont, entre autres, des gens se plaignent souvent qu'au niveau pharmaceutique les coûts des médicaments augmentent. Mais je ferais remarquer qu'au niveau du cancer on... présentement, on guérit des cancers parce qu'on a des molécules pour guérir le cancer, nos taux de maladie cardiaque ont extrêmement baissé parce qu'on a des médicaments pour éviter les maladies cardiaques. Ça fait que vous regardez les bénéfices, puis une société qui coûte plus cher, c'est une société qui n'a pas de système de santé. Les gens meurent jeunes, pas productifs, puis à la fin, également, ils nous coûtent cher parce que les complications en santé coûtent plus cher que le traitement initial pour prévenir. Puis une des préventions qu'on peut faire, c'est au niveau des médicaments. Le message que je veux faire, parce qu'on nous a beaucoup amené que ça coûtait cher, la santé, là, mais je veux voir... Il y en a que, pour la santé, eux autres, c'est la dépense. Moi, je pense que c'est un investissement. Mais il faut essayer de le garder avec un certain contrôle à long terme.

Là-dessus, je vous remercie, puis vous pouvez être assurés que notre gouvernement va être des excellents partenaires pour travailler avec vous autres.

Le Président (M. Kelley): M. Rousseau.

M. Rousseau (Denis): Oui. Peut-être juste un petit commentaire par rapport à la pureté de l'INESSS. Je ne voudrais pas que personne soit sur l'impression que nous sommes une impureté.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bolduc: Non, non, non.

M. Rousseau (Denis): Et, dans le sens de l'usage optimal, quand on parle d'un institut qui est crédible, qui a une influence sur l'usage des médicaments, entre autres, le bon usage, je crois que l'industrie a intérêt à être partenaire et à faciliter l'implantation de ce genre de guide là. Donc, simplement un commentaire.

M. Bolduc: Oui, puis, vous savez, des fois, quand on a deux produits purs puis on les met ensemble, des fois, ça fait un peu d'impuretés. Ça fait que c'est dans... c'est peut-être plus dans ce sens-là. Puis je sais également que, les compagnies pharmaceutiques, entre autres en recherche et développement, vous avez un bon code de déontologie puis un code d'éthique, là, que... D'ailleurs, ce qu'on apprécie, c'est qu'il est bien appliqué. Merci beaucoup.

Des voix: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Marie-Victorin.

**(14 h 30)**

M. Drainville: Merci, M. le Président. Pour ce qui est du dernier commentaire du ministre, 27 milliards, ce n'est pas trop dépenser, M. le Président, il s'agit juste de le dépenser le mieux possible. Et c'est ce que nous recherchons. Nous ne sommes pas ceux qui avons déclaré que, de ce 27 milliards, il serait possible de couper 400 millions sans aucun problème. On attend toujours, d'ailleurs, de voir où il va prendre les 400 millions de coupures dont il nous a déjà parlé, M. le Président.

Par ailleurs, juste pour terminer la discussion que nous avions commencée à la fin de nos travaux, juste avant la pose pour le dîner, sur la question de l'évaluation, M. le Président, on est au courant, nous, qu'il y a des évaluations qui sont faites par les conseils d'agrément. Ce qu'on veut, on veut voir les résultats. Et on ne veut pas qu'on nous arrive avec des piles de documents qui couvriraient l'ensemble de cette table. On veut connaître la liste des indicateurs de qualité du ministère de la Santé. On veut la voir, cette liste-là. On veut voir les résultats par établissement et on veut voir également le classement. C'est ça qu'on veut voir. Pour des fins d'utilisation publique, pour que le public qui paie justement ces 27 milliards puisse savoir quels sont les hôpitaux qui gèrent le mieux leurs urgences, quels sont les hôpitaux qui gèrent le mieux leurs maladies nosocomiales, etc. Ce n'est pas pour pénaliser ou pour être, comment dire, négatifs. Non, c'est dans un esprit constructif, c'est pour pouvoir justement dire: Ah! tel hôpital...

Par exemple, je me rappelle, l'hôpital de Maria, à un moment donné, il y avait eu des résultats qui démontraient à quel point cet hôpital-là performait bien. J'avais fait une entrevue, d'ailleurs, avec le directeur général de cet hôpital-là, à ce moment-là, qui était venu nous expliquer les raisons, selon lui, qui faisaient que Maria allait bien. Alors, moi, ce que je souhaite comme porte-parole en santé, c'est que, pour cet investissement effectivement dans la santé et les services sociaux, qu'on puisse et que le Québécois qui paie pour ça puisse savoir justement où se situent les meilleurs hôpitaux, dans quel domaine, qu'on puisse les comparer et qu'on puisse identifier ceux qui font les choses différemment des autres, qui les font mieux, et desquels on pourrait s'inspirer pour s'améliorer, tout le monde ensemble. Et j'attends toujours, M. le Président, en dépit de ce qu'a dit le député des Îles-de-la-Madeleine, j'attends toujours la liste des indicateurs de qualité, celle du ministère, pas celle des conseils d'agrément, celle du ministère de la Santé, les classements et les résultats par établissement.

Ceci dit, bienvenue. Vous voyez, on est en...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Entre deux.

M. Drainville: Non, mais c'est un débat qui concerne tout le monde, parce qu'on cherche toujours, dans le fond, à établir la pertinence de ce nouvel institut. On essaie toujours de comprendre exactement en quoi est-ce que le système de santé va en sortir gagnant, et vous faites partie de ce système-là, vous y contribuez, et vous y contribuez positivement, je tiens à le souligner.

Cela étant dit, c'est effectivement un gros investissement que l'on fait chaque année dans le domaine des médicaments, puis il faut essayer de trouver une façon, dans ce domaine-là comme dans le reste, pour essayer d'en obtenir encore davantage pour le patient, pour le patient du Québec.

D'abord, je vous amène à la page 10 de votre mémoire. Je cite: «...la fusion de ces deux organismes -- c'est-à-dire AETMIS et Conseil du médicament -- jumelée avec son nouveau rôle envers les services sociaux, soulève de nombreuses interrogations et de grandes préoccupations auprès de nos membres quant à l'efficience de l'INESSS dans l'exécution de son mandat vis-à-vis les technologies médicamenteuses et médicales, par comparaison aux deux organismes qu'il va remplacer.» Donc, vous soulevez des doutes sur l'efficience. Qu'est-ce que vous voulez dire exactement?

M. Perron (Claude): Bien, je pense, puis j'y ai fait allusion tantôt, la crainte qu'on a évidemment, c'est qu'on pense qu'avec ce qu'on a atteint avec le Conseil du médicament, tel qu'il existe actuellement, qu'on avait atteint ce niveau, comment je pourrais dire, de cadre de travail qui nous permet de planifier davantage un peu ce qui va se passer au niveau de la révision de nos dossiers. Et ce qui est notre crainte actuellement, c'est qu'on entre dans un mandat plus large avec l'institut et qu'à ce moment-ci il est possible que ça ait un impact éventuellement au niveau de l'accès à l'innovation, l'accès aux nouveaux médicaments et du timing de cet accès-là. Alors, c'est un petit peu la...

M. Drainville: Oui. Parce que, nous, on l'a dit déjà par le passé, M. Perron, si on veut ajouter de nouvelles responsabilités à l'INESSS avec les budgets actuels, puis effectivement qu'on prend une partie des sous qui vont à l'AETMIS puis au Conseil du médicament actuellement puis qu'on les attribue, par exemple, à la préparation des guides de pratique pour la santé et les services sociaux, puis qu'on n'ajoute pas un sou, il y a effectivement un risque que les missions qui sont bien faites actuellement, de l'avis d'à peu près tout le monde -- le Conseil du médicament, c'est favorable, l'AETMIS c'est également favorable -- bien, si on prend des ressources de ces deux organismes-là pour couvrir les autres missions qui s'ajoutent, il y a un risque, et je pense que c'est ce à quoi vous faites référence, il y a un...

M. Perron (Claude): C'est ce à quoi on fait référence. Je pense que je peux juste mentionner le fait que... C'est sûr qu'on vise toujours l'excellence, et il faut toujours avoir cette vision stratégique dans le temps de créer quelque chose qui va être plus efficace et va permettre éventuellement d'avoir une meilleure gestion, là, des ressources en santé. Ceci dit, je pense que notre intervention dit qu'on devrait le faire par étapes et de s'assurer qu'on ne brûle pas ces étapes-là.

M. Drainville: Mais, vous, vous y croyez, à ces gains d'efficacité?

M. Perron (Claude): Bien, écoutez...

M. Drainville: On va fusionner les deux et on va générer tellement de gains d'efficacité qu'on va pouvoir générer tellement d'argent qu'on va être capables de couvrir les nouveaux mandats sans affecter le travail qui se fait déjà. Vous croyez à ça, vous?

M. Perron (Claude): Bien, c'est-à-dire qu'on a évidemment mentionné dans le mémoire comme quoi on a des inquiétudes, c'est sûr. On les a, les inquiétudes, surtout dans l'implantation de tout ça.

M. Drainville: Là, vous êtes poli parce que vous êtes en présence de beaucoup de gens, y compris le ministre, mais, dans le fond, quand vous dites que vous êtes inquiet...

M. Perron (Claude): Bien, inquiet, c'est qu'on ne sait pas exactement quel genre de forme ça prendra, je pense que c'est un petit peu ça. Mais, en bout de ligne, c'est sûr que, si c'est pour mener à un institut qui permet -- puis, encore une fois, on va parler au niveau de l'évaluation du médicament -- un accès plus rapide à l'innovation, à la gestion optimale des médicaments, bien je pense qu'on aura atteint quelque chose. Mais, d'ici ce temps-là, c'est sûr qu'on doit s'assurer que les étapes entre deux se fassent bien.

M. Drainville: La semaine dernière, nous avons reçu les représentants des compagnies qui fabriquent des médicaments génériques. On a dû vous préparer à cette question, je n'en doute point. Ils ont affirmé que la règle des 15 ans pour le brevet faisait perdre d'importantes sommes à l'État québécois. Ils ont avancé le chiffre de près de 120 millions de dollars par année, et, comme c'est cumulatif, 120 la première, 120 et 120 la deuxième, 120, et 120, et 120 la troisième année, etc., ils arrivaient à un chiffre de 1 milliard sur cinq ans, que la règle des 15 ans qui protège vos produits, les produits de l'industrie du médicament d'origine, faisait perdre donc 1 milliard de dollars sur cinq ans, 1 milliard à l'État québécois. Vous avez sans doute une réaction à ces affirmations.

M. Perron (Claude): On a une réaction. Je pense que, et c'est clair que la... La règle de 15 ans existe depuis 1994. Elle a été appuyée par tous les gouvernements entre 1994 et aujourd'hui. Je vais revenir un petit peu à l'impact économique dont j'ai parlé dans mon allocution. Je pense qu'on ne peut pas dissocier les deux. J'ai mentionné la présence importante de l'industrie de l'innovation au Québec au niveau des investissements R&D. On parle de 400 millions de dollars par année. On parle de 17 % de nos revenus au Québec. On parle évidemment de la présence de l'industrie au Québec, de 12 des 15 plus grosses compagnies pharmaceutiques qui ont soit un centre de recherche ou une usine de fabrication au Québec. Alors, je pense que c'est important de garder ça en tête quand on parle de l'impact de cette règle-là.

Je dois vous dire, M. Drainville, que, moi, je m'en sers, de cette règle de 15 ans là, lors de mes présentations au niveau du siège social de la compagnie. Je pense que c'est une règle qui a permis de distinguer le Québec sur l'échiquier mondial et qui continue de le distinguer comme endroit où on apprécie l'innovation pharmaceutique, et qu'il est important de l'appuyer et de s'implanter ici et d'investir ici.

Je dois rappeler aussi que cette politique-là ou cette règle-là évidemment respecte toujours le choix du patient, le patient a toujours le choix de continuer à prendre le médicament d'origine ou la copie générique.

Et je pense que le dernier point que je voudrais faire à cet effet-là, c'est qu'il y a eu un rapport récent du Bureau de la concurrence canadien qui rapportait que, si les prix des médicaments génériques étaient à la moyenne internationale, qu'on pourrait sauver jusqu'à 800 millions de dollars au Canada par année. Alors, c'est un point que je veux mentionner parce que je pense qu'on ne peut pas non plus regarder ça en isolation, encore une fois. Alors, je vous dirais que c'est les points que je voulais faire.

M. Drainville: Donc, les médicaments génériques sont plus cher au Québec qu'ailleurs?

M. Perron (Claude): Ils sont plus cher au Canada qu'ailleurs, absolument.

M. Boudreau (Ghislain): Au moins 30 %.

M. Drainville: Au moins 30 % plus cher au Canada qu'ailleurs.

M. Perron (Claude): Qu'ailleurs.

M. Drainville: Et est-ce qu'on peut dire donc qu'ils sont plus cher au Québec qu'ailleurs? Est-ce que ça va de soi?

M. Perron (Claude): Qui sont sans doute à parité avec ce qui est au Canada, mais qui sont plus cher qu'ailleurs, définitivement.

M. Drainville: Donc, vous renvoyez la balle...

M. Perron (Claude): Bien, on renvoie la balle... Ce qu'on dit, c'est que, si on parle d'économie, il faut regarder aussi les deux côtés, et, si les prix des génériques au Canada étaient juste à la moyenne internationale, que déjà il y aurait des... on pourrait sauver évidemment au niveau du coût, du prix des médicaments génériques à cet effet-là.

M. Drainville: Vous comprendrez que, nous, on ne va pas faire un arbitrage, à savoir lequel des deux groupes a raison, mais je... La dernière fois, lorsque l'industrie du médicament générique s'est présentée, nous leur avons demandé de nous soumettre des documents pour étayer leurs affirmations, ce qu'ils ont fait. Si c'était possible pour vous de nous fournir des documents qui démontrent dans le détail, davantage dans le détail, le bénéfice économique que le Québec tire de la règle des 15 ans, moi, je l'apprécierais, et je pense qu'il y en a d'autres autour de cette table qui l'apprécieraient également.

Un des arguments qui a été fait... qui a été avancé la semaine dernière, c'est qu'il y a eu quand même une certaine rationalisation dans votre industrie ces dernières années et donc que les retombées économiques, industrielles, fiscales de votre présence et donc les retombées pour le Québec de cette règle des 15 ans ne sont peut-être pas ce qu'elles étaient auparavant. C'est peut-être beaucoup moins intéressant pour le contribuable et le citoyen québécois d'avoir cette règle-là que ça ne l'était auparavant. Donc, je vous invite très cordialement, si c'était possible pour vous, de fournir à cette commission davantage de données qui nous permettraient de se faire davantage une tête comme législateurs. Je pense que ça pourrait être utile pour le débat public.

Je reviens à votre mémoire -- parce que je voulais quand même vous donner l'occasion de réagir à ce qui avait été dit la semaine dernière. Vous parlez du mécanisme de révision, et je n'ai pas posé cette question-là, moi, lors de la présentation de l'industrie générique, mais là je pense que vous avez une occasion de nous expliquer en quoi ce mécanisme de révision qui était prévu dans le rapport du Comité d'implantation de l'INESSS, en quoi ce mécanisme-là est important pour vous.

Je rappelle pour les gens, là, qui écoutent que, dans le fond, ce serait une espèce de mécanisme d'appel. Une fois que l'INESSS prend une décision sur un médicament, ce mécanisme-là vous permettrait de faire appel de cette décision, de demander, dans le fond, un deuxième avis. Expliquez-nous pourquoi c'est important pour vous, parce que, si je ne m'abuse, ce n'est pas prévu au projet de loi, alors que c'était prévu dans le rapport du Comité d'implantation.

**(14 h 40)**

M. Rousseau (Denis): C'est un mécanisme qui existe dans divers autres organismes à travers le monde, et nous croyons que ça devrait être un mécanisme d'usage exceptionnel. On ne croit pas qu'à chaque fois qu'un dossier va recevoir un non on doit aller en appel. Ce n'est pas ce qu'on dit. On dit que ça devrait être une provision prévue dans le projet de loi. Mais nous privilégions avant tout l'amélioration du processus de communication avec l'INESSS dans le sens, là: les détails à fournir dans nos dossiers, les interactions en cours d'évaluation, et, une fois que l'évaluation est faite, la possibilité d'apporter d'autres données ou d'autres informations pour clarifier ou modifier l'évaluation qui en est faite.

Donc, c'est clair, que, nous, au départ, on préfère améliorer les processus actuels, mais on n'exclut pas l'intérêt, que ce soit pour des guides de pratique, que ce soit pour toutes les... dans le cas des services sociaux, que ce soit dans le cadre des recommandations que peut faire l'INESSS, on croit que ça pourrait être intéressant de garder toujours cette possibilité-là, mais, encore une fois, à utiliser sur un usage exceptionnel.

M. Drainville: Est-ce qu'actuellement il y a une possibilité pour une compagnie comme Merck, par exemple, que vous représentez, qui se fait dire non par le Conseil du médicament, pour toutes sortes de raisons, hein, il y a une liste de critères... est-ce que c'est possible pour vous, dans le mécanisme actuel, de faire appel de la décision du Conseil du médicament?

M. Rousseau (Denis): On a une période de 10 jours, une fois que la recommandation est émise, pour commenter le dossier ou revenir avec des choses. C'est quelque chose qu'on apprécie, mais on aimerait quand même que cette période-là soit plus longue, parce que vous comprendrez que, 10 jours, c'est très, très court. Mais...

M. Drainville: Est-ce que ce 10 jours là est conservé dans le projet de loi n° 67?

M. Rousseau (Denis): Il n'y a rien qui indique qu'il ne serait pas... Il n'y a rien qui indique que ce soit conservé ou pas, mais on n'a pas de raison de croire que ça ne le serait pas, parce que les critères d'évaluation du conseil sont restés intégralement les mêmes dans le projet de loi n° 66. Donc, de ce côté-là... Mais on a cette possibilité-là lors de la première évaluation du dossier. Souvent, on est obligés de resoumettre un dossier au complet. Donc, l'idée, c'est d'allonger cette période-là pour pouvoir permettre d'amener d'autres informations mais sans être obligés de resoumettre au complet.

M. Drainville: Donc, un mécanisme de révision qui serait, dans le fond, beaucoup plus complet, qui vous donnerait plus de temps, qui serait plus exhaustif...

M. Rousseau (Denis): Oui.

M. Drainville: ...plus rigoureux que ce qui existe présentement?

M. Rousseau (Denis): On ne veut pas judiciariser l'INESSS, dans le sens que, parfois... Lorsqu'on parle de mécanisme d'appel ou de révision, il y a toute la notion judiciaire où ça devient compliqué, et là il y a des comités, et tout. Non. On veut simplement s'assurer qu'on prévoie un mécanisme de révision. Mais, encore une fois, dans les dossiers courants, on croit que ça peut se faire sans complexifier énormément les choses. Mais, dans des situations exceptionnelles, on pourrait prévoir un mécanisme d'appel.

M. Perron (Claude): Si je peux...

M. Drainville: Évidemment, c'est une des questions que nous soulèverons auprès du ministre. On ne le fera pas maintenant, là, mais il peut s'attendre à ce que ce sera une des questions qu'on lui posera lorsqu'arrivera l'étude article par article. Vous alliez ajouter, quelqu'un?

M. Perron (Claude): Je voudrais juste ajouter, si je peux me permettre, M. Kelley.

Le Président (M. Kelley): M. Perron.

M. Perron (Claude): Je pense à l'intervention du ministre Bolduc au niveau de l'ouverture à réévaluer ces processus-là, d'avoir la possibilité aussi de rencontrer peut-être l'institut avant qu'un médicament soit approuvé par Santé Canada. À ce moment-ci, ce processus-là commence seulement une fois que l'avis de conformité est émis, et je pense que ce serait positif, encore une fois pour optimiser les processus, d'avoir au moins une rencontre et de pouvoir présenter un petit peu ce que cette innovation-là, ce nouveau médicament là amènera dans le traitement de la maladie dans laquelle il sera indiqué.

M. Boudreau (Ghislain): Et je pense qu'à ce moment-là...

Le Président (M. Kelley): M. Boudreau, oui.

M. Boudreau (Ghislain): Merci. Je pense qu'à ce moment-là, ce que ça pourrait aider également... Vous parliez d'études de pharmacoéconomie, je pense que, plus tôt on peut donc introduire ce genre de données pour le conseil ou pour l'INESSS, à ce moment-ci, avant même que le produit ait son avis de conformité, mais je pense que ça peut aider également au processus de révision au lieu de demander a posteriori les données. Donc ça, c'est des choses qu'on pourrait facilement envisager.

M. Drainville: J'ouvre une parenthèse très rapidement, je veux vous dire que votre recommandation 21, «que les états financiers ainsi que le rapport annuel de gestion produits par l'INESSS soient présentés par ses dirigeants aux membres de la Commission de la santé et des services sociaux lors d'audiences publiques», je trouve que c'est une excellente idée. Vous êtes les premiers, à mon avis, selon ma souvenance, à la recommander, cette procédure-là. Actuellement, ce n'est présenté qu'au ministre. Vous souhaitez que ce soit la commission qui en soit saisie, je pense que ce serait une très bonne chose.

L'histoire des conflits d'intérêts. M. le ministre a évoqué tout à l'heure les inquiétudes que certains ont à votre sujet, votre sujet étant au sujet de l'industrie que vous représentez. Qu'est-ce que vous en pensez, vous, de l'article 19 qui prévoit qu'un administrateur pourrait, dans certains cas, être en situation de conflit d'intérêts?

M. Perron (Claude): Bien, si je peux me permettre...

Le Président (M. Kelley): M. Perron.

M. Perron (Claude): Si je peux me permettre de commenter là-dessus, je pense qu'on est... On est d'accord avec le principe de minimiser tout ce qui est situation de conflit d'intérêts, ça, je pense, d'entrée de jeu, c'est notre position. Maintenant, entre balancer, si on veut, l'accès à l'expertise dans certains dossiers qui peuvent être très pointus... Je pense qu'on doit s'assurer d'avoir un mécanisme transparent qui permet déclaration de tout conflit à un expert, mais de pouvoir quand même avoir accès à cette expertise-là dans l'évaluation ultime de ce dossier-là. Alors, on dit: Absolument, il faut minimiser toute situation de conflit d'intérêts, il faut être très clairs là-dessus, mais, dans un contexte de recherche d'expertise, on doit peut-être avoir un mécanisme qui nous permet de faire des exceptions.

M. Drainville: Donc, si je vous comprends bien, vous êtes d'accord avec l'article 19.

M. Perron (Claude): Oui, exact.

M. Drainville: O.K. On fait un peu du coq à l'âne, il nous reste seulement quelques minutes. Vous faites la recommandation suivante dans votre mémoire au sujet de la table de concertation: «Que la table de concertation prévue à la loi fasse place à des tables de concertation dédiées à des thèmes précis tels [que] les services sociaux, [...] technologies de la santé et [...] technologies médicamenteuses.» Fin de citation. Nous, ce qu'on a compris, c'est que la table de concertation visait justement à mettre autour d'une seule table les différents intérêts, les différents agents, acteurs, pour qu'il y ait une espèce de mise en commun de l'information pour justement aider à donner à l'INESSS une direction claire. Ce que vous proposez, c'est non pas... enfin, vous proposez la création de plusieurs tables, donc on n'aurait plus cet avantage, et je vais laisser au soin du ministre le soin de le défendre, là, mais je dirais un avantage théorique en tout cas, d'avoir autour d'une seule table tout le monde.

Là, vous dites: Ayons plusieurs tables pour s'assurer, entre autres, que l'expertise au niveau du médicament ne soit pas trop diluée. Vous n'avez pas peur qu'en proposant ça vous créez les conditions justement où il va y avoir plusieurs silos au sein de l'INESSS puis que les gens ne se parleront pas nécessairement et on n'arrivera pas à l'espèce de gain d'efficacité dans le partage de l'information dont le ministre ne cesse de parler?

M. Rousseau (Denis): En fait, notre souci, c'est de rendre le processus plus efficace. Nous participons actuellement à la table de concertation, là, prévue à la Loi sur l'assurance médicaments, et c'est un défi de faire fonctionner une table. Il y a déjà beaucoup d'intervenants autour de la table, quasiment une quinzaine, si ma mémoire est bonne. Si on se retrouve à ajouter les technologies de la santé, si on se trouve à ajouter les services sociaux, on croit que gérer une telle table et la rendre efficace est difficile. Donc, l'idée de séparer en des tables, ce n'est pas de le faire aux dépens de la vision globale et stratégique mais plutôt de dire: Ayons une façon efficace de prendre les informations, les commentaires des intervenants, et, à un autre niveau, on peut, à ce moment-là, assurer la cohésion de tout ça. Mais c'est quand même... un tel forum où il y aurait un nombre aussi grand de personnes, c'est quand même un grand défi de le rendre efficace, ça, c'est clair.

M. Drainville: M. le Président, je sais que le temps est écoulé, mais je... Comme on n'est pas en retard, je demanderais l'assentiment...

Le Président (M. Kelley): Oui, on peut continuer, parce que...

M. Drainville: ...si ça va, pour continuer encore un peu.

Sur les ententes de partage de risques... Et je rappelle rapidement ce que c'est. Par exemple, ça pourrait être une entente en vertu de laquelle le Conseil du médicament, puis éventuellement l'INESSS, accepte d'inscrire un nouveau médicament, mais il y a une négociation qui se fait entre le Conseil du médicament et la compagnie comme quoi au-delà de, par exemple, 10 millions de dollars de ventes de cette nouvelle pilule, tout ce qui est au-delà de 10 millions, la compagnie retourne l'argent au gouvernement. Ça existe dans d'autres provinces, si je ne m'abuse, ou en tout cas dans d'autres États. Et ça fait un certain temps que les représentants de votre industrie faites des représentations pour dire: Écoutez, on aimerait ça qu'il y en ait, des ententes de partage de risques au Québec, parce que ça se fait ailleurs, et peut-être que, de cette façon-là, on pourrait inscrire de nouveaux médicaments, mais on pourrait protéger le contribuable en s'assurant que ça ne coûte pas trop cher d'inscrire ce nouveau médicament.

Est-ce qu'il serait possible, parce que, là, je ne suis pas sûr qu'on aura le temps d'en discuter en profondeur, mais est-ce qu'il serait possible, dans les documents que vous allez nous faire parvenir, que vous nous soumettiez des exemples d'ententes de partage de risques qui existent ailleurs, dans d'autres États provinciaux ou dans d'autres États nationaux, pour qu'on puisse peut-être d'abord davantage comprendre comment ça fonctionne, puis deuxièmement voir qu'effectivement il y a des précédents qui ont été créés ailleurs puis qui sont peut-être à la fois... qui sont gagnant-gagnant, il faut le présumer, gagnant pour le patient qui a accès à un nouveau médicament, gagnant pour l'industrie qui peut inscrire un nouveau médicament, et gagnant pour le gouvernement qui est assuré que ce nouveau médicament ne va pas coûter plus cher que x millions de dollars, en dessus desquels millions de dollars le gouvernement est compensé? Est-ce que c'est possible pour vous de nous soumettre ça?

**(14 h 50)**

M. Perron (Claude): Bien, moi, disons que ma réponse, puis je vais... évidemment, si vous voulez complémenter... Ma réponse à cette question-là, c'est que je pense que, oui, il y a une ouverture de l'industrie à explorer ça, donc à être partenaire avec le gouvernement et d'explorer quelles seraient ces possibilités-là. Il y a un point qui m'est venu en tête lors de votre allocution, c'est... Je pense, entre autres, aux maladies, aux maladies rares où il est difficile d'avoir des études, des études qui permettent d'aller chercher des données dans des populations de patients et dans des délais aussi qui permettent, dans le fond, d'avoir des données qui seraient révisées lors de demande d'inscription et de pouvoir donc permettre, si on veut, de façon réelle, de collecter ce genre de données là, où il y a un partenariat entre le gouvernement et l'industrie pour donner accès à cette médication-là que le patient a besoin, mais, en même temps, d'aller chercher des données qui permettent de mieux justifier son utilisation. C'est un des exemples qui me vient en tête.

Mme Mignault (France): Si vous me permettez de complémenter.

Le Président (M. Kelley): Mme Mignault, oui.

Mme Mignault (France): Je pense que vous mentionniez au niveau d'interventions entre l'industrie et le Conseil du médicament ou éventuellement l'INESSS. Nous croyons que le rôle de l'INESSS, de par l'excellence et la transparence qu'ils doivent avoir, se situe plutôt au niveau de la détermination de la valeur thérapeutique du médicament. Et ce type de négociation là, que ce soit par des recherches ou encore par des ententes de contenu financier, devrait être à un autre niveau au ministère et non pas résider au sein de l'INESSS ou, actuellement, du Conseil du médicament.

M. Drainville: Mais je ne suis pas sûr que je vous suis, là.

Mme Mignault (France): C'est-à-dire que l'INESSS est un institut d'excellence en santé, tout comme le Conseil du médicament évalue la valeur thérapeutique du médicament. Ça demeure le rôle de l'INESSS de déterminer la valeur d'un médicament avant d'aller dans un processus de négociation ou dans un processus où l'ajout de médicaments serait possible.

M. Drainville: O.K. Mais alors ces ententes de partenariat, éventuellement, si jamais le gouvernement décidait d'en avoir, elles seraient négociées exactement entre qui et qui?

Mme Mignault (France): Entre le ministère et l'industrie. Et nous ne croyons pas que l'INESSS serait la plateforme pour...

M. Drainville: O.K. Donc, vous dites: Une fois que le Conseil du médicament, éventuellement l'INESSS, recommande l'inscription d'un nouveau médicament, s'il doit y avoir une négociation sur un plafond, par exemple, de dépenses, ça, ça doit être... il faut sortir ça de l'INESSS puis donner ça au politique, au ministère.

Mme Mignault (France): Au ministère.

Une voix: Exact, au ministère.

M. Drainville: Très bien. Merci, M. le Président.

Une voix: Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Sur ça, il nous reste... Merci beaucoup, M. Perron, M. Rousseau, M. Boudreau, Mme Mignault, pour votre contribution à notre réflexion.

Je vais suspendre quelques instants et je vais demander aux représentants de l'Association médicale du Québec de prendre place devant moi.

(Suspension de la séance à 14 h 54)

 

(Reprise à 15 h 2)

Le Président (M. Kelley): Alors, la commission reprend ses travaux. Le prochain intervenant, c'est les représentants de l'Association médicale du Québec, représentée, entre autres, par son président, Dr Jean-François Lajoie. Dr Lajoie, la parole est à vous.

Association médicale du Québec (AMQ)

M. Lajoie (Jean-François): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, au nom des membres du conseil d'administration de l'Association médicale du Québec et en mon nom personnel, je tiens à remercier les membres de la Commission de la santé et des services sociaux de permettre à notre organisation de présenter son point de vue sur le projet de loi n° 67 créant l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux.

Permettez-moi tout d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent: d'abord, le Dr Stephen Rosenthal, directeur des ressources informationnelles, et médecin d'urgence à l'Hôpital général juif, et membre du conseil d'administration de l'AMQ; Mme Claudette Duclos, directrice générale de l'AMQ; et Dr Alain Larouche, médecin-conseil qui travaille étroitement avec nous; et moi-même, Jean-François Lajoie, médecin spécialiste en médecine interne travaillant au CHU de Sherbrooke.

L'Association médicale du Québec est la seule association québécoise qui rassemble les omnipraticiens, les spécialistes, les résidents et les étudiants en médecine. L'AMQ compte sur un vaste réseau de quelque 9 500 membres pour réfléchir aux enjeux auxquels est confrontée la profession médicale, proposer des solutions et innover pour repenser le rôle du médecin dans la société et constamment améliorer la pratique médicale.

Qu'il nous soit permis, dans un premier temps, de féliciter le gouvernement d'avoir donné suite aux principales recommandations du comité d'implantation de l'INESSS, dont le rapport a été rendu public en décembre 2008. La création de l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux est, pour l'Association médicale du Québec, une étape décisive et extrêmement importante d'un processus indispensable à l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins et des services sociaux de notre système de santé ainsi qu'à sa capacité à répondre aux besoins de santé émergents de la population.

L'évolution rapide, voire fulgurante, des connaissances, des technologies, incluant les médicaments, et des modes d'intervention de plus en plus complexes et interdisciplinaires commande la nécessité de redéfinir nos actions. Cette redéfinition doit se faire sur la base des données probantes disponibles et sur des considérations de nature scientifique et éthique. Plus que jamais, qualité et pertinence doivent guider nos choix de société et, comme médecins au service de la population, nos choix professionnels.

Alors, notre position est développée autour de quatre grands axes, c'est-à-dire la mission de l'INESSS, ses principales fonctions, son mode de fonctionnement et finalement sa gouvernance et ses mécanismes de reddition de compte.

D'abord, la mission de l'INESSS. D'entrée de jeu, l'AMQ est tout à fait d'accord avec le principe de réunir sous une même entité les fonctions dévolues auparavant à l'Agence d'évaluation des technologies et des modes d'intervention en santé et au Conseil du médicament du Québec. Cette réunion de fonctions suit une tendance mondiale. On en voit d'ailleurs l'illustration au Canada, avec les travaux de l'Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé, le pendant canadien de l'INESSS. Il faut donc reconnaître, et c'est ce que le gouvernement a fait, l'interdépendance accrue entre les médicaments et les autres technologies. Qu'on pense seulement aux tuteurs médicamenteux, à la pharmacogénomique qui est appelée à connaître un essor fulgurant, ainsi qu'aux tests sur les biomarqueurs. Il faut aussi reconnaître que le bassin de professionnels et de scientifiques qu'on retrouve au Québec n'est pas celui qu'on retrouve aux États-Unis, par exemple. Il est donc indispensable de concentrer la masse d'expertise sur les plans cliniques, économiques, pharmacologiques et éthiques et ainsi éviter l'éparpillement de ressources extrêmement compétentes.

Enfin, la mission de l'INESSS est notamment d'élaborer des recommandations et des guides de pratique clinique visant l'utilisation optimale des technologies, des médicaments et des interventions. Tous ces facteurs militent donc en faveur de la mise sur pied d'un organisme comme l'INESSS. Mais pourtant il y a une forme de technologie qui n'apparaît pas dans l'avenir de l'INESSS, et ce sont les technologies de l'information.

Le tout premier énoncé de mission de l'INESSS apparaissant au projet de loi n° 67 est le suivant: «Évaluer les avantages cliniques et les coûts des technologies, des médicaments et des interventions en santé et en services sociaux personnels.»

L'AMQ est surprise de constater que le mandat de l'INESSS, tel que décrit dans le projet de loi n° 67, ne couvre pas, au moins de façon explicite, l'évaluation des technologies de l'information utilisées à des fins cliniques, par exemple l'utilisation du prescripteur, l'aide à la décision clinique, la télémédecine, toutes sortes de technologies de l'information qui peuvent amener des meilleurs soins aux patients, plus sécuritaires, à un meilleur coût.

L'Association médicale du Québec croit que les technologies de l'information et des communications dans le secteur de la santé ne sont pas une fin en soi, mais bien un moyen incontournable pour nous permettre d'adapter notre offre de service aux besoins de santé de notre population. Ces technologies permettent aussi aux individus qui le souhaitent une meilleure appropriation des moyens pour prévenir la maladie ou améliorer, sinon maintenir leur état de santé. Elles sont ainsi le creuset d'un phénomène encore difficile à décrire mais tout de même inéluctable, et ce sont les réseaux sociaux, tant au sein de la communauté professionnelle et de la communauté elle-même qu'entre les professionnels et les personnes participant ainsi à leurs plans de soins.

Les technologies de l'information et des communications sont une composante indispensable dans les domaines de la qualité, de la sécurité, de l'efficacité, de la pertinence, de l'efficience et de la mesure des résultats escomptés. Enfin, vu le phénomène grandissant de l'utilisation du Web pour la recherche d'information ou la mise à disposition des connaissances et l'émergence des réseaux sociaux, nous croyons que les technologies de l'information et des communications seront aussi un élément essentiel dans le fonctionnement d'un tandem équipe de soignants, patients et proches pour la prise en charge des problèmes de santé de nature chronique.

Ensemble, les technologies de l'information sont au coeur des activités cliniques de toute nature. Et devons-nous comprendre que le mot «technologie», qu'on retrouve fréquemment aux articles 4 et 5 du projet de loi, intègre les technologies de l'information utilisées à des fins cliniques?

Il y a une stratégie de collaboration à développer. En effet, il est indispensable que l'INESSS clarifie ses interrelations avec les autres organisations du domaine de la santé au Québec. En particulier, il y a un risque important de duplication entre le mandat de l'INESSS et celui du Commissaire à la santé et au bien-être. La ligne de démarcation n'est pas toujours claire. Il y a risque de confusion.

La mission du Commissaire à la santé et au bien-être est d'apporter un éclairage pertinent au débat public et à la prise de décision gouvernementale pour contribuer à l'amélioration de la santé et du bien-être de la population. Pour ce faire, le Commissaire, entre autres actions, apprécie les résultats atteints par le système et recommande au ministre les changements visant à accroître la performance du système.

De toute évidence, l'évaluation des technologies et de l'efficacité clinique des médicaments sont des éléments qui ont un impact significatif sur la performance du système. Les chevauchements potentiels de juridictions et d'actions apparaissent donc assez clairement. Il y aurait sans doute lieu de considérer des mécanismes permanents de concertation entre l'INESSS et le Commissaire à la santé et au bien-être afin d'éviter la duplication d'études et de mandats.

La révision du panier de services. Le comité d'implantation de l'INESSS a mentionné dans son rapport que l'INESSS devait avoir un rôle essentiel à jouer dans les efforts visant à introduire davantage de rationalité dans la composition du panier de services couvert par le régime public, qu'il s'agisse de l'assurance maladie, de l'assurance hospitalisation ou de l'assurance médicaments.

**(15 h 10)**

L'Association médicale du Québec est déçue de constater que cette fonction, celle de l'évaluation de la composition du panier de services, ne figure nulle part dans le projet de loi. Bien sûr, l'INESSS, par le prolongement de la mission actuelle de l'Agence des technologies et du Conseil du médicament, contribuera à définir la composition du panier de services, notamment en faisant des recommandations au ministre pour la mise à jour des listes de médicaments prévus à la Loi sur l'assurance médicaments et à la Loi sur les services de santé et services sociaux. Il faut toutefois aller plus loin, nous croyons. Le projet de loi devrait être amendé de façon à confier à l'INESSS, de façon explicite, le mandat de mettre sur pied un processus permanent et continu visant à formuler des recommandations sur les services de santé devant être couverts par le régime public.

Comme le prévoit le projet de loi, l'INESSS aura à évaluer les avantages cliniques et les coûts des technologies des médicaments et des interventions en santé. En toute logique, l'institut devrait aussi faire des recommandations à l'effet de cesser d'assurer un acte médical ou une intervention qui ne comporte pas d'avantage significatif sur le plan clinique. Inversement, puisque l'évaluation continue du panier de services assurés va dans les deux sens, l'INESSS pourrait recommander qu'un acte, intervention ou médicament soit dorénavant couvert. Comprenons-nous bien, nous ne recommandons nullement que l'INESSS soit investi d'un pouvoir exécutoire sur cette question. Toutefois, si la mission première de l'INESSS est de promouvoir l'excellence clinique et l'utilisation efficace des ressources, nous voyons mal pourquoi la fonction de faire des recommandations sur la composition du panier de services devrait être absente du mandat de ce nouvel organisme. Il s'agit là d'une omission importante que le gouvernement devrait corriger en amendant le projet de loi n° 67 en conséquence.

Deuxièmement, les programmes et fonctions. L'AMQ est heureuse de constater que, dans la mission et les pouvoirs de l'INESSS tels que décrits dans le projet de loi, il est explicitement fait mention du rôle du nouvel organisme dans la diffusion des recommandations et des guides de pratique clinique.

L'INESSS devrait devenir un dépôt central des protocoles et des guides de pratique basé sur des données probantes et s'assurer que ces outils soient diffusés dans les milieux cliniques. Il faudra prévoir les modalités de transfert des connaissances auprès des professionnels concernés et des établissements du réseau. En ce sens, il faut faire en sorte que les recommandations de l'INESSS s'accompagnent de stratégies et de mécanismes d'implantation de ces recommandations. Il y a donc lieu de distinguer les fonctions liées à l'évaluation de celles liées au processus d'implantation et au suivi des recommandations afin que celles-ci ne restent pas lettre morte. Peut-être l'INESSS pourrait-il même jouer un rôle accompagnateur au sein de divers milieux cliniques. Nous sommes conscients que ces divers éléments relèvent davantage de la régie interne de l'institut, mais nous sommes satisfaits que ces fonctions apparaissent explicitement dans le projet de loi.

Troisièmement, le mode de fonctionnement. L'AMQ accueille avec enthousiasme les dispositions de la loi permettant à l'INESSS de conclure des ententes avec des gouvernements autres que le gouvernement du Québec et avec des organisations nationales ou internationales. C'est là une préoccupation que nous avions clairement exprimée lors des consultations menées par le comité d'implantation.

L'Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé a un mandat identique à celui présentement confié à l'Agence d'évaluation des technologies et des modes d'intervention en santé et au Conseil du médicament. Il n'est donc pas surprenant que le mandat de l'INESSS recoupe celui de l'ACMTS. Il nous apparaît indispensable d'éviter toute duplication d'études et d'analyses. À cet égard, nous ne saurions trop insister sur la nécessité d'instaurer une forme de collaboration entre l'INESSS et l'ACMTS. De plus, cette dernière est en contact étroit avec plusieurs organisations à l'échelle nationale et internationale, ce dont pourrait profiter avantageusement l'INESSS.

Dans le même ordre d'idées, l'AMQ déplore l'absence du Québec dans les études et analyses effectuées par l'Institut canadien d'information sur la santé. Il nous apparaît pour le moins curieux de constater que les échanges d'information avec un organisme comme l'ICIS sont soit inexistants, soit inefficaces. Pourtant, il nous semble que le Québec aurait tout à gagner à pouvoir évaluer sa performance en la comparant à celle des autres provinces. Il y a lieu de s'interroger sur la pertinence de la stratégie de la chaise vide. Lorsque l'on aspire à s'améliorer, il faut accepter de se comparer. En ce qui a trait aux guides de pratique clinique, pour ne donner que cet exemple, l'Association médicale canadienne constitue une source extrêmement riche d'information qui pourrait alimenter les réflexions des équipes de travail de l'INESSS.

Enfin, le gouvernement ne sera pas surpris si l'AMQ demande d'être formellement consultée lorsque l'institut statuera sur la composition de la table de concertation. L'AMQ regroupe les médecins omnipraticiens et spécialistes sur une base volontaire et constitue le lien corporatif officiel vers la profession médicale canadienne. À ce titre, elle se doit de contribuer à la composition de la table de concertation qui aura notamment le mandat de déterminer les sujets prioritaires que l'INESSS devrait examiner.

Quatrièmement, la gouvernance, finalement, incluant la reddition de comptes. La structure de gouvernance prévue au projet de loi indique que le gouvernement a choisi d'adopter une logique de gouvernance stratégique et non une logique de représentation. Fondamentalement, l'AMQ est d'accord avec cette approche. L'article 21 du projet de loi prévoit que le gouvernement nomme les membres du conseil et le président-directeur général après consultation, en tenant compte de leurs compétences.

Nous avons deux commentaires à faire sur la composition des membres... du conseil d'administration de l'INESSS. Tout d'abord, il nous apparaît souhaitable que le projet de loi soit plus explicite quant à la qualité et au profil des membres du conseil d'administration. Le fait qu'un certain nombre de membres du conseil doivent se qualifier comme administrateurs indépendants est une bonne chose. Le projet de loi pourrait cependant aller plus loin et prévoir les qualifications scientifiques et académiques minimales requises pour agir comme administrateur.

Le deuxième commentaire, qui est le corollaire du premier, est lié à la représentation médicale au sein du conseil d'administration. Tout en préservant la logique de gouvernance stratégique, l'AMQ est d'avis que le projet de loi devrait prévoir un nombre minimal de médecins agissant comme administrateurs. De même, le président-directeur général devrait être un médecin.

On ne saurait terminer cette section sur la gouvernance sans aborder l'épineuse question de l'indépendance de l'INESSS par rapport aux pouvoirs politiques. Les dispositions du projet de loi accordent au ministre un ensemble de pouvoirs touchant notamment la nomination du président-directeur général, celle des membres du conseil d'administration, le budget, le plan triennal d'activité, incluant les priorités du nouvel organisme, ainsi que diverses politiques et procédures. Le constat est donc simple à faire: l'INESSS relève du ministre et lui rend compte. La question n'est donc pas tant de savoir si l'INESSS est indépendant du pouvoir politique, mais bien comment il saura acquérir la crédibilité scientifique et professionnelle indispensable à l'atteinte de ses objectifs.

À cet égard, nous ne pouvons que saluer l'obligation conférée à l'institut par l'article 8 du projet de loi de rendre publics les avis et recommandations qu'il formule. Mais ce n'est pas suffisant. L'AMQ souhaite que le projet de loi n° 67 soit amendé de façon à prévoir l'obligation pour le ministre de rendre public, dans un délai prédéterminé, un avis d'intention concernant tout avis ou recommandation émanant de l'institut. Cette garantie d'action, en quelque sorte, aurait l'avantage de lancer un message clair aux milieux cliniques visés par les avis et recommandations de l'institut et ferait en sorte que ceux-ci ne restent pas lettre morte.

Enfin, un mot sur l'article 19. Dire que nous avons été surpris par le libellé de cet article serait un euphémisme. En fait, nous cherchons à comprendre l'intention du législateur sur cette question. S'il y a un organisme qui devrait être à l'abri de toute forme de conflit d'intérêts ou d'apparence de conflit d'intérêts, c'est bien l'INESSS. Aussi, nous croyons que l'article 19 devrait être soit modifié pour interdire explicitement toute forme de conflit d'intérêts chez les administrateurs ou soit carrément abrogé.

En guise de conclusion, l'Association médicale du Québec salue avec enthousiasme la création de l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux. Comme nous l'avons mentionné plus haut, l'un des grands défis que l'INESSS aura à relever sera de faire en sorte que les milieux cliniques puissent s'approprier les recommandations et les guides de pratique clinique qui émaneront de ses travaux et recherches.

L'Association médicale du Québec est la seule organisation médicale du Québec qui regroupe à la fois des médecins omnipraticiens, des médecins spécialistes et des résidents. Elle est également le lien corporatif officiel vers la profession médicale canadienne en vertu de son partenariat avec l'Association médicale canadienne. L'AMQ peut jouer un rôle actif en contribuant au développement de la mission de l'INESSS. Son vaste réseau dans tous les milieux cliniques du Québec en fait un interlocuteur privilégié pour les équipes de travail et de recherche qui seront mis sur pied par l'INESSS.

Les membres de la commission pourront prendre connaissance de l'ensemble des recommandations formulées par l'Association médicale du Québec au mémoire que nous vous avons présenté. Alors, merci, M. le Président, de votre attention, et nous sommes prêts à échanger avec les membres de la commission.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Dr Lajoie. Alors...

M. Bolduc: M. le Président, je devais commencer, mais, avec mon partenaire de l'opposition, je vais partager l'échange.

Le Président (M. Kelley): Alors, si j'ai bien compris, M. le député de Marie-Victorin, vous voulez lancer la balle.

M. Drainville: Voilà.

Le Président (M. Kelley): Alors, la parole est à vous, M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville: Merci, M. le Président. Je m'excuse d'avance, je vais devoir quitter à 15 h 30, donc c'est pour ça que je voulais entamer les questions tout de suite.

D'abord, rapidement, là, il y a un certain nombre de points avec lesquels je suis tout à fait d'accord.

Technologies de l'information, je pense que c'est une excellente suggestion. Je ne sais pas si vous étiez là ce matin, mais j'ai eu l'occasion, ce matin et à bien d'autres occasions, de dire à quel point tout le dossier de l'informatisation du réseau de la santé m'apparaît comme une voie absolument incontournable si on veut améliorer l'efficacité et la productivité de notre réseau, diminuer également les erreurs médicales et peut-être avoir des soins qui, dans certains cas en tout cas, seraient plus humains qu'ils ne le sont déjà, donc la technologie qui pourrait nous aider à avoir un système plus efficace, mais également, dans certains cas, qui permette de mieux soigner notre monde. Donc, c'est une recommandation à laquelle j'adhère.

Une voix: Merci.

**(15 h 20)**

M. Drainville: Parmi... Bon, sur les données comparatives, là, sur l'ICIS, moi, je dois vous dire notre position, puis ça ne vous surprendra pas: on ne pense pas que c'est une bonne idée de confier à un organisme fédéral le soin d'évaluer les résultats des différents systèmes de santé. Par contre, là où on est d'accord, c'est qu'il faut s'assurer de bien comprendre les indicateurs qu'utilise l'ICIS et de rendre nos indicateurs, au Québec, comparables, qu'on soit capables, donc, de se comparer, donc qu'on rapatrie... plutôt que d'envoyer nos indicateurs à Ottawa, qu'on rapatrie d'Ottawa les indicateurs qui existent déjà, qu'on les harmonise avec ceux-là, et donc qu'on soit capables d'évaluer la performance du réseau québécois par rapport aux autres, dans les autres provinces. Ça, je pense que ce serait quelque chose d'intéressant. Et le ministre ne sera pas surpris de m'entendre, parce que je me suis déjà prononcé là-dessus.

L'autre point sur lequel je suis d'accord, c'est sur l'article 19. C'est très bien dit, c'est un euphémisme que d'être surpris de voir un tel article. Et je suis tout à fait d'accord avec vous, il vaudrait mieux le... soit le modifier pour l'interdire ou encore carrément l'abroger.

Bon, là, j'ai... Par contre, j'ai un certain nombre de questions. Le directeur général devrait être un médecin, dites-vous. Ça, ce n'est pas une surprise, compte tenu du fait que vous représentez les médecins, mais je... ou des médecins, mais je serais tenté de vous relancer en disant: Pourquoi pas une infirmière, et, si ça vous inquiète, une infirmière praticienne spécialisée?

M. Lajoie (Jean-François): Écoutez, nous, la raison pour laquelle on suggère que ça devrait être un médecin, c'est que, d'une part, l'ensemble des recommandations, des guide de pratique qui vont sortir de l'institut vont être des guides de pratique qui vont être destinés principalement aux médecins dans leur exercice quotidien. Alors, pour nous, ça semble... c'est important, pour ajouter du poids, une crédibilité, une représentativité à l'INESSS, que le président-directeur général soit un médecin.

M. Drainville: O.K., mais encore? Bien, est-ce qu'il faut...

M. Lajoie (Jean-François): Je veux dire...

M. Drainville: C'est parce que, là... Laissez-moi me faire un peu l'avocat du diable. Il y a des gens qui se sont présentés dans cette commission et qui ont dit: Le pouvoir médical -- et c'est comme ça qu'ils l'ont décrit -- le pouvoir médical prend déjà beaucoup de place dans notre réseau, dans notre système. Et donc ils se sont réjouis entre autres, ces groupes-là, du mandat services sociaux qui est ajouté à l'INESSS. Ils y voyaient une façon de faire contrepoids justement au pouvoir médical et à l'omniprésence de la composante santé dans le fonctionnement de notre réseau. Là, vous nous dites... Visiblement, ce n'est pas votre avis. Visiblement, vous, vous ne trouvez pas que le pouvoir médical ou que la composante santé prend trop de place dans le fonctionnement ou l'évaluation de notre réseau.

M. Lajoie (Jean-François): Nous, on voit ça très positivement, que la composante services sociaux soit associée à la santé, que ce soit Conseil du médicament, AETMIS, les services sociaux. Qu'ils fassent l'objet de recommandations, d'évaluations en profondeur, on voit ça d'une façon très positive. Là où on dit qu'on souhaiterait que le P.D.G. soit un médecin, c'est pour les raisons que je vous ai présentées. Pour nous, en fait, l'ensemble des recommandations qui vont venir, surtout en regard des technologies, que ce soient le médicament, des technologies diagnostiques, thérapeutiques, toute forme d'intervention, les guides de pratique, celles-ci vont être destinées principalement aux médecins en exercice. Alors, on pense que le... qu'un P.D.G. médecin aurait cette sensibilité, si vous voulez, de préparer le terrain pour les futurs guides de pratique qui vont arriver chez les praticiens.

M. Drainville: O.K. Autre question. Vous écrivez à la page 12: «La question n'est [pas] de savoir si l'INESSS est indépendant du pouvoir politique, ce n'est manifestement pas le cas -- on est bien d'accord avec vous là-dessus -- mais bien comment il saura acquérir la crédibilité scientifique et professionnelle indispensable à l'atteinte de ses objectifs.»

Moi, je pense que la crédibilité, elle vient, dans le cas de l'INESSS et des autres organismes qui ressemblent à l'INESSS ou dont s'inspire l'INESSS... Je pense que la crédibilité, elle vient en partie et peut-être en bonne partie de l'indépendance justement de ceux et celles qui vont gérer, qui vont décider.

Et j'aimerais qu'on en discute un peu. Pour moi, ça me semble un peu... un peu évident, mais visiblement vous n'êtes pas de cet avis. Expliquez-moi comment on va pouvoir installer la crédibilité de cet organisme-là, alors que ses dirigeants, le président du conseil, le P.D.G., les membres du C.A. vont tous être nommés par le ministre. J'ai un peu de difficulté. Je crains, je crains que ça devienne un obstacle à l'atteinte de l'objectif crédibilité dont vous parlez.

M. Lajoie (Jean-François): Bien, écoutez, c'est sûr que, quand on... Votre question est légitime. C'est sûr qu'on a... en suivant les travaux de la commission, on a vu que d'autres organisations ont soulevé ça et ont soulevé toutes sortes de mécanismes qui pourraient être mis en place. Je crois que, comme de toute façon l'ensemble des personnes qui peuvent être, si vous voulez, des candidats potentiels sont relativement, dans une société comme la nôtre, relativement restreints, je pense que... Moi, je fais confiance au ministre qu'il va effectivement, dans les termes de la loi, choisir des administrateurs indépendants et conférer l'indépendance nécessaire à l'INESSS pour fonctionner adéquatement.

M. Drainville: Donc, essentiellement, votre réponse, c'est dire: Je fais confiance au ministre et je fais confiance à l'opposition pour surveiller le ministre.

M. Lajoie (Jean-François): Si vous voulez.

M. Drainville: C'est une blague. Vous n'êtes pas obligé de... puis vous n'êtes pas obligé de la trouver drôle non plus.

Une voix: Ce n'est pas drôle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Drainville: Non, c'est ça, ce n'est pas drôle. Ça va.

Une voix: Excusez-moi...

M. Drainville: Parfois, après quelques jours d'auditions ensemble, il nous arrive d'avoir des...

Le Président (M. Kelley): Et je pense que Dr Larouche veut ajouter.

M. Larouche (Alain): Oui, c'est ça, mais...

Des voix: ...

M. Larouche (Alain): Bien là, je ne sais plus si c'est nécessaire que je rajoute quelque chose. Mais il n'en demeure pas moins qu'on recommande quand même un mécanisme de sécurité qui est de dire qu'à chaque fois qu'il y a un avis qui sort de l'AETMIS, le ministre se prononce sur ses intentions sur la réception de cet avis-là, de telle sorte qu'on pourrait être en mesure de bien juger la portée de ceux-là, là.

M. Drainville: Bien, c'est... Vous avez bien suivi la...

M. Larouche (Alain): La conversation?

M. Drainville: Oui, oui, voilà, parce que c'était justement la dernière question que je voulais vous poser, et je voulais que vous nous expliquiez un peu comment cette espèce de mécanisme de sûreté allait fonctionner. Et, si je comprends bien, vous souhaiteriez qu'un article soit ajouté au projet de loi pour... Alors ça, ça veut dire que, quoi, dès que le conseil d'administration, par exemple, prend une décision ou fait une recommandation au ministre, il est obligé de la rendre publique après quelques jours ou quelques semaines. C'est ça?

M. Lajoie (Jean-François): Bien, les rapports sont rendus publics. Ce qu'on voudrait, c'est qu'il y ait clairement un avis d'intention, c'est-à-dire quelle est la procédure qu'on entend... quel est le processus qu'on a l'intention de prendre pour mettre en application, ou comment le guide de pratique va être mis en application, etc. Donc, c'est plus un... On veut avoir comme une assurance du comment. Une fois qu'on a...

M. Drainville: Vous voulez une réponse, vous voulez la réponse du ministre, dans le fond. Vous voulez que la réponse à l'avis de l'INESSS...

M. Lajoie (Jean-François): Oui.

M. Drainville: ...la réponse du ministre à l'avis de l'INESSS soit rendue publique après un certain temps.

M. Lajoie (Jean-François): Oui. On veut un avis d'intention, on veut savoir qu'est-ce qu'on va faire avec la recommandation. Est-ce que c'est une recommandation qui va aller aux établissements? Ça va aller aux praticiens? À quel... etc., là, le processus qui va suivre.

M. Drainville: O.K. Dernière question: Qu'est-ce que ça va changer pour le patient québécois, la création de ce nouvel institut, dans votre esprit, là, très concrètement? Dans quelques années, quand il aura pris son envol, si le projet de loi est adopté bien entendu, qu'est-ce que ça aura changé, à votre avis?

M. Lajoie (Jean-François): Bien, ce qu'on pense, c'est que l'INESSS, avec ses recommandations, avec ses guides de pratique, il va permettre de valoriser les pratiques innovantes, les pratiques gagnantes, les pratiques qui ont vraiment un impact sur la santé des populations. Et, de la même façon, après une certaine période de temps, cinq, 10 ans, on pourrait mesurer, on l'espère, un changement pour nos patients québécois.

M. Drainville: Vous ne croyez pas qu'il serait préférable de conserver ce que nous avons déjà et qui fonctionne plutôt bien, d'après ce que nous ont dit les différents témoins, les différents groupes qui ont témoigné ici? Il ne vaudrait pas mieux garder ce qu'on a et mieux coordonner l'action des différents groupes, des différents organismes qui existent déjà, plutôt que...

M. Lajoie (Jean-François): Je pense qu'on peut tabler sur ce qu'on fait bien puis le faire... puis faire probablement encore mieux, certainement. Puis vous avez parlé du volet services sociaux. Je pense que ce volet-là, certainement, va gagner en s'associant, au niveau synergique, avec les autres intervenants qui travaillent déjà au niveau du Conseil du médicament puis l'AETMIS.

M. Drainville: Les services sociaux font maintenant partie... Vous savez, ils ont... l'AETMIS a reçu le mandat services sociaux en 2009. Ça n'a pas tout à fait encore vraiment débuté, là.

M. Lajoie (Jean-François): Non, c'est ça, oui. Oui.

M. Drainville: Mais vous, bref, votre argument, c'est de dire: Si on met tout ce beau monde là ensemble au sein d'un seul organisme, on va les amener éventuellement à se parler, à partager leurs connaissances, puis le résultat, ça va être...

M. Lajoie (Jean-François): Oui. C'est sûr...

M. Drainville: ... ça va être mieux que ce qu'on a présentement.

**(15 h 30)**

M. Lajoie (Jean-François): Je veux dire, que ce soit dans les établissements... De plus en plus, les gens travaillent en équipes multidisciplinaires, en interrelation avec les autres professionnels. Si on regroupe ces professionnels-là au niveau d'un institut national puis qu'ils produisent des guides de pratique, moi, je vois ça très positivement pour la qualité de nos services dans le futur.

M. Drainville: Je vous remercie. Je dois quitter. Je vais laisser le reste de mon temps de parole à mes collègues, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. Je vais retourner maintenant à M. le ministre de la Santé et Services sociaux.

M. Bolduc: Merci beaucoup. Merci d'avoir toutes les réponses que vous avez données, je pense que ça a éclairé les gens de l'opposition sur la valeur ajoutée du projet qu'on est en train de faire, puis...

Une voix: Vous présumez toujours trop, M. le ministre.

M. Bolduc: Puis j'ai pu constater que, moi, je n'ai pas le droit de faire de farces, mais mon collègue avait le droit de faire des farces. Puis on en a profité.

Tu sais... Juste pour revenir sérieux, l'ICIS, on a rencontré des gens de l'ICIS cette semaine. On partage les données avec l'ICIS. Il y a beaucoup de données qui sont partagées, mais il y a différents indicateurs qui ne sont pas harmonisés, et puis c'est là qu'on a une difficulté. Et puis j'ai rencontré les responsables de l'ICIS cette semaine dans le but qu'on puisse partager.

La différence par rapport à ce qui s'est dit tantôt, c'est que, du côté de l'opposition, ils voudraient qu'on aille chercher les données, qu'on les utilise, mais qu'on ne donne pas nos données aux autres. Bien, ça... Il y a une règle d'or, hein: on ne veut pas faire aux autres ce qu'on ne veut pas se faire faire. Bien, je pense que, si on va chercher les données des autres pour pouvoir se comparer et s'améliorer, il faut accepter que nos données soient partagées avec les autres.

Et je suis d'accord avec l'opposition: ce n'est pas le Canada qui va venir nous gérer. Ça, c'est clair. Ça, là-dessus, là, on est sur la même longueur d'onde. Mais ce n'est pas ça, là. C'est que, si on veut s'améliorer, il faut comparer des indicateurs dans différents systèmes, puis voir... si ailleurs ils font quelque chose de bien, qu'on aille chercher leurs façons de faire. Moi, je suis convaincu qu'ils vont venir plus souvent chez nous qu'on va aller chez eux. Je suis allé en Ontario, j'ai comparé -- puis, je pense, avec l'Association médicale du Québec, on en a déjà jasé, entre autres j'avais fait une présentation avec l'Association médicale canadienne -- où, au Québec, on est... à certains endroits, où est-ce qu'on est des modèles. Puis ailleurs ils ont des pratiques, parfois, qui sont améliorées. Ça fait que je pense qu'il faut comme partager.

L'objectif, là, ce n'est pas l'origine du citoyen, c'est que tous les citoyens doivent bénéficier des meilleures pratiques. C'est ça, c'est ça, l'objectif. Que vous soyez en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario ou au Québec, la médecine, les services de santé, les services sociaux, quant à moi, c'est universel. Et il faut aller chercher les meilleures pratiques pour améliorer les citoyens de chacune des provinces et chacun des pays. Ça, là-dessus, je voulais juste clarifier ça, puis c'est important: on partage déjà et on veut... Et l'ICIS fait déjà des beaux travaux. Également, pourquoi refaire, au Québec, deux puis trois fois des travaux qui sont déjà faits par l'ICIS, qui ont des belles équipes de travail? Mais servons-nous de ces travaux pour compléter, nous autres, pour notre population québécoise.

Un des éléments que vous avez apporté également, puis j'aimerais ça en parler avec vous, c'est la question du Commissaire versus l'INESSS. Je suis tout à fait d'accord avec vous: Commissaire, l'INESSS, c'est deux fonctions complètement différentes. Ils vont avoir... On ne voulait pas mettre dans la loi tous les mécanismes parce que là il aurait fallu prévoir les mécanismes avec les ordres. Mais ce qu'on sait, c'est que chacun a un champ d'intérêt qu'il devra respecter, et le positionnement qu'on fait, c'est que le Commissaire, à la limite, va évaluer des composantes de l'INESSS, parce que, lui, il est responsable de voir à ce que tout fonctionne bien. Ce ne sera pas des... Il faut faire attention à ce que je dis là: C'est qu'il n'évaluera pas l'INESSS, mais, l'INESSS faisant partie d'un système de santé, il va probablement nous dire: Est-ce qu'on a un endroit, dans notre système de santé, où il y a une évaluation objective des technologies, une évaluation objective des médicaments, et est-ce que ce mécanisme-là répond aux standards internationaux? Ça va être ça, le questionnement du Commissaire, puis il va s'occuper de ça pour tout le système de santé.

L'INESSS, elle, s'occupe de l'évaluation, à son niveau, des nouvelles technologies, des processus. Également, on parlait aujourd'hui des technologies de l'information. Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec ce positionnement-là par rapport Commissaire à la santé et l'INESSS, mais on ne veut pas le mettre dans la loi parce que ce serait... ça en ferait... ça ferait une loi un peu lourde, là.

M. Lajoie (Jean-François): Ce qu'on se disait, c'est que le Commissaire à la santé vraisemblablement utiliserait une partie des données qui proviennent de l'INESSS pour justement apprécier la qualité des services, la qualité du fonctionnement du système de santé au Québec, alors... Mais, en même temps, si les deux se mettent à travailler sur des dossiers communs puis... mais pas dans la même direction, là, évidemment, il pourrait y avoir un problème de juridiction, là, tu sais.

M. Bolduc: Oui. Bien, il faut s'attendre à ce qu'il y ait une certaine communication entre les deux...

M. Lajoie (Jean-François): Absolument.

M. Bolduc: ...puis chacun laisse savoir son intention d'évaluation puis de collaborer. Puis, ça, habituellement, on va l'avoir.

L'autre chose que je veux clarifier, puis ça, là, j'ai beaucoup aimé ce que vous avez dit -- vous êtes pas mal les personnes qui nous en avez le plus parlé: la fonction de l'INESSS par rapport à l'évaluation de d'autres types de technologies, dont la télémédecine qui, pour moi, est vouée à un grand avenir, les techniques Web. Parce que, dans le fond, si on fait la promotion de l'excellence, on ne peut plus tenir compte... on ne doit plus tenir compte du fait que ça n'existe pas, ça existe. Puis ça, ça va être un apport. On ne l'a pas marqué dans le projet de loi ou dans ses fonctions, mais c'est non exclu. Je l'ai dit ce matin avec l'APES, ce que je leur ai dit, j'ai dit: Le prescripteur, bien, ça pourrait faire partie des évaluations des bonnes pratiques, et, je vous dirais, jusqu'à un certain point, si on fait un guide de pratique pour la... l'hypertension artérielle, il ne serait pas exclu qu'à un moment donné il y ait des technologies qu'on va évaluer, le sphygmomanomètre, pour être certains que ce soit standard et que ce soit bien fait. Ça, je vous dirais que je suis tout à fait d'accord avec vos remarques et, moi, j'abonde dans ce sens.

Mais, pour l'article 19, il faut regarder comment on peut le travailler. Où ça devient difficile, puis je vais vous donner un exemple: si vous avez un médecin qui siège sur le conseil d'administration de l'INESSS, puis c'est un endocrinologue qui traite le diabète, et puis qu'on fait une recommandation sur le diabète, est-ce qu'il doit se retirer parce qu'il peut être en conflit d'intérêts potentiel, parce que c'est là-dedans qu'il travaille? Il reste là? Des conflits d'intérêts, ça devient difficile parce qu'à un moment donné... Puis il y a quelqu'un qui a fait la remarque, c'est que... Quand on regarde ça, c'est que ça prendrait des gens qui ne connaissent pas ça, qui n'ont pas d'expertise puis qui n'ont jamais touché à ça. C'est là qu'est notre danger par rapport à ça: d'être trop purs, on finit par ne pas avoir l'expertise, puis on ne veut pas de conflits d'intérêts. C'est... Je ne sais pas comment vous voyez ça, cette perspective-là, là.

M. Lajoie (Jean-François): Bien, il me semble qu'au niveau du conseil d'administration... Là, on n'est pas au niveau de la table de concertation ou au niveau des comités permanents, mais là on est vraiment au niveau du conseil d'administration, il me semble que les personnes qui sont là, évidemment vont être là en raison de leurs qualifications scientifiques, académiques, etc., ils pourraient effectivement déjà avoir eu certaines relations qui les placeraient en conflit d'intérêts, mais il me semble que, lorsqu'on va choisir les personnes qui vont être au conseil, on devrait tenter le plus possible de minimiser les conflits d'intérêts. Et, si on marque dans la loi qu'ils peuvent, de façon ponctuelle, afficher un conflit d'intérêts, ça me semble...

M. Bolduc: On va le retravailler.

M. Lajoie (Jean-François): O.K.

M. Bolduc: Ne serait-ce que... Vous savez, quelqu'un fait un bon travail sur un conseil d'administration deux ans, il arrive quelque chose de très particulier, là, qu'il n'est peut-être pas responsable, mais tu pourrais te retrouver en conflit d'intérêts. Est-ce que ça devrait être déclaré? Une chose qui est certaine: toute apparence de conflit d'intérêts devrait être déclarée, mais on favorise à ce qu'il n'y en ait pas, excepté que, quand on arrive dans la pratique, il faut être capables d'avoir du monde qui soit capable de siéger là-dessus aussi, là. Ça fait que c'est des discussions qu'on va avoir lors de l'étude article par article.

J'ai beaucoup aimé votre commentaire sur la question de l'indépendance par rapport au ministre. Ce n'est pas de savoir s'il est relié au ministre, s'il est indépendant, par qui il est nommé, mais, le plus important, c'est la crédibilité des gens qui vont travailler là-dessus et la crédibilité de l'organisation. Et, moi, pratico-pratique, là, que tu mettes quelqu'un n'importe où, que tu le rattaches n'importe comment, si les gens font des rapports qui ne sont pas crédibles, pas reconnus par les experts externes, pas reconnus par les organismes, ça ne donne rien. Même chose si vous avez quelqu'un puis... pour relever...

Puis, nous autres, ce qu'on voyait surtout pourquoi il relevait du ministre, c'est parce qu'il y a aussi une collaboration à faire avec d'autres gens du ministère pour la poursuite des travaux. Bien, à ce moment-là, si c'est crédible, comme l'AETMIS l'est, comme le Conseil du médicament, je pense que c'est une organisation qui va très bien fonctionner.

La question du médecin P.D.G., là, je suis d'accord avec l'opposition quand ils vous ont posé... Ils n'ont pas tranché, là. Mais ce que vous avez dit, c'est vrai: il y a des médecins qui vont être experts, qui pourraient avoir une expertise pour certains sujets, mais il va y avoir aussi les services sociaux, puis il va y avoir des guides de pratique pour les services sociaux, puis également le médicament. Et je pense qu'il faut voir également le rôle du conseil d'administration. Le rôle du conseil d'administration, à la fin, ce n'est peut-être pas la place qu'on va prendre la décision de dire: C'est ça qu'on devrait faire. Ils doivent juste vérifier que tout le reste est bien fait et s'assurer que tous les mécanismes ont été bien mis en place, qu'à la limite ils ont d'autres experts externes qui peuvent les conseiller là-dessus. Ça fait que, moi, je trouve, c'est surtout la valeur de la personne qui va être président du conseil d'administration.

Et, la semaine passée, j'étais à votre rencontre avec vous autres samedi puis j'ai fait un grand discours sur l'égalité entre les professions, et ça briserait un petit peu ma façon de penser de ne pas laisser la possibilité à d'autres types de professionnels, qui ont également des grandes valeurs, de pouvoir soit présider ou être membres de ce conseil, du conseil d'administration. C'est certain que la profession médicale, elle doit s'attendre qu'il y ait des gens de... qui vont être des médecins qui vont siéger là-dessus, comme il va y avoir des professionnels de d'autres... des personnes de d'autres professions qui vont siéger. Je pense que, comme les pharmaciens, on va s'attendre à ce qu'il y ait des pharmaciens, et d'autres types de professionnels.

M. Lajoie (Jean-François): C'est sûr. Il pourrait y avoir une certaine alternance, mais, nous, on croit que ce serait lancer un message fort auprès de la communauté médicale si le P.D.G. était un médecin, autant ça lance un message fort quand le ministre est un médecin. Si le P.D.G. était un médecin, l'institut gagnerait en crédibilité à l'intérieur de la communauté médicale.

**(15 h 40)**

M. Bolduc: Je me suis déjà prononcé que le ministre n'est pas nécessairement médecin. Et puis je suis plutôt égalitaire au niveau des professions. Mais je pense que c'est des attributs, puis ça va beaucoup avec la valeur de la personne. Mais c'est juste pour vous dire où est-ce que je me situe, pour bien faire comprendre à l'opposition que c'est à ce niveau-là que je me situe également, là, je pense que, hein... je pense qu'ils apprécient quand j'ai ce genre de discours égalitaire d'ailleurs, que c'est des valeurs profondes. Ça, je vous le dis tout de suite, ça fait que... Vous savez, on s'entend... on s'entend souvent bien, hein? Puis, je tiens à le dire, ils ne veulent pas que je les appelle mes amis parce que ça brise leur réputation, mais je les considère pas loin de ça.

Des voix: ...

M. Bolduc: Écoutez, je veux vous féliciter, hein? Puis vous êtes une organisation de très grande qualité. J'ai eu plusieurs... plusieurs temps... plusieurs fois l'occasion de le dire. Je vais faire une déclaration d'intérêt: J'étais membre de votre organisation et j'ai toujours dit qu'on avait... que vous faisiez un excellent travail, et vous représentez très bien la gent médicale.

Et je vais vous refaire un autre compliment: vous représentez les médecins, mais vous vous mettez au-dessus de ça, vous, surtout, défendez le système de santé, qui doit être performant. Et, là-dessus, je vous remercie. J'ai eu l'occasion de vous dire que je vous apprécie beaucoup. Merci beaucoup.

M. Lajoie (Jean-François): Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte: Bonjour. J'aimerais ça vous entendre parler... Il y a eu... M. le ministre en a parlé un peu précédemment, là, par rapport à... Dans votre mémoire, vous parlez beaucoup de l'INESSS versus le Commissaire à la santé et au bien-être. Dans le rapport Castonguay, bon, il était recommandé d'ajouter le Commissaire à la santé et au bien-être, de le fusionner. Moi, j'aimerais ça vous entendre parler, là, davantage à ce niveau-là, là, parce que c'est une préoccupation, avant de partir en adoption article par article pour le projet de loi, là, de bien comprendre la position des groupes qu'on entend puis qu'on reçoit. Puis j'aimerais ça que... Parce que vous semblez avoir des inquiétudes à ce niveau-là, par rapport au dédoublement et... Dans le projet de loi, ce n'est pas mentionné que le Commissaire est fusionné avec les autres, mais est-ce que vous avez envisagé peut-être des balises qui pourraient être mises pour s'assurer qu'il n'y ait pas de dédoublement?

Le Président (M. Kelley): Dr Lajoie.

M. Lajoie (Jean-François): Oui. Écoutez, des balises... Nous, on voulait souligner le fait qu'on trouvait que ces deux organismes-là pouvaient avoir des mandats qui se recoupaient. On vous l'a mentionné. Tu sais, c'est sûr que, quand on a pris connaissance du premier rapport du Commissaire, qui était quand même assez touffu, on a vu qu'effectivement, à l'intérieur de ça, il y avait quand même beaucoup d'évaluations qui étaient faites de la performance du système, et on peut se questionner, effectivement, quand on...

C'est sûr que, l'INESSS, je le vois comme s'attaquant plutôt à l'innovation, puis à l'excellence, puis aux nouvelles pratiques, donc proposer plus des nouvelles pratiques pour l'avenir, alors que le Commissaire évalue les pratiques qui sont déjà en route. Vous voyez un petit peu, là, comment les deux sont complémentaires. Je pense que les... ils ont une mission qui est nécessaire. On a besoin d'avoir cet éclairage-là, c'est évident, là, tu sais, mais il faut s'assurer que, justement, étant donné les ressources qu'on a à notre disposition, les ressources soient bien utilisées, et, pour ça, bien, il faut... il va falloir que ces deux organisations-là se parlent, ces deux organismes-là se parlent, qu'ils soient en... pas nécessairement en collaboration mais qu'ils soient au moins en connexion sur les mandats sur lesquels ils sont, là, mutuellement.

M. Turcotte: Donc, vous ne proposez pas formellement qu'on ajoute le Commissaire à la santé et au bien-être dans l'INESSS?

M. Lajoie (Jean-François): Non.

M. Turcotte: O.K. Vous parlez beaucoup, dans votre mémoire, du panier de services. Vous parlez qu'on devrait ajouter, dans la loi, la révision du panier de services tel qu'il était proposé par M. Castonguay. On a entendu beaucoup de groupes, et sûrement qu'on va en entendre encore cet après-midi, qui ont des inquiétudes à ce niveau-là, au niveau de la révision qui pourrait signifier «réduction du panier de services». Est-ce que... Pour vous, dans votre analyse, est-ce que «révision» veut dire «réduction» ou... Comment vous voyez cette... Vous parlez que vous ne croyez pas que l'INESSS doit avoir un pouvoir exécutoire à ce niveau-là, mais vous êtes conscients qu'il y a beaucoup d'inquiétudes à ce niveau-là, puis c'est un dossier très délicat, là, à aborder, une question très pointue. Donc, est-ce que... Comment vous voyez ça par rapport au panier de services?

M. Lajoie (Jean-François): Bien, pour nous, si révision finit... implique un certain nombre de réductions, c'est parce que l'INESSS, après évaluation, aura mis en évidence qu'il y a un certain nombre de choses qui... un certain nombre de pratiques qui sont en cours qui n'ont pas une valeur ajoutée, qui ne répondent pas à des données probantes et que ces pratiques-là devraient être retirées. Par contre, comme je vous dis, je crois que ça devrait être un phénomène dynamique, c'est-à-dire que, les nouvelles pratiques arrivant, il me semble que l'inverse est aussi vrai dans l'autre sens: si on identifie des nouvelles pratiques, si on identifie des nouveaux modes d'intervention et que ces modes-là devraient être... faire partie du panier de services... Ça pourrait être quelque chose qui n'est pas purement dans la sphère médicale, ça peut être au niveau des services sociaux, ça pourrait être la psychothérapie, ça pourrait être la physiothérapie, ça pourrait être bien d'autres types. Alors, si on juge, après analyse des données probantes, que ces interventions-là sont positives pour la santé des gens, bien, moi, je pense qu'on devrait les inclure. Alors, ce n'est pas juste une question de dire: On va réduire le panier, on doit le réduire s'il y a des choses qu'on fait qui ne sont pas démontrées efficaces. Par contre, s'il y en a des nouvelles, bien, on devra les ajouter.

M. Turcotte: Donc, la révision n'est pas... ne serait pas faite sur une base de trouver des actes ou des pratiques pour couper dans les services, pour réduire...

M. Lajoie (Jean-François): L'idée n'est pas... Dans notre esprit, c'est...

M. Turcotte: ...pour trouver de l'argent pour dégager de marges de manoeuvre financières.

M. Lajoie (Jean-François): Non. Dans notre esprit, ce n'est pas du tout ça, l'idée. C'est vraiment... Dans notre esprit, c'est vraiment l'idée de déterminer, après évaluation, quelles sont les pratiques qui ont une valeur basée sur les données probantes pour la santé des gens.

M. Turcotte: O.K. Est-ce que vous avez des exemples en tête?

M. Lajoie (Jean-François): Bien, on pourrait imaginer, par exemple, que certains types de chirurgies, par exemple, qui sont encore pratiquées et qui sont remboursées ont été remplacées par d'autres types de chirurgies moins mutilantes, moins évasives aujourd'hui, et ils ont fait leurs preuves, alors... Par exemple, dans la chirurgie bariatrique, pour dire quelque chose, on pourrait imaginer que certains types d'actes devraient être retirés et que d'autres, s'ils ne sont pas inclus, là, devraient l'être. On pourrait penser à des tests diagnostiques qui sont dépassés, par exemple. Je ne veux pas me lancer, là, dans une révision de choses précises, mais c'est un peu l'esprit qu'on y voit, là.

M. Turcotte: O.K. Ma dernière question serait sur... Vous en avez un peu parlé dans votre mémoire, et puis il y a beaucoup de groupes qui nous ont parlé de ça, puis c'est toujours une question qu'on peut se poser quand il est question de fusion d'organismes qui existent déjà, qui ont déjà des mandats spécifiques et qui performent bien. Mon collègue député de Marie-Victorin a aussi un peu abordé la question. Mais, plus spécifiquement au niveau du volet médicament, volet technologies, puis maintenant volet services sociaux, sachant qu'il n'y a pas de ressources supplémentaires, là, du moins ce qui a été annoncé, vous n'avez pas un risque... vous ne voyez pas un risque qu'un certain volet puisse devenir le parent pauvre ou ne trouve pas son compte là-dedans?

Le groupe juste avant vous justement en a abordé pour la question des médicaments. La semaine dernière, on a entendu beaucoup de groupes qui, eux, militaient pour que les services sociaux occupent une place davantage au sein du ministère de la Santé et des Services sociaux puis voyaient en l'INESSS justement la venue d'une place de choix pour les services sociaux. Est-ce que vous voyez... Est-ce que vous avez des craintes à ce niveau-là? Parce que c'est sûr que plus qu'on ajoute des mandats à une institution, plus qu'il y a de risques que certains mandats, bien, soient mis de côté en fonction de nouvelles priorités.

M. Lajoie (Jean-François): Ce qu'on croit, nous, c'est que le fait de faire cette fusion-là, ça devrait permettre d'utiliser l'expertise qui est disponible dans des sujets qui sont plutôt transversaux, tu sais, là, pas nécessairement... Alors, c'est sûr que, si on regarde, par exemple, le médicament, les technologies, les services sociaux, il y a un ensemble d'experts qui probablement sont capables d'aller au-delà de l'expertise disciplinaire mais qui ont quelque chose à apporter dans chacune de ces disciplines-là. Alors, on pense que de les réunir ensemble, ça va avoir un effet synergique, certainement. Quelle était la suite de votre question?

M. Turcotte: Bien, c'est parce qu'on a différents volets, puis là c'est sûr que là, en en mettant plusieurs dans un même institut... C'est sûr qu'en ce moment ça va bien parce que le Conseil du médicament n'a qu'à s'occuper des médicaments puis... Donc là, en le mettant tout ensemble, il y a un risque, là.

**(15 h 50)**

M. Lajoie (Jean-François): Oui. C'est sûr que, le médicament, tu sais, il faut voir que le médicament va certainement prendre une grande part des efforts qui vont être mis par l'INESSS, certainement au début en tout cas, médicaments, technologies. Et là, évidemment, les services sociaux, eux autres, vont devoir... C'est une dimension, je pense, qui va devoir prendre plus d'espace. Elle va devoir se définir. On va devoir mettre en... Tu sais, on est plus dans l'évaluation qualitative, par exemple. Donc, au niveau de la recherche, ça risque d'être peut-être plus... un petit peu plus difficile. Mais je pense que ça, ça va gagner justement à être en contact avec les autres dimensions que l'INESSS va avoir à aborder.

Dr Larouche voulait dire quelque chose.

Le Président (M. Kelley): Dr Larouche.

M. Larouche (Alain): Un exemple concret, par exemple, l'industrie du médicament, ce qu'on comprend, c'est que le Conseil du médicament, de façon tout à fait légitime, leur demande maintenant de leur procurer des données pharmacoéconomiques: Est-ce que ça a des impacts sociétaux, l'utilisation de cette technologie-là, de cette molécule-là? Alors, on pense que c'est une bonne occasion, en combinant les missions, d'être capables d'avoir une évaluation beaucoup plus globale de l'impact du médicament, pas juste la molécule dans l'organisme humain mais l'utilisation du médicament par un patient pour une pathologie précise: Est-ce que ça a un impact sur ses proches? Est-ce qu'il y a moins de journées de maladie de perdues? Ça, c'est une évaluation qui peut être faite beaucoup plus large que simplement l'approche classique qu'on observe dans ce domaine-là. C'est un exemple qu'on peut vous donner.

Une voix: Dr Rosenthal voulait...

M. Rosenthal (Stephen): Juste pour compléter. Au centre de tous ces services-là sont les patients, O.K.? Puis c'est bien coordonné que tout qu'est-ce qu'on va faire au niveau médicament qui est le plus grand traitement qu'on donne encore, c'est le patient. Au niveau services sociaux, c'est le patient. Alors, de mesurer l'impact... Et, moi, je suis un gars technologique, si on s'assure de mesurer l'impact et utiliser ce nouveau technologie pour le transfert des connaissances, pour la coordination avec les services sociaux, on va avoir une place où on peut vraiment mesurer, évaluer nos travaux pour avoir des effets au niveau des patients, des soins des malades et des coûts qui vont aller avec, d'efficacité.

Le Président (M. Kelley): Alors, sur ça, merci beaucoup pour cette présentation des représentants de l'Association médicale du Québec.

Je vais suspendre quelques instants et je vais demander aux représentants de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec de prendre place à la table des... devant moi.

(Suspension de la séance à 15 h 52)

 

(Reprise à 16 h 1)

Le Président (M. Kelley): Alors, la commission reprend ses travaux avec notre sixième témoin aujourd'hui, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, représentée par sa première vice-présidente, Mme Michèle Boisclair.

Fédération interprofessionnelle
de la santé du Québec (FIQ)

Mme Boisclair (Michèle): Bonjour.

Le Président (M. Kelley): Alors, sans plus tarder, Mme Boisclair, la parole est à vous

Mme Boisclair (Michèle): Merci beaucoup, M. le Président. Merci aux membres de la commission, Mme la députée. Je vais vous présenter la personne qui m'accompagne: Mme Lucie Mercier, qui est conseillère-chercheure au secteur sociopolitique.

Alors, la FIQ est aujourd'hui contente et vous remercie de nous accueillir pour présenter les enjeux que nous avons évalués lors de l'analyse de ce projet de loi là qui est le projet de loi sur la création de l'INESSS. On parle d'enjeux parce que, pour nous, ce sont des enjeux qui sont importants en ce qui concerne le système et l'avenir de notre système de santé. Dans ces enjeux-là, nous avons été chercher des enjeux qui étaient sous-jacents, qui ne sont pas écrits, mais qui, on pense, pourraient, par exemple, avoir un impact majeur sur ce système-là. Donc, en n'étant pas mentionnés clairement, nous faisons référence à la révision du panier de services assurés, à l'élargissement de l'assurance privée complémentaire, que dire des enjeux relatifs à la circulation des renseignements personnels, et, en tout dernier lieu, la gouvernance.

Tout au long de notre travail pour l'analyse de cette loi-là, on a eu un axe transversal, une question à laquelle on s'est toujours référé, et c'était celle-ci: Quels en seront les avantages que la population pourra en tirer, de la création de l'INESSS? On ne peut pas détacher cette préoccupation-là de notre organisation. On est au quotidien auprès des patients, on est au quotidien auprès des étudiants, des élèves dans les milieux scolaires, on est au quotidien dans nos CLSC, et, quand il y a une transformation qui se fait au niveau du réseau de la santé, on ne peut pas faire autrement que de voir et d'essayer d'évaluer: Est-ce que ce sera pertinent ou est-ce que ce sera avantageux?

Notre analyse, dans les faits, nous amène à dire que l'INESSS, c'est plus qu'une simple fusion de deux organismes, dont l'AETMIS et le Conseil du médicament, qui fait en sorte que cet organisme serait donc un mandataire de l'État, c'est-à-dire non régi par la Loi de la fonction publique.

Pour la FIQ, quand on revient au panier de services, le maintien d'un généreux panier de services assurés est très important. Pourtant, dans la mission de l'INESSS, on y retrouve quatre points, et le quatrième est celui sur lequel on a tenté de voir jusqu'où ça pouvait aller, c'est celui qui parle d'exécuter tout autre mandat, donc un enjeu majeur. Il faut donc retourner aux rapports du comité d'implantation de l'INESSS, le groupe de travail Castonguay, et aussi au rapport Clair de 2001, où on indiquait clairement que la mission du futur institut était la révision du panier de services. Même si le ministre refuse cette analyse, parce qu'on a pu entendre et lire ses commentaires, le projet de loi lui donne toute la latitude pour y arriver et pour faire cette révision-là.

On sait... puis, tout à l'heure, je trouvais ça intéressant, on parlait d'élargir le panier de services, mais, dans les faits, ce n'est pas ce que l'histoire nous a démontré. À chaque fois qu'il y a eu une révision du panier de services, on en a retiré, des services qui étaient assurés et fournis par le système public: qu'on pense à la physiothérapie, à l'optométrie, aux services dentaires. Il n'y a pas eu d'ajout de services dans une révision de services. Tous les grands acteurs, que ce soit MM. Clair, Castonguay, entre autres, ont toujours visé à une privatisation active du système de santé, et le projet de loi n° 67, dans la façon dont il se présente, pourrait aider à y arriver. Et d'ailleurs, dans les pages 10 et 11 de notre document, vous pouvez avoir des détails plus précis là-dessus. Donc, la FIQ s'est opposée à la privatisation du système de santé, s'oppose aujourd'hui encore à toute action qui pourrait y amener et continuera de s'y opposer.

Notre deuxième enjeu, l'élargissement des assurances privées complémentaires. C'est, dans les faits, le résultat direct d'une diminution de panier de services par une désassurance. Quand on désassure un service, on fait automatiquement un transfert du financement vers des compagnies qui sont des compagnies d'assurance privées, et l'impact que ça a chez la population, c'est une augmentation de leur charge financière. Il ne faudrait pas oublier, et c'était dans le livre blanc de l'ex-ministre de la Santé, que 48 % de la population émet, au ministère du Revenu, un revenu de moins de 20 000 $. Qui a les moyens vraiment de se payer une assurance complémentaire? C'est les travailleurs et les travailleuses. Et je peux vous dire que l'évaluation qu'on fait, c'est que, même en ayant des assurances complémentaires, plusieurs travailleurs et travailleuses n'accèdent pas à l'assurance pour les soins dentaires parce que trop dispendieux. Ils ne sont pas capables d'arriver à se payer ces primes-là. Donc, quand on sort un secteur, un service et qu'on désassure, c'est vraiment sur cette charge-là que ça s'en va. Les seuls grands gagnants, ce sont les compagnies d'assurance et non pas les Québécoises et les Québécois.

Une autre mission de l'INESSS vient de la récupération d'un des mandats du Commissaire à la santé. Cette fonction qui a été remis... qui a été mise en place et qui est là depuis à peine quelques années... On vient d'avoir d'ailleurs son premier rapport de 2007-2008 sur l'évaluation du système de santé. Le projet de loi met, d'une certaine façon, pour nous, en tutelle le Commissaire de la santé. C'est un dédoublement de la mission et surtout dans la façon de faire. Dans la façon dont, nous, on a compris comment ça se passerait, l'INESSS étant un mandataire du ministre de la Santé, le ministre de la Santé pourrait donner une commande à l'INESSS, l'INESSS va vers le Commissaire de la santé et lui dire: Quand tu vas faire tes consultations, il faut aller vers cette orientation-là. Donc, il y aurait un dédoublement. Est-ce que, quand on fait ça, c'est vraiment un avantage ou est-ce que c'est vraiment une amélioration de ce qu'on vit présentement? Nous ne le croyons pas.

L'enjeu de la circulation et de la transmission des renseignements personnels sans consentement est très important, pour ne pas dire primordial. On fait part de nos préoccupations surtout quand on parle de l'obligation par un organisme public de fournir des renseignements personnels et non personnels. Que dire de la création des registres d'information? Est-ce qu'on parle des banques de données? Présentement, le ministère de la Santé possède une quarantaine de banques de données. Ce qui nous préoccupe, ce n'est pas qu'il y ait des informations qui soient dans une banque de données qui serait sécurisée, c'est l'interpellation qu'on pourrait faire de ces banques de données. Et on a des exemples où un organisme péripublic, c'est-à-dire en dehors de la fonction publique, a déjà utilisé les banques de données pour faire des croisements et les fournir à des compagnies d'assurance, et des choses comme ça. Et on sait qu'en santé on ne peut pas se permettre des choses comme ça. Mais d'aller vers un acteur qui serait à l'extérieur, est-ce qu'on pourrait courir ce risque-là? Nous sommes préoccupés de l'utilisation qu'on pourrait faire de ces banques-là.

On sait que la loi sur la santé et les services sociaux, c'est la loi qui est la plus sévère par rapport à la protection des renseignements personnels, et ça, là-dessus, on ne remet pas ça en question, on pense que c'est important. Mais l'INESSS va relever de quelle loi? Est-ce que ce sera la loi du secteur privé? De quelle loi va-t-elle relever pour protéger les renseignements personnels? Ce n'est pas mentionné, et on ne peut pas faire autrement que de poser cette question-là parce que la loi, entre autres, des secteurs privés, elle est beaucoup moins sévère et se préoccupe beaucoup moins de protéger de façon aussi sévère que la loi sur la santé et services sociaux.

**(16 h 10)**

L'épineuse question de la gouvernance. Je crois que vous allez entendre, M. le ministre, les mêmes étonnements que d'autres groupes avant nous. On exclut tout d'abord l'INESSS de la fonction publique, et, pour nous, on n'est pas en accord avec ça, on pense que ça doit relever de la fonction publique.

L'article 19. On a parlé d'euphémisme tout à l'heure; nous, on a parlé d'étonnement, de surprise, On ne pouvait pas croire qu'on était capables de lire noir sur blanc qu'on était en mesure d'accepter qu'il puisse y avoir un conflit d'intérêts ponctuel. J'ai lu des explications, j'ai lu des réponses. Un conflit d'intérêts dans une machine gouvernementale, même dans toutes les grandes organisations, c'est inacceptable. Ça ne se peut pas. On ne peut avoir de demi-mesures. On est en conflit d'intérêts, on n'a pas d'affaire là. Et il y a beaucoup de situations dans lesquelles les gens qui pourraient se retrouver en conflit d'intérêts, bien, mineraient beaucoup la crédibilité de l'INESSS, et, dans ce contexte-là, on ne veut pas l'accepter.

Je vais vous faire part de l'analyse qu'on a faite quand on a lu l'article 19. On s'est dit: On est de moins en moins surpris de voir que le gouvernement, d'une certaine façon, dans le cadre de l'actualité actuelle, ne soit pas enclin à avoir une commission d'enquête dans ce qui se passe dans le marché de la construction considérant que le conflit d'intérêts semblerait, d'une certaine façon, avoir un aval. Pour la FIQ, on trouve aussi qu'il y a deux poids, deux mesures quant à la notion d'indépendance des membres du conseil d'administration. On disqualifie si la personne qui veut être sur le conseil d'administration vient de la fonction publique, mais il n'y a rien pour les gens qui viendraient du secteur privé. Pourquoi? J'aimerais qu'on me réponde à cette question-là. Pourquoi il faut disqualifier des gens de la fonction publique, mais que, dans le secteur privé, par exemple, ça, il n'y a rien qui les disqualifie.

On s'est posé la question puis probablement que ça pourrait faire partie d'une solution: La formation des comités permanents et de la table de concertation, pourquoi est-ce que ce ne serait pas formé par le législateur? Pourquoi est-ce que ce n'est pas... au lieu d'être décidé de façon différente, que ce ne serait pas le législateur qui pourrait former ces gens-là? L'autre grande faiblesse qu'on a malheureusement trouvée aussi, c'est qu'on ne retrouve aucun organisme qui pourrait faire partie des comités permanents et de la table de concertation. Comment ça se fait que, dans d'autres lois, on est en mesure de savoir qui on peut retrouver dans la table de concertation, dans les comités, on sait qui peut en être partie, et que, dans l'INESSS, qui va être un institut qui devrait, d'une certaine façon, en fusionnant, amener des nouveaux guides de pratique, des nouvelles façons de faire, et tout ça, on ne sait pas qui va y être, en plus d'être à l'extérieur de la fonction publique?

Alors, vous comprenez que notre analyse n'est pas de façon pointue, ou technologique, ou scientifique, comme d'autres ont pu le faire tout à l'heure, mais notre préoccupation est vraiment à l'effet de savoir: Est-ce que ça va améliorer demain matin ce que la population du Québec s'attend de notre système de santé? Et la réponse, c'est non. Pour nous, aujourd'hui, l'analyse qu'on en fait, c'est qu'il y a déjà des organismes qui existent. Est-ce qu'ils sont parfaits? Non. Je pense qu'il y a toujours matière à amélioration. Est-ce que les liens de communication sont idéaux? Probablement pas. Mais, aujourd'hui, ce que monsieur puis madame, dans leur cuisine, dans leur salon, quand ils sont ensemble, veulent, c'est d'avoir accès à un médecin de famille, et c'est ça qui est la solution pour le système de santé et pas la création d'une nouvelle entité.

Tantôt, j'entendais: Les guides de pratique, on va prendre ce qui est le plus performant. M. le ministre, vous me corrigerez, mais, moi, comme infirmière, à chaque fois qu'il y a eu des nouvelles choses qui ont été plus performantes et qui ont été en faveur de la population, ça a toujours été ces pratiques-là qu'on a voulu avoir. J'avais l'impression qu'on gardait des anciennes pratiques parce qu'il n'y avait pas de guide de pratique qui disait de les changer. Je suis étonnée d'avoir entendu ces choses-là.

Pour toutes ces raisons, pour nous, ce qui serait l'idéal, la FIQ vous demande la tenue d'états généraux ou d'un forum sur la santé, des états généraux qui feraient qu'on pourrait faire le bilan de tout ce qui a été réformé et transformé depuis 2003, depuis l'arrivée du Parti libéral, où on a, selon nous... et on évalue que le gouvernement a vraiment sa vision, mais a fait des réformes pièce à la pièce. On pense qu'on est rendus à un point où on doit évaluer ce qui a été mis en place, regarder nos bons coups, les améliorer, changer ce qui n'est pas correct, et ensemble établir notre vision globale de ce que va être notre système de santé. Ce soir et demain, il va être capable d'avoir une vision sur... peut-être les 10 prochaines années, une vision économique du Québec, ce qui est tout à fait, en tout cas, louable et surprenant, parce qu'on n'a pas été capables de prévoir autre chose, mais, au-delà de ça, moi, je pense que de faire un vrai bilan pour voir ce qui a été mis en place, dans des états généraux où on peut, tout le monde, y participer et apporter nos éclairages, pourrait apporter des changements qui ne seraient que bénéfiques pour les gens que l'on représente et surtout pour la population du Québec. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Boisclair. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vais céder la parole au ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Bolduc: Je vous remercie de votre intervention, puis je la reçois bien, parce que je pense que ça prend différents courants de pensée. Puis, dans une société démocratique, il faut écouter tous les points de vue. Puis vous avez un point de vue d'une organisation que je respecte beaucoup, avec laquelle j'ai travaillé avec plusieurs membres, puis il faut juste reprendre ça point par point.

Moi, depuis 2003... Je suis dans le réseau depuis 1982, ça fait que, depuis 2003, j'ai vu qu'il y a eu quand même des bonnes améliorations au niveau du réseau. Je pense qu'on a fait des grands pas également au niveau des infirmières. La profession infirmière d'ailleurs, elle a évolué beaucoup. Vous savez également que vous avez des infirmières praticiennes spécialisées qu'on veut avoir, le partage des tâches. La loi n° 90 avait été bien accueillie aussi parce que ça vous donnait du travail.

Puis je suis d'accord avec vous qu'il y a des choses qu'on fait puis qu'il faut peut-être regarder pour améliorer. Mais globalement, personnellement, il faut qu'on soit d'accord que le système de santé public s'améliore parce qu'il va y avoir d'autres intervenants qui vont venir vous dire qu'on va faire autre chose, puis je ne suis pas certain que ce serait dans l'intérêt du système de santé public. Je pense que c'est cette perspective-là qu'il faut qu'on se donne.

Le panier de services. Bon, là, les gens, ils prennent les travaux qui ont été faits auparavant puis ils ont dit: C'étaient dans les travaux. On ne l'a pas mis dans la loi parce que le panier de services... et puis M. Castonguay l'a confirmé également, il le croit aussi, le panier de services ne doit pas être décidé par l'INESSS. Le panier de services, c'est une décision politique de décider qu'est-ce qu'on couvre au Québec. Et ça, je peux vous assurer que le panier de services, il est large au Québec.

Et juste pour vous dire qu'on a rajouté, au cours des deux dernières années, deux éléments. Le premier, la chirurgie bariatrique a été annoncée l'année dernière, et ça, c'est un nouveau service couvert qui ne l'était pas, et on couvre le service au complet dans une perspective d'amélioration de la population pour les patients qui ont de l'obésité morbide.

Également, il y a un service qui va être couvert très, très bientôt, la fécondation in vitro. C'est un service qui était également privé, qui va devenir public, et c'est un service... Puis ça, pour vous montrer jusqu'à quel point c'est un choix politique, c'est que, dans un gouvernement qui prône une politique de natalité, on veut permettre à des femmes qui peuvent enfanter, mais qui ne peuvent pas le faire de façon naturelle, avec les moyens technologiques d'aujourd'hui, permettre qu'elles aient des enfants. Je pense que le but est louable. Ça va nous donner à maturité l'équivalent de 3 000 naissances de plus par année, et c'est des gens qui peuvent avoir des enfants. Ça fait que ça, il faut permettre aux Québécoises -- puis aux Québécois, elles ont des conjoints -- de réussir à pouvoir avoir une famille. Ça, je peux vous dire que là-dessus le panier de services, pour nous, ça demeure une décision politique.

Où l'INESSS pourrait jouer un rôle, puis je pense que ça a été décrit par plusieurs groupes... Advenant le cas qu'on se pose la question: Est-ce qu'une pratique est encore la pratique qui doit être faite?, à ce moment-là, il pourrait être décidé pour cette pratique-là, puis, comme c'étaient les représentations du groupe avant vous, l'Association médicale du Québec... si c'est un acte chirurgical qui est reconnu qu'ils ne devraient plus pratiquer, l'INESSS pourrait donner un avis là-dessus, et puis, à ce moment-là, comme de fait, il peut ne plus y avoir de couverture. Quoique, si ce n'est pas indiqué «médicament», il ne devrait tout simplement pas se faire. Mais, encore là, il faut se donner plusieurs mécanismes.

Ça fait que je ne sais pas si ça clarifie par rapport au panier de services. Puis là, là je tiens à le dire: On peut toujours avoir des craintes, puis on peut toujours faire des suppositions, comment ils vont l'utiliser, mais on a vraiment fait une attention particulière de ne pas mettre le panier de services comme étant de la responsabilité de l'INESSS. On le voit vraiment comme une organisation de l'excellence pour promouvoir les pratiques excellentes dans toutes les professions au Québec.

Mme Boisclair (Michèle): Si vous me permettez.

**(16 h 20)**

M. Bolduc: Oui, oui.

Le Président (M. Kelley): Mme Boisclair.

Mme Boisclair (Michèle): Bon. Écoutez, l'analyse qu'on en a faite, c'est que... Bon, je vous ai référé à la petite phrase «effectuer tout autre mandat». C'est dans ce sens-là. Je vais vous dire que malheureusement on a eu une expérience où l'ex-ministre de la Santé a annoncé officiellement des choses dans un printemps et, à l'automne, on avait complètement ce que nous avions dénoncé qui pouvait arriver et qu'on... On s'était fait dire: Bien non, bien non, ça n'arrivera pas, il n'y aura pas plus de chirurgies, ou quoi que ce soit. Et on avait le contraire qui s'est passé. Ça fait que vous comprenez que notre niveau de dire qu'on y croit les yeux fermés est loin d'être ce qu'on a.

Quand l'INESSS va faire une recommandation sur des guides de pratique, c'est dans ce sens-là qu'on peut arriver à un point où il y aura diminution d'assurance ou de services assurés dans le panier de services. C'est vraiment dans cette optique-là. Nous, on a un rôle de prévention, vous savez, hein, on a une vision globale de la santé, notre rôle de prévention, et, quand on a fait cette analyse-là, on a demandé à nos chercheurs de s'assurer qu'il n'y aurait aucune prise pour arriver à la réduction du panier de services. Et il y a des chirurgies qui sont reconnues dans le panier de services, que la technologie fasse qu'on le fasse différemment, vous savez comme moi qu'on ne vient pas de diminuer le panier de services, on fait la même chose différemment. C'est pour moi complètement une autre façon de faire. C'est ça qui nous inquiète.

Ou vous enlevez «tout autre mandat», puis je ne suis pas sûre que c'est quelque chose qui vous tente, mais, dans les faits, c'est vraiment là qu'on n'est pas certains qu'on n'atteindra pas, par une demande, un objectif de réévaluer le panier de services que la population a.

Aujourd'hui, il y a 28 % des frais qui sont donnés à la population, vous le savez. Dans ça rentrent la physiothérapie, l'optométrie, la dentisterie, et tout ça, puis il y en a bien d'autres, là, que je n'énumère pas. Alors, vous comprendrez que, je pense, les gens ont atteint leur capacité de pouvoir aller se le chercher. Moi, c'est dans ce sens-là, quand on a fait notre recherche, qu'on s'est dit: Non, on ne peut pas... on ne vous laissera pas de marge de manoeuvre, M. le ministre, on va vous suivre à la trace, vous le savez, hein, ce n'est pas... C'est vraiment inquiétant. À chaque fois qu'on a fait des présentations de mémoire où on a dit que ça pourrait aller vers ça, on nous a dit non en commission parlementaire, et malheureusement on a eu des projets de loi qui nous ont donné raison, avec les impacts qu'on vit aujourd'hui.

M. Bolduc: Je ne pourrais pas soulager complètement votre inquiétude, mais je pense que c'étaient surtout des explications qu'il était important de...

Mme Boisclair (Michèle): Si vous me permettez, dans notre document, on vous parle de la pertinence d'un service. Je vais vous donner la page, attendez un petit peu, là, 16, je crois. Haute surveillance, là, à la page 16-17. Alors, il y a les dimensions de la pertinence par rapport aux ressources disponibles puis par rapport aussi à tous les services. Quand on a fait la recherche de littérature, et tout ça, il y a toujours: Est-ce qu'on est dans une situation où le besoin et où le service est pertinent? Et, dans ce contexte-là, c'est vers ça qu'on amène, nous autres, notre questionnement sur: Est-ce qu'on pourra arriver à atteindre nos objectifs de maintenir un panier de services assurés pour la population si on ne remet pas en cause cette notion-là de pertinence?

Puis Lucie pourrait, à ce moment-là, vous donner un contexte plus global de ce que pourraient avoir... des patients qui ont été opérés, entre autres, pour la cataracte, et, comme on n'a pas évalué si c'était pertinent ou pas, parce que, vous savez, il y a des exemples qui nous ont démontré que, dans le privé, des fois, bien, c'est aussi l'appât du gain, alors on a opéré, et c'est arrivé. Alors, dans la chirurgie de la cataracte, quand elle a été transférée, il y a des gens qui ont été opérés qui se sont ramassés avec un résultat, puis c'est des statistiques qui nous les ont donnés, où le quart des patients opérés avaient une moins bonne vue qu'avant, que le tiers de ces patients-là avaient une vue presque parfaite avant l'opération et qu'après ça on s'est ramassé avec des gens qui ont dit: Bien, est-ce que c'était vraiment pertinent de se faire opérer parce que ça venait d'être ouvert? Et c'est là-dessus qu'on se questionne. Moi, je pense qu'il faut aussi regarder cette notion-là de la pertinence d'un service ou d'un acte posé, et ça non plus, ce n'est pas adressé, même dans les guides de pratique. Autre chose que tu voudrais...

M. Bolduc: Voulez-vous faire un commentaire? Non?

Une voix: Non, ça va.

M. Bolduc: Bien, c'est ça, le travail de l'INESSS, c'est d'évaluer toute la question des bonnes pratiques. Rentrent là-dedans la pertinence, la qualité et la sécurité, et puis je pense... Juste pour vous dire que la pertinence, que ce soit dans le privé ou dans le public, ça a peu à voir. Je pense que c'est plus une question de professionnel par rapport à sa pratique personnelle. Puis ça prend des mécanismes d'évaluation. Et là-dessus on a des ordres professionnels qui font la surveillance des pratiques. C'est un système qui n'est pas parfait, mais je pense que les gens en général disent que ça va relativement bien.

Je voudrais vous amener sur un autre sujet, le Commissaire à la santé. Pour nous, le Commissaire à la santé, c'est très clair, les interactions... Le Commissaire à la santé fait une surveillance du système de santé et fait une évaluation des recommandations. L'INESSS, c'est vraiment l'évaluation beaucoup plus pointue au niveau des technologies, des nouvelles pratiques. Également, là, il va y avoir le Conseil du médicament qui va être à l'intérieur de l'INESSS, puis également des évaluations au niveau des services sociaux.

Le mandat qui a été donné également, c'est des guides de pratique qui se font en collaboration avec d'autres ordres professionnels, d'autres partenaires. Également, je l'ai dit ce matin avec la CSN, on voit les syndicats comme étant des partenaires parce que... Vos membres, c'est des gens qui sont près du terrain. Et, quand on parle d'organisation de services, projets d'organisation des pratiques, je pense qu'on va... il faut qu'on le travaille ensemble.

L'intérêt de l'INESSS, si... l'INESSS va devenir comme l'AETMIS, comme le Conseil du médicament. Mais tout le monde nous ont dit que c'étaient des organismes respectables et crédibles. Jusqu'à date, là, tous les gens qui sont venus nous ont dit qu'autant l'AETMIS que le Conseil du médicament, ils ont très bonne réputation, et ils ont dit également que c'étaient des organisations qui étaient crédibles. Même, à la question qui dit: Si c'est crédible comme ça, pourquoi vous les changez?...

Mme Boisclair (Michèle): Tout à fait.

M. Bolduc: ...tout simplement parce qu'on est capables d'optimiser. Et il y a plusieurs groupes qui sont venus nous voir, dont, entre autres, surtout des groupes des services sociaux, qui sont venus nous dire qu'à l'intérieur de ça ils vont renforcer. Ça va leur permettre également de faire une meilleure évaluation. Ce regroupement-là des technologies, médicaments et des groupes sociaux... services sociaux, comment vous percevez ça? Est-ce que vous voyez au moins que ça pourrait être une petite valeur ajoutée à cette organisation?

Mme Boisclair (Michèle): Bien, l'AETMIS a déjà le mandat des services sociaux. Ça ne fait pas longtemps, ce n'est peut-être pas nécessairement mis en route, mais elle le possède déjà. Écoutez, moi, j'ai une formation avec une vision globale de la santé, alors, pour moi, c'est santé et services sociaux. Quand je rencontre un patient ou une patiente, ou quelqu'un, tout est évalué, au niveau de sa situation sociale, et tout ça. Moi, je pense que c'est... ça peut être une valeur ajoutée. Mais je vais vous la reposer, la question, M. le ministre: Elles sont crédibles, les organisations qui sont là, pourquoi, s'il y a eu des problématiques de communication d'information entre ces organisations-là, pourquoi ne pas solutionner ça plutôt que de créer un autre institut qui vient, d'une certaine façon, fusionner, mais surtout que vous mettez à l'extérieur de la fonction publique? C'est préoccupant.

Moi, je pense, puis... qu'on pense aux frais, puis vous n'en avez pas parlé, là, vraiment, puis, nous autres, on n'a pas soulevé la question plus que ça, mais on ne pense pas qu'il va y avoir une économie là-dessus, là. Et, quand on a regardé les rapports qu'on a dans les fusions, bien on n'a pas eu d'économies non plus, là. Alors, on ne s'attend pas à ce que le système de santé soit regagnant financièrement, si on veut dire, en ayant cette fusion-là. Que les gens se parlent, qu'ils échangent entre eux, je pense que c'est fondamental parce que ça amène la vision globale du système de santé. Mais pourquoi?

M. Bolduc: L'approche globale. Je pense qu'il faut avoir une approche globale de la personne et des épisodes de soins, et l'approche globale nous demande d'avoir une approche plus intégrée. Et les gens qui travaillent sur le terrain, là, les travailleurs sociaux, différents groupes, ils sont venus nous dire: Le fait de se regrouper, c'est que maintenant on n'a plus une approche en silo; maintenant, on a une approche globale. Au même titre, puis ça je ne partage pas votre opinion, les fusions qu'il y a eu dans le système de santé ont permis des grandes économies. Moi, j'étais directeur des services professionnels, ça fait que j'ai été dans ceux qui ont participé...

Mme Boisclair (Michèle): Au début.

M. Bolduc: ...et puis je peux vous dire qu'à la fin il y a eu des économies, ne serait-ce que, dans une organisation où il y avait... des organisations qui avaient trois directeurs généraux, il y en a eu... il en restait un seul, et toutes les équipes administratives ont été réduites. Et ça nous a permis également une meilleure communication entre les différents intervenants. Et l'approche intégrée par... avec une approche population, en tout cas, en termes de gains de soins... On n'est pas obligé d'avoir la même opinion, mais...

Mme Boisclair (Michèle): Non, non.

M. Bolduc: ...moi, je peux vous dire que je l'ai vécu sur le terrain, et puis ça a donné des gros gains. Puis je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de monde, je dois vous avouer, même sur le terrain, qui reviendraient en arrière. Je ne suis pas sûr même que les syndicats diraient... On dirait: Demain matin, on va défusionner... que les gens seraient intéressés à le faire, parce qu'on a fait le changement, puis il y a eu un changement qui a été majeur...

Mme Boisclair (Michèle): Il faut avancer, là.

M. Bolduc: Hein?

Mme Boisclair (Michèle): Il faut avancer, là.

M. Bolduc: Il faut avancer. Je pense que les gens ne veulent plus revenir en arrière. Une fois que c'est fait, maintenant il faut tous travailler ensemble pour aller de l'avant. Bien, là-dessus, je vais vous remercier, puis, comme je l'ai toujours dit, on va continuer à collaborer ensemble...

Mme Boisclair (Michèle): Oui.

M. Bolduc: ...même si on a des points de vue différents. Puis je pense que c'est important d'échanger puis c'est de ça que sortent les meilleures solutions.

**(16 h 30)**

Mme Boisclair (Michèle): Bien, écoutez, moi, ce que je trouve qui est important, M. le ministre, c'est que vous ne preniez pas à la légère les préoccupations qu'on a. Je ne voudrais pas revenir dans un an et dire: Vous voyez, on vous l'avait bien dit, vous êtes en train, par l'INESSS, d'avoir une révision, une réduction du panier de services, et, malheureusement, on vient en commission parlementaire, on refait la même remarque. Et, je vous le dis, c'est plate, j'aimerais ça me tromper. On aimerait ça que, par notre analyse, on se trompe. Alors, prouvez-nous qu'on peut se tromper. Ou vous le mettez clairement, dans votre loi, que le panier de services ne sera pas touché, qu'il n'y aura pas de révision du panier de services, mais que ce soit fait clairement, par exemple, parce qu'au niveau de la transparence je pense qu'il y a des choses qui devraient y être plus clairement. Puis on aimerait aussi savoir les organismes que vous mettrez sur ces comités-là, parce que... Au moment où se parle, pour nous, ça ne répond pas à des besoins.

M. Bolduc: On va travailler très fort pour que vous vous trompiez. Vous allez être contente.

Mme Boisclair (Michèle): J'espère. J'espère, parce que j'ai de la mémoire. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci. M. le député de Saint-Jean.

Mme Boisclair (Michèle): Bonjour.

M. Turcotte: Bonjour. Donc, j'aimerais vous remercier de vous prêter au jeu, si on peut le dire ainsi, de participer à notre rencontre et puis de nous éclairer. Étant donné que vous êtes sur le terrain quotidiennement, vous voyez des choses, vous entendez des choses, vous le vivez, et puis ce n'est pas toujours facile. Et des fois... On ne vous aide pas nécessairement toujours, là. Et là, aujourd'hui, vous semblez avoir des craintes avec ce projet de loi là qui... Si on se fie à ce que vous avez écrit, à ce que vous nous dites, vous avez beaucoup d'inquiétudes à ce niveau-là.

Donc, j'ai beaucoup de questions suite à votre intervention, mais je vais prendre un peu... Parce que vous venez de terminer, justement, vous avez abordé la question de la gouvernance et que... une inquiétude que l'INESSS, étant donné... qu'il soit sorti du gouvernement. Moi, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, voir, selon vous, quelle serait la plus-value pour l'INESSS de demeurer au sein de l'appareil gouvernemental, qu'il relève de la fonction publique.

Mme Boisclair (Michèle): Bien, écoutez, dans le document -- puis Lucie pourra compléter -- la transmission des renseignements personnels que l'INESSS pourra recevoir et pourra demander à n'importe quel des organismes publics... Là, on parle de la santé, mais, quand on parle d'organismes publics, on n'a pas spécifié seulement celui du ministère de la Santé, là, on a eu tout le monde. Le fait de ne pas savoir... et je n'ai pas eu la réponse à ma question, puis peut-être qu'on n'a pas de réponse à la question, mais le fait de ne pas savoir sous quelle loi cette entité-là va se retrouver quant à la protection, pour moi, c'est quelque chose qui est fondamental.

Vous savez, on est d'accord, nous, avec l'informatisation, on est d'accord avec un dossier santé pour les patients, et tout ça, on est d'accord avec ça, mais il y a des normes de protection qui doivent y être. Et ça, pour nous, c'est fondamental.

Donc, l'INESSS, demain matin, s'il est à l'extérieur, il n'est pas sous la loi de la santé et services sociaux qui, elle, est très sévère dans la protection des renseignements personnels. Il devrait être sous l'égide de la fonction publique parce que, dans les faits, il y a déjà des gens qui sont dans les deux organismes qui s'y retrouvent. Pourquoi? Pourquoi les sortir? Pourquoi l'envoyer ailleurs? Pour un sentiment d'indépendance? Est-ce qu'on est en train de me dire que l'AETMIS et le Conseil du médicament ne sont pas indépendants? Moi, je ne pense pas. Je considère que c'est important que ça demeure sous l'égide...

Il y a une question de frais. On parlait d'économies, tout à l'heure. Vous savez, tous les frais administratifs qui sont référés dans des organismes à l'extérieur, ou tout ça, peuvent être très élevés. Alors, l'INESSS... Même si on dit que cette fusion-là ne devrait pas, peut-être, coûter plus cher, nous, on émet des doutes là-dessus. Je ne sais pas si, Lucie, tu avais autre chose à compléter sur la gouvernance, là, que tu pourrais... par rapport à l'analyse que tu as faite.

Mme Mercier (Lucie): Bien, écoutez, je ne suis pas une spécialiste des questions de gouvernance, là, on s'entend là-dessus, mais, pour nous, c'est important quand même que ça demeure un organisme dans le périmètre de la fonction publique.

Puis, entre autres, il y a la question des renseignements personnels, qui a été largement évoquée, qui nous préoccupe beaucoup. Le ministère... En fait, les établissements de santé ont de plus en plus des... différents systèmes de collecte d'informations personnelles qu'ils transfèrent déjà au ministère de la Santé. Le projet de loi n° 24 permet une transmission aussi des renseignements personnels de la Régie de l'assurance maladie vers le ministère de la Santé. Alors, le ministère est détenteur d'une masse assez considérable d'informations personnelles, et là on prévoit que ces informations-là pourraient désormais être transférées dans une organisation qui ne ferait plus partie du périmètre de la fonction publique. Alors, c'est un élément qui était source d'inquiétude, disons, pour dire le moins.

M. Turcotte: Donc, si je comprends bien, votre demande de maintenir l'INESSS sous la Loi de la fonction publique, ce n'est pas tant pour les conditions de travail des employés, mais aussi et surtout, peut-être, en tout cas de ce que je me fie à votre argumentaire, sur la préservation de la confidentialité dans les informations du public, là, des citoyens.

Mme Boisclair (Michèle): Bien, comme organisation syndicale, c'est clair que les conditions de travail font partie toujours de notre prémisse sous-jacente, là. Et je sais fort bien que nos collègues du SFPQ et du SPGQ, qui sont venus vous présenter leurs mémoires, en ont fait grande part et ont pu établir, avec leur spécificités, les raisons pour lesquelles c'est important. Nous, on ajoute à ça la dimension des renseignements personnels.

Vous savez, quand on est dans le système de santé -- puis le ministre en est aussi sous cette lorgnette-là quand il agit comme médecin -- on a toujours ce qu'on appelle le secret professionnel, s'assurer qu'on ne divulgue pas de donnée personnelle quand on parle de cas, ou quoi que ce soit. On est maintenant dans l'ère de l'informatique, on a vu des grandes ratées de certaines compagnies en informatique où des données se sont ramassées partout. Des données sur la santé, c'est un impact majeur. Si, demain matin, une compagnie d'assurance avait le bonheur -- parce que, pour elle, ce serait le bonheur -- de savoir ce vers quoi certaines personnes s'en vont avec leur santé, bien, vous pourrez voir qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui seront capables de pouvoir avoir des assurances après. Et ça, qu'est-ce que vous voulez, on ne peut pas faire autrement que de s'en préoccuper. On est au quotidien avec des gens qui ont de moins en moins de possibilités et qui sont de plus en plus pauvres -- dans les faits, c'est l'expression que je devrais utiliser. L'appauvrissement de la population, il est là, et cet appauvrissement-là amène des besoins qui sont plus grands. Et ce n'est pas en prenant des risques qu'on va les protéger. Donc, pourquoi ne pas garder ça sous la gouverne du gouvernement, dans la Loi de la fonction publique qui, dans les faits, est une loi qui est bien faite au niveau des conditions de travail, mais qui serait aussi excellente pour assurer une certaine protection des renseignements personnels?

M. Turcotte: Vous avez abordé la question du panier de services...

Mme Boisclair (Michèle): Oui.

M. Turcotte: ...largement, et, si vous en avez parlé autant, c'est parce que vous considérez que c'est important d'aborder la question. Et la CSN nous a suggéré qu'on ajoute dans la loi la question d'avoir des recommandations qui favorisent le réseau public de santé. Est-ce que vous seriez... Est-ce que vous partagez cette opinion-là, qu'on devrait ajouter ça dans la loi, dans un premier temps? Et, dans un deuxième temps, par rapport au panier de services, est-ce que vous, ça vous... Ça ne semble pas vous rassurer en ce moment, tout ce qui a été dit à ce sujet-là, là.

Mme Boisclair (Michèle): Non. Écoutez, vous connaissez tous la formule «et toute tâche connexe», hein, au quotidien, hein? Vous êtes cadre... Je l'ai vu, moi, dans l'hôpital où est-ce que j'ai déjà travaillé, et, pour une raison ou pour une autre, bien, nos cadres se sont ramassés... ils ont été obligés de laver le plancher, ça rentrait dans les tâches connexes, quand, dans les faits, c'étaient des gestionnaires, parce qu'il y avait trop de travail et... Bien, quand le patron décide que, même si... c'est ça, bien, il faut que tu le fasses, tu le fais. Alors, «toute autre tâche connexe», il n'y a rien de déterminé, donc, nous autres, tout autre mandat à exécuter est une question principale, est très importante.

De rajouter dans la loi qu'on favorise le système de santé... Écoutez, notre position, nous autres, elle est très claire, ce n'est pas seulement de favoriser, c'est de vraiment privilégier et de n'avoir accès qu'au système de santé public. C'est ça qui devrait être fait.

Moi, je pense qu'on le met en danger depuis une dizaine d'années, là, notre système de santé. On voit qu'il y a une tendance et il y a énormément de pression qui est faite sur vous, comme parlementaires, à une augmentation de la privatisation. Quand on regarde tous les derniers rapports qui sont sortis dans les dernières années, c'est vraiment la tendance sur ce vers quoi... On n'est plus capables de payer, le financement du système de santé, c'est celui qui coûte le plus cher. Bien, moi, je regrette, je n'achète pas votre discours là-dessus, parce qu'on ne parle pas de l'investissement qu'on fait quand on met de l'argent dans le système de santé.

Quand on a un bon système de santé... Puis on a vu l'évolution après les années soixante, après la création de notre système de santé public: les gens ont eu un meilleur accès à l'école, ils sont allés à l'école plus longtemps, ils ont eu des meilleurs revenus. La journée où on va retourner en arrière, bien, c'est ça qui va recommencer. Puis nos enfants ont le droit que leurs enfants aient accès à un système de santé public. Il y a tellement de pays qui nous jalousent, il y a tellement de pays qui veulent garder ce système de santé là. Nous, on va toujours être au front pour le défendre. Et je dis à cela: Bien, augmentons les impôts, revoyons l'assiette fiscale, revoyons les plus nantis pour qu'ils en paient plus, mais il y a des solutions qui sont à faire là-dedans.

Et c'est pour ça que, pour nous, ce projet de loi là, qui n'est pas clair quant à la révision du panier de services, avec la phrase qu'on vous a dite dans la mission, bien, vous comprendrez que... Il veut me faire mentir; j'ai hâte de m'accuser comme étant une menteuse, je vous le dis sincèrement.

**(16 h 40)**

M. Bolduc: Que vous vous êtes trompée, pas «mentir».

Mme Boisclair (Michèle):«Mentir»... Oui, «trompée», bien.

M. Turcotte: Article 19.

Mme Boisclair (Michèle): Ah! O.K.

M. Turcotte: Dans votre mémoire... Je vais citer un paragraphe de votre mémoire. Vous dites: «Il apparaît assez curieux de constater à l'article 19 du projet de loi n° 67 qu'une situation "ponctuelle" de conflit d'intérêts puisse être considérée comme tolérable, surtout pour un organisme qui souhaite établir sa crédibilité. Comment un gouvernement qui légitime les conflits d'intérêts à même la législation pourrait-il vouloir la tenue d'une enquête [...] sur l'industrie de la construction?»

Vous avez écrit ça dans votre mémoire.

Mme Boisclair (Michèle): Puis je l'ai dit tantôt.

M. Turcotte: Vous l'avez dit aussi. Le ministre nous a assurés qu'il allait revoir le libellé de l'article.

Mme Boisclair (Michèle): Oui, oui.

M. Turcotte: Est-ce que ça vous rassure?

Mme Boisclair (Michèle): Bien, écoutez, déjà, d'admettre qu'il y a un problème là, c'est quelque chose, mais, dans les faits, il devrait être complètement rayé. Moi, je pense qu'on ne peut pas avoir de demi-mesure. On ne peut pas dire que tu es peut-être un petit peu, pendant un petit bout de temps, en conflit d'intérêts. Puis j'ai entendu les exemples tout à l'heure: Est-ce que quelqu'un que ça fait deux ans qu'il est là, qui a de l'expérience, on va le retirer parce qu'il est en conflit d'intérêts? Oui. Je regrette, c'est oui. Je n'ai pas d'autre façon de voir les choses. Moi, je pense que c'est trop cher payé, la crédibilité d'une organisation où on va investir des centaines de millions de dollars, pour se permettre d'avoir des gens qui pourraient mettre en péril cette crédibilité-là parce qu'ils se verraient en conflit d'intérêts. Je pense qu'il faut... Si on veut vraiment bien investir, qu'on veut assurer et rassurer la population sur un organisme crédible, il n'est pas question d'avoir de conflits d'intérêts.

M. Turcotte: Vous avez parlé, dans votre mémoire, de l'INESSS versus le Commissaire à la santé et au bien-être.

Mme Boisclair (Michèle): Oui, oui.

M. Turcotte: Vous avez même parlé que ça devient une tutelle pour le Commissaire à la santé et au bien-être.

Mme Boisclair (Michèle): Oui.

M. Turcotte: Comment voyez-vous une façon pour améliorer cette possible tutelle là, là, dans le sens... pas l'améliorer pour l'amplifier, là, on s'entend, mais pour s'assurer que ça ne devienne pas une tutelle et qu'on puisse maximiser tous les efforts qui sont mis à ce niveau-là pour évaluer le système de santé?

Mme Boisclair (Michèle): Bien, écoutez, je pense que, quand on regarde la définition du mandat, on est en mesure de voir, là, ce qui peut arriver au niveau de l'INESSS, et tout ça, mais foncièrement, là, c'est qu'il n'y ait pas ce projet de loi là. Si le Commissaire à la santé n'a pas toutes les marges de manoeuvre nécessaires pour répondre aux besoins du ministre... Tantôt, j'ai fait référence... Si les gens ne se parlent pas entre eux, établissons-les, les liens de contact, qu'on échange et qu'on en fasse... qu'on se parle pour arriver à atteindre les objectifs d'avoir la vision globale de notre système de santé. Pourquoi créer autre chose s'il y a déjà des gens qui ont cette crédibilité-là? Alors, moi, je pense que c'est ça. Je ne sais pas, Lucie, si tu avais autre chose à ajouter.

Mme Mercier (Lucie): Non, c'était le mandat, surtout.

Mme Boisclair (Michèle): C'est le mandat qui est important.

M. Turcotte: Donc, de fusionner le Commissaire à la santé et au bien-être avec l'INESSS ne serait pas une solution pour vous?

Mme Boisclair (Michèle): Pas du tout.

M. Turcotte: O.K. Vous avez parlé tantôt de... que, dans la loi, ce n'est pas mentionné qui serait membre des comités, du conseil d'administration. Est-ce que vous avez des suggestions, vous, à faire, de gens qui devraient être membres de ces comités?

Mme Boisclair (Michèle): Écoutez, la question est très pertinente, mais vous comprendrez que, comme on n'est pas nécessairement en faveur de cette création d'INESSS là... Ce qu'on dit, c'est que le fait de ne pas avoir mentionné les groupes, comme on voit dans d'autres projets de loi, c'est, pour nous, une certaine problématique au niveau de la transparence. On sait que, dans tel groupe, il y a l'Association médicale, il y a le Collège des médecins ou d'autres. On le voit dans d'autres projets de loi, on a regardé la formation, que ce soit de l'AETMIS ou du Conseil du médicament, ou quoi que ce soit. On arrive avec l'INESSS, qui est supposé être le supra, il n'y a rien, niet là-dessus, on n'a pas... on n'a pas les organismes qui sont là. Mais c'est clair que, si on continuait dans cette voie-là, on espère avoir voix au chapitre.

M. Turcotte: O.K. J'ai posé la même question...

Mme Boisclair (Michèle): Comme président... à titre de président directeur... directrice.

M. Turcotte: J'ai posé la...

Une voix: Sans conflit d'intérêts.

Mme Boisclair (Michèle): Sans conflit d'intérêts, tout à fait. Vous pouvez être certaine.

M. Turcotte: J'ai posé la question tantôt au groupe juste avant vous sur leur inquiétude, étant donné que le ministre a répété à plusieurs occasions qu'il n'y aura pas d'argent supplémentaire attribué. Comment, selon vous... Est-ce que vous avez des inquiétudes, notamment pour le volet social, qui est un ajout? Comment s'assurer que les services sociaux ne demeureront pas le parent pauvre?

Mme Boisclair (Michèle): Le parent pauvre. Je veux dire, c'est une bonne question parce que présentement... Tout à l'heure, le ministre faisait part des grandes économies financières qu'on a pu avoir avec les fusions d'établissements, de trois, quatre, cinq directeurs à un. Ça, écoutez, on n'a pas besoin d'être allé longtemps à l'école, hein, pour faire cette mathématique-là, je suis d'accord avec vous là-dessus. Cependant, ce qu'on est en train de voir et d'observer, c'est un peu la disparition de la mission de nos CLSC. Même si ce n'est pas clairement identifié, le fait d'être maintenant dans des centres de santé et de services sociaux, on voit vraiment une disparition... Puis Montréal est encore probablement un meilleur exemple, puis je m'explique: les groupes de médecine familiale, qui sont en soi excellents pour l'accès à un médecin de famille, ont pris des rôles qui étaient dévolus à nos CLSC. Et, veux veux pas, dans cinq ans... Puis là je ne veux pas me faire prophète de malheur, mais quel sera vraiment le rôle qu'on va faire jouer à nos CLSC? Je regrette, ce n'est pas juste dans des campagnes de vaccination qu'un CLSC est important ou les gens qui y travaillent. C'est tout le volet de prévention, et tout ce volet social là, c'est le parent pauvre des centres de santé et services sociaux.

Ce que sur maintenant on met l'accent, c'est sur ce qui paraît: les urgences, les salles d'opération. Ça... Politiquement, on est plus capable de faire des pressions là-dessus. Mais l'autre volet, ils ont plus de difficultés... on a plus de difficultés à se battre et à prendre la place qui nous revient, ça fait que c'est sûr que c'est une question qui est importante, parce qu'ils vont avoir et on va avoir, avec eux, à s'assurer qu'ils ont leur place, parce que ça fait partie d'un tout. Monsieur ou madame qui demeure dans un quartier X à Montréal et que sa qualité de vie fait qu'il a 10 ans de moins d'espérance de vie qu'un autre qui demeure dans l'Ouest, veux veux pas, si je n'ai pas une vision globale, je n'aurai rien fait de bien, et tout ça, et avec santé et services sociaux et la vision globale. Donc, il faut s'assurer qu'ils auront leur place pour faire une bonne évaluation.

Et, d'un côté, vous allez avoir des évaluations quantitatives... C'est facile de mesurer, là, combien j'ai fait de chirurgies puis si on veut des meilleurs guides de pratiques, les technologies, et tout ça, c'est des choses qui sont probablement plus facilement mesurables. Mais, du côté social, là, c'est souvent qualitatif. Alors, vous allez avoir à affronter deux visions qui sont vraiment différentes, donc il faut... il va falloir que les gens se parlent beaucoup pour arriver à ce que ça s'imbrique les uns avec les autres, parce que c'est complètement différent.

M. Turcotte: En terminant, j'aurais le goût de vous poser une question. L'INESSS vise l'excellence, l'excellence quotidiennement.

Mme Boisclair (Michèle): C'est un beau mot.

M. Turcotte: J'aimerais ça vous entendre parler de l'excellence de la pratique des infirmières, surtout dans le contexte où on a de plus en plus d'agences privées d'infirmières.

Des voix: ...

Des voix: Ha, ha, ha!

**(16 h 50)**

Mme Boisclair (Michèle): Je pense que ça vaudrait la peine d'en faire une commission parlementaire. Écoutez, vous avez sûrement pris connaissance du dossier qui est en cours sur les agences privées. Lucie a été une des parties de l'équipe multidisciplinaire, et multisectorielle, et intersectorielle de la FIQ sur l'étude. J'ai d'ailleurs mon document de conseil fédéral. Ils ont passé la journée là-dessus en délégation, hier. C'était sur la négociation. Et vous comprendrez que c'est une problématique qui est majeure. On a entendu régulièrement le ministre de la Santé... je pourrais dire «les ministres de la Santé», mais plus spécifiquement dernièrement, dire qu'il fallait absolument cesser l'utilisation des agences, mais, sur le terrain, ce n'est pas ça, c'est complètement le contraire: on offre des contrats, on fait des appels d'offres, on a des milliers d'heures... Puis les chiffres, je pourrais les prendre dans mon document, là. Je vous le laisserai, le document, vous le photocopierez, il est rendu public maintenant. S'il y a quelque chose qui est incroyable, c'est ça, c'est l'utilisation des agences privées, qui coûtent beaucoup plus cher.

Je vais vous donner un exemple. Moi, je suis infirmière, je travaille sur mon département, ça fait, admettons, six ans. Ce n'est pas vrai, parce que, depuis 1973 que je suis dans le réseau de la santé, M. le ministre, donc un petit peu plus vieille que vous. Je gagnerais 25 $ ou 30 $ de l'heure. L'infirmière, l'infirmière auxiliaire ou l'inhalothérapeute qui est à côté de moi -- on a le même titre d'emploi -- va en gagner 62 $. Et on a appris que tous les fériés des agences étaient payés à taux double. On s'est battus pour en avoir quatre payés à temps et demi. Vous croyez qu'il y a une justice? Vous croyez qu'il n'y a pas deux poids, deux mesures dans notre système de santé, dans la pratique au quotidien auprès de nos patients? Bien, on va pouvoir s'asseoir avec vous une couple d'heures, on va vous en faire une présentation. C'est vraiment préoccupant. Ça ne coûte pas 10 millions de dollars, c'est des centaines de millions de dollars que le système de santé donne à des agences privées. Puis je peux comprendre, puis je n'ai aucun, aucun reproche à faire aux infirmières ou aux autres professionnels qui décident d'y aller. Puis je m'explique: elles ont, à ce qu'elles nous disent, la possibilité de travailler où elles veulent quand elles veulent.

Mais il y a une analyse qui n'est pas faite à long terme, c'est sur l'expertise, la qualité des soins et l'impact que ça peut avoir. Quand on change, au quotidien, trois filles sur le même quart de travail parce qu'elles arrivent à la dernière minute, je regrette, on met en péril la qualité des soins. Et, quand on a des centaines de millions à donner à des agences privées, on pourrait les investir dans notre système de santé. On a des belles propositions, M. le ministre, dans notre projet de négociation, pour la réorganisation du travail, pour faire que notre monde puisse obtenir et avoir des conditions qui sont décentes. On espère qu'on aura l'écoute, et automatiquement il y aura l'éradication... probablement pas à 100 %, mais il n'y aura pas cette montée-là vertigineuse du nombre d'agences au Québec, qui viennent fournir des soins et qui, d'une certaine façon, sans que ces gens-là sur le terrain veulent nuire, mais ajoutent au fardeau de tâches des gens sur le terrain de façon quotidienne. Nos professionnelles nous le disent, elles nous l'ont démontré, on a des chiffres à l'appui. C'est vraiment préoccupant.

M. Turcotte: Je vous remercie beaucoup.

Mme Boisclair (Michèle): Ça me fait plaisir.

M. Turcotte: Puis est-ce que vous allez pouvoir nous déposer le document, on aimerait ça en avoir une copie?

Mme Boisclair (Michèle): Oui. On peut le donner? Je pense que je l'ai, le mien. Il va être sur le site, mais je pense... Moi, j'ai le mien. Je l'ai envoyé, de toute façon, il y a quelqu'un qui m'a...

Le Président (M. Kelley): Alors, on va...

Mme Boisclair (Michèle): Oui, je m'excuse.

Le Président (M. Kelley): Non, non. Sur ça, c'est juste qu'il me reste à dire merci beaucoup, Mme Boisclair, Mme Mercier, pour votre contribution à notre réflexion.

Je vais suspendre quelques instants et je vais inviter les représentants de l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec de prendre place devant moi. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16:53)

 

(Reprise à 16 h 58)

Le Président (M. Kelley): Alors, la commission reprend ses travaux. Nous sommes arrivés à... les dernières, mais pas les moindres, des témoins devant la commission. Je veux... Un mot de bienvenue aux représentants de l'Association des conseils de médecins, dentistes et pharmaciens du Québec, représentée, entre autres, par son président, Dr Martin Arata. Alors, sans plus tarder, Dr Arata, la parole est à vous.

Association des conseils des
médecins, dentistes et pharmaciens
du Québec (ACMDP)

M. Arata (Martin): Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les parlementaires, nous vous remercions de l'opportunité que vous nous offrez aujourd'hui de partager nos réflexions avec vous concernant le projet de loi n° 67, celui qui devrait mener à la création de l'INESSS.

Je suis accompagné aujourd'hui, pour cette présentation, à ma gauche, de Mme Cécile Lecours, pharmacienne, qui est une de nos vice-présidentes, et Mme Dominique Derome, directrice générale de notre association.

Alors, dans les prochaines minutes, nous allons parcourir avec vous notre mémoire, mais un peu en diagonale, afin de souligner les points les plus significatifs et importants, à nos yeux, concernant ce nouveau projet de loi.

Alors, si vous me permettez quelques minutes en début de présentation pour vous faire part de ce qu'est l'Association des CMDP, qui peut malheureusement à l'occasion être méconnue, alors donc c'est une association qui représente les conseils des médecins, dentistes et pharmaciens. Conseils médecins, dentistes et pharmaciens, c'est constitué à l'intérieur de chacun des établissements de santé au Québec et ça veille principalement à s'assurer que des soins de qualité sont disponibles pour la population. Donc, ce conseil s'assure des soins de qualité pour les actes posés par les médecins, dentistes et pharmaciens et veille bien sûr à toutes autres fonctions prévues à la loi, qui sont énumérées dans le mémoire mais pour lesquelles je ne procéderai pas dans les prochaines minutes, étant donné qu'elles sont multiples.

**(17 heures)**

On voit, à l'intérieur du projet de loi, que l'INESSS sera voué à l'excellence. C'est un peu aussi ce à quoi sont voués les CMDP dans chacun des établissements. Nous, on voit un peu l'INESSS comme étant un élément central. Mais comment on peut l'articuler sur le terrain, ça se fait présentement via, entre autres, les CMDP, et on pense que c'est une forme d'actualisation d'éléments et de recommandations qu'on retrouve présentement dans le réseau. On l'a souligné tout à l'heure, il existe déjà des recommandations, des guides de pratique; ils s'actualisent, entre autres, via les CMDP. Et donc on demeure, et on croit, un acteur important et considérable dans ce dossier. Et on se voit d'ailleurs et se sent interpellés à cet effet-là.

La création de l'INESSS, qu'est-ce qu'elle va amener? Elle va amener des nouveaux moyens pour notre société de s'assurer d'une utilisation efficace, équitable et efficiente des ressources.

On a déjà des institutions qui existent, on en a parlé, Conseil du médicament, AETMIS, mais on croit qu'avec un certain rapprochement de ces institutions on va permettre une meilleure collaboration, un partage des compétences, et même, à la limite, une synergie à ce niveau. Pourquoi? On le voit. On parlait tout à l'heure de terrain. Alors, quand on a des équipes sur le terrain, on remarque que les équipes qui sont à proximité vont souvent développer une certaine forme de synergie et de langage, je dirais, non verbal pour pouvoir comprendre comment on peut actualiser certaines préoccupations. Alors, on le voit dans les équipes de soins, lorsque les gens sont habitués de travailler ensemble, il se fait une forme de productivité, je n'aime pas le terme, mais, quand même, une optimisation de la compétence. Alors, dans le processus de fusion en lien avec les entités qui existent présentement, on espère, on souhaite et on désire que l'on puisse retrouver cette façon de voir et de faire à l'intérieur de l'entité que sera le nouvel INESSS.

Donc, on présume qu'il y aura économie de coûts, s'il n'y a pas économie de coûts, qu'il y ait amélioration en termes de rendement. Donc, si ça ne coûte pas moins cher, que les travaux finaux ou la quantité et/ou la qualité de ces derniers soient augmentées de par cette nouvelle façon de faire dans le réseau.

Bien sûr, nous vous ramenons à une recommandation qui nous préoccupe. Une fusion peut amener des délais. On souhaite et on recommande que la transition se fasse sans trop de heurts et de façon progressive. Par contre, elle ne doit pas se faire au détriment des travaux qui sont présentement en cours. Donc, actualiser les travaux durant la fusion et continuer à le faire pour ne pas qu'on se retrouve avec des recommandations de travaux qui seraient en cours qui deviendraient désuètes de par le fait qu'on a amené un délai inapproprié dans l'actualisation de ces recommandations-là.

Je poursuivrais avec les recommandations et guides cliniques que l'on retrouve dans le projet de loi. Alors, on croit que l'association joue un rôle déterminant au niveau de l'intégration des pratiques et des guides reconnus. Je vous le mentionnais tout à l'heure, sur le terrain, comment on actualise le tout. Si on prend des nouvelles technologies qui sont mises en place dans le réseau de la santé, on doit s'assurer que les personnes qui les utilisent ont les privilèges ou les compétences suffisantes.

Alors, comment ça se fait dans les établissements? Les CMDP vont s'assurer que les personnes qui vont utiliser ces technologies vont avoir les compétences. Au niveau du médicament, on interpelle le comité de pharmacologie à l'intérieur de l'établissement pour voir comment on peut optimiser le médicament, comment on peut l'utiliser. C'est des lignes directrices d'ailleurs à mettre en place. Mme Lecours pourra vous en parler davantage, si vous avez des questions plus spécifiques à cet effet-là, ultérieurement.

Par contre, dans une entité aussi grande que l'INESSS, il devient important de prendre en considération les régions. Quand je dis: les régions, c'est: les réalités régionales. Je ne dis pas que les régions sont plus significatives que les grandes... les centres urbains, mais vous comprendrez très bien qu'entre le CHUM et le centre de santé de Gaspé il y a une différence. En tout cas, ceux qui ne l'auraient pas notée, nous demeurons disponibles après la commission pour peut-être vous éclairer à cet effet. Mais donc les guides de pratique doivent prendre en considérant ces réalités-là. Pourquoi? Si on veut faire du mur-à-mur, malheureusement on ne pourra peut-être pas rejoindre les gens, les gens vont peut-être moins se sentir interpellés, et là va venir possiblement la difficulté à mettre en place sur le terrain les guides et les recommandations que l'INESSS voudra actualiser dans notre réseau. Alors, pour nous, il devient important qu'on soit en mode participatif et non en mode mur à mur constrictif, si je peux me permettre le terme.

On voulait souligner aussi que certains éléments dans le projet de loi n'étaient peut-être pas partie préoccupante des rôles et responsabilités de l'INESSS, et on souligne la génétique, la génomique, les technologies de l'information, la télémédecine. Donc, en termes d'analyse de certains enjeux à venir, il nous apparaissait important de le souligner, sans pour autant en faire une obligation de sujet à traiter, mais peut-être dans les considérants, sachant que génomique et génétique pourraient certes générer des coûts significatifs dans le réseau dans les prochaines années.

Ce qui nous amène à vous faire quelques recommandations, si vous nous le permettez, sur ce sujet, qui nous amène à vous dire: Que les critères d'évaluation de la performance des services et les échéanciers de mise en oeuvre des recommandations de l'AETMIS... excusez-moi, de l'INESSS tiennent compte des réalités des différents milieux, donc l'adaptabilité.

Que l'INESSS crée des indicateurs de suivi. Alors, indicateurs de suivi, on parlait tout à l'heure des guides, on parlait des recommandations; il y en a présentement. Ce qui serait certes une plus-value, c'est de s'assurer qu'ils sont mis en application et qu'ils apportent une plus-value, justement, à la population, qui va bénéficier de ces recommandations-là. Alors, au Québec, si on fait des guides, on fait des recommandations, ça doit donner quelque chose de plus. Donc, un indicateur de suivi nous permettrait certainement de voir à s'assurer qu'on a peut-être fait les bons choix.

Que les guides de pratique qui existent déjà, qui ont été développés par les établissements, les partenaires du réseau ou d'autres organismes soient repris et diffusés par l'INESSS. Ne réinventons pas la roue et partons des éléments qui existent déjà pour peut-être déjà... pour permettre de procéder rapidement. De plus, cette façon de partager l'information permet une économie de coûts et d'efforts -- vous n'êtes pas sans, certainement, vous préoccuper des coûts dans notre réseau.

Que les guides de pratique soient adaptables aux particularités institutionnelles et régionales. Quand on dit: particularités institutionnelles, c'est les missions des établissements. Un centre de cardio va certainement être interpellé davantage par des analyses en cardio qu'un centre qui va travailler en psychiatrie. Alors donc, je pense qu'on n'a pas besoin de différencier davantage. Génétique, génomique, je vous l'ai glissé tout à l'heure.

Que l'INESSS identifie des partenaires stratégiques pour la diffusion des guides afin de susciter l'appropriation par les secteurs clés. L'INESSS ne peut pas et ne pourra pas travailler seul, ne peut pas devenir une entité détachée complètement du réseau. Alors, les conseils d'administration, les conseils professionnels à l'intérieur des établissements -- je vous parlais tout à l'heure de qualité d'actes, d'excellence -- ces gens-là sont interpellés. Le conseil d'administration s'assure de la qualité des soins offerts à la population desservie, dans une approche populationnelle. Les conseils professionnels le font et interpellent leurs professionnels à cet effet-là.

Que le ministère s'assure que les ressources nécessaires pour l'implantation des recommandations, des avis et des guides soient disponibles en temps opportun. On sait malheureusement qu'à l'occasion, dans le réseau, les ressources ne sont pas toujours disponibles et qu'il peut arriver que les établissements aient des choix à faire. Donc, afin d'éviter que l'application de certaines recommandations soient en lien avec des enjeux à l'interne, peut-être de faciliter le tout.

Il y a certes, dans le réseau, une amélioration et une optimisation des ressources à faire, mais il faudrait aussi éviter qu'il y ait de la négociation, si je peux me permettre le terme, sur des guides et des pratiques qui devraient être mis en place à partir d'enjeux économiques ou budgétaires de certains établissements. Alors, ce qu'on voudrait s'assurer, c'est que ça ne fasse pas partie, je vous dirais, là, d'enjeux à d'autres niveaux, parce que l'excellence, et la qualité des soins, ne doit pas nécessairement être discutée. La qualité à un prix, mais pas la qualité à tout prix. Dans notre réseau, ça, je pense que c'est important aussi à reconnaître.

Je poursuivrais avec le plan triennal des activités. On a vu, dans le projet de loi, qu'on soumettait un plan triennal. Alors, il mous apparaît important que le plan triennal soit rendu public le plus tôt possible afin de permettre aux établissements de connaître et de comprendre les enjeux qui seront traités par l'INESSS et de faire en sorte que, dans l'appropriation d'une nouvelle technologie, dans la préparation de l'arrivée suite à l'étude qui est en cours, on puisse déjà, à l'intérieur du réseau, être prêts à recevoir ce qui se discute et ce qui se planifie au niveau de l'INESSS. Alors donc, on demande qu'il soit rendu public le plus tôt possible.

Création d'un registre. On ne fera pas le lien avec les armes à feu, hein, tout au moins, mais on va rester à l'effet qu'un registre peut toujours gérer et englober beaucoup de fonds. Assurons-nous que ce qui est prévu dans le registre est pertinent, qu'il va servir au réseau, qu'on ne duplique pas les demandes d'information, que le système qui supporte le tout, en termes de technologie, soit efficace, que les données soient valides et nous permettent, bien sûr, d'accéder rapidement à ces données, de ne pas non plus demander aux établissements de faire ce qu'on appelle malheureusement du manuscrit pour soulever ces... pour aller chercher ces données-là, leur donner les moyens de pouvoir rapidement les rendre disponibles pour l'INESSS. Alors donc, on recommande que l'INESSS s'appuie sur des bases de données déjà existantes et qu'il coordonne la cueillette d'information et, si de nouvelles bases de données devenaient disponibles, de pouvoir puiser à même ces dernières bases.

Bien sûr, on arrive au sujet probablement le plus chaud, qui est l'organisation et la gouvernance. Alors, pour nous, nous adhérons à un régime minceur du conseil d'administration. Alors, on trouve intéressant qu'il n'y ait que 11 membres de proposés au niveau du conseil d'administration. Les nouvelles tendances en gestion vont vers des conseils d'administration plus minces. C'est une tendance probablement aussi en santé de vouloir être plus mince. Alors donc, on arrive avec cette proposition-là, à laquelle on adhère.

**(17 h 10)**

Par contre, on désire s'assurer que les membres de ce conseil d'administration là vont être choisis judicieusement, vont être choisis de façon transparente et vont justement être indépendants, vont surtout, et je ne le dirai peut-être pas suffisamment, être compétents pour ce qu'ils doivent jouer comme rôle à l'intérieur de l'INESSS. Nous, l'élément qui nous interpelle le plus, c'est la compétence des membres du conseil d'administration, donc s'assurer que les critères vont être justement à la hauteur des attendus en termes de compétence.

Que le processus de consultation soit peut-être mieux défini. Quand on parle de «mieux défini», c'est qu'on sache peut-être davantage comment il s'effectuera afin d'éviter ou de sentir qu'il pourrait y avoir un questionnement sur la transparence, et là, par la suite, de questionner, bien sûr, la légitimité de l'INESSS, et là de remettre en question le processus et faire en sorte qu'on va oublier ce qu'est l'INESSS, et on va essayer de le challenger de façon répétée pendant les années de sa... je ne dirais pas les années, les mois de sa création et de son actualisation, et là on pourrait dériver à cet effet-là.

Donc, compétence des membres du conseil d'administration et processus clair, bien défini pour la sélection des membres de ce dernier. Alors, processus rigoureux, transparent, avec une consultation auprès d'organismes jugés représentatifs, et nous n'aurons certes pas besoin de vous dire que nous considérons que nous pourrions être représentatifs à cet effet-là, si vous aviez besoin de consulter les gens.

Rapidement, sur le volet des mandats, on vous mentionne que le président-directeur général et le président du conseil d'administration, pour nous, devraient possiblement cumuler pas plus de deux mandats, idéalement au moins deux. Pourquoi au moins deux? Pour assurer une certaine continuité. Pourquoi pas plus que deux? Ce n'est pas qu'on s'inspire du modèle américain ou quoi que ce soit, c'est qu'on pense qu'après deux mandats qui peuvent aller jusqu'à cinq ans il y a peut-être nécessité de faire évoluer la structure en la modifiant à ce niveau.

Je terminerais par la table de concertation. Alors, oui, M. le ministre, nous réitérons notre disponibilité et notre contribution autour de la table, si vous le jugez opportun et si les compétences peuvent permettre d'assurer des choix judicieux. Il demeure pour nous un incontournable sur cette table, c'est-à-dire le choix et la connaissance des enjeux de notre réseau de santé. Alors, si les gens qui sont autour de la table s'élèvent au-delà du corporatisme et vont en fonction des enjeux qui sont là pour la population québécoise, ce sera probablement le bon choix qu'on aura fait.

En termes de représentativité, en termes de détermination, on le laisse à la discrétion du ministre et/ou des instances qui auront à le faire, soit l'INESSS, mais on croit qu'ils seront en mesure de pouvoir le faire adéquatement. S'ils ont besoin d'aller en processus de consultation, ce sera peut-être apprécié par les organismes du réseau.

Je reviens encore: enjeux à déterminer par la table, important d'avoir les personnes interpellées du terrain, des gens qui connaissent bien le terrain et qui veulent faire avancer le tout.

Alors donc, en conclusion, l'Association des CMDP souscrit d'emblée à la création de l'INESSS. Vous avez probablement pu le constater, nous sommes ravis de voir que l'excellence est au coeur des priorités ministérielles, ou tout au moins se poursuit, et nous pouvons vous assurer de notre soutien à ce noble mandat, et on aime bien le mot «noble». Pourquoi? L'Association des CMDP se présente souvent en étant l'association qui représente une forme de noblesse, c'est-à-dire pas pour ce qui est, là, du règne d'un roi ou de quelconque... mais la noblesse par la qualité des soins qu'elle représente. Donc, on représente la qualité et non un organisme spécifique.

Alors, le succès de l'INESSS par contre sera tributaire de plusieurs éléments significatifs, et en conclusion on aimerait vous les rappeler: donc, tout d'abord, le choix judicieux des membres du conseil d'administration de par leur compétence attendue; les priorités d'action adoptées par cet INESSS là, donc quels seront les enjeux vraiment et comment on va les déterminer; l'élaboration et la diffusion en temps opportun des recommandations -- et je mets «temps opportun», on en a discuté beaucoup: l'actualisation d'une recommandation lorsque la technologie ou le médicament est désuet ou lorsque 90 % des établissements ont adopté soit le médicament ou la procédure devient de facto inappropriée, et on requestionnera peut-être le rôle si jamais cela arrivait, donc on ne désire pas que le rôle soit questionné, on désire que le temps opportun soit pris en considérant; la capacité d'actualisation de ceux-ci, bien sûr, par les cliniciens, donc ça touche, ça appelle les cliniciens, ils se sentent interpellés; et la collaboration étroite avec le réseau de la santé et les services sociaux.

Donc, les motivations qui animeront l'INESSS devront se baser sur un souci, selon nous, d'équité, d'accès, de qualité de soins et de performance, mais non sur des impératifs seulement à caractère économique. Et là, pour nous, la qualité, on vous le dit, devient un impératif significatif. L'ACMDP pense que l'INESSS accentuera l'utilisation judicieuse et équitable des ressources. Pourquoi on parle d'accentuer? Parce que des fois on oublie l'ensemble des efforts qui sont faits dans le réseau de la santé pour optimiser les soins et services et l'ensemble des efforts faits par les gens qui sont sur le terrain. Mais, oui, on pense qu'il y a encore peut-être un certain bout de chemin à faire.

Et, bien sûr, nous réitérons à nouveau, M. le ministre, notre disponibilité pour collaborer à l'INESSS dans la recherche de l'excellence de santé et services sociaux, pour le plus grand bénéfice de qui, selon nous? De la population québécoise et des gens qui sont nos patients ou nos clients.

Et je me permettrais une phrase humoristique en terminant: Si les Britanniques regardaient notre projet de loi, ils diraient certainement: «It's NICE.» Alors donc, je termine sur ce.

Le Président (M. Kelley): Nicely done.

Une voix: More than NICE.

M. Arata (Martin): More than NICE. Je ne peux pas aller plus loin, là.

Le Président (M. Kelley): Alors, merci beaucoup, Dr Arata, pour cette présentation. On va passer maintenant à la période d'échange avec les membres de la commission, et je vais céder la parole au ministre de la Santé et Services sociaux.

M. Bolduc: Merci. Dr Arata, inutile de vous dire que j'adhère entièrement à vos constats. Et puis je vais utiliser votre expertise à vous et à Mme Lecours parce que, je pense, vous avez tous les deux des grandes expertises dans le réseau de la santé. Parce qu'il s'est dit des choses ici ce matin, les oreilles me frisaient, tu sais, je veux dire, j'ai entendu des choses...

On va parler de l'évaluation. L'Association des CMDP, l'ACMDP, un de ses mandats, c'est certainement la qualité et l'évaluation, et il avait été mention ce matin qu'il n'y avait pas d'évaluation dans le réseau de la santé. Le député de... a corrigé un peu par la suite en disant: Oui, il y en a peut-être, là. Mais, selon vous, est-ce qu'il se fait de l'évaluation dans le réseau de la santé, au niveau des établissements de santé? Est-ce qu'il y a des indicateurs qui sont présents? Et je parle au niveau... dans le mandat CMDP. Je voudrais juste qu'on s'en tienne d'abord au mandat CMDP; on ira tantôt dans l'évaluation globale d'indicateurs à d'autres secteurs.

M. Arata (Martin): Alors, pour répondre à votre question, M. le ministre, au niveau des rôles et responsabilités du CMDP, vous le suiviez, il y a un rôle qui est en lien avec l'évaluation de la qualité de l'acte par les médecins, dentistes et pharmaciens. Et, oui, dans les établissements de santé, il y a une obligation de le faire à différents niveaux. J'en conviens, il y a différentes mesures. Il y a des établissements qui en font moins, des établissements qui en font plus.

Il y a même des centres d'expertise, dans certains milieux universitaires, sur l'évaluation de la qualité de l'acte. Je prends l'exemple de Sherbrooke, et là je ne veux pas porter ombrage à tout autre milieu où il pourrait s'en faire ailleurs au Québec, mais ayant eu l'opportunité de voir avec les gens de Sherbrooke ce qui se fait, oui, il se fait de l'évaluation de l'acte, oui, il se fait de l'évaluation de la pertinence de l'utilisation des ressources, oui, il se fait de l'évaluation quant à l'organisation des soins et services et la meilleure façon de dispenser ces soins et services là à l'intérieur des établissements, pour ce qui est du rôle du CMDP.

Puis je laisserais peut-être Mme Lecours compléter, là, pour le volet, là, médicament.

M. Bolduc: Moi, je voulais justement y aller par rapport à l'évaluation, les évaluations au niveau des médicaments. On parlait ce matin des infections nosocomiales, là, comme s'il n'y avait aucun indicateur, puis on n'avait pas de données. Moi, à ma connaissance, pratiquement à chaque mois, j'ai des données de tous les établissements du Québec. Vous pratiquez dans des établissements de santé, c'est quoi, la vérité?

Le Président (M. Kelley): Mme Lecours.

Mme Lecours (Cécile): Bien, par rapport au contrôle des infections, c'est peut-être un domaine que je connais moins, mais il se fait énormément de travaux sur le terrain. Moi, j'ai oeuvré pendant 12 ans à l'Hôpital Sacré-Coeur, et je suis encore consultante à l'Hôpital Sacré-Coeur, et maintenant je suis à Louis-H. Alors, il se fait énormément de travaux au niveau de la prévention des infections, des suivis et des liens entre les prescriptions des patients, la fréquence de réinfection postop, et tout ça a fait, entre autres, que plusieurs établissements ont amélioré beaucoup leur situation, quoiqu'on est toujours en lutte, là, contre... C'est un des grands enjeux en santé mondiale, c'est évidemment de prévenir, là, les infections avec des agents qu'on ne peut pas soigner.

Par contre, je voudrais revenir à votre évaluation de l'acte. Concrètement, pour donner quelque chose de bien concret aux gens ici, je suis dans un hôpital psychiatrique, et puis il y a un travail qui se fait au niveau des psychiatres, au niveau de l'évaluation de la pharmacothérapie, la polypharmacothérapie avec des antipsychotiques. Alors, tous les patients, dans notre établissement, qui en reçoivent, il y a une évaluation de tous les dossiers qui se font de façon régulière. Au niveau de l'évaluation d'acte des pharmaciens, tout nouveau patient qui aurait plus de trois antipsychotiques de combinés, il y a une opinion qui est faite, et on va valider a posteriori: Est-ce que le pharmacien a fait son opinion et est-ce qu'il l'a notée au dossier? Alors, de l'évaluation de l'acte, il s'en fait.

Par contre, ce n'est peut-être pas si connu, parce que les travaux du CMDP ne sont pas encore tout à fait intégrés avec toutes les activités de prévention des risques dans les établissements. Alors, il se fait beaucoup de choses au niveau médical, pharmaceutique et dentisterie -- où il y en a, comme dans un hôpital psychiatrique, il y en a, de la dentisterie -- mais c'est moins connu des administrateurs d'établissement de santé. Alors... Parce qu'il y a beaucoup d'éléments, hein? Il y a la confidentialité de tous les procès-verbaux des comités. Alors, il s'en fait, de l'acte du suivi de morbidité, mortalité, des comités, des sous-comités d'évaluation de l'acte, il s'en fait beaucoup plus que ce que la perception même des gestionnaires d'établissement ont de ça.

**(17 h 20)**

M. Bolduc: Est-ce que vous êtes d'accord qu'il y a plusieurs indicateurs qui existent dans les établissements, des indicateurs très robustes sur lesquels tous les établissements se basent pour faire de l'évaluation?

M. Arata (Martin): Oui, bien, vous souligniez, tout à l'heure, M. le ministre, les infections nosocomiales, donc, oui, on doit donner notre taux d'infections nosocomiales, c'est mesuré, c'est validé, c'est surveillé, l'analyse des causes d'infection. On parle... on va parler l'accès, entre autres accès en chirurgie, on va parler d'indicateurs aussi, parce qu'on parle de qualité, mais l'accès, selon nous, fait partie intégrante de la qualité, donc des mesures d'indicateur au niveau de la qualité. On a des séjours sur civière, des séjours, la réhospitalisation, le nombre de patients avec maladies chroniques. Écoutez, plusieurs éléments sur lesquels j'ai l'opportunité, la chance, le privilège, à la limite, d'être DSP, et, comme gestionnaire-médecin à l'intérieur d'un établissement, c'est à partir de ces indicateurs-là qu'on va prendre les orientations quant aux types de clientèle qu'on a à traiter, quant à la façon dont on les traite, quant aux mesures à mettre en place et quant aux ressources à allouer, entre autres. Alors donc, oui, il y a des indicateurs.

Je me permettrai aussi de dire qu'il se fait de l'évaluation informelle. On n'est pas obligés d'utiliser un processus, dans les établissements, toujours très complexe pour arriver à une évaluation. Les professionnels qui sont dans le réseau sont des gens aussi qui, de par leur nature, ont le goût de viser l'excellence, et qui vont entre eux faire ce qu'on appelle de l'évaluation de corridor, et qui vont se supporter dans les soins et services qu'on a à offrir.

M. Bolduc: Oui?

Mme Lecours (Cécile): Par rapport aux indicateurs, les travaux du Conseil du médicament, particulièrement dans les trois, quatre dernières années, nous ont fourni... nous fournit régulièrement des indicateurs qu'on suit: les nouveaux antifongiques qu'on a ajoutés, les nouveaux antinéoplasiques qu'on a ajoutés dans nos formulaires. Les travaux du conseil sur l'optimisation de l'utilisation de ces agents-là nous fournissent des critères qui font qu'au comité de pharmaco, revoir une cinquantaine de dossiers pour voir si on les utilise selon le choix québécois de ce qu'on va offrir à tous les Québécois, c'est des sources de critères pour nous.

M. Bolduc: J'insiste, parce qu'on a eu quatre jours d'auditions, puis, à plusieurs reprises, on a entendu que notre réseau n'avait pas d'indicateur, qu'on ne surveillait rien. Moi, je peux dire: Vous pratiquez à Thetford Mines, je vois vos chiffres de l'urgence à chaque matin, vos données en chirurgie, vous avez pratiquement 0-6 mois à des patients qui sont en attente. Vos données sont disponibles sur le site Web en temps réel. Si je vous disais comme ça: Il n'y a pas d'indicateur dans le réseau, c'est quoi, votre réponse à ça?

M. Arata (Martin): La réponse serait: Il y a des indicateurs dans le réseau, peut-être sont-ils mal connus, peut-être sont-ils mal utilisés. Je ne pourrais pas... Mais, si vous me posez la question: Y a-t-il des indicateurs dans le réseau?, oui. Devrions-nous nous en servir? Oui. Est-ce qu'ils disent tout? Probablement pas, mais c'est quand même une source d'inspiration pour certaines orientations qu'on peut se donner dans les établissements. Mais ils ne sont certes pas parfaits, si vous me posez, par contre, la question.

M. Bolduc: Tout à fait d'accord, mais il en existe de multiples.

M. Arata (Martin): Oui.

M. Bolduc: Je pense... En tout cas, vous m'avez aidé à faire mon point, parce que vous êtes des gens de terrain qui travaillez à la bonne place. Vous savez, vous êtes dans les établissements, puis je pense que c'est important de dire aux gens qui ne sont pas dans les établissements comment ça fonctionne.

Là, je voudrais en arriver à l'autre point: C'est quoi, la relation entre... que vous voyez entre l'Association des conseils médecins, dentistes et pharmaciens et l'INESSS? Parce que je pense que tout le monde est d'accord, l'INESSS ne fera pas tout, et on pense que l'INESSS va devoir travailler en collaboration avec toutes les organisations. Ce matin, on a eu le FRSQ, on a eu l'Association médicale du Québec. Vous autres mêmes, vous avez une mission qui est très particulière, et puis comment vous voyez votre collaboration avec une organisation comme l'INESSS?

M. Arata (Martin): Bien, écoutez, la première réaction est celle que l'INESSS donne les grandes orientations. Pour l'actualiser sur le terrain, je vous parlais tout à l'heure des technologies, je vous parlais tout à l'heure des médicaments, il y a des gens qui sont là qui permettent l'actualisation et l'appropriation par les professionnels. Et, je vous dirais, l'organisme le plus crédible à l'intérieur d'un établissement de santé demeure le CMDP, entre autres pour les pratiques professionnelles, entre autres pour la médication. Alors, je ne dirai pas que l'INESSS est la tête, qu'on est les bras, c'est peut-être une façon, on pourrait l'inverser, à la limite, mais je pense qu'on est en continuité directe, selon l'interprétation du rôle que l'on voit des CMDP, entre les recommandations quant aux guides de pratique, quant à l'excellence, quant à la qualité qu'on vise et comment l'actualiser sur le terrain. C'est, pour nous, ce que l'on fait déjà sans le support d'une entité aussi importante que l'INESSS, avec les ordres professionnels à certains égards, avec d'autres partenaires à certains égards...

Une voix: L'ACSSQ.

M. Arata (Martin): L'ACSSQ, qu'on disait tout à l'heure. Mais on peut maintenant avoir une structure beaucoup plus centrale, qui va nous permettre peut-être de voir d'où vient l'ensemble de l'information, et de l'actualiser. Mais on se voit comme -- je vais être honnête -- les actualisateurs des recommandations de l'INESSS.

Le Président (M. Kelley): Mme Lecours.

Mme Lecours (Cécile): C'est ça, notre mission, nous, c'est beaucoup d'aider le médicoadministratif à s'implanter dans nos établissements et par des formations qu'on donne, qu'on donne à chaque année, parce qu'il y a du mouvement dans le réseau. Pour nous, l'INESSS, c'est un organisme qui va nous outiller, les établissements, donc, au lieu que chaque établissement révise puis développe un guide ou une meilleure façon d'utiliser une nouvelle technologie ou un nouveau médicament. Et aussi c'est l'organisme qui conseille le ministre par rapport aux inscriptions, etc.

Et, si les travaux de l'INESSS sont faits en temps opportun, avec aussi... très transparent au niveau de ses agendas, ça nous permet d'assurer une certaine équité aux Québécois. Et notre rôle comme ACMDP, c'est de former nos membres, en plus de les représenter dans des échanges comme celui-ci, de former nos membres, dans notre formation sur le comité de pharmacologie, à utiliser, parce que... utiliser ces ressources-là qui sont mises à notre disposition par les travaux de l'AETMIS ou, dans le cas du comité de pharmaco, du Conseil du médicament actuellement, et ultimement de l'INESSS dans le futur. Alors, c'est une façon de... et aussi d'échanger, d'en discuter entre professionnels: Comment tu appliques ça dans ton milieu, les difficultés que tu as eues à appliquer les guides ou etc.? C'est ça, notre rôle.

M. Bolduc: Puis, en passant, je tiens à vous féliciter parce que vous vous en acquittez très, très bien. Puis, pour que nos auditeurs puis que les gens de l'opposition comprennent bien, c'est qu'on a un réseau de la santé qui est complexe, dans lequel il y a multiples organismes, et c'est impossible, quant à moi, de tout... qu'un organisme fasse tout. Ce qui est surtout important, c'est la complémentarité entre tous nos organismes, dont, entre autres, les établissements de santé dont vous représentez des catégories de professionnels qui, eux autres, vont faire de l'évaluation. Mais par contre, comme vous disiez, ça prend peut-être un mécanisme plus centralisateur qui nous permet, au Québec, d'avoir un guide de pratique.

Je retiens des belles choses que vous avez dites. La première, c'est vrai: Gaspé, ce n'est pas le CHUM, et puis il faut adapter, il faut être souples et il faut être flexibles également dans nos guides de pratique. Mais le guide de pratique généralement devrait être le même, l'application peut être modulée.

Un élément que je tiens à vous rassurer également: la transition progressive, vous faites bien de nous le dire, puis j'en ai fait mention aujourd'hui, c'est un élément qui, pour moi, est très important. Les deux organisations, qui sont d'excellente qualité, doivent continuer à le faire, et c'est une fusion progressive où... Puis, bon, on mettra en commun au fur et à mesure. Il ne devrait pas y avoir de temps d'arrêt et il ne devrait pas y avoir de turbulences. Ça, pour nous, c'est un élément majeur. Il y a l'élément services sociaux qu'on rajoute. Donc, maintenant, ça va être vraiment ce que j'appelle une fusion des égaux, hein, le médicament, la santé, les services sociaux, dans lesquels chacun doit aller chercher sa part. Donc, il ne faut pas diminuer l'un par rapport à l'autre mais avoir quelque chose de progressif.

Des guides de pratique, pour moi, c'est essentiel. Je pense que vous avez déjà travaillé, au niveau de votre association, pour en faire, vous en avez fait. Et puis je sais que l'association est quand même un des experts au niveau de l'évaluation par critères objectifs. Je pense que là-dessus c'est quelque chose de bien.

Partenariat stratégique avec le collège, comment vous voyez ça, Collège des médecins, l'Ordre des infirmières, l'Ordre des pharmaciens, par rapport à l'INESSS et l'évaluation médicale?

M. Arata (Martin): Bien, le collège ou les ordres professionnels sont déjà des gens qui doivent s'assurer de la protection du public. Donc, dans leur mandat, ils ont déjà aussi une forme d'évaluation de la qualité de ce qui se fait. Le guide... Certains guides sont déjà élaborés par le Collège des médecins, l'Ordre des infirmières et autres, donc qu'est-ce qui empêcherait de développer des partenariats avec ces gens-là, si l'INESSS le juge opportun, afin de profiter ou d'utiliser les compétences qui sont déjà en place? Si par contre ça venait à amener un biais dans tout ça, bien, écoutez, l'INESSS sera probablement la personne, et/ou le ministre, dépendant des instances décisionnelles, à analyser la situation. Mais il y a des gens compétents, il y a déjà des démarches qui sont faites. Il y a déjà un certain potentiel qui existe. Alors, comment on peut le faire si le partenariat stratégique est la solution? Bon, écoutez, profitons de l'expertise et de l'expérience que l'on a dans le réseau, ne l'oublions pas.

Le Président (M. Kelley): Mme Lecours.

**(17 h 30)**

Mme Lecours (Cécile): Je pense que tout ça, c'est complémentaire. Il faut qu'il y ait des liens entre les inspections, sur le terrain, des ordres professionnels. Il faut que les travaux de l'INESSS soient intégrés à ces inspections-là, comme ils sont intégrés aux critères d'Agrément Canada, etc., dans... Puis, de la même façon, l'INESSS... L'Institute for Safe Medication Practices, par exemple, amène des critères de qualité. Ce serait bon que l'INESSS les reprenne parce que, dans nos agences, ils ne savent pas qu'il faut faire des bilans comparatifs de médicaments. C'est quelque chose qui amène des nouvelles façons de faire, et ça aussi, c'est garant de qualité, d'excellence en soins. Ça fait qu'il faut que tous ces gens-là... les travaux de l'INESSS soient intégrés dans toutes nos autres structures, donc, pour la diffusion puis l'appropriation sur le milieu, et, si tout le monde pousse dans le même sens, ça va marcher.

M. Bolduc: Je vois ça de la même façon que vous. C'est vraiment... puis vous l'avez très, très bien expliqué, on ne peut pas en avoir seulement qu'une, ça nous en prend plusieurs dans lesquelles l'INESSS -- puis ça, c'est la valeur ajoutée de l'INESSS -- va nous faire une bonne coordination puis une bonne intégration.

Pour terminer, bien, c'est sûr que je retiens très bien vos commentaires sur la gouvernance, entre autres un C.A. mince, et ça, je pense que tout le monde s'entend qu'au niveau de la gouvernance, l'expertise à ces niveaux-là, naturellement on veut des gens qui sont crédibles, et, pour nous, l'INESSS, comme l'AETMIS et comme le Conseil du médicament le sont, ça va devenir une organisation crédible qui va représenter toute cette question-là d'excellence au Québec autant en santé et en services sociaux.

Là-dessus, je vous remercie et je vous félicite, continuez votre beau travail. Et puis on va certainement être des collaborateurs dans le fonctionnement de l'INESSS parce que vous êtes une organisation très crédible sur laquelle on va certainement avoir des belles choses à faire avec vous. Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Poirier: Merci, M. le Président. Bienvenue. Effectivement, le débat est très intéressant. J'aimerais revenir sur le débat du registre d'information, que vous avez eu avec le ministre. Ce matin, l'Association des pharmaciens d'établissement nous a recommandé dans son mémoire, page 11, à l'effet «que la mise en place d'un registre d'information [permettait] d'assurer le suivi de l'utilisation des médicaments soit prévue indépendamment du [...] Dossier de santé [...] Québec». J'entends un autre discours. Il me semble que ça fait pharmaciens et pharmaciens, là. Pouvez-vous m'expliquer, là, entre la position qu'a prise ce matin l'Association des pharmaciens et votre position que vous prenez aujourd'hui... comment on se positionne là-dedans, là? Comment on doit entendre ça?

M. Arata (Martin): Alors, possiblement que notre... comment je pourrais dire? que notre propos a été mal exprimé. Ce que l'on mentionne, c'est que, si on crée un registre, on doit s'assurer que ce registre-là est pertinent et ne va pas être englouti ou envahi par des demandes qui ne seraient pas cohérentes et qui n'amèneraient pas une plus-value pour le réseau. Alors, soyons prudents. Dans un registre, on peut mettre toutes sortes de choses qui pourraient, à la limite, ne pas avoir une plus-value. Alors, lorsqu'on parle de la création du registre, notre mise en garde est à l'effet de s'assurer que ce qui sera mis dans ce registre-là permettra de dégager soit justement des guides de pratique, des orientations et qui amèneront une plus-value pour la population en question. Donc, on n'est pas contre le fait de créer un registre parce qu'on doit avoir une banque, mais, si, elle est créée, on doit s'assurer qu'elle sert à quelque chose et que c'est les bonnes choses qu'on met dans le registre afin d'éviter justement, là, la lourdeur de ce dernier.

Le Président (M. Kelley): Mme Lecours.

Mme Lecours (Cécile): En plus, c'est que finalement, des statistiques, ça doit se créer dans l'actualisation de ce qu'on a à faire. Les registres, ça doit être une collecte d'information qui se fait pendant... Alors, outillons nos établissements, outillons la RAMQ, donnons, trouvons... utilisons nos banques, c'est ça qu'on veut dire. Nous, on avait une crainte quand on a vu ça, parce qu'on s'est dit: Ça, là, ça peut amener des dépenses incroyables. Moi, je ne crois pas à ça, créer des registres, à moins que ce soit sur tes activités à toi. L'INESSS peut créer des registres sur ses activités, mais utilisons, optimisons l'intégration de ce qui existe déjà. C'est dans ce sens-là qu'on a fait notre intervention.

M. Arata (Martin): Et dans une perspective aussi afin d'éviter qu'il y ait une demande d'une instance, d'une autre instance, d'une autre instance, d'une autre instance, et qui fait que l'établissement et/ou la saisie de données demande une quadruple et quintuple saisie, alors donc de coordonner cette demande-là afin qu'on puisse avoir, là, quelque chose de plus structuré, là, ou de mieux adapté, ou optimisé.

Mme Poirier: Dans la collecte de ces bases de données là, il y avait aussi des préoccupations de nature confidentielle, des informations confidentielles. Comment vous répondez à ça? Parce que bien des groupes ont mentionné que les données, étant donné qu'elles vont être transportées à l'extérieur du régime public maintenant, bien il pourrait y avoir danger de diffusion ou, en tout cas, de confidentialité, de manque de confidentialité dans le traitement des données. Est-ce que vous avez une crainte là-dessus?

M. Arata (Martin): Il est certain que la confidentialité fait partie des préoccupations de l'ensemble des professionnels du réseau. L'occulter, ce serait de passer à côté d'une de nos préoccupations. Par contre, on pense que les systèmes performants et adéquats doivent et peuvent être mis en place, qu'il ne faut pas non plus avoir peur de ce que j'appellerais une échappée pour empêcher la création de quelque chose qui pourrait avoir une plus-value pour l'ensemble de la population du Québec. Alors, oui, il n'y a pas, il n'y aura probablement jamais de système parfait à 100 % et aussi sécure à 100 %, peu importe la structure qu'on mettra en place, que ce soit en santé, que ce soit au niveau des institutions financières, ou autres. Alors donc, s'assurer que, si on crée ce registre-là, si on va chercher une information et que l'analyse de ces données-là nous permet d'optimiser, de mieux servir les Québécois, bien, écoutez, je pense que, oui, on doit s'inscrire dans ça, mais avec une préoccupation qui doit demeurer, mais qu'il ne faut pas qui devienne limitative de par cet élément-là. Vous comprenez un peu la position, là, que... Dominique?

Mme Poirier: Tout à fait. Tout à fait. Au tout début de votre mémoire, vous demandez que la transition se fasse sans trop de heurts. On a aussi de l'inquiétude là-dessus, à savoir que l'unification, dans un premier temps, de deux structures créant une troisième structure sans budget supplémentaire... J'aimerais vous entendre sur la notion de «sans budget supplémentaire». Est-ce que ça ne vous inquiète pas de savoir qu'il y aura une mission ajoutée à ce nouvel organisme et qui devra réunir déjà deux organismes qui, on l'a entendu, tout le monde, fonctionnent bien? Le défi de ça, là... Moi, j'entends surtout le «sans trop de heurts», là. Ça nous inquiète tous. J'imagine que ça vous inquiète aussi. Comment vous le voyez, là?

M. Arata (Martin): Ce qu'on souhaite... ce qu'on disait comme... Ce qu'on mentionnait tout à l'heure, c'est qu'on souhaite que cette fusion-là, que ce rapprochement-là puisse amener ce qu'on appelait une économie de proximité, alors donc, la compétence regroupée puisse nous amener à un certain niveau de productivité ou d'optimisation qui amènerait, en bout de ligne, une capacité de profiter de l'expertise à proximité, de dégager, à la limite, des heures ou des ressources disponibles pour faire les analyses.

L'autre élément, c'est les priorités: Qu'est-ce qu'on va prioriser? Alors, peut-être, oui, aurons-nous des choix à faire, mais, si ce sont les bons choix et que la population encore en bénéficie, je pense qu'on aura atteint l'objectif.

Devons-nous... est-ce que ça nous préoccupe, ressources supplémentaires ou non? Écoutez, c'est une transition. Ce sera peut-être à la lumière de ce qui se passera. Est-ce qu'il devra y avoir des ajustements qui seront faits? Peut-être qu'on le verra à la lumière de, mais initialement on ne pense pas que ce soit encore un élément qui devrait limiter la constitution ou la création de l'INESSS.

Mme Derome (Dominique): J'aimerais ça rajouter, puis je pense que M. le ministre l'a dit aussi, et ça nous sécurise, tout est dans la transition progressive. Donc, si on est capable de mettre les deux groupes ensemble pour créer cette synergie-là puis que ce soit étape par étape, donc d'y aller de... par étapisme, si on veut, bien, là, je pense qu'on va avoir un succès et on n'aura pas nécessairement besoin d'un budget supplémentaire.

Mme Poirier: Parce qu'il y a une préoccupation, entre autres, à votre recommandation 9, là, qui est d'assurer les ressources nécessaires, entre autres pour l'implantation des recommandations, des avis, des guides, etc., et qui soient disponibles en temps opportun. Donc, là, vous venez vraiment, là, vous venez vraiment faire une distinction, à savoir qu'il y aura des besoins à un certain moment donné dans l'implantation de ce nouvel organisme là, mais de ressources supplémentaires, là.

Le Président (M. Kelley): Mme Lecours.

Mme Lecours (Cécile): C'est certain qu'on souhaite... on souhaiterait qu'il y ait des ressources supplémentaires. Ça, c'est certain. Parce que, comme je vous dis, les travaux de l'INESSS, pour nous, c'est des choses qu'on n'a pas à faire, parce que l'évaluation des technologies... Si on n'est pas aidés par un organisme comme l'INESSS, il faut le faire dans nos établissements, O.K.? puis on n'est pas outillés de critères, etc. Et, aussi, on a à décider pour une petite population, coût-bénéfice, et ça crée des iniquités pour les patients, les citoyens québécois. Alors, effectivement, la priorité... moins il y aura de sous, plus les priorités vont être importantes d'être très, très, très bien choisies. Donc, on souhaiterait qu'il y ait plus d'argent. S'il n'y en a pas... Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il y a des agendas pour l'AETMIS, il y a des agendas de publiés sur les sites Internet du Conseil du médicament, nous, on ne voudrait pas que les acquis puis ce qu'on attend... Par exemple, moi, j'attends l'évaluation de l'Abilify pour Louis-H.-Lafontaine, je n'aimerais pas que ce soit retardé à cause de la fusion. Parce que, nous, c'est sur le terrain qu'on travaille, O.K.?

Mme Poirier: Tout à fait.

**(17 h 40)**

M. Arata (Martin): Pour répondre aussi sur l'actualisation des recommandations quant à la possibilité d'avoir à financer temporairement la transition ou même une recommandation ou un guide qui demanderait, par exemple, si on reconnaît une médication particulière, s'il y a un certain montant à ajouter, qu'elle soit faite. Mais il ne faut pas oublier qu'à l'occasion... je vous disais tout à l'heure, il y a des économies qui vont parvenir par la suite, une amélioration de la qualité, une amélioration de l'accessibilité qui peut venir, et ça, c'est difficile malheureusement dans notre système de santé de quantifier l'augmentation de la qualité ou le prix de cette dernière et/ou l'augmentation de l'accessibilité. Alors, dans ce contexte-là, je pense qu'il faut aussi moduler quand on parle d'ajout de ressources, il y a un certain gain qui peut se faire avec le temps, suite à l'implantation soit d'une technologie ou d'un médicament.

Mme Lecours (Cécile): Puis, si vous le permettez, l'INESSS a aussi l'occasion d'aller puiser de l'aide dans le réseau par des experts. Alors ça, c'est une façon aussi d'arriver à réaliser une bonne quantité de travaux sur les priorités les plus prioritaires en s'associant à des experts dans le réseau et aussi en publicisant les méthodologies utilisées. Les groupes d'experts vont aussi s'inspirer de ces méthodologies-là, alors ça va faciliter des choses.

Mme Poirier: Vous disiez tout à l'heure qu'il y a une forme d'évaluation qui est déjà faite, là, dans le milieu et qui pourrait dorénavant être reprise par l'INESSS. Est-ce que les ressources... est-ce que le ministère, le ministre pourrait tenter de récupérer justement ces ressources-là actuellement qui sont dans les institutions ou qui sont dans le système pour justement les ramener vers l'INESSS, puisque ce sera des formes d'évaluation qui seront dévolues dorénavant à l'INESSS en tant que tel?

M. Arata (Martin): Connaissant la structure, la façon dont l'évaluation se fait dans les établissements, il serait surprenant que le ministre réquisitionne les ressources. Je vous explique pourquoi. La majorité des évaluations concernant la pratique professionnelle se fait à l'intérieur des tâches des professionnels. Donc, je prends l'évaluation médicale, pour citer cette dernière; bien, le département va créer un comité qui va évaluer l'acte ou tel élément, telle prise en charge. Donc, ça se fait à l'intérieur des activités professionnelles. Oui, bien sûr, il y a des ressources au niveau des archives en support à cette pratique-là, mais on ne pourrait pas occulter encore le fait qu'elle doit se faire à l'intérieur des établissements parce qu'elle se fait dans un contexte particulier, dans un milieu particulier -- je faisais le parallèle entre le CHUM et Gaspé tout à l'heure -- alors elle doit aussi se faire sur le terrain. Par contre, les analyses qui sont faites dans les établissements, si on se rend compte d'une tendance, d'une constance, peut-être pourra servir à inspirer l'INESSS pour aller dans une analyse beaucoup plus macro que micro dans ce contexte-là et supporter davantage les milieux à cet effet.

Mme Poirier: Dans un autre ordre d'idées, j'aimerais vous entendre parler de l'article 19. Cet après-midi, l'Association médicale du Québec a demandé à la commission d'interdire explicitement toute forme de conflit d'intérêts chez les administrateurs de l'INESSS. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

M. Arata (Martin): Concernant le conflit d'intérêts, il nous apparaît évident, et on vous a parlé tout à l'heure quand à la constitution...

Mme Poirier: Ponctuel.

M. Arata (Martin): Oui, quant à la constitution du conseil d'administration, qu'il est important qu'on ait des gens compétents, idéalement indépendants. Le conflit d'intérêts ponctuel, c'est certain que je n'ai pas le goût de faire le débat sur le conflit d'intérêts, mais, s'il est ponctuel, identifiable, sectorisable et pour lequel il n'y a aucun risque... et vous allez me dire que, dans le conflit d'intérêts, il peut toujours y avoir des risques, je ne suis pas un expert du conflit d'intérêts. Mais, si jamais il devait et pouvait être isolé, à la limite, si on devait se priver malheureusement d'une compétence exceptionnelle pour une partie de l'ensemble d'un dossier significatif, je serais peut-être... je reconsidérerais peut-être dans ce contexte-là l'expertise ou l'expérience en question. Mais je vous avoue que je n'adopte pas une politique, et je ne viens pas vous dire que, oui, allons-y en conflit d'intérêts puis ne nous gênons pas pour. Mais je mettrais ou je me permettrais peut-être de relativer, s'il était nécessaire, pour une expertise exceptionnelle, si on est capables d'isoler cet élément de conflit d'intérêts, et, si ce n'est pas possible, bien, écoutez, moi, je ne vais pas plus loin dans le débat. Je fais juste le lien en disant: Est-ce qu'on aurait le luxe ou est-ce qu'on pourrait se permettre le luxe de se priver d'une compétence si on est capables de bien signifier et de bien cibler? S'il y a un doute, je ne pense pas qu'on puisse permettre d'ailleurs d'aller et de supporter le conflit d'intérêts. Ça, c'est la position qu'on a. Mais je mets le bémol sur la compétence, c'est le seul élément que... afin d'éviter des fois de discréditer de façon trop prématurée des individus. Puis ça, c'est mon...

Mme Poirier: D'ailleurs, à titre de commentaire, je vais juste lire la note que vous proposez: «Que le libellé [...] 16 se lise comme suit: "Un membre se qualifie comme indépendant s'il n'a pas, de manière directe ou indirecte [de] nature financière, commerciale, professionnelle -- et vous ajoutez -- politique ou philanthropique..."» Alors, je nous le lis pour les bénéfices de notre commission en tant que telle.

À la page 11 de votre mémoire, votre recommandation 12, vous nous dites... vous nous proposez de mieux définir le processus de consultation des organismes. Comment vous le voyez, ce mécanisme-là, ce processus de consultation là?

M. Arata (Martin): Bien, écoutez, nous ne sommes pas le ministre de la Santé et nous ne présumons pas pouvoir l'être. Ce qu'on demande, c'est de s'assurer que les organismes jugés représentatifs seront peut-être mieux définis, alors, qu'on puisse savoir qui ils sont idéalement de façon claire et précise. On vous disait tout à l'heure: La transparence, c'est important de s'assurer qu'elle est là. Alors donc, peut-être de s'assurer que les gens du réseau adhèrent et sont à l'aise avec les gens consultés ou jugés représentatifs, c'est ce qu'on demande, là. Mais définir qui devrait être là ou, si vous me demandiez aujourd'hui: Est-ce que vous seriez en mesure de nous fournir une liste des gens qui devraient être consultés?, je ne me sens pas la compétence pour vous adresser, là, cette liste-là.

Mme Poirier: Nous, on aura à faire l'article par article dans les prochaines semaines et... puis sans nous dire qui exactement, mais peut-être aller nous indiquer en tout cas des types d'organismes ou en tout cas nous éclairer sur le champ de ça, là. Parce que, nous, le libellé comme ça, ça ne nous indique pas plus de précision en tant que tel. Vous, vous le lisez comment? Votre lecture de ça, ce serait comment?

Le Président (M. Kelley): Mme Lecours.

Mme Lecours (Cécile): Écoutez, ça, évidemment, c'est toute la question de s'assurer que les membres du conseil d'administration soient légitimes aux yeux de l'ensemble de la société québécoise et... Ça pourrait faire l'objet possiblement, via les sites Internet des deux organismes existants ou qu'on en crée un tout de suite de l'INESSS, de faire un appel aux suggestions avec trois, quatre lignes de justification pour juste... Ça pourrait faire... je pense que ce serait utile de faire un appel, un peu comme on fait quand on publie l'agenda du Conseil du médicament sur: Est-ce qu'il y a des commentaires par rapport aux travaux qu'on entend faire bientôt? Ça pourrait faire l'objet de... Mais, en même temps, une des pistes, c'est vraiment tous ceux qui voient des collaborateurs pour faire actualiser les acteurs clés, pour actualiser les recommandations, les guides, le suivi des critères, etc., de... puis leurs représentants.

Mme Poirier: Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. S'il n'y a pas d'autres commentaires, il me reste... Merci beaucoup pour cette présentation de l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec. Dr Arata, Mme Lecours, Mme Derome, merci beaucoup.

On va suspendre pour deux minutes et on va revenir après avec les remarques finales. Alors, merci beaucoup. On va suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 48)

 

(Reprise à 17 h 53)

Le Président (M. Kelley): On va reprendre nos travaux.

Mémoires déposés

J'ai un item d'intendance. Je dois déposer les mémoires des groupes, organismes non entendus. Alors, je dépose les mémoires de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, le Conseil pour la protection des malades, Bristol-Myers Squibb Canada et, finalement, la Conférence des recteurs et principaux des universités du Québec. Alors, ces quatre mémoires ont été déposés.

Remarques finales

Le dernier droit, c'est nos remarques finales pour un maximum de 7 min 30 s, en commençant avec M. le député de Marie-Victorin.

M. Bernard Drainville

M. Drainville: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, pendant toutes ces consultations, nous avons soulevé un certain nombre de questions, celle du manque d'indépendance de l'INESSS, créé par le projet de loi n° 67, ce problème-là de... ce manque d'indépendance reste problématique pour nous. C'est le ministre qui nomme tous les dirigeants de l'INESSS. Ça, pour nous, ça entache la crédibilité de l'institut et ça entache également sa capacité de conseiller le ministre avec la plus grande impartialité possible et d'une manière qui soit la plus dépolitisée possible. Donc, il y a un problème d'indépendance qui entache la crédibilité.

Est-ce que la fusion pourrait quand même entraîner des avantages pour le système, et donc pour la population québécoise, en termes d'échange d'information par exemple, pour créer une espèce de communauté, je dirais, d'esprit entre les différents spécialistes dans les différents domaines: technologies, médicaments, guides de pratique, santé et services sociaux? C'est une question à laquelle nous ne sommes pas en mesure de répondre pour le moment. Le ministre dit que oui, mais la démonstration n'a pas été à ce point convaincante que nous sommes prêts à se rallier à son point de vue actuellement. D'autant plus qu'à notre avis, s'il veut confier à ce nouvel organisme tous ces nouveaux mandats, ça va coûter plus cher, et il refuse de l'admettre. Ça, pour nous, c'est un problème. On souhaiterait beaucoup plus de transparence de sa part et on comprend que, dans le contexte politique actuel, c'est difficile de le dire, mais, moi, je pense qu'il devrait avoir la candeur de nous dire: Écoutez, vous avez raison, effectivement, si j'en demande plus, il y a une limite à la capacité de générer des économies d'échelle, et donc, effectivement, on va devoir mettre plus de moyens. Le fait qu'il n'est pas prêt à reconnaître ça, ce qui est une, à notre avis, une réalité incontournable, ça nous questionne sur les autres affirmations qu'il fait, parce que, là-dessus, à notre avis, il ne nous dit pas le fond de sa pensée. Alors, est-ce qu'il y a d'autres éléments sur ce projet de loi où il ne nous dit pas également le fond de sa pensée? Par ailleurs, de nous dire qu'il y aura une fusion sans perturbation, sans aucun problème, sans qu'il y ait des... une transition pendant laquelle il y aura nécessairement des difficultés, ça aussi, ça nous pose problème.

Maintenant -- puis ça nous amène à l'autre question -- est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux conserver ce que nous avons déjà, quitte à améliorer la coordination, quitte à améliorer le travail qui se fait déjà? Cette question-là reste entière, M. le Président. À partir du moment où on n'a pas l'INESSS avec l'indépendance et la crédibilité voulues, il faut se poser la question: Est-ce que ce qui existe déjà ne pourrait pas être amélioré? Et, pour le moment, on ne peut pas répondre à cette question-là.

Maintenant, il y a une autre question fondamentale, et là-dessus le ministre peut faire un bout: Est-ce qu'il y a moyen d'améliorer ce projet de loi, M. le Président? La réponse est oui, absolument, oui.

Il y a l'article 19 sur les conflits d'intérêts -- on ne va pas revenir là-dessus, j'ai sept minutes, là -- mais il sait ce qu'on en pense, il faut que ça... Il n'est pas question qu'on admette quelque reconnaissance de quelque conflit d'intérêts que ce soit.

L'article 12 sur les renseignements personnels, il y a du travail à faire. Meilleur arrimage également avec les organismes existants; il doit absolument arriver, lors de l'étude article par article, avec une vision extrêmement claire de ce que chaque organisme existant fait. M. le Président, et comment l'un s'arrime à l'autre. Il va falloir qu'il nous arrive avec une démonstration beaucoup plus claire que celle qu'il nous a faite jusqu'à maintenant en ce qui a trait, entre autres, au rôle du Commissaire à la santé.

Par ailleurs, ce n'est pas directement lié au projet de loi, mais je pense que le ministre serait bien avisé de nous déposer les indicateurs de qualité à partir desquels les établissements de santé sont évalués actuellement. Et je ne parle pas encore une fois de nous arriver avec toutes les ententes de gestion, puis avec les contrats d'agrément, puis les résultats d'inspection des conseils d'agrément, puis tout ça. Ce n'est pas de ça dont je parle. Je parle d'un document vulgarisé, simplifié, que la population pourrait éventuellement consulter, qui nous donnerait un certain nombre d'indicateurs de qualité. Le ministre a raison de dire qu'il y a déjà des évaluations accessibles au public, que ce soit le temps d'attente pour certaines chirurgies: genou, hanche, cataractes, la durée moyenne de séjour à l'urgence. Il existe déjà, M. le Président, des instruments comme ça qui sont accessibles au public, mais je pense qu'on pourrait se diriger vers des indicateurs de qualité plus complets, et éventuellement une espèce de synthèse de ces indicateurs de qualité aisément accessible, bien vulgarisée, qui permettrait à chaque Québécois d'aller, par exemple, sur l'Internet et de vérifier son hôpital dans son coin. Que ce soit à Saint-Jean, à Rimouski, à Saint-Jérôme, à Joliette, à Montréal, à Québec, peu importe, je veux savoir où se situe mon hôpital dans mon coin, quelles sont les choses qui vont bien, les choses qui vont moins bien. Ça favoriserait le développement d'un esprit d'appartenance de nos établissements de santé à l'intérieur de nos communautés. Je suis certain que ça amènerait les gens qui travaillent dans ces établissements-là à développer une fierté et, dans certains cas, à se dire: On peut faire mieux et on va faire mieux.

Alors, je l'invite, M. le Président, et, je dirais, ça nous inciterait à davantage de, comment dire... Ce serait une belle preuve de bonne volonté de la part du ministre que de nous montrer qu'effectivement il est capable de faire ce travail de synthèse, que c'est possible de le faire. Moi, je ne demande pas mieux qu'à être convaincu de ça. Moi, à mon avis, le problème que vous avez, c'est que vous avez trop information, vous ne savez plus comment gérer. Mais je ne demande pas mieux qu'on me convainque que c'est possible d'arriver avec cette espèce de classement vulgarisé, accessible qui nous permette de mieux comparer la performance de nos institutions.

Alors, ce soir, M. le Président, au moment où on se parle, ce n'est pas possible de dire quelle sera la position du Parti québécois sur ce projet de loi n° 67, et je tiens à le dire, M. le Président, puis là le ministre me connaît assez, je pense, pour pouvoir juger de la sincérité de mes propos, mais je dois dire que mon idée n'est pas faite. C'est vrai que mon idée n'est pas faite. Et mes collègues vont participer à la discussion, et tout le caucus devra également, éventuellement, nous dire ce qu'il en pense.

Mais je pense qu'il appartient au ministre... Il y a une part, je dirais, du processus de persuasion qui appartient au ministre. Je pense que, s'il est capable de nous démontrer qu'il a compris ce que les gens ont dit, qu'il est ouvert et qu'il va donc proposer des amendements ou des améliorations, des ajustements et qu'il va se faire plus convaincant sur le fond des choses, bien, peut-être qu'en bout de ligne, peut-être que le Parti québécois se rapprochera de sa position, on verra bien. Mais on est de bonne volonté là-dedans, on est de bonne foi. On ne demande qu'à être convaincus. Pour le moment, on ne l'est pas. Et, vous savez, vous avez le pouvoir, mon cher, vous êtes le ministre, profitez-en, faites votre travail, puis, nous, de notre côté, on va faire le nôtre en pensant à l'intérêt public toujours. Merci, M. le Président.

**(18 heures)**

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. Maintenant, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, pour vos remarques finales.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc: J'accueille très favorablement les commentaires du député de Marie-Victorin. On va continuer à travailler ensemble comme on le fait à l'habitude.

Merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés membres de la commission. Au cours des travaux de la Commission de la santé et des services sociaux qui s'achève aujourd'hui, nous avons eu l'occasion d'entendre 26 groupes et individus nous faire part de leur appréciation, commentaires et recommandations sur le projet de loi n° 67, Loi sur l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux.

Permettez-moi d'abord, M. le Président, de souligner ma grande appréciation et celle de ma collègue la ministre déléguée aux Services sociaux, Mme Lise Thériault, pour la qualité des mémoires, échanges et interventions depuis le début de la présente consultation. J'aimerais remercier, en mon nom et au nom du gouvernement, l'ensemble des groupes et individus qui ont contribué, par leur présentation devant cette commission, à enrichir notre réflexion.

L'évolution des besoins, des connaissances, des médicaments et des technologies nous oblige à constamment faire des choix pour assurer que notre système public de santé et de services sociaux est le plus efficace possible. La recherche d'un équilibre optimal entre la qualité clinique et l'utilisation efficace des ressources constitue un enjeu d'accessibilité et d'équité de notre système public. En ce sens, et les travaux de la commission viennent nous le confirmer, le système de santé et de services sociaux a besoin d'un organisme qui a la capacité scientifique, la crédibilité professionnelle de même que la légitimité requise pour faire des recommandations à tous les décideurs sur ses choix.

Je suis persuadé que l'INESSS pourrait jouer un rôle crucial et stratégique à cet égard. Pour cette raison, je souhaitais que les travaux de la présente commission fassent émerger un consensus autour de la création de l'INESSS. Devant l'appui et parfois même l'enthousiasme exprimés par la plupart des groupes et leurs suggestions fort pertinentes, je suis assuré que nous avons maintenant un large consensus parmi la grande majorité des acteurs du système de santé et de services sociaux.

Il nous faut maintenant analyser soigneusement ces propositions et, le cas échéant, s'en inspirer pour bonifier le projet de loi. Soulignons que la presque totalité des groupes entendus se dit très favorable à l'idée d'un institut national d'excellence en santé et en services sociaux et reconnaît qu'il peut constituer un atout majeur pour l'avenir du système public de santé et de services sociaux en support aux décideurs, gestionnaires et cliniciens sur les choix à faire.

Bien que la majorité des groupes entendus reconnaissent que l'INESSS puisse avoir accès aux banques de données pour réaliser son mandat, plusieurs ont soulevé des inquiétudes et demandent à être rassurés quant au respect de la confidentialité des données sensibles que leurs membres détiennent sur les personnes qu'ils desservent. Ces inquiétudes sont légitimes et méritent d'être analysées de près.

La mission première de l'INESSS est de promouvoir l'excellence clinique et l'utilisation efficace des ressources. Le médicament étant l'une des technologies privilégiées sur le plan clinique, l'INESSS aura la marge de manoeuvre suffisante pour consulter régulièrement les acteurs du domaine du médicament tout en préservant son indépendance.

Avant de conclure, M. le Président, j'aimerais rassurer mon collègue de l'opposition, critique en matière de santé, quant au budget du futur INESSS. Comme je l'ai mentionné, l'INESSS pourra compter, à sa création, sur les budgets actuels de fonctionnement de l'AETMIS et du Conseil du médicament. Pour les années subséquentes, le budget annuel de l'institut sera établi en fonction du programme de travail soumis par le conseil d'administration de l'institut, lequel devra tenir compte des nouvelles fonctions de l'INESSS dont celles reliées aux services sociaux et aux guides de pratique.

M. le Président, après quatre jours d'audition à cette commission, nous avons entendu 26 groupes s'exprimer majoritairement en faveur de ce projet de loi. J'ai de plus en plus la conviction que l'INESSS jouera un rôle crucial en soutenant les cliniciens, les gestionnaires et les décideurs confrontés aux décisions complexes soulevées par le changement technologique, l'évolution des connaissances et les modifications des besoins dans le secteur de la santé et des services sociaux. Plusieurs groupes qui représentent les gestionnaires et les cliniciens sont venus nous le dire, et je leur fais confiance quand ils nous affirment que l'INESSS est important pour la qualité des services qu'ils donnent à la population québécoise. Je veux remercier les groupes invités de leur contribution à cette commission, pour les suggestions et commentaires qu'ils ont émis et que nous analyserons attentivement.

Permettez-moi, en terminant, de remercier les membres de la commission de leur contribution constructive à nos débats entourant le projet de loi portant sur la création d'un institut national d'excellence en santé et en services sociaux. Je suis convaincu que nous disposons maintenant d'un éclairage supplémentaire pour mener à terme ce beau projet.

J'aimerais également transmettre mon appréciation à toute l'équipe de travail du ministère pour leur travail de soutien. Je voudrais souligner également tout le travail de l'équipe de M. Léonard Aucoin, qui ont tout préparé la préparation pour l'INESSS. Je pense que M. Aucoin est réputé à travers le Québec, je dirais même internationalement, sur la qualité des travaux qui ont été faits, et je tiens à vous dire qu'il nous a soutenus tout le long de la préparation de ce projet de loi, et je pense que c'est vraiment quelqu'un qui démontre une grande qualité. L'excellence, je pense que c'est un mot qui lui appartient bien.

J'aimerais également remercier les membres de l'opposition qui, je pense... on a fait un excellent travail ensemble. Je crois que, comme de fait, tous vos commentaires vont nous permettre de bonifier le projet de loi. Je pense qu'à la fin on va réussir à en faire un bon consensus. Également, les gens qui ont travaillé avec moi, du côté des députés, le député des Îles-de-la-Madeleine qui a été très présent et les autres députés qui nous ont accompagnés.

Et pour terminer, M. le Président, comme à l'habitude, on ne peut que vous féliciter du beau travail que vous avez fait. Vous avez su gérer de maître les commentaires d'un bord et de l'autre de la Chambre, et je pense que votre neutralité et votre bonne humeur nous permettent de faire un travail très agréable. Merci beaucoup.

Le président, M. Geoffrey Kelley

Le Président (M. Kelley): Merci, M. le ministre. Et, à mon tour, merci beaucoup à tout le monde. J'ai été très surpris par la qualité de ce débat. Je pense, début du mois de janvier, on revient de la fête de Noël, et tout le reste, mais on a vite plongé dans un sujet qui était très intéressant. Les 26 groupes et individus ont amené des perspectives très différentes. Alors, je pense qu'on a vu un débat très vigoureux mais respectueux de l'un à l'autre. Alors, je pense que la table est mise pour une étude détaillée qui va être fort intéressante.

Merci beaucoup, parce que je n'attendais pas autant de personnes qui ont suivi de près, surtout aujourd'hui, dans notre salle intime, l'ancienne salle du Conseil des ministres de l'époque de M. Duplessis. Alors, merci beaucoup pour vous autres. Le Secrétariat, comme d'habitude, qui organise nos travaux, merci beaucoup. Je sais que le député de Marie-Victorin veut intervenir pour 30 secondes ou moins?

M. Bernard Drainville

M. Drainville: Je vous remercie, M. le Président. J'ai omis de le faire tout à l'heure, j'ai manqué un petit peu de temps, je veux vous remercier. Je veux remercier le ministre. Effectivement, on a des désaccords, mais on réussit toujours à avoir un dialogue qui, dans l'ensemble, est plutôt fructueux, je le crois. Je remercie ses équipes. Je remercie les députés également de la partie gouvernementale et je remercie bien sûr mes collègues qui ont été là, et les gens également qui ont suivi tous ces échanges. J'espère que vous avez le sentiment de ne pas avoir perdu trop, trop votre temps. Et, encore une fois, M. le Président, votre qualité de présidence, malgré votre toux, qui s'améliore, je l'ai noté...

Le Président (M. Kelley): Oui, ça va de mieux en mieux.

M. Drainville: Je sens que vous êtes sur la voie de la guérison. Parce qu'on souhaite vous garder longtemps. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Et, sur ça, un petit peu de poésie: ayant accompli son mandat, la Commission de la santé et des services sociaux ajourne ses travaux au mardi 2 février, à 9 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, pour l'audition de l'Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale nationale. Merci beaucoup, bonsoir.

(Fin de la séance à 18 h 9)

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