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Version finale

39th Legislature, 2nd Session
(February 23, 2011 au August 1, 2012)

Monday, March 14, 2011 - Vol. 42 N° 1

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 127 - Loi visant à améliorer la gestion du réseau de la santé et des services sociaux


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures onze minutes)

Le Président (M. Sklavounos): Alors, mesdames et messieurs, bon après-midi, chers collègues, bon après-midi également. Bienvenue, M. le ministre, à la Commission de santé et des services sociaux. J'espère que tous les collègues ont passé un bon deux semaines de circonscription avec leurs électeurs et leurs proches.

C'est le premier mandat que nous entamons depuis mon élection à la présidence, alors je voulais remercier tous les membres de la commission pour leur confiance. Et évidemment, vous savez, c'est une commission qui siège beaucoup et qui a été présidée avant moi par ce qu'on pourrait appeler une sommité parlementaire, le député de Jacques-Cartier, qui est désormais ministre des Affaires autochtones. Alors, j'espère pouvoir continuer le bon travail et avoir le même climat de sérénité qui a toujours caractérisé les débats lorsqu'il présidait cette commission-là. Alors, je vous assure de mon entière collaboration, des deux côtés de la table. Et évidemment nous avons du pain sur la planche, comme vous le savez. On va commencer tout de suite.

Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires, s'il vous plaît.

La commission est évidemment réunie aujourd'hui afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 127, Loi visant à améliorer la gestion du réseau de la santé et des services sociaux.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Kotto (Bourget) sera remplacé par Mme Maltais (Taschereau) et M. Turcotte (Saint-Jean) par Mme Doyer (Matapédia).

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Mme la secrétaire. Alors, rapidement je vais faire lecture de l'ordre du jour. Nous avons les remarques préliminaires, nous débutons par les remarques préliminaires. Alors, le temps réparti, c'est 7 min 30 s pour le ministre... pour le gouvernement, six minutes pour l'opposition officielle et 1 min 30 s pour le deuxième groupe d'opposition.

Alors, l'agenda, il est comme suit: remarques préliminaires; par la suite, M. Michel Nadeau, qui est déjà assis -- bonjour, M. Nadeau -- directeur général de l'Institut de la gouvernance d'organisations privées et publiques; par la suite, M. Daniel St-Onge, Collège des administrateurs de sociétés; et par la suite Conseil pour la protection des malades, représenté par M. Brunet, et l'Office des personnes handicapées du Québec, représenté par Mme Hébert, Mme Bourassa et M. Bélanger; et par la suite, oui, le dernier groupe, le Commissaire à la santé et au bien-être. Et par la suite l'ajournement qui est prévu. Nous risquons d'avoir à dépasser de quelques minutes, d'une quinzaine de minutes. Alors, si j'ai votre consentement, vu le retard au début. Alors, il semble y avoir le consentement des deux côtés, que je constate.

Remarques préliminaires

Alors, nous pouvons débuter tout de suite avec les remarques préliminaires. Nous allons commencer avec le ministre de la Santé et des Services sociaux. À vous la parole, M. le ministre, pour une durée maximum de 7 min 30 s.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc: Oui. Merci, M. le Président. Peut-être m'avertir peut-être 30 secondes avant, pour être certain qu'on ne dépasse pas notre temps.

D'abord souhaiter la bienvenue à M. Nadeau mais également remercier l'opposition de travailler sur le présent projet de loi. Jusqu'à date, on a toujours eu une très bonne collaboration, et on dépose un projet de loi, et je sais que l'opposition va se charger de l'améliorer et puis de le bonifier, et puis, jusqu'à date, nous avons toujours eu une excellente collaboration.

M. le Président, mes collègues de l'Assemblée nationale, bonjour. Le projet de loi n° 127 qui fait l'objet de la consultation débutant aujourd'hui s'inscrit dans la continuité des transformations apportées aux règles de gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux depuis les 10 dernières années. Je tiens à rappeler l'importance du réseau de la santé et des services sociaux québécois tant par sa taille, pour l'étendue des services offerts, pour les sommes qui y sont consacrées, que pour sa complexité. Aussi, sa gestion doit soutenir le défi de la performance qui le confronte continuellement en mettant à profit la compétence des gestionnaires et des administrateurs directement concernés par l'offre de soins et de services à la population du Québec. Le projet de loi propose la modernisation de la gestion du réseau de la santé et des services sociaux à l'intérieur des structures existantes. On vise plus particulièrement à accroître la responsabilisation et l'imputabilité des organisations et des conseils d'administration ainsi que la complémentarité et l'interdépendance entre les trois paliers de gestion.

J'insiste sur les principes à la base de cette proposition législative. Au regard du principe de responsabilisation, le projet de loi donne aux conseils d'administration des devoirs plus clairs quant aux décisions stratégiques qu'ils doivent prendre. L'imputabilité, second principe que nous renforçons, est le corollaire de la responsabilisation. En affirmant que les conseils d'administration doivent jouer un plus grand rôle, il est légitime d'exiger qu'ils planifient en considérant les orientations ministérielles et qu'ils rendent des comptes en fonction des résultats visés. En vertu du principe de la cohérence, différentes mesures précisent des liens nécessaires entre les paliers de gestion. Cette gestion plus responsable et plus imputable doit s'exercer avec le plus de transparence possible, un autre principe à la base des propositions législatives. Ceci implique de rendre publiques les décisions des conseils d'administration, de faire connaître publiquement les résultats, d'être à l'écoute de la population et des différents milieux par différents moyens qui sont adaptés.

Les changements législatifs qui sont proposés touchent principalement la composition et le fonctionnement du conseil d'administration de l'établissement et de l'agence, l'exercice de l'imputabilité, le renforcement des liens entre les paliers de gestion, le choix des dirigeants et le soutien au développement de leurs compétences. Sont introduites également des mesures donnant à l'agence et au ministre la possibilité de soutenir ou d'intervenir de façon graduée auprès des établissements du réseau rencontrant des difficultés de fonctionnement. De plus, des ajustements au processus d'agrément des établissements sont apportés.

Le rôle du conseil d'administration de l'établissement et de l'agence est précisé de façon à renforcer son autorité. Dorénavant, ses responsabilités principales seront de définir les orientations stratégiques de l'organisation en conformité avec les orientations nationales et régionales, d'adopter le plan stratégique, l'entente de gestion et d'imputabilité et le rapport annuel de gestion, de s'assurer de la qualité des services et de l'utilisation optimale des ressources, de s'assurer du suivi, de la performance et de la reddition de comptes.

La composition du conseil d'administration mise sur l'expertise des membres, sur leur complémentarité et sur l'indépendance d'un nombre important d'entre eux. Un modèle uniforme de conseil d'administration est introduit pour tous les établissements, et le nombre de membres siégeant dans les conseils est réduit pour en améliorer l'efficience.

Au palier de l'établissement, le conseil d'administration est formé de 13 à 15 membres, dont un nombre important sont indépendants. Un processus défini par le conseil d'administration permettra d'assurer la diversité des compétences de cinq membres indépendants, dont trois sont cooptés par le conseil et deux sont nommés par le ministre. Deux membres indépendants seront élus par la population.

Dorénavant, quatre sièges relèveront de la communauté interne de l'établissement et un membre sera désigné par le comité des usagers. Le directeur général siégera d'office. Le cas échéant, un membre sera désigné par la fondation de l'établissement et un membre sera désigné par l'université à laquelle est affilié l'établissement ayant une désignation universitaire. Le projet de loi précise que le conseil d'administration de l'agence est formé de 13 ou 14 membres. Comme c'est le cas actuellement, tous les membres du conseil sont nommés par le ministre. Le mode de fonctionnement du conseil d'administration de l'établissement et de l'agence est revu dans le but d'accroître son efficacité.

En plus du comité de vigilance et de la qualité, qui existe déjà et qui est maintenu, deux nouveaux comités obligatoires sont créés, soit le comité de vérification et le comité de gouvernance et d'éthique. Le rôle du comité de gouvernance et d'éthique est, entre autres, d'établir le profil des membres indépendants recherchés au conseil d'administration avec le souci de définir les compétences diversifiées qui sont requises. Pour sa part, le comité de vérification doit s'assurer de l'utilisation optimale des ressources. Les membres du conseil sont nommés pour au plus deux mandats de quatre ans.

Pour ce qui est de l'imputabilité, nous maintenons les obligations en regard de la gestion axée sur les résultats découlant des dispositions déjà en place dans la loi. Le but poursuivi est de renforcer la dynamique d'imputabilité pour maximiser la cohérence en fonction des orientations et des objectifs nationaux. Dans cette optique, l'obligation d'élaborer un plan stratégique s'applique désormais aux trois paliers de gestion, y compris les établissements. De plus, le plan stratégique, l'entente de gestion et d'imputabilité et le rapport annuel de gestion devront être adoptés par le conseil d'administration de chaque instance. Le plan stratégique est approuvé par l'agence dans le cas de l'établissement et par le ministre dans le cas de l'agence. Les modalités de gestion sont également renforcées par l'entremise de rencontres de suivi entre l'agence et l'établissement et entre le ministre et l'agence afin d'exposer les résultats en cours de réalisation.

Désormais, les résultats soumis à la reddition de comptes annuelle pour chaque instance porteront sur les objectifs du plan stratégique et sur ceux des ententes de gestion et d'imputabilité. Le rapport annuel de gestion devra être rendu public sur leurs sites Internet respectifs. Il poursuit le but de soutenir le choix des dirigeants et le développement de leurs compétences. Le projet de loi confirme que le directeur général est choisi par le conseil d'administration. Comme c'est le cas présentement, le ministre et l'agence désigneront chacun un représentant au sein du comité de sélection formé de cinq membres. Cependant, l'appui de l'un ou de l'autre sera désormais nécessaire à une recommandation unanime ou majoritaire du comité de sélection.

Ça fait que, M. le Président, c'est à peu près l'essence que nous avons au niveau du projet de loi, et, comme je le disais, on était prêts à en discuter, recevoir les commentaires. Et je tiens à dire que je vais démontrer une très grande écoute et ouverture à toute bonification du projet de loi dans le but d'avoir une meilleure gestion au niveau de notre réseau de la santé. Merci beaucoup.

**(14 h 20)**

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. le ministre. Alors, vous êtes bien à l'intérieur de votre temps. Maintenant, je vais céder la parole à Mme la députée de Taschereau et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé pour une période maximale de six minutes. Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Je me permets de vous saluer ainsi que les gens qui vous accompagnent, de saluer le ministre, que je retrouve avec plaisir autour de cette table, les gens qui l'accompagnent, qui font tout le boulot autour qui lui permet de faire son travail ministériel, et mes collègues députés, d'abord au gouvernement et surtout mes collègues de l'opposition, qui ont tous et chacun une partie du ministère de la Santé à titre de porte-parole. J'ai les services sociaux, nous avons la déficience physique, et notre porte-parole jeunesse, Mathieu Traversy, qui est ici. Alors, c'est un plaisir de saluer tout le monde ainsi que le chef du deuxième groupe d'opposition.

Le titre du projet de loi nous dit Loi visant à améliorer la gestion du réseau de la santé et des services sociaux. Mais pourquoi, pour qui améliorer la gestion de ce réseau? Est-ce que ce projet de loi, en quoi que ce soit, nous permet de dire que nous allons améliorer le service aux citoyens, aux citoyens malades, aux citoyens patients? Nulle part ce projet ne touche aux services de santé, nulle part ce projet de loi n'améliore en quoi que ce soit le citoyen comme participant au réseau. Au contraire, c'est un recul, puisqu'il y aura moins de citoyens participants au réseau de la santé.

Est-ce que ce projet de loi vise à améliorer la gestion en fonction des contribuables? Au contraire, M. le Président, au contraire. Ce projet de loi, je l'ai dit d'entrée de jeu quand il est apparu à l'Assemblée nationale, ce projet de loi va ajouter, ajouter de la lourdeur administrative dans la gestion du réseau, puisqu'il continuera à ajouter de la microgestion, des dédoublements, des chevauchements et de la confusion entre les rôles des trois paliers de gouvernance, que je ne remets pas en question, le ministère, les agences et les CSSS locaux, les services locaux.

D'ailleurs, est-ce que cela, en quoi que ce soit, pourrait améliorer la gestion du réseau? J'ai un doute, qui est partagé par nul autre que l'AQESSS, l'Association québécoise des établissements en santé et services sociaux, qui, on voit dans Le Devoir ce matin, nous disent: «L'AQESSS croit que la solution trouvée dupliquera les mécanismes de contrôle et fera triompher la microgestion qui n'a eu de cesse de prendre de l'ampleur ces dernières années.» Et ce que je sais déjà, ce que nous avons tous remarqué, c'est que ce projet de loi va à l'encontre des rapports Clair, rapport Ménard, rapport Castonguay, qui ont tous, mais absolument tous plaidé en faveur d'une décentralisation.

Est-ce que ce projet de loi là aide en quoi que ce soit quelqu'un d'autre que le ministre? Je pense que non. Ce projet de loi là est à l'aide du ministre, qui a pourtant déjà entre les mains tous les outils qui sont nécessaires pour gérer, pour régler les problèmes pouvant exister dans le réseau de la santé et des services sociaux. Ce projet de loi là va à l'inverse de toute la réflexion sur la gouvernance qui a lieu au Québec depuis 10 à 15 ans, et c'est l'inverse. C'est une inversion totale. On revient à de la tutelle, à de l'emprise centrale, centralisatrice, c'est ça que fait ce projet de loi là.

Il fait même, à mon sens, des conseils d'administration des faux-semblants. Et je dis: Si le gouvernement veut revoir en question la gouvernance, il devrait le faire de façon profonde, sérieuse, réfléchie, mais pas à travers un projet de loi qui met quasiment -- et je reprends les paroles de certains interlocuteurs -- il met quasiment en tutelle les conseils d'administration. Alors, je ne pense pas que cela aide en quoi que ce soit le réseau à mieux donner des services aux citoyens et aux citoyennes.

Et, pour terminer, je vais citer l'ancien recteur de l'Université Laval et ancien président du Centre hospitalier Robert-Giffard, qui est maintenant vice-président de l'AQESSS et qui a fait une allocution qui s'intitule La méfiance érigée en principe de gouvernance en marge du projet de loi n° 127. On sait que M. Gervais a été président d'une trentaine de conseils d'administration dans sa carrière.

Je vais simplement aller à la fin, à ce qu'il dit: «Par le projet de loi n° 127 [la] réforme -- de la gestion du réseau qui devait aller vers le local -- est compromise, car les CSSS se voient déposséder de cette responsabilité populationnelle au profit d'agences qui "ont les doigts fourrés dans tous les gâteaux et toutes les tartes" et leurs conseils d'administration -- des CSSS -- privés de la liberté d'agir et de la latitude requise pour remplir adéquatement leur mission.» Je continue à citer: «[De constater aujourd'hui] que nous, les membres des conseils, soyons traités [...] avec une telle désinvolture et fassions l'objet d'une telle méfiance -- c'est le mot -- de la part du gouvernement du Québec m'apparaît profondément démobilisateur[...]. La participation citoyenne en prend un coup avec ce projet de loi qui marque le triomphe de la bureaucratie envahissante du ministère et des agences.» Il ajoute en conclusion: «Le projet de loi n° 127 est loin d'être un pas dans la bonne direction. C'est un véritable bond en arrière qu'il propose.»

Je dis, M. le Président, que, devant une telle levée de boucliers devant ce projet de loi, nous serons évidemment extrêmement très à l'écoute des groupes, mais ce n'est pas vrai que quelques changements cosmétiques feront de ce projet de loi là un bon projet de loi. Nous allons écouter les groupes, nous allons entendre des propositions, mais je m'attends à des modifications en profondeur, sinon que le ministre retire un projet de loi qui n'améliore en rien les services de santé actuellement. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Mme la députée de Taschereau et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé pour ses remarques préliminaires. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chauveau et chef du deuxième groupe d'opposition pour ses remarques préliminaires. Vous avez 1 min 30 s, M. le député de Chauveau, ce n'est pas beaucoup, mais je vais vous demander d'essayer de respecter ça.

M. Gérard Deltell

M. Deltell: J'ai fait ça pendant 20 ans, des exposés de 1 min 30! Merci beaucoup, M. le Président. Mes salutations à M. le ministre, mes confrères et consoeurs députés. L'objectif de vouloir améliorer la gestion du réseau de santé est tout à fait noble, mais malheureusement l'actuel gouvernement n'a pas la crédibilité nécessaire pour atteindre cet objectif-là.

Souvenons-nous qu'en 2003 le gouvernement s'était engagé, le Parti libéral s'était engagé à abolir les régies de santé. Ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont aboli le mot «régie» pour le remplacer par «agence». La structure est restée la même, et la structure a grossi au fil des ans, tout comme d'ailleurs le ministère de la Santé. Oui, les dépenses ont augmenté en raison, entre autres, du vieillissement de la population mais aussi en raison du fait que le gouvernement a augmenté le nombre de cadres: 2 000 cadres de plus, précisément 2 132 cadres de plus qu'en 2003 pour le ministère de la Santé. On grossit les cadres, mais les services à la population, eux, ne suivent pas la marche, puisqu'au contraire on sait que le temps d'attente dans les urgences a augmenté. Des dédoublements qui coûtent 600 millions de dollars, tels que définis l'année dernière par un groupe d'experts. Et aussi, nous, ce que l'on pense, c'est qu'il faut donner davantage d'autonomie aux établissements.

La meilleure façon de savoir comment régler les problèmes dans les hôpitaux, c'est de donner plus d'autonomie aux gens qui sont à l'intérieur de ces hôpitaux-là, donc aux établissements. Actuellement, on pense que le projet de loi dédouble les procédures et, entre autres éléments, on trouve curieux que les paramédics sont les seuls intervenants de la santé à ne pas faire partie des conseils d'administration des agences. On aura l'occasion d'en parler un peu plus plus tard.

Le Président (M. Sklavounos): Parfait. 1 min 30 s exactement. Mme la députée de Matapédia, j'ai vu que vous aviez demandé du temps. Il reste 10 secondes dans l'enveloppe.

Mme Doyer: 10 secondes, je vais les prendre.

Le Président (M. Sklavounos): Vous allez les prendre, 10 secondes?

Mme Doyer: Bien sûr, 10 secondes.

**(14 h 30)**

Le Président (M. Sklavounos): Alors, allez-y, vous commencez.

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: 10 secondes pour dire que, suite à des rencontres avec mes deux centres de santé et services sociaux de mes deux MRC, ils trouvent inadmissible et inacceptable le projet de loi, et je pense que ça se... ils se font le porte-voix des milieux locaux. Et, même au niveau des régions, il y a des changements qui sont demandés, substantiels, et on va être là pour répercuter ces positions-là.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Mme la députée de la Matapédia. Alors, ça met fin à la partie Remarques préliminaires.

Auditions

Nous allons maintenant commencer la partie des auditions. Alors, M. Nadeau, qui est déjà en place, directeur général de l'Institut de la gouvernance d'organisations privées et publiques, juste un rappel très rapide de la division du temps. La présentation de M. Nadeau et des autres témoins qui prendront la parole sera de 10 minutes. Vous avez 10 minutes pour faire cette présentation-là. Les échanges sont pour une durée de 35 minutes maximum, réparties comme suit: 17 min 30 s pour le gouvernement, 14 minutes pour l'opposition officielle, et, au deuxième groupe d'opposition, 3 min 30 s. Je viens quand même d'annoncer la présence de M. Nadeau, mais je vais vous demander de vous identifier vous-même pour les fins de l'enregistrement. Et par la suite vous avez vos 10 minutes, M. Nadeau, pour commencer. Allez-y.

Institut sur la gouvernance d'organisations
privées et publiques (IGOPP)

M. Nadeau (Michel): Merci beaucoup, M. le Président, de cette invitation à l'Institut sur la gouvernance. Mon nom est Michel Nadeau. Je suis directeur général de cet organisme, qui existe depuis cinq ans, qui s'intéresse au pouvoir. Au pouvoir, parce que toutes les grandes décisions dans notre société sont prises par un conseil, Conseil des ministres, conseil municipal, comité de direction, conseil d'administration, tous ces centres de décision d'une quinzaine de personnes où, au Québec, nous n'avons pas toujours appris les règlements, les modalités de fonctionnement, d'où la création de l'Institut sur la gouvernance, il y a maintenant cinq ans, pour justement, par la formation, par la recherche, par la diffusion, essayer de faire connaître aux Québécois, aux Québécoises les meilleures pratiques en matière de gouvernance.

Le secteur de la santé est un domaine prioritaire pour nous, pour l'Institut sur la gouvernance. Nous avons, au chapitre de la formation, par exemple... notre équipe de huit formateurs a fait 82 sessions de formation de six heures dans autant d'établissements de la santé au Québec au cours des cinq dernières années. Nous avons créé un groupe de travail sur la gouvernance de la santé parce que, comme je l'ai dit, c'est un secteur stratégique. Ce groupe de travail, présidé par M. André Bisson, a remis son rapport en 2008, et il y avait neuf propositions. Et je dois dire que, dans le projet de loi n° 127, nous retrouvons six des neuf propositions sur la gouvernance. C'est un bon départ, vous allez dire, mais...

Parce qu'évidemment l'hypothèse, c'est qu'un conseil local fort, un conseil d'administration fort évidemment répond mieux aux besoins de nos concitoyens. Et je reprends les paroles de M. Jean Charest: «Une bonne gouvernance [...] passe par un conseil d'administration renforcé, pleinement en mesure d'exercer les responsabilités qui lui sont confiées.» C'était dans le préambule de l'énoncé de politique sur la gouvernance des sociétés d'État.

Donc, nous avions recommandé en 2008 un conseil formé majoritairement d'administrateurs indépendants, qu'un profil soit exercé pour avoir une diversité d'expertises. Nous avions recommandé un mécanisme rigoureux de désignation d'administrateurs indépendants, que le directeur général soit membre du conseil d'administration, dont la taille ne devait pas dépasser 15 personnes. Et nous avions également suggéré qu'un comité de gouvernance et d'éthique de même qu'un comité de vérification soient mis en place. Or, pour ces points-là, de même qu'évidemment l'égalité entre hommes et femmes -- un objectif auquel nous souscrivons de tout coeur, et nous répétons ces jours-ci justement cet engagement de la parité, de la diversité entre les deux groupes -- or donc, pour ces bons points là, je pense qu'il faut souligner que le projet de loi apporte une dimension nouvelle en matière de gouvernance.

Par contre, lorsqu'on regarde qu'est-ce que c'est qu'un conseil d'administration, un conseil d'administration, ça fait trois choses dans tous les domaines. La première chose, c'est la révision, l'approbation et l'évaluation des grandes orientations, bâtir la vision, où est-ce qu'on s'en va, faire les grands choix stratégiques de l'établissement, de l'organisation. Deuxièmement, évaluer les programmes et les services qui sont fournis à la population. Alors donc, pour réaliser notre vision, on doit mettre en place des programmes et des services. Or, il faut que ces programmes et ces services-là soient évalués. Troisième fonction, c'est la nomination, l'évaluation et l'établissement de la rémunération du directeur général. Alors donc, pour nous, c'est essentiel que le patron, clairement le patron du directeur général, c'est le conseil d'administration, et ce n'est pas une autre structure. Donc, il est très important de toujours se rappeler que, lorsqu'on parle gouvernance, le conseil doit bâtir la vision, faire les grands choix stratégiques, s'assurer du suivi des programmes et des services offerts à la population, troisièmement, nommer, évaluer et rémunérer, bonifier le directeur général.

Parallèlement à ces trois grandes missions qu'on retrouve partout, dans tous les domaines, que ce soit dans le domaine de l'éducation... Nous sommes intervenus dans cette salle, ici, pour la gouvernance des universités et des cégeps, des commissions scolaires. Dans le domaine des PME, où nous avons un partenariat avec le Fonds de solidarité, c'est encore une fois la même chose. Dans le domaine des comités de retraite, avec la Régie des rentes, nous avons également fait des interventions pour, encore une fois, rappeler ce triple mandat essentiel du conseil d'administration. Par contre, ces trois responsabilités-là supposent que les membres du conseil travaillent fort, travaillent fort et rendent des comptes, rendent des comptes. Actuellement, s'il y a quelque chose qui se passe dans le domaine de la santé, personne n'est responsable, personne n'est imputable. Alors, ceci doit cesser. Pour nous, il est essentiel que le mécanisme de reddition de comptes ne se limite pas à des rapports d'activité. Il faut que nous ayons en place des indicateurs de performance pour mesurer des progrès qui sont en place.

Alors donc, la première étape, pour nous, c'est... Je crois que les bons côtés, les bons éléments que je viens de mentionner du projet de loi, c'est voir qui va être nommé sur les conseils. Est-ce que nous aurons des administrateurs légitimes et surtout crédibles? On a visité 82 établissements, et je dois vous dire que dans la plupart des cas ce sont des gens engagés, dévoués, qui essaient de s'améliorer, qui veulent prendre leurs responsabilités. Les articles 171 et 172 leur donnent des pouvoirs, et ils veulent les assumer. Ils comprennent que c'est une gouvernance qui n'est pas souveraine, comme dans le cas d'une PME, c'est une gouvernance partagée. On partage le pouvoir sur la supervision de l'établissement avec les agences et le ministère. Mais je pense qu'il y a de ce côté une préoccupation.

Donc, il faut que les administrateurs désignés soient légitimes et crédibles. Il faut qu'ils aient une certaine expérience de gestion. Alors, c'est bien de vouloir désigner des usagers, mais dans certains cas, moi, je pense qu'on n'a pas toujours choisi les bonnes personnes pour assurer vraiment une crédibilité, que ce soient des gens qui soient en mesure non seulement d'être usagers, mais en mesure de porter le point de vue au niveau du conseil d'administration. Alors donc, le conseil d'administration... et c'est là où le bât blesse dans le projet de loi, c'est à deux points de vue, à deux points de vue, c'est la formulation du plan stratégique.

À l'article 182, je pense qu'en cinq ans d'intérêt sur la gouvernance je dois vous dire que je n'ai jamais vu une telle phrase dans un texte, un projet de loi, ou tout ça, et je dois vous dire que nous avons fait dans toutes sortes de domaines. Mais, lorsqu'on dit que «l'établissement doit présenter à l'agence ses plans d'orientation de service ou toute autre documentation [...] structurant avant de les faire approuver [au] conseil d'administration», ceci est clairement, clairement inadmissible dans un contexte d'une gouvernance raisonnable.

Alors donc, on ne peut pas faire comme si les conseils d'administration n'existaient pas. Les conseils d'administration doivent assumer leurs responsabilités, et je pense que ce qui est dommage, c'est qu'on ne reconnaît pas cette réalité. Lorsque le président-directeur général de l'agence convoque le D.G. d'un établissement sans la présence du président du conseil de l'agence, évidemment il se débarrasse de quelque chose qui lui est encombrant. Or, ce n'est pas comme ça que les conseils doivent fonctionner. Si on veut garder la motivation des membres des conseils des établissements, des CSSS, il est important de reconnaître que les conseils ont un rôle, ont une responsabilité à faire.

Alors, dire que, lorsque la présence du président de conseil est requise aux rencontres du P.D.G. de l'agence et du D.G. de l'établissement, ça instaure clairement un flou dans le circuit de la gouvernance, et ceci devrait, à mon avis... ce paragraphe-là, je pense, c'est probablement un manque de vigilance du ministre d'avoir laissé passer pareille phrase, à l'article 188... 181.0.3.

Dans un autre domaine, le conseil d'administration, on dit qu'il administre les affaires de l'agence. Alors donc, cet article 182.0.4, également, où on élimine le président du conseil de l'agence, évidemment devrait être rayé.

J'aimerais aussi parler de la désignation du directeur général. Alors là, je crois que... Encore une fois, on dit: Il y a cinq membres. Le conseil d'administration devrait choisir cinq membres, sans aucun droit de privilège au ministre ou à l'agence. Cinq personnes choisies par les 15 membres du conseil, point. Et là, ensuite, ces cinq personnes-là font un choix, le meilleur candidat. Et, comme dans le cas des sociétés d'État, le gouvernement... le ministre pourrait avoir le droit de dire: Ce candidat n'est pas acceptable. Dans le cas des sociétés d'État, que ce soient la Caisse de dépôt, Hydro-Québec, les conseils d'administration choisissent un candidat, l'envoient au gouvernement. Et ça a été le cas dans le cas de la Caisse de dépôt. On a jugé qu'il n'était pas acceptable. Alors donc, on devrait justifier ce refus. Mais je pense que, si le ministre, comme gestionnaire des fonds publics, veut à ce moment-là garder le pouvoir d'exercer un droit de veto, c'est à ce niveau-là, mais non pas au sein de la microgestion d'un comité de sélection.

**(14 h 40)**

Le Président (M. Sklavounos): Alors, merci...

M. Nadeau (Michel): Alors, je termine ma période d'intervention...

Le Président (M. Sklavounos): Oui, très rapidement, M. Nadeau, s'il vous plaît, oui.

M. Nadeau (Michel): ...sur trois points. La première, c'est l'élection des deux individus au suffrage universel. Nous ne croyons pas... Nous avons regardé ça longuement pour les commissions scolaires, mais la démocratie locale actuellement ne fonctionne pas. Peut-être qu'avec Internet on va trouver une façon de la faire fonctionner. Mais actuellement nous proposons plutôt de passer de trois à cinq les membres cooptés.

Un dernier point, c'est les assemblées publiques.

Le Président (M. Sklavounos): M. Nadeau...

M. Nadeau (Michel): La bonne gouvernance devrait... que les assemblées devraient être à huis clos. On devrait avoir des assemblées publiques semi-annuelles. Mais je pense que, dans ce cas-là, si on laisse les administrateurs à la merci des groupes d'intérêts dans la salle, eh bien, on n'a pas le meilleur de la gouvernance.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. Nadeau. Vous allez avoir l'occasion durant la période des échanges, je suis sûr, de faire vos derniers points. Je vais essayer de maintenir le temps rigoureusement pour permettre aux échanges de nous éclairer.

Alors, sur ce, je vais céder la parole maintenant à M. le ministre pour la période des échanges.

M. Bolduc: Écoutez, merci beaucoup, hein, puis je reçois très bien tout ce que vous dites et je trouve ça intéressant, parce qu'il y a comme des éléments sur lesquels on va être capables de se mettre d'accord assez rapidement. Et puis, comme de fait, aussi, je suis très à l'écoute. Comme je l'ai dit, ce projet de loi là, c'est pour améliorer la gouvernance.

Sauf que je vais juste expliquer un peu l'esprit dans lequel ça a été fait. D'abord, le réseau de la santé du Québec est déjà un réseau très décentralisé, dans lequel il doit y avoir une imputabilité. Pourquoi je dis qu'il est très décentralisé? Moi, j'ai été directeur d'hôpital, j'ai été directeur de services professionnels, j'ai été membre de conseils d'administration pendant longtemps, et c'est très, très rare, ou pratiquement jamais, que le ministre va venir nous dire quoi faire ou encore que l'agence va descendre nous dire quoi faire. Il y a des relations puis il y a des discussions, et, comme clinicien, comme administrateur, 98 % du travail que je fais, c'est de l'autonomie. Puis il faut comprendre que le réseau de la santé, c'est un réseau dans lequel les gens sont très compétents à la base, et on les laisse faire. Ça fait que ça, c'est le principe de base.

Également, dans le réseau de la santé, malgré tout ce qui se dit, la majorité du temps, ça va bien. Et je pense que, M. Nadeau, la question va porter là-dessus, je ne sais pas si vous êtes d'accord: la majorité des établissements ou des organismes, ils vont bien, sauf qu'il arrive qu'il y a un petit pourcentage, qu'on estime à à peu près 3 %, qui, eux autres, sont en difficulté. Êtes-vous d'accord avec ça?

Le Président (M. Sklavounos): M. Nadeau.

M. Nadeau (Michel): Je pense que c'est dur pour moi de poser un diagnostic. Des 82 établissements que nous avons rencontrés, nous avons trouvé beaucoup de bonne volonté. Mais, encore une fois, vous dites: 98 % des décisions sont prises localement, mais le 2 % qui manque, c'est les grosses décisions. Bon. C'est les grosses décisions: l'achat d'appareils, l'achat d'équipement, l'ouverture ou la fermeture de certains services, certains établissements. C'est là où la game se joue. Ça ne se joue pas dans le 98 %, on s'entend?

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Bien, on est d'accord. Puis, si vous êtes d'accord... Bien, on est d'accord avec ça. Puis le principe qu'il faut voir, c'est que, quand on fait un projet de loi, ce n'est pas pour l'ensemble des gens qui vont bien, c'est pour se donner des outils pour être capable de leur laisser faire le travail, mais également des outils que, lorsqu'on a une problématique, qu'on soit capable d'agir de façon, je vous dirais, impartiale et de façon correcte pour corriger la situation. Parce qu'il faut se le dire autour de la table, le plus important, c'est qu'on veut que nos établissements aillent bien. Et, une des premières bases puis un des premiers fondements pour que nos établissements aillent bien, ça nous prend un bon conseil d'administration. Ça fait... Donc, le but premier, c'est de renforcer une décentralisation mais nous permettre, lorsqu'il y a une difficulté, de pouvoir agir de façon à corriger la situation et ramener l'établissement au bon endroit.

C'est comme ça qu'on a pensé le projet de loi puis c'est également comme ça qu'il est rédigé, sauf qu'il y a des éléments que, je suis d'accord avec vous, il va falloir peut-être améliorer. Un, dans le réseau de la santé, on a plus de 250 établissements, et vous comprenez qu'à 250 établissements c'est impossible qu'ils aillent tous bien à 100 %. Mais on veut tous leur donner une gouvernance qui est solide.

Par rapport à la formulation du plan stratégique qui doit être adopté par l'agence avant d'être adopté par le conseil d'administration, moi, je tiens à le dire maintenant, là, ça, c'est quelque chose qu'on va retirer parce que ça demeure au niveau de l'établissement d'abord de laisser savoir c'est quoi, les orientations. Mais par contre, par la suite, il faut quand même qu'il y ait une certaine évaluation au niveau de l'agence, et de l'agence au niveau du ministère. Ça, qu'est-ce que vous en pensez, de ça?

Le Président (M. Sklavounos): M. Nadeau.

M. Nadeau (Michel): Oui, je pense effectivement qu'au niveau de... Le ministre est responsable de la gestion de 30 milliards de fonds publics globalement, sous forme macro. Chaque établissement est responsable de son budget, sur la base micro, à la population, Alors, ça, je crois que, si on retirait cette préautorisation de l'agence, je pense qu'il y a une grosse embûche qui serait enlevée.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Puis, je ne sais pas si vous êtes d'accord que par la suite... Parce qu'on est dans un réseau de la santé, donc chaque établissement fait partie... est un élément du réseau. Si chacun fait ce qu'il veut comme un petit peu un royaume, ça ne fonctionnera pas. Ça prend une coordination régionale. Et vous seriez d'accord, par contre, pour qu'une fois que c'est adopté par le conseil d'administration que ce soit adopté également au niveau de l'agence et, si on voit qu'il y a des correctifs à apporter, qu'il y ait des discussions qui se font?

Le Président (M. Sklavounos): M. Nadeau.

M. Nadeau (Michel): Exactement. À ce moment-là, évidemment, le conseil va s'assurer auparavant de consulter l'agence pour ne pas se faire bloquer. Alors, c'est tout à fait normal dans une... Quand vous êtes une filiale dans un holding -- je m'excuse de l'expression -- de l'entreprise privée, mais, si vous êtes une... vous vous assurez que la compagnie mère va aimer ce qu'elle va recevoir. Donc, c'est en ce sens-là, je crois, qu'on peut très bien voir une consultation préalable, qui va se faire informellement, naturellement.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Puis là prenez-le bien, mais, quand vous faisiez vos propositions pour les autres affaires, moi, j'avais l'impression que vous centralisiez plus que, moi, je proposais dans mon projet de loi, dans la décentralisation, puis je vais vous donner un exemple. Quand vous arrivez au niveau du conseil d'administration et puis qu'on décide de former un comité pour faire une nomination du directeur général, ce que le projet de loi prévoit actuellement, ce sont trois membres du conseil d'administration, un représentant de l'agence et un représentant du ministre. Mais ni le ministère ni l'agence n'ont le droit d'imposer quelqu'un, O.K.? C'est comme ça que c'est prévu dans le projet de loi.

Sauf que, pour que la personne soit acceptée comme directeur général, il faut qu'il y en ait un des deux qui soit d'accord, et je vais vous expliquer pourquoi. La raison est très simple. C'est que, si vous... Puis ça, à 254 établissements, ça arrive. Dans une année, là, on nomme plusieurs directeurs généraux, et c'est arrivé qu'à un moment donné... c'est qu'il a été jugé que quelqu'un est devenu directeur général. Les trois membres du conseil d'administration trouvaient, eux autres, que ça avait bien du bon sens, mais, lorsqu'on regardait le profil de compétences, ça ne répondait pas aux normes, et il n'y a personne qui pouvait bloquer ça. Et là on se retrouve dans une situation exceptionnelle -- puis je tiens à le dire, là, c'est exceptionnel -- où un petit groupe décide de nommer quelqu'un, et puis on pense que ce n'est peut-être pas la bonne personne pour faire le travail. Et une des tâches les plus importantes d'un conseil d'administration, c'est la nomination du directeur général. Et, moi, j'ai vu des organisations s'améliorer de façon remarquable avec le directeur général. J'en ai vu également péricliter avec le directeur général. Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec ça?

M. Nadeau (Michel): Tout à fait d'accord.

M. Bolduc: Le directeur général va être la personne qui va donner l'orientation. Et, une fois que la personne est nommée, on doit vivre avec les quatre prochaines années.

M. Nadeau (Michel): C'est ça. Jusqu'à son renouvellement.

M. Bolduc: Jusqu'à son renouvellement. Et, si quelqu'un me dit: Vous avez juste à l'enlever, il faut savoir qu'avec le droit d'aujourd'hui réussir à enlever quelqu'un qui a été nommé de façon légitime par un conseil d'administration, il peut y avoir énormément de dommages au niveau de l'organisation.

Ça fait que, dans le projet de loi, un des éléments les plus essentiels pour moi, c'était de m'assurer qu'on ait des bons directeurs généraux. Et une des façons qu'on a, c'est que, plutôt que de prendre la chance d'en avoir un qui pourrait ne pas faire le travail -- un ou une, parce qu'on autant de directrices générales qu'on a de directeurs généraux -- moi, je préférerais qu'on se donne un mécanisme de protection. Mais pas un mécanisme de veto... pas un mécanisme dans le sens que c'est le ministre qui décide qui va être nommé ou l'agence qui va décider qui va être nommé. C'est encore le conseil d'administration qui nomme, sauf que, si on a un candidat qu'il y a des doutes, c'est préférable d'aller en deuxième puis en troisième concours que d'avoir une personne avec qui on va être pris pendant quatre ans, qui ne fera peut-être pas le travail. Je ne sais pas ce que vous en pensez comme philosophie.

**(14 h 50)**

M. Nadeau (Michel): C'est que... J'ai beaucoup de problèmes avec ça, parce que, je pense, ce que vous dites, c'est exceptionnel. Je pense que nos directeurs généraux sont d'excellents gestionnaires. Et la seule chose, peut-être, pour nous, c'est qu'ils devraient être mieux payés. Mais je pense que dans l'ensemble ce sont des gens qui font du très bon travail.

Votre hypothèse, c'est de prendre une mesure exceptionnelle pour régler une... 99 % des cas sont corrects, il n'y a pas de problème. Moi, je vous dis: Laissons aller la gouvernance... les bonnes pratiques de gouvernance tranquilles. Avoir un des cinq membres qui peut bloquer la décision de la majorité, j'ai beaucoup de difficultés. En matière de gouvernance, de démocratie, pourquoi quelqu'un aurait deux ou trois votes? C'est ce que vous donnez au représentant de l'agence ou du ministre. C'est de dire: Vous, messieurs madame de la majorité, des trois membres du comité de sélection du directeur général, on renverse votre décision, on n'est pas d'accord avec votre décision, parce que, nous, on se drape dans l'étoffe ministérielle ou de l'agence.

Non, nous, ce qu'on dit: Laissons aller la meilleure... Je pense que l'agence, le ministère peut mettre en place des banques de candidats de bons D.G. Il y a des façons de faire circuler les C.V. dans le réseau. Je pense qu'il y a les annonces dans les journaux, mais le ministère n'est pas dépourvu de ce côté-là. D'ailleurs, on voit qu'il y a un jeu de chaise musicale de D.G., qui se promènent entre les établissements.

Mais l'idée de prendre une mesure aussi exceptionnelle, qu'on ne retrouve nulle part, qu'on ne retrouve nulle part... La formule que vous proposez, elle est inexistante, nulle part. À l'article 193, je crois. Ça n'existe pas nulle part. Or, ce qu'on dit, nous: Faisons comme dans le cas des sociétés d'État. Si, à un moment donné, les gens de l'agence au conseil ou les deux personnes nommées par le ministre trouvent que le D.G., ça n'a pas de bon sens, ça n'a pas de bon sens, il a des gros problèmes, bien je pense, moi, que le ministre pourrait dire: Nous n'acceptons pas, et pour ces raisons-là.

Évidemment, vous n'aurez pas intérêt à abuser de ce pouvoir-là. Mais je crois que c'est ce qui arrive dans le cas des sociétés d'État. Le conseil d'administration prend ses responsabilités, désigne le candidat, et, avant de rendre public le choix, on l'envoie pour approbation au ministère. Et là, si le ministre dit: Ça n'a vraiment pas de bon sens, ce n'est peut-être pas notre meilleur candidat, il y en aurait peut-être eu des meilleurs, mais on va le laisser passer, c'est eux qui l'ont choisi... Mais, s'il est inacceptable, vous avez un droit de veto et vous écrivez une lettre au conseil d'administration: On ne peut pas accepter ce candidat-là, trouvez-en un autre.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: ...on va diverger d'idées. Ce que vous proposez, pour moi, c'est de la centralisation.

M. Nadeau (Michel): Pour quelques cas d'exception. Parce que vous êtes inquiet, M. le ministre...

M. Bolduc: Oui.

M. Nadeau (Michel): ...je veux vous rassurer par un mécanisme qu'on n'a pas choisi...

M. Bolduc: Je suis...

M. Nadeau (Michel): ...mais qu'on vous donne pour essayer de vous rassurer...

M. Bolduc: Mais on...

M. Nadeau (Michel): ...sur les deux, trois cas d'exception, plutôt que de généraliser une procédure qui est inacceptable.

M. Bolduc: O.K., je...

Le Président (M. Sklavounos): Alors, M. le ministre, vous allez terminer votre question, après ça ça va être M. Nadeau. Parce que, tous les deux, vous parlez en même temps, un petit peu.

M. Bolduc: Je trouve ça intéressant, parce que le 1 % que vous me dîtes qui est problématique, là, c'est 98 % de nos articles dans les journaux, c'est 98 % des questions de l'opposition. On est un réseau dans lequel il y a énormément de gens qui se font très bien traiter. Je ne sais pas le nombre de personnes qui ont des chirurgies pour cataracte qu'on n'entend jamais parler. C'est 88 000 personnes par année qui se font opérer. J'ai 3,7 millions de personnes qui consultent dans les urgences, j'ai 36 millions de consultations, et, quand j'ai un ou deux cas qui sortent, c'est là-dessus que les gens nous demandent d'intervenir pour corriger la situation. Le 3 % de cas problématiques, si on peut se trouver un mécanisme pour empêcher ça... Et c'est mieux d'avoir un mécanisme de plus grande prudence que de moins grande prudence.

Et ce que je comprends, de toute façon, à quelque part il y a quelqu'un qu'il faut qu'il soit capable de dire que, si le conseil d'administration ou le comité de sélection -- c'est plus à ce niveau-là -- n'a pas bien fait son travail... Vous, ce que vous proposez, c'est le veto du ministre, que, moi, je dis qu'il est beaucoup trop central. La proposition, nous autres, qu'on fait, c'est plutôt d'avoir des représentants qui dans le... qu'un des deux doit donner son accord. Si les deux ne donnent pas leur accord, à ce moment-là la personne ne pourrait pas être sélectionnée. La même chose, même si les deux représentants, un de l'agence, un du ministre, voulaient passer un candidat, le conseil d'administration ou les trois représentants pourraient dire non, et il ne passerait pas. J'aimerais mieux avoir ce mécanisme de prudence là.

Pour ce qu'il s'agit de le nommer par le ministre... de donner au ministre un droit de veto, moi, quand je suis ministre, je serais d'accord avec ça, mais je ne serai pas toujours ministre. Et puis, moi, je me dis: Il faut que je protège le réseau puis les établissements contre un ministre, à un moment donné, qui pourrait vouloir avoir trop de pouvoir. Et, de cette façon-là, c'est de le faire par décentraliser au niveau de l'établissement lors du comité de sélection.

En tout cas, je veux juste vous donner la position, puis je pense qu'on peut avoir des différends, mais c'est important de comprendre, parce que ça va être un élément essentiel dans le projet de loi. Et puis, si jamais les gens me disent qu'on... la formule qu'on a retenue n'est pas acceptable, bien on pourra regarder celle que vous proposez, que c'est le ministre, à la fin, qui va dire non. Mais là ça voudrait dire une implication politique pour une nomination, alors que, moi, je pense que le politique doit rester le plus loin possible et plutôt être décentralisé.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. le ministre. M. Nadeau, allez-y.

M. Nadeau (Michel): Oui. Le point, M. le ministre, c'est le suivant, c'est-à-dire que vous ne pouvez pas participer à un processus de nomination en ayant un représentant au sein du comité de sélection pour l'agence puis un représentant pour le ministre. Je dois vous dire, à mes yeux, l'agence puis le ministre, c'est pas mal la même chose, à nos yeux, là. Le conseil d'administration d'agence est... En tout cas, ce n'est peut-être pas une structure de gouvernance essentielle, selon nous.

Mais ce que je vous dis, c'est que vous ne pouvez pas participer à un processus, travailler dans un processus, puis arriver en bout de ligne: Non, ce n'est pas bon. Ce n'est pas bon, là. On ne peut pas être des deux bords. On ne peut pas participer au processus puis à la fin, parce qu'on n'aime pas les conclusions et qu'on s'est fait battre trois à deux, là, là, on dit: Aïe! recommençons. Non, vous êtes là ou vous n'êtes pas là. Vous êtes là en début ou vous êtes là à la fin d'arrivée, mais pas aux deux endroits. Alors, c'est pour ça que, que le droit de veto soit à l'agence, peut-être, mais, nous, ce qu'on veut, c'est que ça soit vraiment une procédure exceptionnelle. C'est pour ça que, si, vous comme ministre, comme intervenant politique, vous devez le justifier, vous n'en abuserez pas. Vous n'en abuserez pas.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. Nadeau. M. le ministre.

M. Bolduc: Oui, on est d'accord que ça prend un mécanisme à quelque part pour être capable de s'assurer qu'on a le meilleur candidat. Ça, est-ce que vous êtes d'accord avec ça? Puis, si je comprends votre proposition, si, moi, je ne mets pas celle-là qui est proposée, on prendrait la vôtre, avec un droit de veto du ministre, puis ça, ce serait acceptable pour vous.

M. Nadeau (Michel): C'est la problématique des sociétés d'État.

M. Bolduc: Oui. Oui, puis là ce qu'il faut voir, on a l'air des fois en différend, mais, si je comprends bien, la majorité du projet de loi, il était quand même acceptable pour vous, la plupart des éléments.

M. Nadeau (Michel): Oui, mais...

M. Bolduc: Au moins sur six.

M. Nadeau (Michel): Sur beaucoup de points, oui, parce qu'une majorité d'indépendants, on ne peut pas se plaindre. Six des neuf recommandations, vous les suivez.

M. Bolduc: Non.

M. Nadeau (Michel): Mais par contre vous faites deux glissements. Là, vous en retirez un, il en reste un autre, la nomination du D.G., qui est majeur.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: O.K. Juste pour clarifier, la question au niveau de quand le conseil d'administration siège, c'est public, moi, je préconise qu'on garde ça public par un souci de transparence. S'il y a des discussions à faire avant, à ce moment-là, souvent ils peuvent se réunir en plénière, mais les décisions doivent être prises publiques, c'est certain.

Puis j'ai compris le sens en disant: Bien, quand c'est public, ça veut dire qu'il y a des groupes d'intérêts qui peuvent jouer, puis les gens sont toujours un peu gênés. C'est l'intérêt d'avoir un conseil d'administration fort. Un conseil d'administration fort, il faut qu'ils prennent les bonnes décisions, mais il faut également qu'ils assument leurs décisions et il faut qu'ils les assument du côté public, parce qu'on est un organisme public. Et, moi, je crois beaucoup, beaucoup dans la transparence. Je crois tellement dans la transparence que je pense que la plupart...

D'ailleurs, on... Je vais vous donner un exemple. Lorsqu'il va y avoir le rapport de l'agrément de l'établissement, on va le rendre public. Et on sait qu'à ce moment-là les journalistes vont le prendre, puis ils vont le regarder, puis ils vont nous sortir des points qui vont être négatifs. Mais on croit que la transparence de l'information va être supérieure au fait de cacher l'information puis qu'après ça, quand c'est découvert, les gens posent des questions. Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez? Je sais qu'on ne partage peut-être pas la même idée, en vous voyant hochant de la tête, là.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. le ministre. M. Nadeau, il reste juste une minute à cette période d'échange.

M. Nadeau (Michel): On s'entend bien sur le processus démocratique. Ce n'est pas le vote, dans un processus démocratique, c'est le débat avant le vote, hein? Or, ça, on... Alors donc, qu'il y ait débat dans le vote, moi, je ne suis pas contre. Qu'il y ait un bon débat, comme il y en a à l'Assemblée nationale. Mais seriez-vous d'accord, M. le ministre, pour que le Conseil des ministres soit public? Non. Non. C'est inacceptable. Parce que, si vous voulez jouer à fond votre rôle de ministre, de défenseur d'une région ou d'un ministère, ça doit être privé. Partout, c'est comme ça. Tous les vrais centres de décision, pour qu'il y ait des administrateurs indépendants, légitimes et crédibles, ils ne doivent pas être sous observation. C'est là où la démocratie dérape, c'est lorsque les débats se font sous les caméras. Je pense que... Les débats, j'en suis, mais, lorsqu'on commence à décider, là, je pense qu'il faut que les décisions... le processus décisionnel... Moi, je suis représentant des usagers, des bénéficiaires dans un établissement, je dois pouvoir dire ce que je pense sans savoir que mes mandants m'observent dans les caméras.

Le Président (M. Sklavounos): Merci...

M. Nadeau (Michel): Alors, ça, je pense, c'est essentiel à la démocratie.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. Nadeau. Je vais devoir céder la parole de l'autre côté. Alors, ce sera Mme la députée de Taschereau, porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé. 14 minutes au niveau de l'opposition officielle.

**(15 heures)**

Mme Maltais: Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, M. Nadeau. C'est un plaisir de vous recevoir aujourd'hui. Je sais que l'IGOPP a vraiment développé une vision de la gouvernance. Et votre plaidoyer aujourd'hui pour qu'on en revienne à des principes de saine gestion de la gouvernance est très important pour moi.

Vous dénoncez quatre fois... En fait, là, dans votre mémoire, en page 10, il y a quatre points que vous considérez comme devant être substantiellement modifiés -- ce sont vos mots: les orientations stratégiques, les priorités et l'organisation des services. Ça, donc, le ministre vient déjà de retraiter là-dessus et se ranger à l'avis de tout le monde, c'est-à-dire que ça n'avait pas de sens qu'un plan stratégique soit présenté à l'agence avant d'être adopté par un conseil d'administration, ça affaiblit le conseil d'administration.

Mais il y a aussi ce dont vous venez de parler, la nomination et l'évaluation du directeur général. Moi, je me souviens d'une époque où -- et j'ai été présidente de la régie, là, je m'en rappelle -- les allers-retours entre le ministère et les établissements empêchaient la discussion au niveau régional, parce que, quand quelqu'un n'était pas d'accord au niveau régional, il faisait affaire direct avec le ministère. Est-ce que vous pensez que ce... Alors, pour moi, de la décentralisation, c'est aussi la possibilité d'avoir une coordination régionale. Je ne dis pas que les agences devraient être intouchées, je pense qu'il y a une sérieuse révision des choses... des responsabilités, des mandats à faire. Mais, régionalement, il y a des discussions qui peuvent se faire. Puis il y a des conseils d'administration des CSSS, qui sont très gros maintenant, qui peuvent prendre des décisions lourdes. Est-ce que vous pensez qu'il n'y a pas risque de revenir à cette omniprésence du ministère dans les décisions locales? Est-ce que ça... Parce que, moi, c'est ma crainte.

Le Président (M. Sklavounos): M. Nadeau.

M. Nadeau (Michel): Je pense que, oui, il y a un risque, mais c'est ce qu'il faut éviter. On se dit de la microgestion. Par contre, moi, je crois que les agences... Est-ce que les agences jouent le rôle de coordonnateur? 2 500 personnes... On voit, dans le journal ce matin, 2 500 personnes. Moi, je crois qu'encore une fois pour coordonner, là, les 18... Les 18 ministères, en bout de ligne, là, est-ce que ça prend autant de monde que ça?

Je crois, moi, que la structure de coordination régionale devrait faire partie du ministère. Il y a un problème de fonctionnaires, là, dans... amener tous les gens des agences dans la fonction publique. On en a parlé souvent, mais ça, je le reconnais, là. Mais je crois, moi, que, les structures de coordination régionale, oui, il doit y en avoir sur place, là, localement, mais il y en a beaucoup qui doivent se faire à Québec, et tout ça. Alors donc, cette structure de coordination régionale, moi, à mon avis, actuellement c'est une illusion. C'est un héritage qu'on a des années soixante, soixante-dix, quand on a enlevé au... Quand on a hérité, pardon, des communautés religieuses, le système de santé, on a créé ces structures régionales là: agences, régies, etc. Mais posons-nous la question aujourd'hui: À quoi servent-elles?

La coordination, c'est vrai qu'il ne doit pas y avoir des dédoublements de technologie. On le voit dans le milieu universitaire, où là je pense qu'il y a bien des écoles de musique, des fois, qu'on pourrait standardiser, regrouper. Mais je pense que, dans le cas de la santé, oui, il doit y avoir une structure régionale, dans une approche populationnelle, pour répondre aux besoins du milieu. Mais je crois qu'on va trop loin, on va trop loin, on ne laisse pas assez aux conseils d'administration... Puis, encore une fois, il faudrait être plus...

Un bout que je ne vous dis pas, là, j'aimerais qu'on en parle aussi, c'est les exigences envers les membres des conseils d'administration. Il faut que les membres... Si on veut de la décentralisation, il faut que les gens mettent leurs culottes puis prennent leurs responsabilités, puis qu'ils soient formés, puis qu'ils suivent des cours, et finalement qu'ils soient payés, qu'ils soient payés. Ça, on ne s'entendra pas là-dessus, là, mais, je vous dis, moi, ils devraient être payés.

Alors donc, dans ce contexte-là, moi, je pense que la structure régionale devrait faire partie du ministère. Là, il y a des conseils d'administration bidon des agences qui, à mon avis, en termes de valeur ajoutée, ne font pas l'arbitrage correspondant, parce que c'est... Je pense que le ministère, comme responsable des 30 milliards des fonds publics, doit, avec l'information qu'ils ont du palier régional, faire cette opération-là. Mais les gens désignés au conseil d'administration n'apportent rien.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. Nadeau. Toujours Mme la députée de Taschereau? Oui.

Mme Maltais: Oui, en page 18, vous dites: «Un conseil qui n'a pas une solide emprise sur la nomination du directeur général n'aura jamais l'autorité morale pour insuffler sa vision dans l'organisation et en faire les suivis requis.» En ce sens-là, c'est vraiment, là... Vous critiquez cette vision qu'a le ministre du fait qu'il doit absolument avoir un droit de veto sur la nomination, la sélection d'un directeur général. Est-ce que vous voulez nous donner une image, peut-être nous parler un peu de ce que ça peut avoir comme impact dans une organisation...

Le Président (M. Sklavounos): M. Nadeau.

Mme Maltais: ...le fait qu'on sache que c'est le D.G. du ministre?

Le Président (M. Sklavounos): M. Nadeau.

M. Nadeau (Michel): Ou le D.G. de l'agence. Plus souvent, je vous dis, c'est le... En tout cas, j'ai une région en tête, que je ne nommerai pas mais à laquelle tout le monde pense. Il y a des D.G. d'agence qui s'intéressent beaucoup aux nominations des D.G. d'établissement, O.K.? Alors, dans ce contexte-là, moi, je pense que, si je suis administrateur, moi, si je veux... je suis... On est à un conseil d'administration ici, le D.G. et ses adjoints rentrent par la porte, là, et la grosse question en matière de gouvernance: Qu'est-ce qui se passe dans leur tête? Ils disent: Je viens voir le conseil de l'agence. Est-ce que je viens perdre une demi-heure avec des insignifiants qui ne connaissent rien aux problèmes de la santé ou ce sera des gens respectueux qui vont m'enrichir mon processus décisionnel, qui vont me donner des avis éclairés?

Alors, ça, je pense que c'est important que ça soit clair qui est le patron du D.G. Le patron du D.G., c'est le conseil d'administration. Si le conseil d'administration ne peut pas bonifier avec le 10 %, là, puis tout ça, s'il ne peut pas faire quelque chose, si on sent que le D.G. n'a pas devant lui son conseil d'administration, quelqu'un qu'il a un peu peur... Je regarde dans des cégeps, je vous dis que, six mois avant le renouvellement de son contrat, le D.G., il longe les couloirs puis: Bonjour, Mme la commissaire, la directrice. Là, il est bien fin avec chacun des membres, tout ça. Mais, dans le cas présent, nous... Il y a des D.G. qui se foutent éperdument du conseil parce qu'ils savent qu'ils ont l'appui du P.D.G. de l'agence puis que c'est lui qui va leur organiser leur renouvellement de mandat. Alors, dans ce contexte-là, toute la gouvernance s'effondre si vous êtes... vous avez un D.G. et ses collaborateurs de... la direction de l'établissement ne respecte pas la contribution du C.A. parce que le C.A. n'a pas les carottes et n'a pas le foie pour déterminer ce qui doit être fait. On l'a dit, le C.A. doit avoir la vision, la mise en place des programmes. Si le C.A. n'a pas ça, à ce moment-là le D.G. ne le respectera pas.

Alors donc, pour nous, c'est essentiel que le patron... Ça doit être compris de tous que le patron d'un directeur général, c'est l'ensemble des 15 administrateurs, des 14 administrateurs qui ont été choisis à travers un processus clairement légitime, bien crédible. Ce sont des gens compétents qui sont formés en gouvernance, là, et oups! un instant, là, je ne leur dis pas n'importe quoi, à ces gens-là. Je dois les respecter. Mais, si, peu importe, je perds mon temps, là, je viens perdre un après-midi avec eux autres, là, mais je... C'est un pis-aller une fois par mois, et puis finalement mon vrai boss, c'est le P.D.G. de l'agence, là, puis, à travers lui, les gens à Québec.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. Nadeau. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui. M. Nadeau, j'aimerais réfléchir avec vous sur ce que le ministre nous a affirmé tantôt, c'est-à-dire que ce projet de loi, dans le fond, il est fait pour 2 % de problèmes qu'on vit au Québec. Bien, c'est un petit peu ça que j'ai compris tantôt. Et, avec vous, je... Quand on regarde l'ensemble du Québec, la différence entre les régions... Par exemple, moi, mon agence de la santé et services sociaux au Bas-Saint-Laurent versus l'agence de Montréal, celle de Québec ou... sont tellement diverses en grandeur, grosseur, nombre d'établissements, services surspécialisés à Montréal, avec le CHUM, et tout, comment on fait pour faire une bonne législation pour l'ensemble des Québécois, l'ensemble des régions et les trois paliers de gouvernement et, comment je dirais ça, guérir ce qui ne va pas dans le système, ramener un certain nombre de choses, en termes de bonne gouvernance?

Et, moi, j'ai de la misère à comprendre, M. le Président, qu'on va faire une législation pour 2 % à 3 % de choses qui ne vont pas au Québec. Et la question que je vous poserais clairement, c'est: Est-ce que vous pensez qu'actuellement... Dans la loi de la santé et des services sociaux, le ministre n'a-t-il pas en main ce qu'il faut pour régler les cas problématiques?

M. Nadeau (Michel): Bien, je pense que non, la loi doit être changée. Et je l'ai mentionné, moi, je pense qu'il faut qu'il y ait une majorité de membres indépendants, il faut que le D.G. fasse partie du conseil, qu'il y ait l'égalité hommes-femmes. Alors, je pense qu'il y a beaucoup d'éléments... qu'il y ait un comité de vérification, qu'il y ait un comité de gouvernance et d'éthique. Il y a plusieurs des changements qui sont une mise à jour, et ça, je félicite le gouvernement pour sa cohérence, là, dans le domaine de la santé, de l'éducation, des affaires municipales, industrielles, Investissement Québec récemment. Il y a une belle cohérence, là, qui s'inspire de la loi sur la modernisation des sociétés d'État, de Michel Audet. Alors, ça, je pense que c'est...

L'hypothèse de base, c'est la suivante: on est le mieux gérés lorsque des gens sont sur le terrain. Et ça, il faut avoir confiance aux gens sur le terrain. C'est ça qui est la base, là. C'est ça qui est la base. Les gens sur le terrain connaissent mieux les besoins de la population. L'approche populationnelle, c'est là que ça se passe. Mais évidemment ils n'ont pas «the big picture», c'est le ministère qui l'a, la «big picture», et ses agences.

Mais l'hypothèse de base, c'est d'avoir des gens indépendants. Un conseil d'administration, ce n'est pas une gang qui font l'arbitrage d'intérêts particuliers et qui se font des compromis, là. Non, ce n'est pas ça. Ce sont des gens qui travaillent pour le bien commun de l'agence, une majorité d'indépendants. Alors, ça, je pense qu'à partir de là le projet de loi va dans le bon sens, mais à condition de donner au conseil d'administration la grosse carotte. Et la grosse carotte, c'est fondamental, c'est le pouvoir de nommer sans encombre le D.G., et se garder une petite gêne, là, lorsqu'il y a un abus, là, quelqu'un... vraiment, la corrélation politique, ou psychologique, ou n'importe quoi, serait excessive et abusive, le ministre pourra prendre le téléphone ou pourra plutôt écrire, cette fois-là, et dire aux gens: Voilà, je ne suis pas d'accord.

**(15 h 10)**

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Mais, M. Nadeau, les irritants majeurs... Parce que j'ai rencontré mes deux conseils d'administration, mes deux présidents de CSSS de La Mitis, de la vallée de la Matapédia, et ce que je disais tantôt, ça reflète vraiment leurs... je dirais, leurs états d'âme et leurs humeurs par rapport au fait qu'avec ce projet de loi là c'est comme si on leur faisait de moins en moins confiance, aux membres du C.A. Et je comprends que, vous comme moi, on recherche la plus grande compétence, expérience, etc., qu'on n'ait pas des gens qui ne connaissent rien à rien, qu'on ait des gens qui soient représentatifs aussi de la population puis qui savent un peu qu'est-ce qui se passe dans le réseau de la santé et des services sociaux. Mais il faut aussi faire confiance.

Quand on a une approche populationnelle, ça veut dire que, les huit MRC du Bas-Saint-Laurent, qui sont diverses, dont on n'a pas des services de la même façon partout, les gens sont capables de se positionner relativement à leurs agences, relativement au ministère, et que l'agence... Tantôt, vous avez dit: Bien, ils sont pas mal le haut-parleur du ministère. Mais des fois il y a des agences qui se tiennent debout aussi. Puis, moi, je n'haïs pas ça, j'aime ça. Puis, quand mon agence, elle ne se tient pas debout, les politiques peuvent lui dire, à l'agence, un peu comme la CRE, la CRE Bas-Saint-Laurent. Puis, nous autres, on a fait beaucoup de travail, la CRE Bas-Saint-Laurent, avec l'agence et nos huit MRC. Moi, je ne voudrais pas perdre ce travail de se coller à nos populations et d'être le reflet, en quelque part, de ce que ça prend sur le terrain pour vraiment faire les choses au niveau du réseau de la santé et des services sociaux, en lien avec l'éducation, en lien...

Le Président (M. Sklavounos): Alors, si... Il y aura 15 secondes pour la réponse. Il faut aller maintenant.

M. Nadeau (Michel): ...une approche qui va décentraliser. C'est le fondement même, ça fait 40 ans qu'on s'en va dans ce sens-là. Il ne faut pas faire marche arrière avec cette nomination. Par contre, il faut aller une étape plus loin: la reddition de comptes. Il faut que, dans les... Sur Internet, maintenant, il faut qu'on rende des comptes, pas juste un beau rapport d'activité en couleurs...

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. Nadeau. On va devoir passer... Pour préserver le temps de M. le député de Chauveau, alors il faut passer tout de suite une... 3 min 30 s, M. le député de Chauveau. Allez-y, la parole est à vous.

M. Deltell: Merci. Merci, M. le Président. M. Nadeau, c'est un grand honneur de vous accueillir ici, particulièrement pour ce dossier-là. Évidemment, quand vous avez parlé, tout à l'heure, des agences, je ne pouvais pas m'empêcher de penser, entre autres, à l'agence de Montréal, où il y a 360 employés. Et savez-vous il y a combien de cadres pour 360 employés? 99. Un cadre, quatre employés. C'est du jamais-vu. Peut-être, ça existe ailleurs, mais ça démontre encore une fois qu'il y a beaucoup trop de structures dans le domaine de la santé, il y a des économies majeures à faire pour donner beaucoup plus de soins directement aux patients. Eh oui, bien entendu, ça prend des gestionnaires, on l'aura tous compris, mais il faut que les gestionnaires soient imputables et soient aussi autonomes, aient donc l'autonomie nécessaire à l'intérieur de leurs établissements.

J'ai peu de temps, mais j'ai deux questions pour vous. D'abord, l'article 135, qui parle des élections. Nous, on estime que c'est tout à fait burlesque de vouloir tenir des élections, quand on sait que, dans le monde municipal, alors que c'est établi depuis des années, des dizaines d'années, il y a à peine 7 % des gens qui participent. Imaginez dans le monde de la santé, ça va être microscopique, ça va être grotesque. Et donc ça va perdre toute crédibilité.

Dans un second temps, c'est l'imputabilité. On est d'accord, nous, avec le principe de donner plus de responsabilités. Nous aussi, on pense que c'est les gens qui sont les deux pieds dedans qui savent exactement c'est quoi, les besoins dans les établissements. Mais jusqu'où va l'imputabilité? Et j'aimerais vous entendre là-dessus: Quel degré voyez-vous? Et aussi votre commentaire sur les élections.

M. Nadeau (Michel): Sur les élections, je pense, moi, peut-être qu'avec Internet... On fait des recherches actuellement sur la démocratie corporative. Les commissions scolaires anglophones, avec lesquelles l'IGOPP travaille beaucoup, c'est des grands territoires, et maintenant leurs séances sont télédiffusées, et ils ont des records d'assistance, là, parce que les gens voient, ils n'ont pas besoin de se déplacer en Gaspésie ou dans l'Estrie. Alors, ça, je pense qu'on s'en va vers ça, puis, un jour, on aurait des boutons «yes», «no», là, «un tel, je suis d'accord», tout ça, mais ce n'est pas encore prêt. Mais, en attendant, je vous dis, moi, que, tant qu'on n'aura pas une démocratie à la maison, avec les nouvelles technologies, c'est bidon. Moi, j'ai beaucoup plus confiance en deux nominations de cooptés, vous en... le ministre en propose trois, pas à 105, c'est tout, ce n'est pas plus grave que ça. Alors, ça, je n'ai aucun problème avec ça.

Et ça, à condition d'avoir un profil. C'est quoi, l'expertise qu'on a besoin pour gérer? Aïe! les établissements, ce n'est pas des bineries, là, on parle de centaines de millions de dollars. Donc, ça prend des gens qui ont une certaine expérience. Moi, je donne... Des fois, je fais des interventions dans des conseils d'administration où il y a des grands projets, et je me dis: Woups! dans ces gens-là, qui c'est qui a déjà géré des organisations avec des centaines de millions de budget? La bonne volonté ne suffit plus. Alors donc, dans ce contexte-là, c'est important d'avoir des gens qui sont formés, qui suivent des cours.

L'imputabilité, je crois que c'est essentiel, il faut que le ministre oblige les établissements à rendre des comptes sur des facteurs mesurables, mesurables. Arrêtons de se péter les bretelles avec une belle grosse machinerie qu'on a achetée aux États puis qu'on montre en couleurs, avec le médecin, les infirmières, les patients, tout ça. Non, ça, ce n'est pas ça de... L'imputabilité, c'est rendre des comptes, comment on progresse pour l'atteinte des résultats, comment on progresse pour atteindre...

Le Président (M. Sklavounos): En conclusion, M. Nadeau.

M. Nadeau (Michel): En conclusion. Le conseil s'est dit: Je veux me donner une vision, moi. Dans le Bas-Saint-Laurent, on veut aller vers tant. Alors, ces objectifs-là, je dois suivre les progrès. Je nomme le D.G. pour suivre les progrès, alors je dois rendre des comptes. Mais, moi, je pense, s'il y avait une assemblée publique à tous les six mois, où là vraiment on répond aux questions de la population... On ne fait pas un show, là, parce que le journaliste... les hebdos sont là puis les syndicats sont là. Non. On répond aux propositions de la population.

Le Président (M. Sklavounos): M. Nadeau, je vais vous inviter de conclure.

M. Nadeau (Michel): ...et c'est là, je pense, qu'on aurait vraiment un exercice démocratique.

Le Président (M. Sklavounos): Sur ce, je remercie M. Michel Nadeau, directeur général de l'Institut de la gouvernance d'organisations privées et publiques. Et j'invite M. Daniel St-Onge et M. Bruno Déry, du Collège des administrateurs de sociétés, à prendre place.

Je suspends quelques instants pour permettre le changement.

(Suspension de la séance à 15 h 17)

 

(Reprise à 15 h 18)

Le Président (M. Sklavounos): Alors, nous reprenons tout de suite. Nous avons... Oui, nous avons M. Daniel St-Onge et M. Bruno Déry, du Collège des administrateurs de sociétés. Je vais vous demander de commencer en vous présentant. Vous avez évidemment, comme le témoin précédent, 10 minutes pour faire votre présentation, et par la suite nous allons ouvrir la période des échanges. Alors, allez-y. À vous.

Collège des administrateurs
de sociétés (CAS)

M. St-Onge (Daniel): Merci. Je vais d'abord céder la parole à Bruno Déry, qui est le vice-président exécutif, qui va nous présenter, et ensuite on interviendra sur le fond de notre mémoire.

**(15 h 20)**

M. Déry (Bruno): M. le Président, M. le ministre, mesdames, messieurs, bonjour. Permettez-moi d'abord, au nom du Collège des administrateurs de sociétés, de remercier la commission du privilège qui nous est offert aujourd'hui de pouvoir présenter notre mémoire sur le projet de loi n° 127 et, par la même occasion, pouvoir en discuter avec vous.

D'entrée de jeu, je vous propose une très brève présentation du Collège d'administrateurs de sociétés afin de mieux positionner notre contribution aux travaux de votre commission. Le collège a été créé en 2005, donc tout récemment, à l'initiative de quatre grands partenaires: la Faculté des sciences de l'administration de l'Université Laval, l'Autorité des marchés financiers, la Caisse de dépôt et placement du Québec et le ministère du Conseil exécutif. Le collège a une mission d'enseignement dont la finalité est de contribuer au développement et à la promotion de la bonne gouvernance en offrant aux administrateurs de sociétés une formation de la plus haute qualité.

En six ans, le collège a admis plus de 750 administrateurs dans nos diverses formations. Depuis le lancement du programme de certification universitaire en gouvernance de sociétés, 350 diplômés ont obtenu la désignation d'administrateurs de sociétés certifiés, dont 35 % siègent ou ont siégé sur des conseils d'administration de sociétés d'État ou d'organismes gouvernementaux. Le collège met d'ailleurs à votre disposition, à la disposition du public, une banque de ses diplômés, permettant de faire une recherche en ligne à partir de profils de compétence et d'expérience ciblée afin de les aider, ou de vous aider, éventuellement à sélectionner des administrateurs pour combler des postes aux conseils d'administration.

Toutes les formations du collège sont offertes autant à Québec qu'à Montréal par une équipe de plus de 125 intervenants. Ce sont des administrateurs chevronnés, des experts de firmes spécialisées et des professeurs reconnus pour leur connaissance des meilleures pratiques en gouvernance.

Vous comprendrez sans plus de présentation que nous ne sommes pas des experts du réseau de la santé et des services sociaux; notre champ d'intervention est la gouvernance. Ceci étant dit, le collège n'a pas la prétention d'être le détenteur d'une quelconque vérité en matière de gouvernance. L'histoire nous a jusqu'à maintenant démontré... Et, comme je vous disais tout à l'heure, le collège n'a que six ans. L'IGOPP parlait tantôt de cinq ans, alors c'est quand même assez récent, toutes les écoles de formation dans le domaine de la gouvernance. Mais l'histoire nous a jusqu'à maintenant démontré que des nouvelles pratiques de gouvernance, bien qu'elles soient souhaitables au plan théorique, ne s'imposent pas du jour au lendemain dans les entreprises, qu'elles soient des sociétés d'État, publiques ou privées. Ce sont souvent des changements importants, et, par voie de conséquence -- je pense que vos travaux, cette semaine, vont vous le prouver -- il est prévisible qu'une certaine résistance à ceux-ci doive être bien gérée pour en assurer le succès.

Le réseau de la santé et des services sociaux est appelé par le projet de loi n° 127 à faire des changements dans ses paradigmes et dans ses pratiques de gouvernance. Les interrogations que nous soulèverons aujourd'hui dans le mémoire découlent de notre compréhension limitée de la portée globale du projet de loi, dans la mesure où il amende une loi constituante beaucoup plus vaste, dont certaines ramifications nous échappent sans doute. Notre mémoire fait toutefois l'écho des avis et conseils que nos 125 intervenants promulguent au gré des formations, depuis qu'ils donnent des formations à nos participants, donc depuis six ans.

Je laisse maintenant à M. Daniel St-Onge, qui est directeur des programmes et qui est en relation avec l'ensemble de nos intervenants, le soin de vous présenter les grandes lignes de notre mémoire déposé par le Collège des administrateurs.

M. St-Onge (Daniel): Bonjour. Je vais donc prendre quelques minutes pour vous présenter les principaux points de notre mémoire, que vous avez eu l'occasion de lire -- on l'a fait de façon aussi succincte pour éviter que vous ayez à en lire trop à cet égard-là -- donc cinq points principaux. Et je vais vous soulever aussi quelques autres questions par la suite.

Tout ce qui concerne la composition du conseil et ses responsabilités en tant qu'administrateur. On a eu l'occasion déjà de parler, tantôt, du fait que sept des membres sont des indépendants sur 15 membres désignés du côté des établissements, neuf sur 14 du côté des agences. J'ose poser la question de la difficulté que pose la désignation de ces personnes-là par et parmi les membres de certains groupes qui sont identifiés dans la loi. Pour l'avoir vu dans le secteur privé mais pour l'avoir vu aussi dans le secteur public, on estime effectivement que ces personnes-là souvent perçoivent leur rôle comme étant des rôles de mandataires de la personne qui les a désignées, et en conséquence ils ne mettent pas nécessairement leurs compétences en contribution au bien-être de l'établissement, mais ils mettent leurs compétences en contribution de la préservation des intérêts de leurs propres parties qui les ont désignés. Ça les met dans des situations très embêtantes.

En fait, si on regarde ça sous un autre angle, il faut essentiellement se demander si, au niveau du conseil d'administration, nous avons besoin de compétences de médecins, d'infirmières, de pharmaciens et de tous autres qui sont identifiés dans le projet de loi. Faut-il qu'en même temps ces personnes-là soient des gens qui travaillent dans l'établissement où ils exercent leur profession? Parce qu'en faisant en sorte que ces personnes-là exercent les deux fonctions on les met dans une situation excessivement inconfortable pour pouvoir travailler dans le seul intérêt de l'établissement ou dans le seul intérêt de l'agence, parce que c'est ça, le rôle de tout administrateur qui siège sur un conseil d'administration. Donc, question à se poser à ce niveau-là: Est-ce qu'il serait possible de trouver dans le milieu, dans le public, des gens qui ont les mêmes compétences sans pour autant que ces gens-là soient des gens qui travaillent dans ces établissements-là?

Ça ne veut pas dire que les gens qui travaillent dans les établissements ne seront pas appelés à être consultés au moment opportun pour faire connaître leurs points de vue. Ça appartient à toutes les directions générales de consulter leur personnel-cadre, leurs employés, leurs clientèles. Dans n'importe quelle entreprise, dans le secteur privé comme dans le secteur public, poser des questions à la clientèle, connaître leur taux de satisfaction, c'est tous des éléments qui sont importants de connaître avant d'arriver au conseil d'administration. On ne consulte pas le conseil d'administration pour connaître ce que veut la clientèle, c'est l'inverse. C'est donc une question qu'on se pose: Est-ce qu'il est possible de trouver d'autres moyens de nommer des gens compétents au conseil d'administration sans pour autant qu'ils soient désignés par les parties prenantes?

Deuxième question, le rôle de la présidence du conseil. Selon le projet de loi, cette présidence-là est mise au vote à chaque année. Dans les faits, la présidence d'un conseil d'administration, c'est une compétence en soi. Savoir diriger des gens, savoir diriger une quinzaine de personnes autour de la table, faire en sorte que leurs compétences soient mises à contribution et que ces personnes-là soient évaluées périodiquement sur le fait qu'ils font ou qu'elles font bien ou pas bien leur travail, c'est un travail assez important et assez exigeant. Est-ce qu'on peut penser qu'une personne puisse exercer sereinement son travail de présidence de conseil d'administration si en même temps elle sait que dans les mois, dans les semaines qui vont suivre, elle risque d'être mise aux voix et défaite de ses fonctions? Donc, une présidence de conseil, est-ce qu'on ne doit pas lui assurer une meilleure continuité dans le temps? À tous les quatre ans, comme la nomination des autres membres, pourquoi pas la nomination de la présidence? C'est une compétence.

La désignation des membres indépendants. On a déjà parlé, tantôt, de cette problématique-là. Je pense que vous avez l'occasion souvent d'en discuter ici, à l'Assemblée nationale, dans diverses autres fonctions. Je vous signale essentiellement qu'il existe, par exemple en Colombie-Britannique, des dispositions qui font en sorte qu'on fait appel au public essentiellement en disant: Il y aura des postes de disponibles pour siéger sur des conseils d'administration, de sociétés d'État dans le cas de la Colombie-Britannique, mais ça peut être d'établissements ou d'agences, du côté du projet de loi dont on parle ici. Puis, dans le cadre de ces recherches-là, on va chercher des compétences dans tel et tel et tel domaine, veuillez poser votre candidature. Et on établira, de cette manière-là, une liste de gens qui seront soumis à l'attention du conseil d'administration pour les besoins de la cooptation, ou soumise à l'attention du ministre pour les besoins de ces nominations.

On a, à ce moment-là, une palette de gens qui autrement probablement ne poseraient même pas leur candidature, n'y songeraient même pas. En tout cas, nous, on a eu l'occasion de travailler avec l'Office des professions récemment, qui cherchait des candidatures, pour... bien, récemment, depuis trois ans, même, qui cherchait des candidatures pour des représentants du public sur les conseils d'administration des ordres professionnels. On a vérifié dans notre banque de diplômés, et, parmi nos diplômés, des gens se sont pointés, des gens auxquels on n'aurait jamais pensé qu'ils soient intéressés à siéger sur ces ordres professionnels là, non pas parce que les ordres ne sont pas intéressants, mais, compte tenu de leurs profils de compétence, on ne s'attendait pas à ça. Et ces gens-là ont été accueillis avec joie par l'Office des professions et encore plus par les ordres professionnels par la suite. Et c'est des gens qu'on n'aurait jamais trouvés autrement qu'en faisant un appel à tous de cette manière-là.

Toute la question du choix et de l'évaluation de la direction générale. On a eu un certain débat, j'ai compris, tantôt, à cet égard-là, j'y reviens rapidement. Le choix de la direction générale, c'est un choix qui, à notre point de vue, repose, dans ce qu'on connaît en termes de gouvernance, sur les épaules d'une direction générale, de même que son évaluation. Or, le projet de loi mentionne que l'évaluation est faite en collaboration avec la direction générale de l'agence. Et il y a une espèce de veto, aussi, de l'agence lorsqu'il s'agit de renouveler le mandat de la direction générale. Ça fait beaucoup de contrôle par-dessus la tête du conseil d'administration, si en même temps on veut que le conseil d'administration assume pleinement son rôle.

Le Président (M. Sklavounos): En conclusion, il vous reste 30 secondes, M. St-Onge. Je vous invite à conclure.

M. St-Onge (Daniel): Bon. Écoutez, je vous laisse avec quelques questions, essentiellement, qui sont soulevées aussi par le projet de loi. Pourquoi seuls les membres indépendants doivent dénoncer l'existence ou non de conflit d'intérêts? Est-ce qu'il est possible que les autres membres soient parfois aussi en conflit d'intérêts? Lorsqu'on le dénonce, pourquoi le dénoncer au ministre? Pourquoi le conseil d'administration ne prend pas lui-même les dispositions à cet égard-là? Pourquoi monter aussi haut lorsqu'il y a une dénonciation de conflit d'intérêts? On peut comprendre qu'un conflit d'intérêts peut être très momentané. Il y a un contrat qui est à donner pour un établissement, je suis en conflit d'intérêts pour ce contrat-là, je sors de la salle, et ça finit là. Doit-on aller jusqu'à dénoncer ça par écrit au ministre? C'est ce qui est indiqué dans le projet de loi.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. St-Onge. On va pouvoir reprendre durant la période des échanges. Si vous avez d'autres points à amener, n'hésitez pas durant la période des échanges. Alors, M. le ministre, vous avez la parole. 17 min 30 s, la partie ministérielle.

**(15 h 30)**

M. Bolduc: Merci beaucoup. Très, très intéressant. Puis on va entendre pendant plusieurs heures différents commentaires. Puis je reconnais également que vous avez une expertise pour la gestion des conseils d'administration.

Peut-être régler le cas du conflit d'intérêts, là. Ça m'étonnerait qu'au niveau politique actuellement on ne veuille pas savoir s'il y a un conflit d'intérêts à quelque part. Et il faut voir, à la fin, ça va rebondir sur nos épaules. Je vais vous donner un exemple. Si vous êtes dans un conseil d'administration, puis la personne obtient un contrat -- et on sait comment ça fonctionne, les gens se connaissent -- il fait juste sortir de la salle, puis il obtient le contrat quand même, à un moment donné, ça sort six mois après dans les journaux, ils vont venir questionner le ministre. Ça fait que je pense que, si on veut éviter les conflits d'intérêts, il faut qu'il y ait de la transparence, et, la transparence, on veut être informés de ça. Je pense, c'est juste là que ça se situe.

Et je suis d'accord avec vous que peut-être, dans un autre monde, ça pourrait être acceptable. Mais, dans un monde dans lequel c'est de l'argent du public, géré parfois avec des partenaires du privé, ça nous prend de la transparence. Et, si les gens de l'opposition me disent que c'est ce qu'ils veulent, je n'ai aucun problème, mais laissez-moi vous dire que ça va être ramené par la suite. On veut de la transparence et on veut surtout qu'il n'y ait plus de conflits d'intérêts et qu'il y ait des gens qui abusent du système de façon détournée. Juste pour vous positionner, puis je comprends votre position, mais ça fait partie de notre monde politique.

L'autre élément que je voulais parler un petit peu avec vous, c'est la question de la composition. Bon, pour ce qui s'agit des membres, il y a deux façons de gérer. Les gens nous disent qu'il ne faudrait pas que les employés participent, parce que vous regardez c'est qui les collèges électoraux, c'est représentant des infirmières, représentant du conseil multidisciplinaire, représentant des autres et un représentant des médecins. Moi, j'ai siégé quatre ans sur un conseil d'administration d'établissement, je suis un représentant des médecins. Même, à l'époque, il n'y avait pas autant de formation qu'aujourd'hui. Les gens se font dire d'emblée qu'ils ne sont pas là pour représenter leurs gens, mais ils sont là pour défendre l'intérêt de l'établissement. Ça, on se le fait dire d'emblée.

Deuxièmement, ce n'est pas mauvais que des gens laissent savoir c'est quoi, leur perception comme employés d'hôpital, par rapport à la gestion du conseil d'administration, et à la fin ils sont solidaires également des décisions du conseil d'administration. Et c'est certain qu'il peut y avoir des dérives, il peut arriver que quelqu'un défende plus l'intérêt de son groupe. Mais ce que j'ai vu, moi, les quatre personnes qui représentent des gens qui travaillent dans l'établissement, ils ne sont pas ensemble, ils ne font pas une collusion pour dire: On va gérer l'établissement. Non. Premièrement, le projet de loi prévoit que ça va être la majorité des membres indépendants, et, deuxièmement, la discussion, elle, à un moment donné, va se faire et des gens vont se rallier probablement à la meilleure décision pour l'établissement et non pas pour un groupe d'intérêts. Et qu'ils laissent savoir leur perception dans l'établissement, j'aime beaucoup mieux que les gens au conseil d'administration laissent savoir ce qu'eux autres pensent de ce qui se passe que d'avoir des gens de l'extérieur qui ne savent pas du tout comment ça va, comment ça fonctionne et qui viennent donner leur opinion.

Et juste pour vous dire, moi, dans ma gestion, je pense que les employés sont partie prenante, ce sont des partenaires et ils ont droit de siéger aux conseils d'administration, excepté que ce n'est pas des représentants syndicaux. Ça, c'est l'autre perspective. Ils ne viennent pas là pour défendre l'intérêt du groupe, ils viennent là pour donner un avis, avec leurs compétences et leurs membres de l'organisation. Et comment on palie pour ne pas qu'ils prennent le contrôle? C'est qu'on a une majorité de membres indépendants qui, selon le projet de loi, doivent avoir des compétences. Les compétences, que vous nous avez dit qu'il faut aller chercher, c'est la cooptation. La cooptation sert à nous dire: Si on n'a personne qui a une force en administration, puis je veux avoir un comité de vérification, bien on va chercher une personne avec cette compétence-là, et, s'il y a beaucoup plus de femmes que d'hommes -- on va le dire comme ça -- sur le conseil d'administration, bien on va chercher quelqu'un avec une force administrative homme pour équilibrer, pour avoir la parité. L'inverse est vrai également. Donc, il faut juste comprendre comment ça fonctionne, et, je pense, pour ça, le projet de loi est équilibré.

C'est un mot que je vais utiliser souvent, un projet de loi équilibré, dans le sens que les gens nous arrivent, puis... Si c'était facile, on prendra décision. Puis ça, ils ont déjà été faits dans le passé. Mais là c'est un projet qu'il faut aller faire un genre de compromis entre l'idéal, le moins parfait, de façon à ce qu'on soit capable d'avoir une organisation au conseil d'administration très forte. Et, je tiens à le dire, les grands principes qui ont régi ce projet de loi, c'est «décentralisation», et je pense que tout le monde le reconnaît, plus les décisions sont prises de la base, mieux c'est, avec un équilibre, également avec certains contrôles pour s'assurer que, s'il y a des problèmes, qu'on soit capable d'agir.

La présidence, écoutez, c'est une décision... on pourrait dire que le président est nommé pour quatre ans, mais habituellement les conseils d'administration préfèrent revoir ça également à chaque année. Mon expérience à moi, la majorité des présidents, ils font plusieurs années. Par contre, il peut arriver à un certain moment donné qu'il y ait un changement, et ça, ça sera la prérogative du conseil d'administration, parce que: Qui élit le président? C'est le conseil d'administration. Ça fait que ça, moi, je leur laisserais le choix et puis je n'irais pas à l'encontre, de dire: On va le nommer pour quatre ans. Parce qu'un des problèmes s'ils ont quelqu'un qui est là quatre ans puis il ne fait pas le consensus au niveau du conseil, bien, là, ça veut dire qu'ils ont des problèmes peut-être, par quatre ans, à s'entendre, au niveau du conseil.

Au niveau des membres indépendants, bien je ne sais pas, vous, comment vous voyez ça, mais la question des membres indépendants, qu'il y ait eu une prédominance de membres indépendants sur des membres qui font partie de l'organisation, vous êtes certainement en accord avec ça?

Une voix: ...

M. Bolduc: O.K. Le choix du conseil... du directeur général, bien, ça, je pense qu'on en a discuté. Le choix du directeur général, c'est une question d'équilibre, encore là. Ce qu'on veut, c'est choisir la meilleure personne et se protéger contre une problématique qui pourrait survenir. On parlait de droit de veto... de ma part, que M. Nadeau tantôt était prêt à me donner comme ministre de la Santé. Moi, je pense que c'est centralisé. Moi, je préfère un mécanisme de décentralisation dans lequel, lorsqu'on fait la sélection du directeur général, on s'assure que ce soit la meilleure personne qui soit choisie. Je ne sais pas ce que vous pensez de l'idée du veto de la part du ministre, là?

Le Président (M. Sklavounos): M. St-Onge.

M. St-Onge (Daniel): Bien, écoutez... Écoutez, essentiellement, à partir du moment où vous désignez une personne sur le comité de sélection, et c'est vous qui l'avez désignée, et que vous indiquez dans la loi que cette personne-là a un droit de refus vis-à-vis de la candidature, c'est que, vous, en tant que ministre, vous exercez ce droit-là, vous l'avez désignée pour le faire. Donc, vous avez le droit de veto déjà dans le projet de loi. Ce n'est pas différent.

Ce qui est essentiellement mentionné, c'est: Est-ce que l'on doit faire en sorte... et généralement c'est ce qu'on fait en matière de gouvernance, le conseil d'administration a le plein pouvoir de nommer sa direction générale et vit avec les conséquences de sa décision à cet égard-là. Là, on ne parle pas de trois personnes qui décident ou cinq personnes qui décident de nommer la direction générale. Ces personnes-là doivent en référer au conseil d'administration, qui est ici de 15, qui est de 12 dans des entreprises privées, mais ces personnes-là doivent le justifier vis-à-vis l'ensemble de cette direction générale là.

Donc, est-ce que la personne qui est nommée au poste de directeur général ou de directrice générale doit faire l'objet d'un veto additionnel? Personnellement, je n'ai pas tendance à le voir, quand on regarde dans les règles de gouvernance en bonne pratique, parce que c'est davantage le conseil d'administration, dans le secteur privé, qui est remis en cause à l'assemblée générale subséquente s'il a mal fait son boulot en embauchant le mauvais directeur général ou la mauvaise directrice générale. C'est comme ça que ça se gère. C'est le conseil d'administration qui est redevable de ses décisions. C'est tel qu'on peut le voir à ce niveau-là.

Ceci dit, je n'ai pas eu l'occasion tantôt de faire la conclusion du mémoire. Vous avez parlé du monde politique dans lequel on vit. Je pense que nous sommes tous prêts à l'admettre, nous sommes dans une situation, avec l'Assemblée nationale qui siège de nombreux jours dans l'année, face à une espèce d'assemblée générale des actionnaires qui à chaque jour posent des questions au grand conseil d'administration, qui est le gouvernement, qui, lui, ramène ça dans chacune de ses filiales jusqu'aux établissements.

Si l'Assemblée nationale veut des réponses à chaque jour, veut que vous ayez en main des réponses à chaque jour sur combien qu'il y a de personnes en attente dans tel hôpital, combien qu'il y a de personnes sur listes d'attente pour tel type d'opération dans tel autre établissement, c'est clair que vous devez centraliser de l'information. Vous devez fournir de l'information à cet égard-là. Tant et aussi longtemps, donc, qu'on se retrouve dans une situation où vous ne pouvez pas répondre: Je ne le sais pas, il faudrait poser la question à la direction générale de l'établissement x ou au conseil d'établissement y à cet égard-là, tant et aussi longtemps qu'on n'est pas dans un geste de décentralisation, lorsqu'il s'agit d'obtenir l'information, aussi. Donc, dans la mesure où on est appelé à centraliser pour y répondre ici, ça pose une très grande difficulté de pouvoir faire une réelle décentralisation.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Oui. Là-dessus, c'est moi qui vais répondre à votre question, là, puis je vais vous expliquer le modèle dans lequel nous sommes au Québec. On est déjà comme ça, puis je pense qu'on le confirme avec la loi. La première chose, c'est un modèle décentralisé, dans lequel l'établissement gère 99,9 % de ses affaires. Il y a un partage des données entre le niveau local, le niveau régional et le niveau national qui fait partie de la question de l'imputabilité et de la reddition de comptes.

Quand un établissement a des difficultés, il faut lui donner des outils pour qu'il règle ça le plus près possible du terrain. Il arrive des cas -- et ce n'est pas le but du projet de loi, mais c'est un des éléments du projet de loi -- dans lesquels on doit se donner un outil que, si un établissement ne fonctionne pas bien, plutôt que de mettre en péril la population et puis que l'opposition, de façon légitime, pose des questions pour savoir qu'est-ce que je vais faire, ma réponse ne doit pas être: Je ne peux pas rien faire parce que la loi ne me le permet pas. Et, moi, j'assume ma responsabilité politique.

Et je tiens à vous le dire, c'est normal que, comme politiciens, on ait à assumer les résultats de notre réseau de la santé. On travaille pour... Puis ça, ça fait partie de notre démocratie. Puis je vais clarifier. Il y en a beaucoup qui nous disent à un moment donné... Hydro-Québec, puis les politiciens devraient être déresponsabilisés de la gestion du réseau de la santé. Quand ça représente 45 % du budget du gouvernement, quand, également, c'est un enjeu majeur pour la population, un jour ou l'autre, ils vont nous poser la question: Qu'est-ce que vous allez faire pour améliorer?

Donc, c'est comme ça qu'on se situe. Puis, moi, je veux vraiment qu'on continue à avoir un réseau très décentralisé, tout simplement parce que c'est la meilleure gestion, c'est la décentralisation. Excepté que, comme gouvernement, indépendamment du parti qui est au pouvoir, il faut qu'on ait des outils pour être capables d'agir rapidement ou de façon responsable pour régler des problématiques quand on voit que ça n'a pas de bon sens. En passant, il y a des établissements qui ont des difficultés; on travaille avec eux autres, on n'a pas besoin d'outils, on travaille avec eux autres.

**(15 h 40)**

Mais on a tous connu à un moment donné des endroits où c'était vraiment la crise, et là il faut être capable d'agir. Mais le projet de loi, l'essentiel du projet de loi, ce n'est pas ça. On va en discuter beaucoup parce que ce sont les éléments qui portent difficultés. 90 % du projet de loi, là, c'est diminution du conseil d'administration. On veut de la compétence, des membres indépendants, l'égalité hommes-femmes. Même dans le projet de loi, on oblige l'établissement à avoir un site Web. Pourquoi? Parce qu'un établissement qui n'a pas de site Web aujourd'hui, c'est un établissement qui a de la difficulté à rejoindre sa population. Donc, la plupart des éléments des articles, je pense, ça va se régler assez bien.

Et, lorsqu'on arrive dans ces éléments-là de savoir: imputabilité, reddition de comptes, responsabilisation, moi, mon modèle, c'est décentraliser très fort, mais il faut donner l'outil à la personne du gouvernement qui -- un jour, ce ne sera plus moi le ministre -- qui va être capable de dire: Je suis capable d'agir rapidement pour le bien de la santé de la population. C'est là qu'on se situe par rapport à ça. Moi, ça fait 26 ans que j'oeuvre dans le réseau de la santé.

Juste en passant, le réseau de la santé, c'est déjà un réseau qui est déjà comme ça, parce que ce n'est pas vrai qu'à chaque jour, on prend des décisions pour ce qui se fait sur le terrain, sauf qu'on veut se donner un petit peu plus d'outils pour être capables de mieux gérer. Je ne sais pas si vous comprenez dans quel sens qu'on y va? Et l'autre élément qu'on voit, qu'on fasse n'importe quoi comme proposition, il y a toujours quelqu'un qui dirait qu'il y a une proposition qui serait la meilleure. Le plus important, savez-vous c'est quoi? C'est d'abord qu'on ait les bonnes personnes au niveau du conseil d'administration, les personnes les plus compétentes, quel que soit le modèle dans lequel on regarde, et que l'ensemble de ces gens-là, avec ou sans des gens du ministère ou de l'agence, avec ou sans veto, qu'on aille chercher le meilleur directeur général, parce que c'est la clé du succès de plusieurs organisations, et cette personne-là devrait, elle, également avoir une gestion décentralisée. C'est comme ça qu'on positionne le réseau de la santé avec ce projet de loi là.

Quand les gens me disent qu'on centralise, c'est absolument faux. Et demandez à ces gens-là: Qu'est-ce qui arrive quand ça va mal et puis que vous ne pouvez rien faire, et qu'ils téléphonent à notre bureau pour qu'on puisse les aider? Et le projet de loi prévoit, à un moment donné, qu'on peut avoir, de façon graduelle, de l'aide apportée plutôt que de juste le mettre en tutelle.

Mais même l'opposition, souvent, me demande d'agir de façon personnelle dans leurs propres établissements, en disant: Il faut que tu fasses quelque chose pour améliorer ça, parce qu'on a un élément problématique. Bien, moi, je me dis: Fais juste me donner des outils que, si c'est si problématique que ça, je devrais avoir le pouvoir de faire quelque chose comme ministre. Et c'est un projet, puis je tiens à le dire, qui est fait indépendamment de politique. Quel que soit le parti au pouvoir, c'est un projet de loi qui doit être solide, et une loi doit être faite comme ça.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre, je ne le sais pas... M. St-Onge. M. St-Onge.

M. St-Onge (Daniel): Écoutez, je vous l'ai signalé, effectivement c'est un choix que l'on a à faire au plan politique, lorsqu'on décide de gérer le réseau de la santé, de le faire d'une façon x ou y, c'est bien clair.

Que vous ayez les moyens de prendre... Que vous ayez la capacité, au plan législatif, de prendre les moyens lorsqu'il existe un problème, bravo! Aussi, je pense qu'on n'a pas de difficulté. Personne n'empêcherait l'actionnaire majoritaire d'une grande entreprise de mettre le pied à terre à un moment donné, quand une crise arrive, de devoir intervenir. C'est normal à cet égard-là.

Ce qu'on questionnait essentiellement dans les règles de gouvernance: Faut-il faire des actes plus préventifs, par contre, à cet égard? L'exemple dont je vous parlais tantôt, le droit de veto pour la nomination du directeur, ce n'est pas parce qu'il y a un problème, c'est avant qu'il y ait un problème. C'est: Est-ce qu'il est possible donc de confier davantage de responsabilités au conseil d'administration et, s'il se trompe, de pouvoir intervenir, et non pas d'intervenir parce qu'on pense qu'il va se tromper? C'est une différence un peu de fonctionnement, à cet égard-là, qu'il faut voir.

C'est la même chose pour son évaluation. On l'évalue avec le P.D.G. de l'agence et ensuite on demande au conseil d'administration de transmettre l'évaluation. Ce n'est pas tout à fait l'approche où on confie au conseil d'administration le premier geste, c'est-à-dire de faire l'évaluation, quitte à ce qu'il soit requestionné par l'agence par la suite.

C'est une question, donc, de mettre les choses dans un ordre différent, dans certains cas, qui fait en sorte que vous gardez votre droit, à notre point de vue, comme un actionnaire majoritaire l'a dans d'autres secteurs de gouvernance, soit de pouvoir intervenir en cas de problématique, mais de laisser fonctionner jusqu'à temps... avant qu'il y ait des problèmes, parce que, là, à ce moment-là, le conseil d'administration se sent beaucoup plus avec des coudées franches pour prendre les meilleures décisions à son point de vue.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Juste clarifier la question de l'évaluation. La nomination, je pense, les gens comprennent vers quoi on veut s'en aller. Le renouvellement, par contre, ça relève du conseil d'administration. La différence, le conseil d'administration doit demander également un avis, puis ça ne fait pas force de loi de dire si l'agence n'est pas d'accord pour faire le renouvellement, il peut se faire quand même. C'est que, la façon dont c'est fait, c'est juste qu'étant donné que l'agence est un partenariat quand même assez près avec l'établissement, c'est qu'on demande l'avis à l'agence par rapport au directeur général, et c'est le conseil d'administration qui, à la fin, décide du renouvellement du directeur général ou pas. Donc, il n'y a pas de droit de veto au niveau de l'agence puis au niveau du ministre.

M. St-Onge (Daniel): ...évoquait là aussi le mécanisme d'évaluation, dire, bien, fixer les attentes puis vérifier le résultat des attentes. Le mandat, dans la loi, est confié à l'agence et non pas au conseil d'administration. C'est passablement par-dessus la tête du conseil d'administration ça.

M. Bolduc: On va le clarifier, là. Peut-être qu'on n'a pas la même interprétation, mais... Je pense qu'on a la même idée, par contre.

Le Président (M. Sklavounos): Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté ministériel? Il reste une minute. Ça va, collègues? Alors, de l'autre côté, Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci beaucoup. Bonjour, M. St-Onge, M. Déry. Merci de venir nous apporter votre éclairage sur ce projet de loi. Avant de passer à des questions, je vais quand même faire un commentaire. Vous avez dit que les membres des conseils d'administration provenant de l'interne pouvaient se sentir eux-mêmes en conflit d'intérêts. Et c'est rare que vous allez m'entendre être d'accord avec le ministre, mais je dois dire que, moi aussi, je trouve qu'en général les gens qui sont à l'intérieur des conseils d'administration savent très bien concilier les intérêts particuliers qu'ils ont, de leur secteur, avec les intérêts généraux de l'organisation. Et, en général, ils doivent, c'est souvent leur mandat, ils doivent faire valoir l'impact du geste qui est en train... de la décision qui est prise sur le secteur qu'ils représentent, mais qu'ils sont, après, partie prenante de l'organisation. Ça, de ce côté-là, je pense qu'on a des gens extrêmement professionnels.

Ce qui me fatigue plus dans ce projet de loi là, c'est l'aspect centralisateur. Et, moi, je m'inscris en faux contre le ministre, qui dit que c'est un projet décentralisateur. Alors, peut-être que vous allez pouvoir nous aider à nous départager. Je ne vous demanderai pas qui a tort, qui a raison, je sais que ce n'est pas là votre rôle. Mais, quand même, dans ce projet de loi, même si le ministre dit qu'il va retirer cette section-là, mais le plan stratégique et le plan d'organisation des services doivent être présentés à l'agence. Les attentes -- à ce que j'ai lu, je suis d'accord avec vous -- les attentes envers le directeur général doivent être présentées à l'agence. La nomination du D.G., il y a un droit de veto et de l'agence et du ministre. Le renouvellement doit être présenté à l'agence. Tout dossier structurant -- on n'a pas encore soulevé, ça -- tout dossier structurant de l'établissement doit être présenté à l'agence, on va dans tout dossier du structurant sans même décrire quel serait le dossier. Et même le D.G., on dit, peut maintenant... doit rencontrer l'agence, et, selon le cas, on pourra peut-être inviter le président du conseil d'administration. Or, le patron du D.G., c'est le conseil d'administration. Sans nous donner un avis, pouvez-vous nous dire si cela va dans le sens de ce qu'on conçoit normalement comme étant de la décentralisation?

Le Président (M. Sklavounos): M. St-Onge.

M. St-Onge (Daniel): C'est toute une question de nuance à cet égard-là, à notre point de vue. Essentiellement, qu'un établissement soit appelé à rendre des comptes à l'agence régionale, et l'agence au ministre, c'est normal. Mais que la direction générale de l'établissement rende des comptes à la direction générale de l'agence avant de rendre des comptes à son conseil d'administration, c'est là qu'il y a un petit problème à cet égard-là. Essentiellement, si le conseil d'administration, à qui la direction générale rend des comptes, est d'accord avec un point de vue que la direction générale, ensuite, s'apprête à les défendre auprès de la direction générale de l'agence, il aura le mandat avec l'appui de son conseil d'administration.

Si l'agence n'est pas d'accord, et elle a le droit de ne pas être d'accord, on revient vers le conseil d'administration en disant: Je pense que vous vous êtes trompés, essentiellement. Mais de dire: Pour ne pas que le conseil d'administration se trompe, on va aller vérifier avec l'agence si l'agence va être d'accord avant de le proposer au conseil d'administration, puis le conseil d'administration, quand il va être d'accord, il est sûr que l'agence va donner sa bénédiction, je pense qu'on vient d'inverser un petit peu les rôles des uns et des autres. C'est ce qui est écrit, ce que j'ai compris dans le projet de loi. Il s'agit simplement de le remettre dans le bon ordre décisionnel puis dans le respect, donc, de tout le monde, dans cette loi-là.

L'agence a son rôle à jouer, tout le monde en convient, l'établissement aussi, mais le conseil d'administration, qui est quelque part entre les deux directions générales, doit pouvoir placer son mot au bon endroit, essentiellement.

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Donc, dans ce projet de loi, vraiment il est important de voir à le modifier en ce que le patron de la direction générale, c'est le conseil d'administration. Si le conseil d'administration n'a pas en main ce qu'il faut pour appuyer sa direction générale ou, enfin, pour l'appuyer et pour le soutenir dans ses décisions, s'il sent qu'il y a une instance au-dessus de lui, on vient complètement de déresponsabiliser le conseil d'administration.

Le Président (M. Sklavounos): Je crois que M. Déry a également demandé la parole. Alors, allez-y, M. Déry.

**(15 h 50)**

M. Déry (Bruno): Peut-être pour compléter sur votre première... et ça chevauche sur la deuxième question que vous venez... La question de centralisation, décentralisation, dans le fond, effectivement on peut tomber dans la terminologie, mais c'est plus au niveau des principes de gouvernance. Si on considère que le conseil d'administration a des pouvoirs, a des responsabilités et qu'il est souverain sur le choix de son directeur général, il est souverain sur les orientations stratégiques, ces éléments-là, à partir du moment où on gruge là, c'est plus les principes de: Est-ce qu'on est en train d'enlever effectivement un certain pouvoir dans la structure de gouvernance plutôt que de centralisation, décentralisation? Difficile de donner notre avis là-dessus, c'est plus sur les grands principes. Alors, effectivement le patron du P.D.G., c'est le conseil d'administration. Si on enlève des éléments là, c'est peut-être sur des principes plus... Tantôt, on parlait de renforcer la gouvernance des établissements, mais à ce moment-là, effectivement, redonnons le pouvoir complet et renforçons le rôle du conseil d'administration plutôt que de regarder si ça décentralise ou si ça centralise le pouvoir qu'on veut donner au ministre dans ce dossier.

Le Président (M. Sklavounos): M. St-Onge, en complément de réponse.

M. St-Onge (Daniel): Merci. Merci, je... Oui, je voudrais simplement compléter. Il y a une différence entre des choses qu'on indique dans un projet de loi puis la vie de tous les jours. Que la direction générale de l'agence parle régulièrement avec la direction générale de l'hôpital pour le fonctionnement régulier des opérations, c'est normal. Bon. D'instituer dans un projet de loi le fait que le D.G. de l'établissement doit parler avec le P.D.G. de l'agence avant d'en parler à son conseil d'administration, c'est une autre paire de manches, à notre point de vue, essentiellement. C'est juste ça, là. C'est de l'instituer légalement, c'est qu'on vient de décréter par ce fait même que le conseil d'administration n'a pas le pouvoir de demander des comptes à son D.G. sur cette question-là avant que le D.G. ait vérifié auprès de l'agence. C'est un petit peu... C'est juste une question de l'ordonnancer, c'est tout simplement ça.

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Et, si je vous dis qu'il existe déjà dans la loi des mécanismes permettant au ministre de faire des tutelles, des tutelles d'établissement, s'il considère qu'il y a des problèmes sérieux, est-ce que vous pouvez être d'accord avec moi sur l'idée que le fait d'inverser ce rôle des conseils d'administration versus une autre entité qui est l'agence, cette inversion, tout à coup un directeur-général se retrouve parfois plus redevable de l'agence que de son propre conseil d'administration pour régler 1 % des établissements, est peut-être un peu cavalier et risque de perturber profondément le réseau -- alors, surtout qu'on voit une levée de boucliers face au projet de loi, là -- pour finalement une exception? On légifère... on met en quasi-tutelle, on inverse le processus normal de responsabilisation face à ces décisions pour des phénomènes marginaux.

M. St-Onge (Daniel): Écoutez, c'est...

Le Président (M. Sklavounos): M. St-Onge.

M. St-Onge (Daniel): La réponse est davantage ici qu'ailleurs, je pense. Tantôt, le ministre a mentionné qu'il y a, quoi, 97 %, 98 % du réseau qui fonctionne très bien. Moi, j'entends que 98 % comme bulletin, si ma fille avait cette note-là, là, ça fait longtemps que je lui aurais donné des immenses cadeaux et reconnaissances. Pourtant, on passe notre temps à parler du 2 %.

Bon, ce n'est pas toujours drôle, là. M. Bolduc, là... Non, mais, le 2 %... le 2 % génère effectivement une masse d'informations, une masse de demandes, une masse de gouvernance, à l'échelle, ici, de l'Assemblée nationale, qui commande énormément d'énergie dans l'ensemble du réseau, à mon point de vue, et qui, d'une certaine manière, déresponsabilise les conseils d'administration.

Si vous êtes dans un établissement qui pose 10 000 gestes par année en termes de soins médicaux, et qu'on passe trois jours à parler du cas qui a mal fonctionné hier dans l'établissement, et qu'en même temps vous n'avez même pas le droit de donner votre point de vue parce que la question est posée à M. Bolduc à l'Assemblée nationale et qu'il ne peut pas dire: Écoutez, on pourrait-u entendre le président du conseil d'administration ou le D.G. de l'établissement, il aurait quelque chose à dire pour vous expliquer à quel point c'est un cas bénin par rapport à l'ensemble des opérations...

Ce n'est pas ça qui se passe, ce n'est pas ça qui se passe dans la vraie vie. On est dans une situation où on exige d'avoir des réponses au plus haut niveau sur le moindre détail. Et ça pose de gros problèmes en termes de capacité de décentraliser la réelle gouvernance et de laisser la gouvernance au bon endroit.

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Croyez-moi, M. St-Onge, ce ne sont pas nécessairement toujours des cas bénins, c'est même assez extraordinaire que ce serait un cas bénin qui soit discuté à l'Assemblée nationale.

Des voix: ...

Mme Maltais: D'autre part, quand on parle de 98 % vont bien, c'est sûr que, quand -- je vous dis ça comme ça, là -- quand, sur tout le territoire de Montréal et sur toute Lanaudière, toutes les urgences débordent en même temps, et que la promesse du gouvernement -- et c'est là-dessus que s'exerce la reddition de comptes -- et que l'engagement du gouvernement, c'est que plus jamais aucune urgence ne déborde dans les 24 heures, il y a peut-être quelqu'un qui a un peu trop parlé à un certain moment donné, a parlé à travers son chapeau, puis aujourd'hui il est obligé de faire de la reddition de comptes sur ce qu'il a déclaré.

Ici, on fait des... je dirais, le travail de l'Assemblée nationale, c'est qu'il y a des gens qui se font élire sur des engagements, et, ensuite de ça, la reddition de comptes, c'est sur l'argent public et sur la réalisation de ces engagements. C'est un peu... ça peut paraître difficile peut-être, mais on accepte ce jeu-là quand on entre dans la vie politique. Et d'ailleurs le ministre vient lui-même de dire qu'il accepte cette reddition de comptes.

Mais nous devons... nous avons le devoir, ensemble dans cette commission parlementaire, de voir à ce que la meilleure gouvernance possible soit issue de ce projet de loi là. Moi, j'ai jusqu'ici un profond doute, je le trouve plutôt centralisateur comme projet de loi, même si le ministre le trouve décentralisateur, mais c'est quand même... les règles du jeu entre nous sont bien connues et bien acceptées. Si elles perturbent parfois le réseau, c'est que peut-être qu'on s'est un peu trop avancés à d'autres moments. Je ne sais pas si... je pense que j'ai d'autres collègues de mon côté qui aimeraient...

Le Président (M. Sklavounos): Il reste 3 min 30 s à votre formation. Je ne sais pas, M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): M. St-Onge, M. Déry, membres de la commission, ça me fait plaisir d'être ici. Moi, écoutez, vous avez présenté... vous avez amené cinq questions, je pense, concernant le projet de loi n° 127. Et concernant ce qui... il y en a un, entre autres, que je fais un petit commentaire dessus, c'est concernant justement la nomination des membres indépendants sur le conseil d'administration. J'ai aussi une approche... je pense que les gens qui sont membres des conseils d'administration sont quand même compétents, et puis ils sont capables de faire la part des choses. Mais je veux juste aller un petit peu plus loin. Vous suggérez même une approche en disant: Allez chercher les gens à l'extérieur, des retraités ou des... Pouvez-vous développer davantage là-dessus? Parce que je ne suis pas trop, trop éclairé. Et puis, en même temps, bien je pense qu'au niveau de la gouvernance comme telle votre position est assez claire versus la position du projet de loi de monsieur... du gouvernement actuel. Et j'aimerais vous entendre justement sur le conseil d'administration. Il me semble y avoir... vous semblez avoir une réticence à avoir des membres indépendants. Puis j'aimerais ça que vous développiez davantage là-dessus, les membres indépendants tels qu'ils sont suggérés par le projet de loi.

Le Président (M. Sklavounos): Il faut faire ça en deux minutes, M. St-Onge.

M. St-Onge (Daniel): Oui. Écoutez, non, on n'a pas de problème vis-à-vis le fait qu'il y ait des membres indépendants, au contraire. C'était simplement comment choisir ces membres indépendants là. Ce n'est pas facile, et je ne me mets pas dans la peau du ministre à cet égard-là, mais, quand on a une quantité d'établissements aussi énorme auxquels on pense puis qu'il faut en choisir deux à tous les quatre ans, ça fait 500 personnes ou à peu près, c'est du monde, là. C'est du monde à choisir à cet égard-là.

Est-ce qu'il ne serait pas imaginable que, pour trouver des bonnes personnes, on puisse faire un appel à tous, essentiellement dire: On a besoin, pour siéger à l'avenir sur des conseils d'administration des établissements, des compétences dans le domaine du droit, dans le domaine de ci, dans le domaine de ça, peu importe, là, à cet égard-là? Si ça vous tente, veuillez nous faire part de votre intérêt, on va mettre ça en banque, cette information-là.

Au collège, on a comme participants une moyenne d'âge d'à peu près 55 ans, à peu près. C'est des gens qui sont en fin de carrière... d'une première carrière, je devrais dire, pleins de compétences, pleins d'énergie pour pouvoir s'impliquer dans des conseils d'administration et qui ne demandent que ça, de s'impliquer dans les conseils d'administration. Et je suis convaincu que le collège n'est pas le seul endroit où de telles ressources existent.

Si on pouvait faire appel à ces gens-là, leur demander de se manifester, essentiellement nous aurions l'occasion, j'en suis convaincu, de trouver là des gens de très haute compétence et prêts à servir l'intérêt du réseau de la santé, si on se donne des moyens de le faire adéquatement. Et ça permettrait, quand c'est le temps d'aller en cooptation, par exemple, au niveau du conseil d'administration, de ne pas demander aux 12, 13 personnes autour de la table: Connaissez-vous d'autre monde qui serait intéressant dans le cadre de tel profil...

Le Président (M. Sklavounos): En conclusion, M. St-Onge.

M. St-Onge (Daniel): ...voilà.

Le Président (M. Sklavounos): Alors, M. le député... il ne reste pas de temps pour l'opposition officielle, malheureusement. Je cède la parole maintenant à M. le député de Chauveau et chef du deuxième groupe d'opposition. Allez-y, M. le député.

M. Deltell: Merci beaucoup, M. le Président. M. St-Onge, M. Déry, bonjour. On a parlé tout à l'heure, et je vois qu'évidemment toutes les discussions tournent autour de ça, sur la reddition de comptes, sur l'autonomie, sur la centralisation des pouvoirs versus l'autonomie que peuvent avoir les établissements. J'aimerais vous entendre là-dessus. Parce que c'est l'objectif qu'on vise, nous, notre formation politique, c'est de rendre davantage autonomes les établissements. Mais encore faut-il qu'ils puissent, eux, également rendre des comptes, et c'est là où se situe la marge, c'est-à-dire où est-ce qu'on identifie la reddition de comptes, l'autonomie, la responsabilité.

Puis c'est bien vrai aussi que, comme c'est de l'argent public, bien, ultimement c'est le gouvernement qui en est le fiduciaire, donc il doit savoir ce qui se passe à l'intérieur des établissements. Comment, vous, vous établissez, vous voyez le paysage idéal où justement les établissements, les centres hospitaliers auraient assez d'autonomie, et assez de compétences, et assez aussi de reddition de comptes à faire pour que le citoyen, qui verse taxes et impôt, soit content de voir comment cet argent-là est investi et géré par les autorités compétentes?

**(16 heures)**

Le Président (M. Sklavounos): M. St-Onge.

M. St-Onge (Daniel): Un moyen parmi tant d'autres, qui est relativement simple et qui est déjà dans le projet de loi, d'ailleurs: à partir du moment où le ministre émet des orientations stratégiques au plan gouvernemental, qu'elles se traduisent ensuite par des orientations stratégiques à l'échelle régionale et qui se traduisent ensuite par des orientations stratégiques au plan local, au plan de l'établissement et dans des plans d'action pour rencontrer ces orientations stratégiques là, bien ensuite on regarde si le plan d'action puis les orientations stratégiques ont effectivement été atteints au bout d'un an, au bout de deux ans, ou quel chemin on a fait depuis qu'on les a adoptées. On ne fait pas cet exercice-là de planification stratégique si ce n'est pas pour déboucher sur une évaluation des résultats de l'atteinte de cette planification stratégique là.

Donc, si tantôt on revenait à la liste d'attente dans les hôpitaux, si c'est dans le processus de planification stratégique, normalement, quand on arrive à l'établissement, l'établissement prend des engagements vis-à-vis de sa liste d'attente. On vérifie à la suite... à la fin de l'année, ou après six mois, ou au trimestre si on est dans le secteur privé, où on en est rendu dans l'atteinte du résultat qui a été promis, dans lequel on s'est engagé, au niveau de la planification stratégique. Ce n'est pas un exercice vain, cette planification stratégique là, c'est à ça que ça sert.

Le Président (M. Sklavounos): Il reste une minute. Question rapide, réponse rapide.

M. Deltell: Il y a deux semaines, j'étais à Gatineau, puis il y a un groupe communautaire qui me disait qu'ils étaient le 13e maillon de la chaîne entre le ministère et le service direct au patient. À votre connaissance, à votre expérience, est-ce qu'il y a trop de maillons dans la chaîne de la santé au Québec?

M. St-Onge (Daniel): Bon, je ne connais pas le réseau de la santé suffisamment pour pouvoir intervenir à cet égard-là. Essentiellement, tantôt, quand on parlait qu'il fallait faire descendre le niveau de pouvoir, le niveau de décision le plus près possible du service à donner, ce n'est pas uniquement entre le ministre, l'agence et le conseil d'administration de l'établissement, ça va aussi jusque dans l'établissement, dans chacun des départements de l'hôpital aussi. Donc, jusqu'où on doit déléguer, effectivement, pour que le service se donne au bon endroit, avec les bons pouvoirs puis les bonnes ressources? Ça existe dans le domaine de la santé comme dans n'importe quelle entreprise, à ce niveau-là. Il peut bien y avoir 13 niveaux, dans les circonstances, si le 13e niveau est le bon niveau pour donner le bon service et qu'il a les pouvoirs pour le faire, il est à la bonne place. Il a des redditions de comptes en montant, il a des redditions de comptes à faire en montant, mais il donne le service au bon endroit, avec les bonnes ressources au bon endroit. Ce n'est pas en soi un problème.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. St-Onge. Alors, il ne reste plus de temps. Alors, juste prendre quelques secondes pour remercier M. Daniel St-Onge, M. Bruno Déry, du Collège des administrateurs de sociétés, et maintenant d'inviter M. Paul Brunet, du Conseil pour la protection des malades, à prendre place.

Et je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 3)

 

(Reprise à 16 h 4)

Le Président (M. Sklavounos): Alors, nous avons avec nous maintenant M. Paul Brunet, le président du conseil d'administration du Conseil pour la protection des malades. Bon après-midi, M. Brunet. Bienvenue parmi nous. Alors, comme pour les autres intervenants, M. Brunet, 10 minutes pour votre présentation, par la suite nous allons ouvrir sur une période d'échange avec les membres de la commission et le ministre. Alors, vous avez la parole, M. Brunet.

Conseil pour la protection
des malades (CPM)

M. Brunet (Paul G.): M. le Président, M. le ministre, messieurs dames les membres de l'Assemblée nationale, merci de m'accueillir ici. Je rappelle, le Conseil pour la protection des malades a été fondé par mon grand frère en 1974. Il représente près de 400 comités d'usagers et comités de résidents affiliés qui ont payé leurs cotisations à travers toutes les régions du Québec. Et j'ai l'honneur aussi d'oeuvrer dans le domaine de la direction générale d'organismes publics depuis 25 ans. J'ai aussi eu l'occasion de défendre une thèse de maîtrise en 1995 sur l'imputabilité dans la fonction publique. Alors, vous comprendrez que ces questions-là m'intéressent au plus haut point, et tant mieux si je peux aider et notre organisme peut aider aux questions qui sont soulevées par le projet de loi n° 127.

Donc, succinctement, par définition même, c'est sûr que, si vous diminuez la participation des citoyens, vous diminuez évidemment la participation de ceux-ci, vous diminuez la démocratie participative et incidemment vous ne faites pas ce que, je présume, le projet de loi voulait faire, décentraliser, en tout cas sur le plan démocratique. D'ailleurs, je vous invite à prendre connaissance de toute la littérature sur, désormais, la gouvernance et la démocratie. Elle sera de plus en plus, obligatoirement... elle devra de plus en plus, obligatoirement, passer par des connexions avec les citoyens. Nous, en tout cas, dans les municipalités, dans la mienne, nous le vivons quotidiennement, où le conseil municipal veut revenir auprès de groupes de citoyens, des «focus groups», pour savoir si d'abord on est toujours connectés avec eux autres et on fait toujours ce qu'ils pensent qui serait le mieux à faire, compte tenu des budgets que l'on a.

Alors, je prétends respectueusement que la décision d'enlever du monde à se faire élire et les faire nommer plutôt par le ministre, ce n'est pas un gage d'une meilleure démocratie participative. Ça peut être pour d'autres raisons, que je respecte, parce que ce n'est pas moi qui suis assis là, c'est le ministre et le gouvernement, mais, je vous soumets respectueusement, on ne s'enligne pas vers une meilleure participation démocratique des citoyens.

Je peux comprendre jusqu'à un certain point, parce que, je me rappelle, j'en ai déjà parlé avec le ministre, que, les postes électifs dans la population, il y a des D.G. qui s'en occupent, hein? Alors, si ça s'appelle la démocratie, là, d'habitude... Et à plusieurs endroits j'ai malheureusement observé que les élections étaient paquetées par le directeur général ou son entourage. Ça fait que je comprends que, jusqu'à un certain point, on ne perdra pas beaucoup au change, parce que, les fois où des citoyens que je connais ont essayé de se faire élire, ils se sont fait assez tasser rapidement par certains directeurs généraux qui avaient compris qu'on pouvait s'impliquer et qu'on devait s'impliquer pour la démocratie.

C'est le même constat que je fais malheureusement au niveau de la diminution du nombre de représentants des comités d'usagers. Ils sont le lien le plus intéressant et le plus stratégique que le gouvernement et que les hôpitaux ou les établissements de soins de santé devraient garder, encourager, et frotter, et flatter parce qu'ils sont la connexion avec tout ce qui s'appelle terrain dans l'établissement. Les comités d'usagers, les comités de résidents que, moi, je connais, avec qui je transige -- j'étais en Abitibi récemment et plus avant en Gaspésie -- c'est du monde connecté, qui est impliqué, souvent des gens à la retraite, du monde qui ont eu des personnes à leur charge dans leur famille. Ne perdez pas ces contacts-là, M. le ministre, ce sont des gens importants, et je pense que nous gagnons et nous gagnerons encore plus à mesure que vous précisez le rôle de ces établissements-là.

Il faut le rappeler, hein, par contre, le ministre me le signale souvent, on a un très bon réseau de la santé, parce que, quand on y est admis, les gens, convenez-en, on est très bien soigné. Les sondages, à mesure que les années se succèdent, l'ont démontré, que ce soient des sondages dans le temps de M. Legault, en 2003, ou plus récemment, en deux mille... en deux mille... en tout cas, je ne sais pas quand, avant que M. Couillard ne quitte, il y avait un autre sondage qui avait été fait, le monde est content quand il reçoit les soins. Le problème, c'est d'y avoir accès, et c'est à ça présentement qu'on tente de s'attaquer. Et aussi, disons-le, on a un des bons systèmes dans le monde de santé, ça fait qu'il faut en être fiers. Mais est-ce qu'on peut l'améliorer, pour les presque 30 milliards de dollars que l'on dépense?

Je vais succinctement avec d'autres points, particulièrement celui qui m'intéresse, vous en avez convenu: Est-ce que le gouvernement va dans le bon sens au niveau de la gouvernance? Un des piliers, dans la littérature de la gouvernance, imaginez-vous ce que c'est, c'est l'imputabilité. Ça tombe-tu bien, j'en connais quelques notions. Et un des pires exemples, un des plus tristes, puis je l'ai déjà dit à des gens autour du ministre: 182.0.4. Ça, là, c'est le punch. 182.0.4 propose que «l'établissement doit présenter à l'agence ses plans d'organisation de services ou tout autre document d'orientation structurant avant de [le] faire approuver par son conseil d'administration».

Je vous soumets, M. le ministre, que cet article-là -- j'espère que c'est une erreur -- c'est ce qu'il y a de plus méprisant pour tout le monde à qui j'ai parlé au sein de conseils d'administration. Mais, pire, c'est un dédoublement. On dédouble, parce que, si... Et j'ai compris que le conseil d'administration demeurait quand même compétent pour traiter de la question, mais, si on décide que maintenant on s'en va à l'agence, ça veut dire qu'on dédouble. Vous m'avez promis qu'on ne ferait pas de dédoublement. Ça, c'est un exemple frappant, puis j'aimerais ça qu'on l'enlève. C'est méprisant.

**(16 h 10)**

Et, alors qu'on pense à... et qu'on veut -- c'est ce que j'ai compris -- qu'on veut décentraliser... Décentraliser, là, pour éviter qu'il soit galvaudé, c'est qu'on donne le pouvoir à quelqu'un en bas, qui va en répondre, simplement. Ça ne veut pas dire: Je te donne l'autorité de faire un plan, mais tu vas le faire comme je vais te le dire puis tu vas mettre ce que je vais te demander de faire dedans. Ça, c'est de déconcentrer l'autorité. C'est le projet de loi 120, en 1991, que tout le monde a dénoncé et que malheureusement M. Côté prétendait être de la décentralisation. Mais peut-être qu'il n'avait pas fait de maîtrise en administration publique ou peut-être que les gens qui étaient à côté de lui ont compris que la politique parfois peut avoir des priorités que le vrai management, qui est moins politique, j'espère, devrait comprendre de ce que c'est l'imputabilité. Pour moi, ça, c'est le pire exemple de centralisation de l'autorité, en plus d'être méprisant pour les conseils d'administration.

Mais, en vieillissant, on devient sage. J'ai fait trois propositions dans notre mémoire. J'aimerais ça qu'on les regarde, parce que c'est des petits pas, M. le ministre, mais je pense qu'il y a quelque chose à faire avec ça. M. Lalumière sait très bien de quoi je veux parler. Il y a des articles dans la loi qui mériteraient d'être revus avec un changement de quelques mots seulement. En fait, ce que j'ai fait, puis c'est ça, le dénominateur commun des trois articles dont je parle, c'est d'éviter de dire: Tu vas faire quelque chose, mais tu vas le soumettre au ministre pour approbation. Tu vas faire quelque chose, mais l'agence devra l'approuver. Une fois que tout est fait en haut, puis les grandes orientations... Comme la personne qui me précéda tantôt le signala, une fois que les grandes orientations sont faites, une fois que les grands objectifs sont envoyés dans les régions, auprès des agences, on peut-u donner l'autorité et la déléguer aux «boards», aux conseils d'administration et aux gestionnaires pour qu'ils en répondent?

Je vous soumets que c'est probablement... Et ce n'est pas moi qui le dis, c'est un sondage auprès des gestionnaires de la santé, pratiqué par la société d'initiative en psychologie du travail, si je me souviens bien, en 2010. 62 % des gestionnaires ont une opinion négative de leur travail parce qu'ils se sentent sous-utilisés. Moi, là, si ma gang, chez nous, me disait ça, là, mettons que j'agirais puis je ferais quelque chose en ce sens-là. Mais je le sais qu'il y a des éléments politiques qui ne me regardent pas, mais qu'on ne me dise pas, en tout respect, qu'il s'agit ici d'une proposition de plus décentraliser. Mais on peut le faire. Il n'est pas trop tard. Ce n'est qu'un projet de loi. Et, en regard de ces articles-là, je l'ai déjà soumis en guise de discussion auprès des gens dans l'entourage du ministre.

D'ailleurs, au niveau des conseils d'administration, le Vérificateur général rappelait quelquefois encore, depuis 2007, que les «boards» ne font pas leur job. Peut-être que c'est parce qu'ils n'ont pas l'autorité. Et je ne vois pas dans le projet de loi, malgré que le ministre est évidemment bien intentionné, qu'on propose de donner plus d'autorité aux conseils d'administration. La première affaire qui motive quelqu'un, c'est de sentir qu'il est utile et que ce qu'il va faire va servir à quelque chose. Si on ne fait pas ça, on n'améliorera pas la gestion, malgré le fait qu'on ait un bon système de santé, il faut le rappeler.

Alors, c'était en gros, M. le Président, ce que je voulais signaler. Et je réitère le fait que, par ces trois articles-là, qu'on les modifie... D'abord, moi, je vais être bien content parce que ça fait cinq ans que j'en parle à des gens autour du ministère, à des sous-ministres. Et aussi je crois, respectueusement et en toute affection pour le travail extraordinaire que vous avez à faire, qu'il s'agirait là de petits pas et je prétends qu'ils résulteraient en une révolution positive chez vos gestionnaires, sans pour autant vous enlever l'autorité politique dont vous avez évidemment besoin pour runner ce ministère. Merci.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Me Brunet. Vous êtes à l'intérieur du temps, bien à l'intérieur du temps. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Bolduc: Alors, merci, M. Brunet. Dans un premier temps, là, je veux publiquement vous remercier pour tout le travail que vous faites. Vous êtes un de nos intervenants qu'on est certains que vous... Vous dites ce que vous pensez, vous n'avez pas d'attache, et puis comme de fait, quand vous apportez des commentaires, c'est toujours des commentaires dans le but de défendre les usagers, et ça, je vous en félicite. Et tous vos commentaires... Puis je peux le dire, de temps en temps vous nous critiquez, puis on accepte cette critique-là. Par contre, quand c'est le temps de dire qu'on a fait des choses qui sont correctes, vous le dites également. Ça, c'est tout à votre honneur. Je pense que c'est quelque chose de remarquable, surtout dans une société où souvent les gens défendent leurs intérêts. Vous, vous défendez vraiment l'intérêt des usagers.

Et je vais prendre peut-être juste deux commentaires, parce que je veux rajouter là-dessus. Je pense qu'on partage la même opinion. Dans un premier temps, si on y va général, on a un très bon système de santé. Ce n'est pas un système de santé qui est parfait. Il faut viser l'excellence, puis l'excellence, encore là, ce n'est pas la perfection, parce qu'il y a tellement de volume dans nos activités, il y a tellement d'imprévus, puis la santé, ce n'est pas mathématique, hein, c'est plus humain. Ça fait que... Mais je vous dirais qu'en général il y a un très bon système de santé.

Je suis d'accord avec vous également, le taux de satisfaction... Puis récemment on l'a vu dans le journal, un sondage récent de Léger & Léger qui disait que 87 % des gens étaient satisfaits des services. Dans nos données à l'interne, plus de 90 %, 95 % des gens, lorsqu'ils sont traités, sont satisfaits des services et sont même surpris, parce que, si on entend tout ce qui se dit autour du réseau de la santé, c'est comme si ce n'était jamais bon, alors que 90 %, 95 % sont très satisfaits.

Et puis, moi, je reconnais également que, s'il y a un apport à faire au réseau de la santé, c'est l'accessibilité des services. Nos professionnels sont excellents, sauf qu'il faut que tout le monde travaille ensemble pour donner une meilleure accessibilité, avoir le service et l'avoir surtout dans un temps très, très rapide.

Mon commentaire, je commencerais par la question des représentants des usagers aux conseils d'administration. Je dois vous avouer, si c'était de moi, j'aurais laissé deux membres pour tout le monde. Mais à la fin tout le monde nous dit, puis avec raison, qu'il faut diminuer la taille des conseils d'administration. Et chacun que je rencontre, que ce soit le groupe des médecins, qui disent qu'ils étaient deux, ils voudraient rester deux parce qu'ils sont importants... Les usagers nous disent qu'ils sont deux, il faudrait qu'ils restent deux. Les universitaires, ils étaient quatre, on les met à un, ils disent: Il faudrait qu'on reste trois ou quatre. Les fondations, qui sont très importantes dans nos organisations, avaient deux représentants, c'est également un.

Ça fait qu'on se retrouve comme avec un problème, que, si on veut diminuer les conseils d'administration, il faut que tout le monde accepte de diminuer son propre nombre. Et la règle est simple, c'est la règle d'équité pour tout le monde. Ça fait que, là, ça dit: Tout le monde est important et tout le monde va diminuer de presque la moitié sa représentation, sauf les représentants des employés et les représentants du conseil multidisciplinaire, parce qu'eux autres, ils étaient seulement qu'un, ça fait qu'on les laisse à un. Et également, lorsqu'on a fait le projet de loi, on dit: En plus d'être à un certain nombre, il faut qu'ils soient indépendants, donc il faut qu'il y ait des nominations, puis on a gardé le principe des élections.

Le principe des élections, ça va être une des choses qui va être très contestée dans la loi. Nous autres, on veut le laisser, mais je peux vous dire que la majorité des groupes qui vont venir vont nous demander de l'enlever, parce qu'on juge qu'il n'y a pas de représentativité démocratique, parce qu'il y a un très, très faible taux de personnes qui participent. Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez, par rapport à ça, là, ce faible taux de participation par rapport à nos élections?

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. le ministre. Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): J'aurais le goût, M. le ministre, de vous proposer que, si vous faites du chemin sur les trois articles que j'ai déjà proposé à M. Lalumière de regarder, que je suis prêt à laisser tomber certaines des interventions en regard de la représentativité de la population. Il faut qu'on fasse quelque chose. Moi, je pensais au début... Parce qu'on s'est parlé. Vous avez annoncé vos couleurs récemment. Je me suis dit: O.K., il va diminuer la taille des conseils d'administration, peut-être qu'il va augmenter leur autorité. Je n'ai pas vu ça.

M. Bolduc: ...par contre, on va se réconcilier sur...

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: ...on va se réconcilier sur un point, celui que vous avez dit qui était l'article méprisant. Là, on va l'enlever. Ça, je tiens à vous le dire. Puis, moi, quand je l'ai relu également... Puis je vais être très honnête avec vous, on a préparé le projet de loi. Quand on est arrivés à la relecture, moi, dans ma tête, c'est d'abord le conseil d'administration, après ça l'agence. Et j'ai vu la formulation, puis on va la corriger. Puis je suis tout à fait d'accord, et ça a été mal reçu, puis on va le retirer. Ça fait que ça, c'est déjà un bon bout qu'on va faire.

Pour ce qu'il s'agit des autres mécanismes, ce qu'on veut, là, c'est -- puis je tiens à le répéter: conseil d'administration très autonome, avec des mécanismes de reddition de comptes. Et, compte tenu qu'on est dans un réseau de la santé, c'est important de savoir ce que chacun des établissements fait et laisse savoir... il faut laisser savoir aux autres également ce qu'ils font, parce qu'on fonctionne ensemble.

Je vous donne un exemple. Dans notre réseau de la santé, vous avez des hôpitaux locaux, vous avez des hôpitaux régionaux, puis il ne faudrait pas qu'à un moment donné l'hôpital régional prenne des orientations au détriment des hôpitaux locaux. Il ne faudrait pas non plus que l'hôpital local, dans le plus petit territoire, décide qu'il ne tient pas compte qu'il y a des services qui vont se donner, de sa population, à l'hôpital régional. Et c'est ce réseau-là qu'on veut être capable de mieux coordonner en respectant l'autonomie puis la mission de chacun au niveau local.

Ça fait que c'est pour ça que, si on était dans un réseau dans lequel on n'avait pas ce type de reddition de comptes ou de discussion, là, les gens viendraient aujourd'hui puis ils nous diraient quoi? Ils nous disent ce qu'on nous dit depuis des années: Chacun fonctionne en silo. Et, lorsqu'on fait cette discussion-là, on veut que les gens se ramènent... on veut se sortir du silo, et, pour se sortir du silo, il faut donner les outils à l'agence pour être capable de faire la coordination. Puis, au niveau national, on va donner des grandes orientations, ce qui se fait d'ailleurs actuellement, et ces grandes orientations là, bien on voudrait savoir comment chacun des établissements l'intègre dans son plan.

Je pense que le but, ce n'est pas de dire «on vous oblige à» comme «on peut-u avoir un meilleur exercice de communication?» Encore là, la difficulté qu'on a, ça fonctionne bien avec 95 % des gens puis des établissements, sauf que ça arrive à l'occasion qu'il faut se mettre une règle pour dire: Il faut qu'on le sache, donc ça serait peut-être important qu'on se donne un mécanisme de reddition de comptes de ce sens-là. C'est plus l'esprit de la loi, parce que, je tiens à le répéter, si on est capable de gérer un réseau de la santé comme le nôtre, 30 milliards, 300 000 personnes, 254 établissements partout au Québec, pratiquement toujours le plus gros employeur dans chacune des villes, il faut qu'on ait une décentralisation. Si on pense qu'on va gérer à partir du ministère ou de l'agence le réseau de la santé, on se trompe.

Il faut leur donner les outils, par contre, pour bien le faire. Et, nous autres, ça nous prend un mécanisme pour ce qu'il s'agit de reddition de comptes et d'imputabilité. Je suis content, parce que vous avez quand même une maîtrise là-dessus, l'imputabilité. L'imputabilité, on la voit beaucoup par le partage des données. C'est-à-dire qu'on est transparents, tout le monde partage les données. Et naturellement, s'il y a un endroit qu'on voit que ça ne va pas bien, une urgence qui ne fonctionne vraiment pas bien, il faut qu'on soit en droit de poser des questions puis demander à ce qu'il y ait une action pour corriger ça. Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez, comme philosophie de gestion?

**(16 h 20)**

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. le ministre. Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): Pour être imputable et rendre des comptes, il faut avoir l'autorité au moins équivalente à ce que l'on réclame que l'on fasse et ce sur quoi on devra répondre. C'est une règle fondamentale. Si je vous dis: Tu vas faire un plan, voici comment tu vas le faire puis voici ce que tu vas mettre dedans, comme certains articles dont je parle dans mon mémoire mentionnent, je m'excuse, mais c'est impossible légalement d'être imputable là-dessus. Vous ne pouvez pas être responsable de répondre de quelque chose sur quoi vous n'avez pas eu ni mot à dire sur le quoi ni sur le comment, c'est impossible.

Je vous donne un exemple ou une hypothèse. Un directeur général d'un hôpital serait impliqué dans une grave crise pour le C. difficile. Des dizaines et des dizaines de morts surviendraient. Présentement, légalement, vous ne pourriez pas congédier ce D.G. là, parce que le plan de soins a été approuvé par le ministre. Il a fait ça en robot puis il a dit: Je suis désolé, ça n'a pas marché. C'est impossible, légalement, que ce gars-là soit congédié. D'ailleurs, je crois comprendre qu'il ne le serait pas.

M. Bolduc: Bien, le congédiement...

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: ...le congédiement, ce n'est pas le ministre, parce que ça relève du conseil d'administration. Pour être capable de congédier, il faut avoir un motif raisonnable. Et puis il y a un contrat qui existe, mais il faudrait quasiment que ce soit quelque chose de mauvaise foi. Mais on ne pourrait pas imputer à un directeur général de mauvais résultats. Et on n'est pas un réseau... Puis je pense qu'il faut faire attention. Les gens disent: Vous avez juste à le congédier. Les D.G. ont des droits aussi, puis on ne peut pas faire n'importe quoi.

Sauf qu'il faut se donner des mécanismes que, si quelqu'un n'est pas capable de faire le travail, c'est comment est-ce qu'on s'organise au moins pour ne pas le renouveler, puis ça, ça appartient au conseil d'administration. Ça, je tiens à le dire encore, le renouvellement relève du conseil d'administration. La nomination du directeur général relève du conseil d'administration. Un ministre ou une agence ne pourrait pas nommer un conseil d'administration contre sa volonté. Sauf qu'on veut se donner des mécanismes de protection pour s'assurer que ce soient les bonnes personnes qui soient nommées.

L'autre élément... Là, on a parlé de quelques éléments, puis je reçois bien ce que vous me dites par rapport aux trois. On va peut-être voir s'il y a lieu de rédiger ça différemment pour que ça réponde plus à l'esprit que nous parlons actuellement. Par rapport au reste du projet de loi, il y a-tu des choses que vous voyez, dans le reste du projet de loi, qui vous irritaient ou des choses que vous trouvez que c'est une bonne affaire par rapport aux différents éléments?

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. le ministre. Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): Bien, moi, je pense que c'est un «work-in-progress» et je pense que, s'il y a un travail de fait sur les trois articles dont je parle dans le chose, là on va avoir quelque chose. Mais présentement, avec toute l'affection dont je suis capable et surtout la formation que j'ai, je ne suis pas capable de voir qu'il y a un exercice de délégation d'autorité. Je ne sais pas si quelqu'un dans votre entourage, M. le ministre, a cet exemple-là. moi, je n'en ai pas vu. Je sais qu'il y a des intérêts puis des raisons d'État avec lesquelles je peux ne pas être familier, mais je ne peux pas dire, comme personne qui est spécialisée là-dedans -- je crois que j'ai une certaine spécialité -- qu'on a fait un exercice ici pour déléguer des responsabilités. Et, si c'est le cas, je veux être confondu.

J'en ai eu, des discussions, depuis M. Paquette, sur la loi 120, sur les différents articles, 431, 505. Il y a des signaux que vous pouvez envoyer, qui peuvent être très positifs, dans le groupe de gestionnaires que l'on a, et qui vont être extraordinaires, en tout cas comme message, beaucoup plus, puis-je vous le suggérer, que l'état actuel du projet de loi, qui mérite... Parce que je sais que vous êtes bien intentionné et que vous voulez faire de ce réseau un réseau encore meilleur, et, moi, je veux y contribuer avec tout l'amour et la compétence dont je suis capable.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Bien, ce que vous dites, puis, ce que vous dites, vous avez raison, c'est qu'on veut faire un projet de loi, dans un premier temps, qui est dépolitisé, c'est-à-dire que, quel que soit le gouvernement qui va travailler dans le futur -- on espère que ça va être le nôtre -- c'est tout simplement qu'on ne veut pas que ce soit politique, mais bien un projet de loi qui améliore la gouvernance.

Une voix: ...

M. Bolduc: Non, mais, je veux dire, on peut améliorer la gouvernance, à ce niveau-là. Et ce qui est important, pour nous autres, c'est de s'assurer que les gens aient les outils pour bien fonctionner. Dans 97 %, 98 %, je tiens à le dire, ça fonctionne bien. Et on veut se donner également quelques éléments pour être capables d'avoir une meilleure coordination, être capables de s'assurer que les orientations ministérielles régionales soient conformes à ce qui va se faire sur le terrain, et également, dans les quelques cas difficiles, qu'on ait des outils qui sont capables de faire en sorte qu'on ne laissera pas souffrir une population ou une organisation parce qu'il y a des problèmes qui auraient dû être réglés.

Le Président (M. Sklavounos): Allez-y, Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): C'est vrai, mais puisque... Puis, vous me l'avez dit à moi aussi, hein, il y a des problèmes seulement dans 3 %. On n'est pas pour tuer une mouche avec un canon. Il y a moyen de montrer à tout le monde qu'on peut leur faire confiance puis que, le 3 % d'imbéciles ou de situations irrégulières, que vous aurez l'autorité pour les manoeuvrer. Mais c'est parce que je trouve que c'est décourageant pour une grosse gang qui ne demandent qu'à ça, faire mieux, puis que leurs compétences servent le plus possible. Et je sais que vous le savez et que les gens qui vous entourent le savent, parce que c'est des gens extrêmement compétents et consciencieux.

Le Président (M. Sklavounos): Ça va du côté ministériel?

M. Bolduc: Oui.

Le Président (M. Sklavounos): Alors, Mme la députée de Taschereau, à vous.

Mme Maltais: Merci. Bonjour, Me Brunet. C'est un plaisir de vous rencontrer et de vous entendre. On trouve, nous aussi, que vous avez une longue expérience de la protection des malades et que votre apport à la société a toujours été important. Et vraiment vous avez une indépendance d'esprit qui vous honore et qui est salutaire pour notre système de santé et de services sociaux. Je vous en remercie.

Je suis tout aussi déçue que vous, parce que j'ai bien compris une déception par rapport à ce projet de loi, en ce sens qu'il ne va pas vraiment renforcer nos conseils d'administration et leur donner vraiment suffisamment de pouvoirs pour assumer leurs responsabilités, ce qui provoquerait ensuite, comme vous l'avez dit, une imputabilité qui est nécessaire. Je suis d'accord avec vous.

Vous avez eu des mots durs envers ce projet de loi là. Je ne les répéterai pas, mais il y en a un qui m'interpelle particulièrement, c'est celui sur la démocratie. Écoutez, vous êtes un protecteur vraiment des malades, des usagers. Vous parlez du poids que va avoir l'usager, le représentant du comité des usagers qu'il reste sur un conseil d'administration. Vous parlez du stress qu'il peut y avoir à représenter les usagers face à tous les comités qui sont dans un conseil d'administration. J'aimerais beaucoup vous entendre là-dessus, parce que, moi, c'est quelque chose qui m'a interpellée, qui est nouveau dans les mémoires qu'on a reçus.

Le Président (M. Sklavounos): Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): Je veux dire deux choses. La première, c'est que, lors d'une première lecture du projet de loi, j'étais un peu triste, mais après ça je me suis dit que c'est une opportunité que le gouvernement me lance pour améliorer les choses et tenter de donner un apport sur ce qu'on pouvait suggérer. Et là je pense qu'on... Ça fait que, dans le fond, je ne suis pas si déçu que ça, puisque j'ai une occasion, nous avons une occasion de soumettre des idées qui, j'espère, feront un bout de chemin. Ça fait qu'à toute chose malheur est bon, comme on dit.

Et c'est vrai que le réseau de la santé n'est pas si mauvais que ça. D'ailleurs, il l'était, à plusieurs égards, un bon réseau -- parce que c'est difficile de les comparer, là -- il y a quelques années déjà, et on a eu à commenter autant quand vous étiez au pouvoir que depuis que les libéraux le sont. Ce que je veux dire, c'est qu'au sein des comités d'usagers, à cause de l'alourdissement de la maladie et du handicap de plusieurs personnes qui maintenant résident en soins de longue durée, c'est beaucoup plus difficile de recruter les personnes, de sorte que ce sont souvent des personnes proches, des proches aidants qui après le décès ou durant l'hospitalisation ou la résidence de la personne vont s'impliquer.

Mais, si vous saviez... Et on en a en majorité qui siègent au conseil d'administration du Conseil pour la protection des malades, du monde actif, souvent à la retraite, des gens qui ont fait une carrière puis qui continuent à s'en occuper et qui sont motivés. Ne les laissons pas en plan. Donnons-leur quelque chose à faire. Parce que souvent... En plus que, là, ils vont être tout seuls. Ils se sentent accablés par une masse d'informations sur, souvent... Et ce n'est pas juste eux autres qui s'en plaignent. Vous le savez vous-même, il y a du monde qui trouve qu'ils ne décident pas grand-chose au conseil d'administration.

Et je pense qu'on devrait prendre une chance. Essayons-le, M. le ministre. À quelques égards, prenons une chance. Moi, je suis convaincu que... En tout cas, je peux vous dire, après 25 ans d'expérience: Oui, il y a peut-être 3 % d'imbéciles qui se sont immiscés pour fucker la patente, excusez l'expression, mais la très grande majorité des gens sont tellement contents d'avoir une certaine autorité qu'ils vont vous en donner plus que ce que vous auriez souhaité d'eux, et c'est ça qui fait une valeur ajoutée dans une gestion, il me semble. Mais je sais que c'est gros. Moi, j'ai 300 employés, le ministre en a 350 000. Ce n'est pas pareil. Mais je pense qu'il y a un défi de gestion, et peut-être qu'il y a des signaux qu'on peut envoyer, et c'est là où je trouve quand même quelque chose d'extrêmement motivant dans la présentation de ce projet.

**(16 h 30)**

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Écoutez, 14 bénévoles ou 24 bénévoles, ça ne coûte pas plus cher à l'État, là, O.K.? Je comprends qu'on veuille diminuer les conseils d'administration pour les rendre plus efficaces, mais ce que je... Puis je peux comprendre de vouloir les baisser. Mais enlever des usagers ne coûte rien, ils n'enlèvent rien en matière de frais pour... Ce qu'on enlève, c'est de la bonne volonté. Ce qu'on enlève, c'est de la compétence. Puis on enlève la voix de ceux que justement il faut entendre dans un établissement, la voix de ceux qui utilisent les services, la voix de la population.

Moi, ce que je trouve dommage, c'est que le ministre s'ajoute des nominations, parce qu'il y a deux personnes qui vont être nommées par le ministre, mais il enlève la voix des usagers. Je pense que, moi, j'ai... Il y a un problème qu'on va aborder, là, pendant l'étude article par article, mais on va avoir plus de voix du ministre mais moins de voix des usagers. C'est un problème pour moi dans ce projet de loi là, je vous le dis, je le dis devant le ministre, là, il y a... Pour moi, quand tu dis que tu veux localiser, responsabiliser et décentraliser, bien, ce n'est pas en remplaçant... en maintenant le monde sur le conseil d'administration puis en enlevant les voix de l'intérieur pour avoir ta voix ministérielle que tu fais le travail.

Vous parlez de bonifier. J'aimerais ça vous entendre sur cette proposition que vous avez, vous voudriez qu'on... Vous parlez même de trois articles, 105, 431, 505, où, en page 10, vous dites: Voici des exemples de ce qu'on pourrait faire. J'aimerais ça que vous m'en parliez parce que...

M. Brunet (Paul G.): C'est long, là.

Le Président (M. Sklavounos): Me Brunet.

Mme Maltais: Êtes-vous capable d'être bref?

M. Brunet (Paul G.): Oui. Mais j'attire...

Mme Maltais: Je sais que vous êtes un avocat, mais...

M. Brunet (Paul G.): Oui, c'est parce que je ne veux pas être... trop faire d'avocasseries, mais j'en ai... On me pardonnera, mais j'ai souvent des entretiens avec M. Lalumière, et ça fait quelque temps qu'on s'échange certaines informations. J'ai très confiance en lui. Alors, c'est pour ça que j'ai échangé.

Alors, je lui disais: Par exemple, l'article 105, au deuxième alinéa, «l'établissement fixe également les paramètres des services de santé et des services sociaux qu'il dispense et soumet ces paramètres à l'approbation de l'agence», il faut rappeler qu'à plusieurs égards l'établissement est déjà soumis à un cadre d'objectifs, puis de desserte, puis de dispensation très précis. On peut-u le laisser prendre une chance sans qu'il ait encore à reconcentrer l'autorité en haut? Une fois qu'on l'a mis...

Écoutez, un des exemples extraordinaires -- puis ce n'est pas la faute du ministre, c'était là, dans le projet de loi n° 120, rappelons-nous-le -- j'attire votre attention sur l'article 505 où le gouvernement peut prendre des règlements. L'article... l'alinéa 11° est extraordinaire -- puis ça, là, il faut faire quelque chose là-dessus, alors le gouvernement peut faire des règlements, imaginez, et il l'a fait: déterminer la forme du plan d'organisation de tout établissement, les éléments qu'il doit contenir, son contenu, les méthodes et les règles suivant lesquelles il doit être élaboré.

Êtes-vous en train de me dire aujourd'hui que le D.G. ou le C.A. d'un établissement va être responsable du résultat, des succès ou des échecs de ce plan-là? Impossible. En tout cas, sur le plan légal. Impossible. Autant dans la littérature qu'en droit, vous ne pouvez pas être responsable de quelque chose sur lequel vous n'avez eu ni le contrôle ni les moyens de le réaliser. C'est exactement ça qui se passe ici.

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Matapédia, pour la suite.

Mme Doyer: Merci. Merci, M. le Président. Alors, Me Brunet, bienvenue. J'ai trouvé votre mémoire extrêmement intéressant. Et je suis d'accord avec vous, dans le sens que la décentralisation, ce n'est pas ça. Parce que j'ai passé deux ans de ma vie à travailler sur c'est quoi, la décentralisation, j'ai analysé les programmes du Parti libéral et du Parti québécois, et je les ai comparés par rapport à la décentralisation des pouvoirs, et la décentralisation des pouvoirs, il y a 15, 20, 30 ans et jusqu'à maintenant, c'est de faire en sorte de mettre en place un principe de subsidiarité. Et d'ailleurs, dans le mémoire de l'AQESSS, hein, l'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux, c'est qu'il faut mettre les pouvoirs ou les lieux de décision le plus près possible de là où se dispensent les services.

Et, quand on regarde les services par rapport à une population dans une MRC, dans une région, dans une sous-région, prenons le Bas-Saint-Laurent, hein -- puis, je pense, M. le ministre, il va être capable de... -- ça, si on regarde les services ambulanciers, c'est une chose, si on regarde les services de cancer, c'est une autre chose. Mais ce qu'on cherche, là, c'est d'avoir la meilleure dispensation de services là où ça doit être. Si on regarde les services spécialisés, surspécialisés ou de base, c'est une chose. Et ça, c'est l'intelligence de l'objet des services qu'on doit donner qui nous dit qu'est-ce qu'on doit faire.

Et, quand je regarde, la décentralisation, c'est quoi: «Une gouvernance performante devrait d'abord accorder au palier qui donne les services la gestion de ceux-ci. En contrepartie d'une délégation accrue des pouvoirs, les établissements sont d'accord pour rendre des comptes sur les résultats obtenus.»

Alors, prenons SARA, hein, parce que le ministre connaît bien -- on a donné des prix à SARA au niveau de la prévention du cancer du sein chez la femme dans le Bas-Saint-Laurent -- et c'est un service qu'on a voulu le plus décentralisé possible par territoires de MRC. Mais on doit... La coordination de ça, c'est l'agence de santé qui doit la faire et qui doit la regarder et dire, à un moment donné: Il y a des choses à ramener par rapport aux objectifs de prévention qu'on a.

Alors, moi, là, je suis d'accord avec vous -- puis j'arrête ici -- la décentralisation des pouvoirs... Puis on mêle tout ça. On a toujours mêlé, ça fait 30 ans que je regarde ça, moi, puis qu'on mêle. La déconcentration, c'est quand on prend quelque chose au ministère puis qu'on s'en va mettre ça à l'agence, puis l'agence, là, elle... c'est quoi? La décentralisation des pouvoirs, c'est la base, c'est en bas, c'est vers le bas, là où ça devrait être. Qu'avez-vous à dire de ça?

Le Président (M. Sklavounos): Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): Entre nous...

Mme Doyer: Puis on est... On veut toujours la faire. On veut toujours la faire, mais on a toujours peur de la faire. Puis c'est... Le mot clé -- puis, là, c'est vrai que j'arrête là -- c'est la confiance qu'on doit avoir envers les gens, les instances et les gens qui représentent les usagers.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Mme la députée de Matapédia. Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): Entre nous, le projet de loi n° 120, qui est à l'origine de toute cette déconcentration, était toujours en vigueur lorsque le PQ a pris le pouvoir, O.K.? Il n'y a pas eu de changement non plus, là. Je ne veux pas être... Malheureusement, je n'ai pas pu faire de représentation dans ce temps-là, je n'avais pas encore fini ma maîtrise, comprenez-vous? Mais, en toute honnêteté, je prétends... je soupçonne -- je n'ai pas cette expérience-là -- qu'il pourrait...

Je me rappelle M. Couillard, à qui j'avais dit en 2006: Donnez-nous une chance, puis «let's go», on donne... puis il avait dit: Écoute bien -- un peu comme M. Bolduc vient de me dire -- c'est moi, le ministre, c'est moi qui réponds puis c'est moi qui suis responsable, alors c'est moi qui aurai l'autorité. M. Bolduc ne m'a pas dit ça, M. Couillard m'avait dit ça. Puis c'était franc, c'était honnête, ça avait le mérite d'être franc. Alors, je soupçonne, je commence à soupçonner, rendu à un certain âge, qu'il y a peut-être des raisons qui font que ces vertus peuvent difficilement être appliquées dans le monde dans lequel on vit, qui est un monde d'abord politique. Et, moi, je prends note de ce que vous dites: si jamais, un jour, vous êtes au pouvoir, je comprends que ces modifications-là se feront.

Mme Doyer: J'ai toujours travaillé pour ça personnellement, mais on sait que les ministres ont de la misère à se départir de leurs pouvoirs, dans un premier temps, et ensuite ça descend la région, de quelque secteur que ce soit, hein? Puis on dit aux gens: Ah! on va faire la décentralisation. Puis, cinq, 10, 15 ans plus tard, d'un parti à l'autre... Il y en a qui ont fait mieux, il y en a qui ont fait mieux, la création des CLD, par exemple, les gens vont en convenir autour d'ici. La création des centres locaux de développement, c'est de dire aux gens: On va vous envoyer des enveloppes, hein? Puis, eux autres, ils l'ont mis à la MRC, mais, nous, on avait fait confiance aux gens, on avait dit: Les CLD avec un... pas seulement des élus, mais là il y a quand même une importante reddition de comptes par rapport à des budgets. Et c'est ça, la difficulté... Une minute?

Le Président (M. Sklavounos): Oui.

Mme Doyer: Alors, est-ce que ça va être possible un jour d'avoir la confiance suffisamment dans un gouvernement pour faire une réelle décentralisation, encore plus quand ça presse de le faire comme dans le domaine de la santé et des services sociaux?

M. Brunet (Paul G.): Je pense que c'est faisable...

Le Président (M. Sklavounos): ...Me Brunet, une minute.

M. Brunet (Paul G.): Pardon. C'est faisable, j'ai donné quelques exemples, je sais qu'il y en a d'autres, il y a d'autres gestes qui peuvent être posés. Mais, moi-même, comme gestionnaire, des fois, je suis confronté, hein, aux démons que sont ceux de la décentralisation de l'autorité. Et je vous avoue qu'à chaque fois que je l'ai essayé, même si j'avais peur -- mais c'est tout petit chez nous, on est juste 300 -- ça a marché, et j'ai eu beaucoup plus de succès et de valeur ajoutée. C'est ça qu'on veut de notre fonction publique, une valeur ajoutée. Pour ça, il faut prendre certains risques, et j'en propose certains ici.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Me Brunet. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chauveau et chef du deuxième groupe d'opposition.

**(16 h 40)**

M. Deltell: Merci beaucoup, M. le Président. Me Brunet, ça me fait plaisir de vous rencontrer. Écoutez, je ne serai pas différent des autres, je vais vous parler de décentralisation, je vais vous parler de reddition de comptes, je vais vous parler de structures lourdes au Québec, particulièrement dans le domaine de la santé.

Nous, on estime que celui qui a le meilleur contrôle, c'est... enfin, celui qui sait le mieux c'est quoi, les besoins à l'intérieur d'un établissement, c'est celui qui est dans l'établissement. Et c'est pour ça qu'on veut davantage de pouvoirs, davantage d'autonomie pour les établissements, les conseils d'établissement, pour qu'eux sachent c'est vers quoi on se dirige. Évidemment, ça prend des grandes lignes directrices qui viennent du ministère. Mais, dans le concret, comment ça se vit tous les jours, ça relève aux établissements. Et aussi il faut leur donner, donc, l'imputabilité et la reddition de comptes correspondant à ça.

Maintenant, de votre expérience, et elle est très vaste, j'aimerais vous entendre sur le fait qu'au Québec on a beaucoup de structures, on a beaucoup d'étages, on a beaucoup d'étapes entre le ministère et le patient. Je faisais état tout à l'heure de quelqu'un qui me parlait, il y a deux semaines, de 13 échelons entre le ministère et le patient. De votre expérience, à votre connaissance, est-ce que le projet de loi actuel va permettre une meilleure flexibilité? Et est-ce que vous estimez qu'au Québec, de façon générale, il y a beaucoup trop de structures actuellement, particulièrement dans le domaine de la santé, vous qui représentez les malades?

Le Président (M. Sklavounos): Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): Je ne suis pas un spécialiste de la gestion du réseau de la santé. Il y a des gens autour de M. le ministre qui sont beaucoup plus compétents que moi pour répondre à ça. Sauf que, dans la littérature, en matière de services à la personne, vous avez raison, il faut aller le plus possible donner l'autorité à celui ou celle qui donne le service à la personne, hein? C'est un service à la personne, les soins de santé.

L'autre règle, c'est qu'il faut qu'il y ait plus de monde qui touche à la personne, qui soigne le monde qu'il y en a qui ne leur touche pas ou ne les soigne pas. Ça fait que ça, une fois que tu as additionné les gestionnaires, les gens dans le bureau, puis les autres qui ne touchent pas aux patients... C'est notre prétention depuis longtemps -- mais je pense que les médias ont mal rapporté nos propos -- nous croyons qu'on pourrait faire un pas vers cette amélioration-là pour qu'il y ait plus de monde qui soigne, qui touche au monde qu'il y en a qui ne leur touche pas.

C'est un défi, hein, c'est un défi. Mais il y a des torsions en jeu, il y a toutes sortes de lobbies qui font qu'à un moment donné on grossit un appareil. Je pense qu'il y a encore de l'ouvrage qui peut être fait avec la bonne volonté du monde. Mais c'est difficile, parce qu'on a tous besoin de contrôle. Mais en même temps, si on rend les gens un petit peu plus imputables en déléguant plus d'autorité, peut-être que ces contrôles-là vont prendre moins de temps à se faire et peut-être aussi qu'on va éviter certains dédoublements.

Le Président (M. Sklavounos): Ça va, M. le député de Chauveau? Alors, sur ce, on n'a qu'à remercier Me Brunet, le président du conseil d'administration du Conseil pour la protection des malades. Merci beaucoup, pour votre... Ah! vous... Oui? Ça va?

Une voix: ...

Le Président (M. Sklavounos): Oui. Alors, je vais vous inviter à vous asseoir, il reste quelque temps, nous avons une question au niveau ministériel. Alors, il restait du temps, il restait du temps dans l'enveloppe ministérielle. Alors là, on fait la demande. Alors, on...

Une voix: ...

Le Président (M. Sklavounos): Oui. De toute façon, le temps restait. Alors, ça va.

Une voix: ...

Le Président (M. Sklavounos): Normalement, on prend tout le temps. Il restait du temps, alors on m'a fait la demande. Juste... Ça va? Alors, Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Merci, M. le Président. Merci. Merci à tous de me permettre ce petit temps là. Bonjour. On s'est vus, on s'est vus en d'autres lieux. Je pense qu'on s'est vus à Montréal, si je ne me trompe pas. Vous étiez venu nous voir pour le dossier Mourir dans la dignité et... Ah! c'était à Québec, donc ma collègue me rappelle que c'était à Québec qu'on s'était vus. Et, quand vous vous êtes présenté à l'avant tantôt, j'ai dit à ma collègue d'à côté: Ah! je me souviens, j'avais aimé son intervention, probablement pour la même raison que mes collègues, c'est-à-dire que vous allez droit au but puis vous ne «perlez» pas trop, ce qui est fort intéressant, mais ce qui fait aussi une très belle représentation des gens que vous représentez.

Vous avez touché un point qui, moi, me chatouille beaucoup parce qu'en d'autres temps, dans une ancienne vie, comme on aime dire, j'y ai été confrontée: la participation, la démocratie, la volonté de faire face à la reddition de comptes parce qu'on est supposé de représenter des gens, mais que malheureusement... Vous le disiez plus tôt, hein, où il y a de l'homme, il y a de l'hommerie, donc le pouvoir de décentralisation, mais aussi le pouvoir d'intervention puis de représentation, fait en sorte que des fois les gens viennent avec une bonne volonté, mais ils ne représentent qu'un faible taux de gens ou ne représentent qu'eux-mêmes. Moi, je l'ai vu dans d'autres lieux pour d'autres raisons. Mais j'ai eu le privilège, comme parent, de pratiquer une démocratie très peu connue, malheureusement, qui est la démocratie scolaire.

Comment je fais pour susciter chez mon citoyen... Puis, quand on parle des quatre représentants de la population que vous êtes prêt à sacrifier, là, je me dis: Il y a probablement, dans ces gens-là, des gens qui peuvent venir de votre monde. On n'est pas obligé d'avoir un titre pour appliquer, hein? On a juste à être sollicité par un D.G., si j'ai bien compris, ou sollicité par un groupe qui veut qu'on soit représenté. Et j'ai compris, depuis le début de votre intervention, que vous n'êtes pas un spécialiste dans cette notion-là. Par contre, vous avez un regard sur la participation de gens qui ont des intérêts mais de gens différents, qui sont là pour se battre parce qu'ils reçoivent un service et parce qu'ils veulent l'améliorer. Comment je fais, dans la population, pour améliorer ce regard-là sur la démocratie quand ma seule perspective d'avenir en ce moment, c'est le faible taux de participation, ça fait qu'on va me retirer cette démocratie-là?

Le Président (M. Sklavounos): Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): Madame, je peux vous dire qu'il y a des personnes au sein du conseil d'administration du conseil qui sont des présidentes ou membres de comités d'usagers qui siègent aux conseils d'administration d'agences, ou de CSSS, ou même d'établissements et qui font un très beau travail. J'aurais le goût de vous dire -- et encore une fois c'est peut-être une hypothèse, mais c'est quand même des témoignages que j'entends -- que, si on améliore la délégation d'autorité, peut-être que ça va être encore plus intéressant de participer aux décisions de ces organismes-là, de ces corps-là et peut-être que le reste va suivre. Parce que, présentement, on a l'impression que beaucoup de gens se sentent peu utiles dans certains conseils d'administration. Alors, il y a tout ça aussi, il y a ce travail à faire de ce côté-là qui, à mon avis, pourrait aider si d'aventure on décide de donner plus d'autorité aux conseils d'administration.

Mme Charbonneau: Je suis inquiète de ce que vous me dites. Je vous explique pourquoi. Vous me dites que, si on donnait plus de responsabilités, il y aurait plus de participation. Par contre, de notre côté, on vous dit: Vu qu'il n'y a pas beaucoup de participation, on se demande pourquoi qu'on tiendrait ce principe-là. Et, moi, j'ai déjà entendu, dans d'autres lieux, que le fait d'avoir un principe d'imputabilité, ça ne me donne pas le goût de participer, parce que j'ai le goût de donner mon opinion, mais je ne veux pas me faire taper dessus par le D.G. de la santé, ou par un autre membre du conseil, ou, je vais aller un peu plus loin, quelqu'un qui est dans l'auditoire...

Le Président (M. Sklavounos): 45 secondes, Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: ...qui écoute, puis qui est peut-être syndiqué, puis qui n'aime pas mon propos. Comment je fais?

M. Brunet (Paul G.): C'est un peu...

Le Président (M. Sklavounos): Me Brunet.

M. Brunet (Paul G.): C'est un peu l'oeuf et la poule, mais j'ai l'impression que, si on munissait véritablement les conseils d'administration d'une réelle autorité, peut-être que les gens vraiment intéressés et qui sont prêts à répondre du vote et de la décision qu'ils prendraient se joindraient à ces conseils d'administration là. Mais, je l'ai dit tantôt, il y a un sérieux problème de prise en charge, littéralement, des sièges qui sont élus, et ça... C'est pour ça que je... Mettons que ce n'est pas mon meilleur argument, là, que je voulais soumettre aujourd'hui ici.

Le Président (M. Sklavounos): Alors, merci. Merci, Me Brunet. Merci, Mme la députée de Mille-Îles. Alors, nous remercions le président du conseil d'administration du Conseil pour la protection de malades, M. Brunet, pour sa présentation et ces réponses. Et j'invite maintenant les membres de l'Office des personnes handicapées du Québec à prendre place.

Et je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 48)

(Reprise à 16 h 52)

Le Président (M. Sklavounos): Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Office des personnes handicapées du Québec, Mme Anne Hébert, Mme Anne Bourassa, M. Maxime Bélanger. Je vais vous inviter à vous identifier, et par la suite vous avez la parole pour 10 minutes avant la période des échanges.

Office des personnes handicapées
du Québec (OPHQ)

Mme Hébert (Anne): Merci. Donc, je suis Anne Hébert, directrice générale adjointe. Je voudrais souligner que c'est Mme Céline Giroux, qui est notre directrice générale, qui est actuellement au Manitoba pour faire des représentations dans des discussions entre les provinces, les questions des personnes handicapées, qui m'a demandé de la remplacer. Je suis accompagnée par Mme Anne Bourassa, qui est directrice de l'intervention nationale, et M. Maxime Bélanger, qui est conseiller en intervention nationale, qui a rédigé le texte de présentation.

On vient de vous déposer un texte de notre présentation. Malheureusement, on n'a pas pu le faire avant que vous déposiez un document. Ce document-là a fait, bien entendu, l'objet d'échange avec notre conseil d'administration, qui est composé de personnes handicapées, de proches, de parents de personnes handicapées ou de personnes qui les représentent. Donc, ça exprime, notre texte de présentation, les préoccupations de notre conseil d'administration.

L'Office des personnes handicapées du Québec vient ici un peu avec une certaine humilité parce qu'on n'est pas des spécialistes de la gouvernance. J'entendais les débats tout à l'heure, je veux dire, ouf! On va essayer de se centrer sur certaines préoccupations très précises.

Si je résume notre préoccupation, c'est la préoccupation de favoriser la loi sur... de veiller à l'application de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, c'est la mission de l'office. Et, dans cette loi, il y a une orientation qui est précisée à l'article 1.2 de la loi, que je vais vous lire, qui interpelle... qui dit: «Dans l'application des mesures prévues [à] la présente loi, les orientations suivantes guident l'office, les ministères et leurs réseaux, les municipalités[,] organismes publics [et] privés.» Et on dit, comme orientation, que leurs actions, des ministères et des réseaux, doivent «favoriser l'autonomie des personnes handicapées et leur participation à la prise de décisions individuelles ou collectives les concernant ainsi qu'à la gestion des services qui leur sont offerts». Donc, c'est vraiment, je dirais, dans cette perspective -- je la résume comme ça -- qu'on vient s'adresser à vous aujourd'hui, vous faire part des préoccupations de notre conseil d'administration.

Donc, cette orientation est enchâssée dans la loi, dans la Loi assurant l'exercice des droits, mais elle a également été répétée dans la politique À part entière, qui a été adoptée par le gouvernement en juin 2009, politique qui a pour but d'accroître la participation associée à des personnes handicapées sur un horizon de 10 ans.

On a deux principales préoccupations dont on veut vous faire part aujourd'hui, bon, la place des citoyens, de l'usager dans le réseau, également la question du régime des plaintes, qui n'est pas un sujet abordé dans la révision mais qu'on veut quand même aborder sous l'angle de l'impact possible sur la qualité des services.

En ce qui concerne la place du citoyen, de l'usager dans le réseau de la santé et services sociaux, on remarque que le projet de loi est très axé sur une gestion de gouvernance plus efficiente du réseau. Pour nous, à l'office, c'est important que cette recherche d'efficience demeure fortement associée à la participation des personnes utilisatrices et des citoyens à la définition, à l'organisation et à la gestion du système. Et on s'inquiète du recul que certains articles pourraient amener de ce point de vue là.

Donc, c'est pourquoi que l'office recommande que la loi vienne confirmer ou renforcer la place actuellement accordée aux citoyens et aux usagers au sein des conseils d'administration des établissements afin de garantir leur droit de parole et de leur participation aux décisions qui les concernent.

On a trouvé particulièrement intéressant, dans le projet de loi, l'ajout d'une disposition qui vise à assurer un ratio égal d'hommes et de femmes au sein des conseils d'administration.

Puis on a noté également qu'il y avait une préoccupation inscrite sur la représentativité des groupes ethnoculturels. On se questionne toutefois pourquoi cette préoccupation-là n'est pas transposée aux personnes handicapées et à leurs familles pour refléter adéquatement la diversité de la population qui est desservie par les établissements et le réseau. Les personnes handicapées sont particulièrement interpellées sur les enjeux de santé et services sociaux. On se demande pourquoi cette diversité-là n'est pas prise en compte. Au Québec, actuellement, dans les données les plus récentes, le Québec compte plus de 750 000 personnes handicapées, soit 10 % de la population au total. Et on trouve ça dommage que cette préoccupation-là de la diversité de la population ne soit pas prise en compte en ce qui concerne les personnes handicapées.

Donc, particulièrement, qu'est-ce qu'on souhaiterait, que la composition des conseils d'administration soit à l'image d'une société qui se veut plus inclusive, c'est-à-dire qui tienne compte de la diversité de tous les citoyens qui y participent. Et on souhaiterait vraiment que la participation, la représentativité des personnes handicapées et de leurs familles soit une voie à privilégier pour une meilleure prise en compte des besoins de l'ensemble de la population. Donc, on trouve vraiment... on recommande que la loi prévoie une disposition qui permette d'assurer une représentativité effective des personnes handicapées et de leurs familles au sein des conseils d'administration des établissements, mais surtout que cette représentativité soit exigée pour ceux qui exploitent un centre de réadaptation en déficience physique, un centre de réadaptation en déficience intellectuelle ou en trouble envahissant du développement ou bien qui desservent une clientèle ayant des troubles graves de santé mentale. Pour nous, c'est absolument important.

Maintenant, en ce qui concerne les modes de participation de la population à la gestion du réseau de la santé et des services sociaux, on est aussi préoccupés du fait qu'il n'y a pas de mécanisme très précis qui soit formulé dans le projet de loi, mécanisme très précis de consultation et de participation de la population. On laisse le soin à chacune des agences de prévoir des tels mécanismes ou modalités.

On recommande que soient prévus, dans la loi, des mécanismes formels pour favoriser la participation de la population, dont les personnes handicapées et de leurs familles ou des organismes qui les représentent, à l'élaboration du plan stratégique pluriannuel de l'établissement, du projet clinique et organisationnel du réseau local des services, et du plan stratégique de l'agence, ainsi qu'à l'égard des autres enjeux liés à la santé et au bien-être de la population qui sont propres à leur région ou à leur territoire. On trouverait ça dommage que ce genre de consultation là cesse dans les... Actuellement, dans les projets cliniques, il y a eu beaucoup de participation de personnes handicapées dans certaines régions, puis on souhaiterait que ça se maintienne puis que ça soit vrai dans toutes les régions du Québec.

Bien sûr, liée à la question de la participation, il y a toute la question de l'accès à l'information. Quand on parle des personnes handicapées et de leurs familles, cette question de l'accès à l'information pour pouvoir participer est cruciale, ça veut dire qu'on tienne en compte des modalités très précises, pour ces personnes-là, d'avoir accès à l'information. Et il faut que l'information soit vraiment accessible pour eux.

**(17 heures)**

Et on rappelle que le réseau de la... les agences en particulier sont soumises à la politique gouvernementale sur l'accès aux services et aux documents. Et on souhaiterait que la loi précise davantage quand on dit «média accessible à l'ensemble de la population», notamment le site Internet, qu'on s'assure que tous les moyens sont pris pour que l'information qui est rendue disponible à la population... que les moyens d'accommodement soient pris pour les personnes handicapées. Même un site Internet, s'il ne respecte pas les standards d'accessibilité, ça ne permet pas aux personnes handicapées d'accéder à l'information. Et, si on veut favoriser, soutenir leur participation et leurs commentaires sur des éléments comme le plan stratégique ou le rapport annuel de gestion, il faut que ces documents-là soient accessibles. Et là ça veut dire des accommodements pour des personnes qui ont, par exemple, des problèmes de vision, avoir accès en gros caractères ou en braille, et dans certains cas la présence d'interprètes lors de réunions.

Nous, par exemple, dans notre conseil d'administration, on rend disponibles tous nos documents en mode audio pour des personnes qui sont membres de notre conseil d'administration et également on les diffuse en gros caractères. Puis on a, au besoin, des interprètes lors des séances du conseil d'administration. Donc, l'accès à l'information est extrêmement important.

Je rappelle aussi que dans la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées il y a un article, c'est l'article 61.3, qui prévoit que les agences préparent annuellement un plan d'action à l'égard des personnes handicapées, et ce plan d'action doit identifier les obstacles et les mesures pour réduire les obstacles. C'est un mécanisme intéressant à utiliser pour favoriser la participation, puis ça pourrait être intéressant qu'un membre d'un conseil d'administration d'établissement suive de près l'élaboration de ce plan d'action là puis en rende compte. Donc, ça permettrait au conseil d'administration de s'approprier des préoccupations particulières aux personnes handicapées.

Comme il me reste très peu de temps, je vais passer très rapidement sur les questions... régime des plaintes, juste pour vous dire que l'office offre un service de soutien individuel aux personnes qui font des démarches pour obtenir des services, et on accompagne les personnes handicapées dans leurs démarches dans le réseau santé et services sociaux, puis ça compte pour 20 % de nos interventions sur 13 000 interventions, à peu près, annuelles. Et l'office essaie beaucoup de travailler en consultation-concertation, mais on est obligés parfois de faire affaire au régime des plaintes et on se bute aux mêmes difficultés qui ont été...

Le Président (M. Sklavounos): En conclusion, Mme la Hébert, s'il vous plaît.

Mme Hébert (Anne): ...qui nous ont déjà été signalées par le Protecteur du citoyen.

Le Président (M. Sklavounos): En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Hébert (Anne): Pardon?

Le Président (M. Sklavounos): En conclusion, s'il vous plaît. Alors, si vous voulez arriver à votre conclusion, puis on va couvrir les autres points...

Mme Hébert (Anne): En conclusion? Donc, peut-être vous dire que notre préoccupation principale, celle de notre conseil d'administration, est la question de la participation des usagers au réseau, leur participation aux conseils d'administration puis à des mécanismes de consultation sur les grands éléments, comme les plans stratégiques et les projets cliniques.

Le Président (M. Sklavounos): Merci. Merci, Mme Hébert. Alors, nous allons tout de suite à M. le ministre pour la période des échanges. Vous pouvez compléter vos points, Mme Hébert, durant la période des échanges.

M. Bolduc: Félicitations pour tout le travail que vous faites, parce que vous représentez quand même un groupe, dans notre société, qui a besoin de défendre ses droits, et puis ce n'est pas toujours les premiers usagers qu'on consulte, puis c'est important de ramener ça à la base.

Vous n'avez pas eu beaucoup de temps pour le traitement des plaintes, ça fait que je vais vous donner la chance de... J'ai un très, très grand intérêt là-dedans. J'aimerais ça savoir qu'est-ce que vous vous voudriez que l'on fasse pour améliorer le traitement des plaintes. Et puis vous parlez peut-être de se servir de ce projet de loi, puis il y a peut-être des choses qu'on peut faire en même temps, si c'était pertinent.

Le Président (M. Sklavounos): Mme Hébert.

Mme Hébert (Anne): Bon, il y a trois grands niveaux de problèmes sur lesquels on est confrontés, à l'office, là, par rapport au régime de plaintes, trois grands éléments qui ont été repris dans certains rapports, là, du Protecteur du citoyen puis du Commissaire en santé et bien-être. Essentiellement, c'est toute la question de l'information aux usagers. Ces mécanismes-là sont très peu connus, particulièrement chez les personnes handicapées. Donc, mieux faire connaître les recours qui existent. Puis ça, ça veut dire aussi, dans cette information-là, avoir un souci de comment rejoindre ces personnes-là, qui n'ont pas nécessairement accès directement à l'écrit, donc se soucier d'avoir une stratégie de communication appropriée à ces personnes-là, qui sont souvent isolées aussi. Donc, ça, c'est un premier niveau de difficulté.

Le deuxième, c'est aussi concernant le suivi des recommandations. Il y a certaines difficultés lorsqu'il y a des recommandations qui sont faites par les instances. Il n'y a pas nécessairement un suivi... est-ce qu'on donne suite aux recommandations.

Et il y a également la question du délai de traitement, qui est très variable d'une région à l'autre. Essentiellement, là, très rapidement, je vous dirais que c'est ces éléments-là.

Donc, nous, ce qu'on voulait vous dire, c'est: Même si ce n'est pas l'objet, peut-être profiter de l'occasion pour voir ce qui pourrait être fait pour améliorer, parce que ça a un impact direct sur la qualité des services.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Juste pour vous dire, pour ça, je pense que la loi est bien faite. Entre autres au niveau du délai du traitement, là, c'est quand même... c'est 60 jours et... Mais il faut voir, là, que, s'il y a des établissements, des fois, qui prennent plus de temps, ça dépend de la mécanique. On a des mécanismes de surveillance, puis c'est un pourcentage qui sont à l'intérieur du délai. Mais ça, je suis d'accord avec vous, plus vite on traite les plaintes et plus vite on est capable aussi de faire les interventions.

Pour ce qu'il s'agit de suivi des recommandations, bien on assume, quand on a fait... Vous savez, la loi, c'est un cadre général dans lequel on s'attend que les gens par la suite ils prennent leurs responsabilités, ils sont imputables, ils font un suivi de recommandation. Puis, entre autres, un des mécanismes qu'on a, c'est qu'il y a rapport au conseil d'administration à chaque année au niveau des plaintes. Donc, il a déjà été prévu. Puis il y a également des mécanismes d'appel à ces niveaux-là. Donc, il y a déjà des choses qui sont prévues dans la loi, mais, si jamais vous avez des points particuliers, vous pouvez peut-être nous le laisser savoir, puis on les regarderait, parce que c'est un élément que, quand on peut bonifier, on le regarde. Puis ce que vous me dites là, c'est plus dans la mécanique que dans la modification de la loi.

Mme Hébert (Anne): ...que l'office avait...

Le Président (M. Sklavounos): Mme Hébert.

Mme Hébert (Anne): Pardon. L'office avait accueilli très favorablement les modifications qu'il y avait eu antérieurement. Mais on voit dans la réalité, quand les personnes s'adressent à l'office, on voit qu'il y a encore de la... C'est comme si la mécanique n'était pas assez bien rodée, puis là on est obligés, nous... On essaie d'éviter d'utiliser ces mécanismes-là, mais on est obligés de le faire, puis ça amène certaines difficultés, là. Puis il faut bien... on doit être présents dans l'accompagnement des personnes dans ce processus-là, encore, parce que ce n'est pas encore bien rodé. Mais on pourrait vous faire effectivement part de certains cas précis ou de problèmes plus précis.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Oui, puis j'apprécierais. La question du site Internet, je pense qu'il va falloir se trouver, encore là, une mécanique. C'est parce que la loi ne peut pas tout prévoir, puis, quand on va... là, si je vais trop dans le détail, on va m'accuser de centralisation et puis d'être trop contrôlant. Ça fait que ce qu'on a fait, c'est qu'on a gardé ça assez général. Puis je pense qu'en 2011 c'est important que chaque établissement ait un site Internet et qu'il doit être adapté également à la situation de leurs usagers. Et je comprends que, toutes les fédérations des usagers avec des handicaps, déficience intellectuelle, les gens qui sont sourds, les gens qui sont aveugles, il faut qu'on leur donne des mécaniques puis des mécanismes pour qu'ils puissent avoir accès à l'information au même titre que tout le reste de la population. Ça, je suis très réceptif à ça. Sauf qu'on ne voulait pas aller dans le détail parce que, quand tu dis pour l'un... tu dis pour l'autre... Mais ce qu'on voulait surtout, c'est de dire aux établissements: C'est bien, bien important d'avoir le site Internet. Dans ce qu'il s'agit de l'applicabilité, bien ça, encore là, on va laisser ça à chaque établissement dans un principe de responsabilisation.

Le Président (M. Sklavounos): Mme Hébert.

Mme Hébert (Anne): Oui. C'est juste l'utilisation du terme «accessible». Quand on lit avec l'angle des personnes handicapées, «accessible», je veux dire, c'est réellement accessible avec les moyens. Donc, on voulait juste porter attention vraiment que ça soit interprété de cette manière-là. Il existe des mécanismes, comme la politique d'accès aux documents et services, mais là encore c'est une question d'application, et on attend avec impatience l'adoption de standards Web, des standards gouvernementaux qui vont obliger les ministères et organismes, et peut-être une partie de leurs réseaux, à appliquer ces standards d'accessibilité. Donc, les futurs sites Web seraient vraiment accessibles aux personnes handicapées.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Oui, puis c'est ce qu'on cherche. Assurément, c'est notre intention, c'est celle-là.

L'autre question, c'est la question de la représentativité, c'est-à-dire est-ce qu'on devrait avoir des postes dédiés. On n'a pas voulu embarquer encore là-dedans. La raison est très simple. Il y a vraiment une volonté, et tous les gens qui sont des experts en gouvernance nous disent: Il faut que votre conseil d'administration ne soit pas plus que 15 personnes. Et là ce qui... Puis là, si on arrive puis on se met des restrictions... Moi, ce que je vois, c'est que généralement, lorsque c'est des associations comme des personnes handicapées, déficiences intellectuelles, ça va être soit un représentant qui peut être là ou encore ça peut être un représentant de ces gens-là au niveau des usagers. Et on a gardé ça, encore là, général.

Puis, quand on arrive dans les autres établissements, si on avait mis un poste particulier, bien là, ça augmentait nos conseils d'administration, puis on veut vraiment s'en tenir à un nombre assez restreint. Mais je comprends que, quand on va arriver dans les représentativités de nos établissements avec des déficiences, ça va être des gens qui vont être responsables de ça, puis je vois très bien qu'un usager en déficience puisse siéger, et puis ça... Mais par contre ça appartient à l'établissement de faire sa mécanique, encore là, pour s'assurer que ce soit représentatif de leurs usagers à eux autres. Je ne sais pas si ça peut satisfaire...

Le Président (M. Sklavounos): Mme Hébert.

Mme Hébert (Anne): Pour l'office puis son conseil d'administration, la présence, la représentation des personnes qui ont un certain type d'incapacité, surtout pour les établissements, là, les centres de réadaptation, c'est vraiment essentiel. C'est un incontournable. Il ne faudrait pas, s'il y a trop de marge de manoeuvre laissée sur ça, se retrouver dans des situations où par exemple un établissement n'aurait pas de représentant, alors que sa mission même, c'est d'offrir des services aux personnes handicapées. Donc, ça, c'est vraiment, comme je dirais, une demande assez forte de l'office que ce soit précisé.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

**(17 h 10)**

M. Bolduc: Moi, je vous dirais, je ne le mettrais pas dans loi parce que ça devient très difficile à baliser. Mais je comprends que les associations... l'office va faire des interventions pour s'assurer qu'il y a une représentativité selon le profil des compétences. Quand on arrive au profil des compétences...

Puis je vais vous donner un exemple. On a le représentant des usagers, mais je verrais très bien que, comme ministre, pour un institut qui serait responsable des personnes sourdes, que ce soit moi qui nomme. Ça peut être... Pas besoin d'être un représentant des usagers. Mais, moi, je vais m'assurer que la clientèle est bien représentée puis, dans les profils de compétence, c'est cet élément-là qu'on puisse surveiller. Je pense que c'est là qu'on va se rejoindre.

Mais je ne pourrais pas aller dans le petit détail, parce qu'on a quand même eu cette précaution, en visant la décentralisation, ne pas leur dire non plus chacun des petits détails qu'ils vont faire. Puis, vous savez, mon dilemme à moi, comme ministre, là, c'est qu'il y en a beaucoup qui me disent: Bien, tu n'as pas donné le détail. Tu devrais le donner. Puis, la journée que je le donne, on me dit que je suis trop contrôlant. Ça fait qu'il faut que je trouve l'équilibre là-dedans. Puis je pense que le projet de loi, il a un bel équilibre à ce niveau-là. Il y a des éléments qu'on a besoin. Il y a d'autres éléments, il faut vraiment laisser l'établissement se gérer lui-même.

Le Président (M. Sklavounos): Il y a d'autres éléments de réponse avant que je retourne la parole... Alors, je cède la parole à Mme la députée de Hull.

Mme Gaudreault: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue à vous. Vous représentez un pourcentage important de nos commettants, parce qu'on est ici à titre de membres de ce Parlement, et puis justement la semaine dernière des représentants de l'Association de l'ouïe de l'Outaouais sont venus me voir pour me sensibiliser justement aux grandes difficultés d'accès à un interprète. C'est de plus en plus difficile. Puis, lorsqu'ils nous mettent dans certaines situations, c'est vraiment aberrant, lorsqu'on se met dans la peau d'une personne qui a des difficultés à cet égard.

Mais, je voudrais savoir, puisque, vous, votre mandat, c'est de représenter ces gens-là, de sensibiliser les services gouvernementaux et vraiment d'être un porte-parole officiel, j'imagine que vous devez avoir une mission aussi de sensibiliser les établissements de santé. Est-ce que vous avez des personnes qui vous demandent des services précis dans le but justement d'agir à titre de membre d'un conseil d'administration d'un établissement? Est-ce que, vous, vous les guidez, vous les formez? Parce que c'est une difficulté supplémentaire, pour la personne, de pouvoir obtenir les services auxquels elle a droit dans une optique de participer à un conseil d'administration.

Mme Hébert (Anne): En fait...

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Mme la députée de Hull. Mme Hébert, allez-y.

Mme Hébert (Anne): Pardon.

Le Président (M. Sklavounos): Il n'y a pas de problème. Pas de problème.

Mme Hébert (Anne): En fait, ce qu'on a fait dans les dernières années, c'est qu'on a donné des subventions pour aider certaines associations à former leurs membres pour être capables de participer à différents conseils d'administration et on a soutenu plusieurs associations dans ce sens-là, pour préparer une relève mais surtout dans une perspective... Je pense que les personnes handicapées ont un très fort taux de participation dans leurs associations, mais là il y a vraiment une volonté d'aller vers plus une approche inclusive, c'est-à-dire qu'ils soient dans des lieux qui ne sont pas réservés aux personnes handicapées, partout ailleurs. Donc, c'est dans cette approche-là d'offrir une formation de base pour que les personnes soient intéressées et manifestent leur intérêt dans ce type de représentation là.

Il y a encore beaucoup de travail de sensibilisation et de formation à faire. Ça demeure encore dans nos préoccupations de sensibilisation de le faire. Et, comme vous le disiez, une des grandes difficultés, c'est qu'il y a beaucoup de freins à la participation juste sur les questions d'accommodement raisonnable, d'accès à l'information, et on en a fait, à l'office, une priorité, d'essayer de faire de plus grandes... de sensibilisation puis de voir à une application réelle de la politique d'accès aux documents et services. Puis tout ça, ça va aider à la participation. C'est comme un peu une condition de départ pour ces personnes-là, qu'ils n'aient pas à se battre pour avoir des interprètes et avoir accès aux documents. Puis, si ça devient une bataille, ça réduit beaucoup leur participation à des instances décisionnelles, même à des mécanismes de consultation sur des documents, soit en commission parlementaire, s'ils n'ont pas accès, comme les autres citoyens, à l'information de base.

Le Président (M. Sklavounos): Est-ce que ça va, du côté ministériel? Ça va? Oui? Alors, maintenant, je vais céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe, qui est également, de ce que j'ai compris... Est-ce que... Oui? M. le député de Saint-Hyacinthe, qui est également le porte-parole de l'opposition officielle en matière de déficience physique. Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe, vous avez la parole.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Alors, je tiens à souhaiter... Merci, M. le Président. Je tiens à souhaiter la bienvenue à Mme Hébert, Mme Bourassa, M. Bélanger. Alors, en tant que porte-parole, j'ai fait aussi la tournée de plusieurs organismes puis qui sont très, très intéressés par les personnes handicapées au Québec. Et je me rends compte de la politique À part entière, qui a été votée en 2009, qui a été adoptée et que vous avez la responsabilité d'appliquer. C'est l'exercice des droits des personnes en vue de leur intégration scolaire, professionnelle, sociale et intégration en emploi aussi. Et je me demandais, à partir de l'expérience que vous avez ou des connaissances du...

Vous venez de déposer un... Je n'ai pas beaucoup de... Au niveau du maintien à domicile comme tel, je n'ai pas eu beaucoup de rapports, là, comme tel, vous n'en parlez pas beaucoup là-dedans, mais je n'ai pas eu le temps de lire tout au complet. Mais j'aimerais ça vous entendre quand même. En quoi le projet de loi n° 127 actuel qu'on étudie, dans vos commentaires, en quoi ça va aider ou favoriser davantage, on peut dire, le plan de mise en oeuvre qui a été pondu suite à la politique À part entière, qui comprend à peu près 420 objectifs bien précis? Et en quoi cette nouvelle loi n° 127 va faire en sorte qu'on va pouvoir plus facilement, pour les personnes handicapées, atteindre les objectifs et sur le terrain, au niveau du terrain comme tel? Parce qu'actuellement les organismes que je rencontre se plaignent beaucoup que, oui, il y a beaucoup d'écrits, il y a beaucoup d'objectifs, beaucoup d'engagements, mais que sur le terrain ce n'est pas nécessairement ce qui se passe. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, par rapport au nouveau projet de loi qui est déposé.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Mme Hébert.

Mme Hébert (Anne): C'est un peu... C'est une question un petit peu difficile à répondre sans beaucoup de nuances, mais je dirais que ce qui peut aider, c'est toute la question de responsabilisation puis d'appropriation. Ce qu'il y a dans le plan global de mise en oeuvre et dans la politique, ce sont des priorités générales, et il appartient à chaque agence et établissement de se faire un plan de travail pour une concrétisation de tout ça. Donc, on est un peu partagés entre donner la marge de manoeuvre pour que les établissements puis les agences avec des objectifs nationaux trouvent les modalités pour que ça se concrétise, mais on souhaite vraiment, en même temps, qu'il y ait des, je dirais, des cibles nationales très claires qui soient acceptées.

Mais les modalités peuvent varier d'une région à l'autre ou d'un établissement à l'autre pour atteindre ces cibles-là. Par exemple, les services à domicile, dans la politique, c'est très important, et il faut qu'il y ait une aide, parce que la situation est assez difficile. Il y a beaucoup d'efforts à faire pour améliorer l'offre de service, actuellement. Donc, il faut qu'il y ait des objectifs très précis pour améliorer les services. Mais les modalités... Le déploiement en région peut varier, mais la préoccupation de l'office, dans le cadre de la politique, c'est l'atteinte des résultats, c'est qu'il y ait une amélioration sensible.

Donc, si je traduis ça en termes de gouvernance, l'office ne dit pas, dans son mémoire, des choses très précises qu'il devrait y avoir des modalités semblables de gouvernance partout, mais on souhaite vraiment qu'il y ait par contre une appropriation des objectifs de résultats puis que les modalités varient d'une région à l'autre. C'est un...

On en est un peu là dans notre réflexion parce que les... Vous parlez des objectifs au plan global de mise en oeuvre de la politique, qui ont été faits par les instances nationales. Après, c'est comment ça se traduit aux plans régional et local qu'il faut essayer de voir. Et l'office fait également un travail au plan régional pour soutenir les établissements et les agences dans l'appropriation de ces objectifs nationaux.

Le Président (M. Sklavounos): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Merci.

Le Président (M. Sklavounos): Oui, ça va?

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Oui.

Le Président (M. Sklavounos): Alors, Mme la députée de Matapédia.

**(17 h 20)**

Mme Doyer: Oui. Moi, M. le Président, je ne vois rien, dans le projet de loi n° 127, qui concerne votre préoccupation dont vous nous faites part à la page 8. Quand on regarde l'encadré, là, ce qu'il y a à l'intérieur de l'encadré, on dit: «L'office recommande que la loi prévoie une disposition permettant d'assurer une représentativité effective des personnes handicapées et de leur famille au sein des C.A. des établissements et que cette représentativité soit notamment exigée pour ceux qui exploitent un centre de réadaptation en déficience physique, un centre de réadaptation en déficience intellectuelle -- puis on sait les changements qui se passent au niveau des CRDI et des CSSS -- ou en troubles envahissants du développement ou bien qui desservent une clientèle ayant des troubles graves de santé mentale.» Dans la vraie vie, comment ça s'articule?

Puis là le ministre, il m'a inquiétée tantôt, M. le Président, parce qu'il dit: Bien là, quand on n'en met pas trop, c'est correct puis, quand on en met trop, c'est épeurant. Ça fait que, moi, j'aime autant en mettre, des éléments, dans un projet de loi puis savoir que ça finit par atterrir à quelque part. Comment ça doit atterrir par rapport à des clientèles en santé mentale, par exemple? Parce qu'il y a des C.A. au niveau des hôpitaux psychiatriques, par exemple, Robert-Giffard, Hôpital Douglas, il y a les CRDI.

Il y a des listes d'attente actuellement au niveau des gens qui ont des enfants, hein, qui ont des troubles envahissants du développement. On a des cibles. Et, M. le Président, je suis sûre que le ministre comme moi, on veut abaisser les listes d'attente des enfants qui sont... Les parents veulent des diagnostics. Vous, vous êtes les représentants... bien, en tout cas, vous avez dans votre mission de défendre ces personnes-là. Mais, s'ils ne sont pas membres des C.A. suffisamment, s'ils ne sont pas suffisamment présents, qui va parler au nom d'eux? Et, moi, là, M. le Président, j'aimerais bien mieux qu'il y ait quelque chose dans le sens de ce que vous nous amenez, là, à quelque part. Parce que la santé mentale, c'est partout, c'est dans tous les CSSS, hein, par territoire de MRC. Il y a des services, le ministre va en convenir, les gens ici vont en convenir.

Comment vous, là -- j'arrête là -- comment vous verriez que ça s'articulerait, là, votre affaire? Parce que, prenons juste un exemple, la santé mentale, il y a le CHRR, à Rimouski, qui a la psychiatrie courte durée et... Comment ça s'articule, la région, des spécialités, et que ça atterrit, là, par territoire de MRC?

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Mme la députée de Matapédia. Est-ce que c'est Mme Hébert qui va la prendre...

Mme Hébert (Anne): Je vais tenter une réponse, puis après je vais me faire aider de...

Mme Doyer: Tentez, tentez.

Le Président (M. Sklavounos): Parfait, allez-y.

Mme Hébert (Anne): ...mes collègues. C'est sûr que dans le sens de notre recommandation on souhaitait vraiment que dans les établissements qui ont une vocation spécifique pour les services aux personnes handicapées, qu'il y ait une représentativité. On dit, dans le texte, que... on déplore le fait que la réduction du nombre de postes, bien ça rend ça plus difficile. Mais en même temps, comme je vous dis, on n'est pas des spécialistes de la gouvernance, là, en termes du nombre. Mais c'est sûr que ça nous inquiète, et notre conseil d'administration, qui est formé de personnes handicapées ou de proches, ça a été leur première réaction à la lecture du projet de loi. Ça les inquiète, parce que certains d'entre eux siègent sur des conseils d'administration d'établissement, et souvent c'est là qu'ils ont acquis leur expérience de participation, puis c'est ça qui leur donne le goût de participer à d'autres mécanismes qui ne sont pas spécifiques aux personnes handicapées. C'est vraiment un lieu, je dirais, d'apprentissage, de formation extrêmement intéressant pour ces personnes-là, pour penser à d'autres formes de participation.

Donc, on ne s'est pas prononcés nécessairement sur le comment, mais c'est sûr que le... il y a un enjeu peut-être autour du nombre, qu'on dit, là, dans le texte.

Mme Doyer: ...parce que moins il y en a...

Le Président (M. Sklavounos): Alors...

Mme Doyer: ...moins il y a de chances d'avoir ces personnes-là.

Le Président (M. Sklavounos): Juste avant de vous... est-ce qu'il y a un complément de réponse de la part de monsieur? J'ai cru comprendre que Mme Hébert a dit que M. Bélanger compléterait.

M. Bélanger (Maxime): Oui, mais en fait c'est pour faire le parallèle aussi avec ce qui était amené au niveau des dispositions qui portent, par exemple, sur... On prévoit déjà une disposition pour les centres jeunesse, entre autres, où on doit avoir un membre du conseil d'administration qui est âgé de moins de 35 ans, donc je pense que c'est pour mieux refléter aussi la jeunesse qui est desservie par les centres jeunesse.

Également, on prévoit que les membres indépendants qui vont être cooptés... on voit déjà qu'il y a un souci au niveau de la composition socioculturelle, ethnoculturelle, linguistique que l'établissement dessert, donc on se dit qu'en même temps pourquoi pas prendre en compte les personnes handicapées et leurs familles, notamment pour les centres de réadaptation. Donc, le souci est déjà apporté auprès du ratio des hommes et des femmes également, pourquoi ne pas le mettre au niveau des personnes handicapées. Donc, c'est plus dans ce sens-là...

Mme Doyer: En tout cas...

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. Bélanger. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Il me reste-tu du temps un peu?

Le Président (M. Sklavounos): Il vous reste encore cinq minutes.

Mme Doyer: Ah! parfait. Parce que ça, je trouve qu'il faut qu'on creuse ça. Bon. Parce que, moi, je trouve qu'il faut qu'on creuse ça, parce qu'il y a... on nous demande, M. le Président, et les gens vont être d'accord, et j'espère que vous allez être d'accord, on nous demande d'avoir une vision globale de la santé et des services sociaux, de ce qu'on a sur le terrain. Prenons les troubles envahissants du développement, hein? C'est beaucoup en lien avec l'éducation, hein, les écoles, la question du premier diagnostic avec les centres de réadaptation, des fois, quand il y a des troubles de langage, puis on veut bien identifier la problématique. Comment s'assurer, par territoire de région mais localement aussi, qu'il y ait une bonne représentation de ces gens-là? Parce que, moi, là, c'est... Dans le CRDI, par exemple, il y a des représentants, il y a des parents qui s'investissent, qui vont défendre... il y a des organismes communautaires. Mais moins on en a, moins on a de chances d'avoir du monde, là, qui sont dans le bain, là, tous les jours pour défendre ces clientèles-là.

Le Président (M. Sklavounos): Est-ce qu'il y a preneur pour la question? Mme Hébert.

Mme Hébert (Anne): Sans répondre directement à votre interrogation, je dirais: Aussi, il y a la question, oui, de représentativité au conseil d'administration, mais il faut aussi prendre en compte les mécanismes de consultation et de participation, entre autres sur le plan stratégique, sur les projets organisationnels et cliniques, qui sont extrêmement importants. Donc, ce qu'on souligne dans notre texte, c'est qu'il faut qu'il y ait des mécanismes formels qui soient prévus, parce que ça en est une, chose, de participer au conseil d'administration, mais c'est aussi extrêmement important, sur des orientations majeures, qu'il y ait des mécanismes de prévus, où les personnes handicapées ou leurs proches peuvent faire des représentations. Donc, la participation au conseil d'administration, ce n'est pas le seul moyen.

Mme Doyer: C'est un des moyens.

Le Président (M. Sklavounos): Il reste moins de deux minutes, alors il nous...

Mme Doyer: C'est ma collègue.

Le Président (M. Sklavounos): ...reste le temps pour une courte réponse, courte question.

Mme Maltais: Alors, bienvenue. C'est vraiment un plaisir de vous entendre. Écoutez, il y a deux zones, là, où on touche à la représentation des personnes handicapées. Il y a bien sûr au niveau des CRDI, où, là, on fait du mur-à-mur avec les conseils d'administration... Parce que, là, on fait un seul type de conseil d'administration, donc je comprends votre inquiétude quant à la participation des personnes handicapées, puisqu'il n'y a qu'un modèle, maintenant, qui va couvrir tous les types d'établissements. Ça, c'est vraiment, pour moi, un recul et c'est ce que vient de souligner ma collègue. L'autre, et là vous venez de l'aborder, on fait disparaître le dernier rempart où il y a des gens... la participation de la population, on fait disparaître les forums où la population... Pensez-vous que ça va avoir un impact sur la participation, ou la non-participation, l'exclusion des personnes vivant avec un handicap?

Le Président (M. Sklavounos): Mme Hébert.

Mme Hébert (Anne): C'est sûr que c'est un élément qui nous inquiète, parce qu'on est favorables à plus de... comme on le dit dans le texte, à des mécanismes formels de participation de la population. Peut-être que les forums de population, ce qu'on dit dans le texte, avaient besoin d'être bonifiés puis qu'il y ait des... qu'ils soient plus efficaces, mais il faut prévoir des mécanismes. C'est absolument important, parce que les enjeux sont grands, pour les personnes handicapées, quand on parle du réseau santé et services sociaux. Là, on parle souvent de besoins essentiels, comme soins à domicile et soutien à la famille, tous les services de réadaptation.

Mme Maltais: Ça pourrait même être par Internet, on a vu ça. Il y a eu des suggestions qu'on ajoute... En fait, il pourrait... Ça prend une participation personnelle, ça prend des individus, mais on pourrait même y ajouter des méthodes de consultation qui soient un peu technologiquement plus à point.

Mme Hébert (Anne): Donc, c'est extrêmement important, tu sais, que leurs points de vue soient exprimés. Mais il ne faut pas juste voir d'un côté, aussi, que les personnes expriment leurs préoccupations puis leurs points de vue, mais dans ce type d'échange là il y a comme une...

Une voix: ...

M. Hébert (Anne): ...c'est ça, une synergie et un apprentissage. Puis on le voit nous-mêmes, à notre conseil d'administration, parce qu'au-delà de revendications puis des demandes, qui sont tout à fait légitimes, après, il y a la faisabilité des demandes, puis tout ça, et donc il y a un apprentissage qui se fait, des réalités qui se rencontrent, et qui permet à ces personnes-là de devenir des citoyens à part entière et puis qui s'intéressent à de plus grands enjeux, qui ne sont pas juste centrés sur leurs enjeux qui sont très spécifiques. M. Brunet en parlait, sur la difficulté, des fois, de créer un intérêt de la participation. Mais, en permettant ces mécanismes-là, ça crée cette synergie-là puis ça continue l'effort de faire du Québec une société plus inclusive, où les personnes handicapées ne sont pas confinées juste aux questions très spécifiques. Mais il faut que ça démarre à quelque part puis il faut qu'il y ait une synergie qui se crée.

Le Président (M. Sklavounos): Alors, le temps, officiellement, de l'opposition officielle est écoulé, mais je ne vois pas de représentant du deuxième groupe d'opposition. Alors, si vous voulez le temps, 3 min 30 s, allez-y.

Mme Maltais: Alors, 3 min 30 s.

Le Président (M. Sklavounos): Trois minutes.

Mme Maltais: O.K., trois minutes.

Le Président (M. Sklavounos): Trois minutes.

Mme Maltais: Écoutez, c'est extrêmement important ce qu'on aborde, là, parce que c'est une lutte de tous les instants que la participation pleine et entière des personnes vivant avec un handicap dans la société québécoise. Là, j'ai l'impression que ça n'a peut-être pas été évident à la première lecture du projet de loi. Évidemment, je sais que le ministre, là, a commencé à le relire et à se poser lui-même des questions sur ce qu'il y avait dedans. Je pense au plan stratégique. Mais là vous nous amenez autre chose.

Donc, les personnes vivant avec un handicap n'ont plus de type de formation de conseil d'administration sur les CRDI, entre autres. Ensuite de ça, le forum de la population, où on pouvait leur trouver une place, va disparaître. Votre conseil d'administration vous a parlé de l'impact démobilisateur que ça pouvait avoir? Moi, je crains. Moi, je crains, je le dis, là, sincèrement, je crains un impact démobilisateur.

Et c'est vrai, ce que vous avez dit. On ne veut pas seulement, de la part des personnes vivant avec un handicap, des commentaires sur comment être plus accessible pour les personnes vivant avec un handicap, mais on veut des commentaires sur tout le système de santé et sur la société en général. Si on les considère à part entière, il faut les considérer à part entière. Et on a besoin de leur vision sur cette entièreté, cette société.

**(17 h 30)**

Le Président (M. Sklavounos): Voilà, madame.

Mme Hébert (Anne): C'est vrai que les échanges avec notre conseil d'administration, dans le cadre de la préparation de notre présentation aujourd'hui, ça nous a été exprimé, des inquiétudes dans ce sens-là, parce que beaucoup ont commencé par ce type de participation là. O.K. Inquiétudes mais, en même temps, je pense que le conseil d'administration, là, on va poursuivre nos échanges sur ça avec le conseil d'administration, mais... ils ne voudraient pas réduire leur participation à la participation au conseil d'administration. Vraiment... Et la question de mécanismes, hein, ceux qui sont dans la loi, de consultation, de participation, demandent à être précisée du point de vue de notre conseil d'administration pour s'assurer qu'elles puissent y participer et que ça soit clair, surtout qu'elles aient un mot à dire sur les grands éléments qui définissent les orientations.

Le Président (M. Sklavounos): 45 secondes, rapidement Mme la députée de Matapédia...

Mme Doyer: 45 secondes c'est...

Le Président (M. Sklavounos): Pour la question et la réponse.

Mme Doyer: Je vais tout dire dans 45 secondes.

Le Président (M. Sklavounos): Parfait, allez-y, allez-y.

Mme Doyer: Je vais les citer: «En somme, l'office trouve inacceptable qu'en plus de réduire la place des citoyens et des usagers au sein des C.A. des établissements, le projet de loi ne prévoie aucune disposition permettant d'assurer une représentativité effective des personnes handicapées et de leur famille au sein de ces instances, lesquelles auront notamment à se prononcer sur la définition des orientations stratégiques en matière de soins de santé [et] de services sociaux [...] réadaptation dispensés à leur intention.» Et, moi, je vais être vigilante par rapport aux personnes qui vivent des troubles envahissants du développement et, aussi, les clientèles ayant des problèmes graves de santé mentale.

Alors, ça, ça va être la trame de ce qu'on va surveiller dans le projet de loi.

Le Président (M. Sklavounos): Sur ce, merci Mme la députée de Matapédia. Alors, je remercie Mme Hébert, Mme Bourassa, M. Bélanger de l'Office des personnes handicapées du Québec et j'invite maintenant les représentants du Commissaire à la santé et au bien-être, le Commissaire lui-même aussi, à prendre place.

Et je suspends nos travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 32)

 

(Reprise à 17 h 35)

Le Président (M. Sklavounos): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous avons le plaisir d'accueillir le Commissaire à la santé et au bien-être, M. Robert Salois, accompagné de Mme Anne Marcoux, M. Jacques Ramsay et Mme Ghislaine Cleret de Langavant. Alors, je vais vous demander de vous présenter, en quelque sorte, pour qu'on puisse savoir qui qui est assis où exactement, pour les fins de l'enregistrement des débats...

Une voix: ...

Le Président (M. Sklavounos): C'est ce que je... Et je vais vous permettre de commencer tout de suite en vous présentant avec la présentation de 10 minutes.

Commissaire à la santé et au bien-être

M. Salois (Robert): Merci beaucoup, M. le Président. Je me présente, Robert Salois, Commissaire à la santé et au bien-être. Je suis accompagné de trois de mes collaborateurs. Mes deux commissaires adjoints, Mme Guylaine de Langavant, M. Jacques Ramsey, commissaire adjoint à l'appréciation et à l'analyse, Mme de Langavant est commissaire adjoint à l'éthique, et Mme Anne Marcoux qui est directrice générale de notre organisation.

M. le Président, Mmes et MM. les députés, nous sommes devant vous aujourd'hui en réponse au souhait de la commission de nous entendre sur le projet de loi n° 127 sur l'amélioration de la gestion du réseau.

C'est avec la perspective de l'expérience des quatre dernières années de travail du Commissaire que nous avons analysé attentivement le contenu de la loi. Nous souhaitons influencer positivement l'évolution de celui-ci en partageant avec vous nos expériences, nos conceptions de la participation citoyenne et notre approche de travail bien distincte.

Soulignons d'entrée de jeu que nous soutenons le principe à la base de ce projet de loi parce que l'amélioration de la gestion du réseau participe à l'amélioration globale du système. Cependant, nous voulons amener des considérations sur la façon de faire les choses.

J'aimerais, d'entrée de jeu, vous parler un peu de cette façon distincte et particulière de travailler du Commissaire. Le Commissaire apprécie les travaux atteints par le système de santé et des services sociaux. Son regard est global parce que la perspective adoptée porte sur la totalité du système, sur le contexte dans lequel il évolue, sur les valeurs sociales. D'ailleurs, les impacts du projet de loi n° 127 sur la performance globale du système de santé pourront ainsi faire l'objet des travaux du Commissaire.

Le Commissaire travaille avec un forum de consultation, une entité délibérative composée de 27 citoyens, dont 18 citoyens viennent de chacune des régions du Québec et de neuf autres qui possèdent une expérience dans le domaine de la santé et du bien-être. Et, selon l'article 22 de la loi sur le Commissaire, il a l'obligation de faire état des délibérations du forum dans son rapport annuel sur la performance du système.

Dans le cadre de son mandat, le Commissaire exerce quatre fonctions: apprécier, consulter, informer et recommander. Notre mandat principal, c'est l'appréciation de la performance du système de santé et des services sociaux. Pour le faire, un ensemble important d'indicateurs provenant de différentes sources permettent d'évaluer la performance du système de santé et des services sociaux québécois et ainsi faire des comparaisons interrégionales, interprovinciales et internationales, mais ce n'est pas, à notre avis, assez pour faire des recommandations. Il faut documenter le contexte d'application, l'acceptabilité sociale. Il faut connaître les obstacles et les raisons qui vont faire que des recommandations vont fonctionner ou non. Donc, on est dans la faisabilité.

C'est dans cette perspective que nous consultons des experts, et des décideurs, et des citoyens à travers le forum dans nos travaux. Plus de 200 personnes participent à nos rapports annuels d'appréciation de la performance. Nos rapports ont quatre volumes très détaillés qui informent le ministre de la Santé et des Services sociaux, l'Assemblée nationale et l'ensemble des citoyens québécois sur la performance et, aussi, recommandent des améliorations aux services de santé et services sociaux.

Dans ses recommandations, le Commissaire évalue l'enjeu et les implications des propositions qu'il formule en plus de leurs conséquences réelles et potentielles. Le ministre a 30 jours pour déposer le rapport d'appréciation à l'Assemblée nationale et pour étude par la Commission parlementaire de la santé et des services sociaux.

On rend ces rapports disponibles à tous pour partager les résultats. L'on croit que la performance est un projet de société, et tous devront y participer. À cet effet, le Commissaire a conçu un site Internet public et interactif permettant à toute personne intéressée d'effectuer des recherches ciblées sur les préoccupations liées à la performance. J'aimerais juste, à ce moment-ci, insister sur le fait que, pour nous, les citoyens vont être des acteurs de changements pour l'amélioration du système de santé. On parle de la loi n° 127, par exemple, et de d'autres outils qui pourraient faire en sorte d'améliorer la performance du système de santé, mais on oublie souvent le rôle des citoyens comme acteurs de changements. Et, pour qu'il croit que ça vaut la peine pour lui de changer ses habitudes quand on le lui demandera pour améliorer le système de santé, il va falloir qu'il connaisse que ça vaut la peine et qu'au-delà de ce qu'il entend sur ce qui va mal il y a aussi beaucoup de choses qui sont bien sur le système de santé.

Le Commissaire n'entend pas se placer en juge ou en vérificateur. Nous considérons la mission d'amélioration de la performance comme un projet collectif, d'où la nécessité de partager l'information. Le Commissaire porte un regard indépendant sur la performance du système de santé par la multiplicité des sources de connaissances dont il s'inspire, son forum de consultation entre autres, et le fait que ses rapports d'appréciation et de performance soient déposés à l'Assemblée nationale.

**(17 h 40)**

Maintenant, sur le projet n° 127. On l'a déjà dit précédemment, il faut améliorer l'organisation des services. Nous l'avons déjà dit dans nos rapports sur la performance et nous l'avons entendu des citoyens consultés dans le forum et l'avis sur les droits et responsabilités que nous avons produit en décembre. Nous avons entendu le travail en silo, manque de coordination, manque de continuité dans les services, listes d'attente, etc. Nous avons entendu aussi des belles choses.

Nous soutenons donc le principe derrière la loi, améliorer la gestion, elle participe à l'amélioration de la performance du système de santé. Cependant, nous voulons amener des considérations sur la façon de faire les choses. Six grands principes à la base de nos travaux ont guidé le Commissaire dans ses réflexions sur le projet de loi avec l'objectif d'éclairer la prise de décision.

D'abord, l'imputabilité. Le projet de loi vise une plus grande imputabilité des acteurs. Or, pour qu'une personne soit imputable, il faut que l'on lui donne la liberté d'action. Il faut qu'elle puisse choisir ce à quoi elle s'engage. Dans le projet de loi, la liberté d'action des membres des C.A. d'établissement particulièrement est fortement limitée, ce qui rend difficile de les rendre imputables relativement aux résultats atteints.

Cohérence. Le projet de loi vise une plus grande cohérence par un ensemble de mesures. Cependant, les consultations sur l'Avis sur les droits et responsabilités nous montrent l'importance de la concertation pour l'atteindre, parce que chacun doit se reconnaître dans ce projet d'amélioration de la gestion du réseau pour en faire le sien.

Diversité des regards. Il faut plusieurs sources d'information qui vont se complémenter et vont trouver des solutions adaptées au contexte. Ce qu'on voit dans le projet de loi n° 127, c'est un C.A. uniformisé: moins d'élus, plus de membres nommés et liés au réseau de la santé. On a une perte de richesse de la diversité et on diminue la capacité de s'adapter au contexte spécifique.

Transparence. Il existe, dans la loi, un souci de transparence. On mise aussi beaucoup sur la transparence, car cela est fondamental dans nos travaux, et ceci implique un partage de l'information à tous les niveaux. Il est nécessaire, selon notre expérience, de se donner les moyens pour que tous puissent voir l'évolution du système de santé et des services sociaux. Dans le projet de loi n° 127, on considère qu'il serait important que les résultats atteints par le système soient aussi rendus disponibles aux autres paliers décisionnels.

Sur l'éthique, ce qu'on retient de notre expérience, de clarifier le mandat du comité de gouvernance et d'éthique afin qu'il puisse promouvoir une culture de l'éthique. Il serait donc important que le code d'éthique et de déontologie soit en concertation pour que tous se l'approprient.

Pour la participation citoyenne, pour nous, c'est fondamental, particulièrement pour accroître la légitimité des décisions politiques et la confiance des citoyens dans les institutions publiques. D'ailleurs, le travail qu'on fait avec le forum de consultation en témoigne.

Dans le projet de loi n° 127, il est prévu d'informer plus les citoyens et aussi de conserver la consultation des citoyens dans les instances locales. L'information et la consultation sont importantes car elles favorisent une participation accrue des personnes, mais ce n'est pas suffisant à une réelle participation des citoyens aux orientations et à la gestion du système. Il faut distinguer ces modes d'implication des citoyens de ceux où les citoyens participent de manière active aux décisions dans la délibération, par exemple.

Peut-être que les moyens mis en place n'ont pas fait leurs preuves, mais cela nous inquiète de voir à quel point cette participation a été réduite de façon marquée. Ce n'est pas la solution d'enlever ces modes de participation active, mais plutôt de diversifier les moyens de participation.

En conclusion, M. le Président, à la lumière de notre expérience et des consultations menées dans le cadre de son mandat, nous soulignons la nécessité de prendre en compte les considérations suivantes en vue de l'amélioration de la gestion du système de santé et des services sociaux: donner la marge de manoeuvre nécessaire aux acteurs afin qu'ils puissent être imputables dans leurs actions; favoriser la concertation entre les acteurs dans l'atteinte des objectifs communs pour une plus grande cohérence; favoriser la diversité et la complémentarité des perspectives dans les prises de décision; promouvoir la transparence et l'indépendance dans l'évaluation de la performance; favoriser une culture d'éthique fondée sur la collaboration et la responsabilisation, le respect et la confiance mutuelle; finalement, enfin, il est important de se pencher sur l'amélioration de la gestion du réseau puisqu'elle participe à l'amélioration de la performance globale du système, mais ne suffit pas à l'assurer.

Afin de répondre aux défis organisationnels que présente le système, il est important de travailler de concert avec d'autres acteurs, qu'ils soient des instances cliniques, professionnelles, communautaires ou autres qui ont un impact sur la qualité, la sécurité, l'efficacité des services rendus et qui peuvent promouvoir le respect des droits des usagers, ainsi que l'utilisation efficiente des ressources. Il est à noter que le Commissaire évalue l'ensemble de ces éléments. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. le Commissaire à la santé et au bien-être, votre timing est impeccable, vous êtes à l'intérieur de vos 10 minutes.

Alors, maintenant, je vais céder la parole à monsieur le ministre pour la période des échanges. 17 min 30 s, M. le ministre.

M. Bolduc: Félicitations, une très belle présentation, puis surtout, là, vous avez émis plusieurs idées bien séquencées. Il y a beaucoup de choses que je vais discuter avec vous, entre autres de vos six éléments. Et vous avez raison. Si on veut briser le travail en silo dans le réseau de la santé, ça nous prend des meilleures communications. Et, quand on parle du silo dans le réseau de la santé, il se situe à deux grands niveaux. Le premier niveau, c'est lorsqu'on va à l'horizontal, c'est-à-dire tu as le palier local, le palier régional et le palier national où il faut qu'on communique ensemble.

Encore là, l'esprit de la loi, c'est de décentraliser au maximum, mais avec de l'imputabilité, une responsabilisation et également une reddition de comptes. Et j'ai beaucoup, beaucoup aimé quand vous parlez de partage de l'information; c'est le secret dans la décentralisation. Et, quand vous partagez l'information avec des bons tableaux de bord, les endroits qui vont bien, vous les laissez faire. Les endroits en difficulté, il ne faut pas attendre que ce soit la catastrophe, il faut agir et poser des questions, et ça va aller de poser des questions, à la fin, de faire certaines interventions. Et, dans le projet de loi, c'est ce qui est prévu. Mais la base de la discussion, c'est d'abord de laisser l'établissement se prendre en charge puis...

On a parlé tantôt du principe de subsidiarité -- moi, c'est un principe auquel j'adhère, la subsidiarité versus la décentralisation -- la subsidiarité, c'est l'obligation morale de laisser les gens les plus près possible de la base s'occuper de leurs affaires. Ce n'est pas juste de dire: On le fait, c'est une obligation morale de ne pas le faire pour eux autres mais de leur laisser faire. Mais, encore là, dans la subsidiarité, le principe qu'il y a là-dedans, qui relie ça, par contre, il y a de l'imputabilité et de la reddition de comptes. L'élément que je retiens beaucoup ici, c'est la cohérence. Si on veut être cohérents dans notre système, il faut qu'on ait un partage.

Deuxième niveau, il se situe au niveau de l'organisation entre l'établissement local, non pas l'établissement supérieur mais les partenaires régionaux. Et, pour vous donner un exemple, on parlait tantôt de... j'aime bien la région du Bas-Saint-Laurent. Vous avez des hôpitaux locaux, des CSSS locaux, on parle à La Mitis, Matane, Matapédia, Rivière-du-Loup, et vous avez des hôpitaux régionaux et des CSSS locaux avec une mission régionale. Donc, ces gens-là doivent se parler. Et c'est ça, l'objectif, à un moment donné, que chacun fasse sa propre planification, fasse son travail, partage avec l'agence qui joue un rôle régional de coordination, et d'amener de la cohérence. Ça fait qu'en faisant ça comme ça ça nous permet, à tout le monde, d'avoir la même lecture de ce qui doit être fait. Et c'est vraiment l'esprit, au niveau de la loi, de cette décentralisation.

Des fois les gens, on le dit... oui, mais... Là, je vais faire une notion intéressante: décentraliser, ça ne veut pas dire créer des royaumes. Parce que c'est ce qu'on avait dans l'ancien système où c'étaient des silos, chacun travaillait puis se protégeait à cause de son autonomie en disant: Ce sont mes affaires. On ne peut plus travailler comme ça. Là, il faut travailler une approche citoyenne, une approche populationnelle puis une approche de partage de l'expertise à plusieurs niveaux.

Ça fait que, moi, je vous rejoins puis je suis tout à fait d'accord, et le projet de loi, de la façon dont, nous autres, on le voit, ça répond à ça. Où les gens ont plus de difficultés, c'est que ça veut dire: Oui, mais ça veut-u dire qu'il y a des mécanismes de contrôle? La réponse, à la fin: Oui, il y a certains mécanismes d'imputabilité et de contrôle. Et puis même, moi, j'entendais parler, tantôt, je suis pas mal moins centralisateur que beaucoup de gens ici, parce que je veux qu'on leur laisse le plus possible la possibilité de s'organiser.

D'où j'en arrive avec la participation citoyenne qui était votre sixième thème. La participation citoyenne, dans le projet de loi, c'est qu'à un moment donné, au niveau de l'agence, il y avait des forums qu'on dit aux gens, s'ils peuvent l'utiliser bien ils prendront les moyens qu'eux autres jugent nécessaires pour aller chercher la consultation chez les citoyens. Et c'est là qu'on fait encore plus de décentralisation, c'est-à-dire plutôt que de leur imposer un moyen, on leur dit: Il faut que ça se fasse, mais c'est à vous de choisir le meilleur moyen. Et il y a des endroits que le forum peut être maintenu, c'est leur décision. Il y a des endroits qui vont peut-être y aller sur des «focus group», il y a d'autres endroits qui vont y aller de d'autres façons, mais, ce qu'on s'attend, c'est qu'il y ait une certaine participation citoyenne. Et, selon le milieu, parce que les milieux sont tous très différents au Québec, là, ça, il faut leur laisser, eux autres, choisir le meilleur moyen pour rejoindre leur population.

L'imputabilité, liberté d'action, tout à fait d'accord. Là, ce qu'il faut faire attention, puis, encore là, ça nous prend des mécanismes que, lorsque l'organisation ne va pas bien... Puis on revient toujours à ce fameux 3 % où les gens... on fait-u ça pour 3 %? Bien, je ferai remarquer que, quand il y a des crises dans le réseau de la santé au Québec, là, c'est qu'on est dans le 3 %, hein? C'est probablement que ce 3 % là, c'est 95 % de nos crises. Ça fait que, si on ne se donne pas les moyens de répondre à ça, c'est comme si on renonçait à nos responsabilités, puis les gens nous disaient: Bien, laissez-les faire, c'est pas votre problème. Bien, c'est dommage, moi, comme ministre de la Santé, j'ai une responsabilité populationnelle, j'ai une responsabilité d'agir et de me donner les moyens d'agir lorsque quelque chose ne va pas à un endroit.

**(17 h 50)**

Cohérence, concertation, on est tout à fait d'accord, il y a des mécanismes dans à peu près toutes les régions pour être capables de le faire. La diversité des regards, ça, vous êtes les premiers à l'apporter, vous allez peut-être être les seuls à l'apporter. Ça, c'est en créativité. Puis il faut être capable d'aller voir les positions de chacun. Puis, dans une bonne démocratie, c'est tout le monde qui doit être capable de s'exprimer. Il ne faut pas juste regarder un point de vue, il faut regarder tous les points de vue. Puis ça, c'est un point de vue important.

La façon dont on répond ça, à la diversité des regards, c'est les profils de compétence. C'est que, au niveau du conseil d'administration, la façon dont c'est fait, c'est qu'on va nommer des gens avec différents profils de compétence qui doivent représenter différents groupes de la population, de l'établissement, et là on y va selon les besoins. Puis je vais vous donner un exemple: Si vous avez des élections, puis des deux personnes qui sont élues, vous avez un comptable, bien, possiblement, quand on va faire la nomination de la part du ministre, bien, on n'ira peut-être pas avec un comptable. La même chose lorsqu'il va arriver le temps de la cooptation. S'il y a un comptable, on va peut-être en prendre un, puis s'il n'y en a pas, bien, on va peut-être demander à ce qu'il y ait quelqu'un qui ait des notions financières. Comme ça nous prend également... on parle de comptabilité, bien, ça nous prend des gens aussi avec des notions d'éthique, ça nous prend des gens de différentes populations. On parlait tantôt des gens avec des handicaps, des difficultés, bien, si c'est un établissement, je vais m'attendre peut-être qu'au niveau de la cooptation on va avoir des gens avec des handicaps qui peuvent être cooptés. Ce n'est pas seulement qu'au niveau de l'élection, mais il y a également au niveau des cooptations, et là on s'attend à ce que les citoyens soient bien représentés.

L'autre élément, quand on parle de représentation des citoyens, on a toujours tendance à faire égaler représentation des citoyens, mettons, avec les élus. Mais, moi, ce n'est pas comme ça que je le vois, parce que la représentation citoyenne, quand, moi, je vais nommer quelqu'un, il va représenter un groupe de la population, et, quand ils vont coopter, ça va être également des citoyens. Ça fait que, moi, je me dis, à la fin, il faut juste s'assurer que le mélange de ces personnes-là fasse qu'il y ait une représentativité des différents groupes avec différents regards.

Et puis vous savez que, dans la loi, on a mis également l'égalité hommes-femmes, parce qu'il y a une base dans notre société, c'est qu'on devrait au moins avoir autant d'hommes que de femmes autour de la table d'un conseil d'administration.

Je ne sais pas ce que vous en pensez de ce que je viens de vous dire, là, par rapport à ces trois éléments-là.

Le Président (M. Sklavounos): M. Salois.

M. Salois (Robert): Je voudrais vous parler de la diversité, puis de l'apport qu'ils ont. On vient de terminer trois ans d'expérience avec un forum de consultation qui était inclus dans la loi et qui décrivait, à travers un règlement, comment on devait faire ça. Et on a eu un succès absolument fantastique, non seulement sur la participation elle-même, mais sur l'impact qu'ils ont eu sur les décisions du Commissaire à la santé et au bien-être. Et notre succès des trois dernières années est venu justement parce qu'on s'est créé une mosaïque. On a dit aux citoyens qu'ils ne représentaient pas les régions, parce qu'il y avait déjà des députés qui les représentaient, mais on voulait que, dans les recommandations d'amélioration de la performance du système de santé, on n'oublie pas les régions, qu'on n'oublie pas la diversité, qu'on n'oublie pas les cultures qui viennent de partout, et chacun d'entre eux sont venus nous parler des préoccupations qu'ils avaient par rapport à des recommandations qu'on était en train de travailler pour être certains que la vie qui se passe à Montréal ou à Québec n'est pas la même que ce qui se passe aux Îles.

Et ça, ça a été très, très riche pour nous, à un point tel qu'ils ont influencé des décisions chez nous par rapport à leurs valeurs. Je vous donne un exemple: sur le rapport, en 2009, qui était sur la première ligne de soins, on avait, des experts, eu une recommandation sur le fait qu'on voulait utiliser une expérience vécue en Angleterre, de donner à chacun des médecins, par code postal, un nombre de citoyens dont ils auraient la responsabilité. Et c'était une expérience qui avait été vécue dans une couple de comtés en Angleterre, et on voulait voir... on a soumis ça aux citoyens. Et les citoyens, de façon unanime, nous ont dit que la liberté de choix, aussi au Québec, était tellement importante qu'on n'était pas capables de sacrifier ça pour l'amélioration de la performance du système de santé.

Donc, pour nous, le Commissaire à la santé, après avoir entendu nos citoyens, on a simplement dit que c'est quelque chose qui ne passe pas le niveau des valeurs. Et il y a d'autres expériences de cette nature-là qui nous ont influencés, notamment sur le dépistage sur la trisomie 21, quand ils nous ont parlé qu'il n'y a pas de véritable choix qui existe pour les femmes si les services ne sont pas disponibles, de ce type de nature là, qui nous ont été soumis par les citoyens nous ont grandement éclairés. Puis je dois vous dire dans ça qu'on est en recrutement actuellement, et, pour vous dire comment c'est intéressant, on n'a fait que des annonces dans les journaux, là, tel que le prévoit le règlement, quelques entrevues dans les régions, et, à ce jour, ça s'est terminé le 18 février, on a 450 personnes qui ont mis leurs noms pour 18 places. Et, quand on aura complété l'exercice avec les experts, on va avoir au-delà de 500 personnes pour 27 places dans un forum de participation citoyenne où on délibère. Et on les amène loin, et certains...

Et, pour vous montrer comment c'est important pour les citoyens, parce que c'est ça que je veux un peu témoigner aujourd'hui, comment on a vécu ça, c'est qu'il y a des citoyens à qui on a demandé: Est-ce que vous allez remettre votre nom pour une deuxième candidature? Et certains nous ont répondu qu'ils ne seraient pas capables de recommencer l'exercice du début parce que, maintenant, ils ont tellement changé des échanges qu'ils ont eu avec leurs confrères et leurs consoeurs qu'ils ne seraient pas capables de retourner au début. Et particulièrement une nous témoignait, parce qu'elle était très vocale et très affirmative dans ses informations, nous disait: Je me surprends aujourd'hui à changer d'opinion deux fois dans la même séance parce que je suis influencée par mes confrères et mes consoeurs qui viennent des régions et qui font partie du forum.

Et je vais terminer en disant, pour juste pour vous témoigner, que ça a influencé les recommandations du Commissaire sur son rapport 2009, sur son rapport 2010 sur les maladies chroniques, sur l'Avis sur les droits et responsabilités et sur la consultation publique sur la trisomie 21. Ils ont joué un rôle majeur en nous guidant pour s'assurer que, dans le processus, on n'oublie pas les valeurs sociales et on n'oublie pas la préoccupation citoyenne. Tu voudrais...

Le Président (M. Sklavounos): Je pense qu'il y a un complément de réponse de Mme Cleret de Langavant.

Mme Cleret de Langavant (Ghislaine): Merci. On s'entend tous sur les mêmes principes. On l'a dit, je pense que vous avez ramené ça. Mais, en fait, vous parlez de cohérence, on vise tous la cohérence, mais, selon nous, elle ne s'impose pas, la cohérence. Et c'est vraiment à travers la concertation qu'on peut atteindre une cohérence. Donc c'est là où c'est dans la façon de faire qu'on pose les questions.

Aussi, par rapport à la participation citoyenne, on s'entend que c'est important d'accroître la formation des citoyens. D'ailleurs, vous mettez un effort là-dedans, dans le projet de loi. Aussi, la consultation, mais, bon, ça a déjà été dit, l'Internet ce n'est peut-être pas l'unique façon, la seule façon que ça pose problème. Il faudrait vraiment faire une complémentarité d'approche à ce niveau-là, justement pour adapter la formation pour les personnes handicapées, on l'a entendu plus tôt.

Mais ce qui serait important de dire, l'information et la consultation, quoiqu'importantes, parce que ça nous permet de comprendre les besoins des citoyens, ça nous permet aussi de leur permettre de s'impliquer dans la prestation de services qui les concernent, les besoins de services, mais ce n'est pas suffisant. Ce sont des moyens presque unidirectionnels, en fait, il n'y a pas d'échange, possibilité d'avancer par rapport à leur perspective. C'est pour ça que, nous, on pousse vraiment la délibération.

Vous avez, je... l'option d'éliminer des forums de population donc, peut-être que ce n'était pas la formule si fonctionnelle, mais ce n'est pas la solution, d'éliminer totalement toute forme active de participation des citoyens. Pour cela, ça nous préoccupe en fait beaucoup. Surtout lorsqu'on entend ce que M. Salois nous dit, qu'est-ce qu'ils nous amènent, qu'est-ce qu'ils nous apportent. Il faut que les citoyens participent à l'amélioration de la gestion du réseau et de l'orientation qu'on se donne au niveau du système de santé et de services sociaux.

Le Président (M. Sklavounos): M. le ministre.

M. Bolduc: Oui, puis on se rejoint. La difficulté, c'est... il n'y a pas une recette qui va faire pour tous les établissements, sauf qu'il faut qu'il y ait une volonté politique puis une volonté de l'établissement d'aller chercher cet allié-là. Vous vous en souvenez, il y a eu des consultations pour les politiques de santé et bien-être à l'époque où on a fait des grands, grands forums avec des grandes messes; ça a apporté des choses. Mais là ce qu'on veut, c'est vraiment responsabiliser l'établissement avec une reddition de comptes pour savoir qu'est-ce qu'ils vont faire pour être capables d'aller chercher une consultation citoyenne.

Ce qui est intéressant, c'est qu'habituellement, lorsqu'on a plusieurs établissements comme on a au Québec, c'est qu'il y en a qui vont probablement faire de l'innovation puis trouver des façons originales que les autres vont pouvoir regarder, emprunter puis, après ça, on va pouvoir généraliser ces pratiques-là. Quelles sont-elles? On ne le sait pas. Il y a des nouveaux médias sociaux, quoiqu'il y a une limite au niveau des médias sociaux. Il faut aller parler directement avec les citoyens, mais ce qu'on sait, c'est que, quand on a imposé les forums, ça a été ça qui était fait, la conclusion qu'on a, c'est que ça n'a pas été le plus gros succès du monde, et souvent les gens se sont réfugiés derrière le forum en disant: Bien, on a ça, mais ça ne marche pas, puis c'est la faute des citoyens. Il faut se sortir de ça en disant: Oui, c'est possible de faire un forum si vous voulez, et, oui, c'est possible d'aller chercher d'autres modèles, et là on verra les modèles qui ressortiront, et possiblement, dans un autre temps, on pourra en arriver à soit généraliser le modèle ou peut-être, à un moment donné, faire une modification législative. Mais, actuellement, l'orientation qu'on prend par rapport à... puis là il faut comprendre que c'est un forum régional. Vous autres, vous êtes dans un forum national dans lequel il y a beaucoup de gens avec de l'intérêt. Au niveau régional, on a eu beaucoup moins ça. Mais ça, c'est des discussions, puis on va certainement en discuter à l'article par article.

Dans le projet de loi, ce que vous avez commenté sur certains éléments et l'ensemble du projet de loi, comment vous trouvez ça? Est-ce que vous vous êtes attardés un petit peu à l'ensemble du projet de loi?

**(18 heures)**

M. Salois (Robert): Pour le projet de loi, comme je vous disais...

Le Président (M. Sklavounos): En 2 min 30 s, M. Salois, en 2 min 30 s.

M. Salois (Robert): ...comme je vous disais tout à l'heure, sur le principe même, nous, on croit que l'amélioration de la gestion va améliorer la performance de la santé, et notre préoccupation était surtout sur les façons dont on s'y prenait pour le faire, notamment par rapport aux principes qui sont suggérés.

Juste pour revenir sur une question, vous avez parlé des forums. Je vais vous dire que, quand on a créé le forum de consultation, on s'est fait évaluer par, nous, ce qu'on considère les meilleurs dans la participation citoyenne, l'Université McMaster, et, avec la complicité à ce moment-là du ministre, on a fait évaluer notre processus de mise en place du forum jusqu'à la... finale, avec l'objectif que, si quelqu'un au Québec voulait avoir un forum de consultation, il y a chez nous tous les éléments pour en créer un sans avoir besoin d'inventer, il y a aussi été évalué.

Mais, encore, nous sommes dans la performance, nous faisons une analyse de performance et, évidemment, la loi n° 127, nous allons pouvoir mesurer dans le temps les effets de cette loi-là sur la performance. C'est un peu ce que je vous disais d'entrée de jeu tout à l'heure.

Le Président (M. Sklavounos): Ça va. Du côté ministériel, il reste environ 1 min 30 s, ça ne donne pas beaucoup de temps. Peut-être une petite question, petite réponse. Ça va aller? Ça va aller?

Une voix: ...

Le Président (M. Sklavounos): Oui, ça va, c'est fait? Alors, du côté de l'opposition officielle, à Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Bonjour M. Salois, je veux saluer aussi les personnes qui vous accompagnent. C'est important pour nous de vous entendre, vous êtes un de ceux qui utilisent véritablement la population, c'est le fun d'entendre qu'il y a vraiment, au Commissaire santé bien-être, cette idée que la voix de la population, en direct, avec les joueurs du réseau, peut amener une amélioration de la gestion et du réseau. Je suis heureuse de l'entendre, d'autant que les remarques qu'on a jusqu'ici, c'est qu'en fait la voix de la population elle diminue dans le projet de loi qui nous est présenté. Alors, cette importance qu'elle a pour vous, cette voix de la population, c'était important de nous envoyer ce signal.

Je remarque que, dans votre mémoire, vous dites: «Améliorer la gestion du réseau: il est justifié d'agir», et vous nous dites que vous avez fait plusieurs rapports d'appréciation. Vous êtes d'accord avec «l'importance de revoir nos façons de dispenser les services». Vous dites même que c'est peut-être plus important de faire ça que d'ajouter des ressources. Vous nous dites que, dans vos rapports, vous avez «conclu à la nécessité d'une utilisation plus appropriée des professionnels et d'un meilleur soutien organisationnel pour en maximiser la contribution». Vous considérez donc «que des mesures visant à améliorer ces problématiques seraient souhaitables». Si vous saviez comme nous sommes d'accord avec vous.

Je vois que l'Ordre des pharmaciens est sorti aujourd'hui en disant qu'ils voulaient prendre plus de délégation de pouvoirs, qu'ils étaient prêts à en faire plus pour le système de santé, ils sont présents sur tout le territoire national, ils sont ouverts à d'autres heures. Il y en a d'autres comme ça, il y a les sages-femmes qui veulent prendre plus de place, il y a les infirmières praticiennes spécialisées, on arrive à peine à en former. Il y a plein de voix qui s'élèvent pour dire: Nous voulons participer, nous voulons amener de meilleurs soins, de services aux gens. Vous dites que c'est... vous ciblez donc, comme nous, qu'il y a des gestes à poser ailleurs que dans la réforme des conseils d'administration.

Est-ce que vous avez des endroits ou des cibles qui auraient dû être dans ce projet de loi, qui auraient été souhaitables pour la population du Québec, qui ne sont pas dedans mais qui auraient dû y être? Parce que ce qu'on cherche, c'est comment l'améliorer.

M. Salois (Robert): Oui, en fait, la question que vous posez... deux éléments de réponse par rapport à ça. Le premier, c'est que la gestion est, à nos yeux, un élément important pour l'amélioration du système de santé, on est d'accord. Mais, dans nos rapports, on a identifié plusieurs recommandations qui se recoupent, soit le premier rapport sur la première ligne de soins et le deuxième rapport sur les maladies chroniques. On sait que, pour tous les pays du monde, incluant la province de Québec, la gestion des maladies chroniques est un défi énorme. Le prochain rapport qui s'en vient, c'est en regard de la périnatalité petite enfance, donc le 0-5 ans, la période de la naissance et la période de grossesse, et celui qui s'en vient en 2012 est sur la santé mentale.

Donc, on a toujours des thèmes qui font en sorte qu'on a... en fait, je vais vous expliquer, on a choisi d'évaluer les systèmes de santé, avec le premier Commissaire, en faisant les étapes de la vie, donc regarder un système de... Parce que de faire une analyse globale et de faire des recommandations, c'est à peu près impossible. Donc, on a pris ça par tranches de vie: la périnatalité petite enfance, l'adulte avec les maladies chroniques, l'adulte avec les maladies de santé mentale, psychosociales, le vieillissement de la population. Et la première étape était de faire en sorte que la première ligne de soins, c'était transversal à ces thèmes-là. Donc, toujours voir la performance globale avec des indicateurs, se mesurer, là, à l'international... international, interprovincial, interrégional, mais d'aller plus loin sur un thème et de creuser, à travers le processus qu'on a, jusqu'au service, jusqu'au patient et de voir avec le patient et celui et celle qui donnent les services si ce qu'on va recommander va faire la différence. Et, quand on a fini de faire ça, on remonte à faire une recommandation plus globale au système de santé sachant qu'on est allés voir si ça fait une différence sur le terrain. C'est comme ça qu'on procède.

Donc, nos recommandations, elles ont toujours fonctionné comme ça, justement à cause de ce processus-là. Les experts nous disent: Idéalement, voici ce que le système de santé devrait avoir l'air. Les décideurs nous disent: Bien, ce n'est pas faisable, voici les obstacles, voici les solutions. Puis les citoyens nous disent: Non, non, ça, ça ne s'applique pas ici. Il faut respecter les valeurs. Donc, on fonctionne comme ça. Et c'est de la façon qu'on fait nos recommandations et on pense que nos recommandations jusqu'à date sont extrêmement pertinentes pour l'amélioration du système de santé. D'ailleurs, il y en a huit des 10 recommandations qui ont été divisées sur les comités de la table de concertation sur la première ligne et sur les maladies chroniques, je sais que le ministère est en train de les utiliser. Donc, on sait que nos outils sont intéressants.

Et par contre la... Ce que je veux en venir par rapport à ça, c'est que, nous, ce n'est pas nécessaire d'avoir nécessairement une loi pour faire ça. Je pense qu'à un moment donné ce qu'on veut essayer d'avoir, c'est qu'au-delà de la loi il y a un désir incroyable de... On a fait le tour des régions deux fois, là, puis on a rencontré tellement d'intervenants à travers nos travaux, il y a un désir tellement incroyable de tout le monde que ça fonctionne qu'il manque juste comme le ciment ou l'ingrédient qui va faire qu'ils vont travailler. Et, dans ce sens-là, quand on vous parlait de concertation, qu'on travaille en équipe, il y a un désir, il ne manque pas grand-chose pour qu'on ait un tournant. Et je pense que ce n'est pas toujours important que ça soit dans une loi. Par contre, ça prend des directives dans une loi pour faire des choses, mais ça, c'est au-delà, c'est dans l'amélioration du travail.

Et, avant de savoir comment qu'il manque de médecins, nous, on s'est posé la question à essayer de savoir comment ils travaillent, exemple. Donc, on ne bâtit pas une maison en l'agrandissant sans savoir si on utilise toutes les pièces. C'est un peu imagé, ce que je vous dis comme exemple, mais c'est dans ça qu'on dit que c'est dans l'organisation du travail qu'on doit regarder d'abord avant de savoir si c'est un problème de ressources ou un problème d'argent.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, M. Salois. Mme la députée Taschereau.

Mme Maltais: M. le Commissaire, on est directement, là, dans la même réflexion. C'est-à-dire que je comprends qu'il y a un projet de loi qu'on qualifie de centralisateur ou décentralisateur, là, de chaque côté de la table, il y a un projet de loi qui veut améliorer la gestion. Moi, je considère qu'il nuit à l'amélioration de la gestion. D'ailleurs, vous avez quelques commentaires assez clairs aussi là-dedans disant que, par exemple, la cohérence, ça ne s'impose pas et, dans ce cas-ci, il y a comme une imposition, il y a des... vous commentez aussi, peut-être moins durement que d'autres, mais vous commentez quand même assez négativement cette idée de l'imposition de directives au conseil d'administration, plan stratégique, organisation des services, tout ça. J'ai bien lu ça.

Mais, je comprends, c'est que ce même sentiment, vous l'avez, et que l'urgence d'agir, elle n'est pas dans la révision peut-être des conseils d'administration, même si ça peut être souhaitable, mais l'urgence d'agir, elle est dans la délivrance des services, la façon dont on le fait sur le territoire. Et cette discussion qu'il doit y avoir entre les ordres professionnels et entre les gens qui donnent des soins, c'est là qu'il faut jeter notre regard maintenant comme parlementaires.

M. Salois (Robert): Tout à fait...

Le Président (M. Sklavounos): M. Salois.

M. Salois (Robert): Tout à fait. Et, dans cet esprit-là, si vous voulez, c'est comme un entonnoir, hein? On a eu en 2009 au-delà de 6 millions de personnes différentes qui ont utilisé le système de santé, c'est énorme, là. Et, quand on parle de services, on parle en centaines de millions qui sont donnés. Mais le problème qu'on a, c'est qu'on a un entonnoir qui passe par le docteur parce que ça prend un diagnostic. Et c'est dans cet esprit-là que, dans maladie chronique, on a suggéré que c'est autour de cet intervenant-là qu'on doit rassembler un nombre important d'acteurs de telle sorte qu'à un moment donné on va travailler en équipe. Voyez-vous, la création des GMF a été faite dans cet esprit-là. C'est une bonne innovation du Québec de cette façon-là.

Donc, pour nous, on croit que c'est dans les outils qu'on va donner aux acteurs qui donnent des services qu'on va améliorer justement non seulement le nombre, mais aussi la qualité. Et, si je retourne plus loin, on a eu aussi la loi n° 90 qui a permis justement une plus grande délégation des actes à différents autres professionnels pour s'assurer qu'il y ait un maximum d'actes qui peuvent être faits par le maximum de personnes. Et c'est dans cet esprit... Dans cet esprit-là, nous pensons que c'est dans cette voie-là qu'on doit continuer à travailler.

**(18 h 10)**

Mme Maltais: On pourrait, par exemple, se dire que les GMF, qui sont un très bel outil qu'on a mis sur pied, pourraient être ouverts en y ajoutant d'autres professionnels pour essayer de grossir le noyau pour que justement ce ne soit pas: Je veux voir un médecin, mais: Je veux voir un professionnel de la santé et le bon professionnel au bon moment sur le territoire.

Le Président (M. Sklavounos): M. Salois.

M. Salois (Robert): Dans nos recommandations sur maladies chroniques, on va plus loin que ça. On demande... on dit qu'il faut même penser, s'asseoir et revoir la distribution des sous qui sont donnés pour que, par exemple -- j'utilise cet exemple-là, là, ce n'est peut-être pas un bon exemple -- mais, par exemple, une fois que le diagnostic a été fait pour un mal de dos, et qu'on irait voir un physio, par exemple, pourquoi on ne pourrait pas payer en maladie chronique, par exemple? Revoir le panier de services en fonction, surtout dans maladies chroniques, de s'assurer qu'il y ait plus de professionnels qui peuvent être rémunérés pour faire en sorte qu'il y ait plus de citoyens, qu'il y ait plus de services... qui aient accès à plus de services. On pense qu'il y a une réflexion à faire. Et on l'a suggéré dans notre recommandation, c'était la recommandation 10. Au-delà de revoir le panier qui sert... la façon de rémunérer les médecins, par exemple, et les professionnels, de revoir aussi la façon dont on les couvre, particulièrement en maladies chroniques, étant donné l'importance des maladies chroniques, et aussi le fait qu'il y a beaucoup de citoyens qui n'ont pas accès à des services justement parce qu'ils ne sont pas offerts dans le système public.

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: M. Salois, je veux juste conclure en disant que je pense que vous avez abordé la vraie discussion qu'on devrait avoir. On ne devrait pas, à mon sens, avoir une discussion sur, même si ça peut être intéressant, une réduction sur le nombre... sur l'évacuation des citoyens ou des comités des usagers à des conseils d'administration, puis bien une discussion sur une véritable révision, là, de la dispensation des soins et des services de santé au Québec.

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Et, moi, je viens justement sur le nombre de personnes au conseil d'administration, puisque le projet de loi touche à ça. Vous me permettez? Parce que ça rejoint un peu ce que l'OPHQ disait tantôt, hein, par rapport à certaines clientèles très spécifiques d'ailleurs auxquelles vous vous intéressez. Et la Protectrice du citoyen aussi, par exemple, les enfants qui ont des troubles envahissants du développement. Vous vous intéressez, vous allez nous déposer un rapport en 2012 sur la santé mentale. Souvent, vos travaux se recoupent d'ailleurs, hein, la Protectrice du citoyen et vous, M. Salois. Et, à la page 15, parce que... Et ça rejoint aussi ce que ma collègue veut. Les conseils d'administration, dans le fond, sont, je dirais, le réceptacle des besoins, des ressources qui sont allouées pour la dispensation des soins, des services en santé et services sociaux, mais aussi par rapport aux besoins, à l'adéquation avec les besoins des diverses clientèles.

À la page 15, vous dites -- j'aimerais que vous clarifiez ça, M. Salois ou les personnes qui vous accompagnent -- vous dites: «Concernant l'article 9 du projet de loi 127, le Commissaire à la santé et au bien-être recommande de penser la composition des [C.A.] des établissements de manière à maximiser la diversité des points de vue -- ça particulièrement -- et ainsi à favoriser leur capacité de prendre en considération les spécificités de leur contexte et de s'adapter aux changements qui s'y opèrent.» Et c'est là que je rejoins ce que ma collègue vient de dire, en ce sens que comment est-ce qu'on peut organiser les services de la meilleure façon possible. Et le projet de loi, M. le Président, à mon avis, en mettant une certaine tutelle, pour ne pas dire une tutelle certaine, par rapport à plusieurs articles du projet de loi, sur les C.A., hein, ou les CSSS en tout cas, comment on fait pour leur donner la latitude puis leur dire qu'on leur fait confiance puis qu'ils vont arriver à bien répondre aux besoins de leur population, et là que ce soit au niveau local, par territoire de MRC, ou au niveau régional? Et là vous dites: «Cela implique [...] de reconsidérer la diminution du nombre de représentants -- mais je ne voudrais pas qu'on s'arrête là -- de la population et d'usagers...» Mais ouvrez un peu au-delà du C.A.

Le Président (M. Sklavounos): Merci, Mme la députée de Matapédia. Qui prendra la parole pour répondre à la question? Alors, Mme Cleret de Langavant.

Mme Cleret de Langavant (Ghislaine): Ce que nous vous voulions dire par là, c'est à savoir qu'il est nécessaire que les gens qui sont sur les C.A. connaissent bien le contexte de leurs établissements afin de pouvoir trouver des solutions créatives et en connaissance de contexte pour répondre aux besoins des citoyens de l'établissement et qu'en fait le fait que, s'il y a plus de gens nommés, moins de personnes élues, et puis qu'ils soient... en fait qu'il y ait moins de citoyens représentants les usagers, nous trouvions qu'en fait il y avait moins de possibilités de... comment dire, de richesse, de positions, de diversité de positions qui diminuaient en fait la créativité de ces conseils d'administration et leurs possibilités de s'adapter par rapport aux besoins et de leur contexte spécifique en fait qui est changeant. Et ce sont les mieux placés pour le connaître et qui sont incapables de trouver des solutions qui sont adaptées, quitte... Toujours en gardant l'idée de la cohérence. Ça n'empêche pas la cohérence de vouloir s'aligner par rapport aux orientations et les planifications stratégiques au niveau de la région, ça n'empêche pas, mais ils connaissent le mieux comment le faire selon leur contexte. C'était cette idée-là.

Mme Doyer: C'était cette idée-là?

Le Président (M. Sklavounos): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui, parce que, quand on regarde la diversité des points de vue, pour moi, j'essaie de penser en santé mentale, il y a différentes façons de penser les services... J'ai passé une journée à Montréal, M. le Président, dans votre charmante ville, et j'ai rencontré une panoplie d'organismes communautaires, par exemple les ressources alternatives en santé mentale. Il y a des gens qui voient les choses différemment que les personnes qui sont dans le réseau, et c'est là qu'avec le choc des idées on peut regarder... Bon, par exemple, pour les personnes qui vivent des problématiques en santé mentale, toute la question du logement, si on n'a pas du logement, hein, en psychiatrie pour des cas, bon, qu'on a réintégrés en société, puis on sait qu'il manque des ressources de logements adaptés à différents types de clientèles. Comment, dans les C.A. des différents établissements, on peut faire l'arrimage avec ce qui existe quand on veut avoir une vision globale des services, de ce que devraient être les services, en santé physique bien sûr, mais aussi en santé mentale, tous types de clientèle confondus?

Et vous, M. Salois, qui êtes allé dans toutes ces régions-là du Québec, ça, c'est important, mais comment faire, autour d'une table de C.A., quand il y a des postes qui sont bien campés, hein? Bon, les médecins doivent être là, les pharmaciens doivent être là, les infirmières, puis là on avait quatre postes puis là on en enlève deux. Alors, moi, je trouve qu'on va manquer des cibles.

Le Président (M. Sklavounos): M. Salois, 1 min 30 s.

M. Salois (Robert): En fait, le commentaire que je voudrais faire, c'est que, pour nous, et c'est important puisqu'on parlait de la gestion du réseau de la santé, c'est de s'assurer que, dans les conseils d'administration, où les décisions sont prises, on ait les personnes qui puissent ensemble prendre les meilleures décisions. Mais on l'a mentionné tout à l'heure, il y a aussi d'autres outils qui pourraient être utilisés par les conseils d'administration justement pour permettre une plus grande participation des citoyens. Et, si le conseil d'administration, dépendant de la décision qui sera dans la loi, se voit avec une absence importante d'information pour prendre les meilleures décisions, je pense que c'est de sa responsabilité de pouvoir créer justement ces comités-là.

On parlait tout à l'heure que les... M. le ministre faisait allusions tout à l'heure que les forums de population n'ont pas été un réel succès. Il y en a, certaines régions, où ça a très bien fonctionné, là, mais... Et c'est important qu'on trouve des moyens pour que le citoyen soit présent au centre des décisions. Nous, on pense qu'il ne faut pas l'oublier sur le conseil d'administration qui est, lui, décisionnel, mais qu'un conseil d'administration devrait être capable de s'assurer d'avoir la participation que ce soit des personnes handicapées, des personnes âgées, des jeunes, etc., et de créer des...

Notre président de notre forum de consultation a 22 ans. Ils ont choisi le plus jeune pour être leur président. Et ça a été quand même une image au leadership de ce jeune-là qui a pris la responsabilité. Sur ça, je pense qu'on peut...

Le Président (M. Sklavounos): Sur cette note positive, il ne reste que...

M. Salois (Robert): Vous avez 22 ans?

Le Président (M. Sklavounos): Non! Pas loin, là, mais pas 22 ans. Alors, merci beaucoup, M. Salois, M. le Commissaire à la santé et au bien-être, ainsi qu'à Mme Marcoux, M. Ramsay et Mme Cleret de Langavant pour votre présence, et vos réponses, et votre présentation très intéressante.

Sur ce, j'ajourne les travaux jusqu'à demain 15 mars, à 10 heures, à la salle du Conseil législatif, où nous poursuivrons les consultations particulières sur le projet de loi n° 127, Loi visant à améliorer la gestion du réseau de la santé et des services sociaux. Merci et bonne soirée.

(Fin de la séance à 18 h 19)

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