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Version finale

40th Legislature, 1st Session
(October 30, 2012 au March 5, 2014)

Wednesday, May 1, 2013 - Vol. 43 N° 18

Special consultations and public hearings on Bill 30, An Act to amend the Civil Code and other legislative provisions with respect to research


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Table des matières

Auditions (suite)

Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine (CHU Sainte-Justine)

Commission d'accès à l'information (CAI)

Mme Anne-Marie Savard

Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ)

Autres intervenants

M. Lawrence S. Bergman, président

M. Réjean Hébert

M. Yves Bolduc

Mme Hélène Daneault

Mme Suzanne Proulx

Mme Diane Gadoury-Hamelin

Mme Rita de Santis

Mme Stéphanie Vallée

M. Sylvain Roy

M. Roland Richer

*          M. Daniel Sinnett, CHU Sainte-Justine

*          Mme Geneviève Cardinal, idem

*          Mme Nathalie Lecoq, idem

*          M. Jean-Sébastien Desmeules, CAI

*          M. Gaétan Cousineau, CDPDJ

*          Mme Claire Bernard, idem

*          M. Daniel Carpentier, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 30, Loi modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives en matière de recherche.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Non, M. le Président, aucun remplacement.

Auditions (suite)

Le Président (M. Bergman) : Merci. Ce matin, nous recevons le CHU de Sainte-Justine et la Commission d'accès à l'information.

Alors, M. Sinnett, bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, s'il vous plaît, identifiez ceux qui sont avec vous. Et vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.

Centre hospitalier universitaire
Sainte-Justine (CHU Sainte-Justine)

M. Sinnett(Daniel) : Merci beaucoup. M. le Président, M. le ministre, mesdames, messieurs, dans un premier temps, on aimerait vous remercier du temps que vous nous donnez, surtout qu'on a travaillé un peu fort pour qu'on se rencontre aujourd'hui. Et je représentante le CHU Sainte-Justine à titre de directeur exécutif de la recherche et de chercheur en oncologie pédiatrique, et je suis accompagné aujourd'hui de Me Geneviève Cardinal et Me Nathalie Lecoq, qui travaillent aussi à Sainte-Justine.

Avant d'aller dans le vif du sujet, je voudrais vous présenter aussi, brièvement, le CHU Sainte-Justine et son centre de recherche pour avoir un peu une compréhension d'où on vient avec nos opinions. Le CHU Sainte-Justine, comme vous le savez probablement, est le seul établissement de santé québécois qui est dédié exclusivement aux enfants, aux adolescents et aux mères. Nous avons ce qu'on considère un mandat provincial, plus de 60 % de nos patients viennent de l'extérieur de Montréal. Donc, le rayonnement est aussi provincial. C'est le plus grand centre mère-enfant du Canada avec 3 500 naissances, 19 000 patients hospitalisés et 200 000 visiteurs clinique externe annuellement.

Le centre de recherche, c'est 1 200 personnes, 225 chercheurs, 400 étudiants gradués qui viennent de plus de 40 pays. Et on travaille sur différentes thématiques de recherche, allant de la recherche clinique aux essais cliniques multicentriques à l'échelle nationale, internationale, la recherche de laboratoire, ce qu'on appelle fondamental, et la recherche psychosociale. Donc, ça vous donne une idée aussi que notre comité, aussi, d'éthique a une capacité à juger ces différents types de recherche là et les différents risques associés aux projets de recherche.

Et maintenant je vais aller un peu plus dans le vif du sujet, donc concernant le fait qu'on accueille très favorablement les modifications qui sont proposées par le projet de loi… le n° 3… n° 30. On considère que les assouplissements qui sont apportés au Code civil en matière de recherche permettront la réalisation de projets de recherche qui étaient jusqu'à maintenant difficiles, voire même impossibles. On pourrait revenir, à la période de questions, à ce niveau-là.

• (11 h 40) •

Nous considérons que les modifications qui sont proposées vont permettre d'avancer les connaissances sur la santé des enfants, la médecine des adolescents aussi, sans compromettre leur sécurité. Le changement proposé concernant l'âge pour consentir à des recherches ne comportant qu'un risque minimal est très souhaitable, comme le démontrent les nombreux exemples qu'on a soumis dans le mémoire que vous avez reçu. Cependant, on recommande quelques précisions et changements qui visent à répondre aux besoins de la population pédiatrique québécoise, et c'est ce que je vais passer dans les prochaines minutes.

Donc, dans un premier temps, nous applaudissons la modification proposée qui permettrait aux enfants de 14 ans et plus de consentir seuls aux projets de recherche comportant un risque minimal selon l'avis du comité d'éthique de la recherche. L'amendement proposé reconnaît l'autonomie du mineur de 14 ans et plus, consacrée dans le Code civil et dans la Loi sur les services de santé et services sociaux.

Notre observation. Présentement, les adolescents sont souvent écartés de projets de recherche en raison des difficultés posées par l'obligation d'obtenir le consentement du titulaire de l'autorité parentale. D'autre part, les chercheurs, les cliniciens qui sont impliqués auprès des adolescents revendiquent, depuis de nombreuses années, des changements à la règle de consentement à la recherche. Et, dans le mémoire qui a été déposé, vous trouvez aussi un document avec plusieurs signatures dans ce sens-là.

Je voudrais juste apporter un exemple pour vous illustrer un peu, sur le terrain, ce que ça représente comme complications. C'est un exemple qui porte sur un projet de recherche qui, lui, portait sur le soutien social et développement socioattentif des nourrissons de mères adolescentes. Dans le Code civil présentement, le consentement à l'expérimentation est donné pour le mineur par le titulaire de l'autorité parentale ou le tuteur. Dans le cas de parents mineurs, on est confrontés à un paradoxe. Une mère mineure a la capacité de décider du bien-fondé de la participation de son enfant à un projet de recherche mais pas la capacité de décider de sa propre participation au même projet de recherche. Un consentementdoit alors être demandé par la mère mineure à l'autorité parentale. Donc, vous voyez déjà aussi le paradoxe. À cela peut s'ajouter un deuxième enjeu. Dans certains cas, surtout dans le domaine, bon, de ce type de recherche là, bien, ça va être très difficile et même impossible d'obtenir le consentement des parents des jeunes mères.

On peut aller plus loin aussi. On a une panoplie de projets qu'on peut mentionner : projets de recherche sur les infections transmises sexuellement, l'évaluation, dans les écoles, de programmes de prévention d'abus de drogue ou d'alcool, sur l'avortement des mineures de 14 ans et plus et sur l'abus sexuel intrafamilial. Comme vous voyez, ça amène un frein, si vous voulez, à ce type de recherches là.

Alors, en résumé, pour cette portion-là, nous accueillons favorablement la modification proposée, qui est attendue depuis longtemps. Nous aimerions recommander cependant de supprimer les termes «et que les circonstances le justifient» à la fin de l'alinéa trois de l'article 21. Nous considérons ces termes comme étant vagues et susceptibles d'engendrer un manque d'uniformité d'interprétation par les différents comités d'éthique à la recherche. De plus, nous considérons que ces termes deviennent superflus dans la mesure où le critère essentiel est celui du risque minimal.

Le deuxième point porte sur la modification des règles du consentement pour l'utilisation d'une partie du corps prélevée dans le cadre des soins pour être utilisée aux fins de recherche. Nous considérons que les changements proposés à l'article 3 du projet de loi n° 30 ne correspondent pas aux besoins de la population pédiatrique québécoise. Le texte actuel de l'article 22 du Code civil pose constamment problème au CHU Sainte-Justine pour l'utilisation, en recherche, de matériel conservé dans les laboratoires ou, en pathologie, matériel d'archives.

Le changement proposé, c'est-à-dire l'ajout, à la fin de l'article, des termes suivants : «ou, si la personne concernée est décédée, de la personne qui pouvait ou aurait pu consentir aux soins requis par son état de santé», pour nous, ne solutionne en rien le problème actuel que nous vivons. Les médecins et les chercheurs sont très mal à l'aise de recontacter les parents d'un enfant qui était décédé simplement pour utiliser un spécimen de recherche. La sollicitation de consentement devient donc un frein à ce type de recherche utilisant le matériel déjà prélevé dans le cadre de soins. Nous considérons même que c'est non éthique, parce que, finalement, on n'est pas capables de faire ce type de recherche là. Vous allez retrouver plusieurs exemples, dans le document, de projets de ce type-là. On va pouvoir y revenir aussi dans la période de questions, si vous le désirez.

Donc, en résumé, pour ça, on croit qu'il est essentiel d'assouplir la règle établie à l'article 22 du Code civil lorsque la recherche ne comporte pas de risque ou un risque minimal pour les participants.

On aimerait ajouter aussi qu'il serait peut-être le temps d'aligner les règles québécoises aux règles canadiennes et internationales, notamment la Déclaration d'Helsinki et l'Énoncé de politique des trois conseils, ainsi qu'à d'autres normes québécoises, par exemple l'énoncé des principes du RMGA, du Réseau de médecine génétique appliquée, sur l'utilisation secondaire des données du matériel biologique.

Ainsi, nous proposons le libellé suivant… «Une partie du corps, qu'il s'agisse d'organes, de tissus ou d'autres substances, prélevée sur une personne dans le cadre de soins qui lui sont prodigués, peut être utilisée aux fins de recherche, avec le consentement de la personne concernée ou [...] celle habilitée à consentir pour elle ou, si la personne concernée est décédée, de la personne qui pouvait ou aurait pu consentir aux soins requis par son état de santé.» Ça, c'est ce qui était déjà présent. Ce qu'on propose : «Lorsque de l'avis du comité d'éthique de la recherche, la recherche ne comporte qu'un risque minimal, et qu'il est impossible ou pratiquement impossible de solliciter le consentement, une partie du corps peut être utilisée à des fins de recherche sans le consentement.»

Le troisième point porte sur la modification apportée par l'article 4 du projet de loi n° 30, prévoyant la possibilité que le consentement puisse être donné autrement que par écrit. Nous souhaitons ce changement-là comme évidemment souhaitable. Par contre, l'utilisation de l'expression «si, de l'avis d'un comité d'éthique de la recherche, les circonstances le justifient», on considère que c'est sujet à beaucoup d'interprétation. Donc, pour s'assurer que le consentement verbal ou documenté demeure une règle d'exception qui ne devrait pas être applicable aux essais cliniques mais qui pourrait, dans certains cas, faciliter des études à risque minimal, nous recommandons plutôt le libellé suivant pour l'alinéa deux de l'article 24 du Code civil : «Toutefois, le consentement à une recherche peut être donné autrement que par écrit si, de l'avis du comité d'éthique de la recherche, la recherche ne comporte qu'un risque minimal, et qu'il est impossible ou pratiquement impossible de solliciter le consentement écrit.»

Le point 4. Le remplacement du terme «expérimentation» par le terme «recherche» proposé par les articles 1, 2, 4 et 5 du projet de loi n° 30 est souhaitable. Par contre, l'utilisation du mot «recherche» au lieu d'«expérimentation» ne règle pas toutes les problématiques liées à l'usage du terme «expérimentation» puisque le mot «recherche» pourrait être interprété de façon aussi restrictive que le mot «expérimentation». Il serait souhaitable de préciser l'intention du législateur dans le préambule de la loi ou dans le Code civil lui-même. Nous proposons le libellé suivant pour répondre à la problématique soulevée : «La recherche inclut la recherche impliquant une personne physique, une partie du corps ou des données concernant les personnes physiques.»

Cinquième point : possibilité pour une personne qui participe à une recherche de se prévaloir de la procédure d'examen des plaintes d'un établissement de santé et de services sociaux. La modification à la loi proposée par l'article 6 du projet de loi n° 30 est souhaitable. Dans la même foulée, nous recommandons un amendement additionnel à la Loi sur les services de santé et services sociaux au sujet de la confidentialité des dossiers de recherche. Nous considérons qu'il est essentiel que le régime strict de confidentialité et d'accès accordé au dossier médical d'un usager puisse être accordé également au dossier de recherche d'un participant. Nous recommandons donc le libellé suivant pour un article qui pourrait être ajouté après l'article 27.3 de la Loi sur les services de santé et services sociaux : «Les dispositions des articles 17 à 28 s'appliquent, compte tenu des adaptations nécessaires, à tout dossier de recherche maintenu par un établissement.»

Le dernier point qu'on voudrait amener dans la présentation, c'est la notion de risque sérieux — c'est à l'article 21 du Code civil du Québec — qui est une notion que nous considérons qui est à conserver. Il fut discuté, précédemment à cette commission, de l'opportunité de retirer toute référence à la notion de risque sérieux que l'on retrouve à l'article 21, alinéa un. La notion de risque sérieux est essentielle. Les comités d'éthique ont besoin de critères sur lesquels fonder leurs décisions. Cette notion sert aussi à protéger les enfants et les adolescents. Il serait faux de croire que les essais cliniques de chimiothérapie ne peuvent pas se dérouler sur les enfants. Il est important de comprendre que le critère de risque sérieux, tel qu'énoncé dans le Code civil, s'interprète en fonction de l'état de santé de l'enfant. Un risque chez un enfant atteint d'une maladie grave pour laquelle les soins requièrent une chimiothérapie ou encore un enfant atteint d'une maladie incurable pour laquelle il n'existe plus de traitement standard ne constitue pas nécessairement un risque sérieux, alors que ce serait vraisemblablement le cas pour un enfant en bonne santé. Donc, la notion de risque sérieux est donc une notion importante à préserver.

Donc, je termine en vous remerciant de votre attention. Nous répondrons à vos questions.

Le Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation, M. Sinnett. Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup. M. Sinnett, mesdames. Je voudrais débuter par la dernière intervention que vous avez faite au niveau du risque sérieux. Certaines personnes, devant cette commission, ont prétendu que des essais cliniques, par exemple de chimiothérapie, n'étaient pas possibles à faire au Québec, étant donné cette disposition-là, et la modification qui est dans le projet de loi, c'est justement d'ajouter «dans les circonstances» pour qu'on puisse interpréter le risque sérieux à la lumière des circonstances, ce qui n'est pas tout à fait le cas actuellement. Et je voudrais comprendre comment vous interprétez la notion de risque sérieux telle qu'elle est libellée actuellement dans l'article 21.

Le Président (M. Bergman) : M. Sinnett. Me Cardinal.

• (11 h 50) •

Mme Cardinal (Geneviève) : En fait, comme le disait mon collègue, un risque sérieux est vraiment fonction de l'enfant qu'on a devant nous, donc du contexte dans lequel se déroule une étude. Un risque sérieux... C'est clair qu'une chimiothérapie, si on en parle comme ça, chimiothérapie, pour moi qui n'ai pas besoin de chimiothérapie, comporte un risque sérieux. Par contre, une chimiothérapie, avec tous les effets secondaires qu'elle comporte, qu'elle soit expérimentale n'est pas... ne comportera pas un risque sérieux pour un enfant qui, de toute façon, aurait besoin de chimiothérapie ou pour un enfant pour qui on a essayé toutes les chimiothérapies standards qu'on a et pour qui on n'a plus rien d'autre à lui offrir.

Donc, je pense que c'est un critère qu'on peut interpréter en fonction des contextes, qui est un critère qui permet quand même de protéger les enfants puis qui est une balise qu'on utilise à Sainte-Justine depuis de nombreuses années, qui fonctionne très bien.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Donc, si je comprends bien, vous interprétez l'article 21 actuellement dans le sens qu'on veut le modifier, c'est-à-dire vous interprétez «un risque sérieux dans les circonstances».

Le Président (M. Bergman) : Me Cardinal.

Mme Cardinal (Geneviève) : Oui, oui.

M. Hébert : O.K. Moi, j'aimerais que vous reveniez sur des exemples de travaux, là, chez les 14-18 ans, qui sont impossibles à réaliser dans le contexte actuel de l'article 21.

Le Président (M. Bergman) : M. Sinnett.

M. Sinnett (Daniel) : Donc, les... Bien, on va prendre quelques exemples. Nous avons, par exemple… Je vais prendre un exemple en oncologie parce que c'est mon domaine, mais on pourrait aller dans d'autres domaines, si vous le voulez. Je dirais, la première constatation d'un hôpital comme Sainte-Justine, c'est qu'au départ on travaille avec un ensemble de maladies plus ou moins rares. La notion de maladie fréquente n'existe presque pas. Dans le milieu adulte, ça peut être différent.

Pour nous, en oncologie, par exemple, dans tout le Québec, nous avons 120 enfants atteints d'un cancer pédiatrique, O.K.? Une leucémie de l'enfant comme celle-là, que je travaille, c'est 40 cas au Québec. Pour mettre dans une perspective donnée, en oncologie pédiatrique, donc ces 120 cas là, les personnes qui en décèdent, c'est la principale cause de mortalité par maladie au Québec. Donc, ça vous donne une idée un peu des chiffres.

Donc, si on part de ce qui est le plus fréquent, on parle de 120 au Québec, à partir de ce moment-là, tout est très rare. Donc, dans un contexte de maladie rare, si on veut commencer à développer des biomarqueurs, par exemple, pour déterminer, dans telle mesure... pour détecter la maladie ou le diagnostic ou pour suivre une maladie, pour développer de nouvelles cibles thérapeutiques pour améliorer les soins, parce que plus la maladie est rare, moins il y a d'intérêt aussi en recherche de ce côté-là, on doit trouver un mécanisme qui nous permette de faciliter ces recherches-là.

Le problème d'une maladie rare, encore une fois, si je reviens là, si on a besoin — c'est un des exemples qui est donné dans le mémoire — si on a besoin d'une dizaine de cas qui nous permettent d'avoir des données probantes qui nous permettent d'aller à l'étape plus loin, de faire un essai clinique, par exemple, à plus grande échelle, et que nous avons deux cas par année, et donc ça prend cinq ans pour avoir 10 cas, et qu'on n'a pas accès à ces cas-là en arrière qui sont dans les congélateurs parce que les personnes sont décédées, que c'est difficile...

M. Hébert :

M. Sinnett (Daniel) : Pardonnez-moi?

M. Hébert : Mais ce n'est pas sur cet élément-là que je voulais avoir votre avis.

M. Sinnett (Daniel) : O.K. Ce n'est pas... C'est la première partie?

M. Hébert : C'est le consentement des mineurs de 14 à 18 ans.

M. Sinnett (Daniel) : O.K. Excusez-moi. O.K. Donc, avec le... O.K. Ça va. Donc, au niveau de cet... Les exemples qu'on a donnés, c'est... on a donné l'exemple, par exemple, des filles-mères, c'est l'exemple que vous parlez? O.K., l'exemple des filles-mères. Donc là, vous êtes dans une circonstance où, bon, on parle de recherche, souvent, qui est plus psychosociale ou déterminant de santé. Vous êtes dans un environnement particulier, donc vous êtes aussi dans un environnement familial particulier, et les... et donc le fait de vouloir faire une recherche, par exemple, sur les habitudes concernant la consommation de drogues ou d'alcool, ou d'avortement, ou de comportements sexuels x, y, z, ou même d'inceste aussi… De ce côté-là, on s'entend bien que c'est difficile de demander à cette jeune fille là l'autorité parentale pour faire un projet de recherche qui peut les concerner ou qu'ils ne veulent pas qu'ils soient considérés. Et donc ça rend très difficile ce type de recherche là au niveau surtout des adolescentes. C'est ce qu'on veut dire comme frein.

Donc, comme… à l'étape... À l'autre niveau, d'aller demander au parent l'autorisation de faire ce type de recherche là, là ça ne serait probablement pas à cause du contexte familial ou du contexte de la question qui est posée, donc la recherche ne se fera pas, si vous voulez, les... tout simplement.

Et on a d'autres exemples qu'on discutait ensemble, il y a tout, aussi... les personnes qui peuvent être des sujets de ces projets de recherche là qui sont en institution, par exemple, ne sont pas nécessairement chez les parents, encore là pour d'autres raisons familiales, où on n'ira pas, normalement, demander l'autorisation de l'autorité parentale. Donc, il y a plusieurs types de recherche, dans un type plus psychosocial, qui sont très difficiles à réaliser à cause du cadre, présentement, de la loi.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Êtes-vous au courant s'il y a des études multicentriques pancanadiennes ou encore nord-américaines dans lesquelles Sainte-Justine n'a pas pu participer à cause de cette disposition du Code civil?

M. Sinnett (Daniel) : Oui, beaucoup. Mais c'est une recherche... La notion d'étude multicentrique, soit canadienne ou internationale, évidemment, là, je reviens encore avec mon exemple de maladie rare, c'est un incontournable, et les... et, pour d'autres pathologies un peu plus fréquentes, ça devient un incontournable parce qu'on est toujours confrontés avec, toujours, l'échantillonnage, le nombre de patients qu'on recrute pour s'assurer que le résultat qui est généré a une valeur pour aller à l'étape plus loin, si vous voulez. Et le reste du Canada n'a pas les mêmes contraintes. Donc, c'est sûr qu'à l'intérieur du Canada le reste du Canada le sait, et souvent on n'est même plus invités à participer à différents consortiums canadiens, on est exclus, de sorte que, je dirais, les résultats de la recherche qui est générée, qui pourraient être très bien pour nos propres patients ici, au niveau du Québec, on ne peut même pas utiliser les retombées, on n'a pas fait partie de l'étude de ce côté-là. Et donc c'est sûr que, nous, ça fait un frein, mais en même temps, pour nos patients tels quels, notre clientèle, si vous voulez, on ne peut pas bénéficier d'études dont le leadership viendrait d'ailleurs. Et donc c'est fait à deux niveaux, donc, localement, je dirais, l'incapacité de faire le projet de recherche, aussi, à travers les consortiums, l'incapacité de participer à ces consortiums-là, canadiens ou internationaux, ça, c'est sûr.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Au niveau du consentement écrit, j'aimerais que vous m'expliquiez, là, les préoccupations que vous avez, pour préciser davantage le libellé du projet de loi par rapport au consentement écrit.

Le Président (M. Bergman) : M. Sinnett. Me Cardinal.

Mme Cardinal (Geneviève) : Oui, absolument. En fait, ce qui nous préoccupait particulièrement, c'est que l'article a été modulé en disant qu'on pouvait aller chercher un consentement d'une forme différente si les circonstances le justifient. «Si les circonstances le justifient», c'est très large, c'est un terme vague. On craint que ça porte à interprétation d'un centre à l'autre et on disait : Dans le fond, les critères, quels sont-ils? Ce serait probablement de dire : Un consentement n'a pas besoin nécessairement d'être écrit quand on est dans des domaines où il y a un risque minimal, donc c'est des critères que vous reprenez à d'autres endroits dans le projet de loi et qu'on n'est pas capables ou pratiquement incapables d'aller chercher un consentement.

Une voix : Écrit.

Mme Cardinal (Geneviève) : Écrit, oui, absolument. Écrit, pardon. Oui.

M. Hébert : Comment ça pourrait être interprété, d'après vous, «si les circonstances le justifient»?

Mme Cardinal (Geneviève) : Bien, nous, on avait une crainte. On veut juste être certains, entre autres, qu'on ne se servira pas de cet article-là lorsque c'est difficile d'aller chercher un consentement écrit pour faire des essais cliniques sans un consentement écrit, par exemple.

M. Hébert : Mais vous savez que les règles fédérales obligent un consentement écrit dans ce cas précis de toute façon.

Mme Cardinal (Geneviève) : Absolument. Mais on préférerait être en harmonie avec les autres textes à ce niveau-là.

M. Hébert : Ah! O.K.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : De toute façon, lorsqu'il y a un essai clinique… doit obtenir un consentement écrit, alors...

Mme Cardinal (Geneviève) : Absolument.

M. Hébert : ...nonobstant ce qui est là, là.

Mme Cardinal (Geneviève) : Absolument. Et par ailleurs on est favorables à l'assouplissement qui est proposé, parce que, je veux dire, il ne faut pas se le cacher, il y a des recherches qui sont difficiles... qui ne sont pas impossibles mais qui sont très difficiles à faire sur le terrain avec un consentement écrit.

M. Hébert : O.K. Comme?

Mme Cardinal (Geneviève) : Comme par exemple, une recherche dans le domaine psychosocial où on étudie la relation d'amis chez des adolescents, quel est l'impact de la relation d'amis chez des adolescents. Bien, dans ce cas-là, les chercheurs partent de leur groupe de participants adolescents, doivent rejoindre les amis des adolescents à qui on va demander de répondre à des questions par téléphone. Donc, ce qu'on me dit, c'est que j'appelle les amis, on leur explique la recherche. Les amis, souvent, vont dire : Bien, pas de problème, je vais répondre à tes questions. Posez-moi vos questions immédiatement, ça me fait plaisir, tout en sachant quel est l'objet de la recherche et ce qu'on attend d'eux. Par contre, on est obligés de leur répondre : Bien, écoutez, pas tout de suite, on ne peut pas vous poser les questions. On doit avant tout vous envoyer un formulaire de consentement par la poste. Vous devez le lire. Si vous avez des questions, vous nous rappelez, bien sûr. Vous devez le signer et nous le renvoyer par la poste, et, à ce moment-là, on perd beaucoup, beaucoup de participants.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Bien, dans l'exemple que vous citez, avec votre modification, votre libellé, on ne pourrait pas invoquer que c'est presque impossible à obtenir, le consentement. Donc, je trouve qu'on serait pris, encore une fois, avec la même contrainte...

Le Président (M. Bergman) : Me Cardinal.

M. Hébert : ...alors que «si les circonstances le justifient» le permettait.

Le Président (M. Bergman) : Me Cardinal.

Mme Cardinal (Geneviève) : Bien, je pense que, quand on parle de recruter 500 adolescents de cette façon-là, de demander un consentement écrit, c'est pratiquement impossible.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : O.K. Je voudrais juste compléter en disant que ce que vous soulevez au niveau de l'utilisation du matériel biologique déjà collecté, c'est tout un chapitre qui va faire l'objet d'un projet de loi en soi et qu'on va proposer à l'Assemblée nationale au cours des prochains mois. Mais vous comprenez que c'est tout un autre pan du consentement qu'on voulait séparer de l'actuel projet de loi, qui était plus fixé sur le consentement des mineurs et des personnes inaptes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : Alors, ceci met fin au bloc du gouvernement. Le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.

• (12 heures) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, merci, M. le Président. Juste pour la dernière phrase du ministre, moi, je suis d'accord, on ne devrait pas l'inclure dans ce projet de loi là. Il y a quelques personnes qui nous en ont parlé, c'est une autre discussion.

Et puis, là, la question que je voulais vous poser par rapport à ça : Si vous voulez avoir accès aux tissus après le décès ou lorsque quelqu'un ne peut plus consentir, moi, je... en tout cas, je vais avoir du questionnement par rapport à ça, parce que ça veut dire que, là, on ferait des choses avec les tissus de la personne alors que la personne ne le savait pas. Pourquoi vous ne l'incluriez pas dans votre protocole de recherche que ça pourrait être disponible par la suite? Parce que moi, je me souviens des années 90, j'étais au comité de la recherche à Chicoutimi, il y avait eu une cause, entre autres, à l'hôpital de Chicoutimi, contre un chercheur, et puis c'était qui qui aurait le droit au matériel biologique. Puis l'autre élément, c'est : les gens ne savent pas, à ce moment-là, quand ils embarquent dans le projet de recherche, qu'est-ce qui va être fait avec leurs tissus après.

Le Président (M. Bergman) : M. Sinnett.

M. Sinnett (Daniel) : Non, c'est une excellente question. Les... donc… Puis il y a différents éléments de réponse dans la question. C'est évident, si aujourd'hui on démarre un projet de recherche sur le cancer qui a un cas à tous les deux ans, les patients vont être sollicités dans la façon standard de le faire, avec un formulaire de consentement, puis que le projet va avoir son accord, puis avec toutes les sous-questions qu'on va demander, l'usage du matériel à différentes fins, le partage selon les règles de l'art.

Ici, ce qu'on parle, c'est qu'on arrive en 2013, et là, soudainement, on a une question intéressante, il y a eu un nouveau développement, parce que la recherche se fait à différents endroits, on aurait besoin maintenant de 10, par exemple, patients de tel type. Et là la question se pose : Est-ce qu'on attend cinq ans pour les recruter ou on retourne, ceux qu'on a eus, en arrière pour valider, finalement, le biomarqueur ou pour confirmer que c'est une vraie belle cible, qu'on peut faire quelque chose avant? Elle est là, la question. Parce qu'on est d'accord avec vous, dans l'idéal, on le recrute tout de suite. Ça, on est tous d'accord avec ça.

Et donc, dans ce... Et on le sait que c'est quelque chose où on doit faire attention, être vigilants dans cette source de matériel d'archive. Et c'est là qu'on met à profit notre comité d'éthique. À vrai dire, c'est au comité d'éthique qu'on considère... finalement, va être la personne qui va juger si la requête qui est faite pour l'utilisation — en tout cas, dans un cas où on aurait le droit — du matériel, avec la requête qu'on voulait faire, si c'est éthiquement acceptable dans le contexte tel qu'on l'a proposé. Donc, à ce moment-là, le comité d'éthique agit un peu comme le représentant, si vous voulez, du patient et de sa famille.

On juge ça plus adéquat que de retourner auprès… Parce que, bon, vous le savez probablement, il y a certaines maladies qui sont plates, le cancer pédiatrique, c'en est un, et de retourner auprès de la famille quelques années plus tard pour leur faire revivre encore une fois ça, il n'y a personne qui est prêt à faire ça.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Je voudrais... Ça ne fera pas partie du présent projet de loi, mais il y a une réflexion très en profondeur à faire là-dessus, qui est beaucoup plus qu'un dialogue à faire aujourd'hui. Je comprends que le ministre va revenir là-dessus. Puis j'avais compris également que, vu que c'était un projet de loi qui est très restreint, on voulait régler des choses peut-être un peu plus urgentes, puis moi, je savais qu'il y avait un projet de loi qui avait été travaillé au ministère, donc on va revenir par la suite. Puis, ce qu'on veut faire là-dedans, puis je tiens à le dire, on ne veut pas mettre de partisanerie là-dedans, on veut vraiment s'organiser pour faire le mieux et pour la recherche mais surtout, à la fin, pour les patients. Ça fait que, ça, je pense qu'on a eu la réponse du ministre puis je suis très satisfait de ça.

Je reviendrais sur un élément, qui est celui des circonstances à justifier, risque minime, risque sérieux. Vous m'avez un peu donné raison la semaine passée, quand vous dites : À Sainte-Justine, notre interprétation est celle-là, et on n'a pas besoin de changer ça. On a rencontré d'autres comités, d'autres représentants, et leur interprétation était complètement différente. Moi, ce que ça me dit, là, c'est que ce n'est pas nécessairement Sainte-Justine qui a raison, pas nécessairement tort, mais ça veut dire qu'on a besoin de clarification. Et tantôt vous disiez : Bien, dans ce qu'on... on devrait se contenter de ça, parce que notre interprétation est celle-là. Moi, comme législateur, ça ne me satisfait pas. Parce que, si vous, vous l'interprétez comme ça, puis il y en a qui sont venus, la semaine passée, nous dire, puis ça a été repris par le ministre textuellement, en disant : Vous ne pouvez pas faire de projet pour le cancer à cause de ça, c'est parce qu'il y a quelqu'un à quelque part qui a interprété différemment. Puis je ne veux pas porter de jugement sur les différents niveaux des avocats, mais il y a eu des interprétations, par des gens très compétents, différentes. Ça fait que je ne sais pas si ça vous convainc que ça vaut la peine de clarifier ça.

Le Président (M. Bergman) : M. Sinnett. Me Cardinal.

Mme Cardinal (Geneviève) : Ce que je craindrais le plus, c'est qu'on enlève toute notion de risque dans le Code civil. Ça, ça m'inquiéterait énormément. La notion de risque sérieux, je pense, permet... est une balise qui permet de protéger les enfants. Je pense qu'il faut le voir sous cet angle-là. C'est une population vulnérable, il faut faire attention aux mots qu'on va utiliser. Est-ce qu'on peut parler d'une proportionnalité de risques, ou mieux le définir? Peut-être, mais je pense qu'il faut absolument conserver une notion de risque dans le Code civil.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. De conserver la notion de risque, je suis d'accord avec vous. Mais tantôt votre interprétation était que, même lorsque ça pouvait représenter un danger, lorsque la maladie était encore plus grave que le risque, on pouvait aller de l'avant. Mais ça n'a pas été l'interprétation de d'autres groupes. Puis là on parle pour les enfants, mais c'est la même règle qui s'applique pour les personnes inaptes et les adultes. Donc, c'est pour ça que je pense qu'il faut vraiment prendre le temps de rédiger à nouveau cet article-là, pour que la réalité soit conforme avec les mots qu'on veut mettre. Je pense que c'est... Ça, ça va être un élément sur lequel, moi, je vais insister. Et puis vous venez de me donner la réponse. Il faut qu'on parle de risque, mais on peut peut-être plus parler de proportionnalité de risques. Comment nos légistes vont le rédiger, on va avoir l'occasion de le travailler. Mais on veut vraiment garder cette notion-là de risque mais que tout le monde comprenne la même chose.

Le Président (M. Bergman) : M. Sinnett.

M. Sinnett (Daniel) : Oui. Bon, je pense qu'on est d'accord sur certains points. La notion de risque pondérable en fonction d'une situation, je pense que c'est quelque chose qu'on... c'est là qu'on voudrait s'aligner.

Je voudrais juste revenir sur les questions de chimiothérapie et de cancer pédiatrique; bon, c'est mon domaine, là. Ce qu'il faut comprendre, c'est que vous avez devant vous un individu, vous lui offrez un traitement qu'on va qualifier de standard. Donc, à ce moment-là, ce n'est pas un projet de recherche, c'est un standard. Et ce qu'on lui propose comme alternative, c'est de participer à une étude... à un projet de recherche multicentrique. Et on le sait parce qu'il y a des données probantes qui démontrent que ce projet-là multicentrique, bon, avec différents changements dans le protocole, augmente ses chances de survie de 15 % à 20 %, O.K.? Et donc c'est la raison pour laquelle à peu près 80 % des enfants à Sainte-Justine sont sur protocole. Parce que le protocole qui est proposé augmente l'espérance de vie de 15 % à 20 %. Et donc ça, c'est considéré, par le comité d'éthique, dans un risque. C'est la même chose pour une maladie, par exemple, qu'il n'existe pas de cure. Arrive une possibilité. L'enfant va décéder, probablement. Arrive un protocole, par exemple, particulierqu'on pourrait essayer. Donc, on va l'essayer. Donc, la notion de risque est variable, alors que, l'individu qui n'est pas malade, on ne va pas le soumettre à de la chimiothérapie.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Juste pour vous dire...

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : ...c'est ce qu'on veut que vous faites... que vous allez faire... que vous fassiez, sauf qu'il faut qu'on l'écrive comme il faut, de façon à vous permettre de le faire mais que tous les centres aient la même interprétation pour que… c'est vrai pour vous, c'est vrai pour les adultes.

Rapidement, parce qu'il vous reste peu de temps... il nous reste peu de temps, une petite question, probablement que c'est Me Lecoq qui va pouvoir répondre, l'article de la question de la confidentialité, vous dites : Ça va aller comme un peu dans le traitement des plaintes; c'est l'article 218, que vous connaissez très bien. L'article 218, à ma connaissance, même le patient n'a pas accès à son dossier dans le cas d'une plainte.

Mme Lecoq (Nathalie) : Dans le cas d'une plainte...

Le Président (M. Bergman) : Me Lecoq.

Mme Lecoq (Nathalie) : Pardon. Dans le cas d'une plainte...

M. Bolduc (Jean-Talon) : ...le patient.

Mme Lecoq (Nathalie) : ...le plaignant va avoir accès à son dossier de plainte parce que c'est les mêmes règles qui s'appliquent dans la Loi sur les services de santé et services sociaux. Donc, tout le régime, de l'article 17 à 28, s'applique pour le dossier de plainte également. Et le législateur l'avait prévu expressément. On voit, avec la réforme proposée pour la Loi sur les services de santé et services sociaux...

M. Bolduc (Jean-Talon) : Me Lecoq, c'est juste pour savoir, quand je... juste pour spécifier, quand ça va être une plainte qui va être étudiée par le médecin examinateur, parce que, si vous suivez le même régime, ça va aller... la plainte qui concerne un professionnel va aller au médecin examinateur. Et cette plainte-là va être protégée par l'article 218.

Le Président (M. Bergman) : Me Lecoq.

Mme Lecoq (Nathalie) : Oui. Si ça monte au comité de discipline… Quand la plainte est référée par le médecin examinateur à un comité de discipline au conseil des médecins, donc, aussi les pharmaciens, les dossiers du CMDP, oui, sont protégés, mais le dossier de plainte demeure accessible au patient, donc au plaignant. Ça, ça reste. Je pense que c'est important. Parce qu'on a ouvert la porte depuis l'arrêt Gomez contre Michaud de la Cour d'appel qui disait que c'était important de traiter tous les participants à une recherche comme des usagers, notamment quand ça se passe dans un établissement de santé. On voit que l'ajout de le codifier dans la Loi sur les services de santé et services sociaux est important. Je pense qu'il faut profiter de l'occasion pour s'assurer qu'on gère la question justement de conférer les mêmes droits aux participants de recherche, à la confidentialité de leurs dossiers de recherche aussi, comme on fait pour leurs dossiers patients.

Si je pouvais juste revenir sur un petit point...

Le Président (M. Bergman) : ...

• (12 h 10) •

Mme Lecoq (Nathalie) : ...quand on discutait du risque sérieux. Est-ce que c'est possible? Juste de... Parce que, dans le fond, si je comprends bien, dans le projet de loi, on ajoute le terme, je vais juste lire le premier alinéa : «Un mineur ou un majeur inapte ne peut participer à une recherche qui comporte, dans les circonstances, un risque sérieux pour sa santé…» À ce niveau-là, nous, on accueille favorablement ça. Les termes «dans les circonstances», c'était plutôt au troisième alinéa du projet de loi qu'on trouvait que ça portait à confusion quand un comité d'éthique de la recherche doit se prononcer sur ça. Donc, je voulais juste qu'on clarifie.

Pour nous, ça répond à la préoccupation justement, peut-être, de l'application et l'interprétation qui n'est pas uniforme par rapport à la notion de risque sérieux. Donc, en ajoutant «dans les circonstances», ça permettrait justement aux gens d'avoir cette marge de manoeuvre.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Maintenant, pour le bloc du deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci. Merci de votre présence. Je reviens effectivement sur la notion de risque sérieux, là, qui semble faire l'unanimité à chaque fois qu'il y a un groupe qui se présente devant nous. Mais aujourd'hui votre position est complètement... bien, est différente des groupes précédents. Et ce que j'entends de vous, c'est effectivement qu'on veut préserver la notion de risque, de le revoir retrouvé.

Par contre, actuellement, dans le Code civil, l'article 20 nous dit : Un risque qui «ne soit pas hors de proportion avec le bienfait qu'on peut raisonnablement en [retirer]».

Mme Lecoq (Nathalie) : ...majeur apte.

Mme Daneault : Oui. Mais est-ce que... À l'article 21, si on remplaçait «risque sérieux» par ce même libellé, est-ce que, selon vous, ça correspondrait, dans le sens de conserver la notion de risque, mais est-ce que ça répondrait aussi à vos ententes de le libeller de cette façon-là plutôt que le libeller uniquement comme un risque sérieux?

Le Président (M. Bergman) : M. Sinnett. Me Cardinal.

Mme Cardinal (Geneviève) : Je pense... Écoutez, je le réfléchis au moment où vous posez la question. «…que le risque couru ne soit pas hors de proportion avec le bienfait qu'on peut raisonnablement en espérer.» J'imagine que, lors de la rédaction de l'article 21, on a voulu être plus protecteur en parlant de risque sérieux. Est-ce que le critère qu'on utilise chez l'adulte pourrait protéger adéquatement l'enfant? Je veux dire, on assurait quand même une bonne protection.

Un autre exemple de comment on utilise le risque sérieux à l'hôpital, si ça peut vous aider, par exemple, lorsqu'on a un projet de recherche où on ne nous demande de faire une endoscopie ou une ponction de moelle osseuse qu'aux fins de la recherche, on va faire valoir la notion de risque sérieux pour dire que ce n'est pas possible. On ne fera pas subir une ponction de moelle osseuse ou une endoscopie à un enfant qui n'en a pas besoin dans le cadre de ses soins, donc pour les seules fins de la recherche.

Mais, écoutez, je pense que ça peut être intéressant comme notion, là. Il faudrait y réfléchir.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, en fait.

Le Président (M. Bergman) : Alors, M. Sinnett, Me Cardinal, Me Lecoq, merci pour votre présentation et l'échange avec les députés.

Collègues, je suspends seulement pour quelques instants pour laisser les gens de la Commission d'accès à l'information pour prendre place à la table. Je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 12 h 13)

(Reprise à 12 h 15)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît. Alors, je souhaite la bienvenue à la Commission d'accès à l'information. Me Desmeules, Me Giroux-Blanchet, Mme Bétie, bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, s'il vous plaît, faites l'identification de chacun de vos membres. Et vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.

Commission d'accès à l'information (CAI)

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Merci. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, permettez-moi, dans un premier temps, effectivement, de vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui, soit, à ma droite, Me Sophie Giroux-Blanchet, de la Direction des affaires juridiques de la commission, ainsi qu'à ma gauche Mme Christiane Bétie, directrice de l'analyse et de l'évaluation à la commission. Le président de la Commission d'accès à l'information, Me Jean Chartier, s'excuse auprès des parlementaires de ne pouvoir être présent aujourd'hui en raison d'un ennui de santé. C'est donc à titre de secrétaire général et directeur des affaires juridiques que je vous transmettrai la position de la commission en lien avec le projet de loi n° 30.

J'aimerais remercier les membres de la Commission de la santé et aux services sociaux d'offrir à la commission l'opportunité de participer à ces consultations particulières et auditions publiques et de présenter ses commentaires et réflexions concernant ce projet de loi. Tout comme elle en a fait mention dans son rapport quinquennal de 2002, la commission croit qu'il est toujours d'actualité de discuter des enjeux liés à la recherche et à la protection des renseignements personnels.

La commission est d'avis que la recherche doit se faire dans le respect de plusieurs valeurs fondamentales de notre société, dont la protection des renseignements personnels et le droit à la vie privée, prévus à la Charte des droits et libertés de la personne. À cet effet, la commission croit que l'amélioration de la santé et du bien-être par la recherche doit se faire dans un contexte de transparence, de respect de la volonté des personnes et d'imputabilité. De plus, la commission considère que plus un renseignement personnel collecté est susceptible de révéler des informations sensibles sur une personne, plus grandes doivent être les garanties de confidentialité.

Après analyse du projet de loi, la Commission d'accès à l'information nous demande de faire part aux parlementaires de quelques observations au regard de son mandat de surveillance et de promotion de la protection des renseignements personnels, et ce, afin d'assurer une juste utilisation des renseignements personnels dans le cadre de la recherche.

Le projet de loi n° 30 prévoit un assouplissement des règles applicables au consentement du mineur de 14 ans et plus et du majeur inapte dans le cadre de recherche présentant un risque minimal pour les individus concernés lorsque les circonstances le justifient. Ces modifications découleraient de problèmes auxquels seraient confrontés les chercheurs et qui nuiraient à la recherche lorsqu'il s'agit d'impliquer ces deux clientèles vulnérables. De plus, le projet de loi accorde un rôle accru au comité d'éthique de la recherche dans l'évaluation des conditions permettant le consentement des mineurs de 14 ans et plus et des majeurs inaptes.

Le libellé actuel des articles visés par les modifications du projet de loi a été adopté tenant compte de la vulnérabilité des mineurs et des majeurs inaptes. Des moyens supplémentaires de contrôle et de protection ont en conséquence été mis en place par le législateur. La commission appelle à la prudence dans les assouplissements proposés par le projet de loi, considérant la difficulté d'évaluer les conséquences des changements proposés sur la protection des renseignements personnels des personnes concernées.

La protection de l'intégrité et de l'inviolabilité de la personne est établie par le Code civil, et une atteinte à cette intégrité doit être faite uniquement avec le consentement libre et éclairé de la personne ou de son représentant. Dans le cas des mineurs de 14 ans et plus et des majeurs inaptes, le projet de loi propose de permettre aux mineurs et à la personne habilitée à consentir aux soins du majeur inapte de consentir, si les circonstances le justifient, à la participation de recherche. Une telle participation peut impliquer la collecte, la conservation, l'utilisation et peut-être même la communication de renseignements personnels. La commission insiste afin que les intervenants s'assurent que le consentement qui sera donné par ces personnes soit sans équivoque. Selon la commission, recourir au consentement du mineur, à titre d'exemple, ne devrait être utilisé qu'exceptionnellement et après qu'ait été envisagée la possibilité, dans tous les cas, de recourir au consentement de l'autorité parentale ou du tuteur du mineur.

En outre, la complexité des travaux de recherche exige, selon la commission, des efforts accrus de vulgarisation auprès des personnes visées afin que le consentement obtenu soit éclairé. La commission rappelle que même les majeurs aptes ne possèdent pas toujours les connaissances nécessaires à l'évaluation des informations et des conséquences possibles d'une collecte de renseignements personnels dans le cadre d'une recherche dont les enjeux font appel à des connaissances particulières de domaines spécialisés. Ainsi, la personne doit recevoir les explications pertinentes pour lui permettre de comprendre et de connaître la nature, le but et la durée de la recherche.

Un consentement valable doit être manifeste, libre, éclairé, donné à des fins spécifiques et ne valoir que pour la durée nécessaire à la réalisation des fins spécifiées. Par ailleurs, la commission rappelle que l'utilisation secondaire des renseignements personnels collectés à la suite de l'expression d'un consentement dans le cadre d'une recherche doit également faire l'objet d'un consentement.

• (12 h 20) •

La commission s'interroge également sur la mise en oeuvre de l'obtention d'un consentement autrement que par écrit, sur le fait que les modalités d'obtention du consentement soient déterminées par le comité d'éthique de la recherche. La commission se questionne sur l'approche qui sera retenue par les différents comités d'éthique pour déterminer les modalités permettant de constituer une preuve de ce consentement.

Un autre point à préciser, selon la commission, concerne la validité du consentement de la collecte d'organes, de tissus ou d'autres substances prélevés sur une personne dans le cadre de soins qui lui sont prodigués et utilisés aux fins de recherche après le décès de cette personne. À ce sujet, la commission suggère que tout soit mis en place afin d'obtenir, dans tous les cas qui s'y prêtent, le consentement de la personne de son vivant afin de limiter autant que possible les situations au cours desquelles il sera nécessaire de demander le consentement de la personne qui pouvait ou aurait pu consentir aux soins en lieu et place de la personne décédée. En effet, il est nécessaire, de l'avis de la commission, de prendre tous les moyens disponibles afin de consigner et de respecter les volontés du défunt.

Le rôle élargi des comités d'éthique à la recherche amène la commission à s'interroger sur l'encadrement législatif et réglementaire applicable à ces comités d'éthique. La commission suggère qu'un cadre plus précis soit adopté afin de prévoir quelles devraient être leurs responsabilités actuelles et futures en lien avec les rôles et mandats des différents intervenants impliqués dans une recherche. Pour la commission, il semble requis d'établir des règles claires qui devront être mises en place afin d'encadrer les travaux et les suivis réalisés par les comités d'éthique en matière de protection des renseignements personnels.

La commission est préoccupée à la suite de certains propos tenus dans le cadre des consultations publiques relativement à ce projet de loi, notamment quant aux différences d'approche entre les comités d'éthique. Plus particulièrement, la commission se questionne sur la prise en compte par les comités d'éthique, lors de l'évaluation des projets de recherche qui leur sont soumis, de la protection des renseignements personnels. En effet, la commission se questionne quant à l'expertise des comités d'éthique à prendre en considération les obligations prévues aux lois en matière de protection des renseignements personnels et sur la formation dispensée à ce sujet aux membres de ces comités.

Puisque les comités d'éthique, selon ce que prévoit le projet de loi, auront à déterminer dans quels cas le consentement auprès des mineurs de 14 ans et plus ou des personnes pouvant consentir aux soins pour les majeurs inaptes sera opportun, la commission s'interroge sur l'approche qui sera retenue, dans les faits, par les comités d'éthique. Puisque ces comités d'éthique à la recherche sont institués ou désignés par le ministre de la Santé et des Services sociaux, la commission estime que le ministre doit veiller à sensibiliser et à former les membres de ces comités. En outre, la commission propose également la mise en place d'une reddition de comptes du suivi et de l'application des règles en matière de protection des renseignements personnels par les comités d'éthique.

Par le passé, le Conseil de la santé et du bien-être avait recommandé au gouvernement d'allouer un budget de recherche et d'éducation à la commission afin qu'elle puisse assurer auprès de la population et des intervenants du milieu de la santé et de la recherche la promotion des droits visant la protection des renseignements personnels, la bonne compréhension des responsabilités qui s'y rattachent ainsi que leur application dans le contexte de la recherche. Cette possibilité est une autre alternative. Mais ce qui importe, c'est qu'un contrôle soit assuré, et que les comités d'éthique soient imputables à leur interprétation des règles assurant la protection des renseignements personnels, et que des mesures soient prévues afin d'assurer une transparence du processus menant à une recherche.

En guise de conclusion, la commission est d'avis qu'il est important de maintenir un équilibre entre les buts poursuivis par la recherche et la protection des renseignements personnels, plus particulièrement quant aux renseignements de santé des personnes vulnérables. Elle espère également que ce projet de loi sera l'occasion de poursuivre la réflexion sur l'encadrement législatif global portant sur la recherche et les comités d'éthique. Enfin, la commission espère que tout sera mis en oeuvre pour obtenir le consentement éclairé des personnes concernées dans le but de protéger les renseignements personnels de celles-ci.

Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation, Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, monsieur, mesdames, pour cette intervention. Je voudrais comprendre pourquoi vous semblez, dans votre mémoire, voir dans les modifications proposées des changements au principe du consentement libre et éclairé. Parce que vous insistez beaucoup sur un consentement sans équivoque. Qu'est-ce qu'il y a, dans ce projet de loi, qui change le principe du consentement libre et éclairé? Je ne comprends pas vos préoccupations.

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, ça découle en bonne partie du fait qu'il ne semble pas y avoir de cadre précis permettant aux comités d'éthique d'aborder les considérations de protection des renseignements personnels dans l'évaluation des situations qui permettent de passer outre, par exemple, au consentement de l'autorité parentale. Donc, il faut toujours, selon la commission, s'assurer que le consentement qui sera exprimé sera fait en connaissance de cause dans toutes les situations.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Où est-ce que le projet de loi modifie le principe du consentement libre et éclairé? ...demandé à quelqu'un d'autre, mais le principe du consentement libre et éclairé, il reste entier.

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Ce n'est pas tant dans les modifications qui sont apportées au projet de loi, c'est un constat par rapport à la pratique qui a présentement cours à l'effet qu'il y a des interprétations qui semblent diverger d'un endroit à l'autre.

M. Hébert : Vous basez cette analyse-là sur quoi?

Le Président (M. Bergman) : ...

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, notamment... Bien, évidemment, je peux vous mettre dans un certain contexte. La commission n'a pas, comme intervenants directs, les comités d'éthique à la recherche. Toutefois, dans le cadre de ses mandats, la commission reçoit des demandes d'autorisation de la part du chercheur pour recevoir communicationde renseignements personnels dans le cadre de recherche sans le consentement de la personne concernée. Dans le cadre de l'évaluation de ses dossiers, il arrive à la commission de prendre connaissance d'interprétations qui sont portées par les comités d'éthique à la recherche sur différents éléments qui ont trait au consentement, notamment. C'est ce qui permet de constater, par la commission, que, des fois, il y a certaines interprétations qui semblent s'écarter des principes qui sont établis. Puis par ailleurs, bien, évidemment, vous avez entendu, au cours de la présente commission parlementaire, certaines interventions à l'effet qu'il y a effectivement des interprétations qui semblent diverger d'un comité d'éthique à l'autre.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Est-ce que je comprends, là, que vous êtes en train de me dire que les comités d'éthique ne prennent pas compte de la protection des renseignements personnels lors de leur évaluation?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Je ne dis pas que, dans l'absolu, il n'y a aucune prise en considération, mais je vous dis qu'il semble y avoir des interprétations qui divergent sur certains éléments qui ont trait au consentement dans l'évaluation qui est faite par les comités d'éthique.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous semblez aussi évoquer que l'utilisation secondaire de données doit faire l'objet d'un consentement, ce qui m'apparaît être une évidence. Et vous semblez donc mettre en doute que ça, ça fasse l'objet d'un consentement.

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, en fait, c'est une règle qui, selon nous, doit être rappelée, parce que c'est un élément qui est important. Que ce soit pour une collecte de renseignements personnels directement au dossier ou que ce soit par le biais de prélèvements de tissus ou d'organes, effectivement l'obtention d'un consentement manifeste sur chacun des éléments de l'utilisation de renseignements personnels sur la commission est un élément important qu'il est bon de rappeler.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Alors, si je comprends bien, vous souhaitez qu'on réfléchisse, peut-être dans un autre contexte ou dans un autre projet de loi, sur la définition ou revenir sur le principe du consentement libre et éclairé et du consentement et de la protection des renseignements personnels. C'est-u ça que je comprends? C'est parce que je ne vois pas le lien avec le projet de loi qui est là actuellement. Alors, s'il y en a un, éclairez-moi, mais, s'il n'y en a pas, je vais comprendre que c'est une invitation à réfléchir de nouveau sur ces principes du consentement libre et éclairé et sur le consentement de l'utilisation des données personnelles.

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Ce que le projet de loi introduit, c'est des modifications qui permettent d'obtenir un consentement auprès de mineurs de 14 ans et plus — donc, qui est une clientèle, selon nous, qui est vulnérable — à l'effet d'obtenir des renseignements, de collecter des renseignements personnels les concernant. Et on introduit... en fait, on élargit le rôle des comités d'éthique à la recherche dans l'appréciation des situations qui devraient donner lieu ou non à ces possibilités. Bien, selon nous, il est nécessaire de préciser le rôle des comités d'éthique à la recherche dans leur appréciation des critères ou des considérants afférents à la protection des renseignements personnels. Puis, de la même façon, pour les majeurs inaptes, on introduit... on élargit les possibilités d'obtenir le consentement non plus simplement auprès du représentant, mais également auprès d'une personne qui peut consentir aux soins pour le majeur inapte dans les circonstances. Et, là encore, on donne un rôle au comité d'éthique à la recherche, mais sans préciser davantage les balises qui devraient guider les activités du comité d'éthique à la recherche. Donc, dans ce sens, nous croyons qu'il serait opportun de préciser les règles... les activités du comité d'éthique.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Alors, quelles sont vos propositions? C'est quoi, les précisions que vous voulez mettre?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

• (12 h 30) •

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : C'est que, dans les travaux des comités d'éthique, il devrait y avoir une prise en considération... Ça devrait être prévu explicitement que les comités d'éthique doivent prendre en considération les règles entourant la collecte de renseignements personnels dans le respect de la vie privée des gens concernés, et, plus on augmente dans la sensibilité des renseignements personnels, plus particulièrement auprès de clientèles vulnérables, ça devient d'autant plus important.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : C'est tout pour moi. Est-ce que mes collègues…

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Bonjour. Bonjour, mesdames et monsieur. Simplement peut-être nous expliquer un peu mieux votre préoccupation par rapport au traitement des plaintes. Alors, si j'ai bien compris ce que vous proposez, c'est qu'on clarifie, en fait, qui va traiter les plaintes dans le cadre d'un projet de recherche dans un établissement. À l'heure actuelle, c'est le comité de plaintes qui reçoit les plaintes des usagers et, s'il y avait des plaintes spécifiques par rapport à la protection des renseignements individuels dans le cadre d'un projet de recherche mené par un établissement, ce que vous dites, là, c'est qu'il pourrait y avoir confusion entre les deux, votre commission et le comité des usagers, pour la réception et l'analyse des plaintes?

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : En fait...

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Oui, merci. En fait, ce n'est pas tant avec le comité des usagers, c'est en lien avec le Protecteur des usagers, qui a compétence, aux termes du processus de traitement des plaintes, pour réviser le traitement qui est fait, dans un établissement, à une plainte. En fait, aux termes du processus justement, une plainte est cheminée au responsable des plaintes dans un établissement et, si l'usager n'est pas satisfait du traitement qui est donné à cette plainte, il peut en référer au Protecteur des usagers, soit le Protecteur du citoyen, là, selon la législation. Et ce que l'article 6 du projet de loi vient introduire, c'est que, lorsque nous sommes dans le cadre d'une recherche, ça aussi, ça fait partie des attributions qui sont dévolues, en termes de processus, au Protecteur des usagers.

Ce qu'on constate, c'est qu'évidemment, un des éléments importants qui pourraient surgir dans le cadre d'une plainte, c'est des éléments qui portent sur le consentement à la communication de renseignements personnels, et, dans ce contexte, la Commission d'accès à l'information, selon elle, a une expertise particulière qui lui permettrait de traiter ce genre de plainte. Évidemment, en vertu de l'article 173 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, soit la loi qui institue la Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen doit acheminer à la Commission d'accès les plaintes qui relèvent davantage de la compétence de la commission. Toutefois, selon la commission, là, à la lecture de l'amendement qui est apporté à l'article 34 de la Loi sur les services de santé et services sociaux, on semble... en fait, je ne suis pas certain que, dans la pratique, on va interpréter comme de quoi que ces plaintes-là doivent nécessairement être référées à la Commission d'accès à l'information, mais qu'on n'est pas en train de créer en quelque sorte une double compétence, une double juridiction entre la Commission d'accès à l'information et le Protecteur du citoyen.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Et ce que vous dites, en fait, c'est que l'expertise, l'expertise la plus probante pour analyser et traiter ces plaintes, c'est la Commission d'accès à l'information qui l'a et qu'on devrait clarifier toute la procédure dans le projet de loi pour s'assurer que les plaintes finissent par aboutir au bon endroit.

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Oui, merci. Évidemment, la compétence particulière de la commission porte sur la protection des renseignements personnels. Parce qu'on convient que, dans le cadre d'une recherche, il peut y avoir bien d'autres éléments qui font l'objet d'une plainte que des éléments afférents à la protection de renseignements personnels. Puis, ça, évidemment, on convient que ça ne relève pas de la compétence de la commission. Mais, pour ce qui a trait à son champ… à son domaine d'expertise, peut-être qu'il y aurait lieu de préciser un peu le champ de compétence de chacune de ces deux institutions désignées par l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci. Merci.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson. Vous avez trois minutes.

Mme Gadoury-Hamelin : Merci. Alors, bonjour. Merci d'être là. Depuis plusieurs jours, on entend… on a entendu différents groupes nous dire comment c'était facilitant pour eux d'avoir un consentement pas nécessairement écrit pour différentes recherches à caractère plutôt psychosocial sur les déterminants de la santé, ce genre de situation là. Vous, pouvez-vous nous préciser vos préoccupations à l'égard de la possibilité de consentir autrement que par écrit? Vous semblez avoir des préoccupations à ce niveau-là. Pouvez-vous nous dire quelles sont vos... nous expliquer vos préoccupations?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Merci. Évidemment, un des éléments qui interpellent la commission là-dessus, c'est évidemment la notion de preuve du consentement, à l'effet d'avoir un élément qui nous permet de comprendre la portée du consentement, qu'est-ce que ça vise exactement, le consentement qui est formulé. Il y a plusieurs éléments, là, qui peuvent entourer les travaux de recherche, notamment pourquoi les renseignements personnels sont communiqués? Est-ce qu'il y aura une utilisation secondaire? Est-ce qu'une communication sera faite à un tiers? C'est tous des éléments qui sont importants, qui méritent d'être précisés. Donc, évidemment, un écrit est un outil facilitant pour déterminer qu'est-ce qui fait l'objet du consentement.

Et puis un autre élément qui est important, c'est aussi à prendre en considération, bien, c'est un éventuel droit de retrait d'une personne. En ayant une preuve écrite du consentement, ça facilite, pour le citoyen ou l'usager, l'exercice du choix de se maintenir ou non dans le cadre de travaux de recherche.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson, il vous reste une minute.

Mme Gadoury-Hamelin : Ça va pour moi. Les collègues?

Le Président (M. Bergman) : Alors, le temps pour l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bien, merci d'être ici. Puis j'ai eu l'occasion d'assister souvent à des présentations de la commission, peut-être pour l'Assemblée, là, peut-être nous expliquer c'est quoi, votre rôle. Puis vous n'allez pas nécessairement dans le détail, mais vous avez quand même un rôle de surveillance générale qui fait que, dès qu'il se fait une loi, vous faites une mise en garde avec beaucoup de prudence par rapport à la loi, puisqu'il s'agit de la protection des renseignements confidentiels. Peut-être en expliquant bien votre rôle, des fois on va peut-être plus comprendre, là, qu'à toute loi vous n'allez pas juste traiter de la loi mais également des possibilités entourant la loi, pour s'assurer de la protection. Je pense que ça permettrait de bien clarifier, parce que vous avez quand même un rôle important de protection.

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, merci beaucoup. En fait, c'est une occasion intéressante que vous nous présentez là. En fait, la Commission d'accès à l'information est un organisme public dont les membres, au nombre de sept, sont nommés par l'Assemblée nationale. La Commission d'accès à l'information a deux volets d'activité particuliers, soit l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Et, pour exercer ces fonctions, elle dispose d'un volet juridictionnel qui est en quelque sorte son rôle de tribunal administratif mais également des fonctions de surveillance. Plus spécifiquement aujourd'hui, c'est le volet renseignements personnels et protection des renseignements... en fait, protection des renseignements personnels mais dans le cadre de ses activités de surveillance que finalement je m'adresse à vous.

La protection des renseignements personnels dans le cadre des activités de surveillance peut être abordée par la commission notamment dans le cadre de traitement de plainte. Lorsqu'un citoyen considère que, par exemple, ses renseignements personnels n'ont pas été traités adéquatement ou conformément à la loi, il peut porter plainte à la commission, qui peut examiner la plainte et a un pouvoir d'ordonnance, éventuellement. Également, la commission peut — j'y ai fait référence tout à l'heure — accorder à un chercheur l'autorisation de recevoir des renseignements personnels sans le consentement de la personne, toujours à des fins de recherche.

Mais également la commission a un rôle de promotion de la protection des renseignements personnels lorsque, selon elle, il y a des considérants, notamment dans un projet de loi, qui méritent d'être portés à l'attention du législateur. Donc, c'est un peu, en quelque sorte, en vertu de cette possibilité que lui offre la loi que la commission intervient auprès des différentes commissions parlementaires pour faire valoir des préoccupations qu'elle peut avoir, ou tout simplement des rappels ou des mises en garde au législateur, en lien avec des enjeux de protection des renseignements personnels.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, je vais passer la parole à ma collègue.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Merci, M. le Président. Bonjour. J'ai appris, à travers ce qu'on nous a présenté devant la commission, que très peu de personnes inaptes ont un tuteur, ou un curateur, ou un mandataire, probablement moins de 30 %. Et je ne connaissais pas ça et je me posais la question : Mais, mon Dieu, comment ces gens effectuent des retraits bancaires, etc.?

Est-ce que vous avez une opinion sur cela, sur le fait qu'on a très peu de personnes inaptes qui ont un tuteur, curateur ou mandataire, et qu'on permet des gens qui sont des proches ou qui les connaissent bien de prendre des décisions dans leur cas… pour eux?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, en fait, ce qu'un survol de la législation permet de constater... Bien, premièrement, vous aurez constaté, à l'avis écrit de la commission et à ma présentation, que la commission n'a pas formulé d'objection par rapport à cette question parce que la commission convient de l'importance d'effectuer les recherches, notamment auprès des majeurs inaptes. Les préoccupations de la commission sont davantage au niveau de l'expression du consentement. Je vais vous donner...

Mme de Santis : C'est pour ça que je vous pose la question.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien oui.

• (12 h 40) •

Mme de Santis : Qu'est-ce que vous pensez du fait qu'il y a très peu de gens qui ont un tuteur, curateur ou mandataire qui... personne inapte?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Dans ce contexte, introduire la possibilité que le consentement soit formulé par une autre personne, à savoir la personne qui peut consentir aux soins, semble être une introduction législative qui va permettre de régler une situation. Toutefois, la commission fait le constat suivant : c'est que, lorsqu'on est dans le cadre d'un régime de protection qui est couvert par les articles 258, je crois, suivants du Code civil, il y a une disposition, qui est à l'article 260, qui prévoit que le représentant du majeur inapte doit… je n'ai pas le libellé exact, mais doit démontrer un certain intérêt pour cette personne, doit accompagner cette personne, doit assurer une présence auprès de cette personne. Évidemment, on constate que la personne qui peut consentir aux soins n'a pas une telle obligation législative. Peut-être que, dans les faits, c'est ce qui se déroule régulièrement, mais peut-être qu'il y a la…

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : La loi permet en plus à un proche parent, O.K., ou une personne qui démontre par le majeur un intérêt particulier pour prendre une décision quant aux soins d'une personne inapte, O.K? Est-ce que vous croyez que ça devrait être les mêmes personnes qui devraient décider si une personne inapte fasse partie d'un programme de recherche? Parce que qui décide c'est qui, une personne qui démontre pour le majeur un intérêt particulier?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : L'important pour la commission, c'est que la personne qui va formuler un consentement va le faire dans l'intérêt du majeur inapte et que cette personne va le faire également dans une préoccupation de protection des renseignements personnels de cette personne. Que ce soit le représentant légal qui a ces obligations légales prévues au Code civil ou que ce soit la personne qui peut consentir aux soins, l'important, c'est que soit pris en considération l'intérêt de la personne qui va manifester le consentement pour le majeur inapte mais, notamment, dans une optique de protection des renseignements personnels tout au long d'une éventuelle recherche, pas seulement au moment d'accepter d'adhérer à une recherche, mais également dans son déroulement dans le temps.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : D'après l'article 17 du Code civil, le mineur de 14 ans et plus peut consentir seul aux soins non requis par l'état de santé, O.K.? Maintenant, la modification qu'on a à l'article 21, «le mineur de 14 ans et plus peut [...] consentir seul», on ne parle plus d'un mineur qui peut consentir uniquement aux soins non requis par l'état de santé. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : En fait, selon la commission, là, c'est deux choses qui peuvent être liées mais qui sont quand même distinctes. Consentir à des soins, c'est une chose, mais consentir à participer à une recherche, ça peut être connexe, mais ce n'est pas la même chose. Et exprimer un consentement pour recevoir des soins, c'est une chose, mais exprimer un consentement pour participer à une recherche, c'est que ses propres renseignements personnels soient utilisés dans le temps pour effectuer une recherche, mais c'est autre chose. Et, dans ce sens, nous exprimons le souhait que les personnes… les mineurs de 14 ans et plus qui seront appelés à formuler un consentement puissent le faire en toute connaissance de cause pour l'ensemble des modalités, mais y compris la distinction entre les deux.

Mme de Santis : Mais, si un…

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Si c'est un parent qui doit donner son accord aux soins à un enfant de 14 ans et plus, parce que ça touche l'état de sa santé, ce même parent maintenant n'est plus... on ne lui demande pas si l'enfant va participer dans une recherche, vous trouvez ça acceptable? Est-ce que vous croyez que les parents vont accepter cela?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, évidemment, c'est du cas par cas. Puis il y a plusieurs éléments à prendre en considération, notamment la complexité de la question et quelle utilisation sera faite des renseignements personnels. La compréhension même d'un projet de recherche, dans certaines circonstances, est complexe. Et peut-être que, dans certaines situations, il est préférable que le titulaire de l'autorité parentale puisse accompagner le mineur de 14 ans et plus dans l'expression d'un consentement.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Je n'ai plus de question. Merci.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Oui. Alors, bonjour. Je reviens un peu sur la question du consentement donné pour le mineur de moins de moins de 14 ans... pour le mineur de 14 ans et plus. Vous mentionnez dans votre mémoire que ce consentement-là doit vraiment être donné sans équivoque. Vous avez parlé de l'importance de vulgariser l'information. Puis effectivement une recherche sur l'utilisation des données obtenues en recherche puis l'utilisation des données… ou l'utilisation de ce qui va être obtenu suite à un soin accordé à un jeune, ce n'est pas tout à fait la même chose. J'aimerais ça que vous puissiez aller un petit peu plus loin.

Quand vous parlez de la vulgarisation et de l'importance, que ce soit pour le mineur, ou même pour le majeur inapte, ou pour les représentants, de comprendre la portée du consentement qui va être donné et de comprendre les effets de la recherche, j'aimerais bien savoir ce à quoi vous pensez lorsque vous nous... nous vous... pardon, lorsque vous nous apportez la question des efforts de vulgarisation qui devront être faits. Qu'est-ce que vous avez en tête lorsque vous parlez de ces efforts-là?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Oui, merci. Selon la commission, un consentement éclairé doit porter nécessairement sur la nature de la recherche, sur la durée de la recherche, sur les objectifs qui sont suivis, sur les méthodes qui sont employées, également sur les risques et conséquences. Évidemment, au niveau... Là, nous, on s'en tient à la protection des renseignements personnels dans nos préoccupations. Puis évidemment il faut se rappeler également que plus les renseignements sont sensibles, plus les explications devront prendre en considération, évidemment, la nature des renseignements qui sont communiqués dans le cadre de la recherche.

Mme Vallée : Ça devrait…

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Ça devrait prendre quelle forme? Parce que, bon, vous dressez la liste de ce qui doit être soumis à l'attention de la personne qui devra consentir, mais, pour vous, est-ce que ça devrait prendre une forme particulière? Est-ce qu'on devrait faire référence à un formulaire ou... Comment... Quel est le degré de vulgarisation? Parce qu'il y a la forme, mais il y a aussi le degré de vulgarisation qui va dépendre. Parce que, pour certaines personnes, une explication sera très claire et, pour d'autres, elle ne le sera pas; ça va dépendre du degré de scolarisation puis plein d'éléments externes. Donc, lorsqu'on pousse votre recommandation, il faut aller un petit peu plus loin. Ça prendrait quelle forme, tout ça?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, évidemment, il n'y a pas de formule consacrée. C'est du cas par cas. Puis justement, là, les explications qui sont fournies à une personne doivent être... doivent prendre en considération le degré de compréhension de la personne qui est appelée à formuler un consentement. Parce qu'il faut toujours s'assurer, si on veut avoir une adhésion volontaire, que la personne a bel et bien compris ce à quoi on lui demande de consentir. Mais il n'y a pas de formule consacrée, c'est du cas par cas, il faut accompagner la personne convenablement, là.

Mme Vallée : Je comprends, mais c'est parce que, si ultimement ce consentement-là est donné puis mène à une problématique x ou y et qu'on se retrouve devant une plainte qui est formulée, il faut quand même être en mesure d'apprécier la nature du consentement libre et volontaire. D'où ma question. Pour être en mesure d'apprécier si l'information a été vulgarisée adéquatement, et tout ça, ça devrait possiblement prendre une forme quelconque. Avez-vous une opinion là-dessus?

Le Président (M. Bergman) : Vous avez le temps pour une très, très courte réponse.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, c'est du cas par cas. Puis les organismes de surveillance comme la Commission d'accès à l'information peuvent porter une appréciation sur un consentement qui a été formulé puisque c'est un consentement à la communication de renseignements personnels. Et il faut s'assurer que le consentement qui a été exprimé est éclairé et que la personne a bien compris ce à quoi elle adhérait.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci. Et merci de votre présence. Si je comprends bien vos interventions depuis le début, est-ce que… Dans le fond, ce que vous nous dites aujourd'hui, c'est que, dans le projet de loi actuel, il y a des éléments qui ne sont pas suffisamment clairs quant à la protection des renseignements personnels.

Le Président (M. Bergman) : M. Desmeules…

Mme Daneault : Et est-ce qu'il y a des éléments que vous voudriez voir… retrouver dans le projet de loi?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

• (12 h 50) •

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Évidemment, les modifications qui sont introduites sont des mesures d'exception. Donc, la commission souhaite rappeler tout de même que la règle de base, c'est d'aller chercher le consentement du représentant légal pour ce qui est du majeur inapte, mais également d'aller chercher le consentement du parent ou du titulaire de l'autorité parentale dans les cas... Bon, évidemment, il y a des nuances qui sont introduites par le projet de loi, mais, règle générale, le consentement doit être formulé par ces personnes, et ensuite on embarque dans des mesures d'exception, donc, qui doivent se présenter de façon exceptionnelle, strictement.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de…

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : C'est parce que...

Le Président (M. Bergman) : …Groulx.

Mme Daneault : Et ce que je comprends, c'est que le libellé actuel, pour vous, est acceptable… ou vous voudriez voir des modifications? C'est ça, ma question.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : C'est sûr que le libellé actuel accorde une grande marge de manoeuvre au comité d'éthique à la recherche, et on reste avec un questionnement sur, dans les faits, comment seront appliqués les... la subjectivité qui est introduite par le projet de loi, par les comités d'éthique, dans quel cadre ce sera fait en lien avec la protection des renseignements personnels des personnes concernées.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Donc, ce que je comprends, c'est que vous voudriez voir certaines précisions dans le projet de loi?

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Ce serait intéressant de voir quelles sont les balises, quels sont les éléments que doivent prendre en considération les comités d'éthique à la recherche dans l'appréciation des éléments qui sont introduits, lorsqu'eux portent un regard sur une situation particulière, quelle place est faite à la protection des renseignements personnels. La commission rappelle l'importance de prendre en considération ces éléments.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Donc, ce que vous souhaitez, c'est qu'on précise le rôle du comité d'éthique quant à la protection des renseignements personnels. Est-ce que j'ai compris ou...

Le Président (M. Bergman) : Me Desmeules.

M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Oui, oui, absolument. Que ce soit dans le cadre de cette loi-ci ou d'une autre loi.

Mme Daneault : Ça me prend du temps mais ça va. Merci.

Le Président (M. Bergman) : Alors, Me Desmeules, Me Giroux-Blanchet, Mme Bétie, merci pour votre présentation.

Et, compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 52)

(Reprise à 15 h 14)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Et, cet après-midi, nous avons Me Anne-Marie Savard, professeure à la Faculté de droit, Université de Sherbrooke, et M. Gaétan Cousineau, président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Mme Savard, bienvenue. Vous avez 10 minutes pour votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, le prochain 10 minutes, c'est à vous.

Mme Anne-Marie Savard

Mme Savard (Anne-Marie) : M. le Président, je vous remercie beaucoup. Je voudrais tout d'abord remercier les membres de la commission pour m'avoir invitée à participer à ces travaux portant sur le projet de loi n° 30. Vous me tiendrez peut-être par le temps, parce que je n'ai pas de montre, mais vous m'indiquerez si jamais je dépassais. Alors, je vous remercie, bonjour à tous et à toutes.

Je ferai un commentaire général et quelques commentaires spécifiques concernant le projet de loi n° 30, qui est un projet de loi, à mon point de vue, qui est somme toute assez simple, qui vise surtout à clarifier quelques ambiguïtés et à répondre à des demandes répétées de la part de plusieurs acteurs qui sont intéressés par la recherche au Québec, et ces commentaires-là persistent depuis plusieurs années. Bref, je ne pense pas, à l'instar de, j'imagine, mes collègues qui sont intervenus avant moi, qu'il y a ici lieu de s'élever en bloc contre ce projet de loi de… contre ce projet de loi là, pardon.

Mais le reproche général que je me permettrais de formuler, peut-être, c'est qu'il s'agit, comme trop souvent, finalement, de simples modifications à la carte d'une simple partie du Code civil, en l'occurrence, ici, les articles 11 à 25, dans lesquels les articles pertinents du projet de loi s'insèrent, sont modifiés. Donc, ce projet de loi là n'a pas l'ambition de revoir de manière approfondie cette section-là qui comporte des incohérences, à mon point de vue, assez importantes ou, carrément, n'a pas l'ambition de prévoir un encadrement juridique spécifique portant sur l'encadrement éthique de la recherche au Québec, comme l'avait recommandé, en 2007, le rapport du Comité interministériel sur l'encadrement éthique de la recherche et la protection des sujets de recherche.

Je rappelle qu'évidemment la question du consentement en matière de recherche est fondamentale, mais il y a aussi d'autres questions qui pourraient être prévues dans un encadrement plus général, par exemple les questions en matière de vie privée, confidentialité, la question des conflits d'intérêts qui est de plus en plus importante, notamment entre les chercheurs et l'industrie pharmaceutique, et également toute la question de la procédure d'évaluation des projets de recherche. Bref, il y a là éventuellement matière à un encadrement normatif plus rigoureux, mais je constate que ce n'est pas ici le cas avec le projet de loi n° 30.

Somme toute, il y aurait lieu certainement d'améliorer, si on s'en tient aux articles du Code civil, au moins de rendre cohérentes les dispositions entre elles et de faire en sorte que… Parce qu'en ce moment ce qu'on voit, c'est qu'il y a une panoplie d'interventions aussi diversifiées les unes que les autres qui se retrouvent dans le cadre de la section Soins, donc les articles 11 à 25. Et ce je proposerai, si je peux me permettre, c'est peut-être de prévoir au moins deux sous-sections dans la section «Des soins», une section qui serait intitulée... ou, enfin, qui aborderait les soins ou les interventions dans l'intérêt de la personne elle-même et qui couvrirait donc, bien sûr, les soins requis et non requis, la question aussi de la thérapie expérimentale que l'on traite dans le cadre de l'article 21. La thérapie expérimentale, on l'appelle la recherche visant une seule personne, mais il faut comprendre que c'est une recherche, donc, qui est faite dans l'intérêt de la personne avec une part minime accordée à l'avancement des connaissances. Donc, c'est quand même à classer, à mon avis, dans la première partie ou sous-partie qui pourrait s'appeler Soins ou interventions dans l'intérêt de la personne elle-même. Également, les soins innovateurs entreraient dans cette sous-section.

La deuxième sous-section pourrait s'intituler Soins ou interventions dans l'intérêt d'autrui, et là j'y entrerais toute la question du don d'organes, donc l'aliénation entre vifs, et aussi les dispositions en matière de recherche purement scientifique, donc faite strictement dans le but de l'avancement des connaissances.

Donc, ça, c'était mon commentaire général, c'est-à-dire peut-être au moins, si on ne veut pas encadrer de manière plus approfondie la recherche au Québec sur le plan éthique, au moins d'apporter un peu plus de cohérence dans la section Soins.

Mes commentaires spécifiques, j'en ai cinq ou six, et j'imagine, encore là, qu'ils ne seront peut-être pas... qu'ils ne seront peut-être pas si originaux que ça, mais quand même je trouvais important de vous les mentionner.

• (15 h 20) •

D'abord, le remplacement du terme «expérimentation» par «recherche». Bien sûr, il s'agit d'une excellente modification, à mon point de vue, parce qu'il existait une incertitude à savoir si des projets de recherche faisant entrer des personnes majeures inaptes, mais qui ne portaient pas atteinte à leur intégrité et qui ne constituaient pas, à toutes fins pratiques, des expérimentations au sens pur du terme… la question se posait de savoir si ces expérimentations-là étaient soumises à l'encadrement de l'article 21. Il y avait deux écoles de pensée dans la littérature, une école qui disait : Non, ce n'est pas de l'expérimentation, et donc ces projets de lois ne devraient pas être soumis à 21, mais l'école de pensée dominante qui était de dire finalement qu'on devait assujettir tous les projets de recherche à 21, ce qui faisait en sorte, bien sûr, que plusieurs projets très peu invasifs, notamment avec des personnes âgées démentes, ne pouvaient voir le jour, donc, parce que 21 exigeait le consentement du représentant légal et qu'une infime partie de la population est dotée de représentant légal. Donc, ici, ce qu'on fait, c'est qu'on élargit le concept, on remplace donc «expérimentation» par «recherche», «recherche» étant plus large et exclusif qu'«expérimentation», mais, d'un autre côté, on assouplit les règles en matière de consentement lié aux mineurs et aux personnes majeures inaptes lorsqu'il est question de risque minimal. Donc, ça, c'est mon premier commentaire spécifique.

Deuxième commentaire, concernant les mineurs de 14 ans et plus. Également, je pense qu'a priori c'est une excellente modification également, parce qu'il semble que le but de cet assouplissement-là, c'est de faire en sorte que la recherche, notamment sociale, par exemple tout ce qui est étude observationnelle, ou encore des entrevues ou des questionnaires, puisse intéresser et inclure des mineurs qui sont, par exemple, en mauvais termes avec leurs parents ou encore carrément en fugue et pour qui il serait absolument impossible d'obtenir le consentement du titulaire de l'autorité parentale ou encore que ça alourdirait inutilement, là, le processus de recherche. Donc, je pense que c'est très bien.

Les balises, qui sont risque minimal, évaluation des circonstances par le comité d'éthique et interdiction, et ça, c'est fondamental, s'il y a un risque sérieux, semblent adéquates. J'avais quelques réserves quant à l'expression «risque minimal», mais on pourra peut-être y revenir dans le cadre des discussions. J'aurais préféré «risque minime» à «risque minimal» pour la connotation qui réfère... en fait pour ce qui réfère à l'énoncé de politique des trois conseils. Il y a quand même une certaine polémique à l'égard du contexte. Est-ce qu'on parle d'un risque minimal objectif ou encore est-ce qu'on parle d'un risque minimal subjectif, en fonction de l'état général de la personne? Bref, on pourra en reparler, mais, en général, pas de problème avec cette modification-là.

Concernant les majeurs inaptes, on a supprimé, donc, l'obligation du consentement par le représentant légal, très bien également, donc; évidemment ce ne sont que pour les projets de recherche à risque minimal. On demande le consentement de la personne habilitée à consentir pour autrui, donc on réfère à l'article 15 ici. C'est encore une fois une excellente modification, qui va faciliter notamment les projets de recherche qui étaient peu invasifs, surtout dans le cas des personnes âgées avec démence. Donc, ça, c'est très bien. Voilà. Donc, ça, ça va.

J'essaie d'avancer parce que je vois que, finalement, ça va très vite. Donc, l'idée, ici, c'était en ce qui a trait à la recherche avec les majeurs inaptes, c'est bien sûr de s'assurer de l'équilibre entre, d'une part, la protection des personnes les plus vulnérables, mais aussi de s'assurer qu'on ne les exclut pas d'emblée de la recherche sur la santé. Donc, je pense qu'ici cet équilibre-là est bien atteint.

Deux commentaires, si je peux me permettre en terminant, qui s'appliquent à la recherche tant des mineurs que des majeurs inaptes. D'abord, concernant la possibilité qu'ils puissent refuser de participer à un tel projet. Le projet de loi n'apporte aucune modification à cet égard-là. En effet, on ne permet aux mineurs ou aux majeurs inaptes de refuser de participer à un projet de recherche que s'il en comprend la nature et les conséquences. Il y a plusieurs critiques qui ont été faites au cours des dernières années, dans la littérature, à cet égard-là. Je me range du côté de ces critiques-là. C'est-à-dire que, d'une part, il est curieux de parler d'inaptitude et, dans la même phrase, d'une personne qui comprend la nature et les conséquences d'une expérimentation alors même qu'on sait que des personnes majeures aptes ont souvent du mal à comprendre ces projets de recherche là. Donc, déjà, il y a un paradoxe.

Mais, plus important encore, je pense qu'on semble, avec cette disposition-là, vouloir protéger la vulnérabilité mais surtout l'autonomie résiduelle, je dirais, des personnes majeures inaptes, mais, de ce fait-là, on se trouve à ne pas la permettre pour les personnes qui sont encore plus vulnérables, c'est-à-dire qu'ils ne sont même pas en état de manifester leur désaccord. Donc, à mon point de vue, je pense qu'on devrait s'en tenir à un refus pur et simple, à un respect du refus pur et simple d'une personne mineure ou encore d'une personne majeure inapte à participer à un projet de recherche. On pourra également y revenir, mais il me semble qu'on serait, de toute façon, cohérents avec l'article 16 du Code civil du Québec, qui permet à un majeur inapte de refuser catégoriquement des soins requis par son état de santé. Donc, a fortiori, si on permet à une personne majeure inapte de refuser des soins requis par son état de santé, devrait-on lui permettre de refuser de la même manière des soins qui ne sont pas requis et qui sont même dans une visée altruiste?

Deuxième remarque, et je terminerai là-dessus, concernant les mineurs et les majeurs inaptes… bien, celle-là, on pourra peut-être aussi y revenir, parce que je pense que je n'aurai pas le temps, mais j'avais une réserve également avec le risque sérieux et la thérapie expérimentale. Je me réserve ce commentaire-là peut-être pour l'insérer dans le cadre des discussions, parce que je voulais au moins aborder la question des soins innovateurs, c'est-à-dire qu'encore une fois il y a aussi des critiques sérieuses qui ont été adressées au cours des dernières années concernant le fait que les soins innovateurs, dans le cadre de l'article 21, se retrouvent exclus de tout contrôle, c'est-à-dire ne sont pas assujettis, ces soins-là, ni à l'article 21 ni à aucune autre forme de contrôle, alors même que ces soins-là s'éloignent tout de même de la pratique et des standards médicaux. Donc, je trouve curieux qu'il n'y ait pas du tout, là, de processus de contrôle à l'égard de ces soins innovateurs.

Donc, écoutez, voilà. Sinon, je n'avais aucun problème avec la modification à 22, concernant le prélèvement, là, d'organes, de tissus, sauf que je me disais... je me demandais pourquoi on ne l'aurait pas inséré plutôt...

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Savard (Anne-Marie) : Pardon. Mon Dieu, c'est... D'accord. On y reviendra peut-être. Merci.

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard, merci pour votre présentation.

Mme Savard (Anne-Marie) : Je vous remercie.

Le Président (M. Bergman) : ...pour le gouvernement pour 24 minutes. M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, maître, de vos commentaires. J'aimerais ça avoir un petit peu plus de discussions à propos de l'expression «risque minimal», qui est l'expression des trois conseils, justement, qu'on a retenue. Vous semblez dire que ce serait mieux de retenir «risque minime». Est-ce qu'on ne se trouve pas à être en porte-à-faux avec, justement, les trois conseils, qui utilisent plutôt «minimal» comme risque?

Mme Savard (Anne-Marie) : Bien, en fait, c'est que dans...

Le Président (M. Bergman) : Me Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui. Merci pour votre question, M. le ministre. En fait, ce qui se passe, c'est qu'avec l'énoncé de politique des trois conseils, mais aussi le cadre établi par le FRSQ, on parle effectivement... c'est une notion qui revient beaucoup, là, que celle du risque minimal. Mais il y a quand même une certaine incertitude à savoir si, dans le cadre de cette expression-là, on fait appel à l'interprétation en fonction de l'état de la personne. Est-ce que c'est un risque minimal objectif, donc très peu de risque, par exemple une piqûre, ou quoi que ce soit, ou est-ce que c'est un risque minimal eu égard à l'état de santé, qui peut être très grave, de certains patients?

Par exemple, des adolescents de 15 ou 16 ans qui... ou un adolescent de 15 ou 16 ans qui est dans un état... bon, qui a un cancer à un stade très avancé, évidemment il subit des traitements, des interventions très invasifs, il y a des effets secondaires très importants. Et peut-être voudrait-on le soumettre à un projet de recherche, éventuellement même une thérapie expérimentale qui va comporter, bien sûr, des risques qui ne seront pas minimaux, bien sûr, eu égard à la personne en bonne santé, bon, qui se livrerait à n'importe quelle recherche, mais, dans son état à lui, eu égard à ses chances de survie, etc., à son stade avancé de la maladie, pourrait considérer un risque minimal.

Donc, c'est simplement qu'il y a, dans la littérature, par rapport à ce terme-là, une certaine incertitude à savoir, comme je vous dis, si c'est un risque minimal objectif ou encore subjectif. Je comprends que... et c'est là-dessus, je pense, qu'on le récupère dans l'article 21 : on ne peut pas faire de recherche avec des mineurs ou des majeurs inaptes s'il y a un risque sérieux. Donc, on voudrait... à toutes fins pratiques, l'exemple que j'ai donné serait exclu par le biais de 21. Mais je ne sais pas si c'est l'intention du législateur que de le faire ou pas, mais j'avais plutôt l'impression que c'était... l'objectif ultime était surtout d'ouvrir à une recherche plus sociale, dont les risques sont pratiquement nuls. Donc, c'est pourquoi je me serais peut-être, moi, éloignée, au contraire, de cette expression-là.

Et un risque... Puis d'ailleurs, même, peut-être, pour le français, je ne sais pas, mais c'est... mais j'aurais préféré me distinguer pour ne pas justement encore créer plus de mauvaises interprétations. Un risque minime, pour moi, c'est clair que c'est un risque qui est très faible. Un risque minimal, déjà on entre peut-être... mais c'est... Écoutez, peut-être que c'est mon interprétation, là, mais on entre déjà, peut-être, dans quelque chose de plus flexible, plus large et plus porté à interprétation, à mon point de vue.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Si je comprends bien, vous, vous auriez souhaité qu'on utilise le mot «risque minime».

Mme Savard (Anne-Marie) : C'est une suggestion, mais...

M. Hébert : Et vous trouvez que c'est moins... ça porte moins à interprétation.

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui.

M. Hébert : Je ne comprends pas, parce que, pour moi, c'est synonyme, là, «minimal» ou «minime».

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, mais c'est ça, mais c'est... tout est dans la distinction, justement, de se distinguer avec la politique des trois conseils et les autres...

M. Hébert : Ah non! on ne veut pas se distinguer, on veut se coller à la politique des trois conseils.

Mme Savard (Anne-Marie) : C'est ça, mais, comme je vous dis, vient avec... Si vous voulez vous coller, c'est peut-être... mais vient avec, justement, l'utilisation de cette expression-là une interprétation, et cette interprétation-là n'est peut-être pas ce que vous voulez, c'est-à-dire...

M. Hébert : Elle est exactement ce qu'on veut.

• (15 h 30) •

Mme Savard (Anne-Marie) : O.K. Donc, vous, lorsque vous parlez de risque minimal ici, c'est exactement ce que je vous dis, le jeune de 15 ou 16 ans qui est dans un état, bon, de cancer avancé...

M. Hébert : Il ne correspond pas à ça.

Mme Savard (Anne-Marie) : Il ne correspond pas? C'est-à-dire?

M. Hébert : À un risque minimal, selon la définition des trois conseils.

Mme Savard (Anne-Marie) : Il y a... Ce n'est pas si…

M. Hébert : Alors, il faudrait avoir l'autorisation des parents pour le…

Mme Savard (Anne-Marie) : C'est ça. Ce n'est pas…

M. Hébert : … soumettre à un...

Mme Savard (Anne-Marie) : Ce n'est pas si clair que ça. En tout cas, moi, selon ce que j'en comprends des interprétations de la littérature, le risque minimal…

M. Hébert : Mais vous avez vu la…

Mme Savard (Anne-Marie) : …peut être...

M. Hébert : Vous avez vu la définition du risque minimal des trois conseils?

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui…

M. Hébert : Alors?

Mme Savard (Anne-Marie) : …mais il y a aussi d'autres... Bien, écoutez, moi, simplement, là, je vous fais la suggestion, c'est à vous de voir. Moi, c'est juste que... Moi, je trouve que, justement, ce n'est pas si clair. Moi, ce qui… Ce qui sauve, je dirais, c'est le fait qu'il ne peut pas y avoir de recherche s'il y a un risque sérieux, tout simplement. Mais, s'il n'y avait pas eu ça, j'aurais eu peur. Mais c'est tout. Moi, c'est simplement une appréciation.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Allons-y sur le risque sérieux, maintenant. Certains ont défilé à votre place pour nous suggérer d'enlever cette notion de risque sérieux justement pour que des majeurs inaptes et des mineurs puissent être soumis à des expérimentations qui, dans les circonstances, et même compte tenu de leur durée de vie, de la gravité de leur maladie, pourraient être des expérimentations avec un risque sérieux. Qu'est-ce que vous en pensez?

Mme Savard (Anne-Marie) : Je pense qu'ici, comme je l'ai dit tout à l'heure brièvement, il faut distinguer deux types de recherche : la recherche faite sur un seul individu, qu'on appelle aussi thérapie expérimentale, qui vise avant tout le bienfait… un bienfait du moins à la personne majeure inapte, et, selon justement mes collègues Robert Kouri et Mme Nootens, donc qui vise avant tout le bienfait de cette personne-là, avec une place plus restreinte de l'avancement des connaissances, et d'autre part la recherche purement scientifique, qui n'a comme place plus importante que l'avancement des connaissances, avec, bien sûr, des bienfaits espérés pour les personnes qui ont les mêmes caractéristiques d'âge, etc.

Donc, je pense que, dans le premier cas, effectivement, la notion de risque sérieux pourrait être supprimée pour permettre justement ce dont vous parlez. C'est pourquoi je vous disais tout à l'heure qu'en reclassant peut-être des... en insérant des sous-sections, on insérerait ce qu'on appelle la thérapie expérimentale sous «les soins dans l'intérêt de la personne elle-même», mais on laisserait donc la recherche purement scientifique dans «les soins dans l'intérêt d'autrui», et là je pense que la notion de risque sérieux a toute sa place d'être, parce que justement, ici, on n'est pas dans des soins ou dans des interventions qui visent l'amélioration de la santé de la personne, mais aucunement. D'ailleurs, on ne peut pas... il n'y a pas un protocole de recherche, il n'y a pas un formulaire de consentement qui ne peut assurer que la personne va finalement voir son état amélioré. Donc là, je pense que la notion de risque sérieux devrait être préservée. Mais, encore une fois, dans le cadre de la recherche, ce qu'on appelle, dans l'article 21, recherche ne visant qu'une seule personne, je pense qu'effectivement la notion de risque sérieux pourrait être supprimée.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Là où j'ai un petit peu de mal à suivre, c'est que, lorsqu'un traitement a des bénéfices, ce n'est plus, pour moi, de la recherche. La recherche présuppose un grand principe qui est le principe d'incertitude. C'est-à-dire, si on soumet un sujet à une recherche, c'est parce qu'il y a un principe d'incertitude. On ne sait pas. Et d'ailleurs la façon de mener ces recherches-là, c'est par des essais cliniques randomisés où on tire au hasard la personne qui va recevoir le traitement…

Mme Savard (Anne-Marie) : Pas toujours, mais… Oui.

M. Hébert : …expérimental et celui qui va recevoir le traitement habituel, parce qu'il y a le principe d'incertitude. Si ce principe-là n'existe pas, ce n'est plus de la recherche, c'est un traitement innovateur. C'est un soin innovateur, mais ce n'est pas de la recherche. La recherche est basée sur le principe d'incertitude : c'est parce qu'on ne sait pas que c'est éthique de soumettre des sujets à une recherche. Alors, à partir du moment où on a des bénéfices et qu'ils sont démontrés, pour moi ce n'est plus... c'est un soin innovateur, mais ce n'est plus de la recherche, là.

Mme Savard (Anne-Marie) : Disons qu'effectivement la marge de manoeuvre entre... ou la marge, dans la définition, entre thérapie expérimentale et soins innovateurs, elle est très mince. Mais vous êtes d'accord avec moi que l'article 21 distingue deux types de recherche…

M. Hébert : Oui.

Mme Savard (Anne-Marie) : …une recherche visant une seule personne, et c'est bien écrit à l'article 21, ici : «si elle ne vise que lui». «Il ne peut, en outre, participer à une recherche qu'à la condition que celle-ci laisse espérer, si elle ne vise que lui, un bienfait pour sa santé ou, si elle vise un groupe, des résultats…» Alors là, on voit qu'il y a quand même une distinction. Ce n'est pas moi qui l'ai inventé, c'est l'article 21.

Donc, il y a effectivement... il y a une gradation. Puis je pense que là-dessus je suis tout à fait les enseignements de mes prédécesseurs et mentors, Robert Kouri et Mme Nootens : il y a un continuum dans les soins et la recherche. On a effectivement les soins cliniques et on va jusqu'à des soins innovateurs, c'est-à-dire qu'il y a un soin clinique, ensuite il y a la thérapie expérimentale, il y a la recherche, éventuellement. Donc, ce n'est pas noir ou blanc.

L'exemple que vous donnez à la recherche clinique, avec un placebo, randomisé, etc., ça, c'est de la recherche clinique pure et dure. Et ça, c'est clair qu'on va toujours se situer dans la recherche visant un groupe, là, avec des résultats, tout ça. Mais je pense qu'on doit distinguer — et, de toute façon, la distinction, elle est faite à l'article 21 — ce type de recherche là qui... Il y a une part d'avancement des connaissances, mais pourquoi on ne l'élargit pas à un plus grand groupe, c'est qu'on n'a pas encore toutes les connaissances requises. Mais il y a une part intuitive qui nous fait penser que, oui, on devrait essayer avec une personne en particulier, avec un devis expérimental. Parce que, dans le cadre des soins innovateurs, il n'y a même pas de devis expérimental. On est souvent en phase III, et donc, l'efficacité, tout est démontré, sauf qu'on veut tester éventuellement une nouvelle indication.

M. Hébert : C'est phase IV.

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, bien, après la phase III, le... Non, la phase IV, c'est la mise en marché, habituellement.

M. Hébert : Oui, mais c'est des études de phase IV qui ...

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, c'est ça.

M. Hébert : ... testent de nouveaux… de nouvelles applications.

Mme Savard (Anne-Marie) : Pas tous les soins innovateurs sont des phases IV, mais...

M. Hébert : Désolé, mais je ne suis pas d'accord avec vous.

Mme Savard (Anne-Marie) : …on est souvent, après la phase III, dans les soins novateurs. Tout simplement, les médicaments «off-label» sont vraiment exactement ce type-là. Donc, effectivement, ici, on est carrément dans autre chose, mais la marge, effectivement, elle est ténue, mais elle existe. Et donc, pour moi, je fais une distinction entre recherche visant un groupe, recherche visant une seule personne, qui, donc, nécessite un bienfait. Donc, elle est faite dans l'intérêt. En plus, il y a l'avancement des connaissances et soins innovateurs.

M. Hébert : …vraiment pas la même notion de la recherche que vous, parce que, pour moi, s'il y a un bénéfice seulement pour une personne, ce n'est pas de la recherche. Le but de la science, c'est la généralisation.

Mme Savard (Anne-Marie) : Mais alors...

M. Hébert : C'est ça, le but. Le but intrinsèque de la recherche scientifique, c'est de généraliser.

Mme Savard (Anne-Marie) : O.K. Mais, M. le...

M. Hébert : Et, si le pouvoir de généralisation n'est pas là, ce n'est pas une recherche.

Mme Savard (Anne-Marie) : Mais, M. le ministre, si vous me permettez, comment vous voyez… Je veux dire, comment vous expliquez qu'on distingue dans l'alinéa deux, l'article 21?

M. Hébert : Ah! Ça, c'est du juridique, madame. Ce n'est pas de la recherche, pour moi, là.

Mme Savard (Anne-Marie) : Ah! Bien, non… Non, mais sauf que vous n'avez pas proposé de le modifier.

M. Hébert : Non, non, non. C'est ça.

Mme Savard (Anne-Marie) : Donc, c'est qu'il doit y avoir une distinction!

M. Hébert : Bien… Non, non. Mais j'ai proposé parce que ce n'était pas l'objet du projet de loi, madame. Dans le projet de loi, ce n'est pas de modifier complètement le Code civil, c'est de pouvoir ouvrir les dispositions du Code civil pour inclure des mineurs, des mineurs et des majeurs inaptes. C'est juste ça. C'est tout ça, mais juste ça.

Mme Savard (Anne-Marie) : O.K. Donc, vous... Écoutez, c'est vous qui voyez.

M. Hébert : Si on avait à revoir le Code civil sur tous les aspects de soins et de recherche, je pense qu'on en aurait pour un projet de loi assez substantiel, là, mais ce n'est pas...

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui. Sauf que, là, l'article 21, on ne parle pas de refaire tout l'article, mais là il y a quand même... ici, il semble y avoir un problème avec l'intention du législateur à l'origine et celle que vous en faites aujourd'hui. Parce que, là, moi, l'article 21, c'est vraiment de la recherche. Puis il y a deux types de recherche : il y a un type qui se fait avec une personne, et c'est un type de recherche. C'est différent d'effectivement celle où on veut généraliser, mais il n'en demeure pas moins que c'est deux types de recherche.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Oui. Je voudrais avoir un exemple du premier type; je ne suis pas sûr que ça se fait encore. À l'époque où il y avait les traitements chirurgicaux expérimentaux; on n'avait pas encadré la recherche en chirurgie. Ça se faisait, là, mais je ne suis plus sûr qu'un comité d'éthique de la recherche accepterait un traitement qui n'a pas de pouvoir de généralisation et qui n'est fait que sur une seule personne. Ça, je ne suis pas certain que...

Mme Savard (Anne-Marie) : Il faudrait voir, sauf que l'article…

M. Hébert : En 2013, là…

Mme Savard (Anne-Marie) : C'est ça, l'article 21 ne date pas non plus de…

M. Hébert : Je suis d'accord.

Mme Savard (Anne-Marie) : …de si longtemps.

M. Hébert : Oui, je suis d'accord avec vous.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je voudrais également... Vous parliez des deux sous-sections. Là, ce que vous proposez en fait, c'est un remodelage complet du Code civil, de toutes ces dispositions-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Écoutez, pour moi, ce n'est pas un remodelage complet, c'est une question de forme et de cohérence. Il y a, dans le Code civil, effectivement des sections. Ici, on a la section «Soins», puis il arrive très souvent, très régulièrement, dans plusieurs sections du Code civil, qu'il y a des sous-sections, dans un but d'une meilleure compréhension. Et donc je pense que, là, on n'arrête pas de jouer là-dedans… dans ces articles-là, on en ajoute, on en... et, à un moment donné, on ne sait plus trop où on s'en va avec tout ça. Donc, simplement de… oui, de clarifier, de mettre deux sous-sections, en disant : Bien, voici, ça, ce sont les interventions faites dans l'intérêt de la personne elle-même ou encore faites dans l'intérêt d'autrui, tout simplement. Mais, pour moi, ce n'est pas un gros remodelage du Code civil, là.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : J'aimerais ça aussi avoir votre avis sur le consentement écrit. Vous n'avez pas...

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui. Je n'en ai pas parlé.

M. Hébert : ...parlé.

Mme Savard (Anne-Marie) : Tout à fait.

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

• (15 h 40) •

Mme Savard (Anne-Marie) : Merci de poser la question. Donc, non, parce que je n'ai pas de problème majeur... Je vous avoue qu'au début, oui, je me suis dit : Qu'est-ce que c'est? Pourquoi? Bon. Mais, à toutes fins pratiques, lorsqu'effectivement on ajoute cette... — voyons! — cette formalité-là, ça peut tout simplement alourdir lorsqu'on est dans le cadre de recherche, par exemple, d'entrevues, de questionnaires, ou etc. Je pense qu'en autant qu'on puisse... Et je pense que c'est aussi le point de l'article, là, on dit qu'on va devoir, autrement dit, là, conserver une preuve que la personne a consenti. Donc, pour moi, ça ne me posait pas de problème. Attendez un petit peu, je cherche. Je ne trouve pas, mais, en tout cas, vous voyez ce que je veux dire, de toute façon.

M. Hébert : Oui.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Ma dernière question, c'est le refus. Alors, vous faites référence, là, au premier paragraphe de l'article 21, qui dit que le «mineur ou [le] majeur inapte ne peut participer à une recherche [...] à laquelle il s'oppose alors qu'il en comprend la nature et les conséquences». Quelle serait votre proposition de modification, parce que je ne suis pas sûr d'avoir bien compris votre...

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : O.K. Alors, ça serait tout simple, alors : «à laquelle il s'oppose», point. Ça serait ma proposition, parce que, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, à mon avis, déjà il y a une contradiction… ou en tout cas il y a une certaine incohérence avec l'article 16, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, puisqu'avec l'article 16 on est en matière de soins requis et on permet aux majeurs inaptes une autonomie, donc, résiduelle, en matière de soins requis, donc de refuser catégoriquement des soins qui lui sont requis, là.

Donc, ici, je m'explique mal comment, dans un cadre de recherche qui sont des soins qui ne sont absolument pas requis par la personne, on oblige à qualifier le consentement, c'est-à-dire qu'on doit démontrer... la personne doit démontrer qu'elle comprend la nature et les conséquences. Ça, ça veut dire que, si la personne est tellement inapte qu'elle ne peut même pas comprendre la nature et les conséquences, son refus ne sera pas pris en compte, et on va pouvoir procéder quand même. Donc, je vois là un problème, c'est-à-dire le fait de mettre de côté une certaine partie de la population qui est, à mon avis, encore plus vulnérable, donc les personnes majeures très inaptes. Donc, je m'explique mal comment un article... on peut leur permettre de refuser catégoriquement des soins requis mais pas, de la même manière, dans le cadre de soins non requis que sont des soins en matière de recherche ou des interventions.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : O.K. Est-ce que vous mettriez le même adverbe, c'est-à-dire «catégoriquement», ou vous laisseriez «s'oppose»?

Mme Savard (Anne-Marie) : J'ai aussi des réserves sur l'article 16 avec le refus catégorique; ça aussi. Donc, pour moi, un simple refus devrait requérir l'intervention du tribunal, en vertu de l'article 16, là, je parle de l'article 16. Mais je ne qualifierais pas le refus, très sincèrement, et surtout dans le cadre de l'article 21.

Ce qui veut dire qu'effectivement la personne... le mineur, même s'il ne comprend pas nécessairement toute la nature puis les conséquences de l'intervention… Lui, il ne veut pas de piqûre, par exemple, parce qu'il en a une sainte horreur, je vois mal comment... et qu'il le manifeste, il crie, ou quoi que ce soit, je vois mal comment on pourrait, en tout cas selon le libellé de 21, l'astreindre à un projet de recherche. Je pense que, peu importe l'état d'avancement ou d'inaptitude de la personne et la façon dont elle le manifeste, on devrait respecter ce refus-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Alors, si je vous comprends bien, donc, un mineur, on parle d'un enfant, là, qui a... ou les parents ont consenti à un projet de recherche, dès qu'il s'oppose, on devrait s'abstenir.

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : En principe, oui. En principe…

M. Hébert : Mais vous comprenez qu'il y a… beaucoup de recherches en pédiatrie ne pourraient pas être réalisées, là.

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui. Ou alors, peut-être, soit mettre un âge, mais... Moi, c'est sûr que cette réserve-là s'adresse surtout aux personnes majeures inaptes, je vais vous dire, plutôt qu'aux mineurs. Est-ce qu'il y aurait lieu de faire la distinction entre les deux? Peut-être, aussi.

M. Hébert : Je pense que l'intention du législateur, c'était justement de prévoir ces cas-là, là. L'enfant de trois, quatre ans qu'on ne peut pas approcher pour examiner une oreille, ça voudrait dire que, si on fait une étude sur les problèmes d'oreille chez les enfants, qu'on a la permission, dès que l'enfant ne veut pas qu'on lui mette un otoscope dans l'oreille, on n'est pas capable de faire le projet de recherche.

Mme Savard (Anne-Marie) : Je réitère…

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Je réitère que, pour moi, cette partie-là concerne plus la question de la vulnérabilité des personnes majeures et inaptes, et il y aurait lieu, éventuellement, de faire la distinction entre les deux.

Mais, encore là, je pense que, même dans le cas des mineurs, on parle ici de recherche et non pas de soins requis. Alors, pour moi, je ne vois pas nécessairement la pertinence de se montrer aussi insistant face à une personne qui, même mineure ou majeure inapte, semble ne pas vouloir se prêter à l'expérimentation ou à la recherche.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Mais je reviens, là : Vous comprenez qu'un enfant, il ne comprend pas tous les éléments, là…

Mme Savard (Anne-Marie) : Je comprends très bien.

M. Hébert : Et beaucoup de recherches qui ont des interventions, somme toute, mineures ne pourraient pas être réalisées si on retient la notion de l'opposition pure et simple.

Mme Savard (Anne-Marie) : C'est comme ça que vous le voyez, c'est parfait. Moi, je fais simplement vous dire ma position là-dessus.

M. Hébert : O.K., ça marche. Merci.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Ça va. Alors, je vais laisser mes collègues...

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, Me Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Bonjour.

Mme Proulx : Vous avez mentionné tantôt qu'à votre avis les modifications législatives proposées atteignent l'équilibre nécessaire entre la protection des participants aux projets de recherche et, disons, la volonté de pouvoir offrir un environnement un peu moins contraignant pour favoriser des activités de recherche ici, au Québec. J'aimerais ça que vous m'expliquiez qu'est-ce qui vous permet de croire qu'on a atteint l'équilibre, c'est-à-dire qu'avec ces modifications-là on n'ouvre pas beaucoup trop large du côté des contraintes… pour éliminer des contraintes à la recherche et qu'on continue quand même d'offrir le niveau de protection requis et nécessaire pour soit les mineurs ou les personnes majeures inaptes.

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Merci. Merci. Je pense qu'effectivement, dans le cas, si on prend, là… Les deux points principaux, ici, c'est le consentement des mineurs de 14 ans et plus et les majeurs inaptes. Dans le cas des mineurs de 14 ans et plus, je pense tout simplement que les balises sont suffisamment serrées pour bien préserver, justement, cet équilibre-là entre le besoin et la nécessité de protection de la vulnérabilité, mais aussi ne pas exclure la catégorie de personnes, donc des mineurs, ici, en l'occurrence, de 14 ans et plus. Donc, je pense qu'avec le consentement du mineur de 14 ans et plus, un risque minimal et l'évaluation du comité d'éthique selon les circonstances, je pense qu'ici on a un équilibre.

Dans le cas des majeurs inaptes, c'est la même chose. Avant ça, on demandait, donc, le consentement du représentant légal. Comme je disais tout à l'heure, on sait très bien qu'il y a une infime partie de la population qui est dotée d'un représentant légal. Donc, on excluait d'emblée une grande partie de la population et alors qu'il n'y avait rien qui démontrait finalement que le représentant légal, qu'il soit tuteur, mandataire ou curateur, disons, représentait mieux la personne protégée qu'un proche, par exemple, énuméré à l'article 15. Donc, en lui conservant cette garantie de protection via le consentement d'un proche, en plus il y a, donc, le risque minimal et l'absence de risque sérieux, je pense qu'on a ici tous des éléments, là, qui sont suffisamment importants pour garantir cette protection-là. Mais en même temps on permet, donc, l'inclusion... je mentionnais tout à l'heure, là, des personnes âgées qui sont démentes, donc, qu'on excluait d'emblée, et c'est dommage puisqu'on est dans un contexte, comme on le sait, de vieillissement de la population, de la prévalence de la démence. Donc, je pense qu'ici, là, c'est des modifications qui sont très louables.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste deux minutes.

Mme Proulx : C'est bien. Merci, M. le Président. Je n'ai plus de question.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Bonaventure.

M. Roy : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Bonjour.

M. Roy : Vous avez dit tout à l'heure qu'il existait des risques minimaux subjectifs et des risques minimaux objectifs. Est-ce que ça veut dire que les risques minimaux subjectifs sont plus ou moins valides ou, en tout cas... l'aspect minimal est moins certain que ceux... En tout cas, j'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, c'est ça. Bien, écoutez, j'essaie de vous dire un peu ce que je comprends de la littérature la plus récente là-dessus, c'est-à-dire que, concernant l'expression «risque minimal» qui est utilisée notamment dans l'énoncé de politique des trois conseils, dans également… et là je cherche le nom, mais... l'encadrement du FRSQ, les règles de 2008 si je ne me trompe pas, il y a, disons, une sensibilité au fait qu'on pourrait effectivement... cette expression-là référerait à un risque qui pourrait être subjectif, c'est-à-dire évalué en fonction de l'état de la personne et de la gravité de sa maladie, par exemple, donc un risque qui, pour cette personne-là, pourrait être minimal pourrait être extrêmement élevé pour une personne qui serait en bonne santé. Donc, c'est simplement ça.

Mais je ne suis pas en train de dire que c'est l'interprétation, mais je dis qu'en intégrant… en insérant le terme «risque minimal» à 21, on se...

Le Président (M. Bergman) : En conclusion.

Mme Savard (Anne-Marie) : ...peut-être qu'on se porte à... on se porte évidemment à l'interprétation, justement, qui n'est pas claire dans la littérature. Voilà.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le groupe formant l'opposition officielle, pour une période de 21 minutes, M. le député de Jean-Talon.

• (15 h 50) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Très intéressant, votre présentation, mais surtout votre discussion, parce que ce qu'on voit, là, c'est que, malgré le fait que les gens sont dans la recherche… Je pense que ça fait... troisième journée qu'on écoute, les gens ne disent pas la même chose. Première journée, «risque minimal», c'était : on ne faisait pas de projet de recherche puis pas de chimiothérapie, puis on ne faisait pas de ci… Puis c'était facile, on... Ce n'était pas plus compliqué que ça. Puis, plus ça avance, plus on se rend compte que l'interprétation du «risque minimal», là, elle va directement en fonction du chercheur, puis de l'endroit que vous faites votre recherche, puis du comité d'éthique. Puis je ne suis pas... On était tous autour de la table, je pense que vous avez tous eu cette même perception. Puis, même dans votre discussion avec le ministre, vous ne vous entendiez pas, malgré le fait qu'il a fait de la recherche. En passant, c'est intéressant parce que ça veut juste dire que c'est important qu'on mette les bons mots pour les bonnes affaires.

Le risque minimal, au niveau de l'énoncé des trois conseils, c'est défini dans les trois conseils. Nous autres, on va travailler avec le Code civil. La question : Si on ne s'entend pas c'est quoi, la définition du risque minimal... Puis j'aime beaucoup l'expression des juristes, là, l'intention du législateur, là : 10 ans après, là, il n'y a plus grand monde qui s'en souvient, puis ça prend quelqu'un qui veut aller faire la recherche pour savoir exactement c'était quoi, l'intention. Est-ce qu'il y a moyen de mettre quelque chose de clair pour que tout le monde comprenne la même affaire?

L'énoncé des trois conseils, je pense, c'est un document que tous les chercheurs puis tous les comités d'éthique se fient. L'interprétation peut être différente. Moi, la question que je me pose, puis je vais vous la poser, c'est défini dans l'énoncé des trois conseils : Est-ce qu'on devrait utiliser le même terme qu'eux autres sans en mettre la définition dans la loi?

Mme Savard (Anne-Marie) : Je ne pense pas.

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Pardon. Pardon, excusez-moi, M. le Président. Merci pour votre question. Écoutez, je... Il y a, vous savez comme moi, une gradation dans l'édifice normatif, et, à mon point de vue, le Code civil — et, je pense, au point de vue de tous les juristes — est pas mal au-dessus que… des énoncés de politique comme l'énoncé de politique des trois conseils, qui relève de l'autorégulation, c'est-à-dire que ça provient tout simplement des organismes subventionnaires qui se sont concertés pour faire cet énoncé-là. On est loin d'un débat démocratique dans l'énoncé de politique des trois conseils.

Ici, on est dans ce cadre-là, et je ne vois pas en quoi on serait liés par des définitions qui ont été introduites dans des énoncés qui n'ont pas de valeur juridique dure. On parle de droit dur. Ce n'est pas du droit dur, ce n'est pas du droit contraignant. Alors, moi, ça... Je veux dire, je ne vois pas du tout l'intérêt. Je le comprends dans un souci d'uniformité, mais alors moi, je pense qu'on devrait être plus... on devrait consacrer nos efforts à plus d'uniformité et de cohérence au sein même du Code civil plutôt que de vouloir se coller à des énoncés politiques, tel l'énoncé politique des trois conseils. Ce n'est pas la bible, l'énoncé politique des trois conseils. La bible, ça devrait être le Code civil.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bon. Écoutez…

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : …je savais que j'aurais une belle discussion avec vous, là. Je trouve ça très intéressant. Là, ce qu'on fait, c'est qu'on prend un terme de l'énoncé des trois conseils, on le met dans le Code civil sans définition…

Mme Savard (Anne-Marie) : Voilà!

M. Bolduc (Jean-Talon) : …et puis, après ça, on nous dit : Bien, référez à l'énoncé des trois conseils, qui n'a aucune valeur juridique. Moi, il me semble qu'on fait les choses à l'envers.

Mme Savard (Anne-Marie) : Je le pense aussi. Si vous me permettez...

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bon!

Mme Savard (Anne-Marie) : Excusez-moi, je...

M. Bolduc (Jean-Talon) : Non, c'est… Non, continuez votre pensée, vous me donniez raison, j'aime ça.

Des voix : ...

Mme Savard (Anne-Marie) : Je me doute bien, mais ce n'est pas pour ça nécessairement que je le dis...

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : ...tout simplement parce que, oui, j'ai effectivement un problème avec ça. Par ailleurs, je ne pense pas que le Code civil est un instrument juridique qui se prête à de trop nombreuses définitions. Je ne suis pas de celles qui pensent qu'on doit définir tous les termes que le Code civil place dans son... Mais, ceci dit, il faut s'assurer d'introduire des termes qui prêtent le moins possible à interprétation si on ne veut pas se retrouver dans un système où on va laisser cours à trop d'interprétation.

C'est pourquoi je pense qu'il faudrait… il y aurait lieu de s'éloigner, mais c'est vraiment une idée que je lance, c'est simplement de s'éloigner, au contraire, de tout ce qui réfère à «risque minimal» et qui a déjà un passé interprétatif incertain et d'en faire... plutôt de s'en distinguer. Je pense qu'on sait que notre Code civil du Québec est un instrument identitaire important, on a tout le lieu, ici, d'introduire des termes qui sont propres à la pensée civiliste, et je pense que, de ce point de vue là, «risque minime», pour moi, serait plus évocateur et plus clair.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, on peut discuter à savoir si c'est «risque minime» ou autre chose. Moi, j'aimais bien la question de la proportionnalité, la...

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, oui.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Puis je suis content que vous me donniez votre opinion, parce que, là, on est partis avec des petites modifications que, dans le fond, ça veut dire beaucoup de choses. On ne touche pas à certains articles peut-être qui auraient eu besoin d'être remodelés en même temps puis on veut répondre à une petite particularité très spécifique du Code civil pour plein de raisons : parce que ça n'a pas été revu, les chercheurs ne sont pas satisfaits puis on veut se permettre de faire plus de recherche. Puis, par contre, les chercheurs viennent nous voir puis ils disent : Ça ne nous a pas empêchés de faire de la recherche, ça ne nous a pas empêchés d'avoir des soins innovateurs. Par contre, il faudrait avoir cette modification-là qui nous empêche de faire beaucoup de choses.

La question qu'il faut se poser, c'est... Là, on a pris l'énoncé des trois conseils avec un terme. La question qu'il faut se poser : Est-ce qu'on ne devrait pas rédiger, par nos propres mots, notre propre pensée, parce que je pense qu'en 2013, avec toutes les discussions qu'on a eues, c'est beaucoup plus clair, que d'essayer de prendre un terme que personne n'est pas capable de dire la même chose sur ce terme-là et qui est... En tout cas, depuis les trois jours qu'on a faits, il n'y en a pas un qui nous a donné la même définition du risque minimal. Moi, c'est ce que j'ai vu autour de la table. Et même le ministre, au début, la première journée, nous en a donné une définition qui aujourd'hui est une définition différente. Ça fait que moi, je pense que ça va être...

Une voix : ...

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Oui, parce qu'on disait au début qu'on ne faisait pas de traitement dechimiothérapie puis, à la fin, on arrivait avec un peu de traitement de chimiothérapie, on fait des études. Je pense qu'il y a une clarification à faire à ce niveau-là. Parce que… Pourquoi j'accorde de l'importance à cet élément-là? C'est que, si ça n'a pas été ouvert depuis 15 ou 20 ans, cet article-là, ça va prendre un autre 20 ans avant qu'il soit rouvert. Ça fait que ce n'est pas vrai qu'on va le faire en quelques minutes. Je pense qu'il faut prendre le temps de faire une bonne réflexion. Puis, je l'ai dit, il n'y a pas de partisanerie là-dedans, on veut juste faire la bonne chose. Sauf que ce que je vois, c'est qu'au niveau des termes on ne s'entend pas.

On sait par contre ce qu'on veut. Ce qu'on veut, c'est de permettre à des gens de pouvoir participer à des projets de recherche qui vont soit les aider, eux autres, ou qui vont aider des gens qui sont dans une situation similaire. On ne veut pas leur nuire puis on veut aussi faciliter pour que le Québec puisse se distinguer au niveau d'une recherche de qualité. Moi, je pense que c'est les trois éléments que l'on veut, mais la rédaction actuelle, selon moi, ne nous amène pas là. Je ne sais pas ce que vous en pensez, là.

Mme Savard (Anne-Marie) : Bien, écoutez…

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Merci. Je pense que j'ai relevé quand même... Par ailleurs, il y a de très, très bonnes modifications, mais effectivement je suis d'accord avec vous qu'il y a des termes qui sont employés et qui portent à confusion ou enfin à interprétation, dont celui de «risque minimal». Et moi, je ne sais pas, je n'étais pas là dans le cadre des autres interventions, mais, si on est là à en parler, vous imaginez ce que ça va être dans les comités d'éthique. Je siège sur quelques comités d'éthique de la recherche, et effectivement on peut passer des bonnes journées à discuter de l'interprétation. Et, tant qu'à faire l'exercice ici, devant... avec les députés, avec le législateur, aussi bien le faire pour que ce soit le plus clair possible et qu'on, justement, facilite le travail des membres des comités d'éthique de la recherche. Il me semble en tout cas que ça devrait être la moindre des choses.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bien, puis… Voyez-vous, moi, ce que je vois, c'est qu'il faut qu'on soit quand même conformes à ce qui se fait au Canada.

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Par contre, la priorité, c'est notre Code civil. C'est ce que vous venez de nous dire. Théoriquement, c'est là qu'on devrait avoir les éléments pertinents. Puis ma pensée va aussi loin de dire que, si, le reste du Canada, on voit que ce n'est pas là qu'ils sont rendus, ça n'empêche pas que, comme société distincte, on soit capables de mettre nos propres éléments dans notre Code civil. Puis, qui sait, peut-être que, dans 10 ans, les autres seront rendus au même niveau que nous autres.

Mais il y a une réflexion à faire là-dessus. Je suis convaincu que là-dessus il y a une réflexion à faire…

Une voix :

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Ça fait que je tiens à vous remercier, parce que je trouvais que la discussion... Puis vous avez démontré, devant tous nos auditeurs, la difficulté d'un dossier comme celui-là : même s'il n'y a pas plusieurs articles, tous veulent avoir des modifications. Par contre, il va falloir qu'on s'entende à la fin pour que les mots dans la loi correspondent réellement à notre réalité qu'on veut avoir. Merci…

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président.

Mme Savard (Anne-Marie) : Je vous remercie beaucoup pour vos commentaires. En effet, vous parlez, ici, à une civiliste pure. Alors, c'est vrai que j'ai tendance à effectivement accorder beaucoup d'importance à cette identification qu'on a ici, au Québec, à notre Code civil. Il s'agit d'un instrument identitaire très important, l'occasion aussi de se distinguer par notre Code civil, et je ne vois pas en quoi, encore une fois, on aurait à être liés par des énoncés de politique d'organismes subventionnaires fédéraux. Et par ailleurs je... Voilà. Donc, je m'en tiendrai à ça. Je vous remercie.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation, c'est fort intéressant, et vous présentez bien vos points. Félicitations.

Vous faites partie de comités de recherche... Vous faites partie de comités d'éthique de recherche.

• (16 heures) •

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, oui.

Mme de Santis : Pour les gens qui ne savent pas comment ça fonctionne, est-ce que vous pouvez nous dire comment ces comités-là se rencontrent, combien de fois ils se rencontrent par année ou par mois et comment ils font leurs décisions?

Mme Savard (Anne-Marie) : Écoutez...

Mme de Santis : Ou ils prennent leurs décisions, pardon.

Mme Savard (Anne-Marie) : Je ne sais pas s'il faut que j'attende.

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Merci. Oui, alors, merci pour votre question. Alors, la plupart des comités d'éthique sur lesquels j'ai siégé depuis plusieurs années, en général c'est tout simplement une rencontre d'au moins une demi-journée, donc, par mois. Et vous savez certainement, là, la composition... vous connaissez peut-être la composition, on a des éthiciens, des juristes, évidemment, des médecins, des chercheurs de différentes disciplines, des disciplines qui sont habituellement liées à la nature de la recherche qui se fait dans l'établissement, bien sûr. Et donc, en général, la façon dont ça fonctionne, c'est qu'on étudie le protocole et le formulaire de consentement, et on se penche sur, justement, les éléments qui ne seraient pas conformes aux dispositions du Code civil mais aussi, effectivement, aux autres dispositions qui figurent dans différents énoncés, soit québécois ou encore canadiens, qui régissent l'éthique de la recherche au Québec.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Quand je regarde le troisième alinéa de l'article 21 tel qu'on propose de modifier, on dit que «le mineur de 14 ans et plus peut néanmoins consentir seul si, de l'avis du comité d'éthique de la recherche, la recherche ne comporte qu'un risque minimal et que les circonstances le justifient». Maintenant, quand je lis ce texte, est-ce que, d'après vous, le comité d'éthique de la recherche doit déterminer si chaque mineur peut consentir seul ou est-ce que c'est le groupe de mineurs?

Mme Savard (Anne-Marie) : Bien, on va y aller selon...

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Pardon. On va y aller selon le projet de recherche tel qu'il est monté — j'allais dire entre guillemets, si vous me passez l'expression — par le ou les chercheurs. C'est-à-dire qu'on va évaluer, selon le projet de recherche qu'on a devant nous, s'il s'agit ici d'un risque minimal pour une personne âgée de 14 ans et plus ou pas, mais pas pour chacun, évidemment, en particulier selon sa condition, mais plutôt la condition dans laquelle sont ces mineurs-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Et donc, si... J'essaie de comprendre le risque pour chaque personne. Si, dans ce groupe qui est constitué de mineurs de 14 ans et plus, un risque peut être un risque minimal pour certains mais être un risque plus important pour les autres, comment cette détermination est faite?

Mme Savard (Anne-Marie) : Bien, c'est là que je vous dis...

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : ...qu'on va avoir beaucoup de travail et de pain sur la planche en tant que comité d'éthique et… en tant que comité d'éthique pour évaluer si ce projet de loi là, tel qu'il est conçu, et parfois il est conçu pas nécessairement par les… en tout cas, c'est une autre question, mais, tel qu'il est conçu, comporte un risque minimal ou pas. Mais on n'ira pas voir selon chaque personne, bien sûr.

Nous, on évalue le protocole comme tel, le formulaire de consentement. Donc, on va nous dire quelle est la population visée, par exemple 15... des mineurs de 15, 16 ans dans telle école secondaire, on veut observer leur comportement. Là, je vous parle de recherche sociale, et c'est sûr que c'est ça qu'on vise; je le sais. On veut observer leur comportement dans la cour, ou, peu importe, dans les vestiaires, ou quoi que ce soit, les études observationnelles ou encore des entrevues, des questions. On va arriver à des consensus, certainement, en disant : C'est un risque minimal. Et je pense que c'est l'objectif, ici, ultime qui est visé, c'est la recherche sociale qui comporte des risques, en oubliant le terme «minimal», qui sont très faibles pour permettre justement que, comme je le disais tout à l'heure, des jeunes qui sont en fugue ou en conflit familial et avec lesquels on ne pourrait jamais faire de la recherche, puisque leurs parents ne... ils ne sont pas là, ou, tout simplement, ils n'ont pas de contact, ou quoi que ce soit, on ne pourrait jamais faire de la recherche avec eux parce que justement il n'y a pas de titulaire de l'autorité parentale, ou il est parti, ou quoi que ce soit. Donc, c'est ça qu'on vise.

Je suis très consciente de la portée très peu dangereuse, j'allais dire, de l'article 21, mais, pour moi, il faudrait qu'on clarifie et qu'on mette des termes qui sont clairs et ne portent pas à interprétation, ou le moins possible.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Dans votre réponse, vous avez décrit le type de recherche que vous présumez que cette clause... à laquelle cette clause réfère. Mais est-ce que cette clause, quand on lit les mots dans cette clause, réfère exactement à ce que vous venez de dire? Parce qu'on parle de recherche risque minimal mais pas du type nécessairement que vous venez de mentionner.

Mme Savard (Anne-Marie) : Je suis entièrement d'accord avec vous. Je suis entièrement d'accord avec vous, mais, bon, je vais dire, peut-être, pour une petite expérience de lecture de projet de loi, et de la façon dont se modifie ce genre d'article litigieux, entre guillemets : On sait très bien que c'est un projet de loi qui vise à répondre à des critiques répétées depuis plusieurs années, et, ces critiques-là, on est capables de les lire, elles existent, elles sont dans la littérature. Et c'est justement pour inclure le genre de recherche dont je viens de parler, je pense, qu'on introduit cet article-là. Par contre, on ne le fait peut-être pas de la bonne manière, c'est-à-dire avec les bons termes, puisqu'on est encore là à en parler. Alors, je suis d'accord avec vous qu'à la lecture du libellé ce n'est pas écrit que c'est le genre de recherche auquel je réfère. Mais je pense que ça vise à répondre effectivement aux critiques dont j'ai parlé.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Si on revient maintenant à l'article 4, qui fait référence à l'article 24 du code, et on ajoute le consentement autrement que par écrit, alors est-ce que vous êtes d'accord qu'un mineur de moins de 14 ans devrait aussi pouvoir donner son consentement autrement que par écrit? Et disons que c'est par téléphone, on l'appelle, est-ce que vous voyez ça comme étant un consentement éclairé du mineur de 14 ou 15 ans?

Mme Savard (Anne-Marie) : Écoutez, de toute façon, on s'entend que, selon les dispositions qui sont dans le projet de loi, les mineurs de 14 ans et... de moins de 14 ans, j'allais dire, ne pourraient jamais, de toute façon... Bon, ça, on s'entend.

Alors, ici, on parle éventuellement, oui, de mineurs de 14 ans et plus avec ce fameux risque minimal. Dans ce contexte-là et selon des circonstances... si les circonstances le justifient, je pense qu'en effet un consentement écrit n'est pas nécessairement... Je ne suis pas une… j'allais dire une rigoriste, là, du consentement écrit, parce qu'on a tellement de consentements écrits qui ne veulent rien dire de toute façon. Ce qui m'importe avant tout, parce que, souvent, ce qu'on voit... en tout cas, quelquefois, je devrais dire, ce qu'on peut voir, c'est effectivement des consentements très, très bien écrits, mais la personne a plus ou moins lu le formulaire de consentement, etc. Donc, pour moi, ça ne veut pas dire grand-chose. Un consentement, qu'il soit verbal ou écrit, tant qu'on peut le documenter et qu'on peut en arriver à en faire la preuve, je pense qu'effectivement… peut très bien se justifier ici, dans des circonstances très précises.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Une différence, c'est que, quand c'est un consentement écrit, on voit ce que la personne a reçu comme demande et ensuite a signé. Peut-être, la personne n'a pas complètement compris ce que la personne a signé, mais on sait quoi a été présenté à la personne. Quand c'est un consentement qui n'est pas écrit, qu'il n'est pas écrit, comment on va contrôler les mots qui sont utilisés ou comment on va savoir exactement quel est le contenu du message qui a été transmis à la personne dont on veut le consentement?

• (16 h 10) •

Mme Savard (Anne-Marie) : C'est effectivement un problème. Je pense qu'ici on vise souvent... Et, encore une fois, c'est de l'interprétation. Mais est-ce que ça pourrait être mieux formulé? Probablement. Mais je pense qu'on vise finalement des projets à risque, encore une fois, très, très minime, des entrevues, des questionnaires, et qui font en sorte que, si la personne accepte, on voit qu'elle accepte de remplir, on prend ça pour acquis, qu'elle a accepté de le faire. Ici, on parle juste de remplir, bon, une entrevue... comme je vous dis, là, de répondre à quelques questions qui ne sont pas nécessairement très importantes.

Donc, je pense que le fait de remplir pourrait être un gage qu'on a consenti, donc, de démontrer une forme de preuve. Mais, de toute façon, on va en revenir finalement au chercheur. Ça va être au chercheur de se prémunir, finalement, lorsqu'il ne voudra pas utiliser le consentement écrit, de trouver un autre mode de preuve qui pourra donc démontrer que la personne a effectivement consenti.

Mais, écoutez, moi, je suis... mais je ne suis pas, là... Je sais qu'il y a des juristes qui sont très, très... ça prend un consentement écrit. Je suis moins dans cette ligne-là, je vous dirais, parce que, pour moi, j'ai trop vu de consentements écrits qui ne voulaient de toute façon rien dire. Alors, là-dessus, je ne suis pas très, très formelle.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps de ce bloc, c'est fini. Mme la députée de Groulx, pour un bloc de cinq minutes.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci, Mme Savard. Dans votre allocution de départ, vous avez mentionné qu'il n'y a pas de référence, dans le projet de loi actuel, aux soins innovateurs. Alors, on sait que c'est un exercice qu'on ne fait pas très souvent, de modifier... d'avoir des projets de loi. Selon vous, est-ce qu'on devrait l'inclure dans le projet de loi actuel et de quelle façon?

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Merci beaucoup pour votre question. Écoutez, je ne suis peut-être pas là pour vous donner toutes les pistes de solution. Par contre, comme je vous l'ai dit, effectivement, au départ, j'ai été surprise et déçue de voir qu'on excluait encore les soins innovateurs et qu'on ne les soumettait pas à aucun autre contrôle. Donc, c'est ça, mon point.

Et le fait de dire, à l'article 21, dernier alinéa : «Ne constituent pas des recherches les soins qui, selon le comité d'éthique de la recherche, sont des soins innovateurs requis par l'état de santé de la personne qui y est...» «Selon le comité d'éthique de la recherche». Le problème, c'est qu'à partir du moment où les soins ou les interventions sont interprétés par les médecins comme étant des soins innovateurs, ils ne montent pas au comité d'éthique de la recherche. Autrement dit, c'est le médecin qui va interpréter que c'est un soin innovateur ou, en tout cas, que ce n'est pas de la recherche et donc que ça ne requiert pas… J'ai vu une fois en peut-être sept ans un questionnement, dans les comités d'éthique, sur les soins innovateurs, et j'ai siégé sur plusieurs. Donc, ça veut... Je suis persuadée que ce n'est pas parce qu'il ne se fait pas de soins innovateurs ici, dans les établissements de santé ou les instituts de recherche. Il s'en fait, mais ça ne monte pas au comité d'éthique.

Alors, je pense qu'au minimum il devrait y avoir un encadrement, peut-être par un comité qui ne serait pas le comité de la recherche, un comité qui serait plus médical, ou une opinion médicale éclairée, pour faire en sorte que ces soins-là, qui ne sont pas, donc, des soins standards, qui ne sont pas reconnus par la pratique médicale courante, soient soumis à une forme de contrôle. Donc, je dis simplement que je déplore le fait qu'effectivement ils ne soient pas contrôlés du tout.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Donc, ce que je comprends, c'est qu'on pourrait inclure, à l'article 21, que les soins innovateurs soient soumis aux mêmes règles ou...

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, ça peut être une solution, effectivement, ça pourrait être une solution. Ou encore un autre comité, mais là c'est sûr que, là, on a... En tout cas, vous auriez d'autre travail, certainement, à faire puisque... Mais, à tout le moins, oui, il faudrait qu'il y ait quand même un certain suivi, parce qu'encore une fois ce ne sont pas des soins qui relèvent de la pratique courante et standard de la médecine. Donc, je ne vois pas pourquoi, là, ces soins-là pourraient être faits selon le bon vouloir et le bon jugement des médecins ou des chercheurs.

Le Président (M. Bergman) : Il vous reste deux minutes.

Mme Daneault : J'ai du lousse. Je voudrais revenir aussi sur le fait qu'à l'article 21, le premier paragraphe, tout à l'heure vous avez semblé dire : On devrait tout simplement retirer... bon, on devrait arrêter à «il s'oppose». Personnellement, j'ai relu le paragraphe à quelques reprises, et, bon, quand on parle : «Un mineur ou un majeur inapte ne peut participer à une recherche qui comporte, dans les circonstances, un risque sérieux pour sa santé ou à laquelle il s'oppose alors qu'il en comprend la nature et les conséquences», moi, j'ai un peu de difficultés avec ça. Quand on dit que c'est un majeur inapte, comment peut-il comprendre la nature et les conséquences ou comment peut-on s'assurer qu'il en comprenne la nature et les conséquences?

Mme Savard (Anne-Marie) : Bien...

Le Président (M. Bergman) : Mme Savard.

Mme Savard (Anne-Marie) : Pardon.

Mme Daneault : …j'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, c'est ça. Bien, c'est ce que j'ai souligné, de toute façon, comme vous le disiez, dans mon allocution, là. Je voyais un petit peu le paradoxe en disant : Bien, on parle justement de personne majeure inapte, là, ici, et on ne parle pas de comprendre simplement ou de pouvoir... Ce n'est pas quelque chose de simple, là, de comprendre la nature et les conséquences d'un projet de recherche. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, pour une personne majeure apte, il faut déjà se lever de bonne heure, comme on dit; donc, pour une personne majeure inapte, c'est relativement difficile. Si bien que, pour moi, ce morceau de phrase, si vous me permettez l'expression, est inutile et en plus, comme je l'ai dit tout à l'heure, fait en sorte d'écarter toute une partie de la population la plus vulnérable, c'est-à-dire celle qui ne comprendra jamais ni la nature ni les conséquences d'un projet de recherche, et donc pour qui... qui ne pourra jamais non plus s'opposer à un projet de recherche. J'ai mentionné tout à l'heure que je parlais ou je mentionnais surtout les personnes majeures inaptes, peut-être un peu moins les mineures.

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Savard (Anne-Marie) : C'est tout.

Le Président (M. Bergman) : Alors, Mme Savard, merci pour votre présentation. Merci pour l'échange avec notre commission.

Et je demande les gens de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse de prendre place à la table. Je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 16 h 16)

(Reprise à 16 h 17)

Le Président (M. Bergman) : Alors, collègues, je demande votre consentement pour dépasser 17 heures, cet après-midi, avec nos délibérations. Est-ce que j'ai votre consentement? Consentement? Consentement? On va terminer à 17 h 16.

Alors, M. Cousineau, bienvenue. Vous avez 10 minutes pour votre présentation. S'il vous plaît, présentez les membres de votre délégation. Vous avez le prochain 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission.

Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse (CDPDJ)

M. Cousineau (Gaétan) : Merci beaucoup. Alors, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, alors je suis accompagné aujourd'hui de Me Daniel Carpentier, directeur adjoint de la recherche, et Me Claire Bernard, conseillère juridique.

Nous vous remercions de l'invitation qui a été faite à la commission de présenter ses observations sur le projet de loi n° 30. Nous déplorons cependant le très court délai alloué pour commenter le projet de loi, car, bien que ce texte législatif soit court, il concerne une réalité complexe, notamment sur le plan normatif.

La commission, conformément à son mandat, a examiné le projet de loi afin d'en vérifier la conformité aux principes et aux droits contenus dans la charte et de faire les recommandations qu'elle estime appropriées. La participation à des projets de recherche met en cause des droits fondamentaux de la personne, particulièrement la recherche avec des populations considérées vulnérables.

Le droit de jouir du meilleur état de santé possible est un droit de la personne reconnu dans plusieurs instruments internationaux, dont la Convention relative aux droits de l'enfant et la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Dans une observation générale émise en 2000, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a précisé que l'obligation de mettre en oeuvre le droit à la santé requiert, entre autres, que les États parties fassent la promotion de la recherche médicale. Toutefois, tant le Pacte international relatif aux droits civils et politiques que la Convention relative aux droits des personnes handicapées interdisent de soumettre une personne à une expérience médicale ou scientifique sans son libre consentement, car une telle situation est jugée contraire au droit de ne pas être soumis à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Rappelons que, conformément à l'article 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions qui les concernent, notamment celles qui sont faites... des organes législatifs.

• (16 h 20) •

Le Comité des droits de l'enfant vient d'affirmer, tout récemment dans une observation générale sur le droit de l'enfant à la santé, qu'en matière de recherche médicale l'intérêt supérieur de l'enfant doit prévaloir sur l'intérêt de la société ou de l'avancement de la science. Quoique le droit à la santé et le droit «ne doit pas être soumis à des traitements cruels, inhumains ou dégradants» ne soient pas enchâssés dans la charte québécoise des droits et libertés de la personne, plusieurs droits garantis par la charte sont pertinents, en particulier le droit à l'intégrité, le droit à la sauvegarde de sa dignité et le droit au respect de sa vie privée.

Il est également nécessaire de prendre en considération les droits spécifiques que la charte confère à des catégories de personnes qui sont principalement visées par le projet de loi. En effet, tout enfant a droit à la protection, à la sécurité et à l'attention que ses parents ou les personnes qui en tiennent lieu peuvent lui donner. Ce principe, d'ailleurs, a été repris intégralement à l'article 32 du Code civil. Par ailleurs, toute personne âgée et toute personne handicapée a le droit d'être protégée contre toute forme d'exploitation et le droit à la protection et la sécurité que peuvent leur apporter leur famille ou les personnes qui en tiennent lieu. Ça englobe, outre l'exploitation financière, toute autre forme d'exploitation, dont l'exploitation physique, psychologique, morale et sociale.

Le Québec est une des premières juridictions au monde à avoir légalisé la recherche médicale avec des enfants. En 1971, le Code civil reconnaissait la légalité de l'expérimentation impliquant des mineurs à condition qu'ils soient doués de discernement, que l'expérimentation n'entraîne pas de risque sérieux pour la santé du sujet et qu'il y ait consentement du titulaire de l'autorité parentale et autorisation du tribunal. Cependant, face au constat que l'interdiction absolue de toute expérimentation impliquant les enfants non doués de discernement et les majeurs inaptes les prive de l'avancement de la recherche, le législateur a autorisé l'expérimentation avec ces catégories de population en 1991. Toutefois, afin d'assurer le respect des droits des personnes dont l'état de vulnérabilité les rend plus susceptibles d'être exploitées, le Code civil assujettit la recherche avec ces personnes à des conditions plus rigoureuses que celles protégeant les majeurs aptes. Certaines de ces conditions ont été modifiées en 1998, car jugées encore trop restrictives par les milieux de recherche. On a, entre autres, totalement éliminé l'autorisation judiciaire. La commission rappelle qu'elle avait participé aux travaux parlementaires à l'époque.

Le présent projet de loi vise de nouveau à réviser les dispositions législatives pertinentes en tentant d'établir un équilibre entre le respect des droits et la protection des sujets de recherche qui sont vulnérables en raison de leur âge ou de leur handicap, d'une part, et la poursuite des projets de recherche impliquant ces mêmes sujets, d'autre part.

La première modification propose de remplacer le terme «expérimentation» par le terme «recherche». Ce changement ne clarifie pas la portée des actes que l'on vise à réglementer ou à exclure puisque les dispositions du Code civil contiennent peu d'indications qui permettraient d'établir une définition. La commission recommandait déjà en 1998 que la notion des soins innovateurs soit clarifiée. Suivant l'article 21 du Code civil, la responsabilité de déterminer si des soins constituent des recherches ou des soins innovateurs requis par l'état de santé de la personne qui y est soumise revient au comité d'éthique de la recherche. Cette délégation à chaque comité d'éthique peut entraîner des répercussions significatives, les conditions juridiques entourant les soins innovateurs requis par l'état de santé étant moins contraignantes que celles qui encadrent la recherche. La commission estimait donc que cette clarification était nécessaire, entre autres, afin de contribuer à s'assurer qu'une interprétation trop large de la notion de soins innovateurs ne vienne pas réduire à néant l'objectif visé par les modalités entourant l'expérimentation avec des mineurs et des majeurs inaptes. La commission réitère que le concept de soins innovateurs devrait être mieux défini afin d'assurer une protection uniforme aux personnes vulnérables qui reçoivent des soins qui sont, de par leur nature, expérimentaux.

Dans le même sens, la commission considère que la notion de recherche devrait être définie ou délimitée.Rappelons que les dispositions régissant la recherche se situent dans la section du Code civil qui traite des soins et que cette section se situe dans le chapitre qui traite de l'intégrité de la personne. Bien que la notion des soins soit définie assez largement par l'article 11, puisqu'il peut s'agir d'examens, de prélèvements, de traitements ou de toute autre intervention, il faut néanmoins se demander si toutes les recherches envisagées correspondent à des soins. Une réflexion s'impose sur le cadre législatif qui devrait s'appliquer.

Cela dit, la première exigence qui conditionne la recherche est celle du consentement. C'est principalement sur cette question que le projet de loi propose des modifications. Compte tenu du court délai, la commission n'est pas en mesure de présenter une position sur chacune de celles-ci. Nous formulerons toutefois quatre commentaires et une règle fondamentale, soit que le principe du consentement libre et éclairé est au coeur du droit à l'intégrité de la personne.

En premier lieu, le projet de loi propose de permettre à un mineur de 14 ans et plus de consentir seul à une recherche si, de l'avis du comité d'éthique de la recherche compétent, celle-ci ne comporte qu'un risque minimal pour le mineur et que les circonstances le justifient. Rappelons que la charte ainsi que le Code civil et la Loi sur la protection de la jeunesse consacrent le principe de la responsabilité des parents à l'égard de leur enfant mineur, quel que soit son âge. Cependant, plusieurs dispositions du code et de la Loi sur la protection de la jeunesse permettent à l'enfant âgé de 14 ans et plus d'exercer directement certains droits. Cette approche reconnaît le principe de la capacité évolutive de l'enfant, notamment en matière des soins de santé. Cependant, un tel changement exige que les mesures soient en place pour garantir que l'enfant qui participe à la recherche donne un consentement qui soit effectivement à la fois libre et éclairé. D'autre part, si cette modification était retenue, la commission considère que le Code civil devrait être plus précis sur le type de circonstances qui pourraient justifier le recours à ce régime de consentement exorbitant du régime général.

En second lieu, le projet de loi élargirait la situation où une personne aurait le pouvoir de consentir pour un majeur inapte en l'absence de représentant légal. Serait aussi autorisé le conjoint... sera ainsi autorisé le conjoint, ou, à défaut de conjoint ou d'empêchement de celui-ci, un proche parent, ou une personne qui démontre pour le majeur un intérêt particulier. Il faut se rappeler que toute personne inapte n'est pas nécessairement représentée en vertu d'un mandat de protection ou d'un régime légal de protection. L'assouplissement de la règle relative aux personnes qui pourraient donner un consentement substitué ne doit pas se faire au détriment du droit à l'intégrité et des autres droits fondamentaux de la personne inapte. En particulier, les conditions doivent être en place pour que les personnes soient en mesure d'agir dans le seul intérêt de la personne inapte. Elles devront, entre autres, disposer des informations suffisantes pour tenir compte des volontés que cette dernière a pu manifester, en particulier si elle a exprimé son consentement à participer à une éventuelle recherche ou refusé.

D'autre part, il est opportun de se demander comment se régleront les situations où plusieurs proches du majeur inapte divergeraient d'opinion, en particulier lorsque la recherche ne viserait pas le bienfait pour le majeur inapte.

Le troisième commentaire concerne l'introduction du concept de risque minimal. Étant donné que le premier alinéa de l'article 21 interdit la participation à la recherche des mineurs et majeurs inaptes lorsqu'elle comporte un risque sérieux pour la santé, on comprend qu'on introduirait ici un risque qui se situerait au‑dessus du seuil de l'absence de risque mais en deçà du risque permis par l'article 21. La commission recommande que ce nouveau critère fasse l'objet d'une définition dans le Code civil afin que les comités d'éthique de la recherche puissent l'appliquer sur la base d'une compréhension commune.

Finalement, le projet de loi propose de permettre que le consentement à une recherche puisse être donné autrement que par écrit si, de l'avis d'un comité d'éthique de la recherche, les circonstances le justifient. Si on peut admettre que, dans certaines situations, l'exception pourrait être justifiée, notamment pour permettre de respecter les droits de la personne concernée, il n'en demeure pas moins que le Code civil devrait être plus précis.

Par ailleurs, la commission accueille favorablement la proposition de conférer à toute personne qui participe à une recherche de même qu'à ses héritiers ou représentants légaux le droit de formuler une plainte concernant cette recherche auprès du commissaire local aux plaintes et à la qualité de services. Elle note toutefois que ces personnes ne disposeraient pas d'un recours auprès du Protecteur du citoyen. La commission se demande ce qui justifie ce choix.

Pour terminer, la commission souhaite formuler deux commentaires portant respectivement sur l'encadrement normatif des comités d'éthique de la recherche et sur la composition de ceux-ci. Les normes encadrant la composition et les conditions de fonctionnement des comités d'éthique de la recherche responsables d'approuver et de surveiller les projets de recherche ne sont établies ni dans le Code civil ni dans une autre loi. Elles sont plutôt définies par le ministère et doivent être publiées à la Gazette officielle. En 1998, la commission avait suggéré que les normes encadrant la composition et le fonctionnement des comités d'éthique de la recherche soient prévues par règlement. Compte tenu des responsabilités exercées par les comités d'éthique de la recherche pour assurer le respect des droits fondamentaux des sujets de recherche mineurs ou inaptes, la commission est toujours d'avis que les conditions de fonctionnement de ces comités devraient plutôt être édictées par règlement.

Par ailleurs, la commission avait recommandé que chaque comité d'éthique comprenne au moins une personne ayant pour rôle de défendre les droits et l'intérêt des personnes vulnérables impliquées. Elle suggérait que ce rôle pourrait être assumé par une personne ayant une sensibilisation et un intérêt marqué en matière de droits de la personne malade, des personnes handicapées ou des malades mentaux, selon le cas. Cette recommandation n'a été que partiellement suivie.

La présence d'une personne ayant un intérêt particulier à l'égard du groupe de personnes qui font l'objet d'une recherche trouve une illustration dans l'énoncé de politique relative à l'éthique de la recherche avec des êtres humains adoptée en 2010 par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, le Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada et les Instituts de recherche en santé du Canada. Selon nous, ce principe devrait pouvoir s'appliquer au sein des comités d'éthique de la recherche lorsque des catégories spécifiques de personnes sont visées par une recherche. Je vous remercie de votre attention.

• (16 h 30) •

Le Président (M. Bergman) : Merci, M. Cousineau, pour votre présentation. Et maintenant le groupe formant le gouvernement pour un bloc de 24 minutes. M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, M. Cousineau. Bonjour, madame, monsieur. J'aimerais d'abord que… Lorsque vous dites : «clarifier la notion de soins innovateurs», quelle serait votre suggestion, si on avait à clarifier cette notion-là dans le Code civil?

Le Président (M. Bergman) : M. Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Merci. Nous croyons qu'il y a des pistes de définition autant dans la convention européenne que dans des déclarations de l'UNESCO, que peut-être que madame pourrait... Bernard ou monsieur...

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernard.

MmeBernard(Claire) : Pas spécifiquement sur ce...

M. Cousineau (Gaétan) : C'est le risque minimal.

Mme Bernard (Claire) : Oui. Excusez-moi. Les définitions, on les voit sur d'autres questions qui pourraient venir. C'est le législateur qui a fait la distinction. Donc, à notre avis, c'est à lui d'expliquer quelle est la catégorie de soins qu'il exclut du champ des soins qui sont des recherches. Nous, on a fait une présentation en fonction des droits et des moyens pour respecter ces droits, mais on n'est pas sur le terrain pour qualifier les soins. Mais ce qu'on voit, c'est l'impact de l'exclusion et du manque de définition, donc les répercussions sur... le fait qu'il n'y ait pas de définition. Et on a même entendu que même ce que le Code civil prévoyait, c'était que cet examen devait être fait par les comités d'éthique. On apprend que même ce stade-là n'est pas respecté. Donc, merci.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je vais avoir le même genre de question. Lorsque vous dites : Il faudrait préciser le type de circonstances où un mineur de 14 ans et plus pourrait consentir, avez-vous des suggestions quant à la précision de ce type de circonstances?

Le Président (M. Bergman) : M. Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Non, on n'en a pas. Vous savez qu'on a eu un délai très court pour commenter ce projet de loi. Alors, nous, ce qu'on a dit, bien, c'est qu'à la lecture même du projet et des textes écrits ça nous pose des questions.Donc, on reste avec des questions, et c'est ça qu'on vous donne comme information. Peut-être qu'il faudrait les préciser, et, à partir de ces précisions, on pourrait mieux commenter le projet et s'assurer de la protection. Parce que, comme on dit, c'est le meilleur intérêt de l'enfant, c'est sa protection qu'il faut, au-dessus de tout, se préoccuper.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous évoquez, dans votre mémoire, là, l'Énoncé des trois conseils auquel on pourrait se référer. L'Énoncé des trois conseils définit l'expression «risque minimal», et on entendait tout à l'heure que les comités d'éthique basent leurs décisions sur notamment l'Énoncé des trois conseils, qui, soit dit en passant, est un énoncé qui résulte d'une large consultation publique et d'un consensus et qui est révisé, là. Je pense qu'entre les deux énoncés il y a eu 10, ou 12, ou 15 ans. Donc, c'est un processus très bien suivi. Et «risque minimal», c'est : «…la recherche où la probabilité et l'ampleur [de] préjudices éventuels découlant de la participation à la recherche ne sont pas plus grandes que celles des préjudices inhérents aux aspects de la vie quotidienne du participant qui sont associés au projet de recherche.» Est-ce que vous trouvez que cette définition de «risque minimal»... est-ce que vous êtes confortable avec cette définition?

Le Président (M. Bergman) : M. Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Notre commentaire était que… le fait qu'au Code civil, dans le projet de loi, il n'y avait pas cette définition du «risque minimal». Là, j'entends votre définition, donc on n'a pas pu l'étudier, on l'entend maintenant. Nous, on avait regardé... Je m'excuse, tantôt, la question, c'est justement dans la convention européenne, et l'UNESCO avait, eux, fait des tentatives de «risque minimal». Par exemple, celle-là, ici, c'est la convention européenne, je crois.

Mme Bernard (Claire) : C'est le protocole.

M. Cousineau (Gaétan) : C'est le protocole de...

Mme Bernard (Claire) : C'est le protocole de la convention européenne en matière de recherche médicale.

M. Cousineau (Gaétan) : Alors, ici : Recherche comportant un risque minimal et une contrainte minimale. «Aux [termes] du présent protocole, une recherche est considérée comme [représentant] un risque minimal si, au regard de la nature et de la portée de l'intervention, on peut s'attendre à ce qu'elle entraîne, tout au plus, un impact négatif très faible et temporaire sur la santé de la personne concernée.» Et on explique même une définition de ce qui est une contrainte minimale si... Je peux la définir, si vous voulez.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous me permettrez de préférer celle des trois conseils, qui, à mon avis, est plus opérationnelle.

Autre question, sur le consentement écrit. J'aimerais aussi vous entendre sur vos réserves par rapport au consentement écrit, s'il y en a.

Le Président (M. Bergman) : M. Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Bon, on s'est dit que, si, dans... Oui, on dit, dans notre document, que, parfois, ça peut être opportun. Mais je pense que, lorsque c'est consentement écrit, toutes les questions se posent. À quoi on a consenti? Et donc, dans notre texte plus long, là, on vous suggère de penser peut-être à un témoin qui serait là pour assurer de pouvoir bien identifier ce à quoi on a consenti de façon verbale s'il n'y a pas d'écrit pour le confirmer.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : O.K. Mais, par exemple, une recherche qui se ferait par téléphone, parce que c'est à ça qu'on réfère surtout, là, les recherches qui se font par téléphone, où le consentement écrit est difficile, ou encore des recherches de masse où on a 50 000 personnes à observer, par exemple, alors c'est ce que nous révélaient, là, certains témoins qui sont venus à cette commission,alors la présence de témoins, comment ça peut s'opérationnaliser?

Le Président (M. Bergman) : M. Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Dans le projet de loi, on ne parle pas de ce type de recherche, on parle de recherche tout court, et on n'identifie pas que c'est un appel téléphonique ou un autre moyen. Donc, je pense que, dans ces cas-là, il faudrait trouver un moyen quand même de s'assurer du consentement libre et éclairé. On a affaire à un mineur ou une personne inapte, donc il faut prendre les moyens pour assurer la protection de cette personne.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je vais laisser mes collègues poser des questions supplémentaires.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Cousineau, Me Carpentier et Me Bernard. De prime abord, M. Cousineau, j'aimerais ça que vous nous disiez si votre organisme est saisi souvent de plaintes ou de problèmes relatifs à des personnes qui participent à des projets de recherche.

M. Cousineau (Gaétan) : Les plaintes que nous recevons sont basées sur la discrimination. Alors, ça ne pourrait pas être inclus, à moins qu'on puisse faire un lien avec une discrimination. Les autres types de plaintes qu'on peut recevoir, c'est des plaintes d'exploitation, personnes âgées, personnes handicapées. Dans ce sens-là, nous, on n'a pas... On a enquêté dans différents cas où, par exemple, les gens devaient... les soins reçus, ou les soins non reçus, ou la qualité des soins reçus pouvaient être un des facteurs de l'examen de l'enquête, pas nécessairement une participation à la recherche. Je ne me souviens pas de quoi particulier à cet effet-là. Moi, je n'en connais pas.

Mme Proulx : Parfait.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Merci. J'aimerais, M. Cousineau, vous parler de toute la question relative aux changements législatifs proposés en lien avec le consentement des personnes inaptes. Alors, dans le projet, il y a un assouplissement de la règle au niveau des personnes inaptes qui vient donner le droit aux personnes habilitées à consentir aux soins. On vient donner à ces personnes-là le droit de consentir pour la personne inapte à une participation à un projet de recherche. Est-ce que, de votre point de vue, là, de président de la Commission des droits de la personne, vous jugez que les personnes habilitées à consentir aux soins sont en mesure de protéger les droits de la personne inapte au même titre que ce qui était prévu dans la loi précédemment, c'est-à-dire une personne, un tuteur légal? Est-ce que vous pensez que cette personne-là, qui est habilitée à consentir aux soins, va pouvoir protéger adéquatement les droits de la personne inapte?

Le Président (M. Bergman) : M. Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Dans notre texte et comme je l'ai dit tantôt, premièrement, il y a le risque minimal, la définition, on en a parlé tantôt, donc je ne reviendrai pas là-dessus. Mais ce que le projet propose, c'est qu'il pourrait être représenté par une autre personne s'il n'y a pas de mandataire ou un représentant désigné. Alors, oui, ça peut être opportun, à ce moment-là, d'avoir accès à cette personne-là.

Mais je vous rappellerai, on le cite dans nos notes de présentation, la Cour supérieure, une décision qui est importante, qui vient peut-être éclairer de ce côté-là, c'est qu'on dit, dans cette décision du tribunal, que «…doit se justifier par l'intérêt d'une personne majeure inapte dans la mesure où il convient de la protéger de nulle autre personne». Alors, il faut s'assurer que la personne qui va consentir ou qui va venir appuyer parce qu'elle a un intérêt pour cette personne, elle va se préoccuper de la qualité de vie de cette personne et non pas de l'intérêt que le mandataire ou la personne qui a l'intérêt… elle voit qu'il y a peut-être un intérêt que sa mère ou son père qui souffre d'alzheimer, de démence, pourrait être vérifié, puis ça bénéficierait aux autres personnes. Donc, il ne faut pas déplacer le test au bon endroit.

Et je peux vous mentionner que, comme ancien notaire qui a pratiqué le droit et qui a vu plusieurs disputes de famille et comme aussi on s'occupe de la protection des personnes âgées, des personnes handicapées, on peut voir que, souvent, il y a plusieurs personnes autour d'une personne, et qu'ils ont tous, quand on les écoute et qu'on les entend, le meilleur intérêt de la personne en tête, et qu'ils recherchent… mais qui sont tous avec des opinions divergentes, et ce qui fait des bonnes chicanes de famille.

Le Président (M. Bergman) : Monsieur...

M. Cousineau (Gaétan) : Alors, ça, c'est l'enjeu dans ces situations-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

• (16 h 40) •

M. Hébert : Un commentaire là-dessus. Habituellement, c'est une des raisons pour laquelle les gens vont aller vers un processus de protection légale lorsqu'il n'y a pas d'entente. Donc, d'habitude, ces gens-là ont déjà un régime de protection légale, parce qu'il y a justement mésentente dans la famille. Dans les autres cas, on convient selon les dispositions du Code civil.

Une remarque sur l'une de vos notes concernant l'examen des plaintes, et vous dites : Pourquoi on ne réfère pas au Protecteur du citoyen? Vous savez que le Protecteur du citoyen est toujours en deuxième instance dans l'examen des plaintes. Et d'ailleurs la Protectrice du citoyen nous a écrit là-dessus en disant : «Je constate avec satisfaction que le Protecteur du citoyen aurait ainsi compétence pour recevoir et traiter ces plaintes en deuxième instance.» Donc, pour la Protectrice du citoyen elle-même, il s'agit de... elle est impliquée dans le processus de facto, puisqu'on soumet les sujets à une recherche au même processus que les patients des établissements. Donc, elle est là. Elle est dans le processus.

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Bien, écoutez, tant mieux si elle perçoit qu'elle a ce rôle. Nous, on croyait ou on avait perçu... Comme je vous disais, on a peu de temps regardé tout cela, mais on avait perçu que, parce qu'il n'y avait pas de modification de la loi qui... La Loi sur le Protecteur des usagers en matière de santé et de services sociaux, la commission, là, on s'est dit : Bien, peut-être qu'à ce moment-là il y aurait peut-être dû avoir une modification à cette loi. Et, si vous pensez qu'il n'y en a pas besoin puis que la protectrice se croit saisie, bien, tant mieux.

M. Hébert : Dans la loi, la protectrice arrive en deuxième recours lorsque c'est les soins. Et, comme on dit que c'est le même processus que pour les soins, bien, ipso facto...

M. Cousineau (Gaétan) : Tant mieux. Parfait, on est d'accord.

M. Hébert : Mes collègues peuvent peut-être compléter.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Dans votre mémoire, vous parlez de... en fait, vous semblez avoir une préoccupation par rapport à la modification proposée de changer le terme «expérimentation» par le terme «recherche». Vous dites, dans votre mémoire, que ça correspond mieux à la réalité québécoise, canadienne et internationale mais que ça ne clarifie pas pour autant la portée des actes que l'on vise à réglementer ou de ceux qu'on souhaite exclure. Alors, j'aimerais ça que vous nous expliquiez un peu plus la préoccupation. Est-ce que, pour vous, il s'agit d'un changement plus large qu'uniquement sémantique, là, le terme «expérimentation» et le terme «recherche»? Est-ce que vous voyez une différence? Parce que vous mentionnez que le Code civil contient très peu d'indications qui permettent d'établir une définition. Est-ce que, pour vous, il y a une différence?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Il doit y en avoir une. Si on décide de le changer, ça ne doit pas tout à fait dire la même chose, ou, si on change quatre 0,25 $ pour 1 $, je ne le sais pas. Mais ce qu'on vous dit, finalement, c'est que le terme «recherche» aux... et les dispositions du Code civil ne contiennent pas d'indication, justement. Donc, pour mieux définir, je pense qu'il serait important qu'on tente une définition du terme «recherche» dans le code. C'est notre suggestion.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose... M. le député d'Argenteuil.

M. Richer : Merci, M. le Président. Bonjour. Dans votre rapport, vous mentionnez à la page 4 : «La responsabilité de déterminer si les soins constituent des recherches selon la nouvelle terminologie proposée ou des soins novateurs requis par l'état de santé de la personne qui est soumise revient au comité d'éthique de la recherche.» Et vous ajoutez : «On conviendra qu'il s'agit dans les deux cas de soins de nature expérimentale.» J'aimerais vous entendre sur cette dernière phrase.

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Si vous me permettez, là, vous avez parlé tantôt de notre document comme étant un mémoire, un rapport. Je voudrais le qualifier pour ce qu'il est : ce sont des notes de présentation. On n'a absolument pas eu le temps de faire un avis ou un mémoire à l'Assemblée nationale, on regrette, en peu de temps. On a présenté nos notes de présentation à nos membres vendredi parce qu'il y avait une date de fixée pour cette rencontre déjà à l'avance, sinon on n'aurait pas pu le faire, et sans leur donner la chance d'avoir un texte à l'avance. Donc, nous, ce qu'on a fait, on s'est repris... on a repris la majorité de nos notes de 1998, lorsqu'on était intervenus la dernière fois, à cette époque-là.

Alors, ce qu'on dit, finalement, pour revenir à votre question précise, c'est qu'on dit que, dans les deux cas…On convient que, dans les deux cas, ce sont des soins de nature expérimentale, que les... mais que cette... puis que, là, cette détermination-là, elle est déléguée à chaque comité d'éthique. Alors, nous, on dit qu'à partir de là il faut éviter des interprétations divergentes des comités d'éthique,et c'est là qu'il est risqué… et que, donc, les concepts de recherche, de risque minimal, de soins innovateurs, tout ça devrait être mieux défini, mieux précis pour assurer une cohérence, une harmonisation des décisions des différents comités d'éthique qui se fréquentent ou ne se fréquentent pas et qui pourraient avoir une définition plus large ou plus restreinte selon les gens, selon les groupes. Et même on parle de... on vous donne des recommandations quant à la composition des comités… excusez, la... parce que c'est par Gazette officielle, on vous suggère d'y aller par règlement,donc la commission pourrait commenter, comme elle le fait sur les différents règlements, et de plus vous suggère la présence d'une personne additionnelle à ce type de comité pour représenter les groupes de personnes selon leurs spécificités.Voilà. C'est un peu les commentaires qu'on fait à ce niveau-là.

M. Richer : Merci.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Merci. Bonjour, M. Cousineau. Alors, madame, messieurs, vous nous dites aussi, dans vos propos, que le consentement non écrit pourrait... Vous avez certaines réserves par rapport à un consentement non écrit, mais par contre, documenté, il pourrait peut-être y avoir des possibilités. On a entendu des groupes de recherche qui nous ont parlé de recherches sociales, plus de caractère, plus de recherche, de questionnaires, des fois, aussi, faire par téléphone ou... ce genre de questions là qui pourraient apporter des éléments pour faire avancer la recherche et la science dans certains domaines sociaux. Alors, pouvez-vous nous donner une idée de, pour vous, qu'est-ce que ça pourrait être, des choses suffisamment documentées pour que ce soit acceptable pour vous? Avez-vous des idées?

M. Cousineau (Gaétan) : Bien, par exemple, si vous faites affaire avec un mineur, s'il avait 14 ans et plus, puis on entre dans un cadre de risque minimal, comme un questionnaire, par exemple, et que, bon, vous ne lui envoyez pas un document auparavant qu'il pourrait signer, bien, ça peut être par... si les parents sont là, de toute façon, il y a… comme on dit, le parent a toujours autorité même si l'enfant a plus de 14 ans. Alors, le parent pourrait peut-être vérifier et consentir, vous auriez un témoin de ce côté-là.

Mais on ne l'écarte pas, hein? On ne vous dit pas qu'il faut l'écarter. On dit même... On constate que ça pourrait être, dans certains cas, acceptable. Voilà. Par exemple, on peut aller dans des cas, des situations plus graves, plus importantes, je pense, comme dans les situations où les parents, les gens qui... par exemple, suite à un accident où on sait que la personne aurait mentionné des choses à sa famille, à son conjoint, puis on se retrouve dans des situations, donc, où il pourrait y avoir, là, des consentements qui auraient pu être donnés, on peut... Voilà. Il y aurait peut-être des consentements écrits à aller chercher dans ces situations-là pour documenter ce pan-là.

Mme Gadoury-Hamelin : O.K. Par contre, les gens de la recherche nous ont indiqué que, dans bien des cas, c'est de la recherche sociale, les parents ne sont pas présents ou les jeunes, à ce moment-là, sont en brisure sociale avec leursfamilles, et que c'est là toute la difficulté d'aller chercher les consentements parentaux, de là l'allégement qu'on regarde ici, en commission. Est-ce que vous auriez d'autres solutions acceptables?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Oui, d'accord. Oui, d'ailleurs, nous, vous savez, on a... C'est la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, on a régulièrement affaire à des jeunes qui sont dans des familles d'accueil, dans des centres de réadapt, qui sont en coupure avec les parents. On se retrouve souvent dans des situations où c'est un des parents ou les deux parents qui font des plaintes à la commission puis sont complètement en désaccord sur des soins à donner aux enfants. On connaît bien toute cette situation. On la connaît, on la vit de façon, je vous dirais, presque quotidienne dans ces situations-là, parfois justement pour faire des examens de capacité d'enfants pour les soins à donner, au lieu de les servir soit au niveau scolaire ou autrement. Alors, oui, il y a des défis de ce côté-là.

Mais là vous parlez de questionnement, mais je pense que j'aimerais aussi que M. Carpentier vous donne un peu...

Le Président (M. Bergman) : M. Carpentier.

• (16 h 50) •

M. Carpentier (Daniel) : C'est qu'il y a une certaine difficulté à traiter de ce projet de loi puisqu'il y a… On est dans le Code civil, dans la section des soins, et notre réflexe et notre expérience, comme Commission des droits, c'est les droits fondamentaux, le droit à l'intégrité de la personne. Normalement… Et là on passe d'expérimentation à recherche, et ce qu'on entend ici, c'est de la recherche sociale qui se fait par téléphone. Je comprends que ce n'est pas le mandat qu'a le ministre dans ce projet de loi là, c'est d'ouvrir à certaines choses, mais on est en train d'ouvrir sur de la recherche sociale dans un chapitre du Code civil qui traite des soins. Alors, nous, nos préoccupations quant au consentement, c'est... On dit : Pour faire des sondages au téléphone sur des habitudes qu'ont des adolescents, est-ce qu'on est dans les soins requis par l'état de santé, innovateurs, etc.? C'est la difficulté qu'on a. Je comprends le besoin d'étendre... d'ouvrir la recherche à certaines choses, mais on est dans une section du Code civil qui traite des soins. Alors, je veux quand même... c'est peut-être le...

Et nous ne sommes pas des experts en recherche ni sociale ni médicale. On a une expertise sur le respect des droits de la personne, le droit à l'intégrité, le libre consentement des personnes, et c'est ça qu'on vient amener et dire : Faisons attention. Et il faut peut-être définir ce dont on parle ici. On comprend que le Code civil n'est pas un lieu pour... ce n'est pas le type de législation où on définit en détail des choses, mais on peut au moins établir des balises de qu'est-ce qu'on entend par soin minimal, qu'est-ce qu'on entend par soin innovateur puis qu'est-ce qu'on entend par recherche.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson, il vous reste trois minutes.

Mme Gadoury-Hamelin : Moi, ça va pour moi.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Bonaventure.

M. Roy : Bonjour, madame, bonjour, messieurs. Pensez-vous que les modifications proposées constituent un équilibre acceptable entre la protection des participants à la recherche et l'avancement de la science? Bref, globalement, est-ce que c'est un bon projet de loi? Est-ce que ça peut permettre un avancement de la science tout en respectant quand même les droits de la personne?

Le Président (M. Bergman) : M. Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Jusqu'à date, je n'ai jamais répondu à une question si c'est un bon projet ou pas. Je laisse le soin aux législateurs d'en convenir. Nous, on fait des commentaires sur des aspects de projet. En fait, ce qu'on vous souligne, c'est les questionnements qu'on a à la lecture de notre expertise, qui est celui de la protection des droits fondamentaux des individus avec qui on traite. Et là vous... le projet vient traiter des deux groupes les plus vulnérables de ces personnes : les mineurs, d'une part, et les majeurs inaptes. Alors, vous voyez qu'on devient, nous, comme protecteurs, à ce moment-là, plus prudents dans nos commentaires face à cela.

Ceci dit, puis on l'a dit, je pense qu'on a essayé de le dire dans notre document, que l'on constate, à partir de 1971, si je me souviens bien de la date où le Code civil s'est fait innovateur au Québec pour la recherche et comment chaque... les chercheurs ont cherché, puis on voit qu'il y a… l'important... puis, si j'avais... puis je ne le ferai pas, mais, si j'avais le goût de parler de ma vie personnelle et de mes enfants, j'ai eu affaire à des situations semblables dans ma vie personnelle et je connais, moi, personnellement, des situations de demande de recherche, etc. Mais, ceci dit, le document, je pense… il est important que, les gens qu'on aime, et qu'on veut prendre soin, et qui ont des droits fondamentaux, on puisse leur donner les meilleurs soins possible.

Puis le droit, je vous l'ai dit au tout début…Ce que j'ai dit, c'est que le droit important qui nous retient, qui amène la commission ici, c'est le droit à la santé, hein? C'est ce droit-là qui est important. Par contre, il y a d'autres droits, et les droits sont égaux. Il n'y a pas de hiérarchie, là. Alors, il faut faire attention dans ce sens-là. Est-ce qu'il y a équilibre? Bien, c'est ça qu'il faut s'assurer. Et, pour s'en assurer, nous, il manque de clarté dans certains aspects, dans certaines définitions pour s'en assurer, pour qu'on puisse vous donner une réponse équilibrée et éclairée, qui vient de notre consentement libre et éclairé.

Le Président (M. Bergman) : Alors, ceci met fin à ce bloc. Pour le groupe formant l'opposition officielle, pour un bloc de 21 minutes, M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Seulement que faire un commentaire sur la dernière discussion. On n'a pas le choix d'en faire un bon projet de loi puis d'en faire une bonne loi, parce que c'est trop fondamental. Et, si les gens ont autant hésité à ouvrir l'article 21, c'est parce qu'il y a beaucoup de susceptibilité, mais il faut être capables, autour de la table, d'y répondre.

Merci de... puis rebonjour dans cette commission. Vous êtes venus, il y a quelques semaines, discuter...

M. Cousineau (Gaétan) : ...

M. Bolduc (Jean-Talon) : Aux deux semaines, puis réservez...

M. Cousineau (Gaétan) : ...semaines actuellement et dans des... je vous rappellerai, dans des domaines très vastes et différents.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Puis réservez votre mercredi dans deux semaines;on ne sait pas, là, ça pourrait revenir.

M. Cousineau (Gaétan) : Oui. Bien, on en a d'autres en préparation.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Écoutez, j'ai un... je pense que vous nous avez apporté un nouvel élément. Un, votre Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, c'est quand même un organisme qui est très reconnu. Est-ce que j'ai raison ou pas?

M. Cousineau (Gaétan) : Oui. Je pense que oui, que les gens s'adressent à nous, parce que, s'il y a brisure, ou effraction, ou discrimination, exploitation, ils vont venir chez nous. Et ils sont de plus en plus nombreux à le faire et se tournent vers nous pour des opinions sur ces sujets-là.

M. Bolduc (Jean-Talon) : C'est un organisme public.

M. Cousineau (Gaétan) : Absolument.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Absolument.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Excusez-moi, j'ai devancé, M. le Président. Par contre, quand vous avez fait vos devoirs puis vous avez recherché la notion de risque minimal, vous n'êtes pas allés du côté des trois conseils, vous êtes allés du côté d'une autre organisation. Ça fait que je ne sais pas si vous pourriez nous réciter ce que vous nous avez donné comme définition du risque minimal.

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Je vais vous expliquer pourquoi on se tourne vers ces instruments-là. Nous, ce qu'on regarde en premier lieu, c'est la Charte des droits, les droits au Québec et les conventions internationales, parce que c'est là-dessus qu'on base le droit. Mais on peut vous lire… Je vais vous laisser...

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, c'est ça, c'est justement... Vous m'avez dit… vous êtes basés sur les conventions internationales. Où, à quel endroit vous êtes allés chercher votre définition, et est-ce que vous pourriez la lire?

M. Cousineau (Gaétan) : Oui. Allez-y, là.

Le Président (M. Bergman) : Me Bernard.

Mme Bernard (Claire) : Alors, je voudrais juste dire qu'on a quand même regardé aussi les outils normatifs ici, mais c'était pour répondre : Est-ce qu'on est capables de donner, dans un outil juridique, une définition? Et on en donne un exemple.

Donc, l'article 17 du protocole de la convention européenne qui porte particulièrement sur la recherche biomédicale définit le risque minimal et la contrainte minimale :

«1. Aux fins du présent protocole, une recherche est considérée comme présentant un risque minimal si, au regard de la nature et de la portée de l'intervention, on peut s'attendre à ce qu'elle entraîne, tout au plus, un impact négatif très faible et temporaire sur la santé de la personne concernée.

«2. Une recherche est considérée comme présentant une contrainte minimale si l'on peut s'attendre à ce que les désagréments pouvant en résulter soient tout au plus temporaires et très légers pour la personne concernée. Lors de l'évaluation individuelle de la contrainte, une personne jouissant d'une confiance particulière auprès de la personne concernée est, le cas échéant, appelée à évaluer la contrainte.» Donc, il y a deux éléments dans cette large définition.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci. Puis êtes-vous d'accord? Parce que cette définition est quand même différente de celle des trois conseils.

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : La réponse est oui.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : O.K. Merci, M. le Président. Dans notre Code civil, on donne la notion de risque minimal. Qu'est-ce qui ferait que la notion des trois conseils aurait priorité sur la notion que vous venez de nous lire? C'est parce qu'il n'y a pas de définition dans le Code civil. Ça fait qu'on sait juste que c'est «risque minimal». On nous a dit ici que c'était basé sur les trois conseils, mais moi, je pars du principe que, le Code civil, c'est juste marqué «risque minimal», puis on avait tous des interprétations différentes. Qu'est-ce qui ferait que celle des trois conseils serait prioritaire sur celle que vous venez de nous lire?

M. Cousineau (Gaétan) : En fait, il n'y a rien qui oblige qui que ce soit, présentement, à suivre la définition même des trois conseils. C'est un travail de concertation, c'est une définition qui existe. On ne l'a pas mise au code, donc elle n'est pas codifiée, et, à ce moment-là, on confie la tâche d'évaluer le risque au comité d'éthique. Alors, c'est eux qui auront le dernier mot avec l'interprétation qu'ils en donnent, peut-être à partir de la même définition, peut-être avec des regards différents sur les mêmes... C'est sûr que la définition qu'on vous a donnée, qui est la convention européenne, elle est là comme un indicateur dans le patrimoine international qui gère là-dessus. Mais, si on ne la fait pas nôtre, alors elle reste là.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Vous venez de faire mon point, là. C'est qu'on a marqué un terme dans lequel c'est... qui est très, très important, sur lequel on avait la perception que les gens avaient tous la même définition, puis on en arrive aujourd'hui avec la conclusion que, tout dépendant... À la limite, un chercheur européen pourrait dire que le risque minimal… ou des gens qui sont plus de mentalité européenne pourraient dire que le risque minimal, c'est plus la notion que vous nous avez donnée versus celle des trois conseils. Puis je comprends qu'au Canada on assume peut-être que c'est celle des trois conseils, mais trois conseils, c'est un organisme... c'est un principe d'organisme subventionnaire qui n'a pas force de loi, d'où, pour moi, ça devient important de mieux définir les termes.

La problématique que nous avons, c'est que nous voulons clarifier quelque chose pour le bien du patient, mais, si on ne le clarifie pas bien, on va avoir plus de problèmes dans l'interprétation par la suite. Et après ça ça prend des directives. Moi, je pense qu'on est aussi bien de bien faire la loi, aller chercher l'intention du législateur, et — je le répète, ça fait plusieurs fois que je le dis pour nos légistes, là, puis pour des collègues ici — c'est de... Si on connaît bien les concepts, on devrait être capables d'écrire une loi qui va bien définir ces concepts-là. Puis, pour moi, ça va être quelque chose de majeur, parce que je n'ai pas l'intention qu'on rouvre l'article 21 pour en arriver, puis comme ça a été dit :Est-ce que ça répond, oui ou non, aux grosses problématiques? C'est plus que ça. Il faut bien faire la loi, avec les bons mots accrochés aux bons termes. Puis, en tout cas, il y a plusieurs éléments, puis vous êtes une des preuves aujourd'hui que ça va être important de bien définir c'est quoi, les termes qu'il va y avoir dans la loi.

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Bien là, je ne sais pas s'il y a une question, mais...

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui.

M. Cousineau (Gaétan) : Oui, il y a une question?

M. Bolduc (Jean-Talon) : Un commentaire.

• (17 heures) •

M. Cousineau (Gaétan) :«Risque minimal», c'est peut-être les bons mots. Je pense que ce qui manque, c'est la définition pour qu'on... qu'il y ait clarté, et la même chose pour les soins innovateurs.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Bonjour. Dans votre mémoire, vous mentionnez l'importance d'encadrer ou de... par voie de règlement ou autrement, les normes... bien, la composition puis les conditions de fonctionnement des comités d'éthique qui sont responsables de la recherche. On a entendu, depuis la semaine dernière, bon nombre de témoignages à l'effet que les comités d'éthique, entre eux, n'avaient pas nécessairement d'homogénéité non plus dans la façon dont ils appliquaient certaines... dont ils interprétaient certaines notions, et donc, à ce niveau-là, il y avait un besoin de plus... d'avoir une meilleure homogénéité. Mais je comprends que vous voulez... ce que vous recommandez, c'est d'aller un peu plus loin, c'est de dire... de prendre ce qui est... ce qui a été publié dans la Gazette officielle le 29 août 1998, qui est, somme toute, assez sommaire, et de l'encadrer à l'intérieur d'un règlement plus strict.

Est-ce qu'il y aurait des éléments... Si on prend le texte de la Gazette officielle de 1998, est-ce qu'il y aurait des éléments que vous ajouteriez à ce qui est déjà prévu? Parce que je... on le regarde, puis il est quand même... Bon. Le texte est là, mais c'est quand même sommaire, si on tient compte de vos recommandations et aussi de ce qui nous a été présenté depuis deux semaines.

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : En 1998, on avait déjà informé, ici, que le conseil... on avait... le conseil d'en faire un règlement de cette... plutôt que de... une publication dans la Gazette officielle, de cet ordre. En fait, le seul commentaire qu'on fait sur ce qui est là, c'est sur la composition, et on vous suggère de penser à ajouter... D'ailleurs, on a les... moi, je les ai lus encore récemment. Vous, je sais que vous les avez regardés encore plus que moi. Il y a possibilité d'ajouter des personnes, et on s'est dit, à ce moment-là : Peut-être qu'il y aurait intérêt... D'ailleurs, on y voit un grand intérêt à ce que chaque comité d'éthique comprenne au moins une personne qui aurait pour rôle de défendre les droits et les intérêts des personnes vulnérables impliquées. Parce que, là, on a... Prenez le CHUM, par exemple, c'est très gros, puis là il y aurait une personne qui serait là pour parler un peu des... pour les usagers, là. Vous pouvez imaginer la quantité de personnes qu'il aurait à représenter, comment qu'il peut être le porte-parole et vraiment porter ce facteur. Et nous, on va plus loin, on dit : Bien là, écoutez... Et là on vous donne un indicatif, là, c'est là qu'on cite les trois conseils, là, dans ce sens-là. Et nous, on pense que la composition pourrait avoir un intérêt particulier.

On peut penser, par exemple si on fait une recherche sur les autochtones, que vous auriez quelqu'un qui, par exemple, pourrait mieux définir la culture des peuples des Premières Nations et de mieux gérer ces programmes de recherche avec eux, en ayant... capable de vous transmettre, aux comités d'éthique et à tous, de meilleures connaissances. Ça peut être d'autres groupes aussi, ça peut être... Si vous faites affaire avec les jeunes, par exemple, dans tel milieu, il y a peut-être des gens qui travaillent plus près. Vous parliez tantôt de questionnaires d'information auprès de jeunes qui sont dans des centres jeunesse ou dans des familles d'accueil, qu'on n'a plus de parent ou qui ont des parents qui sont en conflit et qui ne sont... incapables d'en prendre soin, comment ces... quelqu'un pourrait être plus près d'eux pour parler de leurs préoccupations et leur façon de regarder les choses et vous aider, finalement.

Alors, nous, on pense que ce type de personne serait intéressant. C'est la recommandation qu'on fait. C'est la seule. Je ne sais pas s'il y en aurait d'autres. On a jeté un regard rapide, quand même, là. Il n'y en a pas d'autre?

Le Président (M. Bergman) : Me Bernard.

Mme Bernard (Claire) : Non, non. Effectivement... Puis ce qu'il faut rappeler, c'est qu'en 1998 l'avant-projet de loi ne parlait pas du tout d'encadrement, on ne parlait même pas de Gazette officielle. Mais nous, on disait : Il faut que ce soit réglementé, et on disait, par exemple : par règlement. Donc, finalement, on s'est retrouvés avec la précision que le ministre devait déterminer les conditions et les règles de fonctionnement et que ça devait se trouver dans la Gazette, mais ça a été émis par simple avis. Vous savez qu'un règlement, ça a quand même l'avantage aussi de pouvoir... d'être public et donc de faire l'objet d'une discussion plus démocratique. Donc, c'est dans ce sens-là, c'est intermédiaire, parce qu'on ne peut pas mettre toutes les conditions dans la loi, surtout dans le Code civil, mais que ce soit mieux réglementé dans le cadre des règlements plutôt que dans un avis.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Et je comprends que vous souhaitez que le paragraphe où on mentionne... Il est évident que cette composition représente un minimum, et donc vous souhaitez qu'on spécifie davantage que la composition du comité soit composée d'un membre qui aurait un lien ou une connaissance particulière avec le cas qui sera présenté au comité. Donc, ça serait variable selon...

M. Cousineau (Gaétan) : Oui, absolument, selon les types de recherche, les projets, etc.

Mme Vallée : Est-ce que ce n'est pas un petit peu utopique? Je comprends ce que vous souhaitez, mais, dans le pratico-pratique, est-ce que ce n'est pas un peu difficile d'atteindre ce que vous souhaitez?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Non, je ne crois pas, au contraire. Écoutez, la commission fait souvent du travail en coopération, ou en collaboration, ou en concertation, parce qu'il y a des... avec des groupes communautaires, des groupes de toutes sortes. Et on sait qu'il y a, sur le territoire du Québec, plein de groupes qui représentent et qui travaillent au meilleur intérêt de différents groupes. Et je pense que, là-dedans, il y a une masse importante de personnes qui pourraient jouer ces rôles-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Merci, M. le Président. D'après l'article 1 de la Charte des droits, tout être humain a droit à la vie ainsi qu'à la sûreté, à l'intégrité... en intégrité de sa personne. On retrouve une disposition semblable à l'article 3 du Code civil du Québec. J'aimerais regarder le premier alinéa de l'article 21 tel que modifié et j'aimerais vous poser la question suivante : Est-ce qu'un majeur inapte qui s'oppose à participer à une recherche, même s'il ne comprend pas la nature et les conséquences de la recherche... est-ce qu'il devrait être capable de dire non, et donc ne pas être sujet à la recherche?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Si la personne inapte est incapable de discernement, elle ne peut pas, en toute connaissance de cause, soit accepter ou refuser une recherche. Alors, c'est là qu'il faut avoir une personne qui va agir à sa place, dans son meilleur intérêt, pour jouer ce rôle pour elle. Écoutez, c'est qu'il y a tout un... Il y a plusieurs maladies, on le voit. C'est le grand défi que la commission a quand elle traite de plaintes en exploitation de personnes âgées ou de personnes handicapées. Ça peut évoluer. Il y a le niveau de vulnérabilité, mais, jusqu'à l'inaptitude totale, il y a toute une gamme. Alors, il y a des cas où on peut, oui, justement aller chercher un consentement de certaines personnes, dans d'autres cas, pas. Et, à ce moment-là, les droits fondamentaux, bien, il faut que d'autres personnes viennent protéger ces personnes. C'est là les systèmes... les régimes de protection.

Mme de Santis : Mais, si la personne qui est... même son tuteur est d'accord, mais la personne inapte ne veut pas, réagit de telle façon que la personne ne veut pas participer, est-ce que la personne devra être forcée à participer à la recherche?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : On ne s'est pas posé cette question. Le projet nous est... C'est une question qu'on n'a pas traitée. Alors, vous me posez une question sur laquelle... Écoutez...

Mme de Santis : Mais, regardez, je vous lis...

M. Cousineau (Gaétan) : Oui, un instant… Oui.

Mme de Santis : ...l'article 1 de la Charte ou je vous lis l'article 3 du Code civil, ça veut dire quoi? Ça veut dire quoi que l'être humain a droit à l'intégrité de sa personne? Vous êtes le commissaire de la Commission des droits de la personne.

M. Cousineau (Gaétan) : Oui, j'ai répondu à cette question-là en disant que, si la personne est incapable de discernement, qu'elle est incapable de porter un jugement éclairé... libre et éclairé sur sa situation à cause de son inaptitude, bien, je pense qu'elle ne peut pas ni s'opposer ni accepter. Si elle est encore capable, oui, je pense qu'il faut l'écouter. Et on dit «alors qu'il en comprend la nature et les conséquences» dans l'article 21 proposé, alors... Et, à ce moment-là, bien, c'est ça qu'il faut examiner, si elle est capable de comprendre. Si elle n'est pas capable, je pense que, pour la protéger, la protéger dans son intégrité, il faut que les autres personnes qui sont autour d'elle puissent prendre cette décision à sa place.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

• (17 h 10) •

Mme de Santis : J'aimerais maintenant adresser cette question, parce que vous êtes les représentants de la Commission des droits de la personne et vous avez une politique aussi vis-à-vis les personnes handicapées et les personnes aînées. Et j'essaie de comprendre, parce que je ne comprends pas. Il y a très peu de personnes inaptes qui ont un représentant légal, qui ont un tuteur, un curateur ou un mandataire. Ces personnes, comment elles agissent dans leur vie quotidienne, vis-à-vis des décisions quotidiennes? Par exemple, ils doivent faire un chèque, ils doivent recevoir de l'argent, comment ces gens fonctionnent, pour que je puisse comprendre comment le consentement est donné tous les jours dans leur vie quotidienne et voir s'il y a un rapport à faire avec le consentement quant à faire partie d'une recherche ou pas?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Alors que la personne est encore apte, si elle a préparé un mandat d'inaptitude, à ce moment-là elle pourrait confier à une ou deux personnes le soin de poser ces gestes-là. Et, à ce moment-là, ce sont ces personnes qui vont signer les chèques, faire les comptes en banque, signer pour les soins, voir à gérer les biens et la personne. Quand les personnes n'ont pas fait de mandat d'inaptitude, on est dans l'impasse. À ce moment-là, la famille est aux prises avec une situation qui n'a pas été prévue. Alors, soit qu'ils organisent la... qu'ils fassent déclarer leurs parents, leur mère par exemple, inaptes, et là il y a quelqu'un de désigné. On ne le fait pas toujours, hein, c'est ce qu'on vous disait tantôt. Alors, à ce moment-là, les institutions, les banques, les institutions financières vont peut-être accepter un mandat qui n'est pas un mandat d'inaptitude, puis ils vont fermer les yeux, puis ils vont accepter qu'il y ait des échanges du compte bancaire pour les besoins de la personne, puis ils vont nous signaler, à la commission, si cette personne abuse du mandat en sortant des sommes, par exemple, de 5 000 $ à tout coup, alors qu'avant la personne dépensait 1 700 $ par mois, et là va nous aviser qu'il y a peut-être une exploitation. Oui, on se retrouve dans des situations où les gens n'ont pas prévu.

L'autre chose qu'on peut faire, c'est qu'on peut, lorsqu'on est apte, faire des choix sur notre avenir. Est-ce que je veux participer à des soins de recherche? Est-ce que je veux certaines choses en cas de maladie et de soins en fin de vie? On peut déjà prévoir ces choses-là. Et c'est, des fois, des choses qu'on a informé les gens autour de nous au moins verbalement; sinon, ce qui est mieux, c'est par écrit quand c'est le cas. Alors, c'est vrai que ça peut être complexe à ce moment-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa, il vous reste 1 min 30 s.

Mme de Santis : Je suis nerveuse et... Ayant entendu votre réponse, sachant qu'il y a très peu de personnes qui sont des représentants légaux de personnes inaptes, je vois qu'il y a une très grande lacune là, et ça me rend très nerveuse.

Mais j'ai une dernière question. Encore, portez votre chapeau de Commission des droits de la personne. Et je demande cette question parce qu'à un moment donné quelqu'un m'avait demandé de participer à une recherche. Quand une personne qui participe à une recherche demande pour le résultat de la recherche, est-ce que vous croyez que la personne devrait avoir droit à ces résultats-là, le rapport de la recherche?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau, dans une minute, s'il vous plaît.

Mme de Santis : Et, si ça fait partie de la demande… de la raison que le consentement a été donné et ce n'est pas fourni, est-ce que le consentement est valable?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Nous ne sommes pas spécialistes dans les contrats de recherche. La commission ne rend pas de tels services, mais je vous dirais que, si la convention ne l'a pas prévu, l'entente, quand on s'est engagé, vous risqueriez de ne pas avoir les résultats de la recherche. Mais ce n'est pas... on n'a pas à étudier ces questions-là. Je ne sais pas si vous vouliez ajouter quelque chose tantôt, sur la première question, je crois.

Le Président (M. Bergman) : Me Bernard.

Mme Bernard (Claire) : Si vous permettez, pour vous rassurer, il y a quand même un encadrement juridique dans le Code civil pour les conjoints qui sont mariés ou en union civile. Il y a un mandat qui est prévu par la loi. Mais, vous avez raison, il y a des catégories de personnes qui, sinon, ne sont pas représentées. Mais le principe, c'est que les régimes sont ouverts, les régimes de protection sont ouverts s'il y a un besoin de protection. Sinon, si les gens fonctionnent sans protection avec leurs proches, le curateur public juge que ce n'est pas nécessaire d'ouvrir les régimes.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Alors le deuxième groupe d'opposition, un bloc de cinq minutes. Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci de votre présence. J'aimerais revenir sur... dans vos notes, la recommandation que vous aviez faite, en 1998, d'encadrer... la composition et le fonctionnement des comités d'éthique de la recherche soient prévus par règlement. Aujourd'hui... Vous savez, à ce moment-là, le législateur avait retenu une voie plus souple, soit la publication dans la Gazette officielle. Aujourd'hui, on est 15 ans plus tard, vous refaites la même recommandation. J'aimerais connaître... Durant les 15 dernières années, est-ce qu'il y a eu, selon vous… ou avez-vous eu vent d'expériences malheureuses quant à l'utilisation du règlement par la... en fait, de ne pas avoir de règlement mais de plutôt utiliser la Gazette à cet effet?

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

Mme Daneault : Dans le fond, pourquoi vous persistez à... dans la même voie et la même recommandation aujourd'hui?

M. Cousineau (Gaétan) : Bien, là-dessus, on peut dire qu'on est logiques. On l'a recommandé en 1998, on réitère, comme on l'a fait aussi dans d'autres projets de loi où on considère qu'il faut des réglementations. Parfois, on suit notre conseil, parfois on ne le suit pas. On l'a fait… par exemple, la certification des personnes âgées pour certains projets. Et parfois c'est...

Puis, en fait, la commission, lorsque ça fait partie de son travail de regarder les projets de loi et les règlements, à ce moment-là elle aurait l'occasion de fournir un éclairage en fonction de son expertise en droits fondamentaux sur ces types de projets de règlement, alors que les règles de d'autres façons, les règles ministérielles ou les politiques ministérielles, on n'aura pas nécessairement à commenter.

Mme Bernard, je pense, a quelque chose d'autre à ajouter.

Le Président (M. Bergman) : Me Bernard.

Mme Bernard (Claire) : Bien, je réitère. Ce qu'on explique, c'est que ça permet de recueillir les commentaires. C'est sûr que, dans notre expérience, on ne reçoit pas les plaintes sur ces types de situations. Mais c'est un principe de transparence dans l'exercice du respect des droits, entre autres.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Mais, ce que je comprends, vous n'avez pas eu vent d'expériences malheureuses où… qui feraient en sorte qu'effectivement l'utilisation du règlement est une nécessité. Dans le fond, d'avoir utilisé la Gazette toutes ces années-là, les 15 dernières années, ne vous a pas... Ne sont pas venues à votre oreille des expériences malheureuses. Ma question, c'est dans ce sens-là.

Le Président (M. Bergman) : Me Cousineau.

M. Cousineau (Gaétan) : Non, on n'a pas eu vent, puis personne ne serait venu chez nous nous le dire non plus. Ce n'est pas notre travail puis ce n'est pas la place où ils iraient le faire. Je ne sais pas si les bureaux des ministres ont eu des commentaires à cet effet-là. Nous, on ne le saurait pas.

Cependant, le fait que vous... qu'il y ait un projet de loi maintenant nous permet... nous permettait d'avoir... de regarder, voir ce qui s'est passé entre 1998 et aujourd'hui sur ça. Comme Mme Bernard mentionnait tantôt, on a quand même amélioré certains textes du côté de la composition, le fonctionnement, tout cela. Et là on... ça nous permet aujourd'hui, puisqu'il n'y pas de... Il n'y a pas eu de discussion possible sur un règlement puisqu'il n'y a pas de règlement. Là, au moins, on peut vous faire une suggestion, qui est celle de la composition, qui nous apparaît intéressante.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Dans le fond, pour vous, la nécessité du règlement, c'est plutôt dans la composition des...

M. Cousineau (Gaétan) : Pas juste ça, sur l'ensemble, sur l'ensemble du contenu qu'on aurait pu commenter. C'est un processus démocratique. Écoutez, vous avez le choix de le faire de cette façon ou de le faire autrement. Dans un autre projet de loi, on avait mentionné que, bon, ça peut se faire par une directive et... mais la directive, elle se change régulièrement. Le processus de règlement, c'est un peu plus ferme, c'est un processus plus formel. Alors, il y a toute une série de contraintes, bien sûr, mais aussi d'occasions de commenter aux gens qui souhaiteraient commenter.

Le Président (M. Bergman) : Alors, Me Cousineau, Me Carpentier, Me Bernard, merci pour votre présentation, merci pour votre présence.

Les collègues, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux au jeudi 2 mai, à 15 heures. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 17 h 19)

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