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Version finale

40th Legislature, 1st Session
(October 30, 2012 au March 5, 2014)

Wednesday, November 6, 2013 - Vol. 43 N° 53

Special consultations on the white paper on the creation of autonomy insurance entitled “Autonomy for All”


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Table des matières

Auditions (suite)

Fédération québécoise du loisir en institution

Association québécoise de défense des droits des personnes
retraitées et préretraitées (AQDR)

Institut universitaire de gériatrie de Montréal (IUGM)

Intervenants

M. Lawrence S. Bergman, président

M. Réjean Hébert

Mme Suzanne Proulx

Mme Marguerite Blais

M. Yves Bolduc

Mme Sylvie Roy

Mme Jeannine Richard

Mme Françoise David

*          Mme Anne-Louise Hallé, Fédération québécoise du loisir en institution

*          M. Louis Plamondon, AQDR

*          M. Jean-Claude Paquet, idem

*          Mme Judith Gagnon, idem

*          Mme Sylvie Belleville, IUGM

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quinze heures quatre minutes)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le livre blanc sur la création de l'assurance autonomie et qui crée l'autonomie pour tous.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Daneault (Groulx) est remplacée par Mme Roy (Arthabaska).

Auditions (suite)

Le Président (M. Bergman) : Merci. Alors, on reçoit maintenant la Fédération québécoise du loisir en institution représentée par Mme Anne-Louise Hallé, directrice générale.

Mme Hallé, bienvenue. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de votre nom, votre titre, et après vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, le micro, c'est à vous, madame.

Fédération québécoise du loisir en institution

Mme Hallé (Anne-Louise) : Alors, mon nom est Anne-Louise Hallé, je suis directrice générale de la Fédération québécoise du loisir en institution. Alors, merci de permettre à notre organisation de vous livrer nos impressions sur l'assurance autonomie.

La Fédération québécoise du loisir en institution regroupe plus de 340 installations de santé utilisant le loisir comme moyen d'intervention privilégié dans la création d'un milieu de vie de qualité auprès de leurs résidents. Forte d'une expertise développée depuis 1979, l'action de la fédération en est une de développement de nouveaux moyens d'intervention par le loisir, de formation des intervenants, d'éducation et de sensibilisation. Les installations membres sont principalement des centres d'hébergement et de soins de longue durée, des centres de réadaptation, des centres psychiatriques, des résidences privées, des ressources intermédiaires, des centres de jour et des organismes communautaires.

C'est avec beaucoup d'intérêt que la fédération a pris connaissance du document L'autonomie pour tous, livre blanc sur la création d'une assurance autonomie proposé par le ministère de la Santé et des Services sociaux. La FQLI se réjouit que le gouvernement québécois propose un modèle pour répondre aux besoins et aux attentes de la population et prendre des actions concrètes dans le vieillissement rapide de la société québécoise. La fédération salue la décision de l'État de prendre action pour trouver un équilibre entre le désir de répondre concrètement aux besoins des personnes en perte d'autonomie et les capacités financières du gouvernement. Il faut revoir l'ensemble de la prestation de services au niveau de la santé pour répondre adéquatement à la demande grandissante des besoins de l'ensemble des Québécoises et des Québécois vieillissants. À la lecture du document, on constate que l'objectif de base de l'assurance autonomie est de réduire l'institutionnalisation et de faire en sorte que les aînés et les autres clientèles en perte d'autonomie reçoivent des services qui les incitent à rester le plus longtemps possible à domicile. À prime abord, notre organisation est d'accord avec cette vision, car plusieurs études ont démontré le désir des personnes aînées à demeurer à domicile. Cependant, nous sommes inquiets quand l'une des difficultés vécues à domicile et en hébergement est l'isolement. Compte tenu de cette réalité, des besoins et des capacités, il est important, dans la couverture des services, d'inclure les activités associées à la vie civile. Ce sont les activités qui permettent à la personne d'interagir avec son environnement, d'être stimulée cognitivement, de faire des choix, de bouger, de socialiser, de pratiquer des activités de loisirs dans le but de maintenir ses capacités mais également de briser l'isolement. Les preuves ont démontré qu'une stimulation périodique et régulière tout au long de la journée prend une importance grandissante chez les personnes.

Le loisir et les activités physiques sont une nécessité dans la prestation de services de l'assurance autonomie. Ils ont des bienfaits psychologiques et physiologiques, aident à prévenir et à lutter contre la maladie, augmentent l'espérance de vie, aident à maintenir ou rétablir les capacités et les aptitudes physiques, mentales, sociales et affectives tout en améliorant aussi la qualité de vie des individus dans leurs milieux.

De nombreux professionnels ont pu constater l'importance du rôle du loisir dans la vie des personnes en perte d'autonomie. Il est prouvé que l'exécution, au quotidien, d'activités de loisirs et d'activités physiques engendre des effets bénéfiques comme l'épanouissement, les habiletés motrices, les habiletés sociales, le développement d'une attitude positive face à la vie, l'acquisition de nouveaux rôles. Elles limitent l'anxiété et diminuent le sentiment de solitude ainsi que le maintien de la qualité de vie. Les activités de loisirs et les activités physiques sont des composantes fondamentales et essentielles au développement de saines habitudes de vie. Elles peuvent jouer un rôle déterminant dans l'éducation et dans la responsabilité donnée aux individus de faire des choix de modes de vie sains. De plus, ils favorisent le développement d'un milieu de vie communautaire et offrent l'opportunité d'établir des échanges et un réseau social. Elles deviennent un puissant moyen de motivation pour inciter la personne aînée à se prendre en main, à réaliser des choses, soit individuellement ou collectivement, dans des activités divertissantes, valorisantes et variées. Par le loisir et l'activité physique, on redonne à la personne les opportunités d'utiliser sa compétence pour prendre le contrôle de sa vie en maintenant des rôles qui ont un sens.

• (15 h 10) •

Le droit au loisir est reconnu universellement depuis 1948 dans la déclaration des droits de l'homme adoptée par l'Organisation des Nations Unies, à l'effet que «toute personne a droit au repos et aux loisirs».

Pour la fédération, cela se traduit par un temps de loisirs et d'activités au quotidien permettant aux aînés de se réapproprier leurs loisirs en leur offrant une expérience. Ce droit légitime fait également référence à une réelle accessibilité aux espaces et aux équipements de loisirs qui tiennent compte des besoins spécifiques des citoyens aînés. Il est important de noter que le plaisir doit être accessible à tous, de la personne aînée la plus dynamique à la personne isolée dans son lit, moins choyée par sa condition de vie. Il est important de... Nous pouvons affirmer que le loisir est une réalité incontournable et essentielle à la qualité de vie des personnes en perte d'autonomie au Québec. Cette vision de la fédération est également souhaitée par la première ministre du Québec, qui affirmait, lors de son discours d'ouverture de la 40e législature de l'Assemblée nationale… lorsqu'elle a donné comme objectif que «d'ici 10 ans la population québécoise devienne une des nations les plus en forme du monde». Pour la Fédération québécoise du loisir en institution, l'assurance autonomie doit permettre l'accessibilité à la pratique d'activités de loisirs au plus grand nombre de Québécoises et de Québécois, peu importent leur condition de santé, leur degré d'autonomie, leur milieu de vie. Quand on pense accessibilité, il faut également penser aux équipements. Des barrières physiques, architecturales, financières et psychologiques entravent l'accessibilité aux infrastructures et aux services. L'accessibilité au transport pour se rendre à la salle de quilles, au parc, au centre commercial en est un exemple. Au niveau de l'environnement, il faut améliorer l'aménagement du mobilier urbain — fontaines d'eau, bancs, toilettes adaptées, trottoirs — pour augmenter l'utilisation et la fréquentation de ces espaces et installations. Pour ce faire, la fédération croit qu'il faut développer la concertation et innover dans les modèles, que ce soit, par exemple, la possibilité de faire de la concertation milieu municipal-institutionnel pour de l'équipement — Villes amies des aînés, centre de jour itinérant dans des résidences privées — ou l'échange d'expertise professionnelle. On peut également regarder la concertation milieu institutionnel-organisme communautaire, milieu institutionnel-scolaire, comme par exemple offrir des espaces de loisirs qui se retrouvent dans les installations du réseau ou dans les résidences privées pour des organismes ou les citoyens du secteur, exemple : des jardins communautaires. Cela donne l'opportunité d'offrir une activité structurée à des personnes de la communauté mais également aux personnes hébergées.

La fédération croit qu'il faut mettre en place des mécanismes pour augmenter le personnel en loisirs qualifié intervenant auprès de la clientèle, afin de mieux répondre à ses besoins. Il faut utiliser les structures du réseau et les professionnels y oeuvrant pour modifier l'offre d'activités de loisirs et d'activités physiques et stimuler les acteurs du milieu à réponde aux besoins.

Nous saluons la mise en place d'un outil de mesure, le SMAF, qui viendra déterminer le niveau de services dont pourrait avoir besoin la personne pour les soins et les services professionnels, d'assistance aux activités de la vie quotidienne et d'aide aux activités de la vie domestique. Nous souhaitons que la grille d'évaluation du fonctionnement social, soit le SMAF social, soit également incluse afin de dresser un portrait de l'occupation du temps libre, du maintien des relations significatives, de l'utilisation des ressources du milieu. Ce sont des éléments importants au maintien de l'autonomie de la personne dans son milieu de vie.

Nous recommandons donc au gouvernement que le ministère prenne en considération les activités de la vie civique, et plus particulièrement les activités de loisirs et les activités physiques, dans les services assurés par l'assurance autonomie, que l'État prenne l'accessibilité à la pratique d'activités de loisirs à toutes les clientèles, de reconnaître l'importance d'avoir du personnel en loisirs qualifié pour répondre aux besoins de la clientèle en perte d'autonomie, que le ministère utilise également le SMAF social pour évaluer les besoins de la clientèle au niveau de ses activités de la vie civique.

En terminant, le loisir est essentiel à la santé et au bien-être des personnes et des collectivités. Le loisir doit être reconnu à travers les valeurs qu'il véhicule et les bienfaits qu'il procure comme un élément majeur pour le maintien d'une société active et en santé. La Fédération du loisir en institution est heureuse d'être partenaire, acteur principal du loisir, dans le réseau de la santé du Québec et de contribuer à la réalisation de ce projet de société. Merci.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé, merci pour votre présentation. Maintenant, pour le premier bloc du gouvernement, M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, Mme Hallé et la Fédération québécoise du loisir en institution, pour ce mémoire. Vous nous rappelez avec beaucoup de justesse que le plaisir doit être accessible à tous, et ce fut un plaisir de vous entendre, d'ailleurs, et un plaisir d'entendre tous les groupes qui présentent à cette commission parlementaire…

J'ai beaucoup apprécié le fait que vous situiez votre intervention dans un cadre plus large, dans le cadre, par exemple, de l'invitation que Mme la première ministre a faite avec sa politique du loisir et du sport, de faire en sorte que les Québécois soient les plus en forme du monde, également la politique de prévention, sur laquelle nous travaillons de façon intense et qui devrait être rendue publique au cours des prochaines semaines, qui va faire une large place à la pratique régulière de l'activité sportive. Et vous le situez également dans le contexte de l'intégration des aînés dans la cité, dans la société, avec le rôle central que joue le programme des municipalités amies des aînés pour rendre disponibles, dans chacune des municipalités du Québec, notamment des infrastructures de loisirs, et je pense que vous le situez très bien.

Pour ce qui concerne les personnes âgées en perte d'autonomie, vous êtes déjà présents bien sûr dans le milieu institutionnel, mais vous êtes aussi présents dans les centres de jour qui font de la réinsertion et de la réadaptation. Et, dans cette réinsertion-là, il y a réinsertion aux loisirs, aux activités civiques. J'aimerais ça que vous nous parliez de ce type d'intervention également.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Alors, présentement, tout dépendant des régions, chaque région a un système un peu différent au niveau des centres de jour, mais, de façon générale, on travaille beaucoup sur la prévention et vraiment permettre à la personne de réacquérir des activités de loisirs qui sont offertes dans la communauté. Ce n'est pas toujours facile parce que les adaptations ne sont pas toujours présentes. Donc, l'insertion est plus difficile à certains groupes et à certaines activités de loisirs pour les gens qui demeurent à domicile, mais on essaie de trouver des façons de faire.

Pour vous donner un exemple, dans un de mes établissements dans la région de Saint-Hilaire, il y a eu une concertation résidences privées, centres de jour et la municipalité, et la salle communautaire a été construite à même la résidence privée, donc ce qui permet aux gens de profiter de l'offre de loisirs de la municipalité mais directement en sortant d'un petit corridor qui les amène directement à la salle d'activités et aux locaux qui ont différentes activités le soir. Donc, pas besoin de sortir à l'extérieur, on peut sortir sans nécessairement avoir le manteau, et tout. Donc, c'est accessible. Et on a vu une augmentation de la participation des personnes à ces activités.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je me souviens, dans une vie lointaine et antérieure, d'avoir participé à la mise en place de centres de jour itinérants pour les milieux ruraux, centres de jour qui sont maintenant assez bien développés et qui permettent à des municipalités même rurales d'avoir accès à cette structure de centre de jour. Et ça permet, dans chacune des municipalités, de pouvoir réintégrer des personnes âgées qui ont perdu de l'autonomie et de pouvoir les réintégrer non seulement dans leur fonctionnement quotidien, mais également dans leur fonctionnement social et dans leurs rôles sociaux. Alors, c'est un travail que vos professionnels font avec beaucoup d'efficacité et de compétence.

J'en viens à l'évaluation, qui est la première étape d'une intervention. Alors, vous suggérez d'intégrer le SMAF social. J'aimerais que vous nous expliquiez pourquoi vous voyez… et qu'est-ce que c'est que le SMAF social et pourquoi vous voyez l'intérêt de pouvoir appliquer cet outil.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

• (15 h 20) •

Mme Hallé (Anne-Louise) : Bien, le SMAF social, bien, pour moi, c'est le complément des profils, des 14 profils du SMAF parce que ça permet vraiment de situer la personne dans un contexte, plus de connaître au moins son temps libre, les relations sociales qu'elle peut entretenir, tout le contexte qui entoure son environnement. Et moi, je pense que c'est important de bien mesurer aussi ce niveau-là pour être capable de bien prendre position et bien faire un suivi à cette personne-là dans toutes les sphères.

Donc, oui, on va faire un suivi au niveau des AVQ, de la vie quotidienne, et tout ça, mais c'est important aussi de mesurer des éléments qui feraient en sorte que la personne qui vient intervenir, qui va faire la prestation de services, soit à même aussi, par son intervention, d'animer un peu le quotidien ou sa présence avec la personne, de trouver des éléments aussi, peut-être, pour la stimuler aussi cognitivement.

Donc, moi, je pense que c'est important que ça fasse… Pour moi, c'est un tout, et on ne peut pas le dissocier. Ça, c'est mon opinion personnelle.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Beaucoup de groupes ont souligné, notamment pour les handicapés plus jeunes, l'importance d'évaluer le fonctionnement social, la participation sociale. Et déjà nous travaillons à compléter l'Outil d'évaluation multiclientèle, avec notamment le SMAF social, pour être en mesure de pouvoir capter ces besoins-là de la part des personnes.

Quels sont, dans votre optique, les services que l'on devrait inclure pour être en mesure de pouvoir améliorer la participation sociale et la participation à des activités récréatives chez les personnes âgées en perte d'autonomie?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : C'est sûr que, si on pouvait offrir un peu plus la possibilité de pouvoir avoir accès à des centres de jour, ça serait magnifique. Mais on sait que ce n'est pas possible parce qu'on n'a pas les structures pour le permettre.

Mais je pense qu'on pourrait réussir à développer des ententes de service peut-être avec des organismes communautaires. On pourrait peut-être aussi… L'idée que, si on prend des entreprises d'économie sociale, on pourrait peut-être regarder du côté des bénévoles qui pourraient peut-être venir soutenir ce côté-là, qui est un peu plus social, au niveau des gens qui sont à domicile, avec des visites d'amitié, où on pourrait avoir certaines activités qui soient faites pour stimuler cognitivement ces gens-là, c'est des avenues qui pourraient être envisagées. Et peut-être aussi regarder tout du côté des centres d'hébergement et de soins de longue durée. Quand on offre des activités à grand déploiement, pourquoi ne pas offrir la possibilité à ouvrir et à permettre aux gens du secteur de venir participer à ces activités-là et de venir pouvoir utiliser les équipements? C'est, entre autres, le cas avec le centre Louis-H.-Lafontaine où, durant la dernière année, on a ouvert le jardin communautaire à l'ensemble des gens qui demeurent aux alentours pour leur permettre d'avoir accès à ces jardins-là qui étaient très peu utilisés par les résidents et que, depuis une année, on vient de rehausser, là, l'utilisation de cet équipement-là. C'en est un exemple.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : L'assurance autonomie s'inscrit dans le concept d'un réseau intégré de services pour les personnes âgées avec un plan de services individualisés qui intègre plusieurs partenaires — vous en avez énuméré un certain nombre — les entreprises d'économie sociale, les organismes communautaires. Il y a aussi les résidences privées d'hébergement pour aînés.

Quels sont les liens que vous voyez à établir avec ces différents partenaires là pour qu'il y ait une préoccupation loisirs dans l'offre de services? Et quelles sont vos expériences, à date, avec ces différents partenaires?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Je vous dirais qu'au niveau des résidences privées c'est un petit peu plus difficile au niveau loisirs.

Cette notion-là d'offrir des activités pour permettre à la personne de s'épanouir et avoir du plaisir, ce n'est pas acquis à tous nos gestionnaires de résidences privées. Je vous dirais qu'on a fait un pas important lors de l'annonce de l'article 83, où on a vraiment insisté sur l'importance de mettre en place des programmations loisirs. Ça commence. Je vous dirais qu'il y a encore beaucoup de résidences qui n'ont pas encore une offre de loisirs vraiment structurée, avec des activités assez diversifiées. Le bingo est encore traditionnellement offert. On n'a pas encore beaucoup changé là-dessus, mais ça s'en vient.

On travaille très fort avec les gestionnaires pour changer et diversifier cette offre de loisirs là et vraiment mettre en place des structures et des équipements pour favoriser un meilleur accès aux loisirs et à l'activité physique de ces clientèles-là. C'est sûr qu'on a encore du travail à faire de ce côté-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je constate dans votre mémoire que vous êtes très, très ouvert et même que vous encouragez le passage vers la priorité des soins à domicile en dépit du fait que vous intervenez majoritairement en institution. Alors, vous avez la préoccupation d'agir en amont. Alors, vous êtes donc, vous, en faveur de l'orientation fondamentale de cette assurance autonomie, qui est de privilégier le maintien dans le milieu de vie des personnes âgées.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Absolument.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Absolument. Et, il y a déjà deux ans, on a écrit, on a fait un document sur un guide pour permettre aux proches aidants de stimuler les gens qui demeuraient à domicile au niveau du loisir donc, avec, à l'intérieur de ça, des pistes d'action, des petites activités à faire au quotidien pour garder, stimuler la clientèle tant au niveau cognitif qu'au... ou intellectuel que physique. Donc, ce document-là a été fait quand Mme Blais était ministre au niveau du Secrétariat aux aînés.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : J'aimerais que vous nous parliez un peu plus de ces expériences positives, où il y a des interventions faites sur la dyade aidant-aidé pour stimuler la participation aux loisirs. Peut-être nous en donner un peu plus de détails?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Bien, des expériences, il y en a quand même quelques-unes.

Je vous dirais que présentement il y a eu une très grosse recherche qui a été faite dans la région de Montréal où vraiment une résidence privée et un organisme communautaire qui offraient de l'hébergement en appartement à ces résidences ont permis aussi, avec les proches aidants, à faire de la formation aux proches aidants, donc de la formation. Quand on vient en... quand on est avec notre résident, comment on peut le stimuler? Comment on peut permettre à sa journée d'être plus plaisante? Comment aussi des petits objets du quotidien peuvent changer le quotidien? On a l'impression que, quand on fait du loisir, ça prend tous les instruments, ça prend tout l'équipement pour faire cette activité-là. Au contraire, simplement de feuilleter un album photo, ça vient changer le quotidien d'une personne. Et c'est ces petits trucs là qu'on montre en formation à certains proches aidants en formation. Et ça s'est fait dans la région de Montréal, et je sais qu'on veut étendre cette formation-là à d'autres régions au Québec.

C'est un document qui a été produit par Hélène Carbonneau, de l'Université du Québec à Trois-Rivières, et qui se promène un petit peu partout.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous soulevez, avec beaucoup de pertinence, le risque d'isolement. Par contre, lorsque les personnes restent à domicile… Est-ce que vous pouvez nous suggérer des pistes pour être capables de contrecarrer ce risque d'isolement et de faire en sorte que les gens qui demeurent à domicile puissent continuer à être intégrés dans leurs communautés, que ce soit en ville ou en milieu rural?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : C'est sûr que pour... Si on regarde le milieu rural, je vous dirais que les gens se connaissent un peu plus dans le milieu rural.

Or, je pense qu'il y a déjà des bons voisinages, qu'on appelle, qui sont déjà établis. On voit que c'est un petit peu moins fréquent. On voit que les gens s'entraident énormément au niveau des ruralités et on voit qu'il y a une participation un petit peu plus active de la clientèle à domicile dans les ruralités. Je vous dirais que c'est beaucoup plus au niveau urbain qu'on a une problématique. Et ça ne sera pas évident de régler cette problématique-là. Il va falloir trouver des moyens de rendre accessibles les équipements, de transformer l'offre de services, peut-être d'utiliser les équipements qui existent déjà dans des résidences privées pour aller les chercher et les stimuler.

Moi, je crois que le fait d'avoir quelqu'un qui va évaluer, faire l'évaluation, ça va nous permettre de bien le cibler, et peut-être, nous, par la suite d'intervenir, et même peut-être de développer une offre de services à partir de nos professionnels pour pouvoir desservir ces gens-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous abordez dans votre mémoire le financement de l'assurance autonomie et de l'allocation. Vous soulevez le point également de la modulation de l'allocation pour faire en sorte que les personnes les moins bien nanties puissent avoir un accès plus grand à ce soutien financier. Alors, j'aimerais que vous explicitiez les raisons de votre positionnement sur ce sujet.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

• (15 h 30) •

Mme Hallé (Anne-Louise) : Merci. C'est sûr que, pour nous, c'est préoccupant. On sait que la clientèle moins nantie n'aura pas les moyens de pouvoir participer à cette assurance autonomie là, et on en a quand même plusieurs, et on se pose la question. On n'a pas trouvé de solution, dans notre organisation, à savoir comment on pourrait venir contribuer et aider cette clientèle-là. On n'en a pas, de solution. Il y en a sûrement, mais nous, on n'en a pas trouvé. Mais on croit qu'il faut absolument faire attention pour vraiment que tout le monde soit bien desservi et que tout le monde soit… que les besoins de chaque personne soient répondus.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Et évidemment — un dernier commentaire avant de passer la parole à mes collègues — évidemment tout passe par d'abord l'évaluation et la considération des activités sociales dans le plan de services individualisés, alors je comprends votre préoccupation par rapport à l'évaluation. Je vais passer la parole à ma collègue.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste huit minutes.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, madame. Ça me fait plaisir d'échanger avec vous.

Alors, vous qui êtes vraiment une spécialiste des loisirs dans les institutions, j'aimerais ça avoir votre regard, votre analyse de la situation actuelle dans le milieu institutionnel quant aux loisirs. Que ce soit dans les résidences privées, dans les CHSLD, dans les ressources intermédiaires, quelle est, disons, l'analyse que vous faites de la situation actuelle au niveau du loisir? Est-ce qu'il y en a suffisamment? Est-ce qu'il y a des endroits où c'est moins développé, où on gagnerait à offrir, à élargir l'offre de loisirs pour les personnes en institution à l'heure actuelle?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Alors, on va y aller en trois parties. La première, si on regarde les centres d'hébergement de soins de longue durée, actuellement la plupart de nos centres d'hébergement ont accès à des intervenants, des professionnels, soit des récréologues, des techniciens en loisirs ou des éducateurs spécialisés qui viennent faire l'offre de services. Ce qui a changé, c'est la lourdeur des gens qui sont hébergés. Donc, on a dû moduler et on a dû changer notre offre de services pour répondre à ces besoins-là. Avant, on faisait beaucoup d'activités d'ordre communautaire. Maintenant, on va faire des activités beaucoup plus de groupe et individuelles pour répondre vraiment à des besoins plus spécifiques et des adaptations d'activités pour répondre aux capacités de chaque personne. Ça, c'est en centre d'hébergement de soins de longue durée.

Au niveau des résidences privées, c'est à un autre niveau, on est en train beaucoup plus de vraiment intégrer les services, de dire l'importance d'offrir des services de loisirs et d'implanter un environnement favorable aux loisirs, à la pratique du loisir et de l'activité physique. Donc, on est à un autre niveau. Il y a certaines résidences qui ont accès à des professionnels et qui ont engagé des gens pour permettre une offre de services et développer cette offre de services là, mais beaucoup de résidences encore n'ont même pas la chance d'engager quelqu'un ou de développer cette offre de services là parce qu'ils n'ont pas investi de ce côté-là. Donc, on a encore du travail à faire du côté des résidences privées.

Au niveau des ressources intermédiaires, bien les propriétaires de ces ressources-là essaient d'offrir des services de loisirs du mieux qu'ils peuvent, et c'est de ce côté-là qu'on essaie de développer des liens de concertation avec les centres d'hébergement et de soins de longue durée, car souvent ils sont en lien pour des services. Donc, ce qu'on essaie de faire… Un exemple qui se passe dans la région de Shawinigan : les centres d'hébergement du secteur ont fait des listes d'équipement, et les ressources intermédiaires peuvent emprunter les équipements, les ressources pour offrir des activités et diversifier leur offre de services au niveau des ressources intermédiaires. Mais la base de tout ça, c'est le manque de professionnels pour venir soutenir et venir appuyer cette offre de services là et la diversifier avec ces différents responsables là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Dans un contexte d'assurance autonomie où on vient vraiment favoriser le maintien à domicile des personnes, comment vous voyez des possibles ou potentiels partenariats avec la communauté? C'est-à-dire, est-ce que… Parce que vous parlez un petit peu, dans votre document, de concertation municipale. Vous mentionnez, par exemple, le programme Villes amies des aînés et une concertation avec les groupes communautaires aussi dans un contexte où les gens vont pouvoir demeurer dans leurs milieux plus longtemps.

Comment vous voyez cette concertation et cette implication de groupes ou d'organismes hors réseau de la santé?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Je peux peut-être vous donner quelques exemples. Entre autres, si on prend la société d'Alzheimer — je vais prendre celle de la région de Montréal — déjà cette société-là a développé des liens avec les gens qui sont à domicile mais aussi les proches aidants qui sont à domicile. Donc, elle offre déjà des activités de loisirs à cette clientèle-là, donc des ateliers de peinture, des ateliers de stimulation intellectuelle, des ateliers de stimulation cognitive.

Donc, il y a déjà des choses qui sont mises en place, très peu connues parce que seulement limitées aux gens qui sont atteints de cette maladie-là. Mais je pense que ça, ce sont des idées qui pourraient être intéressantes et qui pourraient être développées avec d'autres organismes du milieu.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Dites-moi qu'est-ce que c'est, le plus grand risque, selon vous, l'impact qu'on devrait le plus surveiller dans un contexte où il n'y a pas de loisir ou d'activité de loisirs disponible et offerte à des personnes âgées?

C'est quoi, l'impact, là, de ne pas pouvoir avoir des activités de loisirs, d'avoir moins d'opportunités de socialiser? Qu'est-ce qui vous inquiéterait le plus dans cette situation-là?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Bien, moi, je vous dirais, l'isolement social, l'isolement, la solitude et, je vous dirais, une augmentation, sûrement, de suicides chez la clientèle.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Et, selon vous, dans une optique où on se dit que c'est intéressant de pouvoir favoriser le maintien à domicile des personnes âgées le plus longtemps en leur offrant des services pour leur permettre de demeurer chez elles, ce serait quoi, selon vous, le plus grand défi? Parce que, là, vous parlez… vous, vous êtes organisés et structurés dans les institutions, dans les ressources de résidences, mais, quand on parle de maintien à domicile et de l'importance de pouvoir permettre aux personnes âgées de continuer à avoir des contacts, et avoir des activités de loisirs, et de pouvoir socialiser justement en vue de prévenir les impacts négatifs que vous venez de mentionner, comment vous voyez l'organisation de ces services? Et ce sera quoi, la priorité ou le plus grand défi, là, sur quoi on devrait travailler?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Le plus grand défi, ça va être la concertation, ça va être de vraiment mettre en place, de regarder tout ce qui se fait, de regarder les possibilités et de voir à faire des jumelages ou à se concerter pour pouvoir offrir des services à cette clientèle-là. Mais, bien entendu, ça va être important de bien évaluer cette clientèle-là et voir les besoins aussi de cette clientèle-là pour bien structurer cette offre de services là. Et c'est sûr que ça va prendre souvent du petit groupe ou du un pour un, mais je pense qu'il y a des possibilités et que cette offre-là peut se faire.

• (15 h 40) •

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Mme Hallé. Je suis très contente, à mon tour, de vous accueillir.

Vous le savez, que j'ai beaucoup d'appréciation pour la Fédération québécoise du loisir en institution. Quand j'étais aux commandes des Aînés, j'ai soutenu ce que vous faites parce que je considère qu'il n'y avait pas assez d'activités dans nos institutions, là où on retrouvait des personnes âgées. Et vous avez mentionné… et même la partie ministérielle parlait des municipalités amies des aînés. Et je crois que la beauté de ce programme, qui s'intègre très bien avec l'assurance autonomie, c'est toute la question de la concertation parce que, d'une part, pour mettre en place une politique amies des aînés, il faut que les aînés soient au rendez-vous et que les aînés aient cette autonomie de décider par eux-mêmes et pour eux-mêmes de ce qu'ils veulent dans leurs villes, dans leurs villages. Et en plus on a mis quelque chose d'assez unique, et pas seulement assez unique, unique, c'est qu'on finance les petites infrastructures.

Vous mentionnez dans votre mémoire que ça prend du mobilier urbain, qu'il faut adapter les trottoirs, les bancs de toilette, les fontaines d'eau, et toutes ces petites infrastructures qu'on peut financer vont faire en sorte que ce sera beaucoup plus facile pour les gens de pouvoir se mobiliser, et ça, c'est déjà parti. Comme les jardins surélevés, je crois qu'il y en a de plus en plus, et ça permet aux personnes à mobilité réduite, entre autres, de pouvoir jardiner. Je dois vous dire qu'à un moment donné on a fait des projets pilotes, et, parce qu'on a fait des projets pilotes, on a mis ça dans la politique Vieillir et vivre ensemble. Je me souviens, à Trois-Rivières, on a financé pour le Festival international de poésie un projet pour les aînés, et la personne qui a reçu le premier prix est une personne aphasique. Donc, elle a été capable de s'exprimer par la poésie, et c'est devenu pour elle un loisir, une forme de culture. Et, dans la politique Vieillir et vivre ensemble, que le ministre poursuit, il y a des montants d'argent assez substantiels de la part du ministère de la Culture, c'est la moitié de… 2,2 millions. C'était 5 millions de dollars. Ça fait que ça permet de développer des projets culturels. Et, vous le savez, dans des CHSLD, il y a des cours de peinture. Il y a Daniel Turp qui a commencé, avec des musiciens, à aller donner des concerts de musique classique. Récemment, Les Grands Ballets canadiens ont reçu un financement, et ça leur permet d'aller vers les aînés, de leur apprendre la danse. Donc, ça les garde en santé le plus longtemps possible.

Je fais un long préambule, là. Mais je suis convaincue qu'il faut poursuivre dans cette direction et multiplier ce genre de projets pour garder à la fois et dans les institutions et dans les milieux de vie, que sont nos villes, nos villages, nos petites villes comme nos grandes villes, les aînés et les personnes à mobilité réduite en forme et socialiser le plus longtemps possible, et la culture, ça fait partie du loisir. Je veux vous entendre là-dessus, je veux que vous élaboriez.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Effectivement, la culture fait partie du loisir. Nous, à la fédération, on définit ça par champs d'intérêt, donc l'intérêt physique, l'intérêt intellectuel, l'intérêt social, l'intérêt divertissement.

L'intérêt expression, création, art, toute la culture rentre dans ce champ d'intérêt là, et, oui, il faut multiplier ça. Et on voit que des organisations sont prêtes aussi à rentrer dans les centres d'hébergement. Entre autres, c'est le cas du Musée de la civilisation qui offre des expositions itinérantes dans nos centres d'hébergement dans la région de Québec. Donc, on passe certains objets pendant un laps de temps et on vient les rechanger avec… Il y a des quiz qui sont développés pour stimuler intellectuellement ces résidents-là. Donc, ça, c'est un exemple. On a aussi, avec le Musée de la civilisation, développé un concept de magasin général. Donc, c'est un magasin, c'est une structure qui a été développée avec tout un jeu-questionnaire. La structure est en… On vient la placer derrière, et il y a une animation avec des PowerPoint qui sont développés, qui ont été faits en collaboration avec un centre d'hébergement, et un centre de jour de la région de Québec, et le Musée de la civilisation.

Donc, oui, il y a des choses qui bougent là-dedans. On a aussi, dans la région de Montréal, des artistes peintres en résidence. Donc, des étudiants qui sont en peinture et en différentes formes d'art viennent faire leurs tableaux, et tout ça, directement dans les résidences, avec la participation des résidents qui vont faire ensemble, là, une production conjointe.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Il y a aussi des liens intergénérationnels qui peuvent s'établir. Je prends l'exemple de Saint-Jean-Eudes jumelé avec une école où il y avait les aînés qui ont travaillé sur des mosaïques à partir de dessins de jeunes des écoles, et la mosaïque s'est retrouvée à l'école. Et ça, écoutez, je pense que c'est génial parce qu'on met en lien la jeunesse et les personnes qui se retrouvent en CHSLD. Et ça, je trouve que ça fait partie de la vie.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Effectivement, c'est un projet qui a été développé à Saint-Jean-Eudes et ça se continue, ce projet-là.

Il y a des retombées encore et il y a encore d'autres projets qui sont en train de se faire. Et ce qui a été vécu à Saint-Jean-Eudes, ça s'est transporté dans d'autres régions de la province. Il y a d'autres projets du même type qui ont été développés. Il y a même, dans une résidence de la région de Montréal, les tricoteuses. Donc, on vient tricoter des aménagements urbains, le poteau de téléphone, la borne-fontaine, et c'est fait avec des artistes mais aussi des résidents qui viennent offrir leur aide à ce projet-là dans la région de Montréal. Et on a aussi des gens à domicile, là, qui viennent participer, des jeunes aussi de certaines écoles. Ce qu'on voit aussi dans la région, qu'on voit de plus en plus et que… ça, c'est peut-être aussi de l'avenir, c'est de regarder du côté des adolescents — secondaire, cégeps — pour essayer de voir avec eux… de les recruter pour qu'ils deviennent des bénévoles dans nos milieux, que ça soit des agents aussi de motivation auprès de la clientèle à participer à certaines activités.

C'est l'intergénérationnel, mais c'est aussi de permettre à ces jeunes-là de comprendre aussi qu'est-ce qu'un aîné et de vraiment développer des liens.

Alors, je sais qu'il y a des liens qui peuvent s'établir et qui peuvent permettre de l'intégration de la clientèle, là, à des activités de loisirs peut-être de la municipalité ou d'organismes communautaires.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Une des raisons pour lesquelles on avait inclus le développement de maisons des grands-parents dans la politique Vieillir et vivre ensemble — il y en a six actuellement au Québec, mais on visait à atteindre 18 maisons — c'est justement pour tisser ces liens intergénérationnels entre les plus jeunes et des grands-parents. Qu'ils soient réels ou fictifs, ce n'est pas ça qui est important, c'est la transmission de la culture, des savoirs et c'est ce lien intergénérationnel.

Vous savez, Mme Hallé, moi, je suis députée du comté où il y a le plus grand parc de HLM au Canada. Et souvent ces gens-là sont coupés de loisirs, vous pouvez être certains, ils sont dans une extrême pauvreté, et je pense que nous, les députés, on a parfois des soutiens à l'action bénévole. Quand on peut soutenir nos organismes ou les comités de résidents parfois avec un 500 $, un 700 $, ça permet à ces gens-là de faire des choses extraordinaires et de briser leur isolement. Donc, les HLM et toutes ces résidences-là sont très, très, très importants pour le loisir, pour l'équilibre mental, là, pas seulement l'équilibre mental, parce que ces gens-là sont totalement démunis. Alors, s'ils peuvent mettre la main sur des loisirs… Ils aiment le bingo, mais je suis certaine que, quand on les amène à faire autre chose, ils adorent aussi découvrir autre chose.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Absolument, et je peux en être témoin, parce qu'actuellement nous sommes dans un projet pilote avec l'office de l'habitation de la ville de Montréal.

Nous avons offert un service d'animation loisir pour 10 résidences de l'office de l'habitation, le réseau Enharmonie. Alors, actuellement, on est en train de développer l'offre de services loisirs avec deux techniciens en loisirs qui se promènent dans les 10 résidences pour diversifier l'offre de services, amener les clientèles à prendre connaissance aussi de leur environnement, ce qui existe autour, d'établir des échanges aussi avec la bibliothèque municipale, avec l'offre de services loisir pour qu'ils puissent établir des échanges, regarder du côté du transport adapté, est-ce qu'il y a des possibilités. Donc, on est en train de travailler ce projet-là et on a vraiment amélioré l'offre de services. Et on s'est rendu compte que, depuis qu'on est en place, il y a une recrudescence de la participation, mais aussi on a permis à nos clientèles de bouger parce que, dans toutes nos résidences, maintenant il y a un club de marche à tous les jours.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Juste avant de passer la parole, je veux vous féliciter pour ce que vous faites. J'y crois énormément et je suis convaincue que le ministre pense également qu'il faut intégrer toute la question, toute la notion de loisirs, de culture à l'autonomie des personnes. C'est fondamental, ça fait partie de la santé.

Moi, vous savez, quand j'ai financé les clowns thérapeutiques, il y en a beaucoup qui ont ri, et pourtant les clowns thérapeutiques, pour les personnes qui étaient atteintes de maladie d'Alzheimer, c'était un contact avec la réalité. Si c'était à refaire, je le referais. Je n'ai pas honte de ce qu'on a fait par rapport à ça et je suis convaincue que le ministre est aussi d'accord que ces gens-là ont un rôle important à jouer dans nos institutions. Et continuez ce que vous faites, il faut intégrer ça à l'autonomie des personnes.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

• (15 h 50) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Puis moi, je veux renforcer le message, la question de tout l'isolement, mais également toute la question de tenir nos gens en forme par de l'activité physique. Puis on imagine que faire de l'activité physique, c'est aller faire du jogging, mais seulement qu'avoir à se déplacer… Et j'aimerais vous entendre.

Une des théories que nous avons dans le réseau de la santé: lorsque quelqu'un rentre dans une urgence, et qu'il est mis sur une civière, et qu'il attend, et que les gens ne lui font pas pas faire d'activité physique ou le mobiliser, à ce moment-là ces gens-là perdent de la capacité extrêmement rapidement. On dit que quelqu'un qui entre à l'urgence à 70 ans puis il passe trois jours sur une civière, il va avoir 80 ans lorsqu'il va monter à l'étage. Cette même personne là est admise à l'hôpital et par la suite peut être appelée à être transférée soit à domicile, en maintien à domicile, ressources intermédiaires ou encore en CHSLD.

J'aimerais ça vous entendre par rapport à l'amélioration, qu'on peut aller chercher ces gens-là. Et également, quand on parle de pouvoir les retourner à domicile, si les gens ont perdu de la capacité, de l'autonomie pendant qu'ils étaient hospitalisés parce qu'on ne les a pas bien pris en charge, ça, ça veut dire qu'on augmente également notre taux de placement en CHSLD, alors qu'une partie de ces gens-là pourraient retourner à domicile. J'aimerais ça vous entendre là-dessus avec votre expérience personnelle.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : C'est sûr que le fait de faire bouger notre clientèle, c'est important. Et je dis souvent que, quand, sur une unité de soins prolongés, quand… Entre autres, des déficits cognitifs, le meilleur moyen de faire bouger ces gens-là, c'est de faire le petit déjeuner sur l'étage. Et de les faire sortir de leurs chambres juste par la senteur, et de les amener à la salle à manger, déjà on vient de les faire bouger et on vient de changer leur quotidien. Et c'est une façon, pour nous, de les faire… que ça fonctionne, qu'il se passe quelque chose. Et moi, je crois vraiment que, les gens, il faut, quand ils sont hospitalisés ou qu'ils sont… il faut rapidement, si c'est possible, dans la mesure de leurs capacités, les amener à se déplacer, à circuler pour reprendre le plus rapidement possible leurs forces pour qu'on puisse les intégrer et les ramener à domicile le plus rapidement possible.

Et le loisir, oui, ce n'est pas seulement les activités physiques, ce n'est pas seulement le sport, mais c'est toutes les activités. Que ce soit la petite dextérité fine à manipuler certains objets, à ramasser la cuillère, à ramasser la fourchette, déjà c'est déjà un plus, et déjà on les fait bouger au quotidien. Donc, c'est important qu'il se passe quelque chose là-dessus.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Souvent, d'ailleurs, les gens, quand ils sont malades, les familles viennent puis disent : Bien, repose-toi, repose-toi, puis, dans le fond, on ne donne pas le bon conseil. Par contre, il faut que les gens aillent selon leurs capacités. Et ça, c'est une mentalité à changer. Puis tantôt, je pense, vous avez complété en disant : Puis selon leurs capacités. Ça, il faut respecter ça. Mais souvent les gens veulent ménager. Puis, en diminuant l'activité, en les gardant trop au repos, au contraire ces gens-là ont encore plus de difficultés à récupérer.

Votre expérience, là, soit dans les CHSLD, ressources intermédiaires, la combinaison, justement activités pour sortir de l'isolement avec également réussir à faire du loisir, comment c'est reçu par les familles?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Je vous dirais que c'est très bien reçu. Même, le loisir est le prétexte aux familles de revenir dans nos établissements parce qu'ils ont une occupation, ils ont quelque chose à faire avec la clientèle.

Souvent, on a perdu, des fois, des familles parce qu'ils ne savaient plus quoi faire ou quoi dire avec leurs membres de famille, mais le loisir a été le prétexte de les réunir et de les rassembler de nouveau. Et je vous dirais que ce qui est important, et c'est un changement, c'est le fait aussi de diversifier l'offre, de ne pas l'étaler cinq jours sur la semaine, de 9 à 4, mais de l'étaler aussi les soirs, les débuts de soirée, les fins de semaine. C'est à ces périodes-là où on peut rejoindre le plus facilement les familles, que les familles sont plus disponibles à venir, donc c'est intéressant d'être présents puis de faire des offres de services à ce moment-là.

Et je vous dirais que la participation des familles s'est accrue. Depuis quelques années, on voit un changement important à ce niveau-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, dans vos organisations, c'est quoi, la formation de la plupart des animateurs? Est-ce qu'il y a une formation spécialisée ou encore c'est des gens qui ont eu un parcours qui, à un moment donné, les conduit à l'animation, s'occuper des personnes aînées? Et c'est quoi, la tendance également, dans le réseau, au niveau de la formation?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Alors, la formation dans le réseau de la santé, c'est… il y a des récréologues qui sont un peu plus… c'est un baccalauréat de trois ans, et il y a des techniciens en intervention en loisirs et des techniciens en éducation spécialisée. Ce sont deux formations de trois ans au cégep.

Donc, c'est ce qu'on retrouve dans le réseau actuellement. Et, comme ce sont des professions qui sont syndiquées, donc on ne déroge pas trop à ce niveau-là, c'est vraiment ce qu'on voit. On a aussi certains moniteurs en loisirs. Ces moniteurs-là, ce sont des gens qui vont venir plus s'occuper d'ateliers, donc l'atelier de peinture, l'atelier de poterie. On les nomme moniteurs en loisirs dans le réseau, et eux ont une formation plus spécialisée en fonction de l'atelier auquel ils vont offrir leurs services. Si on regarde du côté du réseau des résidences privées et même des ressources intermédiaires, bien, à ce niveau-là, c'est très, très, très diversifié, quelques techniciens en loisirs un petit peu partout, mais c'est beaucoup des gens... les gestionnaires vont prendre des gens qui sont déjà dans l'établissement et vont les amener à faire du loisir. Exemple, on va prendre la personne qui s'occupe de l'entretien ménager et on va la mettre en loisirs l'après-midi pour faire une offre de services. Je vous dirais que ça, c'est plus difficile. Et là-dessus l'offre de services est beaucoup plus restreinte, on répond beaucoup moins aux besoins des gens qui sont hébergés, parce qu'ils n'ont pas les compétences. Ils n'ont pas aussi, non plus, toute l'imagination et les ressources pour aller beaucoup plus loin et offrir une plus grande gamme d'activités.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Une question, je ne sais pas si elle a été étudiée : Est-ce qu'il existe un ratio, par rapport au nombre de personnes en CHSLD, des personnes qui sont suivies à domicile, qui pourrait nous guider pour répondre aux besoins? Mettons, sur une résidence de 100, 150 personnes, ça prendrait quoi comme structure d'équipe au niveau de l'animation?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : C'est intéressant, parce que nous, depuis quelques années, on a fait un ratio, et c'est celui qu'on a proposé récemment, entre autres, dans les... peut-être les nouvelles orientations, là, en centre d'hébergement et de soins de longue durée au niveau loisirs, et c'est un pour 64.

Le Président (M. Bergman) : Alors, ceci met fin au bloc de l'opposition officielle. Maintenant, pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Bonjour, madame, merci d'être venue nous présenter ça.

On a tous à l'esprit des activités auxquelles on a participé dans nos comtés, qui peuvent faire des bons exemples. La députée de Sainte-Marie—Sainte-Anne me parlait du festival de poésie de Trois-Rivières. Vous savez qu'au festival de poésie de Trois-Rivières il y a un volet qui s'adresse aux enfants. Une année, c'est une jeune fille qui était sourde, qui avait un implant cochléaire, qui a gagné. L'année d'ensuite, quand... qui venait d'un milieu défavorisé. Quand ses amis ont vu qu'on pouvait gagner, tout le monde a participé au festival de la poésie.

Donc, ça prêche par l'exemple. Mais toutes ces belles petites réalisations là qu'on voit, qui ne sont pas très chères, qui sont efficaces, qui sont faites de façon assez individuelle, les avez-vous recensées?

Une voix :

Mme Roy (Arthabaska) : Oui, vous avez fait un recensement. Avez-vous une politique, là, pour pouvoir, mettons, tisser des liens? Parce qu'il y a des organismes d'économie sociale. Il y a peut-être les municipalités, il y a des écoles aussi qui ont des secteurs d'enfants handicapés qui font des activités avec d'autres enfants. Vous avez tout recensé ces activités-là?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : On a recensé vraiment tout ce qui concernait le réseau de la santé parce que ce sont nos membres. Alors, c'est vraiment tout le réseau d'hébergement, et tout ça.

Ça, on a recensé ces activités-là et on en fait la circulation de cette information-là auprès de nos membres pour qu'ils puissent les utiliser, que ce soit dans les formations régionales, ou au niveau de notre congrès annuel, ou même dans les journées d'échange, où on fait des... échangeons nos bons coups, ou des forums, des foires du loisir où chacun vient présenter des activités qu'il a faites dans son milieu et les liens qu'il a tissés avec différents organismes. Au niveau de tout ce qui s'appelle école et ce secteur-là, c'est en... il faudrait développer ce secteur-là parce que ce n'est pas un secteur qu'on a développé beaucoup.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de...

Mme Roy (Arthabaska) : Avec les municipalités. Parce que, si les municipalités sont amenées à s'impliquer plus pour les aînés… Il y a le mobilier urbain, oui, l'accessibilité aux locaux, mais le côté social, le côté artistique, le côté culturel. Avez-vous pensé à développer un volet avec eux?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

• (16 heures) •

Mme Hallé (Anne-Louise) : Alors, on essaie d'être sur des tables dans les... Au niveau de mes associations régionales, on essaie que ces associations-là, mes intervenants soient sur les tables au niveau des villes pour développer, là, une offre de services qui répond vraiment aux besoins. Mais il y a encore du travail à faire de ce côté-là. Ça fait longtemps, nous, à la fédération, qu'on souhaite une concertation municipale et institutionnelle, mais ce n'est pas facile. Et on souhaite leur offrir, chacun de leur... Chacun de notre côté, on souhaite offrir une expertise qu'on a versus cette clientèle-là, mais les ponts ne sont pas faciles à faire avec le niveau municipal.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Il doit certainement y avoir des... Vous devez certainement voir des différences entre le milieu rural et le milieu urbain. Le milieu rural, comme vous le dites, les personnes sont souvent moins isolées. Parce que j'ai fait les deux, là. J'ai été députée d'un comté qui était complètement rural puis maintenant j'ai une agglomération urbaine plus grande, plus importante, puis ça a été le premier constat que j'ai eu quand j'ai rencontré des gens dans mon comté. Isolés, ils l'étaient beaucoup plus en ville, beaucoup plus seuls en ville, comme on dit, qu'en campagne. Mais par contre je pense que l'intérêt, c'est qu'il y a plus de... vous avez plus de personnes avec qui avoir des échanges lorsque le milieu est plus structuré. Certaines municipalités rurales ont trois employés, ils ne peuvent pas s'impliquer dans tout.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Effectivement, ce n'est pas facile, sauf que la solidarité des citoyens fait la force aussi, et ça permet de changer les infrastructures au niveau rural beaucoup plus et de répondre davantage aux besoins.

On voit les changements. Si je regarde dans la région du Bas-Saint-Laurent, je travaille avec l'Unité régionale de loisir et de sport là-bas, et nous, avec eux, on a développé des outils pour permettre d'avoir accès aux résidences privées, d'offrir à ces gestionnaires-là des équipements et, avec la ville, de faire des partenariats d'échange et expertise, d'équipement avec les propriétaires. On a réussi à faire quelque chose d'intéressant qui, tranquillement pas vite, se répand et va faire des petits dans d'autres municipalités de la province.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Mme Hallé, merci pour votre présentation, merci d'être avec nous ici aujourd'hui et de partager votre expertise.

Et je demande aux gens de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées de prendre leur place à la table et je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 16 h 3)

(Reprise à 16 h 5)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, on souhaite la bienvenue à l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées. Alors, bienvenue à l'Assemblée nationale, bienvenue à la commission.

Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms, vos titres. Et vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Alors, le micro, c'est à vous.

Association québécoise de défense des droits des
personnes retraitées et préretraitées (AQDR)

M. Plamondon (Louis) : Merci, M. le Président. Mon nom est Louis Plamondon, je suis président de l'association québécoise pour la défense des droits des retraités.

M. Paquet (Jean-Claude) : Mon nom est Jean-Claude Paquet, je suis membre du conseil d'administration de l'association et vice-président de la section Lévis—Rive-Sud de l'AQDR.

Mme Gagnon (Judith) : Mon nom est Judith Gagnon, je suis vice-présidente de l'AQDR Québec.

M. Plamondon (Louis) : Alors, nous allons extraire les éléments centraux pour préserver le temps alloué.

L'AQDR considère que les gouvernements et leurs ministres de la Santé et des Aînés ont été incapables, dans les 20 dernières années de gouvernance, d'orienter les ressources de manière à prendre en charge véritablement les impacts du vieillissement de la population. Les organismes de surveillance que sont le Protecteur du citoyen et le Vérificateur général ont maintes fois signalé leurs échecs dans la prise en charge des aînés vulnérables à domicile et dans la gestion des établissements pour aînés. Les médias en ont largement témoigné au quotidien depuis ces 20 dernières années, et le public a perdu confiance dans nos établissements pour aînés, et ceux-ci désespèrent de vieillir fragilisés dans des conditions de sécurité. Je passe un paragraphe. L'assurance autonomie pourra sans doute, sous réserve d'améliorations à intervenir et des engagements à préciser, favoriser le virage souhaité par la communauté des aînés depuis deux décennies. L'ajout d'argent majeur en quelques périodes électorales dans les services à domicile ou en hébergement n'a jamais permis d'atteindre les objectifs projetés parce que, chaque fois, l'essentiel des fonds était absorbé par des coûts de système ou dérivé vers des compensations pour des compressions budgétaires majeures dans d'autres missions des établissements. Les usagers en perte d'autonomie étaient laissés à l'abandon, et, leur nombre augmentant sans cesse, la crise s'est aggravée au point de compromettre la crédibilité des acteurs politiques sur la compréhension des enjeux liés au vieillissement.

C'est notre introduction, M. le Président. Je note aux distingués membres de l'Assemblée que le document qui vous est présenté a reçu l'approbation de l'assemblée des présidents de l'AQDR, regroupant 45 sections dans tout le Québec. Tous nos présidents y étaient. Donc, c'est un consensus de l'ensemble de notre mouvement, donc de toutes les régions.

Attendu l'accord avec l'intention du livre blanc : les conditions de base. L'AQDR est la gardienne de l'accessibilité et de l'universalité, de l'intégralité et de l'équité de gestion publique des services de santé et services sociaux dispensés aux aînés, mais l'AQDR considère que le réseau de services santé et des services sociaux est un acquis de la communauté et requiert que le projet d'assurance autonomie soit un ajout aux composantes du système de services aux personnes en perte d'autonomie sans qu'il compromette la mission en place en direction des communautés, en particulier dans les CLSC et les CHSLD. L'AQDR se questionne sur la possibilité de problèmes vécus non résolus actuellement et qui pourraient rendre impossible la mise en oeuvre de l'offre proposée de services : pénurie de personnel infirmier, de professionnels de la santé en région, déficits des établissements qui devraient être en voie de règlement avant la mise en oeuvre du projet de l'assurance autonomie lui-même.

Sur les éléments clés, nous allons nous partager la présentation. L'évaluation des personnes à la base du système de financement de tous les services aux personnes en perte d'autonomie : l'AQDR est d'accord avec cet élément clé du projet où l'usager est au centre du système de santé… du système de services, pardon. L'AQDR veut des garanties que l'évaluation SMAF soit en concordance avec les évaluations cliniques et que des mesures soient établies pour que la personne soit correctement représentée par son aidant ou la personne de son choix dans les négociations de services avec l'intervenant pivot. Rappelons qu'une grande partie… une partie très importante des personnes âgées en perte d'autonomie ont énormément de fragilité et sont souvent des personnes seules sans accompagnement.

Il y a plusieurs enjeux de formation et de gestion des professionnels dans leur rapport aux droits des usagers affirmés par la loi de la santé et des services sociaux et de la charte des droits dans le processus de prise en charge et les évaluations de services.

• (16 h 10) •

M. Paquet (Jean-Claude) : Sur la question du gestionnaire pivot dans les établissements pour coordonner la demande de services auprès des usagers et pour négocier les services et assurer les suivis, question centrale dans le projet, la position de l'AQDR est la suivante : L'AQDR croit cet élément essentiel à la nécessité d'assurance autonomie. Il permettra d'assurer la continuité et le suivi des services, que ce soit par les ressources internes ou externes. À présent, certaines questions se posent : Qui seront ces intervenants pivots? Quel sera leur profil professionnel ou autre? Combien y en aura-t-il par centre de santé ou de services sociaux ou par agence? Et de qui relèveront-ils?

Le programme devrait prévoir aussi un mécanisme de contrôle et de révision interne et informel, révision rapide des évaluations et des plans de services en cas de désaccord de l'usager ou de son représentant sans que celui-ci ne soit pénalisé ou retardé. C'est une sorte d'assurance qualité des services, et ça ne devrait pas être figé dans le temps, à un moment donné. Le gestionnaire pivot devrait aussi pouvoir aider l'usager et informer l'autorité de référence, l'agence, au besoin, en cas de réponse inadéquate des dispensateurs de services, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, qui seront établis par l'allocation autonomie.

Enfin, on devrait aussi s'assurer dans la loi de garantir le recours au système d'examen des plaintes de l'usager qui existe actuellement dans la Loi sur les services de santé et services sociaux, le commissaire aux plaintes, sans doute le commissaire régional quand on regarde le système actuel, et au Protecteur du citoyen ultimement, et ce, à l'égard de tous les dispensateurs de services pour éviter des problèmes qui sont survenus dans le passé et des interventions qui ont dû être refaites par le Protecteur du citoyen à l'égard de cliniques ou de... qui avaient des ententes avec le ministère. S'assurer du respect non seulement du plan de services, mais de tous les droits des usagers.

Mme Gagnon (Judith) : Alors, le troisième point : la contribution des usagers coordonnée avec l'évaluation, le coût des services et leurs revenus, voilà la question.

L'AQDR demande au gouvernement que les personnes âgées en perte d'autonomie touchant une partie ou la totalité du supplément de revenu garanti bénéficient d'une politique de gratuité totale des services et qu'il y ait un ajustement compensatoire via l'allocation autonomie prévue dans le livre blanc.

La contribution des usagers doit être établie pour une année de référence afin de permettre une révision éventuelle dans le cas de changement de son revenu ou de son état civil. L'estimation de la contribution des usagers doit tenir compte de l'implication des proches aidants dans les services et les soins à la personne afin que cette contribution soit véritablement reconnue et valorisée. Le mandat des centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes doit être consolidé dans l'accompagnement des personnes vulnérables sans représentation véritable dans leurs démarches d'accessibilité aux services et l'établissement de leurs contributions… ou tout autre organisme aussi, mais il faut qu'il y ait de l'accompagnement pour ces personnes. Quatrièmement : allocation de soutien à l'autonomie établie sur la base des services requis. L'AQDR recommande que les seuils de contribution des usagers tiennent compte en particulier du seuil de faibles revenus des femmes âgées et du fait qu'elles vivent seules, dans la grande majorité. L'allocation autonomie doit comprendre une évaluation des aidants par l'intervenant pivot, ou gestionnaire de cas, afin de mesurer leurs besoins de support ou d'appui en services de la part des établissements. Sans cet ajout, plusieurs mesures ne produiront pas les objectifs à atteindre.

Nous avons des appuis dans chacune des régions, et ça serait important qu'il y ait une concertation entre les subventions ou les projets, des appuis avec l'allocation d'assurance autonomie pour que les aidants soient aidés puis qu'il y ait une cohérence dans les interventions.

M. Paquet (Jean-Claude) : En ce qui concerne l'hébergement public et privé, le projet implique la modification de paramètres importants du financement.

En hébergement public, une question se pose : Est-ce qu'une contribution plus grande des usagers est implicitement envisagée par le gouvernement? L'AQDR demande qu'aucun usager admis en CHSLD sur la base de 3,5 heures de soins ou qui a atteint, depuis son admission, cette condition ne fasse l'objet d'une relocalisation à la suite de l'implantation de l'assurance autonomie. En ce qui concerne les résidences privées, les crédits d'impôt seront fondés sur l'évaluation des besoins de services du résident et non pas sur le coût des services rattachés au logement comme maintenant. Se poseront des questions, et y aura-t-il... Quelle sera la position du réseau des résidences privées? C'est à voir, mais, dans la mesure où les réseaux des résidences parviendraient à se discipliner… Et ça, c'est l'expérience de l'AQDR, en particulier quant aux problèmes relatifs aux baux ou à d'autres questions sur lesquelles on a vu récemment notre président se prononcer.

Dans la mesure où les réseaux de résidences parviendraient à se discipliner, à se conformer aux cadres légaux qui les gouvernent, il est cependant possible de penser que leur clientèle pourrait être accrue et se diversifier pour recevoir le nouveau bassin de clientèle pour des services qui seraient plus ajustés au profil découlant du nouveau programme d'assurance autonomie.

Le Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation. Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, Mme Gagnon, M. Plamondon, M. Paquet, de votre mémoire extrêmement intéressant.

Vous dites d'entrée de jeu qu'au cours des deux dernières décennies on a ajouté des montants en soins à domicile. Certains prétendent que juste d'ajouter des montants en soins à domicile, ça va être assez pour être capables de répondre aux besoins des personnes âgées en perte d'autonomie. Pour vous, ce n'est pas suffisant, il faut changer, il faut remettre aux personnes le pouvoir de pouvoir...

M. Plamondon (Louis) : En fait, ce qu'on constate, c'est que cette mise en échec de cette approche-là de financement du système, elle a été constatée par tous les examinateurs, là, puis on a parlé du Protecteur du citoyen, du Vérificateur général. Et puis on voit bien qu'avec l'effet du vieillissement il faut changer le paradigme. Et puis, si on… Pour ça, on pense qu'en mettant le client, l'usager en perte d'autonomie, au centre de l'allocation de ressources on n'échappera plus les budgets qui vont être contrôlés par le système, puisque l'allocation est destinée à des personnes qui seront évaluées. Donc, nous, on pense que... J'en parlais avec les gens de l'AQESSS, et puis hier justement, et puis on pense tous que c'est la voie de l'avenir compte tenu de l'impact sur le vieillissement de notre population parce que les réinvestissements qu'on a vécus ces dernières années n'ont pas amené de changement de paradigme du tout, du tout, du tout, même des échecs flagrants.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous soulevez également tout le problème des fonds étiquetés au soutien à domicile qui sont utilisés à d'autres fins. Est-ce que la création d'une caisse où on sécurise ces sommes, cet argent-là est bien reçue par votre association?

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : …pas d'autre moyen, là, effectivement, parce que ça a été ça, parce qu'en fait on finançait, vous l'avez vu. Quand les ajouts de la dernière période, là, de, je ne sais pas, 150 millions… il y a même des agences qui n'ont pas été capables de produire les requêtes de services pour arriver dans les délais de l'allocation des ressources. Donc, on se dit bien que la bonne stratégie, c'est d'avoir une caisse pour laquelle les clientèles… les fonds vont être attribués à des clientèles qui auront été évaluées.

Pour nous autres, là, c'est la seule manière de sortir du paradigme d'échec dans lequel on est depuis 20 ans.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Une de vos préoccupations, M. Paquet, c'était concernant les gestionnaires de cas ou les gestionnaires pivots, comme vous les appelez, mais ils s'appellent gestionnaires de cas dans le réseau des personnes âgées puis intervenants pivots dans le réseau des personnes handicapées.

Ce sont, je vais répondre à un certain nombre de questions rapidement, ce sont principalement des infirmières ou des travailleurs sociaux qui sont formés pour ce rôle-là. Il y a des normes. C'est un pour 1 000 personnes âgées, et ils ont 40 cas à s'occuper. Actuellement, il y a 70 % d'implantation, au Québec, des gestionnaires de cas, et on a mis dans le budget de cette année une somme de 8 millions pour qu'on complète le réseau des gestionnaires de cas de façon à ce qu'ils soient présents sur le terrain au moment de l'implantation de l'assurance autonomie. Vous soulevez avec beaucoup de justesse l'évaluation et la réévaluation. Alors, le député de Jean-Talon s'étonnait qu'on demande aux intervenants de réévaluer les gens. Je pense que c'est la base d'une bonne intervention. Il faut réévaluer les gens. Il y a même des normes. Les gens doivent être réévalués au moins annuellement sur une base clinique. Et c'est sûr que l'installation, l'instauration de l'assurance autonomie va stimuler cette réévaluation-là. Évidemment, il est hors de question qu'on puisse avoir une évaluation qui ne soit pas refaite annuellement au moins, lorsqu'il n'y a pas de changement évident, pour baser l'allocation.

Alors, vous préconisez également une réévaluation régulière des gens à des fins cliniques, si je comprends bien.

Une voix :

M. Plamondon (Louis) : …d'ailleurs, des citoyens notait, là, que 70 %... Je pense que c'est dans son dernier rapport ou celui du vérificateur. Il notait que 70 % des gens âgés qui étaient accueillis en urgence, ils n'étaient pas connus du système. Donc, il y a une lacune dans le processus d'évaluation. Et puis on s'imagine que les gens qui étaient accueillis à l'urgence étaient déjà très lourdement handicapés, là, ou en perte d'autonomie.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

• (16 h 20) •

M. Hébert : Il y a deux éléments dans cette lacune-là. D'une part, il y a un certain nombre de personnes qui ne sont pas évaluées, alors toutes les personnes en résidence privée, par exemple, échappent à l'évaluation, et l'assurance autonomie veut redonner une gestion publique, donc une évaluation de ces personnes-là.

M. Plamondon (Louis) : C'est majeur, pour nous.

M. Hébert : C'est majeur, pour vous. Et, deuxièmement, il n'y a pas de système d'information qui est encore implanté dans tout le Québec pour être capables d'avoir accès à l'information. Et ça, actuellement, là, il y a une implantation du système d'information qui va être prêt également pour l'implantation de l'assurance autonomie.

Donc, ce n'est pas tout, d'évaluer, il faut qu'à l'urgence ou partout dans le réseau on ait accès à l'évaluation, puis qu'on ne la répète pas, alors c'est absolument fondamental, puis qu'on soit capables de pouvoir avoir de l'information de gestion également.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : Oui. Bien, nous, à cet égard, là, c'est certain que l'accessibilité du dossier est majeure, et aussi la formation des équipes à l'appropriation des systèmes, là. Parce qu'on a vu, toujours dans le document du Vérificateur général, que le niveau d'appropriation des systèmes de mesure d'évaluation des clientèles est mal intégré, hein, qu'il y avait des écarts épouvantables entre les régions, les CSS de régions puis les CSS Montréal et urbains, en fait, là. Donc, c'est sûr que le ministère doit être vigilant dans la mise en place de ça pour s'assurer que l'appropriation rapide des systèmes, avec une simplicité d'accès puis une généralisation des accès, c'est sûr… Surtout parce qu'on voit, on le constate dans la vie, que les gens débarquent d'abord à l'urgence, puis ils ne sont pas connus.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous parlez du rôle central du gestionnaire de cas ou de l'intervenant pivot.

Dans la définition du service et dans le suivi de qualité, vous suggérez également une approbation ou une discussion formelle avec la personne. J'aimerais ça vous entendre sur ce que vous suggérez d'inclure comme processus d'approbation de la personne, de l'usager, ou de sa famille, ou de son proche aidant.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : Ça nous apparaît très important, fondamental, parce que d'abord on voit que ça vise les clientèles déjà en perte d'autonomie, donc fragilisées.

Alors, nous, là, il y a un processus de consentement à l'offre de services qui doit être organisé. Il faut que le portrait ou le profil du plan de services… qu'il soit soumis à des personnes qui sont souvent fragilisées dans un contexte d'insécurité, sûrement d'une sortie hospitalière, un contexte de posturgence où… on sait à peu près tous dans quel contexte que ça se passe… ou un état particulier de dépendance à domicile. Il faut absolument que, dans ce processus-là, les gens puissent bien comprendre ce qu'on leur propose, que les choix soient réels. Ma collègue Judith, on en parlait tout à l'heure. C'est important que... Est-ce qu'il y a un vrai choix ou on impose un plan de match, que la personne, de toute façon… Tu t'en vas là puis tu n'as pas le choix, comme on le... Actuellement, c'est ça qui se passe, là. Si vous ne l'acceptez pas, notre proposition, hein, bien vous passez votre tour, vous tombez dans le bas de la liste, puis on va le donner à un autre. Vous n'avez même pas 24 heures pour vous décider.

C'est ça, la situation des familles actuellement. Donc, on se dit : Il faut qu'il y ait dans le... Nous, on préfère vraiment, M. le ministre, le gestionnaire pivot, hein, parce qu'on ne veut pas être des cas.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Plamondon (Louis) : C'est, tu sais, dans le langage francophone, francophile, là… être un cas, ce n'est pas spécialement rassurant ou valorisant.

Donc, généraliser la notion de pivot qui est un… ça veut dire un acteur positif, puis nous, on a compris qu'il était représentant des besoins, puis s'assurer aussi de... Il faut qu'il y ait une reddition de comptes qui est faite au gestionnaire pivot. Si le client n'est pas satisfait, il faut qu'il soit… L'établissement est redevable au gestionnaire pivot. Il ne faut pas relaisser le client à nouveau, et les familles, puis l'AQDR en bout de ligne, tu sais, pour taper sur le clou parce que le plan de services n'a pas été respecté ou que le service était bidon.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je voudrais aborder toute la notion du contrôle de qualité, qui est sans doute une préoccupation importante de votre association.

Nous voulons, avec l'assurance autonomie, retrouver une gestion publique, donc, une gestion publique de la qualité et mettre en place des mécanismes d'accréditation des dispensateurs de services, donc, que ce soient les entreprises d'économie sociale, les résidences privées, les organismes communautaires.

Quelle est votre opinion par rapport à ce contrôle de la qualité que nous voulons confier aux établissements?

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Judith) : Que c'est fondamental. C'est fondamental, surtout qu'il va y avoir des services donnés par différents types d'organismes.

Alors, il faut absolument assurer une évaluation de la qualité à toutes les étapes parce qu'autrement on peut se retrouver dans des mauvaises situations. Puis l'assurance qualité, ça fait partie de l'assurance autonomie. Je pense que vous l'avez pensé aussi. Parce que sinon la qualité des services... on ne pourra pas... les gens seront mal desservis. Tandis que, si on a un processus d'assurance qualité de bien établi sur des bases solides, même s'il y a une variabilité des organismes qui offrent des services, ça va bien suivre son processus, puis les gens vont être bien servis puis ils vont pouvoir, s'il y a quelque chose qui ne marche pas, le dire. Puis il va y avoir un changement, puis le processus va être continuellement amélioré.

Ce que l'AQDR veut dire, c'est qu'il faut qu'il y ait un processus d'évaluation ou d'assurance qualité continu, pour que ça se fasse, mais pas fixé dans le béton, qu'on voit les choses aller puis que progressivement, dépendamment des situations, il y ait des évaluations puis qu'on achemine les choses comme il le faut, convenablement.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Plamondon (Louis) : À l'élément 7, on a indiqué que les dispensateurs... on veut qu'il y ait un système de certification pour tous les dispensateurs de services fondé sur des formations accréditées — ça aussi, c'est que les employés, ça soit sur des formations accréditées — par des instances existantes publiques, là, les commissions scolaires, les cégeps ou les universités, pour être certains qu'on accrédite des conformités validées. Ça, ça nous... C'est une base de sécurité, parce que l'intervenant pivot, s'il ne sait pas ça, il ne sait pas à qui, où il envoie sa clientèle. Puis comment il va faire une reddition de comptes s'il envoie des gens? L'insécurité des gens en perte d'autonomie est très élevée. Il faut que notre système soit consolidé. Et puis on a quand même... Tous les partis l'ont constaté, dans le cas de certification des résidences, ça n'a pas suffi à garantir la sécurité. Pourtant, vous avez communément participé à la certification des résidences dans le nouveau règlement, puis tout ça, puis on a encore de graves problèmes.

Donc, il ne faut pas aller en bas d'une certification validée, c'est fondamental, avec des inspecteurs qui s'assurent que la conformité n'est pas factice.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Plusieurs personnes ont mis en doute la qualité des services des entreprises d'économie sociale.

Est-ce que, dans votre expérience, ça se vérifie, pour vous? Est-ce que vous avez, dans vos différentes activités, au cours des dernières années, pu constater qu'il y avait des problèmes dans les entreprises d'économie sociale? D'autres sont venus nous dire que, non, les entreprises d'économie sociale donnaient des services de qualité. J'aimerais ça avoir votre opinion là-dessus.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : On a eu des signalements, là. Bon. Les contrats de services sont... C'est très variable d'une région à l'autre.

Nous, évidemment, au niveau du national, les cas qui nous sont référés sont évidemment les cas pour lesquels les gens n'ont toujours pas obtenu une réponse. On a des cas où les entreprises d'économie sociale ne sont pas vraiment intégrées aux CSS ou au système. Donc, les gens qui se plaignent n'ont pas de recours. La commissaire aux plaintes ou le commissaire local aux plaintes considère qu'ils sont... ce n'est pas dans leur juridiction parce que la nature des contrats qui les lient... etc., là. Et puis il y a le problème de, évidemment, lié au recrutement des personnes qui font, rendent le service. Il y a eu des problèmes. Le profilage judiciaire, par exemple, n'est pas systématique, alors que ces gens-là ont accès, à domicile, à des personnes très vulnérables. Tout ça, là, ça va exiger dans le cadre de la certification... Nous, on a eu des signalements de problématiques… je ne dirais pas «nombreuses», puis certainement pas autant qu'on en a eu dans les résidences privées ou dans les CHSLD. Juste pour parenthèse, là, sur la victimisation, la maltraitance, là, parce qu'on accuse les familles, là, ça sort beaucoup ces jours-ci, mais 33 % des signalements de la ligne Info-Abus, ça vient des établissements en résidence, les CHSLD, qui… 33 % des victimes viennent de là, alors que c'est 10 % des populations aînées qui sont là-dedans.

Donc, je voudrais qu'on relativise un peu le fardeau de... d'où l'importance qu'on accorde à cette question du contrôle de la qualité. Puis, oui, M. le ministre, il y a certainement des problèmes. Puis ils sont plus difficiles à voir, les problèmes, dans les services à domicile EESAD ou même du secteur privé, là. Parce que ça se passe à domicile, c'est dans le secret du service à une personne, puis les moyens de contrôle ne sont pas évidents.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je voudrais vous rassurer sur toute tentative de relocaliser des personnes qui sont admises en CHSLD. Ce n'est pas du tout dans l'intention. Même s'il y a des personnes qui ne satisfont pas aux critères d'admission actuellement, il est hors de question de les sortir. Ce qu'on veut faire, c'est d'utiliser le roulement des CHSLD pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de nouvelles personnes qui sont admises et qui ne répondent pas aux critères d'évaluation. Donc, ne soyez pas inquiets, il n'y aura pas de…

M. Plamondon (Louis) : …parce qu'il y a eu des rumeurs à cet effet.

M. Hébert : …désinstitutionalisation.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

• (16 h 30) •

M. Plamondon (Louis) : Oui. Comme je le dis, nous sommes rassurés à cet égard, parce qu'il y avait des vives inquiétudes. Parce qu'il y a des gens qui disent qu'il y a des clientèles qui devraient y être et... qui y sont et qui ne devraient pas y être. Mais nous qui sommes assez présents dans les établissements, on n'en voit pas beaucoup de ça, là, des gens qui ne devraient pas, en raison de leurs conditions… mais il y a des aspects que certaines personnes ont été acceptées moins dans la logique du paramètre de la perte d'autonomie que d'un isolement social très aggravé qui les mettait en danger.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je voudrais aborder la participation des usagers, ce que vous appelez la contribution des usagers, ou encore la modulation de l'allocation d'autonomie par rapport aux revenus.

Vous savez, actuellement, on finance 15 % des besoins à domicile. 85 % est assumé par la personne, en nature ou en espèces. On estime que ça coûte entre 2 000 $ et 5 000 $ par mois pour ces services-là. C'est la Sun Life qui fait cette estimation-là. Et la façon de donner les services actuellement ne tient pas compte du revenu, de sorte que des gens qui ont juste le supplément de revenu garanti, comme vous le soulignez, sont obligés de contribuer en nature ou en espèces. Même pour le PEFSAD, c'est au moins 7 $ de contribution par heure de service et c'est souvent un montant qui, pour des gens qui ont un supplément de revenu garanti, est impossible à pouvoir assumer. Alors, l'allocation de soutien à l'autonomie sera, comme vous le soulignez dans votre mémoire, modulée en fonction du revenu, de sorte que les personnes avec moins de revenus aient une allocation plus grande… de soutien à l'autonomie pour qu'ils puissent ne pas avoir le fardeau de se payer des services ou encore de compter sur un bénévole, une proche aidante pour donner les services.

Alors, j'accueille avec beaucoup d'intérêt l'appui à cette mesure de modulation, parce qu'actuellement, là, c'est aveugle, hein, 85 % est assumé par la personne elle-même, peu importe son revenu. Alors, on veut être capables de moduler ça.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : Oui, ça nous apparaît fondamental dans le projet, là, c'est certain.

D'abord, évidemment, il faut toujours se rappeler, dans les populations en perte d'autonomie — Judith pourra compléter — que ce sont des femmes seules. Puis ça, c'est un aspect qu'on oublie, que le destin des femmes est de vieillir seules dans la fragilité. Et donc elles n'ont pas de personne pour les représenter, elles sont à plus faibles revenus, elles sont les plus fragilisées. Et puis la société n'est pas organisée pour ça, puis notre système de santé non plus. On espère que justement l'allocation de la ressource à la personne devrait pouvoir corriger cette caractéristique démographique, entre guillemets, là, mais il y a beaucoup de sexisme et d'âgisme dans la production de la solitude et de la pauvreté des femmes âgées.

Mme Gagnon (Judith) : C'est très important pour nous parce que, les gens les plus vulnérables qui n'ont pas de voix, qui sont sans voix parce que plus vulnérables puis sans argent, il faut vraiment les protéger puis qu'il y ait une complète gratuité. Pour nous, c'est essentiel, l'AQDR, parce qu'on considère que c'est ces clientèles-là qu'il faut protéger, puis il faut qu'il n'y ait pas de coût pour eux autres, puis pour qu'ils vieillissent… leur permettre, eux aussi, de vieillir puis d'avoir des soins adéquats.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Dernière question avant de passer la parole à mes collègues. Vous mentionnez les services à inclure pour les proches aidantes. J'aimerais ça que vous élaboriez sur quels sont les services qui devraient être inclus dans les services, le panier de services pour l'allocation de soutien à l'autonomie pour les proches aidantes.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

Mme Gagnon (Judith) : …permettez-moi de…

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Judith) : …de vous faire une petite… d'essayer de vous exprimer ma pensée, vous illustrer ma pensée.

À l'heure actuelle, on a les appuis dans les régions, qui offrent des subventions ou des allocations à des groupes pour aider les proches aidants. Ça, c'est une chose. C'est déployé dans l'ensemble des régions. Et il y a des appuis qui ont fait des appels de projets, qui ont envoyé des projets, et tout ça, et qui offrent certains services. Avec le temps, ce qu'il serait intéressant de faire, c'est de regarder, avec l'introduction de l'assurance autonomie, si ces projets-là… pour faire un match entre ces projets-là, dépendamment des projets qui sont attribués, puis les besoins qui vont se dessiner avec l'assurance autonomie. Parce que les aidants ont un lourd fardeau, ils meurent plus vite aussi, ils sont fatigués. Puis, je ne sais pas, il faut faire vraiment un genre de cohérence dans tout ça pour voir, avec l'assurance autonomie puis avec les subventions données par L'Appui, si ces subventions-là ou ces projets-là vont vraiment répondre aux projets, aux besoins des aidants qui ont une lourde tâche puis qui vont encore en avoir, une tâche, avec l'assurance autonomie.

Il faudrait une cohérence dans toutes ces choses-là pour que ça soit bien ficelé puis qu'à un moment donné, s'il y a un aidant… mon rêve, s'il y a un aidant qui n'en peut plus, il puisse avoir une aide à quelque part, dépendamment de son besoin, facile pour lui permettre de rester en vie, puis de souffler, puis de bien vivre avec la personne aînée.

Je m'exprime peut-être mal, mais c'est important de faire tout un lien entre toutes ces choses-là parce que c'est difficile à vivre pour ces personnes-là. Et puis il faut qu'il y ait de la cohérence, parce qu'il y en a, de l'argent, il y a des projets, il y a des belles choses qui se font. Mais il faut qu'il y ait un match de toutes ces choses-là pour que ça passe bien, puis ça aide le client.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : Oui. Je voudrais compléter aussi que l'évaluation de l'état de santé de l'aidant, ça doit faire partie de l'activité du pivot, là, de l'agent pivot quand il y a un aidant très proche, là, un aidant très engagé. Moi, je pense à, par exemple, des coachings concernant l'ergothérapeute, là— ils peuvent avoir des problèmes de dos. Il y a toutes sortes de problèmes physiques liés à l'aide à apporter — puis que des services de réadaptation pourraient être accessibles aux aidants parce qu'ils ont des efforts à fournir. Il y a peut-être des manipulations à améliorer. On l'a fait pour les professionnels dans les établissements, pourquoi qu'on ne le fait pas pour les aidants?

Ils ne sont pas intégrés dans le plan de services. Puis je pense que Pre Francine Ducharme, je pense, qui est intervenue chez vous ici, à l'Assemblée, pour vous indiquer l'importance qu'elle accorde puis que nous partageons sa préoccupation, toute l'anxiété, l'enjeu associé à la dépression, à la fatigue psychique puis avec des… Il devrait y avoir des services orientés et puis, comme elle l'a dit, que de faire des arrimages avec les projets Appui, ça m'apparaît essentiel. Puis ça doit être affirmé dans le projet et la logique de mise en place.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : …que M. le ministre réponde sur ça, mais…

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : …j'aimerais mieux vous laisser… Ça va?

M. Hébert : …de la réponse.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Oui, mais je pense que, pour l'avoir entendu plusieurs fois, là...

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, il vous reste deux minutes. Il vous reste deux minutes, Mme la députée.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Deux minutes. Merci. Pour l'avoir entendu plusieurs fois, je pense que c'est prévu aussi qu'il y ait justement de l'aide pour les proches aidants, que ce soit de la formation pour savoir comment manipuler ou… sans se blesser ou qu'il y ait du soutien, du répit pour les proches aidants parce que, ceux-là, aussi il faut les aider si on veut que les soins à domicile fonctionnent. Ça fait que je pense que vous avez tout à fait raison dans ce que vous apportez, puis ça, je savais que le ministre pouvait vous rassurer là-dessus, mais je peux le faire, pour l'avoir entendu à plusieurs reprises.

Et justement je voulais parler un peu de l'outil d'évaluation. On a juste quelques minutes. Mais est-ce que vous pensez que l'Outil d'évaluation multiclientèle qui existe présentement peut répondre à ce qu'on a de besoin pour les soins à domicile, là, autant des personnes en perte d'autonomie ou les proches aidants?

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon, il reste du temps pour une courte réponse.

M. Plamondon (Louis) : Oui. Bien, pour nous, il n'est pas suffisant, il n'est pas complet, là.

Nous, on pense qu'il faut que l'outil qui est proposé, qui est fait pour la clientèle qu'on va cibler, l'outil… Parce qu'en plus mes intervenants... Vous avez dû l'entendre, là, j'ai vu passer quelques mémoires, qu'il est insuffisant, l'outil multiclientèle. Il est lourd d'administration puis il ne remplit pas les objectifs du problème qu'on veut résoudre par la prise en charge adéquate de la personne en perte d'autonomie.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci beaucoup. Seulement un commentaire avant de passer la parole à mon collègue pour le bloc de questions. Premièrement, je suis très, très heureuse de vous revoir.

Puis peut-être vous rassurer, Mme Gagnon. Je pense que c'est possible, votre idée d'être en mesure de jumeler les projets des appuis aux proches aidants et le fait des liens avec l'assurance autonomie. Étant donné que, sur le conseil d'administration des appuis aux proches aidants, ce sont majoritairement… ce sont moitié-moitié, mais moitié les sous-ministres au gouvernement du Québec, et le vote prépondérant est un sous-ministre au gouvernement du Québec, donc ils siègent. Même le sous-ministre ici siège sur les appuis aux proches aidants. Puis éventuellement, si l'assurance autonomie voit le jour, il me semble que ce serait tout à fait logique qu'il y ait ce lien entre les projets qui sont choisis, les appels de projets et les besoins dans la communauté pour satisfaire évidemment aux besoins des proches aidants puis de leurs proches.

Ça fait que je voulais vous rassurer là-dessus, puis je suis certaine que le sous-ministre a bien entendu ce que je viens de dire.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bonjour. Bienvenue à la commission. Je pense que vous êtes dans nos habitués lorsqu'on traite de ce type de sujet. Premièrement, juste des questions sur votre organisation. L'AQDR a combien de membres?

Une voix : 45 000.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

• (16 h 40) •

M. Plamondon (Louis) : 37 000.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Puis vous êtes organisés par?

M. Plamondon (Louis) : Par sections locales qui se voient attribuer un territoire. On en a 45 actuellement.

On est reconnus, dans le cadre du programme SACAIS, comme organisme. Ça fait que nous, on ne représente pas des personnes en fonction d'un passé de travail, là, c'est sur la région. On représente les aînés d'un secteur donné, d'une région donnée, et donc ce n'est pas par appartenance professionnelle qu'on est regroupés. Puis on est reconnus comme organisme de défense de droits, dans une région donnée, par les programmes du ministère de l'économie sociale.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci.

M. Plamondon (Louis) : Puis on a notre financement propre par nos membres puis des financements de parrainages par des sociétés mutuelles d'assurance.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Puis votre titre, c'est quand même «personnes retraitées et préretraitées». Pour faire partie de votre organisation, il faut que les gens aient ce statut?

M. Plamondon (Louis) : Oui.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui? Puis...

M. Plamondon (Louis) : Ça couvre quand même...

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : Facilement, ça couvre toutes les catégories, là. Il y a eu une discussion parce que c'est...

À l'origine, c'était comme ça, mais là, la clientèle ayant évolué, l'âge de la retraite étant très abaissé par rapport aux années 79-80 — on a été fondés en 1979 — la notion de préretraité est devenue un peu ambiguë, là, parce que… qui sont les préretraités? Parce qu'à l'époque ça existait, des programmes de préretraite, c'est-à-dire de devancement de la retraite avant l'âge normal, qui était 65 ans. Alors, on voulait couvrir les gens qui étaient mis à la retraite avant l'âge, là, parce que le statut de retraité à l'époque correspondait au discours de la conjonction de la pension de vieillesse et du supplément. Mais, dès les années 80, la Régie des rentes est arrivée, puis là la retraite pouvait être acquise à 60 ans avec une réduction actuarielle. Donc, on a voulu couvrir... les fondateurs ont voulu couvrir ces deux populations-là.

Aujourd'hui, on parlerait de retraités et on couvre tout le monde parce que... Puis, bon, pour des questions d'historique, on ne veut pas échapper le droit à la retraite. C'est pour ça aussi qu'on ne choisit pas «aînés», parce que nous, on croit à la validité, à la légitimité d'une durée de vie de travail limitée. On s'est battues, les sociétés, pour réduire les heures de travail, les semaines... les jours de travail, les semaines de travail, les années de travail, la vie de travail. C'est un gain historique. Puis on ne partage pas du tout la vision de M. Harper, qui veut nous faire travailler jusqu'à 67 ans. On voit l'état de ses sénateurs. Ce n'est pas un encouragement.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Dans vos membres, et puis je suis certain que vous avez visité des endroits, avez-vous vu des bonnes pratiques au Québec par rapport aux personnes aînées, c'est-à-dire des endroits où ça va relativement bien et des endroits que c'est relativement bien organisé?

M. Plamondon (Louis) : …qu'on a développé des bonnes pratiques dans beaucoup de milieux.

On a favorisé le développement des bonnes pratiques par l'implantation des comités de milieu de vie dans les résidences pour aînés, pour favoriser le dialogue. On a mis en place, dans plusieurs de nos sections, comme à Québec, le projet Coup de pouce pour l'accompagnement des personnes vulnérables. On a quand même... je pourrais vous montrer… On a créé, en 1982, une exposition sur les conditions de retraite qui s'appelle Ma retraite au Canada. On a repassé ça à nos présidents la semaine dernière. 30 ans plus tard, on voit le progrès, là. Quand même, on fait mieux, mais il y a encore énormément de travail. Quand on voit des bilans tracés par nos organismes, les systèmes de plaintes, le Protecteur du citoyen, le Vérificateur général, c'est certain qu'on a des bons coups. On n'est pas en échec généralisé. Ce n'est pas le style de l'AQDR de faire des jugements, là, comme ça. Nous, on défend des droits. Puis évidemment, en raison de l'aspect médiatique et les stratégies des médias, bien on doit plus dénoncer que valoriser. Puis les bons coups, bien ce n'est pas... les médias ne sont pas acheteurs, Mme Blais en sait quelque chose.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Vous parlez des bonnes pratiques que vous avez développées, mais avez-vous vu des endroits au Québec… ou pour dire : Les gens, des personnes aînées, là, elles habitent là, elles sont heureuses, puis c'est des bons endroits où les gens peuvent demeurer? Parce que c'est vrai, ce que vous dites. Il y a 40 000 personnes dans des CHSLD. On a plus de 120 000 personnes dans des résidences privées. On est déjà rendu à 160 000. Vous avez un autre 200 000, 300 000 personnes, là, qui sont à domicile, qui reçoivent des soins.

Donc, on est rendus avec un assez gros groupe de personnes qui utilisent le réseau de la santé. Est-ce que vous trouvez que la plupart des gens reçoivent quand même des soins qui sont valables ou tout le monde est mal traité?

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : Je pense que de façon générale — je laisserai, pour des clientèles plus fragilisées, à Judith le soin de commenter, là — notre jugement est à l'effet que nous sommes inquiets, de façon générale.

Notre appréciation, si on regarde les portraits qu'on a dans l'ensemble de la condition de vieillir au Québec, quand vous regardez les conditions économiques des femmes seules, quand vous regardez la… Pour les résidences, ce qui nous a inquiétés le plus, là, c'est la situation des baux. On a découvert que 60 % des baux comportent des clauses illégales, alors qu'on a des établissements certifiés. C'est complètement… Vous ne verriez pas ça dans aucune structure sociale, ailleurs, que des gens locataires d'hébergement et de services se retrouvent avec une quantité de baux illégaux. Moi, je dis que c'est de l'âgisme puis de l'exploitation systémique organisée par des gens qui en tirent les bénéfices. Bien, moi, je ne peux pas dire que ça va bien. Je regrette, là. Quand c'est des cas particuliers, je peux comprendre, il y en aura toujours, puis tout ça, mais là on voit ça, c'est systémique. Donc, moi, je dis : Toute cette clientèle-là est menacée, en danger, du fait d'une conduite volontaire, planifiée, de contrats illégaux, pour tirer des avantages financiers ou autres de la part de ces clientèles-là. Puis vous l'avez vu récemment dans les médias, là, il y en a même qui se permettent de poursuivre les aidants. Bien, moi, si vous pensez que ça donne une image positive du vieillissement, non. Puis c'est cette tendance lourde à vouloir discipliner, intimider, menacer, contraindre les personnes âgées dans des structures, c'est assez dominant.

Moi, je vous le dis, c'est notre expérience dans l'AQDR puis dans nos sections. Mais il y a des gens qui font bien, il y a des gens qui sont protecteurs. Ce n'est pas… je veux dire… Mais la condition générale du vieillir est extrêmement difficile en raison du poids économique, de la fragilité de clientèle à domicile. L'accès aux services n'est pas là. Écoutez, toutes les semaines, on voit des gens qui font trois lits de transition avant d'arriver dans le bon lit, puis ils meurent entre les deux. L'histoire de l'eau chaude, là, qu'on a pris des années à mettre des mitigeurs dans nos établissements… Puis on a vu des gens — passez-moi l'expression — mourir cuits dans des bains pendant… sans rapport de coroner, sans suite criminelle. Écoutez, vous avez vu la fameuse affaire de Claude-David. Dans le déplacement d'urgences, on a tué 22 personnes âgées parce qu'ils n'étaient pas prêts. Puis le Protecteur du citoyen vous a condamné, le ministère, dans cette conduite erratique.

Bien, écoutez, là, je peux-tu vous… Je pourrais vous en parler 12 heures si vous me laissez 12 heures.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, M. le Président. Parce que moi, en tout cas je suis médecin de famille, là, puis j'en ai vu aussi passer, puis j'en ai visité, des endroits, et puis je peux…

Moi, ma perspective, là… puis on peut en discuter longtemps, mais je pense que la plupart des personnes au Québec sont quand même relativement bien traitées. Au départ, là, moi, j'en vois, du monde, puis ce n'est pas tout le monde qui est mal traité. Il y a des cas que je suis d'accord avec vous, mais, sur le grand volume d'activité, il y a des cas, puis il faut qu'il y en ait le moins possible. Un, c'est toujours un de trop, là. Mais il reste qu'il y a beaucoup de gens aussi qui reçoivent des bons soins. Pourquoi je vous dis ça? Puis on va arriver tantôt avec l'assurance autonomie. C'est qu'il faut aussi avoir un discours réaliste, positif. Je pense, c'est correct parce que vous défendez des droits, puis vous avez cette position-là, mais moi, j'ai vu également que ça apeure les gens, puis on crée du stress chez les personnes âgées. Et moi, j'ai vu des patients qui venaient puis qu'eux autres étaient bien, mais ils vivaient un stress parce que justement ils avaient beaucoup de craintes. Puis c'est juste un message que je vous fais comme ça parce que je pense qu'il faut être capable d'équilibrer également l'évaluation. Et puis on en voit. C'est vrai qu'il y a beaucoup de monde qui…

Il y a des situations qui sont difficiles puis il y a des situations qui ne devraient pas être tolérées puis qu'il faut corriger, mais il reste que le volume d'activités fait que la majorité des gens sont quand même relativement bien, ce qui ne veut pas dire qu'on ne veut pas améliorer leur sort. C'est juste une discussion qu'on fait comme ça.

Une voix :

M. Bolduc (Jean-Talon) : C'est ça. Je pense que c'est important de faire une discussion à tête froide puis de façon objective. Parce qu'il y a un élément, là, qui est important, c'est que, si on crée de l'anxiété chez nos gens, ça ne les aide pas. Tu sais, la madame de 83 ans qui, elle, on lui dit, là, que tout est tout croche puis qu'elle va être mal traitée quand elle va rentrer en CHSLD, c'est une crainte de rentrer en CHSLD. Mais, une fois qu'elle est rentrée, ça lui amène également un problème d'anxiété. Mais, comme je vous dis, ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas regarder les situations qui sont dénoncées puis qu'il ne faut pas améliorer.

Le Président (M. Bergman) : Monsieur…

Mme Gagnon (Judith) : Pour compléter, je voudrais répondre, moi aussi, vu que…

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Judith) : …j'accompagne M. Plamondon. Ça ne va pas mal partout, là, ce n'est pas vrai, là.

C'est que nous, on est un organisme de défense des droits, puis, quand M. Plamondon décrit des choses, c'est des choses insupportables socialement. Mais ça ne veut pas dire que ça va mal partout, là, ce n'est pas vrai, là. Ça ne va pas mal partout, là, au contraire. Il y a des choses qui se sont améliorées au cours des années, et il y a des services aux aînés qui sont de plus en plus là, et il y a des aînés qui vivent de mieux en mieux, qui préviennent leur santé, qui font des choses et qui vivent, qui… Même, il y a des nouvelles formes d'habitation pour les aînés qui sont en conception. Il y a beaucoup de choses qui se font. Ils ne sont pas tous mal traités, là. Ils ne sont pas tous avec un couteau. Ce qu'il soulève par contre, M. Plamondon, c'est des cas qui, tu sais… qu'on ne peut pas… impardonnables. C'est pour ça qu'il soulève avec tant de fougue… parce que ce n'est pas acceptable dans notre type de société. C'est pour ça que ça fait écho, puis c'est lourd. Mais il y a des choses qui vont bien aussi, c'est évident.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, un, je suis content que vous me disiez ça parce qu'on a la même perception, c'est-à-dire qu'il y a beaucoup de gens qui sont bien.

C'est juste que, comme je vous dis, quand on écoute des discours où on a tendance à généraliser, le risque qu'il y a, c'est qu'il y a des personnes qui peuvent en souffrir. Je pense qu'il faut juste... Ce que vous venez de dire là, là, moi, je l'endosse, puis je pense qu'il faut avoir ce genre de discours là, c'est-à-dire qu'il y a beaucoup de gens qui sont bien. Il faut améliorer. Il y a encore de l'amélioration à apporter dans le système, mais ça, il va toujours y en avoir. Puis, s'il y a des situations qui doivent être corrigées, je pense qu'il faut se mettre ensemble puis les corriger.

Ma question, la première. Vous avez parlé du SMAF, et puis on est d'accord qu'il y ait une évaluation SMAF, il y a 14 profils, mais vous amenez un élément nouveau, c'est-à-dire un élément de négociation. Pourquoi vous voulez avoir un élément de négociation si on peut penser que le SMAF est fait de façon objective? Vous l'avez dit tantôt, que vous voulez avoir quelqu'un qui accompagne la personne pour être capables de négocier avec l'intervenant pivot.

M. Plamondon (Louis) : …vous me permettez, monsieur?

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : Oui. En fait, la négociation, c'est sur le plan de services qui découle de l'évaluation, ce n'est pas sur l'évaluation elle-même, là.

Parce que je ne pense pas que les gens vont vouloir négocier le plan, là, le service ou, tu sais, l'évaluation elle-même. C'est les conclusions qui permettent d'établir le plan de services, c'est là que... Est-ce que le choix est réel? Est-ce qu'il convient? Ce n'est pas parce qu'il est établi puis qu'il découle d'une évaluation scientifique, professionnelle. Puis il y a beaucoup de gens dans... qui ont soulevé le lien qu'on devra s'assurer dans l'évaluation SMAF avec l'évaluation clinique. Est-ce qu'ils ont des consensus, là, tu sais, entre le SMAF puis... Vous qui êtes médecin, vous en savez quelque chose, là, que... Est-ce que vous allez être cohérents? Est-ce que les systèmes d'évaluation vont pouvoir être cohérents, là, vont se parler? Mon médecin m'a dit que... Ce que vous me dites, ça ne semble pas correspondre à ce que mon médecin m'a dit. Bien, nous, on se dit : C'est plus ce volet-là. Puis les conclusions qu'on va tirer vont-elles être favorables aux droits des résidents, puis là c'est là qu'on… ou des usagers? Puis c'est là qu'on se dit qu'il faut que les gens, compte tenu qu'on parle de la population en perte d'autonomie, soient représentés, parce qu'il y a toujours cette... Judith et moi, on en représente, on en accompagne plus, beaucoup dans notre vie hebdomadaire, et je vois à quel point certaines personnes... Même, j'en avais une de 93 ans la semaine dernière devant les avocats, puis elle les grignotait. Mais, je veux dire, c'est exceptionnel, voir ça, là.

Alors, moi, je pense qu'il faut qu'en général, surtout des gens fragilisés, dans un contexte de perte d'autonomie… il faut s'assurer qu'elles puissent discuter, négocier les conclusions d'un plan de services. Et, comme on le fait quand on va dans un... Nous-mêmes, on le fait quand on demande des services d'un entrepreneur ou de n'importe qui.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste deux minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : C'est ça. C'est parce que la façon qu'on voit que ça va fonctionner, c'est qu'il va y avoir une évaluation SMAF. Ça va donner un profil, ce profil va être envoyé à la RAMQ, et la RAMQ par la suite va décider ou va offrir, en fonction de barèmes, une allocation qui devrait être prise par la personne, puis là ils vont décider si ça va utiliser des ressources, mettons, comme en CHSLD ou des ressources à domicile, après ça les ressources intermédiaires. Et puis là ils vont décider également — puis ça, ça a l'air très clair dans la tête du ministre — que ça va être soit du public, puis c'est, mettons, en CHSLD, ou ça pourrait être des entreprises d'économie sociale, ou à la limite, si c'est dans une résidence privée, la résidence privée pourrait avoir ses propres ressources qui seraient fournies à la personne en fonction des barèmes d'octroi de l'allocation.

C'est comme ça que vous l'avez compris aussi? C'est ça. Puis c'est ça, le principe. C'est pour ça que, la négociation, ce n'est pas sûr qu'il va y avoir tant de place.

L'autre élément — puis ça aurait été intéressant, il y a plusieurs sujets, mais j'ai bien compris dans votre discussion avec le ministre où vous vous situez — est-ce que vous pensez que, s'il y a une insatisfaction de la famille ou de la personne… est-ce qu'on devrait avoir un droit d'appel pour savoir si cette personne-là reçoit bel et bien les services qui lui sont nécessaires? Parce que vous savez que, si vous allez avoir... Juste en passant, on est tout à fait d'accord qu'il y ait de l'évaluation. Je pense que le ministre fait des interprétations, là. L'évaluation, on est tout à fait d'accord, et surtout qu'il nous dit aujourd'hui qu'il va y avoir 200 000 personnes par année qui vont probablement être évaluées juste en domicile.

Le Président (M. Bergman) : En conclusion.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Je pense qu'on verra la quantité de ressources qui vont être juste pour l'évaluation. C'est intéressant, parce que ça va prendre beaucoup de monde pour cette assurance autonomie. Mais est-ce que vous pensez qu'il y a des gens qui à la fin ne pourront peut-être pas bien évaluer, et ça va être un préjudice s'ils n'ont pas le droit d'appel?

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé pour le bloc de l'opposition officielle. Et, pour le bloc du deuxième groupe d'opposition, Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Merci. Bien, moi, je suis d'accord avec vous que tout passe par l'évaluation, et puis... bien, la plupart des personnes, elles voulaient...

Beaucoup de groupes sont venus ici pour nous parler de disparités régionales puis même de disparités entre les CSSS. Si cette évaluation-là se faisait partout pareil, il n'y aurait pas ces disparités-là. Même, j'ai même vu des cas de personnes qui ont déménagé, c'étaient les mêmes personnes, évaluées supposément avec les mêmes outils puis qu'ils perdaient 25 % de leurs services… dans deux familles, dans le mois dernier. On a remédié à ça. Mais c'est parce que c'est la preuve que tout le monde ne le comprend pas ou ne l'utilise pas de la même façon, parce que sinon il n'y aurait pas de disparité. C'était scientifique. Les critères le sont peut-être, mais, dans la façon de l'appliquer, peut-être moins. Et puis je suis d'accord aussi avec vous, parce que des groupes sont venus nous dire, ceux qui recevaient des soins, qu'après leurs évaluations ils refusaient systématiquement, en bloc, tous les soins déployés ou qui devraient être déployés pour eux, parce que ça ne convenait pas à leurs besoins. Donc, s'il n'y avait pas… si c'est blanc ou noir puis qu'il n'y a pas d'arrimage, puis que le système est autoritaire, puis qu'il n'y a pas de droit d'appel, là, bien c'est difficile de répondre — puis je pense que, cette souplesse-là, on va en avoir de besoin — de répondre vraiment aux besoins. Puis, quand vous parlez de bien évaluer, à partir du moment où on n'a pas bien évalué puis qu'on n'est plus dans le bon chemin ou dans la bonne case — j'en sais de quoi, comme députée — c'est très, très compliqué après de revenir. Si la base est mal faite, refaire la maison sur un solage qui n'est pas fait, qui n'est pas droit, bien ça ne va jamais bien.

Maintenant, vous avez aussi dit, puis ça, c'est documenté, que les femmes sont souvent les plus seules, les plus pauvres et les plus isolées. Et puis, si elles sont, ces femmes-là, seules, isolées et pauvres, lorsqu'elles rencontrent leur intervenant pivot ou l'équivalent, là, qui va les accompagner quand elles sont seules, ces femmes-là? Puis c'est la clientèle la plus vulnérable parce qu'elle est plus… Elle est plus vulnérable parce qu'elles sont seules et pauvres, mais en plus elles subissent… elles ont encore moins de force pour se défendre, bien, à moins de cas exceptionnels comme vous venez de nommer, là.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

Mme Gagnon (Judith) : Vous…

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Judith) : …soulevez quelque chose d'important, madame, parce que nous, on se questionne beaucoup là-dessus, l'accompagnement des personnes vulnérables. Puis à Québec, dans la région de la Capitale-Nationale, on a mis en place le service Coup de pouce, où on accompagne les aînés dans différents cas. Notamment, ça pourrait être dans ces cas-là. Mais on considère qu'on devrait repenser les services d'accompagnement à ces clientèles vulnérables là qui n'ont personne pour les aider puis qui ne peuvent pas avoir de support pour rendre, pour favoriser l'équité.

Bien, on se questionne beaucoup là-dessus, mais on n'a pas de réponse totale parce qu'il y a des disparités. Puis, si on avait la réponse, bien on ne se questionnerait plus, là.

M. Plamondon (Louis) : Bien, nous, on a suggéré dans nos commentaires, là… on a suggéré, là, peut-être d'élargir le mandat des CAAP dans ce cadre-là, là, parce que les centres d'aide et d'accompagnement aux plaintes pourraient avoir un autre type mandat, qui serait pour ce cas-là, là, pour s'assurer de la représentation des personnes puis que, là, c'est le gestionnaire pivot qui pourrait dire : Moi, je trouve cette dame mal représentée par elle-même. Puis lui, il pourrait avoir une ressource qui accompagne la personne pour s'assurer qu'elle va comprendre ce qu'il va lui arriver puis que le gestionnaire pivot, en cas d'incident, pourrait avoir une rétroaction sur l'offre de services, parce que c'est certain que les gens aussi fragilisés ne peuvent pas faire face…

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps du deuxième groupe d'opposition s'est écoulé.

Mme Roy (Arthabaska) : …consentement — j'ai toujours été assez souple — pour juste poser une petite question.

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Merci. Moi, je me suis demandé si le mécanisme, ça ne serait pas d'offrir systématiquement à ces personnes seules... leur offrir d'être accompagnées. Si vous désirez être accompagnées de… Toutes les personnes arrêtées ont droit à leur avocat, je ne verrais pas pourquoi eux n'auraient pas droit à un accompagnement.

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon, pour une courte réponse.

• (17 heures) •

M. Plamondon (Louis) : ...dans la structure actuelle, on ne voit pas d'autre ressource disponible, suffisamment... connaissant le système puis jouant le rôle d'accompagnant que les CAAP, là. Actuellement, ce serait la ressource la plus... en extensionnant leur mandat, puis les ressources pour qu'ils puissent le faire. Puis il y a des groupes dans la communauté qui existent, donc ça pourrait être… Sinon, il pourrait y avoir un bottin parce que dans... Comme, à Québec, ils ont Coup de pouce. Dans d'autres régions, il y a d'autres services souvent mis sur pied par des AQDR locales.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gouin.

Mme David : Merci, M. le Président. Pour combien de temps?

Le Président (M. Bergman) : 4 min 10 s.

Mme David : Merci. Merci beaucoup pour votre présence. Je vous connais depuis très, très, très longtemps.

Je vois que vraiment votre organisme s'est extrêmement bien développé, de façon même assez spectaculaire, je trouve, et je ne saurais pas vous dire à quel point vous êtes nécessaires et, je dirais, même essentiels dans la défense des droits des personnes retraitées. Je remarque quelque chose dans tout ce que vous dites, c'est vraiment frappant : les femmes sont au coeur de tout ce qu'on est en train de discuter en ce moment. Vous soulignez à juste titre qu'elles seront… elles sont déjà, elles seront les principales usagères de tous ces services qu'on pense vouloir leur offrir. Elles sont les proches aidantes, très largement, et elles sont déjà les travailleuses, les travailleuses en CLSC, en CSSS, en EESAD. C'est assez fascinant quand on y pense, hein? Et là je veux vous poser une seule question, dans le temps que j'ai, ça concerne toute l'histoire des fameux services d'aide à la vie quotidienne. J'ai lu votre mémoire, et, en page 7, il y a deux paragraphes qui me paraissent, à moi, un tout petit peu contradictoires. Mais il y a sûrement une logique qui vous est propre. Je voudrais que vous me l'expliquiez, parce que, là aussi, on parle de femmes, hein, on parle de 5 000 auxiliaires familiales, bon, qui sont en général dans les CLSC, qui donnent les services d'aide à la vie quotidienne. Et vous dites : C'est important que ça continue d'être comme ça. Ces services-là doivent continuer d'être gratuits. Mais, au paragraphe suivant, vous dites aussi : Bon, il y a une réalité. Les EESAD en donnent de plus en plus, il faut donc certifier les EESAD pour en donner, pour que les EESAD puissent se développer. Puis vous parlez de bonifier les conditions de travail.

Mais, en fin de compte, là, vous voulez que les services d'aide à la vie quotidienne continuent d'être gratuits et donnés dans les CLSC et que même il y en ait peut-être qui reviennent dans les CLSC ou vous voulez que les EESAD en fassent de plus en plus, ou un mélange des deux? Qu'est-ce que vous voulez?

M. Plamondon (Louis) : Bien, d'abord...

Le Président (M. Bergman) : M. Plamondon.

M. Plamondon (Louis) : En fait, nous, là, on est partis... ce sont nos présidents, là, puis dans les régions...

D'abord, ce n'est pas tous les CLSC, contrairement à l'image qu'on se fait, qui ont des services d'aide domestique ou d'auxiliaire familiale. Ce n'est pas généralisé. Il y a des régions où c'est les communautés parce que les CLSC étaient encore des services marginaux, puis ils ont fait surtout une première ligne plutôt vers d'autres types de population que la population âgée. Alors, nous, on dit que, là où la communauté a trouvé des réponses... Et l'opinion de nos présidents, c'est que, là où les communautés ont été capables de mettre en place des structures d'économie sociale capables de répondre à ce besoin-là… je ne vois pas l'intérêt de démembrer ça pour dire qu'on va nationaliser les initiatives des communautés. Alors, nous, on pense qu'une bonification de l'activité des organismes d'économie sociale… là où ils sont déjà structurés, ils ont gagné la notoriété de leurs communautés… qu'on ne veut pas un «tout à l'État».

Par ailleurs, je ne pense que ça veut nécessairement dire que la contribution des usagers, pour moi, c'est distinct. Ça peut continuer d'être gratuit dans une EESAD parce qu'il y a une allocation qui correspond au fait que les gens qui sont à faibles revenus ne contribueront pas, c'est l'allocation autonomie qui va faire la contribution. Donc, pour moi, la gratuité n'est pas menacée par l'EESAD. Nous, on veut qu'il y ait une qualification qui soit reconnue, qu'il y ait une bonification, surtout si les EESAD acceptent. Ça, là, c'est libre aux EESAD. Ils se sont positionnés ici. Donc, libre aux EESAD de dire est-ce qu'ils veulent aussi intégrer des services à la vie... l'aide personnelle. Ils se prononceront puis ils décideront à quelles conditions ils peuvent négocier ces services-là. Moi, je crois que ça, c'est crédible, surtout là où les communautés supportent ces projets-là.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Plamondon, Mme Gagnon, M. Paquet, merci pour votre présentation, merci d'être ici avec nous aujourd'hui et partager votre expertise.

Et je demande les gens de l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal pour prendre la place à la table et je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 17 h 5)

(Reprise à 17 h 7)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, Dre Belleville, on vous souhaite la bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, si vous pouvez nous donner votre nom, votre titre... et les 10 prochaines minutes sont à vous.

Institut universitaire de gériatrie
de
Montréal (IUGM)

Mme Belleville (Sylvie) : Oui. Alors, mon nom est Sylvie Belleville, je suis directrice du Centre de recherche de l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal, qui est un centre de recherche reconnu par le FRQS, le Fonds de recherche Québec — Santé. Je suis aussi professeure en psychologie à l'Université de Montréal, je suis directrice du Consortium québécois pour l'identification précoce de la maladie d'Alzheimer, vice-présidente du conseil consultatif des instituts du vieillissement, que M. le ministre connaît bien, Institut du vieillissement... des Instituts de recherche en santé du Canada. Alors, je vous remercie de m'accueillir ce soir.

Alors, le Centre de recherche de l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal est assurément tout à fait favorable aux objectifs et aux principes qui sont présentés dans le livre blanc L'autonomie pour tous. On sait, et les études le montrent, on sait très bien que les personnes âgées souhaitent, pour la plupart, demeurer à la maison et qu'elles veulent demeurer à la maison le plus longtemps possible. Et évidemment le fait de redonner à la personne en perte d'autonomie la maîtrise sur un certain nombre d'options quant à son choix de milieu de vie, c'est tout à fait louable et, je dirais même, c'est nécessaire, et nous le supportons largement. Nous sommes aussi très favorables à l'approche individualisée que vous préconisez, donc l'utilisation des profils ISO-SMAF. Je pense que c'est intéressant, ça reflète bien la grande variabilité qu'on observe dans les profils d'autonomie, de fonctionnement des personnes âgées.

Par ailleurs, je vais présenter aujourd'hui trois éléments qui nous paraissent faire partie de ce qui est susceptible de favoriser la réussite, l'impact du programme : d'abord, l'importance de tenir compte du bien-être global de la personne, mais aussi des troubles cognitifs et du proche aidant; ensuite, l'adaptation de l'offre de services des établissements, donc qu'est-ce que sera l'impact pour les établissements?, et puis, en troisième lieu, toute la question de la prévention des besoins ou, enfin, des pertes d'autonomie chez la personne âgée.

• (17 h 10) •

Alors, d'abord, favoriser le bien-être global de la personne. J'étais là tout l'après-midi, alors j'étais très intéressée d'entendre la personne qui parlait des services de loisirs. Je trouvais ça très intéressant. Évidemment, l'assurance autonomie, elle, elle centre actuellement sur les soins physiques, les soins de base, et c'est tout à fait raisonnable, c'est légitime, mais j'aimerais rappeler l'importance de tenir compte des autres besoins et de voir la personne dans sa globalité. Alors, tenir compte des besoins psychologiques, des besoins sociaux, des besoins cognitifs, c'est des éléments qui sont très importants pour les personnes âgées, ça fait partie de leurs priorités, ça fait partie de leurs valeurs. Même si pourtant elles souffrent souvent de solitude, d'isolement, de sous-stimulation, hein, ce qu'on appellerait «d'ennui», c'est très important d'en tenir compte.

Et je vous rapporte très rapidement une étude de ma collègue Cara Tannenbaum, qui a fait une grande... une étude auprès de plus de 1 500 femmes canadiennes. Et, ces femmes-là, quand on leur demandait c'est quoi, leurs priorités de santé, bien ce qu'elles disaient, c'étaient tous des éléments qui tiennent à la qualité de vie. Alors, ce qui est important, c'est la mémoire, c'est la mobilité, c'est les chutes. Donc, on voit que les priorités sont très différentes de ce qu'on pourrait avoir si on questionnait des jeunes. Il faut en tenir compte. Et, dans cette étude-là, elle a aussi montré que près de 80 % des personnes âgées mettaient comme hautement prioritaire le fait d'être vues dans leur globalité, comme un tout, comme une personne à part entière, malgré leur âge, malgré leur incapacité. C'est très important. Ils ne veulent pas être vus comme étant juste une maladie ou juste du physique. C'est important d'en tenir compte. Et c'est important donc de tenir compte de la stimulation cognitive, de la stimulation et puis... intéressant de mentionner que ce sont des éléments qui souvent vont faire partie du programme de soins dans les CHSLD. Alors, comment on va remplir ces besoins-là quand les femmes ou les hommes sont chez elles, chez eux? Comment on va faire en sorte qu'elles ne s'isolent pas, qu'on ne contribue pas à leur isolement, qu'on tienne compte de leurs besoins de créativité, de stimulation cognitive, qualité des relations sociales? Et ce n'est pas juste le cas quand on est tout seul, c'est aussi le cas quand on est un duo aidant-aidé. Parce que souvent on a montré... Les recherches ont montré que souvent le réseau social se rétrécit considérablement à partir du moment où, par exemple, quelqu'un a eu un diagnostic d'Alzheimer, même s'il y a un aidant à côté. Tout à coup, les gens ne viennent plus nous visiter. Tout à coup, les gens ont peur, quasiment, d'être en interaction avec la dyade.

Donc, je pense qu'il va falloir penser à des nouvelles façons de faire, on en a parlé tout à l'heure. Mais je trouve ça très intéressant d'évoquer la question de la solidarité intergénérationnelle. Mais, la solidarité intergénérationnelle, je trouve ça intéressant aussi de l'aborder pas juste pour les... Évidemment, les étudiants pourraient contribuer, etc., mais pensez aussi aux jeunes retraités. La magie du vieillissement, c'est que vous allez avoir aussi tout un ensemble de personnes qui vont prendre leur retraite, qui vont être en santé et qui vont avoir envie de contribuer. Ces gens-là pourraient aussi avoir un impact intergénérationnel avec des gens qui sont en perte d'autonomie.

Alors, je pense qu'on a là vraiment quelque chose qui pourrait être formidable sur le plan de l'innovation.

Alors, maintenant, les troubles cognitifs, je voudrais en dire un mot rapidement. Le maintien à domicile d'une personne âgée avec une maladie neurodégénérative, c'est vraiment, particulièrement, difficile à cause des problèmes cognitifs mais aussi à cause des symptômes comportementaux et psychologiques de la démence, donc toute la question de l'apathie, l'agressivité, l'errance, les troubles du sommeil. Alors, c'est des symptômes souvent qui vont précipiter l'institutionnalisation. Comment on va en tenir compte dans ce programme-là? Comment on va équiper les équipes de soins? Comment on va les outiller? Et évidemment c'est très différent de s'occuper de quelqu'un qui a un problème d'autonomie à cause de déficiences physiques, versus à cause de déficiences cognitives, versus quelqu'un qui refuse les soins, qui a peur, etc. Il va falloir les former, ces gens-là. Il va falloir aussi, peut-être, les former sur le plan des interventions de stimulation. Une équipe de Bordeaux, tout juste la semaine dernière, à notre colloque, a montré que... nous a rapporté qu'un programme de stimulation individualisé sur le plan cognitif pouvait retarder l'institutionnalisation de personnes Alzheimer, de six mois. Alors, on peut concevoir assez facilement comment, des programmes de stimulation de ce type-là, l'impact que ça peut avoir sur les proches, sur le système de santé.

Et donc je pense qu'il faut faire preuve d'imagination et d'innovation pour non seulement s'occuper des besoins physiques de base, mais aussi de promouvoir la cognition chez ces personnes en perte d'autonomie.

Et évidemment le soutien des proches aidants va être très, très important. C'est la clé de voûte de réussite de ce projet. Et ils vont être proches aidants plus longtemps. Donc, comment on va les supporter pas juste quand ils sont épuisés, mais aussi au début de leur carrière de proche aidant, pour les outiller comme il faut? Et je pense que ma collègue Francine Ducharme vous a soumis un très beau mémoire à cet égard.

Maintenant, il faut aussi penser à la trajectoire du proche aidant. C'est-à-dire que, si le proche aidant l'est plus longtemps, il va avoir été le pilier très, très longtemps de son proche. Ce qu'on observe, nous, dans notre institution, c'est qu'il y a une forme de questionnement ou de redéfinition de rôle quand la personne est institutionnalisée, qui n'est pas nécessairement facile pour le proche aidant. Donc, il va falloir aussi aider les proches aidants, ce qui... Quand leur proche est admis en CHSLD, comment ils se redéfinissent, comment ils s'intègrent dans l'équipe de soins? Quelle sorte de complicité on va établir avec le proche quand la personne va être institutionnalisée? Évidemment, il y aura un impact sur la clientèle admise en CHSLD. Elle va changer. On assiste déjà, maintenant, à l'augmentation du nombre de personnes avec des troubles cognitifs et des troubles du comportement. Ça va s'accroître, très probablement. Il va falloir former les gens à ce type de clientèle là, la majorité des pratiques courantes va devoir être ajustée pour répondre à ces besoins. Alors, il faut tout de suite penser à des modes de formation, puis pas juste des modes de formation dans les milieux, dans les grands centres, par exemple, il va falloir penser aussi dans les... aussi aux régions. Vous parliez, dans le livre blanc, de la Gaspésie, qui est une des régions où il y a la plus grande croissance des personnes âgées, bien, il va falloir que ces gens-là aient aussi du service de qualité. Et nous, on pense qu'il y a des innovations intéressantes, par exemple, au niveau de la téléformation ou de la téléconsultation. On est déjà impliqués là-dedans. Oh! Une minute. Voilà.

Alors, pour terminer, il va falloir penser aussi à la prévention. Avant d'être maintenues à domicile, les personnes âgées vivent à domicile. Donc, il faudra absolument travailler en amont, réduire les conditions qui précipitent l'institutionnalisation. On les connaît déjà, pour la plupart. On sait que le fardeau perçu par le proche aidant, l'incontinence, les chutes, les syndromes comportementaux de la démence, ce sont tous des facteurs qui précipitent l'institutionnalisation. Alors, il faudra adapter ou proposer des interventions qui vont prévenir ces conditions-là chez la personne âgée. Donc, pensons non seulement à la prise en charge, mais aussi à la prévention. Et on est en train de mettre en place un centre de promotion qui, nous l'espérons, va pouvoir être un atout vraiment formidable pour l'ensemble de la population du Québec en offrant aux personnes âgées des modes de prévention, d'autonomisation, de prise en charge de sa propre santé.

Alors, pour conclure, vous nous avez proposé un projet plein d'espoir, moi, je pense qu'il y a une grande part d'espoir dans ce projet. Nous l'appuyons. Nous l'appuyons assurément. Nous croyons qu'il faut travailler ensemble. Je suis directrice d'un centre de recherche — vous connaissez la recherche, évidemment — et je pense qu'il faut aussi que la recherche soit arrimée à ce projet-là, il faut que le financement de la recherche en soins et services de longue durée soit priorisé au niveau du FRQS.

Donc, pour refléter cette vision que vous avez, il faut que vous invitiez les chercheurs à vous aider à répondre aux questions que vous avez. Il faut que vous les invitiez à faire plus de recherche dans le domaine des soins de longue durée et des personnes en perte d'autonomie. Il faut que nous travaillions tous ensemble à solidifier les liens intergénérationnels, ramener la personne âgée au coeur de nos vies, au coeur de notre société, parce qu'il ne faut pas oublier que c'est la personne âgée qui porte notre histoire et qui porte notre mémoire. Merci.

• (17 h 20) •

Le Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation, Dre Belleville. Merci pour les derniers mots, c'est très touchant. M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, Mme Belleville, de votre mémoire. Même si on l'a reçu un petit peu tardivement, on a été capables de le parcourir, et ça nous apporte le débat à un autre niveau. Et je vais profiter de votre passage pour tirer le maximum de vos opinions concernant la recherche et vous amener un petit peu plus loin.

Vous soulignez, d'entrée de jeu, l'individualisation de l'approche qu'on aura dans l'assurance autonomie avec les profils ISO-SMAF, qui ont 14 profils. Comparativement aux autres pays qui ont implanté ce genre d'assurance à long terme, il y a beaucoup plus de précisions sur les profils. L'Allemagne a trois niveaux, la France en a six, le Japon et les Pays-Bas en ont sept, et ils ne distinguent pas les profils à composantes cognitives des profils à composantes physiques. Alors, j'imagine que c'est, pour vous qui êtes dans le domaine des fonctions cognitives, un apport intéressant?

Mme Belleville (Sylvie) : Oui, oui, c'est tout à fait intéressant. Je trouve qu'il va plus en profondeur ou en raffinement dans l'individualisation des profils.

Je pense que c'est extrêmement important. Donc, il y a les aspects moteurs qui sont pris en charge, les aspects liés aux activités domestiques, les aspects liés aux atteintes cognitives, mais aussi les profils tiennent compte des symptômes comportementaux de la démence et ils tiennent compte aussi du degré de sévérité. Donc, en ce sens-là, ils sont tout à fait intéressants. Je pense que c'est un élément assurément qui va peut-être nous rendre uniques au niveau international par rapport à l'évaluation des besoins des personnes âgées.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous avez abordé évidemment toute la problématique des proches aidantes — parce que moi aussi, j'utilise le féminin, c'est tellement un phénomène qui est surtout lié aux femmes. On a entendu Francine Ducharme, et je ne voudrais pas prendre plus de temps, mais on a bien entendu son plaidoyer pour évaluer les besoins des proches aidantes et fournir des services, alors je n'insisterai pas là-dessus. Je voudrais en profiter pour vous demander votre… Vous parlez des troubles cognitifs à domicile. On a souvent tendance à penser que le domicile, c'est la petite maison individuelle, alors que le domicile, ça peut être des lieux de résidence collective.

Il y a des expériences où des troubles cognitifs sont pris en charge dans de petits milieux comme ça. J'aimerais que vous nous apportiez votre éclairage sur l'importance de ces milieux à soutenir.

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui Je pense que c'est tout à fait important. Je pense que les problèmes cognitifs doivent être pris en charge de façon tout à fait unique et adaptée à leurs caractéristiques.

Les personnes qui ont des problèmes cognitifs, d'une part, ce qu'il faut souligner, c'est qu'elles sont très variables. Donc, on a tendance à penser qu'une personne qui a des problèmes cognitifs, ça ressemble… que toutes les personnes se ressemblent, qu'elles… On sait très bien que les profils peuvent être extrêmement variables. Certaines personnes vont être très apathiques, par exemple, et on va devoir avoir une approche très différente avec ce type de personnes par rapport à quelqu'un qui a essentiellement des problèmes de langage ou qui a essentiellement… ou qui a des problèmes de langage et des problèmes de motricité. Donc, moi, ce que je crois, c'est qu'il faut vraiment, et là je vous rejoins, individualiser l'approche, donc l'évaluation est très importante, individualiser l'approche, favoriser des approches qui sont dans des petits milieux. Mais, pour moi, un petit milieu, ça ne veut pas nécessairement dire que c'est un petit milieu avec des rues alentour, autour, mais c'est que la configuration physique du milieu où vivent ces personnes est adaptée aux particularités de ces personnes. Donc, c'est sûr qu'on peut être dans un CHSLD. Si la configuration de l'unité est adaptée au fait que la personne a des problèmes d'errance, par exemple, au fait que la personne a des problèmes de mémoire, donc les lieux sont organisés de telle façon qu'elle peut marcher et retrouver sa chambre facilement, bien ça m'apparaît tout à fait adapté, même si c'est dans un grand CHSLD, parce que son milieu physique va être adapté à son besoin.

Donc, je pense qu'il faut réfléchir à la façon dont on organise les lieux pour faire en sorte que ces personnes soient heureuses, bien, ou mieux en tout cas, peu importe là où elles habitent. Et je suis tout à fait d'accord avec vous. J'ai l'habitude de dire : Mon chez-moi, ce n'est pas nécessairement là où j'ai élevé… le bungalow où j'ai élevé mes enfants. Ça peut être aussi un endroit plus restreint, plus petit, où j'ai mes repères plus facilement.

Donc, la personne âgée peut changer de milieu, mais en général la personne âgée n'a pas très envie de déménager plusieurs fois. Elle a envie de se reconnaître, elle a envie d'avoir ses objets, elle a envie d'avoir l'impression d'appeler ça chez-soi.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Il y a d'ailleurs des modèles résidentiels qui ont été développés au Québec. Le plus connu est sans doute la maison Carpe Diem, qui regroupe un petit nombre de personnes âgées dans un environnement qui ressemble plus à un milieu de vie et qui peut répondre aux besoins des gens avec des troubles cognitifs pour une longue période, dans toute l'évolution de leur maladie, si les services sont au rendez-vous.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui, tout à fait. Et Carpe Diem est assurément un modèle, à l'international, de ce type de lieu adapté à la personne avec troubles cognitifs.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Oui, on avait les CANTOU, les CANTOU, en France, aussi qui étaient ce genre de modèle, exactement.

Et quelle pourrait être… Et vous le soulignez dans votre mémoire, mais moi, je voudrais vous entendre sur un petit peu de science-fiction, à peine. Quelle pourrait être l'approche de la gérontechnologie, de la domotique dans le maintien à domicile de personnes qui peuvent avoir des troubles cognitifs?

Mme Belleville (Sylvie) : Mais c'est tout à fait…

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Excusez-moi. Alors, la gérontechnologie, c'est l'utilisation de la technologie pour favoriser le maintien à domicile des personnes âgées.

C'est une approche qui est, je dirais, en explosion. Et pourquoi? Parce que les gens âgés veulent rester à domicile, parce qu'il y a plein de problèmes qui sont associés avec un domicile usuel quand on vieillit puis on a des pertes physiques puis qu'on a des difficultés cognitives. Et les chercheurs, il y en a à Sherbrooke, il y en a à Montréal, il y en a à Trois-Rivières, s'intéressent à développer des technologies qui vont permettre soit de sécuriser le domicile... Donc, ça peut être, par exemple, des dispositifs très simples qui permettent d'assurer l'aidant, par exemple, que, si le proche quitte le domicile, bien il est avisé. Donc, il sait qu'il y a quelque chose qui se passe. Ça peut être aussi, par exemple, l'utilisation de systèmes, qui fait en sorte que, quand on ouvre la lumière à côté, sur sa table de chevet, tout le corridor qui se dirige vers la salle de bains s'illumine, ce qui fait que ça réduit les chutes. Ça paraît des choses comme ça qui sont très simples, mais pour une personne âgée ça peut faire toute la différence entre «je reste à la maison, je me sens à l'aise, je suis en sécurité» versus «il y a l'anxiété qui arrive, j'ai besoin de plus d'aide, j'appelle mon fils plus souvent ou ma fille plus souvent».

Donc, c'est des choses qui sont extrêmement intéressantes pour apporter de la sécurité autour de la personne âgée puis des fois, aussi, pour faciliter sa vie.

On peut aller dans des systèmes très sophistiqués, mais on peut aussi aller dans des systèmes très simples qu'on peut acheter à la quincaillerie du coin, puis qu'on adapte tout simplement aux besoins particuliers de la personne âgée. Et je dirais que le défi, dans ce type de technologie — je pense que c'est vraiment très, très intéressant — le défi, c'est de s'assurer qu'on ne fait pas juste les remettre entre les mains des personnes âgées et de leurs proches, mais qu'on s'assure aussi que les personnes âgées et leurs proches... qu'elles savent comment les utiliser, qu'elles ont appris à bien les utiliser, qu'elles les ont automatisés, ce qui fait qu'elles ne vont pas les abandonner après trois semaines.

Donc, je pense que ça, c'est aussi le défi qu'on doit avoir, nous, comme chercheurs. Donc, développer pas juste les technologies, mais aussi les programmes, qui fait en sorte qu'ils vont être bien utilisés, qu'ils vont être acceptés et que ça va être quelque chose qui va s'intégrer à la vie quotidienne de la personne et de sa famille.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Un autre défi aussi, c'est de faire en sorte que ces innovations issues de la recherche puissent être transférées, donc, produites, distribuées, commercialisées, rendues disponibles aux personnes âgées. Et là on a un écart à combler.

J'aimerais vous entendre sur des stratégies qui devraient être mises en place pour favoriser ce transfert de connaissances vers de nouveaux produits et services.

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Bien, c'est un élément extrêmement important, et, moi, comme directrice de recherche, ça a vraiment été un de mes objectifs de sensibiliser les chercheurs au transfert de connaissances, faire en sorte que leurs découvertes, finalement, servent aussi à la population.

On a travaillé très fort. On forme les chercheurs dans le domaine du transfert de connaissances, parce que le chercheur, il est formé à chercher. Il n'est pas formé à transférer ou pas… Enfin, il y a longtemps, il n'était pas très bien formé là-dedans. Alors, il faut un peu le convaincre de l'importance de ça. Il faut lui donner les outils. On a des sociétés de valorisation qui permettent de faire ça. Les chercheurs sont souvent un peu méfiants, mais il faut leur montrer qu'il n'y a pas à avoir peur. On a aussi, maintenant, avec le Web, beaucoup de possibilités de mettre à la disposition des cliniciens ou du grand public des découvertes, des intangibles, parfois des questionnaires, des choses comme ça. C'est un peu plus compliqué pour les technologies, mais je pense que ça habitue les chercheurs à apprivoiser la valorisation. Et moi, j'ai l'habitude de dire que, tant que la recherche n'a pas eu un impact dans le grand public, elle n'est pas finie, la recherche. Et elle est tout à fait complétée quand elle a un impact dans le grand public.

Alors, je pense qu'il faut aussi que les chercheurs apprennent ça. Ils le font de plus en plus, d'ailleurs.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous mentionnez dans votre mémoire qu'il faut travailler pour réduire les conditions qui précipitent l'institutionnalisation et le besoin prématuré en soins de longue durée. J'aimerais ça que vous nous parliez de ces conditions.

Est-ce que vous avez été capable d'en identifier? Et comment on peut travailler là-dessus?

• (17 h 30) •

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui, tout à fait. La recherche a identifié un certain nombre de conditions qui précipitent l'institutionnalisation.

Ce sont des conditions, comme par exemple l'incontinence, la fracture de la hanche, le fardeau du proche aidant perçu, donc le fardeau perçu par le proche aidant, les troubles cognitifs, les troubles comportementaux et psychologiques de la démence. Donc, ce n'est pas nécessairement les éléments liés à la capacité en tant que telle de réaliser des tâches dans la vie de tous les jours. Donc, ce sont des éléments qui sont assez intéressants. Bon. Je vous parlais, tout à l'heure, des symptômes comportementaux liés à la démence. Par exemple, l'apathie d'un patient avec une maladie d'Alzheimer, c'est un des symptômes qui va être le premier symptôme qui va précipiter l'institutionnalisation. Donc, ce n'est pas tellement que la personne n'est pas capable de se laver ou n'est pas capable d'aller s'habiller, mais elle est assise et elle n'initie pas les comportements. Et ça veut dire que le proche aidant doit constamment être derrière la personne et la motiver. C'est quelque chose qui est assez intangible, en un sens, mais qui est extrêmement lourd pour la famille et le proche aidant. Donc, ça, ce sont des conditions qui peuvent se prévenir avec des programmes de stimulation cognitive. On parlait de loisirs tout à l'heure, alors identifier les… Par exemple, le patient avec maladie d'Alzheimer qui se réveille la nuit, qui a un changement dans son cycle éveil-sommeil, qui se réveille la nuit, qui erre, qui va se balader, qui ouvre toutes les lumières, c'est extrêmement difficile pour le proche aidant parce qu'il se réveille lui aussi, puis il devient fatigué, puis il n'en peut plus.

Donc, on voit que ce sont des conditions qui ne sont quand même pas évidentes. Il faut outiller les gens pour prendre en charge puis réduire ce type de conditions. Ce sont des conditions qui précipitent l'institutionnalisation. Quand elles sont présentes, on a un petit drapeau rouge puis on se dit : Oups, Il y a un problème là, et il faut avoir des actions.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Et, encore là, on a un problème de transfert des connaissances.

On écoutait la présentation précédente sur le loisir. Il serait important que ces stratégies-là puissent être intégrées dans les activités de loisirs, et je pense que c'est important d'effectuer ce transfert de connaissances là. Je pense que… la même chose pour les groupes de soutien aux proches aidants : on utilise encore des stratégies traditionnelles dont on sait qu'elles ne sont pas très efficaces, alors qu'on connaît des méthodes qui permettent de diminuer le stress des aidants, mais elles ne sont pas appliquées dans les programmes, alors c'est…

Mme Belleville (Sylvie) : Alors, je voudrais mentionner deux choses. Alors, d'une part, le centre de promotion de la santé qu'on est en train de mettre en place a justement cet objectif-là.

Ce qu'on veut faire, c'est prendre les résultats de la recherche et les rendre dans un format qui soit utilisable, accessible et, de préférence, qu'ils puissent être transférés à distance, donc des formations à distance. Donc, on veut vraiment outiller les gens dans le milieu avec ce que la recherche aura découvert, finalement.

Par rapport aux loisirs, bien vous me faites vraiment plaisir, parce qu'avec des collègues de Toronto, de Montréal, de Sherbrooke on est en train justement de mettre en place un travail de recherche dans le cadre du Consortium canadien sur la neurodégénérescence où ce qu'on veut, c'est justement ça, c'est-à-dire on veut prendre les principes… Moi, je travaille sur l'intervention cognitive, le training cognitif, la plasticité cérébrale, etc. On connaît les facteurs qui vont promouvoir la plasticité cérébrale, mais ce sont des interventions qui sont quand même assez académiques. Ce qu'on veut faire, c'est les intégrer dans des activités de loisirs. Donc, on veut enrichir les activités de loisirs. Et, quand j'entendais la dame parler tout à l'heure, j'ai pris son nom. C'est sûr que je l'appelle, rendue à la maison.

Donc, oui, vous avez tout à fait raison, il faut que ces interventions, qui sont parfois un peu académiques, un peu scientifiques… qu'elles s'intègrent dans des activités qui font du sens pour les personnes âgées puis qui font du sens pour les personnes âgées de tous les milieux. Si on intègre ça dans des activités de loisirs, ça veut dire qu'on peut adapter les interventions à des gens qui vivent à Saint-Henri, à des gens qui vivent sur Le Plateau, à des personnes âgées qui vivent dans les communautés autochtones, parce que ce sont des… les principes vont être adaptables, si on veut, à la culture ou aux préférences des personnes.

Donc, c'est le type de choses, oui, qu'il faut tout à fait faire, et on est en train de le faire.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous soulignez que le financement de la recherche devrait refléter la vision ministérielle du livre blanc. Alors, je suis sûr que vous appréciez l'une des priorités de la Politique nationale de recherche et d'innovation, qui a identifié le vieillissement comme étant une priorité, et, deuxièmement, les modifications de l'article 21 qui permettent de faire de la recherche en soins de longue durée, enfin, en permettant l'accès à la recherche par les inaptes majeurs.

Alors, j'imagine que ces deux stratégies-là vous sont agréables.

Mme Belleville (Sylvie) : Bien, je suis…

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui. Oui, tout à fait. Je suis vraiment ravie que la Politique nationale pour la recherche et l'innovation ait identifié les changements démographiques et le vieillissement comme priorités. Je pense que c'est très important, c'est évident. Et je pense qu'on est… Et je vous félicite de cette initiative. Je pense aussi que les changements à l'article 21 sont vraiment essentiels. Pour moi, c'est essentiel.

Et vous parliez, tout à l'heure, de transfert de connaissances. Une des façons de changer la pratique, c'est de faire de la recherche dans un milieu. Ça change la pratique parce que les chercheurs sont là, parce qu'ils mettent au défi les intervenants. Si on ne peut pas faire de la recherche dans un milieu, c'est très difficile de sensibiliser les gens aux nouvelles pratiques. Donc, je pense que la… Moi, il faut vraiment faire de la recherche en soins de longue durée. Pour ça, il faut que les personnes adultes inaptes puissent participer à la recherche, dans le respect évidemment de toutes les règles éthiques. Mais il faut les amener à participer à la recherche.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous parlez, dans votre mémoire, de modèles novateurs de solidarité intergénérationnelle. Vous piquez ma curiosité, alors j'aimerais que vous me donniez une idée de ce que vous entendez par ces innovations.

Mme Belleville (Sylvie) : Bien, oui. Je faisais référence à ces initiatives où des gens de générations différentes vont interagir autour de projets de loisirs, par exemple, où… On en a entendu quelques exemples plus tôt aujourd'hui.

Nous, on a des jeunes de l'école Notre-Dame qui viennent faire du bénévolat chez nous. C'est une initiative qui a été mise en place par le service de loisirs. C'est extrêmement couru. Les jeunes adorent ça, les personnes âgées adorent ça. Et je pense aussi que, comme je le mentionnais tout à l'heure, il faut aussi mettre à contribution les jeunes retraités, les jeunes personnes âgées qui sont presque d'une autre génération. Si on pense, par exemple, aux gens qui ont 90 ans, 85 ans, et les gens qui ont 65 ans, c'est deux générations totalement différentes, hein? Et ces gens-là, ils ont envie de participer, ils sont très actifs, ils sont en santé et ils ont envie de contribuer. Ça pourrait être aussi… Je nous invite, tous ensemble, à réfléchir à des modèles intergénérationnels novateurs.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Ma dernière question, c'est… Vous me faites plaisir aussi. On se fait plaisir cet après-midi. Parce que vous nous suggérez d'évaluer l'efficacité du modèle d'assurance autonomie qui va être mis en place au Québec pour avoir des données probantes sur ses impacts. J'aimerais que vous me donniez des suggestions quant à la façon dont on pourrait procéder à cette évaluation.

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Une voix :

Mme Belleville (Sylvie) : Oui. C'est une grande question. Moi, je pense qu'il faut… Je vous invite à avoir une approche intersectorielle. Vous avez un scientifique en chef qui a proposé de promouvoir la recherche intersectorielle.

Je vous invite à avoir une approche intersectorielle pour à la fois évaluer les aspects économiques, les aspects sociologiques, les aspects liés à la santé des personnes, les aspects liés à la psychologie des personnes et aussi la dynamique au sein des familles. Donc, je pense que, si vous… Et ça, ce serait novateur, parce que, dans le fond, c'est une politique qui paraît une politique de santé, mais, en ayant une approche intersectorielle de cette question-là, vous auriez peut-être des réponses assez intéressantes à un ensemble de questions. C'est parce que ça va sûrement avoir un impact bien au-delà de la santé des personnes. Ça va avoir un impact au niveau de la façon dont on voit les personnes âgées, ça va avoir un impact au niveau de l'organisation des familles, l'organisation des milieux, et il pourra y avoir un impact au niveau aussi de l'organisation des villes, etc.

Donc, je pense que vous avez intérêt peut-être à appeler votre scientifique en chef et à lui suggérer de faire une évaluation intersectorielle.

• (17 h 40) •

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : …vous avez en tête un appel de propositions à la communauté scientifique pour une évaluation globale, intersectorielle de ça? C'est ça que vous avez en tête?

Mme Belleville (Sylvie) : Oui, c'est ce que j'ai en tête. Et vraiment, vraiment intersectorielle, pas juste les éléments liés à la santé, parce que ça, bon, ça va de soi, mais les éléments ou les impacts plus globaux sur l'ensemble des secteurs de la société québécoise. Moi, je pense qu'étant donné l'importance du vieillissement et puis l'impact que ça a à tous les niveaux ce serait vraiment très intéressant.

M. Hébert : …l'impact sur, par exemple, le travail des femmes, certains éléments sociétaux qui sont importants.

Mme Belleville (Sylvie) : Les aspects économiques, sociologiques, et même, bon, au niveau de comment on perçoit la personne âgée : Est-ce que ça modifie la perception de la personne âgée dans la société? Je veux dire, je pense que, là, on aurait vraiment des… Je pense qu'il y aurait de quoi faire des travaux de recherche passionnants.

M. Hébert : Et vous soulignez, en terminant, qu'il faudrait que la recherche stimule aussi des nouveaux modèles encore mieux adaptés à des réalités complexes. Alors là, j'imagine que vous avez en tête un programme de subvention pour stimuler les chercheurs à proposer des nouveaux modèles pour les évaluer.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui, je pense qu'on n'a pas atteint la perfection, hein, et je pense qu'il y a… Quand on est chercheur, on a toujours l'impression qu'il y a possibilité de faire mieux.

Je vous parlais, tout à l'heure, de cette idée d'intégrer les loisirs ou, enfin, de la stimulation cognitive dans les loisirs. Bien, c'est ce type de nouveau modèle, mais nouveau modèle aussi d'organisation des soins, d'organisation des milieux pour les personnes en perte d'autonomie. Et je pense qu'il faut que les… C'est parce que les chercheurs, je pense, ne se sont pas assez penchés sur cette question des services et soins de longue durée.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Bien, merci, M. le Président. Bienvenue. Je trouve que c'est une conversation très intéressante.

Comment vous trouvez le développement de la gériatrie au Québec, en général? Parce que je trouve en tout cas que vous, l'institut universitaire de Montréal, également Sherbrooke, ici, à Québec, on a le centre du vieillissement… Pensez-vous qu'on est quand même dans ceux qui sont assez innovateurs au niveau mondial, au niveau canadien?

Mme Belleville (Sylvie) : …qu'on prend une place très importante au niveau du Canada.

Vous savez, au niveau des indicateurs d'impact de la qualité de la recherche en vieillissement, on est extrêmement bien positionnés au niveau canadien. Donc, c'est ici que se… On est parmi les… On a les chercheurs les meilleurs et les plus performants au Canada. Donc, à ce niveau-là, je trouve, c'est bien. Là où on a un défi, c'est d'intéresser les médecins à la gériatrie. On a un manque de gériatres au Québec. Dre Kergoat et ses collègues, Dr Morais travaillent très fort pour intéresser les médecins à la gériatrie, mais ce n'est pas encore une branche qui intéresse suffisamment de jeunes médecins. On y travaille, ça s'améliore, mais je pense qu'il va falloir…

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Là-dessus, je peux vous donner un peu d'informations.

Lorsque j'étais ministre, on travaillait sur les plans d'effectifs, c'était à peu près trois ans, puis on a décidé de faire une planification sur cinq ans. Et ce qu'on a fait comme constat, c'est qu'il y aurait trop de cardiologues, trop d'orthopédistes, trop de chirurgiens, et, à ce moment-là, les plans d'effectifs ont été revus. Et, lorsqu'on a revu les plans d'effectifs, on s'est rendu compte qu'il y a des régions, exemple, une région comme Laval, ils ne prévoyaient seulement que quelques spécialistes en gériatrie, et il y a des régions où ils mettaient un gériatre ou deux gériatres. Donc, on a revu les plans d'effectifs, et les plans d'effectifs sont maintenant en fonction d'avoir plus de gériatres. Donc, on crée des postes et, à partir de là, maintenant, on a demandé aux universités de combler ces postes.

Ça, c'est vrai en gériatrie, c'est vrai également en physiatrie, en rhumatologie. Donc, cette planification va faire que ça va devenir plus intéressant. Et les postes dans ces spécialités-là qui sont en surplus, qui étaient très populaires, sont en train de diminuer. Donc, je pense que le ministre doit continuer sur la même tendance ou à peu près, où on va s'organiser pour avoir un équilibre. Et, comme de fait, les plans d'effectifs doivent être ajustés en fonction des problématiques de notre société aujourd'hui. Juste pour vous donner un exemple, moi, je suis en bureau puis je vois des gens qui ont beaucoup plus besoin de physiatres que d'orthopédistes. Souvent, l'orthopédiste même va finir par l'opérer, régler le problème, nous les retourner. Puis, en physiatrie, bien c'est beaucoup plus les problèmes musculosquelettiques. Et cette tendance-là doit être continuée au Québec.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui, c'est tout à fait intéressant.

Une voix :

Mme Belleville (Sylvie) Oui?

Une voix :

Mme Belleville (Sylvie) : Oui. Merci. C'est tout à fait intéressant. Une préoccupation qu'on a, nous, puis c'est relié, c'est la formation des professionnels autres aussi.

C'est-à-dire que ce qu'on a réalisé — ça, c'est un travail qui a été fait par la table gériatrie du RUIS Université de Montréal — c'est que les professionnels, les gens qui vont s'occuper et qui vont travailler avec les personnes âgées dans les autres spécialités, hein, travailleur social, psychologie, bon, n'ont presque pas de formation en vieillissement, et finalement c'est des gens qui vont être amenés à travailler auprès des personnes âgées mais qui, dans leur cursus universitaire, n'auront presque pas eu de formation en vieillissement. Donc, on travaille très fort actuellement pour faire en sorte que les personnes qui sont en charge des formations professionnelles soient sensibilisées à ce problème puis qu'elles intègrent, dans le cursus usuel de formation, du contenu vieillissement. Ça, pour moi, c'est extrêmement important.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Je suis tout à fait d'accord avec vous. D'ailleurs, ce phénomène-là, on a commencé à le voir apparaître il y a quelques années.

Vous parliez du scientifique en chef. C'est le Dr Rémi Quirion, et puis lui-même est un spécialiste au niveau du cerveau, ça fait que je pense qu'il faisait la promotion. Puis la maladie Alzheimer en tout cas est depuis plusieurs années une priorité au Québec, c'est dans nos trois ou quatre sphères qu'on veut faire le plus de recherche. Ça fait que déjà je pense que le Québec est bien positionné.

En termes d'organisation de services, vous êtes à l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal, je pense que, même dans votre secteur à vous, il y a une transformation qui a été commencée il y a quelques années, entre autres, la notion… J'avais visité votre établissement à quelques reprises où il y avait plusieurs personnes qui étaient en ressources intermédiaires, qui étaient l'équivalent de ressources intermédiaires mais dans les lits de CHSLD. Je sais que vous êtes dans la recherche. À votre connaissance, est-ce que cette transformation-là a débuté, c'est-à-dire qu'on admet de plus en plus les gens profils CHSLD en CHSLD, ou ce n'est pas votre domaine?

Mme Belleville (Sylvie) : …je ne peux pas vous…

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Ça ne fait pas partie de mon domaine d'expertise.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Ah, O.K. Merci.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. On parlait également de technogériatrie.

La société la plus vieille au monde, c'est le Japon. Le Japon a comme caractéristique d'être une société fermée. En plus, le Japon ne veut pas accueillir beaucoup d'immigrants parce qu'ils veulent rester vraiment Japonais. En passant, c'est une caractéristique de la société japonaise. Et ce qu'on voit, compte tenu qu'ils ont peu d'enfants, une société vieillissante qui, en passant... décroissance de population assez importante, ils vont perdre plusieurs millions de personnes au cours des prochaines années, ça implique qu'il y a plusieurs personnes aînées, âgées, et il y a peu de personnes jeunes. Et eux autres ont développé plusieurs technologies pour justement diminuer l'hospitalisation et garder leurs gens à domicile.

Ma question : Vous êtes-vous intéressés à ce qui se fait au Japon pour voir : Y a-tu des bonnes pratiques qu'on pourrait partager avec eux autres? Et puis est-ce que c'est quelque chose qui pourrait être apporté ici, au Québec?

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui, on s'est… Évidemment, on a des liens avec les gens qui sont des champions dans le domaine des gérontechnologies.

On s'intéresse aussi à la Corée. La Corée aussi est très forte dans ce domaine-là, et on a beaucoup de liens avec eux. Le Japon fait des choses extrêmement intéressantes, pas juste en gérontechnologie d'ailleurs, mais aussi dans le domaine de cette espèce de jonction entre l'art, par exemple… et je sais que vous avez… Mme Blais a des intérêts pour ce type de question… mais entre l'art et les personnes âgées. Donc, on parlait tout à l'heure d'amener les personnes âgées dans les musées. Moi, j'ai pris connaissance, avec beaucoup d'intérêt, du programme de musées qui a été implémenté, par exemple, au Japon, en Australie, à New York, où on amène les personnes âgées dans les musées. Donc, ce n'est pas la gérontechnologie.

Mais tout ça pour dire que le Japon a effectivement des modèles extrêmement novateurs dont on s'inspire, absolument. Et…

Une voix :

Mme Belleville (Sylvie) : Oui. Mais ils ont… Par contre, il faut toujours adapter à la réalité culturelle des milieux, hein? C'est sûr que, quand on va examiner des modèles d'organisation dans des sociétés qui sont si différentes de la nôtre que le Japon, il faut comme un peu ajuster en fonction des réalités de notre propre milieu.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

• (17 h 50) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Je suis tout à fait d'accord avec vous. Actuellement, ce que l'on voit, maintenir une personne avec une incapacité physique à domicile, souvent il y a des adaptations. On peut donner plus de services.

Ce qui semble être le plus difficile à maintenir à domicile, c'est les troubles cognitifs, dont les troubles cognitifs importants. Et je voyais récemment, là… dans nos CHSLD, il y a une bonne partie de nos gens qui sont admis en CHSLD pour des problèmes de troubles cognitifs.

Vous avez dit tantôt qu'on peut travailler, mais il arrive à un moment donné que ça devient difficile de les garder à domicile. Vous, notre organisation des services pour les personnes âgées, est-ce que vous croyez qu'à un moment donné on va être capables de diminuer de façon extrêmement importante l'utilisation des CHSLD ou encore on peut penser qu'on va continuer à avoir besoin de CHSLD pour ces clientèles-là ou encore des maisons adaptées à leur condition — on parle de Carpe Diem — également au niveau des ressources intermédiaires et le maintien à domicile?

Mme Belleville (Sylvie) : Nous, ce qu'on observe en tout cas, c'est que, notre clientèle, on voit vraiment un accroissement des problèmes cognitifs.

Donc, ce qu'on pense, c'est qu'on ne va pas pouvoir… il y a un incompressible, si on veut. Si on veut que… Étant donné la façon dont le système est organisé actuellement, je ne pense pas qu'on n'aura plus besoin des CHSLD. Il y a toujours besoin… quand les gens sont très, très atteints, et ils ont besoin d'avoir un encadrement, bon, une structure qui permet de répondre à des besoins importants. Je pense que ce qu'on souhaite, et ce que je comprends, c'est… ce qu'on souhaite, c'est repousser le moment où ces gens-là vont arriver justement au point où… à un seuil au-delà duquel ils ne peuvent plus rester à domicile ou au-delà duquel les choses commencent à devenir à risque pour la famille, pour le proche aidant, pour la personne elle-même.

Il y a deux éléments, moi, je dirais. D'une part, je pense qu'on devrait essayer de faire en sorte que ce moment où les… Je pense qu'il y a des programmes, des façons de prévenir l'accroissement des difficultés cognitives, hein? Donc, on parlait des programmes de stimulation cognitive. On parle de l'activité physique, hein? Vous savez que l'activité physique a un effet favorable sur le cerveau, pas juste sur le coeur, pas juste sur le système musculaire, mais aussi sur le cerveau. On sait qu'il y a un certain nombre de programmes de stimulation cognitive ou plus globaux qui vont diminuer le déclin cognitif. Je pense qu'il faut travailler dans ce sens-là. Donc, ça, ce sont des programmes qui vont faire en sorte que le déclin cognitif va être moins important. Donc, on se dit : Peut-être que ça, ça peut être une avenue assez intéressante. Et puis bien, par ailleurs, bien il y a les programmes qui vont faire en sorte qu'on reconnaît qu'il y a des déclins cognitifs, puis on essaie de structurer l'environnement pour que, malgré ces problèmes cognitifs... bon, il y a les technologies ou il y a des systèmes d'aide qui font en sorte que la personne peut rester à domicile malgré qu'il y a des problèmes cognitifs.

Donc, c'est pour ça que je parlais : Oui, c'est vrai qu'il faut donner de l'aide au niveau des soins quand les personnes sont en perte d'autonomie, mais on pourrait aussi avoir une approche préventive. Il ne faut pas penser que ces problèmes sont nécessairement… qu'on ne peut rien y faire, parce que je pense qu'un des problèmes avec les personnes qui souffrent de maladie d'Alzheimer, c'est que les gens ont l'impression qu'il n'y a plus rien à faire.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon)  : Anecdotiquement, je pense, hier ou aujourd'hui, est sortie une revue Maclean's, The Brain, puis, l'avant-dernier article, ils interrogent des spécialistes, dont Dr Quirion puis Dr Serge Gauthier, puis on leur pose la question : Qu'est-ce qu'ils devraient faire? Puis il y a deux thèmes qui revenaient : la stimulation au niveau intellectuel — puis ça, il faut le dire aux gens, même si les gens sont atteints de cette maladie-là, il faut stimuler au niveau intellectuel — et également l'activité physique. Bon. Dr Gauthier rajoutait «un verre de vin rouge». Comme ça, c'est correct aussi. Mais je pense qu'il faut encourager nos gens. Puis, quand les gens sont malades, on a l'impression qu'ils vont se détériorer, mais il y a moyen de ralentir cette détérioration.

Je pense que c'est ça, l'objet qu'il faut qu'on travaille, tous ensemble. Puis, en passant, les principes que vous dites, on y croit tous puis on veut ça dans notre réseau de la santé. La seule question qu'il faut se poser, c'est : Comment on va le faire? Est-ce que l'assurance autonomie est le véhicule? L'assurance autonomie, en passant, les principes que vous avez dits, c'est ce qu'on croit. L'assurance autonomie a un autre volet qui est le volet financement, qui est un autre enjeu. Ça, c'est un autre enjeu qui est différent. La recherche, on y croit également parce que le Québec, on est vraiment dans les meilleurs, d'après moi, au monde, et on veut continuer à se maintenir dans les meilleurs au monde. Il faut investir de l'argent. Mais il y a l'organisation des services, puis ça, vous êtes quand même au Québec, depuis plusieurs années que vous pratiquez ici, au Québec, vous avez dû voir une transformation au cours des sept, huit dernières années. Il ne me semble pas que c'est… En tout cas, moi, je l'ai vu, comme clinicien. Il me semble que ça a évolué, entre autres nos modèles d'organisation de services, de prise en charge de ces gens. Je vais vous donner un exemple. Si on détecte... notre infirmière GMF va faire un test de dépistage au niveau de la mémoire, si on voit qu'il y a des problématiques, on va les référer au centre de gériatrie où ils vont être pris en charge par une équipe.

Je pense que c'est ça que vous préconisez également. Mais ça, actuellement, au Québec en tout cas, on a accès à ça pour la majorité des patients.

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui, tout à fait. Et puis je voulais aussi souligner, parce que vous parliez tout à l'heure de comment nous allons pouvoir supporter ça, par exemple les programmes de stimulation cognitive où… Et c'est là que je dis qu'il faut être peut-être innovant. Je suis d'accord qu'il ne faut peut-être pas qu'on mette la… bon, il faut penser, il faut être rationnel, il faut penser à combien ça va coûter, il faut… Mais je pense qu'il y a possibilité de faire des liens avec les centres communautaires, stimuler le bénévolat, etc.

Mais ce que je pense, c'est qu'il faut que ce soit, entre guillemets, coordonné, il faut qu'il y ait une volonté, il faut qu'on puisse dire : Voilà un panier, ou une possibilité, ou un menu, ou des… Et ça, il faudra que ce soit intégré dans le plan que mettront en place ces personnes pour les… que mettront en place les intervenants.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, il vous reste 2 min 30 s.

Mme Blais : Oui. Écoutez, je suis tout à fait d'accord avec vous. D'ailleurs, ça me fait penser à Saint-Hubert, un endroit que j'ai visité — j'oublie le mot précis, mais il y avait «art thérapeutique» — où on va chercher les personnes atteintes de maladie d'Alzheimer à la maison. C'est un centre de jour. Et là les gens coupent des carottes, des pommes de terre, ils font toutes sortes d'activités. Et, si on pouvait développer davantage… Je le sais, qu'à la Société Alzheimer de Montréal, on le fait à certains endroits, mais, si on pouvait développer davantage des endroits similaires qui font en sorte qu'on va cueillir la personne à domicile, ça permet aux proches aidants de pouvoir poursuivre ses activités quotidiennes, et cette personne-là… bien, ça retarde un peu l'évolution de la maladie et ça retarderait conséquemment le transfert de la personne dans un centre d'hébergement et de soins de longue durée.

Alors, s'il y en avait davantage, ça pourrait faire partie aussi du plan de cette assurance autonomie qui me semble… ça me semble évident, là. Vous êtes d'accord avec ça?

Mme Belleville (Sylvie) : Tout à fait. Puis je voulais aussi revenir à la question de l'individualisation.

Dans cette étude dont je vous parlais tout à l'heure, qui a eu lieu à Bordeaux, ce qu'ils ont fait, c'est faire… Parce qu'on parle d'individualisation au niveau de ISO-SMAF, là, au niveau des besoins de façon plus générale, mais on peut le faire aussi au niveau des activités de loisirs. Parce que ce qu'on a observé, par exemple, au niveau des troubles comportementaux de la démence, quand on offre des activités de loisirs qui plaisaient à la personne avant, on observe une réduction des symptômes qui sont bien plus importants que quand on impose une activité de loisirs, que, bon, c'est celle qu'on offre à tous les patients. Donc, c'est intéressant, parce que je pense que, même dans des choses qui paraissent «soft», là — et je pense que ce ne l'est pas — comme le loisir, il faut aussi avoir une approche qui est individualisée, qui est clinique, en un sens, parce qu'il faut considérer que l'activité de loisirs a un effet clinique, elle a un effet au niveau de la stimulation cognitive, au niveau de l'isolement social. Ça a aussi parfois un effet au niveau de l'activité physique parce que la personne se bouge, bouge et donc…

Donc, je pense qu'il faut réfléchir aussi à l'individualisation de ces activités-là. Ça peut être tout à fait intéressant, en fait. Et on peut peut-être avoir des effets très différents selon justement qu'on individualise ou qu'on n'individualise pas l'activité de loisirs.

Le Président (M. Bergman) : Pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée d'Arthabaska.

• (18 heures) •

Mme Roy (Arthabaska) : Moi, je ne suis pas une chercheuse ni une spécialiste du domaine, mais j'ai des observations. Je peux vous parler de ce que j'ai vu.

Bon. Je veux vous parler de la maison Carpe Diem puis je veux vous parler aussi de Victoriaville, la région de L'Érable-Arthabaska, dans leurs expériences. Si on regarde la maison Carpe Diem, Nicole Poirier, c'était une jeune fille qui avait décidé d'acheter le presbytère puis de recevoir des aînés chez elle, qui, de façon intuitive, puis avec du travail, puis avec des études, a développé une approche humaine et qui a été validée par la recherche. On est allé évaluer qu'est-ce qu'elle faisait, le rendre plus scientifique puis l'évaluer, puis les buts et les effets, si je ne me trompe pas. Elle a eu ses lettres de noblesse par les scientifiques.

Maintenant, Victoriaville et l'Hôtel-Dieu d'Arthabaska ont aussi développé une approche parce que ce sont les médecins qui ont décidé de se doter de bons soins pour garder les personnes à domicile, de soins palliatifs, puis ils ont des très bons résultats pour les personnes qui peuvent mourir à domicile comme elles le souhaitent. Mais ils ont aussi travaillé avec les chercheurs pour valider leurs approches puis pour les améliorer.

Mon problème, c'est que… bon, je sais que vous êtes intéressée à travailler de plus en plus avec le milieu puis de sortir de votre laboratoire, je mets ça entre guillemets, mais, comme me disait Nicole Poirier : Je suis bien fatiguée de recevoir chercheur après chercheur, ministre de la Santé après ministre de la Santé, puis que mon modèle soit recopié en Guadeloupe ou en France, mais pas ici. Il manque la validation des politiciens, je pense, à ces bonnes pratiques là. Mais ça, c'était un commentaire. Je fais passer un message.

Mme Belleville (Sylvie) : Vous êtes dans le bon lieu pour le passer.

Mme Roy (Arthabaska) : Oui, c'est un forum politique, on est un triangle : les chercheurs; le milieu, qui dispense les soins; et la lutte, un petit peu, à l'immobilisme qu'on doit faire, nous, les politiciens, parce qu'on se heurte toujours à : On faisait ça comme ça, il faudrait continuer, puis la lutte à la machine, qui est lourde. Le constatez-vous?

Mme Belleville (Sylvie) : Moi, je dirais, c'est intéressant parce que, quand j'ai travaillé… Il y a quelques années, j'ai voulu augmenter le transfert de connaissances des résultats de la recherche et j'ai fait un modèle du transfert de connaissances avec la recherche au centre, puis j'ai mis…

Bien, qui tourne autour de la recherche? Bien, il y a le citoyen, il y a le clinicien ou le professionnel puis il y a le décideur. Puis ce que je réalise, c'est que les chercheurs commencent par parler aux cliniciens parce qu'ils sont plus proches, puis souvent il y a des cliniciens qui ont été chercheurs, ou vice versa. Puis là ils commencent à parler un petit peu aux citoyens aussi, donc ils vont dans les résidences, ils font des conférences grand public, etc. Mais aller parler aux décideurs, ce n'est pas évident. Venir ici, là, pour un chercheur, ce n'est pas évident. Préparer un mémoire, ce n'est pas évident, on n'a pas été formés pour ça, je le disais tout à l'heure, mais je pense que c'est une étape extrêmement importante.

Comment vous, comme décideurs, vous allez prendre les meilleures décisions? Qu'est-ce qui va faire que vous allez vous sentir motivés et poussés à changer les choses? Bien, je pense qu'il faut que les chercheurs apprennent à vous parler.

Mme Roy (Arthabaska) : Moi, ça fait le tour de ce que je voulais vous entendre dire.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gouin, pour un bloc de quatre minutes.

Mme David : Merci, M. le Président. Bonjour, madame. C'est intéressant vraiment de vous entendre. D'abord, vous créez l'harmonie ici, dans cette pièce, c'est formidable, et puis, deuxièmement, moi, j'apprends beaucoup en vous écoutant, puis, troisièmement, il y a une petite capsule d'optimisme dans ce que vous amenez. Mais ça ne m'empêchera pas de vous soulever quand même une couple d'inquiétudes que j'ai en vous écoutant.

Vous dites : Il y a des conditions qui entraînent parfois l'institutionnalisation des personnes. Bon, il y a tout le côté des pertes cognitives puis il y a aussi des personnes très âgées. Vous avez raison de dire que, quand on parle des gens qui ont entre 65 et 80 ans et puis des gens qui, maintenant, puis il y en a beaucoup, hein, ont plus de 80 ans, on parle un petit peu de deux générations, c'est vrai. Donc, vous parlez des conditions qu'ils précipitent puis vous parlez du fardeau perçu par les proches aidantes. Mais en tout cas, par expérience puis pour avoir jasé avec pas mal de monde, il y a un vrai fardeau, hein? Il y a peut-être des fardeaux perçus, mais il y a des vrais fardeaux. Moi, j'ai une petite crainte. C'est qu'à force de vouloir — et c'est correct, là — maintenir les gens à domicile, y compris des gens très âgés, y compris des gens qui ont peut-être certaines pertes cognitives, sur qui on va vraiment compter pour s'en occuper? J'ai beaucoup de misère à croire que subitement l'État ou même des entreprises d'aide domestique vont faire du sept jours sur sept, 24 heures par jour, chez les gens. En fait, je n'en crois rien.

Donc, forcément, c'est la famille, ce sont les enfants, une soeur aussi âgée, quasiment, que la personne. Et là, moi, ma crainte, c'est : Mais à quel prix finalement allons-nous vouloir à tout prix laisser des personnes chez elles? Puis, parmi ces personnes, bien, des gens assez seuls, des gens qui vivent dans la pauvreté, dans des logements pas toujours décents, franchement. Donc, comment vous voyez ça et comment voyez-vous, là-dedans… Jusqu'où, vous, recommandez-vous qu'on aille dans le rôle qu'on accorde aux proches aidantes? Où est-ce que ça commence, mais surtout où est-ce que ça doit finir?

Le Président (M. Bergman) : Dre Belleville.

Mme Belleville (Sylvie) : Oui. Le terme «perçu» a l'air un peu péjoratif, hein, mais c'est parce que c'est vrai que le fardeau qu'on peut avoir est très… Ce qu'on peut supporter varie considérablement d'une personne à une autre. Et puis je pense que ça aussi, ça doit être respecté. Ce qu'une personne accepte de faire et se sent capable de faire, bien une autre personne ne se sentira pas capable de le faire.

Ça fait que, quand on dit «perçu», c'est qu'on reconnaît aussi que la subjectivité de la personne est importante puis qu'en quelque part, s'il n'y a pas quelqu'un qui va mesurer de façon objective le fardeau, ça va toujours être une question subjective et ça doit rester comme ça. Pour moi, c'est important. Je suis psychologue. Pour moi, la subjectivité, elle est essentielle. Donc, c'est pour ça que souvent on va utiliser ce terme-là, même si c'est clair qu'il y a un fardeau. Puis il est objectif, le fardeau, mais comme il est, en fin de compte, très subjectif en fonction de la capacité qu'on a à l'assumer, donc.

Et par ailleurs, par rapport à jusqu'où on va aller, bien, écoutez, moi, je pense que nous, comme institution, on ne croit pas que les gens vont rester à domicile tout le temps puis que les soins de longue durée en institution vont disparaître de la carte, là, c'est évident, en tout cas pas avant bien, bien, bien longtemps. Ça va rester une composante très importante, puis il va falloir être sûr que les gens ne se sentent pas coupables quand ils prennent la décision d'aller en institution, ce qu'on voit souvent. Souvent, les proches aidantes — moi, j'ai beaucoup travaillé aussi avec des proches aidants — elles nous parlent beaucoup du sentiment de culpabilité qu'elles ont eu quand est venu le moment de prendre la décision d'institutionnaliser un proche.

Donc, il ne faut pas non plus tomber là-dedans. Ça, c'est clair.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Dre Belleville, merci d'être ici avec nous et de partager votre expertise avec nous, on apprécie beaucoup.

Collègues, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux jusqu'à jeudi le 7 novembre 2013, après les affaires courantes, afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous. Bonne soirée, collègues.

(Fin de la séance à 18 h 7)

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