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Version finale

40th Legislature, 1st Session
(October 30, 2012 au March 5, 2014)

Tuesday, February 18, 2014 - Vol. 43 N° 78

Consultations particulières et auditions publiques sur les conditions de vie des adultes hébergés en centre d’hébergement et de soins de longue durée


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux (AQESSS)

Centre hospitalier gériatrique Maimonides

Ordre professionnel des diététistes du Québec (OPDQ)

Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ)

Fédération québécoise du loisir en institution (FQLI)

Vérificateur général

Société canadienne de la sclérose en plaques

Intervenants

M. Lawrence S. Bergman, président

Mme Diane Gadoury-Hamelin

Mme Marguerite Blais

Mme Stéphanie Vallée

M. Yves Bolduc

Mme Jeannine Richard

Mme Suzanne Proulx

Mme Hélène Daneault

M. Pierre Reid

*          M. Jean-Paul Cadieux, AQESSS

*          Mme Diane Lavallée, idem

*          Mme Sonia Bélanger, idem

*          M. Mario Morand, idem

*          Mme Barbra Gold, Centre hospitalier gériatrique Maimonides

*          Mme Karen Flam, idem

*          M. Jacques Labrecque, idem

*          Mme Rosalie Dion, idem

*          Mme Anne Gagné, OPDQ

*          Mme France Bernatchez, idem

*          Mme Lucie Tremblay, OIIQ

*          Mme Ginette Bernier, idem

*          Mme Charlène Joyal, idem

*          Mme Madeleine Lauzier, idem

*          Mme Anne-Louise Hallé, FQLI

*          Mme Lise Charbonneau, idem

*          Mme Louise Poirier, idem

*          M. Michel Samson, Vérificateur général par intérim

*          Mme Marie-Claude Ouimet, bureau du Vérificateur général

*          M. Louis Adam, Société canadienne de la sclérose en plaques

*          Mme Nadine Prévost, idem

*          M. Serge Loiselle, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures deux minutes)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Collègues, la commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et auditions publiques sur les conditions de vie des adultes hébergés en centre d'hébergement et de soins de longue durée.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Non, M. le Président.

Auditions (suite)

Le Président (M. Bergman) : Alors, collègues, on reçoit maintenant l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux.

Bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms, vos titres, et le prochain 10 minutes, c'est à vous.

Association québécoise d'établissements de
santé et de services sociaux (AQESSS)

M. Cadieux (Jean-Paul) : Alors, M. le Président, mesdames, messieurs de la commission, on vous remercie d'abord de nous permettre d'exposer notre point de vue sur la qualité de vie des personnes âgées en CLSC ce matin. Je vais présenter les personnes avec qui je suis à la table ici. J'irais à ma droite, Mme Sonia Bélanger, qui est directrice générale du CSSS du Sud-Ouest—Verdun, et elle va s'exprimer généralement au nom de l'ensemble des établissements; immédiatement à ma gauche, Mme Diane Lavallée, probablement que tout le monde connaît bien, qui présentera l'essentiel de notre présentation; et, à la gauche de Mme Lavallée, M. Mario Morand, qui est directeur général des CSSS des Sources et du Haut-Saint-François en Estrie. Les équipes de M. Morand on fait preuve de beaucoup d'innovation, elles ont déployé des efforts considérables pour améliorer les conditions de vie des personnes hébergées dans leurs établissements. C'est pourquoi on a tenu à ce qu'il se joigne à nous et partage son expertise.

Alors, l'association que nous représentons compte 125 établissements publics, soit l'ensemble des centres hospitaliers, les centres de santé et de services sociaux, communément appelés les CSSS, les centres hospitaliers universitaires et affiliés ainsi que les CHSLD. Notre mission, c'est : rassembler, représenter et soutenir ses membres en agissant comme chef de file et acteur important pour assurer la qualité des services et la pérennité du réseau de la santé et des services sociaux. Cela, elle le fait au bénéfice de la population. Les établissements membres de l'AQESSS gèrent en toute transparence plus de 17 milliards de dollars et emploient plus de 200 000 personnes.

Dans notre présentation, ce matin, on va, premièrement, insister sur le fait que les CHSLD s'inscrivent dans une culture d'innovation et d'amélioration continue et qu'ils agissent en toute transparence. Ils sont appuyés dans leurs tâches par du personnel dévoué et compétent. Les employés des CHSLD constituent ainsi l'âme de nos organisations. Quotidiennement, ils sont sur la ligne de front. Ils ont besoin d'être davantage écoutés, de se sentir fiers, reconnus, valorisés et soutenus, cela parce qu'ils accomplissent dans un contexte extrêmement difficile un travail qui n'est rien de moins qu'extraordinaire. Alors, je laisse maintenant le soin à notre directrice générale de l'association, Mme Diane Lavallée, de vous faire part de nos principales observations.

Le Président (M. Bergman) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Merci. M. le Président, Mmes, MM. les députés, je vous remercie de vraiment nous accueillir et nous permettre de présenter notre point de vue sur les conditions de vie des résidents en CHSLD.

La plupart d'entre vous savent que les services aux aînés sont depuis longtemps, à l'AQESSS, au coeur de nos priorités. Nous y avons consacré, d'ailleurs, plusieurs de nos travaux, et nos recommandations ont su rallier l'ensemble des partenaires en cette matière. Je pense que notre expertise ne fait pas de doute.

En guise d'illustration, rappelons que nos membres hébergent près de 34 000 personnes dans leurs installations et que leur personnel prodigue quotidiennement les meilleurs soins aux plus vulnérables de notre société. J'insiste aussi pour dire que c'est du personnel dévoué. En tant qu'infirmière, je vous dirais que j'ai moi-même oeuvré au sein de différentes équipes de soins. Je suis en mesure de vous affirmer que, quelle que soit la personne à laquelle on doit apporter soutien et confort, cela se fait avec l'humanité qui nous habite, en y mettant toutes nos compétences et toute notre compassion. Cela est vrai aussi dans des unités, autant que les soins intensifs, sur les étages des hôpitaux, dans les urgences, que dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée.

J'ai aussi, pendant sept ans, avant d'arriver à l'AQESSS, été Curatrice publique. J'avais donc la responsabilité de représenter légalement plus de 13 000 personnes inaptes parmi les plus vulnérables de notre société. Elles étaient toutes bénéficiaires de soins ou de services offerts par les établissements du réseau et la plupart d'entre elles étaient hébergées — il y en avait près de 4 000 — dans les CHSLD ou dans des ressources intermédiaires. Ces personnes inaptes, aux prises avec de graves problèmes cognitifs, des déficiences, des maladies mentales, souvent laissées pour compte par leurs familles et leurs proches, trouvaient confort et dignité auprès du personnel des CHSLD qui s'occupaient d'eux comme d'un parent. J'en ai visité des dizaines, pour ne pas dire des centaines, de ces établissements et je peux témoigner de la qualité du personnel dévoué qui y travaille au quotidien. Oui, il y a des situations désolantes, qu'on souhaiterait éviter bien sûr, mais ces cas isolés ne peuvent être généralisés.

Cette commission devrait donc saisir l'occasion de rendre hommage à tout le personnel des CHSLD pour l'humanisme, leurs interventions, pour leur compassion et pour leur dévouement quotidien. J'insiste parce que le message que colportent certains médias et certains groupes sur les soi-disant mauvais traitements dont seraient victimes nos résidents n'a pour effet que de démoraliser et de démobiliser les équipes : les équipes d'infirmières, d'auxiliaires, de préposés, y compris les gestionnaires.

Il y a lieu ici d'effectuer un rappel à l'ordre et de faire certaines mises au point. Rappelons, d'ailleurs, que les milieux d'hébergement publics ont adopté des mécanismes de contrôle très sévères qui permettent de prévenir des situations jugées à risque et d'intervenir en cas de besoin. Ils appliquent une politique de tolérance zéro pour tout manquement à la sécurité des résidents ou à la qualité des services qui leur sont offerts. Ne pas appliquer de tels principes peut conduire à des sanctions sévères, voire au congédiement des personnes fautives, et ça se produit.

Concernant les allégations de maltraitance contre les résidents, il serait pertinent de se référer aussi au rapport d'activités de la ligne Aide Abus Aînés qui a été publié en mars… les rapports ont été publiés en mars 2012, dans lequel il est précisé que, tous milieux de vie confondus, les personnes maltraitantes sont généralement des proches de la personne vulnérable. C'est très malheureux de constater qu'effectivement leurs enfants le sont dans 35 % des cas, puis les conjoints, les autres membres de la famille, des amis ou des voisins dans un autre 35 % de cas rapportés.

• (10 h 10) •

Les plaintes de maltraitance liées à un intervenant, un préposé ou un professionnel représentent, quant à elles, moins de 3 % du total, mais, bien sûr, on considère que c'est déjà trop, et c'est pourquoi nous considérons qu'il est de notre devoir de prévenir et d'assurer la sécurité des quelque 30 000 personnes qui sont hébergées dans nos murs. Pour cela, nous recommandons notamment qu'il soit possible de lever le secret professionnel dans certaines situations où un employé serait témoin de gestes de maltraitance ou d'exploitation envers une personne aînée.

Nous ne répéterons jamais assez à quel point le personnel des CHSLD a tout autant à coeur la qualité de vie des résidents que l'ensemble de la population. Par ses soins et sa présence auprès d'eux, il assure surveillance, sécurité et confort. Les hommes, les femmes qui habillent, accompagnent, lavent, soignent, divertissent, animent, écoutent et apaisent les plus vieux d'entre nous veillent à ce que la vie en résidence se vive comme un passage agréable et, bien sûr, le plus souvent possible, rassurant. Nous estimons essentiel que cela doit être dit, doit être aussi répété.

Maintenant que toutes ces mises au point ont été faites, il y a lieu de faire connaître publiquement à quel point, depuis une vingtaine d'années, la population hébergée dans les CHSLD a changé de visage. Aujourd'hui, quatre résidents sur 10 ont plus de 85 ans. Ce sont des personnes en grande perte d'autonomie. Ils requièrent plusieurs heures de soins par jour. Plus marquant encore, huit sur 10 présentent d'importantes pertes cognitives. Une clientèle, donc, plus âgée, en grande perte d'autonomie, qui représente de nombreux défis pour les équipes soignantes. Il ne s'agit plus uniquement de prodiguer des soins de base et de confort, on parle plutôt de soins infirmiers, de services médicaux et professionnels en ergothérapie, en physiothérapie, en nutrition. Les soins offerts sont donc de plus en plus complexes. L'offre de services s'est ainsi beaucoup spécialisée, et le personnel se compose maintenant d'équipes multidisciplinaires appelées à intervenir non seulement auprès des personnes hébergées, mais des proches.

On ne le cachera pas, le CHSLD est, bien sûr, un milieu de vie, mais c'est aussi de plus en plus devenu un milieu de fin de vie. Milieux de vie, milieux de soins et milieux de fin de vie, les CHSLD font face à une demande et une pression croissantes pour répondre tant aux besoins des résidents en lourde perte d'autonomie qu'aux attentes aussi de leurs proches. Ils doivent relever ces défis avec des ressources qui sont limitées. Ça n'empêche pas les gestionnaires et le personnel d'innover pour améliorer les services. Il faudrait rapidement que l'offre de soins et de services en hébergement soit, donc, adaptée aux nouveaux types de clientèles qui y résident. Ça fait partie de nos recommandations.

Dans nos établissements, on accueille également des clientèles âgées désinstitutionnalisées, des hommes, des femmes qui ne parviennent plus à vivre dans la communauté, et ce, même avec des services. Ces aînés sont aux prises avec des besoins d'assistance complexes et éprouvent des difficultés relationnelles, comportementales qui rendent difficile la cohabitation avec les autres résidents. Le CHSLD public est le seul milieu de soins qui offre des services 24 heures, et ce, sept jours par semaine. Toute autre alternative résidentielle n'offre pas ce type de services en continuité et en intensité, d'où la prise en charge par nos établissements de cette clientèle qui se retrouvait autrefois en hôpital psychiatrique.

Malgré cette offre de services en continu à des clientèles très peu autonomes, plusieurs établissements sont aux prises avec la vétusté de plusieurs de leurs installations. Il est peut-être utopique de demander qu'un milieu de vie institutionnel devienne un véritable chez-soi, mais des efforts doivent être consentis pour qu'il puisse devenir un milieu de vie substitut significatif, agréable et adapté.

Par exemple, étant donné que notre clientèle est de plus en plus en situation de fin de vie, il est apprécié et souhaité par les familles d'avoir accès à des lieux physiques qui favorisent l'intimité et l'accompagnement respectueux des derniers moments de leurs proches. Les chambres à plusieurs lits ne permettent pas ce type d'intimité. Et la mise aux normes des actuels CHSLD a justement pour but de réduire le nombre de lits par chambre et de ne garder que des chambres individuelles et quelques-unes doubles.

Nous préconisons l'aménagement de milieux de vie sécuritaires, personnalisés, empreints d'une atmosphère familiale, organisés en fonction de petits regroupements sous forme d'îlots d'environ 10 à 15 lits. De plus, le regroupement de clientèles qui présentent des profils de besoins similaires permet au personnel de développer des compétences, des connaissances spécifiques pour mieux intervenir et assurer une réponse qui est adaptée. La possibilité d'avoir un accès extérieur sécurisé est aussi recommandée pour permettre aux résidents errants de circuler à volonté dans un espace agréable et sécuritaire.

Toutefois, malgré l'importance de rénover et d'adapter nos installations aux nouvelles clientèles, nous apprenions en septembre dernier que l'enveloppe consacrée à la modernisation de nos installations allait être amputée de 25 %, et ce, jusqu'en 2017‑2018. Cette décision aura pour effet de retarder la réalisation de milieux adaptés aux clientèles plus âgées en perte lourde d'autonomie. Pensons notamment à la conversion de chambres doubles en chambres privées. Nous souhaitons donc que les programmes fonctionnels et techniques qui sont associés à la modernisation des lieux physiques en CHSLD soient réalisés à court terme.

En terminant, nous croyons qu'avec l'instauration prochaine de la caisse autonomie, il deviendra impératif de réfléchir à l'avenir de l'hébergement public en proposant des actions qui ne sont pas uniquement l'apanage du réseau de la santé et des services sociaux, mais qui relèvent également de l'engagement de toute une société à l'égard de sa population âgée en perte d'autonomie. Nous sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions. Je vous remercie

Le Président (M. Bergman) : Merci. M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul) : M. le Président, vous excuserez une omission que j'ai faite au début. J'ai présenté mes collègues, mais j'ai oublié de me présenter. Alors, Jean-Paul Cadieux, je suis deuxième vice-président à l'AQESSS et je suis président du conseil d'administration du CSSS du Coeur-de-l'Île, à Montréal.

Le Président (M. Bergman) : Merci…

M. Cadieux (Jean-Paul) : Alors donc, je suis ici principalement comme deuxième vice-président, mais j'aurais peut-être des commentaires à faire comme président d'établissement.

Le Président (M. Bergman) : Merci, M. Cadieux. Vous êtes toujours le bienvenu. Alors, maintenant, pour le bloc ministériel, Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Alors, merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, messieurs, très heureuse de vous accueillir afin que vous puissiez nous faire part de vos préoccupations et de votre éclairage.

Dans votre mémoire, on remarque que vous déplorez, naturellement, au cours des dernières années, les campagnes, un peu, de dénigrement qu'on a pu observer, en tout cas des éléments qui ont été cités publiquement dans des situations qui se sont présentées dans des CHSLD. Et puis vous nous dites aussi que souvent cette image-là est tronquée de la réalité et que naturellement ça a des effets dévastateurs également sur les clientèles elles-mêmes, sur les familles qui s'inquiètent. Ça inquiète beaucoup les familles qui ont des gens qui sont en situation d'hébergement et le personnel, naturellement, aussi qui oeuvre dans ces établissements-là parce que, je pense que vous l'avez mentionné, vous avez des gens qui sont très dévoués et qui travaillent auprès des personnes vulnérables, et, quand ces choses-là se produisent, bien, naturellement, ça rejaillit sur eux aussi, et ça peut être des éléments assez démotivants.

Alors, pouvez-vous nous en parler un peu plus, comment… À quoi vous associez cette situation-là? Et puis, de l'autre côté de la médaille, il y a sûrement des bons coups. On en a entendus de certains groupes qui sont venus nous rencontrer jusqu'à maintenant. Donc, il y a certains bons coups qui sont là. Naturellement, on les médiatise peut-être un peu moins. Alors, j'aimerais vous entendre sur ce sujet-là.

Le Président (M. Bergman) : M. Cadieux… Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Oui, il est clair qu'il y a beaucoup de groupes à la défense des droits des aînés, qu'on salue d'ailleurs, parce que, oui, nos aînés ont besoin d'avoir beaucoup de groupes en mesure de prendre leur défense, bien que plusieurs d'entre eux sont capables de le faire eux-mêmes aussi. Ce n'est pas parce qu'on est âgés qu'on est tous inaptes, incapables de se défendre.

Moi, je pense qu'aussi ce qu'il faut voir, c'est qu'une mauvaise nouvelle, ça se répand beaucoup plus vite qu'une bonne, et les médias sont avides de ces mauvaises nouvelles. Un cas d'abus, un cas malheureux est toujours un cas de trop, et il est clair que de les mettre de l'avant fait en sorte que ça donne l'impression que l'ensemble de nos CHSLD sont remplis de cas de ce même type. Donc, il ne faudrait pas faire en sorte qu'un cas d'exception devienne une généralité ou soit perçu comme tel parce qu'effectivement…

On a eu même l'occasion d'échanger avec certains groupes sur certaines sorties qui ont été faites. Et je pense que c'est important de rappeler que les gens ne veulent pas démobiliser le personnel qui travaille auprès des personnes vulnérables, mais l'effet que ça a, c'est un effet très démobilisant. Parce que je vous dirais que la plupart des employés qui se lèvent le matin pour venir travailler dans les CHSLD, ce qu'ils veulent, c'est d'offrir le mieux d'eux-mêmes aux personnes qui sont, pour eux, l'extension de leur famille. Donc, d'entendre publiquement, médiatiquement, de façon continue que ces gens-là font de la maltraitance, abusent des personnes, sont incompétents, je vous dirais que ça a un effet tellement démobilisant puis tellement inquiétant sur les familles et les autres résidents aussi qui ne sont pas souvent visés, des fois, par les cas pour lesquels on a eu une médiatisation.

Donc, moi, je pense qu'il faut être vigilant et prudent. Je pense que c'est un appel à toute la société. On n'a pas à minimiser et à taire des cas qui sont déplorables. Par contre, on n'a pas, je pense, à en faire à outrance une promotion qui ferait en sorte qu'on a l'impression que c'est généralisé dans nos CHSLD. Parce que, vous savez, c'est difficile d'attirer puis de retenir des personnes, c'est difficile d'attirer des gens pour venir travailler dans les CHSLD. Ce n'est pas tout le monde qui veut travailler dans les CHSLD. Par contre, on a des cas de gens qui y ont passé leur vie puis qui sont heureux. On pourra vous en donner un exemple tout à l'heure. Moi, je pense qu'il faut être prudent. Demain, on a besoin de gens. Il y aura de plus en plus de personnes âgées qui auront besoin de services en CHSLD ou en soins à domicile. Donc, il faut encourager les gens qui voudront offrir des services auprès de cette clientèle-là.

Puis des bons coups, oui, il y en a. Les gens s'ingénient à en faire régulièrement. On a des gens qui offrent des services dans des appartements. Il y a eu des ententes, notamment l'Office municipal d'habitation puis le CSS Arthabaska-Érable avec les autorités municipales. Ils ont offert des services spécifiques dans les habitations à loyer modique pour permettre aux gens de rester dans leur résidence et ne pas venir dans des CHSLD, et ça a changé la vie des gens.

On a un hôpital, l'Hôpital Sainte-Anne, dans le West Island, qui met à la disposition des usagers les nouvelles technologies, Skype, pour les rapprocher de leurs petits-enfants, pas pour faire en sorte que les enfants ne viennent plus les visiter puis leur parlent par le biais d'un iPad, mais ceux qui habitent trop loin, qui n'ont pas la chance de contacter souvent leurs personnes proches, bien, d'utiliser les nouvelles technologies pour les rapprocher. Il y a des programmes de soins de vie qui sont utilisés à l'institut gériatrique de Sherbrooke, qui sont étendus maintenant dans plusieurs de nos CSSS. Il y a toutes sortes d'initiatives que les établissements mettent de l'avant pour répondre aux besoins de la personne en perte d'autonomie.

Je vais donner la parole à Mme Bélanger, qui va aussi vous témoigner comment du personnel qui travaille dans un de ses CHSLD est dédié aux personnes et aime son travail. C'est peut-être une anecdote, mais je pense que ça en dit long sur la motivation des gens.

• (10 h 20) •

Le Président (M. Bergman) : Mme Bélanger.

Mme Bélanger (Sonia) : Oui. Alors, bonjour. Je suis directrice générale du CSSS Sud-Ouest—Verdun. Le CSSS Sud-Ouest—Verdun, c'est le plus gros CSSS à Montréal avec l'hôpital de Verdun, sept centres d'hébergement, trois CLSC. Dans les sept centres d'hébergement, nous avons 1 200 places pour les résidents. Et je suis entrée en fonction il y a 18 mois et je suis arrivée, donc, en plein été. Ce n'est pas l'idéal, hein, quand on arrive dans une organisation, d'arriver à la dernière semaine de juillet, mais mon entrée en fonction était prévue à ce moment-là, et j'ai donc commencé ma tournée de mes installations par les centres d'hébergement.

Au lieu d'aller à l'hôpital, je me suis consacrée, la première semaine, à faire la tournée des centres d'hébergement et, je vais vous dire, j'ai trouvé là des situations extraordinaires, des gens extrêmement heureux au travail. Et, à la première journée, je me suis aventurée dans la cuisine de la cafétéria d'un de nos centres d'hébergement. Un employé s'est approché de moi, il m'a dit : Bonjour, vous êtes la nouvelle directrice générale? On a entendu parler de votre arrivée. J'ai dit : Oui, ça me fait plaisir de vous rencontrer. Il dit : Madame, je vous souhaite d'être aussi heureuse dans votre travail que je le suis, moi, ici, au centre d'hébergement. Je lui ai demandé quel était son nom, et cette personne-là, elle m'accompagne dans mes tournées parce que je le cite constamment. C'est un exemple, pour moi, d'un employé qui ne travaille pas en service direct à la clientèle, il est à la cuisine, travaille depuis 35 ans à faire ce travail avec passion, avec coeur.

Alors, c'est une anecdote, c'est un témoignage simple, mais, au-delà de ce témoignage, dans le fond, ça vient démontrer tout le travail qui a été fait depuis plusieurs années pour que, dans nos centres d'hébergement, l'approche milieu de vie soit constamment améliorée, déployée, et ça démontre aussi que cette approche milieu de vie, bien, elle est partagée par un ensemble d'employés. On a parlé tantôt des professionnels, des infirmières, des professionnels de la santé, des préposés aux bénéficiaires, mais aussi des autres catégories d'employés.

Je voudrais aussi vous mentionner que vous avez certainement dans votre famille peut-être aussi des gens proches qui sont eux-mêmes hébergés dans les centres d'hébergement publics. C'est la même chose pour moi, pour mon père, qui n'est pas dans mon établissement. Et je suis confiante envers ce centre d'hébergement. Puis, s'il arrive des événements, parce qu'il peut en arriver, des chutes, des erreurs de médicaments, mais au moins j'ai confiance en l'institution, et cet élément-là est extrêmement important.

Vous avez aussi peut-être, dans vos familles, de vos frères, belles-soeurs, enfants qui travaillent comme préposé aux bénéficiaires, ou comme infirmière, ou comme professionnel de la santé, et leur motivation, le matin, je suis à peu près convaincue, ce n'est pas d'aller faire un travail qui est exécrable, leur motivation, elle n'est pas là, leur motivation, c'est de faire un travail extraordinaire.

Et je termine mon intervention en mentionnant que l'effet médiatique, sur des situations qui sont déplorables, bien sûr, a un effet encore plus grand sur l'ensemble des employés de notre réseau. Et, comme directrice générale, je peux vous dire qu'à tous les jours je reçois des courriels, des cartes de remerciement pour toutes sortes de petites actions, et les gens sont, en général, très satisfaits des soins. Il faut être vigilant — on aura l'occasion d'en reparler plus tard — parce que c'est des clientèles vulnérables, mais, de façon générale, moi, je suis très fière de m'associer au centre d'hébergement de mon CSSS.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Merci. Bien, en tout cas, je suis contente aussi de vous avoir entendue tantôt, Mme Lavallée, quand vous avez dit que vous approchiez cette présence-là à la commission comme étant à la recherche de moyens d'innovation, en tout cas, et d'inspirer de bonnes pratiques. Je peux vous dire que c'est l'esprit dans lequel on a abordé cette commission-là, d'ailleurs.

Vous nous avez parlé aussi, dans votre mémoire, qu'avec l'instauration prochaine de la caisse d'assurance autonomie ça va devenir impératif que de réfléchir à l'avenir de l'hébergement public au Québec dans un continuum de soins, en proposant des actions qui ne sont pas uniquement, là, l'apanage du réseau de la santé. Vous avez parlé que ça devrait devenir une responsabilité de tout l'ensemble de la société. Pouvez-vous élaborer un peu sur comment vous voyez cet élément-là de votre mémoire?

Le Président (M. Bergman) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Oui, puis je laisserai M. Morand vous parler comment ça se traduit concrètement. Nous, c'est clair qu'on pense que le fait qu'on veuille accentuer les services à domicile pour répondre aux besoins de la population qui désire rester chez eux, il y a un gros défi là. Et d'offrir les services et s'assurer que seules les personnes qui sont en grande, grande perte d'autonomie se retrouvent dans les CHSLD, c'est sûr que ça va appeler un grand changement. Quand on interpelle la société, on se dit, bon, il y a le municipal, tu as les organismes communautaires de la communauté, de la région concernée qui doivent être mis à partie pour offrir à nos personnes aînées les services qu'elles ont besoin dans la communauté. Et je vais laisser la parole à M. Morand, qui peut vous traduire comment, même déjà, en bonne partie, ça se concrétise à l'intérieur de son CSSS.

Le Président (M. Bergman) : M. Morand.

M. Morand (Mario) : Alors, merci. Moi, je suis directeur général de deux CSSS dans l'Estrie, le CSSS du Haut-Saint-François et le CSSS des Sources, là, à Asbestos. On a mis de l'avant, voilà une quinzaine d'années, un programme assez soutenu au niveau du soutien à domicile, et les résultats sont au rendez-vous, puis c'est là qu'on parle de redéfinition de la mission d'hébergement. En l'espace de 15 ans, on a réduit de moitié le nombre de lits d'hébergement sur le territoire. On a réduit de 75 lits, et il n'y a absolument aucune liste d'attente actuellement, puis la clientèle n'est pas placée chez les voisins, elle est prise en charge par notre communauté.

La façon qu'on a travaillé, naturellement, c'est l'intensité du soutien à domicile, c'est aussi élargir pour rejoindre la clientèle, mais surtout développer des partenariats avec les résidences pour personnes âgées. Et là j'insiste là-dessus, c'est le secret, à mon avis, pour l'avenir, c'est-à-dire que des gens choisissent de s'en aller vers des résidences de personnes âgées, c'est une forme de transition, mais on s'aperçoit qu'on est capables de les maintenir dans ces résidences-là jusqu'à leur fin de vie sans nécessairement avoir recours à l'hébergement public. Comment ça se fait? Mais c'est en… Eux autres assument le gîte et le couvert avec le bail qu'ils ont, puis c'est nos ressources du CSSS, qui normalement vont à domicile, mais vont dans ces résidences-là et donnent les services intensifs requis.

Actuellement, dans notre territoire, par exemple dans la MRC des Sources, on a 24 personnes qui sont maintenues dans ces résidences-là, qui ont le profil de l'hébergement. Puis ces gens-là ne veulent pas aller en hébergement, veulent… Mais on a des auxiliaires familiales et sociales qui sont présentes sept jours sur sept, 12 heures par jour dans ces résidences-là pour prendre soin de ces clients-là. Le coût est assez important, mais il est trois fois moindre qu'il l'est en hébergement. Donc, on est gagnants comme communauté.

Puis ces gens-là, c'est là qu'ils veulent… Ces personnes-là, il n'y a pas personne qui est maintenu dans ces résidences-là contre leur gré. C'est ça qu'ils veulent. Ceux qui vont venir en hébergement, bien ça va être davantage des gens qui ont des troubles de comportement importants, puis là, à ce moment-là, ils deviennent un handicap pour les autres de la résidence. Puis là, à ce moment-là, on les prend en charge puis on trouve une façon de les intégrer dans nos centres. Mais, lorsqu'il n'y a pas de trouble de comportement associé à leur perte d'autonomie, à ce moment-là, on peut aller très loin dans le maintien à domicile, dans ces résidences-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Merci, M. le Président. Dans votre présentation, vous avez parlé aussi d'horaires atypiques. J'ai remarqué que vos gens, vos auxiliaires ont un horaire, là, pas nécessairement de 8 h 30 à 3 h 30, 4 heures. Il y a un horaire sept jours-semaine, 12 heures par jour — vous avez mentionné ça — pour être capables, justement, de répondre à des besoins, là, qui ne sont pas toujours évidents, là, entre 8 h 30 et 4 heures, disons. Est-ce que je me trompe? C'est votre réalité?

Le Président (M. Bergman) : M. Morand.

• (10 h 30) •

M. Morand (Mario) : Bien, c'est exactement ça. On a organisé avec le syndicat des horaires ajustés pour nos personnels. Puis c'est un deux chiffres par jour, deux quarts de travail par jour, sept jours sur sept, pour prendre en charge... Parce que ces gens-là, il faut les aider à se lever, il faut les aider à s'habiller, à faire leur hygiène, les amener à la salle à manger, les accompagner une partie de la journée. Puis, le soir, il faut les préparer au coucher. Donc, dans un horaire de 12 heures, il y a peut-être une couple d'heures où on n'est pas présents, puis c'est le personnel de la résidence qui fait la surveillance, mais, le reste du temps, on est présents. Puis l'entente qu'on a avec la résidence, c'est la surveillance de nuit. On dédommage la résidence pour la surveillance de nuit, puis, pour les soins, c'est nous qui s'en occupons.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Merci, M. le Président. Dans les groupes qui sont venus nous présenter, on a entendu plein de choses, mais il y a des éléments qui sont ressortis, entre autres d'essayer de déménager le moins possible les aînés. C'est souvent quand on est rendu à l'hébergement puis qu'on doit les installer dans des mesures transitoires, en attente d'une place, en attente... Et ça, les gens nous ont dit, différents groupes nous ont dit que ça affectait énormément les aînés, d'avoir à vivre tant de déménagements, des fois à quelques mois, quelques semaines d'intervalle. Puis ça, est-ce que vous avez des solutions pour ça, pour cet aspect-là des choses?

Le Président (M. Bergman) : Mme Bélanger.

Mme Bélanger (Sonia) : En fait, oui, je pense que les gens qui vous ont fait ces commentaires ont tout à fait raison. On déplore aussi, comme gestionnaires, souvent le fait que les processus d'évaluation nécessitent, là, donc, de mettre des personnes dans des services particuliers, avec des équipes interdisciplinaires, le temps que l'évaluation soit faite, que la récupération fonctionnelle soit faite au maximum. Et là, après ça, il y a réorientation selon le souhait des personnes aussi. Mais, je pense qu'il y a place à amélioration.

Il y a aussi le fait que les personnes qui nous arrivent en centre d'hébergement très souvent vont être là pour deux ans et demi, trois ans. Et souvent elles vont être placées dans une unité particulière en fonction de leurs besoins, en fonction des activités dont elles ont besoin, puis, au fur et à mesure de là où elles sont rendues dans leur vie, de leurs incapacités, il peut aussi, des fois, y avoir des changements d'unité, d'étage. Mais, pour les personnes, ces déménagements-là peuvent avoir un impact. Alors, il faut vraiment éviter cela.

Mais je vous dirais qu'avec l'alourdissement actuel de nos centres d'hébergement on a de plus en plus une réalité de clientèle qui a de lourdes incapacités. Dans les centres d'hébergement publics, la clientèle s'est beaucoup alourdie. Donc, le fait de déménager, une fois qu'ils sont rendus au centre d'hébergement public, c'est quelque chose qu'on va voir de moins en moins parce que les besoins sont de plus en plus similaires.

Je vais vous donner l'exemple. Dans nos centres d'hébergement, 1 200 places, 80 % de notre clientèle a des déficits cognitifs, 65 % de notre clientèle a besoin d'accompagnement pour s'alimenter et à peu près 50 % ont besoin d'accompagnement pour leurs déplacements. Alors, vous vous imaginez un peu, donc, ces clientèles-là ont des besoins beaucoup plus maintenant, je dirais, similaires. Tandis qu'avant on voyait une gradation dans les centres d'hébergement, des personnes qui arrivaient avec un profil avec moins de lourdeur, et donc, là, on devait réaménager constamment en termes d'offres de services, d'organisation du travail. Mais ce phénomène-là, on va le voir de moins en moins.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson, il vous reste une minute.

Mme Gadoury-Hamelin : Oh! Rapidement. Je lisais, dans votre mémoire, aussi que vous aviez de la difficulté à attirer des médecins pour venir donner les soins en centre d'hébergement, ce qui a pour effet que vous soyez obligés souvent d'envoyer les gens à l'hôpital puis que ça pourrait, des fois, être solutionné si vous aviez une équipe médicale disponible. Est-ce que vous pourriez nous en parler brièvement?

Le Président (M. Bergman) : M. Morand, pour une très courte réponse, s'il vous plaît.

M. Morand (Mario) : En fait, ça varie d'un CSSS à l'autre, la disponibilité des médecins. La difficulté majeure, c'est la garde que les médecins doivent faire pour répondre au support des infirmières sur une période de 24 heures. Donner les soins directs, faire les visites des patients, ça, ça va relativement bien, mais c'est d'instaurer un système de garde, et ça, c'est plus compliqué. Puis on réussit à le faire lorsqu'on élargit les systèmes de garde avec d'autres systèmes de garde puis qu'on est plus de médecins à assumer cette responsabilité-là.

Une des solutions qui a été proposée, c'est l'intégration des infirmières praticiennes spécialisées. On pense qu'avec les IPS on pourrait très bien soulager la charge qui repose sur les médecins pour concentrer leurs spécialités dans des services de soins actifs davantage. Mais les réponses actuelles varient d'un territoire à l'autre. Dans notre région, on n'a pas de difficulté à avoir des médecins pour ça, mais il y a des régions où est-ce qu'ils ne sont même pas capables d'ouvrir des lits parce qu'ils n'ont pas de médecin pour suivre les patients. Donc, le problème, il reste entier. Puis je pense que, si on était capables de soulager la pratique médicale en termes de pression, on pourrait aller beaucoup plus loin, en tout cas, à mon avis.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci, M. le Président. La pression est forte, de ce côté, pour poser des questions. Alors, je vais essayer de donner la place à tout le monde. Mme Lavallée, M. Cadieux, M. Morand, Mme Bélanger, Mme Bélanger, qui est la directrice du CSSS Sud-Ouest—Verdun qui est mon CSSS. Et tout d'abord je tiens à vous dire que mon père... — c'est un témoignage très personnel — mon père allait au centre de jour Louis-Riel et il ne voulait pas être placé, mais, s'il y avait un endroit où il souhaitait être placé un jour, si nécessaire, c'était à Louis-Riel parce qu'il s'était fait un cercle d'amis. Et j'ai une amie qui est au CHSLD des seigneurs, je la visite fréquemment, elle est dans une unité particulière. Alors, je sais c'est quoi, le travail des gens. Puis j'arrive à l'improviste, là, alors, je ne m'annonce pas et je vois comment les gens travaillent la fin de semaine, la semaine. Alors, je vous poserais une question tout à l'heure, Mme Bélanger.

Mais, tout d'abord, pour Mme Lavallée, je vois que, dans votre recommandation, au point 9... Et j'étais très heureuse que la députée de Masson parle du fait qu'il y a toujours, dans les médias, des histoires sombres autour des CHSLD. Et on a eu aussi un commentaire disant : Bien là, vous le savez, ça fait 10 ans qu'on parle des recommandations, vous devriez appliquer les recommandations qui ont été faites. Mais je crois qu'au fil des ans il y a eu énormément d'améliorations, beaucoup de choses se sont faites. Et, s'il y a aujourd'hui une commission parlementaire, c'est aussi pour être capable de faire en sorte que les bons coups soient mis en évidence puis que les gens cessent d'avoir peur de ces milieux d'hébergement. Parce que c'est faux de prétendre que tout est négatif. Alors, ça, ça fait partie aussi de notre commission parlementaire.

Mme Lavallée, vous préconisez que la législation soit modifiée. On a déposé un projet de loi. Sans entrer dans les détails du projet de loi, c'était vraiment pour protéger à la fois la personne hébergée, mais aussi le personnel, parce qu'on sait que le personnel a peut-être des craintes parfois à signaler un cas d'abus, de négligence, de maltraitance, même si c'est peut-être marginal. Mais les gens ont peur de perdre leur emploi. Donc, vous croyez qu'une législation permettrait à la fois de protéger l'employé et aussi de protéger le résident?

Le Président (M. Bergman) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Effectivement, nous, on croit que la levée du secret professionnel, de permettre à un professionnel de pouvoir signaler lorsqu'il est témoin de maltraitance ou d'abus serait facilitant. C'est sûr que les employés entre eux puis les établissements ont mis en place des mécanismes, qu'il est impossible pour un employé de voir un autre collègue avoir un geste inadéquat ou une forme de maltraitance à l'égard d'une personne aînée sans qu'il soit obligé de le dénoncer, ce n'est pas ça. Mais on pense, à l'égard souvent des familles, quand la personne est hébergée dans nos centres, quand la personne n'est pas inapte, mais commence à avoir de fortes pertes cognitives, des gens de l'entourage — puis, je veux dire, que mon au passé récent, il y a un an, me fait dire que ça existe — ont tendance à venir près de la personne qui commence à avoir des pertes pour faire changer les testaments, pour extirper de l'argent régulièrement. Mais je vous dirais qu'il y en a, du personnel qui sont témoins de ça. Moi, je pense que c'est important que ça, ce soit porté à l'attention d'autorités, que ce soit porté à l'attention des notaires qui sont dans les dossiers, des banquiers qui s'occupent du financement de ces personnes-là pour que la communauté se mobilise pour éviter que la personne soit abusée. Il y a des situations vraiment très, très délicates qui… avec la levée du secret professionnel, permettrait sûrement d'en protéger davantage.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

• (10 h 40) •

Mme Blais : Ma question s'adresse maintenant à Mme Bélanger. Comment faites-vous la différence — parce que j'ai assisté à l'assemblée annuelle de l'AQESSS, vous avez organisé une journée autour des CHSLD — entre un milieu de soins et un milieu de vie?

Le Président (M. Bergman) : Mme Bélanger.

Mme Bélanger (Sonia) : Oui. En fait, le milieu de vie est un milieu qui est le plus naturel possible, qui ressemble le plus possible à ce qu'on retrouve dans nos maisons, avec les routines quotidiennes, avec des moments de loisir, avec des temps de repos. Puis aussi la grosse différence, c'est que, quand on est dans une approche milieu de vie, on n'est pas dans une approche institutionnelle. En fait, les employés travaillent dans le domicile des personnes, et c'est ça, la grande différence de cette philosophie, de cette approche. Donc, on n'est pas dans une approche médicale, institutionnelle, professionnelle, on est dans une approche d'aller en fonction des besoins du client, des proches aidants, des familles, un milieu ouvert.

Vous le dites, dans les centres d'hébergement, il n'y a pas d'heures de visite, les milieux sont ouverts, les familles sont les bienvenues, on essaie d'adapter le plus possible, dans le fond, les activités de la vie quotidienne en fonction des besoins des personnes. Bien sûr, il y a toujours une routine qui peut être présente, mais on essaie vraiment de l'adapter aux personnes, et ça, c'est un grand changement qui a été fait pendant des années. On est partis des centres d'hébergement il y a 10 ans, des milieux qui s'apparentaient davantage au milieu hospitalier, à des milieux qu'on trouve maintenant plus chaleureux et où on met davantage l'accent sur les activités de la vie quotidienne, les activités de loisirs. Nous avons intégré différents éléments en hébergement, les éducateurs spécialisés, les techniciens en loisirs. On n'avait pas cette catégorie de professionnels dans nos centres d'hébergement il y a cinq ans et 10 ans. Donc, vous voyez un peu. Donc, c'est vraiment de faire un milieu qui est là pour soutenir les personnes, pour les assister.

La question, c'était : Quelle différence vous faites avec les milieux spécialisés? Bien, les milieux spécialisés vont demander davantage d'expertise. Puis, dans les centres d'hébergement, je ne veux pas généraliser, il y a des programmes spécialisés, nous avons 200 places réservées à des programmes spécialisés. On parle ici de clientèles avec des problématiques de santé mentale, avec des clientèles ayant des troubles de comportement sévères et qui sont maintenant âgées, des clientèles qui ont des déficiences intellectuelles et qui sont maintenant âgées, mais ces clientèles-là vont demander davantage d'approches spécialisées. Mais approche milieu de vie et approche spécialisée, pour moi, ce n'est pas incompatible, ce n'est pas incompatible. L'approche spécialisée doit être vraiment orientée pour des clientèles spécifiques, tandis que l'approche milieu de vie devrait être notre philosophie, dans le fond, de soins, d'assistance aux personnes.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, merci de votre présentation. Vous avez effleuré une question qui est hyperimportante, c'est le milieu de vie qui se transforme aussi en milieu de fin de vie. Et votre mémoire comporte une recommandation au point 6 : «Reconnaître le milieu d'hébergement et de soins de longue durée comme un milieu de fin de vie et l'organiser en conséquence.»

Donc, j'aimerais savoir, pour vous, les établissements que vous représentez, ce que ça implique, cette recommandation-là, qu'est-ce qui devrait être adapté et comment on en fait un véritable milieu aussi de fin de vie pour une partie de la clientèle.

Le Président (M. Bergman) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Il est certain qu'un milieu de fin de vie appelle des approches différentes. On parle de l'approche soins palliatifs. La moyenne de vie des personnes maintenant dans les CHSLD, c'est autour de 18 mois, hein? Ça fait qu'ils arrivent, et c'est leur dernier chez soi. Donc, il faut adapter la situation puis notre établissement, de convertir les chambres à plusieurs et faire en sorte que les gens soient seuls, pouvoir recevoir leur famille et que la famille soit avec eux 24 heures, c'est important.

D'avoir des intervenants qui sont formés aussi pour une approche qui est différente. Quand on approche des gens en fin de vie, ce n'est pas comme donner des soins de confort, ou des services domestiques, ou autres. Donc, c'est une approche et des clientèles différentes, c'est des besoins différents, donc c'est s'assurer que le personnel ait la formation qu'il faut, soit choisi en fonction aussi de leur intérêt de travailler auprès d'une clientèle où on sait que c'est les derniers moments puis organiser les lieux physiques aussi en fonction de ces besoins-là.

Peut-être qu'il y a des exemples concrets qui peuvent être donnés, je ne sais pas si vous en avez chez vous. Mais chacun adapte. Et c'est vraiment l'avenir aussi, parce que même le colloque auquel Mme Blais a participé, toutes les études qui ont été faites par le comité de travail qui a été mis sur pied par le ministère de la Santé, là, sur la vie en CHSLD témoignent qu'effectivement ça devient de plus en plus et ça deviendra de plus en plus un lieu de fin de vie.

Le Président (M. Bergman) : Mme Bélanger.

Mme Bélanger (Sonia) : Bien, peut-être aussi mentionner qu'en fait les soins palliatifs, on les retrouve tout au long de l'épisode du continuum de soins. Au CSSS Sud-Ouest—Verdun, les soins palliatifs à domicile ont été beaucoup développés. Vous avez eu certainement l'occasion de le voir, ça a été médiatisé au début de l'année, janvier. On est chanceux, on peut compter sur des médecins très impliqués au niveau des soins palliatifs à domicile. Nous avons des soins palliatifs à l'hôpital et nous avons aussi, dans un de nos centres d'hébergement, huit places pour des lits de soins palliatifs. Alors, tantôt, à la question de déménager la clientèle, bien il peut arriver aussi qu'on déménage les clientèles dans ces lieux-là, et c'est… On peut compter sur la même équipe médicale. Donc, les médecins impliqués en soutien à domicile, impliqués à l'hôpital, impliqués à l'hébergement partagent une même philosophie, une même approche, une même intervention et ils ont le personnel aussi, donc les infirmières, le personnel professionnel qui sont impliqués dans ces équipes.

Et, en centre d'hébergement spécifiquement, il faut faire attention de ne pas tomber dans le piège, ça ne deviendra pas, les centres d'hébergement, des grands centres de soins palliatifs, ce n'est pas ça, l'idée. Mais l'idée est de former les intervenants à l'approche fin de vie. Je ne parlerai pas de soins palliatifs. Moi, je fais une différence entre le soin palliatif, qui est beaucoup plus… je vais prendre le terme «spécialisé», versus les soins de fin de vie qui sont peut-être dans un mode un peu plus soutien à domicile, plus basés sur les soins de confort, sur le contrôle de la douleur, sur l'accompagnement des personnes.

Et, bien sûr, il faut adapter nos lieux physiques. Et, dans notre CSSS, c'est pour ça qu'on a décidé de regrouper dans un même centre d'hébergement des lits de fin de vie pour notre clientèle. Ce service-là est très apprécié, d'ailleurs. Mais on se rend compte que ce n'est pas suffisant. Le fait d'avoir six, huit lits dans un centre d'hébergement qui en compte 1 200, places, ce n'est pas suffisant. Donc, on est vraiment en train de développer un programme de soins de fin de vie pour l'ensemble des intervenants de nos centres d'hébergement.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Mais je crois que, dans nos CHSLD, actuellement, lorsque les chambres sont uniques, souvent on peut faire les fins de soin de vie directement dans la chambre et ne pas avoir à déplacer. Mais ce que j'ai vu, M. Morand, des belles visites de vos centres, c'est que parfois on développe des chambres à part parce que, justement, il faut être capable de sortir les gens qui sont dans des chambres doubles pour leur permettre de vivre l'intimité. Et, lorsqu'il y a également des centres qui sont assez gros, oui, il peut y avoir peut-être des chambres de soins palliatifs pour pouvoir plus accommoder la famille. Je pense que c'est peut-être vers ça qu'on s'oriente. Mais je ne pense pas qu'il va y avoir un seul modèle. Ça va être un modèle adapté à chacun des établissements. Commentaires?

Le Président (M. Bergman) : M. Morand.

M. Morand (Mario) : Vous avez raison, Dr Bolduc, on a différents modèles qui peuvent être mis de l'avant dans l'organisation de nos lits puis de nos unités, puis ça dépend beaucoup des profils de nos clientèles puis de notre centre. Mais l'objectif dans tout ça, je pense que le principal objectif, c'est d'assurer l'accès à la famille parce que la famille représente un élément très important dans le processus de fin de vie. Donc, il faut les accommoder, il faut leur donner un séjour, il faut les soigner, dans le sens qu'il faut les aider à avoir accès à du café, à de la restauration ou des choses du genre. Il ne faut pas les négliger. Ils jouent un rôle important.

La grande stratégie dans les soins en fin de vie, outre la formation du personnel puis la présence d'équipes médicales pour les accompagner, c'est l'espace qu'on réserve à la famille et l'espace qu'on réserve à la spiritualité. Et ça, on l'oublie trop souvent, mais la spiritualité est un élément très important pour cette clientèle-là, que, quand on compose avec ces paramètres-là, du personnel formé, des unités adaptées avec de l'espace pour les familles, on est certains d'avoir une formule gagnante.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

• (10 h 50) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. On sait qu'au Québec actuellement, puis je sens que ça fait consensus, c'est que ça nous prend le continuum de services. C'est-à-dire qu'on veut garder les gens le plus longtemps possible à domicile, dans leur maison, dans leur propre place à eux autres. à un moment donné, il y a de ces gens-là qui ont besoin de plus de services puis il y en a qui vont aller demeurer dans des résidences privées avec services. Donc, ça devient leur domicile, mais il est possible d'avoir des services accessoires, améliorer la qualité de vie, leur permettre de répondre à leurs besoins que peut-être parfois ils ne seraient plus capables de répondre à la maison, et également la sécurité.

Le troisième niveau que nous avons lorsque la personne perd de l'autonomie, ça peut être des ressources intermédiaires, qui peuvent être des ressources privées. D'ailleurs, ça peut se faire également dans des ressources avec des résidences avec services. Et le quatrième niveau, c'est le CHSLD.

La discussion que nous avons maintenant... parce qu'il y a eu, à un moment donné, en disant : Bien, tout le monde va rester à domicile, mais je pense que, suite aux différentes commissions qu'on a eues, tout le monde s'est rendu compte que c'était illusoire. Mais par contre ce qu'on veut, la volonté pour tous, c'est vraiment de les garder le plus longtemps possible dans la ressource la plus légère et qui leur convient.

Est-ce que l'AQESSS a fait l'évaluation du nombre de lits en CHSLD ou le nombre de places en CHSLD par 100 personnes de 65 ans et plus, qui est atteignable? Moi, j'ai parlé… un chiffre qu'à 2,8 ça pourrait être acceptable. Dans les meilleurs milieux que j'ai vus… Probablement que 2,5 peut être atteignable, mais probablement pas partout. On nous a parlé récemment de 2,3. Est-ce que l'AQESSS a fait des travaux là-dessus?

Le Président (M. Bergman) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Moi, là, je n'ai pas les chiffres. Je sais qu'il y a eu des travaux de faits à l'AQESSS — Mme Pelletier est derrière — je ne sais pas si on est allés à faire ces calculs-là. Sauf que ce qu'on sait, à l'AQESSS, c'est que l'objectif n'est plus d'injecter des fonds publics dans l'augmentation de CHSLD, de places en CHSLD, mais plus d'ajouter des sommes pour permettre de faire les soins à domicile ou dans les milieux de vie autres que les CHSLD.

Mais, pour ce qui est du ratio, là, Michel, qui est, peut-être, derrière, qui pourrait nous donner une information, là, s'il y a eu des ratios de calculés pour le nombre de lits que ça prendrait. Parce qu'il reste que, même une population de 65 ans et plus, on ne peut pas penser que tous les gens vont se retrouver dans les CHSLD, hein? Il y a une faible proportion de la population qui se retrouve dans les CHSLD, beaucoup moins qu'on pense. Et on pense qu'avec le virage des soins à domicile il va y en avoir encore moins.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, merci. Oui, excepté qu'il faut faire une discussion logique, là. Si les hôpitaux ont eu beaucoup de patients en attente d'hébergement, c'est soit que les soins à domicile n'étaient pas disponibles jusqu'à un certain point, mais il y a des endroits aussi qui manquaient des places en CHSLD, tu sais? Puis, à un moment donné, il faut arrêter de se créer des illusions, là. Si la personne n'est plus capable de retourner à la maison, mettez les ressources que vous voulez, ça va lui prendre des ressources de CHSLD. C'est ça, la discussion qu'on doit avoir. Et ça prend ce continuum de services là.

Et c'est beau de dire : Je n'injecterai pas d'argent dans les CHSLD, là, mais il y en a qui sont vétustes, on veut les convertir. Et il y a peut-être, pour un certain temps, un nombre de places… Puis là, ce qu'il faut voir, il y a probablement des régions où est-ce qu'il y a trop de lits, mais il y a des endroits que c'est en grand développement, que, si vous n'en construisez pas, vous allez demander au patient d'aller déménager dans une autre région pour qu'il puisse avoir de l'hébergement. Là, je vous raconterai l'histoire de La Baie, là, qui se faisait héberger à Métabetchouan, c'était 1 h 30 min de route pour les familles, il a fallu transformer ça... Je ne pense pas que l'AQESSS soit d'accord avec une position comme celle-là.

Mme Lavallée (Diane) : Non, non. Là-dessus, on est tout à fait d'accord qu'il faut injecter des sommes dans nos établissements, dans nos CHSLD parce que plusieurs sont vétustes, il faut les adapter à la nouvelle réalité du profil des personnes, qui n'est plus le même. Bon. On est d'accord aussi que, certaines régions, probablement que ça nécessite une augmentation du nombre de places en CHSLD parce que tous les services dans la communauté ne peuvent pas répondre aux besoins d'un nombre important de personnes qui vont se retrouver en perte d'autonomie. Ça, on est tout à fait d'accord avec ça. Mais ce qu'on dit, c'est que globalement, au Québec, avant d'augmenter de 1 000, 2 000, 3 000 lits nouveaux à créer en CHSLD, je pense qu'il faut regarder de quelle façon on peut aussi injecter davantage de sommes dans la communauté. Mais il y aura toujours besoin de CHSLD, toutes les personnes ne pourront pas avoir les services dans la communauté. M. Morand, je crois que vous vouliez ajouter quelque chose?

Le Président (M. Bergman) : M. Morand.

M. Morand (Mario) : Je pense que la question est tout à fait pertinente, puis elle mérite d'être investiguée de façon importante parce qu'il y a des expériences qui sont très révélatrices. Il y a des territoires où les taux sont à 3,5 % puis il y a des territoires où les taux sont en bas de 2 %, ou à 2,2 %, ou à 2,3 %. Mais prenons le temps de regarder quelles sont les pratiques gagnantes qui permettent d'atteindre ces objectifs-là.

Puis je pense qu'un taux de 2,5 %, c'est un taux qui est tout à fait atteignable. Et, si on fait juste projeter l'avenir avec le vieillissement de la population, bien, dans 20 ans, il faudrait multiplier par deux le nombre de lits de CHSLD au Québec. Donc, c'est des milliards et des milliards de dollars qui sont en jeu. La société n'a pas les moyens de ramasser ça. Il faut trouver des pratiques qui nous permettent de maintenir un ratio inférieur. Puis ça existe parce qu'il y a des territoires qui l'ont réussi. À Magog, on est en bas de 2 %, dans la MRC des Sources, on est à 2,3 %, puis ils n'ont a pas de liste d'attente. Il faut vérifier ces expériences-là puis regarder si on n'a pas là des pratiques gagnantes.

Ce qu'il faut noter aussi, puis ça, je pense que c'est bien, bien important dans les ratios, c'est qu'il y a un roulement de clientèle beaucoup plus important aujourd'hui qu'il y avait voilà 10 ans. Donc, le même lit va être utilisé plusieurs fois dans une même période de temps qu'avant. Donc, le ratio de 3,5 % voilà 10 ans, aujourd'hui il n'a plus la même signification parce que la clientèle arrive plus en fin de vie puis le roulement est plus important. On est capables d'avoir des ratios moindres à cause de ces phénomènes-là, puis c'est le soutien à domicile qui fait toute la différence. Mais, oui, vous avez raison, ça nous prend de l'hébergement partout au Québec.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste trois minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, je ferais un commentaire là-dessus. Je serais quand même prudent parce que déjà on est partis d'un endroit… oui, c'est vrai qu'il y avait des gens qui étaient beaucoup plus légers, mais il y a beaucoup, beaucoup d'endroits au Québec, là, vous êtes dans votre région, la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, on parle d'Arthabaska-Érable, ils l'ont fait, ce travail-là. Et là tout le Québec est en train de récupérer, on est tous en train de prendre ces méthodes-là.

Je fais très attention avec un argument : Parce qu'on n'a pas d'argent, on ne pourra pas donner les services, là. Ça, ça a été l'erreur, là… Puis je ne veux pas faire de politique, mais les coupures de 1995, ça a été ça, hein? On n'a pas d'argent, on met les docteurs à la retraite, on met les infirmières à la retraite. Mais, moi, j'étais médecin dans un hôpital, là, les infarctus, ils rentraient quand même, les fractures de hanches, elles rentraient quand même, tout le reste rentrait quand même. On s'est juste retrouvés en pénurie.

Moi, ce que je dis : Il faut avoir les ressources pour répondre aux besoins des patients, il faut faire une bonne évaluation des patients. Mais la grande idée de génie qui dit : Ça, ça va tout régler les problèmes de société, là, ça n'existe pas. Puis, en passant, ce que vous avez fait... ce que vous m'avez dit que vous avez fait, vous ne l'avez pas fait avec l'assurance autonomie parce qu'elle n'existe pas. Vous l'avez fait dans votre région. Parce que l'assurance autonomie, c'est de promettre ce que vous, vous avez déjà fait depuis quelques années, comme ça a été fait partout au Québec. Donc, ce n'est pas le principe comment ça va être avec l'assurance autonomie ou pas, c'est que les bonnes pratiques peuvent se faire indépendamment. Il faut juste que les gens sachent c'est quoi, les bonnes pratiques, et décident de les appliquer.

Le Président (M. Bergman) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Bien, Mme Bélanger tenait à vous dire quelque chose.

Le Président (M. Bergman) : Mme Bélanger.

Mme Bélanger (Sonia) : Bien, en fait, peut-être pour intervenir avec le Dr Bolduc, oui, effectivement, je pense qu'il faut avoir un ensemble de ressources sur l'ensemble du continuum. Cependant, il faut le faire graduellement et il faut bien l'évaluer. Et on ne peut pas être contre la vertu, on souhaite intensifier le service de soutien à domicile au maximum, mais il y a quand même un risque, si on met seulement le focus seulement sur le soutien à domicile, de désinvestir ailleurs, là où il y a des besoins, c'est-à-dire créer d'autres types de ressources aussi, comme des ressources institutionnelles, des centres d'hébergement, donc rehausser… pas créer d'autres centres d'hébergement, mais adapter les lieux physiques. Donc, je pense qu'il faut vraiment avoir une panoplie de services. Et de mettre le focus seulement sur le soutien à domicile pourrait être un autre risque important en termes d'offre de services à la population aînée au Québec.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Mme Bélanger, M. Cadieux, Mme Lavallée, M. Morand, merci d'être ici, avec nous aujourd'hui, partager votre expertise avec nous.

Et je demande aux gens du Centre hospitalier gériatrique Maimonides pour prendre place à la table.

Et je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 10 h 59)

(Reprise à 11 h 2)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, on souhaite la bienvenue aujourd'hui au Centre hospitalier gériatrique Maimonides.

Alors, Mme Gold, bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms et vos titres. Et le prochain 10 minutes, c'est à vous.

Centre hospitalier gériatrique Maimonides

Mme Gold (Barbra) : Excellent. Merci beaucoup. Puis j'aimerais vous présenter les membres de mon équipe. Puis vraiment c'est le Centre gériatrique Maimonides puis le CHSLD juif de Montréal parce qu'on est en train de faire une intégration, puis ça fait à peu près huit ans qu'on travaille ensemble avec l'équipe de direction. Alors, à ma gauche, c'est Karen Flam, notre directrice de la fondation et communications; ici, Mme Rosalie Dion, la directrice des soins infirmiers; puis ici, à ma droite, M. Jacques Labrecque, le directeur des ressources humaines depuis longtemps avec moi à Maimonides.

Alors, merci beaucoup. Nous remercions les membres de la Commission de la santé et des services sociaux de nous accorder l'opportunité d'échanger avec vous sur les conditions de vie des adultes hébergés dans les CHSLD. Puis, premièrement, je vais vous dire que moi, je ne vais pas parler tout le temps, alors ce n'est pas nécessaire toujours d'écouter mon français. J'ai mes collègues qui vont bien représenter notre approche. Alors, cette présentation, c'est un sommaire des éléments que nous décrivons plus en détail dans notre mémoire que vous avez bien reçu. Puis on veut parler un peu du Centre hospitalier gériatrique Maimonides — on va appeler ça Maimonides — puis le CHSLD avant qu'on commence.

Alors, Maimonides et le CHSLD juif regroupent à peu près 700 lits d'hébergement dans deux établissements à Montréal. On a aussi les lits de répit, les lits de PHPE. Nous gérons aussi les ressources non institutionnelles, et les résidences d'accueil, un hôpital de jour et les popotes roulantes. Ça fait à peu près 100 ans que Maimonides existe à Québec. C'est en 1910 que ça a été fondé par la communauté juive à Montréal. Les deux établissements ont un mandat suprarégional, puis nous desservons la communauté juive puis aussi les autres membres de la communauté à Québec. Nous sommes deux affiliés à l'Université McGill. On a plusieurs programmes d'enseignement avec les étudiants, les stagiaires, puis nous sommes agréés avec le Conseil canadien d'agrément, puis nous sommes affiliés avec Planetree. Maintenant, je vais donner la parole à Mme Flam pour continuer pour quelques minutes avec l'histoire.

Mme Flam (Karen) : La clientèle hébergée de Maimonides et du CHSLD juif présente un profil de perte d'autonomie importante. L'âge moyen est de 86,6 ans, et 80 % des résidents présentent une forme ou d'autre de démence. La durée moyenne du séjour est d'environ trois ans. Et, tout comme d'autres CLSLD, le profil clinique de nos résidents s'est alourdi au cours des ans. Nos résidents ont de multiples problèmes de santé physique et plusieurs présentent des comportements perturbateurs et des problèmes psychogériatriques.

Devant ces constats, nous avons orienté nos efforts, depuis quelques années, vers la mise en place de services et de soins cliniques particuliers qui répondent aux besoins en santé physique de nos résidents. Pour ce faire, nous avons révisé la structure de postes et l'organisation de travail, mis en place des programmes de formation du personnel et développé des pratiques cliniques axées sur l'évaluation et le traitement des soins infirmiers.

À travers tout ça, nous avons maintenu l'approche de milieu de vie. La philosophie et les valeurs — ça, c'est un mot très difficile pour moi — organisationnelles — je l'ai pratiqué très souvent hier soir — un environnement qui respecte la dignité et le confort de la personne, la présence des proches et le respect des aspects culturels et spirituels de la vie des résidents sont tous des éléments qui caractérisent l'approche de milieu de vie. Ceux-ci ne sont pas subordonnés aux services, aux soins et aux interventions qui sont fournis pour assurer le bien-être de la personne. Je laisse la parole à mon collègue M. Labrecque.

M. Labrecque (Jacques) : Merci, Karen. À la lecture de notre mémoire, vous avez sûrement constaté qu'on a exprimé certaines considérations sur les conditions de vie des personnes âgées, mais, dans un premier temps, il faudrait vous préciser que nous épousons totalement l'orientation à l'effet de garder les personnes aînées dans leur milieu naturel le plus longtemps possible. On comprend qu'il y a des énergies à déployer à ce niveau-là, mais c'est quand même une orientation.

Cependant, comme j'écoutais tout à l'heure, il y a une partie de la population qui ne pourra plus rester dans un milieu naturel, et c'est de ça qu'on va vous entretenir, les gens qui doivent être hébergés en CHSLD. Si on veut travailler sur l'amélioration des conditions de vie, il faut reconnaître qu'il existe un alourdissement important de cette clientèle-là présentement dans nos résidents et dans nos résidentes en CHSLD. Compte tenu de la nature et de l'intensité des services et des soins qu'il faut leur donner, ça, c'est des choses sur lesquelles il va falloir travailler énormément.

Dans le mémoire, on a touché quatre points particulièrement, et, avant de passer aux aspects un peu techniques, je vais tenter, là, de vous faire un petit rappel. Il va falloir repenser certains éléments structurants de l'offre de services en CHSLD. On va vous entretenir du financement, un financement adéquat compte tenu de cet alourdissement-là, compte tenu de l'intensité des soins. On va vous entretenir également des ratios soins infirmiers et soins d'assistance. C'est souvent un ratio qu'on néglige, qu'on tient pour acquis. Cependant, on fera la démonstration qu'il y a peut-être des investissements importants à faire qui rapporteront éventuellement au réseau de la santé.

On va vous entretenir aussi du recrutement du personnel qualifié, notamment sur le fait que le personnel qui provient des agences nuit énormément à la continuité et à l'intensité des services à donner aux personnes âgées. Et finalement on va vous parler un peu aussi de la formation de base, autant pour les préposés aux bénéficiaires, les infirmières auxiliaires et les infirmières.

Juste quelques petits mots concernant la tarification en CHSLD. C'est une espèce de petite parenthèse. Nous suggérons, dans notre mémoire, d'implanter un processus obligatoire de prélèvement automatique, ce qui compliquerait beaucoup moins la tâche à tout le monde, d'aller chercher les chèques à tous les mois. Alors, si on avait un système obligatoire de prélèvement… Parce qu'on sait que les tarifs sont connus, sont fixes et on sait qu'on devrait aller les chercher. Et peut-être aussi de regarder la possibilité de moduler la contribution en fonction de la capacité de l'autre conjoint, qui, lui ou elle, va rester à domicile et qui peut avoir ce… le fait de rester à domicile menacé par le fait qu'il doit payer les frais d'hébergement. Ça fait que peut-être qu'il y a une façon de regarder, de moduler cette tarification-là.

Je passe donc la parole à Mme Rosalie Dion, qui est notre directrice des soins et qui va vous donner un peu plus d'esprit nursing dans tout ça.

• (11 h 10) •

Mme Dion (Rosalie) : Oui. Je me rends compte qu'avec le 10 minutes que j'avais, qui est presque tout écoulé… M. Labrecque a mis beaucoup de choses dans mon assiette. Bref, je vais faire ça rapidement. De toute façon, vous allez pouvoir nous poser toutes les questions que vous voulez.

On parlait d'abord du choix de la personne. Évidemment, on travaille, nous, dans un milieu qui est majoritairement anglophone, qui va prendre soin d'une clientèle majoritairement juive. Alors, on voit que c'est important pour cette clientèle-là et pour d'autres clientèles aussi qui auraient une culture différente de pouvoir avoir accès, près de chez eux, à un centre d'hébergement qui va pouvoir leur offrir ça. On se rend compte qu'en ce moment les listes d'attente sont très longues aussi lorsque ces personnes-là veulent avoir accès à des centres de la sorte. Donc, il y a peut-être des mesures qui devraient être mises en place pour essayer de les aider dans ce sens-là à avoir accès plus rapidement à un milieu qui leur convient ou qui répond à leur choix.

Concernant les besoins particuliers, on ne vous apprend rien en vous disant qu'il y a un alourdissement de la clientèle dans nos centres d'hébergement. On le ressent et notre personnel aussi le ressent énormément. Évidemment, du regroupement de clientèles qui ont des besoins particuliers pourrait être une bonne façon de procéder. C'est ce qu'on a fait aussi dans nos deux centres, où on a regroupé les clientèles, sur les différentes unités, par profils avec des soins particuliers. Alors, c'est... et ça peut faciliter aussi la tâche au personnel soignant sur les unités. Donc, c'est quelque chose qu'on pense qui pourrait être souhaitable.

C'est aussi le moment de parler de ces gens-là qui ont moins de 65 ans, qui peuvent souffrir, par exemple, de déficience intellectuelle, ou de sclérose en plaques, ou de maladies dégénératives de la sorte, qui se retrouvent en CHSLD, mais qui est plus ou moins un milieu adapté pour eux, avec des activités qui ne leur conviennent probablement pas vraiment. Donc, il y aurait peut-être quelque chose aussi à penser pour ces clients-là qui ont besoin de beaucoup, beaucoup d'heures de soins et qui se retrouvent dans les centres d'hébergement au travers des personnes un peu plus âgées.

Une voix : ...

Mme Dion (Rosalie) : Oui, c'est ça. Je me dépêche. Ce que je pourrais vous dire aussi par rapport à la formation, on en glissait un mot parce que c'est un projet important, la clientèle s'alourdit et les besoins de formation sont grands. On a beaucoup... Et nous, on a la chance d'avoir des conseillères en soins infirmiers dans nos deux centres, qui aident à donner beaucoup de formation au personnel sur tous les corps de travail. Des fois, c'est des journées, des fois, c'est des capsules de formation durant les heures de travail pour que ça soit moins difficile pour la libération ou le remplacement du personnel. Et ces infirmières conseillères là vont beaucoup nous aider à garder, pour la formation continue, garder les techniques à jour, et tout ça. Donc, c'est grandement apprécié de notre personnel.

Aussi, par rapport à la formation, je pense que les conseillères ont tellement un rôle important que, comme les conseillères en prévention des infections, qui, de par la loi, doivent répondre à un ratio d'une pour 250 lits à l'hébergement, par exemple, je pense que ça pourrait être une belle voie, un beau chemin à suivre, là, pour le futur, pour ces infirmières, des conseillères à avoir dans tous les centres d'hébergement, qui vont aider à la formation parce que la clientèle s'alourdit. Et, si on veut garder ces personnes-là aussi en centres d'hébergement et on veut éviter qu'elles soient transférées à l'hôpital parce qu'on sait que ça nous coûte extrêmement cher, on est pour essayer de garder le plus longtemps possible ces personnes-là dans le centre et donner des traitements requis.

Ce qu'on fait, nous, en ce moment, on a des transfusions sanguines qu'on va donner à Maimonides, beaucoup d'antibiothérapies intraveineuses, des soins de trachéo. On a beaucoup, beaucoup de choses qui sont majoritairement... en fait, je vous dirais, de d'autres centres d'hébergement, qui sont faites à l'hôpital, nous, on les fait...

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Dion (Rosalie) : ...on les fait chez nous. Donc, on apprécie ça. Et…

Une voix : ...

Mme Dion (Rosalie) : Oui? Bien, on aura la chance d'en rediscuter tout à l'heure avec vos différentes questions.

Le Président (M. Bergman) : Certainement. Certainement. Merci pour votre présentation. Alors, maintenant, pour le bloc du gouvernement, Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Merci, M. le Président. Mesdames, monsieur, alors merci d'être là, merci de venir nous faire part de vos expériences terrain qui nous permettent aussi de voir qu'il y a différentes façons de s'organiser. Et je pense que vous êtes un modèle. En tout cas, on a déjà entendu parler de vous avant votre arrivée, comme quoi que… peut-être votre réputation vous a précédés. Mais il y a des choses qui ont été faites de façon différente chez vous, et les gens nous ont dit que c'est intéressant, ce que vous avez réussi à faire.

Alors, sur ce, vous avez effectivement mis en oeuvre avec beaucoup de succès certaines initiatives. Il est évident, là, que la collaboration avec différents acteurs a été un atout dans l'atteinte de ces objectifs-là. Alors, j'aimerais ça que vous nous donniez des exemples de partenariats et d'affiliations concrets que vous avez réussi à mettre en place pour vous aider à atteindre les objectifs que vous avez atteints jusqu'à maintenant.

Le Président (M. Bergman) : Mme Gold.

Mme Gold (Barbra) : Peut-être, je vais commencer puis après je vais demander à M. Labrecque de m'aider. Mais, premièrement, ça commence avec le conseil d'administration. Si on a un conseil d'administration qui est vraiment intéressé à l'établissement, ils ont des proches là-bas, ils se promènent dans l'établissement, ils ne restent pas seulement dans la salle du conseil d'administration… Et ça, vraiment, ça fait partie de la communauté. Alors, ça, c'est le numéro un.

Deuxièmement, on a comme les écoles des infirmières puis les écoles pour les préposés puis les infirmières auxiliaires. On a fait les partenariats avec les cégeps, avec les personnes… «adult continuing care center» avec McGill, avec Dawson puis avec l'aide de notre fondation ou avec quelqu'un qui a donné un peu d'argent. Ce n'est pas de l'argent qui revient chaque année, mais comme un 500 000 $. On a pris une chambre, c'est maintenant l'école, puis les préposés font leur enseignement à Maimonides. Les infirmières auxiliaires, c'est la même chose, au CHSLD juif, avec John Abbott, c'est un cégep. Puis c'est une des choses qui nous aide beaucoup. On a les autres partenariats…

M. Labrecque (Jacques) : Effectivement, sur un exemple de partenariat, le premier partenariat, ça a été avec notre fondation évidemment pour aménager les locaux et ensuite d'aller chercher les institutions pour donner les cours. Alors, on forme des préposés aux bénéficiaires chez nous, des infirmières auxiliaires et des infirmières. On a formé tout près d'une centaine d'infirmières depuis que le programme existe, depuis deux ans et demi, des infirmières qui sont formées en soins infirmiers à l'étranger qui doivent se requalifier ici, à l'Ordre des infirmiers et infirmières. Ils font une mise à jour et passent l'examen à l'ordre, ils deviennent infirmières de plein droit ici, au Québec. Et c'est quelque chose qui a été fait et par le milieu de l'éducation et par notre établissement.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Donc, si je comprends bien, ça favorise aussi un recrutement de personnel…

M. Labrecque (Jacques) : …une formule gagnant-gagnant.

Mme Gadoury-Hamelin : Oui, c'est ça.

M. Labrecque (Jacques) : Pour nous, on gagne un bassin de recrutement très important puis très intéressant, et eux aussi ont l'opportunité de faire leur formation en CHSLD puis de voir si effectivement ils veulent travailler. Et souvent les gens prennent goût énormément au travail en CHSLD.

Mme Gold (Barbra) : Oui, c'était vraiment…

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson. Voulez-vous…

Mme Gadoury-Hamelin : Oui, je vais laisser madame…

Le Président (M. Bergman) : Mme Gold.

Mme Gold (Barbra) : C'était vraiment une initiative qu'on a prise parce qu'on avait des problèmes de recrutement puis on ne voulait pas utiliser les agences. On n'a jamais utilisé les agences à Maimonides. Le CHSLD juif, avant quand notre équipe est arrivée, utilisait un peu, mais c'est vraiment… C'est quelque chose que je pense que la commission ou le ministère de Santé et… sociaux doit regarder. Ce n'est pas bon pour les clients, c'est plus cher puis le soin n'est pas bon. Alors, c'était un résultat de ce problème.

Le Président (M. Bergman) : Mme Dion.

Mme Dion (Rosalie) : Oui. J'aurais ajouté, par rapport aux partenariats aussi, celui qu'on a avec l'hôpital juif qui est vraiment sur le grand terrain, je vous dirais, du CHSLD juif, ils partagent le même stationnement. Donc, cette proximité-là nous a aidés aussi à développer des… On partage une conseillère en soins infirmiers, d'ailleurs, qui va faire la moitié de son temps chez nous et la moitié à l'hôpital. Et on est en train de… Ils ont développé, en fait, un projet qui s'appelait le GREATT Project, qui est un projet où on a essayé, avec les médecins du CHSLD juif… on l'a seulement fait là, on va l'introduire à Maimonides prochainement, mais qui nous aide à diminuer les transferts inutiles aux urgences. Alors, on revoit tous les transferts, à chaque période, qui ont été faits et on revoit : Est-ce que c'est un transfert qui était nécessaire? Est-ce qu'on aurait pu faire quelque chose chez nous pour éviter ce transfert-là? Qu'est-ce qui pourrait être amélioré pour la prochaine fois? Donc, on est toujours en train de s'améliorer. Je n'ai pas les chiffres avec moi, malheureusement, mais je vous dirais qu'on a diminué notre pourcentage de transfert à l'urgence de beaucoup, avec ça. Donc, c'est un projet en partenariat. Et on est en train d'en…

Une voix :

• (11 h 20) •

Mme Dion (Rosalie) : Oui. On est en train d'en développer deux autres avec l'hôpital, un en santé mentale, parce qu'on se rend compte que… bien, de leur côté, ils se rendent compte que leurs lits en santé mentale, des fois, ils sont occupés, des fois, jusqu'à même cinq ans, ils nous disaient ça l'autre jour, jusqu'à cinq ans, des clients qui sont âgés, avec des troubles de santé mentale, qu'ils ne sont pas capables de placer nulle part, qui se font refuser dans plusieurs centres d'hébergement, et nous, on va les accueillir. On a demandé à l'agence de Montréal des fonds pour pouvoir former notre personnel au niveau de la santé mentale et on va les accueillir chez nous pour qu'ils puissent avoir un milieu de vie autre qu'à l'hôpital. Donc, ça, c'est un projet qui s'en vient, qui va débuter très, très prochainement.

Et l'autre qu'on a aussi, c'est avec les médecins du CHSLD juif avec l'hôpital, où on essaie encore de diminuer le plus possible les différents transferts. Et même, on pensait par rapport à des «PICC-line», par exemple, ou à des PEG qui sont comme des… — comment je pourrais dire ça? — …

Une voix : Un gavage.

Mme Dion (Rosalie) : …oui, un gavage ou des tubes qui sont insérés dans l'abdomen, parce que les gens atteints de démence pourraient tirer dessus et quelque chose... Souvent, on est obligés de les transférer à l'hôpital. Donc, on a ce projet-là où on va avoir une entente avec eux, où, dans la même journée, ils vont aller directement à la clinique faire reposer ce PEG là. Ils vont revenir directement à la maison, donc sans passer par l'urgence. Alors, on est en train de travailler aussi avec eux ce partenariat-là. Et je pense que c'est vraiment, vraiment important d'avoir un hôpital comme ça et des médecins, de part et d'autre, qui sont dévoués et dédiés à faire en sorte que ça fonctionne.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : C'est intéressant, très intéressant. Ils sont en lien directement avec vous, ça fait que ça apporte des solutions concrètes. Ce que je retiens aussi, c'est que vous avez parlé de suivi, hein? On a beau… Aussi, ce qu'on a entendu par d'autres groupes, il y a des politiques qui se mettent en place, mais après ça ça prend du suivi puis de l'accompagnement pour que ces politiques-là puissent se concrétiser puis s'adapter à des réalités constantes qui peuvent se modifier au quotidien. Puis je pense que, dans ce que vous venez d'expliquer, c'est un peu ça. Autant c'est vrai aussi au niveau de la formation, ce que vous avez expliqué. Les gens doivent rester à l'affût des nouvelles technologies, de tout ce qui peut changer rapidement, en évolution avec les problématiques que les gens aînés, ou vulnérables, ou des adultes hébergés peuvent éprouver en CHSLD.

Alors, c'est très intéressant parce que je voyais, dans le résumé, que vous avez réduit, en tout cas, de 33 % les transferts à l'hôpital, voyez-vous? Ça fait que c'est un chiffre que je trouve super intéressant de voir, là, justement, avec ce que vous venez de nous expliquer. Donc, ça enlève énormément de pression aussi sur l'hôpital puis des conditions, là, que les gens se retrouvent à l'hôpital… Puis on sait que ce n'est pas l'endroit idéal pour une personne aînée de se retrouver à l'hôpital. Souvent, on a moins de temps pour s'occuper des gens, donc ce n'est pas l'idéal. Alors, intéressant. On veut s'inspirer des bonnes pratiques, ça fait que vous êtes là pour nous en faire part aussi.

Vous avez… Bon, c'est sûr que ma prochaine question… Vous avez développé une approche novatrice. Il y a des personnes qui sont venues préalablement nous dire que vous aviez accentué les soins à la personne beaucoup puis que vous aviez réduit aussi beaucoup l'aspect administratif des choses. Est-ce que vous pourriez nous en parler un peu plus de cet aspect-là?

Le Président (M. Bergman) : Mme Gold.

Mme Gold (Barbra) : Oui, on peut parler. Premièrement, c'était toujours dans la coutume de Maimonides de travailler comme ça. Ce n'est pas quelque chose de nouveau, parce que, vraiment, avec les familles qui sont très exigeantes, elles sont très présentes, ça nous donne l'inspiration de vraiment travailler pour les clients, pour les résidents. L'autre chose est qu'on a toujours mis la plupart de nos ressources au «front line». On n'a pas une grande — est-ce qu'on dit «administration»? — …

Une voix : Administration.

Mme Gold (Barbra) : Oui, administration. Vraiment, la plupart est ici. On a une directrice des finances puis une directrice de qualité qu'il reste aux deux établissements aujourd'hui, mais c'est tout. Alors, on n'a pas comme 15 cadres supérieurs. Alors, vraiment, on prend l'argent puis on met tout proche du patient ou du résident. Voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Labrecque (Jacques) : C'est notre devise. S'il y a une plus-value pour le résident, on le fait; s'il n'y a pas de plus-value pour le résident, bien ça passera à la prochaine fois.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Donc, votre action est centrée sur la personne.

M. Labrecque (Jacques) : Pour le vrai, vrai.

Mme Gold (Barbra) : Oui, oui, vraiment.

Mme Gadoury-Hamelin : Alors, j'aimerais aussi vous entendre sur le niveau de contrôle de la qualité, qui est un élément majeur afin d'assurer des services adéquats. Comment votre établissement s'y prend-il pour atteindre le meilleur contrôle de la qualité? Vous nous avez parlé de certaines collaborations, mais pouvez-vous nous en parler, là, au niveau d'assurer la qualité des services chez vous? Avez-vous des méthodes particulières?

Le Président (M. Bergman) : Mme Dion? Mme Gold.

Mme Gold (Barbra) : Premièrement, ma méthode, moi, je marche partout, je suis dans tous les établissements chaque jour, sur les étages… pas chaque jour, mais quand j'ai le temps, puis je parle à tout le monde. Puis je crois que d'avoir une présence terrain, ça dit quelque chose pour la qualité.

Deuxièmement, chaque jour, on a à peu près 1 000 personnes qui visitent l'établissement à Maimonides. On a les proches, les bénévoles, il y a plusieurs personnes présentes chaque jour. Ça nous aide aussi parce que ce n'est pas comme un travail isolé. Il y a plusieurs personnes à chaque établissement. L'autre chose, c'est les types de cadres qu'on engage. Les infirmières-chefs font la même chose. C'est ça que nous exigeons de nos employés. Vous avez les autres idées pour la qualité?

M. Labrecque (Jacques) : Pour le contrôle de la qualité, comme on l'indiquait dans notre mémoire, on est accrédité au Conseil canadien de l'agrément et on est également désigné or de Planetreeen gardant le personnel aux aguets parce que ces processus-là, hein, c'est des contrôles et c'est des mécanismes de contrôle de la qualité continus. Alors, c'est de même qu'on maintient l'intérêt puis qu'on garde le personnel aux aguets puis… un peu nos surveillants. Ce sont nos yeux et nos oreilles, hein, nos préposés aux bénéficiaires, nos infirmières, nos infirmières auxiliaires. Il faut que les gens soient conscients de ça et réalisent leur rôle. Et c'est de même qu'on les garde aux aguets, impliqués.

Le Président (M. Bergman) : Mme Dion. Mme Flam.

Mme Flam (Karen) : Oui. Je voulais ajouter qu'on a un «turnover», dans notre équipe, qui est très, très, très bas, je ne sais pas le numéro, mais c'est moins que 1 % par année, et aussi qu'on a un taux de…

Mme Gold (Barbra) : …de CSST est très bas.

Mme Flam (Karen) : Le taux est très, très bas chez nous, et ça fait une équipe très, très, très puissante quand on a ces numéros comme ça. C'est très important.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Écoutez, moi, je vous remercie de votre éclairage et de votre témoignage. Je retiens des choses intéressantes. Puis je vais céder la parole, M. le Président, à ma collègue.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Merci, M. le Président. Bonjour. Bienvenue. Est-ce que vous avez une liste d'attente à votre CHSLD?

Des voix :

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Elle est longue? Oui?

Mme Gold (Barbra) : Oui, oui.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Oui, il y a des gens qui veulent aller parce que… Oui, je pense que c'est un modèle et ça peut se répercuter à travers le Québec. J'ai été surprise de vous entendre parler… bien, la moyenne d'âge, 86,6 ans, mais aussi que 80 % de la clientèle est atteinte de démence. Ça, j'ai été surprise de voir la lourdeur. On sait qu'il y a un alourdissement dans les CHSLD, mais 80 %... Peut-être vous pourrez nous en glisser un mot.

Puis je voulais parler d'organisation aussi sur les étages ou par profil. Parce qu'il y en a qui sont venus nous dire qu'ils préféraient que ce soient des… par multiclientèles, que les gens soient différents pour ne pas être regroupés avec des gens qui ont la même maladie, puis tout ça, ce qui fait un effet miroir qui peut être désolant. Par contre, il y a aussi des bons côtés à regrouper par profil les clientèles au niveau des soins. Peut-être que vous pouvez nous dire comment vous êtes organisés par rapport aux services.

Le Président (M. Bergman) : Mme Dion.

Mme Dion (Rosalie) : Oui. Donc, comme j'expliquais tout à l'heure, nous, on a fait du regroupement de clientèles, et c'est depuis très longtemps…

Mme Gold (Barbra) : Très longtemps.

• (11 h 30) •

Mme Dion (Rosalie) : …que ça fonctionne de la sorte. Ça veut dire qu'il y a des unités où on peut retrouver de la démence légère à modérée. On a d'autres unités où on n'a aucune atteinte au niveau cognitif, donc c'est là où on retrouve toute cette même clientèle là. Et on a aussi une unité où on a plus des troubles de santé mentale. Des gens plus mobiles, mais avec des troubles de santé mentale, sont regroupés sur une unité. Et on a aussi une unité qui se retrouve à être celle avec les comportements perturbateurs. Donc, toutes nos clientèles errantes, nos clients très agressifs, qui crient énormément, vont se retrouver sur cette unité-là.

Je vous dirais qu'il y a des bons coups et il y a des avantages et des désavantages à avoir un regroupement de clientèles, mais je vous dirais que, pour avoir vécu les deux — parce que ça ne fait pas tout à fait un an que je suis arrivée comme directrice à Maimonides et au CHSLD juif — je me rends compte qu'il y a probablement beaucoup plus d'avantages à les avoir regroupées sur les mêmes unités. Des fois, c'est plus difficile, on s'en rend compte aussi, pour les familles. C'est souvent avec eux autres qu'on a le plus de difficultés. Quand on vient à transférer un client qui ne répondrait plus à une unité parce que la démence devient de plus en plus sévère et il commence à crier, des comportements qui apparaissent, on doit le transférer, des fois, c'est la famille qui vient à trouver ça difficile.

Mais je vous dirais que l'intégration se fait bien, et le personnel aussi développe des expertises en travaillant avec ces clientèles-là. On voit vraiment que, sur chacune des unités, on a différents types de... Et ils ont vraiment, chacun, trouvé leur bonne unité pour travailler, je vous dirais. Donc, au troisième étage, on a des gens qui sont très résilients, très patients, qui sont avec la clientèle qui est plus perturbatrice. Alors, c'est une façon aussi qu'on a, si vous voulez, d'organiser les soins. Tu voulais ajouter quelque chose?

Mme Flam (Karen) : Oui. On a été capables aussi de changer l'environnement. Disons que, sur un étage, l'éclairage est un peu différent dépendant de la clientèle sur cet étage, et on peut même changer l'environnement dépendant du quart de travail aussi. Ça fait une grosse différence d'être capable de changer l'environnement.

Je veux aussi dire qu'on peut offrir des loisirs complètement adaptés pour chaque profil. Au lieu de faire des grands événements dans une grande salle, on peut avoir des petits intervenants, même un sur un, disons, pour la musique et pour quelque chose qui est très important pour quelqu'un qui est en fin de vie avec la démence, un programme de musique où quelqu'un rentre juste un à un, ou même avec l'aromathérapie, ou des choses qui sont très faciles à faire. Mais, quand le profil est différent sur chaque étage, ça aide beaucoup, ça facilite.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, il vous reste une minute.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Oui, merci. Peut-être, en terminant, j'aimerais parler de financement. Parce que vous abordez, dans votre mémoire, la question du financement à l'activité plutôt que le financement historique. Alors, je vais vous laisser répondre pour cette minute, voir comment vous voyez le financement, là, qui serait plus axé sur les besoins.

Le Président (M. Bergman) : M. Labrecque, pour une courte réponse.

M. Labrecque (Jacques) : Oui. Ce qu'on suggérait, là, c'est dans le mémoire, c'est d'avoir des méthodes de calcul de l'intensité des soins. On sait que nos budgets sont basés sur des bases historiques, mais il y a des outils qui existent, il y a des outils qui sont, d'ailleurs, en essai, on parle d'ISO-SMAF, qui ne couvrent pas tout, mais éventuellement on pourrait avoir un outil qui va couvrir l'ensemble des services à offrir aux personnes âgées et avoir une mesure qui nous permettrait d'établir des ratios, ce qui permettrait d'établir un budget.

Le Président (M. Bergman) : Alors, Mme Dion, pour une courte...

Mme Dion (Rosalie) : J'ajouterais, par rapport à ce que M. Labrecque disait, l'ISO-SMAF, qui s'en vient, qui nous a demandé d'être utilisé à partir du 1er avril avec notre clientèle, va nous aider à parler tous le même langage au niveau des profils, des 14 profils. Évidemment, de pouvoir avoir... Parce que ce n'est pas vrai que, quand on travaille au troisième étage… je reviens toujours à mon troisième étage avec ma clientèle avec des comportements perturbateurs, je n'ai probablement pas besoin du même nombre de personnel, ou le ratio peut être différent, infirmières, infirmières auxiliaires, préposés, que sur une unité où je suis en soins palliatifs, où mes résidents sont grabataires et qu'ils sont complètement, complètement dépendants. Donc, c'est là où ça devient un peu difficile, pour l'instant, de savoir...

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Dion (Rosalie) : Pardon?

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Dion (Rosalie) : Oui. De savoir comment bien gérer ces ratios-là. Je pense que c'est des outils qui devraient nous être fournis pour pouvoir mieux soigner ces gens-là.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le temps de l'opposition officielle. Et je vais commencer les questions moi-même, étant donné que le Centre hospitalier gériatrique Maimonides est dans le beau comté de D'Arcy-McGee.

Alors, merci pour votre présentation. Et, félicitations, vous avez reçu, comme premier CHSLD en Amérique du Nord, la reconnaissance Or du groupe Planetree, une organisation internationale qui favorise la prestation de soins et de services à la personne. Alors, félicitations pour avoir reçu cette reconnaissance.

Mercredi passé, on a reçu devant nous Dre Catherine Vanasse, qui est une gérontologue de Sherbrooke. Elle avait des beaux mots pour vous. Elle nous a expliqué que vous avez une administration qui était vraiment linéaire et pas pyramidale. Alors, peut-être, pendant vos explications et les questions ce matin, vous avez expliqué cette différence, mais, pour être formel, est-ce que vous pouvez expliquer pour la commission les différences entre l'administration linéaire et celle pyramidale et pourquoi ça apporte des bénéfices à votre centre?

M. Labrecque (Jacques) : Je vais commencer la réponse. Effectivement, on a une structure très linéaire. En fait, ce qu'on a comme objectif, c'est de toujours réduire le niveau d'autorité entre celui qui prodigue, qui donne les soins et son patron. En partant, on n'a pas d'assistante infirmière-chef, les infirmières sont toutes chefs d'équipe. Elles doivent superviser leur équipe de préposés aux bénéficiaires, d'infirmières auxiliaires et leur aile. Une aile, chez nous, c'est 17 lits. Alors, c'est la responsabilisation des infirmières. Et c'est à ce niveau-là que ça commence. Elles répondent à une infirmière-chef et une directrice des soins, c'est tout. C'est notre structure. C'est une structure qui est excessivement linéaire. Les gens sont responsabilisés. De cette façon-là, on leur apprend à être responsables et on leur apprend aussi à répondre à la bonne personne. Et c'est de cette façon-là que ça fonctionne depuis très longtemps et, je vous dis, ça fonctionne très bien.

Mme Gold (Barbra) : …peut-être un peu plus facile aussi parce qu'on a seulement une mission. On n'est pas en CSSS, on a seulement une mission CHSLD. Je crois que c'est beaucoup plus facile. Moi, avec mes collègues, quand je parle avec les directeurs généraux des CSSS, c'est plus difficile parce qu'ils ont plusieurs missions, alors ils ont plusieurs chefs. Alors, c'est quelque chose que nous sommes très chanceux d'avoir gardé, c'est d'être un CHSLD qui n'est pas intégré dans un CSSS. Puis c'est peut-être une partie aussi de la réponse.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Dans votre mémoire, vous faites référence à l'accès aux places en CHSLD public pour la clientèle d'expression anglaise et la clientèle provenant des communautés culturelles et vous dites que l'accès à ces places est limité, et ce qui fait des listes d'attentes qui sont longues. Et, pour quelques clients, quelques patients, ils sont obligés d'être hébergés dans un CHSLD en dehors de sa communauté pour une longue durée de temps. Sachant que les personnes qui vont dans ces CHSLD, elles sont là pour seulement quelques années, comment est-ce que ces personnes composent avec ce délai? Et quelles suggestions est-ce que vous avez pour être certains que les places pour les personnes de la communauté anglaise, les communautés culturelles soient améliorées?

Mme Gold (Barbra) : C'est une bonne question. C'est difficile parce que les numéros changent chaque année. Alors, on doit regarder comme une photo des prochains 10 ou 15 ans qu'est-ce qui va arriver à chaque secteur. Mais, premièrement, je crois que tout le monde doit connaître leurs droits. Si on ne connaît pas qu'on a le droit d'avoir une place dans un CHSLD de notre langue ou notre religion, on ne demande pas. Parce que vraiment on en a plusieurs à Montréal, puis c'est vraiment d'avoir comme la coopération entre tous les secteurs. On travaille très, très bien avec l'agence de Montréal. Avec le système central d'admission, ça marche, c'est excellent, parce que c'est là-bas qu'ils savent s'il y a quelqu'un, dans un autre secteur, qui attend un lit à Maimonides ou attend un lit ou dans l'hôpital chez moi, parce que c'est centralisé. Moi, je suis un peu peur dans les prochains mois, si on va perdre ça puis ça va être décentralisé. Puis, si ça vient décentralisé à Montréal, je ne suis pas certaine que ça va marcher comme il marche maintenant, où ça marche assez bien. Voulez-vous ajouter quelque chose?

Le Président (M. Bergman) : Mme Dion.

• (11 h 40) •

Mme Dion (Rosalie) : …non.

Le Président (M. Bergman) : Une question reliée à cette question. Vous faites référence aux contributions et que le tarif doit être modifié lorsqu'un seul membre d'un couple est hébergé et pas les deux, pour permettre à celui qui n'est pas hébergé au CHSLD pour rester au domicile. On a entendu, la semaine passée, la question des couples qui doivent faire des divorces pour être admis et pour leurs finances. Et je pense à cette question des finances pour ces couples et comment est-ce qu'on peut améliorer, et aussi à la question quand les couples sont d'une communauté culturelle et ils doivent être hébergés un dans leur communauté culturelle et l'autre dans un CHSLD qui n'est pas dans la communauté, l'effet difficile sur le couple, l'effet difficile sur leur famille. Sur les deux aspects, est-ce que vous pouvez nous donner un éclairage, s'il vous plaît?

Mme Gold (Barbra) : Alors, premièrement, pour le financement, vraiment, pour les couples, c'est parfois — pas toujours — très difficile, on voit ça. On les aide à faire ce divorce blanc ou quelque chose… Comment dire? Mais vraiment je crois qu'on doit regarder les règles quand quelqu'un est toujours marié avec l'époux vivant parce que c'est très, très difficile de prendre 1 400 $ par mois puis maintenant l'autre personne doit payer le bail, doit payer sa nourriture puis elle doit prendre une grande partie de son argent pour donner au CHSLD. Ce n'est pas la même chose quand la personne est veuve. On dit ça «veuve»?

Une voix : Oui, exact.

Mme Gold (Barbra) : Oui, c'est ça. Puis l'autre chose, on travaille très, très fort pour… «to collect» le bail de tout le monde. Puis qu'est-ce qu'on a suggéré d'avoir comme un «direct deposit», très facile, je crois que ça va aider plusieurs établissements qui ont des grandes difficultés avec le paiement des autres clients. Parce que vraiment, si on est seul puis on est capable de payer, les règles ne sont pas compliquées. On doit aider à cette partie. L'autre question, c'était… Je ne me souviens pas.

Une voix :

Mme Gold (Barbra) : Voulez-vous répondre à ça? Non?

M. Labrecque (Jacques) : Je sais que cette situation-là existe. Je me souviens, il y a quelques années, dans les Laurentides, on avait ce qu'on appelait la règle du couple. Mais je n'ai pas réellement de solution, là, à apporter, là, actuellement. C'est vrai que c'est une problématique, mais…

Mme Gold (Barbra) : …dans les différents établissements, non, je n'ai pas une suggestion non plus pour ça.

Le Président (M. Bergman) : Sur la question… vous avez fait référence que vous avez des lits d'hébergement permanents, des lits d'hébergement temporaires de répit et les lits dans le cas du programme d'évaluation pour hébergement, Programme 68, à Montréal. Et je sais que j'ai eu des discussions avec des membres de votre organisation, on a eu beaucoup des questions, des appels au bureau de comté, cette fameuse question des lits d'évaluation, et lits de transition, et finalement les lits permanents, et les problématiques que les patients encourent.

Un groupe qu'on a eu la semaine passée a dit à nous : Peut-être, les évaluations doivent être faites quand le patient est dans l'hôpital. Et pouvez-vous nous éclairer sur cette question du Programme 68 et le programme de trois étapes : la transition, l'évaluation, le lit d'attente et le lit permanent?

Et finalement, dans ce même aspect, on a eu la question qui a été posée ou mentionnée la semaine passée qu'il y a la question de dumping des patients, peut-être pas dans l'aspect de l'évaluation, mais des fois, des CHSLD envoient un patient à l'hôpital, l'hôpital dit : Ce n'est pas pour nous, on n'a pas de place. Et l'hôpital, même dans l'hiver, peut mettre un veston sur le patient et envoyer le patient dans un taxi à un CHSLD. Je pense, même à un jeune âge, quand quelqu'un vous envoie dans l'hiver avec seulement un veston pour aller à quelque place dans un taxi, c'est inhumain.

Mais c'est deux questions différentes. J'aimerais premièrement parler de cette question d'évaluation, les lits d'attente et les lits permanents et l'effet difficile sur les patients et certainement sur les familles.

Mme Gold (Barbra) : Premièrement, le Programme 68 ou le PHPE — le nom change chaque mois — c'est vraiment… pour nous autres, ce n'est pas un bon programme. Je crois qu'on n'a jamais envoyé quelqu'un de notre Programme 68 à la maison. Ils sont tous devenus longue durée. Parce qu'ils sont arrivés comme ça, ce n'est pas compliqué. Moi, je ne suis pas infirmière, ni médecin, je peux regarder les clients qui arrivent dans ce programme. Certainement, ils sont plus que 3 h 30 min de soins, c'est des cas très compliqués, ils ne sont pas en évaluation. Alors, c'est une autre étape pas... Peut-être que les autres établissements, ils ont les autres expériences, mais, pour nous autres, on n'a jamais envoyé quelqu'un à la maison après l'évaluation. Ils sont tous devenus longue durée. Le dumping, envoyer quelqu'un par taxi, ce n'est jamais arrivé avec nous autres. Non. On n'a jamais vu ça dans l'hôpital, à Maimonides ou au CHSLD juif. Les clients arrivent parfois le soir, minuit, ça peut arriver, mais ils arrivent dans une auto, ou avec une ambulance, ou avec un taxi-van, transport adapté, avec quelqu'un qui l'apporte à l'étage. Alors, voulez-vous ajouter?

Le Président (M. Bergman) : Mme Dion.

Mme Dion (Rosalie) : Ce que j'aurais à ajouter, c'est tout simplement par rapport à... Il n'y a pas de dumping de cette façon-là, mais je vous dirais qu'on ressent de plus en plus de pression aussi. Si on avait une travailleuse sociale de l'établissement avec nous... Les équipes sociales se sentent vraiment sous pression d'accepter différentes sortes de clientèles rapidement. Et souvent ce qu'on a sur papier, quand la personne arrive chez nous, on se rend compte que c'est très différent, l'évaluation ne nous démontre pas la même personne, alors là, il faut s'ajuster avec ça. Donc, je ne suis pas certaine que l'utilisation du Programme 68 soit optimale, honnêtement, pour l'instant.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Alors, merci beaucoup. Je voulais vous entendre davantage sur toute la question de l'arrêt du recours au personnel des agences, parce que ça semble être quand même un élément clé de votre succès, c'est-à-dire le taux de rétention dont vous parliez tout à l'heure, qui est quand même très fort, peu de roulement du personnel, pas de recours aux agences. Donc, vous avez un personnel qui reçoit une formation, qui est sensibilisé aux besoins bien spécifiques de la clientèle que vous hébergez. Comment vous avez réussi à ne pas avoir recours aux agences? Parce que je pense qu'il y a des bonnes pratiques qui ont cours dans différents établissements au Québec, puis on doit être capables de s'en inspirer pour les appliquer ailleurs. Et puis je sais que le recours aux agences, notamment en Outaouais, il est très, très élevé. J'aimerais vous entendre un peu sur la façon dont vous êtes arrivés à ce taux de roulement très bas puis à ne pas recourir aux agences.

Le Président (M. Bergman) : Mme Gold? M. Labrecque.

M. Labrecque (Jacques) : On s'est inspirés de notre propre expérience. On venait de Maimonides, et Maimonides n'a jamais utilisé de personnel d'agence. Lorsqu'on nous a demandé, en 2005, d'aller au CHSLD juif de Montréal pour voir qu'est-ce qui se passait, on s'est aperçu qu'il y avait beaucoup d'agences et on s'est aperçu que ça créait beaucoup d'insatisfaction du personnel, beaucoup de manque de continuité dans les soins. Alors, on a réfléchi quelques jours et on s'est donné comme date butoir le 15 octobre 2005 pour...

Mme Gold (Barbra) : On est arrivés le 1er septembre.

• (11 h 50) •

M. Labrecque (Jacques) : On est arrivés au mois de septembre, on s'est donné comme date butoir le 15 octobre 2005 d'arrêter les agences, et on s'est donné quatre, cinq semaines de recrutement intensif, et on est partis à neuf au 15 octobre, plus d'agence. Et, à partir de cette date-là, j'ai eu énormément de téléphones des agences qui se demandaient ce qui se passait, mais on leur a dit : On ne fait plus appel à vos services. Ça a demandé énormément de sacrifices de la part du personnel restant parce qu'évidemment ils avaient une charge de travail. Et on a reconstitué une équipe d'infirmières, d'infirmières auxiliaires et de préposés aux bénéficiaires de notre propre liste de rappel. Et, après trois mois, c'était stabilisé, on avait nos équipes à nous, avec plus de monde, avec le syndicat qui était heureux parce que c'étaient plus de membres, hein? Puis ils arrêtaient de chicaner parce que des agences leur volaient des jobs. Puis on a commencé, et, depuis ce temps-là, ça dure. On n'a pas refait appel aux agences d'aucune façon depuis 2005.

Je pense qu'il faut, en quelque part, décider que c'est fini, pour ceux qui peuvent le faire, puis d'avoir notre partenariat avec le personnel et avec nos syndicats, parce que c'est nos partenaires, d'expliquer la situation, et tout le monde est gagnant dans ça. Mais ça prend une volonté locale, politique, ça prend une volonté de cesser cette pratique-là. C'est très cher pour le réseau, ça ne donne aucun service direct… ou très peu de services directs, je devrais dire. Et ce n'est pas de même qu'on développe un sentiment d'appartenance, ce n'est pas de même qu'on développe une préoccupation pour la clientèle. Si aujourd'hui je suis à une place, demain je suis ailleurs puis ça ne me dérange pas d'être là… Et c'est ce qu'on a développé et on a effectivement beaucoup de succès. Depuis 2005, on n'a pas fait…

Le Président (M. Bergman) : Mme Gold.

Mme Gold (Barbra) : Si je peux ajouter. Si tous les hôpitaux puis tous les CSSS à Gatineau décidaient ensemble de ne pas utiliser les agences, ils ne vont pas avoir le business. Ils doivent engager les infirmières à chaque établissement. Mais, si on trouve que quelqu'un continue à utiliser les agences, ça ne marche pas. Mais, si tout le monde décidait ensemble de couper les agences : On décide le 1er janvier, le 15 avril, ils choisissent une date puis, si tout le monde gardait ça, vous allez avoir un succès.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Mais vous arrivez quand même… En mettant de côté les agences, vous avez aussi un taux de roulement qui est très faible, et ça aussi, c'est un élément. Alors, comment vous vous êtes attaqués… Qu'est-ce que vous faites que les autres ne font pas pour avoir ce taux de roulement qui est…

Mme Gold (Barbra) : …c'est les familles, c'est le conseil d'administration. Ce n'est pas très bureaucratique, tout le monde parle à tout le monde. Moi, je marche dans le centre, je peux parler avec le personnel d'entretien ménager, dans la cuisine, à midi. Ils me disent : Bonjour, Barbra! C'est vrai, on ne voit pas ça dans les autres établissements. Alors, tout le monde est vraiment très proche. Alors, c'est un feeling qu'on a dans les deux établissements. C'est depuis plusieurs années, ça n'arrive pas dans deux semaines. Voulez-vous ajouter? Mais j'ai mes collègues ici, ils sont arrivés à Maimonides, ils restent 15 ans, 20 ans. Jacques est là depuis combien…

M. Labrecque (Jacques) : 18 ans.

Mme Gold (Barbra) : 18 ans. L'ancienne directrice des soins, qui viendra cet après-midi pour présenter — parce que c'est Lucie Tremblay, qui est la présidente maintenant de l'Ordre des infirmières du Québec — était là aussi pour comme 15 ans. Maintenant, j'espère que Rosalie sera là pour 15 ans. Karen est là depuis 10 ans. Alors, c'est aussi au  niveau des cadres, pas seulement au niveau… On a des employés, plusieurs qui travaillent depuis 30 ans au même établissement. Je vous inviterai à notre Long Service Award Ceremony l'année prochaine, c'est vraiment beau.

Mme Dion (Rosalie) : On vous invite tous de venir nous visiter, également.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Avant, je voudrais aussi aborder une autre question — parce qu'on n'a pas énormément de temps — qui est toute la question des adultes, donc tous ceux et celles qui ne sont pas des aînés, qui sont hébergés au centre. Comment on répond à leurs besoins particuliers? Est-ce que vous avez mis en place quelque chose de spécifique pour répondre aux besoins parfois de ceux et celles qui ont des familles, qui ont des enfants, qui ont de jeunes enfants qui viennent mettre de la vie dans les corridors, qui ont des besoins au niveau des activités puis qui ont des besoins de stimulation qui sont autres que ceux d'une personne de plus de 85 ans?

Le Président (M. Bergman) : Mme Dion.

Mme Dion (Rosalie) : Oui. On fait ce qu'on peut, en ce moment, honnêtement, pour répondre à ces besoins-là. Ce n'est pas toujours évident. On a beaucoup d'endroits, à Maimonides entre autres, où on a des accès à des ordinateurs, à Internet gratuit. On a une bibliothèque aussi où certains peuvent aller. On a des aires communes qui sont assez grandes pour les familles. Et on n'a pas d'heure de visite non plus. Donc, la famille qui veut se présenter à toute heure du jour ou du soir peut arriver sans problème. On est très accueillants dans ce sens-là.

On fait ce qu'on peut pour accommoder les besoins particuliers, mais, puis c'est un peu pour ça qu'on en parlait dans notre mémoire, ça devient difficile parce qu'ils sont mélangés avec les autres. On va essayer avec… On a beaucoup de bénévoles. On a des activités à un à un qui peuvent être faites, où on essaie de regrouper cette clientèle-là ensemble pour des activités particulières, mais ce n'est pas évident. Je vais vous avouer que ce n'est pas évident.

Le Président (M. Bergman) : Mme Flam.

Mme Flam (Karen) : On a créé des aires d'activité qui ont l'air vraiment d'un appartement. C'est comme un salon, une cuisine, une table à manger, un «flat screen» télévision. Et, je me souviens, un soir, après qu'on avait fait… On a un résident qui est dans la quarantaine, il a une blonde, il a deux enfants, il avait un chien, il a deux parents, et ce soir-là, c'était sa fête, et dans... J'ai les larmes aux yeux quand je vous raconte cette histoire. Imaginez-vous un homme très jeune qui se trouve dans un CHSLD et puis il est maintenant... C'est le soir, sa mère a apporté la bouffe, le spaghetti est sur le poêle qui est là, dans la section cuisine, la mère avait fait la table avec un gâteau pour sa fête, le chien était là, les enfants étaient là. C'était comme un «snapshot», exactement ce qu'on essaie de faire tous les jours.

Ce n'est pas facile avec presque 400 clients, mais on essaie, on fait l'effort. Ce n'est pas pour rien qu'on est le premier CHSLD Planetree Gold, parce qu'on essaie d'aller un peu plus loin. Notre plan stratégique, on l'appelle notre plan More Than Care, au-delà des soins. On est toujours au-delà des soins. Et ce n'est pas juste moi ou Barbra, c'est les gens qui travaillent dans la cuisine. On a commencé un programme cette année — je ne sais pas si j'ai le temps — on appelle ça Undercover Boss.

Une voix : Not so undercover boss.

Mme Flam (Karen) : Vous connaissez le programme Undercover Boss? C'est quand le CEO d'un organisme, il porte une perruque et il va travailler dans son...

Une voix : Undercover.

Mme Flam (Karen) : …undercover. Mais, chez nous, il n'y a rien qui est «undercover», je vous le dis.

Une voix : Tout le monde connaît tout le monde.

Mme Flam (Karen) : Et puis Rosalie, elle est allée travailler dans le…

Mme Dion (Rosalie) : «Housekeeping». Avec, oui, les gens de la maintenance puis…

Mme Flam (Karen) : «Housekeeping». O.K.? Elle est allée travailler un quart de travail au complet dans le «housekeeping». Vous savez qu'est-ce que c'est, ça, pour voir les gens, voir ça, la directrice des soins faire ça? Elle a porté ses souliers, ses bottes, son uniforme. Et moi, j'étais dans la cuisine et j'ai travaillé toute une journée dans la cuisine. Je trouve, ces personnes qui travaillent, ils sont mes héros maintenant. Ils travaillent tellement fort. Et puis c'était incroyable, ils sont tous mes amis maintenant. Je n'ai jamais faim. Tout le monde veut me faire un bol de soupe parce que j'ai travaillé. Mais ça, là, c'est aller au-delà des soins, et ce n'est pas difficile à faire, ce n'est pas vraiment quelque chose qui coûte beaucoup d'argent, mais c'est l'esprit de corps que nous avons chez nous.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. On peut vous...

Des voix :

Le Président (M. Bergman) : Alors, Mme Gold, Mme Dion, M. Labrecque, Mme Flam, merci pour votre présentation. Je suis très fier certainement de partager votre expertise avec nous. Alors, on vous remercie beaucoup.

Collègues, compte tenu de l'heure, je suspends nos travaux jusqu'à après les affaires courantes, cet après-midi. Vous ne pouvez pas laisser vos documents ici pendant l'heure du lunch.

(Suspension de la séance à 11 h 59)

(Reprise à 15 h 40)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, à l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur les conditions de vie des adultes hébergés en centre d'hébergement et de soins de longue durée.

Nous avons devant nous l'Ordre professionnel des diététistes du Québec. Bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivi d'un échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms, vos titres. Et les prochaines 10 minutes, c'est à vous.

Ordre professionnel des diététistes du Québec (OPDQ)

Mme Gagné (Anne) : Alors, bonjour, M. le Président. Mon nom, c'est Anne Gagné, je suis nutritionniste et présidente de l'Ordre professionnel des diététistes du Québec et je suis accompagnée de Mme France Bernatchez, qui est également nutritionniste, et qui travaille dans le réseau de la santé depuis 30 ans, notamment auprès de la clientèle dans les soins de longue durée, et qui est une jeune retraitée de quelques mois du réseau de la santé. Alors, elle a une expérience de 30 ans. Ce sera intéressant de vous parler d'expériences concrètes.

Alors, je voudrais saluer mesdames les députées, messieurs les députés, et vous remercier de nous recevoir aujourd'hui. Nous avons déjà fait parvenir notre mémoire, et je tiens à remercier ceux qui y ont participé, parce que, souvent, c'est une contribution bénévole, alors, Mme Bernatchez, Mme Annie Chapados, qui est à l'arrière de nous, Mme Nancy Presse, Michel Sanscartier, Caryn Roll, Denise Ouellet, Janick Perreault et Joanie Bouchard.

Alors, considérant que j'ai peu de temps, je vais faire rapidement. Je ne sais pas combien on a pour la période de questions, vous ne me l'avez pas mentionné, M. le Président. Combien de temps pour la période de questions?

Le Président (M. Bergman) : Vous avez, là, 10 minutes, et on va gérer le temps après avec nos membres de la commission. Mais les prochaines 10 minutes, c'est à vous, madame.

Mme Gagné (Anne) : Parfait, merci. Alors, rapidement. Je reconnais plusieurs membres de la députation ici. Nous sommes venus, à l'automne, vous parler déjà de la nutrition et l'alimentation des aînés. Pour faire un rappel et parce qu'on est actuellement en période de Jeux olympiques, parfois je fais une comparaison avec des athlètes qui doivent avoir une alimentation performante, parce qu'ils ont des besoins particuliers, ils doivent avoir… bien, vous savez qu'on gagne de plus en plus. C'est parce qu'entre autres ils ont des nutritionnistes dans leur équipe et il y a une attention particulière à la nutrition. Alors, les aînés, c'est la même chose, en fait. Ils ont des besoins nutritionnels qui sont particuliers, performants.

Et pourquoi? Ce n'est pas les mêmes raisons. Entre autres parce qu'au cours du vieillissement — ça, c'est les hommes, les femmes, on y passe tous — au cours du vieillissement, il y a une perte qui est normale, une perte de la masse osseuse, une perte aussi de la masse musculaire. Et aussi, en vieillissant, on a de multiples pathologies, maladies cardiovasculaires, du cholestérol élevé aussi, ostéoporose, ce qui augmente la vulnérabilité. Il peut y avoir aussi des conditions physiologiques, conditions sociologiques qui diminuent l'apport des aliments. Alors, les besoins nutritionnels ne sont pas comblés, ce qui fait que, souvent, il y a un état de malnutrition.

On en entend parler beaucoup. Qu'est-ce que ça fait, la malnutrition? C'est ce qui fait que la personne, éventuellement, elle est fatiguée, des étourdissements. Elle peut aussi faire des chutes, des fractures. Elle peut se retrouver à l'urgence, ce qui fait que les… Considérant que ses besoins nutritionnels ne sont pas comblés, son séjour à l'hôpital, il peut durer plus longtemps, ce qui fait que les lits sont vides au CHSLD, la personne est en centre hospitalier.

Alors, je vous fais un portrait assez noir, mais on a des solutions. On a trois recommandations à vous faire aujourd'hui. Et, vous savez, c'est un dossier qu'on connaît très bien, on a présenté plusieurs mémoires au cours des ans. Et les trois recommandations que l'on fait, elles sont à la page 5 de notre mémoire. Premièrement, de dépister les problèmes nutritionnels à l'admission et en cours de séjour pour tous les adultes hébergés en établissement de soins de longue durée. La deuxième recommandation, s'assurer de combler les besoins nutritionnels de tous les résidents dans l'offre alimentaire. La troisième, assurer l'accès à des soins nutritionnels en introduisant une orientation ou une norme sur les effectifs de diététistes nutritionnistes dans les CHSLD. On pourrait élaborer un peu plus lors de la période des questions et des échanges.

Lorsqu'on parle, par exemple, de combler les besoins nutritionnels, vous savez, une personne, par exemple, peut avoir un plateau devant elle, mais peut-être qu'elle ne mangera pas tout ce qu'elle a devant elle pour différentes raisons. Peut-être qu'elle n'est pas capable de s'alimenter seule, peut-être aussi qu'il y a eu une mauvaise nouvelle, un décès d'un proche, de son conjoint. Ça peut arriver aussi qu'elle a des problèmes de déglutition. Il peut arriver aussi qu'elle a un plateau devant elle, elle va tout manger, mais ça ne correspond pas aux besoins nutritionnels de cette personne-là, parce que, vous savez, on est au-delà du Guide alimentaire canadien. Alors, c'est pour ça qu'on recommande de faire un dépistage nutritionnel, entre autres, dès l'arrivée. Et les trois recommandations qu'on a présentées ici, elles sont en lien avec le rapport du Vérificateur général, qui a été publié en 2011 et qui fait aussi ces recommandations-là.

Je ne veux pas vous inonder de chiffres, mais j'ai retrouvé, dans un document qui a été publié par le ministère de la Santé en 2011, produit par des gériatres, des médecins gériatres... Et ça dit, entre autres, que «la malnutrition et son corollaire, la perte de poids, sont associés, chez la personne âgée, à une augmentation de la mortalité, qui peut s'étendre de 9 % à 38 % de un an à deux ans et demi après la perte initiale».

J'ai un autre document ici, un article qui a été publié en 2008, parce que je sais que le budget, l'économie, c'est important pour vous aussi, puis les citoyens également. Alors, ce qu'on dit, c'est que la dénutrition, si elle n'est pas traitée, elle entraîne des hausses de coûts reliés aux soins de santé allant de 180 % à 450 % de plus si on ne s'en occupe pas.

Un dernier document qui a été produit par l'Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie, très récent, ça, c'est assez novateur. Alors, c'est un guide des meilleures pratiques en matière d'alimentation dans les CHSLD. Et, lorsque je vous parlais tout à l'heure d'avoir accès à des soins nutritionnels puis d'avoir des ratios… On vous en parlera un peu plus tout à l'heure. Alors, ce qu'on dit dans ce document-là, c'est que… Nous, ce qu'on recommande, c'est un ratio d'une diététiste pour 100 à 250 résidents, et ce qui est écrit ici, c'est que, dans le réseau de la santé actuellement, il y a un diététiste pour 750 résidents. Et ce qu'on dit plus loin, c'est que «cette situation soulève des préoccupations éthiques [considérant que] la littérature [scientifique] indique qu'au moins 60 % des résidents [des] centres d'hébergement souffrent de malnutrition». Alors, vous comprendrez pourquoi c'est un sujet qui nous préoccupe beaucoup. Ça fait des années qu'on en parle.

Puis aujourd'hui je faisais une entrevue avec un journaliste et... parce qu'on a envoyé notre mémoire sur le Web, et puis il m'a posé une question, puis c'est rare que je suis déstabilisée par une question d'un journaliste. Et il m'a dit : Considérant tous ces chiffres-là, l'ampleur du phénomène, que ça fait des années que ça dure puis qu'il y a des solutions, comment vous vous sentez, comme nutritionniste? Et j'avoue que ça m'a... j'ai pris du recul et je lui ai dit : Bien, je peux vous dire un mot : C'est scandaleux. C'est scandaleux qu'on ne fasse rien quand il y a autant de malnutrition, autant de problèmes. On peut parler de pandémie. Puis il y a des solutions, puis ce n'est pas nécessairement d'augmenter les coûts, mais c'est de faire mieux aussi. Alors, je ne sais pas si j'ai encore de temps pour mon 10 minutes, ou...

Le Président (M. Bergman) : ...deux minutes.

Mme Gagné (Anne) : J'ai encore deux minutes. Bon, alors, j'ai bien fait mon devoir. Alors, pour revenir au... On va parler aussi... Parce qu'on parle de soins nutritionnels, mais, je vous ai parlé du plateau, on parle aussi des coûts-aliments, des coûts-repas. Ça, c'est quelque chose qu'il va falloir se préoccuper, parce qu'actuellement dans le réseau, le coût-aliment ou le coût-repas, on inclut tout là-dedans, les ressources humaines, l'équipement, ce qui fait que la valeur réelle, on ne la connaît pas vraiment, puis ce qui fait aussi, comme le Vérificateur général disait, qu'il y a une grande variation dans le réseau de la santé. Si je ne me trompe pas, pour le coût — la page 8 — ça peut varier de 3,92 $ à 13,79 $.

Et nos recommandations aussi, on les base... Parce qu'actuellement il y a deux provinces au Canada, en Ontario et en Colombie-Britannique, où c'est inscrit dans la loi, le coût minimum d'un repas puis aussi les ratios. Alors, les ratios, c'est une nutritionniste par 250 patients hébergés. Alors, c'est inscrit dans la loi. Et puis il y a les agences, et les centres doivent respecter et aussi doivent démontrer aux agences — on les appelle les agences d'accréditation — qu'entre autres le coût minimal a été respecté et aussi le ratio. Alors, en gros, c'est ça. Mais on est prêts pour vos questions, parce que vous en avez sûrement, puis je trouve que c'est important. On n'a pas l'occasion souvent d'échanger avec des parlementaires.

• (15 h 50) •

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné, merci pour votre présentation. Et maintenant, pour le bloc ministériel, Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : 12235   Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Gagné, bonjour Mme Bernatchez. Ça me fait plaisir de vous saluer, de vous accueillir et de pouvoir échanger avec vous. Écoutez, Mme Gagné, je pense que vous nous avez lancé là un cri du coeur qui est un message assez percutant. Je pense que nous sommes tous préoccupés, comme vous, là, des statistiques dont on entend parler et de cette question, je pense, qui est assez fondamentale, de l'alimentation et de la nutrition des personnes très vulnérables physiquement, là, les personnes âgées, notamment en CHSLD.

Quand vous dites : Ça me préoccupe beaucoup, quand vous dites que, selon vous, les risques de nutrition affectent 60 % des résidents en CHSLD, je trouve que c'est beaucoup. On sait que ces risques-là peuvent générer d'autres problèmes de santé, comme des infections ou des plaies et même du délirium, c'est ce que j'ai constaté. J'aimerais vous demander comment vous croyez qu'une intervention plus précoce au niveau de la nutrition pourrait avoir un effet bénéfique et pouvoir diminuer, là, cette donnée statistique assez alarmante qui met 60 % des résidents à risque actuellement.

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : En fait, je vais commencer puis je vais laisser la parole à Mme Bernatchez. C'est pour ça qu'on demande qu'il y ait un dépistage dès l'arrivée de la personne dans le CHSLD, un dépistage des risques nutritionnels parce que plus on intervient rapidement, plus le rétablissement se fait rapidement. Mais il faut aussi qu'il y ait éventuellement une évaluation nutritionnelle individualisée, faite par une nutritionniste, puis aussi que ce soit fait plus tard, dépendamment du degré de risques de cette personne-là, mais, ponctuellement, qu'il y ait une évaluation. Alors, ça, ça fait partie de nos recommandations. Je laisserais Mme Bernatchez, qui a travaillé pendant plusieurs années avec les personnes, peut-être nous donner des exemples concrets pour illustrer ce qu'on vient de dire.

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernatchez.

Mme Bernatchez (France) : Oui. Ça me fait plaisir de poursuivre. Je trouve la question fort pertinente. Dans le quotidien des soins, lorsqu'une personne arrive d'un milieu de soins aigus, qu'elle doit maintenant passer en CHSLD, ils arrivent déjà avec des problématiques multiples. Alors, la diététiste doit revoir l'ensemble des problématiques médicales, l'ensemble de la médication, l'ensemble des conditions pathologiques de la personne et aussi le désir de la personne : Où est-ce qu'elle en est actuellement, compte tenu que maintenant elle ne retournera pas à la maison? Comment elle veut vivre les années qui vont se présenter devant elle? Alors, ça, c'est une étape fort importante, et, si c'est escamoté, la personne va être de plus en plus démotivée à s'alimenter. C'est comme si elle abandonnait.

Alors, il y a intérêt, fort intérêt de s'asseoir dès le début avec elle et sa famille pour voir comment elle voit les années venir, et on peut prioriser les façons de faire dans les choix alimentaires, dans les suppléments, si requis, pour pouvoir avoir une alimentation au quotidien, parce que c'est tous les jours qu'elle va manger, c'est tous les jours qu'elle va être devant ces aliments-là. Est-ce que c'est ça que je veux? Y a-tu des habitudes de consommations qu'on peut juste respecter davantage? Parce que maintenant c'est son mode de vie, ce n'est plus une transition dans sa vie, mais vraiment là où elle va continuer ses prochaines années. Alors, ce temps-là, à l'admission, est précieux justement pour déterminer comment on va aider la personne à cheminer.

Et, en révisant les soins globaux, on s'associe des partenaires de soins, avec les médecins, avec les physiothérapeutes, des ergos, des infirmières, et on fait une approche globale qui permet de bien situer le rôle de l'alimentation dans sa qualité de vie dans son CHSLD. Si c'est escamoté, ça ne peut pas ne pas se détériorer parce que la personne, elle va être devant toujours ses aliments qu'elle ne sait pas si elle va les manger : Avant ça, on ne me donnait pas ça dans l'autre hôpital; ici, on me donne ça, c'est-u correct? Ils vont se voir probablement maigrir aussi, puis là ça les préoccupe : Je maigris, je dois être plus malade… Ils décrochent. Tandis que, quand ils comprennent où est-ce qu'ils en sont, on peut gérer le poids, les sécuriser ou leur dire : Bien, effectivement, il y a une perte de poids non souhaitable, comment on va s'y prendre ensemble?

Alors, c'est des étapes, dès le début, qu'il faut faire le plus vite possible. Si ce n'est pas fait, ça nous est livré à peu près six, huit mois plus tard, puis là il y a une grande détérioration. Donc, ça fait déjà quelque temps qu'elle fait des lésions de pression puis ils ne savent pas trop pourquoi elle ne récupère pas. Ça fait déjà quelque temps qu'elle est hyperconstipée puis elle a mal partout, elle a mal dans le ventre, elle ne sait plus quoi faire. Alors, tandis que, si on pouvait intervenir au plus tôt, on pourrait atténuer énormément ces inconforts-là ou ces difficultés-là. Est-ce que ça répond un peu?

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Merci. Merci pour votre éclairage. Écoutez, j'aimerais vous parler d'un autre sujet. Vous savez qu'avec les années à venir l'alourdissement des clientèles dans les CHSLD va générer de bien grands défis à bien des niveaux. Et j'aimerais vous parler un petit peu de votre vision, là, non seulement de ce qu'on offre comme nourriture aux personnes âgées, mais de la manière dont on le fait en termes d'organisation du travail. Vous savez, si la clientèle s'alourdit de plus en plus, et qu'il y a de plus en plus de personnes qui requièrent une aide à l'alimentation, et qu'on a des préposés aux bénéficiaires qui doivent alimenter des personnes de plus en plus en groupe dans un temps record — et il n'est pas rare de voir des préposés aux bénéficiaires nourrir à la chaîne quatre, cinq, six personnes autour d'elles — comme professionnelles de la nutrition, comment vous percevez cette situation? Et est-ce que vous avez des recommandations par rapport à la façon d'alimenter les personnes?

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernatchez.

Mme Bernatchez (France) : Oui, vous avez tout à fait raison, le temps du repas, c'est un moment crucial pour réconforter, sécuriser, et, si ça ne se fait pas dans les bonnes conditions, bien ça amène justement un état de stress de plus, un état d'anxiété. Alors, c'est un moment crucial. Il faut effectivement avoir suffisamment de temps à permettre à la personne de prendre la bouchée, de l'observer puis de voir si elle a la capacité de mâcher, d'avaler les choses. Ou est-ce qu'il s'est produit quelque chose dans la journée? Moi, j'ai toujours trouvé que le moment d'observation clinique à l'heure du repas parle énormément de la condition générale de la personne, son état d'éveil. Comment se fait-il qu'aujourd'hui elle n'est pas là, elle n'est pas présente, elle ne répond pas? Alors, ça parle beaucoup de la condition médicale de la personne puis pourtant c'est le moment très simple de la vie, s'alimenter. Alors, si le personnel clinique n'est pas disponible pour l'accompagner à ces moments-là, ils perdent des moments précieux d'observation clinique, et la personne n'a pas les soins requis.

Alors, il faut effectivement un temps de repas, une durée de repas suffisante pour permettre la consommation et aussi le positionnement, parce que, si on la couche tout de suite, bien, ça va refouler, ça crée des problèmes secondaires. Alors, le temps est nécessaire. L'hygiène de la bouche après le repas, bien vider la bouche pour éviter, justement, une détérioration de la bouche et aussi des risques de faire trop d'infection dans la bouche, ce qui pourrait entraîner des problèmes respiratoires parce que par la suite il y a formation de bactéries qui peuvent s'engager dans les poumons. Alors, c'est autant des moments de préparation : l'éveiller comme il faut, l'assister pour faciliter la prise alimentaire et l'hygiène après le repas pour éviter des reflux ou une détérioration de la qualité buccale.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de…

Mme Gagné (Anne) : Si je me permettais de…

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Oui. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : S'il vous plaît, oui.

Mme Gagné (Anne) : Alors, si vous me permettez d'ajouter. Vous savez, le ministère de la Santé — je pense que c'est en 2011 — a sorti un cadre de référence pour que les établissements aient des politiques alimentaires. Et, dans ces recommandations-là, c'est certain que les soins nutritionnels, c'est une chose, mais quand même il y avait des recommandations qui étaient faites, entre autres — c'est à la page 10 — qui comprennent l'environnement alimentaire, s'assurer aussi le développement des compétences du personnel, s'assurer de la qualité globale des aliments et des boissons offerts puis offrir des repas et des collations de haute valeur nutritive. Mais ici c'est sûr qu'on parle d'une clientèle qui a des besoins spécifiques. Mais c'est déjà dans un cadre de référence. Alors, le ministère demande aux établissements d'avoir des politiques, mais il faut que les... on dit : Les babines suivent les bottines ou les bottines suivent les babines. Ça fait que, là, c'est bien beau d'avoir des cadres de référence puis des politiques, mais il faut qu'il y ait un suivi, il faut qu'il y ait des indicateurs, il faut qu'il y ait des ressources qui soient mises en place ou que les ressources soient mieux formées. Ce n'est pas toujours une question d'ajouter de l'argent non plus. Mais déjà, vous savez, votre question, là, déjà le ministère a ce souhait-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous 4 min 30 s.

Mme Proulx : Oui. Bien, simplement, une dernière question en lien avec ce que vous venez de mentionner : Est-ce que vous, comme professionnelles de la nutrition, vous avez l'impression… Est-ce que vous constatez que les personnes chargées d'aider à l'alimentation des personnes en CHSLD, les résidents en CHSLD, elles ont les connaissances suffisantes, qu'elles ont été formées, sensibilisées à l'importance que ça peut représenter, là, tout ce que vous avez décrit? Parce que vous êtes les expertes et vous avez plein d'indicateurs dont vous pouvez tenir compte. Est-ce que vous pensez que le personnel qui aide les personnes est suffisamment bien formé et sensibilisé à prêter l'attention qu'il faut à cette dimension-là?

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Écoutez, si c'était dans la politique, dans le cadre de référence du ministère, c'était la volonté du ministère, ça veut dire qu'ils ont évalué que ce n'était pas suffisant. C'est que ça répond un peu à votre question. C'est certain qu'il y a quand même une sensibilisation qui est faite. Tantôt, je vous ai parlé d'un document, là, de l'agence de la santé de la Montérégie. Mais le problème, c'est que ce n'est pas uniforme, c'est très, très variable. Alors, c'est ça, aussi, un des problèmes.

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernatchez.

• (16 heures) •

Mme Bernatchez (France) : J'aimerais ajouter. On l'a mentionné, au début, j'ai travaillé 30 ans dans le secteur de l'hébergement de longue durée. Au début, les gens, lors des repas, ils agissaient plus en bonne mère de famille, mais aujourd'hui je sens beaucoup plus de connaissances sur l'importance de… Ce n'est pas des caprices. Je sens qu'il y a beaucoup plus d'intérêt, d'importance à porter aux aliments pour le bien-être de la personne, alors. Mais il reste un niveau supérieur à atteindre encore, qui fait que l'acte de manger devient un acte de soins, qu'ils ne sont pas tout à fait… loin de là, bien du monde. Alors, il y a un souci de vouloir faire mieux, ils sont sensibilisés, éveillés à ça plus qu'il y a 15, 20 ans, mais il faut encore les outiller de façon plus optimale pour que le temps du repas soit un moment de soins et non pas juste un moment de ne plus avoir faim après.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Je ne sais pas si mes collègues voulaient…

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson. Il vous reste trois minutes.

Mme Gadoury-Hamelin : Oui. Bien, merci d'être là, mesdames, merci de nous apporter cet éclairage-là de la situation en CHSLD. On a parlé, dans les groupes précédents aussi, qu'on a de plus en plus de gens dans les CHSLD qui sont en perte cognitive. C'est un ratio quand même important. J'imagine que ça apporte un lot aussi supplémentaire au niveau de la nutrition quand on est dans cette voie-là ou dans cette situation-là. Est-ce que vous avez des solutions ou des choses qui pourraient être faites différemment de ce que vous avez observé?

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernatchez.

Mme Bernatchez (France) : Il faut beaucoup de présence lors des repas. Dans les attitudes des soignants, ce que nous recevons beaucoup actuellement, c'est une collaboration pour la cueillette d'observation des repas : qu'est-ce que la personne a mangé, quelle était son attitude. Et le diététiste doit se rendre, sur le temps des repas, observer la personne qui n'est pas si consciente que ça, pour pouvoir présumer de ses choix, de ses préférences et aversions. Et c'est là d'où l'importance de la famille ou du représentant de la personne pour pouvoir avoir des échanges avec ces gens-là : On a observé qu'elle ne prend jamais le lait, elle ne prend aucun produit laitier, y a-tu quelque chose… Bien, la personne ne peut pas nous l'exprimer, mais la famille pourra dire : Ça me surprend, elle n'a jamais fait ça, elle prenait toujours son lait avant. Donc, on va travailler autrement, on va l'amener sur… Bon, ça ne sera pas par dégoût qu'elle ne le prend pas, il y a quelque chose qui se passe.

Alors, c'est d'observer puis d'être très présent. Et le personnel clinique est de plus en plus éveillé à nous informer de ça. Mais nous, il faut aller plus loin. Si elle n'a jamais pris de lait de sa vie, ça ne nous donne rien d'essayer de lui trouver des suppléments qui ressemblent à du lait. Donc, il faut trouver d'autres types de façon de la nourrir qui ne ressemblent pas à du lait puis qu'on va atteindre les objectifs. Ça, c'est les outils réguliers du diététiste, le technicien qui va pouvoir le faire. Mais ça part des observations puis des profils médicaux. Elle peut ne pas manger certains aliments, mais, si ses paramètres biochimiques restent très beaux, son poids reste stable, on va dire : Ça va bien, c'est une période transitoire peut-être.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant pour le bloc pour l'opposition officielle… Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Encore faudrait-il qu'il y ait suffisamment de nutritionnistes parce que, justement, ce sont des personnes qui ont des besoins particuliers et intenses même. Alors, on a parlé tantôt de ratios, c'est une de nos recommandations, qui était d'ailleurs appuyée par le Vérificateur général.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci, M. le Président. Mmes Bernatchez, Chapados, Mme Gagné, je considère que c'est très important, le sujet de l'alimentation. Moi, je suis une personne qui aime manger et je pense qu'on a le droit de manger, de bien s'alimenter jusqu'à la fin de nos jours. Vous savez, j'étais responsable du vieillissement actif, on a fait un outil ensemble pour travailler en amont — justement, ma collègue posait la question sur comment on peut, en amont… — un outil pour empêcher les personnes de se retrouver en situation de dénutrition. Et je crois que vous le confirmez dans votre document, souvent les personnes qui arrivent en CHSLD, ce sont des personnes qui sont en situation de dénutrition, là, souvent très avancée. Alors, c'est la raison pour laquelle vous dites : On doit immédiatement poser un diagnostic pour être capables peut-être de faire en sorte que la personne soit mieux alimentée.

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Votre message est tout à fait ça. En fait, il faut travailler en amont. Les personnes y arrivent, il y a des statistiques là-dessus. Ça varie parce que les méthodes d'évaluation sont différentes, là. Mais elles arrivent déjà en dénutrition en CHSLD. Alors, s'il n'y a pas de dépistage qui est fait puis s'il n'y a pas d'évaluation qui est faite, bien là ça va aller très, très rapidement.

D'ailleurs, on a fait un sondage — je ne crois pas que je vous en ai parlé encore, c'est dans notre mémoire — on a fait un sondage auprès de nos membres qui travaillent auprès des personnes, des adultes hébergés en soins de longue durée et, quelques statistiques : 27 % de ces personnes ont répondu que le délai d'attente est de un à trois mois avant d'avoir une consultation; 45 %, le délai d'attente est de une à quatre semaines. Vous comprendrez que, d'ici trois mois, là, une personne qui arrive déjà dénutrie, la cascade, elle est très rapide, là. Et le dépistage peut permettre ça, justement, de cibler les cas plus urgents puis aussi d'établir le besoin, entre autres, de nutritionniste. Une autre statistique, du sondage qu'on a effectué : 65 % des centres n'ont pas instauré de dépistage des problèmes nutritionnels à l'admission. Ça fait qu'il y en a quand même 65 %.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : C'est important, ce que vous dites. C'est que les personnes ne sont pas forcément en situation de dénutrition dans le CHSLD, mais ça arrive bien avant. Souvent, ce sont des personnes qui vivent seules, qui ne s'alimentent pas ou peu, qui ont peu de services de popote roulante et qui arrivent dans des situations incroyables en CHSLD.

Bon, il y a quelque chose, moi, qui me fatigue depuis des années, c'est de savoir que, dans des endroits, c'est 5,20 $ par jour; dans d'autres endroits, c'est 7,15 $ par jour. Moi, je pense personnellement — et je le pense depuis un bout de temps, on en avait parlé — qu'on devrait avoir une loi, une loi qui fait en sorte que c'est homogène partout et qu'on doit avoir un montant fixe pour l'alimentation. Parce que parfois on dit : Bon, 7,15 $, ça comprend les coûts de fabrication des aliments, par exemple, de cuisine, dans les cuisines; à 5 $, les coûts, ils ne sont pas compris. Pour qu'il y ait cette transparence et aussi faire en sorte qu'on ait, dans cette loi, pour les personnes qui sont en situation de déglutition, par exemple, c'est quoi, les aliments puis c'est quoi... qu'est-ce que ça devrait comprendre. Je ne le sais pas, là, mais moi, je pense qu'on est rendus là.

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Effectivement, c'est une excellente idée. D'ailleurs, en Ontario et en Colombie-Britannique, je vous l'ai mentionné tout à l'heure, c'est dans la loi. Mais, en plus d'avoir une variabilité, là, parce que ce n'est pas seulement le coût-aliment, comme vous l'avez dit, il y a les équipements, les ressources humaines, en fait, le coût-ratio, ratio-aliment ou ratio... ils appellent ça aussi ratio-repas, coût-repas, c'est un indicateur de performance pour les établissements. Imaginez-vous! Ça fait que plus le coût est bas puis plus les établissements sont performants. Est-ce qu'on ferait ça avec un médicament? C'est aberrant, là! Le système est fait comme ça actuellement. Ça n'a pas de bon sens!

Ça fait que c'est pour ça que, dans notre recommandation, on dit effectivement qu'il faut qu'il y ait un coût minimum et on suggère aussi de nommer un groupe d'experts qui va se pencher là-dessus, parce qu'on n'en a pas mis, nous, là. Bon, ça demande réflexion, mais effectivement il faut vraiment changer ça parce que... Tu sais, aujourd'hui, on ne parle plus, là, du Guide alimentaire canadien pour ces personnes-là, on parle de soins nutritionnels. L'aliment, là, est devenu... c'est le médicament. Je parle… «aliment», on parle de nutrition. D'ailleurs, les nutriments, vitamines, minéraux, les micronutriments, le zinc… Alors, on est loin, là, du coût-repas avec tout ce qu'on met là-dedans. Puis il faut faire un profit. Ça n'a pas de bon sens.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : En même temps, il faut comprendre que des personnes à un grand âge qui sont, souvent, malades mangent moins que des personnes qui sont en très bonne forme. Alors, souvent, les gens sont étonnés : Ah! Comment vous faites, 5 $ ou 7 $ par jour pour nourrir quelqu'un? Bien, souvent ces gens-là mangent moins, peu.

Et je me souviens d'une expérience qu'on a vécue ici, à l'Assemblée nationale, et que j'avais vécue aussi en consultation publique. C'est une entreprise, au Québec, qui reproduit des aliments pour les personnes qui ont des problèmes de déglutition. Je pense que c'est Epikura. Je vais nommer l'entreprise. Il y en a peut-être d'autres maintenant. Alors, ça ressemble à une carotte, ça ressemble à une tranche de jambon, à un ananas. Et on m'a dit que les personnes avaient le goût de manger davantage quand ils voyaient la représentation du légume ou de la viande, plutôt que d'avoir un élément qui ressemble à une boule que les gens appellent le «manger mou», que je n'aime pas comme expression, là.

Mme Gagné (Anne) : Donc, en fait, c'est une...

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

• (16 h 10) •

Mme Gagné (Anne) : Excusez, M. le Président. Je suis trop rapide. Alors, effectivement, les conditions physiologiques et médicales des personnes âgées, éventuellement, en raison de problèmes de dysphagie, de déglutition et autres, la texture des aliments doit être modifiée. Donc, c'est sûr qu'il faut qu'il y ait une évaluation nutritionnelle qui soit établie puis évaluer sous quelle forme ces aliments sont mangés. Mais ce n'est pas toujours une question de quantité, c'est surtout aussi… on parle de qualité, c'est ça qui est important, d'où ce qui est important, c'est de faire une évaluation nutritionnelle pour combler les besoins nutritionnels. Alors, oui, il y a différentes façons de faire, mais ce qui est important au départ, c'est qu'il y ait un dépistage puis qu'il y ait une évaluation nutritionnelle parce que chaque personne a des besoins différents. Alors, c'est pour ça qu'on parle de combler les besoins nutritionnels. D'ailleurs, en Ontario, ça aussi, c'est réglementé, le plateau que la personne reçoit, ça doit combler 100 % de ses besoins nutritionnels. Alors là, on est au-delà du guide alimentaire. C'est un menu qui est spécifiquement pour cette personne-là. C'est inscrit dans la loi, ça.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, vous abordez un élément qui me préoccupe. Comment on fait pour concilier les besoins nutritionnels de tous les résidents d'un CHSLD? Parce que vous avez porté attention aux besoins spécifiques des aînés, mais, dans nos CHSLD, on a également des adultes qui sont hébergés, qui sont parfois âgés, qui sont parfois dans la vingtaine, parfois dans la quarantaine et donc qui ont des besoins différents. Et est-ce que c'est possible pour un établissement, justement, de concilier toutes ces demandes-là, tous ces besoins-là? Puis on s'y prend comment pour y arriver à l'intérieur, évidemment, des barèmes, là? Je comprends qu'il y a une question de coût, il y a une question de disponibilité. Mais comment on peut faire pour bien répondre aux besoins nutritionnels de toutes nos clientèles et d'arriver avec quelque chose qui entre à l'intérieur de certains paramètres de…

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Bien, en fait, c'est sûr qu'on a axé notre mémoire sur la clientèle des personnes âgées parce que c'est la clientèle qui est en grande partie dans ces centres-là, mais, vous savez, c'est toujours le même principe, hein? Que j'aie devant moi une personne de 10 ans, 11 ans, 20 ans, 50 ans, femme, homme, il y a une évaluation nutritionnelle qui est à faire. C'est toujours la même base, en fait : déterminer ses besoins selon sa condition médicale, son âge, les médicaments qu'elle prend, si elle fait des allergies. Par la suite, il y a un plan de traitement nutritionnel qui est déterminé puis par la suite un suivi. Alors, peu importe la clientèle, c'est ainsi que l'évaluation est faite puis que le plan de traitement est déterminé. Je ne sais pas si Mme Bernatchez voulait ajouter de quoi.

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernatchez.

Mme Bernatchez (France) : C'est tout à fait dans le même sens. Au fond, si la personne est plus jeune, qu'elle a un plus grand appétit, le profil va devoir se faire pareil, mais on va conclure avec une portion augmentée ou double portion de quelque chose. Si la personne est, justement, en perte d'appétit et d'intérêt, on va donner des demi-portions, mais on va combler les besoins nutritionnels avec des aliments enrichis pour en arriver à dire : Bien, elle mange peu, dans peu de volume, mais elle a tous ses nutriments. Mais c'est pour ça qu'on appelle ça des plans nutritionnels individuels. Dépendant du requis de la personne, on va ajuster l'offre et le volume à servir.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau, il vous reste 3 min 30 s.

Mme Vallée : Qu'est-ce qu'on fait actuellement? C'est quoi, la situation actuelle dans les CHSLD au Québec?

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernatchez.

Mme Bernatchez (France) : Actuellement, il n'y a pas assez de diététistes pour offrir un plan de soins nutritionnels individuel dès l'arrivée de quelqu'un en CHSLD. L'urgence va se manifester à un moment donné parce qu'il va y avoir détérioration. Le médecin va signifier une demande de consultation par un diététiste, et, dépendant des disponibilités du personnel diététiste, bien, il va être sur la liste des personnes à voir dans les derniers. Alors, il y a un délai majeur qui peut s'inscrire par non-disponibilité du service à donner.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Donc, ce que je comprends, c'est que cette évaluation-là n'est pas faite en amont, on la fait lorsque, la personne, son état de santé présente des signes de détérioration. Et là, à ce moment-là, on se penche sur la question, à savoir : Est-ce que cette personne-là reçoit tous les éléments nutritionnels dont elle a besoin?

Mme Bernatchez (France) : Tout à fait.

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Je pourrais reprendre les éléments du sondage de tout à l'heure. Quand je vous disais qu'on a sondé nos membres qui travaillent dans les centres de soins de longue durée, il y a 65 % des centres qui n'ont pas instauré de dépistage dès l'arrivée; puis il y a un délai d'attente aussi pour une consultation, de une à quatre semaines, 45 % ont répondu ça; puis, 25 % de nos répondants, le délai d'attente peut être de un à trois mois.

Donc, il se fait déjà des choses, mais il faut faire plus. C'est plutôt qu'est-ce qu'on ne fait pas actuellement, là. Il y a les ratios de nutritionnistes, mais il y a aussi le service alimentaire, il y a aussi… On a parlé tantôt de la personne qui ne peut pas s'alimenter seule, il faut que quelqu'un l'accompagne. Il faut prendre le temps aussi, je ne sais pas qui de vous l'a mentionné tout à l'heure très bien, il faut qu'elle ait le temps de s'alimenter, de finir son plateau, parce que, si elle en prend la moitié, bien c'est...

Puis ce sont des personnes qui sont vulnérables au niveau physiologique, au niveau pathologique. Alors, le déclin va très rapide, hein? S'il y a un repas, deux repas de sautés, là, ça va très rapidement. Ce n'est pas comme nous, là, si on saute un repas, on a peut-être un peu d'étourdissement, puis, même encore, il y en a... Mais les personnes âgées, non, parce qu'elles sont déjà vulnérables. Alors, d'où l'importance d'avoir un suivi. Puis le suivi peut-être par la personne qui va lui offrir son plateau, qui va l'aider à manger, elle peut vérifier certaines choses aussi, mais c'est de sensibiliser, en fait, tout le milieu, parce que ce n'est pas seulement la nutritionniste, c'est toute l'équipe interdisciplinaire puis c'est aussi les gens qui travaillent autour, là. Mais c'est certain que, l'évaluation nutritionnelle puis le traitement nutritionnel, je ne veux pas être corporatiste, mais ce n'est pas des plombiers que ça prend, c'est des nutritionnistes. Ça fait que… C'est ça.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci de votre présence. Je suis tout à fait d'accord avec vous et j'ai constaté à plusieurs reprises effectivement qu'il y a même des gens qu'on avait classés en perte d'autonomie sévère, finalement on se rendait compte — entre autres, les cas de démence — que le seul problème, c'était qu'ils étaient dénutris chez eux, seuls, oubliaient de manger, et finalement, une fois qu'on leur redonnait à manger, reprenaient de la force, mais reprenaient aussi un niveau mental plus élevé. Alors, je suis tout à fait d'accord avec vous.

Moi, j'aimerais vous entendre... Parce qu'on a aussi beaucoup parlé des milieux de vie, et, pour moi, le vieillissement, s'il reste un plaisir qu'on a, c'est celui de manger, et je trouve, dans nos CHSLD, souvent, qu'on n'a pas créé une atmosphère autour du repas. On a souvent l'impression qu'on est à l'hôpital, qu'on nous sert un plateau puis... Moi, je mange avec les yeux, là, personnellement, puis je sais que beaucoup d'entre nous le font. Avec les années ou avec le temps, on dirait qu'on a négligé d'avoir une atmosphère autour de la nourriture et on a un horaire très rigide qui ne convient pas toujours à tout le monde. Il y a des gens qui ne veulent pas manger le matin, ils ont besoin de bouger un peu puis après ça s'installer au déjeuner.

Alors, est-ce que vous avez des recommandations à faire dans ce sens-là? Quand on parle de créer des milieux de vie, là on sait que de plus en plus on veut aller vers des ressources intermédiaires. Est-ce que vous avez des recommandations à faire à ce niveau-là?

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Bien, en fait, quand je vous ai parlé tout à l'heure du cadre de référence du ministère de la Santé qui a été publié autour de 2010, on en parle là-dedans, justement, des solutions puis de comment rendre l'environnement favorable à ça. Puis, oui, c'est important. Puis là on a peut-être plus parlé, là, de pathologie puis de médication, mais, dans notre discours, les nutritionnistes, il y a ça aussi, le plaisir de manger. Parce que la personne peut avoir le plateau le plus nutritif, mais, si elle n'a pas de plaisir, si elle n'est pas accompagnée, si l'environnement n'est pas là, bien elle ne mangera pas. Ça fait que c'est un tout, effectivement. Je ne sais pas si France…

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernatchez.

Mme Bernatchez (France) : Il y a beaucoup d'efforts qui se font dans ça. Dans le calendrier annuel, les fêtes statutaires sont signalées par le menu. À Noël, Pâques, la fête des Mères, la fête des Pères, il y a toujours quelque chose qui signale l'événement dans l'année. Ça aide aussi, ça contribue à situer la personne aussi par rapport au contexte social. Et on a beaucoup de feed-back de la part des personnes hébergées que c'est le fun, ils aiment ça. Ça n'a pas besoin d'être très élaboré, mais c'est significatif. Leur anniversaire, ils ont leur cadeau, ils ont leur gâteau d'anniversaire puis...

Alors, il s'en fait de plus en plus, des efforts dans ce sens-là. Bien sûr que, si les argents étaient disponibles pour que les repas soient un peu plus élaborés, plus intéressants, c'est ça qu'on souhaiterait. Parce qu'il y a des milieux qui sont peut-être plus avantagés que d'autres par rapport à la disponibilité monétaire. Mais il y a des efforts majeurs. Mais effectivement il faudrait en faire plus.

Puis j'abonde tout à fait dans le même sens que vous, dès que la personne va se réhydrater et s'alimenter, on voit une nette amélioration de sa présence, de son intérêt par rapport aux gens autour d'elle, commence à reconnaître que d'autres sont pires qu'elle, d'autres sont mieux qu'elle, qu'au début c'est tout confus. Alors, on voit que l'alimentation est un élément majeur, qui aide beaucoup à améliorer la condition de vie de la personne.

• (16 h 20) •

Mme Gagné (Anne) : Puis on en a parlé, là, les conditions médicales, tout ça, le plaisir de manger, mais c'est aussi la qualité de vie de ces personnes-là, hein? C'est vraiment... c'est la qualité de vie, là, parce que c'est un milieu de vie, elles vont être là pendant plusieurs années. Si la personne est confuse, si la personne est fatiguée, s'il y a des complications médicales, elle est où, la qualité de vie de ces personnes-là? Surtout qu'on peut faire des choses. C'est concret.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Mme Gagné, Mme Bernatchez, merci d'être ici avec nous aujourd'hui...

Mme Gagné (Anne) : Est-ce que peux ajouter juste une petite chose?

Le Président (M. Bergman) : Mme Gagné.

Mme Gagné (Anne) : Possiblement que vous allez aller en élection bientôt, en campagne électorale et, habituellement, vous visitez des centres de personnes âgées. Bien, demandez-leur quand est-ce qu'ils ont vu une nutritionniste, puis qu'est-ce qu'ils mangent, puis... Posez-leur la question. Vous allez les visiter bientôt, là...

Une voix : On va manger avec eux autres.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Alors, merci d'être ici avec nous et partager votre expertise.

Et je demande à l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec pour prendre leur place à la table et je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 16 h 21)

(Reprise à 16 h 23)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec.

Bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms et vos titres. Et le prochain 10 minutes, c'est à vous.

Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ)

Mme Tremblay (Lucie) : Bonjour. Je suis Lucie Tremblay, je suis présidente-directrice générale de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui de ma collègue Ginette Bernier, qui est vice-présidente de l'ordre; d'aussi Madeleine Lauzier, qui est directrice à l'ordre; et finalement de Charlène Joyal, qui est présidente du comité jeunesse, toujours à l'ordre des infirmières.

Alors, premièrement, merci de nous accueillir aujourd'hui pour qu'on puisse discuter avec vous des conditions de vie des adultes hébergés. J'ai le goût de commencer en vous disant que les grandes sociétés se démarquent par leur capacité de prendre soin des gens les plus vulnérables. Et nous, les infirmières, on veut être au rendez-vous parce qu'on considère que les personnes âgées qui vivent dans nos CHSLD et qui n'ont pas d'autre choix que de vivre dans ces CHSLD-là à cause de leur état de santé et la maladie, la perte d'autonomie, les handicaps duquel ils sont atteints, ils ont besoin de soins. Et on considère que c'est notre devoir de les soigner. Ces gens-là, c'est les gens qui ont construit notre présent, et, dans le respect de nos aînés, c'est essentiel de leur offrir des soins pour qu'ils puissent vivre les derniers mois, les dernières années de leur vie dans la dignité.

Alors, aujourd'hui, je vais vous proposer une courte présentation avec une description de la clientèle, les besoins de ceux-ci, comment la contribution de l'infirmière peut améliorer les conditions de vie de ces personnes-là, et aussi on va terminer avec quelques recommandations.

Alors, les personnes qui vivent de plus en plus longtemps à domicile font en sorte que, quand ils arrivent en hébergement, ils sont de plus en plus hypothéqués, ils ont des besoins de santé très importants. Ils ont plusieurs maladies chroniques, ils ont souvent des problèmes de santé physique, des déficits cognitifs, des problèmes de santé mentale, des troubles de comportement aussi ou des symptômes comportementaux qui sont associés à la démence. La combinaison de tous ces problèmes-là, c'est ça qui fait que c'est si complexe d'intervenir auprès de ces gens-là. Ce n'est vraiment pas une tâche qui est simple.

Plusieurs d'entre eux ont aussi des conditions de santé qui sont instables, qui nécessitent une certaine évaluation pour s'assurer qu'on leur donne les soins dont ils ont besoin. Leur état de santé fait en sorte qu'en moyenne… et là la littérature peut varier un petit peu, là, mais, en moyenne, ils vont prendre sept médicaments par jour, et, on le sait, après cinq médicaments, il y a tout le problème des interactions qui se met de la partie. Alors, la contribution de l'infirmière, du médecin, de la pharmacienne fait en sorte qu'on est capables de contribuer à l'amélioration de la qualité de vie de ces gens-là.

À cause de leur grand âge, à cause des maladies qui les accablent, une personne sur cinq va aussi décéder au courant de l'année, et la plupart de ces gens-là vont nécessiter d'avoir des soins de fin de vie. Et ce n'est pas mince tâche parce que — je vous ai décrit un peu le portrait de ces gens-là — il y a des évaluations pointues qui doivent être faites, on doit aussi s'assurer de soulager la douleur, mais aussi de les accompagner et d'accompagner leurs proches parce que ce n'est pas parce que la personne qu'on aime, elle est âgée qu'on est capable de la laisser partir sans être accompagné. Une mère, on en a juste une; un père, on en a juste un. Et c'est toujours très difficile.

Alors, les clientèles des CHSLD ont de nombreux besoins. Ils ont des besoins d'évaluation approfondie pour qu'on puisse évaluer les conditions, qui sont évolutives — hein, ce n'est pas stagnant dans le temps — faire les meilleurs choix des traitements, des approches dont ils ont besoin, faire des suivis de leur situation, coordonner aussi tous les soins qui leur sont donnés. On a besoin d'une bonne gestion de médicaments, j'en ai parlé tantôt, mais aussi des activités de prévention : prévention du risque de chute, prévention des plaies, du delirium — j'entendais mes collègues en parler — des infections nosocomiales, aussi s'assurer d'une utilisation qui soit appropriée, par exemple, des mesures de contention puis essayer de les éliminer au plus possible. Tout au long du séjour, le résident, lorsqu'il est capable… mais sa famille veut aussi être tenue au courant de ce qui se passe.

Alors, c'est quoi, la contribution de l'infirmière? C'est sûr que les CHSLD, c'est des milieux de vie, mais c'est aussi des milieux de soins, et ça va le devenir de plus en plus parce qu'on le voit, il y a un alourdissement des besoins de cette clientèle-là. Nous, on croit profondément que d'avoir une présence infirmière 24 heures par jour, sept jours sur sept, c'est un incontournable. L'évaluation de l'infirmière, elle permet entre autres de donner des directives aux infirmières auxiliaires, aux préposés. Ça permet aussi de faire tout le suivi, la coordination, la mise en place de programmes préventifs, l'évaluation des résultats puis le réajustement aussi des traitements qu'on fait. Mais la présence 24 heures aussi ce que ça veut dire, c'est que l'infirmière, elle est capable de colliger de l'information, de l'analyser et de la partager avec le restant de l'équipe interdisciplinaire, notamment avec le médecin, pour pouvoir s'assurer que chacun va être capable de réajuster le plan de traitement de ces personnes-là.

L'autre chose qu'il est superimportant de savoir, c'est que, lorsqu'il y a des infirmières en nombre suffisant et en présence continue, on est capable de diminuer de 45 % à 67 % les hospitalisations. Non seulement ça a une influence sur les coûts, mais ça a une influence sur la qualité de vie des résidents eux-mêmes, puisqu'on le sait, un séjour à l'hôpital, ce n'est pas les conditions optimales pour eux, et il y a toutes sortes de risques de plaie, d'infection nosocomiale, de delirium, et là j'en passe. Ce qu'on sait, c'est qu'une journée immobilisé, c'est une semaine de réadaptation, et ça a des coûts pour la personne, ça a des coûts pour le système.

Il y a plusieurs rapports, en ce moment, qui font état qu'il y a des lacunes dans les CHSLD, et nous, on pense que la présence en nombre suffisant d'infirmières, c'est la solution pour résoudre beaucoup de ces lacunes-là. En ce moment, plusieurs résidents, leur famille, certaines infirmières et même des directrices de soins infirmiers s'inquiètent de voir la présence des infirmières diminuer dans ces centres-là alors que ce qu'on constate, c'est qu'il y a un alourdissement des besoins de la clientèle, les gens arrivent plus malades, plus handicapés. On s'étonne un petit peu de voir comment cette diminution-là est en train de devenir une tendance, une tendance à retirer les infirmières sur certains quarts de travail, comme la nuit, le soir, les fins de semaine et... Moi, j'ai travaillé en CHSLD longtemps dans ma vie. Il s'agit de passer une nuit en CHSLD pour savoir que les résidents ne dorment pas tous, ils ont des besoins. Ils ont besoin d'être évalués, justement, pour savoir pourquoi ils ne dorment pas, mais aussi il y a toutes sortes de risques qui sont associés à ce comportement-là.

• (16 h 30) •

Alors, c'est quoi, un nombre d'infirmières en nombre suffisant? La littérature, ce qui se passe en Angleterre, aux États-Unis, suggère que c'est une infirmière pour 10 résidents, c'est en nombre absolu. En ce moment, en nombre absolu, au Québec, en moyenne, c'est une infirmière pour 20 résidents. Il y a donc une réflexion qui s'impose.

Alors, qu'est-ce qu'on vous propose? On pense que le gouvernement devrait garantir aux résidents qui vivent en CHSLD une présence 24 heures sur 24, sept jours par semaine, pour s'assurer qu'on réponde aux besoins réels de cette clientèle-là, que les CHSLD offrent à leurs résidents, bien sûr, des milieux de vie, mais aussi des milieux de vie qui sont accompagnés de soins, de soins infirmiers pour répondre à leur condition physique et mentale.

On veut aussi s'assurer qu'on est en mesure d'accompagner les proches aidants qui sont là pendant tout le séjour de la personne, qui peut durer plusieurs mois. L'ordre souhaite aussi que l'organisation du travail table sur l'utilisation des compétences de tout le monde au sein de l'équipe de soins puis l'équipe interdisciplinaire pour que chacun puisse exercer dans l'ensemble de son champ d'exercice. Finalement, on croit aussi que la présence d'infirmières praticiennes spécialisées de première ligne en CHSLD s'avérerait une excellente solution pour répondre aux besoins de cette clientèle-là, une clientèle qui présente des besoins de plus en plus complexes.

Alors, je terminerai en vous disant que les personnes qui vivent en CHSLD, c'est nos citoyens probablement les plus vulnérables, c'est aussi les gens qui ont bâti notre nation. Je pense qu'ils sont en droit de recevoir des soins de qualité dans leur milieu de vie. Le nouveau milieu de vie, maintenant c'est un milieu de vie qui est substitut. Alors, comment est-ce qu'on peut faire ça? Nous, les infirmières, on veut être au rendez-vous. Alors, je ne sais pas si vous avez des questions. Peut-être que mes collègues peuvent même vous illustrer mon propos par des exemples concrets s'il nous reste quelques minutes.

Le Président (M. Bergman) : Alors, merci, pour votre présentation. Et vos collègues peuvent intervenir pendant les questions à venir. Alors, maintenant, pour le bloc ministériel, Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Tremblay, ça me fait plaisir de vous retrouver. Mmes Bernier, Lauzier, Joyal, bienvenue. Écoutez, vous avez fait une présentation fort intéressante et vous avez des recommandations intéressantes aussi, et j'aurai certainement quelques questions. Et j'aimerais aussi entendre quelques exemples concrets, là, qui vont nous permettre d'illustrer ce que vous nous avez mentionné.

Vous avez, entre autres, comme recommandation que les CHSLD puissent offrir à leurs résidents des soins infirmiers en fonction de leurs réels besoins, autant physiques que mentaux. Et il y a donc, et vous l'avez mentionné, une importance de bien évaluer les besoins de la personne et l'évolution de ces besoins-là aussi. J'aimerais ça que vous nous parliez un peu plus de cette évaluation-là, le portrait que vous en faites. Est-ce que vous trouvez qu'actuellement on évalue suffisamment, on évalue de la bonne façon? Et peut-être nous parler aussi de quelles sont les conséquences d'un manque d'évaluation, d'un manque de suivi dans des évaluations et si vous avez d'autres recommandations par rapport à ça.

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, c'est à géométrie extrêmement variable. Et le manque d'évaluation a des conséquences sur la qualité de vie de ces résidents. M. le Président, peut-être que je pourrais inviter ma collègue, Mme Bernier, qui va donner des exemples concrets de ce qui se passe dans les CHSLD et de l'impact de l'évaluation.

Le Président (M. Bergman) : Mme Bernier.

Mme Bernier (Ginette) : Oui. Quand on parle d'évaluation, c'est vraiment de faire le portrait du client avec ses besoins. Donc, quand on souligne l'importance d'avoir une évaluation, une infirmière sur les trois quarts de travail, tout à fait important de détecter qu'est-ce qui se passe de jour par rapport à notre client, qu'est-ce qui se passe quand on est sur le quart de soir puis pendant la période de nuit. Ça veut dire que notre client…

Tantôt, on parlait de problèmes de nutrition, je vais vous faire une relation. Le client qui commence à avoir de la difficulté à manger ou qui mange moins puis que l'infirmière auxiliaire ou le préposé interpelle l'infirmière, bien ce qu'elle va faire dans un premier temps, en évaluation, elle va lui faire une évaluation physique de sa bouche : Y a-tu un problème physique qui se passe à sa bouche? Est-ce qu'il a de la difficulté à avaler? S'il a de la difficulté à avaler, peut-être qu'il va avoir un besoin de faire une référence à une nutritionniste pour ajuster la consistance de l'alimentation. Mais peut-être aussi qu'il y a un risque dans la façon dont on l'aide à la nutrition. Donc, l'infirmière va avoir des directives à donner, à inscrire à son plan de soins pour les infirmières auxiliaires puis pour les préposés.

Elle va vérifier aussi s'il perd du poids. Si le client a perdu du poids, il est plus à risque de chute, donc il y a des directives qu'elle va aussi devoir donner. Il est plus à risque d'avoir des plaies de pression; là aussi, elle va être obligée de donner des directives. Puis, au-delà de ça, s'il a perdu beaucoup de poids, bien il y a peut-être la médication qui a besoin d'être réajustée. Parce que, quand le médecin va venir, il y a de la médication qui se donne en fonction du poids. Donc, il a peut-être besoin d'un réajustement même de son niveau de médication.

Ça fait que, vous voyez, c'est un ensemble d'éléments. On part d'une situation bien simple, là, se nourrir aujourd'hui. Puis je fais du pouce, tantôt, sur ce que vous disiez, madame. Je pense que se nourrir, c'est peut-être le seul plaisir qu'il leur reste, hein, dans la vie, donc l'importance au moins de s'assurer qu'on puisse les nourrir convenablement, mais qu'on puisse les nourrir aussi dans un milieu ou dans un environnement qui est agréable dans la façon de se faire aider, mais aussi d'être physiquement… d'avoir tout l'apport nutritif nécessaire quand on est alimenté.

Donc, je ne sais pas si ça peut vous aider, mais, dans la vision de ce que… juste l'activité d'alimentation, tout ce que ça comporte d'évaluation de la part de l'infirmière pour ajuster vraiment le plan de traitement puis aussi pour donner les bonnes directives à l'équipe parce qu'on ne veut pas qu'il se ramasse à l'hôpital parce qu'il s'est étouffé, parce qu'il a fait une pneumonie d'aspiration, parce qu'il a des plaies de pression ou parce qu'il a chuté.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci. Quand vous parlez de l'évaluation faite par l'infirmière, juste pour que je comprenne mieux, est-ce que les infirmières auxiliaires, sont incluses quand vous parlez de «faite par les infirmières»? Est-ce que les infirmières auxiliaires font aussi ce type d'évaluation?

Mme Bernier (Ginette) : Les infirmières auxiliaires, dans leur champ d'activité, vont contribuer à l'évaluation. Ça veut dire qu'elles vont amener des éléments d'observations qu'elles ont faites pendant les activités de la journée. Mais le rôle précis d'évaluation globale que l'infirmière va faire : elle va ramasser les données qu'elle reçoit de l'infirmière auxiliaire et du préposé, elle va regarder ce qu'elle a dans le profil de la médication, dans le profil des résultats de labo en collaboration avec le médecin et elle va vraiment porter un jugement, une analyse et un jugement par rapport à l'ensemble des données qu'elle a. Et c'est à partir de ce jugement-là qu'elle va émettre ses directives au plan de soins et qu'elle va donner ses directives à l'infirmière auxiliaire puis au préposé, dans son plan de travail, pour qu'on respecte les consignes pour assurer la sécurité du client puis qu'il reçoive les bons services de façon efficace.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui, merci, M. le Président. Bien, en lien avec ce que vous venez de mentionner, on a entendu, au début, au tout début de cette commission-là, des commentaires à l'effet que le partage des rôles dans les CHSLD entre les membres de l'équipe soignante n'était pas nécessairement toujours très clair. J'aimerais ça avoir votre lecture à vous, entre… Et je parle du partage des rôles notamment entre les infirmières, les infirmières auxiliaires, les préposés, qui fait quoi. Est-ce que, pour vous, actuellement, notre façon d'organiser le travail en milieu de CHSLD, elle est optimale? Est-ce que tout est clairement défini ou s'il y aurait des améliorations à apporter?

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Je vais reprendre… On va avoir une petite obsession sur l'alimentation. Un, l'infirmière, c'est la seule professionnelle, avec le médecin, qui, dans son champ d'exercice, a la capacité d'évaluer. Alors, non, une infirmière auxiliaire ne peut pas évaluer, elle peut contribuer, comme l'a dit ma collègue. Vous savez, le geste de nourrir, si on fait juste le regarder au premier degré, un préposé prend la cuillère et nourrit le résident pour l'aider à s'alimenter. L'infirmière auxiliaire prend la même cuillère, et c'est le même geste, elle nourrit le résident qui a une difficulté particulière et avec lequel il faut utiliser un niveau de connaissance qui est différent. Et l'infirmière prend la même cuillère, et vous voyez le même geste, mais elle le fait pour évaluer le problème de déglutition. Alors, il ne faut pas s'en tenir juste à ce qu'on voit à l'oeil nu. C'est vraiment dans l'intention du geste.

Et nous, on croit qu'il y a moyen d'organiser différemment les soins pour utiliser l'ensemble du champ d'exercice de l'infirmière. Il y a des belles expériences, au Québec, qui ont eu lieu, et on peut s'inspirer de ces expériences-là, mais, pour faire ça, ça prend des infirmières sur tous les quarts de travail. M. le Président, peut-être que Mme Joyal pourrait ajouter, parce qu'elle travaille avec une équipe qui a fait cette évaluation-là.

Le Président (M. Bergman) : Alors, Mme Joyal.

• (16 h 40) •

Mme Joyal (Charlène) : Merci. Alors, oui, tout à fait. En fait, pour avoir travaillé longtemps... Quand même, je suis jeune, mais, depuis le début de ma carrière, j'ai travaillé toujours avec la clientèle en CHSLD et la clientèle âgée. Alors, en fait, avec l'équipe, présentement, de Philippe Voyer, au CSSS de la Vieille-Capitale — ce sont des collègues, dans le fond, moi, je travaille au Jeffery Hale-Saint Brigid's, en collaboration — on a une communauté de pratique. Et ce qu'on a pu voir, en fait, c'est qu'il y a eu certains projets de réorganisation du travail non pas dans le sens de la charge, non pas dans le sens de vraiment toujours scinder les rôles, mais plutôt dans l'optique de voir : Est-ce qu'on utilise l'infirmière à sa juste valeur? Est-ce qu'on ne lui fait pas faire, en fait, des activités que d'autres personnes auraient pu très bien faire, comme des prises de rendez-vous, etc.? Donc, ces projets-là qui ont été faits ont permis, en fait, de pouvoir dégager du temps infirmier pour procéder, justement, pour que l'infirmière ait plus de temps pour son évaluation, ses suivis, la continuité des soins sur tous les quarts de travail.

Il y a le projet qui a été fait en Montérégie, FORTERESSS. Peut-être que vous en avez déjà entendu parler ou peut-être avez-vous lu là-dessus. C'est vraiment un projet de réorganisation du travail, un peu comme ce qui a été fait avec l'équipe, là, du CSSS de la Vieille‑Capitale, mais, en fait, qui vient légitimer le rôle de l'infirmière mais aussi recadrer, en fait, le rôle des différents intervenants pour qu'on sache un peu plus travailler en équipe, qui fait quoi. Il va toujours rester des zones grises, mais le fait de pouvoir avoir fait cette démarche-là vient camper les rôles, fait en sorte que l'équipe, par la suite, est beaucoup plus solide quand on sait un peu où sont les limites de chacun, la contribution que chacun peut amener à l'équipe.

Puis, dans le fond, ça prend le leadership fort de l'infirmière aussi parce qu'elle a à gérer cette équipe de soins là avec une multitude de clients. On ne parle plus de 10, 15 clients. De soir, ils peuvent se retrouver avec 15… excusez, peut-être même jusqu'à 80 résidents par unité. Puis je l'ai vécu comme jeune infirmière. Donc, l'importance de savoir, mais s'approprier son rôle, ça a été démontré, ça apporte de bons résultats. Puis je pense que ce sont des projets sur lesquels on devrait se baser un peu à travers la province pour réussir, dans le fond, à recamper ces rôles-là. C'est très porteur, je crois.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci beaucoup. Je ne sais pas si ma collègue souhaitait poser une question.

Mme Gadoury-Hamelin : Oui, je vais y aller.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson, il vous reste six minutes.

Mme Gadoury-Hamelin : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, merci d'être là. Je vous écoutais. On a parlé des équipes, on a parlé… On a entendu plein de choses. On a entendu aussi des milieux qui sont venus nous dire aussi qu'ils avaient réussi à faire une différence, à consacrer aussi plus de ressources aux soins à la personne directement, moins au niveau administratif. Ils ont éliminé plus les postes administratifs pour avoir le plus possible de postes directement auprès des résidents. Donc, ça a apporté, dans certains cas, une différence appréciable.

Je pense aussi, ce qu'on a entendu aussi, c'est des équipes qui réussissent à s'approprier, tout le monde, le rôle dont vous parliez, mais aussi la vision et l'engagement de chacun à sa mesure à l'intérieur du rôle qu'ils peuvent jouer autour de la personne qui est hébergée. Je pense que c'est un travail d'équipe. Puis, quand on réussit à vraiment initier ça puis transmettre ça à tout le monde, je pense que tout le monde est mis à contribution.

Ce qui m'amène à vous parler des aidants, des proches aidants parce que je pense qu'ils sont aussi un élément important quand ils sont présents auprès des résidents. Tant mieux, plus il y en aura, mieux ce sera. Mais on sait que c'est aussi une réalité. Puis ces gens-là, comment pensez-vous aussi qu'ils peuvent vous aider, tous les proches aidants, à contribuer à apporter un soin le plus possible adéquat aux gens qui sont hébergés?

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Je vous dirais que le proche aidant, c'est le partenaire de choix, et il faut s'en faire un allié dès l'admission du résident ou dès que le résident emménage en CHSLD. C'est la communication constante. Et toute l'information qu'a ce proche aidant là nous aide justement dans l'analyse, dans l'évaluation, dans la détermination du plan de soins individualisés ou du plan de traitement infirmier, le plan thérapeutique infirmier qu'on va faire pour la personne. C'est comment on peut travailler ensemble, comment on peut les accompagner.

Et, je vous dirais, les personnes qui ont un proche qui vit en établissement de santé veulent avoir de l'information, veulent être renseignées, veulent faire partie de la décision parce qu'il y a des décisions importantes tout au long du séjour de la personne qui va avoir lieu. Donc, il faut avoir un interlocuteur qui va être capable d'établir ce lien-là. Et une des choses que nous, on reçoit comme information, à l'Ordre des infirmières, c'est qu'il y a beaucoup de familles qui nous appellent en disant : Moi, je vais visiter mon proche le soir, et il n'y a pas personne qui peut me donner de l'information sur qu'est-ce qui se passe avec mon père ou ma mère parce qu'il n'y a pas d'infirmière. Il n'y a pas personne qui peut me dire est-ce que ça va mieux, le plan qu'on a déterminé ensemble, comment ça avance, s'il est plus désorienté aujourd'hui, qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qui a été mis en place. Donc, le partenariat est souvent scindé parce qu'il y a absence du professionnel qui pourrait répondre à ces questions-là. Je pense que j'ai vu ma collègue Charlène aussi faire un petit signe de la main.

Le Président (M. Bergman) : Mme Joyal.

Mme Joyal (Charlène) : Oui, en fait, il y a comme deux volets. Il y a le volet partenariat, oui, pour recueillir les informations dont on a besoin comme infirmière, un peu sur la biographie, les habitudes de vie puis essayer le plus possible de rendre le milieu propice aux habitudes puis ce que faisait la personne, etc. Mais il y a aussi l'autre volet aussi. C'est que souvent les aidants naturels ou les familles, les proches étaient ceux qui donnaient les soins à la maison ou dans d'autres circonstances, peut-être en résidence privée, mais qui apportaient certains soins, et là ils se voient peut-être perdre ce rôle-là au niveau de l'équipe de soins qui prend plus en charge au niveau du CHSLD.

Alors, c'est un art aussi et c'est beaucoup avec l'infirmière que ça va se travailler, le partenariat, pour dire comment on peut les impliquer encore dans les soins qu'on va donner en CHSLD. Qu'est-ce qui est encore… qu'est-ce qu'il est sécuritaire de faire ou pas si la condition évolue, par exemple, un risque de chute, risque de blessure, bien, si on veut continuer à faire les déplacements pour maintenir l'autonomie... Les familles veulent participer aussi. Ce n'est pas tout le monde, dans le fond, qui va laisser de côté ce qu'ils faisaient avant. Ils veulent garder ce rôle-là un peu qu'ils avaient, toujours en collaboration. Donc, c'est vraiment le rôle de l'infirmière d'aider les familles à dire : Bien, effectivement, je pense qu'on va être partenaires ensemble, il y a encore des choses que vous pouvez faire. Ce n'est pas parce qu'on est en institution CHSLD que c'est l'équipe qui peut tout prendre en charge. Ce partenariat-là est important. Donc, moi, je le vois vraiment de part et d'autre. Ils nous apportent, mais on leur apporte aussi, aux aidants.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson, il vous reste une minute pour un commentaire.

Mme Gadoury-Hamelin : Une minute. Oui. Peut-être que ma collègue a une autre question.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : J'avais une question.

Le Président (M. Bergman) : Juste le temps pour un commentaire, Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, il vous reste une demi-minute.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Une demi-minute. Bon. Je voulais vous entendre parler de la formation des infirmières. Je pense que vous exigez qu'il y ait plus de formation des infirmières qui travaillent avec les aînés. Vous aurez peut-être l'occasion de répondre à travers les questions des collègues de l'opposition, mais peut-être un commentaire par rapport à votre recommandation dans le mémoire.

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay, pour une très courte réponse.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, vous l'avez vu, les clients qui vivent en établissement, en CHSLD, ont des problèmes complexes, et, pour pouvoir bien intervenir auprès de ces clients-là, les infirmières ont besoin d'une solide formation. On en parle depuis plusieurs années. Nous, on souhaite que les infirmières soient formées au niveau du baccalauréat et on est convaincus que ce serait une valeur ajoutée pour les services qu'on offre aussi aux CHSLD.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci beaucoup, M. le Président. Nous allons tous poser des questions. Alors, Mme Joyal, Mmes Bernier, Lauzier, Mme Tremblay, vous savez que vous avez laissé votre marque parce que, ce matin, nous avons accueilli les gens du centre hospitalier gériatrique…

Des voix : Maimonides.

Mme Blais : … — j'ai souvent de la difficulté à prononcer ce nom — mais là tout le monde vous adore là-bas. Alors, vous avez fait, je pense, un travail très important.

Avant de vous poser ma véritable question, la question qui tue : Vous autres, en tant qu'infirmières, est-ce que vous mangez, dans les CHSLD, la nourriture que les personnes aînées ou les plus jeunes mangent lors des repas? Est-ce que c'est la même nourriture que vous prenez?

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, si vous me posez la question, quand je travaillais en CHSLD, est-ce que je mangeais la même nourriture que les résidents?, oui. Et je vois mes collègues opiner du bonnet.

Le Président (M. Bergman) : Mme Lauzier.

Mme Lauzier (Madeleine) : Oui. Je mangeais la même chose que les résidents, j'allais même manger avec les résidents, ceux qui étaient capables d'être dans des petites salles à dîner. On avait fait des petits îlots avec les résidents, et je me faisais un plaisir d'aller manger avec eux. C'était un moment d'échange. C'était un grand plaisir aussi de voir… Puis en même temps je pouvais les évaluer parce que je n'allais pas à tous les jours, mais je pouvais voir si son état de santé s'était détérioré, s'il me reconnaissait, s'il était toujours aussi présent. Mais je mangeais la même chose qu'eux.

Mme Blais : Est-ce que c'est bon?

• (16 h 50) •

Mme Lauzier (Madeleine) : Bien, nous, c'était bon. Parce que, justement, on entendait, juste avant, les nutritionnistes qui disaient que c'était devenu plus un choix de coût. Nous, on avait choisi — c'est un peu fou — de faire un stationnement payant pour ne pas diminuer les coûts des repas. Donc, nos coûts-repas étaient parmi les plus hauts dans le réseau. On se faisait souvent taxer d'avoir des coûts trop élevés, mais on tenait à les maintenir parce que c'était important pour nous d'avoir une bonne nutrition, de ne pas avoir des résidents qui étaient en état dénutritionnel, mais aussi que ce soit bon, pour le plaisir. Et on faisait du repas une activité centrale. C'était très long, les périodes de repas. Le déjeuner, c'était long, le dîner, c'était long, et le souper, c'était long, mais des activités pour prévenir le déconditionnement. Par exemple, on les amenait manger à la salle à dîner, on les amenait… C'était vraiment une activité centrale, les repas. Mais j'aime manger aussi.

Le Président (M. Bergman) : Madame… Excusez, Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Vous savez, Mme Blais, est-ce que la nourriture est bonne en CHSLD?, bon, probablement que, dépendant des CHSLD, ça peut être variable. Est-ce que l'expérience repas, elle est toujours à son maximum? Je ne pense pas.

Et je reviens à l'aspect de la formation. Parce que ça paraît comme un geste banal que de nourrir, ou de laver, ou d'accompagner une personne en la faisant marcher; il n'y a jamais rien de banal en CHSLD. Donc, quand on parle d'alimentation, par exemple, il faut que l'infirmière soit là. Tantôt, je donnais les exemples pour évaluer au niveau de la déglutition. Mais elle a un rôle central pour faire de la formation auprès des collègues. Parce que ce n'est pas vrai que, par…

Puis là je vais vous donner un exemple, là, qui a été un de mes chevaux de bataille toute ma vie. Quand on prend le plat de carottes, le plat de petits pois verts puis le plat de viande puis qu'on mélange tout ça ensemble, ce n'est pas exactement ragoûtant, mais il arrive que des résidents souhaitent ça. Il y a des résidents qui souhaitent commencer par le dessert. Il faut donner des directives de soins pour s'assurer qu'on réponde aux attentes du résident, aux besoins du résident, aux souhaits et à ses habitudes de vie. Et, quand il n'y a pas de personne pour donner ces directives de soins là, quand qu'il n'y a pas un plan qui est intégré, à ce moment-là il y a un laisser-aller qui peut même aller jusqu'à de la négligence, de la maltraitance.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Dernière question, parce que je vois mon collègue, ses questions sont bien alignées. Il y a des écoles de pensée différentes. Puis je suis obligée de vous poser la question, puis d'ailleurs la partie ministérielle en a parlé. Vous savez, récemment, dans les journaux, c'est : On coupe des infirmières parce qu'on a besoin de plus de préposés aux bénéficiaires parce que les cas sont plus lourds, pour soulever les gens, pour être en mesure de leur donner les services. J'ai comme l'impression que parfois la population est alertée par rapport à ça, la population est inquiète. Est-ce qu'on a à s'inquiéter du fait qu'il y a peut-être moins d'infirmières, plus de préposés? Est-ce qu'il y a un déséquilibre ou devrions-nous revenir à une forme d'équilibre?

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Il y a évidemment de la place, dans une équipe de soins, pour plusieurs intervenants qui sont différents. Ça prend des préposés, ça prend des infirmières auxiliaires, ça prend des infirmières. Ma collègue vous a dit : Il y a de bons modèles. Mais il ne faudrait surtout pas faire une économie de savoir, du savoir infirmier parce que, si on ne fait pas les évaluations, il y a des résidents qui vont vivre avec des problèmes de santé importants, des choses, par exemple, comme le délirium. Le délirium, ça s'évalue. Si le préposé constate qu'il est juste plus confus, il n'a pas le bagage de connaissances nécessaires pour aller faire l'évaluation puis comprendre que peut-être que, tout simplement, ce résidant-là est déshydraté. Ça prend de la connaissance pour pouvoir faire ça, et ça, c'est la contribution de l'infirmière. C'est vrai que, dans les CHSLD, il y a une très grande lourdeur, il y a des très grands besoins de soins, mais, si on n'agit pas en amont, ça devient de plus en plus lourd.

Je vais vous parler d'une autre situation. Par exemple, et là le nombre est de plus en plus réduit, mais il y a des résidents qui arrivent, qui sont continents. S'il n'y a pas une évaluation de la part de l'infirmière, puis la détermination d'un plan de traitement, puis la réévaluation, il y a des chances que, parce que ça va plus vite et, dans la productivité, qu'on utilise une culotte d'incontinence plutôt que d'avoir un programme d'élimination. Et, à ce moment-là, un, ça va finir par prendre plus de temps, mais la dignité de la personne, la qualité de vie de cette personne-là… et ce geste-là qui, au premier abord, peut paraître banal, bien, va entraîner toutes sortes de complications, que ce soient des infections urinaires, des plaies de pression, mais aussi… Bon, moi, je pense que ce qui me touche le plus, c'est tout l'aspect de la dignité.

Donc, on a besoin d'avoir un professionnel qui a de la connaissance, qui est capable de faire des liens entre différentes situations. Et, vous savez, prendre soin d'un client qui a un déficit cognitif, prendre soin de son voisin qui a du parkinson puis prendre soin du troisième voisin qui a un problème de santé mentale, ça ne se traite pas tout de la même façon. Et l'approche avec le client qui a un problème de santé mentale, ça peut s'avérer une approche qui est tout à fait à l'inverse de ce que le client avec un déficit cognitif a; ça pourrait même empirer la situation. Donc, c'est important qu'il y ait une évaluation et une détermination des soins, un suivi, l'explication aussi auprès des préposés, qui ne veulent pas mal faire, mais qui, à un moment donné, disent : Bien, si ça marche avec Mme Gagnon, je vais le faire avec M. Simard. Ce n'est pas aussi simple que ça, d'où l'importance de l'évaluation, de l'analyse, de la détermination du plan de traitement. Et on ne peut pas faire de substitution, à mon avis, infirmière, préposé.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste sept minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. La notion de milieu de soins versus leur milieu de vie, pour vous, est-ce que c'est clair que c'est d'abord un milieu de vie plutôt qu'un milieu de soins?

Mme Tremblay (Lucie) : C'est un milieu de vie…

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Pardon. Je reviens dans mes mauvaises habitudes. C'est un milieu de vie, mais, s'il n'y a pas de soins, à un moment donné, la qualité de vie devient tellement mauvaise qu'on ne peut pas profiter du milieu de vie. Si, parce que la personne est souffrante puis elle n'est pas soulagée, elle ne peut pas avoir de contact avec ses proches, elle ne peut pas bénéficier de la visite, elle ne peut pas entretenir des relations, on n'est pas dans un milieu de vie. Si la personne est désorientée parce qu'elle a un délirium puis qu'on n'est pas capable de rien faire, on n'est pas dans un milieu de vie. Si la personne est désorientée et a un problème, par exemple, de maladie d'Alzheimer, puis on n'est pas capable de l'accompagner et d'accompagner ses proches, on n'est pas dans un milieu de vie. Donc, ce n'est pas l'hôpital, le centre d'hébergement et de soins de longue durée, mais, si on enlève la composante de soins, je ne pense pas que les gens peuvent vivre dignement.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. On a souvent entendu parler des infirmières praticiennes spécialisées première ligne en CHSLD. C'est un programme qui, à ma connaissance, n'existe pas encore. Par contre, ça pourrait être un programme qui pourrait être mis en place. Est-ce que l'ordre a fait des travaux par rapport à cette nouvelle avancée?

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, on a des discussions avec les directrices de soins parce que plusieurs directions de soins nous ont posé la question : À quand l'infirmière praticienne spécialisée en soins de longue durée? Il y a des travaux qui demeurent à faire. Dans un premier temps, ce qu'on voit, c'est l'infirmière de première ligne qui pourrait très bien faire ce travail-là auprès de la clientèle qui est hébergée. Et la présence médicale est souvent ténue en hébergement. D'avoir une infirmière praticienne spécialisée, ça permettrait d'assurer une continuité de soins, mais aussi ça permettrait d'adresser les problèmes qui sont d'une très grande complexité. Alors, à notre avis, c'est vraiment une valeur ajoutée, d'avoir une infirmière praticienne spécialisée en hébergement.

Le Président (M. Bergman) : Mme Joyal.

Mme Joyal (Charlène) : Je parlerais aussi peut-être au nom des jeunes infirmières, qui, nous, dans le fond, avons à développer notre jugement clinique, nos capacités d'évaluation. Ça nous prend des mentors, des personnes d'expérience. Ça fait qu'on voit peut-être là aussi, avec la venue d'une IPS de première ligne, qui a quand même un bon bagage gériatrique, qui pourrait nous aider aussi dans… pas nécessairement le coaching, mais peut-être nous valider dans nos évaluations. On va ausculter un patient au niveau pulmonaire, au niveau cardiaque, on va tenter d'évaluer pour détecter puis essayer de prévenir ou du moins de prendre en charge le plus rapidement possible pour éviter un déconditionnement ou des complications, bien je vois là une belle collaboration entre les infirmières elles-mêmes pour s'apporter du soutien. Ça fait que ça, ça serait un plus.

Puis on le voit même déjà. En tout cas, je sais qu'ici à Québec… et je côtoie quand même cette équipe-là, une équipe de mentorat qui aide, dans le fond, au niveau, là, régional et même un peu plus, au Centre d'excellence du vieillissement de Québec, qui viennent aider, dans le fond, les infirmières qui sont en place, autant des infirmières d'expérience que des jeunes infirmières, à développer ces aptitudes-là en CHSLD. Donc, il y a une mouvance vers ça. Ça serait déjà juste une plus-value, finalement, d'avoir peut-être une autre collègue comme une IPS qui pourrait aussi nous aider dans certains traitements, certaines prescriptions, en fait, qu'on pourrait avoir besoin pour aller de l'avant puis avoir une prise en charge rapide, éviter des hospitalisations pour nos pauvres personnes...

• (17 heures) •

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, Mme Joyal a amené le point. Je pense aussi, la présence d'IPS en hébergement, ce que ça peut favoriser, c'est éviter les transferts, davantage de transferts vers les centres de courte durée. L'autre chose, c'est dans tout le traitement des maladies chroniques, parce qu'on le sait, les gens qui sont hébergés ont plusieurs maladies chroniques, l'IPS, c'est vraiment un acteur clé.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste trois minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. C'est parce qu'un des enjeux, c'est qu'actuellement il y a des difficultés à trouver des médecins pour couvrir les CHSLD. Et souvent c'est des médecins, là, qui sont soit en fin de carrière ou encore, tout simplement, les gens ne sont pas capables de trouver des professionnels pour faire les prescriptions, qui souvent sont des soins de base. Et, si je comprends bien, l'infirmière praticienne spécialisée, elle, aurait le droit de prescrire dans son champ de pratique, ce qui, à ce moment-là, pourrait diminuer l'utilisation des médecins, qu'on pourrait utiliser peut-être pour un travail plus productif au niveau de la première ligne. Est-ce que c'est dans cette pensée-là que vous travaillez ou c'est une façon différente?

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : C'est une façon de le voir, mais aussi, nous, on est convaincus que la présence des IPS sur place, ça permet notamment une meilleure gestion des médicaments, ça permet aussi d'assurer davantage de suivi. Et c'est vrai que c'est difficile d'avoir des médecins qui viennent travailler dans ces milieux-là. L'infirmière IPS peut répondre aux besoins de cette clientèle hébergée là. Donc, elle est la bonne personne à être sur place.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste 1 min 30 s.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. On a parlé tantôt de l'alimentation, qui est un élément majeur. Et, quand vous regardez, en CHSLD, les principales préoccupations des gens, c'est des soins de base. On parle d'être capable d'avoir certaines activités d'occupation selon la capacité de la personne, une alimentation qui est adéquate. On parle également de la propreté. Puis un des grands enjeux au Québec, là, c'est le un bain par semaine. On offre aux patients un bain par semaine, puis la plupart des gens qui sont habitués de se laver à chaque jour, ils disent : Bien, ça n'a pas de bon sens. Sauf qu'on sait que ces gens-là, si vous leur offrez un bain à chaque jour, là, je ne suis pas certain qu'ils ont toujours la capacité de le recevoir, pas parce qu'ils ne veulent pas être propres, là. Ils ne se déplacent pas beaucoup. Mais, vous savez, moi, j'ai travaillé en CHSLD, comme vous l'avez fait, là, des fois c'est une épreuve. Même, j'ai vu, des fois, être obligé de donner quelque chose pour relaxer un petit peu avant pour être capable de prendre le bain parce qu'ils ne comprennent pas toujours. Avez-vous fait des travaux pour savoir ce serait quoi, le nombre optimal de bains, en respectant la volonté de ces gens-là ou la volonté de la famille? Parce qu'ils sont quand même responsables de ces personnes-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay, temps pour une très, très courte réponse.

Mme Tremblay (Lucie) : Il n'y a pas de recette magique. Je pense que, justement, il faut individualiser les soins. Il y a des résidents qui ont besoin et qui désirent avoir un bain plus fréquemment, alors que certains, comme vous l'avez dit, vont avoir de la résistance aux soins d'hygiène. Puis il faut adapter le soin et, des fois, il faut l'espacer. Et, justement, il y a besoin de ce bassin de connaissances. Ce qui, en apparence, peut paraître simple, comme de donner un bain, bien, il y a des techniques pour pouvoir, par exemple... Et, on le sait, la plupart des gens qui sont en hébergement, là, entre 60 % et 80 % ont des problèmes de déficits cognitifs. Il faut adapter le soin à chacune des personnes, et c'est là que l'infirmière joue un rôle clé.

Est-ce que c'est un bain, deux bains, sept bains par semaine? Ça dépend des individus, ça dépend des comportements qu'ils ont, de la qualité de la peau. Ça dépend aussi : Est-ce que c'est des gens qui transpirent beaucoup? Est-ce qu'ils bougent beaucoup aussi? Est-ce qu'ils sont incontinents. Il y a tellement de questions à poser qu'il n'y a pas une seule réponse, ça demande une évaluation puis un plan qui est individualisé pour chacun.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, le temps pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci de votre présence. Alors, j'abonde tout à fait dans le même sens que mon collègue. Je pense qu'il est maintenant temps d'avoir des infirmières praticiennes dans les CHSLD. Si vous vous rappelez, au départ de la commission, j'ai plaidé en faveur d'une plus grande part des infirmières, des infirmières praticiennes et de laisser plus de place pour, justement, humaniser davantage, je pense, les soins en fin de vie. Et je pense que les infirmières praticiennes, les infirmières sont les premières à être avec ces gens-là, avec ces patients-là au quotidien, et je pense qu'on a besoin peut-être de démédicaliser un peu nos soins de longue durée et de les humaniser davantage. Je pense que le rôle des infirmières là-dedans est primordial et je vais certainement vous appuyer, c'est sûr, si vous faites des recommandations à cet effet-là.

Il y a une chose, par contre. On a entendu, depuis le début des audiences, beaucoup de gens venir nous dire qu'on manquait de formation. Parce que, vous savez, de plus en plus, les gens qui ont des troubles cognitifs... Autrefois, dans notre formation, je vous dirais, plutôt classique, on parle de contention chimique, contention physique. Maintenant, on sait qu'il y a de plus en plus de nouvelles méthodes utilisées qui, finalement, évacuent complètement et les contentions chimiques et les contentions physiques mais vont beaucoup plus avec un retrait, une isolation du bénéficiaire, du patient, avec un retour en arrière, une discussion, une musique, et finalement on arrive à régler la crise en quelques minutes sans avoir à utiliser des contentions physiques, chimiques. Est-ce que vous sentez que, dans votre profession, on vous a suffisamment formés à cet égard-là ou on a encore besoin de faire du chemin à ce niveau-là?

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Votre question est par rapport à l'utilisation des contentions?

Mme Daneault : À l'approche…

Mme Tremblay (Lucie) : À l'approche de la personne âgée?

Mme Daneault : …de la clientèle de troubles cognitifs.

Mme Tremblay (Lucie) : Il y a de la formation qui se donne. Il y a de la formation, pour en avoir donnée moi-même à l'université, il y a de la formation sur ces problèmes spécifiques là qui se donne. Et, à ma connaissance, il y a plusieurs universités qui vont miser sur, justement, le développement des connaissances. Je ne sais pas… Madeleine, tu me regardes? Peut-être que, M. le Président, vous pourriez donner la parole à Mme Lauzier, qui va peut-être ajouter quelque chose.

Le Président (M. Bergman) : Mme Lauzier.

Mme Lauzier (Madeleine) : Oui, bonjour. Oui, effectivement, bien, il y a deux choses dans votre question, je pense, il y a l'approche aux personnes qui ont des troubles de comportement et il y a aussi l'utilisation des contentions.

Dans la formation quant aux comportements, il y a de la formation qui existe dans la formation initiale, mais il y a aussi beaucoup de formation qui se donne. Et, quand on parle de l'évaluation du résident et de l'établissement du plan des directives, là, des directives de soins, il y a de l'espace pour de la formation aux infirmières puis aux préposés. Parce que c'est souvent des approches individualisées. C'est certain qu'il y a des approches qu'on connaît, mais il faut les adapter à la personne.

Quant à l'utilisation des contentions, c'est à peu près la même chose, ça va beaucoup être lié au comportement. Donc, on va faire des analyses de comportement pour être capables après ça d'ajuster puis, comme vous l'avez bien dit, d'utiliser des mesures moins coercitives, puis rapidement on va réussir à désamorcer, là, le comportement. Je pense que...

Le Président (M. Bergman) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Juste pour compléter. Vous savez, de faire l'évaluation de ces troubles-là, ça prend aussi un certain temps parce que ce n'est pas juste avec des paramètres physiques qu'on est capables. Il y a des situations cliniques, dans d'autres circonstances, qui s'évaluent facilement à partir d'informations qui sont des données dures. Dans le cas de l'évaluation des comportements, des symptômes comportementaux associés à la démence, c'est toute la notion d'aller chercher l'information, de la colliger souvent sur plusieurs heures, sur plusieurs jours, de l'analyser, et après c'est dans la détermination du plan de traitement, c'est de regarder qu'est-ce qui fonctionne, de l'adapter, de se donner le temps de voir si ça fonctionne ou pas, de l'adapter, et tout ça. C'est quelque chose qui demande du temps. Et je pense que trop souvent on sous-estime ce besoin d'évaluation là. Ça prend quelques heures, parfois quelques jours avant d'avoir colligé l'ensemble de l'information pour éviter des situations aussi dramatiques que d'utiliser une mesure de contention chez une personne âgée.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Mme Tremblay, Mme Bernier, Mme Lauzier, Mme Joyal, merci d'être ici avec nous aujourd'hui pour partager votre expertise.

Je demande les gens de la Fédération québécoise du loisir en institution pour prendre leur place à la table et je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 17 h 9)

(Reprise à 17 h 11)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à la Fédération québécoise du loisir en institution.

Alors, bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, et suivra un échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms et vos titres. Alors, le prochain 10 minutes, c'est à vous.

Fédération québécoise du loisir en institution (FQLI)

Mme Hallé (Anne-Louise) : Alors, Anne-Louise Hallé, directrice générale de la Fédération québécoise du loisir en institution.

Mme Charbonneau (Lise) : Lise Charbonneau, présidente de la Fédération québécoise du loisir en institution. Je suis intervenante en loisirs dans un centre d'hébergement de longue durée.

Mme Poirier (Louise) : Louise Poirier, intervenante en loisirs au centre d'hébergement à Maria. Je suis déléguée au niveau de la fédération pour la région Gaspésie—Bas-Saint-Laurent—Îles-de-la-Madeleine.

Le Président (M. Bergman) : Merci.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Alors, la Fédération québécoise du loisir en institution regroupe plus de 340 installations de santé utilisant le loisir comme moyen d'intervention privilégié dans la création d'un milieu de vie de qualité auprès de leurs résidents. C'est avec beaucoup d'intérêt que la Fédération québécoise du loisir en institution a pris connaissance du document de consultation. La FQLI se réjouit que le gouvernement québécois décide de réfléchir sur les conditions de vie des personnes hébergées dans les différents milieux de vie du Québec mais également de consulter l'ensemble des partenaires pour orienter des pistes d'action.

L'accessibilité. L'accessibilité s'avère un problème important dans le réseau de la santé, et l'ensemble des ressources du milieu doit être mis à contribution. Les usagers doivent vivre plusieurs déplacements avant d'arriver à un endroit stable, et ceci a des répercussions importantes sur la santé et l'état psychologique. Nous croyons qu'il est important de nommer un intervenant dédié qui a pour mandat d'accompagner l'usager et ses proches dans les différentes démarches, autant au niveau de l'accessibilité à des services de répit, en passant par le centre de jour, que pour les différents types d'hébergement. Ce soutien est un incontournable pour répondre adéquatement aux besoins de la clientèle.

L'utilisation uniforme, dans toutes les régions, du système de mesure de l'autonomie fonctionnelle, le ISO-SMAF, est un outil qui permet de déterminer le type d'établissement nécessaire pour chaque usager en fonction de ses capacités fonctionnelles et d'orienter la clientèle vers le type d'hébergement approprié. Il est important d'informer et de former l'ensemble des partenaires et des professionnels sur l'utilisation de ce système de mesure.

Le financement. Pour la FQLI, le financement actuel des CHSLD ne permet pas de répondre adéquatement aux besoins de la personne hébergée, et ceci, en raison de l'alourdissement de la clientèle, mais également en raison de l'augmentation des clientèles particulières nécessitant des soins, des aménagements physiques et de l'accompagnement spécialisé.

L'ensemble des dirigeants et des intervenants pris dans la préoccupation de minimiser les impacts des compressions budgétaires veulent également maintenir le concept milieu de vie dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée. Cette vision semble perdre son sens dans plusieurs milieux face à la marge de manoeuvre étroite laissée par les restrictions budgétaires imposées aux soins de santé et aux services sociaux, venant même, dans certains centres, réduire les services directs aux personnes hébergées.

Nous croyons qu'il est essentiel d'être créatif et innovateur en ayant recours à des services peu coûteux qui ont un impact direct dans le milieu de vie. L'animation-loisirs constitue, en fait, un des services les moins coûteux en centre d'hébergement. Il réussit à conserver au-delà des concepts, des lois et des limites budgétaires des environnements plus humains, indicateurs recherchés dans la qualité de vie des personnes hébergées.

L'organisation physique. La FQLI appuie l'orientation du ministère de créer des micromilieux afin de regrouper les clientèles selon les caractéristiques et leurs besoins spécifiques. De cette façon, les intervenants seront en mesure d'adapter leurs pratiques aux besoins de la clientèle et d'aménager des lieux physiques. Il se créera également un sentiment d'appartenance permettant le partage des événements positifs et négatifs qui les touchent. Le milieu de vie doit fournir le maximum d'opportunités à l'individu pour qu'il puisse donner un véritable sens à sa vie et qu'il accède au goût de vivre et de s'épanouir en fonction de ses habitudes de vie, ses intérêts et ses goûts.

Les clientèles particulières. Le réseau est présentement en transformation en regard avec les clientèles particulières qui sont accueillies dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée. Les personnes âgées se retrouvent de façon majoritaire dans les milieux. Cependant, il y a également les autres clientèles — santé mentale, déficience intellectuelle, déficience physique, communautés culturelles — qu'il ne faut pas négliger et qui nécessitent que les pratiques soient adaptées en fonction de leurs besoins spécifiques.

La cohabitation avec la clientèle aînée n'est pas facile. Il faut innover pour créer des milieux de vie de qualité. Ces réalités sont encore plus importantes lorsqu'on se retrouve en région où il n'y a pas d'autres ressources disponibles. Au niveau de l'animation-loisirs, les problèmes rencontrés sont principalement orientés vers l'offre de services en fonction des ressources humaines, financières et physiques disponibles. Les besoins et les intérêts de cette clientèle sont vraiment différents de ceux de la clientèle âgée. Pour répondre de façon adéquate aux besoins de chaque clientèle, l'intervenant doit davantage orienter ses interventions vers des activités individuelles et de petits groupes. Il faut également offrir différentes possibilités de loisirs pour stimuler la clientèle.

Il est cependant important de noter que, malgré le fait que l'intervenant en animation-loisirs soit en mesure d'identifier les intérêts et les besoins en loisirs de la clientèle, il est difficile pour lui d'offrir des activités individualisées et de petits groupes à l'ensemble, ceci en raison du nombre élevé de personnes hébergées qu'il doit desservir. C'est pourquoi l'ensemble des intervenants du milieu doivent devenir des partenaires dans l'objectif d'animer le milieu de vie. De plus, il existe également des disparités importantes entre les CHSLD au niveau du service d'animation-loisirs, car plusieurs regroupent également l'encadrement de l'action bénévole et souvent même les services spirituels.

La FQLI croit qu'il faut mettre en place des mécanismes pour augmenter le personnel en loisirs qualifié intervenant auprès de la clientèle afin de mieux répondre à ses besoins. Les ratios de ressources humaines, l'allocation de ressources financières et matérielles ainsi que la structure du service d'animation-loisirs doivent aussi être redéfinis afin d'harmoniser l'offre de services.

Les proches aidants. L'intégration des proches aidants est essentielle à la vie en centre d'hébergement de soins de longue durée. Leur présence influence grandement la qualité de vie des personnes hébergées. L'animation-loisirs représente une voie par excellence pour permettre la continuité de la relation entre la personne hébergée et ses proches. Plusieurs milieux d'hébergement encouragent la participation des proches aux activités de loisirs offertes dans le milieu. De telles approches favoriseraient un climat social positif et contribueraient à l'amélioration de la qualité de vie des personnes hébergées et de leurs proches.

Les services et les soins. La fédération croit que la dynamique d'un milieu ne peut être laissée à elle-même. Il est essentiel d'orienter et soutenir la dynamique quotidienne d'un centre par une animation-loisirs adaptée. C'est là que prend alors tout le sens du concept «animé». Un milieu de vie animé, c'est un endroit où l'usager évolue dans une dynamique se rapprochant de ses habitudes de vie et ses valeurs, en continuité avec son vécu et en harmonie avec les personnes qui partagent sa vie. Un milieu de vie animé utilise le loisir pour faciliter la cohésion entre les usagers, les personnes significatives, les proches, les intervenants, les bénévoles et la communauté.

L'animation-loisirs est essentielle à la qualité de vie dans l'installation. Il en résulte, d'ailleurs, souvent un équilibre où l'ambiance et le climat proviennent de l'harmonie entre les composantes du centre. Cet équilibre donne un sens à toute l'énergie investie au quotidien, au travail du préposé, à la visite d'un proche, au maintien de l'autonomie. Elle assure la juste balance entre un milieu de soins et un milieu de vie.

• (17 h 20) •

L'organisation du travail. L'animation-loisirs est une approche non médicale qui peut grandement contribuer à faire face aux problèmes de comportement ou psychologiques de la clientèle et elle est un atout important pour l'équipe de soins. L'intervenant joue un rôle de conseiller auprès de l'équipe, car son apport est essentiel dans l'identification des besoins, des intérêts, des goûts et des habitudes de vie de la clientèle, ce qui permet de développer des stratégies d'intervention appropriées au quotidien. Il faut mettre en place des outils et des approches pour maximiser l'application des opportunités et promouvoir la collaboration des divers intervenants.

La formation du personnel. Afin de répondre adéquatement à la réalité des CHSLD, la formation du personnel est un incontournable, et ceci, pour l'ensemble des intervenants. En raison de l'arrivée des clientèles particulières, la formation doit être adaptée pour venir soutenir le professionnel dans son intervention au quotidien, tant au niveau de la connaissance de la clientèle qu'au niveau de l'approche. Il faut offrir des opportunités aux intervenants de développer des compétences et les soutenir dans l'intégration des connaissances.

Nous souhaitons que l'intervenant en animation-loisirs soit bien encadré et soutenu dans son travail afin que son rôle soit bien compris par l'ensemble des professionnels et qu'il puisse pleinement contribuer et mettre à profit ses compétences professionnelles pour répondre aux besoins de la clientèle hébergée. La fédération est reconnue pour son expertise, ses programmes de formation et elle compte devenir un partenaire important dans la réponse aux besoins de formation.

Et, en terminant, il faut persévérer dans l'implantation d'un milieu de vie en centre d'hébergement et de soins de longue durée en invertissant des ressources humaines, financières et environnementales qui génèrent des impacts positifs sur la qualité de l'intervention et l'approche de la clientèle. Merci.

Le Président (M. Bergman) : Merci, Mme Hallé. Maintenant, pour le bloc ministériel, Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Hallé, Mme Charbonneau, Mme Poirier, bienvenue. Il me fait plaisir de vous accueillir ici.

D'entrée de jeu, vous avez mentionné votre préoccupation par rapport aux personnes qui arrivent dans un CHSLD après avoir subi de multiples déplacements avant d'arriver vraiment dans un endroit stable, et vous mentionnez que ça a des répercussions, là, sur leur état de santé, leur état psychologique bien souvent aussi, et vous recommandez de nommer un intervenant dédié pour pouvoir accompagner les personnes dans tout ce cheminement et dans tout ce processus. Mais est-ce qu'il n'existe pas des gestionnaires de cas? Est-ce que ce n'est pas le rôle des gestionnaires de cas ou si c'est d'autres choses dont vous…

Mme Hallé (Anne-Louise) : Non, c'est…

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Oh, pardon! C'est en plein le gestionnaire de cas, là, qu'on… On n'a pas mentionné le nom «gestionnaire de cas», mais c'est…

Mme Proulx : …ce dont vous parlez.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Effectivement.

Mme Proulx : Mais les gestionnaires de cas sont déjà là, font déjà ce rôle-là?

Mme Hallé (Anne-Louise) : Ce n'est pas partout le même… L'application n'est pas faite de la même façon d'une région à l'autre. Donc, je pense que, là, il y aurait un travail à faire de ce côté-là pour rehausser et renforcir cette intervention.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Et est-ce que ces régions-là, est-ce que ça a un lien avec des régions plus éloignées, où il y a moins de ressources, ou, en région plus urbaine, c'est la même chose? Pouvez-vous m'expliquer un peu mieux?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Bien, je pense que c'est… En région urbaine, c'est là où on voit le plus de déplacements, parce qu'en région plus éloignée il n'y a souvent qu'un seul établissement, donc on voit moins ce phénomène-là. C'est vraiment dans les…

Mme Proulx : Les régions urbaines.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Bien, les grands centres, là, où on voit ce phénomène.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : O.K. Vous avez parlé, là, de milieux de vie. On sait que, depuis une dizaine d'années, là, on veut aller de l'avant beaucoup avec des milieux de vie dans les CHSLD. J'aimerais ça vous entendre. Selon vous, quelles sont les valeurs et les actions à mettre de l'avant pour favoriser vraiment un milieu de vie, passer… Bien, on entendait l'Ordre des infirmières tantôt parler d'un milieu de soins, c'est aussi un milieu de soins, mais on veut favoriser, parce que c'est aussi un milieu de vie, on veut favoriser cet environnement-là. Et j'aimerais ça avoir votre point de vue là-dessus et, de façon concrète, peut-être à l'aide d'exemples, nous expliquer comment les membres, les animateurs que vous représentez, là, comment ils peuvent contribuer à implanter des milieux de vie dans les CHSLD.

Le Président (M. Bergman) : Mme Charbonneau.

Mme Charbonneau (Lise) : Le concept milieu de vie, effectivement, on en entend parler et il a fait un grand, grand bout de chemin. Souvent, l'intervenant en loisirs est appelé à faire partie du comité milieu de vie justement pour apporter, par son expertise, des idées et des valeurs à préconiser. Il faut que le concept milieu de vie soit la propriété de tous. Souvent, au début en tout cas, on donnait cette tâche-là à l'intervenant en loisirs, mais l'animation du milieu de vie, on le voit plus comme tous les petits gestes au quotidien qui peuvent être apportés au résident pour justement améliorer sa qualité de vie, mais au quotidien. Par exemple, je sais que, dans certains centres, on organise des concours ou des… oui, des concours pour stimuler le personnel autre que de l'animation-loisirs à organiser des projets, à organiser des activités pour animer le milieu de vie.

Mais moi, je crois plus dans le temps qui pourrait être donné à tous les membres du personnel, peu importent leurs tâches et leurs professions, d'amener tous les petits gestes au quotidien. Par exemple, il n'est pas rare qu'on voie une madame avec une belle manucure, puis on lui demande qui a fait ça, puis elle nous dit que c'est son préposé ou que c'est quelqu'un de l'entretien ménager qui a pris le temps de faire venir un repas du resto puis qui a pris le temps de luncher avec le résident. Moi, je crois au concept milieu de vie de par tous ces petits gestes au quotidien, là, qui peuvent être apportés. Parce que tout ce qui est organisé, c'est beau, c'est organisé, mais, au moment où le résident demande, à 10 heures le soir, avant de se coucher, de se faire une petite toast au beurre de pinottes, ça serait le fun qu'on puisse répondre à cette demande-là. Ce n'est pas toujours le cas parce que, souvent, on se fait répondre que le personnel n'a pas toujours le temps de répondre. On en voit, des belles choses, il s'en fait, des belles choses, mais il faudrait, je pense, encourager encore plus tous ces petits gestes-là au quotidien pour que le concept milieu de vie soit vraiment l'affaire de tous en centre d'hébergement.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui, merci. Et j'ai cru comprendre que votre fédération appuie ou est d'accord avec l'orientation de création de micromilieux regroupant des clientèles particulières, là, et j'aimerais ça vous entendre sur votre vision de cette création de micromilieux. Et avez-vous des exemples, là, que vous avez pu constater?

Le Président (M. Bergman) : Mme Poirier.

Mme Poirier (Louise) : Bien, c'est évident que, dans nos CHSLD d'aujourd'hui, on ne retrouve pas juste des personnes âgées. On peut retrouver des jeunes dans la trentaine, dans la quarantaine, que ce soient des jeunes en sclérose en plaques, des cas de santé mentale. On a une madame qui a 103 ans. Ça fait que les clientèles sont toutes regroupées dans un même établissement, et nous, on se doit d'essayer d'animer ces gens-là tous en même temps, dans le fond. Il faut essayer de répondre aux besoins de chacun. Encore là, si on parlait de milieu de vie, bien c'est la qualité de vie de nos gens aussi. Il faut essayer de répondre à chacun, puis c'est plus difficile.

Puis, quand on parle d'îlots, ce qui pourrait être intéressant si on pouvait se permettre de pouvoir faire ça dans nos centres d'hébergement, c'est que notre jeune de 30 ans ne serait peut-être pas obligé de manger avec la dame de 102 ans qui n'est pas capable d'échanger avec lui parce qu'elle entend dur, tu sais, de créer plus… comme on parle de milieu de vie, mais qu'il y ait une belle qualité de vie puis peut-être qu'il pourrait se retrouver avec des gens qui lui ressemblent, où il pourrait échanger puis qu'il pourrait avoir aussi une routine de vie de sa journée différente. Parce qu'on sait que nos jeunes, peut-être, ce qu'ils aimeraient en CHSLD, c'est peut-être de ne pas faire partie de la tournée de 7 heures ou 7 h 30 pour se faire apporter au lit. Peut-être que lui, cette soirée-là, il aimerait pouvoir veiller jusqu'à 10 heures ou à 11 heures.

Ça fait que c'est pour ça que, si on pourrait avoir des îlots qui regrouperaient les clientèles, ce serait beaucoup plus agréable pour eux de vivre en centre d'hébergement. Déjà qu'on leur impose cet endroit-là parce qu'il n'y a pas d'autre endroit pour eux, autant pour les clientèles spécifiques, si on parle de cas de santé mentale, si on pourrait plus regrouper cette clientèle-là où est-ce qu'on aurait les gens spécialisés pour travailler avec chacune des clientèles… Je ne sais pas si ça répond.

Le Président (M. Bergman) : Mme Charbonneau.

Mme Charbonneau (Lise) : Je rajouterais aussi là-dessus que je pense que ça pourrait faciliter l'organisation du travail, en ce sens que, si on a un ou deux clients plus jeunes sur une unité qui demandent à se coucher plus tard parce qu'il veut écouter un match de hockey puis que, là, la télé est forte, il peut être dérangeant pour les autres clients, alors que, si on regroupe cette clientèle-là ensemble, le personnel va avoir aussi été comme sensibilisé au fait que, dans ce département-là ou sur cette unité-là, bien, c'est une plus jeune clientèle et puis, donc, il faut changer nos façons de travailler. Ce n'est plus à 7 h 30, 8 heures où on fait la tournée et on offre à tout le monde de se coucher, où la majorité des gens ont l'habitude de dire oui parce que c'est des gens plus âgés, mais on change complètement l'organisation du travail. Alors que, là, si on a un ou deux résidents qui demandent d'être couchés plus tard et d'être levés plus tard le lendemain, ça dérange un peu l'organisation générale du travail sur une unité, alors que, s'ils sont regroupés, bien, on organise le travail de façon à répondre à ces clients-là. Donc, je pense que ça pourrait être aussi plus facile pour l'organisation du travail sur ces étages-là si on travaille plus en îlots.

• (17 h 30) •

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Et je présume aussi que ça peut avoir un impact, là, sur la socialisation des personnes, c'est-à-dire leur permettre une meilleure socialisation en étant entourées de personnes avec qui c'est plus facile d'échanger.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Effectivement, et on va rejoindre vraiment leurs intérêts à eux. Avoir un spectacle de musique, bien, on va y aller avec leurs styles de musique à eux, on va aller dans tout un autre registre en fonction de leurs besoins à eux autres. Et le cas du Centre d'hébergement du Centre-Ville en est l'exemple concret. Ils ont une unité complète où les jeunes se retrouvent, on essaie de regrouper les jeunes sur cette unité-là pour répondre vraiment de façon spécifique à leurs besoins et particulièrement au niveau loisirs.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Mais il y a une question qui me vient : Est-ce que ça se fait beaucoup? Est-ce que vous en voyez, des exemples comme ça, de ces îlots-là? Est-ce que ça existe? Et, si ce n'est pas suffisamment généralisé, c'est quoi, les contraintes? Qu'est-ce qui fait qu'on ne voit pas ça plus souvent? Est-ce que vous savez s'il y a des contraintes particulières à l'implantation de micromilieux?

Le Président (M. Bergman) : Mme Poirier.

Mme Poirier (Louise) : Bien, je pense que la principale contrainte, c'est, nos établissements, de la manière qu'ils sont faits présentement, qui demanderaient des aménagements supplémentaires. Parce que c'est sûr que, si on se retrouve avec une unité, on va dire, pour la clientèle avec des troubles de comportement, bien il faut que ce soit une unité qui est quand même protégée. Moi, je pense que c'est plus… Avec les établissements qu'on a présentement, ça demanderait des travaux majeurs pour qu'on peuve permettre de répondre aux besoins de chacune de ces clientèles.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Dans votre document, vous mentionnez une initiative intéressante, et j'aimerais ça vous entendre parler de ça. C'est dans un CSSS, là, qui ont produit un guide à l'intention des familles pour retrouver plus de plaisir dans les visites à un proche hébergé. En fait, si je comprends bien, l'idée a été d'utiliser toute cette dimension de loisirs, animation-loisirs, pour faire en sorte que les proches, la famille puissent participer aussi à des activités de loisirs, et peut-être, on ne sait pas, que ça peut générer un meilleur intérêt pour rendre visite plus souvent.

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : C'est en plein ça. Donc, dans le livre, ce qu'on explique à la famille, c'est que… bon, des techniques de communication, déceler aussi… particulièrement avec les troubles cognitifs — c'est quand même 80 % de la clientèle qu'on retrouve dans nos centres d'hébergement de soins de longue durée — donc on explique à la clientèle les différents phénomènes qu'il peut arriver au niveau de la communication, du non-verbal, des signes qu'ils pourraient déceler.

Puis, parallèlement à ça, on sait que la famille, des fois, elle va moins être présente dans le milieu parce qu'elle se dit toujours : Bien, mon parent ne me reconnaît plus nécessairement, je ne vois pas vraiment l'intérêt d'être présent. Donc, on a pris le médium loisirs pour vraiment leur donner des outils, des petites animations simples, des petits objets qu'ils peuvent utiliser lors de leur visite, et qui vont vraiment stimuler la personne, et qui vont établir un contact plaisant, et que les gens vont être heureux d'êtres venus, et il va y avoir beaucoup de bonheur dans cet entretien-là d'une heure, 1 h 30 min.

Mais, parallèlement à ça aussi, on invite aussi les familles à participer à nos activités, que ce soient nos sorties, que ce soient nos activités communautaires, d'être présents lors de ces activités-là. Ils sont les bienvenus et ils voient des choses très intéressantes, des phénomènes importants, des changements de comportement chez leurs parents, qu'ils ne soupçonnaient pas et qui les impressionnent grandement.

Le Président (M. Bergman) : Mme Charbonneau.

Mme Charbonneau (Lise) : Oui. Je pourrais rajouter aussi que ça les met souvent en contact avec d'autres membres de familles qui vivent les mêmes problématiques. C'est difficile d'aller visiter un parent, un proche qui ne nous reconnaît plus, c'est lourd, parce qu'on dit : Bien, on vient qu'on ne sait plus quoi dire, c'est limité comme conversation parce qu'il n'y a plus vraiment le contact avec la réalité. Alors, le fait de participer à des activités de loisirs, ça rend la visite plus agréable, mais ça met aussi ces gens-là en contact avec d'autres membres de familles qui vivent un petit peu les mêmes difficultés, puis souvent, bien, il peut se créer, à ce moment-là, des petits noyaux, des petits centres d'intérêt, ce qui fait qu'on se donne presque rendez-vous pour nos visites en même temps, ce qui fait que ça rend la visite plus agréable pour le proche aidant.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste trois minutes.

Mme Proulx : J'aurais une question. Est-ce que vous considérez que vos membres, en fait, les animateurs de loisirs qu'on retrouve en centre d'hébergement, est-ce que vous considérez qu'ils sont bien intégrés dans l'équipe soignante? Est-ce qu'ils sont bien reconnus? Est-ce que vous croyez que les autres intervenants dans les milieux d'hébergement sont bien sensibles à l'importance des activités de loisirs ou si c'est encore perçu comme quelque chose : C'est le fun, mais ce n'est pas essentiel? Quelle est votre perception, là, du rôle que vous jouez?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : La dernière affirmation que vous avez faite, c'est encore le cas pour plusieurs établissements. Le rôle de l'intervenant en loisirs n'est pas encore bien perçu par l'ensemble des professionnels. On a encore de la difficulté à participer aux équipes inter, on a encore de la difficulté à écrire des notes au dossier. Notre côté professionnel n'est pas encore bien perçu par l'ensemble. Pourtant, on est le professionnel qui a le contact le plus privilégié, des fois, avec la famille parce qu'on les voit dans un autre contexte qu'un contexte de soins ou de relation traitant. On a des liens, aussi, privilégiés avec le client. On le voit sous une autre forme, on le voit lors d'interactions sociales, on le voit socialiser avec des gens. Donc, on apporte une couleur différente qui peut grandement changer l'intervention du préposé ou de l'infirmière dans son approche avec le client.

On est aussi capables de voir ses habitudes de vie et, par une habitude de vie, on est capables de dire, ou de renseigner, ou de coacher un peu le préposé en lui disant : Bien, ce monsieur-là, vers 16 heures, tu vas voir, il va avoir une crise, peut-être, un comportement perturbateur. Mais amène-lui une petite tasse de thé, là, il avait l'habitude, à 16 heures, de prendre sa petite tasse de thé. Tu vas voir, ça va être différent comme approche. Mais ça, c'est notre apport, notre contribution qu'on peut apporter à l'équipe, mais qui n'est pas tout à fait bien perçue encore. Et c'est pour ça que je pense qu'il faudrait renforcir ça auprès des gestionnaires et des administrations d'établissement pour qu'ils reconnaissent ce rôle-là important et notre contribution.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé.

Mme Proulx : Juste un petit commentaire, M. le Président...

Le Président (M. Bergman) : Certainement, Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : En fait, je pense que votre témoignage aujourd'hui va certainement contribuer à mieux faire reconnaître votre contribution.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci, M. le Président. Mmes Charbonneau, Hallé, Poirier, merci beaucoup. Je pense que vous savez que j'ai, pour la fédération des loisirs en institution... Je porte la fédération dans mon coeur, je trouve que c'est très important. Je me suis fait critiquer énormément pour avoir financé des projets de loisirs dans les institutions. Que ce soit la peinture, la musique, les arts, les clowns thérapeutiques, tutti quanti, les gens disaient, effectivement : Ce n'est pas essentiel — et là je parle de l'extérieur, là, je ne parle même pas de l'intérieur, je parle de l'extérieur — ce n'est pas essentiel. Alors qu'il y a tellement de besoins de soins, comme changer les couches, qu'est-ce que vous faites avec des loisirs en institutions?

Et je veux qu'on continue de parler de ça parce que je considère personnellement que c'est fondamental, que ça fait partie de la vie, qu'on n'a pas le droit de laisser des gens dans une institution à ne rien faire et à attendre, attendre la fin de la vie, là. Je pense qu'il faut que vous nous disiez davantage c'est quoi, un loisir en institution et ce que vous faites, comment vous animez les gens qui ont des pertes cognitives ou les personnes plus jeunes, autrement que de regarder la télévision, là. Qu'est-ce que vous faites avec ces personnes-là?

Le Président (M. Bergman) : Mme Poirier.

Mme Poirier (Louise) : Bien, c'est sûr que — pour répondre à votre question — ça dépend de la clientèle. L'activité ne sera pas la même avec une personne qui a des déficits cognitifs. Si c'est une personne qu'il faut aller gérer une crise, par exemple, bien on va y aller avec une technique multisensorielle, exemple. On va aller essayer de travailler avec cette personne-là avec la douceur, là, on va faire des activités avec elle. Si c'est un jeune, on va essayer de répondre à ses besoins. Si c'est en période estivale, nous, bien, on va essayer de faire des activités à l'extérieur, de faire une sortie, de faire une balade. Écoutez, on est très, très, très polyvalents.

Moi, je pense, quand on commence notre journée, on a toujours une programmation d'activités qu'on a une idée de qu'est-ce qu'on va faire de notre journée, mais, quand la journée termine, on n'a jamais juste fait ça dans notre journée. C'est très… On va commencer notre journée, mais, oups! s'il y a un besoin avec un client, ils vont nous appeler, on va y aller. Il y a une autre personne qui s'ennuie aujourd'hui, ça ne va pas bien, elle pleure beaucoup; ils vont nous appeler, on va y aller. On est très polyvalents dans ce qu'on fait. Puis il faut toujours être alerte à la créativité parce que ce n'est jamais la même activité qu'on peut faire avec un client, parce qu'on va faire des activités communautaires, on va faire des activités de groupe, on va faire de l'individuel. Puis, avec les différents types de clientèles qu'on vit présentement, on travaille beaucoup sur l'individuel pour essayer de répondre aux besoins de tous ces gens.

• (17 h 40) •

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : …que vous croyez de ces activités — en dehors de vous comme intervenante ou intervenant — qui entrent dans les institutions, comme les musiciens qui arrivent pour faire de la musique, qu'elle soit populaire ou dite classique, ou que ce soient des artistes de théâtre, ou que ce soient des peintres qui viennent pour faire faire de la peinture à des gens, ou des gens qui ont envie... l'art par la guérison, c'est-à-dire de mettre des oeuvres d'art sur les murs pour égayer la vie des gens? Qu'est-ce que vous pensez de l'art qui entre dans les institutions, ou des loisirs, ou de la culture?

Le Président (M. Bergman) : Mme Charbonneau.

Mme Charbonneau (Lise) : Il n'y en a pas assez, on n'a pas assez de sous pour en faire entrer encore plus. Je vais parler de mon expérience personnelle. À l'endroit où je travaille, on est deux intervenantes en loisirs pour 345 résidents. Alors, il est bien entendu qu'on ne peut pas toucher l'ensemble de la clientèle avec toutes nos activités qu'on met à la programmation. Heureusement, on a des sous de la fondation et, avec ces sous-là, on va chercher des organismes extérieurs. Pour ne pas les nommer, chez nous, on a la Société pour les arts en milieux de santé, on a de la zoothérapie, on a Jovia, l'organisme Jovia, et on a de la musicothérapie. Toutes ces activités-là sont subventionnées par la fondation.

C'est un plus, un plus que moi, je ne pourrais pas faire. En tant qu'intervenante en loisirs, je ne suis pas musicothérapeute, je ne ferai pas de l'art-thérapie. Je suis très polyvalente, je peux faire plein de choses, mais, à un moment donné, quand ça devient un petit peu plus pointu, ça prend des professionnels formés. Et nous, avec toutes ces activités-là, on en profite pour rejoindre une clientèle que moi, je ne rejoindrai pas avec mes activités de ma programmation régulière qui s'adresse un petit peu plus à l'ensemble de ma clientèle. Alors, avec ces organismes-là, on va rejoindre des clientèles qui sont un peu plus atteintes de déficits cognitifs. C'est là qu'on va aller faire un petit peu plus d'activités individuelles ou de petits groupes parce qu'on sait que les personnes qui présentent des déficits cognitifs un petit peu plus lourds, c'est avec des activités individuelles ou de petits groupes qu'on va les rejoindre. Alors, c'est sûr que, si on n'en avait…

Moi, je dis toujours : En loisirs, si on était huit intervenants, on en fait pour huit intervenants, le résident en aurait juste plus au bout de sa semaine, il y aurait des activités à tous les jours. Parce que, oui, quand on regarde une programmation de loisirs, elle est pleine, on en a sur sept jours, on en a le soir, les fins de semaine, mais le résident comme tel, il n'est pas à toutes ces activités-là parce que, quand je fais une activité, en tant qu'intervenante, de petit groupe sur une unité, pendant que je suis sur cette unité-là, je ne suis pas sur les autres unités. Alors, plus… Puis des loisirs, on n'en a jamais assez. Nous, on sait qu'on peut aller au cinéma le mardi soir, le mercredi, voir une pièce de théâtre, le jeudi, on va aller voir un match de hockey, puis : Envoie, amène-z-en, on n'en a jamais assez!

Moi, je pense que les loisirs en centre d'hébergement, il faut que ça soit autant que les gens en veulent. C'est une offre de services. Plus on en offre, plus les gens vont avoir un choix à faire — parce qu'ils sont encore aptes à faire des choix — et plus on va rejoindre un ensemble de clients. Alors, plus il y en a, mieux c'est. Plus on va rejoindre, plus on va répondre aux besoins de notre clientèle.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bon, merci d'être ici. Parce qu'on parle souvent d'animation, on parle souvent d'alimentation, on parle souvent des bains; moi, je pense, c'est des besoins de base. Et puis, quand vous parlez avec les gens qui vont visiter leurs parents qui sont en CHSLD, la première chose qu'ils vont vous dire : Les gens sont malades ici, puis ça doit être ennuyant.

Puis, pour avoir travaillé en CHSLD, habituellement on a des animateurs. Moi, quand j'ai travaillé en CHSLD, ça fait plusieurs années, les gens avaient une certaine autonomie, même à un tel point qu'il y en a qui pouvaient organiser des activités à l'extérieur en autobus. Mais, à ma connaissance, dans les CHSLD, c'est moins probable aujourd'hui qu'on puisse le faire. Ou est-ce qu'il y a des clientèles avec qui on peut faire ce type d'activités là?

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé? Mme Poirier.

Mme Poirier (Louise) : C'est sûr qu'il y a encore des activités qu'on peut faire au niveau des sorties, comme vous dites. Mais nous, en région, la problématique qu'on vit présentement, c'est d'avoir les ressources, d'avoir les transports pour sortir ces gens-là. Nous, présentement, ce qu'on vit, c'est que, si je dois sortir avec un client, j'ai droit à un transport adapté et que je dois m'organiser avec un autre organisme parce que lui, il peut me permettre d'avoir le transport, exemple, de 10 heures à 1 heure de la journée. Je n'ai jamais de transport de disponible de soir, je n'ai jamais de transport de disponible les fins de semaine. Moi, c'est ce que je vis en région présentement.

Nous avons un résident, dernièrement, qui voulait faire une sortie. Ça tombe un samedi. On a été obligés de prendre un taxi et on a fait environ 50 kilomètres avec le taxi pour vivre une activité qui a duré une demi-heure, et ça lui a coûté 220 $ de taxi. Ça fait que moi, je me dis, tu sais, on est très, très, très limités dans les activités extérieures parce qu'on n'a pas la ressource d'avoir un transport qui nous permet de pouvoir faire les sorties comme on aimerait faire avec les résidents.

Je pourrais vous donner un exemple. La semaine prochaine, je pars avec quatre résidents, je vais aller leur faire faire une activité au centre de ski, on va aller faire du fauteuil-ski adapté. Mais il a fallu que je m'organise avec un transport qui me donne la disponibilité entre 10 heures et 2 heures de l'après-midi, et je dois prendre ces heures-là pour pouvoir permettre à ces jeunes-là de pouvoir faire l'activité.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Les gens qui ont des troubles cognitifs importants, quels types d'activités que vous leur faites faire pour soit les occuper ou que ce soit agréable pour eux autres?

Le Président (M. Bergman) : Mme Charbonneau.

Mme Charbonneau (Lise) : Oui. C'est là que... La musique, c'est une solution miracle parce que souvent... la musique et les animaux, je vous dirais. Les réponses qui me viennent en premier, c'est ça. Parce que, même si on fait une activité de musique sur l'unité, il arrive que les gens qui sont atteints de déficits cognitifs lourds, sévères puissent quand même sortir de l'unité et venir à la salle des loisirs assister à un concert, par exemple. Alors, les gens atteints de déficits cognitifs lourds, souvent on va les rejoindre par la musique, par la zoothérapie ou par des interventions de très courte durée.

On a commencé, nous, des massages de mains. Puis souvent, en sachant aussi leur passé, bien, si c'est des gens qui aimaient la lecture, on va aller faire des petits bouts de lecture. Mais c'est sûr qu'on ne s'enligne pas pour des activités d'une heure ou de 1 h 30 min. C'est dans ce sens-là qu'on adapte nos activités. Et on va se rendre compte qu'au bout de 15, 20 minutes c'est assez. Sauf que, si je n'ai pas de personnes-ressources en assez grand nombre, bien mon petit 15, 20 minutes, s'il revient juste une fois par mois, ce n'est pas beaucoup.

C'est de là qu'on essaie d'embarquer dans nos activités les préposés ou tout autre intervenant. Nous, à ce moment-là, on s'appelle les agents multiplicateurs. On offre des possibilités, des petits jeux simples, de la documentation pour que, si les préposés, ils ont un petit 15, 20 minutes à donner, bien, qu'ils puissent le donner à ces résidents-là, que l'animation-loisirs ne relève pas seulement de l'intervenant en loisirs ou des intervenants en loisirs, qui sont en nombre très peu suffisant pour répondre aux besoins de l'ensemble de la clientèle. Alors, on essaie d'y aller avec des petites activités. Et je reviens encore à tout ce qui est programme Jovia, programme de zoothérapie. Avec cette clientèle-là, c'est tout indiqué. C'est tout indiqué parce que c'est des approches courtes, des interventions courtes, mais très, très personnalisées, selon la personne.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste quatre minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Votre relation avec les familles et… Quelle est l'implication des familles, tout dépendant qui vient visiter puis si les gens peuvent venir régulièrement… comment vous travaillez avec les familles, justement, par rapport aux activités? Parce que ça peut être des gens qui sont très utiles. Et également, dans vos organisations, est-ce qu'il y a des bénévoles que vous coordonnez pour justement être capables de multiplier l'efficacité? Parce qu'on veut quand même être aussi réalistes, on voudrait faire beaucoup, beaucoup d'activités, mais, à un moment donné, il faut rajouter des infirmières, des préposés, des animateurs, des médecins. Il y a comme une capacité financière du système, ça fait qu'il faut être capables de travailler ensemble pour offrir les meilleurs services avec un coût qui est raisonnable.

Le Président (M. Bergman) : Mme Poirier.

• (17 h 50) •

Mme Poirier (Louise) : C'est sûr que la première approche qui se fait avec la famille, c'est toujours une rencontre avec la famille pour mieux connaître le résident avant tout, ce qu'on appelle un peu l'histoire de vie de la personne. Là, le départ se fait là avec la famille, de nous expliquer qu'est-ce que son parent, il aime faire, qu'est-ce qu'il aime moins faire, ses habitudes de vie. Et nous, on part de là avec nos activités. Là, c'est la première partie, c'est vraiment la famille qui sont aidants pour nous.

Mais ensuite, pour tout ce qui est activités communautaires, qu'on parle de la fête de Noël, que ce soit la fête de la Saint-Valentin, quand ça va être le temps des sucres, c'est sûr qu'on implique les familles pour venir donner du temps avec nous pour voir aussi… Justement, comme Mme Hallé disait tout à l'heure, on voit notre parent différemment aussi dans ces moments-là. Ça fait que, là, on les implique. Et là c'est souvent la phrase qu'on entend dire, qu'ils sont très heureux de voir leurs parents avec nous. Et souvent il y a un certain regret, de dire : C'est triste qu'il n'est pas venu ici avant. Parce qu'ils voient que l'état de santé de leurs parents, souvent, change.

Les résidents arrivent à une étape de leur vie, et ça fait quelques semaines, quelques mois qu'ils sont avec nous puis, oups! ils se mettent à bien aller, leurs parents fonctionnent quasiment, des fois, avec un agenda tant qu'ils sont tellement occupés à tout vouloir faire dans le centre. Ça fait que c'est là qu'on voit que l'implication de la famille avec nous, ça a une grande importance parce que plus qu'on a de l'aide, plus qu'on peut organiser des choses. Puis des fois on va aller chercher des forces d'une certaine personne qu'on ne connaissait pas, puis qui va pouvoir nous donner du temps, puis qui va pouvoir nous aider.

Puis, comme tantôt Mme Charbonneau disait, oui, en grand centre, on a la chance d'avoir des ressources. Nous, en région, bien, si on voulait de la musicothérapie, on aurait un peu de difficultés à avoir une ressource qui viendrait chez nous. On s'est aperçus qu'avec la zoothérapie c'était la plus belle activité à faire avec notre clientèle. Et moi, je suis allée chercher la formation à Montréal pour pouvoir faire de la zoothérapie dans mon centre parce que je n'avais pas de ressource. Ça fait que, si je suis en train de faire de la zoothérapie, un après-midi, avec mes résidents, c'est évident que — moi, je suis dans un centre, je suis toute seule pour 94 résidents — les autres résidents, je ne les vois pas dans cet après-midi là. Mais il faut être très, très polyvalent pour justement répondre à tous les types de clientèles, mais à tous les métiers, autant qu'on va faire des galettes qu'autant qu'on va faire de la zoothérapie.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement… Mme Charbonneau.

Mme Charbonneau (Lise) : Bien, j'aurais juste rajouté, concernant les bénévoles… La majorité, oui, des intervenants en loisirs travaillent avec des équipes de bénévoles. La difficulté qu'on rencontre, bien souvent, c'est que ce n'est pas dans tous les milieux qu'il y a des responsables de ressources bénévoles. Si je prends mon exemple à moi, je m'occupe aussi d'une équipe d'une vingtaine de bénévoles en même temps que je suis technicienne d'intervention en loisirs, ça fait que c'est sûr que je n'ai pas beaucoup de temps à mettre pour le recrutement, et le suivi, et la formation.

Mais ce que je voudrais dire, parce que ça renchérit au niveau des familles — je vais terminer là-dessus — c'est que moi, particulièrement, c'est spécial parce que presque tous mes bénévoles sont des anciens membres de familles qui ont tellement aimé ça qu'ils sont restés comme bénévoles. Alors donc, d'où l'importance d'impliquer nos familles parce que, s'ils sentent que c'est un milieu qui est agréable, positif, bien, après ça, ça nous fait des très, très bons bénévoles parce qu'ils connaissent très bien le milieu, ils s'y sentent bien. Souvent, au décès du proche, ils se retrouvent avec un grand vide, ces gens-là. Alors, s'ils ont le goût de venir continuer leurs visites mais en tant que bénévoles, bien c'est positif. Mais, oui, on travaille avec des bénévoles, mais, ça aussi, c'est une denrée rare.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci de votre présence. C'est de la musique à mes oreilles. Ce que vous incarnez, c'est exactement ce qu'on dit de plus en plus, c'est de créer des milieux de vie et qu'il y ait des interventions qui vont beaucoup plus dans le sens de ce que vous faites, c'est-à-dire de distraire nos bénéficiaires, de leur permettre… la notion de plaisir, qu'on perd souvent dans les CHSLD parce qu'on parle beaucoup de soins, on parle beaucoup de médication. Alors, ce que vous, vous venez d'ajouter, c'est la création d'un milieu de vie et la notion de plaisir.

Puis c'est étonnant de voir… Moi, j'ai travaillé aussi en CHSLD, mais je suis allée récemment dans des milieux de vie où effectivement on a eu des gens en musicothérapie, où on a vu des bénéficiaires atteints de démence sévère être capables de connaître les paroles des anciennes chansons, mais de a à z. Alors, ces gens-là, qui ne reconnaissent plus les membres de leur famille, peuvent très bien chanter la chanson de a à z, et tout le monde est surpris de voir que leur mémoire à long terme, elle est toujours là. Et non seulement de chanter, mais de sourire en chantant, c'est un baume quand on les voit.

Moi, j'aurais une question à vous poser et, si ce n'est pas le cas, peut-être une suggestion à vous faire. Est-ce que vous avez des chiffres qui démontrent que le fait de votre présence dans les CHSLD fait en sorte qu'on utilise moins des psychotropes, qu'on utilise moins des contentions et donc donne une économie au système qui vous permettrait de vous multiplier.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Hallé (Anne-Louise) : Malheureusement...

Le Président (M. Bergman) : Mme Hallé.

Mme Hallé (Anne-Louise) : Excusez-moi. Malheureusement, il n'y a pas beaucoup d'études. Les études qu'on a actuellement, c'est plus des études au niveau américain, et les centres d'hébergement du côté américain ne sont pas la même réalité qu'ici, au Québec. Donc, on n'a pas d'études ici qui sont faites vraiment sur l'impact. Mais, si on regarde ceux du côté de nos cousins américains, effectivement, oui, il y a un impact positif et il y a des répercussions importantes sur, entre autres, la médication pour nous aider au niveau du sommeil le soir, une médication plus douce avec une petite activité de loisirs peut très bien pallier à cette médication-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme Charbonneau.

Mme Charbonneau (Lise) : Une petite activité où on aurait offert un petit verre de vin rouge au souper. Habituellement, ça fait une bonne job pour remercier les gens, mais c'est... Moi, je dis tout le temps : Les personnes âgées sont en centre d'hébergement, mais ce sont des humains. Alors, s'ils aimaient prendre un petit verre de vin rouge au souper à l'occasion, bien il faut continuer ça. C'est ça un peu le milieu de vie.

Et je voulais en revenir aux contentions, parce qu'on a eu la chance d'assister à la fin du groupe avant puis on parlait de contention chimique. Moi, j'ai été témoin, à certaines occasions, de personnes âgées en situation de crise parce qu'il ne voulait pas prendre ses médicaments, ou autres, il ne voulait pas aller au bain. Et on a profité de la présence de la musicothérapeute pour venir faire une petite intervention, ou même de la présence de Jovia, qui est… La Belle Visite, anciennement Dr Clown, pour dire : Est-ce qu'on essaierait ça? Parce que, là, on n'a plus le contrôle, madame est en crise, bon, elle donne des coups, puis tout ça. Puis on a réussi. Ça ne marche pas toujours. Mais, oui, à plusieurs occasions, on a réussi.

Alors, moi, j'appelle ça les mesures alternatives. Justement, en situation de crise, alors, au lieu de donner un PRN ou de s'acharner après... Puis c'est difficile pour le personnel aussi. Alors, c'est sûr que ces mesures alternatives là, on ne les a pas en permanence dans nos milieux, mais, au moment où on les a, si on peut s'en servir, bien, pourquoi pas? Et effectivement, des fois, ça peut limiter... Mais on n'a pas de chiffres pour dire les économies qu'on fait.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Mme Charbonneau, Mme Hallé, Mme Poirier, merci d'être ici avec nous et partager votre expertise avec nous.

Collègues, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission quelques instants seulement avant de commencer une séance de travail sur un autre mandat.

(Suspension de la séance à 17 h 58)

(Reprise à 19 h 30)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, la commission reprend ses travaux. Je vous rappelle que la commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et auditions publiques sur les conditions de vie des adultes hébergés en centre d'hébergement et de soins de longue durée.

Ce soir, nous avons le privilège de recevoir le Vérificateur général du Québec. Bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Pour fins d'enregistrement, on a besoin de votre nom et le nom de ceux qui vous accompagnent, ainsi que vos titres. Alors, le micro est à vous, M. Samson.

Vérificateur général

M. Samson (Michel) : Merci, M. le Président. Alors, Michel Samson, Vérificateur général du Québec. Je vous présente les gens qui m'accompagnent : à ma droite, Marie-Claude Ouimet, qui est directrice principale au bureau du Vérificateur général; à l'extrême droite, Josée Bellemare, qui est chargée de projet, au Vérificateur général, évidemment; et, à ma gauche, Mme Carole Bédard, qui est directrice de vérification chez nous aussi. Donc, c'est des gens qui connaissent très bien le sujet dont on va discuter ce soir, qui ont participé, d'ailleurs, aux travaux dont on vous a fait un résumé dans le mémoire qu'on a transmis.

Donc, M. le Président, Mmes et MM. les membres de cette commission, c'est avec intérêt que je participe à cette séance de la Commission de la santé et des services sociaux portant sur les conditions de vie des adultes hébergés en centre d'hébergement et de soins de longue durée.

En 2011, je débutais la réalisation d'une vérification de l'optimisation des ressources portant sur les services d'hébergement des personnes âgées en perte d'autonomie, dont ceux offerts en centre d'hébergement et de soins de longue durée. Le rapport, déposé en mai 2012, fait partie du Rapport du Vérificateur général du Québec à l'Assemblée nationale pour l'année 2012‑2013. Cette vérification s'est articulée autour de trois axes, soit la gestion des ressources d'hébergement, le financement des services et le contrôle de la qualité. Elle avait été effectuée auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux, de deux agences et de quatre centres de santé et de services sociaux.

Plusieurs constats et recommandations formulés alors concernent les défis soulevés par la commission dans le document de consultation. Je vous présenterai aujourd'hui mes observations dans l'ordre qu'elles sont traitées dans ce document, soit les orientations et l'information de gestion au regard des ressources d'hébergement, ainsi que les défis suivants : l'accessibilité, le financement, les services et les soins, ainsi que l'organisation du travail, et enfin le suivi de la qualité. Je n'aborderai pas les autres défis, soit l'organisation physique, les clientèles particulières, les proches aidants et la formation du personnel, puisque mon rapport de vérification n'en traitait pas.

Vous trouverez également dans la présentation que je vous ai transmise d'autres constatations faites dans mon rapport et des extraits des plans d'action transmis par les entités afin de donner suite aux recommandations que nous avions formulées.

Nous avons constaté, lors de notre vérification, que, quoique le ministère ait formulé à son réseau des orientations sur les services d'hébergement, certaines mesures prévues depuis au moins sept ans tardent à s'implanter, dont la définition de balises quant à l'offre de services par niveaux de perte d'autonomie et de critères d'accès par type d'hébergement.

Par ailleurs, les entités vérifiées n'ont pas de portrait à jour ni des personnes âgées en perte d'autonomie, qui inclut leur profil d'autonomie et leurs besoins, ni des services offerts par les ressources d'hébergement ou de l'accès à celles-ci. Il est alors difficile d'assurer l'adéquation entre les besoins et les services offerts.

À ce titre, nous avions recommandé au ministère de mettre à jour ses orientations et de mettre en oeuvre un nouveau plan d'action. De plus, nous lui avons recommandé, ainsi qu'aux entités vérifiées, de disposer de l'information suffisante à l'égard des besoins des usagers, des ressources d'hébergement, des services offerts et de l'accès à celles-ci.

En matière d'accessibilité, notre constat est que les usagers sont hébergés selon la disponibilité des ressources d'hébergement plutôt qu'en fonction de leurs besoins. Les installations existantes ne correspondent pas toujours aux besoins de la clientèle, ce qui entraîne parfois une utilisation inadéquate de ces dernières. Le développement de ressources pour une clientèle moins lourde que celle des CHSLD lui permettrait d'avoir accès à un type d'hébergement plus approprié. Par exemple, parmi les personnes admises dans un centre d'hébergement dans les régions de la Capitale-Nationale et de Montréal entre octobre 2010 et septembre 2011, plus du quart avaient un profil d'autonomie inférieur à celui préconisé pour ce type de ressources.

Dans certaines situations, la décision peut être justifiée, mais une analyse plus détaillée permettrait de déterminer les placements requis et ceux qui le sont moins. Toutefois, le ministère manque d'information sur l'accès aux différentes ressources d'hébergement, et les listes d'attente des deux régions ne montrent pas le besoin réel de places par type d'hébergement. Nous avons recommandé aux entités vérifiées de réserver les lits en centres d'hébergement et de soins de longue durée principalement aux personnes en lourde perte d'autonomie.

En ce qui a trait au financement, nous avons constaté qu'il comporte des disparités et qu'il ne tient pas suffisamment compte des besoins de la clientèle. Les budgets accordés aux CHSLD le sont sur une base historique. Bien que le ministère ait évalué le coût moyen d'une place en centre d'hébergement, il n'a effectué aucune analyse de coûts par établissement afin de déterminer les causes des variations et de juger de leur pertinence.

Outre l'indexation annuelle, la contribution demandée à l'usager hébergé en CHSLD et les règles servant à l'établir n'ont pas été revues depuis plus de 15 ans. Notamment, le lien entre la contribution et les coûts des services n'a pas été démontré. En 2011, la contribution maximale demandée ne couvrait que 78 % des frais liés au gîte et au couvert. De plus, la méthode de calcul crée des iniquités selon les avoirs ou la situation familiale de la personne. Nous avons recommandé au ministère de revoir et de réévaluer périodiquement la contribution des personnes âgées hébergées ainsi que l'ensemble des frais qu'elles assument.

Pour ce qui est des services et des soins offerts ainsi que de l'organisation du travail, les ressources d'hébergement destinées à des clientèles semblables fournissent des services d'intensité et de nature variables quant au temps moyen quotidien disponible par usager, sans que les écarts aient été expliqués. Ainsi, les jours de semaine, le temps moyen disponible par usager atteint 102 minutes dans un centre d'hébergement, alors qu'il est de 37 minutes dans un autre les jours de fin de semaine, soit une variation de 176 %. Par ailleurs, les nuits de fin de semaine, le nombre d'usagers par employé varie considérablement d'une installation à l'autre.

En outre, la qualification du personnel et les services offerts sont variables dans les six centres d'hébergement visités. Des différences importantes existent dans la composition des groupes d'employés alors que chacun d'eux exerce des fonctions précises. Par exemple, le ratio d'infirmières par rapport aux infirmières auxiliaires varie de 25 % à 77 % les jours de semaine et de 20 % à 100 % le soir. De plus, le temps moyen quotidien disponible pour les services professionnels par résident est variable. Nous avons recommandé aux agences et aux CSSS de s'assurer que les établissements adaptent et développent les ressources d'hébergement en fonction des besoins des personnes âgées en perte d'autonomie et voient à ce qu'elles reçoivent les services requis par leur condition.

En matière de suivi de la qualité, le ministère ne s'assure pas que l'ensemble des mesures permet une surveillance suffisante et adéquate de la qualité de tous les types de ressources d'hébergement. Les résultats des différents contrôles effectués ne sont pas intégrés et tous diffusés, ce qui ne permet pas d'obtenir le portrait global de l'ensemble des ressources d'hébergement ni de les comparer.

Ainsi, en ce qui a trait aux visites ministérielles, le contrôle est peu fréquent. En 2012, le premier cycle de visites avait commencé il y a huit ans. De plus, l'évaluation n'est pas effectuée à partir d'indicateurs et est essentiellement qualitative, ce qui rend la comparaison difficile entre les installations. L'agrément par une autorité externe est fait auprès du CSSS, mais certains CHSLD des centres de santé vérifiés n'ont pas été visités. Enfin, toute installation offrant plus d'une heure de soins devrait avoir un permis de centre d'hébergement comme le prescrit le ministère, mais plusieurs résidences privées pour aînés ne demandent pas les autorisations requises et le ministère n'effectue aucun contrôle pour s'assurer du respect de la règle. Nous avons recommandé au ministère de veiller à ce que l'ensemble des mesures de contrôle de la qualité permettent une surveillance suffisante et adéquate des ressources d'hébergement.

En terminant, j'aimerais souligner que plusieurs des lacunes relevées dans mon rapport de vérification correspondent aux préoccupations soulevées par la commission dans le document de consultation. Les entités vérifiées ont été appelées à produire un plan d'action pour les corriger, ce qui devrait permettre, nous le souhaitons, d'améliorer les conditions de vie des adultes hébergés en CHSLD. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Bergman) : Merci, M. Samson, pour votre présentation. Collègues, est-ce qu'il y a consentement afin de permettre au député d'Orford de participer à la séance de ce soir? Consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bergman) : Consentement. Maintenant, pour le bloc du gouvernement, Mme la députée de Sainte-Rose.

• (19 h 40) •

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonsoir, monsieur, mesdames. Il me fait plaisir de vous accueillir dans cette commission. Alors, M. Samson, vous dites que votre rapport a été déposé en mai 2012, et il couvrait, si je comprends bien, la période 2010‑2011, une seule année?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Un petit instant, je veux vous donner la réponse exacte. Je m'excuse. Notre vérification a porté sur les activités des exercices 2010‑2011 et 2011‑2012, effectivement.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci. Effectivement, il y a certains constats, là, qui suscitent des questionnements. Alors, je vais commencer par vous demander… Lors de votre vérification portant sur les ressources et les services d'hébergement, hein, il y a des éléments, là, pour lesquels nous, on se préoccupe, mais qui ne faisaient pas partie de votre mandat, donc, essentiellement, c'était sur les ressources services d'hébergement des personnes âgées. Et un des constats que vous avez faits, c'est qu'il y a des mesures prévues depuis environ sept ans qui tardent, qui ont tardé, qui tardaient à être mises en place. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu plus sur ces précisions-là au niveau de ces retards d'implantation, qu'est-ce que c'est et pourquoi ça a tant tardé à être mis en place?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Oui, comme vous l'avez dit, effectivement les mesures qui étaient prévues depuis au moins sept ans ont tardé à s'implanter. Je peux vous donner deux exemples de ces mesures-là qui n'étaient toujours pas implantées, soit la définition de l'offre de services par niveaux de perte d'autonomie et la détermination de critères d'accès par type d'hébergement selon le profil. Donc, c'étaient quand même deux éléments majeurs que l'on considère, là, qui n'avaient pas été faits depuis que ces mesures-là, il y a sept ans, avaient été annoncées, qui n'avaient pas été définies par le ministère lors de nos travaux.

Mme Proulx : Et est-ce que ce retard-là a eu des conséquences particulières?

M. Samson (Michel) : Bien, écoutez, je pense que certains constats qu'on a dans le rapport, par la suite, découlent effectivement du retard qu'il peut y avoir eu au niveau de l'application de ces grandes orientations là. Lorsqu'on dit, plus tard, un petit peu plus loin dans le rapport, qu'on a constaté qu'il y avait des ressources qui étaient hébergées, par exemple, en CHSLD alors que leur profil d'autonomie ne correspondait pas à ce besoin-là, je pense que c'est un lien direct à faire avec le fait qu'on n'a pas bien déterminé les balises ou donné des orientations claires dans le réseau pour contrecarrer ce genre de situation, malheureusement.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Et, suite à la publication de votre rapport, notamment sur ces éléments-là, le ministère vous a soumis un plan d'action pour donner suite à vos recommandations. Est-ce qu'à vos yeux ce plan d'action soumis représente une avenue intéressante?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Comme vous le savez, lorsqu'on dépose un rapport de ce genre-là, d'optimisation des ressources, le ministère ou les organisations concernées nous transmettent un plan d'action, et ce plan d'action là aussi est remis aux membres, à la demande des membres de la Commission de l'administration publique.

Dans ce dossier-là, il y a, d'ailleurs, eu une audition de la Commission de l'administration publique où les membres de la commission ont pu discuter du contenu de ce rapport et du plan d'action qui avait été proposé par le ministère et les agences. Et nous, de notre côté, évidemment on prend connaissance du plan d'action, mais vous comprenez qu'on ne procède pas à une vérification.

Ce qu'on a constaté, c'est que les actions qui étaient prévues dans le plan d'action, si elles étaient appliquées et si le ministère et les agences allaient de l'avant, ça devrait permettre de corriger les situations qu'on avait soulevées, mais on n'a pas fait de vérification pour aller constater sur le terrain ou au ministère si les gestes avaient tous été posés. Normalement, lorsqu'on dépose un rapport, on effectue notre suivi, qu'on appelle, pour aller voir si les actions ont vraiment été appliquées trois ans après le dépôt de notre rapport. Donc, comme le rapport a été déposé en 2012, mai 2012, on devrait effectuer un suivi, normalement, autour de 2015 pour voir l'application des recommandations et la mise en place du plan d'action.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Vous dites aussi, dans votre rapport, que vous avez constaté, dans vos vérifications, là, du réseau d'hébergement public, toujours en 2010‑2011, que les usagers étaient hébergés selon la disponibilité des lieux d'hébergement plutôt qu'en fonction de leurs besoins et vous mentionnez aussi que les installations existantes ne correspondaient pas toujours aux besoins de la clientèle, ce qui entraînait parfois une utilisation inadéquate de ces ressources d'hébergement. Si, en 2010‑2011, nos CHSLD n'hébergeaient pas la bonne clientèle, quelles seraient les solutions, vous pensez, à mettre en place rapidement pour qu'en 2014 on puisse effectivement héberger les bonnes personnes aux bons endroits?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Écoutez, je ne voudrais pas dire qu'en mettant ces solutions-là en place qu'en 2014 tout serait corrigé parce qu'il faut quand même… Il y a des gens qui peuvent être hébergés en CHSLD et dont le profil ne correspond pas à ce type de besoin là, mais, pour toutes sortes de circonstances, il n'y a pas d'autre place, donc la personne est en CHSLD et c'est tout à fait normal.

Là, je veux être clair dans mes propos, c'est tout à fait normal que la personne demeure en CHSLD si on n'a pas d'autre ressource où cette personne-là peut aller. Mais c'est certain que le développement de places en ressources intermédiaires ou d'autres types de ressources permettrait justement de désengorger — permettez-moi l'expression — peut-être ces places-là au niveau des CHSLD. Parce que ce qu'on constate, c'est que c'est des gens qui ont une autonomie plus grande, donc qui n'auraient pas nécessairement besoin d'être en CHSLD, tout comme on a vu dans des ressources intermédiaires des gens qui étaient là et, avec des soins à domicile, un meilleur suivi de soins à domicile, les gens auraient pu demeurer possiblement dans leur résidence, donc ça aurait libéré des places.

Il y a un peu une cascade, à ce moment-là, qui pourrait se faire. De vous dire, si ce serait mis en place, est-ce que ça corrigerait tout de suite? Je ne penserais pas, bien honnêtement, parce qu'il y a quand même un certain processus qui est assez long, mais c'est sûr que ce seraient des pas dans la bonne direction.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui, merci. Donc, ce qui est notamment proposé dans le plan d'action du ministère pourrait représenter des réponses satisfaisantes, là, éventuellement, si c'était mis en place.

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, effectivement, si c'est mis en place et bien appliqué — chose qu'on verra en 2015 possiblement — oui, ça permettrait de corriger des situations qu'on a relevées.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. M, le vérificateur, vous abordez aussi… En 2010‑2011, vous avez constaté des écarts importants dans les ratios d'infirmières par rapport aux infirmières auxiliaires. Ces écarts, selon votre rapport, variaient de 25 % à 77 % les jours de semaine et de 20 % à 100 % le soir. Et le temps moyen quotidien disponible pour les services professionnels par résident était variable aussi d'une installation à l'autre. Au niveau de l'accessibilité à des services professionnels en milieu d'hébergement, quelles sont les lacunes que vous avez le plus souvent observées? C'était quel genre de difficultés ou de lacunes, là, que vous avez soulevées?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

Des voix :

M. Samson (Michel) : M. le Président, excusez-moi du temps de réaction ou de réponse.

Le Président (M. Bergman) : Non, ça va, M. Samson.

M. Samson (Michel) : En fait, ce que ma collègue me mentionne, c'est que le ministère compile un seul indicateur, donc on n'est pas en mesure de savoir est-ce que c'est au niveau des physiothérapeutes, des ergothérapeutes où les disparités sont les plus grandes. C'est très difficile de le savoir présentement avec l'information de gestion qui est disponible… qui était disponible à ce moment-là, lorsqu'on a fait nos travaux, au ministère.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Est-ce que cette information de gestion correspondait à vos attentes ou s'il y avait des lacunes aussi au niveau de l'information de gestion?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Il y avait des lacunes… On avait des commentaires au niveau de l'information de gestion. Parce qu'on pense, encore là, si on veut réussir à donner les soins appropriés et d'une façon équitable à nos personnes qui sont hébergées en CHSLD ou dans d'autres types de résidences, bien, on doit avoir une information de gestion qui est de qualité, qui nous permet de définir certaines balises ou certains standards qu'on se fixe dans tout le réseau et qu'on se donne comme objectif de respecter, chose qui n'existe pas présentement.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Avez-vous une recommandation particulière au niveau de l'information de gestion?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Oui, on avait recommandé aux entités vérifiées, c'est-à-dire au ministère, aux agences et aux CSSS, de disposer de l'information suffisante à l'égard des besoins des usagers, des ressources d'hébergement, des services offerts et de l'accès à celles-ci. C'est une recommandation, je conviens, qui est quand même assez générale, mais, lorsqu'on lit le rapport, elle est en lien avec plusieurs constats qui sont dans le rapport, et c'est pour ça qu'elle peut paraître très générale, mais elle regroupe plusieurs éléments qu'on a soulevés dans le rapport.

• (19 h 50) •

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : En fait, ce qu'on doit comprendre, c'est qu'il y avait matière à amélioration au niveau, de façon générale, de l'information disponible permettant d'organiser, là, les ressources de manière optimale, notamment en termes de ratio de personnel soignant.

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Tout à fait. Oui, tout à fait. J'ajouterais peut-être aussi, si vous permettez, une information de gestion qui permet de comparer les résultats ou les données entre les mêmes types d'établissements, chose qui ne se fait pas non plus, pouvoir comparer les services offerts, les ratios entre deux CHSLD, entre des ressources intermédiaires, pour optimiser, justement, les services qu'on rend puis être sûrs qu'on rend les bons services et de la bonne façon en se comparant pour voir où sont les plus performants, si je peux m'exprimer de la sorte.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Dans votre mémoire, toujours pour la période 2010‑2011, vous abordez la question de la conduite et de la validité des visites ministérielles et d'appréciation, là, en CHSLD. Pouvez-vous nous résumer les constats les plus…

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui. En fait, au niveau du contrôle de la qualité, ce qu'on a constaté, c'est que ce contrôle-là est très variable. Il y a différents services, différentes organisations qui exercent des activités de contrôle de la qualité, mais tout ça n'est pas nécessairement coordonné, et le ministère n'a pas un portrait global. De plus, par exemple, on a des visites ministérielles, l'agrément par une autorité externe, différents permis qui sont donnés, et tout ça n'est pas nécessairement coordonné. Les visites étaient annoncées, dans certains cas, bien à l'avance. Donc, à notre avis, ça n'assurait pas un contrôle de la qualité qui était optimum au niveau de toutes ces visites-là.

Donc, il y avait lieu de revoir tout le processus parce qu'il y a plusieurs types d'agrément ou de visites de contrôle qui sont faits de part et d'autre par différents intervenants, et, comme je l'ai dit, tout ça n'était pas nécessairement coordonné de façon globale et à la fin le ministère n'a pas non plus une vue d'ensemble des résultats de tout ça. Donc, le ministère n'était pas en mesure de juger des problématiques importantes ou non qu'il pouvait y avoir dans un CHSLD par rapport à une autre organisation, compte tenu qu'il n'a pas le portrait global de toutes ces différentes visites là qui visent à assurer un contrôle de la qualité.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Et qu'est-ce qui pourrait être fait? Ce serait quoi, vos recommandations par rapport à ce contrôle de la qualité? Comment faire en sorte qu'on puisse avoir une vue d'ensemble puis une vision globale et pouvoir se comparer aussi, là, d'une institution à l'autre, d'un centre à l'autre?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : M. le Président, oui. Premier élément, une meilleure coordination, c'est certain, qui permettrait… puis une action, je dirais, beaucoup plus sentie ou proactive de la part du ministère à cet égard-là. Donc, en ayant une meilleure coordination, bien, évidemment on assurerait que les… pas les inspections, mais les contrôles de qualité se font en bonne et due forme, et de façon uniforme, et que le ministère est au courant de tous ces résultats-là, donc qu'il est capable d'intervenir dans les endroits les plus problématiques. Le ministère doit avoir un portrait global de la situation, chose qu'il n'a pas présentement. Mais, encore là, il faut coordonner tous ces différents types de visites là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Et vous parlez de la coordination qui semblait, à cette époque, déficiente, là, ou peu présente. Comment on aurait pu mieux coordonner… Y a-tu des outils qui auraient pu être mis en place, développés? Y a-tu des orientations qui auraient pu être données, des directives clairement établies? Qu'est-ce qui fait que vous avez constaté ce manque de coordination?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Comme je l'ai mentionné, c'est sûr qu'une meilleure proactivité du ministère aiderait beaucoup dans cette situation-là. Un leadership plus senti à cet égard-là aiderait pour uniformiser la façon de fonctionner dans tout le réseau, et des interventions auprès des agences et des CSSS pour s'assurer que tout est coordonné et surtout que lui reçoit le portrait final pour être en mesure de mieux juger de la situation.

Vous savez, en Ontario, il se fait des… puis je ne vous dis pas que c'est la meilleure façon de faire, mais il se fait toutes sortes de visites au niveau du contrôle de la qualité, et les résultats sont publiés, les résultats sont publics, de ces visites-là. Donc, il y a quand même un incitatif, vous savez, lorsqu'on sait que nos résultats de visite vont être rendus publics, bien je pense que ça laisse tout le monde un peu sur le qui-vive, si je peux m'exprimer ainsi.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Est-ce que vous en avez fait une recommandation? Ou est-ce que vous en faites une recommandation?

M. Samson (Michel) : Notre recommandation n'était pas de rendre publiques les données. Je pense que c'est au ministère à prendre cette décision-là et à l'évaluer. Mais c'est certain que, comme je le mentionnais, il doit y avoir une meilleure coordination et une action plus soutenue du ministère pour avoir un portrait global.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : J'aimerais que vous nous parliez un peu des constats que vous avez pu faire dans votre vérification par rapport au financement. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire du mode de financement? Est-ce que, selon vous, ça répond aux besoins? Est-ce que c'est la manière optimale, celle qui avait cours, là, en 2010‑2011, par rapport à ce qu'on pourrait… Qu'est-ce qu'on devrait changer et comment on devrait optimiser le financement?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Écoutez, je pense que vous savez que, dans le réseau de la santé, qui est un réseau… un gros réseau, un réseau important, les allocations ont toujours… bien, ont toujours été faites sur une base historique depuis très longtemps. Il y a une indexation qui est faite à chaque année, évidemment, mais les allocations ont continué à être faites sur une base historique, ce qui fait en sorte qu'il n'y a rien qui nous assure que les sommes allouées correspondent bien aux besoins d'une région donnée ou d'un CHSLD concerné, étant donné qu'on y va sur une base historique qu'on indexe.

Bon, le ministère a mis en place, je sais, dans les dernières années, certaines allocations plus particulières ou précises pour commencer un peu, je dirais, à défaire cette tendance historique là, mais évidemment les sommes en jeu sont tellement importantes, ça va prendre beaucoup de temps avant qu'on réussisse à changer la façon de faire. Donc, c'est vraiment sur une base historique. Et, en y allant sur une base historique, présentement ce qu'on peut conclure, c'est qu'il n'y a rien qui nous assure que ça répond aux besoins soit de la région ou du centre, du CHSLD concerné. Il reçoit ce qu'il avait eu l'année précédente augmenté de tant de pour cent, donc ce n'est pas en lien avec les besoins que cette organisation-là aurait.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Vous, comme vérificateur, là, vous êtes habitué de regarder ces données-là année après année. Avez-vous une idée, une opinion sur pourquoi c'est demeuré comme ça? Vous dites que le financement sur une base historique ne répond pas vraiment aux besoins. Et pourquoi? Pourquoi c'est comme ça depuis... Pourquoi il n'y a pas eu de changement ou de...

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Écoutez, bien honnêtement, je ne serais pas en mesure de vous répondre pourquoi c'est toujours comme ça puis ça perdure comme ça. Ce que je peux vous dire, c'est que, dans le réseau de la santé, au ministère de la Santé, on réalise des mandats quand même assez régulièrement, et c'est souvent un élément qu'on note. Ce n'est pas uniquement au niveau des services d'hébergement, on retrouve la même situation dans d'autres secteurs, et c'est un virage important qu'il y aurait à faire, qu'on voit dans d'autres provinces, dans d'autres juridictions, qui se fait présentement. On n'y va pas en fonction d'une base historique, mais en fonction plus d'une performance, je dirais. Mais, vous comprenez, ici, on parle — le ministère de la Santé — de plusieurs dizaines de milliards qui sont en jeu. Donc, il y a un équilibre à trouver là-dedans. Mais vous dire pourquoi on a toujours continué sur une base historique, je pense que c'est les gens du ministère qui seraient les plus aptes à vous répondre là-dessus.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste deux minutes.

Mme Proulx : Vous mentionnez aussi la contribution des usagers qui est à revoir, qui n'a pas été revue depuis 15 ans. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire là-dessus?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

• (20 heures) •

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Ce qui est convenu au ministère, c'est que les personnes en CHSLD, le coût d'une place en... le service que l'on rend et le coût que l'on demande à une personne vise à couvrir ce qu'on appelle le gîte et le couvert, dans le fond. C'est ce qu'on veut couvrir avec la contribution que l'on demande à la personne en CHSLD.

Bon. Le ministère n'avait pas vraiment de données très précises sur ce que représentait le coût du gîte et du couvert. L'équipe a fait des analyses pour établir ce que pourrait être le coût du gîte et du couvert. Je crois qu'on est arrivé à environ 2 100 quelques dollars, là, d'un montant qui représentait le gîte et le couvert, alors que le montant maximum qui était demandé aux usagers à ce moment-là était de 1 600 quelques, 1 668 $, 1 670 $. Donc, il y avait quand même un écart de presque 28 % entre les deux. Bon. Ce qu'on a dit au ministère, dans le fond, c'est de refaire ces analyses-là, et d'envisager cette possibilité-là, puis surtout de déterminer précisément combien coûtent le gîte et le couvert pour avoir la bonne information et ensuite prendre la décision en toute connaissance de cause.

Parce que vous comprenez que le ministère, d'un point de vue politique, pourrait décider : Je sais que ça coûte 2 000 $. Par contre, pour raisons x, y, z, je demande 1 800 $, tu sais? L'essence de notre commentaire n'est pas de dire : Nous, on a évalué que ça coûte 2 100 $, vous devez obligatoirement demander 2 100 $. On dit : Il y a un écart. Vous dites que le service que vous rendez et le coût que vous demandez sert à couvrir le gîte et le couvert. Ce qu'on vous dit : Présentement, ce que vous demandez ne couvre pas le gîte et le couvert. Donc, faites des analyses plus précises et positionnez-vous, parce que, présentement, au Québec, on est la province… Puis ce n'est pas nécessairement une lacune, mais il faut quand même mettre ça en perspective, on est la province où le coût est le moins élevé parmi les autres juridictions au Canada au niveau du coût. Dans les autres provinces, le coût est beaucoup plus élevé que 2 000 $. On va jusqu'à même 3 000 $ par usager. Donc, le ministère doit mettre ça en perspective et prendre la décision qu'il juge la plus appropriée. Mais présentement il y avait vraiment, je vous dirais, une absence d'information à cet égard-là au niveau du ministère.

Le Président (M. Bergman) : Donc, pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bonjour, bienvenue à notre commission. Je pense qu'on est rendus qu'on a des rencontres régulières, là. Je suis à peu près certain que vous avez dû faire des travaux pour dire combien ça prend de places de CHSLD par 100 personnes de 65 ans et plus par CSSS, combien ça prend de places de ressources intermédiaires par 100 personnes de 65 ans et plus par CSSS, puis c'est quoi, l'intensité au niveau des soins à domicile qu'on doit donner aux personnes qui en ont besoin. Puis on estime généralement que c'est 15 % des gens de 65 ans et plus qui ont besoin de soins à domicile. C'est quoi, l'intensité qui doit être donnée en termes de soins? Est-ce que vous avez tenu compte de ça dans vos travaux?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. On n'a pas fait d'analyse à cet égard-là. Ce qu'on a fait, dans le fond, on a travaillé avec les standards que le ministère avait donnés, les balises que le ministère lui-même s'était fixées. C'est avec ça qu'on a fonctionné, mais on n'a pas fait nos propres calculs à cet égard-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, merci, M. le Président. Bien, je vais vous expliquer la logique. C'est que chacun des CSSS, au cours des années, a développé des services qui étaient différents, et puis on sait qu'il y a des endroits qui avaient beaucoup de lits de CHSLD, peu de lits de ressources intermédiaires, mais ce qu'on visait, puis on vise encore à développer pour avoir à peu près le même type de ressources avec, comme vous disiez tantôt, ressources intermédiaires, CHSLD.

La problématique que vous avez décrite, que les gens n'étaient pas situés au bon endroit, bien ça fait longtemps qu'on a commencé à la corriger, là, je pense. Les gens ont l'impression que c'est quelque chose qu'on vient de découvrir. Moi, j'ai fait des travaux pour le ministère avant d'être ministre, deux ans avant d'être ministre, et ça avait été mes conclusions. Il fallait ouvrir des ressources intermédiaires pour pouvoir sortir les patients des CHSLD pour les mettre au bon endroit, sur un principe très simple. Si vous n'avez pas la ressource intermédiaire, le patient ne pourra pas retourner à domicile. À ce moment-là, je vais être obligé de lui offrir une ressource qui est plus lourde, qui est celle du CHSLD.

Et ça, c'est une transformation du réseau de la santé qui a commencé voilà 10 ans. Et puis quand, au début, on nous disait : On va tout envoyer le monde à domicile, bien là ils se sont rendu compte que ce n'était plus vrai, ça, là, là. Parce que, oui, il vous manque des ressources intermédiaires, quand bien même que vous voudriez les retourner à domicile, si ça prend les ressources intermédiaires, vous devez le faire.

La question des bases historiques, je vais vous donner une explication. Je pense que chacun des CSSS, avec le temps, a développé des bonnes façons de faire, et une des problématiques qu'il y a dans le réseau, il y a des endroits qui vont travailler plus avec des préposés, des endroits plus avec des infirmières auxiliaires, puis il y a des endroits qui vont travailler plus avec des infirmières. Mais les ratios peuvent être un peu différents d'un endroit à l'autre. La question : Est-ce que, parce que les ratios sont différents, les équipes de travail sont différentes? Est-ce que ça fait des équipes qui donnent des moins bons soins?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. La réponse est : Pas nécessairement. Je suis d'accord avec vous, c'est ça… J'imagine que c'est la réponse que vous espériez entendre, mais…

M. Bolduc (Jean-Talon) : C'est la réponse logique.

M. Samson (Michel) : C'est la réponse logique. Merci, je vais prendre ça comme un compliment. Mais effectivement, non, ce n'est pas nécessairement le cas, mais il faut être capable de l'expliquer, il faut être capable de dire pourquoi on a des ratios différents et sur quoi on base cette différence-là, chose que, lorsqu'on a fait nos travaux, on n'a pas été capables de nous expliquer, tout simplement.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président. Je suis d'accord qu'ils n'ont pas tout donné les explications, mais, quand vous allez voir les états financiers, vous allez être capables d'avoir le coût par usager dans chacun des endroits. Et, quand vous faites votre coût par usager, là, on part avec le… Quand on fait une analyse comptable, on part, puis c'est toutes des autos pareilles, puis a on juste besoin de changer des morceaux. Mais, au Québec, là, trouvez-moi un CHSLD qui est pareil à un autre sur les 250 quelques qu'on a. Il n'y en a pas un qui est pareil. Il y en a qui ont 200 places, il y en a qui ont 75 places, il y en a qui sont sur trois étages, il y en a qu'il faut qu'ils marchent des longs corridors. C'est ce qui fait qu'à l'intérieur des établissements, si on leur disait : Bon, vous avez tous le même budget pour la même chose, vous allez vous rendre compte que, pas longtemps après, il y en a qui vont cogner à votre porte, ils vont dire : Nous autres, notre conception est un peu différente, on peut-u avoir des ajustements?

Ce qu'on sait, c'est que, dans les établissements, compte tenu de toutes les pressions financières qu'il y a eu au cours des années, généralement, quand vous allez visiter un établissement, il n'y a pas beaucoup de monde qui ne font rien. Par contre, je suis d'accord avec vous, il y a de l'optimisation à faire. Il y a probablement des méthodes… Entre autres, quand on a fait des lignes même dans des CHSLD ou à des endroits, on a été capables de diminuer les coûts, de prouver que les coûts étaient moins dispendieux pour probablement la même qualité de service.

Ça fait que, quand on nous dit que c'est sur une base historique, oui, il y a des ajustements de budget sur des bases historiques parce que 80 % du budget d'un établissement, c'est quand même des salaires, mais, avec les années, chacun des établissements a quand même fait des plans de performance, ce qui fait que, quand vous comparez le même, même établissement avec un autre, il y a peut-être une différence qui peut être une variation normale, mais ça peut s'expliquer. Avez-vous regardé cette hypothèse-là?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. On a regardé, effectivement, cet aspect-là, mais les explications, lorsqu'on avait des variations, que ça soit au niveau des CSSS, ou des agences, ou du ministère, on n'a pas eu les explications qui venaient justifier pourquoi on retrouvait de tels écarts. Bon, est-ce que c'est parce que les gens n'avaient pas toute la bonne information ou… Peut-être. Mais on n'a pas pu nous expliquer pourquoi on retrouvait des écarts aussi grands entre les établissements.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Êtes-vous allés voir des médecins qui travaillaient sur le terrain pour avoir des explications sur la façon de fonctionner ou vous avez juste parlé avec des gestionnaires?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Lorsqu'on fait nos mandats, on a réalisé des entrevues, beaucoup d'entrevues avec les gens concernés dans les établissements qu'on a visités, autrement dit, les CHSLD, ou les agences, ou les différents types de personnes qui sont dans ces établissements-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Juste pour vous dire, là, moi, je crois qu'il y a de l'amélioration à aller chercher dans le réseau, là, je ne le conteste pas. Avez-vous perçu qu'au cours des années — il y a eu quand même des changements depuis 10 ans — qu'en termes de ressources intermédiaires, les investissements qu'il y a eu dans les soins à domicile, avez-vous fait le constat qu'il y avait eu des changements dans le réseau de la santé puis que c'est une tendance qui se continuait ou vous avez juste pris une photo à un moment donné puis vous avez dit : C'est ça, mais vous n'avez pas vu comment elle était, la même photo, voilà 10 ans avant?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : M. le Président. Oui, écoutez, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, on fait des mandats quand même, je pense que vous le savez, de façon assez régulière dans le réseau de la santé, et effectivement, oui, je peux dire qu'on a vu des… une préoccupation, au fil des ans, qui s'est développée au niveau du développement que ce soit de places en ressources intermédiaires ou en soins à domicile. J'ai eu l'occasion d'en parler, à la Commission de l'administration publique, sur différents dossiers. Mais, oui, on a senti qu'il y avait une préoccupation plus grande du ministère puisqu'il y avait une question de coût, une question aussi de bien répondre aux besoins des personnes. Donc, différents types de ressources vont permettre de mieux répondre aux besoins des usagers et des personnes.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Puis est-ce que vous étiez au courant que le ministère visait, par CSSS, justement à atteindre les ratios que je vous ai dits tantôt, c'est-à-dire qu'on était rendus à 2,8 pour les lits de CHSLD, 0,8 pour les ressources intermédiaires, mais que souvent les établissements ne pouvaient pas développer les ressources par manque d'argent et que l'argent était injecté progressivement, avec une transformation qui allait se faire sur plusieurs années?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Oui, effectivement, oui, on est au courant, et c'est quelque chose qu'on aborde dans le rapport, d'ailleurs, qu'on mentionne.

M. Bolduc (Jean-Talon) : C'est juste parce que…

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Moi, je comprends que le rôle du vérificateur, c'est de nous dire : Pour que ce soit parfait, ce soit ça. Puis je pense que vous l'avez dit récemment, en tout cas je l'ai vu dans le journal, vous avez dit récemment : Quand le vérificateur fait une vérification, il trouve toujours quelque chose. Est-ce que c'est réel?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : M. le Président, c'est ce que les parlementaires nous ont toujours demandé. Ils veulent nous entendre, ils veulent entendre le Vérificateur général sur les problématiques que l'on soulève. Donc, c'est ce qu'on fait. Puis je conçois que ça peut donner parfois… puis je vous dis ça de façon très claire, ça peut amener un certain biais dans l'opinion publique parce qu'effectivement, nos rapports, on soulève des problématiques, donc les bons côtés ou les bons gestes qui sont posés sont moins mis en évidence.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

• (20 h 10) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, le Vérificateur général puis moi, on commence à s'entendre, là. Écoutez, moi, je vais vous le dire, là, je suis un médecin, j'ai visité des CHSLD, j'en ai vu beaucoup. Il y a des très, très belles choses qui se font. Ce que je déplore… Puis je veux respecter votre rôle. Ce que je déplore, c'est, lorsque vous sortez trois, quatre recommandations qui sont tout à fait justifiées, les gens pensent que ce n'est que ça, des CHSLD, alors que ce n'est pas la réalité. Et il n'y aura jamais un CHSLD ou un hôpital qui va être parfait, c'est impossible. Ça fait que, quand on part avec le principe qu'on va sortir le 2 % qui ne va pas bien, ça devient 100 % de la perception de la population parce que c'est ça qui est dans le journal. Mais, ce qu'il faut voir, il y a un 95 %, 98 % qui est relativement bien fait.

Et, juste pour vous donner un indicateur, tout le monde nous dit que les patients sont plus lourds dans les CHSLD, et tous les gens qui sont venus s'asseoir là nous ont tous dit : Vous savez, les gens, là, c'est 40 % qui décèdent par année dans les CHSLD. Ça, ça veut toujours bien dire qu'il y a eu une transformation qui s'est faite au cours des 10 ou 15 dernières années, parce qu'avant ça les gens, ils restaient sept, puis huit, puis neuf ans dans les CHSLD. Moi, j'ai vu des patients, là, ça faisait 20 ans qu'ils étaient dans le CHSLD, ce qui est une transformation qui a été faite au cours des dernières années. Je ne sais pas si vous êtes d'accord que cette évolution-là s'est faite. Puis je comprends qu'on va la continuer, puis il faut la continuer. Quel que soit le gouvernement, c'est ça qui va se continuer. Mais ce n'est pas réel.

Puis, je tiens à vous dire, ce que vous avez fait, vous avez fait un bon travail. Vous décrivez qu'il faut avoir plus d'indicateurs, il faut être plus capables de faire du «bench mark», là, je veux dire, de se comparer les uns avec les autres, puis il faut être plus capables d'évaluer la qualité également. Mais le fait qu'il n'y ait pas les indicateurs ou que les chiffres ou les papiers ne soient pas nécessairement faits ne veut pas dire que les soins ne sont pas de qualité. Et, lorsqu'on se sert de votre rapport pour brandir, en disant : Regardez, les CHSLD, c'est tout croche, bien, moi, comme clinicien, puis comme médecin, puis comme personne aussi, que récemment il y a des gens qui… en CHSLD, ce n'est pas la perception que j'en ai cliniquement.

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Je vous dirais qu'on ne s'est jamais prononcé, le Vérificateur général, sur la qualité des soins qui sont donnés. Que ça soit dans les CHSLD, dans les centres hospitaliers, c'est quelque chose sur lequel on ne s'est jamais prononcé. Il y a un acte médical, qu'on respecte, fait par des professionnels, mais par contre on regarde autour l'information qui est disponible, comment on mesure la performance, comment on se préoccupe de la performance. Et c'est plus là-dessus qu'on axe nos travaux.

Mais je suis tout à fait d'accord avec vous que la qualité des soins, on ne l'a pas regardée et on ne la regarde pas jusqu'à ce jour dans nos mandats. Mais par contre on s'intéresse beaucoup à la performance. Et, pour être en mesure de dire si on est performant ou non, bien ça nous prend des indicateurs, il faut se comparer. Puis je ne veux pas vous... Oui, il y a toujours place à amélioration, mais, non plus, il ne faut pas minimiser les travaux qu'on a faits. Je ne pense pas qu'on puisse parler qu'il y a de la place à amélioration dans seulement 2 % des cas. On a vu des problèmes systémiques. Donc, pour nous, la problématique était beaucoup plus grande.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, le 2 %, je parlais pour... l'ampleur générale de tout, tout, au niveau des CHSLD. Mais je suis d'accord avec vous qu'au niveau des données il y a probablement de l'amélioration à avoir. Par contre, moi, si je comprends bien, c'est que vous dites : On devrait plus aller selon les besoins des patients. Mais, quand vous regardez une unité, c'est que c'est différents patients qui rentrent avec différents profils, qui… En passant, actuellement, dans nos CHSLD, à moins d'avoir un profil très particulier ou une condition très particulière, la plupart des profils ISO-SMAF qui rentrent, c'est tout en haut de 10, hein? Il n'y a quasiment plus de... Puis vous allez trouver des sept, puis des huit, puis des six à l'occasion, mais, une bonne partie des gens, c'est des neuf, 10 et plus. Je ne sais pas si vous êtes d'accord, mais il… Il peut rentrer encore des six, ou sept, ou huit, mais, ce qu'on peut voir, c'est des cas très particuliers qui peuvent s'expliquer, sauf si vous n'avez pas assez de ressources intermédiaires, là vous n'aurez pas le choix.

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : M. le Président, je suis d'accord avec vous, et c'est d'ailleurs ce qu'on a constaté, effectivement, s'il n'y a pas de ressources intermédiaires… J'y ai fait référence tout à l'heure. On comprend très bien qu'une personne pourrait être en CHSLD, ne pas avoir le profil qui correspond à une personne qui a besoin de soins pour être en CHSLD, mais, si on n'a pas d'autres ressources où cette personne-là peut aller, on conçoit facilement que cette personne-là demeure en CHSLD. Mais ce qu'on a constaté, c'est que, sur l'espace d'un an, je crois, dans notre rapport, c'est que, pour Montréal et la Capitale-Nationale, il y avait environ 25 % des personnes en CHSLD qui n'avaient pas le profil requis pour être en CHSLD. Donc, ce n'est pas anecdotique quand même, là. On parle de 25 % des gens. C'est quand même important. Mais, en même temps, c'est sûr, je suis d'accord avec vous, ça prend des places pour ces gens-là si elles ne sont pas en CHSLD, je comprends très bien ça. Mais c'est une réflexion que le ministère doit faire puis se positionner à cet égard-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, puis, je peux vous dire, la position était prise, il y avait une consigne de donnée, à Montréal et à Québec, d'ouvrir des places en ressources intermédiaires. La difficulté, à Montréal, c'est que ça prend un certain temps à les ouvrir parce qu'il faut les construire puis il n'y avait pas beaucoup de places. C'est toujours ce qu'on nous répondait. Mais la consigne était très, très claire à Montréal et à Québec, c'était d'ouvrir des places en ressources intermédiaires. Parce que le diagnostic que vous avez fait, on l'avait fait et on était en train de le corriger. Puis, vous allez voir, dans quatre ans, il n'y en aura pas encore assez parce que c'est tellement un gros système, Québec et Montréal, que ça prend plus de places que dans un CSSS de 50 000, où ça fait longtemps qu'ils se sont ajustés. C'est le constat. En tout cas, je ne sais pas si vos équipes ont fait le même constat, mais ça, c'est des tendances qui sont en train de se faire.

Ce qu'il faut dire, ce n'est pas d'hier que ça se travaille là, ça fait 10 ans que tout se met en place progressivement. Et, comme vous l'avez dit, ça prend des années avant de faire cette transformation-là, ne serait-ce qu'une personne qui avait un profil ressource intermédiaire, le principe, elle va vivre trois fois plus longtemps, donc elle va prendre le lit trois fois plus longtemps, d'où la pénurie de CHSLD à Montréal. Mais, lorsque cette personne-là va quitter, elle va probablement décéder dans quelques années, à ce moment-là, la personne qui va rentrer, elle va avoir un profil qui fait que son espérance de vie… Récemment, dans un colloque de l'AQESSS, ils ont dit que l'espérance de vie en CHSLD est d'environ 18 mois, puis il en meurt 40 % par année, c'est quand même beaucoup, là, parce que ces gens-là sont en fin de vie. Je ne sais pas si c'est les constats que vos équipes ont faits, là.

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Oui, effectivement. D'ailleurs, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, oui, on sent une… je ne sais pas si je peux dire une mouvance, mais une préoccupation de plus en plus grande de la part du ministère puis du réseau pour développer d'autres types de places, de ressources pour répondre aux besoins des gens.

Le Président (M. Bergman) : M. le député d'Orford.

M. Reid : Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bergman) : 4 min 30 s.

M. Reid : Une courte question. Alors, dans ma courte expérience de CHSLD, moi, j'ai été très impressionné par la lourdeur des cas, d'une part, mais aussi par la qualité incroyable du personnel qui y travaille et des soins qui sont donnés. Vous mentionnez, M. le vérificateur… En fait, dans le document de consultation, on dit en parlant de vous : «Suivant son analyse, les sommes déboursées — on parle des coûts et des tarifs — par les agences de la santé et services sociaux et les établissements varient d'un centre à l'autre. À titre d'exemple, le Vérificateur général explique que, dans les 23 CHSLD publics sondés, les montants déboursés varient de [60 000 $ à 90 000 $] — j'arrondis. Une variation similaire est observable dans les centres privés conventionnés.»

Mon expérience, moi aussi… Puis, vous vous rappelez, je pense qu'on se rencontre souvent dans une autre commission, M. le vérificateur, j'aime bien demander à des gens qui ont passé beaucoup de temps dans des environnements comme ceux-là s'ils peuvent nous en dire un petit peu plus que ce qui est écrit dans le rapport. Et, quand on voit une telle variation, est-ce que vous pouvez nous parler un petit peu… dans votre perception, vous avez vu des variations qui dépendent de quoi?

J'imagine que les gens, dans chaque établissement, travaillent fort et essaient de trouver des façons d'être efficaces, d'être performants. Mais vous avez des variations quand même extrêmement grandes, là, c'est de deux à trois… enfin, c'est 50 % de plus entre le plus élevé et le moins élevé. Et est-ce que vous pouvez me donner une idée — ou le personnel qui sont avec vous qui ont été plongés dans ces milieux-là pendant plusieurs mois — de l'origine de ces écarts-là? Est-ce que c'est lié, par exemple...

Vous mentionnez, dans votre rapport… on parle de problèmes comme les prix d'achat où il y a des déficiences qui sont liées à des situations d'urgence, où on négocie dans les situations d'urgence, ou encore où on ne semble pas être très habiles dans la négociation, ou encore lorsqu'il y a une absence d'appel d'offres public, ou encore si la variété des besoins est combinée avec une base historique. Est-ce que vous pouvez nous donner une idée un petit peu plus nuancée, un petit peu plus approfondie de ce qui explique ces écarts-là? Parce que moi, je pars toujours du principe que le monde essaie de faire le mieux qu'ils peuvent, là.

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Si vous le permettez, je laisserais ma collègue Mme Ouimet, qui connaît plus le dossier que moi, je dirais, dans le détail, bien humblement, vous répondre.

Le Président (M. Bergman) : Mme Ouimet.

Mme Ouimet (Marie-Claude) : Bonjour. Merci, M. le Président. Bien, dans le fond, au niveau des coûts, nous, ce qu'on a constaté, par même type de ressources, c'est qu'il y a des écarts importants. C'est sûr que ça peut être expliqué, parce qu'on n'a pas le profil de chacune des personnes hébergées actuellement, ça fait qu'on ne sait pas, pour une installation versus une autre, est-ce que la clientèle est plus lourde. Nous, on commence par dire : Bien, il faudrait au moins évaluer pour savoir si nous, notre clientèle est plus lourde que l'autre, puis, à ce moment-là, c'est certain que ça prend plus de soins.

Mais il y a aussi des écarts au niveau des ressources humaines. Donc, on a vu des écarts importants qui nous ont quand même amenés à poser des questions, mais sans qu'on ait des réponses. Que ce soit au niveau des professionnels ou du personnel soignant, là, des infirmières, les aides-infirmières, les préposés, il y a énormément d'écart. Puis ça, ça peut… On a vu des variations, les fins de semaine, de présences sur place.

M. Reid : Vous parlez d'écart sur le nombre de personnes pour le même nombre de malades, mettons?

• (20 h 20) •

Mme Ouimet (Marie-Claude) : Oui. En fait, on a comparé les heures-soins par personne et on a vu qu'ils avaient, même tout amalgamé… si on amalgame les infirmières, les auxiliaires et les préposés, bien, on voit quand même des variations importantes. Supposons qu'on regarde le jour dans une installation la semaine versus une autre, on voit des variations importantes si on regarde la fin de semaine, la nuit, etc. Donc, c'est un ensemble de facteurs probablement qui amènent ça. Puis la lourdeur des clients, comme Dr Bolduc disait tout à l'heure, peut influencer aussi, parce qu'il y a des gens qui ont des clientèles plus lourdes que d'autres. Mais on n'est pas capables de répondre à cette question-là. Donc, c'est ça qui nous interroge, nous, à savoir… Il faudrait analyser vraiment les différences.

La même chose au niveau des ressources intermédiaires, il y a des variations importantes en termes de coûts annuels, puis on ne sait pas trop par rapport à la clientèle qu'ils ont versus les services. Nous, notre inquiétude, c'est que les gens en place aient suffisamment de services. Donc, s'il y a des écarts de services pour une même clientèle, il y a un problème. Donc, c'est de déterminer le panier de services qu'on veut offrir puis combien d'heures-soins on devrait donner pour une personne qui normalement a un profil ISO-SMAF de 10 ou de 11.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé pour l'opposition officielle. Pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Bonsoir. Merci de votre présence. Effectivement, on vous voit souvent depuis quelque temps, et c'est bien, d'ailleurs. Et ce qui m'amène à vous faire une remarque. Il me semble qu'au fil des constats qu'on fait, que ce soit au niveau des TED, que ce soit au niveau des CHSLD, on s'aperçoit que le ministère, au niveau des contrôles de qualité et au niveau de l'uniformité de ce qu'il concède à tel, ou tel, ou tel établissement, dépendamment de la région, on a l'impression qu'ils sont potentiellement délestés de leur pouvoir de contrôle depuis l'avenue des agences et des CSSS. Est-ce que vous avez l'impression que, depuis… Parce qu'on dit, là : Il y a de plus en plus de chefs, moins d'indiens, là. On a l'impression qu'avec la multiplication des agences, des CSSS le ministère se délaisse de son pouvoir, de son devoir de contrôle et de son devoir de s'assurer que, dans chacune des régions, il y ait une équité tant qu'aux services qu'on donne à la population qu'au nombre d'heures travaillées et… Bon.

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Merci, M. le Président. Je ne serais pas prêt à dire que le ministère s'est délesté de ses responsabilités, mais par contre ce qu'on constate puis ce qu'on soulève aussi dans ce rapport-là et dans d'autres rapports, c'est le manque d'information de gestion dont dispose le ministère. Parce qu'on peut confier des responsabilités, dans le réseau, que ça soit aux agences, aux CSSS, etc., mais ce qui est important, si je délègue certaines responsabilités, c'est que j'obtienne une reddition de comptes, c'est que j'obtienne une information de gestion qui me permette de savoir vraiment ce qui se passe dans le réseau puis, s'il y a lieu d'intervenir, où on doit intervenir. Présentement, cette information de gestion là, dans ce dossier-là, lorsqu'on a fait nos travaux, n'était pas là, était absente. Donc, c'est sûr que le ministère est un peu éloigné par le fait même et a de la difficulté à bien sentir le pouls de ce qui se passe sur le terrain, compte tenu de certaines lacunes au niveau de l'information de gestion.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci. Donc, ce qu'on comprend, c'est qu'on pourrait aussi s'assurer que le ministère ait des mesures de contrôle de qualité, en fait, dans tous les domaines pour s'assurer qu'il y ait une uniformité dans l'ensemble du Québec, des outils, d'avoir les outils, là.

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : M. le Président, oui il y a ce volet-là, mais il y a aussi le volet du ministère puis — on en a parlé au tout début de la rencontre — au niveau des orientations et des directives qu'on donne, des grandes orientations, lorsqu'on constate que certaines mesures qui étaient prévues depuis sept ans n'avaient pas été encore mises en place, des mesures aussi importantes que l'offre de services, des critères d'accès aux ressources. C'est quand même majeur dans ce dossier-là. Ça faisait sept ans que ça n'avait pas… puis ce n'était pas encore défini. Donc, il y a une lacune importante à cet égard-là, que le ministère se doit d'être plus actif, plus proactif, et de donner des directives, et de mieux encadrer, donner des balises pour montrer dans quelle direction on va et comment on veut le faire.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci. Il y a des groupes qui sont passés avant vous, qui nous ont suggéré, entre autres, pour éviter qu'on retrouve des clientèles qui ont… comme 25 % de la clientèle, vous avez mentionné, là, entre autres à Québec et à Montréal, qui ne devrait pas se retrouver nécessairement en CHSLD, que dorénavant l'évaluation se fasse soit à domicile si le patient part de son domicile, soit à l'hôpital, avant d'être dirigé soit en ressource intermédiaire ou en ressource CHSLD. Est-ce que c'est une recommandation que vous nous feriez à la lumière des constats que vous avez faits?

Le Président (M. Bergman) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, M. le Président. Ce n'est pas une recommandation qu'on a formulée dans notre rapport, mais je suis d'accord avec ce que vous mentionnez, que, oui, c'est quelque chose qui devrait se faire le plus rapidement possible, que ce soit à la résidence de la personne ou un autre endroit, mais le plus rapidement possible pour savoir où la diriger, où diriger cette personne-là, pour mieux être en mesure de la diriger.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Samson, Mme Ouimet, Mme Bédard, Mme Bellemare, merci pour votre présentation, merci d'être ici avec nous ce soir, partager votre expertise avec nous.

Et je demande les gens de la Société canadienne de sclérose en plaques pour prendre leur place à la table et je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 20 h 26)

(Reprise à 20 h 29)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, on reçoit maintenant la Société canadienne de sclérose en plaques.

Bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, pour fins d'identification pour l'enregistrement, pouvez-vous nous donner vos noms et vos titres? Et les prochaines 10 minutes, c'est à vous.

Société canadienne de la sclérose en plaques

M. Adam (Louis) : Mon nom, c'est Louis Adam. Je suis le directeur général de la Société canadienne de la sclérose en plaques au Québec.

Mme Prévost (Nadine) : Nadine Prévost, directrice des services et de l'action sociale à la Société canadienne de sclérose en plaques, division du Québec.

M. Loiselle (Serge) : Serge Loiselle, sur le conseil d'administration de la Société canadienne de la sclérose en plaques.

• (20 h 30) •

M. Adam (Louis) : Alors, merci, merci de nous recevoir. Évidemment, ça fait longtemps qu'on veut parler de la situation des personnes qui ont la sclérose en plaques en centre hospitalier et soins de longue durée. Je vais y aller rapidement, si vous voulez, avec juste quelques indications sur la sclérose en plaques avant de passer la parole à Nadine, qui va vous parler plus du profil des personnes qu'on retrouve en centre hospitalier et de soins de longue durée, qui ont la sclérose en plaques, les lacunes aussi, évidemment, que ces personnes-là vivent. Et on va vous parler de certaines solutions, certains modèles, en tout cas, qui sont en place actuellement, qu'on aimerait peut-être voir se développer un peu plus au Québec.

Alors, la sclérose en plaques, vous le savez, c'est une maladie du système nerveux central. Ça touche trois fois et demie plus de femmes. Ça touche malheureusement les gens en plein coeur de leur vie active, entre 15 et 40 ans. Donc, recevoir un diagnostic de sclérose en plaques, c'est extrêmement difficile. C'est une maladie qui est imprévisible, épisodique, alors les gens vivent avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Évidemment, ils ne veulent surtout pas, surtout pas se retrouver en centre hospitalier et de soins de longue durée, et c'est malheureusement le cas d'à peu près 1 000 personnes qui ont la sclérose en plaques, qui, sur les 20 000 personnes atteintes au Québec, là, vont se retrouver dans cette situation-là.

Nous, ce qu'on préconise, évidemment, à la société, en général, c'est l'augmentation, le renforcement de l'argent en maintien à domicile. On a déposé un mémoire aussi sur la situation, les cliniques de sclérose en plaques au Québec, là, le sous-financement des cliniques. On a vu vraiment, là, un glissement, depuis sept ou huit ans, d'un sous-financement, là, assez important au niveau des cliniques de sclérose en plaques qui sont là pour donner des services, je vous dirais, de première ligne aux personnes qui sont atteintes. Notre mémoire a été déposé en août 2013 à ce sujet-là. C'est sûr qu'on demande, évidemment, l'ajout de services ou, en tout cas, l'ajout d'argent. Et on préconise aussi, évidemment, le remboursement des traitements qui sont actuellement disponibles pour les personnes qui ont la sclérose en plaques, qui ne sont pas, évidemment, remboursés sur la liste des médicaments, actuellement. Ce qu'on croit, c'est que le traitement précoce, évidemment, au niveau des personnes, va permettre aux gens, dans le fond, d'avoir une entrée beaucoup moins rapide éventuellement en centre hospitalier et de soins de longue durée.

Mme Prévost (Nadine) : Alors, nous, ça fait peut-être depuis le début des années 2000 qu'on travaille sur ce dossier-là. On avait fait, à l'époque, un premier mémoire, on avait fait plusieurs représentations et pour finalement se faire dire par le ministre de la Santé à l'époque que peut-être l'idéal serait de développer nous-mêmes notre propre ressource, qui pourrait par la suite servir d'exemple d'une ressource qui répondrait bien aux besoins des adultes qui sont en perte d'autonomie.

Donc, le profil de notre clientèle actuellement qu'on retrouve en centre d'hébergement... Parce que nous, on offre des services, on est en contact avec les gens, et c'est évidemment une question qui revient constamment, la question de l'hébergement. Les gens se retrouvent face à des choix qui ne leur conviennent pas, donc ils sont en contact avec nous. Les gens qui sont en hébergement, bon, ce sont des personnes plus jeunes. Souvent, même, on en connaît qui ont 30, 40 ou 50 ans. Il y en a qui ont des enfants et un conjoint et doivent malgré tout aller en hébergement. Donc, elles sont plus dépendantes physiquement que la plupart des autres résidents et elles ont des besoins particuliers, notamment par rapport à la température ambiante qui doit être modérée et qui ne l'est parfois pas en hébergement.

Ces personnes-là présentent des symptômes variés et variables. Ils ont un ou plusieurs autres problèmes de santé et prennent de la médication pour traiter plusieurs symptômes, notamment la douleur, les problèmes de vessie, la spasticité, etc., et elles ont davantage de dépressions en raison de la maladie et des multiples deuils qu'elle apporte. Je disais qu'elles sont plus dépendantes physiquement, mais elles sont aussi lucides et alertes. Elles peuvent assumer certaines tâches intellectuelles ou organisationnelles. Elles peuvent faire des choix. Non seulement elles le peuvent, mais elles veulent et elles ont besoin de prendre des décisions sur leur vie et sur le déroulement de leur journée.

J'aimerais citer en exemple une nouvelle de cette dernière fin de semaine. C'est une femme de 23 ans qui a la paralysie cérébrale, qui est dans un CHSLD à Coaticook, faute d'avoir d'autres ressources. Et ce qu'on disait, cette fin de semaine, c'est que… tout le monde était d'accord, le centre de réadaptation aussi, de l'Estrie, était d'accord que ce n'était pas sa place, mais qu'il y a actuellement 93 places dans différentes ressources alternatives, mais qu'il y avait 11 personnes qui étaient présentement en attente d'une de ces précieuses places là. Pourquoi je cite cet exemple-là? C'est parce qu'on aurait pu tout simplement remplacer « paralysie cérébrale» par «sclérose en plaques» parce que c'est vraiment le type de situation auquel on est confrontés.

Donc, quelques exemples de besoins qui ne sont pas comblés actuellement en CHSLD pour notre clientèle. J'ai parlé de la température. Vous allez me dire : Ça peut être facilement solutionné comme problème. Bon, une température trop chaude peut augmenter les symptômes pour les personnes qui ont la sclérose en plaques et ça peut aussi donner de la faiblesse musculaire et faire en sorte que les transferts sont plus difficiles. Et, dans certains CHSLD, juste l'obtention d'un climatiseur peut être difficile. Les levers du lit qui ne sont pas assez fréquents, ça peut causer une diminution des capacités physiques assez rapidement.

On remarque aussi du personnel peut-être qui manque un peu de formation au niveau des différentes facettes de la sclérose en plaques. C'est une maladie, comme on le disait tout à l'heure… comme Louis le disait tout à l'heure, qui est complexe, qui est vraiment différente d'une personne à l'autre. Vous allez prendre plusieurs personnes qui ont la sclérose en plaques, des fois ça n'a même pas l'air de la même maladie, et même, chez la même personne, c'est très variable d'une journée à l'autre. Donc, la personne peut avoir une bonne journée et, le lendemain, avoir une moins bonne journée, être plus fatiguée, avoir plus de douleur et avoir plus de difficulté à comprendre les consignes, ce qui fait que dans nos échanges avec les préposés et les infirmières auxiliaires, on s'est souvent fait dire que c'était une clientèle très exigeante et complexe. Complexe, je le comprends, devant la nature de la maladie. Exigeante, c'est sûr que, pour les préposés qui ont eu une formation plus dirigée vers la gériatrie ou qui ont une expérience plus avec les personnes âgées, une personne qui est lucide va être une personne plus exigeante. Donc, en 2013, on a développé un DVD de formation pour les préposés et les auxiliaires, qu'on a distribué à tous les CHSLD et les CLSC au Québec. On a senti que c'était vraiment un besoin. Ce qui contribue aussi à la réputation de clientèle exigeante, c'est le fait que les personnes arrivent en hébergement à 20, 30, 40 ans, comme on le disait, donc les personnes sont souvent… on peut difficilement leur demander d'être contentes d'avoir cette perspective de vie là, de se voir en CHSLD, là, pendant plusieurs décennies jusqu'à la fin de leur vie.

D'autres besoins, rapidement, qui ne sont pas comblés : des horaires plus souples au niveau des repas, des menus mieux adaptés et des bains plus fréquents et selon des horaires variables pour permettre notamment les sorties. Et aussi, comme je le disais, ces personnes-là ont encore des familles qui les visitent. Donc, si une personne a un bain le lundi et que sa visite vient le samedi, ses enfants, son conjoint, donc c'est sûr que ça peut être quelque chose de difficile à vivre.

L'accès à la salle de bain. On ne devrait pas obliger une personne à porter une culotte d'incontinence quand elle est capable de mentionner lorsque c'est le temps d'aller à la salle de bain. C'est quelque chose qu'on voit de temps à autre. Évidemment, favoriser les chambres individuelles ou, à tout le moins, quand ce n'est pas possible, essayer de mettre des gens du même âge ou un petit peu de la même condition. Éviter la mixité, parce que, ce qu'on nous dit aussi, il y a des personnes qui se retrouvent dans des endroits qui ne leur conviennent pas, ils vont avoir comme voisin des personnes qui parfois ont des problèmes d'errance et ils vont parfois aussi être conscients de résidents qui sont à l'agonie. Ça peut être aussi… contribuer à l'inconfort de vivre en CHSLD pour ces jeunes-là. Ensuite, l'aménagement de locaux pour la visite du conjoint et des proches et aussi favoriser les sorties et les visites de bénévoles, notamment… Pardon?

Une voix :

Mme Prévost (Nadine) : Il ne me reste pas grand temps. Donc, j'ai déjà dépassé le temps qui m'était accordé. Je vais laisser du temps pour Serge, pour parler rapidement d'Espace Bellechasse. Mais je voulais dire que c'est vrai qu'on a vu une amélioration de la situation ces dernières années. Et il y a des exemples dans notre mémoire, je n'ai pas le temps de vous les résumer, mais il y a des exemples, dans notre mémoire, de ressources qui fonctionnent bien, des ressources institutionnelles et non institutionnelles, et je pense qu'on devrait apprendre de ces ressources-là, notamment la ressource Regroupement de services intégrés Propulsion, à Montréal, qui est ouvert depuis 20 ans, et qui voudrait ouvrir une phase II, et qui est à la recherche de financement depuis trois ans. Donc, je vais laisser la parole à Serge, qui est administrateur sur le projet Espace Bellechasse qui est ouvert depuis quelques années et sur lequel on a été impliqués dès le début, la Société canadienne de la sclérose en plaques.

• (20 h 40) •

M. Loiselle (Serge) : Oui. Ce qu'on a oublié de dire, c'est qu'Espace Bellechasse, c'est une création de la section Montréal, la division Montréal. On a mis sur place un… Je vous parle en tant qu'administrateur d'Espace Bellechasse, je suis dessus. Et c'est un projet novateur, c'est-à-dire que ça a pour but d'abord de réunir des couples, des familles, d'éviter l'hébergement et de sortir les gens des CHSLD. En fait, ouvert en 2009, après cinq ans de travail et avec la collaboration du CSSS Lucille-Teasdale ainsi que le Centre de réadaptation Lucie-Bruneau, il y a 14 unités de logement où résident des personnes qui ont la SP ou d'autres maladies dégénératives. Et puis, l'avantage, ces gens-là sont locataires. Évidemment, il y a des familles qui ont pu retrouver, je veux dire, leur espace de vie, ainsi qu'il y a une flexibilité des horaires au niveau des sorties, et puis ils peuvent s'aider, se visiter et avoir des enfants, des conjoints, qui habitent avec eux autres et puis…

Sauf que les écueils qu'on a vécus, bien ça a été l'arrimage de différents projets. Au début, ça a été assez complexe pour jumeler les différents projets existants, là, comme le Programme d'adaptation de domicile. Et puis il y a aussi les soins à domicile et les salaires des préposés, des auxiliaires, qui sont relativement bas pour une ressource comme celle-là. Et l'avantage, le gros avantage, c'est qu'il y a quand même des économies qui sont substantielles, là. Avec un budget de 550 000 $, on arrive à faire fonctionner une ressource comme Espace Bellechasse. Alors, c'est pas mal tout ce que j'avais à dire là-dessus.

Le Président (M. Bergman) : Alors, merci. Merci pour votre présentation. Maintenant, pour le côté ministériel, Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs, madame, ça me fait plaisir de vous accueillir. Écoutez, Mme Prévost, à vous entendre, là, je pense qu'il y a un constat qui nous vient tout de suite, c'est que les CHSLD ne semblent pas du tout, mais pas du tout adaptés aux besoins des personnes qui souffrent de sclérose en plaques. J'aimerais ça que vous nous disiez ça représente quoi comme recours, là, à peu près. Il y a combien de personnes atteintes de la sclérose en plaques qui se retrouvent en CHSLD? Est-ce que c'est fréquent? Et peut-être nous expliquer un peu comment une personne quand même relativement jeune, là, finit par devoir se retrouver en CHSLD.

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : En fait, ce serait environ 1 000 personnes qui ont la sclérose en plaques qui se retrouveraient en hébergement à des âges variés. Ça peut être aussi jeune que 30 ans, mais il y en a aussi à 40, ou dans la cinquantaine, ou dans la soixantaine. La sclérose en plaques est une maladie vraiment imprévisible, donc, dès le diagnostic, l'image que les gens ont, c'est la peur qui s'installe : Est-ce que je vais être un des malchanceux pour qui la maladie va évoluer plus rapidement et que je vais devoir me retrouver peut-être en hébergement ou que je vais perdre, dans le fond, la possibilité de faire un choix de l'endroit où je vais vivre?

Donc, c'est sûr que la sclérose en plaques, au début, ça évolue par poussées et par rémission la plupart du temps, et ensuite ça va aller de façon progressive, la personne ne fera plus de rémission, la maladie va progresser plus ou moins rapidement, dépendamment de la personne. La particularité de cette maladie-là, c'est vraiment son imprévisibilité et c'est vraiment le fait qu'elle soit différente d'une personne à l'autre. Ça en fait une maladie complexe. Mais ça peut arriver rapidement. J'ai déjà rencontré une personne qui, à l'intérieur de cinq ans, s'est retrouvée en fauteuil roulant électrique. Donc, ça peut… Il y a des gens aussi que vous côtoyez, qui ont peut-être la sclérose en plaques et ça ne paraît pas du tout et qui vont travailler toute leur vie, avoir des enfants et avoir une vie très, très active. C'est très variable.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Et là, pour ces 1 000 personnes là qui se retrouvent en résidence, dans un CHSLD, vous avez mentionné, là… Vous nous avez quand même fait un portrait du niveau de complexité de cette maladie-là et vous avez parlé de formation. Est-ce que vous trouvez que le personnel actuel dans les CHSLD, autant les préposés que les infirmières… est-ce que vous avez l'impression que ces personnes-là sont bien sensibilisées, bien au fait des besoins particuliers des personnes atteintes de sclérose en plaques? Et quel type de formation, vous pensez, pourrait ou devrait être donné? Et finalement est-ce que vous, comme fédération, vous auriez un rôle à jouer dans cette formation-là?

Mme Prévost (Nadine) : En fait, je pense que le rôle que l'on pouvait jouer, on l'a joué en développant un outil de formation sur DVD qui a été distribué à tous les CLSC et les CHSLD. Je ne veux pas du tout faire sentir ou insinuer que les préposés, les auxiliaires, autant dans le réseau que dans les autres ressources, ne sont pas de bonne foi ou qualifiés, mais c'est de leur propre aveu que... Plusieurs ont déjà mentionné qu'ils trouvaient que c'était une clientèle difficile et complexe, parce que, bon, les gens, en CHSLD, doivent travailler avec toutes les clientèles, et c'est sûr que la majorité, c'est des personnes âgées, et le temps consacré à chaque personne est quand même limité. Donc, c'est quelque chose qu'on nous a déjà mentionné. Parce que, si certaines personnes sont peut-être moins lucides…

Je ne dis pas que toutes les personnes en CHSLD ne le sont pas, excepté les personnes qui ont la sclérose en plaques, ce n'est pas ça non plus que je veux dire. Mais il y a des personnes qui vont être moins demandantes, qui sont moins lucides. Donc, cette clientèle-là, comparativement à une clientèle d'une personne qui a la sclérose en plaques et qui a encore toute sa tête, qui arrive en CHSLD, si elle demande un verre d'eau puis, cinq minutes après, elle ne l'a pas, elle va le redemander, elle va aussi essayer de faire valoir ses droits, et c'est ce qui fait que, à comparer avec d'autres clientèles, quand il y a une certaine mixité, bien ça peut faire en sorte que cette clientèle-là est perçue comme complexe et...

Mais je pense que, oui, peut-être qu'il y a un manque de formation. La formation de préposé, c'est quand même des formations qui peuvent être assez courtes. Donc, il pourrait y avoir de la formation dans les milieux de travail. D'ailleurs, ça nous a été demandé par le passé : Est-ce que vous pouvez venir dans notre CHSLD avec des gens qui ont la sclérose en plaques? Est-ce que vous pouvez venir nous donner de l'information? Et on l'a fait par le passé, mais, comme on ne pouvait pas couvrir l'ensemble du territoire, on est allés avec un DVD.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Est-ce que vous pensez que de regrouper les personnes, par exemple, atteintes de la sclérose en plaques dans une même aile, c'est faisable? Est-ce que vous avez eu connaissance, là, qu'il y a des CHSLD qui... Parce que j'avais posé une question semblable à ça à un groupe qui vous a précédés, et il y a une question d'organisation physique des lieux, et il y a une question de : Est-ce que c'est faisable ou pas? Est-ce que, selon vous, c'est faisable? Avez-vous des exemples, là, où, dans des CHSLD, on a regroupé en îlots des personnes plus jeunes atteintes de sclérose en plaques pour...

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Tout à fait. Il y a des ailes de CHSLD, il y a des ressources institutionnelles actuellement qui fonctionnent assez bien. Évidemment, c'est plutôt limité, là, comme nombre de places et nombre de CHSLD. Il y a notamment Ulysse-Gauthier, à Granby, qui fonctionne bien. C'est un partenariat du réseau de la santé, c'est un partenariat avec la communauté et privé qui fonctionne bien depuis au moins une dizaine d'années, et ils sont en voie d'ouvrir un deuxième projet aussi sous peu. Il y a d'autres exemples aussi qu'on a mis dans notre mémoire. Il y a des ressources alternatives aussi qui fonctionnent bien, comme Propulsion. Donc, je pense qu'on devrait voir qu'est-ce qui se fait de bien, les pratiques exemplaires qui sont à notre portée, là, parce qu'il y en a.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Et parlant de ressources alternatives justement, est-ce que, pour vous, c'est la meilleure solution? Je pense, par exemple, à des coopératives d'habitation. Est-ce que c'est des modèles qui vous semblent adaptés pour permettre aux personnes atteintes de sclérose en plaques qui seraient en perte d'autonomie et qui ont besoin de soins mais qui voudraient éviter de se retrouver en CHSLD… Puis monsieur mentionnait l'importance aussi… Tu sais, on pense à des gens placés en CHSLD comme des individus tout seuls, mais il y a des personnes de 30, 40, 50 ans qui vivent avec leur famille, avec leurs enfants. C'est une maladie qui évolue, mais… Selon vous, quelle serait la meilleure alternative et comment permettre à ces gens-là de pouvoir demeurer avec leur famille?

Mme Prévost (Nadine) : Bien, moi, je pense qu'il n'y a pas une solution, je pense qu'il peut y avoir plusieurs solutions. D'ailleurs, c'est vrai que ce n'est pas tous les CHSLD qui sont pareils. Les ressources alternatives, c'est la même chose. Ressources intermédiaires, je les connais un petit peu moins. Je sais que, dans les dernières années, ils en ont ouvert davantage, mais, au niveau des CHSLD puis des ressources alternatives que je connais, c'est vrai qu'il n'y en a pas un de pareil, et je pense que ça prend une diversification parce que les besoins sont variés.

Donc, nous, Espace Bellechasse, ce qu'on voulait, c'était donner la possibilité à des familles de continuer à habiter ensemble parce qu'on connaissait des gens qui avaient été séparés et que ce n'était pas le choix ni de l'un ni de l'autre. Donc, on voulait donner l'exemple d'une ressource qui fonctionnait sous ce principe-là. Parce qu'à un moment donné les couples sont pris devant une impasse, là. Ça fait qu'on a...

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

• (20 h 50) •

Mme Proulx : Oui. Au niveau du maintien à domicile, est-ce que vous pensez que… Par exemple, si je vous parle du projet d'assurance autonomie, où on aurait un montant d'argent qui suit le patient pour lui permettre d'avoir accès à des soins en fonction de son état, est-ce que, pour vous, c'est une solution qui vous apparaît intéressante?

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Bien, c'est sûr qu'on pense que les gens devraient être, en priorité, gardés dans leur milieu naturel, donc, lorsque c'est possible, mais je pense qu'il va toujours rester des gens… Selon ma compréhension des différentes situations, je pense qu'il va toujours rester des moments où ça ne sera plus possible pour des questions de sécurité, et c'est là où… cette partie-là, je pense qu'elle ne sera pas solutionnée par l'assurance autonomie.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Donc, il faut penser nécessairement à se doter de projets novateurs, de ressources pouvant accueillir les personnes atteintes de sclérose.

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Oui. Et nous, on ne dit pas que la solution, c'est de regrouper toutes les personnes qui ont la sclérose en plaques ensemble, mais plutôt de regrouper des personnes qui ont des besoins semblables. Il n'y a pas de ressources actuellement qui regroupent juste des personnes qui ont la sclérose en plaques, mais des personnes qui ont un petit peu le même profil et un petit peu le même âge. Ulysse-Gauthier, c'est un exemple, puis Espace Bellechasse en est un autre. Ce n'est pas exclusivement des personnes qui ont la sclérose en plaques non plus.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Vous avez mentionné aussi dans votre mémoire la possibilité d'avoir accès à des logements locatifs dans un même édifice mais pour différentes familles, alors des logements d'une chambre ou deux chambres, dépendant des besoins. Est-ce que c'est des expériences que vous connaissez? Est-ce que vous pouvez nous en parler, nous donner quelques exemples de ce type-là?

Mme Prévost (Nadine) : En fait, Espace Bellechasse est fait sous ce modèle-là, donc, mais, Espace Bellechasse, Serge le disait tout à l'heure, il y a eu des écueils. C'est quelque chose qui nous a demandé cinq ans de travail parce que c'était tellement quelque chose qui était… C'était un projet novateur qui ne cadrait pas dans aucune enveloppe ou programme existant. Donc, on a eu la chance de travailler avec un CSSS qui avait de l'ouverture à ce niveau-là. Mais même le CSSS, à l'époque, il disait : Bon, il y a l'ouverture, des… on doit faire des ressources intermédiaires, mais, vous autres, ce n'est pas tout à fait ça. Et ils ont travaillé de pair avec nous pour qu'on puisse obtenir le financement.

En fait, nous, ce qu'on voulait, c'était prendre des gens qui avaient déjà des enveloppes de soutien à domicile, les mettre ensemble en commun, leur donner des logements, mettre ensemble en commun puis avoir, grâce à la mise en commun de ces heures de soutien à domicile là, une présence 24 heures sur 24 pour éviter que certaines personnes se retrouvent en hébergement, parce qu'il y en avait plusieurs qui étaient sur le point de ou il y en a qui étaient en hébergement puis on les a ramenées en logement.

Mais je ne pense pas, personnellement, que ce soit d'arrimer des programmes existants comme ça. Ça nous a demandé un effort au niveau du recrutement parce qu'on devait s'assurer d'avoir une moyenne d'heures-soins. Donc, telle personne, on ne pouvait la prendre parce que, là, on devait établir une moyenne, puis telle personne, on ne pouvait pas la prendre parce qu'elle avait bénéficié du Programme d'adaptation de domicile dans les cinq ans avant. Donc, au lieu de sélectionner les gens selon les besoins les plus pressants, on a été obligés de faire en sorte de bénéficier des programmes existants. Les personnes qu'on a sélectionnées avaient quand même des besoins, là, elles avaient leur place à Espace Bellechasse, mais il n'y avait pas de cadre facilitant pour nous pour nous permettre de mettre sur pied cette ressource-là, ce qui fait qu'elle a été mise sur pied avec les moyens qu'on a trouvés.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Et les personnes qui y travaillent… Est-ce qu'Espace Bellechasse embauche des personnes pour assurer… et quels types de…

M. Loiselle (Serge) : Je peux répondre?

Mme Proulx : Oui, allez-y.

M. Loiselle (Serge) : Oui. Espace Bellechasse embauche des préposés et des auxiliaires familiales pour assurer les soins sur une période de 24 heures. C'est la beauté d'Espace Bellechasse, c'est que c'est couvert sur 24 heures, c'est-à-dire, si les gens ont des besoins de nuit ou s'il y a quelque chose… contrairement au chèque emploi-services, où la personne est toute seule chez elle puis, si elle a un problème, bien là elle est mal prise, alors qu'Espace Bellechasse, c'est l'assurance qu'il va y avoir quelqu'un pour répondre à une cloche n'importe quand. Et puis les besoins sont couverts sur une période de 24 heures, sept jours par semaine. Ça fait que c'est ça, Espace Bellechasse. C'est ce que la société a créé.

Mme Proulx : Et j'aurais une question pour M. Adam. L'expérience d'Espace Bellechasse, est-ce que vous ou votre société, est-ce que vous pensez que c'est quelque chose que vous pourriez faire rayonner et implanter, sur la base de l'expérience? J'ai compris, là, que vous avez vécu certains écueils, certaines difficultés d'arrimage avec des programmes, notamment pour le financement et tout ça. Mais, à partir de l'expérience, qui semble très positive, est-ce que vous pensez que c'est quelque chose qui pourrait être répété ou implanté ailleurs au Québec. Et est-ce que vous pourriez jouer un rôle un peu de… basé sur votre expérience, là?

M. Adam (Louis) : D'abord, on a été chanceux au départ, je vous dirais, d'avoir un milieu, une bâtisse qui était l'ancien hôpital Bellechasse, dans le fond, qui a été rénové, tu sais, donc qui était disponible, qui a été pris par une organisation de Montréal, les habitations Loggia, qui ont donc parti cette espèce de coopérative d'habitation, et c'est à l'intérieur de cette maison qu'on a décidé de s'insérer. On vous a dit que ça avait été très, très complexe au départ. Je dois vous avouer, là, vraiment que de juste faire accepter le projet — puis on en a parlé — par le CSSS et par l'agence, là, ça a été très, très, très compliqué.

Nous, ce qu'on a fait après, c'est qu'on a créé un conseil d'administration autonome. Alors, on a créé une corporation qui est devenue Espace Bellechasse. On s'est dissociés, la société, dans le fond, de la maison. Quand je dis «dissociés», tout simplement, c'est qu'on s'est retirés parce qu'on n'est pas… Notre rôle, nous, à la société, ce n'est pas d'être propriétaires de maisons non plus et de gérer des logements, hein? On est là… Notre mission, c'est de soutenir la recherche, évidemment, puis d'améliorer la qualité de vie des gens, mais par toutes sortes de programmes, mais surtout pas d'être propriétaires de maisons. Alors, on a créé une corporation autonome qui est gérée, d'ailleurs, par… La plupart des personnes qui sont atteintes de sclérose en plaques sont sur le conseil.

Et, oui, c'est un modèle qu'on aimerait bien voir s'implanter. On est prêts à jouer un rôle de promotion, évidemment, ou d'encadrement de loin, mais je pense que ça prendrait un programme de création de ressources alternatives, tu sais, qui pourrait s'inscrire dans un… on n'a pas le modèle, là, mais d'être facilitant, en tout cas, pour essayer d'en mettre le plus possible, d'en développer dans les milieux qui seront désireux d'en avoir, de ce type de modèle là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. C'est très intéressant ce que vous… Ce modèle-là, là, je trouve ça effectivement extrêmement intéressant et je pense qu'il y a un potentiel qui répond à des besoins spécifiques du type, là, des personnes atteintes de sclérose en plaques, mais, comme Mme Prévost le disait, de d'autres personnes aussi avec des besoins similaires. Et donc je pense que ça peut être quelque chose d'extrêmement intéressant.

Et ça m'amène à vous parler du rôle de la société. Donc, j'ai compris, là, que vous pouvez aider, supporter, accompagner dans un type de projet comme ça. Vous avez produit un DVD, faire de la formation. Et vous avez parlé dans votre mémoire aussi de l'importance d'organiser des activités à l'extérieur et des loisirs. On en parlait tantôt, de l'importance des loisirs pour les personnes en CHSLD. Et vous, qu'est-ce que vous faites et quel est votre rôle, au niveau de l'organisation des loisirs, autant pour les personnes en CHSLD que vivant dans des ressources alternatives?

Le Président (M. Bergman) : M. Adam.

M. Adam (Louis) : D'abord, on a des sections locales partout sur le territoire du Québec. Donc, il y a une présence de la société partout par le biais d'un bureau avec une ressource ou deux ressources, des bénévoles. Il y a des visites qui se font en centres hospitaliers et de soins de longue durée, là, pour aller visiter les gens qui y vivent. On a évidemment beaucoup de groupes d'entraide, de cafés-rencontres. Ce qu'on fait, évidemment, c'est de l'information sur la maladie.

Nos sections locales sont soutenues par des activités de collecte de fonds, mais aussi par le Programme de soutien aux organismes communautaires pour la plupart. Ils ne sont pas suffisamment soutenus par le Programme de soutien aux organismes communautaires, on n'en aura jamais assez évidemment, Je pense que c'est criant, au niveau des organismes tout le monde le dit. Et donc le rôle des sections locales, dans le fond, là, c'est vraiment d'animer, tu sais, en termes de loisirs, en termes d'activités d'information, les cafés-rencontres, l'écoute téléphonique, toute l'information qu'on peut donner sur la maladie.

Nadine pourrait ajouter… Ce que Mme Prévost disait tantôt aussi, on a un colloque de professionnels de la santé, qui se tient aux deux ans, où on invite des ergothérapeutes, des physiothérapeutes, des préposés aux bénéficiaires qui viennent entendre parler de la maladie, et ça, je pense que c'est très soutenant pour les personnes qui y travaillent. Je pense qu'on pourrait encore faire mieux. On pourrait, en plus du DVD qu'on a produit pour les préposés, mais avoir de la formation sur Web ou des capsules Web, en tout cas, qui parlent beaucoup plus de la maladie et du soutien que les personnes auraient besoin en centre hospitalier et de soins de longue durée ou encore, tu sais, évidemment, dans un nouveau modèle comme on voudrait développer, des modèles qui seraient semblables à Espace Bellechasse un peu partout à travers le Québec.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste 2 min 30 s.

• (21 heures) •

Mme Proulx : En fait, oui, je comprends très bien, là, votre vision de vouloir développer d'autres modèles comme l'Espace Bellechasse, mais, à partir du moment où il y a quand même maintenant, à l'heure actuelle, 1 000 personnes en CHSLD, vous êtes ici, aujourd'hui, pour témoigner devant une commission qui se penche sur les conditions de vie des personnes hébergées en CHSLD, si je vous demandais votre recommandation, selon vous, là, pour les personnes que vous représentez aujourd'hui, ce serait quoi, la priorité? Et quelles actions on devrait poser comme gouvernement pour assurer une meilleure qualité de vie à ces personnes-là en CHSLD? Est-ce que c'est la formation? Est-ce que c'est ça, la principale lacune que vous pouvez constater ou si c'est l'organisation physique des lieux? Ce serait quoi, là, les éléments prioritaires que vous auriez à nous recommander?

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Moi, c'est sûr que ce que je vois qui peut être faisable… mais, encore là, je le sais que les bâtiments sont tous différents, mais c'est sûr que je pense qu'on devrait regarder la clientèle, si elle peut être déplacée. Je ne le sais pas jusqu'à quel point c'est faisable. Des fois, ça a l'air très facile vu de l'extérieur. Mais c'est sûr que regrouper… Ce qui coûterait le moins cher, ça serait de regrouper une clientèle qui a des besoins similaires. Je comprends très bien que les ressources intermédiaires puis les ressources alternatives ne pourront pas toutes être développées en dedans de cinq ans puis répondre à tous les besoins.

Nous, on a développé 14 places, on n'a pas réglé le problème, là. Donc, on a l'expérience pour comprendre que tout ça prend du temps et aussi qu'on a les ressources… On a les ressources que l'on a. Mais de réorganiser à l'intérieur de ce qu'on a déjà, on pense que ça serait déjà un plus parce qu'il y a quand même une grosse partie des problèmes ou des besoins qui ne sont pas répondus qui sont liés, selon moi, au fait que la clientèle est mixte, donc…

Puis je voudrais juste revenir sur quelque chose dont on a discuté. Vous demandiez si on serait prêts à s'impliquer pour ouvrir d'autres ressources. Ce n'est pas notre rôle premier, mais il y a d'autres ressources qui fonctionnent très bien, et c'est leur rôle premier, comme le Regroupement de services intégrés Propulsion, à Montréal, qui sont là depuis 20 ans, et eux, c'est ce qu'ils veulent faire, ils veulent en ouvrir d'autres. Et, encore une fois, pour donner l'exemple d'une ressource institutionnelle, à Granby, ils sont en train d'en ouvrir d'autres aussi. Donc, il y a peut-être des ressources institutionnelles et non institutionnelles qui peuvent devenir des experts. C'est une autre solution plus à notre portée que je verrais.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé pour le côté ministériel. Pour l'opposition officielle, M. le député d'Orford.

M. Reid : Merci, M. le Président. Vous mentionnez, évidemment, qu'il est préférable de maintenir les personnes dans leur milieu naturel, donc à domicile, et vous dites aussi qu'évidemment c'est une formule moins onéreuse, mais c'est aussi — il faut insister — une formule où les gens sont beaucoup plus à l'aise parce qu'ils se sentent chez eux. Une des formules, c'est évidemment ce qu'on appelle… ce que vous appelez les ressources alternatives. Ça existe aussi pour… Et j'ai eu la chance de connaître un petit peu plus d'autres secteurs, comme par exemple les pertes d'autonomie graduelles. Par exemple dans mon comté, à Magog, il y a l'Accueil Notre-Dame, qui devient le domicile de ces gens-là, des fois, des couples, effectivement, dont un des deux est en perte d'autonomie. Et on a beaucoup entendu parler, lors de la commission mourir dans la dignité, des soins palliatifs à domicile, autrement dit, de se maintenir et de rester à domicile aussi longtemps que possible, sinon la totalité… Donc, on peut comprendre qu'il y a un intérêt. Moi, j'aimerais seulement que vous nous éclairiez, avec toute votre expérience, donner un peu plus de lumière sur c'est quoi, les principales problématiques pour maintenir à domicile — disons, à domicile traditionnellement, là — les personnes qui effectivement souffrent de sclérose en plaques.

Mme Prévost (Nadine) : Dans certains…

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Excusez-moi. Dans certains cas, je ne saurais pas vous dire si la recherche a été faite de façon approfondie, mais ça semblait être le cas. Des fois je me demande si ce n'est pas juste… la personne ne se ramasse pas en hébergement faute d'avoir accès à un appartement adapté. Parce que, des fois, comme je vous le disais, la sclérose en plaques est une maladie imprévisible, parfois il y a une évolution qui peut se faire assez rapidement. La personne est à un deuxième étage, il faut qu'on trouve une solution rapidement, et elle n'a pas accès à un appartement adapté, puis elle va se retrouver à un endroit où elle ne devrait pas être, en hébergement. Ça, j'ai déjà vu ça. Je ne le sais pas si c'est encore d'actualité puis si c'est un problème généralisé à la grandeur du Québec, mais je… Des fois, il y a une situation de crise qui arrive, puis on doit trouver une solution rapidement. Des fois, ça peut être une grosse poussée, aussi, la personne fait une grosse poussée de sclérose en plaques, elle a plusieurs symptômes, sa situation se dégrade rapidement, puis là il faut trouver un endroit où elle va pouvoir au moins rentrer et sortir de chez elle.

Le Président (M. Bergman) : M. le député d'Orford.

M. Reid : J'imagine qu'une des possibilités, ce qu'on voit, il me semble qu'on... en tout cas, moi, j'ai eu l'occasion de voir de temps en temps, c'est que le conjoint, la conjointe s'en occupe, et effectivement il y a quelques adaptations comme on en a pour des personnes qui ont un handicap, par exemple, pour marcher, ou des choses comme ça, mais est-ce qu'il y a des problèmes plus particuliers encore? Vous parliez de température tantôt. Moi, j'ignorais totalement ça. Est-ce qu'il y a d'autres problèmes de ce type-là qui, dans un domicile correct, là, mais sans plus, posent problème?

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Je vous dirais que c'est plus par rapport... Le principal problème, ça serait par rapport à la perte de mobilité.

M. Reid : Donc, effectivement, les appartements adaptés, par exemple, pour les personnes qui ont un problème de mobilité, c'est déjà un point de départ, ça veut dire comme une condition initiale qui est incontournable, là?

Mme Prévost (Nadine) : Parce que ce qui fait que la personne va se retrouver en hébergement, c'est qu'elle a atteint le maximum d'heures-soins auxquelles elle a droit à domicile ou encore que c'est devenu... que ce n'est plus sécuritaire qu'elle reste à la maison. Donc, c'est...

Le Président (M. Bergman) : M. le député d'Orford.

M. Reid : Oui. Vous parlez d'heures-soins maximums. Ça, c'est fixé selon quelles normes, ça, puis quels barèmes? Savez-vous?

Mme Prévost (Nadine) : À ma compréhension, c'est variable. Ça peut varier d'un CLSC à l'autre.

M. Reid : Et, à votre avis, si ce nombre d'heures là augmente, bien ça favorise le maintien à domicile, j'imagine, de façon automatique?

Mme Prévost (Nadine) : Oui, ça favorise le maintien à domicile, c'est sûr, surtout quand la personne n'habite pas seule. C'est sûr que, là, la question de sécurité se pose moins. Mais, pour une personne qui vit seule, parfois c'est juste le fait qu'elle ne puisse pas se tourner dans son lit ou, s'il arrive quelque chose pendant la nuit, un incendie ou quelque chose, bien… Pour la question de sécurité, je n'ai malheureusement pas plus de solutions à...

M. Reid : O.K. Non, mais c'est éclairant, parce que la sécurité est un problème pour toutes les personnes qui peuvent avoir un handicap physique, mais, dans ce cas-là, c'est facile à comprendre que c'est plus problématique.

Mme Prévost (Nadine) : Pour les personnes qui vivent seules.

M. Reid : Merci.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bienvenue à notre commission. D'abord, félicitations pour votre approche positive. J'appellerais ça un discours équilibré. On voit que vous cherchez des solutions pour des problèmes qui sont très réels, mais vous n'êtes pas utopiques, là, vous êtes vraiment, là, sur le terrain, puis ça, j'apprécie énormément.

Vous avez parlé de la question des nouveaux traitements. En sclérose en plaques, il y a quand même des beaux traitements. Je pense que ce qu'il faut viser un jour, là, c'est qu'on réussisse à guérir la maladie, si possible même la prévenir, là. Je ne sais pas comment on pourrait faire parce que la cause n'est pas tout à fait connue, mais au moins, si on pouvait la guérir ou retarder la maladie... Vous avez dit «l'accès aux médicaments», est-ce que c'est un enjeu pour vous actuellement?

M. Adam (Louis) : Bien, l'accès aux médicaments est un enjeu extrêmement important évidemment parce qu'on a des nouveaux traitements. La plupart des personnes qui ont la sclérose en plaques actuellement sont obligées de s'injecter, que ça soit une fois par semaine ou encore quelques fois même par jour, en tout cas pour certaines personnes, selon le médicament qu'ils prennent. On a des nouveaux traitements qui arrivent sous forme orale, qui sont extrêmement efficaces aussi, encore plus efficaces que les traitements par injection. Alors, évidemment, c'est déjà une grosse amélioration au niveau de la qualité de vie. Il y a des nouveaux traitements, des nouveaux médicaments qui vont arriver très, très bientôt, qui ont commencé à arriver aussi qu'on ne peut pas inscrire sur la liste des médicaments, évidemment, ou qu'on retarde à inscrire sûrement pour une raison économique. Mais ces médicaments-là, évidemment, selon les recherches qui sont faites, vont augmenter l'écart entre les poussées, hein? Ça fait que, plus on va diminuer cet écart-là entre les poussées, évidemment moins vite les personnes vont avoir besoin de soins plus importants. Alors, pour nous, ça serait, tu sais... pour les patients, en tout cas, quelque chose d'extrêmement important, là, qu'on puisse leur permettre d'avoir accès à ces traitements-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Pour continuer dans le même ordre d'idées, on s'est déjà parlé qu'il y a également l'importance d'avoir des cliniques spécialisées, parce que la sclérose en plaques est quand même une maladie, là, très, très spécialisée. Généralement, il y a un spécialiste qui suit la personne, avec souvent un médecin de famille, là, qui l'accompagne pour les autres pathologies. Je pense que vous avez fait beaucoup la promotion des cliniques spécialisées avec les infirmières pivots. J'aimerais ça que vous m'en parliez, parce qu'on s'en était parlé ici, au parlement, il y a quelques mois.

Le Président (M. Bergman) : M. Adam.

• (21 h 10) •

M. Adam (Louis) : Oui. Alors, évidemment, il y a 18 cliniques spécialisées en sclérose en plaques au Québec. Ils jouent un rôle extrêmement important, hein? Il y a un neurologue à la clinique, évidemment, puis il y a une infirmière pivot, comme on vous en a parlé. Quand ces cliniques-là ont commencé à prendre place, les infirmières, par exemple, avaient un ratio d'à peu près une infirmière pour 500 patients. Elles jouent un rôle clé, hein, tu sais, au niveau de l'information, là, sur les médicaments, elles vont décharger le neurologue. Le neurologue peut passer plus de temps ou voir plus de patients évidemment, avec une infirmière qui joue un rôle très actif.

Et actuellement ce qu'on a constaté, c'est que c'est une infirmière pour 2 000 à 2 500 patients. Alors, ils sont débordés, on n'arrive pas à répondre à la demande. Les personnes sont vues moins fréquemment aussi dans l'évolution de leur maladie, alors ça crée... C'est évidemment beaucoup, beaucoup de pression actuellement sur le système, et on voit de plus en plus de personnes qui ont la sclérose en plaques, dans le fond, déborder, tu sais, au niveau des urgences ou, en tout cas, des visites dans les CLSC, qui sont obligées d'attendre d'avoir des réponses, là, et ça a aussi un impact.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Et puis vous avez touché le point également que la majorité des personnes qui ont la sclérose en plaques sont quand même capables de demeurer à domicile. Ils ont des poussées qui arrivent à l'occasion, l'évolution est variable d'une personne à l'autre. Je ne pense pas que... C'est quand même une minorité de personnes qui vont voir leur condition se détériorer rapidement.

Je crois que vous faites la promotion… c'est la diversité du type d'hébergement. Parce que, quand on arrive dans ces situations-là, souvent les gens, ils viennent puis ils font la promotion d'un type d'hébergement, alors que ce qui est important pour moi, c'est qu'on puisse leur offrir ce qu'eux autres veulent, essayer de les mettre dans les bonnes conditions, en sachant qu'avec une détérioration de l'état ils peuvent avoir des maisons adaptées, des ressources non institutionnelles, ça peut aller jusqu'à un CHSLD, tout dépendant du volume… du nombre de personnes qui ont la maladie par région. Parce qu'une des conditions que moi, j'ai vue souvent, c'est que les gens veulent continuer à demeurer où ils demeuraient. Mais, si c'est des petites populations, parfois ce n'est pas possible d'avoir une maison de huit ou 10 personnes, là, qui serait probablement le seuil de viabilité.

Comment vous voyez ça, notre modèle, au Québec, qu'on devrait développer justement par rapport à ça, c'est-à-dire d'avoir cette offre de services diversifiés?

Le Président (M. Bergman) : M. Adam? Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Merci. Oui, bien, c'est sûr que nous, de par le type de clientèle qu'on a, on ne peut que parler de diversité, là, parce que c'est une clientèle dont les besoins varient énormément. Puis c'est sûr qu'on privilégie aussi des ressources avec un cadre un peu moins rigide qui va faire en sorte que la personne va pouvoir rester un certain temps à la même place, pas être... Si on dit : Une ressource, c'est pour une personne qui a entre 20 et 30 heures, et ensuite il faut qu'elle aille à un autre endroit, 30 à 40, puis à un autre endroit, ensuite en CHSLD… Donc, je pense qu'avoir des ressources diverses, ça peut être une solution intéressante. Puis c'est ce qu'on voit, d'ailleurs, actuellement, là, dans les pratiques d'excellence, dans les ressources qui fonctionnent bien. C'est très variable, là, ce n'est pas du tout les mêmes critères, le nombre de places. Donc...

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Puis avez-vous évalué le coût d'une ressource de ce type-là avec le nombre de personnes qui sont nécessaires? Puis ce que je vois actuellement, c'est des ressources qui sont soit financées par des groupes, ou le gouvernement peut contribuer en partie à son financement.

Mme Prévost (Nadine) : Oui. Bien, je peux parler...

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Pardon. Oui, je peux parler pour la nôtre, pour Espace Bellechasse, en fait, parce que c'est celle qu'on connaît le plus. Donc, avec un budget de 550 000 $, on a un 14 logements, donc une présence 24 heures sur 24, ce qui correspond à peu près aux enveloppes de soutien à domicile des 14 résidents, qui ont été ramenées dans un seul budget.

C'est sûr que, je dirais, c'est un budget correct. Par contre, le défi principal, c'est le roulement de personnel parce que, dans les barèmes qu'on nous a donnés, avec le financement de l'agence qu'on a eu, on doit s'en tenir à un barème et on n'est pas compétitifs avec le réseau de la santé. Donc, on a un roulement très, très important. Ça, ça nuit malheureusement à la qualité de vie, là, des personnes sur place, là, parce que, bon — je n'ai pas besoin de vous faire un dessin — il y a des actes intimes quand même, et puis le roulement de personnel, ce n'est pas quelque chose de souhaitable dans ce type de ressource là.

Donc, une augmentation, même qui ne serait pas très importante, nous permettrait au moins d'offrir un salaire non pas compétitif, mais avec un écart moins grand. Parce que je pense que ce qu'on offre comme employeur, ce qu'Espace Bellechasse offre comme employeur est intéressant. On n'a pas besoin d'offrir les mêmes salaires que le réseau pour avoir des bons employés qui vont rester, mais actuellement ce n'est pas très élevé.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Vos 14 personnes qui demeurent dans votre Espace Bellechasse, le profil moyen, est-ce que c'est du profil ressource intermédiaire ou du profil CHSLD?

Mme Prévost (Nadine) : Bien, c'était 20 à 44 heures, et on devait faire une moyenne avec les gens qu'on sélectionnait, une moyenne de 32 heures.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Ça devient pratiquement un profil CHSLD?

Mme Prévost (Nadine) : Oui.

Le Président (M. Bergman) : M. Adam.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Ça fait que, si on fait juste parler de la qualité de vie, je pense que c'est ça qui doit prévaloir. Ce que les gens veulent, également, pour moi, c'est important. Mais, quand vous regardez le tableau financier, 540 000 $, 550 000 $ pour 14 personnes, c'est beaucoup moins dispendieux qu'une place en CHSLD. Parce qu'à Montréal ils estimaient autour de 90 000 $; Saguenay—Lac-Saint-Jean, autour de 60 000 $. Et vous êtes probablement autour de 40 000 $ par personne, ça fait que c'est quand même avantageux financièrement. Ça fait que ça devient un partenariat gagnant-gagnant?

Mme Prévost (Nadine) : Tout à fait.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Adam (Louis) : Et ça permet aux gens de rester dans leur milieu de vie, ce qui est vraiment… tu sais, d'être des locataires et de pouvoir vivre en famille ou en couple.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Moi, le raisonnement, je ne le fais pas, dire qu'est-ce qu'on peut se payer au niveau financier? Il faut toujours commencer : c'est quoi, le besoin, puis c'est quoi qui est mieux pour la personne. Puis après ça, quand on développe nos ressources, on se rend compte que souvent ce n'est pas plus cher que d'avoir des ressources institutionnelles comme du CHSLD, sauf qu'il faut prendre le temps de les développer et comprendre que… Ça, c'est le raisonnement qu'on doit faire au niveau politique puis au niveau gestion, voir que, si cette personne-là n'était pas dans la ressource alternative, elle serait en CHSLD, ça fait qu'on devrait l'assumer à un moment donné, à une place ou l'autre. Et, quant à le faire, développons les bonnes ressources aux bons endroits pour satisfaire aux besoins. Je pense que c'est comme ça que vous travaillez également.

Si vous aviez à faire des recommandations pour les personnes dans les CHSLD… Vous avez dit : Peut-être essayer de les regrouper. Mais un élément qu'on a eu, c'est vraiment… il y a des gens qui nous disent que, tout regrouper ce type de clientèle là ensemble, il y a comme un effet miroir. Ce serait quoi, la solution pour éviter ça?

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Qu'est-ce que vous voulez dire par «effet miroir»?

M. Bolduc (Jean-Talon) : L'effet miroir, c'est que vous êtes des gens qui sont malades, tous la même maladie, quand vous voyez une personne qui se détériore, ça vous fait penser que, vous aussi, vous allez peut-être passer par là, et il y a comme un effet psychologique qui joue chez ces gens-là.

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Je ne comprenais pas l'effet miroir parce que, pour moi, l'effet miroir, être face à des gens, des personnes âgées puis voir des décès à répétition, je pense que l'effet miroir, pour moi, est plus fort, mais peut-être que je me trompe. Mais nous, ce qu'on voit, c'est que les gens au moins peuvent se voisiner, peuvent avoir des conversations, peuvent même s'organiser des sorties. Donc, ça, on le voit à Espace Bellechasse, puis je pense que ça peut être la même chose aussi en CHSLD, là. Puis c'est sûr qu'avoir une salle pour recevoir la famille, pour ceux qui reçoivent encore la visite de leur conjoint puis des enfants, avoir peut-être un petit peu plus de flexibilité au niveau des horaires… Parce que ça devient difficile d'être spontanés, là, en CHSLD, là, voire impossible.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Puis tantôt vous avez fait mention que souvent ça ne se fait pas. Je peux vous dire, on a fait des unités prothétiques dans des CHSLD pour regrouper certains types de clientèles. C'est juste une question de volonté de l'organisation parce que tous nos CHSLD, en général, sont assez gros pour être capables de faire du regroupement de clientèle. Puis souvent, 14, 15 patients qu'on regroupe dans un même secteur, on peut leur donner une bonne qualité de vie, puis ça, moi, je pense, c'est ce qu'on doit rechercher. Mais la base, moi, je me dis, si quelqu'un veut aller avec des clientèles du même type qu'elle, je pense qu'il faut favoriser ça, mais, si quelqu'un nous dit que, pour toutes sortes de raisons, ça ne fait pas son affaire, bien, à ce moment-là, on doit lui offrir de la ressource alternative, c'est-à-dire qu'elle pourrait être dans un autre endroit où ça lui convient. Donc, ça devient le choix de la personne. Puis moi, j'ai toujours pensé qu'on est différents, il faut avoir des offres diversifiées, mais ce qui est plus important, c'est d'essayer de respecter le choix de la personne en développant les ressources appropriées.

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : Je suis d'accord parce que parfois le choix de la personne même est surprenant. Ah! Ce n'est pas le choix auquel, nous, on s'attendrait. J'ai parlé à des gens qui étaient en CHSLD dans le temps où on ouvrait Espace Bellechasse, et puis il y a des personnes que j'étais certaine qu'elles allaient vouloir venir habiter à Espace Bellechasse, puis elles ne voulaient pas quitter le CHSLD, et ça…

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Et vous touchez un point qui est très important. Souvent, dans notre tête — puis on vit ça comme professionnel — on pense qu'à leur place on ferait telle affaire. Mais, le principe de l'autonomie, c'est la personne qui décide, puis nous autres, on est là pour essayer de favoriser à ce que ce qu'elle veut puisse se réaliser. Et ça, les professionnels, des fois, ont de la difficulté. Entre autres, au niveau des soins, il y en a qui veulent avoir certains types de soins, ou, le principe aussi, il y en a qui ne veulent pas avoir certains types de soins, alors que les autres, ils disent : Bien, vous devriez… Mais ça appartient à la personne de prendre sa décision, quel que soit son raisonnement.

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

• (21 h 20) •

Mme Prévost (Nadine) : Je n'ai rien à redire, je suis entièrement d'accord avec ça. Je pense que c'est à la personne à décider. Mais malheureusement, ce qui se vit actuellement, bien il y a des personnes qui se retrouvent là où elles ne voudraient pas être, malheureusement.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste 2 min 30 s.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, M. le Président. Écoutez, je veux seulement que vous remercier. Mais je tiens encore à vous féliciter puis à dire que vous faites un excellent travail parce que, là, vous nous avez fait une belle démonstration de l'engagement que vous faites face à votre cause. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci de votre présence ce soir, puis je pourrais vous dire, c'est très enrichissant de vous avoir avec nous. Je pense que c'est une belle innovation sur le milieu de vie que vous avez créée à Espace Bellechasse. Je voudrais savoir, selon vous, là… Vous avez dit qu'il y avait 1 000 cas de sclérose en plaques qui sont dans les CHSLD actuellement au Québec. Là, vous avez créé 14 places à Espace Bellechasse. Mais, selon vous, il y en aurait combien qui voudraient se retrouver dans un milieu de vie comme celui-là?

Le Président (M. Bergman) : M. Adam.

M. Adam (Louis) : Bien, c'est une excellente question. Il faudrait leur demander évidemment puis il faudrait qu'il y ait des places disponibles de plus pour qu'on puisse le savoir. Évidemment, on parle de 1 000… il y a un accroissement de la maladie. Ça, je ne l'ai pas dit au départ, hein? On a de plus en plus de cas de sclérose en plaques malheureusement. Puis l'effet du vieillissement de la population va faire que les gens vont vivre plus longtemps aussi. Ça fait que j'ai l'impression qu'on va se retrouver dans une situation où on va avoir un accroissement, finalement, de cas de ce type.

Maintenant, je pense que, si on ouvrait d'autres places dans certains milieux, je suis convaincu qu'on ferait face à la même situation. Il y a des gens qui probablement ne voudraient pas changer d'endroit ou d'autres personnes qui malheureusement feraient face à une éventualité d'intégrer un centre hospitalier et de soins de longue durée puis choisiraient de vivre dans un modèle comme Espace Bellechasse, avec ses lacunes, évidemment.

Une des lacunes dont on ne vous a pas parlé, c'est qu'ils sont locataires, les gens, ils sont locataires selon un bail, comme M. et Mme Tout-le-monde, et, quand il y a une personne qui ne veut plus de soins, bien c'est difficile de dire à cette personne-là : Mais tu dois quitter, tu sais? Alors, ça, c'est compliqué, là. Actuellement, on n'a pas cette souplesse-là au niveau de la ressource. Alors, on pourrait éventuellement se retrouver, par exemple — là j'exagère, je pousserais loin — avec 10 places qui seraient occupées par des gens qui n'auraient plus… qui ne désireraient plus de soins puis qu'on ne peut pas malheureusement envoyer ailleurs parce que les gens sont locataires et propriétaires de leur bail, là, tu sais?

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Mais ce que je comprends, c'est que c'est des appartements, puis la personne-ressource, là, qui est en charge, elle vit dans un appartement… ou elle a ses locaux pour répondre à la demande la nuit, ou est-ce qu'elle vit sur place?

Le Président (M. Bergman) : Mme Prévost.

Mme Prévost (Nadine) : En fait, on a un bureau sur place. Il y a une coordonnatrice qui est là pendant le jour, et elle est sur appel le soir, mais il y a toujours au moins un préposé, selon les besoins, un, deux, trois préposés, selon les plans de services. Donc, il y a au moins une personne la nuit à tout moment et qui est rejoignable par un système — c'est encore un système téléphonique, Serge? — …

M. Loiselle (Serge) :

Mme Prévost (Nadine) : …qui est rejoignable par système téléphonique, toujours?

M. Loiselle (Serge) : Oui, puis il y a toujours moyen… Oui, de toute façon, tous les locataires d'Espace Bellechasse ont tous un bouton d'accroché avec une espèce de truc pour embarquer, là, puis ils peuvent signaler si jamais ils sont dans le pépin. Il y a une cloche qu'ils peuvent sonner tout le temps.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Mais la personne est sur place.

Mme Prévost (Nadine) : En fait, on a un bureau sur place. La coordonnatrice fait les horaires des préposés, les préposés sont sur horaire selon les plans de soins, et il y a au moins… C'est parce que je ne peux pas vous dire les plans de soins de nuit, des fois ça change, là, dépendamment si la personne est moins bien, ils peuvent avoir besoin de deux préposés pendant la nuit, parce qu'ils ont des horaires. Des fois, ils ont à tourner les personnes ou aller à la salle de bain. Donc, selon les plans de soins, il y a toujours le nombre de préposés requis et un gros minimum d'une préposée, la nuit, qui est rejoignable avec notre moyen de communication.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Est-ce que vous avez une liste d'attente, actuellement, pour des…

Mme Prévost (Nadine) : Oui…

M. Loiselle (Serge) : …une liste d'attente. Je ne sais pas combien il y a de personnes sur la liste d'attente. Mais il y a toujours des gens qui s'informent de la ressource, alors on prend leur candidature. Et puis, là, quand il y a un logement qui se libère — ça n'arrive pas souvent, c'est arrivé à quelques reprises, quand même, dans les derniers cinq ans — on passe des entrevues de sélection pour les candidats intéressés.

Mme Prévost (Nadine) : Puis on ne le publicise pas vraiment beaucoup parce qu'on ne veut pas créer de fausses attentes, là. Donc, on ne veut pas avoir une liste d'attente de 50 personnes, là. Donc, on sait que les places se libèrent peu, donc on publicise très peu la ressource.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Adam, Mme Prévost, M. Loiselle, merci d'être ici avec nous ce soir, merci pour votre présentation, on apprécie beaucoup.

Et, collègues, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à demain, après les affaires courantes. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 21 h 26)

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