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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Thursday, April 21, 2016 - Vol. 44 N° 102

Ministère de la Santé et des Services sociaux


Ministère de la Santé et des Services sociaux, volet Santé publique


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Table des matières

Santé et Services sociaux

Remarques préliminaires

M. Gaétan Barrette

Discussion générale

Santé publique

Remarques préliminaires

Mme Lucie Charlebois

M. Jean-François Lisée

M. Sébastien Schneeberger

Discussion générale

Autres intervenants

M. Marc Tanguay, président

Mme Véronyque Tremblay, présidente suppléante

M. Norbert Morin, président suppléant

Mme Diane Lamarre

M. François Paradis

Mme Marie Montpetit

M. Paul Busque

Mme Monique Sauvé

M. Amir Khadir

Mme Manon Massé 

*          M. André Delorme, ministère de la Santé et des Services sociaux

*          M. François Dion, idem

*          M. Horacio Arruda, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures douze minutes)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de votre téléphone cellulaire.

Santé et Services sociaux

La commission est réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du volet Santé et Services sociaux pour l'exercice financier 2016-2017.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Aucun, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Nous allons débuter par les remarques préliminaires, puis par la suite nous allons procéder à une discussion d'ordre général. Je vous indique donc que, considérant que nous avons débuté nos travaux à 11 h 12 — il y avait déjà un consentement préalable pour d'autant dépasser la fin de nos travaux — nous allons donc travailler jusqu'à 13 h 12, ce sera la fin de nos travaux.

Alors, ce matin, il y aura essentiellement deux étapes, l'étape des remarques préliminaires, par la suite l'échange avec le ministre, et les gens qui l'accompagnent, et les parlementaires. Je vous indique la répartition du temps suivante, remarques préliminaires : le gouvernement, 17 minutes, l'opposition officielle, 10 minutes, et le deuxième groupe d'opposition, sept. Si d'aventure l'une de ces trois personnes ne prenait pas tout son temps, il serait, à ce moment-là, réparti sur les blocs d'intervention suivants. Nous allons, à ce moment-là, débuter avec l'opposition officielle pour 21 minutes, le gouvernement, 21 minutes, deuxième opposition, 20 minutes, et le gouvernement, 21 minutes, évidemment sujet au temps qui sera pris ou pas pris aux remarques préliminaires.

Remarques préliminaires

Alors, sans plus tarder, nous débutons donc avec M. le ministre pour une enveloppe maximale de 17 minutes pour remarques préliminaires. La parole est à vous, M. le ministre.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Merci, M. le Président. Alors, évidemment, je suis très heureux d'être ici aujourd'hui. Alors, vous me permettrez de saluer, évidemment, nos collègues de la partie gouvernementale mais aussi les collègues des deux oppositions officielles. Et je vais donc procéder, comme vous m'y invitez, à mes remarques préliminaires.

Alors, M. le Président, ça fait maintenant deux ans qu'on a entamé une vaste réforme, je pense que ça a été qualifié de cette façon-là à plusieurs reprises sur la place publique, et c'est certainement avec fierté que je viens aujourd'hui en quelque sorte faire le bilan de l'état d'avancement de ces réformes-là, des réformes qui avaient comme objectifs, évidemment, certainement de faire des économies dans le réseau, compte tenu de la situation budgétaire du Québec, mais certainement aussi, et sans doute en premier lieu, à faire en sorte que l'on puisse avoir un réseau de santé qui permette d'offrir à la population des soins de santé de la plus grande qualité possible mais dans un accès facilité en temps opportun partout sur le territoire.

Alors, avant d'aller plus loin, M. le Président, je vais simplement identifier les gens qui m'accompagnent aujourd'hui et qui m'accompagneront tout au long de la période d'étude des crédits. Alors, à ma droite, M. Michel Fontaine, sous-ministre en titre à la Santé et aux Services sociaux. Avec moi également, M. Luc Castonguay, sous-ministre adjoint à la planification, à la performance et à la qualité; Dr Horacio Arruda, directeur national de santé publique et sous-ministre adjoint à la santé publique; Dr Jean Latreille, de la Direction générale de cancérologie; Dr Michel A. Bureau, sous-ministre associé aux services de santé et médecine universitaire; Mme Sylvie Dupras, sous-ministre adjointe aux services sociaux; Marco Thibault, sous-ministre adjoint au personnel réseau et ministériel; M. Pierre Lafleur, sous-ministre adjoint à la coordination réseau et ministérielle; M. François Dion, sous-ministre adjoint aux finances, aux infrastructures et au budget; et M. Richard Audet, sous-ministre associé aux technologies de l'information.

Le budget dont on va étudier les crédits aujourd'hui, M. le Président, le budget 2016-2017, démontre clairement que la santé est au coeur des préoccupations de notre gouvernement. En fait foi sans aucun doute le fait que le budget sera, cette année, de 33 739 000 000 $, soit 49,4 % du budget total de dépenses de programmes du gouvernement, ce qui correspond à une augmentation, par rapport à l'année dernière, de 2,4 %, et donc d'une croissance de 775 millions de dollars. Alors, clairement, M. le Président, la santé demeure une priorité pour notre gouvernement.

Je commencerai par traiter, M. le Président, des deux premiers piliers qui ont été mis en place, de notre réforme, à savoir les projets de loi nos 10 et 20. Sommairement, je rappelle que le projet de loi n° 10 est une réforme, évidemment, d'une grande ampleur, qui est une réforme, d'abord et avant tout, organisationnelle, qui vise certes, et je le rappelle, à faire des économies budgétaires, elles aussi, substantielles, mais, sur le plan de l'organisation des soins sur un territoire, organisation qui visait à permettre à la population dudit territoire d'avoir accès à un continuum de soins le plus complet possible, bien, on voit déjà des effets, un peu plus d'un an après le déploiement de la réforme.

Je vous donne, M. le Président, un certain nombre d'exemples pour illustrer la chose. Je vous donne en premier lieu la situation du CIUSSS de l'Estrie. Le fait d'avoir permis d'intégrer sur une même administration toutes les ressources du territoire, bien, ça donne des effets qui sont aujourd'hui clairement positifs, entre autres, par exemple, à la gestion du continuum de soins chez les personnes âgées. On sait que, les personnes âgées, lorsqu'elles se retrouvent en centre hospitalier, il arrive, à un moment donné — et on le souhaite évidemment tous, c'est normal — que les personnes puissent retourner chez elles, mais parfois elles doivent aller dans une ressource intermédiaire ou ailleurs, par exemple. Alors, on a constaté, M. le Président, que le fait de l'avoir maintenant sous une seule administration, ça simplifiait le volet administratif de la gestion de ces patients. Ce qui fait que, dans l'Estrie, le transfert en courte durée, le nombre de patients qui attendent un transfert de l'hôpital en CHSLD est passé en moyenne de 28 à 21 par jour, ce qui correspond à une diminution de 25 % par rapport à l'année précédente. Alors, on voit là un effet clairement positif d'avoir une seule entité qui fait cette gestion-là.

Je vous donne un autre exemple, qui est un exemple de l'Outaouais, une autre région, un autre secteur. On sait que les soins intensifs sont des lits qui sont très sollicités, et, avant la réforme, les deux hôpitaux indépendants de la région de l'Outaouais avaient, pour l'un, des lits de soins intensifs en surutilisation, constamment en pleine capacité, avec les problèmes que ça générait dans le fonctionnement de l'hôpital, alors que l'autre hôpital, l'Hôpital de Gatineau, qui n'a que six lits de soins intensifs, avait un taux d'occupation moyen de 3,7 lits par jour. Alors, le fait d'avoir mis en place cette gestion uniforme et qui a fait tomber les obstacles, qu'on pourrait qualifier même parfois de guerres de clocher, a fait en sorte qu'on a diminué à moins de 100 %, de l'ordre de 92 %, le taux d'utilisation des lits de soins intensifs à Hull, et le taux d'utilisation qui était de l'ordre de 60 % à Gatineau est maintenant... à Hull, pardon, est maintenant augmenté à 75 %. L'effet de ça, évidemment, est évident sur le fonctionnement hospitalier.

• (11 h 20) •

Sur le plan chirurgical, prenons l'exemple du CIUSSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal, qui, on s'en rappelle, avait des ententes, des contrats de services avec une clinique privée. Bien, le fait d'avoir constitué un CIUSSS a fait en sorte qu'ensemble, en ayant mis ensemble les ressources chirurgicales de trois hôpitaux précédents, bien, on a pu non seulement ramener dans le CIUSSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal le volume chirurgical fait à Rockland MD, mais on a même réussi à diminuer le temps d'attente de certaines chirurgies au centre principal du CIUSSS qui est Sacré-Coeur.

Alors, on le voit, M. le Président, le fait d'avoir posé, mis en place cette réforme montre déjà, au moment où on se parle, des gains d'efficience et, dans le cas que je viens de nommer, même une diminution de la liste d'attente et du temps d'attente en soi. Alors, ça, c'est un résultat concret de la mise en place et du déploiement du projet de loi n° 10. Et il y a fort à parier, évidemment c'est ce à quoi on s'attend, à ce que, dans les prochaines années, on multiplie ces effets bénéfiques. C'est ce que l'on voit au moment où on se parle.

Parmi les réformes que nous avons faites ou que nous avons mises en application — d'ailleurs, je rappellerai des souvenirs certainement à notre collègue de l'opposition officielle, qui a beaucoup travaillé en ce sens dans le passé — nous avons opérationnalisé la loi qui permet d'avoir de nouvelles activités en pharmacie. Pourquoi? Évidemment, tout le monde le sait, les pharmaciens ont la possibilité professionnelle d'offrir un certain nombre de services qui font en sorte qu'on puisse alléger notre réseau de première ligne. Il était évidemment important pour nous de faire en sorte que ces pharmaciens puissent opérer, donc, au sens opérationnel du terme évidemment, de nouveaux actes. Ainsi, depuis juin 2015, M. le Président, depuis l'année dernière, sept nouvelles activités, dont quatre qui font l'objet d'une rémunération additionnelle dans le cadre du régime général d'assurance médicaments, sont maintenant pratiquées par les pharmaciens. Quatre de ces activités consistent à prescrire, par exemple, un médicament pour lequel un diagnostic et un traitement sont connus, prescrire un médicament pour lequel aucun diagnostic n'est requis, donc aucune visite médicale, ou encore ajuster une ordonnance d'un médecin sans avoir à revoir le médecin pour l'atteinte d'une cible thérapeutique, ou encore prolonger l'ordonnance d'un médecin sans avoir à aller visiter le médecin. Voilà donc un autre effet positif de nos démarches quant à la fluidité des services médicaux et de santé dans le réseau et quant à l'accès à ces mêmes services.

Alors, M. le Président, on voit donc dans les deux dernières mesures que les effets des réformes que nous mettons en place sont positifs et visibles.

La loi n° 10, je l'ai dit, M. le Président, cette réforme-là visait aussi à réduire notre taux d'encadrement au Québec, et force est de constater que nous sommes non seulement en voie de réaliser nos objectifs, mais nous sommes en voie de les dépasser. Rappelons qu'initialement nous avions annoncé que notre objectif était de diminuer le nombre d'équivalents temps plein dans la haute direction, d'ici 2017-2018, de 1 300 cadres. Les chiffres montrent aujourd'hui que nous aurons une diminution, aujourd'hui, de 1 502 équivalents temps plein dans ce secteur d'encadrement. À date, sur les 1 300 que nous avions ciblés, il y en a 1 051, en date de maintenant, qui ont signifié leur changement d'affectation ou leur départ ou qui sont en voie de l'exercer. Alors, on comprendra, M. le Président, que l'objectif que nous nous étions fixé d'aller faire une économie de 220 millions de dollars, cet objectif sera rencontré, atteint.

Nous avons également, dans notre démarche, mis des mesures en place, tout comme dans notre négociation, pour s'adresser à la problématique de la main-d'oeuvre indépendante et des heures supplémentaires. On se rappellera, M. le Président, qu'il y avait des objectifs qui avaient été fixés dans notre planification précédente, de 2010 à 2015, qui étaient de réduire de 25 % le recours à la main-d'oeuvre indépendante et de 10 % les heures supplémentaires pour certains types d'emploi. Alors, M. le Président, nous avons constaté que ces objectifs-là ont été atteints et qu'aujourd'hui, dans notre planification 2015-2020, nous visons à diminuer encore plus, donc ici de 5,6 % le nombre d'heures supplémentaires et de 5,5 % l'utilisation de main-d'oeuvre indépendante. Alors, nous constatons, M. le Président, que nous avons atteint nos objectifs pour la planification 2010-2015 et que nous sommes en voie d'atteindre celle de 2015-2025.

Mais, encore plus, au moment où on se parle, et c'était le résultat de la négociation que nous avons faite avec les unités syndicales, notamment avec la FIQ, la fédération des infirmiers, infirmières et inhalothérapeutes du Québec, alors nous avons des discussions qui sont en cours pour revoir même, là aussi, et aller plus avant dans la révision de la façon de dispenser les services dans ce secteur, et, au moment où on se parle, il y a jusqu'à 147 projets d'analyse qui se font en collaboration avec tous les groupes de professionnels pour faire en sorte que nous puissions réduire l'utilisation de la main-d'oeuvre indépendante et, évidemment, le temps supplémentaire.

Sur le maintien des actifs, M. le Président, je l'ai mentionné précédemment, et c'est dans les documents budgétaires du Québec, on se rappellera que le Vérificateur général du Québec, dans le passé, avait fait état... ou avait mention du fait que l'état de nos infrastructures, dans notre réseau, n'était pas suivi d'une façon suffisamment appropriée. C'est la raison pour laquelle, pour la première fois, nous avons présenté l'état de situation de 604 de nos bâtiments et que nous avons relevé, évidemment, un certain nombre de problèmes, qui sont bien indiqués dans notre budget et pour lesquels nous allons adresser... Mais, M. le Président, permettez-moi de mentionner l'importance de notre parc d'équipement. C'est 9,1 millions de mètres carrés, pour lesquels on estime un coût de 50 milliards de dollars non seulement de remise à niveau, mais de coûts de remplacement. Cette année, M. le Président, nous injecterons 120 millions de dollars, dans les prochains mois, sur le maintien des actifs et 224 millions en 2017-2018.

Du côté des technologies d'information, là aussi, M. le Président, est-il nécessaire de dire que, dans un monde où on doit faire des mesures, le nerf de la guerre est l'information et que, si nous voulons avoir la possibilité de faire des mesures qui sont valides et valables, il faut se doter d'un système d'information qui nous permette de le faire? D'où notre implication, au moment où on se parle, sur deux volets. D'abord, la mise en place d'un système d'information uniforme au Québec pour ce qui est des données cliniques. Et je fais référence ici au déploiement dans la province de Québec, dans tout le réseau, d'un logiciel qui s'appelle Cristal-Net, dont nous sommes propriétaires, et évidemment le fait d'être propriétaires va nous permettre d'avoir des économies d'échelle à long terme par le non-paiement, évidemment, d'innombrables redevances mais aussi de pouvoir faire évoluer la solution d'une façon contrôlée et économique. Sur le plan du financement à l'activité, qui est l'autre volet, j'y reviendrai dans quelques instants.

Parmi les réformes que nous avons mises en place, évidemment il y a la loi n° 20, que tout le monde connaît maintenant, et la loi n° 20 est en cours de déploiement, M. le Président, par l'entente que nous avons convenue avec les deux fédérations, qui se sont engagées à livrer ce qui est requis par la loi n° 20. Et force est de constater, au moment où on se parle, M. le Président, que les choses vont bien de ce côté-là. Il y a eu un nombre net d'inscriptions nouvelles, net, donc, incluant les gens qui ont perdu leurs médecins pour des retraites, par exemple, du 1er juin 2015 au 28 février 2016, et il y a 148 142 patients, de nouveau patients, inscrits, au net, au Québec. Et on constate que le taux d'assiduité est en progression et on a bien confiance d'atteindre la cible de 85 % de la population inscrite d'ici le 31 décembre 2017 ainsi que le taux d'assiduité de 80 %. Même chose du côté de l'accès aux médecins de famille.

Du côté des groupes de médecins de famille, nous avons resserré les choses, nous avons conclu un nouveau cadre de gestion, et on constate aujourd'hui, M. le Président, que 100 % des groupes de médecine de famille, aujourd'hui, respectent leurs offres de services et que 96 % respectent leurs cibles d'inscription, ce qui est certainement un progrès significatif par rapport à ce nous voyions avant que nous arrivions en place.

Nous avons mis en place il y a une semaine, comme tout le monde le sait, le premier guichet d'accès aux médecins de famille au Québec, un site Internet qui est simple, qui permet à la population du Québec de s'inscrire en ligne, facilement, en peu de temps. Et, si les gens ne sont pas familiers avec l'Internet, il est possible pour eux de faire affaire, par Services Québec, à une personne qui complétera l'inscription. En date d'aujourd'hui, plus de 60 000 nouvelles inscriptions ont été faites... oui, ont été faites, M. le Président... 60 000 visites, pardon, et environ 15 000 nouvelles inscriptions ont été faites.

Du côté chirurgical, M. le Président, l'accès à la chirurgie est quelque chose qui, pour nous, est prioritaire. À preuve, le projet pilote que nous avons mis en place, à trois cliniques, qui va venir servir de soupape à notre réseau pour diminuer les listes d'attente, M. le Président, et faire en sorte que les gens qui attendent depuis plus d'un an, en fait depuis plus de six mois, puissent se faire opérer dans les délais requis.

Du côté des examens d'investigation, l'échographie, M. le Président, sera publique et sera financée par les ententes actuelles, et ça ne nécessitera évidemment aucun argent neuf. Et il va de soi que nous compléterons notre engagement électoral de rendre publics les examens de tomodensitométrie et de résonance magnétique.

Il est clair, par la présentation de notre plan d'action en santé mentale, que nous avons ici un engagement ferme d'améliorer la situation dans ce secteur-là, tout comme... comme on le voit dans le budget, évidemment, ça sera la même chose en soins à domicile.

Alors, clairement, M. le Président, nous avons fait beaucoup de réformes, nous avons fait beaucoup progresser le réseau, nous sommes en train de le transformer, et la meilleure démonstration, M. le Président, de ce fait, c'est qu'en 17 minutes je n'ai pas réussi à faire le tour de toutes les réalisations que nous avons faites dans la dernière année, depuis notre dernier... l'apparition à notre dernier mandat. Merci, M. le Président.

• (11 h 30) •

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, on aura peut-être l'occasion, très certainement, de faire plus amplement le tour avec les prochains blocs de discussion. Maintenant, je cède la parole, pour ses remarques préliminaires de 10 minutes, à notre collègue de Taillon, de l'opposition officielle.

Mme Lamarre : Merci, M. le Président. J'aimerais tout simplement reporter le temps alloué à mes remarques préliminaires pour les périodes d'échange avec le ministre.

Le Président (M. Tanguay) : Parfait, merci.

Mme Lamarre : Merci.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, ce sera fait. Maintenant, pour une possibilité de sept minutes à titre de remarques préliminaires, au collègue de Lévis, de la deuxième opposition.

M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Outre le fait de saluer évidemment le ministre, son équipe, ses collègues et les membres du gouvernement, les membres de l'opposition officielle et d'espérer qu'on puisse avoir des échanges qui seront efficaces et constructifs, je reporterai également, M. le Président, mon temps de remarques sur la période de questions.

Discussion générale

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, chers collègues, nous allons débuter notre période d'échange, et, de la discrétion de la présidence, plutôt que de subdiviser votre bloc, qui passait de 21, donc, à 31 minutes, je vous invite, pour une période de 31 minutes, de débuter l'étude des crédits. Alors, la parole est à la collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je salue le ministre, ses collègues, collègues du parti du gouvernement, collègues de la deuxième opposition. Je salue également tous les experts et les fonctionnaires qui travaillent intensément à nous apporter les documents, les chiffres, les données qui nous permettent de procéder à cette étude de crédits avec les meilleurs instruments possible.

Alors, tout de suite, comme les minutes sont comptées et précieuses dans cet exercice, j'aimerais aborder le dossier de la santé mentale. Le ministre a parlé du Plan d'action en santé mentale, et évidemment la préoccupation qu'on a, ce sont les difficultés d'accès au niveau des patients qui sont atteints d'un problème de santé mentale, et l'actualité nous en présente quotidiennement, mais je dirais qu'au-delà de ça on arrive à une situation où il y a vraiment des urgences. Et le ministre a fait l'annonce d'un budget de 70 millions d'ici cinq ans à l'occasion d'échanges que nous avons eu l'occasion d'avoir sur la place publique. On a compris qu'il n'y avait pas d'argent de ce 70 millions, alors que la population comprend habituellement... Quand on fait une annonce, 70 millions sur cinq ans, le public en général s'attend à ce que ce soit 70 millions divisés par cinq, donc 14 millions par année, mais donc on a pu apprendre du ministre qu'il n'y aurait pas d'argent d'ici 2018 en santé mentale.

Alors, j'aimerais savoir comment il va ventiler le 70 millions après 2018.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Alors, M. le Président, je suis très heureux que notre collègue la députée de Taillon puisse s'adresser à ce genre de sujet là, évidemment, parce que je rappellerai, M. le Président — puis c'est toujours intéressant de le rappeler — que, lors de la présentation du programme du chef de l'opposition, la députée de Taillon, qui est critique en matière de santé, ne faisait pas partie de l'équipe du programme du chef de l'opposition officielle. Et, du côté de la santé mentale, M. le Président, je suis content de constater que la députée de Taillon s'y intéresse, contrairement à son prédécesseur, M. Hébert, qui, lorsqu'il était en poste, a été le ministre qui a...

Mme Lamarre : M. le Président, est-ce qu'on va commencer la période d'échange en passant du temps à discréditer les anciennes personnes ou si on peut avoir des réponses aux questions en lien avec le budget? Ma question était précise : 70 millions sur cinq ans, comment ça se ventile?

Le Président (M. Tanguay) : Là-dessus, collègue de Taillon, la réponse appartient au ministre, là, en vertu des articles 81 et 82. Je n'avais pas vu de propos antiparlementaire ou condamnable, je vous dirais, jusqu'à maintenant, en vertu de l'article 35, de désobligeant. Alors, au niveau de la pertinence, 211, ça prend un lien direct, et j'entendais que le ministre, dans sa période de temps qui lui était dévolue, allait s'appliquer à arriver à votre question. Mais, jusqu'à maintenant, je n'avais pas vu de propos dérogatoire. Alors, M. le ministre.

M. Barrette : Alors, évidemment, mon commentaire était de nature introductive, parce que je pense que c'est important de le mentionner. Au même moment où moi, je dois introduire la façon dont on voit les choses, je pense qu'il est utile, pour les gens qui écoutent nos travaux, de voir ou de souligner d'où vient l'opposition officielle sur ce terrain-là. Je le répète, ça ne faisait pas partie du programme électoral du chef, ce qui est quand même un fait qui est important. Et, d'autre part, j'allais souligner le fait que mon prédécesseur, en santé mentale, avait mis au rancart, avait aboli une campagne de publicité de lutte contre la stigmatisation des patients, des citoyens qui souffrent de santé mentale. Il avait aboli une campagne publicitaire contre la stigmatisation de 775 000 $. Et aujourd'hui on me demande de ventiler les futurs investissements que l'on va faire.

Lorsqu'avant Noël, M. le Président, j'ai présenté notre plan d'action en santé mentale, un plan de cinq ans, ce plan a été présenté d'une façon assez longue. Ça a été une très longue conférence de presse. On me l'a fait remarquer avec justesse, ce n'était pas une critique. Mais c'est un plan qui a une certaine complexité. Et j'avais dit d'une façon très claire que le Plan d'action en santé mentale 2015-2020 était un plan qui résultait de la consultation des acteurs du milieu, et, quand je dis «les acteurs du milieu», ce n'est pas simplement les professionnels, mais c'est aussi les patients et les organismes qui soutiennent ou représentent les patients.

Et j'avais mentionné, M. le Président... Et c'est important, ces remarques-là, M. le Président — avant que vous pensiez m'arrêter, ce que je ne pense pas que vous pensiez, là. C'est important de le mentionner parce que le Plan d'action en santé mentale est un plan qui est le résultat d'une consultation qui, elle, nous a permis de conclure collectivement, le gouvernement, les professionnels qui sont au gouvernement et le milieu sous toutes ses formes, comme je viens de le dire, qu'il fallait d'abord et avant tout rectifier le tir, réorganiser notre façon de donner certains services sur le terrain avant d'aller de l'avant en réinvestissant des sommes.

Et j'avais, à l'époque, aussi dit que ces sommes d'argent là arriveraient plus vers la fin, en fonction évidemment de ce que l'on aura réussi en termes de réorganisation, ayant présenté le Plan d'action en santé mentale de cette façon. Et le Plan d'action en santé mentale étant écrit de cette façon, vous comprendrez que la ventilation ne peut pas être donnée aujourd'hui, certainement pas pour 2016-2017, puisque nous devons commencer par réorganiser les choses avant d'aller plus loin en termes d'investissement.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Collègue de Taillon.

• (11 h 40) •

Mme Lamarre : On comprend que, 2015, c'est zéro, 2016, c'est zéro, 2017, c'est zéro. Mais, dans ce plan de santé mentale, il y a des cibles, et on les a à la page 68, les cibles, c'est-à-dire que, quand quelqu'un consulte avec un problème de santé mentale, il y a différents délais, mais le délai maximal, c'est 30 jours avant une première intervention. Ça, j'espère que le ministre va le reconnaître, parce que c'est vraiment clairement présenté dans le plan de santé mentale. Or, nous avons vérifié certaines cibles et les périodes de délai qui étaient rencontrées actuellement pour une première intervention. On comprend, là, qu'il s'agit de quelqu'un qui a un problème de santé mentale, soit de nature psychotique, on pense à un problème de schizophrénie, soit un problème affectif : dépression, possibilité de suicide. Et donc on a demandé, par la Commission d'accès à l'information, à obtenir quelles étaient les cibles atteintes et non atteintes. Alors, je vous donne quelques exemples. Par exemple, en Montérégie, il y a plus de 29 % des gens qui dépassent la cible de 30 jours. À Montréal, c'est 23 %. Dans les Laurentides, c'est 43 % des gens qui, lorsqu'ils ont fait appel à une situation importante en santé mentale, n'ont pas été vus. Donc, le respect de la cible de 30 jours, il n'est pas atteint actuellement et il n'est pas atteint, pour plusieurs régions du Québec, de façon importante.

Alors, ma question est simple... Je peux donner d'autres informations. Par exemple, le CHUM, pour les troubles affectifs, en 2014-2015, les délais étaient de 44 jours. En 2015-2016 — j'invite les gens à porter attention — le délai est de 79 jours. Donc, 44 jours en 2014-2015, 79 jours pour quelqu'un qui a un problème affectif. Et donc des délais nombreux, majeurs, qui se traduisent par toutes sortes de situations en termes d'attente mais qui vont jusqu'à des drames importants. Alors, au-delà de ça, je pense que ce qu'on exprime, ce qu'on souhaite tous ici, c'est de faire en sorte que les gens qui présentent une détresse au niveau mental soient pris en charge le plus rapidement possible et qu'on atteigne la cible du 30 jours.

Alors, ma question est simple, au ministre : Qu'est-ce qu'il compte faire en 2016-2017 pour que les cibles qui sont prévues dans le plan d'action qu'il a déposé et qui découlent justement d'une consultation... J'étais contente que vous l'évoquiez, que le ministre l'évoque, parce que cette consultation-là, elle a été tenue par son prédécesseur. J'y ai participé, ça s'appelait le Forum national de santé mentale, ça s'est tenu en 2013. Donc, je pense qu'on est ici, tous, pour travailler ensemble, mais trouvons des solutions pour qu'en 2016-2017 on réduise les délais et qu'on atteigne les cibles qui sont visées par le plan d'action.

Alors, quelles sont les actions que le ministre prévoit faire?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, alors, je pense m'y être adressé d'une façon assez claire dans ma réponse précédente et je vais y revenir.

Mais là j'apprends... et je suis content que la députée de Taillon elle-même y fasse référence. Elle vient de faire référence non seulement à son prédécesseur, mais elle vient aussi de faire référence au fait qu'elle a participé à un exercice de consultation tenu par mon prédécesseur. Alors là, c'est très intéressant parce que comment se fait-il, à ce moment-là... — et j'ai la réponse et je vais la dire, là — comment se fait-il que, dans les 18 mois où le gouvernement du Parti québécois a été au pouvoir, 18 mois pendant lesquels il y a eu une consultation à laquelle la députée de Taillon a participé avec son prédécesseur qui était en poste et avait le pouvoir d'intervenir, comment se fait-il que la situation ne se soit pas améliorée? Se pourrait-il que c'était parce que mon prédécesseur tenait en plus grande importance son projet d'assurance autonomie non financée que la santé mentale? Alors, c'est intéressant de voir la députée de Taillon me demander aujourd'hui ce que je vais faire, alors qu'elle sait bien que mon prédécesseur, son collègue à l'époque, n'a pas résolu le problème et n'a pas fait énormément de choses pour le résoudre.

Et elle sait très bien la problématique budgétaire dans laquelle nous nous sommes retrouvés. Il y a quelques instants, je l'ai dit, je le redis, le milieu s'y est adressé, à cette problématique-là, et le milieu, après consultation, considère que la première voie à prendre pour arriver à une amélioration de ces délais-là commence par réorganiser les ressources, notamment en mettant les bonnes personnes à la bonne place, les bonnes équipes à la bonne place. Et ça, il est convenu par toutes les parties que l'effet sera bénéfique dans l'accès.

Est-ce que la situation actuelle est idéale, M. le Président? La réponse est évidemment non. Est-ce qu'on doit mettre en place des mesures? C'est notre plan d'action en santé mentale qui a été présenté et dont j'ai tracé les grandes lignes il y a quelques instants. Alors, ce chemin-là est un chemin de concertation, et je pense que c'est le chemin que nous avons à emprunter au moment où on se parle.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Bien, merci beaucoup. Effectivement, tout à fait d'accord, il faut mettre les bonnes personnes aux bonnes places. Et, dans la catégorie solutions, je pense qu'on a, en santé mentale, un urgent besoin d'avoir des psychologues et d'avoir des psychologues qui sont dans notre système public. Le contexte actuel fait que les psychologues vont travailler beaucoup dans la structure privée, de sorte que seulement les gens qui ont les moyens de se payer des consultations en psychologie, auprès d'un psychologue ont finalement accès à ces services. Et il y a un réel exode des psychologues du système public, parce que les conditions n'y sont pas favorables. Il y a des mesures qui peuvent contribuer à la rétention des psychologues dans notre système public, il y a des mesures de soutien, par exemple, à l'internat.

Alors, il faut comprendre que, pour être psychologue en 2016, il faut faire sept années d'université, sept années d'université. Et donc il y a un internat. Cet internat-là n'est pas rémunéré, alors que, dans toutes les autres provinces canadiennes, il est rémunéré. Il existe déjà au Québec d'autres précédents, les résidences en médecine, la maîtrise en pharmacie, les infirmières praticiennes spécialisées, qui, pour la toute dernière portion de leurs activités académiques, sont des internats, en général, ou l'équivalent, ont une rémunération. Or, avec cette rémunération, c'est possible de demander qu'il y ait conditionnellement des années de service qui soient garanties au réseau public, contrairement à l'exode auquel on assiste actuellement, qui fait que les psychologues vont vers le réseau privé.

Alors, actuellement, il y a même dans cette salle Mme Josiane Jauniaux, qui représente les internes en psychologie. Il y a un mouvement. Ce mouvement-là, il ne vient pas seulement des psychologues, il y avait également ce matin avec nous Jessica Ruel-Laliberté, qui est la représentante de la fédération médicale des étudiants du Québec. Donc, les étudiants en médecine des cinq facultés de médecine qui disent : Nous avons besoin d'avoir plus de psychologues dans notre réseau public, dans nos CLSC, dans nos hôpitaux, dans les GMF. Et donc, cette mesure-là, qui est une mesure concrète qui donnerait l'an prochain plus de psychologues dans notre réseau public, est-ce que le ministre peut nous dire s'il est favorable à cette mesure concrète là?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bien, M. le Président, évidemment, je comprends bien, là, que l'étude de crédits est en train de se transformer en séance de négociation, mais j'y reviendrai dans quelques instants.

Je veux simplement prendre un moment pour rappeler d'où, encore une fois, on vient et mettre en relief les efforts que l'on fait, hein? Il faut mettre les choses... relativiser les choses.

Est paru cette semaine un livre d'un monsieur, Dominique Lebel, qui s'intitule Dans l'intimité du pouvoir, qui est le journal politique des années du gouvernement Marois. Et, à la page 197, on cite ceci :

«Rencontre sur l'assurance autonomie que Réjean Hébert prépare à vitesse grand V pour répondre aux besoins de la population vieillissante. Il s'agit d'un projet ambitieux, et Hébert y consacre beaucoup d'énergie, mais la question de son financement demeure problématique. Nous finissons la journée affalés dans les fauteuils du bureau de la première ministre à écouter madame répéter et se mettre en bouche le discours qu'elle prononcera à la prochaine rencontre des militants du parti.»

Ce n'était pas financé, M. le Président. C'est écrit dans ce livre-là, là, c'est eux autres qui le disent, ce n'était pas financé. Et je n'ai pas trouvé de référence dans le livre, à date, qui parlait d'un intérêt particulier pour la santé mentale. Par contre, il y en avait un gros, gros, gros, intérêt, pour une assurance autonomie qui... plus loin dans le texte, il est mentionné que ce n'était pas financé. Bon.

• (11 h 50) •

Alors, aujourd'hui, on voit d'où on vient, hein? On connaît la situation budgétaire du Québec. Dans le contexte en question, nous avons pris les décisions que nous avions à prendre, nous avons développé notre plan d'action en santé mentale, nous n'avons pu aller de l'avant avec un projet de 2,1 milliards de dollars, qui était celui de Réjean Hébert, qu'on n'avait pas les moyens de faire, évidemment. Aujourd'hui, la députée de Taillon, dans cette séance d'étude des crédits, veut, manifestement, transformer la séance en séance de négociation. Bon.

Il n'en reste pas moins que le sujet qu'elle aborde est un sujet qui est pertinent. Alors, il est tellement pertinent, M. le Président, que j'ai moi-même rencontré les deux personnes que la députée de Taillon a mentionnées, la première, le 24 mars, et la deuxième, le 12 avril. Et j'ai fait part aux deux de la situation dans laquelle nous étions. La question d'avoir tel ou tel nouveau service, c'est une question qui est intéressante. Le contexte budgétaire du Québec est un sujet qui est non seulement intéressant, mais incontournable, sujet qui vient conditionner toutes nos décisions.

Sur le plan de l'accès aux services de psychothérapie offerts par des psychologues, évidemment, il y a l'INESSS qui poursuit son travail à cet égard. Bon. Lorsque tout le monde aura fini ses travaux et lorsqu'on nous... et je vous le confirme, M. le Président — vous l'avez peut-être déjà entendu — lorsque moi et ma collègue à l'Enseignement supérieur, la ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, Mme David, aurons terminé notre réflexion, nous annoncerons, en temps et lieu, notre décision quant à l'objet qui est soulevé par la députée de Taillon.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, ce n'est pas du tout dans un contexte de négociation, c'est dans un contexte d'une solution, une proposition concrète avec un impact rapide pour la population du Québec. Il y a 65 places de résidents, d'internes en psychologie, qui n'ont pas été occupées, et la condition d'organisation des soins autour d'eux n'est pas indépendante à ça. Ils sont 250 à diplômer chaque année, et plusieurs d'entre eux aimeraient travailler, aimeraient pouvoir contribuer à offrir des soins en santé mentale. Qui dit santé mentale dit généralement des gens qui ont moins de moyens, qui sont probablement dans des contextes psychosociaux... pas tous mais un grand nombre, dans des contextes psychosociaux plus difficiles et donc qui ont besoin de notre système public, d'un système d'accès vraiment adéquat pour eux, un système qui les accompagne, qui va faire que ça va nous coûter moins cher en médicaments, qui va faire qu'on va avoir des résultats pertinents dans certains... dans beaucoup plus de cas et qui va faire qu'on va éviter certaines situations.

Alors, j'attire l'attention du ministre. Je suis contente de voir qu'il a un intérêt pour les soins à domicile, je le rassure, on va avoir un bloc qui va traiter de ça un peu plus tard, mais disons que le contexte dans lequel on est actuellement est vraiment celui de la santé mentale. Il y a un plan d'action. Donc, quand on dit plan d'action, c'est parce qu'on veut qu'il y ait des changements qui s'opèrent rapidement.

Je donne une situation... Et je vous le dis, j'ai plusieurs, plusieurs exemples, là, de plusieurs régions. Par la loi d'accès à l'information, on a obtenu des résultats d'une quinzaine d'organismes, d'établissements de santé ou d'ancien CSSS, à l'époque. Mais donc, le territoire Pierre-Boucher, par exemple, le délai moyen pour recevoir un premier service en santé mentale, au niveau de la première ligne, c'est 171 jours, au niveau de la deuxième ligne, c'est 86 jours. Et, dans les données qu'on nous transmet, le nombre de personnes en attente depuis plus de six mois, depuis plus de six mois en première ligne, il y a neuf personnes qui sont en attente depuis plus de six mois, deuxième ligne, six personnes. À mon bureau de circonscription, j'ai eu un appel d'une personne suicidaire. On a été obligés d'envoyer la police la semaine dernière. Elle a été deux jours à l'hôpital, elle est ressortie de l'hôpital et, le jeudi, elle a rappelé pour nous dire qu'elle voulait encore se suicider.

Alors, on a des urgences en santé mentale. Je veux que le ministre nous dise comment il va s'attaquer à ça, quelles sont les mesures pour améliorer les cibles qu'il a prévues lui-même, concrètement, qui vont avoir lieu.

Et, puisqu'on n'a pas beaucoup de temps, puis je ne veux pas y revenir, je veux juste souligner aussi une autre situation qui m'est apparue assez spéciale dans ce contexte-là. Je vous ai dit qu'on avait obtenu plusieurs informations mais par la loi d'accès à l'information, alors que, dans le cahier des questions, réponses aux questions particulières de l'opposition officielle, nous avons exprimé une question, la question 338, qui demandait le nombre de personnes en attente pour des services en santé mentale par tranche d'âge et par région, et on nous a répondu, au ministère, qu'il n'y avait aucun système d'information qui permet de colliger le nombre de personnes en attente en première ou en deuxième ligne. Je peux vous dire que j'ai reçu par l'accès à l'information un nombre impressionnant d'informations.

Alors, je voudrais aussi que le ministre m'explique comment on peut obtenir cette réponse dans les questions préalables, et, quand on questionne sur le terrain, ces données existent et sont disponibles.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bien là, combien de temps qu'il me reste, M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : 9 min 30 s.

M. Barrette : Combien?

Le Président (M. Tanguay) : 9 min 30 s.

M. Barrette : Neuf minutes. Vous comprendrez, M. le Président, qu'il y a comme quatre questions, à peu près, là, dans la question que la députée de Taillon vient de me poser, là. Je vais commencer par évidemment assurer la population que, l'accès aux services en urgence et dans des situations que la députée de Taillon a décrites, un patient suicidaire, notre réseau est à la disposition... à leur disposition 24 heures par jour, et les soins sont requis.

Malheureusement, évidemment, il arrive que les gens, dans cette situation-là dramatique, peuvent... dans cette situation-là où la personne vit une situation difficile, perturbante, puisse ne pas savoir à quelle porte frapper spontanément et qu'elle appelle dans un bureau de comté. C'est le genre de choses que j'ai moi-même à mon bureau de comté, et ça ne signifie pas que le réseau n'est pas là, disponible pour s'occuper de ces patients-là, d'aucune manière. Il y a un élément là qui est circonstanciel, et j'invite la députée de Taillon à ne pas faire ce genre de relation de cause à effet. Je pense que ça inquiète les gens inutilement. Notre réseau est à la disposition des personnes qui vivent ces moments difficiles là, encore faut-il se présenter. Mais je peux comprendre que des gens, dans un moment de stress, parfois de panique, puissent frapper à la mauvaise porte.

Maintenant, M. le Président, la députée de Taillon nous demande constamment des chiffres, nous demande comment on va faire. Bien, j'illustre ma réponse en lui renvoyant la balle. Elle, là, membre de sa formation politique, qui avait prévu, en 2017-2018, que l'assurance autonomie allait coûter 2,1 milliards de dollars, M. le Président, elle aurait fait quoi aujourd'hui, là? Où est-ce qu'elle trouverait l'argent pour, un, faire l'assurance autonomie, deux, augmenter les types de services dans le réseau? Comment le Parti québécois aurait-il fait ça?

C'est beau, là, d'être ici puis de dire : Le ministre doit faire ceci, doit faire cela, je veux savoir... Bien, par équité, par fair-play, si vous me permettez l'anglicisme, peut-être que le Parti québécois pourrait nous dire exactement comment qu'il envisageait la possibilité de faire ce qu'il annonçait, sachant, à l'époque, tel que c'est mentionné dans le livre que je viens de citer il y a quelques instants, qu'il ne l'avait pas? Alors, c'est une chose, là, d'arriver ici puis de lancer quasiment des accusations... Puis je ne dis pas que j'ai des accusations, là, je ne veux pas dire ça du tout, là, mais ça ressemble quasiment à ça, là. Mais, à un moment donné, il y a des décisions qui doivent être prises. Ces décisions-là, on essaie de les prendre dans le bénéfice de la population.

Améliorer la situation... Je l'ai dit, M. le Président, pour ce qui est de la question de l'accès à des données, je l'ai dit dans mon introduction, nous sommes à mettre en place un mode de gestion de l'information uniformisé au Québec. Est-ce qu'il est en place au moment où on se parle, au complet? Non. Est-ce qu'il va l'être? Oui. Est-ce que ce genre de données là, ils seront disponibles? Oui. Mais là je dirais aussi : Où sont les projets de ce type-là? Où étaient ces projets-là au Parti québécois au pouvoir? Nulle part. Où sont ces projets-là dans le programme actuel du Parti québécois? Nulle part. Comment, à ce moment-là, pouvoir arriver ici puis dire : Le ministre ceci, le ministre cela? Ça ne peut pas fonctionner comme ça.

Par contre, pour ce qui est de la façon d'améliorer les choses, si la députée de Taillon le souhaite, je pourrais passer la parole à notre directeur dans le secteur de la santé mentale, Dr Delorme, qui pourrait peut-être apporter quelques éclaircissements aux questionnements de la députée, M. le Président, s'il y a consentement.

Le Président (M. Tanguay) : Y a-t-il consentement, collègue de Taillon?

Mme Lamarre : J'avais des questions encore très précises à demander, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Il n'y a pas de problème, ça vous appartient.

Mme Lamarre : Je suis désolée, M. le Président. Je suis désolée, Dr Delorme. Ce n'est pas parce que je n'aimerais pas vous entendre, mais, dans le contexte des études de crédits...

Le Président (M. Tanguay) : ...1 min 30 s.

Mme Lamarre : Exactement. Alors, écoutez, ce que je mets comme information au ministre, ce sont des faits et ce sont des patients. Ce ne sont pas seulement des statistiques, ce sont des personnes, ce sont des êtres humains qui sont en attente. Je ne sais pas si le ministre a l'intention de continuer l'étude de crédits en passant tout son temps de réponse à parler de ce que le Parti québécois n'a pas fait, mais là le Parti québécois a été au pouvoir pendant 18 mois, et ça fait 25 mois qu'il est au pouvoir. Donc, à la première étude de crédits, on pouvait concevoir qu'il ait cet argumentaire-là. À la deuxième, on pouvait se dire : Bon, quand il manque d'argument. Mais là, si c'est l'angle que le ministre décide de prendre pour l'ensemble des 10 heures qu'on a à passer ensemble en étude de crédits en santé... D'après moi, c'est très faible comme argument. Et la population attend des choses, des réponses plus précises de la part du ministre.

Je ne demande pas toutes les solutions, je dis : Il y a ici un plan d'action qui a prévu des cibles. Le ministre nous dit : Je ne peux pas mettre d'argent, mais il parle d'une réorganisation. De quelle façon est-ce qu'on peut prévoir que, l'an prochain, les délais, qui dépassent les cibles, vont être diminués? C'est ça, ma question. Et j'aimerais ça avoir une réponse précise. Et, pour la transmission des informations, j'aimerais éventuellement aussi avoir une réponse précise de la part des gens du ministère.

• (12 heures) •

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bien, pour la transmission des informations, M. le Président, je tiens à informer tous les parlementaires qui sont ici qu'il existe des informations qui sont disponibles dans le réseau localement mais que toutes les informations disponibles dans le réseau localement ne sont pas nécessairement transmises au ministère. C'est d'ailleurs un jeu auquel... et, un jeu, je ne le dis pas du tout au sens péjoratif du terme, M. le Président, je le dis simplement au sens générique du terme. C'est une démarche, si vous préférez, à laquelle s'adonnent largement les deux oppositions, et les deux oppositions, je pense, savent très bien que la réponse à la question de la députée de Taillon est celle que je viens de faire, à savoir qu'il y a des données qui sont sur le terrain mais qui ne sont pas nécessairement répliquées au ministère. Et je pense, bien... Puis, si elle ne le sait pas, je l'en informe.

Ceci dit, M. le Président, la députée de Taillon me demande encore une fois une prévision de chiffres. Alors, je lui ai proposé de parler à la personne qui est à la tête de toute cette mécanique-là en termes de santé mentale, et elle choisit de ne pas bénéficier d'une information précise. Pas que la mienne ne l'est pas, mais là on a la personne qui est à la tête de ça et qui pourrait avoir un échange constructif en termes d'échange d'information avec elle, et la députée de Taillon choisit de ne pas avoir accès à cette information-là. J'irais même jusqu'à dire que, potentiellement, mon collègue Dr Delorme a peut-être accès à des informations que je n'ai pas, même moi, du terrain, j'entends, puisque c'est son secteur d'activité, mais elle choisit de ne pas avoir accès à cette information-là.

Maintenant, pour mettre les choses dans la juste perspective, parce qu'il faut les mettre dans la juste perspective, la députée de Taillon, à cette étude de crédits, nous dit : Je veux avoir une prévision d'un délai d'accès à certains services. Bon. Ça, c'est un chiffre, c'est une prévision, ça ne fonctionne pas comme ça. Ça passe, la réponse, par la réponse qu'aurait donnée Dr Delorme, mais ça met en relief aussi la position du Parti québécois. L'année prochaine, là, 2,1 milliards de dollars qu'ils auraient autofinancés, ils auraient fait quoi en santé mentale s'ils avaient eu 2,1 milliards de dollars de moins en santé pour financer une chose qui ne l'était pas à la case départ? Je comprends que la députée de Taillon ne veuille pas répondre à ça ni échanger là-dessus et que ça l'indispose, mais, comme elle l'a dit, je la paraphrase, la population a le droit de savoir.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, je vous préserve, collègue de Taillon, votre dernière 1 min 15 s. La parole est à vous.

Mme Lamarre : Alors, ma question n'est pas seulement sur des chiffres, c'est sur... Le ministre vient de nous le dire, là, les cibles ne sont pas nécessairement transmises au ministère. Alors, comment le ministère va faire pour vérifier si les cibles sont respectées si on n'a pas accès aux données? Est-ce qu'il y a une collecte systématique de données? Parce que, là, la réponse que j'ai, ce n'est pas : Les données ne sont pas disponibles actuellement, c'est : Le ministère, aucun système d'information qui permet de colliger le nombre de personnes en attente. Aucun système, c'est ça, la réponse que j'obtiens. Or, comment les gens du ministère vont pouvoir s'assurer qu'il y a une progression, qu'il y a une amélioration, une atteinte des cibles?

Le Président (M. Tanguay) : Alors, il reste 30 secondes, mais je prends pour acquis... Je demande le consentement aux collègues du gouvernement : On pourra permettre au ministre d'empiéter sur votre temps? Oui. Alors, M. le ministre, votre réponse.

M. Barrette : Oui, ça sera très court, M. le Président. La question que l'on m'a posée était une question à la suite d'une affirmation que la députée de Taillon a faite : Nous avons été — et je la cite — obligés de faire une demande à l'accès à l'information pour avoir telle, telle donnée dans le réseau. Bon. Alors, la réponse, elle est très simple, M. le Président : Nous avons des cibles qui sont données au réseau et nous avons aussi des ententes de gestion auxquelles doivent répondre les différentes directions. Et, quand les rapports annuels sont faits, nous sommes à même de constater si les cibles ont été atteintes ou non. Alors, non, nous n'avons pas en miroir, en direct les délais que, par exemple, la députée de Taillon a cités. Mais, quand elle me pose la question : Comment il va faire, le ministre, pour voir si ça s'est fait?, bien, ça se fait à la reddition de comptes à la fin de l'année, parce que l'entente de gestion prévoit l'observance de la cible qui été émise par le ministère dans ce secteur-là.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, ceci mettait fin à l'échange avec la collègue de Taillon. Pour un bloc dont il reste 20 minutes, je cède la parole — un bloc des députés de la banquette ministérielle — à notre collègue de Crémazie, 20 minutes.

Mme Montpetit : Bonjour, M. le Président. Avant de commencer, je voudrais saluer le ministre, toute son équipe, mes collègues de la partie gouvernementale, la députée de Taillon, de l'opposition officielle, le député de Lévis, de la deuxième opposition. Ça me fait particulièrement plaisir de participer à ces crédits dans un contexte où le bilan est très positif.

Peut-être avant d'aborder la question, ma collègue de Taillon avait abordé un sujet, là, fort intéressant, fort pertinent : la santé mentale. On n'a peut-être pas eu le temps d'aller au bout de la question. S'il y a consentement, j'aimerais bien donner la parole au Dr Delorme pour qu'on aille plus loin au niveau de données du terrain, effectivement.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, y a-t-il consentement pour entendre le Dr Delorme? Oui. Alors, Dr Delorme.

M. Delorme (André) : Oui, M. le Président. Merci pour cette opportunité.

Le Président (M. Tanguay) : Peut-être, pour les fins d'enregistrement — excusez-moi, c'est mon erreur, j'avais trop hâte de vous entendre — je vous demanderais peut-être, évidemment, de préciser votre nom, votre fonction au complet, pour les fins d'enregistrement, et par la suite la parole est à vous.

M. Delorme (André) : Bien entendu. Je suis André Delorme, je suis psychiatre et je suis directeur de la santé mentale au ministère de la Santé et des Services sociaux.

Le Président (M. Tanguay) : Merci.

M. Delorme (André) : Il y a plusieurs éléments qui ont été soulevés. Le premier, je pense, c'est la préoccupation, que le ministère partage, là, de pouvoir rendre des services accessibles en santé mentale. Et je pense qu'il serait utile de peut-être mettre cette préoccupation-là en perspective avant le plan d'action 2005-2010. Les délais d'accès en santé mentale, et plus particulièrement en psychiatrie, parce qu'à l'époque il n'y avait pas de santé mentale, il n'y avait pas de service de première ligne, les délais d'accès étaient inacceptables et ils allaient... Vous avez parlé tout à l'heure... pardon, la députée de Taillon a parlé, M. le Président, de la Rive-Sud, mais, sur la Rive-Sud, il y avait, dans certains départements de psychiatrie, un délai de trois ans pour voir un psychiatre quand on avait un problème de santé mentale. Alors, vous comprenez que, dans ce contexte-là, si j'avais été médecin de famille et que j'avais eu quelqu'un dans mon bureau qui avait des pensées noires, j'aurais probablement paniqué puis j'aurais probablement dit : Je ne veux pas en entendre parler, monsieur ou madame, là, parce que je ne sais pas quoi faire avec votre problème.

Le plan d'action, en 2005-2010, a donc proposé la mise en place de services de santé mentale de première ligne. Ce n'était pas révolutionnaire dans la littérature et dans les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé, mais c'était quand même un bouleversement dans l'organisation historique des services pour les gens qui avaient des problèmes, des troubles mentaux, à l'époque. La mise en place de ces équipes de santé mentale là a eu un impact significatif parce que... Tout à l'heure, les chiffres qu'on nous donnait étaient de l'ordre de dizaines de jours. Même à 179 jours, ce qui est encore inacceptable, c'est de loin inférieur à trois ans d'attente pour voir un psychiatre. Et les services en première ligne sont accessibles dans un délai de 30 à 75, 80 jours. C'est nettement mieux que ce qu'il y avait voilà plusieurs années.

Mais ce n'est pas suffisant, et, en ce sens, le ministère travaille... Dans ma direction, il y a un organisme qui s'appelle le Centre national d'excellence en santé mentale. C'est essentiellement des cliniciens chevronnés qui accompagnent les établissements pour une révision de leurs processus, aujourd'hui, sans qu'on soit obligé d'avoir de l'argent supplémentaire, mais qui permet de s'asseoir avec une équipe de santé mentale de première ligne, voir comment on utilise les ressources, comment les évaluations se font, pour avoir une réponse appropriée aux besoins de l'individu. Et, quand on voit les équipes qu'on accompagne, là, on a un rehaussement de la performance significatif. J'ai quelques exemples, là, où le Centre national d'excellence en collaboration avec les centres locaux ont réussi à faire des réductions qui étaient de l'ordre de neuf mois à l'intérieur de 30 jours, de 180 jours à l'intérieur de 30 à 45 jours. Alors, on est capables avec les ressources qu'on a actuellement d'accompagner les gestionnaires et les cliniciens puis d'avoir un rehaussement de la performance qui est significatif.

Je pense que, par ailleurs, les troubles mentaux sont suffisamment présents dans notre société qu'il reste encore du travail à faire pour rendre accessibles un certain nombre de services, on en a parlé tout à l'heure, là, et le travail... le ministère s'acharne à développer certains services. Mais, avec les services qu'on a puis les professionnels qu'on a, on est déjà capables d'avoir un impact significatif. Et je pense que passer de trois ans à 175 jours, c'est une progression remarquable et significative. Il reste encore du travail, on le concède, et on y travaille avec ardeur à tous les jours sur le terrain.

• (12 h 10) •

Le Président (M. Tanguay) : Oui, merci beaucoup. Collègue de Crémazie.

Mme Montpetit : Je serais tentée de continuer sur le sujet, Dr Delorme. Je pense que c'est quelque chose qui nous préoccupe tous énormément et un sujet qui fait les médias trop souvent. Est-ce que vous pouvez, justement, continuer de nous en dire un petit peu plus, justement? Qu'est-ce qui va être fait par le ministère pour la réduction des délais? Puis, je pense, vous nous annoncez des bonnes nouvelles, là, mais, vous le soulignez, il reste beaucoup de travail à faire. Quelles sont les intentions exactement pour améliorer encore davantage ce délai-là, pour améliorer la fluidité?

M. Delorme (André) : Bien, je parlerai un peu plus encore, donc, du Centre national d'excellence. Vous savez probablement que le plan d'action 2005‑2010 mettait en place deux réseaux d'équipes ou de services de santé mentale de première ligne, un pour les jeunes de zéro à 17 ans et un pour les adultes de 18 ans et plus. Bon, les modalités de soins, l'organisation et les recommandations, par exemple, de l'Organisation mondiale de la santé ou d'autres organisations médicales qui s'intéressent à la santé mentale ont, avec le temps, évolué, et aujourd'hui on travaille plus à intégrer les services de jeunes avec les services d'adultes.

Alors, par exemple, dans le plan d'action 2015-2020, on annonce l'importance pour le réseau d'abolir la frontière artificielle qui était constituée par l'âge d'atteinte de la majorité, mais qui n'a rien à voir avec les besoins des jeunes en fonction de leur développement. Le cerveau continue à se développer de la naissance jusqu'à l'âge de 25 ans, où malheureusement, à partir de ce moment-là, il commence à débouler vers la sénescence lentement mais sûrement. Mais il n'en demeure pas moins que, de zéro à 25 ans, il y a tout un bloc, là, de développement, et nos services ne sont pas, présentement, bien adaptés à ces phases de développement. Et donc, une des choses qu'on veut faire, on veut vraiment travailler sur l'abolition de cette frontière pour que le service offre une meilleure continuité. On sait déjà qu'à la frontière on perdait un nombre important de jeunes qui, soudainement, se faisaient responsabiliser miraculeusement le jour de leur 18e anniversaire avec une tape sur le dos en disant : Bon, bien là, maintenant, tu dois t'en aller vers les services dédiés aux adultes, et on perdait un nombre important de jeunes à ce moment-là. Donc, en termes de continuité, l'effort qu'on va mettre dans le plan d'action actuel, ça va vraiment être d'essayer d'abolir et de mieux arrimer les services des jeunes et des adultes pour avoir une meilleure réponse aux besoins des jeunes en fonction de leur développement.

Par ailleurs, le Centre national d'excellence est une création du ministère qui date d'environ 2008. Dans un premier temps, on a mis beaucoup l'emphase sur rehausser la qualité et la performance des services qui s'adressent aux gens qui ont des troubles mentaux graves, essentiellement des schizophrènes ou des personnes atteintes de maniaco-dépression. Un 10 % des gens qui ont cette condition-là ont vraiment un parcours très chaotique, avec des judiciarisations, utilisation de substances illicites. Et donc le suivi intensif dans le milieu est vraiment la modalité qui est bien définie dans la loi pour bien suivre cette clientèle-là, assure moins d'hospitalisations, de plus courtes hospitalisations lorsque le client a besoin d'être hospitalisé et moins de visites à l'urgence. Alors, ici aussi, il y a une emphase sur la continuité du service qui permet d'avoir une meilleure intégration puis une meilleure participation à la société par l'individu, l'usager qui reçoit les services.

On a rajouté par la suite un volet qui touchait au rehaussement des pratiques en première ligne dans les équipes de santé mentale, mais, dans un premier temps, on a mis l'emphase sur les adultes. Alors, le centre national se présentait essentiellement auprès des CSSS de l'époque où il y avait des services pour les adultes pour aider à la révision des processus, à l'accroissement de l'accès aux services. Avec le plan d'action, on élargit un petit peu plus le mandat pour s'assurer que le centre national se préoccupe également des services aux jeunes. Alors, c'est bien qu'on ait réduit les délais d'accès pour la clientèle adulte, mais c'est essentiel, je dirais même impératif que, pour les jeunes, on puisse également rehausser l'accès. On comprend l'importance — à 10 ans ou à 12 ans, une attente d'un an, c'est 10 % de la vie d'un enfant, alors qu'à 60 ans ça devient un pourcentage minime de sa vie. On a plus de ressources, plus de résilience à 60 ans, probablement, plus de capacité à s'adapter à l'impact d'une maladie émergente ou d'une maladie chronique, ce n'est pas le cas à 10 ans — donc, vraiment, l'importance d'assurer un accès beaucoup plus rapide et idéalement beaucoup plus tôt dans le parcours de vie. Parce que la littérature nous apprend que 50 % des pathologies mentales qu'on retrouve chez les adultes ont en fait débuté avant l'âge de 14 ans, ce qui veut dire que, quand quelqu'un se présente dans le bureau de son médecin de famille, ou à l'infirmière scolaire, ou au programme aide aux étudiants au cégep, à l'université, à 22 ans, ça fait souvent sept, huit ans que la pathologie est en place et que, souvent, elle est passée inaperçue. Si on parlait d'enfants diabétiques, bien, on se trouverait avec des enfants qui se présentent dans le bureau de leurs médecins puis on dirait : Écoutez, vos reins commencent à être pas mal finis parce que ça fait huit ans que vous avez un diabète, on a passé à côté, on s'en excuse.

Alors, il y a vraiment un effort important à faire là, et c'est ce à quoi on s'acharne, au ministère, là, avec les nouveaux services, l'intégration des services, mais aussi la capacité de détecter et d'intervenir plus tôt dans le parcours d'un enfant ou d'un adolescent chez qui une pathologie commence à émerger pour être capables de rapidement lui permettre de se maintenir dans son parcours scolaire, dans son parcours professionnel s'il est déjà sur le marché du travail, dans son parcours social également pour qu'il puisse demeurer un citoyen à part entière.

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci, M. Delorme. Députée de Crémazie.

Mme Montpetit : Fort intéressant. J'aimerais ça revenir à ce bloc-là, la dernière partie. Mais, juste avant, vous avez effleuré un sujet, et j'aimerais ça que vous nous en parliez davantage, l'approche pour les premiers épisodes psychotiques. Je pense qu'il y a quelque chose qui a été développé à ce niveau-là. Si vous pouviez nous dire davantage...

M. Delorme (André) : Alors, c'est une modalité relativement récente dans le développement des services en psychiatrie. Il faut comprendre que la psychiatrie, c'est une très jeune spécialité par opposition, par exemple, à la chirurgie. Vous savez que les chirurgiens égyptiens indiquaient comment ils faisaient des... comment on appelle ça, là?

Une voix : ...

M. Delorme (André) : Des trépanations, oui. J'avais un autre mot, peu importe. Donc, les trépanations, on trouve ça dans les hiéroglyphes dans les temples égyptiens. La chirurgie, donc, a une vaste tradition chirurgicale. La psychiatrie n'existe que depuis à peu près 100, 150 ans, mais il y a quand même une littérature scientifique de plus en plus forte qui émerge, puis un des éléments qui émergent, c'est effectivement les services pour les premiers épisodes psychotiques. De la même façon que la plupart des maladies qu'on retrouve chez les adultes commencent à l'adolescence, bien, les maladies psychotiques également commencent souvent autour de 14, 15, 16 ans. Malheureusement pour les jeunes et pour la société, c'est souvent une période où il y a quand même pas mal, comment dirais-je, d'action dans la vie des jeunes, et on peut parfois confondre les symptômes d'une maladie en émergence avec la crise d'adolescence, la révolte envers les parents : le système ne nous écrasera pas, etc., et donc ça passe inaperçu. Malheureusement, les symptômes sont assez peu spécifiques quand ils commencent à émerger, et ça prend des fois un certain nombre de mois ou d'années avant qu'ils se cristallisent suffisamment pour que ça soit évident pour tout le monde.

Ceci dit, quand des cliniciens s'intéressent à ce domaine-là, ils sont capables de développer quand même une certaine habilité à plus rapidement poser le diagnostic, même si l'ensemble du tableau clinique ne s'est pas manifesté, et donc à pouvoir plus rapidement, dans la trajectoire de vie de ce jeune-là, poser des actions. Et donc on veut développer... Il y a déjà un certain nombre d'équipes, mais on va vouloir que soient rendus, pour l'ensemble de la population, plus accessibles des services pour les jeunes psychotiques de façon à ce qu'à 14, 15, 16 ans, quand la maladie émerge, on puisse leur offrir un service, là, qui est vraiment adapté à leurs besoins. C'est souvent des services dans la communauté, alors ce n'est pas un service où je me déplace et puis je m'en vais à une clinique externe, mais où je suis plutôt en travail de partenariat avec mon équipe traitante, qui s'assure que je demeure dans mon parcours scolaire, que je prenne les bonnes décisions et que j'apprenne les capacités d'adaptation, en fonction de ma condition, aux enjeux et aux responsabilités d'étudiant, de jeune professionnel ou de jeune travailleur sur le marché du travail.

Et donc c'est une modalité très prometteuse, et on travaille actuellement sur l'élaboration éventuelle d'orientations qui définiront le type de services qu'on voudra offrir pour cette clientèle particulière.

• (12 h 20) •

Mme Montpetit : Merci. J'aimerais peut-être que vous nous en disiez plus, puis je ne veux pas mal vous citer, là, vous disiez que 50 % de troubles psychiatriques trouvent leur origine ou ont des manifestations avant 14 ans. Donc, ce que j'en comprends, c'est que le défi, c'est une meilleure détection, à ce moment-là. Les mesures qui vont être mises en place, sur quoi vous travaillez exactement pour les détecter davantage?

M. Delorme (André) : Bien, je pense qu'il y a beaucoup d'éducation. Le pionnier dans ce domaine-là, c'est l'Australie. Et l'Australie a vraiment mis l'emphase, il y a déjà maintenant 15 ans, sur des stratégies d'éducation populaire. Ça peut être éducation de la population de façon plus générale, mais, dans les faits, au Québec comme ailleurs, les enfants sont essentiellement à l'école. Et je pense que la stratégie la plus porteuse et sur laquelle vraisemblablement on travaillera, c'est vraiment de vraiment soutenir les professeurs, qui sont dans les milieux scolaires et qui côtoient les jeunes... les professeurs et autres professionnels dans les écoles, là, qui côtoient les jeunes quotidiennement à... pas poser des diagnostics, parce que ce n'est pas des cliniciens, puis on ne s'attend pas à ce qu'ils posent un diagnostic pour une pathologie ni qu'ils donnent des traitements, mais certainement qu'ils puissent avoir peut-être un peu plus de capacités à distinguer qu'est-ce qui est un comportement normal d'adolescent qui veut s'affirmer puis qui est peut-être un petit peu en révolte puis qu'est-ce qui est peut-être plus un signal d'alarme. Et donc l'idée, c'est qu'avec cette éducation-là des gens qui côtoient des jeunes soient capables de voir ce signal d'alarme là et peut-être également avoir une référence vers des professionnels qui, eux, pourront analyser la situation avec le jeune, avec sa famille, et pouvoir peut-être conclure beaucoup plus tôt dans le processus de vie de cet enfant-là.

Je dirais que c'est — l'exemple est boiteux, mais quand même — un peu sur le modèle des sentinelles qu'on met en place, par exemple, dans les milieux de travail, dans les usines, où le contremaître ou quelqu'un qui travaille est éduqué sur des signes d'appel qui pourraient faire penser qu'un travailleur vit un moment difficile et voudrait peut-être avoir des idées suicidaires. On ne s'attendra pas à ce que la sentinelle agisse et devienne un intervenant en prévention de suicide, mais il va être arrimé et hissé avec qui il est arrimé au CLSC pour pouvoir faire une intervention en fonction de cet individu qui donne les signes d'appel. Ici, c'est un peu le même principe, donc une éducation populaire qui permet à des gens qui côtoient les jeunes d'être allumés sur qu'est-ce qu'il faut qui nous inquiète, puis qu'est-ce qui fait partie du comportement normal d'un jeune, et avec qui je peux en parler pour qu'on puisse intervenir de façon appropriée.

Mme Montpetit : Parfait. Je vous remercie. Je vous remercie, Dr Delorme, hein, pour vos réponses, c'est un sujet fort intéressant. Puis merci à la collègue. J'avais l'intention de l'aborder un peu plus tard, mais, d'entrée de jeu, tant qu'à commencer, j'aurais une dernière question. Combien il nous reste de temps, monsieur...

Le Président (M. Tanguay) : 2 min 15 s.

Mme Montpetit : 2 min 15 s. Je vais le faire très brièvement. Bon, vous avez parlé de la politique en santé mentale, d'effacer les barrières entre le 18 ans et la suite des choses, mais, au niveau des réformes, de réorganisation, le projet de loi n° 10, le projet de loi n° 20 qu'on a mis en place, de quelle façon ça va diminuer l'attente au niveau de la première consultation? Parce que je pense que le grand défi, il est là, vous l'avez abordé, là. Est-ce que vous pouvez, il ne nous reste pas beaucoup de temps, mais très brièvement, succinctement nous l'expliquer...

M. Delorme (André) : En fait, pour moi, le projet de loi n° 20 n'aura pas nécessairement un impact immédiat sur l'accès... pardon, le projet de loi n° 10, mais a un impact à un autre niveau. La santé mentale, c'est rare qu'elle est confinée dans un seul secteur d'activité et/ou dans un seul secteur de vie de l'individu, et souvent il y a des problèmes connexes qui sont indissociables. Moi, mes patients, 70 % de ces patients-là ont un trouble de consommation ou d'abus de substances. Évidemment, un patient qui a un abus de substances avec une maladie psychotique, des fois ça ne fait pas bon ménage. Le projet de loi n° 10 amène une certaine intégration... une intégration certaine, en fait, des services et rend accessible une meilleure continuité puis un meilleur arrimage des services, là. Par exemple, nous, depuis le projet de loi n° 10, les répondants avec lesquels on travaille sur le terrain, là, sont maintenant des directeurs de santé mentale, dépendance et itinérance, qui sont trois problèmes extrêmement imbriqués l'un dans l'autre, mais auparavant étaient desservis par des réseaux assez indépendants l'un de l'autre, celui de la santé mentale, celui de la réadaptation en dépendance puis celui de l'itinérance. Et donc, là, maintenant, on rapproche ces trois domaines d'intervention pour le mieux-être... en fait, j'imagine, aussi le grand bonheur des proches, mais le mieux-être des individus qui souffrent de ces conditions-là, parce que c'est bien rare que c'est coupé au couteau, puis que j'aie juste un problème, puis que je n'en aie pas un autre. Alors, je pense que c'est surtout à ce niveau-là qu'on voit un impact vraiment favorable pour une meilleure continuité des soins.

Mme Montpetit : Merci.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Merci beaucoup. Alors, ceci met fin au premier bloc avec les députés de la banquette ministérielle. Pour maintenant une période de 27 minutes, je cède la parole à notre collègue de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Encore une fois, merci à tous d'être là pour faire en sorte qu'on obtienne de l'information qui, manifestement, pourra et nous servir, mais et aussi éclairer ceux et celles qui utilisent le réseau de la santé, c'est-à-dire les patients, les Québécois et les Québécoises.

Le ministre, dans son préambule, a beaucoup parlé de la loi n° 10, de la loi n° 20, alors j'aborderai un élément de la loi n° 20 alors que le gouvernement a décidé de normaliser les frais accessoires que devront maintenant payer les patients qui iront dans une clinique médicale pour se faire soigner. D'ailleurs, la loi n° 20 permet au ministre, par règlement, sans consultations publiques, alors, de mettre en place et de décider quels frais pourront être exigés aux patients. Il y a beaucoup de groupes qui se sont opposés à ça. On n'a pas besoin de revenir sur tout ce qui a été dit pendant les consultations et après les consultations.

Il reste que la Coalition avenir Québec, M. le Président, en octobre, a proposé trois recommandations constructives, je pense, responsables pour régler une fois pour toutes la question. Le ministre est au courant, mais je les lui rappelle : premièrement, le fait qu'à notre avis les patients ne doivent plus payer pour des frais accessoires dans les cabinets et cliniques médicales; deuxièmement, comme le recommande le Protecteur du citoyen, qu'il faut inclure les frais accessoires dans la rémunération globale des médecins qui travaillent en clinique lors des négociations sur le renouvellement de l'entente de la rémunération des médecins; et, troisièmement, que l'État rembourse entre-temps aux médecins uniquement le prix coûtant, sans aucun profit, de certaines fournitures médicales. Ça, ça rejoint, et ce n'est pas inventé, et ça ne sort pas de nulle part, aussi l'avis du Protecteur du citoyen déposé par celui-ci, et celui aussi de Claude Castonguay, le père de l'assurance maladie. Déjà, en 2008, il abordait ce sujet-là. Ces propositions-là, M. le Président, éviteraient ce que certains craignent, notamment des contestations de la Loi canadienne en santé. Et ça, c'est une inquiétude soulevée par Me Jean-Pierre Ménard, qui a d'ailleurs un avis juridique sur la question.

Le ministre a déjà dit que ça coûterait 50 millions par année, sans vraiment déposer d'étude sur l'évaluation qu'il donnait à ce moment-là et qu'il continue de porter. À la question 299 des crédits, la CAQ a demandé au ministère l'évaluation des coûts si les médecins étaient remboursés ou compensés pour les frais accessoires exigés aux patients, et le ministère répond : «Des travaux sont en cours pour évaluer ces coûts.»

Histoire de bien comprendre, est-ce que le ministre peut nous confirmer qu'il étudie actuellement, et que c'est sur la planche à dessin, la possibilité potentielle de rembourser aux patients les frais accessoires qu'il a normalisés dans le projet de loi n° 20, tel qu'on le suggère depuis déjà un bon bout de temps? Est-ce que ça fait partie de l'analyse du ministre actuellement?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bien, M. le Président, je vais répondre à la question, avec plaisir, du député de Lévis, mais je vais prendre aussi la même démarche, j'aurai un commentaire introductif. À la CAQ, c'est toujours étonnant de voir l'évolution de la pensée. Je regarde les programmes précédents. On se rappelle que les programmes... La CAQ est la fusion de l'ADQ et d'autres membres à l'époque, ils ont formé la coalition. Et, à l'époque, à la CAQ... à l'ADQ, pardon, on choisissait : «Un gouvernement adéquiste permettra aux gens de payer les frais accessoires, l'achat de médicaments — gouttes ophtalmiques, anesthésiques — et les frais administratifs, pour l'ouverture [d'un] dossier [...] rédaction de formulaires.» Là, je comprends qu'à la CAQ on n'est plus là.

Et moi, je me souviens d'une époque à la CAQ, au début, à sa naissance, où là on était en faveur du privé, on voulait même construire des hôpitaux privés — privés, privés, là, c'est-à-dire que les patients paient. Et là je comprends de l'intervention et du nombre d'interventions que le député de Lévis fait que, là, ils sont rendus plus près du PQ, là. À la CAQ, on est rendus maintenant... peut-être même pas au PQ, peut-être plus près de Québec solidaire, parce que, là, tout doit être payé par le public. Mais là moi... Parce que j'essaie de comprendre la pensée de la CAQ, qui n'arrête pas de changer.

Alors, sur la question précise que le député de Lévis me pose, bien, la réponse qui a été fournie aux questions qui nous ont été soumises par le deuxième groupe d'opposition, M. le Président, la réponse est simple : Nous sommes en train, effectivement, de faire l'étude de la chose. Mais actuellement, actuellement, il y a une loi qui est en place, et la loi prévoit un règlement, qui va finir par être publié lorsque les analyses du coût de ces services et/ou fournitures seront terminées. Le règlement déterminera ce qui est payable, ce qui ne sera pas payable — et aujourd'hui c'est facile, rien ne sera payable, sauf ce qui sera permis — et à quel montant.

Alors, je ne peux pas répondre autrement qu'au moment où on se parle, aujourd'hui, les frais accessoires, qui ont été mis au monde par le Parti québécois... C'est le Parti québécois, il faut le rappeler, qui l'a mis au monde en 1979, et qui l'a maintenu, et qui a précisé sa créature au fil du temps, là, parce qu'il y a eu deux interventions législatives du Parti québécois à cet égard-là. Alors, nous allons dans cette direction-là pour le moment où on se parle. Alors, les travaux sont en cours, et, lorsque le règlement sera publié... évidemment, il sera publié à la suite de la terminaison des travaux qui détermineront le coût de chacun des services et/ou fournitures qui sont visés par le règlement en question.

• (12 h 30) •

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : M. le Président, deux minicommentaires. Quand le ministre dit que la CAQ, l'ADQ du temps et la CAQ d'aujourd'hui, est plus près du PQ, je pense qu'on est tout simplement près du patient et je pense que c'est là la toile de fond la plus importante. Et, quand le ministre dit : Bon, j'essaie de comprendre la pensée, bien, on pourrait se contenter de tenter de comprendre la question, puis ce serait bien correct. On n'a pas besoin de comprendre les pensées de tout le monde, je pense qu'il faut avancer davantage que ça.

Alors, je comprends, moi, à travers... et je reformulerai donc... Je comprends donc que, sur la table à dessin, on est à jongler avec l'idée de rembourser au patient ou au médecin, que ce n'est pas encore décidé, mais vous ne réfutez pas le fait qu'on puisse maintenant penser rembourser au médecin, ne plus charger au patient ces frais accessoires que l'on ne connaît pas encore. En 30 secondes.

M. Barrette : On s'est mal compris. Alors, manifestement, il faut s'adresser à la pensée puisque nos pensées ne se sont pas rencontrées. Mais, pour ce qui est de la pensée, bien, je vais faire une petite note humoristique : À la CAQ, on change souvent de pensée. Des fois, on se demande si la pensée politique ne change pas aussi souvent que le logo. Mais ça, c'est de l'humour, là.

Alors, manifestement, on ne s'est pas compris, là. Là, actuellement, la loi, ce qu'elle prévoit, c'est, par règlement, de déterminer les services et/ou fournitures qui seront chargés au patient. C'est la personne qui va payer, ce qui était l'esprit initial lorsque le Parti québécois a créé, législativement, une loi qui permettait les frais accessoires. Les frais accessoires, ça a été créé par le Parti québécois. Eux autres aussi, ils ont changé de logo avec le temps, ils ont changé de couleur, même, ils ont rajouté une couleur. Alors, le Parti québécois, quand ils ont créé les frais accessoires, c'était pour que les patients paient une partie d'un service médical : un médicament, un pansement, un stérilet, et ainsi de suite. C'est connu, là, c'est l'histoire du Québec.

Alors, aujourd'hui, nous, on arrive à un moment où nous choisissons de mettre de l'ordre là-dedans, parce qu'effectivement il y a eu beaucoup de... je vais prendre le bon mot, je dirais, là, de «dérapages». Il y a eu des dérapages, et nous avons choisi de mettre de l'ordre là-dedans, par le biais, évidemment, de la loi n° 20, qui fait en sorte qu'au bout de la ligne seront déterminés, spécifiquement et nominativement, les services — barre oblique — fournitures qui seront à la charge du patient et à quel montant, alors que tout le reste sera interdit.

Donc, le député de Lévis, M. le Président, avec tout respect, ne peut pas conclure de mon propos que j'envisage rembourser le médecin, parce que ça, dans le langage administratif, ça veut dire abolir les frais accessoires. Aujourd'hui, l'état de la loi n'est pas là, maintenant.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : Oui. Merci, M. le Président — on fait rien que... on jette tous un oeil au chronomètre, histoire de faire en sorte de bonifier le temps qui nous est imparti. Dans ce même dossier, le ministre possède assurément un avis juridique sur les frais accessoires. L'avocat Me Jean-Pierre Ménard dit que ça va à l'encontre des lois actuelles. Dans la Loi canadienne sur la santé, il a même déposé lui-même un avis juridique. À défaut de présenter son avis, est-ce que le ministre peut nous confirmer s'il a eu des discussions avec le gouvernement fédéral sur la légalité de la normalisation des frais accessoires dont il parle?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Alors, M. le Président, évidemment, lorsque nous adoptons... et c'est vrai pour moi comme c'est sans doute vrai pour tous les ministres : lorsqu'un ministère, un ministre propose un projet de loi, il y a obligatoirement une vérification qui est faite auprès du ministère de la Justice, son contentieux. Bref, il y a toujours une validation juridique qui est faite auprès des instances québécoises. Alors, évidemment, la santé étant un domaine de juridiction provinciale, ce n'est que dans la juridiction provinciale que je dois m'enquérir de la validité ou non d'un projet de loi. Et vous comprendrez, M. le Président, que la réponse est simple : Nous nous sommes enquéris de la validité de notre loi, et elle est considérée par notre contentieux — le contentieux du gouvernement du Québec, du ministère de la Justice — comme étant une loi valide et tout à fait défendable vis-à-vis la Loi canadienne sur la santé.

Maintenant, sur la question des avis juridiques, M. le Président. Un avis juridique, c'est une opinion, ce n'est pas un jugement. Et, dans mon expérience, qui n'est pas aussi vaste que certains de mes collègues des deux côtés de la salle, ma compréhension d'un avis juridique, c'est qu'en général on peut trouver un avis dans un sens et un avis dans l'autre sens. Alors, ce n'est pas un jugement ni une valeur de loi. Alors, aujourd'hui, les appréciations juridiques qui ont été faites ont été faites dans le cadre du Québec, et la conclusion que nous en avons tirée est que nous étions tout à fait légaux.

M. Paradis (Lévis) : M. le ministre disait, M. le Président, il y a quelques instants, que la loi n° 20 est entrée en vigueur, bien sûr, et ça fait déjà un petit bout de temps qu'on attend ce règlement concernant les frais accessoires. Il vient de dire qu'il y travaille, que c'était important. D'ailleurs, il y a même une période de réflexion qui a été prévue, lors des travaux sur ce même règlement là, concernant les frais accessoires. Ce n'est toujours pas déposé. Est-ce que le ministre entend accélérer l'échéancier et faire en sorte que ce soit déposé avant l'été? Parce que tous attendent la forme que ça prendra.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Vous avez tout à fait raison que beaucoup de gens attendent la conclusion de ces analyses-là. Je peux assurer le député de Lévis et tous les collègues aujourd'hui que les travaux vont bon train, et nous allons les conclure le plus vite possible.

M. Paradis (Lévis) : Avant l'été, M. le Président?

M. Barrette : M. le Président, il serait bien imprudent de ma part de donner suite avec une trop grande précision à cette question, compte tenu évidemment de la répercussion potentielle qu'aurait ma réponse.

M. Paradis (Lévis) : Autre dossier, M. le Président : l'état du parc immobilier des établissements du réseau de la santé. On en a abondamment parlé, le ministre aussi a fait un bout de chemin là-dessus dans son préambule. Ce n'est pas d'hier, hein, qu'on s'inquiète de l'état de santé... de l'état des établissements du réseau. En 2012, le Vérificateur général écrivait que le ministère ne disposait pas d'un portrait de l'état du parc immobilier sous sa responsabilité, alors qu'il avait entamé des démarches en ce sens depuis 2001. Ça fait qu'on comprend qu'entre-temps, les bâtiments, bien, force est de constater que ça finit par se dégrader.

C'est la première fois cette année, on a un état de la santé du réseau dans sa structure. Pour 33 % de ses bâtiments, alors à peu près le tiers, on sait déjà que la valeur du déficit de maintien d'actif — ça, ça veut dire ce que ça va coûter pour des rénovations, là, plus facilement dit — s'élève à 338 millions de dollars, deux tiers des montants requis dans la région de Montréal. Mais là, pour le 67 % qui reste, on va attendre 2018 pour avoir l'état complet du réseau. Il faut penser que ça risque évidemment d'occasionner des coûts supplémentaires. La moyenne d'âge des hôpitaux, au Québec, est de 50 ans.

Le ministre a dit ce matin que des sommes étaient déjà avancées pour faire en sorte qu'on s'adresse à ce problème-là. Quand des bâtiments obtiennent la cote E, on dit que l'intervention est qualifiée d'urgente. J'aimerais que le ministre revienne succinctement sur les montants qui sont prévus, pour maintenant et pour l'année prochaine, concernant le maintien des actifs des établissements de santé au Québec.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Alors, la question ou le sujet très pertinent qu'aborde le député de Lévis me permet évidemment de noter que, dans le programme de la CAQ, ni de 2012 ni maintenant, je ne retrouve de mention quant à l'intérêt de la CAQ sur le sujet des infrastructures. Mais je suis content que le député de Lévis l'aborde parce que nous aurons été le premier gouvernement à publier dans un budget une documentation la plus précise possible — parce qu'on ne peut pas être précis à la brique près — de l'état de nos infrastructures. C'est une réalité, et c'est une réalité que nous sommes très contents de rendre publique. Pourquoi on est contents de le faire? Pour faire en sorte que la population réalise à quel point les enjeux budgétaires du Québec sont aussi grands qu'importants.

La CAQ, qui est théoriquement un parti qui vise à équilibrer les finances publiques... Parce qu'il arrive, à un moment donné, où on ne le sait plus. La CAQ, souvent, fait des interventions, M. le Président, qui visent à dépenser encore plus. On se rappellera certaines interventions de la dernière campagne électorale partielle. On ne sait plus où la CAQ se situe sur le plan de l'équilibre budgétaire et de son importance. Quand c'est le temps de dépenser, là, les questions sont toujours à la dépense. Ceci dit...

M. Paradis (Lévis) : ...je m'excuse...

Le Président (M. Tanguay) : Rappel au règlement?

• (12 h 40) •

M. Paradis (Lévis) : ...je pense que la question était claire. Je ne sais pas... Je sais que vous allez dire qu'il n'y a rien d'insultant. Peut-être que non, là, mais, je veux dire, reste que, si le ministre prenait autant de temps à régler puis à donner des réponses, puis à faire en sorte qu'on ait des règlements plutôt que d'analyser ce que les autres font ou ne font pas, peut-être qu'on avancerait collectivement. Ça ne semble pas être le cas.

Je vous rappellerai, M. le Président, en passant, que, dans une autre vie... Ça me donne l'impression, et ça me fait sourire, que le ministre est en train d'analyser une relation de couple qu'il a eue dans le temps, en se disant : Bien, avec celle-ci, c'était bien, avec celle-là, c'était moins bien, puis celle-là s'habillait de même, puis celle-là ne s'habillait pas de même. Je pense qu'on peut passer à autre chose puis arriver à des réponses à des questions.

Le Président (M. Tanguay) : Merci, collègue de Lévis. Par contre, ce n'était pas un rappel au règlement, surtout que vous ne m'avez pas donné d'article. Le débat parlementaire est un débat où s'opposent des opinions divergentes. C'est la définition du débat contradictoire. Il y a des sujets sur lesquels évidemment on n'est pas, de part et d'autre, d'accord. Mais je pense que c'était dans la limite de ce qui est accepté en vertu de notre règlement. Vous ne voulez pas, cher collègue, me faire parler de notre règlement. Je pense que... Et, sur votre point, collègue de Lévis, les gens à la maison écoutent puis ils seront à même de juger de part et d'autre, alors... Mais les propos du ministre lui appartiennent, et, en ce sens-là, il n'avait pas dépassé les bornes du débat contradictoire. Alors, en conclusion de votre réponse, M. le ministre.

M. Barrette : Oui. Alors, c'est vrai, vous avez raison de le souligner, c'est un débat contradictoire. Encore faut-il que les positions des deux parties soient clairement exposées. Et je profite toujours de l'occasion pour exposer ce qui ne l'a pas été de l'autre partie pour en arriver à un exposé qui traite de la question qui a été posée. Mais je rappellerai au député de Lévis qu'il a choisi, lui aussi, de prendre son temps pour faire ma psychanalyse relationnelle. Et c'est son... Il est libre. Je ne le critique pas d'avoir pris du temps pour faire la chose.

Ceci dit, M. le Président, alors, la problématique des infrastructures est une problématique d'une grande ampleur. Et ça, c'est important de le dire, M. le Président : On a publié, pour la première fois dans l'histoire du Québec, l'état de situation de nos infrastructures pour le tiers. Puis, d'ici deux ans, ça sera 100 %. Et ça révèle l'ampleur de la problématique. Je vais le répéter, M. le Président, parce que c'est important de le répéter, c'est majeur.

Dans les annonces que je fais, hein, je fais des annonces où je dis toujours au début qu'un des problèmes les plus importants que nous avons dans notre réseau de la santé et des services sociaux, c'est celui des infrastructures, pas parce que les murs donnent des soins, parce que les murs ont un coût et que le gouvernement paie ce coût, et le gouvernement paie ce coût-là à partir des impôts et des taxes des citoyens. Et c'est ça, la réalité. Il faut le dire, il faut le répéter.

Alors, c'est quoi, le réseau? Je vais le répéter, M. le Président, c'est hyperimportant, c'est 9,1 millions de mètres carrés — 91 millions de pieds carrés — avec un coût de remplacement — remplacement, ça veut dire «on les met tous à terre, on les reconstruit» : 50 milliards de dollars. Et je n'ai pas inclus dans ce coût-là, M. le Président, l'entretien. Alors, c'est énorme. Alors, faisons un calcul simplement algébrique, là, il est simple : une durée de vie de 50, 60 ans, bien, faisons le calcul, là, c'est 500 millions par année qu'il faudra investir pour remplacer les équipements, sans compter les maintenir. Alors, l'enjeu budgétaire est majeur.

Depuis le début de cette séance-ci, j'ai entendu la députée de Taillon nous demander d'investir plus d'argent, j'entends le député de Lévis qui va nous demander d'investir plus d'argent. Et on est tous d'accord parce qu'on veut tous mieux dans tous les secteurs, les soins, les services, les infrastructures. Mais il y a un goulot qui s'appelle le budget du Québec, pour lequel on est ici pour faire l'analyse des crédits : Où on va mettre l'argent? Quel arbitrage allons-nous faire pour décider de mettre un peu plus d'argent dans les services, un peu moins, un peu plus, moyennement, dans les infrastructures? C'est le débat.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Collègue de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : J'aborde une autre question à défaut d'avoir eu la réponse que je souhaitais, en tout cas, pour le moins, un éclaircissement. Dans le PQI, il y a aussi des informations qui sont intéressantes — puis ça, ça va intéresser les gens qui nous écoutent et regardent — sur la vétusté et l'état des appareils médicaux. Alors, il est écrit que les appareils médicaux sont normalement remplacés à la fin de leur durée de vie utile et que ceux dont l'âge réel dépasse la durée de vie normalisée représentent des investissements de 546 millions de dollars. Et là on a coté aussi jusqu'à E les appareils médicaux.

Les gens savent de quoi on parle, hein? Quand il y a des traitements importants, il y a des appareils qui sont tout aussi importants et que plus ils sont récents, plus ils sont, je présume, technologiques, hautement précis et supérieurs. On parle de 546 millions. Est-ce que le ministre peut m'expliquer ce que ça veut dire? Est-ce que ça veut dire que le gouvernement doit remplacer pour 546 millions des appareils qui doivent l'être maintenant ou c'est la somme totale des appareils dont on dispose? Qu'on m'explique ce chiffre-là.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : C'est parce que c'est une somme qui comprend deux éléments, M. le Président. Juste un petit instant pour que je puisse faire la séparation des deux, là.

(Consultation)

M. Barrette : La réponse est complexe, là, et je vais essayer de la simplifier le plus possible. Le but de l'exercice qu'on vient de faire dans les infrastructures est pour permettre d'en arriver à un calendrier d'investissement qui va permettre de maintenir à niveau notre parc d'équipements. Alors, le parc d'équipements, là, ça inclut, sur le plan conceptuel, à la fois les murs, l'infrastructure, mais aussi les équipements médicaux et même l'informatique.

Dans ce qu'on appelle le PQI, là, le Plan québécois d'infrastructures, les infrastructures incluent les trois éléments. Et là nous, ce que l'on fait, et particulièrement dans les équipements médicaux, ce que l'on fait, et ça, ça a été fait, je dirais, avec ma collaboration dans une vie antérieure, on a réussi à mettre en place un calendrier d'investissement pour le maintien de ces actifs-là qui prévoyait des investissements sur la base de la durée de vie d'un équipement.

Maintenant, des équipements peuvent dépasser leur durée de vie, s'ils sont moins utilisés, par exemple. En fait, c'est surtout s'ils sont moins utilisés. Alors, l'argent qu'on voit là-dedans, c'est pour faire cette chose-là. Et je vous donne l'exemple, peut-être un peu précis, là : sur 10 ans, dans ce secteur-là, c'est plus de 2 milliards de dollars qu'on devra investir pour remplacer, maintenir et amener à ou au-delà de la durée de vie de l'équipement. Alors, le 546 millions, c'est la somme des montants qu'on doit investir dans chacune des catégories, en imagerie médicale, en radiothérapie, et ainsi de suite, sur le plan de 10 ans pour en arriver à ce montant-là.

M. Paradis (Lévis) : Ça prend tout son sens, M. le Président, parce que, bon, évidemment, c'est un élément central de traitement lorsqu'on a une problématique ou un diagnostic sévère. Je pense, par exemple, à ce que j'ai ici, coté E. Je présume que, si vous faites référence à l'état de la structure, E étant un remplacement urgent ou une intervention urgente, si on cote 59 appareils E... Je prends, par exemple, pour être plus précis, en radiothérapie, par exemple, 11 sont cotés E sur 100, ça veut dire que 11 %, corrigez-moi si je me trompe dans mes chiffres, 11 % doivent être changés parce qu'ils sont à la fin de leur vie utile, étant cotés E. Est-ce que c'est ça qu'il faut comprendre? Est-ce que le gouvernement a les sous pour changer ça? C'est du traitement direct au patient.

M. Barrette : Alors, il ne faut pas le comprendre comme ça. Le E, quand on le regarde, il y a une définition dans le livre, là, quand on est rendu à E, ça ne veut pas dire que l'appareil ou l'infrastructure sont rendus à un point de perte de sécurité, là, ça veut dire qu'on arrive à la fin de la vie utile. Ça ne veut pas dire que la vie utile est terminée. Alors, il faut le voir comme étant, oui, un score, on est d'accord, mais c'est un score de fin de vie utile et non pas de dépassement de la fin de la vie utile. Alors, ça nous indique essentiellement, dans un exercice de priorisation ou d'ordonnancement d'investissement, que ce sont les éléments qui doivent être pris en considération à cette étape-ci.

Si je considère... Moi, si je peux me permettre un parallèle, M. le Président : Si on dit que la vie utile d'une automobile est 150 000 kilomètres, 200 000 kilomètres, est-ce que ça veut dire que toutes les autos, rendues à 199 000 kilomètres, doivent être mises à la casse? Bien là, il faudrait probablement mettre aux poubelles tout le parc de taxis de Montréal, là.

Alors, il ne faut pas le voir comme ça. Alors, un indicateur, là, il indique, là, qu'il y a un niveau d'usure. Est-ce que ça signifie que, dans tous les cas, le matériel en question, l'équipement en question ne peut plus être utilisé de façon adéquate et sécuritaire? C'est non, la réponse, mais ça nous indique qu'on arrive pas loin de la fin.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Lévis.

• (12 h 50) •

M. Paradis (Lévis) : M. le Président, puis c'est quand même intéressant, puisque, quand on fait des parallèles comme ceux-là, bien, on se renvoie la balle, ça permet aux gens, probablement, de mieux comprendre. Mais on comprendra qu'un véhicule à 200 000 kilomètres, qui a un certain âge, pollue davantage, a une moins bonne suspension, une moins bonne direction, a moins de précision. Et, en ce sens-là, c'est sûr qu'à un moment donné, si c'est encore possible de rouler avec le véhicule, dans le meilleur des mondes et par sécurité aussi, par souci de confort, ça vaut la peine de changer, parce qu'il y a des innovations qui sont faites entre-temps.

Je poserais une question, puis elle est très... permettant aux gens de comprendre. Ce que je comprends, si on est sur la fin de vie utile d'un appareil, par exemple de radiothérapie... J'étais récemment avec des hémato-oncologues qui connaissent ça pas mal plus que moi mais qui me disaient qu'au tout début, quand on envoyait le rayon, on «rayonnait» trop large, permettez-moi l'expression, on s'est rendu compte que, si on est plus précis dans le rayonnement, qu'on va sur une tumeur, bon, on évite des séquelles et des dommages plus larges avec un appareil qui est plus précis, plus performant, plus récent également. Est-ce que les appareils en fin de vie permettent moins de précision, à ce chapitre-là, sur le traitement et son efficacité? Et est-ce que le gouvernement, actuellement, a des sommes prévues pour changer 11 appareils de radiothérapie presque en fin de vie, puis trois en imagerie, etc.? Est-ce qu'il y a des sommes de prévues pour ça?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, puisqu'on est dans les métaphores, je vais continuer dans la même métaphore. J'oublie son nom, mais j'écoutais à la radio de Radio-Canada de Québec, il y a quelques jours, la personne qui est sur la route, qui nous parle du trafic, et il expliquait que son véhicule, qui allait très bien, avait 312 000 kilomètres. N'importe quel mécanicien va vous dire qu'une auto bien entretenue, dont les pièces ont été remplacées au bon moment, et ainsi de suite, là, peut avoir une durée de vie qui excède la moyenne.

Il est parfaitement possible, M. le Président, il est parfaitement possible de déterminer le niveau de précision diagnostique du produit fini d'un appareil d'imagerie diagnostique. Par exemple, là, l'image, il est parfaitement possible de déterminer si le produit qui sort de l'équipement, qui est une image, est de qualité diagnostique comparable au jour 1, par exemple. Il est parfaitement possible, pour un appareil de radiothérapie, de déterminer si la dose, et la précision de la dose, sur le plan géographique, pour prendre quelque chose de plus simple à comprendre, est adéquate. Il ne faut pas mélanger l'âge de la machine avec le substrat.

Puis là je vais vous donner encore plus simple, M. le Président, qui va faire appel à l'expérience de tout un chacun. Quand on avait des appareils avec des films, des vrais films, là... Le film, là, c'est ça, la photo, hein? Quand bien même l'appareil avec une lentille avait 50 ans d'âge, là, si la lentille n'a pas été abîmée puis que le mécanisme fonctionne encore, bien, en général, le film, lui, il n'a pas 50 ans, on l'achète à toutes les 12 photos, là, puis on en met un neuf.

Alors, il faut faire attention avec l'âge de l'équipement, parce qu'on est capables d'évaluer, un, la durée de vie utile et, deuxièmement, si, à la limite de la vie utile, l'appareil produit encore quelque chose qui est diagnostique, et sécuritaire, et suffisamment précis. Par contre, il est utile, en toutes circonstances pour le gouvernement, d'avoir un état de situation pour pouvoir prévoir son ordonnancement, et c'est ça que l'on a fait.

Alors, si on revient aux bâtiments, parce qu'on a commencé avec les bâtiments, je peux vous assurer, M. le Président, que les services qui sont donnés, prodigués dans les établissements, dans les murs, sont de grande qualité. Il n'y a pas de danger là d'aucune manière. Est-ce que l'immeuble a l'air fou de l'extérieur? Est-ce que, quand on voit un filet pour empêcher qu'une brique tombe, c'est moins élégant? Oui, je suis bien d'accord. Est-ce que ça indique qu'on arrive à un moment donné où il faut investir? Je suis tout à fait d'accord, c'est pour ça qu'on a mis ça sur la table. On l'a mis sur la table pour être transparents et indiquer aux gens : regardez l'ampleur du défi budgétaire que nous avons devant nous et l'extrême importance de gérer l'État d'une façon serrée pour avoir les moyens de faire ces remplacements-là de façon appropriée, tout en maintenant l'accès, la sécurité, la précision. Ça, M. le Président, là, si j'étais dans un autre parti, je me sentirais à l'aise. Il y a des partis qui ont déjà eu ce discours-là. Maintenant, il me semble que la population, quand elle entend ça, elle doit se dire : Ah! voilà un gouvernement manifestement responsable.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, vous aviez compris, collègue de Lévis, que, durant la réponse, qui, soit dit en passant, était proportionnelle par rapport au temps qui restait au ministre pour répondre sur votre bloc versus le temps que vous avez pris à répondre à la question, nous avons automatiquement, de consentement, pris ce temps-là additionnel sur le dernier bloc du gouvernement, qui était initialement de 20 minutes et qui maintenant est de 17 min 30 s. Alors, collègue de Crémazie.

Mme Montpetit : Merci, M. le Président. Je vais me permettre, encore une fois, avant de commencer ma question : Dr Delorme a mentionné quelque chose à la fin de son intervention, dans les deux minutes qu'il vous restait, qui m'a un petit peu surprise. Et je présume que peut-être que vous n'avez pas eu le temps de compléter, d'aller jusqu'au fond de votre pensée. Je vous posais ma question sur les réformes qui ont été mises en place, le projet de loi n° 10, n° 20, l'impact que ça va avoir au niveau des délais d'attente pour avoir accès à un psychiatre. Et vous avez mentionné... En tout cas, je vais vous laisser aller, mais j'aimerais ça peut-être que vous complétiez votre pensée sur l'impact que ça va avoir.

Le Président (M. Tanguay) : Dr Delorme.

M. Delorme (André) : Est-ce que je dois me représenter, M. le Président?

Mme Montpetit : Et évidemment j'ai...

Le Président (M. Tanguay) : Vous n'avez pas changé d'identité, ça va être correct.

M. Delorme (André) : J'ai gardé la même identité.

Le Président (M. Tanguay) : Merci.

M. Delorme (André) : Merci. Bien, en fait, j'ai cru que votre question s'adressait au projet de loi n° 10 et j'ai «lapsé». Freud en ferait sans doute quelque chose de significatif, mais, dans le cas actuel, c'était tout simplement une erreur. J'ai commencé par parler du projet de loi n° 20 et j'ai dit : Non, non, pas le projet de loi n° 20, pardon, Mme la députée, pardon, M. le Président, le projet de loi n° 10 n'aura pas, pour moi, un impact immédiat, d'abord, sur l'accès, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en aura pas, mais bien plus sur un meilleur arrimage, une meilleure continuité, une meilleure adaptation de l'ensemble des services qui sont... ou qui étaient, avant le projet de loi n° 10, éclatés dans de nombreux programmes souvent hermétiquement isolés l'un de l'autre, et amenait donc une meilleure intégration de l'ensemble de ces programmes pour une meilleure réponse des besoins du patient ou de l'usager. Alors, je suis désolé si ma réponse n'était pas de la clarté limpide requise ici.

Mme Montpetit : Je vous remercie. J'étais un peu surprise, mais je comprenais qu'effectivement il y avait probablement eu erreur. Ce qui permettra sûrement à l'attaché politique de l'opposition officielle de corriger son tweet ou d'y revenir. Je vous remercie.

Donc, le ministre, dans ses notes préliminaires, avait eu l'occasion d'aborder la question des vastes réformes que nous sommes en train de faire dans le réseau de la santé. Et j'aimerais revenir au départ de cette vaste réforme-là, qui est le projet de loi n° 10. Et, pour les gens qui nous écoutent à la maison, là, donc, je rappelle que c'est le projet de loi qui a été adopté, donc, en février 2015 et mis en oeuvre en avril, en avril 2015, donc il y a tout juste un an. Et le projet de loi n° 10 reposait sur des principes relativement simples, c'est-à-dire passer d'une gouvernance de trois paliers, soit ministère, agences, établissements, à une gouvernance de deux paliers en abolissant les agences, et d'avoir un centre intégré par région, là, sauf exception, ce qui permettait d'avoir... ce qui permet, en fait, d'avoir une gouvernance et une imputabilité qui impliquent une ligne directe entre le ministre et les établissements.

Cette loi a permis notamment — et j'y vais d'une courte liste, mais les impacts sont tellement grands au niveau du réseau — donc, d'alléger et simplifier les structures, alléger la bureaucratie; de définir, comme je le disais, une ligne d'autorité qui est beaucoup plus claire entre le ministère et les établissements; d'avoir une meilleure gouvernance, une meilleure imputabilité; d'améliorer l'accès et la fluidité. Elle a également permis une meilleure coordination des services, puis on en faisait état tout à l'heure, justement, en santé mentale. Et finalement, puisque, bon, bien, c'est ce qui nous intéresse d'abord et avant tout, ce qui nous gouverne à travers les différentes décisions qui sont prises, elle a permis d'avoir un meilleur accès pour les patients.

Et je ne ferai pas un préambule beaucoup plus long que ça, parce que le temps file toujours à vive allure, malheureusement. Le ministre avait abordé, donc, dans ses notes préliminaires, les gains tangibles de la mise en place de la loi n° 20, puis j'aimerais qu'on profite de l'opportunité, dans le fond, pour qu'il nous fasse un bilan des bénéfices puis des améliorations qui sont constatées dans le réseau suite à l'adoption de la loi, donc, il y a tout juste un an... ou déjà un an, devrais-je dire.

M. Barrette : Pas que j'ai l'intention de prendre tout le temps, là, mais je veux m'assurer que j'ai suffisamment de temps. M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : 13 min 30 s.

M. Barrette : 13 min 30 s?

Le Président (M. Tanguay) : Oui.

• (13 heures) •

M. Barrette : Parfait. Merci. Sans vouloir, là, évidemment, prendre tout le temps, là, mais je vais revenir à la genèse de ça. Dans mon préambule, j'ai indiqué trois exemples — j'en ai d'autres, là, puis je vais même en donner —trois exemples qui avaient comme point commun, comme dénominateur commun la difficulté qu'avait le réseau de prendre des décisions, pour le bénéfice du patient, à cause de ce qu'on doit qualifier de silo. J'ai fait allusion dans mon préambule à des guerres de clocher.

Mais oublions la guerre de clocher, là, mais juste le silo. Avant, compte tenu du fait que deux hôpitaux... Avant qu'on les regroupe sous une seule administration, avant, deux hôpitaux qui avaient des services connexes, complémentaires ou parallèles, bien, ils n'avaient pas — à moins de le vouloir, là — d'obligation ou même d'incitatif à collaborer ensemble pour donner... desservir une population à propos d'un service donné. Et ça, ça pouvait poser un certain nombre de problèmes en termes de gestion de la clientèle.

Je vais prendre... Dans un instant, je vous donnerai un certain nombre d'exemples, un ou deux. Le fait d'avoir brisé ces barrières-là, le fait d'avoir mis sous une seule administration l'offre de services à la population dans un secteur donné, bien, vient, par définition, briser le mode de gestion qui faisait en sorte qu'il fallait frapper à la porte du voisin dont on savait qu'il y avait une capacité d'offre de services similaire. Mais là, quand on le dit comme ça, ça tombe sous le sens que cet obstacle-là administratif n'avait pas de sens. Ça n'avait pas de sens.

Je vais vous donner un exemple différent de celui que j'ai donné dans mon préambule. Je vais donner l'exemple de la dialyse. Ça, c'est un exemple qui est très intéressant parce que la dialyse, c'est un service de proximité aujourd'hui. La dialyse s'adresse à des patients qui ont des niveaux requis de soins qui sont variables. Il y a des gens, à cause de leur maladie rénale, qui doivent être dans un hôpital plus tertiaire, plus spécialisé. Il y a des gens qui peuvent la faire, leur dialyse, à la maison. Il y a des gens qui peuvent les avoir dans un centre de dialyse qui n'est pas nécessairement hospitalier ou qui peut être dans un hôpital de première ligne, plus communautaire.

Et on sait que, là, on parle d'une population, là. Avant, le patient qui... lui, souvent, mais pas toujours, va cheminer, dans sa maladie, de la dialyse péritonéale à la dialyse... l'hémodialyse, on va dire, de premier niveau, à, malheureusement dans certains cas, une dialyse plus complexe, parce qu'il y a des complications, il faut aller dans un hôpital plus spécialisé. Ce cheminement-là du patient ne devrait-il pas, aurait-il dû, dans le passé, se faire dans une organisation où ça, c'est intégré, où dans laquelle, à domicile, près de son CLSC, il n'avait pas besoin, dépendamment de l'évolution du patient, à aller frapper à la porte d'un hôpital communautaire qui, lui, dépendamment de la complexité ou de l'évolution de la maladie du patient... frapper à la porte d'un autre hôpital, qui donne des soins plus complexes? Bien, c'était ça avant, il fallait frapper à des portes.

Alors là, aujourd'hui, on se retrouve dans une situation... Puis je vais prendre l'exemple du CIUSSS de Mauricie—Centre-du-Québec. Qu'est-ce qu'on a fait en Mauricie—Centre-du-Québec? Bien, on a fait un CIUSSS, et, dans ce CIUSSS là, les gens l'ont vu venir. Moi, j'avais fait le tour du Québec en disant : Regardez où c'est qu'on veut aller, là, on veut aller dans une intégration, pour le bénéfice de la population, à la case départ. Donc, dans le monde de la dialyse, ne devrait-on pas avoir une équipe de néphrologues en nombre suffisant pour garder une masse critique pour offrir une expertise appropriée, mais une expertise livrée sur le territoire? Bien, ils ont pris la balle au bond et ils l'ont fait.

Alors, qu'est-ce qu'il y a dans le CIUSSS Mauricie—Centre-du-Québec? Il y a une équipe de néphrologues très compétents, de niveau universitaire, qui sont basés à Trois-Rivières mais qui donnent des services, physiquement, là, à Drummondville et dans d'autres hôpitaux. Et on envisage maintenant même la possibilité d'en donner à La Tuque. La Tuque, là, ce n'est pas une place, là, qui est exactement métropolitaine, quoique j'aime beaucoup la place, puisque j'y suis né et j'y ai été élevé.

Mais c'est ça que ça fait, un CIUSSS, ça fait en sorte que l'équipe change son mode organisationnel de pratique pour s'adapter à la population. Et, pour s'adapter, l'équipe doit être dans une organisation où tout est intégré, c'est le cas, il faut qu'elle accepte de se déplacer, c'est le cas, vers le patient. Il faut qu'elle accepte d'appuyer, à distance, les équipes d'infirmières, par exemple, et les patients eux-mêmes, dans le cas où ça peut s'appliquer, c'est le cas. Voilà un bénéfice, là, qui vient de la loi n° 10, qu'on n'aurait pas eu si ces gens-là étaient restés dans une dynamique d'établissement isolé. La Tuque qui demande d'avoir le service, qui va frapper à la porte des gens de Trois-Rivières, qui peut-être leur aurait dit il y a 10 ans : Non, nous autres, on ne fait pas ça, et ainsi de suite, là c'est l'inverse, et on voit sur le terrain les gens prendre à bras le corps cette philosophie-là et modifier leur façon de pratiquer et de donner des services en santé et services sociaux sur leur territoire, de façon intégrée. C'est ça que ça fait, la loi n° 10, du côté clinique.

Bon. Ceci dit, évidemment, là, on vient de parler de l'organisation clinique qui doit être sous-tendue par une organisation administrative qui, elle, doit être tout autant intégrée. L'un doit aller avec l'autre et l'un n'est pas en opposition avec l'autre. Et c'est exactement ça qui a été fait. Et ça a été fait parce que, bon, bien, la finalité était celle que je viens de dire dans l'exemple que je viens de donner et la finalité était aussi jumelée à une finalité budgétaire. Et, la finalité budgétaire, je l'ai dit en introduction, je ne sais pas si vous allez vouloir revenir là-dessus, mais on l'a presque atteinte au moment où on se parle. Je ne sais pas si vous voulez que j'aille plus loin à cette étape-ci.

Mme Montpetit : ...aussi loin que vous voulez, je pense que c'est un sujet...

M. Barrette : Infini.

Mme Montpetit : ...fort pertinent.

M. Barrette : Fort pertinent, alors je vais continuer sur le côté administratif. Alors, le côté administratif, pour continuer sur ma lancée, c'est un côté qui devait faire en sorte que l'administration pense réseau, pense patient, pense proximité vers l'hôpital, vers le domicile. Il faut que l'organisation se fasse dans ce sens-là. Et ça, ça s'est fait.

Bon. Sur le côté financier, c'est un fait que nous avions des taux d'encadrement qui étaient nettement supérieurs à ce que l'on retrouve ailleurs. Nous avions des taux d'encadrement qui allaient de 3 % et quelques à presque 10 %. C'est trop élevé. Il y avait donc un effort à être fait.

Quand nous avions annoncé, au début des travaux sur la loi n° 10, que nous allions réduire le nombre de cadres de 1 300, peu de gens croyaient que c'était faisable en dedans de trois ans. Et on a offert aux gens... Puis on n'a forcé personne, hein? Que les choses soient bien claires, là, il n'y a personne qui a été forcé à faire quoi que ce soit, là. Les objectifs étaient énoncés. Il y a un chemin qui était tracé. Les gens avaient la possibilité de faire une transition, ou la possibilité de réorienter leur carrière, ou de prendre leur retraite, pour ceux qui étaient à l'âge de la retraite. Il n'y a personne qui a été obligé de prendre sa retraite. Oui, il y a eu, évidemment, une réorganisation et des annonces de réorganisation, d'optimisation, et ainsi de suite. Mais la résultante est quoi? La résultante est que, l'objectif que l'on a annoncé, on est à 1 051, en date d'aujourd'hui, sur 1 300 et on sait qu'avec les annonces qui ont été faites par tout le monde qui est dans le réseau on va dépasser 1 500.

Alors, nous avions recherché une économie de 220 millions de dollars et on va l'atteindre. Mais, ce 220 millions de dollars là, il faut le mettre en perspective. Et quelle est-elle, cette perspective-là? Les questions qui viennent d'être posées par les deux oppositions, les deux pointent, toutes les deux, vers l'importance d'avoir des finances publiques gérées de façon serrée. Les questions qui ont été posées ici à date pointent vers l'importance d'avoir un équilibre budgétaire pour nous permettre de dégager des sommes que l'on investira prospectivement, devant nous, là, vers des services plutôt que vers de l'administratif, vers des structures qui ne sont pas nécessairement performantes. Ce qui vient d'être dit même par mon collègue le Dr Delorme va aussi dans ce sens-là.

• (13 h 10) •

Je vais reprendre un exemple de santé mentale. Un des premiers groupes qui m'a parlé des bénéfices de l'intégration de la loi n° 10 a été un groupe de santé mentale reconnu de Montréal, le Douglas, qui est un institut mondialement reconnu en santé mentale, qui m'ont clairement indiqué... ils m'ont clairement indiqué que, dès les premières semaines, il y avait déjà des barrières qui tombaient quand venait le temps pour un patient traité pour des problèmes de santé mentale à avoir accès... dans le réseau de ce CIUSSS là, de l'Ouest-de-l'Île, d'avoir accès à des soins de santé physique. Parce que les gens qui ont des problèmes de santé mentale ont souvent, comme le Dr Delorme l'a évoqué, des problèmes de santé physique.

Ça s'est reflété même très rapidement, ça, en octobre 2015, lorsque j'ai annoncé le programme de santé mentale, Charles Rice, du Réseau communautaire en santé mentale, qui a mentionné, dans une entrevue, que les fusions qui découlaient du projet de loi n° 10 pouvaient forcer le réseau à plus de cohérence. Il est cité : «Un des problèmes qui existaient auparavant, c'est qu'il y avait plusieurs établissements. Mais là, avec un établissement par région, il y a quelqu'un qui va être imputable.»

Là, c'est le milieu qui parle, là. Ce n'est pas moi qui parle. Mais par contre c'est ça que j'avais en tête lorsque j'ai mis ça en place, et on le voit. Est-ce que c'est rendu à la destination finale aujourd'hui? Pas encore. Est-ce qu'on a fait des pas vers cette destination finale là? Bien, oui, on en a fait. Est-ce qu'il y en a d'autres à faire? Oui. À date, est-ce que les pas ont donné des bénéfices? La réponse est oui. Mais ne désincarnons pas ce projet-là de son contexte.

Et c'est plate, je le sais que c'est plate. Puis je sais que les gens nous écoutent, là, ils n'aiment pas ça, là, je le sais, je le comprends. Je le comprends. Tout le monde veut avoir plus de services. Moi, je veux en donner plus moi-même. Mais il y a un contexte, il y a une contrainte qui est le budget du Québec, qui, lui, est le résultat des impôts et des taxes que les citoyens et les entreprises paient.

Quand la CAQ dit : On veut plus de services et moins d'impôt, c'était le slogan de l'élection partielle dans Chauveau, gagnée par notre collègue qui est ici présente, les gens comprenaient, là, les gens comprenaient que, dans cette phrase-là, il y a quelque chose qui ne marche pas. Il y a un souhait qui est louable, mais il y a quelque chose qui ne marche pas. On ne peut pas, là, comme la CAQ veut l'avoir, là... hein, la CAQ veut avoir des économies et veut payer moins d'impôt. Le projet de loi n° 10, là, la CAQ a voté contre, le Parti québécois a voté contre, mais c'est un projet d'économies. Et il y a des coûts. La CAQ dit : On veut plus de services et moins d'impôt. Mais là pourquoi ils ont voté contre le plus d'économies?

Alors, à un moment donné, il y a une contrainte, puis c'est plate. Puis je le redis aux gens qui nous écoutent : Ce n'est pas le fun de ramener ça au budget, mais on est ici parce qu'on parle de crédits pour donner des services dans un contexte qui n'est pas illimité.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, je vous remercie tous, chers collègues.

Compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures, où elle poursuivra son mandat. Merci.

(Suspension de la séance à 13 h 13)

(Reprise à 15 h 6)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je vous invite à prendre place. Nous allons reprendre nos travaux.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude des crédits budgétaires du volet Santé et Services sociaux pour l'exercice financier 2016-2017.

Je vous invite toujours, évidemment, à fermer la sonnerie de vos téléphones cellulaires afin de ne pas perturber nos travaux.

Puisque nous avons débuté nos travaux à 15 h 5 et qu'une période de trois heures doit être consacrée à l'étude de ces crédits cet après-midi, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit 18 h 5? Il y a consentement? Consentement.

Alors, lors de la suspension de nos travaux ce matin... Et vous me permettez de prendre une minute, le temps de nous retrouver dans nos blocs. Nous en sommes maintenant rendus à un bloc de l'opposition officielle pour une période de 21 min 30 s. Alors, collègue de Taillon, la parole est à vous.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour à tous. Le prochain bloc, j'aimerais en partie aborder le dossier de l'accès à la chirurgie, cet accès à la chirurgie qui est déterminant par rapport à l'efficacité de notre système. Je vois que, dans le programme d'accès à la chirurgie, dans ce budget, on a annoncé 15 millions de dollars d'investissement en chirurgie. Or, évidemment, l'étude des crédits est quelque chose qui fait qu'avec quelques années de recul, tout comme le ministre et les autres membres de cette table, eh bien, on compare d'une année à l'autre. Alors, en termes d'accès à la chirurgie, l'annonce qui est faite cette année dans le budget, de 15 millions de dollars, on est obligés de la regarder avec ce qui avait été fait l'année dernière, et, l'année dernière, on note qu'on avait coupé de 24 millions de dollars le programme des chirurgies. Alors, puisqu'on a coupé 24 millions et qu'on redonne 15 millions, on est encore 9 millions de dollars de moins que ce qu'on avait en 2014.

Alors, j'aimerais que le ministre me donne un peu de quelle façon il va prioriser et aussi son explication par rapport à cette annonce de 15 millions en chirurgie supplémentaires, alors qu'on avait coupé 24 millions.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, si vous me permettez, pour simplifier... pas pour simplifier, mais pour que nos échanges soient plus précis, est-ce que la députée de Taillon pourrait m'indiquer sur quoi elle tire la conclusion... sur quelles données tire-t-elle la conclusion qu'on a coupé 24 millions?

Mme Lamarre : En fait, ce qu'on regarde, dans les... C'est la question 82, la question 82 du budget actuel, et c'était... en fait, c'est la réponse. Et puis c'était 64 l'année précédente. Deux tableaux exactement identiques, alors les chiffres sont comparables. C'est dans le livre... je peux peut-être... dans le volume 1 des réponses du ministère de la Santé et des Services sociaux, Réponses aux questions particulières de l'opposition officielle.

M. Barrette : Je suis bien disposé à répondre. Alors, si je comprends bien, vous prenez... Comme la députée de Taillon, M. le Président, prend... Elle pourra m'indiquer si je fais référence aux mauvais chiffres, là, mais je comprends qu'elle prend comme point de référence le budget de l'année dernière et ce qui est le chiffre inscrit cette année, ce qui...

Mme Lamarre : ...exactement avec le même titre, Montants par région pour le programme d'accès à la chirurgie...

M. Barrette : Bien, il faudrait peut-être m'indiquer les pages, parce que la...15397

• (15 h 10) •

Mme Lamarre : ...2013-2014 et Montants par région pour le programme d'accès à la chirurgie 2014-2015, la page 166.

(Consultation)

M. Barrette : Alors, ça, c'est toujours la même affaire, c'est que, quand on dépose le budget, la dépense qui est indiquée, c'est la dépense prévue, mais nous, on paie au réel. Alors, il est possible qu'il y ait une différence entre les deux chiffres, mais nous, on paie toujours le réel. Alors, il n'y a donc pas eu de coupure.

Mme Lamarre : M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : Oui, collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Parce que le titre de ce tableau-là, c'est 2013-2014 et c'était celui de l'année dernière qui a été déposé en 2015. Comme là, celui avec lequel je compare, c'est celui de 2014-2015 déposé en 2016. Alors, j'ose croire que les données sont compilées sur une base annuelle, parce que ce sont des données qui se réfèrent à l'année complète précédente.

M. Barrette : Je veux juste... Parce que c'est toujours la même chose...

Mme Lamarre : Mais je peux donner quelques minutes au ministre pour qu'il...

M. Barrette : Non, j'ai besoin de quelques minutes... Moi, je pense que je peux vous donner quelques minutes pour bien comprendre les tableaux, là, pas que je... c'est-à-dire pour bien saisir quel tableau qui se compare à quoi, là.

Alors, l'année dernière, là, à la dépense prévue en 2015-2016, c'était 184 millions. On s'entend-u, là, qu'on lit la même chose sur la même page, M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Taillon?

Mme Lamarre : M. le Président, c'est la même page équivalente complète, complétée pour l'année. C'est les mêmes pages équivalentes...

M. Barrette : M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : Juste un à la fois.

Mme Lamarre : ...la page 166 du budget de cette année, qui concerne l'année 2014-2015. Et, pour l'an dernier, je ne sais pas la page exacte.

M. Barrette : Page 166, là, de quel document? C'est parce que... M. le Président, je veux juste faire un commentaire, là.

Le Président (M. Tanguay) : Oui.

M. Barrette : À la dernière étude des crédits, on a eu le même problème. Puis moi, je veux bien répondre aux questions de la députée, surtout quand qu'il y a des chiffres de cet ordre-là. Et là j'inviterais, M. le Président, à ce que vous invitiez la députée de Taillon de nous indiquer clairement dans quel document elle prend sa donnée pour qu'on puisse répondre précisément. Moi, 166, j'en ai une, page 166, là. Et, à la page 166, là, j'ai un montant puis j'ai une autre page qui donne un autre montant, mais, si on ne lit pas les mêmes chiffres dans les mêmes pages, on va s'obstiner bien longtemps, puis on va se chicaner, puis moi, je ne veux pas, je veux qu'on fasse ça dans la...

Le Président (M. Tanguay) : L'harmonie?

M. Barrette : ...cordialité, l'harmonie, et qu'on parle des mêmes affaires.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, je vous reconnais là, M. le ministre, l'harmonie et la joie de vivre...

M. Barrette : Voilà!

Le Président (M. Tanguay) : Je ferai en sorte de donner suite à vos souhaits. Alors, collègue de Taillon, s'il vous plaît, aidez-nous.

Mme Lamarre : Alors, dans le plus grand bonheur, je vais faire tout ce que je peux, tout ce que je peux.

Le Président (M. Tanguay) : J'en suis persuadé.

Mme Lamarre : Alors, c'est dans la section Réponses aux questions particulières du ministère de la Santé et des Services sociaux, les questions particulières de l'opposition officielle, le volume 1, la page 166...

M. Barrette : Je l'ai devant moi, M. le Président.

Mme Lamarre : ...et, l'année précédente, même volume, la page 162.

(Consultation)

Le Président (M. Tanguay) : Et peut-être, collègue de Taillon, donc... Oui, M. le ministre?

M. Barrette : ...maintenant me rappeler, parce que, là, on... C'est correct, là, c'est tout correct. Quels chiffres, la députée de Taillon, de quelles années veut-elle comparer, là? Pas la page, quels chiffres?

Mme Lamarre : Bien, le grand total, qui est de 236 milliards...

M. Barrette : De quelle année?

Mme Lamarre : 236 millions, pardon, excusez-moi, de 2013-2014, et je le compare avec 211 millions en 2014-2015. Alors, quand le ministre dit qu'il ajoute 15 millions, on voit qu'entre 2013-2014 et 2014-2015 il nous manque des millions, il manque 24 millions. Alors, quand le ministre dit que, cette année, il ajoute 15 millions, le calcul que je fais, c'est qu'on a encore 9 millions de moins qu'en 2013-2014.

M. Barrette : La problématique, M. le Président, là, c'est toujours la même problématique avec les crédits budgétaires : dans les budgets sont inscrites aux différentes lignes une dépense prévue, et on paie la dépense réelle. Alors, le montant auquel fait référence la députée, là, qui est le 236, je n'ai pas le papier, là, que j'ai sur l'ordinateur, ça, c'est une dépense réelle, et, à chaque année, la dépense réelle... peut-être pas à chaque année, mais en général la dépense réelle est supérieure à la dépense prévue. Alors, ça ne veut pas dire qu'il y a eu des coupures. Ça veut dire que, circonstanciellement, c'est ce qui a été budgété.

Alors, quand je regarde, là, cette année, là, la dépense prévue est 184 millions pour 15... Pardon, l'année passée, c'était 184 millions. Et, cette année, c'est le même chiffre. Et on sait très bien qu'à la fin ça va être plus que ça. Alors, il n'y a pas de coupure. On budgète, et c'est comme ça que ça fonctionne, un budget. Je ne connais pas de budget, dans aucun univers, où on arrive pile au chiffre prévu au début de l'année. Un budget, ça sert à déterminer un environnement budgétaire dans lequel on sait qu'il va y avoir des fluctuations vers le haut dans certains cas, vers le bas dans d'autres cas et c'est ça qu'on adopte. On adopte une globalité qui, elle, est finale, mais dans lesquels il y a des éléments qui peuvent avoir une variation à la hausse ou à la baisse. Alors, ce n'est pas une coupure.

Mme Lamarre : Merci, M. le Président. En fait, les tableaux, je comprends très bien la différence. Il y a des aspects, dans les documents qui nous sont remis, qui sont des projections budgétaires. On n'est pas dans ces documents-là actuellement. On est dans des réponses, on est dans des tableaux fermés, finis, qui ont complété 12 mois en 2013-2014 et 12 mois en 2014-2015 et où on voit clairement qu'il y a 24 millions de moins en chirurgie, en budget chirurgie pour l'année 2014-2015, qui est terminée et qui est fermée, alors, 24 millions de moins dans un contexte où il y a des listes d'attente en chirurgie. Et, quand le ministre annonce que, dans... L'année prochaine, là, on s'entend, l'année prochaine, le ministre nous promet un 15 millions de plus. La conclusion à laquelle on arrive, c'est qu'il manque 9 millions par rapport à 2013-2014. Pour l'année 2014-2015, le ministre n'a pas dépensé. Ce n'est pas lui-même tout seul, là, mais on... Il y a eu un manque de 24 millions par rapport à l'année 2013-2014 en chirurgie.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, puisque je l'ai expliqué et que l'explication ne satisfait pas la députée de Taillon, je vais inviter mon collègue qui est sous-ministre adjoint aux Finances de prendre la parole et de l'expliquer à la ministre. Moi, j'ai dit ce qu'il y avait à dire, et c'est la réalité, là.

Le Président (M. Tanguay) : Est-ce qu'il y a consentement pour entendre M. le sous-ministre?

Mme Lamarre : M. le Président, j'aimerais beaucoup, mais là on a passé quand même 10 minutes juste pour donner le temps au ministre. Si quelqu'un peut me remettre un document écrit qui va me l'expliquer, ça me... qu'il y aurait des explications différentes que celles que moi, j'ai exprimées. Sinon, j'aimerais mieux passer aux chirurgies oncologiques, si c'est possible.

Le Président (M. Tanguay) : O.K. O.K., alors ceci... On va passer à un autre sujet. M. le ministre, aviez-vous d'autres choses à ajouter?

M. Barrette : ...M. le Président, ça va me faire plaisir.

Le Président (M. Tanguay) : De? Excusez-moi.

M. Barrette : On va lui donner, à la députée... On va donner à la députée de Taillon le document écrit. Ça va nous faire plaisir. Mais ça ne changera pas le fait qu'il n'y a pas eu de coupure. Il y a un budget et une dépense réelle, qui ne sont jamais les mêmes.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Alors, j'aimerais parler des chirurgies oncologiques. Les cibles... On parle de chirurgies chez des gens qui ont un cancer, un cancer qui a été diagnostiqué, à qui on a dit clairement : Votre cancer est opérable, vous devez avoir une chirurgie. On est dans ce contexte-là. Parce qu'il y a des gens qui suivent les crédits, alors c'est vraiment ce contexte-là.

Et, les cibles, les cibles de tous les pays développés, c'est que 90 % des gens qui se trouvent dans cette situation-là, diagnostic de cancer opérable à qui on dit : Vous devez être opéré, 90 % des gens doivent être opérés à l'intérieur de 28 jours. Or, au Québec, on n'a que 51 % des gens qui sont opérés à l'intérieur de 28 jours. Mais, pire que ça, on a un Québécois sur cinq qui, 56 jours plus tard, donc presque deux mois plus tard, le double de la période de 28 jours, est encore en attente. Ça, c'est des gens qui ont leurs téléphones cellulaires avec eux en dessous de leurs oreillers et qui attendent un appel en sachant qu'ils sont porteurs d'un cancer qui, lui, ne se met pas à pause parce que le système de santé ne peut pas répondre.

Alors, la question, elle est claire, M. le ministre. Je pense que nous devons avoir une des priorités à ce niveau-là, j'aimerais savoir quelles sont nos cibles pour la prochaine année. Je sais que le ministre est sensible à ça. On est tous sensibles ici à ça. C'est une priorité. Quelles sont les cibles qui sont visées pour que, l'année prochaine, à la même date, on se retrouve avec des statistiques qui correspondent au niveau de développement qu'a le Québec?

• (15 h 20) •

M. Barrette : Alors, évidemment, là, M. le Président, c'est sûr que, sur le plan des cibles... Les cibles, on le sait, là, ce sont des cibles qui... Bien, peut-être que tout le monde ne le sait pas, ça, les cibles que la députée de Taillon... auxquelles elle fait référence sont des cibles qui sont globales. Mais, dans la pratique, il y a des cibles qui sont variables en fonction du site tumoral, et, dépendamment du site tumoral — et je vais vous donner des exemples, là — alors, on vise à ce que les cibles soient à l'intérieur de ce qui a été mentionné par la députée, mais, dans les faits, on se retrouve dans une circonstance où on n'y arrive pas. C'est vrai, tout à fait d'accord avec ça.

Maintenant, la statistique qui est évoquée ou qui est mentionnée est une statistique qui ne tient pas compte de tous les aléas du monde chirurgical. Moi, je veux bien, là, mettre en place un système de santé ou de modifier le système de santé pour que tout le monde ait leur chirurgie en dedans d'un mois, ce qui est un objectif que nous aimerions avoir. Ceci dit, les multiples circonstances auxquelles on fait face font en sorte que nous, au Québec, on a choisi que les chirurgies pour le cancer se feraient dans des cibles qui se retrouvent dans une fourchette de 28 à 56 jours. Aujourd'hui, faire en sorte que tout le monde se retrouve en dedans de 28 jours, je pense que ça pourrait poser un problème opérationnel.

Alors, oui à notre capacité chirurgicale d'améliorer les choses. Mais la raison pour laquelle on vise... on s'est donné la fourchette depuis le début, là, de cet exercice-là... Ce n'est pas nouveau à nous. Je tiens à souligner à la députée de Taillon que, sous leur gouvernement, c'était exactement la même chose. Et je n'ai pas entendu dire, encore une fois, le Parti québécois, lorsqu'il était au pouvoir, qu'eux allaient faire en sorte que 100 % du monde soit opéré en dedans de 28 jours, parce qu'opérationnellement ça n'aurait pas été faisable. Maintenant, tendre vers ça, je suis tout à fait, tout à fait, tout à fait d'accord. Maintenant, aujourd'hui, sur le plan opérationnel, il y a encore des difficultés.

Le Président (M. Tanguay) : Mme la députée de Taillon.

Mme Lamarre : Oui, M. le Président. En fait, vous savez, ce qui arrive, c'est que c'est une troisième étude de crédits. Donc, le ministre, l'année passée et l'année précédente, nous avait confirmé que ça changerait, qu'il y en aurait, que ça serait une priorité et que ce genre d'enjeu là serait majeur. Alors, quand on compare, encore une fois, 2014 et 2015, avec toutes les régions, qu'on fait le total des chirurgies, on arrive au fait qu'il y a eu 652 chirurgies oncologiques, la chirurgie cancer, de moins qui ont été réalisées cette année par rapport à l'an dernier. Alors, comment on peut expliquer cette baisse? Et quelle est la cible pour l'an prochain?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Il y a des variations qui sont annuelles, du nombre de chirurgies, et je ne pense pas qu'on puisse envisager la performance du réseau à la lumière du nombre de cas de faits mais certainement plus à la lumière du temps d'attente, par exemple, là. Ça, j'ai de la misère à suivre la députée de Taillon, là, sur cet angle-là.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Bien, écoutez, le ministre nous dit qu'il y a peut-être eu des chirurgies priorisées. Mais, entre 90 % en 28 jours, 51 % en 28 jours, je pense qu'on va tous convenir ici qu'il y a un écart énorme, là. On n'est pas à 88 % ou 89 % alors qu'on voudrait être à 90 %, on est à 51 % alors que la cible est de 90 %, et on est à 21 % de personnes non opérées après 56 jours.

M. Barrette : Non, ce n'est pas la statistique que j'ai.

Mme Lamarre : C'est celle qu'on a eue sur le site, c'est ce qui est inscrit sur le site, 2014. On a les patients opérés depuis le 1er avril 2015 et patients en attente au 31 mars 2016 sur le site.

M. Barrette : Alors, moi, la statistique que j'ai, là, c'est qu'au 5 mars dernier 61 % des chirurgies étaient réalisées en dedans de 28 jours et 88 % l'étaient en dedans de 56 jours. C'est 12 % qui étaient hors délai pour toutes sortes de raisons.

Mme Lamarre : ...on se fie évidemment aux informations qui nous sont disponibles. Celles que nous avons ici sont celles qui sont sur le site Santé et Services sociaux Québec, Chirurgie oncologique, Patients opérés depuis le 1er avril 2015 et Patients en attente en date du 31 mars 2016, et je compare, il y a exactement le même tableau, identique, Patients opérés depuis le 1er avril 2014 et Patients en attente en date du 31 mars 2015. Alors, c'est vraiment des tableaux équivalents, et on voit bien, là, que...

M. Barrette : M. le Président, je suis sur le site au moment où on se parle, là, je suis en direct sur le site, et, depuis le 1er avril 2015 — c'est sur le site en direct — 61 % des patients en chirurgie oncologique ont été opérés en dedans de 28 jours, et il y en a 27 % supplémentaires entre 29 et 56 jours, pour faire 88 %, comme je vous l'ai dit il y a un instant, et 12 % entre 57 jours et plus. Alors, ça, c'est en direct, c'est maintenant, là, sur le site. Alors, on n'est pas sur le même site, là, manifestement, là.

Mme Lamarre : Oui, mais c'est parce qu'on se prépare un petit peu d'avance pour nos crédits, M. le ministre. Alors, on est allés en avril, nous. Alors, c'est possible, là, que... On est allés le 13 avril. Le 13 avril, on est quand même à sept jours près.

M. Barrette : Oui, mais il n'en reste pas moins, là, que ce n'est pas 20 quelques pour cent. Ça n'a pas changé de même en trois semaines, là. C'est 12 % hors délai, là, ce n'est pas 20 quelques pour cent, là. Et la mise à jour du site a été faite le 13 avril.

Mme Lamarre : On a le même tableau, mais on ne parle pas du même chiffre, M. le ministre.

M. Barrette : Bien là, c'est parce que...

Mme Lamarre : Parce que j'ai le même 12 % que vous...

M. Barrette : Bien, vous avez dit 21 %.

Mme Lamarre : ...les patients opérés depuis le 1er avril, mais j'ai un 20 % en patients en attente en date du 31 mars 2016. Est-ce que vous avez cette colonne-là aussi dans votre tableau? Patients en attente, c'est la dernière à droite, en bas.

M. Barrette : Non, mais ça, c'est...

Mme Lamarre : Alors, vous avez quel chiffre sur votre tableau?

M. Barrette : Non, mais, le chiffre, le chiffre, vous pouvez choisir le chiffre qui fait votre affaire.

Mme Lamarre : C'est 20 %, 20 %.

M. Barrette : Vous pouvez choisir le chiffre qui fait votre affaire, moi, ce qui m'importe, comme gouvernement, comme Parlement, là, c'est de regarder ce qui s'est passé la dernière année. Vous ne pouvez pas, au début de notre conversation, vous baser... D'ailleurs, c'est ce que vous avez fait tantôt dans les budgets, vous avez dit que vous comparez une année puis l'autre année. Bien, moi, je regarde une année, la dernière année. La dernière année, c'est 12 %, et, si on veut l'améliorer, on regardera l'année au complet à la fin de l'année. Alors là, là, sur la base d'une année, c'est 61 % à l'intérieur de 28 jours, 27 % entre 29 et 56 jours, donc 88 % en dedans des délais que le Québec s'est historiquement fixés comme objectifs. Les objectifs de 28 à 56 jours, je n'ai pas inventé ça, moi, là, là, c'était là dans votre temps à vous autres aussi, puis c'était là dans le temps aussi du gouvernement libéral précédent. Alors, ça, ça n'a pas changé, là, c'est encore comme ça. Et, oui, on fait tout pour améliorer les choses, mais, à l'exception de 12 %, puis c'est un 12 % qu'on aimerait voir à zéro, mais ça ne sera peut-être jamais à zéro parce qu'il y a toujours des patients qui ne peuvent pas se faire opérer pour des raisons cliniques, bien on est quand même pas mal dans les objectifs que le Québec s'est fixés historiquement dans la chirurgie oncologique.

Le Président (M. Tanguay) : 30 secondes.

Mme Lamarre : Alors, je voudrais que le ministre me donne, selon ses statistiques, qu'est-ce qu'il avait sur le même tableau, Patients opérés depuis le 1er avril 2014. Moi, j'ai les deux tableaux. Et, pour le 56 jours et plus — alors, moi, tantôt, j'ai parlé du 28 jours — alors là vous êtes à 12 % l'année passée et vous êtes à 12 % cette année. Donc, il n'y a pas d'amélioration sur le nombre de patients en attente de chirurgie oncologique après 57 jours.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, je vais demander aux collègues de la banquette ministérielle : Permettez-vous au ministre de répondre à la question sur votre temps? M. le ministre.

M. Barrette : Oui, merci. Parce que, sur ce dernier point là, je vais me permettre de répondre évidemment en indiquant à notre collègue de Taillon : par exemple, dans le CHUM, là, on a diminué de façon significative, entre le 17 octobre 2015 et le 31 mars 2016, le nombre de patients en attente de chirurgie. Par exemple, au CHUM et à Maisonneuve-Rosemont, il est passé de 1 003 à 488. Ça, c'est deux grands centres oncologiques de l'île de Montréal, c'est des centres prépondérants. Puis je peux prendre un certain nombre de centres, mais je suis sûr que la députée de Taillon ne sera pas satisfaite de voir qu'on s'est améliorés, mais la réalité est qu'on s'est améliorés. On ne s'est pas améliorés partout, on continue à travailler là-dessus, mais il y a une amélioration.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, nous en sommes maintenant rendus sur le temps des collègues de la banquette ministérielle, pour encore 18 min 40 s. Je cède la parole à notre collègue de Beauce-Sud.

• (15 h 30) •

M. Busque : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, chers collègues, chers collègues de l'opposition officielle et de la deuxième opposition officielle, M. le ministre ainsi que toute l'équipe qui vous accompagne, dans la première séance que nous avons tenue ce matin ou, je dirais même, en début d'après-midi, on a parlé, on a eu la chance de parler du projet de loi n° 10. On en a parlé au niveau de tout ce que ça pouvait apporter comme bénéfices au niveau des structures, un peu plus au niveau des impacts administratifs, de la réorganisation, de la réduction des cadres et de l'économie générée par ce projet de loi n° 10, qui est d'environ 220 millions de dollars. J'aimerais aborder un volet un peu plus... dossier un peu plus... dossier patient. Alors, on sait que ce projet de loi a pour but une meilleure cohésion de la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux, alors, entre autres, une meilleure fluidité du parcours de soins qu'expérimentent les patients québécois.

Parlant justement, plus concrètement, du parcours de soins, on le sait, pour l'avoir expérimenté avant le projet de loi n° 10, que, si on prend l'exemple d'un patient qui a des problèmes de diabète ou des problèmes cardiaques, normalement on se rend chez notre médecin de famille, après quoi, s'il y a lieu, on va être référé à un spécialiste qui nous prodiguera des tests, différents tests qui, normalement, déboucheront sur des traitements, un ou plusieurs traitements, qui peuvent engendrer de la réadaptation et après ça un suivi de dossier. Alors, à travers ces diverses étapes de parcours de soins, qu'on a tous expérimentées, ou à peu près tous, on constate qu'il y a différentes étapes et on constate qu'il doit y avoir une coordination entre ces étapes. L'expérience vécue, je dirais, avant le projet de loi n° 10 était qu'on avait un peu... pas l'illusion, mais on se rendait compte que les différentes étapes... ou les différents spécialistes ou médecins ne se parlaient pas entre eux. Nous, en tant que patients, on devait répéter et répéter l'histoire de notre dossier afin d'assurer une bonne compréhension d'étape en étape.

Si je comprends bien, le projet de loi n° 10, en fusionnant les différents acteurs... on parle ici de CSSS, de centres jeunesse, centres de réadaptation, du directeur de la santé publique, et de rassembler ces gens-là et de les regrouper autour... regrouper les directeurs autour d'un conseil administratif pour faire en sorte que ces gens travaillent maintenant ensemble, ayant pour but de rapprocher les services des citoyens, tout en diminuant les frais, il s'agit là d'un objectif commun, et que ces nouvelles directions sont également responsables et doivent rendre des comptes.

Ayant expérimenté personnellement, comme plusieurs d'entre nous, une expérience en soins de santé pendant laquelle nous aurions souhaité plus de cohésion entre les différents acteurs, le projet de loi n° 10, avec comme objectif d'améliorer le parcours de soins de santé, aurait sans doute rehaussé le niveau de satisfaction de ces expériences.

Alors, M. le ministre, pourriez-vous valider ou me confirmer ma bonne compréhension de ce que le projet de loi n° 10 pourrait nous procurer à nous tous en termes d'amélioration de la qualité des services de santé?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Alors, c'est une question qui était vraiment intéressante parce qu'elle s'adresse essentiellement non pas au côté purement administratif de la loi n° 10, mais évidemment à son effet sur ce que j'ai souvent qualifié de fluidité du patient dans le système.

Le patient, lorsqu'il a un problème de santé — je comprends que vous ou quelqu'un de votre famille aurait eu ou a eu un épisode de problème de santé qui vous a ou a obligé quelqu'un près de vous à cheminer dans le réseau —alors, cette réforme-là avait et a encore pour objectif, sur le plan clinique, de faire en sorte que le patient, lorsqu'il entre dans le système... — encore faut-il qu'il y entre, et ça, c'est la loi n° 20 — que le patient, lorsqu'il entre dans le système, il puisse cheminer le plus facilement dans le système.

Et vous y avez fait vous-même référence il y a quelques instants, il y a la question d'entrer dans le système et d'avoir accès à certains services, notamment à certains services de médecine spécialisée. Alors, c'est la raison pour laquelle, dans la loi n° 10, dans la façon dont on a restructuré les choses, on a restructuré les choses pour faire en sorte que, sur un territoire donné, l'équipe médicale soit... et, l'équipe médicale, je le dis au sens large du terme, là, parce que j'inclus là-dedans les autres professionnels de la santé, la santé, ce n'est pas simplement la médecine, que toute cette équipe-là soit intégrée et coordonnée dans son fonctionnement. Intégrée et coordonnée dans son fonctionnement, bien, ça signifie que, si vous avez un problème de santé qui nécessite d'avoir accès à divers professionnels, le système, le réseau, la structure organisationnelle de soins et de services, dans le CISSS ou le CIUSSS en question, soient coordonnés. Et c'est ça qu'on voit sur le terrain.

Alors, on peut le voir de différentes manières. J'ai donné des exemples ce matin, j'ai donné l'exemple des personnes âgées qui avaient à changer de milieu en fonction de l'évaluation de leur état de santé. Il y a d'autres exemples que l'on peut donner, mais un des exemples sur lequel je veux m'arrêter, c'est la coordination qu'il doit y avoir entre la première ligne et la deuxième ligne. Bien, ça, c'est de la vraie fluidité, là, évidemment, là.

On a un problème d'accès à la première ligne. On l'a dit assez, je pense que... mais, malgré tout, je pense que ça vaut la peine de le répéter aujourd'hui. Et, cet accès-là, bien, on s'y est adressés par la loi n° 20 qui impose des exigences plus élaborées, je dirais, que celles qui étaient proposées en 2012 dans d'autres circonstances. Mais ces exigences-là font en sorte qu'on va améliorer l'accès à la première ligne. Mais ensuite il y a la question de passer à l'étape suivante, quand c'est nécessaire, qui est l'accès à la deuxième ligne. Et l'accès à la deuxième ligne, qui est le médecin spécialiste, bien, c'est la raison pour laquelle on a prévu de mettre en place un mode d'accès priorisé pour les services spécialisés. Un mode d'accès qui, essentiellement, là aussi, va être sous la forme d'un guichet unique, un guichet mais qui va s'adresser exclusivement aux référents. Puis c'est les médecins qui auront la possibilité d'avoir accès à un outil, un outil essentiellement de triage, de protocole, qui va faire en sorte qu'un patient qui présente une problématique x va se voir pris en charge et dirigé vers un médecin spécialiste qui, lui, aura l'obligation, dans un délai qui est raisonnable, de faire la consultation et de déterminer s'il y a lieu ou non d'aller plus loin dans l'investigation, ou encore de donner un traitement, ou de compléter une investigation et de retourner le patient chez son médecin de famille. Alors, dans cet élément-là de continuité de services, bien, pour faire ça, il faut avoir une structure qui permette de le faire.

Les conséquences de ça ou les ramifications de ça sont multiples. Je vais vous donner l'exemple de... Je ne pense pas l'avoir donné ce matin, mais je vais le donner cet après-midi. Récemment, il y a une couple de semaines, il y a eu un épisode de ce type-là à Mont-Laurier. On a entendu, on a vu ça dans les médias : On a vu, à Mont-Laurier, des patients qui avaient été vus en première ligne, chez des médecins de famille ou à l'urgence, qui ont eu des examens spécialisés, dans le cas présent, en radiologie. Et là il y a eu un bris de service en radiologie, et les patients, bien, se sont retrouvés en attente d'un rapport diagnostique. Et ça, ce n'est pas une bonne idée en soi.

Alors, le fait d'avoir eu la loi n° 10 a permis à... Parce que, la loi n° 10, ce qu'elle fait, évidemment, c'est qu'elle met dans une même organisation, dans le cas présent, là, pour la spécialité en question, tous les radiologistes dans le même département, qu'ils soient à Mont-Laurier, à Saint-Eustache ou à Saint-Jérôme. L'administration, à ce moment-là, a pu, incluant le chef du département, faire en sorte que tout le monde soit mis en cause, a mis l'épaule à la roue pour faire en sorte que, dans la région, la prise en charge se fasse, de cette lecture-là. Je vais vous avouer une chose : À mon goût, ça ne s'est pas fait assez vite. Mais c'est l'apprentissage de la loi n° 10. Mais ça s'est fait quand même.

Alors là, on a des gens qui sont venus, en première ligne, voir les médecins de famille, qui ont prescrit des examens. Il y a eu un bris. Dans un autre environnement, à l'extérieur de la loi n° 10, ça aurait été impossible. Il aurait fallu appeler l'agence qui, elle, aurait appelé le ministère qui, lui, aurait dit à l'agence d'appeler la fédération qui, elle, aurait appelé son association qui, elle, aurait appelé son officier responsable des couvertures qui, lui, aurait fait un appel à tous, auquel à peu près personne n'aurait eu l'obligation de répondre, et, à la fin, tout le monde aurait attendu. C'est comme ça que ça se serait passé, puis je le sais parce que c'est comme ça que ça se passait avant.

À cause de la loi n° 10, les gens étant maintenant légalement et de façon, donc, imputables inscrits dans une organisation commune, les gens se sont retrouvés dans l'obligation de donner le service. Puis c'est ça qu'on veut. Alors, la loi n° 10, ça vise à faire en sorte que le citoyen ne soit pas défavorisé ou pris en otage d'un dysfonctionnement qui, lui, est généré par une non-intégration de structures et de services.

M. Busque : ...je me suis rendu compte que j'avais fait un lapsus, j'ai utilisé le terme «projet de loi n° 10». Alors, bien sûr, la loi est adoptée depuis février 2015.

M. Barrette : Ce n'est pas grave.

M. Busque : J'aurais dû utiliser le terme «loi n° 10». Alors, ça complète. Je vous remercie beaucoup, M. le ministre.

M. Barrette : Merci.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, toujours pour ce bloc, je cède maintenant la parole à notre collègue de Chauveau.

Mme Tremblay : ...savoir combien de temps que j'ai?

Le Président (M. Tanguay) : 7 min 30 s.

Mme Tremblay : Sept minutes. O.K. Alors, une des grandes questions dans le monde de la santé, c'est : Combien ça coûte? Hein, on se fait opérer pour une hanche puis là on se dit : À partir du début à la fin, combien ça coûte, se faire opérer pour une hanche? Une césarienne, on doit réaliser une césarienne, combien ça coûte, faire une césarienne à partir du moment où le patient entre à l'hôpital et qu'il en sort? C'est important à savoir si on veut savoir que l'argent... si on veut que l'argent suive le patient plutôt que de financer nos hôpitaux selon un mode historique. Les hôpitaux vont pouvoir se comparer, s'ajuster aussi pour devenir plus performants.

Dans le premier budget Leitão, il y a une somme de 65 millions sur trois ans qui a été annoncée pour déterminer le coût de revient de chaque intervention et les associer clairement à un patient et l'ensemble de son parcours de soins. En 2015, il y a le ministre Barrette qui a introduit le financement à l'activité selon le coût moyen provincial pour l'ensemble des traitements de radiothérapie et, en février dernier, M. le ministre qui a annoncé aussi un projet pilote pour mettre en place ce modèle de financement. Alors, M. le ministre, moi, ce que j'aimerais connaître d'abord, c'est : Quels sont les avantages du financement à l'activité plutôt que le financement historique?

M. Barrette : Excellent. C'est une bonne question. Alors, je vais commencer en paraphrasant la députée de Taillon qui nous disait qu'il y avait des normes internationales ou des façons de faire internationales reconnues. Bien, justement, à l'international, une des choses qui est reconnue, c'est le financement à l'activité. Pourquoi?

Le financement historique, comprenons bien ce que ça veut dire. Le financement historique, essentiellement, ça peut se résumer ainsi : on regarde un volume global d'activité d'une institution donnée, sans égard à la performance, sans égard à la qualité. C'est numérique, c'est un volume. On regarde le budget qui lui était alloué et on le reconduit, l'année d'après, sans égard aux éléments que je viens d'identifier. Et le financement historique est un financement global. Il est global, il n'est jamais attaché à un service spécifique, bien qu'il y ait quand même, dans le financement, une certaine reddition de comptes, il y a quand même des rapports à sortir sur les volumes de ceci et les volumes de cela, mais les sommes d'argent ne sont pas attachées spécifiquement à un service médical ou autre donné dans l'institution.

Pire, dans le passé, on a constaté, dans... il y a même eu une période, dans le passé, où on épongeait les déficits. Ça s'est vécu. Moi, j'ai vécu probablement les trois quarts de ma carrière avec des financements historiques qui étaient des budgets qui étaient alloués pour des volumes d'activité avec je ne dirais pas un survol, là, mais une analyse... pas sommaire mais globale des activités de l'institution, et, s'il y avait un déficit, bon, il n'y avait pas toujours d'impact, le déficit était épongé. Et là on avait des taux de croissance qui étaient énormes : 5 %, 6 %, des fois plus encore, d'une année sur l'autre. Après ça, les gouvernements précédents ont voulu gérer avec un peu plus de rigueur et ont dit : Bien là, là, le financement historique, c'est comme ça, c'est de même, mais là il n'y aura plus de déficit, vous allez avoir l'obligation de rentrer dans votre budget, mais toujours sans égard aux services spécifiques, là, l'argent était global. Bon.

Il va de soi que, dans n'importe quelle activité qui a une nature économique... et la santé, c'est une activité qui a une nature économique, on ne peut pas faire abstraction du fait qu'il y a un coût à la santé. Même si c'est public, notre régime, le public fait partie d'un concept économique qui veut qu'il y ait un financement qui génère des services qui ont un coût. Alors, dans n'importe quel système de nature économique arrive le moment où on doit évaluer la performance du geste, du service posé. Et, pour évaluer la performance du geste et du coût du geste posé, bien, encore faut-il pouvoir identifier le coût précis.

Alors, si moi, je veux arriver et dire : Pour une chirurgie donnée, une seule... je prends une chirurgie, peu importe le type, et que je dis à l'hôpital : Pour ça, je vous donne 10 000 $ pour l'ensemble de l'oeuvre... 10 000 $, ça inclut les pieds carrés, l'électricité, le chauffage, le matériel, le bistouri, le robot, peu importe, je vous donne 10 000 $. Bien, si vous en faites 100, là, alors ça va être 10 000 fois 100, ça va être 1 million de dollars. Bien, à un moment donné, il faut que je puisse, moi, dire, idéalement : L'argent que je vous ai envoyé, vous avez performé ou non. C'est quoi, performer ou non? Bien, si l'hôpital est performant, peut-être qu'il va faire ladite procédure à 9 500 $. Mais, s'il la fait à 11 000 $, qu'est-ce que je fais? Historiquement, j'éponge et je reconduis. Est-ce que c'est comme ça qu'on peut gérer le réseau de la santé à long terme et le maintenir public? La réponse est évidemment : Non.

Nous avons connu, là, et ça, les gens ne le réalisent pas... La croissance moyenne des coûts en santé de 2000 au 31 mars 2014, juste avant qu'on arrive en poste, était de 5,3 %, c'est énorme, avec une croissance de notre PIB moyen qui est inférieure à 2 %. Alors, comme le gouvernement n'imprime pas des dollars, aux dernières nouvelles, à moins que je n'aie pas vu quelque chose, là, bien, si le PIB augmente à un rythme qui est la moitié ou moins de la croissance de coût, bien là, à un moment donné, c'est une impasse. On ne peut pas aller plus loin, là.

Et, si on constate que, dans le réseau, il y a des disparités par procédure, après analyse, qui sont trop grandes, bien il y a lieu de resserrer le mode de gestion. Le mode de financement à l'activité vise à faire en sorte qu'on identifie, pour un service donné, le montant requis moyen pour le financer pour ensuite pouvoir nous adresser aux gestionnaires et leur dire : Voici ton barème. On ne vous demande pas d'être le premier de classe, mais on ne vous demande pas non plus... en fait, on ne le demande pas, mais on n'accepterait pas que vous soyez le dernier. Alors, les écarts qui existent entre le meilleur et le moins bon doivent être resserrés. Alors, ils ne doivent pas être resserrés comme ça, mais bien comme ça, c'est-à-dire, ceux qui sont moins performants doivent améliorer leur performance pour arriver évidemment à une performance qui soit adéquate sur le plan clinique et sur le plan financier.

Le financement à l'activité, c'est comme le Christ et l'antéchrist, là, la matière et l'antimatière, le budget historique, son contraire, son opposant philosophique et budgétaire, c'est le financement à l'activité. Et c'est ce qu'ont fait les grandes organisations. Quand vous regardez des organisations privées comme des HMO aux États-Unis ou des organisations publiques comme l'Angleterre, la France, l'Allemagne, la Suisse, et autres, bien, le financement à l'activité devient le mode de financement qui est privilégié. J'y reviendrai sûrement un petit peu plus tard.

Le Président (M. Tanguay) : Merci, M. le ministre. Alors, nous passons maintenant avec le collègue de Lévis pour un bloc de 18 min 30 s.

M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Rebonjour à tous. On va parler d'un dossier extrêmement important, et je pense que les gens se retrouveront à travers ça, parce qu'on a toujours le souci de faire en sorte que nos proches soient et bien soignés et puissent continuer leur vie de belle façon.

Au 31 mars 2015, 3 500 aînés attendaient pour une place dans un CHSLD du Québec. Ça, c'est le 31 mars 2015, parce que les données de 2016 ne sont pas encore disponibles, elles viendront. Le chiffre n'indique pas la durée moyenne d'attente pour obtenir une place en CHSLD, nous y reviendrons. Dans les crédits, le ministère écrit qu'il n'a pas ce délai moyen d'attente par région et par établissement avant d'obtenir une place permanente en CHSLD. J'ajoute également que le ministère ne sait pas non plus quel est le séjour en lit d'hébergement transitoire avant d'obtenir une place permanente en CHSLD par région et par établissement.

Ce qu'on sait, cependant, à travers des données que nous avons colligées, et je pense que c'est un exercice qui permet également de mieux servir nos aînés et d'alléger également la tâche du ministère pour faire en sorte qu'on ait des outils efficaces, ce qu'on sait, c'est que des aînés vont attendre des mois, voire même deux, trois, même quatre années avant d'obtenir une place permanente dans le CHSLD de leur choix. Et là on pourrait, ici, au profit des gens qui nous écoutent ou nous regardent, raconter des histoires, et je suis convaincu que le ministre en a, M. le Président, que vous en avez également et que les collègues en ont aussi. Bref, il y a une problématique à ce niveau-là, donc il manque de places en CHSLD.

Depuis quelques années, le gouvernement ferme des lits en CHSLD. Il se défend en affirmant investir dans les soins à domicile en ajoutant des places dans les ressources intermédiaires et familiales, sauf que les faits et les chiffres parlent : il y a moins de places aujourd'hui qu'il y a cinq ans. En 2010, il y avait 80 400 places en CHSLD publics, privés conventionnés et en ressources intermédiaires et familiales. En 2015, il y en a 77 900, c'est une réduction de 2 500 places ou 3 %.

À la question 287, le ministère indique que le nombre de places qui ont été fermées en CHSLD depuis le 1er avril 2014 est de 2 052. Pourtant, tous conviennent, probablement le ministre le premier, qu'il y a plus d'aînés, au Québec, en perte d'autonomie, plusieurs ne peuvent pas être hébergés dans les résidences, ne peuvent plus rester à la maison.

Comment le ministre explique-t-il la fermeture de 2 052 places en CHSLD depuis le 1er avril 2014? Des documents que nous avons obtenus par le biais de l'accès à l'information, bien sûr : évolution des places publiques disponibles d'hébergement pour les adultes, les chiffres sont là, c'est ceux que je viens de vous citer. Comment peut-on expliquer, dans les conditions actuelles de vieillissement, qu'il y ait au-delà de 2 000 places de moins en CHSLD depuis le 1er avril 2014?

• (15 h 50) •

M. Barrette : Là, M. le Président, je vais demander au député de Lévis de m'indiquer sa référence, parce que moi, j'ai le nombre de lits dressés en CHSLD qui sont... un lit dressé, c'est la place en CHSLD, là. Et j'ai la référence de 2010 à 2015, et je n'ai pas ça, là, moi, 2 000 places de moins entre 2014 et 2015. En 2014 et 2015, moi, j'avais 37 705 places qui sont passées à 37 347. Alors, moi, moins 2 000, là, je ne sais pas où le député de Lévis prend son chiffre.

M. Paradis (Lévis) : ...M. le Président, précédemment qu'évidemment il faut s'entendre sur les paroles puis aussi trouver les bons chiffres, je pense que c'est important. Demande d'accès à l'information qui nous indique l'évolution des places publiques disponibles d'hébergement pour les adultes : CHSLD publics, 31 mars 2010, 35 339; 31 mars 2015, 33 311; variation, moins 2 028, moins 5,74 %. CHSLD privés conventionnés, 7 433 à 7 398, toujours le même espace-temps, 31 mars 2010, 31 mars 2015. Ressources de type familial, 22 302 à 19 144, moins 3 158, pour moins 14 %. Total, donc, c'est le chiffre que je vous donnais il y a deux instants, 80 444 contre 77 896, c'est moins 2 548, moins 3,17 %. Et d'ailleurs c'est la question qui a été répondue à même vos crédits, à même les crédits, la question 287, le ministère indique que le nombre de places qui ont été fermées en CHSLD depuis le 1er avril 2014, c'est 2 052. Ça fait que c'est vos réponses aux crédits en fonction de cette donnée-là.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, on va sortir la donnée à laquelle fait référence le député de Lévis. Le nombre de lits dressés, il faut un permis, là, pour avoir un nombre de lits dressés. Moi, la statistique dont je dispose, que j'ai devant moi, et, dans mon historique, là, ça a toujours été ça, là — je suis bien étonné des chiffres du député de Lévis — le nombre de lits dressés en CHSLD publics et privés conventionnés — là, moi, c'est ces chiffres-là que j'ai toujours vus moi-même, même dans ma vie antérieure, sur les sites gouvernementaux, là — il est passé, comme je l'ai dit, de 38 723 à 37 347 dans une période de six ans. Alors, moi, je ne retrouve pas la donnée que le député de Lévis nous évoque. Et, pour les places en ressources intermédiaires, et ça, les ressources intermédiaires, on comprend que c'est ça qu'on veut développer...

Je vais peut-être... en attendant que mes collègues sortent la documentation à laquelle fait référence le député de Lévis, je vais simplement indiquer à tout le monde que ça fait des années que, dans le monde de l'hébergement... ou de l'aide aux personnes âgées dans la catégorie hébergement, ça fait des années que l'avis des experts est à l'effet qu'on doit non pas développer des lits de CHSLD, mais bien, à la limite, les diminuer à la faveur de ressources intermédiaires et du maintien à domicile.

Et, quand le député de Lévis prend cette position-là me demandant d'augmenter les lits de CHSLD, je suis convaincu qu'il réalise qu'il attaque directement la politique fondamentale du Parti québécois, qui avait été mise en place par Réjean Hébert, qui, lui, était allé sur toutes les tribunes dire qu'il fallait fermer des lits en CHSLD. La politique du Parti québécois sous Réjean Hébert... Et je n'ai pas eu connaissance qu'elle allait changer sous la critique actuelle en santé ni sous le chef actuel, qui, de toute façon, n'a pas la santé dans son programme, alors je n'ai pas entendu dire que là on voulait ouvrir des places en CHSLD. Moi, je comprends qu'au Parti québécois on est encore dans la philosophie Hébert, qui est de baisser... fermer des lits.

Alors, je veux juste terminer, M. le Président : Si on diminue le nombre de lits en CHSLD, ce qui s'est passé de 2010 à 2015 dans la philosophie des experts, qui ne semble pas, à ma connaissance, avoir changé, bien, on s'attendrait, et c'est ce que l'on constate, à ce que le nombre de places en ressources intermédiaires de type familial augmente. Or, qu'est-ce que l'on voit? On voit que, de 2010 à 2015, elles sont passées de 5 606 à 9 091, ce qui fait une augmentation de 62 %, plus 3 485. Au net, ces places-là sont passées de 44 329 à 46 338, donc une augmentation de 5 %, plus 2 000, et non moins 2 000. Alors là, il y a manifestement une discordance fondamentale dans les données, là.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : Merci. Oui, il y a une discordance sur la réponse même. Puis regardez au-delà des tableaux, là, je veux dire, ce n'est pas bien, bien compliqué, c'est la réponse à la question 287, elle vient du ministère. La question a été posée spécifiquement en CHSLD, on est à 2052 places de moins depuis le 1er avril 2014. La question est simple, comme on l'explique.

Je comprends que le ministre peut parler de ressources intermédiaires. On y reviendra, parce qu'il y a des problématiques à ce sujet-là également. Mais il le sait fort bien que des aînés, à un certain moment donné, ne doivent et ne peuvent avoir d'autre choix que le centre d'hébergement. Ça existe. D'ailleurs, on est en train de regarder ce qui se fait de bien pour faire en sorte que ça puisse se propager. On termine un mandat relativement à ça. Mais il reste qu'il y a 2 052 places de moins. Puis ça, c'est la réponse du ministère. Tu sais, je ne demande rien... qu'est-ce que c'est, comment le ministre l'explique. Bon.

M. Barrette : Bien, M. le Président, je vais faire plaisir à ceux qui nous écoutent, parce qu'à un moment donné ça devient difficile à suivre, et je vais faire plaisir aussi à mon collègue de la CAQ. Alors, j'ai l'information, j'ai effectivement la réponse qui lui a été faite. Les chiffres que je viens de donner, M. le Président, là, les chiffres qui montrent une légère diminution du nombre de lits en CHSLD, à la faveur d'une augmentation significative et spectaculaire du nombre de places en ressources intermédiaires, ce sont les places occupées réellement, alors que la réponse que l'on a faite à la CAQ sur sa question à la page 292, la réponse a été interprétée par les gens de mon ministère comme étant une question à propos du nombre de lits au permis. Or, le lit au permis, dans la... peut-être pas la plupart, mais dans un grand nombre d'institutions au Québec, ne correspond pas, dans la vraie vie, au nombre de lits occupés, le meilleur exemple étant le pavillon Notre-Dame du CHUM, qui, historiquement, a déjà été un hôpital où il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de lits, là, au permis, mais que ça fait des années, là, qu'ils ne sont plus utilisés, et il y a eu une espèce de ménage, là, administratif qui a été fait là-dedans.

Alors, moi, quand je donne l'évolution des lits occupés réellement de 2010 à 2015, tant du côté des CHSLD que du côté des ressources intermédiaires, c'est la réalité, alors que les lits au permis sont la virtualité. Et, si je fais un parallèle mais inverse, c'est comme une urgence qui déborde, là. Les civières permises au permis, dans certaines urgences comme celle où je pratiquais, étaient, de mémoire, à l'époque, de 58, puis on a connu des journées à 103, là. Alors, la réalité, c'est celle, je pense, que l'on doit regarder. Et conséquemment on est obligés de constater qu'il n'y a pas eu fermeture de 2 000 lits en CHSLD, d'une part, au contraire. Et l'offre de l'hébergement pour les personnes âgées a augmenté de façon significative pendant la période, 5 %.

Le Président (M. Tanguay) : M. le député de Lévis.

• (16 heures) •

M. Paradis (Lévis) : Alors, M. le Président, regardez, on a un quiproquo sur les chiffres qui sont présentés et les tableaux. Je fournirai au ministre les chiffres que nous avons obtenus par accès à l'information avec des données qui sont aussi... ma foi, doivent être précises, sont fournies, par le biais de l'accès à l'information, par le ministère lui-même. Et on fera également des comparatifs et on débattra là-dessus à un autre moment. Je pense que ce sont des données importantes pour les citoyens et les citoyennes.

D'autant plus, d'autant plus, M. le Président, et là... Et ça le met en exemple, hein, M. le Président? Le ministre dit : Vous, les chiffres, c'est ça. Puis c'est avec permis, pas de permis. Ce n'est pas la réalité, c'est virtuel, et le reste. D'autant plus important d'avoir des outils, pour les gens du ministère, pour les parlementaires, pour les citoyens également, pour faciliter le travail qu'ils ont à faire, notamment pour faire en sorte qu'on puisse trouver, pour un aîné, pour un père, pour une mère, pour quelqu'un de la famille, un CHSLD de premier choix, que l'on aura le plus rapidement possible, en fonction des disponibilités.

Alors, il n'y a pas de portrait de l'attente. Et c'est aussi un problème qu'on craint, important, puis d'ailleurs on l'a abordé. Je l'ai abordé avec le ministre, M. le Président. On a proposé une suggestion constructive pour aider les familles et les aînés, parce qu'on recevait assez régulièrement, et même très régulièrement, des avis de personnes qui disent : C'est parce que je ne sais pas... ou : Ça attend trop, je ferais peut-être un deuxième choix, mais entre-temps je m'en vais sur du transitoire. Pas facile nécessairement pour les familles. On a proposé au gouvernement de publier sur le site Internet du ministère un portrait pour chaque CHSLD pour que les familles puis les aînés qui cherchent une place soient informés et puissent effectuer un choix éclairé en fonction du temps d'attente. Le ministre, M. le Président, s'est montré bon joueur, a dit que ce serait probablement un bon outil.

Est-ce que le ministre peut me confirmer que des travaux sont en cours au ministère de la Santé pour développer cet outil-là? Puis allons plus loin, parce que c'est une bonne nouvelle en soi : Est-ce qu'on est sur le point d'annoncer et de permettre aux familles d'avoir cet outil-là, qui va aussi être essentiel, qui va faire en sorte qu'on traite plus, en tout cas, facilement pour permettre aux familles de pouvoir suivre le cours et trouver un emplacement pour leurs aînés à placer de façon plus rapide et plus concrète?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bien, M. le Président, je rejoins le député de Lévis dans son intention tout à fait louable de simplifier la vie des gens. D'ailleurs, si on fait le parallèle, c'est pour ça que j'ai fait un guichet... on a fait un guichet d'accès, là. C'est pour ça qu'on a fait ça, là. Mais en même temps, M. le Président, je veux juste mettre les choses en perspective. Puis c'est un peu délicat, là, ce que je vais dire, parce que c'est un peu dur, mais, comme on est dans l'étude des crédits, je vais le faire avec la plus grande délicatesse possible. Le monde du CHSLD aujourd'hui n'est pas le même monde qu'il y a 15, 20 ans, là. Aujourd'hui, il y a des gens qui mettent leur nom pour éventuellement avoir une place en CHSLD, et la liste d'attente pour aller en CHSLD n'est pas nécessairement représentative de la réalité de tout le monde. Je m'explique, M. le Président.

On sait tous que l'objectif, là, c'est de donner les meilleurs soins possible à la population âgée qui arrive en perte d'autonomie à la fin, et ainsi de suite. Et tout le monde s'entend sur l'importance et, je dirais, la primauté de s'assurer... ou de tout mettre en oeuvre pour que les gens puissent rester à domicile le plus longtemps possible. Puis c'est ça que les gens veulent, là, les gens ne se précipitent pas pour aller en CHSLD. Et, entre le domicile et le CHSLD, il y a des ressources intermédiaires qui, la plupart du temps, sont plus adaptées à ces gens-là qu'un CHSLD.

Puis je fais ce préambule-là, M. le Président, puis c'est là que c'est un peu dur, là, c'est que regarder les listes d'attente pour l'accès à un CHSLD, ce n'est pas nécessairement ce qui correspond à la réalité, parce que, les milliers de personnes qui mettent leur nom, c'est un nom en vue de peut-être que. Alors, si on prend en considération qu'en CHSLD les patients sont tellement plus lourds que la durée de vie, ou d'utilisation, ou de séjour en CHSLD, c'est moins de deux ans, là, bien, ça, ça ne fait que refléter le fait que les gens arrivent là maintenant, aujourd'hui, dans une situation de vie plus tardive.

Il y a eu un temps où les gens mettaient leur nom pour avoir une place en CHSLD parce que les gens qui étaient en CHSLD étaient beaucoup plus tôt dans leur évolution, ils étaient dans une période de leur vie où ils auraient pu être ailleurs qu'en CHSLD, ils auraient pu être en ressources intermédiaires et, dans bien des cas, à la maison. On sait qu'il y a des gens qui sont en CHSLD qui ne devraient même pas être là, les jeunes, par exemple. Mais là, là, de faire l'adéquation entre les listes d'attente, un guichet qui dit à la population : Voici les places, ce n'est pas simple comme ça. Ce n'est pas binaire, au sens : il y a quelqu'un qui attend, il y a quelqu'un qui a une place, puis la liste d'attente correspond vraiment à un besoin spécifique à ce moment-là.

Moi, je dis simplement qu'aujourd'hui, là, les gens qui en ont besoin, de CHSLD, là, ils ont leur place et que de vouloir mettre en place toute cette mécanique-là d'attente... Je pense que, les gens qui aujourd'hui se mettent sur la liste de la même manière qu'on le faisait il y a des années, ce n'est peut-être pas le même genre de situation. Puis ces gens-là, peut-être qu'ils seraient mieux en ressources intermédiaires ou à domicile.

Le Président (M. Tanguay) : Pour encore deux minutes, collègue de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : Oui, M. le Président. Je comprends la difficulté potentielle. Je comprends que les choses changent, hein, on est en train d'en faire un constat actuellement. Mais on travaille aussi pour faciliter la tâche des citoyens pour faire en sorte que ça puisse mieux aller puis qu'on puisse... Malheureusement, pour plusieurs aînés, dans certains cas, c'est là qu'il faut aller. Oui, les soins à domicile, j'en suis, on va y revenir, les ressources intermédiaires également, il y a des problèmes qu'on devra surmonter aussi, mais le CHSLD fait aussi et encore partie du réseau. Est-ce qu'on va priver, M. le Président, les citoyens d'un outil?

Je suis un peu étonné, parce que la ministre déléguée aux Aînés me disait récemment à ce chapitre-là, parce qu'on a abordé cette question : Ne vous en faites pas, le ministre est sur le point, là, d'offrir un outil, là, on va l'annoncer, ça s'en vient, là. Puis on a dit : On va laisser le ministre annoncer puis dire le moment précis.

Je pense qu'au-delà des difficultés du phénomène — et je le dis entre guillemets, là — d'espèce de places fantômes dont me parle le ministre, dans les CHSLD, là, sans faire le rapprochement avec les garderies, mais reste qu'il y a une problématique, là, de réalité. Mais je pense qu'on ne doit pas priver, quand même, les citoyens d'un outil qui peut être colligé par le ministère pour faciliter la tâche des familles.

Est-ce que je comprends que le ministre décide de changer d'avis et que cet outil-là, en tout cas, sur lequel il avait donné espoir de pouvoir se servir, n'existera plus et on laisse tomber le projet?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président — puis peut-être qu'avec le consentement je pourrai déborder de la période, là — je ne comprends pas. Puis je le sais que ce n'est pas méchant, là, de la part du député de Lévis, là, je ne lui prête pas d'intention d'aucune manière, mais il me semble que je n'ai rien dit qui pouvait indiquer ou suggérer que j'avais abandonné cette affaire-là, là. J'ai dit en Chambre, de l'autre côté, là où le salon est bleu, que c'était une bonne idée, cette affaire-là. On va le faire. Il n'y a pas de problème, on n'a pas abandonné l'idée, là. Il y a des travaux, d'ailleurs, qui sont en cours à cet effet-là. Moi, je ne faisais que mettre en relief, en perspective pas l'utilité, mais l'impact que ça a de mettre en... l'impact au sens où est-ce que le problème que voit le député de Lévis dans la situation des personnes âgées n'est pas nécessairement la réalité vécue par tout le monde pour les raisons que j'ai dites tantôt.

Le député de Lévis aussi nous disait, M. le Président, que la donnée n'était pas claire. Puis c'est vrai. Il va falloir faire le ménage là-dedans, j'en conviens très bien. Mais, pour que le député de Lévis comprenne exactement, par un exemple, la différence entre nos chiffres et ses chiffres, les chiffres du permis, je vais donner un exemple simple.

Régulièrement, on annonce des rénovations dans les CHSLD parce qu'ils sont vétustes. Il y a encore des CHSLD ou des endroits d'hébergement au Québec où les gens sont quatre, parfois six dans une chambre. Il y a une ou deux places là. On les rénove... Bien, ils ont un permis, là, mettons quatre personnes, quatre lits dans une chambre au permis, on les rénove : il y en a deux, il y en a une. Bon, c'est vrai, administrativement le permis n'a pas changé puis il aurait dû être changé. Alors, quand le député de Lévis fait une demande pour avoir, par exemple, le nombre de places, évidemment l'appareil va répondre les lits au permis. Alors que, moi, les statistiques que j'ai, ce sont les lits qui sont occupés au fil de l'année.

Alors, je conviens avec le député de Lévis, M. le Président, que l'outil dont on a parlé et auquel j'ai acquiescé, ça va arriver à destination, pas dans trois ans. Ça va arriver à destination, mais, de grâce, ne me demandons pas une date précise, avec une heure, et une adresse, et l'allocution à l'avance. Et, de l'autre côté, le ménage sera fait, sur le plan administratif, sur les lits au permis. Ça va permettre au député de Lévis d'accéder, d'avoir accès à une donnée qui soit précise et lui permettre ainsi de me poser des questions encore plus pointues.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, nous sommes maintenant sur un bloc du gouvernement, des collègues de la banquette ministérielle, et, pour une période de 17 min 15 s, je cède la parole à notre collègue de Chauveau.

Mme Tremblay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le ministre, si vous permettez, on pourrait peut-être revenir sur la discussion que nous avions tout à l'heure concernant les premiers jalons du financement à l'activité — on n'avait peut-être pas complété — c'est-à-dire définir un montant d'argent pour chaque parcours de soins d'un patient dans un établissement. Tout à l'heure on a parlé... bon, vous avez parlé des avantages du financement à l'activité plutôt que du financement historique. Maintenant, ce que j'aimerais connaître, c'est peut-être les prochaines étapes pour atteindre l'objectif.

• (16 h 10) •

M. Barrette : Oui. Alors, ça aussi, c'est une question qui est très importante pour la compréhension du grand public et même de nous, nous tous et toutes, comme parlementaires.

À partir du moment où nous entrons dans la voie du financement à l'activité, qui, encore une fois, est le chemin que les grandes organisations occidentales prennent depuis des années — là-dessus on est en retard — à partir du moment où on entre dans cette voie-là, bien, pour avancer dans cette voie-là, il faut avoir les outils appropriés. Le premier outil évidemment est de faire en sorte que l'on ait une mécanique de gestion de l'épisode de soins qui ait la précision nécessaire pour déterminer à la fois le coût du service et son suivi. Et là je m'explique.

Mme la députée, lorsque vous... M. le Président, lorsque Mme la députée a fait son introduction, elle se posait la question : Combien coûte une césarienne au Québec? Le prix moyen, je ne l'ai pas moi-même. J'ai une fourchette, mais le prix moyen, c'est difficile. Et ça, je peux dire ça pour à peu près n'importe quoi. Il y a des éléments, il y a des services pour lesquels on est capable d'avoir un prix assez... pas mal précis, d'autres où c'est très flou, que ce soit par la moyenne ou par la fourchette du prix. Et ça, ça vient du fait que notre méthode d'analyse de la donnée financière jumelée à la méthode d'analyse clinique est, à toutes fins utiles, je ne dirais pas inexistante mais pas loin, mais certainement plus près de la non-existence du côté de la précision que de la précision.

Et ça, ce n'est pas jeter le blâme sur personne, c'est l'héritage du financement historique. Le financement historique ne demandait pas ça. Le financement historique, c'est une somme globale, puis dites-nous les activités que vous faites, puis, si c'est à peu près comme on veut, bien, c'est comme on veut. Là, je caricature, là, on se comprend, là. Le financement à l'activité, ça ne permettait pas à un hôpital de faire 50 chirurgies de la hanche une année puis d'en faire zéro l'année d'après pour recevoir le même montant. Mais il y avait un niveau d'imprécision qui était beaucoup plus grand que le financement à l'activité comme tel.

Alors, pour faire le financement à l'activité, il faut donc avoir une mécanique et des outils qui le permettent. À la racine du financement à l'activité, encore faut-il identifier le coût unitaire moyen du service en question. Et, pour l'identifier, ce coût-là, c'est difficile de le faire dans notre système. Dans notre système, je viens de dire qu'on n'a pas les outils pour faire ça. C'est assez difficile de mettre en place le financement à l'activité basé sur un coût moyen mesuré à l'intérieur de notre système, qui, par ailleurs, peut avoir quelques autres points d'achoppement. Ça, c'est la raison fondamentale pour laquelle on a mis en place le fameux projet pilote par lequel on va potentiellement faire affaire avec une, deux ou trois cliniques indépendantes privées, là — le mot difficile à avaler, là, pour certaines personnes, «privées» — mais qui vont être publiques dans le financement, et dans les murs desquelles on va faire des procédures, des procédures qui vont être identifiées et qui vont se faire dans un environnement, évidemment, complètement fermé. Et, conséquemment, comme c'est un environnement complètement fermé, on va être capable de déterminer facilement quel va être le prix moyen d'une procédure.

Je donne un exemple. Imaginons qu'ici, dans le salon rouge du parlement, c'est vous et moi... ou nous tous, là, on s'est mis ensemble puis on a construit cette pièce-là, puis on sait ce qu'elle a coûté, puis on sait ce que ça coûte la chauffer, l'éclairer, l'assurer, et ainsi de suite. On le sait, là, on la construite. Il y a un investissement de départ, on le sait qu'on a construit ça pour 50 ans et on sait quels sont nos coûts afférents. Et là quelqu'un vient ici, là, puis on l'opère, on lui fait une prothèse de genou, on lui insère une prothèse de genou. Et là j'en fais, là, 75 pendant un mois. Bien, compte tenu du fait que, l'environnement d'ici, là, on connaît tous les facteurs de coût... Ensemble, on l'a construit, là, le salon rouge, on sait le coût. Des patients sont venus, on a vu entrer dans la pièce, ici, des points de suture, des prothèses, des gants stériles, des anesthésiques, et ainsi de suite. Et là il y a un patient qui rentre et qui sort. Bien, entre les deux, là, on va être capable de dire exactement ce qu'est le coût moyen de la procédure dans la mesure où le nombre de cas sélectionnés sont représentatifs de la population. Puis c'est ça qu'on fait dans ces cliniques-là.

Alors, dans ces cliniques-là, on va avoir un environnement idéal au sens des cours de chimie du secondaire, hein? Dans les cours de chimie du secondaire, on dit : Une solution idéale dans un environnement idéal. «Idéal», ça veut simplement dire qu'on contrôle tous les facteurs, on connaît la nature quantitative et qualitative des facteurs qu'on a à mesurer et là on dit : Voici, c'est le coût moyen.

Bien là, ce coût moyen là, là, pourquoi on ne serait pas capable de faire la même chose dans le public? Il y a une réponse à ça. Bien, il y a des hôpitaux publics, il y a des niveaux de complexité plus grands, donc il faut un coefficient pour adapter les montants en question. Des fois, il y a de l'enseignement, ça aussi, ça ralentit les choses. Donc, il y a un coefficient attaché pour des situations d'exception : les hôpitaux universitaires par rapport à un hôpital moyen. C'est tout.

À partir du moment où on a trouvé l'épisode de soins, son coût moyen avec un facteur d'ajustement pour prendre en considération l'hôpital universitaire, par exemple, bien là, on peut dire à chacun des hôpitaux du Québec, là : Quand vous faites une prothèse de genou, voici votre montant, vous êtes un hôpital communautaire standard, c'est ce montant-là, vous êtes un hôpital universitaire, c'est ce montant-là, majoré de tant. Vous êtes en région, vous n'avez pas de débit, on majore aussi de tant. Bien, ça, ça change tout.

Là, après, comme gouvernement, comme gestionnaire, là on peut regarder le Québec au complet de la même manière, dans la mesure où on a dans le réseau un système de gestion financière qui soit uniforme, dans lequel les données qui sont entrées sont entrées de la même manière.

Alors, le salon rouge, on l'a construit ici, là, mais, à côté, ils ont fait un salon vert. Il est deux fois plus petit, puis ils font deux fois moins de procédures, mais ils vont savoir aussi leurs entrées, là. S'ils ont le même système de mesure, là, de données financières et que tout est entré de la même manière, bien, la prothèse, elle va être rentrée dans le salon rouge de la même manière que la prothèse qui est faite dans le salon vert. Puis, dans la base de données, ça va être pareil. À la fin, on va regarder puis on va dire : Hum! Bien là, il y a une différence, et la différence n'est pas justifiée ou elle est justifiée.

Aujourd'hui, on constate que, pour certaines procédures... Parce qu'il y a des endroits au Québec où on a ça, mais ce n'est pas uniforme. Alors, dans les endroits où on a ça, où la donnée est entrée de la même façon, et où le système est similaire, et où tout est colligé, bien, malheureusement on constate qu'il y a des variations du simple au double, et même plus parfois, pour la même procédure, ce n'est pas normal. Ce n'est pas normal. En santé, on est dans un environnement où il n'y a pas grand-chose qui justifie qu'il y ait des variations de cet ordre-là. Il peut y avoir des variations, mais simple au double, non, surtout si on compare des milieux totalement comparables, là : hôpital communautaire, hôpital communautaire; groupes de clientèle du même âge au même âge; tel type de... Tu sais, on peut vraiment faire du comparatif d'égal à égal.

Alors donc, la condition pour faire du financement à l'activité, c'est d'avoir un outil de gestion de données financières qui soit uniforme. C'est la raison pour laquelle nous étions allés en appel d'intention. Et l'appel d'intention va être poursuivi par, probablement, un appel d'offres ou encore un dialogue compétitif, qui est une nouvelle façon de faire des appels d'offres, là, telle que prescrite par le Conseil du trésor, parce qu'il y a deux fournisseurs qui se sont, entre guillemets, qualifiés — «qualifiés» voulant dire qu'ils ont montré leur capacité de donner, de livrer un tel service — et on va aller chercher l'outil au meilleur coût possible, l'implanter et procéder à ça. Il y a un élément de plus, mais là il faut faire le lien.

L'élément de plus, c'est qu'évidemment, idéalement, il ne faut pas juste regarder le coût, il ne faut pas simplement tout ramener au dollar, il faut y adjoindre... le jumeler à la performance clinique : Est-ce qu'il y a eu plus de complications, moins de complications? Les patients sont-ils plus satisfaits à un ou à l'autre? Leur expérience de patient — même si on ne veut pas qu'il y en ait, d'expérience de patient, mais malheureusement ça arrive — est-ce que c'était plus satisfaisant à un qu'à l'autre? Parce que ça, ça montre aussi l'implication qu'un milieu peut avoir dans la qualité des services donnés. Bien, pour avoir accès à ça, bien, il faut l'autre volet, qui est le volet clinique, qu'on va venir jumeler — le Cristal-Net auquel je faisais référence dans la séance précédente — et ensemble, ces deux données-là, d'ici une couple d'années, on aura ça partout au Québec. Et, pour la première fois de l'histoire du Québec, le réseau va pouvoir être analysé objectivement d'un milieu à l'autre, et ce sera transparent envers la population.

La conséquence de ça, contrairement au financement historique, c'est qu'au lieu d'accepter des dépassements, qui sont des déficits, aveuglément, bien là, on va pouvoir, au contraire, dire à un milieu : Bien là, c'est parce que tu dépenses, là, puis la preuve est faite parce que les données sont transparentes. Il y a une amélioration que, dans votre milieu, vous devez apporter pour tel ou tel type de procédure. Parce qu'un milieu peut être très performant dans un secteur puis moins performant dans l'autre, mais un milieu peut être aussi non performant dans tous les secteurs, là. Et le milieu qui, lui, est performant, bien, peut-être que... Selon les formules qu'on déterminera à la fin, peut-être qu'ils en tireront un bénéfice en termes de performance pour faire autre chose, faire des choses différentes, faire des essais, faire de l'innovation.

Ça, c'est la façon dont on... c'est le chemin, donc, qu'on doit prendre pour arriver à une façon de gérer notre réseau de la santé d'une manière efficiente. «Efficiente», ça veut dire qu'on rentre dans nos budgets, on livre les services à la population et on a de la marge suffisante pour faire face aux besoins supplémentaires qui sont devant nous.

• (16 h 20) •

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup.

Une voix : ...la parole à ma collègue.

Le Président (M. Tanguay) : Oui. Alors, pour encore 5 min 45 s, la parole est à la collègue de Fabre.

Mme Sauvé : Alors, merci, M. le Président. M. le ministre, collègues, je vais essayer d'être rapide parce que je veux entendre le ministre sur tout le dossier de l'indépendance professionnelle des pharmaciens.

Alors, l'indépendance professionnelle, ça semble aller de soi, mais en même temps il y a une réalité qui est celle-là : le double rôle des professionnels de la santé et de commerçants qui prévaut chez une majorité de pharmaciens propriétaires. Alors donc, il y a bien sûr cette indépendance qui est là, mais en même temps la dualité des rôles. Autour de l'acte professionnel de pharmacien, en périphérie, il y a de nombreux acteurs qui sont là, que ce soient les sociétés commerciales, que ce soient, bon, les fabricants novateurs génériques, les assureurs, les grossistes. Bref, tout l'environnement tourne autour de l'acte professionnel du pharmacien, à travailler de la fabrication jusqu'à la sélection et vente du médicament.

M. le Président, il y a eu les consultations particulières autour du projet de loi n° 81 avec l'objectif de mieux comprendre tout le fonctionnement de la chaîne d'approvisionnement du médicament, du fabricant, encore une fois, jusqu'au pharmacien, afin de pouvoir envisager des économies, donc réduire le coût de certains médicaments pour les patients de tout le Québec.

Il y a eu lors de ces consultations Me Fernet, qui est avocat et pharmacien, qui est venu présenter et déposer son rapport. Et, parmi les constats qui ont émergé, il y a entre autres celui-ci : que «les pharmaciens propriétaires sont [...] majoritairement liés par contrat avec leurs partenaires d'affaires, que ce soit un grossiste ou une chaîne, une bannière ou un franchiseur».

Alors, j'ai hâte de vous entendre, M. le ministre, alors, sur les constats qui ont émergé, les liens avec aussi le rapport de Me Fernet. M. le ministre.

M. Barrette : Merci, Mme la députée... M. le Président. C'est un sujet très particulier, évidemment, l'indépendance du pharmacien pour plusieurs raisons. Et je vous dirais que la raison première, évidemment, vient du fait que, dans la chaîne du médicament, la personne qui a la plus grande responsabilité et le contact le plus étroit avec la clientèle, que sont des patients — parce qu'on parle ici de pharmaciens et donc de médicaments donnés à des patients — outre le médecin, c'est le pharmacien, qui a la plus grande proximité et la plus grande responsabilité dans la chaîne du médicament après, évidemment, la prescription.

Alors, je peux m'avancer à dire que, pour l'ordre professionnel des pharmaciens, c'est un enjeu qui est primordial. Et on le comprend, parce qu'on est ici dans la protection du public. Et, dans la responsabilité et, je dirais, dans la formation du pharmacien, il y a cet enjeu-là, là, qui est enseigné, et c'est intrinsèque à la fonction du pharmacien, et on parle ici évidemment du pharmacien d'officine, là. C'est la même chose dans l'établissement, mais la relation n'est pas nécessairement la même, là. Le pharmacien qui livre un médicament, qui sert un médicament au patient, bien, il a la responsabilité professionnelle de s'assurer que c'est le bon médicament, c'est le bon dosage. Il a la capacité professionnelle d'intervenir.

On se rappellera, là, nous, là, que nous avons passé une loi récemment qui obligeait l'utilisation... la substitution au générique, parce qu'il y avait un générique, mais il ne reste pas moins que le pharmacien garde un rôle clinique significatif. Par exemple, le pharmacien a la possibilité de s'enquérir de d'autres médicaments que le patient prendrait pour voir des interactions médicamenteuses. Il y a des informations qu'il doit donner au patient pour la prise du médicament, le suivi de la prise du médicament. Le patient revient, le pharmacien a la capacité de poser un certain nombre de questions. Bref, il y a une responsabilité professionnelle du pharmacien quant aux médicaments servis aux citoyens, ne serait-ce que par la substitution ou par la classe de médicaments. Ça nous amène évidemment à l'indépendance professionnelle du pharmacien.

Alors, on parle de quoi, quand on parle d'indépendance professionnelle? Est-ce que, si on mentionne «indépendance», ça veut dire qu'il y a des circonstances où le pharmacien ne serait pas indépendant? Bien, quand on lit le rapport de Me Fernet, qui, lui, a une longue expérience dans le monde de la pharmacie, force est de constater que, potentiellement, la réponse est malheureusement oui. Et, si la réponse est potentiellement oui, avons-nous des garde-fous suffisants pour préserver l'indépendance du pharmacien? Et, si je ne m'abuse, M. le Président, je suis peut-être rendu au bout de mon temps.

Le Président (M. Tanguay) : Une vingtaine de secondes encore.

M. Barrette : Combien?

Le Président (M. Tanguay) : 20 secondes encore.

M. Barrette : 20 secondes. Alors, lorsque je reviendrai dans ce bloc-là, je continuerai sur les circonstances que l'on a apprises pendant la commission parlementaire sur le projet de loi n° 81, qui nous ont indiqué que, potentiellement, il pourrait y avoir une attaque à l'indépendance du pharmacien, qui ne vient pas des pharmaciens eux-mêmes mais qui vient de leur environnement.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Maintenant, pour un bloc de 20 minutes, je cède la parole à notre collègue de Mercier.

M. Khadir : Merci, M. le Président. 20 minutes dont mon collègue ministre de la Santé peut faire l'usage qu'il veut, ça dépend de lui, de, comment dit-on, son sens de l'équilibre et de l'équité.

M. Barrette : Qui n'a d'égal que le vôtre, monsieur...

M. Khadir : Que le mien! Bien sûr, c'est reconnu. Alors, on sait à quel point les politiques d'austérité du gouvernement libéral ont...

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Khadir : Ah! ça commence bien, il y a une reconnaissance dans ce rire. Non, mais on en rit, mais ça cause beaucoup, beaucoup de problèmes. Plusieurs acteurs du réseau, des intervenants sociaux, des travailleurs sociaux, des directeurs d'établissement, des infirmières, des patients en ont témoigné au cours des dernières semaines. J'espère que le ministre ne traite pas ces témoignages à la légère. L'austérité, ça fait mal et l'austérité, ce n'est pas juste une... C'est quoi, le contraire de vertu? Vice? Ce n'est pas juste un vice libéral, ça fait 20 ans, 25 ans que des gouvernements successifs... pas seulement au Québec, je l'admets, ce n'est pas un problème uniquement au Québec, c'est une gangrène économique et politique qui a frappé l'Occident depuis 20, 25 ans sous l'impulsion des milieux économiques qui ont forcé le gouvernement à consentir des avantages indus au milieu financier, aux grands industriels, aux grandes fortunes de ce monde, qui expliquent... — et j'espère que le ministre ne remettra pas les données probantes de l'ensemble des acteurs économiques aujourd'hui qui le reconnaissent — qui ont accru les inégalités partout dans le monde, enrichi un faible pourcentage de la population et plongé les États dans les dettes et dans les coupures. Et ceux qui tirent les ficelles de l'économie ont aussi bien convaincu les libéraux que les péquistes ou que d'autres pouvoirs, même de socialistes en Europe, à appliquer ces mesures d'austérité.

Alors, on ne discutera pas de l'austérité, on va discuter de ses effets. Il y en a un qui est très clair, c'est que le Centre de prélèvement d'organes de l'Hôpital Sacré-Coeur, qui commençait à donner d'excellents résultats et améliorer la capacité du Québec à faire en sorte que, lorsqu'il est possible de prélever des organes sur des personnes décédées, et d'offrir à de nombreux patients au Québec la possibilité d'avoir un organe transplanté, et d'éviter de subir, par exemple, ici des traitements, là-bas des dialyses, on parle... Vous savez, les statistiques démontrent que la performance du Centre de prélèvement d'organes de Sacré-Coeur a fait en sorte qu'on prélève 124... le CPO prélève 124 organes par million d'habitants dans le territoire qu'il dessert actuellement, comparé à 45 là où il n'y a pas de CPO, où il n'y a pas de centre de prélèvement. Il y a à peu près quatre... en fait, 3,8 organes par donneur, comparé à 3,2 ailleurs. Ce n'est pas juste le nombre de prélèvements, mais aussi, sur chaque personne décédée où il est possible de prélever des organes, on en prélève plus.

Alors, j'aimerais savoir si le ministre, dans son budget, s'engage à renouveler le financement du Centre de prélèvement d'organes de Sacré-Coeur. Puis, en fait, aller même plus loin. Vous savez, il y a une vertu... même si on est persuadés des fois... j'ai le même problème, je pense que toutes les bonnes idées ne sont qu'à moi, toutes les bonnes idées m'appartiennent, et personne d'autre n'a de meilleures idées, mais des fois il y a des vertus à accepter, à valoriser les idées qui viennent des autres. Alors, j'aimerais que tous ensemble, ici, on accepte que le Centre de prélèvement d'organes, c'est une bonne idée qui a émergé au Québec et qu'il faut le soutenir, puis il faut même probablement le multiplier, pas juste à Sacré-Coeur. Si ailleurs au Québec on n'a que 45 organes par million d'habitants puis que, grâce au Centre de prélèvement d'organes, on a triplé ça, bien, qu'est-ce qu'on attend?

• (16 h 30) •

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, j'invite le député de Mercier à se caler bien confortablement dans sa chaise parce qu'il va être stressé, là, dans les prochaines minutes, parce que je pense que les gens qui nous écoutent vont se demander vraiment si je ne lui ai pas fourni la question pour m'avantager, là. Dans le langage parlementaire, on appelle ça une question plantée, là. Alors, je peux vous le dire tout de suite, M. le Président, je ne lui ai pas planté la question.

Alors, manifestement, le député de Mercier n'est pas informé de la naissance et de la croissance de ce sujet, alors je vais me faire le plaisir de le mettre à niveau, en commençant par la gestation du projet jusqu'à son adolescence, qui est aujourd'hui, on va dire ça comme ça.

Mais je vais commencer, M. le Président, par rectifier les faits... bien, pas rectifier les faits, ajouter un éclairage approprié. Bref, ouvrir la lumière sur la noirceur qu'a décrite le député de Mercier dans son introduction quant à la rigueur budgétaire du gouvernement du Québec.

J'ai ici devant moi — parce que ça, c'est comme mon livre de chevet, là, je regarde ça quasiment tous les soirs avant de m'endormir — j'ai ici l'évolution année sur année du budget de la santé depuis 1993, et les deux seules années où il y a eu une décroissance du budget sont les années du retour à l'équilibre budgétaire du Parti québécois. Je le sais, là, que la députée de Taillon ne sera pas heureuse que j'y fasse référence, mais c'est vous qui m'y invitez. Et malheureusement vous avez visé moi, mais vous avez tiré sur votre collègue de l'opposition officielle. Alors, il y a seulement deux années qui sont négatives et il y en a cinq qui sont inférieures à 1,5 %, dont quatre sur cinq qui sont inférieures à 1 %. Alors, ça, c'est la réalité.

Et les années dites libérales... Parce que le député de Mercier, M. le Président, a aimé me parler de mes côtés oniriques en termes de vice, mais ça, c'est lui qui le dit, là, mais il n'en reste pas moins que les années libérales de 2003 à 2013 ont été... ont vu le budget de la santé augmenter en moyenne de 5,3 %. Je sais que le député de Mercier n'a probablement pas retenu cet élément-là, je le disais ce matin, 5,3 %, M. le Président. On est loin du vice, là, et on est loin de l'austérité comme il le dit. Et, depuis que nous sommes en poste, la moyenne est d'environ 2,5 %. C'est ça, la réalité.

Alors, à un moment donné, là, c'est bien, là, on comprend le jeu politique de perceptions, de laisser circuler des informations qui vont qualifier les actions de la personne qui est en face, mais, M. le Président, vous ne me reprocherez certainement pas de corriger les faits. Le député de Mercier a parlé du vice de l'austérité libérale, alors que les chiffres montrent clairement que c'est exactement le contraire.

Puis je vais me permettre de répéter ce que j'ai dit ce matin, le taux de croissance de l'économie du Québec, dans les années où on avait une croissance de 5,3 % en santé, n'était même pas à la moitié de ça, même pas. Alors, il me semble que le gouvernement libéral a été généreux, peut-être même a manqué de rigueur, à la limite, parce qu'on s'est rendus à l'extrême de ce que l'on pouvait faire. Là, on rectifie le tir.

Et c'est d'ailleurs ce que voulaient faire les deux oppositions si elles avaient pris le pouvoir, ensemble ou séparément. On l'a fait, on a fait ce que les autres souhaitaient faire mais n'avaient pas proposé de plan. Nous, on a proposé un plan puis on l'a fait, je pense que c'est responsable.

Maintenant, le député de Mercier a fait l'introduction à laquelle je viens de répondre parce que c'était important de le faire et là il s'inquiète de la survie du Centre de prélèvement d'organes de l'Hôpital du Sacré-Coeur, donc du CIUSSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal. Alors, je vais lui... et je vais le faire pour tout le monde, je vais vous indiquer un peu d'où vient ce projet-là.

Le projet en question, parce qu'initialement c'était un projet... il vient de l'esprit, de l'implication et du dévouement d'un médecin et de son équipe, le Dr Pierre Marsolais. C'est lui qui est à la base de ça, un intensiviste de l'Hôpital du Sacré-Coeur avant la naissance des CIUSSS, c'est lui qui a eu l'idée, et c'est quelqu'un qui mérite le plus grand respect et l'estime de tous parce qu'il a réussi à faire quelque chose que personne... peut-être pas personne, évidemment, ce n'est pas personne, mais qu'il est difficile de faire. Ce n'est pas évident, faire ce qu'il a fait. Il a réussi à convaincre le personnel de son hôpital de volontairement se rendre disponible 24 heures par jour, sept jours sur sept, des équipes de pathologie, d'infirmières, d'anesthésistes, pour mettre en place le centre de prélèvement d'organes. Il fallait négocier ça, M. le Président. C'est moi qui l'ai négocié dans ma vie antérieure, et je l'ai négocié envers et contre tous, envers et contre certains médecins, envers et contre même, M. le Président, l'appareil gouvernemental, qui n'y croyait pas. Alors, je ne suis pas à l'origine de la gestation de ce projet-là, mais je suis au moment, dans l'histoire, de son accouchement. Et Dr Marsolais a mis au monde quelque chose avec moi, mais j'ai un rôle mineur là-dedans, mais j'ai cru à cette affaire-là. Et le CPO, le Centre de prélèvement d'organes, à Sacré-Coeur, a donné des résultats qui sont non seulement enviables, mais ils se comparent et, dans certains cas, dépassent les résultats du pays qui était le pays de référence en prélèvement d'organes, qui est l'Espagne.

Je peux dire, M. le Président, que, dans ce dossier-là, à la grande surprise du député de Mercier, je suis non seulement bilingue en CPO, là, mais je suis un poète de la chose, je peux vous en parler pendant trois heures — et je vous vois me recommander de restreindre mon intervention. Alors, vous comprendrez qu'avec ce que je viens de dire, M. le Président, l'enfant que j'ai accouché, mais dont la paternité est celle du Dr Marsolais, va grandir et continuer à vivre.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Collègue de Mercier.

M. Khadir : Ça aurait pu être un engagement court : Oui, on va continuer, on va le financer. Parfait. C'est bon.

M. Barrette : J'ai dit que j'étais le poète du CPO, là.

M. Khadir : Très bien. Vous avez dit que la croissance moyenne du système avait été de 5,3 %. Je signale au ministre que le vieillissement de la population, le développement de nouvelles techniques de plus en plus invasives, coûteuses, de nouveaux équipements, des médicaments de plus en plus coûteux fait en sorte que rendre des services à la hauteur des attentes de notre population... fait qu'annuellement la croissance des coûts fixes et des besoins du système sont de l'ordre de 6 %. Donc, quand on investit 5 % ou 5,3 %, on est en bas de ce qui est nécessaire juste pour rencontrer cette croissance normale des demandes, plus le fait que tout le monde maintenant sait, au Québec, après tout ce qu'on en a dit au cours des dernières semaines, qu'une bonne partie de cette augmentation octroyée au financement du système de la santé est allée... a été absorbée par la croissance des revenus de vous et moi, mon cher collègue, nous, les spécialistes, qui avons vu notre rémunération augmenter de 80 % — ça, c'est des statistiques de l'Institut canadien d'information en santé sur la rémunération des médecins — et d'à peu près 40 % depuis 2007 pour les médecins omnipraticiens. Donc, quand on dit ça, ça veut dire que quelqu'un quelque part a été privé de quelque chose dans le réseau. Ce n'est pas les médecins, ce n'est pas les médicaments très chers, ce n'est pas les équipements très chers qu'on achète à l'étranger, à des grandes entreprises, c'est les patients, c'est les infirmières dont on ne reconnaît pas à leur juste titre la pratique, c'est les pharmaciens qu'on ne laisse pas occuper une plus grande place puis qu'on n'est pas capables d'absorber parce qu'il y a des blocages et parce qu'on pense que ce n'est pas le financement... En tout cas, donc, le 5,3 %, c'est quand même une austérité quand on regarde les choses avec un peu plus de rigueur. Parce que vous avez parlé de rigueur.

• (16 h 40) •

Je voudrais vous parler soins à domicile, lacunes et attentes, lacunes dans le service et les carences majeures, les nombreuses attentes. Plus de 16 000 personnes, actuellement, sont en attente de services de soutien à domicile au Québec. Pour beaucoup d'entre elles et d'entre eux, c'est des situations très, très alarmantes, très préoccupantes, que ce soit pour leurs bains, que ce soit pour leurs déplacements. Moi, je connais, par exemple, une patiente qui pouvait avoir quelqu'un à domicile pour la coucher, une patiente en chaise roulante, de sclérose en plaques, maintenant le CLSC ne peut plus lui envoyer que quelqu'un aux environs de 6 heures. Donc, cette personne-là, là, on lui demande, dans sa vie, d'organiser sa vie pour être couchée à 6 heures, le soir, dans son lit. Alors, qu'est-ce que vous pensez qui est arrivé? Elle a fini par se dire : Je ne peux pas faire ça, je ne peux quand même pas me coucher à 6 heures parce que le CLSC ne peut pas m'offrir... Donc, elle est restée sur sa chaise roulante pendant des mois et des mois, il y a eu des plaies de lit qui se sont formées, des infections graves de l'os avec des bactéries résistantes, elle a fini à Notre-Dame. J'ai dû intervenir pour la convaincre, qu'elle accepte... Parce qu'elle était d'origine iranienne. Elle était désemparée, elle ne voulait pas qu'on lui coupe la jambe, j'ai dû intervenir. Et, malgré tous les soins qu'on a voulu donner, il n'y a pas eu d'autre choix que de lui couper la jambe, M. le ministre. On est devant cette situation-là.

Alors, j'espère que la réponse va être, disons, plus engagée et engageante pour dire... On a besoin d'une confirmation de votre part qu'au lieu d'investir, dorénavant, dans les réformes de structure vous allez faire quelque chose de solide, parce que l'argent qui est promis actuellement n'est pas suffisant. La FADOQ, les différents organismes, Ex aequo, tout le monde demande une augmentation du financement. Je pense qu'il faut aller là, M. le ministre.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bien, M. le Président, évidemment, là, il y a, encore une fois, là, deux éléments dans la question — trait d'union — commentaire du député de Mercier. Alors, je vais commencer par commenter le commentaire.

L'augmentation de coût de système de 6 %, évidemment, ça, c'est inexact. Alors, c'est absolument non fondé, ça peut être plus de la catégorie du souhait que du fait. Bon. Et je m'explique, M. le Président.

L'augmentation du coût de système réelle, là, réelle, un coût de système, là, réel, c'est ce que l'on faisait l'année d'avant qui reste la même chose l'année d'après et pour lequel il y a une augmentation de coûts parce qu'il y a le coût de la vie, il y a le coût des fournitures, il y a le coût des salaires, il y a la progression dans les échelons. Ça, c'est ce qui est incompressible. Ça, c'est comme ça, là. Alors, les taxes vont augmenter, municipales, la taxe d'eau, l'électricité, et ainsi de suite, là. Ça, c'est un coût de système de base, c'est incompressible. On vient de terminer une négociation avec le secteur public, il y a des augmentations, et ça, c'est incontournable, c'est sûr que le budget doit augmenter de ça.

Ce que je viens de décrire, qui est le coût de système absolu, c'est de l'ordre de 2 %, moins, en fait, que ça. C'est ça, la réalité, là. Alors, les échelons, les augmentations de salaire, le coût de la vie, tout ça, c'est ça que ça représente. Alors, ce n'est pas 6 %.

Quand on veut tenir un raisonnement qui dit que les coûts de système sont de 6 %, bien là, on introduit des notions qui ne sont pas nécessairement vérifiées avec exactitude mais qui correspondent à certaines réalités souhaitées. C'est sûr, M. le Président, que, si tout le monde veut avoir accès à une technologie de pointe non vérifiée, non validée, mais on veut l'avoir dans son hôpital parce que c'est ça qui est à la mode dans la recherche, bien, moi, j'en ai connu, des technologies comme ça, qui sont devenues obsolètes cinq ans après, là, hein? Quand on pense, par exemple, au shunt porto-cave intrahépatique là, c'est des choses que je faisais, là, ça a duré cinq ans. Tout le monde voulait faire ça. On n'en fait plus, on n'en fait plus nulle part, sauf de temps en temps à l'Hôpital Saint-Luc. Ça existe, ça, et le député de Mercier, qui est médecin comme moi, sait très bien de quoi je parle. Alors, c'est sûr, M. le Président, que, si on dit que les coûts de système, c'est oui à tout, bien là, tant qu'à faire, on va dire que c'est 10 % par année, là.

Alors, les coûts de système, M. le Président, ils commencent aux alentours de 2 %, pas de 6 %. Alors, quand on met 5,3 %, là, croyez-moi, on a satisfait aux exigences de bien du monde.

Alors, je voulais rectifier cet élément-là parce que, le député de Mercier... puis je le comprends, là, c'est une manière d'aborder les choses que moi-même, j'ai déjà utilisée, on prend un exemple d'un cas particulier qui est dramatique... Et ce que le député de Mercier a raconté est un exemple dramatique mais qui n'est pas nécessairement lié à la situation budgétaire du Québec, là, ce n'est pas... Je vais peser mon mot, je ne sais même pas si c'est parlementaire, là, mais je pense que c'est fallacieux de faire ça. Mais je ne veux pas insulter le député de Mercier, mais là il y a des limites à tout. Mais on est dans la joute parlementaire.

Une voix : ...

Le Président (M. Tanguay) : Oui, collègue de Mercier.

M. Khadir : Ce serait fallacieux si j'étais le seul à le dire, mais, juste au cours des derniers mois, il y a eu des centaines de personnes, des associations de patients, des infirmières, des directeurs d'établissement du réseau, des gens qui ont témoigné. Alors, il faut arrêter de nier les choses, là. La baisse de...

M. Barrette : ...c'est moi qui avais la parole, là, mais... je vais la reprendre. Ce n'est pas parce que même tout le membership de Québec solidaire dit qu'il y a un lien qu'il y a un lien, là.

M. Khadir : O.K. Ça, c'est tous des membres de Québec solidaire. D'accord.

M. Barrette : Alors, ça...

Le Président (M. Tanguay) : Un à la fois.

M. Barrette : ...ça, c'est une autre affaire. Bon.

Le Président (M. Tanguay) : Il reste une minute à l'échange. M. le ministre, je vous invite à conclure.

M. Barrette : Je vais continuer, puis peut-être que je pourrai continuer après, avec le consentement de mes collègues. Mais là arrive la question des soins à domicile. M. le Président, là, c'est sûr que c'est un enjeu pour les prochaines années, il n'y a pas de doute. Personne ne conteste ça, et certainement pas moi, là. Mais d'insinuer d'une quelconque manière que nous n'avons pas investi dans ce secteur-là... Et je vais résumer mon commentaire à des données qui sont très simples, là. Quand on regarde la croissance des soins à domicile en dollars et en heures de services depuis notre arrivée, là, jusqu'à aujourd'hui, c'est des augmentations substantielles. De 2013-2014, où on est arrivés, à 2014-2015, c'est une augmentation de 74 millions de dollars, 6 % d'augmentation. En heures de services, c'est quelque chose du même ordre. En nombre de personnes desservies en soins à domicile, toutes catégories, c'est 6 000 personnes de plus.

Le Président (M. Tanguay) : ...le consentement, évidemment, des collègues de la banquette ministérielle, nous sommes sur votre temps. Alors, veuillez poursuivre, M. le ministre.

M. Barrette : Alors, on s'entend, M. le Président, là. Est-ce qu'on est actuellement rendus à l'idéal? La réponse, c'est non. Est-ce qu'on fait les efforts que l'on doit faire, évidemment, comme toujours, à l'intérieur de nos moyens pour y arriver? La réponse, c'est oui. Est-ce que, dans les prochaines années, on aura à faire plus? La réponse, c'est oui, et c'est la raison pour laquelle il était important pour nous de revenir à l'équilibre budgétaire, pour justement... Et je termine là-dessus pour laisser la parole à mes collègues du groupe parlementaire qui forme le gouvernement. Alors, c'est la raison pour laquelle, M. le Président, et je termine là-dessus, il est beaucoup plus utile pour la société de mettre moins d'argent sur la dette et plus d'argent dans les services que le contraire. Et je suis convaincu que, dans son for intérieur, dans son fond, loin, loin, loin, là, le député de Mercier est, en quelque part, d'accord avec ça, mais il ne peut pas le dire. Mais ce n'est pas grave.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, nous sommes maintenant sur un bloc des députés de la banquette ministérielle pour une période encore de 18 min 25 s. Je cède la parole à notre collègue de Fabre.

Mme Sauvé : M. le Président. M. le ministre, dans le fond, vous aviez commencé à nous parler des constats qui émergeaient des consultations particulières pour le projet de loi n° 81, je sais que vous aviez commencé à nous parler un peu de l'impact de l'environnement des pharmaciens en lien avec leur indépendance professionnelle. Alors, les grands constats, vous aviez commencé à nous en parler. Je veux vous entendre, M. le ministre, poursuivre sur cette question-là.

• (16 h 50) •

M. Barrette : Alors, je vais continuer, donc, sur cette lancée-là. Alors, Me Fernet, qui a été, lui, selon... Si mes informations sont bonnes, il est avocat, spécialisé dans le droit pharmaceutique, mais il a déjà été président de l'Ordre des pharmaciens, alors c'est une personne qui a une expérience et une expertise qui le positionnent très favorablement pour faire les commentaires qu'il a faits. Il a produit un document, d'ailleurs, qui a été utilisé par l'Ordre des pharmaciens, document dans lequel il a posé un certain nombre de questions. C'est un document qu'il a déposé en juin dernier, alors c'est récent, donc, c'est d'actualité. En commission parlementaire sur la loi n° 81, il est venu faire état de ça, il a répondu à nos questions et il a renchéri sur ce qu'il a écrit. Il a lui-même parlé de «la dualité [et la problématique] — c'est mon mot à moi, là — des rôles de professionnel de la santé et de commerçant», c'est ses mots, là, «la dualité des rôles de professionnel de la santé et de commerçant». Et, selon ses mots, ses termes, ça prévalait chez la majorité des pharmaciens propriétaires en officine, c'est-à-dire dans la communauté, et il a donné un certain nombre d'exemples où l'indépendance du pharmacien pouvait être mise en cause. Et là je pèse mes mots, là, je ne veux pas lancer la pierre à l'ensemble de la profession, là, je veux simplement aller dans la direction d'une chose bien simple, là : l'environnement dans lequel les pharmaciens propriétaires oeuvrent est un environnement qui leur impose une pression importante, une pression professionnelle et financière qui peut, dans certains cas, avoir un impact sur leur indépendance professionnelle.

Il y a eu un sondage qui a été commandé par l'ordre des pharmaciens propriétaires... l'Ordre des pharmaciens du Québec, qui est récent, là, c'est très récent, ce sondage-là, ce n'est pas à l'époque de M. Fernet. C'est un sondage où on posait une question — et ici, là, cette colonne-là, c'est le total puis c'est les deux autres groupes — on posait une question simple, on posait une question aux pharmaciens propriétaires, aux 3 000, à peu près, pharmaciens propriétaires qui... aux pharmaciens, c'est-à-dire, qui ont répondu au sondage : Est-ce que votre franchiseur, chaîne, bannière cherche à limiter ou à orienter la sélection des médicaments génériques à servir aux patients? L'indépendance du professionnel, là, l'indépendance professionnelle du pharmacien, c'est aussi ça. Est-ce que des sources externes ou des acteurs externes peuvent avoir une influence sur le choix du pharmacien du médicament à servir aux patients? Plus de la moitié des répondants ont dit oui, et ils ont dit oui à propos... parce que la question, c'était à propos du franchiseur, de la chaîne ou de la bannière. Ce n'est pas banal, ce n'est vraiment pas banal.

Cette semaine, il est sorti un article, attendez que je le retrouve, un article à 100 000 $, un article qui est paru dans LeJournal de Montréal pas plus tard que le 19 avril, ça, c'était mardi ou mercredi, mardi de mémoire, où on disait que les pharmaciens... Et je cite l'article de journal de M. Éric Yvan Lemay : «Tous les pharmaciens propriétaires affiliés à Uniprix devront verser une cotisation supplémentaire de 100 000 $ par année.» Ça, c'est au même moment où le député de Rosemont se lève en Chambre... dire que moi, je mets en péril la survie des pharmaciens. 100 000 $ de cotisation, ce n'est pas rien, là, ce n'est définitivement pas rien.

Je continue dans l'article : «Cette cotisation s'ajoutera à celle déjà payée par les pharmaciens, qui correspond à 2,5 % des ventes brutes effectuées annuellement.» Il y en a déjà une, cotisation, puis là il y en a une de plus. La dernière, la 2,5 %, c'est limité à un maximum de 93 000 $. Là, c'est 100 000 $ plus 93 000 $, ce n'est pas banal.

Là arrive l'autre sens, l'argent s'en va dans un sens, là, puis l'argent revient de l'autre bord : «...la cotisation [...] de 100 000 $ sera réduite si le membre respecte les politiques et programmes mis en place par Uniprix. Il sera crédité — donc il y a un retour — en fonction du respect de ces politiques et programmes.» Un peu plus loin, on explique la chose : «...Uniprix veut notamment — notamment — [...]que les pharmaciens s'approvisionnent en priorité auprès de cinq fabricants de médicaments génériques choisis par la bannière», la bannière, c'est Uniprix. Wow! C'est quelque chose, ça. Les cinq fournisseurs privilégiés, ils ont été identifiés et, selon nos informations, ils ont un lien contractuel avec la bannière.

Alors là, les pharmaciens, on dit dans l'article, devaient respecter le pourcentage d'achat de génériques en échange d'avantages financiers provenant d'Uniprix. Alors là, je mets tous les bémols nécessaires, je cite un article, mais on a un sondage qui dit quelque chose qui ressemble à ça, on a un article qui dit exactement ça et on a une commission parlementaire sur la loi n° 81 où tous les acteurs sont venus nous dire, sans le chiffrer, essentiellement ça. Là, il y a des questions à se poser, là.

Une voix : ...

M. Barrette : Pardon?

Une voix : ...

M. Barrette : Et là, ici, M. le Président, la question de l'indépendance se pose. Mais qui est la personne qui est la plus désavantagée dans cette chaîne-là? C'est le pauvre pharmacien. Et lui, lui, là, il est pris.

Et là on va résumer un peu le monde du médicament. Les gens ne savent probablement pas, là, que ce que l'on a comme agent médicalement actif, dans un médicament, c'est essentiellement une poudre. C'est de la cuisine, faire un médicament, là, il y a une farine qui est la molécule active que l'on a dans le comprimé. Bien, ça, c'est fourni par un pays, en général, à l'extérieur du Canada, parfois ici, disons que c'est un mélange. Ça s'en va chez un fabricant, qui en produit sous une présentation quelconque : une pilule, un comprimé, une capsule, un injectable. Ce fabricant-là, lui, là, il doit faire affaire avec des liens contractuels, donc des profits, des pertes, avec un grossiste, qui, lui, a des ententes contractuelles, commerciales avec une bannière, qui, elle, a une entente commerciale et contractuelle avec le pharmacien. Et là tout le monde, là, là-dedans fait sa cote, son profit, et il y a quelqu'un en quelque part qui paie. Et tout le monde dans ce chemin-là, là, a des figures imposées à son partenaire qui ont un impact financier et qui ont des conséquences négatives si les contrats ne sont pas respectés.

Or, ça s'adonne que, le début de la chaîne, on sait c'est qui. La fin de la chaîne, ce n'est pas simplement le patient qui... ce n'est pas juste ça, c'est le pharmacien. Le pharmacien, on l'a vu dans l'article, là, puis on nous a tout confirmé ça, sans le quantifier, dans la commission parlementaire, il y a des choses imposées, des programmes de conformité, des programmes d'achat, des obligations. On l'a vu, là, dans l'article de M. Lemay, là : si vous n'achetez pas de ces cinq fournisseurs-là, vous n'allez pas avoir votre 100 000 $. Ça, ça veut dire que le pharmacien, là, il pourrait peut-être acheter ailleurs à moins cher puis vendre à moins cher, mais, non, il faut qu'il achète... parce qu'il a mis 100 000 $ de l'autre bord, puis ça ne reviendra pas chez lui sous une forme de ristourne. Puis ça, je n'ai pas parlé des ristournes qui viennent des fournisseurs, là, parce que c'est une autre affaire.

Alors, c'est un environnement, là, qui est très particulier auquel la loi n° 81 veut s'attaquer, j'en suis convaincu, à la satisfaction du député de Mercier — peut-être pas à la satisfaction — pour l'intention du moins, on verra pour le résultat. Mais le pharmacien, là, qui est l'objet de votre question, est-ce que son indépendance est menacée? La réponse, c'est oui. Et l'article de M. Lemay, qui corrobore ou qui est corroboré largement par les témoignages qu'on a eus en commission parlementaire... vont dans la direction du sondage qui dit que, oui, chaîne, bannière, grossiste, oui, oui, oui, dans la moitié des répondants, ça a une influence sur l'indépendance du pharmacien.

L'indépendance du pharmacien, là, bien c'est sa responsabilité professionnelle. Sa responsabilité professionnelle, c'est de servir le meilleur médicament en ayant pris en compte les informations cliniques qui viennent du patient, les interactions médicamenteuses, et ainsi de suite. La députée de Taillon pourrait nous en parler largement, elle a déjà été elle-même présidente de l'Ordre des pharmaciens.

Est-ce que l'indépendance du pharmacien est menacée? La réponse, c'est oui. Elle est menacée par un jeu commercial, contractuel dans lequel sont pris les pharmaciens.

Là, vous pourriez me dire : Bien, ils n'ont rien qu'à ne pas aller là. Bon, ça, c'est un autre enjeu, là, mais aujourd'hui force est de constater, experts à l'appui... Me Fernet, là, c'est un expert. Il a été dedans, il a été dans l'ordre, il est avocat, il a négocié, il a vécu ça, il sait de quoi il parle. La commission parlementaire a montré la même chose, puis vous avez des articles de journaux. Alors là, c'est là où on est.

Bon, c'est quoi, la conséquence de ça, à part l'incidence sur la menace du pharmacien en termes de son... sur l'indépendance du pharmacien? Bien, la conséquence, c'est que cette chaîne-là, là, elle induit un coût au système. Et qui paie le coût? C'est le gouvernement, et donc les citoyens, parce que, comme je dis toujours, l'État, ça n'a pas de compte de banque, à l'exception du Fonds des générations, qui existe pour les générations futures, c'est un investissement.

Je fais un petit éditorial : Ne faisons pas l'erreur de la cigale albertaine. Elle s'est construit un fonds des générations qui était le Heritage Fund, elle l'a dilapidé pour qu'il n'y ait pas de taxe, mais, l'automne venu, qui est maintenant, elle trouve ça moins drôle. Et là tout monte. Alors, ça, c'est une erreur. Alors, le Fonds des générations, il est là pour ça.

Alors, le gouvernement, ça n'a pas de compte de banque. Alors, quand les médicaments nous coûtent trop cher parce qu'il y a une chaîne plus ou moins occulte de coûts, et qu'on connaît, qu'on a vue, qui a été dite, bien, à un moment donné, quelqu'un doit agir, et c'est ce que l'on fait avec 81. Donc, à la question : Y a-t-il une menace à l'indépendance professionnelle du pharmacien?, la réponse est oui.

• (17 heures) •

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Collègue de Beauce-Sud, pour encore 5 min 40 s.

M. Busque : Merci, M. le Président. Alors, chers collègues, M. le ministre. Alors, M. le Président, je pense qu'on peut affirmer que la grande majorité des Québécois ont, à une ou plusieurs occasions, constaté le coût très élevé des médicaments. Je crois qu'il a été démontré que le coût des médicaments était plus élevé au Québec qu'ailleurs. Depuis plusieurs années, les provinces et territoires du Canada ont cherché à agir sur le prix des médicaments. Afin d'atteindre l'objectif de réduction de coût des médicaments, l'implantation d'un système d'appel d'offres peut représenter la solution. D'ailleurs, en commission parlementaire, comme vous l'avez mentionné, à laquelle j'ai assisté, on nous a clairement établi que c'était un système qui pouvait très facilement être installé, et que ça fonctionnait déjà dans certains établissements, et que ça générerait à coup sûr des économies.

Alors, nous sommes conscients de la part des médicaments dans le coût des soins de santé au Québec. Les appels d'offres vont permettre de réduire les coûts afin qu'ils soient plus représentatifs de la capacité de payer des contribuables et également plus représentatifs d'une saine compétition entre les fabricants, les grossistes ou autres partenaires. D'ailleurs, M. le ministre, Mme la députée de Taillon a affirmé que l'implantation d'un tel système pourrait faire économiser des centaines de millions aux Québécois.

M. le ministre, puisque nous sommes convaincus des gains substantiels que devraient générer les appels d'offres, pourriez-vous, M. le ministre, nous partager votre vision de l'ajout de ce mécanisme d'appel d'offres, ainsi que de ses avantages?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Alors, vaste question, et j'ai quasiment envie de laisser mon temps de parole au député de Mercier, qui, sans aucun doute, aimerait s'exprimer sur le sujet. Mais je vais quand même prendre la parole malgré tout et je vais commencer par vous dire une citation, une citation récente, une citation qui date du 23 mars 2015, en entrevue au 96,9 FM, et la citation, elle est celle-ci : Un processus d'appel d'offres permettrait de réaliser des économies de plusieurs centaines de millions de dollars. L'auteure de la citation est la députée de Taillon.

Alors, c'est dire que, sur la finalité d'un appel d'offres, normalement le gouvernement et les oppositions devraient être sur la même page. Je pense qu'on devrait être sur la même page et je suis sûr que, si je donnais la parole à cette étape-ci au député de Mercier, il dirait qu'il voudrait, lui, l'écrire, la noircir, la page, parce qu'il va être bien d'accord. Alors, tout le monde s'entend sur le potentiel d'économies d'un appel d'offres.

Lorsqu'on était en commission parlementaire, rappelons — de mémoire, c'était à la demande de Québec solidaire — qu'un officier du gouvernement néo-zélandais ou représentant du gouvernement néo-zélandais est venu nous parler de leur expérience, à eux, des appels d'offres au fil des années. Et force est de constater que c'était assez spectaculaire, pas nécessairement reproductible ici, pour toutes sortes de raisons, là, sur lesquelles je pourrai élaborer ultérieurement.

Mais je vais prendre la dernière minute qui reste pour introduire ce sur quoi nous continuerons peut-être... à moins que les oppositions décident de continuer d'elles-mêmes, mais on a constaté que, dans le monde du générique... Et, les gens qui ne sont pas familiers avec ça, là, on va juste dire c'est quoi, un générique. Un générique, c'est une copie qui a une efficacité comparable à un médicament d'origine, et nos régimes font en sorte que les génériques se vendent à une fraction du prix d'origine. Et quelle est la fraction ultime qui va faire en sorte que le vendeur va y trouver son compte, et évidemment le payeur? Bien, en Nouvelle-Zélande, ça pouvait descendre jusqu'à 4 % du médicament d'origine. Ici, là, on n'est pas là, là, on est entre 18 % et 80 %.

Alors, c'est clair, là, qu'il y a de la marge, mais qui profite de la marge? Bien, au moment où on se parle, ceux qui profitent de la marge sont entre le fabricant et le patient puis, juste avant, le pharmacien. Là, le pharmacien, oublions-le, là. Lui, il ne profite de rien de ça, là. Le pharmacien, là, qui vend, là, il ne profite pas de grand-chose. Peut-être qu'il profite, là, mais ce n'est pas là que l'économie doit être au maximum. Il y a d'autres manières, là, d'aller chercher des sous là, mais, sur la question du prix, la marge, elle est entre les deux... — et là je pense que je suis rendu au bout de mon temps, M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : Oui, il reste 30 secondes.

M. Barrette : ...bien, 30 secondes — alors, d'où la question de l'appel d'offres. Nous avons eu des gens qui sont venus nous dire, expérience à l'appui, que le potentiel d'économies est énorme. Alors, à nous d'entrer là-dedans et de le faire d'une telle façon qu'on va avoir l'économie, tout en préservant la disponibilité et la sécurité, et du médicament administré et de l'approvisionnement. Alors, c'est ça qui est notre enjeu. Mais, dans tous les cas de figure, il y a, à mon avis, des économies substantielles à aller chercher.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Maintenant, je cède la parole à notre collègue de Taillon pour une période de 21 minutes.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je voudrais reparler — c'est un sujet qui a été évoqué par l'équipe du gouvernement — du financement axé sur le patient. En fait, le ministre parle beaucoup de financement à l'activité. Quand on parle de financement à l'activité, on est plus circonscrit dans un contexte où on peut déterminer une activité généralement plus hospitalière. Le financement axé sur le patient conçoit également que, par exemple, si on déploie des soins à domicile plus appropriés, on peut engendrer aussi des économies et que tout ça, ça entre dans un contexte de financement beaucoup plus global. Mais, pour les fins de l'exercice, on va rester à l'expression «financement à l'activité».

Simplement dire que le Parti québécois... Et donc je cautionne tout à fait le support par rapport à cette activité, à cette façon de déterminer le prix le plus approprié possible pour des interventions que nous faisons. D'ailleurs, le ministre des Finances, Nicolas Marceau, avait provisionné 15 millions de dollars en 2014-2015 et 40 millions de dollars en 2015-2016 pour permettre l'acquisition de systèmes d'information qui permettraient le financement axé sur le patient. Et donc c'est un peu étonnant que, 20 mois plus tard, le ministre dise que, tout à coup, pour réaliser ça, ça lui prend une entente avec une firme et que, là, ça prend une entente de gré à gré avec simplement un avis d'intention, et non pas un appel d'offres normal.

Juste avant d'entrer un peu plus en détail : donc, accord sur le financement axé sur le patient. Deuxième élément, je veux tout de suite dire que je ne vise pas du tout une entreprise particulière dans ce dossier-là ni les experts qui sont à son emploi ou qui y participent. Par contre, je pense qu'on est tous ici pour gérer l'argent des Québécois, et on doit s'assurer que les règles fondamentales qui nous assurent que l'argent qui va être consacré et que les sommes qui vont être distribuées vont être appropriés.

Alors, dans ce contexte-ci, d'abord, j'aimerais préciser... Parce que, quand on regarde l'avis d'intention qui nous a été fourni, et qui est intéressant, là, donc, quand on le regarde, on voit qu'il y a, dans cet avis d'intention là, une phrase qui justifie le choix de l'entreprise Logibec, à la page 5 de 9, en disant que les critères qui justifient sont «le respect du délai imparti et l'expertise requise pour assurer une reconstitution complète de la trajectoire de soins et de services et des coûts y étant associés en fonction de la consommation réelle». On a aussi annoncé que Logibec était déjà impliqué dans 51 établissements, donc il y avait déjà de l'information, et des expertises, et un déploiement d'une activité similaire.

Alors, j'ai quelques questions en lien avec ce contexte-là. Première question : Est-ce que d'autres compagnies ont déposé des dossiers à un coût inférieur ou égal à Logibec?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

• (17 h 10) •

M. Barrette : Alors, M. le Président, je vais revenir un peu sur l'introduction, évidemment, qu'a faite la députée de Taillon. Alors, je suis content de constater qu'elle va donc appuyer la démarche, à la lumière de ses commentaires. C'est une bonne chose, parce que ça aurait été tout un revirement d'aller à l'encontre de la position qu'avait prise le ministre des Finances du Parti québécois d'avant. Alors, je suis bien content qu'elle soit en faveur que nous allions dans cette direction-là.

La différence entre nous, évidemment, et le Parti québécois lorsqu'il était au pouvoir, elle commence par le fait que le Parti québécois n'avait pas fait un état des lieux du Québec quant à la possibilité de faire la chose, et nous avons été totalement, totalement transparents dans notre démarche, et nous avons respecté toutes les règles qui existent au Québec et qui ont été nouvellement mises en place par le Conseil du trésor quant à l'octroi de contrat. Nous avons constaté, et je pense que le ministre des Finances précédent, le député de Rousseau, ne savait probablement pas, puis je suis sûr que le ministre de la Santé, lui, ne le savait pas, parce que lui, il n'est pas très, très versé sur ce genre de choses là, ne savait pas que nous avions, au Québec, une compétence qui était reconnue même à l'international en termes de financement à l'activité.

En réalité, il y a une compagnie au Québec de laquelle nous sommes clients, nous-mêmes, dans à peu près le tiers du réseau, qui fait ce genre d'activité là et qui le fait très, très bien. C'est une PME du Québec, c'est une PME locale qui a été appuyée par Investissement Québec, qui a été décrite comme étant une des meilleures entreprises dans le secteur par leurs pairs, ils ont reçu des prix de la part de leurs pairs il y a quelques années, c'est vraiment une excellente PME qui, malheureusement pour le Québec, vend plus à l'extérieur du Québec qu'au Québec pour le même type de produit. Bon.

Ayant constaté ça, et voulant évidemment respecter les règles d'attribution de contrats, et ayant constaté que la compagnie à laquelle je fais référence a été achetée par une autre, qui est Logibec, on a décidé d'aller de l'avant avec ce qui était permis dans notre réglementation, c'est-à-dire de publier un avis d'intention. Un avis d'intention, contrairement à ce que la députée de Taillon laisse entendre, ce n'est pas un contrat de gré à gré, mais c'est un avis qui exprime l'intention d'aller vers un contrat de gré à gré si personne ne se manifeste comme étant capable de faire une proposition d'un produit comparable qui remplit le même objectif.

Alors, je vais le répéter, M. le Président, là, nous avons dit à l'univers, parce qu'il y a un site électronique d'appel d'offres, là, le SEAO, qui est un site où on publie sur l'Internet à l'univers au complet, là, les Chinois peuvent appliquer là-dessus, là : Voici ce qu'on a l'intention de faire et puis voici où on s'en va. Et l'avis d'intention disait ça : Voici ce qu'on veut faire, on veut faire de la mesure d'activité, de coût à l'activité axée sur le patient, c'est la même chose. Et, si vous êtes capable de faire ça, vous avez un système de gestion de l'analyse financière qui nous permet de le faire, bien, venez. Puis, s'il n'y en a pas, là, on va aller dans un contrat de gré à gré avec la compagnie québécoise que l'on connaît, qui le fait déjà, qui l'a montré. Et c'est ça.

On a donné 30 jours, selon les règles d'octroi de contrat au Québec, c'est nos règles. On doit, quand on fait ça, donner un avis transparent, public, ouvert de 30 jours, un avis d'intention, ce qui a été fait. Et, à la fin, il s'est adonné que deux compagnies... il y en a plus que deux, là, mais il y a deux compagnies qui ont répondu de façon conforme aux éléments qui étaient requis pour faire un pas de plus. Il y en a deux.

Mais je vais juste terminer, M. le Président... C'est important, parce que ça, c'est le coeur de la question de la députée de Taillon. Elle me demande s'il y a une autre compagnie qui est arrivée avec un prix inférieur à Logibec. Ça, c'est sans objet parce que l'avis d'intention, M. le Président, ce n'est pas un appel d'offres avec un budget, c'est un avis d'intention, et on ne demandait pas... On pouvait demander, c'était inscrit, là. L'objectif n'était pas de savoir quelle était la soumission chiffrée d'une compagnie, mais bien de savoir si d'autres compagnies étaient capables de livrer le produit que nous recherchions. Alors, quand bien même une compagnie additionnelle ou les deux mettaient un chiffre, pour nous, le chiffre n'avait aucun impact dans l'analyse, puisque l'avis d'intention est un avis, un appel à tous — pour les plus vieux, c'est un appel à tous — alors... ou c'est une vie, là, dans une autre émission d'aujourd'hui, bien là, c'est une ligne tendue vers les gens : Pouvez-vous faire ça? Laissez faire le prix, là, on ne va pas regarder ça. Vous pouvez bien mettre des prix si vous voulez, là, ça n'a aucun intérêt.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Est-ce que le ministre a fait son choix par rapport à la compagnie qui... Est-ce que le ministre a fait son choix?

M. Barrette : Bien non! Je ne peux pas choisir, M. le Président, pour la simple et bonne raison qu'à partir du moment... Et l'avis d'intention était clair, et je vais répéter la mécanique, l'avis d'intention dit...

Mme Lamarre : La question était courte. Je ne voudrais juste pas que le ministre passe cinq minutes à y répondre. Est-ce que Logibec est la compagnie choisie?

M. Barrette : M. le Président, j'aimerais que la députée de Taillon...

Le Président (M. Tanguay) : Oui, mais là juste un à la fois...

M. Barrette : ...prenne un autre ton, là, moi, je ne sais pas pourquoi qu'elle m'agresse comme ça.

Le Président (M. Tanguay) : Oui, mais je pense que ça va bien jusqu'à maintenant. On va continuer, chers collègues. Alors, votre réponse était...

M. Barrette : M. le Président, c'est quasiment de l'intimidation.

Le Président (M. Tanguay) : ...

M. Barrette : Elle m'a posé une question dont la réponse était dans ma réponse précédente. J'ai dit clairement que l'avis d'intention était un document qu'on livrait à l'univers informatique, qui disait : Nous avons un joueur avec lequel on va aller gré à gré s'il n'y a pas d'autre joueur. Autres joueurs — point d'interrogation, au pluriel ou au singulier — êtes-vous capables de faire ça? Alors là, elle l'a, la réponse, là, je l'ai donnée dans la réponse d'avant, il y en a plus qu'un.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Taillon.

Mme Lamarre : M. le Président, ce n'est pas très compliqué, la question : Est-ce que le ministre assume ses décisions? Est-ce qu'il nous dit aujourd'hui que Logibec est encore la compagnie avec laquelle il confirme son avis d'intention et que ce sera la compagnie choisie?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, comme c'est un avis... c'est un appel... un avis d'intention qui a été publié, et qu'il y a eu des soumissions, et qu'actuellement il y a potentiellement plus qu'une compagnie qui se dit capable de faire la chose, on comprendra que les analyses se continuent, et que, non, il n'y a pas de décision qui est prise d'aller en gré à gré avec la compagnie Logibec, et que tout indique que nous n'irons pas dans la direction du gré à gré avec Logibec.

Et ça, c'était, je pense, implicite ou même pas mal clair, là, dans les réponses que j'ai faites les trois fois précédentes.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Alors, aujourd'hui, M. le Président, il y a un congrès qui s'appelle le congrès Évolution Santé, qui a lieu à La Prairie. Et, quand on regarde le programme de ce congrès, l'application, le programme Med-GPS, qui est le programme déployé par Logibec, est largement au menu de cette activité où beaucoup de personnes sont invitées, il y a plus de 150 participants. Alors, il est certain que, compte tenu que le choix n'est pas encore arrêté, il faut, dans ces cas-là, faire preuve de prudence pour ne pas privilégier certains des candidats par rapport à d'autres. Et, bien sûr, on espère qu'il n'y a aucun membre du comité de sélection du GACEQ qui participe aujourd'hui à cette activité-là.

Le Président (M. Tanguay) : Pardon, rappel au règlement, M. le...

M. Barrette : ...l'article 35 s'applique dans l'étude des crédits?

Le Président (M. Tanguay) : Toujours, toujours.

M. Barrette : M. le Président, je trouve que, dans la formulation de la question de la députée de Taillon, elle semble me prêter l'intention de ne pas être prudent et de favoriser une compagnie plutôt qu'une autre.

Le Président (M. Tanguay) : Bien, alors, peut-être sur... en étant prudents, je... collègue de Taillon, je vous en prie, veuillez poursuivre votre question.

• (17 h 20) •

Mme Lamarre : Oui. Mais pas du tout, M. le Président, moi, je veux simplement... D'abord, je suis très contente que cette fois-ci le ministre m'ait clairement dit que le choix n'était pas fait. Dans le contexte où il n'est pas fait, je pense que l'ensemble du gouvernement doit faire preuve d'une immense prudence, compte tenu qu'il y a ce genre de formation là, et je veux juste informer le ministre que ça existe et que ça a lieu aujourd'hui.

La dernière question que j'aurais sur ce sujet-là, en tout cas une, c'est que, quand je vois la page 5 de 9, là, et que l'avis d'intention qui, disons, soutenait la candidature de Logibec dit qu'il y avait le respect du délai imparti et l'expertise requise pour assurer une reconstitution complète de la trajectoire de soins et de services, ça veut dire que les preuves sont faites, de la part de Logibec, pour être capable de faire ça. Alors, ça veut dire que Logibec, selon l'avis d'intention, avait fait la démonstration qu'ils étaient capables de réussir ça. Alors, si ça a été fait, est-ce que le ministre peut nous déposer, puisque c'est une cinquantaine d'établissements, là, 51 établissements où Logibec, semble-t-il, a fait la preuve de sa capacité, est-ce qu'il peut nous déployer les éléments d'un financement à l'activité pour certains types de chirurgies, par exemple, et qui nous permettraient peut-être de voir que les chirurgies d'un jour qu'on s'apprête à confier à des cliniques privées en prétendant que ce ne sont que ces cliniques privées là qui vont pouvoir déterminer le vrai prix d'un financement à l'activité... Est-ce qu'on ne peut pas penser que... Dans les 51 établissements où Logibec est impliqué depuis des années, est-ce qu'il n'y a pas eu aucune évaluation qui s'approchait ou qui permettait de faire une évaluation du coût d'une chirurgie dans un milieu hospitalier québécois, ce qui m'apparaîtrait être plus proche que dans un milieu de clinique privée québécois?

Alors, puisqu'on est là, est-ce que le ministre peut nous déposer un certain nombre de trajectoires de soins qui ont été complétées avec le financement à l'activité qui les accompagnait comme éléments pour démontrer la compétence et la qualification spécifiques de Logibec?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bien là, je suis content, M. le Président, de voir exactement quel est l'objectif qui est recherché par la députée de Taillon. On a compris ici que nous étions dans une dynamique argumentaire qui visait à opposer, d'une façon négative, le projet pilote des trois cliniques que la députée de Taillon qualifie avec insistance de «privées» — évidemment, on comprend pourquoi — et le réseau public. Et je vais m'adresser à ça, M. le Président, puis ça va être très clair.

Ceci dit, M. le Président, je tiens à informer tout le monde ici, et la députée de Taillon plus précisément, que les données qui existent, de Logibec, appartiennent aux institutions. On comprendra que ce sont des contrats qui ont été signés par des entités qui sont indépendantes, parce qu'au moment où elles ont été signées ces ententes-là, contractuelles, l'étaient avec des hôpitaux et que ça leur appartient, d'une part. D'autre part, évidemment, comme nous sommes dans un processus d'analyse avec des gens qui se sont manifestés dans le cadre de l'avis d'intention, il serait très mal venu pour moi de diffuser des informations qui, à cette étape, ici, sont, à mon avis, confidentielles.

Ceci dit, pour aller dans le sens et dans la finalité non avouée mais maintenant transparente, à mon avis, et comprise de tous et toutes, de la députée de Taillon, qui vise à opposer la performance de Logibec, puis même pas la performance de Logibec... Ce que je comprends du commentaire de la députée de Taillon, c'est que c'est bien bon, elle l'admet elle-même que c'est bon, Médiamed, Med-GPS, puis non seulement elle admet que c'est bien bon, mais elle veut s'en servir, avoir des données pour arriver et me retourner ça et de dire : Bien, voici, vous l'avez fait dans le public, n'allez pas dans le privé. Bon.

On va mettre les choses en perspective, M. le Président. Et là je vais au coeur de la question, j'espère que tout le monde va réussir à suivre. C'est simple, cette affaire-là, là, il n'y a rien de compliqué là-dedans. Med-GPS, pour prendre cet outil-là ou un autre — peu importe, là, peu importe la compagnie qui serait installée dans notre réseau, peu importe — la seule chose que cette compagnie-là va pouvoir déterminer en termes de financement à l'activité, en termes de détermination du meilleur coût ou de la fourchette de coûts du meilleur au moins bon, du plus performant au moins performant, et ainsi de suite — parce que celui qui est le plus cher n'est pas nécessairement moins bon que l'autre en bas, là, parce qu'il y a d'autres facteurs à prendre en considération — bien, la seule chose que ça va faire dans le réseau, c'est déterminer le meilleur élève de la classe. Est-ce que ça détermine le meilleur élève du pays? Pas nécessairement, pas nécessairement.

Pour faire une métaphore — je l'ai déjà faite, puis je vais la refaire — ici, là, nous tous et toutes qui sommes présents dans la salle, incluant les gens qui nous écoutent dans la salle, on peut très bien, là, s'en aller sur une piste de 100 mètres, puis se mettre tout le monde au départ, là, puis courir le 100 mètres. La seule chose qu'on va trouver, là, c'est celui qui court le 100 mètres le plus vite parmi nous autres. On ne va pas trouver le Ben Johnson de la gang, là. C'est de même.

Alors, l'idée du projet pilote est aussi de déterminer dans un environnement optimal, parce que contrôlé — parce que contrôlé — un coût. Et ce coût-là, théoriquement, pourrait être le coût idéal. Bien sûr qu'on va le comparer à des données qui auront été colligées dans notre réseau. Et je suis sûr que la députée de Taillon serait et sera très heureuse si je révèle que le réseau est capable de faire mieux que ces cliniques-là. C'est possible, ça, mais l'idée d'avoir un point de comparaison, qui est la base du principe de l'étalonnage, avoir un point de référence indépendant, bien, c'est à la base de l'exercice.

Le projet clinique des trois cliniques, là, ça sert à plusieurs choses en même temps : ça sert à donner de l'accès supplémentaire à la population québécoise, ça sert à avoir un point de référence indépendant, ça sert à faire de la détermination de coût avec des outils qui sont les outils appropriés.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Pour encore un peu moins de deux minutes, collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Merci. Alors, M. le Président, je veux juste souligner que c'est un montant important, le 65 millions, que le Québec a vécu une expérience avec le Dossier santé Québec où il y avait des choses qui n'avaient pas été bien validées au départ et où il y a eu des coûts excessifs, beaucoup de débordements. Je pense qu'on a le devoir de ne pas s'embarquer dans la même situation, de faire en sorte que notre choix soit le plus réfléchi possible et que les paramètres soient bien tous pris en compte.

Je m'étonne par contre de la réponse du ministre qui dit qu'il ne serait pas en mesure de nous transmettre... Parce que ces trajectoires de soins, qui ont été, semble-t-il, conformes à ce qu'on voudrait avoir au niveau du financement à l'activité, sont identifiées. Je pense qu'on peut les dénominaliser, il n'y a personne qui va savoir de quel établissement ça vient. Et on pourrait très bien, j'imagine, dans les 51 établissements, avoir déterminé le coût d'une césarienne, puisque c'était l'exemple qui a été pris un peu plus tôt, le coût de certains autres types de chirurgies d'un jour qui sont prévues. Alors, pour moi, un n'exclut pas l'autre.

Et, dans l'argument du ministre, je ne vois pas les compensations par rapport aux questions précises que j'ai demandées sur la pertinence de s'assurer que ce 65 millions de dollars là soit donné à la personne ou à l'organisation qui va être la plus apte à le faire, à le reproduire, à nous donner toutes les garanties.

Et je trouve que la présomption qui avait été prise au départ avec l'avis d'intention, bien, manquait un peu de fondement, manquait un peu de documentation à ce niveau-là. La preuve est que le ministre dit qu'il y a maintenant une autre candidature valable en piste. Alors, je pense que c'est la preuve que l'opposition fait bien son travail, qu'on a raison de poser ces questions et que, dans sa précipitation, le ministre parfois a peut-être des tentations à l'improvisation.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Alors, nous sommes maintenant...

M. Barrette : Évidemment...

Le Président (M. Tanguay) : On va vous permettre, oui, avec l'accord des collègues, de répondre sur le bloc des collègues du gouvernement. Oui.

M. Barrette : Bloc de?

Le Président (M. Tanguay) : De 19 minutes.

M. Barrette : 19?

Le Président (M. Tanguay) : Oui, 19.

M. Barrette : Alors, M. le Président, avec le consentement, merci. Je vais quand même, M. le Président... Je ne peux pas ne pas répondre au dernier commentaire de la députée de Taillon, M. le Président. La députée de Taillon, par son commentaire, insinue... non, elle n'insinue pas, elle affirme qu'on agit avec précipitation, elle insinue qu'on a mal planifié l'exercice. Elle est contente de voir qu'il y a un nouveau joueur et, à toutes fins utiles, elle considère qu'il y a une compagnie du Québec qui n'est probablement peut-être pas la bonne joueuse. Moi, je trouve ça triste, M. le Président, comme approche, alors que...

Le Président (M. Tanguay) : Appel au règlement.

Mme Lamarre : On me prête des intentions.

M. Barrette : ...M. le Président, c'est moi qui ai la parole, là.

Le Président (M. Tanguay) : Attention, appel au règlement. Oui, collègue de Taillon.

Mme Lamarre : 35, on me prête des intentions. Si on veut parler du Québec, l'entreprise a été vendue aux États-Unis. Alors, je pense que l'on s'éloigne.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, ça va très bien, chère collègue, vous l'aviez constaté aussi, alors poursuivons donc sur cette lancée. Alors, M. le ministre, la parole est à vous.

• (17 h 30) •

M. Barrette : M. le Président, je tiens à m'excuser auprès du gouvernement de ne pas avoir impliqué la Caisse de dépôt dans le rachat de la compagnie. C'est probablement le prochain reproche qu'on va me faire. Parce que, M. le Président, c'est négatif, là, comme approche, là, alors que, je vais le redire parce que c'est important, il n'y a pas eu d'improvisation, M. le Président. Nous avons fait un état des lieux, nous avons exprimé notre intention dans un cadre qui est clair. Le financement à l'activité, il y a un rapport qui a été demandé par le Parti libéral, qui a été cité par le Parti québécois, le rapport Thomson, qui vient du modèle anglais, qui est cité lui-même par... et Thomson qui vient d'Angleterre, puis qui pratique à McGill, et qui a été cité par le Parti québécois, qui a été pris en exemple par le député de Rousseau quand il était ministre des Finances. Mais c'est nous qui avons initié ça, M. le Président, dans le mandat où on était, avant 2014. Ça vient du Parti libéral, M. le Président. Et Médiamed, dans le rapport, est même citée, M. le Président. Alors, on n'a pas agi avec improvisation, on a agi sur la base de données probantes dans le monde, avec en plus des données qui montrent qu'au Québec on a quelqu'un qui est capable de faire ça. Et là, aujourd'hui, je me fais dire que j'ai agi avec précipitation et improvisation en respectant les règles.

Les règles de transparence et les règles édictées par le Conseil du trésor ont été suivies à la lettre. Et ça, la députée de Taillon n'est même pas capable de l'admettre : en lieu et place, le ministre a agi avec improvisation, laissant entendre que peut-être qu'on allait dépenser trop cher, alors qu'on respecte la procédure à la lettre. Alors, ça, c'est un problème du parlementarisme québécois, M. le Président. Même dans un moment d'échange se voulant relativement neutre, à l'étude des crédits, on passe quand même des affirmations péjoratives comme celle-là. Je trouve ça malheureux et je ne peux pas faire autrement que de le corriger.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, nous sommes toujours sur le bloc des collègues du gouvernement pour encore 15 min 50 s. Collègue de Beauce-Sud, la parole est à vous.

M. Busque : Merci, M. le Président. Alors, lors de la dernière question que j'ai adressée au ministre concernant le projet de loi n° 81, je voulais simplement m'assurer, M. le ministre, que vous en aviez terminé, j'étais dans l'impression peut-être qu'il y avait autres commentaires à ajouter.

M. Barrette : Alors, sur la question des appels d'offres, alors là nous entrons dans une phase, évidemment, qui est nouvelle. Le Québec n'a jamais fait d'appel d'offres dans le médicament, dans le cadre du régime général d'assurance médicaments, mais le Québec, depuis des années, depuis le début, à toutes fins utiles, de la RAMQ, là, presque, fait des appels d'offres dans le milieu hospitalier.

Alors, ça a été intéressant de voir venir à cette table — d'ailleurs, c'était cette table-ci — les représentants de l'Association des pharmaciens d'établissements de santé du Québec, les pharmaciens d'hôpitaux, qui sont venus nous parler de leur expérience d'appel d'offres, et eux-mêmes nous ont donné des exemples que je vais qualifier, parce qu'ils l'étaient vraiment, de spectaculaires de différence de prix entre ce qu'un hôpital peut payer pour le même médicament, la même posologie, la même pilule, la même couleur, la même grosseur, donnée à l'hôpital versus celle qui est vendue en pharmacie. Encore une fois, là, ici ce n'est pas le pharmacien propriétaire, là, qui est le problème, c'est la chaîne. Alors, eux sont venus nous dire, là : Ça fait des années qu'on fait ça et ça fonctionne, bon, bonne nouvelle.

Alors, dans la commission parlementaire, on a eu les extrêmes géographiques. On a eu, de l'autre bord de la planète, là, la Nouvelle-Zélande, qui fait ça depuis des années et qui sont allés chercher des prix par rapport à l'innovateur, le médicament d'origine, inatteignables, je pense, ici, au Québec, 4 %, 5 % d'innovateur, alors que, nous autres, le plus bas qu'on va, c'est 18 %, et les pharmaciens d'établissement au Québec, à l'autre bout de la planète, chez nous, où on a des différentiels quasiment de cet ordre-là. Et on a plein de données confidentielles entre les deux, là, de d'autres sources qui nous montrent qu'il y a bien de la marge.

Alors, arrive le moment où on doit, nous, construire un appel d'offres d'une façon appropriée. Un appel d'offres, ça se construit de différentes manières, mais, pour construire un appel d'offres, évidemment, comme on a déposé une loi, un projet de loi sur les appels d'offres, encore faut-il que le projet de loi passe. Et là je me tourne vers les oppositions en sollicitant leur collaboration pour que le projet de loi passe le plus vite possible. Et je dis tout de suite, à l'avance, que le projet de loi est un projet de loi sur les appels d'offres, et ce n'est pas un projet de loi sur la Loi de la pharmacie, sur la révision de la pratique en pharmacie, ce n'est pas un projet de loi, là, sur une politique du médicament, c'est une loi sur des appels d'offres. Et, de vouloir transformer ce projet de loi là en autre chose, bien, je le dis tout de suite, là, à chaque fois qu'on va voir ça, bien, je vais le dire et je vais qualifier les manoeuvres d'obstruction. Mais je suis convaincu que les oppositions ne le feront pas, elles l'ont dit elles-mêmes. Elles l'ont dit même maintenant, là, quand j'en ai parlé, il y a quelques instants, par des hochements de tête sentis, que, oui, les appels d'offres, ça peut faire des économies. J'ai commencé mon intervention en citant la députée de Taillon elle-même, qui a acquiescé du visage à cette citation-là. Alors, c'est là où on en est, là. Dans la séquence des événements, il faut l'adopter, le projet de loi, le plus rapidement possible et ensuite procéder à l'appel d'offres.

Ça va être intéressant de débattre en étude détaillée de la construction de l'appel d'offres, parce que, dans un appel d'offres, là, on peut mettre n'importe quoi, là, on peut mettre n'importe quoi. On peut mettre... Un appel d'offres, c'est un appel d'offres. Un appel d'offres, ce n'est rien d'autre que des règles du jeu. Il n'y a pas de règles universelles, ce n'est pas comme un sport qui a les mêmes règles d'un pays à l'autre. Un appel d'offres, ça se construit en fonction du marché dans lequel on est, et on peut écrire des clauses qui font en sorte que l'on veut protéger telle chose, qu'on veut avoir tel avantage, qu'on va donner tel bénéfice, qu'on va demander d'écrire l'appel d'offres dans un format de telle manière, sur telle couleur de papier, avec telle grosseur de caractères. On peut tout mettre dans un appel d'offres. Moi, je fais ça depuis... ça fait 25 ans que je fais des appels d'offres. Alors, c'est libre cours au donneur d'ouvrage, là, c'est un peu comme ça qu'on dit ça dans le jargon, dans la mesure où, évidemment, on respecte certaines règles, il y a quand même des règles de base à respecter en termes de respect de provisions dans certaines lois, dont celle qui arrivera, là, dans les achats de groupe, dans les appels d'offres, mais ça se construit.

Alors là, on arrive à un moment où ces appels d'offres là devront être construits pour faire en sorte qu'on protège ceux qui ont à être protégés et qu'on puisse aller chercher les sous là où ils le sont. Et, quand je parle des sous là où ils le sont, ce sont les sous qui sont à des moments dans la chaîne, dont j'ai parlé tantôt, où il n'y a pas nécessairement de plus-value. En fait, même que des fois il n'y a pas de plus-value du tout, sauf des intermédiaires qui font une marge.

Alors, l'appel d'offres, c'est pour ça que, dans le projet de loi, on s'adresse à la fois aux fabricants et aux grossistes. Pourquoi? Parce que c'est dans cette partie-là de la chaîne qu'est la marge. La marge n'est pas chez le pharmacien propriétaire. Lui, il est pris là-dedans, il est pris. Puis je pourrais parler, là, sur... je pourrais revenir sur l'indépendance des pharmaciens, là, et raconter un paquet de choses qui sont imposées aux pharmaciens propriétaires par leurs bannières, des coûts, des... En tout cas, il y a une dynamique, là, qui est vraiment particulière, qui n'est pas nécessairement à l'avantage du pharmacien propriétaire.

Puis la question ici n'est pas de donner des avantages mais de faire en sorte que l'État, donc le public, qui, lui, paie tout ça dans le régime d'assurance médicaments public, bien, paie le juste prix, le juste prix qui est sans équivoque, sans aucun doute trop haut actuellement. Le prix qu'on paie, il est trop élevé, peu importe ce que les gens disent. Et là, un processus d'appel d'offres global, ou par sections, ou par groupes — ça, c'est la construction de l'appel d'offres — bien, on verra le prix qu'on peut aller chercher.

Alors, il y a des axiomes dans un appel d'offres. On doit évidemment s'assurer que la disponibilité d'un médicament ne soit pas mise à risque par une structure d'appel d'offres qui serait mal conçue et que, le médicament, la qualité du médicament obtenu soit de la qualité à laquelle on s'attend dans une société comme la nôtre, au Canada. Voilà.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Maintenant, je cède la parole à la collègue de Fabre.

Mme Sauvé : M. le Président, M. le ministre, je voulais rapidement, le temps file, vous poser une question sur les ententes d'inscription, en fait, en vertu de la loi n° 28 qui a été adoptée le 20 avril 2015 et qui permettait donc au ministre de la Santé de conclure des ententes d'inscription avec les fabricants de médicaments innovateurs. Suite à ça, il y a eu l'adhésion du ministère à l'Alliance pancanadienne pharmaceutique en septembre 2015, qui a permis... Et d'ailleurs ça s'est fait au mois d'octobre, donc très peu de temps après. Le ministère a transmis à l'alliance des demandes pour avoir accès à des ententes déjà conclues et aussi se joindre à des négociations en cours. Alors, pour ce qui est des ententes déjà conclues, le ministère a analysé l'opportunité d'y adhérer puis, pour ce qui est des ententes en cours de négociation par l'alliance et celles à venir, le ministère procède selon la même grille d'analyse. Ma question à vous, M. le ministre, c'est : Quels sont les avantages d'adhérer à l'alliance?

• (17 h 40) •

M. Barrette : Alors, l'alliance, je ne surprendrai personne, M. le Président, et certainement pas Mme la députée de Fabre, si je dis qu'au Canada et, je dirais, dans l'Occident nous sommes tous aux prises avec une gestion du prix des médicaments mais avec des difficultés qui varient d'un pays à l'autre, tout le monde est pris avec ça. Et, s'il y a une chose que l'on peut dire, c'est qu'au Canada toutes les provinces sont prises avec le même enjeu. Et il est souvent dit, études à l'appui, que le prix du médicament au Canada, que ce soit l'innovateur ou le générique, et je vais y revenir dans un instant, est plus élevé que dans les pays comparables. Ça, là, c'est un fait, qui est contesté par certains vendeurs mais qui est confirmé par la plupart, sinon la quasi-totalité des observateurs indépendants.

Et là je vais séparer, pour étayer mon commentaire, le monde de l'innovateur du monde du générique. La dynamique est la même, mais pas exactement la même.

Quand on est face à un fabricant, une compagnie pharmaceutique qui produit un médicament dit d'origine, un innovateur, la nouvelle pilule qui n'était pas là avant, O.K., alors, quand cette compagnie-là arrive, après de longues études, pas de marché, là, mais des études scientifiques, pour prouver la validité du médicament, quand les organismes d'accréditation gouvernementaux autorisent la vente du médicament dans un pays, bien là, les parties sont au nombre de deux, il n'y en a pas trois, il n'y en a pas quatre, là, il y en a deux, il y a l'acheteur et puis il y a la compagnie qui vend. Alors, il n'y a pas de compétition. Il y a un brevet, et le fabricant du médicament innovateur, bien, c'est lui qui est sur le marché.

Alors, quel est le levier? Y a-t-il un levier potentiel? Bien, le levier va venir à partir du moment où on a un poids de marché qui existe.

Alors, l'alliance pharmaceutique pancanadienne, elle est née parce que, quand une compagnie débarquait au Canada avec une nouvelle molécule pour laquelle elle venait d'obtenir l'autorisation de Santé Canada de le vendre sur le territoire du Canada, cette compagnie-là pouvait aller voir chaque province séparément et négocier un prix, d'une façon confidentielle dans bien des cas, et gérer son marché comme ça, ce qui avait la conséquence désagréable de laisser parfois un arrière-goût dans... Le négociateur provincial, je vais prendre mon cas, je le sais-tu, moi, si je suis allé chercher le meilleur prix par rapport à l'Ontario ou au Nouveau-Brunswick? Eux autres, ils ont-u fait un deal meilleur que moi? Lequel des deux se fait avoir? On est-u égaux? On ne le sait pas. Mais il y a une chose qu'on sait, par exemple, c'est que, si... Puis là je vais me mettre ministre de la Santé du Nouveau-Brunswick. Mon poids relatif de négociation, là, il n'est pas fort parce que la compagnie, si c'est une négociation par province, va être beaucoup moins encline à baisser ses prix au Nouveau-Brunswick quand elle a fait sa marge qu'elle recherchait en Ontario ou au Québec. Alors là, le Canada s'est dit, avec justesse, que, dans cette mécanique commerciale là... On n'est pas en science, on est dans du commerce ordinaire, on n'est dans rien d'autre que... c'est comme un dépanneur, une épicerie, là. Alors, le Canada a dit : On va tous se mettre ensemble, on va faire l'alliance pharmaceutique pancanadienne, et toutes les provinces, pour le régime public, vont se mettre ensemble, et faire face à la compagnie, et lui dire : Maintenant, vous négociez avec le pays et non avec une province. Et là on a un marché qui est plus significatif. On comprend que le Canada, c'est juste un dixième des États-Unis, mais c'est quand même mieux qu'un centième.

Alors, on s'est mis dans cette dynamique-là pour aller chercher de meilleurs prix et, oui, à date... Et là je ne peux pas révéler certains prix, évidemment, parce que souvent c'est des ententes confidentielles. Et, dans la mécanique de l'Alliance pancanadienne, tout n'est pas nécessairement révélé, c'est ça : des fois c'est révélé, des fois ce ne l'est pas. Alors, il y a eu des économies qui ont été obtenues. Est-ce que c'est le maximum? Bien, probablement pas, mais là c'est le rapport de force, le rapport de force entre l'accès au marché plus grand que par province et le poids du pays, qui n'est pas nécessairement plus grand que d'autres pays comparables. On se compare avantageusement, sans aucun doute, à la Suisse, sans aucun doute à la Belgique, mais on se compare, en volume, désavantageusement à la France, ou à l'Angleterre, ou aux États-Unis, ou une combinaison des trois. Alors, ça, c'est le lien commercial.

Dans le générique, aujourd'hui, on entre dans une nouvelle phase, parce qu'initialement l'alliance pharmaceutique pancanadienne était une mécanique d'alliance pour négocier avec les compagnies fabriquant des médicaments innovateurs, c'est pour eux autres qu'on a fait ça, mais là entrent dans la même danse les fabricants de médicaments génériques. Et là, dans cette danse-là, les fabricants de génériques, ils nous disent aujourd'hui, puis c'est ça qui est intéressant, et je fais le lien avec la question de votre collègue, il y a quelques instants, de Beauce, eux autres, ils nous disent, là : Bien, on n'aime pas ça, votre loi n° 81 des appels d'offres, on n'aime pas ça, on aimerait que vous alliez du bord de l'Alliance pancanadienne. Alors, commentaire décodé : Vous avez une économie encore plus grande, par rapport à aujourd'hui, que vous auriez à l'Alliance pancanadienne, mais là vous nous faites peur avec votre appel d'offres parce que ça se peut que, si vous faites ça, vous allez chercher encore plus, puis on ne veut pas que ça se sache ailleurs au Canada. Puis là on rentre dans la confidentialité d'un, de l'autre, et ainsi de suite.

Alors, l'Alliance pancanadienne, c'est une bonne affaire, et c'est pour ça qu'on y a souscrit. Puis c'est une bonne affaire parce que c'est sûr que, ne serait-ce que sur le plan simplement, là, commercial, c'est un levier qu'on doit utiliser, mais qui est un levier qui est amusant parce que les gens, dans leurs conversations, nous montrent qu'on a encore une souplesse.

Puis je vous explique où est la souplesse. La souplesse, M. le Président, vient du fait que, dans les règles de l'Alliance pancanadienne, on a le choix, on a le choix, pour une catégorie de médicaments ou un médicament en particulier, on a le choix d'entrer dans la danse de la négociation pour un certain temps et, si on dit oui, O.K. pour ce médicament-là ou ce groupe de médicaments là, on s'embarque avec l'alliance dans la négociation, bien, on accepte le résultat, mais on n'est pas obligés d'embarquer dans la danse. On peut choisir de rester sur la touche, ne pas savoir le résultat et tenter notre chance nous-mêmes, et là faire une négociation et peut-être d'avoir un meilleur prix que l'alliance canadienne. Alors, on est gagnants des deux bords. Et là ça devient une question de décision pour nous.

Alors, si je fais le lien avec le sujet précédent, qui est le projet de loi n° 81, bien là, on se retrouve dans une situation où on a des options, des options qu'on doit juger. Et, à en juger par la réaction du Canada hors Québec et de l'industrie, force est de constater que le potentiel de notre loi n° 81 est très grand, parce que le Canada hors Québec nous regarde avec intérêt, ils nous le disent, pour voir comment ça va finir, notre affaire, puis les gens de l'industrie, eux autres, ils nous disent : Allez donc avec l'Alliance pancanadienne. Alors, il y a un potentiel. Juste une phrase, M. le Président : Et là on revient à la construction de l'appel d'offres.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, pour le dernier bloc de cet après-midi, je cède la parole à notre collègue de Lévis pour 18 min 30 s.

M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Je ne parlerai pas de médicament, bien que, dans ce dossier-ci, la pilule n'est pas facile à avaler pour les citoyens et citoyennes à travers ce qu'on va aborder maintenant non plus. Vous savez qu'avec la trop faible croissance des dépenses en santé, bien, les CISSS, les CIUSSS doivent faire des efforts, des efforts et des choix, des choix budgétaires pas souvent faciles, jamais faciles, probablement, c'est-à-dire de réduire pour arriver avec les budgets, réduire les services directs à la population, alors ça, ce n'est pas facile, évidemment, et ça se fait, ou augmenter certains tarifs, et ça aussi, ça se fait. C'est le cas des tarifs de stationnement. Alors, bien, on va aborder ce tarif des stationnements, parce que c'est une pilule pas facile à avaler pour les citoyens et les citoyennes, c'est un irritant. On en a déjà abondamment parlé, puis je pense qu'il est temps, puis c'est peut-être agréable, parce qu'on finira presque cette séance, M. le Président... ce sera peut-être l'occasion d'annoncer de bonnes nouvelles et de faire en sorte qu'on puisse avancer communément sur cette volonté qu'on a de faire en sorte que le fardeau sur les citoyens soit moins important.

Je rappelle quelques chiffres : 66 millions en 2014, des profits pour les établissements de santé, les fondations, concernant les stationnements. Ça fait trois ans, ça fait trois ans que les revenus générés par tous les établissements en fonction du stationnement sont en hausse, trois ans consécutifs. Alors, donnons quelques chiffres, les gens les savent probablement : 12 hôpitaux québécois, prenons seulement ceux-là, neuf situés à Montréal, des frais de stationnement quotidiens d'au moins 15 $ par jour, nouvel hôpital, le CUSM : 25 $ après 90 minutes. À Thetford Mines, là, on prend Thetford Mines juste ici, là, il y a des usagers, il y a des médecins, des médecins qui ont dit : Il faut faire quelque chose, ça n'a pas de sens. Il y a des médecins qui ont dit... à un point tel que, pour Thetford Mines, 60 % d'augmentation, c'est assez important pour les gens que certains, bien, remettent en question des visites au centre hospitalier, et c'est des médecins qui le disent.

Le ministre a déjà dit, lors de consultations particulières sur des projets de loi qui ont abouti, qu'il n'y avait jamais d'économie de bout de chandelle, que c'était important, puis que quelque montant que ce soit était important, surtout si le citoyen est obligé de le payer et qu'on voit manifestement qu'il y a là des tarifs abusifs. J'ai questionné le ministre sur la nécessité de revoir les normes de stationnement. Mettons les dates. 23 février 2016, lors de la période de questions, le ministre en a parlé, il a dit : Écoutez, ça s'en vient, on est actuellement en révision de cette orientation-là. Le 22 mars, plus précisément — et plus récemment — lors de l'étude des crédits provisoires, pas bien, bien loin, le ministre a affirmé qu'une nouvelle directive serait envoyée, puis on nous a parlé d'avril à ce moment-ci, au mois de mars, avril. On est le 21.

Est-ce que le ministre pourrait nous dire si effectivement la révision a été faite? Est-ce que l'orientation est envoyée? Et qu'est-ce qui sera changé concrètement? Je pense que ça peut faire seulement plaisir aux citoyens et citoyennes qui trouvent difficile d'absorber ces hausses-là.

• (17 h 50) •

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, évidemment, je sais qu'en faisant ça ça ne changera pas grand-chose, parce que ce n'est pas lisible de loin, là, mais je le montre simplement pour rassurer le député de Lévis quant à nos travaux qui sont en cours. On a déjà jeté les balises de la prochaine circulaire ou de la révision de la circulaire existante quant à la tarification des stationnements hospitaliers ou des institutions publiques à travers le Québec, essentiellement hospitaliers.

Je l'ai dit en Chambre, ce que le député de Lévis rappelle est tout à fait exact, et je m'étais engagé à ce que ce soit fait, et ça sera fait. Mais évidemment ce n'est pas aujourd'hui que je vais l'annoncer, comme nous sommes à l'étude des crédits, nous ne sommes pas à la préparation des annonces. Alors, en temps et lieu, l'annonce sera faite, évidemment.

Par contre, je n'ai pas le choix de corriger le député de Lévis, nous n'avons pas coupé des services. Nous avons par contre optimisé certaines choses. Puis je vais donner l'exemple, encore une fois, des postes vacants, hein? Un poste vacant, dans un budget, là, il y a un montant assigné à un poste, mais, quand on abolit le poste vacant, il n'y a personne qui s'en va à la maison, là, il n'y a personne qui s'en va à la maison en perdant son emploi, là. Et, quand on prend une personne dont on coupe le poste mais qu'on la déplace sur le poste vacant, il n'y a personne qui perd son emploi, mais il y a une économie budgétaire.

Une voix : ...

Le Président (M. Tanguay) : M. le député de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : Question de règlement, 79, je pense que ça s'applique à ce moment-ci. La question était claire, mais là on est rendus dans les postes vacants. Histoire de faire du chemin sur des résultats concernant la question que je posais, est-ce qu'on pourrait revenir directement au sujet?

Le Président (M. Tanguay) : Oui, bien, peut-être... Je pense que le... Vous savez, l'article 79, lors de l'étude des crédits, il est davantage aidé, votre objectif, par la pertinence, qui est suffisamment large. Alors, j'inviterais peut-être le ministre à conclure sa réponse.

M. Barrette : Bien, je vais conclure rapidement, M. le Président, pas en continuant là-dessus mais simplement en rappelant amicalement à nos collègues des oppositions... Si eux et elles ont la chance de laisser une impression négative par un commentaire qui est non fondé, il me semble raisonnable et fair-play de me laisser la chance de rectifier les faits lorsque c'est possible. Et je m'applique, M. le Président, depuis le début de cette étude des crédits, à grosso modo prendre le même temps qui a été pris pour laisser une impression que je qualifierais, vu de mon point de vue, de négative.

Alors, je donnais un exemple pour étayer le raisonnement que je faisais. Et je le fais avec toute collégialité, M. le Président.

M. Paradis (Lévis) : Et là on va jouer, M. le Président... je comprends, on va jouer sur le temps. J'oserai quand même... Ne nous stationnons pas à ce moment-ci, avançons un peu sur ce même dossier. Est-ce que le ministre... Parce qu'il semble enclin à proposer des choses, alors, il confirme que des choses arrivent. Est-ce qu'il peut aller un peu plus loin et nous dire s'il y aura des réductions de tarif potentielles, pour le moins des plafonds de tarif également, eu égard aux suggestions qu'on lui a faites aussi, hein, qui peuvent être bonnes et reprises? C'est déjà arrivé que le Parti libéral se serve de certaines idées émanant de la Coalition avenir Québec. Est-ce que, donc, il y a des tendances dont il peut nous parler?

M. Barrette : Bien, pas à cette étape-ci, M. le Président. Mais je dois souligner la qualité du député de Lévis et certainement la qualité de la compagnie Communication François Paradis inc., chez qui, probablement, le stationnement n'est pas payant, mais encore faut-il qu'il y ait une adresse. Mais, comme il y a des déductions dues à l'incorporation, il doit y avoir des lieux, là, qui sont déduits à quelque part. Mais par contre, lorsque ce sera, le plus tôt possible, prêt, nous ferons la communication dans tout le réseau, et tout le monde en sera informé.

M. Paradis (Lévis) : M. le Président, je prends 30 secondes, je complète sur ce dossier-là et j'en aborde un autre, parce que le temps file. Je pose une seule question, et ça, ce n'est pas très, très engageant, mais, le 25 $ au CUSM pour 90 minutes, est-ce que c'est terminé?

M. Barrette : Bien là, au moment où on se parle... Bon, je ne connais pas la variation de la grille tarifaire de chacun des stationnements du Québec, là, il y a plus de 600 installations au Québec. Alors, la consigne qui a été donnée, il y a plusieurs mois maintenant, était, et elle est la même qui a été donnée à tout le réseau : Pour le moment, vous révisez autant que possible vos grilles tarifaires pour l'adapter aux besoins de la population. Et, pendant la période en question, nous révisions la circulaire, et on verra si les changements qu'ils ont apportés ou non à leurs grilles tarifaires respecteront les orientations que nous allons dévoiler ultérieurement.

Là, je pense qu'on m'indique que, peut-être, il y a eu des changements. Alors là, on m'indique ici que... Alors, voilà, on m'indique qu'à McGill... J'ai ici la grille tarifaire, les anciens tarifs journaliers au CUSM, qui s'est terminée au 31 juillet 2015, donc après on est intervenus, à la suite de certains commentaires, dont les vôtres, qui ont été faits. Je donne la grille puis je vous donnerai les deux pour voir la variation, ça va, à ce moment-là, répondre à votre question.

À l'époque, les anciens tarifs étaient gratuits de zéro à 20 minutes, c'était 9 $ de 21 à 30 minutes, 17 $ de la 31e à la 60e minute, 19 $ de la 61e à 90e, 21 $ de 91 minutes à 24 heures et un accès illimité dans une journée de 24 heures de 23 $.

Aujourd'hui, le zéro à 20 minutes et le 21 à 30 minutes ont été fusionnés pour être, de zéro à 30 minutes, 10 $. Je ne suis pas sûr que c'est un gain. De 31... Pardon? Mais ça, c'est l'hôpital, là, c'est l'initiative de l'hôpital. En direct, je vous dis que ce n'est pas sûr que c'est un gain.

M. Paradis (Lévis) : On le voit aussi.

M. Barrette : Je suis un peu étonné. Je suis content, finalement, que vous me posiez la question, M. le député, ça va me faire faire un téléphone. C'est ordinaire, là. Alors, de 31 à... Non, mais je vais vous avouer que...

M. Paradis (Lévis) : Non, mais c'est... Puis, si on descend jusqu'au dernier...

M. Barrette : Non, mais on a pris l'information cette semaine en fonction des crédits, alors comme quoi ça vaut la peine de faire l'étude des crédits. Alors, de la 31e à la 60e minute, c'est 15 $ au lieu de 17 $, alors il y a une amélioration de 2 $. De la 61e à 90, au lieu d'être 19 $, maintenant c'est 20 $ — il va vraiment falloir que j'appelle — et, au-delà de 91 minutes jusqu'à 24 heures, c'est 25 $ au lieu... Bien, finalement, on va téléphoner, hein? Alors, il est temps qu'on sorte la circulaire.

M. Paradis (Lévis) : Bon. Alors, je comprends qu'il y aura des annonces probablement en fonction de, bon...

M. Barrette : Ah! je me sens dans une ambiance d'annonce, là.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Paradis (Lévis) : Bien, faisons... On va vous donner l'occasion d'en faire une autre, M. le ministre, M. le Président, autre question sur laquelle il serait pertinent d'avancer aussi parce qu'il y a des gens qui se questionnent, encore une fois c'est une problématique, puis les gens ont dit : Qu'est-ce qu'on fait avec ça? D'ailleurs, le ministre lui-même, questionné puis abordé à ce sujet-là, a dit : Oui, c'est vrai, puis d'ailleurs il y a des avis qui le prouvent, il va falloir qu'on agisse et qu'on balise, hein — c'est un mot qui revient souvent quand on prend des décisions dans le domaine de la santé — l'installation de caméras de surveillance dans les CHSLD.

Et je ne ramènerai pas des éléments qui sont malheureux, mais il y en a, il y en a. Il y a des événements heureux dans notre système, il y en a qui sont moins heureux. Il y a peu de temps, il y a deux semaines à peine, un individu se retrouvait devant la justice en fonction d'une agression d'une personne âgée dans un contexte extrêmement pénible, d'une dame qui manifestement se souvient plus ou moins de l'agression dont elle a été victime, et ça se passe dans un établissement, une résidence pour aînés. Des cas comme ceux-là, sans faire de chemin là-dessus, sont malheureusement souvent encore trop nombreux.

Il y a deux règles officielles sur le droit d'installer des caméras qui ont déjà été présentées, le ministre le sait. D'abord, il y avait une lettre du vice-protecteur du citoyen, avril 2015, où, là, c'était très clair, on disait : Il n'y a absolument rien qui empêche un résident d'un établissement d'installer une caméra s'il le souhaite, même sans aviser la direction. À ça, bien, s'ajoute maintenant le rapport, 113 pages, du Comité national d'éthique sur le vieillissement, publié en septembre, celui-là, où, là aussi, on dit : Le statu quo n'est plus possible. Ça veut dire qu'il va falloir qu'on ait des règles claires parce que les gens ne savent pas. On peut, c'est légal, mais ça peut être contesté, il y a les droits des uns, les droits des autres. Et je pense que le ministre avait déjà considéré, si ma mémoire est bonne, que ça prendrait des balises à ce chapitre-là.

• (18 heures) •

Bon, 113 pages, le rapport du comité national d'éthique, bien, entre septembre et aujourd'hui, je pense qu'on a amplement eu le temps de le lire et de s'y adresser. Le gouvernement a entre les mains les conclusions d'un rapport, donc, depuis neuf mois, M. le Président.

Dans les crédits, le ministère écrit que la question sur l'état de l'avancement des travaux sur l'installation serait répondue par le Secrétariat aux aînés. De son côté, le secrétariat écrit que les deux ministères analysent actuellement différents scénarios. Alors, c'est un, l'autre ou les deux ensemble, ça va peut-être faire juste que ça va aller plus vite.

Et d'ailleurs j'ai questionné, la semaine dernière, la ministre déléguée aux Aînés, qui disait : Ils peuvent installer une caméra s'ils veulent, il n'y a pas de problème. Mais je pense encore une fois que le ministre avait indiqué que des balises claires devaient être données en fonction de tout ce que ça suppose, qui décide, la justification, un registre potentiel, et le reste. Je pense que des aînés attendent encore. En tout cas, moi, je reçois des communications de gens qui disent : Comment on s'installe? Pas seulement des aînés, des travailleurs, des gens qui opèrent des établissements, CHSLD ou RPA, résidences privées.

Où en sont rendus les travaux? Voilà ma question. Est-ce qu'il y a eu des rencontres? Est-ce qu'on a avancé sur ce dossier-là? À quand ces fameuses balises que tous attendent aussi avec impatience?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bientôt.

M. Paradis (Lévis) : Alors, on fait quoi en attendant?

M. Barrette : On attend.

M. Paradis (Lévis) : Non. On installe ou on n'installe pas? Est-ce que vous dites aux citoyens qu'on peut installer sans problème, et puis, bon, pour l'instant, il n'y a pas de trouble à ce chapitre-là?

M. Barrette : Il n'y a pas de problème à en installer.

M. Paradis (Lévis) : Est-ce qu'on a eu des rencontres pour faire en sorte que les choses puissent avancer? Parce que le ministre a déjà indiqué, M. le Président, vous vous rappellerez, que ce n'était pas seulement une question d'installer un appareillage, c'est qu'il fallait aussi faire en sorte... et la volonté, si le ministre dit que c'est pour bientôt, c'est qu'il y a des considérations, des réflexions à faire pour arriver avec des orientations précises, des balises précises. Au-delà du bientôt, est-ce que je comprends qu'on a avancé? Est-ce qu'on a rencontré des gens?

M. Barrette : Oui.

M. Paradis (Lévis) : Combien de rencontres?

M. Barrette : Là, je n'ai pas le décompte, là. On a eu quelques rencontres.

M. Paradis (Lévis) : Avec qui, M. le Président? Est-ce qu'on peut savoir qui prend part aux discussions? Bien, le ministre, c'est petit bout par petit bout. C'est la théorie du petit pas, hein, petit à petit, on peut vraiment avancer.

M. Barrette : Avec mes collègues et leurs équipes. M. le Président, blague à part, là...

M. Paradis (Lévis) : Soyons sérieux, là.

M. Barrette : Non, au contraire, je suis très sérieux. Alors, je vais donner la réponse plus longue, M. le Président. Ça va me faire plaisir, évidemment, de satisfaire le député de Lévis. Le député de Lévis, il nous l'a dit lui-même dans son introduction, il a posé la même question à au moins ma collègue ministre des Aînés, Mme Charbonneau, et j'imagine qu'il a eu une réponse similaire, bien que je ne suive pas toutes les commissions parlementaires en même temps. Je n'ai pas ce temps-là à la Santé puis je ne pense pas que mes collègues l'ont également à mon égard.

Ceci dit, M. le Président, il y a un comité interministériel qui travaille sur l'élaboration d'un projet de loi. Je pense que ça, c'est connu. Et il y a des rencontres qui ont eu lieu, et, dans ces rencontres-là, on y traite, entre autres, mais pas exclusivement, mais entre autres de la question de la mise en place de caméras dans les chambres de CHSLD, des résidences, et ainsi de suite, là. Alors, on s'adresse à ça de façon spécifique.

Dans le passé, je me suis exprimé très clairement à l'effet que j'étais en faveur de permettre aux familles d'installer des caméras. Moi, je n'ai aucun problème avec ça. Sans dévoiler la teneur des conversations que nous avons... Et le député de Lévis comprendra, j'en suis convaincu, qu'il y a quand même une question de confidentialité, dans l'exercice de l'écriture d'un projet de loi, qui fait en sorte que je ne puisse pas dévoiler la teneur de toutes nos conversations, de toutes nos positions, de toutes nos rencontres, de toutes nos réunions, et ainsi de suite, là. C'est parce qu'à un moment donné la procédure doit suivre son cours selon les règles sous lesquelles nous avons l'obligation d'opérer, et je parle ici législativement et non chirurgicalement, là.

Alors, je ne peux pas aller plus loin. Je ne peux pas aller plus loin que ce que j'ai dit publiquement et ce que le député de Lévis sait. Nous travaillons là-dessus. Moi, comme ministre de la Santé, je suis en faveur de la chose et je pense que certains de mes collègues ont exprimé le même confort et, je dirais même, la même intention, mais je ne peux pas aller plus loin à cette étape-ci, évidemment.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Collègue de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : Est-ce qu'il me reste encore un peu de temps, M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : 1 min 20 s.

M. Paradis (Lévis) : 1 min 20 s? Est-ce que cette ouverture ou, en tout cas, ce sur quoi vous travaillez implique également non pas seulement les établissements publics, mais les résidences privées?

M. Barrette : En ce qui me concerne, parce que la question m'est dirigée à moi, comme ministre de la Santé, la réponse, c'est oui, mais on comprendra que ma réponse ne met pas en cause et ne lie pas mes collègues, là. Je prends ces précautions-là pour ne pas poser outrage au Parlement, là. On est près de la ligne que je ne peux pas franchir.

Alors, je veux bien répondre personnellement comme ministre de la Santé qui participe à des travaux. Je suis bien confortable à donner mon opinion, comme vous avez remarqué depuis deux ans, mais là je vais quand même respecter la règle qui m'empêche d'aller plus loin dans mes réponses face à des discussions législatives qui ne sont pas complétées.

M. Paradis (Lévis) : Alors, j'aurai compris qu'un projet de loi est en voie d'être présenté et que le ministre de la Santé, pour sa part, serait favorable à ces installations.

M. Barrette : Oui, mais ça, c'est des choses qui sont connues, là.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, chers collègues, ceci met fin à ce bloc de la deuxième opposition.

Compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30, où elle entreprendra l'étude des crédits du volet Santé publique. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 6)

(Reprise à 19 h 34)

Le Président (M. Morin) : Bonsoir, tout le monde, bonsoir, tout le monde. Comme nous avons quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Comme à l'habitude, veuillez vérifier vos appareils, vos téléphones cellulaires, vos tablettes s'ils sont en mode silencieux.

Santé publique

Donc, si c'est vérifié, la commission est réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du volet Santé publique du portefeuille Santé et Services sociaux pour l'exercice financier 2016-2017.

Mme la secrétaire, y a-t-il des changements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Morin (Côte-du-Sud) remplace M. Tanguay (LaFontaine), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs) remplace M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière).

Le Président (M. Morin) : Merci, chère madame. Nous allons donc débuter par les remarques préliminaires. Par la suite, nous procéderons à une discussion d'ordre général par blocs d'environ 20 minutes, incluant questions et réponses. Donc, puisque nous avons débuté nos travaux à 19 h 34, nous finirons à 22 h 34. Ça va? Tout le monde est consentant?

Remarques préliminaires

Donc, Mme la ministre, nous débutons vos remarques préliminaires, j'ai bien hâte de vous entendre.

Mme Lucie Charlebois

Mme Charlebois : Alors, merci, M. le Président. D'entrée de jeu, vous allez me permettre de saluer mes collègues du gouvernement, les remercier d'être ici pour cette étude de crédits. Je veux également saluer mes collègues des groupes d'opposition, l'opposition officielle ainsi que la deuxième opposition. Et vous allez me permettre également de saluer toutes les équipes du ministère de la Santé et des Services sociaux qui m'accompagnent ainsi que tout mon personnel.

Alors, pour me livrer à l'exercice d'aujourd'hui, évidemment, je suis accompagnée de ma chef de cabinet, Mme Christine Marion, qui est à ma gauche, du sous-ministre M. Michel Fontaine, à ma droite, de la sous-ministre adjointe aux services sociaux, Mme Sylvie Dupras, et du sous-ministre adjoint au Directeur national de santé publique, M. Arruda — où est-il? Il est là — et tous leurs collaborateurs. Évidemment, vous savez que l'équipe de la Santé et des Services sociaux est une grande équipe, et c'est une grande famille, c'est des... Quand je dis «collaborateurs», M. le Président, c'est exactement le vrai mot, parce que ce sont de très grands collaborateurs.

Alors, j'ai le privilège, depuis maintenant deux ans, d'occuper les fonctions de ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la jeunesse, à la Santé publique et, depuis le dernier remaniement, aux Saines habitudes de vie. Je suis très heureuse de venir vous présenter nos réalisations de la dernière année, M. le Président, des réalisations qui ont toutes pour objectif de favoriser le mieux-être de la population québécoise. Mes responsabilités couvrent, dans l'ensemble, deux volets. D'abord, mon mandat est de contribuer à l'épanouissement des personnes vulnérables, notamment des jeunes en difficulté, les personnes vivant avec une déficience physique ou intellectuelle, les personnes aux prises avec des problèmes de dépendance et celles qui sont en situation d'itinérance ou à risque de le devenir. Je dois également contribuer à améliorer la santé et le bien-être de l'ensemble de la population par la promotion de la santé et de la prévention. C'est le mandat que m'a confié notre gouvernement, et il me tient à coeur, M. le Président.

Tout d'abord, c'est avec une grande fierté que j'ai tenu... bien, en fait, nous avons tenu, parce que c'est l'ensemble du gouvernement qui pose ces actions-là, en février dernier, le tout premier forum québécois sur le trouble du spectre de l'autisme, ce qu'on appelle affectueusement les troubles du TSA, alors ne vous surprenez pas si je reviens souvent avec l'appellation TSA. Cet événement nous a permis de déterminer les priorités sur lesquelles nous travaillerons afin de mieux répondre aux besoins des personnes ayant un TSA ainsi qu'à leurs familles et à leurs proches.

Tous les participants ont eu l'occasion de s'exprimer sur leurs priorités à mettre en oeuvre. Des invités de plusieurs régions et de plusieurs horizons ont ainsi eu l'occasion de se prononcer. Nous avons également pris soin de laisser la parole à des personnes autistes de même qu'à leurs familles. Et je crois, M. le Président, que c'était la première occasion où ils avaient — dans un forum comme celui-là, où il y avait des décideurs — l'occasion de s'exprimer. Ils en étaient très fiers.

Notre objectif était d'établir les bases de notre travail collectif sur ce sujet et de mettre en place des actions porteuses et structurantes de concert avec les partenaires de notre réseau ainsi que des autres réseaux de services. À cette occasion, je me suis formellement engagée à donner suite aux préoccupations et aux solutions qui ont été exprimées, et j'ai tenu parole, M. le Président. Mon équipe et moi travaillons actuellement à l'élaboration d'un plan d'action qui sera en lien direct avec les discussions tenues lors de ce forum et qui contribueront au développement du plein potentiel des personnes autistes. Je prends la peine de vous dire : Les personnes autistes, M. le Président, parce que, lors de ce forum-là, les personnes nous ont dit : Arrêtez de dire qu'on a le trouble du spectre de l'autisme puis qu'on est en situation... on est des personnes autistes, appelez-nous «autistes». Alors, je respecte leur voeu.

D'ailleurs, dans le dernier budget de notre gouvernement, le ministre des Finances a annoncé qu'à partir de 2016-2017 des ressources additionnelles et récurrentes de 5 millions — j'ai bien dit «récurrentes», M. le Président — seront accordées aux services aux enfants et aux adultes ayant... ou étant autistes. J'estime que cela témoigne de notre volonté commune, en tant que société, de faire en sorte que ces personnes puissent miser sur leurs forces et leurs talents pour s'épanouir au meilleur de leur capacité, de se tailler une place de choix au sein de la société.

• (19 h 40) •

Je suis également très fière que nous avons accompli récemment... de ce que nous avons accompli récemment pour venir en aide aux personnes qui sont aux prises avec des problèmes de dépendance. Cela inclut les problèmes de consommation d'alcool, de drogues et la pratique de jeux de hasard et d'argent.

Nous avons des acquis importants dans le réseau des dépendances, un réseau engagé et soucieux d'offrir des services axés sur les meilleures pratiques. Au cours des derniers mois, le ministère de la Santé et des Services sociaux a amorcé des travaux d'élaboration des prochaines orientations interministérielles en dépendance. Nous travaillons à accroître l'accessibilité et la continuité de l'ensemble du continuum de services.

Pour y arriver, nous avons la chance de pouvoir compter sur la complémentarité de l'expertise de notre réseau public et celles du réseau privé et du milieu communautaire. Nous savons que les ressources certifiées qui offrent de l'hébergement en dépendance font un travail important auprès de ces personnes en difficulté. Les services offerts par ces ressources ont aussi un impact notable sur la vie de leurs familles, des proches de ces personnes, et ultimement c'est toute la communauté qui rejaillit de ce mieux-être.

C'est pourquoi nous avons récemment confirmé un financement récurrent — encore une fois, je vous parle de récurrence, M. le Président, avec grande fierté — de 6 millions de dollars afin de favoriser l'accès aux services de ces ressources et plus particulièrement aux bénéficiaires de l'aide financière de dernier recours, et ce, tel que je l'avais annoncé en janvier dernier à l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance et à l'Association provinciale des organismes en dépendance, qui étaient très, très, très heureux de cette annonce. Notre appui démontre que le soutien offert aux personnes vulnérables est une de nos priorités.

En itinérance, nous assurons le leadership dans la poursuite de la mise en oeuvre du Plan d'action interministériel en itinérance 2015-2020 en collaboration avec les 15 partenaires ministériels et organismes gouvernementaux concernés. Rappelons que ce plan comporte 31 actions, 111 moyens, M. le Président, visant à prévenir et à réduire l'itinérance au Québec. Des efforts considérables sont déployés par les acteurs impliqués dans la lutte contre l'itinérance afin d'assurer une réponse adaptée aux besoins de ces personnes, et ce, de manière concertée.

Dans cette même optique d'inclusion sociale, j'aimerais aborder nos efforts de la dernière année en vue de favoriser la participation des personnes handicapées à la collectivité. Nous avons dévoilé, en juin 2015 dans le cadre de la Semaine québécoise des personnes handicapées, le Plan 2015-2019 des engagements gouvernementaux. Ce plan, qui comprend de nombreux engagements de la part de 24 ministères et organismes, vise à simplifier l'accès aux programmes en uniformisant l'offre de service liée aux besoins des personnes handicapées. La mise en oeuvre de ce plan donnera un nouvel élan à notre politique À part entière, laquelle est essentielle à l'amélioration des conditions de vie de ces personnes en vue de favoriser l'exercice de leur rôle dans la société. Le Plan 2015-2019 des engagements gouvernementaux permettra donc de réaliser des avancées à court et à long terme pour ces personnes, et ce, dans plusieurs secteurs d'activité de notre société. Ainsi, nous progressons toujours vers une société plus inclusive, au bénéfice de l'ensemble des Québécoises et des Québécois.

En ce qui concerne la santé publique, M. le Président, j'ai eu le plaisir d'avoir sous ma responsabilité ministérielle une avancée remarquable cette année. Je parle bien sûr de la Loi visant à renforcer la lutte au tabagisme. Cette loi est une des plus avancées au monde en matière de lutte au tabagisme. Elle positionne le Québec parmi les leaders mondiaux en ce domaine, et j'en suis très fière. Évidemment, c'est l'ensemble des Québécois qui peuvent en être très fiers.

Pour ma part, je suis plus que satisfaite de la collaboration dont a bénéficié le projet de loi dans le cadre de la commission parlementaire. La loi adoptée a ainsi pu être bonifiée grâce aux nombreux avis et commentaires formulés par les personnes et les organismes qui ont participé au processus démocratique. Notre objectif principal est resté le même depuis le début, soit celui de renforcer la Loi sur le tabac promulguée en 1998.

Le tabagisme fait encore trop de victimes, M. le Président, en plus des conséquences sur les personnes qui sont aux prises avec cette dépendance. De plus, la fumée secondaire cause de nombreux effets négatifs sur l'entourage des fumeurs et des non-fumeurs. Parmi elles, il y a les personnes plus vulnérables, incluant les enfants et les jeunes, dont le mieux-être me tient vraiment à coeur. C'est pourquoi nous avons recentré les nouvelles mesures autour de trois objectifs : prévenir le tabagisme chez les jeunes, mieux protéger les non-fumeurs et motiver les fumeurs à cesser de fumer.

La loi adoptée vient donc raffermir notre détermination en facilitant l'application de la loi et en augmentant son caractère dissuasif. Les nouvelles mesures visent à mieux contrôler les produits du tabac afin d'en réduire l'attrait, évidemment, notamment par l'interdiction de vente et de distribuer des produits aromatisés.

Par ailleurs, plusieurs modifications se sont ajoutées, notamment une plus grande restriction de l'usage du tabac dans certains lieux, comme les aires de jeu extérieures pour enfants et les terrains de sport. Et ça, M. le Président, c'était vraiment, vraiment demandé par beaucoup de jeunes familles qui allaient dans ces parcs-là. D'autres modifications visent à mieux encadrer l'industrie du tabac. Par exemple, toutes formes d'incitatif ou de rétribution provenant des fabricants ou des distributeurs à l'égard des détaillants seront désormais interdites. Cela démontre bien que nous sommes résolus collectivement à intensifier cette lutte contre le tabac, et nous collaborons tous ensemble en ce sens. Il s'agit d'un effort commun qui nous donnera à terme une société en meilleure santé et un Québec à la hauteur de nos ambitions. Et je réitère que je veux remercier tous les parlementaires qui ont contribué à l'élaboration de ce projet de loi, notamment les parlementaires du gouvernement mais aussi des oppositions, qui ont tous travaillé dans le même sens, soit parfaire cette lutte au tabagisme.

Alors, nous avons diffusé à l'automne dernier le nouveau programme national de santé publique qui constitue une nouvelle offre de service, de promotion, de prévention et de protection de la santé publique au Québec. Ce programme s'appuie sur les nouvelles données de santé et les meilleures pratiques pour améliorer la santé d'une population. Il est déployé sur le terrain par plusieurs établissements de santé qui ont une mission de santé publique.

Par ailleurs, comme vous avez pu le constater, nous avons aussi, au cours de la dernière année, fait preuve d'un grand sens de l'innovation en matière de santé publique, et cela m'amène à vous parler d'une autre initiative qui va en ce sens. Il s'agit de notre Politique gouvernementale de prévention en santé, une initiative que j'ai à coeur, grandement. Nous avons d'ailleurs mené des consultations à l'automne dernier afin de prendre le pouls des organisations qui représentent la population. Et je veux ici prendre le temps de souligner et de remercier mon adjointe parlementaire, la députée de Chauveau, qui a fait un travail énorme et qui a été à l'écoute des personnes qui sont venues. Le dévoilement prochain de cette politique sera un événement majeur, d'une portée historique, qui aura un impact fort positif sur le Québec de demain. J'ai bien hâte au lancement de cette politique afin de pouvoir vous en dire davantage. Vous me connaissez, M. le Président, vous savez que je n'aime pas beaucoup garder des secrets, hein, j'aime ça partager les bonnes nouvelles. Je sais qu'elle est attendue avec impatience de tous nos partenaires, alors j'ai très hâte de vous la dévoiler.

Je souhaite aussi vous entretenir des services aux jeunes en difficulté et de la protection de la jeunesse. À la suite d'une... voyons! À la suite d'une série de fugues ayant eu lieu à Laval l'hiver dernier, j'ai mandaté un vérificateur indépendant, M. André Lebon, pour faire la lumière sur ce phénomène. Nous voulions avoir toutes les informations disponibles pour évaluer de manière juste et éclairée nos façons de faire actuelles au Québec ainsi que les possibilités d'amélioration. J'ai de plus tenu à faire le point avec l'ensemble des directeurs de la protection de la jeunesse et des présidents-directeurs généraux des établissements, que j'ai rencontrés, offrant des services de protection de la jeunesse au Québec. J'ai également rencontré des chercheurs, M. le Président, ainsi que des intervenants de centres jeunesse, des jeunes qui vivent en centre jeunesse pour nous parler de leur réalité, des parents des enfants qui sont en centre jeunesse pour mieux comprendre le phénomène.

L'un des premiers constats que nous avons faits, c'est que le phénomène des fugues a évolué au cours des dernières années. En ce sens, nous devons faire évaluer nos pratiques et les adapter à la nouvelle réalité des jeunes. C'est aussi la conclusion à laquelle est venu le vérificateur indépendant. En mars dernier, j'ai pris connaissance de son rapport. Immédiatement, j'ai mis en branle plusieurs actions afin de répondre aux recommandations du rapport Lebon. En collaboration avec l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, les instituts universitaires jeunesse, le milieu de la recherche et l'ensemble des établissements offrant des services de réadaptation aux jeunes en difficulté, nous travaillons en vue de revoir notre offre de service en réadaptation. Celle-ci doit être adaptée aux nouvelles réalités, notamment au regard des jeunes fugueurs, phénomène de l'exploitation sexuelle.

• (19 h 50) •

Le Président (M. Morin) : ...

Mme Charlebois : Là, vous m'indiquez qu'il me reste seulement deux minutes, mais je vais poursuivre, puis peut-être que la partie gouvernementale me laissera terminer.

Un comité d'experts sera également mandaté afin d'identifier des solutions intermédiaires entre l'encadrement intensif et les unités ouvertes, et, de plus, nous nous assurons que... la création d'un lieu d'échange afin de diffuser les connaissances et les meilleures pratiques en réadaptation.

Le rapport nous propose plein d'autres choses, M. le Président, que nous aurons l'occasion de parler tout au cours de la commission, et je vous parlerai aussi du programme que j'ai annoncé, Prévention jeunesse, bien, que mon collègue a annoncé et que j'ai eu le bonheur d'annoncer avec lui. Et je vous parlerai aussi, pendant la commission, des organismes communautaires sur lesquels nous pouvons nous appuyer et vous dire à quel point le financement de leurs organismes est important, et c'est pour ça qu'on indexe nos sommes à tous les ans.

Et, comme vous avez pu le remarquer, M. le Président, plusieurs de nos réalisations cette année se sont faites en partenariat avec d'autres ministères. En effet, comme je le disais, dans le même contexte que l'an dernier, l'amélioration de la santé de la population ne dépend pas que de notre réseau, mais de l'ensemble des ministères, c'est l'action gouvernementale prise dans son ensemble qui peut faire une différence. Et je veux remercier mes collègues qui acceptent de se prêter à l'exercice, avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, pour s'occuper du bien-être de la population. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre, députée de Soulanges. Je n'aurai pas besoin de demander à vos collègues, vous êtes rentrée dans le temps. Donc, j'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle, le député de Rosemont, à faire ses remarques préliminaires. Et vous avez 10 minutes.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Merci, M. le Président. Alors, ceux qui ont lu les journaux, écouté les téléjournaux pendant l'année savent que ça a été une année noire pour les services sociaux, la protection de la jeunesse, les fugueurs, les personnes handicapées, les personnes autistes, cette année. Ce qu'on a vu cette année, c'est l'impact concret, dans la vie des gens les plus vulnérables, de l'austérité. On a vu comment ça faisait en sorte que leurs services étaient réduits, que leur détresse augmentait.

En autisme, il y a eu un beau colloque, mais il y a eu une augmentation du nombre d'enfants autistes, d'adolescents autistes, d'adultes autistes qui sont en attente de traitements et en attente de suivis.

En itinérance, on aurait pensé que ce serait une bonne année parce que le gouvernement avait relayé la politique nationale d'itinérance que la ministre précédente avait élaborée. Malheureusement, la négociation avec le gouvernement fédéral a fait en sorte d'enlever 10 millions de dollars à des organismes qui viennent en aide quotidiennement aux itinérants au Québec et qui ont réclamé qu'on ne les pousse pas à la fermeture dans les mois qui viennent. Pour l'instant, ce n'est pas réglé.

On a assisté à une catastrophe annoncée pour les personnes dépendantes, toxicomanes qui étaient dans des centres de désintoxication. Tout le monde avait dit au gouvernement que la réforme qu'ils avaient introduite l'an dernier allait provoquer des fermetures. Ils ne nous ont pas entendus. Et, lorsque les fermetures ont commencé et que ces gaillards ont été interviewés en train de pleurer devant les caméras, ça a pris encore quelques semaines avant que le gouvernement se rende compte de l'ampleur du désastre qu'il avait provoqué et ça a pris encore quelques semaines avant qu'ils débloquent à peu près la somme qu'ils avaient voulu économiser sur leur dos. Et, pendant ce temps-là, bien, c'est de la détresse qu'ils ont créée. Tant mieux s'ils ont écouté, mais avec un an de retard, les cris d'alarme qu'on avait lancés.

Le problème des fugueuses, c'est extraordinaire. Lorsque le rapport Lebon... Le rapport du vérificateur, qu'est-ce qu'il dit? Il dit : Oui, il y a des vrais problèmes, il y a des problèmes qui ont été exacerbés par les actions du gouvernement libéral. Qu'est-ce qu'il faut, dit-il? Bien, il faut plus d'intervenants. Il y a eu des coupures. Il faut des intervenants sur le terrain qui sont financés. Le gouvernement libéral a annulé le financement de 1,1 million de dollars de ces organisations terrain. Il dit : Ça prend des unités spécialisées comme Mobilis, à Longueuil, qui doit être notre intervention-phare. Le gouvernement a fait en sorte de réduire de 80 % l'action de Mobilis. Et là ils sont en mode rattrapage. Ils sont en mode rattrapage.

Et là on apprend qu'on aura un plan d'action à la fin de l'été. Donc, après deux ans d'avoir nui, cette année d'avoir été obligés de regarder le problème, ils nous disent : Ça va prendre encore plusieurs mois avant de proposer quelque chose. Ce n'est pas une bonne nouvelle, M. le Président.

Cette année, pour la troisième année consécutive, le gouvernement décide de ne pas appliquer la résolution unanime de l'Assemblée nationale de rehausser les budgets de mission de base des organisations communautaires du Québec. Qu'est-ce que ça signifie? J'en ai plein, là, je vais vous en donner.

Les cuisines collectives : 30 % des cuisines collectives prévoient une diminution de leurs revenus, 91 % disent manquer de fonds pour assurer le fonctionnement de base, 30 % ont interrompu temporairement leurs activités pour des raisons économiques, 59 % disent manquer de ressources matérielles pour réaliser leurs activités.

Regardons l'ensemble des groupes communautaires dans la région Lanaudière, Trois-Rivières : 84 de ces groupes ont vu leur situation se détériorer face à l'année précédente, 73 % des groupes ont vu leur situation être aussi difficile, 66 % des groupes ont dû fermer temporairement leurs portes, 82 des groupes ont dû diminuer ou interrompre des activités.

Allons voir À coeur d'homme : «61 % de nos organismes ont effectué des coupures au cours de la dernière année, réduction des activités de prévention et de sensibilisation, réduction du temps consacré à la formation du personnel, abolition d'emplois liés au domaine administratif, réduction du temps d'ouverture des ressources, allongement de la liste d'attente pouvant aller jusqu'à quatre mois dans certains organismes.»

Ils disent tous ça. Ils sont à bout de souffle. Ils réclament une réintroduction de fonds sur leurs missions de base parce qu'ils ne peuvent pas soutenir la demande actuelle. Et ce que la ministre leur offre, c'est l'indexation à l'inflation mais pas l'indexation à leurs coûts de système. Il est certain que l'indexation offerte est moins grande que les coûts de système de ces organisations-là, et donc, par rapport à la demande qui, dans plusieurs cas, augmente, ils ne sont pas capables de suivre.

Prévention nationale du suicide. On a appris ces derniers mois que la réorganisation du projet de loi n° 10 a fait en sorte que, sur toute l'île de Montréal, ils ont perdu le budget. Suicide-Action Montréal faisait en sorte chaque année de former 350 intervenants de la santé. Depuis le 1er avril dernier, zéro, zéro, il n'y a plus de fonds, et on apprend que c'est vrai aussi dans d'autres régions. Donc, on régresse dans un lieu où on avait fait des progrès importants. Et, encore une fois, le rapport Lebon nous dit l'importance de la formation en prévention du suicide des intervenants. Bien, à Montréal, il n'y en a plus pour l'instant. Il y a du placotage. Ils sont convoqués à du placotage, mais personne n'a les sous, personne n'a les sous.

Alors, quand on fait le tour, en fait, le seul élément positif, c'est la loi antitabac. Bravo à la loi antitabac! On a travaillé fort, la deuxième opposition, nous, la ministre. On aurait pu faire mieux, on aurait pu faire beaucoup mieux, mais on a fait un grand pas en avant. Et, si on met ça de côté, c'est une année noire, c'est une année de régression, c'est une année de réduction des services, c'est une année où on nous dit : Il y a des plans d'action, il y a de la discussion, etc. Tout ce qu'il y a eu, c'est du rattrapage sur des crises dont on avait dit qu'elles allaient se produire si le gouvernement s'entêtait dans des réformes mal conçues. Et, pour l'instant, on n'est même pas certains que la situation s'est vraiment rétablie.

Alors, M. le Président, nous, on est ici pour discuter des crédits, ce qui nous permet de discuter des actions réelles, pas des intentions, pas du placotage, pas de l'écriture d'un guide, mais est-ce que les crédits de ce ministère sont suffisants pour répondre aux demandes réelles des gens les plus vulnérables de la société?

Alors, nous allons passer un certain temps ensemble, M. le Président, Mme la ministre, et on va essayer de voir, au-delà des belles paroles, quelles sont les vraies actions. Merci.

• (20 heures) •

Le Président (M. Morin) : Merci, M. le député de Rosemont. Maintenant, je cède la parole au porte-parole de la deuxième opposition dans la personne du député de Drummond—Bois-Francs. Donc, vous avez sept minutes pour vos remarques préliminaires.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Merci, M. le Président. Alors, étant donné que je partage mon temps avec mon collègue de Lévis, qui prendra le relais demain, je veux être très, très bref sur les remarques. Alors, je salue la ministre et tous les gens du ministère, ainsi que les collègues ministériels, le député et collègue de Rosemont.

Le collègue de Rosemont vient de faire un topo que je partage sur plusieurs points, j'aimerais ça les énumérer. Il y a beaucoup de points, justement, qu'on a vus dans l'année au niveau des centres jeunesse et autres. Alors, j'espère qu'on pourra avoir des bons échanges constructifs parce que c'est un dossier que je tiens à coeur et puis j'espère qu'avec la ministre on aura des réponses, et surtout sa vision qu'elle partage, ce qui est très important. Alors, je m'arrête là, M. le Président. Merci.

Discussion générale

Le Président (M. Morin) : Merci, M. le député de Drummond. Donc, je suis maintenant prêt à reconnaître une première intervention de l'opposition officielle en la personne de M. le député de Rosemont pour un premier bloc d'échange de 21 min 30 s, M. le député.

M. Lisée : Merci, M. le Président. J'aimerais donc saluer tout le monde, effectivement, M. le Président : le secrétaire, mes collègues ministériels, la deuxième opposition, la ministre et tous ces gens qui travaillent avec elle.

J'aimerais d'abord parler de la santé publique. Alors, on a appris, en regardant les crédits du ministère de la Santé et des Services sociaux et en discutant avec le ministre de la Santé dans les quarts de crédits, qu'en plus des 23 millions de dollars qui ont été comprimés, 23,7, dans l'année précédente se sont ajoutées des coupes, en 2015-2016, de 39,5 millions à la santé publique. Alors, ça veut dire qu'en deux ans ils ont sabré 64 millions de dollars en santé publique.

Est-ce que la ministre peut continuer à affirmer que cela n'a aucun impact sur les services rendus? Et où ont été pris ces nouveaux 39,5 millions en 2015-2016?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, d'entrée de jeu, je veux juste dire au député de Rosemont qu'on a des organismes qui aident à avoir un petit peu plus de positivisme dans la vie. Je comprends qu'il a une vision qui voit tout noir, de travers, là, mais on va profiter de l'étude de crédits pour lui démontrer qu'il peut être un peu plus optimiste, puis il va pouvoir être plus content.

Concernant la santé publique, pour aller directement au coeur de sa question, il n'y a pas eu de coupure de services en santé publique. Ce qu'il y a, c'est au niveau de l'administration. Il y a eu des regroupements vers l'administration des dépenses et faire en sorte que, quand on élimine un palier... Il est clair qu'on n'a pas besoin de deux personnes pour faire le même travail, d'une part, mais, de d'autre part, il a fallu faire des évaluations, parce que, vous savez, il y a des services qui étaient rendus à des endroits qui n'étaient plus nécessaires puisque maintenant les CISSS et CIUSSS offrent ces services-là. Alors, ces argents-là ont été redistribués vers de l'administratif dans le CISSS, ce qui était déjà dans l'agence, et c'est ça qui fait qu'on a...

Lui, il pense que c'est des coupures, mais ce n'en est pas. Honnêtement, il y a les mêmes services, on fait la même prévention, il n'y a eu aucune réduction de services. Et, s'il me le permet, le spécialiste des chiffres au ministère, c'est M. Dion, je le laisserais expliquer comme il faut tout ce qui a été projeté d'une année à l'autre et lui expliquer les transferts administratifs qui sont réellement faits, et vous allez vraiment comprendre qu'il y a zéro coupure de services en prévention.

Le Président (M. Morin) : Oui. Ça va me prendre... Est-ce que M. le député...

M. Lisée : Non.

Mme Charlebois : Ah! il ne veut pas le savoir. O.K.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre... M. le député de Rosemont.

M. Lisée : Non, c'est que, je veux dire, il est... Je comprends qu'on peut essayer de nous faire cette démonstration, mais d'abord, dans un premier temps, la ministre nous a dit que 23 millions de coupures en santé publique la première année, ça n'avait pas d'impact sur les services. On lui a fait la liste des infirmières, techniciens urbanistes, etc., qui ont été virés.

Maintenant, je voulais simplement confirmer qu'il y avait 39 millions qui étaient coupés. Donc, j'ai cette confirmation. Et, si quelqu'un veut essayer de faire croire aux Québécois qu'en coupant 64 millions de dollars en santé publique les services sont d'aussi grande qualité qu'avant, ils vont faire ça sans moi, parce que ça dépasse l'entendement. Je vais passer à un autre sujet.

Mme Charlebois : Mais est-ce que je peux répondre, M. le Président?

Le Président (M. Morin) : Certainement, chère madame.

Mme Charlebois : Alors, dans son 30 millions, là, 30 quelques millions, il y a 18,7 millions qui est une provision pour transition, qui vient de l'année dernière, qui était des frais pour des départs. Cette année, là, ça n'a aucun impact sur les services. C'est des frais de départ puis c'est des personnes qui étaient reliées à l'administration.

Pour le reste, je vous le dis, c'est carrément des mesures administratives, des baux qui se terminent, des choses comme ça. Ça a zéro impact sur la prévention. Alors, lui, s'il veut continuer de prétendre ça, il a le droit. Moi, je vous dis, M. le Président, et j'affirme qu'il n'y a aucune coupure de services sur la prévention en santé.

Le Président (M. Morin) : M. le député.

M. Lisée : Oui. Bien, ça, on en discutera avec les infirmières qui sont mises à la porte, avec les spécialistes en vaccination qui sont mis à la porte, avec les gens qui ont manifesté à Montréal. Et moi, j'ai parlé à des personnes qui disaient : Bien, moi, c'est fini, là, je faisais ce travail-là puis maintenant je ne le fais plus.

Alors, je voudrais discuter de l'autisme. Alors, effectivement, il y a 5 millions qui sont ajoutés, de plus. Mais cependant — puis ça, j'ai posé la question l'an dernier puis j'ai posé la question l'année précédente — à quel moment, au rythme où ça va, est-ce que la ministre pense qu'on va atteindre un niveau d'attente en autisme qu'elle considère raisonnable? Alors, en ce moment, on sait qu'au 31 mars 2015 il y a un délai de 264 jours pour les 0-17 ans qui attendent un premier service, hein, un premier service en déficience intellectuelle. L'an dernier, c'était 264 jours; en 2014, 264; en 2015, 264 jours, O.K.? Et le nombre de personnes qui sont en attente, bien, c'est 1 500.

En trouble du spectre de l'autisme, parmi les 0-17 ans, c'est 412 jours. 412 jours, c'est plus qu'une année, ça, M. le Président. Ça veut dire qu'on a un enfant, et on sait, tout le monde sait qu'il faut faire une intervention avant l'âge de cinq ans, et, à ce moment-là, ça prend plus d'un an avant de faire une intervention. Il y a 3 348 jeunes de zéro à 17 ans qui sont dans cette attente.

Alors, je sais qu'on a eu un beau colloque cette année, mais, l'an dernier déjà, on avait le Vérificateur général et on avait aussi la Protectrice du citoyen qui avaient donné un nombre très précis de recommandations, et là la ministre, cette année, ajoute 5 millions. Est-ce qu'elle peut nous dire de combien de jours ça va réduire la liste d'attente? De 264, ça va tomber à combien? De 412, ça va tomber à combien? Puis est-ce qu'elle a un objectif, d'ici la fin de son mandat, de réduire ça? À quoi? Qu'est-ce que c'est, pour elle, un nombre de jours raisonnable pour qu'un enfant ait sa première intervention? Ça ne veut pas dire que son plan d'intervention personnalisé est fait, là, ça veut dire que c'est la première fois qu'on va le voir.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, vous savez que, dans mes dossiers, l'autisme est un dossier qui occupe beaucoup de mes pensées. C'est une de mes priorités dans le cabinet, et ce n'est pas pour rien que nous avons eu un forum sur l'autisme. D'ailleurs, je vous rappelle que c'était le premier forum québécois, n'en déplaise au député de Rosemont, sur l'autisme, et ce n'était pas pour rien, c'était justement pour entendre ce que les gens voulaient comme priorités, et c'est à partir de ces priorités-là que nous allons bâtir un plan d'action. Je sais que, pour lui, ce n'est pas important, mais, pour ces personnes-là, je peux vous dire que ça va faire une différence.

Mais entre-temps, avant qu'on produise le plan d'action, ça ne nous empêche pas de poser des gestes. Et je veux juste vous rappeler qu'il y a eu une modification au Code des professions, le projet de loi n° 21, les lignes directrices des cliniques, du Collège des médecins, l'ordre professionnel, qui permettent aux médecins généralistes d'établir un diagnostic provisoire, aux psychologues dûment habilités d'établir une conclusion clinique provisoire de TSA ainsi qu'aux infirmières dûment habilitées d'évaluer les troubles mentaux et les retards de développement, qui devraient justement réduire l'accès... le temps d'attente pour les services.

Maintenant, je veux juste aussi rappeler au député de Rosemont... Parce qu'il n'en parle pas, jamais de ça, mais, c'est certain, il ne parle jamais des bonnes nouvelles, il est encadré d'une perspective de la «grande noirceur». Rappelons-lui qu'on a signé une entente avec la Fondation Miriam, M. le Président, qui nous permet justement... qui nous a permis de réduire substantiellement la liste d'attente qu'il y avait pour les diagnostics. Savez-vous pourquoi, M. le Président? Parce qu'on veut éliminer, dans Montréal et tous les environs, parce que c'est là qu'est la densité de la population... Puis ça ne veut pas dire qu'on ne va pas s'occuper d'ailleurs, parce que le plan d'action va justement prévoir des gestes là-dessus, mais, avec la Fondation Miriam et l'entente que nous avons signée, ça nous permet de faire des diagnostics plus rapidement, mais aussi de soutenir les familles et de... On a commencé à offrir des services de plus aux personnes qui ont le trouble du spectre de l'autisme, bref les personnes autistes.

Alors, dans nos statistiques au ministère, ce qu'on a, c'est que — j'ai eu l'information ici — il y a 89 % des demandes qui sont répondues dans les standards en ce moment. Ce n'est pas tout noir. Oui, il reste de l'amélioration à faire, j'en conviens, et on va y travailler, c'est pour ça qu'on va faire un plan d'action. On a déjà travaillé avec Miriam à ajouter des intervenants pivots, à faire en sorte qu'il y ait des services postdiagnostiques pour 250 enfants, M. le Président. On a mis en communication ou en travail commun le centre universitaire en santé mentale Douglas, le Centre de santé et de services sociaux de la Montagne, le Centre hospitalier universitaire Sainte‑Justine, l'hôpital Montréal pour enfants Jésus. Tous ces gens-là travaillent ensemble, et c'est ça que le plan d'action va nous permettre de faire, justement, d'améliorer notre service aux personnes autistes.

Mais je veux remercier la Fondation Miriam de nous permettre d'avoir pu résorber l'attente pour pouvoir poursuivre avec un niveau acceptable de temps de réponse.

• (20 h 10) •

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre. J'essaie d'équilibrer le temps questions-réponses, mais ça va bien.

Mme Charlebois : Oui, mais j'ai tellement de choses à dire.

Le Président (M. Morin) : Ça va bien. Vous étiez passablement dans votre temps. Oui, M. le député.

M. Lisée : J'essaie de poser des questions courtes et là je n'ai eu de réponse à aucune des questions courtes que j'ai posées.

La question que j'ai posée, je la répète, puis, si la ministre ne connaît pas la réponse, qu'elle le dise simplement, on va passer à autre chose. Les chiffres du ministère disent que le temps d'attente en déficience intellectuelle 0-17 ans, c'est 264 jours au 31 mars 2015. C'était la même chose au 31 mars 2014. Je sais qu'elle a fait des choses, mais j'aimerais savoir quel est son objectif. Elle a dit 49 %... 89 % sont dans les standards. Est-ce que c'est son standard, ça, 264 jours? Est-ce que c'est moins? Quel est son objectif? Ça, j'aimerais avoir cette réponse-là. Quand est-ce qu'elle se dira : On a fait un grand pas en avant parce que c'est x jours?

Pour le trouble du spectre de l'autisme, c'est 412 jours. En un an, ils ont baissé de cinq jours, O.K.? C'est évidemment extraordinairement épouvantable d'attendre plus qu'un an. Elle me dit : 85 % sont dans les standards. Je ne vois pas comment, dans la moyenne du ministère, ça peut être dans un standard acceptable quand il y a 412 jours de moyenne.

Je lui repose la question : Qu'est-ce que c'est, pour lui, un objectif raisonnable d'attente et à quel moment pense-t-elle atteindre cet objectif?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, il faut savoir, là, que des chiffres puis de l'humain, ça ne marche pas tout le temps comme ça. Il faut savoir que, les gens qui ont le trouble du spectre de l'autisme, qui sont autistes, il y en a qui sont classifiés dans le mode urgent, il y en a qui sont classifiés dans le modéré — ça dépend, hein, c'est à tous les niveaux, l'autisme — puis il y en a que c'est classifié élevé. Dépendamment de la classification... Plus c'est urgent, évidemment moins il y a de délais, hein? Il y en a zéro. Pour les autres, il y a des délais.

Est-ce que je souhaite avoir des délais tout le temps pour les personnes autistes? Non. C'est pour ça qu'on va faire un plan d'action, M. le Président. Puisque ça double tous les quatre ans... Ils ont été là 18 mois, ils ont foutu... comme ça. Ça s'appelait, dans mon temps, là, au secondaire, ensemble vide. Je ne comprends pas qu'il me demande... On améliore la chose, on a fait une entente avec Miriam, il n'est encore pas content. Il devrait me dire : Félicitations, puis là vous allez déposer un plan d'action qui va réduire encore l'attente. Je ne comprends pas. Je ne comprends vraiment pas son point.

S'il me demande : Est-ce que je souhaite qu'il n'y ait plus d'attente?, bien oui, bien sûr, M. le Président, tout le monde souhaite que tout le monde ait des services immédiatement. Mais, comme je vous dis, il y a des classifications en fonction des priorisations, en fonction des disponibilités. Puis ce qu'on souhaite, c'est développer davantage de services puis c'est avoir un plan d'action qui va nous permettre justement de donner les meilleurs services en temps réel, surtout aux tout-petits.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Rosemont.

M. Lisée : Bien, écoutez, je l'applaudirai lorsqu'il y aura une réduction de la moyenne de l'attente. Je veux bien la croire qu'elle fait des choses. Je pense bien qu'elle fait des choses, je lis ses communiqués, mais ça n'a pas d'impact sur les chiffres que le ministère nous donne.

Alors, si vous voulez déposer des chiffres et si, dans votre plan d'action, dont vous nous avez annoncé qu'il serait d'ici la fin de l'année... si ça pouvait être plus tôt, les groupes et les personnes autistes seraient contents. Est-ce que vous allez vous donner des cibles? Et elles peuvent être différenciées. Là, j'ai les chiffres, les moyennes que le ministère donne. Si vous voulez nous donner des chiffres différenciés avec des cibles et avec un calendrier, ça, pour l'instant, ça n'existe pas.

Alors, je demande à la ministre : Va-t-elle s'engager à des cibles de réduction de temps d'attente, qui peuvent être différenciés, mais qu'on puisse essayer de suivre un progrès, parce que, pour l'instant, les chiffres que son ministère donne nous montrent qu'en moyenne le progrès est soit inexistant soit insignifiant?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, j'ai ici, sous les yeux... Je m'engage à obtenir comme objectif 90 % de la clientèle desservie dans les délais, selon les classifications. Si je prends les priorités de niveau élevé de tous âges... Prenons, par exemple, en 2009-2010, il y avait 68 % des personnes qui avaient des services dans les délais requis, soit dans les 90 jours. Aujourd'hui, 2014-2015, 83,1 %. C'est une nette amélioration, je pense. Ce que je souhaite obtenir, c'est 90 %. Mon objectif est là puis pour, un jour, en arriver à 100 % de personnes servies dans les 90 jours.

Si on parle les priorités au niveau modéré et de tous âges, prenons la statistique en ce moment, en 2014-2015, on a 89 % de personnes qui ont les services en deçà d'un an, et c'est la norme. C'est la norme. Il y a des choses, là, que le député de Rosemont, il ne semble pas comprendre, mais il pourrait questionner celle qui était dans mon siège, qui formait le gouvernement pendant 18 mois. Elle avait les mêmes, mêmes, mêmes standards, les mêmes, mêmes, mêmes standards. Nous, on a juste amélioré, puis on va faire un plan d'action, puis j'ai fait un forum pour améliorer ça. On a signé une entente avec Miriam.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Lisée : M. le Président, on travaille avec les chiffres que son ministère nous fournit en réponse à nos questions particulières, et j'admets avec elle que tous les chiffres ne nous sont pas fournis. Alors, je la remercierais de déposer le document dont elle vient de parler. Et, s'il est vrai qu'elle veut s'engager à avoir 90 % dans les standards, qui sont 90 jours, un jour, etc., j'aimerais qu'elle nous dépose un texte qui nous dit quel est cet engagement et quels sont les chiffres, et là on pourra juger à partir du même jeu de chiffres.

Alors, là-dessus, est-ce qu'elle est d'accord pour déposer le document qu'elle a devant elle?

Mme Charlebois : Bien, les standards, c'est les standards qui sont dans le plan d'accès, premièrement. Deuxièmement, je pense que ma parole, M. le Président, doit valoir quelque chose au bout d'un micro ici, en commission parlementaire. Si je dis que mon objectif est 90 %, pensez-vous que vous pouvez lui faire parvenir le transcript?

Le Président (M. Morin) : Certainement. Oui, M. le député de Rosemont.

M. Lisée : M. le Président, c'est sûr qu'on prend des notes, il n'y a pas de problème, mais il y a plusieurs catégories et il peut y avoir plusieurs objectifs. Et ici on est aux crédits, et la beauté des crédits, c'est qu'on peut s'appuyer sur des chiffres. Alors, je serais très heureux, et tous les gens du milieu de l'autisme, d'avoir ce genre de chiffres et d'avoir ce genre d'objectifs. Et donc on va vous revenir là-dessus.

Dans le temps qu'il me reste, je voudrais parler de la question du suicide. Alors, comme vous le savez, et je l'ai dit en introduction, le financement pour la formation des intervenants en santé pour le suicide sur l'île de Montréal est à zéro depuis le 1er avril. Il y a des discussions qui sont censées avoir lieu dans le courant de l'automne, mais les sommes pour ça, spécifiquement, là — je ne parle pas du téléphone ou de l'aide téléphonique, je parle du financement pour la formation — est à zéro, et on se rend compte que, globalement depuis deux ans, les organismes ont reçu 600 000 $ de moins de financement. Et, en 2014-2015, il y avait 1 875 intervenants du réseau qui avaient été formés, et, en 2015-2016, ce serait à peu près 659.

Comment est-ce que la ministre peut expliquer que, sous sa gouverne, il y a moins de gens du réseau de la santé qui sont formés pour être à l'affût des signes avant-coureurs de suicide et que, sur l'île de Montréal, pour l'instant, toute formation a été interrompue?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre, en moins de deux minutes.

Mme Charlebois : Là, ce que me parle le député de Rosemont, c'est de Suicide-Action Montréal, avec l'entente qu'ils ont avec le CIUSSS de Montréal?

M. Lisée : ...mais en particulier, oui.

Mme Charlebois : Est-ce que le député de Rosemont est au courant que cet organisme, au PSOC, reçoit en ce moment autour de 830 000 $?

M. Lisée : Oui, pour faire d'autres actions, dont répondre au téléphone à chaque fois qu'il y a quelqu'un qui pense se suicider et qui appelle. Mais, spécifiquement pour former les gens sur le terrain dans le réseau de la santé, c'est zéro. C'était 180 000 $ l'an dernier, c'est zéro maintenant.

Mme Charlebois : Bien, ce n'est pas que c'est zéro. Je pense qu'il y a des discussions en ce moment avec Suicide-Action Montréal et le CIUSSS du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal, et je pense que les discussions vont bon train. Moi, je pense que le contrat est arrivé à échéance, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y aura plus de contrat, au contraire. Moi, ce que j'ai entendu parler, c'est qu'il y avait des échanges en ce moment. Mais il n'est pas question nécessairement d'abolir cette entente-là. Je ne sais pas où vous avez pris ça, mais...

• (20 h 20) •

M. Lisée : Bien, j'ai pris ça à Suicide-Action Montréal, qui sont venus dire... bien, qui ont dit en conférence de presse puis qui aimeraient vous rencontrer pour vous dire que, oui, il y a des discussions, des groupes, des CISSS et des CIUSSS qui disent : On a perdu l'argent, on ne sait plus où il est, on ne l'a pas pour vous le donner. Vous l'avez eu pendant plusieurs années, mais, avec la réorganisation, ça s'est désorganisé. Et, un an avant, Suicide-Action Montréal disait : Mais d'où va venir l'argent dans la nouvelle année financière? Ils ont dit : On ne le sait pas. L'année financière est ouverte, il n'y a toujours pas d'argent. On leur a parlé cette semaine encore.

Mme Charlebois : Suicide-Action Montréal qui vous disent ça?

M. Lisée : Oui.

Mme Charlebois : Bien, Suicide-Action Montréal a formé effectivement beaucoup d'intervenants, puis c'était ça, l'objectif. Je ne pense pas que ces intervenants-là ont perdu leur formation. Je pense que, leurs connaissances, ils les ont encore. Ils sont encore sur le terrain.

En ce qui concerne la supposée désorganisation, bien, justement, on va en parler du projet de loi n° 10...

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre, vous pourrez peut-être prendre le temps... Oui, allez-y. On va prendre le temps du côté ministériel pour répondre à la question.

Mme Charlebois : Oui. Bien, je trouve ça intéressant que le député de Rosemont amène cette question-là parce que, c'est génial, le projet de loi n° 10, qui est devenu une loi, fait en sorte qu'on transforme le système de santé au Québec comme on transforme le Québec à plusieurs égards dans plusieurs dossiers, mais, en santé, ça a fait ça. Tantôt, il me parlait de l'autisme, M. le Président. Savez-vous quoi? Ce qui est intéressant maintenant, là, c'est que l'enfant qui arrive au CSSS, il a ses services tout de suite et il est tout de suite mis en communication parce qu'il a toujours le même dossier. Il n'a pas besoin de répéter son histoire première ligne, deuxième ligne, ici et là puis dans les organismes, il a toujours le même dossier, l'enfant ou l'adulte qui a besoin de services. C'est la même chose pour ça.

Maintenant, moi, je sais qu'il y a des discussions avec le CIUSSS. Moi, je les invite à continuer à discuter avec le CIUSSS, mais je pense que les intervenants qui ont eu une formation ne se sont pas évaporés. Alors, ces intervenants-là sont encore sur le terrain. Est-ce qu'il y aura besoin d'autres formations? Sûrement. Mais poursuivons les discussions, prenons le temps de voir. Puis il n'y a pas de désorganisation au centre CIUSSS du sud de l'île de Montréal, au contraire.

Mais moi, je pense que, quand on travaille avec l'argent des Québécois, qu'ils gagnent à la sueur de leur front, qui paient des impôts, il faut prendre le temps de vraiment revoir les choses, et c'est ce qu'on fait maintenant. Ça fait partie de la transformation du Québec, prendre le temps de réévaluer. Ce n'est pas parce que ça fait 20 ans que tu fais les choses d'une façon qu'on ne peut plus s'arrêter pour réfléchir : Est-ce qu'on a toujours la bonne façon? C'est ça qui se passe en ce moment, mais il n'y a rien de grave.

Puis moi, je ne pense pas que la formation aux intervenants va s'arrêter là. Je pense que c'est, au contraire, signe d'une bonne santé de pouvoir se questionner. Et là on a des intervenants formés. En attendant que tout ça... les discussions débloquent, bien, ces intervenants-là travaillent sur le terrain en ce moment, M. le Président. Et je vous rappelle que l'organisme a 830 000 $ par année pour fonctionner.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, à la députée de Crémazie.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Je commencerais par saluer la ministre et toute son équipe qui est avec nous ce soir, mes collègues de la partie gouvernementale, le député de Rosemont dans l'opposition officielle et le député de Drummond—Bois-Francs, de la deuxième opposition.

Le député de Rosemont a abordé tout à l'heure une des missions importantes, hein, de votre ministère, la question de la santé publique. Et, je sais, bon, les enveloppes de temps sont toujours un petit peu restreintes, puis je comprends qu'on essaie tous de travailler avec ça, et je ne sais pas si la ministre... Il était question de donner la parole à M. Dion tout à l'heure, parce que je pense que c'était une question fort pertinente, là, au niveau des 39,5 millions qui ont été abordés. Est-ce qu'il serait possible de donner la parole à M. Dion peut-être pour nous expliquer justement ces montants-là, de quelle façon, effectivement, ils ont été... en fait, l'état de la situation?

Mme Charlebois : Bien, merci, Mme la députée de Crémazie, de nous permettre de pouvoir expliquer justement...

Mme Montpetit : ...le consentement de...

Le Président (M. Morin) : Oui. Donc, si vous voulez vous identifier.

M. Dion (François) : Oui, M. le Président. François Dion, sous-ministre adjoint aux finances, infrastructures et budget.

Alors, le 39 millions qui a été mentionné plus tôt se subdivise en deux éléments, c'est-à-dire 15 millions de dollars et 18,7 millions de dollars. Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que la restructuration qu'on a faite l'an passé en raison de la loi n° 10 a permis de faire un regroupement des activités. Alors, ce qui était autrefois des dépenses qu'on retrouvait en Santé publique pour de l'administration a été reconfiguré avec l'ensemble de l'administration. Donc, pour ainsi dire, on a été obligés de transférer les budgets restants au niveau de l'administration, à l'intégrer au niveau du budget de l'administration proprement dite.

Donc, essentiellement, il n'y a aucune coupure de poste, c'est juste un regroupement des activités, compte tenu aussi que cette opération a permis de fusionner des travaux qui se faisaient soit par la Santé publique soit par l'administration et que le personnel, dorénavant, était intégré, travaille autant dans un sens que dans l'autre. Ça, c'est le premier volet.

Le deuxième volet, de 18,7 millions, je rappelle aux membres de la commission, c'est que, l'année passée, lorsqu'on a fait un effort de 23,7 millions, qu'on avait demandé à la Santé publique, on a investi. On a investi un budget de transition de l'ordre de 18,7 millions de dollars. Donc, essentiellement, c'était pour subvenir à des coûts de transition, qu'on a appelé, mais qui touchent particulièrement les départs à la retraite de certains cadres, donc les primes de départ qu'on avait pour les cadres, le coût, disons, de location des bâtiments qui demeurait encore un certain temps, et des frais de transition, notamment pour le personnel qui soit était transféré ou il y avait des délais pour être reclassés sur des nouveaux postes. Alors, dans ce contexte-là, on avait prévu des sommes reliées à cet effet-là.

Alors, comme c'est l'ensemble du personnel qui était dédié... était, encore une fois, transféré au niveau de l'administration, donc on a transféré le budget de transition au niveau de l'administration proprement dite. C'est essentiellement les deux éléments qui ont fait en sorte que les crédits comparatifs du dernier exercice ont été corrigés à la baisse de 39,7 millions.

Le Président (M. Morin) : Merci, M. Dion. Mme la députée de Crémazie.

Mme Montpetit : Bien, je vous remercie. Donc, ce que vous nous dites, dans le fond, c'est qu'il n'y a pas eu de montant de moins, là. C'est un exercice... Parfait.

M. Dion (François) : Aucunement. C'est juste un déplacement.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. Dion.

M. Dion (François) : De rien.

Mme Montpetit : J'espère que ça saura rassurer notre collègue de Rosemont. Et donc je vais aller complètement sur un autre sujet qui a fait beaucoup l'actualité aussi au cours des dernières semaines, celui du mouvement citoyen Parents jusqu'au bout. Puis, pour les gens qui nous écoutent à la maison, je sais qu'il est un peu tard, mais je vais quand même faire... Il y a sûrement encore des gens qui sont avec nous pour écouter ces crédits qui sont fort importants. Je vais juste expliquer un peu, là, le regroupement Parents jusqu'au bout, dans le fond, qui a été fondé au printemps dernier, printemps 2015, par trois jeunes mères qui militent pour la création d'un régime parental pour les enfants lourdement handicapés.

La mère d'un des enfants atteints d'une maladie orpheline et deux autres mamans qui sont d'enfants handicapés souhaitent, dans le fond, que l'État offre aux parents d'enfants lourdement handicapés un soutien financier à long terme. Elles ont lancé une campagne pour avoir droit à un régime parental pour enfants lourdement handicapés. On en a parlé à plusieurs reprises. Elles sont venues notamment, d'ailleurs, à l'Assemblée nationale, et, bon, les trois jeunes femmes, et je les cite, là, «ont été dans l'obligation de cesser leurs activités professionnelles pour se consacrer exclusivement aux soins que nécessitent la condition de leurs enfants». Et, ce faisant, bon, leur situation financière s'est grandement détériorée, et elles demandent d'être compensées financièrement par l'État pour pouvoir s'occuper à temps plein de leurs enfants. Les fondatrices de ce regroupement prétendent que le coût de placement d'un enfant est beaucoup plus dispendieux pour l'État que le soutien financier qui pourrait être offert aux parents qui désirent rester à la maison pour s'occuper de leur enfant handicapé.

Et, bon, ce qu'on sait, c'est qu'au Québec il existe différentes mesures financières pour soutenir les parents qui sont dans cette situation-là. En complémentarité avec les mesures financières, il existe aussi de nombreux programmes, mesures, services qui peuvent contribuer à soutenir les personnes handicapées et leurs familles, notamment les services de réadaptation, services à domicile, programme d'adaptation de domicile, programme d'adaptation au véhicule. On compte 246 programmes et mesures qui sont destinés aux personnes handicapées, dont notamment 169 programmes et mesures qui sont spécifiquement adressés aux personnes handicapées et à leurs familles. Et, de ce nombre, il y en a huit qui s'adressent uniquement aux familles qui ont un enfant handicapé.

246 programmes, évidemment, c'est beaucoup, et on peut s'attendre qu'avec un nombre aussi important de programmes, de mesures disponibles, les démarches pour accéder aux divers programmes peuvent être longues, souvent répétitives, particulièrement pour des parents d'enfants qui ont des incapacités importantes. Et, compte tenu que la situation de ces parents, bon, elle est exceptionnelle, mais, il ne faut pas le minimiser, elle est extrêmement exigeante... Et je peux comprendre à quel point ça peut être lourd d'avoir des enfants qui sont handicapés et j'aimerais ça que vous puissiez nous parler des actions qui ont été posées, mais les actions aussi qui sont à venir dans ce dossier-là. Je pense que, comme je disais d'entrée de jeu, c'est un dossier qui a fait énormément l'actualité, qui est dans la sphère médiatique. Donc, je pense que ça serait une bonne occasion ce soir qu'on s'offre l'opportunité de vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

• (20 h 30) •

Mme Charlebois : Merci, M. le Président. Bien, je veux remercier la députée de Crémazie justement de pouvoir parler de ce dossier-là parce que c'est un dossier qui me tient particulièrement à coeur, M. le Président. C'est un dossier sur lequel je travaille, et j'ai demandé à notre équipe ministérielle de trouver des solutions. Je veux ici dire combien je comprends que leur situation nécessite des besoins et qu'il y a des besoins extraordinaires, mais je veux aussi leur dire que... Puis je sais que, pour les autres familles qui ne sont pas dans Parents jusqu'au bout!... mais je veux leur dire qu'il y a des services qui sont offerts, notamment des services psychosociaux, des services d'aide à domicile, il y a du support technique, notamment des fournitures, des équipements, des aides techniques, exemple pour le gavage, ce n'est pas mentionné, mais c'est des équipements qui sont fournis, il y a du gardiennage et du répit qui sont offerts aux parents qui ont besoin, il y a des travaux d'adaptation au domicile pour ces parents-là. Parce que ce n'est pas toujours évident, M. le Président, de pouvoir s'occuper de ces enfants-là, parce qu'ils vieillissent, hein, puis ça prend des équipements adaptés, il y a des prêts d'équipement qui sont faits. Bref, le soutien à domicile, c'est une priorité pour nous, pour notre gouvernement, et c'est pour cette raison-là qu'on veut maintenir les services. Est-ce que ces familles-là ont obtenu un rehaussement du service en soutien à domicile et dépannage? Oui, parce que j'ai demandé à quelqu'un, en passant par ma sous-ministre, qui, elle, s'est assurée de mandater quelqu'un de l'équipe, pour rencontrer ces personnes-là et je vous dirai que ce monsieur-là a été dédié, attentif aux besoins de ces personnes-là.

Et il y a des exemples de bonifications de services qui sont assez importantes et qui, je crois, méritent d'être connues. C'est certain que je ne vais pas parler de cas particuliers, M. le Président, parce que c'est confidentiel, hein? Les dossiers des gens, on ne peut pas les mettre sur la place publique à moins qu'elles-mêmes le fassent, mais mettons que je vais vous donner des exemples de bonifications d'offres de services.

Entre autres, il y a quelqu'un qui a reçu 30 heures de soutien à domicile et de répit spécialisé, allocation aux familles majorée de 4 280 $ à partir d'avril, et ils ont aussi accès à une ressource spécialisée. Mais 30 heures de répit, ce n'est pas ce qu'il avait avant, mais, avec étude de son dossier, en partenariat avec le CISSS, bien, il y a eu une augmentation des services de répit. 30 heures par semaine, c'est quand même mieux que zéro. Est-ce que ça comble tous ses besoins? Non, parce que c'est une situation exceptionnelle. Moi, je comprends ça.

Ensuite, dans un autre cas, il y a eu 35 heures de soutien à domicile, des services de réadaptation, de la stimulation directement faite à domicile, programme de déficience intellectuelle, il y a eu des remboursements de frais de transport à hauteur de 70 % des coûts, ils ont eu aussi accès à une ressource spécialisée. Encore là, je ne suis pas en train de dire que c'est suffisant, je dis juste qu'on a adapté l'offre de services aux besoins. Maintenant, je ne suis pas en train de dire que ces personnes-là, ils ne vivent pas des situations difficiles, là. Je dis juste qu'on a adapté l'offre de services à la demande. Et Mme Dupras peut certainement vous confirmer ça, elle sait combien je suis concernée par ces dossiers-là.

Il y a eu des plans d'intervention de faits, ils sont révisés régulièrement pour nous assurer qu'ils répondent adéquatement pour les services qu'ils ont besoin. Ce qui est important de mentionner, c'est que, dans la dynamique, dans le dossier de Parents jusqu'au bout!, il y a des travaux en cours en ce moment. Je sais que, pour certains, ça peut sembler seulement un comité, mais, si vous saviez comment ces gens-là travaillent ensemble avec plusieurs ministères pour trouver des solutions pour les soutenir, ces familles-là! Mais ce n'est pas des choses qui se font en dedans de deux minutes, c'est des choses qu'il faut planifier, il faut voir comme il faut comment on peut ajuster les programmes existants et/ou en développer d'autres cadres, mais il faut le faire correctement et il faut penser en termes d'équité pour l'ensemble des clientèles aussi.

Je veux aussi vous dire, vous l'avez dit, Mme la députée, qu'il y a 246 programmes. Je ne vais pas vous faire la liste de tous les programmes. J'ai dit quelles sortes de services on avait bonifiés pour ces deux personnes-là, mais il y a des services de réadaptation, des services à domicile, des services d'adaptation au domicile, il y a même de l'adaptation de véhicule au besoin. Il y a plusieurs choses qui sont faites pour les personnes handicapées et pour ceux qui ont des enfants handicapés. Maintenant, je veux aussi vous dire que notre plan des engagements gouvernementaux travaille pour faciliter les demandes d'accès aux programmes pour ces familles-là. On a déjà demandé à l'OPHQ de faire l'inventaire et de trouver les moyens de réduire les délais pour qu'elles n'aient plus à attendre. En matière de personnes handicapées, là, c'est 9,3 milliards, au Québec, qu'on a investis en 2013-2014. Ça veut dire que, quand on va avoir fini le décompte, on va trouver plus que ça dans les années subséquentes.

Ce qu'on travaille en ce moment... Il y a plusieurs ministères qui travaillent à l'optimisation des services, mais, comme je vous le disais, on souligne... Avec la politique À part entière, plusieurs engagements ont été pris, notamment la révision des programmes de soutien aux familles, les travaux de soutien aux revenus pour les personnes handicapées, la simplification des démarches d'accès aux programmes, comme je viens de vous le dire, la simplification des démarches d'accès au programme de soutien financier destiné aux enfants handicapés. Ce n'est pas peu dire, parce que c'est vrai qu'il y avait toute une complexité autour de ça. Il y a aussi les travaux qui visent à soutenir l'autonomie décisionnelle, fonctionnelle des personnes handicapées en offrant un soutien de services à domicile coordonnés, intégrés et de qualité conforme à l'évaluation des besoins. C'est pour ça que je vous disais tantôt que chaque cas est réévalué sur une base régulière.

Alors, le comité interministériel sur le soutien aux parents fait en sorte que nous... à regarder les possibilités. C'est un dossier que je travaille avec mon collègue le ministre de la Santé, mais qui est piloté dans notre ministère, mais qui est sous ma gouverne. Puis effectivement le ministre de la Santé... Moi, je suis ministre déléguée, lui, il est ministre de la Santé, ça fait qu'il est au courant des dossiers. Je ne travaille pas de dossier en cachette, là. Quand il les a rencontrés, il avait déjà de l'information que je lui avais donnée. Ce qu'on souhaite, c'est aider mieux ces familles-là, mais on ne veut pas le faire sur un coin de table pour être obligés de revenir. Parce que, pour nous autres, quand on octroie des sommes, quand on octroie des choses, on met des crédits au bout, des vrais, pas de l'argent de Monopoly. Ça fait qu'avant de prendre un engagement on va faire les choses correctement, on va évaluer ça correctement puis on va revenir à ces personnes-là, qui ont été rencontrées aussi par le ministre de la Santé. Moi, j'ai eu le privilège de les rencontrer aussi. Je sais qu'elles souhaitent des réponses rapides. Ça ne va pas prendre encore un an, mais ça ne va pas se faire sur un coin de table. Alors, dès qu'on arrive avec quelque chose de plus concret, quelque chose qui va être équilibré, on va leur revenir avec des possibilités, puis ça va nous faire plaisir de pouvoir les soutenir mieux.

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Crémazie, il vous reste quatre minutes.

Mme Montpetit : Je vais céder, à ce stade-ci, la parole à ma collègue de Fabre. Merci, Mme la ministre, pour votre réponse.

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Fabre.

Mme Sauvé : M. le Président, Mme la ministre, chers collègues, je veux vous parler d'un sujet qui a retenu également notre attention, on en a parlé tantôt, je veux parler de la situation des fugues au Centre jeunesse de Laval. D'abord, d'entrée de jeu, je veux vous dire toute ma grande sensibilité à cette question, cette situation, alors que j'ai travaillé par le passé, pendant près de 20 ans, à l'accompagnement des jeunes, à l'aide apportée aux jeunes, et que j'ai travaillé de nombreux partenariats sur le terrain, à Laval, avec le Centre jeunesse de Laval. Alors, pour moi, c'est important de bien nommer ma sensibilité. Mais, au-delà de ma sensibilité, il y a celle de tous par rapport à cette situation des jeunes filles qui ont fugué, la sensibilité des parents, des équipes du centre jeunesse et la grande sensibilité de la ministre face à toute cette question, mais j'y reviendrai dans les actions concrètes qui ont été menées.

Je veux vous dire qu'il faut se rappeler un petit peu les faits. Au-delà du cadre normatif sur les fugues qui est appliqué depuis 2011, il y a eu beaucoup de chiffres avancés. Et, pour moi, c'est important de rappeler les faits, mais de rectifier aussi les faits, et je vais passer vite là-dessus parce que les chiffres, ce sont des chiffres, mais il n'en reste pas moins qu'une situation préoccupante à laquelle on s'est adressée... mais quand même les chiffres méritent qu'on y revienne. Dans les faits, il y a 70 % des jeunes dans les centres jeunesse qui ne fuguent pas. De ce 30 % qui fugue, il y a 60 % qui reviennent par eux-mêmes. De ce 30 %, il y a effectivement environ un 25 % de jeunes, donc de jeunes filles, qui sont à risque en lien avec la prostitution. Alors, je trouvais ça très important de ramener ces chiffres-là.

Il y a eu aussi toute la notion de l'augmentation des fugues dans les centres jeunesse, très importante. Encore là, une nuance à apporter : le nombre de fugues a été en augmentation, mais pas le nombre de jeunes. Donc, autrement dit, la tendance est la suivante, c'est que chaque jeune a fugué plus de fois. Il y a des réalités liées, donc, à notre jeunesse qui sont préoccupantes. Et, comme je le dis, je rectifie des chiffres, des faits, mais en même temps la situation demeure très préoccupante.

Je veux amener un peu l'historique des actions et mettre l'accent, effectivement, sur la sensibilité, la préoccupation de la ministre en matière de protection de la jeunesse, des actions rapides, des actions concertées. Je peux vous dire que j'ai bien senti l'intensité, dans la solution, qu'elle y a mise. Alors, très, très rapidement, comme elle l'a nommé, il y a eu le vérificateur indépendant qui a été nommé, ça, ça a été le 9 février; le 16 février, la création du programme Prévention jeunesse, 3 millions sur cinq ans; et le rapport du vérificateur, donc le rapport Lebon, qui est arrivé rapidement, le 15 mars. À travers ces dates, à travers ces éléments de solution rapide, la ministre l'a nommé tantôt, il y a eu toutes les communications, les suivis avec tous les acteurs, la concertation. Alors, ça, ça a été vraiment une mise en place d'actions rapides et concertées avec tous les acteurs, que ce soient les forces policières, évidemment les gens des centres jeunesse, mais aussi la communauté.

Et je veux mettre l'accent sur le rôle de la communauté avec l'action gouvernementale, qui est excessivement importante...

• (20 h 40) •

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Fabre, je me sens un petit peu impoli, mais je suis obligé de vous arrêter parce que le temps est écoulé. Vous pourriez vous reprendre au prochain bloc.

Mme Sauvé : J'étais dans mon élan, M. le Président, vous m'excuserez.

Le Président (M. Morin) : Oui, je vous ai écoutée avec attention, mais... Donc, on se dirige vers le député de Drummond—Bois-Francs pour un temps de 26 minutes.

M. Schneeberger : Merci, M. le Président. Alors, bonsoir, Mme la ministre. Vous savez, depuis quelques mois maintenant, on a vu à plusieurs reprises, malheureusement, là, au niveau des centres jeunesse, les fugues qui ont été médiatisées. Malheureusement, ce n'est pas tous les... bien, je dis «malheureusement», heureusement dans un sens, là, mais c'est beaucoup plus de fugues que ça qu'on voit à toutes les semaines qui se présentent.

Ce matin encore, dans un article très bien fait, on voit surtout une augmentation de 77 % de fugues de plus de 72 heures. Ça, Mme la ministre, là, si vous me dites, là, que ce n'est pas grave, que ça va bien, là ça ne marchera pas du tout, là. Je pense que c'est un sérieux problème. Et, quand je vois qu'il y a des intervenants — mettons, je prends un exemple, là, Cité des Prairies — qui donnent un genre de rémunération ou récompense en argent aux jeunes garçons s'ils ne fuguent pas pendant une semaine, c'est parce que je pense que les intervenants ne savent plus quoi faire.

Et là le gros problème, ce qu'on voit, au niveau des intervenants, c'est vraiment au niveau de la loi, depuis que la loi a changé, en 2007, là, ce nombre de fugues a vraiment augmenté. Et, juste pour vous donner un chiffre, là, on est passés de 2 369 fugues pour 1 008 fugueurs et fugueuses à 6 497 fugues pour 1 440 fugueurs et fugueuses. Ne venez pas me dire que ça, ça a été amélioré, là.

Alors, moi, ce que je voudrais savoir : Depuis que la ministre a été mise au courant de ça, depuis déjà plusieurs semaines, plusieurs mois, est-ce que la ministre prévoit réviser la loi afin d'assurer un meilleur contrôle des sorties et des entrées au niveau des centres jeunesse?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, merci au député de Drummond pour sa question. Puis on aura l'occasion certainement d'y revenir avec la députée de... je ne me souviens plus de son comté... Fabre, excusez-moi.

D'abord, juste dire une chose : Quand on parle de fugues et quand on parle de centres jeunesse, c'est une situation qui est très, très, très préoccupante, les fugues, mais ce que je veux vous dire, c'est que, oui, il y a des fugues, oui, il y a des choses qui doivent être faites, mais il ne faut pas tout jeter par-dessus bord puis il ne faut pas non plus diminuer le travail qui est fait en centre jeunesse.

Moi, je vais prendre cette occasion-là qui m'est offerte, M. le Président, pour remercier les intervenants dans les centres jeunesse et ceux qui sont là, qui se dévouent corps et âme auprès de ces jeunes-là. Vous savez, si les jeunes sont rendus en centre jeunesse, c'est sûrement parce qu'il y a des problématiques. Ce n'est pas de tout repos toujours, travailler avec les jeunes, mais ils aiment ça, ils aiment les jeunes, puis il faut reconnaître le travail qu'ils font, M. le Président, puis il n'y a personne qui leur adresse des remerciements.

J'ai jasé avec des gens qui travaillent en centre jeunesse, et ils commencent à trouver ça lourd par secousses, parce qu'ils se disent : Coudon, on ne fait pas tout mal, puis il y a bien des choses qui sont des belles réussites dans nos centres jeunesse. Il y a des jeunes qui sortent de là qui font des carrières éventuellement. Et savez-vous quoi, M. le Président? Je veux leur dire merci. Vous me donnez l'occasion de les remercier.

Ceci étant dit, c'est des milieux de vie, les centres jeunesse, ce n'est pas des prisons. Il ne faut pas penser qu'on va traiter les jeunes comme s'ils étaient incarcérés quand ils ont besoin, justement, d'apprendre à devenir des gens autonomes. La mission d'un centre jeunesse, là, c'est d'assurer leur protection, le bien-être des enfants, des jeunes qui sont, entre autres, victimes de négligence et de maltraitance, hein? Il faut réadapter ces jeunes-là, les réinsérer en société en les responsabilisant, pas en les embarrant, là. Il y a une différence entre les deux. Si on veut que les gens apprennent à devenir autonomes, ce n'est pas en les attachant au mur qu'on va leur donner cette possibilité-là. Puis il faut accompagner les jeunes vers leur vie adulte en leur apprenant, justement, à devenir des jeunes autonomes. Or, il faut que les intervenants aient la capacité de travailler avec eux de plus près et de leur faire avoir un plan de vie, un projet de vie. Et ça va être impossible d'empêcher 100 % des fugues, puis, à la limite, ce que nous dit le rapport Lebon, c'est que parfois c'est nécessaire, des fugues, dans l'autonomie d'un jeune.

J'aurai sûrement l'occasion de revenir avec mon collègue le député de Drummond, mais je veux lui dire que tout ce qui est possible d'être fait va être fait. On va déposer un plan d'action, mais il faut se mobiliser autour d'un projet de vie pour chacun des jeunes, il faut établir un lien de confiance, il faut faire en sorte qu'ils sachent qu'ils sont importants pour nous, mais il faut aussi développer des partenariats, que ce soit avec des organismes communautaires, avec les services policiers, etc. Est-ce qu'il y a aura des façons de faire, des modalités différentes à établir? Oui, et on pourra voir ça dans le plan d'action, M. le Président. Mais vous me faites signe comme ça. Ça, ça veut dire que mon temps achève, c'est ça?

Le Président (M. Morin) : Bien, c'est parce qu'on veut équilibrer correctement, donc je retournerais au député...

Mme Charlebois : Est-ce que je suis à la fin de mon temps?

Le Président (M. Morin) : Oui, bien, le temps équilibré. Si le député de Drummond ne me fait pas signe, bien... mais là...

Mme Charlebois : Oui, bien, moi, je veux respecter ça, là.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Drummond—Bois-Francs, allez-y.

M. Schneeberger : Oui. Mme la ministre, quand je vous pose des questions là-dessus, là, je le sais que ce n'est pas tout noir, là, je le sais qu'il y a des bonnes choses qui se font. Là, on parle des cas les plus extrêmes, puis ce n'est pas la majorité. Mais, quand un parent appelle le centre jeunesse pour demander au centre jeunesse de prendre soin de son enfant parce que lui n'en est plus capable puis qu'on le rappelle deux, trois jours plus tard pour dire qu'il n'est plus au centre jeunesse, pensez-vous que le parent se sent en sécurité? C'est ça, la réalité. Et, quand les forces policières ramènent constamment les fugueurs... Souvent, les voitures de police se tiennent près d'un centre, les intervenants les appellent, ils ramassent les fugueurs ou fugueuses, là, à quelques centaines de mètres du centre et les retournent. À la minute que le jeune est rentré, il ressort parce qu'il n'a aucun motif, pour dire, pour rester à l'intérieur. Il est là, le problème. Quand des fugues... des fugueurs et des fugueuses à répétition, là, c'est des portes tournantes. On ne parle pas de tous les jeunes ici, là, c'est des cas spécifiques.

Puis je vais le dire, là, parce que je pense qu'il faut le dire, là, l'article, ce matin, là, un intervenant qui dit, là... puis je ne veux pas... je n'aime pas ça dire ça, c'est public, mais c'est dur en même temps, on parle de garçons ados, ils reviennent sans leurs culottes, du sperme dans les cheveux. Trouvez-vous ça normal? Moi, je vais dire, si mon gars, là... j'ai mon gars, il a quatre ans, mais, s'il revient chez nous dans un état de même, là, ça ne marche pas, là, ça ne marche vraiment pas. Alors, de venir dire que, oui, c'est vrai, dans certains cas, la majorité des cas, et heureusement d'ailleurs, c'est bon, mais, dans ces cas-ci... Là, on parle de ces cas-ci. Comme le système de la santé, ça, la majorité des cas, ça va bien, mais, quand ça va mal, c'est qu'est-ce qu'on fait? Il est là, le point.

Alors, moi, ce que je veux voir, c'est quoi qui... Qu'est-ce que vous allez faire pour les cas les plus graves? Parce qu'eux, là, les laisser partir, là, ce n'est peut-être pas super pour leur sécurité. Puis là je parle d'un gars, je n'ose pas imaginer les filles. C'est ça que je veux... Moi, j'aimerais ça entendre la ministre. C'est quoi pour ces cas-ci? Parce que moi, j'ai... On écoute les intervenants, là, on parle avec des intervenants. C'est sûr que, quand on parle avec la direction, tout va bien. Eux autres, ça va bien, c'est super. Mais, les intervenants qui sont sur le terrain, là, eux, là, ce n'est pas ça qu'ils nous disent, ils voient les réalités. Puis, si la nouvelle loi fait en sorte que les fugues, là, c'est quasiment normal, selon ce que dit la ministre, là... En tout cas, moi, si mon gars, à l'adolescence, là, il fait une fugue puis que je dis à ma conjointe : Ah! c'est normal, là, je pense que c'est un phénomène normal, ça se peut que j'aie une petite claque en arrière de la tête, ça se peut qu'elle ne soit pas très de bonne humeur que je dise ça, parce que ce n'est pas la normalité. Personne n'est à l'abri de ça. Mais de venir dire que c'est correct, là... ce n'est pas correct.

Alors, j'aimerais ça qu'au moins la ministre dise : Regarde, il y a des choses qu'il y a à apprendre, là, des préoccupations... Puis j'aimerais ça l'entendre c'est quoi, ses intentions dans les cas spécifiques qu'on parle, pas pour tous les jeunes. C'est sûr que je ne veux pas que ça soit une prison. C'est un milieu de vie avant tout, je suis très d'accord avec ça.

• (20 h 50) •

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors là, ce que me parle le député, c'est 17 % des cas qui sont en centre jeunesse. Dans ce 17 % des cas là, il faut savoir que, pour recourir à un encadrement intensif, il y a des règles. Ce n'est pas la ministre, là, ce n'est pas moi qui décide ça, il y a un encadrement qui est prévu puis il faut que... On parle d'encadrement intensif quand la personne présente un danger pour lui-même et pour autrui. Il faut qu'il y ait un danger imminent, là. Parce que vous vous souviendrez, M. le Président, qu'auparavant, là, tout le monde était en encadrement intensif. Il y a eu des cas d'abus sérieux — moi, je me souviens, là, d'une commission parlementaire ici, là, les cheveux m'en dressaient sur la tête — des jeunes qui ont été emprisonnés des années, là, qui n'avaient pas d'affaire à être emprisonnés. C'était en 2007, ça, M. le Président.

Alors, les éléments qui peuvent être évalués pour juger du degré de dangerosité, c'est la gravité, l'intensité, le degré de dangerosité, la récurrence des comportements de l'enfant, la caractéristique de l'enfant, les antécédents chez l'enfant, la progression d'ensemble de la démarche de réadaptation, les analyses alternatives à un tel hébergement.

Puis je veux aussi dire, M. le Président, là, que des enfants qui fuguent, là, à répétition, souvent ils ne partent même pas du centre jeunesse, hein? Il faut savoir ça, là. Ils étaient chez eux la fin de semaine puis ils ne sont pas rentrés. Ça, on n'en parle pas sur la place publique. Ils étaient dans leur milieu familial, puis, quand c'est venu le temps de revenir au centre jeunesse, ils ne sont pas revenus. Alors là, ce n'est pas de la faute des intervenants puis ce n'est pas de la faute du centre jeunesse. Il y en a qui sont au centre jeunesse, qui vont faire leur journée académique puis qui ne reviennent pas. Bien, il faut s'en occuper, de ces jeunes-là, le député de Drummond a tout à fait raison.

Alors, comment on fait cette analyse-là pour aller en encadrement intensif? Bien, il y a une grille clinique qui est reconnue puis il y a des façons, là. Là-dedans, ça demande : Est-ce qu'il y a un nombre de fréquences à répétition? C'est quoi qui s'est passé? Consommation d'alcool? Il a-tu des comportements violents? Il fait-u de l'automutilation? Il a-tu des idées suicidaires? Il a-tu des conduites sexuelles problématiques? Est-ce qu'il y a un historique de placement? Bref, il y a toute la grille qui détermine s'il doit être en encadrement intensif. Et ça, c'est déjà là, c'est déjà possible d'être utilisé.

Maintenant, dans le plan d'action, il est clair, clair, clair... Il y a la recommandation 4 du rapport Lebon qui nous dit : «Coordonner et animer une réflexion ciblée sur la façon d'établir une transition entre le recours à l'encadrement intensif et le retour aux unités de vie ouvertes qui tiennent compte des facteurs de risques pour les jeunes dont la fugue est soit chronique, soit une façon de se mettre en danger.» C'est une recommandation du rapport Lebon sur laquelle on va travailler et qui va se retrouver dans le plan d'action.

C'est certain, certain, certain qu'on réfléchit en ce moment aux modalités qu'on va pouvoir faire en sorte que le 17 % dont vous parlez, là, il évite de se mettre en danger. C'est une situation qui nous préoccupe, là. Il n'y a personne qui est assis sur ses lauriers à attendre de voir... Moi, à chaque fois que j'entends parler d'une personne qui fugue pour la cinquième fois, là, je vais vous dire que ce n'est pas quelque chose qui me plaît beaucoup, là.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Drummond—Bois-Francs.

M. Schneeberger : Juste question au niveau des chiffres, là, on va parler de Laval, là, 70 % des fugues se produisent lors de sorties autorisées, c'est vrai, par contre, ailleurs au Québec, c'est 40 %. Alors, ce n'est pas une norme, 70 %, là, c'est juste 40 %. C'est juste un point que je voudrais quand même souligner.

Vous savez, les intervenants, justement, des centres jeunesse sont supposés... Le but premier, là, c'est d'établir un dialogue, fournir des services d'accompagnement au niveau de la réhabilitation au niveau des jeunes. Mais ce qu'on remarque souvent, là, c'est qu'à certaines places, là, les fugueurs chroniques, là, qu'on pourrait appeler, c'est que les intervenants ne sont tout simplement pas capables d'établir ce premier dialogue parce qu'ils sortent constamment. Ce n'est pas la majorité des jeunes dans les centres jeunesse qui fuguent, mais ceux qui le font, ils le font très souvent. Alors, elle est là, la problématique. Comment veut-on établir un processus d'accompagnement, de réintégration si les jeunes ne fréquentent pas l'établissement et sont constamment à l'extérieur de l'établissement?

Alors, moi, je reviens avec la même question. Je veux dire, bon, vous êtes en réflexion. Maintenant, avez-vous des dates quand ça va se faire? Et puis moi, j'écoute les intervenants, là, ils en ont déjà, des suggestions à nous faire. Est-ce qu'on ne pourrait pas les appliquer tout de suite? Je veux dire, je ne pense pas que ça prenne un rapport pour certains jeunes qui sont, malheureusement, dans certains cas aussi, en danger, leur sécurité est très gravement atteinte. Alors, moi, j'aimerais ça entendre la ministre, là, sur ces cas précis. C'est quoi, les délais, puis quand ça va se mettre? Parce que, là, souvent, les rapports, on les oublie sur les tablettes.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, je rappelle que c'est pour 17 % des cas, de ce que parle le député de Drummond, puis il fait référence toujours au même article de journal de ce matin, là. Je veux démystifier un petit peu, pour les besoins de ceux qui nous écoutent, là, parler des fugues, dans quel contexte ça peut se faire. Puis, tu sais, je l'entendais tantôt, il y a des lieux d'hébergement, là... En 2015-2016, il y a 55 % des jeunes qui ont quitté du lieu d'hébergement, ils ont quitté aussi sous sorties de groupe ou individuelles. Sous supervision, il y en a 4 % qui ont quitté comme ça. Sorties autorisées, milieu scolaire, travail, activité, sport ou loisir, il y en a 14 % qui ont fait une fugue suite à ça. En milieu familial, il y en a 12 %. Puis il y a d'autres sorties autorisées, là, qui regroupent un total de 14 %. Mais je lui rappelle qu'il y a 17 % des fugueurs qui, eux, sont des récidivistes puis qui sont problématiques. Les durées de fugue, là, la majorité des fugues, c'est 24 heures ou moins, 69 %, M. le Président, il y en a 17 % qui sont plus de 72 heures.

Ça fait que vous voyez que ce n'est pas une grande quantité. Est-ce qu'il faut s'en occuper? Oui, parce que, vous savez quoi, si... En ce moment, il faut prendre le temps de revoir nos pratiques, et on se penche là-dessus en ce moment avec les chercheurs, avec des experts, avec la DPJ pour faire en sorte de revoir... Vous savez, la société évolue, bien, les jeunes aussi, puis leur pratique aussi a évolué, puis ça a changé à travers le temps, alors il faut requestionner tout ça puis il faut revoir tout ça. C'est ça qu'on est en train de faire puis c'est ça qu'on va pouvoir faire des constats dans le plan d'action.

Nous, on a reçu le rapport Lebon avec grande ouverture. Honnêtement, j'ai pris tous les documents et j'ai pris toutes les recommandations, et tout ça va s'intégrer dans un plan d'action. Vous me demandez quand? Au plus tard à l'automne, mais il faut prendre le temps de faire bien les choses. On ne peut pas faire ça... Tu sais, le commun des mortels peut penser que c'est simple, là, mais ça ne l'est pas, ça ne l'est pas. Moi-même, avant de travailler là-dedans, j'aurais peut-être dit : Bien là, coudon, qu'ils barrent la porte. Mais ce n'est pas si simple que ça, ce n'est pas si simple que ça. On a vu qu'à Laval ils ont pris des moyens directement, ils ont pris des décisions dans le centre pour ralentir les fugues avec un certain moyen. Il y a moyen de faire ça ailleurs aussi, mais il faut voir les configurations d'établissement, mais il faut voir aussi... M. le Président, savez-vous quoi? Les centres jeunesse ne sont pas partout pareils. Il y a des endroits, là, où, même si tu ne barres pas la porte, là, ils sont en plein bois, ils ne sortiront pas plus, là, ils vont aller se perdre dans le bois.

Ça fait qu'il faut voir les besoins des jeunes, il faut voir comment ça s'articule partout. Il faut prendre le temps de réfléchir avant de mettre des mesures sur pied, parce que ce qu'on veut, je vous le rappelle, c'est développer leur autonomie. Et, même le 10 % de fugueurs récidivistes, il faut voir pourquoi ça se passe comme ça puis établir un bon lien pour qu'ils aient un bon plan de vie.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Drummond—Bois-Francs.

• (21 heures) •

M. Schneeberger : Oui. Sous le même lien, on parle de jeunes qui sont plus difficiles, là, justement, à créer les liens, et autres, et souvent on voit des organismes communautaires, je parle ici... admettons, je cite comme ça les organismes qui sont regroupés, mettons, sous le ROCAJQ, des organismes travail où est-ce qu'on a des travailleurs de rue, des choses comme ça. Souvent, ces milieux-là, de par leur simplicité ou leur approche qui est beaucoup plus de rue, au niveau des quartiers, choses comme ça, ça fait en sorte qu'il y a des jeunes qui se sentent plus à l'aise.

Moi, ce que je voudrais savoir : Dans son plan d'action, est-ce que la ministre prévoit, justement, de mieux faire, d'accroître les liens avec ces organismes-là, autant au niveau du financement... pour justement faire en sorte que, ces jeunes-là, s'ils s'y retrouvent plus et que les liens, le développement de ces personnes-là sont favorisés ou augmentés avec ces organismes-là, bien, ils soient tout simplement faits comme ça. Souvent, ce qu'on entend aussi, c'est que c'est des jeunes qui partent des centres jeunesse et qui se retrouvent justement dans ces organismes-là parce qu'ils y sont plus à l'aise. Alors, peut-être, ça serait une autre approche à regarder. Et puis le but, c'est d'avoir leur bien-être, leur sécurité. Puis c'est beaucoup plus facile de créer des liens avec un jeune étant à ses côtés qu'un jeune qui est loin.

Alors, ce que je veux savoir : Son plan d'action, est-ce que c'est un côté, c'est une approche qui va être mise de l'avant?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, M. le Président, ça tombe bien parce que j'en ai visité, des organismes communautaires. Je vais en nommer un entre autres : Ali et les princes de la rue. Il y a des jeunes de centres jeunesse qui vont là, qui font du conditionnement physique, qui... J'ai eu l'occasion de jaser avec des jeunes, justement, pendant qu'ils étaient là. Puis effectivement ils se retrouvent bien là, ça leur permet de trouver une façon de se valoriser et de trouver un sens à leur vie. Et ça fait partie de leur projet de vie d'avoir des activités, on va dire, de conditionnement physique et ça leur donne une bonne estime d'eux-mêmes. Pour eux autres, c'est ça. Pour d'autres, c'est d'autre chose.

Mais je vais rappeler au collègue que Prévention Jeunesse, que le ministre de la Sécurité publique a annoncé, où on a annoncé un 3 millions, vous vous souviendrez, M. le Président, c'était exactement pour ça : mettre en lien les intervenants des centres jeunesse et avec un intervenant pivot, mettre en lien aussi les services policiers et les organismes communautaires pour que tout le monde travaille ensemble autour du jeune, pour permettre au jeune de justement... oui, peut-être le retrouver plus facilement, mais prévenir ces fugues-là pour éviter qu'on le prend sur le coin de la rue, qu'on le ramène au centre jeunesse, qu'on le reprenne au coin de la rue, qu'on le ramène au centre jeunesse, et que ça soit comme un effet de tourbillon. Pour justement faire en sorte que les policiers comprennent bien la réalité du jeune, il y a un partage d'information qui va se faire là, c'est déjà en place à Laval. À Longueuil, je sais qu'ils sont en train d'ajuster leur offre de services, ils vont avoir accès à Prévention Jeunesse. Il va y en avoir cinq comme ça dans les grands centres, mais je sais que, oui, c'est quelque chose qui est envisagé dans le prochain plan d'action, de mettre à contribution les organismes communautaires, et qui vont travailler avec les centres jeunesse.

Parce que les jeunes aiment ça avoir des champs d'intérêt. Comme je vous dis, il y en a pour qui c'est le conditionnement physique, mais, pour d'autres, c'est d'autre chose. Alors, on va les mettre en communication avec des groupes qui... Il y a les Auberges du coeur, entre autres, qui prennent... qui sont ouvertes sept jours par semaine, 24 heures par jour, qui offrent des services aux jeunes, puis il y a des jeunes qui aiment ça aller aux Auberges du coeur. Alors, c'est une façon pour eux de retrouver leur équilibre puis d'avoir un milieu de vie stimulant.

Pour ce qui est des argents investis en centres jeunesse, M. le Président, je vais vous rappeler qu'il y a tout près de 1 milliard de dollars avec ce qu'on donne aux organismes communautaires pour les jeunes et ce qu'on donne partout dans les centres jeunesse, mais aussi la première ligne, les CLSC, etc., c'est 1,5 milliard. Je vous écoute.

Le Président (M. Morin) : C'est bien. Oui, M. le député de Drummond—Bois-Francs, vous avez trois minutes et plus à votre disposition.

M. Schneeberger : Oui. Alors, j'ai encore beaucoup d'autres questions là-dessus, malheureusement le temps passe. On sait qu'il y a éventuellement la loi sur les familles d'accueil qui va être révisée. Ce qu'on sait aussi, c'est que les familles d'accueil, actuellement, ne font pas partie intégrante quand vient le temps de regarder l'enfant, là. Souvent, un enfant arrive dans une famille d'accueil, il est là trois mois de temps, puis, après six mois, la famille d'accueil n'a aucun pouvoir pour la suite des choses.

Je voudrais savoir : Actuellement, dans le projet de loi ou ce qui est regardé, est-ce que c'est des approches qui vont être modifiées? C'est des choses qui sont regardées ou... Premièrement, est-ce que vous avez l'intention de refaire le projet de loi là-dessus, de revoir le projet de loi?

Le Président (M. Morin) : Oui, Mme la ministre.

Mme Charlebois : ...protection de la jeunesse dont vous parlez?

M. Schneeberger : C'est la loi sur la protection au niveau des... tout ce qui est en lien avec les familles d'accueil au niveau des règles.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, la Loi de la protection de la jeunesse, c'est révisé à tous les cinq ans. Ça, c'est la base de tout. Mais ce que vous me parlez, c'est des...

M. Schneeberger : Oui, mais ça fait partie de la loi, surtout au niveau des familles d'accueil, là, le...

Mme Charlebois : Bien, c'est les représentations qui sont faites par... comment qu'on appelle les familles, les...

Une voix : ...

Mme Charlebois : Oui. C'est la Loi de représentation sur les ressources de type familial dont vous parlez. Puis là vous me demandez si on a l'intention de revoir ça?

M. Schneeberger : Oui. Non?

Mme Charlebois : Je ne comprends pas votre point. C'est la FFARIQ dont vous parlez?

M. Schneeberger : Oui. Bien, je vais faire un lien. C'est qu'au niveau de... La loi ontarienne reconnaît actuellement l'intérêt de la famille d'accueil, automatiquement, lorsque l'enfant mineur a passé plus de six mois à l'intérieur de la famille, ce qui n'est pas fait ici et ça fait en sorte que les liens créés avec l'enfant, souvent, causent préjudice à l'enfant, parce qu'au niveau de... la famille n'a aucun pouvoir, là, sur cette décision. Et ça, c'est un point très important au niveau du bien de l'enfant.

Mme Charlebois : Alors, c'est un dossier qui, effectivement, est à l'étude en ce moment, ça relève du ministère de la Justice. La demande a été faite par notre ministère pour regarder ça, et nous sommes à regarder les orientations, mais voir aussi s'il y a lieu de modifier la loi pour faire en sorte que les gens puissent être impliqués, comme vous le dites, là, dans le processus décisionnel. Mais on doit d'abord évaluer tout le processus avant de prendre des décisions, alors le ministère de la Justice et nous travaillons là-dedans conjointement. On n'a pas de décision de prise à ce moment-ci. Je voudrais bien vous donner une réponse, mais... Dès qu'on l'aura, on vous la fera suivre, ou, en tout cas, vous allez en entendre parler.

M. Schneeberger : Je souhaiterais vraiment que vous portiez un regard attentif sur qu'est-ce qui se fait en Ontario actuellement. Je pense que c'est vraiment positif là-dessus.

Mme Charlebois : Oui, bien, ils sont déjà venus nous rencontrer au cabinet. Ils ont rencontré des membres de mon personnel, mais aussi ils ont eu des échanges avec l'équipe ministérielle, et on est là-dessus sans faute.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre. Votre temps étant écoulé, M. le député de Drummond—Bois-Francs, merci pour vos échanges. Est-ce que, madame... Mme la députée de Chauveau, vous voulez intervenir?

Mme Tremblay : Oui. Bien, en fait, juste avant de céder la parole à ma collègue de Fabre, j'aimerais revenir sur un point traité tout à l'heure par le député de Rosemont, sur Suicide-Action Montréal, parce qu'il a parlé, il a dit qu'il n'y avait plus d'argent relié à la formation. Et, Mme la ministre, j'aimerais, dans le fond, comprendre un peu plus les raisons et, si nécessaire, bien, je suis prête à entendre également le sous-ministre au dossier.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, comme je l'expliquais tantôt, Suicide-Action Montréal reçoit du soutien à l'action communautaire, sur une base régulière, à hauteur de 800 000 $... 850 000 $, je pense, que j'ai dit tantôt. Mais ce dont nous parle la députée de Chauveau, c'est justement concernant le programme de formation et la discussion qu'ils ont avec le CIUSSS du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal.

Si vous me le permettez, je donnerais la parole à M. Horacio Arruda, qui est le sous-ministre à la santé publique, qui pourrait mieux expliquer les discussions en cours.

Le Président (M. Morin) : Oui, mon cher monsieur, si vous voulez vous identifier.

M. Arruda (Horacio) : Oui, M. le Président. Horacio Arruda, sous-ministre en santé publique et directeur national de la santé publique au ministère de la Santé et des Services sociaux.

Le Président (M. Morin) : Bonsoir, et allez-y.

• (21 h 10) •

M. Arruda (Horacio) : Bon. Écoutez, la stratégie de prévention du suicide repose sur toute une série d'actions comme telles, mais une partie importante est en lien avec la formation des gestionnaires et des intervenants dans les CISSS et dans les centres de prévention du suicide. Donc, il y a eu un mandat qui a été confié, à partir de 2006, à l'institut de gériatrie de Montréal pour développer, à partir d'une analyse de besoins des gestionnaires et des intervenants à la fois devant les CISSS et, je vous dirais, dans les centres de prévention du suicide, dont fait partie Suicide-Action Montréal, quels étaient les outils pour les former. Donc, il y a eu ce travail-là qui a été fait.

Il y a eu développement de deux guides de pratique : un pour les gestionnaires au niveau des organisations, un pour les intervenants à la fois dans les CISSS, dans les réseaux locaux ou à l'intérieur des organisations comme les CPS. Et ça a été suivi d'une action intensive de formation pour laquelle, à ce moment-là, les agences, à cette époque-là, avaient identifié, avec leurs centres de prévention du suicide et l'Association québécoise de prévention du suicide, les meilleurs moyens pour faire vivre cette formation-là. Il y a eu plusieurs ateliers qui ont été organisés, dont un atelier d'une journée pour les gestionnaires et un atelier de trois jours pour les intervenants comme tels sur la base des guides de pratique développés par l'Institut de gériatrie et des analyses de risques, de l'identification de risques par Suicide-Action Montréal et l'institut universitaire Dollard-Cormier. Donc, il y a eu un gros blitz, et, au mois de janvier 2016, on avait formé 1 200 gestionnaires, qui ont été rencontrés dans le cadre de leur journée complète, et 14 000 intervenants, qui ont eu la formation Intervenir auprès des personnes suicidaires à l'aide des bonnes pratiques. Donc, c'était prévu qu'il allait y avoir un grand blitz.

Maintenant, ce qui va se passer, ça va être de maintenir une formation de base à la fois pour les nouveaux gestionnaires et pour les nouveaux intervenants. Ça fait que ça a été l'objet d'un financement particulier, spécifique, pendant cette période-là, qui a eu lieu notamment avec... il y a eu 40 formateurs provenant soit de Suicide-Action Montréal ou d'ailleurs au Québec. Et ce blitz-là est maintenant terminé, mais on va s'assurer qu'il y aura un maintien, un renouveau à la fois pour les nouveaux gestionnaires ou les nouveaux intervenants.

Et actuellement, juste pour votre information, on travaille aussi le même genre de démarche en ayant les outils adaptés pour les communautés autochtones. Parce qu'on avait déjà initié une démarche pour avoir le même genre de guide de pratique mais adapté à la réalité autochtone. Et la démarche est en cours actuellement, on est dans les phases où on va bientôt passer dans l'implantation sur le terrain.

Mme Tremblay : Merci beaucoup pour ces précisions. Je suis maintenant prête à céder la parole à ma collègue de Fabre.

Le Président (M. Morin) : Oui. Je veux bien que Mme la députée de Fabre continue son intervention.

Mme Sauvé : M. le Président, merci beaucoup. Alors, je vais poursuivre dans mon élan. Je veux revenir sur la situation des fugues et j'avais commencé à refaire un peu l'historique récent des actions gouvernementales et des annonces qui ont été faites : donc, le 9 février, le vérificateur indépendant nommé au centre jeunesse, la création du programme Prévention Jeunesse avec le 3 millions sur cinq ans, et le rapport Lebon, donc du vérificateur, qui a suivi le 15 mars.

Mais j'avais commencé aussi, après cela, à parler un peu de la force des groupes communautaires, le milieu qui est très concerté, et, avec l'annonce du programme et les mesures qui seront mises en place, c'est, bien sûr, reconnu et consolidé.

Mais je veux revenir sur la force de la concertation communautaire, les milieux de vie qu'ils sont et le partenariat. Parce que, quand j'ai entendu le collègue, le député de Drummond—Bois-Francs tantôt... Je vais me permettre de parler un petit peu de la réalité de Laval, puisqu'il est question du Centre jeunesse de Laval, que je connais très bien. Vous savez, à Laval, il y a une réalité très particulière : on est une île, une ville et une région. Ça fait en sorte qu'en termes de dynamique territoriale il y a une concertation très tricotée serrée, comme on pourrait dire, très concertée, entre autres entre les milieux et les organismes communautaires.

Alors, quand on nomme la réalité des chiffres qui dit qu'à Laval il y a particulièrement des fugues liées à des sorties autorisées, je peux vous dire que c'est peut-être un indicateur des partenariats que le Centre jeunesse de Laval fait avec les nombreux groupes communautaires, et j'ai été témoin de ça. Les milieux communautaires, qui sont des milieux de vie et de travail tricotés serré avec le Centre jeunesse de Laval, bien, ça fait en sorte qu'il y a des allers-retours entre les deux, toujours dans un objectif d'autonomie des jeunes, une autonomie fonctionnelle des jeunes, et ça fait en sorte qu'entre les deux il y a des sorties autorisées. Mais il y a effectivement des fugues qui se passent entre le moment où le jeune quitte le centre jeunesse et s'en va vers l'organisme ou vice-versa, mais le jeune retourne. Alors, ça fait partie du pourcentage important des jeunes qui fuguent mais qui retournent.

L'autre aspect aussi de ces fugues pour les jeunes qui retournent, et c'est un phénomène, je vous dirais, à la fois triste et préoccupant, mais ça fait partie de la réalité de ces jeunes, et, encore une fois, j'en ai vu, j'ai été témoin de ça : quand on travaille au projet de vie des jeunes et qu'ils sont dans une comorbidité, dans des difficultés importantes, le jeune qui chemine, et qui a été dans des constats d'échec longtemps dans sa vie, et qui approche peut-être un pas vers un certain succès, malheureusement il y a des situations que j'appellerais d'autosabotage, où le jeune a de la difficulté à se mettre envers une situation de succès. Et je vous le dis, ça contribue malheureusement à ces situations-là de fugue où le jeune revient aussi.

Alors, je reviens sur la préoccupation qu'a la ministre pour le pourcentage de jeunes et de jeunes filles à risque, mais il faut bien comprendre toute la réalité aussi de la notion de la fugue, qui, parfois, est un indicateur du chemin qu'il est en train de parcourir aussi, le jeune. Alors donc, je trouvais ça important de témoigner de cela.

Alors, je reviens sur les actions qui ont été prises par le gouvernement et là je sens que, quand je parle de ça, je m'enflamme, alors j'ai certainement quelques couleurs aux joues, vous m'en excuserez, mais, la nomination du vérificateur indépendant avec le rapport Lebon, la ministre nous en a parlé, mais j'aimerais, à ce moment-ci, l'entendre nous parler des autres détails, les suites à donner en lien avec les partenariats et la communauté particulièrement, donc, par rapport aux recommandations-phares de ce rapport.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, c'est sûr. Puis, M. le Président, la députée ne sera pas fâchée, certain, de me permettre de rectifier. Parce que, tantôt, il y a le député de Drummond—Bois-Francs qui nous a parlé des jeunes qu'on payait pour ne pas qu'ils fuguent. Bien, ce n'est pas tout à fait la réalité. En fait, je vais me permettre de corriger ce... Puis je ne le blâme pas parce que c'est ce qui était écrit dans l'article de journal, mais en fait ce n'est pas ça, la réalité. C'est que, oui, les jeunes, dans plusieurs centres jeunesse, reçoivent comme une allocation de base ou une somme supplémentaire en reconnaissance de certaines responsabilités qui leur sont confiées pour améliorer la vie communautaire.

Exemple, ils prennent des engagements, soit d'arbitrer des matchs, des sports quelconques, bon, ramasser les lieux communautaires, le salon, le gymnase, etc., tu sais, ou aider d'autres jeunes, etc. C'est en regard de ça qu'ils ont comme des petites paies, là, si on peut dire. Pour eux autres, ça ressemble à ça, c'est des sommes d'argent... de l'argent de poche, comme dans plusieurs familles au Québec, hein? Moi, je me souviens d'avoir fait ça avec mes enfants aussi, puis ce n'était pas péché mortel. Des fois, ça motive un petit peu. Et ces sommes-là, ça sert juste à donner de l'autonomie aux jeunes, dans le sens où apprendre à gagner de l'argent, mais respecter un engagement. Puis, quand tu n'es pas là, tu es en fugue, bien, ce n'est pas une punition. Ils ne leur donnent pas de l'argent pour ne pas aller en fugue, c'est qu'ils donnent de l'argent pour accomplir des petits travaux. Mais, si tu n'es pas là, tu ne peux pas l'avoir, tu ne l'as pas faite, ta job, tu n'étais pas là. Alors, c'est dans le sens du respect d'un contrat. Ce n'est pas pour les empêcher de fuguer, c'est dans le sens de développer davantage d'autonomie. Je tenais à faire ce petit point là, mais, comme je vous dis, je ne blâme pas le député de Drummond—Bois-Francs, parce que c'est ça qui était écrit dans l'article de journal. Alors, je comprends pourquoi il m'a fait état de cette situation-là.

Maintenant, oui, il y a plusieurs choses en développement. Comme je vous le disais, il y a le plan d'action, il y a les recommandations du rapport Lebon — qui vont me revenir, qui n'étaient pas loin il n'y a pas bien, bien longtemps, la grande feuille avec toutes les recommandations, qui est ici. Mais, vous savez, la problématique des fugues, là, il faut en faire une priorité nationale, et c'est ce qu'on a fait au gouvernement, mais on l'a fait en groupe, parce que ça ne touche pas seulement un ministère. Les personnes sont touchées par différents ministères au cours de leur vie, et c'est pour ça qu'on a fait ça. La Sécurité publique, la Justice, la ministre de la Condition féminine et le ministère de la Santé, on travaille sur un plan concerté. Et, comme je vous le disais, je désire encore une fois saluer le travail des intervenants sur le terrain, parce que c'est un travail vraiment... où ils mettent tout leur coeur. Honnêtement, je connais plusieurs personnes qui travaillent en centre jeunesse, puis les personnes qui sont là y mettent tout leur coeur pour ces jeunes-là.

Alors, ce qu'on a déjà fait, des gestes qui sont déjà posés, c'est qu'on a augmenté le nombre d'éducateurs dans certaines unités. Il y a certains correctifs, je veux dire, architecturaux pour améliorer la prévention et la détection des fugues. Il y a le guide des pratiques qui a été publié et qui a été ramené à l'attention des intervenants pour s'assurer qu'on l'utilisait à bon escient, mais qu'on mettait en place les bonnes pratiques. Parce que ce qu'on a tous à coeur, là, autant nous, parlementaires, comme les intervenants en centre jeunesse, c'est d'abord assurer la sécurité de nos enfants au Québec. Et on veut le meilleur pour eux. Alors, le vérificateur qu'on a nommé, il était là aussi pour nous assurer que toutes les procédures qui entouraient les fugues, notamment au centre de Laval, ont été respectées, et qui ont été faites comme elles devaient se faire. Alors, c'est dans ce sens-là qu'il a fait son rapport, il nous a remis toutes les recommandations, et vous avez certainement pris le temps de le regarder. On en a eu 12 : il y en a eu, des recommandations, sur le plan national, il y en a sur le plan suprarégional puis il y en avait qui concernaient Laval directement.

• (21 h 20) •

J'ai pris le temps de rencontrer... puis ça peut paraître des fonctionnaires pour certains, mais c'est des gens qui sont directement sur le terrain. Quand on parle du directeur de protection de la jeunesse, là, c'est lui qui prend les décisions, ou elle qui prend les décisions : Qu'est-ce qui arrive avec le jeune? Je retiens-tu son signalement? Il s'en va-tu en centre jeunesse? Je le mets-tu en famille d'accueil? Je le retourne-tu à la première ligne? Puis ça me donne l'occasion de vous dire, Mme la députée, à quel point je suis fière de la loi n° 10 qu'on a adoptée, parce que, maintenant, le jeune, il n'a pas 12 places à se présenter. Puis, quand il y a un signalement, avant les gens les dirigeaient tous vers la deuxième ligne, maintenant ce qu'on se rend compte, notamment dans certains centres... Puis je pense qu'on a des exemples qu'on peut fournir, il y a certains centres où les gens de la première ligne et les gens de la deuxième ligne du centre jeunesse travaillent ensemble pour voir si le signalement mérite d'être retenu. Vous savez quoi? Quand il n'est pas retenu, il y a certainement quelque chose, il y a des services que ces gens-là ont besoin. Et, dans cette optique-là, ils sont déjà sur la première ligne, ils travaillent déjà ensemble. Je pense au CISSS de l'Abitibi-Témiscamingue où les gens travaillent première ligne et deuxième ligne ensemble, déjà. Ça, c'est parce que la loi n° 10 apporte ses fruits. Et ils travaillent ensemble dans la fusion de l'établissement, là. À chaque fois qu'ils rencontrent des jeunes, ils font ça ensemble. C'est la beauté du projet de loi n° 10.

Alors, quand on me dit que c'est le «free-for-all», la loi n° 10, puis que ça a coupé des services, non, ça a coupé administrativement. Mais, au niveau des services, on optimise. Le jeune, il a un dossier. Juste un. Pas 12, un. Là, les gens de la première ligne, la deuxième ligne sont ensemble à décider qu'est-ce qui arrive avec le jeune. Et, s'il s'en va à la deuxième ligne, vous savez quoi, quand il ressort de là, il est déjà référencé à la première ligne. Il a déjà des services qui vont être offerts pour l'accompagner dans la suite des choses. Il y a déjà un suivi quand il devient un adulte aussi.

CISSS des Laurentides, même chose, même chose, ils sont déjà, eux autres, dans le mouvement où les gens sont ensemble pour rencontrer les jeunes puis voir qu'est-ce qu'ils font des retenus. Le CISSS des Laurentides qui a connu un fort taux de signalements : pour l'année 2015-2016, 8 586, ce nombre est relativement similaire à 2014-2015, et 3 369 ont été retenus, 3 201 évaluations ont été réalisées en 2015-2016. Et les services dispensés en première ligne avaient des pratiques fort différentes. Bien souvent, la clientèle présentant des problématiques plus lourdes signalées, très peu de «reaching out» se faisait auprès de la clientèle, et maintenant ils sont tous ensemble à travailler pour le bien-être du jeune.

Moi, je trouve ça formidable. Parce que c'est ça qui faisait qu'on avait une grande disparité entre combien il y avait de signalements puis combien de jeunes étaient retenus dans les services de centres jeunesse. Maintenant, non seulement ils ne vont pas nécessairement être référencés dans les centres jeunesse, mais ils vont obtenir des services immédiatement. Parce qu'un jeune qu'on ne s'occupe pas en première ligne, qui aurait besoin d'aide, vous savez quoi, il finit par arriver en deuxième ligne. Il finit par arriver là. Alors, maintenant, on évite ces trajectoires dommageables là.

Pour poursuivre — parce que je suis, moi, comme vous, je dois avoir les joues rouges aussi, c'est un sujet qui m'interpelle beaucoup, beaucoup — vous savez, les fugues, il peut y avoir plusieurs raisons. Ça peut être dû à... Les jeunes, là, sont comme les adultes, hein, mais ils n'ont pas tous les mêmes capacités. Puis ça arrive qu'il y a des adultes qui n'ont pas la même capacité non plus de réagir. Mais, les jeunes, il faut s'occuper de leur montrer comment, face à de la colère... plutôt que de fuguer, comment gérer sa colère. La tristesse, même chose. Il y a des jeunes qui fuguent, là, parce qu'ils ne savent pas quoi faire avec cette émotion-là. Puis ils s'en vont parce qu'ils ne sont justes plus capables, dans le centre, de vivre ça. Mais là, en travaillant de plus près avec ces gens-là, on est capables de mieux encadrer et d'éviter ces choses-là.

Savez-vous que les fugues qui sont comptabilisées depuis... — je ne me souviens plus de l'année, alors quelqu'un va me le dire, va me l'écrire sur un papier — sont comptabilisées de façon uniforme... je pense que c'est depuis 2008?

Une voix : ...

Mme Charlebois : 2012? 2012-2013, c'est comptabilisé de façon uniforme, parce qu'avant, les centres jeunesse, tout le monde y allait de son interprétation pour comptabiliser des fugues. Maintenant, tous les centres jeunesse ont la même grille d'évaluation. Une heure de retard, maintenant, savez-vous ça que c'est déclaré une fugue? Moi, j'ai rencontré des jeunes aux princes de la rue, là — Ali et les princes de la rue — qui m'ont dit : Quand j'ai vu que j'étais en retard d'une heure à cause d'une circonstance à l'école, puis, en tout cas, ça a fait qu'il était en retard au centre jeunesse, bien, il dit : je me suis dis : Je vais avoir la même conséquence que si j'avais été parti pendant 24 heures. Bien, j'ai décidé de m'en aller pour 24 heures puis, tant qu'à faire, d'en profiter, parce que la conséquence était la même. Bien, ça, il va falloir peut-être y penser, de voir qu'est-ce qu'on fait avec ça. Est-ce qu'on peut repenser comment on agit avec ces jeunes-là pour éviter qu'un jeune qui est en retard d'une heure ait la même conséquence que celui qui a été parti pendant 24 heures ou 72 heures? Ça ne fait pas de sens. Ça ne fait juste pas de sens. Moi, je comprends que le jeune... pas parce que je suis rebelle, mais je peux comprendre qu'à un certain moment... Alors, c'est ça.

Il y a aussi des solutions intermédiaires qui devront être pensées entre l'encadrement intensif et les milieux de vie ouverts. C'est une chose sur laquelle... Là, je regarde le président. Il commence à me regarder avec ses yeux... Je suis à la veille de manquer de temps. On va mandater aussi l'INESSS, l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, pour faire l'inventaire des meilleures pratiques au Québec, coordonner et mettre en lumière les pratiques qui doivent être adaptées. On va demander à l'INESSS de faire son mandat.

Il me reste encore deux minutes. Je peux vous entretenir encore pendant un bon deux minutes. Alors, on va aussi, au ministère, s'assurer qu'on va créer des lieux d'échange avec les intervenants pour justement faire en sorte qu'on partage les connaissances qu'on acquiert sur le terrain, mais aussi qu'on partage les connaissances que l'INESSS va nous faire suivre comme les meilleures pratiques.

Alors, ce que je veux vous dire, c'est que la majorité des jeunes en centres jeunesse ne fuguent pas. Là, on entend parler du 17 % comme si c'était tout le monde qui était comme ça. Ce n'est pas le cas. Mais est-ce qu'on doit vraiment s'occuper du 17 %? Oui. Oui. C'est suffisamment préoccupant. Un jeune, c'est déjà un jeune... Si on peut aider tous les jeunes, on va le faire. Et, comme je vous dis, il y a Prévention Jeunesse, qu'on a annoncé avec mon collègue. Il y a plein d'autres choses qui vont venir et qui vont faire en sorte qu'on va s'assurer d'assurer une meilleure couverture pour ces jeunes-là puis nous assurer qu'ils ont un meilleur projet de vie, qu'ils ont une meilleure transition à la vie d'adulte.

Bref, avec la loi n° 10, on a transformé le réseau de la santé. Ça a trouvé à transformer aussi le climat autour des centres jeunesse. On est le gouvernement de la transformation du Québec. Je suis tellement fière de faire partie d'un gouvernement, M. le Président, qui s'occupe du monde, qui ne les prend pas pour des compteurs, qui ne prend pas, tu sais... Puis on fait ça de façon responsable. Et vous savez quoi? Les jeunes, là, c'est notre avenir. Le 17 %, il faut s'en occuper. C'est pour ça qu'on va faire un plan d'action pour ces jeunes-là. On ne va pas minimiser les actions qu'on a à faire sur le 17 %. Mais on ne va pas faire ça de façon toute croche et prématurée, on va le faire bien, dans les règles de l'art, pour optimiser nos services puis donner les bons services aux bonnes personnes. J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre, vous me facilitez la tâche. Bonsoir, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Vous avez... vous avez... vous avez 24 minutes à votre disposition.

Mme Massé : Yé!

Le Président (M. Morin) : 24 minutes. Il n'y a pas de «et».

Mme Massé : Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Morin) : Allez-y, chère madame.

Mme Massé : Bonsoir, tout le monde. Bonsoir, Mme la ministre. Bonsoir, chers fonctionnaires. Je vais faire mon «démarrer», comme ça, je vais pouvoir me suivre. Alors, d'entrée de jeu, je veux dire que j'aborderai quatre thèmes, Mme la ministre. En 24 minutes, ça nous donne l'idée, un peu, du temps questions-réponses que nous avons, et je demande la collaboration, bien sûr, pour qu'on y arrive.

Continuons sur le thème des centres jeunesse. Effectivement, le rapport Lebon a amené beaucoup d'éléments. On a parlé de ressources. Un des grands constats qu'on a faits dans cette analyse de situation, disons ça comme ça, c'est notamment le manque de ressources spécialisées, hein, les jeunes qui ont besoin de façon urgente, soit en prévention de crise ou... en prévention de crise ou de fugue, au retour d'une fugue, de rencontrer éducatrices spécialisées, psychologues, travailleurs sociaux. Alors, est-ce que, dans les crédits, Mme la ministre, vous avez pensé ajouter... augmenter le nombre de ressources spécialisées auprès des jeunes?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, je pense que vous n'avez pas eu la chance d'entendre ma réponse concernant les investissements qu'on fait en centres jeunesse.

Mme Massé : ...c'est les ressources spécialisées.

• (21 h 30) •

Mme Charlebois : Oui, je sais, mais c'est tout près de 1 milliard. Et ce qu'il faut savoir, là, ce que vous me parlez, c'est des ressources très spécialisées. Et tous les jeunes qui ont besoin d'une intervention urgente... Parce qu'il y a des codes, là-dedans, là, hein, code 1, code 2, puis bon. Moi, je ne suis pas une spécialiste des codes, là, mais je sais que c'est tout codé. Code 1, c'est immédiatement, bien, il n'y a personne qui est laissé pour compte. Code 2, c'est en dedans de 24 heures, ils ont les services en dedans de 24 heures. Puis les autres, selon la codification, ils ont les services dans les délais appropriés.

Ceci étant dit, il y a des ressources, comme vous dites, professionnelles qui manquent. Ce n'est pas une question d'argent, c'est que les personnes ne vont pas travailler dans ces domaines-là en ce moment. Et j'en ai parlé avec mon collègue le ministre de la Santé pour voir comment on peut faciliter la rétention de cette expertise dans les centres jeunesse. Parce qu'honnêtement c'est là qu'est l'enjeu. C'est là qu'est l'enjeu, c'est : les spécialistes dont vous parlez qui doivent aller travailler là ne sont pas nécessairement intéressés. Puis ce n'est pas une question monétaire, là, ça n'a rien à voir avec la question monétaire.

Or, étant donné qu'on n'a pas la rétention voulue, on est à réfléchir sur le comment on peut faire pour que ces jeunes-là puissent obtenir ces services-là.

Mme Massé : Donc, si je comprends bien, vous faites des ouvertures de poste, mais ils ne sont pas comblés, donc vous ne pouvez pas offrir les services. On va aller...

Mme Charlebois : Exact. Bien, surspécialisés, là, O.K., parce que, pour tous les autres services...

Mme Massé : Oui, c'est comme des psychologues...

Mme Charlebois : Ah! psychologues, on en a, mais c'est tous les services qui sont très spécialisés, de pointe, qu'on a de la difficulté à combler les postes.

Le Président (M. Morin) : ...échanger, là, mais...

Mme Charlebois : Pardon?

Le Président (M. Morin) : Je vous laisse échanger, mais n'intervenez pas, là, laissez parler...

Mme Charlebois : Ah! excusez-moi, excusez-moi.

Le Président (M. Morin) : Ça va bien, continuez, ça va bien.

Mme Charlebois : Oui, c'est ça, on échangeait trop bien, Mme la députée.

Mme Massé : Donc, je comprends que, quand vous ouvrez des postes de psychologues, éducateurs, éducatrices spécialisés, travailleurs, travailleuses sociaux, vous ne trouvez pas à combler les postes, c'est ce que je comprends.

Je vais y aller d'une autre question, ça permet à vos gens de peut-être compléter. Vous avez parlé de quelque chose d'important, c'est la question du délai de traitement. Quand je vous ai entendue dire... C'est comme si je sentais qu'il n'y avait plus de délai de traitement depuis la loi n° 10. Moi, ce n'est pas les informations que j'ai. De votre propre ministère, 2014-2015, à Laval, il faut attendre 31 jours; en Montérégie, 43 jours; en Estrie, 57 jours. Donc là, encore là, je pense qu'il y a un manque de ressources.

Manque de ressources de l'aveu de M. Lebon aussi. Les jeunes qui arrivent sont de plus en plus maganés, ils ont de plus en plus de défis personnels, comme vous le disiez si bien, alors, qu'on parle d'alourdissement — c'est ses mots, là — des clientèles. Vient, selon lui aussi, le moment de faire le point sur les moyens dont disposent les établissements pour répondre aux besoins de plus en plus lourds de la clientèle. Même M. Lebon parle de manque de personnel.

Dernièrement... dernier élément, pardon, toute la question des intervenants et intervenantes sur le plancher, créer des liens, ma collègue l'a bien signifié, c'est important. On voit qu'il y a annoncé, au budget 2016-2017, 1,6 % des dépenses pour les jeunes en difficulté. Est-ce que vous croyez vraiment qu'avec cette augmentation-là on va répondre à tous les besoins dont je vous ai fait part?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, il faut savoir, M. le Président, que, comme je le disais, c'est 1,5 milliard de dollars qu'on investit en protection de la jeunesse et en prévention, notamment juste dans les centres jeunesse, là, c'est tout près du milliard, mais aussi il y a tous les services qui sont donnés par des organismes communautaires et les CLSC qu'il faut ne pas négliger.

Maintenant, il faut savoir qu'en ce qui concerne, comme elle l'a dit, la députée, les délais de traitement, je le rappelle, là, les cas urgents, codés 1, sont vus dans la même journée, M. le Président, les codés 2, à l'intérieur de 24 heures. Pour les autres cas qui existent, où il existe un délai d'attente, pour les cas qui sont jugés... je ne sais pas trop comment le dire, mais qui ne sont pas code 1, code 2 et qui sont jugés moins prioritaires, ils ne sont pas laissés à eux-mêmes, là, ils ne sont pas laissés à eux-mêmes, là, c'est des jeunes autour desquels on met un filet de sécurité et à qui on donne des services. Mais, oui, effectivement, il y a un soutien positif qui est fait par un intervenant et en attendant des services un petit peu plus spécialisés.

Et ce qu'on a, c'est une enveloppe de 1,5 million qui est attribuée annuellement dans les centres jeunesse pour justement dégager la pression qui existe dans certains centres jeunesse. À tous les ans, on examine les listes et, pour parer à ces attentes-là, on donne des budgets spécifiquement aux zones qui sont plus à risque.

Ce qu'on souhaite ultimement, c'est qu'il y ait de moins en moins de délais d'attente, et c'est ce qu'on va probablement réussir à travailler avec, comme je le disais, la façon dont on travaille maintenant — et de plus en plus ça va être comme ça — en mettant la première ligne avec la deuxième ligne ensemble pour évaluer l'enfant, voir si on retient le signalement. Si on retient moins de signalements puis si on perd moins de temps dans l'évaluation, bien, savez-vous quoi, on est capable de donner des meilleurs services à la personne.

Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Je m'étais seulement basée sur vos propres chiffres, qui disaient : Il faut tant de temps avant qu'il y ait un premier contact entre un intervenant du centre jeunesse et l'enfant et sa famille. Je ne sais pas, moi, c'est vos données. Alors, je ne reviendrai pas là-dessus parce que je ne pourrai pas faire mes autres thèmes, qui sont tout aussi importants, Mme la ministre, vous le savez bien.

Autre sujet qu'on aime bien discuter, vous et moi, ensemble, c'est les services d'injection supervisée. Alors, 2015-2016 a été une année extraordinaire, le ministère a reconnu les sites d'injection supervisée, l'importance d'en implanter, notamment dans la région de Montréal, à tout le moins, on va commencer par là.

Excusez-moi de vous faire courir, tout le monde, je fais une introduction pour vous laisser le temps de courir. Alors, bien, vous allez voir, ma question est bien simple. Dans le fond, ce qu'on sait qui s'en vient, parce qu'on se tient au courant du dossier, c'est qu'effectivement, dans les prochains mois, ça devrait déboucher, on devrait avoir à Montréal, en collaboration entre le CIUSSS et les organismes, notamment un organisme qui s'appelle CACTUS, les services d'un CIS, mais un autre CIS, pas le suicide mais supervision... d'injection supervisée. Ma préoccupation, c'est que l'organisme communautaire qui va faire ce travail-là, qui est vraiment un des experts au Québec parce qu'il accompagne les personnes qui utilisent des drogues injectables depuis plusieurs années, va se retrouver avec une tâche de plus, et notre grande crainte, c'est qu'il n'ait pas l'argent nécessaire pour pouvoir assumer les frais salariaux et administratifs pour réaliser ce travail-là. Je sais que le CLSC, le CSSS, le CIUSSS... en tout cas, de ce côté-là, il y aura les infirmières, puis ça va être dans ce budget-là. Moi, je vous parle de façon spécifique. Est-ce que, dans votre budget, il a été prévu de l'argent pour soutenir au niveau administratif, au niveau des besoins salariaux l'organisme communautaire notamment mais les organismes communautaires qui vont accueillir ce programme, ce magnifique programme là?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : En fait, la députée suit très bien le dossier, effectivement, et on l'a déjà mentionné qu'on était favorables à la mise en place d'un site d'injection supervisée et on a posé les gestes en conséquence. À l'époque de l'ancien gouvernement fédéral, nous avions avisé la ministre de la Santé que nous étions favorables et on lui avait demandé d'examiner le dossier qui était... qui allait être présenté, dans le temps, par l'Agence de santé et services sociaux de Montréal.

Et je ne veux pas prendre trop de temps sur le temps de la députée, mais je veux prendre certainement le temps de dire à la population... Parce que je sais qu'il y a beaucoup d'interrogations sur les sites d'injection supervisée et je veux rassurer la population, parce qu'il faut savoir, là, que c'est le meilleur moyen de prévention, un, pour réduire les cas de surdose, qui parfois amènent des gens à l'urgence mais parfois causent la mort. C'est le meilleur moyen de réduire les maladies transmissibles par les injections et, encore là, qui causent des problèmes aux gens puis aussi au système de santé, créent des engorgements. C'est aussi le meilleur moyen de réduire les déchets de seringues qui vont traîner partout. C'est aussi une façon de pouvoir communiquer avec les personnes qui vont être là. Vous savez, en ce moment, il faut se dire la vérité, M. le Président, on donne des seringues, là, puis on leur dit : Va faire ça dehors puis disposes-en comme tu voudras, puis il y a des enfants sur la rue qui se promènent puis qui peuvent être infectés par une seringue souillée, puis il y a des coûts rattachés à tout ça, effectivement. Alors, moi, ce que je veux dire aux gens, c'est que c'est déjà en place à Vancouver, et c'est prouvé qu'il n'y a pas eu d'augmentation de la criminalité, qu'il y a eu des réductions, justement, en termes de santé publique pour ces personnes-là mais aussi pour l'ensemble du réseau de la santé.

Mais la députée va me laisser terminer, parce que je suis certaine qu'elle était intéressée à ce que je rassure la population. Et, oui, il y a des bonnes nouvelles, apparemment, qui s'en viennent, et j'ai très, très hâte d'avoir la confirmation puis qu'on puisse procéder à cette annonce-là au Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal où se trouvent CACTUS Montréal, Spectre de rue, Dopamine, et etc. Oui, on a prévu les sous. On n'est pas allés là-dedans, M. le Président, sans s'être assurés... Parce que ça n'aurait pas de sens, là, que j'aie donné mon aval, la ministre, sans prévoir des sous.

Mme Massé : Pour les groupes communautaires, pour soutenir les salaires et l'administration. Parfait.

Mme Charlebois : ...prévu des sous pour tenir l'organisme en... Si le directeur national de santé publique veut ajouter à ça, il a beau, si ça peut rassurer la députée.

Le Président (M. Morin) : M. le directeur.

• (21 h 40) •

M. Arruda (Horacio) : Oui. Même par rapport au budget initial qui avait été prévu, on a remarqué, notamment autour de l'organisation CACTUS, qu'il y a eu une augmentation de distribution de seringues, puis etc., donc, même, on a réévalué les devis potentiels de nombre de locaux et de besoin de support. Ça fait qu'effectivement on s'assure... puis même du système informatique qui va être implanté, puis etc., donc tous les éléments. Et ça, c'est un projet spécifique, au-delà des autres activités qui sont faites par cet organisme-là, puis vous savez aussi qu'il y aura aussi d'autres organismes, comme tel, dans Montréal, notamment...

Mme Charlebois : M. le Président, si vous me permettez d'ajouter à ce qu'a dit le directeur de la santé publique, c'est aussi une exigence qui est prévue dans la demande, quand on postule au gouvernement fédéral, d'avoir... d'être sûr d'attacher le financement. Alors, je vous rassure, oui, le financement va être au rendez-vous. C'est une autre bonne nouvelle, le député de Rosemont est sûrement content.

Le Président (M. Morin) : Merci à vous deux. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Oui. Alors, j'ai tellement insisté pour dire que c'étaient des sous pour les organismes communautaires que je comprends, parce que vous ne l'avez jamais dit de vos mots, que c'est de cela qu'on parle.

Un autre sujet qui m'intéresse ainsi que mon collègue, je vais y passer quelques minutes parce qu'il me reste 10 minutes puis deux sujets, c'est la SPLI. D'ailleurs, je vous ai abordée, Mme la ministre, pas plus tard qu'avant-hier en vous déposant une lettre de la part des trois députés de Québec solidaire pour vous sensibiliser à quelque chose que vous savez déjà. Mais, pour les fins des enregistrements, vous savez que, depuis la réorientation 2015-2019 pour le programme SPLI, qui est le soutien en prévention et en lutte à l'itinérance, le gouvernement fédéral a réorienté ça vers ce qu'on appellerait en jargon une approche qui s'appelle logement d'abord, Housing First, qui a eu des impacts majeurs sur les groupes qui interviennent en itinérance à Montréal et partout à travers le Québec. Juste donner quelques... Sur Montréal, que je connais mieux, il y a 30 organismes qui ont subi des coupes de 30 % à 75 % le 1er avril 2015. Pourquoi? Pas parce qu'ils ne font pas encore la job, pas parce qu'ils ont eu des mauvaises notes à l'école puis qu'ils ont eu une diminution à cause d'un mauvais service. Tout simplement parce que le gouvernement canadien avait décidé de réorienter son programme seulement vers la question du logement.

Ceci étant dit, changement de gouvernement fédéral, youpi! augmentation de l'enveloppe de 50 %. Alors, Mme la ministre, ma question est fort simple. Vous le savez plus que moi, nous avons au Québec un modèle québécois en matière d'intervention, prévention et de lutte à l'itinérance et d'intervention auprès des itinérants et itinérantes qui inclut toutes sortes de facettes, le logement, l'accompagnement, l'intervention, etc., tant auprès des femmes, des jeunes, des autochtones, nous avons vraiment développé une façon particulière de soutenir les personnes les plus vulnérables de notre société. Le gouvernement canadien avait décidé d'aller dans un autre sens. Maintenant, Mme la ministre, que nous avons 50 % de plus d'argent qui va descendre ici, au Québec, est-ce qu'on peut compter sur vous pour défendre la diversité des approches, qui est la fierté de notre modèle québécois?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, d'abord, on va refaire un petit peu l'histoire, si vous me le permettez, Mme la députée, se rappeler qu'il y a eu une politique qui a été déposée par ma prédécesseure à mon poste et qui a fait en sorte qu'on... Nous, quand on est arrivés, on a fait un plan d'action. Je me souviens très bien que, quand je suis arrivée puis j'ai parlé de plan d'action, tout le monde avait peur que je tasse la politique qui avait été faite par le précédent gouvernement. Non, on a gardé la même politique et on a fait un plan d'action qui a découlé de cette politique-là, où il y avait des orientations qui ont été stipulées. Maintenant, il y a, dans le plan d'action, des choses qui sont rattachées puis il y a du financement au niveau provincial.

Maintenant, il y a eu effectivement une entente de partenariat sur la SPLI, ce qu'on appelle la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, qui est signée, qui est en vigueur pour 2015-2020. Et je me dois de vous dire... Parce que vous avez dit qu'il y avait juste une orientation, ce n'est pas tout à fait ça. Il y avait, oui, l'approche de stabilité résidentielle avec accompagnement, mais il y avait aussi le respect des autres priorités qui étaient au plan d'action qui découlait de la politique nationale. Je me permets de le rappeler parce que tout le monde dit : Il y a juste le Housing First. Non, il y avait possibilité d'avoir des projets intégrés, et ça a été fait. Est-ce que ça a répondu à tous les organismes communautaires? Non, j'en conviens, mais il fallait se réunir puis déposer des projets intégrés. Ça, c'est pour la première partie, l'état de situation de ce qui s'est passé avant.

Maintenant, concernant les nouveaux argents qui viendront du gouvernement fédéral, bien, je vais vous annoncer une bonne nouvelle, je suis déjà en échange avec le ministre responsable du dossier, M. Duclos, pour voir comment on pourra déployer ces sommes-là et voir dans quel contexte on peut faire ça. Je ne veux pas m'avancer plus que ça parce que nous aurons des rencontres, nous aurons un échange. Il est sensibilisé au fait de comment on fonctionne au Québec, il connaît déjà l'entente de partenariat qui est déjà existante. Oui, ils veulent déployer plus de sous, et je vais travailler avec le ministre Duclos pour voir comment on peut déployer ces sommes-là de façon à répondre aux besoins du Québec, mais certainement qu'on aura une approche qui s'intensifiera vers ce qu'on appelle les groupes communautaires, parce qu'il y a des services qui sont donnés là qui ne peuvent pas être donnés ailleurs, notamment quand on parle de travailleurs de rue, etc.

Alors, moi, j'aurai des échanges avec le ministre Duclos. Je ne peux pas prendre des décisions pour le gouvernement fédéral, puisque ce seront leurs décisions, mais je vais faire part des représentations du Québec. D'ailleurs, il a déjà rencontré des gens à Montréal, le ministre Duclos, à cet effet-là, je peux vous dire ça déjà.

Le Président (M. Morin) : Allez-y, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Votre précision est importante. Effectivement, le Housing First, c'était 65 % de l'enveloppe qui était...

Mme Charlebois : Avec accompagnement, hein?

Mme Massé : ... — avec accompagnement — qui était centré sur cette question-là. Je n'ai pas entendu votre réponse si vous allez défendre la diversité de nos approches. Je crois que vous dites que vous êtes en discussion. La dernière fois, l'année passée, vous nous aviez dit ça aussi, puis on s'est retrouvés avec une orientation du gouvernement canadien qui n'allait pas dans le sens de ce que les groupes voulaient ici, sur le terrain, les experts et expertes.

Mme Charlebois : Bien, dans le plan d'action, Mme la députée, le logement, il fait partie du plan d'action et il venait de la politique nationale. Je n'ai pas inventé ça, moi, là, je suis partie des documents qui étaient déjà existants. Oui, je... Excusez, M. le Président.

Le Président (M. Morin) : Ça va bien.

Mme Massé : M. le Président, oui, le logement en faisait partie, mais... Bon, je n'ai plus le temps, mais je sais que mon collègue de Rosemont va reprendre la «pole» demain. Puisqu'il reste à peu près... Combien de temps, M. le...

Le Président (M. Morin) : Quatre minutes.

Mme Massé : Quatre minutes. Dernier élément, malheureusement. Câline, c'est toujours comme ça que ça se passe! J'aimerais vous entretenir rapidement sur les personnes en situation de handicap. Vous savez comme moi que de vivre avec un handicap, un, ce n'est pas un choix, et, deux, on a décidé depuis longtemps, au Québec, qu'on voulait soutenir collectivement les personnes qui naissaient avec des défis personnels. Et je veux aborder la question de l'accessibilité universelle. Pourquoi? Parce que le ministre Coiteux a annoncé une réforme majeure à la SHQ sans garantie, à notre sens, à cette étape-ci, pour le Programme d'adaptation à domicile. Vous savez, c'est le programme qui permet aux personnes qui vivent avec un handicap de pouvoir adapter leur domicile et/ou, lorsqu'on construit du logement social ou du logement avec la SHQ, qui oblige un certain nombre de normes qu'on appelle l'accessibilité universelle, qui permet aux gens pas seulement handicapés, mais aux aînés, aux gens à mobilité réduite d'avoir accès à des lieux adaptés. Alors, dans le fond, dans les quelques minutes qu'il reste, est-ce que vous entendez défendre auprès de votre collègue la nécessité, en fait le côté incontournable que toute révision au niveau de la SHQ... qu'on impose l'accessibilité universelle, premièrement, et, deuxièmement, que le programme, comme tel, d'adaptation à domicile puisse être maintenu et, bien sûr, je dirais, bonifié, même si je n'y crois pas trop?

Le Président (M. Morin) : En deux minutes, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, moi, je n'ai pas d'indication de penser qu'il y aura coupure dans l'adaptation à domicile. Oui, il veut revoir la SHQ, mais là on parle de deux choses différentes, le fonctionnement de l'organisme... Puis l'adaptation de domicile, là, non, là, c'est sûr que je vais défendre ça, si c'est ça, votre question, parce que c'est une nécessité. Mais, au-delà de tout ça, moi, je n'ai pas d'indications, en ce moment, qui me font croire qu'il y aura coupure dans l'adaptation de domicile.

Mme Massé : ...intéressant. Puis je me permets une dernière petite question...

Mme Charlebois : Mais il faudrait poser la question au ministre des Affaires municipales.

• (21 h 50) •

Mme Massé : Oui, bien sûr, bien sûr. C'est pour ça, M. le Président, que je dis : Est-ce que vous allez défendre ça auprès de lui? Moi, je suis capable, mais je suis certaine que j'ai moins d'influence sur lui que vous pouvez en avoir.

Et je vais juste terminer par une affirmation, parce que j'imagine que c'est ce qu'il me reste, pour dire : Bien, les personnes qui vivent en situation de handicap ont aussi besoin d'aide pour se lever le matin, pour embarquer dans leurs chaises, pour même s'habiller pour pouvoir aller, pour certains, travailler, pour d'autres, contribuer différemment à la société. Ça s'appelle le maintien à domicile. Je sais bien que ce n'est pas ici qu'il faut en parler, mais, encore là, puisque les personnes qui vivent en situation de handicap font un petit peu partie de votre... en dessous vos ailes, comme dirait l'autre, j'espère que vous gosserez vos collègues pour que l'argent soit au rendez-vous.

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Morin) : C'est un mot qu'on comprend bien.

Mme Charlebois : Je vais certainement avoir des échanges avec mon collègue le ministre de la Santé, mais je peux déjà, d'entrée de jeu, vous rassurer, parce qu'il y a une somme supplémentaire qui a été affectée au soutien à domicile, et il y a une partie qui est réservée, là, justement pour les personnes en situation de handicap. Il est clair qu'il y a une portion plus grande dans l'ajout du budget pour les personnes aînées, mais il y aura certainement, oui, une portion pour les personnes en situation de handicap.

Le Président (M. Morin) : Merci beaucoup, mesdames. On se dirige, Mme la ministre, vers Beauce-Sud. M. le député de Beauce-Sud, je veux vous entendre, j'ai bien hâte de voir.

M. Busque : Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, chers collègues de la partie gouvernementale, collègues de l'opposition officielle ainsi que de la deuxième opposition, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, Mme la ministre ainsi que toute l'équipe qui vous accompagne, bonsoir.

Alors, Mme la ministre, vous avez, en introduction, parlé de dépendance, alors j'aimerais vous entretenir sur ce point précisément, en commençant par vous dire que le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale a apporté une modification au Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles, en vigueur depuis le 1er mai 2015. Cette modification vise à remplacer la prestation de base des adultes prestataires de l'aide financière de dernier recours qui bénéficient de la prestation spéciale pour frais de séjour pour des services en toxicomanie. Le ministère de la Santé et des Services sociaux a travaillé de concert avec le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale afin de mettre en place une mesure transitoire d'aide et d'accompagnement en gestion pour les centres offrant des services en toxicomanie avec hébergement qui présentent des difficultés financières découlant de ces modifications. Malgré cette mesure de soutien, on constate une baisse de fréquentation des services d'hébergement en dépendance depuis l'entrée en vigueur de la modification réglementaire du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Les problèmes de dépendance touchent des citoyens dans toutes les régions du Québec. Ces personnes doivent faire preuve de beaucoup d'humilité, ils doivent accepter qu'on leur vienne en aide. Afin de les prendre en charge, les ressources en dépendance du réseau de la santé et des services sociaux ainsi que les organismes communautaires et privés représentent l'ensemble de l'offre de services en dépendance au Québec.

Mme la ministre, vous avez, lors du dépôt du budget 2016-2017, annoncé un investissement de 6 millions annuel récurrent pour les problèmes de dépendance. Cette excellente nouvelle a été, comme on peut s'en douter, accueillie plus que favorablement. D'ailleurs, dans un article paru le 20 janvier dernier dans La Presse sous la plume de M. René-Charles Quirion, M. le directeur général de l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance, M. Vincent Marcoux, s'est dit très satisfait de cette excellente nouvelle. Pour ce qui est de M. Robin Fortier, vice-président de l'Association provinciale des organismes de dépendance, il a dit, et je le cite : «Je suis convaincu que la ministre Charlebois a travaillé très fort sur le dossier et je tiens à la remercier.»

Alors, Mme la ministre, vous avez clairement démontré qu'il s'agissait d'une priorité que de veiller à la protection et à l'accès des services offerts aux personnes ayant des problèmes de dépendance. J'aimerais, Mme la ministre, vous laisser nous entretenir au sujet de l'importance des services offerts aux personnes ayant une problématique de dépendance.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, je suis vraiment heureuse de pouvoir répondre à cette question-ci du député de Beauce-Sud, ça va me donner l'occasion d'expliquer aux gens exactement comment ça s'est déroulé.

Il faut savoir, là, que l'offre de services en dépendance, M. le Président, au Québec, c'est assez varié, et il y a le réseau public qui travaille en étroite collaboration avec les centres d'intervention en dépendance. Et je veux tout de suite, d'entrée de jeu, dire aux gens que l'offre en dépendance, là, en traitement de la dépendance est suffisante pour répondre à la demande en ce moment, il y a 85 ressources communautaires et privées qui oeuvrent actuellement... qui offrent des services aux besoins des personnes qui sont aux prises avec des problèmes de toxicomanie. Et évidemment ma priorité, c'est de veiller à la protection, mais surtout à l'accès aux services offerts aux personnes qui ont un problème de dépendance, et c'est ce que j'ai fait depuis le début de mon mandat.

Et je veux vous dire que, oui, pour refaire un peu l'histoire, depuis le 1er mai 2015, il y a eu une modification à la loi... au règlement, plutôt, du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Il a fait une modification sur le Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles parce que, dans son ministère, il y avait une modification qui visait à remplacer la prestation des adultes qui étaient à l'aide financière de dernier recours, qui recevaient 616 $ par mois, et, dans ce 616 $ là, il y a des sommes qui sont prévues pour, justement, la subsistance, l'hébergement, etc., alors que... Il a changé ça pour amener l'aide financière pour l'allocation de dépenses personnelles à 200 $ par mois pour les personnes à l'aide sociale qui bénéficient de traitements en dépendance et où ils sont logés.

Alors, la prestation spéciale — il faut le dire, M. le Président, parce qu'il faut bien expliquer ça aux gens — à l'aide sociale, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale paie les centres 1 517 $ par mois pour recevoir des gens qui reçoivent des prestations de dernier recours et qui vont avoir des traitements en dépendance. Alors, le ministère de l'Emploi et Solidarité sociale avait dans ses cartons deux fois la même dépense, le même investissement, c'est-à-dire qu'il payait l'établissement puis il payait la personne assistée sociale.

Ce qu'il faut savoir, là, M. le Président, c'est que les personnes assistées sociales n'avaient pas plus l'argent au bout, hein, parce qu'ils prenaient de leurs chèques pour donner aux maisons de traitement des dépendances. Ça fait que finalement il leur restait souvent moins que 200 $, parce qu'ils se faisaient facturer des sommes en plus du 1 517 $ qui était payé par Emploi et Solidarité sociale.

Or, la modification a touché les bénéficiaires de prestations pour frais de séjour en services de toxicomanie. C'est ceux qui sont hébergés, comme je vous dis, en ressources privées ou communautaires. Et ces ressources, elles sont... Il faut rappeler aux gens que les ressources, là, dont on parle, elles sont encadrées par un processus de certification des ressources en toxicomanie ou en jeu pathologique. On ne se part pas une maison de dépendance comme on veut, quand on veut, comme on veut, là, ça ne marche pas comme ça, il faut avoir une certification.

• (22 heures) •

Ce qu'on a fait, M. le Président, dans cette révision réglementaire là du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, on en a profité pour établir une mesure transitoire parce qu'on voulait avoir le temps de réfléchir à comment on allait faire le travail pour la suite des choses. Alors, on a mis une mesure transitoire d'aide et d'accompagnement, de gestion pour les centres de services en toxicomanie avec hébergement qui présentaient des difficultés financières, dont, tu sais... Parce que, là, les gens n'avaient plus le même argent pour payer, aux centres de toxicomanie... bien, aux centres de traitement des dépendances, alors on a mis une mesure transitoire qui les accompagnait, un soutien en gestion qui leur aidait à voir si la gestion était adéquate, s'il y avait des choses à améliorer.

Mais aussi il y avait un second volet qui nous permettait — bien, c'est Emploi et Solidarité sociale — d'offrir un soutien financier transitoire. Je dis «transitoire» pas pour rien, M. le Président, parce que, pendant ce temps-là, nous étions à travailler sur l'autre partie et, bref, à répondre à une demande faite par les associations qui sont l'APOD et l'AQCID, qui nous disaient que la partie traitement devrait relever davantage du ministère de la Santé et des Services sociaux. J'ai eu quelques rencontres avec eux puis j'avais entendu leurs demandes. Alors, moi, j'ai évalué aussi... Suite à la réglementation qui a été changée par Emploi et Solidarité, on a fait des évaluations, puis on a constaté qu'il y avait une baisse de fréquentation des services d'hébergement, suite à la modification réglementaire, et on s'est dit : O.K., il faut vraiment... Non seulement on arrive avec le soutien en gestion, on leur donne un soutien financier, aux maisons, mais il faut voir comment on peut restructurer tout ça pour nous assurer qu'on offre un service efficace. Pour qui? Pour les personnes. Moi, je travaille toujours pour les personnes qui ont besoin de services.

Alors, le 20 janvier dernier, j'ai rencontré l'APOD et l'AQCID — l'APOD, c'est l'Association provinciale des organismes en dépendance, et l'AQCID, c'est l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance — et nous leur avons annoncé que nous allions offrir un soutien financier pour couvrir les frais de thérapie, M. le Président, et, oui, nous avons annoncé dans le budget 2016-2017 un montant de 6 millions récurrent qui va directement aux maisons de lutte aux dépendances qui accueillent des personnes qui ont l'aide de dernier recours. C'est spécifiquement pour ça.

Je vais en profiter, M. le député de Beauce-Sud, pour corriger une affirmation du député de Rosemont, qui dit qu'il y a eu un an qui s'est perdu. Pas tout à fait vrai, puisque nous avons annoncé une mesure rétroactive. Pour moi, il n'a pas écouté quand on a fait l'annonce, parce que non seulement il y a de l'argent pour 2016-2017, mais il y en a eu pour 2015-2016 pour les maisons de traitement en dépendance, toujours en relation avec les personnes qui sont à l'aide sociale qui vont chercher un service de traitement des dépendances.

Alors, dans le processus de création de ce critère-là, tout ce qui a été établi, on a établi des critères d'allocation sur des redditions de comptes qui sont prévues, toujours avec l'AQCID et l'APOD, les deux associations. Et les deux critères principaux qui ont été établis... Il faut que les montants soient attribués aux exploitants de ressources offrant de l'hébergement en dépendance dans le cadre d'un nouveau programme. Et ils sont, les deux critères : les activités liées au programme d'intervention — évidemment, il faut que, hein, ça soit en lien directement — et il faut aussi tenir compte de l'occupation des places réelles par des bénéficiaires de l'aide de dernier recours.

Alors, depuis ce temps-là, le 1er avril dernier, les CISSS, les CIUSSS ont communiqué avec toutes les ressources d'hébergement en dépendance et les ont avisées qu'il y avait des sommes à venir pour 2015-2016 et 2016-2017. Puis ça, c'est une gestion des priorités, on a révisé les priorités ministérielles de 2015-2016 pour arriver à dégager ce 6 millions là. Chaque ressource est financée dans le cadre du programme doit... qui est financée dans le cadre du programme doit signer une entente avec le CISSS et le CIUSSS, qui est responsable de la certification de chaque établissement. Et il est important de souligner qu'il y a un comité interministériel qui doit revoir les structures de financement des ressources financées et qui... — je ne comprends pas.

Alors, il y a des cas spécifiques qu'on a adressés. Je le sais, qu'il ne faut plus dire ça, mais il y en a plein, de monde, dans le Québec qui disent ça. Il y a des cas spécifiques sur lesquels on travaille, et, en ce moment, on est en train de s'attaquer à ces difficultés-là, et on trouve des solutions pour les centres en dépendance qui ont des particularités.

Moi, j'ai fini, M. le Président.

Le Président (M. Morin) : Ah oui?

Mme Charlebois : Oui.

Le Président (M. Morin) : J'écoutais religieusement, là, et j'attendais. M. le député de Beauce-Sud, avez-vous quelque chose à rajouter?

M. Busque : Non, ça fait le tour. Je vous remercie.

Mme Charlebois : ...

Le Président (M. Morin) : Oui. Bon, Mme la ministre. Il me semblait.

Mme Charlebois : M. le Président, je viens de comprendre la note qu'on me passait. Ce qui a été exigé, notamment, dans l'entente avec les ressources — excusez-moi, M. le député de Beauce-Sud — ce qui a été exigé pour ces ressources en dépendance là, c'est qu'il y ait zéro frais pour les personnes qui reçoivent de l'aide de dernier recours qui vont dans les centres de dépendance. Nous comblons, il y a le 6 millions qui est là pour ces personnes-là, et ce qu'on a demandé, c'est qu'il y ait zéro frais. On s'entend bien? J'espère que les gens qui reçoivent de l'aide de dernier recours ne se font pas facturer. Ça va être suivi de très, très près, ça, M. le Président. Aucun sou.

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre. Je crois que, de Beauce-Sud, on va faire un arrêt à Chauveau. Mme la députée de Chauveau.

Mme Tremblay : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme la ministre, j'aimerais vous entretenir sur la hausse constante des signalements à la DPJ. Entre 2010-2011 et 2014-2015, le nombre de signalements reçus a augmenté de 13 %, alors que le nombre de signalements retenus a augmenté de 9 %. Il faut savoir que ce n'est pas unique comme problème, parce que la hausse est presque constante depuis la création de la DPJ, en 1979, exception faite d'un ralentissement important entre 1995 et 2000. Bien sûr, la population est mieux informée et moins tolérante, les gens hésitent de moins en moins aussi à contacter les services de protection à l'enfance pour dénoncer des situations aberrantes. Ce qui était acceptable il y a 10 ans ne l'est plus nécessairement aujourd'hui. Le seuil de tolérance diminue.

Ceci dit, dernièrement, les syndicats des centres... enfin, des syndicats des centres jeunesse ont dénoncé les délais de traitement de signalements. Ils ont demandé un réinvestissement immédiat de la part du gouvernement. Ils disent que les délais de traitement ne sont pas conformes aux exigences ministérielles dans aucune région du Québec. Ils dénoncent aussi ce qu'ils qualifient de compressions de 50 millions de dollars entre 2010 et 2014. Mme la ministre, j'aimerais savoir qu'est-ce que vous répondez à ces critiques.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, effectivement, comme l'a dit la députée de Chauveau, si je prends seulement 2014 puis... Je veux juste vous dire qu'on a tous à coeur, ici, la protection de nos enfants, hein, c'est toujours la prémisse qui guide toutes nos actions. Et malheureusement il y a des jeunes qui ont besoin des services de protection de l'enfance, et il faut s'en occuper, il faut vraiment bien faire les choses. Et il y a 32 000 enfants, en 2014-2015, qui ont été pris en charge par la DPJ. En 2015-2016, les chiffres vont être disponibles prochainement, ça paraît toujours en juin de chaque année. Je sais qu'au 25 mars dernier nous avions reçu 86 675 signalements. On en a retenu, toujours en date du 25 mars dernier, 40 000... excusez-moi, 34 770.

Et je veux profiter de l'occasion pour préciser pourquoi le taux de rétention de ces signalements-là est autour de 40 %, M. le Président, si vous me le permettez. En fait, ce que ça signifie, c'est que l'ensemble des signalements que reçoit la DPJ, seulement 40 % d'entre eux présentent des faits qui laissent croire que l'enfant pourrait être en danger pour sa sécurité, son développement en fonction des motifs de compromission que la Loi de la protection de la jeunesse nous donne. Ça ne veut pas dire que les 60 autres personnes... 60 % autres n'ont pas besoin d'aide, mais, dans cette situation-là, les jeunes et leurs familles sont orientés vers les services de première ligne. Et, comme je le disais tantôt, ce qui est fabuleux dans la transformation que nous faisons du réseau de la santé avec l'adoption du projet de loi n° 10, c'est que la première ligne et la deuxième ligne travaillent ensemble maintenant au bénéfice des enfants. Alors, déjà là, ils sont pris en charge.

Et je veux souligner le travail important que font, encore une fois, les intervenants et professionnels pour qui la protection de l'enfance et les DPJ, c'est au coeur de leurs préoccupations. Depuis 1979, effectivement il y a une hausse des signalements. Puis c'est un engagement de la population, hein? C'est clair que la population n'est plus aussi tolérante, puis c'est merveilleux, parce qu'on s'assure que les jeunes ne sont pas dans des situations de maltraitance. Les gens sont plus informés, ils sont plus sensibilisés et ils hésitent moins à dénoncer des situations qui sont inacceptables.

Alors, je rappelle que les cas urgents, codés 1 ou codés 2, qui portent atteinte à l'intégrité physique d'un enfant, sont pris en charge immédiatement. Il n'y a pas d'attente. Il y a codé 2 dans les 24 heures suivant l'appel. Mais il faut prendre le temps de bien évaluer, pour l'ensemble des signalements, là, il faut prendre le temps de bien évaluer, à part des cas urgents, comme je viens de vous faire mention, de bien évaluer pourquoi il y a des délais, là. C'est parce qu'il faut prendre le temps de bien évaluer la situation de chaque enfant. On ne parle pas, là, d'une planche de bois, là, on parle d'un enfant. Alors, les spécialistes s'affairent à faire une bonne évaluation et à attribuer les bons services à chacun de ces enfants-là.

Comme je l'ai dit tantôt, il y a un montant de 1,5 million qui est attribué à tous les ans à tous les centres jeunesse qui subissent des pressions sur leurs services justement pour désengorger, et cet argent-là sert à donner des ressources supplémentaires pour qu'ils puissent donner des services davantage. Et il y a plusieurs paramètres, hein, qui sont pris en compte : le nombre de dossiers en attente, la richesse relative de l'établissement, la capacité d'accueillir, etc. Alors, ce qu'on vise avec ces argents-là, c'est de justement réduire la liste d'attente. Et je vous le dis, là, les cas prioritaires sont toujours, toujours pris en charge, puis les cas qui le sont moins ne sont pas laissés à eux-mêmes, comme je le disais tantôt. Les centres jeunesse mettent un filet de sécurité autour de ces jeunes-là parce qu'il faut s'assurer que, dans l'entourage de ces jeunes-là, il y a des gens qui peuvent apporter un soutien positif en attendant les services d'un intervenant. Et, si je peux me permettre, M. le Président, de vous dire quels sont les codes, code 1, ça nécessite intervention immédiate; code 2, dans les 24 heures; puis code 3, ça peut aller jusqu'à quatre jours.

Là, vous me faites signe que je n'ai plus de temps, c'est ça?

• (22 h 10) •

Le Président (M. Morin) : C'est terminé, Mme la ministre. On va laisser la chance au député de Rosemont de prendre la parole. M. le député de Rosemont, 21 min 30 s.

M. Lisée : Merci, M. le ministre. Je suis...

Le Président (M. Morin) : Ah oui? Merci!

M. Lisée : D'abord, je tiens à souligner la qualité des questions des députés ministériels. On sent que cette année ils sont... et ça nous a permis d'avoir de l'information. Ce n'est pas toujours ainsi, et, lorsque ce n'est pas ainsi, parfois on le dit, mais, cette fois-ci, je tiens à souligner la qualité des questions, et ça a permis à la ministre de revenir sur certaines de mes interventions. Donc, je vais faire un petit peu de retour en arrière avant de poser mes nouvelles questions.

Bon, tout à l'heure, on a eu une discussion sur les coupures en santé publique. La ministre a réitéré que c'était complètement administratif, et le responsable nous a dit : Oui, oui, puis une grosse somme maintenant, bien, c'est pour payer les départs à la retraite des gens administratifs qui ne donnaient aucune valeur ajoutée et à qui on a demandé de s'en aller. Bien, j'ai une liste ici des 39 professionnels de la Direction de la santé publique de Montréal qui ont été mis à la porte. On va voir ce qu'ils faisaient : urbaniste, développement des communautés et liaison avec le milieu communautaire; professionnel de recherche pour le réseau des établissements promoteurs de la santé; bioéthicienne, recherche et comité d'éthique; ingénieur Ph. D., évaluation de la performance des interventions en santé publique; économiste, évaluation des programmes de promotion de la santé; sociologue, psychologue, épidémiologiste qui faisaient l'analyse de l'état de santé des populations montréalaises, inégalités sociales de santé — ces gens-là sont virés; ingénieur hygiéniste, il faisait l'analyse de l'environnement et urbanisme, viré; infirmière pour la clinique de services pour les accidentés du travail, virée; toxicologue, analyse de la qualité de l'eau et de la qualité des sols, menaces environnementales, viré; professionnel de recherche, surveillance du développement des enfants et des jeunes, viré; sexologie, viré; pharmacien, intégration des pratiques cliniques préventives liées aux maladies chroniques dans les pharmacies communautaires, viré; géographe, travailler au plan de lutte contre le tabac chez les jeunes, viré; sociologue, création de milieux favorables à la santé pour les jeunes, viré; travailleuse sociale, prévention des ITSS et des grossesses chez les jeunes, responsable-école et milieu de santé, virée; trois infirmières, équipe infections-intoxications, enquêtes épidémiologiques pour les maladies à déclaration obligatoire, immunisation, virées; sexologue, elle faisait de la prévention des problèmes de santé transmis sexuellement, virée; infirmière clinicienne répondante auprès des infirmières, virée — ce n'est plus la peine, les infirmières sont virées; Ph. D. nutrionniste, accessibilité alimentaire, virée; sexologue, promotion d'une sexualité saine et responsable, viré; politologue — lui, il fallait le virer — promotion de politiques efficaces en développement des enfants; kinésiologue, plan de lutte contre le tabac, cessation chez les jeunes et les adultes, elle n'est plus là; professionnelle de recherche, prévention encore des maladies transmises sexuellement, elle n'est plus là. Nutritionnistes, démographes, sociologues, infirmières, nutritionnistes, diététistes, ces gens-là ne travaillent plus à la direction de la santé publique de Montréal. On ne me dira pas que c'étaient des comptables.

Je reviens sur les centres de désintox. La ministre dit... bien, j'ai mal compris, parce que c'était rétroactif. On a perdu un an parce qu'une réforme dont tout le monde avait dit qu'elle allait désorganiser le réseau allait s'implanter. La réforme a été implantée, ça a désorganisé le réseau, et là il a fallu que la ministre intervienne pour réparer les pots cassés. Elle me dit qu'elle intervient rétroactivement. Très bien. Ça n'aurait pas été nécessaire si la réforme, dont on savait qu'elle serait délétère, n'avait pas été implantée.

Et là j'ai une question à lui poser là-dessus. Lorsque la réforme a été implantée, on a dit : O.K., les personnes intoxiquées qui sont à l'aide sociale, on leur coupe de façon importante leurs prestations parce qu'on ne veut plus qu'elles versent des sommes aux centres de désintox. Très bien. Mais les centres de désintox vont réussir à survivre malgré ce paiement. Ça n'a pas été le cas. Il y en a qui ont fermé, il y en a qui ont failli fermer, la ministre a dû ajouter 6 millions pour faire en sorte qu'ils restent en vie. Très bien. Elle dit : Maintenant qu'ils ont les sommes nécessaires à rester en vie, les prestataires vont revenir puisqu'on ne demandera plus aux prestataires de verser des sommes pour être là. Bien là, j'aimerais savoir si elle une évaluation. Parce qu'à l'époque, avant que la réforme soit implantée, on leur a dit — on, l'opposition officielle, les organisations — on a dit : Les prestataires vont arrêter d'y aller, et, en quelques mois — et je le disais pendant que ça se passait — 900 prestataires se sont soit retirés de leurs programmes de désintoxication soit étaient inscrits et se sont désinscrits parce qu'ils ont vu qu'ils n'y arriveraient plus.

Alors, maintenant que la ministre dit qu'elle a stabilisé les centres de désintoxication, est-ce qu'elle a des chiffres sur le retour des prestataires dans les centres? Est-ce que les 900 qui avaient déserté sont revenus, et est-ce que le taux d'occupation revient à ce qu'il était avant la crise? Ou est-ce que les prestataires continuent à bouder les centres parce qu'ils considèrent que la coupe qui leur est assénée est trop lourde?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, M. le Président, là, j'ai deux choses. On va recommencer avec ses propos concernant la Santé publique. Je réitère qu'il n'y a aucune coupe dans les services. Je vais lui demander de déposer son document parce que, moi, ce n'est pas l'information que j'ai. Alors, le document que vous avez, j'imagine que vous êtes capable de nous le déposer pour qu'on puisse faire des vérifications.

Ce que je sais, c'est qu'il y avait des contractuels dont les services n'ont plus été retenus parce qu'il y avait une double, double, affectation de services. Alors, comme je vous ai dit, en éliminant les agences, tu sais, deux fois payer pour la même chose... Je sais que ce n'est pas coutume peut-être, de votre côté, d'examiner pour améliorer les façons de faire. Chez nous, on transforme le Québec puis, quand on voit qu'on paie deux fois pour la même chose, bien, c'est bien de valeur, mais on gère les deniers publics puis on ne fait pas ça. On a recentré les activités. Alors, moi, je lui demande de déposer son document pour qu'on puisse faire des vérifications et lui revenir avec grand bonheur, parce qu'il n'y a pas de service coupé à Montréal, il n'y a aucun service coupé.

Maintenant, pour ce qui est de la réforme, je ne sais pas, quand il me parle de la réforme à l'aide sociale puis de tout ce qui se passe dans les centres en dépendance... Moi, j'ai pour optique, M. le Président, dans la vie, je veux dire, quand je peux faire mieux, de ne pas me gêner. Moi, être assise toujours sur la même affaire puis m'endormir sur une situation latente, ce n'est pas trop, trop ma tasse de thé. On va dire ça comme ça. Alors, la réforme a été faite pour améliorer nos services puis faire en sorte que nous puissions, aux bons endroits, verser les sommes. C'était la demande des associations, là, ça n'a pas émané de mon cerveau, ça, cette affaire-là. Ils sont contents, les deux associations, l'APOD puis l'AQCID, ils sont hypercontents.

Le 6 millions qui a été rétroactif... Il a beau me dire qu'on était en rétroaction, là, mais je m'excuse, là, M. le Président, là, les centres ont été informés et ils sont contents, eux autres aussi. J'ai reçu une carte... c'est de valeur, ça m'a tentée de l'apporter. Je vous le dis franchement, là, j'aurais dû l'apporter. Demain, je pense que je vais demander à quelqu'un de mon cabinet d'aller la chercher au cabinet, de l'envoler. La carte est haute de même, signée par les prestataires d'aide sociale. Ils m'ont téléphoné. Ils m'ont parlé eux autres mêmes pour me dire : Merci, Mme Charlebois — bien, c'est mon nom, M. le Président. Merci, Mme la ministre. Alors, il y a 6 millions récurrents qui est accordé partout dans les centres où on a des personnes qui sont en situation de dépendance.

Là, je ne sais pas, il m'a parlé de 900... Je n'ai pas compris le sens de... j'ai perdu ce bout-là, là.

M. Lisée : O.K. Alors, évidemment, les centres, à cause de la réforme, ont failli mourir. Ça a créé une crise nationale. Vous avez trouvé 6 millions pour qu'ils ne meurent pas. Ils sont très contents de ne pas être morts. Ça, je leur passe, ils sont très contents de ne pas être morts, O.K.? S'il n'y avait pas eu votre tentative de réforme, ils n'auraient pas failli mourir. À cause de la réforme, 900 prestataires d'aide sociale qui étaient inscrits dans les centres ou qui suivaient des traitements de désintoxication se sont désinscrits, O.K.? Alors, vous avez réglé le problème, on va attendre, on présume que vous avez réglé le problème de la survie des centres.

Maintenant, je vous pose une question précise : Avez-vous une évaluation du retour des prestataires? Sont-ils revenus? Est-ce que le taux d'occupation est revenu à celui qu'il était avant votre réforme ou est-ce que — ce que tout le monde a dit — l'impact sur les prestataires d'une réduction de leurs prestations va faire en sorte qu'ils n'iront pas dans les centres de désintoxication? C'est ça que je vous demande : avant la réforme, pendant la réforme et maintenant. Y a-t-il un retour des prestataires dans les centres de désintox? Ce qui est le but de l'ensemble de l'opération, c'est qu'ils se désintoxiquent.

• (22 h 20) •

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, avant la réforme, nous n'étions pas capables de savoir le taux d'occupation exact des personnes assistées sociales et des taux d'occupation dans les centres de dépendance. Après la réforme, on va pouvoir parce que, dans la reddition de comptes, ils vont devoir nous rendre des comptes, justement, sur le taux d'occupation, ce qui n'était pas le cas au préalable, avant. Alors, c'est déjà une bonne donnée.

Est-ce que je l'ai ce soir? Non, parce qu'on vient de changer la chose. Voyez-vous, c'en est, une autre bonification qu'on a faite, justement, quand on a revu les façons de faire. On n'était pas capables d'établir combien de personnes allaient là puis combien de temps elles y allaient. Là, on va être capables de le savoir, parce que, dans la reddition de comptes, on va tout voir ça. Pour verser les chèques, ça fait partie de l'élément.

Alors, moi, j'imagine que, si les associations, les deux associations, qui représentent des groupes différents, sont contentes, les associations sont heureuses... Les représentants m'ont accompagnée au point de presse. Je ne leur ai pas tordu un bras, là. Ils m'ont dit : On peut-u vous accompagner, Mme la ministre? J'ai dit : Bien sûr. S'il y a des maisons en dépendance qui m'envoient des cartes de ce format-là... Puis, je vous le dis, demain, je l'apporte, M. le Président, je vais vous la montrer, c'est une super de belle carte, ça m'a vraiment touchée. Moi, là, au coeur de cette réforme-là, comme l'a dit le député, ce qui m'intéressait, là, c'est l'usager de ces maisons de dépendance là, l'usager. Notre offre répond à la demande en ce moment. C'est ça qu'il faut retenir, il y a de la place pour accueillir les gens. Et c'est ce qu'on vise à faire, c'est de donner les services aux personnes en temps opportun. Alors, voilà.

M. Lisée : O.K. Donc, je serai très heureux de voir la carte demain, mais je serai plus heureux de savoir si les prestataires sont revenus.

Mme Charlebois : Avec la réforme, je vais pouvoir vous répondre, au bout d'un an.

M. Lisée : Bien, oui, mais c'est parce qu'on a réussi à compter... Les associations qui sont contentes ont réussi à compter le nombre de prestataires que la réforme a fait fuir, O.K., et nous ont donné cette information-là. D'ailleurs, eux, ils disent qu'ils savaient leur taux d'occupation avant, qu'ils le savent maintenant et qu'ils le savent après. Mais là ce qu'on veut savoir, c'est... O.K., eux, ils vont rester ouverts. S'ils ont des clients, est-ce que les clients que la réforme a fait fuir vont revenir? Parce qu'on avait une question à poser là-dessus.

Parce que, justement... Peu importe la compréhension de l'ensemble de la réforme, lorsque l'individu prestataire qui a des difficultés parce qu'il est intoxiqué se rend compte que son chèque a baissé, parfois, il a une réaction qui n'est pas celle d'un comptable. Parfois, il dit : Bien là, si je vais en centre de désintox, je vais perdre 300 $, donc je n'irai pas, tu sais? Il a cette réaction-là. Parce que le but du jeu, c'est qu'ils aillent en centre de désintoxication. Je comprends que vous n'avez pas ce chiffre-là maintenant, mais vous et moi sommes intéressés à le connaître dès qu'il sera disponible. J'ai peu de minutes.

Mme Charlebois : Bien, à la reddition de comptes qui sera faite, on va vous fournir les renseignements avec grand bonheur.

M. Lisée : D'accord. Il me reste combien de minutes, M. le Président?

Le Président (M. Morin) : Oui, il vous reste huit minutes, cher monsieur.

M. Lisée : D'accord. Je veux parler un petit peu des ressources intermédiaires. Je sais qu'il y a des négociations en cours, donc je ne veux pas discuter de la négociation. Je veux simplement vous citer deux documents, qu'on a déposés plus tôt cette année, qui montrent qu'il y a un problème qui va au-delà de la négociation avec les ressources intermédiaires et qui est celle de la réduction des budgets qui sont alloués pour répondre correctement aux besoins.

Alors, j'ai ici une lettre, une note de service du Centre intégré de santé et des services sociaux des Laurentides du 29 juillet 2015, où on dit, à la demande du sous-ministre, M. Fontaine : «On a des compressions à faire. Plus concrètement, pour la direction des programmes de la déficience intellectuelle et des troubles du spectre de l'autisme, la cible est de 2,4 millions de dollars à comprimer dans nos services. Il s'agit d'un peu plus de 2 % de notre budget. La réduction du nombre de postes d'encadrement n'est pas incluse dans cette tâche.» Il dit : Faites attention, là, ne comptez pas la réduction du nombre d'encadrements, parce que ça, c'est une autre cible qu'on doit satisfaire. «La situation est urgente, et les efforts supplémentaires demandés sont considérables.»

Donc là, on a un directeur qui écrit aux membres, personnel de la clientèle déficience intellectuelle, TSA, DP, et qui dit : Écoutez, là... Là, je ne vous parle pas des besoins de la population. Je vous dis qu'il faut couper 2 % de notre budget, sans compter les coupures administratives, O.K.? Alors, ça, je ne vois pas comment la ministre peut dire que c'est une gestion en fonction des besoins.

Et là il y a un effet de cascade, évidemment. On a ici une transcription verbatim d'une conversation entre des propriétaires de ressources intermédiaires et un directeur régional Santé mentale d'un CISSS, janvier 2015, et voici ce qu'il dit :

«Moi, j'ai un budget pour les ressources et je dois respecter ce budget-là. Ça, c'est clair, je ne peux pas le dépasser, ce qui fait en sorte qu'à un moment donné, ça peut arriver, de façon ponctuelle, que des clients ont plus de besoins puis que ça coûte plus cher sur une période, mais éventuellement il faut que ça finisse par s'équilibrer. On ne peut pas... les clients ne peuvent pas toujours être à la hausse, parce que, là, je vais défoncer mon budget. Puis moi, je dois respecter ce budget-là. Si je n'arrive pas à rentrer dans ce budget-là, c'est clair que je vais devoir prendre des mesures pour y arriver, je n'ai pas le choix.»

La ressource intermédiaire pose la question : «C'est quoi, vos mesures?» Réponse : «Ça va être de fermer des places, je n'aurai pas le choix. Il faut que j'arrive dans le budget.»

Bien là, M. le Président, là, c'est clair qu'on n'est pas en train de répondre aux besoins des citoyens, on est en train de répondre à des besoins budgétaires, et là on a une démonstration que les gestionnaires appliquent des compressions sans égard aux besoins et au-delà des compressions administratives.

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Ce que je peux dire au député de Rosemont, c'est que je vais m'enquérir de la situation, parce qu'il n'est pas supposé d'avoir de coupes de services dans les ressources intermédiaires. Il y a des ententes qui sont signées, il y a des contrats, puis il y en a qui ont déjà signé. Puis vous savez comment ça fonctionne, vous m'en avez déjà parlé. Il y a déjà des ressources qui ont déjà signé les ententes en ce moment, il y en a d'autres qui n'ont pas signé les ententes. Bref, c'est reconduit pour l'instant, mais il n'est pas supposé d'avoir de coupes de services dans les ressources intermédiaires et ressources de type familial.

Alors, moi, je vous demanderais, un, le dépôt de la lettre, deux, la conversation que vous avez. Si vous voulez me les déposer, je vais m'enquérir de la situation, parce qu'honnêtement ce n'est pas comme ça qu'on a demandé de l'optimisation, c'est en administration. Il n'est nullement question de couper des services à qui que ce soit. Alors, je vais m'enquérir de cette situation-là et vous revenir.

Le Président (M. Morin) : M. le député de Rosemont.

M. Lisée : Bon, M. le Président, je dois dire quelque chose, là. Moi, je suis le critique de la ministre, alors je suis très attentif à ce qu'elle dit, ce qu'elle écrit, ses communiqués. J'ai un service de recherche d'une personne, que je partage avec ma critique de la santé, et on essaie de ne rien manquer de ce que la ministre dit.

Ça, là, ce dont je viens de parler, là, je l'ai déposé aux journalistes dans une conférence de presse en février, en février. Je l'ai déposé, j'ai fait une conférence de presse, je l'ai lu. Si quelqu'un du bureau de la ministre nous avait demandé les documents, je les aurais donnés, évidemment. Et là je me rends compte qu'on ne suit pas — le 4 février — je me rends compte qu'il y a un problème de veille du côté de la ministre, parce que moi, si j'avais été à sa place et j'avais entendu dire ça, je dis : Aïe! Je veux avoir ça dans mes mains puis je veux appeler la personne qui a dit ça, mais, peut-être, M. Fontaine va pouvoir nous le dire. Alors, ça, c'est un problème.

Le même jour, j'ai déposé une évaluation. Encore là, je ne parle pas de la négociation avec les associations de ressources intermédiaires, je parle d'un sujet dont on a parlé une fois, lorsqu'elle m'a permis d'être présent dans une rencontre qu'elle a eue avec des gens des RI, de la déclassification. Alors, au-delà de la négociation, on sait que, dans une ressource intermédiaire — ça, c'est des maisons d'accueil pour des handicapés souvent lourds — bien, les handicapés sont codés en termes de difficulté, ils sont cotés d'un à six. Et là, c'est un peu bizarre, parce que, si le handicapé est à un degré de difficulté six, la personne qui l'héberge va être mieux rémunérée que si elle est cotée un. Alors, c'est un peu vicié, parce que la personne, si elle est six puis que la ressource intermédiaire travaille très bien, elle va aller mieux. Si elle va aller mieux, elle va être moins bien rémunérée, un problème vicié à la base dans ce système-là.

Mais là on a des cas où les techniciens qui viennent pour le CISSS dans une ressource intermédiaire, ils le font à chaque année, découvrent automatiquement que tous les patients dans une ressource intermédiaire vont mieux. En un jour, ils passent de la cote 6 à la cote 4, de la cote 4 à la cote 3, de la cote 2 à la cote 1, c'est miraculeux. Et donc, immédiatement, il y a une réduction de la rémunération. Dans le cas de la ressource pour laquelle j'avais l'évaluation, ils ont débarqué de 4 000 $ par mois, c'est la moitié de leur budget, fondé sur la classification. Et donc il y a un problème de déclassification administrative, c'est-à-dire que les gens qui reçoivent des lettres comme celle que je viens de citer, là, qui disent : Il faut que vous coupiez de 2 %, bien, comment on fait ça dans le réel? Dans le réel, on fait semblant que les gens sont moins malades, c'est une façon de le faire. Alors, est-ce que...

• (22 h 30) •

Le Président (M. Morin) : M. le député de Rosemont, si vous voulez que la ministre vous réponde...

M. Lisée : Oui, alors, juste, je termine.

Le Président (M. Morin) : Oui? Elle n'aura pas le temps.

M. Lisée : Depuis qu'on a sensibilisé la ministre à ce problème de déclassification systématique, est-ce qu'elle a enclenché une action quelconque?

Le Président (M. Morin) : Mme la ministre, en une minute.

Mme Charlebois : Mon Dieu! Il ne me reste pas beaucoup de temps pour répondre à autant de revendications. Pour ce qui est de la question du député de Rosemont, ce n'est pas parce que je ne lui réponds pas sur la place publique que je ne suis pas en action. Je veux juste lui dire qu'on a... Ça, c'est une nouvelle façon de faire aussi, on optimise tout le temps, on transforme le Québec, on transforme le réseau de la santé. Saviez-vous ça, M. le Président, qu'une fois par mois les deux ministres — et le ministre de la Santé et la ministre déléguée à la Réadaptation, Protection de la jeunesse, et Santé publique, et Saines habitudes de vie — rencontrent tous les gestionnaires du réseau et tous les P.D.G.? Ils sont assis autour... Tout le Québec est assis autour d'une table pour justement regarder qu'est-ce qu'on a à travailler puis comment on peut faire mieux.

Et, le 22 février 2016, j'ai adressé une recommandation aux dirigeants des réseaux en disant que l'optimisation ne devait pas se faire sur les services. Et j'ai dit la chose suivante : Aucune baisse significative des niveaux de services dans l'ensemble des établissements ne sera acceptée.

Alors, je demande encore une fois au député de Rosemont, qui multiplie ses conférences de presse puisqu'il est en manque d'attention... Il en fait je ne sais pas combien par semaine, ça fait que c'est sûr que ça devient, à un moment donné... En tout cas, je ne dirai pas le qualificatif...

Le Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, je n'ai pas fini, M. le Président, parce qu'il ne m'a pas...

Le Président (M. Morin) : Oui, mais c'est tout le temps qu'on a.

Mme Charlebois : ...il ne me laisse pas la chance de lui répondre.

Le Président (M. Morin) : C'est tout le temps qu'on a.

Mme Charlebois : Bien oui, il l'a tout pris pour lui.

Le Président (M. Morin) : Oui, vous aurez la chance sûrement de lui répondre.

Donc, je lève la séance, et les travaux de la commission sont ajournés au vendredi 22 avril 2016, à 9 h 30, où nous poursuivons l'étude de ces crédits budgétaires. Donc, à demain. Merci. Bonsoir, et bon retour, et bonne nuit.

(Fin de la séance à 22 h 32)

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