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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Monday, February 2, 2015 - Vol. 44 N° 13

Special consultations and public hearings on the draft revised Government Sustainable Development Strategy 2015–2020


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Table des matières

Auditions (suite)

Association des véhicules électriques du Québec (AVEQ)

Roulez électrique inc.

Le Groupe Performance Innovation Transport de FPInnovations (Le Groupe PIT de FPInnovations)

Institut du Nouveau Monde (INM)

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

Autres intervenants

M. Pierre Reid, président

M. David Heurtel

M. Sylvain Gaudreault

M. Claude Surprenant

M. Harold LeBel

M. Ghislain Bolduc

M. Guy Bourgeois

M. Donald Martel

*          M. Simon-Pierre Rioux, AVEQ

*          M. Pierre Langlois, idem

*          M. Michel Gélinas, idem

*          M. Sylvain Juteau, Roulez électrique inc.

*          M. Daniel Breton, idem

*          M. Yves Provencher, Le Groupe PIT de FPInnovations

*          M. Michel Venne, INM

*          Mme Françoise Bertrand, FCCQ

*          M. Dany Lemieux, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quatorze heures une minute)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir faire comme moi, éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires, ce que je vais faire à l'instant. Voilà qui est fait.

Alors, la commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de Stratégie gouvernementale de développement durable révisée 2015-2020.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Ouimet (Fabre) sera remplacé par M. Matte (Portneuf); M. Bérubé (Matane-Matapédia), par M. Lebel (Rimouski); et Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), par M. Surprenant (Groulx).

Auditions (suite)

Le Président (M. Reid) : Merci, Mme la secrétaire. Alors, voici l'ordre du jour. Cet après-midi, nous entendrons cinq groupes : l'Association des véhicules électriques du Québec, Roulez électrique, Le Groupe PIT de FPInnovations, l'Institut du Nouveau Monde et la Fédération des chambres de commerce du Québec. Alors, nous commençons donc par nos invités qui sont déjà installés, l'Association des véhicules électriques du Québec. Alors, je vous signale que vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Je vous donnerai un petit signal quand il restera une minute pour vous permettre d'atterrir, et nous allons procéder par la suite à un échange de 35 minutes avec les membres de la commission. Alors, je vous demanderais de vous présenter et de présenter les personnes qui vous accompagnent.

Association des véhicules électriques du Québec (AVEQ)

M. Rioux (Simon-Pierre) : Merci beaucoup, messieurs. Mon nom est Simon-Pierre Rioux. Je suis le président de l'Association des véhicules électriques du Québec. J'ai à mes côtés Michel Gélinas, vice-président, et Pierre Langlois, le délégué régional de la région de la Capitale-Nationale.

Donc, qui est l'AVEQ? Bien, nous sommes la plus grande association de véhicules électriques et de futurs consommateurs de véhicules électriques au Canada avec plus de 1 600 membres actifs. C'est un site spécialisé en électromobilité — le plus important au Canada encore une fois — avec plus de 3 millions d'accès en 20 mois. Nous sommes la référence numéro un des médias. Donc, lorsqu'il y a une question dans les médias au niveau des véhicules électriques, c'est nous qui répondons à ces questions-là des journalistes. Nous faisons beaucoup d'événements publics pour sensibiliser la population à travers le Québec. Donc, en résumé, nous connaissons l'électromobilité et ses besoins pour son évolution au Québec.

Aujourd'hui, on va vous parler vraiment de l'électrification des transports à travers nos yeux, à travers les yeux des consommateurs et des propriétaires, pour que vous puissiez comprendre les défis auxquels on a à faire face.

Premièrement, c'est que les Québécois ne sont pas sensibilisés, ils ne sont pas au courant qu'il y a des véhicules électriques qui sont disponibles sur le marché, qu'ils peuvent survenir à leurs besoins. Il y a beaucoup de désinformation de la part des médias, puis seuls les propriétaires présents des véhicules électriques sensibilisent via des essais routiers de leurs propres véhicules. Parce que, comme l'adage le dit, l'essayer, c'est l'adopter. Donc, on travaille très fort à ce niveau-là.

Deuxième point, c'est qu'il y a plusieurs manufacturiers qui offrent des véhicules électriques à l'extérieur du pays et de la province, sauf ici. Les concessionnaires n'ont pas d'inventaire. Les vendeurs, de peur de manquer une vente, vont rediriger le consommateur vers un véhicule à l'essence. Donc, on a pu le sensibiliser. Il va arriver chez le concessionnaire, puis on va perdre la vente, on va perdre un électromobiliste potentiel. Il y a peu de choix de véhicules. Puis ceux qui sont disponibles, ils ne sont pas toujours au goût des consommateurs aussi. Donc, il faut être capable de pallier à ce problème-là.

Troisième problématique, c'est que les particuliers ne savent pas qu'il y a un incitatif de 8 000 $ qui existe pour pallier au surcoût du véhicule électrique. Donc, la plupart des gens vont dire que c'est trop cher dès le départ sans faire le calcul d'utilisation. Les entreprises n'ont pas vraiment de programme spécifique pour les encourager à électrifier leur flotte. Donc, on parle de la livraison du dernier kilomètre. C'est important de penser à ça.

Quatrième problématique, c'est le circuit électrique d'Hydro-Québec qui dépend de partenaires pour croître. Puis ça, c'est un frein à l'électrification. Donc, il faudrait qu'on lui laisse un peu plus d'espace. Le MTQ a très peu participé à cette vision. Il n'y a aucun accès à la recharge aux édifices gouvernementaux et paragouvernementaux pour les employés, ils ne comptent pas dans le programme Branché au travail. Difficile pour les locataires et les propriétaires en condo d'installer une borne. Il faut penser à cette future génération, la population vieillit. Où est-ce qu'ils vont brancher leur voiture s'ils sont en condo? Il faut y penser, il y a un manque important de bornes rapides dans notre province.

Donc, les quatre cibles à fixer pour atteindre nos objectifs d'électrification, bien, c'est sensibiliser la population, puis c'est obtenir une meilleure disponibilité des véhicules électriques, améliorer les incitatifs financiers et sociaux, et améliorer les infrastructures. De quelle façon?

Bien, la sensibilisation, c'est l'éducation du public. Premièrement, il nous faut un programme provincial de sensibilisation à l'électromobilité, sensibiliser la population aux gaz à effet de serre et leur impact sur la santé puis les coûts du système de santé aussi. Il nous faut des kiosques publics où les consommateurs vont pouvoir discuter avec un expert des véhicules électriques. Au Québec, on vous a présenté déjà... l'Institut de l'évolution du transport vous a présenté le projet HERVE, qui est un peu calqué sur ce qui se fait déjà en Hollande. Ça fonctionne très bien en Europe. Je ne vous le présenterai pas au complet, mais c'est un des points où on pourra en parler par la suite. Même à Vancouver, il y a un programme qui s'appelle Emotive — émotion, mobilité — qui est là pour expliquer aux gens qu'est-ce que le véhicule électrique. On doit mettre de l'emphase là-dessus.

Il faudrait avoir des affiches distribuées aux concessionnaires sur le programme d'incitatifs du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles qui parlent qu'il y a un rabais gouvernemental de 8 000 $ à l'achat d'un véhicule électrique dans les vitrines des concessionnaires. Les gens vont entrer pour s'acheter un véhicule, ils vont voir 8 000 $ de rabais, ça va les inciter rapidement.

Il faudrait un calculateur officiel du gouvernement qui pourrait être mis à la disposition des vendeurs chez les concessionnaires, qui pourrait comparer un coût d'acquisition versus un coût mensuel d'utilisation sur la période d'achat ou de location, qui démontre les avantages financiers sur la période d'achat ou de location.

Puis aussi il faudrait avoir des brochures gouvernementales chez les concessionnaires pour, encore là, démontrer que le gouvernement est actif, il veut l'électrification des transports et il est présent là où les véhicules se vendent.

Il faudrait aussi une visibilité des véhicules électriques grâce à leur utilisation par les municipalités, par les élus, où ces véhicules sont clairement identifiés avec le logo de la voiture électrique, qu'on voit en vert ici, qui a été créé par le Bureau de l'efficacité énergétique. Il faudrait les identifier parce que les gens ne reconnaissent pas toujours qu'est-ce qu'un véhicule électrique parmi la flotte disponible sur nos routes.

La deuxième chose, c'est la disponibilité des véhicules électriques. Il faut augmenter l'inventaire des véhicules électriques, des concessionnaires et leur nombre, des manufacturiers. Donc, il y a certains véhicules électriques qui sont disponibles à l'extérieur du Québec. On va penser à Volkswagen, par exemple, qui ont la e-Up, ils ont la e-Golf, la Golf électrique. C'est un véhicule très populaire, la Golf à essence. On ne l'a pas au Québec, pourquoi? On a demandé à Volkswagen Canada, ce n'est pas dans leurs plans présentement, le Québec n'est pas une priorité. Il faudrait peut-être leur prouver qu'on est une priorité, que le gouvernement dépense beaucoup d'argent pour les infrastructures, pour les incitatifs, on veut que ça arrive. Peut-être qu'une Mitsubishi va moins plaire à un consommateur, mais la Golf va lui plaire. Il faut penser à ces choses-là.

Donc, la loi zéro émission, pour une de ces raisons, est nécessaire au Québec. C'est souligné, c'est important, il faut s'y attarder. Comment le faire? Bien, il faudrait l'établir à travers la bourse du carbone qu'on a déjà entre la Californie et le Québec, et on espère aussi que l'Ontario va s'y joindre. On doit encourager l'électrification, et non les piles à hydrogène. Donc, cette loi zéro émission doit s'appliquer strictement aux véhicules entièrement électriques ou aux véhicules hybrides rechargeables avec une pile d'une certaine grosseur. On a déjà discuté que l'hydrogène n'est pas d'avenir pour le Québec, c'est un frein présentement au développement d'autres avantages des batteries qui s'en viennent, haute définition. Donc, on aimerait qu'on se concentre sur nos avantages avec l'hydroélectricité.

• (14 h 10) •

Il faudrait qu'il y ait un inventaire de 90 jours chez les concessionnaires, comme pour tous les véhicules d'ailleurs. Et une des choses qui est importante, c'est qu'il faut éviter de forcer les concessionnaires à faire des achats groupés. Ça, vous n'êtes peut-être pas au courant, c'est quoi. Mais un achat groupé, c'est que, si je veux une Volt dans ma concession, bien, je dois acheter un Yukon, je dois acheter un Escalade, je dois acheter différents véhicules de GM, puis, dans le groupe, je peux avoir une Volt. Donc, à chaque fois que je veux cinq, 10 Volt, il faut que j'achète tous les autres véhicules. Puis ça, ça s'appelle un achat groupé, puis ça arrive chez les concessions, puis il faudrait que les véhicules électriques n'embarquent pas dans ce système-là puis que le concessionnaire puisse en acheter tant qu'il veut sans les avoir groupés. Très important.

Troisième point, les incitatifs financiers et sociaux. Donc, les incitatifs qu'on a présentement de 8 000 $ à l'achat ou à la location d'un véhicule électrique, bien, ils viennent à échéance le 31 décembre 2016. Il ne faut pas une date, ce n'est pas la bonne façon de faire, il faut un nombre de véhicules électriques sur nos routes. On envisage 1 % des véhicules qui soient électrifiés, ça veut dire qu'il faut viser pour 50 000 véhicules électriques. Ça veut dire qu'il faut viser, pour un budget qui va sortir du Fonds vert qui va équivaloir à 50 000 véhicules électriques, un incitatif de 8 000 $ chacun. Avec les augmentations qu'il y a sur la taxe sur l'essence pour le Fonds vert, qu'il y a eu en janvier, qu'il va y avoir dans les prochaines années, ça comble facilement ces chiffres-là.

Aussi, il faudrait penser au gouvernement, 10 % du parc des véhicules du gouvernement qui serait à électrifier. Mettre des incitatifs pour les entreprises — on les oublie toujours — pour qu'ils puissent viser, eux aussi, 10 % de leur flotte automobile et de livraison. Ça se fait déjà à Vancouver, puis ça fonctionne très bien. On voit des véhicules même de Postes Canada, de Federal Express, de Frito-Lay, de Pepsi qui sont électrifiés. Pourquoi pas au Québec? Qu'est-ce qui nous empêche de les avoir?

Il faudrait avoir un incitatif social comme les accès aux voies réservées, des stationnements gratuits. Donc, s'il y a une borne sur rue, bien, qu'on offre le stationnement gratuit aussi. Des péages gratuits. Donc, c'est des mesures incitatives sociales qui vont aider. Il y a des gens qui n'ont pas besoin... le 8 000 $, ça va moins les inciter, mais le fait qu'ils vont pouvoir aller plus rapidement au travail, ça, ça va être beaucoup plus important pour eux. C'est des mesures incitatives qui sont temporaires aussi dans le temps. Et puis continuer les incitatifs et programme Branché au travail

Le dernier point, c'est les infrastructures, l'électrification des corridors routiers financée par le MTQ; des bornes aux entreprises, qu'on puisse faire autant le 240 volts que les bornes rapides; des bornes dans les condos et aussi les bornes rapides, il faut penser à une tarification particulière d'Hydro-Québec. Résumer en...

Le Président (M. Reid) : ...alors, si vous voulez vous arrêter, peut-être qu'on aura l'occasion de... en répondant à des questions dans les échanges.

M. Rioux (Simon-Pierre) : Très bien.

Le Président (M. Reid) : Alors, nous allons commencer les échanges avec M. le ministre.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour. Merci pour votre mémoire ainsi que votre présentation. Puis je suis sûr que vous pourrez conclure dans les questions que je vais poser, n'ayez crainte. Premièrement, juste nous placer quand même dans le contexte dans lequel nous sommes. On regarde la stratégie gouvernementale de développement durable, comment l'améliorer, comment améliorer le projet qui est devant nous, comment bonifier. Et ça vise principalement l'action gouvernementale, donc les quelque 122 ministères et organismes gouvernementaux qui sont visés spécifiquement par la stratégie. Ça ne veut pas dire, évidemment, qu'on ne veut pas regarder à l'extérieur puis quelles actions le gouvernement... allant vers la population, allant vers l'entreprise, vers la société civile, on peut le faire.

Moi, j'aimerais ça, essayer de ramener vos quatre points à l'intérieur du giron gouvernemental, voir, par exemple, quand on parle de sensibilisation dans un contexte de lutte contre les changements climatiques... De votre point de vue, je crois que c'est évident que l'électrification des transports... Puis le gouvernement l'a déjà dit, ça fait depuis 2011 qu'on le dit, et même avant, à quel point c'est fondamental dans la lutte contre les changements climatiques, mais, de votre point de vue, à quel point faut-il intégrer dans la stratégie de développement durable du gouvernement l'importance de l'électrification des transports dans l'action gouvernementale et, plus particulièrement, la nécessité de mieux communiquer, de plus faire encore pour éduquer, faire de la pédagogie, s'assurer que l'ensemble de la communication gouvernementale traduise l'action en matière de lutte contre les changements climatiques et, plus particulièrement, en matière d'électrification des transports, que vous visez?

M. Rioux (Simon-Pierre) : Bien, pour nous, c'est important, très important même, c'est le point principal, c'est la sensibilisation. Si les gens ne sont pas au courant, ils n'iront pas pour chercher un véhicule électrique. On doit être capable d'orienter les gens, on doit être capable de fournir cette information-là parce que ce n'est pas à travers des petits organismes que les gens vont avoir cet éclair de génie qui va venir vers eux en se disant : Bien, oui, finalement, l'électrification des transports, il y a un avantage pour notre société au niveau de la diminution des gaz à effet de serre, il y a une importance majeure au niveau de la diminution des coûts de santé. Il faut être capable de mieux éduquer la population puis éduquer même les gens du gouvernement, que les élus et les gens qui travaillent pour le peuple puissent montrer l'exemple à la population.

Donc, une des choses que certaines personnes ont faite, dont vous, bien, c'était se procurer un véhicule électrique. Il y a déjà des véhicules qui sont disponibles à travers le CGER, mais il faudrait peut-être qu'il y ait d'autres gens aussi qui soient au courant de ça. Parce qu'à l'intérieur du gouvernement je ne crois pas que c'est très connu, sinon il y a des gens qui auraient déjà sauté sur tous les véhicules qui ont été achetés, et il y en a qui traînent dans la cour.

M. Heurtel : D'ailleurs, merci beaucoup d'avoir participé, justement, à l'annonce d'aujourd'hui. Je suis justement très fier, justement, comme ministre, d'utiliser un véhicule électrique branchable, et en espérant, justement, que c'est un petit geste vers une exemplarité de l'État dans ce domaine-là. Mais justement, si on va plus loin au niveau de cette exemplarité-là, si je vous lance l'idée, bon, qu'il faut modifier les politiques d'achat du gouvernement, qu'il faut s'assurer, justement, que ce soit en matière d'appels d'offres ou en matière d'achat d'équipement, il doive y avoir un geste véritablement affirmatif vers le véhicule électrique, vous dites quoi à ça?

M. Rioux (Simon-Pierre) : Bien, à ce niveau-là, il faut toujours regarder les besoins de chacun des gouvernements. On pourrait dire : Bon, bien, ça s'applique seulement aux voitures parce que c'est ce qu'il y a chez les concessionnaires. Il faut être capable de regarder un petit peu à l'extérieur de ça. Présentement, le gros du dollar de l'électrification des transports en Amérique du Nord n'est pas sur les véhicules des particuliers, c'est sur les flottes. C'est sur des flottes de livraison, ça va être sur les camionnettes, ça va être sur différentes choses. Et puis les utilités comme Hydro-Québec, mais dans différents États et dans différents pays, s'associent souvent avec des compagnies qui font l'électrification des véhicules. On a déjà un exemple avec le MTQ, qui s'est associé dernièrement avec l'ETS, l'École de technologie supérieure, à Montréal pour prendre des anciennes camionnettes et puis les électrifier, enlever le moteur, enlever le groupe motopropulseur et les électrifier.

Maintenant, qu'est-ce qui doit être fait directement, je pense, c'est ce qui est déjà fait en projet pilote, mais il faut être capable de le pousser un peu plus loin. Donc, il faut regarder, comme je le mentionne, les besoins des gouvernements puis des individus qui vont utiliser ces véhicules-là. Donc, on peut avoir un pourcentage de flotte qui va osciller entre le véhicule entièrement électrique et puis le véhicule hybride rechargeable. Puis ce n'est pas seulement pour des déplacements de courtoisie, mais aussi c'est pour l'utilité. On va regarder les municipalités, qui auraient fort à gagner, pour les transports des élus, d'avoir des voitures, mais aussi, pour les voiries, d'avoir des camionnettes électriques. On pense, par exemple, à des véhicules qui sont disponibles présentement où on peut même brancher du 240 volts sur le véhicule puis faire des travaux sur place. À la place de prendre, par exemple, un banc de parc qui est brisé puis de le ramener à l'atelier, le réparer, le ramener sur place et l'installer, on pourrait tout faire directement sur place en branchant une soudeuse sur le camion. Donc, le véhicule qui est électrifié peut subvenir à des nouveaux besoins qu'on n'aurait peut-être pas anticipés aussi. Donc, c'est vers ça que je penche pour les municipalités.

Puis je pense que vous, vous vous adressez directement à ce que le gouvernement doit faire, mais je pense que le gouvernement doit encourager les autres aussi, et non pas s'encourager lui-même. On parle d'un 10 % sur quelques milliers de véhicules, alors qu'en encourageant le particulier on parle de dizaines de milliers de véhicules sur des millions. Il faut essayer de voir un peu où est le plus gros chiffre puis quoi influencer.

• (14 h 20) •

M. Heurtel : Sur la loi zéro émission, j'aimerais vous entendre parce que plusieurs en ont parlé durant nos travaux, plusieurs groupes, et on n'a pas tout à fait le même son de cloche, dépendant à qui on parle. Il y en a qui sont pour, il y en a qui sont contre, il y en a qui ne savent pas trop. De votre point de vue... J'aimerais ça, avoir votre impression sur pourquoi, justement, il y a une opposition à la loi zéro émission. De votre point de vue, vous, vous êtes clairement pour, on comprend pourquoi vous l'êtes, vous l'expliquez bien, mais c'est quoi, l'argumentaire qui fait en sorte qu'on n'y est pas encore? Pourquoi, selon vous, on n'y est pas?

M. Rioux (Simon-Pierre) : C'est très simple. Avant d'avoir des relations avec les manufacturiers puis avec les responsables des relations gouvernementales de ces manufacturiers-là, moi non plus, je ne croyais pas vraiment que la loi zéro émission était nécessaire. J'avais l'impression que les manufacturiers allaient de leur gré... parce qu'ils voyaient un potentiel au niveau des ventes d'amener les véhicules au Québec. Je croyais que c'était vraiment évident, on a une électrification... 50 % des véhicules se vendent dans notre province, puis le reste se vend à l'extérieur de notre province, dans le Canada. Donc, pourquoi il y aurait un frein comme ça? Bien, c'est en parlant aux responsables des manufacturiers que j'ai eu cet éclair-là, il n'y a aucun incitatif, pour eux, financier L'incitatif le plus important pour eux, ce n'est pas la vente du véhicule, c'est les crédits de carbone qu'il y a en Californie. Ils vont toujours essayer de remplir la demande parce que c'est beaucoup plus intéressant pour eux... Et c'est même plus intéressant pour Tesla, Tesla qui font le gros de leur argent pas sur la vente du véhicule, mais sur ces crédits de carbone là. Puis, si on n'offre pas... puis on ne travaille pas avec la bourse du carbone en échange avec la Californie, ça ne fonctionnera jamais.

Et ce qui a été évident aussi, c'était dans les derniers travaux de la commission sur la pollution — je ne me souviens plus du nom — en Californie... le CARB...

Une voix : ...

M. Rioux (Simon-Pierre) : ...C-A-R-B. Eux, ce qu'ils ont découvert, c'est qu'il y avait d'autres États qui avaient signé, c'étaient des cosignataires. Il y avait le Vermont, New Hampshire, New York, etc. Et puis il y a un des États qui a levé sa main, il a dit : C'est incroyable, je suis content d'avoir été invité en Californie, je vois des véhicules qui ne sont même pas disponibles dans notre État, et pourtant on a signé cette loi zéro émission. Mais c'est qu'il n'y a pas de collaboration avec le marché du carbone. Donc, on pourrait avoir une loi zéro émission, mais, s'il n'y a pas un incitatif pour le manufacturier ou que ça soit un malus... bien, dans ce temps-là, on n'aura absolument aucun poids, aucun poids. Il faut vraiment être capable de comprendre ça et puis d'appliquer les choses proprement faites pour qu'on puisse avoir cet impact-là, pour que les véhicules puissent arriver, pour qu'on puisse avoir des modèles qui vont plaire aux consommateurs, qui vont être utilisés... Même les gens du gouvernement, vous avez eu de la difficulté à vous trouver un véhicule qui pouvait remplir à vos demandes... à vos besoins et qui puisse être entièrement électrique, on n'en a pas trouvé. Il y en a ailleurs. Désolé, il y en a ailleurs, mais on n'a pas pu les apporter parce qu'on n'a pas de loi zéro émission. Donc, il va falloir attendre très longtemps.

J'ai parlé à Hyundai Canada dernièrement. Je leur ai demandé : Ah! c'est... Je leur ai dit : C'est super, vous amenez certains de vos véhicules électriques au Canada. Ils ont dit : Bien, malheureusement, le marché canadien n'est pas une priorité parce qu'il n'y a pas vraiment d'intérêt. Pourquoi il n'y a pas d'intérêt? C'est pas d'intérêt de leur part parce qu'ils n'ont rien à gagner. Ils aiment mieux amener ces véhicules-là directement à un endroit où ils vont avoir un échange, où ça va les aider à subvenir au marché du carbone. Puis j'espère que vous comprenez c'est quoi, le marché du carbone, où on va donner des crédits à ceux qui offrent des véhicules qui sont non polluants. Et ceux qui ont des véhicules polluants, bien, on va leur enlever des crédits ou il faut qu'ils aillent acheter des crédits à ceux qui en ont, point à la ligne. C'est un échange qui se fait.

M. Heurtel : Alors, si je vous suis bien, pour qu'une loi zéro émissionait du succès au Québec, il faut absolument que ça soit lié à une certaine forme de bonus-malus.

M. Rioux (Simon-Pierre) : Oui.

M. Heurtel : On ne peut pas, tout simplement, adapter une loi qui s'inspirerait de la législation californienne, qui, elle, a inspiré déjà, là, huit ou neuf autres États aux États-Unis?

M. Rioux (Simon-Pierre) : Elle les a inspirés, mais il n'y a pas ce lien-là au niveau des échanges de crédits de carbone. C'est simplement ça. Donc, si on est capables d'avoir ça, si on est capables de se rallier avec des provinces qui, en ce moment, avec leur gouvernement, sont très... On parle du gouvernement de Kathleen Wynne en Ontario, puis on parle du Nouveau-Brunswick puis de la Nouvelle-Écosse aussi qui sont émergents en ce moment, ils commencent à comprendre c'est quoi puis ils mettent beaucoup d'incitatifs, d'emphase, surtout... désolé, d'emphase pour 2015-2016, ont un peu de retard, mais ils veulent essayer de rattraper le retard. Je pense que, si on peut se rallier avec ces provinces-là puis travailler de concert avec eux, on va avoir un poids beaucoup plus important. Donc, il faut travailler... on ne peut pas faire ça tout seul. On a la Californie avec nous, il faut bien travailler avec la Californie. La Californie, déjà, est en train d'offrir des crédits de carbone plus importants pour des véhicules hydrogène, mais le besoin en infrastructures est tellement coûteux...

Puis, juste pour que vous compreniez c'est quoi, un incitatif au niveau des infrastructures, si on achète une pompe à essence, c'est 13 000 $. On achète une borne de recharge haute vitesse, c'est 30 000 $. On achète une borne à hydrogène pour remplir un véhicule à hydrogène, c'est 1 million. C'est énormément d'argent. Donc, on est mieux de s'orienter vers des technologies qui sont disponibles, qui sont en train de grandement s'améliorer puis qui offrent le meilleur aspect au niveau de la diminution des gaz à effet de serre. Parce que, si on veut utiliser de l'hydrogène, ça utilise 40 litres d'eau par 1,6 kilomètre de parcouru, alors que même l'essence va utiliser 4 litres d'eau par 1,6 kilomètre de parcouru, et l'électricité, bien, ça fait tourner des turbines.

M. Heurtel : Pour terminer, il reste, quoi, à peine deux minutes, votre dernier point, sur les infrastructures, j'aimerais ça, vous entendre davantage sur... Parce que vous l'avez effleuré dans votre présentation, là, je voudrais, rapidement, là, vous permettre d'approfondir votre point sur les infrastructures, surtout quand vous parlez du ministère des Transports, de la RBQ.

M. Rioux (Simon-Pierre) : Dans les infrastructures, on parle des bornes qui vont être disponibles autant pour des condos, donc il faudrait changer certains des règlements pour la Régie du bâtiment. On peut s'inspirer d'un des règlements de Novoclimat 2.0 qui offre, justement, cette certification-là en installant l'infrastructure ou la possibilité de créer cette infrastructure-là en passant des fils directement, oui, en créant cette facilité-là. Donc, ça, c'est important.

Au niveau du ministère des Transports du Québec, la chose qui est importante, c'est qu'il puisse devenir un partenaire d'Hydro-Québec. Ce n'est pas juste à St-Hubert ou à l'AMT de devenir partenaires d'Hydro-Québec et son circuit électrique, c'est le MTQ aussi qui doit devenir un partenaire, un partenaire sérieux qui va faire plus qu'un projet pilote sur l'autoroute 40, mais qui va vraiment s'y investir. Parce que ça retombe sur le gouvernement. S'il y a une demande parce qu'on a sensibilisé, s'il y a une disponibilité des véhicules, puis les gens ont acheté ces véhicules-là, mais il n'y a aucun endroit pour aller se recharger... Ou ils veulent faire le Montréal-Québec, comme j'ai fait, aujourd'hui en me rendant ici, bien, on a besoin d'infrastructures, on a besoin que les gens puissent recharger, puissent se sentir en sécurité et que ça devienne juste une seconde nature, comme ça l'est avec une pompe à essence.

Donc, c'est ça. Les quatre cibles, c'était que le consommateur, on le sensibilise qu'il y a des véhicules efficaces au Québec qui peuvent remplir les bonnes fonctions; une fois qu'il est convaincu, il peut en retrouver chez les concessionnaires; il ne doit pas être découragé par le surcoût parce qu'il y a un incitatif de 8 000 $...

Le Président (M. Reid) : Merci.

M. Rioux (Simon-Pierre) : ...qui continue; et puis qu'on puisse recharger à la maison, au travail, au condo ou sur les autoroutes.

Le Président (M. Reid) : Merci. Nous allons maintenant passer au bloc de l'opposition officielle, avec le porte-parole, M. le député de Jonquière.

• (14 h 30) •

M. Gaudreault : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue à cette commission. Ça me fait plaisir de vous entendre. Je vais avoir, évidemment, plusieurs, plusieurs questions.

Je veux juste revenir sur ce que vous avez dit avec le ministre concernant la loi zéro émission, dont vous parlez à la page 13 de votre mémoire. Vous l'associez de façon intrinsèque, je dirais, au marché du carbone. Vous avez fait référence à un genre de malus, autrement dit, relié à l'échange de crédits carbone, mais, pour vous, est-ce qu'il faut faire un pas de plus et aussi avoir un bonus-malus pour les consommateurs comme tels, comme il y a en France, là? Vous connaissez le principe du bonus-malus, là.

M. Rioux (Simon-Pierre) : C'est très certainement souhaitable. C'est très certainement souhaitable. Maintenant, est-ce qu'on veut commencer à diriger de force les consommateurs? C'est toujours une question qui est sensible. Je ne suis pas la personne qui est là pour vous influencer à ce niveau-là, mais ce qui a été fait dans le passé puis dans d'autres pays fonctionne très bien. Puis est-ce que ça va faire que certaines des ventes vont être faites à l'extérieur de la province à cause qu'il y a des gens qui ne sont pas d'accord avec ça parce que les véhicules vont se vendre plus cher? Que ça soit au niveau de l'essence ou que ça soit au niveau du véhicule, bien, ce qu'on a remarqué en Norvège puis les gens qui sont sur la frontière Norvège-Suède, où les... tout est moins cher en Suède, de toute façon, c'est que non, les véhicules sont enregistrés dans le pays, et ils ne sont pas achetés à l'extérieur, il n'y a pas de transfert qui se fait. Les gens le font. Au début, il y a eu une grogne, mais, par la suite, en ayant tous les autres avantages sociaux — on parlait des péages, etc. — dans ce temps-là ils ont un intérêt, puis, je pense, 55 % de toutes les familles qui ont deux véhicules et plus ont un véhicule électrique. Donc, ça rentre tout de suite dans les moeurs. Ça se vend très rapidement, ils sont en avance sur leur programme. Ils vont être obligés de l'arrêter dans quelques mois parce que ça a trop bien fonctionné.

M. Gaudreault : ...bonus-malus.

M. Rioux (Simon-Pierre) : Pour bonus-malus avec des incitatifs financiers et des incitatifs sociaux.

M. Gaudreault : J'aimerais ça, vous entendre un peu par rapport à la conjoncture, je dirais... Parce qu'on est en train de travailler sur une stratégie 2015-2020, on a une conjoncture économique avec un prix du pétrole et un prix de l'essence à la pompe qui est plutôt bas. Et je vois M. Langlois hocher du bonnet, là, est-ce que vous avez une... c'est quoi, votre perspective? Comment vous pensez qu'on doit se positionner dans la stratégie 2015-2020? Considérant ce qui se passe présentement sur les marchés internationaux de pétrole, ça sera quoi, l'impact sur les véhicules électriques?

M. Rioux (Simon-Pierre) : Bien, présentement, on le sait tous, c'est temporaire. C'est une guerre de prix, c'est géopolitique. Ça va peut-être durer quelques mois, peut-être un an. Est-ce que ça a un impact sur les ventes de véhicules électriques? C'est là où la sensibilisation est importante parce qu'aussitôt que... J'ai eu à parler à des journalistes qui me disaient : Ah! le prix de l'essence a baissé, ça va être la mort des véhicules électriques, hein? Qu'est-ce que vous avez à dire là-dessus? Bien, ce que j'ai à leur dire là-dessus, c'est que ça me coûte quand même juste 250 $ d'électricité pour faire rouler mon auto électrique pendant un an sur 20 000 kilomètres, alors que, si j'ai un véhicule à essence, avant ça me coûtait 2 500, là, avec la superbe baisse, ça me coûte 2 000 $. Donc, est-ce que je suis affecté par ça? On parle de 250 $ d'électricité. Mesdames et messieurs, excusez-moi, mais c'est mort dans l'oeuf, ça, là. Ce n'est pas un problème, il faut l'expliquer clairement. Si c'est clairement expliqué, les gens vont voir tout de suite la logique. La journaliste financière du Canal Argent à qui j'en ai parlé a changé son ton complètement et a fait un reportage extrêmement positif là-dessus parce qu'elle se disait : Mais c'est extraordinaire, les ventes devraient décoller au Québec. Pourquoi? Pourquoi? Bien, parce qu'on n'en parle pas assez, parce que les gens ne sont pas éduqués. On retourne au point numéro un, la sensibilisation.

M. Gaudreault : On va aller chercher l'extrait que vous venez de faire, là, puis on va le faire rouler sur les réseaux sociaux en viral. Je voudrais vous entendre aussi sur... Ah oui! M. Langlois, allez-y, oui.

M. Langlois (Pierre) : Oui, je voulais dire un mot. En Californie, l'essence est beaucoup moins chère qu'au Québec, et l'électricité est plus chère, puis ça fonctionne quand même. Donc, le rapport qu'on a ici est encore favorable pour le Québec. Il ne faut pas penser, parce que l'essence est à 1 $ le litre, que ça ne fonctionnera pas. En Californie, je pense qu'elle est rendue à 0,75 $, je ne me souviens plus. L'électricité, c'est 0,15 $ le kilowattheure. Je me trompe peut-être, là, j'avais déjà regardé. Ici, on est à 0,085 $, taxes incluses. En tout cas, moi, c'est ce que je paie, les derniers kilowattheures. C'est rentable quand même, là, de beaucoup, de beaucoup, de beaucoup. Alors, il faudrait comparer un petit peu avec ça, puis ça nous aide à comprendre.

M. Gaudreault : Je voulais vous entendre concernant les régions. Vous avez parlé tout à l'heure qu'un des éléments importants de la sensibilisation pour que les consommateurs embarquent dans le produit, il faut, au fond, qu'ils ne sentent pas une grande différence par rapport à ce qu'ils achètent présentement, qu'il y ait un sentiment de sécurité, qu'il y ait autant de bornes rapides disponibles sur la route qu'il y a de stations-services à l'heure actuelle. J'aimerais ça, vous entendre un peu plus sur les régions parce que, juste avant que je prenne la parole, à votre dernière réponse au ministre, vous disiez : Il faut qu'il y ait des bornes le long des autoroutes, et qu'est-ce que vous faites des régions où, par exemple, il y a des travailleurs autonomes qui ont besoin de la F-150 pour aller dans la forêt parce que c'est des travailleurs forestiers qui sont à contrat avec des compagnies forestières, pour convaincre le député de Rimouski de s'acheter un véhicule électrique...

Une voix : Trois heures de route.

M. Gaudreault : ... — trois heures de route — le député de Jonquière, qui en a deux? Bon, là, je joue l'avocat du diable. Alors, qu'est-ce que vous avez à dire aux gens des régions?

Puis j'ai vu aussi, dans votre page 16 de votre mémoire, vous parlez d'élargir aux municipalités... en tout cas, de faire participer les municipalités, là, à l'électrification. J'essaie juste de retrouver ce que vous proposez exactement. Le n° 11 à la page 16 : «S'assurer qu'une politique municipale est en place via l'UMQ...» Il faudrait penser à la FQM aussi, qui représente plus les municipalités rurales. Alors, je voudrais vous entendre sur cette réalité-là du territoire.

M. Gélinas (Michel) : Bonjour. Au niveau des bornes de recharge rapides, je vous entendais mentionner qu'éventuellement... C'est une croyance populaire aussi qu'on dirait que les bornes rapides, ça en prendrait autant que des stations d'essence. Alors, ça, c'est un point qu'on veut clarifier. En partant, on veut informer les gens de ça. Une borne de recharge, ce n'est pas une station de service, ça n'a pas les mêmes fonctions. En partie, mais pas complètement, à savoir que le plus gros des recharges d'une voiture électrique, comme tous les conducteurs automobiles électriques le savent, c'est à la maison que ça se passe et dans notre environnement immédiat. Donc, on ne va pas quelque part pour mettre du courant. On se lève le matin, la voiture est pleine toujours, toujours.

Donc, les bornes de recharge rapides servent au niveau des autoroutes pour se déplacer sur des longues distances. Mais, une fois qu'on a atteint la région qu'on veut aller, on va continuer avec des bornes normales aux commerces où on allait, à l'hôtel où on allait, chez les commerçants qu'on allait et les partenaires d'affaires. Alors, des bornes rapides, ça en prend à des endroits stratégiques, mais pas autant qu'on pourrait penser parce que ça peut couvrir une très, très grande distance. On peut se promener d'une région à l'autre, et ces régions-là sont souvent déjà approvisionnées en bornes qu'on appelle de niveau 2, des bornes de 220 volts, contrairement à des bornes rapides. Alors, voilà, c'était pour mettre... faire un...

M. Rioux (Simon-Pierre) : Et une des choses aussi pour l'électrification des régions, on parle d'un F-150. Bien, il y a une compagnie qui s'appelle Via Motors qui offre un véhicule qui est hybride rechargeable, qui va faire comme une Volt, une Chevrolet Volt, 60 kilomètres tout électrique, qui a sa génératrice, donc, comme j'ai mentionné tout à l'heure, pour pouvoir alimenter des outils électriques, une soudeuse, etc. Le véhicule va fonctionner à l'essence par la suite puis va quand même avoir une consommation de peut-être 1,5 litre par 100 kilomètres parce que, lorsqu'il est utilisé à l'intérieur du périmètre de la municipalité, le 60 kilomètres... Puis, pendant l'heure du dîner, ils vont se recharger. Ils peuvent se recharger à haute vitesse sur des bornes haute vitesse. Donc, tout ça fait que ce n'est pas vraiment un frein. Les véhicules sont là, il faut être capable de les amener dans notre province pour pouvoir les utiliser.

Les gens qui ont, justement, à faire beaucoup de voyagement, bien, souvent ont deux véhicules. Donc, si vous êtes une de ces familles qui ont deux véhicules, vous pouvez quand même avoir un véhicule qui est hybride rechargeable, qui va avoir une pile pour se promener pendant une distance restreinte, mais, par la suite, va utiliser de l'essence. Vous allez utiliser ce véhicule-là surtout dans votre région, vous allez rouler certainement surtout à l'électricité. Puis, lorsque vous allez faire des plus longues distances, vous roulez à l'essence. Donc, c'est un «stopgap», c'est une façon de faire pour le moment jusqu'à temps que les technologies se rattrapent puis qu'il y ait des piles haute définition qui puissent être offertes. Sinon, pour le deuxième véhicule, bien, c'est un véhicule entièrement électrique qui va faire environ 160 kilomètres sur une charge.

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons passer maintenant au porte-parole du deuxième groupe d'opposition, donc au député de Groulx? Député de Groulx.

• (14 h 40) •

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Alors, selon moi, les trois items qui pourraient encourager l'utilisation des véhicules électriques, là, les trois éléments clés, c'est le coût, l'autonomie, également il y aurait besoin, d'après moi, d'une démonstration, là, des gouvernements... en fait, de la visibilité au parc électrique, de montrer aux gens que ça se fait, c'est simple, pas compliqué.

Alors donc, au niveau des coûts, j'ai une expression, là, le «payback», le retour sur l'investissement, je pense qu'actuellement il y a beaucoup de gens qui ne vont pas vers le véhicule électrique parce qu'ils considèrent qu'il n'y a pas de retour suffisant, c'est encore trop cher, les véhicules électriques, par rapport aux véhicules à essence. Alors, est-ce que vous considérez que le Fonds vert, en fait, devrait être plus mis à contribution pour réduire l'écart de coût entre l'acquisition d'un véhicule électrique et l'acquisition d'un véhicule à essence? Donc, est-ce qu'on devrait être plus agressif au niveau des incitatifs fiscaux ou des subventions?

M. Rioux (Simon-Pierre) : Un des points qu'on a mis de l'avant dans mémoire, c'était le fait que oui, on peut avoir l'incitatif de 8 000 $ du gouvernement, mais on pourrait aussi avoir un congé sur la taxe de vente provinciale. C'est un petit montant, mais qui s'accumule, qui va être quand même un gros incitatif. Donc, on peut arriver à un 10 000 $ avec ça. Là, ça devient très intéressant. Là, on arrive à un point comme dans l'État de Géorgie où ils ont 7 500 $ du fédéral puis ils ont un 5 000 $ du provincial. Ça fait un gros montant en bout de ligne, et c'est un marché en ébullition aux États-Unis. On regarde les incitatifs qu'on a autant en Chine qu'en Europe, c'est des gros incitatifs, puis les gens changent très rapidement à ce niveau-là. Nous, on avait calculé qu'en enlevant la taxe de vente provinciale ce serait un très petit manque à gagner qui va être récupéré par la suite dans la vente d'électricité et le retour de cet argent-là qui est économisé parce que, là, on ne prend plus de l'argent qui va acheter de l'essence, qui va sortir du pays, l'argent reste toujours. On va faire travailler les gens, on va l'économiser, mais ça va être réutilisé par la suite, de toute façon. On a quand même un potentiel de 14 milliards de dollars à garder dans notre province, c'est énorme.

Ça fait que le petit 2 000 $ que vous allez avoir sur 50 000 véhicules, là, il va être retrouvé très rapidement. Puis je pense que ça, ce n'est pas seulement un retour sur l'investissement pour le consommateur, mais c'est pour le gouvernement aussi, qui représente le peuple. Donc, il faut être capable de voir «the big picture » à ce niveau-là.

M. Surprenant : Mon deuxième point, c'est au niveau de l'autonomie. Actuellement, là, il y a... Bon, d'abord, il y a 300 000 véhicules sur les routes. Et puis l'objectif était de 300 000 véhicules, on est rendu à 7 200. Donc, il va augmenter beaucoup ça, puis je pense que la crainte des gens, c'est l'autonomie au niveau des véhicules électriques. Alors là, il y a une implantation qui se fait de bornes, là, de 240 volts, 360, selon vos chiffres, où on est rendu à peu près actuellement, et puis il y a le projet pilote de huit de 400 volts.

Donc, vous dites dans vos documents que, pour les gens, c'est important de ne pas perdre de temps lors de la recharge du véhicule électrique. Même le 400 volts, dans ce que vous dites, ça prend 30 minutes, la recharge. Alors, est-ce que vous pensez que le 400 volts serait suffisant et qu'on ne devrait pas aller peut-être plus loin que ça? Je ne connais pas l'électricité. Et puis, à tout événement, est-ce qu'on fait grandement erreur avec le 240 volts présentement, là?

M. Rioux (Simon-Pierre) : Bien, justement, on ne fait pas erreur du tout parce que c'est à des points très stratégiques qu'on va placer ces bornes-là, à des endroits de fin de trajet. Mais le trajet complet doit être fait avec des bornes de 400 volts. C'est ce que la technologie nous permet présentement. Donc, on ne peut pas aller vers du 800 volts ou plus que ça, c'est le 400 volts qui est en ce moment la norme. Puis, quand on parle de 30 minutes, bien, on l'a expérimenté, nous, aujourd'hui à moins 23 °C, c'était 30 minutes. Lorsque c'est l'été, lorsque c'est l'automne ou le printemps, c'est 15 à 20 minutes.

Donc, ce n'est pas un gros temps. Puis, si les gens sont sensibilisés au fait que ce n'est pas juste le temps, mais c'est le fait qu'ils ont un impact, ce petit 15 minutes là va avoir un gros impact sur les gaz à effet de serre, sur leur environnement, sur les effets sur la santé... Je vais vous dire, les gens qui sont en région, là, puis qui arrivent à Montréal, puis qui arrivent dans les grandes villes, là, ils la sentent, la pollution, puis ils sentent le smog, puis ils ont des effets secondaires, puis ils sont obligés de se procurer des médicaments. Donc, il faut être capable de sensibiliser les gens puis qu'ils voient un gros avantage à le faire, puis se sentir fier, avoir une fierté d'aller de l'avant avec un projet de société comme ça.

M. Surprenant : Une question rapide maintenant, peut-être un peu puérile au niveau électricité, là, mais je suis allé au salon de l'auto, puis il y a des gens, des professionnels qui me parlaient qu'eux autres, la vision qu'ils ont de la recharge des véhicules, c'est que les batteries n'appartiennent pas aux propriétaires des autos, que ce soient des centres d'échange de batteries, ça prendrait quatre minutes, changer une batterie électrique, et les gens pourraient reprendre la route et rouler plus rapidement. Est-ce que c'est utopique de penser d'aller vers un système comme ça?

M. Rioux (Simon-Pierre) : Oui.

M. Surprenant : Oui? Bon.

M. Rioux (Simon-Pierre) : Première chose, les batteries qui ne sont pas la propriété de l'acheteur, du consommateur, ça a déjà été essayé ailleurs, puis les consommateurs demandent d'être le propriétaire, ils ne veulent pas acheter le véhicule et puis payer un frais de location à chaque fois. Ceux qui l'ont fait se sont fait revirer de bord, on a demandé l'appui du gouvernement pour changer ces méthodes-là pour qu'on puisse devenir propriétaire. Pourquoi? Parce que la technologie change tellement vite qu'on ne peut pas se permettre de dire : Bon, bien, tu vas nous payer un... Sur 8 000 $ d'une batterie, tu vas nous payer des frais 50 $, 75 $ par mois, mais la technologie, dans deux ans, va faire que cette batterie-là va être la moitié du prix, puis on se ramasse avec un boulet.

Ce n'est pas une bonne idée, puis, deuxième chose, l'échange de batteries, ça a été des faillites pour des compagnies qui l'ont fait. On veut le faire juste pour avoir certains crédits de carbone en Californie. C'est juste pour ça qu'on veut le faire. Les technologies de recharge de très haute vitesse s'en viennent. Donc, en ce moment, on répond à une demande pour le consommateur. Il y a certains consommateurs qui vont être très satisfaits de faire une recharge en 15 minutes. Puis il va y avoir une deuxième génération de consommateurs qui vont avoir besoin de faire une recharge plus rapidement, puis ces batteries-là, haute définition, s'en viennent, de toute façon. Donc, tout évolue.

Le Président (M. Reid) : Merci. Merci beaucoup à tous les trois de votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends maintenant les travaux pour permettre à nos prochains invités de prendre place.

(Suspension de la séance à 14 h 46)

(Reprise à 14 h 48)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous recevons maintenant le groupe Roulez électrique. Je vous demanderais de prendre une dizaine de minutes pour faire votre présentation — j'essaierai de vous donner un petit signal à la dernière minute pour atterrir — et de commencer votre présentation par vous présenter et présenter les gens qui vous accompagnent. Et, par la suite, nous aurons un échange avec les membres de la commission pendant une période de 35 minutes. Alors, je vous donne la parole.

Roulez électrique inc.

M. Juteau (Sylvain) : Bien, merci beaucoup de nous recevoir aujourd'hui. C'est avec entrain que nous sommes ici. Moi, je me présente, Sylvain Juteau, cofondateur de Roulez électrique, le blogue; Daniel Breton, qui n'a pas besoin trop de présentation, que je pense que vous connaissez bien, consultant en énergie et en électrification des transports; et Hans Tremblay, qui est administrateur au Club Tesla Québec, qui se joignent avec nous pour faire la présentation, étant un organisme à but non lucratif en bonne et due forme et qui représente une part importante des propriétaires de voitures électriques.

Donc, Roulez électrique, un blogue qui existe depuis janvier 2012, donc déjà plus de trois ans, qui a comme mission de faire la promotion de l'électrification des transports en général au Québec. Évidemment, il y a une page Web, Facebook, donc c'est une communauté qui est très bien connue. Il y a plusieurs collaborateurs, dont moi, Jacques Duval, François Boucher, Vincent Dussault, qui apporte le visage urbain, qui reste sur Le Plateau—Mont-Royal, qui n'a pas sa propre voiture, mais qui veut utiliser des moyens de transport diversifiés et zéro émission, évidemment.

Donc, Daniel, je vais te laisser faire la partie qui présente...

• (14 h 50) •

M. Breton (Daniel) : En fait, bonjour, messieurs. Bonjour, M. le ministre. Dans le cadre de la stratégie de développement durable, nous avons l'intention de nous concentrer sur un aspect bien spécifique qui est celui de l'électrification des transports individuels, collectifs, de marchandises et spécialisés.

Je suis allé sur le site du ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques. Pour que les choses soient claires, on dit de la définition du développement durable qui est tirée des documents officiels du ministère qu'«au Québec, le développement durable s'entend donc d'"un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Le développement durable s'appuie sur une vision à long terme qui prend en compte le caractère indissociable des dimensions environnementale, sociale et économique des activités de développement."» Là, on dit : Les trois objectifs, c'est maintenir l'intégrité de l'environnement, assurer l'équité sociale et viser l'efficience économique.

Nous sommes d'avis que l'électrification des transports sera un domaine qui contribuera de façon concrète au développement durable en contribuant à : d'abord, maintenir l'intégrité de l'environnement en diminuant les émissions polluantes et les émissions de gaz à effet de serre; ensuite, assurer l'équité sociale en contribuant à une meilleure qualité de l'air et en participant à l'essor des communautés des régions, entre autres; et, trois, à viser l'efficience économique en développant un créneau industriel, de recherche et d'expertise québécois sur le transport partiellement et entièrement électrifié. Cela créera un grand nombre d'emplois de qualité dans toutes les régions du Québec dans les domaines liés à l'électrification des transports, des mines à la fabrication et l'assemblage, en passant par la recherche et à la commercialisation. Ainsi, contrairement au Conseil du patronat du Québec, nous proposons une réelle vision de développement durable pour les régions.

Il est important de noter que le transport routier électrique est énergétiquement de quatre à cinq fois plus efficace que le transport routier qui fonctionne au pétrole, ce qui témoigne de l'efficience économique, environnementale et énergétique de l'électrification des transports.

Nous tenons aussi à souligner que nous sommes conscients que l'électrification des transports, à elle seule, ne pourra faire en sorte que le Québec atteigne ses objectifs de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre pour 2020. Mais il faut voir plus loin que cette date. En effet, la mise en place d'infrastructures et d'un créneau de développement économique en ce domaine amènera le Québec de 2030 vers une société plus verte, plus riche et moins dépendante du pétrole et des pétrolières.

Prochain point, mon ami Sylvain.

M. Juteau (Sylvain) : La loi zéro émission permettant d'augmenter l'offre et l'accessibilité de la voiture électrique. L'offre et le choix aussi, parce qu'il y a plusieurs types de véhicules qu'on ne peut pas avoir, comme, par exemple, la RAV4 électrique. Donc, quelqu'un qui veut un VUS, bien, s'il n'y en a pas dans son choix, bien, il est obligé de se tourner vers un véhicule thermique. C'est notre premier point. En termes de priorités, c'est le prioritaire. Et c'est la priorité unique du Club Tesla Québec, et je vous rappelle que Club Tesla Québec, c'est principalement des propriétaires de Tesla. La Tesla, il n'y a pas de problème, il y a une disponibilité des véhicules Tesla au Québec. Donc, c'est par altruisme qu'ils font ça, parce qu'il faut qu'il y ait d'autres véhicules, pas juste des Tesla, parce qu'évidemment c'est une bracket de prix qui n'est pas...

Donc, lors du dévoilement de la Stratégie d'électrification des transports, le 1er novembre 2013, des représentants du gouvernement ont contacté les constructeurs automobiles afin de leur demander s'ils comptaient avoir des véhicules partiellement et entièrement électriques en quantité suffisante pour les automobilistes du Québec, et ce à quoi ils ont répondu oui. En effet, le gouvernement a beau avoir bonifié et prolongé les rabais à l'achat et la location de ces véhicules, si, lorsque les consommateurs se présentent chez les concessionnaires, O.K., il n'y a aucun véhicule disponible pour essai et qu'en plus il y a attente de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, pour se les procurer, cela décourage bien des gens.

Quelques mois après le lancement de la stratégie, des élus et des gens du milieu, dont Roulez électrique, ont demandé à des consommateurs et certains représentants du gouvernement d'aller chez les concessionnaires afin de vérifier si la promesse des constructeurs était tenue. La réponse a été non. En effet, plusieurs concessionnaires n'en avaient aucun ou très peu en inventaire. Vous essaierez d'avoir la Kia Soul électrique ou une BMW i3, bonne chance. Premièrement, la i3, elle est disponible chez un seul concessionnaire au Québec, à Laval. Même ici, à Québec, le concessionnaire BMW, il ne peut pas vous vendre la BMW i3. O.K.?

Donc, certains ont confié à l'équipe de Roulez électrique qu'ils auraient pu en vendre plusieurs unités, mais, faute de disponibilité, ils orientaient alors les consommateurs vers d'autres modèles afin de ne pas perdre la vente. C'est pourquoi nous plaidons en faveur d'une loi zéro émission inspirée de la loi californienne — sans le volet hydrogène, évidemment, parce que l'hydrogène est extrait du gaz naturel, donc c'est une continuité de l'approvisionnement des ressources thermiques — O.K., qui obligera les constructeurs à offrir et vendre une quantité suffisante et croissante de tels véhicules au cours des prochaines années. Cette loi rendra les véhicules partiellement électriques et entièrement électriques plus accessibles et aussi plus abordables parce qu'ils vont être obligés d'en vendre un certain nombre, ça fait qu'ils vont baisser leurs prix. En Californie, vous pouvez avoir une Nissan Leaf pour 199 $ par mois. O.K.? Donc, non seulement les consommateurs auront-ils accès à un plus grand nombre de véhicules, ils auront par ailleurs accès à un plus grand choix de modèles vendus juste à côté de chez nous.

Au Vermont, par exemple, mais non disponible ici, il y a la Chevrolet Spark électrique. Au Québec, c'est juste les flottes, les propriétaires de flottes, les entreprises qui ont accès à la Spark, mais le consommateur n'y a pas accès.

La Volkswagen Golf, on s'entend-tu que la Golf, c'est une voiture abordable et une sous-compacte connue et abordable? Et on ne peut pas l'avoir, mais à Burlington, avec 40 000 de population, vous pouvez aller vous en acheter une. Mais, si vous n'êtes pas un résident du Vermont, vous n'avez pas le droit de l'acheter. Ça fait que l'ALENA ne s'applique pas dans ces types de véhicules là. O.K.?

Mercedes B200, je tiens à mentionner, la Mercedes B200, c'est l'entrée de gamme chez Mercedes. C'est une petite cinq places, O.K., «hatch back», et c'est vendu seulement au Canada. Aux États-Unis, ils ne la vendent pas. La version à essence, ils ne la vendent pas parce que les Américains n'en veulent pas, ils veulent des grosses voitures. Mais au Québec, dans la «middle class», la classe moyenne, c'est une voiture qui est très populaire. Ils ont sorti le modèle 100 % électrique, qui a plus de 200 kilomètres d'autonomie, mais on ne peut pas l'avoir parce qu'on n'a pas de loi zéro émission. Mais, au Vermont, ils peuvent se l'acheter, O.K., ils peuvent faire l'achat.

Cette loi n'a rien de révolutionnaire. Ça fait déjà 25 ans que c'est en place en Californie, donc on ne réinvente pas la roue. Puis n'oubliez pas que nos voisins proches, dont le Vermont, New York, ils ont déjà cette loi. Ce n'est pas juste la Californie, là, c'est le Nord-Est des États-Unis aussi, dont on fait partie, c'est notre marché. Point 2, Daniel.

M. Breton (Daniel) : Rabais gouvernementaux à l'achat et à la location de véhicules partiellement et entièrement électriques. Nous proposons que le gouvernement prolonge d'au moins deux ans les rabais offerts actuellement dans le cadre de la Stratégie d'électrification des transports, vu le faible nombre disponible qui a ralenti le déploiement de ces véhicules sur le territoire du Québec. Auquel j'ajouterais que nous proposons aussi de créer un bonus supplémentaire de 500 $ par véhicule rechargeable, 100 % électrique ou hybride rechargeable qui serait offert aux vendeurs de tels véhicules chez les concessionnaires. Ce bonus compenserait pour le temps supplémentaire nécessaire à la fois pour la vente de tels véhicules et qui demande aussi plus de temps d'apprentissage. En québécois, ce que ça veut dire, c'est que les vendeurs d'automobiles ne sont pas, pour la plupart, intéressés à vendre des voitures électriques parce que c'est plus de trouble, ça leur demande une formation, ça leur demande de l'équipement. Donc, comme je sais qu'il reste peu de temps, peut-être qu'ils vont nous laisser prolonger un petit peu...

Le Président (M. Reid) : Malheureusement, je dois vous arrêter, il ne reste plus de temps, mais vous aurez probablement l'occasion, avec les questions et l'échange de 35 minutes que nous avons, de pouvoir terminer ce que vous avez commencé.

M. Breton (Daniel) : O.K. Bien, écoutez, je vais finir sur ce point-là très brièvement, 30 secondes. L'idée du bonus supplémentaire, c'est d'arriver à égalité avec le bonus de 8 500 $ des Ontariens, mais aussi c'est de faire en sorte d'avoir un incitatif pour que les concessionnaires puissent en vendre. Les Californiens ont les mêmes problèmes chez les concessionnaires que nous avons, donc l'idée c'est d'avoir un bonus pour les concessionnaires. Voilà.

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons commencer notre échange avec M. le ministre.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci beaucoup pour votre présentation ainsi que votre mémoire. Je serais tenté de vouloir vous laisser continuer, je veux juste encadrer un peu peut-être, là, préciser... Moi, ce que j'essaierais d'approfondir, c'est... Bon, là, vous parlez d'incitatifs financiers. Alors, la première question qu'on va poser, c'est : Comment on paie ça? Comment ça se paie? Alors, pouvez-vous expliquer comment on retrouverait cet investissement-là, on récupérerait ou comment même on y serait gagnant de mettre sur pied... non seulement les prolonger, les incitatifs existants, mais d'en ajouter, comme vous le proposez?

• (15 heures) •

M. Breton (Daniel) : O.K. Ah! il y a plusieurs manières. D'abord, l'idée d'encourager l'électrification des transports, ce n'est pas, tout simplement, pour qu'il y ait plus de voitures électriques sur les routes, c'est pour encourager un créneau de développement industriel québécois. On a appuyé financièrement les Bombardier de ce monde, les entreprises de multimédias. Bien, l'idée d'avoir une masse critique de véhicules électriques, ce n'est pas juste pour importer des voitures électriques d'ailleurs qui viennent au Québec, on n'est pas gagnants là-dedans. Et ça, si vous regardez dans le point 4, Créneau industriel et commercial, ce dont on parle, c'est que le déficit commercial lié aux importations de pétrole a presque doublé depuis le début des années 2000. Et, en 2013, si on prend l'importation de pétrole plus l'importation de véhicules, c'est un déficit de 27 milliards de dollars.

Donc, regardez à la page 2 du point 3, O.K., dans l'électrification des transports, il y a une étude de Secor-KPMG en 2013 qui disait qu'il était beaucoup plus payant en revenus et en emplois, pour le Québec, d'investir en électricité, science et transport que dans les mines et le pétrole, que, pour chaque investissement de 100 millions de dollars, on avait 490 millions de retombées pour le scientifique, 202 millions pour l'électrique, 77 millions pour le transport et 42 millions pour l'extraction minière et pétrolière.

Page suivante, ça dit que, par ailleurs, les investissements nécessaires pour créer 1 000 emplois sont de 13 millions pour les services scientifiques, 49 millions pour l'électrique et 912 millions pour le minier et le pétrolier. Donc, ce que ça veut dire, c'est que d'investir dans l'électrification des transports, que ce soit pour mettre un bonus, que ce soit pour avoir plus de voitures électriques, c'est aussi et surtout pour créer une masse critique pour avoir des véhicules électriques, des technologies électriques faites au Québec.

Il ne faut pas oublier une chose, c'est que, quand vous dites : Comment est-ce qu'on va financer ça?, d'abord, on a la bourse du carbone et on a le Fonds vert. Mais, en plus de ça, on a un malus qui existe déjà. Avant que le malus sur les véhicules d'une cylindrée de quatre litres et plus existe, O.K... c'est-à-dire avant que le malus soit bonifié récemment par votre gouvernement, ce malus-là procurait déjà 60 millions de dollars par année au gouvernement. Ça fait que, si on calcule 60 millions fois 2015, 2016, 2017, 2018, 2019, 2020, ça fait six ans, ça fait 360 millions de dollars, ce qui couvre plus qu'amplement l'argent qui est dépensé en bonus. Donc, le malus existant, même s'il n'est pas un désincitatif à l'achat de véhicules énergivores, donne plus qu'assez d'argent pour financer le bonus.

Ça fait qu'il y a ça plus, comme je vous dis, le Fonds vert, plus la bourse du carbone, ça se finance amplement. Mais, comme je vous dis, le but principal, à mon avis, de favoriser l'électrification des transports, c'est de favoriser un créneau de développement industriel parce que l'avenir du Québec, à mon avis, à notre avis, à l'avis de Roulez électrique et de plein de gens autour de cette table, j'en suis persuadé, c'est de faire en sorte que notre prochain grand projet économique — parce que le développement durable inclut l'aspect économique — ce soit l'électrification des transports. Et ça, ça va se financer avec des jobs.

M. Heurtel : Ça, nous sommes d'accord avec ça. Je veux dire, le premier ministre a été clair, notre gouvernement a été clair, un des trois piliers de notre plan de relance économique, c'est la lutte contre les changements climatiques, puis ça inclut, justement, l'électrification des transports et tout le volet de... une transition de notre économie vers une économie beaucoup plus sobre en carbone.

Alors, ça, le volet développement économique, c'est clair. Moi, ce que j'aime, c'est entendre, justement, des experts comme vous venir nous dire, nous expliquer justement... Parce que, souvent, tout ce qu'on entend, c'est le côté négatif de la lutte contre les changements climatiques ou du développement durable, ça coûte, ça coûte, ça coûte... Mais c'est un investissement, c'est pour, justement, développer cette transition-là. Tout comme on l'a fait dans les années 60 et 70 avec l'hydroélectricité, tout comme on l'a fait avec l'aéronautique, tout comme on a fait des choix stratégiques pour développer l'économie du Québec, on en est maintenant à développer... la prochaine phase de l'avenir économique du Québec passe par, justement, ce que vous dites. Ça, on est d'accord là-dessus.

Là, ce que j'essaie d'approfondir, c'est de voir... Bon, il faut qu'on ramène ça à la stratégie de développement durable du gouvernement. Souvent, on a eu plusieurs groupes qui sont venus puis qui nous ont présenté leur point de vue, certains, semblable au vôtre, puis ils nous disaient... Bien, l'inconvénient, c'est qu'ils n'avaient pas nécessairement une connaissance approfondie du gouvernement pour nous aider sur comment transformer la machine de l'État, comment faire ce virage. Là, cette fois-ci, on a quelqu'un ici qui a, justement, vécu l'expérience gouvernementale, n'est-ce pas?

M. Breton (Daniel) : J'ai d'ailleurs écrit là-dessus.

M. Heurtel : Et donc ce que j'aimerais, c'est voir si on ramène ça aux ministères et organismes gouvernementaux, qui est quand même le but principal de nos travaux, tu sais, parce que la stratégie vise, d'abord et avant tout, ministères et organismes... Ça n'exclut pas l'idée de l'action gouvernementale à l'extérieur du périmètre gouvernemental, mais ce que moi, j'aimerais approfondir avec vous, c'est quels sont les gestes, justement. On a vu la première stratégie, on essaie maintenant de mettre en place une nouvelle stratégie. Beaucoup nous parlent d'exemplarité, de cohérence, de moyens de contraindre l'appareil gouvernemental à poser des gestes proactifs dans le sens que vous suggérez. Alors, vous, si je vous demande le comment, comment vous voyez ça? Quels gestes doit-on poser pour s'assurer que ça ne soit pas seulement des voeux pieux, comme certains pensent que ça pourrait devenir?

M. Breton (Daniel) : Bien, en matière d'électrification des transports, vous avez quelques outils qui sont assez puissants. Et un de ces outils-là, c'est Hydro-Québec, qui est une société d'État qui a déjà une expertise en électrification des transports, qui a développé des technologies de batteries et de moteurs. Ensuite de ça, je veux dire, travailler pour que le gouvernement ait des véhicules gouvernementaux faits au Québec, électriques, modulables, c'est tout à fait faisable, et ça s'est déjà fait. Pour Hydro-Québec, entre autres

Ensuite de ça, quand on parle d'exemplarité, les municipalités sont des créatures du gouvernement. Je veux dire, par décret gouvernemental, vous pouvez faire en sorte que, d'ici 2030, les flottes de véhicules municipaux soient partiellement ou entièrement électrifiées de façon croissante. À partir de ces outils-là, vous développez une masse critique de véhicules électriques faits au Québec qui créent des emplois dans toutes les régions du Québec, une expertise et vous diminuez la dépendance au pétrole, et là vous êtes capables de vous servir, comme je vous disais tout à l'heure, des mines, de l'aluminium, de l'électricité, des moteurs, des batteries. Et tout ça, ça part d'une volonté gouvernementale pour se servir aussi bien de ces véhicules-là pour le gouvernement que pour les municipalités. Pour moi, c'est un outil qui peut très facilement se faire, mais ça demande une volonté politique.

Après ça, évidemment, comme je l'ai déjà dit, ce n'est pas tous les fonctionnaires dans tous les ministères qui vont être d'accord avec ça, mais moi, je pense qu'il y a des gens... J'ai rencontré dans tous les ministères des gens qui étaient volontaires pour aller de l'avant avec une vision comme ça, mais c'est sûr que ça part d'une volonté politique.

M. Heurtel : Une autre question qui a été soulevée, c'est la question de, justement, s'assurer qu'au niveau des politiques d'achat, des appels d'offres, il y ait un geste concret qui aille dans le sens de favoriser ou de s'assurer qu'on intègre dans le processus décisionnel gouvernemental une question d'électrification, que ça soit la même chose aussi sur des questions d'aménagement. Parce que c'est beaucoup plus loin que simplement acheter des véhicules électriques, là, on parle de questions d'aménagement. Qui dit transport, on parle aussi de toute la question des régions. On en a parlé avec le groupe précédent puis avec d'autres groupes, l'électrification des transports, la mobilité durable, l'aménagement durable, c'est une chose dans les grands centres urbains, c'est une totale autre chose en région éloignée.

Alors là, je vous lance plusieurs concepts, là, mais, encore une fois, dans un contexte où on veut mettre en oeuvre des mesures concrètes applicables au gouvernement puis à la machine de l'État pour que, justement, les principes de lutte contre les changements climatiques et de développement durable soient intégrés concrètement, alors, dans cette optique-là, quels gestes... ou comment vous voyez s'opérationnaliser ça?

M. Breton (Daniel) : Question un peu complexe, mais il y a une couple de statistiques que je voudrais citer. Parce qu'on parlait des régions, il y a un texte que j'ai fait, il y a quelques mois, sur une analyse faite par le Centre national du transport avancé et Mobilité électrique Canada qui disait que 89 % des Canadiens parcourent moins de 60 kilomètres aller-retour par jour. Et, quand tu restes en région — on a pris un exemple qui s'appelle Rivière-du-Loup, M. le député va s'y reconnaître — je disais que 83 % des habitants de Rivière-du-Loup parcourent moins de 10 kilomètres pour se rendre au travail par jour.

Donc, cette notion-là comme quoi on aurait besoin d'une grande autonomie pour se déplacer en véhicule électrique, c'est une fausse notion complètement. Vous avez souligné ce point-là, M. le député de Groulx, si je ne me trompe pas — c'est ça? — vous avez souligné cette notion-là d'autonomie. En fait, la très grande majorité des déplacements qui sont faits au Canada ou au Québec sont faits sur des distances qui sont relativement courtes. Donc, d'intégrer ça dans les services municipaux, comme je vous disais, on peut très bien faire ça, c'est beaucoup plus facile que les gens peuvent se l'imaginer. Moi, maintenant, je suis moi-même un habitant d'une région qui s'appelle La Présentation, et je peux vous dire que la réalité, c'est que 90 % du temps, je me promène en véhicule électrique, à 100 % électrique. Ma conjointe a, elle aussi, une voiture 100 % électrique. Donc, tout ça, c'est dans le domaine du faisable.

Il ne faut pas oublier une chose, c'est qu'il va y avoir des consultations dans les prochaines semaines sur la nouvelle stratégie énergétique. Bien, pour moi, les deux sont interreliées, c'est-à-dire qu'on parle de développement durable, on parle de stratégie énergétique. On parle beaucoup de pétrole et de pipelines, de l'avenir du pétrole et de la baisse du prix du pétrole, c'est évident que le gouvernement a les outils pour faire en sorte de diminuer sa dépendance au pétrole par réglementation et aussi par exemplarité. Je pense que le débat sur l'avenir de la stratégie énergétique va devoir nécessairement inclure la stratégie de développement durable que vous allez mettre de l'avant, c'est incontournable, et vous allez voir que ça va être un débat cornélien. Mais c'est clair que vous avez des outils très forts.

• (15 h 10) •

M. Heurtel : Ça, c'est une question complexe, puis oui, c'est un débat cornélien, mais je crois qu'on en est justement... on est à une croisée des chemins parce qu'on doit trouver des solutions. Je ne crois pas qu'on puisse, justement, pelleter par en avant et remettre ça à plus tard. Il y a une question de cohérence, question d'exemplarité. Moi, ce que je suis tenté de vous demander, c'est : Pourquoi on n'est pas plus avancés, finalement, dans cette question-là? Qu'est-ce qui bloque? Que ça soit une norme ZEV, qui a l'air d'être une évidence quand on entend les experts, puis il y a... Les opposants ne sont pas vraiment des opposants, tu sais, ce n'est pas comme s'il y a une vaste opposition. On parle de certains concessionnaires ou de l'industrie, mais ce n'est pas, généralement, mis de l'avant. Là, quand on va plus loin, on a des questions... que ce soient des questions d'aménagement, de mobilité, on est tous à peu près à la même place, là, au niveau du principe. Alors, là où le bât blesse semble être comment on concrétise ça. Alors, c'est quoi, le problème, de votre point de vue?

M. Breton (Daniel) : Premier problème, éducation, sensibilisation, communication. Moi, j'ai commencé à écrire des articles sur les voitures électriques il y a 15 ans et j'ai eu une entrevue à la radio, il y a un mois et demi, où on m'a posé les mêmes questions qu'il y a 15 ans, c'est-à-dire : Quelle est l'autonomie de ces voitures-là? Ça doit se vendre 40 000 $ et plus. Est-ce que ça va sur l'autoroute? Est-ce que, l'hiver, ça démarre? Je veux dire, c'est clair, clair, clair qu'il y a un problème très sérieux. Là, on est entre nous, là, ça semble facile, mais, quand on était au Salon de l'auto... Vous allez au Salon de l'auto, 95 % des gens sont peu familiers avec ces voitures-là. Il y en a un 5 % qui sont très, très familiers, ils connaissent ça mieux que les vendeurs. Il y en a un 20 % à 30 % qui s'y intéressent, mais qui ne savent pas trop. Puis il y en a un autre 60 % qui s'abreuvent de désinformation, de préjugés et, en bon québécois, de conneries qui sont dites dans les médias sur les véhicules électriques. Donc, il y a ça aussi. Il y a ça qui est un réel problème. Il y a un problème d'éducation et de communication très sérieux en matière d'électrification des transports.

Ensuite de ça, vous savez, il y a environ 1 000 entreprises qui travaillent dans le domaine du transport au Québec, il y en a plusieurs qui ont un volet électrification des transports. Je veux le dire parce que je pense que le message est important, il y a des entreprises, tu sais, comme Nova Bus, comme Bombardier, comme Prévost Car, comme TM4 qui poussent l'électrification des transports qui ont les reins solides. Mais les PME, les inventeurs, les patenteux qu'on a au Québec, ces gens-là, il y en a qui commencent à avoir la langue longue, qui disent : On veut faire en sorte que ces projets-là avancent, que ces programmes-là avancent. Que ce soient des Lito Green Motion qui ont inventé une moto extraordinaire 100 % électrique, pourquoi est-ce qu'on n'aurait pas des projets pilotes avec des policiers, par exemple, qui se promèneraient avec des motos électriques?

Pareil comme je sais la résistance que les gardes du corps ont eue à l'Assemblée nationale et ont encore par rapport aux voitures branchables. Bien, je le sais, je l'ai entendu. Mais ce que je peux vous dire, c'est que, si le gouvernement du Québec utilise les bateaux électriques de LTS Marine, par exemple, qui sont des bateaux développés avec des technologies québécoises, et les motos de Lito Green Motion, ça, ça va aider ces petites entreprises là à peut-être devenir du futur Bombardier. Ces gens-là ont bien plus besoin du gouvernement que Bombardier a besoin du gouvernement. Donc, il y a ça aussi qui entre en ligne de compte. Le gouvernement peut utiliser et aider ces petites entreprises là à devenir les futurs Bombardier du Québec.

M. Heurtel : On est dans... On commence. Je sais bien que ce n'est pas assez vite, mais là, bon... Là, vous m'avez fait l'honneur de participer avec moi... Aujourd'hui, on a annoncé, justement, je suis le premier ministre à utiliser un véhicule, justement, rechargeable, branchable, et donc on commence, là, on est dans cette voie-là. Pas assez vite, vous allez me dire, mais on avance. Ensuite, on a des compagnies comme e-Lion, bon, l'autobus scolaire entièrement québécois, entièrement électrique. Donc, on avance, là. On voit, justement — puis ça, c'est grâce au Fonds vert, c'est grâce au marché du carbone — on est dans ce sens-là. Mais, encore une fois, là ce dont on parle, finalement, c'est véritablement intégrer dans le processus décisionnel, en amont, au tout début... Que ça soit des décisions d'investissement, des décisions de prêt, des décisions de prise de participation de quelque forme, politique d'achat, appels d'offres, il faut intégrer ces principes-là de façon contraignante à l'État.

Le Président (M. Reid) : 10 secondes pour répondre, M. Breton.

M. Breton (Daniel) : Bien, rapidement, c'est que vous ajoutez à ça tout l'argent pour les flottes de véhicules pour les municipalités, ça fait que la somme est considérable. Et là, si vous ajoutez à ça l'argent qui est sauvé quand il est question de pétrole, la somme est importante de ce qu'on peut faire comme investissement en véhicules électriques.

Le Président (M. Reid) : Merci. Je passe maintenant la parole, pour la poursuite de nos échanges, à l'opposition officielle, premier groupe de l'opposition, et au député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup, M. Juteau, M. Tremblay et, évidemment, Daniel. On s'ennuie de votre franc-parler à l'Assemblée nationale. Bienvenue comme ancien ministre aussi de l'Environnement.

Première question. Parce qu'on a entendu l'Association des véhicules électriques du Québec juste avant vous, je pense que vous les avez entendus en partie. On n'a pas eu le temps d'aller au fond de tout ce qu'ils avaient à nous présenter, mais je voudrais bien comprendre la différence que vous faites au niveau des incitatifs. Parce que l'AVEQ proposent, à leur page 15, là, de leur mémoire... Augmenter les incitatifs à un équivalent de 10 000 $ par véhicule électrique en abolissant la taxe de vente provinciale jusqu'en 2017 et garder l'incitatif initial de 8 000 $ jusqu'à l'atteinte d'un objectif de 50 000 véhicules électriques sur les routes.

Tandis que vous, vous proposez que le gouvernement prolonge d'au moins deux ans les pleins rabais offerts actuellement dans le cadre de la Stratégie d'électrification des transports et de le bonifier de 500 $ par véhicule rechargeable, donc un bonus supplémentaire de 500 $ par véhicule rechargeable.

Je voudrais juste bien comprendre. Parce que, là, on a différentes propositions, et j'aimerais ça, qu'on soit capables de bien s'entendre éventuellement, là, puis de faire des recommandations justes.

M. Juteau (Sylvain) : Bien, premièrement, si vous décidez de le bonifier de 2 000 $, jusqu'à 50 000 véhicules, on ne sera pas contre ce que... O.K.?

M. Gaudreault : ...consensus.

M. Juteau (Sylvain) : Bon, nous, on pense qu'il faut le maintenir au moins deux ans. Puis on s'entend que, si c'est maintenu pendant deux ans, le 50 000 qu'ils parlent, je pense que la quantité est valide. Actuellement, il y a 5 200 véhicules branchables, là, qui roulent sur les routes au Québec, puis, de toute façon, même si tout le monde voudrait s'en acheter demain, il n'y a pas de disponibilité. O.K.? Il y a un concessionnaire, actuellement, qui a vendu plus de 200 véhicules rechargeables au Québec à Rawdon, dans une municipalité au nord de Montréal de 15 000 habitants environ, mais la moitié de ces véhicules, il les a importés des États-Unis légèrement usagés. Des Spark électriques parce que GM Canada ne veut pas en vendre, puis des Volt parce que GM Canada, ils ne fournissaient pas un quota suffisamment élevé de Volt. O.K.?

Donc, je pense que ce que nos confrères de l'AVEQ disent, je pense que ça se tient. Puis nous, on parle aussi de la taxe de luxe. C'est qu'on y va peut-être un peu différent, mais je pense qu'on revient au même. C'est que le gouvernement donne de la main droite, puis il prend de la main gauche. Vous savez, il y a une taxe sur les véhicules de luxe qui était pour celui qui s'achetait une Cadillac Escalade à 100 000 $ avec un gros V-8, bien, qu'il paie une taxe sur l'immatriculation, que, quand tu dépasses 40 000 $ sur le prix d'achat du véhicule, bien, je pense, c'est 1 %. Ça fait que, si le véhicule coûte 100 000 $, bien, c'est 60 000 $ de plus, ça coûte... tes immatriculations annuelles sont augmentées de 600 $ dans cet exemple-là.

M. Breton (Daniel) : Par exemple, moi, j'ai eu un rabais puis j'ai payé une taxe de luxe en achetant une Volt.

M. Juteau (Sylvain) : C'est ça. Parce que la Volt, il y a un an ou deux, c'était environ 42 000 $, 43 000 $ avant rabais. Mais c'est évalué sur le prix d'achat avant rabais, donc il a payé une taxe de luxe. Les propriétaires de Tesla aussi, ils paient une taxe de luxe. Je pense à la BMW i3 qui... c'est facilement 50 000 $. Une BMW i3, là, c'est une quatre places, là. O.K.?

Donc, nous, on pense qu'il faut être conséquent. La taxe de luxe, ça devrait être plus sur les véhicules énergivores thermiques qui ne roulent pas au pétrole bleu du Québec, l'hydroélectricité. Donc, en tout cas, à mon avis, c'est nécessaire de le maintenir. Puis le 8 000 $ est adéquat comme rabais, à notre avis, parce qu'avec le rabais ça revient au prix d'une voiture équivalente à essence. Ça revient au même prix. O.K.? Une Volt revient à à peu près 30 000 $. Bien, achetez-vous une Camry, là, 30 000 $, elle ne sera pas très bien équipée, puis c'est un véhicule à peu près équivalent, donc...

• (15 h 20) •

M. Gaudreault : Maintenant, faites-vous plaisir puis expliquez-moi, le 500 millions du gouvernement fédéral pour l'innovation dans le secteur automobile, là, qu'est-ce qu'on devrait faire là-dessus?

M. Breton (Daniel) : Bien, en fait, moi, j'ai tenu à ce qu'on parle de ça parce que... Attendez un petit peu. Voilà : «Comme vous pouvez le voir plus bas, le gouvernement fédéral a annoncé en janvier 2014 la reconduction de leur programme d'innovation dans le secteur automobile. Or, lors du lancement de ce programme en 2009...» C'est-à-dire qu'ils ont donné, en pleine crise automobile, en 2009... le gouvernement fédéral a donné 500 millions de dollars dans l'innovation automobile, et 100 % de l'argent est allé en Ontario. Si on regarde les objectifs du programme, c'est marqué : Bâtir la capacité de recherche et développement dans le secteur de l'automobile, sauvegarder des emplois, élargir les plans d'action du gouvernement pour les sciences et la technologie, favoriser le développement et la mise en place de technologies, de procédés innovateurs et axés sur l'efficacité énergétique.

Moi, je considère que les élus du Québec devraient interpeler le gouvernement fédéral en disant : Écoutez, il n'y a pas aucune raison qu'au prorata on n'ait pas notre juste part pour investir dans l'innovation automobile. On parle d'électrification des transports. L'endroit où est-ce qu'il se fait le plus de recherche et de développement en électrification des transports au Canada, c'est au Québec. Pourquoi est-ce que 100 % de l'argent devrait continuer à aller en Ontario? Donc, moi, j'interpelle et le gouvernement, et l'Assemblée nationale, et les élus de l'opposition pour dire : Il y a une partie de cet argent-là qui doit revenir aux Québécois pour, justement, encourager les petites, moyennes et grandes entreprises qui travaillent dans l'innovation dans l'efficacité énergétique. On est dans un processus... on est exactement là-dedans, et c'est ça, du développement durable. Voilà.

M. Gaudreault : M. le député de Rimouski, vite, vite?

Le Président (M. Reid) : M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Oui. Question... Moi, je suis pour l'auto électrique, l'électrification des transports, mais c'est sûr qu'en région c'est difficile, ça, souvent, à expliquer. C'est vrai que, comme tu le disais tantôt, quand tu es à Rivière-du-Loup, 10 kilomètres, ça se peut bien. Mais, quand tu es dans les paroisses autour, dans le monde rural, ce n'est pas vrai, c'est beaucoup plus. L'autre jour, j'ai rencontré un de mes amis, il est encore dans mon village dans le Témiscouata, je l'ai rencontré dans un aréna. Lui, juste promener son jeune au hockey, du gros hockey, c'est Rimouski, Mont-Joli, Matane, des fois Gaspé toutes les fins de semaine parce que... Écoutez, il y en a plusieurs, familles comme ça. Quand tu es dans le monde rural en région, tu es toujours en auto à te promener partout.

C'est la même chose pour le transport des personnes. On voit ce qui arrive avec Orléans, qui coupe du transport en région, ça inquiète beaucoup de monde. L'intermodalité des transports avec la stratégie maritime, comment on peut connecter, tu sais, le développement rural, nos villages, tu sais? Le Conseil du patronat qui vient dire l'autre jour, tu sais : On va donner des subventions pour déplacer le monde, les amener en ville, ça va coûter moins cher, ça a fessé fort chez nous, là. Le monde n'est pas content de tout ça, les gens veulent demeurer dans le monde rural. Mais, dans le monde rural, il faut que tu te déplaces. Le développement touristique, tu sais, on veut développer des routes, la route du grand air, on veut amener le monde sur les routes un peu partout, aller voir nos villages, aller dans des réserves, aller voir notre monde, comment... C'est un gros défi. Il faut asseoir tout le monde autour de la table, il faut que... Comment vous pensez qu'on peut relever ce défi de l'électrification des transports avec les autres défis de développement économique, de qualité de vie dans nos régions?

Le Président (M. Reid) : 1 min 30 s.

M. Juteau (Sylvain) : 1 min 30 s, je vais essayer d'être court.

M. LeBel : Excusez-moi, là.

M. Juteau (Sylvain) : M. le député, savez-vous que Tesla va installer... Tesla a annoncé qu'ils allaient installer des «superchargers», O.K., qui sont en... C'est du 400 volts, mais encore plus puissant que les bornes rapides d'Hydro-Québec. O.K.? Ils vont en mettre six talles, O.K., six d'un coup au même endroit, à Rivière-du-Loup. Ça va probablement être à l'Hôtel Universel. O.K.? Et vous savez que ça veut dire que des propriétaires de Tesla qui viennent de la Floride — parce que les propriétaires de Tesla, ils ont accès à un réseau — ils vont venir vous visiter.

La clé, à mon avis, en région... Puis, en passant, à Rimouski, je vous invite à prendre une application qui montre le nombre de bornes publiques, puis Rimouski est impressionnante au niveau des bornes de recharge publiques. La clé, c'est d'utiliser, O.K., l'infrastructure qu'Hydro-Québec est en... et de bornes publiques qui est en train de se mettre en place puis le programme Branché au travail. Parce que le métro-boulot-dodo — appelons ça comme ça, là — c'est pour aller travailler puis revenir. O.K.? Donc, si ces infrastructures-là sont mises en place, la recharge au travail, parce que la personne est là huit heures pour travailler habituellement, sa voiture est tellement chargée, elle vient de doubler l'autonomie de sa voiture. Donc, une voiture comme la Mercedes B200, qu'on ne peut pas avoir, mais qu'on va peut-être avoir un jour, qui a 200 kilomètres d'autonomie, elle vient d'avoir 400 kilomètres d'autonomie.

Le Président (M. Reid) : Merci beaucoup. Nous allons passer maintenant au deuxième groupe d'opposition, et je donne la parole au député de Groulx.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Écoutez, j'adore ce que vous mentionniez au niveau, là, de la fabrication, la commercialisation et l'exportation au niveau de l'auto électrique. Actuellement, je pense que les Québécois sont intéressés par l'auto électrique et puis je pense qu'il y a un effort qui doit être fait, d'une part, au niveau marketing pour expliquer aux gens c'est quoi, puis de simplifier les choses, puis de gérer les attentes au niveau des gens, les appréhensions qu'ils ont, mais je pense que les gens pourraient être également intéressés encore plus à acquérir des voitures électriques si elles étaient fabriquées ici. Je pense que ça pourrait être un incitatif intéressant.

Je ne pense pas qu'on puisse, actuellement, au Québec, s'immiscer dans le marché des voitures à essence. Il y a des très, très, très gros joueurs, et il n'y a pas de place facile pour nous là-dedans. Mais peut-être qu'il pourrait y avoir de la place pour les voitures électriques. C'est un nouveau marché, et puis on a vu... Vous parlez de Tesla, qui sont partis de zéro, et ils ont créé cette entreprise-là. Alors, on a subventionné les entreprises au Québec dans d'autres domaines au niveau du transport, on parle de sociétés comme Bombardier, Nova Bus, et autres, tout ça. Il n'y aurait pas lieu d'être plus agressif au Québec au niveau de la création d'emplois de qualité? On a perdu beaucoup au niveau des ingénieurs. Le revenu moyen au Québec des citoyens, c'est de 25 % inférieur à ceux de l'Ontario et du reste du Canada. On a une démarche à faire pour rétablir la situation, on doit supporter les emplois de qualité, puis je pense que c'est une belle occasion pour nous si on faisait quelque chose au niveau de fabrication peut-être pas de véhicules à très grande diffusion, mais de créneaux.

Vous dites dans votre document qu'il y a des entreprises qui font des véhicules dans différents créneaux qui sont en difficultés financières pour certaines, qui ont besoin d'être mieux supportées. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Je pense qu'il y a quelque chose à faire. C'est un nouveau marché, puis je pense, si on peut être là les premiers, on pourra même faire de l'exportation aussi avec ça, là.

M. Breton (Daniel) : Bien, écoutez, le Québec fait des avions, et ce n'est pas parce qu'à 8 millions d'habitants qu'on est capables de supporter bien, bien l'achat d'avions, on s'entend? On fait des trains, on fait des bateaux, on fait des camions, on fait des véhicules spécialisés. Il n'y a pas de raison qu'on ne fasse pas des véhicules de niche comme des véhicules électriques, comme je parlais, justement, comment qu'il y en a qui pouvaient être des véhicules de service municipaux. Les véhicules de services municipaux, c'est des véhicules qui font du kilométrage assez court en général. Il y a 1 100 municipalités au Québec, tu viens de te créer un marché instantané.

Et, avec un leader qui est comme l'IREQ, l'Institut de recherche en électricité du Québec, qui a développé les meilleures technologies de chimie, parmi les meilleures au monde, avec un chercheur comme Karim Zaghib, qui est reconnu mondialement pour la qualité de ses chimies de batterie... Le jour où on a dévoilé notre stratégie d'électrification des transports, il a reçu un prix à San Francisco comme un des meilleurs chercheurs au monde en chimie des batteries, et ça, c'est un gars de Boucherville. TM4 fait parmi les meilleurs moteurs au monde. Et il faut ajouter à ça le fait que le premier produit d'exportation du Québec, c'est les lingots d'aluminium. Ça, là, c'est, honnêtement, quelque chose de totalement périmé comme vision. Ça veut dire qu'on prend de l'électricité pas chère, là, on en fait des lingots, eux autres, ils le transforment puis ils nous le revendent tout fait. Il faut qu'on fasse de la transformation d'aluminium, et il y a là un marché pour faire des voitures électriques avec notre aluminium, notre électricité, notre expertise.

Donc, je suis totalement d'accord avec vous, il y a un marché là, et c'est à nous de le développer. Vous avez raison de dire qu'on n'est pas encore au niveau des Toyota, Mazda, Honda de ce monde. Mais la réalité, c'est que les Toyota, Mazda, Honda ne sont pas là, en électrification des transports. Donc, nous, on peut développer un marché de niche dans lequel on peut être parmi les meilleurs au monde avec, en plus, de l'électricité à 99 % renouvelable. Tout est là.

M. Surprenant : Absolument.

M. Juteau (Sylvain) : Si vous permettez que j'ajoute...

M. Surprenant : Allez-y.

M. Juteau (Sylvain) : ...peut-être un petit exemple concret, bon, on parle de... Il y a des manufacturiers de bornes au Québec, AddÉnergie, Elmec. Pour Elmec, pour les bornes, il faut parfois des piédestaux, des pieds, puis Elmec a donné un mandat à l'entreprise Métal Laroche, qui est à Lac-Mégantic. Cette entreprise-là, là, ils reviennent de loin parce qu'ils étaient à 100 mètres de la zone rouge à Lac-Mégantic. Là, ils font des piédestaux pour bornes en aluminium du Québec. O.K.? Oui, là, dans les trois prochains mois, ils vont peut-être en faire juste une centaine. Mais, dans trois à cinq ans, combien de piédestaux, ça va prendre pour brancher toutes les 500 000 voitures électriques qu'on va avoir au Québec? C'est un petit exemple.

M. Surprenant : Une dernière question.

Le Président (M. Reid) : Oui, il vous reste encore 1 min 30 s.

M. Surprenant : Au niveau d'Hydro-Québec, bon, on est producteurs d'électricité au Québec, il y a déjà eu des projets de moteur-roue, et puis est-ce que vous pensez qu'Hydro-Québec en fait suffisamment pour supporter l'industrie?

• (15 h 30) •

M. Breton (Daniel) : Écoutez, comme fournisseurs d'électricité puis installateurs de bornes, je trouve qu'ils font vraiment du bon travail. Parce que, quand on se compare, on se console, je peux vous le dire. On est allés en Ontario, là, puis il y a plein de pancartes où ils disent qu'un jour il va s'installer des bornes. Ça fait trois ans que les pancartes sont là, il n'y a toujours pas de bornes.

Ceci dit, en matière d'électrification des transports, c'est-à-dire des véhicules, il y a TM4 qui fait des moteurs, qui est une créature d'Hydro-Québec, mais je pense qu'Hydro-Québec pourrait faire plus parce qu'il y a des chercheurs et des ingénieurs vraiment, absolument brillants qui sont là. Le cas du moteur-roue, c'est un rendez-vous manqué, c'est un rendez-vous manqué, mais je pense qu'avec la volonté qu'il y a présentement à Hydro-Québec, je pense qu'on peut aller plus loin.

M. Juteau (Sylvain) : Si vous permettez que j'ajoute, au sujet de notre Hydro-Québec, O.K., saviez-vous que, le Vermont, 60 % de son approvisionnement en électricité provient d'Hydro-Québec. Vous savez que l'électricité qu'on exporte est environ à 0,04 $ du kilowattheure, alors qu'au réseau de vente, au réseau de détail, au Québec, c'est environ 0,08 $ à 0,09 $ du... au résidentiel, là, c'est huit virgule quelques cents du kilowattheure. O.K.? Le Vermont s'est doté d'une loi zéro émission, ils ont plus de véhicules que nous autres per capita enregistrés. Au Québec, on est très bons par rapport au Canada, mais, quand on se compare au reste de l'Amérique du Nord, O.K., donc, imaginez, eux, ils profitent de notre électricité propre, à bas prix, donc...

Le Président (M. Reid) : Merci. Merci à tous les trois, M. Juteau, M. Breton, M. Tremblay.

Je vais lever la séance pour quelques instants, le temps, nos prochains invités, le groupe PIT de FPInnovations, de s'installer.

(Suspension de la séance à 15 h 32)

(Reprise à 15 h 34)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons maintenant entendre le groupe PIT de FPInnovations, représenté par M. Yves Provencher. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. J'essaierai de vous donner une petite indication à la dernière minute. Par la suite, nous procéderons à un 35 minutes d'échange avec les membres de la commission. Alors, à vous la parole.

Le Groupe Performance Innovation Transport de
FPInnovations (Le Groupe PIT de FPInnovations)

M. Provencher (Yves) : Bien, merci beaucoup. Merci beaucoup de me donner l'occasion de venir vous entretenir de notre vision sur le verdissement du transport au Québec.

Alors, notre groupe, on est un groupe — rapidement, là — d'ingénierie à but non lucratif dont la mission, c'est d'évaluer les technologies vertes et d'accélérer l'implantation de ces technologies-là auprès des flottes, que ce soient des flottes de transport de marchandises, de personnes ou les flottes municipales. Plusieurs ministères québécois sont membres de notre organisation. On conseille aussi plusieurs ministères. Nos activités traitent de l'ingénierie, de la recherche et développement, du transfert technologique.

Donc, notre mémoire va toucher aujourd'hui brièvement, là, l'importance des camions dans le bilan des émissions de GES, la stratégie mise en place actuellement pour réduire les émissions de GES dans le transport des marchandises en particulier, le transport lourd de façon particulière. Ensuite, on va regarder les atouts qu'on a au Québec. On en a entendu parler un petit peu dans la présentation précédente, puis je vais renchérir là-dessus, et on va y aller avec quelques recommandations.

Un petit point, quand je vais parler de véhicules verts, ça peut vouloir dire des véhicules connectés, des véhicules innovants. Vous allez voir un petit peu, là, je vais toucher à différents aspects des véhicules verts.

Donc, ça, ce n'est sans doute pas étranger à vous, cette diapositive-là, alors, mais ce que je voulais faire, je voulais surtout insister sur les camions de façon générale, les camions légers, les camions lourds. On voit les émissions, dans les 20 années qui couvrent cette étude-là, qui ont presque doublé durant cette période-là. Donc, alors que, dans l'automobile, les émissions réduisaient ou, du moins, étaient... bon, ont été réduites, dans le camion ça a continué d'augmenter presque de deux fois.

Donc, qu'est-ce qu'on fait au Québec actuellement dans le transport des marchandises pour réduire nos émissions et notre consommation de carburant? Bien, première des choses, la première approche, c'est l'efficacité énergétique. La bonne nouvelle, c'est que l'efficacité énergétique, c'est bon pour l'environnement et c'est bon aussi pour celui qui paie le carburant dans le véhicule. L'autre bonne nouvelle, c'est que c'est bon dans toutes les sources d'énergie. On est porté à l'oublier, mais l'efficacité énergétique, ça ne fait pas juste réduire la quantité de diesel dans un camion, mais c'est bon pour un camion de gaz naturel et c'est bon pour un véhicule électrique parce qu'on va pouvoir aller plus loin avec la même recharge si on fait de l'efficacité énergétique dans ces véhicules-là. Et ce qu'il y a de bien aussi, c'est qu'ici, au Québec, on encourage l'acquisition de technologies en efficacité énergétique, dont avec le programme Écocamionnage, que vous connaissez probablement.

Une chose aussi qu'on fait, c'est qu'on travaille beaucoup avec le gaz naturel de plus en plus. Il y a des avantages au niveau des coûts, il y a des avantages au niveau des GES. Malheureusement, les flottes tardent à prendre le virage du gaz naturel. Et ça, je pense que c'est une stratégie qui est... On parlait de stratégie tout à l'heure pour les véhicules électriques, je pense qu'il y a une stratégie à revoir aussi pour les gens qui travaillent au niveau du gaz naturel. On pourra en reparler plus tard si ça vous intéresse.

On est porté à l'oublier, mais l'électrification des transports, ce n'est pas juste l'affaire des automobiles, c'est aussi l'affaire des camions au Québec. Vous savez qu'à Sainte-Thérèse, chez Paccar, on construit des véhicules hybrides, et la flotte de la SAQ, c'est une des plus grandes flottes de véhicules hybrides au Canada.

On travaille aussi avec des flottes comme transport Robert ou avec d'autres flottes où il y a des panneaux solaires qui sont installés sur les véhicules pour alimenter les batteries qui vont servir, par exemple, pour toute la couchette et tous les équipements qui sont à l'intérieur de la couchette, ce qui fait qu'on n'a pas besoin de faire rouler le camion au ralenti durant la nuit, les batteries sont rechargées en temps réel. C'est une entreprise de Saint-Jean-sur-Richelieu qui fournit ces panneaux solaires là.

Il y a aussi des camions qui sont construits par une compagnie québécoise qui est basée à Blainville, qui s'appelle Convelsys, et qui sont totalement électriques, 100 % électriques. Des camions de classe 8, là, donc des camions semi-remorques, classe 8, qui sont totalement électriques, mais ils ne sont pas construits actuellement au Québec pour des histoires de subventions. On pourra aussi en rediscuter, il y a une demande de subvention qui traîne depuis deux ans, à peu près, dans un ministère. Donc, on pourra en reparler, de ça aussi.

Ensuite, si on regarde aussi au niveau de la capacité de recherche et développement et de la capacité industrielle au Québec, bien, on est gâtés. On a, première des choses, la plus belle piste d'essai en Amérique du Nord, elle est située chez nous, au Québec. Il y a un paquet de monde. On est portés à penser parfois que, quand GM est partie, l'industrie automobile s'est écroulée, bien, ce n'est pas vrai, il y a un paquet de fournisseurs qui sont restés. Il y a des Novabus, des Autobus Lion, on en a parlé tout à l'heure, des Prévost Car, Paccar, et tout ça. Et ensuite il y a un paquet de groupes de recherche et développement, on l'a dit tout à l'heure aussi. Le Québec, c'est l'endroit où il se fait le plus de recherche et développement en véhicules électriques au Canada. Donc, il y a beaucoup d'infrastructures, beaucoup de matière grise aussi qui travaille là-dessus.

Alors, petite mise en contexte. Allons-y maintenant avec les cinq recommandations que je voulais vous proposer. Première des choses, on n'ira pas très loin là-dessus, le gouvernement doit montrer la voie. On l'a vu tout à l'heure, on doit le faire aussi avec les municipalités. Et ça, c'est clair, il faut sortir du plus bas soumissionnaire. Je pourrai vous raconter l'histoire de Metro Vancouver, qui, eux autres, vont utiliser même la quantité de particules pour établir la valeur d'un véhicule lorsqu'ils vont en appel d'offres. Donc, il y a moyen de focaliser pour aller chercher des véhicules verts, et sans aller, justement, à la politique, là, du plus bas soumissionnaire.

• (15 h 40) •

Acheter des véhicules verts, c'est bien. On était le groupe qui a évalué l'utilisation des véhicules verts dans la flotte gouvernementale. Je peux vous dire qu'il y a des véhicules verts qui sont parfois achetés, ils sont moins souvent utilisés. Alors, il faut encourager l'utilisation de ces véhicules-là aussi dans la flotte du gouvernement. Et il faut aussi essayer d'encourager des véhicules qui sont faits le plus possible au Québec. Il y en a, des véhicules, qui sont faits au Québec. Je porte votre attention sur la petite navette qui est là, électrique, qui est utilisée au Jardin botanique. Alors, rappelez-vous de son allure, je vais vous en montrer une autre bientôt.

Il faut aussi retirer les barrières législatives à l'utilisation des technologies vertes. Souvent, le Québec est l'Administration la plus restrictive en termes de technologies vertes, dans le transport des marchandises en particulier. Je vous donne l'exemple ici de ce déflecteur arrière de la remorque là qui est utilisé partout en Amérique du Nord, partout aux États-Unis, il est utilisé au Nouveau-Brunswick, dans les Maritimes, il est utilisé en Ontario, mais, au Québec, on attend encore pour le rendre légal. Donc, ça pénalise nos flottes québécoises. Et, évidemment, c'est un problème important pour les flottes québécoises parce que les flottes des autres régions viennent chez nous puis ils ferment ces panneaux-là pendant qu'ils sont chez nous, ils retournent, puis, après ça, ils économisent tout le long du reste du voyage. Nous, on n'a pas cette possibilité-là.

Il faut être un catalyseur dans le développement de véhicules verts en finançant des projets porteurs, mais pas des projets... Je ne parle pas de financer des projets de recherche ici, là, je parle de financer l'acquisition de véhicules verts, d'encourager l'acquisition de véhicules verts. On a parlé tout à l'heure au niveau des municipalités, bien, c'est vrai aussi à plusieurs niveaux. Donc, moi, je vous dis : Si, par exemple... On a parlé d'Autobus Lion — c'est un très bel exemple — tout à l'heure. L'Autobus Lion, c'est un projet où on a financé la fabrication d'autobus Lion, la recherche et développement. On aurait pu se prendre autrement puis dire : On va commander 300 autobus scolaires au Québec, et maintenant on va en appel d'offres, ça nous prend une entreprise québécoise qui la développe.

C'est ce que l'aéroport de Calgary a fait. L'aéroport de Calgary a décidé qu'il avait besoin de navettes électriques et ils ont fait un appel d'offres pour des navettes électriques dans l'aérogare à Calgary. 20 navettes à livrer d'ici deux ans, et ils ont fait un appel d'offres à l'échelle nord-américaine. Bien, c'est quatre entreprises du Québec qui se sont rassemblées. On avait 40 jours pour déposer l'appel d'offres et, en 40 jours, on a fait l'alliance entre un collège d'enseignement, un centre de recherche, un constructeur qui est ici, à Québec, Precicad, et Deutschman, qui est un groupe de design. On est arrivé à construire une petite navette électrique qui, vous pourrez voir... Vous voyez qu'elle ressemble drôlement à celle qui est fabriquée en Chine que je vous ai montrée tout à l'heure. Cette navette-là va rouler à l'aéroport de Calgary dans moins d'un an.

Ça n'a coûté rien à l'aéroport de Calgary, cette affaire-là, parce que ça va être une navette qui va être... Ça n'a coûté rien en recherche et développement parce qu'eux autres, ils ont acheté des navettes, ils ont juste passé une commande assez grosse pour pouvoir justifier la recherche et développement de notre côté. Et ces navettes-là vont être couvertes de publicité, et, à ce moment-là, ça va devenir des centres de profit pour l'aéroport de Calgary. Alors, drôlement intéressant. Je vous invite à penser à des modèles d'affaires comme ça aussi. Et, quand on y pense, on pourrait voir plein de places où on pourrait voir des navettes comme ça. Et ma diapositive n'est pas assez grande pour vous en montrer plus, là, mais il pourrait y avoir plein d'endroits où on pourrait voir des navettes comme ça. C'est un exemple, on a vu tout à l'heure que ça pourrait se faire au niveau des municipalités aussi.

Quand on développe des véhicules électriques, des véhicules connectés, des véhicules nouveau genre, on les fait d'abord en laboratoire, ensuite sur la piste d'essai, et enfin on doit les tester en pleine grandeur dans la vraie vie. Nous autres, on vous suggère que ça prendrait un endroit au Québec où on pourrait faire ces essais-là en pleine grandeur, ce qui fait qu'on aurait un quartier, une ville, un secteur dans une ville qui serait dédié à ces essais-là en pleine grandeur. Ça pourrait être près de la piste à Blainville, par exemple, et on pourrait, à ce moment-là, faire converger les chercheurs chez nous.

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons passer maintenant à la période d'échange. Vous aurez peut-être l'occasion de prolonger dans des réponses que vous aurez. Alors, je passe la parole au ministre pour commencer.

M. Heurtel : Merci. Je me demandais... Bon, premièrement, merci pour votre mémoire, là, je suis déjà...

M. Provencher (Yves) : Non, non, c'est bon.

M. Heurtel : Vous avez suscité beaucoup de questions, mais, un, je veux vous remercier pour votre mémoire ainsi que votre présentation. C'est très intéressant parce que ce que je trouvais, j'aimais bien la notion de meilleures pratiques, là, que vous amenez, là. Dans bien des cas, vous nous montrez, bon, Calgary a fait ceci, Vancouver a fait cela. Je me demandais, premièrement, si vous aviez d'autres exemples, là, qui vous venaient comme ça, là, qui pourraient nous aider, mais plus particulièrement au niveau gouvernemental. Est-ce que vous avez des cas, justement, où la question... Parce que la grosse question qui revient régulièrement, c'est la question au niveau des politiques d'achat puis des appels d'offres. Bien des cas, là, on en a parlé dans nos travaux, bien des cas, là, c'est le nerf de la guerre, là, à bien des égards.

Alors, la question que je me pose, c'est de voir si vous avez vu à travers votre expérience de quelle façon des gouvernements, d'autres gouvernements ont pu intégrer néanmoins dans leur politique d'achat des principes liés, bon, donc au développement durable, à la lutte contre les changements climatiques qui ont permis, justement, d'aller au-delà de ce qui se fait de façon conventionnelle depuis trop longtemps, qui ont permis, justement, d'ouvrir la porte à, justement, des cas comme vous l'avez mentionné.

M. Provencher (Yves) : Bien, en fait, il n'y a pas tant d'exemples que ça qui existent actuellement, mais l'idée, c'est beaucoup par le regroupement d'achats qu'on pourrait susciter assez d'intérêt pour que des fournisseurs puissent se mettre ensemble et produire un véhicule. On a le CGER ici qui est un bel exemple. On travaille beaucoup avec le CGER parce que, justement, ça nous permet d'aller... Eux autres, quand vient le temps d'implanter un certain nombre de véhicules, ils ont accès à plusieurs municipalités et, à ce moment-là, ils ont la masse critique pour pouvoir développer un carnet de commandes assez gros pour dire : Bon, maintenant, on intéresse, par exemple, le type qui fabrique des panneaux solaires, on dit : Bon, bien là, maintenant, tous les appareils qui vont planter des poteaux maintenant, pendant qu'ils sont... ou des véhicules nacelles qui sont utilisés par les municipalités, bien, ils pourraient tous être alimentés de façon hybride ou avec des batteries. Si on disait que toutes les municipalités, maintenant, vont commander ce genre de véhicule là à l'avenir, un fournisseur peut facilement savoir : O.K. Je vais en avoir tant dans les prochains cinq ans, ça vaut la peine de mettre une équipe en arrière de ça pour développer un nouveau produit électrique.

M. Heurtel : Si on intégrait, justement, des mesures qui forçaient le gouvernement au niveau de ses politiques d'achat, au niveau de ses appels d'offres, de considérer, bon, des principes d'écoconditionnalité, des principes de lutte contre les changements climatiques, d'avoir une certaine cohérence avec tous les objectifs qu'on s'est donnés en matière d'électrification des transports, de mobilité durable, d'aménagement durable, vous, de votre côté, de votre expérience, l'impact économie que ça pourrait avoir sur, justement, les entreprises que vous avez présentées et la création peut-être d'autres développements du secteur industriel, pensez-vous que ce serait un positif?

M. Provencher (Yves) : Bien, oui, parce que c'est clair qu'il y a moyen de le faire sans que ça exige des investissements importants supplémentaires — j'ai envie de dire — pour le gouvernement. Les villes vont devoir acheter des véhicules, de toute façon. Il s'agit maintenant de dire : Ils doivent avoir un contenu québécois électrique et... Bref, il y a un certain nombre de critères à établir, puis, à ce moment-là, on va de l'avant, puis on va en appel d'offres, et les groupes s'organisent. S'il y a un contenu québécois qui est spécifié, à ce moment-là ce sera une entreprise québécoise qui va prendre la responsabilité du projet.

Mais ça ne veut pas dire qu'on connaît tout au Québec, là. On est bons, là, mais on ne connaît pas tout encore. Alors, je pense qu'il y a moyen... il ne faut pas limiter ces partenariats-là à des groupes québécois seulement. Il y a trop, actuellement, d'organismes québécois qui forcent des partenariats entre des universités, entre des entreprises privées, et puis là il faut tout faire à l'intérieur du Québec sans nécessairement aller chercher parfois un expert à l'extérieur du Québec qui pourrait nous apprendre, puis, que la prochaine fois, on n'en aura plus besoin, on l'aura appris, mais, au moins la première fois, on a besoin de son expertise.

Donc, moi, je suggère qu'il y a moyen, en définissant comme il faut ce genre d'appel d'offres là, de s'assurer qu'on va avoir un contenu local québécois. Je vous donne l'exemple de Metro Vancouver. Je reviens là-dessus parce qu'eux autres, dans leurs appels d'offres, il y a des points qui sont donnés sur la proximité du fournisseur, il y a des points qui sont donnés même... Je parlais tantôt des émissions, c'est intéressant parce que Metro Vancouver, à un moment donné, disait... les gens qui travaillent en santé disaient : Bien là, les émissions, les particules fines dans l'atmosphère, ça nous coûte une fortune en soins de santé. Et le défi, c'était : Bien, combien ça coûte en soins de santé? Et là ils ont été capables d'établir qu'un kilo de particules fines dans l'atmosphère, ça vaut combien en soins de santé, et là ça faisait partie maintenant des critères de l'appel d'offres aussi dans l'évaluation du coût de l'équipement.

Le Président (M. Reid) : Merci. M. le député de Mégantic.

• (15 h 50) •

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. Écoutez, moi, j'ai une couple de questions parce que vous nous indiquez que non seulement la nouvelle stratégie de développement durable devrait s'appliquer aux ministères et organismes, mais aussi aux municipalités, surtout avec le cas de CGER, qui dessert principalement les municipalités du Québec. Mais, là où j'ai un petit problème, c'est... Avec les groupes précédents, on a parlé beaucoup, vous savez, des véhicules électriques, puis on n'a pas tellement parlé des véhicules lourds, puis on a parlé aussi des technologies de bornes 2 et 3. Est-ce qu'il n'y a pas une crainte qu'à un moment donné les camions, ça va prendre trop de temps les recharger? Comment vous voyez cette problématique-là pour que ces camions-là soient efficaces en utilisation de réseau, par exemple?

M. Provencher (Yves) : Bien, écoutez, les trois exemples que j'ai donnés, là, bon, il y en a un, dans un cas, c'est un camion hybride, là, donc on n'a pas besoin de le recharger, là. Mais on économise quand même 35 % de carburant avec ce camion-là.

Dans le cas des panneaux solaires, bien, ça évite, tout simplement, que le camion roule toute la nuit pour recharger ses batteries, puis pour chauffer la cabine, puis alimenter le téléviseur pour le conducteur le soir. Donc, c'est huit litres de carburant qu'on sauve à l'heure. Donc, c'est encore là un avantage au niveau du véhicule lourd.

Pour le véhicule 100 % électrique, bien, ce ne sera pas dans toutes les applications. Comme on le disait tout à l'heure, même pour les voitures électriques, Daniel disait : 90 % des déplacements se font en véhicule électrique, il reste toujours un 10 %. Je vous dirai que, dans le camion lourd, ce ne sera probablement pas 90-10, mais ça sera peut-être un 20 % qui se fait 100 % électrique. Et il y a du transport régional, il y a du transport local qui peut se faire complètement en camions électriques qui peuvent se recharger. Les camions dont je vous ai parlé, des véhicules 100 % électriques, circulent actuellement. Ils font à peu près une tournée d'à peu près 300 kilomètres par jour avec une recharge à mi-chemin durant le déchargement du véhicule, et ça fonctionne.

Donc il y a des applications. Je ne suis pas prêt à dire qu'on est rendu à dire : On va pouvoir avoir 100 % des camions lourds électriques, là, on n'est pas là. Mais, si on en avait 20 % seulement, ce serait déjà pas mal, d'autant plus que ces 20 % là, ce seront ceux qui sont en ville, ceux qui font du déplacement court.

M. Bolduc (Mégantic) : Est-ce que votre objectif principal, à ce moment-là, est de développer de la compétence québécoise qui va nous amener ailleurs, aux autos électriques, etc.? Est-ce que c'est ça, l'idée derrière l'approche que vous préconisez là?

M. Provencher (Yves) : Tout à fait. Tout à fait. La navette, par exemple, dont je vous ai parlé, bien, écoutez, c'est la première qui se construit pour un aéroport, une aérogare au Canada. Il y a plein de gens qui sont venus voir cette navette-là depuis qu'on la construit parce que c'est fait pour les grands aéroports et pour les personnes à mobilité réduite. On va en avoir de plus en plus, de ça, sur notre planète, des gens à mobilité réduite puis des grands aéroports. Donc, il y a un marché extraordinaire pour ça. On en a construit 20 pour Calgary. On en a déjà pas mal, des gens qui viennent de l'étranger qui viennent nous voir pour voir si on peut en construire pour eux autres.

M. Bolduc (Mégantic) : Dans la nouvelle stratégie de développement durable, quelle serait votre fenêtre, votre horizon de développement? Parce que l'ensemble des ministères et organismes et les municipalités, ça représente quand même un volume considérable, donc, sur quel échéancier, vous verriez l'implémentation de l'ensemble de ces groupes-là dans... Est-ce qu'on pourrait faire ça d'ici 2020, plus, moins? C'est quoi, votre point de vue?

M. Provencher (Yves) : Bien, la navette électrique, là, on va en produire commercialement à partir de l'année prochaine. Alors, ça, c'est déjà un cas. Il y a déjà le parc Jean-Drapeau à Montréal qui nous dit : Ça nous intéresse. Donc, de plus en plus de gens s'intéressent à ça. Puis ça, on parle juste du Québec. Ça, c'est à part des groupes à l'étranger aussi. Donc, ça, c'est déjà commercial. À partir de l'année prochaine, ça va déjà être rentable. Ça va se faire avec Précicad et Kargo, une entreprise de Québec et qui va être rentable à ce moment-là.

M. Bolduc (Mégantic) : Non, mais vous n'avez pas vraiment répondu. Est-ce qu'on peut mettre ça dans la stratégie 2015-2020 puis dire : En 2020, on aura un contenu électrique de, je ne sais pas, 50 %, 70 %, 90 %? Comment vous voyez ça, là?

M. Provencher (Yves) : Pour le camion lourd, vous voulez dire?

M. Bolduc (Mégantic) : Oui. Bien, l'ensemble de la flotte du gouvernement, là, ministères, organismes et municipalités.

M. Provencher (Yves) : Mettons que j'irais, de façon conservatrice, à 20 % de la flotte. C'est parce que c'est sûr que, si on parle de voitures, bien, on peut les acheter demain matin, là. Moi, je parle de véhicules spécialisés parce que c'est vraiment là qu'on va tirer notre épingle du jeu. Comme le groupe avant moi le disait, ce n'est pas essayer de battre Toyota puis Nissan sur des véhicules de promenade, là. Ce n'est pas là notre gain, là, c'est sur les véhicules de niche. C'est ça que...

M. Bolduc (Mégantic) : Mais vous me dites qu'on a déjà un gros pourcentage ou une capacité technologique. Quel serait le pourcentage de contenu québécois de ces véhicules-là, 100 %, 90 %? Je ne sais pas, moi.

M. Provencher (Yves) : Mettons 80 % de contenu québécois parce que, même la navette, il a fallu aller s'approvisionner un petit peu à l'étranger, là.

M. Bolduc (Mégantic) : 80 % et plus. O.K.

M. Provencher (Yves) : Mais elle est toute fabriquée ici. Elle est conçue, fabriquée, pensée ici, au Québec, mais il y a quelques pièces qui viennent de l'étranger.

M. Bolduc (Mégantic) : Combien de temps, là?

Le Président (M. Reid) : Oui, encore quatre minutes.

M. Bolduc (Mégantic) : O.K. Moi, j'ai un autre débat que j'aimerais faire avec vous parce que c'est bien beau, des véhicules lourds, mais, vous savez, ça devient... Puis je ne suis pas contre ça, je suis absolument en faveur de ça, une des problématiques... Puis, si vous êtes dans l'est du Québec, entre autres, vous allez voir rapidement que tous les camions lourds se retrouvent sur la 91, sur la 87, et on va sur le réseau américain. Là, il y a une question de coordination, là, qui va être éventuellement nécessaire. C'est toujours difficile pour un transporteur d'avoir trois, quatre technologies de camions — électrique, hybride, diesel, etc., là — parce qu'il y a un coût d'entretien lié à ça. Puis moi, j'ai un problème de fond parce qu'au Québec ça va bien, on est 100 % électrique. Mais, aux États-Unis, où on est 20 % hydro, gaz, charbon, etc., est-ce que ce n'est pas un mythe, un peu, de charger un véhicule avec de l'électricité qui est faite au minimum 60 % avec des hydrocarbures? Comment vous voyez cette espèce de mythe là, là?

M. Provencher (Yves) : Oui. Bien, moi, je suis d'accord avec vous, là, quant à moi, ce n'est pas un mythe, là, le transport longue distance, on est encore loin du véhicule électrique. O.K.? Quand on descend sur la 91, là, je ne pense pas qu'on voie de véhicules électriques avant très, très, très longtemps. Ça pourrait être du gaz naturel, par exemple, ça pourrait être d'autres combustibles. Ça pourra être éventuellement aussi de l'hydrogène parce que ça aussi, ça se recharge assez rapidement. Il y a des véhicules à l'hydrogène qui fonctionnent actuellement, mais, encore là, là, on comprend, là, que c'est... Parce que, l'hydrogène, je ne le vois pas comme étant le combustible principal, mais je le vois comme — les anglophones utilisent ça — un «range extender», là, excusez-moi, mais ça allonge le trajet qu'on peut faire avec un moteur électrique. En fait, recharge... c'est une batterie à l'hydrogène, là, qui va pouvoir allonger le trajet. Donc, moi, je le vois comme ça plus que comme... Descendre en Floride en camion électrique, là, je ne le vois pas avant... je ne suis pas sûr que je vais voir ça.

M. Bolduc (Mégantic) : Donc, on doit développer une infrastructure pour du marché régional à court terme, dans les prochaines décennies, quelque chose comme ça, là.

M. Provencher (Yves) : Oui.

M. Bolduc (Mégantic) : Au minimum.

M. Provencher (Yves) : Oui, tout à fait. Puis, vous savez, à partir du moment où il va y avoir des véhicules, puis on est capable de les construire, comme je vous disais tout à l'heure, au Québec, ces véhicules-là, bien, les flottes vont s'organiser, là. Les municipalités vont être capables de recharger chez eux, la SAQ va être capable de recharger chez eux. On travaille beaucoup avec la SAQ, ils sont déjà prêts, eux autres, là. Ils attendent ça, un véhicule électrique, là, parce qu'ils ne font pas des grandes tournées, ces gens-là. Il y a plein de monde, là. Hector Larivée a des véhicules... qui fait de la livraison de légumes en ville et qui a des véhicules hybrides, il attend juste ça, des véhicules électriques, lui. Alors, il y a plein de monde qui ont besoin de ça. Et, comme je dis, c'est en ville que ça va se passer, et c'est là qu'on a besoin de réduire le plus possible nos émissions. Du CO2, c'est partout, mais les émissions... particules fines, c'est surtout en ville.

M. Bolduc (Mégantic) : Donc, si je comprends bien, il faut que vous basiez toutes nos soumissions sur des critères de performance exclusivement, et non sur le plus bas soumissionnaire, mettre les critères...

M. Provencher (Yves) : Oui. Ça, c'est clair. Ça, il n'y a rien de pire pour tuer l'innovation que d'aller au plus bas soumissionnaire.

M. Bolduc (Mégantic) : O.K. Ça me va.

Le Président (M. Reid) : ...il reste encore un peu moins d'une minute.

M. Bolduc (Mégantic) : Une minute?

Le Président (M. Reid) : Rapidement.

M. Bolduc (Mégantic) : O.K. Donc, moi, j'aurais aussi une autre évolution à vous faire... Parce qu'on a parlé du gouvernement, des organismes, parce que c'est vraiment l'objectif de notre stratégie, qu'est-ce que vous pensez de l'objectif du 50 000 véhicules électriques d'ici 2020? Puis, en même temps, j'ai un petit problème, moi, avec ça. Rapidement, c'est que les subventions...

Le Président (M. Reid) : ...on va se limiter à cette question-là.

M. Bolduc (Mégantic) : Pardon?

Le Président (M. Reid) : On va se limiter à cette question-là parce qu'il lui reste 15 secondes pour répondre.

M. Bolduc (Mégantic) : On va écouter. Puis les subventions qui vont être utilisées par les vendeurs au lieu d'aller aux acheteurs.

Le Président (M. Reid) : Malheureusement, il vous reste cinq secondes pour répondre.

M. Provencher (Yves) : Je n'ai pas beaucoup d'opinions là-dessus. Malheureusement, ça va être court.

Le Président (M. Reid) : Très bien. Alors, je passe maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de Jonquière.

• (16 heures) •

M. Gaudreault : Oui. Merci beaucoup, M. Provencher, de votre présence et de votre mémoire. Écoutez, moi, j'aimerais ça, vous amener ailleurs. On va un peu sortir de votre mémoire. Si vous trouvez qu'on en sort trop, vous me le direz, puis on y reviendra, je comprends. Parce que le Groupe PIT, dont vous faites partie, est une branche, si on veut, de FPInnovations, FPInnovations, comme vous le dites dans votre présentation, qui se spécialise dans la création de solutions scientifiques pour les secteurs forestiers, entre autres, et j'ai constaté par votre mémoire, là, dans votre présentation, que vous êtes vous-même ingénieur forestier, vous avez une formation en génie forestier. Alors, je voudrais qu'on sorte un petit peu du volet strictement transport — mais pas tant que ça non plus — pour aller voir ce qui se fait au niveau forêts. Puis avez-vous l'impression... là, je sais que vous avez des membres à FPInnovations, et tout, mais qu'il pourrait y avoir encore plus de recherche et développement en matière forestière qui soutiendrait le développement durable, qui soutiendrait en même temps des emplois, des communautés qui en vivent et qui irait ailleurs que dans la production de papier, de carton, de circulaires, qui permettrait même — et là il y a un lien avec les transports, évidemment — de produire des biocarburants, par exemple, qui pourraient alimenter les véhicules lourds ou d'autres types de véhicules?

Moi, je suis extrêmement préoccupé, dans une politique de stratégie de développement durable, mais aussi dans une politique de développement économique des régions, de trouver d'autres créneaux à long terme à l'industrie forestière, autrement que de couper des épinettes pour faire du papier journal. Je caricature, mais presque pas. Alors, j'aimerais ça, vous entendre davantage là-dessus parce que moi, il y a quelques années, j'étais assez renversé quand j'ai constaté qu'autrefois AbitibiBowater s'était retirée de FPInnovations. Je crois que PFR, maintenant, est revenue à l'intérieur de FPInnovations, mais il y a eu un trou, là, de quelques années, alors que, pour moi, dans l'industrie forestière, on n'est plus en 1912, là, à l'époque de William Price, là. Alors, j'aimerais ça, vous entendre un peu plus là-dessus, sur l'innovation au sens large dans l'industrie forestière.

M. Provencher (Yves) : Je vais rester assez au niveau... Parce que je suis ingénieur forestier, j'ai gradué il y a 30 ans, puis j'ai travaillé en transport depuis ce temps-là, donc... Mais je travaille quand même chez FPInnovations, puis, effectivement, oui, c'est clair qu'il pourrait y avoir beaucoup plus de recherche et développement. FPInnovations travaille presque exclusivement présentement à développer des nouveaux produits à partir du bois. Donc, on ne travaille pas à produire le plus de deux-par-quatre possible et le papier journal le plus résistant possible, là, c'est vraiment, vous avez raison... c'est du passé, ça, on travaille... Nous, on travaille surtout sur de nouveaux produits, la nanocellulose. On travaille avec des fibres nouvelles pour améliorer au niveau du papier hygiénique, avoir plus d'absorbants, des... On travaille beaucoup au niveau des nouveaux papiers ou des nouvelles caractéristiques qu'on peut aller chercher dans la fibre pour des nouveaux produits qui peuvent... On travaille actuellement avec BASF, par exemple, qui est une grande firme allemande, pour réussir à introduire des nanoparticules, de la nanotechnologie de fibre qui va être utilisée, qui est produite ici, au Québec, par nos entreprises forestières québécoises.

Donc, on est en train de construire une usine avec Kruger actuellement pour utiliser la fibre cellulosique pour produire des papiers dans des produits plus absorbants, des produits hygiéniques, et tout ça. Produit absorbant, produit hygiénique, ça, c'est un produit d'avenir, beaucoup plus d'avenir que le papier journal, effectivement.

Donc, oui, ça se fait. Est-ce que ça se fait assez? Sûrement pas. Donc, on travaille de plus en plus à essayer d'augmenter ces programmes-là. Le gouvernement fédéral verse des gros montants d'argent chez FPInnovations pour nous aider à revoir un petit peu l'approche que les compagnies forestières ont vis-à-vis le bois. Donc, oui, ça se fait, ça ne se fait pas assez, et, évidemment, les budgets qui sont versés par le gouvernement fédéral sont de moins en moins importants. Et, malheureusement, toute la gestion de la forêt, ça se fait par les provinces, et les provinces se retirent beaucoup de tout ce qui est recherche et développement, deviennent plus des gestionnaires de forêts. Même au Québec, on parle plus de construire... on travaille plus à la gestion de la construction des routes et des choses comme ça que de s'occuper de ce qu'on va faire de la fibre qu'on va sortir de ces routes-là.

M. Gaudreault : Sur les biocarburants, est-ce qu'il y a — là, j'imagine, c'est un peu plus dans votre créneau, là — un marché intéressant à partir de la forêt boréale ou de la forêt québécoise pour produire des biocarburants qui, là, justement, alimenteraient les véhicules?

M. Provencher (Yves) : Je vous dirais qu'à cause des grandes distances de transport le biocarburant est difficilement rentable. On recherche plus des produits à plus haute valeur ajoutée actuellement à sortir de la fibre que de faire du combustible avec cette fibre-là. Je vous dirais que, par exemple, si on va, par exemple, au Brésil, eux autres, ils plantent de la canne à sucre à cinq, six kilomètres autour de l'usine, et là ils réussissent à produire de l'éthanol à un prix compétitif. Nous, on est — bien, vous le savez — à 150, 200 kilomètres en forêt pour aller chercher notre bois, donc c'est très difficile de rentabiliser le biocarburant actuellement.

M. Gaudreault : Oui. Puis, en plus, les arbres, bien, ça prend un certain temps à pousser, là. Je sais qu'il y a une espèce, là, les saules à croissance rapide qui peuvent être un petit peu plus intéressants, mais là il faut trouver des sites près des usines. Je regarde Harold parce que je sais que, dans le Bas-Saint-Laurent, il y avait un projet, là, de saules en croissance rapide. O.K.

En tout cas, moi, je pense que c'est la piste, là. Il faudrait voir, dans la stratégie de développement durable, comment on peut peut-être insister davantage, là, sur le produit bois au sens de la recherche et développement. Je ne sais pas si vous avez une critique à faire là-dessus dans ce que vous avez lu sur la stratégie.

M. Provencher (Yves) : Bien, moi, je pense que c'est sûr qu'il faut travailler à essayer de développer des produits à plus grande valeur ajoutée. Parce que l'idée, ce n'est pas de produire... On s'est très gros développé au Québec en particulier sur produire le plus possible, aller chercher le plus d'arbres possible à l'heure, avec des machines de plus en plus imposantes et de plus en plus productives sans se soucier de savoir comment aller chercher le plus de valeur possible de ce bois-là, et là on faisait du deux-par-quatre. Quand on était chanceux, on pouvait sortir un deux-par-six, c'était plus payant. Mais l'idée, c'est de voir est-ce qu'on est capable d'aller chercher avec la cellulose, avec la composition... prendre avantage de la fibre canadienne, qui est unique. Et celle du Nord-du-Québec est unique et a des caractéristiques très recherchées. Donc, au lieu d'aller en chercher beaucoup, essayons d'aller en chercher moins, mais d'aller chercher plus de valeur de cette fibre-là. Et ça, c'est sûr que...

M. Gaudreault : O.K. Il nous reste 1 min 30 s. Je voudrais vous entendre un petit peu plus sur l'efficacité énergétique parce que ce que j'ai lu dans votre mémoire, c'est intéressant, mais je trouve que c'est plus au niveau des principes. Quand vous dites, bon, c'est ça, que c'est efficace, là, évidemment, pour le transport, comment on pourrait soutenir davantage l'efficacité énergétique par des mesures? Parce qu'honnêtement vous êtes le premier groupe, de mémoire, là, qu'on entend ici où vous insistez davantage sur l'efficacité énergétique. Dans le fond, l'énergie la plus intéressante, c'est celle qu'on n'utilise pas, hein, c'est le bon vieux principe, là, mais comment, concrètement, on pourrait le faire atterrir dans la stratégie?

M. Provencher (Yves) : Bien, il y a beaucoup... enlever des barrières à l'usage... des barrières réglementaires qu'on a ici, au Québec, en particulier pour l'utilisation des technologies les plus efficaces. Ça, c'est dommage parce que c'est probablement dû au fait que nos fonctionnaires ne peuvent pas voyager à l'extérieur ou ont moins de contacts avec l'extérieur, ce qui fait que l'exemple que je vous donnais tout à l'heure des déflecteurs à l'arrière des remorques, bien, c'est quand on voit qu'il y en a partout autour de nous autres, que, là, nos fonctionnaires à Québec nous appellent — parce qu'ils sont membres chez nous — et nous disent : Bien là, comment ça qu'il y en a partout, puis nous autres, on n'a pas ça encore chez nous? Bien oui, mais c'est ça, vous auriez dû aller au congrès à Toronto, il y en avait... on en a parlé ça fait trois ans. Alors, enlever ces barrières-là, c'est déjà un élément important là-dessus.

Il y a la subvention qui est intéressante. Moi, je dirais, il faut essayer...

Le Président (M. Reid) : Merci. Merci, je vous arrête.

M. Provencher (Yves) : O.K. On pourra s'en reparler.

Le Président (M. Reid) : Je vais passer la parole au député de Groulx, du deuxième groupe d'opposition.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, je vais lui permettre de continuer parce qu'en fait c'était ma question première que j'avais au niveau des barrières. Alors, vous dites dans votre document, là, présentation PowerPoint, page 11, que le gouvernement est souvent l'administration la plus restrictive en termes de technologies vertes et vous faites état, donc, de cas au niveau, là, du... Vous avez appelé ça, là, la...

M. Provencher (Yves) : Les rétreints.

M. Surprenant : ...les rétreints. Puis il y a également une compagnie, là, de Blainville, là, qui veut faire... Convelsys qui veulent produire, mais qui doivent produire ailleurs. Alors, être restrictif en termes législatifs puis être pris dans un dédale administratif, c'est deux choses. Pouvez-vous nous dire de quel côté on se situe au niveau de ces problématiques-là?

• (16 h 10) •

M. Provencher (Yves) : Je pense qu'on a les deux, on a la chance d'avoir les deux. La restriction, c'est que c'est au niveau des... au niveau des règlements sur les charges et dimensions, on est plus restrictif, là, on n'accepte pas, par exemple, là, ces déflecteurs-là. Donc, ça, il y a une restriction de ce côté-là.

Les dédales administratifs que... Puis, peut-être pour parler de la question d'efficacité énergétique dans ce cadre-là, on a un bon programme de subvention qui s'appelle Écocamionnage au Québec, et je vous dirais qu'on est porté à subventionner des choses qui sont relativement faciles à rentabiliser. On devrait peut-être pousser l'enveloppe un petit peu à essayer de subventionner des choses qui sont moins évidentes. Une jupe aérodynamique qu'on subventionne, qui vaut 600 $ et qui se rentabilise en neuf mois, je ne sais pas si on a vraiment besoin de subventionner ça pour que les gens en achètent, voyez-vous, alors qu'il y a des panneaux solaires, comme ceux que je montrais, qui sont beaucoup moins évidents à rentabiliser, et ça, ils ont peut-être besoin d'un petit coup de pouce gouvernemental. Ça, c'est le message que je passerais à ce niveau-là.

Quant au dédale administratif, écoutez, cette entreprise-là, Convelsys, veut construire des camions électriques ici, au Québec, cherche par tous les moyens de... Puis il y a un programme qui s'appelle Technoclimat ici et qui est disponible pour ce genre de projets là, malheureusement, je ne sais pas pourquoi, mais ça fait deux ans qu'ils sont pris là. Puis je le sais, j'en ai eu, des projets dans ce programme-là qui ont pris plus de deux ans à traverser toute la... à travers tous les dédales. Alors, je ne sais pas pourquoi c'est comme ça, mais c'est la situation qu'on vit actuellement dans différents projets. Donc, ça, c'est des dédales administratifs, ce n'est pas de la réglementation.

M. Surprenant : Merci. Puis j'ai une autre question maintenant au niveau... On parle beaucoup de l'électrification des transports. Vous avez parlé de d'autres carburants alternatifs tantôt. Au niveau du gaz naturel, il n'est vraiment pas cher, puis on pense qu'il va demeurer pas cher pour un bout de temps. Alors, voulez-vous m'expliquer, au niveau des flottes de camions entre autres, pourquoi ils ne convertissent pas au gaz naturel? Puis, dans un deuxième temps, le gaz naturel, est-ce qu'il pourrait freiner la filière électrique, finalement, éventuellement, si...

M. Provencher (Yves) : Je ne pense pas que le gaz naturel freine la filière électrique parce qu'il est quand même assez dispendieux, là, comparativement à l'électricité. La raison pourquoi les flottes tardent à prendre le gaz naturel, c'est que les intervenants dans le gaz naturel, ce qu'ils ont fait jusqu'à maintenant, c'est qu'ils ont dit : Bon, le gaz naturel est tellement pas cher, c'est une évidence même, tout le monde va convertir au gaz naturel. Malheureusement, il y a plein d'autres coûts qui doivent être pris en compte quand on convertit notre flotte au gaz naturel. Par exemple, le camion coûte 80 000 $ de plus. Sur un camion de 120 000 $, ce n'est pas à négliger. J'ai besoin de former mes mécaniciens, j'ai besoin de former mes chauffeurs. J'ai besoin d'un garage qui soit antiexplosif parce que, quand je renverse du diesel par terre, je passe le balai puis je le ramasse. Si je perds du gaz naturel, il monte au plafond, puis c'est mes éclairages, c'est mon système de chauffage qui sont là, donc j'ai besoin de... donc, je ne veux pas que mon gaz naturel monte au plafond puis qu'il se ramasse avec une petite étincelle de gaz propane qui chauffe mon garage. Donc, j'ai besoin de convertir mon garage aussi. Donc, tous ces frais-là ne sont pas considérés.

Et là les gens jouent un peu les meneuses de claque dans le cas du gaz naturel, puis ils disent : C'est facile, le gaz naturel, tout le monde va en acheter. Ça fait trois ans qu'on travaille à essayer d'implanter des camions au gaz naturel au Québec. Transport Robert en a acheté une centaine il y a trois ans, il ne s'en est pas revendu presque depuis, sauf dans le transport des matières résiduelles, où, là, c'est vraiment une évidence, si je produis mon carburant et que je le réinjecte dans mon véhicule, oui, c'est évident que ça devient rentable.

Mais, malheureusement, les gens... Il y a eu des grosses subventions gouvernementales qui ont été versées pour introduire le gaz naturel, et ce qui manquait dans ça, c'est une étude de rentabilité à la fin de tout ça. Ce n'est pas juste le fait que le gaz soit à 0,75 $ par rapport à du diesel à 1,25 $ qui va faire que les gens vont changer du jour au lendemain. Il y a bien d'autres paramètres à considérer, et ça n'a pas été fait encore.

M. Surprenant : Merci.

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, merci pour votre contribution à notre commission.

Je lève temporairement les travaux pour permettre à notre prochain invité de prendre place, M. Venne.

(Suspension de la séance à 16 h 14)

(Reprise à 16 h 17)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous recevons maintenant M. Michel Venne, de l'Institut du Nouveau Monde. M. Venne, vous avez 10 minutes pour faire une présentation. J'essaierai de vous donner un signal quand il restera une minute, et, par la suite, nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission pendant 35 minutes. Alors, à vous la parole.

Institut du Nouveau Monde (INM)

M. Venne (Michel) : Merci, M. le Président. Merci, messieurs, madame de la commission. Merci de nous avoir invités à présenter un point de vue sur le projet de stratégie gouvernementale de développement durable pour les cinq prochaines années.

L'Institut du Nouveau Monde, c'est une organisation qui est spécialisée en participation citoyenne, et notre mémoire ne porte que sur cette dimension de la stratégie parce que c'est le sujet sur lequel nous sommes en mesure d'avoir une contribution qui pourrait vous être utile.

La participation citoyenne, c'est un concept qui englobe trois formes de participation : la participation électorale, que tout le monde connaît; la participation publique, consultation, participation à des processus de décision des gouvernements ou des municipalités; et la participation sociale, qui est toutes les formes d'engagement, de bénévolat, et ainsi de suite.

Alors, ce principe, ce concept de participation citoyenne, il correspond à l'un des 16 principes de la loi, comme vous le savez, celui de la participation et de l'engagement. Et aujourd'hui, en fait, le message que j'ai à vous transmettre, c'est que ce principe de la participation et de l'engagement, c'est un principe qui est fondamental, c'est un principe clé du développement durable et qu'il doit être traité à sa juste valeur.

En lisant le projet de stratégie, nous avons eu le sentiment que la participation et l'engagement... que ce principe-là avait perdu du galon par rapport à la stratégie précédente. Dans la stratégie 2008-2013, favoriser la participation des citoyens à la vie collective ou, si on veut, la participation citoyenne — une autre façon de le dire, la même chose — c'était considéré comme une orientation de la stratégie et pour laquelle on avait défini des objectifs bien spécifiques, et il y avait, je crois, des raisons pour ça que j'aimerais rappeler aujourd'hui, alors que, dans le projet de stratégie que nous avons devant nous, la participation citoyenne est, en quelque sorte, traitée comme un moyen, comme une modalité qui peut servir à atteindre d'autres objectifs de la stratégie.

À notre avis, il y a lieu de rehausser le statut de la participation citoyenne dans la stratégie, et je vais vous dire pourquoi. Le principe d'engagement et de participation qui est inscrit dans la loi est plus exigeant que celui de la participation publique comme un outil pour, par exemple, favoriser la bonne gestion des ressources naturelles, comme c'est proposé, et avec justesse, dans le projet de stratégie. Les éléments de la stratégie qui concernent la participation publique sont bons, il n'y a pas lieu de les enlever, mais il y a lieu d'ajouter.

Mais le principe, il est défini dans la loi comme disant que la participation et l'engagement des citoyens et des groupes qui les représentent sont nécessaires pour définir une vision concertée du développement. Or, définir une vision concertée du développement, ça veut dire participer aux décisions. Ça veut dire, donc, que, si on veut refléter l'intention du législateur, si on veut refléter toute la richesse du principe de la participation et de l'engagement qui est enchâssé dans la loi, en fait c'est toute la démocratie qu'il faut renforcer.

• (16 h 20) •

Le principe qui est dans la loi, nous l'interprétons comme la volonté ou la nécessité, pour le développement durable, d'accroître la participation des citoyens à la vie démocratique sous toutes ses formes et dans toutes les circonstances. Ce renforcement démocratique soutient le développement durable en soi. Le développement sera d'autant plus durable que la société est plus démocratique, que les citoyens participent activement aux élections, à la société civile, aux processus consultatifs quand ils sont invités. Des citoyens engagés, conscients de leur rôle comme citoyens, non seulement comme contribuables, comme consommateurs ou comme partie prenante concernée par un projet spécifique, contribuent mieux au développement durable d'une société. Les gens se sentent plus responsables de la société lorsqu'ils y participent et ils contribuent davantage au bien-être. La participation favorise le vivre-ensemble. On a des problèmes avec ce genre de concept depuis quelque temps.

Alors, pour refléter, donc, ces constats, eh bien, nous avons formulé quatre recommandations.

Nous disons également — avant d'arriver aux recommandations — que l'affirmation claire, nette d'une orientation en faveur de la participation citoyenne dans la stratégie répond également à un besoin de la société. Parce que nous avons eu l'occasion, au cours des dernières années, des derniers mois, de produire quelques études, des bilans de la participation publique et de la participation citoyenne au Québec, nous avons également pu consulter les rapports qui ont été publiés en marge du projet de stratégie, et on voit bien que les indicateurs ne sont pas tous positifs concernant la démocratie et la participation au Québec.

La participation aux activités communautaires est en baisse. Nous avons, à l'égard du reste du Canada, un déficit d'heures de bénévolat et d'engagement civique sous toutes ses formes. La participation électorale est basse. Il y a eu un sursaut en 2012 après les événements du printemps étudiant, comme vous le savez. Néanmoins, le problème de la participation électorale est réel, en particulier chez les jeunes de 18 à 24 ans, qui votent dans une proportion de moins de 30 %. C'est un drame parce qu'un jeune qui ne vote pas la première fois qu'il acquiert le droit de vote, il ne votera peut-être plus jamais dans sa vie. Et un jeune qui ne vote pas va être moins engagé dans sa communauté. Et un jeune qui est moins engagé dans sa communauté va moins voter, va moins s'intéresser à ce qui se passe dans la société, va donc être un citoyen moins actif, moins contributeur à cette société-là. Donc, c'est un... Comment dirais-je? Il y a là un problème auquel il faut trouver des réponses, et le projet de stratégie de développement durable est un instrument qui peut servir à mettre cet objectif-là sur la table et à le faire rayonner dans toute l'administration publique.

Alors donc, notre première recommandation, elle est très simple, il s'agit, au fond, de ramener ce qui existait déjà dans la stratégie 2008-2013, c'est-à-dire une orientation spécifique qui consiste à accroître la participation des citoyens à la vie démocratique. En soi, ça répond donc, comme je l'ai dit, à un besoin de la société, mais aussi à un des principes de base, un des principes fondamentaux du développement durable qui est reconnu, d'ailleurs, dans une multitude de conventions internationales et par des organisations internationales également.

La deuxième recommandation est liée à la première, c'est-à-dire qu'il faut se fixer des objectifs précis en matière de renforcement de la participation des citoyens à la vie démocratique. C'est-à-dire qu'une fois qu'on s'est donné une orientation, là, on se donne des objectifs pour renforcer la démocratie, et non pas des objectifs uniquement, comme c'est déjà prévu dans le projet de stratégie — et c'est très bien — pour utiliser des modalités de participation aux fins de faciliter, par exemple, la gestion des ressources naturelles ou la mobilisation des communautés.

Et on vous soumet quelques propositions d'objectifs. On se dit, par exemple, que, si, pendant les cinq années d'application de la stratégie, on trouvait le moyen de doter l'État québécois d'un cadre de référence en participation publique... Un cadre de référence, ça, ça servirait de guide pour les ministères, les organismes, y compris même peut-être l'Assemblée nationale — bien que je suis conscient du statut particulier de l'Assemblée nationale — donc, au développement de leurs propres politiques de participation publique. On ne prescrirait pas des mécanismes particuliers, mais on énoncerait des grands principes, des règles à respecter, des bonnes pratiques. Ce cadre-là pourrait aussi servir aux municipalités.

Pour que ce cadre de référence ne demeure pas lettre morte, son adoption devrait être assortie par la création — ou en attribuant le mandat à une entité déjà existante — donc, d'une entité qui serait chargée de coordonner l'application de ce cadre de référence et d'accompagner les ministères et les organismes dans la rédaction et la mise en oeuvre de leurs politiques de participation.

Aujourd'hui, un des problèmes auxquels on est confronté, c'est que des ministères, des organismes, parfois même des commissions qui sont créées sur une base temporaire ont besoin de consulter la population sur un sujet ou sur un autre, et on repart de zéro souvent. On ne sait pas exactement comment le faire, alors on va chercher de l'aide à l'extérieur et on réinvente le bouton à quatre trous à chaque fois qu'on veut faire une consultation. On n'adopte pas toujours les bonnes pratiques parce qu'on les connaît moins. Donc, une entité chargée d'accompagner les ministères et les organismes serait utile.

Troisième objectif, initier une démarche de réflexion sur les meilleurs moyens de développer les compétences civiques au Québec — il n'y a plus d'éducation à la citoyenneté dans les écoles; accélérer les engagements de l'État en lien avec l'ouverture des données publiques, transparence, accès à l'information, c'est déjà en cours, on l'accélère; puis, finalement, encourager la participation électorale, en particulier celle des jeunes.

Les deux autres recommandations, je ne fais que les mentionner. On a une recommandation qui consiste à doter le Québec d'un conseil du développement durable, je pourrai élaborer en réponse à des questions. Et on a une dernière recommandation qui, en fait, concerne l'orientation relative à la réduction des inégalités économiques et sociales. Nous sommes ravis que cette orientation-là figure dans le projet de stratégie de développement durable. Ça répond à un besoin actuel du Québec, nous croyons cependant qu'il y aurait lieu de revoir les objectifs et de se donner les indicateurs pertinents.

Le Président (M. Reid) : Merci, M. Venne, de votre présentation. Nous allons passer maintenant à la période d'échange, et je commence en donnant la parole au ministre.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Venne. Merci pour votre mémoire ainsi que votre présentation. Vous soulevez des questions très importantes qui méritent d'être approfondies, là, dans le contexte de la stratégie.

Moi, ce que j'aimerais, peut-être vous donner, justement, le temps qui m'est alloué pour peut-être aller plus en profondeur puis plus en détail aussi. Dans le contexte de la stratégie du gouvernement en matière de développement durable, vous n'êtes pas sans savoir, là, ça vise spécifiquement les ministères, l'action des ministères et organismes en développement durable. Vous avez cité qu'un des 16 principes de la Loi sur le développement durable est, justement, de favoriser la participation citoyenne. Alors, ma question, ce serait de voir... Avez-vous des exemples plus concrets, vu l'expérience de l'institut, des exemples plus concrets qu'on pourrait intégrer à la stratégie qui permettraient, là, justement, là, pour les ministères et organismes, dans leur quotidien, là, d'intégrer la participation citoyenne...

M. Venne (Michel) : Des exemples, là...

M. Heurtel : ...dans leur démarche?

M. Venne (Michel) : En fait, le problème... Excusez-moi, M. le ministre, vous avez terminé?

M. Heurtel : Oui, oui, excusez-moi.

M. Venne (Michel) : Le problème, pour répondre à votre question, c'est que la participation citoyenne, c'est un concept général, puis presque chaque cas est particulier. On ne consulte pas de la même façon sur un projet de Plan nord ou sur une politique familiale. D'ailleurs, il y a des projets qui peuvent être des projets de politique ou des projets économiques, peu importe, qui ne sont pas tous au même stade. Il y a une espèce de culture à implanter, et c'est la raison pour laquelle ce qu'on propose, finalement, ce n'est pas une série de mesures spécifiques, parce que chaque ministère, chaque organisme dans chaque situation, devrait avoir à sa disposition les moyens de choisir dans un coffre à outils qui lui serait proposé les meilleures façons de procéder.

Et c'est pour ça qu'on vous recommande que l'État se dote d'un cadre de référence, ce qui voudrait dire que, bon, un ministère a besoin de consulter, ou un organisme a besoin de consulter, ou une municipalité, sur un projet de mine sur la Côte-Nord qui est controversé — vous en connaissez, des projets de ce genre-là — bon, alors, il y a une entité au sein du gouvernement, il y a un bureau, il y a un secrétariat qui peut conseiller ce ministère-là sur la meilleure méthode à utiliser, à partir de quand on consulte, comment on fait ça, qui peut donner de la formation, qui peut encadrer les fonctionnaires qui seront responsables de cette consultation-là.

Dans un autre cas, on est placé dans une situation où la participation peut être utile pour servir de médiation entre des groupes qui, dans une communauté, ont de la difficulté à s'entendre. Posons une hypothèse, que, dans un quartier de Montréal, il y a un groupe culturel qui veut ouvrir une église et qu'il y en a d'autres qui ne veulent pas — une hypothèse choisie au hasard — alors, comment on procède? Comment?

Alors, c'est donc une expertise. Il faut que l'État se dote d'une expertise. Et les moyens, bien, il y en a des catalogues, tout plein. Et c'est ça, le but. Le but, c'est que l'État se dote d'une expertise et finisse par se développer, au fil des ans, une culture. C'est un nouveau concept. Tout comme le développement durable est un concept relativement récent encore aujourd'hui, on a encore besoin de se l'approprier, c'est la même chose pour la participation. Souvent, on s'imagine, par exemple, que la participation, ça veut dire permettre aux citoyens de décider seuls d'une orientation à la place des élus. Or, la participation citoyenne ne doit pas être perçue comme ça, elle doit être perçue comme un outil d'aide à la décision. Elle doit aussi être perçue comme un outil de mobilisation des communautés pour réaliser des choses que l'État ne peut pas faire tout seul, par exemple. Alors, c'est pour ça que vous donner une liste de mesures ne serait probablement pas utile à ce stade-ci.

• (16 h 30) •

M. Heurtel : Je comprends. Même question. Dans le mémoire puis dans votre présentation, vous parlez d'éducation. Si je vous comprends bien, il y a un travail additionnel d'éducation de la population à faire. Encore là, dans un contexte de stratégie, où, là, on cherche des moyens pour, justement, travailler avec les ministères et organismes, sachant que, présentement, le réseau de l'éducation n'est pas soumis à la stratégie présentement...

M. Venne (Michel) : Ce que j'ignorais.

M. Heurtel : Oui. Bien, c'est ça, alors on a les municipalités, le réseau de la santé, le réseau de l'éducation pas directement soumis à la stratégie. Dans ce contexte-là... Et aussi, j'ajouterais, il y a la notion d'éducation, la notion aussi de transparence, d'accès à l'information. Est-ce que vous avez des cas concrets, des exemples qui nous aideraient, justement, à préciser le tir, là, dans ces deux objectifs-là qu'on partage?

M. Venne (Michel) : Deux moyens d'éducation, d'apprentissage de ce que c'est, être un citoyen. Le premier, c'est un cours, évidemment, de citoyenneté à l'école. Vous me dites que les écoles ne sont pas soumises à la stratégie. Est-ce que le ministère est soumis à la stratégie? Alors, il y aurait sans doute, en tout cas, une réflexion à faire là-dessus, et on l'a amorcée, cette réflexion-là, avec des représentants du milieu de l'éducation, avec une série de propositions très concrètes qui consistent à créer, en quelque sorte, un rite de passage civique à l'école. Vous savez, quand vous êtes une personne immigrante, vous arrivez ici, pour devenir immigrant, pour avoir votre statut et votre citoyenneté, vous devez passer un examen, et il y a une cérémonie où on vous remet un certificat puis on vous dit : Vous êtes un citoyen canadien, et, parmi les choses auxquelles vous avez droit, c'est d'aller voter aux élections. Bien, un jeune qui acquiert le droit de vote, là, à la fin de l'école secondaire ou au début du cégep, lui, il n'a pas ça. Alors donc, si on associait un cours d'éducation à la citoyenneté ou des activités d'éducation à la citoyenneté en parascolaire avec une célébration de l'acquisition du droit de vote et qu'on ajoutait à ça différentes activités de simulation qu'on fait dans les écoles sur le parlementarisme, c'est une des options.

Une autre des options qu'on a déjà suggérée et qui avait presque été retenue, c'est l'existence d'un service civique pour les jeunes de 16 à 24 ans. Ça existe en France, aux États-Unis, en Allemagne, en Italie, un peu partout dans le monde. Il s'agit d'un programme qui fait qu'un jeune qui n'est ni à l'école ni au travail peut passer huit mois, six mois, un an — ça dépend du programme qu'on conçoit — pour aller s'engager dans une communauté à faire quelque chose qui est utile pour les autres. Il apprend pendant cette année-là à être autre chose qu'un étudiant ou un travailleur, il apprend à être un citoyen. Ce sont deux exemples, on pourrait en donner d'autres.

Le Président (M. Reid) : Merci. Je passe la parole au député de Mégantic.

M. Bolduc (Mégantic) : Écoutez, je trouve votre présentation très intéressante et je vous en remercie. Moi, je suis un peu — comment je dirais ça? — pas confus, mais un peu embarrassé par le fait que... Vous savez, on a toutes sortes de niveaux de consultation. Je vais essayer de vous mettre un peu dans le contexte. En fait, quand on fait une campagne électorale, en fait, les grands enjeux sont mis sur la table, les citoyens se prononcent. C'est une forme de participation citoyenne.

M. Venne (Michel) : Complètement.

M. Bolduc (Mégantic) : O.K. Au même titre, la stratégie de développement durable qu'on fait ici, on rencontre des dizaines de groupes, qui est une autre forme de consultation citoyenne. On a aussi le fait que les gens nous font des pétitions, O.K., qui vont de 50 à 50 000 citoyens. Je vous donne de certains niveaux, puis un des problèmes de fond qu'on retrouve à l'intérieur de ça, c'est la difficulté d'appliquer peut-être le bon outil au bon endroit, là. Je ne sais pas si vous voyez ce que je veux dire. Donc, ma question, c'est : Pourriez-vous éclaircir un peu là-dedans?

Puis la deuxième partie, c'est : Est-ce qu'il y a des modèles dans le monde que vous connaissez, là, l'institut, puisque vous devez contacter ces gens-là... Quels seraient les modèles que vous trouvez qu'ils sont des leaders dans nos sociétés démocratiques d'aujourd'hui?

M. Venne (Michel) : Alors, justement, la recommandation qui consiste à se doter d'un cadre de référence, bien, c'est pour faire le ménage. C'est justement pour déterminer dans quelles circonstances laquelle des méthodes est la meilleure. Parce que faire participer les citoyens inutilement, bien, c'est mauvais pour la démocratie. Ça décourage, ça crée du cynisme, et ainsi de suite. Il n'est pas toujours nécessaire de consulter tout le temps sur tout. Et puis il y a des façons de consulter qui sont plus efficaces que d'autres. Par exemple, si on a un projet, il est toujours mieux de consulter les gens le plus en amont possible du projet. Ensuite, quand on consulte les gens, quand on fait participer les gens, il y a différents niveaux de participation. Il y a une espèce d'échelle de la participation citoyenne, ça commence par l'information. D'ailleurs, quand on sonde les citoyens qui nous disent qu'ils veulent participer entre les élections à des processus de décision, leur première réclamation, c'est d'être mieux informés. Alors, première chose dont on doit s'assurer quand on est dans un gouvernement, c'est de bien informer la population, de rendre les données accessibles, de rendre l'information accessible, de le faire d'une manière qui soit facilement appropriable par un citoyen moyen qui n'a pas nécessairement un diplôme universitaire, par exemple. Bon.

Ensuite, bien, c'est la consultation. C'est-à-dire je vous demande votre avis, comme vous êtes en train de le faire. Ensuite, c'est la discussion. Alors là, on commence à entrer dans le vif du débat public. C'est quand on commence à échanger avec les autres dans des processus de délibération où on cherche à se convaincre mutuellement que la participation commence à devenir la plus riche et la plus... — comment je dirais? — celle qui contribue le mieux à la prise de décision. Pourquoi? Parce que, par exemple, ici, je suis devant vous aujourd'hui, je vous fais ma présentation. Vous allez rencontrer plein de gens, ils vont tous vous faire une présentation, puis, à la fin, vous allez trier à travers ça ce qui vous apparaît intéressant. Forcément, il y a des gens qui vont venir vous dire peut-être le contraire de ce que je suis en train de vous dire aujourd'hui, mais moi, je n'aurai pas eu l'occasion de débattre avec cette personne-là, donc de la contredire, de peut-être trouver un terrain mitoyen, et c'est dans cet échange-là que la qualité se trouve.

Or, dans les processus de consultations parlementaires, par exemple, bien, on est encore aujourd'hui beaucoup dans des processus conventionnels comme ceux-là. Chacun vient faire sa présentation un après l'autre, et souvent c'est un ministre qui tranche, parfois c'est la commission qui adopte une résolution. Et on est souvent placés dans des modèles comme ceux-là, il faut évoluer, il faut aller plus loin, et c'est là qu'on peut faire évoluer la démocratie et la participation. C'est un exemple que je vous donne.

M. Bolduc (Mégantic) : Les leaders mondiaux, est-ce que vous avez des exemples à nous proposer ou...

M. Venne (Michel) : En fait, il y en a à plusieurs endroits dans le monde. Si je vous disais les États-Unis, ce ne serait pas correct parce qu'il y a des endroits aux États-Unis où on ne consulte personne. Mais il y a des expériences américaines qui sont parmi les meilleures au monde. Par exemple, on utilise souvent aux États-Unis une méthode qu'on appelle le jury de citoyens. On est dans de la consultation, là, ce n'est pas un jury qui va décider à la place d'un gouvernement. Mais ce qu'on fait, c'est qu'on regroupe, par exemple, un échantillon de la population et on invite les citoyens qui sont ainsi regroupés à d'abord recevoir de l'information sur un enjeu. Puis, des fois, c'est des enjeux graves, là, procréation assistée, euthanasie. Ça peut être aussi sur un oléoduc, hein? Et donc ces gens-là, ils sont des citoyens, ils sont choisis au hasard, et on leur donne de l'information, on leur donne une période de temps pour qu'ils puissent échanger entre eux, recevoir des experts, leur poser des questions et, à la fin, donner leur avis. On en tient quatre, cinq, six, 10, 12 à travers le pays comme ça, ça nous permet d'avoir le pouls de ce que la population pense. Ça, c'est un bel outil d'aide à la décision.

Il y a aussi une organisation aux États-Unis qui, malheureusement, a muté en autre chose, qui s'appelait AmericaSpeaks, qui a procédé à d'immenses consultations à travers le pays sur des grands projets de politique. Et ces grandes démarches de consultation là, elles ont non seulement la vertu d'aller recueillir le pouls de la population, mais elles ont aussi la vertu d'informer la population sur des enjeux graves.

On retrouve la même chose à l'échelle de l'Union européenne. Le Danemark a développé un certain nombre de mécanismes qui sont particulièrement reconnus et repris ailleurs dans le monde. L'Union européenne, à son échelle, est particulièrement, je dirais, active et à l'avant-garde de ce point de vue là, entre autres dans la recherche sur l'utilisation des nouvelles technologies à des fins de consultation publique.

• (16 h 40) •

Le Président (M. Reid) : Je passe la parole maintenant au député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. M. Venne, bien, justement, dans la même optique et pour aller un peu plus loin, vous parlez à votre troisième recommandation de doter le Québec d'un conseil de développement durable. Pour avoir participé dans d'autres processus où une des questions qui était adressée au départ était qui devrait venir, dans le fond, se prononcer sur les enjeux qui sont adressés face à la population, quelle partie de la population ou quel organisme, est-ce que, le conseil, ça vise un peu cette optique-là?

M. Venne (Michel) : Bien, généralement, un conseil est composé d'un certain nombre de personnes qu'on choisit, que l'on nomme parce qu'elles ont une certaine sagesse, une certaine compréhension de la société, une capacité d'écouter les autres, d'échanger, de trouver la meilleure solution dans un esprit de service public, donc pour le bien commun, pour le bien de l'État, si on veut aussi, le bien de la société. La fonction conseil dans un gouvernement, c'est comme la fonction recherche et développement pour une entreprise. Le conseil, lui, la raison pour laquelle on en est venu à vous faire cette recommandation-là, c'est parce que, dans la stratégie, on décrit les mécanismes interministériels de coordination, on sait qu'il existe un commissaire qui porte un jugement sur l'atteinte des objectifs et la réalisation des plans d'action, mais il y a relativement peu d'interaction avec la société sur une base multisectorielle.

Chaque ministère est en relation avec sa communauté, avec les parties prenantes de son secteur. Mais le développement durable, c'est justement un concept à travers lequel on cherche à réconcilier l'économique avec le social, l'environnement et, des fois, on dit la culture en plus ou alors on l'inclut dans le social, peu importe. On cherche à réconcilier ça, et l'idée, c'était de créer une instance qui est la porte... l'endroit de relation entre le gouvernement et la société civile pour réfléchir au développement durable au Québec, pour, justement, provoquer des discussions sur comment on fait cette réconciliation-là entre les différents univers, donc aller au-delà des silos, si on veut, qui sont créés par le fait que chaque ministère est en relation avec sa communauté, mais qu'il y a peu de lieux où on peut, d'une part, croiser les regards et, d'autre part, aussi animer la discussion dans la population, justement parce que, comme je le disais tout à l'heure, le développement durable, là, ce n'est pas encore compris par tout le monde, cette affaire-là. Et qu'il y ait une organisation qui ait pour mandat d'en parler, d'en faire débattre, de l'expliquer, de trouver des compréhensions communes et de faire se croiser les regards des différents secteurs de la société nous apparaissait comme un plus pour la stratégie.

Le Président (M. Reid) : Merci beaucoup. Nous passons maintenant au porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, M. Venne. Merci d'être ici. Merci pour votre présentation. Et je suis sûr que votre mémoire a fait l'objet d'une consultation chez vos membres, connaissant vos façons de procéder. Je voudrais savoir... Parce que vous êtes très critique quand même envers la Stratégie de développement durable que nous avons devant nous, là, quand vous dites à la page 15, en bas de la page : «La participation était une orientation de la stratégie précédente; elle devient un moyen dans le projet révisé.» Et là vous dites que «le statut accordé à la participation citoyenne dans le projet de stratégie 2015-2020 est moins important que celui qui était accordé dans la stratégie précédente». Alors que nous devrions, dans une deuxième génération de stratégie de développement durable, faire un bond en avant, là, ce que vous nous dites, c'est que, selon votre impression, avec le filtre de la consultation citoyenne, c'est plutôt un bond en arrière en termes de participation citoyenne.

Et, un petit peu plus tôt dans votre mémoire, la page précédente, page 14, là vous êtes très critique à l'égard des réformes de la gouvernance territoriale amenées par l'actuel gouvernement, que ça soit la... Et là vous les citez, conférences régionales des élus qui ont été abolies, les CLD qui ont été largement coupés. Vous parlez de la disparition de Solidarité rurale du Québec, vous parlez de la fusion appréhendée de certaines commissions scolaires, la fusion d'établissements de santé. Et là vous terminez ce chapitre en disant : «Il est toutefois important de prendre conscience de l'impact de celles-ci sur l'un des principes clés de la Loi [du] développement durable, celui de la participation et de l'engagement des citoyens.»

Je comprends que vous n'êtes pas ici — vous le dites vous-même, là — pour faire une critique détaillée de chacune de ces décisions, ce n'est pas ça que je veux faire non plus. Mais on ne vit pas dans un monde désincarné non plus, là, on fait face à des décisions gouvernementales en même temps qu'on fait face à une analyse de la stratégie du gouvernement en matière, là, de développement durable 2015-2020.

Donc, comment vous pensez, sans être une panacée, là, que la stratégie de développement durable peut pallier à ces disparitions que vous soulevez, là, de différentes instances de concertation minimalement, là, ou de pouvoir, ou de décentralisation, même, dans les régions? Est-ce que le conseil du développement durable dont vous suggérez la création peut devenir, à ce moment-là, ce moyen de pallier notamment à la disparition d'un certain nombre d'institutions, là, dans les régions à partir des réformes gouvernementales?

M. Venne (Michel) : Merci pour votre question. Vous avez raison. En effet, le mémoire, c'est le résultat d'un travail qui est fait depuis 10 ans, en quelque sorte, de consultation auprès de nos membres, des participants à nos activités, et ainsi de suite. En effet, on s'est basé sur notre expérience puis aussi sur le croisement entre ce que les citoyens nous ont dit depuis 10 ans et la littérature scientifique et les expériences internationales.

Vous dites qu'on parle de bond en arrière. Je ne porte pas de jugement sur l'ensemble du projet de stratégie, je ne porte un jugement que sur la question de la participation citoyenne et je ne peux que constater qu'avant c'était une orientation spécifique qui avait ses propres objectifs et que, dans le document que nous avons devant nous, il y a des objectifs spécifiques qui me semblent être placés au niveau davantage des modalités qu'au niveau des orientations ou des objectifs prioritaires. On ne définit pas non plus comme un enjeu important la question de la participation citoyenne dans les enjeux du projet de stratégie, et ce n'est pas non plus une activité incontournable. Or, il nous semble — et c'est ce que je viens plaider aujourd'hui — que la participation citoyenne, c'est fondamental dans le développement durable. Et ça se corrige, et puis je ne porte aucun jugement de valeur sur les... ou je ne fais aucun procès d'intention au gouvernement à ce sujet-là.

L'autre chose que vous dites, c'est que vous abordez les réformes de la gouvernance territoriale. Ce que je fais, c'est que je constate que ces réformes ont lieu. Ce que je constate, c'est que les organisations qui sont soit abolies, soit modifiées, soit fusionnées sont des organisations qui sont conçues de telle manière qu'il y a des formes de participation citoyenne. Soit que des citoyens, individuellement, y participent à titre de membres du conseil ou autre chose, soit que des organisations de la société civile ont l'occasion, là, de croiser leur regard sur le développement d'une région, d'un quartier, d'un village, d'une localité ou — comment je dirais? — d'une dimension de la société québécoise, la ruralité.

Je pense qu'il faut prendre conscience du fait que ces changements-là qui sont sans doute faits de façon sectorielle pour un ensemble de raisons qui sont peut-être justifiées dans chacun des secteurs, mais globalement il y a comme un effet global cumulatif que, là, tout à coup, il y a des milliers de citoyens qui, actuellement, sont des bénévoles dans des structures où ils peuvent participer aux décisions dans leur communauté, bien, qui perdent la tribune qui existait et à laquelle ils pouvaient participer. Donc, il y a une réduction des opportunités de participation, c'est juste un fait.

À partir du moment où on prend conscience de ça puis qu'on dit : La participation citoyenne, c'est essentiel pour le développement durable, bien, on fait quoi? Comment, par quoi on remplace ça? Comment on remobilise ces gens-là qui, dans leur coin de pays, avaient une contribution au développement de leur communauté et de leur société? Il faut que l'État en prenne conscience et réalise que, bien, on a une perte, et il faut trouver le moyen de regagner des espaces de participation d'une autre façon si ce n'est pas de cette façon-là. C'est pour ça que je dis que je ne porte pas de jugement sur les réformes qui sont proposées elles-mêmes. Les CLD, c'est-u la meilleure chose? La CRE, c'était-u le meilleur véhicule? Je n'en sais rien. Je ne porte pas de jugement là-dessus, mais j'observe qu'on a là des lieux de participation et de concertation qui disparaissent. Il faut les remplacer par quelque chose, et, oui, je pense que la stratégie de développement durable peut être un véhicule pour soutenir, en tout cas, l'expression d'objectifs qui sont liés à ces formes de concertation et de participation.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Reid) : Merci. M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Oui, bonjour. Actuellement, dans les régions, ce qu'on vit, ça ne va pas vraiment vers le développement durable, là. Au niveau de la pauvreté, on voit beaucoup, de plus en plus d'isolement. On a coupé dans des programmes d'habitation, il y a des projets de coopératives qui sont à risque actuellement. Dans les commissions scolaires, je vous dis, ils ne sont pas en train de penser s'il va y avoir des cours de citoyenneté, là, ils sont en train de calculer puis essayer de sauver les meubles. Les jeunes, ils ne sont pas en train de préparer des mesures d'employabilité, c'est les CJE qui sont chambardés dans leur vocation. Au niveau des aînés, il s'agit de voir ce qui se passe dans les journaux, ce qui se passe dans les CHSLD, on vient de couper dans les ententes qu'il y avait en région avec les aînés. Ça fait que ça va à l'inverse, là, du développement durable.

Mais, d'un autre côté, vous dites : Ça peut couper la participation citoyenne. Mais, d'un autre côté, ça en crée parce que ce qu'on voit, le mouvement un peu partout, Touche pas à mes régions!, je veux dire que les citoyens se mobilisent actuellement, et il y a des grandes assemblées. On a vu en Abitibi, on a vu dans le Bas-du-Fleuve, les citoyens se mobilisent autrement actuellement.

Mais ce que je voulais voir, c'est... Dans plusieurs domaines, on essaie de... Dans le fond, l'objectif, c'est de briser les silos, briser l'approche silo dans différents domaines, et on se dit que, par la création d'un conseil, on pourrait arriver à avoir une vision plus large, à briser les silos pour permettre un développement plus humain, un développement durable. Il y a plusieurs politiques qui existent déjà qui avaient cette vocation-là, cette volonté-là, entre autres la politique de lutte à la pauvreté, il y a la politique de vieillir ensemble. Il y en a plusieurs, politiques. Qu'est-ce qui ferait en sorte que, dans ce domaine-là, la création d'un conseil de cette stratégie-là finirait par réussir à avoir une vraie vision d'un développement plus humain, plus durable? Et comment on pourrait s'assurer que cette vision-là ne soit pas dictée d'en haut, de Dieu le Père qui est à Québec, qui sait tout, mais qu'il laisse un peu de place aux régions, puis avoir une vision plus régionale, entre autres pour occuper notre territoire? Grosse question.

Le Président (M. Reid) : Vous avez une minute. Une minute environ pour répondre...

M. Venne (Michel) : Une minute? Bon. Un conseil, c'est un outil, hein? Ce n'est pas une panacée, mais ça permet de dégager une vision. Comment faire en sorte que ça ne vienne pas de Dieu le Père? Il faut lui accorder de l'indépendance, de l'autonomie, il faut nommer là des gens qui ont du leadership, qui ont une capacité d'autonomie dans leur pensée et dans leurs dires également, dans leur discours. Et oui, en effet, c'est une manière, c'est... Un des objectifs, c'est de briser ces silos-là. Vous mentionniez tout à l'heure qu'il y avait des politiques où on cherchait à agir de façon transversale. Avant, on avait un conseil des aînés, un conseil de la jeunesse, un conseil de la famille, un conseil des relations interculturelles, un conseil de la science et de la technologie. Chacun avait son domaine et sa clientèle.

L'idée d'un conseil du développement durable, comme dans beaucoup d'autres pays — il y a au-delà d'une centaine de pays dans le monde qui ont des conseils économiques et sociaux — ce qu'on fait, c'est qu'on traite toutes ces clientèles-là et tous ces enjeux-là ensemble. Le conseil, il doit être intergénérationnel, il doit être interculturel, il doit être interrégional, il doit être intersectoriel. Et c'est comme ça qu'on réussit à élever une discussion, en essayant d'avoir une vision qui est transversale du rôle de l'État. Ça, c'est difficile dans un État.

Le Président (M. Reid) : Merci. Merci. Alors, nous passons maintenant à M. le député de Groulx, du deuxième groupe d'opposition.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. M. Venne, bonjour. Alors, à votre recommandation 2, qui est à l'égard de fixer des objectifs précis en matière de renforcement de la participation des citoyens à la vie démocratique, votre dernier point, c'est encourager la participation électorale, en particulier celle des jeunes. Alors, vous disiez tantôt à titre d'exemple que ça pourrait être, entre autres, une célébration de l'acquisition du droit de vote, qui pourrait créer un rite, là, de... ce rite de passage là pourrait créer un intérêt. Alors, est-ce que vous auriez d'autres idées? Je pense que c'est important de cibler, à mon avis, les jeunes. Alors, souvent, c'est plus difficile de récupérer des gens que de bien les partir. Alors, auriez-vous, dans vos consultations, obtenu d'autres idées?

M. Venne (Michel) : D'abord, il faut comprendre pourquoi des jeunes ne vont pas voter. Ce n'est pas parce qu'ils ne vous aiment pas, vous, les députés. Ce n'est pas parce qu'ils sont critiques à votre endroit, c'est parce qu'ils ne savent pas que vous existez. Ils ne comprennent pas, les jeunes qui ne vont pas voter, à quoi ça sert, la politique. Ils n'ont pas de... La politique partisane n'est pas sur leur écran radar, pour la plupart d'entre eux. Je parle de ceux qui ne vont pas voter, évidemment. Parce qu'il y en a, des jeunes qui sont engagés. Il y a des commissions jeunesse dans tous les partis, par exemple. Bon. Mais ceux qui ne vont pas voter, ce n'est pas sur leur écran radar. Il faut donc les amener à s'intéresser à la politique.

Alors, le moyen, probablement, le plus sûr, c'est de passer par l'école. Pourquoi? Parce qu'ils y vont tous au moins jusqu'à un certain âge. Ensuite, parce que c'est une institution qui porte les valeurs de la société et qui les transmet aux jeunes, ça fait partie de son rôle, qu'elle est crédible, que c'est un lieu de rassemblement aussi et que c'est un lieu de reconnaissance quand un jeune réussit quelque chose. Et donc d'associer l'éducation civique à l'école, d'associer ce rite de passage civique... de célébrer le moment où tu acquiers le droit de vote à l'école, c'est significatif, c'est le premier moyen, c'est pour ça que je l'ai mentionné tout à l'heure.

Ensuite, il faut faciliter le vote parce que des jeunes nous disent : Ce n'est pas si simple que ça, aller voter. Bon, on peut critiquer, là, mais il y a des façons d'améliorer le vote. On l'a fait aux dernières élections, par exemple, en permettant aux étudiants de voter sur leur campus. Est-ce qu'on doit examiner davantage le vote électronique? Peut-être qu'on n'est pas encore rendu là parce qu'il y a des enjeux de sécurité, il y a des enjeux de confidentialité. Mais certainement que tout ce qu'on est capable d'améliorer sur le plan de la logistique électorale, il faut le faire. Ensuite, il y a des moyens de communication. L'éducation passe par l'école, passe aussi par l'information, et, bien entendu, il faut utiliser les moyens de communication qu'utilisent les jeunes.

Ensuite, on a compris avec le temps que l'un des facteurs qui fait qu'un jeune va voter, c'est qu'il participe à d'autres choses dans la société. Il est membre d'un parti, évidemment, ou autre chose, il est membre d'une association, il s'intéresse à un enjeu qui le passionne, que ce soit l'environnement, que ce soit l'électrification des transports s'il étudie en génie. Peu importe le sujet, si un jeune participe, si un jeune fait des choses dans la société, s'engage, comprend qu'il a besoin des autres pour que la société marche mieux, il va aller voter davantage. Donc, tout ce qu'on est capable de faire pour favoriser la participation des jeunes — je donnais l'exemple du service civique tout à l'heure — il faut le faire.

Au Québec, on a un déficit de bénévolat par rapport au reste du Canada. Quelqu'un me disait ce matin, d'ailleurs, que ce déficit de bénévolat là qu'on a au Québec, si on le comblait et qu'on payait les gens pour le temps qu'ils passeraient à faire du bénévolat, c'est une valeur économique de 7 milliards, énormément de temps. Alors, il faut amener ces jeunes-là, justement, à s'engager dans la société. Une fois engagés, ils vont aller voter.

M. Surprenant : À la page 19 de votre mémoire, vous mentionnez qu'il est une dimension de la vie collective qui a un lien de cause à effet avec la participation, c'est celle des inégalités sociales. Au paragraphe suivant, vous parlez qu'elles continuent, d'ailleurs, de s'élargir au Québec, ces inégalités sociales là, et que l'Institut du Nouveau Monde a mis en place depuis 2012 une démarche participative sur les inégalités sociales. Vous me résumez un petit peu cette démarche-là, s'il vous plaît?

M. Venne (Michel) : On a conçu un centre de documentation sur le Web le plus important au monde en langue française. On a publié une couple de livres, on a convoqué des experts, on a réfléchi aux causes et aux solutions. On est allés voir des citoyens partout à travers le Québec, on en a consulté au total 4 000 pour aller voir quelle était leur perception, d'abord, des inégalités et, d'abord, s'ils trouvaient que c'était un problème ou pas. On les a sondés aussi sur le sujet, les trois quarts estiment que la réduction des inégalités — c'est pour ça que c'est une très bonne chose que ça soit dans la stratégie — ça devrait être une priorité pour l'État. Donc, on a consulté, on a informé, on a fait travailler des experts ensemble, et là on arrive à une phase où on va davantage mettre en valeur, diffuser, faire connaître le résultat de ces consultations-là, de ces travaux que nous avons menés. Ensuite, on va essayer d'identifier certaines mesures qui sont peut-être plus prometteuses que d'autres puis on va refaire le même processus, on va aller voir des gens, des experts, des organisations de la société civile, les citoyens pour leur demander ce qu'ils en pensent.

Finalement, il y a une chose sur laquelle on voudrait travailler, c'est de développer une façon d'évaluer l'impact des politiques ou des réformes sur inégalités. Pas les réformes qui sont en cours, n'importe quelle politique publique. Quand on change la fiscalité, prochain budget, est-ce qu'on élargit les inégalités ou on les réduit? Il y aura une commission sur la fiscalité qui va rendre son rapport. Les recommandations qui sont faites dans ce rapport sur la fiscalité, est-ce qu'elles élargissent les inégalités ou elles les réduisent? Comment on fait pour évaluer ça? Sur quels critères on doit se baser? Parce que les inégalités, c'est un problème, évidemment complexe. Alors, c'est là-dessus qu'on veut maintenant continuer de travailler.

Le Président (M. Reid) : Alors, merci beaucoup, M. Venne, pour votre contribution à la commission.

Je suspends les travaux de la commission quelques instants.

M. Venne (Michel) : Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 17 heures)

(Reprise à 17 h 3)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec, qui en sont à leur troisième présentation aujourd'hui dans les commissions parlementaires. Alors, bienvenue. Et je vous cède la parole, vous avez 10 minutes pour faire une présentation. Et commencez, s'il vous plaît, par présenter les gens qui vous accompagnent, vous présenter vous-même, même si on vous connaît, et, par la suite, nous aurons un échange qui va durer environ 35 minutes.

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

Mme Bertrand (Françoise) : Bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je suis Françoise Bertrand, présidente-directrice générale de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui par M. Stéphane Forget, vice-président, Stratégie et affaires économiques à la fédération, ainsi que M. Dany Lemieux, qui est conseiller et consultant avec plusieurs de nos comités dans le domaine du développement durable et de l'énergie et qui...

Une voix : Et membre de la fédération.

Mme Bertrand (Françoise) : Et membre de la fédération.

Alors, brièvement, la fédération, vous le savez, regroupe 140 chambres locales à travers tout le Québec et, ce faisant, représente 60 000 entreprises dans tous les secteurs d'activité et de toutes tailles, autant petites que grandes entreprises. Nous sommes intéressés à la question du développement durable. M. le ministre a eu l'occasion déjà de nous entendre, et c'est vraiment en continuité avec nos positions, je ne dirai pas traditionnelles, mais des positions que nous avons tenues dans plusieurs situations que nous venons à vous aujourd'hui.

Alors, on veut aussi parler du contexte économique particulier dans lequel nous nous trouvons qui nous amène à vouloir, évidemment, profiter de nos atouts, mais aussi, comme j'ai souvent dit, ne pas être trop en avant de la parade, juste être un petit peu en avant, et de tenir du contexte pour que la mise en oeuvre de la stratégie que le gouvernement anticipe soit une mise en oeuvre qui puisse être fructueuse pour tous.

Alors, pour enrichir la pertinence de ses prises de position publiques, la fédération a créé, vous le savez, des comités multisectoriels, et c'est à partir d'une consultation de l'ensemble des comités que nous sommes aujourd'hui devant vous. Pour nous, à la fédération, un débalancement entre les trois volets du développement durable n'est pas souhaitable, et c'est, malheureusement, ce que nous observons. L'harmonie entre le dynamisme économique, la qualité de l'environnement et l'équité sociale, pour nous, n'est pas actuellement au rendez-vous. La sphère économique est trop souvent évacuée du débat public, et cela fait en sorte de laisser toute la place à l'environnement et à l'acceptabilité sociale lorsqu'il est question de développement durable, surtout dans le débat public. À cet égard, le développement de l'industrie des gaz de schiste, celui de la Mine Arnaud ainsi que celui du projet uranifère des monts Otish sont de bons exemples. L'expression «développement durable» contient bel et bien le mot «développement», et non le mot «arrêt», «moratoire» ou «immobilisme».

Dans le cadre des consultations particulières sur cette stratégie, la fédération tient à rappeler qu'il est temps d'offrir une vision plus globale des choses. En 2014, le Québec a vu sa performance économique ralentir, notamment au niveau de la création d'emplois. Les secousses économiques sont plus imprévisibles que par le passé. Elles touchent rapidement un grand nombre de pays et elles produisent des effets majeurs sur l'emploi, sur la croissance économique et même sur la paix sociale.

À l'ère de l'énergie avec des prix fortement variables et de l'économie verte, disposer des sources majeures d'énergie hydroélectrique et éolienne propre et renouvelable représente un atout considérable, atout que représentent aussi les autres ressources naturelles au Québec. La mise en valeur de ce potentiel économique doit cependant être gérée dans le plus grand respect des règles environnementales et en se préoccupant de l'acceptabilité sociale de ces projets. Les retombées économiques liées à la valorisation des ressources naturelles doivent être plus clairement expliquées à la population. La faible croissance économique et le retard dans la productivité des entreprises obligeront la société à faire des choix difficiles entre ce que nous voulons conserver et les sacrifices que nous devrons nous imposer pour les financer.

Comment y parvenir? D'abord, en haussant la productivité, en investissement notamment en efficacité énergétique; ensuite, en faisant du Québec une terre d'accueil pour les investisseurs et en ne les étouffant par avec une lourdeur administrative dans l'obtention de permis et certificats d'autorisation. Également, le gouvernement doit être un facilitateur de développement, notamment en accompagnant les promoteurs lorsque ceux-ci rencontrent les populations locales pour leur expliquer les divers projets sur lesquels ils travaillent. Nous comptons sur le gouvernement pour donner les faits. Non pas se faire le champion des projets, mais bien de s'assurer de la véracité des faits.

Finalement, le gouvernement devrait rapatrier au plus haut niveau la responsabilité du développement durable. C'est de cette façon que nous parviendrons à véritablement atteindre un équilibre entre les trois volets du développement durable. Le gouvernement doit reconnaître que le ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques est essentiellement tourné vers les enjeux environnementaux et a moins de considération et d'expertise pour les questions économiques. Par contre, les ministères d'Énergie et Ressources naturelles et celui du ministère de l'Économie pourraient être des bons partenaires au ministère du Développement durable. La stratégie devrait donc être finalisée avec le souci d'atteindre ces objectifs.

Selon l'Institut de la statistique du Québec, les exportations interprovinciales et internationales de biens et services sont responsables de 1,1 million d'emplois directs et indirects. Cela représente près de 30 % de l'ensemble des emplois au Québec. On ne peut donc s'imposer des contraintes auxquelles les autres juridictions ne font pas face. Il est important que le gouvernement en tienne compte et qu'il analyse les conséquences de la mise en oeuvre de sa stratégie de développement durable. La fédération tient à souligner que, sur les 16 principes présents dans la Loi sur le développement durable, seulement trois intègrent directement le volet économique, soit l'efficacité économique, le pollueur-payeur et l'internalisation des coûts environnementaux. Tous les autres principes ne concernent pas le volet économique.

Prenons à titre d'exemple le projet ligne de transport d'électricité d'Hydro-Québec à 735 kilovolts entre les postes Chamouchouane et Bout-de-l'Île. Il serait tentant d'analyser ce projet en appliquant simplement les 16 principes à cette infrastructure en métal qui pourrait venir changer le paysage. Pourtant, cette infrastructure servira à maintenir la fiabilité du réseau de transport pour acheminer vers les centres de consommation la production d'électricité québécoise, qui est renouvelable à 99 % grâce à l'énergie éolienne et l'hydroélectricité. Ce projet aura des retombées économiques de 1,1 milliard. Ce dernier exemple sur l'importance des infrastructures démontre qu'un débalancement entre les trois volets du développement durable n'est pas souhaitable.

• (17 h 10) •

L'article 2 de la LDD stipule que le développement durable s'entend d'un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Pour la fédération, un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre au leur doit reposer sur la capacité économique d'y parvenir. La fédération souligne également que, sans développement économique, la dette du Québec ne va cesser de croître, et la qualité des services, décroître, cela au détriment des générations futures, ce qui compromettra leur capacité à répondre à leurs besoins.

Selon la fédération, il est impératif de travailler du côté des instruments qui vont favoriser une croissance économique durable plus soutenue. La fédération recommande donc au gouvernement de s'attaquer aux rigidités et autres contraintes qui font obstacle au développement économique durable tels les délais pour l'obtention de certificats d'autorisation par rapport au temps normalement prévu, sans, évidemment, enlever les exigences normales et essentielles.

La fédération tient à rappeler l'importance de la cohérence des politiques qui seront prochainement mises en place par le gouvernement : stratégie maritime, stratégie énergétique, plan d'action sur les changements climatiques, plan d'ensemble en efficacité et innovation énergétiques. La FCCQ est favorable à rendre l'économie plus verte, mais pas à tout prix ni de n'importe quelle façon. Il faut connaître les coûts véritables de chaque filière avant d'en privilégier une au détriment d'une autre en tenant compte des marchés et de l'internalisation des coûts, comme le prévoit la LDD.

Finalement, la fédération tient à rappeler l'engagement gouvernemental de réduire de 20 % le coût des formalités administratives imposées aux entreprises québécoises. C'est un enjeu majeur que la stratégie doit considérer.

La fédération a été surprise d'apprendre, au sujet des indicateurs de suivi des objectifs, que leur détermination et leur développement complets ne seront finalisés qu'en 2015. Il est plutôt curieux de se doter d'une nouvelle stratégie sans préalablement savoir comment le gouvernement va s'assurer de l'atteinte des objectifs et de sa performance.

La FCCQ rappelle au gouvernement ce que le commissaire au développement durable avait dit à propos de l'absence de reddition de comptes et d'une analyse rigoureuse de la performance des différentes mesures énoncées dans le premier plan d'action 6-12.

Le Président (M. Reid) : ...

Mme Bertrand (Françoise) : C'est fini?

Le Président (M. Reid) : Une minute.

Mme Bertrand (Françoise) : Bon. Alors, la fédération est d'accord avec l'orientation et recommande au gouvernement, sur la gouvernance, de renforcer la capacité et les compétences économiques dans les ministères et organismes qui ont une mission davantage environnementale ou sociale ou soit de leur retirer complètement cette responsabilité de considérer le volet économique et de le confier à des ministères à vocation économique tels Ressources naturelles, Énergie et ministère de l'Économie. Et, le reste, nous en parlerons en discutant ensemble. Merci.

Le Président (M. Reid) : D'accord. Alors, nous allons commencer notre période d'échange avec M. le ministre. Je vous donne la parole.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Merci, Mme Bertrand. Bonjour, messieurs. Quant au principe de l'internalisation des coûts, je dois comprendre que vous êtes d'accord avec ce principe-là.

Mme Bertrand (Françoise) : Absolument, oui.

M. Heurtel : Bon. Alors, dans un contexte de stratégie de développement durable où on regarde l'action des quelque 122 ministères et organismes de l'État et pour les cinq prochaines années en matière de développement durable, comment réagissez-vous à la proposition où on ferait en sorte que l'ensemble des décisions, du processus décisionnel gouvernemental, alors les choix, là... Puis prenons comme exemple des choix économiques, donc politique d'investissement, des choix de participation financière dans des projets, prêts, subventions, peu importe, là, que, justement, on fasse en sorte que tous ces organismes, donc sociétés d'État, ministères à vocation économique doivent en amont intégrer ces principes-là dans leur processus décisionnel, comment vous réagissez à ça?

Mme Bertrand (Françoise) : Nous sommes certainement ouverts, mais il ne faut pas que ça devienne un nouveau frein. Il ne faut pas qu'indirectement on fasse ce qui serait à l'encontre d'un développement réel, et je pense qu'il faut absolument... Puis peut-être Dany, tu veux préciser? Internaliser, si ça devient une manière de comparer de façon je ne dirai pas inappropriée, mais qui ne mesure pas réellement l'impact que nous recherchons, nous ne serons pas plus avancés. C'est une chose d'internaliser. On l'a proposé, même sur des travaux de construction, par exemple, de s'assurer d'être capable de mesurer le cycle de vie, mais il ne faut pas se retrouver dans une situation où on va, de façon imaginative, devenir en situation de poursuivre d'autres types d'objectifs. C'est ça qui nous inquiète. Dany.

M. Lemieux (Dany) : Bien, peut-être juste pour vous donner un exemple très concret, à l'époque, lorsque la Loi sur la Régie de l'énergie avait été modifiée pour mettre en concurrence toutes les filières énergétiques, peu importe leur source, il y avait des critères d'internalisation des coûts environnementaux dans le choix des filières. Donc, le but, c'était, même en appliquant un prix du carbone sur les émissions, si une centrale au gaz revient moins chère qu'une centrale hydroélectrique ou une éolienne, bien, ça sera un choix qui sera fait, compte tenu de l'internalisation de critères environnementaux.

Qu'est-ce qui est arrivé, effectivement, une centrale au gaz a gagné une partie du premier appel d'offres qui mettait toutes les filières en concurrence, et c'était un processus qui était prévu, qui était très transparent, avec des prix transparents, des critères qui avaient été préapprouvés. Et finalement qu'est-ce qui est arrivé, c'est qu'on a décidé que non, on ne voulait plus de ça, et on a décidé de tasser une filière pour faire des appels d'offres dédiés. Donc, on s'était doté d'un processus d'internalisation des coûts, et, à la première occasion, on a tassé ce principe-là et on a décidé de faire des appels d'offres dédiés par filière pour la suite des choses. Donc, c'est un exemple concret où on a tenté de le faire, et, dès qu'il y a eu un premier résultat, on a tout enlevé ça du revers de la main. Donc, ça revient à dire ce que Mme Bertrand disait, si c'est pour créer des effets pervers de décider d'aller vers des orientations comme ça, bien, il faut se questionner si on veut le faire vraiment, et comment on va le faire, et si on va tenir la route pour la suite.

Mme Bertrand (Françoise) : Et est-ce qu'on a les informations pour le faire? Est-ce qu'on a l'expertise pour le faire? Parce que c'est ça aussi. Et ça, ça nous inquiète beaucoup.

M. Heurtel : Encore une fois... Donc, je reviens à ma question, justement, dans une perspective où on veut guider les choix, justement, de l'État au cours des cinq prochaines années... C'est ça que la stratégie a comme objectif. Vous parlez d'objectifs de développement économique, puis on est tout à fait d'accord, il faut conjuguer ces objectifs-là en équilibre avec les deux autres piliers du développement durable dans un contexte de lutte contre les changements climatiques, qui, en passant, est un des trois piliers. Parce que vous avez mentionné le Plan Nord, vous avez mentionné la stratégie maritime, mais vous ne nous dites pas qu'un des trois piliers de la stratégie de relance économique du gouvernement, c'est la lutte contre les changements climatiques. C'est justement les investissements du Fonds vert, ça fait partie intégrale des deux autres piliers. Dans ce contexte-là, je tente de cerner votre opinion sur l'idée que, justement, les ministères à portefeuille économique, l'ensemble de l'État doivent se doter d'une série de guides pour prendre leurs décisions. Donc, on intègre, justement, les principes de développement durable. Vos parlez d'internalité, qu'on les intègre puis qu'on dise : Bon, bien, avant de prendre une décision en développement économique, bien, il faut absolument faire un exercice d'internalité des coûts.

Mme Bertrand (Françoise) : Mais c'est là, M. le ministre, où j'ai un problème. Parce que la façon que vous parlez de ça, c'est comme, avant de faire une dimension économique, il faut qu'on soit assujetti aux critères les plus exigeants au plan environnemental. Or, la façon que nous voyons le développement durable, c'est avec trois piliers qui sont en équilibre, parfois plus économique, parfois plus social, parfois plus environnemental, et non pas d'assujettir tout à la stricte rigueur environnementale. C'est un peu une façon différente que nous avons d'examiner les choses. Peut-être, trouverez-vous, peut-être à juste titre, qu'on a un biais, c'est clair, on est un organisme qui fait la défense économique, et, pour nous, la rigueur absolue en matière environnementale peut devenir un risque d'immobilisme économique. Alors, on dit : Il faut pratiquer les meilleures approches avec les meilleures technologies, les meilleures pratiques qui existent, mais avançons et ne faisons pas en sorte que l'internalisation risque éventuellement dans ses exigences à tout mettre avec un poids, j'allais dire démesuré, du côté de l'exigence environnementale.

• (17 h 20) •

M. Heurtel : Bon, je voudrais approfondir cette notion-là parce que, si je vous comprends bien, vous voyez un risque. Si on parle d'internalisation des coûts, là on voit peut-être un risque d'aller trop vers une préoccupation environnementale dans l'évaluation de projets. Le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et l'organisme riskybusiness.org, on s'entend, ne sont pas réputés comme étant des groupes environnementalistes extrêmes, ont tous mis de l'avant, en plus des Nations unies... Puis le dernier comité des Nations unies était présidé par l'ancien président Calderón, du Mexique, il y avait le président de Bank of America au sein de ce groupe-là. Donc, on voit une série d'organismes, là, qui sont à vocation purement économique qui nous...

Mme Bertrand (Françoise) : Pas la Banque mondiale.

M. Heurtel : Bien, en tout cas, le FMI...

Mme Bertrand (Françoise) : La Banque mondiale, ce n'est pas vraiment un...

M. Heurtel : Bien, en tout cas, ce n'est certainement pas dans la même ligue que Greenpeace. Alors, moi, ce que j'essaie...

Mme Bertrand (Françoise) : Greenpeace peut être très économique.

M. Heurtel : Ce que j'essaie, Mme Bertrand, de comprendre, c'est... Si on ne s'entend pas sur la Banque mondiale, très bien. Mais le FMI, en tout cas, puis des organismes comme riskybusiness.org, qui sont dirigés par Henry Paulson, l'ancien président de Goldman Sachs et ancien secrétaire du Trésor de George W. Bush, tous ces organismes — et il y en a une litanie, là — disent que l'internationalisation des coûts est essentielle pour permettre le développement économique.

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, nous, on estime que nous vivons près de juridictions où nous sommes en compétition et on dit : Oui, il faut avancer, oui, il faut être plus exigeant, mais il ne faut pas qu'au nom de ces exigences-là on se trouve en situation d'être désavantagés au plan de la compétitivité de nos entreprises. C'est ce que nous disons, et on n'a pas vu les autres États être en avant sur ces principes-là à ce point. D'avancer, d'avoir... Puis, comme le dit M. Lemieux, très important que, si on avance, on soit capables de le faire avec justesse, avec rigueur et de livrer la marchandise au bout de la ligne — c'est ce que Dany disait — et qu'on n'ait pas une approche pour un projet, mais que, pour l'autre, tout à coup, ce ne soit pas ça. Il faut que ce soit d'égale exigence, c'est ce que je comprends.

M. Heurtel : Donc, si je comprends bien, s'il y a un terrain de jeu égal pour tout le monde, là, puis que les normes sont connues d'avance, là vous seriez d'accord.

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, c'est-à-dire dans les juridictions je pense qu'on a à surveiller... Vous me nommez des organismes. Je reconnais la valeur de ces organismes-là, mais je pense qu'une entreprise, elle ne se mesure pas avec ces organismes-là. Les entreprises, elles se mesurent avec leurs compétiteurs, qui sont en Ontario, qui sont dans l'État de New York, qui sont dans d'autres États, qui sont en Europe maintenant, parce qu'on sait qu'on veut absolument développer davantage ces marchés-là. Donc, il faut s'assurer que oui, être en avant peut-être de la parade, mais pas au point où on se heurte dans notre volonté de pouvoir avancer au plan économique. C'est ce que nous disons.

M. Heurtel : Merci.

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Mme Bertrand, vous parlez, au niveau des clauses habituelles, là... vous avez, au niveau... d'un objectif de performance environnementale sur lequel vous seriez prête à ce qu'il y ait un excédent de coûts de 15 % de plus. J'aimerais que vous élaboriez un petit peu plus là-dessus, là.

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, c'est sûr le bâtiment vert. On a un comité à la fédération qui s'appelle l'Économie verte et, comme on ne voulait pas être, disons, en duplication avec d'autres travaux qui se faisaient dans le comité de développement durable, on a dédié les travaux de ce comité-là sur le bâtiment. Et, au terme de cet exercice-là, nous avons, dans l'analyse cycle de vie, préparé une formation ou, enfin, une activité de sensibilisation, d'information pour les chambres de commerce et leurs membres, et on a fait une tournée régionale pour aller démontrer que ce qui peut être plus coûteux à la construction de départ, dans son entretien sur 10 ans, 15 ans, 20 ans, dans l'amortissement, en fait, nous étions en mesure de démontrer qu'il y avait une économie. Et donc on dit : Lorsqu'un ministère fait des travaux, c'est peut-être une approche qu'il devrait considérer, que oui, il peut y avoir sur un projet un coût supplémentaire à l'économie verte ou — comment dire? — donc, aux techniques vertes, mais, à terme, le coût sera beaucoup moindre. Et, à la veille de soutenir de façon très concrète tout ce qui se passe au Lac-Mégantic c'est peut-être quelque chose à considérer.

Une voix : Il y a une formation pour ça.

Mme Bertrand (Françoise) : Oui, on va, là, faire une formation, d'ailleurs, oui. Alors, c'est l'esprit de dire peut-être qu'il faut avoir... Parce que, on le sait, on va toujours vers le plus faible soumissionnaire, c'est important de maintenir ça, bien sûr, mais on dit : Peut-être qu'il y a peut-être une petite élasticité à donner quand les techniques les plus performantes au plan vert sont là et qu'elles promettent et peuvent réaliser des économies dans l'exploitation de l'infrastructure.

Le Président (M. Reid) : Merci. On parlait de Lac-Mégantic, M. le député de Mégantic.

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. Bonjour, madame. Bonjour, messieurs. Écoutez, moi, j'aurais une question qui est un peu plus pointue, en regard... à la page, je ne sais pas trop, là... 7, où vous parlez de données ouvertes, où vous parlez, en fait, les études d'impact sur les secteurs d'activité au Québec, tandis qu'en Californie les données sont ouvertes. Vous parlez spécifiquement des activités du carbone, mais est-ce que, pour la Fédération des chambres de commerce, la disponibilité des données dans le sens large est quelque chose d'important? Puis qu'est-ce que vous pensez qu'on devrait faire avec ça? Parce qu'on a déjà, comme vous le savez, un travail qui est en élaboration là-dessus, je pense, ce serait pertinent de vous entendre.

Mme Bertrand (Françoise) : Merci. Je vais demander à M. Lemieux de répondre.

M. Lemieux (Dany) : Oui. Au niveau des données, on en a parlé dans le mémoire, un des problèmes majeurs qu'on a, c'est qu'on n'a pas les études coût-bénéfice de façon systématique pour les projets. Que ce soient des projets des ressources naturelles ou tout autre projet d'envergure, un de nos chevaux de bataille qu'on a à la fédération, c'est qu'on n'a pas accès à ces études-là, un, si elles ont été faites. Deux, si elles ont été faites, elles sont soit non disponibles pour des raisons x, y, soit de confidentialité ou... alors que, dans plusieurs cas, ces études-là sont sur Internet, sont publiques.

Aux États-Unis notamment, c'est très transparent au niveau de l'information, qui est disponible en ligne. Et nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut chiffrer. Quand on parlait d'internalisation des coûts tantôt, si on veut procéder à un exercice d'internalisation des coûts, bien, il faut le faire en toute connaissance de cause, quels sont les coûts d'internaliser les coûts, quels sont les bénéfices de le faire, et qu'on puisse prendre des décisions en toute connaissance de cause en ayant tous les chiffres. Et ça, pour faire ça, il faut qu'on ait l'ensemble des données disponibles, et tout ça, il faut que ce soit transparent. On va être capable de beaucoup mieux étaler les faits au niveau des retombées économiques si tout ça est public, est transparent, que les gens ont accès à de l'information qu'à l'inverse. Donc, oui, l'accès des données, la transparence des données, c'est quelque chose de primordial si on veut être capable de bien équilibrer les retombées d'un projet, les bienfaits d'un projet pour la société québécoise.

Le Président (M. Reid) : Merci. M. le député de Mégantic, il reste quelques secondes si vous voulez faire...

M. Bolduc (Mégantic) : Bon, bien, écoutez, je vous remercie. J'aurais aimé ça, élaborer, parce qu'il reste aussi l'aspect social et environnemental. Sur le plan économique, c'est facile de le quantifier, mais les autres dimensions, des fois, sont un peu plus nébuleuses. Mais on pourra peut-être en reparler une autre fois. Merci.

Le Président (M. Reid) : Merci. Nous passons maintenant à l'opposition officielle, et je donne la parole à M. le député de Jonquière.

• (17 h 30) •

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue à la Fédération des chambres de commerce. Merci d'être ici. Ce qui est fascinant dans une commission parlementaire, c'est que, d'un groupe à l'autre, on peut constater vraiment des divergences, parfois même des positions aux antipodes, là, parce que le groupe juste avant vous, l'Institut du Nouveau Monde, est venu plaider essentiellement l'élément suivant, à l'effet que la consultation publique, populaire est un élément central du développement durable, et vous, à la page 15 de votre mémoire, au dernier paragraphe, vous dites :«La FCCQ trouve curieux de retrouver dans le projet de stratégie les conditions gagnantes de la participation publique au processus décisionnel.» À la page 16, à peu près dans le milieu de la page, vous dites : «Les élus sont le phare de notre processus démocratique...» Je vous remercie, ça fait du bien de se le faire dire. Mais là le deuxième bout reste un petit peu plus ici dans ma gorge, là, quand vous dites : «...il ne faudrait pas que, parce que les citoyens s'expriment légitimement, l'acceptabilité sociale devienne un tribunal populaire.» Alors, si, par exemple, en 2003 ou 2004, les citoyens ne s'étaient pas exprimés légitimement, on aurait peut-être aujourd'hui, par exemple, la centrale au gaz du Suroît, par exemple. On aurait peut-être aujourd'hui le port méthanier de Rabaska l'autre côté du fleuve, alors que la situation sur le prix du gaz est complètement différente aujourd'hui.

Mais, là où je suis encore plus préoccupé ou j'ai plus de questions, c'est à la page 14, quand vous parlez du principe de précaution, parce que, là, vous dites : Pour certains — là, je suis au deuxième paragraphe — le principe de précaution signifie que, si rien n'est fait, il n'arrivera rien, et il n'y aura donc pas d'impact. Pour la FCCQ, il faut une approche beaucoup plus pragmatique. Il faut éviter que le principe de précaution soit systématiquement évoqué pour stopper tout développement.»

Bon, vous savez que le principe de précaution ne sort pas d'une boîte de Cracker Jack quand même, ça a été le principe n° 15 de la Déclaration de Rio en 1992. Il y a même un certain nombre de pays comme le Brésil, qui fait partie aujourd'hui des pays émergents, qui l'a intégré à sa constitution. Donc, ils ont constitutionnalisé le principe de précaution. Alors, moi, je suis étonné de vous entendre là-dessus parce que le principe de précaution... Est-ce à dire que, par exemple il n'aurait pas fallu qu'on tienne... S'il n'y a pas de principe de précaution, c'est sûr que TransCanada Énergie aurait foré au large de Cacouna sans tenir compte de l'impact sonore des forages sur les bélugas. Il a fallu qu'on travaille fortement, puis la cour s'est penchée là-dessus même à la suite d'une demande en injonction pour stopper les forages, puis je pense que, dans ce cas-là, le principe de précaution, bien, aurait trouvé application.

Dans un autre domaine — et là vous serez sûrement d'accord avec moi — si on avait appliqué le principe de précaution d'un point de vue strictement économique, parce que, comme vous le dites, le développement durable, c'est le social, c'est l'environnement, oui, mais c'est aussi l'économie, si on avait appliqué le principe de précaution, on ne se serait peut-être pas retrouvé dans la crise financière de 2008 d'un point de vue économique parce qu'on aurait tenu compte davantage de ce qui s'en vient, d'une analyse davantage documentée pour appliquer le principe de précaution d'un point de vue économique.

Alors, là, quand je vois dans un mémoire sur le développement durable ces éléments-là, autant au niveau de la consultation publique que du principe de précaution, je vous avoue que je suis étonné puis j'aimerais ça, vous entendre un petit peu plus pour voir où elle est, la piste d'atterrissage sans tomber dans un rejet de tout ce qui s'est fait, même au niveau international. Parce que, même dans les accords de Maastricht, fin des années 90, ils ont intégré le principe de précaution, etc.

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, écoutez, je pense que le principe de précaution, quand on lit bien ce que c'est, c'est «un risque de dommage grave ou irréversible, l'absence de certitude scientifique complète ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir une dégradation de l'environnement». Alors, pour nous, c'est qu'on peut facilement invoquer ça. C'est une chose de reconnaître le principe tel qu'il a été conçu, il ne faut pas qu'il glisse pour devenir, au fond, le frein à tout développement ou à toute considération. C'est ça, notre crainte à ce moment-ci.

Et, pour nous, quand les projets s'en vont seuls, sans accompagnement du gouvernement... Puis, pour nous, l'accompagnement du gouvernement, ce n'est pas un gouvernement qui dit : Formidable projet, mais la responsabilité du gouvernement, pour nous, devrait être de donner un processus qui va permettre les faits à être donnés à la population, et c'est ce qu'il nous manque actuellement.

M. Gaudreault : Est-ce que vous trouvez que le BAPE, par exemple, dans le rapport qui vient d'être émis juste avant Noël sur les gaz de schiste où il parle... Bon, c'est quand même documenté, là, c'est autour de 500 pages, je crois, là, où il parle que ce n'est pas le moment de développer les gaz de schiste certainement. Est-ce que vous trouvez que, dans ce cas-là, avoir appliqué le principe de précaution aurait été strictement pour stopper le développement des gaz de schiste ou est-ce que l'expression de citoyens est devenue un tribunal populaire dans ce cas-là?

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, écoutez, dans le cas du BAPE, qu'il regarde la question de type environnemental — c'est surtout l'expertise qui est là de l'équipe au BAPE — c'est une chose. Mais, quand ils disent qu'il n'y a pas d'opportunité économique, bien, je m'excuse, ils n'ont pas ce qu'il faut pour se prononcer sur cette situation-là. Quant à l'acceptabilité sociale, ils ont l'écho des gens qui sont venus devant eux, et on ne peut pas dire que c'est nécessairement l'opinion d'une population qui a été bien informée.

Encore une fois, ce que nous disons, c'est : Il est important, si on recourt à l'expression de la population, de s'assurer comme gouvernement que cette population aura accès à l'information factuelle, et c'est la responsabilité.

M. Gaudreault : Comment on fait ça dans un contexte où, par exemple la loi sur l'accès à l'information, certains la caricaturent en disant que c'est une loi de non-accès à l'information, la plupart des documents parviennent des mois plus tard avec une bonne partie des documents qui sont caviardés. Alors, si la population veut avoir de l'information, il faut aussi agir à ce niveau-là. Moi, je veux juste trouver la bonne piste. Comme si vous dites que le BAPE n'est pas mandaté pour analyser l'aspect économique, même s'il y a eu quatre ans d'études, au-dessus de 80 documents, des études scientifiques qui ont été déposées, moi, j'essaie juste de voir comment on peut appliquer un principe de précaution à ce moment-là. Moi, j'essaie de voir ça d'une autre façon puis je me dis : Les manifestations populaires ont peut-être davantage servi d'éveilleur de conscience, à ce moment-là, pour aller plus loin, alors que vous, vous le voyez comme un frein.

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, c'est-à-dire non, ce que nous voyons, c'est la nécessité d'ordonner. Et, présentement, aussitôt que s'enflamme... Puis je ne suis pas étonnée que mon ami M. Venne ait été en accord avec la consultation populaire, c'est ce qu'il fait comme métier. Moi, comme métier à la fédération, on défend le développement économique. Alors, chacun...

M. Gaudreault : ...c'est de trouver la piste d'atterrissage commune puis le dénominateur commun.

Mme Bertrand (Françoise) : Mais ce sont les élus qui auront cette lourde tâche.

M. Gaudreault : Oui, parce qu'on est le phare de la société, oui, c'est ça, là.

Mme Bertrand (Françoise) : Mais je pense que c'est normal qu'on ait chacun notre point de vue. Mais Dany voulait dire quelque chose, je pense qu'il peut...

M. Lemieux (Dany) : Bien, juste deux exemples rapides pour illustrer. Vous parliez du BAPE. Dans le cadre de la deuxième étude sur les gaz de schiste, sur les 91 documents des personnes-ressources qui ont été déposés pour faire la deuxième partie de l'étude, il y a trois documents sur 91 qui traitaient d'économie. Trois sur 91, on est loin d'un équilibre. Et, quand qu'il y a si peu d'intérêt pour la question économique, on ne s'étonne absolument pas de la conclusion du rapport et de l'importance du volet économique.

Un autre exemple. Lorsqu'on a été, moi et M. Forget, au BAPE sur la ligne 735 kV d'Hydro-Québec Chamouchouane-Bout-de-l'Île, la personne qui était là avant nous a comparé Hydro-Québec au régime nazi. Donc, nous, on a été extrêmement surpris de ça. En disant que, bien, moi, je suis contre le projet, puis les gens d'Hydro-Québec m'oppressent comme dans le régime nazi, donc nous, on était très choqués d'entendre ça, mais ce sont des propos qu'on entend comme ça aussi. Quand on parlait de tribunal populaire tantôt, on a droit à ce genre d'opinion là aussi. Donc, nous, c'est ça qu'on ne veut pas. On se dit qu'il faut, à un moment donné, qu'il y ait des faits qui soient établis, qu'il ne se dise pas n'importe quoi non plus.

M. Gaudreault : Oui. Mais, vous savez, des extrémistes, on en a partout, là. Il y en a aussi du côté économique, il y en a du côté environnemental, il y en a du côté social. Moi, jeudi, on est passé pas loin de voir des extrémistes devant moi, là, mais c'était le Conseil du patronat sur la question des régions, là. Alors, moi, vous savez, ce n'est pas parce que c'est le Conseil du patronat ou que c'est Greenpeace qu'il y en a un qui est nécessairement plus extrémiste que l'autre. Il peut y en avoir dans tous les domaines de la société, puis je pense que ce qu'il faut essayer de trouver, c'est le juste équilibre. Et, si, dans la question du développement durable, c'est trois piliers, bien, il faut essayer d'équilibrer les choses. Mais, moi, souvent, ce que je constate, c'est que ce que vous appelez le tribunal populaire — moi, ce que je parle plus, de l'expression de voix citoyenne — permet, des fois, d'éveiller un peu plus les consciences parce que le gouvernement n'a pas toujours nécessairement ce qu'il faut entre les mains pour y arriver. Est-ce qu'il me reste du temps?

Le Président (M. Reid) : Non, c'est tout le temps que nous avons. Nous avons même dépassé un petit peu le temps, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Ah! c'est beau, merci.

Le Président (M. Reid) : Alors, je passe maintenant la parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition, M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : Merci, M. le Président. Bonjour à vous trois. Merci pour le mémoire. Et merci aussi pour cette franchise-là que vous avez, Mme Bertrand, toujours, c'est très, très consistant.

Dans le mémoire, dans la présentation que vous avez faite, il y a un message, moi, qui me colle beaucoup, là, et je ne suis pas certain si on retrouve ça à l'intérieur de la stratégie gouvernementale. Quand vous dites que, si on avait une économie plus forte, on serait beaucoup plus en mesure d'appliquer des moyens concrets, vous savez, j'aime beaucoup le Québec, on aime tous le Québec, on est très fiers d'être Québécois, mais, quand on regarde nos critères économiques, que ce soit au niveau de l'endettement, que ce soit au niveau de la taxation, que ce soit au niveau des revenus per capita, on peut bien avoir des belles ambitions, là — on a eu des présentations cet après-midi au niveau de l'électrification des transports, c'est des beaux projets, c'est des projets constructifs — mais a-t-on les moyens de réaliser ça, surtout quand on est dans une ère où, pour financer des projets d'infrastructure au Québec, là, on est en train de faire appel à la Caisse de dépôt et placement?

Moi, j'aimerais ça, savoir si vous trouvez que ce message-là très important, là, de dire qu'une économie forte est un avantage au niveau environnemental... est-ce que vous le retrouvez? Sinon, de quelle façon que vous souhaiteriez qu'on comprenne ça?

• (17 h 40) •

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, écoutez, je pense que, pour nous, ce qu'on demande, c'est que l'approche du développement durable en soit une qui ne sacrifie pas tout à la perfection environnementale. Je pense que c'est ça qu'on dit. Puis on dit : Oui, il y a dans la recherche d'une économie verte... Il y a la recherche, c'est un atout. On a déjà des atouts importants au Québec. Alors, on pense qu'il est possible de continuer sur ce chemin-là, mais, on le dit toujours, il faut le faire toujours avec l'oeil sur les juridictions qui sont nos juridictions plus de compétition et il faut s'assurer qu'on n'est pas... peut-être, oui, un peu à l'avance, mais il ne faut pas être à ce point en avance que, pour les entreprises, ce sont des coûts indus. Il faut que ce soit, dans l'analyse coût-bénéfice, peut-être un coût supplémentaire, mais légèrement supplémentaire qui n'amènera pas les entreprises à rechercher de s'établir dans d'autres juridictions. C'est certain qu'il y a des entreprises qui sont un peu tributaires de leur localité, que ce soient, évidemment, les entreprises de commerce, de services. Mais, où sont les entreprises de distribution, où sont les entreprises de confection, il ne faudrait pas qu'on les pousse à sortir et il faudrait donc toujours mesurer les deux.

Puis je vais revenir sur ce que nous disions tout à l'heure en parlant avec le député péquiste, ce qu'il faut, c'est in processus. Puis je regrette, c'est possible d'avoir des processus et c'est possible d'amener dans les processus des faits qui permettent à la population de mieux se renseigner et de mieux se forger une opinion, et, à cet égard-là, le gouvernement a une responsabilité. Le gouvernement doit être lui-même au courant de la réalité des meilleures pratiques et de l'offrir en termes d'alternative, et non pas de se mettre en situation où il attend que l'entreprise aille chercher l'acceptabilité sociale. L'acceptabilité sociale, elle doit se définir en fonction clairement de qu'est-ce qu'un gouvernement attend des entreprises, et non pas en termes d'un référendum sur est-ce que c'est bon ou si ce n'est pas bon. C'est seulement un processus ordonné qui va pouvoir donner ça, c'est évident.

M. Martel : Il me reste un petit peu de temps?

Le Président (M. Reid) : Oui, encore deux minutes.

M. Martel : Tantôt, vous avez parlé du rôle du ministre... le rôle des ministres de l'Environnement, du Développement économique, vous avez dit, ce que j'ai entendu, qu'il pourrait y avoir une plus grande complicité. Pas en disant qu'il n'y en a pas actuellement, là, mais structurellement parlant, ça devrait... J'ai-tu bien compris quand vous avez parlé de ça?

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, en fait, nous, on dit, il nous semble que ça devrait être davantage probablement au Conseil des ministres, au premier ministre lui-même d'avoir la responsabilité du développement durable, qui concerne tout le gouvernement. Pour nous, la responsabilité du ministère tel qu'il est conçu présentement est davantage une responsabilité environnementale sur les changements climatiques, et donc, à cet égard-là, toute la dimension économique appartiendrait davantage aux autres ministères comme Énergie et Ressources naturelles et comme le ministère de l'Économie ou des Finances et que les points de jonction, de convergence qui permettent l'équilibre sur les trois piliers du développement durable se font davantage au niveau du Conseil des ministres et au bureau du premier ministre que dans un seul ministère. C'est ce que nous disons.

Le Président (M. Reid) : Une minute.

M. Martel : Une minute. Vous ne voyez pas le rôle du ministre de l'Environnement un peu comme le chien de garde pour toutes les activités?

Mme Bertrand (Françoise) : Pour l'environnement. Il ne peut pas être le chien de garde... À notre sens, là, on peut... Pour nous, si on veut avoir l'équilibre, il ne faut pas que la dimension économique l'emporte, ce n'est pas du tout ce que nous disons, mais il ne faut pas non plus que, sous le vocable de développement durable, ce ne soit que l'environnement qui soit, à ce moment-là, le chien de garde absolu et le déterminant final sur les projets au Québec. C'est ce que nous disons.

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, merci beaucoup, Mme Bertrand, M. Forget, M. Lemieux.

L'ordre du jour étant épuisé, je lève la séance de la commission, et la commission ajourne ses travaux jusqu'au mardi 10 février, à 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 45)

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