Journal des débats de la Commission des institutions
Version préliminaire
42-1
(début : 27 novembre 2018)
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Le
martes 29 octobre 2019
-
Vol. 45 N° 58
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 32, Loi visant principalement à favoriser l’efficacité de la justice pénale et à établir les modalités d’intervention de la Cour du Québec dans un pourvoi en appel
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15 h 30 (version non révisée)
(Quinze heures quarante-quatre minutes)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! Merci
beaucoup.
Des voix
: ...
Le Président (M.
Bachand) : S'il vous plaît! Je demanderais un peu le silence,
s'il vous plaît, à la commission. Merci beaucoup.
Alors, grand plaisir de vous retrouver.
Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte. Je souhaite la bienvenue et je demande à toutes les
personnes, bien sûr, dans la salle de vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 32, Loi visant principalement à favoriser l'efficacité
de la justice pénale et à établir les modalités d'intervention de la Cour du
Québec dans un pourvoi en appel.
Avant de débuter, M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire
: Oui, M.
le Président. M. Fontecilla (Laurier-Dorion) est remplacé par
M. Nadeau-Dubois (Gouin), et M. LeBel (Rimouski) est remplacé par
Mme Hivon (Joliette).
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Cet après-midi, nous débuterons par
les remarques préliminaires, puis nous entendrons les groupes suivants, soit
L'Association des groupes d'intervention en défense de droits en santé mentale
du Québec, la Coalition pour l'accès à l'aide juridique et l'Association des
procureurs de cours municipales du Québec.
Nous en sommes donc aux remarques
préliminaires. J'invite maintenant la ministre à prendre la parole pour ses
remarques préliminaires. Vous disposez de 5 min 34 s. Mme la
ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Alors, bonjour à tous, merci d'être présents aujourd'hui pour ce que
je considère comme un important projet de loi en matière d'efficacité du
système de justice et l'efficacité, particulièrement...
Le Président (M. Bachand) :
...nous en sommes donc aux remarques préliminaires. J'invite maintenant la ministre
à prendre la parole pour ses remarques préliminaires. Pour... Vous disposez de
5 min 34 s. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Alors, bonjour à tous. Merci d'être présents aujourd'hui pour ce que
je considère comme un important projet de loi en matière d'efficacité du
système de justice et l'efficacité, particulièrement, du système de justice
pénale. Le projet de loi qu'on vous présente aujourd'hui, M. le Président,
comporte plusieurs types de mesures, entre autres des mesures d'adaptabilité du
système de justice. L'un des principaux objectifs du projet de loi, donc, est
de briser ce qu'on appelle le phénomène des portes tournantes pour les
clientèles les plus vulnérables, et c'est la partie, je dois dire, qui me tient
particulièrement à coeur dans ce projet de loi là. Il propose diverse mesures
qui permettent de tenir compte de la situation sociale de ces défendeurs, qu'on
parle de situations de toxicomanie, qu'on parle de situations de troubles
mentaux ou qu'on parle de situations d'itinérance. Je pense que c'est important
de fournir à ces gens-là une alternative au système judiciaire et de bien les
accompagner pour bien rencontrer leurs objectifs. Cette solution va donc offrir
à ces clientèles vulnérables là, M. le Président, l'opportunité de se prendre
en main et d'avoir une chance, justement, de se sortir de cette espèce de
cercle vicieux là que parfois, bien malgré lui, bien mal outillé, le système
judiciaire crée pour ces personnes vulnérables.
Le projet de loi propose également, donc,
de bonifier le système d'aide juridique en parallèle de tout ça pour faire en
sorte que la prestation de certains autres services juridiques entraîne
également... soit défrayée par l'aide juridique, et qu'on permette de...
notamment d'empêcher la juridiciarisation... et... de certaines infractions, et
d'ajouter l'ajout de services d'accompagnement dans un contexte, justement, de
déjudiciarisation. Donc, on pourrait travailler un petit peu en amont,
également, du système judiciaire, et je pense que pour l'efficacité de la
justice pénale, c'est très important également, M. le Président.
Dans un autre ordre d'idées, les mesures
législatives proposées vont favoriser également le recours aux nouvelles
technologies de l'information. L'objectif est donc de faciliter le travail des
intervenants judiciaires et surtout d'améliorer la rapidité des procédures.
Plusieurs mesures visent à faire... à cet objectif, entre autres la possibilité
de transmettre, par ailleurs, par... à titre d'exemple, des documents sous
forme numérique, ou la... pour un agent de la paix de pouvoir demander à un
juge l'émission d'un télémandat sans devoir tenir compte des circonstances
particulières et de la distance à parcourir. Je dois dire que ce sont des
mesures qui, pour rassurer la population, existent déjà en matière criminelle,
et c'est pou réadapter le système de justice pénale qu'on veut avoir ces
mesures-là qui ne sont pas nouvelles et qui ont été éprouvées par les
tribunaux.
La loi prévoit... le projet de loi prévoit
également de nombreuses mesures afin d'optimiser le système de justice pénale
dans son ensemble, M. le Président. Je n'en ferai pas toute la nomenclature, on
aura la chance d'en discuter au cours des consultations avec les différents
groupes concernés, à l'étude article par article également. Et par celles-ci,
on compte sur l'élargissement de certains pouvoirs d'enquêtes des agents de la
paix. En effet, ces derniers auraient entre autres la possibilité d'obtenir du
tribunal un mandat général, à titre d'exemple, afin de mettre en oeuvre des
techniques d'enquête. Encore une fois, ce sont des mesures qui sont connues des
policiers, qui sont connues du système de justice parce qu'elles sont
applicables, elles ont une application en matière criminelle, et on va y
trouver une application en matière pénale. Donc, le projet de loi prévoit
également l'ajout de deux postes de juge à la Cour du Québec. Ce sont... C'est
un ajout important. Ces postes seront situés dans le Nord-du-Québec afin de
mieux répondre aux besoins particuliers des communautés autochtones en matière
de justice. Ça, c'est un bref aperçu, M. le Président, dans le temps qui m'est
imparti, pour vous présenter un peu ce à quoi le survol de ce que le projet de
loi entend couvrir, et je crois fermement que ces mesures proposées auront une
véritable retombée sur l'efficience du système de justice et également sur la
réduction des délais judiciaires, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment. Je cède maintenant la parole au
député de LaFontaine, qui est aussi porte-parole de l'opposition officielle,
pour une durée de 3 min 43 s. M. le député, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Merci beaucoup,
M. le Président. Alors, je suis très heureux de vous retrouver. Ça faisait un
petit bout de temps qu'on n'avait pas travaillé ensemble, alors heureux de
pouvoir travailler et oeuvrer sous votre présidence. Vous me permettrez de
saluer Mme la ministre de la Justice qui est accompagnée des collègues de la
banquette ministérielle. Et, également, vous me permettrez de saluer, M. le
Président... et je suis très fier d'avoir comme collègue ma collègue de
Notre-Dame-de-Grâce, qui est à ma gauche, qui va nous épauler dans ce
travail-là avec son éclairage... qui a notamment, à travers son passage, a
notamment été elle aussi ministre de la Justice... et il sera toujours
intéressant. Femme de bon jugement, bonne connaissance juridique, et aussi qui
a eu, à une certaine époque, cette responsabilité, et qui... et nous permet de
peut-être faire des analogies et peut-être de marquer le chemin qui a été
parcouru depuis, et aussi de cibler des mesures qui se retrouvent dans le
projet de loi et qui découlent, pour plusieurs d'entre elles, du projet de loi n° 168 qui avait été déposé en 2017 par la précédente
ministre de la Justice et qui s'inscrivait... qui s'inscrit dans la suite de la
stratégie d'action gouvernementale visant à contribuer à la réduction des
délais en matière criminelle et pénale rendue publique en décembre 2016. Et
donc on s'inscrira en continuité. Vous me permettrez également de saluer mes
collègues des autres oppositions et le collègue député indépendant de Chomedey.
• (15 h 50) •
Nous voulons...
M. Tanguay
: ...dans la
suite de la stratégie d'action gouvernementale visant à contribuer à la
réduction des délais en matière criminelle et pénale rendue publique en
décembre 2016, et donc on s'inscrirait en continuité.
Vous me permettrez également de saluer mes
collègues des autres oppositions et le collègue député indépendant de Chomedey.
Nous voulons donc que, par des règles de
procédure, la justice soit plus efficace. Mais un fait demeure, M. le
Président. Si nous sommes tous égaux en droits devant la loi, la vie donne
parfois... ne donne pas, parfois, les mêmes opportunités, et nous voulons être
en mesure de s'assurer que la justice soit adéquate.
Et ce qui est présenté dans le projet de
loi qui est devant nous, M. le Président, projet de loi n° 32 — nous
allons d'abord entendre les groupes, très heureux de les accueillir à leur
Assemblée nationale — nous aurons l'occasion de déposer des
amendements le cas échéant et des questionnements, des bonifications quant au
projet de loi, parce que nous devons nous assurer que ça se fasse dans le
respect des droits de chacun et de l'intérêt général. Voilà, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. Je cède maintenant la
parole à la députée de Joliette pour une courte intervention de 56 secondes.
Mme la députée, s'il vous plaît.
Mme
Hivon
: Oui.
Alors, je vais dire tellement de choses en 56 secondes. Alors, je vais vous
dire bonjour, je vais dire bonjour à la ministre et aux collègues, remercier
les groupes qui vont venir devant nous. Je suis très heureuse d'avoir la chance
de travailler sur ce projet de loi qui m'apparaît très important, parce que je
pense que la justice pénale comme la justice de manière générale a besoin d'un
bon coup de barre et elle doit s'adapter à des réalités de plus en plus
complexes qui souvent se situent à la frontière entre la justice et le social,
les enjeux sociaux, et je pense que c'est ce qui va être au coeur de nos
travaux, notamment, mais il y a énormément d'enjeux, des enjeux d'accès à la
justice, qu'il va être aussi très important de regarder à travers ce projet de
loi, qui est un peu un omnibus, donc qui va vraiment toucher à beaucoup de
sujets. Alors, j'offre toute ma collaboration pour la bonification du projet de
loi, parce que je pense qu'il a des bonnes choses, il a des choses à améliorer,
comme toujours. Alors, voilà, M. le Président. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, Mme la députée de Joliette. M. le
député de Chomedey, pour 51 secondes.
M. Ouellette : Bien, je vais
commencer... M. le Président, distingués invités... Je pense que ça couvre tout
le monde, et... Parce qu'en 50 secondes, il faut faire le tour rapidement.
Merci d'être avec nous et de venir nous éclairer sur certains besoins
particuliers qu'il y a à l'intérieur du projet de loi, et je vais tout
simplement faire écho à une remarque que Mme la ministre, qui est assurée de
notre collaboration, a faite tantôt : Ce n'est pas parce que ça existe en
matière criminelle qu'on n'aura pas certaines questions à poser, parce qu'il y
a des ratés en matière criminelle sur certains des articles du projet de loi
qui est devant nous aujourd'hui, et on devra s'assurer que les droits des
citoyens sont protégés. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment, M. le député. Je souhaite donc la
bienvenue aux représentants de L'Association des groupes d'intervention en
défense de droits en santé mentale du Québec. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi, nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à débuter votre exposé. Encore une fois, bienvenue. À vous la
parole.
M. Moreau (Claude) : Claude
Moreau, président de L'Association des groupes d'intervention en défense de
droits en santé mentale du Québec.
Mme Provencher (Doris) :
Doris Provencher, je suis la directrice générale de la même association.
M. Moreau (Claude) : D'abord,
j'aimerais remercier... j'aimerais saluer Mme la ministre LeBel, M. le
Président, ainsi que les membres de la commission, remercier de votre accueil.
L'Association des groupes d'intervention en défense de droits en santé mentale
du Québec a pour mission de lutter pour la reconnaissance et l'exercice des
droits des personnes vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale. Ces
droits sont fondés sur des principes de justice sociale et liberté d'égalité
qui sont ceux de toutes personnes citoyennes. Fondée en 1990, L'AGIDD-SMQ est
administrée majoritairement par des personnes vivant et ayant vécu un problème
de santé mentale. D'abord, nous ne sommes pas des avocats. Nous voulons vous
présenter les impacts de ce projet de loi qui pourrait avoir sur les personnes
vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale. Nous ne sommes pas des
experts de la mécanique des applications de la justice, tel que présenté dans
ce projet de loi.
Quand l'efficacité nuit aux droits, après
le renforcement de la sécurité, l'argument pour faciliter l'efficacité de la
justice pénale vient à son tour placer les droits de la personne en bout de course.
Le projet de loi n° 32 nous questionne sérieusement sur les impacts
profonds que les modifications au Code de procédure pénale auront sur les
personnes qui vivent ou ayant vécu des problèmes de santé mentale. Tout en
comprenant que les procès doivent être instruits dans un délai raisonnable et
que les victimes et le public doivent retrouver confiance en la justice, il est
aussi important que la personne accusée soit certes jugée dans un délai
raisonnable, mais également que ses droits soient protégés.
Or, ce projet de loi propose certaines
modifications entraînant un sérieux doute sur le respect des droits de la
personne, notamment étendre l'utilisation du télémandat, télémandat d'entrée,
télémandat général, fouille, perquisition et saisie, restreindre l'accès ou la
communication de certains documents ou en interdire...
M. Moreau (Claude) : ...que ces
droits soient protégés. Or, ce projet de loi propose certaines modifications
entraînant un sérieux doute sur le respect des droits de la personne, notamment
étendre l'utilisation du télémandat, télémandat d'entrée, télémandat général,
fouille, perquisition et saisie, restreindre l'accès ou la communication de
certains documents ou en interdire la communication, l'ajout du mandat d'entrée
et du mandat général.
L'AGDSMQ s'attardera davantage à deux modifications
que le projet de loi propose, l'utilisation de tout moyen technologique et
ensuite la mise en place du programme d'adaptabilité des règles relatives à la
poursuite. Quand la technologie pallie les manques de la justice, plusieurs
articles du projet de loi font référence à l'utilisation de tout moyen
technologique approprié qui est disponible et privilégie cette voie pour
l'application du Code de procédure pénale. Même si cette possibilité existe
déjà dans l'actuel Code de procédure pénale, en faire une priorité peut
entraîner des avantages pour la personne poursuivie.
L'élargissement du mode de signification
prévu dans le projet de loi, article 4 du projet de loi, établit que tout
moyen approprié peut être utilisé et peut maintenant être aussi fait par
messagerie, par aéroporteur ou par un avis public. Comment s'assurer que le
destinataire réel recevra la signification dans la mesure où quel que soit le
mode de signification utilisé, le destinataire qui accuse réception de l'acte
de procédure qui reconnaît l'avoir reçu est réputé avoir reçu signification de
cet acte. Que signifie en droit «approprié» dans la mesure où si l'acte de
procédure ne peut être remis, celui qui fait la signification constate ce fait
avec l'indication du lieu, de la date et l'heure et laisse l'acte de procédure
dans un endroit approprié, sous pli cacheté ou ou sous une autre forme propre à
en assurer la confidentialité.
La signification est réputée avoir été
effectuée à cette date, sauf si une peine d'emprisonnement est réclamée pour la
perpétration d'une infraction. Il est également utile de rappeler l'existence
de la fracture numérique, expression décrivant les inégalités dans l'accès aux
technologies de l'information et de la communication, leur utilisation et leur
impact.
La comparution. Notre expérience dans le
domaine de la santé mentale nous a démontré que les personnes sont peu
présentes à la cour lors de procédures qui touchent pourtant leurs droits
fondamentaux : Cour supérieure pour les autorisations judiciaires de soins,
Cour du Québec pour les gardes en établissement, Tribunal administratif pour
les recours. Une consultation réalisée auprès de nos membres nous a indiqué que
la visioconférence ou téléaudience est utilisée dans sept régions du Québec sur
11, notamment pour les auditions concernant la Loi P-38.001, les autorisations
judiciaires de soins et celles du Tribunal administratif du
Québec.
Certains groupes et personnes concernées
apprécient cette nouvelle technologie, d'autres favorisent l'échange direct
entre le juge et la personne, particulièrement en cas de témoignage et pour
favoriser le droit de présenter une défense pleine et entière. Des lacunes
existent en ce qui a trait à la dimension relationnelle et communicationnelle
et plusieurs personnes préfèrent bénéficier d'un contact direct avec le juge
dans un lieu impartial, neutre, soit le palais de justice.
Recommandations. Au niveau de la
signification, L'AGIDD-SMQ recommande que le projet de loi tienne compte de la
fracture numérique, s'assure que la signification parvienne au destinataire
réel et que son droit à la confidentialité soit respecté. Les articles 7, 8, 10
et les articles concordants ne garantissant pas ces trois conditions doivent être
retirés. La comparution. L'AGIDD-SMQ recommande que la présence de la
personne accusée soit la règle générale pour une comparution. Toutefois, la
visioconférence peut être utile, dans certains cas, mais celle-ci doit, d'une
part, faire l'objet d'un consentement de la personne accusée et doit procurer
un avantage à celle-ci.
• (16 heures) •
Mme Provencher (Doris) : Il
reste combien de temps? Bon. Un gros quatre minutes.
Alors, les fameux systèmes parallèles.
Vous savez, au niveau de la santé mentale, ça fait, depuis 2008, qu'il y a des
tribunaux, ils s'appellent les programmes, pardon, d'accompagnement, justice,
santé mentale, les PAJ-SM, parce qu'avant, au début, ça s'appelait les
tribunaux en santé mentale, mais ça a changé de nom. Alors, à la cour... c'est
à la Cour municipale de Montréal que la première expérience a lieu. Depuis, il
y a plus d'une dizaine de villes où on retrouve ce type de programme
d'accompagnement justice. Au tout début, quand ils avaient commencé ce projet à
Montréal, on avait plusieurs questions qui nous étaient venues, entre autres,
on se demandait, puis, malheureusement, ça a été confirmé, pour que les
personnes puissent bénéficier de ces programmes, il y avait deux conditions
préalables, il fallait que, un, ils acceptent leur diagnostic et, de deux,
qu'ils acceptent de prendre la médication qui était prescrite. Et effectivement
il y a eu une recherche qui a vraiment démontré que c'était vraiment ces deux
points-là qui étaient les deux premiers points identifiés. L'idée...
16 h (version non révisée)
Mme Provencher (Doris) : ...il
y avait deux conditions préalables. Il fallait que, un, ils acceptent leur
diagnostic, et, de deux, qu'ils acceptent de prendre la médication qui était
prescrite. Et, effectivement, il y a eu une recherche qui a vraiment démontré
que c'était vraiment ces deux points-là qui étaient les deux premiers points
identifiés.
L'idée est bonne, l'idée est d'éviter, effectivement,
que les personnes qui se retrouvent... plus dans la procédure juridique et
judiciaire, sauf que, dans les faits, les personnes se retrouvent sur des programmes
qui peuvent durer plusieurs années. Et ce que j'ai entendu aussi dernièrement,
ça ne veut pas dire que, nécessairement, il y a tout l'ensemble des
intervenants qui sont disponibles sur le terrain. Donc, les gens se retrouvent dans
une espèce de vide. Ça fait en sorte, oui, que les gens peuvent avoir accès à
des services, mais dans un cadre bien précis.
On sait qu'il y a des endroits où c'est
appliqué plus de manière... on travaille vraiment avec la personne, à partir de
ses besoins réels et, dans d'autres endroits, bien, on décide beaucoup. On
travaille beaucoup pour le bien de la personne, hein? En santé mentale, c'est
quelque chose qu'on voit souvent, de travailler pour le bien de la personne.
Donc, c'est des processus des fois qui peuvent être plus longs que s'ils
étaient passés par le système normal, surtout quand c'est une première offense.
Dans ce contexte, que le projet de loi
ajoute une section qui parle qui veut introduire cette façon de faire ou ces programmes
d'adaptabilité, bien, nous, on se questionne par rapport à ça vraiment beaucoup.
De un, la participation au programme, ça peut entraîner le retrait d'un ou de plusieurs
chefs d'accusation. Ça, ça va, mais les infractions ou catégories d'infractions
sont prévues par règlement. Donc, on ne sait pas trop qu'est-ce qui va être vraiment
prévu
Il est difficile de se prononcer sur ce
programme, parce qu'on ne l'a pas. Ça va être fait par règlement. Comme je
disais, son objet est louable, mais qui va être impliqué dans des démarches
d'éducation, de sensibilisation, de prévention et d'intervention? Comment
s'assurer que le poursuivant, parce qu'il est nommé que le poursuivant, il peut
retirer les chefs d'accusation ou demander la rétractation du jugement à
certaines conditions. Qui va décider de ces conditions? Comment ça va être
établi? C'est quoi, l'intérêt réel de ce programme pour la personne? Quelle
garantie elle va avoir, dans la mesure où son offre doit être dans l'intérêt de
la justice? Quels sont les liens entre les mesures alternatives qui sont
prévues au programme et les travaux compensatoires, lorsque le projet de loi
l'indique, particulièrement à l'article 50 du projet de loi?
Bien sûr qu'il y a des pours et il y a des
contres aussi. Donc, on a des questions. Vous savez, les programmes... le
premier programme, PAJ-SM en 2008, on avait demandé une coalition d'organismes
communautaires, qu'il y ait une évaluation du programme avant d'aller plus
loin. Elle a été faite, l'évaluation, mais les programmes commençaient déjà à
s'étendre dans plusieurs villes... dans plusieurs villes.
Le Président (M.
Bachand) : Eh! bien, désolé de vous couper, parce qu'on est
très serrés dans le temps.
Une voix
: Je le sais.
Le Président (M.
Bachand) : D'ailleurs, plusieurs ont des engagements à 18
heures, donc on ne peut pas aller au-delà de 18 heures. Donc, on est en train
de calculer le temps pour... On va répartir ça équitablement entre l'ensemble
des membres de la commission. Parfait?
Alors, cela dit, nous sommes maintenant
rendus à la période d'échange. Alors, Mme la ministre, vous avez pour à peu
près 15 minutes de période d'échange avec nos invités. Merci beaucoup.
Mme LeBel : Bien, merci, M. le
Président. Mais, merci surtout de votre présence et merci de votre contribution
à cette réflexion. Je pense que c'est important d'en parler et je pense que
c'est important de réfléchir, justement, à comment on peut mieux adapter le
système de justice à certaines personnes qui sont vulnérables, dont les
personnes que vous représentez par votre présence ici puis par vos
commentaires.
De façon très générale, vous avez fait
plusieurs... vous avez fait d'autres remarques préliminaires sur... bon,
l'ajout de nouvelles technologies. On pourra peut-être y revenir si on a du
temps, mais je veux vraiment discuter de ce qui est dans votre champ
d'expertise, de votre propre mission, c'est-à-dire les programmes et
l'adaptabilité du système. Vous êtes bien au fait que présentement, dans sa
forme actuelle, le système de justice n'est pas adapté aux personnes
vulnérables, l'itinérance, la toxicomanie, les troubles mentaux. Est-ce qu'on
peut se mettre au moins d'accord sur cette prémisse de base là?
Mme Provencher (Doris) : On
peut se mettre d'accord sur cette prémisse.
Mme LeBel : Parfait. Alors, on
va... Donc, on discute sur le même terrain, à ce moment-là. Moi, j'ai eu, malheureusement,
je dirais, l'occasion, de par mon passé, d'avoir, justement, à être... je vais
le dire de cette façon-là, prise, comme procureure de la couronne, avec des
situations où j'ai un dossier et j'ai de la récidive dans certaines matières.
Souvent, des infractions sommaires, malheureusement, ou en matière pénale, il y
a des infractions pénales, qui passaient sur nos bureaux aussi, même à la Cour
du Québec, et de bien voir que cette personne-là a des difficultés, ne pas
avoir les outils dans le Code criminel ou dans le Code de procédure pénale pour
agir pour ces personnes-là.
Est-ce que je comprends que votre remarque
n'est pas sur le fait qu'il faut fournir une alternative au système de
justice...
Mme LeBel : ...des infractions
pénales, qui passaient sur nos bureaux aussi, même à la Cour du Québec, et de
bien voir que cette personne-là a des difficultés, ne pas avoir les outils dans
le Code criminel ou dans le Code de procédure pénale pour agir pour ces
personnes-là.
Est-ce que je comprends que votre remarque
n'est pas sur le fait qu'il faut fournir une alternative au système de justice,
mais plutôt sur la qualité... je ne dirais pas la qualité, la... les programmes
eux-mêmes, qui ne sont peut-être pas aussi bien adaptés? Est-ce que votre
crainte est plus au niveau des programmes comme tels?
Mme Provencher (Doris) : Moi,
je vous dirais que... c'est parce que les programmes qui sont proposés
actuellement, ils sont basés sur le fait de la maladie, ils sont basés... que
les personnes, ils font des actes, ils posent des gestes à cause de leur
maladie, mais ce n'est pas nécessairement ça. Les personnes, ils posent souvent
des gestes parce qu'ils ont faim, parce qu'ils ont froid, parce qu'ils n'ont
pas de moyens. Je comprends que ce n'est pas au ministère de la Justice de
régler tout ça, mais la réponse qu'on leur offre, c'est strictement bio...
psycho... biosocial. Vous savez, il y a le côté services de santé mentale et il
y a le côté social, bien sûr, aussi, accès aux services, à des intervenants, à
des... ce qui n'est pas nécessairement mauvais. Mais ce qu'on dit, c'est qu'on
trouve que la réponse n'est pas nécessairement adaptée à la réelle situation.
Mme LeBel : Donc, on est
d'accord. Donc, on parle vraiment des programmes comme tels, parce que ce que
le projet de loi vient faire ici, vous le comprenez, ne vient pas mettre en
place les programmes, mais vient permettre justement au système de justice de
fournir une alternative. Et c'est toujours sur le consentement de la personne
parce que, vous avez... et je vais revenir à une de vos premières remarques,
vous avez mentionné que, quelques fois, le passage à travers ces programmes-là
peuvent s'avérer peut-être plus onéreux en termes de temps et d'investissement
pour la personne que l'infraction pour laquelle il se retrouvait devant les
tribunaux. À ce moment-là, les gens ont le choix de ne pas entrer dans un
programme alternatif d'adaptabilité.
Mme Provencher (Doris) :
C'est sûr.
Mme LeBel : Donc, ce que le
projet de loi fait, c'est de fournir cette alternative-là. Est-ce que vous êtes
d'accord avec cette option-là?
Mme Provencher (Doris) :
Bien, c'est-à-dire qu'on donne un choix, je comprends qu'on donne un choix. Ou
c'est la judiciarisation ou c'est : Écoute, on t'offre... puis c'est soit
des gens qui sont en rupture de services, et tout. C'est sûr que, pour les
personnes, ça peut être intéressant, je comprends très bien, et qu'il y a des
personnes qui sont heureuses de ça. Nous, ce qu'on vous dit, c'est par rapport
à... le choix, et est-ce que c'est vraiment un choix entre la judiciarisation
ou une amende ou de passer par ce système? Je peux y être pendant huit, neuf, 10 mois,
un an, sur ce programme, hein? Alors, est-ce que c'est vraiment un choix?
Mme LeBel : Bien, aidez-moi à
réfléchir, à ce moment-là. Comment on fait quand quelqu'un commet... Parce que,
de facto, quand on entre dans un programme... je n'aime pas ce mot-là, le
programme d'adaptabilité, c'est parce qu'il y a... à la base, il faut qu'il y
ait une accusation de déposée, donc il faut qu'il y ait... On va partir de la
prémisse de base qu'il y a un acte de commis. Donc, qu'est-ce qu'on fait comme
système de justice pour bien répondre aux besoins de ces gens-là quand on parle
de santé mentale? Nous, ce qu'on offre, naturellement, on n'a pas la réponse à
tout, c'est une des solutions proposées qui devra se faire dans un ensemble,
hein, il y a de la prévention en matière de santé mentale, de troubles mentaux,
vous l'avez bien dit, il faut trouver des façons de prendre soin de ces gens,
mais à partir du moment où ils entrent dans le système judiciaire, on essaie de
trouver une alternative, justement, à la coercition ou à la judiciarisation à
tout prix, et c'est ce que le projet de loi veut offrir.
Mme Provencher (Doris) : O.K.
C'est sûr qu'idéalement, dans un monde idéal, pour nous, ce qu'on a toujours
dit... Puis, vous savez, au niveau de la santé mentale, il y a beaucoup de
stigmatisation et de préjugés. Alors, de faire un tribunal spécialisé en santé
mentale, pour nous, est-ce que c'est vraiment ce qui a de mieux par rapport à
la question de toute la stigmatisation? Ça, c'est une chose. Idéalement, là,
dans un monde idéal, là, Mme la ministre, il faudrait que le système de justice
s'adapte, il faudrait qu'un problème de santé mentale, ça soit traité comme
n'importe quelle autre situation. On ne fait pas un tribunal spécial pour tout
et n'importe quoi. Vous comprenez? Donc, c'est vraiment...
Mme LeBel : Ça, je suis
entièrement d'accord avec vous.
• (16 h 10) •
Mme Provencher (Doris) :
Donc, c'est que... mais là, on est peut-être dans l'idéal, c'est sûr, mais ça
devrait... le système devrait s'adapter aux personnes et il devrait, pour ça...
Nous, on dit : De la formation... Vous savez, les juges, ce sont des MM.
et Mmes Tout-le-monde, avec leurs connaissances, avec leurs préjugés, avec...
comment ils sont, donc quand il y a quelqu'un en face d'eux qui a un problème
de santé mentale, tout de suite, est-ce que : Oups, ah! là, il y a
comme... ça prend une autre dimension. Est-ce que... Et, vous voyez, tout de
suite, la réponse qui est donnée dans ce système, la condition essentielle pour
que les gens participent, il faut qu'ils acceptent de prendre leur médication
psychiatrique. Si les personnes n'acceptent pas de prendre cette médication-là,
elles ne pourront pas participer à ce programme. Alors, vous voyez, c'est que
c'est vraiment basé...
Mme Provencher (Doris) : ...et
vous voyez tout de suite la réponse qui est donnée dans ce système : la
condition essentielle pour que les gens participent, il faut qu'ils acceptent
de prendre leur médication psychiatrique. Si les personnes n'acceptent pas de
prendre cette médication-là, elles ne pourront pas participer à ce programme.
Alors, vous voyez, c'est que c'est vraiment basé là-dessus. Je sais que ça ne
peut pas se régler en six mois, ce que je vous dis là, je sais que... Mais on
trouve dommage que tous, tous, tous les efforts soient investis d'en faire des
choses à part plutôt que d'essayer de faire entrer ça dans le système.
Mme LeBel : O.K. Je veux juste
qu'on...
Mme Provencher (Doris) : Je
ne vous aide pas du tout, là, hein?
Mme LeBel : Non, pas du...
Mais non, mais vous ne me nuisez pas non plus, vous faites ce que vous avez à
faire, puis c'est parfait. Ce n'est ni positif, ni négatif, c'est parfait comme
discussion. Mais ce que... Je veux qu'on recadre la discussion quand même un
peu, parce que ce que le projet de loi fait, ce n'est pas de créer un
programme, ce n'est pas de forcer les gens à prendre leur médication. Ce que
le projet de loi fait, c'est qu'il offre justement au système de justice
d'ouvrir dans la voie... à partir du moment de la comparution jusqu'à une
sentence potentielle, dépendamment, c'est qu'il ouvre une brèche en cours de
parcours et permet à des gens qui le souhaitent de prendre une voie parallèle, parce
que la judiciarisation, ça peut être également un «stigma». Il y a des
critères, et les critères ne demandent pas aux gens d'admettre leur condition
de maladie, ils ne demandent pas de prendre leur médication, parce que ces
programmes-là peuvent être en santé mentale, vous avez raison, peuvent être en
toxicomanie, peuvent être en itinérance, et ce sera les programmes qui sont
créés, et votre apport va être inestimable, justement, pour la création de ces
programmes-là.
Mais je veux juste m'assurer que ce que le
projet de loi fait, qui est très... à la fois très simple et très... et peut-être
avoir des conséquences, le projet de loi ne fait qu'ouvrir la voie pour la
création d'une alternative pour les gens qui le souhaitent. Le juge ne pourra jamais
forcer quelqu'un à entrer dans un de ces programmes. Donc, est-ce que, ça, on
peut... est-ce que, ça, c'est quelque chose qui est quand... C'est quelque
chose qui est positif, à mon sens. Bien, je suis sûre que je suis vendue, là,
mais...
Mme Provencher (Doris) :
Bien, c'est-à-dire, écoutez, il va falloir que vous m'éclairiez, parce que, dans
la mesure où... cette ouverture à des systèmes d'adaptabilité — c'est
ça que vous me dites dans le projet de loi — il y a déjà des systèmes
d'adaptabilité dans le système de justice. Les PAJ-SM, c'est ça?
Mme LeBel : Oui.
Mme Provencher (Doris) :
Alors, en quoi le projet de loi — c'est à mon tour à poser les
questions — en quoi le projet de loi... Qu'est-ce qu'il vient faire?
Ou il vient améliorer l'accessibilité à ces programmes-là?
Mme LeBel : Le projet de loi
vient ouvrir plus d'alternatives pour ce même type de programmes là, dont la
ville de Québec a d'ailleurs certains programmes, permet justement de... si le
programme est réussi, entre autres, de retirer des constats d'infraction,
permet de substituer une amende ou une peine d'emprisonnement pour défaut de
paiement d'amendes, souvent, qui est récurrent pour les personnes en matière de
vulnérabilité, de substituer ça par d'autres alternatives. Pas toujours en
santé mentale, comme je vous disais, ça peut être en toxicomanie, ça peut être
en itinérance. Donc, ce que le programme vient... ce que le projet de loi vient
faire, c'est ouvrir une alternative.
Moi, ce que j'entends de votre part et que
je prends très au sérieux, c'est : Soyez avisés que les programmes ne sont
pas toujours adaptés aux situations ou ne sont pas toujours réfléchis en
fonction de vos mises en garde, si on veut, et c'est ce que je comprends. C'est
pour ça que je vous dis : Votre rapport est inestimable sur la réflexion
des programmes qui seront mis en place. Mais le projet de loi ne met pas de
programmes en place, le projet de loi ouvre la possibilité de mettre ces
programmes-là en place. Et je veux juste être sûre qu'on se comprend dans ce
qu'on est en train de faire comme démarche versus ce qui est très important
dans ce que vous soulignez. Je veux juste le mentionner, là.
Mme Provencher (Doris) :
Bien, ce que je me demande à ce moment-là, c'est que, comme vous dites,
l'ouverture que le projet de loi apporte par rapport à des personnes qui ont
des problèmes de santé mentale, ça va être quoi, cette ouverture? Est-ce que ça
va se traduire pas mal par des... Ça va ressembler pas mal à des PAJ-SM,
j'imagine. Parce que, si vous dites qu'il y a des programmes par rapport à...
au niveau de la toxicomanie, au niveau de l'itinérance et tout, au niveau de la
santé mentale, ce que notre système de justice a mis en place, c'est vraiment
le programme d'accompagnement justice-santé mentale. Alors, si le projet de
loi, il permet...
Mme LeBel : Continuez, je vais
juste... je cherche une petite affaire.
Mme Provencher (Doris) :
... — oui, d'accord — il permet d'ouvrir d'autres
alternatives, qu'est-ce que ça va être en santé mentale, les autres
alternatives? C'est juste ça, moi, que je dis, je dis... Ce qu'on vous dit, ce
que je vous dis, en fait, c'est qu'au niveau de la santé mentale, à cause des
préjugés qui sont associés aux problèmes de santé mentale, les réponses, les
alternatives qui risquent d'être développées, ça devrait toujours aller dans le
sens de : Viens, on va t'aider puis on va te soigner, plutôt que de...
Vous voyez, c'est ça qu'on dit.
Mme LeBel : Bon. Alors, la...
Et c'est exactement l'objet de mon propos. Présentement, ce que le projet de
loi fait, c'est un cadre habilitant, c'est-à-dire de permettre de développer
ces programmes-là, et ce qui va être important, c'est que ces programmes-là
soient bien adaptés, comme vous venez de le mentionner, aux besoins d'une
clientèle particulière. Le programme... Le projet de loi permet donc de bâtir
ces programmes-là...
Mme LeBel : ...l'objet de mon
propos. Présentement, ce que le projet de loi fait, c'est un cadre habilitant, c'est-à-dire
de permettre de développer ces programmes-là, et ce qui va être important,
c'est que ces problèmes-là soient bien adaptés, comme vous venez de le
mentionner, au besoin, d'une clientèle particulière. Le projet de loi permet
donc de bâtir ces programmes-là.
Une voix
: ...
Mme LeBel : Oui, je sais, je
demandais un renseignement sur le programme que vous avez mentionné
particulier, parce que je ne l'avais pas à l'esprit, mais ça va être important
de s'assurer, dans la mise en place de ces programmes-là qui vont se faire par
la suite, que des organismes comme le vôtre soient présents pour être certain
que ces programmes-là répondent bien aux besoins de la population. Ce que le
projet de loi fait, il ne crée pas ces programmes-là, puis j'ai l'air de taper
sur le même clou, mais c'est parce que c'est important pour moi, c'est comme si
j'ouvre une porte, mais maintenant vers quoi on va se diriger par la suite,
c'est la seconde étape, et là, ça va être très important de faire en sorte que
le programme, à défaut d'autres mots, c'est le mot exact, les programmes qui
vont être créés dans les différents domaines soient bien adaptés, comme vous
venez de mentionner, aux besoins de votre clientèle ou les gens que vous
représentez.
Mme Provencher (Doris) : Moi,
j'aurais deux... Ah!
Le Président (M.
Bachand) : ...la parole au député de LaFontaine. M. le député
de LaFontaine, s'il vous plaît. Désolé. Désolé, Mme Provencher.
M. Tanguay
: Merci
beaucoup, M. le Président. Dites pas, malheureusement, je dois céder la parole
au député de LaFontaine...
Le Président (M.
Bachand) : Non, non, absolument pas. Ça n'a rien à voir avec
vous, M. le député.
M. Tanguay
: ...parce
que là je vais prendre mes affaires puis je vais m'en aller. Non, ne nous
punissez pas. Merci beaucoup, M. Moreau, Mme Provencher, d'avoir pris le temps
de rédiger le mémoire, d'être avec nous ici aujourd'hui. Moi, Mme Provencher,
je viens d'entendre, là, votre cri du coeur, puis je ne veux pas être
réducteur, mais vous avez dit, dans le fond : S'il y a des programmes
habilitants, s'il y a des nouvelles façons de faire, pouvez-vous juste vous
assurer que ce ne soit pas au détriment... puis je ne suis pas en train de dire
que c'est l'objectif du projet de loi, la ministre vient de nous dire que ce
n'est pas ça, l'objectif, l'objectif va aller dans le sens, très fort
probablement, que vous souleviez, mais j'aimerais ça vous entendre davantage là-dessus,
vous avez dit, deux, trois minutes : Faites donc des programmes qui vont
améliorer l'accès à la justice, aux personnes que nous représentons notamment
et faire en sorte qu'ils soient... que l'ouverture soit davantage là, que la
facilitation soit de notre côté, s' assurer que ça tombe toujours du côté
d'aider les gens que vous représentez, de faciliter leur passage qui est
difficile au sein d'un système judiciaire que ce soit toujours ça, l'objectif,
et non pas de dire : Ah! Bien, il faut le sanctionner parce que,
finalement, il n'est pas rentré dans une case, puis là on le sanctionne. Alors,
j'aimerais ça vous entendre là-dessus, sur ce qui pourrait être, dans le fond,
un principe directeur. Oui, il y aurait de nouveaux programmes, il y aurait de
nouvelles façons de faire qui permettrait cette latitude-là. Mais, quand on
vous dit : Vous avez plus l latitude, vous avez plus d'espace, mais que ce
soit toujours fait dans la façon de dire : Bien, l'optique de la personne
qui a un problème de santé mentale, par exemple, ou qui en a eu un, mais
comment on peut faciliter son passage dans un processus judiciaire. J'aimerais
vous entendre là-dessus.
M. Moreau (Claude) : Oui,
bien, peut-être un exemple, c'est au niveau de la durée des programmes, là. Je
regardais, dans le projet de loi, on veut changer la durée des programmes. Je
regardais dans le projet de loi, on veut changer la durée. Si une personne
choisit de faire des travaux compensatoires, la limite, c'est 1 500
heures, alors que, s'il choisit un modèle alternatif, il n'y a pas vraiment de
limite de définie, là, ça peut être plus long. Quelque chose qui pourrait être
fait, ce serait de s'assurer du consentement libre et éclairé de la personne
visée, que, si tu choisis cette alternative-là, tu peux... ça peut prendre plus
de temps que, si tu choisissais des travaux compensatoires.
M. Tanguay
: Merci. Et,
vous, Mme Provencher, j'aimerais vous entendre aussi là-dessus.
Mme Provencher (Doris) :
Bien, c'est-à-dire que ça part toujours d'une bonne intention. Le problème,
c'est toujours... puis ce n'est pas juste au niveau de la justice, là, c'est
partout, c'est au niveau de la pratique. C'est quand, ça arrive sur le terrain,
comment les personnes sont vues, comment on les traite, comme... quels sont nos
préjugés par rapport à ça. C'est toujours là que le bât blesse, alors... et
c'est ça qu'il est difficile. Alors, même s'il y a une ouverture pour des
alternatives, que ce n'est pas inintéressant, bien sûr, essayer. Mais, nous, ce
qu'on vous dit, ce qu'on voit, pas partout, mais il y a certains endroits où,
au niveau de la pratique, bien, ça fait... c'est comme si la personne, elle se
retrouve prise dans une espèce de système qui veut son bien puis qu'à ces
conditions, par exemple, à ce système, pas nécessairement les siennes, même si
c'est un choix libre, en principe, ça va se retrouver, première des choses.
• (16 h 20) •
Deuxième des choses, juste pour répondre,
parce que je voulais clarifier les organismes en promotion et défense de droits
en santé mentale, il y en a partout au Québec. Nous, ce qu'on peut faire comme
travail, on va... on peut accompagner les personnes qui vont nous demander,
mais on ne sera pas là pour, comment dirais-je, on est là pour la personne, pas
pour le système qu'il y a autour, vous savez. Alors, si la personne, elle veut
être accompagnée, ça, ça va, mais pour le reste, on ne pourrait pas, par
exemple, être partie prenante d'un tribunal parallèle à cause de notre mandat
de défense de droits parce que, nous, on est là pour la personne et pour
l'aider à ce qu'elle, elle fasse valoir ses droits...
Mme Provencher (Doris) :
...elle veut être accompagnée. Ça, ça va et... Mais pour le reste, on ne
pourrait pas, par exemple, être partie prenante d'un tribunal parallèle à cause
de notre mandat de défense de droits. Parce que nous, on est là pour la
personne et pour l'aider à ce qu'elle, elle fasse valoir ses droits.
M. Tanguay
: Et la
pertinence...
Mme Provencher (Doris) : Ce
qui ne veut pas dire qu'on ne peut pas travailler avec vous.
M. Tanguay
: Non, c'est
ça, puis on peut même le revirer de bord en disant : C'est ce qui fait en
sorte que l'on doit travailler ensemble et que le système de justice doit
travailler avec vous.
Mme Provencher (Doris) : Oui,
oui.
M. Tanguay
: Puis c'est
ce que vous lancez comme message, c'est ce que l'on reçoit. Et vous êtes de la
réalité terrain. Vous accompagnez des femmes et des hommes qui ont leurs défis,
notamment en santé mentale. Et votre son de cloche aujourd'hui est important,
même si l'objectif du projet de loi est d'établir, je dirais, et là je résume,
là, un cadre, une approche judiciaire qui permet cette latitude-là.
Vous dites, en page 12 de votre mémoire,
là... vous recommandez qu'avant toute mise en place de nouveaux programmes
d'adaptabilité des règles relatives à la poursuite, l'article 37 du projet de
loi... vous demandez donc que le monde se parle, puis qu'on fasse le point.
Autrement dit, une réflexion quant au déficit du système judiciaire et du
réseau de santé, parce que vous ne voulez pas qu'il y ait une approche en silo.
Aujourd'hui, le projet de loi n° 32, c'est le système
judiciaire, mais, vous le dites, nous, on passe tantôt dans le système
judiciaire puis on passe tantôt dans le système de santé, et autres, et autres.
Donc, pas de silo, réflexion et évaluation des programmes existants, et vous
demandez, donc, que les gens, les acteurs se parlent. On parle de santé et
services sociaux, justice, sécurité publique.
Mme Provencher (Doris) : Oui.
M. Tanguay
: Alors,
comment, ça, nous, on pourrait y faire écho dans le projet de loi n° 32 qui est sur la table?
Mme Provencher (Doris) : Si
je peux me permettre, je sors d'une journée et demie d'un forum sur la santé
mentale des adultes, organisé par le ministère de la Santé et des Services
sociaux, et ce que la majorité des personnes présentes ont demandé au ministère
de la Santé, c'est de travailler... faites un plan d'action interministériel,
qui va toucher un ensemble d'autres acteurs, Éducation, Sécurité publique, la
Justice aussi. Parce que les déterminants sociaux ont une grande part dans les
actions des personnes, dans les difficultés que les personnes vivent. Encore
une fois, ce n'est pas la maladie. C'est que c'est les déterminants sociaux. Je
n'ai pas un logement décent, je suis pauvre, je ne mange pas à ma faim. Vous
voyez, c'est à ça qu'ensemble comme société, il faut qu'on s'attaque, tout le
monde ensemble, avec ça. C'est bien évident que le projet de loi n° 32,
ce n'est pas son but, puis ce n'est pas... Mais il faut que ça fasse partie de
cette réflexion.
Je veux aussi dire, la formation, il
faudrait que... je pense, il faudrait... Ce qui serait intéressant, c'est qu'il
y ait de la formation qui soit donnée à l'ensemble du domaine de la justice par
des personnes qui vivent ou qui ont vécu un problème de santé mentale, pour
démystifier, de un, c'est quoi et démystifier toute la médication. Parce que
c'est la réponse en santé mentale, qu'on soit dans le domaine de la justice,
qu'on soit en santé : la médication, en principe, ça règle tout. Ce qui
n'est pas vrai. Alors donc, il y aurait beaucoup de formation et d'information
qu'on pourrait partager. Ça nous ferait plaisir de la partager.
M. Tanguay
: Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous
plaît.
Mme Weil
: Écoutez,
merci beaucoup pour votre présentation. Moi, j'ai eu l'occasion, quand j'étais
ministre de la Justice — c'était en 2010 — de voir cette
première courte tentative. C'était le juge ..., Martin ... , qui était
tellement enthousiaste et... par rapport à cette initiative. Il y avait eu une
visite du ministère de la Justice à Toronto pour voir comment ça se passait. On
en parlait à New York, etc. Mais je dois vous dire, même moi, parce que j'ai vu
ce que j'ai vu, on se demande, des fois : Est-ce que la personne a
vraiment compris, vraiment compris de quoi il s'agit? Ils sont contents d'être
traités avec humanité. Donc, comme mon collègue le dit, de LaFontaine, c'est un
peu cette idée. Et la ministre de la Justice, le rôle du ministère de la
Justice, mettre en place, évidemment, pour que le système de justice soit
aidant, et non un frein pour ce traitement humain de cette personne...
Mais, si je comprends bien, vous, vous
dites : Un des principes de base... Parce qu'on touche aussi le droit
humanitaire, hein? Et savez-vous que Montréal, c'est le tribunal qui reçoit le
plus de cas de personnes, dans ses tribunaux, de santé mentale qui sont des
sans-abri? Ils sont littéralement des sans-abri. Alors donc, on voit que...
exactement ce que vous dites. Donc, est-ce que vous voyez que... peut-être un
principe de base qui pourrait être rajouté à ce projet de loi, qui évoquerait
un peu cette santé globale, ce bien-être global de la personne, qui irait
au-delà d'un système de justice? Et on comprend très bien les limites,
finalement, aussi...
M. Moreau (Claude) : Bien sûr.
Mme Weil
: ...d'un
système de justice, mais que le système de justice...
Mme Weil
: ...qui
pourrait être rajouté à ce projet de loi, qui évoquerait un peu cette santé
globale, ce bien-être global de la personne qui irait au-delà d'un système de
justice. Et on comprend très bien les limites finalement aussi d'un système de
justice, mais que le système de justice et le système de santé puissent
travailler main dans la main, qu'on pourrait avoir un principe quelque part
dans le projet de loi.
M. Moreau (Claude) : On
parlait tantôt de réalité terrain, je vais vous en donner une réalité terrain,
c'est être une personne vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale connu
dans son quartier pour son problème, puis de voir son nom dans le journal, pour
aller au palais de justice ramasser un avis de procuration, là, un document
officiel. Moi, je sais que, personnellement, je n'aimerais pas ça que mes
voisins voient ça parce que, probablement qu'ils se demanderaient qu'est-ce que
j'ai fait de croche, c'est de la... ça.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Merci, M.
le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Il y a un passage de votre
mémoire qui m'a interpellé particulièrement, à la page 12, vous recommandez,
disons, de surseoir à la mise en place de nouveaux programmes d'adaptabilité à
certaines conditions, en tout cas, vous mettez des conditions à ce qu'on
élargisse les programmes actuels ou qu'on en ajoute, j'aimerais que vous
élaboriez là-dessus puis que vous précisiez la nature de vos craintes, pourquoi
vous faites cette recommandation-là. Est-ce que vous dites qu'il ne faut pas
adopter de nouveaux programmes, il faut en adopter, mais suspendre l'entrée en
vigueur? J'aimerais comprendre toute votre réflexion là-dessus, puis j'ai peu
de temps, ça fait que je vais vous laisser le temps d'élaborer, s'il vous
plaît.
Mme Provencher (Doris) : O.K.
Bien, écoutez, je vais me répéter un peu, mais c'est dans la mesure où, en
2008, le PAJ-SM, le programme... a commencé, et ça s'est répandu comme une
traînée de poudre partout au Québec. On n'a pas fait d'évaluation. Est-ce que
c'est la meilleure chose? Est-ce que... Quelle amélioration on pourrait amener?
Qu'est-ce que ça a comme effet dans le système de santé? Il y a eu une
recherche, en 2010, mais c'était parti.
Alors, nous, ce qu'on disait à l'époque,
en 2008, avant de faire ça... et je voulais rebondir un peu sur ce que Mme Weil
disait, la compassion, là, c'est comme il y a du monde qui sont formés au
niveau de la justice, eux autres, ils comprennent les problèmes de santé
mentale, eux autres, donc ils agissent de manière... avec plus de compassion,
ils acceptent, et tout. C'est très bien, mais le reste, c'est comme... parce
que je pourrais vous parler longtemps des gens qui passent au niveau des
autres... comme la P-38, l'hospitalisation involontaire, les autorisations
judiciaires de soins, et tout ça, là, ils sont comme moins compatissants, vous
comprenez? Donc, c'est comme on fait une petite gang de compatissants, bien, le
reste, on ne s'en occupe pas. Je ne dis pas que, demain matin ou dans six mois,
wow, tout le monde, il va être ouvert, parce que les gens, les avocats, les
juges, ce sont des M. et Mme Tout-le-monde, comme je l'ai dit
tantôt — je me répète, je suis désolée — mais ce sont, avec
les préjugés qu'on a tous et toutes, alors ça se répercute aussi.
Alors, à cause de problèmes de santé
mentale, c'est vu de telle façon, bien, les juges et les avocats... vous savez,
souvent, dans une cour, les avocats ne sont même plus des avocats, là, tout le
monde est médecin, tant qu'ils sont dans une cause pour une P-38 ou pour...
tout le monde :Tu devrais faire ça, tu devrais accepter 21 jours
d'enfermement, plutôt que de te battre, que je te défende, acceptes donc, tout
le monde devient médecin. Vous voyez, donc c'est... tout le monde est pour le
bien...
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée de Joliette, pour
2 min 37 s... 39 s, pardon.
Mme
Hivon
: Oui,
merci beaucoup, Mme Provencher puis M. Moreau, c'est vraiment très, très
éloquent ce que vous nous dites, et puis, moi, si je vous comprends bien, vous
dites : Il y a un énorme besoin de formation, une des choses que vous
dites, et pas juste des grands experts qui ont écrit des études poussées sur la
maladie mentale, mais de gens qui le vivent sur le terrain ou qui auraient eu
des expériences, tout à fait, je l'entends très bien, je pense que ça
s'applique ici et ailleurs. Ce que j'entends aussi, c'est que vous dites que là
on est en train, avec le projet de loi, de généraliser des mesures
alternatives, mais qu'on n'a pas bien fait encore l'évaluation de ce qui s'est
fait notamment le PAJ-SM à Montréal.
Vous, est-ce que vous avez été consultés
comme organisation, vos membres ou des groupes qui sont proches de vous, lors
de la mise en place, la création du programme et dans le contexte de l'évaluation?
Pas du tout. O.K.
• (16 h 30) •
Mme Provencher (Doris) :
Non...
16 h 30 (version non révisée)
Mme
Hivon
: ...de
ce qui s'est fait, notamment le PAJ-SM à Montréal. Vous, est-ce que vous avez
été consultés, comme organisation, ou vos membres, ou des groupes qui sont
proches de vous lors de la mise en place, la création du programme et dans le
contexte de l'évaluation?
Mme Provencher (Doris) : Non.
Non.
Mme
Hivon
: Pas
du tout? O.K.
Mme Provencher (Doris) : Non.
On avait formé une coalition d'organismes communautaires. Écoutez, ça fait
longtemps; 2008, ça fait quand même 10 ans. Est-ce qu'il y avait eu des
échanges? Parce que ça se faisait avec l'agence de la santé et des services
sociaux, il y avait eu des rencontres d'échanges, mais pas nécessairement de
consultation, non.
Mme
Hivon
: O.K.
Puis, évidemment, là, vous me parlez de la P-38 puis tout ça, qui sort beaucoup
de notre cadre...
Mme Provencher (Doris) : Bien
sûr.
Mme
Hivon
:
...mais vous voulez dire que ça peut être bien d'avoir des voies alternatives,
quoique votre idéal, ce serait que tout le monde soit formé, absolument tout le
monde, à la réalité de la santé mentale, mais qu'il peut y avoir des
alternatives, mais qu'elles doivent être adaptées, si on pouvait avoir une
réflexion plus générale en matière de justice pour une formation, qu'on soit en
civil, en mesures d'exception. O.K. Ça, je vous comprends bien.
Vous avez touché la question des
technologies, puis on n'en a pas parlé. Donc, qu'est-ce que ça peut représenter
comme défi pour les personnes qui ont un enjeu de santé mentale?
Mme Provencher (Doris) :
Bien, de un, ce n'est pas tout le monde qui a les technologies, hein? C'est
comme quand on voit comment, pour... bien voyons, pas pour la délégation, pour
la signification, par exemple, y aller par moyen électronique, y aller par...
Oui, mais au niveau de la santé mentale, il y a bien du monde qui n'ont rien.
Et je trouve que cette façon-là, ça devient une mode aussi. Je sors du forum
santé mentale, et là aussi, les nouvelles technologies... il se fait de la
psychothérapie par visioconférence. Peut-être que ça peut aider du monde.
Peut-être que ces nouvelles façons, ça peut faire en sorte que les gens sont
plus à l'aise ou même qu'ils ont accès à la... Nous, ce qu'on dit :
Attention... ne pas mettre ça mur à mur. Attention de ne pas perdre de vue que
c'est facile pour le système de justice, on y va par visioconférence aussi, ça
fait bien l'affaire du système aussi. C'est dans ce sens-là qu'on dit :
Oui, peut-être, mais attention, il y a ce que mon collègue a appelé la fracture
numérique...
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup.
Mme Provencher (Doris) :
...hein, oui, et c'est une réalité, parce que les gens sont pauvres.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Chomedey, s'il vous plaît.
M. Ouellette : Bonjour,
monsieur dame. Puisqu'on est dans la fracture numérique, vous avez insisté sur
deux choses. S'assurer que la signification soit bien au destinataire réel, je
pense que c'est bien important. Vous allez sûrement avoir une suggestion que
vous pourriez nous faire pour qu'on puisse s'assurer que ça soit comme ça.
Puis, dans la comparution, il y a trois mots que j'ai eu de la misère à...
Regardez, vous me dites que la visioconférence, ça peut aider aux gens, mais il
faut que ça procure un avantage à la personne qui va en visioconférence.
J'aimerais ça que vous m'en donniez un petit peu plus, là, parce que...
M. Moreau (Claude) : Bien, la
visioconférence, je pense que ça avantage surtout les médecins, les
psychiatres, là. Ça leur évite d'aller au palais de justice, puis ce n'est pas nécessairement
d'aller dans l'intérêt de la personne. Parce que le palais de justice, c'est un
endroit neutre, alors que la... quand il y a une salle de cour qui se trouve à
l'intérieur d'un hôpital psychiatrique, ce n'est pas nécessairement un endroit
neutre. La personne se sent toujours vraiment, là, emprisonnée, ne se sent pas nécessairement,
là, dans des lieux impartiaux. Puis...
M. Ouellette : La
signification.
Mme Provencher (Doris) : La
signification?
M. Ouellette : Oui, la...
Oui.
Mme Provencher (Doris) :
Bien, ce qu'on dit... Actuellement, là, il y a des façons de donner une
signification à des gens, et les moyens qui sont proposés, peut-être qu'il y en
a que ça peut être mieux puis qu'il y en a qui existent déjà, encore une fois,
et tout. Mais prenez bien conscience : quand j'ai un problème de santé
mentale, malheureusement, il y a l'étiquette qui vient avec pour tout le monde,
et, comme disait Claude, si ça paraît dans le journal, mon journal local, parce
qu'on me connaît dans mon quartier : Ah! Elle a un problème de santé
mentale, elle, hein? Mon Dieu! As-tu vu son nom dans le journal? Il faut
qu'elle passe au... Je ne sais pas où qu'il faut qu'elle passe pour aller
chercher un truc de cour. Qu'est-ce que vous pensez que ça va faire dans la
tête du monde, ça? Danger, danger, danger! C'est ça qui va flasher.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, Mme Provencher,
merci beaucoup, M. Moreau, merci beaucoup d'être ici. Je vais suspendre les
travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
Merci infiniment, merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 16 h 35)
(Reprise à 16 h 37)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission
reprend ses travaux. Merci beaucoup. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants
de la Coalition pour l'accès à l'aide juridique. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre présentation, et après on aura un échange
avec les membres de la commission. Je vous invite à débuter d'abord en vous
présentant. Merci beaucoup d'être ici.
Mme Lévesque (Sylvie) : Oui,
bonjour. Mon nom est Sylvie Lévesque, de la Fédération des associations de
familles monoparentales et recomposées du Québec et membre de la coalition.
Mme Thériault (Élise) : Je
suis Élise Thériault, avocate, conseillère budgétaire chez Option Consommateurs
et également membre de la coalition.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Bon après-midi. Claude-Catherine Lemoine, des Services juridiques
communautaires de Pointe Saint-Charles et Petite-Bourgogne, également membre de
la coalition.
Mme Lévesque (Sylvie) :
Alors, Mmes, MM. les députés, Mme la ministre, merci de nous avoir invitées à
vous soumettre les commentaires de la Coalition pour l'accès à l'aide
juridique. La coalition a vu le jour à l'automne 2007. Elle est composée de
groupes communautaires, sociaux, syndicaux et d'intervenants du monde juridique
qui se préoccupent d'accès à la justice. Elle compte présentement 38
organisations membres.
La coalition se positionne du point de vue
des bénéficiaires de l'aide juridique, et ses actions ont comme seul objectif
d'améliorer l'accès des bénéficiaires aux services, tant au niveau de
l'admissibilité financière que de celui du panier de services couverts, ou
encore, de l'organisation de l'offre de services. Depuis la hausse des seuils
d'admissibilité à l'aide juridique en 2016, la coalition poursuit son objectif
d'élargir l'accès à l'aide juridique, notamment en plaidant pour un
élargissement du panier de services couverts ainsi que pour une révision des
méthodes du calcul des revenus.
Aujourd'hui, notre intervention va se
limiter aux dispositions que l'on retrouve dans la section des mesures visant à
bonifier le régime d'aide juridique et à accroître l'efficacité de la
Commission des services juridiques et qui traitent spécifiquement de la loi sur
l'aide juridique et sur la prestation de certains services juridiques et de son
règlement. La coalition s'est sentie interpellée par les mesures pour bonifier
le régime d'aide juridique, et tout ce qui favorise un meilleur accès à l'aide
juridique est un pas dans la bonne direction. Toutefois, le projet de loi n° 32 nous laisse perplexes quant à l'intention du
gouvernement. En effet, certaines modifications proposées dans le projet de loi
représentent des reculs importants en matière de panier de services, d'autant
qu'il est souvent difficile, comme citoyen et citoyenne, de s'y retrouver et de
savoir si notre besoin est couvert ou non par la loi.
Pour la coalition, trop de services
juridiques essentiels à la sécurité physique, financière et psychologique des
personnes et des familles sont exclus des services couverts ou sont soumis à
des critères discrétionnaires, comme les demandes en matière de logement, de
garde en établissement psychiatrique ou les demandes en matière de droit de la
consommation. Des embûches administratives à l'admissibilité devraient aussi
être éliminées.
Je passe maintenant la parole à Élise
Thériault, qui va vous présenter plus en détail nos préoccupations et nos
principales recommandations.
• (16 h 40) •
Mme Thériault (Élise) :
Merci. Alors, je vais commencer par faire un petit survol de la couverture des
services d'aide juridique. D'abord, il y a les services qui sont précisément
listés dans la loi comme étant couverts. Ce sont les nommément couverts. Il y a
aussi les services qui ne sont jamais couverts. Ce sont les nommément exclus.
Il y a finalement les services qui sont parfois couverts lorsque certains
critères sont rencontrés. Ce sont les services discrétionnaires. En matière
autre que criminelle et pénale, pour qu'un service juridique qui n'est pas
nommément couvert le devienne, en fonction du principe de la couverture
discrétionnaire, il faut établir que la personne subit ou subira
vraisemblablement une atteinte grave à sa liberté...
Mme Thériault (Élise) :
...services qui sont parfois couverts lorsque certains critères sont
rencontrés, ce sont les services discrétionnaires. En matière autre que
criminelle et pénale, pour qu'un service juridique qui n'est pas nommément
couvert le devienne en fonction du principe de la couverture discrétionnaire,
il faut établir que la personne subit ou subira vraisemblablement une atteinte
grave à sa liberté, notamment une mesure de garde ou de détention, ou que
l'affaire met en cause ou mettra vraisemblablement en cause soit la sécurité
physique ou psychologique d'une personne, soit ses moyens de subsistance, soit
ses besoins essentiels et ceux de sa famille. Les consultations d'ordre
juridique font partie des services nommément couverts. À l'heure actuelle, ces
consultations sont couvertes par l'aide juridique pour l'ensemble des domaines
de droit sauf un et heureusement car elle constitue un élément essentiel de
l'accès à la justice.
On en saurait trop dire que la simple
information juridique, bonne et moins bonne, est de plus en plus accessible,
elle est même souvent gratuite. Par contre, les intervenants qui offrent de
l'information juridique vous le diront tous, sans avis juridique, sans conseil
juridique, les citoyens ordinaires n'ont pas les compétences pour traiter
l'information reçue de manière à exercer efficacement leurs droits.
L'information ne réduit pas leur détresse s'ils ne sont pas capables de la
transformer en action. Les citoyens veulent être accompagnés, guidés, mais les
avis et conseils juridiques peuvent être exclusivement prodigués par des
avocats et des notaires. Une consultation juridique offerte par un avocat de
l'aide juridique, c'est donc beaucoup plus que de la simple information. Or, le
projet de loi n° 32 propose de rapatrier
l'article 32.1 qui prévoit la couverture de consultation juridique dans la
même section de la loi que les autres services couverts, il devient
l'article 4.3.1, mais 4.3.1 n'est pas rédigé de la même façon que
l'ancien 32.1. On lit maintenant : «L'aide juridique est accordée
pour des consultations d'ordre juridique dans les domaines pour lesquels les
services sont par ailleurs couverts.» Selon nous, c'est une réduction de la
couverture de services qui est totalement inacceptable. On passe de tous les
domaines de droit sauf un à des consultations uniquement pour les domaines qui
sont par ailleurs couverts.
Le législateur tente-t-il de limiter la
couverture des consultations uniquement aux services nommément couverts? Si ce
n'est pas le cas, ça risque de poser des problèmes d'interprétation qui vont se
refléter dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire des avocats. Par exemple,
dans certains domaines comme le logement, où tous les services ne sont pas
automatiquement couverts, ça pourrait vouloir dire que certaines consultations
actuellement couvertes ne seraient plus couvertes.
Du point de vue des bénéficiaires, non
seulement les consultations juridiques devraient toujours être un service
nommément couvert, mais cette couverture devrait même être élargie à tous les
domaines du droit.
Le projet de loi ajoute des services pour
lesquels l'aide juridique peut être accordée en introduisant la notion de
services rendus avant la judiciarisation. La coalition tient à souligner
qu'elle applaudit tout élargissement du panier de services. Cependant, on
s'interroge encore sur la nature exacte des services qui seront couverts et sur
les domaines de droit dans lesquels ils seront accessibles. On peut s'imaginer
que les modes alternatifs de résolution de conflits seront couverts. Est-ce à
dire que l'aide juridique couvrira les honoraires des médiateurs dans des
domaines autres que familial? Est-ce que les avocats du réseau de l'aide
juridique pourront être rémunérés à titre de médiateur? Est-ce que le travail
des avocats qui accompagnent et conseillent un client dans un mode alternatif
de règlement des différends devient un service couvert? Peut-être que la
réponse nous viendra dans un éventuel règlement, mais dans sa rédaction
actuelle, le projet de loi ne jette aucun éclairage sur ces questions.
En matière criminelle, la description des
services couverts est plus claire mais la disposition proposée reste ambiguë.
En effet, on lit : «lorsqu'il est nécessaire qu'un avocat assiste une
personne dans le cadre de sa participation à un programme de traitement non
judiciaire de certaines infractions criminelles». Quels sont les critères qui
servent à déterminer si les services d'un avocat sont nécessaires? Qui
détermine cette nécessité? Est-ce que ce serait laissé à la discrétion des
avocats? Si oui, ça pourrait engendrer un grave recul en matière d'accès à la
justice. Pour nous, par sa seule présence au bureau d'aide juridique, la
personne concernée considère qu'il est nécessaire qu'elle soit accompagnée ou
assistée. Ce service devrait être nommément couvert.
Le projet de loi prévoit un autre ajout au
panier de services actuellement offerts, soit la participation à un processus
de droit collaboratif ou de médiation au nouvel article 43.2 du Règlement
sur l'aide juridique. On se demande ce qui sera inclus dans ces nouveaux
services couverts. Est-ce que ce sont les mêmes que ceux rendus avant la
judiciarisation dont on vient juste de parler? Le fait d'utiliser les
expressions «droit collaboratif», «processus de médiation» dans un article et
«mode privé de prévention de règlement des différends» dans un autre, mais sans
les définir, fait en sorte de semer la confusion. Dans tous les cas, nous
croyons que l'accompagnement lors d'une séance de médiation à la Commission des
normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, ou devant toute
autre instance similaire, doit être un service nommément couvert par l'aide
juridique.
Lorsqu'il s'agit de la rédaction d'un
document alors que le tribunal n'est pas saisi, l'aide juridique est
présentement accordée si la personne éprouve de la difficulté à préserver ou
faire valoir ses droits et si des conséquences néfastes en résulteraient pour
son bien-être physique ou psychologique ou celui de sa famille en l'absence de
ce service. C'est deux critères qui s'additionnent.
Le projet de loi n° 32
propose de modifier «conséquences néfastes» pour «conséquences graves»...
Mme Thériault (Élise) : ...si
la personne éprouve de la difficulté à préserver ou faire valoir ses droits et
si des conséquences néfastes en résulteraient pour son bien-être physique ou
psychologique ou celui de sa famille en l'absence de ce service, c'est deux
critères qui s'additionnent. Le projet de loi n° 32 propose de modifier
«conséquences néfastes» pour «conséquences graves». Une conséquence grave
est-elle pire qu'une conséquence néfaste ou est-ce que c'est le contraire? On a
le fait tour des dictionnaires et on n'a pas trouvé la réponse. En quoi, ce
changement constitue-t-il une bonification du régime de l'aide juridique? Nous
proposons donc d'utiliser la formulation «conséquences négatives» qui, selon
nous, est suffisant pour justifier la couverture du service et aurait pour
avantage d'inclure un plus large spectre de situation.
La rédaction d'une lettre ou d'une mise en
demeure est un important service offert par l'aide juridique, car elle fait
partie des différents moyens permettant d'éviter la judiciarisation. Ça apporte
souvent une solution rapide pour les citoyens, citoyennes. Trop de personnes
sont incapables de lire, écrire, comprendre et bien s'exprimer dans les
domaines reliés au droit. Selon nous, il est essentiel que l'accessibilité à ce
service soit le plus large possible. Finalement, en ce qui concerne le
processus de révision, le projet de loi propose de réduire la formation qui
entend les demandes de révision de trois à une personne, lorsque
l'inadmissibilité à l'aide juridique est basée sur le refus d'une personne de
fournir tous les documents requis par l'aide juridique. On n'est pas contre
plus d'efficacité, au contraire, mais on pense que cet enjeu en cache un autre
beaucoup plus important.
On sait tous que le nombre de documents
requis à l'aide juridique est immense et peut ressembler, pour certains, à une
montagne impossible à escalader. La loi ne fait pas la différence entre refus
de fournir et impossibilité, une difficulté à obtenir les documents exigés. Le
nombre de demandes de révision concernant des documents manquants a triplé au
cours des huit dernières années, c'est ça qui est alarmant et c'est à ça qu'on
devrait s'attarder. Le processus de demande de service d'aide juridique doit
être simplifié, la rigidité administrative ne doit pas se traduire par un déni
de justice, ce qu'on constate parfois malheureusement.
Je terminerai, en disant que, dans les
dernières années, on parle de plus en plus d'efficacité dans le domaine
juridique. Le présent projet de loi ne fait pas exception, mais efficacité ne
rime pas toujours avec accès. Évidemment, on répète, on n'est pas contre
davantage d'efficacité. Cependant, il faut éviter à tout prix que l'atteinte de
cet objectif devienne l'arbre qui cache la forêt et empêche les citoyens les
plus vulnérables de bénéficier des services juridiques.
Le Président (M. Bachand) :
Merci infiniment. Vous êtes vraiment, là, bien organisés, ça paraît. Alors,
période d'échange, on débute avec Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci de votre mémoire. Merci d'être ici aujourd'hui pour nous en
parler puis nous aider à peut-être voir comment on peut, malgré les intentions
qu'on a d'améliorer tout ça, éviter certains écueils que vous soulignez. Naturellement,
bon, vous avez fait... vous avez parlé de lettre et de mise en demeure, on
n'est pas dans le domaine pénal à ce moment-là, on est plus dans le domaine
civil. Je dois mentionner que l'objectif du projet de loi est d'ouvrir certains
services qui ne sont pas couverts en matière... dans le domaine pénal. Et avant
d'y revenir, je veux bien comprendre, parce qu'à la lecture de votre mémoire,
je suis sur l'impression, et vous me corrigerez, que vous êtes d'accord pour
réduire le nombre de personnes, c'est-à-dire de passer de trois à une personne
pour la révision des refus.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Oui, en fait, que le ban passe de trois à une, on ne le conteste pas, et tant
mieux si c'est plus efficace, c'est juste qu'on considère que le fait qu'on ait
besoin d'adopter cette mesure-là cache un autre problème plus grand que le problème
des documents manquants lors d'une demande d'aide juridique.
Mme LeBel : Donc, sans
cacher... il peut y avoir un autre problème, mais le fait de réduire de trois à
une personne, on pourra déjà avoir une efficacité plus grande, là-dessus, ça
vous convient.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Tout à fait.
Mme LeBel : O.K. Parfait.
Juste pour ça certaine. On parle justement, l'objectif principal de ce projet
de loi là et de cette mesure en termes d'aide juridique est de faire en sorte
que les personnes puissent être accompagnées ou assistées d'un avocat dans le
cadre de leur participation à un des programmes d'adaptabilité qui sera créé,
et je réitère que le projet de loi ne crée pas de programme, mais donne une
ouverte à la création des programmes. Est-ce que vous pensez que c'est une
bonne mesure de pouvoir avoir cet accompagnement-là qui est défrayé par l'aide juridique
ou est-ce que vous avez des bémols à ce niveau-là également?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Vous voulez dire l'accompagnement dans les programmes d'adaptabilité?
Mme LeBel : Oui, le fait qu'il
y ait une possibilité pour un avocat d'accompagner puis que cet
accompagnement-là puisse être couvert par l'aide juridique, je pense que ça va...
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Évidemment, le fait d'élargir le panier de services, pour nous, c'est toujours
un avantage, et on le demande, en fait, on le souligne, on vous félicite. C'est
juste que, dans la rédaction du projet de loi, évidemment, comme c'est un projet
de loi omnibus, oui, le titre le dit, ça touche surtout la justice pénale, mais
dans ces articles, ça ne touche pas seulement la justice pénale, mais ça touche
également la justice civile. Et c'est dans un peu cet angle-là qu'on a aussi
parlé d'aide juridique, beaucoup plus largement, avec un peu de recul, pour
parler du régime de façon plus large.
• (16 h 50) •
Mme LeBel : OK Je comprends
bien. Vous vous attaquez ou, en tout cas, vous dénoncez ou vous soulignez le
fait que le sens du mot, il peut être nécessaire, mais pas, selon votre
critère, n'est pas clair...
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
...cet angle-là qu'on a aussi parlé d'aide juridique beaucoup plus largement,
avec un peu de recul pour parler du régime de façon plus large.
Mme LeBel : O.K., je comprends
bien. Vous attaquez ou en tout cas vous dénoncez ou vous soulignez le fait que
le sens du mot «il peut être nécessaire» n'est pas...
selon votre critère, n'est pas clair, mais je peux vous dire... Bien vous êtes
au fait d'ailleurs que ce critère de nécessité là se retrouve déjà dans la loi
actuelle, surtout quand on parle des programmes d'accompagnement par rapport à
un adolescent ou un mineur qui existent déjà
en matière de Tribunal de la jeunesse. Est-ce que ce critère-là, dans le passé,
qui existe déjà dans la loi, où on dit qu'il peut
être... s'il est nécessaire qu'un avocat accompagne dans ces
programmes-là au Tribunal de la jeunesse, est-ce que ce critère-là de nécessité
ou le fait que ce soit nécessaire a posé problème dans l'admissibilité dans la
loi, dans la pratique, si on veut? Parce qu'on s'est collés aux mêmes critères,
là, pour établir...
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Bien, en fait, c'est que, tant qu'à avoir un
nouveau service, le fait d'ajouter un critère le rend pour nous discrétionnaire, et, si c'est de
toute façon dans l'optique du nouveau Code de procédure civile d'aller vers
d'autres avenues de règlement — là, on est en matière pénale, mais
c'est la même chose en matière civile — le fait d'ajouter le critère
de nécessité, pour nous, c'est un ajout qui n'est pas nécessaire, puisque la
personne en a besoin.Ça fait que, tant qu'à rédiger un nouvel article, on
considère qu'il devrait être plutôt
nommément couvert puis de ne pas ajouter le critère de nécessité.
Mme LeBel : Mais je suis
vraiment intéressée par votre expérience pratique, puis je vais réitérer ma
question, parce que j'aimerais bien savoir si vous avez une réponse à cet
aspect-là. Ce critère de «lorsqu'il est
nécessaire», en tout cas la façon dont c'est
rédigé, «quand il peut être nécessaire
d'être accompagné» existe déjà à l'article
4.10 de la loi, qui prévoit justement, en
matière de délinquants ou en matière de jeunesse pour le Tribunal de la
jeunesse, que la personne peut être accompagnée par un avocat et peut être couverte
par l'aide juridique lorsqu'il est nécessaire de le faire.
Ce n'est pas un critère quand les gens
sont... Les critères d'admissibilité sont
différents quand on peut passer à travers le système judiciaire pour une
accusation. Mais là, on parle des programmes
alternatifs ou d'adaptabilité. Ça existe déjà.
Alors, j'aimerais savoir :Avez-vous
des éléments, des données où on pourrait penser que ce critère de «nécessaire»
fait en sorte que des gens qui devraient,
selon toute objectivité, être accompagnés par un avocat se sont vu refuser de
le faire parce qu'il y avait ce critère-là?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Pour la question spécifique que vous posez — puis je ne veux pas...
mes collègues pourront compléter — on n'a pas de données précises en
droit de la jeunesse, et en fait on
renverrait ou on inviterait la commission à peut-être consulter des gens qui
travaillent en protection de la jeunesse ou qui sont avocats en protection de
la jeunesse. La coalition est un regroupement d'organismes qui en ce moment ne
possèdent pas cette expertise-là.
Mme LeBel : O.K.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Alors, on ne va pas s'inventer expertes dans des domaines qu'on n'est pas.
Mais, par contre, en consommation, en matière civile, en matière familiale, en
matière de logement, c'est surtout l'expertise des membres de la coalition en
ce moment.
Mme LeBel : O.K., parfait.
Donc, je comprends bien. Puis je ne voulais pas vous piéger, je voulais juste
voir...Comme
vous émettiez une réserve ou en tout cas une crainte par rapport à ce critère
de nécessité là, je voulais savoir si vous aviez des exemples où... à tout le
moins dans la pratique, vu que ça existe déjà dans la loi actuelle, pour nous
illustrer que cette crainte-là est bien fondée dans cette matière-là.
Peut-être m'éclairer un peu. Vous dites
que le projet de loi, actuellement, de par la rédaction de certaines mesures,
vient atteindre le panier de services. Quels sont les frais... Outre le fait
qu'on va couvrir un nouvel aspect, c'est-à-dire l'accompagnement à travers le
programme d'adaptabilité, quels sont les services qui risquent, que vous
craignez qu'ils disparaissent par le projet de loi actuel ou par les mesures
actuelles? Parce que vous avez parlé d'«atteindre le panier de services», et
ça, ce n'est certainement pas un objectif.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
C'est ça, les deux principaux, en fait, puis c'est un peu le régime des
consultations juridiques qui est particulier. Donc, je vais commencer par là.
Mais donc la rédaction des documents, pour nous, c'était la question du terme
utilisé. On le voit comme un durcissement du critère, que ce soient des
conséquences néfastes, que ce soient des... — mais même moi, je me
mélange — conséquences graves versus conséquences néfastes. Donc, si
on ajoute un critère plus serré sur les conditions dans lesquelles ce
service-là peut être offert, alors qu'on vise plutôt, en matière civile,
d'aller vers les modes alternatifs, on trouve que, ça, c'est une réduction de
panier de services. Autrement, la question des consultations d'ordre juridique
en fait un régime particulier dans la loi actuelle de l'aide juridique, puisque
c'est un service qui est couvert par des articles spécifiques, et la rédaction
rend le tout un peu difficile en termes de compréhension, puis ça, c'est la Loi
sur l'aide juridique au complet qui est un peu complexe, là. Mais, donc, quand
on dit qu'en ce moment les consultations juridiques sont offertes dans les
domaines, sauf dans une exception, qui est, si je ne me trompe pas, l'article
22, f, qui est le service de consultation téléphonique en cas d'arrestation...
Donc, c'est tout un autre régime à part entière, qui est l'appel à l'avocat
quand on se fait arrêter.
Mais autrement, l'article, comme il est
rédigé en ce moment, est large; dans son application, n'est pas si large. Donc,
ma compréhension, c'est que dans son application en ce moment, les
consultations juridiques sont dans des services qui ne sont pas autrement
nommément exclus, mais ce n'est pas comme ça que l'article de loi est rédigé en
ce moment. L'article de loi qui est en vigueur en ce moment est très large et
devrait couvrir tous les domaines. Donc, dans son application dans l'usage,
mais aussi avec l'article du projet de loi, si on le restreint aux domaines qui
sont par ailleurs couverts...
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
...son application, en ce moment, les consultations juridiques sont dans des
services qui ne sont pas, autrement, nommément exclus, mais ce n'est pas comme
ça que l'article de loi est rédigé en ce moment. L'article de loi qui est en
vigueur en ce moment est très large et devrait couvrir tous les domaines. Donc,
dans son application, dans l'usage, mais aussi avec l'article du projet de loi,
ça le restreint aux domaines qui sont par ailleurs couverts. C'est dans ce
sens-là qu'on pense qu'on vient cristalliser un peu une restriction, une
limitation dans l'assiette de panier de services pour les domaines qui sont
couverts par la consultation juridique.
Mme LeBel : O.K. Puis est-ce
que vous pouvez nous donner un exemple? Juste à titre d'exemple, quels sont les
types de consultation qui risquent de tomber en bas du panier, si je peux dire
ça?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Bien, en fait, ça dépend si on prend la loi à la lettre ou si on considère
l'expérience actuelle dans les bureaux d'aide juridique. Mais, comme l'usage a
fait en sorte qu'on exclut les consultations pour les services qui sont,
autrement, nommément exclus, ça veut dire qu'une personne qui a une question,
par exemple, en diffamation ou en atteinte à la réputation c'est un service, en
ce moment, qui est nommément exclu en demande à l'aide juridique. Pour notre
part, on considère que ça devrait être des services en consultation qui sont
nommément couverts. Une personne, même si on ne sera pas peut-être son avocate
pour faire son recours, devrait avoir droit à une consultation juridique pour
comprendre quelle est la situation, quelles sont ses chances de succès, quels
sont ses recours, par quelle voie le faire, comment commencer, est-ce que ça
vaut la peine. En ce moment, la loi, comme elle est rédigée, couvre tous les
domaines, même si, dans son application, on est déjà en train de restreindre la
portée, qui serait finalement cristallisée dans le projet de loi. Donc, pour
nous, la consultation juridique, c'est quelque chose qui est beaucoup plus
large.
En matière de logement aussi, on se pose
des questions en ce moment. Le logement est... En termes de services, donc, si
on parle d'aller à la Régie du logement, ce n'est pas toujours couvert. On est
dans la couverture discrétionnaire. Il va falloir s'assurer que la sécurité de
la personne ou son toit est en... ses besoins essentiels, donc l'éviction est
en cause. Donc, c'est des services, en termes de représentation, qui sont de
couverture discrétionnaire. Mais en ce moment, la consultation juridique en
matière de logement est nommément couverte. Donc, la personne peut venir voir
le bureau d'aide juridique, évidemment, poser des questions en matière de
logement, même si ça ne veut pas nécessairement dire que l'aide juridique
pourrait faire le pas de la représenter devant la Régie du logement.
Donc, avec la rédaction comme elle est
maintenant, on se demande, si c'est pour un problème plus mineur dans son
logement, qui peut-être ne porte pas atteinte à sa sécurité physique ou
psychologique, mais qu'elle se pose des questions sur ses droits comme
locataire, on craint que, si le service vers la Régie du logement n'est pas par
ailleurs couvert, est-ce que ça veut dire que la consultation n'est plus
couverte, alors qu'elle l'était ou qu'elle l'est en ce moment?
Mme LeBel : Bon, bien, merci
pour cette illustration-là. Ça m'aide à mieux comprendre, là, ce que vous
vouliez dire, puis je vous remercie. Je n'ai pas d'autre question, là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Je me tourne maintenant vers le
député de LaFontaine pour 10 minutes.
M. Tanguay
: Oui, merci
beaucoup. Merci beaucoup à vous trois d'être présentes, donc, Mme Thériault,
Mme... Me Thériault, Me Lemoine et Mme Lévesque. Merci pour votre...
Une voix
: ...
M. Tanguay
: C'est ça.
Mme Lévesque? C'est ça. Alors, merci pour votre mémoire et votre éclairage
quant au projet de loi. Plusieurs questions sur lesquelles j'aimerais être sûr
d'avoir bien compris votre intervention, puis je vais y aller en rafale. On
parle de l'article 4.3.1 du projet de loi, qui propose donc de rapatrier cet
article 32.1 dans la même section que les autres services couverts, en ajoutant
4.3.1. Et on dit que cette modification simplifie la compréhension des services
couverts en les regroupant dans une même section.
Toutefois, ce qui semble à première vue
une simple opération d'efficacité s'ajoute à une modification du texte, et là
vous citez le texte : «4.3.1. L'aide juridique est accordée pour des
consultations d'ordre juridique dans les domaines pour lesquels les services
sont par ailleurs couverts.» Et peut-être juste par précision, dans le projet
de loi, on dit : «L'aide juridique est accordée pour des consultations
d'ordre juridique pour les sujets pour lesquels les services sont par ailleurs
couverts.» Donc, c'est une petite rédaction différente, mais l'essence est là,
et ça ne vient pas annuler votre propos. La formulation choisie laisse croire
qu'il y aura place à énormément d'interprétations dans l'application des
exclusions.
J'aimerais ça que vous nous en parliez,
vous, de cette... des écueils que représente quand ce n'est pas clair, ce qui
est couvert puis n'est pas couvert. J'aimerais ça, vous, que vous nous disiez
comment le débat se fait et en quoi, justement, ça ne vient pas aider, mais ça
vient ajouter un nuage au-dessus de la tête de vos membres, oserais-je dire.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Bien, en fait, comme je disais tantôt, c'est le... il y a certains services qui
sont plus... c'est plus difficile de savoir si c'est couvert ou pas quand c'est
une couverture discrétionnaire parce qu'en fait c'est les personnes dans les
bureaux d'aide juridique qui vont faire cette évaluation-là. Règle générale,
c'est les avocats, avocates de l'aide juridique pour les dossiers permanents,
parfois, des techniciens, techniciennes quand c'est pour des mandats de
pratique privée.
• (17 heures) •
Alors, il y a une interprétation à faire,
qui peut être utilisée de façon large et libérale. On se souvient que c'est une
loi sociale. Elle devrait être interprétée de façon large, mais qui peut aussi
être restreinte, puisque ce n'est pas nommément couvert. Pour les services qui
sont nommément couverts, on parle de droits de la famille, on parle de révision
à l'aide sociale...
17 h (version non révisée)
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
...c'est pour des mandats de pratique privée. Alors, il y a une interprétation
à faire qui peut être utilisée de façon large et libérale — on se
souvient que c'est une loi sociale, elle devrait être interprétée de façon
large — mais qui peut aussi être restreinte, puisque ce n'est pas
nommément couvert. Pour les services qui sont nommément couverts — on
parle de droits de la famille, on parle de révision à l'aide
sociale — ce sont des domaines où je n'ai pas besoin de me poser la
question à savoir si la personne risque de perdre son toit ou ses moyens de
subsistance. Et donc, à ce moment-là, c'est dans le bureau que l'évaluation se fait,
et, si la personne est en désaccord avec la décision, peut porter la décision
devant le comité de révision de la Commission des services juridiques.
M. Tanguay
: Et de là
se développe une jurisprudence uniforme, ou dans certains cas, malgré une
jurisprudence, il y a toujours place à l'interprétation, puis d'une région à
l'autre on pourrait même avoir des écarts de couverture?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
En fait, je pense que, ça, c'est peut-être à la Commission des services
juridique de venir nous éclairer, mais dans nos membres, effectivement, c'est
ce qu'on rapporte. On a fait un questionnaire l'an passé pour essayer de
recueillir l'information. On ne prétend pas du tout que c'était scientifique
comme questionnaire, mais on voulait recueillir l'expérience de nos membres un
peu partout au Québec. Et donc, oui, il y a des divergences, il y a des bureaux
qui peuvent être plus sévères, moins sévères, mais toujours dans la même
conformité avec la Loi sur l'aide juridique, puisqu'elle confère une discrétion
en termes d'application. Donc, ce n'est pas quelqu'un fait bien, quelqu'un ne
fait pas bien ou analyse bien ou analyse mal, mais c'est plus une divergence de
façon d'appliquer les critères d'aide juridique d'une façon à l'autre... d'une
région à l'autre ou d'une situation à une autre. Alors, je pense que, si on
peut... Plus on peut rendre des services qui sont nommément couverts, c'est
aussi plus clair pour le justiciable de savoir quelle porte est celle qui est
la mieux placée pour m'aider, parce que sinon on est dans le peut-être. Donc,
des fois, la réponse... Mais c'est peut-être couvert, des fois oui, des fois
non. Donc, c'est plus difficile pour les gens de se diriger dans le système.
M. Tanguay
: Et pour ma
gouverne, parce que je ne suis pas familier de la procédure, si un justiciable
se fait dire non dans un cas précis, quel est son recours?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
C'est une... À ce moment-là, la personne reçoit un refus, un document qui
s'appelle un refus d'aide juridique et, joint à ça, un formulaire qui est une
demande de révision. En ce moment, le formulaire indique où envoyer... C'est
pour ça qu'on en parlait dans notre mémoire aussi. Mais il est écrit à qui
l'adresser, où l'envoyer, et puis à ce moment-là c'est une demande de révision
qui est traitée par le comité de révision de la Commission des services
juridiques.
M. Tanguay
: O.K. Et là
c'est le dernier recours, là, la décision finale.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Oui. Et donc, pour répondre à votre question de tantôt... Vous disiez :
Est-ce qu'il y a une jurisprudence constante qui se développe?
M. Tanguay
: Oui. C'est
là.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
En fait, c'est que c'est les refus qui se ramassent souvent à être entendus en
comité de révision, et donc, si on applique la loi de façon large, mais
conforme à la forme et la lettre de la Loi sur l'aide juridique, bien, ces
dossiers-là, les fois où l'aide juridique a dit oui ne font pas nécessairement
partie de la jurisprudence, puisque là on va plus se concentrer sur les refus
et dans quels cas le refus a été renversé.
M. Tanguay
: Avez-vous
des statistiques sur le nombre de personnes qui portent le refus en appel, je
dirais, à la commission?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Je ne les ai pas sous la main, mais c'est dans les rapports d'activité de la
Commission des services juridiques. Ceux qu'on a remis dans le mémoire
concernent les demandes de refus spécifiquement parce que... on a refusé l'aide
juridique parce qu'il manquait des documents. Parce qu'il y a plusieurs raisons
pour lesquelles on peut refuser l'aide juridique : si ce n'est pas un
service couvert; si on est inadmissible financièrement; si on a peu de chances
de succès; et s'il manque des documents. Donc, c'est cette donnée-là qu'on a
reproduite.
M. Tanguay
: O.K. Vous
parliez, et, j'imagine, c'est variations sur le même thème, là, à 4.4, lorsque
vous disiez, là : «De quels services est-il question dans cet ajout à
l'article 4.4 et quel enjeu ou domaine de droit est ici concerné?» Là
également, là, je ne sais pas si vous avez un commentaire à ajouter là-dessus,
parce que le temps file, mais c'était pour les services rendus avant la
judiciarisation. Pouvez-vous nous dire, donc, de façon très tangible on touche
à quoi ici?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Bien, en fait, c'est notre question. On est ravis qu'on élargisse le panier de
services avant la judiciarisation, parce qu'il y a beaucoup de choses qu'on
peut faire avant la judiciarisation pour éviter l'escalade. C'est juste que,
comme on va commenter un projet de loi, on ne peut pas donner notre aval sur
le... derrière la porte sur ce que, nous, on ne voit pas, il y a probablement
un projet de règlement qui s'en vient, mais avec ce qui est là, on ne peut pas
tant savoir, du moins en matière civile, quels services vont être à proprement
parler couverts si c'est la personne qui fait la médiation ou le conseil
pendant le processus de médiation. Mais on le salue, ceci dit, on en est très
heureux.
M. Tanguay
: Bravo!
Vous disiez aux pages 11 et 12, par rapport à l'article 4.10 : «Le projet
de loi remplace — et ça, c'est une particularité, là — le
mot "néfaste" par "grave".» Autrement dit : «Malgré
les dispositions de la présente sous-section, l'aide juridique est accordée à
une personne pour la rédaction d'un document relevant normalement des fonctions
d'un notaire, avocat si ce service s'avère nécessaire, compte tenu de la
difficulté qu'éprouve cette personne à préserver ou faire valoir ses droits et
des conséquences néfastes qui, en l'absence de ce service, en résulteraient.»
Donc, on vient ici changer «néfastes» par «graves», et, à raison, vous, vous
dites en page 12 : «Pourquoi changer "néfastes" par
"graves"?» Et qu'est-ce qui est derrière ça? Est-ce que, vous, vous
avez un début de piste...
M. Tanguay
: ...et des
conséquences néfastes qui, en l'absence de ce service, en résulteraient. Donc,
on vient ici changer «néfastes» par «graves», et, à raison, vous vous dites, en
page 12 : Pourquoi changer «néfastes» par «graves» et qu'est-ce qui
est derrière ça? Est-ce que vous, vous avez un début de piste de réflexion ou
ça arrive de nulle part? L'avez-vous déjà rencontré, ça, cette évolution-là
vers de «néfastes» à «graves»?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Non. Non, mais j'imagine que c'est probablement ce qui est derrière. Je veux
dire, je ne pense pas qu'il y ait des gens qui ont décidé de faire un
changement tout à fait inutile. Alors, assurément, on est confiantes qu'il y a
une raison derrière ça. Ceci dit, tant qu'à discuter de cet article-là, on
considère qu'on devrait amoindrir le critère d'admissibilité pour que ce soit
simplement «conséquences néfastes». Pour nous, ça devrait être suffisant pour
accompagner la personne dans sa démarche.
M. Tanguay
: Merci beaucoup.
Mme Thériault (Élise) : Même
«conséquences...
M. Tanguay
: Oui, je
vous en prie.
Mme Thériault (Élise) : Même
«conséquences négatives», parce qu'en fait, que «néfastes» soit plus pire que
«graves» ou que ce soit l'inverse, nous, ce qui est important, pour nous, et du
point de vue des bénéficiaires, c'est qu'il y ait le plus de gens possible qui
soient admis. Donc, à partir du moment où la personne a une conséquence
négative, que ce soit vraiment très, très grave ou néfaste, ou que ce soit
juste moyennent mauvais, on considère que cette personne-là, si elle est dans
un bureau d'aide juridique, c'est parce qu'elle a besoin d'aide puis qu'elle
devrait être admise.
M. Tanguay
: Tout à
fait, bon point. Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de
Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.
Mme Weil
: Bien,
peut-être juste en...
Le Président (M.
Bachand) : Une minute.
Mme Weil
: Oui.
Peut-être, vous permettre, dans votre conclusion, vos recommandations. Vous
parlez d'efficacité du système pénal, votre deuxième paragraphe :
«Cependant, une plus grande efficacité du système de justice n'équivaut pas
nécessairement à un meilleur accès à la justice. En ce sens, la démarche du
projet de loi n° 32 en ce qui concerne l'aide
juridique est décevante.» Vous faites un commentaire sur les hommes et les
femmes. Est-ce que vous avez — je pense qu'il reste, quoi,
30 secondes — peut-être un commentaire à faire là-dessus?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
En fait, c'était une question qu'on voulait vous soumettre. Ce qu'on constate,
en fait, c'est que le système de justice pénale, si on y concentre des
ressources, évidemment, c'est tant mieux. Les hommes sont surreprésentés dans
le système de justice pénale, mais ce sont les femmes qui utilisent en plus
grande partie les services d'aide juridique en matière familiale, en matière administrative,
en matière de logement. Alors, évidemment que nous, on prône, en fait, le bilan
du régime de l'aide juridique, la réforme pour voir où est-ce qu'on devrait
aussi investir. Alors, on n'est pas en train de dire qu'on ne devrait pas
améliorer la justice... le système de justice pénale, au contraire, mais qu'on
croit que c'est le temps qu'on s'attarde aussi à l'autre pendant du système du
régime de l'aide juridique.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Gouin, s'il vous
plaît.
Mme Lévesque (Sylvie) : C'est
souvent le parent pauvre du système de la justice
Le Président (M.
Bachand) :Rapidement, oui.
Mme Lévesque (Sylvie) :
....qui est souvent le parent pauvre du système de la justice.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Merci, M.
le Président. Bonjour. Merci d'être là aujourd'hui. J'ai été... Vous avez
attiré mon attention avec vos commentaires sur l'article 4.3.1 concernant
les consultations. J'ai aimé aussi... j'ai trouvé votre échange avec la ministre
intéressant, j'ai comme envie de vous permettre de le poursuivre. Puis
j'aimerais que vous me donniez un exemple, idéalement le plus concret possible,
disons une mise en situation basée sur votre interprétation de cet article-là
que... vous avez expliqué votre interprétation théorique, mais, disons,
concrètement, là, parce que vous représentez des gens qui sont sur le terrain,
pouvez-vous nous donner l'exemple d'un type de consultation qui était couvert
et qui ne le serait plus si on adopte le projet de loi tel quel?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
...on se demande si, par exemple, en matière de logement, on ne va pas perdre
une capacité d'aider les locataires en termes d'information de conseils,
puisque c'est entre autres un domaine où est-ce que la couverture est
discrétionnaire. Et, à ce moment-là, est-ce qu'on doit... On s'imagine dans un
bureau d'aide juridique, je suis avocate, quelqu'un vient me voir, est-ce que
j'ai besoin de savoir si c'est un service par ailleurs couvert — parce
que si j'allais à la Régie du logement avec cette personne-là, ça serait un
service couvert — ou c'est suffisant de me dire : C'est à
matière de logement, je peux considérer que c'est couvert par l'aide juridique?
Donc, jusqu'où — quand on fait l'admissibilité, l'évaluation de
l'admissibilité à l'aide juridique — je dois aller pour déterminer
que le service est par ailleurs couvert pour être capable de donner la
consultation d'ordre juridique qui en est reliée?
M. Nadeau-Dubois : Alors
qu'actuellement, comment ça se passerait?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
En ce moment, les... En ce moment, les consultations d'ordre juridique, c'est
nommément couvert.
M. Nadeau-Dubois : Parfait.
• (17 h 10) •
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Alors, à moins que ce soit un service qui est nommément exclu de la Loi sur
l'aide juridique comme la diffamation en demande comme le libelle... et les
contraventions de stationnement, c'est couvert, je peux donner une consultation
juridique. Et même ça, je vous soumets que le texte de la loi est plus large et
devrait me permettre de donner des consultations juridiques dans les domaines
qui sont nommément exclus. Mais dans le terrain, sur le terrain, c'est la
pratique qui est développée, ressemble au projet de loi qui est soumis et donc
il restreint la portée de l'article sur la consultation, qui devrait être
élargie puisque c'est une façon importante de prévenir les conflits, de les
désescalader, de les régler en amont. Et donc la consultation, au-delà de l'information,
pour nous, est primordiale, puis c'est une des richesses du régime de l'aide
juridique et c'est là-dessus, en fait, qu'il faut...
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
...au projet de loi qui est soumis et donc qui restreint la portée de l'article
sur la consultation, qui devrait être élargie puisque c'est une façon importante
de prévenir les conflits, de les désescalader, de les régler en amont. Et donc
la consultation, au-delà de l'information, pour nous, est primordiale, puis
c'est une des richesses du régime de l'aide juridique et c'est là-dessus, en
fait, qu'il faut même augmenter notre action, puisque c'est la particularité de
l'aide juridique de pouvoir donner des consultations au-delà de la simple information
qu'on peut trouver de toutes sortes autres façons maintenant.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Merci, M. le député de Gouin. Mme la
députée de Joliette, s'il vous plaît.
Mme
Hivon
: Oui.
Merci beaucoup. Je voulais savoir, vous parlez, après... Je pense qu'on a bien
fait le tour. En tout cas, moi, j'ai bien compris votre point. Il y a deux
éléments. J'aurais été curieuse de savoir, là, dans la page 16, le
cinquièmement, vous parlez vraiment, là, de la question de clarifier ce qu'on
entend par «droit collaboratif», «processus de médiation», tout ça. Le langage
peut être important. Je ne sais pas si, selon vous, il peut y avoir une portée
sur l'importance du droit qu'on va avoir selon les termes qu'on peut utiliser.
Ça fait que, ça, je serais intéressée à vous entendre par rapport à ça.
L'autre chose, c'est plus général, mais est-ce
que vous avez été surprise, donc, de trouver certaines modifications sur l'aide
juridique, dans le cadre de ce projet de loi omnibus, qui touchent certains
aspects très précis? Et est-ce que vous vous êtes dit : Bien, est-ce qu'on
ne devrait pas saisir l'occasion pour aussi d'autres éléments sans faire une
réforme globale de l'aide juridique via un omnibus? Mais, je ne le sais pas,
j'étais curieuse de vous entendre sur votre jugement un peu critique par
rapport à ce qui est choisi dans le cadre d'un omnibus versus d'autres
éléments.
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Effectivement, puis c'est pour ça qu'on a pris la peine, à la page 16, de
réitérer les autres propositions de modification que la coalition porte. Donc,
c'est après avoir consulté l'ensemble de nos membres. Mais est-ce qu'on a été
surprises? Je dirais que non puisque ça fait la suite du projet de loi n° 168, mais on l'a été au moment du projet de loi n° 168 puisque c'était un projet qui était vraiment omnibus
et qui, à la toute fin, encore comme maintenant, venait ajouter d'autres
articles qui touchaient l'aide juridique, et donc on aurait pu même ne pas le
voir passer.
Mais c'est une belle occasion, donc c'est
pour ça qu'on souhaite la saisir. On souhaite pouvoir participer aussi aux
discussions pour après, comme là on ouvre une porte avec des ajouts de
services, mais donc qu'est-ce qu'il va y avoir après, vers quoi on s'en va? On
espère pouvoir être consultés puis mettre l'épaule à la roue dans ce
travail-là, parce qu'évidemment ça peut être surprenant vu que ce n'était pas
le focus du projet de loi, mais c'est une belle occasion, puis on comprend
comment ça s'imbrique dans la première partie du projet de loi en particulier.
Mais, pour nous, c'est une occasion d'aller peut-être plus loin.
Mme
Hivon
: Puis
pour ce qui est du langage utilisé, mon autre élément, droit collaboratif,
processus de médiation, tout ça, vous soulevez la question, mais vous n'avez
pas de...
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
...proposerait que... C'est que si... Ce qui n'était pas clair pour nous, c'est
si on fait référence à la même idée puisqu'on utilise des termes différents. Si
l'idée, c'est d'élargir, ça pourrait être bien d'utiliser le terme le plus
large possible puisqu'il sera précisé dans une deuxième étape... ou, en tout
cas, c'est ce qu'on déduit du projet de loi, donc d'utiliser la forme la plus
large possible et, si c'est le... si on parle des mêmes services, à ce
moment-là, peut-être utiliser le même langage. Mais c'est, en soi, une
discussion très intéressante de savoir qu'est-ce qui est dans le droit
collaboratif versus un autre mode privé de prévention.
Mme
Hivon
: O.K.
Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Chomedey, s'il vous
plaît.
M. Ouellette : Merci.
Bonjour, mesdames. Deux minutes, ça passe bien vite. En matière de logement, ce
que vous parlez tantôt en aide juridique, vous savez que le projet de loi n° 16 est présentement à l'étude devant une autre
commission. J'ose penser que vous avez fait des représentations pour que, s'il
y a des choses qui doivent être incluses, ils le soient. Si ça n'a pas été
fait, bien, on en parlera parce qu'effectivement, puisqu'il est en étude
détaillée, c'est le temps, là, à même titre qu'à la page 16 vous parlez que,
s'il y a des choses qui pourraient être faites au niveau de l'aide juridique,
c'est aussi le temps. Est-ce qu'il y a une ouverture? Ça, ça serait à nous de
faire la discussion, mais je pense que c'est bien que vous nous l'apportiez.
Dans la dernière minute qu'il reste, les
demandes de révision, pourquoi qu'à 38 ça augmente et... Tout d'un coup, il y a
quelqu'un qui a trouvé une solution ou... Bien, pourquoi il y a eu une baisse
significative l'an dernier sur les demandes de révision?
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
Ici aussi, je pense que c'est peut-être la Commission des services juridiques
qui pourrait venir nous répondre puisque ce sont leurs chiffres. Évidemment, on
sait que le réseau était sous la loupe, dans les dernières années, avec le
Vérificateur général. Mais qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui, c'est mieux?
Peut-être que les gens ont apporté davantage leurs documents, mais je pense que
c'est quelque chose juste à surveiller ou demeurer vigilant dans les prochaines
années. Tant mieux si c'est un vent qui change et qui continue de diminuer. À
ce moment-là, on pourra se dire : Mission accomplie, on a changé nos
façons de faire. Je pense que c'est juste une question de demeurer vigilant et
alerte pour voir si c'est... quelle est la tangente. Est-ce qu'on...
Mme Lemoine (Claude-Catherine) :
...davantage leurs documents, mais je pense que c'est quelque chose juste à
surveiller ou demeurer vigilante dans les prochaines années. Tant mieux si
c'est un vent qui change et qui continue de diminuer. À ce moment-là, on pourra
se dire : Mission accomplie, on a changé nos façons de faire. Je pense que
c'est juste une question de demeurer vigilante et alerte pour voir si c'est...
quelle est la tangente. Est-ce qu'on continue d'aller vers le haut en termes de
chiffres ou si on diminue? Là, on a une année d'amélioration, alors c'est un
petit peu tôt pour conclure.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député.
Une voix
: Merci.
Le Président (M.
Bachand) : À mon tour de vous remercier beaucoup de votre
présence cet après-midi.
Alors, je vais suspendre les travaux quelques
instants pour accueillir le prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 15)
(Reprise à 17 h 17)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci. Alors, la commission reprend ses travaux. Je souhaite maintenant la
bienvenue aux représentants de l'Association des procureurs de cours
municipales du Québec. Comme vous avez vu, vous avez 10 minutes de
présentation, après ça, on a un échange avec les membres de la commission.
Donc, j'invite... d'abord, en vous présentant. Merci.
M. Rousseau (Nicolas) :
Alors, M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, bonjour. Je
me présente Me Nicolas Rousseau. Je suis président ex officio de l'Association
des procureurs de cours municipales. Je vais laisser ma collègue se présenter.
Mme Roy (Marie-Ève) : Alors,
bonsoir — c'est approprié — à tout le monde. Marie-Ève Roy,
Me Marie-Ève Roy, je suis nouvellement présidente depuis quelques jours de
l'APCMQ, l'Association des procureurs de cours municipales du Québec et je suis
aussi procureure à la Cour municipale de Lévis.
Alors, je débute tout de suite avec la
présentation de notre association que j'appellerai l'APMCQ, parce que ça va
beaucoup plus facilitant. Depuis 21 ans, l'association regroupe des avocats de
plusieurs municipalités, mais aussi en cabinet privé, qui représentent les
municipalités devant les cours municipales. Les cours municipales, pour votre
gouverne, sont de juridiction de première instance, et l'objectif premier est
d'offrir une justice de proximité aux justiciables québécois. Fortes de leur
indépendance, les résultats générés ne sont plus à démontrer, autant au niveau
des délais dans lesquels les dossiers sont entendus et jugés, mais aussi dans
la proximité des services judiciaires rendus, adaptés aux citoyens et
justiciables de leur région. De plus, en comparant la quantité de constats
d'infraction émis, les municipalités sont les principales poursuivantes en matière
pénale au Québec.
Alors, l'APCMQ vous remercie de
l'invitation que vous nous avez lancée, et nous pouvons, d'ores et déjà, vous
dire que l'association est très satisfaite du projet de loi n° 32, mais
certaines recommandations pourront, sans aucun doute, vous éclairer sur
certaines situations terrain vécues par nos procureurs.
• (17 h 20) •
M. Rousseau (Nicolas) : En
effet, le projet de loi, je vous dirais, on a quatre mots qu'on retient, là,
sur le projet de loi : simplicité, efficacité, modernité et au service du
justiciable. Vous comprendrez que, comme ma collègue vous dit, on est très favorable,
là, aux propositions législatives qui sont proposées puisqu'elles s'inscrivent
également dans la continuité du projet de loi n° 161, mais on vous invite,
là, à bonifier certains éléments, là, du projet de loi que vous avez vus dans
notre mémoire. On peut parler sur le virage technologique où est-ce qu'on
invite, là... où est-ce qu'on vous invite à mettre un certain bémol sur les
pouvoirs que la magistrature peut avoir d'imposer un virage numérique, là, dans
certaines cours, puisque, fortes de leur indépendance entre chacune des causes,
ce n'est pas toutes les cours...
M. Rousseau (Nicolas) : ...où
est-ce qu'on invite, là... où est-ce qu'on vous invite à mettre un certain
bémol sur les pouvoirs que la magistrature peut avoir d'imposer un virage
numérique, là, dans certaines cours, puisque fort de leur indépendance entre
chacune des cours, ce n'est pas toutes les cours qui sont au même niveau.
Je vous parlerais également de la
signification des actes de procédure, où est-ce qu'on est d'accord avec le
premier pas qui est fait, où est-ce qu'on peut, avec certains barèmes... Et,
là, quand on parle des actes de procédure, bien sûr, on enlève le constat
d'infraction et on enlève les avis d'appel, là, c'est vraiment sur les autres
actes de procédure, notre lecture du projet de loi. Mais on comprend qu'il y a
certains barèmes où est-ce que le juge va autoriser ou non l'assignation des
actes de procédure, mais également on vous proposerait, là, d'autres
modifications où est-ce qu'on pourrait faciliter la signification des actes de
procédure puisqu'en matière pénale, c'est une justice qui se veut de volume et
d'efficacité et où est-ce qu'il y a un penchant qui n'existe pas dans les
autres domaines de droit, qui est la rétractation de jugement, où est-ce que le
justiciable peut toujours revenir en arrière et se faire entendre.
Ma collègue va vous élaborer tantôt sur
les programmes d'adaptabilité, où est-ce qu'on vous invite à ne pas freiner les
programmes et à avoir encore une plus grande ouverture. La clarification des
conséquences du paiement pour valoir, plaidoyer de culpabilité. À cet effet-là,
il y a une... dans le but.... une question d'efficacité, une question, là, de
cohérence, on vous inviterait, là, à apporter certaines modifications. Sans
prêcher pour notre paroisse, là, mais de clarifier comme quoi que les corps
municipaux, les corps publics devraient être représentés, toujours, par des
procureurs. Le projet de loi est certainement un peu flou à cet — pas
le projet de loi, là, pardon, la loi — est certainement un peu floue
à cet effet-là, où est-ce qu'elle fait certaines ouvertures, mais on vous
invite à apporter certaines précisions.
Et finalement, là, la crainte de
l'ouverture à des possibilités de plaidoyer à des infractions autres, vous
comprendrez que l'association est très favorable à cette ouverture-là, mais...
de certains bémols pour ne pas qu'on ait un système de justice à deux vitesses,
où est-ce que ça soit toujours les amendes qui soient avantagées, où est-ce que
certaines personnes plus bien nanties seraient favorables, versus d'autres
personnes, là, de la collectivité.
Mme Roy (Marie-Ève) : Alors,
au niveau du programme d'adaptabilité — je vais avoir de la
difficulté à le dire tout le long, je suis certaine — je vais vous
parler... on va commenter au niveau du programme les articles 159.1 et
suivants. Et non tout ce qui est les mesures du programme d'adaptabilité pour
l'exécution des jugements parce que je pense que c'est plus au niveau des
greffes, des cours et de la perception, qui devront peut-être vous entretenir
là-dessus.
Pour le programme d'adaptabilité pour la
poursuite, l'APCMQ est en accord avec l'idée et le principe d'implanter des
mesures de ce type-là dans le système pénal québécois, compte tenu que le
visage de notre société, mais aussi des justiciables, a grandement changé. Et
je pense que le système judiciaire doit emboîter le pas pour développer des
solutions novatrices comme celle-là et adaptées à la nouvelle réalité que nous
vivons et que les justiciables vivent. Comme association, on croit grandement à
ces programmes-là puisqu'ils seront principalement utilisés et déployés dans
nos cours municipales. L'objectif du législateur était de cibler la
clientèle vulnérable : itinérance, dépendances diverses, troubles mentaux,
etc. Cette clientèle-là, elle est déjà en grande majorité chez nous, dans les
cours municipales parce que souvent, ça va être des personnes qui, s'ils ont à
commettre des infractions, ça sera souvent des infractions de réglementation
municipale, donc d'ordre et de paix publique.
Alors, cette clientèle-là, nous la
connaissons particulièrement bien dans les cours municipales, et je crois que
si vous souhaitez implanter ce type de programme là, on a quelques
recommandations à vous faire, dont la première et non la moindre : ça
serait de vous recommander de laisser une grande discrétion aux municipalités,
mais également au poursuivant municipal, et j'irais même à dire jusqu'à
déléguer une grande partie des pouvoirs aux municipalités. Je m'explique :
je comprends qu'il devra y avoir certaines grandes balises, par contre, ce sont
nous, les spécialistes, dans les cours municipales, qui connaissons notre
propre clientèle. Et, là, je vous donne seulement qu'un exemple : on prend
une cour municipale MRC Bellechasse, cour municipale de Québec. Pas la
même clientèle, pas le même type d'infractions, pas le même type non plus
d'intervenants communautaires qui sont sur le territoire. Beaucoup moins de
ressources communautaires, vous comprendrez, en Bellechasse qu'à Québec, et ces
intervenants-là communautaires vont être l'appui à donner, entre autres, aux
procureurs pour ce type de programme là. Donc, ce qu'on vous recommande, c'est
de laisser le plus de flexibilité possible aux procureurs et aux municipalités
afin qu'on puisse déployer le programme de façon un peu plus libre et faite sur
mesure pour notre propre territoire et nos justiciables.
À cet effet, on recommandait d'enlever le
règlement qui inclurait les infractions, c'est ce qu'on vous demande.
Subsidiairement, sinon, plutôt mettre des exceptions et nous laisser gérer les
infractions qui pourraient faire partie du programme...
Mme Roy (Marie-Ève) : ...pour
notre propre territoire et nos justiciables. À cet effet, on demandait... on
recommandait d'enlever le règlement qui inclurait les infractions. C'est ce
qu'on vous demande. Subsidiairement sinon plutôt mettre des exceptions et nous
laisser gérer les infractions qui pourraient faire partie du programme.
Si vous voulez un succès de ces
programmes-là, je pense aussi qu'il faudra, par le fait même, laisser un
pouvoir de discrétion aux procureurs et aux intervenants communautaires par qui
ils sont appuyés au niveau du retrait ou non des constats d'infraction et même
quand le programme ne sera pas complété. Ce qui est important de comprendre
c'est que même si le programme n'est pas complété, il peut y avoir plusieurs
constats d'infractions et je pense qu'il devra y avoir quand même une
évaluation par le procureur et les intervenants communautaires à savoir si un
ou des constats pourraient être retirés.
Finalement, dans les critères
d'admissibilité au programme, il faudrait plutôt... à l'article 159.2 :«3°
que le défendeur ne conteste pas les faits générateurs de l'infraction». Parce
que ce que vous... ce que le projet de loi n°
32 nous dit, c'est que le défendeur devra
reconnaître les faits générateurs de l'infraction. Souvent, ce type de clientèle
là, pour diverses raisons, ne se souviennent pas de ce qui s'est passé. Alors,
si on les oblige à reconnaître les faits de l'infraction plutôt qu'à ne pas les
contester, on va en exclure une grande partie selon nous.
M. Rousseau (Nicolas) : Finalement,
là, l'APCMQ croit qu'il faut aller un petit peu plus loin dans le projet de loi
et vous sort une série de mesures, là, pour aller directement sur l'efficacité
du système de justice pénale québécois. On pense premièrement, la prescription
en matière pénale où la Cour d'appel dernièrement est arrivée avec une
conclusion où la computation des délais commence à... ne s'applique pas, là...
l'exception qui est prévue au Code ne s'applique pas au monde municipal. Et ça
crée certaines problématiques, là, surtout en matière d'urbanisme et en matière
d'abatage d'arbres où on voit que certains justiciables pourraient se faufiler
du système et ne pas encourir la responsabilité pénale.
Vous avez également la présomption de
propriété de véhicules qui est une présomption qui existe déjà pour la
propriété d'un immeuble. On croit qu'on doit l'étendre à la propriété d'un
véhicule et la raison est fort simple. La personne peut toujours la contester
la propriété d'un véhicule et tout procureur qui est tenu par un code de
déontologique... de déontologie, pardon, et qui voit que la personne n'est pas
propriétaire d'un véhicule va retirer les constats d'infraction et ne
poursuivra pas l'infraction. Aller à l'encontre de ça serait à notre sens, là,
une faute déontologique et faciliterait également la présentation de la preuve.
Vous avez aussi des... On vous recommande
sur certaines dispositions de biens où est-ce que ce serait bien d'éclairer la
façon de... les fardeaux de preuve qui doivent être établis. L'assignation de
certains constats qui sont normalement réservés aux questions de stationnement,
on vous ouvre aussi l'ouverture, là, dire qu'il y a certains constats
d'infraction... On parle, exemple, en matière de portes débarrées — On
va beaucoup en termes de sécurité routière parce que c'est là-dessus que les
grands... que les constats sont émis au Québec — où est-ce qu'on ne
peut pas signifier, là, à un endroit apparent du véhicule. Or, le tarif en
matière d'huissier a changé et souvent nos municipalités nous disent que si on
doit signifier des actes de procédures, versus les tarifs qui sont appliqués,
elles préfèrent ne pas poursuivre... ne pas émettre de constats d'infraction.
Le Président (M.
Bachand) : Je vais vous demander... Malheureusement, le temps
est écoulé donc on va rentrer immédiatement en période d'échanges avec la
ministre s'il vous plaît, pas députée, Mme la ministre.
Mme LeBel : Bien, je vais vous
offrir peut-être de voir si vous voulez conclure, s'il y avait autre chose.
Parce que votre mémoire est quand même... Il comporte 20 recommandations
assez bien élaborées, merci, là.
M. Rousseau (Nicolas) : Très
facilement, là. On vous parle de la problématique des ordonnances en matière municipale
où est-ce que... si la personne... on a une tendance à vouloir émettre une
ordonnance de libérer ou de nettoyer le terrain — je donne un exemple
facile — et que la personne plaide coupable avant, là, audition, il
n'y a pas de possibilité d'avoir des ordonnances. Donc, ça serait important de
changer le projet de loi pour pouvoir que ces ordonnances soient misent là.
Et finalement, je vous parlerais de
l'article 366, là, qui est une revendication de l'association depuis
plusieurs années, là, de pouvoir l'étendre également aux poursuivants
municipaux.
Mme LeBel : Parfait, bien
merci. Peut-être revenir un peu sur les programmes d'adaptabilité — Moi
aussi, j'ai de la misère à le dire, ça fait que... Plusieurs de vos
membres : ville de Montréal, ville de Québec, surtout, il y a d'autres
municipalités où ces programmes-là existent, participent donc à ces
programmes-là, participent à l'utilité de ces programmes-là. Êtes-vous capable
de me donner quelques exemples peut-être concrets pour illustrer vu que vous
avez une expérience pratique de ces programmes-là? Dans l'état actuel des
choses, qu'est-ce qu'on est quand même capable de faire présentement et quelle
est l'utilité? Parce qu'on a vu certains... un groupe entre autres qui avait
des préoccupations tout à fait légitimes en matière de santé mentale. Êtes-vous
capable de me donner un éclairage par rapport à ce qui se fait présentement
dans la pratique?
Mme Roy (Marie-Ève) : Mais je
connais surtout les programmes à la cour municipale de Québec, Montréal
peut-être un petit peu moins, mais je sais qu'à la cour municipale à Québec
vous avec IMPACmais qui est plus en matière criminelle, donc là qui va se
dérouler pendant l'instruction. Ils ont aussi un programme, je ne sais pas
comment ils l'ont appelé, mais au niveau de la perception des amendes. Je ne
sais pas si c'est de ça que vous voulez que je donne des exemples, Mme la
ministre, plus qu'au niveau criminel parce qu'on est plus en pénal. Alors, je
donne un exemple...
Mme LeBel : C'est en matière
d'itinérance, je pense, dans la ville de Québec surtout, hein, que ça peut
s'appliquer?
• (17 h 30) •
Mme Roy (Marie-Ève) : Oui
surtout...Oui, surtout en matière d'itinérance mais aussi en matière de
stupéfiants...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Roy (Marie-Ève) : …de la
perception des amendes, je ne dis pas que c'est de ça que vous voulez que je
donne des exemples, là, Mme la ministre, plus qu'au niveau criminel parce qu'on
est plus en pénal. Alors, je donne un exemple…
Mme LeBel : C'est en matière
d'itinérance, je pense, dans la ville de Québec, surtout, hein, que ça peut
s'appliquer?
Mme Roy (Marie-Ève) : Oui,
surtout en matière d'itinérance, mais aussi en matière de stupéfiants, là, dont
une personne, un exemple, là, que la dame… elle avait des jeunes enfants, elle
est retournée… Elle avait beaucoup, beaucoup de constats d'infraction, elle est
retournée à l'école pendant neuf mois, elle a fait un programme de méthadone,
et, à un moment donné, elle n'a pas pu compléter le programme en tant que tel,
mais ils ont quand même été capables de faire des trucs pour elle et de retirer
certains constats d'infraction compte tenu de sa mobilisation, et que sa vie a
pratiquement changé.
M. Rousseau (Nicolas) : Si
vous me permettez, pour la ville de Montréal, il y a… En itinérance, c'est une
grande réalité où est-ce qu'on est beaucoup en matière pénale, on se retrouve
rarement en matière criminelle. Là, on parle d'injures, on parle d'infractions
de biens publics. La ville de Montréal, là, si la personne rentre dans un
programme et fait des démarches positives, on n'est pas obligés,
nécessairement, de se rendre à un résultat, mais où est-ce qu'elle fait des
démarches positives, à la ville de Montréal, à la cour municipale, à cet
endroit-là, on a pris la décision de dire : On va retirer… on va enlever
le fardeau financier qu'un constat a sur le justiciable, et on va lui permettre
de progresser, et c'est là-dessus qu'on vous dit que les cours municipales, par
le fait qu'elles sont proches… qu'il y ait des cours de proximité, ont un rôle
important à jouer, là, à ce niveau-là.
Mme Roy (Marie-Ève) : Puis
aussi éviter, je vous dirais de… parce que c'est ce type d'infraction là au
règlement municipal qui, si au bout de la ligne n'est pas payé, qu'on ne peut
rien faire en perception, la dernière alternative, c'est l'emprisonnement, ce
n'est pas compliqué. Donc… puis souvent, il peut y avoir les travaux
compensatoires, mais les travaux compensatoires pour certaines clientèles, je
vais être bien terre à terre, là, mais aller mopper un plancher, là, ce n'est
pas très mobilisant, donc, quand on utilise des types de programmes comme ça,
ça va être beaucoup plus mobilisant pour les gens qui vont les utiliser, puis
ça va être, pour leur avenir, ça va être beaucoup plus gratifiant que d'aller
faire des travaux compensatoires, là. Ça fait que je pense que c'est…
Mme LeBel : Parce qu'on
émettait des craintes, je suis contente que vous alliez sur ce sujet-là, des
travaux compensatoires, on émettait des craintes, justement, que
1 500 heures ou 150 heures, 200 heures,
1 500 heures, c'est beaucoup, là, dans ma pratique, là, on ne se rend
pas là nécessairement tout de suite, là, il faut le dire, avant d'avoir
1 500 heures… Mais, pour les gens qui nous écoutent, les travaux
compensatoires, donc, sont l'alternative au paiement d'amendes ou à
l'emprisonnement, donc…
Mme Roy (Marie-Ève) : Ou s'il
n'y a pas de biens à saisir.
Mme LeBel : Et voilà,
exactement. Donc, la crainte qui était émise par un des groupes précédents
était le fait que certains de ces programmes-là sont plus longs pour le
justifiable que de faire le 150 heures. Vous savez qu'il y a un
commentaire à faire par rapport à ça, vous avez parlé de mobilisation, de
structurant, de peut-être quelque chose qui va y ramener un peu de dignité, là.
Mme Roy (Marie-Ève) : Tout à
fait, et ce qu'on a compris aussi, parce qu'effectivement je ne pourrais pas
tout vous citer, mais je sais qu'il y a eu plusieurs études, plusieurs
recherches à tout le moins, en tout cas, pour la cour municipale de Québec, et
clairement, je vous dirais que… Puis, il ne faut pas que les gens pensent qu'on
va être les seuls procureurs dans nos bureaux, puis c'est nous autres qui
décident comment ça fonctionne, là, ce n'est pas nous les spécialistes, nous,
on est les spécialistes du droit, mais qui va être.. On va être capables
d'accompagner les intervenants communautaires qui, eux, vont prendre en charge
ces personnes-là, puis qu'ils vont les aider à se mobiliser, puis à grandir
dans tout ça. Nous, on est la courroie, puis on les aide, mais c'est clair que
ça ne sera pas notre travail, seulement à nous autres, comme procureurs, de
prendre… il doit aller dans quel programme, il doit faire quoi, il doit-tu se
rendre à six mois, cinq mois, quatre mois. Ça, c'est sûr qu'on va avoir besoin
d'être appuyés, puis c'est pour ça que je disais que le soutien de notre
communauté, à chaque municipalité, va être important, là.
Mme LeBel : Puis le projet de
loi établit bien le fait que le justiciable doit être d'accord pour participer
à un tel programme d'adaptabilité.
Mme Roy (Marie-Ève) : Ça doit
toujours être volontaire. Si ce n'est pas volontaire, ça ne fonctionnera pas.
Je vous le dis, là, c'est certain que ça ne fonctionnera pas, puis, oui, les
gens sont… c'est volontaire, puis, souvent, quand je disais qu'il y avait des
grandes balises, mais qu'il fallait quand même nous laisser une certaine
partie, il y a différents formulaires qui sont remplis, effectivement, ils ont
droit à un avocat qui va pouvoir tout leur expliquer ça : Toi, tu
t'embarques dans le programme, ça va être ça, ça, ça. Et ce n'est pas parce
qu'ils font une coche mal taillée qu'on les sort nécessairement tout de suite
du programme. Ça fait que c'est tout ça qu'il y a à être élaboré, selon moi. On
a déjà une partie, mais il y a quand même tout plein d'autres trucs à toucher,
là.
M. Rousseau (Nicolas) : Puis
je vous dirais que nos procureurs sont très fiers des programmes qui sont mis
en place, ils sont très fiers de faire partie de ces programmes-là, et pour eux
c'est… si c'est bien une implication dans la collectivité des procureurs, c'est
à ce niveau-là qu'ils se sentent valorisés.
Mme LeBel : Donc, pour
compléter là-dessus, donc, vous parliez tantôt de l'article qui demande que le
programme soit complété, justement, avant qu'on puisse retirer les constats
d'infraction. Donc, ce que vous proposez, justement, vous parliez de coche mal
taillée, c'est peut-être de voir… d'être capable de prendre en compte le
cheminement d'une personne qui pourrait arriver au bout d'un programme, et pour
une raison x, y, z n'est pas capable de le compléter, et qu'on ne pourrait
pas, je ne peux pas dire récompenser, mais je vais plutôt dire, tenir
compte de son cheminement, en n'étant pas capable de retirer le constat
d'infraction si le programme n'est pas complété. Est-ce que c'est ce que vous
voulez dire par…
Mme Roy (Marie-Ève) : C'est
exactement ça, comme l'exemple que je donnais de la dame qui avait beaucoup,
beaucoup de constats d'infractions, trois enfants… Elle est embarquée sur un
programme de méthadone, je pense qu'elle l'a pratiquement complété, elle est
retournée aux études, mais il y a certains trucs qu'elle ne pouvait plus faire
compte tenu de la vie qu'elle avait mais…
Mme LeBel : ...d'infraction si
le programme n'est pas complété, est-ce que c'est ce que vous voulez dire
par...
Mme Roy (Marie-Ève) : C'est
exactement ça, comme l'exemple que je donnais de la dame qui avait beaucoup, beaucoup
de constats d'infraction, trois enfants, elle est embarquée sur un programme de
méthadone, je pense qu'elle l'a pratiquement complété, elle est retournée aux
études, mais il y a certains trucs qu'elle ne pouvait plus faire compte tenu de
l'avis qu'elle avait. Mais elle avait grandi, elle est sortie de la rue... en
tout cas, elle a terminé son programme de méthadone, donc elle a quand même
avancé et cheminé dans tout ça. Donc, si au bout de neuf mois, pour une réalité
x, madame a super bien travaillé, super bien évolué, mais qu'on lui dit :
Le programme, nous, c'était 12 mois qu'on avait prévus, ça fait que malheureusement,
bien, bonjour. Et puis, là, bien, vous retournez à la case départ. Ça fait que
ce n'est pas l'objectif.
Mme LeBel : Donc, c'est une
des flexibilités auquel vous faites mention.
Mme Roy (Marie-Ève) : Voilà.
Mme LeBel : Bon, la partie, je
vais vous l'avouer d'entrée de jeu, où j'ai peut-être un petit plus de
craintes, où je veux comprendre un peu, c'est la partie de la liste des
infractions qu'on se propose d'établir par fin de règlement. Quand on parle au
niveau provincial, on parle du DPCP, de la poursuite provinciale, quand il y a
des directives, elles s'appliquent à la grandeur du Québec. À partir du moment
où on laisserait peut-être aux différentes... Je ne mets pas en cause
l'expertise des procureurs municipaux sur le terrain et l'expertise de leur
communauté puis leur société. Là où j'ai une crainte, dans votre proposition,
puis peut-être vous pourrez me rassurer ou voir comment on peut baliser ça,
c'est de faire en sorte que, dans une municipalité x, le même contrevenant
aurait accès au programme parce qu'on considère qu'il est accessible, ou il
ferait partie d'une liste que cette municipalité-là aurait élaborée, et dans
une autre municipalité, le même contrevenant, dans d'autres circonstances,
parce que ça adonne qu'il vit ailleurs, n'aurait pas accès.
Donc, nous, ce qu'on se propose de faire,
naturellement, c'est d'aller élaborer une liste par règlements pour s'adapter
et d'entendre les suggestions du milieu et d'ouvrir la liste en conséquence.
Mais le fait de laisser ça à chaque municipalité, bien, je pense que vous
comprenez ma crainte, là...
Mme Roy (Marie-Ève) : Bien,
je comprends tout à fait, là, c'est au niveau aussi de la cohérence de tout
le... parce que oui, effectivement...
Mme LeBel : Oui, la cohérence
pour le justiciable qui, des fois, se promène d'une municipalité à l'autre
aussi dans ses constats.
Mme Roy (Marie-Ève) : Oui,
aussi, effectivement, puis ça, ça va être un enjeu, parce que, quand elle va se
déplacer de municipalité en municipalité, il va falloir que ces
municipalités-là se parlent avec... En tout cas, ça, ça va être un autre...
Mme LeBel : Mais si ça vient
du niveau provincial, la cohérence est peut-être plus assurée.
Mme Roy (Marie-Ève) : Bien,
on au niveau de la liste des infractions, oui, la cohérence serait peut-être
plus là, je suis d'accord avec vous, Mme la ministre. Par contre, ce que je ne
voudrais pas, c'est qu'on encarcane ça et qu'on... À la limite, je me
dis : Est-ce qu'on peut mettre des exceptions?
Mme LeBel : Donnez-moi un
exemple. Comment vous verriez ça?
Mme Roy (Marie-Ève) : Je ne
sais pas, mais, moi, selon moi, ça va être nécessairement des infractions au
règlement municipal en grande partie qui vont être ciblées. Donc, je ne le sais,
mais sérieusement... Là, j'entends mon collègue... réfléchir tout haut.
M. Rousseau (Nicolas) : Non,
mais il ne faut pas oublier aussi, on ne souhaite pas bloquer l'innovation.
Parce que, vous le savez, le projet de loi n'était pas là avant, et on a quand
même fait des grandes choses dans les cours municipales, on est arrivés avec
des beaux programmes. Ce qu'on veut vous proposer, c'est de dire : Ne
bloquez pas l'innovation s'il y a quelqu'un qui a une idée nouvelle et qu'elle
ne fait pas partie de la liste. Changer une liste dans un règlement, c'est beaucoup
plus difficile que d'innover et d'être sur le terrain rapidement. C'est plus à
ce niveau-là.
Et quand la crainte du fait que le
justiciable n'ait pas le même service à tous les endroits, ça sera toujours
difficile d'arriver avec cet effet-là parce que, comme ma collègue vous le
disait, qu'on soit à Bellechasse, qu'on soit à Lévis ou qu'on soit à Montréal,
l'itinérance, on n'a pas les mêmes ressources, on n'a pas les mêmes ressources
sociales à tous les endroits. Et notre compréhension de projet de loi n'impose
aucune obligation d'avoir des programmes sociaux dans les municipalités. Donc,
là de dire, alors la liste, qu'est-ce qu'elle vient de faire, elle vient
freiner et non obliger d'avoir des programmes sociaux.
Mme LeBel : O.K. je comprends.
Je quitte les programmes parce qu'il me reste peu de temps, puis il y a une
mesure que je veux aborder, votre document étant quand même assez très clair,
mais il y en a une où vous me laissez un petit peu perplexe. En matière
criminelle, il y a l'infraction moindre et incluse, le procureur a une très
grande latitude pour changer un plaidoyer de culpabilité ou accepter un
plaidoyer de culpabilité sur les faits qui comportent une même affaire, qui
sont moindres et inclus. En matière de code pénal, c'est beaucoup plus
difficile, là, de changer des plaidoyers pour un autre. Bon, on connaît la
procédure, on n'entrera pas là-dedans. On parle, je pense que c'est la mesure
10, où vous recommandez de : «les infractions ou catégories d'infractions
qui sont... la discrétion de l'admissibilité des infractions ou catégories
d'infractions incluses dans...», non ce n'est pas ça du tout. C'est celle où
vous dites que vous craignez que par le... oui... Vous savez du quel je parle?
M. Rousseau (Nicolas) : Le
deux vitesses.
Mme LeBel : Exactement, le
deux vitesses, exactement. Et là vous, naturellement, vantez le
professionnalisme des procureurs, et je vois mal où est votre crainte si on
ouvre, justement, sur cette possibilité-là d'avoir des constats d'infraction,
merci.
• (17 h 40) •
M. Rousseau (Nicolas) : La
règle est déjà claire, en matière pénale, que les infractions moindres et
incluses, il peut y avoir des changements de plaidoyer, et la justice, la
magistrature surtout, surveille cette réalité-là. Et ce qu'on comprend, c'est
qu'avec la recommandation 19, là mais, c'est l'article 42 du projet de loi,
ce qu'on prend, c'est que le ministère de la Justice et le législateur
souhaitent accélérer les règlements, d'arriver avec des ententes, c'est ce
qu'on comprend de l'article 42. Parce que l'article 42, s'il n'existe
pas, il va toujours avoir des infractions moindres...
M. Rousseau (Nicolas) : ...la recommandation
19, là, mais c'est l'article 42 du projet de loi. Ce qu'on comprend, c'est que
le ministère de la Justice et le législateur souhaitent accélérer les règlements,
d'arriver avec des ententes. C'est ce qu'on comprend de l'article 42. Parce que
l'article 42, si elle n'existe pas, il va toujours y avoir des infractions
moindres et incluses, et c'est toujours permis. Alors, à la lecture de l'article
42, ce qu'on comprend, c'est que de dire... c'est que le législateur dit :
Forcer avec des grands guillemets, là, mais travailler sur les règlements de
conflit, je vous dirais, là, d'arriver avec des règlements autres, si c'est
possible. Mais ça, ça a toujours été possible, là. Donc, c'est pour ça qu'on ne
voit pas la pertinence de l'article 42, puisque c'est déjà le cas. Nous, notre
seule pertinence, à la lecture, puis peut-être qu'on se trompe, là, c'est de
dire : Bien, c'est de provoquer le règlement de dossiers, là, pénaux.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
LaFontaine, vous avez la parole. Merci.
M. Tanguay
: Merci beaucoup,
M. le Président. Et j'aurai l'occasion... Bien, d'abord, merci beaucoup d'être
là, de répondre à nos questions puis d'apporter votre éclairage. Il est de bon
aloi, lorsque nous serons rendus à l'étude article par article où je vais
demander à Mme la ministre : Pouvez-vous me déposer en liasse vos amendements?
Et là elle va dire : Non, non, on va y aller au fur et à mesure des
articles. Et elle va me poser la même question : Pouvez-vous déposer en
liasse vos amendements? On dirait que j'en ai déjà 20 qui sont déjà écrits et
rédigés qui sont vos recommandations de façon tout à fait précise. Là, on va
les analyser, mais vous avez fait un travail, je dirais, que l'on voit
rarement, qui est très chirurgical, qui est très précis. Il y a : ajouter
tel bout de phrase, tel mot, et ça dénote l'aspect très, très pratique que vous
avez. À tous les jours, dans votre profession, vous avez à vivre avec ces dispositions-là.
Ma première question plus macro, hors de
ces 20 recommandations là, est-ce qu'il y a d'autres pans que vous auriez aimé
voir à l'intérieur du projet de loi, donc réforme du droit pénal, du Code de
procédure pénale, devrais-je dire? Parce qu'il y a des semaines où on ne rouvre
pas la loi. Mais vous vous êtes, je pense, attardé beaucoup, beaucoup sur ce
qui est déjà prévu. Est-ce qu'il y a d'autres éléments que vous auriez aimé,
tant qu'à l'ouvrir, aller, là, sur lesquels vous auriez aimé que l'on aille?
M. Rousseau (Nicolas) : Je
dois vous avouer que... vous l'avez dit, là, il y a un travail chirurgical qui
a été fait, là, on a pris le projet de loi, on l'a... on est arrivés avec une
version administrative, si je peux me permettre les mots, et on a traversé...
complètement. Pour nous, là, le système de justice pénale se porte très bien.
Le système est simple. Le système est efficace. Est-ce qu'il est parfait? Non.
Je pense que le projet de loi arrive avec d'excellentes solutions. On vous
propose, au-delà des 20, vous comprendrez qu'on a fait le travail au complet,
et il y a des pans qu'on ne s'est pas penché. On pense, là, aux questions de
mandat perquisition. Pour nous, pour l'association, ça ressemble beaucoup plus
à des questions pour l'AMF, pour les autorités, là, qui font des poursuites un
peu plus grosses, un peu plus administratives, mais qui ne touchent pas
95 % des justiciables. Alors, pour nous, les propositions qu'on fait sont
complètes et répondent, là, aux besoins qu'on vit dans nos cours municipales.
M. Tanguay
: Merci
beaucoup. J'aimerais revenir sur le dernier élément, la recommandation 19, et
je vais vouloir laisser du temps à ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce. Vous
parliez, à ce moment-là, de l'article 42 du projet de loi qui... et il
s'agissait d'avoir l'insertion d'un nouvel article 193.1 : «Malgré toute
disposition du présent code, un défendeur peut nier sa culpabilité à l'égard
d'une infraction qui lui est reprochée et présenter au juge un plaidoyer de
culpabilité à l'égard d'une autre infraction se rapportant à la même
affaire...»
Vous levez un drapeau rouge en
disant : Il y a potentiel de justice à deux vitesses. Et j'aimerais vous
entendre de façon très tangible là-dessus où il arriverait un cas où un
justiciable dirait : Bien, pas à ça, non-culpabilité, mais culpabilité par
rapport à telle infraction. Et woup, en matière d'infraction au Code de la
sécurité routière, il n'y aurait pas de point de démérite, mais il y aurait une
amende plus salée, plus élevée. À ce moment-là, j'ai les moyens, je paie
l'amende puis je n'ai pas de point de démérite. C'est dans ce cas d'espèce là.
Est-ce qu'il y a d'autres cas? Mais c'est ce à quoi vous faites référence?
M. Rousseau (Nicolas) :
...fait référence... Et le cas... La jurisprudence le prévoit déjà qu'on peut
plaider une infraction moindre et qui est incluse, et la magistrature a un
devoir de surveillance sur nos changements de plaidoyer, là, à cet effet-là.
Comme je vous ai dit, sans s'attaquer puis en vous disant que c'est... on va
déchirer notre chemise sur le fait que ce n'est pas l'objectif, je pense, du
projet de loi, mais ce qu'on vous dit, c'est... notre lecture du projet de loi,
c'est qu'on invite les procureurs à participer plus grandement à des processus
de médiation, des processus de négociation. Et ce qu'on vous dit, c'est
qu'en... on pense, en matière de sécurité routière, on ne veut pas que... on
pense que les points de démérite, je pense en matière de sécurité routière,
parce que c'est flagrant, les points de démérite ont un impact puisque tout le
monde est sur le même pied d'égalité, ce n'est pas que l'amende qui a un
pouvoir de dissuasion, il y a les points de démérite où est-ce que n'importe
qui a 15 points de démérite, là, au Québec.
M. Tanguay
: Tout à
fait. Dans la recommandation... une recommandation précédente, la 17, à
l'article 41 du projet de loi, vous désireriez et vous le suggérez,
l'article...
M. Rousseau (Nicolas) : ...un
pouvoir de dissuasion, il y a les points d'émérites où est-ce que n'importe qui
a 15 points d'émérites, là, au Québec.
M. Tanguay
: Tout à
fait. Dans la recommandation... une recommandation précédente, la 17, à
l'article 41 du projet de loi, vous désireriez, et vous le suggérez,
l'article 41 remplace l'article 192. Je vais lire juste le premier
alinéa : «Le poursuivant et le défendeur peuvent agir personnellement ou
par l'entremise d'un procureur. Une personne morale peut agir par l'entremise
d'un procureur, de ses administrateurs ou de ses dirigeants.» Vous, vous
voudriez que nous ajouterions, à «personne morale» «Une personne morale de
droit public — donc que l'on vise les personnes morales de droit
public — doit agir par l'entremise d'un procureur.» J'aimerais vous
entendre là-dessus.
M. Rousseau (Nicolas) : Vous
comprenez, c'est purement théorique. Une personne morale... une municipalité
est une personne morale et on ne souhaiterait pas que le maire vienne plaider
les dossiers devant la cour municipale. Donc, c'est juste de rajouter que,
quand on est une personne morale de droit public, d'obliger d'avoir un
procureur, avocat, membre du Barreau, question de déontologie, question aussi
de protection du public, là. C'est à cet effet-là.
M. Tanguay
: Et ce
n'était pas déjà couvert dans l'état actuel du code?
M. Rousseau (Nicolas) : Non.
Et ce que le projet de loi... Comme je vous dis, vous l'avez fait la lecture du
projet de loi, là, on vient dire : Une personne morale peut être
représentée par procureur mais par aussi ses dirigeants, puis un maire, c'est
un dirigeant d'une municipalité. Donc, c'est pour ça qu'on voyait mal...
M. Tanguay
: Fermer la
porte.
M. Rousseau (Nicolas) : Et
c'est purement théorique, là. C'est clair, là. Dans nos cours, on ne le vit
pas, cet effet-là.
M. Tanguay
: Et on ne
voudrait pas le vivre, c'est ce que vous nous envoyez comme message, très certainement.
De façon un peu plus pointue, puis, encore
une fois, je veux laisser du temps à ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce. Vous
avez mentionné... votre première recommandation, vous levez votre chapeau pour
la cour municipale de Laval, premier tribunal à atteindre l'objectif d'une cour
sans papier. Et par la suite, vous soulever les efforts tout à fait louables de
Québec, Longueuil, Lévis, Marguerite-D'Youville : «quoique nous sommes
favorables à une plus grande utilisation des moyens technologiques...», vous
aimeriez que soit ajoutée la préoccupation dans la mesure où la cour qui entend
la cause serait capable de fournir ce service, donc d'ajouter, dans les
limites, des moyens dont la cour dispose. Ça, on pourrait dire : Bien, il
allait peut-être sans dire qu'une juge ou un juge ne l'aurait pas permis dans
la mesure où ce n'était pas couvert par une possibilité technique de la cour.
Mais au-delà de ça, est-ce que vous avez une réflexion en amont, à savoir
est-ce que... qu'est-ce qu'on fait justement pour suivre le bon exemple de la
cour de Laval? Parce que je pense que vous allez plaider que ça serait bon,
effectivement, d'aller davantage vers une cour plus technologique et avec moins
de papier, là.
M. Rousseau (Nicolas) : C'est
certain qu'on est d'accord avec une cour technologique, cependant, comme je
vous ai dit, c'est l'étape des petits pas, ce n'est pas toutes les
municipalités qui sont au même niveau. Je ne pourrais pas parler pour les
unions municipales qui vont, eux... paient pour les cours municipales, paient
pour les services de cours, là, que ce soit mettre au niveau technologique,
tout ça, mais ce que je vous dis, c'est qu'on vous suggère de prendre le
fardeau au juge, de dire : Bien moi, je peux imposer qu'on utilise un
moyen technologique, à dire : Oui, on peut l'imposer, si on est dans la
possibilité de le faire. Parce que notre lecture de l'article 1 est
d'effet que c'est vraiment, là, le magistrat peut imposer, là, l'utilisation de
moyens technologiques.
M. Tanguay
: Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de
Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît, 2 min 30 s.
Mme Weil
: Oui, merci.
Oui, j'ai beaucoup aimé, évidemment, votre présentation, c'est très clair et
net, mais toute cette section, vous parlez un peu d'une certaine autonomie
municipale, parce que c'est vrai que chaque municipalité vit des différences.
Si on compare Montréal, justement, avec l'itinérance, bon, la drogue, etc., des
enjeux particuliers, donc les procureurs, nécessairement, ont développé dans
chaque municipalité une sensibilité puis j'ai beaucoup aimé votre intervention.
Je comprends la ministre aussi qui dit : Mais, quand même, il faudrait
qu'on offre cette même possibilité à la largeur du Québec, mais de trouver
cette façon.
Lorsqu'on a fait le projet de loi sur le
cannabis, on a beaucoup parlé de... On aurait voulu vous avoir d'ailleurs dans
cette commission, parce qu'on cherchait comment faire des recommandations qui
feraient que la justice pénale ne viendrait pas être un frein dans le
développement d'un jeune qui, soudainement, va être judiciarisé, et c'est un
adulte, un jeune adulte qui devient judiciarisé. Et, d'ailleurs, même,
l'Association des psychiatres, tous ceux qui étaient pour le projet de loi
avaient ce souci. Est-ce que, dans ce sens-là... parce qu'on parle de tout ça.
Avec ce projet de loi, on parle du droit social, de la pauvreté, d'itinérance,
beaucoup de ces jeunes, et on l'a vu aux États-Unis, les jeunes en infraction,
la drogue, c'est des itinérants, c'est des jeunes qui n'ont pas de
possibilités, donc ils ne pourront jamais payer des contraventions, etc.
Avez-vous, peut-être, une recommandation à cet égard? Parce qu'on a beaucoup
parlé de santé mentale jusqu'à date, et dans ces cas, ce n'est pas
nécessairement en santé mentale, ça peut l'être, c'est vraiment tout simplement
itinérance, ou autre, ou vulnérabilités, ou même des jeunes qui, bon, qui sont
pris avec ça, mais qui ne vont pas payer les contraventions, qui n'ont pas
l'argent pour les payer, des solutions de rechange, des exemples, là?
• (17 h 50) •
M. Rousseau (Nicolas) : Ce
que j'ai vu dernièrement, exemple, la ville de Montréal où est-ce que, pour des
constats d'infraction en matière du Code de la sécurité routière, mais
cycliste, où est-ce qu'on va arriver avec des mesures...
Mme Weil
: ...qui, bon,
qui sont pris avec ça, mais qui ne vont pas payer les contraventions, qui n'ont
pas l'argent pour les payer, des solutions de rechange, des exemples, là.
M. Rousseau (Nicolas) : Ce
que j'ai vu dernièrement, exemple, la ville de Montréal où est-ce que, pour des
constats d'infraction en matière... le Code de la sécurité routière, mais
cycliste, où est-ce qu'on va arriver avec des mesures alternatives où est-ce
qu'on va préférer la formation et la pédagogie, inviter les gens, dire :
Bien, on retient votre constat d'infraction, mais allez suivre une formation
sur où est-ce qu'on traverse, aux lignes à piéton. C'est tout ce volet-là qui
peut être développé, là, dans d'autres matières.
Mme Roy (Marie-Ève) : Et peut-être,
je m'excuse, si vous me permettez de faire du pouce là-dessus aussi, au niveau
du cannabis, il y a certaines municipalités, là, je ne les connais pas toutes,
là, mais, entre autres, à Lévis, ça, je peux faire ce constat-là, on a inclus,
à la réglementation municipale, le fait qu'on ne pouvait pas consommer de
cannabis dans les lieux publics. Et nécessairement, comme c'est de la réglementation
municipale, probablement que ça pourrait entrer dans les programmes
d'adaptabilité, là, ça fait que peut-être on pourrait, de cette façon-là,
atteindre votre préoccupation, là.
Mme Weil
: Oui, puis
les médecins recommandés devraient inclure la possibilité de contraindre les
contrevenants à des stages de sensibilisation aux dangers de l'usage du
cannabis, par exemple.
Mme Roy (Marie-Ève) : Et en
laissant un peu plus de discrétion justement, mais ça, pour les municipalités
qui ont ce type d'infraction là, on pourrait l'inclure nécessairement et on
pourrait y aller avec des mesures comme, entre autres, vous proposez, là.
Mme Weil
: ...
Le Président (M.
Bachand) : Désolé. Le député de Gouin a la parole. Merci.
M. Nadeau-Dubois : Merci.
Bonjour. Ça tombe bien, je veux continuer sur le même sujet. Moi aussi, j'ai
été interpellé par votre recommandation n° 10, et
j'ai une mise en situation à vous soumettre. Vous proposez de donner plus
d'autonomie, de flexibilité aux municipalités pour décider quelles infractions
il y aurait une possibilité d'avoir un programme d'adaptabilité. Prenons
l'exemple d'une personne en situation d'itinérance qui, comme c'est malheureusement
trop souvent le cas, cumule des constats d'infraction et qui, par définition,
est mobile, hein, dans son itinérance, ne reste pas toujours au même endroit.
Disons qu'elle se promène sur le territoire de l'île de Montréal et a des
constats d'infraction à Montréal, d'autres à Westmount, est-ce que ça ne crée
pas une situation potentiellement difficile où une même personne aurait
certains, pour une même infraction, commis dans une certaine municipalité,
pourrait se prévaloir de ce programme-là, puis de la même infraction commise
par la même personne, potentiellement la même année, pourrait, dans le cas de
d'autres constats, ne serait pas admissible puisque cette municipalité-là,
cette deuxième municipalité ne permettrait pas, dans la liste d'infractions,
qu'il y ait un programme? Est-ce que ça ne crée pas une possibilité non
seulement d'inéquité régionale entre différents citoyens, citoyennes au Québec,
mais même pour une même personne? Ça pourrait créer des situations où certaines
infractions, dépendant d'où on les commet, on peut avoir accès à des programmes
puis parfois pas. Est-ce que je fabule ou est-ce que ce n'est pas une des
possibles conséquences de votre recommandation n° 10?
M. Rousseau
(Nicolas) : Le projet de loi ne vient pas obliger
les poursuivants municipaux ou tous poursuivants à avoir des programmes
d'adaptabilité, elle vient permettre d'avoir des programmes d'adaptabilité et,
si la municipalité n'est pas en mesure de l'offrir, elle ne le force pas. Ce
qu'on nous dit à la recommandation n° 10, c'est de dire :
Limitez-nous pas avec une liste d'infractions, on est innovant, on est proche
de notre monde. Ça va être une justice de proximité, on le répète souvent, on
connaît notre milieu. Laissez-nous l'innovation possible dans le futur. C'est
vraiment à cet effet-là en plus. Votre crainte que vous avez, elle est louable,
on la comprend, mais, malheureusement, le système de justice pénale est très
territorial et le projet de loi ne vient pas obliger les municipalités à avoir
des services sociaux.
Mme Roy (Marie-Ève) : Et peut-être
qu'à Westmount, bien, il n'y en aurait justement pas de programme d'
adaptabilité aussi, là, c'est une possibilité.
M. Nadeau-Dubois : Je
comprends ce que vous me faites comme réponse, tout à fait. Deuxième question
sur votre recommandation n° 12, vous parlez, encore une
fois, d'un gain de flexibilité puis vous l'argumentez en disant : Ça
pourrait permettre de retirer des chefs d'accusation, même si le programme
n'est pas complété, ce que j'ai compris de votre argument. Or, l'article 159.1
parle de participer à un programme, pas de le compléter. L'endroit où on parle
de compléter le programme, c'est à un autre article puis c'est à l'article
159.5, où là on dit «lorsque c'est complété, le poursuivant peut», d'ailleurs,
le Barreau nous recommandait de mettre «doit». Donc, en quoi changer 159.1 qui
parle justement de participer à un programme et non pas de le compléter, il me
semble qu'il y a déjà là donc la flexibilité que vous demandez, est-ce que je
me trompe?
Le Président (M.
Bachand) : Très rapidement, s'il vous plaît...
Mme Roy
(Marie-Ève) : Non, vous ne vous trompez pas,
effectivement, c'est le cas. Nous, ce qu'on voulait, c'est que, dans ces deux
articles-là, j'y voyais du contraire, un qu'on donnait une discrétion et un
qu'on obligeait. Alors, moi, je pense que c'est un oubli, je vous dirais, là,
dans les recommandations, et je pense qu'il faudrait plutôt se fier à 159.5, si
je ne me trompe pas, qui dit au lieu de «doit», ce serait «peut»... non, c'est au
niveau que le programme est complété ou pas... pardon, que le programme soit
complété ou non, le poursuivant peut retirer un ou des chefs d'accusation.
Le Président (M.
Bachand) : Merci...
Mme Roy (Marie-Ève) : ...vous
dirais, là, dans les recommandations. Et je pense qu'il faudrait plutôt se fier
à 159.5, si je ne me trompe pas, qui dit, au lieu de «doit», ça serait
«peut»... non, c'est au niveau que le programme est complété ou pas, pardon,
que le programme soit complété ou non, «le poursuivant peut... retirer un ou
des chefs d'accusation». Donc, vous m'excuserez de l'erreur, mais vous avez
raison.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Joliette, s'il
vous plaît. Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon
: Oui,
merci. Bonjour. Deux questions. Donc je veux... Juste la question de
l'article 42, quand vous affirmez qu'il faut faire attention de ne pas
créer un système de justice à deux vitesses, donc je voudrais vous entendre
pour que vous expliquiez vraiment, là, pour que je comprenne bien. Puis l'autre
élément, c'est, quand on parle de projet, de programme particulier adapté, quel
genre de formation est donné aux procureurs, aux juges, là, je comprends que
vous ne représentez pas les juges, mais on ne les entend pas souvent en commission
parlementaire malheureusement, ça fait que si vous le savez, ça
m'intéresserait, donc, municipaux, par rapport à ça, parce que je ne sais pas
si vous avez entendu le témoignage tout à l'heure, mais on nous disait qu'il y
avait quand même pas mal de lacunes.
M. Rousseau (Nicolas) :
Alors, pour la première question, là, comme je vous dis, la lecture, là, de
la... je pense que c'est de l'article 47, là, notre lecture, c'est qu'on
nous invitait...
Une voix
: 42.
M. Rousseau (Nicolas) : 42,
pardon. On nous invitait fortement à arriver avec des règlements dans les
dossiers alors que la situation actuelle et la situation du droit actuel permet
déjà d'avoir des... appeler des coupables à des infractions moindres et
incluses. Donc, le fait de l'ajouter dans le code de procédure pénale, on
comprend que c'est une invitation, là, forte du législateur, là, de venir,
là... d'encourager le conflit de règlements, qui plus est, qu'on est dans un projet
de loi qui propose l'efficacité du système de justice. Donc, on comprend qu'il
y avait une question... À l'époque, en tout cas, au 161, on avait une question
de délais, on avait une question de retard, ce qu'on ne vit malheureusement pas
dans nos cours municipales, qu'on est relativement très à jour, là, dans nos
délais.
Mme
Hivon
: Vous
ne vivez heureusement pas dans vos cours.
M. Rousseau (Nicolas) :
Heureusement pas, oui. Et pour le programme, je vais laisser ma collègue, là.
Mme Roy (Marie-Ève) : Bien, au
niveau de la formation, moi, c'est plus, je vous dirais, je ne sais pas s'il y
a de la formation spécifique autant pour les juges que pour les procureurs. Je
ne peux pas vous dire si ça a été fait ou pas, entre autres, à Québec et à
Montréal. Par contre, ces deux cours municipales là, sont appuyées par une
grande équipe, que ce soit, il y a des agents de probation, il y a des
psychologues, il y a des travailleurs sociaux, il y a vraiment une panoplie
d'intervenants, finalement, qui sont beaucoup plus spécialistes au niveau,
entre autres, de la santé mentale mais aussi plus communautaire, pour
l'itinérance et des trucs comme ça. Donc, les procureurs sont toujours, toujours
appuyés, là, par ces intervenants-là et ces acteurs-là.
Mme
Hivon
:
Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Chomedey, s'il vous
plaît.
M. Ouellette : Merci. C'est
aussi 2 minutes, ça passe vite, hein? 20 recommandations, vous avez fait,
je pense, un travail de moine, et je pense qu'on va devoir en tenir compte, et
donc, on devrait partir avec 20 amendements au projet de loi, ne serait-ce que
pour harmoniser et faire en sorte que la réalité du terrain se traduise dans le
projet de loi, ce que vous avez vécu. Parce que je regarde, avec l'ensemble des
exemples que vous nous présentez, là, bon, on est vraiment sur le terrain. Vous
n'êtes pas allés dans le 5 % qui parle des grosses boîtes, mais quand vous
parlez des portes débarrées puis ces choses-là, là, bien, c'est vraiment la
réalité de... pas juste à Bellechasse, à Montréal aussi, à Laval et aux
différents endroits.
Je n'ai pas retrouvé, dans vos 20 recommandations,
là, parce qu'au début de votre présentation vous vouliez avoir beaucoup plus de
flexibilité, une plus grande discrétion, ça ne s'est pas traduit, je n'ai pas
lu dans aucune de vos 20 recommandations quelque chose de tangible sur :
On le matérialise comment cette discrétion-là puis ce pouvoir-là? Parce que, ce
que vous nous dites, c'est : On connaît ça, là, on vous le dit qu'on
connaît ça, mais on aimerait ça être capable de le matérialiser sur le terrain.
Mme Roy (Marie-Ève) : Je
comprends que vous parlez au niveau des programmes d'adaptabilité?
M. Ouellette : Oui.
Mme Roy (Marie-Ève) : Oui.
Bien, c'est la recommandation 10. Quand on demande de... Attendez, c'est-u ça?
Les infractions? Oui, à l'article 159.1, que «"Les infractions ou catégories
d'infractions visées par ce programme sont prévues par règlement.", soit
retiré». Ça, c'en est un. L'autre plus loin... Puis comme j'ai eu la question
tout à l'heure, là, c'est... La recommandation 12 n'était peut-être pas tout à
fait adaptée, mais à 159.5, ce qu'il faudrait faire, ce que je vous recommande
aujourd'hui, c'est qu'il faudrait laisser de la latitude, même si le programme
n'est pas complété, de retirer ou pas des constats d'infraction.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, c'est tout le temps qu'on a. Merci
infiniment de votre participation, vous êtes très appréciés. Cela dit, la
commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à 18 heures)
18 h (version non révisée)
Mme Roy
(Marie-Ève) : …même si le programme n'est pas
complété de retirer ou pas des constats d'infraction…
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, c'est tout le temps qu'on a. Merci
infiniment de votre participation, vous êtes très appréciés. Ceci dit, la
commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à
18 heures)
19 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 19 h 35)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bonsoir. La commission
recommence ses travaux. Je demande bien sûr à toutes les personnes dans la
salle de bien vouloir éteindre la petite sonnerie de leurs appareils
électroniques, s'il vous plaît.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le
cahier de consultation sur le projet n° 32, Loi
visant principalement à favoriser l'efficacité de la justice pénale et à
établir les modalités d'intervention de la Cour du Québec dans un pourvoi en
appel.
Ce soir, nous entendrons deux groupes. D'ailleurs,
je souhaite la bienvenue au premier groupe. Il s'agit des représentants du Barreau
du Québec. Alors, je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous procéderons à une période d'échange avec les membres de
la commission...
Le Président (M.
Bachand) : …visant principalement à favoriser l'efficacité de
la justice pénale et à établir les modalités d'intervention de la Cour du
Québec dans un pourvoi en appel.
Ce soir, nous entendrons deux groupes.
D'ailleurs, je souhaite la bienvenue au premier groupe. Il s'agit des
représentants du Barreau du Québec. Alors, je vous rappelle que vous avez
10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à une période d'échange
avec les membres de la commission. Donc, bonsoir et la parole est à vous.
Merci.
Mme Claveau (Catherine) : Mme
la ministre, M. le Président, mesdames et messieurs les députés, je suis
Catherine Claveau, vice-présidente du Barreau du Québec, et je suis accompagnée
ce soir de Me Pascal Levesque, ici à ma droite, qui est président du
comité en droit criminel du Barreau, ainsi que Me Michel Marchand, qui est
également membre de ce comité, et, à ma gauche, de Me Nicolas Le Grand Alary
qui est avocat au secrétariat de l'ordre et aux affaires juridiques du Barreau
du Québec.
Alors, le Barreau a effectivement pris
connaissance, avec un grand intérêt, du projet de loi n° 32, et souhaite
vous faire part de ses commentaires. La mission principale du Barreau du Québec
étant la protection du public, ceci l'amène à assurer un rôle social de premier
plan dans la promotion de la primauté du droit. C'est dans ce contexte que le
Barreau donne régulièrement son point de vue sur des questions d'administration
de la justice, tant civile que pénale.
Tout d'abord, en matière pénale, le
Barreau du Québec comprend que le projet de loi modifie le Code de procédure
pénale en étendant les pouvoirs que le Procureur général ou le Directeur des
poursuites criminelles et pénales peuvent exercer en ce qui a trait à la
poursuite d'instances pénales. Plus particulièrement, le paragraphe 4° du
nouvel article 11 prévoit que le Procureur général et le DPCP peuvent reprendre
une poursuite pénale dans les six mois de l'arrêt de celle-ci. Dans plusieurs
situations, le poursuivant original peut avoir conclu une entente avec le
défendeur ou bien le dossier peut faire l'objet d'un nolle prosequi. Or, le
Procureur général ou le DPCP, à l'intérieur d'un délai de six mois, pourrait
reprendre l'instance et reprendre la poursuite, revenant ainsi sur la décision
du poursuivant original, et affectant négativement le défendeur. Les ententes
qui interviennent entre la poursuite et le défendeur se doivent, en principe,
d'être respectées, de même que les décisions visant l'opportunité du maintien
de la poursuite, sauf lorsque celles-ci vont à l'encontre de l'intérêt public
et de l'intérêt de la justice. Le Barreau du Québec est d'avis que le pouvoir
ainsi conféré au Procureur général ou au DPCP ne devrait être exercé que très
exceptionnellement lorsqu'ils estiment que la décision originale est contrainte
à l'intérêt de la justice et à l'intérêt public ou qu'elle est susceptible de
déconsidérer l'administration de la justice.
En outre, l'article 3 du projet de loi
propose de permettre au défendeur de renoncer à la prescription d'une
infraction. Cette entente, bénéfique pour toutes les parties, permettra, selon
le Barreau du Québec, d'augmenter le nombre de dossiers qui font l'objet d'un
règlement. Le Barreau du Québec salue donc cette modification qui améliorera
l'accès à la justice et permettra sans doute de réduire certains délais en
matière criminelle et pénale.
Par ailleurs, l'article 19 du projet de
loi permettra à un agent de la paix de demander de voir la pièce d'identité
d'une personne s'il a des motifs raisonnables de croire que celle-ci a commis
une infraction. Nous comprenons que les objectifs poursuivis par cette
disposition sont de contrer la fraude d'identité et de s'assurer que ce soit bien
la personne en cause qui réponde de ses actes. De façon générale, rappelons
qu'actuellement il n'existe pas d'obligation d'avoir une pièce d'identité sur
la voie publique. La disposition proposée suggère une interprétation qui va à
l'encontre de ce principe. Nous nous demandons quelle problématique le
législateur cherche à régler en permettant à l'agent de la paix d'exiger une
pièce d'identité. Les infractions pénales étant de gravité moindre que les
infractions criminelles, elles devraient comprendre des règles moins intrusives
du point de vue des droits des justiciables.
• (19 h 40) •
De plus, le projet de loi prévoit la
possibilité de procéder à une arrestation dans une maison d'habitation sans
mandat, en vertu du Code de procédure pénale. Il est évident que le pouvoir
d'effectuer une arrestation constitue un élément très important de
l'application de la loi. Pour cette raison, il n'est pas réaliste de croire que
les agents de la paix ne pourraient jamais entrer sans mandat dans des lieux
privés pour effectuer une arrestation. Cela diminuerait grandement leur
capacité d'appréhender des personnes soupçonnées d'activités illicites et de
préserver des éléments de preuves nécessaires à leur condamnation. À la lecture
du nouvel article 27, nous comprenons l'intention du législateur qui est de
baliser et protéger juridiquement les agents de la paix lorsqu'ils font une
intervention dans une maison d'habitation. Néanmoins, nous constatons que le
projet de loi prévoit des critères moins exigeants que ceux actuellement prévus
au code de procédure pénale en ce qui concerne l'arrestation dans une maison
d'habitation sans autorisation. Rappelons encore une fois la gravité objective
moindre des infractions pénales par rapport aux infractions criminelles. Pour
bien illustrer notre position, il nous paraît déraisonnable que les agents de
la paix s'introduisent sans mandat dans une maison d'habitation pour y arrêter
un piéton qui aurait traversé la chaussée sans danger, mais pas à une
intersection, ou un conducteur…
Mme Claveau (Catherine) :
...rappelons, encore une fois, la gravité objective moindre des infractions
pénales par rapport aux infractions criminelles.
Pour bien illustrer notre position, il
nous paraît déraisonnable que les agents de la paix s'introduisent sans mandat
dans une maison d'habitation pour y arrêter un piéton qui aurait traversé la
chaussée sans danger mais pas à une intersection ou un conducteur pour avoir
conduit avec un silencieux défectueux. Ces exemples illustrent bien la
disproportion potentielle entre les objectifs poursuivis et les moyens mis en
oeuvre pour ce faire. Ces cas d'espèce font partie des situations hypothétiques
raisonnables que l'on doit évaluer lors de l'analyse de la constitutionnalité
d'une disposition selon le critère de la portée excessive.
Le projet de loi modifie également le Code
de procédure pénale en modifiant les critères applicables aux travaux
compensatoires. Ces travaux compensatoires sont des heures de travail non
rémunérées qu'un citoyen se trouvant dans l'impossibilité de s'acquitter d'une
amende accepte volontairement d'exécuter dans le but d'éviter l'emprisonnement.
Ces heures de travail sont réalisées au profit d'organismes à but non lucratif
ou des municipalités. Le projet de loi prévoit une série de mesures
alternatives à ces travaux compensatoires et prévoit les règles de mise en
oeuvre de ce nouveau régime. Or, le projet de loi est muet quant au nombre
maximal d'heures à exécuter dans le cadre du régime des mesures alternatives,
ce qui semble constituer une lacune importante.
Le projet de loi propose la mise en place
d'un programme d'acceptabilité. Ces programmes permettent de mettre en place
une infrastructure légale dans laquelle pourront évoluer certains programmes
sociaux principalement en lien avec des personnes en situation d'itinérance ou
de dépendance toxicologique. Cette clientèle vulnérable se voit donner une importante
quantité de constats d'infraction en lien avec des infractions municipales
d'incivilité : trouble de la paix, ivresse dans un lieu public, bagarre,
dormir à des endroits inappropriés ou être présent dans certains endroits après
l'heure de fermeture, traverser une rue ailleurs qu'à une intersection, etc.
Dès lors, un grand nombre de ces individus
se retrouvent endettés de plusieurs milliers, voire des dizaines de milliers de
dollars découlant de constats impayés. Ces dettes nuisent inévitablement à leur
motivation et à leur réadaptation, sans compter qu'elles peuvent également se
traduire par l'emprisonnement de la personne. C'est ainsi que s'est développé
un partenariat entre les services de perception des amendes et les avocats de
la poursuite des cours municipales de Montréal et de Québec afin de mettre en
place des programmes sociaux dans le but de favoriser la réadaptation de ces
personnes. Plusieurs nouveaux articles proposés par le projet de loi mettront
en place l'infrastructure législative pour favoriser une souplesse dans ces
programmes, bien que d'importants éléments de ces programmes d'adaptabilité et
les infractions qui pourront en faire l'objet seront clarifiés dans les règlements
à venir.
De façon générale, nous saluons cette
modification. Notre mémoire contient cependant plusieurs commentaires
techniques qui visent à bonifier le projet de loi et à porter à votre attention
certains éléments qui sont absents, dont l'absence d'un mécanisme indépendant
de vérification du fait que les conditions du programme ne sont plus observées
par le défendeur, l'octroi d'une discrétion au poursuivant de retirer les chefs
d'accusation visés par le programme, alors que le défendeur a complété le
programme, et la connaissance potentielle du juge des admissions du défendeur,
bien que celles-ci ne soient pas admissibles en preuve.
Alors que le projet de loi reprend la
majorité des mesures proposées par le projet de loi n° 168
en matière pénale, il contient peu de mesures en matière civile. En ce qui
concerne le Code de procédure civile, le projet de loi ne reprend que la mesure
concernant la convocation des témoins étrangers. Alors, le Barreau de Québec
attend donc avec intérêt le dépôt d'un projet de loi qui reprendra les
modifications du Code de procédure civile proposées par le projet de loi n° 168, dont plusieurs répondaient à ces recommandations.
En terminant, l'article 143 du projet
de loi propose la création de deux nouveaux postes de juge à la Cour du Québec.
Le Barreau du Québec salue cette mesure et recommande que ces juges soient
intégrés à l'équipe des juges de l'Abitibi-Témiscamingue—Nord-du-Québec. En
effet, la création de ces postes est nécessaire pour répondre adéquatement aux
besoins du Nunavik. Cela permettrait à la cour itinérante d'accorder plus de
temps aux communautés qui les requièrent et d'accéder à leur demande voulant
que la durée des termes soit augmentée jusqu'à un maximum de quatre semaines.
Alors, voilà qui fait le tour des enjeux
principaux que le Barreau du Québec voulait aborder avec vous ce soir. Des
explications plus détaillées sur les différents enjeux que nous venons
présenter se retrouvent dans le mémoire que nous vous avons soumis et qui est
également disponible sur le site Web du Barreau du Québec. Nous espérons que
notre présentation a contribué à votre réflexion et évidemment nous sommes
disponibles pour répondre à vos questions. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment. Nous allons déjà débuter la
période d'échange avec la ministre pour une période de 15 minutes.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci de votre présence et merci de votre rapport. On a pris la
peine... J'ai pris la peine de lire votre mémoire. Il y a beaucoup de mesures
qui sont soulignées. Vous proposez plusieurs aménagements. Naturellement, en
peu de temps où on a pour faire une discussion, je vais peut-être...
Le Président (M.
Bachand) : ...la période d'échange avec la ministre pour une
période de 15 minutes.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci de votre présence et merci de votre rapport. On a pris la
peine... J'ai pris la peine de lire votre mémoire. Il y a beaucoup de mesures
qui sont soulignées. Vous proposez plusieurs aménagements. Naturellement, en
peu de temps où on a pour faire une discussion, je vais peut-être mettre
l'accent sur quelques mesures particulières, ce qui ne veut pas dire que les
autres ne sont pas... vos autres commentaires ne sont pas intéressants, là, je
veux juste qu'on le précise. Mais il y a des petites choses que j'aimerais...
sur lesquelles j'aimerais avoir des précisions.
Dans le deuxième chapitre du projet de loi
particulièrement, on veut renverser une tendance peut-être trop forte en
jurisprudence, d'une trop grande référence envers les tribunaux administratifs
pour offrir un véritable moyen d'appel aux citoyens et non pas juste une
révision judiciaire. Bon, il y a plusieurs enjeux là-dessus, mais je voulais
savoir qu'est-ce que vous pensez de ces mesures-là, du fait qu'on veut donner à
la Cour du Québec un pouvoir d'appel, finalement, des tribunaux administratifs.
M. Le Grand Alary (Nicolas) :
Oui, bonjour. Je dirais, on a un petit commentaire dans notre mémoire là-dessus.
C'est sûr qu'au final, il faudra que le projet de loi considère, là, la récente
décision dans le renvoi qui a été fait par la Cour d'appel sur la compétence de
la Cour du Québec, mais aussi sur la compétence d'appel, où on semble dire que
les critères qui doivent être appliqués pour un mécanisme d'appel seraient ceux
de la révision judiciaire. Donc, c'est sûr qu'il faut avoir ça en mémoire, mais
ce qu'on soulève au niveau de l'article actuellement, vous pouvez le voir dans
le mémoire, là, au niveau de la connaissance du juge puis les critères qui sont
établis, mais c'est sûr qu'avec la nouvelle décision qu'on a, ça peut un peu...
C'est sûr que ça devra être considéré, là.
Mme LeBel : O.K. Mais
pensez-vous que ça sera une mesure d'accès, là, un moyen d'accès à la justice,
de donner un véritable moyen d'appel aux citoyens, à ce moment-là?
M. Le Grand Alary (Nicolas) :
Je dirais qu'on n'a pas réfléchi à cette question-là dans ce détail-là. Je
référerais juste au renvoi de la Cour d'appel, qui mentionne que si on est pour
utiliser un droit d'appel à la Cour du Québec, que les mêmes critères qu'une
révision... un recours en révision judiciaire à la Cour supérieure, est-ce que
là, il y aurait un dédoublement? Je pense que la question se pose, mais on n'a
pas poursuivi l'analyse là-dessus.
Mme LeBel : D'accord. Peut-être
souligner un autre... plus particulièrement, parce qu'on a reçu l'association
des procureurs municipaux et ils soulevaient un bémol quant à l'article 42, qui
donne un pouvoir de négociation supérieur que qu'est-ce qui existe déjà, pour
pouvoir peut-être offrir de plaider coupable à un autre constat d'infraction
que celui qui a été déposé à l'origine, pas nécessairement moindre et inclus,
mais qui fait partie de la même affaire. Vous êtes en faveur de cette
mesure-là, vous avez une très grande ouverture.
L'association des procureurs municipaux
émettait certaines réserves. J'aimerais avoir votre point de vue là-dessus par
rapport à leurs réserves, justement, et pourquoi vous êtes en faveur.
M. Levesque (Pascal) : Bien,
essentiellement...
Mme LeBel : J'en suis fort
aise, d'ailleurs, mais...
M. Levesque (Pascal) : Pardon?
Mme LeBel : J'ai dit : Je
suis contente que vous soyez en faveur, mais juste peut-être pour comprendre...
M. Le Grand Alary (Nicolas) :
Bien, essentiellement, on est en faveur parce que le Barreau du Québec a
tendance à prendre comme position de principe... de donner le plus de
flexibilité aux acteurs de première ligne. Et ça, ça permet de donner une
flexibilité de première ligne. Si je me mets dans la position d'un procureur,
je peux... qui attend d'avoir... de discuter avec un avocat de la défense puis
l'avocat de la défense : Bien, je serais prêt à plaider à quelque chose
de... pas nécessairement de moindre et inclus, mais une autre infraction qui
couvre la transaction, mais qui l'expose à des peines moindres.
Alors, ça donne une meilleure panoplie et,
évidemment, au comité, on a des gens de la poursuite, on a des gens de la
défense. Alors, c'est ça qui a sorti, c'est que ça augmente la flexibilité au
niveau des acteurs pour favoriser des règlements.
Mme LeBel : Mais ... d'avoir
un régime à deux vitesses, tel qu'il a été soulevé par l'association des
procureurs municipaux, où on dit que peut-être que quelqu'un qui a plus
d'argent pourrait monnayer ou négocier une infraction qui nécessite une plus
grande amende et moins de points de démérite? Est-ce que c'est quelque chose
qui a été soulevé ou vous ne voyez pas... Est-ce que vous voyez une crainte par
rapport à ça qui est fondée?
M. Levesque (Pascal) : Bien,
ça, ça... Non, ça n'a pas été soulevé. Ça peut être une crainte légitime de
leur point de vue, quoique là, c'est peut-être un autre débat. C'est peut-être
le débat du... et probablement qu'on ne réglera pas ça ici, ce soir, mais sur
la capacité des gens de se défendre en fonction des moyens qu'ils ont, c'est un
plus vaste débat.
Mme LeBel : Dans votre
mémoire, vous parlez de l'absence de garanties juridiques, en particulier
concernant le consentement lors d'une comparution par visioconférence. Il y a
des garanties dans la charte, hein, qui existent déjà, qui vont couvrir aussi
ces événements-là.
D'après vous, c'est quoi les garanties de
la... qui ne sont pas suffisamment couvertes par la charte. Quelles sont les
garanties qu'on pourrait ajouter pour rendre cette mesure-là plus satisfaisante
à vos yeux?
• (19 h 50) •
M. Marchand (Michel) : Bien,
moi je pense que ça prendrait le consentement de l'accusé. Je pense que c'est
bien important, même s'il est représenté par avocat. Et aussi, ce n'est pas
indiqué dans le libellé du projet de loi, là, mais je pense qu'il faut prévoir
un mécanisme par lequel...
Mme LeBel : ...pour rendre
cette mesure-là plus satisfaisante à vos yeux?
M. Marchand (Michel) : Bien,
moi je pense que ça prendrait le consentement de l'accusé. Je pense que c'est
bien important même s'il est représenté par avocat. Et aussi, ce n'est pas
indiqué dans le libellé du projet de loi, là, mais je pense qu'il faut prévoir
un mécanisme par lequel l'avocat peut communiquer facilement avec son client,
tu sais durant les entractes, pas évidemment durant l'audience durant que la
personne parle, là. Mais à moment donné, il peut y avoir ajournement puis les
deux, il faut qu'il puisse se parler. Il peut y avoir un problème de preuve, il
peut y avoir toute sorte de choses qui arrivent, là, tu sais. Alors, ce n'est
pas prévu actuellement la manière que c'est écrit. Alors on a ces deux
composantes-là, là, qui nous causent un peu de problèmes.
Mme LeBel : C'est plus le
mécanisme qui permettrait de communiquer avec son client de façon efficace qui
faudrait qui soit prévu. Parce que vous pouvez comprendre que dans des villes
comme Montréal, Québec, d'amener systématiquement les gens ou de demander systématiquement
aux gens de comparaître, c'est peut-être plus facile qu'en région éloignée où
on voulait favoriser justement... On fait déjà des comparutions par téléphone
d'ailleurs dans certains cas. Donc, votre préoccupation est plus au niveau des
communications et des contacts qu'il pourrait y avoir entre l'avocat et son
client?
M. Marchand (Michel) : Ils
sont de deux niveaux. Le consentement de l'accusé aussi je pense que c'est
important. Puis, au fédéral, la manière qu'ils ont prévu ces dispositions-là,
on l'a entre autres dans le C-75, le consentement de l'accusé est requis. Alors
moi je pense que c'est important, là. Habituellement les gens vont consentir
parce que les gens, ça ne leur tente pas tellement d'aller se promener en
panier à salade à partir de Saint-Jérôme puis aller à Montréal ou l'inverse.
Les gens n'aiment pas tellement ça. Alors même, souvent on va avoir la
demande : Est-ce que je peux le faire par vidéo? Bien non, c'est ton
procès, il va y avoir des témoins, tu es mieux de venir.
Alors, en général, le consentement on va
aller le chercher de la part de l'accusé. Ce n'est pas tellement ça. Mais je
pense que ça doit être écrit quand même parce que peut-être dans certains cas
l'accusé y tient à être présent, tu sais, à son audience. Il tient à voir le
juge qui va peut-être lui accorder ou lui refuser son cautionnement. Le
cautionnement c'est une procédure très importante, hein? La Cour suprême a
rendu plusieurs jugements récemment et souvent, la cause se joue là au niveau
du cautionnement aussi. Alors moi je pense que c'est important, là.
Mme LeBel : À la base de ça
dans le fond, c'est la notion de consentement vous qui est... sur laquelle vous
mettez l'accent.
M. Marchand (Michel) : Oui,
la notion de consentement puis comme vous l'avez dit tantôt, la notion de
pouvoir communiquer d'une manière confidentielle avec son avocat. Et aussi, on
a ajouté dans le mémoire la disposition qui existe dans le Code criminel
concernant l'accusé qui n'est pas représenté par avocat. Tu sais, le juge, il
faut qui s'assure, là, que la personne comprenne bien et tout ça. Il y a une
obligation supplémentaire dans ce cas-là. Et je pense que ça serait bon,
surtout en matière pénale où il y a peu de personnes... en tout cas, il y a
beaucoup de personnes qui ne prennent pas d'avocat parce que ça coûte trop
cher. Alors ils se défendent seuls. Il y a beaucoup de personnes démunies
également, beaucoup d'itinérants. Alors moi, je pense qu'il faudrait que le
juge soit informé puis qu'il y ait une disposition particulière pour protéger
ces personnes-là vulnérables.
Mme LeBel : D'accord. Mon
collègue le député de Chapleau aurait des questions, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : O.K.
M. Lévesque (Chapleau) : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci. Mes Claveau, Levesque, Marchand et Le Grand
Alary pour votre présentation. Peut-être de façon plus macro, là, pour la
première question : De quelle façon vous pensez que le projet de loi
pourrait, dans le fond, permettre d'améliorer l'accès à la justice pénale sur
l'ensemble du territoire québécois et peut-être même en région? Je ne sais pas
si vous avez une opinion par rapport à ça. On pourrait peut-être commencer par
une question plus large après ça on ira dans certains points plus spécifiques
du projet de loi.
M. Levesque (Pascal) : Bien de
façon large, comme je disais tantôt, on est... Le projet de loi de façon
globale, et c'est pour ça qu'on est d'accord avec le projet, c'est que ça donne
de la facilité aux acteurs de la première ligne et ça facilite... ça va... au
niveau de l'augmentation des ressources, l'augmentation de l'utilisation des
moyens technologiques pour faciliter... Et c'est ce qu'on voit de façon macro.
Si on y va macro, c'est ça... c'est que ça donne la possibilité aux
intervenants de première ligne de... cette flexibilité-là de pouvoir régler des
dossiers, avant qu'on soit des procès contestés.
Me Marchand a souligné un point. C'est
vrai qu'on est avec une clientèle particulière qui bien souvent ce n'est pas
représenté. Donc, dans la mesure où les gens sont représentés puis qu'ils
peuvent avoir des discussions entre le procureur puis l'avocat de la défense,
ça facilite les choses. Pour les gens qui sont... Et l'autre aspect, c'est
d'éviter le phénomène de portes tournantes pour bien des individus qui ont
tendance, dans ce phénomène de portes tournantes là, à augmenter les délais de
justice. Alors, si on peut les sortir de ce cycle-là plus tôt, c'est indéniable
que c'est un avantage pour tout le monde.
M. Lévesque (Chapleau) :
J'aimerais peut-être également vous entendre sur la question des programmes,
là, en lien avec les mesures permettant de tenir compte, disons de la situation
de certains défendeurs. Il y a peut-être trois niveaux du moins à travers le processus
judiciaire donc soit relative à la poursuite, des règles dans le fond des
programmes d'adaptabilité en lien avec la poursuite, en lien à l'exécution des
jugements et également, en lien avec la rétractation de jugement. Est-ce que
vous être à l'aise avec différents programmes qui pourraient être justement,
là, proposés au défendeur dans ces cas-là?
M. Levesque (Pascal) : Bien
comme on dit...
M. Lévesque (Chapleau) :
...soit relative à la poursuite, des règles... dans le fond, des programmes
d'adaptabilité en lien avec la poursuite, en lien à l'exécution des jugements
et également en lien avec la rétractation de jugement. Est-ce que vous êtes à
l'aise avec différents programmes qui pourraient être, justement, là, proposés
aux défendeurs dans ces cas-là?
M. Levesque (Pascal) : Bien,
comme on dit dans notre mémoire, on est généralement à l'aise avec ces
programmes-là, mais il y a des zones qui nous préoccupent plus en détail.
Comme, par exemple, au niveau des programmes de... l'équivalent d'un travail
compensatoire, il n'y a pas de limite et, si je fais un parallèle avec le droit
criminel, on a 240 heures maximales de travaux compensatoires. Bien là, on
ne l'a pas prévu, alors il y a une question de prévisibilité du droit. Mais le
principe est bon, de permettre à quelqu'un de pouvoir... En termes de justice
rétributive, c'est très bien, et encore là, ça donne une autre option aux
intervenants de premier niveau, de pouvoir utiliser d'autres choses que
l'approche répressive.
M. Lévesque (Chapleau) : Vous
avez également parlé de la rétractation de jugement. Il semblait y avoir un
malaise au début. Peut-être que je me suis trompé dans votre propos, là, mais
il semblerait que, tu sais, cette portion-là, vous préféreriez que, lorsqu'il y
a un jugement qui a été prononcé, qu'il ne soit pas nécessairement possible
qu'il y ait rétractation. Est-ce que je me suis trompé? Ou peut-être, vous
pourriez nous éclairer sur cette question?
M. Levesque (Pascal) : Sur la
rétractation de jugement, et là je ne veux pas me tromper, mais c'est que de
bonne foi, il peut y avoir des proches qui peuvent régler l'amende de quelqu'un
qui... Et là, le cas typique, c'est quelqu'un dont la maman reçoit quelque
chose, la personne est démunie, décide de régler le constat, puis, là, la
personne avait une défense. Mais dans ce domaine-là, une fois que l'amende est
payée, elle est réputée à être jugée et là, le juge n'a plus juridiction.
Alors, c'est compliqué parce que, là, il faut que la personne qui veut obtenir
la rétractation de jugement doit aller en cour supérieure pour faire détricoter
ça, pour retourner en bas, là, ça occasionne des frais, bon. Est-ce que c'est
sain pour système d'aller en cour supérieure, nécessairement, d'aller à un
niveau plus haut pour régler quelque chose, dans le fond, qui pourrait être
très simple?
M. Lévesque (Chapleau) : Mais
sur la question plus spécifique de la rétractation suite, dans le fond, à
lorsque... Dans le fond, le défendeur aurait suivi un programme. Est-ce que,
ça, vous êtes à l'aise avec ça? Parce que, là, vous présentez la situation où
est-ce que, bon, quelqu'un aurait payé, du moins, l'amende ou quoi que ce soit,
mais dans le cas contraire où est-ce que, justement, un défendeur suit un
programme, le réussit, et en échange, obtienne cette rétractation-là. Est-ce
que vous êtes à l'aise avec cette... oui, cela? O.K., parfait.
M. Levesque (Pascal) : On est
à l'aise avec ça. Écoutez, il y a un parallèle à faire avec le programme de
mesures de rechange général qu'on a au criminel et ça, ça ne nous cause pas problème.
En fait, je vous dirais que ça devrait même être automatique. Il ne devrait pas
avoir de pouvoir discrétionnaire de la part du poursuivant. Dès lors que
quelqu'un a complété son programme, on devrait dire : Bon, bien, rayé.
M. Lévesque (Chapleau) :
Peut-être vous entendre sur la question de l'emprisonnement, là, de personnes
vulnérables pour non-paiement d'amende. Est-ce que vous êtes à l'aise avec
cette proposition-là?
M. Levesque (Pascal) : Comme
je vous ai dit tantôt, très à l'aise, parce qu'évidemment si on veut essayer de
contrer le phénomène de porte tournante, alors si on est capable d'éviter qu'un
individu retourne en prison, et je vais vous donner un exemple : quelqu'un
s'en va en prison, il est en statut précaire et ça ne lui permet pas de
conserver son logement pendant qu'il est en prison. Alors, il perd son
logement, il sort de prison, il est encore dans la rue. Alors, c'est une roue
qui tourne, on est très favorables à ça.
M. Lévesque (Chapleau) : Vous
avez également parlé de la question d'identification d'une personne à
l'article 19, donc le fait de pouvoir demander une pièce d'identité. J'ai
senti un certain malaise, une réticence par rapport à ça, peut-être m'éclairer
sur cette question-là puis peut-être, j'imagine, vous avez entendu également
les préoccupations des services policiers en lien avec certaines demandes par
rapport à ça?
M. Marchand (Michel) : Bien,
moi, je trouve qu'on vit dans une société libre. On n'est pas obligés de se
promener avec des pièces d'identité et je suis convaincu que les gens qui sont
autour de la table, il y en a plusieurs qui font du jogging ou n'importe quoi,
prennent des marches le soir, puis on n'a pas tout le temps nos pièces
d'identité. Alors, moi, je trouve qu'en incluant ce pouvoir-là dans le projet
de loi... Parce que, dans le fond, c'est le policier qui va avoir la
discrétion. Alors, je pense qu'assez souvent, ça va aller au niveau des pièces
d'identité, «t'as-tu ta pièce», un itinérant, n'importe quoi ou même un
joggeur, «non je n'ai pas mes pièces», «bon, bien, tu t'en viens au poste».
M. Lévesque (Chapleau) :
Peut-être, sur ce point-là, là, le fait de ne pas avoir sa pièce d'identité ne
constitue pas un refus de s'identifier, là, juste pour qu'il y ait une
clarification à ce niveau-là. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de LaFontaine, s'il
vous plaît.
• (20 heures) •
M. Tanguay
: Merci, M.
le Président, et merci beaucoup à vous quatre d'être ici présents pour répondre
à nos questions et échanger sur le projet de loi n° 32, merci pour votre
mémoire très étoffé, on ne s'attend jamais à rien de moins du Barreau,
étoffé...
20 h (version non révisée)
M. Levesque (Pascal) : ...ne
constitue pas un refus de s'identifier, là, juste pour qu'il y ait une
clarification à ce niveau-là. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Merci, M.
le Président, et merci beaucoup à vous quatre d'être ici présents pour répondre
à nos questions et échanger sur le projet de loi n° 32. Merci pour votre mémoire
très étoffé, on ne s'attend jamais à rien de moins du Barreau, étoffé et bien
outillé et souvent, en note de bas de page, sur des éléments qui nous
intéressent, vous faites la référence à la jurisprudence puis on a le goût
d'aller se l'imprimer pour compléter notre... Même si ce n'est pas, ceci dit,
reconnu pour des heures du Barreau, on fait le travail pareil parce qu'on est
consciencieux. Alors, M. le Président, je ne veux pas susciter le débat, je me
rappelle à l'ordre. Pour les quelques minutes qui nous sont dévolues, j'aurais
des questions en rafale. Prenons le dernier sujet que vous avez abordé,
fameuses pièces d'identités. Vous dites... l'article 19 du projet de loi,
donc... Juste pour placer le sujet pour qu'on comprenne, là, à la maison, entre
autres : «...projet de loi permettrait à un agent de la paix de demander
de voir la pièce d'identité d'une personne s'il a des motifs raisonnables de
croire que celle-ci a commis une infraction...», et là, il y a la notion où
vous dites : L'agent de la paix semble avoir l'entière discrétion pour
procéder à l'une ou l'autre des méthodes d'identification. Et l'on vient de
voir, puis c'est tout à fait correct de mon collègue de la banquette
ministérielle, de dire : Bien, écoutez, ça part d'une bonne intention, ce
n'est pas malicieux, normalement, c'est pour identifier une personne, c'est la
sécurité publique, la paix sociale. Mais vous nous faites... et là, sur ce
point-là, vous y allez de quatre pages vraiment bien ficelées, vous faites,
entre autres, référence à l'arrêt Bain, que, moi, je ne connaissais pas
personnellement, puis vous faites bien de citer un extrait. Puis j'étais
agréablement surpris de voir ça, que notre Cour Suprême, en 1992, avait
dit ce qui suit : «Malheureusement, il semblerait que chaque fois que le
ministère public se voit accordé par la loi un pouvoir qui peut être utilisé de
façon abusive, il le sera en effet, à l'occasion. La protection des droits
fondamentaux ne devrait pas être fondée sur la confiance à l'égard du
comportement exemplaire permanent du ministère public, chose qui n'est pas
possible de surveiller ni de maîtriser.» Fin de la citation.
Donc, vous dites, et j'aimerais vous
entendre là-dessus puis ça a parti d'une réflexion qui va peut-être même
au-delà de l'approche très cartésienne, en droit, là, les blocs qui se suivent,
c'est une approche très pratico-pratique à laquelle... qui vient me chercher.
«Aussi bien formé et intentionné qu'ils puissent être — c'est vous
qui parlez à la page 4 — particulièrement lorsqu'aucun critère
législatif ne guide l'agent dans l'exercice de cette discrétion, vous dites à
ce moment-là qu'il y a un drapeau rouge. Bravo pour cette approche-là qui va,
encore une fois, au-delà de la mécanique juridique de droit, mais qui est un
fait de la vie que vous avez constaté. Ce n'est pas banal comme élément, et
j'aimerais vous entendre là-dessus si vous avez des éléments à ajouter à notre
réflexion.
M. Marchand (Michel) : Bien,
ce qu'on peut ajouter aussi, c'est la commission Viens, ils viennent justement
de déposer le rapport. Si vous regardez le chapitre 7.5.1 ou la section 7.5.1,
on parle de la surarrestation des autochtones, puis on parle du fait qu'ils
reçoivent plein de contraventions. Et, quand on fait des statistiques au niveau
national — national, j'entends du Québec — on se rend
compte que c'est des régions où les autochtones, Val-d'Or, et tout ça, qui ont
le plus gros taux. On a comparé, je pense, 23 % puis on arrive à
Trois-Rivières, on a à peu près 6 %. Alors, il y a un problème, là. Alors,
moi, je pense qu'au niveau de l'identité, ça va causer des problèmes, là, au
niveau de tout le monde qui sont un peu démunis puis même les moins démunis qui
n'ont pas nécessairement la pièce d'identité avec eux. Il y a aussi le
profilage racial, ça sort de plus en plus. Alors, vous avez le rapport du SPVM
à Montréal.
Alors, c'est des choses pratiques, là,
c'est des choses concrètes, là. Et, moi, je pense que ça ne vaut peut-être pas
la peine, juste pour sauver une ou deux erreurs d'identification, d'avoir un
aussi gros pouvoir aux policiers. Moi, je pense qu'on est mieux de vivre avec
quelques erreurs dans le système, quelquefois, quelqu'un qui va donner une
mauvaise identité, que d'essayer de tout régler et de causer beaucoup plus de
problèmes que ce qu'on essaie de régler.
M. Tanguay
: Et on
avait, avec ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce, quand vous faisiez état de la
situation de fait avec les peuples autochtones, on s'est dit : Écoute, il
n'y a pas eu une étude qui est sortie, justement le profilage racial, SVPM,
puis vous embarquez directement là-dessus. C'est les mêmes réflexes, les mêmes
réalités que l'on vit, entre autres. Puis, ceci dit, on n'est pas en train de
pointer du doigt les policières, les policiers, mais c'est un fait de la vie que
je trouvais qui était bien traduit par la citation que vous avez faite de
l'arrêt de la Cour suprême en 1992 dans R. contre Bain.
J'aimerais maintenant, parce que je sais
que ma collègue a des questions importantes également, l'arrestation dans une
maison d'habitation. Vous faites référence notamment, et je cite, à la page
6 : «À la lecture de l'article 27 proposé, nous comprenons l'intention du
législateur qui est de baliser et protéger juridiquement les agents de la paix,
lorsqu'ils font une intervention dans une maison d'habitation, afin de diminuer
les risques d'une situation analogue à celle de R. c. Bédard. Néanmoins, nous
constatons que le projet de loi prévoit des critères...
M. Tanguay
: … référence
et, notamment, et je cite, à la page 6 : «À la lecture de
l'article 27 proposé, nous comprenons l'intention du législateur qui est
de baliser et de protéger juridiquement les agents de la paix, lorsqu'ils font
une intervention dans une maison d'habitation, afin de diminuer les risques
d'une situation analogue à celle de R. contre Bédard. Néanmoins, nous
constatons que le projet de loi prévoit des critères moins exigeants que ceux
prévus du Code criminel en ce qui concerne l'arrestation dans une maison
d'habitation, sans autorisation, à savoir, mandat ou télémandat ».
Est-ce que, pour vous, il y a une voie de
passage là-dessus et quelles seraient-elles, si l'on voudrait rendre plus… pas
facile, mais, permettre, donc, des interventions, arrestations, dans des
maisons d'habitation? Est-ce qu'il y a une voie de passage pour vous?
M.
Marchand (Michel) : Bien moi, personnellement, mais pas personnellement, là, le
Barreau, ce qu'on pense, c'est qu'il devrait y avoir une adéquation avec les
articles 84 et 85 qui sont déjà dans le Code de procédure pénale, et tout
simplement les adapter avec le même niveau de critères pour ce qui est des arrestations
sans mandat. Alors, parce que l'article est quand même libellé d'une
manière très large, là, quand on regarde, là, le libellé exact, là, la
première… je cherche l'article. Bon, 94.1, ça commence, premier alinéa :
« Lorsqu'une personne se réfugie dans une maison d'habitation alors
qu'elle s'est enfuie pour échapper à son arrestation. » On n'a même pas de
critères, on n'a même pas de motif raisonnable et probable, on n'a rien de ça.
La personne s'est enfuie. Je veux dire, je pense que le policier, ça lui prend
des motifs raisonnables et probables de penser que la personne s'enfuit, là.
Alors, ce n'est pas écrit, donc, ce qu'on a fait, à 94.1, dans le fond, on
prend 85 et 84, puis on abaisse les critères. C'est ça qu'on fait.
Puis
moi, je pense que, en tout cas le Barreau, ce qu'on pense, c'est que
l'alinéa 1 devrait être formulé avec les mêmes normes que
l'article 85 actuel. Puis quand on parle de l'urgence, là, ça devrait être
en adéquation avec l'article 84 du Code de procédure qui existe. Tandis que
là, on baisse les critères, parce qu'on voit dans le cas de l'urgence, à
l'alinéa 3 du deuxième paragraphe : « des motifs raisonnables de
soupçonner », on n'est plus sur des motifs raisonnables de croire, là, on
est sur des motifs raisonnables de soupçonner. Alors… Puis les mandats, on a
beau dire que c'est un mandat d'arrestation ou un mandat de dépôt, mais ça peut
être juste pour des contraventions impayées, là, tu sais, là, ce n'est pas un
mandat d'arrêt pour un meurtre ça là, là, ou un vol qualifié ou une
séquestration.
Alors,
moi, je pense que c'est beaucoup de pouvoir pour des choses qui ne sont pas si
graves que ça, en fait. La personne n'a pas payé son amende, bon, on dit que
les mandats de dépôt à Val-d'Or, je pense que c'est 100 % d'Amérindiens
qui n'avaient pas payé des amendes. Alors, dans tous les cas, les critères sont
abaissés pour pénétrer dans les maisons… qui est le sanctuaire de la personne.
Alors, moi, je pense qu'il faut faire attention à ça.
Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la
députée de Notre-Dame-de-Grâce, deux petites minutes, s'il vous plaît.
Mme
Weil
: Deux petites minutes. Je vais vous dire peut-être en
rafale, comme ça, parce que je trouve votre mémoire excellent, tellement
détaillé… et toujours ce souci de justice, hein, et donc, ça cadre bien avec
les discussions qu'on a eues plus tôt aujourd'hui. Donc, une question qui
toucherait le nombre d'heures de travail non rémunérées, donc c'est une
question de justice pour le justiciable… de revenir là-dessus. Vous dites que,
contrairement au projet de loi n° 168, il n'y a pas de mesures en matière
civile… peut-être vous entendre là-dessus… Le droit d'appel, aussi, que ça
devrait plutôt suivre la règle que chaque loi doit avoir ces propres règles
concernant le droit d'appel. Je pense que c'est le seul temps que j'ai, donc,
en rafale, en une minute.
M.
Le Grand Alary (Nicolas) : Je répondrais pour en matière civile, c'est
sûr qu'il y avait eu un gros travail qui avait été fait dans le projet de loi
n° 168, au niveau de faire des corrections au niveau du Code de procédure
civile depuis la réforme, là, du Code de procédure civile, il y avait beaucoup
d'irritants qui avaient été identifiés par nos praticiens. Le Barreau avait
travaillé longuement là-dessus, à identifier les problématiques, on les avait
soumises au gouvernement… qui avait été, pour la plupart, reprises dans le
projet de loi n° 168. Donc, nous, on prend acte que ça va être pour une
prochaine fois qu'on va attendre ces mesures-là, là, parce que l'essentiel des
dispositions pénales, avec des nouveautés par contre, qui étaient dans 168 ont
été reprises dans le projet de loi, ici, 32, mais tout le volet civil a comme
disparu. Donc, ça, on l'attend toujours.
•
(20 h 10) •
M.
Levesque (Pascal) : …au niveau des travaux compensatoires, idéalement,
il faudrait le prévoir parce que c'est une question de prévisibilité du droit,
parce que, sans ça, quelqu'un pourrait être là-dessus indéfiniment. Et il y a
aussi avec un nombre maximal, il y a aussi, là : je n'ai pas été capable
de faire mes heures, alors, je veux avoir une extension. À un moment donné, le
juge va… s'il y a un nombre maximal, il va mettre une ligne rouge, il va
dire : là, attendez, là, je vous ai donné une extension, mais je ne vous
en donnerai pas deux. S'il n'y a pas d'heures maximales, là, le juge va être un
peu mal pris, de fixer…
M. Levesque (Pascal) : ...il y
a aussi, là : Je n'ai pas été capable de faire mes heures alors je veux
avoir une extension. À un moment donné, le juge va trancher. S'il y a un nombre
maximal, il va mettre une ligne rouge. Il va dire : Là, attendez, là, puis
je vais donner une extension mais je ne vous en donnerai pas deux. S'il n'y a
pas d'heures maximales, là, le juge va être un peu mal pris de fixer une telle
ligne rouge à un justiciable.
Mme Weil
: Le droit
d'appel qui, normalement, devrait être dans chaque loi, je pense, c'est un
point important aussi.
M. Levesque (Pascal) : Bien,
le droit d'appel qui est...
M. Le Grand Alary (Nicolas) :
...c'est qu'on a soulevé dans le mémoire, c'est que, normalement, quand il y a
un tribunal administratif puis qu'il y a des droits d'appel ou des révisions
administratives, ou, peu importe comment on l'appelle, la révision de la
décision, normalement, c'est spécifié de le faire de manière générale, c'est un
peu... c'est une façon nouvelle de le faire, mais... encore de s'assurer qu'on
soit conforme avec le renvoi de la cour d'appel qui a été rendu récemment.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Gouin, s'il vous
plaît.
M. Nadeau-Dubois : Oui,
j'avais beaucoup de questions sur l'article 19, puis vos commentaires sont
très éclairants sur les possibilités de dérive de ce pouvoir discrétionnaire
qui est donné aux agents... bien, aux forces policières, mais vous avez déjà
bien répondu, alors je vais poser une autre question qui a été soulevée plut
tôt par l'Association des procureurs de cours municipales. C'est une question
sur les programmes d'adaptabilité à l'article 159.5. L'article, comme il
est rédigé actuellement, dit que si un défendeur complète ledit programme, les
accusations peuvent être retirées. Vous recommandez que ça soit changé par
«doivent être retirées». Pourtant, les gens qui vous ont précédé jugeaient que
c'était déjà trop contraignant et qu'il faudrait donner plus de flexibilité.
Vous, vous dites : Non, il y a trop de flexibilité. Il faudrait que ça
soit une garantie que, si on remplit les exigences du programme, les
accusations tombent. Pouvez-vous m'en dire plus, nous expliquer votre point de
vue sur cette question-là? Pourquoi c'est important pour vous qu'il y ait comme
une garantie écrite dans la loi?
M. Levesque (Pascal) : Bien,
si je peux m'exprimer ainsi, c'est que c'est une question d'équité,
essentiellement, d'équité pour que... Si quelqu'un complète son travail, complète
ce qu'il a besoin, l'État lui dit : Si tu fais ça, là, tu vas avoir réglé
ton ardoise. Alors, il faut que la contrepartie, ça soit «doit».
Autrement, quel incitatif la personne ou
son avocat va avoir de dire : Je te recommande de prendre le programme?
S'il n'y a pas de garantie que le procureur va dire... va l'enlever, il va
dire : Bien là, s'il n'y a pas de garantie, on fait le procès. C'est un
peu ça qui va arriver et c'est ça, le risque. Et ce projet de loi là, c'est
quoi la philosophie derrière? C'est donner la flexibilité aux acteurs pour
diminuer les délais pour régler des dossiers. Alors, il faut être... je dirais,
il faut être équitable avec le judiciaire.
M. Nadeau-Dubois : Et, pour
vous, quand on dit, à 159.5 : «Lorsque le défendeur complète le
programme», je comprends que votre lecture de cette formulation-là, c'est que
ça implique qu'il a rempli les exigences, donc qu'il a réussi. Donc, si
quelqu'un le faisait à moitié, ça n'engagerait pas — même si on
écrivait «doit» — d'obligation de faire tomber les accusations.
M. Levesque (Pascal) : S'il le
faisait, non, mais s'il le faisait à moitié, là, il faudrait quand même qu'on
crédite cette moitié-là. Ça permettrait au procureur de dire : Bon, il ne
l'a pas complété, mais au moins, je dois... Le juge doit dire : Je
considère le fait que la personne a complété son programme à moitié, aux trois
quarts. Je dois le considérer.
M. Nadeau-Dubois : Puis en ce
sens-là...
Le Président (M.
Bachand) : En terminant, M. le député. Oui.
M. Nadeau-Dubois : ...est-ce
que 159.1 vient un peu répondre à cette question-là, non? En disant que, s'il y
a une participation à un programme, il y a des chefs d'accusation qui peuvent
être retirés? Est-ce que je me trompe si je lis l'article 159.1 comme ça?
Le Président (M.
Bachand) : Rapidement, oui.
M. Le Grand Alary (Nicolas) :
Je dirais peut-être aussi que ce n'est sans doute pas prévu actuellement dans
le projet de loi. On pourrait s'inspirer de l'article 717, paragraphe 4
du Code criminel , là, qui prévoit déjà, quand il y un... le programme a été
rempli partiellement, les exigences sont partiellement atteintes, qu'il y a un
mécanisme qui existe déjà. On va pouvoir s'inspirer de ceux-là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. La parole est maintenant à la
députée de Joliette, s'il vous plaît.
Mme
Hivon
:
Merci beaucoup. Donc, pour poursuivre sur ce point-là, en gros, vous
dites : Inspirons-nous de ce qui se fait déjà en matière criminelle pour
ces programmes d'adaptabilité. À l'heure actuelle, les programmes, donc,
spécialisés qui existent, qu'est-ce qui arrive? Est-ce que c'est retiré? Est-ce
que ça... dans les faits, là, pratico-pratique?
M. Levesque (Pascal) : Oui. Si
je prends, par exemple, le programme de mesures de rechange général, la
dynamique pour le faire très rapidement, la personne rencontre un agent du
service de probation, admet sa responsabilité, rencontre quelqu'un, un
intervenant d'un centre d'Équijustice, on lui propose de faire une mesure de
rechange qu'il fait. Pendant ce temps-là, le dossier, lui, il avance à la cour,
il chemine, puis quand le programme est complété, le personne d'Équijustice va
dire : Le programme est complété, on demande que la cause soit rayée.
C'est automatique. Les procureurs de la couronne vont... C'est ce que les
procureurs du DPCP vont faire.
Mme
Hivon
: O.K.
Je voulais vous amener sur un autre point. On a eu la Coalition pour l'accès à
l'aide juridique qui soulève le même point que vous soulevez à la...
M. Levesque (Pascal) : ...la
personne d'Équijustice va dire : Le programme est complété, on demande que
la cause soit rayée. C'est automatique. Les procureurs de la couronne vont...
C'est ce que les procureurs du DPCP vont faire.
Mme
Hivon
: O.K.
Je voulais vous amener sur un autre point. On a eu la Coalition pour l'accès à
l'aide juridique qui soulève le même point que vous soulevez à la page 18
de votre mémoire. Vous faites ressortir que l'utilisation du terme... du
changement de «néfastes» par «graves» vous semble, donc, à première vue,
restreindre l'accès. Et c'est un peu la même lecture que je fais, là. «Grave»,
ça paraît plus grave que néfaste. Donc, c'est surprenant de retrouver une
restriction à l'accès juridique dans un projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui.
Est-ce que vous faites cette lecture-là?
M. Le Grand Alary (Nicolas) :
Bien, je dirais qu'effectivement... Je pense qu'un des principes de base en
matière d'interprétation des lois, ça va être l'intention du législateur, puis
un des principes, c'est que le législateur ne parle pas pour rien dire. Donc,
si on est pour modifier juste un mot, remplacer «néfastes» par «graves», il y a
une raison derrière ça, et la cour, quand elle va avoir à interpréter ces
critères-là, va le faire d'une façon à comprendre pourquoi ça a été modifié. Ce
n'est pas fait sans aucun objectif. Donc, s'il y a eu une... Effectivement, ça
semble restreindre et ça pourrait être l'interprétation qui en serait donnée.
Donc, on se pose la question : Pourquoi le faire?
Mme
Hivon
:
C'est beau. Dernière petite question. Je reviens à mon premier sujet. Je n'étais
pas sûre d'avoir les 30 secondes. Pour... Donc, pour les programmes
d'adaptabilité, à 1.8.2, vous dites qu'il n'y a pas de mécanisme indépendant de
vérification si les conditions étaient remplies. Ça pourrait être quoi, un
mécanisme indépendant pertinent?
M. Levesque (Pascal) : ...deux
options. C'est soit qu'on retourne devant un juge pour... et là il y a une
petite audition qui se fait, soit qu'on prend quelqu'un d'un service parallèle
comme... je fais un équivalent avec un service d'un agent de probation qui
vient dire : Écoutez, je constate que ça n'a pas été fait, et voici. Mais,
idéalement, ça serait plus par une audition judiciaire.
Mme
Hivon
:
...on retourne en audition.
M. Levesque (Pascal) : Non,
c'est ça, effectivement.
Mme
Hivon
: O.K.
C'est beau...
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Merci beaucoup. M. le député de Chomedey,
s'il vous plaît.
M. Ouellette : Merci.
Bienvenue. Deux minutes, c'est très vite passé. Merci de nous indiquer, pour 19
et 27, les mandats d'entrée, vos préoccupations. Je pense qu'on les partage.
Je remarque que, dans votre mémoire, vous
n'avez pas... ou il n'y a pas de réflexion sur le mandat général, les articles
29 à 36, là. Il y a-tu une raison particulière? Parce que c'est... Ce qu'on veut
introduire pour le pénal, on voit des exemples réguliers, là, qu'il y a des
petits manques au niveau criminel, ça fait que... puis, dans votre mémoire, on
ne retrouve pas aucune réflexion sur ces items-là, particulièrement le mandat
général. C'est-u parce que tout va bien ou, pour vous autres, je veux dire,
c'est... comme c'est calqué sur le criminel, tout est correct?
M. Levesque (Pascal) : ...on
n'a pas... Quand on a soumis le projet de loi à l'analyse des membres, ça, ce
n'est pas ressorti. Est-ce que ça veut dire que tout est correct? En tout cas,
ça n'a pas été la problématique qui nous a été soulevée par les membres du
comité en premier lieu.
M. Ouellette : O.K. Pour les
autres choses, je pense que vous avez répondu à mes questions, ça fait que, M.
le Président, pour qu'on puisse finir à 9 heures... Je suis très
magnanime. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Vous êtes toujours aussi efficace... (panne de son)
...alors, sur ce, merci beaucoup d'avoir été présents. C'est très, très, très
apprécié.
Je suspends les travaux quelques instants.
Merci.
(Suspension de la séance à 20 h 19)
(Reprise à 20 h 22)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Merci beaucoup de votre collaboration habituelle, merci. Alors, je
souhaite la bienvenue aux représentants du Service de police de la ville
de Québec. Bonsoir, bienvenue. Je vous rappelle que comme vous savez
maintenant, vous avez 10 minutes de présentation. Après nous aurons un
échange avec les membres de la commission. Donc, je vous invite d'abord à vous
présenter et à débuter votre exposé. Encore une fois, bienvenue, à vous la
parole.
M. Pigeon
(Robert) : Merci.Merci, M. le Président,
Mme la ministre, Mmes et MM. les élus. D'abord je me présente, Robert
Pigeon, je suis le directeur du Service de police de la ville de Québec mais je
suis également le président de l'Association des directeurs de police du
Québec. Donc, j'interviendrai ce soir avec les deux chapeaux. Je vous présente
Me Serge Giasson, c'est le responsable du service des affaires juridiques de la
ville Québec. Donc, merci infiniment de nous avoir invités. Effectivement, ce
sont des sujets qui nous intéressent beaucoup puisque... notamment le processus
qui amène des trajectoires particulières pour les personnes vulnérables
intéresse la ville de Québec déjà depuis plusieurs années.
Donc oui, nous sommes satisfaits. On a
pris connaissance du projet de loi n° 32 et nous sommes satisfaits des
outils supplémentaires qui sont proposés d'abord pour les policiers mais
également pour la clientèle un peu plus vulnérable qui se situe un peu partout
sur le territoire québécois.
Concernant l'harmonisation des pouvoirs en
matière d'enquête, donc on parle d'identification d'une personne, les mandats
d'entrée pour l'exécution d'un mandat d'amener, le mandat général dans le but
d'exécuter une technique d'enquête, les ordonnances de communication et les
télémandats, nous accueillons favorablement la proposition qui est faite
puisque ce sont des outils supplémentaires qui vont permettre aux policiers
d'avoir une seule façon de procéder que ce soit en matière criminelle ou en
matière pénale en vertu de lois provinciales. Donc, on parle de faciliter pour
les policiers... on parle le même langage. C'est facile aussi pour la clientèle
et la population.
Donc, ces pouvoirs étaient jusqu'à présent
complètement absents du Code de procédure pénale. Pour nous, c'est une suite
logique. C'est une façon logique de travailler que ce soit en matière
criminelle ou en matière de lois provinciales. Il est clair pour nous que ça
amener une forme de cohérence et que ça va faciliter définitivement le travail
policier sur le terrain, M. le Président. L'uniformité est importante pour nos
patrouilleurs, l'uniformité est importante pour les policiers et dans un
contexte comme ça, bien, c'est une seule façon de procéder pour tout le monde.
Concernant le programme IMPAC, les
projets... le processus de trajectoires particulières, à la ville de Québec, on
est soucieux des personnes qui vivent des situations difficiles sur notre
territoire. On cherche des solutions pour faciliter la vie à ces gens-là
puisque nous sommes d'avis que l'emprisonnement n'est pas une solution...
M. Pigeon (Robert) :
...concernant le programme IMPAC, le processus de trajectoire particulière, à
la ville de Québec, on est soucieux des personnes qui vivent des situations
difficiles sur notre territoire. On cherche des solutions pour faciliter la vie
à ces gens-là puisque nous sommes d'avis que l'emprisonnement n'est pas une
solution pour ces personnes-là. Parce que lorsqu'une personne se retrouve en
emprisonnement, bon, perd son logement, perd ses facilités, perd ses repères
également, on parle de personnes complètement désaffiliées. Donc, avoir un
processus de trajectoire particulière pour ces gens-là nous permettrait
certainement de raccrocher des personnes qui pourraient démontrer des signes de
vouloir se réaffilier à la société.
Le programme IMPAC de la ville de Québec,
d'abord, il en existe plusieurs autres un petit peu similaires partout au Québec,
dans d'autres régions, donc, nous, c'est notre modèle, mais à quelque part, la
ville de Montréal, à Laval, à Longueuil, ils ont des processus qui y
ressemblent beaucoup. Et ils ont certainement tous le même objectif, c'est-à-dire
d'offrir aux personnes vulnérables d'autres possibilités que l'emprisonnement,
les travaux communautaires ou des ententes de paiement d'amende de façon
différée. Donc, on sait que chaque petite victoire pour cette personne-là
constitue pour nous un gain et on aimerait que ces efforts-là par ces
personnes-là puissent être évalués par le système de justice au niveau de la
cour municipale. Je vais laisser mon collègue, Serge Giasson, entrer un
peu plus en détail, vous expliquer le programme IMPAC de la cour municipale.
M. Giasson (Serge) : Alors,
j'aimerais vous dire que le programme IMPAC de la ville de Québec, c'est un
programme d'adaptabilité. Il s'appelle IMPAC parce que l'acronyme c'est :
intervention multisectorielle programme d'accompagnement de la cour municipale.
Il vise à adapter le tribunal à des clientèles particulières. En fait, en
mettant en place d'autres méthodes de traitement des dossiers à différentes
étapes de la trajectoire judiciaire a fait en arriver à une justice à caractère
communautaire, s'intéresser aussi aux causes intrinsèques du délit afin
d'apporter des solutions durables, rendre la communauté partenaire dans la
résolution du problème et, finalement, faire participer tous les intervenants
du système judiciaire, afin qu'ils apportent ensemble des solutions durables
plutôt que de se limiter à l'application des sentences traditionnelles.
«IMPAC, ça vise présentement deux axes
d'intervention depuis 2013 dans la ville de Québec, soit le Programme nouvelle
vision de la perception, qui s'intéresse aux infractions pénales, et le
programme Tribunal à Trajectoire Spécifique, qui s'intéresse aux infractions
criminelles. Les objectifs poursuivis par ces programmes sont : accroître
le sentiment de sécurité sur le territoire favorisé, un milieu de vie
attrayant, diminuer les récidives, bien entendu, et favoriser le règlement des
dettes sans recours à l'emprisonnement, tout en facilitant la remise en action.
Mettre en place des solutions mieux adaptées et durables à la situation des
clientèles visées, favoriser l'accès à la justice, améliorer le traitement de
ce type de dossiers à la cour municipale de la ville de Québec, puis adapter le
traitement judiciaire et favoriser l'encadrement et le suivi continu dans la
communauté comme moyen de réinsertion.»
«Voilà quelques années déjà que la ville
de Québec réclame une adaptation ou des adaptations au Code de procédure pénale
afin de pouvoir assurer une mise en œuvre plus efficiente du programme IMPAC.
Le programme de travaux compensatoires qu'on connaît actuellement a été
introduit dans les années 80, et il n'avait pas été modifié depuis. La
notion de travaux compensatoires réfère à des heures de travail bénévole qui
doivent être exécutées auprès d'organismes de référence inscrits dans le
registre du YMCA pour la région de Québec. Ni le percepteur des amendes ni le
YMCA ne sont en mesure de commuer des amendes dues autrement que par la
réalisation de ce travail bénévole. Dans le cadre du programme IMPAC, le
Programme nouvelle vision de la perception, qui s'intéresse surtout aux
affaires pénales, se veut une approche plus holistique pour le traitement des
amendes impayées en reconnaissant que la clientèle qui a vécu ou qui vit
présentement une des situations d'itinérance ou l'itinérance, et qui a des
problèmes de santé mentale ou qui veut se reprendre en main, peut avoir des
besoins particuliers et nécessiter un accompagnement différent dans sa démarche
de réinsertion.»
• (20 h 30) •
«Le programme vise justement la
reconnaissance aux participants pour les efforts faits pour se sortir de
l'itinérance. Les intervenants du programme IMPAC souhaitent pouvoir
reconnaître les efforts faits dans cette voie en réduisant les heures de
travail à faire pour éteindre sa dette et éviter le recours à l'emprisonnement.
Ceci signifie, par exemple, que les heures effectuées dans le cadre d'un retour
aux études puissent être reconnues. Il s'agit aussi...» On donnait comme
exemple que le fait de reprendre le plan de traitement, par exemple, ça peut
constituer aussi des efforts reconnus pour la réduction de la dette. Tout comme
le fait de se lever tous les matins, après avoir vécu une longue période, O.K.,
où il ne se passait rien dans sa vie, de se reprendre en main, ça peut aussi
mériter une...
20 h 30 (version non révisée)
M. Giasson (Serge) : ...le
fait de reprendre le plan de traitement, par exemple, ça peut constituer aussi
des efforts reconnus pour la réduction de la dette. Tout comme le fait de se
lever tous les matins, après avoir vécu une longue période, O.K., où il ne se
passait rien dans sa vie, de se reprendre en main, ça peut aussi mériter une
réduction de la peine, de son amende. Il s'agit ici d'avoir une vision plus
large de la notion des travaux compensatoires afin de reconnaître les efforts
consentis à se sortir de la situation ayant conduit à l'accumulation de cette
dette importante à la suite de l'émission de constat d'infraction. Il ne s'agit
pas de remplacer l'ensemble des heures à effectuer par cette reconnaissance
mais de permettre d'en tenir compte dans l'analyse du dossier qui est faite par
le percepteur des amendes.
C'est dans ce contexte que la ville
demande, depuis quelques années, que soient modifiées les dispositions du Code
de procédure pénale concernant l'imposition de travaux compensatoires pour
ajouter la possibilité de cumuler aux heures de travaux compensatoires
traditionnels des heures effectuées dans le cadre d'un plan structuré de remise
en action.
Maintenant, la réponse qui est offerte à
cette demande-là, par le projet de loi n° 32, pour IMPAC, nous semble être
la bonne. La demande de la ville de Québec est globalement satisfaite par le projet
de loi à l'étude en permettant d'adopter un programme d'adaptabilité des règles
relatives à la poursuite et à l'exécution des jugements, voire même la
possibilité pour le poursuivant de demander une rétractation de jugement, le projet
de loi offre une réponse complète aux besoins du programme IMPAC.
Cela étant dit, quelques ajustements de
trois ordres pour offrir encore plus de souplesse à la mise en oeuvre des
programmes d'adaptabilité de la ville de Québec, ces ajustements concernent la
nécessité que le ministre prenne un règlement pour que les programmes
d'adaptabilité puissent être instaurés, la nécessité que le défendeur complète
le programme d'adaptabilité pour que la poursuite puisse retirer un chef
d'accusation, ou le fait que les sommes dues ne puissent être réduites en
conséquence de l'accomplissement de mesures alternatives.
Alors, concernant le règlement du ministre,
le nouvel article 159.1 du Code de procédure pénale permet un programme
d'adaptabilité des règles relatives à la poursuite en donnant la possibilité
d'offrir au demandeur... au défendeur, plutôt, une alternative à la
continuation de la poursuite. Cela peut conduire au retrait d'un ou plusieurs
chefs d'accusation, de même, l'article 333 du Code de procédure pénale
permet un programme d'adaptabilité des règles relatives à l'exécution des
jugements. Les travaux compensatoires ou une partie de ceux-ci pourront être
remplacés par des mesures alternatives. Les infractions visées par de tels programmes
doivent, cependant, être prévues par un règlement du ministre. Nous comprenons
que le règlement que prendra le ministre établira l'ensemble des catégories
d'infractions que les municipalités pourront choisir ou non de traiter dans
leur programme d'adaptabilité. Il importe que l'autorité municipale conserve la
souplesse requise pour adapter son programme à sa réalité, et nous aurions même
été favorables à ce que les municipalités jouissent d'une pleine latitude pour
établir les infractions ou les catégories d'infractions visées par le programme
d'adaptabilité.
Le Président (M.
Bachand) : Pardon maître, si vous pouviez conclure. Désolé, la
table est déjà... Merci beaucoup.
M. Giasson (Serge) : Alors,
ce que nous souhaitons, dans la première, c'est qu'il y ait une mesure
transitoire, finalement, dans le projet de loi, pour assurer au moins que les
règlements, qui concernent notamment le bon ordre et la paix, soient d'emblée,
en mesure transitoire, des règlements qui pourraient faire partie du programme.
Concernant les retraits des chefs
d'accusation...
Le Président (M.
Bachand) : Je vais être obligé... Je suis vraiment désolé, le
temps est compté. Justement, parlant de temps, on a un léger retard. J'aurais
besoin, si on veut garder nos temps initiaux par groupe parlementaire, j'aurais
besoin d'ajouter un maximum de 12 minutes à la séance d'aujourd'hui.
Une voix
:
Consentement.
Le Président (M.
Bachand) : Consentement. 12 minutes. Parfait. Mme la
ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Bonsoir, M. Pigeon, Me Giasson, merci d'être présents. Merci surtout
pour vos commentaires, votre mémoire. Puis je vais vous laisser, justement,
compléter ce que vous alliez compléter, puis, après ça, on pourra peut-être
élaborer sur certains points.
M. Giasson (Serge) : Alors,
le deuxième élément qu'on aurait aimé comme bonification, c'est que de
permettre, avant la fin du programme, pour les efforts faits dans un programme,
même si le programme n'a pas été complété, de pouvoir, selon les engagements ou
l'entente qu'on a pris avec la personne qui est impliquée dans le programme, de
pouvoir retirer des chefs sur lesquels on s'était entendu qu'il allait y avoir
des retraits. Alors, c'est sûr qu'il n'y aurait pas la totale, mais il y aurait
une possibilité de réduire les chefs d'accusation s'ils sont multiples.
La réduction des sommes dues, c'est la
même chose. Dans la trajectoire, il se peut que quelqu'un embarque dans le programme,
puis, éventuellement, nous dise : Moi, je suis rendu à une étape où j'ai
rempli certaines... je ne l'ai pas complété, mais j'ai rempli, O.K., la
démarche, et là, maintenant, je me suis trouvé un petit boulot et j'aimerais ça
pouvoir continuer en payant en mode traditionnel, continuer à payer. Et là on
pourrait avoir les deux bénéfices, c'est-à-dire, pendant qu'il est dans le programme,
une réduction de ses amendes, ensuite, la...
M. Giasson (Serge) :
...je ne l'ai pas complété, mais j'ai rempli, O.K., la démarche, et là maintenant
je me suis trouvé un petit boulot et j'aimerais ça pouvoir continuer... en
payant en mode traditionnel, continuer à payer. Et là on pourrait avoir les
deux bénéfices, c'est-à-dire, pendant qu'il est dans le programme, une réduction
de ses amendes, ensuite, la continuité pour régler le reste de ses amendes avec
une entente de paiement, par exemple.
Mme LeBel : Oui. Revenant
au retrait d'un chef... On va revenir surtout sur votre programme
d'adaptabilité, là, pour la ville de Québec, qui a d'ailleurs ces programmes-là
à deux volets depuis quelque temps déjà et qui ont fait leurs preuves. On va
peut-être parler des modalités, puis j'aimerais ça, après ça, si vous étiez
capable d'illustrer pour nous... parce qu'on se comprend dans nos termes, les
personnes vulnérables, qu'est-ce que ça signifie, mais peut-être nous parler
d'un cas type d'une personne qui va bénéficier de ce type de programme là mais
de façon plus particulière.
Pour ce qui est le retrait d'un chef
d'accusation à la fin du programme, l'association, justement, des procureurs
municipaux nous avait demandé cette flexibilité-là d'être capable que, quand
une partie du programme est complétée, de pouvoir avoir une certaine latitude.
Je comprends que vous êtes d'accord, et votre expérience démontre que ce serait
bénéfique.
Une voix
: ...
Mme LeBel : O.K. On a
parlé également... Le Barreau a mentionné, là, peut-être de faire en sorte
qu'une fois que le programme est complété, que les étapes sont complétées, et qu'on
a cette certitude-là, on parlait d'imposer une exigence, maintenant que le
procureur agisse. Parce que le projet de loi, tel que présenté, dit qu'une fois
que le programme est complété le procureur «peut». Alors, on demandait... ou on
demandait la réflexion, de dire aller à «doit». Donc, quand il y a une portion
du programme de complétée, on pourrait y aller dans le «peut» parce qu'il y a
une évaluation à faire de la pertinence de le faire. Et on suggère que, quand
le programme est complété de façon satisfaisante, qu'il y ait une obligation,
ce qui permettrait aux contrevenants d'avoir une certaine certitude d'entrée de
jeu que, s'il fait le chemin ou le parcours qu'on lui demande de faire, bien,
il aura le résultat escompté. Qu'est-ce que vous en pensez selon votre
expérience?
M. Giasson (Serge) : Selon
mon expérience, là, je n'ai jamais... on n'a jamais vécu une situation où il y
avait un désaccord, par exemple, à la fin d'un programme complété, qu'il y
avait un désaccord parce qu'il y a une entente qui est préalable à la démarche.
O.K.? Dans cette entente-là, il y a une équipe multidisciplinaire, il y a des
alliés, par exemple, soit le procureur de la personne qui bénéficie du
programme, soit un autre allié. Il y a des intervenants sociaux aussi qui
accompagnent généralement les personnes dans leur programme. Et, le programme,
c'est comme une entente dans laquelle entente, il y a la portion aussi des
obligations du poursuivant, là, à respecter, puis il y a aussi des obligations
de celui qui participe au programme à respecter. Ça fait que c'est vraiment une
entente, et jamais on ne s'est retrouvés dans une situation où l'entente n'a
pas été respectée.
Mme LeBel : ...
M. Giasson (Serge) :
Exactement.
Mme LeBel : ...entre le
poursuivant et le...
M. Giasson (Serge) :
Exactement. Et comme on est plusieurs, on n'a pas besoin de tiers parce que,
des tiers, il y en a beaucoup autour de la table. C'est l'équipe
multidisciplinaire qui est témoin de l'engagement de toutes les parties dans le
programme. C'est comme ça que le programme est construit, puis ça donne
toujours le meilleur effet, c'est-à-dire tout le monde est lié par les
engagements du programme.
Mme LeBel : O.K. Si on
revient peut-être à l'opportunité ou à la possibilité, pour la ministre ou le
ministre de fixer par règlement les infractions qui seraient... qui donneraient
une admissibilité à ces programmes-là si on veut, vous avez aussi, un peu à
l'instar de l'association des procureurs municipaux, la même préoccupation de garder
de la souplesse pour les différents milieux municipaux. Est-ce que vous pouvez
peut-être me donner un exemple là, vous, bon, quels sont les types
d'infractions qui traditionnellement donnent lieu à ces programmes-là et où
est-ce qu'on pourrait penser que le fait de le fixer par règlement pourrait
faire en sorte de contrevenir, si on veut, aux objectifs de ces programmes-là?
• (20 h 40) •
M. Giasson (Serge) : Nous,
on voyait surtout parce qu'on est persuadés, avec la collaboration actuelle du gouvernement
puis du ministère de la Justice, on a la... on est persuadés que le ministère
va entreprendre des discussions, O.K., pour l'établissement de ce règlement.
Ce qu'on voulait éviter, parce qu'on
demande depuis des années, O.K., de pouvoir soulager les gens qui participent
au programme, de pouvoir réduire leur peine avec des mesures alternatives, ce
qu'on demandait, c'est de retrouver une mesure provisoire dans la loi qui
dirait tout simplement : à défaut d'avoir un règlement, bien, toutes les
infractions qui sont normalement dans un règlement de bon ordre et paix, puis
on peut l'identifier assez facilement parce que c'est un règlement qui est
adopté en vertu d'une loi sur les compétences municipales. Ça fait qu'en
faisant une référence, là, à la Loi sur les compétences municipales, on
pourrait assurer le pont. O.K., à partir du moment de la mise en vigueur, on pourrait
au moins avoir les infractions à nos règlements de bon ordre et paix. Puis je
l'ai listé à la page 11 du mémoire, là : l'ivresse dans un endroit
public, consommation d'alcool, flânage, vagabondage, dormir dans une rue, la
bataille, le tumulte, le bruit, le désordre, mendier...
M. Giasson (Serge) :
...on pourra au moins avoir les infractions à nos règlements de bon ordre et
paix, puis je l'ai listé à la page 11 du mémoire, là : l'ivresse dans
un endroit public, consommation d'alcool, flânage, vagabondage, dormir dans une
rue, la bataille, le tumulte, le bruit, le désordre, mendier. Ça se trouve
généralement dans ces règlements-là, ça fait que, là, on pourrait déjà
commencer à travailler pendant que le ministère de la Justice fait des
consultations sur le règlement à être adopté. Tout ça pour ne pas qu'on perde
de temps, O.K., puis qu'on puisse aider — tout de suite après la mise
en vigueur de la loi — qu'on puisse aider les gens qui participent au
programme.
Mme LeBel : Et j'imagine
que, dans la majorité des cas des individus qui ont affaire avec votre
programme à la ville de Québec, ce sont ce type d'infractions là qui, de toute
façon, sont à la base de notre intervention, si on...
M. Giasson (Serge) : Nos
personnes les plus vulnérables sont généralement en situation d'itinérance et
c'est ce genre de contravention là ou d'infraction.
Mme LeBel : Ça fait que
peut-être qu'on pourrait justement discuter de ce genre de dossier là qui sont
abordés par police, qui deviennent des dossiers de porte tournante dans le
système judiciaire et que vous avez pu constater par votre expérience, compte
tenu que vous avez un programme à la ville de Québec, qui ont démontré une
efficacité pour les contrevenants.
M. Pigeon (Robert) :
D'abord, ce qu'il faut dire, d'entrée de jeu, c'est que les policiers ne
souhaitent pas judiciariser ces cas-là. Dans la majorité des cas, d'abord, les
policiers de la ville de Québec, Montréal, c'est la même chose, on travaille
avec des groupes communautaires, des organismes du communautaire, sur le
territoire. Donc, presqu'à toutes les fois, lorsque les policiers ont à se
rendre sur un appel — parce que c'est généralement les citoyens qui
vont nous appeler ou les commerçants — une personne qui fait du
désordre, bien, le policier va lui offrir, d'entrée de jeu : Est-ce que tu
souhaiterais qu'on aille te reconduire à l'Auberivière? Est-ce que tu
souhaiterais qu'on contacte l'organisme Pech ou un autre organisme
communautaire, pour en prendre charge autrement que par la voie judiciaire.
Donc, toutes ces tentatives-là vont d'abord être faites, mais il arrive, au
final, assez souvent, que l'absence de collaboration est là et le policier est
dans l'obligation d'agir, de faire cesser l'infraction. Et pour pouvoir faire
cesser l'infraction, bien, il faut que ça se fasse en vertu d'un règlement ou
d'une loi en vigueur, donc dans le cas présent, à la page 11, c'est
majoritairement dans ces cas-là que les policiers vont intervenir, donc en
vertu du règlement «paix et bon ordre». Donc, lorsque ça arrive, ça vient avec
un constat d'infraction. Lorsque la personne arrive en détention, généralement,
le sergent de la détention qui est là est déjà habilité à reconnaître ces
cas-là. Il va, dans certains cas, appeler un infirmier de garde — ça,
c'est un petit peu unique au SPVQ — , où on va déjà annoter le
dossier, le préparer pour la cour municipale pour qu'il soit repris un peu plus
loin, pour l'emmener, ou à tout le moins, offrir une trajectoire particulière
pour une personne, parce que ce qu'on souhaite, c'est que la personne ne
revienne plus, parce que le lendemain, elle est encore au même coin de rue à
faire les mêmes choses. Idéalement, c'est de les sortir de là puis de les
réaffilier à la société, faire en sorte qu'on ne les judiciarise pas
inutilement.
Donc, le policier est pris parfois entre
des demandes citoyennes et une intervention qui est obligatoire. Mais les
groupes communautaires qui sont en assistance avec nous autres dans 80 %,
90 % des cas en prennent charge. Mais, lorsque ce n'est pas possible, là,
on doit judiciariser à ce moment-là. On sait très bien que l'idéal, c'est de
faire en sorte de trouver des moyens alternatifs pour ces personnes-là, autres
que l'emprisonnement, bien sûr, parce que l'emprisonnement ne donnera
absolument rien dans ces cas-là. Ce n'est pas ça qui est efficace pour ces
gens-là, c'est de les réaffilier.
Mme LeBel : Merci.
Peut-être, avant qu'on... que je passe peut-être la parole à mon collègue, le
député d'Ungava qui aurait au moins quelques questions pour vous, j'aimerais
peut-être parler de l'exigence d'identifier... d'exiger des pièces d'identité,
ou en tout cas, la possibilité d'exiger plutôt, parce que ce n'est pas une
exigence, c'est une possibilité, et le mandat d'entrée. On sait que dans le cas
de la sécurité routière, il y a déjà une exigence d'avoir en tout temps sur soi
son permis de conduire, donc, qui est en soi une pièce d'identité. Il n'y a pas
de problème pour les constats d'infraction en matière de sécurité routière,
parce qu'on est capable d'identifier le conducteur.
Peut-être nous parler de votre expérience
où on a des problèmes justement en matière d'émission de constat d'infraction,
où la base de l'émission du constat, c'est l'identification. Et est-ce que vous
avez souvent vu, ou est-ce que vous avez vu à quelques reprises, des cas de
mauvaise identification ou de constat qui ont été signifiés à la mauvaise
adresse, au mauvais nom, parce qu'on avait les mauvaises informations de départ
et qui a fait en sorte qu'on n'a pas pu pénaliser la bonne personne, si je peux
dire de cette façon-là?
M. Pigeon (Robert) :
L'absence d'identification positive alourdit le système d'un bout à l'autre,
là. En fait, lorsqu'on n'a pas la bonne personne devant nous, bien on enclenche
des processus d'identification. Les constats sont émis au nom d'une mauvaise
personne, ainsi de suite. Et les cas de supposition de personne sont fréquents.
Donc, ce n'est pas rare que des gens s'identifient sous un faux nom, donc on le
sait maintenant avec les vols d'identité, ça va être encore de plus en plus
présent. Donc l'identification positive d'une personne raccourcit énormément
l'intervention policière, mais donne beaucoup plus de qualité par la suite à
tout le processus judiciaire qui va s'en suivre. Donc pour nous, d'avoir une
identification positive le plus rapidement possible lors d'une intervention
amène une satisfaction à la personne qui est en contact avec les...
M. Pigeon (Robert) : ... Donc,
l'identification positive d'une personne raccourcit énormément l'intervention
policière, mais donne beaucoup plus de qualité par la suite à tout le processus
judiciaire qui va s'ensuivre. Donc, pour nous, d'avoir une identification
positive le plus rapidement possible lors de l'intervention amène satisfaction
à la personne qui est en contact avec les policiers, puis raccourcit le délai
d'intervention, puis permet une meilleure trajectoire par la suite pour le
processus judiciaire.
Mme LeBel : Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député d'Ungava, s'il vous plaît.
M. Lamothe : Oui. À la page 6
de votre mémoire, vous définissez votre programme IMPAC, puis on dit ici :
«Il vise à adapter le tribunal à des clientèles particulières et à...» le point
n° 3 : «rendre la communauté partenaire dans la
résolution de problèmes.» Bien, moi, je trouve ça génial. Comment vous faites
ça?
M. Pigeon (Robert) : Bon. Je
l'ai abordé un petit peu tout à l'heure, on travaille beaucoup avec les groupes
communautaires. Et, lorsqu'une personne est complètement désaffiliée, bien, un
simple petit effort pour cette personne-là, ne serait-ce que de prendre sa
médication, d'aller à ses rendez-vous médicaux, peut-être même être en
recherche d'emploi ou viser une trajectoire scolaire différente, donc, ce sont
toutes des choses qui pourraient être mesurées. Donc, les partenaires, ce sont
tous les groupes communautaires avec qui on a des
alliances — d'ailleurs, on en a plusieurs sur notre territoire, comme
partout ailleurs au Québec — avec qui on coopère d'une façon
régulière. Et on ne se cachera pas que ces gens-là finissent par être connus,
parce qu'ils viennent tout le temps dans le système. Il vient un temps où les
groupes communautaires, lorsqu'on leur envoie... soit qu'ils nous le signalent
ou soit qu'on leur signale, on leur demande : Es-tu capable d'embarquer
avec nous pour nous aider à convaincre cette personne-là de prendre la
trajectoire du programme IMPAC puis peut-être en bout de ligne de sortir
gagnante en bout de piste?
M. Lamothe : Puis j'imagine
que celui qui coordonne tout ça ou celle, c'est un policier ou une policière.
M. Pigeon (Robert) : Oui.
M. Lamothe : C'est ça?
M. Pigeon (Robert) : Oui.
M. Lamothe : Ça fait combien
d'années qu'il dure, ce programme-là? Depuis combien d'années?
M. Pigeon (Robert) : On
recule...
M. Giasson (Serge) : C'est
2013.
M. Lamothe : 2013. Puis, ça
marche-tu?
M. Giard (Serge) : Il a fait
l'objet d'une évaluation entre 2014 et 2017 par un groupe de recherche de
l'Université Laval qui nous a aidé à valider les hypothèses qu'on avait, puis
il a fait des recommandations pour améliorer le programme. Un des succès du programme,
c'est qu'il a été évalué par un groupe indépendant, un groupe d'universitaires
indépendant, des gens spécialisés en travail social qui nous ont guidés sur la
façon de procéder. Et les interventions communautaires ou l'implication de la
communauté, c'était un élément très important dans les remarques, là, de ce
groupe de recherche.
M. Lamothe : Donc, je pense
que c'est la base de tout, puis… non, c'est bon. Ça répond à ma question.
Êtes-vous satisfaits de votre programme depuis le début?
M. Pigeon (Robert) : …parfois
que c'est les procureurs de la défense qui nous signalent : alors, on
aurait peut-être ce client-là, ce serait peut-être un client potentiel pour
s'inscrire dans le programme IMPAC. Donc, au début, c'était peut-être plus nous
autres qui essayaient de les orienter vers là. Maintenant, la demande… on
commence à avoir de la demande. Donc, on n'est plus à sens unique, là, on est
vraiment en…
M. Lamothe : …nous autres,
qu'on aligne, notre gouvernement, qui aligne les nouvelles lois, va aider à ce
programme-là.
M. Pigeon (Robert) :
Absolument.
M. Giard (Serge) : Oui, on
s'attend, avec la diffusion, de la possibilité de réduire avec d'autres choses…
que de réduire les amendes, par exemple, on s'attend à une popularité, là, dans
le programme, pour donner espoir aux gens qui rentrent dans le programme
d'éteindre des dettes, même des dettes importantes, O.K. C'est ça qu'il nous
permet, le programme, les dispositions du projet de loi, c'est de donner espoir
à ces gens-là qui ont des dettes importantes de pouvoir les éteindre dans un
laps de temps qui est plus court que celui des travaux compensatoires, parce
que, quand on travaille sur soi, on travaille sur soi habituellement
24 heures sur 24, alors, vous savez, le bénéfice, là, qu'ils peuvent
retirer, on peut le calculer, ce bénéfice-là, puis réduire d'autant la dette.
M. Lamothe : Les partenaires
disent quoi du nouveau projet de loi?
M. Giasson (Serge) : Les
partenaires l'ont demandé avec nous… plus de flexibilité, plus de possibilités,
pour aider les gens qui sont pris dans des situations, par exemple, avec des
amendes importantes.
M. Lamothe : O.K. Merci
beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de LaFontaine, vous
avez la parole. Merci.
• (20 h 50) •
M. Tanguay
: Oui, merci
beaucoup. Merci, M. Pigeon, M. Giasson, d'être avec nous ce soir. Merci
pour votre mémoire puis merci de répondre à nos questions. Ma collègue de
Notre-Dame-de-Grâce va aller davantage sur le programme IMPAC pour lequel, je
pense, on a des félicitations à vous communiquer… programme d'adaptabilité.
Moi, je vais revenir en arrière — je ne sais pas si vous étiez présents
quand le Barreau était ici lors de la dernière heure — et vous
parler, notamment, M. Pigeon, à titre de président de l'association des
directeurs de police du Québec, donc à titre de président de l'association des
directeurs de police de Québec, et vous vous félicitez de constater dans le
projet de loi qu'il y a une harmonisation, dans le projet de loi, qui permet
dorénavant d'adopter, en regard des lois provinciales et des règlements
municipaux, les mêmes pratiques d'enquêtes qu'en matière criminelle. Là, Woups!,
là, moi, j'ai un gros drapeau rouge parce que, justement…
M. Tanguay
: ...vous
vous félicitez de constater dans le projet de loi qu'il y a une harmonisation,
dans le projet de loi, qui permet dorénavant d'adopter, en regard des lois
provinciales et des règlements municipaux, les mêmes pratiques d'enquête qu'en
matière criminelle. Là, woups! Là, moi j'ai un gros drapeau rouge parce que
justement, si ça c'est l'approche, puis détrompez-moi, si c'est de dire :
Bien, ce qu'on fait en matière criminelle, on va l'harmoniser avec ce que l'on
fera dorénavant avec la loi provinciale et les règlements municipaux en matière
pénale. Là je pense et j'aimerais vous entendre là-dessus, c'est faire peu de
cas... Et j'aimerais vous entendre là-dessus parce que vous félicitez de deux
mesures du projet de loi, notamment la mesure en ce qui a trait à la pièce
d'identité valide sur soi et la possibilité de l'agent d'en exiger la
production et les arrestations dans une maison d'habitation sans mandat.
Le Barreau nous a démontré, parce qu'il y
a toujours la loi telle que rédigée, est-ce qu'elle les chartes des droits et
libertés? Ça, c'est une chose. La loi, tel qu'elle a été appliquée, deuxième
niveau de questionnement, est-ce que ça respectait les droits et les libertés
protégés pour la citoyenne ou le citoyen? Et très clairement, ce qu'on vient de
nous dire, c'est qu'il doit y avoir une proportionnalité. Je fais juste
l'extrait du Barreau : «Soulignons, dans le contexte de l'exigence d'une
pièce d'identité, que de façon générale les infractions pénales sont de gravité
moindre que les infractions criminelles et ce faisant, elles devraient
comprendre des règles moins intrusives du point de vue des droits des
justiciables». Alors, rassurez-moi, là, je suis certain que je vous ai
peut-être mal lu mais que vous n'êtes pas de cette école où on devrait agir en
matière criminelle de la même façon... c'est-à-dire on devrait agir en matière
provinciale et municipale de la même façon qu'en matière criminelle. Parce que
là, il risque d'avoir des poursuites qui se rendent jusqu'en Cour suprême, là.
M. Pigeon (Robert) : D'abord,
les policiers ont toujours à cœur le respect des droits fondamentaux des
personnes qu'ils côtoient à chaque jour, là.
M. Tanguay
: Je le
prends pour acquis.
M. Pigeon (Robert) : Ça,
c'est de base, c'est des acquis pour les policiers. Donc, les gens
interviennent toujours de cette façon-là, de un. De deux, pour ce qui est des
mandats d'entrée, exemple : le mandat d'entrée, ce n'est qu'une façon de
faciliter le travail des policiers. Parce que pour les citoyens, ce qui les
préoccupe dans les villes, dans les sociétés, ce n'est pas la grande
criminalité en passant, on a des sondages là-dessus, ce sont tous les petits
crimes, les petites incivilités, les éléments justement en lien avec les
règlements municipaux. Et les citoyens souhaitent que les policiers agissent et
agissent sur-le-champ, immédiatement, lorsque des situations comme celles-là se
produisent sur le territoire. Donc, d'avoir des facilités, d'avoir des outils,
ça n'empêche pas que le policier doit être face à des motifs raisonnables et
probables de croire qu'une infraction est commise. Donc, ce n'est pas un chèque
en blanc, ce n'est pas un passe-droit pour les policiers, ce n'est que des
facilités d'appliquer la loi.
M. Tanguay
: Ça, c'est
une chose, la «raisonnabilité». Mais moi, j'aimerais ça vous entendre sur...
Même s'il y a des motifs tout à fait raisonnables, c'est coulé dans le béton
qu'une infraction a été commise, si ce n'est pas une infraction criminelle,
c'est parce qu'il a commis d'autres choses qui relèvent de la loi provinciale
ou municipale, n'êtes-vous pas d'accord avec moi qu'il ne devait pas aller
aussi loin que si c'était une accusation criminelle? Autrement dit, je n'en
suis pas sur les motifs raisonnables mais je suis en train de comparer des
pommes et des oranges. Un acte criminel où là, il pourrait y avoir un niveau
d'intrusion plus justifié versus un règlement municipal... Puis le Barreau fait
justement état de situations hypothétiques déraisonnables ou raisonnables que
l'on doit évaluer lors d'une analyse de la constitutionnalité. J'aimerais vous
entendre là-dessus. Ou... Puis détrompez-moi si j'ai tort, je suis sûr que vous
ne me dites pas : Peu importe l'infraction, on va être plus efficace en
exigeant la pièce d'identité ou en entrant sans mandat dans la résidence. Vous
faites quand même la distinction entre le type d'infraction : criminelle
et municipale.
M. Pigeon (Robert) : Bien, on
parle d'application de... on parle de l'application d'une loi. Lorsqu'on parle
d'un mandat d'entrée, c'est parce qu'il existe déjà un autre mandat. Donc on
parle d'un mandat d'arrestation, un mandat d'emprisonnement ou autre. Donc, les
policiers pourraient s'installer en avant de la résidence puis attendre pendant
une journée que la personne sorte pour l'interpeller alors qu'il serait plus
simple de contacter un juge, d'obtenir un mandat d'entrée puis d'exécuter le
mandat. Donc, on parle de facilité, on parle d'opérationnalité beaucoup plus
efficace, on parle d'efficience ici à ce moment-là.
M. Tanguay
: Mais là
ici on parle sans mandat.
M. Pigeon (Robert) : Oui,
mais à ce moment-là, lorsque les policiers sont face à des motifs raisonnables
probables qu'une personne a commis un crime, elle se retrouve à l'intérieur
d'un lieu, pourraient, dans les mêmes circonstances, demander à un juge
l'autorisation d'entrée pour poursuivre leur travail et éventuellement
finaliser leur dossier.
M. Tanguay
: Puis au
niveau de l'intervention sans mandat, comment vous le comprenez? L'arrestation
dans une maison d'habitation sans mandat, comment vous le comprenez cet
élément-là pour lequel vous êtes en accord?
M. Pigeon (Robert) : Bien, ça
dépend on parle de quel genre d'infraction, là.
M. Tanguay
: C'est...
M. Pigeon (Robert) : ...pour
poursuivre leur travail et éventuellement finaliser leurs dossiers.
M. Tanguay
: Et au
niveau de l'intervention sans mandat, comment vous le comprenez? L'arrestation
dans une maison d'habitation sans mandat, comment vous le comprenez, cet
élément-là, pour lequel vous êtes en accord?
M. Pigeon (Robert) : Bien, ça
dépend, on parle de quel genre d'infraction?
M. Tanguay
: C'est...
Je reviens à la première minute de mon intervention. Tel que je vous lis, c'est
pour tout type d'infraction, il y aurait possibilité pour vous d'entrer sans
mandat dans une résidence. Est-ce que c'est de même que vous le comprenez?
Une voix
: Il y a des
exceptions...
M. Pigeon (Robert) : Oui,
c'est ça. On parle d'une arrestation dans une maison d'habitation en
application d'un mandat d'amener, d'un mandat d'emprisonnement ou d'un mandat
d'arrestation... doit être autorisée au moyen d'un mandat ou d'un télémandat
d'entrée délivré par un juge.
M. Tanguay
: Et est-ce
que, appliqué à ce cas-là, puis je veux revenir appliquer au cas de la pièce
d'identité, est-ce que pour vous, que ce soit en matière criminelle ou en
matière d'infraction municipale, est-ce que pour vous, c'est du pareil au même,
c'est une infraction, que ce soit criminel ou municipal, et que ça mérite ces
deux mesures-là, notamment l'exigence d'une pièce d'identité?
M. Pigeon (Robert) :
Absolument.
M. Tanguay
: O.K. Et
que faites-vous du commentaire du Barreau qui disait : «De façon générale,
les infractions pénales sont de gravité moindre que les infractions criminelles
et, ce faisant, elles devraient comprendre des règles moins intrusives.»
M. Pigeon (Robert) : Bien, ce
n'est pas une question de plus grave ou de moins grave, c'est question
d'application d'une loi. Lorsqu'une personne commet une infraction, je pense
que les autorités sont en droit d'identifier positivement cette personne-là,
d'abord, et dans un premier temps, de ne pas commettre d'erreur judiciaire.
M. Tanguay
:i O.K. Je
vais laisser ma collègue poursuivre sur le...
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de
Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Weil
: Bonjour
messieurs. Contente de vous avoir, parce qu'on n'a pas si souvent l'occasion de
parler avec... vous êtes des premiers intervenants, hein, sur le territoire.
J'avais une question, donc... la santé mentale. J'imagine, vous aussi, comme
beaucoup à Montréal... souvent l'itinérance est associée à des personnes
vulnérables qui vivent de la pauvreté, santé mentale aussi. Et votre programme
Impact, les deux en fait, et l'autre, PTTS, vous vous êtes inspirés d'autres
programmes semblables, j'imagine, que vous... bien, peut-être de Montréal et
ailleurs, mais vous l'avez créé vous-mêmes, ici à Québec, hein, c'est ça? Pour
répondre aux enjeux qui sont identifiés par le projet de loi, c'est-à-dire une
justice de proximité, d'accès à la justice, déjudiciarisation, c'est vraiment
la philosophie que vous avez.
Est-ce que... Vous dites, donc, bien que
le programme fonctionnait bien, il vous manquait quelques outils, et ce projet
de loi vient vous donner des outils additionnels. C'est un peu ça? Ou est-ce
que vous étiez déjà là-dessus, parce que peut-être, d'après ce que je vois, des
tribunaux, les acteurs de la justice, ont déjà innové et là, ce projet de loi
vient confirmer ces innovations, peut-être vous ouvrir un peu plus la voie,
vous donne un sentiment de confort?
M. Giasson (Serge): C'est-à-dire
qu'avant le projet de loi, avant ces dispositions-là, les procureurs dans
plusieurs municipalités développaient de la créativité. Là, présentement, la
créativité, elle est encadrée, elle est normée dans le projet, O.K. Ce qu'on
souhaitait, nous, c'est de pouvoir annoncer officiellement par exemple que le
programme permettrait d'adapter la réduction des amendes par des activités qui
sont personnelles. O.K., un plan de traitement, par exemple, quelqu'un qui a
abandonné son traitement de méthadone, puis qui se retrouve dans la rue avec
les...en itinérance, et qu'on... à qui on demande de raccrocher avec son plan
de traitement, de reprendre la méthadone, de reprendre ses différentes
rencontres qui... périodiques, là, pour s'assurer qu'il suit son plan de
traitement. Nous, on pense que ça, c'est compensable.
Actuellement, dans la loi actuelle, c'est
impossible de compenser directement ces activités-là. Alors là, ce qu'on fait,
c'est que... ce que l'Assemblée nationale fait en adoptant cette loi-là, c'est
d'annoncer à tout le monde que c'est possible. Quand tu te retrouves dans une
situation de vulnérabilité, que tu es admissible à un programme d'adaptabilité,
tu peux profiter de la... des efforts faits pour te prendre en main pour
réduire tes amendes. Alors, c'est un levier essentiel, je pense, qui était
essentiel pour le programme.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, Mme la députée. M.
le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Bonjour
messieurs. Merci d'être parmi nous ce soir... Commencer par une question très
simple avec vous, pour M. Pigeon. Est-ce que vous reconnaissez au Québec
l'existence, de manière générale, de problématiques de profilage social et de
profilage racial au sein des corps de police au Québec?
• (21 heures) •
M. Pigeon (Robert) : Bien,
j'ai pris connaissance du dernier rapport qui a été déposé concernant le SPVM.
Donc, mon collègue directeur du SPVM en a pris acte et s'engage à y donner
suite. Pour ce qui est de l'association...
21 h (version non révisée)
M. Nadeau-Dubois : ...distance,
de manière générale, de problématique de profilage social et de profilage
racial au sein des corps de police au Québec.
M. Pigeon (Robert) : Bien,
j'ai pris connaissance du dernier rapport qui a été déposé concernant le SPVM.
Donc, mon collègue directeur du SPVM en a pris acte et s'engage à y donner
suite.
Pour ce qui est de l'Association des
directeurs de police, on est préoccupé aussi par cette situation-là et on
entend regarder avec le SPVM quelles solutions pourraient être apportées pour
s'assurer de donner confiance à l'ensemble des communautés qui sont présentes
sur le territoire québécois.
M. Nadeau-Dubois : Mais sur le
diagnostic parce que la ministre de la Sécurité publique, elle le disait clairement :
C'est un défi qui existe, une problématique qui existe. Vous, est-ce que vous
reconnaissez l'existence de ce problème-là dans les corps de police?
M. Pigeon (Robert) : Bien, il
faudrait regarder en profondeur dans quelles circonstances. Si on est en
Abitibi, bien c'est la communauté autochtone qui est plus présente, qui est
plus visée. Lorsqu'on est à Montréal, c'est autre chose. Lorsqu'on est à Québec,
bon, on est moins là-dedans parce que c'est un petit peu moins multiculturel
ici.
Mais il reste quand même qu'il faut
rassurer ces communautés-là. Il faut trouver des moyens qu'elles aient
confiance aux services de police lorsque les policiers interviennent auprès
d'eux et qu'elles aient confiance qu'elles ne font pas justement l'objet d'un
profilage soit racial ou social.
M. Nadeau-Dubois : Je prends
note de ce que vous me dites et aussi de ce que vous ne me dites pas, et je
vous ramène aux inquiétudes du Barreau qui ont été exprimées il y a quelques
minutes, qui justement dans un contexte où eux reconnaissent que ça existe, le
profilage social, le profilage racial, qui s'inquiètent des pouvoirs étendus
qui vont vous être conférés, mais qui vont être conférés aux forces policières
en général dans le cadre de ce projet de loi là en ce qui a trait à la
possibilité pour des policiers d'exiger une carte d'identité. Si vous aviez les
gens du Barreau devant vous, qu'est-ce que vous leur répondriez pour les
rassurer?
M. Pigeon (Robert) : Bien, je
leur répondrais que les policiers d'abord et avant tout cherchent à résoudre le
problème. Et dans la plupart des cas, s'il y a une issue potentielle autre que
la judiciarisation, c'est celle-là que les policiers vont prendre. C'est-à-dire
l'assistance par un groupe communautaire, faire cesser l'infraction de
n'importe quelle autre manière autre que l'émission d'un constat d'infraction
et identification de la personne, c'est d'abord et avant tout ça qui va être
utilisé.
Donc, on sera... Les policiers ne
cherchent pas à judiciariser nécessairement.
M. Nadeau-Dubois : Je suis
moins sur la question de la judiciarisation que spécifiquement sur la
possibilité qui vous serait donnée d'exiger une carte d'identité, ce qui est un
nouveau pouvoir. Qu'est-ce que vous répondez aux gens qui, dans le contexte que
je viens de vous décrire puis que vous connaissez, qui s'inquiètent de ce
nouveau pouvoir?
M. Pigeon (Robert) : Moi, je
pense que c'est une très bonne nouvelle parce que ça va raccourcir les
interventions policières, ça va permettre d'avoir des identifications positives
et ça va permettre de rassurer le système judiciaire qu'on a les bonnes
personnes devant nous.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. le député. M. le
député de Chomedey maintenant, s'il vous plaît.
M. Ouellette : Merci.
Bonsoir, messieurs. Pour faire du pouce un peu sur ce que le collègue de Gouin
vient de mentionner et vous avez entendu les gens du Barreau tantôt, le drapeau
rouge qu'ils lèvent, c'est qu'il pourrait peut-être y avoir avec ces nouveaux
pouvoirs de l'abus de pouvoir.
Je comprends de votre réponse que par le
professionnalisme de vos policiers puisqu'ils doivent répondre dans différentes
situations, vous n'êtes pas de cet avis-là que ça pourra conduire à de l'abus
de pouvoir. Il y a toujours des situations exceptionnelles, mais vous êtes en
mesure... je pense que vos réponses nous amènent à penser que pour vous, ça va
augmenter l'efficacité des réponses policières par rapport aux citoyens du Québec
si j'ai bien compris votre point de vue que vous avez exprimé, là, dans les
différentes questions qui vous ont été posées.
M. Pigeon (Robert) : Vous
avez tout à fait raison. Donc, on parle d'augmentation de l'efficacité puis de
l'efficience, ça, c'est certain, de un. De deux, les policiers se comportent de
façon rigoureuse, professionnelle et avec professionnalisme et éthique. Et pour
tout ce qui serait en dehors de ça, il existe déjà plusieurs mécanismes partout
au Québec, la déontologie, les codes de discipline à l'intérieur des organisations
policières. Il y a déjà beaucoup de transparence, il y a beaucoup de mécanismes
de contrôle autour de la police pour permettre, je pense, d'être rassuré sur
ces points de vue là. Et je suis convaincu que ça ne serait pas nécessairement
un enjeu.
M. Ouellette : Merci. Merci,
M. le Président. Me Giasson, vous nous avez parlé tantôt qu'il y avait dans
plusieurs municipalités, j'ai bien aimé votre terme, de la créativité. Il ne
faudra pas qu'avec le projet de loi, ça soit trop rigide et qu'on s'encadre
trop pour que... pas juste cette créativité-là, mais que ce soit le justiciable
au bout qui fasse les frais parce qu'on était là puis là, on s'en va
complètement l'autre côté, là, qu'on ne sera pas en mesure de donner le service
au justiciable en fonction des situations qui vont être rencontrées.
M. Giasson (Serge): Vous, le
législateur, a beaucoup observé les gestes...
M. Ouellette : ...de... parce
qu'on était là, puis là, on s'en va complètement l'autre côté, là, qu'on ne
sera pas en mesure de donner le service aux justiciables en fonction des
situations qui vont être rencontrées.
M. Giasson (Serge): Savez-vous, le
législateur a beaucoup observé les gestes de créativité et s'en est beaucoup
inspiré dans la rédaction des articles. Alors, je peux vous dire que je
retrouve, dans le projet de loi, à peu près rédigé maintenant en normes, à peu
près tout ce qui se fait de plus créatif au Québec, là, pour... dans le cadre
de ces programmes-là. C'est pour ça que je ne pense pas qu'il va y avoir de
problèmes dans ce qui a été rédigé et les éléments... les éléments que j'ai
soulignés, bien ce sont des éléments pour essayer d'en avoir plus, de flexibilité,
d'enlever certaines des contraintes que je vois comme étant des contraintes qui
pourraient...
Déjà, dans notre pratique, on pratique ces
gestes-là aussi, là, et j'aimerais ça pouvoir avoir les mêmes outils à la fin. Mais
déjà, le projet, là, il fait le tour à peu près de tout ce qui est créatif dans
ces programmes-là au Québec.
Le Président (M.
Bachand) : Sur ce, je vous remercie infiniment de votre participation
ce soir. C'est très apprécié.
Cela dit, la commission ajourne ses
travaux jusqu'à demain mercredi 30 octobre, après les affaires courantes, où
elle va poursuivre son mandat. Merci beaucoup, bonne fin de soirée.
(Fin à 21 h 6)