Journal des débats de la Commission des institutions
Version préliminaire
42-1
(début : 27 novembre 2018)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version finale du Journal est publiée dans un délai de 2 à 4 mois suivant la date de la séance de la commission.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Le
miércoles 5 février 2020
-
Vol. 45 N° 67
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin
Aller directement au contenu du Journal des débats
11 h (version non révisée)
(Onze heures vingt-huit minutes)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte.
Je vous souhaite bien sûr la bienvenue, et
bien sûr, vous savez, d'éteindre la petite sonnerie de votre appareil
électronique.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi
n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin.
En tant de députés, M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire
: Oui, M.
le Président. M. Fontecilla (Laurier-Dorion) est remplacé par M. Nadeau-Dubois
(Gouin).
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Est-ce qu'il y
aurait consentement aussi pour accepter avec plaisir la présence de la députée
de Marie-Victorin pour la séance? Consentement?
Une voix
: Consentement.
Le Président (M.
Bachand) :Consentement, merci beaucoup.
Alors, ce matin, nous allons entre autres entendre Force Jeunesse, mais, avant
tout, nous allons débuter avec la Centrale des syndicats démocratiques.
Mais, avant d'aller pus loin, pour... il y
a des gens qui nous écoutent. Ce n'est pas qu'on a couché sur la corde à linge,
hier, c'est juste de souligner que c'était la journée de prévention du suicide,
alors c'est pour ça que les élus portent cette magnifique épinglette.
Alors donc, aux gens de la Centrale des
syndicats démocratiques, bienvenue. Vous avez 10 minutes de présentation, après
ça, on fait l'échange avec les membres de la commission. À vous la parole.
M. Vachon (Luc) :
Alors, bonjour. Bonjour à toutes et à tous. Merci de nous recevoir, Mme la
ministre. Bonjour, M. le Président, députés. Alors, merci. Je suis Luc Vachon,
président de la Centrale des syndicats démocratiques. Je suis accompagné de mon
collègue Normand Pépin, qui est conseiller à la recherche.
Donc, la CSD regroupe près de 72 000
travailleurs, travailleuses, et c'est bien entendu au nom de ceux-ci,
celles-ci, en tant qu'acteurs de la société civile que nous nous présentons
aujourd'hui devant vous pour vous soumettre nos commentaires, recommandation
pour le projet de loi n° 39.
Avant toute chose, nous désirons souligner
le fait que le gouvernement de la Coalition avenir Québec a porté la
revendication d'une réforme du mode de scrutin plus loin qu'aucun gouvernement
avant lui. Donc, plus que jamais, nous sommes près d'atteindre le système
électoral le plus représentatif des aspirations de l'électorat québécois.
Introduire la proportionnalité dans le mode de scrutin a pour objectif
fondamental de redonner plus de représentativité au vote des électeurs et des
électrices. Idéal qui ne faut pas perdre de vue est tout simplement que chaque
vote compte réellement dans la composition de l'Assemblée nationale.
• (11 h 30) •
Ceci dit, il est évident qu'il faut
tempérer cet idéal pour permettre une certaine stabilité politique, d'où le
fait qu'il existe un consensus partagé par les...
11 h 30 (version non révisée)
M. Vachon (Luc) :
...des électeurs et des électrices, idéal qu'il ne faut pas perdre de vue, est tout
simplement que chaque vote compte réellement dans la composition de l'Assemblée
nationale. Ceci dit, il est évident qu'il faut tempérer cet idéal pour
permettre une certaine stabilité politique, d'où le fait qu'il existe un
consensus partagé par les acteurs de la société civile québécoise pour un système
proportionnel mixte compensatoire, tel qu'énoncé dans l'entente transpartisane
du 9 mai 2018.
À cet égard, c'est au nom de ce principe
de la proportionnalité que nous contestons de nombreuses dispositions du projet
de loi n° 39. En effet, s'il avait été appliqué comme
tel lors de la précédente élection générale, les conclusions de nos analyses
montrent que la CAQ aurait bénéficié d'une importante prime au vainqueur.
Certes, la députation obtenue par la CAQ aurait été moindre qu'avec le mode de
scrutin actuel, mais la composition de l'Assemblée nationale n'aurait malgré
tout pas été pleinement représentative du suffrage exprimé. Dans le cadre de
notre présentation, nous contestons plus précisément trois éléments du projet
de loi n° 39, soit les distorsions amenées par le
nombre élevé de régions électorales, le haut seuil d'éligibilité aux listes
compensatoires et la méthode d'attribution des sièges régionaux.
En ce qui a trait aux régions électorales,
le projet de loi n° 39 arrime aux régions
administratives et porte ainsi à 17. Elles comporteront de deux à 20... une
vingtaine environ de circonscriptions, elles seront aussi très disparates quant
au nombre d'électeurs et d'électrices qu'elles contiennent. Tout ceci va à
l'encontre d'une plus grande proportionnalité, car cette dernière s'exprime au
mieux quand les régions électorales contiennent un nombre équilibré d'électeurs
et d'électrices. Autrement dit, trop de régions déséquilibrent la répartition
de l'électorat entre ces dernières. Dans l'idéal, la CSD propose de réaliser un
redécoupage de la carte électorale du projet de loi n° 39
afin d'en arriver à un équilibre entre les diverses régions électorales quant
au nombre d'électeurs et d'électrices dans chacune d'entre elles. À tout le
moins, nous recommandons que chacune des régions électorales compte un minimum
de deux sièges de région pour que ceux-ci jouent pleinement leur rôle de
compensation des déséquilibres causés par l'élection des députés de
circonscription, sauf pour les régions d'exception.
Quant au seuil d'éligibilité pour accéder
aux sièges de région, il est prévu à 10 %, ce qui est beaucoup trop élevé.
Un tel seuil empêche l'introduction des partis émergents ayant obtenu un petit,
mais tout de même représentatif pourcentage de votes dans une région. Un tel
seuil ne fait que maintenir l'ascendant des partis dotés d'une forte base
électorale sur l'émergence des plus petites formations politiques. Suivant
cela, la CSD recommande d'abaisser ce seuil de 10 % à 2 %.
En ce qui a trait à la méthode
d'attribution des sièges régionaux, nous rejetons le paragraphe 2° de l'article
379.1 du projet de loi, où il est prévu que seulement la moitié du nombre de
candidats élus et de candidates élues comme députés de circonscription soit
comptabilisée pour l'attribution de sièges de région. Une telle méthode
d'attribution n'est défendue par aucun expert, ne trouve écho chez aucun acteur
de la société civile. Elle n'est simplement... Elle ne semble, à tout le moins,
être simplement qu'une invention du gouvernement. Ses impacts négatifs, cela dit,
sont bien réels. Elle a pour effet d'avantager tout parti ayant obtenu de forts
résultats électoraux en leur garantissant des résultats artificiellement plus
avantageux dans la répartition des sièges de région. Comme le nombre de sièges
obtenus est réduit de moitié, l'accès aux sièges compensatoires s'en retrouve
augmenté pour des partis n'en méritant pas du fait de leurs résultats élevés
aux suffrages. En ce sens, nous défendons l'abandon du facteur de division par
deux des sièges de circonscription.
Nous sommes, de plus, critiques face au
manque de dispositions fortes à amener la parité femmes-hommes dans la
députation de formations politiques. Le projet de loi est pourtant l'occasion
de faire d'une pierre deux coups. Malgré un énoncé de principe pourtant très
fort, tout au plus, le projet de loi prévoit l'obligation de principe...
l'obligation des partis de fournir au Directeur général des élections un énoncé
relatif aux objectifs que se fixe son parti en ce qui concerne la parité entre
les femmes et les hommes et une pénalité financière négligeable pour ne pas
soumettre à temps cet énoncé. Une telle obligation n'est rien d'autre qu'un
voeu pieux, et la sanction n'est qu'une formalité. S'il est le moindrement
sérieux, le gouvernement doit revoir complètement les dispositions du projet de
loi relatives à la parité et mettre en place des mécanismes fonctionnels pour y
arriver. Nous recommandons d'imposer l'alternance femmes-hommes sur les listes
de candidatures régionales, avec une liste sur deux commençant par une femme,
de proposer des incitatifs financiers aux partis politiques quand ils font
élire au moins 40 % de femmes dans les sièges de circonscription, que les
incitatifs soient accordés en fonction des résultats électoraux et non des
candidatures présentées, sinon la tendance à présenter des femmes comme
candidates dans des circonscriptions qui sont difficilement gagnables risque de
perdurer.
Nous désirons également nous attarder à la
question du référendum en vertu duquel la population sera interrogée sur
l'implantation du nouveau mode de scrutin au même moment...
M. Vachon (Luc) :
...présentées, sinon, la tendance à présenter les femmes comme candidates dans
des circonscriptions qui sont difficilement gagnables risque de perdurer.
Nous désirons également nous attarder à la
question du référendum en vertu duquel la population sera interrogée sur
l'implantation du nouveau mode de scrutin au même moment que la prochaine
élection générale. Rappelons que 72 % et un peu plus de 75 % des
sièges, lors de l'élection de 2018, ont été remportés par des partis ayant
signé l'entente transpartisane du 9 mai. On peut difficilement demander
mieux que cette double majorité de plus du deux tiers pour aller de l'avant.
Cela étant dit, si le projet de référendum est maintenu, nous voulons signaler
que le fait de tenir le référendum le même jour que celui du scrutin général de
2022 est la recette gagnante pour le perdre. Saturer l'espace public de deux
discours qui, somme toute, ont peu en commun, ne permettra pas à la population
du bien participer au dialogue social. On imagine mal aussi que les partis, en
pleine campagne électorale, surtout dans le modèle actuel, mettront leurs
activités en arrêt pour promouvoir la réforme du mode de scrutin. Nous
déplorons que les dispositions du projet de loi n° 39 empêchent le premier
ministre et le gouvernement de prendre position en faveur de la refonte du mode
de scrutin, alors que la CAQ s'est engagée à réaliser, lors de l'élection de
2018, et en signant l'entente transpartisane... Le message que cela lance n'est
certes pas très mobilisant. Le gouvernement a défendu le fait de tenir un référendum
en même temps que des élections pour économiser des coûts. Cela dit, une consultation
aussi fondamentale, selon les mots mêmes du premier ministre, ne devrait-elle
pas être organisée pour qu'elle se déroule dans des conditions optimales? Nous
croyons que oui. À cet égard, nous recommandons que si le règlement est
maintenu, que ce dernier se tienne le plus rapidement possible, soit d'ici
juin 2021, afin de donner le temps au DGE de modifier le mode de scrutin
en cas de victoire du oui.
Pour conclure, certains déploreront que la
réforme du mode de scrutin rende plus instable la scène politique et rende plus
difficile l'élection de gouvernements majoritaires. À cela, nous répondons que
l'objectif du projet de loi ne consiste pas à garantir l'élection de gouvernements
majoritaires, mais de transformer le système électoral en le rendant plus
représentatif de l'expression du vote de la population, qui... de la population
québécoise. Nous voyons d'un bon oeil la possibilité que se mette en place une
culture des gouvernements de coalition où le dialogue entre les formations
politiques et le travail transpartisan occupera une place de plus en plus importante.
Nous y voyons là la preuve d'une maturité politique, et il ne fait aucun doute,
selon nous, que c'est la population... c'est ce que la population attend plus
que jamais.
Quant à l'argument selon lequel la réforme
serait trop compliquée pour la population québécoise, rappelons que la réforme
du scrutin est le fruit de 20 ans de mobilisation, de recherche, de consultations
et de discussions entre divers acteurs de la société civile. Celles et ceux qui
ont travaillé d'arrache-pied pour en arriver où nous sommes aujourd'hui nous
proposent une éloquente démonstration... et comment la population du Québec
tient à ses institutions et vise à leur excellence. Nous vous demandons,
mesdames et messieurs, de prendre exemple sur ces citoyennes et citoyens et
d'avoir le courage d'appliquer les changements requis au mode de scrutin pour
un système électoral plus juste et représentatif, et de respecter les engagements
pris envers la population. Merci de votre écoute.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup de votre
présentation. Mme la ministre, s'il vous plaît. Oui, M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Si vous me
permettez, juste avant qu'on entame, on m'informe que le collègue de la
troisième opposition ne sera pas présent pour ce premier bloc. Alors, avec le consentement
de tout le monde, je proposerais qu'on redistribue son temps entre les
différentes oppositions pour qu'on ait le temps d'avoir des discussions en
profondeur.
Le Président (M.
Bachand) : Parfait. Consentement?
Une voix
: Consentement.
Le Président (M.
Bachand) :Consentement. Merci beaucoup. Mme
la ministre.
Mme LeBel : Alors, merci, M.
le Président. Merci, messieurs, de votre présentation. Vous apportez, là, à
l'instar des gens qui sont venus faire des présentations avant vous, ici, un
éclairage souvent similaire, souvent différent sur certains aspects, et je
pense que c'est le but de cette consultation-là. Mais vous faites la
démonstration également, je me plais à le dire, du fait qu'on a... ce qu'on a
tenté de faire, c'est d'avoir un projet de loi équilibré, donc, qui ne sera pas
parfait sous tout ses aspects, mais qui va permettre, à tout le moins,
d'atteindre un objectif que je crois que nous partageons tous, et vous me corrigerez
si je vous prête des intentions, mais, celui d'avoir une plus grande
proportionnalité, donc une plus grande représentativité de la volonté des
citoyens à l'Assemblée nationale. Donc, je pense que c'est l'objectif qu'on
poursuit par le projet de loi qui a été présenté par le gouvernant, et merci
d'avoir souligné effectivement qu'on se retrouve quand même dans une étape
importante qu'on n'a pas eu l'occasion d'avoir dans les 40 dernières années,
c'est-à-dire une discussion sur projet de loi qui est vraiment déposé et qui
chemine présentement à l'Assemblée nationale.
• (11 h 40) •
Ceci étant dit, je vais aborder,
peut-être...
Mme LeBel : ...poursuit par le projet
de loi, qui a été présenté par le gouvernant et merci d'avoir souligné, effectivement,
qu'on se retrouve quand même dans une étape importante qu'on n'a pas eu l'occasion
d'avoir dans les 40 dernières années, c'est-à-dire une discussion sur un projet
de loi qui est vraiment déposé et qui chemine présentement à l'Assemblée
nationale.
Ceci étant dit, je vais aborder peut-être
quelques points avec vous, pour vous permettre de... Bon, votre mémoire est quand
même très bien étoffé, mais je pense qu'il y a quelques petits points que je
voudrais peut-être en lumière, ou en contexte avec vous. Le fait des régions
administratives. J'en parle, parce que c'est quand même une part importante de
votre... de points, ça fait partie des trois points que vous avez soulignés,
d'ailleurs, et vous intitulez votre chapitre Des régions trop déséquilibrées
entre elles.
Alors, je ramène mon argumentaire à
l'équilibre, aux différents principes. Oui, la proportionnalité, mais également
le poids des régions et la question des régions administratives... Bon, vous
parlez de l'argument de la confusion, mais l'argument du point d'ancrage
important des services gouvernementaux, etc., mais surtout de l'identité et
vous faites un commentaire, en disant que peut-être que cette identité-là, elle
est une réalité régionale, mais peut-être pas administrative; que, bon, ce
n'est pas une réalité à laquelle les gens doivent s'identifier. On voit donc
pourquoi des régions électorales différentes des régions administratives
sèmeraient la confusion dans l'esprit des électeurs. Mon collègue de
l'opposition, du Parti québécois, qui n'est pas présent, aurait peut-être des
arguments contraires à vous soumettre et vous dites que ce n'est qu'un prétexte
qu'utilise le gouvernement, où il a pour résultat de réduire la
proportionnalité du mode de scrutin.
Je vais m'insurger un petit peu ici, parce
que ce n'est pas un prétexte qu'utilise le gouvernement pour diminuer la
proportionnalité, c'est une réalité réelle, l'attachement aux régions et, oui,
je suis prête, d'entrée de jeu à stipuler que 17 régions administratives a un
effet proportionnel moindre que neuf, à titre d'exemple, mais que, dans un
souci d'équilibre, et de ralliement, et d'obtenir un plus large consensus
possible, pour que cette réforme-là passe. D'ailleurs, certains experts nous
ont dit que c'était la voie, la façon de faire, c'est-à-dire d'avoir le plus
large consensus possible. Bien, la raison pour laquelle on l'a fait, c'est pour
protéger le poids des régions. Et de mettre, de découper les régions selon un
poids démographique plus proportionné... plus proportionné, ou plus équivalent,
ou plus équitable, peu importe le terme que vous employez, ferait en sorte
que... bien, des territoires plus éloignés des grands centres, comme la
Gaspésie, comme l'Abitibi, comme d'autres — puis j'ai bien précisé
«éloignés des grands centres» et non pas «éloignés» tout
court — auraient des territoires immenses, on aurait des plus petites
régions ailleurs, bien je vous le soumets, là, je pense que ça serait une façon
de faire achopper la réforme, en toute humilité, dans mes consultations.
Vous représentez des membres... vous avez
des membres partout sur le territoire. Est-ce que... Vous n'avez pas eu cette
sensibilisation-là régionale? Et c'est plus qu'un attachement à des lignes
administratives. Oui, vous parlez du Saguenay—Lac-Saint-Jean, je suis tout à
fait d'accord qu'il y a deux identités, qui sont très fortes et qu'ils
revendiquent avec beaucoup de passion, à bon droit, mais il y a quand même...
C'est déjà ça. Donc, de l'exacerber et, d'un autre côté, je ne comprends pas.
Est-ce que ça veut dire plus de régions? Moins de régions? Des régions plus
grandes? Il y a quelque chose qui m'échappe, là, dans votre argumentaire, outre
l'argument de la proportionnalité, naturellement, que je comprends très bien.
M. Pépin (Normand) : Bien, il
y a quelque chose qui m'échappe aussi dans l'argument des régions
administratives, c'est-à-dire que ce que j'ai tenté... ce qu'on a tenté de
démontrer, c'est que, oui, les gens sont attachés à leur région, ce n'est pas
ça qu'on nie. Ce qu'on nie, c'est que si l'attachement se fait envers la région
administrative puis que c'est absolument à ça qu'on doit se rattacher.
Ceci dit, le territoire du Québec n'est
pas le territoire de l'Écosse, la population est dispersée sur tout le
territoire. On comprend toutes ces contraintes-là. Ce qu'on dit, c'est que pour
compenser, d'une certaine façon, le trop grand nombre de régions, il faut
absolument absolument avoir deux députés de région dans chaque région
administrative, sauf, on a identifié deux circonscriptions qui seraient d'exception,
pour notre part, de façon à ce que les sièges de compensation puissent jouer
leur rôle, c'est-à-dire compenser le déséquilibre créé par le mode uninominal à
un tour, qui va guider l'élection des 80 premiers députés... bien, pas
premiers, là, excusez, les 80 députés de circonscription.
Mme LeBel : ...la question de
la réforme, purement... sur un angle purement théorique, purement puriste et,
dans un monde idéal, vous avez raison. On devrait découper des régions
administratives de façon différente, peut-être en augmenter, peut-être les
réduire, avoir plus de circonscriptions. Ça, c'est pour atteindre une
proportionnalité idéale ou, en tout cas, maximale. Sur ça, on est sur le même
terrain. Sauf que cette réforme-là doit être ancrée sur le territoire, doit
être acceptée par les gens, comprise par les gens...
Mme LeBel : ...vous avez
raison, on devrait découper les régions administratives de façon différente,
peut-être en augmenter, peut-être les réduire, avoir plus de circonscriptions.
Ça, c'est pour atteindre une proportionnalité idéale ou en tout cas maximale,
sur ça, on est sur le même terrain. Sauf que cette réforme-là doit être ancrée
sur le territoire, doit être acceptée par les gens, comprise par les gens.
Et le député... et je reviens aux régions
administratives, ce n'est pas juste une question de nombre de personnes qui
votent dans une telle région, et ce qu'on entend aussi, c'est l'attachement au
député de circonscription par ailleurs présentement. On va réduire ce nombre de
députés là par le fait même parce qu'il faut avoir des députés de liste dans la
réforme qu'on fait. Donc, ce député de liste là doit avoir aussi un ancrage
régional. Donc, l'attachement à la région administrative est plus que des
lignes sur une carte, c'est qu'on veut que le député de région nous représente
le plus possible. Et qu'est-ce qui nous représente comme citoyens? Là, je vous
véhicule les arguments que j'ai sur le terrain naturellement pour vous donner
l'occasion d'y répondre. Qu'est-ce qui nous représente comme citoyens? C'est
souvent notre identité régionale qui nous distingue du fait qu'on a une
identité provinciale, nationale qu'est le Québécois. Mais, à l'intérieur du
Québec, nous avons nos identités régionales. Un Gaspésien, ce n'est pas
quelqu'un de l'Abitibi, ce n'est pas quelqu'un du Saguenay. Bon. Et je pense
que vous le comprenez très bien, je ne vous explique pas des choses.
Mais le fait que le député aussi
régional... donc en suivant la proposition que vous faites, le député régional,
les députés de circonscription, ça serait peut-être moins criant, mais le
député régional, lui, va avoir un territoire qui va être beaucoup plus éclaté,
si on veut en termes d'identité que ce soit parce qu'on redivise et subdivise
ou que ce soit parce qu'on fusionne. Est-ce que vous n'avez pas entendu des
commentaires? Et je ne suis pas au niveau de la théorie parce que, vous avez
raison, théoriquement, c'est mieux. Mais, pratico-pratique, il faut comprendre
les sensibilités parce que, moi, mon objectif, c'est que cette réforme-là passe
et soit acceptée, donc d'avoir le plus large consensus possible. Trouver ce que
j'appelle le point d'équilibre, la voie de passage. Donc, vous avez dû avoir
des échos. Ça doit déranger certains de vos membres le fait qu'on fasse éclater
ou non, là, les régions administratives.
M. Vachon
(Luc) : En fait, Mme la ministre, ce qui est l'élément le plus
fort auprès des membres consultés, et consultés d'ailleurs en juin dernier au
congrès spécifiquement sur ce sujet-là, ce qui est le plus grand enjeu et la
plus grande préoccupation, c'est vraiment de se rapprocher le plus possible de
la proportionnalité. Alors, c'est ça, la préoccupation et c'est c'est ça
l'intérêt qui nous a été signifié par nos membres, et vous allez retrouver les
différentes résolutions qui ont été prises dans le mémoire. Et ça, ça date de
juin dernier, et c'est vraiment une sensibilité à se rapprocher, et ça ne sera
pas un modèle parfait. Tout le monde en convient, on n'y arrivera pas à 100 %,
et le modèle théorique est une chose. Mais comment peut-on faire pour se rendre
le plus près possible d'une proportionnalité en respectant différents degrés de
sensibilisation et différentes choses? Mais il y a moyen de trouver, nous
croyons, des zones d'équilibre dans ça.
Mme LeBel : Votre... la
dernière position que vous avez sondée chez vos membres date de juin dernier,
donc je comprends que, sur la théorie d'un mode de scrutin, d'une réforme qui
n'était pas encore présentée de façon pratique, le principe qui motivait vos
membres et que vos membres mettaient de l'avant, c'est celui de la
proportionnalité. Je le comprends très bien.
Maintenant, est-ce que vous avez eu
l'occasion de sonder vos membres maintenant qu'il y a un projet de loi concret
avec des mesures concrètes où on a dû trouver des points d'équilibre? Parce que
chacun des leviers, dans le projet de loi, c'est des vases communicants, hein?
Si on joue sur les régions, on joue sur la proportionnalité nécessairement.
Donc, tout ça, ce sont des vases communicants. Est-ce que vous avez eu
l'occasion de sonder vos membres sur cette proposition-là d'avoir
17 régions? De la façon dont c'est expliqué, oui, ça fait en sorte qu'il y
a une certaine réduction de la proportionnalité, mais il y a aussi l'aspect des
régions. Donc, il y a, moi, je considère, un point d'équilibre, mais on peut le
contester naturellement. C'est l'exercice... le but de l'exercice. Mais, depuis
le dépôt d'un projet de loi en octobre, avez-vous eu l'occasion d'avoir un son
de cloche de vos membres sur les modalités précises du projet de loi?
M. Vachon
(Luc) : Est-ce qu'on a consulté de manière spécifique depuis le
dépôt du projet de loi? La réponse, c'est non. Maintenant, est-ce qu'on ne
savait rien du tout, du tout, on n'avait aucune indication de ce qui pouvait
s'en venir dans le projet de loi en juin? Soyons tout à fait honnêtes, il y
avait plein d'éléments que, dans les différentes tribunes auxquelles nous avons
participé, il y avait des éléments qui étaient déjà... ça n'a pas été
totalement un effet de surprise au niveau du projet de loi, là. Alors, il y
avait des éléments qui étaient connus, qui ont été mis au jeu dans les
consultations avant. Alors, bien entendu, le projet de loi n'était pas là, mais
nous avons quand même pu, en juin, consulter les gens sur plusieurs aspects qui
se retrouvent dans le projet de loi.
Mme LeBel : Parfait.
Merci. Vous allez peut-être...
M. Vachon
(Luc) : Et vous le verrez. D'ailleurs dans les propositions qui
ont été prises, vous allez voir qu'on n'est pas si éloignés.
• (11 h 50) •
Mme LeBel : Parfait. Bon,
alors, merci, merci pour ces précisions.
J'en arrive peut-être à un point, un autre
point précis de votre mémoire, la question de la parité. Je comprends très bien
l'alternance homme-femme sur les listes, ça a été d'ailleurs proposé par
plusieurs, et c'est une des façons qu'on peut justement profiter de cette
réforme et d'un nouveau type de mode de scrutin pour injecter une dose de
parité. Ça a été discuté. Je vais y aller sur...
Mme LeBel : ...arrive
peut-être à un point, un autre point précis de votre mémoire, la question de la
parité. Je comprends très bien l'alternance hommes-femmes sur les listes, ça a
été d'ailleurs proposé par plusieurs, et c'est une des façons qu'on peut justement
profiter de cette réforme et d'un nouveau type de mode de scrutin pour injecter
une dose de parité, ça a été discuté.
Je vais y aller sur le côté des... du côté
des députés de circonscription. Vous proposez que la loi propose des effets
financiers aux partis politiques... des incitatifs financiers, pardon, aux partis
politiques quand ils font élire au moins 40 % de femmes dans les
circonscriptions — je le comprends très bien, la question du
bonus — mais aussi des pénalités à ceux qui n'atteignent pas cet
objectif. On a vraiment... Mais on a discuté beaucoup, abondamment, du fait que
malgré, je pense, que ça peut porter certaines difficultés, je suis prête à
concevoir qu'il est beaucoup plus aisé pour un parti politique de contrôler le
nombre de candidats présentés que de contrôler le nombre de personnes élues.
Donc, vous proposez de récompenser les élus mais aussi de punir les gens qui
n'auraient pas des élus en bas du seuil de 40 %. J'avoue que je trouve ça
un peu «touchy», parce qu'il y a une... Comment vous vous attendez à ce que les
partis politiques se comportent pour éviter la punition? Quand on me demande de
présenter un nombre de candidates, bien, j'ai des efforts à faire, comme parti
politique, j'ai un certain contrôle. Mais, quand on me parle du nombre d'élues,
je veux dire, rendu là, c'est le choix de la population. Donc, comme vous...
Quelle stratégie vous envisagez pour un parti politique pour éviter... je ne
dirais même pas d'aller jusqu'au bonus, mais à tout le moins éviter la
punition?
M. Pépin (Normand) :
Bon, c'est sûr que les partis politiques ne contrôlent pas la façon dont la population
vote. Ce que les partis politiques contrôlent, par ailleurs, c'est... je vais
dire, la qualité de la circonscription offerte aux femmes. Si c'est le parti
politique qui décide si une femme va être dans telle ou telle circonscription,
un homme aussi, là, donc ça va être un incitatif dans le fond à offrir des
circonscriptions gagnables à des candidates aux élections, puis d'avoir ça
comme préoccupation au moment de présenter ces listes de candidates.
Mme LeBel : Mais, si je
vous réponds à ça que, dans la conjecture actuelle avec quatre partis
officiellement à l'Assemblée nationale, les circonscriptions gagnables, sûres,
prévisibles vont être, dans le futur, de moins en moins prévisibles et sûres
pour les quatre partis parce qu'il y a naturellement une division des
émergences. Donc, à ce moment-là... et on l'a vu dans la dernière élection,
puis je ne veux pas... je n'en fais pas de la partisanerie, je fais un constat
de faits, il y a des comtés qui étaient des châteaux forts, qui étaient
supposément prévisibles et gagnables qui se sont avérés ne pas l'être au final.
Comment, à ce moment-là dans un futur qui change, un électeur qui change, un
citoyen qui n'a plus le même attachement indéfectible à un parti politique,
mais va vraiment aller plus peut-être sur les programmes de chacun, comment...
quelle stratégie proposez-vous si on inclut ce genre de pénalités là à
l'élection?
M. Pépin (Normand) :
Quel genre de stratégie? Une fois que la règle sera établie, ça sera à chaque
parti politique d'établir sa stratégie. S'ils choisissent de présenter
60 % de candidates pour avoir 40 % d'élues, ça sera leur choix, là, puis
évaluer... De toute façon, moi, j'imagine que tous les partis politiques font
des pointages sur les circonscriptions qui sont gagnables et ils vont être
obligés de l'évaluer peut-être un peu plus d'avance pour soit obtenir la
bonification, soit éviter le malus, là, la pénalité. Merci.
Mme LeBel : O.K. Merci.
Merci pour votre éclairage.
Le Président
(M. Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de
Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.
Mme Robitaille : Merci.
Merci, messieurs, d'être là aujourd'hui. Je vais continuer sur la même
lancée que la ministre. Hier, on avait Eric Montigny qui en fait disait...
sur la parité, qui disait un peu le contraire de ce que vous dites. Il disait
qu'il fallait laisser la chance au coureur pour vérifier la pérennité des gains
en parité. En fait, il disait : Bien, faisons confiance à vie, regardons
en avant, on n'a pas besoin de mesures contraignantes. Qu'est-ce que, vous,
vous lui répondez? Pourquoi c'est important selon vous, de mettre justement ces
mesures contraignantes?
M. Vachon
(Luc) : Bien, écoutez, de faire confiance à la vie, puis il
peut y avoir deux courants de pensée là-dessus, là, mais faire confiance à la
vie pour faire en sorte que ça va se positionner seul, écoutez, force est de
constater, là, actuellement qu'il faut quand même donner un coup de barre et il
faut quand même, pour que ça se produise... je veux dire, prenez tous les
éléments de l'équité salariale, prenez tous les éléments d'accession aux différents
postes, actuellement tous les débats sont autour de comment on met des mesures
qui sont plus que des intentions pour être capable d'y arriver parce que sinon,
dans 30 ans, on va être encore à débattre de ces choses-là. Alors, faire
confiance à la vie, ça dépend toujours combien de temps on peut... on espère de
vivre...
M. Vachon
(Luc) : ...actuellement tous les débats sont autour de comment
on met des mesures qui sont plus que des intentions pour être capable d'y
arriver parce que sinon, dans 30 ans, on va être encore à débattre de ces
choses-là. Alors, faire confiance à la vie, ça dépend toujours combien de temps
on peut... on espère de vivre parce que ça va être long, hein, ça va être long.
Alors, ce qu'on dit, nous, c'est qu'il faut introduire des affaires, il faut
introduire des choses et il faut introduire plus que de simples intentions au
niveau des candidatures. Puis on se dit : Bon, bien, regarde, on prend un engagement,
on va faire ça, on va mettre un nombre sur la liste, puis après advienne que
pourra. Tu sais, il y a tout un développement au niveau des engagements
officiels, formels qui doit se faire par après.
Donc, quand on parle au niveau des circonscriptions
qui sont plus gagnables aussi, tu sais, pour pas qu'on se retrouve à
dire : Bien, moi, j'ai mis une proportion de femmes sur ma liste de
candidatures. Les candidates, je suis correct, hein? Bien, oui. Mais, après, la
résultante finale concrète d'une élection va être quoi? Et c'est la résultante
finale qui est importante pas ce qu'on a mis au début, c'est la parité concrète
et réelle. Alors, il y a peut-être plusieurs façons d'y accéder. On ne peut pas
dire... je ne dis pas que la nôtre est parfaite. La nôtre, ce qu'elle dit,
c'est qu'il faut plus que d'y penser, il faut qu'il y ait des mesures réelles,
concrètes, fortes qui soient mises en place.
Mme Robitaille : Là, vous
dites : Bon, à ce niveau-ci, dans le projet de loi... en fait, vous
qualifiez ça de «mesurettes», hein? On devrait aller beaucoup plus loin que ça,
donc encadrer pour avoir la parité pour ce qui est des candidatures, mais aussi
des élues au bout du compte. Comment vous mettez vos mesures contraignantes
pour les candidatures et, en bout de ligne, pour bonifier la parité au niveau
des... après les élections? Est-ce qu'il y a une différence? Comment vous
l'encadrez?
M. Vachon
(Luc) : On va aller sur la détermination de quoi, combien
comment.
Mme Robitaille : Mais
vous auriez une zone, hein, 40... bon, en tout cas, à partir de 40, là, il
faudrait...
M. Vachon
(Luc) : Oui. Bon, mais là, l'idée, c'est de se fixer des
objectifs qui sont atteignables et qui vont générer, après ça, des incitatifs
importants. Bon. Alors, comment ça va se traduire? Est-ce que ça va se traduire
de manière progressive? Est-ce que ça va se traduire? Ce n'est pas à nous
d'établir ça. Je pense qu'il y a d'autres tribunes qui sont plus aptes que nous
à faire ça. Maintenant, nous, on s'attarde en disant : S'il n'y a pas
d'éléments forts et d'éléments porteurs, bien, le modèle de changera pas
suffisamment. Les résultats qu'on va obtenir vont être à la mesure des
mesures... vont être en fonction des mesures qu'on va établir. C'est ce qu'on
croit.
Mme Robitaille : Vous
suggérez des pénalités plus que des bonifications, mais pas nécessairement les
deux.
M. Vachon
(Luc) : On va toujours être plus en faveur de mesures
incitatives que des mesures de pénalité, tout le temps. Ça, on va toujours
croire qu'il faut récompenser plus que punir. Maintenant, il y a quand même un
minimum d'engagements, et si un parti, par exemple, ne faisait pas les efforts,
mais il faut qu'il y ait quand même une couple de conséquences qui soient
associées à ça.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous
plaît.
Mme Weil
: Oui.
J'aimerais revenir sur cette question de proportionnalité et les régions
administratives. Est-ce que... parce qu'on veut, on souhaite donc la
proportionnalité, des mesures pour faire en sorte que, dans les régions, la
voix se porte, la voix des citoyens soit bien portée.
Mais l'élément de fonctionnalité, est-ce
que ça pourrait être que le fait d'avoir une région administrative avec des
instances là de décision qui fait en sorte que les députés élus dans les comtés
et les députés de région, il y ait comme un endroit où tout le monde peut
travailler ensemble pour représenter les enjeux de la région. Comment vous
faites la part des choses entre, d'une part, proportionnalité qui est bien
importante... je vois, dans région administrative — je pense comme
ça, là, j'imagine — il y avait les CREQ avant. Il y a des instances
régionales qui sont très utiles pour aider la démocratie. Est-ce que vous
comprenez ce que je dis? C'est-à-dire que voyez-vous qu'il pourrait y avoir des
avantages aussi de se coller, si on veut, aux régions administratives ou
pensez-vous que... parce que, vous, vous souhaitez évidemment regarder plus
l'élément proportionnalité juste... j'aimerais vous entendre là-dessus.
Des voix
: ...
Mme Weil
: Tu
sais, le rôle dans les régions des municipalités et des instances
décisionnelles administratives qui sont vraiment le... comment dire, un genre
de pilier quand on veut savoir, donc avoir le pouls des enjeux d'une région, on
s'adresse à ces gens-là, qui permettrait... parce qu'on voit partout les gens
sont inquiets, il y a une division entre les députés de région et les députés
des comtés. Ça revient constamment. Est-ce qu'il y a quelque chose qui peut
faciliter le travail qu'ils ont à faire ensemble pour représenter les régions?
• (12 heures) •
M. Vachon
(Luc) : Mais, ça, c'est parce qu'on véhicule cette
catégorisation...
12 h (version non révisée)
Mme Robitaille : ...on voit,
partout, les gens sont inquiets qu'il y a une division entre les députés de
régions et les députés des comtés. Ça revient constamment. Est-ce qu'il y a
quelque chose qui peut faciliter le travail qu'ils ont à faire ensemble pour
représenter les régions?
M. Vachon (Luc) :
Bien, ça, c'est parce qu'on véhicule cette catégorisation-là de deux types de
députés, alors... Et je pense que le grand défaut qu'on a, c'est qu'on regarde
ça avec les lunettes d'aujourd'hui, sous un modèle actuel, sur un modèle qui
n'a pas muté à répondre à ça. Et, si... Dans un modèle réformé, pourquoi il y
aurait moins d'efforts, moins d'intentions sur l'une ou l'autre des catégories
de députés?
Nous, on est convaincus qu'à partir du
moment où on va fonctionner avec nos nouveaux modèles tous les députés, peu
importe la façon dont ils vont accéder, vont avoir le même attachement, le même
intérêt à la région, et en même temps, la population va s'y retrouver, elle
aussi, va s'y retrouver. Parce qu'on part de la prémisse où, à chaque fois
qu'on a notre député, qu'il est notre identité, mais il y a des gens qui n'ont
pas voté pour ce député-là ou ce ou cette députée-là, puis qui ont voté pour
l'autre. Et c'est lequel, leur député, c'est lequel? Alors, à partir de là,
moi, je pense que leur rôle va s'adapter et que les deux... Il n'y aura pas
deux catégories. Il va y avoir deux façons d'y accéder, mais il va y avoir des
députés. C'est ça qu'il va y avoir. Moi, je pense que c'est ça.
Le Président (M.
Bachand) : ... s'il vous plaît.
Mme Robitaille : Le
référendum. Donc, vous dites, si je comprends bien, un référendum pas en même
temps que des élections dans une campagne électorale. C'est bien ce que je
comprends?
M. Vachon (Luc) :
Tout à fait.
Mme Robitaille : Et
maintenant, la... j'aimerais vous entendre sur la participation des élus à un
référendum comme celui-là. Le bureau de Mme LeBel... je lisais dans un article...
nous disait : On précise qu'il reviendra au premier ministre de décider si
les membres du caucus pourront militer publiquement en faveur de la réforme.
Vous, quelle place vous attribuez aux élus? Quelle place ils devraient prendre
dans un genre de référendum comme celui-là?
M. Vachon (Luc) :
On n'arrête pas de parler qu'il s'agit là de quelque chose de quasiment
historique. Bon, ça fait très longtemps qu'on en parle. Ça fait une vingtaine
d'années à peu près qu'on en parle de manière plus importante. Alors, le
référendum, un des problèmes de... j'y vais sur deux volets, là... de le tenir
en même temps que l'élection... Et j'ai entendu certaines remarques qui
disaient : Oui, mais ça se gagne aussi. Il y a des endroits où ils l'ont
fait en même temps que l'élection, et ça a été un Oui. O.K., là, pas de
problème, c'est vrai, ça existe. Ma question, moi, sur le référendum en même
temps que l'élection, c'est : Si c'est un Oui, il n'y a pas de problème,
le dossier est clos. Si c'est un Non, allons-nous recommencer à en parler
pendant 20 ans? Parce que l'élément pour lequel on va encore continuer d'en
parler, c'est le fait qu'on l'a noyé à travers l'élection. Voulons-nous, à ce
tour-là, continuer de générer un débat pour les 20 prochaines années? La
question se pose.
Nous, on dit, on pense qu'on est rendus là
où... tellement près qu'il serait dommage, qu'il serait vraiment dommage de
faire achopper une vraie consultation, si on veut en faire une, une vraie
consultation en noyant ça à travers l'élection. Puis la participation, là,
bien, à mon avis, les partis qui ont signé l'entente transpartisane, ils ne
sont pas... ils ne se sont pas mis en position de neutralité. Alors, pourquoi
on va se mettre en position de neutralité, tout à coup, dans les débats?
Pourquoi? Notre rôle, c'est d'informer la population. C'est ça, le rôle. Notre
rôle, c'est de faire en sorte que la population fasse un choix éclairé? Prenons
les moyens qu'il faut et engageons-nous en fonction des convictions que nous
avions lorsqu'on a pris ces ententes-là. Respectons ça. Et traduisons ça aussi
dans nos actions.
Mme Robitaille : Donc, les
élus devraient s'impliquer, ne devraient pas être gênés de s'impliquer...
M. Vachon (Luc) :
Absolument.
Mme Robitaille : ...puis d'y
aller, puis de donner leur point de vue. Puis ça les touche directement,
évidemment.
M. Vachon (Luc) :
Mais je crois que c'est tout à fait légitime et que ça devrait faire partie du
processus.
Mme Robitaille : Maintenant,
est-ce que le chef du gouvernement, le chef de la CAQ, du gouvernement de la
CAQ pourrait être aussi chef du camp du Oui? Parce qu'il y a un article...
M. Vachon (Luc) :
Il pourrait.
Mme Robitaille : ...dans le
projet de loi qui l'interdirait, d'une certaine façon. Vous, est-ce que vous
avez des problèmes avec ça? Est-ce que les leaders des... les chefs des partis
devraient aussi se mouiller, puis choisir leur camp, puis devenir...
M. Vachon (Luc) :
Ils pourraient...
Mme Robitaille : Oui, allez-y.
M. Vachon (Luc) :
...et ils devraient.
Mme Robitaille : Pourquoi?
M. Vachon (Luc) :
Parce...
Mme Robitaille : ...dans le projet
de loi...
M. Vachon (Luc) :
Il pourrait.
Mme Robitaille : ...qui
l'interdirait, d'une certaine façon. Vous, est-ce que vous avez des problèmes
avec ça? Est-ce que les leaders des... les chefs des partis devraient aussi se
mouiller, puis choisir leur camp, puis de venir...
M. Vachon (Luc) :
Ils pourraient...
Mme Robitaille : Oui, allez-y.
M. Vachon (Luc) :
...et ils devraient.
Mme Robitaille : Pourquoi?
M. Vachon (Luc) :Parce qu'il a été un des défenseurs de l'entente
transpartisane, il y a eu des engagements de pris. Ce n'est pas une position
neutre, ça, ce n'est pas une position neutre. Alors, quand on prend ce genre
d'engagement là, c'est parce qu'on s'engage aussi à le défendre. Et l'entente
transpartisane allait plus loin que ce qui est là sur la table aujourd'hui.
Bon. Maintenant... On allait plus loin, on se retire un peu. Bon, c'est
correct. On peut comprendre qu'il y a différentes raisons, là, qui ont provoqué
ça, on va vivre avec ça. Mais, maintenant, est-ce qu'aujourd'hui on peut
adopter une position neutre? Je pense que c'est difficile d'adopter une
position neutre. En tout cas, c'est un drôle de message qu'on donne à la
population lorsqu'on adopte une position neutre suite à un engagement qu'on a
pris. C'est un drôle de message.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Gouin, s'il vous
plaît. M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Oui. Merci,
M. le Président. Je vous rassure quand même, on a des indications... On a posé
une question au premier ministre en Chambre, qui nous a dit qu'il
s'impliquerait dans la campagne du Oui. En sera-t-il le chef? Ça reste à voir.
Mais on essaie, de notre côté, de convaincre également le gouvernement et son
premier ministre d'être résolument engagés, puis, à ce stade-ci, l'information
qu'on a, c'est en effet qu'il s'impliquerait, parce qu'on est d'accord avec
vous que c'est important.
Vous faites beaucoup de recommandations,
certaines qui recoupent des choses qu'on a déjà entendues, d'autres qui'on a...
d'autres qui sont nouvelles. J'aimerais vous demander c'est quoi, pour vous, la
principale défaillance, le principal défaut de ce projet de loi là. Qu'est-ce
qui vous dérange le plus, si vous aviez une chose à changer seulement?
M. Vachon (Luc) :
Bien... Oui. Si j'avais une chose, moi, qui au niveau des réflexions qu'on a
faites, qui m'agace le plus, je vais vous dire que la prime au vainqueur, c'est
vraiment problématique. C'est vraiment problématique, parce que c'est comme
venir défaire quelque chose qu'on essaie... Ça ne repose pas sur un principe
qui rejoint, qui correspond à la proportionnalité. Alors, maintenant, tu sais,
il pourrait y en avoir d'autres. Mais, s'il y en avait un pour lequel ça heurte
de manière particulière, ça, pour moi, ça heurte.
M. Nadeau-Dubois : Vous n'êtes
pas le premier à dire ça. On essaie tous de comprendre d'où ça vient; on essaie
tous de comprendre qu'est-ce qui a inspiré ça. On essaie tous de comprendre quels
sont les objectifs, parce qu'on dit souvent ici que les législateurs ne parlent
pas pour ne rien dire. Quelle est l'intention, selon vous, derrière cette
disposition-là du projet de loi? On la cherche. Aidez-nous.
M. Vachon (Luc) :
Oui. Là, vous me demandez dans le fond de...
M. Nadeau-Dubois : Faire une
hypothèse.
M. Vachon (Luc) :
...vous dire quelle est mon intention... quelle est l'intention derrière des
débats auxquels on n'a pas participé. Mais j'ai l'impression que c'est plus une
question d'internes au niveau de toutes les incertitudes, un peu de venir
réduire les incertitudes qui peuvent se générer actuellement au niveau... plus
au niveau des députés, je dirais, sur la transformation. Il y a une zone
d'insécurité. On comprend que pour la population il y a une zone actuellement
d'insécurité dans le changement, tout changement comporte une zone
d'insécurité. C'est vrai, certainement, à l'intérieur des partis, c'est vrai.
Maintenant, moi, je pense que, si on est
capables de franchir cette chose-là, si on est capables de franchir ça puis de
vivre le nouveau modèle...
M. Nadeau-Dubois : ...d'avoir
cette astuce-là.
M. Vachon (Luc) :
Bien, ça, on n'en a pas... Écoutez, ça, c'est... Sous un principe où on essaie
de trouver des façons d'atteindre la proportionnalité, il y a plein d'éléments
qui peuvent se justifier, là, mettons, puis on peut trouver des arguments pour,
des arguments contre au niveau des régions, au niveau de ci, au niveau de ça.
Mais celui-là, celui-là, pas capable d'en trouver, pas capable de trouver, si
ce n'est que de trouver un mécanisme pour venir réduire l'effet de la
proportionnalité. Mais on n'est pas capables de trouver d'où c'est porté.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Marie-Victorin,
s'il vous plaît.
• (12 h 10) •
Mme Fournier
: Merci
beaucoup, M. le Président. Merci à vous pour votre présentation. Pour aller
dans le même sens que le collègue de Gouin, en fait, moi, je pense que j'ai une
hypothèse à vous soumettre. En fait, ce que dit le gouvernement quand il défend
la question de la prime au vainqueur, c'est en fait que ce serait pour rassurer
la population, hein, parce qu'on entend beaucoup que la réforme du mode de
scrutin entraînerait une plus grande instabilité de notre...
Mme Fournier
: ...que le
collègue de Gouin... En fait, moi, je pense que j'ai une hypothèse à vous
soumettre. En fait, ce qu'il dit, le gouvernement, quand il défend la question
de la prime au vainqueur, c'est, en fait... est-ce que ça serait pour rassurer
la population, hein? Parce qu'on entend beaucoup que la réforme du mode de
scrutin entraînerait une plus grande instabilité de notre système politique,
donc, de là, selon eux, l'instauration de la fameuse prime au vainqueur.
Mais si je vous disais qu'il y avait
également une autre proposition, qui permettrait de réduire ce sentiment de
crainte quant à l'instabilité de la réforme du mode de scrutin, qui est
l'encadrement des motions de censure, c'est-à-dire le fait de pouvoir limiter
les possibilités de l'opposition de faire tomber, essentiellement, le
gouvernement. Est-ce que vous trouvez que ce serait une bonne solution de
rechange à la question de la prime au vainqueur?
M. Pépin (Normand) : Bien,
oui, tout à fait. C'est... D'ailleurs, c'est dans le mémoire puis... On ne fait
pas une réforme du mode de scrutin pour pouvoir obtenir des gouvernements majoritaires,
pas plus qu'on fait une réforme de scrutin pour absolument obtenir des
gouvernements minoritaires. On fait une réforme du mode de scrutin pour que ça
soit plus représentatif du suffrage exprimé. Quand on rentre dans ça, là, dans
le diviseur par deux, on rentre dans une logique qui, de prime abord, apparaît
incompréhensible, mais elle vise surtout à réduire la proportionnalité. On fait
une réforme du mode de scrutin pour avoir une meilleure représentativité de la
population, on devrait essayer, à tout le moins, de contrevenir à ce
principe-là le moins possible.
Puis les motions... encadrer les motions
de censure, ça nous apparaît essentiel. Si quelqu'un fait... Si un parti fait
partie d'une coalition puis il décide de s'en dégager, bien qu'il ait l'obligation
de négocier puis essayer de former un autre gouvernement avec quelqu'un
d'autre. Ça va réduire les motions de censure frivoles, ça va assurer une
meilleure stabilité aux gouvernements futurs. C'est la voie à suivre, selon
nous.
Mme Fournier
: Parfait.
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) : Sur ce, merci beaucoup de votre participation aux
travaux de la commission. On suspend les travaux quelques instants pour
demander au prochain groupe de venir s'installer. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 12)
(Reprise à 12 h 14)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci. La commission reprend ses travaux. Il me fait plaisir maintenant
d'accueillir les représentants de Force Jeunesse à cette commission.
Alors, comme vous savez, vous avez 10
minutes de présentation et, par après, on aura un échange avec les membres de
la commission. La parole est à vous. Merci d'être ici.
M. Diallo (Daye) : Bonjour.
Merci de nous recevoir. Merci à la commission de nous écouter, aux élus qui
sont présents ici. Je m'appelle Daye Diallo, je suis le président de Force
Jeunesse.
M. Jacques (Olivier) : Merci
de nous recevoir. Je m'appelle Olivier Jacques, je suis le responsable au
contenu de l'organisme Force Jeunesse.
Mme Racine (Éliane) : Puis je
m'appelle Éliane Racine, je suis administratrice puis membre du comité contenu
sur Force Jeunesse.
M. Diallo (Daye) : Excellent.
Donc, sans plus attendre, on va commencer. On sait qu'on n'a pas beaucoup de
temps. Je vais quand même commencer à vous présenter rapidement qu'est-ce que
c'est que Force Jeunesse. Certains connaissent déjà notre organisation.
Ça fait 20 ans que l'on existe. On est un
groupe de jeunes bénévoles issus de la société civile en emploi, en éducation
qui essayons de défendre les intérêts de la jeunesse québécoise dans les politiques
publiques. Donc, on essaie de faire en sorte que les politiques publiques qui
soient adoptées au Québec soient faites sous un angle d'équité
intergénérationnelle, qui fait en sorte que les intérêts de la jeunesse québécoise
y sont présents...
M. Diallo (Daye) : ... Ça fait
20 ans que l'on existe. On est un groupe de jeunes bénévoles issus de la société
civile en emploi, en éducation qui essayons de défendre les intérêts de la
jeunesse québécoise dans les politiques publiques. Donc, on essaie de faire en
sorte que les politiques publiques qui soient adoptées au Québec soient faites
sous un angle d'équité intergénérationnelle qui fait en sorte que les intérêts
de la jeunesse québécoise y sont présents. On est présents dans de nombreux
domaines. En santé, le Fonds des générations, en matière de finances publiques,
la représentation des jeunes sur les C.A., c'est des enjeux sur lesquels on
s'est exprimés au cours des dernières années. Et comment est-ce que l'on fait
ça chez Force Jeunesse? On le fait de deux manières, soit en rencontrant
directement les élus, comme aujourd'hui, on fait de la représentation politique,
ou en faisant en sorte que les jeunes puissent rencontrer leurs élus dans
certains événements que l'on organise pour pouvoir discuter avec ces élus-là
des enjeux qui les concernent. Donc, rapidement, Force Jeunesse, c'est un peu
ça.
Donc, on va embarquer directement, comme
vous pouvez le voir à la page 5, sur la raison qui nous amène ici aujourd'hui,
donc notre position sur la réforme du mode de scrutin au Québec, donc le projet
de loi n° 39. Comme dit, «le projet de loi n° 39 mentionne l'importance d'utiliser la réforme du mode
de scrutin pour accroître la représentation des jeunes. Bien que Force Jeunesse
appuie la réforme du mode de scrutin dans la perspective où celle-ci pourrait
améliorer la représentation des jeunes, nous considérons que le projet de loi
ne va pas assez loin pour favoriser cette dite représentation. Force Jeunesse
considère que la réforme du mode de scrutin peut permettre au Québec
d'atteindre deux objectifs : un, assurer une plus grande représentativité
des jeunes dans les institutions démocratiques; deux, favoriser la prise de
décision publique à long terme pour promouvoir l'équité intergénérationnelle
dans les politiques publiques. Dans les prochaines minutes, notre argumentation
se fera de telle manière qu'on va essayer de vous démontrer comment est-ce que
les systèmes proportionnels favorisent la représentation des jeunes et comment
est-ce que ces systèmes proportionnels là favorisent une gouvernance à long
terme où l'équité intergénérationnelle est présente dans les politiques
publiques.
Donc, plus concrètement, en vue de
favoriser la représentation des jeunes, Force Jeunesse propose l'instauration
de quotas de 25 % de candidats de moins de 35 ans sur les listes
compensatoires des partis politiques. Nous proposons aussi d'augmenter la
proportionnalité du mode de scrutin proposé dans le projet de loi n° 39. Force Jeunesse propose d'abandonner la compensation
régionale pour plutôt favoriser une compensation nationale. Tant qu'à faire,
allons-y. Ainsi, la liste des candidats de chaque parti serait regroupée dans
une seule liste nationale plutôt que dans 17 listes régionales. Non seulement
cela augmenterait la proportionnalité du système, mais cela permettrait aux
partis d'assurer un respect des règles de positionnement des jeunes. Il est en
effet quasiment impossible d'imposer un quart de candidatures jeunesse si les
régions compensatoires ne font qu'élire un ou deux députés. Force Jeunesse
propose aussi de diminuer le seuil minimal d'entrée au Parlement de
10 % — je pense que ça fait consensus assez — à
5 % des votes à l'échelle nationale. Finalement, nous invitons le
gouvernement à augmenter le financement public au référendum et à le devancer.
Dans les perspectives où ces demandes sont acceptées, Force Jeunesse réitère
son appui à la réforme électorale en cours et formule donc les recommandations
suivantes dans le cadre des consultations.
Pour faire un résumé, notre première
recommandation consiste à instaurer un quota de 25 % de jeunes candidats
de 35 ans et moins sur les listes compensatoires des partis politiques; deux, à
augmenter la proportionnalité de la réforme électorale en faisant passer les
régions desquelles sont issus les députés élus par listes partisanes de 17 à
une seule; trois, augmenter la proportionnalité de la réforme électorale en
diminuant le seuil minimal de votes obtenus à l'échelle nationale pour obtenir
des sièges de compensation de 10 % à 5 %; et finalement de devancer
la date du référendum — parce qu'on en propose un avec cette réforme
du mode de scrutin — pour qu'elle soit au plus tard un an avant la
campagne électorale et aussi d'augmenter le financement public pour les groupes
souhaitant faire campagne pour ou contre la question référendaire. Ce sont les
positions de Force Jeunesse.
Je vais passer la parole à ma collègue
Éliane, qui est juste à ma gauche, pour étayer un peu plus nos positions.
Mme Racine (Éliane) : Oui. En
fait, je vais vous parler du lien entre la représentation des jeunes et la
proportionnelle, puis ce lien-là a été établi dans la littérature scientifique
puis politique, pardon, puis ce qu'on constate, c'est qu'il y a plus de
représentation de la population à travers un mode proportionnel, et donc ça
veut dire plus de femmes et plus de jeunes qui sont élus que dans un mode non proportionnel.
• (12 h 20) •
Là-dessus, on se base ici sur l'étude qui
a été faite sur la question de la représentation des jeunes en fonction du mode
de scrutin, puis ce qu'ils ont constaté, les auteurs, c'est que le pourcentage
de jeunes de moins de 36 ans, pour un mode de scrutin proportionnel, était
significativement plus élevé, à 12,1 % ou 10,6 % dans une
proportionnelle mixte, que dans un mode de scrutin majoritaire, où on passait à
7 %. Puis les raisons qui peuvent expliquer ce lien entre système proportionnel
puis la représentation des jeunes sont, premièrement, que dans un scrutin
majoritaire les associations locales vont choisir ou vont élire les candidats,
puis ça va avoir tendance à faire en sorte que les hommes plus âgés provenant
de groupes...
Mme Racine (Éliane) : ...à 7 %.
Puis les raisons qui peuvent expliquer ce lien entre le système proportionnel
puis la représentation des jeunes sont, premièrement, que dans un scrutin
majoritaire, les associations locales vont choisir ou vont élire les candidats,
puis ça va avoir tendance à faire en sorte que les hommes plus âgés provenant
de groupes ethnoculturels majoritaires soient surreprésentés. En ayant un
système de... proportionnel, les listes qui vont être gérées par les partis
vont permettre aussi d'imposer des règles de positionnement en fonction, par
exemple, du genre ou, dans notre cas, de l'âge.
Ensuite, les systèmes proportionnels
tendent à augmenter le nombre de partis élus puis, donc, à favoriser la
représentation de partis dans lesquels les jeunes se retrouvent. Puis
finalement, dans un système majoritaire, les partis ont des incitatifs à placer
dans chaque comté des candidats qui ont le plus de chances d'être élus, alors
que dans un système proportionnel, les partis vont devoir diversifier leur
clientèle électorale au maximum et donc chercher à attirer les jeunes en
mettant de l'avant les jeunes sur leurs listes électorales.
Je vais passer la parole à mon collègue
Olivier.
M. Jacques (Olivier) : Merci.
Je voulais conclure en discutant des quotas électoraux. Force Jeunesse croit
fermement que les quotas électoraux liés aux jeunes ont fait leurs preuves et
seraient un excellent mécanisme pour assurer une représentation des jeunes à
l'Assemblée nationale du Québec. L'exemple de la Suède démontre l'efficacité
des quotas. Avec un quota, dans les listes de partis, qui exigent 25 % de
candidatures de moins de 35 ans, la Suède a beaucoup plus de jeunes élus que la
moyenne, avec 12 % d'élus de moins de 30 ans et plus de 34 % d'élus
de moins de 40 ans dans l'Assemblée législative suédoise. Ainsi, Force Jeunesse
recommande d'imposer une règle de positionnement, dans les listes électorales,
de 25 % de candidatures de moins de 35 ans. Force Jeunesse propose aussi
que les listes alternent un candidat jeune au minimum à chaque candidature... à
chaque quatre candidatures, pardon, pour éviter que les candidats jeunes ne se
retrouvent en bas des listes et aient moins de chances d'être élus.
La demande de Force Jeunesse concernant
les quotas se limite aux candidats élus par listes régionales, puisque
l'autonomie des associations locales pour la sélection des candidats des
circonscriptions ne devrait pas être limitée. Il faut que ces quotas soient
assortis de punitions et de récompenses qui soient conséquentes et qui
dissuadent les partis à ne pas les respecter, et les quotas doivent être
suffisamment élevés pour avoir un effet. Et il est peu probable que les quotas
puissent fonctionner dans le mode de scrutin proposé par le projet de loi n° 39 actuel parce que le nombre de régions est trop élevé
et le nombre de députés élus par listes régionales est trop faible. Par
exemple, comment s'assurer qu'il y ait des jeunes élus sur les listes
électorales si la majorité des régions n'ont qu'un à trois députés? Par exemple,
une région à trois députés, où trois partis différents feraient élire son
candidat en tête de liste, pourrait n'avoir aucun représentant de moins de 35
ans, malgré l'installation d'un quota.
Donc, pour que les quotas soient
efficaces, on propose... Et non seulement pour que les quotas soient efficaces,
mais aussi pour réellement diminuer l'indice de distorsion du mode de scrutin,
puisqu'on est convaincus que la proportionnalité du système électoral favorise
la représentation des jeunes... Donc, pour rendre la proposition de quotas
viable et diminuer l'indice de distorsion, le gouvernement devrait éliminer la
compensation régionale et passer à une compensation nationale. Plutôt que
d'avoir 17 régions, le projet de loi n° 39 devrait
plutôt considérer le Québec comme une seule région, dans laquelle 45 députés
seraient élus à partir d'une liste, qui servirait à compenser les distorsions
du scrutin nominal à un tour.
M. Diallo (Daye) : Excellent.
Donc, pour conclure, je vous rappelle que Force Jeunesse réitère son appui au
principe d'une réforme du mode de scrutin qui puisse augmenter la
proportionnalité du système électoral québécois et la représentation des jeunes
à l'Assemblée nationale. En effet, la position que l'on vient de vous dire
démontre que la proportionnalité est associée à une meilleure représentation
des jeunes, et cette représentation des jeunes pourrait être bonifiée à l'aide
d'une règle de positionnement, dans les listes électorales, qui favorise les
jeunes.
Vous savez, en général, les gens ont
tendance à voter quand ils se sentent représentés. Donc, au Québec, nous
faisons face à un enjeu où, d'élection en élection, on se rend compte que le
taux de vote chez les jeunes est sensiblement plus bas, et l'on pense
sincèrement que le fait d'avoir des gens qui les représentent, le fait d'avoir
une certaine forme aussi de représentativité, au niveau de la représentation
hommes-femmes, de la représentation ethnique, va faire en sorte que les gens se
sentent plus concernés, qu'il y ait plus d'idées qui soient représentées au
sein des partis politiques et que, de cette manière-là, on puisse, à long
terme, se retrouver dans un... au Québec, dans une situation où les partis
politiques sont beaucoup plus représentatifs de l'ensemble de la population et
donc arrivent avec des idées et des solutions qui sont beaucoup plus
représentatives.
C'est un peu la position de Force
Jeunesse. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, merci, messieurs, merci, madame, de votre présence. Et
d'entrée de jeu, je veux souligner l'excellente qualité de votre mémoire.
J'apprécie surtout le fait que, dans votre argumentaire, c'est soutenu. Vous
avez des exemples, vous nous dirigez vers d'autres pays, donc ça illustre vos
propos. On peut être d'accord ou pas d'accord, mais vous avez une base
extrêmement soutenue et vous avez des exemples pour les illustrer. Puis merci
beaucoup...
Mme LeBel : ...souligner
l'excellente qualité de votre mémoire. J'apprécie surtout le fait que, dans
votre argumentaire, c'est soutenu, vous avez des exemples pour nous diriger
vers d'autres pays, donc ça illustre vos propos. On peut être d'accord ou pas d'accord,
mais vous avez une base extrêmement soutenue et vous avez des exemples pour les
illustrer, puis merci beaucoup. Ce qui fait en sorte que je n'ai presque pas de
questions dans le sens où c'est très bien compris. Mais quand même j'aurais...
j'aimerais voir un peu avec vous un point que vous amenez et je le comprends.
Je comprends votre argument au niveau de la... pas de l'abolition, mais du fait
qu'on ne se base pas sur 17 régions administratives, mais plutôt qu'on se
base sur le Québec, donc une compensation nationale. Une liste nationale plutôt
que d'avoir des listes régionales ce qui fait en sorte qu'on n'a plus à diviser
le Québec en régions selon votre proposition. Je la comprends très bien. Je
comprends très bien le fait aussi qu'au niveau de l'argumentaire de la
proportionnalité, bien, on a beaucoup plus de facilité à injecter de la
proportionnalité dans noter Assemblée nationale parce qu'on n'est pas limité
par la proportionnalité par région. Ça, ça me va très bien.
Là, où j'aimerais vous entendre parce que
c'est un peu silencieux, là, sur cet aspect-là dans votre mémoire, mais on en a
discuté dans les dernières journées surtout, c'est sur comment on va
opérationnaliser ça sur le terrain. Mettons qu'on s'en va dans la direction que
vous proposez. À titre d'exemple, on jase, on accepte d'aller avec une liste
nationale. On prend les 45 députés, puis on les met à la grandeur de la
province du Québec. Beaucoup d'arguments circulent, on peut les adopter ou non.
Mais ce qui circule entre autres c'est... déjà avec la proposition
gouvernementale, c'est qu'il y a un risque, bon, d'autres y répondent, mais
qu'il y a un risque de créer deux classes de députés, c'est-à-dire un député de
circonscription, un député de région. Il y a des réponses à donner à ces
arguments-là, mais c'est quand même une crainte. L'attachement aussi aux
régions, c'est une crainte. Quel est le rôle que le député régional va jouer?
Et ce que j'ai entendu aussi, c'est : Comment le député de liste va se
comporter en campagne électorale? Comment va-t-il faire campagne? Je pense
qu'on y répond en divisant le Québec en 17 régions, en disant : Le
député régional, comme la liste est régionale et la compensation est régionale,
bien, le député de liste devra quand même faire campagne sur le terrain dans la
région dans laquelle il se présente. Mais comment vous proposez, pour les
députés nationaux? Est-ce qu'on ne vient pas exacerber cette impression-là ou
cette crainte-là d'avoir deux classes de députés? Ils vont faire une campagne
nationale un peu comme un chef de parti. Est-ce qu'on ne vient pas favoriser
l'entrée en jeu de candidats vedettes comme on le craint? Comme vous n'avez
peut-être pas eu l'occasion de le faire dans votre mémoire, je veux avoir votre
tête sur cette façon d'opérationnaliser votre proposition sur le terrain
surtout du point de vue des citoyens. Quel va être l'attachement dans ce
sens-là? Je comprends l'argument de proportionnalité, je veux aller sur un
autre aspect.
M. Diallo (Daye) :
Excellent. Je vais y répondre. Je vais prendre la première partie de la réponse
et je suis très content de voir que l'argument de la proportionnalité soit très
bien compris et que vous voyez que la nécessité... Pourquoi est-ce qu'on a
demandé à ce qu'il y ait une liste nationale? C'est qu'on voudrait
effectivement qu'il y ait de la proportionnelle. On la veut, cette
proportionnelle, faisons-la.
Et donc pour répondre un peu plus à votre
question sur l'aspect régional, sur comment est-ce que l'on fait pour essayer
de s'arrimer au fait qu'on n'a pas juste les députés de circonscription, et les
députés nationaux. C'est là où Force Jeunesse, d'une certaine manière, a
réfléchi à la question, puis d'une certaine manière on compte un peu sur la bonne
foi des partis politiques et aussi sur un aspect pragmatique. Pour ne citer
aucun parti, par exemple, il y a certains partis qui sont beaucoup plus
représentés dans certains lieux géographiques du Québec ou pas. Sur l'île de
Montréal, on ne citera pas ce parti-là, mais il est très représenté sur cette
île-là par exemple, en prenant cet exemple-là. Donc, ce parti aurait tout
intérêt, sur sa liste nationale, à avoir des députés dès le départ qui ont une
certaine... qui ont un certain tropisme pour d'autres endroits que la région de
Montréal, disons. Donc, des députés qui viennent, par exemple, de la Côte-Nord,
des gens qui ont un attachement avec la Côte-Nord, par exemple si je ne prends
que cet exemple géographique là, où, sur la liste électorale, on aurait déjà,
dès le départ, un choix de députés qui seraient probablement élus qu'ils
viennent d'endroits ou ces partis-là ne pensent peut-être pas pouvoir élire des
gens issus des circonscriptions. Donc, de cette manière-là, on arrive déjà à
avoir une certaine forme de représentation.
Puis il y a un autre exemple que l'on a
souvent, c'est que les députés à l'Assemblée nationale, ils ont souvent des
portefeuilles. On peut être ministre, on peut être adjoint parlementaire, par
exemple, au tourisme ou à autre chose. Donc, dès le départ, ce qu'il faudrait,
c'est que les députés qui sont élus sur les listes de circonscription aient
déjà d'une certaine manière une affectation, et qu'on leur dise : Si vous
êtes élu, bien, on pense que vous soyez peut-être plus... vous auriez... vous
devriez normalement être plus dans la région de l'Outaouais, par exemple, puis
que les citoyens sachent de manière très claire, une fois que les élections se
passent, à quels députés ils pourraient, par exemple, s'adresser s'ils
n'arrivent pas à avoir accès à leur député de circonscription. Et donc ces
députés-là, d'une certaine manière, seraient des députés de région qui
remplaceraient, par exemple, les régions administratives. Donc, très
rapidement, ça peut être une réponse à ce que vous dites.
• (12 h 30) •
Mme LeBel : Mais je
comprends ce que vous dites et je comprends l'argument de la bonne foi. Mais il
peut y arriver des cas où des... peu importe le parti, où on n'a pas cet
équilibre...
12 h 30 (version non révisée)
M. Diallo (Daye) : ...d'une
certaine manière, seraient des députés de région qui remplaceraient par exemple
les régions administratives. Donc, très rapidement, ça peut être une réponse à
ce que vous dites.
Mme LeBel : Bien, je comprends
ce que vous dites, je comprends l'argument de la bonne foi, mais il peut y
arriver des cas où, peu importe le parti, on n'a pas cet équilibre-là régional
dans les députés nationaux. Où est-ce qu'ils vont s'installer, ces députés-là?
Est-ce que ça va être à leur choix? Quels dossiers ils vont porter? Clairement,
c'est plus difficile de penser... Moi, je pense que ça se décline beaucoup
mieux quand on parle de régions et de circonscriptions, quand on parle des 17
régions, de penser qu'il va y avoir une organisation sur le territoire et que,
bon, les députés régionaux de liste... de circonscription ou de liste pourront
aussi faire des cas de comté, peu importe, et vice versa. Mais on parle de 45
députés nationaux. Oui, la bonne foi, mais, une fois... Quel va être le rôle de
ces députés-là? Est-ce qu'ils vont faire des cas de comté? Lesquels comtés?
M. Diallo (Daye) : En fait,
la bonne foi, c'est aussi une question de pragmatisme. C'est que, comme je vous
dis,les partis politiques n'ont aucun intérêt à concentrer des députés d'un
seul coin du Québec, dans le cas où c'est une représentation nationale, puis
aussi, de manière très claire, ce sera aux partis politiques d'assigner une
certaine forme de régionalisation à l'action de leurs députés. Donc, oui, ces
députés-là, s'ils n'arrivent pas... pardon, si les citoyens n'arrivent pas à
entrer en contact avec leur député de circonscription, ou c'est beaucoup plus
difficile, il faut que, dans l'information que les partis divulguent aux
citoyens, que les citoyens sachent de manière très claire vers lesquels des
députés ils pourraient se tourner s'ils se trouvent, par exemple, dans
l'Outaouais. Donc, ce sera un travail aux partis de le faire, mais c'est aussi une
question de pragmatisme, parce que, si un parti politique, sur ces 45 personnes
qu'il met sur la liste nationale... ne sont que dans la grande région de
Québec, bien, le parti se tire d'une certaine manière une balle dans le pied en
faisant ça.
M. Jacques (Olivier) : Si je
pouvais rebondir rapidement, je pense que la question de permettre la double
candidature serait assez pertinente dans ce cas-là, on pourrait éviter, là,
d'avoir deux classes de députés. Je pense que ce serait vraiment une bonne
réforme à mettre de l'avant aussi. Et je pense qu'en fait on peut réfléchir au
fait que notre liste nationale permet aux partis, à l'ensemble des partis
d'avoir une forme de représentation dans plusieurs régions qu'ils n'ont pas nécessairement
actuellement. Et donc je ne pense pas que la question de la représentation
régionale de chacun des partis est vraiment problématique avec notre réforme.
Mme LeBel : Peut-être que la
question du point de vue du citoyen qui, au moment où il vote, ne saura pas,
lui, qui sera son député régional ou s'il aura un député régional, parce que ce
sera le parti, ça dépendra du pourcentage national du parti, ça dépendra de qui
sur sa liste sera sélectionné et ça dépendra du pragmatisme du parti, que je ne
mets pas en doute, qui devra assigner après coup peut-être un député à une
région donnée... Donc, le citoyen, de son point de vue, quand il vote... Alors
qu'avec la proposition gouvernementale présentement sur la table, la liste est
fermée, elle est régionale, le citoyen sait qui est susceptible de le
représenter, alors qu'avec une liste nationale... Du point de vue de la
proportionnalité, je suis... j'en suis. Quand on parle d'une proportionnalité
maximisée, là, c'est sûr que la liste nationale, effectivement... Dans les
choix qu'on a dû faire dans la proposition, bien, il a fallu sacrifier une
portion de la proportionnalité pour avoir une portion de représentativité
régionale et d'attachement.
Mais je reviens sur un autre point, parce
que je veux être sûre de pouvoir vous voir... — pas parce que ce
n'est pas intéressant, on pourrait en discuter pendant des heures, puis on aura
peut-être l'occasion de le refaire — mais la question des quotas, et
je vous ramène à la bonne foi des partis. On a eu un expert qui est venu nous
dire : En matière de parité hommes-femmes, à titre d'exemple, en 2018, on
a quand même eu une année exemplaire de tous les partis confondus, on a eu une
année exemplaire; on a même eu des années exemplaires en termes d'élections, en
termes de représentation à l'Assemblée nationale, en termes de constitution du
Conseil des ministres. Si on prend une photo de 2018, là, on est en bonne
posture au niveau de la parité hommes-femmes. Malgré tout, les groupes de
femmes viennent nous demander de mettre des quotas et d'être plus coercitifs
dans nos mesures. Certains experts sont venus nous dire : Bien, ça va
bien. Il y a une belle tendance, il y a un point de bascule. Voyons voir la
bonne foi des partis, justement, parce que ce sera ultimement aux citoyens de
juger de l'attitude des partis. C'est un peu la nature des mesures qu'on a
mises, c'est-à-dire : Vous déclarez vos intentions, vous déclarez si vous
avez rempli vos propres intentions, et le peuple, en bon français, jugera de
votre performance et si vous êtes à côté de la plaque ou non.
Vous me parlez de la bonne foi des partis
par rapport à la distribution nationale, mais vous semblez en douter par
rapport à la représentation des jeunes. Alors, comment concilier tout ça?
M. Diallo (Daye) : Pour
répondre très rapidement à cette question, c'est que notre mode de scrutin
actuel existe depuis plus d'un siècle, puis, de manière très claire, jusqu'à
maintenant le nombre de jeunes présents à l'Assemblée nationale n'a jamais été
significativement proche de la réalité qui existe au Québec, et c'est pour ça,
c'est pourquoi on pense qu'il faudrait une mesure très claire, une mesure
effectivement très forte pour faire en sorte qu'il y ait plus de jeunes à
l'Assemblée nationale. Et ça, ça passe effectivement par le fait où il faudrait
imposer aux partis politiques...
M. Diallo (Daye) : ...Assemblée
nationale n'a jamais été significativement proche de la réalité qui existe au Québec
et c'est pour ça... c'est pourquoi on pense qu'il faudrait une mesure très
claire, une mesure effectivement très forte, pour faire en sorte qu'il y ait
plus de jeunes à l'Assemblée nationale. Et ça, ça passe, effectivement, par le
fait où il faudrait imposer aux partis politiques ce 25 %-là, qui est
juste une présence sur les listes électorales, qui ne veut pas forcément dire
qu'il y aura autant de jeunes présents à l'Assemblée nationale, mais en
espérant que ça fasse en sorte que le seuil augmente.
Par exemple, un exemple, à la dernière
élection, en 2018, il n'y avait que 9 % de jeunes de moins de 35 ans à
l'Assemblée nationale. Donc, il y a très clairement quelque chose à faire
là-dessus et c'est pourquoi, on le répète encore, sur cet enjeu-là, on va aller
au-delà de juste la bonne foi pour faire en sorte qu'il y ait des balises qui
sont très claires, pour obliger les partis à avoir plus de jeunes et comme nous
disait tout à l'heure mon collègue, avec ça, on s'en vient aussi avec des idées
pour qu'il y ait des bonus et des malus, en fonction du respect de ce
critère-là.
Mme LeBel : Oui, vous... puis
vous faites d'ailleurs une très belle nomenclature des possibilités. Donc, vous
parlez naturellement de... votre mesure est introduite par le biais des listes.
Je comprends bien, une certaine forme d'alternance, là, vous la décrivez très
bien dans votre mémoire. Vous faites référence au fait que dans d'autres... les
mesures punitives, je crois, n'ont pas nécessairement tout leur impact, parce
que souvent, bon, on peut les contourner.
Est-ce que vous favorisez une mesure plus
qu'un autre? Parlez du rejet de la liste, vous parlez de bonus, vous parlez de
malus, mais est-ce qu'il y a quelque chose qui, à votre sens... Je comprends,
ce sont toutes des mesures que vous mettez de l'avant, mais, à votre sens,
est-ce qu'il y a une mesure qui est plus efficace qu'une autre? Quand on parle
du respect de ce quota-là? Parce que quand on impose un quota, encore faut-il
qu'il y ait une façon de le faire respecter, là, un levier.
M. Jacques (Olivier) :
Franchement, on n'a... il n'y a pas de recette magique, je pense, mais il faut
s'assurer que la punition et la récompense soient suffisamment élevées pour
créer un incitatif très clair, pour que les partis respectent ce quota-là. Mais
de là à exclure un parti de la liste électorale d'un parti, je pense que, par exemple
ce qui se fait, je pense que c'est en Espagne, où la liste est tout simplement
rejetée jusqu'à ce que le quota soit rempli, c'est sûr que ça fonctionne, là.
Mais, bon, on peut considérer que c'est peut-être un peu radical, mais ça
dépend à quel point on veut absolument que les quotas fonctionnent.
D'ailleurs, on veut réitérer qu'on est
d'accord avec les groupes qui proposent une alternance, une femme sur les
listes électorales aussi. Ça serait vraiment plus facile à faire, d'ailleurs,
sur une liste nationale.
Mme LeBel : Bien, merci
beaucoup. Merci pour votre rapport. Très apprécié.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.
Mme Robitaille : Merci, M. le
Président. Bonjour à tous les trois. C'était vraiment un plaisir de lire votre
mémoire et, comme la ministre, je vous félicite, c'était intéressant et je vais
aller un peu plus loin. En fait, j'écoutais ce que vous disiez à la ministre et
ça m'intéresse beaucoup. On a... on aura peut-être... en tout cas, le projet de
loi nous dit : On aura 80 députés de circonscription et 45 députés de
liste. Et, donc, 80 députés qui sont élus directement par les gens et 45
députés qui sont, finalement, établis par... en tout cas, les partis, hein? Ce
sera le pouvoir du parti d'établir des noms, d'établir ces listes-là.
Vous dites, peut-être que... et puis je
veux vous entendre là-dessus. Est-ce que j'ai bien compris qu'on a peut-être
deux catégories de députés, deux types de députés? Vous, ça ne vous dérange
pas... ça ne vous dérange pas.
M. Diallo (Daye) : Très rapidement,
non, parce que le Québec ne serait pas dans une situation unique au monde... Il
y a des proportions mixtes un petit peu partout à travers le monde, puis, de manière
claire, non, ça ne nous dérange pas, puis, comme on le disait tout à l'heure, il
y a une manière, quand même, d'attribuer à ces députés-là des fonctions qui
feraient en sorte qu'ils soient beaucoup plus proche de la population,
localement parlant.
M. Jacques (Olivier) : Et
permettre la double candidature aussi règle aussi une partie de ces
problèmes-là, parce que c'est les mêmes candidats qui pourraient se présenter
aux circonscriptions et aux listes.
Mme Robitaille : Alors,
comment vous verriez, par exemple, les tâches, les responsabilités du député de
liste versus le député de circonscription?
M. Diallo (Daye) : Les tâches
et responsabilités, d'une certaine manière, seraient pareilles. On peut déjà
s'inspirer de ce qui se passe an provincial et fédéral, même si ce n'est pas
les mêmes compétences et ce ne sont pas les mêmes actions, mais un citoyen peut
aller taper sur certains enjeux, autant à la porte de son député provincial
qu'à la porte de son député fédéral, même si, bon, à la limite, l'un ou l'autre
ne pourra pas l'aider sur son problème, mais l'idée, ce serait vraiment que,
oui, avec les circonscriptions qui restent — aujourd'hui, on en parle
de 80 — que le premier réflexe de citoyen. Mais comme on disait tout
à l'heure, il est possible que les partis puissent attribuer de manière très
claire aux différents députés, donc aux 45 députés élus de liste nationale, des
objectifs géographiques.
• (12 h 40) •
Donc, le citoyen saurait, en allant sur un
portail, par exemple, mis en place par le gouvernement, à qui il peut
s'adresser si, effectivement, son député de circonscription n'est pas là pour
répondre à sa question ou il n'est pas satisfait du travail de son député de circonscription.
Et même pour les partis, électoralement parlant, vous savez, il peut se faire
sanctionner. Si, effectivement, ce citoyen-là n'arrive pas à se faire servir
par son député de liste...
M. Diallo (Daye) : ...par
exemple, mis en place par le gouvernement, à qui il peut s'adresser si, effectivement,
son député de circonscription n'est pas là pour répondre à sa question ou il
n'est pas satisfait du travail de son député de circonscription. Et même pour
les partis, électoralement parlant, vous savez, il peut se faire sanctionner.
Si, effectivement, ce citoyen-là n'arrive pas à se faire servir par son député
de liste aux prochaines élections, il y a fort à parier que ce citoyen-là s'en
rappellera.
Mme Robitaille : Donc, ce
serait du cas par cas, ce serait individuel, ce serait... bon, c'est ce que je
comprends de ce que vous dites?
M. Diallo (Daye) : Oui.
Mme Robitaille : Est-ce que...
Mais je vous écoute, là, et puis je me dis : Est-ce qu'on pourrait...
parce qu'on en a déjà parlé, ça a déjà été amené comme idée, d'amener un amendement
qui préciserait les rôles de l'un puis les rôles de l'autre? Est-ce que vous
pensez que ça, ce serait une bonne idée? Non? Mais tu dis non pourquoi?
M. Jacques (Olivier) : Vous
semblez en avoir discuté davantage que nous.
Mme Robitaille : Non, mais
c'est parce que vous en avez parlé tout à l'heure avec la ministre.
M. Diallo (Daye) : A priori,
on ne serait pas contre, parce que, vous savez...
Mme Robitaille : Vous me dites
ça, je vous entends, je trouve ça intéressant.
M. Diallo (Daye) : A priori,
on ne serait pas contre, parce que, vous savez, nous, on est pour le plus de
clarté possible. Donc, il est très clair qu'en ayant deux types de députés, des
députés de circonscription et les députés nationaux, il faut que ça soit très
clair pour les citoyens.
Donc, si ça passe par un amendement qui,
dès le départ, décide d'attribuer des rôles et des responsabilités, on ne
serait, a priori, pas contre, mais il faudrait qu'on le voie, effectivement,
puis l'objectif derrière tout ça, c'est que, pour le citoyen, infiniment...
infini, ce soit, le plus facile possible. Et je tiens quand même aussi à
rappeler, c'est que la raison de cette liste nationale là, c'est qu'aujourd'hui,
certaines projections qui ont été faites démontrent que si, par exemple, le
scrutin se serait tenu avec cette réforme-là, ça n'aurait pas grandement
changé.
Donc, la composition de l'Assemblée
nationale, au jour d'aujourd'hui, serait à peu près pareille à celle précédente.
Donc, la réforme actuelle ne règle pas ce problème-là. Oui, il est un tout
petit peu plus proportionnel, mais ne répond pas à cet objectif-là, où la
proportionnalité est un système électoral qui permettrait d'avoir une
représentativité plus grande à l'Assemblée nationale, autant d'idées politiques
que de catégories de citoyens : jeunes, moins jeunes, diversités
ethniques, femmes, hommes, etc.
Mme Robitaille : Mais je veux
revenir sur ce que vous disiez juste... Donc, juste pour conclure : pas
une mauvaise idée de définir ces types de députés là, en leur donnant des
tâches... bien, en tout cas, en établissant des...
M. Jacques (Olivier) : On est
d'accord avec vous. Nous, par exemple, on priorise vraiment la diminution de
l'indice de distorsion dans la réforme électorale. C'est ce qu'on trouve le
plus important.
Mme Robitaille : Maintenant,
vous parlez du référendum, puis là, vous dites... vous suggérez, comme recommandation
4 : «Devancer la date du référendum pour qu'elle soit au plus tard un an
avant la campagne électorale.» Il va falloir qu'on se dépêche.
Donc, 2021, vous pensez que c'est
réaliste? Vous pensez que c'est possible?
M. Diallo (Daye) : Oui. 2021,
c'est réaliste, c'est possible. Et, oui, vous disiez? Vous savez, cette réforme
du mode de scrutin, là, on en parle depuis un siècle, à peu près, quelque chose
comme ça.
Oui, on peut se presser, on peut se
dépêcher. Je pense que si toutes les forces vives autour de la table étaient
d'accord avec ça, en un an, ce serait possible d'organiser ce référendum-là,
qui permettrait à la population du Québec de se prononcer. Mais, comme on
disait chez Force Jeunesse, je tiens quand même à la préciser, c'est qu'on est
pour un référendum chez Force Jeunesse. On considère que cette question est
importante et qu'il faudrait que la population se détermine là-dessus. Mais ça
ne veut pas forcément dire qu'il faudrait que l'on fasse ce référendum-là un an
avant les élections.
On est aussi d'accord avec l'autre proposition,
qui ferait en sorte que l'on tienne le prochain scrutin en fonction du nouveau
mode de scrutin puis qu'on essaie deux fois, puis qu'ensuite, on demande à la population
de se prononcer là-dessus. L'argument ici, c'est qu'il faut absolument que les Québécois
se prononcent sur le changement de leur mode de scrutin, mais ça peut se faire
avant le scrutin comme ça peut se faire après, mais il faut le faire.
Mme Robitaille : Mais, donc,
mieux vaut tard que jamais. Si ce n'est pas dans un an, ça peut être dans trois
ans. L'important, c'est qu'on l'ait. C'est ce que vous dites. Mais l'idée
d'avoir un référendum en même temps que des élections, c'est quoi, votre
position là-dessus? Vous êtes...
Mme Racine (Éliane) : Bien, en
fait, nous, on préférerait que la question du référendum soit séparée des
élections, pour ne pas que ça devienne un enjeu dans la campagne électorale,
puis, vraiment, que les gens puissent répondre à la question du référendum en
faisant fi de ce qui se passe au niveau politique.
M. Diallo (Daye) : Et
l'histoire aussi démontre qu'à chaque fois que la question a été mêlée à une
élection normale, c'est souvent passé au second plan ou, du moins, l'enjeu
était tellement très peu discuté, tellement... très mal expliqué à la population
que, bien, ça n'a pas été aussi viable que ce l'on voudrait. Les gens ont le
droit de se prononcer là-dessus, mais il faudrait que l'information leur arrive
et que l'information normale leur arrive, oui.
Mme Robitaille : Mais quel
rôle vous voyez — on en a parlé tout à l'heure au groupe qui vous a
précédé — quel rôle vous voyez aux députés? Est-ce que les députés
devraient s'impliquer directement dans une
campagne référendaire? Devraient se mouiller, là, ne devraient pas se gêner, en
fait.
M. Jacques (Olivier) :
Ça... Là, ça devient une opinion un peu personnelle de notre côté. Là, je pense
qu'on n'est pas les mieux placés, là, pour avoir une opinion là-dessus, là, je
crois franchement.
Mme Robitaille : Vous êtes...
vous représentez les jeunes, les étudiants...
Mme Robitaille :
...directement dans une campagne référendaire, devrait se mouiller, là, ne
devrait pas se gêner en fait.
M. Jacques (Olivier) :
Ça, là, ça devient une opinion un peu personnelle de notre côté. Là, je pense
qu'on n'est pas les mieux placés, là, pour avoir une opinion là-dessus, là, je
crois franchement.
Mme Robitaille : Vous êtes...
vous représentez les jeunes, les étudiants, les moins de 35 ans, c'est
quoi le sentiment? Est-ce que vous avez...
M. Jacques (Olivier) :
Bien...
Mme Robitaille : Bien,
parce que vous y avez réfléchi. L'implication de vos élus, par exemple, dans
une campagne référendaire.
M. Jacques (Olivier) :
Nous, ce qu'on pense qui est important... C'est une réforme qui est complexe,
mais c'est une question qui est complexe, puis ce qui est important, c'est que
les gens sachent de quoi il s'agit. Si la participation des élus aide, ce qui
est probablement le cas, et si le premier ministre et le gouvernement en
général se mettent du côté de la réforme électorale, ça aiderait certainement.
Nous, on veut que la réforme passe et on veut que les gens soient informés
lorsqu'ils fassent un vote. Donc, oui, logiquement, ça serait bien que les
députés puissent s'impliquer d'un côté ou de l'autre ne serait-ce pour que les
gens soient informés.
Mme Robitaille : Vous
dites aussi : «Augmenter le financement public pour que les groupes
souhaitant faire campagne pour ou contre la question référendaire puissent
participer.» La place des jeunes et est-ce que... comment vous voyez ça
s'articuler? Pourquoi est-ce important
M. Diallo (Daye) : La
place des jeunes, elle est importante effectivement dans ce débat-là. Vous le
savez, il y a des groupes de la société civile comme Force Jeunesse et
d'autres qui nous ont précédés ici, Citoyenneté Jeunesse, l'UEQ et la FECQ
et d'autres peut-être que j'oublie le nom, on sera présent dans l'espace public
pour pouvoir défendre certaines idées qui sont en lien avec cette réforme du
mode de scrutin là.
Comme vous pouvez le voir dans le mémoire,
déjà dans le cadre des commissions parlementaires, on propose certains
changements qui feraient en sorte que la représentation des jeunes soit
beaucoup plus importante, et d'autres types de populations au Québec. Mais
c'est clair que, durant la campagne, si campagne il y a lieu, ces groupes de la
société civile là essaieront de participer au débat surtout, comme j'ai dit,
chez Force Jeunesse, on est là aussi pour animer le débat public, faire en
sorte que des gens qui représentent certaines idées politiques entre en contact
avec la jeunesse pour leur parler de leurs idées, mais aussi pour faire monter
plus haut les idées de ce que ces jeunes-là pensent. Donc, c'est comme ça que
les groupes jeunes comme le nôtre pourront s'impliquer dans une éventuelle
campagne référendaire sur la question.
Mme Robitaille : Vous dites...
je vais revenir à cette idée de quota, là, de 25 % de jeunes candidats de
35 ans et moins, donc c'est circonscrit aux listes compensatoires
seulement. Pour ce qui est des candidatures, pour ce qui est des
circonscriptions, vous ne touchez pas à ça. C'est bien ce que je comprends?
M. Diallo (Daye) : Vous
savez, dans un monde idéal, comme je le disais tout à l'heure, ça devrait être
normal aussi que, dans les circonscriptions, cette question-là soit à l'ordre
du jour au moment de choisir un candidat. Mais, pour l'instant, vous savez, ma
grand-mère disait souvent qu'il faut choisir ses batailles, pour l'instant, la
première bataille, effectivement c'est celle des listes nationales où l'on
pense qu'il est beaucoup plus facile de pouvoir avoir ce genre de quotas là.
Parce que circonscription par circonscription, en général, c'est beaucoup plus
difficile, et c'est pour ça qu'aussi la raison des 17 régions nous
semblait un peu compliquée pour avoir des quotas de jeunes. Donc, dans un mode
idéal, on saurait qu'aussi pour que, dans ces circonscriptions-là, que les gens
aillent de l'avant vers plus de jeunes.
Mme Robitaille : Donc...
oui, allez-y.
M. Jacques (Olivier) :
Mais c'est qu'en même temps il y a un arbitrage à faire, là. C'est évident que
le fait que les circonscriptions aient une forme d'autonomie, ça diminue la
concentration du pouvoir vers le premier ministre, ça diminue... ça crée une démocratie
locale qu'on ne veut pas enlever, là. Donc, on est conscient des arbitrages que
la ministre a à faire et donc on ne peut pas imposer des quotas à ces
circonscriptions locales là, mais c'est très facile de le faire en fonction des
listes.
Mme Robitaille : Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois :
Bonjour, merci d'être ici. Vous semblez avoir comme préoccupation principale la
question de la proportionnalité, c'est une préoccupation qu'on partage, et donc
je me surprends amicalement de ne pas vous avoir entendu parler puis qu'il n'y
ait pas de recommandations dans votre même au sujet de cette fameuse prime au
vainqueur dont on parlait justement avec le dernier intervenant. Est-ce que ce
n'est pas là, selon vous, un des principaux, sinon le principal accroc à la
proportionnalité dans ce projet de loi là?
M. Diallo (Daye) : On
avait 10 minutes pour exprimer nos positions, mais c'est très clair
qu'au-delà de la prime au vainqueur, nous pensons que la réforme proposée
actuellement n'est pas adéquate pour augmenter la proportionnalité voulue à
l'Assemblée nationale du Québec. Et effectivement la notion et la question de
prime au vainqueur fait partie de l'ensemble de ces petites choses qui font que
la réforme proposée actuellement n'est pas la plus adéquate.
M. Jacques (Olivier) :
Mais prime au vainqueur ou pas, si on garde, là, les listes comme elles le
sont, ça va être difficile d'avoir notre objectif de règles de positionnement
qui favorisent les jeunes sur les listes.
• (12 h 50) •
M. Nadeau-Dubois : Je
comprends bien cela. Je veux vous entendre également sur le financement... en
fait, sur la campagne référendaire. Vous parlez de financement public à votre
quatrième recommandation...
M. Jacques (Olivier) : ...si
on garde, là, les listes comme elles le sont, ça va être difficile d'avoir
notre objectif de règles de positionnement qui favorisent les jeunes sur les
listes.
M. Nadeau-Dubois : Je
comprends bien cela. Je veux vous entendre également sur le financement... en
fait, sur la campagne référendaire. Vous parlez de financement public à votre
quatrième recommandation, vous parlez d'augmenter le financement public pour
les groupes souhaitant faire campagne pour ou contre la campagne référendaire.
Juste pour bien comprendre votre recommandation, est-ce que vous parlez là des
camps officiels, parce que les amendements déposés par la ministre instaurent
un camp du oui et un camp du non reconnu par le DGEQ ou vous parlez des tiers
qui, en vertu de ces mêmes amendements-là, pourraient aussi faire campagne puis
auraient une limite de dépenses? Est-ce que vous demandez qu'il y ait du
financement public pour les tiers ou plus de financement public pour les camps
officiels du oui et du non?
M. Diallo (Daye) :
Normalement, chez Force Jeunesse, comme je vous disais, pour un souci de clarté
et de transparence, on est... on serait plus pour un financement officiel des
camps du oui et du non, qui seraient officiellement financés et qui seraient
officiellement étiquetés, et qui auraient une voix claire sur la question pour
la transmettre au Québécois.
M. Nadeau-Dubois : En ce
moment, c'est un peu moins que 1 million de dollars. Vous, vous
souhaiteriez qu'il y ait davantage d'argent à l'intérieur de chaque camp pour
financer la campagne référendaire?
M. Diallo (Daye) : Vous avez
dit combien?
M. Nadeau-Dubois : C'est à peu
près un peu moins qu'un million. En ce moment, c'est 850 000 à peu près.
M. Diallo (Daye) : J'avais
entendu 8 millions. J'étais... C'est beaucoup d'argent, ça.
M. Nadeau-Dubois : Non, c'est
un peu moins que 1 million. À peu près 850 000.
M. Diallo (Daye) : Oui, on
serait... On considère que pour une question aussi importante pour la vitalité
du Québec et du système démocratique du Québec, 1 million, c'est très peu
d'argent pour la question.
M. Nadeau-Dubois : O.K. Quelle
est votre position sur le nombre de députés? Vous n'en avez pas parlé. Si, en
tentant de trouver ce fameux équilibre que, je pense, on tente tous de trouver
ici entre différentes formes de proportionnalité, entre différents principes
démocratiques, si une des voies c'était d'augmenter le nombre de députés,
est-ce que vous y verriez un inconvénient majeur?
M. Jacques (Olivier) : Pas du
tout.
M. Nadeau-Dubois : Ça a le
mérite d'être clair. Merci beaucoup.
M. Diallo (Daye) : Mais je
tiens quand même à préciser qu'il a fallu faire des choix parce
qu'effectivement il y a eu toute la réflexion portée sur comment augmenter la
proportionnalité du mode de scrutin québécois, puis on a pensé aussi à la
question d'augmenter le nombre de députés, mais on n'a pas finalement choisi
cette option-là, mais c'est quelque chose à laquelle on a réfléchi et qui
serait possible parce qu'effectivement il y a... si je me rappelle bien notre
statistique, depuis les années 1980, le nombre de députés n'a pas augmenté, au
Québec. On est toujours à 125 députés, puis il y aurait peut-être quelque chose
à faire là.
M. Jacques (Olivier) : Puis on
ne voulait pas vous proposer un mémoire avec huit recommandations qui allaient
dans tous les sens, donc on en a choisi une, mais il y a d'autres possibilités,
définitivement.
M. Diallo (Daye) : Choisir
ses batailles.
M. Nadeau-Dubois : Vous avez
choisi vos batailles. Voilà, c'est ça.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Marie-Victorin,
s'il vous plaît.
Mme Fournier
: Merci
beaucoup pour votre présentation. Merci de ces points si importants que vous
amenez concernant la représentation des jeunes à l'Assemblée nationale. Vous
savez, pour cette législature-ci, nous sommes 17 % de députés âgés de
moins de 40 ans, mais, en fait, on représente 30 % de la population
québécoise, à peu près, donc c'est vraiment nécessaire. Au-delà de la question
de la réforme du mode de scrutin, est-ce que, à l'instar de certains groupes de
défense des droits des femmes, est-ce que vous êtes en faveur d'une loi sur la
représentativité des jeunes à l'Assemblée nationale?
M. Diallo (Daye) : Oui. Oui.
Comme tout à l'heure, de manière à très claire, on est pour une loi claire pour
la représentativité... pour la représentation des jeunes à l'Assemblée
nationale. Puis, comme je le disais tout à l'heure, je tiens quand même à le
répéter, chez Force Jeunesse, on est pour une... pour plus de présence féminine
à l'Assemblée nationale, pour une meilleure représentativité. On n'a pas porté
ces points-là dans notre mémoire, mais on supporte ces groupes-là qui demandent
qu'il y ait une parité homme-femme puis qu'il y ait une plus grande
représentation des différents groupes sociaux du Québec à l'Assemblée
nationale.
Mme Fournier
: Merci
beaucoup. Maintenant, en ce qui concerne les objectifs plus globaux du projet
de loi, vous avez dit que, pour vous, votre but, c'était de réduire au maximum
l'indice de distorsions dans le projet de loi, donc le collègue de Gouin a
parlé de la fameuse prime au vainqueur, qui, effectivement, n'aide pas à se
rapprocher de l'objectif. De la part du gouvernement, on entend que c'est pour
des raisons de stabilité des gouvernements, ce qui est quand même un peu
curieux, considérant qu'il existe la mesure d'encadrement des motions de
censure qui serait possible d'utiliser pour arriver aux mêmes fins. Donc,
seriez-vous favorables à l'implantation d'une telle mesure dans le projet de
loi?
M. Jacques (Olivier) : Oui.
Mme Fournier
:
Trouvez-vous que ça serait une bonne solution de rechange aux primes aux
vainqueurs?
M. Jacques (Olivier) : Oui.
Mme Fournier
: Très
bien. Merci beaucoup.
M. Diallo (Daye) : Ça a le
mérite d'être clair.
Le Président (M.
Bachand) : Alors, sur cet grand degré d'efficacité, merci
beaucoup de votre participation en commission. La commission suspend ses
travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 54)
14 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 heures)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon après-midi,
bienvenue. La Commission des institutions reprend ses travaux. Comme vous
savez, je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de pouvoir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Rappel du mandat : La commission est
réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions
publiques sur le projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de
scrutin.
Cet après-midi, nous allons entendre,
entre autres, les personnes et groupes suivants : M. Henri Milner,
chercheur invité au Département de science politique de l'Université de Montréal,
M. Stéphane Rouillon, directeur au Centre de recherche informatique de
Montréal...
15 h (version non révisée)
Le Président
(M. Bachand) : ...afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 39, Loi
établissant un nouveau mode de scrutin. Cet après-midi, nous allons entendre entre
autres les personnes des groupes suivants : M. Henry Milner,
chercheur invité au département de science politique de l'Université de
Montréal, M. Stéphane Rouillon, directeur au Centre de recherche informatique
de Montréal, M. Marc-André Bodet, professeur agréé au département de la
science politique de l'Université Laval.
Mais nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui
les représentants d'Élections Québec. Alors, bienvenue, c'est un grand plaisir.
Alors, je vous cède la parole pour 10 minutes, et après ça on aura un
échange avec les membres de la commission. Alors, M. Reid, vous avez la
parole.
M. Reid
(Pierre) : Ah! Bien, M. le Président, Mmes, MM. les membres de
la commission, d'abord, je tiens à vous remercier de m'avoir invité à
participer aux consultations particulières sur le projet de loi n° 39. Je
suis accompagné, cet après-midi, de Me Lucie Fiset, qui est la directrice du
financement politique et des affaires juridiques, qui est à ma gauche, de
Mme Catherine Lagacé, qui est secrétaire général, ainsi
M. Jean-François Blanchet, qui est le directeur des opérations
électorales.
Le projet de loi n° 39 propose de
remplacer le mode de scrutin majoritaire uninominal actuel par un mode de
scrutin mixte avec compensation régionale. Un tel changement requiert d'importantes
modifications à la Loi électorale et a des répercussions sur l'ensemble des
processus électoraux qui sont sous ma responsabilité.
La Loi électorale prévoit que le Directeur
général des élections peut être consulté par le gouvernement sur toute
législation à caractère électoral. Conformément à un décret pris par le gouvernement
en janvier 2019, mon équipe a fourni, au cours de la dernière année, son expertise
sur les questions liées à l'organisation et à la tenue des élections et sur les
impacts techniques d'un nouveau mode de scrutin ainsi que sur ses délais de
mise en oeuvre.
La fonction que j'occupe exige que mon
équipe et moi fassions preuve d'impartialité et de neutralité. Pour cette
raison, les échanges que nous avons eus n'ont jamais porté sur le choix du mode
de scrutin envisagé par le gouvernement ni sur toute autre question de nature
politique.
Le projet de loi n° 39 propose
également la tenue d'un référendum sur le mode de scrutin. Le gouvernement a
déposé, en décembre dernier, une série d'amendements à ce projet de loi qui
prescrivent le cadre légal retenu pour un référendum qui aurait lieu lors de la
prochaine élection générale prévue le 3 octobre 2022, et là encore
nous avons fourni notre expertise. La semaine dernière, j'ai transmis à la
commission un mémoire sur le projet de loi n° 39 qui, je le souhaite, nous
permettra d'avoir une compréhension commune des effets des dispositions de ce
projet de loi sur les processus électoraux et sur l'administration des
élections.
Ce mémoire décrit, par exemple, le
processus de répartition des sièges de circonscriptions et de régions, et à cet
effet mon équipe a réalisé une simulation de cette répartition entre les
régions électorales en fonction des données de la liste électorale du mois
d'octobre dernier. Les résultats de la simulation sont présentés dans notre
mémoire. Le mémoire illustre également, à partir d'un exemple fictif, la
mécanique d'attribution des sièges aux candidates et aux candidats de régions,
ce qui représente le volet compensatoire du mode de scrutin proposé. Le mémoire
précise aussi les principaux changements qu'apporte le projet de loi n° 39
aux différents volets de l'administration des élections, et plusieurs recommandations
concernant la réforme du mode de scrutin, le cadre référendaire, de même que
l'administration plus générale de notre système électoral.
J'aimerais vous faire part de mes
réflexions quant à certaines dispositions du projet de loi n° 39 qui concernent
les candidatures et la parité entre les hommes et les femmes. Certaines
personnes ayant comparu devant la présente commission ont soulevé la
possibilité de permettre la double candidature dans le cadre d'une élection
tenue selon le nouveau mode de scrutin. Je souhaite vous sensibiliser aux
conséquences d'un tel choix principalement en ce qui concerne l'encadrement des
dépenses électorales.
Il m'importe de rappeler que les grands
principes qui sous-tendent les règles en cette matière sont l'équité et la
transparence, d'où l'importance du contrôle des dépenses électorales et de la
limite devant être respectée, ainsi que l'obligation de reddition de comptes
juste et complète reflétant la réalité. Si la double candidature est permise,
nous devrons nous assurer que ces grands principes seront respectés afin de
garantir l'intégrité du processus électoral. Une analyse des règles actuelles
s'imposerait, et mon équipe est évidemment disposée à collaborer à cet
exercice.
Le projet de loi introduit deux nouvelles
obligations pour les partis politiques : la production d'un énoncé
indiquant les objectifs que se fixe le parti quant au nombre de femmes et
d'hommes qu'il entend présenter à l'élection, et la production d'un rapport qui
rend compte de l'atteinte de ces objectifs. Ces obligations s'apparentent à
l'une des recommandations que nous avons formulé dans l'étude Femmes et
politique publiée en 2014. Nous proposions alors que les partis produisent
un plan visant à favoriser une meilleure représentation des femmes au sein de
leurs candidatures et de leurs élus.
Le projet de loi prévoit notamment que, si
un parti politique ne produit pas l'énoncé ou le rapport dans des délais
établis, ou si ces documents ne contiennent pas les informations prescrites, le
Directeur général des élections peut retirer l'autorisation de ce parti. Si le
retrait d'autorisation survenait au cours de la période électorale, les
personnes candidates de ce parti devraient alors faire campagne comme candidats
indépendants et ils devraient respecter les responsabilités qui y sont
associées en matière de financement politique et de gestion des dépenses
électorales. Si le retrait de l'autorisation avait lieu après la période
électorale, les députés élus sous la bannière du parti politique devraient
siéger...
M. Reid (Pierre) :
...les personnes candidates de ce parti devraient alors faire campagne comme
candidats indépendants et ils devraient respecter les responsabilités qui y
sont associées en matière de financement politique et de gestion des dépenses
électorales. Si le retrait de l'autorisation avait lieu après la période
électorale, les députés élus sous la bannière du parti politique devraient
siéger comme indépendants à l'Assemblée nationale.
Considérant que le retrait de
l'autorisation est une sanction liée aux exigences légales touchant le
financement politique, j'estime qu'afin de respecter la cohérence de la Loi
électorale, le retrait d'autorisation ne devrait pas constituer une sanction
applicable à la production de cet énoncé et de ce rapport. Je tiens à rappeler
que cette sanction ne concerne pas l'atteinte des objectifs que se fixe le
parti politique quant à la proportion de femmes parmi ses candidatures, il vise
uniquement la production de l'énoncé ou du rapport ainsi que leur dépôt dans
les délais prévus. Même si le projet de loi n° 39 ne définit pas
d'objectif minimal pour les partis politiques en matière de parité, j'invite
les partis à porter une attention particulière au rang qu'occuperont les
candidates sur leurs listes régionales, sans négliger les candidates dans les
circonscriptions. Plus généralement, j'encourage les partis politiques à
recruter des candidates et des candidats aux profils divers, ce qui peut
enrichir les débats politiques et, ultimement, inciter davantage de personnes à
exercer leur droit de vote.
Concernant le cadre spécifique proposé
pour la tenue d'un référendum sur le mode de scrutin simultanément à une
élection générale, je souhaite vous faire part de mes préoccupations à l'égard
du processus de désignation des camps référendaires et des moyens financiers
dont ils disposeraient pour effectuer une campagne référendaire nationale. Il
m'importe également de vous exposer ma vision quant à l'information aux
électrices et aux électeurs dans ce contexte référendaire.
Le projet de loi n° 39 prévoit que
j'aie la responsabilité de désigner les deux camps référendaires qui
représenteront les deux options selon certains critères établis. Toujours selon
le projet de loi, une évaluation qualitative des demandes soumises est nécessaire
afin de rendre une décision. Évidemment, nous mettrons tout en oeuvre afin que
ce processus soit le plus transparent possible et qu'il soit réalisé de façon
objective. Toutefois, afin d'éviter toute impression de partialité du Directeur
général des élections dans ce processus, je suis d'avis que le mécanisme de
désignation des camps référendaires devrait exclure toute forme d'évaluation
qualitative des demandes admissibles. Nous sommes naturellement disposés à
participer à une réflexion à cet égard afin de trouver d'autres pistes de
solution.
En ce qui concerne les moyens financiers
dont disposeront les camps référendaires, le projet de loi prévoit un
financement public de 850 000 $ pour chaque camp. Les camps pourront
recueillir des contributions d'un maximum de 200 $ par électeur ou
électrice à partir du 1er février 2022. Nous ne pouvons évidemment pas
prévoir les sommes qui seront ainsi recueillies par les camps référendaires,
mais n'oublions pas que ces mêmes électeurs pourront contribuer à un parti
politique pour un montant similaire au cours de la même période. À titre de
comparaison avec le financement qui a été accordé lors du dernier référendum,
en 1995, en considérant également le montant maximal que pourra dépenser un
camp référendaire, soit 1,5 million de dollars durant une campagne de cinq
mois, je me permets d'affirmer que les moyens financiers des camps
référendaires sont limités. Lors du référendum de 1995, chaque camp avait reçu
une subvention d'un peu plus de 2,5 millions pour une période référendaire
de 29 jours.
L'information est un facteur déterminant
de la participation électorale. Le mode de scrutin est un sujet avec lequel de
nombreux électeurs sont peu familiers. Le fait que le référendum soit prévu en
même temps qu'une élection générale pose un défi additionnel en matière
d'information aux électrices et aux électeurs. Le projet de loi n° 39
prévoit que le Directeur général des élections doit mener une campagne
d'information publique concernant la tenue du référendum sur la réforme du mode
de scrutin et qu'il doit faire toute publicité qu'il juge nécessaire. C'est
pourquoi, dans le cadre de ce référendum, en plus de l'information habituelle
que je communique aux électeurs, par exemple sur les modalités de vote
offertes, et les jours, et les heures pour voter, j'entends diffuser à travers
le Québec une campagne d'information publique qui explique les modalités du
référendum, du mode de scrutin actuel et du nouveau mode de scrutin proposé.
Les électeurs et les électrices doivent avoir accès à une information non
partisane et objective décrivant ces modes de scrutin. Il appartiendra aux
camps référendaires d'exposer les arguments en faveur et en défaveur du nouveau
mode de scrutin soumis au référendum.
• (15 h 10) •
En terminant, je souhaite, par les
recommandations présentées dans le mémoire qui vous a été remis, vous fournir
des pistes de réflexion et d'amélioration pour le projet de loi n° 39.
Elles visent à assurer le bon déroulement des opérations nécessaires à la tenue
du référendum qu'il prévoit ainsi qu'à l'organisation d'une élection sous un
nouveau mode de scrutin. Plusieurs recommandations formulées dans ce mémoire
ont également pour but d'améliorer le processus électoral, et ce,
indépendamment d'une réforme du mode de scrutin. Je veux m'assurer avec mon
équipe que les personnes candidates, les partis politiques et les autres
acteurs, par exemple ceux qui seront au coeur de la campagne référendaire,
soient adéquatement informés et outillés pour...
M. Reid
(Pierre) : ...dans son mémoire ont également pour but
d'améliorer les processus électoral, et ce, indépendamment d'une réforme du
mode de scrutin. Je veux m'assurer avec mon équipe que les personnes
candidates, les partis politiques et les autres acteurs, par exemple ceux qui
seront au coeur de la campagne référendaire, soient adéquatement informés et
outillés pour agir dans le respect des règles établies. Les électrices et les
électeurs étant au coeur de nos préoccupations, je veillerai avec mon équipe à
ce qu'ils aient facilement accès à toute l'information leur permettant
d'exercer leur droit de vote de façon éclairée, que ce soit dans le cadre d'un
référendum ou lors des premières élections tenues sous un nouveau mode de
scrutin. Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, M. le directeur général. Mme la
ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci d'être présent. Votre rapport est certainement important. Vous
allez être au coeur, naturellement, de l'application de ce nouveau mode de
scrutin si tant est qu'on y parvienne. Plusieurs... Je vais peut-être... Votre
mémoire est quand même assez bien étoffé. Beaucoup de technicalités. Donc, je
ne veux pas aborder les technicalités de façon particulière. Je pense que ce
n'est pas l'objectif, et j'ai peu de temps. Donc, je vais peut-être mettre
l'accent sur certains aspects. Plusieurs groupes qui... Pardon. À la page 59
de votre mémoire entre autres, vous dites : «Aussi, le cadre référendaire
proposé par le gouvernement pour la tenue de scrutins simultanés ne pose pas
d'enjeu majeur d'application», selon le DGE, naturellement. Vous mentionnez le
fait que la qualité d'électeurs soit la même et que l'exercice du vote se fasse
selon les mêmes modalités et lors d'une seule visite facilite grandement
l'administration des scrutins. Donc, vous ne voyez pas d'enjeu technique à
tenir un référendum en même temps qu'une élection. C'est exact?
M. Reid
(Pierre) : Oui. Il n'y a pas d'enjeu.
Mme LeBel : O.K. Compte
tenu de tout ça, on nous a... Certains groupes nous ont fait part, surtout dans
le cadre d'un référendum, et surtout quand on parle d'un changement de mode de
scrutin qui peut quand même être assez... bon, qui est très important, mais
qu'il faut expliquer à la population, il est prévu, dans le projet de loi, que
vous ayez une obligation d'informer, d'informer de façon objective,
naturellement, sur les modalités, et non pas de prendre position, on comprend
très bien... je comprends très bien la nuance. Mais les groupes nous ont parlé
de cette importance-là, que l'information, à tout le moins, sur les deux modes
proposés... parce que ce qu'on propose, dans le fond, c'est de maintenir le
statu quo, le mode actuel, ou d'aller vers un autre mode tel que présenté dans
le projet de loi. Et beaucoup nous ont fait part de l'importance de cette
information-là.
Je vais me permettre de citer un article
de LaPresse, mais je veux voir ce que vous en dites,
l'article de Fanny Lévesque), qui dit que... elle paraphrase, naturellement,
mais je veux un petit peu avoir votre input là-dessus. Elle dit : «Le DGEQ
souligne, dans son mémoire, que la réforme anticipée implique plusieurs
changements importants — bon, je pense qu'on est tous d'accord — et
qu'il devra prendre soin de les communiquer adéquatement. Selon lui, la Loi
électorale actuelle ainsi que les changements prévus dans le projet de loi
n° 39 ne sont pas suffisants pour lui permettre de remplir adéquatement
son rôle en matière d'information. Il réclame une plus grande latitude en
proposant que les moyens de communication à sa disposition ne soient plus
précisés dans la loi, ce qui lui offrirait davantage de flexibilité. Selon lui,
la loi actuelle l'empêche de suivre l'évolution normale des moyens de communication.»
Alors, comme on a un souci que vous ayez
l'espace ou la capacité d'informer adéquatement, quels sont... peut-être nous
entretenir plus précisément des modalités que vous voudriez voir modifiées ou
qu'est-ce qu'on pourrait faire pour vous faciliter la tâche en matière
d'information.
M. Reid (Pierre) :
En fait, si... il y a peut-être deux volets. Pour le volet de tenir un
référendum et une élection en même temps, je dirais, il n'y a pas d'enjeu,
parce que... Si ce n'est le défi, comme je l'ai lu précédemment, de bien
informer les électeurs... il est vrai que la campagne référendaire va quand
même débuter avant la période électorale, et on mettra tous les... on trouvera
tous les moyens nécessaires pour bien informer les électeurs et les électrices.
L'article auquel vous référez... c'est parce qu'il y a également des
recommandations qu'on a déjà faites et qu'on ferait même en l'absence, là,
d'une réforme du mode de scrutin. C'est que la Loi électorale, elle est très
prescriptive sur les moyens, on doit envoyer une carte d'avis, on doit envoyer
un manuel à... elle est très prescriptive, et ce qu'on demande, c'est de
laisser au Directeur général des élections plus de flexibilité dans les moyens
pour informer autant les partis politiques que les électeurs et les électrices.
En gros, c'était un peu ça... Oui?
Mme LeBel : À titre
d'information, puis pour illustrer... parce qu'on... vous connaissez très bien
votre travail, peut-être que pour les gens, c'est moins concret. Qu'est-ce que
la loi actuelle, et même le projet de loi n° 39 avec les modifications,
vous empêcherait de faire comme campagne d'information ou comme moyen
d'information qui pourrait être approprié dans le cas d'un référendum?
M. Reid (Pierre) :
Bien, je vais vous donner...
Mme LeBel : À titre d'exemple,
là.
M. Reid (Pierre) :
Oui. Bien, en fait, un référendum, c'est que... si on nous laisse, dans le
fond, là... s'il n'y a pas de... c'est les moyens qui sont prévus dans la loi,
et lorsque... quand on regarde les recommandations que je propose, on suggère
des choses, de remplacer, de ne pas s'en tenir aux moyens, mais c'est une
obligation d'informer. Je vais citer une recommandation qu'on fait depuis, je
pense, trois ans, en période électorale, et ça, je... c'est sur le terrain, il
y a des électeurs, des électrices qui m'avaient formulé cette idée...
M. Reid (Pierre) :
...les recommandations que je propose, on suggère des choses, de remplacer, de
ne pas s'en tenir aux moyens, mais c'est une obligation d'informer. Je vais
citer une recommandation qu'on fait depuis, je pense, trois ans. En période
électorale, et ça, c'est sur le terrain, il y a des électeurs, électrices qui
m'avaient formulé cette idée aussi, c'était d'avoir une vitrine d'information
des candidats et des candidates sur notre site, que les candidats et
candidates, dans une circonscription, puissent afficher avec photos et également
leurs propres textes sur leurs projets, leurs engagements afin de faciliter
pour les électeurs, les électrices de l'accès à l'information. Parce que, je
pense, le sondage qu'on a réalité au lendemain des élections de 2018, si ma
mémoire est bonne, c'est plus du tiers, ce n'est pas 35 % des gens qui se
seraient abstenus d'aller voter par un manque d'information, et déjà un manque
d'information à l'égard des candidats et candidates de leur circonscription.
C'est un exemple, là, d'avoir une vitrine... de nous permettre, ce que la loi
ne permet pas actuellement.
Mme LeBel : O.K. Donc, c'est
nonobstant la réforme du mode de scrutin, vous pensez que la loi actuelle ne
vous donne pas assez de latitude en termes de communication de l'information,
c'est ça?
M. Reid (Pierre) :
Oui.
Mme LeBel : O.K. Parfait.
Merci. Peut-être aller plus précisément dans le mode de scrutin lui-même, une
des recommandations que vous faites, je pense, la première même est à l'effet
que la Loi électorale ne définisse pas de circonscription, que la CRE ait le
pouvoir de délimiter l'ensemble des circonscriptions. La position que nous
avons choisie d'adopter, c'est qu'on est partis des 17 régions, effectivement.
Si on regarde la philosophie du projet de loi tel que présenté, je l'ai
expliqué à plusieurs reprises, donc il y a eu des arbitrages à faire, le poids
des régions versus la proportionnalité, mais ce n'est pas là-dedans que je veux
vous amener, là. Je veux vous dire qu'on a décidé de partir des 17 régions
administratives puis, effectivement, le projet de loi demande à ce que les
circonscriptions soient dessinées à l'intérieur des régions administratives
actuelles, ce qui ferait en sorte que les régions administratives ne
bougeraient pas dans le temps.
Ce que vous semblez proposer, je veux
juste simplement comprendre la proposition, c'est donner donc plus de latitude
à la CRE pour la définition des 80 circonscriptions avec l'utilisation d'un
quotient provincial plutôt qu'un quotient régional. Et on pourrait penser que
le quotient, l'utilisation d'un quotient provincial pourrait favoriser, bon,
peut-être la légalité du vote de l'électeur, effectivement, parce que le poids
démographique des circonscriptions et des régions serait peut-être mieux
balancé, mais ça pourrait faire en sorte que les limites de ces régions-là
ainsi que les limites des circonscriptions... puis on connaît les tollés que ça
peut soulever ou les commentaires que ça peut soulever à chaque fois qu'on
élimine une circonscription pour des raisons démographiques, ou qu'on change
les limitations d'une circonscription. Je viens d'ailleurs de la
circonscription de Champlain qui, à l'élection précédente, n'était pas la même
et à l'élection précédente, on était cinq, donc ça fait partie de ça, et c'est
très... ça devient... c'est toujours un débat qui est assez enflammé, disons-le
comme ça.
Mais ce que vous proposez donc... pourrait
faire en sorte, est-ce que je me trompe, pourrait fait en sorte que, par des
mouvements démographiques, les circonscriptions changent, mais les
délimitations des régions aussi, pour les fins des députés de région, évoluent
au fil de la démographie, là, je ne veux pas être simpliste, mais ça semble
être ça.
M. Reid (Pierre) :
Bien, en fait, le choix qui a été fait, c'est d'établir, dans la loi, les
régions administratives et le travail qu'aura à faire, à ce moment-là, la
Commission de la représentation électorale, c'est que, dans chaque région, ce
sera de dessiner, dans le fond , les circonscriptions électorales, mais à
partir d'une moyenne régionale, donc de la moyenne de la région. Ce que vous
amenez, je pense, c'est à la fin, là, je pense, du chapitre qui concerne la
carte électorale, il y a peut-être la façon aussi, compte tenu de l'évolution
démographique, est-ce que, si on utilisait la moyenne provinciale, donc pour
assurer une représentation effective qu'un vote, par exemple, à Montréal,
autant qu'un vote en Gaspésie, mais là, à ce moment-là, ce serait qu'on aurait
à délimiter l'ensemble des 125 circonscriptions et, par la suite, les regrouper
dans un nombre de régions.
Mme LeBel : Mais ce qui
pourrait faire théoriquement... ce qui pourrait donner l'effet théorique que la
ligne des régions... parce que, nous, on les a fixées, les 17 régions, ce sont
les régions administratives telles qu'on les connaît, et on demande donc
effectivement que la CRE dessine les circonscriptions à l'intérieur des limites
des régions, ce qui éviterait d'avoir, comme on a aussi au fédéral, une
circonscription à cheval sur deux régions, ou le contraire, deux
circonscriptions... une circonscription qui peut être à cheval, exactement le
bon terme, à cheval sur deux régions — je ne sais pas pourquoi je
doute de moi-même comme ça. Mais il pourrait y avoir aussi une mouvance dans le
dessin des régions administratives comme telles, donc la limite des régions
pourrait bouger avec ce que vous proposez, théoriquement, là.
• (15 h 20) •
M. Reid (Pierre) :
En fait, c'est deux façons de voir...
Mme LeBel : ...le bon terme, à
cheval sur deux régions. Je ne sais pas pourquoi je doute de moi-même comme ça.
Mais il pourrait y avoir aussi une mouvance dans le dessin des régions
administratives comme telles, donc la limite des régions pourrait bouger avec
ce que vous proposez, et théoriquement, là.
M. Reid (Pierre) :
Bien, en fait, c'est deux façons de voir. Dans le fond, avec ce qui est
proposé, les régions sont fixes, sont établies dans la loi, et s'il y avait une
modification des régions administratives, bien... administrativement, donc, si
le gouvernement décidait de définir les limites des régions, bien, la loi, il
faudrait qu'elle s'adapte, ou si on vit... on continuerait de vivre avec les
17.
Mais, dans le fond, l'une ou l'autre, je
pense que ça dépend du choix qui est fait. Pour nous, on est capables de
travailler avec les deux modèles, si on peut dire, là. C'est que l'un... je
veux dire, ce qu'on dit, à un moment donné, si on a à déterminer l'ensemble des
125 circonscriptions, on va travailler sur une moyenne nationale ou
provinciale, comme on le fait actuellement, et c'est pour ça, d'ailleurs, je
pense qu'il y a quatre ou cinq circonscriptions, au Québec, qui chevauchent
deux régions administratives, à moins que je ne me trompe. Mais là n'est...
Dans le fond, notre travail, c'est qu'on va le faire à l'intérieur de chaque
circonscription et... ce qui ne nous empêchera pas d'avoir... d'établir des
circonscriptions d'exception. Et je pense que le travail de la circonscription
ne sera pas plus compliqué qu'il peut l'être, actuellement.
Mme LeBel : Merci. Bon, je ne
vous demande pas nécessairement d'être précis à la virgule près, là, mais de
façon générale, combien coûte une élection?
M. Reid (Pierre) :
Pardon?
Mme LeBel : De façon générale,
combien coûte une élection?
M. Reid (Pierre) :
L'élection de... 2018, je ne suis... a coûté presque 94 millions.
Mme LeBel : 94 millions.
Parfait. Un référendum... est-ce qu'on peut anticiper qu'un référendum seul
coûte à peu près la même chose?
M. Reid (Pierre) :
Non. Seul, c'est à peu près 77 millions ou 78 millions.
Mme LeBel : Le référendum.
M. Reid (Pierre) :
Le référendum seul.
Mme LeBel : O.K., et quand...
M. Reid (Pierre) :
Si vous le combinez avec l'élection, on ajoute presque 12 millions.
Mme LeBel : Donc, ce serait...
le coût du référendum, finalement, combiné devient 12 millions au lieu de
77 millions si on le fait seul, c'est ça?
M. Reid (Pierre) :
En fait, le 12 millions va s'ajouter au 94 millions.
Mme LeBel : Donc, le coût du
référendum, quand on le combine à une élection, est de 12 millions, mais
si on le fait à l'extérieur d'une élection, il est de 77 millions, c'est
ça?
M. Reid (Pierre) :
C'est ça.
Mme LeBel : Parfait, merci. À
moins que mes collègues aient d'autres questions, ça va aller pour moi.
Le Président (M.
Bachand) : Ça va du côté ministériel? Alors, M. le député de
LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Merci, M.
le Président. Merci beaucoup, merci à vous d'être ici pour répondre à nos
questions. J'aimerais que l'on regarde justement à la page 11 de votre
mémoire, j'ai trouvé un extrait particulièrement intéressant, puis l'objectif
de la commission parlementaire, ici, dans les auditions, c'est justement, c'est
de prévoir le travail qui est amont lorsqu'on sera en article par article.
C'est important de savoir c'est quoi les défis, les écueils, les drapeaux
rouges. Si on ne le sait pas, on pourrait faire fausse route. Page 11, à
partir du deuxième paragraphe... je vais prendre le temps de citer les deux
paragraphes.
«Le mécanisme de répartition a tendance à
allouer un nombre de sièges plus élevé aux régions peu populeuses par rapport à
leur poids électoral. C'est le cas, notamment, des régions de
l'Abitibi-Témiscamingue, de la Côte-Nord et du Centre-du-Québec, qui, selon les
données de la liste électorale permanente, obtiennent chacune un siège de plus
que leur poids électoral. À l'inverse, la méthode tend à allouer moins de
sièges aux régions plus populeuses, telles que Montréal et Montérégie, qui
obtiennent respectivement trois et deux sièges de moins que leur poids
électoral.»
Le deuxième paragraphe, là, je le cite, il
est particulièrement important : «Toutefois, précisons que toute méthode
de répartition aurait pour effet d'avantager ou de désavantager certaines
régions, notamment parce que le projet de loi prévoit que les sièges sont
répartis entre des régions électorales fixes dont la population varie de
manière importante.» Fin de la citation.
Autrement dit, ce que vous proposez, et
j'aimerais ça que vous l'expliquiez, qui est une autre façon de fonctionner et
qui nous permet de diminuer cet écueil-là, on sait qu'il n'y a pas de système
parfait, là, mais il y a quand même un écueil dans ce qui est proposé dans le
projet de loi n° 39, ce serait, plutôt que de
s'encarcaner, j'utilise, puis ce n'est pas nécessairement péjoratif, là, de se
limiter dans les 17 régions administratives, de faire l'exercice par la
Commission de représentation électorale, la CRE, d'établir les
20 circonscriptions, et après ça de regrouper les circonscriptions à
travers d'entités régionales, ce qui ferait en sorte qu'on pourrait mieux
respecter les critères de l'établissement d'une circonscription à savoir les
données sociologiques et ainsi de suite, là.
M. Reid (Pierre) :
En fait, ce que vous dites, c'est qu'il y avait... dans le fond, là, on
déterminerait les régions administratives une fois qu'on aurait établi les
circonscriptions.
M. Tanguay
: Oui, ça,
ça pourrait être une approche selon vous?
M. Reid (Pierre) :
Oui, bien, c'est un choix. Ici, dans le fond... Le choix qui a été fait dans le
projet de loi, c'est que... puis c'est pour ça, quand on dit que le mécanisme
de répartition a tendance à allouer un nombre de sièges plus élevé aux régions
peu populeuses, c'est sûr qu'en partant, on attribue déjà un siège, là, de
circonscription aux 17 régions, plus les Îles-de-la-Madeleine, 18, et on
fait la même chose du côté des circonscriptions de... en fait, des régions, où
on alloue un...
M. Reid (Pierre) :
...peu populeuse, c'est sûr qu'en partant, on attribue déjà un siège, là, de circonscription
aux 17 régions, plus les Îles-de-la-Madeleine, 18, et on fait la même chose du
côté des circonscriptions... en fait, des régions, où on alloue un siège par
région, 16, parce qu'on exclut le Nord-du-Québec.
Mais c'est un choix. L'un ou l'autre,
c'est l'alternative, là, dont on parlait plus tôt, mais, comme je vous dis, pour
la Commission de la représentation électorale, que ce soit le choix proposé
dans le projet de loi n° 39 ou bien le choix dont vous faisiez part et
qu'on indique dans notre mémoire, l'un ou l'autre, la commission est en mesure
de travailler, là... de réaliser son mandat.
M. Tanguay
: Et... Mon
point n'est pas sur l'aspect technique, dans le genre l'impossibilité technique
de le faire. Mon point n'est pas là-dessus. Mon point, et je fais du pouce sur
cette lancée-là, et je vais d'abondant dans votre mémoire, à la page 13, on
peut voir que vous avez compté les écarts types par région de plus ou moins
25 %. Autrement dit, à l'heure actuelle au Québec, sauf exception puis il
y en a, des exceptions, mais allons d'abord... établissons d'abord la règle,
c'est qu'une circonscription, comparée à une autre... comparée à la moyenne,
pardon, nombre d'électeurs divisé par 125 ne peut pas — c'est le
principe général — être plus basse ou plus élevée que 25 %, des
variations plus ou moins 25 % sur le nombre d'électeurs, comparé à la
moyenne provinciale.
Le projet de loi ferait des moyennes
régionales et je pense que c'est ce que traduit votre tableau à la... tableau,
figure 5, à la page 13, et on peut voir que la moyenne régionale, je prends
l'exemple d'Abitibi-Témiscamingue puis je vais la comparer avec Montérégie.
L'Abitibi-Témiscamingue a, en moyenne, dans la région, évidemment, calculé sur
les données disponibles, là, 56 848 électeurs.
Si l'on fait le moins 25 % de ça,
parce que c'est la moyenne régionale qui va être déterminante pour évaluer plus
ou moins 25. Si je prends la moyenne inférieure, c'est-à-dire la limite
inférieure en Abitibi, 75 % de 56 848, donc, moins 25 %, c'est,
en moyenne... ça, en gros, c'est 42 600. Et si je fais le plus 25 %
de Montérégie, qui a une moyenne, au départ, de 84 589, le 125 %, le
plus 25 %, est à 105 700, j'arrondis.
Donc, au Québec, et j'aimerais vous
entendre là-dessus, ça a toujours été un discours excessivement important et
déterminant, que mon vote, qu'il soit en Abitibi ou en Montérégie, ait
sensiblement... ça ne sera jamais du un-pour-un, mais ait sensiblement le même
poids. Or, la limite inférieure en Abitibi est à 42 600 et la limite
supérieure en Montérégie sera de 105 700. Vous voyez là, qu'il y a un écueil
où, à la situation actuelle où c'est plus ou moins 25 % pour les 125, là,
on est rendus dans des écarts excessivement énormes, on est à au-dessus de
100 % lorsqu'on compare les possibilités d'écart admissibles.
J'aimerais vous entendre là-dessus, sur...
La représentativité, c'est le pivot de notre loi électorale, que mon vote en
Abitibi et mon vote en Montérégie soient comparativement avec le même poids.
Est-ce...
M. Reid (Pierre) :
Mais je vous dirais que c'est la situation actuelle, indépendamment de la réforme
du mode de scrutin. En fait, le défi... Quand regarde le Québec, c'est un grand
territoire, avec des populations qui sont dispersées sur le territoire et que
c'est à ce moment que... Et lorsqu'on vient pour établir une carte électorale,
en essayant de, je dirais de tendre vers une représentation effective des
électeurs et des électrices, bien vient un moment où c'est difficile et c'est
pour ça qu'on en arrive à avoir à établir des circonscriptions d'exception,
donc des circonscriptions qui sont, en fait, en bas du 25 %. On en a six
au Québec, sept avec les Îles-de-la-Madeleine, là, vous êtes encore plus loin,
là. On est dans du 80, moins 87...
Une voix
: 77.
M. Reid (Pierre) :
Moins 77 %. Mais c'est la réalité, là...
M. Tanguay
: Oui, mais
êtes-vous d'accord avec moi que là, on exacerbe ces écarts-là par cette
approche-là? Les écarts vont être, de façon générale, beaucoup plus grands par
cette approche dite «régionale», force est de constater.
M. Reid (Pierre) :
Non.
Une voix
: C'est une
autre approche...
M. Reid (Pierre) :
C'est une autre approche, mais quand vous regardez les... En tout cas, les
simulations qu'on a pu faire et même que vous pouvez voir dans notre mémoire,
la répartition des sièges ou des... ça ne change pas tant que ça.
M. Tanguay
: ...ma question
de bord. N'êtes-vous pas d'accord avec moi que les écarts permissibles seront beaucoup
plus grands?
• (15 h 30) •
M. Reid (Pierre) :
En fait, quand vous regardez ce qui est proposé, Montréal perd trois... En
fait, Montréal a trois circonscriptions de moins et je pense que la Montérégie,
je pense, une circonscription de moins et c'est... quatre, et ces
circonscriptions-là iront en Outaouais, en...
15 h 30 (version non révisée)
M. Reid (Pierre) :
...ce qui est proposé. Montréal perd trois... en fait, Montréal a trois circonscriptions
de moins et je pense que la Montérégie, je pense... une circonscription de moins.
Et ces... quatre... et ces circonscriptions-là iront en Outaouais, en... je
pense c'est dans le Centre-du-Québec, en Mauricie, puis peut-être Lanaudière.
M. Tanguay
: M. Reid,
question très simple, n'êtes-vous pas d'accord avec moi que, tel qu'illustré,
les écarts permissibles seront beaucoup plus grands sur ce modèle que ce n'est
le cas actuellement, les plus ou moins 25 %? Je pense qu'il faut dire oui,
je vois votre conseillère à votre droite, là.
M. Reid (Pierre) :
Oui. En fait, c'est ça...
M. Tanguay
: C'est
parce que si on se... pas d'accord là-dessus, là, c'est un dialogue de sourds.
Je vous respecte, M. Reid, mais il faut que vous me donniez au moins ça, là.
M. Reid (Pierre) :
Bien, c'est parce que la première étape, c'est... Oui.
M. Tanguay
: C'est
parce que si on ne s'entend pas là-dessus...
M. Reid (Pierre) :
C'est parce que, ce qu'on va faire, c'est qu'on va répartir... Dans le fond, la
première... qui est faite... l'étape qu'on fait, c'est qu'on répartit dans le
fond les sièges selon le poids électoral, là.
M. Tanguay
: Il me
reste 1 min 30 s. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Mais
accordez-moi une chose.
M. Reid (Pierre) :
Oui.
M. Tanguay
: C'est que
la loi va permettre, peut-être en théorie... peut-être là où on diverge, mais
la loi va permettre des écarts beaucoup plus grands entre une circonscription
et l'autre, oui, sur le calcul des plus ou moins 25 %. Je viens de vous en
faire la démonstration. Alors, virez ça de bord. N'est-il pas vrai que si
d'aventure une circonscription serait légalement admissible en vertu du nouveau
modèle... en Abitibi, si elle avait 42 600 électeurs, oui, parce qu'elle
serait dans la mesure du moins 25 %, et qu'en Montérégie, il pourrait y
avoir 105 000 électeurs, oui, parce qu'elle serait... N'est-il pas vrai
qu'on pourrait avoir, théoriquement, de telles situations?
M. Reid (Pierre) :
En fait, moi, je vous dirais que... j'aimerais mieux faire le calcul puis
vérifier, mais je pense qu'en raison du fait que les régions sont fixes, là, en
fait, on vient dans le fond de... que ce soit la Montérégie, que ce soit
l'Abitibi ou les autres, c'est qu'on va devoir travailler à l'intérieur, là, de
la région.
M. Tanguay
: La
possibilité existe, la possibilité existe.
M. Reid (Pierre) :
Actuellement, ce qu'on peut... ce qu'on veut faire en vue de favoriser soit les
communautés naturelles et l'équilibre au niveau du nombre d'électeurs entre les
circonscriptions, et c'est pour ça que je mentionnais tantôt que dans... sur la
carte électorale actuelle, il y a quatre ou cinq circonscriptions qui viennent
chevaucher deux...
M. Tanguay
: Mais c'est
théoriquement possible, ce qui n'est pas... sous ce modèle-là, que ce qui n'est
pas le cas actuellement. N'êtes-vous pas... vous êtes d'accord avec ça?
M. Reid (Pierre) :
Actuellement, peut-être que les écarts sont moins élevés.
M. Tanguay
: Non, mais,
théoriquement, techniquement, possible.
M. Reid (Pierre) :
C'est possible.
M. Tanguay
: Oui.
Dernière question, il me reste quelques secondes, merci, M. le Président,
quelques secondes... Est-ce que les députés sortants et les candidats aux
élections générales 2022 pourraient selon vous faire des dépenses électorales
dans le contexte du référendum, oui ou non?
M. Reid (Pierre) :
Ils pourront en faire avant le début de la période référendaire, mais s'ils en
font en... Ils ne peuvent pas en faire en période référendaire. Ils pourront en
faire en période électorale, mais à ce moment-là, s'ils font des dépenses en
période électorale, ce sera considéré comme des dépenses électorales.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Merci, M.
Reid, merci d'être avec nous aujourd'hui, merci de partager votre expertise. Un
de vos prédécesseurs, M. Blanchet, estimait en 2005 que la mise en place d'une
réforme du mode de scrutin prenait entre 18 et 24 mois. Rapidement, est-ce que
vous partagez cette évaluation-là?
M. Reid (Pierre) :
À l'époque... Ça, on a regardé cette question-là, oui. À l'époque, le 18 à 24
mois... puis pour avoir parlé à M. Blanchet, il dit : Écoute, on a mis...
j'ai pu dire deux ans, mais il dit : Aujourd'hui, c'est avec... Entre
autres, là, quand on regarde les systèmes informatiques que nous avons, c'est
là qu'il y a un délai qui s'accroît par rapport à autrefois. Mais...
M. Nadeau-Dubois : Est-ce que
vous êtes d'accord, est-ce que c'est 18 à 24 mois? Sinon, c'est... quel serait
le délai de la mise en place d'une éventuelle réforme?
M. Reid (Pierre) :
C'est 30 mois minimum. Oui.
M. Nadeau-Dubois : 30 mois
minimum.
M. Reid (Pierre) :
Oui.
M. Nadeau-Dubois : Parfait.
M. Reid (Pierre) :
Bien, ce qu'on a déjà... dans le fond, on vous a déjà informés de ça.
M. Nadeau-Dubois : Parfait.
Merci. J'ai peu de temps, je m'excuse, je ne veux pas vous brusquer.
M. Reid (Pierre) :
Oui, non.
M. Nadeau-Dubois : Dans la
mouture actuelle du projet de loi, le projet de loi prévoit que vous commencez
à travailler à la mise en place de la réforme après un éventuel référendum
positif en 2022, qui serait simultané à l'élection. Si, à cette élection, était
élu un gouvernement minoritaire, dont la durée de vie moyenne au Québec est de
18 mois, ne serions-nous pas en danger qu'on n'ait pas le temps d'appliquer la
réforme du mode de scrutin en vue du scrutin subséquent?
M. Reid (Pierre) :
Oui.
M. Nadeau-Dubois : Ce serait
un risque réel, donc, que la réforme du mode de scrutin ne serait pas valide
pour le scrutin suivant celui de 2022, dans un scénario de gouvernement
minoritaire, et seulement au mode de scrutin... au scrutin suivant celui-là?
M. Reid (Pierre) :En fait, il y a un délai de 27 mois qu'on aurait de besoin au
lendemain de la sanction, c'est... parce que c'est la carte électorale, là. La
carte électorale, si on maintient les dispositions telles qu'elles existent ou
proposées, c'est deux ans, c'est 24 mois.
M. Nadeau-Dubois : Donc, il
faut espérer un gouvernement majoritaire en 2002 pour s'assurer que 2022 soit
le dernier scrutin mené sous le mode de scrutin actuel?
• (15 h 40) •
M. Reid (Pierre) :
Bien, vous comprendrez, je n'y peux rien, quant au futur gouvernement...
Mais...
M. Nadeau-Dubois : ...donc il
faut espérer un gouvernement majoritaire en 2022 pour s'assurer que 2002 soit
le dernier scrutin mené sous le mode de scrutin actuel.
M. Reid (Pierre) :
Bien, vous comprendrez, je n'y peux rien quant au futur gouvernement, mais
c'est à la population de décider à ce moment-là.
Mais, nous, c'est sûr qu'en bas de 27 mois, ce serait impossible.
M. Nadeau-Dubois : Donc, si on
voulait s'assurer que le scrutin, suivant celui de 2022, soit sur le nouveau mode
de scrutin, la décision logique, ce serait de tenir le référendum plus tôt, question
d'avoir le temps entre ce dit référendum et le scrutin post-2022 de l'appliquer
la réforme, de la mettre en place.
M. Reid (Pierre) :
C'est sûr que, s'il y a un référendum qui pouvait se tenir soit en 2021 ou en
2022, au printemps 2022, c'est possible.
M. Nadeau-Dubois : Ça nous
rajoute du temps. Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Rimouski, s'il vous plaît.
M. LeBel : Merci, M. le
Président. Bonjour. Effectivement, je pense qu'il faudrait faire le référendum
plus vite, faire un référendum en plein été, à travers les barbecues puis la
piscine, je pense que ce n'est pas une bonne idée, mais faire un référendum
avant, ça vaut les 167 millions. Vous avez dit, en 1995, les deux camps
avaient 2 millions pour 29 jours, vous dites là quatre mois, 850 000 par camp, vous avez fait... vous trouvez que ce
n'est pas une bonne idée, j'ai compris que vous trouvez que ce n'est pas assez.
J'aimerais ça savoir pourquoi, qu'est-ce que vous en pensez.
Puis l'autre
élément, je vais poser deux questions, c'est, à votre proposition 20, vous dites
qu'il faut enlever toute évaluation qualitative des demandes d'OBNL, j'aimerais
ça que vous m'en parliez davantage, parce que là le projet de loi fait en sorte
que les élus ne pourraient pas participer à la gestion des camps ou
participer... et là vous voulez enlever toute l'évaluation qualitative de
demandes. Ça fait que comment on peut s'assurer que les camps vont être bien
représentés, comment vous voyez ça? Ça fait que c'est deux questions, oui, les
budgets aux camps et l'évaluation qualitative.
M.
Reid (Pierre) : Bien, les budgets, naturellement,
ma préoccupation et, je pense, ça peut être la préoccupation que vous avez sûrement,
c'est que les électeurs, les électrices soient bien informés et qu'on puisse en
débattre en toute connaissance de cause. Donc, si chaque camp référendaire veut
vraiment lancer une campagne d'information avec les moyens que nous avons aujourd'hui,
qui sont quand même différents que 1995, bien, il nous apparaît que le montant
de 850 000 $ nous apparaît insuffisant. Bien sûr, nous aurons l'occasion
de faire une campagne nationale pour expliquer deux modes de scrutin, mais,
nous, on est d'avis que 850 000 $, là, c'est insuffisant.
Par rapport à l'évaluation
qualitative, bien, en fait, s'il y a seulement deux groupes qui se présentent,
un de chaque côté, il n'y a pas d'évaluation. Ils sont admissibles selon les
critères prévus dans la loi. Bon. On les reconnaît, il n'y a pas d'évaluation. S'il
y en a plus d'un, bien là, on va les inviter... je vais les inviter à se
fusionner. S'ils refusent de se fusionner, là encore, je devrai faire une évaluation
de chacun. Et l'évaluation, c'est qu'on en arrive, là, à évaluer, par exemple,
la capacité des gens à faire une campagne. Il y a une appréciation que je dois
faire. Et, là encore, c'est sûr qu'on pourrait mettre en place ce à quoi on a
pensé, un peu comme lorsqu'on lance un appel d'offres pour l'octroi d'un
contrat, avoir des comités de sélection, avoir des critères puis établir un
pointage, là. Mais, moi, je vous dirais que, quant à moi, il y a d'autres
pistes de solution. Et on comprend que... puis l'autre, ce qui est prévu dans
le projet, s'il n'y a aucun groupe qui se présente, je lance un appel aux
électeurs qui manifesteraient un intérêt à former un groupe pour chaque camp
référendaire.
Le
Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée de Marie-Victorin, s'il vous
plaît.
Mme Fournier
:
Merci beaucoup pour votre présentation fort intéressante. Considérant que la
campagne référendaire a débuté... débuterait, en vertu du projet de loi, le 1er
mai 2022, est-ce que vous considérez que ce sera suffisant pour bien faire
connaître, dans le fond, les deux positions?
M.
Reid (Pierre) : Bien, moi, je pense
que je n'attendrai pas le 1er mai pour commencer la campagne, je pense qu'on va
élaborer une stratégie pour, quand même, commencer à sensibiliser les gens et
pour vraiment qu'ils aient toute l'information nécessaire, mais, moi, je pense
que... puis de se retrouver les bons moyens pour être capables de les
rejoindre. C'est un défi de communication de bien faire comprendre les
modalités des deux modes de scrutin pour que les gens en arrivent à faire le choix
le plus éclairé possible.
Mme Fournier
:
Vous allez commencer la campagne d'information tout de suite après l'adoption
du projet de loi, on peut le comprendre.
M.
Reid (Pierre) : Bien, en fait, il
faudra élaborer, là, il faudra... naturellement, il n'y a rien qui se fera tant
que la loi ne sera pas sanctionnée, mais ça ne nous empêche pas de réfléchir à
des choses.
Mme Fournier
:
Merci beaucoup. Puis comptez-vous mener une campagne contre la désinformation,
pendant la campagne référendaire, dans l'éventualité où, par exemple, un camp
ou un autre...
M. Reid (Pierre) :
... naturellement, il n'y a rien qui se fera tant que la loi ne sera pas
sanctionnée, mais ça ne nous empêche pas de réfléchir à des choses.
Mme Fournier
: Merci
beaucoup. Puis comptez-vous mener une campagne contre la désinformation,
pendant la campagne référendaire, dans l'éventualité où, par exemple, un camp
ou un autre amenait, par exemple, des publicités qui pourraient être
fallacieuses sur le mode de scrutin?
M. Reid (Pierre) :
Non, la seule... J'aurais à intervenir pour la mauvaise information s'il y avait
de l'information qui circulait, par ailleurs, par rapport aux modalités du référendum,
les jours de vote et tout. Mais quant à... Je pense que vous parlez de mauvaise
information sur ce qu'est le mode... un mode de scrutin, non, je
n'interviendrai... Ça, ça appartiendrait aux deux camps référendaires à faire
les ajustements nécessaires, là, pour s'il y a de fausses informations sur les
modalités d'un mode de scrutin ou l'autre.
Mme Fournier
: O.K.
Donc, vous n'interviendrez pas sur les... je veux dire, de façon neutre par
rapport aux modalités des modes de scrutin proposés.
M. Reid (Pierre) :
Bien, la seule chose, c'est que les gens... Dans le fond, ce que je pense que
je pourrais faire, c'est que les gens seraient invités à venir sur probablement
notre site ou de regarder... de lire, là, comment est-ce qu'on a pu...
Comment... Quelles sont les modalités de chaque mode de scrutin.
Mme Fournier
: Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Sur ce, merci infiniment à votre participation très
éclairable. Alors, sur ce, je suspends les travaux quelques instants. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à 15 h 41)
(Reprise à 15 h 46)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci. La commission reprend ses travaux. Nous accueillons maintenant M. Henry
Milner, chercheur invité au Département de science politique de l'Université de
Montréal. Je rappelle que M. Milner, on n'a pas de document écrit, mais M.
Milner est avec nous pour une période de 10 minutes d'exposé et, après ça, une
période d'échange. La parole est à vous. Merci.
M. Milner (Henry) : Bonjour, tout
le monde. Je suis bien content d'être invité ici. Et, comme vous avez dit, je
n'ai pas un document écrit que j'ai à distribuer, peut-être parce que j'ai fait
l'erreur d'écouter beaucoup d'autres présentations et même de lire cela pas
mal, beaucoup, où je n'ai pas assisté. Et j'ai décidé, au lieu de revenir sur beaucoup
de choses, le mémoire complet, je vais vraiment insister sur les éléments que
je trouve les plus intéressants, le plus importants, où je peux, à cause de mes
connaissances, je suis spécialiste sur les pays européens, surtout les pays
européens de l'Ouest et du Nord, et je connais pas mal les systèmes de mode de
scrutin différent dans les pays démocratiques. Donc, le plus possible, faire
des échanges autour de mes expériences, mes connaissances et poser les
questions qui sont, à mon avis, les plus pertinentes à ce moment-là.
Donc, je veux juste insister sur un
principe, d'abord, un mode de scrutin, ce n'est pas pour les élus, c'est pour
les électeurs. Et, pour moi, le principe fondamental, c'est que chaque
électeur, le plus possible, a la possibilité d'affecter le résultat. Et dans
notre système, si vous habitez dans un territoire où votre parti est faible, en
effet, votre vote ne compte pas. Et le principe fondamental d'une réforme sur
la base proportionnelle, c'est que chaque vote compte. Votre vote, qui ne veut
rien dire dans votre comté, va quand même aider à élire quelqu'un, quelqu'une
dans votre région. O.K. Il y a des limites si votre parti ne peut gagner que
1 % de vote, il y a des limites, mais le principe est là, et il ne faut
jamais oublier ce principe-là.
Bon. Et, moi, je connais très bien le
système compensatoire, j'ai été même en Nouvelle-Zélande, au moment que ce
système-là était mis en application, et aussi j'ai visité plusieurs fois
l'Écosse, l'Allemagne, etc. Donc, je connais ces systèmes-là, pas simplement en
principe, mais dans l'expérience concrète. Donc, sur le projet de loi
n° 39, d'abord, je veux dire qu'il y a un progrès important, même si je
suis pas mal critique comme vous allez voir, c'est quand même une amélioration
sur ce qu'on a maintenant et surtout à cause de ce principe-là. Il y a plus
d'électeurs québécois qui, maintenant, se trouvent dans une situation où le
vote compte pour rien, parce qu'ils se trouvent dans un district où leur
candidat, leur parti n'a aucune chance à gagner, auront une meilleure chance
d'affecter le résultat, et ça, c'est déjà un progrès.
• (15 h 50) •
À partir de cette constatation, je vais
commencer un peu mes critiques, mes critiques sont pas mal connues, j'ai
travaillé avec le MDN sur son propre mémoire et j'ai été impliqué
même — vous voyez mon âge — à des projets de réforme il y
a... pendant les derniers 35 ans. Donc, je commencerais avec les deux
amendements, d'après moi, fondamentaux, ça ne va pas vous surprendre. D'abord,
le 10 %, le seuil de 10 %, c'est vraiment inacceptable, ça existe...
M. Milner (Henry) : ...dans
les derniers 35 ans.
Donc, je commencerais avec les deux amendements,
d'après moi, fondamentaux. Ça ne va pas vous surprendre, d'abord, le 10 %,
le seuil de 10 %, c'est vraiment inacceptable. Ça existe... Le seul pays
où il y a des élections où ça existe que je connais, c'est la Turquie. Et
c'était introduit exactement... par le gouvernement qui n'est pas très, très démocratique,
on peut dire, pour... parce qu'il y avait des partis d'opposition qui ne
pouvaient pas chercher 10 %. Alors, ce n'était pas compliqué, ils l'ont
fait pour des raisons tout à fait partisanes. Et c'est le seul. Dans les autres
pays où il y a un seuil, ce n'est jamais plus que 5 %. Donc, d'où vient le
10 %? Je dois dire que j'ai trouvé ça surprenant. Le deuxième, encore une
fois, et ça, c'est plus compliqué, c'est cette idée-là d'une prime au
vainqueur. Ça, c'est aussi assez original. J'ai essayé de trouver un autre pays
démocratique où ça se trouve, je n'ai pas trouvé.
Et donc je vais essayer un peu d'expliquer
comment ça fonctionne et pourquoi ce n'est pas nécessaire. D'abord, il faut
savoir qu'on a déjà une prime au vainqueur sans la prime au vainqueur
artificielle qu'on impose dans le projet n° 39. C'est
parce que les partis qui sont plus forts, quand il n'y a qu'un tiers des sièges
de compensation, quand il y a des régions avec peu de sièges, il y a déjà une
prime au vainqueur. J'ai regardé l'Écosse, qui est le pays avec un système le
plus proche à ce qu'on propose, où il y a neuf régions, dans chaque région, il
y a 16 sièges, neuf sièges de district et sept sièges de compensation. Et dans
les deux dernières élections, le parti nationaliste écossais a gagné... dans un
cas, ils ont cherché 44 % de votes et la majorité des sièges, dans l'autre
cas, ils ont cherché 46 % des votes et trois sièges... une minorité de
trois sièges. Donc, dans notre système, dans le système compensatoire, avec des
régions, surtout des régions qui ne sont pas très grandes, il y a déjà une
prime au vainqueur, et ça, c'est légitime, parce que ce n'est pas fait pour
avoir une prime au vainqueur, mais pour d'autres raisons, pour permettre aux
gens d'avoir des régions qui correspondent à la réalité. Donc, qu'on ajoute une
prime au vainqueur artificielle...
Et moi, j'ai fait une expérience,
simplement pour regarder, si le vote, il y a deux ans, avait été... on avait
utilisé la prime au vainqueur, dans une des régions — j'ai pris la
région Laurentides, où il y a 10 sièges — si on avait imposé la prime
au vainqueur avec les résultats de 2018, le résultat aurait été le
suivant : le parti CAQ a gagné 47 % de votes, aurait gagné déjà six
parce que la dernière fois ils ont gagné tous les 10, donc cette fois-ci, ils
auraient gagné six, O.K.? Et les autres quatre votes, quatre sièges, auront...
le septième siège aurait... Excusez-moi. Le neuvième siège aurait allé à la
CAQ, pas aux libéraux. Les libéraux, même avec 14 % de votes, n'auront pas
gagné, aucun siège. 14 % avec 10 sièges, aucun siège pour les libéraux,
sept sièges pour la CAQ, avec 40 sur 10, avec 47 %. C'est ça que ça donne
avec les résultats qu'on a eus la dernière fois. Est-ce que ça, c'est légitime?
Je ne comprends pas. Oui, il y a une prime au vainqueur, on a vu, la CAQ gagne
déjà six sièges avec 46 %. Pourquoi leur donner un autre siège pour...
enlever un siège aux libéraux pour donner à la CAQ avec ce moyen artificiel?
Ça, je ne comprends pas du tout.
Alors, ce sont mes deux... vraiment mes
deux critiques les plus importantes. Aussi, je ne comprends pas du tout
pourquoi on doit avoir... on ne peut pas avoir deux types de... excusez-moi,
c'est quoi, l'expression que je cherche? Qu'on élise séparément... non, que les
candidats peuvent être des candidats de liste et des candidats du district.
C'est... Encore une fois, je ne...
M. Milner (Henry) : ...c'est
quoi l'expression que je cherche? Qu'on élise séparément les... Non. Que les
candidats peuvent être des candidats de liste et des candidats du district,
c'est... Encore une fois, je ne comprends pas du tout. Et il y a... ça ne donne
rien. Et c'est beaucoup mieux, maintenant, que chaque candidat, même pour un
parti qui n'a aucune chance de gagner un siège de district, chaque candidat
soit invité de se présenter dans un district. Cette personne-là ne sera pas
élue, mais, quand même, aura une identité concrète dans un des districts de la
région. Donc, mais, si c'est... si on parle de quelqu'un qui représente un
petit parti qui peut chercher, disons, 15 %, 20 % de vote, c'est bon
que cette personne-là soit élue au niveau de la région parce que le parti...
l'appui est distribué d'une façon assez large. Donc... Alors, ça, c'est le
troisième élément, donc, sur lequel j'ai des problèmes avec la proposition.
J'aurais d'autres, mais je n'ai pas le temps, là...
Le Président (M.
Bachand) : On va profiter d'abord... d'ailleurs, de la période
d'échange qui débute avec Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci. Merci, M.
Milner. Je vais peut-être vous laisser, même, compléter un peu, parce que
j'aurais quelques questions sur les points que vous avez déjà soulevés, mais si
vous voulez, peut-être, compléter votre présentation, s'il y a d'autres points
que vous vouliez soulever, là. Vous avez fait... parlé du seuil, de la formule
de calcul, de la double candidature. Est-ce qu'il y a un autre élément que vous
aimeriez mettre sur la table, à notre connaissance?
M. Milner (Henry) : Bon, tout
ce que j'aurais voulu ajouter, qui est un peu à côté, mais c'est l'argument
qu'on va entendre demain, ça veut dire que pour protéger les francophones de
Québec, comme minorité en Amérique du Nord, il faut garder le système actuel
qui favorise... qui défavorise le Parti libéral, qui est le parti appuyé par
les non-francophones. C'est ça que M. Dufour va vous dire, et je veux... j'ai
écrit pourquoi c'est une mauvaise idée. Je n'ai pas vraiment le temps, mais je
veux m'inscrire en faux. Si on commence à regarder un mode de scrutin parce que
ça va... ça favorise un groupe et pas un autre, je peux vous donner des
exemples d'autres pays où c'est exactement... qui se fait, et, ça, ça met une
menace à la démocratie, et, ces jours-ci, on voit des menaces à la démocratie
dans plusieurs pays traditionnellement démocratiques. Alors, j'espère que le
Québec ne va pas aller dans cette direction.
Mme LeBel : M. Milner, prenez
le temps. Prenez le temps de l'expliquer, parce que ça m'intéresse parce
qu'effectivement un des arguments étant qu'on va fragiliser le gouvernement du
Québec parce qu'on aura entre autres des gouvernements minoritaires de façon
plus fréquente, ce qui... un peu, une des conséquences potentielles d'une mode
de scrutin. Et on nous dit, je n'en suis pas, mais on nous dit, entre autres,
on va l'entendre demain, vous avez raison, que, face au gouvernement fédéral,
la légitimité du gouvernement québécois s'en trouverait fragilisée dans nos
négociations avec le fédéral. Personnellement, je ne vois pas en quoi, parce
que c'est un gouvernement qui est quand même légitimement élu, mais j'aimerais
que vous développiez, parce que vous voulez vous inscrire en faux, mais
j'aimerais que vous développiez sur cet aspect-là, s'il vous plaît.
• (16 heures) •
M. Milner (Henry) : Bien,
d'abord, je vais dire une chose : qu'avec la réforme, si M. Dufour est
correct avec ses arguments, ça va... c'est vraiment le Parti libéral qui va
gagner avec les réformes. Donc, j'aurais posé la question aux représentants du
Parti libéral, est-ce que vous n'avez pas, jamais, pensé au fait qu'avec une
réforme, vos chances sont meilleures, et que, dans la situation actuelle, donc,
souvent, vous n'êtes... vous êtes mal représentés? Donc, ça, c'est une autre...
tout un autre argument que j'aurais pu entrer, mais, pour répondre à vous, pour
moi, si un gouvernement est élu avec 39 %, même si vous avez la majorité
des sièges ou non, tout le monde, dans notre... à Ottawa, le sait, ce n'est pas
un secret. Donc, et si vous êtes élu, un gouvernement de coalition, avec
60 %, on le sait aussi, à Ottawa. Alors, l'argument qui dit qu'on est
affaibli parce que ce n'est pas un gouvernement majoritaire, à mon avis, on
n'aura pas... on aura plus de gouvernements avec une base plus de 50 %.
Ça, c'est fini. Toutes les sociétés modernes sont divisées, et, de voir un
gouvernement... un parti seul avec plus de 50 % d'appui, ce n'est plus le
cas. Donc, est-ce qu'une majorité artificielle, qui est simplement produite par
le mode de scrutin, est-ce que ça...
16 h (version non révisée)
M. Milner (Henry) :
...toutes les sociétés modernes sont divisées, et de voir un gouvernement d'un
parti seul avec plus de 50 % d'appui, ce n'est plus le cas. Donc, est-ce
qu'une majorité artificielle qui est simplement produite par le mode de
scrutin, est-ce que ça met... on peut aller à Ottawa dire : Ah! On est
très fort parce qu'avec notre 39 % on a 55 % des députés. À mon avis,
ça ne donne rien. C'est beaucoup mieux d'aller à Ottawa et dire : Regarde,
on représente 60 %, notre gouvernement de coalition, ou même, si ce n'est
pas une coalition, mais une entente entre plusieurs partis. Je pense que c'est
le contraire qui est le cas.
Mme LeBel : Vous avez
parlé de plusieurs points. Vous avez parlé du 10 %, le seuil. On en a...
Plusieurs personnes aussi ont adressé cette question-là. Si on met de côté,
pour fins de discussion, le 10 %, vous préconisez quel type de seuil? Je
sais que cinq... ce n'est jamais plus que 5 %. Certains nous ont dit
2 %, certains nous ont dit 3 %. Est-ce que vous pensez qu'à
5 %... parce que vous dites : Jamais plus de 5 % ailleurs...
est-ce que vous qu'à 5 % ça fait le travail entre... l'équilibre entre
laisser la place aux petits partis de se tailler une place, si je peux
l'exprimer ainsi, tout en mettant une certaine barrière à une émergence
peut-être trop précoce d'un courant de pensée, ou trop rapide d'un courant de
pensée qui n'aurait une prise assez solide dans la société, mais parviendrait,
si on ne mettait pas de seuil, à peut-être atteindre un siège à l'Assemblée
nationale? Est-ce que vous pensez que 5 % est quand même un point
d'équilibre qui pourrait être justifié?
M. Milner (Henry) : Pour
moi, c'est vivable. En tout... D'une certaine façon, c'est un faux débat parce
que, dans un système régional, il y a un seuil de soi. Ça veut dire que, dans
une région avec une vingtaine de députés, il y a un seuil de 7 %, quelque
chose comme ça, simplement parce que, sans 7 %, vous n'avez pas... vous ne
pouvez pas élire une députée de compensation. Dans le cas de Montréal, ça sera,
je ne sais pas exactement, si on regarde toute la situation comme elle est,
c'est peut-être 4 %, 5 %, je n'ai pas vérifié. Donc, d'une certaine
façon, c'est un faux débat, mais si je devais choisir un chiffre en général,
pour moi, le 4 %, qui est typique des pays nordiques, etc., je trouve que
c'est... je peux vivre facilement avec ça.
Mme LeBel : Parlez-nous,
peut-être... Bien, je vous ramène peut-être à une autre chose, et vous ne nous
en avez pas parlé. On a fait des choix, naturellement, un mode de scrutin tel
qu'on le propose et un changement tel qu'on le propose, ça demande souvent de
l'arbitrage et d'essayer de ramener un plus grand consensus possible, donc il y
a des choix qu'on doit être fait. Je ne vous apprendrai pas qu'il y a certains
choix qui favorisent la proportionnalité, d'autres favorisent d'autres
principes, comme la stabilité gouvernementale, le poids des régions, la
représentation, et, des fois, c'est au détriment, ultimement, peut-être, de la
proportionnalité.
Vous avez, dans une publication en 2004
qui s'intitulait Le point sur la réforme électorale dans les provinces
canadiennes,où se situe le Québec, vous disiez, dans cet article,
que vous vous montriez, bon, favorable à un mode de scrutin mixte proportionnel
comme aujourd'hui, avec compensation régionale, en disant, et je vous
cite : «Au Canada, les identités régionales qu'on observe dans les grandes
provinces sont fortes. Cela valide donc le choix d'un système de type écossais
ou gallois basé sur des régions.» Donc, vous y défendiez, à ce moment-là, les
listes régionales fermées, ce qu'on offre naturellement, les 17 régions
administratives que l'on propose de maintenir, choix naturellement, et je le
dis d'entrée de jeu, qui a un effet sur l'effet proportionnel ou sur la
distribution. Neuf régions auraient été meilleures pour la proportionnalité,
mais catastrophiques, dans mon sens, pour l'identité régionale. C'est mon point
de vue. Deux votes par électeur, c'est ce que nous préconisons effectivement.
«Qu'il revienne aux membres des partis plutôt qu'à leurs dirigeants...», bon,
ça, je pense, c'est plutôt marginal. Donc, je pense... j'ose prétendre ou
déduire de votre... du fait que vous n'avez pas relevé que ce sont des choix
qui sont appropriés dans le mode de scrutin.
M. Milner (Henry) :
...l'apport d'une double candidature, je trouve que c'est...
Mme LeBel : Mais on va
y... je veux vous donner aussi du temps, mais vous pouvez le faire dans le même
souffle, si vous voulez, là.
M. Milner (Henry) : O.K.
Sur la question de... je n'ai pas abordé la question des régions, ça veut dire
le nombre de régions, parce qu'en 10 minutes j'aurais utilisé toutes les
10 minutes parce que, ça, c'est compliqué. Comme vous dites, c'est des
arbitrages. Si on a moins de régions, ce sera plus proportionnel, mais ça,
l'identité régionale sera moins exprimée. Donc, ça prend des compromis, des
arbitrages. Moi, j'aurais préféré...
M. Milner (Henry) : …toutes
les 10 minutes, parce que ça, c'est compliqué. Comme vous dites, c'est des
arbitrages. Si on a moins de régions, ce sera plus proportionnel, mais ça…
l'identité régionale sera moins exprimée. Donc, ça prend des compromis, des
arbitrages. Moi, j'aurais préféré 14 régions. Moi aussi, je pense, avec les 17,
au moins, il faut probablement ajouter deux sièges à Montréal et un siège à la
Rive-Sud, quelque chose semblable. Parce que ce n'est pas… il n'y a aucune
raison, simplement à cause du mode de scrutin, de défavoriser ces deux
régions-là, parce qu'elles ont plusieurs sièges. En effet, c'est simplement
l'application de la formule, le fait que ces endroits ont peu de sièges, il y a
moins de… et les… donc ils reçoivent moins, les autres reçoivent plus, et
l'effet, c'est qu'ils sont plus défavorisés. Donc, au moins, si on dit qu'il
faut garder les 17 au lieu d'aller avec les 14, peut-être quelque chose… on
parle des arbitrages, ajouter un ou deux sièges, ce n'est pas la fin du monde
non plus. Ça, c'est... mais comme je dis, ça, c'est des questions compliquées,
où il n'y a pas de noir et blanc, où il n'y a pas le clair. Pour moi, le
10 %, la prime du vainqueur, pour moi, c'est clair, etc.
Mme LeBel : Et la double
candidature, vous voulez nous en parler?
M. Milner (Henry) : Et la…?
Mme LeBel : Double
candidature.
M. Milner (Henry) : Oui.
Encore une fois, je ne vois aucune légitimité de cela, aucune logique derrière
cela.
Mme LeBel : O.K., mais je vous
ramène un argument, simplement pour vous donner l'opportunité d'y répondre. On
a entendu, j'ai entendu aussi dans mes consultations, le malaise avec la double
candidature. C'est peut-être plus un malaise théorique, mais c'est un malaise,
et on parle de faire un changement. Donc, on essaie d'éviter le plus de
malaises possible pour que les gens soient à l'aise dans cette
transformation-là, le malaise de faire en sorte que potentiellement quelqu'un
qui n'a pas réussi à obtenir, et je ne dirai plus perdre, mais qui n'a pas
gagné le siège de circonscription, ce qui est bien différent, pourrait se
retrouver à entrer dans la région par le siège de liste, par la liste
régionale. Donc, il y a un certain malaise au niveau de la démocratie, si on
veut, parce que la personne a été…
Une voix
: Légitimité.
Mme LeBel : Légitimité, voilà…
de sa présence. Je vous soumets l'argument et j'aimerais peut-être que vous
nous fassiez part de votre opinion par rapport à ça. Et quels sont pour vous
les avantages d'une double candidature qu'on échapperait en l'interdisant?
M. Milner (Henry) : Bien,
d'abord, je connais des pays où on utilise… où on fait ça, et c'est
parfaitement normal. Il n'y a personne qui dit à lui : Ce n'est pas
légitime, parce qu'il n'a pas gagné dans son district, et donc ce n'est pas
légitime. Tout ce qu'on fait, c'est que dans ce cas-là il y a certains
candidats qui seront découragés de se présenter. Est-ce que vraiment… Pourquoi
décourager des personnes qui vraiment seront bienvenues? Ça, c'est une chose.
Deuxièmement, comme je dis, il est valable
d'encourager quelqu'un qui n'a aucune chance de gagner un siège, de quand même
se présenter… O.K., ça, c'est la double candidature, excuse-moi. Alors, comme…
si on dit à quelqu'un… Disons que je suis électeur et je vote dans mon
district. Vous, vous êtes les députés. Bon, vous êtes des bons députés, je vous
aime beaucoup, mais le moment est arrivé pour voter pour un autre parti. Ça n'a
rien à faire avec vous, ça n'a rien à faire avec votre compétence. Vous le
savez très bien. C'est une question de politique. Alors, si vous vous êtes
battu, bien, vous vous trouvez premier de liste, parce que vous êtes bien
connu, bien respecté dans votre région, et vous revenez à cause de cela. Qui,
parmi vos électeurs, va dire : Ah! c'est terrible, cette personne-là, on
ne l'a pas gardée, et regarde, il ou elle revient de la liste. Ils vont dire le
contraire. Ils disent : Ah! on est chanceux quand même que, oui, notre
vote était compté, parce qu'on a changé le… c'est le parti qui… on a voté
contre le parti, et le résultat, c'était que le parti a été affaibli. Mais le
fait que la personne, l'individu, revienne, c'est un atout, ce n'est pas
quelque chose de négatif.
Mme LeBel : Bien merci, merci
beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Bourassa-Sauvé,
s'il vous plaît.
Mme Robitaille : Merci, M. le
Président. Bonjour monsieur. Vous êtes pour ou contre la… vous êtes pour la
double candidature, alors, si je comprends bien?
M. Milner (Henry) : Oui...
• (16 h 10) •
Mme Robitaille : O.K. Moi, je
viens d'un comté qui est à Montréal, Montréal-Nord, Bourassa-Sauvé…
M. Milner (Henry) :
...chose de négatif.
Mme LeBel : Bien, merci. Merci
beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.
Mme Robitaille : Merci,
M. le Président. Bonjour, monsieur. Vous êtes pour ou contre la... Vous êtes
pour la double candidature, alors, si je comprends bien.
M. Milner (Henry) : Oui,
absolument.
Mme Robitaille : Moi, je
viens d'un comté qui est à Montréal, Montréal-Nord, Bourassa-Sauvé. Avec le projet
de loi, la région de Montréal perdrait trois sièges. C'est quand même
considérable. S'il y a un référendum, là, il va falloir travailler fort, ceux
qui veulent passer ce référendum-là parce qu'à Montréal on perd trois sièges,
je ne sais pas si les gens vont aimer ça beaucoup.
Vous dites : Il faut ajouter deux
sièges. Pourquoi deux sièges? Je voudrais comprendre. Je sais que c'est
compliqué, là, mais pourquoi... On en perd trois. Là, vous dites : On
voudrait en ajouter deux.
M. Milner (Henry) : Parce
que c'est une sorte de compromis, tu sais. Je sais qu'avec les sentiments,
etc., on... tu sais, on... Et on le sait, on ne veut pas ajouter trop de sièges,
etc. Regarde, je n'ai pas vraiment réfléchi, mais simplement, au moins, de
dire : Oui, il y a une perte qui... il faut s'adresser à cela. Est-ce que
ça prend les trois sièges, est-ce que...
Parce qu'une autre chose, c'est que ça
veut dire que, si vous dites : Il faut régler toute la perte, le risque,
c'est une autre... après, une autre... en regard de la population, il y a une
autre région qui arrive pour dire : Ah! on perd un demi-siège. Tu sais, on
perd un demi de... ou quelque chose.
Donc, si on dit : Oui, on va aider
maintenant, mais pas absolument pour que ça soit exactement... d'autres régions
peut-être ne vont pas dire : Ah! O.K., nous autres, on a perdu un petit
peu, mais on peut vivre avec ça. C'est simplement, encore une fois, des questions
d'arbitrage, de compromis, de trouver quelque chose vivable pour tout le monde.
Mme Robitaille : Donc, le
principe de proportionnalité, on... Le Québec, c'est particulier, hein, parce
que c'est immense. Et justement hier on avait quelqu'un, on avait un expert de
la Nouvelle-Zélande qui travaille aussi pour la proportionnelle en Angleterre,
et justement on comparait le Québec versus la Nouvelle-Zélande, l'Écosse, la
Bavière, les densités de population n'ont rien à voir, là.
Et donc l'expert nouvelle-zélandais nous
disait : Bien, en Nouvelle-Zélande, on a augmenté le nombre de
circonscriptions pour respecter ce principe-là de proportionnalité. Vous, vous
me dites : Bon, O.K., Montréal perd trois sièges, bon, on en rajouterait
deux, ça serait comme un compromis.
Mais est-ce que carrément, là, pour
respecter ce principe de proportionnalité là, il ne faudrait pas carrément
faire comme en Nouvelle-Zélande, ajouter des sièges? Vous êtes allé en
Nouvelle-Zélande, vous devez... je suis sûr que vous êtes très conscient de ça.
Est-ce que, tant qu'à faire, on ne devrait pas repenser et ajouter des sièges
pour justement que la proportionnalité soit bien respectée?
M. Milner (Henry) : Vous
savez, pour moi, c'est une question de deuxième niveau. Oui, j'aimerais voir
ça, mais je ne vais pas sacrifier la réforme pour quelque chose avec lequel on
peut vivre. Et c'est plus ou moins accepté au Québec qu'en comparaison avec
d'autres provinces canadiennes, pas avec la Nouvelle-Zélande, on a quand même
assez de députés, comparé avec la population des autres provinces, par exemple.
Donc, entrer dans ce débat-là, tu sais,
avec une, ou deux, ou trois qu'on peut ajouter, je pense qu'on n'entre pas
vraiment dans ce débat-là. Mais de penser qu'on peut avoir 200 députés, par exemple,
ou, tu sais, de vraiment augmenter le nombre comme ils ont fait en
Nouvelle-Zélande, je pense que c'est, comme on dit en anglais, c'est un
«non-starter».
Mme Robitaille : Mais on
change de... Comme disaient mes collègues durant les derniers jours, on change
de culture politique, c'est autre chose. On va... C'est nouveau, c'est très
nouveau, puis c'est une autre dynamique.
Est-ce que justement, pour respecter ce
principe-là de proportionnalité, puisque les autres provinces n'ont pas ça, elles
ont toujours le système uninominal à un tour, est-ce que justement, pour bien
le faire, on ne devrait pas carrément repenser notre carte électorale, ajouter
des circonscriptions et puis respecter ce principe-là? Comme ça, la région de
Montréal, bien, elle ne sentirait pas qu'elle perd quelque chose.
M. Milner (Henry) :
Alors, simplement, je vous dis : Allez chez vous, donc chez vos électeurs,
et dites : On va chercher un autre 75 députés, êtes-vous d'accord ou non?
S'ils sont d'accord, moi, je serai d'accord aussi.
Mme Robitaille :
Dites-moi, j'ai juste une question, vous étudiez... Vous avez étudié les
systèmes, les modes de scrutin partout en Europe, et tout ça. Est-ce que la
proportionnelle amène...
M. Milner (Henry) : ...d'accord,
moi, je serais d'accord aussi.
Mme Robitaille : Et
dites-moi... J'ai juste une question. Vous étudiez... Vous avez étudié les
systèmes, les modes de scrutin partout en Europe, et tout ça. Est-ce que la
proportionnelle amène la création de nouveaux partis? Est-ce que c'est un
phénomène qu'on peut voir apparaître, ça?
M. Milner (Henry) : Avec un
seuil de 4 %, 5 %, ça se fait, mais pas très souvent. Il y a aussi,
dans notre système, des nouveaux partis qui arrivent sans la proportionnelle.
Moi, j'étais toujours pour l'idée d'un seuil, tu sais, donc je n'aime, je
n'accepte pas l'idée de... qu'un parti qui n'a aucun appui doit profiter d'un
mode de scrutin qui va leur permettre, même avec, je ne sais pas, 1 % ou
moins de 1 %, d'avoir un député. Moi, je pense que ce parti-là devrait
trouver les moyens de chercher un appui légitime, un appui réel. Donc, c'est
pour ça que j'appuie le seuil.
Mme Robitaille : Le seuil à?
M. Milner (Henry) : Hein?
Mme Robitaille : À 4 %?
M. Milner (Henry) : Oui, quelque
chose comme 4 %. Quand vous avez un système régional, je vous rappelle, il
y a déjà un seuil automatique qui est dans une... Quand vous avez un système
national, c'est à ce moment-là qu'il faut mettre un seuil.
Mme Robitaille : Mais à
10 %? Est-ce que l'exercice en vaut la peine si on reste à 10 %?
M. Milner (Henry) : Moi, le
10 %, vraiment, comme j'ai dit... j'ai donné l'exemple de Turquie... c'est
très difficile à défendre, surtout... Si on n'avait que deux grands partis,
deux partis, bon, pas de problème, mais si on veut que... Quand même, des
partis arrivent qui représentent quelque chose de réel, d'imposer... de dire,
je ne sais pas, à un groupe qui veut vraiment s'organiser, qui représente des
idées importantes, qui... on va leur dire «bonne chance», on met ça à
10 %, c'est fini, vous n'avez... vous ne pouvez rien faire. Les députés
ici représentent des partis qui étaient... ou qui avaient un appui moins de
10 %. Ça ne fait pas longtemps. Est-ce que vraiment... Si, à ce moment-là,
il y avait un seuil de 10 %, est-ce que vous seriez ici autour de la
table, beaucoup entre vous? Oui, les deux... Tu sais, c'est quelque chose qui,
vraiment... C'est comme si c'est un autre «boys' club», et vous n'êtes pas
invité. C'est un peu ça.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il
vous plaît.
Mme Weil
:
...j'aimerais vous amener sur le terrain des référendums. On a parlé, donc,
est-ce qu'on le fait bien avant, un peu avant, en même temps, etc. La
Colombie-Britannique, l'Île-du-Prince-Édouard, ça n'a pas fonctionné, c'était
en même temps. Donc, j'aimerais avoir votre opinion sur... Premièrement, quand
on demande aux citoyens, actuellement... Je pose la question à tout le
monde : Saviez-vous qu'il y a actuellement un projet de loi pour revoir
notre système? «Non, je ne suis pas au courant.» Donc, la population ne sait
rien de ce dont on parle. Puis ici, on entend tellement d'experts, des gens qui
ont travaillé ça. On regarde l'historique de ça, c'est incroyable.
Donc, comment faire en sorte que... de
mettre la population à niveau? Donc, j'aimerais vous entendre sur cette
question de référendum avec un peu ça en tête. C'est-à-dire, vous y croyez
beaucoup, vous avez étudié ça. Comment ça... Pourquoi ça n'a pas marché en
Colombie-Britannique et à l'Île-du-Prince-Édouard?
M. Milner (Henry) : Bon,
Colombie-Britannique, ce qui était intéressant, c'est que les sondages, pendant
beaucoup de temps, étaient favorables, et soudainement, les sondages ont
changé, et le vote était très négatif. Pourquoi les sondages ont montré que le
vote... que ça a changé? Bien, une chose, c'est... les jeunes n'ont pas voté,
les plus vieux ont voté et ils sont plus conservateurs. Mais deuxièmement, il y
avait une campagne de salissage. On peut simplement penser... avec des dangers,
des dictatures, de toutes sortes de choses avec la réforme. C'était incroyable.
Et le fait qu'il y avait vraiment... La seule autorité pour corriger cela,
c'était les bénévoles pour le Oui. Il n'y avait pas une commission respectée,
avec les ressources pour remettre les choses et dire : Non, ce n'est pas
ça, c'est ça, et...
Mme Weil
: ...à quel
moment est-ce que vous recommanderiez de faire un référendum?
• (16 h 20) •
M. Milner (Henry) : En...
Moi, je suis un peu divisé sur cela parce qu'en principe je ne pense pas que
c'était nécessaire. Par contre, c'est un changement important, et ça prend de
la légitimité, et si... Ceux qui sont contre peuvent dire...
M. Milner (Henry) : ...je suis
un peu divisé sur cela, parce qu'en principe je ne pense pas que c'était nécessaire.
Par contre, c'est un changement important et ça prend de la légitimité et si...
ceux qui sont contre peuvent dire : Ah! ce n'est pas légitime, la population
n'a pas voulu, c'était imposé par les politiciens. Ce n'est pas un bon début.
Donc, le fait qu'il y a un référendum et, si c'est un référendum gagné par des
bons arguments avec une population renseignée, qui sait de quoi il s'agit, et
c'est ça, un défi très important. Mais ce n'est pas impossible même si notre
ami M. Piuze de Nouvelle-Zélande disait que ce n'était pas absolument
nécessaire d'avoir un référendum. Là-bas, ils ont eu des référendums qui
étaient gagnés par le Oui, par des bons arguments même quand les deux grands
partis étaient contre. Au début, ils étaient contre, après, ils ont accepté...
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Je dois passer la parole, désolé, au député
de Gouin. Désolé. M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Bonjour.
Très content de vous avoir avec nous aujourd'hui. Je vais aller dans le vif du
sujet. Un des arguments qu'on entend souvent, et je pense que la prochaine
personne, j'ai jeté un regard plutôt à notre prochaine invitée ici, je pense,
c'est un argument qui va nous être aussi présenté, alors c'est une préoccupation
qui va nous être présentée, c'est l'idée selon laquelle des systèmes électoraux
où il y a une composante de proportionnalité, ça tend à fragmenter le champ
politique, voir à le polariser. Et le professeur Marc-André Bodet, qui va vous
succéder à cette place, dit, dans son mémoire... pose la question
suivante : «Voulons-nous être pris dans des situations impossibles comme
les vivent les Allemands, les Danois, les Autrichiens, les Norvégiens, etc., en
disant qu'une réforme du mode de scrutin va, à cause des différents clivages au
sein de la société québécoise, plonger le Québec donc dans une situation
impossible? Ma question serait : Est-ce que vous jugez que ces pays-là
sont dans des situations impossibles? Et est-ce que c'est un risque que vous
voyez, vous aussi?
M. Milner (Henry) : Bien,
d'abord, vous allez poser la question au professeur, au Pr Bodet, je suis assez
surpris d'entendre cela parce que... et je connais ces pays-là, pas simplement
comme quelqu'un qui est académique, mais aussi j'ai vécu en Suède, je connais
très bien des pays-là, et ces pays-là, la citation qu'on vous donne, ça n'a
rien à faire avec ces pays-là. Les gens sont contents avec leur démocratie, la
démocratie fonctionne bien. Oui, il n'y a rien de parfait, parfois, ça prend du
temps pour former un gouvernement, parce que le résultat est très serré, donc
il faut former une coalition. Mais les élections ne viennent pas souvent, elles
sont comme nous. Alors, d'où vient cette idée-là que ça ne marche pas? Je ne
comprends pas.
Moi, je suis spécialiste surtout sur ces
pays-là, donc c'est un vécu parce que... et les gens trouvent que... si tu leur
demandais : Voulez-vous changer votre mode de scrutin? Voulez-vous plutôt
comme les Anglais, etc.? Ils ne sauront pas de quoi vous parler. Ils sont
habitués à cela, le système, d'après eux, fonctionne bien.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Rimouski, s'il vous
plaît.
M. LeBel : Merci, M. le
Président. Salut! À la réponse... tantôt, vous avez parlé, bon, de l'échec du
référendum en Colombie-Britannique, vous avez dit, il y avait un groupe de
bénévoles dans le camp du Oui, qui n'étaient peut-être pas assez outillés pour
répondre, puis ça aurait pris des spécialistes, ça. Tantôt, le DGEQ parlait des
deux camps, il disait qu'il fallait exclure toute forme d'évaluation
qualitative des demandes d'OBNL qui pourraient être dans les camps. Ma
question, c'est : Comment on s'assure que les camps sont bien représentés
puis on est capables de défendre des intérêts ou défendre la réforme? Parce que
là, dans le projet de loi, les élus politiques ne sont pas dans les camps, mais
ils sont... bref, comment on fait pour ne pas tomber dans le piège de la Colombie?
M. Milner (Henry) : Je n'ai
pas vraiment réfléchi à cela, parce que, d'abord, il faut faire... être d'accord
sur les contenus. Après ça, la façon qu'on va débattre cela, c'est une deuxième
question. Pour moi, ce qui était très important, c'est que, oui, il y aurait...
c'est un référendum, donc, normalement, il y a deux équipes, une pour le Oui,
une pour le Non. C'est évident que les partis politiques qui...
M. Milner (Henry) : ...une
deuxième question. Pour moi, ce qui est très important, c'est que, oui, il
aurait fait un référendum. Donc, normalement, il y a deux équipes, une pour le
Oui, une pour le Non. C'est évident que les partis politiques qui ont exprimé
une position doivent être là, peut-être pas nécessairement comme président du
comité du Non ou du comité du Oui, mais présents. Mais comme je le disais, et
j'insiste sur cela, ce qui manque dans la Colombie-Britannique, un bon exemple,
c'est cet aspect-là de commission respectée, non partisane, qui connaît cela et
que tout le monde peut... où tout le monde peut référer les questions des
déclarations, des... tu sais, d'un côté ou de l'autre. Et pas simplement que ça
va aider les citoyens, mais ça va aussi limiter la capacité des deux côtés
d'exagérer, de dire des choses qui ne sont pas vraies. Et les gens du DGE, ils
ont déjà exprimé le manque de ressources, la nécessité d'avoir plus de
ressources. Et, vraiment, moi, je pense que c'est ça vraiment qui est
important. Oui, les partis politiques doivent être là, parce que, ça, c'est
notre démocratie, mais pour s'assurer que le contenu du débat soit comme il
faut, c'est un autre aspect qui est très important.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Marie-Victorin,
s'il vous plaît.
Mme Fournier
: Merci
beaucoup pour votre présentation. Justement, en réponse à ma question sur la
désinformation, qui pourrait y avoir lors de la campagne référendaire, le DGEQ
a répondu qu'il ne comptait pas intervenir ou fournir de l'information pour
rectifier des faits qui proviendraient d'un camp ou de l'autre. Est-ce que vous
croyez, a contrario, que ce serait important que le DGE, s'il dispose de
ressources suffisantes, puisse le faire, ou à travers une commission
indépendante comme vous semblez l'évoquer?
M. Milner (Henry) : C'est
délicat. Ils ne doivent pas intervenir d'une façon qui peut donner l'impression
d'être partisan. Mais s'ils ont les informations, les informations sont là
facilement, avec un accès facile, il peut diriger les gens vers les
informations. Si quelqu'un ou un organisme pose une question, ils ne doivent
pas dire : On n'a rien à dire, ils doivent leur dire : Vous pouvez
trouver ces informations ici et là et vraiment les aider de cette façon-là, de
fournir des textes et toutes sortes de choses nécessaires. Je pense que ça,
c'est une sorte de compromis qu'il inculque et que ça doit être bien connu.
En Nouvelle-Zélande, on m'avait dit, parce
que je suis arrivé un peu en retard, mais je suis pas mal vieux... de Darren
Hughes , Darren Hughes était un enfant à ce moment-là, et le rôle de la
commission, qui a donné les informations sur les enjeux du référendum, était
extraordinaire. Tout le monde que j'ai consulté disait : Ah oui! Eux, ils
ont toutes les informations. Ils étaient des gens tout à fait respectés. Même
moi, je conseillerais aux gens du DGEQ de faire un petit voyage en
Nouvelle-Zélande. Ils peuvent voir exactement comment c'est fait. Et il y a
même des articles et des livres qui étaient écrits, que je peux... qu'on
connaît. Merci.
Mme Fournier
: Très
bien, merci.
Le Président (M.
Bachand) : M. Milner, merci beaucoup de votre
présentation. Cela dit, je suspends les travaux pour quelques instants. Merci
infiniment.
(Suspension de la séance à 16 h 29)
16 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 16 h 32)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission
reprend ses travaux. On semble avoir un petit problème technique qui va se
régler. Alors, nous allons avoir une présentation PowerPoint de
M. Stéphane Rouillon qui est directeur au Centre de recherche informatique
de Montréal. Alors, M. Rouillon, merci beaucoup d'être ici. Et vous avez
la parole. Merci.
M. Rouillon (Stéphane) :
Merci. Je tiens à préciser quand même que c'est en mon nom personnel que j'ai
été contacté. Étant donné mon historique de présence, ce n'est pas à titre de
directeur du CRIM, rôle que j'ai effectivement. Je vais vous lire ce que j'ai écrit
pour les 10 premières minutes. Chers membres de la Commission des
institutions de l'Assemblée nationale, dans le but de promouvoir une saine
compétition dans la sphère politique, j'aborderai essentiellement la problématique
de la stabilité gouvernementale, avant de répondre à vos questions, notamment
sur le mécanisme d'adoption d'une réforme du mode de scrutin.
La concurrence est la clef de bien des
succès. Ce principe nous l'avons appliqué à l'économie, et il est temps de
l'appliquer en politique. Une société riche de ses choix est une société riche.
En ce sens, la multiplication des options offertes par les partis politiques
est un investissement. Le défi consiste à traduire cette variété d'opinions en
un microcosme des débats et des pistes de solutions autour d'une table, pour
pouvoir discuter intelligemment de solutions à des problèmes complexes.
Chaque électeur devrait avoir droit à la
représentation, sans aucune forme de discrimination quant à la taille du groupe
auquel il désire exprimer son appartenance. Le projet de loi propose un quota à
partir duquel un parti aurait accès aux sièges de compensation. Les défenseurs
de ces quotas les justifient en arguant qu'une véritable représentation
proportionnelle n'est pas compatible avec un parlement stable. Examinons les
résultats d'élections possibles sous l'angle de la stabilité. Alors donc, si on
considère l'historique des comportements des élus et des partis d'opposition,
on peut modéliser globalement les chances de voir un vote de confiance être approuvé
ou battu. Grosso modo, afin d'illustrer le propos, on peut approximer à 40 %
les chances qu'un parti d'opposition approuve le gouvernement. De la même
façon, on peut aussi considérer que 90 % des élus gouvernementaux suivent
la ligne de parti et que la balance, les 10 % restant, a à peu près
90 % de chances de voter avec le gouvernement.
Ces chiffres peuvent fluctuer, bien sûr,
mais les conséquences et les comportements demeurent. Donc, on obtient cinq
familles de situation décrivant les résultats d'élection. Donc, en ordre de
stabilité croissante, et c'est ce qui est représenté sur le graphique que vous
avez là : premièrement, des coalitions multipartites de trois partis ou
plus; deuxièmement, une ou plusieurs combinaisons de coalitions bipartites
potentielles; troisièmement, un parti majoritaire de justesse; quatrièmement,
des coalitions bipartites autour d'un même parti quasi majoritaire; et cinquièmement,
le cas le plus courant, un parti à forte majorité, le cas le plus courant en
tout cas au Québec.
La première situation correspond à ce qu'a
connu...
M. Rouillon (Stéphane) :
...deuxièmement, une ou plusieurs combinaisons de coalitions bipartites potentielles;
troisièmement, un parti majoritaire de justesse; quatrièmement, des coalitions
bipartites autour d'un même parti quasi majoritaire; et cinquièmement, le cas
le plus courant, un parti à forte majorité, le cas le plus courant au Québec.
La première situation correspond à ce qu'a
connu la Tunisie depuis la Révolution de Jasmin. Au Québec, ce serait, par
exemple, un cas où cinq partis se partageraient les 125 sièges
ainsi : 32, 30, 28, 20 et 15 sièges respectivement. Les premières
éditions de telles coalitions sont relativement stables la première fois où ça
arrive. Ce sont les éditions subséquentes regroupant les mêmes partis
politiques qui sont parfois instables. En effet, le menu législatif devient
bien maigre quand le peu de programmes communs a déjà été réalisé.
La seconde situation correspond à un
partage des sièges de l'Assemblée nationale de ce type : 45, 40, 35 et
cinq sièges pour un quatrième parti, par exemple. Encore une fois, c'est la
répétition de coalitions déjà obtenues lors de législatures précédentes qui
engendre parfois de l'instabilité. L'Irlande, les Pays-Bas, la Belgique ont
tous connu des situations similaires où la persistance même des mêmes partis politiques
et certaines restrictions idéologiques empêchent le renouvellement de la
composition du gouvernement ou la formation pure et simple parfois même d'un
gouvernement tout court. Donnez-moi deux secondes.
La troisième situation a été vécue à la
Chambre des communes lorsque le vote de Mme Belinda Stronach a fait
pencher la balance, en 2005. Dans le cas du Québec, le modèle prédit une
stabilité de l'ordre de 53 % à peu près dans le cas d'un parti à
63 sièges, donc vraiment une majorité de justesse, et de l'ordre de
88 % dans le cas d'un parti à 64 sièges finalement.
La quatrième situation, donc la coalition
bipartite avec alliés multiples sur le dessin, c'est celle que nous avons
souvent vécue, ces dernières années, tant au fédéral qu'au provincial. Les gouvernements
minoritaires de MM. Harper, Trudeau et M. Charest, de Mme Marois
se sont retrouvés dans cette situation. Et comme il s'agit de convaincre au
moins un seul des partis de l'opposition d'appuyer le gouvernement, la
stabilité augmente ave le nombre de partis.
Le tableau suivant, que vous pouvez
regarder donc dans le document papier que je vous ai transmis, illustre la
stabilité estimée par le modèle selon le nombre de partis d'opposition capables
de fournir une majorité au gouvernement en l'appuyant. Dans ce cas, la
proportionnalité est respectée. Plus il y a de partis et donc plus les
gouvernements minoritaires de ce type sont stables.
Le cinquième et dernier cas correspond à
la norme du dernier siècle au Québec, un parti très majoritaire, donc un
gouvernement extrêmement stable, trop diront certains. Le graphique précédent
illustre donc toutes ces situations-là de gauche à droite, et c'est de ça dont
j'espère vous... regarder ça en détail avec vous, c'est ça que j'espère.
Plusieurs détracteurs des coalitions
ciblent leurs critiques sur ce portrait de l'instabilité sans aucune nuance.
Toutefois, plusieurs participants ont souligné la stabilité économique de
nombreux pays de gouvernements proportionnellement représentatifs tels ceux de
l'Allemagne, des pays scandinaves, et de plusieurs autres pays européens.
Je tiens à souligner que la représentation
proportionnelle implique sur les politiques à long terme... ce que la
représentation proportionnelle implique sur les politiques à long terme de ces pays,
une continuité. En effet, les systèmes de représentation proportionnelle
produisent souvent des gouvernements de coalition représentant un compromis
parmi une majorité de la population. Il devient alors extrêmement rare qu'aucun
parti du gouvernement précédent ne participe au suivant. Ces pays évitent ainsi
de coûteuses contre-réformes. La proportionnelle semble donc rentable à
condition d'en dégager une majorité stable pour la durée du mandat.
Pour contrer une potentielle instabilité
gouvernementale, plusieurs pays sacrifient l'équité de la représentation des
idéologies et de l'électorat en imposant des quotas à la compensation. Les
défenseurs de ces quotas les justifiant en arguant que c'est la seule façon
d'obtenir un parlement stable. C'est faux. Le pays fondateur de la démocratie
moderne, la Grèce, a fait le même constat. Ils utilisent un mécanisme de
stabilisation et ils considèrent que c'est mieux adapté, en tout cas pour
l'instant. En boostant, en bon français, le parti vainqueur, on ramène les
situations un et deux, donc les plus à gauche, coalition tripartite, coalition
bipartite, à des cas stables.
Dans un mémoire endossé par l'Association
des étudiants des cycles supérieurs de Polytechnique, j'avais présenté un mode
de scrutin stable proportionnel, préférentiel et acirconscriptif qu'on peut
retrouver sur le site http://www.votebook.ca, ainsi que d'autre matériel, ou
sur celui de... je vous laisserai lire le lien au long, mais celui de la bibliothèque
donc l'Assemblée nationale tout simplement. J'avais baptisé le mécanisme de
stabilisation de béquille puisqu'il empêche un gouvernement de tomber et
garantit un parlement qui marche.
• (16 h 40) •
La béquille décrite à l'époque garantit
une coalition bipartite stable pendant un mandat réduit et peut être greffée à
tout modèle proportionnel en remplacement d'un quota. Une béquille pondérée
comporte ces mêmes avantages sans ajouter de sièges supplémentaires. Donc, au
lieu d'ajouter des sièges supplémentaires avec tous les défis logistiques que
les «überhangs», c'est-à-dire les sièges supplémentaires
en allemand, représentent au Parlement allemand, on ajuste le poids législatif
des élus au parti majoritaire, tout en réduisant la durée de leur mandat afin
d'égaler le poids de l'ensemble de l'opposition. Il s'agit d'une option de
stabilisation, donc bel et bien d'une option. Donc, si les partis peuvent
s'entendre directement pour former une coalition majoritaire...
M. Rouillon (Stéphane) : ...en
un an représente au Parlement allemand. On a juste le poids législatif des élus
au parti majoritaire, tout en réduisant la durée de leur mandat afin d'égaler
le poids de l'ensemble de l'opposition. Il s'agit d'une option de
stabilisation, donc bel et bien d'une option, donc, si les partis peuvent
s'entendre directement pour former une coalition majoritaire, elle n'est pas nécessaire.
Le tableau suivant illustre le poids législatif
et la durée corrigée des mandats de la législature selon le nombre d'élus du
parti pluralitaire, c'est-à-dire le parti qui a reçu le plus de sièges. Je vous
laisserais regarder les chiffres. Dans le cas d'un parti pluralitaire à 62
sièges, la situation est de facto dans le cas numéro quatre, donc il n'est pas nécessaire
de faire appel à une béquille pondérée. D'ailleurs, ce pourrait être le cas
tant que le parti pluralitaire dispose de plus du tiers des sièges, c'est-à-dire
jusqu'à 42 sièges à l'Assemblée nationale. Ce mécanisme de stabilisation
respecte le principe de la coalition, préserve le poids de chaque... de chaque
électeur, excusez-moi, en termes de députés/année, et reste compatible avec le
maintien de 125 députés, avec des élections à date fixée d'avance, avec les
changements d'allégeance et avec les élections complémentaires telles qu'on les
connaît. Les élections complémentaires se dérouleraient comme prévu, tout
nouvel élu recevant un poids législatif d'un, quelle que soit son appartenance politique,
car la durée du mandat ne serait pas davantage modifiée. Le mode de scrutin
résultant devrait permettre de voir fleurir un parti vert, un parti des
régions, un parti rose, et bien d'autres qu'individuellement nous ne pouvons
prédire, mais que collectivement nous pourrons définir.
En résumé, les quotas ne sont donc pas nécessaires,
ils ne servent qu'à retarder l'apparition de partis émergents. La
semi-compensation a le même effet en préservant l'actuelle prime au vainqueur.
La décision de voter en fonction de la prise du pouvoir ou d'une simple représentation
revient à chaque personne qui vote, et non au législateur qui l'impose via un
mode de scrutin. La commission devrait s'assurer que des éléments de la réforme
garantissant la stabilité du Parlement tout en étant compatible avec une
véritable représentation proportionnelle... Notre institution parlementaire
serait alors capable de suivre l'évolution des communautés d'intérêts au
Québec.
Merci d'avoir pris le temps de m'écouter,
ainsi que bon nombre de mes collègues précédents, des gens intéressés non à
faire de la politique, mais bien à refaire la politique. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, M. Rouillon. Peut-être juste pour des fins de langage, quand
vous parlez de quotas, vous parlez des seuils, je comprends?
M. Rouillon (Stéphane) : Oui,
effectivement.
Mme LeBel : O.K. juste pour
être sûre qu'on parle des mêmes choses. Est-ce que je comprends de votre
présentation que la stabilité du gouvernement n'est pas nécessairement
tributaire du mode de scrutin, c'est-à-dire que, dans le mode de scrutin
actuel, il pourrait y avoir une certaine instabilité gouvernementale de l'effet
de voir l'apparition de plusieurs partis, maintenant, qui sont représentés à
l'Assemblée nationale, on pourrait avoir des gouvernements quand même
minoritaires, donc avec une certaine dose d'instabilité, même en vertu du mode
de scrutin actuel?
M. Rouillon (Stéphane) : En
effet. C'est peu probable, mais c'est tout à fait possible.
Mme LeBel : O.K. Donc, ce
n'est pas le corollaire unique ou ce n'est pas la conséquence unique d'une
réforme de mode de scrutin.
M. Rouillon (Stéphane) : Non.
Pas du tout.
Mme LeBel : Parfait. Ce que
vous nous dites, par contre, c'est qu'il y a des mécanismes pour s'assurer
d'une certaine stabilité gouvernementale dans un mode de scrutin compensatoire
mixte tel qu'on le présente et qu'à tout le moins il y a au moins l'avantage
d'avoir une stabilité des politiques gouvernementales.
M. Rouillon (Stéphane) :
...mécanismes qui permettent d'augmenter les chances, donc, comme les quotas,
malheureusement, ou un bulletin préférentiel permettent d'augmenter les
chances. Ce que je vous dis, c'est qu'on est capables même de mettre en place
des mécanismes qui vont garantir qu'on n'ait pas ces genres de problèmes là.
Mme LeBel : Par contre, ce que
vous avez constaté ou qu'est-ce que vous mettez de l'avant, c'est que dans le
cas d'une telle... d'un tel mode de scrutin, il y a, à tout le moins, une
stabilité des politiques gouvernementales, c'est-à-dire qu'on voit, de
gouvernement en gouvernement ou de législature en législature, des gens qui,
bon, apparaissent dans la coalition ou non, mais qu'il y a un certain suivi,
donc il ne pourrait pas y avoir de renversement drastique de politiques
gouvernementales pour des fins partisanes, à titre d'exemple.
M. Rouillon (Stéphane) :
C'est beaucoup plus rare dans ces cas-là, contrairement à ce qu'on peut...
regardez au sud de la frontière, en ce moment, où on a un gouvernement qui a
passé beaucoup de son temps à annuler, finalement, ce qu'avait mis le
précédent. Donc, quand on regarde la somme des investissements faits pour faire
mettre des politiques en place puis ensuite les défaire, ça donne peu de
rendement, on va dire, par dollar investi, ce qui est beaucoup moins le cas en
Europe, avec tous les gouvernements de coalition, où souvent on a un des partis
qui étaient dans le gouvernement qui se retrouve dans le suivant.
Mme LeBel : Donc, on peut y
voir deux types de stabilité gouvernementale, donc, la stabilité des personnes
en place, des élus pour un mandat donné, mais aussi la stabilité des politiques
gouvernementales sur le long terme. Parce qu'on est de passage, quand on est au
gouvernement, donc on est dans un continuum, mais on est là pour les citoyens,
donc, du point de vue du citoyen, il y a une certaine dose de stabilité qui
peut s'injecter de par le fait qu'on a ce mode de scrutin là.
M. Rouillon (Stéphane) :
Définitivement.
Mme LeBel : O.K. Parlons de
votre... bon, de la façon de voir. Bon, la stabilité, j'avoue, là, j'ai lu, je
vous écoute, mais je n'ai pas analysé tout ça. Vous avez parlé de cette espèce
de «boost» au vainqueur, de «booster» la cote du vainqueur pour lui permettre
d'avoir peut-être une majorité ou, à tout le moins, une représentation assez
forte pour former le gouvernement...
Mme LeBel : ...j'avoue, là,
j'ai lu, je vous écoute, mais je n'ai pas analysé tout ça. Vous avez parlé de
cette espèce de «boost» au vainqueur, de «booster» la cote du vainqueur pour
lui permettre d'avoir peut-être une majorité ou, à tout le moins, une
représentation assez forte pour former le gouvernement. Qu'est-ce que...
Comment ça fonctionne? Ça fonctionne après l'élection? Ça fonctionne pendant?
Ça fonctionne dans la distribution des sièges? C'est une sorte de prime au
vainqueur également pour la stabilité, là.
M. Rouillon (Stéphane) :
Alors, effectivement, vous avez un petit peu raison dans ce sens-là, c'est-à-dire
qu'au lieu de donner une prime au vainqueur qui a un nombre artificiel défini
et d'y avoir recours, par définition, en partant, O.K., ce qu'on fait, c'est
qu'on regarde le résultat de l'élection, donc c'est après l'élection, et, si vraiment
il peut y avoir un problème de stabilité, on offre cette option au gouvernement...
au parti vainqueur, c'est-à-dire celui qui a gagné le plus de sièges. Et, par
exemple, si le parti qui a gagné le plus sièges devait avoir que, mettons, 42
sièges, alors qu'il en faut 65, eh bien, il devrait être capable, donc, de
rattraper l'ensemble de l'opposition. Donc, si un parti a 42 sièges au Québec,
il faut le déduire des 125 précédents, donc l'opposition en aurait 83. Donc,
grosso modo, il faudrait doubler sa représentation, O.K., pour être capable
d'obtenir autant de représentants du parti pluralitaire que de l'opposition.
Donc, ce qu'on propose de faire dans ce
cas-là, c'est de doubler le poids en Chambre des députés de ce parti politique
là, ce qui fait qu'on respecte le mécanisme, parce qu'on ne vient pas leur
donner une majorité — c'est ce qui, des fois, fait défaut et qui
cause des problèmes avec ces mécanismes-là dans certains cas — mais
on vient les ramener tout juste au cas n° 3, c'est-à-dire...
au cas n° 2, excusez-moi, coalition bipartite avec
alliés multiples. Ce que vous voyez, le 50 %, le gros cercle au milieu,
c'est le poids législatif qu'obtient le parti vainqueur, celui qui a le plus de
sièges, après qu'on lui ait donné l'option de la béquille. Donc, ensuite, il
peut s'allier à n'importe lequel des partis d'opposition pour être capable de
passer une législation quelconque.
Mme LeBel : Mais l'objectif
ultime de cette prime, peu importe où on la situe dans le processus, est
d'assurer une stabilité gouvernementale.
M. Rouillon (Stéphane) :
...oui, assuré. Vraiment garanti, là.
Mme LeBel : O.K. Parfait. Écoutez,
peut-être juste... Je pense que je peux annoncer, d'entrée de jeu, que je n'ai
pas l'intention d'aller dans cette direction-là, mais je veux quand même...
Non, je vais... C'est le préambule de ma question, mais je veux quand même vous
permettre de l'expliquer. Qu'est-ce que vous voulez dire par acirconscriptif,
donc sans circonscription? Peut-être nous illustrer un peu. Je veux rassurer
mes collègues, je ne veux pas abolir ni les circonscriptions ni les régions,
mais je suis curieuse quand même de voir qu'est-ce que vous voulez... pourquoi
vous soutenez ce...
M. Rouillon (Stéphane) :
Disons que c'est une façon de regarder. La Cour suprême, quand on parle de
réforme du mode de scrutin, a défini... parce que, bon, j'ai participé à des
recours collectifs qui ont eu lieu, donc, au Québec pour contester la
légitimité du mode de scrutin par l'ARDD, l'Association pour la revendication
des droits démocratiques au Québec, et la Cour suprême définit le mode de
scrutin comme un outil pour donner une représentation aux communautés
d'intérêts.
Il y a 60 ans ou même un peu plus, les
communautés d'intérêts étaient géographiques. Les gens connaissaient leurs
voisins. Les centres d'intérêt étaient donc dans les villes, etc., et autres.
Depuis, la société change très vite, on va dire ça comme ça, et les communautés
d'intérêts sont devenues plus électroniques, idéologiques. Et donc pour
représenter, pour aller capturer les verts par exemple, la représentation
géographique est déficiente pour ça. Donc, le but, c'est d'obtenir des façons
de définir des échantillons de la population, qui vont avoir... essayer
d'obtenir de la représentation et qui ne sont pas définis géographiquement.
Donc, pour vous donner un exemple, si vous
deviez essayer de demander l'opinion des gens pour le transport en commun à
Montréal, vous pourriez utiliser les tranches d'âge. Donc, les 18 ans se
trouvent quelqu'un pour les représenter, les 19 ans, les 20 ans, les 21 ans, et
ainsi de suite. Donc, d'avoir des formes de représentation qui sont différentes
donne des avantages différents.
L'Irlande, par exemple, a un Sénat qui est
par profession. Donc, quand vient le moment de localiser des projets qui sont
nocifs, on va dire des centrales nucléaires, des dépotoirs ou ce genre de chose
là, eh bien, l'avantage d'avoir un Sénat par profession, c'est qu'on va essayer
de mettre la centrale nucléaire, par exemple, à l'endroit en Irlande où, s'il y
a un accident, bien, les conséquences seront emportées par les courants marins
et puis les vents hors du territoire vers l'océan plutôt que le contraire.
Tandis qu'au Québec il y a des tas de cas,
que ce soient des musées, des aéroports, des hôpitaux, et autres, où, souvent,
bien, on a vu la population s'offusquer que les projets de développement
finissaient souvent dans le comté géographique des gens qui avaient, donc, le
pouvoir de décider où est-ce qu'on les situait.
Donc, l'idée, c'est de bénéficier des
avantages que ça peut avoir d'avoir une autre forme de représentation qui ne
soit pas géographique. Ce n'est pas le cas là-dedans, ce n'est pas ce que je
vous ai mentionné avec la stabilité, là...
Mme LeBel : ...pas du tout,
pas du tout, mais vous y faisiez comme référence, donc je voulais avoir un
peu...
• (17 h 50) •
M. Rouillon (Stéphane) :
...mais c'est un peu ce qu'on fait, quand on essaie de généraliser, en
disant : On veut des représentants de région, O.K.? C'est parce qu'on n'a
pas besoin d'avoir de représentant...
M. Rouillon (Stéphane) :
...des avantages que ça peut avoir, d'avoir une autre forme de représentation
qui ne soit pas géographique. Ce n'est pas le cas là-dedans, ce n'est pas ce
que je vous ai mentionné ave la stabilité, là.
Mme LeBel : Non, non, pas du
tout, pas du tout, mais...
M. Rouillon (Stéphane) : Mais
c'est un peu ce qu'on fait quand on essaie de...
Mme LeBel : Mais vous y
faisiez comme référence, donc je voulais avoir un peu...
M. Rouillon (Stéphane) :
Quand on essaie de généraliser en disant : On veut des représentants de
région, O.K., c'est parce qu'on n'a pas besoin d'avoir de représentant de
municipalités. On a déjà des maires qui s'occupent de faire ça, et les
problématiques qui sont liées, donc, au... géographiquement, là, les trottoirs,
la circulation, les bibliothèques et autres sont déjà prises en compte par les
municipalités. Et tandis qu'un gouvernement provincial ou fédéral, lui, est là
pour traiter de problèmes d'équité qui ne devraient rien avoir,
essentiellement, à faire avec la géographie, donc le mariage gai, par exemple,
la légalisation du cannabis, qui devrait être une forme sur le territoire ou
pas, donc, l'opposition pour ou contre le nucléaire. Donc, tout ce genre de
débats de principes qui traitent de problèmes qui font les journaux,
d'ailleurs, ces derniers temps, là. Il faut être conscient, là, en 2020, la
grande majorité des problèmes qu'ont affrontés les citoyens ne sont pas
géographiquement localisés, mais ce sont des choses comme les idées, donc
l'Iternet, les missiles, les maladies contagieuses, donc les animaux migrateurs,
etc., toutes des choses qui traversent les frontières et pour lesquelles une
mise à jour, on va dire, plus adaptée de nos institutions serait plus apte à
répondre, à mon avis.
Mme LeBel : O.K. Et, peut-être
en terminant, sous l'angle, encore une fois, de la stabilité des gouvernements,
de façon peut-être plus marginale, vous ne prônez pas l'utilisation des quotas,
mais est-ce que vous ne pensez pas qu'un seuil minimal d'accessibilité, quand
même, devrait être... peut-être pas sous l'angle... bien, oui, un peu sous
l'angle de la stabilité, mais pour empêcher que des courants complètement
marginaux qui réussiraient quand même à rassembler un certain seuil de voix
n'aient pas encore la légitimité nécessaire pour atteindre un siège à
l'Assemblée nationale. Est-ce que vous ne pensez pas qu'outre l'argument de la
stabilité des gouvernements, qui peut en faire partie pour les seuils, j'en
suis, est-ce que vous ne pensez pas qu'un certain seuil, quand même, est
approprié pour y avoir une certaine barrière à l'entrée, attendre que certains
courants fassent leurs preuves un peu plus, là, ou s'ancrent un peu mieux dans
la réalité du Québec, là?
M. Rouillon (Stéphane) : Je
vais y aller avec deux réponses d'abord. Premièrement, le mécanisme, tel qu'il
est décrit, par exemple, donne un poids législatif plus fort au gouvernement
qui gagne. Comme ce parti-là est celui qui nomme le président, si, par exemple,
il devait hériter, donc, d'un poids double, par exemple, il faudrait qu'il soit
capable d'aller convaincre au moins deux membres de l'opposition à voter pour
compenser. Donc, il y a... un indépendant tout seul ne serait pas forcément
capable de faire pencher la balance à lui tout seul, tout simplement, dans ce
cas-là. O.K., donc, il y a des cas où, franchement, il faut voir un petit peu
qu'il y a une dynamique qui s'installe à partir de ça.
La deuxième chose, c'est que c'est une
question de perspective. Si vous avez des groupes extrémistes, comme vous
dites, préférez-vous qu'on les entende au Parlement pour donner leur opinion,
ou pensez-vous que c'est mieux qu'ils se décident qu'ils trouvent qu'ils ont
besoin de se faire justice eux-mêmes et qu'ils vont faire ça ailleurs par
d'autres moyens? Donc, moi, je pense que même des groupuscules, s'ils sont
capables d'aller chercher 1 % ou 2 %, ils devraient être représentés
au Parlement pour être capables d'exprimer leurs opinions. Et je vais vous
faire un parallèle. Que les grands partis se mettent d'accord, par exemple,
pour être équitables entre eux et tasser tous les petits pour essayer d'en
tirer profit, bien, c'est un comportement que je trouve malsain. Et moi, je
pense que la concurrence pure et dure qu'on a dans le milieu économique, où les
PME, les moyennes entreprises font toutes concurrence aux plus grandes est
beaucoup plus saine et répond beaucoup mieux, et c'est ce modèle-là que je vous
propose d'aller chercher, ces avantages-là, et de l'intégrer dans la sphère
politique, tandis que, si on devait faire le contraire, bien, c'est un
mécanisme que vous connaissez bien vous-même, particulièrement, parce que c'est
quand les grands se mettent d'accord, dans le milieu économique, pour tasser
les petits, on appelle ça de la collusion, et bon, on l'a déjà vécu, on a vu
les conséquences que ça a, et ce n'est pas ça qu'on veut.
Mme LeBel : Oui. Merci. Merci
de votre éclairage.
Le Président (M.
Bachand) : Cool. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, s'il vous
plaît.
Mme Robitaille : Bonjour.
Merci, M. le Président. J'essaie de comprendre, avec le projet de loi... en
fait, ce que vous nous dites, c'est que ce 10 % là de distorsion, on ne
devrait pas l'avoir, c'est ça?
M. Rouillon (Stéphane) : Non.
Il n'y a que la Turquie qui fait ça, et elle a... elle est passée proche de se
faire poursuivre aux droits de l'homme, donc à l'ONU, comme quoi ce seuil-là
allait contre les droits de l'homme. Donc, je ne vous recommanderai pas ça du
tout, ce n'est pas un modèle de démocratie.
Mme Robitaille : Donc,
10 %, ça ne vaut pas la peine, là, tant qu'à faire ça?
M. Rouillon (Stéphane) : Moi,
je vous recommanderais 2 %. J'étais sur le comité, donc, conseil du DGE, à
l'époque. On avait étudié, on avait gardé 2 %, 3 % et 5 %, qui
étaient les plus courants, on va dire, en tant que tel.
Mme Robitaille : Peut-être que
je ne comprends pas ou je comprends mal, mais ce que vous nous dites, c'est que
même 2 %, vous, vous dites : Pas de pourcentage de distorsion. On
peut... On pourrait y aller avec ce qu'on a, on travaille avec ce qu'on a, on
ne met pas de barrière?
M. Rouillon (Stéphane) : Moi,
je vous recommanderais personnellement de ne pas mettre de seuil et d'aller
regarder pour mettre un autre mécanisme de stabilisation plutôt que des seuils,
O.K.? Si vous tenez à en mettre, ce n'est pas un problème. Je vous recommande,
dans ce cas-là, 2 %, mais je vais vous prendre un des cas les plus
fractionnés que j'ai pu...
Mme Robitaille : ...ce qu'on a,
on travaille avec ce qu'on a, on ne met pas de barrière?
M. Rouillon (Stéphane) : Moi,
je vous recommanderais personnellement de ne pas mettre de seuil et d'aller
regarder pour mettre un autre mécanisme de stabilisation plutôt que des seuils,
O.K. Si vous tenez à en mettre, ce n'est pas un problème, je vous recommande
dans ce cas-là 2 %. Mais je vais vous prendre un des cas les plus
fractionnés que j'aie pu voir, sur lesquels j'aie pu travailler. Quand j'ai
développé ce genre de recherche et que j'ai pu le présenter à gauche, à droite,
j'ai eu l'occasion de discuter avec différents représentants de corps
diplomatiques, O.K., une dizaine à peu près d'attachés politiques, attachés
consulaires, attachés d'ambassade, consuls, consuls généraux, ex-ambassadeurs
et ambassadeurs d'une demi-douzaine de pays, dont la Tunisie, l'Islande, le
Mexique et l'Allemagne. Et donc le cas de la Tunisie, avec qui j'ai travaillé
parce que, bon, l'ambassadeur à ce moment-là m'a invité pour voir ce détail-là,
qui était vraiment exactement le même à l'époque, là, est assez flagrant. La
Tunisie est entrée en démocratie, O.K., par rapport au système dictatorial
qu'elle avait avant en tant que tel, et donc ils ont eu 84 partis politiques
qui se sont présentés la première fois où ils ont fait une élection. Ce n'est
pas du tout ce à quoi on s'attend au Québec, d'accord. Soyons concrets, il n'y
a aucun risque.
Mme Robitaille : Est-ce que,
quand même, ça peut augmenter le nombre de partis? On en a déjà beaucoup, là,
quand on va voter. Mais ça pourrait... Oui.
M. Rouillon (Stéphane) : Mais
on n'attendrait pas ces sommets-là. Et ce que je vous dis, c'est que, même dans
des cas comme ça... L'ambassadeur était soucieux de la stabilité de son pays,
c'est normal dans ce cas-là, O.K., à 84 partis politiques. Ils en ont élu 18 et
se sont retrouvés dans le cas le moins stable, donc, et ils ont fait une
coalition tripartite. Comme c'était la première fois, il n'y a pas eu de
problème, ça a été fonctionnel en tant que tel. Là, ils ont eu une deuxième
élection. D'abord, le nombre de partis s'est rapproché plutôt de 60,
c'est-à-dire, ils ont... ça s'est agglutiné naturellement, ce qui est normal.
Ils n'en ont élu que 16 à la dernière élection, en tant que tels, mais ils ont
toujours une coalition tripartite avec laquelle c'est difficile de travailler.
Mais le mécanisme que je vous ai décrit
rendrait ça totalement fonctionnel, c'est-à-dire que le parti
vainqueur — je pense qu'il a eu 54 sièges sur les 217, donc à peu
près le quart — on pourrait tripler son poids législatif, diviser donc
par trois la durée de son mandat en compensation. La durée du mandat en Tunisie
est de cinq ans. Donc, eux, ils auraient un an et huit mois, donc le tiers du
mandat, pour faire ça avec ce parti politique, qui aurait des représentants qui
voteraient en Chambre avec un poids de trois et qui seraient donc obligés,
comme je viens de l'expliquer, d'aller convaincre au moins deux membres de
l'opposition pour être capables de passer des politiques au nom du
gouvernement. Sauf que, sur les 15 autres partis qu'il y a, bien, il y en a
sept qui ont déjà plus de deux représentants et il y a huit indépendants, si je
me souviens bien, donc, de la répartition qu'il y a eu. Donc, toutes ces
combinaisons-là font que, statistiquement, c'est très proche de 98 %, 99 %
de chances d'être capable de convaincre qui que ce soit d'aller de l'avant et
donc d'avoir un gouvernement stable pour un an et huit mois, malgré une
surfragmentation de l'État.
Mme Robitaille : Ce que vous
proposez, ça existe déjà? Est-ce qu'il y a des modèles? Non.
M. Rouillon (Stéphane) : Non,
ça n'existe pas. Ce qu'il y a de plus proche, c'est la compensation grecque,
qui existe en ce moment, qui fixe... qui est un groupe de 50 sièges qui va au
parti pluralitaire, donc le parti vainqueur. Mais ça cause des heurts, on va
dire, dans le monde politique, là, pour trois raisons différentes. D'abord,
comment est-ce qu'on détermine ces gens-là? Donc, les mêmes problèmes qu'on a
ici, là. D'où est-ce qu'ils viennent? Est-ce qu'ils représentent un comté, une
région d'où est-ce qu'ils sont originaires? O.K. Et ensuite, qui les nomme?
Quel est le mécanisme? Et surtout, ce qui est fondamental là-dedans, c'est que,
la population ayant élu un gouvernement minoritaire en tant que tel, le fait
d'avoir 50 sièges pile, pile, pile fait que, des fois, on passe du cas 5 ou 4
au cas numéro 1, O.K., et là ça fait des grands heurts avec les représentants
de l'opposition, qui nous disent : Regardez, on devrait avoir une partie
du pouvoir pour pouvoir négocier, participer selon la volonté populaire, et on
se retrouve totalement exclus des décisions pour un mandat total de quatre ou
cinq ans en tant que tel. D'où la problématique, et je pense que la Grèce va
abandonner ce format-là, en tout cas, pas à la prochaine élection, mais à la
suivante, et peut-être qu'ils retravailleront un modèle comme celui-là. Je
l'ignore encore.
Mme Robitaille : Donc, dans la
mécanique, on pousse les individus qui représentent les partis, bon, pas
nécessairement... bien, plus forts, pas nécessairement, mais à aller faire des
compromis avec les plus petits partis. Et comment on enchâsse ça dans une loi?
En fait, on guide les parlementaires dans leurs résolutions de conflits ou dans
leurs façons de résoudre le conflit? Comment on fait?
• (17 heures) •
M. Rouillon (Stéphane) :
C'est la dynamique actuelle exacte que vous avez dans le Parlement britannique
et qu'on a vécue quatre fois déjà dans les quatre cas de gouvernement
minoritaire que j'ai nommés, de M. Harper, de M. Charest, de Mme Marois et
de... excusez-moi, le quatrième... M. Trudeau, qui est en ce moment, donc qui
peut s'allier à n'importe lequel des partis d'opposition pour être capable de
faire passer un budget, et...
17 h (version non révisée)
M. Rouillon (Stéphane) : …les
cas de quatre gouvernements minoritaires que j'ai nommés, de M. Harper, de M.
Charest, de Mme Marois et de… excusez-moi, le quatrième… si vous pouviez
m'aider, je pense que… M. Trudeau, qui est en ce moment, donc qui peut s'allier
à n'importe lequel des partis d'opposition pour être capable de faire passer un
budget. Et on a vu les conservateurs refuser, le NPD se faire tirer l'oreille
et le Bloc dire que, pour la première fois, il donnerait son appui. Donc, c'est
totalement ce genre de dynamique là, mais au lieu d'espérer avoir ce genre de
dynamique-là, on cherche à être capable de le garantir.
Je vous dirais, cette mécanique-là m'a été
proposée par un des… Moi, je travaille dans le milieu de l'intelligence
artificielle, de recherche opérationnelle, et c'est un des professeurs avec
lesquels je travaille qui m'a amené cette dynamique-là, cette façon de faire
là… pas tout à fait exactement celle-là. Le but, sa philosophie à lui, c'était
de dire que, quel que soit le nombre d'élus, on est capable d'obtenir un
résultat proportionnel en pondérant les votes législatifs de chacun des partis.
Là, il y a quelques petits bémols quand même à apporter, c'est-à-dire que si
vous avez des partis qui finalement n'ont aucun élu, zéro… Le parti vert
actuellement, maintenant… et je pense qu'il y a même les marxistes-léninistes,
enfin il y a un certain nombre de partis. Ce n'est pas en pondérant l'absence
de députés que vous allez y arriver.
Donc… et moi, j'ai préféré utiliser cet
outil-là pour résoudre le problème de la stabilité, qui semble être le problème
principal, parce que, quand je lis le projet de loi, toutes les corrections qui
ont été faites, la semi-compensation, le niveau de seuil, le fait de calculer
sur une base régionale plutôt que nationale, tout ça, c'est guidé par un
principe, celui de la peur de l'instabilité, et donc j'espère vous donner une
solution de base et vous donner l'occasion de pouvoir dire : On peut aller
de l'avant avec la proportionnelle, le cas échéant, si vraiment on a des
problèmes extrêmes, on aura des solutions à proposer.
Mme Robitaille : Juste… On n'a
pas parlé de la parité, mais est-ce que dans votre approche, dans… Est-ce que…
Qu'est-ce que vous pensez de cette idée de parité où là, on met une zone de 40
à 60…
M. Rouillon (Stéphane) : Le
mécanisme est totalement compatible avec n'importe quel mode de scrutin
proportionnel, donc l'alternance hommes-femmes sur les listes, tel qu'il est
dans le projet de loi est totalement compatible. Et si vraiment ça devait être
déficient comme forme de représentation, bien, le fait d'avoir un mode de
scrutin proportionnel stimule l'apparition de partis, donc c'est pour ça que
j'ai mentionné un parti rose, dans le sens… un parti féministe, qui serait
totalement, donc, pertinent, on va dire, dans le contexte actuel des #metoo et
des autres causes.
Mme Robitaille : C'est ça.
Oui, mais… oui, c'est sûr qu'un parti féministe… Mais ça ne veut pas
nécessairement dire qu'au sein d'un parti féministe on va avoir juste des
femmes, là.
M. Rouillon (Stéphane) : Bien
sûr, tout à fait.
Mme Robitaille : L'idée
d'encadrement des motions de censure, par exemple, ça, c'est un autre domaine,
mais est-ce que vous pouvez… parce qu'on dit, justement pour éviter
l'instabilité : On pourrait peut-être avoir des motions de censure, mais
ça, ça n'a rien à voir avec le…
M. Rouillon (Stéphane) :
…s'arranger pour que ce soit compatible avec le fonctionnement actuel du
Parlement. Les avantages des élections fixées d'avance, quand j'ai travaillé
dessus, avec M. Béland, à l'époque, et autres, c'est qu'on ne voulait pas qu'un
chef de gouvernement puisse tirer avantage du contexte pour essayer de surfer
sur la vague et choisir ce moment.
Donc, sans avoir des élections fixées
d'avance, le mécanisme permet d'avoir une date fixée à l'avance. Donc, ça ne
sera pas toujours la même date récurrente, là, pas toujours le 4 novembre, par
exemple, et autres, mais au début du mandat, on saura que, si le gouvernement
ne tombe pas sur une question de confiance, eh bien les élections auront lieu
exactement dans un an, neuf mois et puis quatre jours, par exemple, et donc
vous pouvez reculer si vous voulez avoir le dimanche ou le lundi, je pense que
c'est le lundi en ce moment qu'on a, là, donc le lundi qui soit adapté, là.
Mme Robitaille : Merci.
M. Rouillon (Stéphane) : De
rien.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Bonjour.
Vous avez mentionné à plusieurs reprises quelque chose qui me semble… avec
lequel je suis tout à fait d'accord, ça me semble incontestable, c'est-à-dire
qu'une des critiques, une des craintes qui est avancée le plus souvent, quand
on parle de proportionnalité, même si ce qui est proposé dans le projet de loi
est une forme très modeste, très diluée de proportionnalité, c'est
l'instabilité, la difficulté à gouverner. Et vous prenez un peu à… Vous
renversez cet argument-là, comme l'a fait un intervenant néo-zélandais qu'on a
entendu hier, en disant… Bien, en fait, lui parlait de volatilité
gouvernementale dans les systèmes uninominaux majoritaires à un tour. Et vous
faites le même argument, nous disant : En fait, ce qu'on remarque dans les
pays où il y a de la représentation proportionnelle, c'est que, malgré qu'il y
a un plus grand pluralisme politique, il y a une plus grande continuité dans
l'élaboration des politiques publiques, parce qu'on n'a pas d'effet de balayage
d'un côté, balayage de l'autre, c'est-à-dire une vague bleue, suivie d'une
vague rouge, suivie d'une vague orange ou d'une vague verte. Au contraire, les
partis passent… souvent, ils étaient dans le gouvernement, ils y restent, où
ils passent, ils y reviennent. Bref, expliquez-nous ces… qu'est-ce que vos
recherches démontrent à ce niveau-là, à quel point… qu'est-ce que ça donne dans
la dynamique d'élaboration des politiques publiques?
M. Rouillon (Stéphane) :
Écoutez, malheureusement, c'est un des domaines où ce n'est pas moi, le bon…
M. Nadeau-Dubois :
...étaient dans le gouvernement, ils y restent, ou ils y passent, ou ils y
reviennent? Bref, expliquez-nous qu'est-ce que vos recherches démontrent à ce
niveau-là, à quel point... Qu'est-ce que ça donne dans la dynamique d'élaboration
des politiques publiques?
M. Rouillon (Stéphane) :
Écoutez, malheureusement, c'est un des domaines où ce n'est pas moi, le bon
expert. Les gens que vous avez eus, M. Milner, M. Blais, peut-être
que vous avez déjà entendus, et autres, les politicologues, sont mes références
dans le domaine. Mais ce que je peux vous dire par exemple, c'est que la très
grande majorité des partis... des pays européens ont des modes de scrutin
proportionnel, à quelques exceptions près, et qu'on constate, O.K., qu'il y a
une continuité dans ces politiques-là, comparé à ce qu'il peut y avoir dans le
modèle britannique où... Ou même on l'a vécu. Je peux prendre le cas du
registre des armes à feu, ici, au Canada, par exemple, où les... où, d'un coup,
on a investi des sommes faramineuses et qu'on a tout fait disparaître. Donc...
Et c'est ce genre de gestion là que des coalitions vont... va réduire parce que
ça va être extrêmement rare qu'il n'y ait aucun des deux ou trois partis qu'il
pourrait y avoir dans les coalitions précédentes, qui se retrouvent dans dans
la suivante, à moins qu'on ait vraiment une révolution en tant que tel, là.
Mais dans ces cas-là, il n'y a pas... Ce n'est pas un mode de scrutin, là, qui
doit intervenir, là, c'est la volonté populaire qui change.
M. Nadeau-Dubois : Merci
beaucoup.
M. Rouillon (Stéphane) : De
rien.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Rimouski, s'il vous plaît.
M. LeBel : Merci, M. le
Président. Bonjour. Vous m'avez fait un peu réagir tantôt quand vous avez
dit : Les dossiers régionaux, les maires sont là pour s'en occuper. Il y a
quand même des dossiers, là, Internet haute vitesse, les traversiers chez nous
dans le Bas-du-Fleuve, me semble que les députés sont interpelés. La santé dans
le milieu rural, ils sont interpelés. Et je ne vous lirai pas mon agenda de la
fin de semaine, là, mais, conseil climat, une assemblée citoyenne, un salon
funéraire, des carnavals dans les villages ruraux. Puis je ne suis pas le seul,
là. On est tous un peu comme ça. L'accès aux députés, vous ne pensez pas que
c'est une variable qui est importante aussi à avoir dans notre réforme.
M. Rouillon (Stéphane) :
On avait fait les calculs déjà à l'époque. On parle de
40 000 électeurs, à peu près, par comté, là. Si on regarde le temps
que vous devez passer, ici, à l'Assemblée nationale et, bon, le temps pour
manger et dormir, etc., si vous deviez voir équitablement tous vos électeurs,
vous auriez moins de cinq minutes pour chacun. O.K. Donc, c'est monstrueux en
tant que tel. Et, il faut être honnête, maintenant, ce n'est pas de les voir
physiquement, là, qui compte le plus, là. Ils vont vous téléphoner, ils vont
vous écrire par mail, etc., et autres. Donc, la relation géographique physique,
là, n'a plus la même dimension. Je ne dis pas que c'est inutile, là. O.K. Au
contraire, O.K. C'est sain. Ça permet d'avoir l'heure juste et autre. Mais ce
n'est pas la seule façon de rejoindre et d'être connecté avec son électorat.
O.K. Alors, l'idée, c'est de comparer quels sont les avantages et les
inconvénients. Je ne vous proposerai pas des systèmes qui soient assez
constrictifs pour une élection municipale. Dans ce cas-là, je vous
recommanderai le vote unique transférable irlandais qui pondère le côté
préférentiel et le côté proportionnel de façon raisonnable en ayant un lien
géographique de proximité. Ça, oui. O.K. Mais, bon...
M. LeBel : Je vais vous
dire, les gens veulent nous voir. Ils ne veulent pas nous voir en
visioconférence, ou par téléphone, ou par... Et c'est le danger qu'on a. On
entend souvent ça maintenant. On peut avoir des grandes régions. De toute
façon, il y a la visioconférence. Mais moi, ce n'est pas vrai. Moi, le
Bas-du-Fleuve, ce n'est pas une région de visioconférence. On a besoin de...
M. Rouillon (Stéphane) :
Je suis d'accord avec vous. Ce n'est pas aussi pratique, ce n'est pas aussi
convivial, ce n'est pas aussi... Mais il faut regarder qu'est-ce qu'on perd et
qu'est-ce qu'on gagne aussi dans cette vision-là.
M. LeBel : Merci.
M. Rouillon (Stéphane) : De
rien.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée de Marie-Victorin, s'il vous plaît.
Mme Fournier : Merci
beaucoup pour votre proposition et votre présentation très intéressante et qui
nous amène à réfléchir à toutes sortes de possibilités. Toujours est-il que,
justement comme le disait le collègue de Gouin concernant la possibilité qu'une
réforme du mode de scrutin permette en fait plus de stabilité dans les
politiques publiques parce qu'elle amènera la formation de coalitions
électorales, je trouve ça très intéressant aussi. Est-ce que vous diriez donc
que l'État québécois pourra économiser beaucoup d'argent parce que, justement,
on n'aura pas à continuellement refaire... faire et défaire les réformes qui
auront été décidées par les gouvernements?
M. Rouillon (Stéphane) :
Écoutez. Pour moi, ça me semble évident parce que je vais vous donner des
ordres de grandeur. D'ailleurs, je pense que quelques-unes des personnes qui
sont passées avant moi vont vous avoir dit ça, des élections au Québec, ça, on
parle de... C'est de l'ordre de grandeur de dizaines de millions,
plusieurs dizaines de millions de dollars. Donc, je ne sais exactement où
en est rendu le Directeur général des élections, mais ça doit être autour de 80 millions
à peu près comme ordre de grandeur. Si on compare aux problématiques,
justement, qui ne sont pas géographiques et auxquelles on doit faire face, et
ne serait-ce que, donc, les paradis fiscaux, lorsqu'on travaille sur les
estimations, les problématiques de ça auxquelles les élus cherchent des
solutions et auxquelles, justement, là, il n'y a pas de lien géographique, on
ne veut pas savoir si les gens qui cachent de l'argent, ils viennent de
Gatineau, de Hull, ou de Rimouski, ou de Québec, ou de Montréal, là. O.K. Bien
là, on est dans l'ordre des dizaines de milliards de dollars, là, O.K. en
fuite, etc., et autres.
• (17 h 10) •
Si on regarde, par exemple, les politiques
climatiques, là, le Parti vert qui est absent, là, de l'Assemblée nationale.
Mais ce genre d'enjeu là, là, et vous regardez sur la scène internationale, on
parle de combien en estimation des montants qui vont être perdus et autres, là,
on est dans les centaines de milliards de dollars de ces catastrophes-là qui
sont...
M. Rouillon (Stéphane) :
...etc., et autres.
Si on regarde, par exemple, les politiques
climatiques, là, le Parti vert, qui est absent, là, de l'Assemblée nationale,
mais ce genre d'enjeu là, là, et que vous regardez sur la scène internationale,
on parle de combien, en estimation, des montants qui vont être perdus, et
autres, là, on est dans les centaines de milliards de dollars... qui sont
dissipés.
Donc, toutes proportions gardées, là, O.K.,
oui, je pense que ça vaut la peine d'investir dans notre démocratie pour avoir
une saine concurrence et être capables d'aller chercher les meilleures idées
qui vont être capables de résoudre ces problèmes-là.
Mme Fournier : Je vous
donne un exemple peut-être plus concret de ce que je veux dire, les fusions municipales
au Québec. Il y a plusieurs années, bon, il y a un parti qui les a mises en application.
Le parti... Bien, aux élections suivantes, il y a un parti qui a promis de les
défaire qui a été élu au pouvoir. Donc, on a engouffré des millions de dollars
de fonds publics.
Donc, avec la réforme du mode de scrutin,
avec justement le fait qu'il y aura des coalitions, le fait d'avoir davantage
de gouvernements minoritaires, ça va éviter ces retournements de situation qui
sont très, très coûteux pour les contribuables.
M. Rouillon (Stéphane) :
...vous venez de me donner un propre exemple auquel je n'avais pas pensé. Donc,
effectivement, c'est vraiment un cas qu'on a vécu et où on a dilapidé beaucoup
d'argent pour arriver à certains résultats qu'une meilleure pondération de la
volonté populaire, un meilleur équilibre aurait pu éviter. Donc, ça, oui.
Mme Fournier : Génial.
Donc, la réforme du mode de scrutin serait très bonne pour les contribuables.
C'est bien noté.
M. Rouillon (Stéphane) :
Moi, c'est ce que j'ai essayé de vous présenter.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Merci de votre participation, c'est
très apprécié.
Je suspends les travaux quelques instants.
Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 11)
(Reprise à 14 h 14)
Le Président (M. Bachand) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Merci beaucoup. Je vous invite à prendre place.
Merci.
Il me fait plaisir de souhaiter la
bienvenue à M. Marc-André Bodet, professeur agrégé au Département de
science politique de l'Université Laval. Alors, bienvenue. Vous connaissez le
système : 10 minutes de présentation, après ça, période d'échange. Merci
beaucoup. La parole est à vous.
M. Bodet (Marc-André) :
Merci. Alors, bonjour. Je tiens d'abord à remercier tous les membres de la Commission
des institutions pour leur invitation. J'espère que mes propos viendront
nourrir votre réflexion et surtout qu'ils apporteront une contribution
constructive aux discussions sur le sujet de la réforme du mode de scrutin.
Je constate que mon rôle comme universitaire
est avant tout de présenter ma lecture de la littérature en sciences politiques
sur le sujet. Je m'y attarderai donc avec un souci constant de rigueur et de
transparence.
Comme vous le savez, la recherche scientifique
n'avance pas à coups de consensus, bien au contraire. Il y a des vifs débats
parmi mes collègues à propos des mécanismes et institutions permettant une
juste représentation d'un corps politique.
Il est d'ailleurs important à mon avis de
garder en tête que nos institutions démocratiques ne visent pas uniquement à
représenter mécaniquement les préférences et les intérêts des citoyens qui
composent la société québécoise. Au contraire, ces institutions doivent également
assurer la protection et même la valorisation des opinions minoritaires en plus
d'assurer une représentation territoriale adéquate. C'est donc un compromis qui
doit dépasser la simple formule consacrée «Une personne, un vote».
Je tiens également à réitérer que le
Québec s'est doté d'institutions politiques de tradition britannique. L'Assemblée
nationale est un parlement de style Westminster, qui fait vivre en son sein une
culture politique britannique. Pour faire vite, cette culture a une
dimension...
M. Bodet (Marc-André) :
...c'est donc un compromis qui doit dépasser la simple formule consacrée «une
personne, un vote».
Je tiens également à réitérer que le Québec
s'est doté d'institutions politiques de tradition britannique. L'Assemblée
nationale est un parlement de style Westminster, qui fait vivre en son sein une
culture politique britannique. Pour faire vite, cette culture a une dimension
normative : légitimité gouvernementale issue du parlement; efficacité législative;
reconnaissance d'une opposition officielle constituée, etc., mais aussi une
dimension organisationnelle, avec un mode de scrutin majoritaire, une
représentation basée sur la géographie et une indépendance des tribunaux.
Les institutions démocratiques québécoises
sont finalement assez proches de leurs sources du XIXe siècle, malgré les
changements sociaux et économiques massifs qu'on a connus. On peut même dire
que ces institutions, implantées parfois à contrecœur par le conquérant
anglais, nous ont extrêmement bien servi.
Ceci étant dit, il y a toujours place à
l'amélioration. Nos institutions ont évolué quand cela étant nécessaire,
parfois à la marge, parfois plus en profondeur. Mais l'intégrité du caractère
Westminster de notre Assemblée nationale a toujours été préservée. On peut
affirmer sans risque que créer la controverse... sans créer la controverse, que
la modification de notre mode de scrutin, comme le propose le projet de loi
n° 39, est une transformation en profondeur. Mais je vais plus loin et
j'affirme que l'intégrité des institutions Westminster, dont nous profitons,
est menacée.
J'ai plusieurs collègues politologues qui
sont venus discuter avec vous au cours des derniers jours. J'ai quelques
commentaires au sujet de leurs propos. D'abord, malgré eux, cette entrée en
matière, là, plutôt dramatique que je viens de faire, je tiens à dire qu'il y a
beaucoup de bons éléments dans la réforme proposée. Je comprends tout à fait
l'enthousiasme de certains pour cette réforme pleine de modération, qui cherche
à réconcilier un désir exprimé par certains d'obtenir plus de proportionnalité,
tout en s'assurant que la vigueur démographique de Montréal et ses banlieues ne
viennent pas marginaliser encore plus des régions moins dynamiques sur ce plan.
Je note également que la proposition
tente, par un mécanisme tout de même compliqué, de protéger notre vie
électorale des extrémistes de tout acabit. En ce sens, et dans un désir de
participer pleinement au débat en cours, je reprends à mon compte certaines
propositions de mes collègues politologues, soit les professeurs André Blais, de
l'Université de Montréal, et Éric Montigny, de l'Université Laval. Leurs
propositions atténueraient des déficiences du mode de scrutin proposé par la
loi. Je suis certain que plusieurs autres intervenants ont apporté des éléments
pertinents, mais je me concentre sur les interventions de mes deux collègues,
simplement parce que j'ai eu accès à leurs propositions suffisamment à
l'avance.
Je répète juste une dernière fois que je
considère que notre mode de scrutin actuel est bien supérieur à son alternative
proposée par le projet de loi. J'ajoute que je ne suis pas opposé, par
principe, à une réforme, mais s'il faut changer, il se fait plus simple et il
se fait plus efficace.
Parmi les éléments proposés par mes
collègues, je partage totalement, à la surprise et peut-être même l'inquiétude
de mon collègue André Blais, quant à la présence d'un seuil national de représentation
à 10 %. C'est à la fois inhabituel et propice à créer un mécontentement
auprès d'une proportion significative de la population qui appuie des partis
mineurs. En fait, il n'y a pas de justification crédible, à mon avis, qui
permet de placer ce seuil au-delà de 5 %. C'est en quelque sorte une norme
internationale.
Par contre, je considère que le maintien
d'un seuil minimal national, plutôt que régional, est une excellente idée. Il
serait beaucoup trop facile pour des acteurs marginaux d'atteindre ce
pourcentage dans certaines régions moins populeuses.
Je partage également la satisfaction de
mon collègue André Blais, quant à la présence d'un mécanisme de
proportionnalité modeste, qui diminue significativement, mais n'élimine pas, la
possibilité d'un gouvernement, sinon majoritaire, du moins unicentré, soit un
gouvernement minoritaire à un seul parti. Le calcul mathématique pour y arriver
est particulier, mais cela relève davantage de détails techniques sans grand
intérêt pour l'électorat. De plus, la taille des régions pose... ou plutôt, par
contre, la taille des régions pose problème. André Blais est très critique de
cet aspect des choses. Il a raison de dire que les régions moins bien pourvues
en termes de sièges en compensation profiteront moins d'un mécanisme qui
insuffle de la proportionnalité dans la représentation. Les tiers partis qui
réussiront à passer le seuil de 10 %, ou 5 % au demeurant, risquent
de se retrouver avec un caucus essentiellement montréalais ou du 450.
Faut-il moins de régions? Je pense que
oui. Eric Montigny note, avec justesse, que l'harmonisation des frontières
administratives électorales a eu du bon, mais illustre également les impacts
réels de la création de régions actuelles sur la représentation. Une réflexion
plus systématique s'impose, à mon avis.
Éric Montigny semble suggérer que l'appui
de l'opposition officielle est possiblement essentiel pour permettre toute
réforme du mode de scrutin. Je trouve ses arguments convaincants. Je suis
conscient que cela accorde un pouvoir inhabituel à un parti spécifique.
Pourtant, le statut d'opposition officielle, que nos institutions accordent à
ce parti, rend ce privilège, à mon avis, incontournable, même s'il y a la tenue
d'un référendum subséquent.
Je suis également en désaccord avec
plusieurs arguments présentés par mes distingués collègues. Voici deux points
particulièrement illustratifs. Premièrement, contrairement à André Blais, je
considère qu'un référendum est inutile et surtout nocif pour notre vie
démocratique. Qu'il y ait deux choix ou quatre — comme le proposait
André Blais — les règles du jeu électoral ne méritent pas cette
attention. Le sujet est trop secondaire pour occuper une place publique de
façon aussi conséquente.
• (17 h 20) •
D'ailleurs, lors de l'importante réforme
du financement des partis menée par le ministre Bernard Drainville du Parti
québécois, il ne fut jamais question de référendum...
M. Bodet (Marc-André) :
...pour notre vie démocratique. Qu'il y ait deux choix ou quatre — comme
le proposait André Blais — les règles du jeu électoral ne méritent
pas cette attention. Le sujet est trop secondaire pour occuper une place
publique de façon aussi conséquente. D'ailleurs, lors de l'importante réforme
du financement des partis menée par le ministre Bernard Drainville du Parti
québécois, il ne fut jamais question de référendum. Pourtant, cette réforme a
eu des effets majeurs sur notre vie démocratique et sur les partis eux-mêmes.
En fait, le référendum ne fera que polluer la campagne électorale qui, elle,
mérite toute notre attention citoyenne. L'obligation de céder les rênes des
camps pour et contre à des acteurs non partisans est aussi compliquée. Qui a la
légitimité pour occuper un tel leadership? Qu'arrivera-t-il aux élus et aux
partis divisés sur la question? À mon avis, l'accord des deux premiers partis
de l'Assemblée nationale et de 75 % des députés me semble amplement
suffisant pour adopter une réforme.
Deuxième point, où je suis en désaccord
avec mes collègues, je me permets d'être moins catégorique que mon collègue
Eric Montigny quant aux bienfaits des mesures coercitives pour assurer la parité
homme-femmeparmi la députation. Je connais bien les travaux sur le
sujet, j'ai travaillé avec des collègues là-dessus, et surtout les travaux de
Rosalie Readman, cités par le Pr Montigny. Ma lecture de la littérature
est que l'argent est un puissant acteur de changement des habitudes partisanes,
j'y reviendrai, mais je tiens aussi à dire que l'obligation de présenter des
listes avec candidates et candidats en alternance aura un effet positif sur la
représentation des femmes.
Maintenant, ma position sur la loi n° 39. Je suis opposé à la proposition de réforme
électorale présentée par le projet de loi. Je crois que cette réforme aurait
des effets néfastes sur notre vie démocratique et que des ajustements moins
drastiques à notre système électoral pourraient être davantage souhaitables.
Cette réforme n'aura probablement pas
d'effet sur la participation électorale. Les Néo-Zélandais avaient fondé
beaucoup d'espoir sur leur réforme dans les années 1990. Rien n'a
réellement changé sous le nouveau système mixte proportionnel.
Cette réforme n'aura probablement pas
d'effet sur la satisfaction envers les institutions. Le cynisme des citoyens à
travers le monde démocratique est une réalité qui transcende les règles du jeu
électoral. L'insatisfaction a des causes politiques mais aussi sociales qui
dépassent largement le mode de scrutin.
Cette réforme n'aurait probablement qu'un
effet limité sur la proportion de votes tactiques ou stratégiques aux
élections. De nombreux travaux empiriques ont montré que le vote tactique était
effectivement moins présent quand les petits joueurs occupaient une place plus
enviable, en proportionnel donc, mais que le vote tactique prenait alors
d'autres formes. C'est dans la nature de l'humain de s'ajuster aux règles du
jeu.
Cette réforme ne rapprocherait pas
l'électeur québécois médian du positionnement du gouvernement en place non
plus. Les études sur le sujet, notamment mené par André Blais et moi-même, ont
démontré que le mode de scrutin ne changeait rien dans cette congruence
idéologique, puisque les électeurs sont au centre idéologique, tout comme les
gouvernements en régime parlementaire.
En quelques mots. La réforme du mode de
scrutin vers la proportionnelle est une licorne politique. On y projette plein
de belles intentions, mais, au fond, ce n'est qu'un mirage.
Par contre, cette réforme coûterait cher
en termes de cohésion et de coopération intrapartis. Tous les partis
gouvernementaux au Québec depuis la Confédération ont été ou sont des
coalitions larges qui regroupent des progressistes, des conservateurs, des
environnementalistes, des nationalistes, etc. Le Parti québécois, le Parti
libéral et la Coalition avenir Québec sont tous des illustrations
spectaculaires de coopération interne au gouvernement. Toutes les tendances
sont alors représentées au cabinet, tous les compromis sont possibles. Même
Québec solidaire, idéologiquement plus homogène, n'aurait pas pu exister sans
la cohésion et la coopération des forces de gauche forcées par les règles
électorales. Dans une société labourée par des clivages indépendantistes-fédéralistes,
gauche-droite, et interculturalisme-multiculturalisme, les institutions doivent
nourrir un désir de cohésion et de coopération à l'intérieur des partis, pas
une compétition fragmentée et polarisée. Voulons-nous vraiment vivre des
situations impossibles comme vivent les Allemands, les Danois, les Autrichiens,
les Norvégiens, etc.?
Finalement, comme je l'affirmais
précédemment, nous sommes dans un système parlementaire de style britannique.
Nous valorisons des gouvernements efficaces, des oppositions organisées qui
poussent le gouvernement à mieux faire, des moyens de punir clairement les
responsables politiques incompétents ou insatisfaisants. Il nous faut un mode
de scrutin en conséquence. La réforme proposée ne remplit pas ce mandat. Il
nous faut un mode de scrutin majoritaire.
Mes propositions. Premièrement,
l'Assemblée nationale...
Le Président (M.
Bachand) : ...
M. Bodet (Marc-André) : Oui.
Le Président (M.
Bachand) : ...parce que le temps est écoulé. Alors donc, je
vous laisserais peut-être une minute, si vous voulez, ou on pourrait passer...
M. Bodet (Marc-André) : Oui,
je vais passer à la conclusion, à ce moment-là.
Le Président (M.
Bachand) : Allez-y, allez-y, professeur.
M. Bodet (Marc-André) : J'ai
quelques propositions qu'on pourra discuter si ça vous intéresse, mais, en
conclusion, je répète respectueusement mon opposition à la réforme proposée. Le
projet de loi comporte des éléments intéressants et je salue le travail de
réflexion effectué jusqu'ici. Je reconnais également la légitimité des
insatisfactions exprimées par les tenants d'une réforme. Pourtant, je demeure
convaincu que nous avons plus à perdre qu'à gagner. Ses fondements sont en
dissonance avec notre culture parlementaire britannique et ses conséquences
peuvent être graves pour la paix sociale et surtout la cohésion partisane au Québec.
Finalement, il existe d'autres mécanismes moins radicaux pour ajuster nos
institutions.
Je vous remercie encore une fois pour
votre écoute, et je suis évidemment disponible pour répondre à vos questions.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, professeur. Mme la ministre, s'il
vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci. Merci de votre présentation, de votre point de vue
intéressant. Mais je vais vous avouer que, bien que je comprenne que vous êtes
contre la réforme actuelle, naturellement, puis vous êtes pour le statu quo,
avec certains ajustements, cette portion-là, je vais vous avouer qu'elle est
très claire pour moi, mais il y a des choses qui...
Mme LeBel : ...de votre
présentation de votre point de vue intéressant, mais je vais vous avouer que,
bien que je comprenne que vous êtes pour... contre la réforme actuelle naturellement,
puis vous êtes pour le statu quo avec certains ajustements, cette portion-là,
je vais vous avouer qu'elle est très claire pour moi. Il y a des choses qui
m'apparaissent un peu incohérentes dans votre présentation, puis je vais vous
les relever pour vous permettre de les préciser pour dissiper mon
incompréhension peut-être sur vos positions. Bon. C'est sûr que, d'entrée de
jeu, le fait de dire que les gens qui sont pour la réforme du mode de scrutin
vers la proportionnelle, c'est une licorne politique qu'on vit tous au pays des
Calinours depuis plus de 50 ans et... les pays qui ont fait cette réforme-là et
qui sont dans la proportionnelle, la Nouvelle-Zélande, l'Écosse. Je trouve ça
un peu drastique, mais vous avez probablement une façon de nous l'expliquer.
L'objectif d'une telle réforme est, d'abord
et avant tout, d'insuffler de la proportionnalité. Donc, vous rejetez du revers
de la main le fait que la réforme n'aurait pas d'effet probant sur la
participation électorale, peut-être. Vous rejetez du revers de la main le fait
que la réforme n'aurait probablement pas d'effet sur la satisfaction des
institutions, peut-être, peut-être pas uniquement cette réforme-là, il faut
travailler sur d'autres aspects, j'en suis, mais peut-être. Que cette réforme
aurait probablement un effet limité sur la proportion des votes tactiques aux
élections, donc de la façon de voter, donc le comportement de l'électeur
changera de toute façon, nécessairement, on va changer de système électoral.
Mais vous ne pouvez pas être en désaccord avec le fait que le mode de scrutin
va injecter une meilleure proportionnalité, donc une meilleure représentation
du vote du citoyen, ce qui est l'objectif d'un modèle proportionnel mixte qu'on
nous propose.
M. Bodet (Marc-André) : À mon
avis, il y a deux types de mode de scrutin, il y a des modes de scrutin
majoritaire et proportionnel. Bien que dans la réforme proposée, il y ait
encore un aspect qui nous fait penser à notre mode majoritaire actuel, l'accent
qui est mis sur cette proportionnalité, qui aura des effets quand même assez
importants sur la distribution des sièges, me fait penser qu'il faut maintenant
considérer qu'il y aura un transfert du mode majoritaire au mode proportionnel
au Québec. Et mon point, quand je vous parle de licorne, c'est surtout que les
gains seraient, à mon avis, à la marge et que les coûts pourraient être
importants.
Mme LeBel : Parce que vous
dites, on y projette plein de belles intentions, l'intention première qu'on y
projette et les autres mécanismes sont mis pour soutenir d'autres objectifs,
mais les intentions premières qu'on y projette, l'intention première qu'on y
projette, c'est d'obtenir un vote beaucoup plus représentatif de la volonté des
Québécois, donc c'est la proportionnalité. À la marge peut-être, les bénéfices
pourront être la diminution du cynisme, une meilleure satisfaction du
Québécois, peut-être un taux de participation augmenté, à la marge peut-être,
mais, moi, j'appelle ça, un bénéfice marginal qui pourrait peut-être en
découler, mais l'intention première est la proportionnalité, et ça, ce n'est
pas une illusion, là, ce n'est pas une licorne.
M. Bodet (Marc-André) : Ce
que je comprends, c'est personne qui n'a eu une obsession pour la
proportionnalité comme telle, c'est ses objectifs qu'on valorise, puis ce que
je vous dis, c'est que ces objectifs-là sont loin d'être assurés. Et, ceci
étant dit, dans notre système, il est faux de dire que nous n'avons pas un
système qui représente les visions et les préférences des électeurs, c'est
simplement qu'il est basé sur une logique territoriale avec un gagnant qui est
la pluralité des voix, mais il est... on ne peut pas accuser notre système de
ne pas offrir une correspondance égale en termes de voix et de sièges, puisque
ce n'est pas son objectif, son objectif est de transformer des voix, à
l'intérieur de circonscriptions, en siège. Donc, il y a représentation de préférences,
c'est juste que ça ne s'exprime pas sous la forme d'une proportionnalité exacte
entre le nombre de voix et le nombre de sièges. Vous voyez ce que je veux dire?
Mme LeBel : Absolument. On
n'accuse pas notre système de ne pas le faire, on comprend très bien que ce
n'est pas son objectif, d'où l'idée de faire un changement vers un mode de
scrutin proportionnel mixte pour avoir justement cette proportionnalité, parce
qu'on voit l'émergence, on n'est plus dans une situation bipartite, tel que le
préconise... Le système britannique a été fondé sur une philosophie de système
biparti. Nous ne sommes plus même à l'intérieur d'un système britannique, sur
une philosophie de système biparti, on a déjà quatre partis à l'Assemblée
nationale. On s'en va vers ce système-là, nécessairement, dans le système
actuel — puis là-dessus, vous ne pouvez pas être en désaccord avec
moi — nécessairement, dans le système actuel, nous avons un
éclatement ou une pluralité, éclatement est peut-être négatif, donc je vais y aller
vers le positif, une pluralité des voix, donc qui va faire en sorte qu'on va
avoir potentiellement, de toute façon, des gouvernements minoritaires qui
devront aussi se former en coalition.
Donc, le système britannique, tel qu'il
existe aujourd'hui, est sur une base bipartite qui n'existe plus présentement
au Québec...
M. Bodet (Marc-André) : Mais
je vous dirais que les pays...
Mme LeBel : ...je ne pense pas
qu'il y a des partis qui vont disparaître.
• (17 h 30) •
M. Bodet (Marc-André) : Mais
le système proportionnel a été adopté par les pays européens à l'époque pour
accommoder des partis ouvriers. Est-ce qu'il y a encore des pays ouvriers en
Europe? Non, mais ils ont conservé la proportionnelle parce qu'elle leur
accorde des avantages. Je comprends qu'historiquement notre système était conçu
pour le bipartisme, mais comme c'est le génie des institutions britanniques,
ils sont capables...
17 h 30 (version non révisée)
M. Bodet (Marc-André) :
...mais il y a des... le système proportionnel a été adopté par les pays
européens, à l'époque, pour accommoder les partis ouvriers. Est-ce qu'il y a
encore des partis ouvriers en Europe? Non, mais ils ont conservé la
proportionnelle parce qu'il leur accorde des avantages.
Je comprends qu'historiquement notre
système était conçu pour le bipartisme, mais, comme c'est le génie des
institutions britanniques, elles sont capables... les institutions sont
capables de s'adapter, par des changements à la marge, aux changements de
contextes et de distribution partisane. Et cette logique d'explosion de l'offre
électorale, c'est vrai... On a, cette fois-ci, une situation assez
intéressante, on a quatre partis, à l'Assemblée nationale, avec des... un
nombre de sièges important, mais ça... notre système nous permet quand même
d'obtenir un gouvernement majoritaire stable. L'un n'empêche pas l'autre en
soi. Je comprends qu'il y a un sacrifice à faire, mais je constate que ce
sacrifice-là vaut la peine par rapport aux bénéfices dont on bénéficie avec ce
système, qui nous a très bien servi.
Mais c'est une question de valeurs. Juste
pour... Je vais faire un petit point sur ce... Le monsieur qui a présenté avant
moi, il accorde beaucoup d'importance à la stabilité des politiques publiques.
C'est une valeur. Peut-être que d'autres accorderont plus d'importance au fait
qu'on peut à la fois reporter au gouvernement un parti qui a bien fait, mais
surtout punir et exclure de la vie gouvernementale un parti qui aurait été
incompétent. Et dans une logique proportionnelle, avec effectivement des
joueurs en coalition temporaire ou permanente, bien, cette possibilité de se
débarrasser des partis incompétents est, à toutes fins pratiques, éliminée.
Mme LeBel : Ah! bien,
là-dessus, on va se rejoindre. Donc, on va trouver un point d'accord,
c'est-à-dire, donc, le choix d'un mode de scrutin, pour une société, va être
une question de choix des valeurs que la société désire mettre de l'avant au
moment où elle est rendue dans son évolution.
M. Bodet (Marc-André) : Oui,
mais ce que je vous dis, c'est que, si on change uniquement le mode de scrutin,
le reste des institutions se retrouvera dans une situation instable, et il y
aura, à ce moment-là, un travail beaucoup plus profond à faire pour s'ajuster
dans ce sens-là. Est-ce que les Québécois veulent aller dans cette
direction-là? Je ne suis pas certain.
Mme LeBel : O.K. Il y a un
changement de culture qui devra s'opérer nécessairement.
M. Bodet (Marc-André) : Pour
le meilleur ou pour le pire.
Mme LeBel : Oui, mais il y a
un changement de culture qui devra s'opérer nécessairement?
M. Bodet (Marc-André) : Oui.
Mme LeBel : Parfait. Vous
parlez... À la page 2 de votre mémoire, vous dites : «Éric Montigny semble
suggérer que l'appui de l'opposition officielle est possiblement essentiel pour
permettre toute réforme du mode de scrutin.» Vous trouvez ses arguments
convaincants. Donc, pourquoi... à la base, qu'est-ce qui nécessiterait l'appui
de l'opposition officielle?
M. Bodet (Marc-André) : Bon,
premièrement, ma compréhension, suite à la lecture de son mémoire, à son
intervention d'hier, mais aussi à des discussions qu'on a eues par le passé, il
y a dans... vous le savez, évidemment, dans nos anciens parlementaires, une
idée de... une espèce de norme de vie parlementaire qui nécessite un certain
consensus parmi les acteurs présents. Et il y a même — et là, M. Montigny
pourrait vous en parler plus en détail — des moments dans le passé où
ce type de décision des changements a nécessité un consensus large, qui mettait
au moins en place les deux acteurs institutionnels fondamentals d'un Parlement,
le parti gouvernemental et le parti de l'opposition officielle. Je ne vois pas
pourquoi, cette fois-ci, on peut se permettre de faire l'économie de l'appui de
ce premier parti d'opposition. Après ça, est-ce qu'il en faut deux, trois ou
quatre? Ça, pour moi, ça me semble moins important. Ce qui compte, c'est le
pourcentage des députés qui appuient cette réforme. Mais l'appui à cette
réforme de la part des deux premiers partis représentés à l'Assemblée nationale
me semble aller dans le sens des normes et des coutumes de notre vie
parlementaire.
Mme LeBel : O.K. Mais est-ce
que les normes et les coutumes de la vie parlementaire n'étaient pas justement
basées sur le fait qu'à l'époque, historiquement l'opposition officielle,
doublée du gouvernement, représentait la majorité de la Chambre, alors que ce
n'est pas nécessairement le cas aujourd'hui? Donc, quand on parle de large
consensus, est-ce qu'on ne parle pas plutôt de consensus qui fait en sorte
qu'on pourrait représenter la majorité d'un poids... la majorité de la Chambre,
ce qui serait le cas avec... À titre d'exemple, on jase, QS, le Parti québécois
et le gouvernement actuel, nos représentons, à trois, une large majorité de la
Chambre, alors qu'à l'époque effectivement, quand on incluait l'opposition
officielle dans cette notion de large consensus... Parce que ce qui est
important, c'est la notion de large consensus. C'était que l'opposition
officielle, nécessairement, avec le gouvernement, représentait
historiquement... on pourrait revoir les chiffres, là... historiquement cette
espèce de large majorité de la Chambre.
M. Bodet (Marc-André) : Je
comprends, mais à la fois, en termes de statut institutionnel, mais en termes
de poids dans la Chambre, les deuxième et troisième partis d'opposition n'ont
pas le même poids que le deuxième. Donc, en ce sens-là, rejeter du revers de la
main un acteur institutionnel aussi important me semble inapproprié dans le
cadre des normes et des coutumes parlementaires québécoises.
Mme LeBel : Donc, dans votre
vision des choses, le député qui fait partie de l'opposition officielle a plus
de poids que le député qui fait partie de la deuxième ou la troisième
opposition?
M. Bodet (Marc-André) : Non.
Chaque député a un poids égal. C'est pour ça que je constate que 75 % des
députés est satisfaisant. Mais le premier parti d'opposition, donc l'opposition
officielle, l'opposition loyale officielle, qu'on dit, même, à mon avis, a une
importance plus grande dans le jeu démocratique québécois que les autres partis
d'opposition.
Mme LeBel : O.K. Un dernier
point peut-être. Vous allez me permettre d'élaborer un peu parce que, des fois,
à sa face même, ça peut être assez, je dirais même, heurtant. Vous dites :
On peut être en désaccord avec le fait de la nécessité ici, dans ce cas de
figure, de tenir un référendum ou non.
M. Bodet (Marc-André) : Oui.
Mme LeBel : On peut penser
qu'on a la légitimité de le faire si on avait, exemple, l'appui de l'opposition
officielle. Qu'on ait ou non l'agilité de le faire, pour moi, c'est un autre
débat, mais de dire qu'un référendum est inutile et nocif pour la vie
démocratique, et que l'enjeu du mode de scrutin est un enjeu secondaire,
j'avoue que je ne vous suis pas du tout.
M. Bodet (Marc-André) : O.K.
Bien, il y a...
Mme LeBel : ...référendum ou
non. On peut penser qu'on a la légitimité de le faire si on avait, exemple,
l'appui de l'opposition officielle.Qu'on ait ou non l'agilité de le faire, pour
moi, c'est un autre débat, mais de dire qu'«un référendum est inutile et nocif
pour la vie démocratique et que l'enjeu du mode de scrutin est un enjeu
secondaire», j'avoue que je ne vous suis pas du tout.
M. Bodet (Marc-André) : O.K.
Bien, il y a deux aspects, dans cette affirmation, qui est, effectivement, à la
relecture, peut-être un peu raide. Le premier aspect... Je pense réellement que
mélanger, dans le cadre d'un même événement démocratique, un référendum, quelque
chose qui ne fait pas partie de la culture... des référendums de politiques
publiques, là, ne font pas partie de la culture politique au Québec et au Canada.
Mélanger ça avec une élection générale me semble problématique, surtout que,
comme on exclut la participation partisane à l'aspect référendum, il va
commencer à y avoir beaucoup d'acteurs dans la sphère publique en même temps. Ça,
c'est sur la première partie.
Sur la deuxième partie, quant à l'intérêt
des électeurs, je pense que je peux dire sans me tromper qu'en général les
électeurs québécois ont peu d'intérêt pour la question de la réforme du mode de
scrutin. C'est un sujet qui est très, très important pour une tranche de la population,
mais, dans la très large majorité, c'est loin d'être une priorité.
Mme LeBel : ...il faut faire
une grande différence entre l'opportunité de tenir un référendum parce qu'on
pense qu'on a le consensus ou la légitimité nécessaire, faire la différence
entre l'intérêt potentiel des Québécois, faire la différence entre le mélange
de... l'amalgame ou le fait de tenir en même temps l'élection et le référendum
parce qu'il y aurait un mélange, peut-être, des genres ou des enjeux, et de
dire qu'un référendum est inutile, nocif pour une question secondaire, je
pense. Je suis contente que vous ayez eu le temps de l'expliquer, parce que je
pense que ce n'est pas du tout, du tout le même point de vue, là. Qu'on discute
d'opportunités, c'est une chose, d'aucun disent : Il a été promis de ne
pas le faire, d'autres disent qu'on a la légitimité de le faire, d'autres
disent que c'est opportun de le faire. Donc, on peut parler d'opportunité, mais
je suis contente que vous ayez eu le temps de le préciser, parce que je pense
que ce n'est pas tout à fait la même façon de voir les choses. Merci.
M. Bodet (Marc-André) : Mais
je pense réellement que c'est une erreur de mélanger les deux.
Mme LeBel : Ça, c'est une
autre question que de dire que c'est nocif pour la vie démocratique. Merci.
Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Merci
beaucoup, M. le Président. Bonjour. Merci d'être présent avec nous pour
participer au débat. J'aimerais juste revenir sur une affirmation qui est quand
même importante : «Je répète juste une dernière fois que je considère
notre mode de scrutin actuel bien supérieur à son alternative proposée dans le projet
de loi.» Donc, le mode actuel versus le projet de loi n° 39,
tel que proposé, vous dites qu'il est bien supérieur à son alternative. On aura
l'occasion, entre autres avec des gens qui vont venir demain, entre autres,
Christian Dufour, de justement, je pense, se poser la question : Qu'est-ce
qu'on essaie de réparer? Est-ce que l'on ne fait pas mauvaise presse indûment
au système actuel qui a bien servi le Québec, les Québécois et les Québécoises?
On parle... Certains sont venus citer René
Lévesque en disant qu'il disait du système qu'il s'agissait d'un système
démocratiquement infect, alors qu'au lendemain des élections de 1970, il avait,
le Parti québécois, 23 % des voix, sept députés, 1973, 30 % des voix,
six députés, mais le même système démocratiquement infect, en 1976, a donné un
gouvernement majoritaire au Parti québécois avec 41 % des voix. Ce qui
aura permis au Parti québécois de passer des lois excessivement
importantes : la Charte de la langue française, la Loi sur les consultations
populaires de 1978 — qui dit, en passant, que vous ne pouvez pas
faire un référendum en même temps qu'une élection. Je referme la
parenthèse — et bien d'autres réformes, entre autres, de notre
démocratie, avec le financement des partis politiques, et j'en passe, et j'en
passe. 1981, avec 49 %, le gouvernement du Parti québécois était
majoritaire, 80 députés sur 122. Alors, quand on prend cette citation-là, de
«démocratiquement infect», je pense qu'il faut la remettre dans son contexte
historique. Vous faites bien de nous inviter à se poser la question :
Est-ce que ce qui est suggéré est réellement une avancée ou un recul? Et il est
facile de dire : Bien, il y aura deux forces, la force du changement et la
force du statu quo. Moi, je pense que le système actuel mérite plus qu'une
appellation aussi simpliste que de statu quo.
Et vous dites donc que ce qui est proposé
est drastique, et on a plus à perdre et à gagner. Donc, j'aimerais bien vous
entendre là-dessus, sur l'importance de regarder ce que l'on a et de... Oui,
historiquement, il y avait beaucoup de bipartisme, même si l'on peut voir que,
dans l'évolution démocratique du Québec du XXe siècle, il y a eu, à l'occasion,
trois partis, l'Action libérale nationale, l'Union nationale, le Parti libéral
et ainsi de suite, et une évolution, ce qui fait qu'aujourd'hui le projet de
loi n° 4 constate qu'il y a quatre partis à
l'Assemblée nationale et que ça fonctionne. Alors, j'aimerais vous entendre
là-dessus, sur l'importance de reconnaître que le mode électoral actuel a su
et... a permis aux Québécois d'avoir un État moderne, un État... une grande
démocratie, au Québec, puis ce n'est pas vrai, là, qu'on doit avoir honte du
système actuel, là.
• (17 h 40) •
M. Bodet (Marc-André) : Je
pense que les faits sont assez clairs au fait que le Québec est une des
sociétés les plus riches et les plus libres du monde, malgré son mode de
scrutin, certains diraient. Je dirais aussi, par rapport à ça, qu'évidemment le
système actuel a ses défauts, mais quel système n'en a pas? Je préfère vivre
avec ces défauts. À mon avis, la réforme du mode de scrutin, au Québec, n'a
jamais eu lieu, ou les réformes...
M. Bodet (Marc-André) :
...que le Québec est une société les plus riches et les plus riches du monde
malgré son mode de scrutin, certains diraient. Je dirais aussi, par rapport à
ça, qu'évidemment le système actuel a ses défauts, mais quel système n'en a
pas? Je préfère vivre avec ces défauts. Je.. À mon avis, la réforme du mode de
scrutin, au Québec, n'a jamais eu lieu, ou les réformes n'ont jamais eu lieu
car elles étaient contre nature par rapport à notre culture et nos
institutions.
Ça... Vous me permettez d'ouvrir la porte
sur trois petits points que... proposition d'ajustement à la marge que le
Québec pourrait se permettre. Le premier, je sais qu'il n'est pas populaire,
mais le Québec pourrait avoir beaucoup plus de... l'Assemblée nationale
pourrait avoir beaucoup plus de sièges pour être dans la norme mondiale. En
fait, on pourrait même monter jusqu'à 200 sièges. L'augmentation du nombre de
sièges augmenterait la proportionnalité, c'est mathématique. On pourrait
décider d'avoir entre peut-être une vingtaine ou une trentaine de sièges de
compensation, de liste, si on voulait, pour conserver l'aspect majoritaire, en
ajoutant, si on veut, une façon de compenser les parties vraiment pénalisées.
Il y a un autre élément que...
d'ajustement que moi, je trouve très important mais dont on parle peu, bien,
dans certains pays, il y a une représentation réservée pour les peuples
autochtones. C'est le cas de la Nouvelle-Zélande. À mon avis, quand on parle de
représentation d'intérêt, ça serait une priorité.
Donc, il y a des petits ajustements qui ne
viendraient pas travestir la nature de nos institutions et notre culture
politique et qui apporterait des changements réels, avec un impact
potentiellement très positif sans chambouler l'ensemble de nos institutions. Je
pense que nous avons le meilleur système, mais qui nécessite des ajustements à
la marge.
M. Tanguay
: Tout à
fait, qui est perceptible et qui... qui est perfectible, pardon. Et là on peut
voir sur différents aspects, on dit : Bien, on aimerait ça améliorer la
parité femme-homme à l'Assemblée nationale, est-ce qu'on peut agir sur les candidatures,
est-ce qu'on peut agir sur les résultats, le nombre de femmes élues et en
pourcentage, est-ce que l'on doit avoir un système de bonus, un système malus,
est-ce que ça doit être une condition sur... d'existence d'un parti politique
que de présenter un certain... une zone paritaire, est-ce qu'on veut 40-60, 45?
Il y a plein de choses. Donc, la parité et une de ces choses-là. Augmenter le
taux de participation. On peut se questionner et, évidemment, bonifier notre
démocratie à cet effet-là. On parle de l'âge pour voter, de l'âge... Le
Directeur général des élections est venu nous dire : Bien, ça serait
peut-être intéressant de sensibiliser les jeunes, de nous aider à avoir un
intérêt chez les jeunes de 16 ans et plus, qui pourraient être scrutateurs,
scrutatrices, représentants et ainsi de suite.
Donc,effectivement, il y a beaucoup,
beaucoup de choses qui peuvent nous aider et qui pourraient être mises en place
sans passer par une sacro-sainte réforme, un grand soir mais un petit matin,
d'un mode de scrutin avec un référendum. Je pense que ça, ça serait de façon
tangible. Il y a même des groupes qui nous exhortent : Ne rendez pas la
parité femme-homme tributaire d'un référendum parce qu'il en va... La Cour
suprême nous le dit, le droit de vote, la représentativité effective, ça
implique également la parité, c'est un droit fondamental et on ne peut pas le
rendre tributaire d'un référendum. Passez la loi puis faites en sorte...
Et vous, vous dites, la taille... j'y
viens, maintenant, sur la taille parce qu'on semble, puis je le dis en toute
amitié, être un peu apprenti sorcier. On veut garder 125 comtés, on veut
respecter les 17 régions administratives, puis là on patente un mode
proportionnel à 45 députés où vous dites : En Abitibi, on va avoir une
proportionnalité. Vous avez toujours trois députés, mais il n'y a plus trois
comtés, il y en a deux gros, puis il y a un député ou une députée qui sera en
elle-même et en lui-même la proportionnalité de toute la région. Bien, la
proportionnalité à un, il me semble, c'est un peu court. Alors, vous dites que
pour que ça tienne la route, c'est ce que je dénote, puis j'aimerais vous
entendre là-dessus, il faudrait, si on veut que ça tienne la route, aller
encore beaucoup plus loin, mais on n'y va pas, ce n'est pas ce qui est proposé
par le projet de loi, donc ça serait plus députés. Et on cite beaucoup
l'Écosse, je reviens là-dessus parce que c'est important. L'Écosse, il y a 3,6
millions, l'Écosse, il y a 4 millions de moins de personnes, en Écosse, et
l'Écosse rentre 20 fois dans le Québec. L'Écosse, ils ont 129 députés, on en a
125. Alors, quand on essaie de se patenter une proportionnelle, bien, à cette
image-là, ça ne tient pas la route. Et je suis d'accord avec vous que,
lorsqu'on dit : C'est drastique, puis on a plus à perdre qu'à y gagner,
bien, à ce moment-là, on ne peut pas faire la moitié des choses parce qu'on va
empirer la situation et la démocratie. Je pense, ça participe de votre
réflexion.
M. Bodet (Marc-André) : Oui.
Donc, deux aspects. Évidemment, l'utilisation du mot «licorne» n'est pas
anodine, là, je voulais créer la réaction, mais je pense que... le problème est
réellement là. On voit, dans cette réforme-là, quelque chose qui ne s'y trouve
pas, puis on ne voit pas les inconvénients qui est associés à ça.
Sur le nombre de sièges, je sais, encore
une fois, que c'est très impopulaire, notamment pour des élus, de parler
d'augmentation de la taille de l'assemblée, mais effectivement des travaux
empiriques qui incluent des parlements à travers le mode démontrent que le Québec
est... son assemblée est beaucoup trop petite. Et, en plus de ça,
l'augmentation de la taille de l'assemblée, non seulement, améliorerait la
proportionnalité, mais également ça... les circonscriptions seraient plus
petites, ça serait donc plus facile, pour des groupes plus marginalisés ou
encore des gens qui ne viennent pas de milieux aisés, de remporter ces
élections dans des comtés plus petits, et ça permettrait, et je pense que le
cas anglais, le parlement de Westminster est parlant, là, ça permettrait le
développement de... comme il y aurait plus de députés, donc il y aurait plus de
gens qui pourraient se spécialiser vraiment...
M. Bodet (Marc-André) : ...les
circonscriptions seraient plus petites. Ça serait donc plus facile pour des
groupes plus marginalisés ou encore des gens qui ne viennent pas de milieux
aisés de remporter ces élections dans des comtés plus petits et ça permettrait — et
je pense que le cas anglais, le Parlement à Westminster, est parlant, là — ça
permettrait le développement de... Comme il y aurait plus de députés, donc il y
aurait plus de gens qui pourraient de spécialiser, vraiment développer des
expertises sur des sujets donnés.
Donc, ça, c'est une mesure qui est moins
spectaculaire mais qui peut se faire très facilement et qui améliore la
proportionnalité et d'autres aspects de la gouvernance parlementaire qui... Je
pense, il faut les considérer, ces choses-là, et je pense qu'une vraie
réflexion qui... et un consensus parlementaire sur cette question-là est beaucoup
plus facile à atteindre qu'une réforme du mode de scrutin.
Le Président (M.
Bachand) : Députée de Bourassa-Sauvé, pour
1 min 30 s.
Mme Robitaille : Vous parlez,
à la page 3 de votre mémoire, de la Nouvelle-Zélande. Bien, on en a parlé beaucoup
hier. Même, on avait un expert néo-zélandais qui est maintenant sur l'équipe
pour pousser la proportionnelle en Angleterre, en Grande-Bretagne. Et vous
dites qu'en fait l'exemple néo-zélandais n'a pas changé grand-chose là-bas. Je
vais lire : «Les Néo-Zélandais avaient fondé beaucoup d'espoir sur une
réforme du mode de scrutin dans les années 1990. Rien n'a réellement changé
sous le nouveau système mixte proportionnel.» Donc, la participation n'a pas...
M. Bodet (Marc-André) : ...
Mme Robitaille : La
participation électorale. Mais, au-delà de ça, est-ce que, si vous comparez,
est-ce que ça a été...
Une voix
: ...
Mme Robitaille : Oui, sur
la... Oui, mais plus que ça, je pense. Vous dites : L'exercice...
M. Bodet (Marc-André) : Donc,
rien n'a changé sur la participation. Il y a eu des oscillations, mais,
essentiellement, le gain est nul. Sur d'autres aspects, évidemment, les choses
ont changé. Des acteurs... D'autres acteurs ont réussi à apparaître sur la scène
politique.
Il faut comprendre que la sociologie
politique de la Nouvelle-Zélande est différente de la nôtre. C'est un pays qui
n'est pas labouré par les mêmes types de clivages politiques. Donc, il y a
certaines de mes craintes, pour le cas québécois, qui ne s'appliquent pas au
cas néo-zélandais, mais cette dose de proportionnalité en Nouvelle-Zélande a...
en fait, a créé exactement ce qu'on pensait, en fait, plus d'acteurs, plus de
diversité au Parlement et des ajustements que les Néo-Zélandais vivent encore
dans leur culture politique. Fait intéressant, les Néo-Zélandais ont également
adopté une représentation spécifique pour les Maoris, pour revenir sur ma
question des autochtones.
Mais, effectivement, la Nouvelle-Zélande
est le meilleur cas de comparaison avec le Canada puisque... et le Québec parce
que c'est une culture politique britannique, sauf que la sociologie de ce
pays-là a malheureusement peu à voir avec celle du Canada.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Merci.
Bonsoir. Je trouve très intéressant votre argument sur le statut exceptionnel
de l'opposition officielle. En tout respect, vous me semblez faire un appel à
la tradition. Donc, vous dites : Dans la tradition de Westminster, il y a
un statut particulier. Donc, vous dites, si je vous comprends bien : Il y
a une différence qualitative entre les députés de l'opposition officielle et
les députés des autres oppositions, peu importe leur quantité, et que donc, par
extension, les citoyens qui habitent dans des circonscriptions représentées par
l'opposition officielle, leur vote vaut plus puisque leur représentant aurait
un veto à l'Assemblée nationale du Québec sur une réforme du mode de scrutin,
alors que les députés... que les électeurs représentés par des députés comme
moi, de deuxième opposition, n'auraient pas ce privilège.
J'aimerais bien que vous m'expliquiez
comment, du point de vue de la légitimité puis de l'égalité des députés entre
eux dans notre Assemblée, mes estimés collègues de l'opposition officielle,
leur voix, qualitativement, vaudrait plus, même si les trois... même si les
deux autres oppositions et le gouvernement forment plus de 75 % des
députés en Chambre.
M. Bodet (Marc-André) :
Alors, ce n'est pas les députés du premier parti d'opposition qui sont
qualitativement supérieurs, c'est le premier parti d'opposition qui est
qualitativement supérieur. Chaque député s'équivaut. C'est pourquoi, dans cette
logique de consensus parlementaire, ce que je pense qui est un seuil
acceptable, c'est 75 % des députés, tous partis confondus. On pourrait
imaginer un vote libre là-dessus, d'ailleurs, à la limite.
Mais ce que je vous dis, c'est
qu'effectivement le parti, premier parti d'opposition, oui, a un statut
institutionnel différent. Après, l'électeur qui vote pour son député, il est
dans une relation de représentation des intérêts mais aussi de service à la
population, et, dans ce sens-là, tous les députés sont égaux. En fait, cette
relation-là de supériorité qualitative de la première opposition ne se vit, au
Parlement, pas dans l'activité de représentation.
M. Nadeau-Dubois : Bien,
j'aimerais que vous me justifiiez, pour des raisons profondes autres que
l'appel à la tradition, pourquoi il y a une suprématie d'une formation
politique de l'opposition par rapport à une autre.
M. Bodet (Marc-André) :
...les Anglais ont inventé ce concept de loyale opposition, cette nouvelle
technologie parlementaire, parce qu'ils étaient conscients que le parti gouvernemental
avait besoin d'une opposition organisée, financée, institutionnalisée pour
rendre la gouvernance démocratique meilleure, O.K.? Donc, il y a un prix
effectivement de légitimité pour les deuxième, troisième partis, mais le gain,
en termes d'efficacité et de gouvernance politique, était jugé par les Anglais,
à l'époque, supérieur. Je pense que c'est encore vrai aujourd'hui. Je pense que
chaque bon gouvernement a eu une bonne opposition officielle.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de Rimouski, s'il vous plaît.
• (17 h 50) •
M. LeBel : Oui. Bonjour...
M. Bodet (Marc-André) :
...O.K.? Donc, il y a un prix effectivement de légitimité pour les deuxième,
troisième partis. Mais le gain en termes d'efficacité et de gouvernance
politique était jugé, par les Anglais, à l'époque, supérieur. Je pense que
c'est encore vrai aujourd'hui. Je pense que chaque bon gouvernement a eu une
bonne opposition officielle.
Le Président
(M. Bachand) : Merci. M. le député de Rimouski, s'il vous
plaît.
M. LeBel : Oui. Bonjour.
M. Bodet (Marc-André) :
Bonjour.
M. LeBel : Moi,
effectivement, j'ai appris, dans les dernières années, c'était quoi la loyale
opposition de Sa Majesté. Effectivement, là, quand ils ont négocié les moyens,
l'opposition, c'est différent parce que c'est l'opposition. À la période de
questions, ils ont plus de questions. Ça plaide aussi pour une réforme
parlementaire qu'on devra faire à un moment donné. Mais de là à leur donner le
veto sur une réforme du mode de scrutin, il y a quand même des marges. Puis, en
parlant de marges, quand vous dites que des ajustements institutionnels à la
marge, ce serait d'augmenter le Parlement de 75 députés, c'est toute une
marge, je dois vous dire. Je suis loin que... pas sûr de penser que la
population est prête à faire ça.
La question... l'autre question, c'est
quand vous dites aussi que vous voulez... voulons-nous être pris dans des
situations impossibles comme le vient les Allemands, les Danois, les
Autrichiens, les Norvégiens, etc.? C'est quoi ces situations impossibles là qui
pourraient nous faire peur? Personne ne nous a parlé de ça encore.
M. Bodet (Marc-André) :
O.K. Sur le premier point...
M. LeBel : Y a-tu quelque
chose qu'on n'a pas vu?
M. Bodet (Marc-André) :
Sur le premier point, je dis «pourrait avoir jusqu'à 200 sièges plutôt que
125». Chaque ajout de sièges est intéressant. Là, je ne fais pas un argument
pour 75 sièges de plus, je vous dis que, si on suivait la norme internationale,
on pourrait monter à 200 sans se retrouver dans une situation inhabituelle.
Quand je parle des Allemands, des Danois,
des Autrichiens, des Norvégiens, bon, les Allemands, vous le savez, ils sont en
gouvernement d'union nationale depuis longtemps parce qu'il y a un parti
d'extrême droite, l'Altenative pour l'Allemagne, qui finalement bloque la vie
parlementaire normale. Donc, c'est un pays qui ne vit pas d'alternance et qui
ne vit pas une vie parlementaire normale depuis un bon moment.
Les Norvégiens et les Danois, on a
également des partis d'extrême droite qui forcent la main, dans la création de
coalitions, à des partis sociaux-démocrates ou chrétiens-démocrates, donc
centre gauche et centre droit, et qui créent de l'instabilité, mais aussi une
certaine violence dans la vie parlementaire de ces pays-là. L'Autriche est un
autre exemple patent avec, encore une fois, une extrême-droite. Je pourrais
aussi vous trouver des exemples de pays, mais l'Allemagne en a, là, d'une
extrême-gauche assez turbulente qui finit soit par paralyser, soit délégitimer
la vie parlementaire de ces pays-là. O.K.? Les exemples d'Europe du Nord sont
surtout à droite. Mais la menace peut également venir de la gauche.
Le Québec, on dit souvent que le Québec
est une société modérée, oui, c'est vrai, mais il n'y a aucune raison qui
pourrait justifier ou prédire que le fait que les Québécois, ou certains
Québécois n'appuieraient pas des partis d'extrême droite et d'extrême gauche
dans un régime plus proportionnel comme ce qu'on retrouve en Europe. Ils n'ont
rient de... ce n'est pas des gens meilleurs ou pires, ce sont des citoyens
démocratiques comme nous, et ces partis réussissent à proliférer dans ces
systèmes. Je pense que cette menace-là est largement évitée grâce à notre mode
de scrutin.
Le Président
(M. Bachand) : Oui, Marie-Victorin, pardon.
Mme Fournier
:
Merci beaucoup, pour votre présentation. Je comprends vos arguments, mais bien
franchement, là, je ne partage pas les prémisses de votre argumentaire, surtout
que vous soulignez, à plusieurs reprises, bon, que la réforme du mode de
scrutin menace la cohésion partisane. Je vous soulève quand même bien
humblement que les Québécois, puis, je veux dire, c'est un phénomène assez
répandu en Occident, n'ont peu ou pas du tout confiance en fait dans les
institutions que représentent les partis politiques.
En fait, les recherches menées, par
exemple, par le Pew Research Center démontrent que, dans toutes les
institutions qui existent dans nos sociétés démocratiques, en fait c'est les
partis politiques qui recueillent le moins la confiance des électeurs. Donc, le
fait de justement contribuer à changer la façon dont les partis politiques
traditionnels fonctionnent ou coopèrent entre eux, à mon sens en fait c'est
quelque chose de très positif.
Puis, quand on parle de culture politique
au Québec, tu sais, vous faites même référence à la paix sociale, je trouve que
c'est quand même assez poussé. Mais, quand on parle de culture politique des
Québécois, bien au contraire, ce qu'on entend dans la population, c'est un
désir pour moins de partisanerie. Chaque fois qu'il y a une initiative qui est
faite en ce sens-là, c'est applaudi partout, puis je considère que ça
représente, au contraire, la culture politique désirée des Québécois. Ils
souhaitent que les partis soient capables de travailler ensemble, souhaitent
que les parlementaires s'élèvent au-delà de ces lignes de partis. Donc, vous
parlez plutôt d'une tradition, de ce que je comprends, parce qu'on ne peut pas
vraiment parler d'une culture de la société québécoise.
M. Bodet (Marc-André) :
Sur le premier aspect, je... cette insatisfaction, ce cynisme est présent dans
tous les modes de scrutin que ça soit en proportionnel ou en majoritaire. Donc,
ce changement-là n'apporterait probablement aucun changement. Sur le rôle des partis
politiques, effectivement, quand on demande aux gens s'ils aiment la
partisanerie, ils disent non. Mais, si on demande aux gens s'ils aiment le
bruit puis la dissension parmi les élus, ils n'aiment pas ça non plus.
Les partis politiques ont été créés ou se
sont développés au Québec et au Canada, en réponse aux difficultés de
coordination des élus. Ça, c'est peut-être un mal nécessaire, mais c'est un
véhicule qui est extrêmement efficace dans la vie parlementaire et qui organise
notre vie électorale de façon, encore une fois, à mon avis, assez positive et
assez efficace. Si on veut éliminer ce véhicule-là, il faut le remplacer par
quelque chose...
M. Bodet (Marc-André) :
...développés au Québec, au Canada, en réponse aux difficultés de coordination
des élus. Ça, c'est peut-être un mal nécessaire, mais c'est un véhicule qui est
extrêmement efficace dans la vie parlementaire et qui organise notre vie
électorale de façon, encore une fois, à mon avis, assez positive et assez
efficace. Si on veut éliminer ce véhicule-là, il faut le remplacer par quelque
chose. J'ai de la misère à voir qu'est-ce qui serait capable de jouer un rôle
de légitimisation mais également d'organisation de notre vie démocratique autre
que les partis politiques.
Peut-être que je suis juste peut-être un
peu trop réaliste. Je suis peut-être cynique par rapport à la vie politique en
général. Mais je pense qu'il ne faut pas simplement rejeter un système parce
qu'on est insatisfait, il faut trouver une alternative qui est supérieure à ce
qu'on a entre les mains actuellement.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre
participation.
Cela dit, la commission ajourne ses
travaux jusqu'à demain jeudi 6 février, après les affaires courantes, où elle
va poursuivre son mandat. Merci, bonne soirée.
(Fin de la séance à 17 h 56)